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JUGEMENT
R E N D U
PAR LE TRIBUNAL DE COMMERCE
SÉANT A RIOM ,
Le 18 août 18 12 ;
Entre les syndics de la faillite P U R A Y , et autres ;
et ledit sieur P U R A Y .
E
n droit,
Considérant qu’un jugement qui déclare une faillite ouverte,
est essentiellement un jugement par défaut ; qu’il est d ’équité
que la partie déclarée faillie puisse y former opposition, si la
faillite n’existe pas, ou si, à raison de sa profession, elle n ’est
pas passible de cette mesure de rigueur;
Que ce jugement est définitif, si elle y a acquiescé par son
silence qui devient alors un aveu de sa position et du bien-jugé;
Q u’il est de règle q ue, pour que la partie condamnée soit
admise à se pourvoir contre un jugement qui, en vertu d’une
disposition p é n a le de la loi, p r o n o n c e une peine telle que celle
de se constituer prisonnier, il faut qu’avant tout elle comparaisse
et obéisse au jugement ;
Que l’art. 469 réputant s’étre absenté à dessein, celui qui n’a
pas comparu par fondé de pouvoir, pour clore et arrêter ses
livres, il est évident qu’il ne peut être admis à former son oppo
sition après le délai ;
�Que les délais d’oppositions aux jugemens par défaut, sont
en usage pour garantir la partie condamnée contre la surprise
011 l’erreur, mais qu’elle doit réclamer lebénéfice de la lo i, dans
le temps qu’elle p rescrit, à peine de déchéance; que cette dé
chéance est fatale , suivant le texte de la loi et le sentiment de
tous les auteurs, lors même qu’il s’agit de jugemens attaqués
pour cause d’incompétence ratione m aterim , ainsi qu il a été
jugé le vingt cinq février mil huit cent douze, par un arrêt de
la Cour de cassation, rapporté p arD enevers, cinquième cahier
de 1 8 1 2 ;
Que l’art. 457 du Code de commerce ne donne au failli d’autre
délai que celui de huitaine, pour former opposition ;
Que cet article, ainsi que tout le titre relatif aux faillites, étant
d ’exception au droit commun dans sa totalité, il est évident que
les articles i5 6 , i58 et i5g ne peuvent régler, ni le mode de
signification du jugem ent, ni le délai de l’opposition;
Q u’en matière de faillite , l’affiche , et l’insertion de l’extrait
du jugement dans le Journal du départem ent, valent signifi
cation au failli; que cette signification est régulière, lorsque la
feuille contenant ledit extrait est revêtue de la signature de
l’imprimeur , légalisée par le maire , suivant le mode établi par
l’article 683 du Code de procédure civile ;
Que l’on ne p e u t, sans s’ériger au-dessus de la lo i, exiger
l’observation des formes établies par les articles 684 et 685, le
lé g is la te u r ayant restreint sa disposition à l’article 683 ; d’où il
faut c o n c lu r e q u e le procès verbal de l’affiche de l’extrait du
ju g em en t, complète le m o d e de s ig n ific a tio n , s a n s q u ’il soit
besoin de le signifier à personne ou dom icile;
Que l’opposition ne peut dès-lors se form er que pendant la
durée de l’agence, et l’instance être introduite que contradic
toirem ent avec les agens , sur le rapport du juge-commissaire;
d’où il suit que 1q failli a méconnu la disposition de l’article'
458, et, par suite , mal et tardivement p rocédé, en assignantles
syndics ;
�(3 )
Que si, contre l'évidence de tons ces principes, le -failli
pouvoit réclamer le bénéfice de l’article i5 8 , il faudroit qu’il
fû t légalement présumé avoir ignoré le jugement;
»
Que les moyens de publicité dont le législateur a accom
pagné tous jugemeus de déclaration de faillite, établissent une
présomption contraire.
En f a it,
Considérant que le failli n’a pas satisfait au jugement qui lui
ordonnoit de se constituer prisonnier dans la maison d’arrét,
pour dettes ;
Q u’il n ’a répondu à aucun des appels qui lui ont été faits,
qu’il n ’a pas comparu pour clore et arrêter ses livres par son
fondé de pouvoir ;
Q u’il résulte de sa procuration m êm e, portée à la date du:
six avril mil huit cent onze, et enregistrée, un an ap rès, qu’il
avoit le pressentiment que sa faillite pourroit être déclarée par
le tribunal; que dès-lors il devoit, par lui ou son mandataire,
former opposition en temps utile ;
Que l’insertion de l’extrait du jugement a été régulièrement
fa ite , et que le procès verbal d’affiche, fait par l’huissier Collât,
fait foi jusqu’à inscription de faux;
Que surabondamment le jugement a été signifié par un huissier
commis ;
Que de nombreux témoignages de la plus éclatante publicité
attestent qu’il n ’a ignoré ni le jugem ent, ni l’exécution qui s’en*
est suivie j
«.•
Q u’il est impossible en effet de supposer que si l’intention du
failli n ’eût pas été de garder le p l u s p r o f o n d silence , il eut sup
porté sans aucune résistance ,
Le dessaisissement de ses biens, l’apposition et la rémotion
des scellés, la nomination d’agens , de syndics provisoires et dé
finitifs , la vérification des créances, le contrat d union légale
ment form é, les divers instances qui ont eu lieu au nom des
syndics de l’union , dont la qualité a été reconnue par la Coup
�, (4 )
im périale, ainsi que la compétence du tribunal, dans une ins
tance par elle jugée contre le beau-père du failli;
Q u’il auroit encore moins supporté la vente de ses m eubles,
qui a été faite dans la maison qu’il occupoit, laquelle a é té ’
p u b liq u e, et a d u r é .......................jours ; enfin, qu’il n’auroit
pas supporté la demande tendante à obtenir permission de vendre
ses im m eubles, la permission qui s’en est ensuivie , et par-dessus
t out , les poursuites du m inistère public;
C o n s id é r a n t q u e l e c o n t r a t d ’u n io n a é té lé g a le m e n t f o r m é ,
que l’opposition est tardive, au désir de l’article 4 5 7 ayant
été formée treize mois après le délai voulu ; qu’elle l’est au
désir de l’article 158 , les meubles saisis par l’autorité d’un ju
gem ent non attaqué ayant été vendus du quinze au vingt-sept
juin mil huit cent o n ze, et l’opposition n’ayant été formée
que le vingt-trois juin mil huit cent douze;
D ’où il résulte que si le sieur Puray eût été traduit à une
juridiction à laquelle il n’appartenoit pas, il auroit à se repro
cher de n e s’étre pas pourvu en temps utile , et auroit perdu
le droit d’en faire la preuve.
Par ces m otifs, le tribunal déclare que l’opposition du sîeur
Amable-Pascal Puray est mal et tardivement fo rm ée, l’y dé
clare non recevable envers toutes les parties ; ordonne que le
jugement attaqué, continuera d’étre exécuté suivant sa forme
et te n e u r, nonobstant l’appel ; et condamne ledit sieur Puray
aux dépens faits sur ladite opposition, sommairement taxés à
la somme de se iz e francs trente centim es, à c e , non compris
les frais de l'expédition d u p r é s e n t ju g e m e n t , a u x q u e ls ledit
sieur Puray est pareillement condamné. F a it, etc.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, imprim. de la Cour Impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L andriot. — Mars 1813.
�
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Factums Godemel
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[Jugement. Puray. 1813]
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The topic of the resource
notaires
banqueroute
fraudes
spéculation
banquiers
usure
créanciers
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créances
livres de comptes
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commerce
vin
troubles publics
scellées
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Titre complet : Jugement rendu par le tribunal de commerce séant à Riom, le 18 août 1812 ; entre les syndics de la faillite Puray, et autres ; et ledit sieur Puray.
Table Godemel : acte de commerce : quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ? Faillite : 1. l’opposition au jugement qui déclare un individu en état de faillite doit être formé dans le délai prescrit par l’article 457 du code de commerce, et non dans ceux déterminés par les articles 156, 158 et 159 du code de procédure civile.
2. en matière de faillite, l’affiche et l’insertion de l’extrait du jugement dans le journal du département faites en conformité de l’article 683 du code de procédure, valent signification au failli.
3. la fin de non-recevoir, résultant de ce que l’opposition au jugement qui déclare la faillite n’a pas été formée dans le délai, s’applique à l’appel interjeté dans ce même jugement. Notaire : 3. l’individu qui exerce la profession de notaire peut être réputé commerçant.
Quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 4-1813
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2224
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0620
BCU_Factums_M0619
BCU_Factums_G2221
BCU_Factums_G2222
BCU_Factums_G2223
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Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Lyon (69123)
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Domaine public
banqueroute
banques
banquiers
commerçants
commerce
Créances
créanciers
exil
fraudes
fuite à l'étranger
livres de comptes
notaires
Scellées
spéculation
troubles publics
Usure
vin
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MEMOIRE
EN R É P O N S E ,
'
P O U R
Les Syndics définitifs à la faillite d’A m ab lePascal P u r a y , intim és;
CONTRE
Ledit sieur P U R A Y , commerçant
' appelant y
EN
Des
fa illi
PRÉSENCE
sieurs G U É M Y ,
V E R S E P U Y et
autres , intimés.
U n mémoire pom peux et subtil vient de paroîtrc
pour le sieur Puray :
Il défigure les faits;
Il en dénature les conséquences ;
Il établit en droit la discussion la plus vaine et la
plus étrangère à la cause,
X
�U ne consultation y semble uniquement accolée pour
soutenir la prétention de Purny, par les noms célèbres
dont elle est revêtue; elle dém ontre, dans sa question
m ê m e , qu’elle fut donnée sur un mémoire qui avoit
dissimulé les faits; elle ne présente et ne décide aucune
des questions ‘de la cause.
L e mémoire imprimé est peut-être plus spécieux; son
auteur semble livrer à la justice le m alheureux qu’ il a
po u r objet de défendre.
,
......... . ^
1
’
.
>
dU ■
■ ■' I
|J ,;i
Il l ’accuse pour le justifier.
Il dépeint son esprit inquiet et ambitieux, pour l’ex
cuser par cela même.
Il critique jusqu’à ses opinions, pour rejeter sur une
erreur prétendue commune le principe de ses égaremens.
Il représente enfin sa famille malheureuse et intéres
sante, comme réclam an fla générosité de la Cour.
A p rès avoir ainsi préparé l’ûme du magistrat à l’in
dulgence, il présente subitement un tableau hideux de
créanciers dont le moindre vice est l’avidité.
;
1
Il tonne contre l’animosité de ces êtvfes insatiables;
ce-sont des tigres dont-la férocité dépassant les limites
de leur intérêt, l’a dénoncé à la justice criminelle com m e
lin banqueroutier frauduleux.
P u is, se croyant certain de l’impression qu’il a faitey
il se crée une cause; et traversant les y e u x fermés des
faits et des moyens dont l’évidence est irrésistible, il
arrive légèrement au bout de sa course, et croit avoir
vu partout que Puray n’est pas commerçant.
Immédiatement, sans autre témoin que lui-m êm e il
,
l ’uilirme avec assurance*
•
�(3)
Il est impossible d’etre plus subtil ; et il étoit fort
difficile assurément d e ,l’être autant dans cette cause.
Cent trente-sept créanciers connus jusqu’à ce jo u r,
courent après les lambeaux de leur fortune : si on y
remarque dès capitalistes, qui ne sont pas moins des
créanciers légitimes, o r iy voit aussi des commerçans qui
l'éclament le prix de leurs marchandises ;
D e nombreux propriétaires, qui demandent des sommes
que Puray avoit touchées pour eux ;
Des filles de journée, dont il a retenu les salaires,
et dissipé les économies ;
Des cultivateurs qui ont fait des acquisitions, qui en
ont déposé le p rix dans ses m ains, com m e n ota ire, et
qui ‘s’en voient dépouillés ;
Des gens de toutes les classes, dont la fortune est com
promise , même sans leur participation ; des infortunés
q u i , ayant droit à des successions communes à des m i
neurs ou ù des absens, ont vu commettre Puray pour
faire des ventes m obilières, l’ont vu en recevoir le p r ix ,
et qui apprennent aujourd’hui que des dépôts nombreux
et considérables ont été v io lé s,'p o u r en tirer un béné
fic e ; qu’ils ont été versés dans une banque, ou fondus
dans un com m erce de clicnige et rechange que P u ra y,
notaire , avoit enté sur une profession dans laquelle une
probité inaccessible et une délicatesse scrupuleuse dévoient
repondre à la confiance publique.
Et ils entendent dire que P u ra y , qui les a dépouillés
par cette scandaleuse association, ne peut plus être com
merçant, parce qu’il étoit notaire, tandis qu’il est évident
que son état de notaire a été le principe et le soutien de
i *
�C4 )
sa b a n q u e ,’par la'’facilité qu’il a eue d’attirer, com m e
n o ta ir e , des sommes qu’il mettait-en circulation comme
com m erçant.
?
N o n , ils n’en veulent point à sa personne : qu’une fin
de n o n -re c ev o ir civilement prononcée; le préserve de
l ’action de la justice; ils le désirent pour lu i, plus encore
pour sa famille.
Mais s’il n’est ni commerçant, ni fa illi, tout espoir disparoît pour eux; ils voient s’évanouir la dernière de leurs
ressources, leur substance est entièrement dévorée.
V o ilà le motif qui les dii’ige.
Est-il donc interdit à un créancier légitime de courir
après les lambeaux de sa créance?
A l’homme frappé de la foudre, de chercher l’air qui
doit le ramener à la v ie ?
,
A u malheureux dont la récolte est emportée p a rl’orage,
d’en recueillir tristement les débris poiir sustenter quel
ques jours sa languissante famille ?
Sieur P u r a y , jetez un regard sur le nombre de familles:
que vous avez précipitées dans l’a b îm e; et peut-être
appellerez-vous moins la faveur de la justice sur les
maux que vous avez causés dans la vôtreHâtons-nous d’exposer les faits..
Dans le cours de Fan 4?
Ie sieur Puray obtint une
commission de notaire public à la résidence de Riom..
Les circonstances, des relations assez étendues, et la
position où il se trouvoit dans des momens difficiles pour
ses honnêtes confrères, lui attirèrent bientôt une clientelle considérable. L e besoin de s’agrandir encore, lui fit
�_C 5)
entreprendre la perception des rentes; il crut y trouver
le moyen d’étendre davantage ses relations, et d’ usurper
la confiance; il y roussit. Il fut bientôt chargé de perce
vo ir deux cent cinquante parties de rentes, qui lui valoicnt
d’abord une remise du ren tier, ensuite des quittances et
autres actes ù recevoir pour le débiteur; aussi son étude,
pour user de son expression , fut bientôt la 'plus Jbrla
de Riom .
Cet état de prospérité, qui devoit satisfaire ses désirs,
ne fit qu’exciter son ambition. La soif de la fortune le
conduisit bientôt à des spéculations dont le moindre vice
étoit une incompatibilité absolue avec la vie retirée d’ un
homme qui veut exercer avec sagesse et avec honneur,
une des professions les plus délicates de la société; mais
cette circonspection, si nécessaire pourtant, n’entroit pas
dans ses calculs. L ’événement n’a que trop justifié cette
triste et affligeante vérité.
D irigé par l’esprit de système, et ridée de tous les nova
teurs, que jusqu’à eux on n’a rien fait de b ie n , il crut arri
ver à la fortune en faisant m ouvoir ensemble une foule de
ressorts ; il se persuada qu’il pourroit suffire à to u t, et sui
vre constamment avec ordre le fil de chaque opération ,
en les consignant sur uue foule de registres de couleurs
et de formes diverses; e t, en entassant sur des tables ou
des i*ayoiis, cette masse effrayante de i-egistres et de con
trats de rente, des papiers, des actes, des dossiers, des
cartons, des liasses, des minutes, etc., e tc., j1 parvint
insensiblement au plus épouvantable désordre, et a fini
par une chute à laquelle d’autres causes ont certainement
concouru.
�Il commença ses essais par un commerce de denrées
qu’ il f it , tantôt seul, tantôt en société ; peu difficile même
sur le choix de certains de ses associés, il n’entrevit jamais
que le produit de telle ou telle spéculation. U n registre
intitulé A ffa ires et spéculations particulières, attestecette
opération.
Il s’associa d’abord avec la dame Dum as, veuve M o l l e ,
aujourd’hui femme D a g io u t , pour acheter et revendre
du froment. Dans le mois de fructidor an 9 , ils en ache
tèrent cinquante-six setiers; ils y gagnèrent, chacun
*77 francs; Puray en fut payé par un effet souscrit par
G arraud, m a rch a n d , et inscrit au registre des effets, sous
le n°. 62.
Dans le même m o is, il en acheta soixante-six setiers,
de société avec le sieur Marnat ; son registre apprend que
M arnat retira 134 francs, et lui P u r a y , 308 liv. 17 sous,
à cause de l’intérêt de ses avances ; il reçut cette somme
en un effet de la veuve Y a c lie r , porté aux registres sous
le n°. 71.
U n commerce d’orge et de fèves fut entrepris dans
le môme m o is , de société avec le sieur R o u g ie r , de
M ozac ; les résultats en furent arrêtés sur le registre
des spéculations , les 11 prairial an 10, et 5 ventôse an 11.
P u ra y retira une somme de 327 francs, que f a i replacée,
d it-il, à d ix p our cent pour trois jnois.
I l entreprit avec G ard ize, bourrelier au faubourg de
L a y a t, un commerce de foin ; il se.termina le i tr. floréal
an 10. L e registre constate q u e , riay a n t pas un grand
bénéfice à esp érer, il traita avec Gardize qui demeura
phurgé de tous les frais; lui tint compte de Î>intérêt au
�fa ?
sou pour livre, pendant dix mois ; lu i donna pour bênêj î c e , d ix pour cent du capital f o u r n i ; lui fit un eiïet
de 800 francs compris dans son registre, sous le n°. 65 ,
et lui paya de plus une somme de 59 francs pour four
nitures. A in si cette spéculation, qui ne présentoit pas
de grands bénéfices à espérer, lui valut pour dix m ois,
quinze pour cent net de son capital.
Il spécula seul sur le bois à brûler; on trouve sur le
môme registre l’état d’acliat et reventes par lui faits jus
qu’au 8 praii’ial àn 11.
Le
25 thermidor an 1 0 , il fit avec Rougier un renou
vellement de société, pour l’achat et revente de fèves;
elle duroit encore le 6 thermidor an 11.
L e commerce d’avoine fut l’objet de deux sociétés^
l ’une avec Marien L e v a d o u x , de Châtelguyon, marchand
fort connu; l’autre avec Honoré D avid. Les résultats de
la première furent abandonnés à L e v a d o u x , moyennant
nn eiï’et de 3,000 francs; ia seconde fut partagée avec
David.
Enfin il spécula sur le v in , d’abord à lui seul, et ensuite
de société avec Rougier.
O
«
Ces premiers essais occupèrent les années 9 , 1 0 et r 1.
U ne spéculation plus importante fut conçue et exécutée
dans le cours de l’an 9 ; nous voulons parler de l’établis
sement d’une banque, qui s’est soutenue jusqu’à la chute
du sieur Puray„
;
f
Il est notoire dans la ville'de R i o m , que cet établissement commença par une société entre Puray et le sieur
A lb ert : les caractères de celte association ne sont pas difii—
Îaf
�(8 )
•
ciles à reconnoître; elle fut assurément commerciale, et
ne pou voit être que cela pour A lb e r t , négociant consi
déré. O n sait assez qu’après sa dissolution, le sieur A lb ert
a continué seul la b a n q u e , et le transport d’argent de
place en place ; qu’il le fait encore aujourd’hui avec
succès, parce qu’il y a apporté de l’ordre, de' l’exactitude
et de l’honnêteté. A u reste, le sieur Puray a laissé parmi
ses papiers , le projet des conditions de cette société;
nous le transcrivons i c i , tel qu’il est écrit de la main du
sieur Albert.
« Il y aura deux registres doubles déposés dans chacune des deux maisons, signés, paraphés, approuvés
« à chaque p a g e , et arrêtés chaque décade. Dans l’un
« sera le rapport des sommes em pruntées, l’époque du
«
«
«
«
«
«
«
«
p rêt, l’époque du pa}rem ent, le taux du p r ê t , et le
nom du prêteur; dans l’autre, le rapport des sommes
prêtées, le nom de l’em prunteur, l’époque du p r ê t,
du payem ent, et le taux.
« Toutes les sommes que l’ un ou l’autre pourra se
p ro cu rer, seront fidèlement rapportées à proposé; do
sorte qu’on se consultera mutuellement avant chaque
opération.
« Il entrera dans les spéculations celles a u ssi de re~
cevoir de Vargent pour fa ir e passer à P a r is ou autres
« v illes, m oyennant tescom pte d'usage; l ’échange et
« rechange des lettres de change, toujours en se commu
te niquant chaque opération,
« Il y aura une caisse fermée à double serrure, d é« posée dans l’une des deux m aisons, qui ne pourra
* Couvrir que par la présence des d e u x , où seront fer<< jnés
�C9 )
çc mes l’argent et les effets, et une note signée double?
« qui constatera son aperçu chaque décade.
« Les sommes que nous emprunterons seront, si les
« parties l’exigent, pour les effets, signées par nous deux,
« et celles qui ne le seront que par l’un d e u x , seront
« spécifiées sur les registres, p o u r, en cas d’événement,
« les pertes et les gains soient compensés.
« Quant aux sommes que nous prêterons, les effets
« seront signés par A lb e rt a în é, etc., etc. »
Pas de méprise : sans entrer en ce moment dans la ques
tion de savoir si les prêts et les emprunts faits en société,
et toujours avec du papier de commerce et des effets né
gociables, constituent un véritable n égo ce, tenons pour
certain au moins q u e, dès le p rin cip e, la société eut aussi
pour objet de recevoir de Vargent à Riom , pour le faire
passer à Paris ou ailleurs, et aussi le change et rechange
des lettres de change.
Q u ’on n’élève pas de doute sur la véracité de cet écrit ;
le sieur A lb e r t , incapable d’ailleurs de se prêter à rien
de déshonnête, est trop intéressé à ce que Puray ne soit
pas failli, pour que son écriture puisse être suspecte.
O n sait qu’en vertu d’un jugement du tribunal de
com m erce, que Puray n’a pas attaqué, le sieur A lb ert
a pris une inscription de trente et quelques mille francs
dans les dix jours qui ont p r é c é d é la faillite, et que cette
inscription ne peut être valable si Puray est com m erçant,
et si on ne parvient pas à le faire déclarer simplement
en déconfiture.
Les registres de mouvemens de fonds de celte société,
nous apprennent que depuis le 12 messidor an 9 , jus-r
�qu’du 30 germinal an 1 2 , il fut loncé ou reçu dix-neuf
cent soixante-treize effets; qu’il entra en caisse onze cent
soixante mille quatre-vingt-treize francs, et qu’il en sortit
onze cent cinquante et un mille soixante-quinze francs.
Outre ces deux registres, dont l’ un est écrit de la inaia
d’A lb e r t , et les deux dont parle le pro jet, et qui ne se
sont pas trouvés cliez le sieur P u r a y , un grand registre
intitulé B a n q u e , qui existe intégralement, renferm oit, jour par jour, le relevé des effets, et l’indication de
leur échéance. V o ilà bien assurément de quoi caractériser
cette entreprise.
L ’association ne pouvoit pas durer lon g-tem ps entre
deux hommes dont l’ un , mesurant ses démarches avec
prudence , ne se livroit jamais à des opérations dou
teuses, et dont l ’autre, toujours avide d’un profit plus
considérable, entreprenant et négligeant to u t, s’abandonnoit sans cesse à des spéculations incertaines : aussi
dit-on qu’elle fut dissoute paV A lb e r t , dans le courant de
l ’an 12, et vraisemblablement à l’époque à laquelle s’arrête
le registre commun.
Cette division d’intérêts ne fit pas cesser le commerce
de banque ; il en résulta seulement qu’il y eut deux
banques au lieu d’ une : chacun se mit à l’exercer pour
son compte personnel; et les deux associés convinrent
de tirer respectivement l’un sur l’autre.
O n conçoit facilement que le sieur Puray n’étant plus
retenu par la surveillance continuelle d’un associé pru
dent, dut s’abandonner à la vaste étendue de ses con
ceptions. Il ne tarda pas en effet à agrandir, et ses re
lations de banque 7 et son négoce particulier.
�ClO
A lo rs commença l ’usage des registres de fouie espèce r
douze seulement ont été trouvés dans son étude, les autres
ont disparu. Il est assez utile de connoître, et l ’intitulé
de ces livres, et ce qui en résulte, puisque le sieur Puray
prétend qu’il n’étoit pas banquier.
E n voici la nomenclature :
« R egistre des diverses sommes placées par M . P u r a y ,
« n ota ire, à in térêts, com m encé le i l ventôse an 1 2 ,
« et J in i le z i ju ille t 1808.
« Registre des diverses sortîmes placées ch ez M . P u r a y ,
« n ota ire, à intérêts, com m encé le i 5 germ inal an 13,
« et J in i le 6fé v r ie r 181 o. »
Si ces deux livres, si ces emprunts et ces prêts d’argent,
établis par des effets de commerce tous tirés sur un papier
à l u i , imprimés avec son chiffre et sa vignette, ne constituoient pas un commerçant, comme le prétend le sieur
P u ra y , nous pourrions trouver une explication de plus
dans les autres registres, puisque, indépendamment de
celu i des prêts et de celu i des em prunts, on trouve :
L
ivr e
E tat
de banque.
courant de l a b a n q u e.
C omptes
couran s des p a r t ic u l ie r s .
B a n q u ie r
Jo u rn al
a
L yon.
g é n é r a l
.
U n agenda écrit de sa m ain, et intitulé r A
banque.
c t if de
Nous ne parlons ni du livre des dépôts, ni de celui
des rentes, ni de quelques autres; ils sont étrangers, par
leur n atu re, à ce qui étoit spéculation com m erciale,
a *
�( 12 )
jDour nous servir encore de l’expression du sieur P u ra y,
quoique malheureusement les fonds qui en étoient l’objet
aient été versés et fondus dans la banque ou dans le com
m erce, par la main impie qui disposoit des uns et des
autres.
T o u t cela n’étoit pas de l’ordre : aussi le sieur A lb e r t ,
avec qui les relations étoient les plus fréquentes, lui
é c r iv o it- il, par une lettre sans date : « A n im e -to i du
«
«
«
«
«
«
Code de co m m erce, et conçois qu’en opérations de
banque il faut de l’o rd re, du soin, de l’exactitude,
ou on ne fait que de mauvaises affaires. T u conçois
que si nous avons pris le pai'ti de nous solder par
effets respectifs, c’étoit pour ne plus entraver nos services par des comptes.......... Si tu y portes toujours
« négligence, nous ne pourrons plus nous entendre; te
a répétant que les opérations de banque demandent une
« tenue soignée. »
Remarquons qu’ A lbert et lui étoient en compte cou
rant, et se soldaient par des effets*
A tous ces livres de banque et de comptes co u ro n s,
il faut ajouter encore un autre registre absolument né
cessaire à un commerçant, c’est celui qu’on appelle vul
gairement Copie de lettres, et que le sieur Puray intitula :
R e g is t r e
d e c o r r e s p o n d a n c e ».
C ’est ici que nous découvrirons plus particulièrement
la nature de ses opérations. Nous devons cependant re«-marquer que ce registre commence au n°. 191 ce qui
laisse à savoir ce qu’est devenu celui qui p ré cé d o it, et
qui > comme tant d’autres plus importans encore r a été
�yx>
( 13 )
soustrait à la connoissance des c r é a n c i e r s m a i s il faut
bien se contenter de ce que le désordre et l ’empresse
ment n’ont pas permis d’enlever.
L a correspondance se divise en plusieurs parties; elle
étoit fort active avec plusieurs agens d’affaires de Paris?
Rippert jeune et G r o n e t, W a l t o n , Dérigny-Lebeau et
G od dé, etc.,.etc.; elle avoit pour objet, dans cette partie,
la négociation de beaucoup d’affaires particulières, et
n ’a de rapport à la question qui nous occup e, que l ’ha
bitude constante où étoit P u r a y , et qui est établie
pnr ses lettres, de solder ce qui étoit dû à ses correspondans, par des effets négociables, et cela, toujours
pour payer sur diverses places les sommes dues par des
tiers , et qu’il recevoit à Riom ; ce qui assurément n’étoit autre chose qu’ un transport d’argent de place en
place, sous une remise quelconque.
L a partie la plus intéressante est la correspondance
avec le sieur M o rin , b a n q u i e r , ou d i r e c t e u r d e l a
C A I S S E D E S N O T A I R E S d e C l e r m o n t ; il est indiffé
remment désigné, tantôt par l’un e, tantôt par l’autre
expression.
La première lettre que notis ayons à ce sujet, est
du 28 novembre 1806; elle est tellement essentielle pour
preserver de toute erreur sur la nature des relations
qui existèrent entre les sieurs M orin et P u r a y , qu’on
croit utile de la transcrire presqu’en entier dans ce
mémoire. L e sieur Puray en a omis quelques parties es
sentielles, quoiqu’il en ait assez dit pour détruire toutes'
les conséquences qu’il en a tirées. L a voici :
« Mes fonctions notariales me donnant par fois de*
I
in f
�C 14 )
relations qui mè mettent dans le cas d'avoir besoin
de fo n d s ou d'en f a i r e passer par la voie des tra ites,
j’ai trouvé sur le premier o b je t , près de v o u s , une
facilité dont j’ai usé et userai, puisque vous accueillez
mes demandes; quant au second, le transport des fo n d s
de Hiorn à Clerm ont comme de Clerm ont à R i o m ,
ce m’exposant à des frais..............il m’a semblé que je
ce sortirois de tout cet em barras, en obtenant de vous
« un crédit su r votre m aison de P a r i s , et un autre
cc
«
«
«
«
«
« su r votre m aison de L y o n . Je vous le proposerois
« de dix mille livres sur chacune. Sous vos auspices et
« à votre recommandation, M A s i g n a t u r e , M O N T l M «
BRE
ET
M A V IG N E T T E SE R O IE N T RECO N N U S E T A C -
«
«
cc
«
cc
cc
«
«
te
«
A P a r i s e t a L y o n ; et d’ailleurs, f a n noncerois toujours dans mes tr a ite s, valeur reçue
pour le compte de M o rin et com pagnie; j’aurois toujours vingt-quatre heures sans intérêts pour vous faire
passer les fonds à Clermont ; et si je ne vous les envoyois
pas, ce que ma lettre d’avis vous annonceroit, alors
ils porteroient intérêt en mes m ains, à votre profit,
sur le taux dont nous conviendrons ; et dans tous
les ca s, je ne pourrois retenir en mes mains plus de
10,000 francs sur chaque maison , sans perdre la fac u e il l is
« culté de tirer sur elles..............V o u s ine désigneriez
a
«
«
is.
se
le nombre de jours pour l’acquittement de mes effets
sans droit de commission, et leur nombre aussi avec
droit de com m ission ..............P o u r toutes ces opéra
tio n s , il s'établirait entre vous et m o i un compte co u
ra n t............Q uant a u x remises q u i me seroietit attri-
* buées sur les négociations à termes ou à v u e , jo
�( *5 )
« n’entre, pas, sur ce point personnel à m o i, dans unê
« discussion longue ; je me plais à croire que nous secc rions bientôt d’accord. »
T o u t est clair dans cette lettre ; un transport conti
nuel d’a rgen t, des négociations d’effets à.term es ou ¿1
vue , un compte courant avec M o r in , ba n q u ier, des
remises sur les effets, un droit de com m ission , un cré
dit sur des maisons de commerce de Paris et de L y o n ,
un papier propre au sieur P u r a y , sa vignette, son
tim b r e , son c h iffr e , sa signature , qui doivent se proinener sur les places de com m erce, qui doivent y être
reconnus et accueillis ; voilà tout l’objet, tout le but
que se propose ce notaire qui ne veut pas être ban
q u ie r, mais q u i, en écrivant ces lignes, était certaine
ment to u t, excepté ce que doit être un notaire.
Po u r ne pas tenir en suspens sur le temps q u ’a duré
ce com m erce, posons ic i, comme une vérité certaine,
qu’il existoit encore le 28 mars 1 8 1 1 , jour de la fuite
du sieur Puray. Ce fait est prouvé par les comptes courans de Morin , dont le dernier article est dti 22 mars;
par ses lettres que nous iivons< sous les y é u x , <et dont
la dernière est du 26 mars ; enfin , par Je »livre des
comptes courons de P u ra y, où est porté.u n article de
solde pour iutérêt, à la date du .19 février i 8 r i , et
un emprunt de 1,000 francs, à celle -du £2 mars, six
jours avant la faillite.
'
':
La correspondance avec les maisons de Paris et de
L yo n ne tarda pas à être en activité. Sur la réponse
aiïirmative du sieur M o rin , Puray la commença le 16
décembre i 8o 5. Nous allons l y voir déjà initié aux
�( i6 )
mystères dé la banque, banquier par son style, banquiet
par le f a it, banquier par profession.
A Messieurs Charles Sebault et compagnie ,
r u e .............à Paris.
M e s s ie u r s ,
« P ar suite des relations qui existent entre M . M o «
a
«
«
«
r in , directeur de la caisse des notaires de Clerm ont,
et n o u s , nous sommes autorisés par la lettre que
vous en recevrez, à nous prévaloir sur votre m aison
des fo n d s que nous aurions besoin de f a i r e payer
à P a r is . Les traites que nous vous adresserons seront
« toujours conformes à celle ci-incluse, sur laquelle nous
cc avons apposé notre signature ; nous espérons que vous
« voudrez bien les accueillir comme celles de M . M oriu
« lui-même.
cc Nous commençons dès ce jour avec v o u s, Messieui’s ,
te une correspondance pour laquelle nous vous deman« dons exactitude et amitié; et nous vous donnons avis,
c< ainsi que nous le ferons toujours par la suite, que
cc nous avons tiré sur vous , i° . pour 3 , 0 0 0 f r a n c s ,
a ordre D é s a i x . . . .payable le rj ja n v ier 1807 ,J ix e ;
« 2°, pour 1,100 fr a n c s , ordre de Carvillon-D estillers,
et payable le môme jo u r; v eu illez, nous vous en p rions,
« f a i r e honneur à ces deux effets. »
L e sieur Carvillon-Destillers est un habitant de Paris,
qui percevoit des rentes î\ Riom par l’entremise de Pup y ; celui-ci recevoit les fonds à Riom ? et les faisoit
paye?
�1 17 J
payer à Paris p a r 7a voie des traites. Si ces traites
étaient portées au compte courant de M o r in , Puray
n ’en faisoit pas moins le transport, dont il étoit seul
responsable; et il en résultait, entre M o rin et l u i ,
une autre négociation, puisqu’il étoit o b lig é , pour le
compte d’autrui et dans les vues d’un bénéfice , de solder
M o rin avec des effets n égociés, ou de transporter quel
quefois l’argent de R iom à Clermont.
L a seule cliose qui manque à cette lettre dont Oll
n’a que la co p ie , c’est la signature P u r a y et compa
gnie : c’est l’impression que laisse le style soutenu de
cet écrit. L ’original de la lettre justifieroit vraisembla
blement cette pensée toute simple , toute naturelle, et
dont on ne peut se défendre; toujours la correspon
dance est-elle établie avec le banquier de Paris.'
L e 25 décembre 1806, lettre à Gaspard V in cen t, ban
quier à L y o n ,* elle est conçue dans les mêmes termes.
cf ..... Nous sommes autorisés à nous prévaloir sur vous des
« différentes sommes que nous serions dans le cas de
« fa ir e payer sur votre place ,* nous vous prions de
« vouloir bien nous a ccu eillir et f a i r e honneur à nos
cc tr a ite s , etc. » Il tire en même temps sur la maison
Vincent un effet n é g o c ié , ordre Girard.
P o u r se mettre en c r é d it, il falloit commencer par
tirer modérément sur les maisons de Paris et de Lyon ;
mais il est si aisé de s’enhardir! I¿e 29 du même m ois,
nouvelle lettre à M M . Sebault et com pagnie, à P a r is .
« Nous avons reçu votre lettre du 20 courant, et l’as« surance que vous fe r ie z bon accu eil à nos deux traites
u annoncées ; .................
3
�( i3 )
« E n con tinuité de nos op éra tio n s, r.ous vous dou
te nous avis que nous avons tiré sur vous 3 »
i ° . Sous le n°. 3 , ordre Cadier de V e au ce,
3 j000
Suivent, sous les n ÜS. 4 , 5 , 6 , 7, quatre
autres effets, même ordre.................................
i o ,525
T o t a l ............................................................
i 3>025 f *
« Nous vous prions de vouloir bien prendre note de
,« ces traites, pour les acquitter à leur échéance, etc. »
Remarquons en passant que ces cinq effets tirés à l ’ordre
du sieur Cadier de V eau ce, n’étoient et ne pouvoient être
autre chose que le transport à Paris, par voie de banque,
de sommes appartenantes ù M . {le V e a u c e , que Puray
avoit reçues à Riom .
L e même jour il donne avis à M o rin :
« V o ic i la note des différentes traites dont nous nous
« sommes prévalus su r vos m aisons de P a r is et de
« Lyo?i. »
Suit le détail.
,
O n ne sauroit se dispenser ici de quelques explica
tions qui «voient d^abord paru inutiles, mais que né
cessite aujourd’hui l ’audace avec laquelle Puray déna
ture , et ces opérations, et la correspondance avec M orin.
L a Cour n’eût-elle d’autres élémens que le mémoire
Puray, les faits dont il a été obligé de convenir se feroient
jour à travers le prestige dont il a voulu les envelopper.
11 seroit vrai en effet, d’après cela seul, que Puray fit
un véritable change et rechange d’a r g e n t, en faisant
payer à Paris , à L yo n , et ailleurs , m oyennant une
rem ise, des sommes qu’il recevoit à R io m , lui seul en
�C *9 )
effet demeurant responsable , et cliargé du transport ;
et qu’enfin s’il ne f u t , comme il le p ré te n d , que le
courtier de M o r i n , il n’en fit pas moins une opération
constante et habituelle de courtage, que la loi désigne
comme un acte de commerce.
Mais nous avons en main toute la correspondance de
M o r in , depuis l ’an 1 3 , jusques et compris 1811 ; nous
avons sous les yeu x ses comptes cou ran s, extraits, et
certifiés légalement. T o u t cela a été communiqué et
examiné à loisir ; et tout cela donne un démenti formel
i\ l’étonnante assertion qu’il n’y eut jamais entre lui et
Puray aucune opération de change; que M orin ne con
sidéra jamais Puray comme banquier ou commerçant,
et à la conséquence tirée d’une déclaration que M o rin
a dû fa ir e devant le juge d’instruction, et qu’on a l’in
discrétion de publier comme te lle , tout insignifiante
qu’elle est.
Les lettres de Puray lui-inême sufïiroient pour dé
montrer ce que nous disons.
Elles établissent en effet que le transport d’argent se
fit rarement eu espèces entre M orin et Puray ; et que
presque toujours il consista en effets respectivement tirés
ou négociés.
Nous nous bornerons à citer quelques frag#mens des
lettres de Puray.
*
L e 17 janvier 1807, il écrit à M orin : « Vous trou« verez ci-joint un effet de 1,375 francs su r M M . D o « mergue père et f i l s , ¿1 notre ordre, que nous avons
« passé au v ôtre............V e u ille z nous créditer de cette
k somme. »
3*
�' Le
I e r.
f é v r ie r , lettre semblable ; envoi d’ un effet tiré
sur D o m e rg u e , passé à l’ordre M orin.
L e 4 , toujours à M orin : « Dans les trois jours, à la
« représentation de m a lettre, vous m’obligerez de payer
« en mon acquit, au receveur des domaines, la somme
« de 1,000 f r . , dont je vous tiend ra i compte au débit
« de notre com pte courant. »
L e registre établit, pendant les années 18 0 7 , 1808,
1809,1810, la continuité de cette correspondance delettres
et iPeffets : nous avons déjà dit qu’elle ne finit qu’au
26 mars 1811 , c’est-à-dire, qu’elle n’eut d’autre terme
que la faillite.
Nous ferons cependant remarquer encore une lettre
du 21 juillet 18 10 ; elle p ro u ve, comme les précédentes-,
que Puray ne se bornoit pas à tirer lui-m êm e, mais qu’il
prenoit et négocioit p a r compte courant les effets qui
couroient sur les places de commerce.
« Monsieur et a m i, ci-inclus deux effets de 2,o5o f r . T
« que f a i pris pour 2,000 f r a n c s ; je les a i passés à
« votre o rd re, comptant bien que vous les prendrez
« pour la même valeu r, etc. »
L a correspondance avec Gaspard Vincent et compa
gnie s’es^ continuée jusqu’au 29 décembre 181 o.
Celle avec Sebault et compagnie paroît s’être arrêtée
dans le courant de la même année.
A rriv o n s aux lettres de M orin ; et sans remonter à
nne époque reculée , fixons l’état des choses pendant la
dernière an n ée, et jusqu’au moment de la faillite.
11 est vrai : les lettres de M orin à Puray sont pleines
�1 2 \
( 21 )
ele reproches amers sur son ignorance, son inexactitude
et ses retards; mais comment le sieur M orin se f û t - i l
cru autorisé à taxer Piu’ay d’ignorance, s’il n’eût re
connu qu’il devoit s’instruire des lois du commerce? et
comment supposer qu’il eût pu exiger de lui qu’il s’en
instruisît et q u’il y conform ât ses opérations , en avi
sant les banquiers de L y o n et lui-m êm e de toutes ses
tr a ite s, s’il n’eût fait avec lui des opérations de com
m erce?
Les reproches furent violens en 1809 ; par une lettre
du 12 ja n v ier, M orin écrit : « Nous avons reçu les
« deux vôtres ; la première contenoit la promesse de
« M . B . . . . de 1,280 francs, dont vous avez été re« connu , et repose à votre crédit. »
Il lui envoie son compte co u ran t, et se plaint vio
lemment du défaut de remises.
Une lettre du 20 avril est plus vive encore; elle me
nace de faire sur lui une disposition considérable.
Puray lui répond le 2 2 ; nous avons le projet de sa
lettre écrit de sa m ain; elle est utile pour l’intelligence
de bien des choses.
t
Il v a , dit-il, lui expliquer confulem m ent les causes
de son silence.
«
«
«
«
« Des persécutions sourdes , mais certaines, et don C
j’ai surmonté deux fois ,1e danger, mais dont j ’ai redouté et voulu prévenir les effets ultérieurs, m 'ont
déterm iné à quitter la banque.,,. Cette détermination
prise, je l’ai répandue, m ais insensiblem ent, parce
« que je craignois qu’un bruit pareil, brusquement
« appris, ne me fût nuisible. Ces mesures de prudence
�Va
( 22 )
ce m ’ont assez réussi jusqu’à ce jo u r ; et je vois avec 3a« tisfaction que j’arrive à une liquidation qui se ter« minera pour moi sans déchirement..............» Il l’ins
truit ensuite des moyens qu’il a de se lib ére r; il parle
d’ une spéculation faite par un a m i , « à qui j’ai f a i t ,
« d i t - i l , une avance de fonds considérable : aujourd’hui
« il me d oit, intérêts compris , jusqu’au z 5 juin pro ch ain ,
« de 55 à 60,000 francs; l’ objet de sa spéculation étoit
«
«
«
ce
«
la maison conventuelle de S a in t e - M a r ie , à Iliom ; et
comme ce bâtiment a été acquis par le gouvernem ent,
pour en faire un dépôt de m en dicité, son estimation
a été portée à 80,000 fran cs, et toutes les pièces sont
entre les mains du préfet............. » 11 attend que cette
somme de 80,000 francs soit payée par le gouvernement ;
il a la presque certitude qu’elle le sera bientôt ; mais il
lui est impossible de satisfa ire M o rin ta nt que cette
fo r te rentrée ne s'effectuera pas.
Nous ne rapportons ce fragment que pour établir
contre P itra y , par la reconnoissance de P u ray lu i-m ê m c,
qu’il faisoit la b a n q u e , qu’il vouloit la quitter , qu’il
ne le pouvoit qu’en se liquidant, qu’il lui falloit pour
cela une forte rentrée de 55 à 60,000 francs ; et comme
le gouvernem ent n’a pas paye les 80,000 francs, que
les 55,ooo francs ne sont pas ren trés, il ne se liquida pas,
il ne quitta pas la banque, et crut plus sage de la continuer.
Nous le prouvons immédiatement.
L e 14 juin , M o rin lui envoie extrait de son com pte;
il l’établit débiteur de 46,893 francs 67 centimes, et le
crédite de 16,607 fra n cs, par suite d’une négociation
d’effets,
�r
(*s)
L e 5 mai 1 8 1 0 , lettre de M orin qui répond a mie
demande de fonds.
L e 19 m a i, autre lettre de M orin :.
« Nous sommes favorisés de la clière vôtre, contenant
« cin q rem ises, montant ensemble à .24,506 fr. 5 cent,
c. auxquelles nous allons donner co u rs; en attendant,
« elles reposent à votre crédit : nou? ne manquerons pas
« de vous aviser de leur encaissement.
« M. Gaspard Vincent ne nous a encore rien dit du ver
te sement qu'on lu i a fa it p our votre compte, de i,3 5 o fr. »
L e 9 ju in , il lui envoie 2,000 francs.
L e 10 juillet : « Nous avons reçu, avec votre lettre
«
«
«
«
du 5 courant, l’effet y contenu sur S ......... , à v u e , de
700 francs; nous vous adressons pour la contre-vale u r , et sauf la commission, notre effet sur Paris, de
689 livres 10 sous. »
Sans continuer jusqu’au dernier jour l’analise des lettres,
jetons un coup d’œil sur les comptes courans, et bornonsnous au dernier de to u s, celui de 18 10 , en observant
que les autres sont semblables. Nous allons en tracer une
esquisse.
DOIT M. Puray aîné, de Riom, son compte courant, etc.
1810.
Mars.
Mai.
24 Pour acquit de son mandat sur Lyon, ordre Mordefroit. .
24 Autant à lui compté...........................................................
Juin.
4 Notre remise en un mandat sur Pa ris...............................
1811
.
Mars.
3o,'i6f
9S7
79o
T o u t sur le même exem ple, jusqu’au
Autant compté pour lui à Mlle. Marnat
1000
Son billet, ordre Tabardin..................
»485
�( H )
AVOIR.
1810 .
Mai.
18 Pour sa remise, mandat Durand, sur Paris.
ld .
id.
r %» » » » .
sur id.
5gî5f
5g 25
Suivent trois effets semblables.
Juillet
Décemb
A u ta n t qu* i l averse à Lyon, chez M. V in c e n t, pour nous. i 333
Autant
id .
id .
id.
444
6¡Sa remise souscrite Chevalier , sur Lyon............................... 4000
ld .
souscrite
id.
43oo
sur id.
1 811 .
Janvier.
Autant que M. Vincent a touclié pour M “>e. Parias.
ld .
id .
id.
id .
444
529
Ces opérations ainsi conduites jusqu’au moment de la
faillite, ne sont-elles pas des témoins irrécusables des faits
que Puray s’efforce le plus de dém entir? ne sont-elles
pas caractéristiques d’un change et rechange habituel d’ar
gent et d’effets d’une place à une autre ?
Elles démontrent que P u ra y , qui vouloit quitter la
b a n q u e, ne la quitta pas ;
Q u ’il en continua les relations habituelles ;
Q u ’il ne les interrompit pas un instant jusqu’à celui
où. le mauvais état de ses affaires, ses mauvais calculs,
et les détestables spéculations dont il s’accuse, le forcè
rent à une cessation de payemens et à une fuite hon
teuse.
E t les lettres de M orin démontrent qu’il ne considéra
jamais Puray comme banquier!
' .
Que Puray ne fit jamais la banque, pas même le change
et rechange!
Et la déposition
du sieur Mçria dit tout cela !
.
EH q
�( *5 )
Elle peut avoir des réticences; elle en a certainement,
si elle est conçue en ces termes. Mais quand le sieur
M o r i n , banquier, anroit rougi de reconnoître à Puray
ce titre légitim e, il ne faudroit. pas s’en étonner. Mais
qu’on veuille réduire à ce point la question qui nous
occupe, dire que parce que Puray n’a jamais tenu d’une
permission le titre de b a n q u ier, il n’a pas fait habi
tuellement des actes de commerce , des opérations de
b a n q u e, change et courtage, c’est ce que M orin n’a pas
d it, c’est ce qu’au m oins,il n’a jamais pu dire.
C ’en est assez sur ce point essentiel. Que les prestiges
s’évanouissent, que les subtilités disparoissent; la vérité
est démontrée.
Nous arrivons à un autre genre de spéculation. Ce
n’étoit pas assez pour le sieur Puray d’être notaire im
périal et certificateur, même avocat, s’il falloit l’en croire,
et en outre banquier, d’avoir été marchand de blé et
autres gfa in s, de bois à b r û le r , de vins du p a y s, de
fo in , d’avoin e, etc.; il fallut être marchand de liqueurs
et de baume de vie. Il commença par le kirschenvasser.
Il découvre dans le département du H aut-Rhin un
sieur W e l t é , fabricant de kirsch; il lui en demande un
envoi considérable. L e sieur W e lt é ne le connut vrai
semblablement que par sa lettre et la qualité qu’il prit :
il lui expédia le kirsch, et lui répondit le 17 avril 1809;
sa première lettre est adressée à M . P u r a y a in é , no*
taire et banquier. ,
,
;
Il lui annonce l’envoi de six caisses de k ir s c h , con
tenant six cent seize bouteilles à 2. francs. Une seconde
»
4
�c ^ y
lettre du 4 ju in , semble* demander compte de la prem ière :
l’une et l’autre restent sans réponse. E n fin , le 11 août,
nouvelle lettre du fabricant, qui réclam e, et la réponse
aux deux premières, et le payement du kirsch. P u rà y
répond le 22 : •>
•
*
'
J ’ai reçu les six caisses le 8,mai dernier.^.;..rL orsq u d
« je vous f e r a i un& autre dem ande, j’y joindrai certai« nement celle de changer la maison de roulage de L yo n
« à R io m .......J e vous fais passer la somme de i,22Ô fr. ,*
«
a
«
«
«
montant de votre envoi des susdites caisses, en un effet
de même so m m e , à votre ordre, payable à P a n s ,
le 20 septembre prochain ; veuillez m’en accuser ré*
ception dès Vencaissement. V ou s me ferez plaisir de
m’apprendre si cette liqueur a augmenté dans votre
« pays, et si j’ai p u , sans inconvénient pour la qua«' l i t é d e cette liq u eu r, garder l’envoi tout emballé jus« qu’à l’hiver prochain. »
J ‘
I
W e lt é répond le I er. octobre; il accuse la réception*
de reflet et la solde du com pte; et quoique Furay n e
lui eût vraisemblablement indiqué d’autre qualité que
celle de notaire et banquier, il trouve tout simple de
qualifier négociant et b a n qu ier, un homme qui achète
à la fois six cent seize bouteilles de* la même liqueur
pour les revendre, et qui les paye avec des effets sue
Paris.
L e débit ne commença que dans l’hiver de 1810 r
Puray en débita cent cinquante-deüic bouteillëâ; il n’eut
ni le temps ni le besoin de f a i r e une autre demande ;
au moment de sa faillite-, il en avoit encore quatre cent
soixante-quatre/qu’il debitoit toujours.
«
�'
( *7 )
Il étoit donc marchand de kirschenvasser,
11 est connu dans cette v i lle , que cette liqueur ne fut
pas la seule dont il fit commerce ; il en débitoit de plu
sieurs sortes : la vente m obilière, lors de laquelle une foule
de personnes en ont acheté, en est un témoin irrécusable*
L ’inventaire constate l’existence de cinquante-quatre
bouteilles de liqueurs de toute espèce, quarante-deux bou
teilles de vin d’A lican te, quatorze bouteilles de vinaigre
des quatre voleurs, trois cent quarante-neuf bouteilles de
vins de diverses qualités, sur quoi soixante-cinq seule
ment de vins du pays; et les créanciers sont en état d’éta
blir qu’il couroit dans les maisons où on donnoit des
repas, offrir ses v in s , ses liqueurs, etc.
Il étoit donc marchand de liqueurs et de vins étrangers.
Parlons maintenant du commerce de baume de vie :
il est étab li, comme celui du kirsch, par les lettres de
la demoiselle L e liè v r e , et par le registre de correspon
dance; il paroît remonter au moins à l’an 1 0 : c’est de
cette époque que date la première lettre de M . Lelièvre.
Nous n’entrerons pas ici dans de grands détails ; nous
nous borneronsàdireque le débit de ce baume, que le sieur
P u ray dit avoir fait venir pour sa femme, fut néanmoins
assez considérable : la'correspondance nous montre un
envoi de cent dix bouteilles, le 18 frimaire an 12 ;
Cent d i x , le 11 vendémiaire an 1 3 ;
Cent d i x , le 7 floréal an 1 3 ;
r
Cent d i x , le 23 avril 1806;
_• (Deux cent v in g t, le 20 novembre 1809.
La dernière lettre, à la date du 31 janvier 1810, éta
blit un envoi de six bouteilles de rob anti-syphilitique
4*
�(
2
8
}
de Laffecteur, que la demoiselle L elièvre ne lui faisoit
que par commission, et qu’apparemment le sieur Puray
ne faisoit venir que pour le revendre.' Aussi en a-t-il
acheté ailleurs et revendu ; car, au lieu de six bouteilles
constatées par cette lettre, il s’en est trouvé h u i t , lors dô
l’Înventaii’e.
r
O n veut faire considérer comme un simple d é p ô t, la
vente du baume de vie.
‘
Mais remarquons, i° . que'la demoiselle L elièvre joint
à chaque envoi le compte de la valeu r, établit Puray
débiteur envers elle du prix de l’e n v o i, et en demande
le m ontant, ou au moins un à-compte.
20. Puray payoit comme débiteur personnel, même
aVant d’avoir débité; témoin une lettré de la demoiselle
L e liè v r e , du 21 frimaire an 1 2 , ainsi conçue:
« Je viens de vous expédier par les rou liers, une
cc caisse de cent dix-bouteilles <de baume de v i e , que
'et- vous nîe demandez par!-votre’ d ern ière; j’a i1 reçu de
ce'M. B e rtiio n , les trois cent douze livres du dernier
ce envoi ; quant au payem ent de ce d ern ier, soyez per
ce su ad é, M o n sieu r, que je prendrai avec vous tous
«e les arrangemens qui pourront vous être agréables. »
A 1coup sûr, le sieur Puray n’avoif pas attendu qu’un
envoi fût totalement épuisé, pour en demander un autre;
donc il payoit avaüt d’avoir v e n d u , donc il vendoit pour
son propre compte; ce qui est bien constamment v r a i ,
au moins pour les dix bouteilles pour cent, dont on lui
faisoit remise com m e débitan t, et pour le rob iinti-syphi—
litique que la demoiselle L elièvre lui envoyoitptfr com
m ission.
�c
2
9
}
Dans une nutre lettre du 11 vendémiaire an 1 3 , elle
mande : I l est de mon intérêt de contenter les personnes
q u i veulent bien m 'honorer de leur confiance; donc c’étoit
Puray qui lui donnoit sa confiance comme débitant, et
'et non pas elle qui la donnoit à Puray comme dépositaire.
Par une autre lettre du 23 avril 1806, elle envoie
tout à la fois cent dix bouteilles de baume de v ie , et cent
rouleaux d’eau de Cologne. Il paroît.que Puray avoit
demandé U n e remise de dix rouleaux pour, l’eau de Co
logne; mais elle la refuse, parce q iie llë la passe à 2.5 sous,
et que Pui*ay aura le double de bénéfice, en la vendant
30 s o n s ,’ qui est le p rix.
.
. ’
Prendre une marchandise à a 5 sous, et la revendre 30 ,
c’est sans doute en faire un commerce. Donc lès dix bou
teilles de remise étoient aussi un bénéfice de revente.
A u reste, Puray n’étoit pas dupe. S’il n’eût été que
dépositaire, il n ’eût pas pu vendre à un prix plus élevé
que la demoiselle L elièvre : o r , personne n’ignore que
prenant la bouteille à . 3 f r . , il la revendoit 3 fr. 75 c .,
c’est-à-dire, à 75 centimes de bénéfice.
Par cette même lettre, la demoiselle Lelièvre établit
Puray son débiteurde 881 fr. ; lui demande un à-compte le
plutôt possible, et jamais 11e s’inquiète s’il a. ou non débité.
Enfin , tous les payemens ont été faits en effets de com
merce , tirés sur des maisons de Paris par le sieur Puray,
A u reste, on doit ajouter ici un fait qui suffit pour
jeter la lumière sur ce point de la cause.
La demoiselle Lelièvre eût été fort intéressée à n’avoir
fait qu’ un dépôt, parce que le dernier envoi n’étant pas
payé lors de la faillite, et cent cinquante bouteilles exis-
�( 3° )
tant encore en n ature, elle eût pu réclamer la m a r c h a i
dise elle-même; cependant elle a donné son consentement
à la vente, par le ministère d’ un fondé de pouvoir spécial :
l ’eût-elle f a it , si ce n’eût été qu’un dépôt ? et si c’eût été
un dépôt, n’en eût-elle pas eu les preuves par-devers elle ?
Bien m ie u x , lors du procès verbal de vérification de
créances, elle a réclamé d’être admise au passif de la
faillite , pour une somme de 519 francs 21 cent, à elle
due par le J a illi, p our vente et délivrance de baum e de
vie ^fa ite au J a illi.
Cette créance a été vérifiée et affirmée.
L e sieur P u r a y , lors de sa ¿fa illite, étoît donc mar
chand en détail d’eau de Cologne et de baume de vie.
Jusqu’ici les intimés sont à l’abri du plus petit reproche
dans l’esprit du sieur Puray : ils n’ont fait aucun usage de
l ’unique moyen contre lequel il dirige tous ses efforts;
nous voulons dire ce commerce d’argent qui s’entremêle
dans les affaires de b an q u e, et qui s’incorpore tellement
avec elles, qu’il en est inséparable.
Nous n’en avons pas parlé, et cependant qui doutera
qu’indépendamment de cette branche de spéculations, que
Puray appelle usure et m altotage, il ne fût dans toute la
force du term e, et commerçant, et banquier? E t comment
ne l’auroit-il pas été avec un compte courant chez Morin ;
un crédit ouvert sur les deux places de commerce les plus
considérables de l’empire; un change et rechange conti
nuel d’argent et d’effets ; la négociation des efTets d’autrui,
au profit de ses correspondans ; des achats et reventes à
bénéfice, etc., etc.?
Que faudroit-il donc pour constituer un banquier ?
�(3 0
Disons cependant un mot des opérations scabreuses
de ce notaire, et de sa manière de tirer un bénéfice dé
l ’argent d’autrui; de travailler ïa rg en t, comme on le dit.
Nous- avons vu que ce négoce étoit une des spécu
lations qui fondèrent la banque d’A lbert et Puray , as
sociés : après leur séparation, Puray la continua à sa
m anière, et la réunit à toutes les autres bi*anches de
commerce dont nous avons parlé.
1
Quoique les créanciers n’aient pas, à beaucoup près^
dans les mains la totalité des effets souscrits par le sieur
Puray , depuis l ’an 12 jusqu’aux premiers mois de 1 8 1 0 ,
ils ont néanmoins en leur pouvoir onze cent soixantesix lettres de change, tirées par Puray dans cet intervalle,
toutes sur un papier uniform e, décorées de sa vignette
et de son-chiffre, datées de Clermont, pour être payées
par A lb ert à R i o m , excepté quelques-unes tirées de
Riom sur D u m a y , Blatin , Daubusson , Nicolas et autres.
Dans' ce nombre de onze cent soixan te-six ne sont
compris ni les effets souscrits à son profit, ni ceux né
gociés sur les places de commerce de L yo n ou Paris,
ni ceux encore vivans lors de la faillite, et qui sont
entre les mains des créanciers, ni ceux qui ont disparu *
l ’état d’im perfection, de d ésordre, d is o n s - le , d’infidclite des registres qui constatent ces opérations, lie
donne pas la facilité de suppléer à ce qui manque: Nous
n’y comprenons pas non plus les innombrables reconnoissances de dépôts, qui l’ont souvent muni de sommes con
sidérables, sans la participation de ceux à qui elles étoient
destinées, et qui (puisqu’il les a audacieusement v io lé s )
�( 32 )
ont plongé dans l ’abîme tant de malheureux qui n’ avoient d’autre reproche à se faire que celui d’avoir eu
confiance en son intégrité.
Nous ne présenterons pas non plus le résultat en
somme de tout l’argent travaillé par le sieur Puray dans
cet intervalle ; ce seroit se donner beaucoup de peine
pour un détail assez inutile à connoître. Il nous suffit
d’indiquer la quantité des effets dont clxacun pouvoit
donner lieu à un jugem ent de com m erce et à la con
trainte par co î'p s, et dont la masse effrayante devoit
nécessairement constituer, et Vhabitude des actes de
com m erce , et la qualité de commerçant.
^ T e l étoit l’état des affaires et des spéculations de P u
ray ; sa marche étoit tortueuse, mais rapide ; il sentit
plus d’une fois la difficulté de sa position et le désordre
de ses affaires : cependant le public les croyoit au plus
haut degré de prospérité, lorsqu’une disparition soudaine,
une fuite inopinée, vint glacer de terreur une foule de
créanciers, de toutes les classes de la société.
Cet événem ent, qui date du jeudi 28 mars 1 8 1 1 , à
l ’entrée de la nuit, fut annoncé aux habitans de R iom
le 29 au matin. U n mouvement extraordinaire qui avoit
eu lieu toute la nuit dans sa maison , qui duroit encore
le vendredi matin, étonna les habitués; quelques créan
ciers venant pour affaire trouvent dans son cabinet plu
sieurs personnes ; l’absence de P u r a y , des réponses
vagues, un air inquiet et affairé, donnent des soupçons ;
l ’inspection du cabinet effraye; des cartons déplacés et
puverts , des liasses entassées et en désordre, des papiei's
détachés
�( 33 )
détachés et épars, un bouleversement universel et une
confusion épouvantable, tout porte dans l’âme des créan
ciers la crainte et la consternation : le juge de paix est
appelé, et les scellés sont apposés.
Parm i des papiers négligemment jetés sur un bureau,
se trouvent trois effets de l’actif du sieur P u r a y , l’ un
de i o , 5 n francs, tiré par la dame Neufville , veuve
D é s a ix , sur le sieur M o r i n , banquier; le second, de
9,927 liv. 10 sous, su r le sieur D a u b u sson a in é ; le
troisième , de 8,732 francs , sur. le sieur D om ergue ;
tous trois à l’ordre du sieur P u r a y , et qui depuis long
temps auroient été négociés et passés à l’ordre d’autres
in dividus, si la signature eût été plus rassurante. Sur la
marge d’un de ces effets se trouve ces mots écrits de la
main de P u r a y , le même j o u r , et peut-être à l’instant
de son départ : a J ’ai reçu sur cet effet 6,450 fr. de
ce madame Désaix, par M . M o r in , le 23 décembre 1809 :
« je la p r ie , au nom de l’ humanité, de payer le surplus
« et intérêts à ma femme. R i o m , ce 28 mars 181 r. P. »
Les scellés, quoiqu’apposés immédiatement, le furentils néanmoins assez tôt ? Les créanciers se défendent du
soupçon , et croient devoir se taire ; mais s’il est dur
pour des fournisseurs, même pour des capitalistes, comme
le dit le sieur P u r a y , de voir s’évanouir ou le prix de
leurs marchandises revendues à bénéfice, ou les capitaux
versés dans les mains d’un homme qui en retiroit du
p r o fit, qu’il l’est bien davantage encore pour des ou
vriers, des artisans, des filles de journée, des serviteurs,
des gens à ga g e, d’avoir travaillé toute leur vie pour
J’iDstant où leurs forces les abandonneront, et de se voir
5
�C 34 )
■arracher le fruit de leurs économies, par l’homme à
qui ils avoient confié ce dépôt sacré , cette ressource uni
que de leurs vieux ans !
Q u ’il est cruel pour des propriétaires honnêtes , de
trouver dans son étu d e, ou plutôt dans Vautre qu’il
appeloit son cabinet] des actes commencés et non finis;
des quittances restées' en projet ; des partages demeurés
dans les termes d’ une simple n o te, etc., etc.; de voir
que leur argent s’est év a n o u i, et que leurs créanciers ne
sont pas payés ; qu’ils ont s o ld é , et les droits d’enregis
trement, et les vacations du notaire, et qu’ils n ’ont point
de titres! Q u’il est difficile à l’homme honnête de retenir
son indignation , et de ne pas s’abandonner aux mouvemens de son âme! Plusieurs créanciers de ce genre
ont paru au procès verbal de vérification des créances;
beaucoup ignorent leur destinée, et ne'la découvriront
que quand le mal sera plus grand encore. Mais poursui
vons le récit du fait.
Une assemblée de créanciers fut convoquée dans l’étude
de M e. Bon ville; aucune proposition déterm inée, quoi
qu’on en dise, ne tendit à la rendre fructueuse. Des dis
cours vagues et des plaintes, voilà tout ce qu’on offrit
aux créanciers : quelques-uns présentèrent une requête
au tribunal de commerce , et le 13 avril un jugement
déclara Puray en état de faillite.
U n m otif et le dispositif de ce jugement sont essen
tiels à connoître , puisque c’est celui contre lequel le
sieur Puray a dirigé son opposition , et qui fait aujour
d’hui l’unique but de son appel. O n ne croit pas pou
vo ir se dispenser de transcrire ce m otif ; le dispositif
se retrouvera dans la suite des faits-
�i f r j
«
«
«
«
«
«
( 35 )
« Considérant qu’en supposant que le sieur Puray
n’exerçât pas légalement la profession de banquier et
de commerçant, et qu’il n’eût pas de patente, il n’est
pas moins notoire qu’il en faisoit sa profession liabituelle; qu’il se mêloit de toutes les opérations qui y
sont relatives, telles que négociations de lettres de
change, billets à ordre et autres effets commerçables,
«
«
«
«
«
«
«
«
«
a
change d’argent contre des effets de commerce sur les
diverses places d e l ’E m p ire , emprunts et placemens
dans les vues d’un bénéfice, escompte d’effets à termes,
et généralement de toutes espèces d’opérations de
banque et trafic d’argent ; qu’il faisoit également le
commerce de liqueurs ; que ces divers actes de banque et de commerce n ’étoient pas seulement passagers,
mais habituels et soutenus, au su et vu de tout le
monde; ce qui caractérise en lui l’habitude des actes
qui constituent le commerçant. »
L ’article 467 du Code de commerce exige que le ju
gement soit affiché, etrinséré par extrait dans les jour
naux : cette formalité ne tarda pas à être remplie.
L ’insertion fut faite d’abord dans le Journal hebdo
madaire; on le trouve dans la feuille du 24* avril î concu
j
en ces termes :
« Extrait de jugement rendu par le tribunal de com
te merce de R iom . . . . à l’audience du treize avril mil
« huit cent onze............sur la requête présentée p a r . . . .
« et autres créanciers du sieur Am able-Pascal P u ray,
« banquier et com m erçant, habitant de la ville de Riom ;
« q u i déclare ledit sieur P u r a y en fa illite o u v e r t e que
a l’époque de sa faillite est fixée au vingt-neuf mars mil
5*
K Ï
�<■•S'X.'i
( 35 )
cf huit cent onze, jour de sa retraite, de la clôture de
« son com ptoir, de ses bureaux, de.la cessation totale
« de ses payemens.
cc O rdonne, si fait n’a été, l’apposition des scellés par
« M . le juge de paix de la section Ouest de la ville
ce de Riom , sur les magasin, co m p to ir, caisse, porte« feu ille, livres de banque ou de com m erce, registres,
ce papiers, meubles, et autres effets du f a illi.
cc Nomme M . M o rtille t, juge audit trib un al, juge« commissaire à la faillite, et M M . H u g u e t, avoué à
« la Cour d’app el, Faucon et Gosset, avoués au tric< bunal de première instance, et Lamadon fils, défencc seur agréé au tribunal de commerce, agens de ladite
« fa illite ,
ce Ordonne le dépôt de la -personne dudit P u r a y
ce dans la m aison d’a rrêt, pour dettes; et que le prê
te sent jugement sera affich é, et inséré dans les jource nîiux , au désir de l’art. 4 5 7 'du Code de commerce.
ce P o u r extrait conforme^ la minute : signé Lamadon,
ce greffier.
Cotte mesure suffisoit pour valoir signification du
jugem ent, aux termes de l’article 457 du Code de com
m erce, puisque, indiquant le Code de procédure pour
les formalités à rem plir, il ne renvoie qu’à l’art. 683,
Ct que l’art. 683 ne parle que de l’affiche ou insertion au
Journal hebdomadaire; cependant-, pour ne laisser rien
a désirer, les agéns de la faillite employèrent toutes les
formes introduites par le Code de procédure, pour la
publicité des jugemens, et pour en donner connoissance
à lu p a r tie condamnée,
i
*
�( 37 )
Ils commencèrent par l’affiche de l ’extrait du jugement
à tous les lieux indiques par l’art. 684. Cet acte étaut
attaqué de nullité, il est encore essentiel de le connoître;
il est fait par C o llât, huissier en la Cour.
« L ’an mil huit cent onze, et le vingt-sept avril, à la
« requête des créanciers du sieur Amable-Pascal Puray
« aîné, banquier et com m erçant à R io m , déclaré J a i l l i ,
«
«
a
«
«
«
«
«
«
«
«
poursuites et diligences d e . . . . en qualité il'agens ¿1
ladite fa illite , nommés par jugement du tribunal de
commerce, du treize avril présent m ois; je, François
C o llâ t, -etc.. . . . . certifie avoir affiché à chacun des
lieux désignés par l’art. 684 du Code de procédure,
un extra it certifié conforme à l ’expédition , par lesdits
sieurs agens, du jugem ent dudit jo u r treize avril
présent m o is , dûment enregistré, q u i ji x e touverture
de ladite fa illite au v in g t-n e u f mars m il h u it cent
onze ; et a i , en vertu de la lo i, dressé le présent acte
d’apposition, lesdits jour et an. »
Ce procès verbal est visé par un adjoint à la m airie;
il apprend par lui-m êm e, et par lui seul, que le jugement
dont on affichoit l’extrait, avoit été rendu le 13 avril
1811 ;
Q u’il avoit pour objet de déclarer le sieu r P u r a y en
état de fa illite ;
Et q ii’il fix o it au 29 m ars 1811 Vouverture de la
dite fa illite.
Ce procès verbal est fait d’ailleurs à la suite de l’insertion
au Journal hebdomadaire, de l’extrait qu’on vient de lir e ,
et indique assez que cet extrait, bien concordant avec son
�.
(
38 } .
procès v e r b a l, est celui qu’il vient d’afficher à tous les
lieux indiqués par l’article 684.
L e I er. mai 1 8 1 1 , une nouvelle insertion est faite
dans le Journal hebdomadaire.
« Les créanciers du sieur Amable-Pascal Puray, ban « q aier à R i o m , sont invités à se réunir le samedi 18
« mai 18 r i , heure de deux de relevée, dans la salle du
« tribunal de commerce de la ville de R iom .
« L e commissaire par intérim à la fa illite dudit P u ra y . •
« Signé Beraud. »
L e 7 m a i, pour plus grande précaution, les agens
présentent une requête à M . le président du tribunal de
com m erce, et lui demandent de commettre un huissier
pour la signification du jugement au sieur Puray.
Ordonnance qui commet Collât.
E t le 14 m ai, signification au domicile de P u ra y , du
jugement qui déclare la faillite : la copie en est encore
laissée à un adjoint, toute la famille du sieur Puray
ayant abandonné sa maison.
Les agens s’étoient sérieusement occupés de connoître,
autant que possible, l ’état des affaires du sieur P u r a y ,
pour pouvoir procéder à la rédaction du bilan, aux termes
de la loi. Cet examen fut pour eux d’autant plus péni
ble, qu’ils reconnurent bientôt l’impossibilité où ils étoient
par le fait du f a illi, de se procurer toutes les lumières
qu’ils avoient le droit d’en espérer: obligés, sous la di
rection du juge-commissaire, de rendre compte de tout
ce qu’ils ont vu , ils s’en expriment néanmoins avec ré«*
serve dans le préambule du bilan,
�C 39 3
.
« Il eût été à désirer , disent-ils, que le sieur P u ra y ,
t< qui étoit notaire, se fût exclusivement livré à cette
« carrière aussi honorable que lu crative, parce que
« tout fait présumer, q u e , dans ce ca s, ses créanciers
cc n’auroient pas ¿1 déplorer la perte immense qu’il leur
« fait essuyer; car n’ayant pas eu à sa disposition des
« sommes aussi considérables, il n’eût pas songé à réa« liser une faillite dont la nature est plus que suspecte. »
Ils déclarent easuite q u e, soit le livre de banque, qui
ne commence quen mars 181 o , qu i est incomplet et
défectueux , soit le livre des dépôts, qu i laisse presque
tout à désirer sur le quantum des sommes déposées,
le placement de ces som m es , et les retraits qui ont
pu en être f a i t s , ne leur ont donné que de très-foibles
éclaircissemens.
Ils ajoutent que « l ’inspection qu’ils ont faite de l’état
« intérieur de la muison, et des objets mobiliers qui s’y
« tro u ven t, ne leur a pas donné une idée plus avanta« geuse de la bonne foi du sieur Puray ; ils croient
« devoir cet hommage à la v é r ité , c’est q u e , dans
« diverses armoires, commodes et secrétaires, il ne s’est
« rien ou presque rien trouvé : tout fait donc présumer
« aux agens que des soustractions mobilières ont été
« commises très-peu de temps avant la disparition du
' cc failli.)!
Pénétrant ensuite dans ce gouffre, que le sieur Puray
lui-même a appelé un antre ( 1 ) , ils donnent approxi
mativement l’état du passif et de l'actif.
(1) Son cabinet.
�C 4° )
L e premier se p o r t e , pour les créances connues jus382,195 f.
qu’alo rs, à . . .
19 7 ,3 1°
L e second à
L e déficit à
184,885 f.
Encore a-t-il fallu comprendre dans l’actif une foule
de créances verreuses, et d’autres fort douteuses, qui en
composent la majeure partie. Les connoissances acquises
depuis le bilan démontrent que le déficit sera de plus
de trois cent mille francs. U n calcul d’intérêts accumu
lés ne peut avoir absorbé des sommes aussi énormes :
les syndics n’accusent pas le sieur Puray d’être riche;
mais certainement sa faillite a eu d’autres causes , que
sans doute il n’oseroit avouer lui-inême, pour nous servir
encore des expressions du bilan.
Ce bilan fut enregistré et déposé le 24 mai 1811. Bientôt
les mesures s’activèrent, et le jugement fut mis à exécution
avec la plus éclatante publicité.
D ’abord, par un jugement du 21 mai 1 8 n , qui nomma
les syndics provisoires, aux termes de l’art. 480 du Code
de com m erce, et qui fut signifié au sieur Puray le 30 du
même m ois, avec assignation pour assister à la levée du
scellé et à l’inventaire. Dans cet acte, comme dans tous
les autres signifiés au sieur Puray, il est qualifié banquier.
2». P ar l’inventaire publiquement fait par le juge de
p a ix , depuis le 31 mai jusqu’au 7 juin.
3°. Par la vente du m obilier, faite, après des affiches
apposées à R iom et à Clermont, à la chaleur des enchères,
et pendant plusieurs jo u rs, dans la maison même de
P u r a y , à la face de sa famille, et en présence d’une foule
considérable
�(
4
0
considérable d’habitans de la v i l l e , et d’étrangers,
appelés à cette vente par la publicité qu’on lui avoit
donnée.
E t remarquons qu’elle fut traversée par différens actes,,
émanés de la femme, du frère et du beau-père du failli,
et qui démontrent combien il est de mauvaise foi ,
lorsqu’il prétend n’avoir pas connu l’exécution du ju
gement.
Ces actes sont : i ° . une requête présentée par la dame
Puray., à M M . les syndics provisoires de la fa illite du
sieur Puray.
Elle est signée d’elle ;
. Elle est écrite de la main du sieur Chassaing, beaupère du failli ;
Elle a pour objet de réclamer le mobilier nécessaire à
son usage, et à celui de son mari et de ses deux enfans;
Elle est présentée en conformité de l’article Ô2g du
Code de commerce ............ sous Vapprobation de M . le
commissaire N O M M É A L A D I T E F A I L L I T E .
Cette requête fut suivie d’une lettre du 14 juin, signée
de la dame P u ray, et écrite de la main du sieur Puray
jeune, frère du failli;
Elle est écrite à M M . les syndics provisoires de la
fa illite du sieur P u ra y ;
Elle est ainsi conçue';
« Depuis le 10 du courant vous avez reçu une pé« tition faite à ma requête”, tendante à réclamer les
« vêtemens, bardes et meubles, que Part. 529 du Code
(s de commerce veut qu’on accorde au f a illi et à sa
6
�( 4* )
«' fa m ille ; je m’attendois d’un jour à l’autre à recevoir
« une réponse.................... Chassaing , femme Puray. »
T o u te la famille Puray considéroit donc P u ra y, no
taire, comme un banquier ou commerçant y«////.
E n fin , le 17 ju in , acte signifié par la dame Puray
a u x syndics provisoires de la fa illite ; elle leur dé
clare qu’elle forme opposition à la vente du mobilier ,
que les affiches publiques annoncent devoir se f a i r e
a ujou rd’h u i 17 ju in 1811.
Cette vente étoit donc connue de la famille Puray et
de lu i- m ê m e , tout aussi-bien qu’ils connoissoient et
avouoient les uns et les autres la qualité de f a i l l i im
primée au sieur P u ra y , par les jugemens du tribunal de
commerce.
J lies syndics provisoires exerçoient toujours leurs fonc
tions : on songea à les remplacer par des syndics dé
finitifs. L e sieur Puray fut appelé à l’assemblée par deux
assignations des 13 novembre et 5 -décembre; le procès
verbal denom ination des syndics fut fait publiquem ent,
le 9 du même mois.
Dans l’ intervalle, on avoit procédé à la vérification des
créances-, elle commença le 13 octobre, et le procès verbal
fut clos le 8 novembre.
T ou s les parens du f a illi, même son frère et son beaupère , se présentèrent à la vérification, armés de titres
bien en règle; tous furent admis an passif; et ce qu’il
y a de rem arquable, c’est que de tous les créanciers, e x
cepté d e u x , les membres de la famille sont les seuls qui
aient des titres, et des titres fort réguliers, sur du papier
de dimension.
�} 4 $>
C 43 )
Toutes ces créances ont été vérifiées; une seule a donné
lieu à des difficultés , c’est celle du sieur Chassoing, beaupère du failli; elle fut vivement contestée : le juge-com
missaire renvoya les parties à l’audience; la cause fut
plaidée contradictoirement le 26 novembre 1811.
Les créanciers contestans opposèrent au sieur Chassaing
un ensemble de circonstances qui tendoient à établir que
sa créance étoit supposée ; ils l’accusèrent personnelle
ment d’avoir coopéré à des sousti'actions d’effets mobiliers,
et ils offrirent la p reu ve, soit des faits de supposition
de créan ce, soit des soustractions.
Cette preuve fut admise; le tribunal l’ordonna dans les
-termes de l’art. 5og du Code de commerce; il pensa que
dans cette matière, toute d’exception, il étoit dispensé des
règles ordinaires; et sans caractériser aucun fait précis
par le dispositif de son jugement, il ordonna que preuve
seroit faite des faits qui pouvoient tendre à établir la sup
position , et que les personnes qu i pourroient fo u r n ir
des renseignemens , seraient à cet effet citées devant le
juge-commissaire : ce sout les propres termes de l’art. 509.
, Ce jugement fut attaqué par la voie de l’a p p e i, et la
cause fut plaidée solennellement en la C o u r , pendant
deux audiences, les 6 et 9 mars 1812.
La défense du sieur Chassaing fut remarquable : il
ue la prit pas dans sa personne; mais il la tira des moyens
personnels au failli.
Chose singulière! On proposa un moyen d’incompé
tence contre le tribunal de commerce, et contre la Cour
elle-meme jugeant commercialement. Mais sur quoi futelle fondée ?
6*
.
^
�( 44 )
Plusieurs articles du Code de com m erce, d is o it -o n ,
veulent impérativement que celui qui a soustrait des effets
mobiliers, et celui qui a présenté à la vérification une
créance fausse ou supposée, soit déclaré complice de
banqueroute frauduleuse.
D on c la preuve qu’ordonneroit la C o u r, tendroit à
établir une complicité de banqueroute frauduleuse; et
cette complicité seroit la conséquence nécessaire de
l ’arrêt qui déclareroit la créance supposée, ou qui juge-
roit le créancier coupable de soustractions.
O r , comme il ne peut y avoir de complices, sans
qu’ il y ait un banqueroutier frauduleux ; comme eu
ce moment le juge d’instruction est saisi de la connoissance du prétendu d é lit, c’est anticiper sur ses fonctions*
c’est usurper les pouvoirs qui lui sont exclusivement
confiés; c’est remplir le ministère de la Cour d’assises,
que de juger civilement qu’ une créance est supposée en
tout ou en partie.
L ’emploi de ces m oyens, par les plus proches parens
du failli, annonçoit assez la pénurie; il caractérisoit les
craintes-, disons m ie u x , le désespoir d’une famille q u i,
redoutant les effets d’une preuve rendue facile par la
notoriété des faits, saisissoit avec avid ité, tout dange
reux qu’il étoit, le plus empoisonné des remèdes.
Com m ent, à celte époque, aucun des proches de Puray}
qui se donnoient tant de înouvemcns pour faire réussir
cette mauvaise chicane; comment Puray lui-m êm e, à
qui tous ces faits et toutes ces démarches éloient à peu
près personnels ; comment les conseilscommunsdc P u ra y y
de Chassaing et de la fam ille, ne pensèrent-ils pas à
�* ( 4S )
( fortifier leur moyen d’incompétence,, du fait positif que
Puray n’étoit ni marchand , ni banquier, ni failli ?
Comment préférèrent-ils de reconnoître et de publier
avant qui que ce soit, que Puray étoit en banqueroute,
et que la conséquence nécessaire , la conséquence absolu e , la conséquence terrible de l’arrêt qui ordonneroit la preuve (car ils le répétèrent cent fo is ), étoit la
condamnation de Puray comme banqueroutier fraudu
le u x ? Se fussent-ils portés à cette étrange extrém ité,
s’ils n’eussent été étourdis par la connoissance, la certi
tude personnelle que P u ray, notaire, étoit effectivement
négociant, banquier et failli ?
Quoi qu’il en soit, le moyen employé ne tendoit à
autre chose qu’à établir en principe, que le tribunal de
commerce, seul compétent pour juger de la vérification
d’une créance contestée en tout ou en p artie , n’avoit ni
mission, ni caractère, pour rejeter une créance comme
fausse ou supposée.
La C o u r, après un d élib éré, rejeta cette argutie; elle
infirma le jugement de com m erce, en ce que la preuve
avoit été admise sans préciser aucun fait; mais elle déclara
que le tribunal de commerce étoit seul compétent pour
juger non-seulement les faits de supposition de créance,
mais encore les cas de soustraction d’effets mobiliers. Les
motifs de son arrêt sont utiles à connoître.
« Attendu que la loi a confié aux tribunaux de corn
et merce la vérification des créances contre un f a i ll i
« avant d’admettre ces mêmes créances au p a ssif de la
« fa illite ;
/
�«
cc
«
«
«
C46)
« Attendu que s i , pour procéder h. cette vérification,
la loi parle de l’examen des livres-journaux du failli,
et mênie de ceux du créancier, s’il en a , elle n’a pas
entendu borner la vérification au seul examen des
liv r e s - jo u r n a u x , soit du fa illi, soit des créanciers,
mais seulement indiquer l’examen des journaux, comme
« un des moyens de parvenir à cette vérification, puisque,
« suivant l’article 509 du Gode de commerce, le tribunal
« de commerce a le droit d’ordonner et de procéder à
« des enquêtes ;
a Attendu que le but de la l o i , en ordonnant aux
« tribunaux de commerce une vérification préalable
« des créances contre un f a illi, avant d’admettre ces
« mêmes créances au passif de la faillite, a été évidem« ment de prévenir et d’empêcher toutes fraudes, soit
« de la part du fa illi, soit de la part des créanciers;
cc Attendu que le fait de simulation d’ une c ré a n ce ,
« n’est autre chose qu’une fraude pratiquée contre la
masse des créanciers ;
cc Attendu que tout fait de soustraction des effets quel« conques d’un f a i l l i , de la part d’ un créan cier, est
« encore un tort et une fraude envers la masse des créan
ce ciers , dont le tribunal de commerce est autorisé à
cc rechercher la p r e u v e , d’après cette maxime de droit :
cc
« Q ui veut la fin veut les moyens;
cc Attendu que dans le cas de simulation de créance,
« il n’existe réellement pas de créan ce, et que le titre
« qui l’établit doit être rejeté ;
'
« Attendu que dans le cas de soustraction des effets
�C 47 )
a d?uu failli, de la part d’un créancier, Je moulant des
« soustractions desdits effets doit s’imputer sur sa créance;
« Attendu enfin que le droit de vérifier une créance
« confère nécessairement celui d’en examiner et d’en re« chercher la légitimité ;
« L a C o u r , sans s’arrêter.........aux moyens d’incom« pétence proposés par la partie de B ayle...........renvoie
« la cause devant le tribunal dont est a p p e l, etc. »
U n arrêt formel a donc reconnu, et l’existence de la
faillite, et la compétence du tribunal de commerce.
L e sieur Chassaing a gardé le silence depuis cet arrêt,;
il semble avoir renoncé à la vérification de sa créance ; et
les syndics qui n’avoient d’autre but que de préserver
l ’actif du sieur Puray des atteintes de la mauvaise foi j
n’ont pas fait un pas pour arriver à une preuve qu’on re
doutait si fort dans l’ intérêt du failli.
Une autre voie fut tentée : ou proposa uu concordat;
ce m oyen, en dési nié ressaut les créanciers, pu moins
d’une manière apparente, faisoit disparoître la faillite,
et donnoit des facilités poux écarter la prévention de
banqueroute. Les créanciers s’y fussent prêtés avec em
pressement; mais après une longue méditation, deux
obstacles parurent invincibles à leur conseil, indépen
damment des conditions qu’apposoit la mère à son des
saisissement , et dont le sieur P u r a j ne parle pas.
L e premier naissoit de l’inscription du sieur A lb e r t ,
qui les auroit tous prim és, dans le cas de la déconfiture,
et que le Code de commerce anéantit, s’il y a faillite,
parce qu’elle est prise dans les dix jours qui l’ont précé-
�V v
_
(
48 )
dée. Ce m otif étoit considérable a leurs y e u x , puisque
la créance du sieur A lbert tendroit à diminuer d’un tiers
les modiques ressources que leur présente l’actif du sieur
P Liray.
L e second obstacle naissoit du juge-commissaire, à qui
l ’art. Ô2i du Code de com m erce, prescrit de s’opposer
au concordat, toutes les fois que l’exameudes actes, livres
et papiers du fa illi, donne quelque présom ption de ban
queroute simple ou frauduleuse, et q u i , dans la circons
tance surtout où une instruction criminelle avoit été
commencée, sur les présom ptions qu’avoit données l’état
de la faillite, ne se croyoit pas permis de fermer les yeux.
Pourquoi donc avancer qu’ une passion aveugle chez
les créanciers, et une prétention à la sévérité chez le
juge - commissaire , ont été l’unique principe de leur
refus ? S’il étoit possible que le sieur Puray pût distinguer
parmi ses créanciers, quelqu’un à qui il lui fût permis de
faire des reproches; s’il avoit conservé le droit d’accuser
qui que ce soit au m o n d e, au moins doit-il convenir que
le juge-commissaire et les syndics, qui certes n’ont pas
été les causes premières ni secondaires de sa faillite, ne
sont pas sortis des bornes les plus étroites de leurs de
voirs.
U n autre m otif plus grave en core, et que tout fait
assez pressentir, étoit un obstacle formel à ce qu’on ré
duisît Puray à l ’état d’une simple déconfiture.
11 a donc fallu employer d’autres moyens, et user, tout
désespéré qu’il étoit, du dernier remède qu’on croyoit
apercevoir. L e 23 juin 1 8 1 2 , une assignation écrite de
Ù
�C 49 )
la main du sieur Chassaing, a été donnée aux syndics;
Elle a pour objet de faire tom ber, par une opposition,
le jugement du 13 avril 1 8 1 1 , qui a déclaré le sieur Puray
en état de faillite ;
Elle est formée à la requête du sieurP uray, ex-notaire ;
Elle est signifiée aux sieurs......... indûment q ua
lifiés syndics à la ¿faillite supposée dudit instant. On
se souvient pour cette fois de ne pas les qualifier soim ê m e , syjidics à la fa illit e dudit P u ra y .
■
>
La cause ayant été solennellement p laid ée, l’oppo
sition a été déclarée non recevable après un examen
attentif.
O n se feroit un devoir de transcrire ici le texte du
jugement, qui est le fruit d’une méditation louable et
d’ une parfaite connoissance des lois du commerce ; mais
diverses raisons ont fait regarder comme préférable de
le détacher de la discussion.
D e même on ne sauroit se taire sur une inculpation
grave que le sieur Puray se permet envers des syndics
qui n’ont aucun reproche à se faire.
;
« On leur a voit communiqué une consultation, pour
« qu’ils n’ignorassent pas même les moyens de d r o it,
« et ils cachèrent des faits ; ils vinrent à l’audience,
« armés de registres et de pièces absolument inconnus à
« l’avocat du sieur P u ra y; celui-cif u t épouvanté de cette
« masse de preuves : il le laissa connoître avec fran« cliise......... L ’imputation n’est cependant pas faite ¿1
« l’avocat des créanciers; son confrère a la conviction
« q u 'il ne connoissoit de ces p iè ce s, que ce q u i en a
7
�5 0 }
« été lu à Vaudience; peut-être que dans ce dessein on
« nvoit affecté de ne lui remettre les pièces que fort tard. »
L es pièces, les registres desquels on lira les moyens,
appartiennent tous à la faillite Puray. Sa famille ne
pouvoit en ignorer l’existence; aucun de ses membres ne
pouvoit douter que les syndics y puiseroient des moyens;
la consultation même apprenoit qu’on les avoit connus:
ces pièces étoient à leur portée , comme à celle des syn
dics; ils ne les •demandèrent pas.
Elles furent communiquées à l’avocat des créanciers;
sa conviction fut établie par la simple inspection des
livres d’achat et reventes, et du registre de correspon
dance ; il en trouva les preuves tellement fortes, qu’il ne
jeta même pas lin regard sur les autres pièces, ni sur les
-comptes et les lettres de Morin. Il vint à l’audience avec
ces registres; il se borna à en lire quelques articles et
plusieurs lettres de P u r a y , après avoir rendu compte des
faits, notamment du commerce de kirscli.
Son confrère en fut tellement fr a p p é , qu’il se leva
spontanément pour déclarer qu’il n’avoit rien à y ré
pondre. 11 le fit avec cette franchise et cette loyauté que tout
le monde lui connoît; il parut éprouver quelque peine
d e ’ce qu’ on lui avoit dissimulé des faits aussi graves.
.M a is, ni l’avocat qui connoît les devoirs de son état
et les règles du barreau, ni les syndics eux-m êm es, ne
firent la moindre attention à ce reproche
qu’ils ne
s’attribuèrent pas.
.. .
Ge n’étoit pas e u x , en effot, qui lui avoient présenté
la cause comme une simple question de droit ; les actes
�C 51 )
de commerce, comme isolés et épars; la banque et le
change, comme une usure et un maltotage.
Ce n’étoit pas eux qui lui avoieut mis dans les mains
une consultation qui l’induisoit en erreur.
L ’avocat du sieur Puray croit avoir été abusé par des
apparences trompeuses.
Il le fut en effet, mais par ceux qui ne s’étoient éblouis
eux-mêmes qu’après avoir avoué pendant seize mois de
silence une vérité trop connue.
Les syndics se croient permis de penser qu’on l’enve
loppe encore aujourd’hui d’une illusion trompeuse, sans
autre but que de propager cette illusion par son organe
et le soutien de sa bonne foi. Ils ne blâment ni le motif
de la famille P u ra y , ni le but qu’elle se propose; mais
obligés de se défendre, ils ont dû apprendre à la Cour
et au public la vérité des faits. Sur une place de com
merce, ou même dans une ville étrangère au sieur Puray,
- ils eussent pu retrancher beaucoup de détails; les cir
constances ne le leur permettent pas : mais ils trouvent
dans ce développement la facilité de se réduire à une
discussion simple et résumée.
D e u x moyens uniques font tout le système du sieur
Puray.
1°. Il n’est ni commerçant, ni banquier.
2°. Il ne résulte aucune fin de non-recevoir du délai
• qui s’est écoulé depuis le jugement qui le déclare failli.
Ces propositions se subdivisent.
Il n’est pas banquier,
Parce qu’il étoit notaire;
7*
�( 52 )
• Parce qu’il n’a jamais: été reconnu sous ce titre ;
Parce que ses livres ne sont pas ceux d’un banquier;
Parce qu’il n’a jamais fait de banque proprement dite,
ni avec les correspondans de L yon et de P aris, sur les
quels il ne tiroit que pour le compte de M o r i n , ni chez
M o rin lu i- m ê m e , qui lui a seulement d on n é, comme
n o ta ire , un crédit dont il n’auroit pas eu besoin comme
banquier ;
Parce q u’il n’eut jamais avec A lb e rt aucune société de
commerce ou de banque ;
E n f in , parce que ses prêts et ses emprunts n’étoient
qu’un tissu d’usure prohibée par la l o i , et qui ne put
constituer la banque.
Il n’est pas commerçant,
- Parce qu’il n’a jamais fait aucun com m erce, ou que
les actes en ont été tellement isolés, qu’ils n’ont pu lui
imprimer cette qualité.
V o ilà l’analise exacte de tout ce qu’on a pu apercevoir
de moyens dans sa défense.
Quant à la fin de non - recevoir , il la repousse par
l’irrégularité dont il accuse l’exécution du jugement.
Les syndics pourroient se borner à cette fin de n o n • recevoir, qui leur suffit d’autant m ieux, que la manière
dont le sieur Puray l’a discutée, dépose de sa propre
conviction ; mais ils ne doivent pas souffrir qu’on les
accuse d’employer des moyens odieux pour soustraire
à une infirmation juste et nécessaire un jugement surpris.
Ils ne se serviront donc de la fin de non-recevoir,.
que comme la conséquence nécessaire d’une vérité de
fait, que le sieur Puray a pu et dû reconnoîtrev
�C 53 )
§. Ie1'-
L e sieur Puray est en fa illite , parce qu il étoit
commerçant.
j
Q u ’est-ce qu’un commerçant? L a réponse est écrite
dans l’article i cr. du Code de commerce.
« Sont commerçans, ceux q u i exercent des actes de
« com m erce, et en font leur profession habituelle. »
M . Locré , sur cet article, donne une explication
précieuse.
« Cette dénomination générique comprend trois sortes
« de personnes ;
« Les fabricans ;
« Les négocians et marchands ;
« Les banquiers.
«
«
«
«
«
. . . . . . . .
r . . . . . . .
............. « .................. ..
r.
..
. r . V
« La rédaction communiquée au tribunat portoit :
h e u r profession principale ,* le tribunat observa que
cotte expression pourroit engager des individus qui
concilieroient Vhabitude des fa it s de commerce avec
une profession quelconqiAe , à représenter ce lle-c i
« comme leur profession prin cip a le, afin de se sous« traire aux diverses lois particulières qu i régissent
v les négocians (1).
« Ces réflexions ont porté à substituer au mot princc cipale le mot habituelle (2). »
L a conséquence nécessaire de l’expression de la loi est
(1) Observations du tribunat.
(2) Proc. verb. du 5 mars 1807, du 8 août.
�donc qu’on peut être négociant, marchand ou banquier,
commerçant, en un m o t, quoiqu’on ait une autre pro
fession, et que cette autre profession soit la principale,
parce qu’on peut concilier avec une profession quelconque
Y habitude des actes de commerce.
D on c P u ra y, quoique notaire, a pu être commerçant.
La loi déclare le commerce incompatible avec plusieurs
fonctions ou professions. U n a vo cat, un magistrat, qui
feroient habituellement des actes de commerce, seroientils fondés h soutenir que cette incompatibilité les pré
serve d’etre marchands? Non sans doute : l’avocat encourroit sa radiation, le magistrat éprouveroit une des
titution ; mais l’un et l’autre seroient marchands , et
déclarés en état de faillite s’ils avoient cessé ou suspendu
leurs payemens.
A plus forte ra iso n , cela est-il vrai pour le notaire,
dont la profession n’est pas déclarée par la l o i , incom
patible avec le commerce.
E t à plus forte raison cela d o it-il être vrai pour le
sieur P u ra y , qui a tiré de son état de notaire le moyen
d’alimenter sa banque, au mépris de tous ses devoirs.
C’est là toute la réponse que mérite la question de droit
traitée, soit dans le m ém oire, soit dans la consultation.
E n f a it , le sieur P uray a réuni en sa personne la qua
lité de banquier et celle de marchand.
Je n’étois pas banquier, d it-il, parce que je n’en a vois
pas le titre, et que mes livres n’étoient pas des livres
de banque.
Il sem ble, à l ’entendre, que la banque est une pro
fession qui ne doit etre reconnue, qui ne peut exister
que par l’aveu de l’autorité publique.
�(
55)
Il est ,v r a i , en effet, que d’anciennes ordonnances
avoient défendu de faire la banque, sans en avoir ob
tenu la permission; « mais, dit M . M erlin , ces ordon« nances sont tombées en désuétude, et chacun peut in
et distinctement et sans p erm ission , s’établir banquier. »
A ille u rs, et après avoir parlé des fonctions fort éten
dues qu’avoient certains banquiex’s chez les Romains, il
ajoute : « L a différence du profit qu’il y a à tirer par une
« place ou par une autre, lait l’art et l ’habileté parlicuct lière des nôtres. »
A i n s i, il n’est pas vrai qu’il faille une autorisation pour
être banquier.
Mais en fa llû t-il, celui qui auroit eu l’art de s’y sous
traire, ne seroit pas moins commerçant d é f a i t , et sujet
à faire faillite, que le marchand ou négociant q ui, ven
dant et achetant publiquement, éviteroit le payement
de la patente.
Q u ’importe que ses livres soient ou non conformes
aux lois du commerce? qu’importe même qu’il en ait
tenu? Celui qui se rend coupable de contravention aux
lois, seroit-il plus favorisé que celui qui les .observe reli
gieusement ?
A u reste, en imposant an banquier .comme à tout
commerçant, l’obligation de faire .parapher ses livres, et
de les tenir régulièrement jour par jour, le Code de com
merce n’a eu d’autre but que.de déclarer, comme il le fait
immédiatement en l’art. 1 2 , que ceux de ces livres qui
auront les conditions requises, pourront f a i r e f o i entre
comm erçons.
Mais il a si peu dispensé des lois du commerce et des
�( 56)
peines de la faillite, le négociant qui n’observera pas ce9
form es, que par l’art. 58y il soumet à la peine de banque
route sim ple, celui q u i présentera des livres irréguliè
rem ent tenus.
Par l’art. 693, il déclare banqueroutier frauduleux
celui q u i a ca ch é ses livres.
E t par l’art. ^94, il permet de déclarer tel celui q u i
n ’a pas tenu de liv r e s, ou dont les livres ne présen
teront pas sa véritable situation active et passive.
Il importe donc peu que les livres produits, cons
tatent ou non des opérations habituelles de banque ;
Que le sieur Puray ait ou non soustrait ceux qui éta
blissent la multitude d’opérations de ce genre, auxquelles
il s’est livré ; opérations prouvées par les comptes courans des ban qu iers, par la correspondance , par les
treize cents lettres de change qu’on a dans les mains, et
dont on ne trouve presque aucune trace dans les regis
tres qu’il a laissés.
A u reste, ceux-là m êm e, quoi qu’on en ait dit, cons
tatent, outre leur in titulé, que les prêts et emprunts
ont presque toujours été faits et soldés en effets de com
merce échangés les uns contre les autres ; et c’est là un
véritable négoce.
P o u r nous fixer sur ce p o in t, et ne pas nous méprendre
sur les personnes que la loi considère comme banquiers,
définissons cette profession.
« Il y a , dit M . M e r lin , plusieurs sortes de banquiers :
« q u e lq u e s - u n s f o n t la banque pour leur co m p te, et
« ce sont ceux-là qu’on appelle proprement banquiers;
<f. d’autres la font pour le compte d’a u tr u i, et on leur
« donuo
�c
«
«
«
«
«
donne une-certaine rétribution, telle que 10 sous ou
5 sous sur io o francs, pour les soins qu’ils prennent
de faire payer les lettres de change'à l’échéance, et
d’en faire passer le montant dans les lieux qu’on leur
a indiqués : on appelle ceux-ci banquiers com m issionnaires.
« L a plupart de nos banquiers sont tout h la fois ban-
« quiers simples et banquiers commissionnaires, parce
« qi?ils fo n t des affaires pour leur compte particulier,
« et des commissions les uns pour les autres. »
Telles sont, dit M. L o c r é , après M . M erlin , les diffé
rentes personnes q u i ont la qualité de commerçant.
Prenons encore une autre expression de la loi : elle
déclare commerçant celui qui fait, des actes de com
merce , sa profession habituelle.
En l’art. 632 elle réputé actes de com m erce,
j
Ton te opération de' chan ge, ba n qu e, ou courtage.
Donc l’habitude de ces opérations'eonstitue à elle seule
le commerçant.
O r , qui doutera que Puray ait fait avec Vincent et
Sebault, des opérations de banque et de change?
Q u ’importe queiMorin en fût l’intermédiaire? que les
effets fussent portés à son compte? E n étoient-ils moins
tirés au profit de P u ra y ? n’en percevoit-il pas un bénéfice
personnel ? ne faisoit-il pas payer directement des som
mes à Vincent ? ne payoit-il pas Morin avec des effets
négociés? n’en re c e v o it-il pas d’autres effets? leurs
comptes courans, soutenus jusqu’en 1 8 1 1 , ont-ils d’autres
élémens? le transport d’argent de place en place, en
est-il moins le seul agent de cettè correspondance?
8
�( 53 )
M ais expliquonspourquoi il tiroit et recevoit au compte
de M orin.
L a ville de Riorn n’est pas une place de commerce; un
b an q u ier, s’il faisoit toutes ses affaires directement et
pour son compte personnel, y seroit exposé quelquefois
i\ manquer de fonds, quand on tire sur lui, ou à éprou
ver une stagnation, quand il lui arrive des sommes inat
ten d ues , p a rce que le co u ra n t d ’affaires n ’est ni assez
s u iv i, ni assez soutenu.
P o u r parer à cet inconvénient, les banquiers des villes
peu commerçantes se mettent en correspondance avec ceux
des places voisines; là ils trouvent des fonds lorsqu’ ils en
ont besoin, et ils versent immédiatement lorsqu’ils en
ont t r o p , sauf le droit réciproque de commission ou
de remise : par ce moyen ils sont sûrs de ne jamais
éprouver de perte d’intérêts. C ’est encore aujourd’hui ce
que pratique le sieur A lb e r t , comme tant d’autres : en
sont-ils moins banquiers?
E t le sieur Puray p o u rro it-il ne pas l’être, avec un
change et rechange continuel d’argent et d’effets, sous
des remises et un droit de coimnission , un transport
d’argent sur toutes les places , un papier à lui , une
v ig n e tte , u n chiffre , etc. ?
L e sieur P u ra y , à la page 36 de son m ém oire, donne
à cela une singulière explication.
« Puray avoit un chiffre et une vignette, parce qu’il
« aimoit les images............Il ne se servoit pas de papier
« timbré ; il étoit assez simple qu’il prît quelques p ré« cautions pour reconnoître plus facilement S O N p a p i e r ,
« et empêcher yiCon ne Je contrefit . »
�-
'( 59 )
Excellente ra iso n , sans d o u t e , p o u r p ro u v e r q u ’il
n ’ctoit pas ba n q u ier! C o m m en t0 donc <ét p o u r quelle
cause a voit-il s o n p a p i e r ? com m ent pouvôit-il.craindre
qu'on ne le contref it , si ce n’est parce q u ’étant banquier,
i l avoit besoin que tous les banquiers et ses correspondans le reconnussent ?
t
* C ’est sans doute aussi pour avoir quelques images de
plus, que Puray se faisoit consentir des effets' dans les-1
'quels il comprenoit des intérêts à douze et quinze pour
cent, même à des taux plus élevés, si par hasard il
prêtoit par l’intermédiaire de G ardize, ou autres cour
tiers de cette espèce.
t Q u ’im porte, au reste, que son papiër fût ou non tim
b r é ? dans le dernier cas, il cômmettoit une fraude, il
encouroit une amende ; mais il faisoit toujours un acte
de commerce.
* A u surplus, cela ne s’applique q u ’aux effets qui se rap'portent à l ’usure ; car il n’y a pas de doute que tous les
effets comnhét’cés ou tirés sur L y o n et P a r is , n’aient été
timbrés. Celui qu ’il a fait à A l b e r t , le 13 février 1808,
p o u r 55,663 fr. est tim bré; celui du sieur Chassaing, son
beau -p ère, ést tinibré; tons ceux qui sont entre les mains
des m embres de sa famille sont tîùibrôs : tous les autres
créan ciers, excepté d e u x , ont été réduits à se présenter
sans titres.
A u reste, on ne niera pas qu ’ outre son papier non
tim bré , il avoit aussi du papier tim bré à vignette? et avec
'son chiffre. Il en existe beaucoup dans les effets acquittés;
il en existe m êm e qu i n’ont pas été réiuplis ; vingt-cinq
effets en b la n c , de 1,000 francs c h a c u n , restent encore
8 *
�' ( Go )
d'une liasse plus forte, portant écrit sur la bande, et de
la main de Puray : 60 à 1,000 francs.
Pou rqu oi donc tous ces déguisemens?
Mais en nous réduisant même à cette dernière espèce
d’effets , ceux qu’on applique à l’ usure , la loi répute
encore actes de com m erce,
E n tr e toutes p erson n es, les lettres de change et re
m ises d’argent d é p la c e en place.
O r , dans l’espace de six ans, Pu ray a tiré , pour ce
seul o b jet, plus de treize cents lettres de ch a n ge, y
compris celles non encore acquittées ; il en a reçu à peu
près autant.
t
Il a donc fait deux mille six cents actes de commerce;
c’est plus d’un chaque jour : c’étoit^lonc, pour cela seul,
non-seulement une habitude, mais une habitude journa
lière des actes de com m erce.
Ces lettres de change n’étoient, dit-on , que de simples
promesses ; car elles étoient tirées de R i o m , quoique
datées de Clermont. Q u ’importeroit encore la vérité de
cette assertion ?
L e titre dépose contre celui qui l’a fait, et qui ne peut
jamais être admis à. proposer ni à prouver la simulation
qui lui est personnelle.
Si un propriétaire honnête, pour avoir fait une fois
en sa vie une lettre de change dictée par le besoin, ne
peut p as, tout favorable qu’il est, être admis à en prouver
la simulation, à moins que l’acte lui-même n’établisse la
supposition de lie u x , il est par trop audacieux de vou
loir soustraire aux lois du com m erce, celui qui prend
et qui prête par spéculation et dans la vue dûun bénéfice ?
�( 6 1 }
celui qui exerce publiquement le métier infâme d’usurier,
qui ruine le propriétaire par un commerce illicite dont il
se reconnoît Phabitude, et q ui, s’il se ruine lui-même, le
doit à des causes plus honteusçs encore. L a justice flé
c h ir a -t-e lle donc pour le favoriser? sera-t-il commer
çant pour lui seul, et cessera-t-il de l’être lorsqu’il s’agira
de l’intérêt d’autrui ? Cette proposition est insultante
pour la loi et la justice.
Il est certain que les treize cents lettres de change qui
existent, pou voient donner lieu à treize cents jugemens
de com m erce, à treize cents condamnations par corps.
Il en est de même des effets actifs qu’il recevoit d’une
m ain, pendant qu’il en faisoit de l’autre; déjà beaucoup
de jugemens ont été p r is , par les syndics, au tribunal
de com m erce, sans que personne les ait attaqués.
Observons encore que ce commerce qui exigeoit des
* relations avec A lb e r t , et des versemens de fonds réci
proques, a toujours été fait entre e u x , en se l soldant
p a r des effets respectifs , et par voie de comptes courons.
Puray n’a-t-il pas avoué partout que so u ven t, et trèssouvent, il avoit n égocié, soit au profit d’A lb e rt, soit
au profit de M o rin , des effets qui n’étoient consentis
que pour cause de prêts à usure? ne s’est-il pas plaint
quelque part qu’A lb ert vouloit toujours ch oisir dans
son p ortefeuille, et prenoit, bien entendu , ses m eil
leurs effets ? N ’est-il pas certain que s’ il y eût eu garantie
dans les signatures, ceux qu’il a laissés auroient été commercés comme les autres? Ce trafic qu’il appelle usure,
m altotage, et pour lequel il semble appeler sur lui-même
l ’application de la loi du 3 septembre 1807, ctoit dcnc un
�">VSV
(6 0
véritable négoce, soit dans son objet, soit, et plus encore,
dans ses efiets ?
,
,
• Mais si on le cumule avec les véritables opérations
-de banque, change et rechange, continuellement et lia Rituellem ent exercés, et avec les achats et reventes de
différentes marchandises, on est h concevoir comment on
a osé publier que Pu ray n’étoit pas commerçant, et affir
mer qu’on y a voit confiance.
n! '
N o n , ce n’est pas ]i>ar ignorance ou par irréflexion
que Puray a gardé le silence ; il n’a fait en cela qu’avouer
une véx’ité constante.
Ce n’est pas sans raison que sa famille s’est tue.
m La fin de non-rdcevoir proposée n’est dônc autre chose
que l ’aveu d’un fait matériel et suffisant pour décider la
cause. O r , ce fait a pu être avoué ou reconnu , sans que
*3e la fausseté du fait ou de l’aveu il pût résulter la
moindre incompétence rationè materïce. Cela nous c o n - '
duit à la seconde proposition.
i
I I.
•
•
L'opposition ri ¿toit plus recevable lorsqu'elle a etc
L a faillite est un cas d’exception pour lequel la loi a
tracé des règles particulières, et propres à ce seul cas.
A p rès avoir indiqué les premières opérations dont il
charge le tribunal de éom m erce, en cas de faillite, le
Code s’exprime ainsi en l’article 467 :
« L e jugement sera affiché, et inséré par extrait dans
« les journaux, suivant le mode établi p a r Part* 683 du
« Code de procédure.
�( 63 )
« Il sera susceptible d’opposition, savoir : pour le failli,
« dans les huit jours qui suivront celui de l’affiche. »
L ’article 683 du Gode de procédure est ainsi conçu :
« L ’extrait prescrit................ sera inséré...........................
« sur la poursuite du saisissant, dans un des journaux
« imprimés dans le lieu où siège le tribunal devant lequel
« la saisie se po u rsu it, e t , s’il n’y en a p as, dans l’un
« de ceux imprimés dans le départem ent, s’il y en a.
« Il sera justifié de cette insertion par la feuille contea nant ledit e x tr a it, avec la signature de l’imprimeur,
« légalisée par le maire, a
L ’article 684 établit un mode d’affiches; mais le Code
de commerce n’y renvoie pas, et ne punit pas de nullité
l’inobservation d’une forme qu’il n’a pas exigée.
O r , l’extrait régulièrement fait du jugem ent, a été
inséré dans le journal du 24 a vril, tel que nous l’avons
rapporté ci-dessus, page 35.
. f
,
L ’article 683 du Gode de procédure a donc été exé
cuté pleinement.
L ’opposition a donc été non recevable après le 2 mai.
Mais les agens ne s’en sont pas tenus à cette mesure.
L e jugement a été affiché par extrait à tous les lieux
indiqués par le Code de procédure : ils ont donc fait
plus que n’exigeoit la loi.
Pu ray fait à cela deux objections ; l’une, que l’extrait
n’a pas été joint au procès verbal; l’autre, que l’huissier
n’étôit pas commis.
Q u’importe d’abord que l’extrait ait ou non resté at
taché au procès verbal d’affiche? L e Code de commerce
ne l’exige pas.
�(64 )
En second lieu , le procès verbal que nous avons trans
crit page 37, contient en lui-même l’extrait du jugement;
il porte la preuve que cet extrait affiché étoit celui d’un
jugement du tribunal de com m erce , qu i déclare f a illi
P u ra y aîné, banquier et commerçant à R iom ; que
ce jugement a-été rendu le 13 avril 1 8 1 1 ; qu ’/7 a f ix é
Touverture de la fa illite au 29 mars 1811. L ’extrait
contenoit donc tout cela : que falloit-il apprendre de plus?
30. L e Code n’exige nulle p a rt, même pour la saisie
im m obilière, que l’huissier chargé d’apposer des affiches
soit commis par un jugement : il n’y a donc pas de n u l
lité dans l’apposition des ralïiches.
E n fin , le jugement a été signifié à domicile par un
huissier commis.
M a i s , dit-on , il n’y avoit pas de commission par le
ju g em e n t, et le président ne pouvoit pas remplacer le
tribunal, d o n t, à lui se u l, il n’avoit pas l’autorité.
A cela deux réponses.
L ’une, que dans tous les cas où les Jugemens ne com
mettent pas d’huissier , même pour la contrainte par
c o r p s , le Code de pi’oçédure confie au président du
tribunal le droit de donner cette commission.
L ’autre, que le mode de cette signification est inutile
'i\ exam iner, parce que ce qui l’a'suivie en réparerait le
v ic e , s’il existoit; c’est ce qui résulte des articles i 58
et i ô ç du Code de procédure.
« Si le jugement est rendu contre, une partie qui n’a
« pas d’a v o u é , Vopposition sera recevable jusqu'à Texé« cution du jugement (art. i 58 ).
« L e jugement est réputé e x é c u té , lorsque les meubles
« saisis
�( 65) "
saisis o?it été vendus. ".. . . . . où que la saisie d'un
ou plusieurs de ses immeubles a été notifiée au
condamné ..........ou enfin , lorsqu'il y a quelqu'acte
duquel il résulte ‘nécessairement que Vexécution a
été connue de la partie défaillante. »
Ici l’exécution a été légalement faite, aveô toute la
publicité imaginable.
r; '
!
«
«
«
«
«
D eu x insertions successives'sont faites au journal du
département.'
>■
'{ ' * ' '
. '
- Une affiche est apposée à tous les lieux voulus par
la loi.
‘
•
•.
D eux jugemens nomment des syndics provisoires et
définitifs.
Trois exploits successifs, donnés en exécution du ju
gement, sont signifiés au sieur P u ra y, et l’appellent à
l ’inventaire, ou devant le tribunal de commerce, ou à
des assemblées de créanciers,
t
Des affiches apposées à Riom et à Clermont, annoncent
la vente du mobilier.
(
Cette vente se fait à l’enchère; elle est consommée dans
la maison même du sieur Puray.
»■
Sa femme signifie'des actes'par lesquels elle réclame
certains objets mobiliers nécessaires au f a i ll i et à sa
fa m ille ; et c e , en vertu de Varticle 5 zg du Code de
commerce : son père et le sieur Puray jeune, frèi’e du
failli, y participent.
:
Partout, même dans ces actes , Puray aîné est qualifié
banquier et commerçant f a i l l i , par le tribunal, par
les syndics, par sa famille même.
9
»
�. < 66 )
■Un jugement du-tribunal pivil permet dp vendre les
immeubles.
'
.
Cette vente est poursuivie judiciairement; les affiches
eont apposées, et la poursuite o?est interrompue que
par les circonstances,
'
■
L a yérification des créances se dait ; Puray y 'e s t ap
p e lé; il n’y comparoît pas.
.
i
U ne contestation s’élève sur la créance du sieur Chassaing, beau-père du fa illi; elle est portée eu la C o n r;
elle y est solennellement discutée^ .pendant ' deux au
diences; elle y est jugée en état de f a illit e ; la. Cour
la renvoie devant le tribun al de com m erce, pour y être
jugée au fond.
•
.
E t il pourroit ne pas exister de faillite!;/ ?
E t le tribunal de commerce ne serait pa& compétent !
Ce n’est qu’après tout cela ,-et au moment où on voit
de plus près le danger d’une preuve testimoniale, en
matière c iv ile , qu’on se précipite dans l’antre d e là chi
cane , et qu’on en retire le plus tardif et le plus dé
sespéré des moyens»
i . .1
E t l’exécution du jugement ne seroit pas suffisante, lors
que la loi n’exige qu’ une simple insertion au journal !
E t il manqueroit quelque chose .à la publicité de cette
exécution depuis si long-temps consommée ! •
Et cette exécution si éclatante, seule chose q u e désire
la lo i, ne seroit plus connue du failli, parce que l’huis
sier qui a signifié le jugement n’auroit été commis q u e
par le président et non par le tribumil!
Que toutes ces subtilités disparoissent devant la di-
�C 67)
gnité de la loi ! L e sieur Puray a connu légalement et
de fa it, la déclaration de faillite et l’exécution du ju
gement.
Les mesures commandées par la lo i, en cas de faillite,
la détention, par exem ple, sont de véritables disposi
tions pénales ; et, en cette m atière, celui qui y est con
damné ne peut en faire cesser l’effet que1lorsqu’il se re
présente.
'
A u s s i , diiTcrens articles du Code de com m erce veu
lent que le failli qui ne comparoîtra pas, soit réputé
s être absenté à dessein.
Ét on voudroit que, sans com paroître, il fût admis
à former opposition!
^Mais, dit-il enfin, je ne suis pas commerçant; donc
tout cela ne peut me concerner; donc il y a incompé
tence rotione m ateriœ ,* donc il ne peut y avoir de délai
fatal.
1
1
Ce raisonnement n’est qu’ un abus du sophisme,
lie tribunal de commerce est seul essentiellement com
pétent pour gouverner une faillite et en régler les effets;
lui se u l, avaut to u t, a le droit de déclarer qu’elle existe,
et d’en fixer l’ouverture.
>
Ainsi il étoit, dans l’espèce, essentiellement compétent
pour la matière dont il a été saisi.
A la vérité , l’existence de la faillite étoit subordonnée
à la réalité d’un fait, celui que Puray étoit commerçant.
Mais le tribunal de commerce étoit tout aussi com
pétent pour décider ce fait que pour juger la faillite
elle-même; la partie pouvoit le reconnoître devant lui
9* •
�(68)
par un aveu ! positif; elle pouvoif le "nier, et alors le
tribunal en devenoit le juge ;'e lle pouvôit : enfin le. reconnoître tout aussi-bien par son silence en n’attaquant pas le jugement qui lie’ décide, que par -un ¡aveu formel
et positif, consigné au jugement lui-même. Cejfait une
fo is 'iix é , tout est jugé, quant à la compétence^'r, .
j
C ’est'ce que-décida la seconde chambre de la C o u r,
dans l’affiiire de la femme Geneste.
r
C ’est ce qu’a jugé la Cour déjeassation, par un arrêt
cité dans les motifs du (jugement dout est appel»
.j *ï
L ’opposition étoit donc non recevable.,v
, L e sieur Puray semble le reco n n ô îtré;'il interjette
appel de ce premier jugem ent, et fait de grands .efforts
pour établir que l’appel seroit recevablei, quand;.bien
m êm e-l’opposition ne le seroit pas..
<).■
h i
] Les syndics et leur co n seil'd oiven t l’avouer ; \ils ne
peuvent découvrir de réponse à un moyen inintelli
gible pour eux. Ils lisent dans i’avticlc 443 du Code.de
procédure :
.
■
'
- a ; L e délai pour interjeter appel sera de trois mois.
« .Il „courra. . . , . ... pour les jugernens par défa ut’r
« du jo u r où Popposition ne sera^plus recevahle. » .
Et ils attendent que le sieur Puray trouve dans le’
Code , ou partout ailleurs, un .cas où les tribunaux doi
vent admettre un appel plus de trois mois après le jour
où l’opposition est devenue non jrecevable par suite de
l ’exécution du
j u g e m e n t l o r s q u e surtout elle a été
précédée d’une signification à domicile.
Convaincu de ccs vérités qui l’accablent, le sieur Puray
�(¿9 )
Semble réclam er et attendre la faveur de la justice com m e
son unique et dernier soutien : il n’est pas jusqu’aux
circonstances qui ont accompagné sa fu ite , qui ne lui
semblent un titre p o u r l ’exiger.
« Ses registres font foi qu’à cette époque Puray n’avoit
«
«
«
«
point d’argent à sa disposition; et, dans la réalité, ses
parens les plus proches, aidés de leurs amis, réunirent
leurs bourses pour lui fournir les fonds nécessaires à
son voyage. »
Ses registres f o n t J b i : cette proposition est un peu
hardie dans la bouche même de Puray.
I l rt avoit point chargent à sa dispositiofi.
Mais à chaque jour du mois de mars il avoit reçu des
sommes plus ou moins considérables.
L e 1 8 , il avoit emprunté 1,000 francs à Morin.
L e 22, il avoit reçu 614 francs pour le montant d’un
effet que la fille Solagnier lui avoit confié. Il lui a ravi
cette somme , qu’elle destinoit au soulagement de son
,père, depuis long-temps privé de la vue.
Ces sommes et quelques autres pourroient, à la vérité,
avoir été employées à quelques payemens ou à quelques
dépenses personnelles; mais cet usage ne seroit pas moins
un coupable abus de confiance.
Depuis le 9 février jusqu’au 5 mars, il avoit reçu
4,021 francs 85 centimes du receveur général', pour
des pensions d’ecclésiastiques ou de religieuses pauvres;
il n’en a payé que 2,936 francs z5 centimes, et retenu
i , o 85 francs 60 centimes.
Les 18 février et 6 m ars, il reçut 3,070 francs po u r
�>>\\
(
T
le compte du sieur M ilanges, prêtre. Cette somme étoit
destinée au sieur Rottgier, de L a y a t, qui la prenoit en
viager. Puray commença par lai faire signer l’acte portant
quittance; il lui remit ensuite î,o o o fr. sur les 3,070 fr. ;
prétendant n’avoir encore l'eçu que cela du sieur Milanges;
encore n’oublia-t-il pas de se retenir 103 francs pour le
coût de l’acte, ce qui réduisit le payement à 897 francs.
Il am usa R o u g ie r jo u r p a r j o u r , ju sq u ’au 28 m a rs, et
lui emporta 2,173 francs.
Puray avoit fait un liv r e ; il avoit chargé un im pri
m eur de tous les frais d’im pression, sans lui donner un
sou. V oulan t user de toutes ses ressources, il en vendit
soixante-treize exemplaires à la chambre des notaires de
l ’arrondissement; il se fit p a ye r, le 16 m a r s, 328 francs
5o centim es, pour le prix de ces soixante-treize exem
plaires f et laissa à l’im primeur le soin de les livrer.
T a b a rd in , tanneur à R i o m , avoit uu effet de 600 fr.
sur la Charité ; il le porte à Puray le 24 ou 25 m ars,
et le prie de faire rentrer les fonds. V o lo n tiers, lui dit
P u ra y; j’ai une excellente occasion. Il le garde, et, le 28,
va le percevoir lu i- m ê m e à la C h a rité ; toujours pour
aider à son voyage.
L es exemples de ce genre feroient un v o lu m e , et ils
peuvent aller de pair avec les faits d’usure habituelle,
o u , pour parler comme la l o i , les fails d’escroquerie
que le sieur P u ray accumule sur sa tête à toutes les
pages de son mémoire.
Enfin , il puisa dans la bourse de ses proches et de
h u r s am is.
�(
7
0
Cela peut être : eh ! où nç p ren oit-il pas? il aurait
puisé dans un tronc. Mais ce fut peut-être aussi un stra
tagème, pour persuader dès-lors de sa bonne f o i , et ses
proches, et leurs amis, et Fume généreuse dont il comp
tait bientôt se faire un avocat.
Les intimés se reprochent, en quelque sorte, la Iongeur des détails dans lesquels ils sont entrés ; mais pour
quoi les y a-t-on obligée? pourquoi, par des contestations
sans cesse renouvelées, s’eilovce-t-on de leur ravir, ou
de faire absorber en frais Je peu de ressources qui leur
paroissoient offertes? pourquoi, non contens de retenir
ce qui est à e u x , a-t-on attaqué et leurs intentions et
leur conduite ? Ils avoient désiré qu’on ne les obligeât
pas à ces éclaircissemens ; ils avoient témoigné ce désir,
dans l’intime conviction que P u r a y , en les forçant à
im p rim er, prenoit de tous les partis celui qui pouvoit
le plus lui devenir funeste : se sont-ils fait illusion ? L a
Cour en décidera. Mais les syndics voient avec douleur
que malgré tous leurs efforts pour conserver à la masse
des créanciers le modique actif qui reste, l’obstination
d’un débiteur de mauvaise foi en fera consumer jusqu’à
la dernière obole; et que les créanciers, courant après
un gage qui sembloit ne pouvoir leur échapper, ne
saisiront qu’ une chim ère, et n’auront eu q u ’un instant
d’illusion.
Que la famille Puray ne s’offense pas; les syndics ont
eu pour elle tous les égards qu’ils lui devoient. Ils eussent
désiré pouvoir les porter plus loin encore, en passant
bien des faits sous silence; mais chargés par la justice
�-
%V‘
de l’intérêt d’une foule de familles, ils ont dû les dé
fendre par les moyens légitimes qu’ils avoient dans les
mains. Des faits, et toujours des fa its, ont été leurs
uniques armes. Ce n’est pas à eux qu’il faut rep roch er,
*
ni la gravité qui les accompagne, ni la publicité qu’on
y a donnée.
Signé F A U C O N , G O S S E T , L A M A D O N , syndics.
M e. V I S S A C , avocat.
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M e. H U G E T ,
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avoué licencié.
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/. V,.A.u
^
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is ,
A R IO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, ct libraire,;
rue des Taules, maison La n d rio t. —
Mars 1813.
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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A name given to the resource
[Factum. Syndics d'Amable-Pascal Puray. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Huguet
Subject
The topic of the resource
notaires
banqueroute
fraudes
spéculation
banquiers
usure
créanciers
exil
fuite à l'étranger
créances
livres de comptes
commerce
banques
commerce
vin
troubles publics
scellées
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour les syndics définitifs à la faillite d'Amable-Pascal Puray, intimés ; contre ledit sieur Puray, commerçant, failli, appelant ; en présence des sieurs Guémy, Versepuy et autres, intimés.
note manuscrite : arrêt du 19 mars 1813.
Table Godemel : acte de commerce : quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ? Faillite : 1. l’opposition au jugement qui déclare un individu en état de faillite doit être formé dans le délai prescrit par l’article 457 du code de commerce, et non dans ceux déterminés par les articles 156, 158 et 159 du code de procédure civile.
2. en matière de faillite, l’affiche et l’insertion de l’extrait du jugement dans le journal du département faites en conformité de l’article 683 du code de procédure, valent signification au failli.
3. la fin de non-recevoir, résultant de ce que l’opposition au jugement qui déclare la faillite n’a pas été formée dans le délai, s’applique à l’appel interjeté dans ce même jugement. Notaire : 3. l’individu qui exerce la profession de notaire peut être réputé commerçant.
Quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 4-1813
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
72 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2223
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
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1
M E M O I R E
S I G N I F I É
P O U R Me. J e a n - L é o n a r d R E I G N A C ,
Avocat en Parlement, Confeiller du R o i ,
Receveur des Confignatio n s aux Sieges de la
V ille de Tulle , Demandeur.'
