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M
E
M
O
I
R
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D ’A P P E L
EN
R É P O N S E ,
POUR
C a th erin e
LAFONT,
et L o u i s - A u g u s t e
P E T A U T O N , son mari, habitant à Néris-lesBains, intimés;
C O N TR E
LA FO N T, J e a n -B a p tis te B O U R N E T , J e a n F O R I C H O N , M a r i e et autre
G ilb e r t
L A F O N T leursfemmes habitant aussi
à Néris, appelans.
M a r ie
Ce n' etoit pas une assez grande douleur pour une m ère
d avoir perd u, en quelques mois d’intervalle , son époux
et son enfant; il a fallu q u e pour satisfaire l’avidité de
A
deriom.
�• ■\
* >'
'
( o
quelques collatéraux, elle fût contrainte d’entendre encore
les plus m inutieux détails de ce douloureux sacrifice, et
d’en peser scrupuleusement toutes les circonstances.
Il étoit consolant pou r elle de penser que sa fille avoit
eu rang parmi les enfans des hom m es, et que des mains
de la religion elle étoit descendue heureuse dans le tom
beau : mais l’intérêt ne com pte pour rien les opinions
et les mouvemens de la nature; il ne respecte pas plus la
cendre des morts que le repos des vivans.
Cependant si les tribunaux sont obligés de tolérer d’in
discrètes recherches, ce ne peut être q u’avec un sentiment
d’indignation qui force à désirer qu’elles soient infruc
tueuses; et sans doute toute la rigueur de l’examen est
réservée à ceux q u i, attaquant les actes les plus sacrés,
s’ imposent la tâche de les anéantir.
Cette vérité a servi de base à la décision des premiers
juges. P o u r arguer de faux un acte de naissance , les
appelans s’étoient soumis à p rou ver que l’enfant de Ca
therine L afon t étoit né m o rt; mais ils n’ont présenté que
des doutes au lieu des faits positifs qu’ils avoient annoncés.
D e sa p art, au con traire, l’intimée/a établi clairem ent la
vérité de l’acte de naissance qui faisoit son titr e , et q u i,
pour faire pleine C-i entière fo i, n’auroit eu nul besoin de
preuve auxiliaire.
Néanm oins les appelans ne se sont pas jugés vaincus;
et le secours qu’ils n’ont pu trouver dans leurs enquêtes,
ils l’ont cherché dans des consultations de médecins dont
l ’opinion auroit été sans doute bien puissante s’ils avoient
vu , mais qui ont été réduits à ne présenter que des
hypothèses et des incertitudes, et, sur la foi de quelques
�¡¿y
(3)
faits insignifians, à 'présumer que l’enfant pouvoit elre
venu au m onde sans vie.
A u reste, la cour ne se rendra qu’à sa propre con
viction dans une cause entièrem ent réglée par les lois
civ ile s, et encore plus claire par les faits dont on va lui
rendre compte.
F A I T S .
Catherine Lafont ép o u sa,le 14 brum aire an 10, GilbertM arie L a fo n t, son cousin.
Seule h éritière de son p è re, qui lui abandonnoit dèslors tous ses b ie n s, elle fut assez heureuse pour offrir à
son époux un sort avantageux. Quant à lu i, il avoit vendu
tous ses droits successifs à G ilbert L a fo n t, son frère ,
partie adverse, pour une somme m odique de 10000 fr.
Les ép oux stipulèrent un gain m utuel d’ usufruit, en
cas qu’il n’y eût pas d’enfans survivans.
Ce mariage n’a duré que dix mois et dem i; et le 27 fruc
tidor de la même an née, la f o n t est m ort à vingt-trois
a n s, laissant sa jeune veu ve enceinte de six mois.
A u terme de ses couches elle app ela, outre une sagefem m e, des pareutes ou des amies; m ais, loin de sup
poser qu’elle pouvoit survivre à son enfant , plus loin
encore d’avoir réfléchi que cette survie lui donneroit
une succession , le hasard a voulu qu’elle 11e s’entou
rât que de la fam ille de son mari : c a r , depuis sa dou
loureuse perte , c’étoit là sa société habituelle , pour
chercher des consolations dans ses entretiens et dans ses
souvenirs.
A
2
�( 4 )
Ses couches furent extrêm em ent 'laborieuses ; mais
n’ayant éprouvé aucune incom m odité pendant sa gros
sesse, la vigueur de son âge seconda la nature, et elle
m it au monde une fille.
Il n’est que trop vrai que cette malheureuse enfant
a voit cruellem ent souffert de ces efforts. Ses m ouvem ens,
prolongés jusqu’à sa délivrance , indiquoient le besoin
du repos; car la m ême fatigue qui accabloit la mèi*e dût
à plus forte raison agir sur une foible créature, qui avoit
besoin du plus grand x*epos pour échapper à la mort.
M ais la raison ne cède que trop souvent aux procédés
de l’habitude. O n tourm ente les enfans sous prétexte de
les soulager, et le souffle de vie qui les anime est quel
quefois incapable de résister à ces ¡prétendus soulagemens.
O n suivit donc pour l’enfant de Catherine L afont la
•m éthode ordinaire. L e cordon om bilical co u p é, on cher
cha du vin pour lui frotter le visage et réparer ses forces;
on ne trouva que de l’e a u - d e - v ie , et on ne l’em ploya
pas moins au m êm e usage. L e résultat du remède ne fut
pas aussi heureux qu’on l’a voit pensé : les muscles du
visage se contractèrent, la respiration repoussée se dilata
par des soupirs, l’enfant remua les b ras; mais ce n’étoit
là qu’ un dernier effort de la nature, bientôt la vie acheva
de s’éteindre.
Pendant que l’enfant luttoit encore contre la m ort, le
curé fut m andé; et quoiqu’ il n’arrivât que lon g-tem p s
après l'accouchement , il ne trouva pas moins à cette
enfant des signes de v ie , car il lui administra le baptêm e,
quoique la sage-femme lui eût rapporté l’avoir déjà 011doyée par précaution.
«
�(
5 )
A p rès le baptêm e, le curé se retira pour aller faire
l’acte de naissance ; car il étoit aussi adjoint et officier
public : il ch o isit, avant de p a r tir , ses deux témoins.
Ces témoins, en effet allèrent à la m airie , et on les
renvoya au lendemain. Comm e alors l’enfant étoit m ort,
les deux actes furent faits l’un à la suite de l’a u tre , le
>21 frim aire an n .
Catherine L afont étoit h éritière de son enfant par la
loi du 17 n iv ô se , ce qui avoit dû p eu t-être exciter la
jalousie des adversaires.
11 est naturel qu’ils fussent plus occupés de cette suc
cession qu’elle-même;. et tout ce qui s’étoit passé devoit
leu r être con n u , puisque Catherine L afon t, comme elle
vient de le d ire, avoit été entourée de la fam ille de son
m a ri, c’est-à-dire, de la fam ille des adversaires : la sngefemme elle-m êm e étoit leur tante. N éanm oins, et dans
cet instant m alheureux où le sacrifice de sa fortune lui eût
été totalement in d iiféren t, aucun des adversaires n’ima
gina d’élever le m oindre doute sur un acte de naissance
q u i, dans une petite com m une, et d’après ce qui s’étoit
passé, n’avoit été un secret pour personne.
T ro is mois se passèrent, et les adversaires laissèrent
prendre à la veuve la récolte de quelques vignes dépen
dantes de la succession : après ce tem ps, ils jugèrent con
venable de com m encer sourdement les hostilités.
Comm e G ilb ert L afon t avoit acheté les droits de son
déiunt frè re , dont la succession étoit créancière du prix
de ces droits céd és, il se fit faire une saisie-arrêt par ses
beaux-lrères Bournet et F o ric h o n , dans la vue d’embar-
�(6 )
rassct* Catherine L a fo n t, et n’osant pas lui-m êm e com
m encer le procès.
G ilbert L a fo n t, fit encore en ses propres mains une
saisie-arrêt, sans titre ni autorisation; et on en fit une
troisième ès-mains du sieur S o u lie r, n o ta ire , débiteur
de la succession.
L e prem ier sentiment de la veuve L afon t fut d’être in
dignée d’une conduite qui paroissoit fondée sur un soup
çon injurieux pour elle; dès-lors elle ne voulut plus rien
m én a ger, et poursuivit ses adversaires en payement et
m ain-levée de saisie, le 12 ventôse an 11.
A lo rs G ilb ert L afon t fut forcé de s’ex p liq u er, et il crut
l’intim ider davantage en s’inscrivant en faux contre les
deux actes de naissance et de décès ci-dessus rappelés :
mais Catherine L afont lui fit signifier sur le cham p la dé
claration expresse qu’elle entendoit se servir de ces deux
actes, et G ilb ert L afont fut obligé de donner suite à sa
procédure. G ilbert L afont présenta les faits par lui arti
culés, et offrit de prouver que l’enfant étoit m o r t- n é ,
ayant la pâleur sur son visage, les yeux ferm és, et que
tous les assistans s’écrièrent : V o ilà un enfant m o rt;
que l’adjoint n’avoit pas vu l’en fa n t, et n’avoit rédigé
les actes que sur la déclaration de deux témoins.
E n vertu de jugement du 3 floréal an 1 1 , G ilbert
L afon t fit entendre cinq témoins.
est essentiel de re
m arquer qu’il alfecta de ne pas appeler celui qui devoit
donner plus de lum ières, la sage-femme. Quant à ceux
11
entendus à sa req u ête, voici ce qu’ils ont déclaré.
L e prem ier témoin est le c u ré -a d jo in t, qui a adinU
�tér
(?)
nistre le baptêm e et fait l’acte civil; A v an t le bapteme
il a touché l’enfant et lui a, senti de la chaleur.
L e second tém oin , F ra n ço is C o r r e , ne sait pas si
l’enfant étoit vivan t ou m ort.
L e troisièm e, M a rie L a fo n t , fe m m e P ig7tot, la plus
proche parente des adversaires, sait tou t, et a connu que
l ’enfant étoit m ort à l’éjection de ses excrém ens. L a sagefemme lui fit signe qu’il étoit m o rt; elle lui dit aussi de
toucher le coeur de l’enfant pour sentir qu’il b a ttoit, mais
le tém oin répondit qu’il ne s’y com ioissoit pas. L a sagefemme lava l ’enfant, et lui m it les doigts dans la bouche;
il ne donna aucun signe de vie. Puis la femme C orre le
p rit sur ses genoux , et ses genoux trem blèrent par la
crainte qu’elle avoit de la m ort de l’en fan t, et ce trem
blem ent se com m uniquoit à l’enfant. L e curé v i n t , le
toucha h divers en d ro its, et le baptisa
puis la femme
Corre dit à son m ari d’aller faire faire l’acte de naissance,
et de ne pas m anquer de dire au curé ( q u i venoit de
sortir) que l’enfant étoit né vivant. A p rès cela elle avoue
qu’elle a dit e lle -m ê m e à la m ère que son enfant étoit
vivant, mais que c’étoit pou r la tranquilliser; et que lors
qu’elle a vo u lu dire autrem ent, L ou is L afont lui a fait
beaucoup de menaces.
L e quatrièm e tém o in , M a rie B o u r n e t, ne sait rien
par elle-m êm e ; elle confirm e la proposition faite par la
sage-femme à la P ign o t de toucher les battemens du cœur,
et la réponse de celle-ci qu’elle ne s’y connoissoit pas.
Enfin elle a ouï dire dans la maison que l’enfant étoit
vivant.
L e cinquièm e tém oin , M arguerite L a f o n t , veuve
�*iU
v " - 1
(8)
I
H o n n e fo i, a vu la sage-femme in q uiète, lorsqu’elle de
manda de l ’eau bénite pour ondoyer l’enfant; cependant
elle a dit plusieurs fois qu’il étoit vivant. Quand on a
frotté le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie, elle a
rem arqué qu’il a fait tin léger so u p ir , ce qu'elle a re
gardé comme un signe de v ie ,• elle n’en a pas remar
q u é d’autres.
Cette enquête, comme le disent très-bien les adversaires,
étoit parfaitement in u tile; et en effet il n’y avoit rien de
moins p rou vé que le faux m atériel de la naissance de
l ’enfant. Q uatre témoins attestoient plutôt la vie que la
m ort ; un seul attestoit la m ort par ses p aroles, et ce
qu’il a indiqué pou r la prouver donne plutôt à présum er
!
pour la vie. Les faits du baptêm e et de la naissance restoient donc dans toute leur force.
N éanm oins, et par surabondance, Catherine L afon t
vo u lu t aussi faire une enquête; et il ne faut que la parcourir pou r être convaincu de la vie de l’enfant,
j
L e prem ier témoin est la sage-fem m e ; elle sentit les
'
mouvem ens de l ’enfant dans ses mains : elle sentit les
pulsations du cœ u r, et proposa à la femme P ign o t d’y
toucher. Quand l ’enfant fut sorti elle ne sentit plus de
m ouvem ent, c’est pourquoi elle demanda du vin. O n lui
porta de l’e a u - d e - v i e , et quand elle en passa sur le
visage de l’enfant, il lit un soupir. A lo rs ayant à s’occu
per de la m è re , elle a remis l’enfant à la femme C orre
(quatrièm e témoin ci-après). E lle avoit ondoyé l’en faut;
Je curé est venu et l’a baptisé.
L e second tém oin, F ra n çois D u r i n , a soupe avec lo
!
curé le soir des couchas. L e curé dit avoir vu l’enfant,
avoir
f
i
�avoir touclié son estom ac, senti de la ch a leu r, cru re
marquer de la v ie, et baptisé l’enfant.
L e troisième témoin est M a rie B o u r n e t, déjà entendue.
L e quatrièm e tém oin, la fem m e C o rre , a gardé l’en
fant sur ses genoux après que la sage-femme eut fait les
frictions d’eau-de-vie au visage ; elle a elle-m êm e lavé
l ’enfant avec du v in , lu i a v u rem uer les bras trois ou
quatre fo is, lu i a senti battre le cœ u r , a distingué des
rnouvemens au visage quand on y passoit du vin , a re
m arqué que l’enfant soupiroit ; mais il est m ort sur ses
g e n o u x , sans q u’elle ait pu distinguer l’instant où il a
cessé entièrem ent de vivre.
L e cinquièm e tém oin, Q u illem in , a soupé avec le curé
quelque temps après les couches. Il dit qu’il avoit exercé
ses fonctions en baptisant l’enfant, ce qiüïl n 'a u roit pas
f a i t , s ilii eût cru s être assuré de son existence. La sagefemme a dit encore au tém oin que l’enfant étoit venu
au monde v iv a n t, et qu’elle l ’a voit ainsi déclaré à son
confesseur.
L e sixièm e té m o in , Georges F o riclio n , a ouï dire au
curé qu’il avoit senti de la chaleur à l’en fan t, et admi
nistré le b ap têm e, sans p o u voir assurer qu’ il fût vivant.
Il a ouï dire à plusieurs femmes que la Pignot (c e lle
qui a dit l’enfant m ort ) avoit dit qu’ il étoit né vivant ;
et qu’elle-m êm e, femme P ig n o t, lui avoit vu plusieurs
fois porter les bras à la tête , et avoit rem arqué plu
sieurs autres signes de vie.
L e 14 niyôse an 13 les parties en sont venues à l’au
dience où il ne s’agissoit que d’opposer l’acte de naissance
u 1 enqucle d irecte, et m ême les enquêtes entr’elles. 11
B
�est vrai que le procureur im périal vouloit renvoyer la
décision à deux docteurs en médecine et en ch iru rgie,
mais le tribunal de M ontluçon ne pouvoit se rendre à
cette opinion qui n’en étoit pas u n e; en conséquence,
après avoir pesé toutes les dépositions et la force des prin
cipes, il a fait droit aux parties par le jugement qui suit.
« Considérant que tous les actes de l ’état civil font
« foi jusqu’à inscription de faux ; qu’il est établi par un
« acte extrait des registres de la commune de N éris, que
« l’enfant de Catherine L afont est né à trois lieures et
« dem ie, le 21 frim aire de l’an 11 ; qu’ il est établi par
« un autre acte que le même jour le même enfant est
« décédé à quatre heures après m id i, c’est-à-dire, demi«
«
a
«
«
heure après sa naissance; qu’ainsi il est prouvé par actes
authentiques que l’enfant est né vivan t; que pour détruire ces deux actes, G ilbert L afon t a pris la voie
de l’inscription en faux incident; que par conséquent
il s’est imposé la tâche de prouver que cet enfant étoit
« m ort avant que de n aître; et il s’agit d’exam iner s’il
« l’a rem plie ; que le prem ier tém oin par lui produit
«
se
«
«
«
«
«
a senti un reste de chaleur à l’en fan t, et lui a admi
nistré le baptême à telles fins que de raison, a ensuite
in terro g é, comme oilicier p u b lic, l ’accoucheuse qui
lui a attesté que l’enfant étoit né v iv a n t; que le secon d , quoique témoin dans les deux actes, a déclaré
ne s’être pas assuré par lu i-m ê m e de l'existence de
l’enfant; que le troisième a toujours regardé l’enfant
« comme m ort avant que de naître; qu’il l’a jugé ainsi"
« aux exçréinens qu’il a vu tom ber, aux signes que la
« sage-femme lui a faits ; que cependant la même sage-
�tu
( II )
« femme lu i a dit que le cœur de l ’enfant battoit encore,
(< lui a proposé d’y porter la m ain , ce qu’il n’a voulu
« fa ire; qu’après qu’il fut entièrem ent sorti du ventre
« de la m ère, il ne lu i a rem arqué aucun signe de v ie ,
« quoique la sage-femme l’ait frotté avec de l’eau-de-vie,
« lu i ait mis les doigts dans la b ou clie, et y ait soufflé;
« que le quatrièm e ne s’est pas assuré par lui-m êm e si
« l ’enfant avoit vie après sa naissance, mais qu’il a en« tendu dire dans la maison qu’il étoit encore v iv a n t;
« que le cinquièm e lui a v u faire un léger soupir qu’il
« a regardé comme un signe de v ie ;
« Q ue de ces cinq témoins , le troisième est le seul
« qui soutienne que cet enfant étoit m o r t, parce qu’il
« le pensoit ainsi d’après la chute des excrémens et les
« signes de l’accoucheuse ; cependant cette m ême acçou« clieuse a dit ensuite que le cœur de l ’enfant battoit,
« a proposé au tém oin d’y porter la m a in , ce qu’il n’a
« vo u lu fa ire , disant qu’il n’y connoissoit pas.
« Considérant. que le prem ier tém oin a senti de la
<c chaleur à l’enfant, a interrogé l’accoucheuse, qui lui a
« attesté que l ’enfant étoit né viva n t; que cette m êm e
« accoucheuse l’a ainsi déclaré lorsqu’elle a été appelée
« en tém oignage par Catherine Lafont; que le quatrièm e
« témoin a ouï dire dans la m aison, après la naissance
v de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie ; que le cinct
“
«
«
«
quième lui a vu faire un soupir qu’il a pris pour un
signe de v ie ; que de l’ensemble de ces déclarations il
résulte plutôt que l’enfant a vécu après sa naissance,
qu il n’étoit mort avant que de naître; qu’ainsi G ilbert
L afon t n’a pas détruit les deux actes de naissance et
B 2
�111.
,y
k
«
«
«
«
( 12 )
de d écès, ainsi qu’il se l ’étoit ptoposé ; qu’on en est
d’autant plus convaincu quand on considère que le
quatrième tém oin ouï à la requête de Catherine L a fé h t,
à qui l’accoucheuse rem it l’en fan t, pour donner des
soins à la m ère, a confirmé la déclaration de cette sage-
« fem m e, lui a v u battre le cœ u r, lui a distingué des
« mouvem ens dans le visage, et a rem arqué qu’il sou«
«
«
«
p iro it; que d’ailleurs il paroît constant que cet enfant
étoit parvenu au terme prescrit par la nature; q u ’il
n’a apporté au monde aucun vice de conform ation ,
ni aucun signe de putréfaction; que ces dernières cir-
« constances, jointes aux actes de l’état c iv il, aux décla« rations des tém oins, doivent suffire pou r constater là
« vie de l ’enfant, ou au moins le faire présum er vivan t;
« de m anière que Catherine L a fo n t, qui a été m è r e ,
« qui en a couru les dangers, qui a perdu son enfant,
« doit obtenir la consolation que la loi lui accorde.
« L e tribunal déboute G ilbert L afont de sa demande
« en inscription de fa u x , le condamne en l’amende de
« 60 francs, consignée conform ém ent à l’ordonnance de
« 173 ?) et aux dépens. Fait et jugé à M on tlu çon , le 14
« nivôse an 1 3 , etc. »
A p rès ce jugem ent, Catherine Lafont en a obtenu un
second le 23 ventôse su ivan t, lequel prononce la m ain
levée des saisies-arrêts, et condamne G ilbert L afont à
payer ce qu’ il doit au défunt.
Quant aux Forichon et B ournet, autres parties, il avoit
déjà été rendu contre eux un jugement le 19 ventôse
an 1 1 , prononçant aussi contre eux la main - levée de
leur saisie-arrêt \ niais ils avoient gardé le silence en
�/■ *»
3
( i )
attendant l ’événement de l ’inscription de faux que G ilbert
L a fo n t, débiteur, avoit seul osé hasarder. G ilbert L afont
a interjeté appel du jugem ent du 13 nivôse an 1 3 ; les
autres parties ont interjeté appel de celui du 19 ventôse^
an 11 : et quoiqu’ils ne se soient pas réunis en prem ière
instance, ils ont fait joindre leurs appels.
M O Y E N S .
L a jonction demandée par les Bournet et Forichon
est aussi singulière que le but de leu r appel. O n con cevroit cette jonction, si G ilbert L afon t avoit interjete
appel du jugement du 23 ventôse an 1 3 , pai'ce que ce
jugem ent et celui du 19 ventôse an 1 1 , frappent égale
m ent sur des saisies-arrêts. M ais le jugem ent du 14 ni
vôse an 13 prononce sur une inscription de faux à la
quelle les Boufnet et Forichon n’ont voulu prendre aucune
part. Comm ent se fait-il donc qu’aujourd’hui ils veuillent
se rendre commun le jugem ent qui y fait droit ?
