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MEMOIRE
P O U
Me.
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Je a n - B a p t i s t e - G e r a u d
D r a p p e a
u , D ia c re , Héritier de
D e m o i s e l l e
C a t h e r i n e
F alié
s fa mere, &
ç o i s
- L o u i s
S ieu r
D
Fr a n
r a p p e a u
,
Bourgeois, Habitants de la Ville
d’Aurillac, Demandeurs ;
C
Me.
O
N
T
R
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G u y S a l v A g e , P r ê t r e , C u ré de la
P aroiffe de
G io u ,
D é fe n d e u r ,
néceffaire dansl’efpece d’une fubftitution
faite fous des conditions alternatives , que toutes les
conditions foient accomplies ? ou fuffit-il qu’une feule
arrive pour réalifer la fubftitution ? Telle eft la queftion
A
s t
-
il
�foumife-à la décifion de la Gour ; les faits (ont infi
niment îlmplesi
' . ..
F A I T .
& Marie Chartron étoient iœurs; celleci épouia Jean BeÎTon dont elle eut Anne B eilon ,
mere de Catherine Faliés 8t aïeule du Demandeur,
& Marie Bedon dont on parlera bientôt.
D u mariage de Jeanne Chartron avec Antoine
Andrieu, provinrent Pierre Andrieu décédé fans px)£
térité , & Marie Andrieu mariée avec G uy Salvage,
qui donnèrent le jour à Philippe & Marie Salvage.
Par ion teftament du 5 Mars 17 14 , reçu par Delon
Notaire, Jeanne Chartron légua, à titre d’inilitution,
à Philippe & Marie Salvage fes petits-enfants, une lé
gitime telle que de droit.
Elle inilitua G uy Salvage fon gendre , Ton héritier,
à la charge de rendre ion hérédité, iàns détra&ion de
quarte, a Tes enfants par égale portion, lors de leur
mariage ou majorité, voulant qu’après ion décès, il fut
fait inventaire de fes meubles , que le linge & la v a if
felle d’étain fuiTent mis dans un coifre, dont Marie
BeiTon fon héritiere fubilituée auroit la clef, pour les
conferver auxdits enfants.
Elle ordonna en outre, qu’en cas qu’un de fes petitsenfants vînt à mourir avant fa majorité, ou iàns etre
marié, le iiuvivant profitât de fon entiere hérédité j
' &f i tous deux venoient à décéderfans mariage, ou avant
leur majoritét Marie Bejjfbnfû t Jubflituée àfefdits petitsenfants ; & que ledit Salvage fon gendre jo u it pendant
fa vie y de la maifon ou elle habitoit , f tuee près la porte
de S, Etienne, de la boutique, jardin & des meubles
Je
a n n e
�& outils fervartt au métier de Teinturier ; toutes lejquelles
chofes, aufufd.it cas, reviendraient à ladite Marie Bejfon,
après le décès dudit Salvage.
Par Ton codicille du même jour, ladite Chartron dé
clara , que par-deiTus le contenu en ion teilament, &
au cas que Philippe & Marie Salvage enfants dudit
G uy Salvage & de ladite Marie Andrieu, viendraient
à mourir avant leur majorité ou fans être mariés , elle
donnoit audit G uy Salvage fon gendre, la fomme de
quatre cents livres payable après le cas arrivé.
G uy Salvage palÎa à de fécondés noces, dont eil
iÎïu le fieur Salvage Défendeur.
Marie Salvage furvécut de peu Jeanne Chartron
fon aïeule.
Philippe Salvage fut promu à la Prêtrife & pourvu
de la Cure de S. Sulpice de Montils, dans laquelle
il eil mort le 4 Janvier 1740.
Marie Beiïon là tante, lui aiurvécu, & a par con
séquent recueilli l’effet de la fubflitution qu’elle atranfmis à Catherine Faliés fà niece & ion héritiere mé
diate que le Demandeur repréfente..
G uy Salvage a joui juiqu’à ion décès, des biens de
Jeanne Chartron ià belle-mere ; & après lui le D é
fendeur profitant de l’ignorance où étoient les fleur
ÔC demoiielle Drappeau, de la fubilitution, s’y eil
maintenu. »
Il n’eil perfonne qui ne ioit imbu que ce n’eft
qu’après avoir épuifé les voies de p a ix , que l’on a
traduit le Défendeur en Jugement.
Il fera facile aux Demandeurs d’établir que Marie
BeiTon qu’ils repréfentent, a recueilli l’eiFet de la fub£titution dont il s’agit.
A ij
�4
M O Y E N S.
L Á volonté du teilateur eit la premiere de toutes
les L o ix; c’eil ion intention qu’il faut iuivre pour l’effet
de fes difpofitions & des conditions qu’il a jugé à
propos d’y ajouter. In conditionibus primum Locum
voluntas defuncli obtinet ; eaque régit conditioner, L .
i y yJ f de cond. & demonji.
C ’eil par les termes dont le teilateur s’efl ièrvi, qu’on
reconnoît cette volonté ; & fi ceux dans lefquels ia d it
pofition fe trouve conçue , ont un fens clair & précis,
il ne peut pas être queilion de .recourir à l’interpréta
tion , qui n’eil admife que lorfque les expreilions font
obfcures & ambiguës. Ubi nulla verborum ambiguitas,
non débet admitti voluntatis quœfiio.
On ne peut lire la claufe du teilament de Jeanne
Chartron , fans fe convaincre de la vocation de Marie
Beflon ' la teilatrice a fubilitué Marie Befion fa niece,
à íes petits-enfants ; f i tous deux viennent à mourir
fans mariage ou avant leur majorité ; audit cas & non
autrement, je jubjlitue à mefdits petits-enfants ladite
Marié BeJJbn mon autre niece ; la même difpofition
iè trouve répétée dans le codicille.
Ces deux conditions font féparées par la particule
disjonélive ou ; ce n’eil pas dans l’un & l’autre cas que
la niece eft appellée; c’eil dans l’un ou l’autre; rien
n’eil plus clair que le iens de ces deux particules & Sc
ou, dont l’une réunit & l’autre fépare ;
Ia teilatrice
ayant employé la particule o u , on doit l’entendre de
la maniere que la Grammaire & la L oi veulent qu’elle
foir entendue.
�Jeanne Chartron a voulu c^ue Mai ie BeiTon ia niece,
recueillît les biens qu’elle lui a iiibilitués, au cas que
fes petits-enfants vîniTent à décéder fans mariage ou
avant leur majorité ; & que dans l’un ou l’autre de ces
deux cas, elle fût préférée aux héritiers de fes petiisenfants ; c’efl-à-dire , au fleur Salvage fon gendre , &
aux enfimts d’une fécondé femme, qui font abfolument
étrangers à la teftatrice ; la teilatrice n’a pas dit : fi
tous deux viennent à mourir ians mariage & avant
leur majorité; mais, fi tous deux viennent à mourir
fans mariage ou avant leur majorité ; d’où il fuit que
les héritiers inflitués étant décédés fans avoir pris de
parti en mariage, quoique l’un d’eux ne foit mort qu’a
près la majorité, il y a ouverture à la fubilitution.
„ S’il y a ( dit l’Àuteur des L oix C iv iles, Liv. 3
„ des Teilaments , fe&. 8 , N. 2 2 ) , plufieurs condi„ tions jointes, de forte que le tellateur les impoiè
,, enfemble, il ne fuffira pas qu’il foit fatisfait à une
„ pour la validité d’une aifpolition qui dépendra de
„ toutes ; mais fi elle dépend feulement de l’une ou
„ de l’autre, l’événement de la premiere y donnera
,, l’effet qu’elle doit avoir. Si hceredi plures conditionés
,, conjuncïim datæ J în t, omnibusparendum ejl ; J i dij„ junclim , cuilibet, L. j , ff'de condit. injht.
Plufieurs textes de Droit confirment cette vérité.
L a Loi generaiiter, au Code de injütut. & fubjlit.
& refl. fub conditione fa clis, a introduit une excep
tion aux Loix générales qui regardent les conditions
alternatives.
Voici les termes dans lefquels cette L oi eft conçue;
Generaiiter fancim us,fi quis ita verba fa a cqmpo-
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fueritut edicat: Sifilius vel filia inteßatus vel intefiata,
vel fine liberis aut fine tefiamento , autfine nuptiis
decejferit ; & ipfe vel ipfa Liberos fufiulerit ,jiv e nup
tias contraxcnt, five tefiamentum fiecerit :firmiter res
pojjtderiy & non effe locumJubfiitutioni eorum, vel refi
titutioni.
S i enirn nihil ex his fiuerit fubfecutum, tunc valere
conditionem & resJecundum verba tefiamenti refiitui,
ut incertus fuccejfionis morientis exitus videatur certo
fubfiitutionis vel refiitutionis fine concludi.
Cui enirn. Jerendus efi intelleclus, f i fiorfitan tefia
mentum quidem nonfiecerit ypofieritatem autem habuerit,
propter hujufmodi verborum angufiias, Liberos ejus om
ni pene fruclu paterno defraudari ?
Viam itaque impiam obfiruentes, ut ne quis alius
deviet, hujufmodi facimus fanclionem, & hanc legem
in perpetuimi valiturani inducimus, tam patribus quàm
liberis gratam : quo exemplo edam aliis perfonis, licet
extranece f i n t , de quibus hujufmodi ahquid Jcriptum
fiuerit, medemur.
Cum autem invenimus excelfi ingenii Papinianum
in hujufmodi cafu in quo pater filiis fuis Jiibfiituit,
nulla liberorum ex his procreandorum adjectione habitd,
optimo intelleäu difpojuifi'e, evanefcerefibfiitutionem >fi
is qui fubfiitutione prcegravatus e fi, pater ejftciatur &
liberosfufiulerit, intelligentem non effe verifirmle patrem,
f i de nepotibus cogitaverit, talem jecijfe fubfiitutionem:
humanitatis intuitu hoc latius & pinguius interpretandum ejfe credidimus, ut &f i quis naturales filios habeat y & partem eis reliquerit vel dederit ufque ad modum
quem nos fiatuimus & fubftitutioni eos fubjugaverit,
�nulla liberorum eorum mentione facia : & h)c intelligi
evanefcere fubjlitutionem, liberis earn excludentibus, &
intelleclu optimo , his qui adfubjlitutionemvocantur obJiflente & non concedente ad eos earn partem venire,
Jed ad Jilios vel jilia s , nepotes vel neptes, pronepotes
vel proneptes morientis tranfmittente, & non aliter iubj-'
titutione locum accipicnte y niji ipji liberi Jine jujla jch
bole decejfhint, ut quod inter jujlos liberos Jancitum
ejly hoc & in naturales Jilios extendatur.
Quæ omnia & in legatis & JideicommiJJis Jpecidlibus locum habere fancimus.
Quoique cette Loi Toit rédigée d’une maniéré diffuie,
comme prefque toutes les Loix du C o d e , on ne peut
pas errer fur Ton véritable fens ; il eft évident que
c’eil la préférence accordée aux eniànts du grevé iur
tout autre fubilitué, qui en fait le fondement.
Pour l’entendre parfaitement, il eit bon de remar
quer que quelques Juriiconfultes s’attachant trop rigoureuièment aux textes du D r o it, fuivant leiquels ,
lorique les conditions ne font pas réunies, il iùmt que
l’une des conditions arrive, pour que la iubilitution
ait Ion effet, étendoient la décifion des L oix au cas
même où l’inilitué ou grevé laiifoit des enfants , &
penfoient que le fubilitué de v o it, à leur préjudice,
profiter du bénéfice de la fubilitution, contre l’avis
de Papinien.
L ’Empereur adopta la décifion de Papinien, nonfeulement en faveur des enfants légitimes des grevés,
mais même en faveur des enfants naturels qui ont été
inilitués ou fubftitués, lorfque ceux-ci laiiTent des enf?.its légitimes.
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Les anciens Jurifconfultes fe font accordés fur le
véritable fens de cette Loi -, ils ont penfé unanimement
qu’elle devoit être reflreinte au cas particulier dont
nous venons de parler.
Parmi les modernes, Ricard dans ion Traité des D ifpoiitions conditionelles, chap. 5 , N. 388 & iuivants,
a penfé que cette Loi eil générale , que les particules
disjonctives font devenues conjonctives dans tous les
cas par la diipofition de cette Loi •, ce qui paroi't d’au
tant plus furprenant, que le même Auteur obferve,
N . 3 8 3 , qu’il n’y a aucun exemple dans tout le D ro it,
dans lequel une difpofition qui fe trouve parfaite dans
les termes dans lefquels elle efl conçue, foit convertie
en une autre difpofition différente, pour donner aux
uns & ôter aux autres, contre les termes dont le te£
tateur s’efl iervi.
Quoi qu’il en io it, cet Auteur prétend que la decifion de cette Loi n’eil pas établie fur une coniidération particulière qui ne regarde que la faveur des
enfants ; mais fur cette confidération générale, que le
teilateur a eu prédilection pour l’héritier, en lui don
nant un titre qu’il a dû eflimer très - cher, puifque
c’efl lui qui le repréfente plus particulièrement après
ià mort.
O r , tous les Auteurs , fans en excepter F u rgo le,
conviennent que cette Loi ne préfente que quelques
exemples qui n’ont pas trait à une règle générale.
D ’ailleurs, indépendamment de ce qu’on demeure
convaincu en lifant cette L o i, qu’elle n’a pour baie que
la faveur des enfants de l’héritier, la coniidération que
le teilateur a pour l’héritier, ne prouveroit pas qu’il
a voulu
�a voulu préférer tout autre que lui à l’héritier qu’il lui
fubilitue dans un cas prévu.
On ne craint pas de dire qu’il répugne autant de
donner aux particules disjon&ives la force de copulatives ou conjonttives , que de donner à celles-ci la
force de disjon&ives ; elles ont chacune leur lignifi
cation & leur effet propre ; s’il eft naturel de s’en
écarter en faveur des enfants de l’héritier inilitué ,
cette limitation de la Loi generaliter qui a pris fon
fondement dans la Loi Cum avus i o z j f de condition& demonjîr. ne peut pas être étendue à tout autre
cas ; & la condition alternative doit demeurer dans ia
nature.
Il ell; apparent, continue Ricard, que le but prin
cipal du teftateur a été de conierver les biens aux
enfants de fon héritier , s’il mouroit fans tefler, comme
aufli de lui laiffer la liberté de difpofer, s’il ne vouloit pas mourir ab inteflat, ce qui produit deux vo
lontés différentes qu’il a joint au profit d’une même
perionne, & au fujet d’une même diljpofition, lefquelles
par conféquent doivent conjointement avoir leur effet;
d’où il conclut que c’eil la préiomption de la volonté
du teflateur & la f a v e u r de l’héritier, & non pas la
C O n f i d é r a t i o n de fes enfants qui ont donné lieu à la
déciiion de la Loi ; & que ce n’eil pas la condition
feule qui regarde les enfants, qui doit être prife con
jointement, mais auifi toutes les autres que le teilateur
a employées dans fa difpofition.
Cet Auteur ne s’eft décidé, comme l’on v o it, que
par des conjetures, pour fixer le fens qu’il donne à
la L o i, fans prendre garde qu’il attaque ouvertement
les regles meme qu’il invoque.
B
�ÏO
"• L ’on ne doit fe livrer aux conjectures, que' lor£?
que la volonté du teftateur eft incertaine: or, quelle
ambiguité peut-on trouver dans une difpoiition par
laquelle le teftateur fubftitue à fon héritier, dans le
cas qu’il décede avant fa majorité, ou au cas qu’il
décede fans fe marier?
Que par un tempérament digne de la fageffe des
L oix & des vues même du teftateur, on regarde la
fubftitution comme non écrite, lorfque l’héritier inftitué laide des enfants, parce que l’on préiiime que le
teftateur les auroit préférés, & n’a fubftitué que parce
qu’il a ignoré qu’il en exiftoit, ott n’a pas prévu qu’il
en naîtroit ; mais il ne fuit pas de-là qu’une disjonctive puiiTe jamais paifer pour conjon&ive, & qu'on
doive faire dans tout autre cas la même violence aux
expreiîions qui marquent l’intention du teftateur.
L ’on rend à cet Auteur l’hommage qui lui eft dû \
mais s’il s’eft furpaffé dans la matiere des donations
e n tre -v ifsil eft fort au deifous de lui-même dans les
autres traités qu’il nous a laiiTés. On convient générale
ment qu’il n’a lait qu’ébaucher la matiere des fubftitutions; & ion Annotateur a été forcé d’avouer que l’opi
nion de Ricard, fur notre queftion, eft plus conforme aux
maximes des Pays coutumiers, où les fubftitutions font
moins favorables qu’aux maximes du pays de Droit écrit.
Au refte, à l’autorité de Ricard nous oppoferons cel
le de M. Henris.
L ’interprétation que ce dernier nous donne de la
même L o i, Tome 2 , L. 5, Q. 4 , Ed. de ijofty porte
la convi&ion dans les eiprits.
Après avoir obièrvé la différence qui fe rencontre
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entre les Loix -du D igefte & celles du C o d e , que c e t
les-ci font prefque toujours obicures & ambiguës, & le
plus fôuvent ne’ réiolvent de doutes que pour en faire
naître de plus grands , il raifonne ainfi :
« ,, Quoique lTEmpereur parle généralement , il fait
plutôt une exception à la réglé générale, qu’il n’en
,, établit une.
„ En matiere de conditions, il faut faire cette difFé„ rence entre les conjonctives & les alternatives ou di£*
„ jonctives ; qu’au lieu que par les conjonctives , il faut
„ qu’elles foient toutes accomplies ; au contraire, aux
>, alternatives, c’eil afTez que l’une arrive, comme il
„ efld iten la Loi 5 ,jfd e condit. inflit. S i plures con,i Jditiones conjunclim datœJ in t, il faut attendre l’évé,, nement de toutes : Scdji Jint datœ disjunclim , com
b in e elles fubfiflent fé parement, c’eil aifez que l’une
„ arrive.
„ Si le teflateur a d it, qu’en cas que l’héritier meure
„ fans enfants & fans tefler , il fubllitue ; il faut, pour
j, donner ouverture à la fiibilitution , & que l’héritier
„ ne laifïe peint d’enfants , & qu’il ne faife point de
,, teflament ; mais fi le teflateur a dit qu’il fubflitue
„ en cas que l’héritier meure fans enfants ou fans tefler,
„ il fuffit qu’il n’ait point fait de teflament, pour don„ ner lieu à la fubftitution , comme étant faite en l’un
„ ou l’autre cas.
„ Donc en matiere de fubflitution , c’efl le propre
„ des claufes ou conditions alternatives , que l’une ou
„ l’autre ait lieu ; comme au contraire , c’eil le propre
» des conditions copulatives , & qu’une même particule
» üe & joint enfemble, de ne pouvoir être féparées,
�& de n’opérer aucun effet qu’en cas du concours de
„ toutes.
„ C ’eil à quoi, continue-t-il, Juilinien n’a pas voulu
,, déroger abiolument ; & nonobilant ce qu’il a dit en
„ ladite Loi generaLiter, les particules & , vel, aut,
,, ne laiflent pas de demeurer dans leur véritable figni„ fication , iàns qu’il foit permis de s’en départir ; au„ trement il feroit permis à un chacun de les inter„ prêter à fafantaifie, ce qui cauferoit de la confuiion)
„ il faut donc tenir communément que la conjonctive
„ iùbfiile pour une conjonctive, & que la disjondive
,, doit opérer pour unedisjon&ive. Quorsiim enimverba,
„ niji ut demonjlrent mentern dicmtis ?