C O N T R E Sieur J u l i e n A L A T E R R E ,
Adjudicataire Général des Fermes Unies de
France Défendeur.
,
E
J pourfuis la fixation des dommages intérêts
que la Cour m’a accordés contre le Ferm ier,
pour raifon de la vexation exercée contre
moi par certains de fes G a rd es, à qui j’ai déplu en ne ju g e an t, ou ne concluant pas fuivant leurs defirs dans différentes affaires dans lefquelles
ils étoient accufés en l’E le tci o n de T u lle , de prévari
cation dans leurs exercices, & ou j ai fait les fonctions de
Ju g e ou de Procureur du R o i. J ’ofe me flatter que l'e xpofé de cette vexation & . des préjudices quelle m’a caufés s détermineront la C o u r a m adjuger un dédomma
gement confidérable.
�w*.
1
F
A
I T
:
Plufieurs Em ployés de la Ferme , & en particulier ceux
de la Brigade d’Eym outier en Limoufin , ayant les an
nées dernieres vexé les Citoyens , & même infulté aux
Juges des droits du R o i de la maniéré la plus criante,
il fut rendu diverfes ( plaintes contr’eux en l ’Ele& ion de
T u lle . J ’ai été quelquefois invité à remplacer dans les
inftruttions de ces affaires , ou des Juges , ou le Subrtitut
de M . le Procureur Général. J ’ai eu le défagrémertt de
ne pas trouver les accufés innocents , & j’ai eu la fer
meté de Ju g e r ou de conclure fuivant les fentiments de
mon honneur & de ma confcience.
Dans une de ces accufations contre Pierre G o ilo u 3
Capitaine G é n é r a l , fur laquelle il avoit été décrété d’a
journement p erfo nn el, j’ai donné des c o n c lu fio n s , le 3 1
O ftobre 1 7 7 1 * qui n’ont pas été de fon g o û t; j ’ai été
menacé de la vengeance de ce Capitaine Général , & il
n ’a pas tardé de chercher à m’en faire reffentir les effets.
L ’après dîner du z Ju in de l ’année derniere , jour de
la foire de faint C l a i r , la principale de la V ille de T u l
le , je fus interrompu dans le travail de mon Cabinet
par des clameurs de la rue : j’entends crier à l’affaifin.
, U n premier mouvement d’humanité me fait courir en
.robe de chambre au tumulte s afin de l’appaifer.
J e vois qu’une troupe de gens armés & très-mal mis ,
maltraitoit la femme du fieur la C h a ife , m arch and , mon
voifin , au milieu de fa boutique & à la vue des paffants
de la foire. J e me crois autorifé à dem ander.à ces g e n s ,
qui n’avoient aucune marque diftin&ive , le fujet de leurs
mauvais traitements. Pierre G o ilou , l’un d ’eux , me ré
pond q u ’il eft Capitaine Général des F e rm e s , q u ’en cette
q ualité, il a tous les droits poffibles.
J e repréfente poliment à ce Capitaine que fes droits
ne vont pas jufqu’à excéder de coups la femme d ’un
honnête domicilié , & à mettre le défordre dans fon
commerce un jour de foire j que s’il a quelque recher
�3
che à faire clans la maifon du fieur la Chaife il doit y
procéder avec m odération, & fe rendre à la demande
que lui faifoit ce Marchand de pofter des Gardes à cha
cun des appartements de fa maifon , & de fouflrir c u ’on
allât appeller des témoins ou un Ju g e de l ’EIe&ion , pour
être préfents aux perquifitions.
G oilo u répliqué q u ’il f e F . de la Juftice de T u l l e ; con
tinue fa vifite fans aucun o b ftacle, tandis que les aififtants
s ’occupent à foulager la dame la C h a ife , accablée par les
coups redoublés des Gardes. C eux-ci fe retirent enragés
de n’avoir rien trouvé en fraude chez le fieur la C h a i f e ,
proférant des injures, faifant des menaces & laiiTant l’ef
froi dans lam e de tous les fpe&ateurs.
Les fieur & dame la Chaiie fe hâtent de donner leur
plainte à l ’Ele& ion des excès commis cÆntreux par les
“Em ployés.
Juftement effrayés de cette démarche des fieur &
dame la Çhaife & des fuites de leur crime , les Gardes pro
jettent de les empêcher d ’avoir juftice. Ils tentent d’ar
rêter leur procédure par la fignification d’un procès
verbal de prétendue rébellion qu’ils leur font fignifier dans la foirée du lendemain 3 J u i n , & qu’ils ont la
criminelle précaution de dater de la veille de la fignifïcation.
Ces Em ployés ne m’ont pas notifié ce procès-verbal,
mais ils ont voulu me mettre pour quelque chofe dans
la rébellion qu’ils imputent aux fieur & dame la Chaife.
Ils ont inféré fur mon compte dans cette piece inique
ces faufles énonciations : & dans l'injîant lefieur Reignac,
A v o c a t , qui fa ifo it ci - devant les fonctions de Procureur
du R o i dans une affaire que moi Capitaine Général fo u fi
fg n é avois en ¿’Election de Tulle avec deux de mes Em
ployés ; lequel nous auroit couverts d'injures & de menaces,
faifant des efforts pourfe jetterfuf nous^ & nous maltraiter r
ce qu'il auroit fa it dans la colere oie i l étoit , s 'il n'en avois
été empêché par une Dame à nous inconnue , qui Je jetta à
'fon cou pour l'empêcher d'effectuerf i s menaces ù f i s démonftrations ; & le fieur Reignac crioit toujours de le laiffer
�^
4
aller , difan t audit (leur la Chaife q u l l a v o lt tout le tort
poffible d 'a voir la iffé entrer des Coquins & de la, Canaille
che% lu i ; qu i l auroit dû crier aux Voleurs & au F eu ,
& nous auroit d i t , toujours en nous infultant 3 que nous
. n a vion s aucun d roit d'entrer dans les m aifons , fa n s être
affiflés d u n J u g e ; que les D écrets m ultipliés qui a voien t
été décernés contre nous , dont i l a v o it f e r v i de J u g e plufîeurs
f o i s , & les différents p rocès verbaux annullés en l'E lection
de T ulle , d évoien t nous intim ider &nous fa ir e rentrer en nousmêmes ; que nous ri étions que des D rôles & de la C anaille.
L a C o u r fera bientôt convaincue que les propos que ces
'Gardes me prêtent ne font que trop v r a is , mais que je ne
me fuis pas permis de les leur tenir.
Cependant les fie u r& d a m e la Chaife ont prefîe leur in
formation. L a femme ayant fouffert une perte coniidérable
& d’autres maux dangereux, il y a eu un rapport en Chirur
gie , qui porte que ces accidents lui ont été occaiîonnés par
les mauvais traitements que lui ont faits eifuyer les G a rd e s,
contre lefquels il a été décerné un Décret d’ajournement
'perfonnel le 8 J u i n , qui leur a été fignifié le 1 4 .
Jufques-là les E m p lo y é s, qui n’avoient fait le procès
verbal de rehellion que pour épouvanter & l’oppofer en
cas de b efo iiij ie font bien gardés d’en faire le moindre
ufage ; mais à la vue d’un Décret émané des véritables
Juges de la matière, auxquels ils n’ont pas voulu obéir ,
ils m’ont fait décréter par le Subdélégué de Lu berfat, de
la Commiiîïon de Valence , d’afligné pour être o u i , & les
fieur & dame la Chaife d’ajournement perfonnel.
C e Décret qui eft du 23 juin , & qui ne vife aucunes
ch arges, m’a étéfigniilé le 2 J u ille t , à la requête de M r.
M e. de Beaune, Subftitut de M . le P rocureur G énéraldu Conf e i l de Valence : il porte dans fon intitulé que cette C o m miilion efl établie p ou r ju g e r fou vera in em en t de toutes les
fra u d es fa ite s aux droits des F erm es , & des rebellions &
v o ies de fa its ex ercées envers les E m ployés d'icelles. Il y
efl: dit que je fuis a ccu fé d 'a voir ex cédé les E m ployés des
Fermes dans leurs fo n ctio n s , & que j e fe r a i in terrogé fu r •
les fa it s réfultants des charges qui fo n t dans le Greffe de
�ï
t jp Z y
la S ubdélégation & a u tres , fu r ¿efquels le Subflitut d e M .
le P rocureu r G énéral dudit C onfeil requérera mefa ir e en
tendre.
Satisfaire à ce D é c re t, c ’eût été renoncer aux droits
de mon état, à ceux d’un Français dom icilié, & même
à ceux de l’innocence. Je favois que la C o u r des Aides
réprimoit les ufurpations que faifoit fur Ton autorité là
Commiifion Fifcale de V a le n c e , & accordoit fa protec
tion aux fidèles Sujets du R o i que les Gardes du Fer
mier traduifoient mal à propos à ce Tribunal de la Ferme.
J ’entendois publier de tous côtés que la C o u r du Confeil*
Supérieur remplaçoit la C o u r des A id es, à la fatisfaclioa
du Souverain & du Public. J ’ai réclamé la juftice de Paugufte C o m p a g n ie , fous l’empire de laquelle le Limoufin
fe félicite de fe trouver dans la partie des Impôts. Elle m’a
tendu une main fecourable. Par Arrêt du 7 Juillet j’ai
été réçu appellant du Décret comme de Ju g e incompé
tent : il m ’a été permis.d?intimer Je Fermier. J e dois parler
d ’un autre Arrêt obtenu le même jour par les fieur &
dame la C h a ife , qui porte les mêmes difpofitions fur le
Décret d’ajournement perfonnel contr’eux décerné à Lu berfat: il ordonne que les charges de leur plainte en l’E ledion de Tulle , & celles fur lefquelles font intervenus
• les Décrets de Luberfat- feront apportés au Greffe de la
C o u r.
#
L e Greffier de l’Ele&ion a obéi. Celui de la Subdé
légation de Luberfat ne reconnoît d’autres Supérieurs que
le Fermier : il ne lui a point ordonné de fatisfaire à
TArrêt de la C o u r : il l’a méprifé.
L e trois Septembre , la C o u r * fur le vu des charges de
la plainte des fieur & dame la Chaife en l’E le â io n de
T u l l e , a rendu un Arrêt par d éfau t, faute de plaider
contre FAdjudicataire , qui déclare nuls , incom pétam m ent
rendus & vex atoires les décrets de f o i t o u i , d'ajournem ent
p erfo n n el , décernés p a r le S ubdélégué de la Commifjion de
Valence à Luberfat contre lesfieu r & dame la Chaife &m oi ;
condam ne CA djudicataire en nos dom m ages intérêts à don
ner p a r déclaration , & or donne que la procédure extraor -
�o
•
6
dinalre , commencée en VElection , fera continuée jufqu’à
Sentence définitive inclufivement, f a u f Vappel en la Cour.
D ans Ton oppofitioti à cet A r r ê t , le Fermier demanda
la nullité de la procédure, fur le prétexte que les fieur
& dame Lachaife & moi avions afligné le Fermier au
domicile de Ton Agent près la C o u r , & non à l’Hôtel
des Fermes à Paris.
L a caufe revenue à l’Audience du 2 1 du même mois
de Septem bre, le défenfeur de la Ferme fe borna au
foutien de cette nullité , & refufa de plaider fur le fond
de l’appel. O n lui offrit la continuation
la remife de
la caule pour lui d o n n e r, s’il en avoit befoin , le temps
de s’expliquer au fond. Il déclara que toutes réflexions
lui étoient interdites là-deifus. L a Cour , Jans s arrêter à la
demande en nullité du Fermier , la déboute de Jon oppofition
à rArrêt du 3 ; en conféquence a ordonné qu'il fera exé
cuté felon f i forme & teneur.
D ans le temps que le Fermier feignoit de reconnoitre
la Ju rifd iâ io n de la C o u r , en y propofant des moyens
de nullité contre ma procédure & celle des fieur & da
me la C h aife, il travailloit à avoir au Confeil de Sa M a jefté
Arrêt de caiïation de celui de la C o u r du 7 Ju il
le t , & des défenfes de connoîtrq de l’affaire dont il eft
queftion.
M algré- les artifices ,• les fauiTetés & les couleurs trompeufes d’intérêt public employés par le Fermier dans farequête au C o n f e i l , il n’a pu obtenir l’Arrêt de caifation
dont cette requête contient la demande , mais il a été
affez heureux- pour furprendre la religion de Meilleurs
du C o n f e il , jufqu’à en faire rendre un.le 8 du même mois
de Septem bre, qui ordonne que les charges > informations
& autres procédures faites pour raifon du fa it dont i l s ’a~
g it , circonflances & dépendances , tant en VElection de
Tu 11} , au Confeil Supérieur de Clermont - Farrand qu'en
la Subdélégation de la Commifjion de Valence à Luberfat ,
feront inceffamment envoyées au Greffe du Conjeil, par le
tout vu & rapporté à f a Majeflé , être par elle Jlatué ainfi
qu i l appartiendra i & cependant par provifion que l'inÇ-
�truclion com m encée de rau torité de la CommiJJîon de F a
ïen ce fe r a continuée ju fq u a u Ju gem en t d éfin itif ex cluftvem ent.
" C e t Arrêt ne m’a été figniiîé que le 15 O ft o b r e , poftérieurement à la taxe & au paiement des dépens qui me
iont adjuges”par l ’Arrêt de la C o u r du 2 1 Septembre.
L ’Arrêt du Conieil du S Septembre ne caflant point
ceux de la C o u r des 7 Juillet & 3 Septembre , encore
moins celui du 21 du même mois ,q u i n’étoit pas encore
rendu , ne faifant point de défenfes à la C o u r de connoître des fuites de Paffaire , j’ai pris le parti d’y former oppoiition par un fimple a£te fur les lieux & par requête t par
Je miniftere d’un A v o ca t aux C o n fe ils , & de pourfuivre
le Règlement des dommages intérêts que la C o u r m’a
accordés.
Q uoique je lois pénétré de refpea & de foum ifîïon,
comme tout bon & fidele fujet doit l’être pour tout ce
qui émane du Confeil de Sa Majefté , cependant je n’ai pas
liéiîté à refufer d o b éir au décret de la Subdélé Ration de la
COUR S ouveraine de Valence t établie à L ubetfat , ainfi
que j’en ai été fommé par l’a&e de fignifîcation de l’Arrêt
du Confeil „ parce que cet Arrêt n'étant intervenu que
fur la requête non communiquée du Ferm ier, & ne por
tant pas qu’il feroit exécuté nonobftant oppofition , celle
que j’ai formée devoit arrêter de plein droit fon exécu
tion ; & parce qu’en obéiffant a ce décret je perdois m on
r e p o s , mon état & mon honneur.
M O Y E N S
.
Dans la taxe de mes dommages intérêts , la C o u r vou
dra bien avoir égard , 1 ° . à l’incompétence du Juge qui
m’a décrété. 20. A l’injuftice du décret. 3 0. A l’atteinte
que ce décret a porté à mon honneur & à mon repos 9
* & au préjudice qu’il m a caufé dans ma 'fortune.
P reu ve de Vincompétence de la CommiJJîon de V alence ,
L ’incompétence d’un ju g e dans une affaire ordinaire,
�..
.
g
ne préfente pas un moyen; de dommages intérêts en fa
veur de celui qui attaque le jugement incompétamment
rendu : mais dans l’efpece où l’on traduit par un décret
un Citoyen connu & d’un état honorable , devant un
Ju g e , qui tel que celui de la Commiflion de V a le n
c e , ne peut juger que des fraudeurs, errants & va g ab o n d s,
armés avec attrçupements , fuivis de meurtres & d’ém o
tions populaires, de forcement des poftesdes E m p lo y é s ,
ou enlevement des objets en fra u d e , quel dédommage
ment ne doit pas obtenir ce Citoyen vexé ? c ’eft la poiition où je me trouve.
Po u r manifefter combien le décret de la Com m iffion de Valence eft incompétamment prononcé &
m’eft injurieux', il eft à propos que j’expofe la nature
de cette Commiflion , fk les affaires dont elle peut
feulement connoître , fuivant les Arrêts du Confeil >
portant fon établiffement ou fa confirmation.
O n fait affez communément que cette Commiflion fut
créée en 1 7 3 3 , qu’elle eft compofée d’un feul Ju g e & d ’un
Procureur du R o i . O n apprend par l’affiche de fes juge
ments qu’elle a été confirmée par un Arrêt du Confeil
du 9 Juillet 17 6 6 , & que fon Reffort comprend les Pro*
vinces d e D a u p h in é , L y o n n o i s , B o u rg o g n e , Auvergne,.
Limoufin , P r o v e n c e , Languedoc , R ouergu e , Q u erci
& Rouflillon.
M ais comme les Titres qui ont établi ou confirmé
cette Commiflion n’ont été enrégiftrés nulle p a rt, q u ’ils
n’ont point été publiés ni im prim és, il eft peu de perfonnes quipuiflent être inftruites des cas dont cette C o m m it
fion doit avoir la connoiffance.
Il ne faut pas s’en rapporter fur la jurifdiftion de ce
T r ib u n a l, aux énonciations des décrets qu’elle décerne y
où l’on voit quelle fe déclare établie p ou r ju g e r fo u v era i-
nem ent de toutes les fra u d es fa ite s aux droits des F erm es .
A u travers
les bornas
Par des
N ovem bre
des nuages dont il s ’enveloppe , j ’ai découvert
de fon autorité.
Lettres patentes des 3 Septembre 1 7 6 4 8c n
17 6 5 , duement enregiftrées en la C o u r des
Aides
�9
Aides de Paris & au Parlement de M e t z , Sa Majefté avoit
rendu légales les Commiifions de Saumur & de Rheims ;
celle de Valence eft à l ’inftar de ces deux là. L ’Arrêt du
Confeil du 9 Juillet 1 7 6 6 , vifé dans les jugements de
la deiniere, doit être conforme aux Lettres patentes con
cernant les deux premieres.
Les expreifions du préambule de ces Lettres patentes qui
en développent l’efprit 3 & les difpoiitions des articles de
ces L o ix concourent à démontrer que je ne fuis point J u s
ticiable de la Commiffion de V a le n c e , même d’après la
teneur du procès verbal du 2 Juin .
V o ici comment s’explique le Souverain dans le préam
bule : L a multiplicité des Contrebandes qui fe font fu r les
frontières de notre Royaum e, nous a paru un objet d ’au
tant plus digne de notre attention ,\aue non feu lem en t les
Fermiers de nos droits , mais encore les Fabricants & Com
merçants en fouffrent un préjudice confidérable ; nous avons
été informés d'ailleurs que la vie errante & vagabonde à
laquelle plufieurs Habitants des frontières font invités par
l'attrait de la frau de , leur fa it contracter trop fouvent la trop
malheureufe habitude du crime & de la violence ; c’efl à
quoi nous avons voulu pourvoir en prononçant contre les
Contrebandiers les peines les plus Jévéres ; cependant les ex
cès commis depuis quelques années nous ont fa it connoître
la nécefjité de recourir à des remcdes extraordinaires 3 &
parmi les différents moyens qui nous ont été propofés , nous
avons employé par préférence celui qui a été employé plufieurs fo is en femblables occafions par les Rois nos prédeceffeurs, comme le plus propre à remplir la double vue que
nous nous propofons de réunir dans un feu l & même Tri
bunal un grand nombre de procès connexes entreux , & d ’y
faire juger définitivement & Jdns appel ceux q u i, par leur
nature & fuivant les L o ix de notre Royaume , feroient fufceptibles d ’être jugés prévôtalement ; en conféquence nous
nous fommes déterminés à envoyer dans l'une des Pro
vinces de notre Royaume , où la contrebandefe commet avec
plus de licence , des Commiffaires choitfis dans notre Cour
des Aides , à l’effet de juger fu r les lieux mêmes leflits
�Contrebandiers & Faux-fauniers , faifants la fraude a force
ouverte , & autres qui feront fpécifiés dans ces préfentes
Lettres , &c.
Les articles 3 , 4 , 5 & 6 des Lettres patentes pour
S au m u r, qui font les 5 , 6 , 7 & 8 de celles pour Rheims
règlent les pêrfonnes étrangères, à la Ferme , & les cas
:que peuvent juger ces Commiflions. Il paroît à propos de
rapporter ces articles-e.n entier.
Voulons que lefdits Commiffaires connoiffent de tous les
faits d'introduction de Marcfiandifes de contrebande ,
fa u x S e l , fa u x Tabac & de tous les attroupements, vio
lences , rebellions , féditions occasionnées par lejdites con
trebandes.
Ladite CommiJJîon connoîtra en dernier reffort des accufations de contrebande formées contre des Vagabonds, gens
fans aveu , où qui auroient été ci-devant condamnés à pei
ne corporelle , banniffement ou amende honorable.
E lle connoîtra pareillement en dernier reffort des contrebandes avec attroupement & violence publique , accompag
nées de meurtres, excès , (éditions & émotions populaires ,
fo it que les accufés foient de la qualité portée dans Varticle
4 , foit quils tien foient pas , à l'exception néanmoins de ceux
qui feront defignés ci-après ; & feront réputés lefdits Contre
bandiers être dans le cas de l'attroupement, s’ils ont commis
la contrebande au nombre de trois ou au deffus avec armes ,
fans titre ni permifjion , ou de cinq hommes ou au defjus ,
même fans armes ; feront pareillement réputés être dans le
cas de la violence publique, quand ils feroient en moin
dre nombre , s’ils ont attaqué les Employés , Commis
& Gardes des Fermes , ainfi que dans les cas de force
ment de pofles , recoujfes de Prifonniers & de reprifes vio
lentes , fpoliation & enlevement de Marchandifes , fa u x
Sel & faux Tabac faifis par les Employés.
Les Receleurs & Complices des Contrebandiers, dont le
procès fera jugé en dernier reffort par ladite CommiJJîon, y
feront pareillement jugés en dernier reffort.
Ne fa u t - il pas que le Fermier foit animé contre
înoi de la même paillon que fes Gardes pour foutenir
�11
que je fuis juiliciable de la Commifiion de V a le n c e ?
Suivant le procès verbal lui même , je ne fuis dans
aucune des claffes des perfonnes ni dans aucun des
cas fpécifiés par le préambule & les articles des Let
tres patentes que je viens de mettre fous les yeu x de la
C o u r.
J e fuis accufé par ce procès verbal d’avoir cou vert
les Gardes d'injures & de m enaces (lorfq u’ils excédoient
de coups la dame la Chaife ) fa ifa n t des efforts p o u r me
je tte r f u r eux & les m altraiter ; ce que f aurois f a i t dans la
colere , f i j e non euffe été em pêché p ar une D am e qui f e jetta
à mon cou ; que j e criois de me la iffer a lle r , d ifan t au fie u r
la Chaife qu'il a voit tout le tortpoffible d 'a voir la iffé entrer
des coquins & de la canaille che^ lu i , & qu'il auroit du
crier aux V oleurs,
Mais en fuppofant ces déclarations du procès verbal
aufTi exa&es qu’elles font prouvées faufles , aurois-je. c o m
mis un crime q u i , par fa nature & les L o ix du R oy au m e ,
m ’eût expofé à être jugé prévôtalement ? en réfulteroit-il
que je fuis prévenu d’avoir introduit de la contrebande
d’une Nation étrangère dans le R oyaum e ; d'être un Va
ga b on d &un homme fa n s aveu , déjà condam né à des p ein es
a jfliclives ; d’avoir fait la fraude a vec attroupem ent & v io
len ce pu b liq u e , accom pagnée de m eurtres 3 ex cès , f éditions
& ém otions populaires ; d 'a voir f o r c é les p ojles des Em
p lo y é s , de leur a voir en levé des P rifon n iers & des M ar
chandises de contrebande par eux fa ifies ? Il ne peut pas
non plus s’enfuivre du procès verbal que je fois le R e c e
leur ou le Complice d’un Accufé de quel que ce foit des
crimes dont laconnoiiïance eft attribuée à la Commiflion
de Valence , puifqu’aux termes de ce procès v e r b a l, le
iîeur & la dame la Chaife ne peuvent être mis ni au
nombre des perfonnes, ni dans aucun des cas défignés
dans l’attribution de ces fortes de Commiifions.
. Ils font accufés de violence publique & de rebellion
par le procès verbal ; mais cette rebellion & cette violence
fo n t-elles, même d’après les expreifions du titre de leur
accuiation, de la nature de celles fpécifiées dans les artiB 2
�I2
d e s 5 & 7 des Lettres patentes pour Saumur & pour
Rheim s ? N o n feulement ce procès verbal n’annonce pas
des violences publiques & des rebellions de cette efp ece,
mais la letture écarte toute idée d ’une rebellion ordinaire, &
même d’une fimple contravention. O n y lit que malgré les
débats d’entre la dame la Chaife & le Capitaine G o ilo u ,
les Gardes font montés & reftés feüls dans les chambres
de la maifon du iieur la Chaife ; que G o ilou a été les y
jo in dre; que les uns & les autres, qui étoient au nombre
de f e p t , & avoient la force en mains , ont fait toutes les
viiîtes q u ’ils ont jugé à propos * fans trouver de la M a r - '
chandife en fraude ; cependant il auroit été d’autant plus
aifé de la d é c o u v rir, s’il y en avoit eu dans la m aifon , &
d’autant plus difficile de la verfer ailleurs , que les Gardes
ont dit dans leur procès verbal qu’elle étoit dans une
malle.
C e ne feroit d’après les Règlements de la matiere que
fur l’accufation d’avoir été l’auteur ou le complice d’un
des délits que je viens de rapporter , que j’aurois pu être
traduit à la Commiffion de Valence : elle étoit donc no
toirement incom pétente, même pour les cas exprimés
dans le procès verbal.
Toutes les fois que le Fermier a voulu étendre l’attri
bution des Com m iflions, fes Tribunaux fa v o r is , & que
ces attentats à la juftice ordinaire &: au bien public font
parvenus à la connoiiTance des Cours 3 ils ont été
promptement réprimés. Il fe trouve dans les dépôts de
la C o u r des Aides de Paris & de Clermont-Ferrand une
foule d ’Arrêts rendus contre des décrets décernés par
les Commiflions de Saumur , Rheims & V a le n c e , ou con
tre des procès verbaux faits à la requête des.Procureurs
du R o i de ces Commiflions dans des cas plus forts que
celui où me place le procès verbal du î Juin dernier.
E n 17 6 8 la Commiflïon de Valence décréta de foit
ouï le fieur D u m a s, Procureur d’Oifice à T h i e r s , à l’o ccaiion d’un procès qui s’inftruifoit dans ce Tribunal con
tre des Faux-fauniers. Le fieur Dumas implore l’afliftance de la C our des Aides , il invoque fa qualité de do-
�•3
Ô ÿ -> '
,
mïcüié. Cette C o u r prononce des défenfes contre la
Commiflion d’aller plus avant fur ce décret. Cette C o m
miflion reconnoît ion devoir & obéit à cet Arrêt.
En 1 7 7 0 le iieur Chaifigni , Capitaine Général des
Fermes , drefle un procès verbal de rébellion , de l ’auto
rité de la Commiflion de Valence , contre le fieur Benoît
de la F o u illo u fe, Marchand de fel à Courpiere ; il lui
impute d’avoir employé la violence publique pour em
pêcher l’exercice des C o m m is, d’avoir caufé une émo
tion populaire, & mis la vie des Gardes dans le plus
grand danger. L e fieur de la Fouilloufe court à la C o u r
des A i d e s , fe mettre fous la fauve-garde des L o ix . Il y
intervient un A rrêt, conforme à celui du fieur D u m as:
le Fermier fe voit contraint d’y rendre hommage. Il fe
pafle un traité le 2 1 Juillet de la même année 1 7 7 0 , ’
refté en minute chez M e . C h e v a lie r , Notaire en cette
V i l l e , par lequel le Fermier convient que le procès ver
bal de Chaflîgni eft une vexation , & paye au fieur de
la Fouilloufe fes dépens , & des dommages intérêts.
Peu d’années auparavant les Em ployés du précé
dent Ferm ier, au pofte de R o u g n a t , font un procès
verbal de rebellion contre le fieur Bets B o u q u e t, B ou r
geois , & le fieur D e q u eriau x, Greffier du Dépôt des
Sels à Auzance. O n les y accufe d’avoir foulevé le Peu
ple d’Auzance contre ces Gardes un jour de M a r c h é ,
d ’avoir crié de fondre fur eux comme fur des voleurs
de grands chem ins, d’avoir déclaré aux Employés qui leur
rémontroient qu’ils faifoient exécuter les Ordonnances
du R o i , qu’ils fe moquoient du R o i & de fes O rdon
nances.
Sur ce procès v e rb a l, ces particuliers furent décrétés
de foit ouï par le Subdélégué de la Commiffion de Saumur à E v a u x . Par Jugement du trois Juin mil fept cent
foixan te-fept, les Juges de ce Tribunal renvoyerent d’of
fice l’afFaire pardevant les Juges ordinaires. Le Fermier
fut forcé d’exécuter ce Ju g e m e n t, le procès verbal fut
attaqué de faux à la C our des A id e s , ce faux fut admis
& p ro u v é , les Gardes décrétés de prife de c o r p s , le
�M
Fermier iurprit un Arrêt du Confeil pour parvenir à la
caffation de ceux de la C o u r des Aides.
Afin d’éviter une plus grande furprife de la part du
F erm ie r, les fieurs Bets Bouquet & Dequeriaux furent
éclairer fes démarches au C o n f e il , furs d’y obtenir la
plus exacle juftice des Magiftrats infiniment refpeâables
qui le com pofent, dès qu’ils en feroient entendus. L e F er
mier prévint l’Arrêtdu Confeil qui alloitfoudroyer les faux
révoltants commis par fes Gardes' contre les fieurs Bets
Bouquet & D e q u eriau x , en comptant à ceux-ci de gros
dommages intérêts.. N ’auroit-il pas dû en faire autant à
mon égard dans l’affaire défagréable que fes gens m’ont
ii mal à propos fufcitée ?
P reu ves de l'in ju flice du D écret.
L ’injuftice du Décret eft déjà démontrée par les preuves
de l’incompétence du Ju g e qui l’a rendu ; mais elle paroîtra beaucoup plus criante par celles des charges de la plainte
des iieur & dame la Chaife en l’E le û io n de T u lle . M e
trouvant impliqué dans le procès verbal fait contr’eux ,
leurs informations me deviennent communes. Je les connois par la lefture qui en a été faite aux Audiences de la
C o u r : elles manifeftent l’innocence des Accufés & l’atro
cité de la conduite des Em ployés. .
L e F e rm ie r, qui fent combien ces charges font acca
blantes contre ies C o m m is, &: confolantes pour les fieur
& dame la Chaife & pour m o i , s’eft permis, pour tacher
d’en affoiblir le p o id s, d’avancer des faits faux & des prin
cipes tout à fait erronés dans fa Requête au Confeil du
R o i . Il entreprend, de critiquer ces charges fur le défaut
de consignation d ’amende pour l’infcription de f a u x , fur
les défenfes portées p a r la Déclaration du 2.5 Mars 1 7 3 2 ,
de recev o ir aucune plain te tendante à d étru ire les p ro cès
verbaux des Commis des F erm es , & fur la qualité des té
moins ouïs dans celle des fieur & dame la Chaife. Q u ’il
eft aifé de mettre au grand jour les fauffetés & les erreurs
volontaires contenues dans cette Requête !
�10. Ln confignation de l’am ende'nëtoit point re q u ife - ^
pour la validité des procédures des fieur & dame IaC h aife.
Il en faut une dans les infcriptions de faux ; mais ce « eft
que plusieurs jours après leur plainte admife & dans l’afle
de fignification du D écret, que les fieur & dame la Chaife
ont déclaré qu’ils s’infcrivoient en faux contre le procès
verbal qui leur avoit été fignifié poftérieurement à l’admiffion de leur plainte, & qu’ils employoient pour moyens i
preuves du faux le contenu en leurs informations. L ’inf<
cription de faux étant alors inutile , n’ayant pas même été
entamée , il ne pouvoit pas êtrcqueftion de configner une
amende.
. 2°. Le Fermier auroit eu railon de cenfurer la plainte
des fieur & dame la C h a ife , fi elle eût été poftérieure à la
fignification du procès verbal jm aisfe trouvant antérieure,
fa cenfure eft un artifice dont il a i:fé pour en impofer à
la Juftice.
Il eft bien vrai que l’article 8 de la Déclaration du 25
Mars 1 7 3 2 , invoqué par le Fermier dans fa Requête au
C o n fe il, défend de recevoir des plaintes tendantes à dé
truire les procès verbaux des Commis des Fermes ; mais c’eft
lorique les procès verbaux ont été fignifiés avant les plaintes:
s’il en étoit autrement, il n’y auroit pas de plainte qu’un
procès verbal poftérieur ne pût anéantir pour obliger les
Particuliers de former une infcription de f a u x , dont les
procédures font dans la partie des Fermes critiques , coûteufes & multipliées; & ce feroit tout comme fi la Loi
avoit fait défenfes aux Citoyens de rendre aucune plainte
contre les excès des Commis des Fermes ^ & avoit ordonné
d’attendre, pour avoir juftice de ces e x c è s , que les C o m
mis fignifiailent un procès ve rb al; ce qui feroit une injus
tice & un ridicule qui ne peut s’accorder avec la fageiïe
des vues du Légiflateur.
L e Fermier eft pénétré de ces principes diftés par les
premières lumieres de la raifon ; auffi seft-it avifé de Sou
tenir dans fa Requête que le procès verbal de fes Gardes
étoit antérieur à la plainte, en le datant du 2 Juin , même
jour de l’Ordonnance qui donne a&e de cette plainte.
�16
C e procès verbal eft à la vérité cîaté de ce jour là ;
mais les Commis étant les maîtres de donner à leurs procès
v e rb a u x , qu’ils n’ affujettiffent pas même.à la formalité du
c on trôle, telle date qu’il leur p laît, dans la concurrence d’u
ne plainte & d’un procès verbal, ce n’eft pas la date de cette
derniere piece qu’on confulte , c’eft celle de fa fignifîcation ; & le procès verbal dont il s’agit n’a été notifié aux
fieurs & dame la Chaife que le lendemain de l’admiffion
de la plainte : circonftance que le Fermier a eu l’adreffe
de fupprimer dans fa requête au C o n fe il, parce qu’elle
prouvoit que la plainte étoit admiflible.
3°. Cette requête du Fermier eft aurtî peu fincere fur
le chapitre des Tém oins de l’information des fieur & da
me la Chaife. Ils y font traités de gens de la lie du Peu
ple & de complices des plaintifs.
Ces Tém oins font des étrangers à la V ille de T u l l e ,
que la Foire y avoit attirés. C eu x qui ont fait les plus
fortes dépofitions contre les Gardes , font des Gentils
hommes , de riches Marchands. Parmi ceux-ci fe trou
ve le fieur B e l l e , aîné , N égociant de cette V ille de
Clermont-Ferrand , ancien Ju g e de la Jurifdi&ion C on fulaire , qui jouit de l ’eftime générale par fon exa&itude
8z fa probité dans le commerce & la fociété.
Q u ’ont dépofé ces T ém oin s? que le 2 Juin 1772.3 des in
connus mal vêtus & qui fedifoient des E m ployés de la Fer
me , maltraitoient violemment la femme du fieur la C h aife,
& boulcverfoient tout dans fa boutique ; que ces gens n’avoient aucune marque du cara&ere qu’ils s’attribuoient,
qu’ils étoient fans bandoulières ; cependant les Lettres pa
tentes du 2 0 £tobre 1 7 5 9 , défen dent aux Commis du
F erm ier de fa ir e aucunes v'ifites che\ les d om iciliés pou r la
G abelle & le Tabac fans être m unis de leurs bandoulières
aux armes du R oi. Dès qu’ils ne font point diftingués par
l à , les domiciliés font autorifés à leur refufer l’entrée de
leurs maifons.
Ces T ém oins ajoutent que le fieur la Chaife crioit à
ceux qui faifoient cette bagarre dans fa maifon , de pofter des Gardes à la porte de chacun de fes appartements,
d’aller
�}7
/
d’aller appeller des Témoins ou un Ju g e de l’EIe£Hon,
& de faire enfuite chez lui toutes les vifites qu’ils jugeroient à propos ; que de mon côté je leur repréfentois
poliment que leurs droits n’alloient pas jufqu’à excéder de
coups la femme d’un honnête domicilié , & à mettre le
défordre dans fon commerce un jour de fo ire, que s’ils
avoient quelques recherches à faire dans la maifon du fieur
la Chaife , ils devoient y procéder avec m odération, &
fe rendre à la demande que lui faifoit ce M a rch a n d , & c .
A la vue de ces déportions & du rapport en chirur
gie qui conftate les coups reçus par la dame la Chaife &
leurs fuites dangereufes, le procès verbal & le décret qui
l ’a f u i v i , ne fon t-ils pas un ouvrage de la plus grande
iniquité ? le Fermier pouvoit-il lés fouteilir?
Quand ce procès verbal n’auroit pas été fait pour croifer
, 1a plainte des fieur & dame la Chaife , & qu’il auroit étépréfenté à des Juges compétents, auroit-il dû occafionner un
Décret fur-tout contre m o i, daprès ces expreiïîons c i , &
dans l'inflant le fieu r R eig n a c , qui fa i fo i t ci-d eva n t Les
fo n S io n s de P rocureur du R oi dans une affaire que m o i ,
Capitaine gén éra l a voïs en l'E lection de T u lle , &c. & d’après
les preuves que préfentoient ces énonciations, que c’étoit le
fiel & un efprit d’animofité qui avoit pouffé'le Capitaine
G o ilo u à m’impliquer dans ce procès v e rb a l, & qu’il voiiloit fe venger par là de ce que je n’avois pas voulu préva riq u e r, en lui donnant des conclufions favorables dans
le procès criminel dont il parle. M a caufe étoit celle de
la juftice elle-même; & tous autres Juges que ceux de la
Commiifion de Valence n’auroient décrété que les G ar
d es fu r leur propre procès verbal.
L a légéreté du Décret decerne contre moi n empeche
pas qu’il ne foit marqué au coin de la plus grande intu ftice, foit à caufe de mes qualités & de mon innocence
démontrée non feulement par l’information des fieur &
dame la Chaife , mais encore par le procès verbal lui-mê
me foit oar rapport aux cas & aux perfonnes que peut
juger là CommHnon de Valence,
D ’ailleurs, le Fermier ayant la plus grande influence dans
�i8 ^
la Cormliiffiôn de Vaïeiice , fi j ’euiïe coriïp'aru'dëvarit Ton
Subdélégüé à 'L ü b é r fa t , qui n ’aurôit garanti que les'Gardes de la Ferme ne m’euflént pas chargé d e ‘fers <Sc con
duit dans les cachots fontérreins des priions dé V alen ce ,
côtc . à côte de ces criminels de délits 'politiques-.^ deftinés aux derniers fupplices : trop foulent'vi£lim cs infor
tunées'de la cupi'djté & 'de Î'impoftu're 'a'trôces- des E m
ployés qui fighent un procès''verbal ^qu’ilsTaVent rdrëmeiit
lire , '¿k. .'dans .lequel ils acçufeiit fauffément ces' malheuréux,, de contrebandes accompagnées des plus grands
crijnes., “bienâilurés qiie.les ■aççufés manque'rÔht.de toutes
les ^rielïQq r ce s néç«ff?ir*<“s'p9ÜrçÎetrà
par*ta‘ voie* p'refq^’irnçfâïicable de lTnfcnptionj'ideîfaiix.
Ç e n ’eft pas'la .-prémïei;e fois 'qüe les fuppôts ‘dü "Fer
mier ont em ployé des ruies poiir attirer des. domiciliés
à 1^ Çommifiîon de Valence , & mleur faire éprouver un
fori' bien plus t r i f t eque celui ^ i n l leur faifoit annoncer.,
EiitV.aotres exemples'faits •pour inÇpirer d é l a terreur à
ceux'q^i*fo’rit tra^luits à 'cetté t ô m m iffio n '& 'q u e je ri’împute ni à Tes Juges , ; ni'a' l’intention des Fermiers G é n é
raux , mais à la "fourberie & à la dureté de leurs E m p lo y é s,
trop! âccouturrtés & trop ingénieux à les 'tromper , celui ’
du y.ièux l ^ i n c a r d a i r i v é en,' i 769 , ëft'énco're préfeht'àf
la îjnetiipirç1 de tQ.ïïslës liâbitants'dë cette rPrdvihce.‘ Ij('
C et lïorrime âgé.,de fôixhntë-qulnze a n s, éft'âccufé en
î 769 d’avoir vendu du fel à Vertai'fdn, ou la vente en eft l'ibt-'e
tout comme en cette V ille , à un particulier qui à fon irifu en
avojjp-Fait. le vërfemërit dans le Fôréz , pays de petites
Gabelles ; Il eïl po u rfüivi c olri me F à ux^- fa un ie r par la Com miifioiv de V aleace , il.refûfp .cl y ço.mpàroître & T e ' tient
caché. U n Capitaine Général *fe' rend''A ‘Vértâifon avec ,
une bande’ de 2 0 ’ Gardés : il s’anno'nCe comme-uni A nge'
de paix. Î1 propofe un accommodement amiable à la fa
mille de T rin c a rd ,, moyennant .1500 livres': la propo
rtion éit'acceptée , l’argent reçu par J e ' Capltaiiie (géné
r a l , lui ‘S rT a 'Troupe foin' régalés. 'Dans jl.e ’ re'pà|s. le
Capitaine remarque qu’il feroit a. propos que T-rincàrd fut
de la fete. O n le fait entrer , Tés enfants
tous les af-
�19
/
fiftarjts clu pa.ys. verfent des larmes de joie. L e C a p it a i dc Général Saifit cc V ieillard , le couvre dç chaînes, l’ar
rache du fein de fa famille éplorée & refte inflexible auxcris
l’amentables de tous lesfpe&ateurs. Il eft donc clair que mal
gré la légéreté du décret décerné contre moi , toutes les
circonstances prouvent qu’il contient une injuftice
manifeite,
P reu ves de £atteinte que le décret a p o rté à mon honneur
& à mon repos , & du p réju d ice qu'il nia ca u fé dans
ma fo rtu n e.
Etant confiant que je fuis A vo cat & R eceve u r des. C o n
signations _auxSiegçs de T u l l e , que la Fetme rp’a ftit dé
créter par une Commiflion qui ne peut juger que
des Contredandiers errants & vagabonds , ou des domi
ciliés qui , en faifant la contrebande , auront commis des
crimes fufceptibles d'être jugés prévôtalement, il eft dé
montré que ce décret a considérablement compromis mon
honneur , & m’a fait perdre la confiance que j ’avois acquifc par une conduite irréprochable & un travail de plu
sieurs années.
Au bruit que je fuis décrété par un Tribunal redouta
ble par fa févérité., & l’abréviation des form es, dont la
moindre peine qu’il prononce eit toujours affliftive , ne
dois-je pas pafler pour un grand criminel ? Il n’-eft perfonne qui à l’annonce de mon décret ne me regarde com
me flétri d’avance par le crime , en attendant que la flétriflure foit prononcée par un jugement ; & quelque ré
paration que la C our m’accorde, le coup que les injufles
pourfuites du Fermier ont porté à ma réputation marquera
bien long-temps.
L a vexation qu’il me fait efluyer a entièrement troublé
mon repos, en me caufant le plus v i f chagrin , & en jettant
dans la crainte & la déiolation ma femme & ma famille ;
tous ces malheureux accidents ont donné de violentes fecoufles à ma fortune ; la perte de la confiance y à fait un
échec irréparable.
L e féjour eue j ’ai fait en cette Ville pendant plus de*
C i
�10
huit mois pour la pourfuite d’une affaire qui intéreffoit
ii eiTcnnellement mon h on n eur; celui que le Fermier me
met dans le cas d’aller faire à la fuite du Confeil de Sa
M a j e i é , pour faire révoquer l’Arrêt qu’il y a furpris, font
faits pour achever ma ruine.
Q u ’iL me foit permis de repréfenter à la C o u r que pour la
toucher en ma faveur je n’ai pas eu l ’orgueilleuie témérité
de me placer au deffus dema véritable poiïtion.Pour manaiffance, j ’appartiens à ce qu’il y a de mieux dans la R o b e &
dans l’Epée en la V ille T u lle. Je ne fuis pas A vocat de nom
fimplement ; j ’âi l’honneur d’exerçer. cette honorable & laborieufe Profefiion avec toute ladélicateffe & toute l’exa&itude que requierent fes importantes fon dions. Il ne me
convient pas de parler de mes fuccès dans la carriere que
je fournis. Les certificats de l’Ordre dont j’ai l’avantage
d’être membre , des Officiers du Préfidial , des Maire 8c
E ch evin sd e la V ille de T u l l e , qui font imprimés à la fin de
ce M é m o ire, annoncent le rang que je tiens dans mon état.
J e puis ajouter à toutes ces atteftations que j’ai mérité "
l’honneur de la confiance , dans la partie des impoiîtions,
du grand Magiftrat Départi dans ma Province pour foutenir & accorder les intérêts du Souverain & ceux de fes
S u je t s , & qui eft à tant & de fi juftes titres eftimé de fon
Maître & adoré des Peuples du Limoufin , & que ce
digne Perfonnage a bien voulu recommander mon bon
droit à l’illuftre Magiftrat Préfident de cette C o u r
augufte , fou Confrere , qui de fon côté fait tous fes
efforts pour rendre heureux tous les Etats de fon D é
partement , où il eft univerfellement chéri.
Cependant j’ai la douleur & l’humiliation de me vo ir
confondu par le Fermier dans la claffe des gens q u ’il re
garde & traite comme d’infignes criminels. Les dix mille
livres de dommages intérêts auxquels j’ai conclu , feront
donc un foible dédommagement des maux de toutes les
efpeces que le Fermier m’a eaufés. Signée R E I G N A C .
M o n fcu r S A V Y
,
D u
R apporteur.
g
a
s , Procureur.
�J % J O u s , Préfident , Lieutenant Général , & Officiers
I l au Préfidial & Sénéchal de la V ille de T u lle, cer
tifions à tous ceux qu 'il appartiendra que M e. R e ig n a c ,
A v o c a t , Receveur des Confignations, fréquente notre
Barreau , plaide affulument à toutes nos Audiences ; q u il
sefl mérité nos fuffrages par f a façon de fe conduire dans
l'exercice de fo n miniflere , que nous avons vu avec déplaifir quon l'a impliqué dans une affaire pendante actuel
lement au Confeil Supérieur de Clermont, ce qui l'a obli
gé & l'oblige encore de s'expatrier pour la pourfuite de cette
affaire, ce qui ne peut que déranger infiniment fe s affai
res ; en foi de quoi lui avons donné le préfent certificat,
pour fervir & valoir ce que de raifoti, auquel avons fait
appofer le Sceau de la Sénéchauffée & fa it contrefigner par
notre Greffier. F a it à Tulle dans la Chambre du Confeil
le 1 4 Août i j j 2. Signés, D e f e n t s d e L a f e u i l l a d e ,
Président; D a r l u c , Lieutenant Général ; S t . P r j e c h
D E S t . M u r , Lieut. Gén. de Police', A u d u b e r t ,L ie u t.
Crim. F o r t 1 E R , D oyen ; M e l o n d e P r a d o u ,
D e v i a n e , L oyac d e la S u d r i e , d e B r a c o n a c ,
Confeillers ; B R I V A L , A vo c. & Proc. du R o i. P a r la
Chambre , C H I R A C , G réf. en chef.
N
' O u s fouffignés, Maire & Echevins de la Ville de
T u lle , certifions & atteflons à tous ceux qu’il appar
tiendra que Me. R e ig n a c, A vocat & Receveur des Confignations près les Sieges R o y a u x de cette V il le , y jouit
d’une très-bonne réputation & de toute la coniidération
qui eft due à Ta profeflion, & que nous avons vu avec
bien de la peine qu’on l’ait impliqué dans une affaire dont
la décifion eft foumife au Confeil Supérieur de Clermont ;
& qu'il n'eft jamais venu à notre connoiifance que ledit
M e . Reignac fe foit jamais trouvé dans aucune affaire où
il ait été inculpé , fes mœurs & fa conduite étant irrépro
chables ; en foi de quoi lui avons délivré le préfent cerv
�*
22
i i f î cat, auquel avons fait appofer le Sceau de la V ille &
contre-iigner par notre Secrétaire. Fait à l’Hôtel de V ille
le 1 4 Août 1 7 7 2 . Signés, D e f e n i s d e L a f e u i l l a d e ,
M aire ; L a n o t , Ëchevin ; L e y x , Echevin ; S a g e ,
E ch evin . Par Meilleurs , B e r a l , Secrétaire.
T O u s fouffîgnés , Avocats en Parlem ent, fréquentants
le Barreau du Ptéfidial & Sénéchal de la V ille de
Tulle , certifions & atteflons à tous ceux, qu'il appartiendra
que M e . R eign ac, notre confrere, efl très- ajfidu aux A u
diences, q ù i l y plaide exactement &f qu'il jouit parmi nous
de toute la cotifidération qui eft due à fo n état ; nous avons
vu avec beaucoup de mal au cœur quon l'a impliqué dans
une affaire pendante au Confeil Supérieur de Clermont y
ce qui depuis cette époque l'a empêché de vaquer aux fon c
tions de fo n état, & dont la pourfuite dérange extrême
ment fe s affaires, en f o i de quoi nous avons fîgné le p ré fent certificat, pour fe rv ir & valoir ce que de raifon. A
Tulle- ce 1 6 A o û t z y y z . S i g n é s D e f a r g e s , ancien
M aire de la V ille , D o yen des Avocats ; D u M Y R A T s.
Syn d ic ; L a n o t 3 V ï a l l e , R a b a n i d e , S t . P r i e c h
de St . A g n e, M augen de S t. A vjd , D uval ,
F ez , F augeron , S artelo n, Vi l l e n e u v e r
C h i r a c & B r i v a l , Avocats.
Légalifé par M . D a r l u c , Lieutenant G énéral.
N
O u s fouiîignés, Procureurs en la SénéchauiTée &
Siege Préiidial de lu V ille de T u lle , certifions à tous
qu’il appartiendra que M e. R e i g n a c , A vocat en la C o u r ,
R e c e v e u r des Confignations èfdits S ie g e s fr é q u e n t e le
Barreau & plaide pluiieurs & différentes Caufes à chacune
des Audiences tant civiles que criminelles, qui fe tiennent
régulièrement dans nos Sieges ; qu’if jouit de la coniklération & réputation qui eit due à fon é t a t & profeifion , 8c
que nous avons vu avec beaucoup de peine l’affaire ac
tuellement pendante au Confeil Supérieur de C le r m o n t,
o ù l’on l a impliqué.; que. fe trouvant obligé de fecourir
�par lui-même fa Caufe , cela lui occafionne divers vo yages
à C lerm on t, & -par là il ne peut vaquer aux fon ctions de
fon miniftere ; que cela nous a même empêché de pourfuivre
diverfes affaires,& même obligés de demander des délais dans
.d’autres affaires q u ’il fe trouvoit chargé de défendre , par la
confiance que les Parties avoient en lui étayée fur fes vrais
mérites, & q u ’il a été obligé de nous remettre bien des pro
cédures , foit en demandant & en défendant, & dont nous
ne pourrons obtenir de jugement à caufe de l’approche
des vacan ces, & que cette abfence lui occafionne un dom
mage très-confidérable par la ceffation de fes affaires, foit
a u x Audiences, dans fon Cabinet, & finalement par les
médiations des parties entre A v o c a ts , en foi de quoi avons
délivré la préfente atteftation des plus finceres , pour ferv i r & valoir au fieur Reignac ce que de raifon. Fait à T ulle
le 1 7 Août 1 7 7 2 . Signés , S u d o u r , Vieux , D o y e n ;
F l o u c a u d , Sous-D oyen & S y n d ic ; L u d i e r e ; J u y é
d e L a b e s s e ; V i l l e n e u v e , V ieu x, Syndic; O r l i a g u e t ;
P a u q u i n o t ; S u d o u r , Jeune ; G u i r a n d e , Procureurs.
L éga lifé p a r M . D a rlu c, L ieutenant G énéral.
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du Roi, Rue S, Gcnès près l'ancien Marché au Bled. 1773
�
Dublin Core
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Reignac, Jean-Léonard. 1773]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Savy
Dugas
Subject
The topic of the resource
abus de pouvoir
foires
vexation
dommages et intérêts
médecine légale
violences sur autrui
collecte de l'impôt
compétence de juridiction
commission de Valence
contrebande
faux-sauniers
troubles publics
témoins
fiscalité
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour maître Jean-Léonard Reignac, avocat en Parlement, Conseiller du Roi, receveur des consignations aux Sièges de la ville de Tulle, demandeur. Contre sieur Julien Alaterre, adjudicataire général des Fermes unies de France, défendeur.
Table Godemel : Dommages-intérêts : 3. Fixation de dommages intérêts résultant de vexations ou de poursuites criminelles devant des juges incompétents, d’un décret injuste, et de l’atteinte portée à l’honneur du demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1773
Circa 1771-1773
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0434
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tulle (19272)
Courpière (63125)
Rougnat (23164)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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abus de pouvoir
Collecte de l'impôt
commission de Valence
compétence de juridiction
contrebande
dommages et intérêts
faux-sauniers
fiscalité
foires
médecine légale
témoins
troubles publics
vexation
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53451/BCU_Factums_G2222.pdf
0ae68eb6a8cfe3c5cfbaa3b33982d699
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C ONS ULT AT I ON.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a lu un mémoire à consulter,
pour le sieur P u r a y , ex-notaire à la résidence de R io m ,
E st d ’ a v i s que plusieurs des différentes questions que ren
ferm e le mémoire rentrant les unes dans les autres , il est inutile
de répondre à toutes ; qu’ en les classant com m e elles doivent
l 'ê t r e , on peut les réduire à trois, et que c ’est à ces trois ques
tions qu’il s’agit de répondre successivement.
E t d’abo rd, sur la prem iere, qui est en même temps la plus
importante de to u te s , celle de savoir si un homm e qui n’est pas
co m m e rç a n t, et entr’autres un notaire qui tombe dans l’insol
v a b ilité , peut être regardé com m e en état de déconfiture, ou
s i , au contraire, on a la faculté de l’envisager comme f a i l l i ,
et lui appliquer toutes les dispositions du Code de c o m m e rc e ,
relatives aux faillites et aux banqueroutes, il ne faut que co n
sulter les principes les plus ordinaires pour la décider.
Il y a m ê m e , sur cette question, un premier point de vue
d ’ordre p u b lic , qui suffiroit s e u l, en quelque sorte, pour se
fixer sur l’opinion qu’on doit en prendre, et en déterminer le
résultat.
En g é n é r a l, en e f f e t , on ne peut pas confondre les juridic
tions ;
On ne peut pas déplacer les limites qui les séparent;
On ne peut pas surtout confondre des législations différentes.
L a législation du com m erce est une législation d ’exception ,
u ne législation qui n ’est faite que pour un seul état de la société,
e t qui a ses principes déterminés et ses règles particulières.
La législation de la déconfiture, au contraire, embrasse, par
son é te n d u e , tous les individus et tous les états ; elle tient à la
A
�législation civile générale ; elle participe aux principes généraux
de cette législation, et ce sont ces principes m êm e qui font ses
régies.
On ne peut donc pas amalgamer ces deux législations , qui
ne sont pas de la m ême n a tu r e , et qui n’ont pas eu pour but
de produire les mêmes effets.
L ’ordre public s’oppose à une association de ce genre.
Mais il s’y oppose m êm e par une autre considération extrê
mement importante.
L a législation du com m erce e st, sous beaucoup de rapports,
une législation pénale.
L e législateur a eu pour objet de conserver parmi les comi n e r ç a n s , et dans l’intérêt m êm e du c o m m e r c e , qui s’exerce
toujours avec une sorte d’abandon et sans la précaution des
sûretés ou des titres , les principes de l’h o n n e u r, l’habitude de
la bonne f o i , la sincérité des relations , la fidélité de la co n
fiance; e t, pour y parvenir avec plus de facilité et plus d ’effi
c a c ité , il a prononcé des peines sévères contre tous les délits
relatifs à leur profession, que les commerçans pourroient se
permettre.
Mais ces peines, le législateur ne les a prononcées que contre
les com m erçans; il ne les a point étendues aux autres individus
de la société; il ne les a point appliquées aux autres états : c ’est
le com m erce seul qui en a été le m otif, l’occasion et le b u t ,
et c ’est dans les personnes qui y sont livrées exclusivement que
la loi elle-même les a concentrées.
O r , le premier de tous les principes, c ’est que les peines en
général ne reçoivent pas d’extension; et quand il y en a en par
ticulier de déterminées par la loi contre les abus d ’une telle
profession, il est encore moins permis d appliquer ces peines
à des professions qui n’ont rien de commun avec elle.
C e seroit sortir de l’ordre naturel des choses, et mêler ensem
ble des formes qui n’ont pas de cohérence entr’e lle s, et qui doi
vent toujours rester séparées.,
�( 3 )
D e quel droit, en e f f e t , poursuivroit-on par e xem p le , en
banqueroute frauduleuse, un notaire qui seroit devenu insol
v a b le , comme on poursuivroit un commerçant?
La loi n’a point assujetti les notaires, pas plus que tout autre
particulier, à ce genre de poursuites.
Elle n’a ¡eu en v u e que les commerçans.
E lle n’ y a soumis q u ’eux.
T o u tes ses dispositions n’ont qu’eux pour objet.
L e notaire a lui-m êm e ses peines à part.
Il a les abus de sa profession ; il a ses manquemens à la
discipline ; il a ses faits de charge.
D es peines sagement graduées ont été infligées par la loi,
contre tous ces délits; et s i, par événem ent, le notaire a c o m
mis des fautes encore plus graves ; s’il a trompé ses créanciers ;
s’ il s’est permis envers eux des fraudes plus ou moins coupa
b le s, il est frappé alors des mêmes peines que tous les autres
c it o y e n s , et ces peines sont conformes au genre de fraudes
q u ’il a pu commettre.
Mais , dans tous les cas , ce ne sont pas les peines prononcées
contre les c o m m e rça n s, qui peuvent l’atteindre. Ces peines
n’ont pas été prononcées contre lu i; la loi ne l’a point prévenu
q u ’il les subiro it, si dans l’exercice de sa profession il com m ettoit des délits qui se rapprochassent de la nature de ce u x que
peuvent commettre les commerçans ; il ne peut donc pas eu
être l’objet, m êm e sous c e rapport, et l’application qu’on se
permettroit de lui en f a i r e , blesseroit toutes les idées reçues
en jurisprudence, et seroit absolument contraire à l’ordre public.
N ous avons donc eu to u t à l’h e u re raison d ’observer q u ’il
Suffiroit d e ce point d e vue g én é ra l, d e la différence des légis
lations com m erciale e t c i v i l e , pour être autorisés à décider
q u ’un notaire p eut bien to m ber en décon fiture, q u an d il devient
insolvable ; mais q u ’il n ’est pas constitué pour cela en état d e
faillite , et q u ’on n ’a pas le droit de lui appliquer les règles que
A2
�( 4 )
le Code de com m erce a créées pour les fa illite s, et qu’il nfa
créées que pour elles.
>
M a i s , si nous voulons maintenant descendre dans l ’examen
des principes ordinaires de la faillite et de la déconfiture , il est
bien facile de se convaincre que la déconfiture ne peut regarder
que le particu lier, et que la faillite ne peut regarder elle-même
que le commerçant.
D ’abord il faut prendre garde que ce n’est en effet qu’ au com
m e rç a n t, que le Code de com m erce applique l’état de faillite.
« T o u t com m erça nt, dit l’article 437 de ce C o d e , qui cesse
« ses p a y e m e n s, est en c ta t de fa illit e . r>
I lfa u td o n c , pour tomber en é ta td e faillite, d’après c e ta rtic le ,
deux choses principales et réunies : x°. être com m erçant, c ’est-àd ir e , exercer la profession de com m erçant; 2°. être dans l’ha
bitude journalière de faire des payemens , suivant l’usage du
com m erce , et cesser tout à coup ses payemens.
T o u t individu qui n’est pas com m erçant, tous ceux qui exer
’
cent dans la société une autre profession que celle-là , un magis
t r a t , un avo ca t, un notaire, un a v o u é , un particulier m ême
sans profession, ne peuvent donc pas tomber en état de faillite.
Ils peuvent b ie n , sans d o u te , devenir insolvables, mais ils
ne sont pas pour cela en faillite ; ils tombent alors dans ce que
la loi appelle déconfiture.
On ne peut donc pas leur appliquer les règles que le Code
de com m erce n’a établies que pour les faillis ; on ne peut leur
appliquer que celles qui ont déterminé les effets de la déconiiture , et q u e le Code Napoléon lui-m êm e a tracées.
Il est bien vrai q u ’il y a q u e l q u ’a n al o gi e en t r e certains effets
de la déconfiture et certains effets de la faillite, et que sous
c e rapport le Code Napoléon les place quelquefois sur la même
lig n e , et les nmnme ensemble.
Par exem ple, la déconfiture dissout une société, com m e la
faillite; com m e e lle , elle ne permet pas au débiteur de pré-
�( 5 ) _
tendre an bénéfice du terme qui lui avoit été accordé par sort
créancier ; comme elle e n c o r e , elle rend exigible m êm e le
capital d ’une rente perpétuelle; com m e elle aussi, elle donne
aux créanciers la faculté d’exercer les droits de la femme c o m
mune , et quelques autres effets semblables , que le Code dé
clare en se servant des termes en cas de f a illit e ou de décon
fitu r e (1).
Mais ces dispositions du Code ne doivent pas étonner.
Il auroit été difficile qu’il ne s’établît pas quelques ressem
blances entre la situation d’un commerçant qui a cessé ses
p a y e m e n s , et celle d ’un particulier qui est devenu insolvable.
Cette situation, au fo n d , étant la m ê m e , c ’est-à-dire, tenant
de la part de l’ un et de l’autre à l’impossibilité de satisfaire ses
créanciers, elle doit nécessairem ent,.à l’égard de tous d e u x,
entraîner certaines suites qui soient les mêmes aussi.
Ce sont les résultats d’une m êm e cause.
Mais il n ’y en a pas moins une grande différence entre les
mesures que le Code de com m erce prescrit contre les faillis,
e t celles que la loi civile détermine contre la déconfiture.
C ’est une remarque extrêmement juste, que fait M . L o c r é ,
dans son E sp rit du Code de commerce.
cc La Jaillite, dit-il , soumet celui qui l’encourt à la juridictc tion co m m erciale, et à toutes les mesures prescrites par le
c< Code contre le failli.
« La déconfiture , au contraire , laisse le débiteur devenu
« insolvable sous l’empire du droit c o m m u n , quant à sa per« sonne, et quant à ses b ie n s , et sous la juridiction des tri« bunaux civils (2). »
Nous concevons b ie n , sans d o u te , q u ’ u n particulier, un
notaire entr’autres, peut faire quelques actes de commerce',
tout en exerçant assidûment la profession à laquelle il est livré.
(1) V o yez les articles i 865 , 19^3, 1188, e tc ., etc.
(a) Tom e 5 , page 20.
�m
N ous concevons m êm e q u ’il soit s o u m is, pour l’exécution
d e ces a c te s , à la juridiction des tribunaux de c o m m e rc e ; il
n e peut pas y avoir à cet égard de difficulté.
Mais parce qu’un notaire fera des actes de c o m m e r c e , il ne
sera pas pour cela commerçant.
L a loi elle-même ne déclare commerçans que c e u x q u i ex er
cen t des actes de com m erce, e t en f o n t leur profession h a b i
tu e lle (1).
L a profession de notaire excluant nécessairement celle de
com m erçant, le notaire qui exerce sa profession, ne peut donc
p a s , malgré q u ’il fasse m êm e des actes de c o m m e r c e , être
regardé com m e un c o m m e r ç a n t, puisque ces actes de c o m
m erce ne sont pas sa profession habituelle.
E t si on ne peut pas le regarder com m e un c o m m e rç a n t,
on ne peut donc pas non p lu s, lorsqu’il devient insolvable,
l ’envisager com m e tombé en faillite ; car on a vu tout à l’ heure
que la loi disoit q u ’il ne pouvoit y avoir de faillis que les com mercans.
»
Nous prions d’ailleurs qu’on observe que le C o d e de c o m
m erce lui-méme a mis un grand soin à fixer la démarcation de
la juridiction des tribunaux qu’il établissoit.
Il a bien voulu que les tribunaux de com m erce connussent .
non-seulement de toutes les contestations relatives aux engagemens entre négocians ou banquiers, mais encore entre toutes
p erso n n es, des contestations relatives a u x actes de com m er
c e (2); ce qui suppose déjà que ce u x qui ne sont pas commercans peuvent faire cependant des actes de c o m m e r c e , sans de
venir pour cela commerçans aux y e u x de la loi ; mais en m ême
temps il a voulu que les individus qui contracteroient par billets
¿1 ord re, mais qui ne seroient pas négocians, et qui ne con-
( 1) Code de com m erce, article I er,
( 2 ) Article 6 3 i,
�17
)
tracteroient pas ce s billets pour des opérations de co m m erce,
ne fussent pas soumis à la juridiction commerciale (1).
Il a également voulu que dans le cas même où des individus
non négocians auroient signé avec des négocians des billets à
ordre, pour d ’autres opérations que des opérations de com m erce,
le tribunal de com m erce n’eût pas le droit de prononcer contre
eux la contrainte par c o r p s , com m e il l’avoit contre les indi
vidus négocians (2).
O n voit par ces nuances, pour ainsi dire, délicates de la lo i,
avec quelle exactitude elle veu t qu’on observe les limites des
juridictions, et jusqu’à quel point elle respecte elle-m êm e les
droits des citoyens qui y sont soumis.
Il résulte donc évidemment de ces précautions m êm e de la
l o i , que ce seroit aller absolument contre son intention , que
de dénaturer les principes relatifs à la juridiction com m erciale,
et de confondre cette juridiction avec la juridiction civile.
Ainsi un notaire, par cela m êm e qu’il est notaire, ne faisant
pas profession h ab ituelle des actes de com m erce , 11’est pas
com m eiçant aux y e u x de la loi.
S ’il n’est pas c o m m e rça n t, il ne peut pas tomber en faillite.
S'il ne peut pas tomber en faillite, il n’est pas justiciable du
tribunal de c o m m e r c e , sous ce rapport.
Il est bien justiciable de ce trib u n a l, sous le rapport des
actes qu’il peut faire , et relativement à leur exécution ; mais
lors même qu’il devient insolvable , il n ’est pas justiciable du
tribunal de com m erce comme failli , puisqu’il ne peut pas y
avoir de faillite pour l u i , mais seulement déconfiture ; il esc
alors justiciable des tribunaux ordinaires, com m e déconfit.
C est aussi l’observation q ue fait M. Locré.
1
cc Q ue d é cid e r, d it- il, dans le cas où un particulier ayant
« fait des actes de c o m m e rce , ne peut pas payer les engage« m<jns qui en sont la suite ?
( 1 ) Article
(a) Article 637 ..
�( 8 }
« Il est certain que ce particulier devient justiciable des tri
ée bunaux de co m m e rce , quant à l’exécution de ses engagemens;
et m ais p u isq u 'il ri est pas com m erçant, la disposition de l'a rcc ticle 437 statue q u ’i l se trouve en déconfiture , e t non en
ce f a illit e (1). »
T e lle est également la jurisprudence.
A la vérité, nous devons com m encer par avouer qu’il existe
un arrêt de la Cour d’appel de B ruxelles, qui a jugé contre le
président d’ un tribunal c iv il , devenu insolvable, q u ’ il pouvoit
être réputé e n état de f a i l l i t e , q u o i q u ’il n ’ e û t même pas fait
d’actes de co m m erce; et qu’en conséquence il n ’avoit pas p u ,
à compter de la manifestation de son insolvabilité, donner sur
ses biens d’hypothèque valable , comme un négociant ne le
peut pas à compter de l’ouverture de sa faillite ; mais ce sys
tèm e a été proscrit par la Cour de cassation, dans l’affaire du
sieur L o c h e , qui lu i-m ë m e avoit été c o m m e rça n t, mais qui
avoit cessé de l’étre lorsque l’affaire avoit pris naissance.
L e sieur L o ch e , retiré du c o m m e r c e , étoit devenu insol
vable.
U ne saisie réelle avoit été jetée sur ses biens, le 4 vendé
m iaire an 6 , après refus de payement de sa part.
Ses c ré a n c ie rs, postérieurement à cette saisie, et sous l’em
pire de la loi du xi brum aire an 7 , prirent une inscription
sur ses biens.
L a femme du sieur L och e p ré te n d it, contre ses créanciers,
que leurs inscriptions étoient n u lles, sous le prétexte, d’une
p a r t , que le sieur Loche avoit été négociant , et de l’autre ,
que la saisie réelle o c c a s i o n n é e par l’insolvabilité étoit un obs
tacle légitime à ces inscriptions,.
Cette prétention de la fem m e Loche fut accueillie par un
arrêt de la Cour d ’appel de M o n tp ellier, du 21 therm idor an
an g ; mais sur le pourvoi en cassation, et « attendu que Jean
(1) Tome 5 , pages 20 et 21.
« Loche
�( 9 )
Loche n ’étan t plus dans le commerce à l ’époque du 4 ven-'dem iaire an 6 , la saisie réelle alors apposée sur ses biens
( et aimullée depuis au mois de frimaire an 8 ) , n étoit pas
capable de le constituer en éta t de f a i l l i t e , et par là m êm e
de rendre sans effet les inscriptions faites sur ses biens postérieurement à cette d a te, » cet arrêt fut cassé.
L a Cour de cassation a donc bien consacré ce principe ,
qu’il ne pouvoit pas y avoir de faillite pour celui qui n’étoit
pas com m erçant, qu’il ne pouvoit y avoir que de la déconfiture,
<c
u
«
«
«
«
et que la déconfiture n’étoit pas regardée par la loi comme la
faillite.
C e même principe a été consacré aussi par la Cour d’appel
de Paris, par arrêt du 12 fru ctid o r an 1 1 , et même en faveur
d ’un notaire.
O n accusoit le sieur L e r o i , qui étoit ce notaire , d’avoir
souscrit frauduleusement une obligation de 20,000 francs au
profit du sieur R o n d o u let; et les créanciers du sieur L e r o i
deraandoient la nullité de l’inscription qu’il avoit prise en vertu
d e cette obligation, com m e faite sur les biens d ’un failli d e
puis sa faillite.
L e tribunal civil de Versailles avoit, par jugement du § f r u c
tid o r an 10, adopté ce système des créanciers, et annullé l’ins
cription du sieur Rondoulet.
Mais par arrêt du 12 fru ctid o r an xx, « attendu, entr’autres
« motifs, qu’un notaire n’est ni un négociant, ni un banquier,
« dont la déconfiture puisse prendre le caractère de fa illit e ,
cc et être constatée par une cessation publique de payem ent;
« A tte n d u que Leroi étoit en plein exercice de son état de
« notaire h l’époque de l’obligation souscrite en faveur de
« R o n d o u let, qu’il n ’a jamais été suspendu de ses fonctions, v>
le jugement du tribunal de Versailles fut infirmé, et l’inscrip
tion maintenue.
Il y a eu aussi un arrêt semblable relativement à un rece
veur.
B
�II y en a un également rendu par la Cour impériale de Bor*
d e a u x , il n’y a que quelques mois, en faveur d’un ancien m a
gistrat.
En un m o t, il existe aujourd’hui à cet égard une véritable
jurisprudence, et c e principe n’est plus équivoque.
Il faut donc répondre à la première question proposée dans
'le m ém oire, que le notaire P ura ï ne peut pas être regardé
com m e un com m erçant; qu’à ce titre, malgré l ’état d’insolva
bilité ou de déconfiture dans lequel il est tombé , on ne peut
pas supposer qu’il soit tombé en faillite ; et que par conséquent
les dispositions du Code de com m erce relatives aux faillites >
ne peuvent pas lui être appliquées.
Sur la seconde q u e s tio n , celle de savoir s i , d’après les cir
constances énoncées dans le m ém o ire, on peut dire que c e
notaire a fait des actes de com m erce , et si , en supposant
q u ’il ait fait des actes de co m m e rce , on peut le regarder comme
lin négociant, les principes que nous venons de développer sur
la prem ière question contiennent d’avance la décision de celle-ci.
P a r cela s e u l , en e f f e t , q u e le n o ta ire dont s’agit n’a pas cessé
d ’çtre n o ta ir e , q u ’il n e s’est pas fait c o m m e r ç a n t , q u ’il n ’a
jam ais pris de p a te n te , q u ’il a toujours co n tin u é l'exercice de
sa profession avec u n e grande assiduité , e t q u ’il y a m ê m e joui
de la confiance pu bliqu e , il est bien év id en t que lors m ê m e
q u e , to u t en e x e rç a n t sa profession , il au ro it fait des actes d e
c o m m e rc e , il n e seroit pas p o u r cela devenu co m m erçan t.
N o u s avons observé to u t à l’h e u re q u e la loi elle-m êm e sup*
posoit à 1 a rticle 6 3 i , q u e d ’a u tre s personnes que des c o m m e r
çons pou voien t faire des actes <le c o m m e r c e ; il résulte donc
de là q u ’on n ’est pas nécessairem ent c o m m e r ç a n t, parce q u ’on
a fait des actes d e c o m m e rc e ( 1 ).
( 1 ) « O n peut faire des actes de co m m erce, dit aussi M. Locrè, sans être
n coinm crçnnt, et o n devient po u r ces actes, justiciable de la juridiction
« com m erciale; mais Ofl n ’est com m erçant que cjuund on fait du com m erce
�C ii )
D ans tous les temps il s’est trouvé quelques individus qui
ont mélé des actes de com m erce à l’exercice de leur profes
sion , et q u i , à l’occasion de ces actes de c o m m e r c e , ont
souscrit des engagemens commerciaux.
Il s’en trouve encore aujourd’h u i , com m e il s’en est trouvé
sous l’ancien régime.
Il a bien fallu sans doute, q u e , dans ce c a s - là , la loi d éci
dât que , malgré la nature de leur profession qui les rendoit
justiciables des tribunaux c iv ils , ils devinssent, pour les enga
gemens com m erciaux qu’ils auroient contractés, justiciables des
tribunaux de com m erce , qui étoient les juges naturels des
engagemens de c e genre.
L es principes conduisoient là.
Mais il ne pouvoit pas résulter de là que ces individus d us
sent être regardés com m e commerçons ; c a r ia loi elle-m êm e ne
d onnant, ainsi qu’ on l’a v u , c e titre qu’à ce u x qui faisoient
leu r profession h a b itu elle clés actes de com m erce , i l est m ani
f e s t e que c e u x q u i , au lieu de fa ir e leur profession h ab ituelle
d e ces actes , en o n t au contraire une toute différente q u ’ils
exercen t h a b itu ellem e n t, ne peuvent pas être des commerçans
aux y e u x de la loi.
. A i n s i , en admettant m êm e que le notaire dont il est question
dans le mémoire , eût fait en effet des actes de co m m erce, on
voit qu’il neseroit pas pour cela com m erçant, et qu’on ne pourroit, ni lui en donner le n o m , ni l’envisager com m e commerçant.
Mais d’ailleurs T qu’est-ce que c ’est donc que ces actes de
com m erce qu’on lui impute ?
On dit dans le m é m o ire , qu’il empruntoit à des particuliers
de sa co nnoissance, différentes sommes qu’il plaçoit ensuite
dans les mains d ’autres p a rtic u lie rs ,^ un intérêt plus fo rt, et
q u ’il remettoit aux préteurs des reconnoissances en forme de
« sa profession habituelle , et ce n ’est qu’alors q u ’on est soumis nux obligations
et aux. lois particulières sur cette profession, comme celles 6ur les fa illite s , n
13 a
�C 12 )
lettres de change, sur papier im prim é, revêtu de son c h iffr e f
tirées de la ville v o is in e , mais tirées sur des particuliers de
celle qu’il habitoit, et qui n’entroient pas dans la confection
de ces lettres qu’ils ignoroient vraisemblablement, et qu’il receT o i t à son tour des emprunteurs, ou des lettres de change dans
la m êm e form e, ou de simples reconnoissances, ou des obli
gations notariées.
On ajoute qu’il inscrivoit sur un registre qu’il avoit intitule
L ivre de b a n q u e , et qu’il tenoit avec exactitude, les emprunts
qui lui étoient faits, les prêts qu’il faisoit, les remboursemena
qu ’il avoit occasion de r e c e v o ir , ceux dont il avoit lui-m êm e
occasion de s’acquitter; en un m o t, tout ce petit mouvement
d ’opérations intérieures auxquelles il étoit livré ; mais que d’ail
leurs , ces opérations n’en entrainoient aucune de change; qu’il
n ’y avoit de sa p a rt, ni négociation, ni circulation; qu’il n’y
avoit pas de remise de place en place ; qu’il n’y avoit pas d’a c
ceptatio n , point de correspondance dans d’autres villes, point
de fonds en dépôt nulle part, point de provision pour faire face
aux effets tirés; en un m o t, rien qui respirât le change»
ou qui en donnât seulement l’id é e , si ce n’est la forme m êm e
des lettres.
Mais co m m e n t, d’après l’énoncé du m ém o ire, pourroit-on
regarder ce s piéts qui étoient faits par ce notaire, et les em
prunts qu’on lui faisoit, comme de véritables act^s de com m erce?
Cette forme de lettres de change n’étoit qu’ une forme.
C ’étoit un titre donné sans les effets attachés à c e titre.
Il n’en résultoit pas un véritable contrat de change.
Les trois personnes n’y étoient pas réellement ; il n’y avoit
pas de remise de place en place ; il n’ y avoit pas d’acceptation j
il n’y avoit pas de provision : ce n’étoit d o n c , d’après la loi
elle-même , que de sim ples prom esses (1) ; ce n’étoit pas des
lettres de change.
( i ) Article H2>
�( 13 )
L e titre de Livre d e b a n q u e , donné au registre , ne faisoît
pas non plus de ce notaire un banquier.
On n’est pas banquier par cela seul qu’on se regarderoit soim êm e comme t e l , et qu’on donneroit à de simples registres d&
p a y e m e n s, ou à des livres de recette et de dépense , le nom
fastueux de Livre de banque.
C e ne sont pas là des circonstances qu’on puisse , à propre
m ent parler, envisager com m e de véritables actes de com m erce
bien caractérisés et bien importans.
Nous en dirons autant des liqueurs qu’on dit avoir trouvées
dans la maison de c e n otaire, après sa retraite, en plus grande
quantité que ne l’auroit exigé sa consommation, et dont il auroit
cédé une partie à quelques personnes de sa connoissance.
Il seroit très-possible, en e ffe t, que ce notaire eût fait venir
des liqueurs, soit de Paris, soit d’ailleurs, au delà de ses besoins,
et pour en céder à des amis, et trouver peut-être sa provision
personnelle sur celle qu’il auroit faite ainsi pour autrui.
Mais ce ne seroit pas là non plus un véritable acte de com
merce.
On observe d’ailleurs , dans le m é m o ir e , qu’on n ’a trouvé
dans les papiers de c e notaire aucune note ou lettre qui indiquât
q u ’il eût correspondu, pour l’achat ou la vente de ces liqueurs,
avec aucun marchand ou fa b ric a n t, ni aucune facture qui en
constatât l’envoi.
-i:
t
Cette circonstance particulière vient appuyer encore notre
opinion sur ce fa it, et y ajoute un d^gré de force.
Mais elle n’existeroit pas, et on auroit trouvé quelque facture
d ’en vo i, ou quelque correspondance relative à rachat et à la
vente de ces liqueurs, que cela ne ieroit pas encore grand’ehose.
On donneroit même à cette vente le nom d’acte de c o m m e rce ,
que cela ne charigeroit rien aux principes.
O n a vu que, dans les principes, ce n ’étoit pas quelques actes
de com m erce qui faisoient un commerçant aux y e u x de la l o i ,
que c ’étoit la profession h a b itu elle de ces actes.
�( h )
O r , ici il n’ y avoit pas , de la paît de c e notaire , de pro
fe ss io n h a b itu elle des actes de co m m erce ; il y avoit tout au
plus mélange de ces actes ave c sa profession; e t , du r e s t e ,
c ’étoit sa profession de notaire qu’il exerçoit habituellement.
O n ne peut donc pas absolument le regarder com m e c o m
m erçan t; et il auroit contracté ou reçu encore plus de lettres
de ch an ge, il auroit reçu ou vendu plus de liqueurs, qu’on ne
pourroit jamais lui donner c e titre, ni lui en appliquer les effets.
Sur la tro isièm e e t d ern ière q u e s tio n , il est difficile de co m
prendre c o m m e n t , dans la situation où s'est trouvé le notaire
dont s’a g it , et au milieu des circonstances exposées dans le
m é m o ire , il a pu être poursuivi devant un tribunal de co m
m erce , com m e f a i l l i , et envisagé c o m m e tel par ce tribunal.
Il est évident que c e n ’étoit pas les formes que le Code de
c o m m erce applique aux fa illis, qu’on pouvoit lui appliquer à
lui-méme.
Il est évident que cette déclaration de fa illit e , cette ouver
ture de fa illit e , ces agens adm inistrateurs, ces syndics provi
soires, ces syndics définitifs, cette accusation de banqueroute
fra u d u leu se, ces poursuites crim in e lle s, rien de tout cela ne
pouvoit avoir lieu.
T o u t cela é t o i t , en e f f e t , contre les principes.
L e notaire dont s’agit n’étoit pas com m erçant; il étoit tombé
en déconfiture, et non pas en faillite.
Il n’étoit pas justiciable des tribunaux de c o m m e r c e , si c e
n’est pour les actes particuliers de com m erce qu’il avoit pu faire;
il l’étoit des tribunaux civils.
Il pouvoit bien être accusé de fra u d e , s’ il en avoit com m is;
mais il ne pouvoit pas être accusé de banqueroute, puisqu’il ne
faisoit pas sa profession du com m erce.
T o u te cette procédure dont il a été l’objet pèche donc par
sa base.
On ne peut pas mémo la laisser subsister; il faut qu’elle soit
détruite.
�Et c ’est à ce notaire lui-méme qu’il appartiendroit de se p r é
senter, pour attaquer aujourd’hui cette compétence que le tri*
bunal de com m erce s’est attribuée contre les principes.
Rien n’e m p é c h e ro it, en e f f e t , qu’il n ’y fût admis.
»
D ’abord sa réclamation seroit fondée.
Elle seroit fondée sur les grandes maximes de l’ordre public y
sur les dispositions du Code de c o m m e r c e , sur celles du Code
N ap o lé o n , sur la jurisprudence des Cours, sur celle de la Cour
de cassation; en un m o t, sur tout c e q u i , en matière de dé
cisions ju d iciaires, constitue les règles qu’on est naturellement
obligé de suivre.
Nous l’avons démontré dans le développement de la première
question : il n’y a pas à cet égard à y revenir.
Mais ensuite toute cette procédure qui a été instruite au tri
bunal de c o m m e rce , contre le notaire, à l’occasion de sa pré
tendue fa illite, est une procédure par défaut.
L e notaire éioit ab sen t, et il ne s’est pas présenté dans c e
tribunal.
Il n’y a pas été entendu ; il n'a pas constitué de défenseur
pour lui ; il n’ a fait aucune espèce d’acte d’adhé3îon ou d’a c
quiescement aux jugemens qui y ont été rendus,' et dont il est
cependant l’objet.
*J';
■1 ■.! <
r
Il a donc le droit d’attaquer ces jugemens par la voie de l’op
position.
Le Code de com m erce lui-méme (i) appliqué a u * trib unaux
de c o m m e r c e , relativement à la forme de procéder, les dispo
sitions des articles i 5 6 , i 58 et i 5g du Code de procédure, qui
permettent l opposition envers les jugemens par défaut, jusqu’à
ce (pie ces jugemens aient reçu leur e xécu tio n , suivant le mode
que prescrivent ces mêmes articles, ou qu’il y a des actes qui
prouvent que la partie défaillante a connu cette exécution.
( i ) A i t i c l e G42.
�( 16
)
. Ici on ne peut rien opposer de semblable au notaire dont
s’agit.
- .......................
.
. . .
• Il est donc encore dans les délais de l’opposition.
E t on diroit en vain que si la procédure du tribunal de com
m erce n’a pas été instruite a v e c .c e no taire, elle l’a été avec
des syndics légalement nommés pour le. représenter et paroitre
pour lui en ju s tice , puisque lui-même n e le pouvoit pas.
Mais il faut prendre garde que c ’est précisément ce système
en vertu duquel on a établi des syndics pour le représenter,
lorsqu’il n’étoit pas dans le cas de l’être , que ce notaire atta
quera.
II se plaindra qu’on l’ait constitué f a i l l i , lorsqu’il ne l’étoit
pas ;
II démontrera que la procédure qu'on a instruite contre lui
p èch e par sa base ;
Il fera voir qu’elle viole tous les principes ;
-t.-
Il demandera, en Conséquence, la rétractation des jugemens
qui ont été rendus
E t co m m e , au fond , c ’est l u i , et m êm e lui seul qui est
l ’objet de ces ju g em en s, com m e c ’est lui qui en supporte les
dispositions, com m e c ’est lui qui est intéressé à ce qu’ils soient
rapportés , c ’est lui aussi qui a le droit de les attaquer par la
.voie de l’opposition ; et, il n’y a rien ni dans les lois , ni dans
les fo r m e s , ni dans les fa its , qui puisse lui ôter c e d r o it, ni
le priver de son exercice.
D
élibéré
•
à P a r is , par les anciens avocats soussignés, c e
21 avril 1812.
,
*
,
DESÈZE,
BONNET,
! •
BELLART.
A RIOM, de l’imp. île THIBAUD, im prim . de la C our im périale, et lib raire,
ru e des T au les, m aison L a n d r i o t. — F évrier 1813,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Puray. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Desèze
Bonnet
Bellard
Subject
The topic of the resource
notaires
banqueroute
fraudes
spéculation
banquiers
usure
créanciers
exil
fuite à l'étranger
créances
livres de comptes
commerce
banques
commerce
vin
troubles publics
scellées
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : acte de commerce : quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ? Faillite : 1. l’opposition au jugement qui déclare un individu en état de faillite doit être formé dans le délai prescrit par l’article 457 du code de commerce, et non dans ceux déterminés par les articles 156, 158 et 159 du code de procédure civile.
2. en matière de faillite, l’affiche et l’insertion de l’extrait du jugement dans le journal du département faites en conformité de l’article 683 du code de procédure, valent signification au failli.
3. la fin de non-recevoir, résultant de ce que l’opposition au jugement qui déclare la faillite n’a pas été formée dans le délai, s’applique à l’appel interjeté dans ce même jugement. Notaire : 3. l’individu qui exerce la profession de notaire peut être réputé commerçant.
Quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 4-1813
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
60 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2222
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0620
BCU_Factums_M0619
BCU_Factums_G2221
BCU_Factums_G2223
BCU_Factums_G2224
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53451/BCU_Factums_G2222.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Lyon (69123)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
banqueroute
banques
banquiers
commerçants
commerce
Créances
créanciers
exil
fraudes
fuite à l'étranger
livres de comptes
notaires
Scellées
spéculation
troubles publics
Usure
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53450/BCU_Factums_G2221.pdf
927fb0d2a3f77567f3f8f4ec57fa930e
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MEMOIRE
E T
C
O
N
S
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L
T
A
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I
COUR
IMPÉR IALE
> DE RIOM. ¡I
O
N
i . re C h a m b r e .
POUR
L e sieur P U R A Y , e x - n o t a ir e , appelant
Oku
CONTRE
Les sieurs D U B R E U L , B R U N , V E R S E P U Y ,
'
G U E M Y et autres, ses créanciers , intimés
ET C O N TR E
L e s Syndics à sa prétendue f a i lli t e ,a
i
s
u
intimés.
M u ltis occulto crescit res fœ nore.
H orace .
L
a
cataslrophe
du
sieur P u r a y peut servir
de
leçon aux h ommes ambitieux. Plus q u ’aucun autre
événem ent,
elle leur
montre q u ’un
fi
travail assidu
et opiniâtre, joint à l’ économie la plus rigoureuse,
ty m m /ws /vîi^.
'
2-î
I
�( * )
aidé m ê m e des secours de l ’intelligence et de Tinst r u c t i o n , est insuffisant pour acquérir des richesses,
lorsque , d’ailleurs , ces qualités essentielles
ne sont
point dirigées par la prudence. U n e première faute
influe sur la vi e e n t i è r e , sur-tout lorsque celte faute
est le fruit d ’une erreur sur laquelle reposent tous
les projets de celui qui s’y laisse entraîner.
C ’ est en va in q u ’ au milieu de la carrière trop
courte q u ’il a à pa r courir, l ’ambi tie ux sera éclairé
par l’expérience ; c ’est en vain q u ’il verra s’ouvrir
devant lui , et s’agrandir journellement l ’ab îm e qui
doit bientôt
l'engloutir
ave c
ses projets
insensés :
l ’illusion, cet aliment funeste des passions, s'oppo
sera. à ce que la vérité pénètre jusqu’à lui. A l o r s ,
livré à son im a g in a t io n , il compensera des pertes
réelles
par des
gains
futurs et
imaginaires ; trop
confiant dans ses forces, il croira détruire la cause
du mal par des remèdes qui ne feront que l ’aug
menter.
Mais si à ces idées générales vien nen t se joindre
des motifs plus p r o c h a in s , plus déterminans encore ;
si l’ambitieux a conçu le pr oj et d ’arriver h la fortune
en exerçant une profession honorable; si par ses tra
vaux,
il a
placé au
mérité
la confiance p u b li q u e ; s’il est
milieu d’ une
sidérée ; s’il
est entouré
famille nombreuse et c o n
d ’amis sur
l ’attachem ent
desquels il croit pouvoir c o m p t e r , co m m en t se ré
soudra t-il à rompre autant de liens? ira-t-il pro
clamer l u i - m ê m e
un désordre q u ’il croit pouvoir
�( 3 )
réparer ? s’avilir
aux y e u x
fa t )
de
ce ux
qui lui
ont
toujours témoigné de l’estime, et briser de ses propres
mains
l’instrument
q u ’il
suppose
encore
pouvoir
servir à sa f o rtu n e ?
U n e abnégation aussi complète de ce qui honore
et
enchante la v i e ,
h u m ain es ;
des
et
il laut
paraît a u -d es su s
des
forces
convenir que s’il se trouve
hommes assez heureuse ment nés pour
régler
co ns tam ment leur conduite sur ce que la sagesse et
la prudence prescrivent, il en est peu d ’assez iorls pour
découvrir leurs fautes au public, lorsque les résultats
sont tels q u ’ils doivent blesser les intérêts d’autrui, par
suite éloigner l ’amitié le plus souvent froide pour le
m al h eu r, et donner de nouvelles forces aux manœuvres
toujours naissantes de l ’envie ou de la haine.
C e tableau présente l ’esquisse des fautes que l ’on
peut reprocher au sieur P u r a y ; il en déve lop pe é g a
lem en t
les causes ; mais
co m m en t montre r celles
de tous les malheurs qui pèsent aujourd’hui sur l u i ,
sur sa f e m m e et ses en fa ns?
Faud ra -t-il q u ’il remonte à l’ép oqu e o ù il a c o m
mencé
l ’exercice
des
fonctions de n o ta i re ?
q u ’il
parle de son in ex périen ce, d e ses préjugés en affaires,
qui étaient c e u x du tems où il vivait ? Dira-t-i l que
des emprunts considérables ont d ’abord été faits par
l u i , dans le seul but de servir d’aliment à son ét u d e?
que bientôt les avances q u’il faisait ont absorbé les
cap itaux, prêtés à des intérêts qui n’avaient d ’autre
règle que la volonté ou le caprice du p r è l e u r ?
2
�( 4 )
Rapportera-t-il à c e ll e origine les différentes spécu
lations auxquelles l’on veut donner le nom d'opération
de b a n q u e , et qui n’ont, il faut l’a v o u e r , d ’autre c a
ractère que celui de l ’ usure ?
P o u r montrer cette v é r it é , faudra-t-il le représenter
en touré de la foule de ses créanciers tous habilans de
R i o m , recevant d’eu x des sommes produisant des in
térêts e xc ess if s, pour les placer à des intérêts égale
ment excessifs.
Il faut des victimes à l’ usure. C e m o n s t r e , trop
long-temps acclimalé en F r a n c e , y fait gémir plus d ’ une
famille. P u r a y se classera-t-il parmi ces infortunés?
M ontrera-t-il
que la profession q u’ il exerçait avec
tant d'av antage et d ’assiduilé a elle m ê m e concouru
à sa ru in e ? que pour a u gm en ler sa clienlelle, il a fait
des emprunts considérables, pour le remboursement
desquels il a cons tamment été obligé de s’en remettre
à la
volonté de ses d é b it e u r s , ou d ’obtenir contr’eu x
des jugemens qui fixaient les intérêts de ses créances
à cinq pour c e n t , tandis que le m inim um de ce ux
qui lui p r êt a ie n t était de 9 à 10 ?
Sera-t-il i n c o n c e v a b l e q u e peu d o n n é e s passées dans
des opérations aussi ruineuses aient réduit P u ra y à
faire sans cesse de nouveaux emprunts pour servir les
intérêts des sommes q u ’il devait d é j à , et que bientôt
le fruit de ses travaux a b s o r b é , il se soit trouvé ré
duit à p aye r l’intérêt de la valeur de la plume qui lui
servait à écrire ses acte s?
Com b ie n de projets différens n’a pas du faire naître
�ce bouleversement
d’affaires ! a vec quelle rapidité
devaient se succéder les idées qui présentaient quelq u ’espoir de gain ! Pu ray
ne devait - il pas saisir
tout ce qui semblait devoir améliorer sa situation ?
Aussi voit-on dans ses livres n o m b r e u x , dans ses notes,
dans les diiïërens documens q u 5il a laissés, les traces
de l’embarras dont il cherchait à sortir par des spécu
lations qui n'ont aucun caractère déterminé.
Mais combien de haines ne va pas exciter la défense
du sieur P u r a y ! 11 est impossible que quelques véri
tés d u r e s , mais nécessaires à sa c a u s e , ne v i e n n e n t
encore enflam m er la colère de quelques-uns de ses
créanciers.
Po urquoi l’à - t - o n réduit au désespoir?
L e sieur P u r a y ne com bat point pour ravir à ses
adversaires le gage de leur créance. Retiré dans des
contrées lointaines, éloigné des objets de toutes ses
affections, il peut supporter avec courage tous les
genres de privations; il doit et il veut consacrer l e .
reste de sa vie à désintéresser ses créanciers ; mais le
p e u t- il si on lui en ôte les m o y e n s , en lui arrachant
son état civil, et en flétrissant son n o m ?
L o r s de la disparition du sieur P u r a y , ses créanciersmêlaient à leursjustes plaintes le reproche d ’avoir
em porté des sommes énormes. Ils ne pouvaient conce
voir co m m en t ce notaire si occupé , si la borieu x,
pouvait laisser un passif aussi considérable, s’il n’avait
voulu aller jouir hors de sa patrie d’ une fortune h o n
teusement acquise. A u c u n alors ne pensait que cet
�h o m m e si a ct if travaillait depuis quinze ans pour l’in
térêt de quelques capitalistes , qui triplaient ou dou
blaient au moins le r ev en u de l ’argent q u’ils y avaient
placé ,-et absorbaient ainsi tout le produit de ses labeurs.
Aussi l’opinion que P u r a y fuyait chargé d’o r , s'accré
dita-t-elle au point q u ’il devenait impossible m êm e
de cher ch er à la détruire.
Sa présence seule pouvait effacer des soupçons aussi
déshonorons q u ’injurieux. Son retour fut proposé; on
fit offre aux créanciers de leur remettre la personne
et les biens de leur d éb it eu r , en leur laissant entrevoir
combien les connaissances particulières de P u ra y leur
seraient utiles pour la liquidation de leurs affaires.
L e plus grand
nombre des créanciers, ce ux qui
étaient les plus respectables par leurs lumières et leur
délicatesse, allaient accepter la proposition, lorsque
quelques voix s’é l è v e n t , refusent d ’adhérer aux arrangemens p r o je té s, et sortent de l ’assemblée pour aller
pr o v o q u e r au tribunal de c o m m e r c e l ’ouverture d ’une
faillite, et dénonce r au magistrat de sûreté une b a n
queroute frauduleuse. ~
>
j
L a fuite était donc le seul parti qui restait au sieur
P u r a y : il fut chercher un asile dans les pays étrangers,
et y a tte n d re un m o m e n t favorable p o u r en tr e r en
a r ra n g e m e n t avec ses créanciers.
Cet instant n’est point encore venu.... En vain , à
diffère nies reprises, a - t - i l offert un n ou ve l abandon
de ses biens! En vain sa mère a-t-e ll e proposé l ’ou
verture actuelle de sa succession, pour transmettre, sur-
�( 7 1
le-champ, a u x créanciers la propriété direcle.de la por
tion qui doit revenir à son fils! .En vain son épouse
a -t-e ll e offert l ’abandon de tous ses droits! E n va in
le sieur Pu r a y n’a-t-il cessé de dire que pour tout
cela il ne demandait point de quittance définitive ;
q u ’il voulait laisser à tous ses créanciers l'espoir d ’être
payés un jour de tout ce qui pouvait leur être dû : rien
n’a pu réussir. L e s créanciers ont semblé en vouloir plus
à la personne q u ’à la fortune du sieur P u r a y , et ont
rép on du à toutes les propositions par le cri de guerre*
F aillite
et
Banqueroute
frauduleuse
.
L e sieur P u r a y est-il failli?
Est-il recevable à se plaindre du ju gem ent qui a
déclaré l’ouvertu re de cette faillite?
Telles
sont les questions
q u Jil faudra e x a m in e r,
quand on aura établi les faits de cette cause.
F A I T S .
L e sieur P u r a y encore fort jeune eut le m alh eu r
de perdre son p è r e ; son éducation fut dirigée par sa
m è r e , qui y donna tous les soins de la tendresse la
plus éclairée.
Dans des tems ordinaires, ses leçons eussent été
suffisantes. L e s institutions sociales suppléent à l’e x
périence qui m anque à la jeunesse, lorsque de bonnes
études l’ont mise à m ê m e de les connaître et de les
respecter.
.
,
P u r a y sortit de l ’école pour assister à la révolution;
�( 8 )
son imagination ardente adopta les systèmes q u’elle
fit naître. Son ignorance des anciennes lois , de ces
principes qui nous avaient été transmis à Ira vers les
siècles par la sagesse de nos p è r e s , mit obstacle à ce
q u ’il pût apprécier à leur juste valeur les idées qui
devaient bientôt les remplacer.
P u r a y se maria : il devint père ^ la tendresse q u ’il
avait pour ses enfans le rendit am b iti eux, et bientôt
il ne songea plus q u ’à acq uéii r des richesses.
D es fortunes colossales se faisaient alors remarq uer
sur tous les points de la France ; la rapidité avec
laquelle elles avaient été faites, dans tous les métiers,
dans tous les états , dans toutes les professions, devait
faire regarder c o m m e une chose faci le , de se placer
parmi les h e u r e u x de ces tems de malheur. U n je u n e
h o m m e pouvait sur-tout ignorer et les m oye n s qui
avaient produit ces colosses aussi extraordinaires q u ’é blouissans , Hries ressorts secrets qui les faisaient agir.
P u r a y crut qu'u n travail opiniâtre joint au x c o n
naissances q u ’il se supposait, était suffisant pour réaliser
les projets q u ’il avait conçus.
,
Il voulut choisir une profession ; celle de notaire
parut lui présenter les plus grands ava ntages; il avait
alors beauco up d ’a m i s ; ses opinions politiques qui
étaient celles de la m u l t it u d e , étendaient considé
rablement ses re lat io n s, et lui faisaient espérer une
clientelle nombreuse.
En l ’an 4 , il postule une commission de notaire : il
en est pou rvu le 14 thermidor de la m ê m e année. Dès
cet
�( 9 )
cet in s ta n t,
entièrement livré aux. affaires, toutes
ses pensées n ’ont d ’autre but que celui de donner
plus d’éclat et d’ utilité à l ’état qu’il a embrassé.
Si l ’admission de P u r a y au notariat eût été pr é
c édée des études que cet état e x i g e ; si livré à un
guide sûr,
il eût appris sur-tout que la confiance
publique ne s’acquiert q u ’ave c beaucoup de te m s, et
par des épreuves aussi dures que multipliées; si enfin
son imagination trop ardente eût pu être calm ée
par les conseils de la sagesse et de l’e x p é r i e n c e , tout
doit faire présumer que P u r a y aurait réussi.
Mais son premier pas fut une faute : il crut que
le m o y e n le plus sur et le plus prompt pour s’attirer
la confiance , était d’affecter de pouvo ir donner à ses
cliens des facilités qui devaient bientôt lui devenir
onéreuses.
P u r a y n’avait pas de dettes ; cependant réduit à un
re venu personnel de i o o o f r . , et à celui de 600 fr.
du côté de sa f e m m e , il ne semblait pas que cette
position de fortune lui pe rmît de faire des avance s
à c e u x qui s’adressaient ¿1 lui.
Mais
1 ambition calcule-t-elle ainsi ? L e désir de
se faire un état brillant, de s’attacher une clientelle
n o m b r e u s e , peut-être celui de tenir le premier rang
dans une profession honorable et considérée , le por
tèrent non-seulement h négliger les rentrées de son
étude , mais encore à y absorber tous les ans des
capitaux considérables.
P u ra y était propriétaire de de ux r e n t e s , m onta nt
3
�I
( 1° )
ensemble à s o o ô francs : il les vend ; son étude e n
absorbe le prix. Quelques im meubles ont bientôt la
m ê m e destination.
Ces premiers sacrifices parurent produire quelque
effet avantageux ; P u r a y ne faisait q u ’entrer dans la
c ar riè r e, et déjà il n’y v o y a i t que des é m u l e s ; il
attribuait ses succès a u x m o y e n s q u ’il venait d ’e m
p lo ye r : il v o u l u t , par de n o u v e au x efforts, les c o n
firmer et en obtenir de plus certains.
N ’ayant plus de ressources personnelles,
il
eut recours
à l'emprunt. Cette mesure extrêm e et toujours dan
gereuse , l ’éiait encore bien plus au tems dont nous
parl ons.
Différentes opinions s’étaient glissées en F r a n c e ,
et s’y
étaient d’autant plus facilement accréditées,
qu'elles semblaient autorisées par la loi. L 'a r g e n t est
m a rch a n d ise, Cintérêt r ia d ’autre régie que ta çoionté
ou le caprice d u prêteur : tels étaient les principes publi
q uem en t professés; et alors la plupart de ce u x qui pr ê
tai ent
à 10 pour c e n t , croyaient qu'on devait des éloges
à leur d é s i n t é r e s s e m e n t , et imaginaient avoir satisfait
à tout ce que l ’h o n n e u r , la délicatesse ou l ’a m i t i é m ê m e
exigeaient d ’eux.
P u r a y trouva quelques-uns de ces amis toujours prêts
à oblig er ; la facilité d’em prunter l ’ave ugla sur les
suites; il ajouta aux avances q u’il avait déjà faites, des
avances plus considérables encor e; il agissait ainsi, dans
la ferme persuasion où il était que le nombre d’affaires
qu'il faisait, et les bénéfices q u ’elles devaient produire,
�( ”
)
surpassaient dë beauco up les intérêts qu'il était obligé
de payer pour les sommes multipliées, avancées gra
tuitement à chacun de ceux qui lui accordaient leur
confiance.
Les choses se passèren t ainsi jusqu’à la fin de l ’an 9 ,
et l’on doit concevoir combien ces cinq années, éc ou
lées en renouvellemens d ’effets, durent être funestes
à P11 ray.
S i, à cette é p o q u e j il eût consulté sa situation, il
aurait sans doute v u q u ’ elle comm ençait à être désa
vantageuse; mais plus d'un obstacle s’opposait à ce t
examen.
D ' u n e part, les études profondes auxquelles se li
vrait
habituellement
P u r a y , et qui avaient toutes
pou r but la connaissance de son é t at ; les travaux sans
nombre q u ’il se créait à ce sujet : de l’autre , la préoc
cu pation continuelle où lè tenait l ’exercice de ses fon c
tions de notaire, dans lesquelles il jouissait d ’ une con
fiance aussi entière que générale , étaient bien des
«iotifs suffisans pou r l’em pê cher de se livrer à l’ e x a
m en de ses affaires particulières, que cinq années de
travail et d’économ ie ne po u vaie nt d’ailleurs lui faire
supposer être en mauvais état.
O n peut ajouter que la confiance que l ’on avait en
lui , se manifestait par des témoignages, chaque j o u r ,
plus capables d ’exciter ses vues ambitieuses. D é j à il
avait été chargé de la perception de parties de rentes
aussi nombreuses que considérables. C e l a , en ajoutant
à ses occupation s, multipliait ses r elation s, et semblait
4
�augmenter ses
profils. E n s u i t e , plusieurs personnes
voulurent placer leurs fonds en Ire ses mains, 7i un inté
rêt conven u , sauf à lui à faire un bénéfice sur ces
placemens. P u r a y ne vit dans ces propositions que de
' n o u ve au x moyens de prospérité. Qui sait m ê m e s’il
n ’avait pas dès-lors le projet d ’ user de la faculté que
lui accordait la l o i, de prêter à tel intérêt que ce f û t ,
pour r ép a re r les loris que lui avaient occasionnés différens emprunts faits sous son rè gne ; car c ’est ainsi qu'un
mal nous conduit dans un autre.
Bientôt son étude fut remplie de faiseurs d ’afïaires
de différens genres: des capitalistes de toutes les pro
fessions,
ce ux sur-tout qui n’en exercent aucune , et
qui calculent leur aisance moins sur leur industrie que
sur le t a u x ' d e la pl ace, accouraient pour faire r e c e
voir leur argent, et prenaient du notaire P u r a y , écri
vant dans son cabinet, des effets, datés de Clerm ont,
payables à R iom . A ce ux-ci succédaient des spécula
teurs d’ une autre espèce; c ’étaient ou des acquéreurs
d’imm eu ble s, qui n’avaient point leurs fonds, ou des
débiteurs poursuivis par leurs cr éan cie rs ; ils venaient
p r o p o se ra P u r a y de r e c e v o i r leur v e n t e ou leur quit
t a n c e , et lui demandaient en m êm e tems à empru nter
les sommes qui leur manquaient. Rare men t ils étaient
déçus dans leur es pé ra nce; P u r a y , aussi facile que
confiant, prêtait souvent sans autre indemnité que le
plaisir de passer un acte, ou l’espérance de se faire
une clientelle qui lui présentât que lq u’ utilité ou quel
que jouissance d ’amour-propre. En fin , c ’étaient des
�( i
3 )
propriétaires ou autres personnes riches et considérées,
ayant
un
besoin
actuel et
instantané de
sommes
plus ou moins forte s: pour ceux-ci l’intérêt était res
treint autant que possible; P u ra y comptait sur leur
protection, leur amitié ou leur influence.
Des relations aussi ét e n d u e s , et embrassant toutes
les classes de la soc iété, devaient faire naître des é v é nemens singuliers, et qui'se rencontrent difficilement
dans la vie des h ommes livrés à des occupations plus
paisibles.
;
P u r a y , notaire , et en cette qualité revêtu de la
confiance de plusieurs personnes étrangères à la ville
q u ’il habitait , se trouva dans la nécessité de faire
quelques transports d’argent à Paris ou à L y o n . Les
usages du com m erc e rendant ces opérations plus faciles
et plus sures, il s’adressa à un banqu ier, se fit ouvrir
un crédit sur ces deu x villes, et entra en correspon
dance avec ccux auprès desquels il fut crédité. Mais
les banquiers de L y o n et de Paris n ’acceptèrent les
traites q u ’en les portant au compte de leur confrère,
ave c lequel ils étaient en relation.
P u r a y , prêteur el e m p r u n t e u r , avait quelquefois
entre les mains des sommes dont il ne pouvait trouver
le placement ; plus souvent encore lea fonds lui' m an
quaient pour les remboursemens q u ’on exigeait de lui.
Dan s ces circonstances il avait recours à la banque.
Sa f em m e fut malade; on lui conseilla le b a u m e
de v i e ; ce remède produisit un effet salutaire; alors
l ’imagination de P u ra y s’allume; il vante l’efficacité
�( 14 )
de ce spécifique, en fait publiquem ent l’é l o g e , et
v e u t en avoir un d é p ô t , sans au tre b ut que celui
d ’en obtenir p o u r son usage de la meilleure qualité.
U n de ses p a r e n s , m om en taném en t établi dans les
pays où se fabrique le K e r s w a s e r , fit un v o y a g e à
R i o m ; il lui vanta la supériorité de cette liq u eu r;
bientôt P u r a y désire en avoir ; mais n ’abandonnant
jamais ses vues d ’é c o n o m ie , il s’en fait faire une e x
pédition assez considérable, pour être sûr q u ’il sera
approvisionné ¿1 peu de frais.
A c h e v o n s de peindre cette imagination mobile et
pr om p te à adopter tous les projets qui pouvaient lui
faire espérer un gain, en avouant que P u ra y n ’a pas
craint de participer à des spéculations passagères,
qui avaient pour o b j e t , du b l é , du v i n , du f o i n ,
de la paille et autres denrées.
C e t a b l e a u , fidèlement extrait des différentes pièces
produites contre le sieur P u r a y , a servi à le faire
déclarer tout à la fois banquier et marchand ; ses
créanciers ont induit cette double qualité, des difFérens
registres qui ont été trouvés dans l’étude de leur d é
b it e u r , de sa correspondance et d’autres circonstances
accessoires.
A i n s i , suivant eux ,
P u r a y est b a n q u i e r ,
i.° Parce q u ’il a tenu des registres de b a n q u e , et
q u ’il les a lui m ê m e qualifiés ainsi;
2.0
Parce q u ’il a eu des relations avec le sieur
A l b e r t , banquier a Riom.
�3.° P arce q u ’il a été en courant d'affaires avec le
sieur M o r i n / b a n q u i e r à C le rm o n t;
4.0 Parce q u ’il a été en correspondance avec les
sieurs Sébaud, banquier à P a r i s , et V in c e n t, banquier
à Lyon.
5°. E nfin, parce que les effels q u ’il donnait à ses
prê te u rs, étaient conformes aux usages de la b a n q u e ,
et ornés de son chiffre et d 'u n e vignette.
P u r a y est marchand ;
i°.
P a r c e q u ’ il a fait c o m m e r c e de b a u m e d e v i e ;
20. Parce q u ’il a acheté et vendu du K ersw a se r;
3°. Parce que ses registres font foi q u ’il a participé
à des spéculations de c o m m e r c e , sur le b lé , le vin,
et autres denrées.
Suivons sur ce plan les pièces
produites par les
créanciers; et en comm ençant par la b a n q u e , e x a m i
nons si les registres que P u r a y a tenus lui donnent la
qualité de banquier.
L e grand nombre d’affaires et d’opérations du sieur
P u r a y , rendaient nécessaire la lenue de beaucoup de
notes. Il avait dans son élude plusieurs livres consa
crés à cet usage , et il tâchait de donner à chacun d ’eux
un titre, dont la briéve té pût servir à le faire décou
vrir sans p e i n e , au milieu de tous ceux parmi lesquels
il était confondu.
C ’est ainsi que le 12 messidor an 9 , c ’e s t - à - d i r e ,
à l ’époque où P u r a y , d'em prunteur qa il é ta it, ré so
lut de devenir et prêteur et e m p r u n te u r , ouvrit un
registre, sur la couverture duquel il écrivit lastu eu-
�è + 'l
( 16 )
sement le m o t Banque. Que l’on ouvre ce l i v r e , et
l ’on n ’y verra autre chose, si ce n ’esl la noie de ses
e m p r u n ts faits à R i o m , celle de ses prêts aussi faits à
R i o m , avec l’époque des échéances ou des renouvellemens. Nulle part ne se découvre la moindre o p é
ration de b a n q u e ; point de change ni rech an g e, point
de transport d ’argent de place en place: ainsi l’inté
r ieur du livre donne un d é m e n t i f ormel au t i t r e ;
c’est un e note de prêts el d ’e m p r u n ts , ruais ce n ’est
point un livre de banque.
E x e m p l e s
N * . 17 .
H ». 62.
tirés d u l i v r e :
F . . . 13...
I n t é r ê t s re t e n u s .
8 p l u v i ô s . an 10. 1 ,0 0 0 fr.
R e n o u v e l é v. u ° .
7 t h e r m . au 9.
935
x 5 p. 100.
T i r é s u r G ...
L a tenue de ce livre cesse au 4 ventôse an 12.
Alors ces notes parurent insuffisantes au sieur P u r a y :
en effet , leur briéveté devait en rendre l’intelligence
difficile; d’ailleurs, la confusion qui y régnait, le m e t
tait hors d’état de pouvoir se rendre com pt e à luim êm e,
Il paraît que pendant quelque t e m s , P u r a y opéra
sans registre et sans guide. E n f in , le 11
1 3 , et le i
venlôse an
5 germinal an i 3 , il établit deux livres
destinés à remplacer celui dont on vient de parler,
el dont l’ un devait contenir la note des emprunts,
et Vautre celle des prêts.
Le
�( *7 )
~ Le
¿4 $
titre de celui du 11 ventôso an t z est ainsi
conçu :
R egistre de diverses sommes
placées
par M . P u r a y ,
N O T A I R E , à I NT ÉR ÊT S.
L e livre du i
v
5 germinal an i 3 a pour inscription,
ces mots :
R egistre de diverses sommes
placées
che% M . P u r a y ,
N O T A I R E , à I NTÉ RÊ TS .
Ainsi le rap prochement de ces deux titres explique
donc bien ce que faisait P u r a y , et confirme celte idée
que le mot b a n q u e , écrit sur la cou verture du registre
de l ’an 9 , n’était q u’ une indication de caprice pour
reconnaître ce l i v r e , mais ne pou vait servir à désigner
les opérations qui y étaient mentionnées.
Aussi P u r a y adoptant un nouvel ordre qui l’obligeait
à se rendre à l u i- m ê m e co m pte de la nature de ses
opérations, n’e m p l o i e - t - i l plus la dénomination de
banque pour ses livres. Il leur refuse ce titre a v e c
autant de soins q u ’il s’interdit à l u i- m ê m e la qualité
de banquier.
C ’est chez P u r a y , notaire, que l ’on place des sommes
à intérêts.
C est encore P u r a y , n o t a i r e , qui place
à intérêts.
des
sommes
Ainsi prêts et emp runts faits par un no ta ire , voilà ce
qui reste.
L ’exa m en des registres détruirait-il les idées si claires
qui font naître leur titre?
Q u ’on les parcoure.
5
�( i8 )
Celui du
ii
ventôse an 1 2 , qui rappelle les difïé-
rens prêts faits par P u r a y , conlient 370 articles, tous
relatifs à des liabilans de Riorn; il indique la nature
des effets, leur d a t e , celle de leur é c h é a n c e , leur renou
v ellem en t, et le taux de l’intérêt.
Prenons pour exe m ple le n°. 101.
« Le i
3 floréal an i 3 , j ’ai prêté à M. N .............la
« so mme de 2,000 francs à 12 pou r cent pour trois
« mois ; et il y a effet de 2,060 f r a n c s } payable le
«
3 thermidor an i 3. »
Dessous est écrit , « le
3 messidor an 3 , j ’ai reçu
« 60 francs pour intérêts, et j ’ai reno uve lé pour trois
« m o i s , échéant le
3 brumaire an 14. *
V o ilà pour les lettres de change.
Ajoutons que ,
dans ce régislre , se trouvent mentionnés plusieurs
prêts dont les titres sont des ob lig ati ons, et m ê m e
de simples billets.
C e registre peut-il être considéré c o m m e un livre
de ba nqu e? son ti tr e , sa f o r m e , la qualité de celui
auquel il servait , celle des personnes qui y sont in
, la nature des opérations q u ’il m e n t i o n n e ,
les titres qu'il r e l a t e ; t o u t ne se r é u n i t - i l pas pour
d iq u ée s
exclure cette i d é e ? et lors m ê m e q u ’il aurait été tenu
par un h o m m e dont la profession n’aurait point été
exclusive de celle de b a nqu ie r, pourrait-on voir dans
ces livres autre chose que le bordereau du portefeuille
d ’un prêteur à intérêt ?
L e registre du i 5 germinal an
i
3 , contenant la
note des sommes placées chez P u r a y , est composé
�(
19 )
(9$
de 414 articles, concernant tous des liabitans _de
R iom , ou de lieux circonvoisins.
G o m m e celui du 11
ventôse an
12,
il rappelle
les sommes prêtées à P u r a y ; il indique la nature des
effets souscrits par lui, leur date , celle de leur échéance,
le renouvellement et le taux de l ’intérêt.
Exemple :
N.° 217. « L e
5 septembre i 8 o 5 , j ’ai pris de N....
« 460 fr. ¿1 10 pour cent pour six mois. 11 y a effet
« de 433 fr. pour le 5 mars 1807 ».
Dessous est é c r i t , « le 5 mars 1 8 0 7 , je devais
483 fr.
fr.
3 c.
d e .....................................................................507 fr.
3 c.
« Intérêts de 6 m o i s ...................24
« J ’ai fait effet pour le 5 sept. 1807,
« Intérêts d ’un a n .........................46
11.
5 septembre 1808,
d e ....................................................................... 553
14 c.
« J ’ai fait un nouvel effet, au
C e livre a - t - i l plus que le premier les caractères
de la banque ? s’ unissant à lui par son titre , pour
en exclure 1 i d e e , ne vient-il pas également corroborer,
par sa c o n t e x t u r e , les observations que nous avons
eu lieu de f a ir e ? et si du prem ie r, l ’on a pu dire
qu’ il était le bordereau du portefeuille d'un prêteur
à i n t é r ê t , ne faut-il pas assurer du second q u ’ il est
aussi le bordereau des dettes d ’ un emprunteur à intérêt.
Ces registres ont cessé , savoir : le p r e m i e r , au
i 1 juillet 1808, et le s e c o n d , au 6 février 1810.
6
'
�( 20 )
Cette différence dans les époques de cessation du
registre, contenant la note des prêts de P u r a y , et
de celui établissant ses emprunts, donne lieu à quelques
observations.
L a loi de 1807 a yan t prohibé le prêt à usurè , il
paraît que P u ra y crut devoir s’interdire toute espèce
de plac em e nt ; mais c o m m e il devait l u i - m ê m e des
sommes co n si dé r ab le s, el q u’au l e m sd o n t nous pavions,
les fonds q u ’il avait confondus dans son é t u d e , la
mauvaise volonté ou l’impossibilité où
étaient ses
débiteurs de satisfaire à leurs engagemens , avaient
déjà établi dans ses affaires la mine qui devait bientôt
les re n v e rse r ; P u r a y était obligé de continuer ses
emprunts pour servir les intérêts de tout ce q u ’il
devait.
'
Si ce fait ressort de la combinaison des dates des
deu x registres dont nous venons de pa rle r, n ’est-on
pas obligé de convenir que P u r a y , victime de l’ usure,
sous une loi bienfaisante, qui semblait devoir la faire
cesser pour tout le m o n d e , a trouvé
dans ce qui
faisait le bonh eu r de t o u s , un poison funeste qui
devait hâter sa d e s t r u c t i o n ?
Mais arrivons à ,1810.
Cett e ép o q u e , plus que toute a u t r e , nous manifeste
Tembarras de P u r a y ; il semble que l ’illusion s’est
évanoui e : la difficulté d’emprunter se fait sentir; les
rentrées s’opèrent avec pein e; déjà plusieurs créanciers
se sont retirés après avoir inutilement réclamé leurs
fonds ; des bruits désavantageux circulent : « Suis-je
�( 21 )
ruiné »? T e l l e est la question que P u r a y devait se
faire à lui-même.
Il lui était difficile d ’y répondre ; combien d’é lémens divers ne fallait-il point rassembler? co m b ie n
de documens imparfaits ne fallait-il pas rapprocher et
consulter pour connaître sa situation? U n travail aussi
long
ne pouvait
s’exécuter
que
diffic ilement, au
milieu des occupations du sieur Puray. Il osa ce p e n
dant l ’entreprendre ; et c o m m e l’espérance reste
toujours cac hée dans le cœur de l’h o m m e m ô m e le
plus malheureux , P u r a y croyant encore à un résultat
qui pourrait présenter un déficit peu con s id ér ab le,
voulut donner un essor à son crédit , en affectant
de p r ê te r , tandis q u ’il continuait ses emprunts.
P o u r atteindre son b u t , P u ra y organise differens
registres : il faut les parcourir.
L e premier est du mois de mai 18105 sur la c o u
verture sont écrits ces mots : livre de banque. L 'i n t é
rieur de* ce livre est divisé en trois parties.
L a prem ière est indiquée par ces m o ts :
* Série num érique des sommes que j e dois. «
E
No.
ni.
x e m p l e
:
20 ,7 23.
No. 224.-77.
11 n o v em b re 1810.
L a seconde partie a pour titre :
<r N ote des dem andes en rem boursem ent, a in si que
des échéances. »
�( 22 )
E
No. 2g.
x e m p l e
:
3,000 fr.
12 m a i 1810.
i , 5 o o fr.
L a troisième et dernière partie est ainsi indiquée :
«• N ote des sommes q u i me sont dues. »
E x e m p le :
N o . 38.
i o o fr.
5 p. i o o .
i o n o v e m b r e 1 8 0 7.
Voilà P u r a y donnant le nom de livre de banqu e
au registre qui mentionne les sommes q u’il d o it , et
celles qui lui sont dues. C e l le dén om in ati on, si con
traire à la chose q u’elle doit in d iq u e r, ne peut avoir
aucune influence sur les esprits susceptibles de réflexion.
E n e i i e t , les opérations de P u r a y , en 1 8 1 0 , étaient
du m ê m e genre que celles auxquelles il se livrait en l ’an
1 3 ; ce dernier l i v r e , c o m m e les premiers, ne parle
toujours que d’argent prêté à des habilans de R i o m ,
ou d ’emprunts faits à des ciloyens de la m ê m e ville:
nulle part dans ce dernier l i v r e , pas plus que dans
les p r e m ie rs , l ’on ne trouve une opération de banque
proprement d i t e ; pas d e c h a n g e , pas de transport de
place en place; il n’y a d ’autre différence à remarquer
que celle résultant de ce q u ’un seul liv re, divisé en plu
sieurs parties, con tie n t'c e q u i , en l’an i 3 , était r e n
fe rm é dans deu x regislres ayant des titres dislincls.
C ett e diilérence, loute légère q u ’ elle puisse paraître,
a cependant donné lieu au titre dont on se prévaut.
P u r a y voulant indiquer ce livre d ’ un seul m o t , et ne
�( * 3 ')
pouvant l ’appeler Livre cTusure, devait nécessairement
y substituer la dénomination de
Livre de b a n q u e,
expression qui n’a pu abuser que ceux q u i , par h a bi
tude, voudraient confondre deux choses si différentes
et si essentielles à distinguer.
L e second registre est du 17 mars 1810. Il est intititulé : E t a t courant de la banque.
Ce l iv r e , inventé pou r établir l’état de l ’entrée et
de la sortie des fonds, co ntien t, jour par j o u r , et la
noie des emprunts de P u r a y , et les remboursemens
q u ’il recevait ; et celle des prêts ou des rembourse
mens q u ’il faisait
les sommes
lui-même. Il indique simplement
par entrée et so rtie, sans mention des
effets auxquels elles se rapportent.
E x e m p l e :
ENTRÉE.
i . er a v r i l 18 10 .
Id em .
R e ç u en p la c e m e n t , 1 1 0 . 7 7 ,
de M .
P a y é à ....
n°. 5 o.
i,o u o
p o u r l ’ effet
fr.
SO RTIE.
»#
16 2 6 fr/
L ’on ne pense pas, q u’après les explications qui-iont
déjà été données, les créanciers se méprennent sur les
conséquences à tirer de ce registre : il n’établit rien de
plus que les autres; il s e ,r éfère à celui ,du mois de
mai; il en est une annexe., et ne contient autre chose
que deux calculs, dont les résultats comparés devaient
éclairer le sieur P u r a y sur sa situation.
L e troisième registre, qui c om m en ce'a u ss i au l y
mars 1 8 1 0 , a pour îtitre, J o u rn a l g én éra l, et sur le
�( H )
verso de la première f e u i ll e , on trouve ces mots : étu d e}
banque, d ép ôts, rentes, qui indiquent que tout ce qui
a rapport à ces différens objels est confondu dans le
corps du livre.
C e re gistre, c o m m e celui qui p r é c è d e , mentionne
les sommes par entrée et sortie ; il n’en diflère q u ’en
ce q u ’il contient tout ce que P u r a y percevait ou payait
pou r quelque cause que ce f û t , tandis que le premier
ne faisait q u ’indiquer les résultats des prêts et des e m
prunts.
C e livre , loin de faire naître des idées de b a n q u e ,
en est exclusif plus que tout a u t r e ; il devait éclairer
le sieur P u r a y sur sa situation ; aussi c o m prend-il ce
qui est relat if à l ’é t u d e , ce qui regarde les d é p ô t s ,
ce qui con cerne la perception des rentes; et si le mot
b a n q u e se trouve placé au milieu de tous ces objets,
c ’est parce que le sieur P u r a y ne pouvait omettre dans
ce travail général l’objet le plus important, ses prêts
et ses emprunts malheureusement trop multipliés.
Ces trois registres ont duré jusqu’au 26 mars 1 8 1 1 ,
é p o q u e de la disparition de P u r a y ; le second et le troi
sième établissent q u e , pendant les derniers mois de sa
présence à R i o m , les sorties ont constamment excéd é
les rentrées , et que du 16 au 26 mars, il a reçu 3 , 1 7 4 fr.
22 c e n t . , et a p ayé
4 ^ 4 4 f 1'* ^ cent. Cette observation,
qui trouvera dans la suite un e application plus direc te,
doit ce p en d a n t, dès cet instant m ê m e , faire apprécier
la justesse de l ’opinion de ceux qui persistent à sou
tenir que P u r a y a fui en emportant des som m es si
considérables ;
�( *5 )
considérables; que , dans leur esprit d’e x agé ra ti on , ils
ne peuvent pas m êm e en fixer la valeur.
Mais r e v e n a n t , nous croyons q u’il est établi que
les registres tenus par P u r a y n’ont aucun des caractères
qui constituent la banque. V o y o n s actuellfement s’il a
pu acquérir la qualité de banquier par ses relations
a v e c Albert.
Les créanciers produisent à ce sujet quelques feuilles
info rm es , écrites en partie de la niain du sieur A l b e r t ,
en partie de celle du sieur S a v o u r e u x , son commis, et
enfin de celle du sieur Puray lui-mêm e. I l paraît qu'ils
veulent prétendre que ces feuilles ont été extraites d ’un
registre destiné à consigner les opérations que ces d eu x
h om m es faisaient ensemble et en c o m m u n , d’où ils
induisent que P u r a y participant aux opérations d ’un
ban qu ier, doit être considéré l u i - m ê m e c o m m e ba n
quier.
‘
P o u r donner de suite une idée coiriplèt'è de cetié
pièce , il faut figurer la tête des colonnes qui divisent
chaque page.
N° du registre,
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P.
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1
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DATES.
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CAISSE.
SORTIE.
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R appel.