Dans leur appel les Forichon ont demandé que les con
clusions par eux prises en prem ière instance leur fussent
adjugées ; et ils n’en avoient pris aucune. L e u r appel
au fait n’a aucune base , car ils n’ont pu fonder leur
saisie-arrêt que sur le faux de l’acte de naissance', et ce
pendant ce faux n’a jamais été articulé par eux.
Ces réflexions suffisent donc pour répondre à l’appel
de Forichon et Bournet. Il ne reste plus qu’à exam iner
les moyens proposés sur l’appel de G ilbert Lafont.
Ils se réduisent à dire i° . que les enquêtes prouvent
le faux de l’acte de naissance ; 20.' que les signes de vio
�( H )
rem arqués par les'tém oins ne sont pas suffisans, d’après
les lois et les notions de la médecine.
,
. -»-r'
'Ce sont ces deux prétentions qu’il faut exam iner, pour
en dém ontrer l ’erreur. ’
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e s enquêtes prouvent-elles le f a u x de Tacte de n ais
sance ?
- A u cu n acte ne m érite une foi plus grande que les
actes de l’état civil ; les ordonnances nous l’enseignent,
et la raison nous dit qu’il im porte au bon ordre de ne
les détruire qu’avec la preuve claire et évidente d’un faux
m atériel.
- C a r , comme le dit M . C o ch in , les registres de nais
sance sont des monumens publics a u x q u els la lo i veut
q u ’on donne une foi entière, comme dépositaires de l’état
des hommes.
Il ne faut pas être plus exigeant que la lo i; elle se con
tente, pour la déclaration des naissances, du tém oignage
du père s’il est viva n t, et de celui de la sage-femme ou
l’accoucheur, si le père est m ort ou absent ; car l’accou
cheur a lui-mêm e un caractère p u b lic, et seul il fait foi
de la naissance. ( L o i du 20 septembre 179 2 , tit. 3 , art 2.
Code c iv il, art.
.) Il faut en outre deux tém oins, mais
56
ce n’est pas pour attester la naissance, c’est seulement
pour attester la déclaration.
Enfin il faut que l’enfunt soit porté à l'officier public,
ou qu’il vienne s’assurer de sa naissance. ( L o i du 20 sep-
�fis
tem bre, tit. 3 , art.
( ' 15 )
) V o ilà tout ce que la loi a exigé.
Quand elle a dit qu’ un acte’ de l’état civ il feroit fo i, eL
que la preuve ne seroit pas reçue contre ce qu’il énonce,
c’est une chose assez bizarre qu’on pense l’anéantir, sous,
prétexte d’une inscription de fa u x , par la même voie de
la preuve testimoniale. Ce ne seroit qu’un pur changement
de fo rm e, si les trib u n au x, en expliquant la loi par le
sens qu’elle présente, ne pensoient que celui qui s’inscrit
en faux s’engage à quelque chose de bien plus positif qu’au
résultat d’une simple enquête, puisqu’un acte public ne
peut être anéanti par une preuve testimoniale.
Sans doute si 011 présentoit un extrait de naissance faux,
la justice ne dcvroit y ajouter foi que jusqu’à la preuve
du faux ; et c’est là le but de l’art. 45 du Code civil : mais
quand il s’agit de dém entir la déclaration dont la loi s’est
contentée, sans contredit aucune preuve testimoniale ne
doit suffire pour faire tom ber l’acte ; ou bien il falloit
dire franchement que les actes de naissance ne faisoient
foi que jusqu’à la preuve contraire.
Ces réflexions, présentées à la prudence de la co u r, n e'
tendent point à éluder l’examen des enquêtes; et pour
cela il n’y auroit qu’ un seul mot à d ire , c’est qu’au lieu
d'y vo ir la preuve de m ort annoncée, on a peine à trouver
qu’un seul tém oin ait certifié ce fait sans en douter luimême.
Que devoit prouver G ilbert L afon t? et qu’a-t-il p ro u vé?
Ses faits de faux étoient clairs et précis. 11 se soumetloit
à établir, io. q ue plusieurs personnes étoient présentes
lo is des couches, et que toutes ces personnes s'écrièrent :
V o ilà un enfant m ort j
�(i6)
2°. Q ue la sage-fem m e ayant frotté l’enfant avec de
Teau-de-vie, elle ou vrit sa bouche avec un de ses doigts,
mais que sa bouche se referma de suite; qu’il étoit pâle,
et avoit les yeux fermés ;
3°. Q ue François C orre n’arriva dans l’appartement
que dans l ’instant où la sage-femme plioit l’enfant pour
le faire enterrer;
4°. Q ue la femme Corre dit à son époux d’aller avec
L ouis L afon t faire faire les actes de naissance et de décès,
qui furent rédigés dans le même instant;
°. Q u’il n’a été fait aucune réquisition à l ’adjoint de
se transporter dans la maison où étoit l’enfant; qu’il n’a
5
par conséquent rem arqué aucuns signes de v i e , et qu’il
n’a rédigé les deux actes que. sur la déclaration de deux
tém oins, dont l’un étoit l’aïeu l, partie ipféressée, et l’autre
avoit seulement vu ensevelir l’enfant.
L e prem ier fait n’est attesté en partie que par un tém oin
qui est démenti par tous les autres. Ce ne sont pas toutes
les personnes présentes qui s’écrièrent : V o ilà un enfant
m ort; c’est la femme P ign ot qui prétend seule l’avoir dit à
M arie B ou rn et, parce qu’elle a vu tom ber des excrém ens;
mais M arie Bournet ne le confirme pas,
Cette P ign ot qui a voulu tout dire est tombée dans le
piège ordinaire des m enteurs; elle se contredit elle-m ême
sur tous les points. L ’accoucheuse lui fit signe que l’enfant
etoit m o rt, et cependant l’accoucheuse l’engagea à sentir
battre son cœ ur; elle refusa de s’assure?: si l’enfant étoit
v iv a n t, parce quV/fe ne s y con noissoit pas : cependant
d ie avoit déjà dit que l’enfant étoit mort.
1
Ces contradictions s’accordent parfaitement avec « dé
position
�( 17 )
position du tém oin F o riclio n , qui a ouï dire à plusieurs
femmes que cette m ême P ign o t leur avait attesté que
l’enfant étoit v iv a n t, et qu’elle lu i avoit rem arqué p lu
sieurs signes de vie. Cette malheureuse a ensuite changé
absolument de langage -, et ceux qui la connoissent ne s’en
étonnent pas.
Toutes les personnes présentes n’avoient pas dit : V o ilà
un enfant m o rt; puisque tous les autres témoins présens
ont rem arqué des signes de vie plus ou moins prononcés.
L e deuxièm e fait n’est p rou vé par aucune déposition,
si on en excepte la circonstance attestée par la m êm e
P ig n o t, que la sage-femme ou vrit la bouche de l’enfant :
fait is o lé , faux et inutile. M ais personne n’a dit que la
bouche se refermât de suite, et que l ’enfant eût, en nais
sant, ni de la p â le u r, ni les yeu x fermés.
L e troisièm e fait n’est encore déclaré par aucun té
m oin. C orre n’a pas dit être venu seulement quand on
ensevelissoit l’enfant, mais l’avoir v u sur les genoux de
sa femme. L a loi n’exigeoit pas m êm e de l u i , com m e
tém oin , qu’il attestât la naissance, elle ne l’exigeoit que
de la sage-fem m e; et il étoit tém oin de l’attestation seule
ment. S’il avoit déclaré la naissance, com m e tém oin instrumentaire il feroit encore f o i , et ne seroit $as admis
à se rétracter.
Jg
L e quatrièm e fait étoit aussi insignifiant que le précé
d en t, et n’est pas déclaré de la m ême m anière par ld
V ig n o t, quoique ce soit elle qui ait dicté évidem m ent
les faits articulés par l’adversaire.
Il y a même quelque chose d’essentiel à rem arquer dans
ce que disent Corre et la Pignot. Celle-ci assure avoir tout
vu depuis les couches jusqu’à riulium ation , et cependant
C
�(i8)
Corre dît que c’est elle qui vint le chercher à sa vign e;
elle s’est donc absentée quelque temps.
L e cinquièm e fait est dém ontré faux par tous les té
m oin s; car bien loin que le sieur R e yn au d , adjoint, ait
rédigé ses actes sans se transporter dans la maison où étoit
l’enfant, et sans le v o i r , il dit lui-m êm e y être venu et
•l’avoir vu. T o u s les témoins parlent de ce fait, et la P ignot
elle-m ême déclare que le sieur Reynaud toucha l’enfant
à plusieurs endroits, et le baptisa.
A in si rien de ce que G ilbert JLafont avoit offert de
p ro u ver ne l ’a été. L ’acte de naissance demeure donc dans
toute sa force.
Q uand on ôteroit de son enquête tous les signes de vie
articulés par ses propres tém oins, il ne resteroit que des
doutes sur la m ort de l’enfant; et des doutes ne détruisent
pas un acte.
Ces doutes encoi’e ne sont com m uniqués que par un
seul témoin qui a refusé de toucher l’enfant, et qui n’ayant
pas voulu s’éclaircir veut cependant com m uniquer tous
les éclaircissemens.
Il faut se méfier d’elle, puisqu’elle s’en est m éfiée ellem êm e; d’ailleurs ses contradictions appellent aussi la mé
fiance, quand elle ne seroit pas personnellement suspecte,
comme la plus proche parente des adversaires. D ’ailleurs
c’est une chute d’excrém ens qu’elle a regardée comme
signe de mort. Sur ce fait m êm e, qu’ il est étonnant qu’elle
ait pu vérifier avant la fin des couches, de quel poids
peut être 1111 semblable tém oignage? C ’est là cependant
la seule preuve de la m ort qu’elle d on n e, ou plutôt la
seule preuve qu e fournit l ’enquête.
�( 19 )
I-e curé auroit été un tém oin im portant s’il avoit as
sisté au commencement des couches ; mais il a fallu l’en
voyer chercher et l’attendre : et q u o iq u e , dans ce délai
assez lo n g , la vie de l’enfant n’ait pu que d im in u er,
cependant à son arrivée il a encore senti de la chaleur;
et si l’enfant avoit été m ort - n é , cette chaleur n’auroit
pas duré jusqu’alors , surtout à la fin de décembre. Ce
qu’il y a de certain c’est que le curé n’atteste pas que
l ’enfant fût m o rt, c’est qu’au contraire il l’a baptisé comme
v iv a n t, et après un prem ier baptême. O r , suivant les
règles, ce prem ier baptême suffisoit, n’y eût-il eu que du
danger, Canonistœ d icun t sufficere quod aliquod mernbrum b a p tizetu r, ut sit infans christianus.
A in si ce second baptême fait par un prêtre est une
présom ption authentique de la v ie , d’après les auteurs :
à celte présom ption se joint la preuve légale de la vie
par l’acte de naissance fait par le m êm e témoin. A in s i,
quand il m arquerait les conjectures de m ort les plus
fortes, jamais il n’y auroit lieu d’annuller son propre acte
p u b lic , qui parleroit plus haut que sa déposition.
O n vo it d’ailleurs dans cette déposition du curé une
retenue qui abrège trop les détails, et qui s’explique assez
par l’inquiétude que devoit lui donner m algré lui une
inscription de faux contre son propre acte.
Mais cette circonspection est corrigée par les témoinsD u rin et G u ille m in , à qui le curé a dit à différons inter
valles qu’ avant de baptiser l’enfant il s’étoit assuré de
son existence.
vSi à cela on ajoute les dépositions de la sage-fem m e,
de la veuve Bonnefoi et de la femme C o r r e , il n’y aura
plus à douter; çar les mouvernens de l’enfant dans la main
C 2
�Vt o
(( 20 y
de la sage-fem m e, les batteme?is du Cœur, leâ soup irs,
les bras remués trois à quatre fo is , la contraction desmuscles du visa g e, sont sans contredit des signes évidens
d’existence.
Cent tém oins, qui diroient avoir vu un individu m ort,
ne détruiroient pas le tém oignage de ceux qui l’ont vu
vivant. L es apparences de la vie et de la m ort sont sou
vent difficiles à reconnoître, et peuvent d’ailleurs avoir
lieu quelquefois alternativement.
S
e c o n d e
q u e s t i o n
.
L e s sigjies de vie rem arqués p a r les tém oins s o n t- ils
sitjjisans ?
Les lois françaises sont muettes sur cette question, etla jurisprudence s’est toujours basée sur les lois rom aines,
qui ne laissent presque rien indécis.
A peine l’enfant étoit conçu qu’ il étoit com pté parmi
les créatures, et réputé vivant toutes les fois qu’il s’agissoit de son intérêt.
Si cependant il m ouroit avant de naître, il n’étoit pas
réputé avoir v é c u , parce qu’alors en effet son intérêt
'é to it n u l, et il étoit inutile qu’il eût vécu pour l’intérêt
d’autrui.
M ais dès l’instant qu’ il étoit n é , il devenoit capable de
succéder et de transm ettre, quelle que foible et courte
qu’ait pu être sa v ie , licet
illico
decesserit. L . 2 , cod..
l ) e post. hœr.
Cependant les écoles ne s’accordoient pas sur les preuves
de la v i e , ’ lorsqu’il s’agissoit de savoir quand un testa
ment étoit auuuüé par la naissance d’un posthume. Les
�»
( 2*. ) ^
proculeïens, qui étoient les rigoristes du droit, vouloient
que l’enfant, pour être réputé avoir v é c u , eût c r ié , ciamorem ew iserit. M ais les sabiniens n’étoient pas de cet
avis, et répondoient que la foiblesse ou un défaut d’or
ganes peuvent em pêcher les cris de-l’enfant, quoique visi
blem ent il existe. Justinien termina ce débat par la loi
Ç u o d diù certa tu m , et d it, en approuvant l’opinion des
sabiniens, que le testament étoit rom pu si l’enfant étoit
né v iv a n t , quand m êm e il seroit m ort im m édiatem ent
après sa naissance, et m êm e dans les m ains de la sagefemme.
S a b in ia n i existim a ba nt s i viçus natus esset e t s j
v o c e m n o n j e m i s i t rum pi testamentuin : eoruni etiam
nos laudarnus sen ten iia m , et sa n cim u s, si pei'fectè na
tus e s t , licet i l l i c o postquarn in terrain cecidit veî
s o b s t e t r i c i s d ecessit, rum pi testam entum. L o i Ç u o d d m , code D e posth. lib.
in
m a n ib u
Cette supposition d’une m ort aussi prom pte, pour ainsi
d ire , que la naissance, marque assez que la loi n’a pas
exigé des signes de vie bien prononcés , puisque le son
de la vo ix ne lui a pas même semblé nécessaire.
11
y a p lu s, car la loi encore a p révu le cas où un
accouchement auroit été tellem ent forcé et difficile que
l’enfant n’auroit pu être extrait qu’en partie. Si la p or
tion qui a v u le m onde est celle en qui consiste princi
palement l’existence, l’enfant n’en est pas moins réputé
avoir vécu , quoiqu’incapable de conserver la v ie ; et la
loi en ce cas se contente du m oindre souille.
S i non integrum a n im a l cditurn s i t , cum s p i r i t u
tarnen, adeo testam entuin rum pit. L . 1 2 , il’. D e lib e n s
et post/l.
�m
( 1 2 )f
Ces principes ont toujours été adoptés par la jurispru
dence; et les auteurs du droit les enseignent comme des
maximes certaines.
L ebrun se plaint avec éloquence de ceux qui veulent
pour signe de vie avoir entendu la v o ix de l’enfant ;
« comme si, d it-il, la nature attentive à d’autres choses,
« ne pou voit pas, dans un petit espace de temps, v iv re
« et m ourir sans se plaindre : au contraire l’on peut d ire,
« ajoute-t-il, que l’enfant qui se tait ainsi en naissant,
« subsiste en partie par ce silence, parce que la nature
« m énage ses forces pour prolonger sa v i e , et évite do
« la dissiper en accens superflus. » ( L iv r e i , chap. 4 ,
sect. 1.)
M . D o m a t, cité par les adversaires, s’occupe des cas
où l’enfant est né avant le terme ordinaire ; et quoique
dans l ’usage on n’ait jamais regardé com m e viable un
enfant né avant le septième m ois, M . D om at distingue
le cas où il s’agit de son état personnel, de celui où il
est question de savoir s’il a succédé et transmis la succes
sion. Dans la prem ière espèce, c’est-à-dire, curn agitur
de statu e t j i t quœ stio sta tû s, M . D om at pense que l’en
fan t, avant sept m ois, n’est pas réputé avoir vécu : mais
quand il ne s?agit que de transmettre la succession à ses
h éritiers, cîtm agitur de transrnissione hœ redita tis, les
raisons 11c sont plus les m êm es, et il n’im porlc plus que
l’enfant ait pu v iv re , il suilit qu’il ait vécu; et M . Dom at
cite des arrêts qui ont réputé successibles des enfans do
quatre et cinq m ois, nés même par l’opération césarienne.
( L i v . 1 , sect. 1 , n°. 5 , p. 2 .)
Rem arquons qu’ici il s’agit d ’un enfant venu à tonne
après neuf m o is, et dès-lors légalement viable,•
�- 23 ^
H enrys, cité encore par les adversaires, 11e leur est pas
plus favorable que D om nt; il parle d’une cause où il s’agissoit d’ un enfant q u i, loin d’êlre regardé comme mort
pour avoir i*ejeté des excrém en s, 11’avoit au contraire
donné d’autres signes de vie constans. V o ic i littéralement
le fait rapporté par M . H enrys lui-m êm e, ce U ne m ère
« n’ayant pu rendre son enfant qu’avec peine et violence,
« et cet enfant n’ayant donné d’autre signe de vie que
« par les excrémens qu’il avoit ren d u s, cela fit douter
« s’il avoit survécu la m ère ou non. C eux qui avoient
« intérêt qu’il fût plutôt né vivan t que m o rt, ne man« quèrènt pas d’user de précaution , et de faire ouir par
ce devant le juge la sage-femme et un médecin. I,e p ré« texte qu’ils en prirent fut au sujet de l ’en terrem en t,
« et sur le refus que le curé p ou voit faire de le mettre
« en terre sainte. Y ayant eu procès en ce siè g e , nous
« fûmes ouïs pour le procureur du r o i.. . . La sage-femme
«
«
«
et
«
ne s’étant arrêtée qu’à l ’éjection des excrém ens, et en
cela n’ayant pu parler que par l’organe du m éd ecin ...
le rapport nous paroissoit précipité et affecté ; nous
crûmes qu’il y avoit plus d’apparence d’ en ordonner
un second__ que puisqu’on n’avoit établi la vie de
cc l’enfant que sur ce signe se u l, les médecins en p o u « voient aussi-bien juger que s’ils avoient été présens à
« l’enfantement. Nos conclusions furent su iv ies, et un
K nouveau rapport fut ordonné. Y ayant eu appel au pai*“ ^emen t, la cour a cru que le prem ier rapport devoit
c< suffi1'e ; en un m o t, que su r le d o u te, et dans les cir« constances du f a i t , il,fa llo it plutôt ju g er que f enfant
« avoit eu vie , que d'être m ort-né. » ( Quest. 2 1 , liv. 6. )
Enfin A caranza, cité aussi par les adversaires, d it, au
�( H )
rapport de B reton n ier, dans son traité D e p à rtu , ch. 16 ,
n°. 3 2 , que le m oindre signe de vie suffit s’il est certain, *
Dans une cause qui dépend toute entière d’un fait pii'blic et légalem ent attesté, que de simples indices ne peu
vent d étru ire, les réflexions des docteurs consultés p a i
les adversaires ne conduiront pas la cour à tout l’éclair
cissement qu’elle avoit lieu d’attendre de leurs lum ières;
car ces docteurs n’ont pu se déterm iner que par le vague
des enquêtes : aussi leur opinion se réduit-elle à un système;
M ais quelque brillant que puisse être un système, jamais
l ’incertitude n’amena la conviction.
'
.
L e raisonnement des docteurs consultés se réduit à cecn
L a c h a le u r, les m ouvem ens de l ’en fan t, ses soupirs et le
battement de son cœ ur, peuvent avoir trom pé les tém oins,
parce que les genoux trem bloient à celle qui tenoit l’en
fant sur ses g e n o u x , et ce trem blem ent, com m uniqué A
l’enfant, a pu en im poser pou r un m ouvem ent qui lui fût
personnel. L e seu l soupir entendu étant un dernier sorjpir,
n’a été q u’un m ouvem ent exp iratoire, sans inspiration,
parce que les poumons n’ont pas eu la force de supporter
le volum e d’air nécessaire à la respiration. Les sigues de
vitalité rem arqués ne sont qu’ un reste de contractilité et
d’irritabilité tels qu’on les observe sur les têtes nouvel
lem ent coupées, sur le larynx des oies, et nu galvanisme;
T o u t cela n’étoit qu’un indice de la cessation encore
récente de la vie animale.
>
L a base de ce système est une simple possibilité : le fait
principal qui le inotive n’est pas exact, cl par conséquent
lu système s’évanouit tout cutier.
Le
�I
25
(
)
L e tremblement des gen o u x, im puté à la.fem m e C orre,
n’est pas attesté par elle; et sans doute sa déposition devoit
être la plus notable à l’égard d’un fait qui lui étoit per
sonnel.
L e soupir appelé un dernier soupir est encore une
erreu r; car puisque les docteurs ont choisi les témoins
q u i parloient de v is u , ils ont dû rem arquer que la sagefem m e, après avoir lavé l’enfant avec de l’e a u - d e - v ie ,
entendit un gros soupir j puis elle le rem it à la fem m e
C orre pour s’occuper de la m ère. O r , à son tou r, la fem me
C orre lava l’enfant avec du v i n , et alors remarqua que
l ’enfant so u p ir o it, qu’il avoit des mouvemens dans le
visage, qu’il remua les bras trois ou quatre fois, et que
Je coeur lui battoit.
Ces soupirs ne sont pas les mêmes que ceux entendus
par la sage-fem m e quelque temps auparavant. Il n’y a
donc pas, comme l’ont cru les docteurs, un seu l et der
n ier soupir.
A lo r s , et sans exam iner s’il est possible qu’un enfant
sortant du sein de sa m ère rende de l’air par expiration,
sans en avoir jamais asp iré, il est au moins certain que le
prem ier de ces soupirs, à supposer qu’il n’y en ait eu que
•deux, n’est pas un dernier m ouvem ent expiratoire passif.