„ Voici l’exception que Juilinien a voulu apporter:
„ il a confidéré que le teilateur ayant dit : fi l’héritier
,, meurt fans enfants , ou fans faire de teilament, je
,, lui fubilitue un tel, il peut arriver qu’il laiiTe des en„ fants &. ne fàffe pas de teilament ; ôc que par ce
„ défaut, & ne s’attachant à la rigueur de la lettre, la
„ fubilitution feroit ouverte par la réglé in alterna„ tivis veldisjunclivisfujficitunam conditionemevenijje:
„ or comme cela feroit trop rude, & qu’il n’y a pas
„ d’apparence que l’héritier laiifant des enfants, le te£
„ tateur ait entendu que le fubilitué leur fut préféré,
„ l’Empereur a cru devoir faire cette exception, en
„ faveur des enfants, en établiifant qu’en ce cas la di£
„ jondtive aura le même effet que la conjonctive ; &
„ qu’ayant dit : S i fine liberis vel fine tejlamento, c’eil
„ la même chofe que s’il avoit dit : Si fine liberis &
yyfne teflamento ; ôc comme cette converfion fe fait
„ contre la propriété des mots, ce n’eil auiîl qucfavore
�,, liberorum, qu’elle a été établie ex prefumpta mente
3) teflatoris ; n’étant pas à croire que le teilateur ait eri~
,, tendu préférer le fubilitué aux enfants de l’héritier;
,, prudens enim conJiLium teflatoris qui nonJolumhœre„ dem, Jed etiam ejus Liberos prœtulit jubflituto. L. Lu„ dus , jf. de hœred. inflit.
„ Mais comme cette exception à la réglé commune
„ n’a été introduite qu’en faveur des enfants de l’hé» r(irjef> & que cette converfion des particules , n’a
„ ete introduite qu’afin que la condition ne iubfiilant
» Pas Pour alternative, les enfants ne fuiTent pas .exclus
„ par le fubilitué; auili s’enfuit-il que leur faveur ceflant^
,, c eil-a-dire, l’héritier n’ayant point d’enfants, les con„ ditions fubfiflent pour alternatives, & la disjon&ive
„ pour disjondive en faveur du fubilitué.
„ M. Henris cite une foule d’Auteurs pour fbn opi„ nion ; conclut d’après eux , que la Loi generaliter ,
„ ne doit s’entendre qu’en faveur des enfants de l’héritier.
„ B re f, cette condition J i fine liberis, appofée en„ tre ou après d’autres conditions négatives & alterna„ tives , n’opere une conjonétion contra propriam vim
,, verborum, qu’en confidération des enfants, pai une
n préiomption favorable & tirée des ientiments que la
nature nous infpire, parce qu’il faut croire que le
teilateur n’ayant fubilitué à fon héritier qu’à défaut
„ d’enfants, il eil cenfé les avoir préférés ou iùbilitués;
r cela fe fait pour éviter une chofe abfurde, une in„ juilice évidente ; qu’en ce cas , l’équité l’emporte,
„■& l’intention préfumée prévaut aux paroles.
, Par exemple, dit-il,
fans nous écarter de notre
„ L o i, fi latÆ/iilitution étoit conçue en ces termes: Si
�x4
„ fîlius meus moriaturjine Liberis velJine nuptiis , eut
„ fin e tejlamento:Sans doute qu’à s’attacher aux mots
,,*& à la rigueur , l’une de ces conditions devroit donner
ouverture à la fubilirution ; de iorte que quoique
„ l’héritier eût des enfants , s’il étoit venu à décéder
„ fans avoir tefté ,1e iubiiitué feroit appellé, à l’excluj, fion des enfants; y ayant donc en cela de l’inju£
tice & de l’abfurdité, pour l’éviter & fe conformer
au'ièns commun, il a fallu néeflairement d’une di£^r:jon6Hve‘ éh faire une çonjcn& ive,'& forcer les mots
■,-pour s’accommoder à la; volonté Jdu tefiateur.
■„ Mais dans la même,efpece s’il n’y a qu’à diiputer
„ le s deux autres con d itions,^ fine nuptiis veL fine
¿tejlam ento, & que l’héritier grevé vienne à fe marier,
„ mais; décede fans faire aucun teftament, pourquoi
„ voudra-t-on en ce cas, faire violence aux mots, &
„ d’une alternative en faire u n e copulative fans aucune
5Î néceflité & fans raifon apparente ? Qu’importe-t-il
„ que l’héritier de l’héritier emporte les biens, ou que
ce foit le fiibilitué ? N ’y ayant donc rien d’injuile
j, ni d’abfurde, & au contraire la condition du fubilitué
„ étant la plus favorable , pourquoi voudroit-on fe
„ départir au propre fens des termes, & pourquoi ne
pas laiiTer les conditions dans leur lignification na
tu r e lle ?
„ Il fout donc conclure que Juitinien n’a entendu
„ faire ce changement des conditions alternatives en
„ copulatives, que parce que la condition Jine liberis,
„ s’y rencontre, & en faveur des enfants : il s’en eft
nettement expliqué lu i-m tm e;& pour rendre raiion
9} de fa décifion & en expliquer le véritable motif, il
�,, fuffit, de pefer ces termes: Cuienim ferendus.ejl in-{
„ teLleclus sJi forfait quideni teflamentum non fecerit ,
„ pojîeritatem aûtem habuerit, propter hujufmodi.yer-^
n borum angujlias Liberos ejus omnifruclu paterno penè
,, defraudari ? Après quoi l’Empereur ajoute : Vifrïh
„ itaque impiam objlruentes ; & dit qu’il établit une
„ réglé qui fera auili-bien reçue des peres que des
j, entants , & de laquelle ils feront également fatisfaits.
„ Quelle peut être cette efpece d’impiété que l’Emj? pereur veut prévenir, fi ce n’efV l’injure faite aux
enfants de l’heritier, s’ils étoient exclus par le fubflitue, par la rigueur d’une ou de deux conditions alternatives ? Leur confidération ceffant , où peut fe
,, rencontrer cette impiété? E t qu’importe qui iuccede?.
5, Ou plutôt en l’efpece que nous traitons (V eit toujours.
„ l’Auteur qui parle) n’e ft - il pas plus jufte qu’u n i
„ parente de la teilatrice recueille fes biens, qu’un
étranger? Ainfi fi Juftinien n’avoit reflreint fa peniée
„ a la iêule faveur des enfants de l’héritier inititué;
loin d’aller au-devant d’une injuftice, il l’auroit plutôt établie.
„ I>u-moins il s’écarteroit du but qu’il s’eft j>ropoie;
car il eft certain que chacun eft c e n f é préférer le^
„ liens; 8t que cette inclination naturelle qu’on a pour
„ fon propre fan g, efl commune en tous les hommes
Les raifonnements de ce favant Magiflrat les feuls
fans doute que l’on puifTe faire adopter à l’efprit & au
cœur difpenferont d’entafler de nouvelles autorités.
Qu’il loit permis cependant d’en rappeler deux parmi
celles qu’il nous indique lui-même.
. Charondas, qui a expliqué la .Loi generaJiter de la
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même maniéré, enfeigne qu’elle efl tellement fondée
fur la faveur des enfants, qu’elle ne peut avoir lieu ,
finon au cas que l’héritier en ait laiiTé j que ce n’eil
qu’à leur conlidération que le fubilitué eil exclus , &
que pour l’exclure on tait violence aux termes ; que
n’y ayant point d’enfants , les conditions alternatives
doivent demeurer en leur force ; & qu’en ce cas nulla
Jît converjio altemativœ in conjuncîivam , & rapporte
un Arrêt qui l’a jugé.
Fernana , qui a fait un Commentaire particulier fur
notre L o i, fuppofe qu’un pere qui ayant deux enfants,
en fait l’un héritier, & fubilitué l’autre , fi l’héritier
décede fans enfants ou fans teiler ; & réfout que n’ayant
point eu d’enfànts, encore qu’il ait teilé, la fubilitution
doit avoir lieu ; le fubilirué, dit-il, eilappellé ious une
condition alternative ; il fuffit donc qu’il y ait une par
tie qui ioit vraie ; il ajoute que l’alternative ne fe chan
geant en copulative quefavore liberorum, comme l’Empereur l’a allez déclaré , c’eil un cas fpécial que l’on ne
pe.it pas tirer à conféquence; 8c puifquec’eil en taveur des
enfants que ce changement fe fait, il ne peut avoir lieu, à
contrario fenfu, lorfqu’iln’ya point d’enfants; il faut en
demeurer à la réglé commune pour les autres cas; c’eilà-dire, que la faveur des enfants ne s’y rencontrant pas,
il faut que l’alternative demeure en fa force & faiTe ion
office, n’y ayant point de perfonne pour qui l’on puiiTe
lui faire violence ., & au contraire la préfomption de la
volonté du teilateur étant plutôt pour le fubili tué, que
pour celui au profit duquel l’héritier a difpofé ; car de
aire que le Légiilateur, en parlant du cas où il y a
des enfants de l’héritier, n’a fait que montrer un exem.
�%7
t pie, cela ne tombe pas Tous lesfens', puifqu’^1 a fr|ouvent répété ce cas, & que leur faveur cellant, on ne
. voit pas d’autre motif pour lequel iL fût* néçeffaire de
forcer les paroles, & convertir une alternative^en
_copulative.
•
* '•
* ,1 1 eil bien fingulier que le fieur Salvage prétende
que M. Henris s’eit borné à prouver que la Loi generaliter a reitreint ion opinion au cas ou le fubilitué eil
deicendant du teflateur, attendu que dans l’efpece pour
laquelle il a écrit, c’étoit un des enfants du teftateur qui
réclamoit la fubilitution.
M. Henris ne diflingue pas file fubilitué eil defcendant du teilateur, ou s’il n’eil qu’un parent collatéral,
&. refout indiiiinélement que l’exception d e . la Loi
gerceraliter y?* été introduite qu’en faveur d e s enfants
de l’héritier inilitué ; que s’il n’en a point, la fubilitution doit avoir fon eifet.
^
On avoue que dans l’efpece qui a donné l i e u à, ia
diilertation, le iubilitué étoit deicendant du^teilateur j
mais ce n’efl pas l’efpece qu’il faut confidérer., mais ce
qui fait le fondement de ion avis qui eût été le même
à l’égard d’un collatéral, puiiqu’il fait voir que la loi
n’a dérogé à la regle commune qu’en faveur des enfants
de l’héritier
Bretonnier annotateur de M. Henris , témoigne
affez dans iès oblervations fur la même queilion, qu’il
eil du même fentiment. ;
On ignore s’il a dit ,1 e contraire dans, quelque
coniùltation ; mais l’on préfume que l’efpece étoit
différente, ou qu’il s’eil décidé par d’autres motifs.
, On croit n’en devoir pas dire, davantage pour écarter
le Tuifrage de Ricard, ;& en faire fentir, l ’abfurdité.
C
1............... ...
�Comme F ùrgolè, qu’il a entraîné dans ion erreur,
ti'a écrit que pour le Parlement de Touloufe, nous nous
Bornerons à lui oppofer Mrs. D olive, M eynard, L a
roche , &c.
L e iieur Salvage invoqueroit en vain la jurifprudence. L ’Arrêt unique du 10 juillet 1 6 5 5 , rapporté
¡par SoefVe, tome I , Cent. 4 , chap. 9 7 , & par Ricard
a l'endroit cité, a feulement jugé qu’en matiere de
fubilitution , la condition Ji fine Liberis, fe rencontrant
avec une ou plufieurs autres conditions, il fuffit qu’une
des conditions ait été accomplie*, pour empêcher l’effet
"de la fubilitution, ce qui différé de notre efpece. L a
juriiprudence eft conforme à l’avis de M . Henris.
On peut voir l’Arrêt cité par Charondas*dans iès
Réponies, liv. 7, chap. 16 1 , ôc liv. 10 , chap. 85 ,
qui a rejeté la prétendue diflin&ion entre le fiibflitué
qui eft parent collatéral, & celui qui deicend du teflateur, & a jugé que l’un comme l’autre, ne peuvent
•ctre exclus de la fubilitution que par les entants de
l’H éritier inftitué.
Les Auteurs du Parlement de Touloufe en rappor
tent une foule d’autres femblables.
C ’eil auiïî ce qu’avoit jugé la Sentence du Bailli
de .Montbrifon, qui donna lieu à la differtation de
M . Henris : fi elle avoit été attaquée par la voie de
4 ’appel, cet Auteur n’auroit pas manqué de le dire.
Ainfi donc la faveur du fubflitué, l’intention de la
teflatrice, les loix, les interprétés & la jurifprudence,
ïe réuniffent pour affurer aux demandeurs la propriété
qu’on leur contefle.
Il efl démontré que la L oi generaliter ne reçoit
point d'application -â notre efpece.
�ip;
■Si Philippe Salvage s’étoit marié- & avoit laiiTé des
enfants, la iubilitution fe feroit évanouier quoiqu'il fu$
décédé avant fa majorité, conformément à la L oi
generaliter. La particule disjon&ive fe feroit convertie,
dans ce cas, en copulative *, mais la faveur des enfants
çeflant, il n’y a plus de prétexte pour l’entendre contre
fa fignification naturelle, ôc violer l’intention formelle
de la teilatrice.
Forcé de iè rendre fur l’exiilence de la fubflitution,
le fieur Salvage fe retranche à dire que Jeanne Chartron
n’étoit pas propriétaire de la maiion & du jardin qui
ont ete iubititues, qu’ils faifoient partie de la fucceilion
d’Andrieu ion mari. Il ie préfènte plufieurs réponfes.
i°. L e fieur Salvage n’a juilifié d’aucun a¿le a l’appui
de cette allégation -, au contraire, il paroît que la pro^
priété de la maifon en queilion appartenoit à Jeanne
Chartron, foit d’après l’énonciation portée par le teila
ment qui a été fait dans fa maiion , foit d’après l’inven
taire que le fieur Salvage fit faire après fa m ort, dans
lequel il eil dit expreHément que ladite maiion appar
tenoit à Jeanne Chartron, veuve d’Andrieu.
7 j°. L e fieur Salvage fe mettroit vainement en frais
pour éclaircir ce point. En fuppofant que la propriétéi
de la maifon en queilion eût appartenu à ion marij
& que Jeanne Chartron eût été chargée de la rendre
à ion fils lorfqu’il auroit atteint l’âge de vingt-cinq
ans, cette propriété auroit paiTé fur la tête de Jeanne
Chartron, loi t à caufe de la caducité de la fubflitution
réfultante de ce qi*e Pierre Andrieu étoit décédé en
minorité, foit parce que ladite Chartron étoit héritière;
légitime de fon fils -, on a même lieu de penfer qu’il y
avoit des difpofitions en fa faveur,
�3 °- Quand même Jeanne Chartron n'auroit pas été
propriétaire, elle auroit valablement iiibilitué des im
meubles qui auroient appartenu à iès petits-enfants :
en acceptant ia fucceiïion, ceux-ci n’auroient pas été
admis à réclamer contre íes difpoiitions ; il y a même
cette circonitance que Philippe Salvage vendit, eri
* 7 3 2 , une maiion iile dans la rue du Rieu, qui appartenoit conilamment à ladite Chartron.
. 4°. Enfin,-le fieur Salvage eil d’autant moins recevable à propoièr cette objection , que G u y Salvage
ion pere, n’a joui des biens de ladite Chartron qu’en
vertu du teilament qui contient la iubilitution, ôt
que ne tirant fon droit que de ce teilament, il n’eil
pas recevable à équivoquer fur les difpofitions qu’il
renferme.
L a derniere obje&ion du fieur Salvage, la feule
fur laquelle il paroiiTe infiiter, coniiile à dire que
l ’a&ion des demandeurs eil prefcrite. Suivons-le dans
cette nouvelle illufion.
* Il oppofe que la fubilitution a été ouverte le 24
Janvier 17 4 0 , jour du décès de Philippe Salvage;
qu’à cette époque, Marie BefTon a pu & dû former fa
demande en ouverture de la fubilitution ; que s’étant
écoulé plus de trente ans de iilence, le droit de Marie
BeiTon & des demandeurs fe trouve preicrit.
Il avoue qu’il pourroit y avoir du doute relativement
à la maifon dont G uy Salvage avoit la jouiiïànce juiqu’à
fon décès ; mais il ajoute que fi ledit Salvage en a
joui jufqu’en 1748 , ce n’eil pas en vertu du teilament
de Jeanne Chartron, mais uniquement en vertu d’une
rétroceflion que lui fit, en 1737 , Philippe Salvage
ion fils, des biens qui lui appartenoient du chef de fa
�11
/nere, ià fœur-, fes aïeul & aïeule ; de laquelle il infere
que dans ce moment Gui Salvage avoit remis a ion fils
lç fidéicommis , & par conféquent Marie Befibn auroit
pu agir. Hâtons-nous de le torcer dans ce dernier re
tranchement.
'
Déjà il n’eil pas vrai que l’uiufruit de G u y Salvage
fut borné à la jouiflarice de la maifon en queilion il
embrafloit auiTi la jouiiTance de la boutique, du jardin,
du mobilier , & outils qui forment l’objet de la fubilitution.
•-v-Cet ufufruit ayant été légué par le même teilament
qui contient la iubilitution , il fuit que les droits de
G uy Salvage & ceux de Marie Beiïon émanoient du
meme titre, & n’avoient qu’une même origine.
¿ ’ G u y Salvage a reconnu l’exiilence de la iubilitution
au cas prévu par la teilatrice, que íes petits - enfants
viendroient à décéder Jans mariage ou avant Leur ma
jorité ; d’après cela, il a lui-même fait procéder, après
le' décès de la teilatrice , à l’inventaire du mobilier
fubilitué ; il a déclaré dans cet iuventaire , que c’eil en
préience & avec Marie Beifon , héritiere iubilituée, &
pour exécuter la volonté de ladite Chartron fa bellemere portée par ion teilament, qu’il date.
' • Cet inventaire a déterminé invariablement leurs
droits,refpedifs , & la qualité qu’ils ont eu depuis, l’un
à l’égàrd de l’autre ; &, quoique l?efpérance du fidéi' commis àit été réalifée en faveur de Marie Beifon ,
&■fa vocation décidée au décès de Philippe Salvage [
elle ri’avoi’t^néanmoins à cette époque-, aucune attion
contre G uy Salvage , pour le contraindre au délaiffement1des biens' fubilitués ; parce que le titre qui lui
aifuroit _dès4 ors la propriété des biens, en coniervoit
�12,
l’ufufruit audit Salvage*, en forte que fi Marie BelTon ,
qui n’a jamais pu agir que contre G uy Salvage ,s ’étoit
avifée de le faire , elle auroit évidemment iuccombé,
ion droit étant fubordonné à l’ufufruit dudit Salvage.
C ’eifc une puérilité de dire qu’elle devoit agir pour
la conièrvation de la propriété; le teftament de Jeanne
Chartron étoit commun à l’un & à l’autre ; l’inven
taire auquel ils avoient fait procéder conjointement ,
l’un pour la conièrvation de ion ufairuit, l’autre pour,
la propriété qui lui étoit fubilituée conditionnellement
^écartoit entr’eux'toute efpece de fin de non-recevoir ,
& équipolloit, ou plutôt étoit une reconnoiiTance mu
tuelle & irrévocable de leurs droits , à laquelle aucun
d ’eux n’a pu déroger.
D è s - là il eft manifefte que la jouiÎTance qu’a eue
G u y Salvage des biens en queilion, ne peut iè rappor
ter , du moins vis-à-vis de Marie BeiTon , qu’au legs
d’uiuiruit des biens iîibilitués ; qu il n a pas dépendu
de lui de changer l a c a u f e de ia poifeilion , & de nuire
à la propriété de Marie BeiTon.
A la vérité, s’il sétoit écoulé 30 ans depuis le décès
de G u y Salvage jufqu’à la demande en défiftement,
l’a&ion de la demoiièlle Drappeau feroit prefcrite;
mais G uy Salvage n’étant décédé qu’en 1 7 4 ^ & ta
demande ayant été formée en 1 7 7 7 , il n’y a pas le
temps requis pour la prefcription.
Inutilement G uy Salvage avoit-il eu la précaution *
de fe faire céder par fon fils, par un a&e de 1737 que
l'on ne voit pas, les droits qui lui étoient échus du
chef de fon ayeule. En fuppoîànt que cet a&e exifte,
le fils n’a pu tranfmettre au pere plus de droit qu’il
n’en ayoit ; or il eil évident qu’il n’étoit que proprié
�.