. 1 ■'
Quel Caractère p euvent avoiç.cës feuilles? M em bres
épars d’un travail dont on ignore l’objet et le b u t , leur
présence dans l’étu de de P u r a y serait-elle suffisante pour
7
&
�( 26 )
le faire regarder c o m m e b a n q u ie r ? les créanciers ne
les ont-ils pas jugées e u x - m ê m e s indifférentes à leur
ca u s e , en négligeant de les faire coter el parapher
par le juge de paix ? A u jo u r d ’hui pourrait-on donner
quelque valeur à ces feuilles, dont .on ne voit ni le
c o m m en cem en t ni la
fin,
et
qui
depuis nombre
d ’années étaient restées ensevelies dans la poussière
d ’ une é t u d e ?
L ’on pourrait s’èn tenir là : mais Pu ray doit, pou r
dissiper toutes les ob sc ur ités , donner quelques expli
cations de plus.
L o r s q u ’à la fin de l ’an 9 , il se livra à des e m
pr unts, a vec le dessein de prêter l u i - m ê m e , il eut
bientôt à sa disposition des sommes considérables.
N ’en tro uv an t point le p l a c e m e n t , et voyant avec
peine q u ’il payait les intérêts d ’un argent qui ne lui
produisait aucun profit, il voulut verser ces fonds
dans la caisse du sieur Albert. Celui-ci accepta : il
y eut de la part de P u ra y divers versemens qui fu ie nt
suivis de placemens faits par Albert j il paraît m ê m e
q u ’à cette ép oqu e il y eut projet d ’association, mais
trouvant b e a u c o u p de difficultés à l’organiser, l’un
et l’autre convinrent q u ’ Albert continuerait de placer
jus qu’au m om en t où ils seraient d’accord sur les co n
ditions de leur association projetée. Alors fut inventé
le registre dont les créanciers de P u r a y produisent
quelques feuilles, et qui n ’était autre chose que le
tableau de représentation
des sommes versées par
P u r a y ch ez Albert et placées par ce dernier. D e nou
�( 27 )
6 iS>
velles réflexions les ayant bientôt convaincus q u ’il,
était iinpûssiblè d ’établir une société entr’ e u x , leurs
relations cessèrent; P u r a y
retira ses fonds , et les
choses en demeurèrent là.
Plus lard, Puray eut encore des relations ave c A lb e rt ,
mais elles sont d ’un genre bien différent que les pre
mières. Pressé par des remboursemens ou des paiemens
d ’i n t é r ê t , il fallut
plusieurs fois avoir recours à la
ban qu e du sieur A l b e r t ; mais ces emprunts d eve
nant trop multipliés, le sieur Puray? perdit b i en t ô t
cette ressource , et fut obligé de rembourser avec
des effets de son portefeuille les sommes q u’il avait
empruntées.
Ces relations ne peuvent constituer la banque.
L a première époque ne peut tout au plus présenter
qu’ un projet de société qui n’a point été réalisé. Si
cette société eût existé , on en trouverait la pr e u v e
au g r e f f e , où la loi ordonnait que l’acte serait déposé.
Enfin , si l’on pouvait supposer l ’existence de cette
so c ié t é , cette supposition serait inutile pour le but
que les créanciers se p r o p o s e n t , dès que d ’ une part
elle aurait cessé avant l’an i 3 , époqu e dès laquell e
on rapporte tous les registres, constatant les opéra
tions de P u r a y , et que de l ’a u t r e , cette société ne
pouvant être considérée que com m e une société en
par ticipation, n’aurait rien changé aux qualités des
parties contractantes.
La
seconde époque n’a pas besoin d ’explication.
P u ra y ayant dans ses besoins recours à la b a n q u e ,
8
�( 28 )
ne peut pour cela être considéré c o m m e banquier.
Il faut actuellement .ce livrer à l’exam en de ce qui
concerne
les sieurs Morin , banquier à G e r m o n t ,
S é b a u d , banquier à P a r i s , et V i n c e n t , banquier à
L y o n . Les relalions de P u ra y avec ces diffèrens per
sonnages ayant paru aux créanciers le plus for! soutien
de leur systè me, il devient indispensable d’analyser et
d'apprécier tout ce qui est produit à ce sujet.
Sous ce point de v u e , l ’affaire réside spécialement
dans le registre de correspondance du sieur P u r a y ,
où l’on fait remarquer différentes lettres écrites à ces
différens banquiers ; lettres qui, suivant les créanciers,,
annoncent
de la part de P u r a y des transports d ’argent
de place en place et des opérations de banque. Po u r
a p p u yer cette idée et lui donner plus de d é v e lo p p e
m e n t , les créanciers produisent les lettres adressées
par M o r i n , Sébaud et V in ce nt h Puray.
T r a ç o n s , d'après les documens co m m u n iq u és , l ’his
torique de ces relations.
Une
lettre du 28 n ovem b re
1 8 0 6 , adressée par
P u r a y au sieur M o r i n , banquier à C le rm o n t , et an
térieure à toutes celles dont on fail usage contre l u i,
s’exprim e ainsi :
«
M es
fonctions
notariales
m e donnant par
« fois des relations qui m e mettent dans le cas, ou
« d’avoir besoin de f o n d s , ou d'en fa ir e passer par
« la voie des tra ites, f a i trouvé sur le-premier o b je t,
« près de v o u s, une fa c ilité dont j ’ai usé et userai
« dès que vous accueillez mes d e m a n d e s . Quand au
�( 29 )
« second objet.............. , il m ’a semblé que je sortirais
« de tout em b ar ra s, en obtenant d e y o 'u s un crédit
« sur votre maison de Paris , et un autre sur voire
« maison de L y o n ; je vous le proposerai de 10,000 fr.
« sur c h a c u n e , sous vos auspices et votre recom mgn« d a tio n . Ma sig natu re, morç timbre el ma vignette
« seraient reconnus et accueillis à Paris et à L y o n ,
« et d'a illeurs f aura i crédit toujours dans mes traites y
« valeur reçue pour le compte de M orin et com pagnie....
a pour toutes ces opérations, il s xouvrirait nécessai« rement entre vous et m oi un compte courant. »
Les idées que fait naître cette lettre sont aussi incon
testables que faciles à fixer.
D ' a b o i d , c ’ est par suite de ses fonctions notariales,
et de ses relations com m e notaire, que P u r a y , dans ses
besoins de fonds, a eu recours à lu banque de Morin.
C e sont ces mêmes relations de notaire qui le mettent
dans le cas d’en faire passer, par la voie, des traites, à
L y o n ou à Paris.
Jusques-là pas un seul mot de banqu e; t o u t , au c o n
traire, en exclut l ’id ée, puisqu’il n’est question que du
notariat.
P u r a y dem ande ensuite un crédit a Morin ; nonseulement il veut correspondre avec les banquiers, sous
ses auspices et sa recommandation , mais encore il re
connaît que la valeur de ses traites doit être reçue pour
le compte de Morin et compagnie.
Ainsi P u r a y , notaire, demande un crédit à M o r i n ,
banquier ; il reconnaît -qu’il ne peut correspondre avec
�U d
( 3o )
les ba nqu iers , que sous les auspices et la re com m an
dation d’un liom me ayan t la m êm e profession ; il sent
m ê m e que ses traites ne p e u v e n t être reçues q u ’au
tant q u ’elles seront portées au compte du banquier
qui le crédite. P u r a y p e u t - i l manifester {¡lus ouve r
tement q u ’il n’a point de b a n q u e , reconnaître d ’ une
manière plus positive q u ’il n ’est point banquier , et
avo ue r plus f o r m e l l e m e n t que p e rs onne ne lui re
connaît c e tt e 'q u a lit é ?
L o r s q u ’ensuite il a j o u t e , que les opérations q u ’il
fe ia a vec le crédit ouvert par Morin , nécessiteront
l ’ouverture d’ un co m pte courant entr’e u x , ne c o m plette-t-il
pas l’idée que l’on vient de se f orm er? ne
dit-il pas bien explicitement à M o r i n , « vo us, commç
« ba n q u ier, vous serez en com pt e a vec les banqu iers,
« auprès desquels vous me créditez, m o i, comme n o
ta taire, c o m m e simple particulier, ayan t besoin de
c< votre crédit, pour mes affaires, je serai en com pt e
« courant a v e c vous. »
L e s propositions de P u r a y furent accept ées ; une
lettre écri te par M o r i n , le 12 décem bre 1806, l’in
vi te à se rendre à C l e r m o n l p o u r convenir des bases
du crédit.
Différentes correspondances s’ouvrent bientôt après;
l ’ une entre le sieur Séb a ud, banquier à Paris, et Je sieur
P u r a y , notaire à B i o m . - L e s lettres écrites par Séb aud ,
donnent constamment soit sur l ’adresse, soit dans l’in
térieur, la qualité de notaire au sieur P u r a y , sans
jamais y ajouter celle de banquier.
�I il J
L a seconde est encore entre le sieur P n r a y et le
sieur V i n c e n t , banquier à L y o n . - - Vincent , c o m m e
S é b a u d , ne reconnaît à P u r a y d’autre qualité q u e
celle de nolaire.
L a t r o is ièm e, qui parle souvent des opérations qui
ont eu lieu entre les sieurs Sébaud , Vin ce n t
et le
sieur P u r a y , est entre M o rin , Banquier à C le rm o n t ,
et Puray. — M o r i n , qui connaissait si bien la qualité
de P u r a y , qui n’était étranger à aucune de ses opéra lio n s , s’accorde ave c Sébaud et Vin cen t pou r lui
donner exclusivement la qualité de notaire.
A i n s i , voilà trois banquiers
corresp ondais a v e c
P u r a y , qui ne lui reconnaissent ni b a n q u e , ni la qua
lité de banquier; qui traitent a v e c lu i, sachant q u’il
e xer ce exclusivement la profession de nolaire: c o m
ment donc leurs opérations avec ce nolaire pour
raient-elles être des opérations de b a n q u e , proprement
dites?
Ouvrons
actuellement ces différentes
correspon
dance s, et voyons si les banquiers se sont mépris sur
la qualité de P u r a y , et si la nature des relations
q u ’ils avaient avec lui, leur permettait de le
regarder
co m m e un de leur confrère.
C ommençon s par Sébaud.
L e 2.6 décembre 1806 , P u r a y lui annonce q u’il
lui adressera plusieurs traites, en verlu du crédit qui
lui a été ouvert par le sieur Morin. Par autre du 29
du m êm e mois^, il ajoute que c ’est du sieur Morin q n ’il
recevra ses remises; q u ’il ne veut point avoir de co m pte
�(
32
)
par ticulier ; que ses écritures se trouveront dans la
caisse de Clermont.
Il fait ensuite différentes Iraifes : Sébaud lui en
accuse réception à chaque fois, et dans les lettres qui
ont été commun iqu ées , et dont la derrière- est du
i
5 mars 180 8, il n ’en est pas une qui ne dise :
O u « que bonne noie en a été prise pour la porter
« au débit de la caisse des notaires de Clermont » ;
O u « q u ’il y a débit pour le compte de la banque
« de Clermont ».
Si au lieu de faire des traites, le sieur P u r a y faisait
verser des fonds dans la caisse de S é b a u d ,
Ce
dernier répondait
aussi constamment
« q u ’il
« avait instruit la caisse de Clermont du versement
« qui avait eu lieu, et q u ’il en avait été donné crédit
« h cette caisse ».
Ainsi toutes les opérations de ba nqu e étaient entre
Mori n et Sébaud ; P u r a y n’y participait en aucune
m aniè re; il ne recevait du banquier de Paris que les
renseignemens relatifs au crédit que lui avait ouvert
le b a n q u i e r de C l e r m o n t ; c ’était a v e c ce dernier seul
que P u r a y a v a i t à faire.
Son c o m p t e courant était
celui d ’ un simple particulier; Sébaud avait donc bien
raison de ne pas lui donner la qualité de banquier.
L a correspondance de Vince nt , de L y o n , a des
caractères semblables a celle que l’on vient d’analyser.
M ê m e avis de la part de Puray.
M ê m e envoi de traites.
M ê m e versem ent de fonds.
Même
�M ê m e réponse de la part de Vincent.
Les Irailes « sont accueillies au débit de Morin ».
Pou r les versemens, il « en crédite le compte de
M o rin ».
Ainsi V i n c e n t , de L y o n , avait donc les mêmes raisons
que Séb aud, de P a ri s , pour ne pas reconnaître en
P u r a y la qualité de banquier.
L a correspondance de Mori n devait être plus consi
dérable; P u r a y faisait h c e d e banque de fréquens
em prunts, qui nécessitaient beaucoup de lettres de
demandes et d’envois d ’argent : oulre cela , le crédit
ouvert à P u r a y exigeait souvent des explications et
des règlemens de compte. Aussi re m a rq u e-t-o n un
très-grand nombre de lettres écrites dans le courant
des a n n é e s i 3 , 1 4 , 1806, 1 8 0 7 , 1808, 1809 et 181 0;
dans aucune l’on ne trouvera une seule phrase, un
seul mol qui puisse faire penser que le sieur Morin
a regardé un seul inslant P u ra y com m e banquier.
L a plupart de ces lettres attestent , au contraire,
que P u r a y était entièrement étranger aux usages du
com m erc e , et spécialement à ce u x de la b an qu e,
dont Morin était obligé de l’instruire.
C ’était des mal-entendus continuels sur la valeur
des term es; c ’était des reproches sur son ignorance
des usages de la banque de L y o n , qui ne reconnaît
point de jours de grâce pour les paiemens; ce qui
nécessitait que les Irailes fussent toujours précédées de
lettres d’avis.
E n f in , les erreurs de P u ra y en ce genre étaient si
9
�'A
( 34 )
multipliées, que M o ri n ayan t à craindre q u ’elles ne
missent son correspondant de L y o n dans une situation
embarrassante ou f â c h e u s e , suspendit le crédit q u ’il
avait ouvert sur cette vi ll e, et en prévint P u r a y par
lettre du 26 n ovem b re 1808.
Ainsi celte correspondance plus que toutes les autres,
p r o u v e que P u r a y n ’était pas banquier; q u ’il ne pou
vait l’être; q u ’il n’avait pas m ê m e la connaissance des
usages de la banque.
S’il élait besoin d ’ajouter quelque chose à la force
de faits déjà si clairs, Ton pourrait in vo q u e r le té m oi
gnage du sieur M ori n l u i- m ê m e : il est créancier de
P u r a y ; il perd des sommes considérables; plus que
tout autre , il a droit de se plaindre : cependant il n’a
pas craint de manifesler son opinion sur le procès
a c t u e l , et de déclarer q u ’il n’avait jamais regardé
P u r a y c o m m e banquier.
S ’il était in terrogé , il répondrait c o m m e il a dû le
faire devant le juge d ’instruction :
« Q u e le crédit par lui ouvert à P u r a y , sur ses
« correspondants de Paris et de L y o n , n’était autre
« chose (ju line fa c ilité que P u r a y lui avait dem an dé e
« pour po uvo ir fournir directement des mandais sur
« ces deu x villes , sans l ’inlervenlion de lui Morin ».
I l dirait : « que chaque fois que Pu ra y se prévalait
« sur ses corresp ondans, il était spécialement tenu de
« lui donner avis , par détail de sommes et de d a t e s ,
« afin q u ’il pût l’en déb iter, et en créditer le corres« pondant sur leq uel P u r a y tirait.
�Il dirait : « qu’ il ¡ici point connu Le sieur P u ra y
« comme
b a n q u ie r,
q u’autrement
le sieur
Puray
« n’aurait point eu besoin de son intermédiaire ».
Il ajout er ait: « que du moment» où il écrivit à
« ses
correspondans
de
ne
plus créditer le sieur
« P u r a y pour son c o m p t e , ces correspondans cessèrent
« et ne firent plus aucune opération a vec lui ».
E n f in , si on l’interrogeait sur la nature des registres
produits par les créa nciers, il répondrait sans liésiter
« q u ’il ne les reconnaît point pour être ce ux d ’un
« banquier 3 tant en La form e qu'au f o n d ».
Q u e pourrait-on ajouter à celte déclaration? ne
renfermeM-elle pas toute la cau se , et les créanciers
de Puray ne sont-ils pas condamnés par le seul d ’entre
eux i capable’ d’apprécier et la nature des opérations,
et la qualité de leur débitefur ?"
1
Nous ne pouvons terminer saris dire un mot de la
vignette et du chiffre du sieur P u r à y ; les créanciers
disent que cet ornement placé sur leurs effets, les a
autorisés à penser que leur débiteur était banquier.
S’il y avait à raisonner sur un objet aussi futile ,
on leur répondrait q u ’ils ne pouvaient se méprendre
sur les conséquences à tirer de celte vi gn ett e, puisqu elle né mentionnait aucun établissement de banque
m ention que P u r a y n ’eût
pas manqué
de faire à
l ’instar des notaires de G e r m o n ! , et autres chefs de
pareils établissement, si réellement il eût été banquier.
Mai s chacun des créanciers ne pouvait-il pas con
naître sur ce point le goût du sieur P u r a y ? Il était
10
�C 36 )
impossible cTenfrer dans son étude, sans s’apercevoir
de sa prédilection pour les images et les lableaux de
1oute espèce. C ’étaienI des cartons rouges, verts, jaunes,
bleus,
avec é t i q u e t t e , ornés de chiffre et vignette.
Sur un m u r , l ’on
apercevait
un tableau
tracé et
écrit a vec de l’encre de différentes couleurs. Sur son
bur eau é t ai e nt des e x p é d i t i o n s d’actes, ayant une tête
i m p r i m é e et son chiffre au-dessus ; e n f i n , tout ce qui
l ’entourait
se
faisait ainsi remarq uer par
quelque
caractère singulier ou bizarre.
Ses effets auraient-ils seuls été exceptés de cette
m a n i e ? mais en ce point
elle avait quelque chose
de raisonnable. P u r a y ne se servait pas de papier
l i m b i é ; il était assez simple q u ’il prît quelques pré
cautions pour reconnaître plus facilement son pa pier,
et em pêc h er q u ’on ne le contrefît.
P u r a y n ’est donc point banquier.
Est-il c o m m e r ç a n t ?
Parcourons les faits q u’on lui impute.
Le
premier est relatif au
b au m e
de
vie. [Les
cr éan cie rs, pour mo n t r e r que P u ra y en a fait c o m
m e r c e , produisent sa correspondance a vec l ’inve nteur
de ce spécifique.
L ’on a déjà expliqué ce fait ; il suffit d ’ajouter ici
que P u ra y devint dépositaire de ce remède ; mais ce
dépôt ne le constitue pas plus marchand que le sieur
D u fa u d , directeur de la posle ne l’est , pour avoir
accepté celui des grains de santé du doc teur Franck.
L e second fait de c om m erce porte sur le K e r s w a s e r j
�( 37 )
le sieur P u r a y en a v a i t , d i t - o n , une grande quantité ;
l ’on rapporte d’ailleurs la leltre d’envoi qui lui en
a été faite, et on en co nclût q u ’il est co mmerçant.
L ’on ne veut point rép éter ce que l’on a dit plus
haut à ce sujet.
Mais il faudra que les créanciers expliquent co m
ment un seul envoi de liqueur peut établir une pro
fession habituelle de c o m m e r c e ; com m en t il peut cons
tituer m ê m e un acte de c o m m e r c e , quand il est fait à
un individu non commerçant.
L e sieur P u r a y était-il d ’ailleurs privé de la faculté
de faire une provision de liqueur assez considérable,
po u r po u voir en céder à ses amis ou à ses parens?
A - t il établi un magasin de cette l i q u e u r ? A - t - i l
cherché à la v e n d r e ? C o m m e m arch a nd, en a t-il fait
sa déclaration à la régie des droits réunis?
A u t a n t de questions, autant de réponses favorables
au sieur P u r a y , e! qui sont la preuve de la légèreté des
imputations de ses créanciers.
L e dernier fait résulte de la production d ’un registre
non coté ni paraphé , et portant pour suscription :
<\ffciLres et spéculations particulières.
C e registre conlient la note d ’une association de
P u r a y a v e c divers individus pour achat et revente de
denrees, telles que fro m en t, o r g e , etc.
Si les créanciers avaient bien exam iné ce registre,
ils se seraient sans don le dispensés de le produire. En
eflet , ces spéculations finissent en l ’an 11 ; il serait dif-
�•;\Vc
( 38 )
ficile de deviner c o m m e n t , en 1 8 1 1 , elles pourraient
constituer un négociant,
'
.
D ’ailleurs, sont-ce bien la des fails de c o m m e r c e ?
L e s propriétaires ne sejp-eTinettenl-ils pas lous les jours
de pareilles spéculations , sans être pour cela considéréscomrae co m m erç ans? et P u r a y , en fournissant les fonds
à ce u x qui se chargeaient des achats et dos vent es, ne.
pouvait-il pas, sans être regardé c o m m e co m m e rç a n t ,
courrir l a ' c h a n c e de perdre l ’intérêt de son argent ,,
ou d ’en lirer un parti plus avantageux.
N e craignons pas de le.dire^ ces faits sont futiles et
11e p r o u v e n t îieii. L ’èsprit de prévention peut seul leur,
donner
quelque valeur ; mais aux y e u x dé l’h o m m e
im p a rt ia l, Priray
ne sera
pas plus marchand que
banquier.
r
Ap rès L’ e xa m en de ces p iè ce s, il convient de fixer
son attention-sur des fait^ d’ un ordre différent, et sur
la procédure qui a été instruite côntré le sieur P u r a y
depuis l ’é p oqu e de sa disparition.
L ’on
se rappelle que les registres de 1810 avaient
spécialement él é établis pour éclairer le sieur P u r a y
sur sa situation. L ’on se s o u v i e n t aussi des d eu x livres
qui établissaient, jour par jou r, l'entrée et la sortie
de ses-fonds. L es résultats que P u r a y att endait , se
réunirent pour l ’accabler. A u mois de mars 1 8 1 1 , il
11e peut plus douter que le mal était irréparable. D ’ un
c ô t é , . s o n passif se montait à des sommes énormes,
et était exigible su r-le-cham p, tandis que son actif,
bien moins, considérable, était d ’ailleurs d’ un rec ou-
�C 39 )
vre ment difficile; de l ’autre ¡¿ison crédit était perdu ;
les créanciers se succédaient pour iréclamér lduF3 fonds;
e t , pendant les derniers mois, il avait été obligé de
compter des sommes bien supérieures à cellès q u ’il
avait reçues.
‘
■V,
-
i. - 'i ;
Quel parti prendre dans^ u n e ‘situation aussi déses
p é r é e ? P u r a y assèmblera-t-il ses créanciers? se liv re
ra-t -il à leur discrétion ? Mais il craint de les trouver
i n t r a i t a b l e s : d ’ailleurs il faut q u ’il se soumette à l ’e m
barras et aux désagrémens d ’ une explication ; q u ’il
entende et supporte leurs reproches;, son état,, n’en est
pas moins perdu ; il va ajouter par sa présence à la
désolation de sa famille. T ou te s ces raisons, tous ces
pr éjug és, peut être, fermeutent dans sa tête, allument
son. im aginat ion, et l’entraînent loin de son pays.
Il
part le 29 mars 1 8 1 1 ; ses ressources étaient nulles:
ses registres font foi q u ’à cette époque P u i a y n’avait
point d’argent à sa disposition; et dans la réalit é, ses
parens les plus proches, aidés de leurs a m i s 1, réunirent
leurs bourses pour lui fournir lé s’ fonds nécessaires à
son voyage .
' l,‘ ‘ P
:!i) *n
' '
C fx
‘'■
P u r a y , c o m m e surpris par la fo u d re , n ’avait eu le
tems de rien régler. Ses papiers ¿(aient en ’désordre ;
les co m m un ic atio ns’ q u ’il avait faites ne donnaient
auéune lumière certaine sùrle vé rifa ble état deschoses.
L e bruit de sa fuite est bientôt répandu : d’abord
l ’on s’en étonne , on refuse d ’y croire; mais la ce r
titude q u ’on acquiert fait bientôt n a î t r e ‘des soupçons
de ious genres.
^
,J0 •:Jî : —
�'( 40 )
( j L e s scellés sont apposés; les créanciers ) se ré u -riissent; ilsr tâcheht.de se Reconnaître; ils se choisissent
des chefs.
Il . -üoî - .
v.i .
L a faraillé P u r a y éludiait tous ces m ouvem ens : elle
entendait sans cesse répéter que P u ra y avail fui en
e m p o r t a n t ,l e t g a g e de ses créanciers ^que^la voiture
qui le portait était,chargée des richesses q u ' i l . e n t r a î
nait a v e c . l u i , et que la nouvelle patrie q u ’il allait se
choisir, le verrait bientôt dans.un état aisé et florissant.
C e i f e imputation devait mettre au désespoir ce u x
cjiii tenaient dé plus près aii sieur Pu ray. Ils avaient
assisté à ses derniers m o m e n s ; ils connaissaient ses
ressources : quelqu’argent em prunté par sa mère ou
son f r è r e , la montre de sa " f e m m e , quelques é c u s ,
produit des récompenses^ données à ses enfans dans
d e s te m s plus henriéux': tels étaient les trésors du sieur
P u r a y , et ses m o y e n s d ’existence pour l ’^ e n i r .
Le
retour du sieur P u r a y
fuf résoliv, c o m m e le
m o y e n le plus sûr de |fairp cesser ^ces calomnies^ il fut
proposé à c e u x des cr éanc ier s q u e la masse s’était ch o i
sis p o u r la diriger: m a is, c o m m e dans ces premiers m o
mens il était question de faillite, et des mesures q u ’elle
en tr a în e, l ’on fit (d^pendre ce r e l o u r .d e la promesse
q u ’on donnerait, de ne faire aucune
poursuite jus
q u ’à plus ample explication.
L e s chefs sentirent que cette proposition était a v a n
tageuse ; ils assemblèrent Jeurs c o m m e l la n s , leur c o m
muniquèrent les ouvertures de la famille P u r a y , et
les
�(
4i )
les appuy èr en t de toutes les raisons que leur sagesse
et leurs lumières purent leur suggérer.
C e l l e réunion se passa en discussions. U n e assem
blée nombreuse, composée d’individus de sexes diflérens , de condition et d ’éducation di lièrent es , donne
rarement des résultats que la raison puisse approuver.
L e s plus sages voulaient le retour de P u r a y ; le plus
grand n ombre y consentait ; quelques-uns plus pas
sionnés se lèvent , s’opposent à ce re tour; l ’assemblée
se dissout j et bientôt l ’ouverture de la faillite est
p r o v o q u é e , tandis qne dans le m êm e fems P u r a y est
dénoncé
c o m m e banqueroutier frauduleux.
Quels étaient les créanciers
qui
employaient des
m o y e n s aussi rigoureu x? Y en avait-il un qui eut traité
avec P u ra y sous la foi du c om m erce , qui fût lu im ê m e c o m m e rç a n t , q u i , en celt e q u a l it é , eût des
relationsd ’aOaires a v e c P u r a y , et pût venir dire q u ’il
était fondé à regarder son débiteur c o m m e banquier
ou commerçant ?
Rien de tout cela :
C etaient des liabitans de Riorn , la plupart capi
talistes, et plaçant leur argent au taux le plus avan
tageux , se faisant souscrire des effets à R i o m , payables
¿i R io m , ayant pour débiteur un notaire de Riom.
Q u ’y avait il donc dans les qualités des personnes et
dans la nature des pr êts , qui pû t faire soupçonner la
ban qu e 011 le c o m m e r c e ?
i* Cependant le tribunal de com m erce r e n d , le 1 3 avril
1 8 1 1 , un jugement qui déclare le sieur P u r a y failli,
�( 42 )
fixe l’ouverture de la faillite au 29 mars ; n o m m e
des agens provisoires et un ju g e -co m m iss aire à la
faillite, ordonne en m ê m e tems l ’apposition des scellés.
C e ju gement ne co m m e t point d’huissier pour les
différentes significations exigées par la l o i , à l’effet
de faire courrir les délais d ’opposition ou d ’appel.
C e premier acte d ’hostilité ne permettait pas au
sieur P u r a y de paraître; il n ’avait plus que des mal
heurs à prévoir ; sa liberté était compromise : les
créanciers plutôt excités par la haine que dirigés par
le u r i n t é r ê t , ne respectaient plus r i e n ; ils poursui
vaient criminellement leur d é b i t e u r , cherchaient à
com pr om et tre sa réputation, ou ¿1 attaquer la moralité
de ses parens et de ses amis. Qu e pouvait faire le
sieur P u r a y ? .............. f u i r , se taire, et a t t e n d r e , fut
le parti q u ’il crut devoir prendre.
L e 24 a v r i l , l ’extrait du jugement du i 3 est in
séré dans la feuille du département.
P a r acte du 27 du m êm e m o is , un huissier non
c o m m i s , écrit avoir affiché un extrait certifié c o n
f orm e à l ’e x p é d it io n ,
par les a g e n s , du ju g em e nt
du i 3.
Cet acte est a llaq u é de n u l l it é , i.° parce q u ’il n’a
point été fait par un huissier commis au désir de
l ’art. i
2.0
56. C. P . ;
Parc e que l ’extrait du ju g em e nt n’a point été
fait par l’ huissier, ministre de l’acte ;
3 .° Parce q u e rien n ’établit q u ’il y ait
extrait de ce ju geme nt j
eu
un
�(
43 )
4-° Enfin , parce que l ’acte n’indique pas le jour
de l ’affiche.
L e 7 mars 1 8 1 1 , les agens présentent req uê le à
M . le Président du tribunal de c o m m e r c e , et lui
demandent de com m et tre un huissier pour la signi
fication du jugement du i 3 avril. Sur celt e req uê le
intervient une ordonnance qui com m et l’ huissier Cola?.
L e 14 m a i , m ê m e a n n é e , le jugement du i
3 avril
est signifié à domicile par l ’huissier commis par le
Président.
C e l l e signification est aussi attaquée de nullité; l'on,
soutient q u ’elle a élé faile par un huissier sans ca
ractère , le président du tribunal de com m erc e ne
pou va nt le commettre.
L ’on donne bientôt suite à ce ll e procédu re ; des
syndics provisoires succèdent aux ag en s; les opéra
tions indiquées par le Code de com m erc e ont succes
sivement l i e u , enfin la faillite a des syndics définitifs.
L ’an 1812 arrrive. L e tems q u i s ’élail écoulé depuis
la
disparition du sieur P u r a y , les diftérens renseigne-
niens que l’on avait pu recueillir; les dé ve loppem ens
que cette affaire commençait à r e c e v o i r ; des discus
sions qui étaient nées entre les c r é a n c i e r s , et des
prétentions qu'ils avaient é le v é e s , concouraient à c o n
firmer dans l’idée que l’on avait déjà eue que P u r a y
n’était ni marchand ni banquier. Alors l ’on recueille
ave c soin tout ce qui échappe ; les faits les plus légers
sont réunis aux plus graves : un m ém oire à consulter
est rédigé ; il est présenté à un grand nombr e de juris12
�\0J
(
44 )
consultes, qui décident un animem ent q u ’ un notaire
ne peut êlre ni marchand ni b a n qu ie r, et que d ’ailleurs
les faits imputés à Pu ra y ne constituent ni le c o m
merce ni la banque.
Alors le a 3 juin
"
1812,
Puray
forme opposition
au jugement qui le déclare failli; il soutient que, n'étant
point com m erça nt , le tribunal de c o m m e rce était
incompétent ratione materiœ.
A cette é p o q u e , Ton pouvait supposer q u e le teins
et la réflexion auraient conduit les créanciers à accueillir
des m oy ens d ’arrangement. Ils avaient pu s’assurer
que leur débiteur était plus malheureux qu'e ux -m êm es ;
que loin de sa patrie, et éloigné des objets de ses
affections les plus ch è r e s, des chagrins de tout genre
«
venaient
rendre
plus
insupportable
le dén uem en t
complet auquel il était réduit. E n f i n , ils avaient pu
apprendre que sa mère avait été obligée de faire divers
emprunts pour lui faire passer des secours. Dans cet
état de choses, n’était-il pas naturel de penser que
les élans de la passion devaient êlre calmés, et que
l ’on pourrait enfin s’entendre ?
L e sieur P u r a y avait laissé une proc urat ion; on
crut que l ’instant était ve nu d’en faire usage. L ’on
proposa, i°. de délaisser aux créanciers toute la fortune
personnelle de leur débiteur , et de leur donner toutes
les facilités possibles pour l ’a l ié n e r , et en dis poser a
leur gré ;
2°. L a mère offrit le partage de ses biens , et de
�1( 4 5 )
délaisser la propriété directe de la portion qui devait
revenir à son fils;
3°. L a fe m m e se soumit à l’abandon de tous ses
d r o i ts , reprises et avantages matrimoniaux.
Que pouvait-on faire de plu s? Q u ’obtiendront les
créanciers qui leur soit aussi a v a n ta g e u x , sur-tout si
l’on ajoute que P u r a y ne leur demandait point de
quittance dé fin iti v e, et
laissait
à chacun d ’eux le
droit de r é c l a m e r , dans l ’ave nir , le montant entier
de sa créance ?
Les créanciers ont eu tout le lems nécessaire pour
apprécier ces propositions; elles ont été connues d ’e u x
c o m m e particuliers , soumises à l’e xam en de leurs
sy n d ic s , c o m m u n i q u é e s à M. le juge - commissaire.
Comment c o m e \ o i r q u ’elles aient été rejetées, si l’on
neMippose, d ’un côté, une passion aveugle, et de l’autre,
des prétentions à une sévérité q u ’on ne saurait fléchir.
T o u t espoir d ’acco mm odement
étant é v a n o u i , il
fallut bien songer à se défendre :t la famille P u r a y
devait croire q u e , dans la lutte cm elle était obligée de
se présenter, on observerait envers elle les égards dus
au m alh eu r, ou q u ’au moins les créanciers ne mécon
naîtraient pas les usages du ba rre au, jusqu’au point do
ne pas lui donner communication des pièces dont on
entendait se servir.
Les consultations délibérées en faveur du sieur P u ra y,
avaient été communiquées à l ’avocat d e s ’ créanciers.
En nem ie de toute surprise, la famille Voulait que l’on
pût répondre aux moyens que celte consulta lion con
�te na it, et donner toute l ’attention nécessaire à la
question importante qui y est traitée. Ce procédé
semblait exiger quelque r e t o u r , et il était
difficile
de penser que des faits seraient cachés à ce u x qui
faisaient connaître les m oye n s de droit dont ils en
tendaient se servir.
C'est cependant ce qui a eu lieu : les créanciers
p ar u r e n t à l ’a u d i e n c e , a r mé s de registres et de pièces
absolument inconnus à l’avocat du sieur Pu ray. Ils
avaient eu le terris de choisir tout ce qui pouvait être
avantageu x
à leur système. Lett res
de différentes
n a t u r e , actes de c o m m e r c e , correspondance avec des
b a n q u i e r s ; co m m en t saisir, au milieu d ’ un auditoire
n o m b r e u x et dans la chaleur de la discussion, les
rapports de tant d’objets dont la valeur ne peut être
parfaitement con nue et a pp ré cié e, que dans la solitude
du cabinet ?
L e rédacteur du m ém oir e doit en c o n v e n i r ; il fut
ép ou van té
de ce ll e masse de preuves. Il partagea
sur-le-ehamp la conviction du confrère qui plaidait
contre lui ; il le laissa connaître a v e c autant de fran
chise q u ’il en met aujourd’hui à déclarer que sa cons
cience avait été abusée par des apparences trompeuses.
Il se doit à lui-même d ’ajo uter, q u ’il a la conviction
que l’avocat des créanciers ne connaissait de ces pièces
que ce qui en a été lu à l’audience , et que si c o m
munication n ’en a pas été donnée pour la plaidoirie,
ce procédé est imputable aux créanciers seuls,
qui
�(
47 )
peut-être dans ce dessein ont affecté de ne remettre
que fort tard leurs pièces à leur avocat.
L e 18 août 1 8 1 2 , est intervenu au tribunal de
c o m m e rce ju g em ent contradictoire, qui déclare l ’o p
position de P u ra y tardive et non recevable.
L e sieur P u r a y a interjeté appel de ce jugement»
le
5 décembre m ê m e a n n é e , et s’est également
pou rvu contre celui du 18 avril 1 8 1 1 , qui le déclare
failli. — T e l est l ’état de la cause.
M O Y E N S .
L e but principal de ce m ém o ire était de faire con
naître les circonstances de c e ll e cause. Elles avaient
été présentées sous tant de laces différentes, livrées
à des interprétations si malveillantes et si haineuses;
elles étaient enfin tellement dénaturées, q u ’il étail ¿i
craindre q u ’ une plaidoirie fût insuffisante pour les ré
tablir dans leur vé ril a ble j o u r ,
et pour Jaiie aper
cevoir les conséquences auxquelles elles conduisent.
Mais actuellement que lotis les faits sont c o n n u s ,
la discussion doit êlre courte et facile.
A u fond , la première queslion ;i e x a m i n e r , est celle
de savoir si un notaire peu! ê lr e considéré c o m m e
banquier ; si exerçant une profession exclusive de la
banque et du c o m m e r c e , on peut , en appréciant ar
bitrairement quelques actes qui paraîtraient étrangers
à cette profession, lui attribuer une qualité q u ’il n’a
pas, lui imposer des obligations ou des devoirs a u x -
�\V j
( 43 )
quels il n’a pas entendu se s o u m e t t r e , l ’enlacer en
fin dans des chaînes plus pesanles que celles dont le
chargeait son existence sociale.
U n e consullalion qui esl jointe au m ém oir e , e x a
mine ce point de la c a u s e , avec lous les détails qu'il
peut comporter : l ’on rie veut point lasser l’altenlion
par des rediles inuIîles ou fastidieuses, mais Ton doit
ajo uler quelques réflexions.
L e co m m er ce est une des professions les plus inté
ressantes de la société ; devant y occup er une place
distinguée, elle do it, c o m m e toutes les a u t r e s , avoir
des droits et des privilèges particuliers auxquels co r
respondent des obligations et des devo ir s'qui lui sont
aussi particuliers.
Ainsi les caractères distinctifs du co m m e rç a n t sont
la paten te , le droit q u ’il a d ’être appelé dans les as
semblées et corporations de c o m m e r ç a n s , l ’inscription
de son nom sur les listes qui doivent servir à former
les assemblées et les tribunaux de c o m m e r c e , et sur
celles que les iribunaux de c o m m e r c e doivent fournir
aux autorités locales p o u r les t ransmett re au g o u v e r n e
ment.
Voilà les véritables c o m m e r ç a n s , ce ux que la loi
reconnaît pour tels. Les hommes attachés à d ’autres
professions peuvent faire des actes de c o m m e r c e , mais
n e sont pas commerçans.
Comment* donc P u r a y a u r a i t - i l pu être à la fois
notaire et b a nqu ie r? C o m m e notaire, il ne p o u v a i t
être
�( 49 )
être m e m b r e d ’aucune assemblée, d ’aucune corpora
tion de c o m m e r c e ; il ne pouvait-être porié sur les
lisles présentées au go uver nem ent; il ne pouvait êlre
élu m em bre d’ un tribunal de commerce. Ainsi, sa pro
fession s’opposait à ce q u ’il pût participer à aucun
des privilèges exclusivement attachés à la personne
du commerçant. L a m êm e raison a dû le faire exe m p t e r
des charges attachées à celte qualité ; aussi, quoique
les prêts et les e m p r u n t s de P u r a y fussent parfaitement
co nnu s, n’a-t-on jamais pensé à regarder P u ra y c o m m e
banquier, et à le soumettre au droit de patente; sa qua
lité de notaire excluait l’idée de loute autre profession. ■
U n e nouvelle réflexion semble venir donner encore
plus de force à ces moyens. L ’on pourrait supposer
que le co m m er ce peut être fait par un h o m m e e x e r
çant une profession qui en est exclusive ; par e x e m p l e :
qu'un notaire tienne un magasin’, qu’il y étale et
ven de habituellement des marchandises; cet h o m m e
sera nécessairement c o m m e r ç a n t ;
i l !sera soumis à
à la rigueur des lois du c o m m é ic e j sans être revêtu
de leurs privilèges. Po u rq u oi ■
cela ? G’est q u ’ a y a n t
une profession principale qui l’incorpore îV u n 1 ordre
quelconque , il ne figure dans la société que sous le
titre que ce ll e profession lui d o n n e ; mais q u ’ayant
joint à c e ll e profession des détails de com m erc e q u i,
tout accessoires q u ’ils puissent ê l r e , sont cependant
habituels: ces actes, jusqu’au m oment où il l e s . aura
cessés, le m e tt e n t, par sa v o l o n t é , sous la juridiction
d ’une classe d’hommes qui ne le reconnaissent cepen
dant point co m m e leur pair.
i3
�( 5° )
Mais la profession de banquier ne peut jamais être
accessoire; l’exercice de la banque ne se restreint point
à une seule v i l l e , il embrasse tous les lieux et toutes
les distances, il fait
circuler les fonds d’ un pôle à
l ’a u t r e ; ses opérations ont un caractère 'public; sou
vent elles concourent à assurer le succès des plus
grandes entreprises. A in si, le banquier est un h o m m e
public que le g o u v e r n e m e n t doit reconnaître , dont
la profession ne peut être un m y s t è r e , qui doit être
placé parmi les commerçans. Il faut que tous ce ux
qui exercent le m ê m e état que lui sachent le point
q u ’il occupe dans le-monde co m m ercial, pour po uvoir
se servir de lui dans les transports d’a r g e n t , qui sont
le signe caractéristique de cette profession. Un b a n
quier dont l ’existence est in c onnu e, ou restreinte à
u n e ville ou une c o n t r é e , n ’est pas banquier. U n h o m m e
a yan t pour profession principale l’état de n o taire, et
pou r profession accessoire celui de b a n q u ie r , est un
être inconcevable.
Mais supposons un instant q u e la profession de notaire
ne soit point exclusive de celle de c o m m t i ç a n l , et plus
particulièrement d e celle de b a n q u i e r , q u ’e n résullera-t-il?
P u r a y , n o ta ire, était-il banquier ou m a rch a n d ?
Quels sont les banquiers?
« C e sont ceux qui font un co m m erce par lettres
« de change et négociations d ’argent de place en plac e,
v pour raison de quoi ils perçoivent un certain protit.
« Par e x e m p l e , un particulier qui est à C a d i x , veut
« faire loucher à q ue lq u’un une s o m m e d ’argent1 à
�( 5i )
« A m st erd a m ; il porte celte somme h un banquier de
« C a d i x , qui lui donne une lellre de change à re ce« voir sur un autre banquier d ’A m sterd a m , son cor« respondant, moyen nant un profit q u ’il prend pour
« la lettre de change ainsi fournie.
.
« On appelle change le profit qui est ainsi p e r ç u , et
« qui n’ es! autre chose, en gé n é r a l, que le droit qui
« se paye ;'i un banqu ie r, pour une lettre de change
« q u ’il fournit sur un autre lieu que celui d ’où celte
«■lellre est tirée, et dont il reçoit la valeur d ’ un autre
« banqu ie r, ou négociant, ou d ’une autre personne
« dans leunêine lieu que celui où la lettre est fournie ».
( L o c r é , loin, i , p.
3. )
I c i , y a - t - i l , de la part de P u r a y , la moindre opé
ration de b a n q u e ?
. D ’abord, quant aux effets q u’il fournissait, pouvaientils a vo ir , et avaient-ils pour but un transport d ’argent
de place en place? L e fait répond à ces deux questions.
Suivant les créanciers, P u r a y était banquier h R to tn ;
ainsi, en cette qualité, il devait prendre les fonds sur
cette pla ce, pour les transporter dans une autre.
Ri en de tout cela : Puray prend les fonds à Clermont,
en fait le transport sur R i o m , et se charge lui-mêm e
du paiement de ses propres traites.
Il est dû un change au banquier pour les effets
q u’il fournil. Les registres de P u ra y établissent que
c ’était lui qui payait des sommes quelconques à ce u x
qui prenaient ses effets : ainsi les rôles étaient changés;
1b droit de la banqu e était perçu du b a n q u i e r , par
ceux qui avaient recours à lui.
14
�Cv,
(52)
.
.
Quant aux effets q u ’il recevait , ils ne pouvaient
le constituer b a n q u ie r, puisque c ’était pour lui que
le Iransport avait lieu. P u r a y , sous ce rapport, loin
d’être
b a n q u i e r , aurait au contraire pour banquier
chacun de ce ux qui lui souscrivaient des lettres de
change.
Po u r être
conséquens a vec
eux-m êm es,
pourquoi ses créanciers ne l o n t - i l s pas déclarer en
faillite c e u x de ses débiteurs qui sont en retard de
le paye r ?
»
E n voilà bien a s s e z , ce s e m b l e , pour démontrer
le ridicule d ’ un système soutenu avec tant d ’opiniâ
treté. Mais
ne
nous décourageons pas , et s’il est
possible , pénétrons plus avant.
Beau co up de
gens,
habitons de la m ê m e v i l l e ,
prêtent leurs- fonds à un de leurs conciioyens. Cet
em prunteur
lient registre de ses em pr un ts ; il
dit
l'intérêt q u ’il en donne, il renouvelle à chaque échéance;
il en lait également mention.
Y a -t-il là une seule opération de b a n q u e ? T o u t
nu cont ra ire, n ’en est-il pas exclusif? l'intérêt p a y é
par le p r é t e n d u banquier; ces renouvellemens qui
attestent que les fonds n ’ ont pas éi é transportés, ne
concourent - ils pas à prouver que-les créanciers ont
fait des prêts à P u r a y , mais n ’ont fait ni entendu
faire par son intermédiaire , aucune opération de
banque.
*
!
'
'
• Actu ell em en t l ’empru nteur place les fonds q u ’il a
ainsi réunis; toutes ses opérations ont lieu dans la
vill e.q u’il habile.; à:son t o u r , il iperçoil des intérêts;
à son t o u r , renouvelle1, lient registre de tout cela.
�Ces registres s ont produils, el l ’on ose parler de banque!
Ven ons enfin au mot de celte cause.
P u r a y a empru nté à des intérêts excessifs; il a
prêté de même.
L ’habitude de ces faits peut-elle établir une pro
fession ?
Celui qui spécule sur l ’intérêt de l’argent est un
u su rier, mais n’est point un banquier.
C e u x qui alimentent de leurs londs l’entrepôt de
l ’ us ure, en exigeant eux-mêmes des intérêts que la loi
défend d ’exig er , font
un métier que la morale et
l ’opinion regaident co m m e vils, que la loi prohibe
el p u n i t , et qui conséquemment ne peut être classé
parmi les
professions que
la société ne reconnaît
qu'autant q u ’elles lui sonl utiles.
Arrêtons-nous i c i ; n ’avilissons point le commerce,'
en insistant plus long-tems sur une vérité
sentir loul
que doit
commerçant qui tient à l'honneur de sa
profession : craignons également de trop approfondir
des idées qui pourraient blesser quelques-uns de nos
le cteu r s, el que le besoin de la cause a seul pu a u
toriser à rendre publiques.
P u r a y n’est donc pas banquier.
v
L ’on a - d é m o n t r é dans les laits q u ’il n’était point
co m m er ça nt ; ainsi, c ’est à tort q u ’on l’a déclaré failli.
Les créanciers bien pénétrés sans doute de l ’i m
possibilité où ils se trouvent de justifier leurs pr é
tentions au f o n d , insisteront sur les fins de n o n - r e cevoir q u ’ils ont déjà opposées , el lâcheront de tirer
avantage du silence du sieur P u ra y.
�( 54 )
L e s délais d ’opposition d’appel sonf ex pirés; vo ilà ;
n'en douions pas, ce q u ’ils se plairont à répéter.
Si dans les affaires ordinaires, une fin de n o n -recevo ir est toujours d éf avo ra b le, ici elle est odieuse*
Quand la négligence d’ un client peut entraîner la
perte de quelques intérêts p é cu n iaires, le magistrat
ex am in e a v e c scrupule tout ce qui peut en détruire
les effets : une nullité de p r o cé d u r e est alors a v id e
m en t sai sie, et l ’omission de la plus légère formalité
devient suffisante pour réintégrer dans ses droits celui
que l ’on en croyait exclu.
C o m b ie n est plus favorable encore la position du
sieur P u r a y ! I l réclame l ’état qu ’on lui a r a v i , pour
y substituer une qualité q u ’il n ’a jamais eue ; il de
man de ses juges dont on l ’a distrait pour le soumettre
à une juridiction qui n’était pas la sienne } et q u ’il
ne pouvait reconnaître. P e u t - o n plaider pour de plus
grands i n t é r ê t s , réclamer des biens plus inaliénables
et plus spécialement placés sur la surveillance et la
garantie de la loi ?
être d e ces premières i d é e s q u i ,
en recevant le d é v e l o p e m e n t q u ’elles e x i g e n t , seraient
Q u o i q u ’ il puisse
peut-être seules suffisantes pour faire rejeter la fin de
non-re ce vo ir proposée; vo yon s ave c le C ode de pro
dure si le sieur P u r a y était enc ore à tenis d ’attaquer
le ju g em e nt du i
3 avril 1 8 1 1 , soit par la voie de
l’o p p o sitio n , soit par la v oie de l’appel ; car l’on a
pu
remarquer que la cause doit aujourd’hui être
ex a m in é e sous ces deu x rapports.
Il est reconnu que tout jugem ent par défaut, rendu
�( 55 ) contre une partie qui n’a pas constitué' d’a v o u é , doit
être signifié par un huissier commis. Il est éga le m en t
certain que ce principe est applicable aux jugemens
ém an és des tribunaux de c o m m e r c e , c o m m e à c e u x
rendus par les tribunaux civils.
( V o y e z C. P. , art. i
56 et 4^5 ; C. C . , art. 6 4 3 ).
L a C o u r a décidé que celt e formalité était néc es
saire pour les significations de ju g em e ns, portant d é
clarations de faillites; ainsi ces premières idées ne sont
plus sujettes à contestation.
Cela posé : le ju g em e nt du i
mettait pas d ’huissier.
3 avril 1 8 n ne c o m
Sa signification a donc été
nullement faite , et n’a pu faire courir les délais de
l ’appel.
* ;
A v o u o n s cependant que les créanciers s’étant aperçu
du vice de ce j u g e m e n t , ont cherché à le c o u v r i r , en
présentant requête au président du tribunal de c o m
m erce , et en obtenant de lui une ordonnance qui
co m m et
Colas , huissier. Disons en m ê m e teins que
la signification du jugement a été faite par l ’huissier
commis par celte ordonnance.
Cela ch ange -t-il quelque chose au m o y e n ?
L article i 5 6 du Code de procédure porte : « Tous
« jugem ens par défaut seront signifiés par un huissier
« c o m m is , soit p a r Le trib u n a l, soit par le juge d u
domicile du défaillant, que le tribunal aura désigné ».
L ’article
4 3 5 , plus spécialement applicable aux
Iribunaux de co m m er ce , a les mêmes dispositions.
Ainsi il faut un huissier commis, et commis p a r le
tribunal j l e président n’a aucun caractère pour donner
�i Ao
\
( 56 î
•
ce ll e commission. A n tribunal se u l, la loi accorde une
confiance entière; elle veul l’imissier du choix du tri
b u n a l, et non celui indiqué par le président, seul.
Elle pousse si loin la précaution à ce sujet, que lorsque
le tribunal qui rend le j u g e m e n t , n ’est point celui du
domicile du défaillant , elle n'indique pas le président
du tribunal de ce domicile pour commett re l’huissier,
elle le confond a vec tous les autres juges; elle dit que
l ’huissier sera commis par le ju g e que le tribunal ( r e n
dant le j u g e m e n t ) aura désigné. Ainsi tout juge n’est
donc point appelé à donner cette commission. 11 fa ut,
ou q u’ elle ém ane du tribunal entier, ou d ’ un juge spé
cialement désigné par lui.
C e m o y e n serait inconleslable, si on élail obligé, ou
de l ’appliquer à l’ordonnance d’ un président de tribunal
civil, ou m ê m e à celle du premier président d ’ une
Cour souveraine ; perdrait-il quelque chose de sa valeur
p a r l ’emploi q u ’on en fait contre l’ordonnance d ’ un pré
sident du tribunal de c o m m e r c e , d ’ un juge d’attribu
ti o n , à qui la loi refuse l’ exécution de ses jugemens;
enfin qui n’a pas m ê m e d ’hôtel?
Ainsi il n’y a point de signiHcalion du j u g e m e n t du
d ’ u n président
i 3 avril 1 8 1 1 , an moins il n’y en a point de régulière;
donc l’appel qui en a él é interjeté esl venu dans les
délais.
M a i s , d ir a - t- o n : vous aviez formé opposition à ce
jugement ; vous y avez été déclaré non recevab le, pour
ne vous être point pourvu dans la huitaine du procèsverbal d’apposition d ’afliche de l ’extrait du j u g e m e n t
que vou sal luqu ez ; or, la m ê m e raison qui a em pêc he de
recevoir
�( $7 )
recevoir votre opposition, doit également faire exclure
votre appela parce que l’art. 443 du Code de procé
d u r e , veut que le délai de l ’app el , pour les jugemens
par d éfa u t, courre du jour où l’opposition n’est plus
recevable.
C ette ob jectio n, qui est la seule que l ’on puisse pré
senter, doit fournir au sieur P u r a y les m oyen s les plus
puissans de cette partie de sa cause.
I/art. 4 57 du C ode de com m er ce dit : « que le juge-« m en t sera affiché et inséré par extrait dans les jour« n a u x , suivant,le mode établi par l’art.
683 du Code
« de procédure civile. »
Il ajoute : « q u ’il sera susceptible d ’opposition ^ pour
« le failli, dans les huit jours qui suivront celui de
« l ’afïiche. »
Vo ilà tout ce que l’on trouve dans le Code de c o m
m e r c e , à ce sujet.
X/on conviendra b ien, sans d o u t e , que le ju g em ent
de déclaration de faillite est susceptible d ’opposition
et d ’appel. Nous pou vons supposer que tout le m o n d e
sera d’accord sur ce point.
quel est l’acte qui fait courir les délais accordés
pou r se pourvoir? P o u r l ’o p p o s i t i o n / c ’est incontesta
Mais
blement le procès-verbal d’affiche de l’extrait du ju g e
ment. P o u r L'appel, c ’est encore le procès-verbal d ’af
fiche , ou c ’est une signification particulière du jug e
ment à domicile.
Si le procès-verbal d ’affiche fait courir le délai dç
l ’a p p e l , alors l’article
44-3 du Code de procédure est
applicable; mais dans ce cas, ce procès-verbal valant
i
5
�(
58 )
signification, doit êlre. revêla, de fouies les formalités
exigées par la loi.
11 faut sur-foul q u ’il ém an e du mi
nistère d’ un huissier commis par le tribunal, au désiu
de l'article i
56 du C ode de p r o c é d u r e , qui est appli
cable aux significations de ju gem ent de déclaration de
faillile , ainsi que l’a jugé un arrêt de la Cour.
Cela posé : le p r o c è s - v e r b a l dont il s’agit a été fait
par un huissier non commis p a r l e tribunal; on n ’a pas
m ê m e à cet égard la ressource d’ une ordonnance du
président du tribunal de co mmerce. Colas, ministre de
cet a c t e , n’avait aucune commission : donc cet acte est
n u l , c o m m e ém an ant d'un officier sans caractère ; donc
l ’opposition et l’appel sont également recevables.
S i , au contraire , l’on co n v ie n t, q u ’outre le procèsverbal d ’affiche, il faut encore une signification du
ju g em e nt à domicile pour faire courir le délai de l’a p
p e l , il faudra également co n v en ir , q u ’en matière de
faillite, l ’opposilion et l ’appel sont deux voies abso
lument distinctes, qui ne se suivent ni ne se s u c c è d e n t ,
mais s ouvr ent chacu ne au moment où est fait l’acte
qui fixe les délais dans lesquels elles doivent êlre e m
ployé es; q u ’ainsi le délai de l’opposition c o m m e n c e
à courir de la dale du p r o c è s - v e r b a l , et celui de l’a p
pe l, de la dale de la signification ; alors l ’article 443
du_£ode Je procédure n’est plus applicable, parce que
le principe q u ’il établit est une censéquence de cet
autre p r in c i p e , que la signification régulière du ju g e
ment est le poinl de départ des délais de l’opposition
et de ce u x de l'appel.
�( 59 )
Ainsi Ton ne peut échapper à l’une de ces deu x
conséquences :
1
Ou le p r o c è s - v e r b a l d’affiches fait courir les délais
de l ’opposition et de l’appel; dans ce c a s , le procèsverbal étant nul, l'opposition et l’appel sont égalem en t
recevables.
Ou il faut, pour faire courir les délais d’appel, une
signification du j u g e m e n t , h domicile ; dans ce cas,
l’article 448 du Code de procédure n ’est point appli
c ab le ; et en supposant l’opposition non rec evab le, l ’ap
pel est venu à te m s , puisque la signification du j u g e
ment est nulle.
A
ces moy en s qui paraissent suffisans , on peut
encore en ajouter d’autres aussi forts , et qui con
courent à prouver et l’irrégularité du p r o c è s - v e r b a l ,
et le mal-ju gé du jugement qui a accueilli la fin de
no n-r ec evo ir proposée par les créanciers.
L'article 167 du C o d e de c o m m erce exige l'affiche
d ’ un extrait du j u g e m e n t ; les principes et la juris
prudence veulent un procès-verbal constatant l'affiche
de cet extrait. Ainsi deux pièces sont i n d i s p e n s a b l e s ,
l extrait
et le procès-verbal.
Les créanciers rapportent le procès - verbal ; ils ne
rapportent point l'original de l’extrait affiché ; donc
lu 1tièce principale, la seule qui puisse établir que c e
que la loi prescrit a été fait , n’existe pas.
Ensuite l’huissier a affiché un extrait certifié c o n
forme à l’expédition par les agens de la faillite.
C e n'est donc pas l’huissier qui â vu l'e xp éd it ion5
ce 11’est donc pas lui qui en a fait l ’extrait. C epen-
�( 60 )
dant lui seul avait caractère pour le faire , et les
agens à la faillite, parties intéressées, ou représentant
les créanciers , ne pou va ie nt, dans leur propre cau se,
délivrer un extrait pareil.
Ainsi tout se réunit pour repousser les fins de nonrecevoir qui sont opposées.
L a tache que s’était imposée le sieur P u ra y est enfin
terminée. i l a montré sa cause dans tous ses détails.
Plein de confiance dans les lumières de la C o u r , il n’a
dissimulé aucune de ses fautes; il a c a c h é , autant que
possible, celles d’a u t r u i , et n’a dit que ce qui était indispensable à sa défense.
Si ses créanciers n ’eussent
été que r i g o u r e u x , il
eût gardé le silence : mais ils sont injustes; ils attaquent
sa réputation ; ils veulent flétrir son nom ; ils le pour
suivent jusque dans sa postérité.
L e sieur P u r a y est fils, ép oux et p è r e , ces différens
titres lui font un devoir de se défendre. Il appartient
à une famille nombreuse ; quelques amis lui restent
encore. L e s r ep ro che s q u ’on peut lui faire ont été ap
préciés, et tout doit faire supposer q u ’u n e x a m e n ap
profondi des circonstances de cette affaire, conduira
l ’h o m m e impartial à conven ir q u e , c o m m e beaucoup
d ’autres é v é n e m e n s , elle montre que le p lu s m alheu
reu x n'est pas toujours le p lus coupable.
M .e J.n-C h .
M.°
B A Y L E , A voca t.
M A N D E T j e u n e , A voué.
J .- C . S A L L E S , lmp. de la Cour impériale et du Barreau.
«
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Puray. 1813?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Mandet
Subject
The topic of the resource
notaires
banqueroute
fraudes
spéculation
banquiers
usure
créanciers
exil
fuite à l'étranger
créances
livres de comptes
commerce
banques
commerce
vin
troubles publics
scellées
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation pour le sieur Puray, ex-notaire, appelant ; contre les sieurs Dubreuil, Brun, Versepuy, Guémy et autres, ses créanciers, intimés ; et contre les Syndicas à sa prétendue faillite, aussi intimés.
note manuscrite : « jugement confirmé par arrêt du 17 mars 1813. Voyez l'arrêt à la suite du second mémoire ».
Table Godemel : acte de commerce : quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ? Faillite : 1. l’opposition au jugement qui déclare un individu en état de faillite doit être formé dans le délai prescrit par l’article 457 du code de commerce, et non dans ceux déterminés par les articles 156, 158 et 159 du code de procédure civile.
2. en matière de faillite, l’affiche et l’insertion de l’extrait du jugement dans le journal du département faites en conformité de l’article 683 du code de procédure, valent signification au failli.
3. la fin de non-recevoir, résultant de ce que l’opposition au jugement qui déclare la faillite n’a pas été formée dans le délai, s’applique à l’appel interjeté dans ce même jugement. Notaire : 3. l’individu qui exerce la profession de notaire peut être réputé commerçant.
Quelles sont les circonstances suffisantes pour établir qu’un individu s’est livré habituellement à des opérations de commerce et de banque ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1813
An 4-1813
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
60 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2221
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0620
BCU_Factums_M0619
BCU_Factums_G2222
BCU_Factums_G2223
BCU_Factums_G2224
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Lyon (69123)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
banqueroute
banques
banquiers
commerçants
commerce
Créances
créanciers
exil
fraudes
fuite à l'étranger
livres de comptes
notaires
Scellées
spéculation
troubles publics
Usure
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53156/BCU_Factums_G1128.pdf
e3cc567cd0cc31ddecdcce675e61d05a
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Text
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1
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MÉMOIRE EN RÉPONSE T“
-"N
P O U R
J ean - C
laude
de
I'"‘* «ectîon.
PLANTADE - RABAN ON ,
p ro priétaire d e m e u r a n t
à
C h ita in , com m une
S a i n t - C h r i s t o p h e , a p p e la n t '
C O N T R E
J
acques
c
C H O U S S Y , géomètre, demeurant a
Cusset, intimé.
L e citoyen Rabanon, dans son précis du 14 ventôse
dernier , avoit cru devoir ne pas donner le récit tou
jours dégoûtant de la procédure immense faite contre
lui. Jacques Choussy l'accuse d’avoir dissimulé les faits
essentiels de la cause. Il faut donc en fatiguer et le tribunal
et le public. L e citoyen R abanon n’y avancera rien sans
preuve, et par la comparaison, il sera facile de découvrir
l’imposture, la perfidie, la calomnie.
L e citoyen Rabanon est bieu éloigné de plaider contre
A
�I I*.
C 2)
son b ille t, comme Jacques Choussy lui en fait le reproche
grossier. Il reconnoît et il a toujours reconnu ce b ille t,
puisqu’il a fait non seulement des offres réelles du mon
tant de ce même b ille t, mais le dépôt de somme bien
plus considérable pour se garantir des poursuites vexatoires de Jacques Choussy. Mais il réclajue contre les
causes de ce billet : mais il réclame contre une espèce
darrangement qu’on lui a arraché dans ces temps de
calamité ou le citoyen honnête étoit forcé de tout sacri
fier au sentiment de sa pi'opre conservation.
F A I T S .
L e 30 septembre 1 7 9 3 , le citoyen Rabanon devint
adjudicataire au directoire de district à Cusset, de deux
domaines appelés Joninain et Chitain , et situés dans les
environs de Cusset.
Ces deux domaines avoient été affermés au citoyen
Choussy p è r e , commissaire à te rrier,.p ar bail de 1783.
Ils étoient garnis de bestiaux à cornes et de brebis. L a
preuve en est consignée dans la lettre du citoyen Busseuil
ancien fermier (1).
( 1 ) C om m une de G en e la rd , le «a v en dém iaire , ^me. année rép u b licain e.
L e cito y e n
B
u s s e u il
,
c i-devan t ferm ier de C h it a in ,
A u citoyen P l a h t a d e -R a b a n o n , propriétaire de la maison
et domaines de Chitain et Joninain.
1
J ’ AI laissé, c i t o y e n , deux années de jouissance de m on bail,
nu c ito y e n C h o u ss y le p è r e , qui a été m o n su c ce sse u r, npre»
“avo ir renouvelé la ferme de Chitain. J ’ ai pareillement laissé les
domaines garnis de bons et beaux bestiaux ; je me rappelle trèsbien que les domaines de C lütaio et Joninain étoient com posés
�¿75*-/
C3 )
I/adversaire, fils du Fermier, éleva au citoyen Rabanon
des difficultés sans fin. Sous le règne des lois elles auroient
été bientôt écartées ; mais en l'an 2 , mais avant le g ther
m idor, elles étoient très-graves, insurmontables.
L ’une de ces difficultés avoit pour objet l’exigue des
de six paires de b œ u fs , ch a cu n d’une quantité de v a ch e s, garnis
dans la p roportion que six paires de bœufs c o m p o r te n t, les autres
bestiaux dans les mêmes proportions. Les brebis léle pour tête ;
ie3 truies ou c o ch o n s comme j e les ai reçus pour chaque domaine.
E n un m o t , j ’ai rendu à Pierre C h o u ss y la m êm e quautité, qualité
e t espèce que j’avois reçues des citoyen s L a m o tte s et D e s p e u x , et
que je devois la isse r , au term e de m on bail verbal entre le c ito y e n
Lacjueuille et m o i, plus l’excédant dont C h o u ssy le père in’a fait
raison. J e m e rappelle très-bien, c i t o y e n , qu’à l’époque de m a
so rtie , j’ai laissé tous les bestiaux en bon é t a t , et que Choussy a
eu pour moi de fort mauvais procédés. 11 a dû vo us rendre la m êm e
b r a n c h e , qualité et quantité de gros et menus b e stia u x , qu’il
avoit reçus de moi, c l tels que je les avois reçus m o i-m êm e de m on
prédécesseur, et que ce dernier fes avoit reçus des siens, et ainsi
des autres. Quant aux brebis , je les ai rendues tete pour tète, tel
que je Ie3 ai reçues. Quant aux réparations lo ca tù es , je les ai
toutes payées au citoyen Pierre Choussy, en présence des citoyens
Charles d e là Coste, et Souciions de Lalouette, et l'arrangeaient
«’ en fit à G o u g e . D ’après toutes les règles de justice et de ra iso n ,
il me paroît bien naturel qu’ il doit être obligé de vous laisser la
m ê m e quantité, espèce et qualité de tons bestiaux quM a reçus de
jnoi,et que je luiai abandonnés tels que je les avois reçus m oi-m êm e.
J ’ai laissé les étangs en bon état et bien empoissonnés ; et tout ce
qui était à ma charge, Choussy a bien su me le faire payer. Il en
a été de mêm e des prés et de lotit ce qui (.'toit à ma charge. 11
ne m’a fa it, en v é rité , a u cu n e espèce de grâce. J e l ’ ai comblé
A 2
�i v.
U )
bestiaux. L e citoyen Rabanon ne faisoit que des demandes
justes. Par cela seul, elles ne convenoient pas à Jacques
Choussy. L e citoyen Rabanon étoit déjà menacé en ger
minal an 2. Claude Bourgeois disoit à Paris : ce ,}’en ai
« encore quatre en vue. J ’ai Dumonsseau, j’ai G r a v ie r ,
de bons procédés , et lu i rûen a eu que de mauvais pour m o i,
après avoir couru ma ferm e et fo r c é à lu i céder les deux années
de mon bail. Il a gardé tous mes to n n ea u x de p ê c li e , m algré
i n o i , sous prétexte qu’ ils lui étoient nécessaires p o u r celle qu’il
avo it à f a i r e , ainsi qu’ une très-grande c u v e à recevo ir de la v e n
d a n g e , que j’avois établie dans la chapelle de Chitain , par ordre
d u c it o y e n L a q u e u ille , et que j’ai p a y é e a ux cit oyens de Creusier.
T o u s ces objets ont dû v o u s ê tre délaissés, c o m m e je les avois
r e ç u s. J e vo u s observe seulem ent que j’avois renou velé les vieux,
selon l’ usage. J ’ai laissé des volets a u x croisées donnant sur les
fossés, ferm ant et en bon é t a t , a u x croisées qui en avoient ou
a v a n t m o i ; pareillement la co rd e de la c l o c h e , le b o u c h e -fo u r .
J ’ai pareillem ent laissé un va let en fer à la p orte du m a g a sin ,
donnant vis-à-vis le ch â tea u . J ’ai pareillement laissé Je magasin
garni de crèch es et râ te lie rs, en bon état. J ’ a i pareillement laissé
dans la p ê c h e r ie , qui est-sous le g r a n d j a r d i n du ch âteau , et que
v o u s avez a c h e té e , un très-grand et beau c o f f r e , cil c h ê n e , fort,,
a v e c ses garnitures et cadenas de fer. En un m o t , c i t o y e n , j’ai
e xécuté toutes les clauses de m o n bail v e r b a l, envers le c it o y e n
L a q u c u iltc , et j’ai bien p ayé au c ito y e n Pierre C h o u ss y le p è r e ,
t o u t ce qui étoit à m a c h a rg e , c o m m e fermier. C ’est le c ito ye n
D u ro se t qui avoit fait faire le coffre de la pêcherie du ch â te a u .
Q u a n t a la cu v e que j ’ai faite et laissée, e l l e fait partie du cliâ le a u
qui vo us a été vendu. T o u t ce que je vous écris, e s t de la plus
grande e x a c titu d e , et C h o u ss y le sait aussi-bien que m oi. S a lu l
et fraternité. S ig n é, B u s s e u i l .
�( 5 )
Reynaud - Sauret et R aban on . » Déjà l’une des maisons
du citoyen Rabanon sise à Paris, avoit été comprise dans
la liste des biens d’é m ig rés, une seconde maison alloit
y être inscrite , etc. etc.
L e 29 messidor an 2 , l’adversaire écrivoit au citoyen
Rabanon : « toutes ces tracasseries ni ont rnis dans le
« cas (feu parler à notre brave représentant F o restier,
<c qui n’a pas été content de votre façon d agir, et r?i a,
« dit de vous écrire de sa p a r t, et vous invite de vous
« montrer plus accommodant; que nous n étions plus
« dans ces temps où les tracasseries étoient à to rd re
« du jo u r , etc ». ( V o y e z page 18 et 19 du précis du
citoyen Rabanon. )
L ’on c o n ç o i t combien une invitation de la p a rt à'un
représentant redouté avec raison, étoit puissante: c’étoit
un ordre absolu ; il falloit obéir, ou la réclusion et la mort.
Aussi le citoyen Rabanon ne balança-t-il plus ; il se
sentit forcé à écrire à Jacques Choussy, le 14 thermidor
an 2 , la lettre transcrite dans le précis de Jacques
Choussy, page 4. Il invita Choussy à venir ù Chitain ;
Choussy parut, et le citoyen Rabanon se soumit à ses
volontés.
Jacques Choussy faisant tant pour lui que pour son
p è re , présenta au citoyen Rabanon , un état de compte
des bestiaux, (é ta t heureusement co n servé); l’adver
saire lui remit un écrit daté du 17 ,thermidor an 2 ,
duquel il résulte, i ° . que tous les bestiau^c avoient été
estimés à 9,960 fr. assignats, prix de foire; 20. que
pour la moitié du bénéfice revenant à l’adversaire, le ci
toyen Rabanon lui compta 2; 5oo IV. en argent, (dans un
�(S)
tettips où il n y avoît que certains êtres privilégiés , et déjà
accoutumés à satisfaire leur passion, qui pussent im puné
ment parler écus et en exiger). Jacques Clioussy , dans son
précis, page 4 , dit que cette somme lui fut payée en
assignats. Mais son écrit le dém ent; son écrit dit argent.
L e citoyen llabanon fît en outre à l’adversaire un billet de
2.892 fr. 16 sous, payable en germinal an 3 , total 5,392 fr.
16 sous. Dans la discussion des moyens nous tirerons un
grand parti de ces deux pièces , (ellessont transcrites mot
pour mot à la suite du précis du citoyen Rabanon , pages
1 9 , 20 et 21 ) , nous prouverons que ce billet est le fruit
de la terreur. Noüs disons de la terreur, parce que même
après les 1 7 , 22 et 28 thermidor an 2, le représentant
F o r e s tie r è toit encore l’effroi du département de f A l l ie r ,
dont il devoit être par état, et le patron, et l’a m i, parce
qu’encore la consolante influence du 9 thermidor ne s'éloit
pas étendue jusqu’au district de Gusset, parce que le 22
thermidor an 27 Forestier rendit un arrêté , et fit partir,
le 28 du même mois , douze victimes de tout â g e , de tout
sexe, pour le tribunal de Fouquet-Thinville. Nous rap
portons l’arrêté de Forestier ; nous l’avons fait imprimer,
( pag. 22 et 23 du précis).
L e district de Gusset est celui de la république où la
tourmente révolutionnaire a régné le plus long-temps.
En l’an 3 , en l’an 4 , en l’an 5 , etc. tous les gens de bien y
étoient comprimés presque autant qu’avant le 9 thermi
dor. lie citoyen Rabanon étoit en apparence débiteur en
vers l'adversaire. Il l’éloit ostensibleirent de la somme de
2.892 fr. 16 sous, montant de son billet. Il étoil exposé
des poursuites rigoureuses. Pour les p réven ir, il lit à l ad-
�(7)
v e r s a i rn
, le 2 germinal an 3 , époque de l'échéance du
billet, un acte d’offres réelles, qui se ressent encore de
la contrainte, mais qui en dit assez , mais qui .exprime et
rappelle assez les griefs du citoyen Rabanon.
P ar cet acte, le citoyen llabanon offrit réellement
l’adversaire la somme de 2,892 fr. 16 sous, montant du
billet; il offrit de la lui p a ye r, mais ù condition, i°. que
Vadversaire lu i ju sh fiero it de sa qualité d eferm ier des
dom aines de C/iitain et de J o n m a in ; 20. que le citoyen
R a ba n on profilera il des lois annoncées su r les cheptels,
atten du, est-il dit dans cet a c te , que des circonstances
particulières Vont contraint a u x engagemens q ù il a
contractés. L e citoyen Rabanon ajouta, que le véritable
f e r m i e r , le citoyen Choussy p è r e , lu i étoit redevable de
sommes considérables sur les clauses du ba il ¿1ferm e.
Ces offres et ces conditions ne furent pas acceptées. L ’ad
versaire poursuivit le payement du montant du billet et
de quelques autres objets inutiles à détailler ici. L e 12
germinal an 3 , les parties étant au bureau de paix, le
citoyen R abanon s'en référa ¿1 son acte d’offres, du 2.
lie 22 floréal suivant, l’adversaire prit au tribunal de
Cusset, jugement par défaut contre le citoyen Rabanon.
Pierre Choussy p è re , parut ¿\ l’audience pour déclarer
qu il jia v o it aucun droit ¿1 exercer sur le cheptel des
bestiaux des dom aines C hitain et J o n in a in , dont
J a cq u es C houssy étoit le seul fe r m ie r .
t
L e citoyen Rabanon appela de ce jugement. Cet appel
fut porté au tribunal de Gannat, où l’adversaire obtint
encore défaut. L e 11 vendémiaire au 4 , lo citoyen R a-
�(8 )
fcanon y forma opposition. II y fut statué par le tribunal
civil d’A H ier, le 3 pluviôse suivant.
V o ic i ce jugement. Il importe que le tribunal prenne
la peine de le lire en son entier; parce que c'est de cette
pièce que Choussy tire une fin de non recevoir, et cria
pour prouver q u ’il est de bonne fo i, qu’il veut éclairer
la religion de ses juges (1).
(1) E n tre Jea n -C Ia u d c P la n ta d e -R a b a n o n ;
Contre Jacques Choussy , fils.
O u i , G o n t ie r , R a b a u o n conrine sou fondé de p o u v o i r , p ou r
leq uel il a c o n c lu en ce qu e son opposition sus la tte , fût reçue
a u ju gem ent aussi susdaté ; qu ’en co nséqu en ce il seroit déchargé
d e reflet d’ic e lu i, statuant au principal que la promesse du 1 7
thermidor dernier, qui est causée valeur reçue comptant, tandis
(¡ue les causes d’ icelle sont pour bénéjice de cheptel, sera déclarée
nulle et de nid effet, comme étant le fruit de l ’ erreur et de la.
surprise et consentie par ledit Rabanon à Choussy , Jils , qui
n’ auoit ni droit , ni qualité ; et à c e qu’ il s o it, en co n s é q u e n c e ,
r e n v o y é de la dem ande dudit C h o u ss y a v e c depen s, le to u t par
ju g em e n t qui sera e x é cu té en dernier r e s s o r t , suivant le consen
tem e n t prêté par ledit R abanon , p ar le jugem ent du tribunal
du 26 pluviôse dernier, et qu’ il a n'itéré à la barre. Oui Jaudart t
aussi défense r officieux et fo n d é de pouvoir dudit Choussy ,
par lequel il a co n clu à c e que ledit Habanoti lût déclaté p ure
m ent et simplement non recevable dans son opposition du 14
frim aire dernier , au jugem ent du tribunal de G a u n a t , d u 11 ven
démiaire prteedent , ce faisant que ledit jugement seroit exécuté
selon sa form e et te n e u r , et (¡ne les poursuites en eom m eucées
^croient continuées ; que ledit Hab,mon seroit co n d a m n é en tous
les d é p e n s, le to u t par ju gem ent en dernier ressort, suivant son
La
�<
( 9 )»
Ln cause du citoyen Rabanon fut mal présentée ; on lui
fit demander la nullité du billet de 2,892 fï\ 16 sous, su r
-consentement piété par le ju gem ent dudit jo u r 26 pluviôse der
n ier, et qu’ il r. itère à la barre.
L a cause plaidée par les défenseurs des p a r t ie s , Rabanon a
soutenu par l ’ organe de son défenseur, qu1étant certain qt.e la
ferm e des domaines Chitain et Joninain, desquels il était devez u
adjudicutiire de la nation , comme confisqués sur l ’ émigré
LaqucttHhe, était au nom de Choussy , père, il n’ avait pu traiter
qu’ avec l u i , et que l'euigue des bestiaux desdits biens qu’ il avait
J a it y. a erreur avic Jacques Choussy , ji/s, ainsi c^te le Li.ltl eu
promesse qui en était résu lté, devaient être annuités et regardés
comme non avenus; que (¡liant aux mitres chefs de la demande
prim livr de h partie de .la n d a r d , il 11e les contestoit pas.
J a u d a r d , pour sa p artie, a demandé ac te de l’aveu cjne f.isoit
R abanon de d e v o i r les autres chefs d e l à d e m a n d e , et a souten u
que Rabanon l ’avoit. reconnu p our fermier dudit lieu , puisque
c ’est C lio u s s v , iüs, (jui l’en a mis eu possession , que c'est a v e c
lui qu’il est venu à l’exigue des bestia ux ; (ju’il a fait ;in c o m p te
g é r e r a i ; qu’ il a a c h e t é , dudit C h o u s s y , fils, une partie de la
récolte de !a réserve de C h ita in , et diiïérens autres actes d’ un
propriétaire et d’ un fe rm ie r ; que d’ ailleurs il ne pouvoit plus
m éco u n o ître la qualité dudit C h o u s s y , fils, de fermier dndil lieu ,
puisque Pierre C h o u s s y , père , a d é cla r é , pan le jugement diid-t 8
floréal dernier , (pi’il 11’ avoit plus a u cu n s droits sur la ferme ni
les bestiaux desdits lieux, et que J a cq u e s C h o u s s y , son fils, en
¿tuil le seul fe rm ie r , lequel ju gem ent lui avoit été signifié.
Oui
le commissaire du directoire e x é cu tif en ses conclusions;
si Rabanon
pouvait ou non méconnaître la qualité de fermier de la partie de
Jaudard , des lieux dont il s’ agit; et s i , par une suite le billet
ou promesse du 18 thermidor était ou non nul j et
si Je juJa cause a présenté à juger les questions de savoir, 1
JB
�( 6 ^
Y ;'* .
( t° )
le fondem ent seulement qu il y avoit erreur et surprisse
s u r le f o n d e m e n t s e u l e m e n t , que cette erreur et cette sur\
g e m e n t rendu sur a p p e l, par le tribunal de G a n n a t, le n ven
démiaire dernier, seroit e x é c u t é , ou si au contraire / R a b a n o n
seroit déchargé de l’ effet d’ic e lu i, ainsi que de l’effet du ju ge
m e n t du 18 floréal d e r n ie r, rendu par le tribunal de C u s s e t ,
en première instance.
L e trib u n a l, considérant qu’il est co nstan t entre les parties,
que c ’est la partie de Ja udard qui a mis celle de G o n tie r en
possession des lieux d o n t il s’ a g it; co n sid éran t, que c ’est ave c la
partie de J a u d a r d , que celle de G o n t ie r est venu e à l’exigue des
bestiaux desdits lieux; considéran t, que le 1 7 therm idor der
nier ,
la partie de G o n tie r a fait un co m p te ave c celle de
Jaudard,
du
profit desdits bestiaux et d’autres objets ; que
R a b a n o n a reçu la qu itta n ce des profits des bestiaux dudit
C h o u s s y fils, c o m m e fermier dudit lie u , et qu’il a donné le
billet dont il s’a g it, audit C h o u s s y , aussi c o m m e ferm ier; c o n
sidérant, que la partie de G o n tie r a m êm e ach eté d e celle de
J a u d a r d , la m oitié de la récolte qui lui revenoit c o m m e fer
m ier de la réserve dudit lieu de Chitain ; et qu’il a
d ’ailleurs
r e ç u différentes choses dudit C h o u ss y fils, venant de la ferme
desdits biens; considéran t, que la partie de G o n tie r a reçu de
celle de J a u d a r d , les baux et obligations de cheptel desdits
biens, en s’ obligeant d’en aider la partie de Ja u d a rd , lorsqu’elle
en auroit besoin; considérant, que la partie de Confier n’ a pas
f a i t tous ccs actes par erreur et surprise, puisque c'est elle qui
a provoqué le compte général et les arrangemens dont il s’ a g it ,
par une missive adressée à Choussy Jils.
Considérant, que Pierre Choussy père , a déclaré par ju ge
ment du iB floréal dernier , n’ avoir aucun droit à exercer sur
la ferme ni les bestiaux desdits lie u x , el que son fils Ja cq u e s
C h o u s s y , eu étoit seul fe rm ie r , et que d'après cette déclaration
i
�( ”
)
prise dérivaient de ce que Tadversaire ii étoit pas le f e r .
jif’er de C hitain et Jo n in a in . Aussi le citoyen Rabanon
succomba dans son opposition.
que la partie de Confier ne peut pas méconnaître, puisque le
jugement lu i a été signifié le 4 prairial aussi dernier, et se pouvo it co n va in cre qu’il avo it valablement traité a v e c la partie de
J a u d a r d , et qu’ elle ne p o u v o it plus être inquiétée par le père
C h o u s s y ; considérant, que d’après tous ces actes la partie de
G o n lic r ne peu t et 11e p o u v o it m é co n n o ître la qualité de fer
mier de la partie de J a u d a r d , desdits li e u x , et que par c o n
séquent le billet ou promesse dont il s’agit , ne peut être argué
de nullité, ni c o m m e étant fait par erreur et surprise; consi
dérant enlin , que la p arue de G o n t i e r ' a déclaré 11e pas c o n
tester les autres chefs de demande , conten an t les prétentions
de la partie de J a u d a r d , et que les parties ont consenti à t i r e
jugées en dernier ressort par le tribunal.
L e tribnual jugeant en dernier res ort, sans s'arrêter ni avoir
égard aux moyens de nullité, opposés par ta partie de Gantier,
contre le billet ou promesse du \~j thermidor dernier, et contre
les opérations qui ont précédé, déclare la partie de G o n t i e r ,
p urem ent et simplement non recevable dans son opposition du
14
iiiuiriire d e r n ie r , au jugem ent rendu par le tribunal de
G a n n a t , Je 11 vendémiaire p récéden t, sur l’appel d ’un juge
m ent du tribunal de C u s s e t , du 18 floréal dernier; o r d o n n e ,
quCT lesdils jugem ens seront exécutés selon leur for/ne et teneur,
et que les poursuites en co n sé q u en ce , seront co n tin u é es , c o n
dam ne la partie de G o n tie r aux dépens, l'a it et jugé à M o u lin s ,
l’audience du tribunal civil du département de l’ Allicr tenante,
pardevant nous Joseph P ir o n , D u llo q u e t, D e l a r e , C oinclion et
V ille m o in c ,
juges audit
tribnual, le 3 p lu v iô se , f a n 4 de la
république une et indivisible.
B a
�( 12 )
Depuis, vexation sur vexation de la part de l’adversaire
contre le citoyen Rahanon ; depuis, résistance égale, résis
tance constante de Ja part du citoyen Rabanon. Tel est le
déplorable effet de l’injustice ; celui qui en profite, est
très-ardent dans l’attaque; celui qui en est victime, est
aussi très-ferme dans sa défense. Beaucoup de temps a été
employé par les deux parties à se regarder, à incidenter.
Enfin a paru la lumière ; le citoyen Rabanon a été éclairé.
En l’an 6 , le citoyen Rabanon avoit dem andé, contre
l’adversaire , raison des bcvtiaux : sa demande étoit du
5 fructidor an 6 ; elle embrassoit encore d'autres objets.
P o u r qu'on ne la défigure plus, nous la mettons sous les
yeu x du tribunal (i).
(i) L 'a n six de la république fran çaise, et le cinq f r u c t i d o r , a
là requête de Je a n -C Ia u d e R a b a n o n , soussigné, m e suis trans
porté au dom icile du c it o y e n J a c q u e s C h o u s s y , etc.
7°. l a somme de six cent soixante-dix-huit fran cs , pour cent
treize brebis ou moutons , que ledit Choussy a fa it payer injus
tement audit Plantade-Rabanon , et qu'il dei'oit lu i remettre par
la fo rce de l'usage et de la ju stic e , tête pour tête, sans les argen
ter , comme il les a reçus de son prëaécesseur, sans les payer ,
comme son devancier les avoit aussi reçus de Laqueuille , tête pour
tête, et sans p a y e m e n t , c o m m e C h o u ssy les a donnés aux m ét a y e r s d e C h ita in , ainsi qu’il résulte de leurs b a u x , passés d evant
C a q u e t , n o ta iie , c o m m e lesdits m é ta ye rs les lui auroient ren
dus et me les re m e ttro n t; et tels enfin qu’il a dû et doit nie les
laisser tete p our t ê t e , sauf la valeur supplémentaire du n o m b r e ,
s’j! en existoil à sa sortie prétendue de fe rm e , et qui lui est offerte.
8°. Pour avoir dudit Jacques Choussy non seulement les actes
d’appréciation d* s gros bestiaux, mais encore les états des brebis
ou moutons qui lu i ont été remis par son prédécesseur , afin
�C 13 )
Choussy fut déconcerté ; cette demande l ’éiourdit : l'ac
tion de la justice le pressoit. Pour s y soustraire momen
tanément, il se réfugia dans un moyen de nullité de forme.
Cette nullité lui réussit; elle emporta l’exploit du 5 fruc
tidor an 6 , mais elle n’emporta pas le fond. Nous prions le
tribunal de lire le jugement rendu sur ce point au tri
bunal de Moulins, le 14 fructidor an 6 (1).
d’ éclairer la religion des juges sur les doubles emplois et les injus
tices consacrées par ledit Choussy, lors de notre arrêté de compte
du 1 7 thermidor an 2 , qui sera mis sous les yeux du magistrat,
et desquelles pièces il doit me justijier et m’ aider pour me con
vaincre qu’ il m’ a remis, au terme de son bail, le même nombre
et la même espèce de chose dont il étoit chargé , pour les laisser
à sa sortie, comme il les a reçus du précédent fermier. P age 4 ,
fo l. verso.
90. Pour que ledit Jacques Choussy fa sse raison audit Plan fadeRabanon, des fa u x calculs et erreurs matérielles commis dans
le bordereau qu’ il lu i a présenté, et sur lequel il a été fa it le
compte du 1 7 thermidor an 2 , et le billet de 2,892 fr. 16 sousÿ
attenduqu’ il est démontré par une opération simple et méthodique,
qu’ il y a une erreur grossière de 2,027 f r'
io°. Sous toutes les réserves de droit, dom m ages-intérêts, répé
tition de réparations lo c a tiv e s , d é g r a d a t io n , d é té r io r a tio n ,
prévues et signalées par son bail p r é c it é , remise de bestiaux , con
formément aux clauses de ce même acte, et aux airêtés du comité
de salut public, lois relatives aux délaissemens de cheptel, de
ferm ier à propriétaire, et sous les conditions apposées à l'exploit
d’ (ffres ci-devant rappelé.
(1) E n tre Jean-Claude l ’ Iantade-Rahanon :
Contre Jacques Choussy.
O u i G a y , p our le demandeur , et Jaudard p o u r le défen-
�V
r
( *4 )
Enfin après avoir passé au bureau de p aix, le 9 p lu
viôse an 7 , le citoyen Rabanon fit assigner l’adversaire
d e u r , présent à l’audience; ensemble le cito y e n M ic h e l, ju g e ,
faisant fon ction p our le substitut du commissaire du directoire
e xécu tif en ses conclusions-.
11 s’agit avant tout de statuer sur la nullité opposée par le
d é f e n ie u r , e on tre l’assignation à lui donnée , sur le fondem ent
que la copie qui lui a été donnée à son d o m ic ile , ne co ntient
a u c u n e mention de la personne à laquelle elle a élé laissée.
L a question est de savoir si ce défaut de mention opère la
nullité de la demande.
Con sid érant qu’aux term es de l’article trois du titre deux de
l’ ordonnance de mil sept cen t s o ix a n t e - s e p l, d o n t leslites dis
positions n’ ont point été a b r o g é e s, il doit être fait m e n tio n , en
l’ original et en la copie , de l’exploit d’ajournem ent des personnes
auxquelles ils a u ro n t été laissés, à peine de nullité et d’am ende
de vingt fr. co n tre l’huistier, attendu (pie dans la copie donnée
à C h o u ss y de l’assgnation du 5 de ce m o is , 011 ne tro uve a u cu n e
m ention de la personne à qui elle a été laissée.
L e tribunal jugeant en premier r e s s o r t , déclare l’assignation
donnée à la requête du d e m a n d e u r , au d é fe n d e u r, par Biesse ,
ln iissie r , le 5 de ce m o is , n u lle , co n dam n e Plantade-Ilahanon
a u x dépens liquidés à vingt-deux f r . , ensemble au c o û t et lev».c
du présent jugem ent.
Et. statuant sur le réquisitoire* du substitut du commissaire du
directoire exécu tif, condîimtie l ’huissier B ie s s e , qui a posé lad.te
assign ation, à l’am ende de vingt Ir.
J'ait et jugé à ÎMoulin-î, l’an lietice du tribunal <¡vil t e r r n t c ,
j n relevai H n o m . 1; cqties Baudinot , Pelaire . llossigneil, N u fo u r,
.Armet et T i b a i r l , juges c l pivsi lent dudit tribunal, le 14 fr u c
tidor an six de la république lraneaû>c, une c l indivisible.
�( 16 )
J
au tribunal d’allier. i° . L e citoyen Rabanon conclut à
être restitué contre son l)illet du 17 thermidor an 2 , et
contre le simulacre d'arrangement du même jo u r, remis
y.ar l’adversaire au citoyen Rabanon. 20. L e citoyen R a
banon demanda aussi la restitution de' la somme de
2.500 fr. payée à l’adversaire par le citoyen Rabanon le
17 thermidor an 2 , avec intérêts. 30. L e cit. Rabanon
demanda encore compte des bestiaux, suivant les bases
déterminées par la loi du 2 thermidor an 6 , et autres,
sur cette matière. L e citoyen Rabanon déclara qu’il se
désistoit de toutes demandes q u 'il a u ra itform ées contre
ledit Ja cq u es C h o u ssy , en ce q u elles seroient contraires
a u x différât/s chefs de celles q u i l vient de motiver et
f o r m e r : ce sont les termes de sou exploit.
Comme l’adversaire pouvoit reprocher au cit. Rabanon
de plaider pour éloigner le payement, s’il pouvoit devoir,
le citoyen Rabanon déposa, le 24 ventôse suivant, ès
mains du citoyen Gontier , notaire à M olle, la somme de
1. 5 00 fr. é c u s, et aux conditions apposées en l’acte du
2 germinal an 3. Il en fut dressé acte, qui fut signifié le
lendemain à l’adversaire.
L e 17 iloréal an 7 , l’adversaire a obtenu contre le
citoyen Rabanon sentence par défaut, par laquelle le dé
part du citoyen Rabanon, quant à ses demandes précé
dentes, a été homologué , et le citoyen Rabanon a été
déclaré non recevable en celles du 9 pluviôse an 7.
Sur son opposition à cette sentence, le cit. Rabanon y
a été déclaré non recevable p a r a u t r e sentence du u mes
sidor su ivan t, par le motif bien étrange que celle du
17 iloréal précédent ayant été rendue à tour de r ô le , il
n’y avoit pas lieu
opposition.
�(
1
6
)
Les 24 vendémiaire et 9 brumaire an 9 , le citoyen
Rabanon a appelé des deux sentences.
L e 2Ô germ inal, Choussy a pris défaut contre le citoyen
Rabanon : celui-ci y a formé opposition le 6 iloréal ; il a
demandé en même temps la suppression du précis signifié
par Choussy. Ce précis est un libelle.
M O Y E N S .
L a sentence du n messidor an 7 ne doit pas nous oc
cuper beaucoup. Il seroit ici bien ridicule do prétendre
encore qu’en l’an 7 un jugement par d éfa u t, rendu à tour
de rôle par un tribunal jugeant à la charge de l’appel ,
ne fût pas susceptible d’opposition. Venons-en donc à la
sentence par défaut du 17 floréal précédent-: cette partie
de la cause donne lieu aux questions suivantes :
, ’
i°. L e citoyen Rabanon est-il recevable en ses de
mandes ?
20. L e citoyen Rabanon est-il dans le cas de la resti
tution , contre l’espèce d’arrangement fait entre lui et
l’adversaire le 17 thermidor an z ?
30. L e citoyen R a b a n o n est-il aujourd’hui en droit de
poursuivre la restitution de la sonunc de 2,5oo francs,
payée A l’adversaire le 17 thermidor an 2 , avec intérêts,
à compter du même jo u r?
4°. L e citoyen Rabanon est-il recevable et fondé à de
mander raison des bestiaux des domaines de Chitain et
Joninain ?
Nous allons tru"terc«iLquestionsséparément; mais aupa
ravant, il faut proposer quelques explications contre la
première
�C r7 )
p re m iè re disposition de la sentence d u 17 floréal an 7 /
P a r cette p r e m iè r e d is p o s itio n , les p rem iers juges o n t
adm is les conclusions judiciaires de l’adversaire ; ils o n t
h o m o lo g u é le dép art d u citoyen R a b a n o n , quant à ses
dem andes précédentes.
.
•
M ais ceci est tr o p v a g u e ; l’on p o u rro it en in d u ire q u e
le d ép art du cito y e n R a b a n o n est absolu , tandis q u ’ il est
p u re m e n t re latif: voici p o u rq u o i. L ’on dit que le désis
tem ent du citoyen R a b a n o n est p u re m e n t r e la t if , p arce
q u ’il n’a entendu le ra p p o rte r q u ’au x conclusions q u ’il
a v o it prises p o u r le m ê m e objet dans des actes antérieurs
à celui du 9 p lu viôse an 7 : aussi a -t-il d i t , en ce quelles
seraient contraires a u x différens chefs de celles q u i l
vient de form er. P a r là , le citoyen R a b a n o n a v o u lu dire
q u 'il n’insistoit plus sur ce q u i , dans scs dem andes p r é
c é d e n te s , seroit contraire à ses nouvelles conclusions.
M ais il n’a jamais eu la pensée de re n o n ce r a u x autres
chefs de d e m a n d e , tels q u e ce u x de la p ortion de fe r
m a g e à lui r e v e n a n t , etc. A
cet é g a r d , il y a instance
p articu lière q u ’il v a p o u rs u iv re incessamment.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il recevable en ses demandes
du 9 pluviôse an 7 ?
Ici l’adversaire op pose au citoyen R a b a n o n , la chose
j u g é e , les ju gem en s rendu s à C u sset, à Gannnt et à
M o u lin s , les 22 floréal an 3 , 11 ve n d é m ia ire et 3 p lu
viôse au 4 ; il s’appuie p rin cip a le m en t sur le ju g e m e n t
G
�( 18 )
du 3 pluviôse an 4 ; il invoque la maxime non 1rs in
idem.
P o u r juger du mérite de l’objection, il faut se r a p - .
peler l’objet de la contestation d’alors; il faut se rappeler
encore le système de défense adopté pour le compte
du citoyen Rabanon.
L ’adversaire demandoit le payement de la somme de
2,892 fr. 16 sous, montant du billet du cit. Rabanon.
Quant à la défense du citoyen R a b a n o n , il faut ne
pas s’arrêter à ce qui a été fait à Cusset et à G a n n a t,
puisque les jugem ens q u i y ont été rendus , Vont été
p a r d éfa u t, il faut se porter au jugement rendu i\
M oulins, le 3 pluviôse an 4. O r , au tribunal de M oulins,
au nom du citoyen R abanon, on demanda la nullité
du b ille t, par le motif seul que l’adversaire n’étoit pas
le vrai fermier de C h itain, et qu’ainsi il y avoit eu er
reur et surprise : cette demande en nullité fut rejetée.
Voilà ce qui a été jugé le 3 pluviôse an 4 ; il a été jugé
qu’il n’y avoit ni erreur ni surprise, quoique dans le
principe Pierre Choussy père seul fût fermier.
3VIais alors, il n’étoit pas question c o m m e aujourd’hui,
de la validité de toutes les parties de l'arrangement}
mais alors, il n’étoit pas question comme aujourd’ h u i,
d’une demande; en restitution contre l’intégralité de cet
arrangement pour cause de fo rce et crainte grave,
pour cause de dot personnel de la part de ¿’ adversaire,
p o u r cause d'erreur de com pte, double et f a u x emploi.
P a r le jugem ent du 3 pluviôse an 4 , le tribunal
d 'A llie r n a. pas statué n i pu statuer sur ces difficultés
infinim ent lég itim es, p u is q ii elles ne lu i ont pas été
�/o(
C T9 )
-présentées : ce n e s t donc pas le lieu de la jn a xim e
non nobis in idem.
L ’adversaire, dans son précis (p a g e i 5 ) , excipe
d’un jugement du 14 pluviôse an 6 , q u i, dit-il, a ap~
prouvé le compte de cheptels , et le billet. Mais l’on ne
connoît aucun jugement à cette date : Choussy ne l a
point signifié. Il y a probablement méprise sur ce
point; il est vraisemblable que l’on a voulu parler de
celui du 3 pluviôse an 4.
L ’adversaire ne peut pas se prévaloir des actes subséquens.
L e citoyen Rabanon s’est toujours récrié contre là
contrainte violente, exercée contre lu i; il n’a pas signifié
un acte, où il n’ait protesté de toutes ses forces, et au
tant que les circonstances fâcheuses dans lesquelles nous
nous sommes trouvés, le lui ont permis. Ses réclama
tions ont été graduées sur le plus ou le moins de liberté
civile adont il a 'joui.
Jacques Choussy appelle en vain à son secours, le
jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4 , et la
sentence du 14 prairial an 6 , par laquelle il est
prouvé que le citoyen Rabanon avoit demandé et obtenu
un délai pour payer le montant du billet du 17 ther
midor an 2 , en vertu des lois nouvelles sur les h’ansactions.
i°. L e jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4,
n'a pas jugé la question ; nous venons de le prouver.
20.
La sentence du 14 prairial an 6 , ne signifie rien
dans les circonstances. Personne n’a encore oublié qu’en
l’an 6 , l’oppression directoriale pesoit principalement
C 2
*t'\
�76%
y \
C 20 )
dans l’arrondisscmcnt de Cusset. L à , comme aupara
v a n t, les personnes honnêtes étoient froissées, terrorifiées : d’ailleurs, en donnant aujourd’hui à l’arrangement
fait par Choussy lui-m êm e, le 17 thermidor an 2 , la
f o r c e (Tune transaction , il y auroit également lieu à
réclam ation , parce que Tordonnance de i 56 o, ne m ain
tient que les transactions f a it e s sans dol et sans con
trainte , et q u ic i il y a eu contrainte et dol.
S e c o n d e
q
u
e
s
t
i
o
n
.
L e citoyen R a b a n o n est-il dans le cas de la restitu
tion contre Tespèce d'arrangement f a i t entre lu i et
Tadversaire, le 17 therm idor an 2 ?
C ’est ici le lieu d’analiser les principes les plus certains
en restitution, et d’en faire de suite l’application dans le
môme ordre.
L ’on est restitué contre tout engagement o \ il y a eu
crainte : ait p r œ to r , quod metûs causa gvztum e n t
ration non habebo. L . 1. il’, quod met. caus.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
force : S i quis v i compulsus aliquid f e c i t , per hoc ediction restituitur. L. 3. cod.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
dol.
Nos ordonnances ( 1 ) , en particulier celle de François
(1) C e l l e parlic est tirée m ot p ou r m ot du précis du cito ye n
R a b a n o n , pag. y et 10. N ous l’avons fait ainsi, p our cjue l’attentiou du lecteur ne soit pus détournée.
�( ' 21.)
1er. de l'année i5,39 , ont adopté les principes du droit
romain et admis la restitution pour cause d'erreur de fait,
de d o l , de violence et de.crainte; et non seulement notre
jurisprudence s y est conformée, et nos livres sont pleins
d’arrêts qui ont détruit les engagemens que la crainte et
la violence ont fait contracter; mais cette même juris
prudence avoit été plus loin ; elle a voit consacré les prin
cipes d’un titre du code théodosien intitulé: D e infirm andis lus quœ sub tirannide acta sant. Nous trouvons
dans les réponses de Charondas , un arrêt du mois de
janvier 1 6 9 7 , par lequel il fut jugé que des ventes d’hé
ritages faites durant les troubles des guerres civiles et temps
de calamité, étoient sujettes à rescision, sans même s’en
quérir de la vilité du prix. L . 9 , rép. 25 . Nous trouvons
dans Mornac un arrêt par lequel un débiteur qui s’ étoit
fait faire remise de sa dette , pendant le temps de la ligue,
par son créancier , lorsque les troubles furent appaisés,
fut néanmoins condamné à payer la dette, ad. le g .z .ff.
de calum niatoribus ; et c’est à l’occasion de cet arrêt que
Mornac cite le titre du code théodosien intitulé : D e la,
nécessité de détruire les actes passés dans les temps de
tyrannie ; mais quels temps furent plus calamiteux ! quels
temps furent plus tyranniques, plus meurtriers que ceux
de l’an 2 dans le district de Cusset ?
Un autre principe écrit dans l'ordonnance de 1667 9
s e m b l e fait pour la cause : l'art. 21 du tit. 29 d it, en
parlant des redditions de compte: s'il y a des ei'reuis ,
des om issions de recette ou f a u x em p loi, les parties
pourront en J o r m er demande.
Tous ces vices 11e se couvrent point par le silence de
�( zz )
*a partie ldsde , à moins que les parties n’aient ensuite
traité expressément sur ces mêmes vices.
Quant à la crainte , il faut q u ’elle soit grave. Il faut
metus instantis vel J 'u tu ri p ericu li causa m entis trepidatione. L . i . ff. quod inet. caus. D om at, liv. i , titre 18 ,
section 2, n.° 3 , dit : « Si 011 la met (la personne effrayée)
« en péril de quelque mal dont la juste crainte l’oblige
« à un consentement forcé ; ce consentement sera sans
« effet. »
A u 17 thermidor an 2 , il y avoit contre le citoyen
Rabanon, metus instantes, ou tout au m oins, f u t u r i
p ericu li causa. Il y avoit m entis trepidatio. L e citoyen
Rabanon étoit dénoncé dès le mois de germinal an 2 ;
B o u rg eo is, l’un des principaux ennemis du citoyen Raba
n o n , disoit à Paris qu’ il seroit encore l’un de ceux des
tinés à appaiser la soif ardente des persécuteurs. La
preuve en est écrite dans une information faite à la
société épuratoire de V ich y , le seize brumaire an 3.
( Voyez page 17 du précis du citoyen Rabanon. ) L e
29 messidor an 2, l’adversaire écrivoit au citoyen Rabiiuon
qu’il avoit parlé de sa résista n ce, des difficultés q u 'il opposoit ; que le représentant F orestier 11’étoit pas content
de sa façon d’agir ; que ce brave représentant l’invitoit
à se montrer plus accommodant, et que ce n éloit plus la
temps où les tracasseries étaient à f ordre du jour. ( V o y.
page 18 du précis du citoyen Rabanon ). Déjà une des
maisons que le citoyen Rabanon avoit î\ P aris, avoit été
comprise dan-» la liste des biens des émigrés.
L e sens naturel du langage de Clioussy saute aux yeux.
Il signifie, que si le citoyen Rabanon 11e se rondoit pas
�/ o J '
( 23 )
tiux vues de Fadversaire, tout iniques qu’elles étoîent,
le sort commun d’alors attendoit le citoyen Rabanon ;
d’abord visites, menaces, nouvelle dénonciation , réclu
sion , d puis la mort. Il y avoit dès lors , le metus
p ericu liin sta n tis v e lfu tu r i, mentis trepidatio.T^c citoyen.
Rabanon n’avoit pas à s’y méprendre, puisqu'il y avoit
une dénonciation form elle, à raison de la résistance qu’il
opposoit i\ Choussy, et de sa confiance dans l’attente de
la loi du 17 fructidor, en faveur des propriétaires contre
les fermiers.
Aussi le citoyen Rabanon souscrivit-il le 17 thermidor
an 2 , à tout ce que l’adversaire exigea de lui. L e citoyen
Rabanon n’examina rien. La m entis trepidatio étoit si
grande en lui, qu’il en fait l’aveu : l’entendement l’aban
donna. Il fit et paya tout ce que l’on voulut; trop heu
reux en lo u vo ya n t, de gagner quelques instans de plus.
L ’adversaire répond en vain qu’au 2 thermidor an 2 ,
( page 9 de son p ré cis), l’alégresse universelle agitoit tous
les Français; que la tète du premier tyran de la France
étoit tom bée, et qu’ainsi le citoyen Rabanon n’avoit plus
de sujets de crainte.
A u 17 thermidor an 2 , et long-temps après, la terreur
régnoit àC usset, comme avant le 9 thermidor; eh bien,
la stupeur, le deuil, y planoient sur toutes les têtes. Rien
ne le prouvoit plus que l’arrêté de Forestier du 22. Par
cet arrêté , ce représenta?it envoyoit encore au tribunal
révolutionnaire, douze citoyens honnêtes de tout âge , de
tout sexe , qui partirent des prisons de Cusset et Moulins,
le 28 thermidor, et ne sont revenus de celles de Paris,
que le i . cr brumaire an 3 , après avoir justifié de leur
�(H )
innocence. L e s Dussaray-Vignoles, les B o u q u e t - D e s c li a u x ,
les Charles, les Combes et autres, ne sont sortis cles
prisons de C u sset, q u ’à la fin de brumaire et frimaire
an 3. Les vertus étoient alors des crimes. Ce même
arrêté réservoit pour un autre e n vo i, deux magistrats du
bailliage de Cusset, dont l’un honore le tribunal d’appel
par des qualités bien estimables , et trois autres victimes
signalées par le même arrêté. L e 9 thermidor et autres
jours mémorables , n’avoient fait qu'augmenter, l’au
dace et la fureur des illuminés. La pièce imprimée
ci - dessous ( 1 ) , et plusieurs autres , le prouvent.
(1) Extrait d'une adresse présentée à rassemblée nationale , en
Van 3 , par les citoyens de Cusset et de Vichy.
L e sage et vertueux Vernerey , e n v o y é en mission dans le dé
p arte m e n t de l’A Hier, clans le mois de germ inal dernier, versoit le heaum e de la consolation dans les cœ urs des m alheureux
liabitans de ce district ; les principes de justice et d’hum anité ,
m é co n n u s depuis lo n g -te m p s, étoient rappelés; des cito ye n s inn o c e n s , entassés en foule dans les prisons, r e c o u v r o i e n t la l i b e r t é :
ch a cu n c r u t ê t r e à l’époque du bonlicur. V ain e illusion! Vernerey
quitte le département, laissant après lu i Forestier, pour le mal
heur de ses concitoyens, et de ceux à qui il en voulait. Bientôt
la terreur ressuscita; ceux qui avaient recouvré leur liberté , f u
rent traînés de nouveau dans les maisons d'arrêt. Dans l ’espace
d ’un mois toutes les traces du bien que le vertueux Vernerey
avoit laissées , furent entièrement effacées, e t notre district se
vit plus q u e jamais l e théâtre de mille ve x a tio n s; tout se passoit. sous les y e u x de F o r e stie r , à ijni il an ro it été si facile de
maintenir le bien (ju’avoit lait son collègue. Mois <juel co n C 'v ’ t
�ÏO V
(
)
Ces pièces ne sont malheureusement que trop ex
pressives. D ’ailleurs Choussy , qui a tant de m ém oire,
traste dans la co n d u ite de ces deux
représentais ! l ’un avait
passé comme une divinité bienfaisante , pour réparer les maux
que la tyrannie nous avoit causés: Vautre comme le démon des
tructeur, ne paroît que pour jeter la désolation dans nos âmes t
et préparer de nouvelles victimes à la mort. Vernerey avant le
9 thermidor, ne voit dans le district, que des innocens persé
cutés ,* il les rend à la liberté. Forestier, après le 9 thermidor, ne
voit dans la plupart de ces mêmes citoyens , que des conspira
teurs, des contre-révolutionnaires: il les envoie chargés de fers ,
au tribunal révolutionnaire, et ils obtiennent tous , quelque
temps après, leur liberté du comité de sûreté générale. Vernerey,
sous le règne de Robespierre, préchoit la justice et l ’ humanité ;
il exhortait à ne pas fa ir e par des vexations injustes, des en
nemis à la chose publique. Forestier ranimait la terreur: il di
soit qu’ il fa lla it encore se défaire de six têtes à Cusset; que rien
n’ étoit plus beau, plus m ajestueux , que le tribunal révolution
naire : qu'on y passoit en revue la fou le immense des accusés,
avec une rapidité incroyable, et que les jurés faisoient / e u de
file ; enjin, que le tribunal révolutionnaire lui paroissoit au-des~
sus de la convention. I l se plaignoit vivement, de ce que deux
citoyens qui depuis ont obtenu leur liberté du comité de sûreté
générale , avoient échappé à la guillotine de Lyon; m ais , disoiti l } Us n'échapperont pas à celle de Paris . A v e c des principes si
o p p o s é s , des mesures si co n tra ires, eût-on dit que ces deux rcprésentans siégeoient dans le m êm e s é n a t, aspiroieut au m ê m e
b u t.
C ito y e n s représentans, pourrons-nous nous e m p ê ch e r de nous
livrer à de justes plaint es co n tre F o re stie r, el le regarder c o m m e
le prem ier m o t e u r de tou s les m aux qui nous ont affligés pen-
D
f-
�c
2
6
}
n’a pas oublié, ( mais il ne voudra pas le dire ) qu’en
l’an 5 , il y .eut à Gusset un mouvement violent, tel que
dant un a n , « lorsque nous savons qu’ il s’ est vanté d’ avoir
« f a i t guillotiner Dujfort ; lorsque nous savons qu’ après le 9
« thermidor, il a cherché à ranimer le courage de nos terro« ristes, et les entretenir de l ’ espoir de voir bientôt reparoître
« le règne de la tyrannie, soit en écrivant à la société populaire.
« de Cusset, le 18 fructidor dernier : « Croyez que l ’ esprit public
« va reprendre son énergie première » , soit en écrivant que la
convention nationale alloit fa ir e poursuivre les individus qu’ il
avoit renvoyés, au tribunal révolutionnaire, et q u e le co m ité de
s u « t é générale venoit de m e ttre en liberté; a j o u t a n t , que la
convention nationale alloit reprendre une attitude capable d’ en
imposer à Varistocratie.
L e s mânes d’ une foule de victim es in n o ce n tes, d o n t le sang
crie encore ven g ea n ce, s’ élèveront dans tou s les tem ps p ou r co n
dam ner c e tte assertion aussi fausse que révo lta n te : suivent centsoixante-quinze signatures, etc.
J e soussigné, ancien adm inistrateur au directoire du district
de Cusset, certifieàqui il appartiendra, avoir été envoyé au tribunal
révolutionnaire de Paris , le 28 thermidor an 2 , en v e r tu d’un
arrêté de F o r e s t ie r , représentant du peuple alors , en date du 22
du même mois, et n’ être sorti des prisons de Paris que le i er. bru
maire an^, après avoir été interrogé et avoir justifié de mon inno
cence , ainsi que les onze autres victimes dénommées par Varrêté
précité, qui étaient parties le même jour que moi, soit des prisons
de Cusset, soit de celles de Moulins. E n foi de quoi j’ai signé le
présent p ou r servir et valoir c e que de raison. F a it à M a g n ct ,
le 29 germ inal an 9 de la république française. Signé P . A .
M e i l i i e u v a t , adjoint.
V u bon p our la signature ci-dessus du c it o y e n M e iliie u v a t,
�( 27 )
les deux partis étoient armés et en présence ; et une
-personne prudente ayant fa it rem arquer à c e r ta in jiîs ,
que J a cq u es C houssy connoit b ie n , qii il était en opposition avec son p è r e , lu i dit : vous voulez donc tirer
su r votre père ,* l e j î l s répondit, mon père est à son
p o s te , je suis au m ien.
Choussy dit lui-m em e, page 3 de son précis, et dans
sa lettre, que le citoyen R a ba n on differoit, q u i l lu i avoit
demandé divers d é la is , q u i l Vavoit obligé à f a i r e des
voyages inutiles et fa tig a n s , et qu’après la lettre du 29
messidor, le citoyen R a ba n on garda le silence pendant
encore qu in ze jo u rs.
T o u t ce ci sig n ijie, caractérise une obsession cons
tante de la part de C houssy contre le citoyen R a b a
non , et une résistance opiniâtre de ce de} nier à une
oppression raisonnée et soutenue. L a vérité déchire
donc le voile astucieux dont Jacques Choussy voudroit
se couvrir. Toutes ces démonstrations , qui lui échappent
forcément, démontrent la nécessité d e là réponse du cit.
Rabanon , du 14 thermidor.
Jacques Choussy en impose encore, en disant ( pag. 10
de son précis ) q u e F o r e s t ie r n e st que s o j i a llié à un
adjoint à la mairie de c e t te c o m m u n e . A M a g n e t , le 29 germinal
an 9. Signé, C
haules
L acoste.
V isé p o u r légalisation de la signature du citoyen C h arlesL a co ste ,
m aire d e là co m m u n e de M a g n e t , par le sous-préfet du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’AIlicr, à la Palisse, le 3 floréal
a n p d e la république française. S ig n é , C
à la Palisse, le 9 floréal an 9. Signé V
ossonn ier
alleto n
. . . Enregistré
.
D
î
�C z* )
degré f o r t éloigné. Jacques Ckoussy sent ici le besoin d’un
mensonge grossier , et la nécessité d'en imposer aux juges
et aux lecteurs : m ais Ja cq u es C houssy en est le neveu
à la mode de Bretagne ; ce fait est prouvé par la pièce
matérielle ci-jointe ( i ). Quelle croyance donner à un
hom m e q u i m ent a u ssi effrontém ent , et à toutes les
-pages ! __
Que malgré cette parenté, le bail de Choussy père ait
été condamné aux flammes ; que cette condamnation ait
été prononcée par le département d’A l l ie r , il n’en résulte
qu’une conséquence de justice forcée en f a v e u r du citoyen
Rabanon , et que les juges saisiront bien en repoussant la
fausseté de cette autre assertion de Jacques Choussy.
(i)
J e soussigné, m aire de la c o m m u n e de C u s s e t, certifie à
qui i! ap p a rtien d ra, que la citoyenne A n n e Touset, née le 28
lévrier 1 7 6 0 , sur c e tte c o m m u n e , et mariée a u c ito y e n Ja cq u e s
C h o u s s y , d e l à m êm e c o m m u n e , est nièce, à la mode de Bretagne,
du citcycruForestier, ci-devant représentant du peuple, en l'an 2,
par L o u ise D esbrest, sa m è r e , mariée en 1^66, a F r a n ç o i s T o u s e t ;
laquelle L ouise Desbrest étoit cousine-germ aine dudit Forestier,
c o m m e enfant l’un et l’autre de frère et sœur.
E n foi de q u o i , j’ai délivré le présent p o u r servir et yaluir
c e que de raison. A C u s s e t, ce 2 floréal an 9.
Signé,
D u ssa r a y- V ig n o les,
maire.
V u bon p o u r îïi signature du c it o y e n D u s s a r a y - V i g n o l e s ,
maire de la ville de C u s s e t , par le sous*préfct du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’ A l l i e r , a la Palisse. L e 9
floréal an y de la république française. S ig n é , C
ossonn ieii.
Enregistré à la Palisse, le 9 floréal an 9 >Signét V a l l e t o u .
�...............................................................
(
2
9
)
'
1°. L ’avis du district de Gusset, sut lequel il est inter
venu , est du z 5 brumaire an 2 , et ce n’est q ne le 1 ^ p lu
viôse suivant que le citoyen Rabanon a été nommé membre
du conseil du district de Cusset, ainsi qu’il est démontré
par la lettre suivante (1). 20. Ce bail a été anéanti, d’une
part , parce qu’il étoit postérieur au mois de février
179 2 , et de l’autre parce qu’il rappeloit des qualifications,
des énonciations qui faisoient ombrage. N o u s nous sommes
-procuré cet arrêté; a in s i, Fannullation du bail en ques
tio n , est absolum ent étrangère au citoyen R a b a n o n ,
q u i n a été nom m é membre du conseil du district, que
longtem ps a p rès, et lorsq u 'il étoit en m ission dans
le département du C h e r , où i l a séjourné ju sq u 'à la
J in de p ra irial an 2 (2).
(1) C u s s e t , le 16 p lu viô se , l ’an a de la république une e t in d iv isib le.
L'agent national provisoire près le district de Cusset , au.
républicain Plantade-Rabanon, à Vichy.
J e te donne avis q u e , par l’arrêté du représentant du peuple
Vernerey, du 13 de ce mois, tu as été nommé administrateur au
conseil du district de Cusset, J e t’invite à te rendre à tou poste.
S alut et fraternité,
P o n c e t.
(2 )
E
xtrait
de l’un des registres des délibérations et arrêtés du
directoire du district de Cusset.
Séance publ i que et permanent e du 9 p l u v i ô s e , an 2 de la républ i que une 1
et indivisible.
Nous administrateurs composant le directoire du district de
Cusset ;
�C 3° )
L e citoyen Rabanon n’a jamais dissimulé l’origine
des domaines de Chitainet de Joninain; ils proviennent
du sieur de Laqueuille, ém igré; et son mémoire au
conseil le dit formellement; mais il en a joui en bon
père de famille; mais il les a administrés plus soigneu
sement que les siens, que ne le faisoit Jacques Choussy;
mais il n'a jamais permis que l’on détachât la plus petite
branche des bois des deux domaines en question ; mais
il y a au contraire, procès verbal régulier des dégrada
tions commises dans tous les genres par Choussy , et dont
l’effet sera poursuivi à propos. Mais cette a c q u i s i t i o n n e
garantissoit pas; elle ne pouvoit pas garantir le citoyen
Rabanon , des traits meurtriers dont ses ennemis vouloient l’accabler.
L e surplus des épisodes du précis de Jacques Choussy ,
n’est qu’une lâche récrimination : le citoyen Rabanon y
a répondu par des réflexions, à la suite de son mémoire
au conseil. Revenons à la cause, et dévoilons le dol per
sonnel commis par Jacques Choussy.
P o u r le d o l p e r s o n n e l , il faut le d e s s e in de l’un des
contractans de surprendre l’autre, et l’événement effectif
de la trom perie, dit Dornat, liv. i , titre 18 , section 3 ,
A p r è s avoir consulté et entendu l’agent national p ro viso ire ,
A r r ê to n s les dispositions suivantes :
A n T . I er. L es c ito y e n s P lanta.de-Rabanon , habitant de la c o m
m u n e de V i c h y , et a u tre s, sont nom m és co m m issa ires,à l’effet
de se transporter sur le ch a m p au départem ent du C h er.
P a r les administrateurs ; signé, F o u i i n j e r , P. L. R. P . ,
et O l i v i e r , secrétaire adjoint,
�( 3i )
n°. 4. F ra udis interpretatio semper in ju r e c iv ili non
e x eventu d u n ta xà t, sed e x con cilio quoque desideratur.
L . 79 ff. de reg. jur.
Dans l’espèce, le concilium est dans la lettre de l’ad
versaire au citoyen R ab an on , du 29 messidor an 2 , où
le citoyen Rabanon étoit menacé de la disgrâce du brave
représentant F orestier ; l’adversaire menaçoit de cette
autorité terrible, pour réduire le citoyen Rabanon à l’im
puissance de se défendre, et pour le tromper.
U cçeiitu s est dans le simulacre d’arrangement même.
Dans la reconnoissance du 17 thermidor an 2 , on lit que
le citoyen Rabanon a donné au citoyen Choussy, 2,5oo
francs argent ; c’est-û-dire, z 5oo francs écus. Cette circons
tance est marquante ; 2,5oo francs écus, dans un temps
où il ne se faisoit aucune affaire en argent, annonce
combien alors le citoyen Rabanon étoit comprimé. D ’ail
leurs il y a erreur de com pte, double em ploi, faux em
p lo i, dans ce prétendu arrangement.
En effet, à en juger par les propres écrits de l’adver
saire , par l’état et par l’écrit qu’il remit au citoyen R a
b an on, le 17 thermidor an 2 , il y a sûrement erreur de
com pte, double e m p lo i, faux em ploi; nous allons le
démontrer.
Mais auparavant, il est b o n d e prévenir le tribunal,
que l’adversaire a fait l’opération, comme si le citoyen
Rabanon eut été tout ¿1 la fois, et le propriétaire, et le
métayer des deux domaines. L e citoyen Rabanon est
chargé de tou t, sauf à lui i\ s’entendre avec les métayers.
Suivant l’écrit de l’aiiversaire ? sous la date du 17 ther-
�( 3* )
m idor an 2 , et l’état y jo i n t , les bestiaux auroient été
estimés à la somme de neuf mille neuf cent
cinquante francs, ci . . , .............................. 9 j 9§0 fr* 0 s>
Suivant lu i,l’ancien prix
des bestiaux pour le do
maine de Chitain , étoit de
neuf cent cinquante-deux
francs seize sous, ci . . . . 952 fr. 16 s. I
Suivant l’adversaire,l'an.
cien prix des bestiaux pour
?
le domaine de J o n in a in ,
étoit de neuf cent soixante
francs , c i ............................
g6o
Ces deux sommes don
nent un total d e ................. 1,912 fr. 16 s.
Cette dernière somme déduite de celle
de 99Ôo fr. ci-dessus, montant de l'estima
tion des bestiaux, au 17 thermidor an 2 , il
r e s te ................. .................................................. 8;037
Cette somme seroit partageable par moitié
entre l'adversaire, comme Fermier, et les
m étayers; la moitié de l’adversaire seroit
d e ......................................................................... 4,018
Suivant l'écrit du 17 thermidor an 2, l’ad
versaire auroit r e ç u , i ° . en argent comp
tant 2 , 5 o o fr. ; 2°* en-un billot de 2,892 fr.
16 s. T o t a l, ci . . . . . ................. ... . . . . 5,392
La diflerenceau préjudiceducit.Rabanon
seroit d e ................................................................. I >374
4
12
16
4
Preuve d’erreur bien marquée.
M a is ,
�( 33 )
Mais , dira l’adversaire, le prix du cheptel entre L aqueuillie et moi n’étoit pas le même qu’entre les mé
tayers et moi ; mon prix avec lei métayers étoit plus con
sidérable.
E h bien ! comptons encore dans ce sens. Mais pour fa:re
bien sentir la démonstration, commençons par une expli
cation essentielle.
L ’adversaire nous dit lu i-m êm e, qu’au 17 thermidor
an 2 , l’estimation totale des bestiaux étoit de 9,960 francs.
Dans cette som m e, est comprise la valeur originaire des
bestiaux , la valeur de 1783 ( date du bail à ferme par le
susdit Laqueuilhe à Choussy. )
Dans cette somme est aussi comprise la valeur progres
sive , à partir du bail de 1783 , jusqu’au bail à métairie
consenti par Choussy ; dans cette somme est aussi comprise
la valeur progressive depuis ce bail à m étairie, ju?qu à l’es
timation de l’an 2. Toutes ces valeurs sont réunies dans la
somme de 9,960 f r . , puisqu’en l’an 2 les bestiaux, suivant
l’adversaire, n’auroient pas été appréciés à plus de 9,960 fr.,
ensorte qu’à en juger par Choussy lui-même en 1 an 2 , les
bestiaux ne valoient que 9,960 fr.
Ceci p o sé , si l’adversaire veut faire deux opérations de
com pte, s’il veut établir une distinction entre le bail à
ferme et le bail à métairie , il ne peut pas prendre d’abord
la moitié de toute la différence qu’il y auroit entre le prix
exprim é au bail de 1783 et l’estimation de l’an 2.
Il ne peut pas prendre ensuite, sur la moitié revenant
aux métayers, dans cette même différence, toute la somme
en plus entre lè prix énoncé au bail à ferme et le prix
énoncé
bail à métairie.
�( 34 )
En effet, entre Choussy, ferm ier, et les rti&aÿers, le bail
à cheptel opéroit une société. O r , il est de principe que
lorsqu’il s’agit d’ un partage de société, l’on commence
par en former l’actif.
'
Sur toute la niasse de cet a c t if , chacun des sociétaires
prélève les fonds qu’il a mis dans la société, et ce qui reste
est partagé entre les sociétaires.
Entre Choussy et les m étayers, la valeur des bestiaux en
l ’an 2 , la somme de 9,960 fr. auroit été la masse de l’actif
de la société ; les fonds mis par Choussy dans la société
auroient été la plus-value des b e s t i a u x d e p u i s 1783 , ju s
qu’aux baux à métairie faits entre Choussy et les m é
tayers.
Sur la valeur de l’an 2, Choussy de voit prélever le mon
tant de cette plus-value; mais il devoit faire ce prélève
ment avant tout partage, afin que ce prélèvement portât
également sur tous les sociétaires.
A u lieu de cela, Choussy a commencé par
porter en lign e, c i ...........................................9,960 fr. o s.
D e cette som m e, il a soustrait celle de
1,912 fr. 16 s.
Pou r le prix des bestiaux en 1783 , il a
p r i s ..................................................................... 1*912
Il en est r e s t é .............................................. 8*037
16
4 s*
. D e cette somme, il a pris pour lui moitié,
q u ia é t u d e ..............................................
4,018 fr. 12 s.
Il a attribué au citoyen Rabanon , comme, | (
1
représentant les métayers, une somme de . 4,018
12
�7t r
r s 5 )
Sur cette moitié, il a été retenu la somme
d e ........................................................................ 1,218
4
pour la plus-value des bestiaux entre 1783 _______ _
et 1792.
D e cette manière il s’est donné . . . . 5,23$
Dans cette opération il y a erreur de
compte , double emploi et faux emploi.
Il y a double em ploi, en ce qu’il reçoit
deux fois la mcme somme ; il reçoit deux
fois la même som m e, en ce que les 1,218 fr.
16
4 s. devant être seulement un prélèvement
sur la somme totale, par la forme du prélè
vem ent, il en auroit lui-mêmc supporté la
moitié.
Il y a faux em ploi, en ce qu’en opérant
de cette manière il a mis sur le compte des
métayers,et dès-lors sur le citoyen Rabanon,
la totalité d e .....................................................1,218 fr. 4 s.
montant de la plus-value, tandis que lui •
Clioussy devoit en supporter la moitié.