A p rès cette exanim ation, il seroit impossible de conce
vo ir qu’un second soupir eût pu succéder au prem ier. C ’est
bien assez d’admettre un prem ier soupir dans un nou
veau n,é, si scs poumons n’ont pas eu la force de sup
porter le volum e d’air nécessaire à la respiration.
Les signes de vitalité rem arqués aux têtes fraîchement
poupées ne semblent devoir rien prouver h l’égard d’un
pjifunt qui ne s’éteint que par foiblesse, Dans une tête
D
�r.
" '
. . .
r
, •
coupée, la vie surprise, p o u r ainsi d ire, pendant sa fo rce ,
s’arrête encore dans une partie'restée saine. Les muscles,
irrités ordinairem ent par la m oindre blessure , le sont
bien davantage par leur section entière; et leur contrac
tion com m unique à tout ce qui en dépend un jeu m é
canique qui n’est pas la v i e , mais qui en est l ’apparence.
A u contraire quand un corps entier s’éteint par débi^"lité ou dissolution ', ce m ouvem ent des muscles rie peut
ii
pas survivre à l’atonie de l’organisation ; à plus forte
raison dans un enfant nouveau, qui n’auroit pas eu la fo ire
de supporter une seule aspiration, toute contractilité et
irritabilité, semble une chose entièrem ent impossible.
*
L e larynx des oies ne répète leur cri que pendant la
durée du souffle qu’on y com m unique; ainsi il n’y a pas
de vitalité dans ce qui exige une fonction étrangère.
L e galvanisme peut bien, par une combinaison de m é
ta u x , produire sur des chairs inanimées une com m otion
dont nos sens imparfaits ne peuvent pas apercevoir lu
cause : m ais, quelle qu’elle so it, elle est le produit d’un
appareil q u elco n q u e; et jamais un corps n’a répété les
inouvemens galvaniques hors la présence de cet appareil.
Rem arquons une vérité frappante. Dans leur propre
opinion les docteurs ont supposé que la vitalité môme
qu’ ils présum oient dans l ’enfant, étoit l’indice de la ces
sation en cart récente de la vie animale.
V o ilà donc une présomption de m ort attachée A la con
viction que l’enfant vivo it encore un instant auparavant.
O r , cet instant, où est-il? qui peut le saisir aujourd’h u i,
quand les assistans ne Font pu recon n oître? Com m ent,
dans une m atière aussi conjecturale que les signes de la
�H1
( 2?' V
m o rt, les docteurs assureront-ils que l’enfant de Cathe
rine L a fo n t, venu à terme en l’an n , soit m ort avant,
ou pendant l’extractio n , ou une minute après sa nais
sance, avan t, ou pendant son b ap têm e, ou in rnanibus
o bslciricis, suivant le langage de la loi.
L a sage-femme l ’a gardé quelque tem ps; après elle, la
femme, C orre l’a gardé-; puis le c u r é , mandé pour le
baptiser, est v e n u ; et c’est après tout cela qu’on a été
certain de sa m ort.
, ,■ r .
.
- ,
t
'
Quand il n’y auroit pas de signes de vie l’econnus, rien
ne seroit plus conjectural que les signes de la m o rt, et
en ce cas même il faudroit seulement douter.
C a r , comme le dit M» W in s lo w , « si la chaleur du
« corps et la mollesse des* parties flexibles sont des signes
« incertains d’une vie encore subsistante, la pâleur du vi« sage, le froid du corps, la roideur des extrém ités, la
« cessation des m ouvemens et l’abolition des sens externes,
« sont des signes très-équivoques d’une m ort certaine....
c< 11 est incontestable que le corps est quelquefois telle« ment privé de toute fonction v ita le , et que le souille
« de la vie y est tellement cach é, qu’il ne paroît aucune
« différence, de la vie et de la mort. » ( Dissertation.sur
l’incertitude des. signes de la m o r t, page 84. )
E t c’est parce que les signes de la m ort sont plus dou
teux que ceux de la v ie , que les auteurs de médecine
h’ gale se contentent des moindres indices pour présum er
la vie de reniant.
S i sp ira v en t, dit Zuchias ,• s i mem hra d isten d en t, s i
se m o v en t, .si sternutaverit, s i urinant red^at. •( Quest,
xuédico-leg. liv .
tit. , n°, 123.) Cependant la plupart
5
D 2
�WV
\>\
• . ... (
3
de ces cas pourroient se prendre encore plus pour de
simples m ouvem ens de vitalité musculaire.
Foderé m arque une notable différence entre le cas où
l’enfant seroit m ort dans le ventre de sa m è re , et celui'
où il ne m eurt que pendant sa naissance. A u prem ier
cas, l’état qu’il décrit des souffrances de la m ère ne laisse
pas de doute; au deuxièm e cas, il indique comme signe
de m ort le défaut de pulsation et de chaleur des artères
ombilicales : néanmoins il cite encore des exemples où
ccs signes mêmes ont trom pé les praticiens. ( M édeciue
c iv ile , tom. i , n ° . 288.)
M ahon ne pense nullem ent que la pulsation des artères
soit un sim ple indice de vitalité et de contractilité. « L a
«
cc
«
«
«
continuation du battement du cœur et de la circulation
du sang en gén éral, dit-il, est un indice bien plus sûr dé
la vie de l’enfant après sa naissance. Cette fonction est,
de toutes celles qui tom bent sous les sens, la plus im portante de la vie animale. » ( M édecine lé g a le , tom. 2 ,
pag- 393- 3
Si donc nous ignorons quand est m ort l ’enfant de Ca
therine L afon t, au moins ne l’étoit-il pas quand son cœur
battoit encore; et si les mouvemens des bras et du visage
sont, comme les soupirs, des signes douteux de la v ie , au
m oins tous les raisonnemens de l’univers ne prouveroient
pas qu’ils sont des signes de mort.
C ar il faut pour les adversaires des signes évidens de
m o rt, puisqu’ils attaquent un acte de naissance.
E h ! où en serions-nous, si h chaque m ort il falloit élever
autant de doutes et d’incertitudcs?
Les hommes sont convenus de regarder comme i’ins-
�( 29 ) ^
#
tant fixe de la m ort celui de la cessation totale de la cir
culation du san g, suivie de la roideur des membres; et
les intérêts de toutes les familles se règlent chaque jour
sur la foi de cette croyance.
On: sait bien qu’il est de loin en loin des exceptions
à cette rè g le , et que des personnes ont v é c u , après avoir
eu tous les signes ordinaires de la mort,
c M ais on ne vo it pas pou r cela que ces phénom ènes
changent les notions de l’habitude; et certes nul ne certifieroit vivant un homm e sans pouls et sans fle x ib ilité de
m em bres, parce qu’il en auroit v u v iv re d’autres ayant
les mêmes symptômes de m ort.
Com m ent donc est-il possible de décider qu’ un enfant,
qui conservoit du m ouvem ent , etoit cependant m o r t,
par cela seul qu’il est des exemples que des individus
morts ont quelquefois donné des signes de vie.
Cependant il ne s’agit ici que de fixer l’époque précise*
d’ une m ort reconnue récente ,* et au lieu de la rechercher
dans des possibilités et dans des h ypoth èses, pourquoi
ne pas supposer aussi une cause plus im m édiate et plus
naturelle?
'
.
• .,
L es couches de; Catherine L afon t ont été laborieuses;
I
7
voilà un fait connu.
, ‘
L ’enfant a dû être très-acçablé, et avoir besoin du plu9
grand calm e; si on l ’a tourm enté on n’a pu que lui nuire :
Voilà la prem ière présom ption certaine.
Mais au lieu de lu i laisser du x*epos on lui a coupé le
cordon om bilical, on l’a frotté avec de l’eau-de-vie, puis
avec du vin.
P ou rqu oi donc ne pas croire que ces opérations ont
�$ e *
('3 0 '
achevé d’éteindre une vie encore ré cen te, plutôt que
d é s ig n e r une époque antérieure, sans aucune certitude, ;
mais pnr sim ple soupçon.
^ ' *ni >{
Ici au moins nous présentons :un système qiii "anime *
hase, et cette base est assise^sur une grande autorité.)
« Lorsque l’enfant, dit H ipp ocrate, est »sorti du>!gein:'
« de sa m ère avec effort, com m e il est fo ib le , il ne fautj
« p a s lui c o u p e r 'l’om bilic q u’il n’ait crié et'uriné/*»
( 'H ippocr, de sùperf. ch,
)
yb
'i
' - I ■
r-i
E t qu’ori n’objecte pas que ce sont là des principes d’an-<
cîenne th éorie; A lphonse L e r o i, qui les rap pelle, ajoute ;
5.’
-*I
ru
« Nous développerons ailleurs ce précepte excellent, que
cc nous tâchons chaque jour de rétabjir. » ( A lp h . L e r o i,
pratique des accouclicm ens. )
: 1
)
L a section du cordon om bilical a donc pu nuire à un
enfant déjà fo ib le ; des frictionâ d’e a u -d e -y ie sur’ son
visage ont dû m ême lui causer une l’évolution qu’il étoit
hors d’état de supporter : c’est en ce m om ent q u eu es
soupirs ont annoncé le dernier effortfde la n ature; e t’
quand le spasme a arrêté le battemenÉidé son; cœ u r, il
a résulté de cette siïsperl^ion rtiêmé^que Jc’est alors seu
lement qu’il a cessé de vivre.
* f
Si ce n’est là qu’une présdm ption ,>-'cl1é> a p o u r elle les
dépositions des témoins qui ont vu des m ouvem eus ’jus-r
q u’aptès la friction d’eau-cte-vite : mnis,d,aÎllle ui‘s, daiisî lo
dctotb m êm e, la réligion , laph ysiq u e ét les lois-puésument
que l’enfant a vécu.
1 ' '•
„1
,
>
i ih) 'i i-. ii»!
1
r ‘ 'ReniarqiiorÀ’ co nVbîeri'eii^oVé^ ti
jiorï do dn. <vio
est ici plus favorable que dans l’espèce des lois voiiiainrs. J ,;ï
il sVigissoit'(ilLM‘6tTrprLJ'ni1i
4
efrPj <
*.•¿tpuru; pei' Iu
�1p o u r,Ie :^ s th u m £ ,':sMr^^
, in m anïbus ohs~
tetricîs; ic i, au contraire, iï s’agit < e présum er la vie en
faveur d’une m ère, et de supposer que la nature a suivi
son cours oi’din aire, en faisant naître vivan t un enfant
q u i,'v e n u -à term e, étoit légalem ent viable.
’
^
'A Cj
\
3
O n a articulé contre l’acte de. naissance des vices de
form e, mais ils sont im aginaires, et n’em porteroient au
cune peine de nullité. L e seul vice conséquent serait de
‘ n’avoir pas porté l’enfant à là maison com m une ; mais
la loi dit seulement qu’il sera présenté à l ’officier p u b lic,
Jet l’officier public l’a vu.
u. ' ‘r
O n se fait un moyen de ce que Catherine L afon t a
contracté récem ment un second mariage. M ais qui peut
lui reprocher ce que la loi et les bienséances autorisent:
' depuis trois ans elle n’a plus le bonheur d ’être épouse
ni m ère, et l’obéissance qu’elle doit à son père ne lui a
pas permis de mettre un plus long term e-au désir qu’ il
manifestoit chaque jour de se donner un nouveau sou
tien. M ais au reste, quelle influence cet événem ent peut-il
avoir pour la cause, et surtout pôur infirm er un juge
ment antérieur ?
•
■
Ce n’est pas moins une m ère qui réclame la succès«
*
»
.
sion de son enfant, luctuosam hœ reditcitem , suivant le
langage de la lo i. O n a blâmé les premiers juges d’avoir
dit que celle qui avoit co u ru 'les dangers de la maternité
méritait la préférence dans le doute ; mais ce m otif, bien
loin d être aussi absurde qu’on le p réten d , est entière
ment puise dans la nature et dans la m orille, comme il
1 est dans l’opinion des plus sa vans auteur^, et notamment
�C 32 )
-de D o m at, qui parle de la faveur de la cause du père ou
de la m ère qui survivent à leur enfant.
Cujas d it, com m e les prem iers juges, que la plus favo
rable interprétation devoit être pour la m ère en sem
blable circonstance, B e nignius est credere ordinem nar
turœ servasse f o rtu n a m , ut in dubio m a tr i fa v e a m u s ,
-quœ in luctu est magno , propter am issum f ilium et
m a r itu m , q uam agnatis. ( C uja c, ad leg. 26, D e pact.
dot. )
A quels titres en effet seroîent plus recommandables
d es collatérau x, qui ne voyant dans les dangers d’une
m ère q u’une exp ectative, et dans ses m alheurs qu’ une
succession, veulent tout renverser pour en faire leur
p r o ie , e t , irrités de trouver une barrière dans un acte
authentique, osent ro u vrir les tom beaux de leur fam ille,
p o u r chercher une heure in certain e, et recueillir pour
ainsi d ire la vérité dans le néant ? L a cour ne verra en
eux q ue des profanateurs av ides, qui d’ailleurs, dans leurs
m oyens im puissant, sont encore bien loin d’avoir satis
fait à ce qu’ils s’étoient imposés à eux-mêmes pour par
v enir à renverser un acte d’ordre p u b lic , par le m otif
u nique de leur intérêt particulier.
»
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M° . T A R D I F , licen cié a v o u é x
A RI
O M , de l'imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Nivôse an 1 4
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Catherine. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Catherine Lafont, et Louis-Auguste Petauton, son mari, habitant à Néris-les-Bains, intimés ; contre Gilbert Lafont, Jean-Baptiste Bournet, Jean Forichon, Marie et autre Marie Lafont, leurs femmes, habitant aussi à Néris, appelans.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1801-An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1508
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0722
BCU_Factums_M0723
BCU_Factums_M0323
BCU_Factums_G1506
BCU_Factums_G1507
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53248/BCU_Factums_G1508.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53247/BCU_Factums_G1507.pdf
41c22927303d1dd7adfe05ab3aa1ad73
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
MÉDICALES
d
'appei
D E RIOM
POUR
G ilbert
L A FO NT,
appelant ;
CONTRE
Catherine
L A F O N T , et L
P E T A U T O N , son mari
L
e
ouis- A u guste
,
intimés.
CONS EI L S O U S S I G N É , consulté su r les
signes qui constatent évidemment qu’un enfant est né
vivant,
E
s t i me
COUR
qu’il ne faut s’arrêter qu’à ceux qu’on
aperçoit sur l’enfant entièrement sorti du ventre de la
A
�mère : tout ce qui se passe pendant ¡’accouchement
n’étant pas mouvement propre de l’enfant, il ne regarde
pas la clialeur du corps de l’enfant comme un signe
notoire qu’il est sorti vivant : le cadavre la conserve
long-temps. Il faut donc pour constater Lien sûrement,
bien légitimement la vie du nouveau n é , qu’on aperçoive
le jeu du poumon, le mouvement alternatif d’inspiration
et d’expii’ation ; que la circulation du sang soit soute
nue ; qu’il y ait dilatation et contraction alternative du
cœur et des artères : ce qui n’est pas assuré par unrseul
battement de cœur qui peut s’apercevoir, même dans
un cœur détaché de la poitrine.
L e conseil pense donc que quand la certitude que
l’enfant a respiré , que le sang a circulé, n’est pas consta
tée par un homme de l’art, le signe univoque et seul in
contestablement sûr de la vie du nouveau n é , est le cri,
le vagitits si désiré par les m ères, et si bien entendu
par elles, que par ce cri la plupart connoissent le sexe
du nouveau né.
DÉLIBÉRÉ
à,C lerm o n t-F erran d , ce 14 frimaire
an 14.
M O N E S T I E R , D . iV. M .
D U L A C , V . M. M.
�us
(3)
J
e
SO U SS IG N É , docteur en chirurgie, après avoir
lu attentivement le mémoire de Gilbert L afon t, tendant
à prouver que l’enfant en question n’est pas né vivant,
P
ense
q u ’il ne p e u t y a v o ir de doute à cet é g a r d ,
et q u ’il p a r o ît, d’après les faits m ê m e , que cet enfant
a p éri dans le travail de l ’accoucliement.
L ’absence des m ouvemens, celle des cris qu’il jette
ordinairement; l’absence de la ligature du cordon om
bilical , absence qui peut être présum ée, puisque la
sage-femme n’en parle pas : ligature qu’elle n’auroit
pas manqué de faire , si elle eût cru l’enfant vivant ,
sont une masse de présomptions en faveur de sa mort.
Quant à la chaleur de son corps , seul^ m otif qui a
déterminé le prêtre à lui administrer le baptême , il
n’est personne qui ne sache que la chaleur n’est pas
la vie , et qu’elle se conserve encoi’e plus ou moins
long-tem ps, suivant l’individu et le genre de mort.
Personne ne parle de l’avoir vu respirer , d’avoir
senti les battemens du cœur ou des artères •, et certes,
si ces signes avoient existé, il en auroit paru d’autres
plus décisifs en core, tels que les mouvemens des pau
pières , de la bouch e, des m em bres, l’éternument et
les cris. Que n’a - t-o n pas fait pour le rappeler à la
v i e ? Les frictions avec l’e a u -d e -v ie étoient un bon
A z
“t
�(4)
m oyen, mais on pouvoit en ajouter d’autres; et si on
les a négligés, c’est parce qu’on les a jugés inutiles.
Les battemens du cœur qu’on a sentis dans le mo
ment de Paccoucliement, ne peuvent prouver que l’en
fant a vécu après sa naissance , mais seulement qu’il
vivoit un moment aupai'avant, avant d’etre débarrassé
des liens qui l’unissoient à sa mère ; et que la demiheure qui s’est écoulée depuis l’instant où la sagefemme a senti les battemens du c œ u r , jusqu’à celui
de la naissance , a été plus que suffisante pour qu’il
pérît : et on en sera d’autant plus convaincu, si l’on
jette un coup d’œil sur la manière dont s’opère l’ac
couchement par les p ied s, qui est le cas de l’enfant
dont il s’agit.
Cet accouchement s’opcx-e par les seules forces de la
nature, 011 par l’art. Dans le premier cas, l’enfant est
chassé jusqu’au-dessous des bras; mais alors le volum e »
de la tete et des bras oppose une plus grande résis
tance , et le cordon ombilical qui se trouve placé sur
les parties latérales de la tete de l’enfant, souifre une
compression qui intercepte la circulation de la mère
à l’enfant, qui est le seul moyen d’existence de ce der
nier. O r , on conçoit que s’il tarde quelque temps à
sortir, cette compression le fait périr nécessairement.
Si l’art vient au secours de la mère et de l’enfant, i l
�/ ■
JP
( 5 )
clierclie à rendre sa sortie plus prom pte, en tacliant
d’abord de dégager' les bras l’un après l’autre : reste
ensuite la tête, qui remplit alors exactement la cavité
du petit bassin , et exerce toujours sur le cordon une
compression funeste, pour peu qu’elle dure. 11 faut
donc
que l’accoucheur emploie une force suffisante
pour la sortir le plutôt possible ; et il ne peut pai'venir à ce but, qu’en tirant sur le corps de l’enfant;
mais il faut que ces efforts se fassent en ligne directe,
et soient calculés sur le degré de force des ligamens et
des muscles qui unissent la tête de l’enfant à son tronc,
sans quoi on court le plus grand risque, ou de le dé
coller, ou de luxer la première vertèbre sur la seconde:
de là , rupture de la moelle de l’épine, et mort subite.
Si ces accidens arrivent quelquefois entre les mains
de gens habiles, à plus forte raison combien ne doiton pas les craindre, lorsque l’accouchement est livré
aux mains d’une femme dont l’ignorance ne peut être
révoquée en doute, puisqu’elle ne sait ni lire ni écrire.
E t qui peut répondre que la mort de l’enfant n’ait
été occasionnée ou par les mauvaises manœuvres de la
sage-femme, ou par la compression qu’a éprouvée le
cordon ombilical en restant comprimé pendant demiheure que la tête a resté engagée dans le bassin. L ’ac
couchement a dû encore être d’autant plus pénible, que
�(6)
c’étoit le prem ier, et que les parties ont dû offrir plus
de résistance.
J ’espère que
ces réflexions sont du plus grand
poids, et méritent d’etre prises en considération.
Peut-on regarder comme un signe de vie cet unique
et léger soupir que l’on croit avoir entendu faire à
l’enfant, dans le temps qu’on lui administroit des fric
tions sur la figure? N ’est-il pas plus naturel de penser
que ce n’étoit qu’un mouvement mécanique imprimé
par le frottement sur des parties jouissant encore de toute
leur élasticité, et par lu compression que l’on a pu
faire sur la poitrine de l’enfant, en lui administrant
ces secours. J ’en dis autant du mouvement du bras»
qu’on a cru apercevoir : une position sur un plan non
horizontal, comme les genoux, suffit pour en rendre
raison , sans avoir recours à line action vitale qui
n’existe pas. On ne peut donc de ces diiférens mouvemens en conclure que l’enfant étoit vivant.
Pour me résumer, je pense qu’un enfant ne peut être
censé vivant, tant qu’il est encore dans le ventre de sa
m ère; que les seuls signes positifs qui annoncent la vie ,
lorsqu’il est né, sont les mouveinens bien distincts et répé
tés des membres , des paupières, de la bouche, l’étcrnument, la respiration, les battemens du cœur et des
artères, et les cris. L ’enfant dont il s’agit n’a donné
�( 7 )
aucun de ces signes Lien évidens ; en conséquence il
me paroît prouvé qu’il a péri dans le travail de l’accou
chement ; et on ne peut pas dire qu’il est né vivant ,
puisqu’il est mort avant de naître : la naissance ne datant
que du moment où l’on respire, et où l’on commence
à sentir les influences de l’air atmosphérique.
D
é lib é r é
à Clerm ont-Ferrand, le 8 janvier 1806.
C I I O M E T , D . Ch. P .
D u même avis , par les mêmes motifs.
A Clermont-Ferrand , le 8 janvier 1806.
DULAC,
;D. M . M .