*3
taire conditionnel des biens en queltion, & n’a pu en
difpofer par conféquent, a u préjudice de la fubilitution.
Cette vérité n’à pas beioin d’autre preuve.
Si Philippe Salvage avoit quelque droit fiir les biens
en queilion de fon chef, le défendeur peut les exercer ;
on le réfer ve de les contredire: mais les a<5les pailés
entre le pere & le fils, peuvent d’autant moins être
oppoiés à l’héritiere fubftituée, qu’il n’en a jamais été
notifié aucun à Marie BeÎfon, laquelle, par conféquent,
n’a pas eu de motif pour agir, & n e pouvoit, comme
on 1 a déjà obfervé, le faire utilement qu'après le décès
dudit Salvage, c’efl-à-dire, après Textin&ion de ion
ufufruit.
On obferve même que les ailes collufbires qui auroient été foufcrits entre le pere & le fils , pour frau
der la fubilitution, ôc enrichir le fruit d’un fécond ma
riage , fourniroient une circonftance de plus pour ren
dre le fieur Salvage défavorable.
A défaut de plus légers prétextes, le fieur Salvage
a cherché à exciter la commifération des Magiflrats,
en infinuant que les objets compris dans la fubilitution
formoient fa principale reflource.
\
Cette confidération feroit aifez indifférente ( quand
«lie feroit vraie), pour la décifion de la caufe. i l n’en
feroit pas mieux fondé à retenir des biens que Jeanne
.Chartron avoit fubflitués à Marie Beifon : mais pour
montrer qu’il en impofe en tout point, on croit devoir
rappeller qu’il eft propriétaire d'une maifon, jardin &
autres fonds dans un des Fàuxbourgs de cette ville,
qu’il lui en appartient une autre auprès de celle qui
eft fubflituée.
L e fieur Salvage eft d’ailleurs pourvu de lai Cure
�24
de Giou, qui eft plus que fuffifante pour fournir aux
befoins d’un Ecclefiaftique qui vit felon les maximes
de l’Evangile.
Concluons, en nous réfumant, que la fubflitution
écrite dans le teftament de Jeanne Chartron, en faveur
de Marie B effon , a été ouverte par le décès de Phi
lippe Salvage, fans avoir été marié, quoiqu’il eut
atteint fa majorité ;
‘ Que la fubftitution comprend la maifon , boutique ,
jardin, défignés par le teftament, foit qu’ils ayent
appartenu en totalité à Jeanne Chartron, ou qu’elle
n’ait été propriétaire que d’une partie;
Que l’action des demandeurs eft entiere;
Que fi , dans le fait, Jeanne Chartron étoit proprié
taire des biens fubflitués, ou fi l’on a approuvé fon
teftament, recueilli & difpofé de fes autres biens ; & fi,
dans le Droit, c’eft la volonté de la teftatrice qu’il faut
confulter dans l’interprétation de fes difpofitions, au
lieu de fe livrer à des differtations académiques pour
établir, c o n t r e la f a i n e r a i f o n , q u e l a p a r t i c u l e disjonctive doit être réputée copulative, & que la L oi generaliter, qui n’a envifagé que les enfants de l’héritier
inftitu é, doit être étendue à touts les autres cas, le
fy ftème du fieur Salvage, appuyé fur des fondements
auffi fragiles, n’eft pas éloigné de fa chute.
M O N S I E U R D E V I X O U Z E S , LieutenantParticulier , Rapporteur.
Me. A r m a n d , Avocat.
V i g ie r , Procureur.
A VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE,
Chez V e d e ilh ié , Imprimeur du Roi.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Drappeau, Jean-Baptiste-Géraud]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
de Vixouzes
Armand
Vigier
Subject
The topic of the resource
successions
droit écrit
doctrine
usufruit
substitution
Description
An account of the resource
Mémoire pour Me. Jean-Baptiste-Géraud Drappeau, diacre, héritier de demoiselle Catherine Faliès sa mère, et sieur François-Louis Drappeau, bourgeois, habitans de la ville d'Aurillac, demandeurs ; contre Me. Guy Salvage, prêtre, curé de la paroisse de Giou, défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Vedeilhé (Villefranche-de-Rouergue)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1780
1714-Circa 1780
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0714
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Giou-de-Mamou (15074)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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doctrine
droit écrit
substitution
Successions
usufruit
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53889/BCU_Factums_M0629.pdf
3d887f17cc25d0446e02274210e97129
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CONSULTATIONS
POUR
LES SIEURS DELSOL, FRERES;
CONTRE
LA
DAM E
*
VEUVE
LEUR
V IG IE R -D ’O R C E T ,
SOEUR C O N S A N G U I N E .
( V o ir , pour le fait et les questions élevées à ce sujet, la Sentence ci-jointe7 du 22
août 1808, intervenue depuis la première Consultation, et dont lesdits sieurs Delsol
sont appelants ; voir en outre (pour plus grand développement des principes consacrés
par l’Arrêt solennel du 17 février 1767, sur la transmissibilité du retour conventionnel)
la copie ci-jointe du Précis qui a été imprimé pour lors, et auquel renvoient les
Consultations. )
PARIS,
DE
L ’I M P R I M E R I E
DE
1809.
MAME
FRÈRES.
�PREMIÈRE CONSULTATION.
F A IT S E X P O SÉ S.
L
e
.
S O U S S I G N É , auquel il a été exposé,
Q ue, par le contrat de mariage passé entre le sieur GabrielBarthélemi de V igier et la demoiselle Delsol de Volpilhac, en
1760 , à A urillac, le sieur Delsol père a donné à la future sa
fille , ce acceptante , et par avancement d’hoirie , les domaine
et terre Duclaux , en qu o iq u ’ils puissent consister, aux mêmes
charges et conditions que le délaissement lui en seroit fait et
adjugé , conformément aux demandes par lui formées aux re
quêtes du Palais; et, à défaut d’adjudication de ladite demande
en délaissement, il a donné à ladite future toutes les créances
qu’il avoit à exercer sur lesdits biens en capitaux et accessoires ;
Que , par le même contrat , ledit sieur Delsol père a en
outre donné à ladite future sa fille la somme de 10,000 liv .,
qui a été délivrée audit sieur futur époux qu’à l’égard du surplus de ses autres biens qui se trouveroient lui rester lors de
son décès, il a promis de n’instituer d’autres héritiers que
ladite future sa fille , sous la réserve de l’usufruit de ces
mêmes biens , qu’il pourroit cependant vendre et engager tant
a la vie qu’à la mort, et sous la réserve en outre de pouvoir disposer d 'une somme de 10,000 liv. , qui resteroit a ladite future,
s’il n’en disposoit pas j comme aussi à la charge par sadite fille
de payer 600 liv. de peusion à la demoiselle Lagarde, sa belle-
�.
.
.
.
m ère, si celle-ci survivoit à lui donateur; qu’enfin le sieur
Delsol père s’est réservé expressément (pour le cas où ladite fu
ture épouse décèderoit sans enfants, ou ses enfants sans des
cendants et sans avoir disposé valablem ent), le droit de
réversion , tant des biens donnés que réservés , sans qu’il
put être dérogé par sadite fille audit droit de reversion, par
aucune d isposition / n i autres actes à ce contrairesj
•Qu’en conséquence, le sieur Delsol père a cru pouvoir dispo
ser du droit de réversion qu’il s’étoit réservé, comme d’un droit
qu’il avoit in bonis , et faisant partie de son patrimoine , ainsi
qu’il résulte de son testament fait en 1780, annulé pour vice
de forme seulement, par lequel il appeloit son fils aine', et
successivement ses autres enfants, parôrdre de primogeniture, '
à profiter de ce même droit;
Que ledit sieur Delsol père , décédé depuis, a transmis né
cessairement à ses héritiers tous les droits, même éventuels,
dont il étoit saisi, et, par conséquent, le droit de réversion
qu’il s’étoit réservé expressément pour le cas du décès de sadite
fille sans enfants , et de ses enfants sans enfants , et qu’ainsi ils
ont l’espérance , le cas arrivant, de recueillir, comme effets de
la succession de leur père , les biens dont il a stipulé le retour
à son profit, c’est-à-dire non seulement ceux qu’il avoit donnés
irrévocablement sous la seule réserve du retour, sans même en
retenir 1 usufruit, mais encoi'e ceux qu’il avoit compris dans
l’institution contractuelle de sa fille, avec réserve de pouvoir les
vendre ou engager (même d’en jouir en usufruit sa vie durant),
et que cependant il n’a ni vendus ni engagés ;
�( 3
A vis y relatif.
que les enfants et héritiers Delsol sont saisis de
tous les biens et droits dont leur père est décédé saisi, et qu’en
cette qualité ils ont droit, la condition du retour arrivant, à
tous les fonds et créances qu’il a pu donner à sa fille en la
m ariant, tant ceux par lui donnés irrévocablemeut que ceux
pour lesquels il l’a instituée son héritière contractuelle, c’est-àdire même à ceux desdits fonds et créances qu’il s’étoit réservé
de pouvoir vendre ou engager, et que cependant il n’a ni ven
dus ni engagés 5
Q u’en conséquence lesdits héritiers, comme propriétaires et
créanciers conditionnels, sont fondés dès h présent, non pas à
intenter aucune action pour revendiquer les fonds en question,
ou pour exiger le paiement des créances dont il s’a g it, mais h
faire tous actes conservatoires de leursdits droits éventuels ( art.
1 180 du Code civil ) , notamment à requérir toutes transcrip
tions et inscriptions nécessaires dudit contrat de mariage , aux
bureaux de la conservation des hypothèques , dans les arron
dissements desquels sont situés les fonds en question, ou ceux
affectés à l’hypothèque desdites créances ; le tout à l’effet d’em
pêcher que leur sœur et autres possesseurs desdits fojids, ou
les débiteurs desdites créances', puissent préjudicier aux droits
éventuels de propriété et d’hypothèque des requérants; comme
aussi à défendre à toute demande qui seroit formée contre eux
à fin de radiation desdites transcriptions et inscriptions.
E
st
d ’a v is
�(4 )
O B S E R V A T IO N S .
P rincip es sur la transm issibilité des stipulations
conditionnelles.
Il ne s’agit pas ici cl un retour lé g a l, qui sans doute ne seroit
pas transmissible aux héritiers du donateur décédé avant son
ouverture.
C ’estpar convention, par stipulation expresse que le donateur
s’est réservé ce droit pour l’exercer, comme tous ses autres droits,
par lui-meme ou par scs ayants-causc, quels qu’ils fussent, le
cas de la condition arrivant.
A la vérité, ce n’est qu’une espérance jusqu’à l’arrivée de la
condition, du moins tant qu’il est possible que la condition ar
rive ou n’arrive pas) , e x stipulatione conditionali tantum
spes est debitum i r i , In st., §. 4 ? D e verborum obligationibus ; mais cette espérance est transmissible, eamque ipsani
spem in hœredem transmittimus ,• s i, priusquàm conditio
c x s t e t , mors nobis contingat, ibidem. E t la raison en est que
dans le's contrats la condition'a effet rétroactif au temps de
l’acte , quasijam contracta in prœteritum em ptione, Leg. 8,
iï. D e periculo et comrnodo rei venditœ y Leg. 7 8 , if. D e
verborum obligationibus ; Leg. 16 , ff. D e solutionibus et
lïberationïbus.
Ainsi, la condition une fois arrivée , la stipulation a le même
effet que si elle avoitété faite sans condition : Ciim enim sem el
conditio e x t it it } perinde habetur ac si illo tempore r/uo 'sti
pula tio interposita est, sine conditione fa cta es set, Leg. 11,
§. 1, ff. Q u i potiores. Car dans les stipulations on ne considère
�( 5 .)
que le temps où le contrat est l'ait: Quia instipulationibus tem
pus speclatur quo conlrahimus. Leg. 18 , vers. , F iliu s f a
m ilias, fF. D e regulis jui'is.
’ Enfin, il n’est pas nécessaire que la condition arrive pendant
la vie du stipulant : C iirn quis sub aliqud. conditione stipulatus f a e n t , posteà eæistente conditione hœres ejus agere
jjp test. In st., p. 20 , D e inutilibus stipulationibus.
‘
I ls ne souffrent aucune exception.
'
Cette règle ne reçoit aucune exception , pas même pour les
faits stipulés sous condition , quoiqu’ils pussent paroitre person
nels de leur nature: Generciliter sancim us omnem stipulationem , sive in dando , sive in faciendo , sîve~lïïïæta e x
dando et f a c iendo ihveniatur, et ad hæredes et contra luc
re de s transm itti, sive specialis hœredum fiat_nientio , sive
non. Leg. i 3 , Cod. D e contrahendd et com m ittendd stipulationey ca r, comme le dit Pedius , Leg. 7 , §. 8 , ff. D e
p a ctis : Plerum què persona pacto inseritur , non ut persoîiale p a c tu m fia t, sed ut demonstretur cum quo pactum
factum est.
A in si, Tliériticr n’a point à prouver que son auteur a voulu
stipuler pour lui j c est à celui qui le prétend exclu par la stipu
lation à prouver sa prétendue exclusion : Quamvis veruni
est quod qui ex cip it probare debet quod ex cip itu r, attamen
de i p s o d u n ta x a t, at non de hœrede ejus convenisse p eti
tor, non qui e x c ip it probare-debet. Leg. 9, Si. D e probationibus etprcesiitnptionibus. E t l’on décidoit en conséquence
que, le fils de làmille qui a stipulé sous condition ayant été en- .
suite émancipé, l’action appartient au père, quoique la condition
�( 6 )
soit arrivée depuis l’émancipation. L eg . 7 8 , ff. D e verborum
obligationibus.
E n un m o t, comme le dit Jean-Jacques Schüts dans son
Compendium j u r i s , au titre D e pactis : Condiùo casualis
suspendit actûs p erfectio n en i, adeo ut ipsum ju s in sus
penso s i t , et tantum spes sit debitum iri, quæ tamen spes
in conventionibus hoc f a c i t , ut quis creditor d ica tu r} atque
res ipsius bonis annum eretur. . . . h inc apparet, pendente
conditioner aliquid subesse quod conventionem sustentât,
atque sic obligationem tanquam in utero materno latere ;
c’est un enfant dans le ventre de sa mère , q u i, une fois venu
au monde, est réputé né dès le moment de sa conception: Undè
com entiones çonditionales e x prœ senti vires accipiunt,
quod sechs est in legatis y ut itaque conventio conditionalis obligationem producat, conditio casualis omnino e x pectanda e s t . . . . conditione autem sem el e x is tente, perindè habetur ac s i ab initiopurè com entum esset, et statim venit ac cçdit dies.
P a s même pour les contrats bienfaisants. A rrêt solennel
¿1 ce sujet de 1767. '
Ces décisions s’appliquent non pas seulement aux conditions
s t i p u l é e s dans les contrats intéressés,
mais aussi £1 celles des
contrats bienfaisants.
•
Cependant La Rouvière a prétendu le contraire dans son
du droit de retour, liv. i c% chap. i 3 , où il veut que le
T
r a
i t e
retour stipulé par les donateurs, pour le cas du deces du dona
taire sans enfants, ne soit pas transmissible aux héritiers du do
nateur, décédé, avant) l’événement de la condition; et) il se fonde
�( 7 )
sur la loi Quod de pariter } ff. D e rebus dubiis , qui, dans le
fait, ne décide qu’une question de survie (comme le soussigné
l’a démontré dans la seconde partie de son précis , imprimé en
176 7, pour le sieur Réné Louis, l’héritier et consorts, contre
le marquis de Mesme, appelant de sentence rendue au parc
civil du Châtelet de Paris , le 29 juillet 1766, après cinq au
diences.)
«
Mais, comme l’a démontré pareillement le soussigné dans la
même partie de son précis, la loi C a ïu s , 45 , ff. Soluto matri
monio , et la loi Avia , 6 , au Code , D e ju re dolium , déci
dent au contraire que le retour conventionnel est transmissible
aux héritiers du donateur , quoique celui-ci soit décédé avant
l’événement de la condition sous laquelle il avoit stipule le re
tour à son profit. E t c’est aussi ce qui a été jugé en grande connoissance de cause, dans la première cause du rôle d’après la
Chandeleur, par arrêt solennel du parlement de Paris , c n j a
grand’chambre, le 17 février 1767, qui confirme ladite senteiice.
Cependant la cause de l’appelant avoit été plaidée, tant au
Châtelet qu’au parlement, par M. Tronchet, et e etoit bien le
cas de lui appliquer ce que Virgile avoit dit d’Hector : S i Pergama d extrd jd efejid i pojkï&te&t', etiam hâc defensa fu is
sent. Mais malgré les grands talents et les prodigieux efforts
du défenseur, qui passoit dès-lors à j uste litre pour un des plus
profonds jurisconsultes de ce temps, tous les magistrats,'ainsi
que l’avocat général Barentin , qui portoit la parole, reconnu
rent facilement, comme avoient fait les p r e m i e r s juges, que
pour cette fois M. Tronchet s’étoit trompé ; qu’en effet la pré
tention de son client, qu’il avoit défendu avec tant de zèle,
étoit évidemment subversive des principes généraux sur la trans
mission de toutes stipulations conditionnelles, quelle étoit con-
�.
(8 )
.
traire à toutes les décisions des docteurs et des lois sur la trans
mission du retour conventionnel en particulier, et qu’enfin
elle étoit également contraire a la jurisprudence établie par tous
les jugements rendus sur cette question, comme le Soussigné
l’avoit démontré dans les trois parties de son précis imprimé.
L e s lois nouvelles n’y ont point déro ë é'
On a cependant tenté encore dans ces derniers temps de re
nouveler la même prétention, en soutenant que le droit de re
tour , stipulé par le donateur , ne pouvoit avoir lieu qu’à son
profit personnellement, c’est-à-dire autant seulement qu’il survivroit à l’événement de la condition du retour qu’il se réservoit; mais il falloit pouvoir mettre en avant de nouveaux pré
textes, autres que ceux qui ont été proscrits si solennellement
par l’arrêt du 17 février 1767.
On a cru les trouver dans la loi des 1 5 octobre et 14 novem
bre 179 2 , qui abolit toutes les substitutions non encore ou
vertes, dans l’article 896 du Code c iv il, qui les prohibe pour
l’avenir , et dans l’article g 5 i du même Code, qui prohibe
toute stipulation conditionnelle du retour des choses don
nées , au profit d’autres que le donateur se u l, et survivant
à l’événement de la condition qui doit donner ouverture au
retour.
lin effet, a-t-on dit, nul doute que l’on doit regarder comme
une véritable substitution la stipulation expresse ou tacite du
droit de retour au profit.-d’autres que le donateur vivant lors de
son ouverture : or les substitutions non encore ouvertes lors de
la publication de la loi des 25 octobre et i/j novembre 1792
sont abolies par cette loi ; donc toutes les stipulations de retour
�(9 )
au profit d’autres que le donateur, qui n’étoieni pas encore ou«
vertes à cette époque , sont pareillement abolies; et c’cst par
cette raison, a-t-on ajouté, que l’article t)5 1 du Code civil dé-,
fend de stipuler le retour au profit d’autres que le donateur sur
vivant à son ouverture.
Tels sont du moins les nouveaux moyens qui ont été em
ployés au tribunal de cassation par M. M éjan, défenseur de
M. Larregoyen contre la dame de Navailles, pour faire casser,
s’il avoit été possible, le jugement de la Cour d’appel de Pau ,
du 19 thermidor an 12 , confirmatif de jugement du tribunal
de première instance de Saint-Palais j rendu au profit de la
dame de Navailles.
Mais, sans avoir égard à ces prétendus m oyens, par arrêt
rendu le 1 1 frimaire an id , en la section des requêtes, au rap
port de ÏVL Borel, sous la présidence de M. Muraire , et qui est
rapporté au commencement du troisième cahier du Journal des
audiences du Tribunal de cassation , pour l’an 14— 1806 : L a
C o u r, attendu qu’on ne peut appliquer a u x droits de retour
Vabolition prononcée par les lois des 25 octobre et 14 no
vembre 179 2, a rejeté la demande en pourvoi dont il s’agissoit.