En cet état, voici le vrai calcul qui auroit dû être fait par
Jacques C h o u s s y , même .daus son système. L e citoyen
Rabanon n’entend pas approuver les bases que Choussy
a posées. E n temps et lie u , le citoyen Rabanon en pro
posera d’autres qui sont très-justes; mais en ce moment,
et sans tirer à conséquence, nous comptons d’après Choussy
lui-m êm e, et nous montrons l’erreur, le double em ploi,
le fux emploi.
Ainsi, suivant Choussy en l’an 2 , p rix de
�fo ire , les bestiaux v a lo i e n t ............................ 9>95o fr. o s.
A in si, suivant Choussy, les bestiaux en .............
1783 valo ien t, prix de f o i r e ....................... 1,912 fr. 16 s.
q u ’il falloit déduire.
________
R e s t o i t .................................
Suivant C h o u ssy, la plus-value depuis
1783 jusqu’en 1 7 9 2 , avec les
métayers, étoit pour Joninain
888 fr. 4 s.
P o u r C h ita in .......................
330
1,218
4
A d é d u i r e ................. ...
R e s t o i t ............................................................6,819
L a moitié revenant à Choussy, étoit de . 3,409 • 10
Il lui reviendroit encore pour la plusvalue entre 1783 et 1792 ci-dessus, ci . . . 1,218
4
L e total du contingent de Choussy seroit
d e .........................................................................4*627
Il a reçu en a rg e n t. . . 2,5oo fr. os. 1
Il lui seroit encore dû
> 5,392
par billet . • . ................. 2,892 •» 16
)
‘
14
16
Il y auroit donc une première erreur contre le citoyen
Rabanon de 765 fr. 2 s ., non compris les valeurs des chep
tels des brebis , qui appartiennent aussi essentiellement au
citoyen Rabanon que les cheptels des gros bestiaux , et que
Jac ques Choussy, par le compte que Ton vient de discuter,
fait payer au nombre de cent vin gt, à raison de 6 J'r.p ar
brebis • tandis qu'il doit les rendre tête pour tê te, comme
�( 37 )
son père les a reçues du citoyen Busseuil, précédent fer
mier, ainsi que l’explique la lettre imprimée de ce dernier,
page 2.
D e tout ceci, il résulte matériellement qu’il y auroit
preuve bien positive d’erreur de com pte, double em
p lo i, faux emploi ; et comme erreur n’est pas compte ,
tout est à refaire.
Ce n’est pas que le citoyen Rabanon en soit réduif à
ce moyen ; il en a plusieurs autres qu’il développera ; mais
il a cru devoir se borner en ce moment à celui-ci,
comme l’un des plussaillans. Lorsque le simulacre d’arran
gement du 17 thermidor an 2 sera effacé, lorsque le
compte se f e r a de n o u v e a u , i l s t i p u l e r a scs intérêts avec'
plus de t r a n q u i l l i t é d’esprit; il jouira de toute sa lib erté• ^
alors, il aura sûrement justice.
Nous avons démontré qu’il y a eu erreur même dans
le com pte, dans l’opération de Choussy. Mais nous n’en
avions pas besoin ; la vérification ne doit s’en faire, que
lorsqu’il s’agira de l’exécution du jugement que le tri
bunal va rendre ; en ce m o m en t, il suffit d’avoir bien
p r o u v é que le citoyen Rabanon a été terrorifié par
Choussy et par t o u t e s les horreurs des circonstances des
temps, et par celles des 17 , 22, 28 thermidor, pour que
le citoyen Rabanon doive être restitué, contre des actes
produits par la tyrannie.
�7^°
(38)
T
r o i s i è m e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on -p eu t-il dem ander la restitution
de la som m e de 235 oq J r a n c s en a rg en t, p a r lu i payée
le 17 therm idor an 2 , avec intérêts ?
Cette proposition n’est pas une question 5 elle est seu
lement une conséquence de la précédente.
E n effet, nous venons de démontrer que l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 , doit être annullé :
cette a n n u l a t i o n r a m è n e r a t o u t e s les p a r t ie s e n l’état
d’avant le 17 thermidor an 2 ; les écrits du 17 thermidor
an 2 et tout ce q u ia suivi, seront considérés comme non
avenus ; il faudra que chacune des parties reprenne le sien.
Ce qu’a fait l’adversaire, ne présentera plus q u’une expoliation , et spoliatus antè om nia restituendus. L ’adver
saire rendra la somme de 2,5oo francs ; il la rendra avec
les intérêts, à compter du payement. Ces intérêts seront
la réparation du dommage causé au citoyen Rabanon. Z/. 2.
cond. ind.
Q
u a t r i è m
e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il a u jo u rd 'h u i, recevable et
J b n d é à demander raison du cheptel ?
Celle proposition ne présente pas de difficulté ; elle
est encore une conséquence forcée de la seconde. L ’es
pèce d’arran^cinent du 17 thermidor an 2 , écartée, les
V
�ïz \
( 39 )
droits du citoyen Rabànon sont rétablis en leur intégralité.
" Ce sont le s;nouvelles-lois sur le9 cheptels, qu'il faut
'consulter; en voici la série et les dispositions propres à
la contestation d'entre les parties.
Un arrêté du comité de salut public, du 2 thermidor
an 2, article 3 , porte : « Lorsque le bail du métayer sera
et J î n i , il sera obligé de rendre en nature au proprié
té taire, Je mérrtè nombre de bestiaux et la même branche,
« tels enfin qu’il les avoit reçus, sans pouvoir se servir
« de la clause de son b a il, pour en fournir la valeur. »
U n arrêté du même com ité, en date du 17 fructidor
an 2 , dit en l’article premier : « Les fermiers qui ont reçu
« du propriétaire des bestiaux en entrant dans leurs fer« m es, sont tenus comme les métayers, d’exécuter l’ar« rêté du 2 thermidor dernier. »
Ces deux arrêtés furent rapportés par un troisième
de ce com ité, en date du 16 pluviôse an 3 ; par l’ar
ticle 2 , les comités de législation et de com m erce, furent
invités à présenter sans délais un projet de lo i, su r les
difficultés qu occasionneraient alors les ba u x à cheptel.
Parut ensuite la loi du i 5 germinal an 3. L ’art. Ier.
obligea les1fermiers ou métayers à rendre les bestiaux
à la jin du ba il ou lors de Vexig u e, compte ou partage,
en même nombre , espèce et q u a lité qu'ils les aboient
reçus.
~ T/article 4 , dans le cas d’une simple énonciation de
prix dans les b a u x, et sans désignation du nombre des
espèces et des qualités ; dans ces deux cas, cet article
veut qu’il y soit suppléé par enquête ou par experts.
L ’article 5 recommande aux experts de prendre toutes
�(40).
les informations, tous les éclaircissemens nécessaires pour
découvrir la vérité ; il les charge de s’arrêter au mon
tant de l’estimation exprimé au bail, et d'apprécier com
bien au temps de cette estimation, moyennant la somme
de cette estimation, l’on pouvoit avoir de bestiaux. 11
les charge de consulter le nombre de bestiaux conve
nable pour l’exploitation du bien.
Enfin l’article n parle ainsi : « toutes les difficultés
« qui ont pu s’élever dâns le courant de ta n n ée d ern ière,
« sur les baux à cheptel expirés ou r é silié s, et qui sont
« indécises ; toutes celles a ussi q u i se sont élevées rela»
c tivement à l’exécution des arrêtés du comité de salut pu
is blic des 2 thermidor et 17 fructidor, jusqu’à ce j o u r , et
« q u i ne sontp a s non plus entièrem ent term inées, seront
cc définitivement réglées d après les dispositions dex
articles précédens. » G est ici une restitution que la loi
accorde aux propriétaires, contre la sorte de brigandage
des métayers et des fermiers , contre les propriétaires.
L e papier-monnoie a b o l i, le législateur rendit la loi
du 2 thermidor an 6.
P a r l'article 6 de cette loi , les m étayers o u ferm iers
fu re n t ob ligés à re n d re les bestiaux ou tête p o u r tête ,
ou le p r ix su ivant l’estimation.
L ’article 6 dit : « Les comptes et partages de cheptel
« entièrement consommés, soit qu’ ils l’aient été par suite
« de jugement, soit qu’ ils l’aient été par suite d'nrran» gemens définitifs faits de gré à g r é , sont maintenus,
« et sortiront leur plein et entier effet, à quelque épo« que et dans quelque proportion qu’aient été faits le^d.
«.comptes et partages, »
Mais
�t e s
c 4* )
Mai? ¡’article 7 po¡rte :« A l’égard' des comptes et par« tnges .écjius, ¡niais non définitivement consommés, ils
seront ,r<é.glés suivant les conventions et les lo is , ou
-« usfiges antérieurs ,î\ la loi du i 5 germinal an 3. .»
... «, Ü estim a tio n à faire, s'il y a lieu , dit l’article 8 ,
* pqur la rendre des bestiaux, dans le cas de l’article
« précédent , sera faite en valeur métallique, au prix
<« rnçyen de 1790, ,ç\ ucmobstaut toute estim ation déjà
m J a iie j p en da n t la dépréciation du papier-m onnoie :
hu cette estimatiqn sera faite à raison de l’état du b é ta il
.« reiidu,, s’il est ençorfi sur les lie u x j dans le cas con« traire, les e x p e r ts q u i a u r o ie n t opéré la remise ., et
k<;j à Jqur dt^ant y \tçvis autres \ççcpfirts tém o in s, seront
je appelés,
procéderont de n ouveau, d'après laurm é
ta m oire , ■
leurs connaissances particulières , ou tous
■
ft autres dpeumens, conformément aux règles prescrites
,« par la présente. »
. ,j >
I/artiçle 11 de 1? loi du i,5 gprminal an 3 , parle en
général .de ¡toutes difficultés élevées dans le courant de
J’^njiée précédente, de .toutes les difficultés .encore indé
cises ; elle ne distingue pas,:, il suivit qu’il y ait difficulté,
pour qu’il y ait lieu à 1’applicatio.n de cette loi.
ï $ e parle no# seulement dpsj^aux expirés, mais encore
¡des Jjapx r,ésilié$;; pias .de .distinction ;ent¡r’eux.
^llçis’iipp.roprie à tpus les cns.ou Je propriétaire auroit
réclamé le bénéfice des arrêtés des z thermidor .et 17 fruc
tidor an 2;.elje dit qü’alorp si JesidifficuHés qui s’ensuivent
7ie s.oiit pas etttièrcmçjit term in ées, -elles seront défini
tivement réglées ¿suivant les .dépositions de cette loi ( d u
i 5 germinal. )
F
�C 42 )
Celle du 2 thermidor an 6 va plus loin. S i , en l’ar
ticle 6 , elle maintient les comptes et partages faits, elle
veut qu’ils soient entièrem ent consom m és; elle exige qu’il
11 y ait plus rien.à faire; elle exige que les parties se
trouvent en position telle qu’elles n’aient plus rien à se
dem ander, -parce que sans cela la chose ne seroit pas
entièrem ent consom m ée.
Dans ce sens, pour une consom m ation en tière, il n&
su ffit pas d'une estim ation des bestiaux pendant le
papier - jnonnoic , puisque ta rticle 8 dit nonobstant
toute estim ation d éjà j'a ite p e n d a n t la d é p r é cia tio n dtù
papïer-m onnoie.
P o u r une consommation e n tiè re , il ne suffit pas de
la reddition des bestiaux par le fermier au proprié
taire, puisque le même article 8 d it: Cette estim ation
sera f a it e ¿1 raison de Vétat du bétail ren d u , s’il est
encore su r les lieu x ( ce qui suppose la reddition déjà
faite au p ro p riéta ire), puisque le môme Article, dans
l'hypothèse où ces bestiaux ne seroient plus sur les lieu x ,
charge les e x p e r t s q u i en a u r o ie n t o p éré la rem ise} d’en
faire l’appréciation, d’après leur m ém oire et leurs con
naissances particulières.
O r , ici il 11 y a rien eu de définitif; il ne peut pas y
avoir encore rien de définitif aujourd’hui entre le citoyen
Rabanon et l'adversaire, puisque le citoyen Rabanon n’a
rien p a y é , et que c’est le payement définitif ou le dépôt
qui opère la consommation : tout le prouve.
i°. Dans le sens de la loi du i 5 germinal an 3 , des
difficultés1se sont élevtfçs entre le citoyen Rabanon et
l'adversaire.
�ÏX J
(A 3 ) .
L e citoyen R abanon, en l’an 3, par ses offres cTu 2 ger
minal et par nombre d'autres actes subséquens, a réclamé’
toujours le bénéfice des arrêtés des 2•thermidor et 17 fruc
tidor an 2; de là des difficultés non entièrement terminées
lors de la publication de la loi du i 5 germinal an 3.
2°. Dans le sens de la loi du 2 thermidor an 6 , d’une
part il n’a été rien fait de gré à g r é , puisque le citoyen'
Rabanon a élo ig n é, résisté autant qu’il a été en son’
pouvoir, au prétendu arrangement du 17 thermidor an 2;
puisque, s’il n’a voit pas obéi aux réquisitions, aux injustes"
prétentions de l’adversaire, les visites, les menaces, les
dénonciations auroient recommencé , jusqu’à ce que’
J a c q u e s Ghoussy e u t o b t e n u cc q u ’ il désiroit ou dans li n
sens ou dans l’autre; d’un autre c ô t é , il n’ÿ a encorer
rien de définitivement consom m é>puisqu’il fau t'y revenir,
puisque dans l’opération il y a eu crainte grave, force
dol personnel., erreur de com pte, double em ploi, faux'
emploi.
N ’importe qu’ i l 'y ait e u , en l’an 2 , estimation des
bestiaux; mais cela ne suffit pas. ( Y . art. 8 de cette lo i,,
première partie. )
N ’importe qu’il y ait eu remise des bestiaux, par lracl-versaire, au citoyen Rabanon; mais cela ne suffit pas
encore. ( V ‘. art. 8 de cette l o i , deuxième partie. )
- En ce cas, la loi en appelle, i°. aux experts qui au
r o ie n t déjà opéré cette remise; 2 0. à tous autres experts
témoins; 3°. à le u r m é m o ir e , à leurs connoissances
■particulières, et à tous autres dücumens. Et certes, il'
existe encore beaucoup de témoins de l’injustice criantefaite par Choussy au citoyen Rabanon.
F 2-
�t A4 )
Un. autre moyen, puissant se présente contre l’adver
saire; il ne sauroit y répondre convenablement.
E n p o m t.d e d r o it, un acte synallagmatique est celui
qui est obligatoire de part et d’autre; toutes les fois q u’il
y a obligation réciproque, il en est résulté un.engagement
synallagmatique; et l'acte contenant cet engagem ent, s’il
est sous seing p r iv é , doit, être fait d oub le, à peine de
nullité.
Dans l’espèce, il s’agissoit de la résiliation d’un cheptel
de fer. L e propriétaire pouvoit réclamer le montant de
l’estimation de 1783 ;;le fermier étoit en droit de retenir
l ’excédant.
Il y avoit nécessairement obligation réciproque entre
le citoyen Rabanon et l’adver.saire.. Suivant le calcul de
l’adversaire, le citoyen Rabanon lui devoit-raison de la
plus-value des bestiaux; de .son côté, l’adversaire devoit
lui rendre les bestiaux. Il y. a de part et d'autre 'des engagemens i\ remplir : ceci posé, il devoit y a vo ir, de la
part du citoyen Rabanon , décharge des bestiaux du
cheptel; il devoit y a v o ir, au profit du citoyen R aban on ,
quittance de la p l u s - v a l u e . P a r c e s d e u x motifs, il devoit
y avoir un acte fait double; il n’y.en a point. L e citoyen
Rabanon pourroit demander h Choussy raison des bes-r
tia u x , parce que Choussy n’en a point de décharge.
Choussy ne pourroit pas dire qu’il 11’en avoit pas besoin,
et qu’il lui suflisoit de la simple remise des bestiaux,
parce que quand on est engagé par écrit, il faut établir
sa libération par écrit.
Choussy ne pourroit pas plus offrir utilement une preuve
testimoniale, parce que l’objet cxcéderoit 100 fr.
�(■4 5 )
D e tout ceci^ il suit que tout n’est donc pas définiti
vement consom m é, et dûs lors c’cst le cas de la loi du 2
therm idor, an 6.
L a lo i du prem ier.fructid or an 3 , a prévu fesp èce;
elle rappelle , relle consacre tous les principes de ju r is
prudence-sur des doutes ¡q u i s 1étoient élevés. L e légis
*
lateur passe à Vordre du j o u r ,fo n d é sur ce q u u n remboursem ent n e s t consom m é que lorsque le débiteur
s’est dessaisi p a r la consignation.
En cet état de choses, il faut mettre à l’écart l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 ; alors demeure dans
toute sa fo rc e , l’obligation de l’adversaire de compter des
bestiaux du cheptel, en conformité des lois d e s 'i 5 ger
minal an 3, et 2 thermidor an 6.
l ia loi de thermidor an 6 présente au tribunal le moyen
de rendre justice à qui elle appartient. Des experts témoins
montreront au doigt le véritable débiteur : ce sera alor*
que l’on- pourra , en très-grande connoissance de cause,
juger laquelle des deux parties est à condamner, ou le cit.
R ab an on , pour avoir lutté contre une injustice criante, ou
Jacques Choussy, pour vouloir en abuser.
Après avoir analisé le précis, les moyens de Jacques
Choussy, ses apostrophes, ses personnalités,que restc-t-il
dans son m émoire? des injures, des calomnies, des perfidies,
pas une vérité.
Mais ce n’est point assez que les moyens de droit du cit.
Rabanon obtiennent un succès complet. Il doit cire vengé
de toutes les expressions diffamatoires du précis de Jacques
Choussy. L e cit. R abanon, dans le sien, a été grandement
modéré sur le coinpte de Jacques Choussy. Les pièces qu’il
�71 t
(4 6 )
a produites sont dans les mains de tous les administrés du
district de Cusset qui les lui ont confiées.
II a dû les présenter à la justice : sa cause l’exigeoit.
Elles sont l’expression des sentimens de tous ceux qui les
ont signées : rien ne lui est personnel. Jacques Choussy,
au contraire, a dit tout ce qu’il falloit pour fatiguer ungalant homme , pour attaquer sa délicatesse. Mais le sanc
tuaire de la justice ne doit jamais être souillé par des com
bats d’injures, d’impostures, de calomnies; les tribunaux
doivent empêcher- et réprimer ces scènes scandaleuses. L e
meilleur moyen , en pareil cas, est celui employé lors d’un
arrêt du c i - d e v a n t p a r l e m e n t de P a r i s , du 7 f é v r i e r 1 7 6 7 ,
rendu sur les conclusions du cit. Seguier. Ce moyen est
d’ordonner la suppression du précis épisodique de Choussy..
L e cit. Rabanon y a conclu : le tribunal consacrera sans
doute cet acte de justice.
GOURBEYRE,
A R
io m
,
avoués
de l'imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire demeurant à Chitain, commune de Saint-Christophe, appelant ; Contre Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1128
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53156/BCU_Factums_G1128.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52902/BCU_Factums_G0225.pdf
e5d88d628fe1100f781bfcd47863da17
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Text
¡JA »
I
13
55?
g=g 5a?ífl;
P O U R le fieur J e a n P A R E N T - , Négociant,
demeurant à Euvy , Paroiffe ’ de -Valigny-leMonial , Appellant de Sentence du JLieu tenant
Criminel de Saint-Pierre -le - M o utier , &
Demandeur.
C O N T R E Monf ieur le P R O C U R E U R
G E N E R A L , intimé. 7
E T encore contre N i c o l a s TIXERAND
auf f i Intimé Défendeur &Défaillant
.
,
«
L eft temps que le fieur Parent jouif
P fe du repos que fes Oppreffeurs lui
§o ont ra v i, il eft temps qu’il foit lavé
9
0 des imputations dont on a voulu le
3o o o q iil
noircir. Calomnieufement accufé ,
pourfuivi par de vils Délateurs, dont fes bienfaits
ont tantôt couvert la nudité, tantôt appaifé la
A.
++++++++++
* r » T -¡~T
«► +
+++
L— I
�X
faim (a) , condamné enfuite, malgré la demondration de Fon innocence, il aime,à croire que par
}in retour indifpenfable , les M agiftrats, aux pieds
defqucls il s’eft réfugié, le vengeront de ces odieuiès'perfécutions. Il n’ignore cependant pas que la
ténébreufe cabale qui conjura fa perte,_iî ,y.ajro is
ans , travaille avec un nouvel acharnement à la
réalifer ; il/fait" que l'es Chefs de cette indigne
confédération,, non 'contents ¿ ’avoir-fait-entendre
leurs propres complices dans les informations
qu’on: a ordonnées pour conftater les délits dont
cm 1 accuftit.y,non tcontents d’avoir eux- mêmes
porté dansées informations un témoignage ¡eippoiFonné. p^r la h^ine^.non contants ^nfin d’avoir
provoqué la févérite de fes premiers Juges fur lui,
en ofant lui prêter des difcours offenfants _contreeux (b), ont encore obfcdé ici l’Homme de la
:
■ V
J
■
■ ••
..
. '
v. ^
v ♦ . '•
(d)
C ’eft un nommé W i b i e r , M e n d ian t,Soupçonné de vo l ,
qui a le premier accufé le iieur P a r e n t, & il doit être prouvé
p^r les d ép o rtio n s d’ Antoine Radureau , de Nicolas Auperrin ,
& "rie Gilbert Caron , témoins enténdus dans une information
faite à Lur(ç i-L e v i^ 'd o n t on a ordonné l’apport\aû Greffe d e là
C ou r / q u e le fiêtir Parent a com blé ce même Joub ier & fa fa
mille dé bienfaits. Claude S o r to n , autre témoin entendu dans
les informations- faites à S. P ierre-le-M ou tier contre le fieur
Parent, eft çonvenu du même fait à la confrontation,
(¿) On prétend que Marie Barbartn i veuve le.Borgne ( c’eil
un des témoins de l’information faite contre le fieur Parent )
a d i t , lors d e .fo n , récolenjent, qu’elle avoit ouï dire au fieur
V id a l , Curé de Bardais & de V a lig n y ," q u è le fieur Parent
s’étoit van té’* pouvoir f a ir e cajfer tous les Ju g c i de S. P icrre-leM oiuier i illk voulait. On fent aflez combien il eft abfurde que
je fieur Parent ait tenu ce propos pourquoi donc le lui prê
t e r ?p o u r aigrir fes Juges contre lui ? -- -■ >
;
�loi (c). par. une foule de plaintes,-dont le moindifç
défaut ell fans <knu:e. de „n’êtrè avouées de periprxf
ne. Maiî>(qué li)iji^pnenf>ces noirceurs anonyf
mes? de quebpoids lcnt-elles? ILne fera point ^
la Magiilrature l’aifront de penfer-que ces ma
nœuvres de.la mççhançete'la plus mépr^fable', ppiÇqu’elle eft la plus 1âçhe,>'puifîen t-ê tre},pqujo$n,é,e£
du fuccès que leurs auteurs en attendent«Il.-^i’eft
pas aifèz.malheiireUxrpqur avoir à fe,déf$ndrg en
même temps & des traits de'l’envic |‘ôc des preÇ
tigë$ de la prévention.‘«ainfij il ;Va >rcpq.uiIèrrles
l i n s ,red ou terJcs autres. ;,~c!DiCl il iup.ji .jr m c S
" . u o r -v..-‘A jir , oi'"x/U (. :!• or:,r; T y i b ï i n ï i : 7 : m î o y c i è r I
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;L- De; longs, m v a p . ^ frefifis , ^yee.^ardi.'eiîè
lo.utenus! av'écypon&uicft'*;i*ne in d u r i e;d Qrit;l’ac
tivité ne s’eft: jamais^lémeniie^ un 'cjoçnmerçe 4çoi>d u . 6c fou vent; heureux, ,ont-procuré, aujjetjr
lient uneaifaiiee d’aut^nt;plus
^queiayfoyçiCe en,a tpujousféçpxpvire,- Cettç ;^iiàricevajf^èss. ¡ira^f^
dans le pays qu’il habite,-n'a-pas manqué de ibulever l’envie contre lui', & pour ctre coupable aux
yeux de bien de gens,j(il a fuffi que fes foins eu£
fent arraché a-laifortune cScs faveurs:qu’eUc aV.oïc
rc fui ces à leur indolence/ G cil en vain qi'i’il tendôit unè'mainTecourable à fh i^ ^
c’eil en.vain qu’il vérfoit ion >fùperflu rdans le fein
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(c) M. le Procureur General. v>v sb SirallionuoD ■wovü ilWjje
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des pauvres-(<i) ; il étoit riche, on ne devoir pas
le lui pardonner. Mais commfc il auroit été vifiblement extravagant-de déférer- tin femblable délit
à la' Juftice, on étoit réduit au trifte plaiiir d’en
iùppofer de plus graves au fieur P arent, fauf à
rhereher enfuite des témoins qui voulurent cil
avoir coiihoiiïànce moyennant une rétribution
convenueP* •
• •••
<
*;■
;
: Tandis que ces fémences dé!haine fermentoient,
tandis que l’envie défeipérée poufîoit de ridicules
<lameurs; & tramoit des projets iniques, le lieur
Parent, à qui la Déclaration du R o i du 13 Août
17 6 6 venoit d’inipirer une nouvelle ardeur pour
l’agriculture, s’occupait tranquillement à fertilifer une partie des Landes de la Paroiile de Lurci-Levi, dànslaqùëlie il po(Téde quelques Domaines.
L a récolte duterrein qu’il avoit vivifié, ne devoir
ni dîmes ni tailles; lai Loi qu’on a précédemment
rappellée l’en affrâiichiiibit par une diipoiition
eXpreiîè; mais files Gollé&eurs de là Paroiiïè de
Xurci-Levi furent ailèz raifonnables pour ne rien
_
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(a) L a charité du fieur Parent lui a fait diftribuer aux pau
vres , pendant toutes ces années dernieres., environ quatre ou
cipq mefpres de bled par feruaihe. La rnefure , qu ipefe trente à
Irrerire-trots livres , valoir-cotVimuhénient 3 livres 0113 livres 10
f o ls ; indépendamment de cet a d e d'hum anité, Ie iîe u r Parent
habilloit & habille encore tous lps ans douze 011 quinze pauvres
*<le fa paroiffe : on peut en trouver la preuve dans les dépofi■tions'd’A n n ® Pruneau & de Pierre C olio , témoins entendus dans
les informations faites à S. Pierre-le-Moutier. Le fieur L ’hom m è , témoin entendu datls l’information faite à L w rci-L e vi, peut
auifi avoir connoiiTance de ces Jairs. ...i
,‘i - J . '
�J2J
demander au fieur Parent, relativement à cetobjet,'
le fieur.Gillet, Curé de cette même Paroiiîe, ic
crût dilpenféde fuivre l’exemple “qu’ils lui donnoient, & prétendit n’avoir pas moins de droit
fur les défrichements entrepris depuis 176 6 que
fur les terres cultivées avant cette époque. Une
idée aufii chimérique n’étoit pas faite pour en
crer dans la tête du fieur Parent ; l’avide Pafc
ceur, qui vouloir l’accréditer, ciiàya donc inutile
ment de la lui faire adopter; il ne lui fut pas poffible d’y parvenir. Plus il s’échaufFoit à établir ce
fyftêm e, plus l’agriculteur manquoit de f o i, &
leurs conférences fur ce fujet croient autant de
combats qu’ils le livroient l’un à l’autre. Il n’eft
pas befoin d’annoncer que le fieur Parent fortit
viâorieux de la lice où ce nouvel Adverfaire l’avoit forcé dp deicendre: mais ce triomphe de la
raifon fur l’intérêt valut au vainqueur un enne
mi de plus.
Ce n’eft pas tout. Le fieur V id a l, Curé de Bar
dais, eft en même temps Curé de V alig n y , parce
que l’une de ces deux Paroiiîes n’eft: apparemment
que l’annexe de l’autre. S ’agit-il de percevoir la
dîme dans le Territoire qu’elles embraflent? le
fieur V id a l, qu’on retrouve par to u t, femble iè
•multiplier à fon gré; le temps le plus orageux ne
le retient pas : la plus longue courfe ne peut
l’effrayer ; il gémit de voir fon a&ivité reiîèrrée
dans une fphére auifi étroite : mais faut-il venir de
Bardais à V align y, foit pour faire le Catéchii'mc
�•
6
aux enfants, foit pour préparer un malheureux qui
fc meurt à paroître devant le.tribunal'du Juge iupreme, foit pour inhumer le cadavre de cet infor*
tune, quand la mort l’a enlevé à fa famille, foit
même pour célébrer l’Ofïice divin, lorfque les R h
tes Eccléiiaftiques exigent le plus rmpérieufemenc
qu’on le célébré, tout change en un moment ; le
fie ni* Vidal r concentre dans le Presbytere de Bar*
dais, ne fe fent pas laforce de franchir la diftance
qu’il y a de-là à V aligny ; il cherche dans la tempe*
rature de l’air des raifons pour ne pas fortir déchez lui ;/(i le ciel trop ferein ne les lui fournit
pas , il a recours à d’autres expédients ; deux
ou trois maladies qu’il a quand il veut , &
qu’il complique en cas de befoin, ne man*
quent pas alors de l’attaquer y & ta voilà hors
d’afïàire. Malheur à l’imprudent qui' fe permettroit de douter deces infirmités préméditées!' ma 1heur fur-tout à celui qui s’opiniâtreroit à entraîner
le fieur 'Vidal hors de fon fo yer, fut-ce dans la
circonftance la plus preiïànte 1 l’homme de paix»
que ià fievre ou la migraine >ou toute autre maladie
qu’il leur auroit préférée, n’auroit pas encore eu
le temps d’afioiblir, le feroit infailliblement re
pentir de fa témérité, (f)
>
(e)
Le (leur Parent reprocha au fieur V i d a l , lors de fa con
frontation , d ’avoir donné des coups de p'ofng & des fouffletsau nommé Fontaine & à la femme de Mathieu le C l e r c , qui
u’avoient d’ autre tort envers lui que de l’av o ir folliciti dcrem plir plus exa&ement les fond ions du Miniftere pafloral à
(Y a l i g n y , & ce même fieur V id a l ne difeonvint pas du fait<
�Jxr
Il y avoir déjà longtemps que le fieur Viciai
abufoit ainfi de la patience des Habitants de la P at
roiiTe de Valigny. Les enfants y vieilliiloient fans
inftruction ; une partie des malades y mouraient
fans Sacrements ; les morts y demeuroierit quelque
fois deux ou trois jours fans fépulture ; enfin, les
femmes enceintes les plus foibles
les vieillards
les plus larçguiflànts croient obligés de iè traîner
à' Bardais, ou de renoncer abfolument à la confolation de participer aux faints Myfteres. (J") Ces
abus étoient trop multipliés &: trop choquants,
pour être toujours tolérés ; il s’élevoit de temps
en temps quelques murmures ; les plaintes des
mécontents alloient bientôt retentir jufques dans
le Palais du Prélat, à la Jurifdi&ion Paftorale ,
duquel le fieur Vidal eft aiTujetti : le fieur V idal
prévit l’orage qui fe formoit fur fa tête, mais loin
de changer de conduite , loin de fe prêter avec
plus de complaifance aux juftes vœux des H abi
tants delà Paroiffe de V alig n y , il en fit interdire
. ( / ) Un Procès verbal d’ademblée des Habitants de la Paroide
de V a l i g n y , du 17 Jan vier 1 7 6 8 , qui fera produit fous la
prem ierecote des pieces juiUficatives du fieur Parent, conftarc
c e s f a i t s , & notamment que le fieur V id a l a edeftivemenc
laide mourir Jean B e l l o n , Jeanne Lavalette & deux autres
Particuliers fans Sacrem ents, quoiqu’il eut été averti à temps
de venir les leur adminiftrer. On voit encore dans ce Procès
verbal que le fieur V i d a l , ayant refufé d ’inlnuner un Habi
tant de V a l i g n y , à V a li g n y m ê m e , dans un temps où les che
mins éroient couverts de g la c e , les Parents du Défunt furent
contraints de quitter leurs chaud'ures, & de le porter pieds
nuds au Cimétiere de Bardais, au hazard de l’y fuivre bientôt euxmêmes. 0 religion ! ô charité ! où ¿tes vous ?
t o u s
�fE glife , fous prétexte de quelques dégradations,
dont jufqu’alors il n’avoit point parlé. Triomphant
du fucc'es de ce iîratagême, qui le difpenfoit de
deiîèrvir la Cure de V a lig n y , fans l’empêcher
d’en percevoir les revenus , il fe hâta de transférer
Jes Vafes facrés de cette Paroiife dans l’Egliiè de
Bardais; mais l’avantage qu’il venoit de rempor
ter n’étoit que l’avantage d’un mioment ; la
Paroiiïè de Valigny ayant fait réparer fon Eglife , & s’étant aflèmblée pour délibérer fur le parti
qu’elle avoit à. prendre dans cette eirconftance,
arrêta qu’il falloir faire faifir les revenus de la
Cure dé V alig n y , jufqu’à ce qu’il plût au ficur
V idal de rentrer dans fon devoir, & chargea
le iieur Parent, qu’elle nomma fon Syndic ad hoc,
du foin de remplir fes intentions à cet égard. Il les
remplit en effet, & fes pouriuites plus efficaces
que les prieres auxquelles on s’étoit auparavanE
borné , obligèrent enfin l&fieur Vidal de repren
dre une partie des fon&ionsr qu’il avoit abandonnées : mais il ne fut pas moins haï de ce même
fieur VidaL, qu’il i’étoit déjà du fieurGillet, ôc
fes ennemis eurent deux chefs, au lieu d’un.
C’en étoit trop pour fa tranquillité d’ avoir ofé
déplaire à deux hommes de cette cfpece ( g) ; il
(g) Iî ne tiendroit qu’au fieur Parent de dévoiler ici des m y £
teres qui couvriroient ces deux Prêtres de honte , & qu'ils ont
tlès-lors un intérêt preflant d ’enfevelir dans un éternel oubli ;
il pourroit par exem ple.............. niais le refpe£ï qu’il a pour les
M inières de la religion , dont les mœurs font dignes de ce nom-,
�ne tarda pas de réprouver : à quelle occaiion? nous
allons l’expliquer.
Le Gouvernement Vêtant apperçu que le nom
bre des mendiants s’accroiiToit de jour en jour,
& Tachant d’ailleurs que cette foule de fainéants,
qui couvroit la furface du R oyaum e, n’étoit guere qu’une pepiniere de voleurs 6c d’aflàflins, avoir
renouvellé depuis peu la profeription de la mendi
cité. M . Dupréde Saint-Maur , Intendant du Berr y , ne fe contentoit pas de veiller à l’exécution de
la loi qu’on venoit de promulguer à ce lu je t , il
promettoit des récompenfes à tous ceux qui vou-~
droient concourir avec lui à purger ia Généralité
de ce fléau deftru&eur. (Æ) La MaréchauiTce de
lui impofe filence fur la conduite des autres. Ainii quoique la
néceifité où il eft de défendre fon honneur , injuitement attaquée,
fut fuffifante pour l’autoriferà révéler tout ce q u ife r o it capa
ble d’atténuer les dépofitions des fieurs V id a l & G i lle t , il fe
bornera à ren vo yer aux reproches qu’il a fournis contr’eux à
la confrontation.
. (h) V o ic i ce que ce Magiftrat re fp e £ à b le à tant;d ’é g a r d s , annonçoit à tous les Curés du B e rry dans une lettre circulaire du
23 A v ril *769. f
» J e vous prié. ’. . . deraflurer vos Paroifliens fur les crain» tes mal fondées qui les déterminent fouvent à donner retrai» te aux mendiants , vagabonds & gens fans a v e u , tandis qu’ils
» d vroient au contraire les dénoncer , ou même les arrêter &:
« \es livrer aux Maréchauflees. J e Crôis devoir leur accorder
» pour cet effet les encouragements ci-après.
» i ° . J e ferai donner par forme dtî décharge fur la capirar> tion la fomme de trois livres à tout Labou reu r, Ferm ier ,
» M étayer ou autre perfonne de la campagne qui fera arrêter
» par fes gens & dom eftiqu es, & livrera i la Brigade de, Ma» réchaufléela plus prochaine un m e n d ian t, vagabond ou fans j.
» aveu , qui par l’examen qu’on fera énfuite de fa conduite ’,
B
�IO
Bourges arrêta en conféquence un nommé Joubier
le 14. M ai 17 7 0 , & comme il n’y avoit ni prifon
ni auberge dans le lieu où elle s’en faiiit, & qu’il
étoit déjà aiïèz tard ,*elle le conduiiit chez le fieur
Parent, dont la maiion n’étoit pas éloignée de là.
Ce Joubier, qu’il eit intéreiîant de connoître , parce
que,c’eft: une des principales machines qu’on a em
ployées pour perdre le fieur Parent, étoit un miiérable q u i, pouvant vivre du produit de fon tra
vail, aimoit mieux refter dans loifiveté, & devoir
ia fubfiftance aux fecours humiliants de i’aumô» fe trouvera dans le cas d ’être envoyé & enfermé dans les dé-*
» pots & maifons de force établis pour cet objet. r
» i ° . Si le vagabond ainfi arrêté fe trouvoit dans le cas d’ê» tre condamné aux g a le re s , le Laboureur ou autre qui l’au» roit remis ou fait remettre à la Brigade de MaréchaufTée , fe» ra en outre exempté d’ une des corvées de printemps ou d ’Au» tomne pour laquelle il pourroit être commandé après l’é» poque de ladite capture.
» 30. Si par événement le vagabond eft prévenu de crimes
» qui puirtent lui attirer une peine plus grave & le faire con » d a m n e ra m o r t , j’accorderai à celui qui l’aura fait arrêter,
foit pour l u i , foit pour un de les fils ou domeftiques l’exem p» tion de milice au tirage fubféquent, & ce indépendamment
» des autres privilèges qu’il auroit & feroit valoir fur d ’autres
» enfants ou domeltiques.
» 40. Je me réferve d ’accorder de plus fortes grâces aux
» gens de la campagne q^ii arrêteroient des vagabonds & gens
» fans aveu en bande ou attroupés & prévenus de crimes
« c a p ita u x .
« Je vous prierai. . . . de faire part de mes intentions à vos
» Paroifllens , & de faire enforte qu’ils c o n c o u r e n t , au tant qu’il
» fera en e ux, à rendre aux campagnes la sûreté qu’elles do i» - v e n t avoir , Hcc. »
Cette lettre fera rapportée en entier parmi les picces Juilificatives du fieur P a re n t, cote leconde.
�0<
11
ne. (i) Indépendammentde cette lâcheté, quifufïifoit feule pour juftifier fa capture, il y avoir encore
d’autres raifons de l’arrcter : on lui imputoit d if
férents vols commis dans le voifinage, ôc le gen
re de vie qu’il avoit embraiie, la iituation de la
chaumiere qu’il habitoit, les armes qu’on y trouvoie, pretoient en effet auxfoupçonsquis’élevoienc
contre lui une force à laquelle il étoit difficile de
réfifter. Cependant le iieur Parent le vit à peine
entie les mains de la Maréchauffée, qu’oublianc
tout ce qui devoit le rendre odieux, il ne s’occupa
qu’à foulager fon infortune : au ioin qu’il prit ae
lui faire ôter fes fers , à l’attention qu’il eut eniiiite
de lui procurer la nourriture dont il pouvoit avoir
beioin, il joignit encore un plus grand bienfait,
puifque fes iollicitations réitérées déterminèrent
enfin la MaréchauiTée à lui rendre la liberté, ( j )
Qui pourroit penfer qu’après avoir eu tant à le
louer de l’humanité du iieur Parent, cet homme
n’ait pas craint de le déférer à la juftie ? c’eil pour
tant ce qui efl: arrivé : ce meme homme, dont il
(i) Philippe Libault , François Chardeau , Anne Pruneau ,,
Pierre Colin &: Marie M a ré c h a l, témoins entendus dans les in
form ations, ont dû atteiîer unanimement la mendicité de cec
h o m m e , ils en ont une connoifTance particulière.
( / ) Plufieurs tém oin s, & Claude Sorton entr’ autres, ont v a
Joub ier foiiper dans la cuiiîne du fieur Parent le jour même
de fa cap tu re , & cette circonftance eft confignée dans les in
formation'! : Jacques Defrimais a auiTi dû dépofer que les C a
valiers de M-iréchauiTée , qui avoient arrêté Joubier , lui d ir e n t, ?
eu lui rendant la liberté, aye^ obligation à- Al. P a ren t de ce que
nous vous relâchons.
B a
�11
avoit ii fouvent confoléla mifere,*&: qui n’échappoic à une captivité ignominieuie que par un non-*
vel effet de là bonté, oublia tout-à-coup la recon»
noiflànce qu’il lui devoir, 6c le prêtant aux artificieulès inftru&ions qu’il avoit reçues des iieurs G il
lette Vidal, ofa lui imputer non feulement de l’avoir
dénoncé à la Maréchauilee, mais encore de l’avoir
livré entre fes mains , de 1’avoir fait maltraiter par
elle, & de l’avoir maltraité lui-même , dans le
criminel deiièin de le forcer ainfi à lui vendre le
bien qu’il poiîedoit. Ce prétendu complot auroit
été d’autant plus ridicule , qu’en effet Joubier ne
poiîedoit pour toute fortune qu’un briquet, une
fourche de fer , une beface & un fufil ( £ ) ; cepen
dant le Lieutenant criminel de S. Pierre-le-Moutier , auquel cette plainte fut portée , crût devoir
ordonner une information. On entendit jufqu’aux
iieur Vidal ÔC Gillet, mais foit que leur animofité
commençât de s’éteindre, foit que la religion du
ferment les eût effrayé, ils n’eurent pas eux-mêmes
le front d’appuyer 1 impoiturc de Joubier par
leurs dépofitions. Les autres témoins, qui n’avoienc
abfolument aucun intérêt à faire réuflir le roman
de ce malheureux, chargèrent encore moins le fieur
Parent ; & toute la Procédure, avec quelque appa(k) S’ il jouifloit avec cela de quelques h éritages, ils appartcnoient à fes enfants ; d’ ailleurs la valeur en étoit déjà plus qu’ ab- >
iorbée p ar les dettes hypothécaires dont ils étoient chargés.
Après ces faits, que le iieur Parent ne pouvoit pas ig n o rc r,o n
fent afïez combien ceux qu’on trouve dans la plainte de Joui*
bicr font abfurdes.
�*3
reil qu’ on l’eut inftruite, ne prouva que la capture
de Joubier , qui n’avoit pas befoin d’être prouvée.
Le peu de fucccsde cette tentative ne découra
gea pas la cabale qui l’a voit rifquce ; au contraire,
le dépit que les ennemis du fieur Parent eurent de
le voir échouer, aggrava Tes torts h. leurs yeux : leur
haine, irritée par les obftacles qu’elle rencontroit,
n’attendoit donc qu’une circonftance plus favora
ble pour éclater avec plus d’exces; mais fe préj
fenteroit-elle bientôt cette circonftance ? fi ori
l’efpéroitpeu , au moins le defiroit-on beaucoup :
aufli ne fut-on pas difficile fur le choix?
Joubier, auquel la Maréchaufîee avoit intimé'
d’un côté une défenfe expreiîè de mendier ,do-j
rénavant, & de l’autre , une injonâion précife
d’abandonner incontinent le répaire iuipecc qu’il*
s’ étoit pratiqué fur un grand chemin ( / ) , s’étant
(/) V o ic i la preuve du fait. Claude Sorton ( c’e i l , autant qu’ on
peut fe le ra p p e lle r, le dernier des témoins entendus dans l’in
formation du 3 1 Mai 1 7 7 0 ) après avoir dépofé qu'il ¿toitfaux
aue Jo u b ier eût été maltraité lors de f a capture du 2.4 du même
mois de M a i, ajoute que s’étant rendu le lendemain che1 le fieu r
P aren t, ou il trouva Jo u b ier'q u i mangeoit là fo u pe , un des Ca
valiers de Maréchauffée ,q u i avoit arrêté ledit Jo u b ie r , dit en f a
nrelence & en celle de Simonnet & de D efrim ais : nous voulons
bien , à la conjidération de madame P a r e n t , ne pas amener Jo u bitren p rifo n , vous fere^témoins que de X J livres que nous avons
trouvé hier fu r lu i, nous lui en remettons 3 livres p o u r le fa ir e
fubfifier ju fq u ’à ce qu'il ait trouvé un autre endroit po u r f e retirer.
■Vous jere7^¿paiement témoins que nous depofons les 2.4 livres reftantes entre les mains de madame P a r e n t , pour les remettre à
Jo u b ie r , quand il aura trouvé une autre retraite. Nous ne voulons
pas qu'il demeure dans une loge qui efifu r un g ra n d chemin. Vous
�?4
néanmoins opiniâtré à garder ion appartement 6c
fa beface , & ayant en canféquence été arrêté une
fécondé fois le 3 Juin 1 7 7 0 , on fe hâta de profiter
de perte occafion pour*, inquiéter encore le fieur.
farent. A entendre les fieurs Vidal & Gillet, à
entendre dix ou douze imbécilles , tres-dignes
d’être leurs échos, c’ étoit toujours à fon inftigation , c’étoit toujours pour l’obliger, que la Maréçhauilee avoit-recammencé d ’appréhender ce men
diant au corps (772 ) ; aprbs avoir ainfifuppofe gratuipowrre^ rendre témoignage que nous ne lui avons f a i t aucun mal,.
I l e jlv r a i, continue ce témoin-, que la loge que Joubier s'ejl conf
irait e efi: pT¡écifément f u r le g ran d cherriin du V eurdreà Charantonr
& Jo ubier'prom it effectivement de fe fix er fo n fé jo u r dans un en-*,
¿ro it plu s' habitable. .
(m) Lè contraire eft établi par le fécond procès verbal d e
captuçe de. Joubier. Ecoutons les Cavaliers de MaréchauiTée qui:
l ’ ont rédigé. N ous Etienne Libaut & Barthelmi R o g e r , Cava
liers de MaréchaufTée à la réfidence de D u n - le - R o i, nous étant'
m is en campagne po u r arrêter les mendiants qui inquiettent plusque jam áis les Fermiers & L abou reu rs, & particulièrement pour
arrêter, le nomme G abriel Joubier , qui non feulement mendie de
pu is z<j a n s , mais qui f a i t des menaces de tuer & de mettre le.
feu , fur-tout depuis que la. M a r ¿chauffée Va une fo is arrêté & re
lâché à la requiftion d e là dame P a ren t, fo u s la, promejfe qu 'il
a-voitfa it e de ne plu s m endier, & étant parvenus dans la P a ro iJfe de Lurci , ou il f e retire dans une barraque en. fo rm e de loge ,
fituée dans un champ , le long d ’un g ran d chemin , nous avons fa it
perquifuiun dans ladite barraque , & ne l'y ayant pas trouvé, nous
nous fommes occupés à le chercher dans différentes P aroijfes , &
notamment dans celle de V a lig n y-le-M o n ia l, où le nommé R e g
nard y Syndic de ladite P a r o ijfe , & le, nommé Nicolas , Jea n &
lila ife Àupcrrin- nous ont requis d'arrêter ledit G abriel Jo u b ie r,
m e n d ia n t t menaçant & dangereux a la Société.
* . , Nous fom
mes en confequence retourné c h e jju i dans le cours de la n u it, nous
n’y avons encore trouvé perfon ne, mais nous y étant cachés , tj*
ledit Joubier y étant venu f u r les Jix heures du matin le /j. du-
�S2>J
tementquc cette avanture étoit ion ouvrage; après
avoir peint cette même avantuie comme un atten
tat inexpiable; après avoir cherché à s’aiTurer d’une
certaine quantité de témoins, clifpofés à avoir va
à peu près ce qu’on vouloir qu’ils euifent vu;..on.
paya un vagabond , foi-difant. Laboureur., ppj-iij
rendre une nouvelle plainte Contre lui." ÇÎè vaga-,
bond, dont le nom éft Nicolas TixeranH, pe fe
borna pas à répéter là fable ufée dont o\i vient de
rendre compte ;. s’étant fouvenu que le fieur Pa
rent avoit donné un foufïlet a un aiitre'Particulier$
il y a environ vingt ans ( n ) , i l rie m an q u V p id e
recueillir ce grand événenlent dans*fa chronique ;
il ne manqua pasnon plus de demander vengeance
d’un autre foufïlet qu’il avoit reçu lui-même, il,v a
\ 1 i; J '
“ ' . r ■ I ■* p ■ -.1/103.4.
. •,
/.
presdejdix ans; mais1 comme il lentit que ces ri
dicules doléances n’annonçoient que rimpoiïibiliré
de trouver de véritables crimes à l’honnête Citoyen
qu’il attaquoit, il alla plus loin ; il l’accufa d’avoir
indignement outragé ion propre frere en différents
temps ; de l’avoir, forcé par là à fe dépouiller de
préfent mois ( c’étoit le mois de Juin '17 7 0 ) nous nous en Corn—
mes f a if is , & îa von s arrête à la requête de M . le Procureur du
R o i de la M aréchaujfée, & f u r les requifitiçns çi-dejfus mention
n é e s & c . &c.' &c. Ce procès verjbal.ierapto du it parm i l e i p i e ces juftificarives, cotç tfaiftem e.
t ,v
.
a •»■ ; Il eft donc confiant que, le fieur\Pp.rçnt n’a participé en au
cune m a n i é r é à cet événement."
. .
i . ’
1 -i:
(n) Ce particulier, qui s’ nppelloit Jacques R o i , eut en effet
dans ce temps une rixe avec le fieur Parent >mas c’étoit lui qui
étoit l’agrefleur , & il’ reconnut fi. bien fon tort ,• qo’apaèsavoi#
rend u plainte'à cé 'fujeV, il s’ en déiîfta,
ut
�1 6
tour en fa faveur , & de l’avoir cnfuite jette dans
un puits.
...
Le Lieutenant criminel de S. Pierrc-le-Moutier
ne voyant plus dans le fieur Parent qu’un fcélérat,
coupable d’un forfait voifin du parricide, ordon»
naauiïi-tôt une feçonde information (o ); on aifigna
une foule dê témoins ; Prêtres ? Femmes de mauvaiiè*vie , Ju ges, Laboureurs, Marchands, M a
nœuvres, Artifants, Mendiants, Domiciliés, V a
gabonds ; on n’oublia, pour ainfi dire, perfonne
que, les gens dont, on connoiiToitpl’impartialité*
Il ieroit' bien extraordinaire qu’après cette in1
1
iidieule précaution , tout ce quon împutoit
au fleur Parent ne fut pas établi de la maniéré
/*
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1î *
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■T- (o) P o u r ju g e r de la; confiance que méritent, la plupart des
témoins, qu’ on ai produîts-!dans cette information , il iuffic d’érc-^uier Gilbert Desfourneaùx , autre témoin entendu dans une
autre1 ïrifoi'mâtiôn qui fut faite quelque temps auparavant par
le J u g e de L u rcÿ-L ev i , & dont la C our a ordonné l’apport en
io n Greffe. Il attefte qu étant allé à B a rd a is , che^le fieur V id a l,
p o u r retirer des p apiers dont i l avoif bejb in , i l y trouva le nomirié J i à n B u ta rd ' qui mangeoit avec ledit fieu r V id a b ;' que quel
quet temps après , ayan t vraifemblablement qtidque chofie â Je di
re , ils montèrent au grenier ¡q u e lui Desfourneaux ayant retiré fe s
p apiers y s’ cri revint en la compagnie dudit B u ta rd jufiquau V il
lage de la Goujfonniere , ParoiJJe de Saint A g n a n ; que ledit B u
tard paroijfoit outré contre le fieur P a r e n t , & d i/’oit qu’i l feroit
tous fies efforts p o u r parven ir à le fa ire décréter ., Q UE p o u r C E T
S F'JF£X ' I L N E F E R O I T P A S A S S I G N E R L E S G E N S QU J L U l \
y O U D R O I t N T D U B I E N , QU’ l L N E S ' A D R É S S E R o i t QU' a
C E U X Q U I L U I F O U D R O I E N T DU MAL.
Cette anecdote qui fe trouvera apparemment dans.la dépo»
fition de Gilbert Desfoiirneaux , eft d’autant plus intéreflànte ,
que c’eft en effet cd même Butard cjui a indiqué prefque tous,
les témoins dos informatipiïs qu’on a faites contre le fieur Parent.
-
,a
�34
la pins Îumîneufe. On ne l’a pourtant convaincu
d’aucun fait qu’on puiife raifonnablement appelpeller un crime.
••
Que réiulte t-il en effet de la derniere information
-qu’on a faite contre lui à S. Pierre-le-Moutier ?
Qu’un jour il excita un chien à fe jetter fur une
chevre. Çp)
Qu’un autre jour il fit un trou au toit d’une
maiion , & quY étant deiccndu , il battit un veau
'qui étoit au coin du feu. ( q)
• Qu’un autre jour il tua trois oies dans un de fcs
prés, ce qui fit d’autant plus de bruit dans le can
ton , que ces trois oies apparcenoient à trois femmes
différentes. (V)
Qu’un autre jour il menaça des Pâtres de les châ
tier, s’ils menoient leurs beftiaux dans fes pâturages.
Qu’un autre jour il donna un foufïlet au nommé
Jacques R o y , 6c pourquoi? parce que ce Jacques
H o y lui en avoit auparavant donné un à luimcme.
Qu’un autre jour il donna un autre foufïlet à
Nicolas Tixerand, parce que ce Nicolas Tixc(p) On airure que c’tft à Pierre Caban , témoin entendu dans
l’inform ation'du n Juin 17 7 0 qu’ on doit la connoifl'ance de
ce démêlé du chien du iieur Parent avec une ch cvredu voifinage.
. .
. . *
(?) Cette hiiloire d ’un v eau , qui avoit un fo ye r pour érable,
& duquel des charbons ardents étoient vrairemblableniciit la li
tière , appartient cxcluiîvement à Marie R o n d e t , autre témoin
produit à l’information du 1 1 Juin 1 7 7 ° '
(r) Magdelaine Bailli ( eft une de ces trois femmes ) elle
a également paru dans l’information du nitnic jour 1 1 juin 17 7 °*
G
�;l8
ranci, qui étoit alors ion M étayer, & par confén
-quent ion domeRique, avoir l’infolence de le traiter
publiquement de B ...... ... d ’âne & tde mangeur de
chrétiens. ( s )
V
Qu’un autre jour ayant trouvé Ton frere qui
mettoit le feu à fa m aifon, il lui donna aufli un
fou filer.
Qu’un autre jour ayant furpris ce même frere
qui portoit un tifon enflammé dans fa Grange,
il l’en écarta à coups de fouets , & que l’ayant re
pris fur le fait quelque temps après, il le pourluivit & le frappa deux ou trois fois avec une ba
guette , qui pouvoir être groiîè comme le petit
(î) Pierre D u ran d , rémoin qui a été confronté au iïeur Pa
r e n t , a dépofé dans l’information du n Juin 17 7 0 que le Curé
de V a lig n y , ayant été obligé d’y rapporter les Vafes fa c r é s qu’i l
avoit transférés à B a rd a is , N icolas Tixerand, qui ¿toit iv re , ra r
rêta à n jju c de V êpres, un jour de Fête , & lui dit.: vous voulie£
voler noire bon D ieu , mais vous ave^ trouvé un homme ( le fieur
Parent ) qui vous Va b ien fa it rapporter ; que dans le moment Etien
ne Sim onet, craignant que ce que Tixerand difoit audit fieur Curé
ne le fâ c h â t , il l’interrompit 6* lui d it : Tixerand , alle^-vous-en
vers votre m aître, i l vous appelle : qu.e pour lors étant allé jo in
dre le fieur P a ren t, qui ri'était p a s loin de l'E g life , il lui deman
da , que me voulez-vous ? à quoi le fi.u r Parent répondit, je ne
te veux rien ; que cela impatienta T ix era n d , qui re p rit, puifque.
vous ne me voulie^ rien, fin e fa llv it pas me d éran ger, vous êtes un
J ] .............. d'âne ( Jean M ailloux , autre témoin , dépofe qu’il
ajouta , & un mangeur de chrétiens ) que le fieur P a r e n t, après lui
avoir long-temps répété inutilement de j e retirer, lui donna enfin
un foufflet ; que Tixerand continuant de l'inveclivcr , il le jet ta p a r
terre , & q u 'il ne fa llo iip a s de grands efforts pour y p a rv en ir, at
tendu qu'il était f i complettcmcnt ivre , £ u 'il ne pouvait pas J e tenir
f u r J i s jambes.
�]9
Quelques témoins dépofent encore qu’ils ont'
ouï dire qu’il a jette fort frere dans un piiits' : '
mais à qui l’ont-ils ouï dire ? au fieur V idarou au '
fieur G illet, qui l’ont inventé/
Un payian ( c’eft un feul payiàn ) dépofè égale
ment que le Curé de V alig n y , ayant voulu chanteç
les Vêpres immédiatement après la MeiTe, il y a en«
viron quinze ans, eut à peine entonné le premier
veriet du premier Pieaume,. que le Heur Parent
fbrtit de l ’Èglife en fredonnant à peu près fur le
même ton , é m o i je m'en vais:.
Un autre témoin, ifolé comme le précédent,
ajoute enfin que le.' fieur Parent voyant le iieur
Vidal tranfporter, les Vafes facrés deTEglife de
Valigny en celle de Bardais, il y-a quelques
années , dit à une demi-douzaine de perfonnes
avec lefquelles il étoit alors woila. lt Diable'qui em.'
porte notre bon Dieu j mais que trouVe-t^on danstout cela ? des propos fans conféquence ,un ouïdire qui n’eft eftè&ivement qu’un ouï-dire des
vivacités néceiîaires' ou du moins excufables ; despuérilités , des abfurdités.
-Il n?y avoitpas'là dequoi attirer l’animadveriion
de la Juftice fur le fieur Parent. Cependant le Lieu
tenant criminel de S. Pierre-le^Moutier, qui d’a
bord l’avoit ailez inconfidérément décrété d’ajour
nement perionnel", ri’a1 point héiiré à prononcer
contre lu i, le 3 Juillet 17 7 2 ,, une Sentence défi
nitive, dont voici les difpofitions. Toutconjidéré ,■
& raccujé ajfis fu r la Sellette au boüt du Bureau ,
C 2.
�fious avons ( eft-il dit) déclaré Jean Parent due~
ment\,attéiqt ,fk con\[aincy dïavoir exercé des. voies
de fa it 'y ' tant envirs Etiennet P a ra ît , fan fre re ,
quenvers Nicolas Tixerand , dit Monbrun ; l a
vons en outre déclaré véhémentementfoupçonné de
plufieurs autres voies d éfa it , ainji que des paro
les indécentes, proférées publiquement contre les
Eccléfiajliques & contre la Religion; en réparation
de.quoi fera ledit Parent mandé en la Chambre du
Coifeil j poury être admonejlé ; lui faifons défenfes de récidiver & d'ufer à l ’avenir de pareilles
voie s y fous telles peines q u i l appartiendra ;. le
condamnons en cent livres de dommages & intérêts.
envers ledit Tixerand, en vingt livres daumône ,
applicables aux pauvres de la Paroijfe de V aligny ,
enfèmbk en tous les dépens faits par le fufdit T i
xerand , & le renvoyons du furplus des conclufions
contre lui prifes au procès.
Ce Jugement qui commande (ans motif le plus
libre de tous les actes , c’eil-à-dire, l’aumône ; ce
Jugement qui tend à recompenfer un domeftique
d’avoir infulté fon Maître ; ce Jugement qui ou
tre ces vices efièntiels , rend la religion d’un Ci
toyen eftimable violemment fufpe£te ; ce Jugement
enfin q ui, pourcqmble d’injuftice, compromet gra
tuitement l’honneur de, ce même Citoyen par
l’admonition à laquelle il le condamne, eft préci13ment le Jugement dont le fieur Parent demande
ici la réformation. On doit déjà préfïcntir coni'
bien il cil fondé àrcfpérer; mais ce ne feroit pas
�J/i I
Il . *
aiîèz pourlui d’être préfumé innocent ; il faut qu’il
foit entieremenr iu (lifté: Il rv a donc'achever dqf.
démontrer l’iniquité de la Sentence qu’il attaque >;■'
perfiiadé qu’après avoir rempli cette tache, il peut
le repoier du refte , fur les auguftes Magiftrats , >
dont il réclame l’autorité.
.
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Il y a deux fortes d’honneur ; le premier qui eft
en nous, eft-fondé furie droit que nos vertus;nous r
donnent à notre propre eftjme ; le fécond qui efti
dans les autres 5_eft^ondé fur-¡ce qu’ils;penfént de
nous.
.
L ’eftime de nous-mêmes eft un bien indépen
dant des caprices du deftin ; rien ne peut nous le
faire perdre que le çrime : il en eft autrement de?
l’eftime des autres, une feule laçcufation calom-t
meule , un feul jugement.injufte-, peuvent nous;
en priver.
!.•,.= i .
Quelque fragile que, foit cet avantage, il n’en
eft pas moins préciçux;;; Tans¡lui plus de confidé-’
r a t i o n , plus de confiance ; ifolé au milieu de la
fociété , on fuit les lieux où vous êtes comme ii
l’on y refpiroit un air contagieux ; on rougit de
vous connoîcre; l’ amitié,l,’amitïç;même , s’éloigne
de vous en détournant les yeiiK , auifi les loix qui
ont prévu toute l’importance de. cette partie elîèntielle de notre exiftence civile, qui confifte dans
l’opinion publique , n’ ont-ellcs permis d’y portée
atteinte que dans les circonftances où l’économie
�.
............
du fyftèmepoîitiquerexigeabfolurnent. On ne doit,
par exe mp1ê,"déce r neru nidécrçc d’ajôurherii'ènr per-(
lonnel 'contre un Citoyen que dans l’e, cas oit les!
iriforaiatiôns;-ànhdncent une peihe?ai‘fli£Hve à infli
ger ; encore’fau t-il, pmi r en venir à cette extrémité,
que la fidélité des dépcriitions foit iuifiiàmmentv
conflatée ; car l’honneur d’un j ’hqmme qui eiTuyeun décret de cette eípece, eft tellement attaqué
dáns l’elpriÉ 'des? autres hommes*, quil ne peut
plus lui être rendu.que par une abfolution folem-;
nélle ; & it icFoit affreux d-imprimer la moindre
fíétriíruréVIrnímjS à-un fimple particulier q û in es’ÿ
ieroit pas expofé, même au dernier des humains*“
qui lie l’an refit pais méritée. (V)Si ce n’eft qu’avec cette
circonfpe&ion qu’tin Jugé, inftruit des limites de l'on
pouvoii?vprononc€ im décret d’ajournementperfonnel contre un^aitifan', contre ün manœuvre^ contreun valet , combien* n’eÆ-il^àsplns réierve quand'ilr
s’agitde ffatuer définitivement fur le fort d’une per—
fonneplus confidéràble,|qui:tenant peut-être à vingt
familles honnêtes!/ qu’un malheureux préjuge envelopperoit jafqu’à-un céitàin point dans, la con
damnation -, les aiîocieroit par confëquent toutes
à fon ignominie ! il faut alors , & que le délit foit*
abfoliimeijtimpardonnable, & que les preuves qui'
s’élevent contre1l’accufé portent l’empreinte d’une
1 '
**
'
1' ■
'__
••
(/) V oyez l'ejfa i f u r Fefprit & les motifs de la procédure crim in d le, nombre X X . Cet ouvrage qui eft de Me. d e . L a v e r d y ,
fó rm e le difeours préliminaire du Code P e n a l, .autre produttion.
du. mémo Auteur.
.
�J/i3
■M3
évidence irréfiftible. Examinons la Sentence'du
3 Juillet dernier d’apres ces principes ; voyons d’a
bord ii fa forme même n’efl pas'vicieufe voyons
.cnfuiteifi les torts quelle impure’au fieur Parent
font ailèz lumineufement prouvés , pour qu’on ne
puifle pas au moins douter qu’il ne les ait, & ii
d’ailleurs ils iont ailcz graves pour'être entierement inexcuiables. t • - j.oi î’ 1;
* i u
L ’article X X !I du titre X I V .d e POrdonnance
de 16 70 eft,, comme on fa it , 'conçu emees ter
mes : f i par devant les premiers Juges, les conclu-fions de nos Procureurs ,.oude céux des Seigneurs,
& en nos Cours les Sentences, dont e f appel^ ou
les conclufions de nos Procureurs Généraux portent
condamnation de peine ajjii clive, les Accufés feront
interrogés fu r la felletîe. On peut donc aifujettir
tout homme que les’ conclufions du Miniftere pu
blic ou un premier jugement menacent d’une peine
afflicKve , à VaiTeoir ihonrcufement .fur ce iiege
iiniftre ; mais il n’en eft pas de même dans une
hypotheie différente. Deux Déclarations du R oi y
l’une du ;io. Janvier* 1 6 8 1 , ôc l ’autre du 13 A vril
1 7 0 3 , veulent quen tous les procès qui Je pourfui
vront -, fo it par devant les Juges des Seigneurs, .
Jo it par devant les Juges Royaux jiib alternes,
fa it dans les Cours
&i qui »auront été réglés
ci Vextraordinaire , à biflruitsupar. récolément &
confrontation, les Accufés f i e n t feulement enten-,
dus par leur bouche, dans la Chambre du Confeil,
derrière le Barreau5 lofqu il n y aura pas de cou-
�, 2-4
dupons ou de condamnations tendantes a une peine,
telle que celle qui ejl indiquée par ü Article X X I
-du titre X I Y de lOrdonnance de-i&yo ci-de[fus
- cité, cefaijant, abroge tous ufages à ce contraires. Le
dit article X X I du titre X 1 JS de VOrdonnance
de i 6j o , fortant auJhrplus fonplein & entier effet..
O r il.eft conftantd’un côté que l’admonition n’efl:
point une peine afïli&ive ; il eft confiant d’un au
tre côté que les conclufions que la Partie publique
a données dans le procès du iieur Parent ne tendoient qu’à une admonition, ainii il eft d’abord
palpable que le..Lieutenant Criminel de S. Pierrele-M outier, qui n’auroit pas ditfaire fubir à ce der
nier l’humiliantè formalité de la fellette, n’auroit
pas dû non plus en faire mention dans fa Sentence.,
Ce n’eft pas uniquement en cela que le Lieute
nant Criminel de.i S„ Pierrc-le-Moutier s’eibpermis d abufer des formules exclufivement affe&ées,
aux grands crimes. Un Arrêt du Parlement deBretagne du 14 Juillet 1 7 1 7 a décidé qu’on ne
devoit. fe fervir des mots atteint & convaincu que
dans les jugements, définitifs des crimes capi
taux (w) ; cette Jurifprudcnce d’autant plus raifonnable, qu’il feroit vifiblement abiurde d ’em
ployer la même forme dans la condamnation d’un
homme qui neferoitacculé qued’avoirdit quelques
injures a' fon voiiin au milieu de la rue , 6c dans
(u) V o y e z le Journal du Parlement de Bretagne, tome p r e
mier , chapicrç 4.7.
•'
__
’ ;
celle
�SAs
.
?**■
celle d’un homme qui auroit commis un parri
cide aux pieds des Autels, n’eft pas feulement la
Jurifprudence du Parlement de Bretagne, c’eil
encore celle du Parlement de Paris. Deux Arrêts
de ce dernier Tribunal, l’un du 2.8 Juin 16 9 1 ,
Fautre du 19 Janvier 1 7 3 1 , ont unanimement ré
glé qu’il n’y avoit pas lieu de prononcer par at
teint & convaincu quand il ne s’agifloit pas de
décerner une peine afîli&ive ou infamante, &
qu’il fufïifoit alors de déclarerl’Accufé convaincu
de tel ou tel délit (v ): il ne falloit donc pas que
la Sentence du Lieutenant Criminel de S. Pierrele-M outier, qui n’impofe ni peine affli&ive, ni
peine infamante au iieur'Pàrent, le jugeât duement
atteint & convaincu des faits quelle lu iattribue; &
puifqu’elle l’en juge duement atteint & convaincu,
c’eft une fécondé irrégularité à ajouter à celle que
nous avons déja remarquée dansfà réda£ltôn.:,:>
Venons-en maintenant au fond. De quôile fiéur
Parent.eft—
il duement atteint & convaincu? c eft, fe
lon la Sentence du Lieutenant Criminel de S*Pierre-le-Moutier, d’avoir exercé des voies defaitytant
contre Etienne Parent , fin fre re , que contre N i
colas Tixerand, dit Monbrun ; elle veut en outre
qu'il fa it véhémentementfiupçonné de plüjieurs au(v) V o y e z A ugeard , tome p r e m ie r , page 1 1 9 , nombre 6 1 ,
édition de 1 7 5 ^ , & le C òd e Criminel de M . Serpillon , tome
2 , page 1 ^ 9 , édition de 176 7 . I l n’eft pas inutile d’ obferver
que T A rrê t du Parlèment de Paris du 19 Jan vier 1 7 3 1 eiï un
A rrêt de règ le m e n t..
D
�i6
très voies de fa it , qu’elle n’indique même pas: elle
veut finalement cjiiil ait proféré des paroles indécentes contre les Eccléfiaftiques & contre la Religion.
Comme chacun de ces objets mérite d’être difcuté
à part, on va les reprendre les uns & les autres
dans l’ordre où ils fe préfentenr.
A ne confidérer que le jugement dont on a
. dansTinftant rappelle les dilpoiitions, on feroic
tenté de penfer que le fieur Parent, apres avoir
extorqué le bien de fon frere par de criminels ex
pédients , a enfuite gouverné ce même frere avec
1111 fcepti'e ,de fer ; mais qu’on s’abuferoit de s’en
rapporter au Lieutçnant Criminel de S. Pierre.:;le-M$uticrr fur ce point! qu’on feroit injufte de
regarder le premier de ces deux Particuliers comme
. le tyran/du dernier ] il eft de notoriété publique
que-la prétendue viâim e de la' barbarie du fieur
Parent n’a jamais(eu qu’à fe féliciter dd ion afïcc. tiou/Si quelqu’un en doutoit, quM interroge le
fieur Du front ( x ) , il apprendra qu’Etienne Parent
ne s’eft défaifi. de fon bien que par un a&ç volontaise.;. qu’il interroge/le fièur GcôifFroi (y ) il ap*1 prendra qu 4 ’4 ^
Etienne Parent;fe fe
roit repenti de ce qivil avoitfait, il n’auroittcmi
qu’à j u i de revenir fur fes pas; qu’il interroge la
: noiflq^cçTSnnc'’PriïncaiT
il apprendra qu.’E■'
Lè'fieiirDumofity'Notaire, à Sancojns, eft un des témoins
v cnrendüs d.ihfe'Vio^rmation de LurcyrLevi.
! ( y.)' Le-iiiitir’Geolfifoi-, Jiotaire à laGuierchc, a aiiffi été en
tendu , comme témoin dans l’information de Lurcy-Levi.
(^)- Anne Pruneau acté entendue dans les informations faires
à S. Pierrc-le-Moutier.
�sa
y
p-7
tienne Parent étoit traité avec une douceur finguliere chez celui qù’on accufe de tant de cruau
tés à fon égard; qu’il, interroge enfin le fieur
Sauvage (& ) , il apprendra qu’Etienne Parent le
noyoit un jour dans un puits 7 fi fon frere n’eut
pas veillé fur lui avec une attention continuelle.
Que faifoit cet Etienne P arent, tandis qu’on
lui prodiguoit ainii les foins les plus tendres ? Tan
tôt il s’emparoit furtivement d’un tifon enflam
mé , qu’il s’emprefloit de porter dans la grange
de fon frere pour y mettre le feu : tantôt il déroboit dans fon mouchoir des charbons ardents dont
t il cherchoit à faire le même ufage. Eft-il étonnant
que le fieur Parent, après l’avoir furpris plufieurs
fois dans ces extravagantes 6c périlleufes opéra
tions , fe foit laiifé emporter un moment à fa
vivacité? Devoit-il fe borner au langage de la raifon avec un infenfé qui ne l’entendoitpas? Une jufte
réprimande, accompagnée d’un foufïlet, 6c fi l’on
veut, de quelques coups de fouet ou,de quelques
coups de baguette échappés a un homme qui n’avoit d’autre but que d’empêcher un fou d’enve
lopper toute fa famille dans un incendie qui l’auroit lui*même confumé, peut-elle jamais être envifagée comme une voie de fait,? Que le Lieute
nant Criminel de S. Pierre-le-Moutier réponde,
qu’il choifiile de défavouer fa Sentence, ou de
foutenir une ablurdité.
(&) Le fieur Sauvage a cté entendu dans l'information faite
à L u r c y - L e v i.
'v
i
‘
i
D i
�, 2,8
On obje&era peut-être aux fieur Parent qu’il
eft allé au delà des limites qui féparent une corre&ion fraternelle d’ une honteufe brutalité ; mais
lur quoi pourra-t-on appuyer cette inculpation?
fin* la dépofition de Claude Blond. Il fubiifte
entre le fieur Parent &c lui un procès trop confidérable pour qu’il n’en ait pas le cœur ulcéré : au
ra-t-on recours au témoignage de Philippe Tixerand ? ce Philippe Tixerand cft le fils d’un des dé
nonciateurs.du fieur Parent 6c le neveu de l’autre :
écoutera-t-on Antoine Berthommier? ileil l’ennemi
capital du fieur Parent qui l’a fait décréter ; 6c c’eft
une réglé univerfellement admife, une réglé puifée dans les loix les plus refpe&ables, une réglé
enfin qui a la raifon 6c l’équité même pour ba
ie , qu’on ne doit entendre -contre un accufé , ni
fes ennemis , ni fes dénonciateurs , ni les pro
ches parents de fes dénonciateurs. ( i) O r en écar
tant les impoftures que Claude B lo n d , Philippe
Tixerand 6c Antoine Berthommier ont avancées,
(x) Teflium fides diligenttr examinanda ej7. Ideoque in perfonâ
eorurn txploranda erunt imprimis conditio cujufque : utrum quis de•curio , an Plebeius fit.: & anhoneflæ , & inculpât ce vit œ , anverb
notatus q u is, & reprehenfibilis. A n locuples, vel egens f i t , utlucri
eau fa , quid facile adrriittat: vel an inimicus ci fit adverjùs quem
tefîimonium f e r t , & c.'D igefl. Lib. X X I I , Titul. V, Leg. H J %
F acilè mentiuntur inimici. Caufâ cognitâ habendafides autnon '
habenda. L . I. § X X I V & X X V . Digefi. de queeft. &c.
Idem Tarinacius, quœfi. 5 5 , n. 3 , £ , 7 Ù 1 1 . Ju ltu s C la ru s,
quœft.x/\.,n.§. Menochcus, de arbitr. judic. cafu i 8 & 1 1 0 . Le traité
•de la Juftice criminelle par Joufl'e , tome acr. page 708. Le
traité des matières criminelles de Bruneau , partie Iere. titre 1 7 ,
maxime i z , & c , & c , & c.
�19
il ne refte que la dépofition de Pierre C olin , &c
ce témoin, quin’avoit aucun intérêt d’en impofer,
cil convenu à la confrontation que le jour
qu’Etienne Parent a , dit-on , été le plus maltrai
té par fon frere , celui ci n’a fait que lui donner
deux ou trois coups de baguette qui ne pouvoient
pas lui faire de mal. Si ce malheureux, égaré par
la démence, a été enlevé quelque temps après par
une mort précoce, c’eil lui-même qui l’a cherchée.
Le fieur Parent efb encore moins coupable en
vers Nicolas Tixerand qu’envers Etienne Parent,
fon frere. Pour s’en convaincre, il n’eil befoin
que de jetter un coup d’œil impartial fur le d if
férent qu’ils ont eu enfemble. Un Payfan qui entendoitun jour Nicolas Tixerand injurier le Cu
ré de Valigny à l’iffue de l’Office divin, cherche
à prévenir les fuites que pourroit avoir cette
iniulte, en faifant accroire à ce Nicolas Tixerand,
qui demeuroit alors chez le heur Parent, que fon
maître rappelle. Nicolas Tixerand aborde auiïitôt le fieur Parent au milieu d’une nombreufe affemblée : que me voulez-vous i3 lui demande-t-il :
je ne te veux rien , répond ce dernier : fi vous ne
me voulez rien , replique-t-il, ce nétoit pas la pei
ne de me déranger : V O U S E T E S U N
B. ....... . D ' A N E E T U N M A N G E U R D E
C H R E T I E N S . Le fieur Parent ordonne à ce
Domeftique, fi mal morigéné, de fe retirer; il n’y
gagne que de nouvelles inve&ives ; il réitéré l’or
dre qu’il avoit déjà donné, c’eft inutilement: il
�. 3°
recommence une troiiieme fois, & ne fait parlà que s’attirer de nouveaux outrages : alors il ne
peut plus le contenir , il donne un loufflet à l’inîblent qui le provoque. Si nous n’avons pas fur
nos domeiliques un pouvoir aulH étendu que ce
lui des 'Citoyens de l’ancienne Rome fur leurs
efclaves ; ii nous ne pouvons pas nous jouer d’eux
avec autant d’impunité, au moins eil-il certain,
qu’ils nous doivent un refpeft particulier, & que les
injures qu’ils nous font exigent une peine plus grave
que celles que des hommes, indépendantes les unes
des autres,peii vent fc faire. Pierre Creifel, convaincu
d’avoir proféré des paroles outrageantes contre la
Dame * * * dont il étoit le Valet de Chambre,
fut condamné par un Arrêt du 9 Septembre 1712*
à être attaché au carcan, à la Croix rouge, ayant
un écriteau, portant ces mots : V J Î L E T D E
C H A M B R E I N S O L E N T . Cefa it rbaiini pour
trois ans & condamné en 10 livres d?amende. Un
autre Domeftique,nommé Pierre Pizel, ciluyafcn
î j j 1 une femblable punition pour un iemblable
délit. (V) Siippofons que les deux perfonnes que
ces deux Arrêts ont ainfi vengées de l’audacieufe
licence de leurs gens, fe fuilent contentées de iouf- fletter les coupables , au lieu de les déférer à la
juftice , ce léger châtiment auroit-il paifé pour un
délit ? Le Parlement auroit-il daigné en prendre
(z) V o y e z le DiiHonnairc de Police de Frém enville , & la
C olle& ion de Jurifprudence de Denifard , au mot Domcjliques.
�31 ,
connoiiîànce ? Non : & qu’auroit fait le Juge donc
eft appel? ce qu’il a fait fans doute.. . . Mais ileft évi
dent que c’eft là iur-toutce qu’il n’auroitpasdu faire.
L a Sentence de S. Pierre-le-Moutier veut en
core que le fieur Parentjo it véhémentement feupçonné deplujieurshutres voies dey#/r,'puifqu’elle ne '
les indique même pas, & qu’au refte le fieur Parent
n’en eft tout au plus que loiipçonné; a-t-on dû ailèoir
une condamnation iùr des fondements aufli vagues
& aufli incertains ? La plupart des témoins qu’on
a entendus contre le fieur Parent , ayant été
choifis expres parmi fes ennemis(3 ) , ne devoit-on
pas plutôtfoupçonner véhémentement qu’ils avoient
par cette raifon fubftitué les murmures i’mpofteurs
de la haine à la voix défmtéreffée de la vérité?
La derniere imputation que la Sentence du
Lieutenant Criminel. det S. Pierre le Moutierfait
au fieur P aren t, eft d'être a iijji foiipçoîiné d'avoir
proféré publiquement des paroles indécentes contre les
Eccléfiajliques & contre la Religion. Lui ioupçonné
d’avoir proféré publiquement des paroles indécen
tes contre les Êccléiiaftiques ôc contre la R eli
gion! eh! s’il les a publiquement proférées ces
paroles, il falloit mieux faire que de l’en ioupconner, il falloit prouver qu’il les avoit dites en
effet. Un Juge ne doit fe borner à des foupçons
que lorfqu’il n’a rien de plus fatisfaifant à eipércr;
il ne doit pas fur-tout fc décider par de pareils
(3) V o y e z la note qui eil au bas de la
page de ce Mémoire.
�' 31
motifs : il feroit révoltant que les douteufes conjeftures d’un efprit qui peut être fafciné par la
prévention influailent iur le mouvement de la
balance où. l’on pefe nos deftins. Qu’eft-ce d’ail
leurs que de {impies paroles ? un vain bruit quife
diilipe dans le moment même où on l’entend.
î> Ouvrons rEfprit des Loix , les difcours , y
» verrons-nous, font fi fujets à interprétations; il
,» y a tant de. différence entre l’indiierétion & la
» malice , & il y en a G peu dians les exprefiions
» qu’elles emploient, que la loi ne peut guere fou» mettre les paroles à une peine.. . . . . . Les pa» rôles ne forment point un corps de d élit.. . .
« La plupart du temps elles ne ngnifient point par
» elles-mêmes, mais par le ton dont on les dir.,
n Souvent en redifant les mêmes paroles on ne
?» rend, pas le même iens; ce fèns dépend de-la
5> liaifon qu’elles ont avec d’autres chofes. . . . .
» Il n’y a rien de fi équivoque que tout cela : com« ment, donc en feire un crime ? Les paroles n’en»> deviennentun, quelbrfqu’elles préparent, qu’el?» les accompagnent ou.qu elles fuivent une a&ion» criminelle. » Examinons cependant celles qu’on
attribue au fieu r Parent : il y a quirrce ans, qu’en
fortant de l’Eglife de V alig n y , après la M ette, il
a , dit-on, fredonné, & moi je ni en vais. D ’abord
il n’y a qu’un témoin qui nous attefte cette anec
dote , regardons-la néanmoins comme légalement
prouvée : nous pouvons fans conféquencc nous,
prêter à cette hypothefe. Qu’y a-t-il là d’injurieux
au
�SS 3
33
an Cierge & de contraire à la foi ? des qu’il s’en'
alloit réellement, il étoit fondé à le dire, & s’il y
a des vérités plus fublimes, il eit inconteilable qu’il
n’y en a point de plus innocentes.
Mais le fieur Parent voyant, il y a quelques
années le iieur Vidal traniporter les vaiès iàcrés
de TEglife de Valigny dans celle de Bardais , a
encore dit r. Voilà Le diable qui emporte notre boit
D ieu . ..... Eft il bien vrai qu’il la it dit? quand il
Tau roit dit, qu’en réfultcroit-il ? la Religion & les
Eccléfiaftiques en général n ont rien» à démêleidans.,ce propos : s’il a été tenu, il ne concernoit
que le fieur. Vidal-, & le'fieur. Vidal lui-même ne
fèroit pas recevable. à s’en< plaindre aujourd’hui 7
car on ne pourroit tout au plus y trouver, qu’une
* injure verbale , t qui dans le cas où: elle auroit
échappé au fieufc P aren t, remonterait à l’époque
de l’interdijEHon de l’Eglife de: V a lig n y ,. ç eft àdire, à l’année 1 766 , ¿e perfonne n’ignore que
les injures de ce genre font cenfées remifes à T offenfeur par un pa&e tacite, quand læ partie o£~
fenfée. a, laiifé écouler feulement une année iàns
en pourfulvre,la réparation. Ces huit mots, dônt
perfonne ne le plaint, & dont perfonnene peut
même fe plaindre n’ayant rien , ni de plus héré
tique, ni de gliis outrageant jxuir Je Clergé, que ces
cinq autres mots, à moijem en vais , où.le.Lieute
nant Criminel de S. Pierre-îe‘Mouticr a-t-il vu que
le fieurParenteùt proféré publiquement des paroles
indécentes contre les Eccléfiaftiques & contre la ReE
4«
�ligion ? eil-cc dans les informations? <?eil en vain
qu’on y chercheroit autre choie que ce qu’on vientde rapporter : eil-ce dans fon imagination ? nul
ne doit répondre .des illufions dont tel ou tel
homme, quel qu’il foit,peut être le jouet.
V oilà tous les crimes du fieur Parent ; voilà
pourquoi on l’a condamné à être admonefté; voilà
pourquoi on l’a condamné en 10 0 liv. de dom
mages & intérêts ; voilà pourquoi on l’a condamné
en xo liv. d’aumône. Ces condamnations qui ont
compromis fon crédit, qui ont altéré fon honneur,
qui ont fait manquer des établiflements avanta
geux à deux ou trois de fes enfants, & qui peuvent
faire le même tort aux autres, fubfiftcront*elles
long-temps à la face delà Juftice qui les défavoue ?
N on : l’innocence une tois reconnue rentrera bien
tôt dans la plénitude de fes droits ; & puifque
le fieur Parent n’eft point coupable, il eft déjà
abfous dans le cœur des -Magiftrats Souverains
dont il implore ici l’équité.
- ¡*
\
. i
Monfieur'ALBO D E CHANAT,'Rapporteur.
M e. S A U T E R E !A U D E B E L L E V A U D ,
Avocat.
( J - ? •' - ; ■ 1 3
i-
. ..
.■
•. *’ .i’’. V.
B
.
Î.
u sc h e,
fi.;
* " 'j;;
Procureur.
.il,.’ .
? i. ‘
;
u.
�JSS
35
A C T E
D E
N O T O R I É T É
des Habitants de la Paroiflè de Valigny-leM o n ial, du 2.3 A vril 17 7 3 .
,,
On a cru devoir imprimer ici cet aefe parce quil contient
un nombre confid&rabh de faits d'après lejqueis on peut
fe former une jujle idée & du (leur Parent & de fes D é
nonciateurs & du Procès même..
,
Ard'evant le Notaire R o y a l, ioufTigné réfidant en la V'ille de Sancoins , & témoins ciaprès nommés, de préfent au Bourg & Paroiflè de
Valigny-lè-M onial, font comparus André Rc~
nard , Syndic & Propriétaire , Antoine Chaput,Procureur & Fabricien de l’Egiife de Vali^ny ,
Pierre Blond'& Louis Simoner, Marchands ,tn m \
cois Bèlierec, Sacriftain , Pierre Derimay & N ico
las & Jean Auperin ,,tous Propriétaires;' Etienne
Bonneau, Charles Sim onet, Jean Bajot & Jean
Délabré, Fermiers , Jacques Pernier& Pierre Rai-,
auili Ferm iers, Jacques Buret, Locataire, Charles
Dumont & Jean Chevalier, Ferm iers, Jean M ayoux, Aubergiûie, Jean Bourgeois & Jean Clerc;
Elifant la plus grande partie & principaux Habi
tants d e ladite Paroiflè de Valigny-le-Moniah
Lefquels ont dit qu’ayant appris que le Procès
qui a été fufeité au fieur Jean Parent, Marchand
& Propriétaire , demeurant en la Paroiflè de
Yaligny-lc-M onial,par les nommés Gabriel JouE i
P
,
�>y>
\.
36
bier & Nicolas Tixerand , de Lurcy & de cette
Paroiiïè, avoit été porté par appel pardevant nos
Seigneurs du Conleil Supérieur de Clermont-Fer
rand, ils ont cru devoir attefter à tous ceux qu’il
appartiendra, & ce pour le feul intérêt de la vérité
& pour contribuer, autant qu’il eft en eu x, à com
pleter la juftification dudit iieur Parent; que le
même fieur Parent, de la vie & des mœurs du
quel ils ont tous une connoiUance particulière,
' eft non feulement un homme pailible, dont perfonne n’ a fujet de iè plaindre , mais encore un
homme d’une probité irréprochable, qu’il aem-'
ployé des fommes confidérables , notamment ces
années dernieres, pour vêtir & nourrir les pau
vres du canton, qu’il porte aux pauvres malades ou
envoie par fes domeftiques pain, vin , viande,
pour leur aider dans leurs befoins ; qu’il remplit
avec Tcxa&itude la plus fcrupuleufe tous les
devoirs que lui impoiè la R eligio n , fait ou fait
faire chez lui les Catéchifmes, pour inftruire les
enfanta, tous les Avcnts & Carêmes ; fait ou fait
faire la priere tous les foirs chez lu i, 011 les perfonnes des Villagcs ou Hameaux voifins vorjt tous
les ibirs ; a fait taire à fes dépens une belle Croix
de M illion devant la porte dans le Village 011 il
demeure & fur le chemin, pour infpirer aux p a f
fants la dévotion, que jamais on lui a entendu pro
férer aucunes paroles équivoques, 6c encore moins
aucuns propos repréheniibles iui* les objets iacrés
de notre culte ; que loin d ’avoir eu la dirrcfé de
�JS1
maltraiter habituellement le fieur Etienne Parent,
fon frere , comme quelques-uns de les ennemis
n’ont pas craint de l’avancer, il a au contraire veillé
avec un zélé, quine s’efi: jamais démenti, à la confervation de fes jo u rs, &. n’a rien négligé pour lui
faire couler une vie plus douce & plus longue; qu’il
eft de notoriété publique que ledit Etienne Pa
rent, dont l’efprit étoit aliéné depuis quelques
années, cherchoit depuis la même époque à le
noyer, qu’on l’a vu fouvent marcher fur la mar
gelle de différents puits du canton, & même des
cendre dans lefdirs puits, & que la mort eft la fuite
de cette imprudence ôc du projet que la démence
mélancolique où il' étoit tombé lui avoir infpiré ; qu’ils ont connoiflance que ledit Jo u b ier, l’un
de fes délateurs, qui avoit fait une petite chaumie«
re furie bord de la Commune d’Euvy , & fur le
grand chemin de Beifais à L u rc y , a mis le feu , &
l ’a faite incendier, ainii qu’un gros chêne de 9 à 10
pieds de tour, qui fervoit pour porter la filière
& le jambage d’entrée, qui aefluyé le même fort,
ainfi que la Haie de féparation de l’Héritage dudit
fieur P aren t'd ’avec celui où ’étoit bâtie ladite
Chaumiere; qui fans lefecours des voifins, des nom
més Gilbert Baudy, G ilbert.C haputC laude Delabre & du nommé Sorton, & plufieurs autres
perfonnes, qui ont accouru , & y ont palle la
n u it, 6c qui ont coupé lefdires Haies, pour évi
ter la continuation du feu , qui en avoit incendié
environ douze ‘toifes de lo n g , auroit continue
ü<{
�j.ufqu’aux Bâtiments du Village d’Eu'Vy,-appar
tenants audit fieur Parent, & fucceÛivement aurolt
rnis le feu dans Le canton ; & ledit Tixerand,
beau-frere dudit Joubier, mendiants leurs pains
journellement dans ladite Paroiilè , ainfi que dans
les voiiines ; gens remplis de mauvaifes volontés
& mauvais propos > dont fa fille quTil fouffre
avec lui, menant une vie fcandaleufc, faifant des
enfants {ans être mariée , ont quitté la Paroiilè, ôc
mendient leurs pains, quoiqu’en état de s’en paifer.
Qu’ils ont auifi connoiiîance que ledit fieur Pa
rent fait lacharité aux pauvres, honteux , les har
bille lors de,.la rigueur du temps ; qu’il a. été
choifi par les Habitants, de V aligny pour aller à
Bourges dans un temps de gelée, pour obtenir
main-levée de l ’interdit deTEglife de ladite Paroiffe de V align y, qui avoit été mendié par le fieur
Guré , pour s’ approprier le revenu fans aucune fervitude, & pour demeurer tranquille dans la Paroifle de Bardais,. dont il eft également Curé ; que
ledit fieur Parent a obtenu main-levée de l’inttrdi&ion r & a auifi obtenu que le même fieur Curé
viendroit deilèrvir ladite Paroiilè de Valigny , ce
qui s’exécute depuis ce tem ps,.à ce moyen l’obli
gation que les Habitants lui en ont;tque pour don
ner des marques de chrétien ledit fieur Parent a
fourni & fait conduire un gros arbre pour faire,
une Croix au devant de l’Eglife , qui cil: toujours
fur la place, dont le fieur Curé empêche dé faire
faire au Procureur fabricien lafaçon ;.qu’ils ont auiîi
�39
connoiilànce que ledit iieur Parent fait un com«
merce depuis longues années de vins d’Auvergne,
qu’ il le vend aux Paroiilès voifines, le plus louvent à crédit ; & aufli Marchand de Bœufs pour la
provifion de P aris, qu’il fait faire des effaras
dansfes terres, pourquoi il emploie plus de cent cin
quante perfonnes par jo u r, & a acheté des avoines
confidérables pour la fourniture des Troupes, ainiï
u’il l’a fait plufieurs fois pour le Régiment de J a ^
.eine, Cavalerie ; en un m ot, pour rendre j'ulticc!
à la vérité, ils déclarent qu’il eU: très-utile dans lc^
Pays,, par ïori Commerce & par les travaux qu’il,
fait faire, ce qui fait vivre nombre d’Ouvriers, &
ont affirmés leur déclaration véritable, pour lervir
& valoir ce que de raifon.
Fait en paiïànt au Bourg de Valigny-le-Monial, après midi * l’an mil fept cent foixante-treize,
le vingt-trois A v r il, préfence de Me. François
Auguftin Beauvais, de Sebaftien/l’EcuyerjH uilfiers royaux, demeurants tous les deux en la V ille
de Sancoin , témoins , de préfent audit Bourg de
V a lig n y , qui ont (ignés avec lefdits Chevalier ôc
M ayoux, & ledit Notaire, fouiTigné ; quant aux
autres comparants ont déclaré ne le lavo ir, de ce
enquis & interpellés; & foit contrôlé la Minute des
préfentes, & fignéeChevalier, M ayoux, Beauvais,
l’Ecuyer & D um ont, Notaire royal, & icelle
contrôlée ôçfcellée àSancoins le vingt-quatre A vril
mil ieptcent foixante-treize ; reçu vingt-huit fols.
Signé , D um ont, 'Commis. »
!■» » w - î
D u m o n t , Notaire Royal"-1
S
�4o
r
*'•*
r
*■
N O u s Jacques Philippe' R u b y de Bergerenne,
A v ocat en P arlem en t, Confeiller du R o i , Préfident , Prévôt, Juge & garde de la Prévôté Royale
de Sancoins , certifions à tous qu’il appartiendra r
que Me. Dumont eft Notaire R oyal "à la réfidence
de' cette V ille y & .que la fignature appofée au bas
de; l’acte'de l'autre. part eft celle dudit M e. Dumo n t, dont il a coutume de fe fervir en fa qua
lité de Notairè R o y a l, que foi doit y être ajoutée
tant en jugement que hors , en foi de.quoi avons,
figné. A Sancoins , ce: vingt-rquatre À vril mil fept:
cent foixante-treize, & fai appofer le fceau de cette
Prévôté , & fait contre-figner ces préfentes par no
tre Greffier ordinaire.
...
S ig n é R U B Y D E B E R G E R E N N E
P a r m ondit S ieur C A Y A R D
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C L E R M O N T - F E R R A N D ,
De l’Imprimerie de P i e r r e V l A L LIA N E S imprimeur de* Domaine s
du.Roi r u e S G e n è s p r è s l'a n c ie n m a r c h é a u b le d 17 7 3
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Parent, Jean. 1773]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ruby de Bergerenne
Cayard
Subject
The topic of the resource
amendement de terres
exemption
dîmes
taille
contestations
assemblées des habitants
plainte contre un curé
mendicité
faux témoignages
troubles publics
opinion publique
jurisprudence
clergé
fiscalité
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean Parent, Négociant, demeurant à Euvy, Paroisse de Valigny-le-Monial, Appellant de Sentence du Lieutenant Criminel de Saint-Pierre-le-Moutier, et Demandeur. Contre Monsieur le Procureur général, Intimé. Et encore contre Nicolas Tixerand, aussi Intimé, Défendeur et Défaillant.
Acte de notoriété des habitants de la Paroisse de Valigny-le-Monial.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1773
1766-1773
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0225
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Pierre-le-Moutier (58264)
Lurcy-Lévis (03155)
Valigny (03296)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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amendement de terres
assemblées des habitants
clergé
contestations
dîmes
exemption
faux témoignages
fiscalité
jurisprudence
mendicité
opinion publique
plainte contre un curé
Taille
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/17/53986/BCU_Factums_V0111.pdf
8eed3aa84f8bf95afcaaada9b2e7a14c
PDF Text
Text
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N O U V E A U MÉMOIRE
A U R O I
ET A L’A S S E MB L É E N A T I O N A L E ,
E n dénonciation contre le S r. L A M B E R T
Contrôleur - général
des Finances.
S I R E ,
Si le ciel t’a fait R o i ; c’eft pour me protéger.
MÉrope .
J ’A I eu le courage d’expofer la vérité à Votre Majefté, lorfqu’il étoit
dangereux d’en préfenter les traits, fous des Miniftres qui abufoient
de votre autorité pour perfécuter : maintenant que la liberté eft un de vos
bienfaits; maintenant qu’affranchi vous-même de la tutelle minifterielle, vous
Voulez regner par la loi & l’amour paternel ; c’eft avec fécurité que je la mets
de nouveau fous vos yeux & ceux de l’augufte Aff emblée, dont plufieurs
de fes honorables membres l’ont accueillie , en me répondant de fon fuccès.
C ’eft fous les aufpices de la lo i, qui établit la refponfabilité des Miniftres,
que je traduis le Sr. Lambert au Tribunal de la Nation, dont vous êtes
l'augufte Chef. Loi fage & heureufe, faite pour immortalifer à jamais le
Peuple qui la propofe, & le Monarque qui la fanctionne. Plutôt, elle eut
fauvé la France des malheurs qui la défolent ; mais elle en préviendra le
retour, fi ce n’eft pas en vain que les citoyens l’invoquent ; fi les coupables
. A
�( ï )
dénoncés, convaincus &c néanmoins impunis, ne continuent pas à occuper
les places dont ils auront abufé contre les intérêts de la patrie &c au détri
ment des citoyens.
Vers la fin de 1785 , des perfonnes qui me votiloient du bien, firent
part à feu M. le Comte de Vergennes d’une difgrace qui m’étoit furvenue,
& qui renverfoit ma fortune
mon établiflement.
M. le Comte de Vergennes y fut fenfible. Il étoit mon compatriote : nos
Peres a v o ie n t été amis. Il me connoiffoit, m’eflimoit &c il m’en avoit
déjà donné quelques preuves.
Ce Miniftre m’offre les reflources de fa proteâion, pour réparer le
dommage que me caufoit l’être mal-faifant ( a ) , auteur de la deftru&ion
de ma fortune & de mon établiflement , il me propofe de réhabiliter l’une
pour opérer l’autre ; ienfible aux mouvemens de fa bienveillance, je lui
demande fa recommandation auprès du Contrôleur-général, pour être
placé dans la finance d’une maniéré avantageufe, & analogue aux efpérances que j’avois eu lieu de concevoir fous MM. Turgot, Clugny,
Taboureau, Necker &c Joly de Fleury.
M. de Vergennes accueille ma priere, parle à M. de Calonne, & convient
avec lui que la premiere place de Fermier, Régiffeur ou Adminiftrateurgénéral des finances fera pour m o i, Si certes ! fans être égaré par l’amour
propre, fans recourir à aucune comparaifon avec la plupart de ceux qui
occupent ces places, je crois pouvoir dire, que j’étois capable de les remplir.
Quelquefois il s’écoule un long-temps fans qu’il en vaque.
J ’avois attendu iix mois ; j’étois preil'é d’en obtenir une quelconque ;
je priai M. le Comte de Vergennes d’écrire il M.de Co'onia ( b ) , alors
( a ) C é to it
la
M
a r q u is e
de
S i l l e r y , ci-dcvant C
o m tesse
de
G
e n l is
, femme
célébré par fou efprit & encore plus par fon mauvais cœur , qui la rendue depuis vingt
ans le fléau de la triailon d’O rléans, o ù , on ne trouvera qui que ce foit qui ne Ia
détefte ; même parmi ceux qu’elle a pu obliger , car elle leur fait achij||j^trop chef
les grâces qu’il eft d’étiquette dans les maifons des Prin ces, de répandre fü’r ceux qu*
v font attachés , 6c dont on ne peut fe paiTer. InceiTamment j’expoferai au public le
fu j:t de mes triftes démêlés avec ce cruel auteur de différens ou vrages, fur la relig‘on >
l'hum anité, la m orale, & c . fi je ne fuis pas aflafliné.
(1)) U n mois après, M . le Duc de Villequier ayant écrit à M . de Colonia pour le
m im e objet , il en reçut cette réponfe ci. » P a ris, 16 mai 17 8 6 . M . te D u c , j’ai f3lt
» connoître aux Fermiers généraux le defir qu’a M . le Com te de V ergen n es, que Ie
�Intendant de la ferme générale, pour me propofer à la place de caiiîîer,
que le Sr. de Cimmery devoit quitter , &C qu’il quitta en effet huit à neuf
mois après.
De même que M. de Calonne s’étoit engagé envers M. le Comte de
Vergennes ( a ) , M. de Colonia s’engagea par fa réponfe ; néanmoins
j’échouai, &c c e la croit jufte. Au moment de la nomination, il fe trouva
une délibération antérieure de deux ans, qui appelloit M. .Toly de St. Eufebe
à la place. J ’eus connoiffance des motifs ; ils ctoient vrais o£ folides :
j ’applaudis a la nomination. MM. de Calonne
Colonia, fâchés des circonftances, me remirent à la premicre vacance, après l’affemblce des
Notables, dont il étoit déjà fort queilion.
Prefque auffitôt je perdis M. le Comte de Vergennes. M. de Calonne
fe retira du miniftere, pendant la tenue de l’Affemblée, & M. de Colonia
abdiqua fon Intendance.
M. le Comte de Montmorin fut appelle aux affaires étrangères ; M.
de Villedeuil, r.u Contrôle général, tk le Sr. Donet de la Boullaye, protégé
par Madame de MontefTon, auprès de M. l’Archevêque de Sens (b ) ,
reçut de cette Dame le feeptre de la ferme générale.
» Sr. M orizot obtienne l’emploi qu’il follicite , &
auffitôt qu’ils m’auront remis leurs
» obfervations fur cette dem ande, j’en rendrai compte à M . le Contrôleur-général. Je
» ne laiiTerai point ig n orer, M . le D u c , à ce Miniftre , l’intérêt que vous accorder
» au Sr. M o riz o t, & je ferois fort aifj que mon fuffrage pût concourir au fuccès de
» fos vues. 11 Je fuis avec r e fp e it, M . le D u c , & c . Sign é,
(a)
de
C
o l o n ia .
M . de Colonia m’ ayant averti de foire parler par M . de Vergennes à M . de
C alon ne, au moment qu’il comptoit prefenter fon travail à celui-ci ; j’écrivis au premier ,
dont je reçu la réponfe ci-aprcs. » V erfailles, n juillet 178 6 . J ’ai re ç u , M oniteur, la
» lettre que vous avez pris la peine de m'écrire le 7 de ce m o is, relativement à la
» place que vous defirez d’obtenir. Je fuis fort aife des difpofitions favorables que M .
» de Colonia vous a témoignées à ce fujet. Je ferai avec plaifir ce qui dépendra de
» m o i^ p o u r concourir à en alTurer l’effet, & je ne laiiTerai pas échapper la première
” occafion que je trouverai, de témoigner à M . le Contrôleur-général l’intérêt que je
” prends à ce qui vous regarde.
Je fu is, & c . Signé , d e V e r g e n n e s .
00
Sa nomination déplut beaucoup à la C o u r , où le Sr, la Boullaye n’étoit ni
cftimé ni aimé. L ’Archevêque en eut de la difgracc, quoiqu’il s’en défendit, en difant
•ju il n avoit pu refufer Madame de Monteffon. C elle-ci s’en eft auffi repentie, quand
elle la vu mécontenter tout le monde. Elle afîuroit qu’elle ne le coiinoiffoit pas auparavant,
�(4)
M. le Marquis de la Fayette me préfenta à M. le Comte de Montmorin,
en l’inftruifant des arrangemens pris pour moi avec Ton prédéceffeur,
(dont il avoit été le témoin 8c prefque l’inftigateur ) , avec MM. les Comtes
ik Marquis d’Apchon, les Comtes de Schombcrg & Marquis de Lambertie,
pendant que M. le Duc 6c Madame la Ducheffe de Liancourt, l’Abbé de
G a fc, M. de l’Eflart & M. le Duc de Villequier, en avoient fuivi &C
prefl'é l’exécution avec Madame de Malesherbes auprès du Sr. de Colonie.
Naturellement bienfaifant, M. le Comte de Montmorin confentit facile
ment , quand il *fut inftruit de mon honnêteté , à achever l’œuvre com
mencée par M. le Comte de Vergennes. Je remis mes titres à ce Miniftre
patriote, pour les joindre à la lettre qu’il me donna pour M. de Villedeuil,
avec une particulière pour le Sr. Donet de la Boullaye.
J ’avois connu, peu de temps auparavant, M. de Villedeuil, par l’entremife du feu Marquis de Bercy, lorique M. le Duc de Maillé ( a ) avoit
follicité pour moi les bontés de Monfeigneur le Comte d’Artois. Il m’ac
cueillit très-favon.blement, en m’aflurant que l’engagement de fon prédecefleur feroit d’autant plus facré pour lu i, qu’il fçavoit perfonnellement
ce que je méritois.
La réception du Sr. de la Boullaye fut moins honnête, ou plutôt elle
fut grolîiere. Après unephrafe de protocole pour M. le Comte de Montmorin,
il me congédia fort brufquement.
Je ne me rebutai pas. Je me retournai du côté du Sr. de Colonia, en le
priant d’ entretenir le Sr. la Boullaye des arrangemens qu’il avoit lui-même
arrête pendant fon exercice. L ’ex-Intendant me le promit, & tint parole.
Le 23 juillet, il m’écrivit (b ) de revoir le Sr. de la Boullaye , en affurant
& qu’elle ne l'avoit protégé qu’à caufe de la Comteffe de L a m a iïa y e , fœur du la Boullaye
qui pendant vingt ans avoit été la complaifante de Madame de Monteflon. V o ila une
excellente raifon, pour faire d’un Donet de la Boullaye un Intendant des finances ; c’eit
cependant celle qui réuflit à exclure l’homme capable , qui n a pas de fœur complaifante.
Souvent même fon parent, celui auquel on a des obligations , & qui eut fait honneur à
fon protefteur, eil rejeté, pour protéger à fon préjudice des fots, des impudens , fans
qu’on en roupille.
( a ) J ’ai encore pour le p ro u v er, les lettres de M M . de B ercy & de Maillé.
( b ) V o ici les deux lettres. » J ’ai parlé de v o u s , M onfieu r, à M . de la B ou llaye,'
» vendredi encore avec le plus grand intérêt, & il m’a paru difpofé à vous obliger. Il
» m’ a même demande votre adrefle ; c’eft tout ce que je puis pour vous à préfent-
�C 5 )
Madame de Malesherbes, par une lettre à la même date, que je ferois
reçu plus humainement.
Le 30 fuivant, l’entrevue eut lieu. Le fous-Miniitre de la ferme m’offrit
le bon de Fermier adjoint à la ferme entiere. Je l’acceptai ; lorfque huit
jours après il retira fon offre, en me propofant une penfion de 4000 livres,
que je refufai, répugnant à être le croupier de la ferme, quand je pouvois
la fervir utilement.
Vainement je reprefentai au Sr. de la Boullaye que le Miniftere me
deftinoit une place & non une penfion onéreufe au fife (a ) ; le fâcheux
trancha impérieufement, en me dil'ant : Eh bien ! vous n'atireç qu'une plau
inférieure.
En effet, il s’en étoit préparé les moyens. M. de Villedeuil en envoyant
dans les bureaux la lettre de M. le Comte de Montmorin, pour y répondre,
avoit laifle celle qui y étoit jointe (de M. de Calonne) à M. le Comte
de Vergennes, qui formoit mon titre. Le Sr. de la Boullaye s’en em
para & la fit difparoître, fans que j’aie pu me la reprocurer de lui.
AiTure que je ne la reproduirois pas, il rédigea la réponfe qu’il préfenta
à figner à M. de Villedeuil, de maniéré, qu’elle reconnoifloit &c re-
» V ous fçavez que ma bonne volonté pour vous obliger a toujours été entiere. V o y e z
» M . de la Boullaye , d’après même notre converfation de vendredi; il le d efire, & je
” ferai fort aife , fi j’ai contribué à vous rendre heureux. » J ’ai l’honneur d ë tre , &cSlgné, DE C O LO N IA .
Celle à Madame de Malesherbes ejl ainfi conçue :
» L ’intérêt que vous prenez à M . M orizot, ne peut qu’ajouter à celui qu’il m’a infpiré
” depuis long-temps , & par lui-même & par les perfonnes qui me l’avoient recommandé.
” Il n’a pas dépendu de moi qu’il n’ait été placé quand j’avois une influence que les
” circonftances m’ont ôté*. Je le fervirai du moins de mon témoignage & de mon ap p u i,
” & c’eft ce que j’ai déjà fait. Je le ferai encore , & je me féliciterai de vous prouver
” »>nfi mon empreflement à vous plaire,
fu is, & c . Signé, DE C
(a)
o l o n ia .
Cette penfion d’ailleurs auroit éprouvé fur le champ la diminution qu’elles ont
toutes fubies auflitôt par l’impôt que mit deilus l’Archevêque de S en s, &
en outre
^ e aur° it fini au renouvellement du bail de la ferme ; enforte que c’étoit une adreiT«
“ Sr. la B o u lla y e , pour paroître accorder quelque ch ofe, & me fruftrer réellement en
définitif.
�( 6 )
nouoit les engagemens pris avec m o i, mais feulement pour une place
tellement inférieure, que je n’aurois pu 1 accepter ( a ) .
Je l’obfervai fur le champ à M. île Villedeuil, en lui rapportant la
lettre que M. le Comte Montmorin avoit renvoyé à M. le Marquis de
la Fayette ; mais ce Miniftre me répondit : » l’erreur eft fans conféquence,
» ce font de ces inadvertences de bureaux, auxquels ils font fort fujets ;
» MM. de Montmorin, la Fayette & moi, nous avons vu l’engagement,
» Sc puis , il fuffit de vous connoître pour ne pas vous propofer de
» ces miférables «mplois.
Je fuis confiant ; j’efpérai que la fupercherie du Sr. la Boullaye ne me
préjudicieroit pas, & comme j’ai peu d’ambition, deux califes aux fermes
ayant vaqué prefque auiHtôt, j’en demandai une; mais le Sr. de la Boullaye
fit fi bien, que l’une fut vendue h un Huiffier-prifeur, l’autre fut donnée
à un Directeur de la ferme.
A ce moment, M. de Villedeuilfe retira du contrôle, ôc M. Lambert
monta au trône de la finance.
M. le Marquis de la Fayette parla de nouveau à M. le Comte de
Montmorin ( b ) , pour reprendre les engagemens avec le Sr. Lambert,
de maniéré qu’ils fufîent enfin remplis; ce Miniftre y confentit &C écrivit
dans cette intention au Sr. Lambert.
Suivant la routine, la lettre fut renvoyée dans les bureaux de l’in
tendance , où le Sr. de la Boullaye eut foin d’éviter dans la réponfe ,
l’expreiTion de place inférieure, q u i, dans la premiere , avoit bleiTé mes
droits & excité ma réclamation pour y inférer celle de place convenable,
qui, dans l’acception maltotiere, que le Sr. de la Boullaye fe préparoit
d’y donner, l’auroit rendue fynonyme.
( a ) C ’étoit fi peu une place inférieure, que portoient les engagemens, quen donnant
la çlace du Sr. de Cim m ery au Sr. J o ly de St. E ufebo, on ne me propofa pas celle
de Contrôleur des cailles, que faifoit vaquer la promotion du Sr. J o l y , qui étoit de
jo o o liv re s, & dont on augmenta le traitement de cent piftoles, pour la donner a
un nouveau v e n u , le Sr. A c o y e r,
qui
1occupa
fix lemaines
feulement, pour avoir
fa retraite avec 3000 1. de penfion. Eh ! voila comme le fang des peuples convertis efl
m onnoie, fervoit a faire des peniions a des favoris ; il eft aife de vérifier le fait.
( b ) Je pourrois rapporter ici les lettres de M . le Com te de Montmorin à M . lfi
Marquis de la F a y e tte , avec celles de ce dernier qui me les e n v o y o it, mais tous les, deu*
exiftent heureufement, & on peut les confulter ; néanmoins pour ceux qui n’en ont pas
�( 7 )
Je me défiai d’un Intendant, qui dès notre premiere entrevue m’avoit
annoncé machiavel pour Ton cafuiile. D ’après le confeil de mes protec
teurs , je vis en particulier le Sr. Lambert , pour le mettre au fait du
manège ( a ) du Sr. la Boullaye, & de ce que j’en avois ;\ attendre.
Le Sr. Lambert m’avoit paru bon homme, & fa dévotion ajoutant à
mon opinion, je crus tout ce qu’il me promit; je ne tardai pas m’appercevoir, que dans les gens en place, la foibleiTe étoit auffi dangereufe
que la mauvaife foi réfléchie. Le Sr. de la Boullaye le menoit par le bout du
nez; les chefs de bureaux, & jufqiùuixfimples commis, en faifoient de même.
Défefpéré, je m’adreflai à fes parens, à les amis Sc à tous les Miniftres
qui vouloient l’accompliiTement des engagemens pris avec moi. Chacun
d’eux écrivit, ote parla au Sr. Lambert , dont, aux réponfes que j ’ai
entre les mains, je reconnoiffois le protocole du mauvais éleve de
machiavel. Pour faire fortir celui-ci de derriere la toile, je convins avec
Madame de Malesherbes & M. Clément de Barville, qu’ils écriroient
au Sr. Lambert, relativement à ce qu’il m’avoit dit verbalement, afin
d’embarniffer le la Boullaye dans les réponfes qu’il lui donneroit à
foufcrire ; ils devoient entrecroifer leurs lettres, & les rendre preflantes.
U facilité, je vais en citer u n e: » J ’ai l’honneur, Monfieur , de yous envoyer ci» jointe, la réponfe que j’ai reçu de M . de la Boullaye , relativement au Sr. M orizot,
» auquel vous vous intéreiTez ; je d fire bien finccrement que la bonne volonté que
» témoigne M . de la B o u lla y e , ne demeure pas ftérilc , & que le Sr. Morizot puiffe
” bientôt en éprouver les effets.
J ’ai l’houneur, & c . Signé, le Comte
de
M
o n t m o r in
.
( a ) O n connoît tout le trigaudage du Sr. la Boullaye dans les bureaux des domaines
du R o i , qu’il bouleverla pour y faire entrer de force un Secrétaire de fon gendre Jo ly
de Fleury ; ce coup de main a valu mcme depuis de la difgraco au Sr. Debonnaire
de Forgées.
On fçait comment il donna du defTous au Sr. V ia l, auquel tout le crédit de M o n s ie u r ,
frère de R o i, ne put faire reftituer la p lace, quoiqu’elle lui eût été ôtée injuftement.
On n’ignore p a s, comment il difpofa au profit d’une de fes créatures, d’une place
de D ire&cur des A id e s, promife par M . Lambert à M a d a m e . Sans tous les efforts de
cette généreufe Princefle, fon protégé n’obtenoit pas juftice.
Le déplacement du Sr. d eF o rg u es, Receveur de la Barriere d ’E n fe r, a fait aflez de
bruifc par fon injuflice.
^ E n fin , qu’on confulte M . Falbert de Q uingey & tous les b u reau x, & on aura du
r- la B o u lla ye, la jufte opinion qu’on doit en avoir. Il eft connu.
•
. V
�C 8 )
Le ilratagême me réuifit. Le Sr. de la Boullaye fut obligé de fe mettre
en fcene dans les réponfes qu’il fournit a la iignature du Sr. Lambert ; celle
à Madame de Malsherbes annonçoit l’homme dès l’exorde, & on Pauroit
reconnu à tout le corps de la lettre, quand bien même il n’y eût pas
été nommé.
Celle à M. Clément de Barville promettoit une réponfe définitive,
d’après le rapport de M. de la Boullaye, dont l’intention étoit bien d’éviter
de la faire ; mais M. de Barville la provoqua , en écrivant de rechef à M»
Lambert pour qu’il la lui fit.
Elle vint, remplie de fiel, d’injures, de menaces, de diffamations, &
foufcrite du Sr. Lambert. M. de Barville la jugea auffitôt furprife à M.
Lambert. En effet, les objets dont il s’agiffoit, étoient étrangers à lui,
mais perfonnels au Sr. la Boullaye. Il ne jugea pas à propos de me
remettre une lettre qui compromettoit le Contrôleur-général, fon ancien
camarade ; mais il m’en laifla prendre une copie, que je portai au Sr.
Lambert.
Dès que celui-ci la v it , il la défavoua, en me promettant d’en témoigner
fon mécontentement au Sr. de la Boullaye. Néanmoins ce dernier avoit
réuiïï, pendant les dix mois qui s’étoient déjà écoulés du miniftere du
Sr. Lambert, à fe faire affurer , par la fignature de ce dernier , jufqu’à
fes vengeances perfonnelles, &c à difpofer1 de tout, à l’infçu du Sr. Lambert,
& à mon préjudice.
Vainement je prévenois , je follicitois &C j’avertiffois le Sr. Lambert,
à toutes fes audiences qu’il donnoit fréquemment ; je n’en étois pas
moins éconduit , malgré fes paroles & fes affurances , à fon infçu,
quoi qu’il fignât.
Entre plufxeurs faits particuliers, je n’en citerai qu’u n , c’eft celui du
bail des meffageries , pour lequel le principal Miniftre avoit une nouvelle
compagnie, qui lui donnoit une fomme confidérable d’augmentation,
& que le Sr. Lambert paifa à l’ancienne, en fe cachant du principal
Miniftre, &c à l’inftigation de la Dame de Villeneuve, fa belle-fœurj
qui vivoit avec les Morel ( a ).
. Le Sr. Lambert avoit promis formellement à Madame de MonteiTon,
( a ) Le public a retenti, dans le tem ps, de la reconnoiiEance de l’ancienne Com
pagnie envers la Dam e Villeneuve.
que
�( 9 ).
que je ferois un des RégiiTeurs de ce bail, s’il y en entroit de nouveaux,
& il y en avoit eu deux admis. Madame de Monteilon s’en plaignit au
Sr. Lrmbert, qui lui dénia en avoir admis de nouveaux. Effectivement
il n’en fçavoit rien , & il avoit figne.
Mais le fait capital dont j’ai à me plaindre, & qui eft l’objet principal
de ce mémoire, eft encore plus étrange. Il prouve linguliérement combien
le Sr. Lambert étoit incapable de gérer le contrôle général. Comme ce
fait eft amplement expofé &c difcuté dans quatre mémoires imprimés,
qui ont déjà paru, j’abrégerai, pour ne rien répéter de ce que j’ai
dit, &c je fiipplierai Votre Majeité de s’en faire rendre compte, & l’AiTemblée nationale d’en prendre communication.
J ’occupois depuis douze ans un emploi dans les bureaux de la loterie
royale, aux appointerons de 4000 livres, fans les gratifications ordinaires
& extraordinaires. L’intrigue oppreiïïve de deux chefs m’en avoit retenu
le payement pendant les douze années, malgré les ordonnances & déci
dons des Miniflres. J ’avoisfervi à mes frais, & j ’attendois impatiemment
chaque anuée ma tranflation dans une autre partie de finance, pour en
reclamer judiciairement le payement contre l’adminiftration de la loterie ,
fans craindre d’être révoqué par elle, fur cette înfurreûion; Iorfque
confidérant, d’un côté , que cette tranflation pouvoir être différée par
des événemens imprévus ; de l’autre, que j’avois un preffant befoin de
percevoir en entier à l’avenir mes appointemens , &c de toucher pour le
moment ceux arriérés, afin defolder les avances que lagénérofité m’avoit
faites, dans la vue de me faciliter les moyens d’attendre la rentrée de
ces fonds; au rifque delà révocation, j ’avois réfolu, peu après l’arrivée
de M. Lambert au miniftere des finances, de pourfuivre en Juftice mon
recouvrement.
Dans cette intention, j’avois difpofé un mémoire, fur lequel un Jurifc°nfulte expérimenté m’avoit donné fon avis. L’un & l’autre alloient
paroître imprimés, lorfqu’il tranfpira qu’il
préparoit une réforme dans.
ks bureaux.
furfisit aiïïgner & à publier mon mémoire, & le 2.5 août, le miniftere des finances abandonna le Sr. Lambert.
Quatre jours après, 'es opérations de la réfome, complotées & arrangées
dans le fecret, éclatèrent, telles que je les ai expofées dans mes deux
ptacets à M. Necker, qui ont été imprimés,
B
1
�C i° )
A mon grand étonnement, je me vis inglobé dans la fuppreflion
défaftreufe qui avoit été manoeuvrée pour mafquer à M. Lambert la
création d’une multitude de places ruineufes, & le renvoi de cinquante
peres de famille, auxquels on ôtoit l’état & le pain pour le donner à
des étrangers , nouvelles créatures que la Roche & les Adminiilrateurs
fubftituoient à des Commis plus capables qu’eux.
Cette opération, aulieu d’être une fuppreflion , étoit une vraie créa
tion, qui, loin de diminuer les frais de 120,000 livres, comme on
l’avoit fait entendre au Sr. Lambert, les avoit augmenté de 51000 livres,
fuivant le dépouillement qui en a été fait depuis au tréfor royal.
Alors je me pourvu à la Commiflion de la Police, contre l’adminiftration de la loterie, pour la faire contraindre à me payer mes appointemens retenus, & j’écrivis en même temps au Sr. Lambert, pour lui
apprendre la furprife qu’on lui avoit faite, le tort particulier qu’il me
caufoit ; n’ ayant aucune autre reflource pour fubfifter & pour lui repréfenter, qu’ au lieu d’avoir rempli envers moi les engagemens de fes deux
prédéce fleurs & les fiens, pendant les onze mois de la durée de fon
miniftere, il m’avoit, en le quittant, privé d’une place médiocre , lorfqu’il
devoit m’en donner une plus avantageufe.
Auflitôt je rendis public mon mémoire à confulter , après en avoir
auparavant envoyé un exemplaire à S. A. S. Madame la Princefle de
Lamballe, à M. le Préfident de Rofanbo & à M. de l’Eflart, que j’avois
pris à témoin de la vérité des faits que j’y énonçois. Ces deux derniers
me répondirent chacun par une lettre qui en rcconnoiiToit l’authenticité.
La Princefle fit encore plus ; elle envoya l’exemplaire à M. Lambert,
avec fon atteftation, en lui recommandant de me faire payer de mes
appointemens , d’après l’afliirance qui lui en avoit été donnée par M.
N ecker, lors de fon premier miniftere; enfin, elle redemandoit à M»
Lambert, pour m oi, la place qu’il m’avoit ôtée.
Le Sr. Lambert répondit à ma lettre du 2 feptembre, ainfi qu’il fuit«
Paris , 7 feptembre ¡788.
C e n’c ft, pas M onfieur, par une ordre particulier que j’ai donné à votre ¿gard >
que la place que vous m’apprenez que vous aviez dans les bureaux de la loterie,
s ’e f t
trouvée fupprim ée; j’ignorois même que vous y fuffiez employé.
J’ai exigé des Adminiilrateurs une économie fur leurs frais de régie, qui allât au
�(
Il
)
moins à 12 0 ,0 0 0 livres; je leur ai laiffé la fixation particulière des retranchemens qui
procureroient cette économie. C ’eft ce plan qui a produit & néceflitc les fuppreflions
dans lefquelles vous avez été compris. Si j’euffe pu prévoir que ces réformes vous
fi fient éprouver une perte, au lieu des effets que vous aviez a attendre de toutes les
efpérances qui vous font données depuis long-tem ps, j ’aurois cherché, du moins pour
l’inftant, à détourner de vous ce contre-temps ; mais e n v o u s a d r e s s a n t a M . l e
D ir e c t e u r - g é n é r a l
d e s f i n a n c e s , je ne doute pas qu’il n’entre dans les mêmes
vues, & je lui rendrai volontiers m o n t é m o i g n a g e fur vos talens & votre perfonnel,
fuivant la connoiflance que je puis en avoir.
J ’aurois defiré pouvoir remplir l’engagement que M . de Calonne avoit pris avec M .
le Comte de V erg en n es, & qui avoit été renouvellé par M . de Villedeuil avec M .
le Comte de M ontm orin, pour vous donner une place diilinguée dans la finance.
V o u s avez les preuves de l’intention où j’étois de la te n ir, par les affurances que
j ’en ai données à M . le principal Miniftre , à M . de Lam oignon, à M . le Com te de la
Luzerne, à M . le Com te de M ontm orin, à M . le D u c de V illeq u ier, à M . de Barville
& autres de vos protefteurs ( a ).
Je vais avoir l’honneur de réitérer mes regrets à Madame la PrinceiTe de Lam balle,
qui m’a fait celui de m’écrirç, en m’envoyant votre mémoire im prim é, pour la répétition
de vos appointemens contre la loterie & la réclamation de votre place. Je fu is, & c
Signe, L a m b e r t .
Cette lettre n’a pas befoin d’un long commentaire, & h l’apologie
près de la faullc opération fouferite par le Sr. Lambert fur la loterie, on
y trouve tout ; mais on fçait que plus un Adminiftrateur eil aveugle,
plus il a d’affe&ion pour fes opérations; au furplus, on voit que le Sr.
Lambert connoiffoit parfaitement la teneur des engagemens de MM. de
Calonne & Villedeuil avec MM. les Comtes de Vergennes & Montmorin,
Puifqu’il dénomme tous les Miniftres avec lefquels il les avoit fanftionné.
Ce n’ell plus le ftyle du Sr. de la Boullaye, pour une place inférieure 011
convenable ; dès qu’il n’ell plus le fecrétaire de l’ex-Miniftre, celiu-ci
rétablit la chofe en convenant que les engagemens portoient fur une
place diflinguée ; & au lieu de cette place diilinguée il m’a ravi jufqu’au
chétif emploi qui me faifoit vivre , il m’a mis fans état & fans pain.
Mais confidérez fes regrets de n’avoir pu prévoir ma perte, & détourner
dt moi ce contre-temps. Ce contre-temps ! ah ! eit-ce le mot qui convient
( a ) Je n’ai pas befoin de rapporter tous les engagemens par écrit de tous ces
Miuiftr.es & autres, puifque
M.
Lambert
en
convient ; mais je les garde en original.
�( 12, )
à la chofe ? n’eft-ce pas plutôt un attentat; puifque ôter l’état & le pain à
un homme, c’eft lui donner lentement la mort. L ’ex-Contrôleur-général
pénétré , ne femble-t-il pas me dire : » j’ai fait une faute, je l’avoue; mais
» une fa u te involontaire. J ’ai été furpris, je ne vous fçavois pas là ! il
» j’avois encore de l’influence fur l’adminiftration de la loterie , je vous
» reftituerois votre place. Adreffez-vous à M. Necker, il eft juile, il
» vous réintégrera, lorfque je lui aurai parlé de mon erreur, de vos
» talens & de votre perfonnel.
C ’eft ce langage que confirme le billet ci-après du Sr. Lambert, du 12
feptembre 1788.
M . Lambert envoie à M . M orizot la lettre de Madame la Princefle de Lam balle,
qu’il defire d’a vo ir, & fon mémoire qu’il a lu , & qui n’a été vu de perfonne ; il n’a point
réfufé de voir &
d’entendre le Sr. M orizot; Mais il n’a plus aucune influence fur
l’adminiftration de la loterie , S i M . N ecker peut feul y pourvoir.
Je fuivis l’avis du Sr. Lambert. Le jour même j’écrivis à M. Necker,
8c par fa réponfe du 17 feptembre, ce Miniitre me renvoya à en
entretenir le Sr. del’Eflart, auquel je remis mon placet manufcrit, deftinc
pour M. Necker, que le Sr. Lambert avoit approuvé, &c que depuis j’ai
fait imprimer, lorfque le Sr. de FEffart , d’abord enclin à me rendre
juftice , en a été détourné par une femme qui follicitoit pour les Adminiftrateurs de la loterie.