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r io t , seul imprimeur de la
Cour d ’a p p e l.— Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lafon, Gilbert. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Monestier
Dulac
Chomet
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations médicales pour Gilbert Lafont, appelant ; contre Catherine Lafont, et Louis-Auguste Petauton, son mari, intimés.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1801-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1507
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1506
BCU_Factums_G1508
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53247/BCU_Factums_G1507.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53246/BCU_Factums_G1506.pdf
92d9ff98b9f508d7808a29e4c0bc217d
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_______________________________________________________________________
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MEMOIRE
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ET CONSULTATION
C0UR
P O U R
D ’A P P E t
G i l b e r t L A F O N T , propriétaire, aubergiste de
*****
___
la commune de N é ris-le s-B ain s, appelant de
jugement rendu au tribunal de Montluçon, le
14 nivôse an 1 ;
3
ET
ENCORE
POUR
J e a n B O U R N E T , M a r i e L A F O N T , son épouse;
J e a n F O R IC H O N , et M a r i e L A F O N T , sa
femme; appelans d’un jugement rendu au même
tribunal, le 19 ventôse an 1 1 ;
CONTRE
C a th e r in e
-
-
LAFONT,
veuve et commune de
Gilbert-Marie L a f o n t , habitante de la même
commune de N é r is -le s -B a in s , intimée..
Q U E S T IO N
M É D IC O -L É G A L E . '
A quels signes peut-on reconnoître qu’un enfant est né
vivant ?
L e 14 brumaire an 10, Catherine L afon t, intimée, a
épousé Gilbert Lafont. L e père de Catherine l’institua
A
�I#
( o
son héritière universelle, et lui abandonna, dès l’instant
m êm e, les biens qu’il possédoit dans la commune de
Néris.
Il fut stipulé entre les époux une communauté con
jugale. L e mari devoit habiter dans la maison de son
épouse, et confondre une somme de 300 fr. pour prendre
part à la communauté; le reste de ses biens devoit sortir
nature de propres.
Les époux se donnent réciproquement l’usufruit de
tous leurs biens, en cas de non enfans survivans, et
pendant la viduité.
Ce mariage n’a duré que jusqu’au 27 fructidor an 10,
époque du décès de Gilbert-M arie L a fo n t, âgé de vingttrois ans.
L e 21 frimaire an 1 1 , Catherine Lafont a accouché
d’un posthume-, ses couches furent laborieuses et pénibles.
L ’enfant est sorti mort du sein de la mère : c’étoit une
fille. L e même jour on a dressé deux actes civils, c’est< à-dire, l’acte de naissance et celui du décès. Ces actes
sont ainsi conçus :
« A cte de naissance d’un enfant né en ce b o u rg, à
« trois heures et demie après m id i, du légitime mariage
« du défunt G ilbert-M arie Lafont et de Catherine La« font : le sexe de l ’enfant a été déclaré être un enfant
« femme. Prem ier tém oin, François C orre, tisserand,
« voisin à l’enfant-, deuxième tém oin, Marguerite Roclie« fo rt, accoucheuse, domiciliée audit bourg. L e premier
« témoin a signé ; le second a déclaré ne le savoir. Fran« çois C o rre, âgé de quarante ans; le deuxièm e, de
« soixante-six ans.
�« Sur la réquisition à nous faite par Louis L afon t,
« propriétaire, aubergiste, grand-père de l’enfant, aussi
« domicilié audit b o u rg, qui a signé avec le premier
« témoin. Constaté par moi adjoint au maire de la com« mune de N éris, faisant les fonctions d’officier public,
« le maire absent. Signé R eynaud, adjoint. »
O n remarque deux choses importantes à la lecture de
cet acte; i ° . que l’enfant n’a pas été présenté à l’officier
public, conformément à la lo i; 2°. qu’on ne lui a donné
aucun prénom.
Suit l’acte du décès, ainsi conçu :
« A cte de décès d’un enfant fem m e, né du légitime
« mariage de défunt Gilbert-M arie Lafont et de Catlie« rine L afo n t, décédé ledit jour en ce bourg, à quatre
« heiu’es après m idi; né audit lieu le même jour, h trois
« heures et demie de l’api’ès-m idi. Sur la déclaration
« faite par le citoyer/Louis Lafont, propriétaire, auber« giste, grand-père de l’enfant, âgé de cinquante ans,
« et de François C orre, tisserand, âgé de quarante ans,
« tous les deux domiciliés audit b o u rg, qui ont signé.« Constaté par moi Pierre R eynaud, adjoint du maire
« de la commune de N éris, le maire absent, »
Ce sieur Reynaud étoit tout à la fois curé de Néris
et adjoint de la commune ; il avoit été mandé , en sa
première qualité, au moment des couches de Catherine
L afo n t; on lui avoit présenté l’enfant, auquel il avoit
trouvé un reste de chaleur , et il l’avoit baptisé sous
condition.
La sage-femme elle-m ôm e, qui avoit remarqué que
1 enfant étoit en danger lorsqu’il étoit dans le sein de sa
A 2
�4
. • .
C )
m ère, avoit pris la précaution de l’ondoyer avant que
l’enfant fût so rti, et lorsqu’il présentait les pieds.
L a notoriété publique avoit appris que cet enfant étoit
né mort : les parentes et voisines qui assistoient à l’accoucliement l’avoient ainsi déclaré ; elles n’avoient aperçu
aucun signe de vie à l’enfant. La mère elle-m êm e, au
milieu de ses douleurs, téraoignoit la plus grande inquié
tude ; elle croyoit avoir accouché d’un enfant mort : mais
l ’accoucheuse, pour rassurer son esprit dans ce moment
critique et douloureux, lui avoit dit que son enfant étoit
vivant. T e l est toujours l’usage dans ce ras. Catherine
Lafont a persisté à vouloir s’en rapporter à ces paroles
de consolation, et à en tirer parti : elle est accouchée
dans un temps où la loi du 17 nivôse étoit en vigueur,
et où dès-lors elle devoit succéder à son enfant, s’il étoit
né viable. E lle a annoncé sa prétention aux héritiers dé
son mari : mais ceux-ci, qui étoient parfaitement instruits
de la v érité , et qui savoient que l’enfant étoit né m ort,
ont cherché à faire valoir leurs droits \ ils ont d’abord
pris la précaution de faire saisir entre leurs mains et eü
celles des tiers tout ce qui pouvoit être dû à la succession
de G ilbert-M arie L a fo n t, leur frère et beau-frère.
Bientôt s’est engagée une lutte considérable entre les
parties. Catherine Lafont a fait citer au bureau de p aix,
le 12 ventôse an 1 1 , en m ain-levée de la saisie-arrêt,
avec dommages - intérêts ; elle a soutenu qu’elle étoit
seule héritière de son enfant, et que tout devoit lui ap
partenir.
Les voies conciliatoires ayant été sans succès, elle a
présenté requête au tribunal de M ontluçon, le 12 ven-
�5
(
)•
^
tôse an n , pour voir dire, par provision, qu’elle auroit
pleine et entière main-levée des saisies-arrêts, sous toute
réserve de ses autres actions. A l’appui de cette requête
elle a justifié de son contrat de mariage , de l’acte de
décès de son m ari, et des actes de naissance et de décès
de son enfant.
L e 19 ventôse an 11 elle a obtenu un jugement par
d éfaut, qui lui adjuge ses conclusions.
Mais ce premier jugement n’étoit qu’un prélim inaire;
et Catherine Lafont avoit sa principale confiance dans
les deux actes de naissance et de décès de son enfant, qui,
suivant e lle , établissoient que cet enfant avoit vécu une
demi-heure; elle les opposoit aux héritiers de son mari.,
comme un obstacle invincible à leurs prétentions, et
comme un moyen certain de s’approprier la succession
de son enfant.
Gilbert Lafont crut d evoir, dans cette circonstance,
s’inscrire en faux incident contre ces deux actes; il con
signa l’amende, conformément aux articles 8, 9 et 10 de
l’ordonnance de 1737; e t, muni de'Sa quittance, il pré
senta requête au tribunal de M on tluçon , tendante à ce,
qu’il lui fût permis de s’inscrire en faux incident contre
les deux actes dont il s’agit, avec sommation à Catherine
Lafont de déclarer si elle entendoit se servir de ces deux
pièces. La requête fut présentée et signifiée les 1 , 2 et
3 germinal an 11. L e 7 du même mois, Catherine Lafont
fit sa déclaration qu’elle entendoit se servir de ces mêmes
pièces, et le même jour elle en fit le dépôt au greiï'e; il
en fut dressé procès verbal le 10 ; et le sieur Lafont pré
senta ses faits et moyens de faux -ainsi qu’il suit.
�(6)
IL expose que plusieurs personnes étaient présentes à
l’accouchement de Catherine L a fo n t, veuve de G ilbert;
que l’une d’elles, en soutenant la mère , aperçut les
pieds de 1,’enfant sortir les premiers ; toutes les personnes,
s’écrièrent : V o ilà un enfant mort. L a sage-femme de
mande et prend de l’eau bénite, et s’empresse d’ondoyer
l’enfant dans le sein de la mère ; elle emploie cinq à six
minutes pour achever la délivrance; elle prend cet enfant,
qu’elle met dans les bras de M arie Gusse, épouse de Fran
çois Corre. Immédiatement après la sage-femme demande
de l’eau-de-vie, elle en frotte la tempe de l’enfant et autres
parties de son corps ; elle ouvre avec un de ses doigts la
bouche de l’enfant, la bouche se referme de suite : la
pâleur étoit sur son visage, ses yeux étoient fermés; en
uii m ot, l’enfant étoit vraiment mort né.
François C orre, l’un des témoins dénommés aux actes
de naissance et de m ort, sur la déclaration duquel les actes
ont été rédigés par l'adjoint, n’étoit pas présent à l’accou
chement de Catherine Lafont; il n’arriva dans l’apparte
ment de l’accouchée que dans l’instant où la sage-femme
ensevelissoitl’enfant pour le faire inhumer.
L a femme de Corre, en palpant l’enfant, dit à son époux :
V a s avec L o u is L a fo n t (aïeul maternel de l’en fan t),
Ju ire fa ir e ces actes de naissance et de décès. C’est dans
le môme instant que les actes de naissance et de décès ont
été rédigés sous la date du 21 frimaire an u ,
G ilbert Lafont expose encore que l’enfant n’a pas, aux
termes de l’article 6, titre 3 de la loi du ao septembre Ï792,
été porté à la maison commune de Néris : qu’il n’a pas
été présente a l’adjoint. Il n’a point ute fait rnême de ré-*
�>4
'( V O
tjuisition à l’adjoint de se transporter à la maison où étoit
l’enfant; il n’a par conséquent remarqué aucuns signes de
vie de sa part. Il n’a rédigé les deux actes que sur la décla
ration des deux témoins, du nombre desquels étoit l’aïeul
maternel, partie intéressée, et François Corre, qui avoit
seulement vu ensevelir l’enfant.
Il n’a été donné aucun prénom à l’enfant, ou du
moins l’acte de naissance n’én contient aucun ; ce qui
est contraire à l’art. 7 du même titre de la loi citée.
Les professions des père et mère de l’enfant ne sont
pas énoncées dans l’acte de naissance. L e mcme acte
de naissance est muet sur les professions et domiciles des
tém oins, contre le vœu du même article.
Par tous ces m otifs, Gilbert Lafont conclut ù ce que
les deux actes de naissance et de décès soient déclarés
faux, et rejetés de l’instance.
L e jugement intervenu sur cette requête, en date du
3 floréal an 1 1 , ayant égard au premier moyen de faux
énoncé par Gilbert Lafont contre les deux actes dont il
s’agit, déclare ce premier fait pertinent et admissible, en
ce qu’il tend à prouver que l’enfant femelle étoit mort
avant de naître; ordonne qu’il sera informé de ce fait,
tant par titres que par tém oins; et à l’égard des sept
autres moyens de faux présentés par le sieur L a fo n t, il
est ordonné qu’ils demeureront joints à l’incident de faux,
pour en jugement y avoir tel égard que de raison.
Il a été informé en exécution de ce jugement. L e
ptemier tém oin, qui est Pierre Reynaud, desservant de
la succursale de N éris, et adjoint de la com mune, dé
d a le que le a i frim aire, un peu açant quatre heures
¿¿4
�(8)
île t après-midi, il fut appelé par Marie Bournet, épouse
de Gilbert Lafont, dit Chamblant, pour aller administrer le baptême à un enfant né du légitime mariage de
déiunt G ilbert-M arie Lafont et Catherine Lafont. On
lui dit que cet enfant étoit en danger de mort ; il y
courut, et chercha à s’assurer de son existence : il le
toucha, et lui sentant u n 1reste de chaleur, il crut, dans
le doute, pouvoir risquer le sacrement de baptême, qu’il
lui administra à telle fin que de raison. Cette cérémonie
religieuse fin ie, il inteiTogea , comme officier public,
M arguerite R ocliefort, accoucheuse, qui lui attesta que
• l ’enfant étoit né vivant. Après être sorti de -la m aison,
François C o rre, tisserand, voisin de l’accoucliée, et Louis
L a fo n t, gran d -p ère maternel de l’enfant, vinrent lui
déclarer que Catherine L afont, veuve de G ilbert-M arie,
avoit mis au monde un enfant fem elle, à trois heures et
demie de 'l’après-midi; que l’enfant étoit mort à quatre
heures du même jour. Sur leur déclaration relative à
la vie de cet en fan t, il rédigea son acte de naissance;
et sur leur déclaration relative à son décès, ainsi que
sur ce qu’il avoit vu lui-m êm e, il rédigea son acte de
m ort,
«
L e second témoin est François C orre; il.déclare-que
le jour que Catherine Lafont est accouchée , la femme
'du nommé Pignot vint le chercher dans la vigne où il
étoit; elle lui annonça que le curé étoit venu à la maison
de Catherine Lafont pour baptiser son »enfant, et lui dit
que le curé, comme adjoint et officier public, le trou
verait bon pour signer Pacte, Sans expliquer s’il s’agissoit
' d’acte de naissance ou de décès. Il se rendit en elle t en
la
�u »
( 9 ) .
. '
la maison de Catherine Lafont. Il vit l’enfant sur les
genoux de sa fem m e, et ne se st nullement assuré par
lu i -m êm e s'il étoit mort ou vivant lorsqiüil est venu
au monde. L e même soir il alla avec Louis L a lo n t,
grand-père de l’enfant, pour faire faire les actes de
naissance et de décès, chez le sieur Reynaud, oilicier
public. Celui-ci leur dit que les actes n’étoient pas encore
rédigés, et les renvoya au lendemain pour les signer :
effectivement il s’est rendu le lendemain chez le sieur
R eynaud, et a signé les deux actes.
L e troisième témoin est Marie L a fo n t, femme à Jean
T rim ouille, dit Pignot. Elle a déclaré être cousine ger
maine de Gilbert L afon t, et par conséquent alliée au
même degré de Catherine I^afont. Quoique l’ordonnance
défende d’entendre des témoins à ce degré de parenté,
comme il y en a plusieurs autres dans le même cas, tant
dans l’information que dans l’enquête de l’intim ée, l’ap
pelant n’a pas cm devoir proposer aucuns reproches dans
les circonstances extraordinaires où se trouvent les parties.
Les parens sont des témoins nécessaires ; et si on peut
soupçonner de la prévention ou de la partialité dans la
déclaration de ces mêmes parens, la cour d’appel appré
ciera quel degré de conliance ils peuvent inspirer. L ’ap
pelant s’en rapporte à cet égard à la prudence de la cour.
Ce tém oin, au surplus, déclare que comme parente,
amie et voisine de Catherine L afon t, elle s’est rendue
chez cette dernière au moment où elle sentoit les douleurs
de l’enfantement; elle la trouva debout, et soutenue des
sous les bras par la femme de Gilbert Lafont et Marie
Bournct. A van t que l’enfant parût, elle, déclarante, a
E
�( 10 )
vu tomber de ses excrémens; aussitôt elle a dit à Marie
Bournet: V en fa n t est m ort, parce qu’elle l’avoit déjà vu
arriver ainsi. Elle a ouï dire que les enfans qui lâchoient
ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître.
L ’enfant a paru les pieds premiers : l’accoucheuse le lui
fit voir sorti jusqu’aux reins, et lui fit signe que l’enfant
étoit mort. Elle lui demanda de l’eau bénite, qui fut
apportée aussitôt : l’accoucheuse l’a ondoyé sur la partie
du corps qui étoit visible. L ’enfant a resté plus d’une
demi-heure ù venir entièrement au inonde. L ’accoucheuse,
lui dit : E n tre la main du côté du cœ ur, et tu le lui sen
tiras encore battre ; elle lui a répondu : Je ne m’y connois
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
sortoit ainsi, l’enfant lui a paru m ort, ainsi qu’après qu’il
a été venu au monde. Lorsqu’il fut entièrement sorti du
sein de sa m ère, l’accoucheuse lui demanda de l’eau-devie pour le frotter; elle lui en mit au visage, lui a mis
les doigts dans la bouche et y a souillé : l’enfant n’a donné
aucuns signes de vie. La femme Corre le prit sur ses
genoux ; m ais, émue de l’idée que cet enfant pouvoit
être mort, les genoux lui tremblèrent, et ce tremblement
se communiquoit i\ l’enfant. La femme Corre disoit que
cet enfant portoit signe de v ie , et qu’il falloit le porter
à l’église pour le faire baptiser; elle, déclarante, répondit :
Nous serons mal reçues, si nous portons à. M . le curé un
enfant mort. La m ère, qui n’étoit pas encore entièrement
délivrée, dit alors : Mon enfant est peut-être m ort; pour
la tranquilliser, on lui répondit que non. M . le curé
arriva, toucha l’enfant à divers endroits, prit de l’eau
bénite, le baptisa et se retira. L e nommé Corre, qu’ou
�fa i
oil
( n )
avolt envoyé chercher,'arriva aussi, et sa femme lui dit :
T u iras faire faire l’acte de cet enfant; ne manque pas de
dire que tu Vas du vivant, parce q u il Vétoit. Cependant
dans ce temps-là 011 se mettoit en devoir d’ensevelir l’en
fant; et le nommé Corre et Louis Lafont se rendirent
chez M . le curé. D epuis, Catherine Lafont est venue
chez elle, déclarante, et lui a dit : Vous disiez autrefois
que mon enfant étoit venu au monde vivant, et actuel
lement vous dites qu’il étoit mort ; elle lui répondit :
Nous te disions cela dans les temps pour ne pas t’inquiéter
dans l’état où tu étois : je te conseille de t’accorder avec
tes beaux-frères, parce que si je suis appelée en justice
je ne pourrai m’cmpêclier de dire la vérité ; mais elle
répliqua : Ils auront tout, ou je l’aurai. L e témoin ajoute
de plus que Louis Lafont, père de Catherine, lui avoit
fait beaucoup de menaces sur ce qu’elle étoit disposée à
dire la vérilé.
L e quatrième témoin est M arie B ournet, femme de
Gilbert Lafont ; elle est également cousine germaine des
appelans et de l’intimée. Elle dépose que pendant que
Catherine Lafont étoit au mal d’en fan t, elle la tenoit
avec une autre femme nommée Catherine Lafont ; que
l’enfant parut long-temps avant que la mère fût délivrée.
La sage-fem m e demanda de l’eau bén ile, et, en l’on
doyant, dit : J e crois le baptiser en cas dé vie. Elle dit
aussi ù la femme Pignot : T ouch ez, commë son cœur bat.
Cette femme répondit : Vous connoissez votre m étier,
pour moi je ne m’y connois pas. Après tous ces propos,
1 enfant resta près d’ une demi-heure à venir au monde.
L o isq u ’H parut, elle, déclarante, détournant les yeu x,
B 2
J
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(et
( ** )
ne l’a nullement regardé ; elle ne s’est occupée qu’à mettre
la mère au lit. Pendant qu’elle y travailloit, elle a en
tendu dire dans la maison : L ’énfant a encore de la vie.
E lle, toujours sans le regarder, a dit de le porter à l’église :
l’accoucheuse s’y est opposée. L a déclarante alors a été
bien aise de trouver un prétexte pour sortir de la maison,
et est allé chercher M . le c u ré , qui y est venu. Ce n’est
que long-temps après que M . le curé est arrivé, qu’elle
est rentrée dans la maison, et alors l’enfant étoit sans vie.
M argueviteLafont, veuve Bonnefoi, cinquième témoin,
encore cousine germaine des parties, déclare s’être trouvée
dans la maison lorsque Catherine Lafont est accouchée.
Lorsque l’enfant a commencé à paroître, la sngc-femme
a témoigné de l’inquiétude sur son compte, et a demandé
de l’eau bénite pour l’ondoyer : cependant elle a dit plu
sieurs fois qu’il avoit de la vie. Catherine Lafont a été
à peu près une demi-heure sans se délivrer : lorsqu’elle
l’a é té , la sage-femme s’est emparée de l’enfant, et a de
mandé de l’eau-de-vie. E lle, déclarante, étoit auprès de
la sage-femm e et de l ’enfant; et lorsque la sage-femme
lui a frotté le visage avec de l’eau-de-vie, elle a remarqué
que l’enfant a fait un léger soupir, ce qu’elle a regardé
comme signe do vie : mais depuis elle ne lui en a vu
donner aucun autre.
Telle est l’analise exacte de l’information faite sur une
demande en faux incident, qui étoit aussi indifférente
.qu’inutile dans la cause. On ne voit pas, en effet, quelles
inductions Catherine Lafont pouvoit tirer d’un acte de
naissance qui ne donne aucunes lumières sur le fait im
portant qu’il s’agissoit de vérifier. Cependant Catherine
�*3
U *
(
)
Lafont, effrayée de cette démarche, crut devoir demander
permission de faire une preuve contraire •, et en vertu
d’un jugement du tribunal de M ontluçon, du 7 nivôse
an 12, qui l'y autorise, elle a fait procéder à une enquête
dont on va également dépouiller les déclarations.
L e premier témoin est Marguerite R ocliéfort, veuve
de Gilbert Lafont : c’est la sage-femme qui a accouché
Catherine Lafon t; elle est âgée aujourd’hui de soixantedouze ans; elle est tante par alliance de toutes les parties.
E lle déclare que lors des couches de Catherine Lafont,
elle fut appelée pour lui porter les secours de son art.