On faisoit cependant beaucoup valoir pour M. Larregoyen
la circonstance particulière que, dans le fait, il s’étoit écoulé un
7siècle d’intervalle entre la stipulation de retour et l’ouverture
de ce droit au profit de la dame Navailles, l’eprésentant les
sieur et dame Martin, dotateurs , dont elle, dcscendoit ; que
pendant ce temps la d o t, par eux donnée à leur fille à charge
de retour , avoit passé successivement dans sa descendance par
plusieurs mains, sans pouvoir être aliénée au préjudice du droit
de retour qui pourroit s’ouvrir un jo u r, ce q u i, suivant le dé-
�( 10 )
fçnseur du sieur Larregoyen, présentait tous les caractère» d’une
'véritable substitution graduelle dans la descendance de la do
nataire , et ensuite , en cas d’extinction de cette descendance ,
*en faveur de ceux qui pour lors représenteroient les donateurs.
Mais (comme l’a observé M. Daniels, substitut du procureur
général, portant la parole ) de ce que les substitutions testa
mentaires et même celles établies par contrat de mariage ont
été abolies, il ne faut pas conclure qu’il en est de même du droit
de retour. L e s dispositions textuelles de la loi (celles du
17 nivose an 2, art. 74? £t du 23 ventôse suivant, art. 5 ,)
s ’élèveroient, ajoute-t-il, contre cette con séquence, p u is
qu’elles conservent le droit de retour (en faveur d’autres que
le donateur) lorsque les substitutions étoient déjà abolies.
D ’a illeu rs, disoit-il encore, le droit de retou rn e p e ut être
assim ilé à une véritable substitution , lorsque le donateur
<
ex erce lui-m ême ce droit ; ce n’est donc pas non plus une
substitution quand il est e x e r c é par ses héritiers qui ne re
présentent avec lui que la m ême personne ; et de là il eoncluoit que- les juges, tant de première instance que d’appel ,
avoient fait une juste application des lois de la matière (comme
l’a reconnu la Cour par son arrêt de rejet du iG frimaire an i/j..)
E lle s ne lepouvoient même p a s , quand les r édacteurs en
auroient eu ïintention.
'
E n vain insisteroit-on encore, malgré le préjugé de cet ar•r£t, sur ce que l’article 951 du Code civil a prohibé toute
stipulation de retour au profit d’autres que le donateur vivant;
•en vain voudroit-on en conclure que les rédacteurs de l’article
■oui considéré comme des substitutions véritables les stipula-
�f II )
lions de retour qui ne profileroient qu’aux représentants det
donateur après sa m o rt, et qu’ainsi ils ont entendu abolir tous
les retours conventionnels qui n’auroient été ouverts , posté
rieurement au décès des donateurs, que depuis l’abolition des
substitutions.
Quand même il seroit possible de supposer aux rédacteurs un
pareil m o tif, et que ce m otif prétendu est le seul qui ait dé
terminé la rédaction de l’artiçle, l’intention qu’on leur suppose
ne feroit pas loi toute seule et par elle-même, puisqu’elle n’a
pas été érigée en loi ; car autre chose est la loi, et autre chose est
le m otif qui a pu déterminer a la proposer , comme, en fait de
dispositions testamentaires, autre chose est la disposition et au
tre chose est le m otif ( causa dandï) qui a pu la dicter : Ratia
legandi legato nqn çoheeret, le m otif de la disposition n’en
fait pas partie. L eg . 72 , p. G, ff. D e conditionilms et demonslrationibus et causis quos in testamento scribimtur. E t
tout ce qui résulterait de cette supposition, o’est que l’article
951 seroit indubitablement un de ceux qu’il faudra rapporter
lorsqu’il sera question de la révision du Code civil; car com
ment pourroit-on laisser subsister une loi dont le seul m otif au
rait été de donner lieu (sans cependant l’ordonner ) à l’abolition
de droits acquis par des conventions qu’autoriçoient les lois et
la jurisprudence antérieures.
Ajoutez que la loi de 1792, qui abolit les substitutions non .
encore ouvertes , est odieuse par elle-même , comme contraire
au droit commun établi de temps immémorial par toutes les
lois antérieures rendues sur ce lait, et sur-tout à cette raison
écrite, qui depuis tant de siècle^ qst reconnue par tous les.peu
ples policés comme le Code universel du genre humain. Aussi
n’a-t-elle pu être provoquée que par des circonstances impérieuses,
�( 12 )
seules capables de la justifier ; mais au moins ne doit-on pas
l’appliquer à ce qui ne porte pas la de'nomination expresse de
substitution, quand mcme il en auroit d’ailleurs le caractère
et PefFet sous une dénomination différente ; à plus\ forte raison
ne doit-on pas l’étendre à des stipulations conditionnelles qui,
saisissant à l’instant même le stipulant, et ses ayants-cause con
sidérés comme la continuation de sa personne, ressemblent
• aussi peu à une substitution que le jour ressemble à la nuit. E t
il faudra toujours en revenir à dire avec la loi que ce qui* a
été établi contre la raison et les principes du droit ne doit pas
être tiré à conséquence : Q uod contra juris rationem receptum est non est p roducendum ad consequentias. Leg. 14 ?
i 5 et 16, ff. D e le gibus ; Leg. 1 4 1 ? f f D e regulis ju ris.
Il y a plus 5c’est que quand mcme la nouvelle loi auroit aboli en
termes textuels, et très expressément, tous les retours conven
tionnels qni n’auroient été ouverts que depuis celle de 1792, con
cernant les substitutions, etaprès le décès des donateurs, une pa
reille loi, attendu le vice radical de rétroactivité dont elle se trouveroit infectée, ne seroit pas susceptible d’exécution en cette par
tie. En vain voudroit-on l’assimiler à la loi qui abolit les substitu
tions établies par actes antérieurs à sa promulgation, mais qui
n’étoient pas encore ouvertes pour lofs. Il y a bien de la diffé
rence entre l'ime et l’autre, car les substitutions qui ne sont que
des dispositions en faveur de tiers non présents ni acceptants
ne peuvent saisir l’appelé qu’au moment de leur ouverture , et
même autant seulement que ? appelé l’acceptera pour lors • jus
que-là le substitué n a aucun droit acquis ; et par conséquent la
loi a pu , sans porter atteinte à un véritable droit de propriété ,
abolir toutes les substitutions qui viendraient à s’ouvrir par la
.suite, quoiqu’elles fussent établies par des actes antérieurs.
�C i3 )
Il n’en est pas de même des stipulations conditionnelles. En
effet, quoiqu’il n’en résulte qu’un droit éventuel, une simple
espérance, comme le disent les Institutes, elles saisissent de ce
droit, à l’instant m êm e, le stipulant, et dans sa personne ses
ayants-droit, c’est-à-dire ceux qui le représenteront, quant à l’ob
jet de la stipulation, lors de l’événement de la condition sous
laquelle la stipulation a été faite et conservée ; or il résulte né
cessairement de là que toute loi postérieure qui aboliroit ces.
droits éventuels enlèveroit de fait au stipulant, dans la per
sonne de ses ayants-cause , des droits acquis dont ils étoient sai
sis, ce qui seroit une atteinte formelle au droit de propriété,
E n fin la lettre même de la clause en question nécessite
rait :, en tant que de besoin, la transm issibilité du retour
qui y est stipulé.
1
A ces considérations générales, toutes péremptoires, nous
en joindrons une particulière, et qui toute seule suffiroit, en
tant que de besoin, pour trancher la question; c’est que les
propres termes dans lesquels est conçue la stipulation condi
tionnelle de retour dont il s’agit assurent textuellement et
littéralement ce droit aux ayants-cause du stipulant, quels qu’ils
soient, comme au stipulant lui-même, le cas de la condition
arrivant; et que, de plus, les mêmes ternies sont formellement
exclusifs de toute substitution.
E t d’abord, que dans l’espèce le droit de retour soit assuré,
en tant que de besoin, par les termes mêmes de la stipulation
du donateur, à ses ayants-cause, comme au donateur lui-même,
ou plutôt au donateur dans la personne de scs ayants-droit, au
cas d’événement de la condition, en quelque temps que ce soit;
�( 4 )
c’cst ce qui résulte évidemment de ce que ce retour est stipulé,
nommément, pour les biens formant l’objet de l’institution con
tractuelle de la donataire; car assurément il étoit impossible que
le retour de ces biens particuliers qui n’étoient donnés qu’à titre
d’institution, et par conséquent sous la condition de la siirvie
de la donataire au donateur, s’ouvrit jamais pendant la vie de
celui-ci. E t puisque cependant il s’éloit réservé pourlui-même,
ernôrTpour aucun tiers après lu i, ces mêmes biens à titre de
retour conventionnel, il falloit bien que sa réserve pùt profiter
à ceux de ses ayants-cause et transmissionnaircs à titre universel
ou particulier q u i, lorè de l’ouverture du retour par lui réservé,
le représenteroient pour cet objet, comme ne formant à cet
égard qu’une seule et même personne avec lui. Autrem ent, sa
réserve n’eût pu profiter à personne en aucun cas, et la clause
_
auroit été illusoire.
E lle sitffiroit aussi toute seule pour écarter toute idée
de substitution.
Mais il est également sensible que le donateur en stipulant le
retourp o u rlü i, qt non pour aucun autre que lui-même, a néces
sairement exclu toute substitution; car enfin, comme le disoit
M. Daniels, portant la parole pour le ministère public en la
Cour de cassation, il est impossible de se substituer soi-même à
son donataire pour la chose donnée.
Il est bien vrai que le donateur qui stipule le retour pour
lni-mcrnc seulement, et non pas pour des tiers après ltii, le sti
pule aussi nécessairement pour ses ayants-cause et transrmssionnairos, soit qu’il doive en profiter de son vivant, soit que par
l’événement, le droit qu’il s’est réservé ne s’ouvre qu’après s^
�C 15 )
mort, à moins qu?il n’ait formellement excepté ce dernier cas
par sa réserve, comme par exemple en stipulant le retour à sou
profit, pour le cas seulement du prédécès du donataire.
Mais ces transmissiopnaires et ayants-cause ne forment avec
lui qu’une s.eule et même personne, qui a toujours été saisie
ab ihitio, tant de son vivant que depuis son décès, du droit
éventuel qu’il s’étoit réservé, comme de tous ses autres Liens,
sans attendre l’événement de la condition.
Ainsi, il est impossible de les supposer substitués par le do
nateur au donataire, et tout ce qui résulte de la réserve de re
tour stipulée par le donateur pour lui-même seulement, et non
pour aucun tiers après lui, c’est que la condition du retour ar
riv a n t, le donataire cesse d’être propriétaire de la chose don
née, c’est que la donation qui lui avoit été faite est alors réso
lue ou révoquée j c’est enfin que le donateur en la personne de
ses ayants-droit, en conséquence de sa réserve, se trouve avoir
recouvré sa propriété dont il ne s’étoit dessaisi que sous une con
dition résolutive qui a eu lieu -, c’est en un mot que cette pro
priété s’est réunie de plein droit à son patrimoine aussitôt l’ar
rivée de la condition résolutive apposée à la donation : or cer
tainement il est bien permis aux donateurs , nonobstant l’abo
lition de toutes substitutions, de stipuler qu’en tel ou tel cas
leurs donations seront résolues de plein droit, ab initip, comme
si elles u’avoient jamais existé, ou pour la suite seulement,
comme dans le cas de la révocation des donations pour cause de
survenance d’enfants', le tout, soit que la condition résolutoire
arrive de leur vivant, soit qu’elle n’arrive qu’après leur mort :
car les conditions résolutives produisent leur effet, lors meine
qu’elles n’arrivent qu’après la mort du stipulant , ce qui n’em
pêche pas que l’acte résolu n’ait subsisté jusque-là, s’il n’a pas
�(■ G )
¿téautrement convenu. L eg . i 5 , in princ., ff. D e in diem addictione. ) V o y e z aussi la loi finale au Code, D e legatis.
L e s observations précédentes sont égalem ent applicables
„ a u x institutions contractuelles sous conditions résolu
toires.
Il en est de même incontestablement des donations par forme
d’institution contractuelle, qui, suivant Pothier ,'Laurière, et
tous nos autres auteurs, ne diffèrent des autres donations en
tre-vifs qu’en ce qu’elles sont faites sous la condition particu
lière de la survie du donataire, et en ce que le donateur peut
encore , nonobstant la donation, s’aider des choses qui y sont
comprises , par contrats intéressés , tels que la vente ou l’hy
pothèque , mais non pas en disposer à titre graÔuit par dona
tions entre-vifs , institutions ou legs.
En effet, l’instituant contractuel doit aussi pouvoir stipuler
que sa donation sera résiliée ou révoquée, si telle ou telle con
dition arrive par la suite, n’importe en quel temps, et que ce
pendant elle aura jusque-là tout son effet; mais en ce cas les
biens qui en sont l’objet, comme étant retournés à la masse de
l'hérédité, et réunis au patrimoine du donateur, appartiennent à
ceux qui lors de l’arrivée de la condition résolutoire se trouvent
représenter ledit donateur ou instituant; etassurément ceux-ci ne
reprennent pas les biens en question en qualité de substitués au
donataire ; c’est le donateur lui-même, toujours existant dans leur
personne, qui reprend sa chose, comme ayant cessé d’appartenir à .
l’institué, au moyen delà résolution de l’institution, qui a eu lieu
par l’événement, comme le donateur ou ses représentants re
prennent la chose donnée, lorsqu’il y a survenance d’enfants,
�C *7 )
même posthumes, quoique le posthume ne soit né que depuis
son décès. Autrement, il faudrait dire, ce qui est absurde, que
le vendeur ou scs héritiers, rentrant dans la propriété de la
chose vendue par l’effet de la résolution de la vente, ou de lu
rescision du contrat, reprennent la chose vendue comme substi
tués h l’acheteur. E t il faudrait conclure de la ( ce qui seroit
encore plus absurde, s’il est possible), qu’attendu l’abolition de
toute substitution, il n’est plus permis de vendre sous condition
résolutive , ni de faire résilier aucun contrai de vente, non
plus que de disposer par donation, institution ou legs, sous
condition résolutive. Mais il faudrait aussi, avant tout, effacer
du Gode civil les articles g 53 , 960 , 962, 963 et 966, relatifs
à la révocation des donations de toute espèce pour cause de
survenance d’enfants , même posthumes, qui ne seroient nés
que depuis le décès du donateur; il faudrait notamment sup
primer ledit article 963, en ce qu’il suppose qu’au cas de la sur
venance d’enfants du donateur (avant ou après son décès ) le
retour s’opère , non pas, à proprement parler, par voie de ré
version h sa personne, mais bien plutôt par voie de réunion à
son patrimoine de tous les objets qui en avoient été distraits à
titre lucratif, et par conséquent au profit de ses représentants ,
si la réunion ne s’opère qu’après son décès ( les biens compris
dans la donation révoquée de plein droit r e s t e r o n t d a n s
LE P A T R IM O I N E DU D O N A T E U R , LIBRES DE TOUTES CHARGES
E T HYPOTHÈQUES DU CHEF D U D O N A T A IR E
, etc. )
(
Conclusion.
Tout ceci posé, nul doute que les représentants du sieur
Delsol, donateur, sont fondés à requérir, dès à présent, toutes
3
�( i8 )
transcriptions et inscriptions nécessaires pour assurer la conser
vation de leur droit de retour, a l’effet de prévenir les atteintes
qui pourroient y être portées par la donataire et autres posses
seurs des biens sujets, à réversion , ou par les débiteurs des
créances qui tiennent lieu de ces mêmes fonds.
On peut d’autant moins leur contester ce droit, que le retour
•dont il s’agit doit nécessairement s’ouvrir un jour îx leur profit,
ou au profit de leurs trùnsmissionnaires et ayants-droit, par le
fait du décès de la donataire sans enfants , attendu qu’elle n’a
pas eu d’enfanls , et que son âge avaneé ne lui laisse plus d’es
pérance d’en avoir.
Délibéré à Paris par le soussigné ancien avocat, ce vingt-sept
juin dix-huit cent six.
LESPARAT.
�( *9 )
SECONDE CONSULTATION.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , q u ia vu copie (ci-jointe)
du jugement reudu en première instance par le tribunal civil
d’Aurillac , le 22 juillet 1808 , entre les sieurs Dclsol Frères, et
la dame veuve Y igier d’Orcet, leur sœur consanguine; ensemble
les mémoires imprimés qui ont été présentés au tribunal pour le
soutien de leurs prétentions respéctives ;
>
, par les raisons déjà exposées en sa Consultation
délibérée le 27 juin 1806, ainsi que dans les observations par
ticulières sur chacun des motifs dudit jugenient, qui lui ont
■été communiquées, et encore par les autres raisons qui seront
déduites ci-après ;
Que les sieurs Delsol frères sont bien fondés dans leur appel
dudit jugement, en ce que par icelui la stipulation de retour.
'réservé par le sieur D e lso lp ère , dans le contrat de mariage
de la dame d’ Orcet, sa f i l l e , a été déclarée personnelle au
dit sieur D e lso l , et caduque par son p réd écès. Qu’en effet,
(bien loin que le retour réservé soit devenu caduc par le prédé
cès du sieur Delsol père, qui l’a stip u lé), il ne peut manquer
de s’ouvrir un jour et d’opérer la réunion effective à son patri
moine, des choses sujettes audit droit, au moyen de ce que la
dame d O rc e t, sa fille, qui n’a pas d’enfants, et qui est actuelle
ment hors d’àge d’en avo ir, décédera néccssaii’emeiit sans en
fants.
•
E s t d ’a v is
�( 20
Les premiers juges avoient encore élevé deux autres ques
tions, l’une (qui est la première des trois posées dans leur ju
gement) étoit de savoir quels biens avoient é té et pouvoient
être compris dans la clause de retour réservé par le sieur
B a sile D e ls o l, dans le contrat de mariage de la dame d’ Orcet sa f ille y et l’autre de savoir si, dans le cas de transmissib ilité , ce droit de retour ne se seroit pa s confondu
dans la personne de la dame d’ O rcet avec sa qualité d’héri
tière contractuelle de son p ère ; mais leur jugement n’a dé
cidé que celle de savoir si la réserve du retour dont il s’agit
étoit limitée à la personne du sieur Delsol, ou si au contraire
elle avoit pu être transmise à ses héritiers ; et c’est aussi la seule
dont la solution doit nous occuper , comme étant la seule qui
soit à juger sur l’appel de leur sentence.
Ce n’est pas qu’ils n’aient émis dans les attendus de leur ju
gement leur opinion sur les deux questions qu’ils ont laissées
indécises ; mais cette opinion n’y est présentée que pour justi
fier leur jugement sur celle qu’ils ont décidée : or l’appel dont
il s’agit ne peut porter que sur ce qui a été jugé effectivement,
quelle qu’ait pu être d’ailleurs leur opinion sur d’autres ques
tions restées indécises.
I. L a stipulation du retour par le sieur D e lso l père étoit
in rem , et pourquoi ?
Q uoiqu’il en soit au surplus, nous observerons d’abord à
cet égard que, si la stipulation dont il s’agit a été jugée per
sonnelle au stipulant, et par conséquent non transmissible, c’est,
comme l’exposent les premiers juges dans leurs motifs, parceque le sieur Delsol n’a n a s stipulé nommément pour scs ayants-
�( 31 )
'Cause, et sur-tout parcequ’en stipulant le retour pour le cas pré
vu par sa stipulation, il ne l’a pas réservé aux siens en particu
lier, comme l’a fa it, dans le même contrat de mariage , la mère
<lu futur en dotant son fils.