Votre Majefté, Monfieur, & toute votre Cour, ne dédaignèrent pas
de lire ce placet, qui occafionna le renvoi de la femme Gourbillon &
de fon fils. Tous furent révoltés de l’injuftice que j ’éprouvois, & néan
moins ce fut à ce moment que fe formeront les intrigues pour empêcher
la réparation, foit de celle que je pourfuivois devant M. Necker, Juge
né de la queftion en reftitution de ma place, foit de cel’e pour le paye
ment de mes appointemens, dont le Confeil étoit faifi, au moyen d’un
Arrêt, du propre mouvement du R o i, qui avoit évoque de la commiilion
de la police ma demande avant l’inftru£Uon achevée.
Je dévoilai toutes ces intrigues clans un deuxième placet ;\ M. Necker ■>
que M. de Barentin remit imprimé à ce Miniftre, auprès duquel je réunis
çncore le fuffrage de MM. les Comtes de Montmorin, de la Luzerne &
celui de M. de Villedeuil.
M , N ecker m’écrivit la lettre ci-après,
�C *3 )
‘
Perfailles
M . DE R
um are
,
ce 6 février 178g.
a dû prévenir M . M o rizo t, qu il devoit faire le rapport de fon affaire
au Comité contentieux. M . le Direfteur-général l’engage de lui envoyer toutes les inftruélions qu’il croira c o n ven ab les. S i M . M
o r iz o t
PO RTÉE A UN AU TR E T R IB U N A L , IL
Q u ’ a LE DÉSIGN ER LUI-M&ME , & en atten
n ’a
PRÉFÉRÉ QUE
sa
d e m a n d e s o it
dant , M . le Direéteur-général ayant connoiffance de la fituation dans laquelle il fe trou ve,
lui envoie un mandat de 12 0 0 1.
Ce mandat n’a pas fuffit pour les frais d’impreiHon des quatre mémoires
que j ’ai donnés. M. de Rumare, que le Sr. Lambert avoit nommé* mon
Rapporteur, en l’endoftrinant contre moi, s’étoit heureufement démis,
& M. de Fourqueux lui avoit fubftitué M. de Pafloret;
J ’acceptai entre les mains de M. de Barentin l’offre faite par M. Necker
d’un autre Tribunal que le Confeil; mais quand le Comité contentieux
eut connoiffance de cette propofition & de mon acceptation, fans attendre
les injlrucllons que M. le Dire&eur-général m'avoit engagé d'envoyer, fans
que Maître Perdry, mon Avocat au Confeil, en fîit averti, fans avoir mes
pièces, fans que mes adverfaires fuflent conftitués ; enfin, fur un écrit
furtif, illégal de ceux-ci, & non communiqué, ce Comité s’emprefla de
m’étrangler par un Arrêt qui me déclaroit fubitement non-recevablc, dans
l’efpoir qu’il m’empêcheroit de profiter du bénéfice de l'offre de M. Necker
pour le changement de Tribunal (a ).
Maître Perdry, par cet Arrêt, fe trouvoit pour ainfi dire compromis dans
fon honneur & fa fidélité, vis-à-vis de fon client, qui pouvoit en quelque
forte le prendre à partie. Il préfenta requête au Comité contentieux,
pour le rappeller au principe de ne pas juger les Parties au moins fans les
entendre ; & M* de Pafloret qui rapporta cette requête, fit rétablir les
chofes , en ordonnant que cette production illégale &c clandeftine de mes
adverfaires me. feroit communiquée. Les Magiilrats fe prêtèrent d’autant
( a ) Eft-il croyable que tfes h om m es, oracles du Confeil du R o i, fe permettent de
rendre ainfi des Arrêts en fon nom impunément ? Seroit-il poflîble que l’Aflemblée
nationale ne ’ prît point en confidération le fort de leurs com m ettans, jufticiables de
tels ^ g e s , & qu’ils ne les écartaflent pas du plus jufte des Rois qu’ils trom pent, &
d°nt ils abufent fans ceiTe. Oh ! qui auroit donc pitié de l’infortunée nation, obligée
fe voir ainfi ra va gé e , fans ofer fe plaindre , fe foulevcr ni fecouer ce régime arbitraire.
�'
"I
au mépris de toutes les formes , qu’ils fe promettoient bien de répéter le
même , en obfervant toutes les formes.
Mais ce fut alors , que très-déterminé à confommer la propofition de
M. N ecker, & à ne pas paroître dans un Tribunal, dont les vieux
Magiftrats fouloient aux pieds, fans fcrupule, les L o ix, la confcience &C
l’honneur, je démalquai la monftruofité de leur procédé, dans un mé
moire que je donnai le 18 juin dernier à l’Affemblée nationale & à
Votre Majefté, que je fuppliois de me juger elle-même, ou de me nommer
un Tribunal, en lui expofant quelques réflexions fur la néceifité de
réformer les bureaux de fon Conieil.
J ’attendois, Sire, votre décifion , lorfque votre peuple, las du joug
de ces defpotes Magiftrats , qui avoient ui'urpé votre autorité pour vous
fubjuguer v o u s-m ê m e , s’eft levé en rompant fes chaînes, &C a pris les
armes pour délivrer fon Monarque bien-aimé.
Les fecouffes d’un fi noble effort, en altérant l’harmonie apparente
qui déguifoit les vrais défordres de la Capitale, ont ébranlé un moment
les fondemens de la fécurité particulière. A l’abri de ce trouble momenrané , ceux auxquels l’empire de l’iniquité échappoit, ceux que j’avois pu
bleiTer par une révélation de faits honteux, mais nécelïaires à mettre en
évidence, ceux enfin que l’habitude a familiariié avec le crime, me
menacerent d’un attentat horrible.
Pour leur épargner un forfait de plus, j’ai cherché unafyle fur une T erre étran
gère : j’y toitchois à peine, que j’allois échouer contre un nouvel écueil ( a ).
( a ) Quarante-huit heures après être arrivé à Bruxelles, où je ne A>nnoiffois perfonne,
le Gouvernement me notifia l’ordre de fortir des Terres de l’Em pereur, dans vin gtquatre heures, & il étoit alors onze heures du foir. Je communiquai les pafle-portsque
j’avois de mon d iftriil, de l’H ôtel-de-V ille de Paris & celui du R o i, je rendis vifite
a M . le Comte de TrauttmaudorslE En voyant l’état de ma fanté, il .'évoqua I ordre de
déguerpir. C e Miniftre honnête s’exeufa même de l'avoir ^donné , fur ce qu’il ne me
connoiiToit p as, & fur ce qu’un François m’avoit rendu ftlfpeft; j’ai fçu depuis le nom
du lâche, q u i, abufant de la confiance qu’infpiroit fon n o m , fon état 8c fon rang »
m’avoit rendu ce mauvais office ; je ne le nomme p as, par égard pour M M . les Ducs
de........... meilleurs patriotes que lu i; je fouhaite de n’être pas fo.ee à le nom m er, car
ce trait-là ne lui a pas fait honneur à B ruxelles, dès que j’y û été connu. On peut
voir aux pièces juftificatives, le certificat du Gouvernement de B ru x elle s,la lettre du
M iniilre de l’Empereur & celle du Miniftre du R o i des François.
t
!
1
I
�C *5 )
Sans la vigilante prote&ion de M. le Comte de Montmorin, qui me pro
cura un moment de repos, pendant lequel, je donnai avis à quelques-uns
de MM. les Députés à l’Affemblée nationale du malheur de ma pofition
des dangers qu ej’avois courus pour avoir ofe demander juftice au R o i&
à l’Affemblée, avec ces carafteres de vérité & de courage, qui n’appar
tiennent qu’à l’honnête homme, parce que lui feul peut les ioutenir.
Aux a ffu ra n c e s de leurs bons offices, ils jo ig n ir e n t une invitation vrai
ment fr a te r n e lle de revenir, & ils m’annoncerent le rappel du S r . Lambert
au miniftere.
Je me mis en marche auifitôt, & j ’en prévins une parente dti Sr.
Lambert, qui, pénétrée du tort que celui-ci me fait éprouver, m’avoit
promis fa médiation auprès de lui trois jours avant mon départ.
AufTitôt mon arrivée, je réclamai la parole de cette parente en même
temps que j’adrefl'ai au Sr. Lambert la lettre ci-après.
P a r is , 4 feptembre 178g.
-M O N S IE U R ,
R
appelle
au Contrôle-général, tout ce quo je vois de plus avantageux pour vous
dans cet événem ent, c’eft la facilité qu’il vous donne de réparer partie du dommage
que vous avez pu commettre pendant votre premier miniftere.
Pour y parvenir sûrement, il faut vous environner de perfonnes honnêtes, & éloigner
de vous les frippons , les intrigans & les gens de parti, qui vous avoient dominé &
circonvenu ; malheureufement la nature vous a refufé le don de connoître les hom m es,
don fi nécefTaire à ceux appellés à les gouverner.
U n intérêt majeur ne me permet pas de vous diflimuler cet a v is , dont dépend pour
tttoi la réparation des torts que vous m’avez fait par furprife, & pour vo u s, l’eftime
& le refpeét du public éclairé, qui 11e confond pas l’homme avec la place.
Si vous êtes ju fte, avec courage vous ferez le bien, même à ceux qui vous feroient
Perfonnellement défagréables, s’ils font d’ailleurs honnêtes & capables. V ous ne profiterez
Pas de votre place pour exercer vos vengeances ou celles de
vos créatures. Main
tenant que la refponfabiïué efl une Loi de l'E t iit , vous vous expofetiez à être dénoncé,
à moins que la régénération ne foit illufoire, ou que l’Affembée nationale ne foit
elle-même complice avec nos ty ra n s, vous feriez infailliblement jugé d’après la lettre &
*e billet que vous m’avez adrefle les 7 & 1 2 feptembre de l’an dernier. Faites-y attention;
V ous fçavez qu’à pareille date vous m’avez mis fans pain , pour donner ma place
au Jei,ne B i l l e c o q ; enforte qu’à charge à la fociété qui me fait vivre depuis ce m om ent,
^ dans un temps où chacun n’a pas trop du fie n , je fuis dans la fituation la plus
«W oureufe.
Aujourd’h u i, M on fieu r, que vous avez reffaifi l’autorité, vous devez à la Juftice &
�( 16 )
à la fociété de chafler honteufement ce B i l l e c o q , déjà fi riche par lui-même & par
la fortune immenfe de fon beau-pere , qui vous a trom pé, pour me reftituer ma place
ou me donner une retraite analogue aux appointemens de la place. Je ne la demande
même pas aufli avantageufe que vous l’avez faite aux autres, auxquels vous avez donné
âppointement & gratification en retraite, en aflurant moitié d’icelle à leurs femmes.
C e feroit vous couvrir d’opprobre & manquer à votre d evo ir, fi vous accordiez de
nouveau votre confiance à un
la
R
oche
, qui en a fi cruellement abufé, d’intelligence
avec les Adm iniftrateurs.
Le public éclairé par les quatre mémoires que j’ai donnés , les a proferits, & beaucoup
des
h o n o r a b le s
membres de l’Affemblée nationale fe promettent de les éplucher, lorfqu’ils
s’occuperont de la finance. Il eft impoffible que leur fortu ne, acquife aux dépens du
R o i & de la Nation , ne lerve pas à foulager le peuple qu’ils ont dévoré par leur dépré
dation. Heureux encore s’ils n’expient à la lanterne les forfaits de leur oppreiïion.
V o u s n’ignorez p a s , Monfieur , que tous ces flippons qui vous ravirent votre fan£Hon
pour me ravir ma place, ne m’avoient pas fatiifait de mes appointemens, pendant douze
ans que je l’avois occupée avec diftinâion. V o u s en avez vu la preuve dans les témoi
gnages foutenus des Adminiftrateurs, q u i, pendant les clou/., années , ont donné à mon
tra v a il, à ma vie publique & p rivé e , les élog:s qu’ils ne pouvoient leur refufer ( a ) .
M ais vous avez vu aufli les preuves de cette intrigue atroce qui m’en a privé , &
qui avoit été menée avec fuccès par les Srs. M efnard, Seigneur de Conichard r &
P ré v o it, Montaubert d’A rlin co u rt, connus notoirement pour les deux tyrans de la finance
les plus effrontés, comme pour las deux vampires les plus ir.fatiables.
M algré l’évidence de mes d ro its, le Comité contentieux du Cor.A-il n’a pas eu honte
de former cabale pour les anéantir, & d’admettre des fins de non-recevoir ipadmiflibles.,
qui font la fource du brigandage de la M agiïtrature, qui depuis deux fiécles défoie la
France & en prépare la perte.
O b ligé , au péril de ma vie qui étoit m enacée, d’échirer cette cabale rcl'inccrate,'
je l’ai fait avec fuccès dans mon mémoire au R o i , auquel le françois & l’é-.ratiger ont
applaudi. L a chicane effaie d’éternifir ce procès, dont vous aviez d’aboid nommé pour
Rapporteur ce Grégoire de Rumare , aufli eilimé au H avre qu’à P aris, &. je ne puis
fuffire aux frais quelle dévore.
V o u s devez prononcer fur le rapport de M . de P aftoret, les Magiftrats du Confeil
ne pouvant plus connoître de cette difcuflion depuis la plainte que j’ai portée contr’eux
au Roi & à l’Afïl’mblée nationale, & la propofition qui m’a été faite par M . N ttk er
pour me changer ce Tribunal.
Des Magiilrats com prom is, attaqués , devroient fe réeufer d eux-mêmes. La réunion
des bureaux ne change pas leurs difpofitions. Elle n’épure pas leur cœ u r, & c’eft Ie
cœur qui infpire la confiance ou qui diffuade. Réunis ou divifés, les Magiftrats for t les
(a )
V. dans mon mémoire à confulter les lettres des Srs.Campan , Pcrnon, M efna ; à
&. de Clugny.
jnemes >
\
�( >7 )
mûmes f & ce n’étoit pas une réunion qu’il falloit, & qui ne diminue aucunement leur
ignorance & leur corruption. La nation attendoit une fuppreiîion & un renouvellement
total. L e bien public les follicitoit ; fans cela , la régénération eft manquée , notre efpoir
trom pé, & le defpotifme nous menace de fes vengeances implacables.
T erm inez, M oniieur , cette querelle honteufe pour vos confreres , odieufe au public '
& douloureufe pour moi. V ous préviendrez le Jugement de l ’augufte A flem blée, déjà
affez furchargée de travaux importans pour le bien général & particulier. V o u s vous
ménagerez des droits à Ton eftim e, au lieu de vous attirer des difgraces.
C e provifoire rem pli, il ne vous reftera , Moniteur , qu’à acquitter les engagemens
que vous aviez pris pour m o i, avec tous les M iniftres, pendant que vous étiez Contrôleurgénéral. La mechancete du Sr. Donet de la B o u lla y e , qui avoit toujours quelques ififipides
créatures de fes favorites à p ou rvoir, vous en a empêché, piefque à votre infçu ;
car c’étoit vers la fin de votre miniftere qu’il vous furprit votre fignature , au bas
d’une lettre injurieufe &. calomnieufe qu'il vous faifoit répondre contre m o i, à M .
Clément de Barville.
V o u s n’a v ie z , vous ne pouviez avoir alors aucun grief contre moi. L e Sr. Donet
vous abufoit, pour couvrir de votre autorité fes reffentimens perfonnels, & difpofer,
à mon préjudice , des places auxquelles j’avois d ro it, par vos engagemens &. le vœu
réuni des M iniftres, qui vouloient une fois, qu’un homme qui le m éritoit, entrât dans
les finances du R o i , depuis trop long-temps la proie de toute la valetaille delà Cour
& de la Ville ( a ) .
D eux de ces Miniftres bien intentionnés font encore aujourd’hui dans le miniftere
jes deux plus fermes appuis de l’honnêteté malheureufe. Ils n’ont point changé, & je
n’ai pas démérité. A u contraire, mon courage développé par le malheur & les circonftances, m’a mis dans un jour nouveau, & vu fous un afpeft plus intéreflant •
d’honorables membres de l’augufte Aflemblée ont penfé, qu’une fi jufte énergie décéloit
quelque v e rtu , dont on pouvoit tirer avantage pour le bien public ; ils m’ont afliiré
de leur proteâion.
Secondez leurs intentions patriotiques, M onfieur, je fupplierai M M . les Comtes
de Montmorin & de la Luzerne de vous réitérer leurs opinions fur mes droits ; mais
pourvoyez promptement à la reftitution de ma place ou à la fixation de ma retraite,
ainfi qu’au payement de mes appointemens , fi long-temps & fi vexatoirement retenus.
Cet objet eft provifoire & requiert célérité, puifque enfin depuis un an je fuis fans
Pain , & cette extrême fituation eft votre feul ouvrage. Je fuis, & c. Signé, M
o r iz o t .
Les torts du Sr. Lambert, fes faux fuyant, fon manège & ma fituation,
ni’autorifoient à lui écrire, ainfi qu’on vient de le v o ir, avec une
énergie propre à rappeller fon ame aux fentimens qui lui étoient devenus
( a) Campan, Morel, Diancourt, &c. &c.
c
�( *8 )
étrangers, mais en vain; le Sr. Lambert, éloigné des principes de juftice
que je lui retraçois , ne me fît aucune réponfe ; aucontraire, averti par
cette lettre de mon retour dans la Capitale, il s’emprefla de m’inquiéter,
¿k l’aide du Comité de Police de l’Hôtel-de-Ville de Paris.
Ce Comité turbulent me cita devant lu i, par lettre du 8 feptembre
dernier, quatre jours après celle que je venois d’écrire à M. Lambert.
J e comparus devant les Srs. P itra (a ) & Dufour ( b ) , adroits caffards
p a t r i o t i q u e s , qui, depuis la révolution, s’étoient introduits d’abord fans
miffion à l’Hôtel-de-Ville, & avoient réuffi enfuite, malgré l’amovibilité,
à s’y perpétuer avec miffion, voulant abfolument être quelque chofe,
en dépit de l’improbation générale & de la nullité, dont les a frappés la
nature. Obfcurs & myftérieux comme les Sibilles, à peine purent-ils me
dire le motif de leur indifcret appel. Je parvins cependant à démêler les
refforts de la même intrigue qui m’avoit expatrié, & qui, en apprenant
mon r e t o u r , r e n o u v e l lo it fes e ffo r ts pour s ’e m p a r e r , s ’ il étoit p o f fib le ,
de ma perfonne, en employant à cet attentat, des formes en apparence
légales; car ni le Sr. Lambert, ni les Commis de M. Bailly,dans les
bureaux de la Police municipale, n’ignoroient_ ou ne devoient ignorer
leur incompétence.
Au fein de l’anarchie, où toutes les réglés font oubliées, confondues
ou violées, l’abus étoit facile, & le danger preffant. J ’avois à craindre le
defpotifmc fanatique & la complaifance intércffée des Officiers, Rois de
la Police parifienne , compofée en partie du rebut des diftrifts ( c ) , depuis
que les gens fenfés & honnêtes les abandonnent aux intrigans. D ’ailleurs,
l’afcendant d’un Contrôleur-général, qui a la lâcheté & la baffeffe de
flatter des fubalternes incompétens, pour provoquer d’eux des attes
( a ) P itra, marchand bonnetier, & lai-m êm e,u n peu bonnet de laine , n’étoit pa?
con n u , avant que les murs de Paris fuflent tapifTés de fon nom.
( b ) Celui-là , & fon frere , Secrétaire du d’Aligre , font fort connus. Les hurlemens
des cliens écorchés
les ont longuement célébrés.
.. ( c ) Je ne prétends pas qu’il ne refte plus de gens honnêtes &
éclairés dans le*
diftriéts ; ce n’eft pas c e la , je fçais qu il y en a encore qu’on n’a pu réufTir à écarter,
mais ils y font fans influence, & fans ofer parler, &. le défordre entr’autres de certain*
d iiw a s eft au dernier période.
�Ci 9 )
illégaux, lorfqu’il peut recourir à des Tribunaux compétens,me rendoit
encore plus redoutable cette voie oblique, infolire & vexatoire.
Je pris les feules précautions que je pouvois prendre dans de fi fâcheufes
circonitances , & je fis Maître Carre, CommiiTaire au Châtelet, dépoiitaire
de la déclaration ci-après.
L ’ a n mil fept cent quatre-vingt-neuf, le jeudi dixfeptembre , deux heures de relevée,'
en l’hôtel & devant nous, A dricn-Louis C a rr é , Confeiller du R o i , Commiffaire-enquêteur
&
examinateur au Châtelet de P a ris, eft comparu Maître Edroe-Etienne M o riz o t,
A vocat au Parlem ent, demeurant à P a ris, rue St. Thom as du L o u v re , Paroifle St.
Germ ain-l’Auxerrois :
Lequel nous a déclaré , qu’il auroit été averti, environ le 20 juillet dernier, qu’une
cabale puiflante &, nombreufe devoit profiter du trouble &
du défordre où étoit la
C ap itale, pour le faire aiTafliner, à caufe de certaines affaires, entr’autre une qu’il
avoit avec des Financiers, dans laquelle étoient compromis grand nombre de Magiftrats
S i de M inières, hors maintenant du miniftere ( a ) , ou rappelles au miniftere; qu’en conféquence, le comparant auroit auflitôt fait un emprunt ( b ) , & pris des paffe-ports de fon
diftriiS, de l’H ôtel-de-Ville & du R o i, & fe feroit enfui, le 25 dud. mois de ju illet, à
Bruxelles, d’où il en auroit prévenu fes protetteurs à l’Aflemblée nationale, & fes amis ; que
raffuré par ceux-ci, & jufques par quelques-uns de M M . les Députés de l’Aflemblée nationale,
que ladite Affemblée s’occuperoit de" faire rendre au comparant la juilice qu’il avoit
réclam ée, il s’étoit mis en marche pour rentrer dans fa patrie, en apprenant la nouvelle
du rappel du Sr. Lambert au contrôle-général q u o i q u e l e S r . L a m b e r t f u t s o n
en n em i
c a p it a l
; qu’arrivé à P a ris, le comparant auroit é crit, le quatre du courant,
audit Sr. L am b ert, pour le prévenir de la juilice qu’il réclamoit de l u i , & il auroit
appris qne la cabale renouvelloit fes intrigues, & même auroit e ifa y é ,p a r des voies
illégales 8 i infolites ,
de s’emparer de fa perfonne, pour difpofer plus sûrement de
fa v ie ; qu’en conféquence , cette cabale infernale l’auroit dénoncé à l’H ôtel-de-Ville ( c )
comme fufpett , imaginant que dans un moment où l’organifation de fa Police eft
incomplette , fa Municipalité leur donneroit la fatisfaélion & l’avantage de le faire
arrêter & conftituer prifonnier ; qu’alors le com parant, fouilrait à la fociété, ilo lé , fans
( a ) rattendrai, pour tout d ire , que l’on m’oppofe les ailes livrés par ce lâche que
je ne nomme pas.
( b ) C e fut un V ica ire -g é n é ra l, du Diocèfe d’A u tu n , qui eut la générofité de
Ine prêter.
( c ) U n Millin du Perreux , Député à la V ille , Repréfentant de la commune, n’eft
P is fait pour infpirer de la confiance à un citoyen, honnête. J ’ignore qui p eu t, fans
K-pugnance, fiéger avec Un homme de cette trempe.
�(1°)
déferife , ne pourroit échapper au poifon , s’il avoit échappé au poignard ; ce que
vo yan t le com parant, il auroit pris la réfolution de dénoncer à fes concitoyens, par
un mémoire qu’il v a faire imprimer, la fituation dans laquelle il fe trouve , fe réfervant »
jorl’que les Lois reprendront leur empire , de fe p o u rvo ir, ainfi &. contre qui il avifera.
Defquelles déclarations led. Sr. comparant nous a requis de lui donner a ft e , ce que
nous lui avons oélroyé , pour lui fervir & v a lo ir, ce que de raifon, & a ligné avec
n o u s, Com m ¡flaire, la minute des préfentes , demeurée en nos mains. Signé fu r l’expé
dition , C
arré.
J ’étois occupé à la réda&ion du mémoire annoncé ci-defïus, lorfque
no&urnement le Comité de Police de l’Hôtel-de-Ville me dépêcha un
courier,porteur d’unemiffiveimpertinente, lignée desSrs. Montaleau, ( a )
Prélxdent, Lagrénée 6c Bonvallet , qui ne m’avoient jamais vu ni
entendu, lefquels m’affuroient cependant être parfaitement injlruits fans
m’avoir parlé.
Rien ne motivoit, dans cette lettre infultante , les peines arbitraires
dont elle me menaçoit en ftyle de G rève, fi ce n’eft un faux rapport
du Sr. Dufour , contre lequel Maître Perdry, Avocat au Confeil ( b ) ,
a rétabli la vérité, dont on avoit les preuves , en démentant complétetement les aiîertions erronées du Sr. Dufour. Je me difpofois à employer
ces preuves, pour éclairer la Capitafé fur l’oppreffion de l’Hôtel-de-Ville ,
dont les membres, pour la plupart , incapables , indignes ou flétris,
aggravoient les défordres de l’anarchie, lorfque de vertueux citoyens,
infiniment plus habiles, ont développé les manœuvres anti-patriotiques
---- —
■
—
( a ) Je ne conçois pas comment le Sr. Moctier de Montaleau a pu briguer d’être
Député à l’H ô tel-d e -V ille , d’où fon frere a été chaffé, à moitié de fon cours d’échevinage. 11 me femble qu’avec un peu de délicateffe , il faudroit s’exclure d’un théâtre
où notre nom s’efl dégrade & flétri. Je conçois encore moins qu on députe des
Magiftrats & des Nobles titrés, tous gensintéreffés à la c o n f e r v a t i o n des abus, dont ils. viven t,
& par lefquels ils regnent; & ce qui eft encore plus inconcevable, c eft que tous les quinze
jours les diftriils nomment de nouveaux r e p r é f e n t a n s , & cependant on voit toujours les
mêmes perfonnages remplir les m îm es Comités & les m îm es noms affichés. Je fouhaite qu’au
milieu du mécontentement général contre l'H ô tel-d e-V ille, il n’arrive rien de fâcheux,
mais j’en doute. Je fouhaiterois encore que le petit nombre d’honnêtes gens qui s’y
trouvent , & y jouent un trifte rôle , fe retiraien t, pour n’avoir point à fe reprocher
le malheur de leurs concitoyeus, car on fe laflera.
( b ) Voyez fon certificat aux pièces juftificativos.'
�C »1 )
de ccs tyrans municipaux ( a ) , qui entendent nôus traiter plu'ôt en
vagabonds fans aveux, qu’en citoyens auxquels ils doivent des égards.
J ’ai repris alors ma tâche, pour dénoncer
Votre Majeftc, &
l’ A^emblée nationale, le Sr. Lambert, comme un M i n i s t r e i n e p t e ,
i n j u s t e , m a l - h o n n ê t e e t o p p r e s s e u r , dont l’honneur du T rône,
& le bonheur de vos Sujets follicitent le renvoi, & les injuftices une
punition. E n fu ite ,p o u r la fupplier de me rendre enfin la juftice que je
reclame depuis il long-temps, &C h laquelle il feroit dangereux , pour le
Sr. Lambert, de s'oppofer.
Votre Majefté abufée, votre autorité ufurpée, votre fife épuifé, vos
Provinces dévailées, votre Etat trahi, votre Royaume à deux doigts
de fa perte , vos peuples affamés , avilis, »dégradés par la corruption &
l’efclavage ; la France, enfin , cette fi belle contrée de l’Europe, n’offrant
plus que le fpeftacle de toutes les douleurs & de toutes les miferes : voilà
le tableau trop vrai des opérations meurtrieres des Miniitres & des
Magiftrats.
O ui, ce font vos Miniftres, enrichis des dépouillés de vos peuples ,
qui ont multiplié les impôts & les emprunts encore plus ruineux, pour
en dévorer le produit, ou acheter, par la prodigalité des dons , la faveur
intéreflee d’avides courtifans, néceflaires il les maintenir en place.
Ce font vos Magiftrats, infidelles à leurs obligations, traitres à la
Nation & à fon Chef fuprême , qui, par leur lâcheté dans vos Confeils,
ont célé la vérité à Votre Majefté, & lui ont dérobé la connoiifance
des gémiffemens & des plaies de fon peuple. Fiers de s’en dire les peres ( b "),
Pour en éxiger la docilité d’un enfant, ils faifoient fervir fa propre
force à l’enchaîner par une coalition combinée ; ces confpirateurs du
( a ) O n m’aflure ce Comité renouvellé en entier, dans ce moment. J ’en félicite la
Capitale. Maître Letellier &
tous les gens honnêtes pourront efpérer à leur sûreté,
& cefler de vo ir la Garde nationale obtempérer à des ordres arbitraires , évidemment
jnfenfés, les exécuter
b o u rea u x
avec un empreflement
indécent,
&
s’honorer d’être
les
de leurs concitoyens. S ’ils euflent continué, nous aurions été trop heureux
reprendre nos fers.
( b ) Sous les noms féduifans de patrons &
de p eres,
Ils affeftent des R o i s , les démarches altieres.
B r v t u s , trag. de Volt.
�( “
)
malheur public échangeoient les grâces de la Cour contre la pré
varication criminelle des nombreux complices de fon afferviiTement ;
& le fang des infortunés cliens, dont s’abreuvoient à longs traits les
vautours en robe, étoit, pour ainfi dire, la foute du pafte infame de
ces Cannibales.
L ’excès du défordre a produit le remede. Votre Majefté a convoque
fa Nation, pour s’occuper avec elle de l’oeuvre immenfe de fa régéné
ration. L ’élite dont elle s’eft environnée, a fondé la profondeur de
l’abyme, & nous attendons de íes pénibles travaux, 8c de votre augufte
bienfaifance, une nouvelle exiftence.
Pour parvenir à ce but heureux, eft-ce un Lambert, inepte & injufte 3
qui peut y co-opérer ? feroit-ce un Miniftre fans idées, fans cara&ere,
qui pourroit éclairer & diriger Votre Majefté, au milieu des accidens
douloureux, irréparables de cet enfantement politique ? a-t-il feulement
l ’ in t e llig e n c e propre à faifxr l’enfemble de ce vafte plan, chef-d’œuvre
de la raifon humaine, dont votre fagelïe a déjà fanâionné quelques-unes
des lignes.
Vous l’avez v u , Sire, dans mon expofé des onze mois de fon premier
miniftere ; toujours fignant, & ne fcachant point ce qu’il fignoit ; avouer,
dél'avouer, contredire, aller &C revenir fans ceffe, au gré du caprice
ou des paillons , tantôt du Sr. la BouUaye, tantôt de la Dame de
Villeneuve, ou des bureaux, ces royautés fubalternes, d’ou émanent
depuis ii long-temps ces décifions atenttatoires aux droits des citoyens
& à la juftice qu’ils invoquent.
Votre Majefté a vu le fous-Miniftre Laroche, fans autre expérience
des affaires que celle acquife à ouvrir & fceller les paquets du bureau
des dépêches, confommer avec les Adminiftrateurs de la loterie une
opération défaftreufe pour la caiiTe publique , & ruiner cinquante peres
de fam ille, dont ils livroient la dépouille à leurs créatures.
Vous avez lu enfuite l’expreffion patétique des regrets du Sr. Lambert
dans fa lettre & l'on billet des 7 & n feptembre 178 8 , après
m’avoir ravi mon état &c mon pain, fans le fçavoir ; lorfque fes engagemens perfonncls, dont lui-même circonftancie l’origine & les détails»
l’obligeoient à me donner une place diftinguée; fon confeil officieux,
de m’adreffer à M. Necker, afin d’obtenir de lui la reftitution de mon
emploi; fa promeffe d’en apuyer la réclamation par fon témoignage
�c *3 ) ;
fur mes talens & mon'perfonnel; cette intime {ftrfuafion de l’empreffement de M. Necker à entrer dans fes vues, dès qu’il les lui aura
expofées, toutes ces chofes n’ont pas échappé à l’attention de Votre
Majefté.
Eh ! cependant, cédant à une honte puérile, à un orgeuil puiillanime,
ce papelard, loin d’écouter les remords de fa confcience qui le preffent
fur la réparation de ion attentat, tremblant de voir fon opération appro
fondie , fon ineptie & fon injuitice mifes au grand jour, il garde un
filence homicide, que, dis-je, pour montrer davantage la vérité de cette
maxime , que quelque dificile qu’il foit de ne pas fe tromper, il e'ft
bien plus difficile encore d’avouer qu’on s’eft trompé ; il effaie d’enve
lopper de nuages fon erreur, afin qu’elle ne puiffe être pénétrée, &
¿échapper ainfi à la févérité d’un examen qui en provoqueroit la
déformation.
D ’un côté, pour étouffer les accens plaintifs da ma v o ix , le Sr:
de la Michodiere, auquel le» fondions d’Infpetteur-général impofe l’obli
gation de fcruter cette opération, trahit fes devoirs, fori honneur & les
droits du malheureux, pour fauver, s’il eft poifible , le Sr. Lambert des
reproches & des mépris du public ( a ).
De l’autre, la bureaucratie contentieufe du Confeil, fabrique un Arrêt
monftrueux, & afin de prévenir le changement de Tribunal, propofé par
M. Necker (pour m’arracher à ce régime), il me déclare, à l’improviite,
non-recevable, fans avoir entendu mon Défenfeur , ni avoir vu hies
P'cces, & fur une feule requête informe &c clandeftine, fournie furtive
ment par mes adverfaires, fans s’être conllitués.
Mais, pour établir l’ineptie du Sr. Lambert, il ne faut pas fe mettre
beaucoup en frais, elle eft notoire, & chacun fçait que ce fut fon titre
de recommandation auprès de l’Archevêque, principal miniftre, qui ne
demandoit qu’un automate docile à fes volontés, pour leur donner , par
^ fignature, un caraftere de forme.
C ’eft peut-être aufTi cette faculté paffive, fi commode à la rapidité des
°pérations d’un Adminiftrateur en chef, qui a déterminé M. Necker à
fouffrir la rentrée de cet incapable , dans un miftiftere pour lequel il a’a
( a ) V o y e z la Lettre du Sr. la M ichodiere, dans mon fécond placet à M.Neckei\
�( 24 )
aucune aptitude , dans lequel il eft l’effroi &c le fcandale de la fociété,
& qu’il ne tiendrait pas un moment, fi M. Necker fe retiroit ( a ).
Je pourrois citer une multitude de faits, honteux pour ce Miniftre,
qui cara&érifent les injuftices auxquelles l’entraîne fon ineptie ; mais
fans rappeller les plaintes générales des citoyens, & fortir du cercle des
miennes , dans lesquelles je me fuis renfermé, ce ne fera pas multiplier
les fcènes' épifodiques, ni facrifier l’objet principal aux acceffoires, que
de les étayer de celle d’un Magiftrat, dont la déclaration eft relative à
la publicité de la mienne. Voici fa lettre.
P a r is , 2/ m ai 17 8 9 .
M a d a m e la Ducheflfe d e ..........a bien voulu , M onficur, me prêter les deux exem
plaires des placets à M . N ecker , que vous lui avez remis. Je les ai lu avec l’attention
& l’intérêt qu’infpire un homme honnête & malheureux. Rien n’eft mieux fondé fur-tout
que les plaintes que vous portez contre M . L am b ert, & fa malheureufe facilité à fe
laitier prévenir , 8c à figner aveuglément tout ce que fes partifans lui préfentent. A u x
exemples que vous citez, & à ceux que vous vous propofez de citer encore dans le
nouveau mémoire que vous annoncez, vous pouviez en ajouter un, qui ne feroit pas
moins frappant que tous les autres. V o ici le fait :
U n nommé C a u v y , charpentier de Sette en Languedoc, fous les prétextes les plus
friv o le s, forme au Parlement de Toulouze
une demande manifeftement injufte &
révoltante , contre la Compagnie des intérefles aux Salins de S e tte , dont je fuis
m em bre,
ainfi que plufieurs autres perfonnes du plus
haut rang, 6c parvient à
furprendre un Arrêt favorable de cette Cour.
L a Compagnie fe pourvoit an Confeil en caflation de cet A rr ê t, qui blefloit toutes
les réglés de la Jurifprudeuce & d elà Juftice : & après la plus ample inftru&ion, elle
obtient un Arrêt du C o n feil, qui caiTe celui du Parlement de T o u lo u fe, & compenfe
les dépens.
Cet Arrêt contradiiloirement rendu, revêtu de toutes les formes légales , eft figr.ifié
à C a u v y , qui y acquiefce dans le f a it , en fe faifant rembourfer à T ouloufe, le montant
des droits qu’il avoit payé pour l’expédition de l’Arrêt de cette Cour.
L a Compagnie regardoit donc cette tracafferie comme abfolument terminée, & n y
penfoit plus.
Cependant C a u v y étayé par quelques perfonnes avec lefquelles il s’étoit engagé de
partager le produit des condamnations qu’il pourroit obtenir contre la Compagnie des
S alin s, s’avife , après quatre mois d’ina& ion, de préfenter une requête à M . Lambert >
( a ) Je ne veux pas
rapporter
l’anecdote de la fille naturelle du Chevalier
de
M éziére, dopt Clam ecy & les environs ont été les témoins.
nom^é
�( 25 )
nommé depuis peu Contrôleur-général ; & fur cette requête, ce Miniftre , fans avoir
égard à un Arrêt contradiftoirement rendu , revêtu de toutes les formes légales, acquiefeé
par les Parties, &
après tous les délais expirés, fait rendre un nouvel A rr ê t, qui
ordonne que la requête de C a u v y fera communiquée aux Conceilionnaires des Salins
de Sette , & les condamne provifoirem ent, folidairement e t p a r CORPS , à payer aud.
C au vy une fomme de 6000 !.
Il feroit difficile , je crois , M onfieur , de trouver un exemple plus révoltant de l’abus
de l’autorité & du pouvoir miniftériel. En effet, condam ner, fur une fimple requête
non communiquée, une Compagnie , compofée en grande partie des premieres familles
du R o yau m e, à p a y e r > 6* par corps, une fomme. de 6000 liv re s, elle qui dormoit
tranquille, à l’abri d’un A rrêt contradi&oire & de la chofe ju gée, c’eft violer tout-k-lafois, les loix de la Juftice , de la propriété, de la sûreté & de la liberté des citoyen s;
c’eft un a&e fi tyrannique & fi defpotiqu*, qu’un ¿ D e v d’Alger ou un S u l t a n
Conftantinople n’oferoit l’entreprendre.
de
Si vous v o u le z , Monfieur , enrichir la colle&ion de vos plaintes, contre M . Lambert,'
ce fait inique, je vous laiffe le maître. Je vous donne cd fait pour exaél & certain.
Les preuves en font dépofées chez M . Guillaume , A vocat au C o n fe il, chargé de défendre
ta Compagnie des Salin s, & nous ne doutons pas que ce ne foit à M . Lam beit à qui
nous devions le choix qui a été fait de M . G
r e g o ir e d e
R
um are
( a ) , pour R ap
porteur de cette inique & indécente inftance.
R ecevez, M onfieur, l’affurance de la parfaite confidération avec laquelle j’ai l’honneur, & c .
Signé, d ’ A c q u e r i a , Préfident, Tréforier-général de France.
S’il manque quelque chofe à la conviûion que porte avec lui cet écrit,
*1fera facile ;\ Maître Guillaume, l’un des honorables membres de l’augufte
AlTemblcé, d’y fuppléer, puifqu’il eft dépofitaire des preuves. Mais certes !
M. ne doit pas être étonnée, fi fes peuples, fuccombant fous l’opprefïîon
de femblables Miniitres, mis aux derniers abois par des abus révoltans
de fon autorité, recourent avec un empreffement tumultueux, & pour
3lnfi dire défordonne à fon cœur, pour en obtenir un fort & des Miniitres
Phis conformes à l’anxiété de leur fituation, & aux fentimens paternels
fon Roi.
Le Sr. Lambert n’eft pas l’homme qui convient à V. M. pour feconder
les vues bienfaifantes qu’elle a fur fon peuple. Il a trop peu de lumieres
^ de fentiment pour ce qui eft jufte. Si des génies fublimes éclairent votre
Trône, &r approchent de la perfeftion dans les moyens d’une falutaire
regéncration, il dérangera dans l’exécution, où il altérera, par/a mal( a) Pour celui-là, oui, car c’eft fon ame damnée.
D
�( 2 ,6 )
adreffe, & fa dépravation, l’économie & la fageffe de leurs deffeins.
Ce ne font pas les bayonettes qui font ou affurent les révolutions
utiles; c’eft le changement de régime qui ramene l’empire de la juftice,
de la probité & des mœurs, fans lequel il n’eft point de révolution
folide & heureufe.
Depuis fon rappel ( & c’eft ce qui eft à remarquer ) , le Sr. Lambert
ne s’ eft pas montré détaché du fyftême d’injuftice dont j’ai été la viftime,
& qui, pendant fon premier miniftere, l’avoit rendu l’objet de la pitié
& du mépris public. A peine lui ai-je remis fous les yeux fes tors , fes
engagemens &c fa lettre du 7 feptembre 17 8 8 , dont fon rappel lui conféroit
le pouvoir de remplir le vœ u; que loin d’y fatisfaire, en me reftituant
ma place, il intrigue lâchement auprès des Repréfentans de la commune,
dont il connoît l’incompétence, pour leur furprendre l’afte de violence
& de defpotifme , qu’il n’ofe fe permettre lui-même dans les circonftances.
Sous le point de vue de l’ineptie &: de l’injuftice, fi le Sr. Lambert
mérite d’être écarté du miniftere, il provoque fon expulfion , fur-tout
par fa mal-honnêteté & par fon penchant à opprimer.
Malgré les preftiges de l’amour propre, il n’eft permis à aucun homme
d’ignorer à peu près les bornes de fa fphere , & c’eft ;Wui, qui touche
à la fin de fa carriere , qu’il eft fur-tout moins pardonnable de fe méconnoître. Les différentes circonftances où s’eft trouvé le Sr. Lambert, les
affaires dans lefquelles il a échoué, l’appréciation de fes proches &C de
fes amis, fa propre expérience, tout enfin a du l’éclairer fur ce qu’il vaut,
& lui apprendre à fe juger lui-même.
O r, le Sr. Lambert, au printemps même de fa vie, n’a pas brillé dans
la Magiftrature, il y a toujours végété, fans fe faire remarquer par aucun
atte utile ou important. Né au-deffous du médiocre dans l’ordre des talens,
l’argent feul le fit monter au Palais, & lui ouvrit la cairiere des dignités.
Pour fe donner un peu de confiftance, il prit le m a f q u e d’un parti auftere,
dont les vertus font impofantes fans être folidaires ; l’opinion trompée par
cette repréfentation menfongere, s’égara un inilant, mais bientôt elle fe
vangea de fon erreur, quand les œuvres lui firent juger de l’ouvrier.
Si le Sr. Lambert, pour mieux connoître fes forces intelleûuelles, eût
confulté fa nombreufe famille, qui ne fait aucun cas de lui ; s’il eût coti'
fidéré comment, dans fon adminiftration domeftique, il a été peu habÜe
mené par les agens de fa confiance } il n’eût pas eu la témérité de
�( *7 )
briguer deux fois un miniftere, dans lequel ion ineptie & fon injuftice
ont donné la mort, à une multitude de peres de familles, &c expofent tous
les jours le fort de plufieurs millions de citoyens. Il manque donc aux
règles de la probité & de l’honnêteté, en ofant prendre fur fes foibles
épaules, la charge qui feroit plier un atlas; & s’il peut s’exeufer, cen’eil
qu’aux dépens de fon efprit ou de fon cœur.
Mais ce qui ajoute à ces preuves de mal-honnêteté, c’efl l’avidité du
Sr. Lambert, qui coûte plus à l’État & à la Nation, qu’un Adminiftrateur
intelligent &c capable. Logement, penfion, appointement, places, grâces;
il envahit tout pour lui, tes fien s(a) &c fes nombreux collatéranx, &
nous fommes au fein de la détrefle la plus cruelle. Ah ! les frelons
çefferont-ils enfin de dévorer le patrimoine des laborieufes abeilles , &
qu’il me foit permis d’être ici l’écho du Platon de la France, dans fon
difeours, fur la fanûion royale: les emplois font f i fcandaleufement remplis ,
les grâces font f i indignement proflituècs, que fi les effets de la révolution ne
deftéchent principalement la fource de cet abus, le citoyen honnête, utile,
mais timide, eft pour jamais découragé par les fuccès exclufifs du fot
intrigant &c ambitieux.
Ma premiere proportion remplie, il me refte à fupplier Votre Majeilé
de me rendre la juftice que je réclame depuis fi long-temps, & qu’il eit
de l’intérêt du Sr. Lambert de ne point traverfer.
Si les forces militaires défendent les Trônes contre l’invafion des
ennemis du dehors , ft l’habileté des Capitaines maîtrife le fort des armes,
c’eftla Juftice, Sire, qui les foutient contre les chocs tumultueux de la
difeorde au dedans, & de la fidélité des Magiftrats à en fuivre les prin
cipes , dépend la fplendeur des Empires ; fans elle, bientôt les Lois font
violées, les droits confondus, la sûreté eil anéantie, l’arbitraire perfide
les remplace, 8c l’cgoïfme deilrufteur étouffe la vertu dans fon germe,
—
_________________________ ________________________________________________________________________
___________________
( a ) E t quand il n’y a pas de places, il en créé. Tém oin celle pour le Sr. Guignace
de la Bretonniere, fon parent, réfugié dans le T em p le, qu’il avoil voulu faire enfermer,
& au lieu de la place à Bicêtre , qu’il lui deftinoit, il en fait une aux Ferm es, de
5000 livres, pour le récompenfer de fon inconduite , pendant qu’il dépouille un
J'omtne Honnête & utile
de la fienne. C e n’eft pas la feule qu’il ait créé aufli peu
a Propos, & on fçait tout le trigaudage pratiqué pour faire Guignace de L angé, fon
teau-frere} Direfteur des loteries à Lille,
�(
5
en rompant les liens qui unifient les diverfes parties de la fociété.
Telle eft, malheureufement, la fituation où nous ont amené vos Magiftrats, après deuxfiécles de tyrannie, en fubftituant au réglés immuables
de l’équité, les formes incertaines & capricieufes des fins de non-recevoir ;
formes non moins commodes à leur afioupifiement & à leur dépravation ,
qu’aux fophifmes & à la voracité des cohortes affamées, que l’appas du
butin appelle à guerroyer fous les fanglans drapeaux de la chicane.
J ’ai vu l’ honoraire de mes travaux, le gage de mes créanciers, les
débris de ma fortune , mon aliment quotidien enfin, prêts à être en
gloutis dans ces gouffres, par un Arrêt du Comité contentieux de votre
Confeil, fila précipitation à me facrifier, ne m’avoit elle-même , quoique
très-involontairement, ménagé une planche pour me fauver du nauffrage.
Averti’ par le danger encouru, inftruit de la ruine de mes concitoyens,
qui fe font brifés contre ces éceuils dévorans , j’ai recouru à la juftice
perfonnelle de Votre Majefté , qui m’offroit un afyle , & j’ai eu l’hon
neur de lui préfentér , le mois de juin dernier, un mémoire que j ’ai
répandu dans l’AiTemblée nationale.
Si Votre Majefté daigne s’en faire rendre compte par quelques-uns des
honorables Membres, elle fera convaincue, i°. que me retenir le paye
ment des douze années de travail que j’ai confacrées à fes bureaux, &
dont je n’ai reçu que le tiers des appointemens , c’eft me voler les deux
autres tiers , &c les voler à mes créanciers ; 20. que la reftitution de
mon emploi, ou la continuation provifoire de mes appointemens, ne
peuvent m’être refufée, en totalité ou en partie , pour fubfifter fans
l’injuitice la plus évidente & la plus cruelle.
En effet, S ire, j’ai démontré la légitimité de ma prétention à être
payé des deux tiers de mes appointemens retenus par l’intrigue des Srs.
Mefnard & d’Arlincourt. Mes mémoires ont obtenu le fuffrage unanime
de votre C our, de votre Capitale, de vos Provinces , & jufqu’à celui
du pays étranger, 011 ils font parvenus. Quatre de vos Miniitres, dont
deux font encore en place , après avoir reconnu mes droits , lés ont
protégé, & la bureaucratie de votre Confeil, malgré fa partialité &C
formes obliques l’exprimer, n’a pas ofé m’en débouter.
Je fuis donc créancier de PÉtat pour ces deux tiers d’appointemens
non foldcs, & en cette qualité, j ’invoque pour moi & mes créanciers,
l’honneur ôc la loyauté fran çoife, fous la fauve garde defquels les
2
8
�( *9 )
fenfibles Repréfcntans d’une Nation toute dévouée à l’honneur , ont mis
Tes créanciers.
Serai-je le feul excepté de cette utile garantie, qui fait la gloire de
nia patrie, & honore les dignes interprétés de fes généreux fentimens ?
Eh, pourquoi !
Eft-ce que j ’aurois à craindre le fuccès de quelques fins de non-recevoir ?
Mais ce génie créateur, Député de la Provence , n’a-t-il pas rendu
l’opinion générale , lorfqu’il a exprimé la fienne particulière ? J ’ai méprijé
toute ma vie , » a-t-il dit, » les fins de non-recevoir, 6- je ne m'apprivoiserai
pas avec ces formes de Palais.
D ’abord, cette objedionne fieroit pas à la Majefté royale & nationale,
&c j’en ai prévenu la tracaiferie , en donnant la preuve par mes mémoires,
qu’il n’en exiftoit pas. Enfuite, croit-on que j’aurois été aflez peu attentif
pour leur laifler prendre naiffance, 6c permettre que des Adminiftrateurs
de loterie m’euffent enveloppé dans des filets, dont ils ne connoiffent
pas feulement la tiiTure ?
RepouiTé, par la vénalité &c une indigence honorable, du fanduaire de
la Juftice, qui avoit été mon berceau, & où j’avois fait mes premieres
armes, comment aurois-je négligé de me garantir du labyrinthe de fes
formes , en ufant du peu de lumieres que j ’avois acquis avant de tomber
dans lapouiliere des comptoirs de la loterie (a).
Avec des Adminiftrateurs tirés eu hafard de boutiques, d’ateliers ou
d’antichambres, fans éducation ni culture, fans connoiffances théoriques
ou pratiques du droit ou des formes, encroûtés de l’ignorance la plus
crafle en finance même, aurois-je méconnu ma fupériorité fur ces for
bans , ôc négligé de prendre mes avantages ? non ! une inadvertance aufli
létargique ne peut fe préfumer , lorfqu’il m’étoit il facile & ii intéreflant
d’y veiller ! J ’ai eu ce foin : mes mémoires en donnent les preuves , je
les répéterai pas.
( a ) Compte-t-on pour rien l’humiliation d’avoir appartenu à la loterie ; mêlé parmi
Ce
'1 y a de plus méprifable dans la fociété, &
^Ue
guérifon,
mémoire.
de C lugny
m’auroit propofé
croit-on que j’y ferois en tré, ni
d’y entrer, fi ce n’avoit été l’efpoir de là
l’aflurance d’une place diitinguée dans la finance. V o y e z mon premier
�( 3° )
Qui m’écartera donc du port, ouvert par l’humanité des archite&es
politiques de la conftitution, aux créanciers de l’État ? fera-ce la nature
de ma créance ? l’impuiflance d’y fatisfaire ? ou quelque reproche encourru
par le créancier, occafionera-t-il le rejet de la créance ?
La nature de ma créance eft telle, que fur les débris des privilèges,
elle doit fe foutenir avec privilege. C ’eft le prix de mon temps, de mes
peines & de mes fervices , & ce n’eft point dégrader l’employé des bureaux
du R o i, d’en alîimiler l’appointement au falaire de l’ouvrier. Or , lefalaire
de l’ouvrier eft privilégié ; il ne fouffre ni retard pour le payement, ni
diminution vexatoire dans le payement.
L ’impuifTance d’y fatisfaire ne fera pas alléguée par ceux qui connoiflent
les reffources abondantes de l’Etat, & pour lefquels le mot banqueroute eft
infâme. Sans avoir comparé la recette à la dépenfe ( qui devroient être
publiques), on eft afluré de les mettre au niveau, & de foulager le
peuple avec les richeffes immenfes que le clergé facrifie, que les nobles
& les riches offrent à l’en vi, & par l’économie exercée fur la prodigalité
des penfions & l’énormité des traitemens.
Quand l’impuiflance feroit auiïi réelle qu’elle eft imaginaire, où feroit
l’inconvénient d’obliger les Srs. Mefnard & d’Arlincourt ( a ) , àmeiatis-
( a ) Ces deux fots , fans talens ni m érite, ont fait la plus brillante fortune. M e(nard ,
temont.
commis à l’intendance de Rouflillon , fous M . B ertin , avoit 800 1. d’appoin-
11 m angeoit,
à 8 f. par repas, avec Fribourg. Il fuivit M . Bertin à P a ris, qui
le fit fon Secrétaire, pendant que cet Intendant étoit Lieutenant de Police. D e -là M .
B ertin , nommé Contrôleur-général, le nomma premier commis. C ’eft à ce pérou où
il a puifé la fortune qui l’a conduit à la C o u r, à l’intendance de la p ofte, à celle de
la loterie, à la place d’Adminiftrateur , &
avec laquelle il s’eft procuré équipages,
nombreux domeftiques, arm oiries, bonne table, voyages., plaifirs, T e rre s , châteaux,
Seigneuries, tout enfin , excepté l’eftime publique. On l’a vu jouer un rolle dans l’aftàire
du Comte du Loup des G r è s , par un plat é crit, 011 ce poliflon prenoit infolemmei1*’
le titre de Chevalier, fans s’expliquer fi c’ctoit Chevalier françois ou chevalier grinpant.
D A rlin cou rt, fils d'un employé de la ferme à D o u len s, a fucceflivement prit trois
noms , pendant fon orageufe jeuneflfe, après laquelle, pour d’agréables raifons fans doute,
le pauvre T lm fy , Ferm ier-général, lui donna fa n iè c e , fa place & fa fortune. Son
avarice &
fa dureté auroient conduit à la G rève fon g ndre Baudouin de Quem adeue,
fi on punifloit les gens riches. D ’A rlincourt, quoique b ête, ignorant & ne fçaehantql,e
figner fon n o m , n’en a pas moins pendant douze ans mené la loterie & les M iniflres
�Ç 3' )
faire de leurs propres deniers ? n’y suroit-il pas au contraire de la juftice
à les y contraindre? ce font eux qui ont commis la prévarication. Mais
au moins pourroit-on prendre mon payement fur les 630000 1. dont le
Sr. d’Arlincourt a profité par une erreur dans fes comptes, & elle ne
feroit pas la feule recouvrer , fi ces comptes, qui n’éprouvoient d’autre
cenfure que celle du Sr. Mefnard, fon complice, étoient livrés à la revifion
de ceux qui les connoiiïent & s’y connoiiTent.
D ’ailleurs, le retranchement de la penfion de 25000 livres, accordées
contre toute bienféance au Sr. d’Arlincourt, celle du Sr. Sémonin 6c une
multitude d’autres, prodiguees fans modération ni pudeur aux employés
de cette partie , laiflent des fonds pour me iatisfaire ; & il en manqueroit,
qu’il faudroit plutôt les prendre encore lur les 140000 1. diftribuées
annuellement à titre de bienfaiiance , à des étrangers , qui en font indignes,
ou par la fuppofition de leur indigence fimulée, ou par la dépravation
qui les y fait participer. Les dettes paffent avant les aftes de bienfaifance,
& il n’y a pas de mérite à être généreux du patrimoine des créanciers.
Ce n’eft donc pas l’impuiflance de fatisfaire à ma créance qui s’oppofera
à mon payement ? l’Etat en paie &c en paiera de bien moins facrce !
Sera-ce donc quelque reproche mérité par le créancier, qui occaiionera
le rejet de la créance ?
D ’abord, ii le titre par lui-même n’eft infe&é d’aucun reproche, il a
toute fa force, & peu importe que le porteur auquel il en eft dû le mon
tant qu’il exige, foit répréhenfible ou irréprochable. Il ne s’agit pas de fon
m oral, c’eft de fa créance dont il faut s’occuper.
Mais admettons des reproches contre m oi, porteur du titre : ces repro
ches feront-ils valides contre mes créanciers, pour les fruftrer du prix d’une
créance hypothéquée aux fommes qu’il m’ont prêtées pour me faire vivre,
lorfque j’attendois mon payement ? Ce fyftême , qui ne feroit qu’abfurde
Sf révoltant dans les
»»»-Tribunaux de la fifcalité , que fera-t-il devant
Votre Majefté & l’augitfte Aiïemblée à laquelle j’en foumets l’examen?
a fon gré ) pjj-cg que M efnard, de moitié avec lu i, faifoit paffer tout ce que d’Arliricourt
Pr°p o fo it, fans égard à aucunes obfervations de fes collègues. Eh ! c’eft pour enrichir
Pareils imbécilles qu’on foule les peuples; que l’on vexe les honnêtes gens ! en v é rité ,
cek finira peut-être d’une façon ou d’autre. 11 faut l’efpérer,
�32- )
Ces reproches ne pourroient tomber fur moi que comme commis ou
comme citoyen.
Comme commis, j’ai rapporté clans mon mémoire,à confulter tous les
titres d’éloges que j’ai reçu & mérité conftamment depuis mon entrée
dans les bureaux du R o i, jufqu a la furprife qui m’en a exclu. Il eft curieux
de voir comment le Sr. de la Michodiei'e, en voulant imprudemment y
toucher, s’eft perdu lui-même d’honneur & de réputation. Le fait & la
preuve en exiftent dans mon deuxieme placet à M, Neclcer. C ’eft fon
propre écrit qui le flétrit, fans sucun effort de ma part, pour lui arracher
le manteau d’homme de bien, fous lequel ce Magiftrat gangrené cachoit
la honte des malverfations multipliées pendant fa longue adminiftration.
Mais encore , fi on me trouvoit difpofé à pafler en quelque forte con
damnation fur ce qu’on oferoit dire contre m oi, comme commis, qu’on
ne fe flatte pas de la même indifférence fur les attaques faites au citoyen
en ma perfonne. Les qualités qui le diftinguent, furent le feul patrimoine
que me laifla mon pere, après cinquante ans de fervices dans la robe &
l’épée. Il avoit fait valoir avec foin ce domaine, & il produifit beaucoup,
pour fa confidération perfonnelle & fa tranquillité intérieure. Ambitieux
comme lui de cette efpece de fortune, qui fait rarement des jaloux ou des
rivaux , je- n’ai point négligé le fond qui la procure ; &c fans avoir ni les
moyens de mon inftituteur, ni le mérite des facrifices de mon modèle,
j’ai peut-être été plus heureux dans mes fuccès, puifque jufqu’à mes adverfaires , tous ceux qui me connoiiTent, ont rendu témoignage à mes efforts.
Ecoutez, s'il vous plait , le Sr. Campan dans fa lettre du ¡y feptembre
ty8 S , à M. le Préfident de Rofambo , après lui avoir- rendu tous les
renfeignemens avantageux qu’il tenoit du Comité général de fes confreres ;
il termine ainfi : E nfin, Monfieur, le Sr. Mori^ot efi Avocat, & dans fes
momens de loifiir il confacre généreufement fes lumieres dans cette partie , a la
veuve & l'orphelin qui les réclament.
Si d’après l’aveu de mes ennemis j’ai été un commis utile, un citoyen
gcncreux, il s’enfuit qu’aucun reproche mérité par Ie créancier de l’Etat >
n’occaiionera le rejet de fa créance; au contraire, plus le citoyen s’eft
emprefle de payer fa dette à la patrie, plus la reconnoiffance de la veu ve
& de l’orphelin follicitent la patrie d’être exatte à payer les appointemens
du commis.
(
Eh ! comment la patrie balanceroit-ellc ? elle qui fe montre li pei1 ar'
dente
�( 33 )
dente dans fa détrefle à reprendre fes tréfors aux vampires de la finance ,
qui fe les font appropriés. Eft-ce que ces gains illicites, qui ont trans
porté la fortune publique à ces Adminiftrateurs gorgés d’or & d’argent,
fous des Miniftres infurveillans ou complices , font des propriétés que les
Lois protègent ? Le droit de la Nation fur les richeifes détournées de fon
fifc , eft imprefcriptible. Elle peut toujours les arracher des mains infidelles
qui les ont fouftraites , parce que la poifeiïïon d’objets volés ne peut jamais
devenir un titre de propriété.
O r , fi la patrie eit indulgente pour fes déprédateurs , fera-t-elle injufte
& inhumaine vis-à-vis des citoyens qui l’ont fcrvie fidellement ?
Je l’ai fervie douze années fans être payé.
Elle me voleroit, elle voleroit mes créanciers, fi elle me retenoit les
appointemens que je n’ai pas perçus , par la prévarication des Srs. Mefnard
8c d’Arlincourr, dont l’opulence fcandaleufe , fous les yeux de ceux qui
manquent de pain, eft une infulte à la raifon & à la mifere publique.
Mais fi Votre Majefté n’ordonne point enfin ce payement, fi fur le
rapport de l’augufte Ailemblée elle ne ie décide point ; fi abfolument elle
veut la décifion d’un Tribunal fur ma répétition ; je la fuppüe de comniettre la Jurifdi£Hon des Juge-Confuls de fa Capitale.
D ’après l’offre contenue dans la lettre de M. Necker, du 6 février, &
qu’il m’a confirmée à fon Audience du 1 3 o&obre dernier ; c’eft à moi de
choifir & défigner le Tribunal qui doit me juger. La récufation, d’ailleurs,
que j ’ai propofée à Votre Majefté, contre les bureaux dtt Confeil, la
peinture que je lui ai faite de la dépravation de fes autres Tribunaux ( a ) ,
ne permettent pas d’en nommer aucun d’eux, ni d’y avoir confiance, &
malgré le peu de vergogne des Magiftrats, ils fe refuferoienr fans doute
à connoître de cette conteftation, & à devenir mes Juges. J ’avoue môme
que jamais je ne comparoîtrois devant eux, & qu’alors, avec les apparences
de vouloir rendre juftice, ce ieroit réellement la refufer que de m’y
adreffer, quand on eft certain que je n’y comparoîtrai pas.
( a) L ’on fe rappelle l’infame prévarication des Srs. Bachois & Brun ville, dont j’ai
donne les détails dans mon deuxieme placet à M . N ecker; ces deux Magiftrats font
er>core en place, malgré les gémiiïçmens univerfels d elafo cicté. Q u ’a t t e n d - o n pour les
chafier & les punir?
E
�( 3 4
J ’ajouterai que la reftitution de mon emploi, ou la continuation pro
)
visoire de mes apointemens, ne peut m’être déniée, puifqu’il y va de
mon exiftence, 6c qu’il eft de l’intérêt du Sr. Lambert d’y concourir
au lieu de s’y opofer.
Cette fécondé queftion eft étrangère à la première, elles n’ont rien
de commun entr’elles. Ce n’eft point un incident détaché de la demande
en payement de mes appointemens retenus , c’eft une réclamation à part,
foumife
des obfervations & à des principes nouveaux ; le Miuiftre
des finances en eft l’arbitre né. Il ne me feroit rien adjugé fur la première,
que je n’en ferois pas moins fondé à prétendre au fuccès de la fécondé,
& le gain de celle-ci ne liquideroit pas les droits de l’autre.
Dans les détails de mon expofé, V. M. a vu , i° . tout cfe qui eft relatif
à la furprife qui m’a ravi mon emploi; i ° . mes démarches Scies mouvemens que je me fuis donnés pour éclxirer les manœuvres de cette
furprife; 30. la lettre & le billet du Sr. Lambert qui motivent fes
regrets, 2c les affurances de fon témoignage auprès de fon fuccefleur, pour
parvenir à réparer laperte qu'il ria puprévoir que j'éprouverois.
La foibleffe du Sr. Lambert, fon héfitation à avouer fon erreur & à
donner fon témoignage à M. N ecker, fa nonchalance à preffer mon
rétabliffement, n’auront pas échappé à Votre Majefté; & ce qu’elle
aura pu remarquer avec étonnement, c’eft l’inaftion du Sr. Lambert,
depuis fa rentrée dans le miniftere, fon refus formel, quoique tacite de
me réintégrer, & fes intrigues pour me perdre.
Néanmoins , la reftitution de mon emploi eft indifpenfable ; la
Juftice la demande, l’humanité la follicite , l’intérêt même du Sr.
Lambert l’exige.
Par fa lettre du 7 Septembre 178 8 , le Sr. Lambert a avoué qu’il avoit
été induit en erreur. S’il eut été encore . Contrôleur-général, il en eut
réparé le dommage, &. je ne puis en douter, d’après l’expreifion de fes
regrets, & fa promefte d’appuyer ma réclamation , que quatre autres
Miniftres appuyoient déjà.
Il eft à préfumer que M. Necker y auroit acquiefcé, fans le Sr. de
l’Effard, fans l’intrigue des bureaux & la pufillanimité du Sr. Lambert.
Cependant, la reftitution qui a parujufte, dans fon principe, au Sr.
Lambert n’a pas perdu de fa confidération par le laps du tem ps, au
�(30
contraire , le rappel de ce Mi'ûftre s’étant opéré avant la déciiion que
j ’attendois, il devoit en effectuer auflitôt la reftitution.
Mon déplacement étant l’ouvrage d une fiirprife avouée & reconnue ,
mon rétabliiïcmcnt devenoit un ade ind ipt niable &c néceflV.ire.
Quelque libre que l'oit la nomination aux emplois exercée par les
Minières , elle eil néanmoins ftibordonnée aux réglés de l’équité , de
la raifon & à l’inrérêt de la chofe.
Un lu jet pourvu d’une commiffion ne peut en être dépouillé fans for
faiture ou incapacité. Admettre des principes ou un ufage contraire,
c’eft bleffer l’équité, introduire un brigandage dans l’adminiftration, &C
lin arbitraire décourageant pour le fervice.
J ’avois rempli mon emploi avec diftin&ion. La férié des témoignages
rapportés dans mon mémoire à confulter , prouve que je n’avois à
craindre aucun reproche de forfaiture , encore moins d’incapacité ,
puifqu’il étoit queftion de me confier une place plus importante.
Douze années d’exercice répondoient de mon expérience , & m’afFermiffoient dans ma poffeiïion ; ainiï, loin d’appréhender de voir la fille
de Laroche, porter en dot au Sr. Billecoq mon emploi, j ’avois tout lieu
d’elpérer un avancement mérité par mes fervices.
Or , il faut convenir que ce feroit fe jouer barbarement d’un citoyen,
f i , quand il a rempli avec exactitude le porte qui lui étoit confié , il
pouvoit perdre ce porte fans avoir démérité. Ce fyftême abfuçde révoltéroit la Juftice, & répugneroit à l’humanité , qui follicite au moins
la continuation provifoire de mes appointemens devenus néceflaires
Pour ma lübfiftance.
Il faut que je v iv e , & tant que le ciel prolongera mes jours, j ’ai
droit, en travaillant , à être logé , nourri , vêtu.
11 femble au contraire que le Sr. Lambert foit d’accord avec mes
adverfaires pour me faire périr : pendant que d’un côté je pourfuis en
Juftice le payement de mes appointemens, dont la chicane éternil’e la
c°nteftation ; de l’autre, le Sr. Lambert retient la reftitution de mon
emploi , pour m’ôter les moyens de me défendre & de vivre.
En effet , depuis i y mois , fans autre reffource que la générofité de
cluelques citoyens à me prêter des fonds , j ’ai épuifé ces fécours ; j’ai
augmenté leurs titres de créance fur moi. Placé entre le befoin Si le
�( 3« )
crime , je végété dans le défefpoir, n’ayant à choiiir qu’entre le v o l , la
mendicité ou le fuicide. Sans fortune , fans patrimoine, à mon âge , ÔC
avec une fanté délabree par le travail ÔC les chagrins , puis-je embraffer un nouvel état ( a ) , ou tenter de nouvelles entreprifes ? eil-ce
après avoir pris le travail d’un homme dans fajeuneffe, qu’il fera permis
de le rejeter de l’arène où il ne fe montre pas encore fans vigueur?
Au moins , fi revenant fur mes pas, je pouvois reprendre mon temps,
mes peines, mes fervices, ma fanté, je fiiirois loin d’une contrée (b) ,
où la bafleile , la crapule , les offices honteux, décident feuls du bonheur
de fes Habitans, où la probité abandonnée ne trouve ni acceuil ni
foutien. Ce n’eft: pas que par-tout où il y a des hommes, 8c des Mi
nières fur-tout, il n’y ait des pallions à combattre , des injuftires à
dévorer ; mais où eft l’Empire fur la terre, où avec fon travail &c de
l’honnêteté, un citoyen ne puiffe être aflùré de fon état ôc de fon
pain ?
» On vous a donné , me dit le Sr. Lambert , une penfion de 900 I.
Certes ! 900 1. de penfion fur une place de 6000 livres, font-elles
un traitement affez avantageux pour ofer en parler ? il ne fuffiroit
pas aux befoins de mon domeftique, ôc ce n’eft pas avec cette parci
monie qu’il a réglé le fort de ceux qui avoient moins mérité que moi.
D ’abord , ce n’eft point une penfion qui m’étoit dûe, ni que je
répcte, c’eft la reftitution de mon emploi, dont le Sr. Lambert a trouvé
la réclamation fi jufte, qu’il y a promis fon appui ; enfuite, pour que
cette obje&ion put valoir , il faudroit qu’au moins en la fixant, il eût
obfervé les] règles en ufage dans les bureaux. Or , l’ufage , lorfqu’on
prive un employé de fa place, eft de lui accorder, en retraite, moitié
de fes appointemens. Le Sr. Lambert l’a pratiqué pour plufieurs de ceux:
qu’il a fiipprimés, ÔC il l’a outre-pafle pour beaucoup d’autres, auxquels
il a accordé en retraite la totalité, outre qu’il en a aflùré moitié aux
femmes , après le décès de leurs maris , tandis que pour moi il 2
dédaigne la règle Sc même les obfervations particulières que des Adminif”
trateurs lui ont fait à mon égard.
(a )
Si, je pouvois devenir N otaire, A rc h itele ou Banquier, j’aurois encore afle*
tôt fait fortune ?
^
(b) on fe détache facilement d’une paia»- ingrate & injufte.
�C 37)
Je m’explique : lorfque les Adminiftrateurs arrêtèrent la lifte des
employés qu’ils vouloient profcrire, ils fixèrent la quotité de leurs peniions;
je fus porté fur cette lifte avec un éloge fingulier, & pour 1800 1. en
retraite ; cependant le Sr. d’Arlincourt , de concert avec le Sr.
Laroche, réduifirent les 1800 1. à moitié, pour ajouter au traitement de
leurs créatures ; & le Sr. Lambert qui fignoit tout aveuglément, figna
encore cette fupercherie.
Ce n’étoit donc pas à 900 1. que le Sr. Lambert, d’après les Admi
niftrateurs, avoit entendu me réduire ! Ce Miniftre le fentit dès l’abord,
& même le Sr. de l’Eflard, qui m’offrit, du premier m ot, 2000 1. Je
refufai fa propofition, outre qu’elle étoit infuffifante. Je n’avois point
droit à une penlïon, mais à la reftitution de ma place, ou à la conti
nuation provifoire de mes appointemens , jufqu’à ce que la place difilnguée,
promife par le Sr. Lambert & fes deux prédécefTeurs, en indemnité de
mes fervices , m’eût été accordée.
» Touchez ces 900 livres , pourfuit le Sr. Lambert, » & vous vivrez?
E h ! où a-t-il pris, le Sr. Lambert, que je vivra i, & que je ferai,
fubfifter mon ménage avec 900 livres , dans un temps où les calamités
publiques ont doublé !e prix des comeftibles ? S’agit-il feulement d’acheterl
du pain? ne faut-il pas être logé, vêtu, pourvoir en fanté & en maladie
aux befoins communs à tous les hommes, & même à ceux relatifs; car,
enfin, l’éducation , l’état, l’âge, l’habitude, forment une fécondé nature
dont on n’étouffe pas entièrement les droits.
Au furplus, je ne pouvois percevoir ces 900 livres, & pourfuivre
en même temps la reftitution de ma place, fans donner lieu h une fin
de non-recevoir contre ma réclamation, & on connoît le fuccès des fins
de non-recevoir. Cette obje&ion fpécieufe n’eft qu’un détour pour pallier
l’iniquité qui fait différer la reftitution de ma place ou la continuation
provifoire de mes appointemens.
Le Sr. Lambert a cru que je donnerois dans ce piège, & que par
provifion je prendrois cette penfion, afin d’avoir à me dire: » vous
» avez accepté votre penfion en retraite , vous ne pouvez plus réclamer
» votre place. »11 s’eft trompé. Je ne l’ai point accepté. Je ne l’accepterai
jamais que je n’obtienne juftice entiere , ou je préféré que la Nation
en fafle fon profit, fx fes repréfentaus font capables de fe fouiller d’un
déni de juftice.
�C 38 )
Le Sr. Lambert s*eil imaginé de même que s’il pouvoir éluder & traîner
en longueur, pour la reftitution de ma place, il réuiîïroit , pendant
ces délais affeftés, à faire juger, par fa bureaucratie du Conieil, ma
demande en payement de mes appointemens retenus. A lors, comme
fes Arrêts {'ont à commandement ; déclaré non-recevable fur ce point,
le Sr. Lambert m’oppofoit auflitôt ce Jugement, pour fe refufer à
la reftitution de ma place, pour régler la quotité de ma penfion en
retraite , &c prétendre fuffifans les 900 1. accordées ; mais il s’eft encore
trompé.
Je ne confentirai point à ce que la demande provifoire paffe la
derniere , & avant toutes choies , la premiere à décider, c’eft la refti
tution de ma place ou la continuation de mes appointemens , parce
qu’avant tout, il faut que je puiffe vivre , pour me défendre & procéder
fur la qiteftion en litige au Confeil , pour laquelle il m'eft promis un
un autre Tribunal.
Je ne fouffrirai pas qu’on intervertiiTe cet ordre facré , & on ne
l’intervertira pas, fans forfait de part & d’autre. Que le Sr. Lambert le
perfuade bien que je l’ai vu s’avancer avec ce tour de force , mais
que je lui en oppoferai un autre, s’il perfifte à abufer de fa place pour
m’opprimer !
O r, fi la Juftice demande la reftitution de ma place , fi l’humanité
follicite,au moins provifoirement, la continuation de mes appointemens,
l’intérêt même du Sr. Lambert l’exige.
Depuis fi long-temps que les dépofitaires de votre autorité , S ire,
abuient de votre confiance, en a-t-on vu un feul puni ? Quel eft le
Miniftre opprefteur, le Magiftrat fcandaleux(aj, le Financier déprédateur,
dont en France on ait fait 1111 exemple ? cependant, que de coupables
parmi eux ! ce n’eft même que parmi eux qu’il y en a. Il fuffit d être en
en place , pour fe tout permettre, & il femble que les fupplices foient
exclufivemcnt le lot de la claiîe utile , indigente, obfcure , qui connoitroit
h peine le crime, fi elle n’ y étoit p rovoquée par les malverfutions de
celle qui l’ opprime en la gouvernant.
( a ) V o y e z fi Beaudouin de Quemacleue, gendre de d’A rlin co u rt, n’a pas été fouftrait à la Juftice. U n homme du peuple, coupable comme lu i, eût été pendu. E h !
voilà comme les Lois font infulTifantes contre les coquins riches & puiffanst
�( 39 )
L ’impunité de ces prévaricateurs a tout perdu dans votre Empire, elle
y a corrompu les mœurs, & attiré les fléaux qui nous défolent. Les corps
politiques comme les individus, ne peuvent eviter la peine qu’ils ont méritée;
les uns 6c les autres fubiflent des révolutions qui expient leurs forfaits,
& pendant que les nations difTolues fe déchirent par des fa&ions, les
Gouvernemens perdent l’autorité qu’ils ont fait fervir à la difïolution des
Nations.
Quel feroit donc le privilege du Sr. Lambert, s’il pouvoit, avec fécurité,
être injufle &C opprefleur, me dépouiller de mon état, m’arracher înon
pain ( a -) , attenter à ma vie, tk. me préparer une fin lente &c tragique,
dans les convulfions de la rage & du délefpoir, irrité par la faim ? Seroit-il
plus coupable, s’il me faifoit aiTaiîiner, ou s’il m’ailaiïïnoit lui-même? ah!
je le lui pardonnerois plus volontiers, & dans la fituation horrible où il
m’a réduit, je lui fçaurois quelque gré d’abréger mon fupplice.
Cependant les Lois divines & humaines, m’autorifent à défendre ma vie
contre le fcélérat qui l’attaque. I l e s t l i c i t e d e r e p o u s s e r l a f o r c e
pAR l a f o r c e , félon même la Commune, de Paris, & de donner la mort
à celui qui la prépare. Le Sr. Lambert me provoque &c s’expofe. La pa
tence , comme l’oppreiïion, a fes bornes ; la nécefïïté feule n’en reconnoît
pas. T o u t s u c c o m b e , a dit (b ) l’auteur de la m o tion, pour exclure les
banqueroutiers & ayant caufe des affemblecs publiques; TOUT DOIT SUC
COMBER d e v a n t l ’ h o m m e q u i a f a i m . Il faut v iv re , & celui qui
111 en ôte la faculté, eft véritablement mon aiTaffin; qu’importe, la forme
*>u l’effet cil le même.
C ’eft un rafïnemant de fcélérateile de réduire un citoyen
une telle
Extrémité, qu’il foit néceilîté de périr miférablement, ou de fe livrer à
des excès excufables néanmoins , dans l’ordre naturel, fi l’ordre public
les réprouve; celui-là feul eft coupable du crime qui y provoque, Sc
Ce feroit un objet digne d’occuper l’attention de l’augufte Affemblée, fi
( a) Je ne confeille à perfonne de nV’ôter mon état & mon pain, fans m’arracher en même
temPs *a v ie j ca ria fienne ne feroit pas en sûreté,
fi
je n’obtenois Juftice.
^ ( k ) Il feroit à defirer que ce publicifte en fît u ne, pour propofer de rendre un peu
n°bIe(Te & de dignité au pafte con ju gal, ravalé au-deflous des baux à chetel du
orvand , elle auroit même dû précéder celle fi précieufe pour l’enrégiftrement des
i unes gens de vingt-un ans.
�C 40 )
prenant en confédération le trifte fort des fubordonnés, elle établifloit une
Loi pénale contre cette efpece de guet-à-pens, ou la paflion réfléchie,
affaiïïne avec art.
Sans ce frein tutélaire, la Juftice anéantie, l’humanité méprifée, ne
laifTeront à l’homme, pour fe défendre, que le poignard. Vainement on
multipliera les échafauds & les boureaux, reffources familières aux defpotes
qui menacent l’indocilité , rebelle à leurs forfaits : l’ordre ne s’établit pas
par la violence ; les voies de la Juftice y conduifent plus efficacement ; quand
on eft afïuré de l’obtenir, on n’eft pas tenté de fe la faire; au contraire,
les Lois fanguinaires aigriffent fans contenir, 8c malgré les fpéculations,
les paradoxes 8c les fophifmes des charlatans en politique, l’échafaud eft
fans horreur pour l’homme, que des affaiTins heureux y conduifent.
Socrate, Phocion 8c leurs imitateurs, ont fuccombé fans foibleffe, parce
que n’en ayant point à fe reprocher, ils ont envifagé dans la mort, un
terme à l’opprefïion, ôc un afyle contre l’oppreffeur.
Toute légiflation eft vicieufe, qui ne prévient pas les délits, & emploie
les boureaux ; elle eft parfaite, ii elle enchaîne les citoyens par l’intérêt
particulier à l’intérêt général, 8c s’ils font entraînés au bien, par l’attrait
à le faire, feul garant qu’il fera fait. L ’efprit ni le génie même, ne fuffîfent à trouver le fecret d’une bonne légiflation; les orateurs font rare
ment d’habiles légiilatenrs. Au lieu de fes Lois fublimes, admirées depuis
tant de fiécles, S o l o n eût laifle des Arrêts de Réglemcns, s’il n’eût été
qu’un difeoureur du Palais.
Mieux confeillée, V o t r e M a j e s t é , confacrera les principes de fon
cœur, elle fera regner la Juftice, 8c fes efforts, pour en régénérer, étendre
8c protéger l’Empire, afîureront la félicité publique, objet de fa tendre
follicitude.
M O R I Z O T , Avocat.
N o t a . Certain grand Seigneur a trouvé mes mémo'res fo rts.. . . Je n’ai pas de pein®
a le croire; car l’attentat dont je me plains, eft fort. Mes preuves font fortes. L a vérité
eft forte. M on caraftefe.. . . ma logiqu e.. . . tout eft fort. Bon Dieu ! que certains grand*
Seigneurs font foibles; quand, pour une C ro ix , un C ordon, un G ra d e , un m ot, üs *"e
coupent la gorge ; pour m o i, qui n’ai pas l’honneur d’être un grand Seigneur, je ne me
la couperai, que quand on me ravira mon honneur, mon état 8c mon pain. Il faut bief»
cefler de v iv re , quand on vous coupe les vivres.
Mais Ci M . Lam bert, qui n eft pas un grand Seigneurs, quoique fes fils fe foient cotntifieS >
trouvoit, lu i, mes mémoires forts, je lui propofe de s’en plaindre en Juftice réglée, &
O*1
�(40
on nous donne des Juges intègres, je confens que celui de nous deux qui fera reconnu
coupable, foit pendu ; car c’eft un combat a mort entre lui & m oi, que je veux foutenir,
& ma propofition ni mon confentement, ne font pas temeraires, fi M . Lambert garde
le filence. Cependant, c’eft convenir de to u t, & donner les mains a fon deshonneur ; &
s’il n’a pas.le courage de defeendre dans l’arène judiciaire , où je l’attends, & dans laquelle,
o mes concitoyens, je vous fupplie de vous réunir à m o i, pour me fournir vos plaintes
& vos griefs particuliers, afin que ce fycophante, ipalgré la puifiance dont il eft envi
ronné , ne triomphe point de mes efforts folitaires ! notre intérêt eft commun , & en
défendant les m iens, je ne néglige pas les vôtres.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
I—
mmmmmmmmr n mmm
N °. I.
Ce r
-N o U S
M
t if ic a t
ic h e l
de
du
B
G
o u vernem ent
eelen
d e
B
ru x elles
.
, E c u y e r , & c . Amman de la V ille , banlieue &
ammanie de B ru xelles, & c . & c .
Certifions que le Sr. M otizot, fe difant A vocat de P aris, a féjourné dans cette V ille
depuis le zij juillet jufqu’au commencement d’août dernier; qu’ayant eu à fon arrivée
des.notions qui nous ont rendu cet A vocat fu fp eft, nous lui avons fait intimer l’ordre
de quitter, dans les vingt-quatre heures, les Terres d e là domination de Sa M a jefté,
l’Empereur & R o i ; mais le lendemain de l’intimation de cet ordre ayant reconnu que
les notions qu’on nous avoit données fur fon com pte, étoient dépourvues de preuves
fuffifantes, nous avons révoqué led. ordre , & lui avons permis en conféquence de
refter en cette V ille , pour achever les affaires qui l’y amenoient; que pendant le court
féjour que led. Sr. Morizot y a fa it, il ne nous eft parvenu aucune plainte qui le concer"
lâ t , & nous déclarons ne pouvoir donner , de la conduite qu’il a tenu i c i , qu’un
témoignage avantageux. En foi de qu oi, nous avons fait figner les préfentes par POfïïcier
du département de P o lic e , & y avons fait appofer le fceau ordinaire de nos armes.
Fait à Bruxelles , le aa feptembre 17 8 9 . Par Ordonnance. Signé , d e P r e z .
N °.
Lettre
l
E
d e
M.
m pereur
le
,
Com
te d e
I I.
Trau
ttm a n sd o rff
, M
in is t r e
d e
à M. Morizot, en lui envoyant le certificat ci-deiTus.
Bruxelles, i f oElobre 1789.
^ a i reçu la lettre que vous avez pris la peine de m’écrire , M oniteur, le 12 du mois
F
�(4 0
dernier, & m’étant fait rendre compte par la Police de ce qui pourrait être déclaré à
votre fu jet, ce département n’a pas trouvé de difficulté a vous expédier la déclaration
ci-jointe. Je ne doute point quelle ne remplille votre o b jet, & je fuis très-parfaitement,
M onfieur , & c . Signé , T r a u t t m a n s d o r î F .
N °.
L
ettre
d e
I I I.
M. le Chevalier de
la Gravierre, Réfident de France à Bruxelles.
M.
le
Co m
te
d e
M
o n t m o r in
, à
A Verfailles , j août 178g.
L e Sr. M orizot, Monfieur , qui eft aftuellement à Bruxelles , me demande une lettre
de recommendation auprès de vous. Je ne puis la lui e n v o y e r, puifqu’il ne m’indique
pas fa demeure. S’il fç préfente à vous , je vous prie de le recevoir favorablement. C ’eft
un h o m m e très-mallieureux , qui eft digne de votre intérêt. Je fuis très-fincérement,
M on fieu r, entièrement à vous. Signé, l e C o m t e d e M o n t m o r i n .
O
b s e r v a t io n
. Je me fuis engagé de tout prouver par écrit : o r , on vient de v o ir ,
i ° . que des gens mal-intentionnés m’avoient inquiété à mon arrivée à Bruxelles ; 20.
l’ordre qui setoit enfuivi d’en déguerpir; 30. la rétra&ation de l’ordre; 40. le témoignage
rendu à ma conduite dans cette Ville.
L a lettre de M . le Com te de Montmorin ajoute à mes preu ves, en établiflant, i° . que
j’ai été inquiété, & que j’ai recouru à fon témoignage ; 20. qu’il la donné, connoifTant
bien la fource de mes malheurs, & combien je les méritois peu.
M aintenant, pour ne laiffer abfolument rien fans preuves écrites, je vais établir, par
le certificat de M . P e r d r y , la faufieté du rapport fait au Comité de Police de l’H ôtelde—
V ille de P aris, fur la foi duquel lis Srs. Bottiers de M ontaleau, Lagreflce & Bonvalet,
ne fe feraient pas permis de fouferire une lettre atroce à un c ito y e n , qui vaut mieux
qu’e u x , s’ils euflent fuivi la première réglé du bon fens, qui étoit de me parler & de
s’afiurer de la vérité par mon aveu ou ma dénégation ; mais il eft des gens qui croient
fe réhaufler, en affeéhnt de l’im portance, & de dédaigner les réglés les plus fimples.
N °.
Ce r
t if ic a t
d e
M
a ît r e
P
I V.
erd ry ,
Avocat aux Confeils du Roi.
J e fou ilign e, certifie, qu il n a pas dependu de Maître Morizot de préfenter fa requête
& d’être ju g é , puifquil n a p u , jufqua préfent, fe procurer fes pièces, qui font encore
entre les mains de M . P aftoret, R apporteur, lequel n’a pu lui-même fe les procurer
�( 43 )
que depuis quelques jours ; je certifie encore que quand bien même Maître Morizot
auroit eu fes pièces, & qu’il auroit préfenté fa requête, il n’auroit pu être jugé défini
tivem ent, y ayant un incident provifoire en communication de titres à juger préalable
ment , pour qu’il puiffe enfuite fe défendre au fond. A u furplus, Maître M orizot ayant
récufé le Confeil entre les mains du R o i , & M . Necker lui ayant offert de défigner
le Tribunal qu’il vo u d roit, par fa lettre du 6 février dernier, il n’y a encore point de
Tribunal no m m é, auquel Maître Morizot puiffe adreffer fa requête, ce q u i, avec les
délais réciproques entre les Parties , ,ne/ permet pas
à Maître M orizot d’efpérer un
Jugement définitif de long-temps. En foi de quoi je lui ai délivré le préfent certificat,
pour lui fervir & valoir ce que de raifon. A P a ris, ce 29 feptembre 1789 .
Signé, P e r d r y .
C
o n c l u s io n
. Maître Perdry eft un impofteur infigne, fi Dufour eft honnête homme.
\
M O R I Z O T , Avocat.
�
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Factums Vernet
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Morizot. 1790?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Perdry
Morizot
Subject
The topic of the resource
prévarication
ferme générale
intrigues de Cour
pension royale
La Fayette (Marquis de)
Calonne (Charles-Alexandre de)
favoritisme
loterie
Necker (Jacques)
troubles publics
créances
offices
Description
An account of the resource
Nouveau mémoire au Roi et à l'Assemblée Nationale, en dénonciation contre le sieur Lambert, contrôleur-général des Finances.
Pièces justificatives.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1790
1785-1789?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0111
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Bruxelles (Belgique)
Rights
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Domaine public
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Calonne (Charles-Alexandre de)
Créances
favoritisme
ferme générale
intrigues de Cour
La Fayette (Marquis de)
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Necker (Jacques)
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troubles publics
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PDF Text
Text
MÉMOIRE
EN RÉPONSE,
POUR
Louis D E F A U R E DE C H A Z O U R S ,
ancien capitaine d’infanterie, Habitant au lieu
'de la Com be, commune de Saint-Quentin
demandeur en exécution de jugement;
! *i >
*
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M
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a ir e
'
C O N T R E
■*r
u
•
:
de la ville de Gannat,
défendeurs.
a b it a n s
L e sieur de Chazours se vît enlever, en 1790, une
récolte de vingt septerées, à main armée, par une foule
d’individus se disant envoyés par une autorité adminis
trative. A la suite de cette voie de fait il fut obligé, par
A
�(a-)
la force des circonstances, d’abandonner environ qua
rante septerées, de terre : mais lorsque des temps plus
heureux lui ont permis d’élever la v o ix , il a réclamé
contre une violence que les tribunaux ne pouvoient que
blâmer et proscrire.
Après une révolution , le temps présent n’est point
comptable des erreurs du passé, et il est rare que celui
à qui elles furent étrangères veuille se charger de leur
justification. Aussi pendant toute la durée du litige sur
la nullité de l’abandon forcé dont on vient de parler,
M . le maire de Gannat avoit défendu les intérêts de sa
commune avec le ton de: décence et de modération qui
convenoit à la dignité de sa place et à la nature du procès.
Pourquoi faut-il; que changeant tout à coup le genre
de sa défense, M. le maire de Gannat ne veuille plus
répondre qu’avec emportement à un demandeur qui avoit
soumis ses prétentions à la justice ? quel a pu être son
motif, de ne donner de la publicité à sa défense que pour
la noyer dans un amas d’injures calomnieuses et incon
venantes ?
Et certes le moment étoit bien choisi, pour s’irriter
ainsi brusquement et comme par réminiscence. On conçoit
que dans le commencement de ce procès, et lorsque M. de
Chazours se plaignoit d’un acte de violence, sans autre
preuve que son allégation , il eût pu y avoir quelque
chose d’excusable, que le maire de 1811 mît une certaine
véhémence à venger ses prédécesseurs d’une inculpation
dont il pouvoit douter.
Mais c’est après un jugement non attaqué, pronon
çant la nullité de l’acte illégal qui fait toute la matière
�( 3 )
du procès; c’est en produisant lui-m ôm e des pièces
officielles qui constatent la voie de fait articulée par
M. de Chazours ; c’est enfin lorsqu’il ne s’agit plus, de
la part de M. le maire de Gannat, que de produire des
titres, comme il l’avoit promis ; c’est alors, disons-nous,
que M. le maire de G-annat, ne pouvant tenir sa promesse,
perd toute mesure et s’en prend à tout le monde, accuse
le sieur de Chazours pour avoir réussi, accuse le juge
ment pour avoir annuité ce qui étoit nul, et s’accuse
lui -môme d’indolence et d’insouciance pour l’avoir laissé
rendre.
De quel profit pour la cause peut donc être cette colère
posthume, lorsque l’acte qui en étoit le seul objet est
déjà déclaré nul, et que, par une conséquence forcée,
il faut remettre les parties au même' état qii’elles étoient
en 1791 ?
M. de GHàzours a été d’abord plus sensible qu’il n’étoit
nécessaire à ce ton d’irascibilité et d’aigreur qui règne
dans tout le mémoire de M. le maire de Gannat. Les
épithètes d>usurpateur habituel et de spoliateur ne pouvoient paroîtré que fort dures pour un homriae élevé à
l’école de l’honneur, et qui croit avoir fourni une longue
carrière de délicatesse ; il s’est demandé à quels signes
un homme peut être déclaré usurpateur habituel, lorsqu’ayant h la main le titre de propriété de ses ancêtres,
il n’a pas dépassé d’une ligne lesÎ)ornJes qui y sont écrites,
et lorsqu’il rie se défend que poiir conserver ce qu’ils
lui ont transmis. Alors il’ ne lui a plus semblé que l’opi
nion publique dût être fort touchée d’une récrimination
injurieuse, qtii n’est que trop habituelle à ceux qui se
A 2
�C4 )
voient vaincus, quoique peut-être il n’y eût pas lieu de
s’attendre qu’un magistrat se livreroit à ce genre de
défense.
Quoi qu’il en soit, voyons ce qui résultera des faits
de cette cause, et si déjà il n’est pas éclairci que la com
mune deGannat est seule convaincue d’usurpation.
F A I T S .
La ville de Gannat est propriétaire d’un grand com
munal appelé de Chantoirat, borné au nord-ouest par
lin ruisseau appelé de Sigilon.
Ce ru isseau, coulant dans une gorge, sépare ce com
munal d’un ténement appelé des TSruyères, et de toutes
les autres propriétés du sieur de Chazours.
Il est difficile qu’une limite soit mieux marquée par
la nature. Cependant les habitans de Gannat voyant au
revers de leurs communaux un terrain souvent inculte,
y laissoient aller leurs bestiaux, ce q u i, en terre v a in e ,
étoit sans conséquence; mais le propriétaire de Chazours
n’en faisoit pas moins des défrichemens partiels et suc
cessifs sur tout son ténement : il en percevoit sans obs
tacle les récoltes, et alors les bestiaux voisins étoient
soigneusement chassés.
Comme quelquefois cette expulsion avoit pu être
faite par les colons h force ouverte, l’esprit de résistance
portoit les expulsés à aller se plaindre à la mairie ,dç
Gannat, en alléguant que leurs auteurs ayant joui du
pacage sans trouble, le local étoit présumé faire partie
des communaux. La m airie, pour ne pas paroître né-
�( 5 )
gliger les intérêts de sa' v ille , avoit cru par deux fois
devoir verbaliser, et menacer de procès. Mais le sieur
de Chazours n’en étoit que plus attentif à défricher pour
faire des actes publics cie propriétaire, et cependant la
mairie de Gannat n’a jamais osé l’attaquer pour empêcher
ces défrichemens.
Ses successeurs appellent cela de l’insouciance et de
l’oubli, lorsqu’au contraire des procès verbaux de dires
et menaces constatent que tout étoit mis en œuvre pour
épouvanter le propriétaire , mais que sa bonne conte
nance tint en respect la commune qui n’avoit de droits
d’aucune espèce. En sorte que toute cette verbalisation
ne reste là que comme un monument, pour attester que
le sieur de Chazours est resté en possession malgré la
contradiction ; ce qui de toutes les preuves de propriété
est certainement la plus publique et la plus incontestable.
Comment, en effet, une commune voisine auroit-elle
cru possible, sans titre, de franchir les limites naturelles
de ses communaux, pour s’arroger une propriété nonseulement d’un nom étranger, mais encore faisant suite
et corps avec toutes les propriétés de Chazours, sans le
moindre signe de séparation, sans bornes, sans fossés,
sans titres? En sorte que- par un arbitraire dont l’idée ne
peut pas se soutenir, la commune de Gannat, une fois
entrée dans ce territoire, sans savoir elle-même jusqu’où
elle vouloit aller, auroit été aussi fondée à le réclamer
tout entier qu’à en vouloir une petite portion.
Et véritablement si la commune de Gannat avoit con
servé un droit quelconque sur un espace inconnu, le
sieur de Chazours eût été absolument à la merci de
�. m
l’étendue qu’elle auroit jugé à propos de se donner,
comme il ne l’a que trop été dans les circonstances dif
ficiles où il a été forcé de subir la loi du plus fort.
Mais avant de parler de cette époque, il faut dire un
mot des actes que M . le maire de Gannat n’ose pas appeler
des titres, mais qui prouvent, suivant lui, que le ténement des Bruyères a été pour ses prédécesseurs un sujet
d?inquiétude et de discussion.
Le premier acte d’inquiétude date de l’année 1680 ;
mais comme cet acte est tout en faveur du sieur de
Chazours, M . le maire ne juge pas à propos de s’en
prévaloir.
L e conseil du roi avoit ordonné une confection de
rôles pour les terrains que les privilégiés possédoient
hors de leurs privilèges ; et un sieur Desessart fut en
voyé en Bourbonnais pour vérifier les possessions qui
pouvoient être sujettes à cet impôt. L ’occasion étoit belle
pour eeux des habitans de Gannat q u i , à cause de la
proximité du ténement des Bruyères, auroient voulu le
faire ajouter aux communaux, et en arrêter les défrichemens ; en conséquence, ils indiquèrent le sieur de
Chazours, comme ayant usurpé cent sesterces de terre
sur les habitans de Gannat, sans autre explication.
Sur cette dénonciation occulte, le sieur de Chazours
fut taxé à 1,000 fr., le 28 janvier 1680; mais aussitôt il
se pourvut, en déclarant qu’il se soumettoit au* payement
du quadruple, et à l’abandonnement des héritages taxés,
si on pou voit prouver qu’ils fussent usurpés.
Comme personne n’osa entreprendre de faire cette
�' ( 7 )preuve, il intervint une ordonnance de l’intendant, du
18 mars 1680, qui déchargea le sieur de Cliazours de
cette taxe 5 sauf audit Desessart à justifier de Vusurpation
-par lui prétendue.
Ce sieur Desessart ne la justifia pas ; ses souffleurs ne
lui donnèrent ni titres , ni renseignemens. En consé
quence , le sieur de Chazours continua de défricher, et
resta paisible propriétaire de ces cent sepierées comme
de sa chose propre.
Quatre-vingt-cinq ans de tranquillité suivirent cette
première tentative de trouble* L e sieur de Chazours
avoit même consolidé sa propriété dans cet intervalle,
en achetant de la maison de Fontanges le droit de jus
tice sur tout ce qui lüi appartenait déjà et Chazours.
On voit par une prise de possession publique , faite
en présence de deux habitans de Gannat, qu’il fit l’en
ceinte de toutes ses possessions de la même manière que
son acte de vente les déterminoit ; et précisément on y
remarque, du côté de Gannat, le confin immuable du
ruisseau de Sigilon.
En-1765,.les-métayers!de Chazours chassèrent les ber
gers de Gannat, qui s e - plaignirent à leur mairie d’avoir
été maltraités.
On conçoit aisément que ces plaintes aigrirent les.
parties, et que les maîtres des troupeaux ne manquèrent
pas de murmurer que la ville négligeoit de vérifier si
elle étoit propriétaire.
Il falloit bien ne pas se montrer insouciant ; et la
mairie se mit ù l’abri de tout reproche, en envoyant sur
�(
8 )
les lieux l’arpenteur de la mairie, avec un notaire, deux
procureurs du roi et un médecin.
Cet arpenteur, allant chercher des confins, sans titres
et sans bornes, avoit à faire une assez bizarre opération.
Mais on ne se douteroit jamais comment la ville de Gannat imagina de suppléer aux titres qu’elle n’avoit pas.
E lle arrêta, par un délibératoire, que Vétendue du ter
rain appelé des Bruyères seroit constatée sur le rapport
des labou reurs , vignerons et journaliers DE G a n n â T !!
Enfin voici le notaire, l’arpenteur et les commissaires,
arrivés sur le local où ils sont conduits par ces indicateurs
désintéressés, qui disent qu'entre le ruisseau de Sigilon
et une autre partie de terrain mise en valeur par M. de
Chazours, il y a trente-une septerée'b, moins cinq septerées’
défrichées à l’aspect de nuit, tant antérieurement que
postérieurement à une année, sans avoir pu distinguer
les anciennes d'avec les nouvelles entreprises.
Ensuite les commissaires font leurs plaintes sur un
inaltraitem ent exercé de la part du sieur de Chazours,
sur les bergers de Gannat, en différentes reprises, après *
avoir chassé les bestiaux, notamment mercredi dernier.
A cela M. Chazours répond qu’il n’a maltraité personne,
qu’il n’a pas même chassé des bestiaux : « qu'au surplus
« il est surpris des mouvemens que se donnent les
« liabitans de Gannat pour la propriété et l’usage dudit
« terrain, puisqu’ils n’ont aucun droit certain sur icelui,
« parce que ce terrain, dans toute son étendue, lui ap-
« par tient. »
Alors il produit l’acte de 1680 , pour prouver que
les habitans de Gannat n’ont jamais tenté de justifier
qu’il
�.
. ( 9 )
qu’il eut rien usurpé ; enfin il dit que c’est par tolé
rance de sa part, si les bestiaux de différens' particuliers
ont pacagé , mais qu’on ne peut en induire une ‘pos
session qu’il sera toùjours en* droit dé contrarier.1 1 * '3
A cela les commissaires l’épondent « que saris s’arrêter
« maintenant à la question-de savoir à qui des'habitans
« ‘de Gannat ou'dé M . Defaure appartient lé ’terrain
« des Bruyères, question qui ne doit être agitée que
« dans Vinstance qui suivra sans doute /’opération d’au« jourd’h u i, et pour laquelle instance lesdits sieurs comCf missaires font toutes protestations contraires à celles
« dudit sieur de ' Chazours , ils se bornent à dire que
« outre la possession immémoriale et notamment d'an et
« jo u r, dans laquelle sont les habitans de Gannat d’en-'
« vôyer pacager leurs bestiaux sur le terrain contentieux j
« seules circonstances pour autoriser leurs démarches ,
« ils ont encore l’avantage de réunir en leur faveur dif« férens aveux dudit sieur de Chazours, qui sont acceptés.
« A u moyen de tout quoi ’ ils persisteront dans cette
« possession, et dans Vusage non interrompu où ils sont
« de faire pacager leurs bestiaux dans lesdits commu« naux, par une suite de cette possession. * J
*
cc Et en faisant les réserves nécessaires et capables de
« les maintenir dans généralement tous leurs droits, tant
« sur le terrain renfermé dans les confins ci-dessus iri« diqués, que sur celui qui leur sert de confin à l’aspect
« d’occident, et autres qui seront reconnus faire partie de'
« leurs communaux, ils dht signé sans aücîune approba« tion préjudiciable; observant au surplus Jque la fixation’
« de la commune, relativement auxdrts^confîrisViiiation
B
�( 10 )
faite sur le rapport des anciens habitans déjà nommés,
est demeurée sans réplique, ce qui est accepté,* re
quérant lesditg' sieurs commissaires M . de Chazours
de leur, indiquer laa partie,.dudit terrain défrichée antérieurement à une année, d’avec celle défrichée pos
térieuremenj: ^à une année. »
M . de^Chazours leur répond que tout ce qui est la
bouré a été défriché de temps immémorial.
Les commissaires ne veulent pas y croire, et font en
core des protestations, en disant que la ville assemblée!
saura relever et détruire les prétentions du sieur de
Clïazours. Puis ils signent encore pour la dernière fois,
en ajoutant que les droits des habitans se trouvent con
servés par.leurs réserves et protestations, qu’ils réitèrent
encore pour la plus grande satisfaction de leurs commettans.
Enfin, voilà ce procès verbal fini, et il en étoit bien
temps. Ou a cru devoir le faire connoître dans tous ses
détails , parce que M . le maire de Gannat le produit
comme une pièce importante pour sa commune; et certes
il l’est bien davantage pour le sieur de Chazours.
Où est en effet cette instance qui devoit suivre Vopé
ration d'aujourd'hui ?
Qu’a fait la ville assemblée, pour éteindre les préten
tions du sieur de Chazours?
Si la ville de Gannat s’est assemblée , c’est pour se
«
«
if
«
k
te
tair.ç ;
C’est pour reconnoître qu’on lui avoit fait faire une
fausse démarche; .
!
C’est pour laisser M . de Chazours défricher tout à son
�( « ) '
aise, sans oser lui intenter ce procès si solennellement et
si indiscrètement annoncé.
Si on doutoit de cette suite de défrichemens, on en
trouveroit la preuve dans un autre procès verbal, du 23
juin 1768, que M . le maire de Gannat a eu la bonté
de conserver, pour attester ce fait.
Ce défrichement de 1768 étoit considérable, et c’étoit
bien encore le cas que la ville s’assemblât pour éteindre
ce qui étoit un peu plus que des prétentions *, mais on
voit seulement que, dans une tournée générale ordonnée
par la commune pour constater les usurpations des voi
sins, et parmi trente-sept anticipations constatées (car
la ville de Gannat ne se mettoit pas en recherches pour
peu de chose ), les indicateurs firent écrire au procès
verbal que M. de Chazours avoit anticipé cent quatrevingts pas de plus cette année, dans le ténement des
Bruyères.
Cet acte demeura inconnu à M . de Chazours, qui
continua de faire des actes de propriété jusques à la
révolution.
En 1789 , plusieurs individus allèrent à la mairie de
mander qu’on verbalisât encore pour des usurpations at
tribuées non-seulement à M. de Chazours, au delà du
ruisseau de Sigilon , mais encore à M . de Fontanges,
dont les propriétés joignent les véritables communaux
de Gannat, en deçà du ruisseau de Sigilon.
En conséquence, on dit par un procès verbal du 17
août 1789, que des commissaires se sont transportés sur
les lieux , « avec les indicateurs pris dans la classe
« des paysans cultivateurs ; et suivant leur déclaration,
B a
�«
«
«
«
«
«
«
»
«
( 12 )
il paroît qu’en entrant par le cliemin de Gannat allant
à Chazours, au delà du r i f de Sigïlon ,;M . de Chazours
a annexé A u n e t e r r e q u i l u i a p p a r t i e n t , 'APp e l é e d e s B r u y è r e s , la quantité de quarante septerées de terre, ou environ, anciennement défrichées,
prises dans cette partie du communal ; et autant que
peuvent se rappeler les indicateurs, ils ont fait remarquer 4qu’il y a environ trois septerées nouvellement
défrichées, et le tout en guérêt, etc. »
En ce temps-là y . l’assemblée constituante rendit un
décret, le 18 décembre 1789 , portant défenses aux mu
nicipalités et communautés d’habitans, sous prétexte
dÜusurpations, droit de propriété, ou tout autre pré
texte, d’agir par voies de fait, etc.
Cependant les soi-disant indicateurs ne se bornoient
pas, comme autrefois, à faire verbaliser à Chazours : les
temps étoient changés; et des menaces très-vives épouvantoient les colons pour la sûreté de leurs récoltes. Le
sieur de Chazours fit enceindre les ensemencemens de
l’année suivante de larges fossés, et ne douta pas que la
municipalité e lle-m êm e, conformément au décret cidessus, ne les prît sous sa protection.
Il se trompoit. M. le procureur de la commune donna
le 20 juin 1790 un réquisitoire ainsi conçu :
« i°. A ce que, pour les terres dont M. Defaure est
« en possession avant le 4 août 1789, il soit dit et or« donné que l’on se pourvoira par les voies de droit
« devant les juges qui en doivent connoître; que les six
* quartelées nouvellement ensemencées et défrichées par
�( ?3 )
«
le sieur Defaure,
s o i e n t , r é c o l t é e s e t ENGRANGÉES
« PAR DES GENS QUE VOUS COMMETTREZ A CET EFFET-',
«
«
«
«
«
et qu’il sera fait défenses au sieur Defaure dé n’y rien
recueillir. Requiert aussi q u ’i l s o i t e n v o y é d e s g e n s
pour combler les fossés faits tant dans le communal
que dans le chemin qui conduit à Begues et aux
Viviers. »
»
Y eut-il une délibération prise sur ce réquisitoire? on
l’ignore. Le- sieur de Chazours ne fut informé de ces
mesures que par l’apparition inopinée d’un officier mu
nicipal suivi d’une foule d’hommes venant en tumulte
dans ses propriétés, pour couper et enlever la récolte
ensemencée dans vingt septerées ou environ du ténement
des Bruyères. Le sieur de Chazours, informé de cette
irruption par le bruit considérable qui l’accompagnoit,
s’enferma dans sa maison, avec toute la terreur et l’in
quiétude qu’on peut aisément supposer. Il défendit même
aux gens de sa maison d’aller en apprendre la cause, de
peur d’irriter la multitude.
Toute la récolte du maître et du colon fut enlevée,
chargée, conduite et engrangée à Gannat. L ’attroupement
n’étant irrité par aucun obstacle, se borna à des cris et
des menaces, et se retira, escortant cette récolte comme
une conquête.
Voilà ce qui s’est passé en 1790, dans cette année
que M. le maire de Gannat, dans sa satisfaction, appelle
« Vépoque du véritable esprit public, dirigé par Vamour
« du bien général, et par une opinion réfléchie ? dégagée
« de toute prévention. »
�.
(*4 )
Quoi qu’il en soit, et quelle que fût la direction de
cet esprit public, il falloit louvoyer, et se garantir, s’il
se pou v o it, de toutes incursions nouvelles. JLe sieur de
Chazours exposa sa situation à la municipalité assemblée,
qui blâmant, il faut le croire, ce mouvement révolu
tionnaire, mais forcée peut-être par la difficulté des
temps de ne pas rendre une sévère justice, proposa un
arbitrage au sieur de Chazours , pour régler les limites
des communaux.
Un arbitrage en cette matière, étoit une chose fort
bizarre ; mais il n’y avoit pas à hésiter. Le sieur de
Chazours se trouva trop heureux d’accepter ce qui avoit
un simulacre de justice, et ce qui donnoit du temps;
en conséquence , par délibération du 20 mars 1791 ,
M M . Legay père, et Becquemi, experts, furent choisis
pour prendre connoissance des titres, s’aider du témoi
gnage des anciens hahitans et gens connoissant l’état
des lieux, et faire leur rapport devant trois hommes de
lois, chargés de prononcer définitivement sur la contes
tation.
Cet accord fut homologué par le département, et les
experts se réunirent. M. de Chazours, ne se rappelle
pas s’il donna à déjeûner aux officiers municipaux qui
les accompagnèrent : l’état de gêne où le tenoit cette
affaire, et les menaces violentes des parties intéressées,
ne lui ont pas permis de garder une telle niaiserie dans
sa mémoire.
Il sait seulement qu’il alla sur les lieux, et que fidèle
au compromis, il donna des titres aux experts, mais que
la municipalité ne leur en donna pas.
�( i5 )
Elle n’en a jamais eu.
Mais elle leur envoya ces anciens habitans, ces éter
nels indicateurs, obstinés à appeler communal tout ce
qui avoit été parcouru par leur vaine pâture hors les
temps des défrichemens.
On voit tout de suite comment les choses dûrent se
passer, quelle aigreur s’en mêla , quelles menaces en
furent l’accompagnement.
Aussi ne fut-il plus question de permettre aux experts
de faire leur rapport à des hommes de lois, pour avoir
une décision définitive.
Les experts eux-mêmes, intimidés, et pressés d’émettre
une opinion, conseillèrent au sieur de Chazours d’adopter
les limites qu’on voudroit prescrire. Mandés à la mairie
avec le sieur de Chazours, il s y rendirent avec la cohorte
des indicateurs, et là fut rédigée, le 30 avril 179 1, une
prétendue transaction , par laquelle rejetant dès la pre
mière ligne la distinction adoptée jusqu’alors entre les
communaux de Chantoirat et le ténement des Bruyères,
tout est confondu sous le nom des communaux de Chan
toirat. On y dit que les titi'es et documens respectivement
produits, n’ont pas procuré des éclaircissemens sufïisans
sur les vraies limites : en conséquence de quoi on fixe
les lieux où seront plantées deux bornes aux angles, et
des bornes intermédiaires. Il est dit que Laplanche ,
expert, placera ces bornes en présence du sieur de
Chazours, qui a promis de s'y rendre.
Cette transaction n’a pas été homologuée, comme on
pourroit le croire, d’après cette pièce retrouvée, que
�( 16 )
M. le maire annonce dans son mémoire ( page i 5 ).
On avoit bien fait homologuer le compromis, qui pré
cisément n’a pas été exécuté ; mais on n’a pas osé pré
senter à l’homologation la pièce qu’on juge à propos d’ap
peler une transaction.
Elle a cependant été exécutée, et on peut dire même
largement exécutée ; car on a pris ce qu’on a voulu ;
et si l’abrégé de plan, qui est dans les pièces de la mairie,
est fidèle, évidemment la commune a pris beaucoup plus
que d’abord elle ne .vouloit prendre.
Mais aucune borne n’a été plantée. Le sieur de Cha
zours , une fois sorti de la municipalité, n’a eu garde d’en
requérir la plantation ; et les habitans eux-mêmes, plus
pressés de s’emparer que d’exécuter leur acte, ont’ oublié
que cette plantation en étoit'partie intégrante et nécessaire;
. On sait que de jour en ijour les tëmps devinrent plus
orageux ; il falloit de la patience .pour de plus grandes
choses, et M . de Chazours rongea son frein. En 179 3,
il fut incarcéré à Moulins, comme suspect; ses biens
furent mis en séquestre, et un maréchal de Gannat en
ut le fermier national.
>
Les communaux furent partagés ; ils devoient l’être par
tête , et on fut forcé d’en donner un lot au sieur de
Chazours. M. le maire de Gannat paroît extrêmement
satisfait que M. de Chazours ait eu ce lot, et il en tire
les plus grandes conséquences. Mais un maire sait bien
que ce n’est pas l’habitant qui se fait son lot. L e sieur
de Chazours n’en a pas dem andé, il 11’a pas même assisté
aux délibérations; il en étoit empêché. On l’a compris,
comme
�( *7 )
comme tout le m onde, dans un partage municipal *, il
n’eut pas été prudent de refuser un lot, et le sieur de
Chazours a laissé jouir le sien par un vieux domestique,
comme s’il avoit prévu que la mairie, se prévalant de
son propre fait , lui feroit un jour une aussi singulière
objection.
En l’an 13 , les habitans de Gannat ont fait un nou
veau partage, et M . le maire n’a pas manqué de re
chercher si ce lot ne se trouvoit pas placé dans le terrain
contentieux. On voit, à la page 14 de son mémoire, qu’il
s’efforce de le faire entendre ainsi, en disant qu’il est
dans ce même ténernent des Bruyères, mais dans une
partie séparée par le ruisseau Sigilon.
Ce n’est là qu’une équivoque, mais elle n’y est pas
placée sans cause. Pourquoi dire que ce lot est dans le
ténement des B ruyères, lorsqu’il est dans le vrai com
munal de Gannat, dans le local appelé Chantoirat, qui
n’a jamais eu d’autre nom ? Pourquoi dire que M . de
Chazours a -participé au second partage , et ratijié par
là ce qu’il attaque, lorsqu’au contraire M. de Chazours
a formé opposition à ce partage, par exploit de l’huis
sier Labalme ? Il n’a pas plus voulu jouir de ce lot que
du premier; et certes il ne pou voit pas empêcher qu’on ne
lui donnât encore un lot malgré lui : il avoit fait tout
ce qu’il pouvoit faire, en protestant par écrit, et en assi
gnant en désistement.
C’est en effet en l’an 13, et précisément avant ce partage , que le sieur de Chazours a commencé sa récla
mation. Jusqu’alors, se reposant sur l’inexécution de cet
acte de 1791, quant aux bornes, et sur les lois qui prosG
�( i8 )
cri vent les actes de violence, il avoit attendu avec pa
tience l’instant favorable de rentrer dans ses droits. Les
anarchies et les factions qui s’étoient succédées depuis
1793 jusqu’au consulat, ne lui avoient présenté aucune
occurrence favorable. Enfin, voyant l’ordre affermi, et
les lois en vigueur, il présenta une pétition à la préfec
ture, pour parvenir à l’annullation de l’acte de 1791.
Un conseiller de préfecture répondit, par un arrêté du
12 frimaire an 13 , qu’il autorisoit le sieur de Chazours
à plaider devant les tribunaux, néanmoins en ajoutant
son avis dans des motifs contraires au sieur de Chazours,
et en disant qu’il y avoit un acte solennel et authentique,
et qu’il faut faire respecter les conventions écrites.
Quoi qu’il en soit de cet avis, M. de Chazours a fait
assigner les habitans de Gannat en la personne de M. le
maire, par exploit du 21 prairial an 13 , pour voir
annuller l’acte du 30 avril 1791, et se désister du terrain
placé entre le ruisseau de Sigilon et les autres propriétés
du sieur de Chazours.
Cette demande n’étoit pas de nature à éprouver de
sérieuses contradictions : aussi, par jugement du 4 août
1809, la nullité de la transaction a été prononcée.
11 est vrai que cette nullité n’a pas été fondée sur la
violence, parce que les habitans de Gannat n’avoient
encore jugé à propos de produire le réquisitoire de 1790,
et qu’ils soutenoient n’avoir usé d’aucunes voies de fait.
L e défaut d’autorisation pour transiger étoit un motif
suffisant, et le tribunal s’est borné à celui-là, en élaguant
toutes les fins de non-recevoir opposées par la commune.
Cette nullité devoit naturellement amener le désiste-
�( i9 )
ment; mais en désespoir de cause, M .le maire de Gannat
a trouvé le moyen de le retarder encore : n’ayant plaidé
que sur la nullité, il a dit qu’il avoit des titres, et il
a demandé un délai pour les produire. Le tribunal s’est
laissé toucher par l’idée que ces titres à produire seroient
peut - être d’une grande importance ; en conséquence ,
après avoir prononcé la nullité, il a dit : « Attendu que
« la commune de Gannat n’a pas suffisamment déduit
« ses moyens pour établir son droit à l’objet litigieux ;
« que son importance nécessite d’accorder un délai à
« la commune pour déveloper ses prétentions et faire
« la recherche de ses titres, si aucuns y a;
« Le tribunal déclare nulle la transaction du 30 avril
« 1791 ; et pour être fait droit sur la demande en dé« sisteinent, remet la cause d’un mois, etc. »
A u lieu d’un mois, la commune en a d’abord pris
huit, et s’est laissé condamner par défaut, le 12 avril
1810 : son opposition lui a donné un délai de dix autres
mois. Et c’est ainsi que se jouant de la justice et de sa
promesse de rapporter des titres qu’elle n’a pas, la com
mune de Gannat, contre toutes les règles , s’est main
tenue en possession.
Maintenant que M. le maire de Gannat est forcé d’a
vouer qu’il n’a aucune espèce de titres, il n’en est pas
plus déconcerté; et pour se tirer d’embarras il dénature
le genre de la cause, et feint de se regarder comme un
simple défendeur qui attend paisiblement les preuves de
propriété que la loi exige de tout demandeur.
Il dit au sieur de Chazours *.
i°* C’est vous qui êtes demandeur en désistement ;
C 2
�( 2° )
c’est à vous à justifier votre demande par des titres,
et vous seul devez en produire; 2°. vous m’avez mal
assigné, puisque ce sont des individus qui jouissent,
et non le corps commun; 30. vous êtes non recevable,
pour avoir participé deux fois au partage des commu
naux ; 40. enfin , comme seigneur de Chqzours, vous
n’avez possédé qu’à titre féodal, ce qui est proscrit par
les lois de 1792 et 1793.
Voilà la somme des eiiorts de M . le maire de Gannat,
et à quoi se réduisent toutes les objections qu’il met à
la pince de ses titres. Il s’agit d’y répondre, et la tâche
ne sera pas bien difficile.
M O Y E N S .
Il ne faut plus parler, comme le dit très-bien M. le
- maire de Gannat, de l’acte de 1791, puisqu’il est déclaré
nul par un jugement non attaqué; mais il ne faut pas
gémir avec lui sur ce premier acte de justice, ni l’appeler
un mal , car il n’est encore qu’un demi-mal; et il est indu
bitable que si ce jugement n’étoit pas rendu, et si le
tribunal eût pu soupçonner qu’on l’induisoit en erreur
sur des titres qu’on étoit hors d’état de produire, M. de
Chazours ne seroit pas obligé de lutter encore pour ob
tenir le complément de la justice qui lui a été rendue.
Oublions cependant que M . le maire de Gannat a
pi’omis de fournir des titres, et ne nous souvenons que
de ses quatre objections.
La première est proposée comme la plus embarrassante;
�( 21 )
c’est par elle que M. le maire commence ses moyens, et
c’est par elle qu’il les termine en la développant ; c’est
l ’alpha et l’omega de ses pensées. Il est visible que c’est
là qu’il a placé toute sa confiance; et en vérité voilà une
confiance solidement établie.
Rien n’est plus incontestable que la maxime invoquée
par M. le maire de Gannat, que tout demandeur doit
justifier sa demande, et que le défendeur n’a rien à prouver.
Sans difficulté , lorsque les choses se sont passées régu
lièrement, il n’y a pas même lieu de mettre cette vérité
en problème; elle se réduit à dire que celui qui,possède
n’a rien à prouver \possideo quia possideo, Si on l’assigne
il n’a que cela à répondre.
G’étoit aûssi tout ce qu’avoit à répondre M . de Cha
zours, lorsqu’on le menaçoit, en 1765, d’un procès qui,
disoit-on, alloit commencer tout de suite. 11 ne commença
pas; et M. de Chazours étoit encore en état, en 1790,
de répondre à la commune de Gannat : C’est à vous à
tout prouver, car je suis possesseur.
Cependant il se trouve un procureur de la commune
qui tranche la difficulté, et qui abrège singulièrement le
procès. En vingt-quatre heures la règle possideo a changé
de citateur; et par suite de cette admirable prévoyance,
M . le maire de Gannat dit aujourd’hui froidement à
M . de Chazours, après l’avoir chassé de chez lui : C’est
à vous qui vous plaignez, à tout prouver, car aujour
d'hui vous ne possédez plus.
Ainsi on pourroit donc renverser les maximes fon
damentales de la propriété, et changer les qualités des
�^ ( 22 )
parties, en réduisant à être demandeur celui qui n’avoit
rien à prouver.
-Aucune loi n’a laissé échapper une telle monstruosité;
et au contraire, en remontant à cette législation vaste
qui prévoyoit tout, nous trouvons un livre entier du
digeste consacré à nous donner des idées plus saines, et
à nous enseigner comment il faut entendre les règles
générales de cette matière.
Le législateur avoit fait, sur les contestations élevées
en matière de désistement et de possession ( interdicto
ati possidetis ), plusieurs lois explicatives, afin que le
juge s’occupât, non pas de celui qui étoit le demandeur
de fa it, mais de celui qui devoit l’être, ut nimiriim
sciatur quis actoris, qui s rei partibus fungi debeat, et
cui incumbet onus probandi.
Ces sortes d’actions étoient, par cette raison, appelées
extrordinaires, parce que la règle que le demandeur doit
tout prouver cessoit. Quand le possesseur ancien avoit été
troublé , le juge ne recherchoit autre chose , si ce n’est le
fait de cette possession, et, sans autre examen , il remet
tait le possesseur en l’état ou il étoit d’abord ; c’étoit
alors à l’autre partie à se constituer demandeur.
Rien de tout cela n’est étranger au droit français. La
maxime spoliatus antè omnia restituendus, est le som
maire de tout le livre 43 du digeste ; elle est le fon
dement de toutes les actions en complainte et réintégrande, qui sont singulièrement protégées par nos lois.
.. Celui qui est troublé a le choix de plusieurs actions.
Peut-il élever sa voix dans l’année, alors un juge de
�( *3 )
paix le rétablit promptement dans ses droits; et celui
qui l’a troublé ne peut, même avec les meilleurs titres,
être admis à prouver qu’il est propriétaire, qu’après avoir
rétabli le demandeur dans sa possession, rendu compte
des fruits, et.tout payé, même les dépens.
Veut-il prendre la voie criminelle si le trouble a eu
lieu de voie de fait, l’action lui est encore ouverte, et
il faut encore que tout soit rétabli et soldé avant qu’on
puisse l’attaquer au pétitoire.
Enfin, si l’action n’a pas pu être intentée dans l’année,
ou si, comme dans l’espèce , le trouble a été suivi d’un
simulacre d’acte qui colore la possession de l'usurpateur,
alors il faut bien que le troublé s’adresse aux tribunaux
civils pour faire tomber l’acte qu’on lui oppose; mais
cet obstacle étant vaincu, chacun rentre dans ses droits,
en vertu de la maxime spoliatus antè ornnia restituendus.
Les parties reprennent alors les qualités de demandeur
et défendeur, comme elles eussent dû le faire avant
Yacte et le trouble; et certes ce seroit donner une prime
à l’usurpation, si l’ancien possesseur paisible étoit réduit
à prouver sa propriété, avant d’être rétabli dans sa
possession.
Tel est l’objet de« la cause actuelle , et c’est en vain
que M. le maire de Gannat feint de s’y méprendre. M. de
Chazours n’est pas demandeur au pétitoire, pour réclamer
ce qui est paisiblement possédé par un autre; il est sim
plement demandeur en nullité d’un acte de violence qui
l’a dépossédé lui-même, et il a conclu au désistement
de l’objet usurpé , toujours d’après lu règle spoliatus
�( 24 )
ante omnia restituendus, Lorsqu’il a prouvé la nullité
de cet acte, il a fait tout ce qu’exigeoit sa qualité de de
mandeur.
' Le procès actuel est donc fini ; et quand il plaira à
M . le maire de Gannat d’en commencer un autre, comme
demandeur au pétitoire,, M. de Chazours sera prêt à
le soutenir.
Mais M . le maire de Gannat se fait quelque part un
moyen de ce qu’il n’existe pas de bornes d’entre les com
munaux et les champs de Chazours. Veut-il en conclure
qu’en attendant sa dépossession il faut vérifier actuelle
ment les limites? Mais cette objection ne seroit qu’un
prétexte de violation des principes; le savant Domat va
y répondre.
- « Si des parties qui sont en procès pour des confins,
« se contestent aussi la possession des lieux qu’il faut
« borner, il faudra premièrement juger la possession ;
« car la question des confins regarde la propriété , qui
« ne doit être jugée qu’après la possession. ( Liv. 2 ,
« tit. 6 , sect i re. , n°. 8.) »
Le motif de ce principe vient toujours à l’appui de
la situation du sieur de Chazours, ut hoc online f a c t o ,
de dominii disceptatione probationes , ab eo qui de
possessione victus e s t, exigantur. ( L . 35 , 1T. de acq.
rel am. poss. L. 3 , C. de in terdie t. )
Il faut donc regarder comme un point certain et in
dubitable, que ce n’est pas à la commune de Gannat à
faire les conditions au sieur de Chazours ; que c’est à
elle-même à montrer des titres de propriété si elle en
�(*5 )
com m e elle l’a avan cé; et q u e, dans l ’état actuel, n’y <
ayant eu de procès que pour une rescisiQn qui remet les
parties au même é ta t, la rescision prononcée ne laisse
plus qu’à prononcer le désistem ent, pou r que M . de
Chazours soit remis en possession.
Ces principes invoqués par M. de Chazours ne pourroient céder qu’à la démonstration évidente que feroit
la commune de Gannat, de titres précis et non sujets à
litige. Peut-être bien que par esprit d’équité le tribunal
ne se décideroit pas facilement à expulser celui qui ,
malgré un titre vicieux, viendroit en exhiber un sans
reproche, qui auroit été méconnu : c’est ce qu’a dû
supposer le tribunal, lorsque M . le maire de Gannat a
promis d’en produire ; et pour ne rien précipiter , le
tribunal a suspendu le complément de sa décision.
Maintenant il est éclairci que la commune de Gannat
n’a de titres d’aucune espèce. Un confin vague et incer
tain , énoncé dans deux ventes, contemporaines de la
tracasserie de 1680 , et du fait de deux habitans de
Gannat, ne peut pas être honoré sérieusement du nom
de titre. 11 est donc impossible que la commune de Gannat
tarde plus long-temps à se désister ; et tout délai par elle
obtenu depuis la rescision du titre vicieux de son usur
pation , n’est qu’une prolongation de durée de la loi du
plus fort.