Lorsqu’elle fut auprès d’e lle , et qu’elle voulut toucher
la malade, elle trouva que les pieds de l’enfant se présen
taient les premiers; elle sentit que ces pieds remuoient
dans sa main : à mesure que le corps de l’enfant avançoit
de sortir, elle s’apercevoit toujours de son mouvement;
lorsqu’elle fut à même de porter la main sur le cœur
de l’enfant, elle en sentit les pulsations; elle proposa
à la femme P ign ot, qui étoit auprès d’elle, d’y toucher;
ce qu’elle ne voulut faire. I/enfant fut à peu près 1111
quart d’heure à sortir du sein de la mère ; dès l’ins
tant qu’il fut sorti, elle ne lu i sentit plus de mouve
ment : elle demanda sur le champ du vin pour l’en
frotter, ainsi qu’il est d’usage. A u lieu de v in , on lui
porta de l’eau-de-vie ; elle en prit dans la main et en
passa sur le visage de l’enfant : dans ce moment l’enfant
a fait un gros soupir, qu’elle a regardé comme un signe
de vie; mais elle ne lui en a pas distingué d’autre. Aussitôt
elle a remis l’enfant à la femme C o rre, pour s’occuper
de la mère. L e curé de la commune, qu’oji avoit envoyé
�U 1
( 14 )
chercher, est ven u, et a baptisé l’enfant. L a déclarante
le prévint qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer
avant qu’il fût sorti entièrement du sein de la mère.
François D urin , second témoin, non parent des parties,
a dit avoir soupé chez le sieur Etienne Forichon , officier
de santé, le jour des couches de Catherine Lafont : le sieur
R eynaud, c u ré , étoit à ce souper. Pendant qu’on étoit
à table, le déclarant dit que la veuve Lafont étoit accou
chée : le curé répondit o u i, et dit qu’il avoit été appelé
chez elle, comme officier public. J ’ai touché, d i t - i l ,
l ’enfant sur l’estomac, je lui ai senti de la chaleur ; j’ai
cru lui remarquer de la vie, et j’ai rempli les fonctions
de curé en lui donnant le petit baptême,
L e troisième témoin est M arie B ourn et, femme de
Gilbert L afon t, cousine germaine des parties : c’est la
même qui a été entendue dans l’information faite à la
requête de l’appelant; et comme la déclaration qu’elle a
réitérée est absolument la même que celle précédemment
faite, il est inutile de s’en occuper,
Claire G ilet, femme de François Corre, quatrième té
m oin, non parente, dépose qu’elle étoit chez Catherine
Lafont lorsqu’elle est accouchée. A près que l’enfant a
été entièrement sorti du sein de sa m ère, la sage-femme
a demandé du vin; on lui a donné de l’eau-de-vie. Après
que la sage-femme a eu essuyé un peu cet enfant, elle l’a
porté sur-les genoux d’elle déclarante, et lui a dit de le
laver avec du v in , qu’elle alloit prendre soin de la mère.
E lle a pris l’en fant, l’a lavé avec du vin qu’on lui a
porté dans un plat, lui a vu remuer les bras trois ou
quatre fois, lui a^ vu égalemont battre le cçeur, et lui a
�( 15 )
distingué des mouvemens dans le visage lorsqu'on lui
passoit du vin sur cette partie : elle a remarqué qu’il soupiroit; mais l’enfant est resté mort sur ses genoux, et il
a été impossible de distinguer le moment où il a cessé
entièrement de vivre. ■
Gilbert-Jérôm e Guillem in, cinquième tém oin-, déclare
que quelque temps après les couches de Catherine Lafont,
et dons un temps où l’on disoit que les héritiers Lafont
vouloient s’inscrire en faux incident, il a.;soupe avec le
curé de N éris, qui lui dit qu’au moment où Catherine
Lafont avoit accouché il avoit été appelé chez elle comme
officier public; qu’il s’y étoit rendu, et avoit aussi exercé
les fonctions de curé en baptisant son enfant; ce qu’il
n’auroit fait s’il n’eût cru s’être assuré de son existence;
que quelque temps après la sage-femme qui avoit accou
ché Catherine Lafont lui avoit dit chez lui que l’enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’elle l’avoit ainsi dé
claré à son confesseur.
L e sixième témoin , Georges Forichon , officier de
santé, déclare que quelque temps après l’accouchement
de Catherine L afon t, et au moment où l’on disoit que
les héritiers Lafont se pourvoyoient en faux incident, il
s’éloit trouvé chez Mari en Forichon avec le sieur R ey
naud , curé de la commune. L e sieur Reynaud dit en sa
présence que le nommé' Corre étoit venu-chez, lui lui
déclarer qu’il avoit vu l’enfant de Catherine Lafont en
V iei que s’il venoit à se rétracter il le dénonceroit au
commissaire du gouvernement. Il ajouta qu’au moment
des couches de Catherine Lafont, il avoit été appelé chez
elle; qu’il avoit senti de la chaleur à son enfant, et lui avoit
�tto
< SI
( 1« )
administré le baptême en cas de vie, sans pouvoir assurer
qu’il fût vivant. Il a aussi ouï dire à plusieurs femmes
que la nommée P ig n o t, femme Trim ouille, leur avoit
déclaré que l’enfant de Catherine Lafont étoit né vivant,
qu’elle lui avoit vu porter plusieurs fois son bras à la
tête, et lui avoit remarqué plusieurs autres signes de vie.
A la suite de ces enquêtes, Catherine Lafont, qui ne
comptoit pas infiniment sur la déclaration des témoins,
s’est bornée à soutenir qu’elle n’avoit besoin d’autres
preuves de viabilité que l’extrait de naissance qui constatoit que son enfant avoit eu vie ; et quoique cet acte
de naissance constatât que l’enfant n’avoit pas été présenté
' ù l’officier public, un moyen aussi futile a fait impression
sur les premiers juges. L e 14 nivôse an 13, la cause portée
à l’audience, après plusieurs séances, est intervenu juge-^
ment contradictoire qui déboute Grilbert Lafont de sa
demande en inscription de faux incident, le condamne
à l’amende de 60 fr. par lui consignée, conformément
cjux articles 4 et
du titre 2 de l’ordonnance de 17 3 7 ,
et en tous les dépens.
A van t de rendre compte des motifs qui ont déterminé
les premiers ju ges, il est à propos de rappeler que le
procureur im périal, dans ses conclusions, observa qu’il
né suffisoit pas pour qu’un enfant puisse succéder et trans
mettre , qu’il eût donné des signes de vie dans le sein
de sa mère; qu’il falloit qu’il fût né vivant; Il remarqua
que de l’ensemble des dépositions des témoins, présentées
respectivem ent, il résultoit seulement que l’enfant de
Catherine Lafont avoit fait un soupir après être sorti tout
4 fait du sein de sa mère; que quelques-uns de ses membres
a voient
_
5
�U1
*7
(
)
avoient palpité. M ais, ajouta-t-il, les auteurs ne sont pas
d’accord sur la question de savoir si ces signes sont carac
téristiques de vitalité. Plusieurs veulent que l’enfant ait
jeté des cris ; d’autres se contentent d’un souille, d’un
soupir; mais aucun n’a régardé la palpitation des membres
comme un signe évident et certain. Il observe avec jus
tesse que le Code civil ne s’explique pas sur les caractères
qui peuvent prouver que l’enfant a eu v ie , ni sur la ma
nière de le prouver. Il conclut en conséquence à ce que
avant de faire droit il soit ordonné qu’un docteur en rnéidecine et un docieur en chirurgie, nommés par le tribunal,
donneront leur avis sur la question de savoir si les sou
p irs, restes de chaleur et de palpitation, dont ¡Varient
quelques-uns des témoins, sont des signes certains de vita
lité; ou si, malgré ces signes, l’enfant doit être réputé
mort né.
Mais le tribunal, peu touché de cette opinion marquée
au coin de la sagesse et de la prudence, en a pensé autre
ment. Il donne pour motif d’une décision précipitée, pour
ne rien dire de plus, i° . que tous les acte^ de l’état civil
font foi jusqu’à inscription'de faux ; 2°. qu’il est établi
par l’acte de naissance que l’enfant de Catherine Lafont
est né à trois heures et demie le 21 frimaire au 11 ; 30. qu’il
est établi par l’acte de décès que, le merne jour, le même
enfant est décédé à quatre heures après m idi, c’est-à-dire,
demi-heure après sa naissance ; qu’ainsi il est prouvé par
acte authentique que l’enfant est né vivant.
Les premiers juges ajoutent que Gilbert Lafont a pris
la voie de l’inscription en faux incident contre ces deux
actes; que par là il s’est imposé la luehc de prouver que
C
,
�(
1 8
5
cet enfant étoit mort avant de naître : mais il n*a pas
rempli cette tâche. L e premier témoin a senti un reste
de chaleur à l’enfant, et lui a administré le baptême à
telle fin que de raison. 11 a ensuite interrogé, comme offi
cier public, l’accoucheuse, qui lui a attesté que l’enfant
étoit né vivant. L e second témoin ne s’est pas assuré par
lui-même de l’existence de l’enfant. L e troisième a tou
jours regardé l’enfant comme mort avant de naître; il l’a
jugé ainsi aux excréjpens qu’il a vu tom ber, aux signes
que la sage-femme a faits,: cependantila même sage-femme
lui a dit. que le cœur de l’enfant battoit encore, lui a
proposé d’y porter la m ain , ce qu’elle n’a voulu faire.
Lorsque l’enfant a été sorti du sein de la mère, le témoin
ne lui a remarqué aucun signe de v ie , quoique la sagefçimne.. l’ait frotté a v e c de l’e a u - d e -v ie , lui ait mis.les
doigts dans la bouche et y ait souillé. L e quatrième témoin
ne s’est pas assuré par lui-même si l’enfant avoit vécu après
sa naissance; mais il a entendu dire dans la maison que
renfant^existoit encore. L e cinquième lui a vu faire un
léger .soupir^qu’il. a,.:rçgai;dp çon^me un signe de vie.
Mais de ces cinq témoins , ¡Je troisième est le seul qui
soutient que cet enfant étoit mort; il pensoit ainsi, d’après
la chute des excrémens et les signes de l’accoucheuse.
Cependant cette même accoucheuse a dit que le, cœur de
l’enfant battoit, a proposé au térrçoin d’y porter la main,
ce qu’il n’a voulu faire , parce qu’il ne s’y connoissoit pas.
L e tribunal, considérant que le prçmicr témoin ,a senti
de la chaleur à l’enfant; qu’il a interrogé l’accoucheuse;
qu’elle lui a attesté que l’enfant etoit né vivant; qu’elle
l’a ainsi déclaré lorsqu’elle a été appelée en témoignage ;
�!9
Ias
(
)
que le quatrième témoin avoit ouï dire dans la maison,
après la naissance de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie;
que le cinquième témoin lui a vu faire un soupir qu’il
a pris pour un signe de vie.
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces décla
rations que l’enfant a plutôt vécu après sa naissance qu’il
n’étoit mort avant de naître; que Gilbert Lafont n’a pas
détruit les deux actes de naissance et de décès, ainsi qu’il
se l’étoit proposé; qu’on en est d’autant plus convaincu,
quand on considère que le quatrième témoin ouï à la
requête de Catherine Lafont, à qui l’accoucheuse a remis
l’enfant pour donner des soins à la m ère, confirme la
déclax’ation de la sage-femme, lui a vu battre le cœ ur,
lui a distingué des njouvemens au visage, et a remarqué
qu’il soupiroit; que d’ailleurs il paroît constant que cet
enfant étoit parvenu au terme prescrit par la nature; qu’il
n'avoit apporté au monde aucuns vices de conformation,
ni aucuns vices de putréfaction.
Les premiers juges concluent que ces dernières circons
tances , jointes aux actes civils et aux déclarations des
témoins, doivent suffire pour constater la vie de l’enfant,
ou au moins le faire présumer vivant.
Ils considèrent encore que Catherine L a fo n t, qui a
été m ère, qui en a couru les dangers, qui a perdu son
enfant, doit obtenir la consolation que la loi lui accorde;
et dans leur sagesse ils en-trouvent assez pour débouter
Gilbert Lafont de sa demande , pour attribuer à une
éti'angère tous les biens d’ une fam ille, et enrichir un
second m ari, qui la consolera mieux encore.
Quel état d’incertitude et d’anxiété pour les parens du
C a
�mari ! Il semble qu’une'* question de ce genre méritoit
peut-être plus d’examen et de maturité; elle tient à l’ordre
public, elle intéresse la société toute entière. L e procureur
impérial sembloit avoir tracé la seule marche que les pre
miers juges avoient à suivre; et les héritiers Lafont, usant
des moyens que la loi leur accorde, bien convaincus de
l’impartialité de la cour d’appel, dont les arrêts sont de
grands exem ples, se sont pourvus contre ce jugement.
Mais avant que la cour prononce, ils désireroient réunir
une plus grande masse de lum ières, en s’adressant aux
jurisconsultes et aux docteurs , pour leur demander une
splution sur le point de savoir si l’enfant femelle dont
Gilherine Lafont est accouchée, a été capable de recueillir
et transmettre la succession de son père.
JLiES a n c i e n s a v o c a t s e t l e s d o c t e u r s
E N M É D E C IN E R É U N IS , qui ont pris lecture des
pièces et mémoires de la cause d’entre Catherine Lafont
et Gilbert Lafont, et notamment de l’information du 13
prairial an 1 1 , de l ’enquête du 10 messidor an 12 , du
jugement définitif dont est appel, du 14 nivôse an 13 ;
ensemble des mémoires à consulter;
que l’enfant femelle dont est accouchée.
Catherine Lafont n’a pas donné des signes de vie assez
évidens pour qu’il ait été capable de recueillir et de
transmettre une succession.
E u examinant cette question en point de d ro it, on peut
E
stim ent
�K J
( 21 )
décider, d’après la loi et les jurisconsultes-, que les signes
de vie que semble donner l’enfant, lorsqu’il est encore dans
le sein de sa m ère, sont absolument indifférons. On ne
considère l’enfant que du moment qu’il a vu le jour, qu’il
est hors du sein de la m ère, ou entre les bi*as de la sagefemme. L a loi pénultième, au code D e posth. hœredib.
inst. en a une décision précise. S i vivus perfectè natu*
est, lit e t, illico postquàm in terram cecidit, vel in manibus obstetricis decesserit, nihilom inùs testamentum
rumpit. Ces expressions, perfectè natus e s t, annoncent
assez qu’on ne doit s’attacher à l’enfant, et remarquer les
signes de vie, qu’autant qu’il est entièrement sorti ex utero
matris. Toutes les expressions de la loi présupposent né
cessairement que l’enfant a entièrement vu le jou r, qu’il
est débarrassé de toutes les entraves : jusque-là il n’est
réputé qu’une portion des entrailles de la mbvc}pars viscerum matris.
11 est certain, nous dit Henrys, tom. 4, p. 202, 5e. plaid.
n °. 2, qu’un enfant ne peut être censé vivant, ni capable
de succession, s’il n’est hors le ventre de la m ère, et s’ il
ne touche la terre, ou du moins ne se trouve entre les
bras de la sage-femme. Quelques signes de vie qu’il ait
pu donner, ils ne sont pas plus considérables que les
actions vitales qu’il a pu faire dans le ventre de la mère.
Comme ce 11’est pas assez qu’il ait eu vie dans le sein ma
ternel, s’il ne vient à naître, il ne sufïit pas aussi que,
venant h sortir, il paroisse vivant, et en donne quelques
signes, s’il ne sort entièrement et ne quitte la matrice.
Il faut qu’il s’en détache, autrement- il est plutôt censé
une portion de la mère qu’une personne vivante : il ne
«ci
�( 22 )
vit que par elle, et n’a pas d’autre subsistance; et par
conséquent ne peut établir un degré dans les successions.
M . Domat, Lois c iv ile s, tit. 2 , n°. 6 , enseigne que
les enfans qui sont encore dans le sein de leur mère n’ont
pas leur état réglé, et qu’il ne doit l’être que par la nais
sance. Jusque-là, dit-il, ils ne peuvent être comptés pour
des enfans, non pas même pour acquérir à leur père les
droits que donne le nombre des enfans. P a rtu s antequàni
edaturym uîierisportio est, velviscerum , L . ï, §. 1, ff. D e
inspect. vent. P a rtu s nondiim ed itu s, homo non rectc
f u is s e dicitur. L . 9, in jin . ff. A d leg.Jalc. Henrys s’appuie
également sur l’avis de Bartliole, d’A lc ia t, de Tiraqueau,
dans son commentaire sur la loi S i unquiim , au code D e
revocand. donat., ouvrage très-estimé; et enfin de T e rtu llien , qui s’exprime ainsi : M entior s i non statïm injfan s utvitam vagitus satura v it, hoc ipsum se testatur
sensisse ? atque intellexisse quod natus est : omnes sirnul
dedicans sensus , et luce v isu m , et sono auditum , et
lannore gustum , et aere odoratum, et terra tactum.
Il résulte de ces autorités que, pour réputer un enfant
viable, il ne suffit pas qu’il ait paru vivant au passage,
il faut qu’il ait donné des signes de vie après être entiè
rement sorti du sein de la m ère, aux termes de la loi 3
ci-dessus citée : S i vivus perfectè natus est,
Ilen rys, t. 3 , liv. 6 , cliap. , question 21 , examine
encore à quels signes on peut reconnoître si l’enfant est
vivant après qu’il est sorti du sein de la m ère, et si l’éjec
tion des excrémens notamment est un signe suffisant de
vitalité. H paroît qu’Hemys a voit cherché la solution dans
¿os pères de la médecine, dans Ilippocrate, Galion et
5
�ia
6
C 2 3 )'
Avicène \ il décide, d’après l’autorité de ces grands
hommes, quel’éjectiondes excrémens n’est pas une preuve
de vie. D ’après Hippocrate, liv. 4 , aphorisme 23, et l’ex
plication que donne Galien de cet aphorisme , cette éjec
tion arrive souvent dans un cadavre, pai’ce que les excré
mens s’épanchent et tombent d’eux-mêmes. Si la chaleur
vitale en est la cause commune, il ne s’ensuit pas qu’elle
soit absolument nécessaire ; c’est aussi souvent une preuve
de dissolution qu’une preuve de vie : dès-lors on ne peut
en tirer aucune preuve de vitalité.
• Bretonnier appuie l’opinion d’Henrys; il se fonde sur
le sentiment de Ménocliius , de Paul Zachias, dans ses
Questions médico-légales, liv. 1 , tit. 2 . quest. 6 , n°. 8,
qui décide que l'enfant ne doit être réputé viable qu’au
tant qu’il rem ue, crie , éternue, et épanche son urine :
S i voce/n e miser i t , s i spiraperit, s i membra distenderitj'velse m overit, s i sternulaverit, et urinam reddat,
Bretonnier cite encore Acaranza , médecin espagnol,
en son traité D e partit, nos. 32 et 3 4 , qui exige des
signes évidens et certains, et qui apprend qu’en Espagne
il y a une loi qui définit qu’aucun enfant n’est censé
parfait et viable, s’il ne survit pendant vingt-quatre heures
après sa naissance, et s’il n’a reçu le baptême. Jure verb
nostro regio , lege taiiri nullus est partus m aturus, et
vitalis qui viginti quatuor horas ab editione non superv ix e r it, et sitnulJ'uerit baptizatus.
Bretonnier ne peut s’empêcher de remarquer que cette
lo i est Irès-judicieuse, et qu’elle devroit être adoptée parmi
nous pour éviter toute difficulté. En eil’e t , nous sommes
encore dans un état d’incertitude sur ce point : il eût été
�(H )
à désirer que le Code civil contînt un règlement à cet
égard; niais on n’y trouve qu’une seule disposition qui
puisse s’y appliquer ; c’est celle exprimée en l’art. 725
qui porte que l’enfant qui n’est pas né viable est incapable
de succéder.
Il faut donc en revenir aux anciens principes ; et on'
ne peut trouver de meilleur guide que R icard , dans son'
Traité des dispositions conditionnelles, chap. ,sect. ,
n°. 503 etsuivans, où il soutient qu’il faut dés signes de>
vie évidens et certains,parce que la mort étant certaine,
c’est à celui qui veut tirer avantage de la vie de véx*iGer
sa prétention par des témoignages convaincans.
O n pourroit encore invoquer l’opinion de L e B ru n ,
dans son Traité des successions , et une foule d’autres
auteurs qui n’ont fait que copier les précédens. En appli
quant ces autorités à l’espèce particulière, on remarque,'
i°. que l’enfant ne doit être considéré que lorsqu’il est*
sorti du sein de la mère. Tous les mouvemens qu’on a
pu apercevoir dans l’instant de la délivrance, avant que
l’enfant ait touché la terre, ou qu’il soit sur les genoux de *
la sage-femme , sont insignifians,
•
2°. Lorsqu’il est sorti du sein de la m ère, il faut des
signes de vie évidens et certains, des mouvemens n o n ’
équivoques, et qui ne soient pas un reste de palpitation
ou de chaleur. Il 11es’agit donc que d’analiser les enquêtes,'
et d’examiner si on y trouve des présomptions assez fortes,
ou des preuves que l’enfant de Catherine Lafont est né
vivant.
'
On commencera par celle faite à la requête de Cathe
rine L afd u tj.ct ce n?est pas intervertir l’ordre, quoique
celte
5
5
�*5
(
)
cette enquête soit postérieure à l'inform ation, parce‘que
la mère devoit prouver que l’enfant avoit eu vie , tandis
que l’objet de l’appelant étoit d’établir que l’enfant étoit
mort. né.
■
L a sage-femme, premier témoin , et cousine germaine
des parties , a remarqué d’abord que les pieds de l’enfant
se présentoient les premiers ; elle sentit les pieds de cet
enfant remuer dans sa main ; à mesure que le corps de
cet enfant avançoit de sortir , elle s’apercevoit toujours
de son mouvement: elle porta la main sur le cœ ur, elle
en sentit les pulsations; elle proposa à la femme Pignot
d’y tou ch er, ce qu’elle ne voulut faire.
<
Ces premiers signes aperçus par la sage-femme ne peu
vent donner aucunes lumières. L ’enfant n’étoit pas encore
né ; il étoit toujours dans le. sein de la m ère, et ces moiir
vemens appartenoient à la mère. U n corps inanimé , sus
pendu , se meut par son propre poids ; mais ce m ouve
ment ne peut être regardé comme un signe de vitalité,
»Les pulsations du cœur remarquées toujoursr dans le
sein de la m ère, ne seroient pas plus convaincantes; mais
dès qu’il ne faut considérer l’enfant que lorsqu’il a touché
la terre, on ne doit pas s’arrêter à des signes aussi équi
voques.