Mais c’est précisément parceque le sieur Delsol entendoit ré
server un retour vraiment réel, in rem , à la masse de son pa
trimoine , en faveur de tous ceux auxquels il pourroit importer
que le retour eût lieu , qu’il l’a stipulé en termes g én éra u x,
non exclusifs d’aucune classe de ses ayants-cause, et non pas
seulement pour sa personne ou les siens. Taie pactum non in
personam dirigitur y sed chm general e s i t , locum inter hceredes habebit. Leg. 4 1 , ff- D e pactis.
II. Conséquences qui seroient résultées de la personnalité
de sa stipulation pour lu i et les siens seulement.
• Dans le fait, le sieur Delsol père n’avoit pas alors d’autre en
fant que la future sa fille. Peut-être même supposoit-il, attendu
son état de viduité , qu’il n’en auroit jamais d’autre : or dans
cette supposition , si par l’événement le retour stipulé ne
s’ouvroit qu’àprès son décès, soit par le décès de sa fille sans en
fants, soit par le décès des enfants de sadite fille , après leur
mère, sans descendants d’eux, il ne pouvoit pluS être représenté
par aucuns siens proprement dits , mais seulement par des col
latéraux très éloignés qu’il ne connoissoit même pas (comme l’a
dit et répété souvent la dame Dorcet elle-même), ou par d’au
tres successeurs qu’il se seroit créés à lui-même par titres uni
versels ou singuliers.
" •
'
• •
Si donc il n’avoit stipulé le retour que pour lui et les sien s,
comme avoitfaitla mère du fu tu r, alors le retour n’auroit eu
�( « )
e
lieu qu’en sa personne , ou celle des s ie n s , c’est-à-dire pour
le cas seulement de sa survie, ou de celle d’aucuns des siens
à l’ouverture dudit droit ; et ce droit n’auroit profité à son dé
faut qu’à celui ou ceux d’entre les siens qui auroient existé pour
lors. Eux seuls en effet se seraient trouvés composer la classe ou
espèce particulière et déterminée d’ayants-causc, à laquelle au
rait été réservé le retour : o r, comme le dit la loi 80, ÎT. D e regulis ju r is y In toto ju r e , generi p er speciem derogatur ;
et comme le dit aussi la loi 99, p. 5 , iF. "De legatis 3° , Sem
p er species generi derogat. E n un m o t, nuls autres ayantscause du sieur Delsol stipulant n’y auroient pu rien prétendre ,
à quelque titre que ce f û t , ni comme héritiers légitimes ou àb
in testa t, mais non s ie n s , ni comme héritiers irréguliers ,
ni comme héritiers institués , ou légataires, soit universels, soit
à titre universel (c’est-à-dire pour partie) , ni comme léga
taires particuliers, ni comme donataires entre-vifs ou à cause de
m ort, ni comme cessionnaires à titre onéreux, ni enfin comme
créanciers chirograpliaircs ou hypothécaires, quelqu’intérêt que
ces différentes classes d’ayants-cause pussent avoir à ce que la
réunion effective à son patrimoine des biens donnés et réservés
leur en eût assuré la conservation; alors en effet, au moyen du
prédécès de ceux dans la personne desquels seulement le retour
auroit pu s’opérer , toute réunion au patrimoine du stipulant
seroit devenue impossible.
Ainsi le sieur Delsol se serait interdit, pour ce cas particulier,
toute espèce de disposition, tant des biens donnés que des biens
réservés, et par conséquent de tous ceux q u i, lors de son dér
' ces, auroient pu composer son patrimoine , quoique tous fus
sent stipulés réversibles, si sa fille décédoit sans enfants, ou si
les enfants de sa fille (lécédoient eux-mêmes sans descendants :
�( ^3 )
or assurément, le cas arrivant que sa fille décédât après lui sans
enfants (comme il arrivera bien certainementJ, ou que les en
fants de sa fille décédassent après lui et leur mère sans enfants ,
comme il étoit alors très possible, il étoit bien plus naturel qu’en
ce cas tous ses biens stipulés réversibles retournassent et se réu
nissent à son patrimoine en faveur de ceux qui y auraient in
té rêt, et qu’à cet eifetle retour fût stipulé par une clause gé
nérale , c’est-à-dire à la masse de sou patrimoine , plutôt qu’à
lui-même et a u x siens personnellement, à l’exclusion de tous au
tres ayants-cause ; car n’y ayant encore alors personne qui pût
l’intéresser, au défaut de sa fille et des enfants de sa fille ou de
leurs descendants (puisqu’il n’avoit pas encore d’autres successibles que des collatéraux fort éloignes qu’il ne conuoissoit même
pas ) , il devoit préférer tous les autres ayants-cause qu’il pouxroit avoir, ou se créer à lui-même, à ceux de sa fille décédante
sans enfants, qui ne pouvoient que lui être étrangers, si lui^
m ê m e restoit en viduité. C’est même probablement par cette
raison qu’il a interdit très expressément à sa fille toute, disposi
tion préjudiciable au droit de retour qu’il stipuloit par une
.clause générale et sans aucune limitation ; et s’il n’a pas étendu
cette prohibition aux enfants de sa fille, lors même qu’ils dé
céderaient après lui et leur .mère sans descendants d’eux (quoi-,
qii’en te cas ils fussent pareillement grevés du retour à son pa
trimoine, tant pour les biens donnés que pour les biens réservés) ;
si même au contraire il leur a permis audit cas toute disposition
des biens on question ; si enfin il a stipulé à cet effet que ledit
.retour a sou patrimoine n’auroit lieu qu’autant qu’ils seraient
.décédés sans descendants d’eux, et sans avoir disposé, c’est
évidemment pareeque (à la différence de leur mère , sa fille ,
,qui dans le cas où elle survivrait à son père décédé en viduité.,
«
�( »4 )
_
ne pouvoit avoir pour succcssibles que des collatéranx fort éloi
gnés , et peut-être même inconnus) eux au contraire, décédant
ensuite après leur mère et sans descendants d’eux , avoicnt du
moins pour succcssibles , à défaut du sieur Delsol leur aïeul
maternel, d’autres parents très proches dans la personne de
leurs oncles paternels, frères de leur père; alors en effet le sieur
Delsol n’avoit aucune raison suffisante d’empêclier que les en
fants de sa fille, décédant sans enfants après lui et après leur
mère, pussent disposer des biens dont il stipuloit la réversion;, car
ces mêmes enfants ayant audit cas pour succcssibles des oncles
paternels, ou leurs enfants, le sieur Delsol pouvoit facilement
supposer que les enfants de sa fille ne seroient pas tentés de dis
poser au profit d’étrangers , au préjudice de parents aussi pro
ches , et que , s’ils usoient de la liberté qu’il leur laissoit de dis
poser , ce ne seroit qu’en faveur de ceux de ces parents dont la
position particulière exigerait qu’ils fussent plus avantagés que
les autres.
III. I l n’en étoit p a s du retour stipulé p a rla mère du fu tu r,
comme de celu i stipulé par le sieur D elsol.
Il n’en étoit pas de même du retour stipulé par la mère du
futur pour elle et les sien s> en cas de décès de son fils sans en
fants , ou des enfants de son fils sans enfants et sans avoir dis
posé ; en effet, la mère du futur ayant , lors du mariage de son
fils, plusieurs autres enfants, né pouvoit penser qu’h assurer à
ces autres enfants le retour des biens qu’elle donnoit au futur ,
son fils , si celui-ci decedoit sans enfants , ou si ces enfants décédoient eux-mêmes sans descendants : or il lui sufllsoit à cet
effet de stipuler le retour pour elle et les siens personnellement,
�( *5 )
c’est-à-dire à l’exclusion de tous autres ayants-cause; et cepen
dant de laisser non seulement aux enfants de son fils , mais à
son fils lui-même, la liberté de disposer ; n’étant pas à présumer
que celui-ci, s’il n’avoit pas d’enfants, voulût user de cette fa
culté au préjudice de sa propre mère , ou de ceux qu’elle appeloit les siens (frères, sœurs, neveux ou nièces de sonditfils),
si ce n’est en faveur de ceux d’entre eux d o n t, comme il vient
d’être d it , la position pourroit exiger qu’ils fussent plus avan
tagés que les autres. E t c’est aussi tout ce que le mandataire de
la dame veuve d’Orcet, porteur de sa procuration rédigée à Mau
riac , et comparant pour elle au contrat de m ariage, étoit
chargé de stipuler, sans pouvoir s’en écarter, ni y rien changer. ,
IV . Peut-être le sieur D e ls o l auroit-il stipulé le retour dans
la même form e que la mère du fu tu r, s 'il avoit é té dans le
m êm e cas.
Il en auroit peut-être été de même de la stipulation du sieur
Delsol père , s’il avoit été dans le même cas ; mais n’ayant pour
lors d’autre enfant que la future, s’il avoit restreint de même
à sa personne et a u x siens le retour qu’il stipuloit, cette res
triction auroit eu l’inconvénient d’annoncer des espérances d’a
voir d’autres enfants d’un second mariage ; et quoiqu’il ne pen
sât peut-être pas alors à se remarier , il auroit au moins donné
lieu par-là au futur et à la famille du futur d’exîgëFdè lui qu’a
vant tout il s’expliquât sur ce point. Q ui sait même s’il n’auroit
pas fallu leur donner des assurances positives que ce qu’ils pouvoient craindre n’arriveroit pas ?
D ailleurs il pouvoit très bien se faire que, le cas prévu du re
tour arrivant, il n’existât aucun parent successible du sieur
�( *6 )
Delsol père capable de le représenter, ou qu’il n’y en eût que
de très éloignés qu’il n’auroit jamais connus; et c’est même ce
qui serait nécessairement arrivé, s’il étoit resté veuf : or il étoit
bien naturel qu’il pû t, au moins pour ce cas particulier, se don
n e r par a c t e s entre-vifs ou de dernière volonté, à titre gratuit
ou onéreux , tel successeur universel ou singulier, qu’il jugeroit
«Hpropos, à l’eiTetde recueillir , emtout ou partie, le bénéfice
du retour en question.
Il devoit donc, comme il ¡l’a fait, se réserver le retour par une
stipulation générale , de manière que le cas prévu arrivant, en
quelque temps que ce f û t , de son vivant ou après sa m o rt, il
y eût lieu au retour in rem , ou k Son patrimoine, en faveur de
ses ayants-cause, ou de qui de droit, et non pas seulement à sa
personne ou a u x s ie n s , à l’exclusion de tous autres ayantscause, le tout sans que la donataire, sa fille, pût préjudicier
ou déroger à ce di’oit de retour par aucune disposition.
-
-
V . L e s prem iers ju g e s ont supposé que la personnalité d elà
stipulation du retour par le sieur D e ls o l résultoit de la dé
fe n se qu’il a fa ite à sa fille d’y déroger. Combien cette
supposition est absurde /
Cependant, s’il faut en croire les premiers juges, la défense
faite par le sieur Delsol père à la dame d’O rcet, sa fille, de dé
roger a u droit de retour qu’il stipuloit, prouveroit au contraire
qu’il ne l’a stipulé que pour lui personnellement, n’étant pas
présumable , disent-ils , qu’il mît sa f ille (lors unique) dans
un tel état dinterdiction (pour le cas où elle décèderoit sans
enfants; car c’cst de ce cas uniquement qu’il s’agit) , et ce en f a
veur de parents éloignés avec lesquels il n’avoit aucune re-
�( 27 )
lation , que les parties même ne connoissoient p a s , a in si
que la dame d ’ O rcetl'a plusieurs fo is dit et é c r it, sans que
c e fa it ait é té désavoué.
' Il auroit donc été bien plus convenable, suivant eux , que le
sieur Delsol père se mit lui-meme dans l’interdiction , et ce en
faveur des étrangers que sa fille, décédante sans enfants, jugeroit à propos de préférer h. tous les ayants-cause qu’il se seroit
créés à lui-même , ou à ceux qui (comme il pouvoit arriver, et
comme il est arrivé effectivement) lui seroient survenus : or
on sent combien est absurde une pareille supposition.
V I. L ’institution contractuelle de la dame d 'O rce t} q u i, sui
vant les prem iers ju g e s , prouverait la personnalité de la
Stipulation du retour p a r le sieur D e ls o l son p è r e ,
• en démontre au contraire la réalité.
Enfin , suivant les mêmes, ladimitation du retour dont il s’a
git à la personne du stipulant résulterait s u r - t o u t d e l a
circonstance que le sieur D e ls o l, après avoir fa it à sa
f il le une donation entre-vifs, l ’a instituée en même temps
son héritière universelle ; e n e jfe t , ajoutent-ils, il seroit ab
surde de supposer qu’il eût fa it et voulu fa ir e } contre cette
héritière , une réserve qui ne devoit et ne pouvoit p r o f i t e r
q u ’à elle-m êm e, puisqu’en admettant là t r a n s m i s s i b i l i t é d u
retour} cette transmission'ne pouvoit a v o i r lieu qu en fa v eu r
de cette m êm e héritière.
'
Mais ils supposent par-là que l’institution contractuelle de
la demoiselle Delsol par son père est- une institution pure et
simple , q u i, une fois ouverte au profit de l’instituee par le pré
décès de l’instituant, ne pouvoit cesser en aucun temps d’avoir
�'
( ,8 )
^
tout son effet, qu’en un mot cette institution n’étoit affectée
d’aucune condition résolutoire , tandis qu’au contraire cette
même institution ( qui à la vérité ne pouvoit être révoquée
par aucun acte postérieur ) devoit cependant se résoudre de
plein d ro it, comme la donation, par le seul fait du décès de
l’instituée sans enfants , ou de ses enfants sans descendants et
sans avoir disposé ; car c’est ce qui résulte textuellement de la
clause par laquelle le sieur Delsol ( après avoir promis de n’ins
tituer d’autre héritier que la future sa f ille dans les autres
biens ( non donnés ) qui se trouveront lui rester lors de son
d é c è s) s’est réservé , (pour le cas où ladite future saillie décèderoit sans enfants , ou ses enfants sans descendants, ou sans
avoir valablement disposé ) , le droit de réversion et retour,
tant des biens donnés que réservés , sans q u il puisse être
dérogé par sadite f i l le audit droit de réversion par aucune
disposition, n i autre acte à ce contraires. O r , bien loin que
cette clause puisse faire présumer la personnalité du retour sti
pulé par le sieur Delsol père , comme le prétendent les pre
miers juges , la vérité est au contraire qu’il en résulte une
nouvelle preuve de sa transmissibilité ; et cela , quand même on
voudrait ne comprendre dans la classe des biens réservés dont
la réversion est nommément stipulée , que ceux non donnés
qui existoient pour lors , et qui lui seraient restés lors de son
décès , à 1 exclusion de tous ceux qu’il aurait acquis depuis sa
stipulation \ car enfin il est bien évident que le droit de retour
(qui pouvoit s’ouvrir pendant la vie du stipulant pour les biens
qu’il donnoit) ne pouvoit s’ouvrir qu’après sa m o rt, pour les ,
biens réservés , soit que (comme on n’en peut douter) il ait
entendu désigner par biens réservés ce qu’il appelle dans lemême acte les biens institués (c’est-à-dire la totalité de ceux
�( *9 )
non donnés qui Iuiresteroient lors de son décès, et généralement
tous scs biens, à l’exception des biens donnés, èt de ceux qu’il
auroit depuis vendus ou engagés), soit même , qu’il n’eut en
tendu comprendre sous cette dénomination que ceux des biens
non donnés qu’il possédoit lors du contrat de mariage de sa
fille et qu’-il auroit conservés jusqu’il sa mort.
E t qu’on ne dise pas , comme l’ont fait les premiers juges ,
que les m ots, biens réservés, ont échappé à Tinadvertance
du réd a cteu r, qui (suivant eux) ti avoit que les notions les
plus obscures sur la nature et les effets des institutions
contractuelles y car ce sont bien plutôt les premiers juges
eux-mêmes q u i, comme on l’a pu voir déjà , et comme 011 le
verra encore plus particulièrement ci-après , sont dans le cas
qu’on leur fasse ce reproche 5 et au surplus , quoi qu’il en soit,
ils ont bien prouvé par-là qu’il étoit absolument impossible ,
malgré toutes leurs subtilités, et pour ainsi dire leurs tours de
force , de restreindre aux biens donnés un retour stipulé pour
les biens tant donnés que réservés. Il faudra donc toujours
en revenir à dire que le retour des biens réservés (q u i, dans
tous les cas , sont nécessairement des biens non donnés), ne
pouvant s’ouvrir avant la mort du stipulant,. étoit bien cer
tainement transmissible à ses héritiers ou autres ayants-cause
or, il devoit en être de même du retour des biens donnés, puis1
qu’il est stipulé par la même clause et dans les mêmes termes.
V II. Lorsque le retour s’ouvrira par le fa it du décès de la
dame d ’ O rcet sans enfants , son institution contractuelle
sera comm e non'tivenue.
Peu importe enfin que la dame d’O rccl, en sa qualité d’hé-
�( 3o )
îilère instituée contractuellement, soit quanta présent la seule
représentante de son père. Du moment que le retour s’ouvrira
par le fait de sou décès sans enfants, elle n’aura plus été héri
tière contractuelle , attendu la clause résolutoire apposée à son
institution. A lo rs, en effet, il sera vrai de dire qu’elle n’aura
été qu’héritière ah intestat de son père, concurremment avec
ses frères, c’est-à-dire pour partie seulement; et par consé
quent elle n’aura laissé dans sa succession , à ses ayants-cause,
quels qu’ils puissent ê tre , que sa part afférente dans tous les
objets dont la réversion.au patrimoine de son père aura eu lieu
par le fait de son décès sans enfants.
Il est vrai , comme l’observent les premiers juges , qu’en
droit romain une institution d’héritier par testament (autre
que celui fait ju r e militari) n’auroit été susceptible d’aucune
limitation ou résolubilité, quand même cet héritier testamen
taire n’auroit été institué que e x re certd, ou pour une certaine
quotité , telle que la moitié ou le tiers de l’hérédité, ou à
compter de tel temps , ou enfin: jusqu’à, tel temps; qu’en effet
l’héritier ainsi institué par testament valable , étant seul insti
tué , auroit é té, de droit,, héritier pour le to u t, pour tous
les cas et pour tous les temps , sauf seulement les droits des légitimaires ; mais c’est pareeque chez les Romains personne ne
pouvoit mourir parti/n te status, partim intestatus (à moins
qu’il n’eut teste ju re m ilitari) ; car , comme l’observe Pérez en
ses Institutes impériales, e x institutione hceredis ad certum v e l e x certo tempore fa cta sequeretur quod quis deced erep o sset, pro parte te sta tu s, et p ro p a rte intestatus.
�( 3i )
V III. L e s institutions contractuellesy inconnues ch ez les Ro
mains , n’ont rien de commun avec leurs institutions tes
tamentaires.
•
«
Il n’en est pas de même des institutions contractuelles abso
lument étrangères au droit romain, et qui cependant ont été
admises dans les ci-devant provinces dites de droitécrit, comme
dans tout le surplus de l’ancienne France \ en effet, suivant
tous nosauteurs (quoi que disent au contraire les premiers juges),
ces institutions d’héritier par contrats ne ressemblent aucune
ment aux institutions testamentaires des Romains , si ce n’est
à celles faites ju r e m ilitari, ou à leurs legs universels , soit aux
legs de toute l’hérédité ou de tous les biens, soit aux legs de
partie de l’hérédité ou de partie des biens, partis etpro p a rte,
(que notre Code civil qualifie legs à titre universel), avec cette
différence seulement qqe nos institutions contractuelles, d’ori
gine française et absolument inconnues clicz les Romains, sont
irrévocables comme tenant de la nature des contrats, tandis
que les legs et autres dispositions testamentaires de toute es
pèce peuvent toujours être révoquées par le testateur jusqu’à
son décès.
IX . A utrem ent elles ne pourroient ja m a is avoir lieu pour
partie , tandis q u e, suivant P o th ie r , elles ont lieu in
contestablement pour partie comme pour le tout.