La deuxième objection de M. le maire de Gannat n’est
qu’un faux-fuyant sans intérêt et sans but. O11 n’a jamais
pu assigner que le maire pour réclamer ce qu’il prétend
être un communal; si on eût assigné les individus, la
D
�6 )
procédure eût été nulles( a comme
l’a jugé maintes fois
'la Cour de cassation.
■M. le maire de Gannat cite un arrêt de la Cour d’appel,
concernant les héritiers Dufraisse ,' pour un marais du
Cheix. Ce marais avoit été partagé avant la révolution,
en vertu d’un arrêt du conseil; il ne pouvoit donc plus
être revendiqué comme communal, lorsqu’on plaida en
1806 , pour attaquer une sentence arbitrale qui avoit
eu lieu pendant l’émigration de M. Dufraisse.
Mais sans perdre du temps à discuter sérieusement,
et par l’application des lois, une difficulté imaginaire,
il suffit au sieur de Chazours de s’autoriser d’un juge
ment rendu par le tribunal, entre la ville de Riom et
la commune d’Ennezat, confirmé par la Cour d’appel.
’ M . le maire d’Ennezat opposoit aussi qu’y ayant eu
un partage des communaux, fait en exécution de la loi
du 10 juin 1793* et la loi du 9 ventôse an 12 déclarant
-propriétaires ceux qui ont partagé les communaux, eux
seuls avoient dû être assignés.
• Cependant le jugement et l’arrêt ont proscrit cette
prétention, et la procédure faite contre le maire a été
déclarée valable.
Remarquons encore combien M. le maire de Gannat
est favorable à proposer ce mauvais moyen d éform é,
après avoir plaidé au fond , et après avoir succombé
sur l’objet principal3 qui ne laisse plus qu’a prononcer
une exécution de fait d’un désistement déjà réellement
obtenu*
La troisième objection est plus misérable encore ; et
�( 27 )
on ne sait comment qualifier la prétendue" fui de nonrecevoir tirée de deux partages des communaux auxquels
on prétend^que M. de Ghazours a participé.
Il a déjà dit que si le premier partage, fait en exécu
tion de la loi du 10 juin 1793 , a compris le terrain
qui lui avoit été enlevé en 1790, c’est par suite de la
voie de fait qu’il n’avoit pas pu empêcher. Ce partage
se faisoit en 1794, à une époque où le sieur de Ghazours
n’avoit ni la possibilité ni la liberté d’y coopérer. Le
comité de surveillance de Gannat y avoit mis bon ordre,
en ordonnant, par un arrêté du 5 juin 1793, que le sieur
de Chazours seroit tenu d’habiter la ville de Gannat,
sans pouvoir en sortir sous quelque prétexte que ce soit.
Ensuite il fut envoyé en,détention à M oulins, où il est
resté jusqu’au 19 brum aire an 3.
N’est-ce donc pas, de la part de M. le maire de Gannat,
une ironie cruelle, de supposer, aux pages 14 et 19 de
son mémoire, que le sieur de Chazours a participé volontairement au partage des communaux par deux fois,
et que par avidité il a même abdiqué le domicile qu’il
se donnoit à la Combe ppour profiter du domicile réel
qu’il a à Chazours, afin d’avoir sa part des communaux?
Cet arrêté de surveillance, du 5 juin 1793 ( joint aux
pièces ) , prouve combien le choix d’un domicile étoit
volontaire au sieur de Chazours. Une participation au
partage de 1793? n’étoit pas plus volontaire de la part
d’un proscrit, et d’ailleurs on ne Yy appela pas. Enfin,
quant au partage de l’an 13, commencé après la demande
de M. de Chazours contre la commune, qu’a-t-il pu faire
de plus que de protester par écrit contre ce partage, et
Ü2
�(zS)
de former opposition par un huissier, à ce qu’il comprît
la portion de terrain pour laquelle il étoit en procès.
Comment après cette opération M . le maire de Gan-^
nat a-t-il pu imprimer sérieusement qu’il y avoit par
ticipation volontaire, acquiescement et fin de non-recevoir contre la demande ?
Venons h la dernière objection de M . le maire de
Gannat; il s’est plu à la développer comme un point
de droit très-ardu. M. de Chazours, dit-il, étoit sei
gneur; or un seigneur ne pouvoit pas avoir des terres
vagues ou pacages, qui de leur nature appartiennent aux
communes. D onc la commune de Gannat aura l’objet
contentieux à titre de terres vagues.
A la vérité, avant d’en venir à cette solide conclu
sion, M7 le maire de Gannat a préparé sa matière, en
disant que M. de Chazours n’ayant pas de titre, et ob
ligé de l’avouer, y supplée en trouvant dans la loi de
1793 que ses titres o n t été brûlés ; et sur ce supplém ent,
en effet très - ridicule, M. le maire de Gannat s’égaye
pendant une page entière (3 0 ) aux dépens de celui
qu’il signale comme raisonnant tout de travers.
M . de Chazours ( d’ailleurs fort enchanté d’avoir pu
fournir l’occasion de cette gaieté à M. le maire de Gan
n at), peut bien avoir dit que tous ses papiers avoient
été brûlés, parce que c’est la vérité , sans qu’il y ait
rien de plaisant dans cet événement. Il peut bien re
gretter la perte d’une transaction du i 5 avril 1698, qui,
faite à une époque non suspecte , et pour l’assiette des
cens dûs par le domaine de Chazours, devoit être pré-
�( 29 )
cieuse pour la cause. Mais ce n’est pas dans la loi qu’il
a trouvé ce brûlement, pas plus qu’il n’a trouvé dans ce
brûlement une preuve de propriété.
C’est un malheur, sans doute, pour le sieur de Cha
zours d’avoir perdu des titres qui lui eussent plus d’une
fois, peut-être, épargné des procès. Mais s’il est privé
d’en justifier ici, il a du moins l’avantage de n’en avoir
nul besoin, puisqu’il étoit en possession de défricher,
de temps immémorial, le terrain en contestation, lors-*
qu’il a été expulsé par voie de fait.
• S’il lui falloit des titres à l’appui de cette longue pos
session , la mairie de Gannat a conservé l’acte de 1680,
et le procès verbal de 1765, qui constatent qu’il y a eu
possession après contradiction ; ce qui incontestablement
est le signe de propriété le plus infaillible.
Le sieilr de Chazours prouve encors, par une prise
de possession notariée, du 26 novembre 1748, que son
1 père ayant acheté du sieur de la Fauconnière le droit
de justice dans Vétendue de ses biens de C hazours,
le seigneur de la Fauconnière, qui avoit intérêt de res
treindre les limites de ce démembrement de fief, en fit
une circonscription exacte ; et on y lit que cette étendue
des biens, alors appartenons au sieur de Chazours, com
mence de la Croix de Saint-Antoine à l'étang R oup,
le long du ruisseau, et de là , en suivant le même ruis
seau , jusq 11 au pré du sieur de Chazours , confinant
ceux du domaine de la Cabome. Ensuite , et après avoir
décrit tout ceconfin, qui précisément est celui qui sépare
Chazours des communaux de Gannat, on continue l’enceinte aux autres aspects, et généralement dans tout ce
�( 30 )
qui peut appartenir audit sieur de Chazours, dépendant
dudit domaine de Chazours, suivant les termes de l’acte.
M. le maire de Gannat ne sachant comment com
battre un titre aussi précis, et n’ayant rien de pareil à
produire de son côté (quoiqu’aucune loi n’ait fait brûler
les titres de sa commune), trouve plus commode d’en
appeler à la féodalité : et avec ce cri de guerre, il croit,
comme Gédéon, que tous les remparts qui lui font obs
tacle vont tomber en ruine, pour faciliter sa victoire.
Mais ne perdons pas de temps à rechercher si les lois
féodales ont ôté aux seigneurs leurs propriétés foncières],
ou simplement les redevances féodales; demandons seu
lement à M. le maire de Gannat où il a trouvé que M. de
Chazours étoit seigneur de Gannat.
Car il faudroit qu’il fût seigneur de Gannat, et qu’il
eût dépouillé les habitans de leurs biens par sa puissance
féodale, pour donner lieu à l’application des lois des 28
août 1792, et 10 juin 1793, dans le cas ci t é, ainsi que
l’a jugé la Cour de cassation, par trois arrêts des 7 mes
sidor an 12 , 17 vendémiaire an 13 , et 19 février 1806.
En effet, où seroit la puissance féodale sur ceux qui
étoient hors le fief, et soumis à une autre féodalité?
O r, 011 a vu que Chazours n’étoit qu’un simple do
maine roturier jusqu’en 1748, et qu’il étoit dans le iief
et justice de la Fauconnière ; qu’alors le domaine direct
y fut réuni par la vente qu’en fit le seigneur de la Faucon
nière. Mais les habitans de Gannat n’étoientpas dans la
seigneurie de la Fauconnière, et par conséquent ils ne
sont pas devenus assujétis à la puissance féodale de l’ac
quéreur de 1748.
�( 31 )
Cet acquéi’eur de 1748 étoit bien moins seigneur encore
en 1680 ? lorsqu’on le taxoit comme usurpateur, et qu’il
résistoit à cette taxe, en défiant de prouver qu’il eût
rien usurpé sur Gannat.
Ce n’éloit alors aucune puissance féodale qui empêchoit
les habitans de Gannat de soutenir qu’il y avoit usurpa
tion, pour empêcher le sieur de Chazours de jouir,
comme il l’a toujours fait, jusqu'au ruisseau Sigilon,
et de défricher successivement ce dont il jouissoit comme
propriétaire.
Que deviennent après cela toutes les citations de M. le
maire de Gannat, pour prouver, i° . d’après Dumoulin 7
Basmaison, etc., que les terres incultes appartiennent
au maître du territoire, et non au seigneur de la justice;
2°. que les lois de 1629 et 1667 défendent aux seigneurs
d'usurper les communaux, et permettent aux habitans de
rentrer dans ceux qu’ils auroient vendus ou donnés*
30. que la loi du 10 juin 1793 attribue les communaux
et terres vagues aux habitans des communes dans h
territoire desquelles ils sont situés.
Aucune de ces autorités n’a d’application. Basmaison ,
sur l’article 19 du titre 27 de la Coutume d’Auvergne, dit
bien en général que les vacans sont présumés être aux ha
bitans ; mais il faut le suivre dans sa distinction. «Les terres
« hernies et vacans d é f r i c h é s , sont réputés être au
« seigneur du territoire, et non pas au public , ni aux
« villes, bourgs et bourgades. » Dumoulin dit, sterilia
et inculta ; et ici il s’agit de terres défrichées successi-
�C 32 )
vem ent, et en suivant périodiquement les surfaces qui
pouvoient donner des récoltes.
Cet auteur, en disant encore que ces terres vagues sont
au maître du territoire, ad dominum territorii, laisseroit la preuve de propriété à faire à la commune de
Gannat. C’est.donc à elle à produire des titres pour montrer
que le territoire de Gannat va au delà du ruisseau de Sigilon, et dans la partie que l’acte de 1748 dit appar
tenir au sieur de Chazours, et être une dépendance de
son domaine.
Les ordonnances de 1629 et 1667 sont étrangères à la
cause. Il n’y a ici aucun communal vendu ni donné ; aucun
titre ne constate ni aliénation, ni usurpation féodale.
La loi du 10 juin 1793 laisse encore tout à prouver
à la commune de Gannat, puisqu’il faut que le terrain
soit dans son territoire, et que ce soit des terres vagues
et abandonnées, si déjà elles ne sont pas reconnues comme
communal.
Quelque dure qu’ait été cette lo i, elle ne pousse pas
l’injustice au point de dispenser les communes de toute
preuve, lorsqu’elles voudront s’arroger des propriétés
d’autrui. Elle ne change rien aux principes enseignés
par Coquille, qui, tout en disant que les communaux
appartiennent de droit aux liabitans , ajoute que cette
présomption cesse, s'ils ne rapportent point de titres,
ou s'ils ne payent aucune redevance.
E n fin , la rigueur de la loi n’a jamais ete étendue aux
terres en culture, dans les cas même où le seigneur avoit
usé de sa puissance féodale; caries terres hermes et vacans
sont
�( 33 )
sont seulement attribués aux habitans; et on connoît sur
cette question un arrêt de cassation, du 27 avril 1808,
qui a jugé la question formellement.
M. le maire de Gannat, après avoir accumulé les plus
mauvaises citations , comprend cependant qu’elles ne suf
fisent pas s’il ne prouve rien ,* et il est allé compulser tous
les registres des notaires de sa commune, pour y découvrir
une vente de 1678, et un partage de 1683, où des vignes
de Chantoirat sont confinées par les communes, de midi.
M. de Chazours a déjà répondu à cette nouvelle produc
tion, en faisant remarquer la date de ces actes et la qualité
des parties. D ’ailleurs Chantoirat est un territoire trèsconsidérable, et s’il confine les communaux, d’une part,
ce n’est pas un signe certain que les actes, dont on produit
une simple note, joignent le local contentieux.
Aussi ce-n’est pas sur cela que M . le maire insiste,
comme preuve, c’est sur ce qu’il appelle la possession des
habitans de Gannat; car, dit-il, ils ont constamment
possédé.
Mais quelle est cette possession si vaguement énoncée ?
Les faits du mémoire de M. le maire nous apprennent
qu’elle a consisté dans plusieurs pacages de bestiaux.
Mais a-t-on jamais vu que le simple pacage attribue
une possession, et soit une preuve de propriété ?
On n’ose pas dire qu’il ait eu lieu en temps de récoltes;
on ne s’en prévaut que comme ayant eu lieu sur les
portions de terre non cultivées, ou après les récoltes
levées ; or, cette espèce de pacage ou marchage n’est attri
butive d’aucune espèce de droit.
« C’est, dit D unod, un reste de l’ancienne communion
E
�( 34 )
« des biens. Le vain pâturage est utile aux communautés,
« et ne fait aucun préjudice aux propriétaires qui ont
« cessé de cultiver leurs héritages, ou abandonné les
« fruits qui peuvent y croître. Mais ce vain pâturage
« n’acquiert point de droit et ne donne pas lieu à la près« cription, etc. Fas est, jus non est. » ( Part, i re. , ch. 12. )
« A in si, dit M. de Malle ville sur l’art. 2232 du Code
« civil, quand j’a11rois pendant cent ans fait paître mes
gc bestiaux sur les fonds en friche de mon voisin, cela
« ne l’empêchera pas de les cultiver. »
La commune de Gannat ne peut donc se prévaloir
d’aucune espèce de possession, sous prétexte d’un pacage.
On a vu que ce pacage ne s’exerçoit que sur les terrains
en friche, et que M. de Chazours et ses auteurs n’ont
jamais cessé de défricher quand ils l’ont voulu.
Les procès verbaux, rapportés par la commune, de
1765, 1768 et 1789, loin d’être favorables à cette pos
session , sont au contraire ce que M. le maire pouvoit
produire de plus formel pour se faire condamner.
En effet, il ne faut pas croire qu’il suffise à quelqu’un
d’avoir consigné dans un acte l’annonce qu’il a faite
d’une prétention; car tout le monde, p?ir ce moyen,
pourroit se faire des titres. Mais il faut persévérer dans
Fattaque ; et lorsqu’on a menacé de former unv de
mande, il faut tenir sa promesse, sinon on est présumé
avoir reconnu n’avoir aucun droit. S i cognitâ rei veritate suum negotium deseruerit , nolens m lite improbâ perseverare.
C’est par ce m otif, qu’en matière de trouble on re
garde comme plus solide le droit de celui q u i, après
�( 35 )
avoir été troublé, b’a tenu aucun compte de la résis
tance, et a continué de jouir.
Ceci s’est même étendu aux servitudes, quoiqu’odieuses
de leur nature; et l’empêchement qu’on a voulu y ap
porter , fait un titre plus fort à celui qui la réclame, lors
qu’il est prouvé qu’après l’empêchement il a continué
de jouir comme auparavant, ainsi que l’enseigne le docte
Fa ber. D ic i solet, interrumpi prœscriptionem servitutis
naturaliter, per contradictionem et prohibitionem ejus,
adversùs quern prœscribebatur,*idtamen intelîigi debet,
si prohibitio tffectum liabuerit : alioquin si prohibitus
in servitute perseveraverit, tanto fortiiis erit ju s prœscribentis.
- Après cela , et quand on relit les procès verbaux de
1765 et 1768 , on n’y voit plus qu’une vaine formalité,
qui n’a pas empêché les actes de propriété du sieur de
Chazours, et qui a seulement affoibli le prétendu droit
que vouloient s’arroger les habitans de Gannat, d’em
pêcher les défrichemens.
Le procès verbal de 1789 signifie encore moins; car
c’est un autre acte obscur, encore moins interruptif
de possession , et qui, en reconnoissant M. de Chazours
propriétaire d’une terre appelée le ténement des Bruyè
res , renverse le système actuel de la commune de Gannat,
et achève la démonstration que si aujourd’hui elle veut
se dire propriétaire d’une portion de ce ténement, c’est
à elle à exhiber des titres.
L ’acte de 1791 est inutile à la commune, puisqu’il est
annuité ; ne le fût-il pas, il seroit inutile à sa possession,
parce qu’il étoit la suite d’une expulsion de voie d e i‘a it;
�( 36 )
arrivée après des menaces d’assignation, qui n’ont jamais
été effectuées. Car, comme le dit Dom at, « celui de qui
« la possession n’est interrompue que par une voie de
« fait, sans forme de justice, ne laisse pas d’être consi« déré comme possesseur , parce qu’il a le droit de ren« trer en possession. Ainsi le temps de la possession de
« l’usurpateur n’interrompt pas la sienne. » ( Liv. 3, t. 7 y
sect. 4. )
C’est donc toujours M . de Chazours qui est réputé
possesseur, d’après les principes; il l’est encore plus
depuis le jugement qui remet les parties au même état*
et qui est passé en force de chose jugée.
O r, on le répète, le possesseur n’a rien à prouver;
et cependant M . de Chazours seul prouve qu’il est pro
priétaire. A u contraire, M. le maire de Gannat ne rap
porte aucuns titres, et ne prouve rien. Comment donc
une cause aussi simple a-t-elle pu donner lieu à une résis
tance aussi opiniâtre, et à des injures aussi réfléchies et
aussi accum ulées? Il ne faut pas s’en étonner, les injures
sont le dédommagement le plus commode de l’absence
des raisons. Elles sont douloureuses pour celui qui en a
été l’objet; mais il est dédommagé à son tour par le
succès , et il est assez vengé en obtenant justice.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . M I O C H E , avoué licencié.
A. RIOM, de l’imp. deTHIBAUD, im prim . de la Cour impériale, et libraire,
r u e d e s t a ulcs maison L a n d r i o t »
Mars 1811
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Defaure de Chazours, Louis. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mioche
Subject
The topic of the resource
communaux
limites de communaux
pacage
vols
experts
arbitrages
troubles publics
bornage
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Louis Defaure de Chazours, ancien capitaine d'infanterie, habitant au lieu de la Combe, commune de Saint-Quentin, demandeur en exécution de jugement ; contre les maire et habitans de la ville de Gannat, défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1680-1811
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0414
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Saint-Quentin (02691)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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PRÉCIS EN RÉPONSE,
POUR J
acques
C H O U S S Y , Géomètre, demeurant
à Cusset, Intimé ;
C O N T R E Jean-Claude P L A N T A D E R A B A N O N , propriétaire , demeurant au lieu
de C h itain , commune de Saint-Christophe , dépar
tement de l 'A llie r , Appelant.
C e t t e cause offre le h ideux spectacle d'un débiteur
de mauvaise fo i, q u i, pour se soustraire au payement d’une
dette constante et avérée, épuise d’abord les subterfuges
ordinaires de la chicane; et se ro idissant contre l’autorité
de la chose ju gée, cherche enfin par d’odieux détours et
d’affreuses calomnies, à rendre illusoires des condamna
tions bien motivées, prononcées en dernier ressort, aux
quelles il a formellement acquiescé et à remettre en question, dans un nouveau tribunal, sur un autre territoire où
il est moins connu,ce qui a été irrévocablement décidé par
ses juges naturels et compétens.
A
�Telle est l’idée sommaire de ce procès vraiment scan
daleux : les détails en sont révoltans. Hatons-nous de les
retracer , pour détruire les effets de la perfidie avec la
quelle ils ont été tronqués dans le précis im prim é de Plan»,
tade-Rabanon.
F A I T S .
Claude Busseuil, fermier de la terre de C liitain, subroge,,
le 4 avril 1 7 8 1 , Pierre Choussy, père de l’intim é, à l'effet
de son bail ; il le charge de rendre, à sa sortie, au proprié
taire ( Laqueuilhe ) un cheptel montant à 3^894 f r .,
et lu i v e n d e n o u tre tous les b estia u x q u i e x c é d o ie n t ce
cheptel, avec quelques autres objets, moyennant 3 ^ 9 6 fr.
L e 27 mai 1783., Pierre Choussy renouvelle sa ferme
avec le propriétaire (Laqueuilhe ) pour neuf ans, finissant
au 24 juin 17 9 2 , et se charge de laisser , à la fin de son
b a il, pour 3,894 fr. de bestiaux, comme en étoit tenu Bùsseu il, précédent ferm ier : le p rix de la ferme étoit de
8,000 fr.
L e 12 janvier 179 2 , Pierre Choussy afferme encore
cette même tei*re p o u r trois ans , finissant au 24 juin 179 5
(an 3 ) , aux mômes clauses et conditions ; mais le fermage
est réduit à 4,300 fr. à cause de la suppression des droits
féodaux, avec convention que le p rix sera augm enté, si
ces droits féodaux sont rétablis avant la fin du bail.
Au. mois de juin de la même année ( 1 7 9 2 ) , Jacques
Chousjy- fils prend desarrangemens avec Pierre son père,
qui le subroge à la ferme dé Chitain. Choussy fils, intim e,
y va résid er,et en prend ^administration.
Laqueuilhe est porté sur la liste defi émigrés.} ses biens.
�C3 )
\
sont confisqués et mis en vente; la terre de Çhitain est
vendue par lots séparés : Plantade-Rabanon achète la ré
serve et les domaines de Chitain et de Jon in ain , le 2. bru
maire an 2.
Un arrêté de l’administration centrale du département
de l’A llie r, du 2 1 ventôse an '2, > pris sur l’avis de celle
du district de Cusset, annulle le dernier bail de ferme de
la terre de Chitain , et le condamne aux flammes , à raison
de la clause d’augmentation du prix stipulée en cas du réta
blissement des droits féodaux supprimés. Jacques Choussy est dépossédé de. sa ferme au 24 juin
l794(m essidoran 2) ; Plantade-Rabanon et lesautres acqué
reurs en tren t en jouissance des lots par e u x achetés , et font
procéder par deux experts, le 14 du même m ois, à l'es
timation des bestiaux ; et comme le nombre étoit supé
rieur à celui qui avoit été l’objet du cheptel, l'estimation
dut par là même excéder de beaucoup le montant de ce
cheptel.
Choussy, qui avoit quitté la ferm e, et qui laissoit ses
bestiaux, désiroit en recevoir le prix ; il presse Plantade
de te rm in e r avec lu i, comme avoient fait les outres acquér
,1‘curs. Plantade di/Fèrc, lui d e m a n d e divers délais, et
l’oblige à faire des voyages inutiles et fatigans.
Choussy va trouver le représentant Forestier, alors en
séjour ù Cusset, avec qui Plantade étoit intiméinent lié ;
il le prie de le concilier avec son ami. Forestier lui dit
qu’il peut écrire i\ Planlade, et l’inviter desa part h terminer
•cette affaire. Choussy écrit la lettre du 29 messidor an 2 ,
im prim ée à la suite du précis de P lantade ; celui-ci garde
A z
�>4 }
le silence pendant quinze jou rs; enfin, le 14 therm idor,
il écrit à Choussy la lettre suivante :
« J e vous p rie , mon cher citoyen, de venir ici après
« demain 16 du couran t, et d’apporter, comme nous en
« sommes convenus , les baux des métayers de Chitain et
<r Jo n in a in , et votre b a il, ainsi que les papiers que vous
« croirez nécessaires. Tous mes hommages à votre ci
te toyenne. Salut et fraternité, et signé P lan tad e . »
Choussy ne manque pas au rendez-vous, et le 17 mes
sidor an 2 ,les parties règlent définitivement leur compte.
Choussy modère même l’estimation des bestiaux; Plantade lui paye une somme de 2 r5 oo fr. assignats, et lui sous
crit u n billet de 2,892 fx*. 80 cent, /payable le prem ier ger
minal an 3. Choussy lui remet les baux à cheptel des mé
tayers, et les autres papiers relatifs à la ferme de Chitain.
L e lendemain de l’échéance ( 2 germinal an 3 ) , Plantade fait à Choussy fils, absent, un acte d’offre du montant
du billet de 2,892 fr. 80 cent., ù condition , r .° qu*il éta
blira sa qualité de ferm ier; 2.0 que dans la quittance qu’il
fou rn ira, il sera tenu de réserver au citoyen Plantade le
bénéfice de toutes lois qui pourroient in te r v e n ir su r les
ch e p te ls. C et ncto étoit n u l p ar vice de forme , et ridicule
dans son contenu. Choussy le regarde comme non avenu ,
et cite Plantade, le 6 germinal an 3 , devant le bureau de
p a ix , pour se concilier sur la demande eu payement du
billet et de quelques autres objets.
Plantade persiste dans son acte d’offre, et la conciliation
n’a pas lieu.
1 3 germinal an 3 , demande en condamnation du mon
tant du billet..
�( 5)
25 du même m ois, jugement par défaut du tribunal de
C u sse t, qui condamne Plantade à le payer.
L e 28 du même mois Plantade y forme opposition.
L e 22 floréal an 3 , il intervient un second jugement par
défaut, qui déboute Plantade de son opposition, et donne
acte à Pierre Choussy père de la déclaration par lui faite,
que la ferme de Chitain appartenoit, depuis 1 7 9 2 , à
Choussy fils, intim é, et qu’à son égard il n’avoit rien à
prétendre.
Plantade appelle de ces deux jugemens. L a cause est por
tée au tribunal de district de Gannat, où il intervient, le 1 1
"vendémiaire an 4 , un troisième jugement par défaut, qui
confirme les deux premiers.
Plantade y forme encore opposition devant le tribunal
civil du département de l’A llie r, qui venoit alors d’être
installé.
L a cause se plaide contradictoirement. Plantade répète
que Choussy père étoit seul fermier ; qu'il n’a pu traiter va
lablement avec le fils; qu’il s’étoit glissé des erreurs consi
dérables dans l’arrangement par lui fait avec Choussy fils j
que cet arrangement,et le billet de 2,892 francs 80 centimes
qui l’a s u i v i , so n t le fruit de l’e rreu r, dé la surprise, etc.
Et le 3 pluviôse an 4 , Je tribu nal civil de TAllier rend un
quatrième jugement, en dern ier ressort, par lequel, sta
tuant sur l’appel interjeté par Plantade, il confirme défini
tivement les deux jugemens du tribunal de Cusset, des 25
germinal et 22 floréal an 3 , prononçant la condamnation
du montant du billet.
f
Ce jugement est signifié ù Plantade. Deux ans s’écoulent^
il ne paye pas. L e 8 floréal an 6 , une saisie-exécution est
H
�lïi\
t.\K
(6)
assise sur quelques bestiaux : Plan ta de, sous la réserve de
tous ses d ro its, fournit un gardien volontaire ; bientôt il
forme opposition aux poursuites. Les parties retournent au
tribunal civil sur ce nouvel incident : la cause se plaide le 14
prairial an 6. Plantade conclut en ces ternies: « O uï Ga y ,
» pour l’opposant (Plantade) qui a conclu ù ce qu’il plaisç
» au tribunal accorder à sa p artie, en vertu de la loi du i 5
» fructidor dernier ( an 5t) terme et délai pqur tout le temps
» que cette loi permet aux tribunaux d’accorder aux débi» teurs de créances antérieures au 5 thermidor an 4 ; lui
» donner en conséquence main-levée de la saisie faite à son
x préjudice, ù la requête du citoyen Çhoussy, aux offres
jj que fait le citoyen Plantade-Rabanon de payer en même
» temps la créance principale, ainsi que les intérêts et frais
» légitimes ».
Choussy conteste le délai demandé* et il intervient un
cinquième jugement contradictoire, qui accorde à Plantade
terme et délai jusqu’au premier vendémiaire an 7 , la saisie
.tenant jusqu’ù l’entier payement.
Lorsque Plantade voit approcher le terme fixé , il élève
de nouvelles chicanes; il form e , le 5 fru c tid o r nn 6 , une de
m a n d e en d o u z e chefs , o ù il a n n o n c e qu’ily a eu des erreurs
et une lésion considérable dans les arrangenions faits entre
lui et Choussy , le 17 thermidor an 2 ; mais il ne se plaint
pas d’avoir souscrit le billet par l’effet d’une prétendue ter
reur. Cette demande est déclarée nulle paru ii sixième jugojn e n t, du 14 du même mois.
Plantade forme lui-même une saisie-arrêt, entrôses pro
pres m ains, sur Choussy , quoiqu'il n’ait ni créance, ni
titre,
‘
r
r ' ’.
. .
�C7 )
' Choüssy reprend ses poursuites. Plantade imagine alors
un nouveau système de défense ; il forme , par citation et
exploit des 17 vendémiaire et 9pluviôse an 7 , une demande
tendant à obtenir la rescision des arrangemens faits entre
lui et Choussy , ïe 17 thermidor an 2 ; i° . comme étant le
fruit de l’erreur , du d o l, des menaces , violences et dénon
ciations résultant d’une lettre du 29 messidor ( celle impri
mée à la suite du précis); 20. comme étant contraires aux
arrêtés du comité de salut public, des 2 thermidor et 1 7
fructidor an 2 , et aux lois des 15 germinal an 3 et 2 thermi
dor an 6. Il conclut à ce que les parties fassent un nouveau
compte, basé sur lés lois et arrêtés précités. P ar cette de
mande , Plantade se départ de toutes autres demandes
antérieures.
L e 24 ventôse suivant, il v a , seul et sans'citation , chez
iin notaire, pour y déposer, dit-il, une somme de i , 5oo f .,
pour payement de ce qu’il peut devoir à Choussy ; il en fait
dresser acte , et retire de suite le prétendu dépôt.
L e 19 germinal an 7 , Plantade assigne Choussy devant
le tribunal civil de FA llier, pour faire accueillir sa saisiearrêt faite sur lui-m êm c, son opposition aux(poursuites, et
faire prononcer la validité du dépôt (_iionja.it ou retiré de
suite') de i , 5oo francs, et conclut encore à l’adjudication,
des conclusions portées en ses exploits, du 5 fructidor an6 ( déclarénul')i 17 vendémiaire an 7 ,et autres postérieurs..
L a cause appelée à l’audience du 17 floréal an 7 , sur l’as
signation du 9 pluviôse seulement, Plantade ne se présentepas. Choussy demande acte du départ des autres demandes „
donné par cet exp lo it, et congé-défaut*
�( 8 )
Un septième jugement homologue ce départ, et rejette
la demande en restitution de Plantade.
Celui-ci y forme opposition. Un huitième jugem ent,
sous la date du 1 1 messidor an y , fondé sur le règlement du
tribunal c iv il, et.sur ce que la cause avoit été appelée à.tour
de rô le, déclare Plantade non recevable dans son oppo
sition.
Plantade a interjeté appel de ces deux derniers jugemens.
C’est sur cet appel qu’il s’agit de prononcer.
Plantade, qui jusqu’alors avoit presque toujours affecté
dese laisser condamner par défaut sur toutes ses demandes,
a enfin rompu le silence et publié u n mémoire im prim é,
o ù , tro n q u a n t et dissimulant tous les faits essentiels du
procès, il ne parle que de son assignation du 9 pluviôse an
7 , et des deux jugemens des 17 floréal et 1 1 messidor suivans ; il suppose qu’il n’a souscrit le billet du 17 thermidor
an 2 , que pour éviter la mort dont le menaçoient Choussy
et le représentant du peuple Forestier; et pour colorer sa
lâche im posture, il s’est livré aux diatribes les plus viru
lentes et les plus calomnieuses.
Ce simple récit des faits a déjà mis à nu la m auvaise foi de
ce d éb ite u r d é h o n te . L a ré p o n se de Choussy va faire éclater
toute sa turpitude.
L e citoyen Plantade parle ironiquement de l'épithète de
notre brave représentant , que Choussy donne dans sa
lettre au citoyen Forestier----I£h ! mais n’eSt-il pas notoire
que c’est lui-même , Plantade , qui l’a ainsi qualifié dans
ses discours et dans ses lettres aux sociétés populaires de
Ciisset et de V ichy ? Il l’appeloit avec complaisance son
doux atni\ se glorifioit d’avoir été constamment son ami
depuis
�(9)
depuis sa jeunesse , et long-temps avant la révolution; il
annonçoit par-tout qu’il étoit son conseil dans toutes ses
affaires contentieuses ; et le citoyen Plantade sait bien que
ce fut là le motif qui détermina le citoyen Choussy àparler
au citoyen Forestier des lenteurs qu'il .éprou voit dé la part
du citoyen Plantade.
L e citoyen Choussy livre la lettre qu’il a écrite à ce sujet
le 29 messidor an 2 , à la critique la plus sévère , et défie
qu’on y trouve aucune expression qui puisse servir de
prétexte aux viles calomnies du citoyen Plantade : ce der
nier fait lin rapprochement perfide de cette lettre et d’un
arrêté du représentant Forestier du 22 therm idor.. . . E t
qu’y a-t-il donc de commun entre la lettre et l’arrêté pos
térieur de près d’un mois ? Cet arrêté n’a pu effrayer PJantade , puisqu’il n’existoit pas à l’époque des arrangeinens.
L e 9 thermidor 'avoit lui sur la France et fait cesser
alors le régim e des triumvirs dont Plantade parle dans
son mémoire. Il cherche à insinuer qu’il ig n o ro it, le 17
thermidor , les événemens du 9 , tandis que l’alégresse
universelle agitoit alors tous les F ran çais, dans les départemens mêmè les plus éloignés. Si le citoyen Plantade au reste
a des reproches à faire aucitoyen Forestier,il peut s’adresser
directement à lui j il saura bien répondre, et peut-être at-il encore dans son porte-feuille des pièces capables de con
fondre le citoyen Plantade.
• '
1
Quelle, crainte'Forestier pouVoit-il inspirer au citoyen
Plantade qui lui étoit attaché par les nœuds de la plus
étroite amitié,) avec qui il mangeoit fréquem m ent, qu’il
accompagnoit au comité de salut public), à la commission
dys/subiiisUinces > et rà qui il prodiguoit les noms les plus
chers?
.! d 'j ; J •
B
’
�( 10 )
Planlade dit que le cordonnier B ou rgeois, de V ich y
étoit l’émissaire de Forestier; on ignore s’il a des preuves
de cette assertion , mais on doit s’étonner que Bourgeois
ait été dans le cas d’inspirer de la frayeur au citoyen Plantade qui étoit avec lui membre du comité de surveillance
de V ic h y ; à Plantade qui a été constamment fonctionnaire
public pendant le gouvernement révolutionnaire ; à lui
qui étoit un des plus grands orateurs des clubs ; à lui dont
les collègues Bourgeois et Bonnefont ont attesté le civisme
et l’ardeur à exécuter les lois d’alors et les arrêtés des re
p ré se n ta i en m issio n ....
Ne seroit-ce pas p o u r e f f a c e r ces impressions après le 9;
therm idor , que Plantade auroit imaginé de mettre en
scène le dénonciateur Arm illon ,u n journalier qui ne sait
n i lire ni écrire, pour faire croire que Plantade étoit sus
pecté d’incivisme et menacé comme G ravier, R aynaud,
Sau ret, de . . . Mais la fable a été mal ourdie ; on place les.
propos de Bourgeois aux premiei’s jours de germinal an s#
et c’est le 23 du même mois de germ inal, que lç représen
tant du peuple Vernerey proclamoit le citoyen Plantade
administrateur du district de Cussel ; que la société popu
laire de cette c o m m u n e upprouvoit avec transport sa no
mination , tandis qu’elle déclaroit que G ra v ie r, Raynaud
n’avoient pas assez d 'én ergie.. . . Planlade avoit donc assez
d’én ergie; il étoit donc ce qu'on appeloit à la h au teur,
puisqu’il sortoit triomphantde toutes les épreuvos.
Plantade qualifie le citoyen Choussy de neveu deFores-tier ; mais il sait bien que ce fait est fa u x , et que Choussy a
seulement épousé une femme qui est la cousine de Forestier
à un degré fort éloigné; il sait bien aussi que Choussy at
eu très-peu de rapport avec lui..
�(
)
Si Choussy avoit eu autant de crédit que Plantade lui
en suppose auprès de Forestier, n’auroit-il pas alors obtenu
quelque em ploi? se seroit-il laissé dépouiller de sa ferme ?
n’auroit-il pas fait maintenir son bail qu'un arrêté émané
<lu corps adm inistratif, dont Plantade a ¿té m em bre, a
condamné à être lacéré et b rûlé? Cette décision n’a-.t*elle
pas dû donner à’Ghoussy de justes inquiétudes, tandis que
Plantade triomphoit d evo ir le bail anéanti, et sa mise en
possession rapprochée ?
‘
Pourquoi le citoyen Plantade a-t-il laissé ignorer dans
son p récis, que les deux domaines et la réserve par lui
acquis provenoient de Laqueuilhe inscrit sur laliste des ém ig r é s ? a u r o it-il craint q u ’ o n fît la r é fle x io n bien juste que
l’acquéreur d’un tel bien devoit avoir moins d’e ffro i, que
le ferm ier de l’émigré dont le bail ¿toit condamné aux
flammes.
' Vous aviez dpnc cru , citoyen Plantade, qu’on avoit
perdu la m ém oire, et qu'il vous sufïisoit d’avoir agi et
réagi en sens contraire, selon le temps et les lie u x , pour
-vous soustraire au payement de vos dettes légitimes.. . . Si
-v o u s aviez voulu inspirer plus de confiance aux juges
d a p p e l, vous auriez clu développer tous vos m oyens,
tous vos prétendus faits devant vos juges naturels, devant
-le tribunal de Cusset, devant celui de Gannat, devant celui
de Moulins........ Quoi ! vous laissez prendre contre vous
■huit jugeniens successifs, les uns par défaut, les autres
contradictoires, sans révéler £i vos.juges que la crainte de
la mort vous a arraché le billet contre lequel vous plaidez
depuis sept ans.
Vous avez vu Forestier incarcéré, et vous n’avez pas
�/
7A0
î,- .x
( 12 )
songe à parler des événemens relatifs au billet î convenez
que votre mémoire a été bien ingrate. Qui vous a donc
empêché de protester , de réclam er devant tous les juges
qui se sont succédés depuis thermidor an 2 , et qui sont
certainement à l’abri du soupçon d’avoir favorisé les agens
de la terreur ?
Comment se fait-il qu’un homme dont la finesse a passé
en proverbe dans le district de Cusset, qu’un homme qui
rédige lui-meme ses citations, ses exploits, ses m ém oires,
qui étoit le patron et le solliciteur au parlement, des procès
de ses compatriotes, et quia été constamment fonctionnaire
public , ait re c o n n u la dette , ait acquiescé au ju g e m e n t de
condamnation, ait demandé termes et délai, ait offert de
p ayer, et même ait fait semblant de consigner, lorsqu’il
avoit un m o yen , qu’il croit si sur* de faire ajinuller le
billet ?
L e citoyen Plantade a-t-il pu espérer de rendre sa cause
plus intéressante, en remuant la fange des passions, en
nous ramenant aux temps malheureux des excès, lorsque
le gouvernement s'efforce de les faire oublier, et que l’oli
vier delà paix rallie tous les Français sous son ombre tulélaire? En v ain le citoyen Plantade a voulu parler n la haine,
au ressentiment des hommes passionnés..........L e citoyen
Choussy ne veut parler qu’à l’in tégrité, à la raison, à l’im
partialité de ses juges.
L ’engagement arraché par violence à un homme que
Von tient enfermé , à qui on tient le pistolet sous la gorge,
et qui est menacé de perdre la vie s’ il n’obéit, est justement
proscrit par les lois; mais on n’annulle pas légèrement les.
conventions: il faut établir clairement ses faits, et no pas.
�//p
C 13 }
se contenter de verbiager et de vom ir des calomnies. O r
Plantade n’a rien prouvé , ni même allégué de précis q u i
puisse justifier sa nouvelle manière de payer ses dettes.
C’est Plantade lui-même qui a écrit à Choussy,le 1 4 ther
midor an 2 , de venir à Chitain terminer leurs comptes :
tout a été consommé dans le domicile de Plantade luim êm e; il a été l’arbitre et le régulateur de l’arrêté de
compte. Toutes les circonstances sont donc contre lui ;
toutes sont en faveur de Choussy, comme on vient de l’éta
blir. Aucune menace ne lui a été faite; il étoit en grande
faveur sous le régime du trium virat, et Choussy, comme
ferm ier d’ém igré , avoit de justes inquiétudes ; il n’étoit
pas m ê m e membre des sociétés p o p u la ir e s , o ù Plantade
triomphait comme orateur.
Si son engagement n’étoit que le fruit de la crainte de la
m o rt, le citoyen Plantade pou vo it, il de voit même exciper
de ce moyen péremptoire chaque fois qu’il a été appelé
devant les tribunaux 5 et cependant, loin d’articuler ce vice
radical, il a approuvé le billet, il a fait des offres réitérées
de le payer ; et d’après les lois civiles, cette approbation le
rendroit non recevable à attaquer la convention si formel- .
leinent sanctionnée, dans un montent où sa prétendue
terreur étoit évanouie.
' ;
Mais qu’e st-il besoin d’entrer dans tous ces détails,
quand il existe desjugernens définitifs non attaqués ni attn*quables, qui ont prononcé la condamnation du billet ,
m a lg r é les reproches d’erreur et de surprise allégués par
Plantade? Tout est jugé par les jugemens des tribunaux de
Cusset, Gannat et M oulins, des 2 5 genninal et 22 floréal
an d eu x, 1 1 vendémiaire et $ pluviôse an 4 , et 14. prairial
�(
1 4
)
an 6. Plantade a acquiescé formellement a tous ces jugem en s;i!s sont passés en force de cliose ju gée; il n’est pas
même au pouvoir du tribunal d’appel d’y porter atteinte:
tout jugement en sens contraire donneroit infailliblement
ouverture à la cassation.
Plantade parle dans son précis des lois des i 5 germinal
an 3 , et 2 thermidor an 6 , sur les cheptels. Quelle influence
ces lois pourroient-elles avoir dans l’espèce ? D e quel droit
auroit-on voulu forcer Choussy à laisser ses bestiaux à Plan
tade sans en recevoir le p rix ? N e doit-on pas traiter confor
mément aux lois qui existent au moment où l’on entre en
p o u r -p a r le r ? L'art. V I de la loi d u 2. th e r m id o r an 6 , dit
expressément : et que les comptes et partages des cheptels
« entièrement consommés , soit qu’ils l’aient été par suite
« de jugeniens,soit qu’ils l’aient été en vertu d’arrangemens
« définitifs faits de gré à g ré , sont maintenus et sortiront
« leur plein et entier effet, à quelqu’époque, et dans quel« que proportion qu’aient été faits lesdits comptes et par
te tages. »
O r , Plantade et Choussy ont fait des arrangemens de
.gré à g r é ; ils ont réglé leur c o m p te de cheptel ; les bes
tiaux ont été estimés et rendus au propriétaire, 6ans
réserve ; le reliquat a été payé, partie en inonnoic cou
rante , partie en un billet ; tout est consommé. Peu importe
que Plantade ait voulu revenir après coup sur scs engagem ens; qu’il ait plaidé et chicané sur leur exécution; cette
•circonstance ne détruit pas le fait matériel du compte ar
rê té , de l’arrangement terminé. Un acte n’est pas moins
¡consommé, quoique la somme promise ne soit pas encore
piiyée, I/m gagcm cnt de payer existe ; il suilrt à la perfeo*
�C * 5. )
tîon de la convention. Un plaideur n’est pas moins obligé
d’exécuter une transaction , quoiqu’il lui plaise de chica
ner sur les payemens. L a remise d’un billet pour achever
de solder le prix des bestiaux a d’ailleurs opéré une nova
tion , et changé la nature et l’espèce de la dette. C’est un
effet pur et simple qui a remplacé l’obligation de cheptel
et qui en a détruit les effets. L a créance de Choussy est une
créance nouvelle, une sorte de prêt, dont le sort ne peut
plus être lié aux contestations qu’il a plu à Plantade d’a
monceler sur la tête de Choussy. L ’arrangement est en
core consommé par le jugement en dernier ressort, du 14.
pluviôse an 6 , qui a approuvé le compte de cheptel et le
billet, qui l’a s u i v i , et rejeté le p o u v o i r de Plantade.
Ainsi les parties sont doublement dans le cas de l’art. V I
de la loi d u s thermidor an 6 , soit à raison des arnrngemens>
consommés à l’amiable, soit à raison de la sanction judi
ciaire et définitive qui leur a été donnée.
Choussy n’auroit pas lieu de craindre le résultat d’un
nouveau compte avec un homme honnête et délicat; mais
Plantade est tellement connu par sa mauvaise fo i, sa du
plicité, son esprit intrigant et chicanier; il en a donné dans
cette affaire des preuves si frappantes , qu’il faudroit con
sentir à plaider toute sa v ie , et à manger dix fois Je billet*,
pour arriver à un résultat d éfin itif.... Voile» le véritable
m otif qui détermine Choussy à ne plus entrer en lice, sur
tout aujourd’hui que les bestiaux n’existent plus, et que les
baux et les pièces ont été remis A Plantade. Comment ose-til tracasser ù ce point l’ex-fermier de Laqueulhe, lorsque
tous les coacquéreurs de Chitain, le citoyen RuetLam otte
particulièrement ^ancien fermier, du même bien, a traité*
�*
( ï 6 )
avec Choussy sur les mêmes bases, et d’après la même esti
mation que celles arrêtées avec Plantade? Aucun de ces
acquéreurs ne s’est plaint; tous ont payé l’excédant du
cheptel. Il étoit réservé à Plantade de plaider sept ans
contre son b illet, et d’employer les moyens les plus faux
et les plus viles.
>
Ün dernier trait achève de le peindre.. . . Désespérant
d’arrêter les poursuites avec sa propre saisie-arrêt, il est
allé en mendier une d’un métayer illitéré, nommé Marie
B a rg e , à qui Choussy n’a jamais rien dû. Depuis plus d’un
an , Choussy plaide contre le prête-nom de Plantade,pour
le forcer à faire connoître les motifs de cette saisie-arrêt,
faite sans titres et sans autorisation de justice.. . . Ce pré
tendu saisissant , fertile en moyens de nullité contre la
procédure, fait constamment défaut quand il s’agit de
m otiver sa saisie.. . . A peine un jugement du tribunal de
la Palisse en a-t-il prononcé la main-levée , que le prêtenom en a appelé. Intimé devant le tribunal supérieur,
cette rnarionette de Plantade refuse de déduire ses moyens.
Mais Choussy ne cessera de le rép éter, tout est jugé défi
nitivement entre lui et IMantado par les cin q premiers
jugetnens q u i o n t ,p r o n o n c é la condamnation du billet,
qui sont passés en force de chose jugée, et auxquels il
a formellement acquiescé. L e tribunal ne peut -, ni ne doit,
entrer dans aucune autre discussion ; 011 ne peut faire juger
cent fois la même chose. C'est faire injure aux tribunaux,
c'est renverser toutes les idées reçues en jurispruderice, que
de présenter des chicanes si ridicules, si injustes et si mé
prisables. L a fin de non recevoir doit seule faire justice
d >1 la fourberie de ce débiteur infidèle et-perfide.» Choussy
�( *7 )
a une trop haute idée cles/taie ns étde la probitedpstrofg.
ju r is c o n s u lte s , d o n t les noms figurent aü bas du précis
de Plantâde, pourm ’être pas convaincu qu’ils auroient
rougi de dOnrier une sorte d’approbation à ce libelle dif
famatoire 3 -s’ils eussent connu lès véritables circonstances
çt lés faits de la' cause , dont Plantade a affecté de ne pas
dire un seul ràot.
• ,• si - ! .
' ' ;.
C H O U SSY .
D E V E Z E , avoué.
N o u s soussigné, GeofïroiBonnefont l’aîné, perruquier^
et Claude Bourgeois, cordonnier, demeurant tous deux en
là commune de V ichy , certifions à tous qu’il appartiendra,
que le citoyen P la n ta d e -R a b a n o n , demeurant ci-devant en
la commune de V ich y , et actuellement en celle de SaintChristophe, a été nom m é, conjointement avec nous, miembre du comité de surveillance de V ic h y , par le citoyen
M ativet, alors membre duicomité de survéilldnce de Cusset, et ensuite délégué tant de ce comité que des représen
t a i du peuple en mission dans le département de l’A llier,
siu cornmencèmÊnt de l’an deux de la république, et qu’il
en a exercé les fonctions conjointement avec nous, et qu’il
a montré le plus grand zèle pour l’exécution des lois et
arrêtés des représentans du peuple. En foi de quoi nous
avons délivré le présent certificat. A V ich y, le 29 ventôse
an 9 de la république française. — Bon pour ce que dessus,
quoique non écrit de ma main. Sign é , B o n n e f o n t . —
J ’approuve ce que dessus, quoique non écrit de ma main..
S ign é, B o u r g e o i s .
V u bon pour la signature ci-dessus des citoyens Bonncfont et Bourgeois-
�'
Ci8)
Fait en bureau m unicipal, à V ic h y , le 29 ventôse an 9 de
la république. S ig n é, S a u r e t , maire.
J e soussigné , Germain M ativet, atteste et certifie la vé
rité des faits énoncés au présent certificat. A Cusset, ce 30
ventôse a n .9.de là république. S ig n é, M a t i v e t .
’
1
V u.bon pour la.signature ci-dessus du citoyen Mativet.
E n m airie, à Cusset, le 2 germinal an 9.de la république _
française. S ign é, B o u q u e t .
Enregistré le 9 germinal à R io m , par Poughon.
’
E x tr a it des registres de la société populaire de la com mime de Cusset, départem ent de V A llier, séance du 23
g erm in a l, deuxièm e année républicaine.
L e représentant du peuple Vernerey est entré dans la
salle des séances , au son d’une musique , etc.
L e représentant du peuple a pris la parole et a annoncé
à l’assemblée que l’objet de sa mission étoit d’organiser le
gouvernement révolutionnaire, et d’épurer les autorités
constituées, etc.
L e secrétaire du représentant est monté à la tribune; il
a exposé les principes d’après lesquels l’assem blée de v o it se
c o n d u ire p o u r a d m e ttre o u rejeter ceux qui alloient lui etre
proposés pour rem plir les places publiques, etc. Il a com
mencé par les membres du directoire du district.
D istrict.
Christophe Frcm invillc, président.
François G ivo is, agent n a tio n a l, etc.
L e secrétaire a passé aux membres du conseil du district.
�Conseil de D istrict.
Gouthier de Busset.
Plantade-Rabanon, etc.
L ’assemblée a également approuvé le choix de ces mem
bres du conseil de district, à l’exception de G ravier-R aynaud, à q u i elle n 'a pas trouvé assez d'énergie pour rem
p lir une place d' adm inistrateur, etc.
P ou r extrait conforme. L . F o r i s s i e r , secrétaire.
J e soussigné, maire de la ville de Cusset, département
d e l’A llie r, certifie que la signature ci-dessus est celle véri
table du citoyen L u c F o rissier, secrétaire de l a m airie, et
que foi doit être ajoutée aux actes qu’il signe en cette
qualité.
E n m airie, à Cusset, le 26 ventôse an 9 de la répu
blique française. S ig n é, D u s a r a y - V i g n o l l e s .
Enregistré à Riom , le 1 2 germinal an 9 , par Poughon.
A R
io m ,
de l'im prim erie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy, Jacques. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Choussy
Devéze
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé ; Contre Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire, demeurant au lieu de Chitain, commune de Saint-Christophe, département de l'Allier, appelant.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1129
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53157/BCU_Factums_G1129.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
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f0757809a78ab6e72458283aab4cbd09
PDF Text
Text
P O U R
V I N G T
H A B I T A N T S
du village d e Taleizat,oppofants à l'enrégiftrement
des Lettres Patentes obtenues a l’effet de leur
ôter le droit de fecondes herbes dans les prés.
C O N T R E les fleurs C A R R I E R E &
B A R T H O M E U F , fe difants Syndics
du village de Taleizat réellement parties en la
caufe, & demandeurs en enrégift rement def dites
Lettres Patentes.
E T V I N G T - T R O I S autres H A B I T A N T S
, Vagabonds , à qui Ja f uppref f ion du
droit de fecondes herbes eft indifférente , ou qui ,
débiteurs de Carrière & Barthomeuf nofe nt pas
f e def endre,& font obligés d' en paff e rpar leur avis.
' f urp r is
T
Out ce que l’injuftice a inventé de plus étonnant fe trouve en cette caufe. Les fécondes
herbes des prés du village de Taleizat ont, de tout
tem ps, appartenu aux Habitants , qui font fans com
munaux. B arthomeuf, C arriere, la dame de M ontlo u b y , les Héritiers d’un feu fieur P rivat , feuls
A
�w,
a
propriétaires des p rés, ie font apperçus que cet
ufage leur laiibit un tort notable , ils ont voulu le
fupprimer, & à force de furprifes & d’aftuces, ils
en font prefque venus à bout.
Achever de ruiner un village au profit de quatre à
cinq particuliers , détruire un ufage auiîi ancien que
Taleizat, juger contre la coutume, ne pas avoir
égard aux furprifes vifiblement faites a ceux qui
paroiiïent conientir à la fuppreffion des fécondes
herbes, voilà ce que l’on propofe de faire au C o n feil Supérieur, après avoir furpris le R o i , par des
menées auiTi fourdes que criminelles.
F A I T .
Taleizat eit fitué dans la haute A uvergne, a deux
lieues de S. Flour : il n’a que 4. à feterées de com
munaux ; il s’y trouve néanmoins beaucoup de prés,;
mais tous appartiennent aux héritiers P rivât, la
dame de M ontlouby , Carriere & Barthomeuf.
Com m e de tous les temps les chofes ont été
dans cet é ta t, de tous les temps les Habitants, qui
n’avoient pas de quoi elliver leurs beftiaux , ont eu
le droit de fécondés herbes dans ces prés, qui iitués en pleine coutume d’Auvergne , <Sc n’ayant
jamais porté revivres , font régis par l’article 4 du
titre 28 , qui permet de faire pafturer le beftail eç
héritages portants fruits , /oit prés ou terres, iccux
levés.............. f i 11 ejl e% prés où ¿'ancienneté Von
a accoutumé faire revivre.
�3
Le fieur P riv â t, Procureur du R oi a S. P lour,
homme puiiTant'a T aleizat, fut le premier qui con
çut le projet de fupprimer ce droit de fecondeskerbes: il éveilla tous les antres propriétaires au
nombre de quatre , 6c après des prieres, des me
naces , d e 'l’argent prêté , de petits fervices rendusà quelques malheureux de la paroiiîe, il fit cons
truire clie^ lui certain délibératoire du 2 j Juin 1 7 6 5,dans lequel il paroît que vingt-cinq perfonnes qui
font dites tous faifant la communauté ¿'Habitants'
dudit lieu de Taleizat, ont (a) reconnu-qu’ancien
nement les- prés de Taleizat portoient foin 6c re
gain, que depuis quelques années, il s’étoit introduit’
parmi eux unufage iingulier de ne faucher qu’une
fois leurs prés, ce qui étoit contre l’uiàge de tous;
les villages 6c de la Province d’Auvergne ; que les
iecondes herbes dont ufoient les gens de Taleizat
empêchoient la confommation des herbes des pâturaux pendant l’été, attendu que les Habitants-nfcpouvoient eiYiverdebeitiaux qu’autant qu’ils en pouvoient hiverner. Ils dirent que ce droit étoit a char
ge a la communauté , qui par la n’avoit aucun;
iumier pour améliorer les terres , & que la fuppreffion de ce droit, en facilitant le paiement des im
pôts, dont ils étoient furchargés, empêcheroit leur
expatriation.
Le fieur Privât 6c Barthomeuf crurent qu’ils
pouvoient agir en vertu de ce feul délibératoire.
(a) C et extrait eit fidele.
�D ès le lendemain leurs près furent fermes ; mais
les habitants, même ceux qui font en nom en
l’a& e, ignorants ce qui s’étoit pailé , réfiilerent.
Barthomeuf prit desbeiliaux, le village s echauflà,
Barthomeuf craignit, &c s’applaudit de les avoir
rendus , fentant bien que , quoique l’on puniilè le
défefpoir des gens , il n’y si qu’un téméraire qui,
l’excite.
_ '
:
Le fieur Privât m ourut, & en mourant il re
nonça a fes projets odieux , recommandant a fes
domeftiques de mener fes beftiaux aux fécondés
herbes, 6c de le faire avec toute la publicité
Alors Barthomeuf, qui ne travailloit qu’en ious
ordre , devint chef d’un parti, que lui & la dame
de M on tlou by, dont il eil fermier & homme
d’affaires, avoient trop intérêt de ne pas laiilèr étein
dre. O n croit d’abord qu’il agit en vertu du,dé
libératoire : point du tout. O n ne voit ni fes ac
tions, ni fes mouvements; il paroît s’endormir en
176^ , pour ne s’éveiller qu’en 177 3 .
Le délibératoire eftd e 1765 ; au bout de
ans de fom m eil, il obtient 1111 Arrêt du Confeil
d’Etat du R o i, le 21 Août 1770 , qui rend les
prés défenfables juiqu’à la Saint M a rtin ,
il
garde cet Arrêt avec le délibératoire. Trois ans fe
pailènt encore dans le filence le plus profond, ÔC
il obtient des Lettres Patentes, le 12. M ai 17 7 9 ,
qui ordonnent la même chofe, & font adreiTées
à la Cour pour y être cnrégiftrées.
\
�Barthomeuf ne dit rien de touàcela àTalciza*,;
dont les Habitants jouiiïoient toujours des fécon
dés herbes. Arrêt de la C our du
Juillet 1773 ,
q u i, fur la requête de Barthomeuf, ordonne une
enquête de commodo & incommodo. L e 18 cette
enquête fe fait chez la dame de Montlouby par
le Lieutenant Général de Saint-Flour, qui couche
chez Barthomeuf ; dans cette enquête on n’entendque des parents & des amis de la dame de M ont
louby , que l ’on a eu la précaution de ne pas
mettre en caufe , que des. gens étrangers, que des
débiteurs de Barthomeuf. A rrêt du 31 Juillet,
q u i, fur requête, enregiftre les Lettres Patentes.
Com m e l’on v o it, la Procédure a été prompte :
en huit jours de temps tout eft confommé. Le but
étoit de dérober aux Habitants la connoiiTance de
la matiere que l’on traitoit; aufil lorfqu’ils virent
le Juge de Sain t-Flour a Taleizat, fut-on obligé
de répandre le bruit qu’il venoit informer contre
le C uré du lieu.
Barthom euf, muni de fon A r r ê t, voulut le
mettre a exécution ; il faifit les beftiaux de trois
Particuliers , un d’eux fe laiila condamner par
défaut, les deux autres confentirent condamna
tion ,
Barthomeuf, leur rendant leurs beitiaux ,
les tint quittes.
Mais le 0.4. Aouc tout le village, tant ceux qui
paroiiîènt aii délibératoire de 176^ , que ceux
qui n’y font pas, ignorants 6c les Lettres Paten
tes 6c les Arrêts de la C our , abattirent les mu
�6
railles que Barthomeuf 6c Carriere avoient fait
élever autour de leurs prés ; procès verbal en
fut d reiîé, Arrêt intervint le 30 , qui , par
provifion , ordonna l’exécution des Lettres Paten
tes , & permit de faifir les beitiaux qui fe trouveroient dans les prés.
■A lo r s , (■& voici le premier a£te public que
Barthomeuf ait fait ) alors il fit afficher & publier
à la porte de l’Eglife cet A rrê t, q u i remplit de
refpeft 6c d’étonnement tous les Habitants.
Ils efpérerent enfin d’avoir juftice , ceiTerent les
voies de fait dont ils étoient en droit d’ufer , 6c
s’ ailèmblerent pour prendre la voie de l^oppofxtion.
Quelques-uns n’oferent réfifter à Barthomeuf,
&c ne voulurent rien accorder ni contefter* à cet
homme la ; mais trente-un autres prirent leur parti,
£>C délibérèrent de défavouer tout ce qui avoit été
f a it , démandé &: par lui obtenu pour l’autre par
tie du village.
C om m e le PrédéceiTeur de M . l’intendant
avoit homologué le délibératoire de 1 7 6 ^ , celui
de 1773 , qui étoit abfolument contradi&oire , ne
le put être ; mais loin que cet incident rebutât les
O ppofants, ils réfolurent de plaider chacun en
leur n om , puifqu’ils ne pouvoient pas le faire en
nom collectif.
Q u ’a fait Barthomeuf? il a taché d’attirer dans
ion parti plufieurs des oppofants. Il les a fait boi
re , m anger, leur a fourni du tabac 6c prêté de
�■V7
«■
7
l’argent ; huit des oppofants ont défavoué tout cô
que l’on avoit fait pour eux. M ais Barthômeuf, à
qui ils ioutiendront, quand il vou d ra, qu’ils ont
déiavoué tout ce qui s’étoit fait, fans lavoir ni
pourquoi ni comm ent, Barthômeuf oleum perdidit.
Nous rapportons aujourd’hui le défaveu de ces
prétendus déiaveux , un a&e par lequel 2,4. H a
bitants renouvellent leur premiere oppofitio.11, ce
font eux tous qui plaident en préfence de 14 au-*
très qui ne veulent prendre aucun p arti, crainte
de fuccomber ; Barthômeuf n’a donc pas feule
ment quatre mutins a réduire en dépouillant le
village de T aleizat, c’efl: donc plus de la moitié
du village qui s’oppofe a Tes injuftices, 6c voici
fur quoi elle fonde ion oppofition.
M
1
O Y
E N -S .
Les Lettres Patentes iont obreptices êc iiibreptices ; la procédure faite en conséquence, 6c les'
Arrêts intervenus fur icelle font nuls.
. -n rr
P ' R E M
I E R E - P
A R T
i
I E.
7
O b r e p t i o n .
L ’obreptiôn confifte à fuppofer un f a it , pour obtenir quelque ‘grâce qiie l?on neût pas obtenue,
fi ce fait n’avoit été fuppofé.
Pour obtenir la fuppreifion des fécondés her- J obr^ o^ '
�8
bes , Barthomeuf a été obligé de iuppofer dans le
délibératoire que les 27 Habitants y dénommés
faiioient la communauté entiere de T aleizat, il a
été obligé de l’expofer. ainfi dans fa requête au
R o i , qui, n’eut accorde ni A r r ê t, ni Lettres Pa
tentes , fi l’expofé n’avoit été tel.
L e délibératoire porte : Tous ( les dénom
més ci—deiTüs ,) faifant la communauté d'Habitants
dudit lieu de T aleizat, lefquels de leur bon gré ,
L ’À rrêt du Confeil du R oi porte : V u la requete préfentée au R o i ? en fo n Ç o n fe il, par les
Habitants & Laboureurs xde la paroijje de T alei^at.
!
r
• •
11 fuit bien de ces termes que l’on a expofé au
R o i que tous les Habitants de Taleizat demandoient la fuppreifion des fécondés herbes : que
le R oi n’a prononcé' la. iiippreiïion des fécondés
herbes, que parce que tous les Habitants la de
mandaient ; delà deux objets à prouver : l’un ,
qu’il s’en faut plus de la moitié que tous les H a
bitants aient demandé cette fuppreifion : l’autre ,
q u e , pour que cette fuppreifion ait lieu , il faut
que tous les Habitants , ufque cid unum , l’ayent
demandée.
. „
§. I.
L es z y ’ uîénqpinif s au (h’libératoire de ¿765 ne
J ç n t-p o in t la .communauté.
.
;
,
¡,
Il y a 27
perfonnes de nommées dans le
délibératoirc
�délibératoire de 17 65 , qui fait la bafe de la de
mande de Barthomeuf. N ous rapportons le rôle
des Tailles de 1765 , cette piece eft irrécufable ,
ôc nous y trouvons qu’il y a 94. cotes ; de ces
94. cotes il en faut ôter 33 , qui , quoique de
laparoiiîè de T aleizat, ne font pas du village ;
ainfi relient 6 1 fe u x , 61 chefs de famille à T a
leizat. Si donc il ne fe trouve que 27 vocaux dans
le délibératoire de 176$ , il s’enfuit que la moitié
de la paroiiTe n’a pas été appellée
il s’enfuit in
vinciblement que l’on a fait un faux expofé au
R o i , lorfque l’on lui a dit que ces 1 7 vocaux
faifoient tous la communauté cCHabitants de Ta~
lei^at. Il y a obreption, la preuve en eft on ne
peut pas plus claire.
En effet fi on n’eut pas expofé au R o i que ces
27 vocaux faifoient le village entier de T aleizat,
il on lui eut expofé au contraire q u e, pendant qu’il
y avoit 27 demandeurs , il y avoit 34. perfonnes
qui n’avoient point été confultées, ou qui refufoient
de confentir a la ilippreftion des fécondés herbes,
le R oi n’eût accordé ni Arrêt ni Lettres Patentes,
voici pourquoi.
§.
I I.
I I faut que tous les Habitants, ufque ad unum ?
confentent à la JuppreJJion desfécondés herbes. Taleizat n’a point de comm unaux, les fécondés
B
�^
IO
herbes lui en tiennent lieu. L ’on doit Juger des fé
condes herbes comme des com m unaux, & ceuxci étant inaliénables & imprefcfijriibles, celles-là
doivent jouir des mêmes privilèges. Ce n’eft qu’avec
l’autorité.du R oi que l’on peut porter atteinte aux
communaux, les Parties adveries ont eu recours
au R oi pour fupprimer les fécondés herbes. Elles
¡ont donc reconnu que les fécondés herbes devoient
;fe juger comme les communaux ; or in pari caufâ
idem judicîum.
Dix Habitants
Suivant la coutume <le-Nivernois, chap. i %art.
font communauté
t r
I
rr i l r o
.
pour délibérer fatJJ . dlX fOîlt peUlUC OU Cl etÎlbléc'' 'Qt tOUS les A u chofe de pure pofin
\
r ce •
n
lice & non per- teurs dilent que ce nombre lumt pour compofer
«natieme.
.une aifemblée faite pour choie1qui concerne l’adminiflration d’une communauté , charger Procu
reur , nommer Synd ic, parce que ces choies ne
font pas permanentes; tous dilent que les autres
Hjbitants ne peuveht s’en plaindre , parce que c’eiî
à eux à s’imputer la faute de ne s’y pas être trouvés,
il faut les deux Mais tous les Auteurs difent en même-temps que
n'autépôurobliger dix Habitants ne fuffifent- pas, lorfqu’il s’agit d’un
Ja communauté. çmprunt xonfidérable , de paffer tranfa&ion ; qu’il
faut alors au moins les deux tiers des Habitants, &c
c’eil là en particulier le fentiment de Baquet en
foti traité des droits de juilice, chap. 2 9 , n°. 22
& 23 ; de Tronçon fur l’article <51 de la coutume
dç ¡Paris ; de Legrand fur Part. 64 de la coutumede Trbyes , n°. 34. '
11faut latotalité E nfin, ajoutent les mêmes Auteurs avec un
,des Habitants ufi
r •n
vi /'
1
i
„¿«n«*«,pour nombre innnid autres, qu il-leroit trop long de ci-
�11
ter, s il s 'a g i t e d’aliéner partie des communaux,
bois, pâturages, ou même de traiter avec le Sei- pâturages, &c.
gn eu r, s’afiiijcttir à un droit de bannalité , fo u r, *
moulin , corvées & autres fervitudes : il' faut que
tous les Habitants foient afiemblés, fans exception, '
parce que l’exécution s’en fait ab omnibus ut a
jin g u lis, chacun y eft intérefle pour foi, ôt paye de r
fa perfonne ou de fon argent. Etant de principe
que routes les fois qu’il s’agit d ’une chofe’ qui ap
partient a tout un corps, non comme corps, mais
comme appartenante a chacun des membres en
particulier, qui perd quelque chofe, ou eft aiTujet- jti perfonnellement, il faut le confentement de tous.- ^
L a Poix de Fréminville n’elt pas le feul qui pehfe.
ainfi, avant lui Godcfroi fur la loi 1 9 , ff. ad nui- nicip. avoit dit : in his quee jiu nt à plunbns ut^ ab
omnibus, majoris-partis confenfus fujficit ; in his ~
autem quœ Jiunt à pluribus ut à jingulis , non fuffic it majons partis confenfus. Ferriere fur l’art. ?
7 1 de Paris ; DupleiTis, liv. 8 , chap. 2 des fiefs;
Brcdeau fur 71 de Paris, & une infinité d’autres
font la même diilin&ion.
*;
Si donc , pour l’aliénaiion des biens d’une com
munauté , il faut le confentement de tous les Ha- ;
hitants ujque ad unum , comment permettroit-on
cette aliénation , lorfque fur 6 1 Habitants il n’en
paroît que 2 7 , qui encore ont été furpris ou n’o
ient s’en expliquer , lorfqu’encore ces 27 ont é,é •
■dits, fauiîèment au R o i, faire le total de la com
munauté } tandis qu’ils n’en font pas la moitié ,
B 2
1
�IX
ioriqu’enfin il eil clair que le R o i , qui ( comme
on l’a plaidé ) fait to u t, Tachant qu’on ne peut
dépouiller, une communauté, fans que tous ies
membres n’y conientent, n’eut pas accordé iès Let
tres Patentes, s’il n’eut cru que les chofes étoient
dans l’état où on les lui expofoit. Il y a donc obreption dans les Lettres Patentes, & le total des
Habitants n’ayant jamais demandé la fuppreilion
des fécondés herbes , il eil: donc impoiîible de l’or»
donner par l’enrégiflrement de ces Lettres.
Contre ce premier moyen, on a bien ofé plaider
que le délibératoire de 176 5 étoit compofé de 36
perfonnes ; mais quand cela feroit ( ce qui n’eft
pas ) ce nombre ne ieroit pas fuiiifanr. O n a
bien dit que ce nombre faifoit com m unauté, que
les oppofanrs n’éroient qu’au nombre de quatre ;
c’eit à cela que Barthomeuf a réduit tous fes
moyens Mais', comme l’on v o it, cela ne répond
>as au rôle des taillesde 1765 , qui prouve que
’on n’a point appellé tout le village au délibé
ratoire portant aliénation des fécondés herbes ;
cela ne prouve pas que s’il y a 17 demandeurs en
enrégiftrement de lettres , il y a réellement 10
oppofants pour lefquels ce Précis cil: fait, & qu’il
y a i^. perfonnes , qui ne voulant fe mêler de
rien , relient dans l’ina6lion, & p ourrjn t après
le jugement former oppofition a l’ Arrêt. Quand
Barthom euf réuniroit aujourd’hui tout le village,
tout ce qu’il a fait n’en feroit pas moins nul.
H é, pourquoi! c’ eft que le délibératoire de 1765>
Ï
�cp'b
13
portant que les 2 7 vocaux font la communauté
entiere de T a le iz a t, il contient un faux , fur lequel
font intervenus un A rr ê t du C o n fe il d’Etat, des
Letcres Patentes & des A rrêts du C o n fe il Su
périeur ; que tout cela ayant pour bafe un faux
fu ppofé, tout cela eft nul de toute nullité.
L e délibératoire ds 176^ & la R equête pré- Ile. Moyen
fentée au R o i portent qu anciennement tous les D° BRE*T10*'*
prés des Habitants du village de Taleizat por
taient fo in & regain ; que depuis quelques années
il sétoit introduit parmi eux & dans leur village
un ujage fingulier , de ne faucher quune f o is
leurs prés.
C ’ eft encore la un faux expofé. Si en effet les
prés de Taleizat avoient jadis porté foin & re
gain , eft-il pofiible de croire que les propriétaires
de ces prés en euilènt abandonné la fécondé her
be au public? N ’eft-il pas plus naturel de croire,
en voyant Taleizat réduit a 4 a 5 feterées de
communaux , que dans l’origine les fécondés
herbes ont eu lieu, & que quelqu’ eiTai que l’on
ait tait en différents temps pour faire porter revivres
aux prés de T aleizat, on n’a jamais pu y parvenir.
L ’ état des choies eft d’abord une preuve pour les
Oppofants ; cette preuve eft foutenue par l’art. 4
du tit. 2,8 de la C o u t u m e , qui permet de mener
paître les beftiaux dans tous les prés 6c terres où
l’on n’ a pas accoutumé faire revivre.
A cet article de C o u tu m e , à des chofes exiitantes, au défaut de’ pâturaux, a une néceflité de
••
�fécondés herbes attachée au fol d eT a leiza t, qui
n’a point changé, on oppofe un ancien ufage;
& où eft donc la preuve de cet ancien ufage ?
Elle c ft, nous dit-on dernièrement à l’ A u
dience, confignée dans l’enquête de commodo &
incommodo ; mais outre que cette enquête eft
nulle pour avoir été faite en vertu d’A rrèt obrep*
tice,fans parties appellées ; outre qu’elle eft nulle,
parce que tous les témoins en font reprochablcs ,
pour être parents des véritables Parties adveriès ,
)our être leurs débiteurs & ne pas connoître le
o ca l, c ’eft qu’aucun des témoins ne dépofc de
cet ancien ufage. Ils difent bien qu’ils ne favent
pas quand les fécondés herbes ont commencé à
avoir lieu en faveur des Habitants , mais ils ne
difent pas qu’ il y eût auparavant un ufage con
traire : ils ne fixent point les époques de la ceflàtion de l ’un & du commencement de l’autre. Il
n’y a donc pas de preuve, comme le prétendBarthom euf, de cet ancien prétendu ufage.
O n plaida enfuite que ce fait étoit indifférent.
N ’étoit-ce pas plaider qu’il étoit indifférent de
faire un expofé v r a i, eu un expofé faux au R o i,
de lui furprendre .des Lettres Patentes, quelque
moyen que l ’on employât pour les obtenir, pourvu
que l’on les obtint?
O n en vint jufqu’h dire que peu im portoitque
la Coutume fût contraire à la prétention de Barthom euf ; mais eft*cc là répondre à un moyen
d ’obreption "? N ’eft-cc pas là pouiïer l’abfurdité
j u f q u a l'on comble?
Î
�s> *
M
En effet, Barthomeut dit dans fa requête au
R oi que l’ancien ufage privoit les Habitants des
fécondés herbes ; on dit a Barthomeuf qu’il en
a im pofé, que jamais les prés n’ont fait revivre :
on lui ajoute que la coutume autorife en ce cas
les Habitants a prendre les fécondés herbes, qu’il
n’eft pas préiumable que l’ufage des fécondés her
bes fe foit introduit fans raiion en faveur des H a
bitants , qu’il faut que ce droit ait exifté de tous
les temps, que l’article de la coutume n’a pas été
mis fins iujet, qu’il a été fait pour les Paroiiîès
mal fituées 6c fans communaux, 6c il nous répond:
cela eft égal, cela eft indifférent. C ’eft a la C o u r
à juger du mérite de l’obje&ion 6c du mérite de
la réponfe; mais toujours eft-il vrai qu’il s’en faut
bien que la réponfe vaille l’obje&ion.
Barthomeuf a expofé dans fon délibératoire de nie. Moyen
D O B R E P T IO N .
i 7 6j 6c fa requête au R oi que les regains 6c les
revivres étoient d ’ufage dans toute la Pro\ince
d’Auvergne 6c dans tous les autres villages de
Taleizar. .
C ’elV encore là un faux expofé. Toute la Pro-*
vince d’Auvergne n’a pas pour maxime de faire
porter revivre a fes prés. Tous les villages ne {ont
pas privés des fécondés herbes : pour s’en convain
cre , il n’y a qu’à fe rappeller l’article 4 du tit.
de la coutume d’ Auvergne, & l’on y voit que*
naturellement les prés portent revivre ; que ceux
qui ne portent pas revivre font exceptés de la loi ' .
générale, à caufe de la poiîeifion ancienne 6c im.
�16
mémoriaîe où ils font d’être clos & bouchés ; mais
cette poiîèiîion ancienne eft un privilege pour les
propriétaires ôc une privation pour ceux qui ont
droit aux fécondés herbes. D ’où il fuit que Bàrthom euf a non feulement vifiblement trompé le
Prince en lui expofant que les fécondés herbes
n’étoient pas d’ufage dans toute la Province d 'A u
vergne y mais encore qu’il a pouffé les choies au
point qu’il a engagé les Habitants de Taleizat a
fe priver d’un droit qu’ils avoient, pour lui donner
un privilege qu’il n’avoit pas.
a°. C e t ufage de tous les villages circonvoifins
n’eft pas vrai ( b ) ; mais quand il le feroit, que
s’enfulvroit-il ? les villages voifins ne font pas fitués
comme T aleizat, ils ont des communaux , ce ne
font pas 4 a ■
>particuliers qui y pofledent tous le>
prés. Enfin fi dans les villages voifins tous les prés
ont été clos d’ancienneté par les propriétaires au
préjudice des Habitants, c’eft la faute de ces H a
bitants de s’êtrelaifTés priver d’un droit qu’ils avoient,
&: laifîe acquérir fur eux un privilege. L a faute de
ces Habitants ne doit pas faire la condamnation
des Habitants de Taleizat, & quoiqu’en dife Barthomeuf, le droit de la coutume d’Auvergne eft
toujours d’abandonner les fécondés herbes des prés
aux Habitants, puifque fi la coutume ôte ces fè(b) A lla n c h e s & M u râ t , q u o iq u ’a y a n t b eaucoup d e c o m
m u n au x , jouifi'ent du d r o i t d e fécondes herbes : à S. i ’io u r le
p iê.ne d ro it a lieu.
condes
�condes herbes, ce n’ eft que dans le cas où les près
aurcient fait revivre d’ancienneté, que par conféquent c’elf la une exception a lo i, &:!que dans la
faine raifon, pourfaire exception à une; loi ' il faut
qu’il en exille une générale, qui fait le droit com
mun 6c univerfel du pays. C ’eft auffi dans ce fens,
que Barthomeuf a toujours parfaitement bien en
tendu que nous^ propofons notre troifiéme: moyen
d’obrepticn, fondé fur ce que l ’on a trompé le j l o i
fur le droit & l’ufage de la coutume d’Auvergne.
Barthomeuf a expofé au R oi que pendant l’été d*obrepÎ ioh.K
les Habitants de Taleizat ne pouvôieht pas confommer leurs pâturages, n’ayant pas la ‘liberte de ‘
tenir plus de beiliaux qu’ils n’en pouvoient hiver
ner.
• C e f t encore la un faux expofé; Les Habitants r -•
de Taleizat n’ont point dé communaux, ce qu’ils
en ont, ne peut nourrir lé'gros bétail’ 6c ne iùfft-'
roit pas a cent brebis ; tout eft rocher , tout eft
fec , tout cil aride , tout eft ftérile a Taleizat- :
n’eft-ce pas la un fait notoire ¿^comment Bartho
meuf peut-il entreprendre de perfuader le con
traire ?
Que répond-t-il a ce fait que les Oppofants ar
ticulent ? il n’ofe pas le nier ouvertement 6c en
public, du moins ne l’a-t-il pas fait a l’Audience :
il répond que quand les Habitants de Taleizat
n’auroient pas de communaux , il n’y auroit pas
faux expofé : mais quelle abfurdité ! Si Taleizat
n’a pas de communaux, il n’a pas d’herbes * s’il
c
�i8
n’a pas d’herbes’ , comment eft-il vrai qu’il s’en
perd par la trop grande abondance ? comment eftil vrai que les fécondés herbes lui font inutiles ?
comment peut-il lui être avantageux d’en être
privé ? cela étant iènfible, 6c le faux expoie étant
dém ontre, pafïons à la fùbreption.
S E C O N D E
P A R T I E .
S U B R E P T I O N .
.1 . '
1
L a fùbreption confifte à taire des choies q u i,
fi elles eufîènt été feues , eufïènt empêché le Sou
verain d’accorder la grâce que l’on lui demandoit.
: Barthomeuf a tu au R o i, que fi le droit de fé
condés herbes avoit lieu à Taleizat, ce village tenoit ce droit de la Coutume.
Il eft vrai que Barthomeuf a répondu, a l’au
dience , que le R oi favoit to u t, qu’il favoit par
conféquent que l’ancien ufage de Taleizat étoit
contraire à l’ufage aduel.
Mais fi le R oi fait to u t, que deviendra donc
la fùbreption ? il faut donc la rayer du nombre
des moyens que le R oi veut que 1on emploie
contre les grâces qu’il fait , 6c qu’il n’accorde
jamais que fous la condition que. toutes choies lui
ont été expofées dans leur véritable point de vue ?
fi le Roi fait tour, a quoi bon l’adreile qu’il fait
aux Cours de fes Lettres , n’eft-ce pas pour les
�19
^
vérifier ? à quoi iert cette information , de coirtmodo &’ incommodo , n’eft-ce pas pour découvrir
la vérité toujours iuipeétée en pareil cas ? le R oi
ne fait donc pas to u t, puifqu’il veut que l’on vé
rifie les faits ? en difant que le R oi fait tout ,
Barthomeuf convient qu’il ne fait rien lui-m êm e,
qu’il ne voit rien qui puiilè répondre à notre ob
jection.
Barthomeuf a tu au R o i que , fi les villages
voifins n’avoient pas droit de fécondés herbes ,
c’eft qu’ils avoient des communaux , c’eft qu’il y
avoit titre ou poiïeiïion contr’eux de la part des
propriétaires.
Et qu’a-t-il répondu: a cette obje&ion ? la même
chofe que ci-deilus : Le R o i Jait to u t, il favoit
cela, il n’e'toit pas befoin de le lui dire. 'JSJlême
réponfe par conféquent.1 '
Barthomeuf a tu ;au R o i'q u e 'le s‘''pires de T a - n ie . M oyen d*
•1 •
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^
T i\ " ■ /
„
SUBREPTION.
leizat n appartenoient qu a 4011/$ iroprietaires.,
que le relie n’avoit aucun communal , aucun
fo n d s, ou fi peu. que cela nevaloit nas.la peii>e
d’ en parler.
' ; - •_; ■-1 /
™
f
E t Barthom eiif à plaidé1qu’il n ^ voirpas dit
cela au R o i , parce que cé fait étoit faux: “
Les Oppofants perfiftent néanmoins1' dans ce
qu’ils ont dit , & foutiennent; que la' clame de
M ontlotiby B arth om eu f, Càm erpfy Fontanier
& les Héritiers Privât enleVent à; eux *feul’s .tous
les foirts de Taleizat , qu’il n’en appartient pas 100
chars au refte des Habitants.
C *
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y-«
-I
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�20
T R O I S I E M E
P A R T I E .
t
. N u llité de toute la procédurefaite parBarthomeuf.
!•
■-rt h■
Les Lettres Patences font viciées d’obreption &
fubreption. Barthom euf s’eft préfenté a la Cour
pour les faire entériner. Il a parlé au nom de tout
je village de T aleizat, tandis qu’il n’étoit charge
que par 27 Habitants. Il a induit la C o u r en er
reu r, comme il y avoit induit le R oi. Le premier
A rrê t, rendu par la C o u r eft donc. ,nul comme
obreptice & fubrepticc.
1
C et A rrê t eft d’autanr plus n u lp que s’il eut été
expofé au Confeil Supérieur qu’il n’y avoit que 27
Habitants qui demandoient la fuppreiîion des fé
condes herbes , que fi on eut expofé que tous n’avoient pas donné leur avis, .que fi la Cour eut
iii qu’il y eût eu,un feul Oppofànt, au lieu d ’or
donner fu rie champ une information de commoi/o & ijîçp.mmodQjr elle auroit prdonné,, fuivanc
Tordre de là procédure, que les* 0 [Vpofants ftiilènc
appelles.,pgur. favoir,; leur .radions;?rrleur auroit
permis, cj’articuler,, des ..faits., contraires au de libé
ratoire d e . . a u r o i t 'f a i t , f a i 'r e . l ! i n f o r m a t i o n
^ntradiâD irem cnt.ay.ec.eux. y
-j ,
sJi.> p ' . ' y ^ '•v'1' r Î- \ 1' :
J^
'1 Vd ^
; L înrorm^tiopfh ite a ^ rçquet^ d e ,M ,.lc P r o
cureur Général' eft eiicore,,n.ulle ^..patjce’ qucj M .
le Procureur Général e^bien le jprortîâeur ne des
communautés ; mais- lçs Oppofants aux délibéra-
�toircs doivent être en caufe aufïi-bien cjne lu i,
pour détendre leurs droits, perionne ne les en
tendant mieux que le perionnellement intérefle.
Il a été ordonné que l’information feroit faite à la
requête de M . le Procureur G én éral, parce que
tout Taleizat étant dit confentir & requérir l’enrégiftrement, il n’y avoit que lui que l’on put met
tre en caufe.
Si l’enquête eft nulle , l’A rrêt auquel les vingt
Habitants ont formé oppofition étant toujours
vicié d’obreption 6c fubreption, eft également nul,
rien de tout ce qui s’eft fait ne peut fubfifter.
V oyon s quelles font les raiions avec lefquelles
Barthom euf a prétendu fejuftifier de ces nullités
radicales.
Il pôle pour principe ce qui eft en queftion.
L ’ A rrê t, dit-il, le premier A rrêt de la C o u r ne
porte pas que je vous mettrai en caule. N ous la
vons parfaitement cela. Ce n’étoit pas là le but de
Barthom euf, il s’en faut bien. Mais pourquoi cet
A rrêt ne le porte-t-il pas? c’eft que vous avez
furpris la C o u r, en lui difant que tout le village
de Taleizat étoit d’accord-, que tout le village
.de .Taleizat demandoit U iiippreifion des fécondés
herbes : ce fait étoit faux ; obreption par conléquent.
^ L ’information, dit Barthom euf, n’eft pas nulle,
quoique faite"chei, la dame de M on tlon by, parce
.que, qu oiq u ’elle ait beaucoup de prés à T a leiza t,
Çc que Î’on ait entendu quelques-uns de les parents,
gens qualifiés , cette dame n ’eft point partie en
la caule.
�(ûX
11
M ais v o u s, fieur Barthom euf, vous êtes bien
partie au procès, puifque, fans vous, il n’exiileroit
pas, puifque iî vous n’exiiliez p as, il n’auroit ja
mais exiilé. H é bien! les Juges de S. Flour , qui
ont procédé à cette information , ont couché, bu
& mangé che^ vous & avec vous ; eft-ce là une
nullité?
Dans cette information que vous n’ofez fignifier,
toute avantageufe qu’elle vous eft, pour éviter les
reproches qui pleuvroient fur les témoins qui la
com pofent, l’articulation du contraire des faits qui
y font dépofés, &: bientôt la preuve que ce n’eft
qu’un tiifu de menfonges , dans cette information ,
n’avez - vous pas fait entendre les parents de la
dame de M ontlouby, vos débiteurs, des gens qui
dépendent de vous, des gens qui n’ont peut-être
jamais vu les ccmmunaux de Taleizat, qui n ’en
ont jamais examiné la nature du fol ? ne font-ce
pas là des nullités, qu’avez-vous à dire à cela ?
Réponfes à dautres objections faites par B a ithomeuf
l°. Il oppoÎè une fin de non-recevoir en la for
me , réfultant du filence des Oppofants, jufqu’à la
lignification de l’A rrêt fur requête, qui ordonne
l’enrégiilxcnicnc des lettres.
Pitoyable fin de non-recevoir, vous ères l’ou
vrage d’un défefpéré! rappelions les faits, Bartho*
m euf n’appelle que 1 7 Habitants, lui compris au
�lo2f
délibératoire de 1 7 6 ^ ; il met en poche ce déli
bératoire , ce n’eft que cinq ans après, ce n’eft
qu’en 1 7 7 0 qu’il le préfente au R o i , ôc obtient
un A rrêt du Confeil.
Il met cet A rrêt du Confeil avec le délibéra
toire; ce n’ell: qu’en 177 3 qu’il leur fait voir le
jour
obtient des Lettres Patentes. Pendant ces
huit années perionne ne trouble les Habitants dans
leur pofTeiTion des fécondés herbes, ils ignoraient
les fourdes menées de Barthomeuf, qui n’en parloit
pas même à ces cofyndics, tant il avoit peur de
manquer ion coup.
Il vient a la C o u r, y furprend un A rrêt qui
ordonne une information. Il fait venir des témoins
éloignés qu i, fous prétexte de vifite, vont chez la
dame de Montlouby figner leurs dépofitioris. Le
nombre. des vijîtants excite la curiofité des Habi
tants, ils veulent favoir ce que font les Juges de
Saint-Flour chez la dame de M ontlouby , ils veulent
favoir le fujet des vifites que l’on lui rend ; Bar
thomeuf dit a chacun en particulier & d ’un air
m yftérieux, que l’on informe contre le Curé de
Taleizat , a qui l’on va faire le procès. A u lieu
d’appaiièr les mouvements de curiofité , Bartho
m euf, avec ce menfonge , les excite davantage ,
& r on découvre la vérité.
Auifi-tôt les Habitants prennent le parti de
s’oppoièr à la fuppreflion des fécondés herbes ; ils
vont garder leurs beftiaux : l’Arrèt d’enrégiitre-
¿üi
�M
Ku,
a4
ment fur requête eft du 31 Juillet, le 8 A oût il
eft publié , & le 10 trente-deux Habitants s’a f
femblent pour s’y oppofer.
/
Avant cette publication, cette affiche de l ’A r
rêt , peut-on dire que ces Habitants euilent connoiiîàncé des' démarches de Barthomeuf, puifqu’ils
ne connoiiîoient pas le délibératoire de 1765 ; que
même , quand ils l’auroient connu, il n’étoit pas
préfumable que Barthomeuf , qui l’avoit depuis
8 ans, en eût fait aucun ufage , puifqu’il n’avoic
fait faire aucune ailèmbl e , ni demandé aucun
fonds/A infi point de fin de non-recevoir dans la
forme , puiique la procédure eft non feulement
obreptice , mais encore frauduleufe , tortueuie ,
& 011 ne peut pas plus dangereufe ; car enfin quel
étoit le but de Barthom euf, en cachant ainfi fes
démarches? il favoit parfaitement que 1 7 Habitants
ne pouvoient dépouiller le village ; en habile hom
m e, repréfentant ces 27 Habitants, comme faifànt
la communauté entière, ion projet, fut de faire
clandeftinement toute fa procédure , afin de par
venir a un Arrêt d’enrégiftrement , au nom de
toute la communauté, de fupprimer enfuite le délibératoire , de ne montrer que les pièces qui
parlent purement 6c fimplement de toute la com
munauté, 6c de dire enfuite : l’Arrêt d’enrégiftre
ment fuppofe le délibératoirc, fi cet A rrêt porte
que tout le village a demandé la fuppreifion des
fécondés herbes , perfonne ne peut aujourd’hui
s’y
�s'y oppofer. C ’étoit là le but de Barthomeuf, &
l’on défie d’expliquer autrement fon filence de 8
années fur l’objet dont il s’agit.
a°. Barthomeuf oppofe une fin de non-recevoir , particulière a Antoine. Chaftinel ; il la fait
réfulter de ce qu’apr'es que l’Arrêt d’enrégiftrement a été rendu , ce Particulier oppoiant continua
de mener fes beltiaux , qui furent pris aux fécon
dés herbes , & fut condamné par une Sentence
rendue par le Juge des lieux.
M ais cette fin de non-recevoir eft im aginaire,
parce que Chaftinel n’a été condamné que par
défaut , qu’il a appellé de la Sentence , dont il
pourfuivra l’infirmation quand bon lui femblera.
30. Salus populi fuprema lex ejlo , s’écrie Bar- thom euf ! &: dans quelle bouche fe trouve cette
loi fainte , qui doit faire le premier m otif du ju
gement que le Confeil Supérieur va rendre ici ?
Barthomeuf dit qu’il fe fait un commerce confidérable de Mules a Taleizat ; que fi on n’ôte point
les fécondés herbes aux Habitants c’eft ruiner ce
Com m erce , qui foutient le peuple.
Mais Barthomeuf en im poiè, on ne peut pas
plus lourdement : jamais il n’y a eu de commerce
de Mules a Taleizat. Il eft vrai qu’il a acheté 4.
Mules au mois de M ars dernier, que Fontanier
&: Juilhe, fes adhérents, "en ont acheté chacun
deux , mais on ne voit de Mules que chez’eux. E it-ce
donc là un fonds de commerce? eft-ce là ce corn*
D
�16
mercc tant van te, qui devroit procurer la iubfiftance des gens de Thaleizat ? B arthom euf,
Fontanier & Garriere font-ils le peuple ? pour s’é
crier S alu s popuh ?
Suprema lex ejlo , hé bien, qu’il le ioit donc ;
examinons les inconvénients qu’entraînera la fuppreiïlon des fécondés herbes.
Barthomeuf n’uie plus des raifons employées
dans le délibératoire , il en a fenti la vanité ; peut»
être y reviendra-t-il clandeftinement, fuivons ce
délibératoire pied à pied.
O n y dit que les fécondés herbes étant fupprimées , l’on confommera les pailles par le moyen
de la mêlée qui s’en fera avec le regain , pour
nourrir une quantité fufHiante de belûaux , pour
produire & fournir du fumier qui engraiflera les
terres labourables &C produira l’abondance.
Mais B arth om eu f& fes adhérents raifonnent là,
on ne peut pas plus mal. Ils ne confultent sûre
ment que leurs intérêts, fans prendre garde que
tout le monde n ’eft pas des Barthomeuf.
L ’abondance vient bien des terres labourables
& labourées ; ces terres produifent bien , parce
qu’elles font fumées ; on fait bien du fumier avec
du regain ôc de la paille ; mais pour en venir là,
que Barthomeuf & fes adhérents donnent donc
du regain &c de la paille à 57 maifons qui n?ont
rien en prôpriété, qui n’ont point de communaux,
qui n’ont que les fécondés herbes pour toute reír
?
�4o7
,
X?
.
iou rce, qui, déjà prefque hors d’étàt d’hiverner les
beitiaux qui font leur ioutien & leur v ie , ne pour
ront jamais les eftiver, puifqu’elles n’ont point de
regain , & qu’elles ne pourront acheter de la
paille.
Tant que Barthom euf, qui a du regain <Sc de
la paille autant 6c plus qu’il n’en peut deiirer, dira
qu’il faut l’un & l’autre pour faire du fum ier; tant
qu’il dira de labourer la terre , & que loin
d’en faciliter le labour, il ôtera la nourriture
des befliaux , il eft confiant qu’il conflituera l’Habitant dans l’inipoifibilité d’exécuter ce projet,
d’autant mieux que, convenant que cet Habitant
eft déjà furchargé par les. im p ôts, il ne pourra
acheter ni regain, ni p aille, ni faire du fumier,
ni labourer, ni procurer l’abondance.
Renfermé dans la fphere, Barthom euf raifonne
comme un homme qui a tout ce qu’il lui faut
pour exécuter ce p rojet, qui eft bienfait pour des
propriétaires, mais non pour des malheureux qui
deviendraient les efclaves forcés de ceux à qui les
terres appartiennent. Q ue l’on applique a préfent
cette fameufe loi que Barthomeut nous cite avec
tant d’emphafe. S al u s populi Jùprema lex ejlo ?
Le délibératoire ajoute que les Habitants fe
font apperçus que l’ufage oii ils font d’abandon
ner les p rés, après qu’ils lont fauchés , leur eft
à charge, qu’il tend à leur ruine 6c deflru& ion,
en ce que , pendant l’été , ils ne peuvent confom-
ot
�mer leurs pâturages, n’ayant pas la liberté d’efc
tiver plus de beftiaux qu’ils n ’en peuvent hiverner.
M ais d’abord où lont ces pâturages ? Si Bar
thom euf vouloit les indiquer, s’il pou voit en don
ner d’à peu-pres fuififants , on lui abandonncroic
ici le champ de bataille.
E nfuite, fi l’on fait bien que l’on ne peut eftiver plus que l’on ne peut hiverner, comment peut-il
s’enîuivre que les fécondés herbes ruineront le
village de Taleizat? Les prés appartiennent touc
au plus à cinq particuliers, & comme expedit
imum hominem mori pro populo, on ne voit pas
que Barthom euf entre bien dans l’efprit de la loi
qu’il cite : Salus populi fuprema lex ejio.
Enfin , fi ce droit eft fi à charge, pourquoi
avoir recours à des remedes violents, à des déli
bératoires , des Arrêts du Confeil d ’E ta t, des
Lettres Patentes, des Arrêts de la C o u r, des in
formations ? Si ce droit eft à charge aux Habi
tants de T aleizat, il n’y a qu’à s’en rapporter à
eux, le remede eft tout fimplc , ils n’ont qu’à
n’en plus ufer. La Coutum e le leur confervera
pendant qu’ils uferont du projet œconomique ,
6c un homme qui veut faire le bien des gen s,
leur propofera plutôt de fufpendre l’exercice de
leur droit que d’y renoncer. En effet , fi le pro
jet ne réuilit pas , les Habitants de Taleizat ic
trouveront fans regain, fans paille & fans fécondés
herbes; Barthomeuf & les adhérents, les {culs qui
�2 9
en puiiTent fournir, puilqu’ils ont tous les prés,
y mettront tel prix que bon leur femblera , ÔC
au lieu d’avoir fait le bien du village , on en aura
occafionné la perte , & que deviendra la loi Salus populi fuprema lex efto ?
Le delibératoire continue & porte que fi l’on
rend les prés détenfables, les Habitants auront
l’avantage d’avoir en hiver plus de beftiaux, que
leurs fourages augmenteront, 6i qu’en été ils au
ront lieu d’avoir les beftiaux néceiïaires pour confommer les petites herbes vaines qui fans cela iè
perdent, que l’on payera facilement les impôts
dont on eft furchargé, ôc que l’on ceiTera d’être
vagabond.
Là les mauvaifes raifons manquent, & làauiïi
finiiïènt le délibératoire & la Requête préfentée
au Roi.
L ’attentif Barthom euf a tout compté. Il fem
óle qu’il fait jufqu’au nombre des brins d’herbes
qui peuvent par-ci, par-là, border les chemins de
Taleizat ; mais à quoi fert tout fon calcul, lorfque
1 im posibilité de Ion iyftême eft démontrée par
ion iyftême même.
D ’aprcs lui on eft furchargé d’impôts, on ne
peut les payer, on eft obligé de s’expatrier, 6c
Ion fait tout cela dans le temps où l’on jouit des
fécondes herbes; que fera-ce d o n c , lorfque l’on
ne jouira plus de ce d ro it} Couper un bras à un
homme , eft-ce lui donner le moyen d’être plus
�w>
3°
adroit ? Si avec un fecours, tel que les fécondés
herbes, on peut à peine fuffire à to u t, ne fera-ton pas absolument hors d’état de faire la même
ch o ie, fi l’on diminue les forces, ii l’on ôte ce iecou rs ?
Barthom euf prétend qu’en hiver on aura plus
de beftiaux, mais il n’offre pas d’en payer l’acquiiitio n , & de nourrir ces mêmes beftiaux, qui,
faute des fécondés herbes pendant l’été , auront
ruiné leur maître qui pendant l’hiver ne pourra
fubvenir à leur fubiiftance.
• Il prétend qu’en été ces beftiaux confommeront
les petites herbes vaines qui fe perdent, ôc il ne
fait pas attention qu’il reconnoît la qu’il n’y a pas
de communaux. Pourquoi en effet cite-t-il plutôt
ces petites herbes vaines que ces grands & gras
pâturages communs dont il a coutume de parler
& qui ne giflent que dans fon imagination ?
D ’après cela ne voit-on pas que fi jamais la loi
• Jalus popuh fuprema lex ejlo , a été faite pour être
appliquée a la cauie préfente , ça été pour foudroyer
Barthomeuf & non pour l’en voir abufer comme
il a ofé le foire.
Le refte des obje&ions ne tirant a aucune confequence, trouvant d’ailleurs fa réponfe dans tout
ce qui cil ci-deffus, il ne reile plus aux Oppofants
que de fe réfumer.
Obreption , fubreption dans les Lettres &c les
Arrêts rendus en conféquence ; injuilice , fauifeté ,
furprife, indignité , oppreiïion, vexation de la part
�pg?-------------
■
Hk
3 l1
de Barthomeuf contre les O ppofants, qui ne cefferont d’invoquer la loi fa lu s populi f uprema lex
ef t o , voila à quoi fe réduit la caufe.
Perfuadés qu’inftruite de leur m ifere, la C ou r
les traitera moins comme des mutins puniffables
que comme des pauvres défefpérés qui, manquants
prefque déjà de to u t, fe voient encore dépouillés
par Barthomeuf ; les oppofants demandent juftice
& s’affurent qu’ils l’obtiendront, malgré la brigue
& les démarches fouterraines de cet homme dan
gereux pour tout le village.
M o n f ieur C A I L L O T
A vocat Général.
D E
B E G O N ,
M e. G U Y O T D E STE. H É L É N E , Avocat.
, I m b e r t , Procureur.
A
De
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du R o i , Rue S. G enès, près l’ancien Marché au Bled. 1774,
l'im p r im e r ie
W.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Carriere. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Caillot de Bégon
Guyot de Sainte Hélène
Imbert
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
coutume d'Auvergne
droit de secondes herbes
enquête de commodo & incommodo
troubles publics
subornation de témoins
obreption
faux témoignages
communautés villageoises
consentement
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour vingt habitants du village de Taleizat, opposants à l'enregistrement des lettres patentes obtenues à l'effet de leur ôter le droit de secondes herbes dans le prés. Contre les sieurs Carriere et Barthomeuf, se disant syndics du village de Taleizat, réellement partie en la cause, et demandeurs en enregistrement desdites lettres patentes. Et vingt-trois autres habitants surpris, vagabonds, à qui la suppression du droit de secondes herbes eft indifférente ou qui, débiteurs de Carriere et Barthomeuf, nosent pas fe défendre, et font obligés d'en passer par leur avis.
Table Godemel : Secondes herbes. d’injustice et de violation de la règle salus populi suprema lex esto.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1765-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Talizat (15231)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53012/BCU_Factums_G0603.jpg
communautés villageoises
communaux
consentement
coutume d'Auvergne
droit de secondes herbes
enquête de commodo & incommodo
faux témoignages
obreption
pacage
subornation de témoins
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53097/BCU_Factums_G0936.pdf
332f905acce22ca04152cde66959ac8d
PDF Text
Text
P
R
É
C
I
S
P O U R L o u i s B O I S S O N , citoyen de la
ville de RiOM plaintif.
,,
CONTRE les sieurs TRAPET, MARCHAND
PELLABO U T, ASTRE, garçons tanneurs
et PE TIT, dit TIX IE R , voiturier, tous de cette
ville de Riom , accusés.
couru les risques de perdre la vie dans mon
ja rd in , où les accusés se sont introduits exprès pour
m’assassiner. Pour en avoir le prétexte, ils me provoquent
par les outrages les plus sanglans , et les obscénités les
plus infâmes.
L a présence de mes enfans, auxquels je dois l’exemple
de la prudence , et la crainte de les voir victimes de-la
fureur de ces forcenés, me rendent patient au-delà du
croyable je souffre les outrages sans y répondre ; ils
durent trois quarts d’h eu re, au m oins; e t , lorsque je
A
J ’A I
�\
■:
■ c o
v *
crains de voir pousser ma patience à b ou t, j ’ai recours à.
la fuite. J e quitte mon chez moi avec mes enfans ; je
l ’abandonne aux assaillans ; mais ils me poursuivent sur
le grand chemin ; ils se jettent sur moi : les coups de
pierres et de bâton pleuvcnt sur ma personne ; ils veulent
m’arracher un fusil , que je remporte de mon jardin à
la ville , sans doute pour consommer plus facilement,
avec cette j&rme , le crime cpi’ils ont médité : lorsqu’ils
sont trompés dans leur ^espW'j ils: ameutent le peuple
contre moi par le^cri qui leValîie f e f s i j ’ai Conservé la
yie 3 je la dois à plusieurs gardes nationaux qui accourent
au secours d’un, homme qu’on assassiné ( i ).
Pour me soustraire ai là *îiiréiir ^d’e^cé^peuple trompé
gar_ me^ ^ssassins^, qui^ crioient que j ’avois tué deux
hommes à coups'de fùsil , je suisv'<àBligé? de demander à
la m u n icip a lité un asile*dans le/séjour des c r im in e ls ,
tândis-que le s cciim in els;vtQnt coucher tra n q u illem en t dans
leur lit : pour comble de disgrâce ? j ’apprends qùfe l’on
impute mon malheur à une imprudence de ma part ; qu’on
répand que j ’ai tiré'su fiîes enfaris'qui se b a ig n o ie n t, et
p e n d a n t q u ’ils é to ie n t dans l ’eau.
i ■
~ J ’apprends encore que ces malheureux ont ,des pro
tecteurs , et qu’ils espèrent fermer la bouche à mes té
m oin s, et se.soustraire^à la punition de leur crime. Je dois
donc détromper mes concitoyens, et leur faire connoître
la vérité, les coupables, et la satisfaction qui m’est due.
( i ) MM. Barbat du Clozcl et Loriette, de Clermont; Dumontj
ci-deyant procureur ; Forel, oratoiienj Rougier, fils J Faure , grç*
nadier de la garde nationale.;
'
,
9
�yy ° )
< j. )
y ^
.Tout le jnbnde saif 4 u e rje suis adjadic^ita ire.cje l ’en cios
de Bardon , dont j ’ai fait un jardin à gros frais. Il est
fermé de murs à trois aspects ; un faux ruisseau , amené
du moulin des Boules, et-démembré du grand ruisseau,
à la faveur d’un droit de prise d’eau , le ferme à l ’aspect
de bise. Mon ja rd in , le Champ-Redon , et, le ruisseau
qui les sépare, ne form oient, avant mon adjudication ,
qu’une même propriété des dames religieuses de la visita
tion, de cçtte v ille , et la moitié de son lit fait aujourd’hui
partie de la mienne.
■
3;, ; ,
,■ * ,
. Au bout de mon enclos, à l’aspect de jo u r, les anciens
propriétaires avoient fait un rutoir ou une serve, aux
dépens du terrein qui en fait partie ; et à la faveurjd’une
digue qui en soutient le terrein , l ’eau „est retenuejî la
hauteur nécessaire, soit pour faciliter l ’irrigationfdes deux
héritages, soit pour faire chute au moulin .Bardon ,,.dont
les dames religieuses de Sainte-Marie étoient aussi pro
priétaires.
:
...
Depuis la digue jusqu’au mur de clôture , , à l ’aspect
de jo u r, le ruisseau porte le nom de ruisseau Beaum é,
parce qu’il l ’est effectivement; entre le ruisseau Beaumé
et l’ancieii rutoir, il y a une langue de terrein de 12 à
15 pieds, sur lequel sont d’anciens arbres qui font partie
de mon adjudication ( 1 ).
•j
. . . i;
Ainsi je suis seul propriétaire de l’ancienne .serve ou
( 1 ) Cela est établi par un plan géométrique des sieurs Manneville et Savarin qui ont fait 1arpentage de mon jardin , par ordre du
district, et j’ai fait l ’année dernière et celle-ci les mayères qui ont
été successivement en coupe.
A 2
�Ÿùtolï
jfcôifteèdelalànguedutetéiriquiestau-delà
.
■<*■>
du tnur qui rénfefrftie le tout dans l’enceinte de mon
jardin*. A l’égard dü lit du ruisseau, j ’en suis co-propriétâife dans toute sa longueur s depuis le pré de M .
Sàm pigny, jùsqu’à mon mur de clôture.
L e public n ’a donc aucun droit dé venir se laver dans
ce ruisseau qui n’est pour ainsi dire qu’un b é a i, environné
de propriétés particulières, et pratiqué pour l'usage du pro
priétaire s cela est si v r a i, c ’est qu’on ne peut y arriver
qu’en traversant ces propriétés particulières, ce que nul
ii’adroit de faire, pas même du consentement d’un des ri
verain s, dont la Co-jouissanee n’est pas cessible , dès que
là propriété ta’est que promiscue entr'eux.
Cependant sur le fondement que dans les tettips où la
ctiltùre des deux héritages que ce ruisseau divise , étoit
livtée à 60 ou r8o fermiers ou sous-fermiers, on hantoit
familièrement ce ruisseau, et même l’ancien rutoir, prati
qué dans mon jardin : quelques jeunes gens de la ville se
iônt persuadés que cettë tolérancè des anciens jouissans
leur forme aujourd’hui un droit acquis : il sem ble mêmô
îqu’ils ont entrepris de me faire tenoncer à la jouissance de
taon jardin.
Ils viennent journellement se baigner, et dans mon ruis
seau , et dans mon rutoir ; ils s’y mettent exactement
hus , sans s’embarrasser s’ils peuvent être v u s, ou non r
par des personnes du sexe ; ou pour mieux d ire , c’est
lorsqu’ils en v o ie n t, soit dans le Cham p-Redon, soit
dans mon jardin , qu’ils affectent de se montrer davan
tage ( 1 ).
( r ) Quelques personnes mieux élevées et mieux instruites n y
�Ils font p lu s, ils s’attachent à me provoquer et à me
braver, lorsque je suis dans mon jardin ; ils y viennent en
troupe pour être en force et m’insulter impunément ( i ).
Parmi ces jeunes gens se sont fait sur-tout remarquer le
sieur T rap et, fils j un sieur Marchand ( a ) , et un sieur
P ellab ou t, tous garçons tanneurs de cette ville , et
un sieur Petit, dit Tixier , fils du voiturier, qui se sont
mis dans la tête qu’ils avoient autant de droit que m oi, non
seulement au ruisseau, mais même au rutoir qui fait
essentiellement partie de mon jardin, comme renfermé
dans les murs qui en forment l ’enceinte.
J ’ai reçu en conséquence, de leur p a r t , plusieurs in
sultes, et sur-tout de très-graves, de la part du sieur Trapet
t[ui m’a toujours paru être le chef et le principal acteur
des scènes que j ’ai eues à supporter, qui s’est montré
chaque fois non seulement un homme qui est sans mœurs,
tnais qui se fait encore une gloire de les braver et de se
livrer aux actes et aux propos de la plus infâme obscénité.
sont venues que de mon agrément, et d une matière décente : toutes
personnes honnêtes auroient cet agrément, sans le demander, s’ils y
venoiçnt de la même manière.
(i)
Il y en eut même un qui poussa l'audace jusqua menacer
de battre mon enfant, parce qu’il vouloit chasser de mon jardin un
chien qui pouvoit y faire du dégât.
A la vérité tous n’ont pas été aussi malhonnêtes; et dans la même
société , il s’en trouvoit qui paroissoient reconnoitre la justice de
mes plaintes.
( 2 ) Il est mon parent; j’ai même été assez heureux pour rendre
quelques petits services à sa famille > dent une partie est venue
me témoigner les plus vifs regrets de sa conduite.
�( O
J e m’étois tu sur les premiers motifs de plainte que ces
jeunes gens m’ont donnés ; une seconde scène plus grave
me détermina à me plaindre à un de MM. les officiers
municipaux : je nommai principalement le sieur T ra p e t;
je ne voulois pas en faire encore une matière à p ro c è s(i);
je sollicitois une ordonnance de police contre les indé
cences de la jeunesse ; j ’espérois que l’ordonnance que
je sollicitois, en défendant à toutes personnes de paroître
nuesj dans les endroits fréquentés , me débarrasseroit de
cette foule d ’étourdis et d’m solens, qui rendent impos
sible toute jouissance de mon jardin ; je ne voulois leur
faire d’autre mal que de les chasser de chez moi.
L ’impunité enhardit les ames basses et malhonnêtes ;
ils imputent à crainte et à foiblesse les ménagemens dont
on use à leur égard ; et cette espèce d’hommes mesure
toujours sa hardiesse sur le degré de crainte qu’ils s’ima
ginent inspirer ; tels ont été les accusés ; parce que j ’ai
_ ( i ) Entre les insultes que le sieur Trapet vomit , il me dit que
son père étoit procureur, comme m oi, mais avec cette différence que
son père étoit u n h o n n ê t e h o m m e , e t q u e j'étois un coquin; je me
contentai de lui répondre , que si son père étoit aussi honnête
homme qu’il le disoit, il devoit payer à la communauté des procu
reurs l’argent qu’elle lui avoir prêté et qu’il leur fait perdre. J ’avois
alors été provoqué à tel point par le sieur Trapet qui s’étoit, ainsi
que ses camarades, armé de pierres contre moi, et q u i, pour me les
lancer sapprochoit du bord de mon p ré , qu’un sieur Rougier'qui
de mon agrément faisoit baigner son cheval, fut obligé de le prendre
par le corps pour le retenir , et lui dit qu’il étoit bien heureux qu«
je fusse plus prudent que lui : ce jeune homme qui m’a parit fort
honnête , et que j ’ai appelé en témoignage , rendra assurément
compte de ce fait.
�c 7 }
souffert de premières insultes, lors même que je pouvoia
avoir pour moi l’avantage des armes et du nombre : parce
que je n ’ai pas même cherché à les en faire punir par la
lo i, ils ont cru qu’ils pouvoient venir m’assassiner impu
nément.
j C ’est dimanche dernier qu’ils ont choisi pour exécuter
ce complot : sur les six heures et demie du soir,ils s’introdui
sirent dans mon jardin, en passant sous-le pont, non pour
y prendre les bains, car le temps ¿toit si froid, que l’usage
ne pouvoit qu’en être funeste : l’air furieux avec lequel
ils entrèrent, annonçoit leurs desseins et les fit suivre par
plusieurs particuliers ; ils ont à peine les pieds dans l ’in
térieur de l ’enclos, qu’ils crient qu’il faut me tuer; ils
s’excitent à ce meurtrç à haut cris ; ils s’imaginent que
le bruit qu’ils font m’attirera vers eux ; ils se trompent,
J ’étois au haut de mon jardin avec mes enfans, où je
cueillois quelques fruits, et récoltois quelques grains; ils
étoient alors dans l’ancien rutoir à 80 pas de nous , je
feignis de ne pas les entendre, et ne bougeai point. Alors
ils moptent dans le pré qui fait partie de mon enclos; ils
le traversent dans toute sa largeur.en crian t, ou pour
mieux dire en hurlant; ils vont jusqu’au ruisseau Beaumé ;
ils reviennent dans mon pré ; j ’affecte de leur tourner le
dos : alors ils m’appellent et m’insultent; je fais la sourde
o re ille ; j ’ai déjà dit les raisons de ma m odération,j’avois
mes enfans avec m oi, mais ellenefaisoit pas leur compte:
ils prirent un autre moyen pour m’émouvoir et m’attirer. '
Trapet.se déshabille ; il se met nu , exactement nu ; en
cet état il s’ étale sur mon p ré, et, tourné de mon côté, il
affecte de montrer sa nudité, en appelant ma fille et
�C 8 )
moi ( i ) , en nous provoquant à l ’acte de la plus grande
obscénité , et en tenant et répétant des propos tels qu’on
rougiroit de les prononcer dans les lieux mêmes destinés
à la débauche la plus crapuleuse. A ce spectacle , à ces
horreurs, mes enfans et moi courûmes nous cacher dans
ma maison basse ; nous en étions éloignés : il profita du
temps que nous mîmes à y arriver, pour s’approcher, nous
répéter les mêmes propos, et nous les faire mieux entendre:
arrivés à notre m aison, nous fermons portes et fenêtres;
ses camarades et lui s’approchent alors davantage ; il vient
nu jusqu’au milieu du p r é , et nous les y entendions
comme auparavant ; les obscénités , les insultes, les me
naces se succédoient et se répétaient sans discontinuation.
Soit pour ne plus les entendre , soit pour être plus en
sûreté, je monte avec mes enfans en ma maison haute(2),
je m’y ferme derrière, et me contente de regarder par la
fenêtre ce qu’ils deviendroient.
Trapet nous voyant échapp er, courut s’habiller en
partie ; car il ne prit pas le temps de se chausser, et
re v in t comme un furieux , avec q u e lq u e s-u n s de ses
cam arades, jusqu’au milieu du jardin ; l à , armé de
pierres qu’il frappoit l’une contre l’au tre, il m’appeloit,
en me menaçant et en me défiant de venir j il insulta
ma domestique ; il menaça de la battre : lorsqu’il vit
que je ne me mettois pas en mouvem ent, il traversa,
( 1 ) Elle aura bientôt quinze ans.
( 3. ) Mon domestique, qui (levoit sortir le même soir de chez moi
m'avoit rendu un outil, et un fusil que je lui avoit donné pour la
garde du jardin , <t je l'emportais ¡)vec moi.
avec
9
�(> ))
avec quelques-iins de ses camarades'qui s6 contentoient
de m’insulter de plus loin , la partie basse de mon jardin
dans toute sa longueur ; il revint sur ses p a s, s’approche
de moi en me disant qu’il vouloit venir sortir par la
po rte, et en invitant ses camarades à lui porter un bâton.
A ces mouvemens, à la fureur qui se manifestoit chez
ces assaillans , je ne doutai pas que leur projet étoit de
m’assassiner ; la frayeur s’étoit emparée de mes enfans ,
nous résolûmes de venir à la ville avant qu’il fût plus
nuit j nous sortons, et laissons ces assaillans dans mon
jardin. Mais pendant que nous les évitons, ils nous
cherchent j nous venions à la ville par le chemin de
Bardon"; les compagnons de Trapetnous voient sortir ;
une partie passa sous le pont, et vint nous couper le pas.
Trapet ne nous avoit pas vu sortir , et ne m’appercevant
plus à ma fenêtre, vint à ma maison haute , en m’appe
lant et en criant : Où est-il, ce coquin de Boisson, où estil que je le tue ? Cependant nous voyions en venant ici
ses camarades sortir de dessous le pont, et déjà au-devant
de nous. Pour les éviter, nous rebroussons chemin , et
nous enfilons un sentier qui conduit au faubourg de
Clermont ; mais déjà Trapet et un autre sont sortis par
le portail de mon jardin ; et les autres étoient venus à
bride abattue sur nos pas. J e vois leur dessein de nous
suivre par ce petit sentier peu fréquenté ; nous nous
arrêtons, je prends témoins ; ils passent en se tenant
sous le bras et m’insultant : je me contente de le faire
remarquer. Ils feignent de prendre un chemin qui
conduit à la Varesne. Nous revenons sur Je grand
chemin j ils y sont aussi-tôt de retour que nous i ils
B
�4'
( 10 )
s’arrêtent près de moi en continuant leurs insultes ; alors
plusieurs personnes passent , et nous les suivons, dans
l ’espérance que ces forcenés n’oseroient nous attaquer en
leur présence; m ais, vaine précaution l ils se contentent
de nous suivre en chantant jusqu’à ce que nous sommes
arrivés en face de la porte du moulin Bardon ; là , ils
avoient des amis et des soutiens dans le m eunier, son
domestique et ses enfans, contre lesquels j ’ai déjà rendu
plainte pour mauvais traiteniens commis sur la personne
de ma fille a în é e , à coups de pierres.
> C e fut devant le moulin que mes assassins, confians
dans le secours que le meunier leur avoit promis , sans
doute , viennent m’assaillir ; j ’étois au milieu de mes
deux en fan s, Trapet s’approche en m’insultant; je
rapportois de mon jardin à la ville le fusil que j ’avois
confié à mon jardinier ; je le tenois sous le bras droit,
la crosse en arrière , le canon en avant ; il fa u t que tu
rendes cé fu s il à ma compagnie , dit-il , ou j e te coupes
la fig u re à coups de bâton ; et dans le même in stan t,
pendant que de la main gauche il s’em pare du bout
de mon fusil , de l ’autre il me porte deux coups d’un
bâton à nœuds , beaucoup plus gros en bas qu’en haut ;
il espéroit , sans doute , que cette attaque imprévue
me feroit lâcher plus aisément mon fusil ; mais elle
produisit l’effet contraire ; il m’étoit aisé de voir que ces
assassins vouloient s’en emparer pour s’en servir contre
moi , et je le saisis des deux mains ; en vain Trapet
continuoit de me porter des coups de bâton à la tête ?
pendant qu’aidé d’un ou deux de ses cam arades, il
tiroit le fusil par le bout du canon, que d’autres cher-
I
�itr
( 11 )
choient à m’arracher la crosse des m ain s, et que
d ’autres me lançoient des pierres ; je tins bon , lorsque
le valet du meunier accourut , se précipita sur moi ,
me porta deux coups à la tête et me terrassa. Cependant,
dans les efforts respectifs de mes assassins pour m’ôter
le fusil, et des miens pour le retenir, le coup partit( i ) ,
mais il n ’atteignit aucun de mes meurtriers qui avoient
eu soin , en essayant de l’ô ter, d’en placer la bouche
entr’eux , de manière que le coup en partant ne pût
les atteindre ; car ils sentoient bien qu’ils ne méritoient
aucun ménagement de ma part ( 2 ) ; ce qu’il y a de
v r a i, c’est que Trapet , ses camarades et le valet
( 1 ) Sans doute il s etoit armé , lorsque Trapet en le prenant par
le bout l ’avoit tiré de dessous mon bras.
(2 )
Trapet a montré une meurtrissure à la poitrine ; elle ne peut
être du coup de fusil, parce que, ou il étoit boutonné, ou il avoit la
poitrine nue : dans le premier cas, si le coup avoit porté à bout tou
chant à l’endroit qu’il indique , dès qu’il n y a aucune blessure , ce
seroit une preuve que le fusil n etoit chargé qu’à poudre ; mais
alors ses habillemens auroientbi en em p o ch é le coup de marquer sur
sa poitrine:si sa poitrine eût été nue, ou seulement couverte de sa
chemise, alors la poudre auroit brûlé le linge ou la poitrine dans la
largeur d’une assiette, et il auroit dû le faire constater par le juge
de paix , lorsqu’il se transporta chez lui , sur la suppositiun qu’il
ne pouvoit sortir: l’assertion est donc fausse; mais quelqu'un qui dit
avoir vu le sieur Trapet, m’a assuré que sa peau sur le côté du bas
ventre présente , comme de petites, vessies ou levures, ce qui
annonce que la poudre en sortant du canon l’a eiïïeuré légèrement
et brûlé en cette partie , et confirme ce que j ’ai dit que le coup
n avoit pu passer qu’entre lui et son camarade.
. t,
�du m eu n ier, ne cessèrent de me frapper jusqu’à ce
<jue, m’arrachant de leurs mains , je me sauvai dans
Ia maison voisine , dont la porte étoit ouverte, dans
l ’espoir que cet asile ne seroit point v io lé , et que je
pourrois y retirer mes enfan s, dont l ’état faisoit mon
plus grand mal et ma plus grande inquiétude ; mais
les meurtriers m’y poursuivirent avec fureu r, et s’y
précipitèrent aussi promptement que moi ; le meunier
et un autre y furent les premiers ; ils sautèrent sur moi
pour me terrasser : je vis alors que j ’allois être; assas
siné dans cette maison, sans espoir de secours : j ’es
quivai , en me baissant , les mains qui vouloient me
saisir ; ils ne purent prendre que ma perruque et mon
chapeau qui quittèrent ma tête ; je profite du moment';
je m’arme de force et de courage , je repousse et
éloigne de moi , par un effort du. bras d ro it, les deux
coquins qui s’étoient jetés sur moi , et en poussai en
avant trois ou quatre autres qui étoient sur le pas de
,1a porte pour entrer dans la m aison, et je m’échappai,
la tête n u e , et en parant du bras les coups de bâtons
qu’on me portoit.
Mes enfans, plus morts que v ifs, jetoient les hauts
cris ; j ’appelois du secours , et ne pouvant me résoudre
à les laisser seuls au milieu de mes assassins , je ne
courois qu’en proportion de leur force pour me suivre ,
et cependant j ’étois accablé de coups de bâtons et de
coups de pierres ; les scélérats, ils ne sont pas assez de
huit contre un , ils ameutent contre moi le peuple ,
ils le provoquent en criant : A rrête£ L'aristocrate, il a tué
deux enfans y et dans l'instant j e suis’ assailli par cent
�C
)
personnes; j ’allois perdre la v ie , j ’en aurois perdu mille,
si je les avois eu es, sans le secours des braves gardes
nationaux qui m’arrachèrent aux assassins , me condui
sirent à la municipalité , me défendirent généreusement
contre les coups qu’on me portoit en chemin.
• Tout le monde sait le reste de cet événem ent, le
rassemblement populaire qui eut lieu auprès d e là maison
de ville , et le parti que je fus obligé de prendre
pour ma sûreté.
.
; '
...
Mais ce que l ’on ne conçoit p a s , c’est la ^situation
de mon fils qui me suivit à la maison de ville et en
prison , et qui s’évanouit à différentes reprises ; c’est
celle de ma fille qu’on avoit portée évanouie chez moi}
et que la douleur et le désespoir tinrent pendant'deux
heures entre la mort et la vie ; eh ! qui pourra, s’il n’est
pas père, se peindre ma situation pendant tout le temps
que j ’ignorois le sort de cet enfant, et jusqu’à ce qué
je l’eus vu e; les scélérats, sera-t-il jamais en leur pouvoir
de réparer tout le mal qu’ils m’ont fait ? quelle,,puis
sance humaine le pourroit? Voilà les faits ( i ) : je n’ai
besoin d ’a u cu n e réflexion. Il suffit de la connoître pour
juger les coupables et la punition qu’ils méritent. Qui
n e verra qu’ils ont cumulé les délits lés plus graves; ils ont
violé ma propriété; ils l’ont souillée ; ils "¡sont vernis dè
dessein prémédité ppur m assassiner 3 puisqu aucun ne
( i ) Toutes les dépositions des témoins , en forment la preuve,
et ils se seroient exprimés bien plus disertement encore , si.lors de
leur déposition, leur mémoire eût été rafraîchie sur cliaqiie fait de
la plainte, et si la s l^ ifit é du juge ne les-eût pas interdits.
�(
H
)
s’est m ouillé, ni mis à même de le fa ir e , si ce n’est
le sieur Trapet qui voüloit aggraver l ’insulte. Ils ont
commisr• ou servi de soutien à des obscénités horribles
devant une jeune personne de quinze ans. Ils sont
vpnus ensuite m’attaquer en grand chemin pour m’homicider ; ils m’y ont assailli ; ils auroient consommé leur
crime , s’ils Pavoient pu ; enfin , ils ont provoqué une
émotion populaire pour faire faire par le peuple ce
qu’ils n ’avoient pu faire eux-mêmes , m’arracher la vie.
Pour mettre le comble à leur scélératesse , ils se sont
livrés à la plus noire calomnie ; quels hommes ( i ) !