La sage-femme ajoute que l’enfant fut à peu près un
quart d’heure à sortir entièrement; e t , dès l’instant qu’ il
fut sorti, elle ne lu i a plus senti de mouvement : circons
tance remarquable, qui prouve que l’enfant n’a jamais
pu être compté au nombre des êtres vivans. Lorsqu’elle
u passé de l’eau-,de-vie sur le visage de l’en fan t, il a fait
uu gros soupir qu’elle a regardé coiu.me un signe (Je vie;
^
.D
�(26)
mais elle ne lui en pas distingué d'autres. E li quoi ! un
seul soupir, qui peut n’être qu’ un mouvement expiratoire,
remarqué dans un instant de trouble, seroit-il donc suffisant
pour faire présumer la vitalité ? L a sage-femme a remis
l’enfant à la voisine pour s’occuper de la mère : le curé
est v e n u , et a baptisé l’enfant -, mais elle a prévenu le
curé qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer avant
qu’il fût sorti du sein de la mère.
Cette sage-femme , qui ne s’appesantit pas davantage
sur les détails de son opération, déclare ensuite ne savoir
n i lire n i écrire. Comment une femme illitérée pourroitelle inspirer quelque confiance dans une matière aussi
importante? Peut-elle avoir assez de connoissances dansson
art, pour raisonner et tirer des conséquences sur des signes
aussi incertains que ceux dont elle rend compte ? Sa décla
ration ne pourroit être de quelque poids, qu’autant qu’elle
seroit appuyée oii corroborée par l’opinion d’un homme
de l’art. Il est assez étrange q ue, dans un moment aussi
critique, on n’ait pas appelé un médecin ou un chirur
gien : l’état de la mère et de l’enfant sembloit exiger cette
précaution ; l’intérêt de toutes les parties le commandoit
impérieusement ; et c’est à la mère , ou au grand-père
présent, qu’on doit faire le reproche de n’avoir pas cons
taté les faits d’une manière certaine , puisque , pour se
servir des termes de R icard , elle devoit tirer parti de la
vie de son enfant; et c’étoit à elle à l’établir.
L e second témoin est un marchand cafetier qui soupoit
en villeavec lecuré,le jour des couchesde Catherine Lafont,
et qui ne répète que ce qu’il a oui dire au curé , qui
étoit un des convives. Sa déclaration est donc absolument
insignifiante.
�( 27 )
Vient ensuite la femme Bournet^ cousine germains
des parties , qui n’apprend autre chose, sinon que l’enfant
a été ondoyé avant qu’il fût sorti. Elle a entendu la sagefemme proposer à la femme Pignot de le loucher , pour
sentir comme son cœur battoit ; cette femme a refusé de
le faire : pour elle , elle n’a jamais porté les yeux sur l’en
fant. D e la manière dont elle s’exprim e, il paroît qu’elle
le croyoit m o r t, et qu’elle avoit quelque répugnance à
le considérer. Cependant elle a entendu dire qu’il avoit
de la vie ; elle a recommandé , dans ce cas, de le porter
à l’église : mais on a répondu qu’il ne falloit pas aller à
l’église , et seulement envoyer chercher le curé. Elle étoit
charmée de trouver un prétexte pour sortir de la maison ,
parce qu’elle étoit elle-même fatiguée ; elle s’est empressée
d’aller chez le curé; elle n’est rentrée que lorsque celui-ci
sortait, et pour lors elle a vu que l’enfant étoit décidé
ment mort.
On ne voit pas quelles inductions on pourroit tirer de
cette déclaration. Y a -t-il, dans tout ce qu’a dit le témoin,
quelques signes de vie évidens ? Cette femme n’a pas osé
jeter les yeux sur l’enfant dans les premiers momens ;
cependant elle soutenoit la mère ; elle a été témoin des
alarmes de la sage-femme : enfin elle 11’a vu l’enfant que
lorsqu’il étoit décidément mort.
Claire Gilet étoit chez Catherine Lafont lorsqu’elle est
accouchée. Après que l’enfant a été entièrement sorti du
sein de la m ère, la sage-femme l’a essuyé un peu avec de
1 eau-de-vie ; elle l’a ensuite porté sur les genoux d’elle
G ile t, lui a recommandé de le laver avec du vin , ce
qu elle a iait ; elle lui a vu remuer les bi'as trois ou quatre
D a
�y*
n*i
( 28
fois, lui a vu battre le cœ ur, lui a distingué des mouvemens dans le visage lorsqu’on lui passoit du- vin , a re
marqué qu’il soupiroit ; mais l’enfant est resté m ort sur.
ses genoux : il' lui a été impossible de distinguer le moment
où il a entièrement cessé de vivre.
•
Cette’ Claire Gilet est la femme de François Corre.
Peut-pn compter sur ce qu’elle dit avoir aperçu ? O11
verra bientôt- qu’elle trembloit elle-m êm e de tous sesi
membres;¿et ce qu’elle a cru sentir ou apercevoir peut
être l’effet de■
l'imagination effrayée: car, dans L’état où.
il paroît qu’étoient tous les assistans ; il ne seroit pas.
étonnant que le dépôt d’un cadavre sur ses genoux lui
eût inspiré de l’effroi. M^ais s’il est vrai qu’il n’y a qu’un»
point entre la vie et la m ort, et que ce point étoit im-r
perceptible pour le témoin lui-même , puisque Penfant»
est resté mort sur ses genoux sans qu’elle ait pu distinguer
le moment où il a cessé de v iv r e , de quel poids peut être
une déclaration aussi incertaine?
X^es cinquième et sixième témoins n’étoientpoint présens
à l’accouchement ; ils ne parlent que sur la relation qui
leur a été faite par le curé et quelques femmes, plusieurs
jours après les couches de Catherine Lafont. L eu r dépo
sition n’est donc d’aucune importance pour le fait dont
il s’agit ; et c’est à quoi se réduit l’enquête de Catherinel
Lafont.
L ’information faite à la requête- de l’appelant laisse
encore moins de doutes sur la mort de l’enfant. L e curé,
qui est le premier témoin , fut appelé un peu avant quatre
heures par M arie Bournet (. troisième témoin de l’en
quête ) , pour aller administrer le baptême à l’enfant,
�9
'
( * .)
q u i, lui dit-on, étoit cd danger de mort. Il‘ y. courut f
chercha.à s’assurer de son existence, le toucha; et,'.lui,
sentant un reste de chaleur, il crut dansjle doute, pouvoir
risquer lé sacrement de baptêm e, qu’il lui administra, à,
telle lin que de raison.
• .
.
.
Ce langage, annonce assez que le curé avait des doutes;
il s’exprime-.plutôt en homme religieux, qu’en, homme
instruit. Ce-reste de chaleur, avoit été contracté dans le;
sein de la m ère, et n’étoit point un signe de'.vie y il n e
couroit aucun.danger en administrant,le baptême, et remplissoit un devoir, en ne le donnant q u à tellefin que derai
son, Si la sage-femme lui a dit que l’enfant étoit né vivant;:s’il a rédigé ensuite les actes de .naissance et -do décès>
comme officier p u b lic, il ne l’a fait que sur la déclara
tion de François Corre et de l’aïeul maternel ; mais il n?en
étoit pas mieux, éclairé -, on.ne lui a pas même représenté»
ïenfantv - ;>•
-,
Il
résulte de la déposition de François C o rre , qu’it
n’étoit pas. présent à l’accouchement; qu’on l’est vemij
chercher dans sa vigne. On lui a annoncé que le curé,
étoit allé u la maison.de Catherine Lafont pour baptiser,
son enfant; ou lui a dit q,ue le cu ré , comme adjoint .et
officier public , le trouverait bon pour signer Pacte, sans,
expliquer s’il s’agissoit d’acte de naissance ou de décès.,
Il se rendit en effet en la maison de Catherine L afon t;
il vit l’enfant sur les genoux de sa femme. Il ne s’est nul
lement assuré par lui-même s’il étoit mort ou vivant; sa.
femme lui a dit qu’ il étoit vivant lorsqu’il est venu au.
m onde, et le même !soir il-est allé le déclarer ainsi à
1 officier public,. Quelle confiance doit-on avoir en. ces
�MX
M
3
•
( ° )
actes de naissance et de décès, dès que l’un des témoins
déclare qu’il ne savoit pas lui-même si l’enfant avoit eu
v i e , et lorsque celui qui l’accompagne est l’aïeul maternel
de l’enfant ? On ne conçoit pas même comment l’appelant
a pu avoir besoin de s’inscrire en faux contre ces deux
actes. Loin de chercher à les détruire il faut les conserver,
puisque ces deux actes ne sont faits que sur la relation
d’un témoin qui n’a rien v u , et d’un autre qui est inté
ressé k la chose. L ’enfant n’a pas été représenté ; l’oifiçicr
public ne sait rien et n’atteste rien par lui-même. Les
deux actes de naissance et de décès sont faits dans le même
instant ; et loin d’être avantageux à Catherine L afo n t, ils
tendent au contraire à prouver que l’enfant n’a pas eu un
moment d’existence.
L e troisième témoin de l’information est M arie Lafont y
femme Pignot; c’est elle qui a vu tomber les excrémens
avant que l’enfant parût : elle a regardé cette circonstance
comme un signe de dissolution. E lle a dit que l’enfant étoit
m o rt, parce qu’ellél’avoit déjà vu arriver ainsi, et qu’elle
avoit ouï dire que les enfans qui lâchoient ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître. L ’enfant a paru les
pieds premiers ; l’accoucheuse le lui a montré sorti jus
qu’aux reins ; elle lui fit signe qu’ il étoit mort ; elle lui
demanda de l’eau bén ite, et l’ondoya sur la partie du corps
qui étoit visible. L ’enfant a resté encore plus d’une demiheure à venir entièrement au monde. L ’accouchcuse lui
a dit : Entre la main du côté du cœur , et tu le lui sentiras
encore battre ; elle a répondu qu’elle ne s’y connoissoit
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
jsortoit ainsi , lenfant lui a paru moi-t , ainsi qu’après
�11*•
( 31 )
qu’il a été venu au monde. Lorsqu’il a été entièrement
sorti, l’accoucheuse l’a frotté au visage avec de l’eau-devie , lui a mis les doigts dans la bouche, y a soufflé ; l’en
fant n’a donné aucuns signes de vie : la femme Corre l’a
pris sur ses genoux. Emue de l’idée que cet enfant pouVoit être m o rt, les genoux lui trembloient ; ce tremble
ment se communiquoit à l’enfant. La femme Corre disoit.
qu’il portoit signe de vie, et qu’il falloit l’envoyer à l’église
pour le faire baptisei\ Marie Lafont répondit qu’on seroit
mal re çu , si on portoit à M . le curé un enfant mort. La
mère n’étoit pas encore entièrement délivrée; elle s’écria :
M on enfant est peu t-rôtre .mort ! Pour la tranquilliser, on,
lui dit que non. L e cu ré, qu’on étoit allé chercher , est
ven u , a touché l’enfant à divers endroits, a pris de l’eau
bénite, l’a baptisé, et s’est retiré. L e nommé C orre,
qu’on a voit envoyé chercher, Ust aussi venu. Sa femme
lui a dit : Tu iras fa ir e fa ir e Pacte de cet enfant; ne man
que pas de dire que tu Tas vu vivant, parce qiCil üétoit.
Dans ce temps-là cependant on se mettoit en devoir de
l’ensevelir. D epuis, Catherine Lafont est venue la voir,,
et lui reprochoit qu’autrefois elle disoit que son enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’actuellement elle disoit
qu’il étoit mort. Elle lui répondit : Nous te disions cela dans
le temps pour ne pas t’inquiéter dans l’état où tu étois.
On s’est appesanti sur cette déposition , parce qu’elle
est plus détaillée et plus circonstanciée que les autres. L e
témoin a mieux observé : plus rapproché de l’accou
cheuse , il a été à portée de tout v o ir , de tout remar
quer; et scs observations, ainsi que son récit, prouvent
a n en pas douter, qxie l’enfant n’a eu aucun instant de vie.^
�WK
^ * |4
3
( *)
'
L ’autre témoin est M arie Bournet, qui a été aussi enfendùe dans l’enquête, et qui ne fait que répéter sa décla
ration.
Il
n’en reste plus qu’un , qui est Marguerite L a fo n t,
veuve Bonncfoi; elle s’est trouvée dans la maison deCatlierine Lafont au moment de ses couches ; elle est cousine
germaine ; elle a rem arqué, lorsque l’enfant a commencé
a paroître, que la sage-femme témoignoit de l’inquiétude;
qu’elle a demandé de l’eau bénite pour l’ondoyer.Cependant
cette sage-femme a dit plusieurs fois qu’il avoit .de la vie.
Catherine Lafont a été à peu près une demi-heure sans
se délivrer. Lorsqu’elle l’a été , la sage-femme a frotté
. le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie ; e t, pendant
cette opération , la déclarante a remarqué que l’enfant a
fait un léger soupir. Elle l’a bien regardé comme signe
de v ie ; mais depuis elle ne lui en a vu donner aucun
autre,
.
Ce sont là les seuls éclaircissemens qu’on a obtenus sur
le fait important qui gissoit^en preuves. 11 faut en con
venir'; si de légers signes aussi équivoques pouvoient être
déterminans sur une question d’un si grand intérêt, la
fortune des citoyens seroit sans cesse flottante et incer
taine! encore les témoins ne sont-ils pas d’accord sur ces
signes si légers et si douteux. A la lecture des enquêtes,
on voit que le moment des couches de Catherine Lafont
fut un moment de terreur et d’effroi pour tous les assis
tons. Des femmes parentes et officieuses , ordinairement
si touchantes dans ces tendres soins , n’éprouvent que de
la répugnance et de la crainte; l’une refuse de toucher
l’enfant; l’autre éprouve un tremblement universel lors
qu’on
�14*
33
(
)
qu’on le dépose un instant sur ses genoux , et s’aperçoit
bientôt qu’elle ne tient qu’un cadavre. On ne s’occupe
que de la mère , on cherche à la rassurer par des paroles
de consolation : mais on a la conviction de la mort de
l’enfant. Dans les heureuses couches, l’instant de la déli
vrance est un moment de joie ; on n’éprouve que le plaisir
de voir naître son semblable ; et l’heureuse délivrance
d’une jeune mère de famille comble tous les vœux : on
l’environne, on la félicite ; elle est accablée de caresses.
La naissance de l’enfant est annoncée avec sensibilité :
c’est un jour de fête. I c i , au contraire , les assistans sont
consterne^ ;la mère est inquiète, un silence funeste l’épou
vante: elle s’écrie, M on enfant est m ort! On veut la ras
surer suivant l’usage ; on craint une révolution dans l’état
critique qui précède la délivrance : mais il est impossible
de feindre ; et les témoins, en rendant compte des détails,
ne présentent qu’un tableau de deuil et de douleur.
L ’enfant est né sans vie! voilà la seule induction qui
puisse résulter des enquêtes. Les circonlocutions, les hési
tations des témoins ne permettent pas de douter. On
plaint la m ère; mais on est convaincu que son enfant
est mort avant de naître.
- La succession de cet enfant pourroit-elle consoler une
m ère? A h ! que l’intérêt approche peu de ce sentiment
que la nature a gravé dans son cœ ur! et ce n’est qu’avec
l’œil du mépris qu’on doit envisager ce m otif du juge
ment dont est a p p el, portant « que Catliçrine L a fo n t,
* qui a été m ère, qui on a couru les dangers,doit être
« -consolée par la succession. » L e cœur n’a pas dicté ce
E
�’ ( 34 )
m otif absurde ; et dans les tribunaux , lorsque l’esprit
n’est pas convaincu, là finit le ministère du juge.
Loin de nous ces motifs de considéi-ation, qui nous
' jetteroient dans un arbitraire dangereux, et qui sont mar
ques au coin de la dépravation et de l’insensibilité.
Si on les envisage même sous le rapport politique, est-il
bien intéressant que les biens d’un individu passent dans
une famille étrangère, qu’ils aillent enrichir un second
époux aux dépens des héritiers légitimes (* ) : on ne voit
pas ce qu’y gagneroit la société ; on ne trouve pas de motifs
assez puissans pour faire fléchir la sévérité des lois , in
tervertir l’ordre des successions.
Les premiers juges se sont encore déterminés par la
circonstance que l’acte de naissance devoit faire foi. Mais
cct acte de naissance, que prouve-t-il ? L ’officier public, le
seul qui puisse donner par son caractère quelque authen
ticité à sa déclaration , n’atteste i’ien par lui-mêm e; il ne
'rédige que sur la relation d’autrui, sur le rapport d’un
aïeul intéressé qui n’a rien vu , rien entendu ; sur la dé
claration d’un homme qui a avoué n’avoir pas vu l’enfant
vivant.
Les information et enquête détruisent la déclaration
de François Corre , seul témoin à l’acte de naissance. L ’officier public, qui a encore la qualité de curé , n’est pas
même en état d’attester le fait ; il est dans l’incertitude ,
lorsqu’il remplit les devoirs de la religion dont il est le
ministre.
L o rsq u e le m ém oire étoit à l ’im pression, on a été instruit que
C ath erin e L a fo n t \enoit de contracter un second m ariage.
�35
(
)
II aperçoit, il sent un reste de chaleur ; il risque, dans,
le doute, le sacrement de baptême , à telle fin que de
raison. L ’acte de naissance rédigé par lui ne fait donc
aucune preuve, et ne devoit pas influer sur la décision
des premiers juges.
Jusqu’ici les jurisconsultes ont seuls raisonné d’après
les principes du droit et les assertions des auteurs les
plus accrédités \ ils croient avoir rempli leur tâche ; ils
se flattent d’avoir démontré que l’enfant de Catherine
Lafont n’étoit pas viab le, et n’a pu transmettre une suc
cession qu’il étoit incapable de recueillir. Les docteurs à
leur to u r , après avoir mûrement examiné l’information
et l’enquête, pensent que ces deux pièces ne donnent pas
Une solution satisfaisante.
Elles ont besoin d’une explication et d’un développe
ment puise dans les principes de la physique médicale,
afin d’atteindre ce degré de probabilités médico-légales
qui doit édifier les magistrats.
Pour répondre affirmativement ou négativement sur
la vie ou la mort de Venfant Lafon t au moment de sa
naissance, il est nécessaire d’exposer que la vie est un
mouvement continuel, successif et réciproque des solides
et des fluides de tout corps animé, formant l’ensemble des
fonctions qui résistent à la mort,
I^a vie se divise en animale et en organique.
La vie organique se compose d’une succession habi
tuelle de contractions, d’oscillations,’ d’assimilations, d’ex-
�( >u
C 3 6 )
crétions , qui fait rèjeter ou retenir les molécules des
corps qui peuvent servir ou nuire à son accroissement;
elle est indépendante de la perception ; elle est commune
aux animaux et aux végétaux (*).
La vie animale consiste dans la perception des sensa
tions nuisibles ou utiles, agréables ou douloureuses ; la
faculté d’exprim er par la vo ix articulée ou inarticulée,
ses désirs et ses craintes, ses peines et ses plaisirs.
Cette vie est le partage exclusif de tous les animaux ,
et constitue essentiellement leur existence.
P our déterminer si l’enfant Lafont a joui de l’une et
de l’autre v ie , les docteurs entreront dans l’analise de
l’information et de l’enquête, en s’attachant seulement
aux déclarations des témoins de visu.
L ’un a senti des restes de chaleur ; un autre a dit avoir
vu rendre des excre'mens avant la naissance complète ;
un autre propose de toucher le cœur , q u i l dit battre
encore ,* un autre dit avoir vu rendre un seul et dernier
soupir ; un autre dit avoir senti les pieds de l’enfant
remuer entre ses mains , ainsi que le mouvement du cœ ur,
lui avoir fait des frictions sur le visage avec de l’eau-dcv ie , lui avoir mis le doigt dans la bouche , y avoir soufflé,
et vu rendre un dernier soupir ; un autre dit avoir mis
l’enfant sur ses genoux , lui avoir lavé le visage avec de
l’e a u - d e - v ie , avoir vu remuer te bras et soupirer *
un autre enfin déclare- que les genoux de la femme sur
{*) Bichat, Rrcclicrches physiolog. sur la vie et la mort.
�MO)
37
(
)
lesquels étoit placé l’enfant lui trembloient de pour, et que
ce tremblement s’eloit communiqué à l’enfant.
Ge tremblement de genoux ainsi communiqué à l’ènfant, ne peut-il pas en avoir imposé pour un mouvement
qui lui fut personnel ?
Quelles inductions tirer de ces déclarations? Les signes
de vitalité qui en résultent n’indiquent autre chose qu’un
reste de contractilité et d’irritabilité, attributs, de .la vie
organique, mais indices de la cessation encore récente de
la vie animale.
Parmi les signes les plus saillans de cette contractilité
organique , il faut compter les déjections dés matières
fécales dont il est parlé, dans les dépositions , long-temps
avant la sortie de l’enfant du sein dç sa m ère, annoncées
par l’un des témoins comme symptôme de mort.
Les signes non équivoques de la vie animale consistent,
comme on l’a d it, dans la perception des sensations nui
sibles ou utiles, etc. Si l’enfant Lafont eût épx*ouvé le
contact de l’air atmosphérique sur la surface du corps ;
si ses poumons eussent eu la force de supporter le volume
d ’air nécessaire pour la respiration , première fonction de
la vie animale, il l’auroit exprimé par les cris toujours
naturels aux nouveaux nés ; aucunes déclarations ne font
«îention de ces cris; quelques-unes seulement parlent
d un dernier soupir, d'un léger soupir : mais ce dernier
mouvement expiratoirc, atonique et passif, n’est point la
respiration.
La respiration se compose du double mouvement actif
�133
(
)
de l’inspiration, et passif de l’expiration : un dernier
soupir , un léger soupir, doivent donc être considérés
comme le dernier mouvement expiratoire passif, propre
ment dit expiration dernière, ou la m ort, et peut-être
encore comme l’effet de l’insuflation..........