S’il en pouvoit être autrem ent, il faudroit aller jusqu’à dire
que l’institution contractuelle pour partie des biens ou de 1 hé
rédité, ou même seulement pour quelques uns des corps certains
qui la composent, auroit l’effet d’une institution universelle
pour toute l’hérédité ; car c’est ce qui résulterait du principe
�( 3a )
posé par les premiers juges (dans le second attendu de leur troi
sième question), que Tinstitution contractuelle form e un v é
ritable héritier q u i N E DIFFÈRE QUE DE N O M DE £ HÉRITIER
t e s t a m e n t a i r e (des Rom ains), q u a n t a i ’ u n i v e r s a l i t é
*
9'
f
9 *
t
d u t i t r e : or personne jusqua présent navoit ose mettre en
avant une hérésie aussi monstrueuse, et il étoit réservé aux pre
miers juges d’en faire la base de leur jugement.
Il leurauroit cependant suffi, pour se garantir d’un pareil écart,
de consulter sur cette matière jios auteurs élémentaires, tels
que Polluer, dans son introduction au titre 17 de la coutume
d’Orléans. Ils y auroient vu , par exemple, à la fin du n° 17 de
l’appendice de cette introduction, que l’institution contractuelle
y est définie la donation que quelqu’un fa it de sa succession
en tout ou e n p a r t ie , p a r contrat de m ariage, à l’une des
'
parties contractantes} ou a u x enfants qui naîtront du fu tu r
mariage y au n° il\ du même appendice, que de m êm e que la
succession testamentaire dans les provinces oh elle est ad
m ise y fa it cesser la succession légitim e et a b i n t e s t a t ,
de m ême la succession contractuelle fa it cesser la su cces
sion légitime ou ab intestat pour le total, lorsque l ’héritier
contractuel a été institué héritier pour le total, ou po u r l a
p a r t ie p o u r l a q u e l l e il a é t é i n s t i t u é ; d’où il conclut, à la
fin dudit n° 24 > que, lorsque l’héritier contractuel étranger
a é té institué s e u l e m e n t po u r u n e p o r t i o n , p u t a p o u r
LA MOITIÉ , il succède a u x propres , de m êm e qu’a u x au
tres b ie n s, pour l a p o r t i o n p o u r l a q u e l l e i l a é t é i n s
t i t u é , et que l ’héritier l i g n a g e r ab intestat « y succède que
pour cette m oitié y et ensuite au n» 25 qui suit, que Tenfant
héritier contractuel de so n p e re , pour u n e c e r t a in e p o r
t io n , PUTA. POUR UN TIERS OU POUR UN QUART, n ’e ST PAS
�(33)
OBLIGÉ E N V E R S SES FRÈRES E T SOEURS, HÉRITIERS LÉGITIMES
E T AB
INTESTAT
POUR
LES A U TR E S P O R T IO N S , CM
rapport
de ce qui lu i a é té donné ou légué par son père.
X . D an s les pays de droit écrit elles ont lieu pour partie et
par conséquent ad tempus ou ex tempore, vu sur-tout
q u elles y sont considérées comme de véritables dona
tions entre-vifs.
.
Dira-t-on qu’il n’en étoit pas de même dans nos provinces cidevant régies par le droit écrit ? Mais s’il est vrai, comme le
dit Laurières (au sommaire du n° 23 du chapitre premier de
son Traité dès institutions et substitutions contractuelles), que
ces institutions ont pris leur origine des lois romaines q u i
perm ettaient a u x soldats i n p r o c i n c t u de s'instituer héri
tiers par des pactes réciproques de succéder, il en résultera
nécessairement que les institutions contractuelles, comme les
legs universels , ou à titre universel, peuvent avoir lieu, même
en pays de droit écrit, ou pour un temps seulement, ou à par
tir de tel temps, ou pour partie seulement de l’hérédité ou des
biens , ou même pour un tel corps héréditaire , etc. ; car as
surément 011 ne pouvoit pas appliquer à celui qui testoit ju re
m ilita ri, la règle : Nerno potest decedere partim testatus
partim intestatus.
C’est ce qui résultera pareillement de ce que dit et répète
souvent le même auteur , notamment au n° a3 de son chap. 3 ,
et au chap. /|, nos 8 et suivants , que les institutions contraç tuelles y en pays de droit écrit, sont réputées vraies dona
tions entre-vifs~de biens présents et à ven ir, par lesquelles
Finstituant s'interdit la fnnulté de disposer non seulement
�( 34 )
a titre gratuit, mais même à titre on éreu x, par ven te, hy
pothèque ou autrement s i ce n’est pour pressante et ur
gente n écessité y car on conviendra sans doute que les dona
tions peuvent se Hure pour n’avoir effet que jusqu’à tel temps,
ou ù compter de tel temps, etc. E t il faut bien que le sieur Delsol pèrç, reconnu pour procureur très instruit, ait eu connoissance de cette jurisprudence, puisqu’il a cru devoir se réserver
l’usufruit de ce qu’il appelle les ¿tiens institués (c’est-à-dire de
ceux pour lesquels il inslituoit sa fille son héritière contrac
tuelle) , ainsi que la faculté de pouvoir les vendre ou engager.
X.I. L ’héritier institué contractuellement ne pourroit être
a ssim ilé , suivant Laurières , même en pays de droit
écrit > qu’à lliéritier des Romains institué in castrensibus,
qu
jure militari.
Si donc ,on vouloit absolument assimiler l’héritier institué
contractuellement à l’héritier institué du droit romain, ce ne
pourroit être au moins qu’à l’héritier institué in castrensibus,
ou par testament fait ju re m ilitari, qu’il faudroit le comparer ;
et c’est aussi cc qu’a fait Laurières au n° i 56 dudit chap. 4 > où
il remarque que , quoiqu’il y eût accroissem ent de l ’institué
i n bo n is ÇyiSTKHNSiBUs a Théritier a b in t e s t a t du sold at,
i l n’y avoit p a s accroissem ent de l’héritier a b in t e s t a t ,
quand il répudioit, lï l ’héritier institué i n ca str en sibu s ;
après quoi il ajoute : E t , par la même raison, il n’y apas a c
croissement parm i nous de Théritier ab intestat à Théritier
contractuel, ou dùlégataire universeldiineportion de biens,
(qutiiqu’i l y ait accroissem ent du légataire universel, ou de
Fhéritier contractuel, d’une portion de biens ou de succès-
�( 35 )
s ion , à Théritier ab intestat) , parcec/ue, comme on Fa d it ,
l ’héritier ab intestat est héritier solidairement de tous les
biens du d é fu n t, au lieu que l’héritier contractuel, ou le lé
gataire universel, n’étant supposé successeur q u e d ’ u n e
p a r t i e s e u l e m e n t , il ne peu t rien prétendre a u -d e l a d e
l a p a r t i e q u i l u i e s t d o n n é e , l’usage étant certain par
mi nous que chacun peut mourir p a r t i m t e s t a t u s , p a r
t i m i n t e s t a t u s , com m e les soldats romains y car, comme
le remarque très bienLoisel (liv. 2, t. 5 , règle a i , de ses Ins
titutes coutumières), nos Français comme gens de guerre ont
reçu plusieurs patrim oines, et divers-héritiers, d’une même
personne : or il faut convenir que ces propositions sont toutes
précisément les contradictoires de celles que les premiers juges
ont cm nécessaire* de consigner dans les motifs de leur jugement,
pour le justifier autant qu’il étoit eh eux.
X II. I l résulte évidemment de tout ce que dessus que le
sieur D e lso l a stipulé un retour à son patrimoine in rem ,
et qu’au contraire celu i stipulé par la mère du fu tu r étoit
personnel à elle et aux siens.
Tout ceci posé , il doit maintenant demeurer pour constant
et suffisamment démontré, que si l’on voit, dans le même con
trat de mariage, d’un côté, le sieur Delsol père se réserver, par
une clause générale , le droit de réversion ou retour pour le
cas du décès de sa fille sans enfants , ou des enfants de sa fille
sans descendants , avec stipulation expresse que sadite fille ne
pourroit déroger h ce droit de retour par aucunes dispositions ,
ou autres actes à ce contraires, et cependant, que les enfants de
sadite fille , pareillement grevés dudit droit de retour pour le
�( 36 )
_
_■
_
cas de leur décès sans descendants, pourroient faire telles dis
positions qu’ils jugeroient à propos ; si en même temps on y
voit d’un autre côté la mère du fu tu r, qui stipuloit le retour
pour elle et les sie n s , en cas de décès de son fils sans enfants,
ou des enfants de son fils sans enfants, ne point défendre à son
fils de déroger audit droit de retour par aucunes dispositions ,
mais au contraire laisser aux enfants de son fils et k son fils luiijnême toute liberté à cet égard , ce n’est pas, comme l’ont sup
posé les premiers juges dans leurs motifs, que les contractants
aient entendu restreindre au sieur Delsol père personnellement
le retour qu’il stipuloit, et cependant assurer à tous les ayantscause de la mère du futur le retour qu’elle se réservoit. Leur in
tention au contraire étoit évidemment, à raison de la différence
des circonstances où chacun se trouvoit pour lors, que le retour
stipulé par le père de la future eût lieu généralement comme
retour ou réversion in rem h son patrimoine, en faveur de tous
ceux qui auroient intérêt à ce que son patrimoine fût conservé
dans son intégrité , mais que celui stipulé par la mère du futur
fût seulement personnel à elle et a u x siens.
X III. Princip es élém entaires sur la transmissibïlité de tou
tes stipulations conditionnelles, tant suivant le droit ro
main que suivant le Code N apoléon. L a présomption lé
gale de leur r é a lité ne peut être balancée que par des preu
ves écrites dans la clause même de leur p e r s o n n a l i t é .
Voilà ce que les premiers juges auroient vu dans les stipu
lations de retour dont il s’a g it, s i , au lieu de s’arrêter à de pré
tendues conjectures toutes insignifiantes qu’ils ont entassées
sans mesure, comme s a n s discernement, dans leurs motifs, ils,
�('37 )
avoient considéré , ainsi qu’ils le devoient, que la stipulation
de retour dont il s’agit est une de celles dont le vrai sens, dé
terminé par la loi même , n’a jamais été abandonné à l’interpré
tation arbitraire des juges, et qu’au surplus, comme ils en con
viennent eux-mêmes dans leurs motifs, toute stipulation de re
tour est, de droit, transmissible aux ayants-cause du stipulant,
lorsque celui-ci ne l’a pas limité à sa personne.
A la vérité , ils supposent en même temps que cette limita
tion est de droit, et qu’elle doit se suppléer lorsqu’il n’a rien été
dit de contraire; mais ils ignorent donc, ou feignent d’ignorer,
que tout au contraire les lois, tant anciennes que nouvelles,
ont érigé en présomption légale, à laquelle on ne pourroit op
poser aucune autre espèce de présomption ou conjecture, celle
résultante de ce que le stipulant n’a pas exclus, en termes ex
près, du bénéfice de sa stipulation conditionnelle, et de celle de
retour en particulier, ses héritiers ou ayants-cause.
? Cependant ils ne pouvoient méconnoitre cet adage si sou
vent rappelé dans les livres élémentaires, tels en particulier que
les Institutos, et aujourd’hui consacré en tant que de besoin par
le Code Napoléon, que le bénéfice des stipulations condition_nelles se transmet nécessairement.aux ayants-cause du stipulant
décédé avant l’événement de la condition : E x stipulalione
conditionali tetntum spes est dcbitum i r i , eanxquê ipsani
spem in hœredem transniittimus, sipriusquàm conditio e x
tet mors nobis contingat. Inst., p. 4, D e verb. oblig. Ciun
quis sub coiulitione stipulatus f u e r it , licet cuite conditionem decesserit, postea existente conditione hceres ejus
agerepotest. Inst. , p. a 5., D e inutil, stipul.
Ils auroient du savoir au moins que , suivant l’article 117Q.
du Code Napoléon , la condition accomplie a un effet ré-
�( 38 )
^
t.ro a c tif au jo u r auquel 1engagement a étécon tra cté, et que}
s i le créancier est mort avant Iaccom plissem ent de la con
dition y ses droits passent à son héritier. Qu'ainsi, comme
le décide l ’article i i a a dudit Code, on est ce n s é avoir stipulé
pour.ses héritiers et ayants-cause , à moins que le contraire
ne soit e x p r i m é , o u j n e r é s u l t e d e l a n a t u r e m ê m e d e l a
c o n v e n t i o n (comme, par exemple, parcequ’il s’agiroit d’un
droit d’usufruit ou d’usage, ou de tout autre droit personnel au
stipulant, mais non pas bien certainement, comme l’insinuent
les premiers juges, parceque quelques circonstances pourroient
donner lieu de le faire soupçonner.) Enfin, ils auroient dû con
clure de là que l’ayant-cause du stipulant, quel qu’il s o it, et en
quelque temps que la condition arrive, n’a point à prouver que
son auteur a voulu stipuler pour ceux qui le représenteroient
lors de l’arrivée de la condition -, qu’en un mot c’est à celui qui
je prétend exclus par la stipulation, à le prouver, c’est-à-dire,
suivant l’article 1 1 1% dudit C ode, à prouver que cette exclusion
est écrite dans la stipulation même. Quamvis verum est quod
qui excipitprobare debet quod excip itu r, attamen de ipso
d u n ta xa t, a tn o n d e hœrede ejus convertisse, p e tito r , non
qui e x c ip it , probare debet. Leg. 9 , ft'. D e prob. et prœs.
Q u’en e f f e t , il y a en ce cas présomption vraiment légale ,
ju r is et de ju r e , que la stipulation est in rem , et non pas
limitée à la personne du stipulant, comme le soussigné l’a déjà
d é m o n t r é dans sa Consultation précédente, délibérée le 27 juin
1806 , et comme il l’avoit démontré avec bien plus de déve
loppement encore dans son Précis (ci-joint), imprimé en 17G7,
pour les sieurs Lliéritier , Fourcroi et consors , contre le mar
quis de Mesme , et sur lequel est intervenu l’arrêt solennel du
17 lévrier même année : or une présomption de cette espèce ,
�^
( 3cj )
contre laquelle on ne doit admettre aucune présomption con
traire, ne pourrait être balancée ou détruite que par des
preuves positives et bien formelles, evidentissimis et in scriptis habitis , comme le dit la loi a 5 , p. 4 > in f in e , ff. D e
pvob. et prœs.
Il faudrait donc démontrer par écrit, c’est-à-dire, comme le
porte ledit article 112 2 , par les expressions mêmes de la stipu
lation, que celui qui a stipulé sous condition (quoiqu’il n’ait
pas parlé de ses ayants-cause ) a cependant témoigné vouloir les
exclure, ayant par exemple déclaré expressément ne vouloir
stipuler que pour le cas où il survivrait à l’événement de la con
dition.
Autrement, et a défaut de preuve écrite de cette espèce , il
sera toujours censé, comme Te dit V iunius, a d rem fam iliarem respexisse , c’est-à-dire avoir voulu acquérir, ou con
server, ou reprendre, et avoir en pleine propriété ( le cas de la
condition arrivant, en quelque temps que ce fût) , ce qui fait
l’ objet de sa stipulation conditionnelle, le tout a l’effet de'pou
voir disposer librement par actes entre-vifs ou à cause de mort
du droit éventuel qui en résulte, comme de tous ses autres
droits, soit ouverts, soit seulement éventuels : or tel est le cas
où s’est trouvé le.sieur Delsol père , qui, en stipulant un droit
de retour auquel sa fille ne pourrait déroger par aucunes dispo
sitions (quoique les enfants de sa fille le pussent) n’a exclus
aucun de ses ayants-cause du bénéfice de sa stipulation.
�( 4o )
X IV . Preuves par le testament du sieur D e lso i, et par les
consultations qu’il avoit p rises d'avance sur ce point, qu’il
étoit bien convaincude la r é a l i t é de sa stipulation.
Aussi voit-on que le sieur D elsol, toujours bien convaincu de
la réalité de son droit en a disposé par testament peu de_ jours
avant sa m ort, comme d’un droit vraiment reelTra rem , quoi
que ce droit purement eventuel ne dût s’ouvrir, suivant toutes
les apparences, qu’après sa mort et même bien long - temps
après.
Effectivement par ce testam ent, après avoir institué son fils
aîné et successivement ses autres enfants, par ordre de primogéniture, ses héritiers universels, il avoit déclaré -vouloir e x
pressém ent que, dans le cas ou la dame Jeanne-M arie D elsol,
épouse du sieur de V i g i e r , viendroit à décéder sans en
fa n ts ou descendants , son héritier recueille et profite du
droit de réversion , par lu i stipulé dans le contrat de ma
riage de sa f ille avec ledit sieur de V ig ie r , etc. E t si ses
dispositions à cet égard n’ont pu recevoir aucune exécution, c’est
uniquement pareeque le testament a été déclaré nul pour vice
de forme. Comment en effet auroit-il pu douter un instant de
son d ro it, lui qui savoit bien n’avoir pas limité sa stipulation
au cas de sa survie , et qu’il ne s’agissoit pas d’un droit d’usu
fruit ou d’usage, ni d’aucun autre droit personnel de sa nature ?
Il avoit bien présumé cependant que sa fille , en cas qu’elle
lui survécût, prétendrait le retour éteint par le seul fait de sa
survie, et qu’alors elle s’opposerait à l’exécution de toute espèce
de disposition qu’il aurait cru devoir en fairè, pour le cas où. il
s’ouvriroit en quelque temps que ce fut.
Eu conséquence il avoit pris dès l’année 1 7 7 1 , neufans avant
�'
( 4 0
sa mort, (un mois avant son second mariage) la précaution de con
sulter M. Chabrol, jurisconsulte de Riom, regarde pourlors à bien
juste titre comme l’oracle de la province*, et ce jurisconsulte, quoi
qu’il ne connût pas encore l’arrêt de 1767 quia fait cesser tous les
doutes sur ce point, avoit répondu par sa consultation du a/j. sep
tembre 17 71 ( conformément à laTdecîsîôn'IIeTIenrys sur sem
blable espèce) que M. Delsol ayant stipulé le retour, en cas de
décès, non seulement de sa fille, mais des enfants de sa fille sans
descendants (comme il n’étoit pas vraisemblable qu’il eût entendu
survivre aux enfants de sa fille et à leurs descendants, et qu’il eût
étendu si loin sa pensee; comme d’ailleurs il est de principe que
les stipulations son cemeèTTaTtës7tant pour les stipulants que
pour leurs héritiers ou ayants-causc), il devoit être supposé
avoir éntendu que cette réserve et convention slFt^iJdrdïérit
bien loin , et pouvaient durer encore après lui.
,
Il en a été de même de MM. A u d râ ^ e jeune , u jjytteeet
Ducrochet, jurisconsultes distingués de Riom , qu’il a encore
consultés les 1 5 décembre 1*778 et 2 janvier 1779, plus d’un an
avant sa m ort, et q u i, en lui faisant la même réponse, l’ont '
appuyée de nouvelles autorités notamment de celle de l’arrêt
solennel de 1767 , qu’ils présentent comme ayant levé tous les
doutes sur ce poin t, s’il pouvoit y en avoir encore.
X V . E n vain voudroit-on assim iler la stipulation du retour.
in rem a unJidéicom m is.
Mais, disent encore les premiers juges (dans le septieme at
tendu de leur première question), la clause par. laquelle le
sieur D e lso l a voulu fa ire rentrer dans sa fa m ille, après son
décès et celu i de sa f i l l e , les biens réservés ou institués, ne
(>
«
>
�.
.
(4 °
.
pourvoit être envisagée que comme une cliarge de fid éico m i
m is, comme une véritable substitution dont il aurait voulu
grever sa f ille , et laquelle seroit abrogée par lés lois du
i 4 novembre 1792. Ainsi ils supposent que le retour dont il
s’agit seroit un retour à la fa m ille du sieur Delsol en particu
lier , à l’exclusion de tous ses autres ayants-cause, tandis que
dans le fait c’est un retour indéfini et illimité à son patrimoine,
et par conséquent à ses ayants-cause, quels qu’ils puissent être,
c’est-k-dire un retour k lui-même, dans la personne de ceux qui
à son défaut le représenteront pour les choses sujettes à ce droit,
lors de son ouverture. O r , certainement on ne pourra jamais
concevoir que le retour a son patrimoine, ou à soi-même, soit
une véritable substitution fidéicommissaire. Il faudroit au moins,
pour constituer une telle substitution, que ce retour eût été
stipulé en faveur de tiers, autres que les représentants néces
saires du stipulant, pour venir en second ordre après celui qu’il
a gratifié directement; ou si l’on veut encore, au profit du
moins d’une classe particulière et déterminée de ses représen
tants et ayants-cause , à l’exclusion de toutes les autres classes ,
comme j par exemple , au profit des siens seulement.