( i ) Trapet dit à la maison commune , que je lui avois tiré un
coup de fusil et deux coups de pistolet. Dans sa déclaration devant
le juge de paix ( M. Polignat ) , il a dit d’abord que dans la
chem in, je lui avois tiré un coup de fusil ; qu’il avoit ra té , et
que de la maison où je m’étois réfugié, je lui avois tiré un coup
de pistotet ; ce n’est que par réflexion , et par un renvoi, qu’il
a ajouté que j’avois réarmé mon fusil et tiré un second coup : dans
son i n t e r r o g a t o i r e , il a dit qu’il ne savoit pas si le c o u p de pistolet
étoit parti ; mais que je l’avois sorti, et qu’il avoit eu tant de
p e u r, qu’il s etoit évanoui, et qu’il ne sait s’il a raté ou s’il esc
parti. Dans le fa it, j ’ai déposé à la municipalité le pistolet bien
chargé , bien amorcé , et je réponds qu’ujx essai prouveroit que sur
cent coups, il ne rateroit pas un seul. Il est plaisant d’entendre dire
au sieur Trapet qu’il a été raté d’un premier coup de fu sil; qu’il
en a reçu un second dans la poitrine; qu’il 11e s’est pas trouvé mal,
puisqu’il a dit qu’après le coup , il avoit voulu m’arracher mon
fu sil, et qu’il s’est trouvé mal à la vue d’un pistolet. Cet homme là
n’est-il pas aussi bête que scélérat? A coup sûr, depuis qu’il m’afteignit, jusqu’à la maison-commune, il nd^essa de me frapper, ou
d’essayer de le faire. A mon égard, si je m\rois servi, à dessein, ds
�1
5 )
mon fu s il, si je m’étois servi de mon pistolet, je n’aurois besoin ni
de désavouer , ni de me justifier ; eh ! où est le doute que je me
s erois servi , et de toutes mes forces , et de toutes mes armes, pour
écarter ou diminuer le nombre de mes assassins, sans un sentiment
plus fort que celui de ma conservation , la crainte de faire assas
siner mes enfans : ouï, ce n’est ni dans ma foiblesse, ni dans ma pru
dence que j ’ai puisé, et ma patience, et ma modération; c’est à ma
tendresse paternelle qu’ils en ont l ’obligation : sans la présence de
ces êtres chéris, ils auroient vu ce que peut un homme arm é, quand
il a à défendre sa vie mais j ’ai mieux aimé leur laisser assouvir
leur rage sur m oi, que de la voir tomber sur ceux-ci.
B O I S S O N .
^
mmmmmtmé——— —
A R IO M , D E L ’IM P R IM E R IE DE L A N D R IO T , 1752.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boisson, Louis. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boisson
Subject
The topic of the resource
violences sur autrui
violation de domicile
jouissance des eaux
béal
troubles publics
atteintes aux bonnes mœurs
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Louis Boisson, citoyen de la ville de Riom, plaintif. Contre les sieurs Trapet, Marchand, Pellabout, Astre, garçons tanneurs, et Petit, dit Tixier, voiturier, tous de cette ville de Riom, accusés.
Table Godemel : Violation : de domicile et voies de fait.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0936
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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atteintes aux bonnes mœurs
béal
Jouissance des eaux
troubles publics
violation de domicile
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53750/BCU_Factums_M0302.pdf
2b38e0e39a1f071ad368afaf27fc096b
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Text
MÉMOIRE JU ST IF ICA TIF
POUR
G U IL L A U M E
BARD,
E x-age n t de la commune de Sauvetat-Autezat, accusé.
I nfuriam mihi f aclet si quis m e, ad u llas nostri sa cu li
controversias , aut natas aut quoe nasciturte praevideri
possunt, respexisse arbitratur.
,
Grotius, de jur. bel. et pac. in prolegom.
s
’i L p o u vo it y avoir quelque chose de plaisant dans une accusation
de guerre civile, de concussion et de terrorisme royal, ce seroit de voir
comment on compte pour rien les outrages faits à un fonctionnaire
public revêtu de ses marques distinctives, et avec quelle aisance les
coupables , par une récrimination heureuse, ont pu le dénoncer,
être témoins contre lu i, et le jeter dans les fars !
Mais il est très-sérieux d’être emprisonné quand on a raison, d’être
contraint par prudence de dévorer une infinité de réflexions naturelles,
et de sentir sur-tout que la puissance et la foiblesse ne peuvent user du
même mode de défense.
Sans doute, dans une révolution qui a vu tour à tour les mêmes
opinions exaltées et proscrites, les mêmes hommes poursuivis, appelés
et poursuivis encore, il n’est surprenant pour personne que ce flux et
reflux de promotions et de reviremens, ait transformé la plupart des
Francais en sectaires divers, voulant la même république, m ais s’entredéchirant tour à tour pour acquérir le droit exclusif de ses prérogatives.
Dans ce cours surnaturel des choses, l’impartialité doit considérer
cependant que la masse du peuple ne pouvant et ne devant prendre
d impression que de ses législateurs, n’avoit garde de deviner en l'an 5 ,
que leur morale fût un catéchisme d e la loyauté dangereux à suivre,
pas plus qu’elle n’avoit deviné en l’an 3 , que les noms odieux qu’ils
donnoient aux meilleurs patriotes n’étoient qu’un pur badinage sans
conséquence.
L accusé alors étoit un de ces patriotes persécutés par l’opinion
I
�fugitive. Alors il fut placé sur la liste de ceux dont une loi (i) ordonnoifc
3e désarmement; alors ses mêmes ennemis l’appeloient un terroriste
révolutionnaire; et aujourd’h ui, par une bizarre inconséquence, ils
en font un terroriste royal, pour profiter de toutes les chances qui
peuvent lui être nuisibles.
Ils ont fait plus; et pour affoiblir davantage leur victime, en lui ôtant
l’honneur, ils ont supposé qu’il avoit établi des taxes à son projit, sur
les citoyens de sa commune.
Cette horrible imputation n’a pas même atteint le citoyen Bard ,
nux yeux de ceux qui le connoissent ; une foule d’attestations lui
rendent justice: mais il faut aussi convaincre ceux qui ne le connoissent
pas. Il faut encore examiner cette longue série de dénonciations, sur
lesquelles l’impartialité ne s’arrêtera que pour plaindre les hommes des
passions qui les démoralisent. Il s’agit donc de commencer par le détail
vrai de ce qui s’est passé, et de discuter séparément ensuite les six
chefs de l’acte d’accusation.
F A I T S .
L e citoyen Bard fut élu agent municipal de sa commune en l’an 5.
Les temps n’étoient pas médiocrement difficiles.
L ’occupation des fonctions publiques par beaucoup d’hommes nou
veaux, paroissoit une véritable usurpation à leurs prédécesseurs. Une
guerre de conquête s’établissoit par des qualifications de parti, jusqu’à
ce que la démarcation qu’elles opéroient, produisit des hostilités plus
réelles.
L e libre exercice des cultes, asservi à un formulaire aisé, rappeloit
de toutes parts les prêtres cachés ou fugitifs. Déjà les temples en ruine
iilloient reprendre leur destination primitive ; et déjà l'intolérance
intempestive commençoit à guerroyer pour une prédominance ima
ginaire.
Que pouvoit, dans cette fluctuation de choses, le mince agent d’une
petite commune ? D eux prêtres du vieux style y étoient revenus, et
certes on ne pouvoit pas plus s’y opposer là , que dans les cilés princi
pales , où ils abondoient bien davantage.
Il y avoit aussi un prêtre constitutionnel (2) q u i, ayant abdiqué ses
fonctions, choisissoit précisément ce moinent-là pour les reprendre :
(1)
La loi du 21 germinal an 3. Le citoyen Bard obtint sa radiation de cette liste
par arrêté du district de Clermontj du Ier» floréal an 3*
(a) Le citoyen Duelos,
�il Venoit d’en réclamer la permission à l'administration centrale j de
sorte qu’il étoit évident qu’une querelle religieuse alloit incessamment
s’établir.
L a loi (i) exigeoit que l’heure de l’entrée à l’église lui fût déter
minée , et ce fut onze heures du matin. L e 28 germinal, une assemblée
étoit convoquée pour aviser aux moyens d’empêcher lea vols journa
liers de récoltes; la convocation étoit pour 8 heures, et le citoyen Duclos
crut le moment favorable pour venir afficher sa soumission sur les
murs de l’église, et augmenter par sa présence le nombre de «es
catéchumènes.
Il se trompa.
Un toile général l’avertit que ses ouailles étoient en révolte. Cinq
cents voix lui rappelèrent son abjuration et une foule de griefs dont la
commémoration est inutile.
Les menaces devenoient plus sérieuses ; il s’agissoit de sauver le
prêtre, et le citoyen B a rd , au milieu de scs incertitudes, savoit comme
tout le monde qu’on n’appaise le peuple irrité qu’en flattant adroite•nient ses volontés et ses erreurs. Il dit au citoyen Duclos qu’il étoit
de la prudence de se retirer. Celui-ci vit bien qu’il avoit fait une école,
et pour mieux montrer sa bonne volonté, il répéta à rassemblée son
abjuration, emporta ostensiblement ses ornemens et ustensiles ecclé
siastiques , et en demanda quittance. La continuation des cris faisoit
encore craindre pour sa sûreté : lecitoyen Bard se revêtit de son écharpe
pour l’accompagner à travers l’a,ffluence.
Ce signe de l’autorité fut respecté nous verrons bientôt qu’il ne l*a
pas été toujours.
L e citoyen Bard s’étoit conduit en galant homme ; il le croyoit du
moins; cependant cette aventure a été la matière d’une dénonciation,
et d un autre procès criminel réservé inpetto à l’accusé, quand il sortira
de la maison de justice.
L a commune de la Sauvctat possède beaucoup de prés artificiels,
en sainfoins, ou cheprières. Les troupeaux friands de cette nature
herbages, y font des dégâts considérables, si les propriétaires ne sur
veillent avec une attention continuelle. Tous ceux q u i, là comme
ailleurs, airnent à vivre du bien d’autrui, ne cessent de ravager ces
récoltés précieuses. Il fajloit y porter remède. Tels étoient les ordres
uu ministre de la police (2).
( 0 La loi du 11 prairial an 3.
(2) Lettre du citoyen Merlin, du 10 prairial an
5.
a
�Là commune étoit d’accord de vouloir un garde, elle vouloit même
qu’il ne lut pas de la contrée, et pour cause. On chargea le citoyen
Bard d'en mander un : mais quand il fallut parler du salaire, il n y eut
-plus moyen de réunir les opinans.
Cependant les dégâts augmentoient, et le grelot du conseil ne s’atta-,choit pas. Les habitans arrêtèrent de former provisoirement une garde
civique de quatre personnes par jour : ce service gratuit fut fdit avec
Beaucoup de zèle, et dura depuis le 14 messidor jusqu’au 12 thermidor,
avec le plus grand ordre et sans aucun sujet de plainte.
Ils arrêtèrent encoi'e que le propriétaire de chaque troupçau pris en
délit, payeroit une somme déterminée, moitié aux gardes et moitié
à la: commune. Cette législation locale n’étoit p e u t-ê tre pas trèsrégulière, mais tel étoit l’usage des communes voisines, et il en résul
tait un grand bien.
T o u t ce qui a été perçu à cet égard se réduit à 9 t t . Les gardes en
ont eu
i5 ^ , et la commune 2 ^ 5 ^. Il est à remarquer que le
troupeau du citoyen Bard fut pris comme les autres, et qu’il paya
3
aux gardes. Ilp o u rro it, s’il le vouloit, imputer cette somme sur
ce qu’il a reçu ; mais il est au-dessus d’une pareille petitesse, et le registre
de la commune à la main, il prouvera que sa comptabilité de quarante■
cin q sous le laisse encore créancier de scs concitoyens.
Un garde fut enfin envoyé dans la commune (1). On lui fixa un
traitement, mais il n’avoit pas un sou pour l’attendre. A u refus de tout
]e m onde, le citoyen Bard et son neveu (3) le nourrirent et logèrent
pendant une quinzaine de jours.
Les mocontens perpétuels trouvèrent encore que ce sacrifice étoit un
privilège. Alors le citoyen Bard invita les principaux propriétaires à
nourrir i\ son exem ple, au moins par charité, un homme utile à la
commune. Quelques-uns adhérèrent à cette exhortation, mais après
quelques jours le gard e, dégoûté, quitta la com m une, et, pour payer
le citoyen Bard de son zèle, l’assigna en payement de ses gages. Le juge
de paix, qui savoit bien que cette élection étoit l’ouvrage de la com
mune , n’en condamna pas moins le citoyen Bard individuellement.
. Pendant que ce garde étoit dans la com m une, il ne fut pas au pou
voir du citoyen Bard de le faire recevoir ù l’administration ; à chaque
décade, on remettoit do s’assembler à la décade suivante. On a cru sa(2) Il n’étoit pas du choix privé du citoyen Bard, il fut choisi par un des bureaux
de l'administration centrale.
^3) Le citoyen Blanchier,
�tisfaire à tout, en certifiant ce fait au citoyen Bard ; mais il n’en porto
pas moins à lui seul le fardeau des frais, de la responsabilité et d’une
accusation.
Il ne faut pas omettre que , pendant l’établissement de la garde v o
lontaire des récolles, la confédération de ses ennemis et des voleurs lui
faisoit un crime de cette surveillance. Insulté par les uns et les autres ,
il avoit le chagrin de voir que les moyens coercitifsétoient plus foibles
que ce faisceau d’intérêts contraires. Alars il supplia la gendarmerie du
canton, de faire elle-m êm e une tournée dans les champs pour intimi
der les voleurs. Cet empêchement dirimant ne plut pas aux fédérés qui
ont supposé (i) qu’il avoit eu pour motif d’inspirer de l'eHroi aux ré
publicains.
L a veille de St. Jean , on est assez en^usage de faireides feux de joie.
Les plus gais attachent au haut d’un mai une poupée ou des pétards;
les plus cruels y attachent un animal vivant j chacun s’amuse à sa ma
nière.
Ce jour-là, de jeunes citoyennes de la Sauvctat, avoientfait une pe
tite poupée de papier et de chifions. L e mai étoit préparé , les cordes
tendues, mais il plut, et le feu de joie n'eut pas lieu. L e feu et la poupée
n en ont pas moins servi de prétexte à une accusation d’une infinité de
propos plus absurdes les uns que les autres.
Mais ils sont liés au feu de joie et il n’y en eut pas. Cette découverte
de la calomnie sur un p o in t, donne la mesure du degré de confiance
qu il faut ajouter il de tels témoignages.
La fête d’Autezat devoit avoir lieu le i 5 août ou 28 thermidor. Les
agitations préliminaires d’une révolution prochaine occasionnoient
dans les esprits une fermentation sourde qui donnoit de l’inquiétude
aux amis de la tranquillité.
• ^ (’ P U1S quelque temps l’administration centrale ne paroissoit pas ras
surée sur ces symptômes de discorde , elle avoit par une proclamation
tres-sage invité les autorités constituées à prohiber les chants, les dé/t
et les rassemblcmcns (2).
.
P r e c a u lions sadaptoient d’autant plus à la fête d’Autezat, que
eja I agent étoit prévenu que les factions en avoient choisi lu jour
pour 1 essai de leui*s forces. Il crut prudent de faire, sous l'autorisation
(1) A r t. 8 de la dénonciation a u directoire.
(2}. V o y e z le n,° i cr, des pièces justificatives.
*3
�J 6)
de la com mune, line proclamation basée sur celle du département, et
prohibant les chants , les injures, les attroupemens et les signes exté
rieurs de réunion, (i)
Ceux qui ne savent pas que le citoyen Bard n’avoit plus sa sûreté
personnelle depuis qu’il étoit en place, qu’il n’avoit eu les registres de
l’élat civil de son prédécesseur qu’avec des formalités inouies et des
ordres supérieurs, que les propriétaires des fondions publiques'en
conservoient le titre malgré les élections du peuple, vont apprendre
contre quel excès de licence avoit alors à lutter un agent municipal.
Sa proclamation déconcertaitdes projets qu’on n’abandonnoit pas,
et la voix du proclamatcur étoit étouffée par les cris séditieux de la ré
sistance. On lui crioit qu’on se f ......... de ses ordres et qu’on n’en feroit
pas moins ce qu’on avoit à faire.
L e lendemain en effet une bande chantante parcouroit les rues dès
l’aurore. Les chansons de parti, les cris à bas les chouans, les provo
cations particulières croissoient d’heure en h eure, avec une fureur
marquée; et pour mieux montrer que tout ce qui étoit défendu par la
proclamation augmentoit le plaisir de la désobéissance, on fit une cou
ronne de papier, on la promena tout le jour au bout d’une longue per
che, e t , pour augmenter Vimbroglio, on y joignit une vaste cocarde
blanche.
■ Les insultés se formoîent aussi en bande ; toutes deux avoient un tam
bour : celle de la couronne commença l’agression par un coup de pied
au tambour de l’autre : elle prétendoit avoir seule le droit de battre par
■permission de Tancien agent de la commune. La scène alloit devenir
sanglante, quand le citoyen Bard en écharpe vint sommer au nom de
la loi les deux rassemblemens de se dissoudre.
La seconde bande obéit et se retira dans la maison Dugravier. La
bande de la couronne entoura 1agent avec des menaces terribles. M eur
tri de coups de pieds, de coups de poings, et de coups de coude sur la
fig u re , il fut mis en délibération sérieuse si on devoit le tuer sur le
champ. Enfin les moins furieux lui ordonnèrent de se retirer sans bruit
s’il vouloit vivre.
Si le citoyen Bard eût voulu dégrader scs fonctions par une lâcheté,
il n’y auroit pas aujourd hui d accusation ; mais il crut devoir requérir'
la force armée du chei-lieu de son can ton, en exposant sa position et les
dangers de sa commune.
L ’agent de PJauzat vint avec cent hommes ; on les distribua en pa( 0 - Voyez le n.° 2. des pièces justificatives.
�,
( y )
„
trouilles, et par suite de sa proclamation le citoyen Bara engagea tous les
citoyens à se fermer chez eux et à illuminer.
Les rebelles allèrent dans l’auberge deB rionet, affectant de chanter
a pleine tête comme le matin ; quelques-uns parcouroient le voisinage
pour recruter des forces nouvelles, et résister encore à l’autorité civile.
Une patrouille rencontra deux de ces recruteurs, en fut insultée et les
arrêta : ils s’évadèrent. La troupe repartit à onze heures du même soir,
après avoir laissé dans Autezat une apparence de calme.
Ainsi se passa cette fête destinée à de plus grands événemens que le
citoyen Bard a eu le bonheur de détourner de sa com m une, et certes on
ne dira pas que c’est une simple conjecture, quand , peu de jours après,
à une demi-lieu de distance, les mêmes provocations, les mêmes élé-î
mens de discorde ont occasionné l’assassinat d’un citoyen (i).
^L ’accusé dressa procès verbal de cette journée (2) et l’envoya à l’admi
nistration centrale; il eut la bonhomie de croire et de dire que les insul
tes faites à son caractère seroient punies; cette menace avertit les coupa
bles, et le lendemain huit d’entre eux firent une pétition contenant rap
port i\ leur manière de cette journée, et demande en destitution du
citoyen Bard.
Ensuite ils dénoncèrent les mêmes faits au commissaire du directoire
près la police correctionnelle.
_Ensuite ils arrangèrent une autre pétition tendant au même b u t, en
richie de quelques autres signatures (3), contenant un acte d’accusation
tout dressé contre le citoyen Bard, n’omettant rien des moindresactibns
de sa vie publique, le tout rédigé de la manière la plus inensongèrement persuasive.
Ce triple aboiement de la vengeance fut envoyé au directoire. La
révolution du 18 fructidor lit droit à la demande et donna idée d’obtenir
A van tage; °n y est parvenu, elle citoyen Barda été mis en jugement.
Voua donc une loi grecque exécutée : un fonctionnaire public de
vant le peuple pour rendre compte de sa conduite.
L e citoyen Bard vient d’en remplir le devoir avec toute la fidélité de
narration que le grand détail des faits permettoit h sa mémoire; mainte
nant il ne reste qu i\ y compai’cr les divers chefs de la plainte et l’entasr
sement intéressé des dépositions.
cito yei\ f ? uP^c > négociant de C le rm on t, ¿gorgé à V e y r e , le jour de la fête
(2.) r fe * 8t c
^ c°u p s de sabre ou de couteaux.
V ) omme ce procès verbal n’est pas joint à la procédure , il est tout a u Iòne a u x
pièces justificatives, N °. III.
,
(3) On fit signer des enfans, d’autres ont signé deux fois.
.4
�(8 )
§.
«
«
v
«
k
Ier. D E
L’ A C T E
D’A C C T J S A T IO X .
« Guillaum e B a rd a abusé de sa qualité d’agent pour fa ire venir
un garde qu’il a installé de sa propre autorité en floréal an 5, sans le
concours de Tadministration municipale m
0 a fa it donner étape à ce
garde par les particuliers, et les a astreints à lui fo u r n ir les vivres
et le logement, les uns pendant 5 jours, les autres pendant 4, sans
prendre d’autre règle que son caprice. »
Les faits ont expliqué à quoi tout cela se ré d u it, et les 10 témoins
qui en parlent ne les contredisent pas.
Ces témoins n’ont pas dit que l’agent eût fait installer le garde de son
autorité', ce garde ne fa pas été du tout. Aucun témoin ne parle du lo
gement.
Ils n’ont pas dit que ce fût sans le concours de Vadministration m u
nicipale: l’accusé rapporte cinq certificats de ses anciens collègues, por
tant que s’il n’y a pas eu de réception de ce garde , c’est qu’on n’a ja
mais pu réunir tous les membres i\ la fois (1).
Quant aux billets dits d’étape, qu’on les représente, et leur style
montrera la méchanceté des dénonciateurs.
§ . II D E L’ A C T E
D’ A C C U S A T I O N .
« B a rd a perçu des amendes dont il a f a it tout son p ro fit, et n*en
« a jam ais rendu compte ’ que ces amendes perçues sans jugement
« et sans y être autorisé par aucune autorité sont autant de con
ta eussions. »
Aucun témoin ne dit que le citoyen Bard ait fait tout son profit des
amendes , ni qu’il n’ait été autorisé par aucune autorité à les perce
voir. Ils disent seulement qu’il a reçu , et Bard ne le désavoue pas.
Les registres de la commune contiennent l’arrété qui fut pris sur ces
amendes. S’il y a erreur de droit, au moins il n’y a pas défaut de pro
b ité , et cette corde délicate eût p e u t-ê tre valu la peine d’être m é
nagée davantage.
Toutes ces fameuses amendes se réduisent à 9
Les payemens arti
culés par les témoins se rapportent ¿\ la même journée, et deux délits.
Chacun devoit payer 3
La veuve A u rier, Bard et Assolent sont les
(1)
Ces certificats sont en date des i cr 5 et 10 fructidor, an 6.Voyez n°. V des pièces
justificatives.
•
•
.
�seuls qui payèrent, Pierre Cordan , dont on ne parle pas, a donné en
sus 30^. Les gardes en eurent 6 ti~. i 5J.
Pialle qui dit avoirpayé 3
est un faux témoin \ il n’y étoit pas.
Sa femme disputa le payement et ne donna rien.
Gaumi et Monestier prétendent avoir donné 6 tt~. Ceci n’a pas de
rapport aux prises des gardes. Bard avoit pris lu i-m êm e leur trou
peau dans son champ ; il vouloit s’en plaindre i\la police correctionnelle,
et l’arrangement du dommage fut fait de gré à gré à 6 *** pour les deux.
Certes,Bard étoit le maître de traiter sur son in térêtprivéjeton lui tait
un crime de n’avoir pas été un plaideur vindicatif.
V oilà cependant à quoi se réduit l’article des dénonciations le plus
pénible au citoyen Bard ? à 9
, dont la réception et l’emploi se trou
veront dans le registre de la commune, duquel il a demandé la repré
sentation au ministère public.
C ’est ainsi qu’on avoit peint comme un concussionnaire, un homme
d’une probité reconnue (1). Il étoit permis h l’esprit de réaction de lui
imputer des torts révolutionnaires j mais au moins d evo it-o n soup
çonner qu’un honnête homme met encore du prix à sa réputation.
§.
III
DE
L’ ACTE
D’ A C C U S A T IO N .
« B a r d , sans aucun m otif, e n jlo r é a la n 5 , a f a i t venir dans la
« commune quatre gendarmes , ¿ilatéte desquels il s'est promené ¿1
« cheval pendant toute une jo u r n é e , menaçant à'emprisonner,
« suivant son caprice, différons citoyens, a
L e fait est vrai en lui-même ; mais les circonstances ajoutées ne
sont ni dans les trois plaintes, ni dans les dépositions.
Neuf témoins (2) disent avoir vu Bard parcourant le territoire ,
* pour empêcher que les bouviers ne regardassent dans les cheprières ».
Aucun ne dit autrement.
Il n y avoit donc pas de ca p rice, ni de menace de prison : il y avoit
donc 1111 motif.
Sans doute ce m otif étoit louable, et lés voleurs seuls, h qui il nuiso it, pouv oient décemment lui en faire un crime.
Certes dans une com m une, où les voleurs de récoltés se réunissent
de huit en h u it, armés de fusils, pour disputer au propriétaire le droit
(1) V o i r les certificats de probité , etc. des administrations Yoisines
pièces justificatives.
(2) Les
34°. 35e.
37e.
38e. 3ge.
41e. 45e. et 49°. témoins.
, n.° V I
des
�(le jouir de son propre héritage , il faut sans doute d’autres formes que
des proclamations couvertes de huées et d’insultes.
Déjà cette résistance armée venoit d’avoir lieu contre l’acquéreur
d’un bien national (i). Elle avoit lieu tous les jours encore , et dans
le territoire de la Sauvetat et dans celui des communes voisines (2;.
§. I V
k
«
«
*
d e
l
' a c t e
d
’a c c u s a t i o n .
«■Bard a tenu à diverses époques de Van 5 , des propos anarcluques et contre-révolutionnaires, a dit que le gouvernement
actuel ne valait rien , q u il en fa llo it un autre; a dit également
q u i l n’y avait point de lo is , q u 'il se fo u to it des fa n tôm es de
lois q u i existoient »
Ici commence l’assemblage infernal de tous les ingrédiens employés
par des ennemis capitaux , pour expulser un père de famille du sol
de la république.
. C ’est h\ que se rapporte le brfilement d’une poupée de papier,
qui donna lieu , dit-011, aux propos tenus dans la gaieté d u n fe u de
j o i e , et à son occasion.
Et cent témoins peuvent déposer qu’ il n y eut pas de fe u de jo ie ! !
Il ne faut pas une grande habitude des dépositions concertées, pour
vo ir par le ton de passion , par la divagation des témoins sur les
mêmes imputations , que les rôles étoient mal distribués ou mal appris.
L ’un(3J, pour inspirer plus de confiance, lait tenir devant deux
cents personnes, les propos qu’il a entendu tout seul. L ’autre (4) a
compris que c’étoit Bard , mais il a compris aussi qu’il déguisoit sa
voix.
L ’un fait d’une poupée de haillons et de papier la déesse de la
république; il ajoute que Barda'jff/w doute lait faire cette déesse,
pour la suspendre par une corde, la briller dans un soi-disant feu
de joie , et crier quand elle bniloit : la république est malade' un
autre ( 5) vire la république ; un autre (6) fait grâce à Bard de la
fabrication de la pou pée, et dit que Bard l’ayant aperçue b rû ler,
dit : en voilà une de m oins, en attendant quelque autre.
(1) L e c it o y e n G ardet de V a y r e a v o u lu chasser un troupeau de son p r é , les bou
viers attroupés et armés de fu sils, l’en ont chassé lui-m êm e.
(2) V o y . le certificat de l’administration deMonton, n°. I V des pièces justificatives,’
( 3) L e G'!. tém oin.
(a) L e 4o'\ témoin.
( 5) L e 'j;)'. tém oin.
(G) L e 7 0. témoin.
�»
■ ( 11 ")
N ’y en a-t-il pas déjà assez pour se dire dans l’impassibilité de sn.
conscience, que la diversité de témoignages sur le même fa it, ou le
rnême propos , est la vraie pierre de touche de la mauvaise foi des
témoins. Aucun alors ne mérite de la confiance. Testis umts , contradiceiis a lteri, nem ini credi débat (i).
Quand l’accusé en écharpe voyoit son caractère avili par les cris
^ r o y a liste ow chouan , il a dû dire plus d’une fois: royaliste ou non,
je ferai exécuter les lois. Les provocateurs léinoins ont tourné la phrase
£i leur manière, en rendant le propos comme un aveu , fait à propos
de rien , de ehouanerie ou de royalisme.
A u reste, ces dépositions si passionnées, sont-elles -bien dégagées
d’un intérêt contraire ? Les Gaumi déjà en procès, les Brionet pour
suivis pour patentes , Chamalet, dit le tapageur, etlcs Pascal, désignés
dans le procès verbal du 30 therm idor, peuvent-ils, sans un renverse
ment de la moins scrupuleuse morale , faire foi en justice ?
juges. Qu’il en est de même quand on est en pn
L a dénonciation respective en est déjà un : les Gaumi d’ailleurs en
ont cinq ou s ix , partie pour bornes enlevées.
Le reproche d’inimitié pouvoit être proposé en tout temps , même
en crime de lèse majesté, à la différence des autres (3); ce qui prouve
combien la déposition de la haine ou de l’intérêt étoieut en liorreur
à la justice.
§.
«
«
«
«
«
«
«
«
«t
V
d e
l ’a c t e
d ’a c c u s a t i o n .
« L o rs (Tunefété baladoire q u i eut lieu dans la commune les i 5 et
16 août, il a excité les jeunes gens connus par leur républicanisme,
ou dont les parens av oient acheté des biens nationaux ; ce qui détermina ces jeunes ge/is à se diviser ci 1 deux bandes ’ il J it tous
ses efforts pour dissoudre celle q u 'il regardoit comme patriote,
e t j i t à ces derniers un crime d'avoir avec dérision brillé une
couronne de papier blanc j q u i l prit des notes contre e u x , meJi a ç a n t de leur fa ir e un procès crim inel ¿1 la suite de ce , quoiq iiil n\y eût dans la commune aucune espèce de trouble, que la
tranquillité y eût régné, et que les^ jeunes gens se Ju ssen t amu(1) Bruneau , obs. crim. tit. 17. max. 12.
/ < Îr
de testibus. Ord. civ. tit. des récusations. Muyart. part. 6,
( 3) M azuer, tit. 17. des témoins.
�«
«
«
«
«
«
te
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( Ï2 )
ses paisiblement , il fit venir à Ventrée de la nuit une fo rce
armée considérable de P la u z a t , il se promena toute la nuit avec
cette fo r c e , menaçant les uns et les autres de les em prisonner,
sans aucun m o tif apparent. I l autorisa par sa présence, ou au
m oins toléra , plusieurs infractions au droit île propriété, par
cette troupe armée , qu i même exerça plusieurs mauvais trai
temens envers dijférejis citoyens de ladite com m une, notamment
coj?tre la veuve M arnat , Jea n B rion et , A n toin e et L ig ier
P a s c a l, à q u i en outre on vola ^ J 'ra n cs. a
Si tout cela est litté r a le m e n t v r a i, il faut assommer le coupable,
ou l ’e n v o y e r aux petites maisons.
Car un homme qui fait diviser en deux un attroupement p aisible,
pour eri vexer une m o itié, qui s'insurge contre du papier blanc, et
veut faire des procès criminels à ceux qui en brûlent ; qui mande cent
hommes d’armes pour se promener avec eux toute une nuit dans un
lieu bien tranquille, qui menace de la prison sans m otif apparent,
ne peut être qu’un scélérat furieux , ou un imbécille.
Mais les témoins n’ont pas dit que Bard persécutât des jeunes gens ,
parce que leurs parais avoient acheté des biens nationaux. Il en
a acheté lui-méme.
Ils n ’ o n t p as d it q u e la fo r c e a r m é e s’ é to it p r o m e n é e toute la nuit :
e lle p a r tit à o n z e h e u re s d u so ir.
’ Ils n ’o n t pas dit qu’il n’y eût pas
de trouble, ni aucune espèce de
trouble , et qu’on s'amusoit paisiblement. Ils ont dit au contraire ( i)
que des jeunes gens vouloient battre le citoyen B a rd , et qu’on l’ôta
d’entre leurs mains.
Il reste donc en accusation l’aventure de la couronne, et celle de
la force armée ; mais dans tout cela les dépositions présentent encore
l’image de la confusion, de la passion, et de la cause personnelle.
Si quelques témoins affectent de sincoper leurs dires, en disant seule
ment que l’accusé voulut empêcher de brûler cette couronne ; d’au
tres qui rapportent ses expressions, font voir que c’étoit principale
ment une cocarde blanche qui l’olfusquoit (2); qu’il observa aux;
attroupés quer la constitution ne permettoit pas de porter ce signe (3).
S i , lors de l’arrivée de la troupe,, quatre témoins disent que l’ordre
de se fermer chez soi n’étoit donné qu’aux patriotes (4 ), si deux autres
0
) Le
et le 80e. témoin.
(2) L e 5°. ti'iiioin.
( 3) L e 3 i c. et le 80e. témoin.
(4} Les 5 i e. 52e. 54% et 70e. témoins.'
�( T3 )
disent que la consigne êtoit de tuer ceux qui ne se retiroient p/ts (i),
ces dépositions sont d’autant mieux un signe de vengeance, que six
témoins ont dit que l’ordre d’illuminer étoit pour tout le monde (2) ;
que deux autres ont été trouvés dehors la n u it, et déposent que
Bard leur dit : a llon s, je vous prie de vous ôter de l à , et d'aller
vous coucher.
Les prétendus excès de la force armée , si gratuitement imputés
à Bard seul , s’entre-détruisent encore par les rapprochernens des
dépositions qui s’y rapportent.
B rio n et, si intéressé à la vengeance, a fait preuve par deux fois
de son grand désir de ne pas en perdre l’occasion. Dans une alfa ire du
citoyen George , ouï comme témoin >il oublie pourquoi on l’appelle y
et ne parle que de Bard.
Cette affectation est utile, parce qu’il s’est plusieurs fois contredit.
L a première fois il attribue un propos à D upoujet ,• la seconde à
JBesseyre.
La première fois quand on lui d it, de quel côté es-tu ? il dit avoir
répondu : du côté de la rivière j la seconde fois, du côté de ceux
q u i veulent la paix.
Une fois il avoue que Bard en écharpe fut appelé brigand ; l’autre
fois il le tait. Tantôt il fait arriver Bard avec les gens de Plauzatÿ
tantôt il parle à Bard quand on l’avertit qu’ils arrivent.
Il fait une touchante hyppolipose du raalencontre d’une nièce des
Pascal , battue , traînée , ramassée et em portée, pour avoir voulu
défendre ses oncles 5 et les oncles eux-memes n’en disent pas un
m ot (3).
Il fait saisir son fils par Bard et se débattre avec lui; et ce fils
dépose, qu’ayant été arrêté par la patrouille, Bard au contraire le
fit relâcher (4).
Dans sa première déposition il ne parle pas de voyageurs ; dans la
seconde il croit rendre la scène plus piteuse, en disant que « toute
« la nuit sa maison fut investie, dont cinq fem m es d'Issoire, en voya« géant, e n fu ren t effrayées et tombèrent par terre à cet aspect ( 5),
Cette foule de contrariétés est trop choquante pour ne pas deve
nir une conviction certaine de mensonge. L a loi rejette les déposi»
(1) Les 41e. et 72e. témoins.
(2) Les 29e. 4re. 58e. 66e. 67e. et 60e. témoins.
Î3| Les 5 i . 52e. et 53e. témoins.
14) L e 64 . témoin.
( 5) Soixante-uuième déposition.
�( *4 )
tions contraires, même en procès différens ; elle condamne encoreïe
témoin à 400 francs d’amende (1).
Un Pascal se dit volé de 36 francs ; mais il le dit seul. Il s’eit vanté
depuis , d’avoir voulu par là se venger de cette soirée. L ’incursion
chez lui est donnée comme illégale; mais il n’étoit pas nuit; mais il
avoit mandé l’agent (2). A u reste, Bard n’arriva que pour faire re
tirer la patrouille.
Il y a dans l’ensemble des dépositions une telle mauvaise f o i, qu’un
témoin (3) prétend qu’un jeune homme qui étoit là à regarder , fut
saisi et menacé de prison , tandis que le jeune homme lui-même(4)
dépose qu’il étoit en chem in, et que deux jeunes gens de la troupe
vonloient l’introduire parmi eux.
Il résulte de tout cela , que comme le disoit un excellent criminaliste:
« l’expérience a fait voir que c’est souvent moins l’équité et la vérité
« qui président au jugement de la multitude » ( 5).
Il en résulte que les faits du procès verbal de l’agent (6) ne perdent
.rien de la confiance qui leur est due : que le devoir d’un magistrat
étoit de faire régner la tranquillité , et respecter son caractère avili;
que les moyens qu’il a employés, ne doivent p a s, à cause du chan
gem ent des circonstances, être devenus un crim e, si alors ils étoient
nécessaires.
§. V I d e l ’ a c t e d ’ a c c u s a t i o n .
« jDans le cours de Van 5 , B a rd a montré une anim osité im« placable contre tous ceux qu’il croyoit républicains : il voulait
« exciter dans sa commune une guerre civile. »
Ce dernier paragraphe n’est sans doute que le corrolaire de tous
les chefs précédons , car il 11e précise rien ; et fort heureusement les
témoins n'ont pas eu idée de charger le citoyen Bard de ce surcroît
d’iniquités.
Cette animosité implacable, quoi donc la prouve? seroit-ce d’avoir
été désarmé comme terroriste , d’êLre acquéreur et fermier de biens
’ nationaux, d’avoir indiqué des biens d’ém igrés, inconnus ? Seroit-ce
d’avoir montré à son poste une fermeté mal entendue? Un homme
ii)
hS
( 3}
(4I
O d . d e 1ÎÎ70. tit. i 5 . art. 2 i .
A rt. 3 ~)Ç) de la constitution.
L e 24e. témoin.
L e 36 e. témoin.
h) Muyart de Vouglans, part. 6. pag. 3o5. ^
(6) D u 3 o thermidor. V o y e z pièces justificatives, n°. III;
V.
' '
�( 15 >
public insulté, ne peut-il donc résister à l’opprobre qu’en méritant
une inculpation aussi cruellement appliquée ï
E t la guerre civile....sur ses foyers...... on en attribue le désir à un
père de famille.... à un propriétaire !....Combien il est dur à un mal
heureux , poursuivi par la vengeance, de sentir qu’on lui suppose un
tel excès de délire, comme si ce n’étoit pas assez de le flétrir par la
nécessité de se justifier de concussions fabuleuses.
Jusqu’à présent, l’accusé n’a eu que ses ennemis à combattre :
bientôt en présence de ses ju ges, des témoins sans haine et sans
crainte d iro n t, il l’espère, toute la vérité, et rien que la vérité.
Ils diront que tout son crime a été de mettre un pied profane sur
le canaam des fonctions publiques, et qu’il en a fait une expiation
suffisante en luttant sans cesse contre des délations, des coups et des
injures.
L a roue de la fortune a reporté ses ennemis sur leurs chaises currules; il eût été généreux peut-être, que pour l’inauguration de ce
joyeux avènement, ils oubliassent un ennemi sans défenses. Mais loin
de nous cet incivique héroïsm e, la vengeance sans ax-mes offensives
ne vouloit qu’une destitution; la vengeance armée s’est rattaché à
sa victime : elle-même dénonciateur , elle-même témoin la poursuit
jusqu’à satiété dans ses trois caractères. Nofi missura cutem , n isi
ylena cru oris, hirudo (i).
^ Mais la sagacité des jurés saura découvrir les vrais motifs de toute
1 accusation ; ils pèseront dans la même balance les griefs de l’accusé
comme ceux des accusateurs. Ils réfléchiront s’il est bien juste de
condamner un fonctionnaire public, en lui représentant pour témoins
ceux qui ne cessoient de l’outrager sans crainte. Si cette impunité
en honneur est aujourd'hui tolé rée , demain elle sera nécessaire,
demain ( 2 ) d’autres magistrats seront aussi insultés et n’auront plus
le droit de s'en plaindre.
Si le trop grand zèle de l’accusé a pu lui faire franchir les bornes
du pouvoir dans l’exercice d’une fonction peut-être mal assortie au
genre ardent de son caractère, il faut se souvenir et de sa position
et de la gravité des circonstances ; il faut lui tenir c o m p te de ce que
dans une contree livrée à une fermentation c o n tin u e lle , il a été assez
heureux pour conserver à tous ses concitoyens leurs propriétés et
( 0 Fin art. poet.
(2) Nam et illis parvum est impune maie fecisse et volis ceterm sollicitudo remanebit.
ùallust. oeil, jug.
�( 16 ).
l’existence. On a empoisonné minutieusement les moindres actions
de sa vie privée et publique ( i ) ; et on doit au moins lui savoir gré
du bien qu'il a fait et du sang qu’il a empêché de répandre. (2 ).
(1) O n a poussé la palinodie jusqu’à dire que Bard a v o it été le plus grand dénon
ciateur révolutionn aire de son p a y s , m ais on ne nom me aucun dénoncé.
(2) N otam m ent celu i du prêtre D u c lo s , q u i , en reconnoissance est un de ses accu- ’
sateurs.
P I E C E S
J U S T I F I C A T I V E S .
N .° I.
E xtrait de la proclamation du département, du 8 floréal an
5.
. E n v i s a g e z désormais a vec horreur ces dénominations funestes, ces chants
« qui éveillent la haine et appellent* la discorde.Ce sont des crisde ralliement pour les plus
« violentes agitations, ce sont desinstrumens delà vengeance, c’est l’affreuse puissance du
« génie destructeur qui préside aux partis et a u x factions».
“ É vitez les grands rassemblemens et peut être môme lesréunions........ Combien dans
“ ets tems d ifficiles, l'activité et la surveillance sont nécessaires au x magistrats du
peuple ».
1
N .° II.
E xtrait de la. proclamation du citoyen B ard agent d'A ute^at, du 26 thermidor an 5 .
« . . . V o u s êtes invités au nom de la loi à ne former aucune espèce d'nttroupemen¿'
ni d’avoir aucun instrument e x t é r ie u r .. . . C om m e aussi il vous est défendu de vous
« servir de ces expressions : à bas les chouans, terroriste ou buveurs de s a n g ... Rangea
it vous autour de la constitution de Van 3 . Reprenez le c a l m e , tenez-vous en garde
« contre la perfidie de vos ennemis et contre l’exagération de votre effervescence.
N.° III.
Procès verbal de la fête d ’ Autc\at.
3
5
A u j o u r d ’hui
o thermidor l’an
de la république française une et indivisible,
je Guillaum e B a r d , agent municipal de la commune d’A u te z a te t la Sauvetat, craignant
que la c i- d e v a n t fête d’ Autezat n’occasionnât des troubles par l’effet de diverses
opinions, a v e d’autant plus de raison que le 18 du même m o i s , cela avoit déjà
occasionné une rix<> 011 certains citoyens, après s’être traités de chouans, de terroristes,
en vinrent a 1 x violences, ai le 2G d u même mois publié une proclamation pour inviter
les citoyens à la paix et à l’union.
^
L e jour de la lête,
th erm idor, revêtu de mon écharpe, je n’ai cessé de veiller au
1 maintien de la tranquillité p ub liq u e, me portant par-tout où je croyois m a présence
nécessaire. T o u t fut assez tranquille ce jour-là.
A 4 heures du soir du lendemain 2 9 , je yis un groupe considérable qui entouroit un
�militaire arrivé de la veille ; lequel groupe insultoit les citoyens par le. mot de chouans
et par des provocations qui alloient jusqu’ à la violence. Ils portoient une latte d’entour
•douze pieds, a u bout de laquelle étoit un bonnet b la n c ; il étoit entouré de Jean
.M ontorié, Cham alet le Tapageur, les trois Pascal frères et n e v e u x , V a l e t , et Garçon ,
tailleur , et nombre d’autres citoyens habitans des susdites communes voisines. Je
m ’approche de ce croupe pour faire abattre ce signe contre-révolutionnaire ; mais
plusieurs voix s’écrierent, et entre autres le citoyen Montorié : N ’écoutons pas ce b .......
et envoyons-le faire f ..... et continuèrent à parcourir les ru e s , coudoyant ou entravant
a v e c leurs pieds les passans.
C ’est dans ce moment-là que je rencontrai un autre groupe a yan t comm e ceux qui
étoient autour du bonnet blanc, un ta m b ou r, lequel fut frappé par le premier groupe
d e coup de pieds, ce qui alLoit attirer une rixe. Mais j’invitai ces derniers citoyens à se
retirer dans la cour du citoyen D u g rav ie r, et à y demeurer. Ce qu’ils firent, s’amusant
à y danser, motif pour lequel ils me dirent s’être rassemblés.
Q uelques momens a p r è s , ayant entendu du bruit sur le grand chemin à côté
d’A u te z a t, je m ’empressai, de m’y rendre. J’ai rencontré le même rassemblement a v e c
le même bonnet blanc; je réitérai mes instances pour engager ces citoyens à suppri
mer ce signe couleur de royalisme ; mais deux valets du citoyen M onestier, médecin
a C le r m o n t, propriétaire d’ un bien dans cette com m un e, se portèrent sur moi avec
violence. Le nommé Louis me donna un coup de coude sur la figure ; et le nommé
T rillie r me frappa de deux coups de poing sur l’épaule. L e domestique du citoyen
• B o r d e , acquéreur d’ un bien d’A u t e z a t , et un nommé Gardise D im ier , qui faisaient
•partie de cet attroupem ent, s’avancèrent contre m o i , et me dirent a vec fureur , qu’il
étoit temps de me retirer ; et en même temps je fus fortement frappé d’ un coup de
p i e d , sans avoir reconnu celui qui l’avoit donné. Quelques instans a p rès, le bonnet fut
tôté; mais les mêmes hommes ne cessèrent de provoquer le tr o u b le , et de se livrer à des
excès qu’il m’étoit impossible d’empêcher, puisque mon caractère public et la loi furent
tous les deux méprisés- J’avois écrit à l’agent municipal d e P l a u z a t , même canton, pour
requérir une force l é g a le , propre à faire respecter la loi et ses organes. Cette force
a rriva à huit heures et demie du soir , conduite par l’adjoint municipal de P l a u z a t ,
revêtu de son écharpe. N o u s parcourions ensemble les rues et les places publiques,
in v ita n t, conjurant par-tout les citoyens à l’ordre , à la paix , k l’ union , lorsque nous
aperçûmes une troupe d’ entour vingt c it o y e n s , que je reconnus pour être partie des
mêmes qui étoient autour du bonnet blanc. Il étoit alors entour dix heures du soir. Je
sommai les^citoyens, au nom de la l o i, de se séparer et de se retirer. Sur leur r e f u s ,
accompagné d’jnvectives , j’ ordonnai d’en arrêter un , nommé Pascal. II faut observer
que qnelqu.es instans auparavant j’avois aussi fait arrêter C ham alet dit le ta p ag e u r,
qui avoit insulté les deux adjoints par ces m o ts, jo u ta gueux, etc. T o u s l e s 'd e u x
secnapperent et se retirèrent dans la maison de Ligier P a s c a l, où quelques citoyens
u detachement entrèrent pour les chercher. C e qui donna lieu audit Ligier d’ insulter
® même de battre les citoyens du détachement qui étoient entrés chez l u i , et auxquels
eannioins j ordonnai de se retirer, afin de marquer mon respect pour la loi qui défend
e violer 1 anle d un citoyen pendant la nuit. Les autres se retirèrent chez Brionet, où
ils se mirent ;'i boire avec le père et un des fils. Je réitérai de dehors par la fenêtre
u c a b a r e t, de se retirer chacun chez eux ou chez leurs maîtres. Ils s’y refusèrent
orm euem ent, et ledit Brionet cabaretier non p atenté, se refusa aussi à fermer son
c a b a r e t , d après la sommation que je lui en fis au nom de la l o i , comme étant heures
indues, et comme n ayant pas droit de vendre du vin.
. . . eRf dans £e. moment qu’arriva le domestique du citoyen Borde , juge du tribunal
ciYU séant a K iom ; et je m ’aperçus un instant a uparavan t de la sortie' des deux autres
�( 18 )
fils B rio n e t, qui altèrent à la S au vetat chercher m ain -fo rte contre nous. D u nom bre
de ceux qu’ils rassem blèrent étoit M ontorié je u n e , G uillaum e M on estier, Bles, etc.
Enfin nous avons rem arqué que ceux qui étoient rassemblés à la Sauvetat par les
B rionet f ils , se retirèrent à la Saigne chez le citoyen M onestier, où réside sou frè r e ,
le cito yen M onestier, ex-cu ré de S ain t-P ierre , et ex-conventionnel ; et après nous être
assurés pendant une partie de la n u i t , que la tranquillité publique ne seroit point
trou b lée, nous nous sommes retirés. E n foi de q u o i, j’ai signé le présent procès verb al
le 3 o therm idor, et l’ai déposé au départem ent, afin que l’adm inistration a v ise dans sa
sagesse a u m o yen de punir les délits que j’ai constatés.
N .° I V .
Certificat de Monton relatif aux pacages.
L ’adm inistration m unicipale de M onton certifie— que les habitans de la S a u v e ta t;
se permettent tous les jours de faire pacager d a n s..
la com m une de M o n to n , m algré
les in v ita tio n s .. . . et que même lorsqu’on les invite à se retirer , ceux-là attroupés et en
grand nom bre, les m enacent de les frapper . . . F a it en l’adm inistration m unicipale à
M onton le 8 v e n dém aire an 7 de la république. Signe M A R N A T président; BLANCHIER.
secrétaire.
N .° V .
Cinq certificats relatifs au garde-récolte.
Je soussigné R. A . M a ga u d certifie qu ’en l’an 5 étant agent municipal de Saint-Sand o u x , il fut présenté à l’administration du canton par le citoyen Bard agent de la Sa u
vetat un citoyen pour garde champêtre, et ce d’après une lettre du ministre . . . Les mem
bres de l ’ administration ne s’étant jam ais trouvés en nombre suffisant pour délibérer, le
citoyen Bard présenta plusieurs fois inutilement ce g a r d e ---- A Sain t-Sandoux le 1o
fructidor an 6.
Certificat conform e de F o u rn ia lle , ex-adjoint de Saint-Sandoux.
Certificat conforme d’ Antoine G irard ex-président du canton.
Certificat de Rochefort qui avoit la fièvre en l’an 5 .
C ertificat de C u reyras juge de p a ix , portant que le garde lui fut présenté pour être reçu.
N .° V I.
Quatre certificats de probité et de civisme.
L ’ adm inistration m unicipale du canton de M onton certifie à tous qu’il appartiendra
qu’il est de sa connoissance que le citoyen Bard n’a cesse de faire preuve jusqu’à ce jour
d ’une honnêteté et probité parfaitem ent intactes, qu’elle a vu et voit encore avec douleur son
■incarcération que peut a vo ir opérée la calom nie, attendu qu’elle ne connoît en lui aucun
m o tif qui ait pu faire soupçonner son républicanisme et lui faire comm ettre des actes inci
v iq u e s . l'a it en adm inistration m u n icip a le, le 29 brum aire an 7 d e la république une
et indivisible. Signé M A R N A T président, B L A N C H I E R secrétaire.
C ertificat sem blable de l’adm inistration m unicipale du canton des M artres, du premier
fr im a ir e an 7 .
. . . . .
Certificat semblable de douze propriétaires de Saint-Sandoux, du 26 brumaire an 7.
Certificat de l’adm inistration de P la u z a t, portant que Bard s’est toujours bien com
p o rté, qu’il a toujours jo u i d’une bonne rép u tation , ne lui ayant jam ais rien entendu dire
contre le g o u v e r n e m e n t républicain. S ig n é BERTHONNET, président; A r m a n d , agent;
FA U G ER A T, agent; BER N AR D , agent ; BRIONET, agent; L A C H E R A L commissaire du
pouvoir exécutif ; C o u l l o n , secrétaire.
,
F I N . . .
�
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Factums Marie
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[Factum. Bard, Guillaume. 1798?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
garde des récoltes
Révolution française
excès de pouvoir
agent communal
contre-révolution
troubles publics
Description
An account of the resource
Mémoire justificatif pour Guillaume Bard, Ex-agent de la commune de Sauvetat-Autezat, accusé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1798
1796-Circa 1798
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0302
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Sauvetat (63413)
Authezat (63021)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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agent communal
contre-révolution
Excès de pouvoir
Garde des récoltes
Révolution française
troubles publics
-
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07232ad48f1202a55cbbb70473ec00f0
PDF Text
Text
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*
PRECIS
POUR
le fieur B A I L E
,
Plaignant y
C O N T R E le fieur C O U H E R T , Accufé.
I L
fuffit d ’être honn ête
homme
pour
déplaire au
fieur
C o u h e r t : le fieur Baile a eu la fermeté de réfifter à fes.
injuftes follicitations ; il a refufé de faire une fauffe dépo-,
fition
contre
le
fieur G ra ne t.
Inde mali labes.
Pou r
fe
v e n g e r de cette réfiftanc e , il n ’eft pas de crime dont le
fieur
Couhert
ne fe
foit rendu coupable envers le fieur
Baile.
L e fieur B a i le , en fa qualité d ’huiffier royal , avant é té
c har gé de fignifier un exploit au fieur Beff e y r e , habitant de
la ci-de van t provi nce du Geva ud an , & de le comprendre
en perfonne , che z le fieur C o u h e r t fon b e a u - f r è r e , où il
é toit a l o r s , le fieur C o u h e r t , auffi- t ô t qu’il apperçu: le fieur
B ai l e , le m e n a ç a , l ’infulta & fit
tous
fes efforts pour le
m a ltraiter.
A
�A p r è s c e tte f o r t ie , & c o m m e s’il eût craint que le procèsverbal clu fieur B a ile ne f î t pas une
fois fuffifante de Tes
e x c è s , le iieur C o u h é r t lui fignifia l’a£le le plus in ju r ie u x ,
le plus a u d a c i e u x , un a & e qui ne refpire qlie m é c h a n c e t é ,
que c a l o m n i e , que m enaces ; un afte d o n t on d evro it d o u ter
d e l ’e x ifte n c e , fi les co p ies n ’en euffent pas é té m u ltip lié e s ,
c o lp o rté e s dans toutes les rues de V i v e r o l s , par un fe rg en t
&
deux r e c o r d s , & fi elles n ’é to ie n t lignées du fieur C o u -
h ert lu i-m ê m e . P a r c e t a c t e , le fieur C o u h e r t qualifie le
fieur B a ile
de f a u x
tém oin , de com plice du
dans divers délits ; il lui
copies d 'e x p lo it s ,
(leur G r a n d
im p u te d ’avoir fo u fflé différentes
dont , le bruit p u b lic annonce vaguem ent
des originaux ; de s'être introduit dans f a
cour &
dans f o n
ja r d in , fo u s p r é t e x t e , d i t - il, de lu i porter des copies , tandis
çu il n en remet aucunes & qu étant devenu fo n ennemi G*
f a u x témoin contre l u i , i l ne doit p o in t f e perm ettre d 'e x
,
ploiter contre l u i , n i de venir ch e£ lui. E n co n féq u e n ce, il
protefle de f a u x contre tous actes qui pourraient être fa b riq u es
tant par le (leur B a ile , par le fie u r Chapuis ,
huiffier
à
V iv e r o ls , par C h ap ela in -V illen euve , huiffier à A m b e r t, que
par quelqu autre huiffier de
I l déclaie que fo n
la v ille
refpecl & f a
de V i e , & c.
confiance dans
& c. & c .
les l o i x ,
m algré leur léthargie > qui devient de p lu s en p lu s fu n e jle ,
fe ro n t toujours irréfragables ; mais que dans cet inflant d ’a
narchie , f i h eureu x pour les m échants , la defenfe naturelle
étant le prem ier droit du c it o y e n , i l prendra pour a tta q u e,
agreffion, ou attentat à fes jours , l'introduâion d ’un f e u l ou
de plufieurs defdits dénommés ci - deffus , & particulièrem ent
dèf'dits B a ile , Bernard & C h o u v in s, non feulem ent f u r fo n
habitation à E tr u c h a t, m ais encote f u r aucune de J es p o f-
�7o3
3
fefjions ; q u i l repoufera toute violence par tous les m oyens
n a tu re ls, & q u i l les rend tous corporellem ent & folidairem ene
garans &
refponfables de tous attentais. &
dommages
qui
pourront être portés fur la perfonne dudit fie u r requ éra n t, fu r
c elles des fietis £* f u r Ces b ien s.
L ’on ne fe permettra
ici
aucune réflexion fur c e c h e f-
d ’œ u v re de folie , crainte d ’en affbiblir les ex pre fiions dnergiques ; elles fo n t bien fuffifantes pour cara£tdrifer celu i qui
en eft l ’auteur.
L e fieur B aile c ru t d evo ir à fon état &
fe po urvo ir
en
j u f t i c e : il rendit plainte en la c i - d e v a n t
S é n é c h a u ffé e d’ A u v e r g n e ,
m auvais
à lu i-m ê m e de
traitem ens que lui
tant des
a vo it
infultes , m enaces ÔC
faits le fieur C o u h e r t ,
lors de la fignification q u ’il fit au fieur B e fT e y re , fon beauf r e r e , que des calom nieufes inculpations &
m enaces c o n
tenues dans l ’a & e d o n t on v ie n t de rapporter les termes.
S u r c e tte plainte , le fieur C o u h e r t fut d é c r é té de foito u ï ; mais il n’eût pas
r é c i d i v a , le
p lu tô t
fubi
in terro g a to ire ,
qu Jil
i y d é ce m b re 1 7 8 ^ : il te n o it une audience en
qualité de bailli en la ci-devant juftice feigneuriale de V i v e r o l s ;
a y a n t e ntend u appeller une caufe
pour le fieur C h o u iT i,
ancien ferm ier de la directe de V i v e r o l s , il sJécria c o m m e
un fu rieu x : j e ne v e u x p oin t connoître des caufes de c e t
homme ; mais j e
v e u x fa ir e connoître au p u blic ce frip o n de
B a i l e , qui efl ceffionnaire des arrérages de cens de la fe r m e
du fie u r Chouffu E n cotiféquence j'o ffr e d'être le défenfeur de
tous
c e u x qui
auront à f e plaindre , foit contre
le fieur
Ç h o u fji, fo it contre le fie u r Baile ; j e me charge de les faire,
débouter de toutes leurs demandes
6* même de les fa ir e
condamner à la reflitutioti de tout ce q u ils ont reçu , parce
A 2
�'que la liève du ficar ChouJJi n e j l p oin t
fieur C o u h e r t n ’oublia rien p o u r
en règle.
fo u le ve r
E n fin le
les ce rifitaire s,
& les po rter à des vio le n c es c o n tre le fieur B aile ; & il eft
bon
de
rem arquer qu e
le fieur C o u h e r t
a v o it choifi un
tem ps bien propre à Tes mauvaifes i n t e n t i o n s , c Jé to it c e lu i
où le peuple abufé par les ennem is du bien p u b l i c , s’ima^
g in o it qu’il n ’é to it plus permis d’e x ig e r le paiem ent des c e n s ,
c e lu i
où
une
pareille
erreur
a v o it
o cca fio n n é
tant
de
m eurtres 6c d’incendies. C 'e f t d ’après c e tte p ro cla m a tio n -,
de Ce charger de la déferife de tous c e u x
qui auroient à f e
plaindre des Jïeurs B a ile & Chouffi : c ’eft par
c e tte a£tion
baffe q u ’il e n g ag e a un n o m m é D a u r a t , c e lu i d o n t la ca u fe
v e n o it d ’être â p p e llé e , à lui confier fon affaire.
I l eft effentiel d e rem arquer que , dans c e tte caufe , il
s’a giffoit de trente-fix livres d’argent prêté, & non pas d’ar
rérages de cens ; cepen dant le fieur C o u h e r t qui ne fuivoic
que fa p a i f i o n , fans s’o c cu p e r de l ’in té r ê t de fa p a r tie , fe
livra uniquem ent à critiquer la
liève du fieur C h o u f f i , à
fo u ten ir q u ’il ne lui é to it po in t dû d ’arrérages
de
cens ;
qu’au co n tra ire il d e v o it rem bourfer une partie de ce qu’il
a v o it r e ç u , 8c il v o u lo it que le fieur B aile, q u ’il ne ceffoit
d e qualifier de cejfionnûire du fieur C h o u f l i , ( qu o iq u ’il fu t
très-affuré du c o n t r a i r e , ) en fit le rem b o u rfem en t fur le
cham p. C ro ira - t- o n que le
fieur
C o u h e r t plaida
pend ant
plus de d e u x heures fur le m êm e ton ? L e cro ira - t - on ,
fur-tout quand on faura que le défenfeur du fieur C h o u fli
étant n b f e n t , il ne s’agiffoit que de prendre des conclufions
p o u r a vo ir une fen te n ce par d é fa u t? L e c r o ir a - t- o n e n f i n ,
‘ Quand o n fera inftruit que ç ’eft d e v a n t fon gendre que l e
�y
fîeur C o u h e r t p l a i d o i t , '( i ) après
lui a vo ir c é d é fa place
d e J u g e ? T o u s ces faits fo n t néanm oins c o n fia n ts , ils fo n t
pro u vé s
par
q u e , dans
les
inform ations , & il n ’eft pas moins certain
le cours de c e tte odieufe p la id o ie r ie , le
fieur
'C o u h e r répéta une infinité de f o i s , que le Heur B a ile é to it
un coquin , un frip o n , un v o le u r , un fa u jja ire , un brigand,
un fcele'rat ; en un m o t , le fieur C o u h e r t n ’oublia rien pour
■noircir le fieur B a i l e , &
lu i ,
fous
le
pour fo u le v e r
le peuple co n tre
prétexe fa u x q u ’il é to it ceifionnaire du fieur
•C ho uiïï.
L e charlatanifm e du fieur C o u h e r t , (fi l ’on peut Te ferv i r d e c e tte e x p r e if i o n ,) lui attira deux ou trois autres clients
p o u r l ’audience f u i v a n t e , & c e c o u p - c i , il s’agifioit d ’arré
rages de c e n s; mais le défenfeur du fieur C h o u ifi n ’a yant eu
gardeJe plaider contre le fieufC ouhert, devantfongendre\i\ri é to it
e n c o re queftion que de prendre des conclurions & demander
d é fa u t: mais le but du fieur C o u h e r t q u i é to it de diffamer
en co re le fieur B a i l e , n ’auroit pas été rempli ; il avoit eu
foin de rendre l ’auditoire trè s-n o m b re u x > en faifant a n n o n
c e r p a r-to u t qu’il d e v o it plaider une caufe c é lé b ré . I l plaida
d o n c to u t f e u l , & fans contradicteur , pendant to u te l’au
d ie n c e , qui dura plus de quatre heures. T o u t e s les injures ,
to u tes les h o r r e u r s , toutes les calom nies dont il.a v o it tiifu
( i ) S’il e it expreiTém ent défendu aux Ju ges de q u itter leu r place de J u g e
p o u r fe ch arger de la défenfe des plaideurs dans leurs ju rifd i& io n s ; com bien le
fie u r
C o u h e rt n’é f t - î l pas coupable de n’être
p our fe livrer, aux e x cè s q u ’on lui im pute &
d e v a n t fon g e n d r e ,
co n treven u à cette d é fe n fe q u i
q u i font prouvés ; p o u r s’y liv tfr
fon fécon d lu i- m ê m e , fo n co m p lice d e d ivers d é lits , fon
'•todécrété de p rife-d e-co rp s î.
�r6
fo n prem ier p l a i d o y e r , fu ren t ré p é tée s ; rien ne fut o u b lié *
rien n ’échappa à la langue infern ale du fieur C o u h erc .
L e fieur Baile qui ne d ût fon falut qu’à la c o n fia n c e qu’ il
s’é to it acquife de fes c o n c it o y e n s , en adhérant à fa p ré c é d e n te
pla in te , en rendit une n o u ve lle pour raifon d e tous ces f a i t s ,
& fur les in fo rm atio n s qui ne p o u v o ie n t pas m anquer d’ê tre
c o n c l u a n t e s , puifque les faits s’é to ie n t
paiTés d evan t
d e d e u x cents p e r fo n n e s , le fieur C o u h e r t a é té
une fé c o n d é fois de f o i t - o u ï .
plus
d é c r é té
» - -
E n f i n , le p mai 1 7 ^ 0 , le fieur B a ile &
le fieur B r e u i l ,
O ffic ie r s M u n ic ip a u x du B o u r g de V i v e r o l s , c h e f - lieu de
C a n t o n , a ya n t é t é e n v o y é s en d éputation à la M u n ic ip a lité
d e S a u v e fla u g e s , à l ’o c ca fio n de la fédération p ro p o fé e par
la V i l l e de C l e r m o n t , & p o u r quelques autres objets relatifs
à la M u n ic ip a lité , ils furent o b lig é s de fuivre le chemin
p u b l i c , qui paife auprès de la m aifon du fieur C o u h e r t., 6c
q ui traverfe fes pro priétés ( n ’y ayant pas d ’autre route ).
L e fieur C o u h e r t qui les a v o it vus pafier , alla
fe pofter
au co in de fon é t a n g , d errière un t e r t r e , a ttenan t au c h e
m in ,
pour les atten d re
à
m auvais deffein : il é to it là
leur r e t o u r , &
avec la f i l l e
e x é c u te r
fo n
F erry , dite la
V a illa n t e , au f o l e i l couchant ; ôc lo rfq u e les
fieurs B a ile
& B re u il reven o ien t de S a u v e fla u g e s , le fieur C o u h e r t fo rtit
de d erriere le t e r t r e , & tira un c o u p de piftolet au fieur
B a i l e , en difatit :
g u e u x j e te tiens , h eu reu fem en t q u e
le c o u p n’a tte ig n it que le chapeau du fieur B a ile j qui en
fu t p e rc é .
Le
fieur
B a ile ,
en
adhérant
à fes
deux
p ré céd e n te s
p la i n t e s , a e n c o r e rendu plainte de c e t ajjajfinat prém édité,
fur la p re u ve réfiiltante des in fo r m a t io n s , le fieur C o u h e rc
�7
a
é té d é c ré té d 'ajourném ent perfônnel ; dans la
fu i t e , Ici
p ro cé d u re a é té ré g lé e à l ’e x tr a o r d in a ir e , &: m algré toutes
les m enées du fieur C o u h e rt &
de Tes p a rtifa n s, m a lg ré
fon or , Tes promefles & Tes menaces p o u r féduire les tém o ins
&
les p o rte r à un rétra& ation ;
enfin m algré les aftuces ,
les apoftrophes captieufes du fieur C o u h e r t , pour
les faire
tro u b le r & to m ber dans quelques c o n tra d ic tio n s , la vé rité
a t r i o m p h é , tous les tém oins
fitions au re co le m e n t &
o n t perfifté dans leurs dépo-
à la co n fro n ta tio n . Ils o n t tous
foutenu que le fleu r Couhert a tiré le coup
de piJloU t au
fie u r B a ile ; ils o n t rendu c o m p te du m o m e n t , du lieu ôc
des circonftances de c e c r i m e , a v e c la plus g ra n d e e x a c
titu d e ^ fans que le fieur C o u h e r t ait pu
dans la plus lé g è r e contradiction.
L e fieur C o u h e r t ,
toujours
les faire to m b er,
fe rtile dans
les
reifources
»de la chicane, prévoyant une condamnation inévitable, a
im aginé de faire u f a g e , p o u r la p rem ière f o is , au mois
d ’o & o b re 175)0 , 6c après les re co lem en ts & co n fro n ta tio n s ,
de cinq requêtes de p lain tes qu’il a v o it eu la précau tion de
d o n n er les 1 0 ,
20,
2 7 f é v r i e r , 13
mai &
2 7 feptem bre
175)0; mais les trois prem ières de ces plaintes
lu m e n t étran gères à la
font abfo-
conteftation a& u e lle î ce lle du
15)
fé v r ie r ne co n c e rn e que le fieur G r a n e t ; celles des 20 &
2 7 f é v r i e r , ne fo n t relatives
q u ’à c e qui s’eft paiTé lors de
la nom ination des O fficiers M u n ic ip a u x du bourg de V iv e r o l s , où le fieur C o u h e r t s’avifa de v e n i r , quoiqu’il ne fût
p o in t c ito y e n a£tif du bourg ,
mais feulem ent des villa g e s
de la p a ro ifie , qui fo rm o ie n t une M u n ic ip a lité diftin£te. ( 1 )
( 1 ) Le
dans
fieur C o u h ert
la M u n icip alité
ayan t to u jo u rs e xe rcé
les
droits de cito y e n
a ilif
des villages , n e d e v o it p a s , d’après les D é cre t* c o n ilit u -
�s
C e n’eft d o n c que pour
faire diverfion , p o u r faire perdre
d e vue l ’o b je t e ife n tie l, que
cu m u ler fes
le fieur C o u h e r t
nom breufes plaintes fur
c h e rc h e
lefquelles il
à
n'a pas
feu lem en t pu o b ten ir le plus lé g e r d é cre t.
Q u a n t à fa plainte du 1 3 m a i , c ’eit une pure récrim ina
tion , & c e qui le p ro u ve fans répliqué , c ’eft que le fieur
C o u h e r t n ’a penfé à faire enten d re fes tém o ins , q u ’après
avoir é té d é c ré té fur la
plainte du fieur B a i l e , ôc même-
après les re co llem en ts &
c o n fro n ta tio n .
E n f i n , il ne lui reftoit plus q u ’ une reifource ; la plainte
tio n n els , a flifle r aux aflem blées de
la M u n icip a lité du bourg ; il ne d e v o it pas,
fu r-to u t y v e n ir armé de p ijîo lc ts , &
après a vo ir m enacé d’en faire u fa ge
pour
m ettre, d ifo it-il , de l ’ ordre dans l'ajfem blée. C e fu re n t ces m otifs , bien lég itim es
fans d o ute , q u i firen t exclu re le fieu r C o u h e rt de l’alFemblée. Il c il don c iîn g u lie r
qu’ il ait o ie fe p la in d re , lu i q u i e ft le feul coupable ; mais fa plainte n’a eu pouc¿ u t que d’atténuer celle q u i a vo it été ren due co n tre lui-m êm e &
co n tre fes ad h é.
ren s par pluiieu rs p articu liers. E n vain v o u d ro it-il d iilïm u ler q u ’il a vo it des p iftolets dans fes p oches ; le fieu r B en o ît R ig o d o n , q u ’ il a p ro duit lu i-m ê m e , &
don t par confe'quent le tém o ig n a g e fait p lein e foi co n tre lui , dépofe que «. lo rfq u e
te p luiieu rs m em bres de l’ailem blée e u ren t p ro p o fé de fe f o u ille r , p our favoir
» s’il n ’y en a vo it pas q u i fuiTent arm és com m e le b ru it p ublic Pa/Furoit ; le fie u r
j».
Couhert foutint qu'il ne portoit point d ’ armes ojlenfibles
,
mais qu’ i l lui étoit perm it
» d'en avoir dans fa poche pour fa Jureté pcrfonnelle. » N ’e fl-c e pas là l’aveu le plua
form el qu e le (leur C o u h e rt é to it arm é
de p ifto lets ? Et fi fo u s p rétex te de f^
defenfe perfonnell» , chacun p o u v o it porter des p ifto le ts dans les afTem blées, q u e ls
in c o n v é n ie n ts , quels m alheurs n e p o u r r o it- il pas en réfulter ? Sans chercher des
e xem p les ailleurs , n ’en tro u v o n s-n o u s pas t l; terribles dans la co n d u ite du fieut;
C o a h c r ; ; p su t-o n , fan.» frém ir d’in d ign atio n , le ra p p eller ces menaces q u ’il fit
au fieur B r e u i l, après lui a vo ir lencé l i a t ê t e , dans u n e a lfem M ée, un eh an d elier
des fc ru tjte u rs : j . f , f i j ’ avots mes■
p ijlolets fu r m o i , j e te biûlerois la ca v ella
en pleine ajfcmbléc.
A v e c d’aufli fager. d ifp o fitio n s , le fieur C o u h e rt n’a -t-il pa* bo n n e g r â c e , n ’efti] p-1 bien en d a ji: i L fn u te u ir qu’ il lui cil: perm is de porter d e i p iitc le tx d^tis
Ids
pour fa d ils u f e p ctfo n n e lle ?
en
�5>
¡en fu b o rn a tio n , &
c ’eft c e lle q u ’il a e m p lo y é e par fa requête
du 27 fe p te m b r e ; mais q u o iq u ’il ait fait entend re fo ix a n te f e p t t é m o in s , & qu e fur c e n om bre , il y en ait c in q u a n te - n e u f
de fufpe&s ( I ) &
d o n t le té m o ig n a g e
ne
peut faire foi :
n éanm oin s il n ’ y en a pas un qui dife qu e le fieur B a ile a
fe u le m e n t penfé à fuborner aucun des tém oins.
A la v é r i t é , il y en a pluiieurs qui d é p o fen t a vo ir
oui-
dire par la fem m e T r a q u e le t, ou par d'autres qui l ’avoient
oui-dire par c e tte fem m e T r a q u e l e t , que le fieur Breuil l ’a v o it
ind uite à dépofer c o n tre la vé rité , ôc que le fieur Cauffange,
Juge
d ’A r la n c ,
qui a v o it fait les inform ations par c o m -
m i i f i o n , n’ avoit pas ré d ig é la dépofition de c e tte fem m e
t e lle q u ’elle l ’a vo it rendue ; mais l ’on fen t d ’a va n ce to u te
l ’inutilité de ces d é p o fitio n s , tous les prétendus o u i-d ir e s, y
en eût-il c e n t , fo n t a bfolum ent in fig n ifia n ts , dès que furto u t C a th e rin e T r a q u e le t a p erjîjié dans fa dépofition au re
collem ent & à la confrontation.
E n e ff e t , to u t c e qu ’ un té m o in pourroit dire , toutes les
déclarations m êm e q u ’il p o u rro it donner par éc rit c o n tre
fa d é p o f it i o n , & fu r-to u t lo r fq u ’il y a perfifté au re co lle-
( 1 ) I l n’a pas o u b lié fes c o m p lic e s , au n om bre de d o u z e , décrétés con join te*
m e n t avec lu i d’a jo u rn em en t p e rfo n n e l, à la req u ête du fieur B reu il ; il n 'a pas
o u b lié le fieur C a len u rd , beau-pere de fa f i l l e , non plus qu e l’ A b b é le Blanc ,
(, ci-d e v a n t des M o u lin s ) les fieurs T rica u ts , D a u r e lle , G im e l, & leurs fem m es
& enfan ts , tous do ublem en t parents du fieur C o u h ert & de fa fem m e au trolfiem e
& qu atrièm e d egrés ; & de plus ces trois d e n i e r s , alors fubordonnés par leu r état
d e p rocureurs , a u fieu r C o u h e rt B a i l li , leu r créateur. Enfin il n’a pas o ublie
l 'iv r o g n e , le crap uleux Jean R o u r e , d o n t il a fi in d ign em en t abufé du nom pour
v e x e r le ficut G r a n e t , non plus qu e Jacques P it a v y , fon b e a u -fr e r c , ni C o n t y ,
q u i a fait une don ation frauduleufe de tous fes bien s à fa fe m m e , pour faire p erd re
fes créanciers ; nj la fem m e n i la b clle -fœ u r de çe m êm e C o n t y .
B
�to
m e n t & à la c o n f r o n t a t i o n , eft i n u t i l e ; les lo i x d é fen d e n t
exp re ffém e n t d ’y
avoir é g ard ( i ) &
c e t t e r è g le ce rta in e
nous difpenfera d ’en trer dans le détail des différents repro
ches que le fieur B aile auroit à pro po fer c o n tre les tém o in s
ind ignes de f o i , que le fieur C o u h e r t a e m p lo y é s p o u r faire
a v a n c e r des fauffetés auffi in co n féq u e n te s.
A u r e f t e , quel auroit pu être l ’in té rê t du Heur B re u il 8c
du fieur CaufTange ? ni l ’un ni l ’autre n ’a v o ie n t eu jufques-là
aucun différend a v e c le fieur C o u h e r t. J u f q u e s - l à le fieur
C o u h e r t a v o it fait le plus g ra n d cas du fieur B r e u i l , & il
1 a v o it fi bien reconn u p o u r h o n n ê te h o m m e , q u ’il l’a v o it
pro d u it p o u r té m o in dans deux procès crim inels qu ’il a v o it
e u s , l ’un c o n tre le fieur Im b e rt T r e m i o l l e s , & l’autre c o n tr e
le fieur G r a n e t.
II a prétendu, pour la première fois , lî>rs de la co n fro n ta
tio n , qu e le fieur B reu il é to it fon ennem i ; mais le fieur
B re u il lui a très-bien répondu qu e l’in vra ifem b lan ce de la
p ré te n d u e anim o fité , ré fu lto it de c e q u ’ il a v o it n é g l i g é ,
depuis cin q a n s , de m e ttre à e x é c u tio n
c réa n ce q u ’il a v o it c o n tre l u i ; &
plufieurs titres de
en effet ,
c e n’eft que
depuis l'é p o q u e de la c o n fro n ta tio n , que le fieur C o u h e r t
s’ eft l i b é r é , & il l ’a fait fans qu e le fieur B re u il ait eu en
id é e de lui faire aucuns frais ( 2 ).
______
( I )
»
D éfen d o n s aux J u g e s d’avoir égard aux déclarations faites par les tém oins
depuis l’in form ation , lefq u elles n ou s déclarons n u lles y vo u lo n s qu ’elles fo ien t
re jettée s du p r o c è s , &
néanm oins le tém o in q u i l'aura f a i t e , & la p artie q u i
l’aura p ro d u ite , condam nés chacun en quatre cen ts liv res d’am ende en vers n o u s ,
& autres plus gran des pein es s’il y é ch o it. O rdon n an ce d e 1 6 7 0 , art. X X I du
lit . X V .
(1)
L e fieu r C o u h ert v ie n t de n ou s fo u rn ir lu i-m ê m e u n e p re u ve non équivo»
q u e , q u ’il ne re g a rd o it pas le
fle u r B r e u il co m m e fo n e n n e m i; c’e ft T inter*
I
�xi
Q u a n t au fieur
C a uffa ng e, beau co up plus h e u re u x
tant d ’a u t r e s , il n ’a jamais
mais te l eft l ’ufage de
ennem is tous
ceux
eu à faire
c e lu i- c i ,
qui ne lui
au
que
fieur C o u h e r t ;
de regarder
c o m m e fes
fo n t pas favorables. Q u e
n ’a-t-il pas dit des J u ge s d ’A u r i l l a c , parce q u ’ils l ’o n t d é
c r é té de prife-de-corps ? Q u e n'a-t-il pas dit du fieur C h o u ili
&
d ’un CommifTaire au C h â te le t de P a r i s , parce q u ’ils onc
in fo rm é c o n tre lui ? Q u e n"a-t-il pas dit de tous les tém oins
qui o n t eu le c o u ra g e de d épofer la v é r i t é , & de d é vo ile r
tous fes forfaits ? Q u e n ’a-t-il pas fait c o n tre les avocats ôc
p r o c u r e u r s , qui o n t em braffé la d éfenfe de fes adverfaires ?
Q u e n ’a-t-il pas fait enfin c o n tre les huiiliers ôc les C a v aliers
d e MaréchauiTée qui o n t o f é , fo it lui m e ttre la main au
c o l e t , l’e x é c u t e r , ou fe u le m e n t lui faire la m oind re fignification ? N e
leur a-t-il pas fait à tous les im putations ,
les reproches & les m enaces q u ’il fait au fieur C a u fla n g e ôc
au fieur B reuil : c e que le fieur C o u h e r t im p u te d o n c au
fieur C a u fla n g e & au fieur B r e u i l , ne d o it pas faire la m o in
dre im preifion y c e fo n t les co m p lim e n ts ordinaires du fieur
C o u h e r t.
S i l’in fo rm atio n du fieur B a ile ne fe faifoit qu’a ujourd’h u i ,
ro g a to ire q u ’il a fu b i au tribunal d’A m b e r t , le f fé v rie r J791 , fur un d écret
d ’ajo u rn em en t p e r fo n n e l, ren du à la req u ête du fieu r B r e u il , pour injure r é e lle ,
voie de f a i t , & projet d ’affajjinat : il d cfa vo u e d’avo ir p in cé le fieur B r e u il, de
lu i a vo ir don né des fo u fflets & des co u p s de p o in g s ; il dit qu’ il lu i a vo it feu ?
Iem ent to u ch é la main , le m en to n & la jo u e } en lui diiant : mon cher a m i, j ç
ne vous veux aucun m a l, vivons en p a ix . C o m m e n t, d’après u n e déclaration fi
a m ic a le , le fieu r C o u h e rt o fe r o it-il préten dre q u e le fieur B reuil éto it fon enn em i ;
il ne le p e u t , à m oins q u e , fu iv a n t les c ir c o n fh n c e s où il fe t r o u v e , le fieu r
C o u h e r t ne m étam orphofe à fon g r é fes am is e n e n n e m is , & fes en n em is c e
am is / félon les b efo in s de fa ca u fç.
B î
�12
le fieur C o u h e r t pourroic dire p e u t - ê t r e , a v e c f o n d e m e n t >
q u ’il exifte de l'in im itié en tre lui & le fieur B r e u i l , & que
l ’inim itié réfulte du d é cre t d ’a jo u rn e m e n t p erfo n n el que le
fieur B reu ii a c b te n u c o n tre l u i , & o n z e d e fes c o m p li c e s ,
au tribunal du Diiîri£t d ’A m b e r t , le 22 ja n v ier 175)1 ; mais
les faits qui o n t d onné lieu à c e d é c r e t , ne rem o n tan t qu’au
26
d é ce m b re
1 7 ^ 0 , é p o q u e d’une a ifem b lée o ù
le fieur
C o u h e r t , to ujo urs en h o m m e fa g e & p r u d e n t , ju g e a à p ro
pos de je tte r au fieur B r e u i l , prem ier O ffic ie r M u n i c i p a l ,
& qui é to it alors dans fes fo n d io n s j un c o u p de c h a n d e lier
q u ’il prit fur la table des fcrutateurs & d o n t le fieur B reu il
fu t a tte in t au fro n t &
prefque
terraifé.
L e fieur C o u h e r t
n e c ra ig n ît pas d ’ajouter : j . f . f i j ’avois m es p ijîo lets f u r
m o i, j e
/
te brulerois la cervelle en p lein e affemblee ; 6* en
fo rta n t i l répéta , j e ne J u is f â c h é que de ne l ’avoir p as tu é ,
i l n en aurait été ni p lu s ni m oins.
V o i l à e x a & e m e n t les faits qui o n t d o n n é lieu au p ro c è s
c r i m i n e l , a£luellem ent exiftant
e n tre
les fieurs
B reuil &
C o u h e r t ; ces faits étant poftérieurs & a u x inform ations du
fie u r B a ile & a u x recollem ents & confrontations , le fieur
C o u h e r t ne peut pas en induire que lors de la d épofition du
fieur B r e u i l , il exifto it de l'in im itié e n tre e u x ; to u t c e que
l ’on d o it induire au co n tra ire de c e nouveau p ro cè s c r im in e l,
c ’eft que le fieur C o u h e r t eft un h o m m e vra im en t d a n g e
re u x , un h o m m e capable de t o u t , puifqu’il a ofé m e n a cer
le fieur Breuil de lu i brûler la
nombreufe ; l ’on
d o it croire fans
cap able de tirer un c o u p de
un lieu ifolé , &
cervelle dans une afjem blée
peine
q u ’il
a
é té bien
piftolet au fieur B a ile , dan»
o ù il ne c r o y o it être vu que de la j î l U
v a illa n te } a v e c la q u e lle il é to it c a c h é d errière le tertre.
�•15
Nous
p arce
nous
en tiend ro ns à
ces
fimples
q u e lle s paroifTent fu ffifan tes, &
o b f e r v a t io h s ,
q u ’il faudroit des
vo lu m es entiers fi l’on v o u lo it e n trer dans tous les d é ta ils,
auxquels le fieur C o u h e r t défireroit qu’on fe l i v r â t , en d is
cu ta n t fes plaintes m u ltip lié e s, q u i , c o m m e on Ta déjà d i t ,
n e te n d en t q u ’à furch arger la conteftation & à faire perdre
d e v u e fon vé ritab le o b j e t ;
en nous
réfum ant de tirer les co n fé qu e n ce s qui réfultenc
n a tu rellem en t des faits
On
nous nous co n te n tero n s d o n c
a vu
d o n t on a rendu com pte.
que le. fieur
Couhert
envers
le fieur B a ile d ’une infinité
in fu lté
&
sJeft
rendu
de crim es.
c o u p a b le
i°.
Il
l ’a
m altraité lo rfq u ’il eft a llé c h e z lui pour fignifier
un e x p lo it au fieur B e f l e y r e , fon beau-frère. O r la L o i v e u t
q u e de pareilles vio len ces qui ten d en t à e m p ê ch e r le cours
de
la ju f t ic e , foient furetnent punies,
a 0. Il a c h e rc h é
à
f o u le v e r le peuple c o n tre le fieur B a ile dans deux audien
ces p u b liq u e s, fous le p ré te x te f a u x & de fa pure inven
tion , que
cens du
le fieur Baile é to it ceffionnaire des arrérages de
fieur C h o u iïi ; dans les
d eu x audiences
le fieur
C o u h e r t , après s’être transform é de ju g e en d é fe n fe u r , a
qualifié publiquem en t le fieur B a ile de m alverfa teur,
de
concufjionnaire , de f r ip o n , de brigan'd & de fcélera t. Il eft
difficile
que
de
pareils
excès
d em eurent im p u n is ,
il eft
im p o iïib le q u ’ils n’attirent pas à leur auteur to u te l ’animadverfion des miniftres de la j u f t i c e , chargés de l ’e x é c u tio n
des L o i x .
50. Par l’a& e reco rd é du 31 o tto b re 1 7 8 p , le
fieur C o u h e r t a fait au fieur Baile les inculpations les plus
g r a v e s , il l ’a qualifié de f a u x té m o in , il lui a im puté d 'a
vo ir prevarique dans fon é t a t , il l ’a p ro v o q u é par des mena
c e s tém éraires d ’ufer de f o r c e &
de tous les m oyens natu-t
�I*
rels , en prenant pour attaque, agreffion ou attentat â fes
jo u r s j fo n
introduction ,
non fe u le m e n t dans f a
maifon à
E tr u c h a t, m ais encore dans aucune de Ces p ofjejjio n st q u o i
q u ’il fo it impofTible a u x habitants de V i v e r o ls d ’a ller ni
.U fT o n , ni
à
à A r l a n t , ni à C ra p o n n e , ni à SauveiTauges ,
fans pafler d eva n t la m aifon du fieur C o u h e r t , ni fans trave rfe r fes polTeiTions. L e M a n ifefte du fieur C o u h e r t n ’a v o it
d o n c pour b u t qu e de le m e ttre à c o u v e r t des peines atta
c h é e s au c rim e d ‘ affajfinat qu’i l prem editoit ; mais il s’eft pris
tr o p m a l- a d r o it e m e n t , fon lib e lle eft u n tifîu de m en fo n g e s 6c
<3e fuppofitions fi mal o u r d i e s , qu e la v é r ité p e rc e d e toug
c ô t é s , ta n t il eft vrai qu’ il eft difficile d e d onner au m e n f o n g e les co u leu rs de la v é r ité ; il en eft c o m m e du finge qui
im ite l ’h o m m e , il c o n fe rv e toujours fa laideur qui ne per
m e t pas q u ’o n s’y m éprenne. L e c rim e d ’aiïaiTinac a v o it
é t é p ré m é d ité ; l’a d e du 31 o & o b r e en eft une p re u ve
manifefte ,
concilium .
C e crim e a é té effe£tué le
éventas. I l e ftim p o flib le au fieur
la preuve
en
C o u h e r t de le d iiïim u le r,
eft c o m p l e t t e , quatre t é m o i n s ,
o c u la ir e s , l ’o n t
attefté par leurs d é p o fitio n s ,
au re c o lle m e n t &
p mai 9
d o n t trois
&
fo u te n u
à la c o n fr o n ta tio n ; les propres témoin3
du fieur C o u h e r t lu i-m ê m e , f a chère f i l l e v a lia n te, qui avoic
la co m plaifan ce de lui tenir c o m p a g n ie d errière le t e r t r e ,
e n attendan t le retou r des fieurs B aile &
de c e tte f i l l e ,
le fieur B o r o n &
B r e u i l , la m è re
autres tém oins produits
par le fieur C o u h e r t , tous atteftent q u ’il y a eu un c o u p
d e piftolet tiré.
L e fieur C o u h e r t eft le feul qui n'en c o n
v ie n n e pas ; cepen dan t il n ’a pas o fé im puter au fieur B aile
ni au fieur B reu il de l’avoir t i r é ; il a feulem ent fuppofé qu e
le fieur B reu il a v a n ç o it c o n tre lui le fa b re nud à. la ntain ,
�ce
q u ’aucun té m o in
n’a d é p o fé j il eft d o n c co nfiant que
le co u p de piftolet a é té tiré par le fieur C o u h e r t , ôc il eft
d ’autant m oins permis d’en d o u t e r , que le ca ra& è re & les
m œ u r s du fieur
Couhert
font c o n n u s , ( i ) l ’a& e
du 3 1
o & o b r e fuffiroit pour c o n v a in cre qu'il eft capable de t o u t ;
la co n d u ite qu’il a tenue co n tre le fieur Breuil dans une aiïemb lé e p u b l i q u e , ne laiflfe plus rien à défirer fur c e point ; il
eft d o n c d ém o n tré que le fieur C o u h e r t s’eft rendu co u p a
b le d 'e x c è s & violences co n tre un huiflier
qui rempliflbic.
les fo n d io n s de fon état ; q u ’il s’eft rendu co upable du crim e
d e diffamation 6c de calom nie ; foit par écrit dans l ’a£te du
5 1 o & o b r e , foit verbalem ent dans d eu x audiences publiques»
très-nom breufes ; q u ’il s’eft rendu c o u p a b le enfin du crim e
d ’affajjïnat, de dejfein p rém éd ité, dans un chem in p u b lic. O n
n e peut fe le d i i l i m u l e r , un pareil d élit eft gra ve . S i les
v o y a g e u r s ne fo n t pas fous la fauve-garde des lo ix qui les
p r o te g e n td a n s les r o u te s , il n 'y a plus de fureté p u b liq u e ; il
n ’y a plus de c o m m e r c e , plus de liberté j puifque les c ito y e n s
n ’a u r o n t , pour m ettre leur fo rtu n e , leur h o n n eu r ôc leur',
v ie à l ’a b r i, d’autre p r é fe r v a t if que les murs qui e n v iro n
n e n t leurs maifons. L e s peines de la vindi£le p u b liq u e , pour,
d e pareils c r im e s , fe ro n t fans d o u te f é v è r e s , mais c ’eft au
m iniftere public à co n c lu re ô c à réclam er l ’e x éc u tio n des L o ix .
A c e t égard , le fieur B a ile fe bornera à d e m a n d e r, pour Tes
réparations c i v i l e s , < fo.,ooo liv. des défenfes de r é c id iv e r ,
( 1 ) L es exp reflion s m êm e d o n t !e
fieur C o u h e r t s’e ft fe rv i à la confronta*
l i o n , ne le cara& iîiifen t-elles pas fuffifam m ent ?
Il
d it qu ’il na p o in t tiré d’arm e
à feu au fieur Baile , parce qu’ i l n ’ en avait pas dans ce moment , mais que s ’ i l
tn avait e u , i l en auroit certainement f a i t u ja g t } lorjque le fieu r B reuil a v a n feii
i galop ,
le fa b rt m d à la main.
�16
à peine de punition
c o r p o r e ll e ; l ’impreff i o n
&
affiche du
j u g e m e n t , au n o m b re de 3000 exem plaires.
C e s c o n clu fion s n ’o n t rien d’e x a g é r é ; en e f f e t ,
fi l ’o n
co n fid ere les torts de to u te e f p e c e , qu e le fieur C o u h e r t a
fait au fieur B a ile dans fon é t a t , fa fo rtu n e & fon h o n n e u r ;
fe l’on fe p é n é tre bien de l’a tro cité des in cu lp a tion s qu’il lui
a faites v e rb a le m e n t &
par é c rit ; fi l ’on fait atten tio n
fon a charnem en t à le p e r d r e , à fes récidives pendant
leurs différends é to ie n t fournis à la juftice
j
à
que
& à la nature de
l'affaffi n a t ; fi d ’ailleurs l ’o n ré flé ch it fur la fo rtu n e im m e n fe
du fieur C o u h e r t ; fi l ' on confid ere c o m b ie n
p eu e lle lui a
x
c o û té , c o m b ie n e lle a été r a p i d e , puifque en 1 7 7 4 to u t fo n
a vo ir confiftoit dans un O f f i c e
300
liv. que
de N o t a i r e , qui lui c o û t a
le fieur T r é m io lle s lui prêta , & q u ’a u jo u r
enfin fi l ’on fe rap
d’hui il fe dit riche de 3 0 0 , 0 0 0 liv .
p e lle que pour une lé g e r e r i x e , le fieur C o u h e r t a retiré
3 0 , 0 0 0 liv. de d om m ages intérêts du fieur T r é m io lle s
b ien fa ite u r, &
fon
que depuis c e tte é p o q u e il n’a ceffé de fe
faire des affaires crim in e lle s a vec to u t le m o n d e
en p r o v o
q u a n t a u d acie u fem e n t les ho n n ête s g e n s jufques dans des
affem blées refpecta b l e s , on dem eurera c o n v a in cu qu’on ne
fauroit le mulecter tro p f é v é r e m e n t ,
& que les co n clu fio n s
du fieur B a ile ne p e u ve n t plus être m o d érées.
S ig n é B A I L E .
A
D e l'imprimerie de M
R
a r t i n
Libraire, vis à -vis
I
O
M ,
DE G O U T T E
, Imprimeur-
la Fontaine des Lignes. 179 1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baile. 1791]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Baile
Subject
The topic of the resource
diffamation
diffamation
huissiers
troubles publics
cens
droits féodaux
tentative d'assassinat
témoins
homicides
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour le sieur Baile, plaignant, Contre le sieur Couhert, accusé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1791
Circa 1789-1791
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1230
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Viverols (63465)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53188/BCU_Factums_G1230.jpg
cens
diffamation
droits féodaux
homicides
huissiers
témoins
tentative d'assassinat
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53186/BCU_Factums_G1228.pdf
bd10b19b18f18aa74adbbffb5a612b8d
PDF Text
Text
6 ïf-
EMOIRE
DÉPARTEMENT
du
P u y - d e -D ô m e .
T
J U
POUR J . J
S
T
u st in
I F
I C
A
T
I F
,
D U B O IS -L A M M A R T IN IE ,
L i e u t e n a n t surnum éraire des troupes d ’A rtille rie
de la Marine, Accusé.
Do nobis tristis sen tentia fertur.
J UVENAL.
J
E suis accusé d’avoir fait usage d’une fausse com
mission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement des
chevaux de luxe. Sur des bruits vagues et sans fon
dement , on m’arrête à Aurillac , on me traîne ignomi
nieusement dans les prisons de C lermo n t , et bientôt
dans la maison de justice du tribunal criminel de ce
département.
A
r ib u n a l
mè
�< V .j
Sans inquiétude, sur une accusation frivole qu’il
m’est aisé de détruire , j ’attendois impatiemment le jour
qui doit éclairer mon innocence , lorsque j ’apprends
que mes ennemis cherchent à prévenir contre moi l’opi
nion publique ; on répand que j ’ai contribué à la mort
de l’infortuné Colinet de Niaucel , l’intime ami de ma
famille, le mari de la sœur de mon beau-frère. On ajoute
que j ’ai participé aux journées désastreuses des 2 et 5
septembre à Paris ; on me représente comme un factieux,
1111 agitateur, un faussaire.
J e dois à ma famille , au public , à moi-même , une
justification complète de ma conduite , et le récit exact
de mon malheur : citoyens impartiaux , qui devez pro
noncer sur mon sort , lisez et jugez !
J ’habite le lieu de Fontenilles, paroisse de Jussac ,
district et canton d ’Aurillac , département du Cantal.
Mon père , originaire de Saint-Céré , département du
Loth , a servi avec distinction ; il a fait toutes les cam
pagnes de l’Hanovre, et s’est retiré capitaine de cavalerie ;
il a épousé Ailarie-Anne Farganel , dont la famille est
illustre par les grands hommes qu’elle a produits.
Mon frère a în é , sert en qualité d’officier dans le
corps d’artillerie de terre, en garnison à Nancy. Mon
frère c a d e t, commande en second le dépôt du 220 régi
ment de cavalerie , ci-devant N avarre, en garnison à
Aurillac.
Voulant suivre la carrière des armes, j ’entrai dans
la marine de la division de Rochefort. Une maladie
considérable occasionnée par l’air des marais qui envi
ronnent cette ville , m'obligea de quitter ce service j
�( 3)
mais depuis, les ministres do n t'je suis connu, m’ont
engagé à me faire inscrire sur la liste des lieutenans sur
numéraires d ’artillerie de la marine: on savoit que j ’étois
expert dans cette partie , et j ’eus la promesse de m’em
barquer sur la première flotte qui armeroit pour la répu
blique.
J e jouissois paisiblement dans mon domicile des
bienfaits de la révolution , lorsque mes concitoyens, qui
connoissoient mon ardent amour pour la chose publique ,
mon respect et ma soumission aux lois , mon empres
sement à les exécuter, me firent l’honneur de me nommer
commandant de la garde nationale de Jussac.
J e me rendis digne de leur confiance en leur inspirant
les scniimens du véritable patriotisme ; c'est-à-dire,
amour de l’ordre , soumission aux l o i s , respect pour les
personnes et les propriétés.
Au mois de mars 1 7 9 2 , une foule d’individus égares
partirent pour Mont-Salvi, et vinrent me solliciter de me
mettre àleur tête ; je refusai constamment de m’y rendre,
quelque danger qu’il y eût dans ce refus. Je prévoyois
des troubles ; je leur écrivis avec fermeté pour les dé
tourner de leur dessein, pour prévenir toute infraction à
la loi ; ma lettre qui fut imprimée dans le temps, fit
le plus grand effet ; elle est jointe aux pièces de mon
procès.
Quelques ennemis de la chose publique , suscitèrent
peu de temps après des troubles dans la ville d’Aurillac ;
je m’y rendis à la première réquisition, à la tête de mes
camarades ; mais j ’arrivai trop tard pour prévenir les
premiers excès } j ’appris avec douleur que l’infortuné
A 2
�<W o
(4 )
Colinet avoit été victime de la fureur du peuple : sa
mort m’arrache encore des larmes ; il ¿toit l’ami de ma
famille , ma sœur a épousé Alexis Vigier de Fumel s
frère de la veuve Colinet.
N e pouvant lui donner des secours, j ’arrêtai les
progrès du m al; je rendis la liberté, au péril de ma v ie, à
plusieurs prêtres réfractaires qui alloient être immolés.
C ’est cette conduite généreuse qu’on voudroit lâchement
calomnier : ces faits néanmoins furent consignés dans
une adresse lue à l ’assemblée nationale par le citoyen
Pages Vixouse , député pour solliciter une amnistie en
faveur de quelques habitans d’Aurillac. Dans cette
adresse , devenue publique par l’impression, on rend
justice à mon zèle dans l ’exercice de mes fonctions, à
mon amour pour la liberté.
E h quoi ! un citoyen généreux, ami de l’ordre et des
lo is , qui a reçu plusieurs fois des éloges publics, seroit-il
donc un faussaire, un factieux? Cette idée me fait fris
sonner d’horreur. Livré à moi-même, confondu avec des
criminels, je croyois du fond de mon cachot inspirer à
ceux qui me connoissent au moins un sentiment de
compassion et de pitié : sentiment bien stérile , mais un
peu consolant; j ’apprends au contraire que l ’acharnement
de mes ennemis ne fait qu’augmenter ; leurs efforts
seront impuissans.
Au mois de mai 1792 , je fus député à Paris ; j ’assistai
à la fédération du 14 juillet ; je fus n o m m é président du
comité de subsistance des fédérés des quatre-vingt-trois
départemens : j ’en ai le certificat dans mes pièces. Ma
conduite m’attira quelque confiance ; le 10 août 3 je
�( 5 )
commandai le peloton qui enleva le drapeau des Suisses
au château des Tuileries ; je m’y iis remarquer par
quelques actions d ’éclat ( i ) ; je n’entends pas m’en
¡prévaloir1; si' dans cette journée mémorable, je fus utile
à laf cliose publique, ma récompense est dans mon cœur,
et mes foibles services ne diminueroient pas la gravité du
délit dont on m’accuse, si j ’en étois coupable.
J e ne dois cependant pas passer sous silence que le
même jour, je haranguai avec courage l’assemblée que je
présidois, et j ’eus le bonheur de ramerier-à des sentimens
de modération une foule de citoyens égarés, qui vouloient
massacrer sans pitié les signataires de la protestation des
vingt-hilit mille v ils durent la vie à mes efforts.
' - J é me' retirai avec calm e, et vécus en citoyen privé :
j ’étois bien 'élôigné de. prévoir les scènes abominables
des 2 e t ' 3 septem bre, moins d’y participer ; je n ’en
appris les détails que par le bruit pu b lic, et le seul
souvenir me fait dresser les cheveux ; affreuses , exé
crables joüPnéés 1 que la> postérité n’apprendra qu-’avec
horreur ; qui seroient l ’opprobre de la nation’ , si on
pouvoit les reprocher aux Français: Mais dans ces grands
mouvemens, il se trouve bien peu de personnes qu’on puisse
étt accuser ; il né faut qu’tin.soélérat, hardi et entreprenant , :la multitude jk’émeut en aveugle , le crime des
mouvemens populaires ne tombe que sur celui qui les
cause.
‘ Oh mb -pardonnera sans doute cette courte réflexion;
( i ) ' J ’ëtt Vâppôrfê' une<atte&fofioïï
H
^oV ( j )
A 3
�IV
/
o
je n ’ai pu résister au plaisir de justifier mes concitoyens
des reproches injustes de nos voisins à la nation française^,
toujours magnanime et généreuse.
j,
J e passai toute la journée et une partie de-la nuit du
2 septembre chez la dame B e lleville, avec le citoyen
Contrastin , prêtre constitutionnel d ’Aurillac ; le lenr
demain, je me rendis dès lè matin chez le citoyen Pages,,
bourgeois, mon compatriote, qui habite Paris, rue Mauconseil, n ° . 50 : j ’y dînai avec une compagnie nombreuse;,
je partis deux jours après pour M elun, avec une commis^
sion de la commune de Paris, et du pouvoir exécutif,,
pour la levée des chevaux de lu x e , que l’assemblée
nationale avoit mis au pouvoir des ministres : ma commis
sion concernoit principalem ent les chevaux des émigrés;.,
je m’en acquittai- avec succès : les papiers publics du temps
vantèrent mon patriotisme, etmonzèle éclairé(1). Enfin,
je revins à Paris avec le projet de me retirer dans ma
famille, où j ’étoisappelé pour quelques affaires; d éjaj’avois
arrêté ma place à la diligence, pour le 12 novembre, ainsi
que je le prouve par la feuille des messageries , lorsque
je me présentai, dans les hureaux des ministres pour,
annoncer mon départ à ceux que je connoissois. Dans ce
temps, l ’armée manquoit. généralement de chevaux : il
étoit naturel, que les chevaux de luxe appartenans aux
émigrés,.fussent employés aussi utilement ; la levée n ’en
avoit pas été faite dans les départemens du C a n t a l, du
L o t h , de l ’Aveyxon.^du Puy-de-Dôme et de la Corrèze...
'*
"
1
■—
1
1
'
11
'
CO Voyez les annales patriotiques du 20septembre, n°,.a6^.
..............
�.
£> v\
(7 )
Orr me crut propre à donner des renseignemens, et m in e
à faire cette levée ; on me dit de passer aii; bureau' de la
guerre, où je recevrais des ordres i^mais , n ’ayant point
trouvé le chef du bureau à qui je devois m’adresser, je
me rendis chez le citoyen B ru n e, commissaire - général
du pouvoir exécutif ; je priai un de ses commis de me
dresser un projet de commission que je devois envoyer
au ministre du premier endroit , où je m’arrêterois ,
parce que la diligence devant partir le même soir, je ne
pouvois retarder mon départ sous aucun prétexte.
L e commis fit le projet; il prit dans le tiroir de son bureau
un cachet du citoyen Brune et l’adapta à ce projet; il me
remit ensuite le tout. J e ne peux pas être soupçonné sans
douted’avoircherchéàcontrefaire les ordres duministre.,ou
le cachetde la république : j ’avois déjà étépourvu de sembla
bles commissions ; je savois qu’elles étoient imprimées, et
celle dont il s’agit est une écriture privée ; je savois que les
véritables commissions sont munies d’un sceau sur lequel
est inscrit : République française > et sur le projet dont il
s’agit,, le sceau qui y a été adapté'porte : Commissairegénéral du pouvoir exécutif. On dit que la signature du
ministre Pache qui se trouve sur ce projet, n ’èst pas le
seing du citoyen Pache ; mais cette signature n’avoit été
mise a p p a rem m en t que pour que le projet fût figuratif;
d’ailleurs il est reconnu que l’écriture de ce projet, et du
seing du ministre , n’est pas la mienne ainsi on ne
peut me faire aucun reproche de l’avoir contrefaite.
J e partis avec ce projet dans ma poche : le plaisir de
me réunir à ce qiie j ’ai de plus c h er, me fît Bientôt
oublier pour quelques instans 3 et le projet de commission^
'
�et les ordres que j ’avois reçus : j ’arrive; màis voulant être
utile à la république, je m’informe à Clerm ont, s’il y a
beaucoup de chevaux de luxe qui appartiennent aux
émigrés dé cette v illè <;1j ’écrià-'ràu ; ministre pour' lui
apprendre1 mon arrrvéé ;''ët lui" dfemaridër'- de nouvéaux
ordres ; je crois pouvoir -m’ouvrir à quelques citoyens; sur
l ’objet de ma mission et de mes'Recherches. J e leur dis
que je-suis commissaire du ■pouvoir exécutif; mais là
preuve que: j e ne voiilois faire aiicun usage d e ;cë projét
de commission, c?ëst que jè^né'-I’ai pas présènté auxxorps
administratifs ; c’èst que je n’ai fait aucune levée , aucune
demande.
•„
*
,
* *j
' 1 [• OI. * ' Í*' '
''
U n jour oïl me conduisit avec affectation Háns l’éciirie
d ’une aubergé, pourm‘y faire vóir qiíátrb chJéVaüx superbes1^
qui appartenóíéñt, disoit-on, ’au’^itqy'én C haret, Amé
ricain , demeurant actuellement°én cette ville de Riom ,
chez la citoyenne . Deçhapte*
sá párente,' Sur une
fdflexio'ïi qui °ínwéchappa‘V que c$s|fch£vaú¿ seroient
plus utilement employés à traîner les charriots dè'i’armée
oii conçut quelques inquiétudes. Ón me'párlá du proprié-2
taire, comme d’un homme honnête et estimable ; on me
vanta l’amabilité et1 les ciiarmes de tsa,parente.; et peu de
' (i
üj
¡
in
,
Tours après on me du qu elle etoit instruite de mes
*• «i»
i :;n*irf «-i oA . .»tôt íji ir
- ir- • • - •
observations, et 'qu’elle .en çtoit alarmée.*
..
■■ :
.■
Í
115’ il'O ’ 'f
• il
’ .
J ’et oís alóte "sur le point db partir pour Aurïllac ;
d é jà 'j’avois fait mon marché pour m’y Faire conduire' ; je
vins à Riom ; je me présentai chèz la clame Dechaptes
•
: ‘jii - qx/.i
*vî,.?;ri
H
pour la, rassurer sur. ses craintes ; . je ne voulois donner
! ;ii
, *'-fb pjî.i »> u- r
- •su -i ¿.n
uonibraire a personne.; ae retour à Clermont , je.,tus
V; h
II.-- ’ iííiiint ZOUt l /Uî>
'»OJICJC
mande u la municipalité ; on m interrogea; je ne craignis
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9
-
y
pas de m’ouvrer,ayec confiance au conseil' de;Ia comirume ;
je dis que j ’étois commissaire du pouvoir exécutif ; que
cependant je ne faisois aucun usage des ordres quô
j ’avois reçus ; que je n ’ignorois: pas qu’un, décret de la
convention révoquoit toutes les commissions du pouvoir
exécutif ; que je ne in’étois permis aucune infraction à
cette lo i, et qu’on pouvoit être tranquille.
On me demanda si je comptois faire quelque séjour à
Clermont ; je répondis que j ’y étois encore pour deux pu
trois jo u rs, et tel étoit mon dessein : un -incident que
personne n ’ignore, me fit partir le lendemain ; ce ne fut
point un motif de crainte qui hâta mon départ ; j ’avois
l’intention de revenir peu de jours a p r è s p a r c e que
j ’attendois des ordres. J ’étois d’ailleurs maître de mes
actions , dès que je ne troublois pas, l ’ordre public. Quel
fut mon étonnement, lorsqu’arrivé à Aurillac, je me
vis arrêter en vertu d’un mandat d’amener du juge
de paix de Clermont, qui avoit pris la précaution d’en
envoyer plusieurs expéditions sur les routes circonvoisines ; on me conduisit comme un criminel dans les
prisons ; je fus placé dans un lieu, où la pluie et la neige
pénétroient jusqu’à mon lit. J e contractai une maladie
sérieuse dans un séjour aussi mal sain ; je crus que sans
blesser la ju stic e,.o n pouvoit soulager l’humanité souf
frante ; je fis parvenir ma réclamation aux magistrats
du peuple : des commissaires de la municipalité se trans
portèrent dans ma prison; e t , pour toute réponse , je
leur entendis dire ironiquement , qu’il falloit me faire
faire une cheminée la polonoise, et faire dresser un lit
de damas.
�( 10 )
Enfin , j ’ai été mis en état d ’accusation ; je suis pré
venu d ’avoir méchamment et a dessein Je nuire , présenté
à plusieurs personnes une pièce que je savois sciemment
être fausse , et d ’en avoir fait usage.
J ’ai été transféré dans la maison de justice de ce tri
bunal ; pendant le voyage , on m’a chargé de chaînes
pesantes , et serrées si fortement que j ’en ai été assez
grièvement blessé en plusieurs endroits ; je me ressens
encore de mes blessures.
Sont-ce là les précautions que recommande la loi pour
s’assurer des prévenus ? jé m’abstiens de toutes réflexions
sur un traitement aussi cruel ; je ne cherche point à atten
drir. Fort de mon innocence , je n’ai pas besoin d’em
p lo y e r cette ressource pour co n vain cre mes juges.
J e sais qu’on a fait entendre contre moi un nombre
prodigieux de témoins ; je me réserve de discuter leurs
dépositions, lors de l’instruction publique de mon procès;
j ’ose assurer d’avance que le résultat de toutes ces dépo
sitions ne donnoit pas lieu à un mandat d’amener contre
moi ; il n’est aucun témoin qui ait dit ou puisse dire que
j ’aie jamais fait usage de ce projet de commission ; que je
me sois permis de mettre ;\ contribution aucun citoyen ; '
j ’ajoute même que j ’en aie eu l’intention ; et quand je l’aurois eue , comment juger l’infention ? où est la loi qui la
punisse ? on n ’en trouvera point dans le code pénal ; il ne
peut pas en exister dans le code de l'humanité.
Ci toyens, l’em] loi dont je suis honoré , m’appelle au
service de la république : l’artillerie de la marine sur-tout
a besoin de gens experts dans cette partie. J ’ose dire que
�je serai utile à ma patrie par mes services; je n ’attends
que votre jugement pour voler à mon devoir , et je
l ’attends avec autant de sécurité que de confiance.
D
ubois
-L
A R I O M , D E L’ I M P R I M E R I E
am m artin ie
DE
.
LANDRIOT.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois-Lamartinie, J. Justin. 1792?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dubois-Lamartine
Subject
The topic of the resource
faux
prison
marins
contre-révolution
troubles publics
homicides
prêtres réfractaires
réquisition de chevaux
émigrés
témoins
opinion publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour J. Justin Dubois-Lamartinie, lieutenant-surnuméraire des troupes d'Artillerie de la Marine, accusé.
Table Godemel : Faux : 3. imputation d’avoir fait usage d’une fausse commission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement de chevaux de luxe.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1228
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Jussac (15083)
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53186/BCU_Factums_G1228.jpg
contre-révolution
émigrés
Faux
homicides
marins
opinion publique
prêtres réfractaires
prison
réquisition de chevaux
témoins
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53119/BCU_Factums_G1021.pdf
c52b3bdca1bc0e12bfd53200b20e36be
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Text
DÉLIBÉRATION
DU DIRECTOIRE
D U D É P A R T E M E N T D U P U Y -D E -D O M E ,
E T
CONSULTATION SUR ICELLE.
L
E d ix - n e u f mars mil s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , le
d ire cto ire r é u n i, a été com posé d e M M . B essey vice-pré
s id e n t ; Riberolles, C handez on F a v ier , C hollet , P eyronn et
P uray ,
3
M o n e s t ie r , procur eu r-g én éra l- syn dic .
L e p ro c u re u r-g é n éra l-sy n d ic a dit :
M e s s i e u r s ,
D e p u is lon g-tem p s les troubles re lig ie u x d éso le n t n o tre
A
�( o
.
d é p a rte m e n t ; e t , p o u r les a p p a is e r, vou s a ve z mis eitu s a g e , n o n s eu le m en t les m o y e n s que la loi a r e m is e n t r e
vos m a in s , mais e n co re c e u x q u e des circon stances im pé
rieuses vous o n t co m m a n d e s; vous a ve z p resq u e toujours
réussi à ra m en e r la p aix ; q uelqu efois vous a v e z été forcés
d e recou rir à la force a r m é e , tant p ou r rétablir l ’o r d r e ,
q u e p ou r protég er le cours des informations faites contreles fon ctionnaires publics qui n ’o n t pas obéi à la loi du 26
d éce m b re , et leurs t u t e u r s
e t vous a v e z retiré les troupes,
lorsq u e les officiers m u n ic ip a u x sont ve n u s vous assurer
q u e le - c a l m e - r é g n o i t , et- q u ’ils p o rte ro ie n t leurs soins à
l ’e n treten ir. "Vous a v e z d e m a n d é p a r m o n o rg a n e à l ’as
sem b lée n a tio n a le co n stitu a n te un d écret qui.réprim ât les
e xcès des p ïêtrâs fanatiques et d e leurs adhérens. C e t t e
assem blée qui étoit alors s u ç la rfïn d e ses tr a v a u x , r e n v o y a
ce tte p étition au m inistre d e l ’intérieur. V o u s a v e z atten d u
a v e c sovimission le d é cre t d e l ’assem blée n a tio n a le législa
t i v e , d o n t l’ex écu ti on a été arrêtée par le veto. De p u is p e u
vo u s a v e z réclam é p a r mon. o rg a n e auprès d e l ’assem blée
n a tio n a le lé g is la tiv e , u n n o u v e a u d é cre t qui vous m e t à
m êm e d e vou s op p oser aux m en ées so u rd e s , mais c o n ti
n u e lle s des prêtres réfractaires. V o u s espériez p o u v o ir
a tte n d re c e tt e l o i , et n e tfô p ^ s forces à p re n d re des arrêtés
d e c ir c o n s t a n c e s , ruais c h a q u e jo u r vous re c e v e z des p la in tes
co n tre les prêtres dissidens e t leurs adhérons. T antôt vous
a p p re n e z q u e des co m m u n es les ont expulsés d e vo ie d e
fa it, p ou r faire cesser le trou ble q u ’ils p o rto ie n t dans leurs
foyers. T a n t ô t vous êtes instruits q u e les adhérons d e ces
prêtres égarés par le fa n a tis m e , ont attenté à la vie des
pasteurs lé g itim e s, d e c e u x qui sont honorés du ch o ix du
�p e u p l e ; q u ’ils les i n s u lt e n t , les m e n a c e n t , les tro u b le n t
d an s l ’e x e r c ic e d e leurs fo n c tio n s , et em p êch en t les fidèles
attachés à la co nstitu tion d ’ assister à leurs instructions.
Il est d e votre d e v o ir , M
essieurs,
d ’arrêter l e cours des
m a n œ u v re s d e ces e n n em is d e l ’état qui p ro fiten t d e l ’as
c e n d a n t q u ’ils ont sur les ames foibles , p o u r leu r faire
croire que la religion est attaqu ée par les décrets d e l'as
s em b lée n a tio n a le co n stitu a n te q u i , sous ce m a sq u e d e la
r e l i g i o n , c a c h e n t des vues d ’intérêt p e r s o n n e l e t - p o r t e n t
le p e u p le à l ’insurrection.
Il est p eu cle com m unes où la pré se n ce d e ces fo n c tio n
naires qui n ’ont plus d e fonctions à rem plir , n ’irrite les
uns , n e sou lève les autres. Il est u rg e n t d e r e m é d ie ra ces
m a u x qui p ou rroien t e n tra în e r d es atten ta ts'a u x propriétés
e t aux p e r s o n n e s , ou u ne g u erre civ ile . É lo ig n e z -c e s prê
tres des paroisses où ils n ’ont plus d e fonctions à r e m p lir ;
q u ’ils a ille n t jo in d re les foyers d e leur p ère , ou q u ’ils se
r e n d e n t dans les villes ou leurs discours et leurs e x e m p le s
n e p e u v e n t pas influ er sur des ames fortes , sur d es p e r
sonnes é c la ir é e s , ou la v ig ila n c e des corps a dm in istratifs,
e t le vrai p atriotism e des c ito y e n s a p p r e n n e n t q u ’il faut
re sp e c te r les o p in io n s r e lig i e u s e s , et souffrir dans son sein
c e u x qui d ifféren t d e c e lle s qui sont le plus g é n é r a le m e n t
adoptées dans l’e m p i r e , et sur-tout dans ce d é p a rte m e n t.
S ’ils n ’ont pas le p erfid e dessein d ’être p ertu rb a teu rs d u
repos p u b lic , q u ’ils v ie n n e n t dans les villes où leur c o n
d u ite sera à d éco u v ert ; ils ren dron t la paix au p a y s q u ’ils
q u i t t e r o n t , et s’il est vrai q u ’ ils soien t p ersé cu té s, c o m m e
ils s’en p la i g n e n t , ils y tro u vero n t la tran q u illité , la sûreté :
p o u r leurs p ersonnes.
A 2
�(
4
)
II est n é c e s s a ir e , M e s s i e u r s , d e p rë n d re un parti sa g e,
mais v ig o u r e u x . C h e r c h e z la source des insurrections qui
se m a n ife s te n t dans plusieurs co m m unes d e c e d ép a rte
m e n t , vous la tro u vere z dans l’in d ig n a tio n q u ’a e x citée le
fanatism e d es ennem is d e la constitu tion ; p re ss e z-v o u s
d e c o u p e r la ra cin e des m a u x qui n ou s m e n a c e n t ; h â te zvo u s d e re n d re la p a ix à ce d é p a rte m e n t qui ju s q u ’ici
a vo it eu le b o n h e u r d ’en
jo u ir ; faites im prim er v o t r e
arrêté ; c o n fie z - e n l ’e x é c u tio n aux directoires d é districts
d o n t le ze le et l ’a tta c h e m e n t aux vrais p r i n c ip e s , se sont
montrés ju s q u ’à ce jo u r ; in v ite z les officiers m u n ic ip a u x
qui le n o t if ie r o n t , d e se servir d e la vo ie d e la p ersu asion
e n v e r s c e u x q u e c e t arrêté frappe , à reten ir les habitons
de le u r s c o m m u n e s , dans les bornes du patriotism e d o n t
la base est le re sp e ct p ou r les person n es et p ou r les p ro
priétés , et à n ’user e n vers les prêtres dissidens d ’a u c u n e s
voies qui pu issent être rép rou vées p a r la raison et p a r le
cri d e leur c o n s c ie n c e .
L es A d m i n i s t r a t e u r s c o m p o sa n t le d ire cto ire du
d é p a rte m e n t du P u y - d e - D ô m e , o u ï le rap p ort du p ro c u re u r-g é n é ra l-s y n d ic ;
C o n s id é r a n t q u e le m a in tie n d e l ’ordre et d e la p a ix ,
la sûreté d es p e r s o n n e s e t des propriétés , d o iv e n t être
l ’o b j e t , d e . la
su rveilla n ce la plus a tten tiv e
des
corps
administratifs ;
Q u e les troubles qui se m anifestent dans c e d ép a r
te m e n t o n t en général p o u r m o tif la d ifférence des o p i
nions religieuses ;
Q u e ces troubles sont, p a r leur essen ce et leur m u ltip li-
�4
(
5
r& ,
)
c i t é , d e n a tu re à e x c ite r to u te la sollicitude d és corps
administratifs ;
Q u ’il est instant d e
assurant le re s p e c t qui
p r e n d r e des m o y e n s q u i , e n
est dû a u x p erso n n es et aux
propriétés , m e tte n t les prêtres réfractaires à l ’abri des
suites q u e p e u v e n t e x cite r d es m a n œ u v re s cla n d estin e s ;
A r r ê t e n t q u e dans quatre jours d e la notificatio n d e
la présen te d é lib é r a tio n , e t à la p ou rsu ite et d ilig e n c e d u
p ro c u re u r - g é n é r a l- s y n d ic , tous, curés e t vicaires n o n
asserm entés seron t tenu s d e sortir d e la paroisse où ils
o n t c i - d e v a n t e x e rc é des fonctions curiales , e t d e
se
r e n d r e dans le lieu d e leu r n a i s s a n c e , ou dans le oheflie u du d ép a rte m en t.
. • '
''
E n j o i g n e n t a u x c i - d e v a n t ch a n o in e s , d ’e x é c u te r p o n c
tu e lle m e n t les dispositions d u d écre t du 13 mai d e r n i e r :
e n c o n s é q u e n c e ils n e p o u rro n t se p résenter dans les
é glises paroissiales q u e p o u r y dire la m esse s e u le m e n t.
O r d o n n e n t l ’e x é cu tio n d e c e tte m êm e loi aux co in m u nalistes e t prêtres - filleuls qui n e d e sserv e n t p o in t les
fon dations , c o n cu rre m m e n t a v e c les curés.
C h a r g e n t les m unicipalités d e ¡veiller à l ’e xécu tion d u
p ré se n t arrêté ; les r e n d e n t resp on sables d e tous les évéïie m en s qui p o u rro ie n t résulter d e son in e x é cu tio n ; le u r
e n jo ig n e n t d ’e n faire le c tu re
à l ’issue d e la messe p a
roissiale , e t d ’en certifier au d irectoire d e le u r d is t r i c t ,
ainsi q u e d e soji e x écu tio n .
C h a r g e n t p a re ille m e n t lesd ites m unicipalités d ’adresser
au directoire d e leur d is tric t, un état n o m in a tifd e s prêtres
n o n sermentés q u i é to ie n t dans leur a r r o n d is s e m e n t ,
A
5
�vVv' »
( « )
d ’instrüire le d it d irectoire des m o y e n s q u ’elles auront em
p lo y é s p ou r faire sortir lesdits curés et vicaires , e t d e
l ’é p o q u e d e leur sortie.
In viten t les prêtres assermentés d e p o rter dans leur
c o n d u ite et leurs instructions , cet esprit d e tolérance et
c e t am our d ’ordre e t d e paix qui sont la b ase d e la c o n s
titution , et qui d o iv e n t anim er tous les F ra n ça is.
A r r ê te n t eniin q u e la p résen te délibération sera im pri
m é e , l u e , p u bliée et affichée dans toutes les m unicipalités
d u d épartem en t.
E t ont signé, B esse, v ice -p ré sid e n t, R iberolles,C /lande^on,
Favier , C k o lle t , Purciy , Peyronnet , Alonestier , p ro cu re u r-g én é ra l-sy n d ic ; et G oigoux , secrétaire-général.
TÆ
c o n s e i l s o u ss ig n é , qui a v u la délibération prise
p ar le d irectoire du d é p a rte m e n t du P p y - d e - D ô m e , le
19
de
ce m o is,
consulté sur la question d e savoir si
c e tt e délibération est c o n fo rm e à la n o u v e lle co n stitu tion
f r a n ç a i s e , et dans le cas où elle y seroit c o n tr a ir e , q u e ls
sont lçs m o y e n s que les an cien s curés ou vicaires d o iv e n t
e m p lo y e r p o u r se soustraire à la p ersécu tion q u ’on leu r
p répare ?
E s t d ’ a v i s , i ° . q u e la deliberation du d é p a rte m e n t
du P u y -d e -D ô m e est un attentat à la constitution française.
2 °. Q u e les adm inistrateurs qui l’ont p r is e , ont e xcéd é
les pouvoirs qui leur o n t été délégués par la constitu tion.
3 °. Q u e ce tte d élibération n e p e u t être exécu tée sans
l ’ap p rob ation du roi.
�4rs
(
7
)
C ’est dans 11 constitu tion m êm e q u e nous pu iseron s
les p re u v e s d e ces trois prop ositions.
t S i q u e lq u ’un s’éton n o it d e la discussion à laq u e lle nous
allons nous livrer , q u ’il sache q u e les actes des pouvoirs
c o n s titu é s , sont sujets à. la ce n su re.
L a censure sur les <actes des pouvoirs constitues , est
permise ; mais les calomnies volontaires contre la probité
des fonctionnaires publics , et la droiture de leurs intentions
dans Vexercice de leurs jonctions,pourront être poursuivies
par ceux qui en sont l'ob jet; c h a p . V , art. X V I I du p o u
vo ir ju d icia ire.
N o u s censurerons d o n c c e tte d é lib é ra tio n , p u isq u e la
co n stitu tion nous e n d o n n e le d r o it ; mais nous n e c e n s u
rerons q u ’elle.
Dispositions garanties par là constitution.
« La
constitu tion ga ran tit à t o u t . h om m e la liberté
s d ’a lle r , de r e ste r , d e p a r tir , sans p o u vo ir être arrêté n i
9 d é t e n u , q u e selon les formes déterm inées p ar e lle ».
» T o u t c e qui n ’est pas d éfend u p a r la l o i , n e p e u t
» être e m p ê c h é ; et n u l n e p e u t être co n tra in t à faire c e
v q u ’elle n ’o rd o n n e pas ».
Oii est la loi qui o rd o n n e au x curés e t vicaires
non
assermentés d e sortir d e leurs paroisses , p ou r se retirer
dans le lieu d e le u r naissance , ou dans le ch ef-lieu d e
leu r d ép a rte m e n t ? C itero it-o n le décret } ar le q u el c e t
ordre a v o ité té p ron on cé ? L ’e xécu tion en a été su sp e n d u e
p a r le veto: mais s’il n ’ y a pas d e loi ( et l’on n ’en- tro u ve
pas u ne sem blable dans toute la constitution ) , la d élibé
ra tio n d u d ép a rte m en t du P u y - d e - D j i n e est d o n c u n
�(
3
)
ordre arbitraire attentatoire à la c o n s titu tio n , à la liberté
d e ces m a lh e u re u x p rê tre s, e t à leu r existe n ce .
E h ! q u e l ’on n e c ro ie pas justifier c e tt e d élibération, e n
la qualifiant d'arrêté de circonstances ; en la disant n é c e s
saire au m ain tie n d e la tranquillité p u b liq u e ! N ’avonsnous pas d es lois p ou r p u n ir c e u x qui e n tre p re n d ro ie n t
d e la trou bler ? E h b ie n ! q u ’on les a p p liq u e à ces anciens
fon ction n a ires publics ( si toutefois il en est qui se soient
rendu s co u p a b les des excès q u e le u r re p ro ch e si amère
m en t le p ro c u re u r-g é n é ra l-s y n d ic , dans son réquisitoire ) ;
mais q u e l ’on re sp e c te la liberté d e c e u x qui n ’o n t rien
fait d e contraire à la loi.
L a d iffére n ce des opinions religieu ses n ’est pas u n
d é l i t , s e u le m e n t e lle p e u t le d even ir.