Tous les signes de vitalité qu’on peut recueillir de l’in
formation et de l’enquête , ne sont que des indices de
contractilité et d’irritabilité, attributs de la vie organique,
tels qu’on les observe sur les cœurs nouvellement arrachés
du sein des animaux , sur les têtes récemment séparées
de leurs troncs , sur les chairs encore palpitantes des ani
maux pendus à la boucherie, sur les trachées-artères ou
l’arynx des oies, que les enfans insufflent dans les rues
pour en tirer un bruit semblable aux cris de l’oie ; tels
enfin qu’on les excite, par les nouveaux procédés galva
niques , sur tout ou partie des animaux morts depuis
peu.
Si la distinction que les docteurs viennent d’établir
étoit arguée de subtilité métaphysique, ils répondront
qu’elle est reconnue par tous les physiologistes modernes;
q u e, puisée dans la nature, elle doit être consacrée par
la loi ; et qu’au commencement du siècle dernier cette
grande vérité fut pressentie par Paul Zacliins, dans son
fameux Traité sur les questions médico-légales. Cet auteur
s’exprime en ces termes: P r o mortuo habetur, qui vi-r
çere non potest.
Par tous ces motifs , le conseil estime que si l’enfant
Lafont a porté en naissant quelques restes de vie orga
nique, il n’a pas joui dçs conditions qui çonsituenl la vio
�IM
39
C )
toute entière ; e t , pour s’expliquer plus nettement, qu’il
est mort avant d’être né.
D
é l i b é r é
8 5
à R io m , le 24 novembre 1 o .
P A G E S (de R io m ), B A R T H E L E M I ,
ancien avocat.
doct. en méd.
ANDRAUD,
anc. av .
D E VAL,
anc. av.
GRANCHIER,
anc. av.
C H O S S IE R ,
doct. en méd.
G E R ZA T,
doct. en méd.
M e. V E R N I È R E , avoué licencié.
A R I O M , de l’im prim erie de L
andriot,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — F rim aire an 14.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Gilbert. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bartelemi
Andraud
Granchier
Chossier
Deval
Gerzat
Vernière
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation pour Gilbert Lafont, propriétaire, aubergiste de la commune de Néris-les-Bains, appelant de jugement rendu au tribunal de Montluçon, le 14 nivôse an 13 ; Et encore pour Jean Bournet, Marie Lafont, sa femme ; appelans d'un jugement rendu au même tribunal, le 19 ventôse an II ; Contre Catherine Lafont, veuve et commune de Gilbert-Marie Lafont, habitante de la même commune de Néris-les-Bains, intimée.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1801-An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0323
BCU_Factums_G1508
BCU_Factums_G1507
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53246/BCU_Factums_G1506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52883/BCU_Factums_G0206.pdf
bb5c86a581f79a9ed74ce6f6ead8e2f3
PDF Text
Text
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MEMOIRE
P O U R G i l b e r t R E B I E R E , C ordon nier,
E t ie n n e t t e , A n n e & A n t o in e t t e
R E B I E R E , fes Sœurs j A p p elan ts de Sen
tence de la D uché de Montpenfier.
C O N T R E Me. F r a n ç o i s D U P U I ,
Notaire & Procureur.en la V ille de Chambon,
Intimé’
L
'
Affai re dont il s’agit eft moins importante par elle-même que par la queftion de droit public à laquelle elle
donne lien. Elle a pour objet une foible donation , q u i, malgré tous les
efforts de la cupidité, a fu réfiftcr devant le pre
mier Juge aux attaques les mieux soutenues. Les
Adverfaires, qui cherchoient à la com battre, n’ont
rien négligé ‘pour l’aneantir ; cependant après la
A
�décifion du premier J u ge, l’intime a été le feul qui
fe foit cru fondé a porter plus loin fes pourfuites.
Il s’eft pourvu au Bailliage dé M ontpeniier, & fes
allégations y ont acquis un certain intérêt auquel il.
n’auroic point dû s’attendre.. Pour faire tomber la
donation il a infifté fur une furvenance d’enfant ;
mais cette iurvenànce n’étant conftatée par aucun
commencement de preuve écrite ÿ les Juges pouvoient-ils permettre d’y ilippléer par une preuve
teftimoniale ? telle étoit la difficulté principale qui
devoit les arrêter, & fur laquelle néanmoins ils iè
{ont hardiment expliqués ; ce fera auilirle point e f
fentiel que nous aurons a difcuter.
-, j . • Peut-être femble-t-il déjà que l’affirmative ne
devoit fouffrir aucun doute. Quand il s’agit de re
chercher la vérité j pourquoi ne pas admettre, dirat-on , tout,ce qui peut la faire découvrir ? motifféduifant qui a entraîné les deux Officiers qui ont
rendu la Sentence dont eft appel : ils ont été jaloux
de favoir la vérité ; mais entre les moyens' de la reconnoître, ils n’ont pas fait attention qu’il y en
avoit de ii dangereux, que ce feroit expofer la vé
rité même que de* les employer. Soyons plus réfervés : prenons pour guide la loi qui doit nous
éclairer fur cette matière ; &c en défendant les in
térêts de la vérité-, nous verrons à quels dangers
elle feroit livrée , fi la Sentence; dont -eft appel
pouvoit fubfiller.
�-f Le i o Février 1 7 4 4 , une Marie R e b i'e r e ^ f c
majeure, ujant de je s droits, voulant donner aux
Appéllants, fes couiins germains, des marques de
ion. attachem ent/leur fait donation de quelques
bâtiments fitués en la -Ville de' Cham bón : -la v a - r
leur en eft m odique, les chofes données ne1font
appréciées qu’à 300 livres. '
- ! ■.i: f
La Donatrice appofe pour condition a fa libéra-"
lité qu’elle confervera l’uiufruit des objets donnés'
pendant ia v i e , ‘ & que cet <uiiifruit pailera encore
au premier mari qu’elle épouicra. ,r
' t.; >1
Le lendemain cette fille contra&e avec un F ran
çois Coulandre : elle iè conftitue tous fes droits, &c
rend fon prétendu l’uiufinitier général de tous les
biens dont elle fe trouvera faifie lors de ion décès.J
- Le mariage fe célébré le jour d’après ; aiibout de ’
1 5 ni°is la femme vient a mourir. Le mari fe faifit
de 1 ufufruit de íes biens ; les Donataires ne difent
rien.' .
. V j ” .*»<•; ; ;.*j v i'.;- , /..» r
En 177 0 rUfufruitier meurt à: feri tour : les
Appellants veulent alors fé mettre en poiîeifion dés
héritages donnés, mais ils éprouvent de la réfiitance
de la part de l’intim é1&• de troiî» autres cohéritiers,
prétendants droit a laîfucceilion de la Donatrice.
A i % nation devant le Juge de Chambón pour
voir dire que la donation fera exécutée fuivant ia
forme &; teneur.
.
A i
�Les Adverfaires combattent cette même dona
tion lous différents prétextes. Ils prétendent d’abord
que lors de fa libéralité , la femme étoit par fes fian
çailles fous, puijjance de mari, que par conféquent
elle avoit les mains liées. En fécond lieu, ils obiervent qu’en même-temps que cette femme donnoity
elle n’auroit point dû retenir, comme, on dit quelle
l’a fait,. & qu’en fe contrariant a in fi, le:don deve-;
noit illufoire. En troifieme lieu ,. ils veulent que: le
défaut du mot de remerciment dans l’a&e foit une
nullité. Finalement ils articulent une furvenance
d’enfants pour rendre la libéralité caduque.
C e s vains prétextes deviennent faciles j, diiîiper
aux yeux du premier Juge, On-prétend que cette
femme étoit fiancée lors de la donation, mais
quelle preuve en produit-on ? Aucune. Donner &
retenir ne vaz/rla maxime eil vraie ; mais il y avoir
défaifiiTemenr a&uel de propriété , fans autre re
tenue que de l’ufu.fruit pour un temps. Les D o
nataires n’ont point remercié, mais ils ont accepté,
& il n’en falloir pas davantage. Il cil: furvenu un
enfant, mais où en eft la preuve écrite ? O n offre
des témoins- mais leur dépofmon eft-elle recevable ? Et quand, même oii pourroit l’admettre , fe
ibumet-on de prouver que Ucnfantfut né vivant, 6c
u’il fut viable?nulle foum iifionà cçt égard] ( a )
>ès - lors quelle eft la folutioh du premier Ju-
S
(a) O n a v o i t b ie n o f f e r t , fi V o n v e u t , p ar une ¿crit ure d u
ï i A v r i l 1 7 7 1 d e p r o u v e r q ue la f emm o étoic a c c o u c h é e , &
q u e l’e n f a n t , au m o m e n t d e fa nai lf ancc , a v o it encore $uct~
�ge? Il ne s’en rapporte pas à fes propres lum ieres,»
il prend co n feil,
le décide pour la validité de
la donation.
'
,
Les Adverfaires étoient au nombre de quatre.
Ils ie confultent fur cette décifion, l’avis cft d’y
adhérer. Mais, l’in tim é, en qualité de P rocu reu r,
fe fent plus de. re£ources que fes cohéritiers pour
fatiguer les donataires , -jen les traduiiànt de Tri-?
bunal en Tribunal ; il interjette- donc lui feul appel
de la Sentence du Juge de Cham bón au Bailliage
de Montpenfier.
Sa caute ne devient pas plusinréreilàntea Aiguë-»
perfe qu’à Chambón. M êm es chicanes , mêmes
réfutations ; mêmes articulations , même défaut
de preuve ; il devoir dès-lors.s’attendre à la même
iflïië. Mais point du tout : parce qu’il avoit arti
culé que la Donatrice .¡étoit accouchée d’un en
fant , les Juges de ce Bailliage'.ont p-iîétendu que
c étoit le cas d’admettre la preuve vocale de cet
accouchement. Il eft vrai qu’ils ont bien fenti
qu il falloit quelque chofe de plus , qu’il falloir
une preuve en. même-temps.que l7enfant fut venu
viable , aufïi ont-ils accordé d’afïice à l’intim é la
faculté de vérifier ce dernier p o in t, quoiqu’il nes’y fut jamais fournis, & qu’il fut cependant le
plus eifentiel. C a r autre chofe étoit dedire, comme
nous venons de le remarquer , que l’enfant avoit
que mouvement de vit : mai s autre c h o f e ¿t oi t d e d o n n e r q u e l
ques l i g n e s d e vie o u d ’être* viable»
�ipantre quelque mouvement de vie ,' ou de ioutenic ;.qu.’i l t , f u t . v i a b l ' e . .<» :.» <ii.1,
¡
,
Il eil doncqueftion aujourd’hui de favoir fiicette>
Sentence :fera-accueillie" de la OourJ"°‘.;L A «
Il
fembler'oit que'toute la diícuííioñ ■
devroit iel
borner à ce point de d r o it, fi la preuve a été
régulierementl ordonnéeou non ; car la Sentence ,
eôil'admettant,;ba:préjugé .que lesfautres moyens
em ployés1 par FIntimé ne pouvOient' faire fenfa-í
tion , fans quoi ilauroit été plus expédient de pro
noncer la nullité qu’ils avoient pour o b je t, que
d’autofiferruhe.preiive'aiiiTi'dangéreufe que celle
dont il s’agit. CependantTIntim é, par fa requête
donnée en la- C o u rp re iîe n ta n t à merveille que
cette preuve fera déclarée inadmiilible, a fortement
infifté a faire valoir, fes premiers moyens. Il faut
donc les reprendre &c les iuivre avec autant d’exac
titude, que de précifion. :
; /
0
i '* J
D i sc u ssi o
'
. '
n
^d
■■
e
s M
V.
oyens
.
•trLe premièr à!été?de dire -que.M arie Rebiere
étoit par íes fiançailles, avec François Coulandre
en. puiiîànce .de 'fo in prétendu r de façon à ne
pouvoir plus.»faire aucune difpoiition.
y M ais eft-il .bien vrai de nos jours qu’une
fille fiancée/; ioit fous- l’autorité 'de fon pré
tendu , comme .une femhie fous l’autorité de ion
mari ? La coutume d’Auvergne parle cffe&ivement de femme fiancée : mais il cft bon de
�<r,
remonter an temps de fa rédaâion, dans ce temps
ou les fiançailles avoient i quelque , chofe de plus
iblemnel qu’elles n ’ont maintenant; c’étoitudéja
une.) elpece de mariage par' paroles de,, prélent ,
dont on drefloit a£l:e , au lieu qu’aujourd’hui) cc
n’eft plus qu’ une cérémonie qui n’a rien d’eiïèntiel. Il y a même quelques; Diocefes ou elle/ceile
d’être en ufage. E n un ¡mot.(31 il-cfl; 'exadem ent
vrai que lès idéesiOnt fiofortl cliangé a cet égard
que s’il arrivoit que deux perfonnes fiancées n’e a
viniTent point au Sacrem ent, & quelles demeur
raifent \fiancées toute leur vie , on.n-loferôit partir
du texte d elà coutume pour.critiquer les a£Ujs,que
la fille auroit pu faire dans Cet éta t} fous prétexte
qu’il lui falloit l’autorité de fon fiancé, pour con
trarie 1•
f i tj i. f î# ..• * . *A u furplus. tranchons,fur une; obfervatiion.qui
nous meneroit trop loin fi vous «voulions y mçtjtre
de l’érudition: fuppoions ;qù’une fillçjfiancée ou
promife ne puiiFe plus agir lans la participation
de fon prétendu , quelle, preuve a donné; le fieur
Dupui que .M arie R ebieçefut fiancée Iqrs de la
donation? aucune,. Voudroit-il,encore; ètre admis
à la preuve de ce fait ? mais l’article 7 de l’Ordonnance de 1639 'défend à tous Juges , même
à ceux d’ Eglife , de recevoir la preuye par témoins
des promeifes de mariage.autt-pmcnt.que par écrit.
A u rd lc,, quelle,meilleure preuve ;clu contraire
fau d rait-il aux Appellants que l ’Aéte m ené de
donation où la donatrice s’eit dite j i l l e majeure,
i
�;
8
xifant de fe s droits ? Elle n’étoit donc dans læ
dépendance de perfonne, elle pouvoit donc li
brement diipoièr.
, -Les vraies fiançailles 'aujourd’hui Îbnt les con-;
trats de mariage où les ¡Parties promettent de s’époufer, &c comme Marie Rebiere n’a contracté
que le lendemain de la donation , ce n’eft donc
que de ce jour-la tout au plus qu’elle eft'devenue
fous'la puiilànce de ion .prétendu ; dès-lors ce qui
étoit fait auparavant ne poüvoit ’être argué d’in
capacité. Le jour de .fon contrat elle-a pu, fi l’on
V eut, réitérer ia promeflè aux pieds des Autels,
mais il n’y avoit point de loi qui exigeât que cette
cérémonie précédât le -mariage d-un plus grand
ou moindre intervalle : ainfi nous croirions afouièr
des moments de la C o u r que de porter plus loin
la réfutation d’un moyen -fi ridicule.
A l’égard de là maxime donner & retenir ne
vaut, le fieur D üpui a ''prétendu qu’elle «étoit ap
plicable a l’efpece en ce que la Donatrice par fon
contrat de mariage s’étoit confkituée tous fes ¡biens
& droits, fans en excepter môme les objets don
nés , <Sc delà il a conclu qu’elle avoit donné & re
tenu.
Nous iommes fàchés7pourl’honneur du bon iens,
d’ctre obligés de refondre a cette miierable objeélion. Quoique cette femme fefoit conflituée tous,,
fes biens & droits, cette conftitution n’a néan-*.
moins aucun rapport aux objets donnés, elle n’en
parle pas. Cette itipulation, d’ailleurs fort inutile,
ne
�ne pouvoir s’appliquer qu’à ce qui lui reiloit en
core ; finalement c’ eii: qu’il ne dépendoit plus d’elle
de diipofer des biens donnés ou de fe les approprier
de nouveau ; l’a&e étoit irrévocable, quod Jcmcl
placiterat, ampliiis dijplicere non pote rat ’ ainfi
quand même la future par fon contrat de mariage
fe feroit nommément conilitutée ( ce qui n’eit pas )
les choies données, cette conilitution ne pouvoir
nullement préjudicier a fa libéralité.
La maxime donner & retenir ne vaut, fe feroit
rencontrée dansl’eipece, fi après avoir donné, Marie
Rebiere avoit retenu par le même a&e l’objet de la
donation, ou du moins fi elle y avoit inféré quel
que clauie, iuivant laquelle elle eut eu le pouvoir
de fe jouer de fa générofité. Mais point du tout,
elle fe déiaifit de la propriété des objets donnés,
jelle ne s’en réferve pour elle èc le mari qu’elle
prendra que le fimple ufufruit ; cette réferve étoit
une condition qu’il lui étoit libre d’appofer: dans cette
condition même on trouve une tradition , du moins
fî& ive, telle qu’il la faut pour une donation : car
comme le remarque fort bien le célébré Ricard
( tr. des don. part, i , ch. 4 , fe£L ' i , cliil. 1 , )
d’après la loi quifquis 28 , cod. de don. retenir
l’ufufruit d’une chofe, c’cft donner la chofe mê
me. Idem enim e jl, dit cette lo i, ufiimjruïïum re
tiñere, quàm rem tradere. Dès-lors nous croyons
qu en voila fuffiiamment.fur cet article.
Quant au remerciaient que le fieur Dupuis pré
tend avoir du fuivre la donation, s’il a voulu dire
B
�1°
qu intérieurement les donataires devoient favoir
gré à leur couiine des marques d’affe&ion qu’elle
leur d o n n o it, & même qu’il étoit de l’honnêteté
de l’en remercier par des effufions de cœ ur, nous
ferons, s’il ve u t, d’accord la deiïus avec lui : mais
qu’en homme de loi il veuille nous ioutenir que
l’acceptation expreflè portée par l’a â e de libéralité
n’étoit pas iiiffifante , nous le renverrons a l’O r donnance de 1 7 3 1 qui n’exige rien au delà, &C
qui abroge tous autres u fages, ltyles & coutumes.
L ’acceptation renferme fans doute le rem ercim ent,
iouvent même le plaifir d’être généreux l’emporte
fur celui d’être remercié , & ne l’exige point.
Mais pour l’acceptation, c’eft différen t, elle
form e le contrat : en acceptant ce que le dona
teur me transfère, la cholè n’eft plus à lu i, le
voilà dépouillé, 6c en même-temps je deviens obligé
à remplir les charges qu’il m’impofe. O bligation
d e part &: d’autre ; de la part du donateur, de
ne plus fonger à ce qu’il m’a donné , & de la
m ienne, d’exécuter les claufes auxquelles je me fuis
engagé. En voilà encore fans doute plus qu’il n’en
faut fur une chicane auifi finguliere.
D
i f f i c u l t é
e s s e n t i e l l e
.
Pour ce qui eft de la furvenance d’enfant ; cet
article, qui a paru le fcul aux Juges d’Aigucperfe
, mériter quelque attention , préfcntc en effet la
partie la plus fcrieufe à traiter. Il cit vrai qu’aux
�11
termes de la l o i , un enfant furvenu au donateur
iuffit pour opérer de plein droit la révocation de
la libéralité , nous rie contenons pas le principe;
( b ) mais quelle doit être cette iurvenance d’en
fa n t,
comment peut-elle le constater ? V o ici
ce qu’il faut examiner.
L a révocation d’une donation par furvenance
d’enfants eft fondée fur des motifs dignes de la
fageife du Légiflateur. I l fuffit de confulter la
nature pour préfumer qu’un homme n’eut point
donné ion bien , s’il fe tut attendu à de la poftérité. La loi dès ce moment entre dans fes regrets,
& anéantit ce qui eft devenu le fujet de fon re
pentir.
M ais cette faveur ne s’applique point indiffé
remment à la furvenance de tout individu de
l’efpece humaine : un enfant qui viendroit au
monde fans avoir vécu ne changeroit rien à ..ce
qui fe trouveroit fait; eut-il refpiré un m om ent,
fi par fa conftitution il n’étoit pas deftiné à aug
menter le nombre des Etres vivan ts, s’il n’étoit
pas ce qu’on appelle viable en terme de jurifprudence , fon apparition fur la terre n’opéreroic
aucun dérangement : ce n’eft point pour un ob
jet inutile à la fociété que la loi s’écarte de la ré
gie , elle ne s’intérefle qu’à ceux qui peuvent en
{!’ ) C e p e n d a n t dans l’A u v e r g n e , avant l ’O r d o n n a n c e de 1 7 3 1 ,
p a r u ne d i f p o f i t i o n p a rt i cu l iè re de la c o u t u m e , la f u r v e n a n c e
d ’enf ant n’étoi t p o i n t un m o t i f d e r é v oc a ti o n. Si nous p e nf i o n s
c o m m e le fieur D u p u i , q ue ne d i r i o n s - n o u s pas à ce fujet
p o u r e f la ye r d e faire i l l u f i o n ?
B i
\
�Il
faire l’efpoir &c le foutien. Dans quel détail n’en
trerions-nous pas, s’il étoit néceilàire de dévelop
per plus particulièrement ce principe !
N o n , ce n’eft point par la furvenance d’une
figure humaine que fe révoque de plein droit
une donation. Il faut un .enfant qui, non feule
ment ait v é cu , mais qui encore ait été deftiné à
vivre. S i vivus perfcclè. natus ê j l , dit la loi. Si la
nature a donc manqué fon ouvrage , ii elle ne l’a
pas pleinement animé de ce foufle de vie qu’elle
accorde à< fes autres enfants , la .loi rébute cette
produ&ion imparfaite , &. ne change rien à l’ordre iocial.^ 'L.
<■
,. ..
. A -jj •;
.j
M ais fi l’enfant eil venu au monde avec tous
les fignes'd’une conftitution ordinaire, quoiqueia
mort ait fuivi ide près ia naiiïànce , la loi n’a pas
moins opéré dans l’inftant & fans retou r'to u t
x c qu’elle pouvoit opérer en fa faveur.* Sa mort
en ce c a se it plutôt regardée comme une fuite’des
foins qui lui ont, m anqué, que comme un vice de
formation. Mais à quelles marques, reconnoît-on fi
un enfant »étoit viable ou non .?t II étoit viable',
s’il ai fait des. mouvements ordinaires
:aux enfants,>
II
& non de ces mouvements qui marquent un paflàge de la'>vie au trépas; s?ilai jetté des cris^cnjuji
mdtt, fi en haiilànr>il/a>> donné, des: efpéiiancps'de
vie, 11 ne Téroit pas , fi ces-, fignçs ne-fe,-forrt
point rencontrés ; ce n’étoit qu’un, être éphemér-e
pour lequel le vœu des hommes (Sc delà loi étoit
entièrement fuperflu.