Il ne peut pas en être de même du retour indéfini stipulé par
une clause générale, sans aucune espèce de limitation, tel que
celui stipulé par le sieur Delsol père, à raison des circonstances
• particulières où il se trouvoit, comme on l’a vu ci-dessus ; en
effet, il y a cette différence entre le retour conventionnel et la
substitution fidéicommissaire, que le retour général et indéfini,
apposé pour tel cas, à une convention quelconque, même à
celle de succéder , la résout, et fait rentrer , le cas arrivant,
tous les biens dont il avoit été disposé sous cette condition, par
donation ou institution , dans le patrimoine du stipulant, pour
/
�(43)
les remettre entre ses m ains, ou à son défaut dans celles de ses
représentants, qui ne sont à cet égard et pour ce qui concerne
cet objet que la continuation de sa personne. Aussi voit-on que
la loi du 17 nivose an 2 (quoique les substitutions fidéicommissaires fussent alors abrogées) a conservé les retours convention
nels dans leur intégrité, et qu’en conséquence la Cour de cas
sation, par son arrêt du 11 frimaire an 14 (dont le soussigné a
rendu compte dans sa Consultation de 1806) , a maintenu un
droit de retour indéfini et illimité, comme n’ayant rien de com
mun avec la substitution fidéicommîssaire, quoique son ouver
ture n’eût eu lieu que plus d’un siècle après le décès du donateur
qui l’avoit stipulé.
X V I. D e V exposé ci-dessus résulte la solution des trois
questions posées p a r les prem iers ju g es.
De tout ce qui vient d’être exposé résulte incontestablement
la solution de la seconde des trois questions posées par les pre
miers juges , qui étoit de savoir si la réserve de retour stipu
lée par le sieur D e ls o l père étoit lim itée à sa person n e, et
pouvait être transmise à ses héritiers: or cette question est la
seule qu’ils aient jugée , et par conséquent la seule qui soit k
juger sur l’appel; mais il en résuite encore,, en tant que de besoin,
la solution des deux autres questions qu’ils ont pareillement posées (quoiqu’ils n’aient pas pris sur eux de les juger, s’étant
contenté à cet égard d’émettre leur opinion). En effet la pre
mière de ccs deux questions étoit de savoir quels biens ont été
et pouvoient être compris dans la clause par laquelle le sieur
Delsol s est réservé le retour, et l’autre de savoir si, dans le
cas de transmissibilité , ce droit de retour ne seroit pas confon-
�( 44 ) '
...
du dans la personne de la dame d’Orcet avec sa qualité d’hen
tière contractuelle de son père : or on a vu ci-dessus, d’une part,
que la stipulation de retour par le sieur Delsol père comprenoit
en termes exprès les biens par lui donnés à sa fille, et en outre
la totalité des biens non donnés qu’il laisseroit au jour de son
décès; et d’autre part, que le retour ne devant s’ouvrir que par
le fait du décès de la dame d’Orcet sans enfants (c’est-à-dire lors
de la révocation de son institution contractuelle), il étoit im
possible que ce droit de retour, en quelque temps qu’il s’ouv r it , se confondit un seul instant dans sa personne avec sa qua
lité d’héritière contractuelle de son père ; et l’on a vu de plus
que la dame d’O rcet, qui n’a pas d’enfants, étant actuellement
hors d’àge d’en avoir, le droit de retour dont elle est grevée ne
peut manquer de s’ouvrir un jour au profit de ceux qui se sont
trouvés être héritiers ab intestat du sieur Delsol père décédé
sans avoir testé valablem ent, c’est-à-dire au profit de la dame
d’Orcet elle-même pour sa part héréditaire, et pour le surplus
au profit des sieurs Delsol, ses frères j le tout attendu que l'é
vénement de la condition apposée au retour (comme toute es
pèce de condition apposée à une stipulation), a un effet rétroac
tif au jour même de la stipulation, comme on l’a vu ci-devant:
or il résulte de là, en dernière analyse, que les sieurs Delsol frères
ont été bien fondés à exercer les actes conservatoires de leur
droit, quoique ce droit ne soit qu’éventuel; et ils doivent croire
que c’est aussi ce qui sera jugé sur leur appel par les magistrats
supérieurs qui en sont saisis.
Délibéré à Paris par le soussigné ancien avocat, ce 24
mars 1809.
LESPARAT.
�L e
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a pris leclure des deux
consultations délibérées et rédigées par M. Lesparat, les 27 juin
1806 et 24 mars 1809, ensemble du jugement rendu en pre
mière instance par le tribunal d’Àurillac, entre madame d’Orcet
et MM. Delsol, le 22 juillet 18085 vu d’ailleurs le précis imprimé
sur lequel est intervenu l’arrêt solennel du 17 février 1767,
adopte entièrement tous les principes déduits dans les deux con
sultations précitées, où la doctrine sur les clauses de retour est
établie avec un jugement exquis et une cia* té parfaite. Il s’ho
nore
sur-tout de professer, avec le respectable jurisconsulte qui
en est l’auteur, l’opinion que l’article g 5 i du Code Napoléon,
quelles qu’aient été les intentions de ses illustres rédacteurs (ce
qui est fort inutile à approfondir), n’a nulle influence sur une
question qui procède d’une.convention faite ayant le Code; et à
ce sujet il croit devoir observer que si (par application de ce
principe sur l’impossibilité de donner effet rétroactif aux lois )
on croit devoir contester à l’article 1179 du Code Napoléon
(quoique confirmatif d’un droit antérieur) toute influence sur
la question de présomption légale pour la réalité du retour, celte
présomption légale se retrouve, quant à l’espèce, dans le droit
romain, qui, lors des conventions, étoil la loi coërcitive des
parties domiciliées en pays de droit écrit. Le Conseil pense donc
�<( 44 ter )
que le jugement du tribunal de première instance sera réformé
sans coup férir par la cour d’appel, et que la stipulation de re
tour sera réinvestie de tous les effets que lui a assignés la volonté
des parties.
Délibéré a Paris, ce 17 m a r i 809.
‘
BELLART,
B O N N E T, D E L V IN C O U R T , LA C A LPR A D E .
�IN a p o l e o n ,
PAR LA GRACE DE
DlEU
ET LES CONSTITUTIONS DE l ’E m -
f i r e , E m p e r e u r d e s ' F r a n ç a i s , R o i d ’I t a l i e , e t P r o t e c t e u r d e l a
, à tous présents et à venir, S a l u t :
Le T r i b u n a l civil de première instance établi à Aurillac, chef-lien ■
de préfecture du département du Cantal, a rendu le jugement suivant :
Entre dame Jeanne-Murie Delsol, veuve de sieur Gabriel-Barthélerny
V i gier-d’O rcet, habitant de la ville de Mauriac, demanderesse en exé
cution de jugement du six aoûl dernier, et défenderesse en opposition,
comparante par Me. Labro, son avoué, d’une part;
Sieur Pierrc-François Delsol, propriétaire, habitant de la ville d’AuC o n f é d é r a t io n du R h in
rillac, défendeur et opposant, comparant par M '.R am pon, son avoué,
d’autre part;
Sieur Gabriel-Barthélemy Delsol, proprie'taire, habitant de la ville
de Paris, aussi défendeur et opposant, comparant par Me. Bonnefons,
s o n avoué, d’autre part;
En présence de sieur Antoine Desprats, propriétaire, habitant dudit
Aurillac, aussi défendeur, comparant par Me.Manhes, son avoué, d’autre
part :
Ouï le rapport de l’instance d’entre les parties, fait publiquement à
l’audience par M. Delzons, président, membre de la Légion d Honneur,
en exécution du jugement du dix-neuf février dernier, à l’audience du
vingt-un juillet, et après qu’il en a été délibéré à la chambre du conseil,
en exécution du jugement d'hier vingt-un juillet; vu le procès, les con
clusions desdits sieurs Pierre-François et Gabriel-Barthélemy Delsol,
tendant à être reçus opposans au jugement rendu par défaut faute de
' plaider, le six août dernier, que faisant droit sur leur opposition, ledit
jugement fût déclaré nul et de nul effet, au principal la dame dO rcet
iut déclarée purement et simplement non reccvable dans sa demande, ou
en tous cas déboutée, sous^Ia réserve que font les sieurs Delsol, d exer
cer contre tous détenteurs des biens soumis au droit de retour les droits
et actions résullans de leurs qualités de transmissionnaires, ainsi qu’üa
�( 46 )
'
aviseront, et que la dame d’Orcet soit condamnée aux dépens ; vu les
conclusions de la dame d’O rcet, tendantes à ce que les sieurs Delsol fus
sent déboutés de l’opposition par eux formée par leur requête du vingt- ^
trois août dernier au jugement du six du même mois, qu’il fût ordonné
en conséquence que le susdit jugement seroit exécuté suivant sa forme
et teneur, et que lesdits sieurs Delsol fussent condamnés aux dépens ;
vu aussi les conclusions du sieur Desprats, tendantes à ce qu’il fût donné
acte des offres qu’il avoit toujours faites de payer le prix de son acquisi
tion, en , par la dame d’Orcet, lui donnant bonne et suffisante caution,
ou en faisant juger la validité de son paiement vis-à-vis des sieurs Delsol
ses frères ; en conséquence, et dans le cas où elle parviendroit à faire ju
ger par jugement en dernier ressort, que le droit de retour dont s’agit
e s t irrévocablement éteint, que lesdits sieurs Delsol fussent condamnés
aux dépens de la contestation, même vis-à-vis de lui Desprats; et au cas
contraire où le tribunal décideroit que le droit de retour peut s’ouvrir
encore en faveur des sieurs Delsol, en ce cas, que la dame d’Orcet fût
déclarée non recevable dans sa demande en paiement du prix du pré
de Cancour, qu’elle fût condamnée à restituer les six cents francs par
elle reçus, avec les intérêts légitimement dus, et en outre en six mille
francs de dommages-intérêts résultans de l’éviction, et en tous les dé
pens.
Dans le fait, en l’année i j 4° > 1° sieur Basile Delsol, procureur au
bailliage d’ A.uriüac, épousa la demoiselle Thomas; de ce mariage il
n’issut qu’une tille qui se maria avec le sieur de Vigier-d’Orcet -, dans leur
contrat de mariage, du deux juin 17G0, le sieur Delsol donna par dona
tion entre-vifs pure et simple, à la demoiselle Delsol, sa fille, par avan
cement d’hoirie, le domaine, terre et seigneurie du Claux, en quoi que
ladite terre'ct domaine du Claux puissent être et consister, aux mêmes
clauses, charges et conditions que le délaissement lui en sera fait, confor
mément à la demande qu’il en a formée aux requêtes du palais, et au
cas où ladite demande en délaissement desdits biens 11e lui seroit pas ad
jugée, ledit Delsol, pour dédommager sa fille dudit domaine et terre du
�( 47 )
Claux, lui donna et délaissa toutes les créances qui lui étaient dues par
lesdits biens en capital et accessoires; le sieur Delsol donna aussi par
même donation entre-vifs à ladite demoiselle Delsol sa fille la somme
de dix mille livres, qu’il paya comptant ; et à l’égard du surplus de ses
autres biens qui se trouveroient rester audit sieur Delsol lors de son dé
cès, il promit de n’instituer d’autre héritière que la demoiselle Delsol,
sa fille, sous la réserve de l’usufruit de tous les biens institués, et de pou
voir vendre et engagèr lesdits biens ainsi qu’il jugera à propos, tant en
la vie qu’à la m ort, et encore de disposer d’une somme de dix mille liv .,
et n’en disposant pas, la réserve tournera au profit de sadite fille; et au
cas où ladite demoiselle future épouse viendroit à décéder sans enfants,
ou ses enfants sans descendants, ou sans disposer valablement, ledit sieur
Delsol se réserva expressément le droit de réversion et retour, tant des
biens donnés que réservés, sans qu’il pût être dérogé par sa fille future
épouse audit droit de réversion par aucune disposition ni autres actes
à ce contraires. P ar le même contint, le sieur de Vigier oncle, pour et
au nom de la dame Moissier, usant du pouvoir donné à ladite dame par
le sieur de V ig ier, son mari, dans son contrat de mariage du onze
février 1722, nomma ledit sieur de Yigier futur c'poux, pour recueillir
l’efFet de ladonation de la moitié de tous ses biens par eux faite au profit
de celui de leurs enfans à naître qui seroit choisi par eux ou par le sur
vivant d’eux; et en vertu du pouvoir spécial porté en ladite procuration,
il donna à titre de donation entre-vifs audit sieur de Y igier, futur
époux, tout le surplus des biens, meubles et immeubles, présents et à
venir de ladite dame, et réserva à ladite dame Vigier la liberté de dispo
ser par acte entre-vifs ou à cause de mort d’ une somme de dix mille
livres à prendre sur les biens par elle donnés; se réserva pareillement,
ladite dame Yigier, (et pour elle ledit sieur procureur constitué), le retour
et réversion à elle et aux siens des biens par elle donnés audit sieur futur
époux, dans le cas où il viendroit à décéder sans enfants, ou ses enfants
sans descendants, ou sans avoir valablem ent dispose.
Ce ne fut que
plus de onze ans après le mariage <le sa fille que, le vingt octobre 1771,
le sieur Delsol en contracta un second avec la demoiselle Dubois. Dans
�( 48 )
ce secoud contrat de m ariage, les époux donnent la moitié de leurs biens à un des enfants à naître qui seroit choisi par eux ou par le survi
vant.— Le 11 juillet 1780, le sieur Delsol fit un testamentpar lequel,après
avoir légué mille livres à la dame d’Orcet, et soixante mille livres à cha
cun de ses trois enfants, il institua pour son héritier universel son fils
aîné du second lit, et, a son défaut, ses autres enfants par ordre dé primogéniture, voulant expressément que dans le cas où la dame d’Orcet
viendroit à mourir sans enfants, ouses enfants sans descendants, sonliéritier profitât du droit de retour par lui stipulé dans le contrat de mariage
de sa fille. — Ce testament fut déclaré nul pour vice de forme par sen
tence du bailliage d’Aurillac du vingt-neuf août 1782, laquelle ordonna
le partage de la succession du sieur Delsol, pour en être délaissé aux
enfants du second lit trois douzièmes pour leur,légitime de droit, et les
neuf autres douzièmes à la dame d’Orcet, en vertu de l’institution con
tractuelle. Ce partage fut ainsi exécuté. — Devenus majeurs, les sieurs
Delsol frères, tant eu leur nom que comme cohéritiers de Sophie, leur
sœur morte ab intestat, ont passé avec la dame d’O rcel, les dix ventôse
et vingt-trois germinal an neuf, deux actes séparés par lesquels les sieurs
Delsol, en approuvant le partage des immeubles de leur père, cédoient
à la dame d’Orcet le huitième revenant à chacun d’eux dans l’argent
comptant, le prix du mobilier, les créances perçues, et lçur part dans la
somme de dix mille livres portée par le contrat de mariage du deux juin
17G0, en quoi que le tout puisse êlre cl consister, sans autres réserves
que celles ci-après : (la dame d’Orcet demeure chargée des dettes de la
succession; au moyen de ce, les parties se tiennent respectivement quilles
du pas se jusqu ahuy, et promettent ne plus se rien demander l’une à
l’antre.)— Parmi les biens restés ¿1 la dame d’Orcel étoil une partie de
la montagne appelée de Broussette ; elle l’a vendue au sieur Delsol aîné,
par acle du vingt-huit fructidor an d ix, moyennant douze mille livres,
dont il a payé huit mille livres, et la dame d’Orcet l’a tcuu quitte des
quatre mille livres restantes, au moyen de ce qu’il a renoncé au quart
des créances à recouvrer. — Le sieur Delsol n’a vu aucun danger dans
cotte acquisition. — Le quinze avril 1806, la dame d’Orcet vendit au
�( 49 )
sieur Desprats un pré appelé de Cancour, lequel fait partie des biens
du sieu r Delsol. — Peu après a paru l'arrêt de la cour de cassation, du
onze frimaire an quatorze, qui a validé un droit de retour convention
nel et coutumier, auquel on \ouloit appliquer la loi suppressive .des
substitutions. Alors le sieur Desprats, craignant à tort d'être un jour
évincé de’ son acquisition, refusa d’en payer le prix; sur le commande
ment qui lui a été fait le onze juillet, il a répondu que le droit de retour
étant une stipulation conditionnelle qui passe aux héritiers, il avoit
juste sujet d’appréhender d’être troublé dans la propriété du pré de
Cancour, et de demander par conséquent à résoudre la vente, ou à re
tenir le prix, ou à payer sous caution. Ce refus obligea la dame d’Orcet
à se pourvoir en justice, et à demander contre le sieur Desprats la con
tinuation de ses poursuites, et contre les sieurs Delsol la nullité de la
clause. Cités au bureau de paix, l’aîné a répondu qu’il ne connoissoit
pas le contrat de mariage de sa sœ ur, qu’il ignoroit si son père avoit
stipulé un droit de retour, qu’en le supposant ainsi, il n’auroit qu’une
espérance. On a pre'tendu pour le cadet qu’il avoit changé son domi
cile à Paris, et sous ce prétexte on a éludé la clôture du procès-verbal
jusqu’au onze août. Assignés au tribun al, chacun d’eux a constitué
avoué, et après avoir tergiversé pendant plus de huit mois, ils ont de
mandé par des exceptions séparées à être mis hors de cause, s’agissant,
disoient-ils, d’un droit non ouvert. Dans cet état, la cause porlée à l’au
dience du cinq juin 1807, ^ intervint un jugement par défaut qui or
donna qu’ils défèndroient au fond. Ils ont fait signifier des défenses le
deux juillet, en protestant de se- pourvoir contre le jugement du cinq
juin. Quoiqu’ils eussent donné leurs moyens par écrit, les sieurs Delsol
n’ont pas voulu les plaider à l’audience. L e six août un second jugement
par défaut a déclaré nulle la clause du droit de retour, et a ordonné la
continuation des poursuites contre le sieur Desprats. Les sieurs Delsol
ont formé opposition à ce jugement, et ce n’est que le dix-neuf février
1808 qu’ils se sont enfin présentés à l’audience, où, sur plaidoiries res
pectives pendant quatre audiences, il a été ordonné une instruction par
écrit au rapport de M. Delzons., président.
n
�( 5o )
Dans le droit, la cause présente à ju ger,
i° Quels biens ont été, et pouvoient être compris dans la clause de re
tour réservée par le sieur Bazile Delsol dans le contrat de mariage de
la dame d’Orcet sa fille;
2° Si cette réserve étoit limitée à la personne du sieur Delsol, ou pouvoit êlre transmise à ses héritiers;
3 ° Si dans le cas de la transmissibilité, ce droit de retour ne se seroit
pas confondu dans la personne delà dame d’Orcet avec sa qualité d’héri
tière contractuelle de son père.