N u l ne peut être inquiété pour ses opinions même reli
gieuses ^pourvu que leur manifestation ne trouble pas l ’ordre
public établi par la lo i; art. X d e la d éclaration des droits
d e l ’hom m e.
L a libre communication des pensées et des opinions , est
un des droits les plus précieux de l'homme. Tout citoyen
peut donc parler , écrire , imprimer librement , sa u f à répondre
de l'abus de cette liberté , dans les cas déterminés par la lo i,
art. X I .
1
D a n s le cas d e ces d e u x a rtic le s , ce lu i-là seul d o it être
p u n i ( p a r lés tribun aux d e ju stice ), qui a abusé d e la liberté
d e m anifester son o p in io n , ou d ’exprim er sa p en sé e.
M ais le d ire cto ire du d ép a rte m en t n e fait a u cu n e dis
tinction : sans j u g e m e n t , sans inform ation p r é a l a b l e , il
co n fo n d l ’in n o c e n t a v e c lé c o u p a b le , en bannissant d e
leurs paroisses des a n cien s curés e t vicaires n o n asser-
�jfTT
( S> )
m en te s,' en les p r iv a n t du droit accordé par la co n stitu
tion m êm e à tous les autres h o m m e s , d ’a lle r , de rester où
b o n leur sem b le.
S u p p oson s q u ’un d e ces an cien s fon ctionnaires p u blics
soit trouvé hors du lieu d e sa n a is s a n c e , ou d u c h e f - l i e u
d e son d é p a r te m e n t : se saisira-t-on d e sa p e rso n n e ?
M a i s , su ivant l ’article X du ch ap itre V d e la co n sti
tution , nul homme ne peut être saisi que pour être conduit
devant l'officier, de police ; e t su iva n t ; l ’article X I , s'il
résulte de l'exam en qu'il n 'y a aucun sujet d'inculpation
contre lui , il sera remis aussi-tôt en liberté.
S u p p oson s aussi q u e l ’on n ’ait à re p ro ch e r à c e fo n c
tion n a ire p u b lic , q u e l ’in e x é cu tio n d e l ’arrêté , et q u ’il
o p p o se à c e t acte l ’article d e la co n stitu tion q u i lui p e r
m e t d ’aller , de rester, etc. q u e fera alors l ’officier d e
p o lic e ? R e n o n c e r a - t - il à la loi p o u r m ettre à sa p la c e la
v o lo n té <des adm inistrateurs ? Q u e l l e p e in e p o u rra -t-il
in flig e r ? L a co nstitu tion n ’en p résen te pas co n tre c e u x q u i
lu i sont soumis : il y en aura d o n c u n e arbitraire ! E n
vérité , : il eût été difficile au x plus gran ds en n em is d e la
co n stitu tion d e faire q u e lq u e ch o s e d e plus in co n stitu
t io n n e l, q u e c e t arrêté, et c e p e n d a n t, il est l ’o u v ra g e d ’un
corps ad m in istra tif, établi pour fa ir e chérir et respecter une
constitution qui doit assurer à jam a is la liberté de tous les
citoyens.
É t r a n g e liberté
q u e c e lle qui p riv e
u n e classe d e
c ito y e n s d e faire c e q u e la loi leur p e r m e t j elle re sse m b le
a ces ordres arbitraires , à ces lettres de cachet co n tre le s
q u e ls on a tant déclam é.
Il est assez p ro u vé q u e la d élibération d u d ire cto ire d u
�*I
-
(
IO )
d ép a rte m en t du P u y - d e -D ô m e est atten tatoire h. la co n s
titution i v o y o n s m a in ten a n t si les adm inistrateurs o n t
eu droit d e la p re n d re .
« L e s administrateurs de dép artem ens e x e rc e n t, sous la
y> su rveilla n ce et l ’autorité du roi , les fonctions adm inisv» tratives. D é cre t du 22 d éce m b re 1789 ».
* v> Ils n e p e u v e n t ni s’im miscer dans l ’e x e rc ic e du pou» voir lé g is la tif, ni su sp endre l’e x é cu tio n des lois , ni
rien e n tre p ren d re sur l’ordre j u d i c i a i r e , art. III.
L ’instruction sur c e d écret leu r a p p ren d q u e « le fon * d e m e n t essentiel d e c e tte im portante partie d e la cons» t it u t io n , est q u e le p o u v o ir adm inistratif soit toujours
* m a in te n u tre s -d is tin c t, et de la puissance législative a.
•t> laquelle il est soum is , et du p o u vo ir j u d ic ia ir e , d o n t il
» est in d é p e n d a n t» ; e lle leur a p p re n d aussi que la cons
titution scroit violée , si les adm inistrateurs d e d épartem en s
7
ch erch o ie n t à se soustraire a Vautorité législative
, ou à
O
usurper aucune partie d e ses fo n c tio n s , et q u e to u te e n tre
prise d e c e tt e n atu re seroit , d e leur part une forfaiture.
O n re tro u v e les mûmes principes dans l'instruction du
2 août 1790 , sur les fonctions des assemblées adm inis
tratives
: on les exh orte d abord à faire resp ecter
et
c h érir, par un régime sage et paternel , la constitution , qui
doit assurer à jam ais la liberté de tous les citoyens.
Il leur est reco m m a n d é par le chap. I, d e co n sid érer
* a tte n tiv e m e n t ce qu’elles sont dans l ’ordre d e la consti» tu tio n , p ou r n e jamais sortir des bornes d e leurs fonc> tio n s , et pou r les rem plir toutes ave c e x a c titu d e ; elles
> d o iv e n t ob server q u ’elles n e sont ch arg ées que d e l'a d -
t ministration ; qu’aucune fonction législative ou ju d icia ire
�v ne leur appartient , et q u e to u te entreprise d e le u r p a r t ,
> sur l ’u n e ou l ’autre d e ces fonctions , introduirait la
» confusion des pouvoirs , q u i.p o r te r o it l ’a ttein te la plus
*> funeste aux p rincip es d e la co n stitu tio n ».
E n i i n , ce tte instru ction p o rte e n termes e x p r è s , que
* les adm inistrations d e dép artem ens n e p e u v e n t faire
* n i d é c r e t s , ni o r d o n n a n c e s , ni règlem ens ; q u ’elles n e
» p e u v e n t agir q u e par v o ie de simples deliberations j u r les
» matières générales , ou d ’arrêtés sur les affaires p a rticu » libres; q u e leurs délibérations sur les o b jets particu liers
> qui c o n c e rn e ro n t leur d é p a r te m e n t, mais qui intéresse -
•> ront le régime de l ’administration générale du royaum e ,
» n e p e u v e n t être e x é c u té e s , q u ’après q u ’elles a u ro n t été
» p ré s e n tie s au r o i , et qu elles auront reçu son approbation ».
S i l ’on e x a m in e sur le d écret du 22 d éce m b re 1 7 8 9 ,
e t sur les instructions qui l ’o n t su iv i, la délibération p rise
p a r les m em bres du d irectoire du d é p a rte m e n t du P u y d e - D ô m e , on est forcé d e c o n v e n ir q u e c e tte d élibéra
tio n est u n e entreprise sur les fonctions du p o u v o ir légis
l a t i f , u ne u surpation sur les fon ctions du p o u v o ir ju d i
ciaire.
L ’u n e e t l ’autre sont m arquées clans le réquisitoire du
p r o ju r e u r -g é n é r a l- s y n d ic . O n y v o it q u e « le d irectoire
» a y a n t d e m a n d é à l ’assem blée co n stitu a n te un d écret
> co n tre les prêtres fanatiq ues et leurs adhérens , ce tte
v> assem blée r e n v o y a la pétition au ministre d e
> rieur ; q u ’après
l ’inté-
le d é cre t d e l’assem blée lé g is la t iv e ,
> d o n t l ’e x é cu tio n a été arrêtée par le v e to , il r e n o u v e la
» la m ême d e m a n d e ».
E n d e m a n d a n t , soit à l ’assem blée c o n s t it u a n t e , soit
�(
12
)
à l ’assem blée lé g is la tiv e , u n e loi co n tre les prêtres n o n
asserm entés, le d irectoire du d ép a rte m en t du P u y - d e - D ô m e
s’est d o n c re co n n u in co m p é te n t pou r la faire lui-m êm e ;
il sen toit d o n c alors le b eso in des autorités a u xq u elles il
s’adressoit ; c e n ’ est q u ’à le u r r e f u s , après le veto , et au
mépris d e c e tt e p ré ro g a tiv e r o y a l e , q u ’il a cru p o u v o ir se
d o n n e r, sous le n o m de délibération , u n e loi sem b la b le à
c e lle q u e sa m ajesté a réfusé d e s a n c tio n n e r, p a rce q u ’elle
étoit contraire à la co n stitu tion .
C e t t e en trep rise m érite to u te l ’attentio n du g o u v e r
n e m e n t et des a d m in istré s , p a r les co n sé q u e n ce s d a n
gere u ses qui p o u rro ie n t e n résulter ; les adm inistrations d e
d ép a rte m en s qui n ’e x e r c e n t leurs fonctions q u e sous la
surveillance et Vautoritê du roi , d e v ie n d r o ie n t législa
tiv e s , et se jo u e ro ie n t d e sa s a n c t i o n , e n transform ant
e n délibération ou r è g le m e n t p a r t i c u li e r , c h a c u n e p o u r
le u r d é p a r te m e n t , u n e loi faite par l’assem blée lé g isla tive ,
pré se n té e à la sanction r o y a l e , e t refusée à ca u se d es inco n v é n ie n s q u ’on y auroit trouvés p o u r l ’adm inistration
g é n é ra le du ro y a u m e .
C e t t e usurpation d e p o u v o ir s’é te n d ro itb ie n tô t des dépar
tem e n s aux districts, des districts au x m unicipalités : p a r c e
m o y e n , nous n ’aurions
p ou r l o i s , q u e la v o lo n té
d es
adm inistrateurs e t la co n stitu tion seroit re n v e rs é e .
C o n c lu o n s : le d irectoire d u d ép a rte m en t d u P u y - d e D ô m e a usurpé sur le p o u v o ir lé g is la tif, en r e n o u v e la n t
sous la forme d e délibération ; e t après le veto , u n e loi
re je té e co m m e in con stitu tio n n elle ; il a entrepris sur le
p o u vo ir j u d i c i a i r e , en in flig e a n t u ne p e in e au x anciens
£urés et vicaires îiojo, ^ssçrm catcs j ca r c ’en est u ne b ie n
�441
>3
(
)
c r u e l l e , q u e d e les c o n tra in d re d e sortir de leurs paroisses,
p o u r se retirer dans le lieu d e leur naissance ou dans le
ch ef-lieu du d ép a rte m en t. C e t t e d élibération a été frappée
d ’a v a n c e d ’u n e n u llité ra d ica le , p a rce q u ’elle rep résen te
le d é cre t refusé par le roi. E n la p r e n a n t , le d irectoire
s’est exp osé au x p e in e s p ro n o n cé e s par l ’a rticle III d e la
d éclara tion des d ro its ,c o n tre c e u x qui expédient, exécuten t,
ou f o n t exécu ter des ordres arbitraires.
L a d élibération d o n t il s’agit , q u o iq u e p articu lière au
d é p a rte m e n t du P u y - d e - D ô m e , intéresse le ré g im e d e
l ’adm inistration intérieure du r o y a u m e , p a rce q u ’il im p o rte
à la société en tière q u ’u n e ce rta in e classe d ’hom m es n e
soit pas persécu tée dans q u e lq u e s d ép a rte m en s, e t tolérée
dans d ’autres ; p a r-to u t on d o it etre g o u v e rn é p a r les
memes lois ; q u e lle s sont ces lois ? C e ll e s q u e la co n stitu
tio n nous a d on n ée s ; il n e d o it pas y en avoir d ’autres : il
falloit d o n c a v a n t tout q u e les m em b res du d ire cto ire d u
d é p a rte m e n t d u P u y - d e - D ô m e présentassent le u r d é lib é
ration au roi ; s’ils la fo n t e xé cu te r sans avoir re ç u son
a p p r o b a t io n , ils c o n tr e v ie n n e n t fo rm elle m en t à l ’in stru c
tion sur le d ére t du 22 n o v e m b r e 17 8 9 .
Il n e nous reste q u ’à in d iq u e r les m o y e n s d e se p o u r
v o ir co n tre c e tt e d élib éra tion .
<i L e roi a le d ro it d ’a n n u ller les actes d es adm inistra» tions d e d ép a rtem en s, contraires aux lois 011 aux ordres
9 q u 'il leur aura adressés ; ch ap . I V , sect. I I , art". V d e la
> co n stitu tion ».
C ’est d o n c au roi q u e les an cien s curés et vica ires n o n
assermentés
d o iv e n t
adresser leurs p la in te s
d élibération d u d irectoire d u d ép a rte m e n t d u
/
co n tre la
Puy-de-
�14
(
)
D ô m e , q u i les attaqu e ju s q u e dans le u r e x is te n ce ; et
co m m e ce tte d élibération n ’est autre ch ose q u e le d écre t
a u q u el sa m ajesté a refusé sa s a n c tio n , on d o it croire q u e ,
fidelle à ses p r in c ip e s , e lle annullera un acte d 'ad m in is
tratio n aussi contraire à la constitution.
M ais le recours au roi en tra în era peut-être u n plus
lo n g d élai que ce lu i accordé par la délibération p o u r y
satisfaire ; c e la d ép e n d d e la d ilig e n c e q u e m ettra le
p ro c u re u r-s y n d ic à la faire notifier : ca rce n ’est q u e du
jo u r d e la notilication q u e c o m m e n ce ra à courir le délai
d e quatre jours.
Dans
c e tte i n c e r t i t u d e , v o i c i la co n d u ite à te n ir , à
l ’instant d e la n o tificatio n ( on p eu t la d e v a n c e r ). M M .
les curés et vicaires qui ne ju g e r o ie n t pas à p rop os d ’y o b
tem p érer , p ré se n te ro n t au tribunal d e district du lieu d e
leu r d o m icile , u ne requ ête exp o sitive d e la d élibération
d u d irectoire du d ép a rte m e n t du P u y-d e -D ô m e , et d e sa
co n tra d ictio n ave c les p rin cip es d e liberté consacrés par
la constitution. Ils d e m a n d e ro n t à y ê tre reçu s o p p o s a n s ,
e t des d éfenses d ’attenter à leur person n e.
C e t t e requête sera co m m u n iq u é e au com m issaire du ro i:
nous n e d ou tons pas q u e ce m a g is t r a t , chargé par l ’art.
X X V . du cha;>. V , tit. III d e la constitution , d e requérir
l ’observation
des lois dans les ju g e m e n s à re n d re , n e
s’élève a v e c force co n tre ce tte d é lib é ra tio n , q u ’il n ’en d e
m an d e la n u l l i t é , co m m e co n traire à la liberté é ta b lie p ar
la constitution.
A u moins devons.-nous croire q u ’a v a n t d e consentir à
l ’exécution d e c e tte délibération , il consultera le ministre
d e la ju stice sur le p arti q u ’il d oit p re n d re ; q u e la denon-
�5
( 1 )
c iation q u ’il en fera au roi p ar c e t o rg a n e n e p e u t m a n
q u er d ’en accélérer la cassation , et d e nous procurer un
régime p lu s sage et p lu s paternel.
A p rè s ce q u e l ’on v ie n t d e d ir e ,q u i p ou rroit d o u te r de
la nullité de la d élibération d u d irectoire du d ép a rte m en t
du P u y - d e -D ô m e , d e son in c o m p é te n c e et de son o pp osi
tion à Îa co n stitu tion . N o u s avons mis à l’exam in er autant
d ’intérêt q u e si nous avions eu à la d é f e n d r e , e t nous
n ’avons pu la ju stifi e r , sous au cu n r a p p o r t , pas m êm e en
la considérant co m m e u ne p ré ca u tio n p o u r le m a in tie n
d e la tranquillité p u b liq u e ; nous nous sommes dit q u e si
c e soin im p o rtan t a été confié aux adm inistrations d e
d é p a rte m e n s , c e n ’est q u ’à la ch a rg e d ’e m p lo y e r d es
m o y e n s autorisés par les l o i s , avoués p a r la c o n stitu tio n ;
nous d evo n s d o n c présum er q u e les m unicipalités u n e
fois averties q u e c e tte d élibération est co n traire à la c o n s
titu tio n , s’em p resseron t p ar c e la seul d ’e n d e m a n d e r la
ré v o ca tio n .
D élib éré à R i o m , c e 30 mars 1 7 9 2 .
T O U T T É E ,
père, A N D R A U D ,
G R A N C H I E R ,
A
L A P E Y R E ,
T O U T T É E ,
fils.
RIOM,
DE L’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T . 1793.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Délibération du Directoire du département du Puy-De-Dôme. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Touttée, père
Andraud
Lapeyre
Granchier
Toutée, fils
Subject
The topic of the resource
prêtres réfractaires
contre-révolution
ordre public
antagonisme entre campagnes arriérées et villes éclairées
troubles publics
droits de l'Homme
caractère anticonstitutionnel de la délibération du Directoire
abus de pouvoir
constitution de 1790
droit de rester
séparation des pouvoirs
distinction entre villes et campagnes
Description
An account of the resource
Titre complet : Délibération du Directoire du département du Puy-de-Dôme, et consultation sur icelle.
Table Godemel : liberté individuelle : une délibération départementale, du 19 avril 1792, portant, « que dans les jours de sa notification, tous curés ou vicaires non assermentés seront tenus de sortir de la paroisse où ils ont ci-devant exercé des fonctions curiales, et de se rendre dans le lieu de leur naissance, ou dans le chef-lieu du département, &c. », constitue-t-elle excès de pouvoir, attentat à la constitution et à la liberté individuelle ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1021
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Puy-de-Dôme
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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abus de pouvoir
antagonisme entre campagnes arriérées et villes éclairées
caractère anticonstitutionnel de la délibération du Directoire
constitution de 1790
contre-révolution
distinction entre villes et campagnes
droit de rester
droits de l'Homme
ordre public
prêtres réfractaires
séparation des pouvoirs
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53043/BCU_Factums_G0709.pdf
c4a9d1612c0a7b0e5a075d4329af819f
PDF Text
Text
ARRÊT
DE LA COUR DE PARLEMENT,
R E N D U LES C H A M B R E S A SS E M B L É E S,
LES
PAIRS
Y
SÉANT,
Q U I condamne un Imprimé ayant pour titre :
Mémoire au R o i, des Députés de l’Ordre des
Avocats au Parlement de Bretagne , à être lacéré
& brûlé par l'Exécuteur de la Haute-Juft ice.
EXTRAIT
DES
R EGISTRES DU
PARLEMENT.
D u fix A vril mil f ep t cent quatre-vingt-neuf.
C
E jour, la Cour, toutes les Chambres affemblées, les
Pairs y féant, les Gens du Roi font entrés -, & , Me
Antoine-Louis Seguier , Avocat dudit Seigneur R o i, portant
la parole, ont dit :
M E S S I E U R S ,
I l eft des événemens fi extraordinaires .en e u x -m ê m e s, fi
oppofés au cours naturel des chofe s , fi contraires à tous les
principes, & aux régles de la prudence & de la fubordination,
A
�2;
qu’il eft difficile d’y ajouter foi, lors mêiïie qu’on en- a lé ■
récit fous les yeux
la preuve entre les mains.
Un grand nombre des.Àvocats attachés au Barreau du P a r
lement de Bretagne , animés par des motifs que nous ne,
chercherons point à pénétrer , fe font rendus dénonciateurs
auprès du Roi de la conduite des Magiflrats qui compofent
le Parlement de Rennes, dans une affaire où ils ne font p as.
même Parties : & ces Jurifconfultes, dont les fonélions fe
bornent ù. confeiller , défendre & conduire les Clients qui
ont recours à leurs lumieres, n’ont pas cçaint d’accufer & de
calomnier un Corps de Magiflrature auquel ils font liés, par :
devoir & fubordonnés par état ; cette accufation eft confignée dans un. Mémoire que fa publicité rend, encore plus:>
coupable.
De fon côté, le Parlement de Bretagne inculpé par la ,
diffamation la plus authentique , s’eil rendu à fon tour Dé
nonciateur auprès de M. le Procureur Général, du'Mémoire
que les Avocats de Rennes ont fait imprimer & diftribuer
dans cette Capitale, pour donner plus d’aftivité à la calom- nie dont ils. vouloient^ répandre le fcandale dans toute la. ;
France.
Pbur mieux faire connoitre à la Cour le motif & lés conféquences de cette double dénonciation , notre Miniftere eil •
forcé de vous retracer des -faits fur lefquels nous nous fommes .
déjà expliqués lors de l’Arrêt du 6 Mars dernier, dans le '
compte que nous- avons eu l’honneur de vous rendre des dif- .
férentes Brochures que la Cour nous avoit fait remettre pour ,
y donner nos Concluions. C ’eft avec regret que nous don- .
nerons à ces faits un peu plus d’étendue: nous avons entre,
les mains les pieces. juridiques qui en contiennent toutes les
circonftances ; & ce détail eft inçlifpcniable pour fixer le.
deeré de certitude qui peut être dû aux inculpations que l’on ;
s’eâ permifes contre le Parlement de Bretagne*
Vous avez encore préfent à la mémoire le tableau des
émotions populaires arrivées dans la ville de Rennes les z6 .
& 27 Janvier dernier ; l’ordre chronologique des faits & des
procédures eft intéreiTant a faifir.
I
\
�2-<6
5
La premiere émeute avoit été prévue ; & M. de Catuelaii,
Premier Préiidçnt, avoit été averti le Dimanche 25 Janvier,
-qu’il devoit y avoir le lendemain une affemblée au Champ
•de Montmorin. Son premier loin fut de fe concerter avec le
' Commandant, pour empêcher -cette affemblée., s’il étoit pof*
' iible , ou du moins pour en prévenir les fuites. On donna
■ordre au Major de la Milice bourgeoife de veiller à tous les
mouvemens, & d’en donner aufli-tôt connoiffance.- On prit
enfin toutes les précautions que la prudence pouvoit fuggérer.
Le lendemain 2 6 , le Major de la Milice bourgeoiie vint
■au Palais avertir M. le Premier Préfident qu'il y avoit une
affemblée au Champ de Montmorin. Les Chambres s’affemblerent fur le champ, ¿k nommèrent iix Commiflaires pour
defeendre à Huilant fur les lieux, à l’effet de difpcrfer la
multitude.
La Cour délibéroit encore , & le Feuple avoit prévenu fa
délibération; il étoit déjà dans les Salles & dans les Galeries
du Palais, au moment où les Commiflaires fortirent pour ap*
paifer le tumulte.
Deux Particuliers inconnus, fe préfenterent, & remirent
chacun aux Commiflaires un écrit non {igné > l’un avoit
pour objet la cherté des grains , l’autre étoit rélatif à
l’événement du jour. Les Commiflaires reçurent ces écrits ,
&T le Peuple s’étant aufîi-tôt retiré , ils rentreront aux Cham"bres pour faire leur rapport &: dreffer procès-verbal de ce
qui s’étoit pallé en leur préfence. On vint avertir de nou
veau qu’il y avoit du, trouble au bas de la place du Palais -,
& le Parlement envoya les mêmes Commiflaires pour appaifer l’émeute , & donna des ordres pour que la M aréchauffée fe rendit fur les lieux.
Les Commiflaires s’étant tranfportés fur la p la c ", y trou
vèrent beaucoup de gens du Peuple armés de bâtons, &
.beaucoup de jeunes gens armés de cannes avec épées tirées >
même* de couteaux
de piftolets. Ils parvinrent a rctabjjr le
calme, & laifferent la M aréchauffée pour contenir le petit
nombre qui reiloit encore fur la place.
Les Commiflaires fe bâtèrent de rentrer au Palais ; & fur
A z
�4
leur rapport, il intervint Arrêt qui ordonne aux Habitans de
rentrer chc-z eux, avec défenfes de s’attrouper en plus grand
nombre que quatre pendant le jour, & trois pendant la nuit.’
Les Comm'iiTaires étoient à peine retirés que l’émeute re
commença ; & fur l’avis qui en fut donné , le Parlement •
renvoya , pour la troifieme fo is, les Commiiîaires , qui ren
contrèrent le Commandant accompagné de quelques Gentils
hommes. Tous enfemble ils parcoururent la Ville, & l’attrou
pement parut entièrement diffipé.
Au retour des Commiiîaires, le Parlement renouvella les
défenfes de s’attrouper; enjoignit à la Maréchauffée & aux
Officiers de la Milice bourgeoife, de faire nuit & jour de
fréquentes patrouilles, & ordonna qu’il feroit informé de
l’émeute, circonllances & dépendances , &: que l’Arrêt feroit
imprimé & affiché le même jour i6 . Voilà donc le Parlement
iaiii de la connoiiTance de cet attroupement , & perfonne
n’en pouvoit prétendre caufe d’ignorance, puifque l’Arrêt •
avoit été imprimé & affiché le même jour. Nous ferons pafler
cet Arrêt fous les yeux de la Cour.
Le Parlement délibéra enfuite fur l’un des écrits qui avoient
été remis aux CommifTaires, qui avoit pour objet la diminu
tion du pain; manda les Juges de Police, & leur recommanda
<Je veiller avec le plus grand foin à faire bailler le prix du
pain , dès que les circonftances pourroient le permettre. Ce
fécond Arrêt fut également imprimé.
Le lendemain 27 , la fermentation étoit encore la même.
M. le Procureur Général fut chargé de s’informer s’il y avoit
des procédures commencées au Siège de la P olice, & d’en
rendre compte fur le champ. 11 fe retira pour prendre des
inftru&ions, & rentra pour dire que fon Subftitut au Siege
de la Police avoit chargé un CommiiTaire de faire une infor
mation fommaire, & que fon Subftitut au Préfulial lui avoit
appris que le Siege lui avoit enjoint de faire une remon- '
trance, & fur fes concluiions avoit ordonné une information.
A lors, le Parlement qui, dès la veille, avoit ordonné une
information, chargea M. le Procureur Général de requérir,
dans l’après-midi, l’évocation de ces procédures.
�. LVxiTeiriklée des Chambres fut en conféquence continuée
à quatre heures après-midi. L e s . Magiftrats fe rendirent à
l’neurc indiquée. Ils apperçurent un grand concours de Peuple
au bas de la place, ,11s apprirent que le motif de l’aîtroupe•ment étoit un coup de couteau donné à un Àrtiiàn par nn
Porteur ou par un Domeftique. Le Parlement fe hâta de s’aifembler ; & les Chambres n’étoient pas encore toutes réunies ,
lorfau’on entendit fur la place un grand nombre de coups
d’armes à feu ; & des fenêtres du Palais on apperçut beaucoup
depées & d’armes blanches tirées.
M. le Procureur Général s’étoit rendu fur le lieu avec le
Grand-Prévôt de la Maréchauflee, pour appaifer la fédition.
L ’Affemblée des Chambres fe forma aufli-tôt, & le Parlement
fortit en corps de Cour.
Il trouva M. le Comte de Thiard, Commandant, à peu
de difhnce du Palais. Le Parlement parcourut avec lui toutes
les rues pour rétablir l’ordre. On fonnoit le toefin : le Com
mandant envoya deux Cavaliers de MaréchauiTée pour faire
ceifer un moyen capable d’augmenter le défordre; la Cour
ne fe fépara du Comte de Thiard, que pour rentrer au Palais,
& avifer au parti qu’il y avoit à prendre dans une circons
tance auiTi critique. Le premier foin fut de rédiger un procèsverbal. Le 26 , la Cour avoit ordonné une information fur
l’émeute du même jour, circonitances & dépendances. Le
2,7, fur les conclufions de M. le Procureur Général, le Par
lement évoqua les procédures qui pouvoient avoir été com
mencées, foit au Préfidial, foit à la Police ; ordonna qu’elles
feroient pourfuivies en la Cour; joignit le procès-verbal de
ce qui venoit de fe palier, h l’inftruftion déjà commencée;
ordonna qu’il feroit informé fur le tout, circonftances & dé
pendances, & chargea le Procureur Général du Roi de faire
arrêter fur le champ le Quidam prévenu d’avoir donné un
coup de couteau, pour l’on procès lui être fait &: parfait
fuivant la rigueur des Ordonnances.
Dans la même Séance, le Parlement nomma deux de fes
Préfidens pour fe réunir aux Députés déjà envoyés àVerfailles,
& inftruire le Roi du péril imminent où fe trouvoit la ville
�6
de Rennes &: la Province entière. Il eût en même tems l’hon
neur dadreffer une Lettre au R oi, qui lui feroit préfentée par
tous Tes D éputés réunis.
M. le Procureur Général,penfa alors que le Préfidial auroit
pu s’occuper de l’émeute du 2 7 ; & comme TArrêt de ce
jour ne pouvoit évoquer que les procédures faites fur l'émeute
du 1 6 , il demanda, le 28, un nouvel Arrêt qui évoqua les
procédures commencées fur.les deux émeutes, circoniunces
-c£ dépendances,, & l’Arrêt fut rendu en conféquence de fa
,réquisition.
Ce 'fécond Arrêt d’é-vocation excita une nouvelle fermen■tation dans les efprits. Le Parlementinftruit qu’on cherchoit
.àrépandredansle Public des doutes fur fa compétence , qu’on
lélevoit des-nuages furJa-droiture d e’fes intentions, arrêta d é
crire , & écrivit le 29 , une Lettre au R o i, pour lui faire part
*de fes inquiétudes , & le mettre à portée de s’expliquer.
Il efl néceifaire de vous remettre cette Lettre fous les yeux*
«SIRE,,
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
.»
»
»
»
» Votre Parlement fe rend à lui-même le témoignage qu’il
ne-manquera ;j imais aux réglés de la Juftice & de l’impartialité; mais dans des tems aufli défaftreux, fa délicatefle
doit vous déférer jufquau foupçon , jufqu’à la défiance
même la plus injufte. Nous ayons mis fous les yeux de
V o t r e M a j e s t é ., le tableau trop effrayant des cruelles
journées des 26 & 27 de ce mois. Notre premier devoir
a été de nous faiiir de l’affaire , à Üeffet de conitater les
délits & d’empêcher le dépériffement des preuves. Cette
affaire eft, s’il en fût jamais, dans l’ordre des affaires majeures dont ,les Juges fouverains ont toujours retenu la connoiffance.j nos regiftres & ceux des autres Parlement en
contiennent la preuve.
» Mais nous ne devons pas laiffer ignorer à V o t r e M a j e s t é
que des intérêts perionnels, que l infubordination qui agite
tous les cfpritj avec un excès bien déplorable, que toutes
les paflions réunies ofent élever des nuages fur la droiture
de nos intention?, fur la pureté de nos vues.
�7'
»'■Nos confciences', SIR E , fort fans reproches ; notre com»•■pétence eft certaine, mais notre délicateffe eftbleiTée. C ’eflr
»■ à V o t r e . M a j e s t é à pefer dans fa iageffe les importantes
» confidérations que nous croyons devoir mettre fous fes
» yeux.
» Nous fommes, S I R E , avec le refpeft & la foumiiïïon la
»■ plus profonde , de V o t r e M a j e s t é , & c . »
i
-Cette démarche du Parlement annonçoit fans doute fa
modération & fon impartialité ; mais les faits dont nous allons .
vous rendre compte juilifient encore davantage la fageife de fa
conduite..
La lettre adrelîee au R oi-eiï du 29 Janvier. Le lende
main 3 0 , les Avocats demandent & obtiennent l’entrée de.
là Cour. Un d’entre eux prend la parole
dit au nom .
de fes Confreres:
L'Ordre des Avocats au Parlement, profondément affligé des
malheurs publics. . . . vient vous apporter le texte de la Loi & le .
cri des citoyens. .
Après avoir tracé le tableau 'des événemens des 26 & 27
Janvier, qu’ils attribuent à une horde effrénée d’hommes que leur
domefliciré exclud de tous les Ordres de? la fociété.........& dont le,'
réfultat a été des féditions, des émotions populaires, des m eurtres,
des affajjlnats , l’Orateur continue : :
Ivous ne .nous permettrons pas de prévenir les preuves quune ■
information réguliere doit établir ; mais, nous ofons le ■ dire, .
I honneur même des maîtres , fe trouve intéreffé à la régularité de
la procédure. .. . 1jf .pour qu elle foit réguliere, il faut quelle Joit :
l ouvrage des Juges auxquels la Loi en a confié ¿’inflnicïion.
^Suivant l’article I I du Titre premier de l’ Ordonnance criminelle , c ejt aux Baillis , Sénéchaux & Juges Préfidiaux qu appartient, .
pnvativement a. tous autres Juges y la connoijfance des cas royaux ,
au nombre deJ<juels font les attroupemens & les affemblées illicites 3 ,
les f éditions & les émotions populaires. .
L'article I V du Titre zG ànnulle toutes défenfes & furféances ;
que les Cours pourroient donner de continuer Cinflruclion. des ■,
procès criminels, fans voir les charges & informations. .
�8
L'article Vdu mêmeTitre défend aux Cours d'évoquer les procès
criminels 'pendant devant les Juges des lieux , f i ce n efl qu elles
connoijfent , après avoir vu les charges , que la matière ejî légere
& ne mérite pas une plus ample inflruclion ; alors elles peuvent
les évoquer , mais pour les juger jur-le-champ à L’Audience , le
tout à peine de nullité.. . .
'
Ce n’efl qu entre des Juges inférieurs que la prévention peut
avoir lieu.. . . Le Parlement n a pas cru qu ilpû t prévenir, ni
qu’il eût prévenu ; il a évoqué.
L ’ Ordre des Avocats efpere que la demande qu’il fa it , dictée
par les motifs les plus purs, paroitra un nouveau témoignage de
fon attachement, de fa confiance, & de fon yele pour tous les
Ordres également intérejfés à l’obfervation des réglés qu’il ré
clame.
Nous demandons, au nom de la Loi 6* du Public , dont nous
fommes également les Défenfeurs , que vous veuille?^ rapporter
Us Arrêts par lefquels vous ave^ évoqué la procédure, & rendre
les Citoyens à leurs Juges ordinaires & naturels.
Tel efl: l’abrégé du Difcours que les Avocats firent à l’Affemblée des Chambres.
Le Parlement délibéra fur cette réclamation, que nous ne
nous permettrons point de caraftérifer *. nous nous contente
rons d’obfervcr qu’elle eft pleine de réticences & d’erreurs.
Le Parlement fit rentrer les Avocats, & donna une nouvelle
preuve de fa modération. M. le Premier Préfident leur ré La Cour me charge de vous dire quelle efl furprife de vous
voir paroitre devant elle pour un pareil motif , & fans en avoir
prévenu le Chef de la Compagnie. Elle fe feroit attendue à trouver
en vous les garans de fon impartialité & de l’exactitude de fes
principes. Qiioique la Cour ne vous doive aucun compte de fa
conduite, elle veut bien vous dire quelle avait pris d’avance le
parti que fa fageffe lui a infpbé.
Toute la prudence du Parlement fut inutile. Les Avocats ,
inécontens de cette réponfe, députèrent quatre de leurs
Membres, pour fe plaindre de ce que le Parlement n’avoit
pas fait droit fur une réclamation qui, fi elle étoit fon’
dec,
�I
dée , n’eût été placée que dans la bouche du Miniftere
public , feul intérefîe jufqu’alors dans la pourfuite d’une
inftruéUon commencée fur fa prspre Requête.
Cependant, le premier Février fuivant, le Roi fit écrire à
fon Parlement de Rennes , qu’i/ approuvoit fa conduite , rela
tivement aux émeutes des z6 & zy Janvier.
Le 4 , cette Cour reçut une fécondé lettre, par laquelle M.
le Garde des Sceaux lui marque, au nom du R o i, qu’en
attendant que Sa Majeflé fajfe connoitre fes intentions, elle l'a
chargé d’ordonner au Parlement, de fa part, de ne point aller
' en avant, ou du moins de ne pas précipiter /’inflruclion.
Le 1 2 , MM. les Prélidens de Catuelan & de G uerry, à
4eur retour de Verfailles , remirent fur le Bureau la réponfe
faite par le Roi aux Députés, le 8 Février. Elle eft ainfi
conçue :
« Mon Parlement de Bretagne, en connoifiant des émeutes
» arrivées a Rennes, les 26 & 27 Janvier dernier, n’a fait
» qu’ufer du droit que lui accordent les Ordonnances , & qui
» ne peut donner lieu à aucune réclamation fondée. Je ne
h puis cependant qu’approuver les motifs de délicatefie qui
» ont engagé mon Parlement de s’en rapporter à ma fagcilë;
» & c'eft pour feconder fon vœu , coniigné dans la lettre
» que vous avez été chargés de me remettre , que je me fuis
» déterminé à évoquer cette affaire, & à la renvoyer au Par>♦ lement de Bordeaux. Je lui ai fait adrefler en conféquence
» les Lettres Patentes nécefiaires, & j ’ai chargé mon Garde
>* des Sceaux d’en faire part à votre Compagnie, & de lui
>> témoigner ma fatisfa&ion de fa conduite.
» J ’ai donné les ordres les plus précis pour arrêter les
» procédures qui s’inihuifent tant au Préfidial qu’au Siège de
» Police , & je compte que lorfque mon Parlement connoitra
» mes intentions, il i’urfeoira à la pourfuite de l’mitruéKon»,
Cette Reponfe du Roi annonçoit une lettre de M. le Garde
des Sceaux ; elle eft: du 9 Février. Il écrit a u Parlement:
« La réponfe c{ue le Roi a faite à MM. les Députés, vous
♦> mettra à. portee de connoître que Sa Majefte a décidé
» que votre compétence n’étoit pas douteufe.........Sa MaU
�»
»
»
»
»
”
jefté , fatisfaite du zele & de la modération dont vous avez
donné des preuves dans toute cette affaire, eft perfuadée
que vous continuerez à vous conduire avec la même fa—
geiTe , . . . . & que vous me mettrez inceflamment à portée
de faire part au R o i, que vous vous êtes , à cet égard,
conformés à fes intentions ».
Le Parlement s’empreiTa de donner au Roi une preuve de
ion obéiiTance , & rendit un Arrêt qui porte :
» La C our, vivement touchée des témoignages de fatis» faction dont Sa Majefté l’honore, témoignages qui la con» folent de tous les événemens pénibles qui lui lont perfonnels, a arrêté de furfeoir à la pourfuire de l’inftru&ion
y commencée en icelle, à l’occafion des émeutes des z6 8c
» 27 du mois dernier; & ce ,. en conféquence de révocation
» au Parlement de Bordeaux , prononcée par Sa Majefté
» conformément aux Ordonnances : ordonne qu’il fera écrit
» au Seigneur R o i, à l’effet d’aflurer Sa Majefté que la Cour
» ne fe départira jamais des principes de fageiTe , de modéra» tion & de dévouement au bien de tous les Ordres de la
» Province, qui feuls l’ont animée jufqu’à préfent, & qui
» lui ont mérité . fon approbation ». Cet Arrêt eft du 1 z
Février dernier.
, Vous n’avez pas oublié , Meifieurs, que les Avocats de
Rennes avoient envoyé quatre Députés à Verfailles, pour
porter, au pied du T rô n e, la réclamation qui n’avoit point
été adoptée par le Parlement de Bretagne.
Pendant que les Magiftrats, alarmés de la pofition critique
où ils fe trouvoient eux-mêmes , dépofoient dans le fein du
Roi les vives inquiétudes dont ils étoient agités j & que ,
par un excès de délicatefle, ils formoient le vœu de n’être
point chargés de la continuation d’une procédure, que les
Tribunaux inférieurs fembloient revendiquer par le miniftere
des Avocats , les Députés de l’Ordre s’emprefl’oient de s’ac
quitter de la miflion dont ils avoient été chargés par leurs
Confrères. Ils furent admis h l’Audience de M. le Garde des
Sceaux ; ils lui adreiferent un difcours pour juftifier leurs demarches,. &: lui remirent en même temps un Mémoire,
�iï/ .
11
ilgné d’eux qu’ils le fupplierent dé préfenter au Roi. Ce
Mémoire 81 ce difcours contiennent les inculpations les piüs
graves contre le Parlement. Nous aurons, dans un moment,
l’honneur de vous en rendre un compte particulier. Jufqueslà, la conduite plus qu’extraordinaire des Avocats de Rennes,
ne pouvoit exciter une grande fenfation dans un Corps de
Magiftrature, auquel le Roi venoit, depuis la préfentation
même de ce Mémoire, de donner des preuves éclatantes de
fa fatisfa&ion, après avoir reconnu fa compétence & loué forr
zele, ainii que fa modération j mais les Députés , non contens
d’avoir préfenté un Mémoire tout-à-fait repréheniible, non
contens d’avoir aggravé les injures, dans le Difcours qu’ils
avoient prononcé à M. le Garde des Sceaux, fe font permis
de faire imprimerie Difcours avec le M ém oire,& de donner,
par la diftribution de cet Imprimé, une publicité réelle à la
diffamation qui feroit demeurée dans le fecret du Miniftere,
& pour ainiî dire dans le fein de l’Autorité.
Ce Mémoire a été imprimé à Paris , & diftribué, tant dans
la Capitale que dans la Province de Bretagne.
Le Parlement crut devoir s’occuper d’un Libelle, d’autant
plus dangereux, qu’il paroiffoit avoir été préfenté au Roi luimême , & qu’il contenoit les affertions les plus outrageantes
contre fon honneur & fon impartialité. « Déterminé, par ces
» motifs, pour élever au-deffus de tout foupçon les droits de la
» vérité, pour ne laiiTer à l’audace , à la malignité des calom» niateurs , aucune reffource, aucun prétexte , confultant les
» fentimens de délicatefTe qui l’ont toujours dirigé, & intimen ment perfuadé qu’il ne remplit pas moins le vœu des Loix, *
» en demandant juitice, qu’en fe la rendant lui-même ». Le Par
lement de Bretagne rendit un Arrêt le 1 1 M ars, dont il faut
vous retracer les difpoiitions.
» La Cour, les Chambres affemblées, indignée des in » jures, de la mauvaife foi & des calomnies répandues à
» chaque page & prefqu’à chaque ligne de cet Imprimé,,
» doit à fon honneur cruellement attaqué , le recours: aux
» Loix qui feules peuvent rendre fa juftification authcntiqùe:
» considérant que c’eil fous le ReiTort du Parlement de Paris,;
�V\
12
/'q u e l’injure & la calomnie ont été confommées & rendues
» publiques par la voie de l’impreffion ; attendu les circonff> tances, & fans que, du préfent Arrêt, on puiiTe rien in» duire de contraire au droit inhérent aux Cours Souveraines,
» de punir les infultes qui leur font perfonnelles » ,
» A arrêté de dénoncer, au Parlement de Paris, ledit ïm» primé contenant un Difcours à M. le Garde des Sceaux, &
» un Mémoire au-Roi, reféré, figné G l e z e n , L a n j u i n a i s ,
» C h a p e l l i e r & V a r i n : enfemble les Auteurs defdits Difcours
» & Mémoire ».
Et le projet de ladite dénonciation ayant été à l’inftant mis
fur le Bureau, après l’avoir unanimement approuvée :» ordonne
v que ladite dénonciation fera (ignée & chiffrée, haut & bas
» de chaque page, & remife ès mains de M es de Moelien &:
» de la Feronniere, Confeillers , que la Cour a commis &;
» commet pour la porter inceflamment, & de jour à autre,
» à M. le Procureur-Général du R oi, au Parlement de Paris,
» avec tout pouvoir auxdits CommiiTaires de fuivre l’effet de
» ladite dénonciation ; fe réfervant ladite Cour de fe pourvoir
» autrement, & en tout état de Caufe, par les voies de D roit,
*» s’il eit vu appartenir. Et en l’endroit les Gens du Roi ayant
»> demandé l’entrée de la C o u r, & iceux entrés , le&ure à
» eux donnée de ladite dénonciation & du préfent A rrêt,
» ils ont demandé a&e de leur adhéfion, lequel leur a été
» accordé ».
C ’eft, Meffieurs, cette dénonciation que nous apportons
à la Cour: elle a été remife, à M. le Procureur Général,
par les deux Magiftrats députés.
Elle commence ainii : Déclarent les Gens tenant le Par
lement à Rennes, repréfentés par M es de Moelien & de la
Feronniere, Confeillers en ladite Cour, fe rendre dénonciateurs à
Juflice , contre un Imprimé, portant pour titre , Mémoire au
R o i, des Députés de l’Ordre des Avocats au Parlement de
Bretagne > & c.
Elle finit par une déclaration ainiï conçue:
IL demande juflice > il la demande prompte, entiere , écla
tante s
�3 //
I l déclare, unanimement, il protejle q u il ne cejfera de la de- '
mander par tous les moyens que prefcrivent les Loix. Il a
droit de üattendre du Parlement de P a ris, feul Tribunal com
pétent , puifquil ejl Juge du lieu du délit.
C ejl à ces fins q u il adreffe à M . le Procureur Général la
préfente dénonciation , requérant q u il ait à agir de fort Office.
Offrant de fournir toutes preuves requifes , & Je foumettant
dans tous les cas, à langueurdes Ordonnances. Fait en Parle—
nient, toutes les Chambres affemblées.
Toutes les pages font fignées en haut & bas, par M. le
Premier Préiîdent & par le Doyen de la Compagnie , & on
lit à la fin du manuferit, Dumerdy de Catuelan, Eurenou de
Kerfalaun.
Nous venons d’avoir l’honneur de vous rendre compte des
faits qui ont préparé la démarche du Parlement de Bretagne.
Ils font extraits de la Requête adreflee à M. le Procureur
Général ; & du nombre de ceux que nous avons choiiîs, il
nen eft: aucun qui ne l’oit appuyé fur les pièces juilifîcatives
qui nous ont été remifes.
Nous avons également eu l’honneur de vous faire connoître
la dénonciation que ce Parlement nous fait, du Difcours &
du Mémoire préfenté au Roi par les Députés des Avocats at
taches au Barreau de ce premier Tribunal de la Province.
Il ne nous refte plus qu à mettre fous vos yeux le Difcours
& le Mémoire qui font l’objet de la dénonciation. Mais cette
analyfe doit être précédée de quelques réflexions.
La démarche des Avocats au Parlement de Rennes efl: ii
inconciliable avec leurs fonftions, que nous avons peine à
concevoir comment des Jurifconfultes , qui doivent être inftruits des devoirs de leur état, qui ont dû apprécier les bornes
e eur Minifterc, & avoir fait une étude profonde des droits
per onnels de chaque'Citoyen, ont pu fe permettre colleftivement une réclamation à laquelle leur qualité, leur Minii—
tere & leur état n etoit point intéreiTé.
Nous ne parlons point du Difcours qu’ils ont fait au Parle
ment , les Chambres affemblées, pour lui demander de retirer
les Arrêts d évocation que la Cour n’avoit pu fe difpenfer de
prononcer,
�• Non.', ne parlons pas de la réticence volontaire , qui leur a
fait diflimulcr les procédures commencées par le Parlement,
dans le moment même du flagrant délit, lorfqu’après avoir
cté témoin de rémeute du 16 Janvier, après en avoir drefle
Procès-verbal, il a ordonné qu’il feroit informé defdits faits,
circonftances & dépendances.
Nous ne parlons point de l’ignorance affe&ée fur la com
pétence d’une Cour Souveraine, chargée de veiller particu
lièrement à la grande Police, fur-toîït dans le lieu de fes
iéances , ni de la fauife application des articles de l’Ordonnance, ni de l’indécence d’une réclamation faite en face de
tout le Tribunal, fans même y être autorifé par une million
fpéciale des Officiers du Préüdial ou du Siège de la Police,
qui, fans revendiquer leurs prétendus droits, ont cru néanmoins
pouvoir fe refufer à l’exécution d’un Arrêt rendu , & à eux
iignifié pour prévenir une double procédure fur un objet dont
le Parlement étoit fsiiï de droit & de fait.
Une pareille difcuiîion nous eft abfolument étrangère. Cette
infurreéHon inouie s’eft paifée au milieu du Temple de la Juftice. Le Parlement s’eft contenté de répondre qu’il n’avoit
aucun compte à rendre de fa conduite aux Avocats. Nous imi
terons la prudence & la modération du Parlement de Bretagne.
Nous ne vous rappelions même cette fcène préliminaire, que
parce qu’elle a donné lieu aux Imprimés fur lefquels nous
avons en ce moment à nous expliquer. Nous le ferons avec
courage, parce que les fondions auguftes qui nous font con
fiées, nous élevent au-deffus des perfonnalités &: des injures
que la force de la vérité peut arracher à l’aveuglement & h
la mauvaife foi ; nous le ferons avec circonfpe&ion, parce
que nous croyons devoir des égards à un Ordre refpettable ,
prêt à défavouer quelques-uns de fes Membres, à qui la paffion du moment a fait oublier les reglos de la décence & de
la fubordination.
Quatre Avocats de Bretagne ont été députés pour préfenter
un Mémoire contre le Parlement. Pour juper du mérite de
cette députation ; il faut déterminer ce que c eft qu’un Avocat,
&: quelle eft la nature de l’aiTociation qui les réunit.
�Qu’eft-ce qu’un Avocat ? C ’eft un Particulier gradué dans
une des Univeriïtés du Royaum e, qui s’eft livré à un examen
approfondi des Loix & des Ordonnances, à la fcience géné
rale du Droit public & du Droit privé, à l’étude réfléchie des
ufages & des Coutumes particulières, & qui fe confacre libre
ment au fervice de fes Concitoyens, fe dévoue tout entier à
la défenfe de ceux qui viennent puifer dans fon favoir les lu
mières dont, ils peuvent avoir befoin pour foutenir leurs inté
rêts, maintenir leurs propriétés, montrer leur innocence , conferver leur honneur & aflurer leur liberté. Tantôt c’eft un
Confeil qui éclaire les Parties, tantôt c’eft un Orateur qui
déployé fon éloquence : tantôt c’eft un Conciliateur qui rap
proche les efprits & devient le premier Juge des Cliens qui
le confultent ou s’en rapportent à fon expérience : fouvent c’eit
un Arbitre : par-tout c’eft un homme public, mais dont le
miniftere ne peut agir que lorfqu’il eft mis eh aftion par un
tiers qui le charge de fa défenfe ou de fes demandes.
Comment peut-on envifager la réunion des Avocats ? C ’eil
une efpece d’aflociation volontaire que des êtres libres ont
formée entr’eux. Us n’ont ni titre, ni droit, pour faire un Corps
dans l’Etat. Chacun d’eux eft un être ifolé, & indépendant de
tous ceux qui exercent le même emploi. Ils fe font néanmoins
fournis à une difcipline particulière : & la Juftice a toujours
refpeêté cette convention non écrite , parce quelle eft fon
dée fur l’honneur, la probité, la délicatefle & la liberté de
leur profeilion.
Dans ce tableau des fondions des Avocats, nous ne voyons
rien qui ait pu autorifer les Jurifconfultes du Parlement de
Rennes à s'ériger en Corps, pour venir cenfurer, aux yeux de
la Juftice y des Arrêts folemnels dont ils devoient relpefter en
fîlence la déciiion. Mais s’il eft étrange que fans titre , fans
million, fans pouvoir, fans en avoir été requis, une portion
des Avocats de Rennes fe foient permis de demander la ré
vocation des Arrêts de la Cour Souveraine à laquelle ils font
attaches, combien n’eft-il pas plus incompréhensible qu ils fe
foient réunis pour former une réclamation perfonnelle, &:
qu’ils aient cru pouvoir nommer des Députes à l’eiTet de por-
�i6
ter au pied du Trône une dénonciation dont il n’y a pas d’e
xemple dans les faites de la Juilice ?
Le-motif de cette députation eil clairement exp’iqué dans
le Mémoire préfcnté au Roi.
\
Attachés à nos Concitoyens, difent les Députés, habitués à
les fecounr, nous n’avons pu nous défendre de partager leurs
alarmesi Nous avons regardé autour de nous quels étoient les
Corps , les Corporations qui auroient pû porter à Votre Majejlé
les doléances de fes nombreux Sujets d^B retagne, & n apperccvant par-tout qu’un morne fllence, Jigne du défefpoir. . . . . Nous
nous fommes cru forcés par notre Nliniflere, de paraître dans
F affaire publique , ne craignant point de facrifer notre fortune,
notre tranquillité , notre exiflence même au hefoin d’un Peuple
que Votre Majeflé chérit ; nous nous fommes déterminés à venir
U défendre, &c.
Il eft donc démontré , par leur aveu , que c’eft de leur
propre mouvement que les Avocats fe font engagés à venir
dénoncer la conduite du Parlement.
Nous nous impofons le filence le plus rigoureux fur une
démarche de cette nature. La députation eit faite au Roi ;
c ’eft à lui que la dénonciation a été prefentée : qu’elle con
tienne des faits faux & calomnieux, où des aiTertions réelles
¿k bien fondées , c’eitun recours au Prince. Tous fes Sujets
ont un droit égal de folliciter fa juiKce ; c’tft à lui à prononcer
fur les fupplications de ceux qui réclament fon autorité , fur
la légitimité de la députation, fur la vérité ou la calomnie
des faits qui lui font expofés. Le Parlement de Bretagne auroit eu droit de fe juilifier , mais pouvoit-il faire un crime aux
Avocats de leur accufation, fi le Mémoire , qui la renferme,
lût demeuré entre les mains du Roi ou de M. le Garde des
Sceaux ? Nous ne le penfons pas. Ce Mémoire, dépofé dans le
f.in du Souverain , n’exiftoit que pour lui. Tous les reproches
que le Parlement pôuvoit faire aux auteurs du Mémoire, feroient
ians objet. Il etoit également inconnu au public & aux Macifirats. C.’étoit bien une diffamation , mais il étoit difficile d en
acquérir la preuve, & par conféquent de pourfuivre les car
lomniateurs,
Malheureuf.-ment
�Malheureufement l'efprit, mê;ne le plus iage , ne réfléchit
pas aflez lorlqu une fois il s’eit abandonné à l’aveuglement de
la prévention, lorfqu’il s’eft IaiiTé féduire par l’amour de l’in
dépendance , ou entraîner: par l’efpoir de la célébrité.
Les Députés des Avocats, non contons d’avoir préfenté au
Roi un Mémoire diñé par la plus grande partialité, ont voula
fe faire un trophée de l’excès même de leur diffamation ;
iis ont fait imprimer à Paris , & diftribuer l’ouvrage dont le
Souverain devoit feul refter dépofitaire ; & par une publicité
fcandaleufe , ils ont encore ajouté à la gravité de l’injure.
C ’eft, Meilleurs, cette impreifion furtive , cette diftribution
publique que le Parlement de Bretagne pourfuit , & dont il
demande la réparation.
Son honneur cft fans doute vengé d’avance par les témoi
gnages honorables que le Roi lui a donnés de fa faiisfa&ion,
&: par l’approbation authentique du zèle qu’il a fait éclater.
Notre miniftere fe bornera à chercher dans le Mémoire im
primé , les preuves de la calomnie dont on a voulu noircir
tout un Corps de Magiftrature.
Les Députés des Avocats commencent par déclarer qu’ils
ont été témoins oculaires du coupable, attroupement des Domeflicjues & des porteurs de chaifes attachés à la Noblcjje & aux
M agijlrats......; qu’ils ont vu des Gentilshommes exciter, approu
ver ces attentats , s’en déclarer les auteurs , Si des Magiflrats ,
jroids fpeclateurs d’un défordre qu’ils pouvoient arrêter, conjldé—
rer avec indifférence leurs Valets armés contre les Habitans , &
n interpofant leur autorité que pour favori fer l'impunité , &c.
Cette imputation invraifemblablc & calomnieufe , cft dé
mentie par les pieces mêmes dont nous avons eu l’honneur
de ^vous rendre compte. Vous y avez vu que M. le premier
Préfident, inftruit la veille du projet de cette Aflemblée,
prit des mefures avec le Commandant & les Officiers de la
Milice bourgeoife, pour prévenir l’attroupement. Vous avez
vu qu’à'trois fois différentes, il a envoyé des Commiffaires
pour rétablir le calme. Vous avez vu que le Parlement cft
defeendu lui-même en corps de Cour lur la place , & que
préférant la fureté publique à fa fûreté perfonnelle , il a
�18
parcouru la Ville avec le Commandant, & par fa préfence
a diffipé le tumulte dont on ne pouvoit trop craindre les fui
tes. Vous avez vu , enfin , qu’en rentrant au Palais , fon pre
mier foin a été d’ordonner qu’il feroit informé de l’émeute
qu’il venoit d’appaifer.
Ce feul expofé montre jufqu’à l’évidence la calomnie que
les Députés avancent avec tant de hardiefle.
Les Députés , fans faire attention que le Parlement avoit
le premier ordonné une information , & qu’il étoit naturel
d’évoquer les procédures commencées fur le même objet ,
foit au Préfidial , foit à la Police, empoifonnent cette évoca
tion qui dépouille les premiers Juges , & s’écrient :
A infi les Magiflrats du Parlement de Rennes, fe font attri
bués exclujivsment en premiere & derniere inflance , l'inflniclion
& le jugement de leurs fils , de leurs freres , de leurs parens , de
leurs amis , de leurs domcfhques.
Peut-on imaginer une inculpation plus horrible. On diroit
que le Parlement a excité lui-même ce foulevement de la
Populace, que tout ce qui tient à la Magiftrature par les liens
du fang & de l’amitié , efl complice , &: qu’il ne s’eft réfervé
l’inftruftion que pour fauver les coupables.
Il efl , néanmoins, dans ce Mémoire , une accufation plus
atroce ; c’eft celle où les Auteurs du Mémoire difent, au à
rafpecl de l'évocation , les Habitans de Rennes ont cru ne Jortir
dis horreurs d'une guerre civile, que pour éprouver des malheurs
plus grands encore : les armes de la Nobleffe , les mains de fes
f^alets ne portent que la mon , & il ejl pojjlble de s’en défendre :
mais des Magiflrats armés du pouvoir Judiciaire , menacent la
vie & l'honneur.
Qu’eft devenue la pudeur publique ? Eft-il poifible que fans
preuve, contre toute vraifemblance, contre la notoriété publi
que , on traveftifle, en Magiflrats armés du pouvoir judiciaire
pour menacer la vie & l’honneur des Citoyens, une Cour fouveraine qui ne néglige aucun moyen, qui s’expofé â tous les
dangers pour appaifer une fédition & rétablir la tranquillité ?
Non-ieulement les Députés prennent fur eux de répandre
les inventives les plus fanglantes contre le premier Tribunal
i
�îp
de la Province, mais iirités cle ce que le Parlement, fur leurs
repréientations , n’a pas prononcé le renvoi de la procédure
au Prélidial, feul Juge compétent, iis fe chargent de j'o.ire
parvenirjufquau Trône, la récujation unanimement prononcée par
tous les Habitans de ¿lames......... Quelles font, demandentils , les importantes caufes qui peuvent décider le Parlement à
retenir cette procédure , à l'inflruire, à la juger dans le feerzt ?
I l ri y en a pas une. Et ils ajoutent : Enfin, S i r e , f i vos augufles ayeux ont cru devoir s'en rapporter à la morale des Tribu
naux fouverains , & les honorer de ce mot fuperbe , NOUS EN~
CHARGEONS VOTRE CONSCIENCE y ils Je font fans deute réjervés le pouvoir de s'expliquer fur la compétence de leurs Cours ;
& il ejl de votre juflice de décharger la confcience de votre Par
lement de Bretagne d'un fardeau qui pejeroit à jamais fu r elle.
Eh ! quels font les prétextes de la réeufation du Parlement?
Voici le premier -, cefl un bien mauvais Ju&e quun Parlement
noble , placé entre la Noblejfe ■& le Tiers-Etat.
Voici le fécond; c’efl: que les Magillrats ont gardé à leur
f a 'vice des Valets coupables.
Voici }e troifiéme \ c’elt que le Parlement prononceroit fu r
le fort de fes propres Domefliques ; il jugeroit fes parens , fes
amis, des Nobles auxquels il tient par tons les rapports, dont il
approuve ou dont il craint de blâmer la conduite.
Enfin un dernier motif, cefl que les Magiflrats n'ont arrêté
toute infl/uclion , que par complaij'cnce pour la Noblejfe. dont ils
font Membres ; par cotnplaijance encore, que ne jugeroient—ils
pas ? confemiroieni-ils à condamner un attroupement qu'ils ont
approuvé '? & c.
En clt-ce allez pour vous prouver jufqu’oii la calomnie &
la mauvaile foi ont été portées dans ce Mémoire ? Non ,
Meilleurs. On propofe au Roi de faire ujage de fon pouvoir;
Efc-cc pour attribuer à dautres Juo’es Souverains , l’inltruétion
& l c jugement de cette affaire ? Non, c’eit Amplement pour
qu’un autre Parlement connoiffe de l'appel des Sentences des
Juges.
Le Mémoire fe termine par cette infinuation : S i n , en vous
rendant au voeu des Citoyens de Bretagne, qui fe réun jjentpour
C 2
�20
récufer le Parlement, vous ne dépouillerez-pas les Juges Préjîdtaux
de Rennes d’une compétence qui leur ejl ajjiirce par la Loi.
I l nexijle aucune fufpicion contre les Juges PrêÇid.aux. Leurs
Valets n ont point été au Champ de Monunorin. Leur conduite
prouve qu’ils ne connoiffent que leur devoir..............Ils n’ont vu
que la L o i, & leur ^èle n’a point été arrêté par les défenjes qu’on
leur a intimées. Ce courage efl un garant de leur impartialité.
Quel langage !
Ne pourroit-on pas dire, au contraire , que le refus de fe
foumettre aux Arrêts d’évocation , que cette perfévérance à
continuer l’initru£Hon , que ce vœu même des Avocats efc une
preuve de la partialité qu’on attend des Juges Préiîdiaux. Si le
Parlement eit récufable , parce qu’il tient à la N obkife, les
Juges Préiîdiaux ne tiennent-ils pas au Tiers-Etat, & peut-être,
aux Avocats eux-mêmes? M .is loin de nous cefoupçon effrayant
pour les uns & pour les autres. On ne peut pas fuppofer que la
différence d’origine puiffe influer fur le jugement d’une procé
dure criminelle.
Ah ! quelle étoit mal placée cette réeufation .vraiment injurieufe au Parlement de Bretagne ! Dans le tems même où les
Députés mettoient le plus de vivacité pour lui faire enlever la
connoiffance de l'affaire,, ce Corps plus modéré, plus tranquille,
plus digne de la confiance du Souverain & des Sujets, cherchoit à 1e dépouiller lui-même de l’infl:ru£Hon, pénible & douloureufe dans le fein de fa réfidence. il n’ignoroit pas les nuages
que l’on cherclioit à répandre dans le Peuple contre fon impar
tialité. Il voyoit avec amertume les foupçons qu’on s’efïorçoit
d’accréditer contre la légitimité de fa compétence. Il prévenoit l’injuftice qu’on fe préparait à lui faire , il dépofoit dans
le fein du Roi fes craintes, fes inquiétudes , & , pour ainfi
dire, le foin de fon honneur: il s’en rapportoit à la fagefîe du
Monarque fur ce qu’il jugeroit à propos de décider pour le
complément de 1initru&ion qu’il avoit commencée. Oui ,
Meilleurs , dans le moment même où les Avocats contefloient
la légitimité de fes droits, attaquoicntfa compétence, tk le récufoicjit avec autant d’indécence que d’injuitice , le Roi reconuoiflbit que le Parlement de Ilçnncs n’avoit fait qu’ufer du droit
�21
que lui accordent les Ordonnances, & qui ne peut donner lieu à
aucune réclamation fondée ; ilapprouvoit les motifs de délicateiTe
qui avoient engagé le Parlement à s’en rapporter à fa fageffe ;
&: pour feconder le vœu confïgné dans la Lettre du 29 Janvier
précédent, il iè déterminoit à évoquer l’affaire & à la renvoyer
au Parlement de Bordeaux. Le Parlement de Bretagne avoit
donc fenti toute l’importance de l’inftru&ion qu’il avoit or
donnée. C ’eft avant le difcours prononcé par les Avocats aux
Chambres affemblées , c’eft: avant la députation des Avocats,
c’eft avapt la compoiition & la préfentation du Mém oire,
qu’il demande lui-même que l’inftruéHon foit confiée à une
autre Cour Souveraine. Il ne vouloit donc pas s’attribuer exclufivement la connoiffance de l’affaire. L ’édifice de calomnie
élevé fur le fondement des intentions prétendues du Parlement
de Bretagne, s’écroule à la vue de la Lettre écrite au Roi le
29 Janvier. Cette Lettre dépofe de la droiture de fes fentimens,
de la pureté de les vues. Tout cil donc calomnie dans le Mé
moire prélenté au Roi. Ce Libelle contient une diffamation
atroce , -abominable , & d’autant plus criminelle, qu’elle tend
à foulever les Jufticiables contre les Magiftrats, & à perpétuer
un germe de divifion dont les effets font d’autant plus à craindre,
que le premier développement en a été plus funefte.
Le Difcours imprimé en tête du Mémoire , Difcours adreffé
à M. le Garde des Sceaux, contient les mêmes faits , les
mêmes reproches , les mêmes inculpations. Il ne manquoit à
ce rccucil d’injures que d’y ajouter l’ironie la plus infultante ;
les Députés ne fe font pas refufés cette fatisfa&ion. Après
avoir parlé de leurrefpeét, de leur attachement pour le Par
lement , ils s’expriment ainii :
Ah ! nous le plaignons Jincérement de n avoir point eu le
courage de déjerer aux touchantes repréfentations que VOrdre
s ej cmp/ejje de lui jaire fur la nécefjlté indifpenfaùlc de rendre
aux pienuers Juges l'injiru&ion de la procédure. Combien ce ren
voi^ libre G’- volontaire L'eût honoré aux yeux de la N ation !
qu il eut ete jatisfaijant pour les Avocats d'avoir hâté, ou feu
lement préjugé le moment de fa gloire !
Le Parlement de Rennes n’avoit befoin ni de l’infpinition
�4£'.
ni des confeils, ni des repréfentation> des Avocats ; il a
trouvé dans fon cœur les motifs qui devoient le décider ; il
a pris pour guide Ton attachement à Tes devoirs, la fidélité à
les rem plir, & la jufte délicatefie d’une ame pure , qui fupporte difficilement l’ombre même du ibupçon. Il avoit pré
venu l’indécente réclamation des Avocats. 11 ne doit qu’à
lui-même fa véritable gloire, & elle eit d’autant plus écla
tante , que le Roi lui-même a loué fon z^le , a approuvé fa
conduite , a confirmé fa compétence , & n’a renvoyé l’inftru&ion à un autre Parlement que pour féconder fes vœux
& calmer de plus en plus la fermentation que les Magiftrats
ne lui avoient pas diifimulée.
Par quel aveuglement les Députés des Avocats ont-ils pu
le rendre, dans une même affaire, Parties, Témoins, Con
feils , Juges, & en même temps-Arbitres de l’honneur du T ri
bunal qui les a adoptés? la calomnie elltrop évidente, pour
ne pas rendre au Parlement de Rennes la juifcce qu’ilréclame,
Tant que le Mémoire & le Difcours n’ont eu qu’une exiftence
fecrete, la calomnie a pu le promettre l’impunité : mais du
moment qu’ils ont été diffribués , la diffamation a r ç u une
publicité confiante dans le lieu de l’impreflion <$v de la difiribution. Les Juges du lieu du délit ne peuvent donc fe difpenfer
de prononcer la réparation d’un outrage d’autant plus fetiiible ,
que c’eit au Roi lui-même que les Réda&eurs ont adreffé le
tiffu de leurs infâmes calomnies,
C ’efc l’objet des Concluions par écrit c[ue nous avons prifesj
nous les biffons à la Cour , avec la dénonciation faite à M.
le Procureur Général , le Mémoire imprimé, & les autres
Pie ces julKficatives des faits énoncés dans ladite dénonciation.
Et fe font lefdits Gens du Roi retirés, après avoir laifie
fur le Bureau ledit Mémoire imprimé avec la dénonciation
faite au Procureur Général du R o i , les pieccs y annexées,
nfemble les conclufions par eux priles fur le tour.
ix retirés..
t.
’Imprimé intitulé : Mémoire au R o i, des Députés dç
V »).*
�¿57
VOrdre des Avocats cm Parlement de Bretagne , imprimé à
Paris iy8g , commençant par ces mots : Confacrés à la défenfe de leurs Concitoyens , & finiffant par-ceux-ci : ce ne font
pas les Grands. Signé G leun , Langninais, Le Chapelier, Varin ;
ledit Imprimé remis au Procureur Général du Roi par deux
Confeillers lais, Députés du Parlement de Bretagne, avec la
Dénonciation que le Parlement de Bretagne a arrêté être faite
au Procureur Général du Roi dudit Imprimé : Vu pareillement
ladite Dénonciation, {ignée en fin d’icelle par le Premier Pré
sident & le Doyen des Confeillers dudit Parlement : Vu pa
reillement les pieces annexées à ladite Dénonciation. Conclu
ions du Procureur Général du R.oi. Oui le rapport de M c
Adrien-Louis Leftbvre d’Ammecourt, Confeillcr: Tout confidéré,
L A C O U R donne acte au Procureur Général du Roi
du dépôt par lui fait au Grc-ft’e de ladite Cour , de la Requête
contenant Dénonciation , remife au Procureur Général du
Roi par les Députés du Parlement de Bretagne , enfemble des
pieces y annexées j donne pareillement afte au Procureur
Général du Roi de la plainte qu’il rend des faits contenus en
ladite Dénonciation , relativement à l’impreilion,faite à Paris
dudit Mémoire , & la diflribution d’icelur ; ordonne que l'edit
Imprimé portant pour titre : Mémoire prèfenté au R o i, &c.
fera lacéré & brûlé au pied du grand efcalier du Palais, par
l’Exécuteur de la Haute-Juitice, comme contenant des faits
faux, injurieux & -calomnieux à tous les Membres compofant le Parlement de Bretagne , tendant à foulever les habi
tants de la ville de Rennes contre les Dépositaires de l’autorite royale, & à perpétuer les troubles dans la Province ;
enjoint à tous ceux qui en ont des exemplaires de les apporter
au Greffe de la Cour , pour y être fupprimés -, fait inhibi
tions oc defenfes a tolis Libraires, Im p rim e u rs, d’imprimer,
vendre & débiter ledit Mémoire , & à tous Colporteurs ,
Diftributeurs & autres , de le colporter ou jdiftribüer , à
peine d’être pourfuivis extraordinairement & punis fuivant la
rigueur des Ordonnances ; ordonne qu’à la requête du Pro-
�V
Général du R o i , il fera informé , même en temps de
Vacations, pardevant le Confeiller-Rapporteur pour les té
moins qui fe trouveront à Paris, & pardevant les Lieutenants
Criminels des Bailliages & Sénéchauff ees pour les témoins
qui demeurent en Province , de la compofition & dift ribution dudit Mémoire , pour les informations faites , rapportées
&: communiquées au Procureur Général du R o i, être par lui
requis & par la Cour ordonné ce qu’il appartiendra ; à l’effet
de quoi ordonné qu’un Exemplaire dudit Mémoire imprimé
à Paris, fera dépofé au Greffe de la Cour, pour fervir à l’inftruction du procès ; ordonne que le préfent Arrêt fera im
primé , publié & affiché par-tout où befoin fera ; & copies
collationnées envoyées aux Bailliages & Sénéchauff ees du
Reffort, pour y être lu , publié & regiftré $ enjoint aux Subftituts du Procureur Général du Roi efdits Sièges d’y tenir la
main & d’en certifier la Cour au mois. Fait en Parlement,
toutes les Chambres aff emblées , les Pairs y féant, le fix Avril
mil fept cent quatre-vingt-neuf. Collationné L u t t o n .
cureur
Signé D U F R A N C.
E t le Mardi fept A vril mil fept cent quatre-vingt-neuf, à
la levés de la Cour, ledit Mémoire imprimé , ci-deffus énoncé ,
a été lacéré & brûlé par L'Exécuteur de la Haute-Juftice , au
pied du grand efcalier du Palais , en préfence de moi FrançoisLouis Dufranc, Ecuyer, l’un des Greffiers de la Grand' Cham
bre affift é de deux Huiffiers de la Cour.
Signé D U F R A N C ,
A P A R I S , chez N . H. N y o n , Imprimeur du Parlement,
rue Mignon y 1789.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Arrêt de la Cour de Parlement. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
censure
conflit entre avocats et magistrats de Parlements
troubles publics
avocats
domestiques
Parlement de Bretagne
Description
An account of the resource
Titre complet : Arrêt de la Cour de Parlement, rendu les Chambres assemblées, les pairs y séant, qui condamne un Imprimé ayant pour titre : Mémoire au Roi, des Députés de l'Ordre des Avocats au parlement de Bretagne, à être lacéré et brûlé par l'Exécuteur de la Haute Justice.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez N.H. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1789
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0709
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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avocats
Censure
conflit entre avocats et magistrats de Parlements
domestiques
Parlement de Bretagne
troubles publics
-
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1608ccf6cb660ed0ff9b44a080db325f
PDF Text
Text
A R R Ê T
D E L A COUR DE PARLEMENT,
RENDU LES CHAMBRES ASSEMBLÉES,
LES
PA IR S
Y
SÉANT,
Q ui condamne un Im prim é ayant p ou r titre : Lettre
de M . C . F
de V o ln e y à M . le C o m te de S . . . T ,
& onze autres Imprimés fa n s nom d'A uteur , à être
lacérés & brûlés p ar l''Exécuteur de la H aute Juf t i c e , com m e féd id eu x & calomnieux.
EXTRAIT
DES R E G I S T R E S
DU P ARLEMENT.
D u f ix Mars m il fep t cent quatre-vin gt-n eu f
E jour la C o u r , toutes les Chambres affemblées , les
Pairs y féant, les Gens du Roi font entrés ; & , M e
’A ntoine-Louis Seguier, Avocat dudit Seigneur R o i , portant
la parole, ont dit :
C
,
m e s s i e u r s
,
Nous avons pris communication des différens Imprimés que
la Cour nous a remis , & nous venons lui rendre compte de
nos obfervations fur la nature & le but de tant de Brochures
également dignes d’animadverfion & de mépris.
�Elles font au nombre de douze, toutes, à l’exception d’une
feule , fans nom d’Auteur j toutes fans nom d’imprimeur ni
du lieu de l’impreflion.
Nous partagerons ces Ecrits en trois clafles. La premiere
renfermera ce qui concerne les Parlemens & la Capitale.
La fécondé contiendra ce qui eft émané de la Bretagne &
a un rapport direft aux troubles de cette Province.
Nous réunirons dans la troifieme un Imprimé iîgné de
¡’Auteur, & cinq Numéros d’un Ouvrage deftiné à former
une Feuille Périodique fur les affaires actuelles»
Commençons par ce qui intéreiïe les Parlemens & la V ille
de Paris.
Le premier Imprimé a pour titre :. Catéchifme des Parle—
mens. C eft une efpece de converfation entre deux Interlo
cuteurs , q u i, dans les demandes & dans les réponfes, prêtent
à tous les Parlemens du Royaum e des vues , des projets , un
plan, fi éloignés de leurs devoirs , de leurs fonctions & de
leurs fentimens , qui fuppofent même une intelligence fi com
binée entre le O e rg é , la NobleiTe & la Magiftrature, une
confédération fi abfurde contre la conflitution de la Monar
chie & les droits inaltérables de la Souveraineté , dont les uns
& les autres ont toujours été & feront toujours les plus fermes
appuis , que la le&ure feule de cette Brochure calomnieufe
fumt pour faire connoître l’aveuglement, la haine & la mé
chanceté de l’Ecrivain.
Le fécond Imprimé eft intitulé : A vis aux Parijlens, &
'Appel de toutes convocations ¿Etats Généraux, où les Députes
du troifieme Ordre ne feraient pas fupérieurs aux deux autres.C ’efl à regret que notre Miniftere fe voit dans la néceifité
de faire l’analyfe d’un Ecrit diñé par la fureur encore plusque par la folie.
L ’Auteur débute par fe plaindre de Xinaüion flupide desHabitans dû la Capitale, quand on veut les rendre efclaves T
quand ils devroient fonger à fe défendre , quand des Écrivains
tnflammés de la Patrie , foutiennent leur liberté.
Il les invite à fortir de cette honteufe apathie, « s'élever
�3
contre le Clergé, la Nobleffe & la Magifiratürc ligués enfemble ÿ
& à ne pus fouffrir que fix cens mille hommes fajfent la loi à
vingt-quatre millions. Bientôt n’écoutant plus que le délire
d’une imagination ardente , il s’écrie : uniffons-nous de cœur
& de fentimens......rompons toute communication avec eux........
rappelle^ tous vos enfans qui font à leur fsrvice ; s’ils refufent
d'obéir , lancer la foudre de l ’exhérédation , déclarez-les traîtres
ci la Patrie. Et dans une note que nous ne pouvons paiTer
fous filence , on lit à ce fujet : Pour Uaccomplijfement de cette
mâle réfolution, je voudrois que cet écrit fut publié aux Prônes
de toutes les Paroiffes.
Ce cri de fédition, ce vœu fanatique n’efl: pas encore fuffifant : l’Auteur pofe en fait, que la Noblejfe, le Clergé & la
Magijlrature ne fupportent pas le demi-quart des charges pu
bliques ; que le Corps du Peuple en paye les fept huitièmes , &
il en conclud que les Repréfentans du Peuple doivent être au
moins fept fois fupérieurs en nombre aux repréfentans des deux
autres Ordres ; il veut que les Notables du Tiers-Etat dé
clarent que f i fes Députés nom pas la prépondérance , ( il ne
fe contente pas même de l’égalité, il faut que les Notables
du Tiers-Etat déclarent que s’ils n’ont pas la prépondérance )
ils n enverront point aux Etats Généraux.
Enfin l’Auteur termine par fe charger lui-même du poids
de la défenfe commune j il déclare q u il fe rend appellant de
toute décifion quelconque qui ne feroit pas conforme à ce prin
cipe immuable , que les Repréfentans doivent être en raifan des
Repréfentés............ parce quelle feroit fouverainement injufle ,
& par cela fcul frappée d’une illêgfllité radicale.
Les paiïages que nous venons d’avoir l’honneur de vous
rapporter , luffifent pour caraftérifer un Ecrit de cette na
ture. Nous ne nous permettrons en ce moment aucunes réfle
xions fur les deux Imprimés de la première clafle.
La fécondé doit contenir , entre tous les Imprimés qui
nous ont été remis par le Greffier de la C our, ceux qui ont
un rapport direflt aux troubles de la Bretagne.
Nous avons réuni fous cette indication huit B r o c h a s qui
A z
�4
©n't le même cara&ere & refpirent le même efprit ; vous y
verrez le commencement, les progrès & les fuites d’une forte
de confpiration q u i, fous le voile du bien public & de la
liberté , a prefqu’occaiîonné les plus grands défordres.
La premiere de ces Brochures eft un Difcours, vrai ou fuppofé, des Commijjaires des Etudians en Droit & jeunes Citoyens
de Bretagne , en préfentant leurs Arrêtés au Commandant de la
Province.
On eft tout étonné de voir les Eleves de l’une des Fa
cultés de l’ Univerfité de Rennes, & le reite des jeunes gens
de la Ville , réunis tout-à-coup en corporation , s’ériger
en Corps lé g a l, former une Affemblée & prendre des délibé
rations. Nous ne devons pas préfumer qu’ils aient encore
reçu beaucoup d’inflruéKons fur les matieres de Droit public.
Cette Harangue> adreifée au Commandant de la Province ,
iembleroit néanmoins annoncer une forte de fubordination
un recours à l’autorité royale ; mais dans le fait elle n’eil
que le paiTeport de la délibération la plus étrange & la plus
inconilitutionnelle.
Les Etudians en Droit & les autres jeunes Citoyens de la
Ville s’étoient aiTemblés dans la Salle des Ecoles de Droit le
2.0 Janvier ij8 g ,• ils avoient pris une délibération , tant en leurs
noms perfonnels que par procuration & adhéjîon des jeunes Ci
toyens des Villes de Nantes , L'Orient, Saint-Malo & autres
Villes de la Province ; & c’eil dans cette efpece de coalition.,
( pour nous fervir d’un terme emprunté de nos voifins, qui
exprime une chofe étrangère à nos mœurs ,) qu’il faut cher
cher le germe des troubles qui depuis ont enfanglanté la Bre
tagne.
Cette jeunefle ardente , inconfidérée, & d’autant plus
prompte à décider qu’elle connoît moins les vrais principes
fe hâte de prendre parti dans l’efpece de fchifme qui a paru
divifer les trois Ordres ; & pour faire connoître fon vœu par
ticulier , elle emprunte le langage tk -la forme uiîtée dans les
Arrêtés des Cours Souveraines -, en conféquence l’Arrêté
quelle fait commence ainii;
�%
24*
9
Vu en ladite Ajjemblée ÜArrêt du Confeil d'Etat du R o i, du
3 Jan vier, qui enjoint aux Députés du Tiers-Etat de Bretagne de
retourner à leurs Communes pour y prendre de nouvelles charges.
Les Arrêts de la Cour ( du Parlement de Bretagne ) des
8 & 10 du préfent, portant défenfes à tous Corps , Communes
& Communautés , de fe réunir ni de prendre des délibérations
autres que celles autorifées par les Ordonnances . . . . . fous peine
d’être punis & pourfuirvis fuivant la rigueur des Ordonnances
portées contre les Affemblées illicites, & c. & c.
Les déclarations de l’ Ordre de la Nobleffe , &c.
L a Lettre du Chevalier de Guer , &c.
Les différens Arrêtés......... des Paroi [Tes de Rennes affemblées.
Vu & examiné de nouveau le cahier des charges arrêté par les
Membres des Villes & Communes de la Province , en la Salle
de rHôtel-de-Ville , du mois de Décembre dernier.
Ces différens vus font fuivis de pluîieurs confédérations.
Confîdérant ladite Ajfemblée quelle n efl pas fous le coup
des Arrêts de la Cour, qui défendent les Affemblées illicites &
contraires aux L oix du Royaume, & c ............
Confîdérant que la déclaration de l ’ Ordre de la Nobleffe tend
à foulever le Peuple contre fes légitimes Repréfentans , &c.
Confîdérant que la Lettre du Chevalier de Guer efl infi—
dieufe , &c. •
Confîdérant que les Arrêtés pris par les différentes Paroiffes ,
expriment le vœu général & réfléchi du Peuple :
Confîdérant enfin que le cahier des charges du Tiers-Etat ne!
■contient que les réclamations les plus équitables, &c.
Déterminée par toutes ces confidérations , l'Affemblée arrête
•qu’elle fe réunira toutes les fois que le befoin & les affaires pu*
ùliques Vexigeront, fa u f à fe pourvoir contre les défenfes qui
pourroient lui être faites.
Après avoir nié, critiqué , défavoué la déclaration de
VOrclre de la NoblciTe , après avoir confirmé XArrêté pris par
Us jeunes Citoyens de Nantes, du 6 Janvier précédent celui de
VOrient du iz > & généralement tous l e s Arrêtés pris par les jeunes
�6
Citoyens des autres Villes de la Province , elle ordonne que fx
délibération fera imprimée au nombre de fix cents e x e m p l a i r .
Cette Délibération eft revêtue d’un grimd nombre de Signa
tures , & en outre fignée Raoul, Lieutenant de Prévôt & Greffier
des Etudiants en D ro it, pour les jeunes Citoyens de Nantes 3
L'Orient, Saint-Malo , & tous les jeunes gens de la Province non.
préfents} mais qui ont envoyé leur procuration, accompagné de
huit cents jeunes Citoyens.
Ce coup d’éclat fait en la Salle des Ecoles de D ro it, a été
fuivi d’une démarche plus éclatante encore. Ces mêmes Etu—
dians fe font tranfportés le même jour à l’Hôtel-de-Vrlle où
fe tenoit l’AlTemblée Municipale. Ils ont demandé à entrer, fy
ayant été admis, ce même Raoul, faifant les fonctions de Prévôt,
a donné leclure de la Délibération prife aux Ecoles, a mis les
Arrêtés fu r le Bureau , a demandé acle du dépôt defdites Pieces,
& l’Ajfembîée Municipale a décerné acte de la repréfentation &
leclure defdites Pieces, & arrêté quelles feroient dépofées au Greffe
de la Vaille.
Cette premiere Brochure étoit comme le préparatif des
faits qui n’ont pas tardé à fe fuccéder.
La fécondé a pour titre ; Détail de ce qui s’eflpaffé à Rennes
le 2,6 Janvier ijSç).
Cette feuille où l’on accufe la NobleiTe d’un complot odieux,
où elle eft traitée d’abominable race, femble contenir la relation
incroyable d’une émotion populaire dont il y a peu d’exemple.
Cette relation a été démentie par un récit tout-à-fait oppofé
de la part de la NobleiTe de la Province. L ’une & l’autre n’ont
aucune authenticité : mais la premiere a été diftribuée avec
un tel empreiTement, qu’on forçoit ceux qui ne vouloient pas
l’acheter à en r e c e v o ir un Exemplaire fans en payer la valeur:
& cette circonftance peut faire foupçonner l’efprit dans le
quel cette Brochure a été çompofée , envoyée & diftribuée.
Nous nous ferions un jufte reproche de reproduire les
aflertions que ce détail préfente. 11 feroit trop douloureux h
notre Minïftere de retracer des évènemens ii tragiques que
fious defirerions d’en effacer même jufqu’au fouvenir,
�^43
7
La troiiîeme Brochure de cette fécondé claffe, eft en quel
que forte le premier fruit du détail que nous venons de faire
connoître.
Elle eft intitulée : Difcours prononcé à l’Hôtel de la Bourfe,
dans r Affemblée des jeunes gens de Nantes , par M . O m n ES
O m n i b u s } Député des jeunes gens de Rennes , le 2 8 Janvier
2J 89L ’Auteur annonce qu’il eft Député & qu’il vient, au nom des
jeunes Citoyens de Rennes , chercher les fecours quils attendent
de ceux qui fe font j î bien montrés pour la caufe commune........ ..
J e me facnfierai , ajoute-t-il, s’il le fa u t, pour mes Compastriotes. L a Patrie efl en danger, marchons pour la défendre.
Cette vive apoitrophe eir fuivie d’une Proteflation des jeunes
gem de Nantes : on y lit, Que le cri de la vengeance reten*
tiffe jufquau pied du Trône ! Que le Monarque voie couler le '
Jang de nos freres , &c. &C........... Jurons tous au nom de l’hu
manité & de la liberté, d’élever un rempart aux efforts de nos
ennemis............Ils arrêtent en conféquence de partir en nombre
fufffant pour en impofer. . . . . de regarder comme infâmes &
déshonorés , ceux qui auront la baffeffe de cofluler & mêîne d’ac
cepter les places des abfens............de j e foumettre aux Commiffaires nommés par acclamation pour la police Ù l’ordre qu’il
conviendra obferver pendant la route & le féjour à Rennes.
Enfin ils proteflent d’avance contre tous Arrêts qui pourraient
les déclarer féditieux............& jurent au nom de l’honneur & de
la Patrie, qu’au cas qu’un Tribunal injufle parvint à s’emparer
de quelqu’un d’eux, & qu’il ofât , par un de ces actes que la P o
litique appelle a3e de vigueur, & qui ne font en effet qüe des
acles de defpotifme } le Jacrifier fans obfen>er les formes & les
délais preferits par les L o ix , ils jurent, difons-nous, défaire
ce que la nature , le courage & le défefpoir infpirent pour fa
propre confervation.
Cet Arrêté paroît revêtu d’abord de féi'Ze fîgnat u res, &
ceux dont on 1-rt les noms, prennent la qualité de Comntiffaires,
Enfuite on trouve les noms de fix autres Particuliers qui s-an’noiicent pour Chefs de çorrefpondance} & comme fi tous Ieis>
<
�8
afliftans n’avoient pu figner , on voit un grand nombre de
Signatures fuivies de pluiieurs & c. & c. & c.
Vous venez de voir que la JeuneiTe de Nantes a arrêté de
partir & d’aller au lecours de les freres de- Rennes. Ce. plan
a été auflitôt exécuté que conçu. L ’Arrêté eil du 28 Janvier.
Nous voyons par la quatrième Brochure intitulée , Journal cU
route, que ce même jour 28 Janvier, les jeunes gens de Nantes
fe font en effet mis en marche, qu’ils le font approchés de la
ville de Rennes avec armes & bagages, mais en obfervant
une diicipline prefque militaire , d’après un Arrêté fait par les
.Commijpiires nommés avant le départ.
Ce même Journal nous apprend que cette JeuneiTe a été
trois jours en marche, que la JeuneiTe de Rennes cil venue
en partie la rejoindre à Nozay; que le 31 Janvier, les deux
corps réunis le font remis en route pour arriver à Rennes; que
l ’entrée de la ville a été interdite au plus grand nombre } que
leurs inftances réitérées leur 'ont fait obtenir la permiiTion
d’entrer, que les jeunes gens de Nantes ont été logés chez
les Bourgeois, & qu’ils ont dépofé leurs armes fous la garde
.de cinquante d’entreux.
. Cependant l’émeute du 16 avoit excité la vigilance du Par
lement de Rennes, & ayant voulu prendre connoiiTance de
l’affaire furvenue entre M M . de la Noblejje & du Tiers-Etat, il
avoit rendu un Arrêt qui évoquoit les procédures commencées
foit au fiêge de la Police, foit au Préjidial, avec défenfes d’en
. connoitre. Le même Journal nous apprend encore que le Préfidial ri avoit pas voulu déférer à cet Arrêt, q u il continuoit fes
informations, & que l’ordre des Avocats crut alors devoir
agir en fon nom. I l demanda l’entrée de la Cour, le rapport de
rArrêt de convocation. ( c’eft évocation qu’on a voulu dire )
il demanda que la connoijfance de l’affaire refiât au Préfidial
comme Tribunal d’injlruclion & le feul qui pût en connoitre. Nous
ne pouvons nous perfuader qu’un Barreau auffi éclairé que
celui de Rennes, ait pu ignorer que les Couf's fouveraines
ont dans toute l’étendue de leur reflort, & principalement
dans le lieu de leur fixation , l’exercice inconteilable de la
grande
�grande Police. Le Parlement de Rennes devoit ie place*
entre le corps de laNobleiTe & celui du Tiers-Etat, pour pa
cifier les efprits & arrêter le défordre , quels qu’en ruiTent les
auteurs. Mais ce qui nous étonne encore davantage, c’eft
qu’on faiTe dire à l’ Avocat qui portoit la parole au nom de
rOrdre , qu ïl tenoit d’une main VOrdonnance & de l’autre le
cri public : comme fi cette menace déguifée, pouvoit en impofer aux Magiftrats dépofitaires de l’autorité : comme fi la
Cour devoit le motif de fes réfolutions à un Ordre fait pour
défendre les intérêts des Particuliers, fans interroger la Juftice
dans le fan£luaire de la Loi. Auffi le Parlement de Rennes
a-t-il répondu à cette infurreftion inouie, qu’il ne devoit au
cun compte à l’Ordre des Avocats , & quilvouloit bien lui dire
qu’il avait puifé dans fa fageffe l’Arrêté qu’il avoit pris. Nous
lifons dans le même Journal, que mécontent de cette réponfe,
l ’Ordre a député quatre de fes membres pour Paris , fans doute
pour fe plaindre de ce que cette Cour n’a pas fait droit fur fa
réclamation.
La cinquième Brochure eft un Recueil de Pieces tant im
primées que manuferites y mais ce Recueil fe réduit à deux
feulement.
La premiere eft un Ecrit des jeunes gens de la ville de
Breft, dans lequel ils certifient, promettent & jurent d’adhérer
aux Délibérations de la ville de Rennes............de fe foumettre
à tout ce qu’il plaira............à la Jeuncjfe afjhnblée de la ville
de Rennes, de décider pour foutenir les droits injuflement mé
connus du Tiers, de s’oppofer aux infultes & vexations d ’une
Nobleffe orgucilleufe.............. & enfin de Je foumettre aveuglé
ment à tout ce qui fera décidé par le. Confeil de la Jeunejfe aJJ'emblée, & de fe confacrer avec le plus parfait dévouement à la
caufe publique. Cet Arrêté eft du i cr Février 1789. Il eft revêtu
de ioixante fignatures, & à la fin il eft figné F rémont, Commijfaire pour la correfpondance de Nantes 6’ Rennes.
La fécondé Piece de ce Recueil, eft une Homélie HifloricoPolitico-Morale, où l’Auteur s’eft efforcé de faire voir ce que,
d’après fes idées & les faits qu’il raconte, on doit penfer d$
�la conduite des Ordres de l'Eglife & de la Nohlejfe -, & de celle
du Parlement, depuis Uouverture des Etats de Bretagne.
Dans ce difcours, l’Auteur , vraiment fanatique, s’eft oublié
au point d’affe&er d’imiter en tout la forme pratiquée dans
les inftruéKons que les Miniftres de l’Eglife donnent aux F ideles aiTemblés, fur les Myfteres, les Dogmes & les préceptes
de notre Religion fainte. Cette Homélie ne préfente qu’un
narré infidele ae faits hafardés ou dénaturés, qu’un aiïemblage
d’aflertions injurieufes au Clergé, à la NobleiTe & à la M agiftrature, la dénonciation d’un fyftême d’alTerviiTement mé
dité contre le T iers-E tat, fyftême qui n’a jamais exifté &
n’exiftera jamais dans le cœur ou dans l’efprit des deux premiers
Ordres de la Province, enfin Fapologie des prétentions de
toute nature du troifieme Ordre , & un encouragement pour
faifir l’occafion de rompre le joug & de rentrer dans tous les
droits dont-il a été injuftement privé. O ! iouvenir malheureux,
c’eft avec de pareils moyens, c’eft par de femblables décla
mations, que les Prédicateurs du tems odieux de la Ligue,
çherchoient à foulever le Peuple & Tanimoient contre ce qu’il
y avoit de plus refpe6ïablc dans l’Etat !
Il nous refte encore à vous rendre compte, dans cette claiîe,
de trois Imprimés qui font une fuite de tout ce que nous
venons d’avoir l’honneur de vous expofer.
L ’une eft une Proteflation des Etudions en Droit de la ville
d ’Angers , du j Février iySg,
La fécondé, un Arrêté des Membres de la Basoche de la
ville d'Angers , du même jour.
La troifieme, un Arrêté des jeunes Citoyens de la même V ille}
du 4 Février.
La Proteftation des Etudians en D roit, a été faite dans la
Salle des grandes Ecoles ; elle a été faite fur la leclure d’une
Lettre des jeunes gens de la ville de Rennes. On rappelle dans
cette Proteftation les coniidérations qui ont déterminé les
Etudians en Droit de l’Univeriité de Rennes, 011 arrête des
Remercirnens à tous les jeunes gens de Nantes , aux Etudians en
Droit de Rennes , & à tous les jeunes Citoyens de Bretagne :
�$
4
II
qu’il leur fera fu r le champ donné affurance du ^ele de l’AÎTem—
blée à concourir avec eux à la jufle vengeance des affaffinats
commis par quelques Nobles de Bretagne , que chacun fe pré
parera fans délai à partir pour fe rendre à Rennes, qu’on com
muniquera à la Jeuneffe d’Angers les Pièces même de Nantes ,
& que la Délibération fera rendue publique.
L ’Arrêté de la Bazoche efl dirigé d’après le même plan de
conduite. On expofe d’abord , que déjà les Etudions en Dro.it
& en Médecine , ont envoyé des Députés à Nantes & à Rennes,
pour prendre des informations , & offrir aux Bretons la vie &
les bras de la Jeuneffe Angevine, difpofée à partir au premier
fign al; & d’après cet expofé, la Bazoche prend une Délibé
ration femblable à celle des Etudians de la ville de Rennes,
tk arrête de s’y tranfporter au premier avertiffement, & que ceux
qui obtiendront ou folliciteront les places des abfens, feront voués
à rinfamie & déclarés incapables depoffeder aucune Charge dans
la Judicature.
Enfin la Jeuneffe de la ville d’Angers arrête qu’<m qualité
d'hommes & de Citoyens , ils font & feront toujours prêts à voler
au ¡¿cours de leurs frères injuflement opprimés............. & en
coméqunnce ils adherent aux Arrêtés des Etudians en D ro it,
des Etudians en Médecine & des Membres de la Baroche de
ladite Ville. Ces trois .dernieres Pieces font accompagnées
d’une grande multitude de fignatures.
L ’analyfe que nous venons de prefenter des huit Brochures
comprifes dans cette fécondé claffe, démontre avec évidence
à quel degré de fermentation les efprits fe font portés dans
la Province de Bretagne. Non-feulement les Municipalités,
les Communautés , les Paroiifes fe font affemblées & ont pris
des Délibérations : Elles en avoient la faculté 5 elles forment
un Corps dans l’Etat : Tout Corps a droit de délibérer fur
fes intérêts. Nous n’avons point à nous occuper de ces Déli
bérations particulières. M ais, par quelle infligation eit-il arrivé
que la Jeuneffe de Rennes, Nantes, ¿’ Orient, Brefl & Saint-M alo , fe foit aifemblée dans chacune de ces V illes, & fe foit
enfuite réunie pour agir de concert & .fe porter aux memes
B x
>
�VI r-
îz
extrémités ? Pourquoi les Etudiants en Droit & en Médecine
ont-ils fuivi le même exemple ? Qui a pu leur perfuader de
former une aiïoaation publique? Comment ont-ils pu fe pro
mettre de faire couler le fang de leurs freres jufques fous les
yeux du Monarque ? Et comment n’ont-ils pas frémi àe jurer >
s’ils étoient poursuivis par un Tribunal qu’ils appellent injujle.,
de faire tout ce que la nature , le courage & le défefpoir infpire
pour fa propre confervation ? Comment ce cri de vengeance
a-t-il retenti jufque dans les Villes voifines? par quelle fatalité,
en un mot, cette traînée de poudre a-t-elle pris feu au même
inftant dans prefque toute l’étendue de la Bretagne? Vous en
avez l’aveu dans le Journal de route des jeunes gens de Nantes.
Déterminés par le Difcours prononcé à la Bourfe par un
Député de Rennes, ils fe font tranfportés en grand nombre
dans le fein de la Capitale , où les Etats devoient être &
étoient cenfés aiTemblés -, ils y font entrés armés , & ont
en quelque forte , forcé le Commandant de les admettre „
pour éviter de plus grands défordres. Ils accufent la NobleiTe,
le Clergé , le Parlement ; mais n’ont-ils rien à fe reprocher à.
eux-mêmes? Ne pourrions nous pas leur dire, comme Horace:
au Peuple Rom ain, dans les troubles de la République expfr
iante ;
F uror-ne c œ cu s , an rapit vis acrïor ?
An culpa ? Refponfum date.?
Epod. L. VUL.
''
Eiî-ce parl’efFetd’unecombinaifon fortuite que cettejeuneiler
non contente de folüciter fes Compatriotes, a fait circuler fon
effervefcence jufque dans les Provinces limitrophes? Par l’impulfion de quelle force inconnue les Etudians en Droit r les,
Etudiants en Médecine de l’Univerfité d’Angers, la Jeunefle
de cette même V ille , & la Bazoche attachée à la Sénéchauil'ée
d’Anjou, ont-ils adopté la même réfolution ? Pourquoi cette'
foule, abfolument étrangère aux Etats de Bretagne , a-t-elle
embraffé la querelle du Tiers-Etat de cette Province ? Pour
quoi s’eil-elie réunie, autant qu’il a été poflible , à la JeuneiTe
�Bretonne ? Pourquoi.a—t —elle juré de voler à Ton fecours
au premier iignal, l’a - t - e l l e remerciée de fa confiance?
E t , enfin, de quel droit a-t-elle fait imprimer des Arrêtéspris dans la chaleur du premier moment ? Seroit-ce pour faire '
parade, aux yeux de toute la France, d’une intrépidité cou
pable , & qu’on doit envifager comme le fruit de l’aveugle
ment , plutôt que comme l’eiFet d’un zèle pur & d’un vrai
patriotilme ?
Il leroit, iàns doute, dangereux d’approfondir des queftions
que l’homme fenfé fe fait malgré lui-même , mais auxquelles
il lui eft impoiïible de répondre. Détournons nos regards de
ce tableau trop affligeant, & achevons de parcourir les Im
primés dont notre Miniftere a été chargé de rendre compte
à la Cour.
Le nombre n’en eft pas coniîdérable dans la troiiîeme
claffe j ils fe réduifent à deux : en voici le réfumé.
Le premier eft intitule : Lettre de M . C.-F* d e V o l n e y t
à M . le Comte de S ..... r.
Il paroït que cette Brochure eft une réponfe à la réfutation
cPun des ouvrages de l’Auteur. Le commencement de cette
lettre eft une fuite de farcaimes contre celui à qui elle eft
adreflee, un long tiiTu dmveftives contre la Noblefîe Françoife, ui^ aiTemblage de reproches contre la Magiftrature ,
& un recueil apologétique des lumieres, des forces & des pré
tentions du Tiers-Etat. L ’Auteur veut repouiïer des EtatsGénéraux tous ceux qui font attachés à la NobleiTe de quelque
maniéré que ce fo it, & , pour cet effet, il divife fon ordre
( le Tiers-Etat ) en deux claffes ; l’une réellement indépendante
de la Noblefje par fa fortune & fon caraclere ; lyautre encore dans:
le fervage parjes intérêts & fes places : ces derniers fo n t, dit-il",.
des efclaves d’Alger que nous voulons délivrer, mais que non»
Jommes forcés de canonner afin de détruire le Corfaire.
Quant aux principes que l’Auteur établit, nous n’en citerons
qu’un feul; il renferme tous les autres. Il diftingue dans le
Tiers-Etat la force morte & la force vivante r & voici comme
il s’exprime : pour vous expliquer la force morte, je vous dirai
�r4
que c’efl celle d'un Payfan qui, perfécutepar un Haut-Juflicier,
j e défend par des Mémoires ; & que la force vivante , e(l celle
d’un, autre Payfan qui, pouffé à bout, prend fon fu fil & fe fait
jufîice. On peut juger de la trempe d’efprit de cet Ecrivain,
de la profondeur de fes raifonnemens, de la fagefle de Tes vues,
par cette feule explication.
Le fécond Imprimé elt divifé en cinq numéros, qui forment
chacun une Brochure féparée : elles ont pour titre : La Sentinelle
du Peuple^ & font adreffées aux gens de toutes les profejjions,
fciences , arts , commerce & métiers compojant le Tiers-Etat
de la Province de Bretagne.
Cet ouvrage, comme nous l’avons déjà annoncé, étoit deftiné à devenir périodique, & le pian que le journalise paroît
avoir adopté, cil de recueillir les projets, les propos, les converfations, les entretiens furtifs, & généralement tout ce qui
peut avoir trait aux affaires de la Province , & d’accompagner
le tout de fes remarques & de fes réflexions.
L ’Auteur avertit que tout Citoyen doit avoir un emploi dans
la fociété , & il fuppofe qu’il a pris, pour Jon lot, le métier de
fentinelle ; en conféquence, il va rodant les foirs par les rues ;
il fe tient en embufeade aux coins des carrefours ; il parcourt les
places publiques, épie tous les pafTans, les fuit, les écoute,
&: fait fon profit de toutes les convc l'fations qu’il peut entendre.
Ce cadre eft rempli de nouvelles apocriphes., de fables inven
tées à plaifir, de contes propres à échauffer le Peuple , d’événemens ajuftés aux affaires du jour, d’ailégorics injurieufes &
de conjurations qui n’exiftent que dans rmragination de cet
cfpion noéturne. Son but principal eft d’exaipérer le TiersEtat contre la Noblefle. Il accufe, fans celle, les deux premiers
Ordres d’avoir formé un complot pour opprimer, pour dé
pouiller le troilïeme, pour le réduire à un efclavage honteux;
& la Magiftrature eft d’intelligence pour faire réuilir la confpiration...............* • Frères & Citoyens, s’é c rie -t-il, faites feu
lement ce que je vous dirai............. J e veux , avant dix jo u rs,
mettre à vos pieds tous les Conjurés. Et ce fecret eft d’obliger
tous les membres du Tiers-Etat, dans quelque rang qu’ils fe
�O JI
«5
trouvent placés, à rompre toute communication, à refufer
tout fervice, en un mot à ne rien faire de ce qui concerne
leurs profeffions, pour le Clergé , pour la Nobleiïe & la M agiiîrature. Cet expédient eil heureufement imaginé, & le TieisEtat s’applaudiroit fans doute d’une réfolution il analogue à
fes intérêts. Au reile, l’Auteur eil d’accord avec lui-même ;
car fon projet eil de détruire dans le Royaume tout ce qui n’eit
pas le Tiers-Etat. Dans un autre de fes numéros, il introduit
un médiateur qui offre d’appaifer tous les débats , & cet
efprit pacificateur trouve extraordinaire quunOrdre fe jépare des
deux autres. Voici la réponfe de l’Auteur: qu appeliez-vous un
Ordre ? Changeç vos termes , A i onfieur. Le Tiers-Etat r i ejl point
un ordre; il ejl la Nation; c’ejl un Corps entier & complet dont
la Nobleffe & le Clergé ne font pas même les membres miles , car
ils ne le font ni vivre ni agir ; ce font deux loupes................. q u il
faut refouler dans la maffe. A-t-on jamais rien lu de plus extra
vagant. Le délire eil porté jufqu’à la frénéfie.
Avant de terminer cette difcuilion, nous allons vous faire
connoître le génie de ce Folliculaire anonyme ; nous ne ci
terons plus qu’un paifage du dernier de fes Numéros ; mais
on doit frémir en le liïant.
Après s’être livré à la violence de ces déclamations , l’Auteur dit qu’il veut quitter les perfonnalités pour fonger à la
■choie publique. Il s’adreiTe à l’un des Membres de l’Ordre
de la Nobleffe , & l’invite à jetter un regard fu r la France
& fu r la Bretagne ; & à l’afpecl des nuages immenfes de l’horifon , de juger quelle tempête fe prépare. Il ajoute : le feu de
la fédition ejl prêt à éclater ; voye^ les liens Je ¿’Etat d ffous 3
le frein des pajfions brifé, le champ ouvert à la licence ; voye^
le Peuple mutiné , la Jufllce civile fufpendue , les impôts par
tout refufés............ Voye^ la fédition dans les Villes, le pillage
dans les Campagnes , les allarmes dans les familles. Dans ce
danger des Citoyens , voye^ le danger de votre Ordre. En vain
i l veut fe rajjembler pour oppofer plus de réfijlance , la jeunefje
rOturiere fe ligue & forme des Corps volontaires redoutables. On
fujcite vos Payfans contre vous y & leur donnant en propriété
'^
�H
16
ce qu 'ils n’ont quen fermes, ils deviennent vos plus ardens en
nemis.............. Tremble{ de livrer un. combat où le Peuple n a
rien à perdre & tout à gagner.
Quel pinceau a pu tracer- cette image horrible des cala
mités que les diffentions publiques pourroient accumuler ? Les
écrits multiplies qui contiennent ces indices d’une rebellion
méditée , feroient-ils les avant-coureurs du plus terrible des
fléaux ? Ce nefont encore que des manifeftes, mais les bruits
fouterreins préfagent l’exploiion des volcans. Le calme qui
paroît iuccéder aujourd’hui aux premiers coups de l’orage,
n’eft peut-être qu’un calme apparent. Les trois Ordres l’ont
toujours partagés , ils font en préfence , ils s’attendent ; lequel
deviendra l’agreffeur ? Nous ne pouvons le dilîimuler ; vous
venez de l’entendre ; ce n’eft pas la Nobleffe qui veut anéan
tir le Tiers-Etat, c’eft un Membre du Tiers-Etat qui cherche
à le foulever; c’eft lui qui annonce toutes les horreurs de'la
guerre civile ; il dit à la NobleiTe : nous fommes tout, vous
n’êtes rien ; cedez à la force, autrement vos châteaux Jont
incendiés, vos richejfes font diffipées , vos droits féodaux vous
font arrachés, vos femmes & vos enfans je trouvent expofés
aux infultes de la populace & aux befoins de la pauvreté y &
dans ce combat terrible de la Nation contre vous...........f i vous
remportiez la vicloire............... vous régneri fu r des tombeaux
¿y fur des ruines.
Nous ne faifons que copier littéralement le texte de l’Ecrivain. Comment cara&érifer de pareils Ouvrages? Le fanatiime
n’a jamais enfanté de produftions plus féditieufes j comment
a-t-on pu en tolérer la diftribution ?
Reprenons en peu de mots tout ce que nous venons d’offrir en
détail.
L e Catéchifme des Parlemens préfente un fyftême que la
Magiftrature défavoue, & que la haine de certains efprits mal
intentionnés a pu feule imaginer.
L ’A vis aux Parifiens eft le fignal de la fédition , tout y
Fefpire le fchifme , la fureur & Panarchie.
Les Arrêtés des Etudians en Droit & en Médecine de l’Univerfité d’Angers j
L ts
�$S2>
17
Les Arrêtés de ia Jeunefle des villes de* Rennes, Nantes,
l’Orient, Breft, Saint-Mqlo & Angers ;
L ’Arrêté de la Basoche de la Sénéchauflee d’Anjou ;
Le DiJcours prononcéà la Bourie de Nantes, & L’Homélie de
l’Orateur Breton ; enfin , La Lettre de Volney & La Sentinelle dw
Peuple, ne font que le langage de l’infubordinàtion & de la
révolte, le produit du délire &: de l’aveuglement. Par-tout on;
voit une main ennemie, qui entafle reproches fur reproches,
accufation fur accufation, complots fur complots; l’opiniâtrfcté
d’un Auteur, qui prend toutes les formes pour reproduire fes
fentimens, & les faire adopter ; les efforts d’un Conjuré , qui
fe propofe de caufer un embrâfement dont rien ne puiife
arrêter les progrès. En effet, quelle a été l’origine des troubles
de la Bretagne ? Nous n’acculerons aucun des trois Ordres....»
Il y a peut-être eu des torts refpeftifs. Le parti étoit pris avant
l’Affemblée des Etats, & la fermentation s’eft augmentée par
la fermeté de la Nobleffe & l’obftination du Tiers ; mais le'
feu n’a pas refte long-temps caché fous la cendre ; l’incendie
a bientôt éclaté. Tirons le rideau fur un fpe&acle lamentable.
La combuftion eft devenue prefque générale ; alors la jeunefle
a voulu faire la lo i, la jeunefle, v iv e , préfomptueufe, facile
à s’égarer, fur-tout lorlqu’elle fe livre à fon premier mouve
ment j elle s’eft érigé à elle-même un Tribunal démocratique;
elle a donné fes idées pour des Plébifcites ; elle a envifagé
fes délibérations comme le premier ufage de fa liberté & le
fondement de l’autorité qu’elle vouloit s’arroger ; elle en a
ordonne l’impçeflion.
Imprimer des Arrêtés violens, fe lier par des fermens réci
proques , former des attroupemens illicites & provoquer la
réunion armée d’une portion des Citoyens , voilà cependant
les fruits de cette liberté indéfinie de la preffe que l’amour de
l’indépendance ne ceffe de réclamer ! Il n’en eft en quelque
forte reliilté , dans les circonftances a&uelles, que des libelles
féditieux, des relations menfongeres, des avis propres à en
flammer les efprits , des adhéfions à des projets fanguinaires ,
& Ja facilité de communiquer promptement les réfolutions
Me
�18
les plus violentes & les plus contraires à l’ordre public. Tel
eft i’ufage qu’on fait encore aujourd’hui de cette tolérance
univerfelle ; mais n’eft-elle pas devenue abuiive ? Nous en
tenons la preuve entre les mains , & le compte que nous
venons de rendre de tous ces Imprimés dépofera toujours que
l’intention de la Cour n’a jamais été de favorifer les abus d’une
impreffion clandeftine.
L ’ufage légitime de la prefle , ce moyen fi rapide d’étendre
les lumieres & les connoiifances utiles au genre humain, cette
liberté repréfentative du don naturel de la parole, dégénéré,
comme la parole elle-même, en licence intolérable , toutes
les fois qu’elle facilite le moyen de répandre le poifon de
l’erreur, d’attaquer les dogmes & les myfteres de la Religion ,
de corrompre la pureté de la morale , de bleffer l’honnêteté
publique & de diffamer le dernier des Citoyens. Tous ccs
grands objets doivent être couverts de l’Egide de la L o i, &
quiconque leur porte atteinte eft un perturbateur du repos
. Eft-il poifible qu’il fe trouve des ames affez viles pour fe
livrer à des perfonnalités qui déshonorent plus celui qui fe les
permet que celui qu’on cherche à déshonorer ? Comment fe
rencontre-t-il des Imprimeurs aifez faméliques pour mettre au
jour des ouvrages obfcenes , des écrits téméraires , des bro
chures calomnieufes, & toutes ces produirions préparées pour
attifer le feu de la difcorde dans le cœur ou dans l’efprit des
Citoyens ? Y a-t-il donc de la probité à répandre la calomnie,
à devenir l’inftrument de la diffamation, & à fe rendre le
complice d’un mal fi difficile à réparer?
Quand le Roi a autorifé tous fes Sujets à lui faire parvenir
leurs fentimens particuliers fur objet important qui femble
partager la Nation, le Roi n’a eu d’autre but que d’éclairer
fa religion : & il donnoit une grande preuve de bonté, en
confultant fes Sujets fur leurs propres intérêts. Pouvoit-il pré
voir que cette bonté paternelle deviendroit la fource d’une
multitude d’écrits, plus propres à divifer les efprits qu’à les
rapprocher, plus capables de confondre les idées que de réunir
�*9
les opinions, plus favorables aux fa&ieux que confolans pour
les véritables Patriotes? Il eft peut-être tems encore de réprimer
un défordre qui pourroit caufer les plus grands malheurs, par
la rapidité avec laquelle l’Art de rimprimerie communique la
contagion. Pour arrêter ces funejles effets, le Roi a déclaré qu’il
alloit prendre des mcfures propres à prévenir la licence à laquelle
on Je livre en imprimant toutes fortes d’ouvrages fans aucune
fanclion. PuiiTe cette intention manifeftée être déformais une
digue allez puiifante pour arrêter l’impreiTion furtive & la
diltribution publique de ces ouvrages licentieux , dont une
tolérance funefte femble autorifer la publicité !
Quelque profond que foit l’égarement de ces Ecrivains ano
nymes , q u i , du fein de leur obfcurité, fement le trouble &
appellent la révolte, qui voudroient armer la Nation contre
la Nation, qui ne connoifîent de droit public que la force,
& fe promettent de dénaturer la Conftitution françoife, pour
s’élever fur fes ruines par l’établiflement d’une égalité chimé
rique dans tous les états &: dans toutes les conditions ; nous
ofons encore nous flatter que le phantôme de l’illufion ne
tardera pas à s’évanouir, & que bientôt le Génie du patriotifme confum£ra>ilfs nuages qu’un Démon malfaifant oppofe à
la lumiere de h.)vérité.
La iituation a&uelle de la France eft femblable à la poiition
critique d’une flotte nombreufe battue de la tempête , & dans
l’impoflibilité de faire ufage des fignaux convenus ; les vaiifeaux , pouifés par les vents contraires, obéiflent à la vague
écumante, fe heurtent, s’entrechoquent, fe féparent, malgré
l’habileté de la manoeuvre : mais auili-tôt que l’orage eft diflipé,
ils fe rapprochent, fe fecourent, fe réunifient fous le pavillon
am iral, fe mettent en ligne , & voguent avec confiance pour
arriver au port qui les attend. Les Etats-Généraux dü Royaum e
feront ce point de réunion ; c’eft dans cette au eu île Aficrnblée ,
& fous les yeux d’un Monarque chéri, que les Repréfentans
de la Nation, guidés par le même ciprit, animes du ineme
zele , formant le même v œ u , après avoir dépofé fur l’autel
de la Concorde les préjugés anciens & nouveaux, les prtten-
�tiens injuftes & démefurécs , l’orgueil du rang, le poids de
la multitude, la défiance enfin , & les jaloufies , fources
impures de la fureur ou de l’aveuglement, porteront au pied
du Trône les fruits précieux de l’union, une preuve éclatante
de fon dévouement, & fa juile réclamation contre les abus que
le malheur des temps a fait introduire dans toutes les parties de
l’Adminiftration. Pourrions - nous craindre de nous livrer à
cette douce el'pérance ? Ce n’eft que dans cet accord heureux
de fentimens infpirés par le véritable honneur, que les Fran
çois peuvent fe prouver à eux-mêmes qu’ils font freres, amis,
Citoyens, qu’ils ne forment qu’une feule famille , qu’aucun
des trois Ordres ne veut prédominer, qu’ayant tous le même
intérêt, ils doivent tendre au même but, & alfurer le bonhevy
commun , par un monument inébranlable dont la liberté , la
foi publique & l’amour de la Patrie auront pofé les fon—
demens.
PuiiTent nos vœux hâter ce moment il defiré ! M ais, en
efpérant que le flambeau de la diieorde fera entièrement
étouifé , il eil de notre devoir , comme de la l’ageiTe de la
Cour, de condamner publiquement les Imprimés dont nous
venons de lui rendre compte. Les fanatiques plaifantent fur
un genre de flétriiîure depuis long-temps eo'üfage dans les
Tribunaux ; niais l’homme circonfpc£l y voit une improbation
légale prononcée par les Dépoiitaires de l’autorité fouveraine :
& fi l’Auteur d’un Ecrit repréhenfible, ainfi que fes partifans,
fe font une gloire & tournent en ridicule une condamnation
juridique -, l’homme fage fe tient en garde contre un Ouvrage
condamné par les Minières de la L o i, faits pour veiller à la
confervation des bafes fur lefquelles repofent la tranquillité
publi que. C ’eft dans les momens de crife que la vigilance des
Magiitrats devient, en quelque forte , le contrepoifon des
•opinions que la cupidité, l’indépendance & l’anarchie veulent
accréditer.
Nous laiflons à la Cour les Imprimés qu’ elle nous a fait
remettre, avec les conclufions par écrit que nous avons prifes
A -ce fujet.
�Et fe font lefdit» Gens du Roi retirés, après avoir laiffé fur
ïe Bureau lefdits douze Imprimés, & les conclufions par eux
prifes par écrit fur iceux.
Eux retirés,
Vu les douze Imprimés, favoir le premier in-iz , intitulé :
Catéchifme des Parlemcns , fans nom d Auteur ni d’imprimeur,
contenant 1 6 pages d’imprefîion , commençant par ces mots :
Qii êtes-vous de votre nature ? & finiffant par ceux-ci : Point de
réponfe-, Le deuxieme Imprimé , auifi in - iz , intitulé : A vis aux
Parijiens, fans nom d’Auteur ni d’imprimeur, contenant 1 1 pag.
d’impreiîiofi., commençant par ces mots : Frivoles Parifiens , &
•finiffant paf ceux-ci : & qui s ’engraiffe de vos travaux. Le troifieme
Imprimé iti-i i , intitulé : Dijcours de M M . les Commiffaires des
Etudians en Droit & jeunes Citoyens de Bretagne , en présentant
leurs Arrêtés à M . le Comte de Thiard , Commandant de la.
Province , fans nom d’Auteur ni d’imprimeur , contenant
■douze pages , commençant par ces mots : Monfieur ic Comte ,
& finiffant par ceux-ci : le Marchand de l’Epinay , Greffier.
Le quatrième Imprimé in-1 2 , intitulé : Détail de ce qui s’ejl
paffé à Rennes le 26 Janvier ij8çj , fans nom d’Auteur ni
■d’imprimeur , contenant fix pages , commençant par ces
mots : Notre Ville a eu le fpeclacle, & finiffant par ceux-ci :
tels quils fe font pafjés ; avec cette apoftille en lettres itali
ques : Le refle à F ordinaire prochain. Le cinquième Imprimé
in-1 2 , intitulé : Difcours prononcé à l’Hôtel de la Bourfe , dans
ïAffemblée des jeunes gens de Nantes , lans nom d’Auteur ni
d’imprimeur , contenant huit pages d’impreffion , commen
çant par ces mots : Me (¡leurs, & finiffant par ceux-ci : Lupé,
M enard, £-*. &c. Le fixieme Imprimé in-iz , intitulé : Journal
de Route, Nantes , le 28 Janvier ijS g , fans nom d’Auteur
ni d’imprimeur, contenant douze pages d’impreiïïon, com
mençant par ces mots: L e Mercredi matin fufdit jo u r, & fi
niffant par ceux-ci : ferait imprimé. Le feptieme Imprimé , in
titulé : Pieces intéreffantes , fans nom d’Auteur ni d’imprimeur,
contenant vingt-huit pages d’impreffion , commençant par ces
�mots : Nous foujjignés, & finiifant par ceux-ci : par un Curé
de Bretagne. Le huitième Imprimé in-i z , intitulé : Protefladon
& Arrêté de M M . les Etudians en Droit de la. Ville ¿Angers ,
fans nom d’Auteur ni d’imprimeur , contenant cinq pages
d’impreifion , commençant par ces mots : Nous foujjignés , &
finiifant par ceux-ci : pour M M . les Etudians non préferis à
FAjJ'embUe. Le neuvieme Imprimé in-1 z , intitulé: Arrêté de
M M . les Membres de la Basoche aTAngers , du j Février ty8g ,
fans nom d’Auteur ni d’imprimeur , contenant fept pages d’impreifxon , commençant par ces mots : Mejjieurs les Membres
de la Basoche dAngers , & finiifant par ceux-ci : Dubois,,
Secretaire. Le dixieme Imprimé in-1 1 , intitulé : Arrêté des
jeunes Citoyens de la ville dAngers , fans nom d’Auteur ni
d’imprimeur , contenant cinq pages d’impreifion , commen
çant par ces mots : Nous jeunes Citoyens de la ville dAngers ,
&: finiifant par ceux-ci : V erfé, Yvon , &c. &c. Le onzieme
Imprimé intitulé : Lettre de M . C. F . de Volney, à M . le
Comte de S ...... T. ......., fans nom d’Auteur ni d’imprimeur y
contenant vingt-trois pages d’impreifion , commençant par
ces mots : M . le Comte, ik finiifant par ceux-ci : C. F . de
Volney. Le douzième Imprimé intitulé : Afjaires de Bretagne;
la Sentinelle du Peuple, divifé en cinq N os diftin£ts l’un de
l’autre , tous fans nom d’Auteur ni d’imprimeur ; le premier
N°i contenant douze pages d’impreifion , commençant par
ces mots : Amis & Citoyens, & finiifant par ceux-ci : pire
encore que le defpotifme. Le fécond N°. contenant dix-huit
pages d imprelfion, commençant par ces mot? : Amis & Ci
toyens , & finiifant par ceux-ci : de peur d’accident. Le troi—
fieme N°. contenant vingt pages d’impreifion , commençant
par ces mots : Amis & Citoyens, & finiifant par ceux-ci : la
logique de üAuteur , avec cette apoftille en lettres italiques :
la juite inceffamment. Le quatrième N°. contenant dix-neuf
pages d’impreilion , commençant par ces mots : Amis & Ci
toyens , & finiifant par ceux-ci : vingt fois plus j ’ort queux. Le
cinquième N °. contenant dix-huit pages d’impreifion, com
mençant par ces mots : Amis & Citoyens, &: finiifant par
�ceux-ci : à la perte de leur tyrannie. Concluions du Procureur
Général du Roi. Oui le rapport de Me Adrien-Louis Lefebvre
d’Ammecourt , Confeiller.
La matiere mife en délibération :
'
L A C O U R ordonne que lefdits douze Imprimés feront
lacérés & brûlés en la Cour du Palais, au pied du grand
efcalier d’icelui, par TExécuteur de la Haute-Juftice , comme
féditieux, calomnieux , tendans à détruire la confiance fi néceffaire à maintenir dans les différentes claffes des Citoyens,
à perpétuer les troubles par la violence des expreffions; comme
contraires aux vues de fageffe & de bonté qui ont déterminé
le Roi à convoquer les "Etats-Généraux du Royaume ; fait
défenfes aux jeunes Gens de la ville d’A ngers, aux Etudians
en l’Univerfité de ladite V ille , aux Clercs de Procureurs
compofant la Bazoche en la Sénéchauffée d’Angers, défaire
à l’avenir de pareils Arrêtés, fous telles peines qu’il appartien
dra ; enjoint aux Officiers de la Sénéchauffée d’Angers, &
aux Re&eur & Profcffems de l’ Univerfité de ladite Ville de
veiller à ce qu’il ne foit fait à l’avenir aucun Arrêté femblable, foit dans la grande Salle d’audience de la P olice,
foit dans la grande Salle des Ecoles de D roit, foit ailleurs ;
enjoint à tous ceux qui ont des exemplaires defdits Im
primés de les apporter au Greffe de la Cour , pour y être
Supprimés ; fait inhibitions & défenfes à tous Libraires &
Imprimeurs, d’imprimer , vendre & débiter lefdits Impri
més , & à tous Colporteurs, diilributeurs & autres de les col
porter ou diffribuer , à peine d’être pourfuivis extraordinai
rement ¿k punis fuivant la rigueur des Ordonnances; ordonne
quà la requête du Procureur Général du Roi, il fera informé
pardevanr le Confeiller-Rapporteur, pour les témoins qui fe
trouveront a Paris ; & pardevant les Lieutenans-Criininels des
Bailliages & Sénéchauffées, pour les témoins qui demeurent
en Province, de la compofition & diftribution defdits Impri
més; pour les informations faites, rapportées & communi-
�14
quées au Procureur Général du R o i , être par lui requis '& par
la Cour ordonné ce qu’il appartiendra ; à cet effet ordonne
qu’un exemplaire de chacun defdits.Imprimés fera dépofé au
Greffe de la Cour pour fervir à l’inftructio n du procès, Or
donne que le préfent Arrêt fera imprimé, publié & affiché
par-tout où befoin fera , & copies collationnées envoyées aux
Bailliages & Sénéchauffées du reff ort, pour y être lu , pu
blié & regiftré ; enjoint aux Subftituts du Procureur Général
du Roi efdits Sièges d’y tenir la main & d’en certifier la
Cour dans le mois. Ordonne que ledit Arrêt fera notifié à la
requête du Procureur Général du R o i, pourfuite & diligence
de fon Subftitut en la Sénéchauffée d’Angers , aux Recteur &
Profeffeurs de l’Univerfité de ladite V ille , pour qu’ils aient à
tenir la main à l’exécution dudit Arrêt, en ce qui les concerne.
Fait en Parlement, toutes les Chambres affemblées les Pairs
y féant, le fix Mars mil fept cent quatre-vingt-neuf. Collationné L u t t o n ,
Signé D U F R A N C.
E t le Samedi fept Mars mil fept cent quatre-vingt-neuf à la
levée de la Cour, lefdits Imprimés ci-deffus énoncés , ont été
lacérés & bridés, par l'Exécuteur de la Haute-Juftice , au pied
du grand Efcalier du P a la is, en préfence de moi FrancoisLouis Dufranc, Ecuyer, l'un des Greffiers de la Grand' Chambre
affifté de deux Huiffiers de la Cour.
Signé D U F R A N C .
A P A R I S , chez N. H. N y o n , Imprimeur du Parlement,
rue Mignon Saint André-des-Arcs t 1789.
�
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Factums Godemel
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Arrêt de la Cour de Parlement. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dufranc
Subject
The topic of the resource
censure
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catéchisme des Parlements
états-généraux
troubles publics
étudiants
presse
Description
An account of the resource
Titre complet : Arrêt de la Cour de Parlement, rendu les Chambres assemblées, les pairs y séant, qui condamne un Imprimé ayant pour titre : Lettre de M. C. F. de Volney à M. le Comte de S...T, et onze autres Imprimés sans nom d'auteur, à être lacérés et brûlés par l'Exécuteur de la Haute-Justice, comme séditieux et calomnieux.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez N.H. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1789
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0707
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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