. ..
j
�Polir la révocation d’une libéralité par furvenance d’enfant d eu x. chofes doivent donc con^
courir, & la certitude que l’enfant eft furvenu,
& l’aifurance qu’il étoit viable. M ais lorfque,cette
certitude manque , quelles preuves eft-on autoriie d’en donner? V o ici le nœud de la difficulté.
. >Le premier J u g e, qui eft.celui de Cham bon ,
attaché à la loi , &. ne voulant pas être plus fage que ceux qui l’ont portée*, a cru qu’il n’y avoit
d’autre preuve admiihble en ce genre que la preu
v e par écrit.; Les' Officiers d’Aigueperfe ont cru
que leur fupériorité fur ce Jugeies autorifoit à être
fupérieurs a la loi même , ôc qu’ils pouvoient le
décider par une preuve teftimoniale, enconiéquence ils l’ont ordonnée.
- M ais ont-ils; bieirréüéchi fur ce que les Auteurs
nous enfeignent au fujet;;de }la; preuve par té-m.ôi;n$? ont^ils ,médité. iurr-les ¿bus auxquels,elje a
donné ii fouvent ouverture ? ils n’avoient- qu’p.
jèttfcr ’les’ yeux fur le procès, verbal* de l’Q rd on naiicc de 1667 , ils y'auroient vu les iàges(motifs
qui pnt déterminé le Légiflateuçà nç laxcrlérer jque
pour certains cas-légers & g. la^ prohiber. abi,olu
men t clans toutes les autres affaires d’importance.
La Joi a j^ien prévu en même’ temps qu’il étoit intéreilànt de prendre des précautions, pour aifui^r
la naiilanec des citoyens ; elle-n’a point voulu i^iirb
.dépendre leur état d’un, événement auifi dance'« ,
1 1 ;
^ . 1
/Y* '
**11*
reux que celui d une preuve vocale ; aulli a-t-elle
•PJd°j}.péjen^conl^quenee qu’il feroit tenu des rc-
�A *4-
giftres p u b lics, pour être fenls les dépofitaires de
Phonneur & de la tranquillité des fam illes, &
dès ce moment elle n’a plus permis dé puifer la
vérité dans aucune autre fourcc étrangère.
Les Juges d’Aigueperfe auroiént du s’ètre formé
l’cfprit fur cette lo i, cependant ils ont cru pouvoir
penièr différemment: ii au v r a i, ont-ils d it, il efb
iurvenu un enfant, parce que ia naiiîânce ne ferà.
point confignée dans des regiftres publics , en doiton moins permettre la preuve vocale de ce fait ?
V oila quelle a toujours été leur idée : mais ils pouvoient raiionner plus jufte : on parle de la furvenance d u n enfant ; cette iurvenance n’eft point vé
rifiée par un extrait des regiftres où elle devroit
être marquée, donc elle n’elt point réelle, & que
'nous ne devons point nous arrêter a la fimple arti
culation d’un fait pareil.
Q u ’il foit dur, il l’on v e u t, pour des héritiers
de ne pouvoir, a défaut de preuve, profiter d’un
moyen fi efficace pour faire tomber une libéralité;
mais faut-il, pour favorifer la fàuflc cupidité d’un
collatéral avide, donner atteinte à la loi la plus for
melle , tandis que les enfants eux-mêmes , dans les
circonftances les plus favorables , n’en ont toujours
éprouvé dans le ian&uaire de la Juftice que la ri
gueur la plus abiolue ?
Q u ’on ouvre nos livres fur cette matiere, au mot
état, ou queflion d ’état, on verra que les Loix R o
maines rejettent en pareil cas la preuve par témoin,
& que le même cfprit qui les anime a décidé tout
�ce qui cil porté à cet égard par l’article <>i de
TOrdonnance de i $39 ; par celle de Blois, article
1 8 1 ; par celle de 1 6 6 7 , & par la Déclaration de
1 7 3 6 , dont l ’exécution a déjà fait un objet d’at
tention de la C o u r , par un Règlem ent de 1772- ;
mais s’il faut des exemples, en voici :
En 1 6 4 1 , une M arie d’Am itié vouloit prouver
par témoins qu’elle étoit fœur d’Elifabeth & d’Anne
Rouilèl. M . 1 Avocat Général Talon s’éleva conf
ire une tentative fi périlleufe, déploya avec élo
quence tous les incovénients auxquels donneroit
lieu Tadmiffion d’une preuve p a r e i l l e p a r A r ^
rêt du 7 Mars de la: même année M arie d Am itié
fut déboutée de fa demandç.
En 172 6 la demoifelle de Choifeul fut bien à
la vérité autorïfeeà conftater ion état par témoins,
mais il y avoit commencement de preuve par écrit
dans le journal d’un Accoucheur , mort quelque
temps, auparavant. Son a£le baptiftaire ne lui donnoit ni pere ni mere ; mais cet a&e paroiiloit &c
donnoit lieu a des préemptions pour elle, il y avoit
encore des lettres non fufpe&es qui dépoibient en ia
faveur, en un mot des particularités fans nombre
venoient à l’appui de fa réclamation ; ce qui ne fè
rencontre point dans l’efpece dont il s’agit.
En 17 3 4 » une jeune Pcrionne avoit faitaiïigner
” un Gentilhomme du pays de C au x pour qu’il l’a
» reconnut pour fa fille ; elle alléguoit qu’elle n’a* voit point été baptifée, mais fimplement ondoyée.
» Elle articuloit une naiiîance & des foins du pere
�16
& de la mere tres-circonftanciés jufqu’a un certain â g e , & difoit qu’alors elle avoir quitté la
maifon paternelle, parce qu’elle y. étoit mal
traitée , & c . cette demande fut iolemnellement
plaidée au Parlement de Rouen. L ’Anonym e of>
froit la preuve; mais par A rrêt du 2 6 Janvier,
même année , elle fut déboutée de .fa demande,
parce qu’elle n’avoit aucun commencement de
preuve par écrit, (c) "•
' ;
En 1735 lln Jeune Homme' n .avoit entrepris
de perfuader qu’il étoit fils, des fleurs & dame
deSàiilîy , il avoit articulé les faits les plus im
portants & les plus précis:: il avoit obtenu des
Juges de C h in o n . permiifion d’en faire preuve
par témoins. Son enquête, compoféc d’un grand
nombre de dépofitions , étoit ii claire »& il précifè quon ne pouvoir fe refufèr à l’évidence d&
l’état qu’il réclamoit. La dame de Safilly elle(c)
L ’abus du b o n fens a été t e l p o u r l ’ i n t i m é , d ’ o fe r di re
q ue le c o nt r a t de m a r i a g e d e M a r i e R e b i e r e a ve c F r an ço is Coi^l a n d r e é toi t un c o m m e n c e m e n t d e p r e u v e par é c r i t ; mais le
m a r i a g e n’eft q u’ une v o i e à la p r o c r é a t i o n des enfants ; refte à
f a v o i r s’il en eft p r o c r é é : de la p o i f i b i l i t é i l’a f te , faufle c o n f é q u e n c e . Si le. m a r i a g e étoi t un c o m m e n c e m e n t de p r e u v e ,
ce c o m m e n c e m e n t fe t r o u v e r o i t t o u jo u rs , pa rc e q u ’ on ne fe
di t o r di n a i r e m e nt fils de tel & d e telle que p a r c e q u ’ on fait
q u ’ il y a un m ar iag e. Mais fi un c o n t r a t ou un a£te de c é lé b r a
t i on p o u v o i t fuffire , les P e r f o n n a g e s d o n t nous p a rl o n s a v o i e nt
c ette r ef l o ur c e : ponrqti oi c ep e nd an t- o nt - il s é c h o u é ? c ’eft p ar ce
q u ’ il n’ y a a uc u ne c o n n e x i o n néceflaire entre l e f a i t a r t i c u l é & le
m ar iag e. O n p eut être mari é fans q ue celui qui nous r é cl a m e
p o u r p er e & me re foit néceiTairement no t r e enf ant] a ut re me nt
quelle dangereufs conféquence !
même
�' » même fembloit fe prêter a la réclamation , mais
« rien ne put l’emporter fur l’auilérité des regies,
» & par A rrêt folemnel du i l Mars de la même
« année, furies conclufions de M . de C hauvelin, la
» Sentence , qui avoit ordonné la preuve , fut infïr» m ée, & le prétendu Saiilly débouté4de fa deman» de. « L ’efpece de cet A rrêt eft rapportée plus au
long dans les Caufes célébrés , ( tome 1 5 , édi
tion de 1 7 5 1 . )
En 1765 a paru la grande affaire du fieur
de Rougem ont ; quels,indices ne s’élevoient pas
en ia faveur pour le faire croire fils du iieur Hatte ,
'comme il le pretendoit? il auroit bien voulu être
admis à une preuve teftimoniale, mais'les princi
pes & l’A rrêt furent contre lui.
En 1768 les Juges de N evers avoient autorifé
un Claude A u d in à proiiver par témoins qu’il
étoit fils du Marquis de la F e rté , il y avoit des
lettres qui fembloient le reconnoitre pour t e l ,
ou qui pouvoient être regardées comme un com
mencement de preuve par écrit; mais on fit valoir
contre lui toute l’autorité de la L oi a , au
code de tejl. on lui dit : defende caufam tuam argumentis & injlrumentis quibuspotes ,f o h autem tejies
ad ingenuitatis probationem non fufficiunt..........
non epiflolis , non nudis aJJ'everatïojiibus....... j î l i i
patri conjlitauntur. E t par A rrêt du 1 *Janvier
* 7 6 9 , fu ries conclufions de M . Barcntin, l’infirmation de la Sentence 11e fouffrit aucune dif
ficulté.
c
�i-8
D ’après des préjugés fi frappants-, comment le
fieur D upui pourroit*il le flatter que la C o u r penfera différemment? il allègue que M arie Rebiere
a mis un enfant au monde; mais quel commence
ment de preuve en donne-t-il? Q u oi ! il voudrait
avoir plus de privilege que n’en auroit l’enfant
lui-même, s’il réclamoit aujourd’hui fon état? il
voudroit être admis à une preuve v o ca le, tandis
que cette voie feroit conftamment refufée à l’en
fant , malgré toute la faveur qu’il pourroit méri
ter? A la vue d’une témérité pareille on ne fauroit
croire qu’il ait d’autre m otif de confiance en {g,
caufe que -celui que peut infpirer l’e'tatdes App^lla n ts, dont la fortune ne fauroit réiifter à.tant
d’épreuves ?
M ais fi l’enfant, dit-il, eft mort {ans avoir pu
recevoir le B aptêm e, /pourquoi exiger le rappqrt
d’un Extrait baptiftaire ? Q n -a été dtfpenfé .de
faire mention de lui dans les Regiftres publias;
cependant fi cet enfant n’en eft pas. moins venu au
m on d e, pourquoi ne,pas permettre de cqnftater
fa naiifance par témoins * dès 'que l’autre genre,ç|<ï
preuve eft impoilible ?
Voilai toujours la même atteinte à 1$ l o i , fous
le ton le plus fpécieux : on veut donc que (’en
fant fojt mort fans avoir reçu les cérémonies. c}e
l’E g liiè , .fans même avoir pu être ondoyé; ( ç#r
s’il l’avoit- é té , on auroit dû le porter
FEgliiç
poiir l’inhum ation, ôç en faire çlreffer a& e) la
tournure eft ingénieufe, pour fe tirer d’ijn pas
�.
. •
r9
difficile ; triais en voulant éviter un étueil, l’ Adverfaire eft: tombé Bans un autre. Si l’enfant, cft venu
au monde fans~avoir pu être o n d o yé, tout ‘porte
dès:lors à cônje£hirer qu’il 'n’étoit point viab le,
& même qu’il étoit déjà mort au fortir du fein de
fa mère : car enfin, fiâ l’inilant de'fdn'âpparition on
avoit remarqué quélques fignts d e v ië , bnri’auroit
pas manqué de lie munir du Sacrement.; ^ pendant’
comme l’efficacité de 'nos myfteres n’a point :été
pour lu i, il y a donc toute apparence que le* C h i
rurgien accôü dicu r, dont parlent les‘écritures de
l ’Adverfàire , n’a;pas 'ignoré ,qu?il y ,a une grande
différence, :fuivânt que nous Tavons déjà‘remar
q u é , ttiivc quelques mo.uveïnerîtsdont on vouHroit
argumenter & de vrais fignes de vie ; l’enfant,
comme on le f a it , , eft comprimé dans le fein de
fam ere : fut-il mort avant de naître , lorfqii’il efl:
forti de cette étroite démeure ,11 ‘fe fait une dila
tation de fes membres, que les gens de l’art rte fauioient prendre pour une m arque'de vie. L ’émiifion des cris eft'le feul indice infaillible de vitalité ;
c’cfl aüfli celui que'laioi propofe , Jrvaceni cmiJit,
Indice que' l'Intim é^ ’a point ofé articuler.
D e fimples mouvements n’étant donc pas tou
jours des preuves que le-fujet eft animé ;>ces mêmes
mouvements., lorfqu’ils ne font que paÎîàgcrs,
indiquent encore moins fa viabilité. Dès-lors ii
l’enfant n ’étoit point viable , qu’importe qu’il ait
paru ou non.
C ’étoit un E t r e , comme nous l’avons d it , pour
C 2,
�0,0
lequel la donation dont il s’agit étoit fort indiffé
rente , fa furvenance n’exigeoit.aucun changement
aux choies coniommées. D elà cet argum ent, fi
l’enfant a été du moins o n d o y é , fa fépulture
eccléiiailiquc doit fe trou ver, qu’on la rapporte;
fi elle n’eftpas une preuve de la viabilité, elle fera
du moins une preuve de fa furvenance , faut enfuite
à conftater qu’il étoit en état de vivre. Si au con
traire, à défaut de preuve par écrit de Ion inhuma
tion, il paroît, comme on le dit, qu’on n’a même pas
eu le temps de l’on doyer, preuve, ou du moins pré
e m p tio n naturelle, qu’il n’a jamais vécu , ou que
tout ail plus fa vie n’a été qu’un éclair; & dès-lors
pourquoi admettroit-on une preuve , q u i, quand
même elle ieroit adm iiïible, ne ferviroit à rien ,
( c i ) Q u ’ importe que M arie Rebicre foit accou
chée , ii fontruiu n’a point été animé de ce fouffle
de vie que la loi exige pour renverfer les chofes
établies ?
Allons plus lo in , formons les hyporhefes les
plus favorables au iyftême de l’A dvcrfaire: fup(d)
Mais au b o u t d e 30 a n s , des t é m o in s qui v i e n d r o i e n t di re
q u ’ils favent q ue M a r i e R e b i e r e c i l a c c o u c h é e , & q u e f o n fruit
a fait des m o u v e m e n t s v i t a ux , p o u r r o i e n t - i l s faifir la c o n f i a n
c e d ’un n o m b r e de Ju ge s é c l a t é s ? N e f ai t - o n pas q u ’en pareil'
cas il eft faci le d e p r e n d r e l ’a p p a r e n c e p o u r l ar é a l i t é ? C o m m e
l ’a dm in ir t ra t io n d ’ une p r e u v e , dans le cas où elle elt p e r mi fe ,
d é p e n d t ou jo ur s de l ’arbi tr age des J u g e s ; cette f eul e c i r c o n f t a n c e d e l’i m p o f l ï b i l i t é m o r a l e de d o n n e r par r émo i ns une cer
t it ude du fait d o n t il s’ a g i r , Teroit fuffifante p o u r faire rejetter
Jes entreprifes d e celui qui c r o i r o i t y p a r v e n i r , q u a n d m ê m e
R a i l l e u r s l a L o i n ’ y f e r oi t p a s f o r m e l l e m e n t o p p o f é e .
�y*
21
pofons que l’enfant étoit parfaitement conform é,
qu’il étoit deftiné a la vie comme les autres hu- .
mains , mais qu’en venant au monde il a payé le
tribut a l ’impéritie d’une fage-fem m e, ou qu’à dé
faut de foins néceilàires il lui eft furvenu un acci
dent fatal : ajoutons à la fuppofition toutes les
particularités les plus propres à faire croire qu’il
y a eu un enfant & u n enfant viable ; néanmoins s’il
n’en paroît aucun commencement de preuve par
é crit, nous foutiendrons toujours avec confiance
que la JuiHce n’a qu’un flambeau dont elle puiile
s’aider en pareil ca s, celui que la Loi lui propofe.
La lumière que peut fournir une enquête eit trop
fuipe&e & trop dangereufe pour s’y arrêter ; à dé
faut de clarté on doit demeurer attaché à la L o i,
en ne la quittant d’un inftant, on ne craint nulle
ment de s’égarer.
Dans les préjugés que nous venons de rappor
ter , de quelles particularités les plus frappantes ne
s aidoient pas les enfants mêmes qui recherchoient
leur état. Les preuves teftimoniales étoient déjà fai
tes, on y voyoit comme la vérité dans fon plus grand
jour; le penchant auquel on fefentporté en pareil casr
d’être favorable à un fils qui réclame fon pere, fa
mere , fes parents ; l’éloquence des orateurs, le cri
de la nuture, tout devoit être féduiiant; un fils pouvoit-il fouifrir de l’injure qu’on lui avoit faite ? étoitil maître d’empccher ce qu’on avoit réfolu contre
lui ? que dcmandoit-il ? de faire connoître la vérité:
il appelle le témoignage des hommes à fon fecours
�22
tous viéririënt "en foule aifitrér qüë fa rédamàtioh
eftjü fte, quelle eft'fondée fur la’plus exacte vérité ;
mais il eft quelque chôfe de plus réipe&able aux
yeux des Juges que le fuffrag’e 'des hom m es, c’eft
là Loi qui leur parie : dès ce moment ils raffèrmiffent léiir edeur trop âtténdri, &c ràlfürént lés Ju rif
cdiifültés 6c la fociété èn donnant le triomphe à
la Loi.
O B S E ]R V A T I 0 N S.
Gomment a-t-il pu T e‘‘faire "qU’utie foiblë don a
tion !de 300 ‘livrés, corifëritie a un 1Cbrdontiier &
a’ fes trois fœurs par leur coufine germ aine, ait pu
exciter la cupidité1d‘e l’A d verfaire, au point de faire
conibmrtVer etrfrais aux Donataires plus cjuetïc' Va
lent les chofes données ? S’ils étoient dés étrangers
opulents, & que lë fieür D u p u i, "Nbtaire & x r o cuieür, fut dans la détreilè, peut-être féroit-il'excufàblë de rttürmui-ér de la libéralité ; ‘mais pbint du
tout, ‘lés ^on'atairés font les proches’ parents de la
bienfaitrice; leür état'de trille médiocrité devoit
lés 'méttre à couvert de l’énvic; il iufHibit même
que lé fieür Î)upui fut plus habile qu’eux dans l’art
d’otifdir
de conduire une'procédure, pour qu’il
dut iïïarijucr jMüs de'défmtéreÎfement en pareille
occafion , ¿epéndlrit jamais il ne fut plus animé
darisTes pourfuites.
 u 'fo n d 'fu r quoi eft fondée fa réclamation ?
fur de prétendues nullités &c fur une furvenance
�2-3
d’enfant. Pour, les nullités, nous venpns dç, vpjr
qu’il étpit le feul capablp 'de les, prpppïèr,, &
qu’elles ne méritent pas Ta plus legej;e attent^oja : à
l’égard de la furvenance d’enfant , nous croyons
avoir comme démontré que les Juges de M ontpenfier, en voulant corriger,le Juge de C h am b o n ,
ont donné dans une erreur palpable : ils fe font
/
/ j
. .
i
.
■
*'*■
/' / écartés des principes les mieux avérés , ils ont
frondé la Loi la plus fage , &c en même-temps
la plus impérieufe : ils ont vouju que; l’intim é
fut recevable à vérifier par témoins un fait que
ies cohéritiers aujourd’hui défavouent par leur
filence ; il les a,voit engagés k plaider conjoin
tement avec lui devant le premier Juge , mais
ia décifion leur a fait ouvrir les yeux : ils reconnoifîènt maintenant la témérité de la conteftation ,
qu’il leur avoit fait entreprendre : ils ne veulent
plus infifter , & le fieur D upui lui feul , parce
qu’il eft Procureur , portera plus loin fes dé
marches ?
Quoi qu’il en io it, nous ne cherchons point k
furprendre la religion de la Cour , comme il a
iurpris celle des deux Juges qui ont rendu la <
Sentence dont eft appel. Nous n’implorons au
cune confidération humaine fur mille circonftances que nous pourrions détailler en faveur des
Appellants , nous nous en tenons pour eux k la
loi.. Refte maintenant, a, fayoir.JaquelJc des deux
Sentences fera confirm ée, de celle.de Cham bon
ou d.’AîSy.Çpcrre
.
�2-4-
ou elle fixera les efprits fur la Jurifprudence con
nue , ou elle donnera lieu a recourir à de nou
v e a u x principes.
'Mr. D E M A L L E T
Rapporteur.
D E
M e. D A R E A U
S.
GENEST,
, Avocat.
B o y e R , Procureur.
A C L E R M O N T - F E R R A N D ,
D e l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaine«
du R o i, Rue S. G enès, près l’ancien Marché au Bled. 1774.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rebière, Gilbert. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Mallet de Saint Genest
Darreau
Boyer
Subject
The topic of the resource
donations
coutume d'Auvergne
fiançailles
puissance maritale
viabilité nouveau-né
donations par survenance d'enfants
conflit de lois
jurisprudence
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Gilbert Rebière, Cordonnier, Etiennette, Anne et Antoinette Rebière, ses Soeurs, Appellants de Sentence de la Duché de Montpenfier. Contre Me. François Dupui, Notaire et Procureur en la Ville de Chambon, Intimé.
Table Godemel : Survenance d’enfant : Les héritiers de la donataire, attaquant la donation entre vifs, faite par elle en 1744, peuvent-ils être admis à prouver par témoins qu’il y a eu survenance d’enfant, et qu’il était viable ? La naissance et la viabilité doivent-elles être établies par les registres publics ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1744-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0206
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chambon-sur-Voueize (23045)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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