~
Sur la première question, attendu,
i° Q u e, conformément au Code civil, dans l’interprétation des con
ventions , on doit plutôt rechercher quelle a été la commune intention
des parties contractantes, que s’arrêter au sens littéral des termes j
que les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans celui qui
convient le plus à la matière du contrat ; que toutes les clauses des
conventions s’interprètent les unes par les autres, en donnant à cha
cune le sons qui résulte de l’acte entier; que, dans le doute, les con
ventions s*interprètent contre celui qui a stipulé, ou qui pouvoit faire
la loi ;
2° Que l’objet du droit de retour conventionnel est de faire rentrer
dans les cas prévus, dans le domaine du donateur, les choses par lui
données; que dès-lors, on ne peut le supposer ou l’admettre que dans
les conventions et cas où un donateur s’est dépouillé de sa propriété.
et peut ensuite la reprendre ;
• 3 ° Que le sieur Delsol ayant fait une donation entre-vifs à sa fille, et
l’ayant, par le mem^ o n tratv instituée son héritière universelle, il seroit
contradictoire et comrb la nMure d’une institution que la réserVe de re
tour par lui stipulée en même temps, s’appliquât, a u x biens quifaisoient
l’objet de cette institution, dont la propriété et toute disposition à titre
onéreux ne laissoient pas de rester en son p o uvoir, et dont il ne se dépouilloit pas ; qu’il seroit dès-lors ridicule de supposer qu’il songeoit à
faire rentrer dans scs mains cc qui n’en oorloit pas, cl ne pouvoit pas
en sortir'cie son vivan t;"
‘
!
"
’
�( 5 i )
i: 4 0lQ ue sens c^e t’actc entier , et l’intention' Lien connue des parties
étoit d’assurer , dès l’instant/à la dame d’Q rcct, à titre de donataire, et
tant en nue propriété' qu’ usufruit, une partie de la fortune de son père ,
et le surplus aprèsfsa m ort, sans cfue»la donataire pût cependant dispo
ser de rien, au préjudice de son père, clans les cas prévus par la clause
de rçUmr ; .
>
i
5 ° Qu’il s’ensuit» dès-lors que, quoiqu’on lise dans cette clause que le
sieur Delsol se réserve le droit de réversion et retou r, lailt des biens
donnés,que réservés, les principes ci-*dessus énoncés permettent d’au
tant moins de supposer que, par les mots de biens réservés, les parties
-avoient entendu les biens de l’institution, que peu de lignes aupàravant
elles les avoient désignés sous le nom de biens institués ; qu’il est plus
naturel do croire que les-mots biens r é s e r v é s ont échappé à l’inadver
tance du rédacteur; d’autant plus que toute la contexture de la partie
t du contrat de mariage, qui concerne les dispositions du sieur Delsol,
prouve que ce rédacteur avoit les notions les plus obscures sur la nature
et les effets des institutions contractuelles ;
6° Qu’il se peut encore (car toute conjecture est admissiblè dans l’in
terprétation d’une clause aussi extraordinaire) que, par retour des biens
• réservés ou institués, on ait voulu entendre la caducité de l’institution
en cas de prédécès de l’héritière instituée et de ses*enfants ;
70 Que s’il falloit donner quelque sens, quelques effets à la clause de
retour des biens réservés, y reconnoitre les biens de l'institution, et
supposer que le sieur Delsol vouloit les faire rentrer dans sa famille
après son décès et celui de sa fille ; cette clause contrariant évidem
ment la nature et les principes du droit de retour > ne'pouvoit être en
visagée que comme une charge de fidéicommis, comme une véritable
substitution dont il auroit voulu grever sa fille, et laquelle seroit abrogée
par les lois du quatorze novembre 1.792.
Sur la seconde question, attendu ,
• J'
■
■: ‘ ‘ 1
l ° Que quoique la majorité des auteurs, et plusieurs même très
estimables, aient lenu quVn général l'effet de la stipulation de retour
conventionnel, eu faveur du donateur, sans qu’il fût fait mention de se*
�...
( r' 2 )
.
.
héritiers, étoit transmissible à son héritier comme toute autre stipulation,
même conditionnelle, apposée dans les contrats ; quoiqu’il se trouve
même deux arrêts qui l’avoient ainsi jugé, tous s’accordent cependant à
dire, et la saine raison suffît pour prouver, que cette transmissibilité ne
peut avoir lieu lorsque la stipulation de retour a été limitee à la per
sonne du donateur ;
2o Que , dans l'espèce actuelle, cette limitation à la personne du sieur
Delsol rés'ulte évidemment, soit de la circonstance que la
V ig ie r^ mère du futur époux, lui faisant donation de tous biens, s’en
réserva le retour pour elle et le s s i e n s , tandis que le sieur Delsol ne le
re’serva que pour lui ; que cette différence remarquable dans les deux
clauses insérées dans le même a cte, d’ailleurs parfaitement semblables,
annonce clairement que les parties vouloient, quant à ce , leur donner
une étendue différente ;
3 ° Que celte différence dans la stipulation s’explique encore par la
.
circonstance importante que la dame de Vigier avoit plusieurs enfants,
pour lesquels sa sollicitude maternelle l’engageoit à conserver ses biens,
au lieu que le sieur Delsol n’avoit qu’une fille unique , et aucun proche
parent ;
/¡° Que la prohibition si entière, si absolue de disposer, que le sieur
Delsol imposoità sa fille, prouve encore qu’il ne stipuloit que pour lu i}
n’étant pas présumable qu’il mît sa fille dans un tel état d’interdiction
e n f a v e u r d e p a r e n t s é lo i g n é s , a v e c l e s q u e ls i l n ’a v o i t a u c u n e s r e la
ti o n s , q u e le s p a r t ie s m ê m e n e c o n n a i s s a ie n t p a s , a in s i q u e l a d a m e
d ’O r c e t l’a p l u s i e u r s j Ois d i t e t é c r i t , s a n s q u e le f a i t a i t é t é d é s a
voué ;
.
.
5 ° Que celte limitation résulte sur-tout de la circonstance que le sieur
Delsol, après avoir fait à sa fille une donation entre-vifs , l’instiluànt en
même temps son héritière universelle, il seroit absurde de supposer
qu’il eût fait et voulu faire contre cette heriliere une reserve qui ne devoit et ne pouvoit profiter qu’à elle-même , puisqu’en admettant le sys
tème de transmissibilité du droit de retou r, cette transmission n’auroit
pu avoir lieu qu’en faveur de celte même héritière.
)
�C 53 )
Sur la troisième question , attendu ,
i» Comme il vient d’être d it, que l’action résultante d’une réserve
de retour, même indéGnie, ne pouvoit profiter qu’aux héritiers comme
faisant partie des actions héréditaires ;
.
20 Q ue, dans l’espèce, la dame Dorcet, étant seule héritière univer
selle, forme un véritable héritier qui ne diffère que de nom de l’héritier
testamentaire, quant à l’universalité du titre; que cette institution met
l’institué à la place des héritiers du sang, et le cas avenant, le saisit de
tous les droits de l’hérédité ;
3 ° Que les autres enfants même de l’instituant, suivant les principes
univèrsellement reçus lors du décès du sieur Delsol, perdoient par FefFet
de cette institution la qualité d’héritiers et ne conscrvoient qu’uu simple
droit à une portion des biens à titre de légitime ;
4 ° Que dès-lors la réserve de retour transmissible, quoique dirigée
contre un héritier institué, (s’il étoit possible de la présum er), se seroit
confondue avec l'effet de l’institution par le concours de deux qualités
de donataire grevée de retour, et d’héritière seule appelée à en proGter.
L e T R IB U N A L déboute les sieurs Jean-François et Gabriel-Barthélemy Delsol de l’opposition par eux formée au jugement par défaut faute
do plaider, du six août 1807, ordonné que ce jugement sera exécuté
selon sa forme et teneur; en conséquence, déclare personnelle au sieur
Delsol père, et caduque par son prédécès, la stipulation de retour par
lui réservée dans le contrat de mariage de la dame d’Orcet sa fille, or
donne que les poursuites commencées contre le sieur Desprats seront
continuées, en cas de refus ultérieur de sa part dè payer les termes du
prix.de la vente du pré de Cancour à proportion de leur échéance,
ainsi que des intérêts, tous dépens compensés entre toutes les parties,attendu la proximité des sieurs Delsol et dAmc d’Orcet, que les premiers
n ont pas provoqué l’instance, cl attendu que le sieur Desprats a pu avoir
jusqu’à un certain point un juste sujet de crainte sur la validité de son
acquisition et la sûreté de ses fonds j et sera, le présent jugement comme
fondé en titre, exécuté vis-à-vis le sieur Desprats , nonobstant cl sans
�( 54)
préjudice de l’appel, à la charge néanmoins par la dame d’Orcet de don
ner, en cas d’appel, bonne et suffisante caution>à concurrence des ca
pitaux exigibles. Fait et jugé au tribunal civil de première instance,
établi à Aurillac, chef-lieu de préfecture du département du Cantal , le
vingt-deux juillet mil huit cent huit, séants, messieurs Delzons prési
dent, membre de,la légion d’honnqurjjDelzorts et L aval, juges. Man
dons et ordqrçnons à tous huissiers sur ce requis de mettre le présent
jugement à exécution, à nos procureurs près les tribunaux de première
instance d’y tenir la m ain, à tous commandants çt officiers de la force
publiquo de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis. En
foi de quoi le présent jugement a été signé par le président et par le
greffier. Sign é à la m inute, monsieur D e lz o n s , président j et BrunoH ,
greffier. Pour copie conforme à l’expédition, sig n éL abro , avoué. ”
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�PRÉCIS
PREMIERE'
CAUSE
du rôle de
Paris
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PO U R le sieur René-Louis L IIÉ R IT IE R et consbrs, intimés ; (de 17670
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C O N T R E messire J o s e p h . marquis de M E S M E S .
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sieur Louis Lhéritier, par l e contrat de mariage de demoiselle MarieAlberline Racine, sa belle-nièce, avec le sieur marquis.de,Ravignan, du
18 mars 1 7 1 2 , a promis donner à la demoiselle, lors future épouse, la
somme de 3o,ooo liv ., qu’il lui a effectivement payée peu après; mais il a
été stipulé en même temps q u e l a d i t e s o m m e r e t o u r n e r o i t a u d i t s ie u r
L h é r i t i e r , d o n a t e u r , e n c a s d e d é c è s d e l a d e m o is e lle f u t u r e é p o u s e
s a n s e n f a n t s , e t e n c o r e e n c a s q u ’i l y e û t d e s e n f a n t s , e t q u ’ils v i n s
s e n t à d é c é d e r a v a n t d ’ê tr e p o u r v u s , o u a v a n t d ' a v o i r a tte in t l ’â g e
d e m a jo r i t é .
,
t
,
L a donataire n’avoit alors que vingt-trois ans et dem i, le donateur étoit
dans la soixantième année de son âge, et il avoit deux enfants mâles âgés
l’un de dix-sept ans et l’autre de treize (1). C’est donc évidemment pour
ses enfants et héritiers, encore plutôt que pour lui-même, qu’il stipuloit
cette réserve, dont il ne pouvoit pas se flatter de profiter personnelle
ment.
Quoi qu il en soit, le donateur est decede en i " 3o. Long-temps après,
et le 3o novembre 17C4, la demoiselle Racine, donataire, est décédée sans
avoir laissé d’enfants, ni de son premier mariage avec le sieur marquis de
Ravignan, ni de son second mariage avec le sieur comte de Darnpus.
En conséquence, les intimés, comme représentant le sieur Louis L hé( 1) Laine’ , conseiller au parlement, a s u r v é c u au donateur son père, dont il aliérilé. Il estaujourd hui représenté par les intimas, scs héritiers bénéficiaires, <jui sont en müne temps héritier»'
substitués du donateur leur oucle.
Delà trans
mission de*
stipulation!
Condition-
neiies , et
de celles du
retour tu
particulier
�( 5 6 )'
ritier, donateur, ont formé contre le sieur marquis de Musinés, dona
taire universel de la demoiselle Racine, veuve Dampus, et chargé à ce
titre de ses dettes antérieures au premier avril 1749» leur demande en
restitution des 5o,ooo liy. données par leur auteur, conformément à la ré
serve stipulée p arle contrat de 1712.
L a cause portée à l’audience du parc civil du Châtelet de Paris, il y est
intervenu le 29 juillet dernier, sur les plaidoiries respectives des parties
pendant cinq audiences, sentence par laquelle, attendu le décès de la
dem oiselle R a cin e, veuve D a m p u s, sans enfants j le marquis de
Mesmes, son donataire universel, est condamné à restituer aux intimés
les 3o,ooo liv. dont la réversion avoit été stipulée par leur auteur. C ’est
de celte sentence que le marquis de Mesmes est appelant. Il ne sera pas
difficile d’en établir le bien jugé.
A. cet effet, nous examinerons les principes généraux sur la transmis
sion de toutes stipulations conditionnelles ; les décisions des docteurs et
des lois sur la transmission .du retour conventionnel en particulier, et
l’état actuel d elà jurisprudence sur cette question.
P R E M I È R E
P A R T I E .
P rin cip es généraux sur la transmission de toutes stipula
tions conditionnelles.
\
.
Un seul mot suffît pour justifier la sentence dont est appel, c’est que
la condition sous laquelle le retour a été réservé, se trouve aujourd’hui
purifiée par le décès de la demoiselle Racine, donataire,«ans enfans.
Inutile d’opposer que le donateur est décédé avant l’événement de la
condition. Celte circonstance est des plus indifférentes, parccquc le re
tour a été stipule pour avoir lieu, non en cas de p réd é cè s, mais simple
ment en cas de décès de la donataire sans enfants : o r , cette condition se
trouve purifiée par 1 evenement.
Il est vrai que les héritiers du donateur n’ont pas été appelés nommé
ment à recucillii le profit du retour; mais les héritiers n’ont pas besoin
de la vocation de l’homme pour profiter des droits dont leur auteur est
�( *7 )
,
décédé saisi ; ils n’ont besoin que de celle de la loi qui les saisit de lous les
droits du défunt, qui les subroge à sa saisine en la continuant en leur per
sonne. En conséquence, il leur suffit que celui auquel ils succèdent ail été
vraiment saisi du droit qu’ils réclament, que ce droit ail fait partie de ses
biens. Or les actes entre-vifs, même conditionnels, saisissent Loujours à
l’instant même, sans attendre l'événement de la condition. Les actions qui
en résultent, quoique non encore ouvertes, sont in bonis du stipulant :
conlractus, ctsi condilionalis, tamen e x prevsenti vires accipit, dit
Vinnius. I n contractibus id tempus spectatur quo contrahim us, dit la
loi 78 , ff. de verb. oblig.
D e là , celte règle générale rebattue dans tous les livres élémentaires,
et notamment dans les Institutes, que les stipulations conditionnelles se
transmettent à l’héritier, quoique le stipulant soit décédé avant l’évèncment de la condition. E x s t i p u l a lio n e c o n d ilio n a li ta n tin n s p e s e s t d e b itu m i r i , e a m q u c i p s a tn s p e m in h œ r e d e m tr a n s m ittim u s s i p r ii/s
q u à m c o n d i t io e x s t e t , m o r s n o b is c o n t i n g a t , liv. 3 . t. iG. p. 4 - C ù m
q u is s u b a l i q u â c o n d itio n e s ti p u la tu s f u e r i t , p o s t e à e x is te n te c o n d i î i o n e , h œ r e s e ju s a g e r e p o t e s t , même liv. t. 20. p. i 5 .
En vain voudroit-on apporter quelqu’exceplion à cette règle; les lois
décident qu’on n’en doit admettre aucune : O E N E R A L I T E R s a n c im u s
O M N E M s t i p u l a t i o n e m s iv e in d a n d o , s iv e i n f a c i e n d o , s iv e m i x l a e x
d a n d o e t fa c ie n d o in v e n ia tu r , e t a d h œ re d e s e t c o n lr a h œ re d e s Ira n sm i t t i , S I V E SPECIALIS' H ÆREDUM F I A T MENTIO, SIVE NON:
jiv. i 3 . cod. d e c o n tr a h . e t c o m m . s tip u l.
En vain opposeroit-on que le stipulant qui n’a parlé que de lui-même,
qui n’a pas nommé ses héritiers, a entendu restreindre la stipulation à sa
personne ; la loi répond qiiela stipulation n’en est pas moins r é e l l e : p leriu n q u sen im , ul Pedius a it, persona p a clo Inseritur, non ut p ersonalc pactum f i a t , sed ut dem onslretur cum quo paclum faclum est,
liv. 7. p. Ulrum. 11’. de pactis.
P ou r tout dire en un inol, l’héritier n’a point à prouver que son auteur
a voulu stipuler pour lui. Il lui suilil qu’il n’y ait pas eu d’intenlion de
l’exclure. O r celte intention n’est pas à supposer lorsqu’elle 11’cst pas ex
'
8
�_
Traité
n. 65o.
.
( 58)
primée. C’est ¡1 ceux qui le prétendent exclus à prouver son exclusion :
Quamvis verum est qu od qui ex cip it, probare debet q u o d excipitur ;
attam en de ipso dum taxat, a tn o n de hcerede ejus convertisse petitor,
non qu i e x c ip itp r o b a r e debet ; liv. 9. II'. de prob. et preef.
Il en est autrement des dispositions (1) conditionnelles de l'homme ou
de la loi. Elles 11e se transincltent pas à l’héritier de l’appelé décédé avant
l’événement de la condition , ( et voila pourquoi le retour légal n’est pas
transmissible ) mais c’est pareeque les héritiers ne recueillent du chef de
leur auteur> et comme transmissionnaires, que les droits dont il est dé
cédé saisi : or les dispositions conditionnelles 11c saisissent qu'au moment
de leur ouverture. Jusque-là elles ne sont point m bonis de l’appelé.
Inutilement le testateur en auroit-il ordonné la transmission ; elle n’auroit pas lieu pour cela, dit R icard, pareeque le testateur ne peut pas donner à ses dispositions un effet rétroactif, que les lois leur refusent, ni
opérer une transmission qui n’est l’ouvrage que de la loi, et qui ne dérive
Xoalis de
pas de l’inlention de l’homme. Il est vrai qiie dans ce cas l’bérilier viendroil de son chef et en son nom, comme appelé lui-mênje en vertu de la
vocation expresse du testateur; mais il ne viendroit pas comme transmissionnaire, ce qui est bien différent à tous égards. Æ iu d e n im est trans-
sione™su m issioy et aliud est vocatio.
‘
■omnicnceSi donc la transmission a lieu pour les stipulations conditionnelles , et
ment.
. . .
.
.
1
non pour les dispositions, cela ne vient pas, comme 011 vo it, de la diffé
rence d’intention,, puisque l’intention même expresse est incapable d’opé
rer la transmission dans les dispositions conditionnelles ; il est évident
que c’est la saisine seule qui transmet, pareeque la transmission n’est
elle-même qu’une continuation de saisine.
L e sieur marquis de Mcsmes , dont les prétentions ne s’accordent pas
avec ces principes, fait tout son possible pour en éliuli;r l'application;
(1) I.a disposition proprement dite, par opposition aux stipulations, est un acte pur de la voloutë
qui se passe hors la présence, et sans la participation de celui (pii eu est 1 objet. Telles sont les dispo
sitions testamentaires. Telles- sont aussi les substitutions contenues dans 1rs acles entre-viCs, aux«juuls le substitutn’interviciit pas; car sil iutervenoitpour accepter, il scrrçit donataire couditionn<l, et l’acte seroit à son égard un pacte, uue convention, uu contrat, une stipulation, et non pas
une dispusltion..
'
�C *9 )
forcé de convenir que tous actes entre-vifs, purs et simples ou condition
nels, saisissent actuellement et nécessairement, il ne veut cependant pas
rcconnoître que la transmission en doive être la suite ; il aime mieux la
faire dériver de la présomption générale, qu’en stipulant pour nous,
nous sommes censés avoir parlé pour nos héritiers; puis, restreignant
celte présomption aux seuls contrats intéressés, il en conclut que la trans
mission des stipulations conditionnelles n’a pas lieu lorsqu’elles se rencon
trent dans les contrats bienfaisants.
Mais i° il est faux que les contrats intéressés soient les seuls dans les
quels le stipulant est censé avoir parlé pour scs héritiers ; la règle est
générale pour toute espèce de contrats, puisque les lois n’ont fait aucune
exception, puisqu’au contraire elles ont exclu toute exception par la gé
néralité et l’universalité absolue de leurs expressions. G e n e r a l i t e r
s a n c im u s O M N E M s t i p u l a t i o n e m ........... tr c in s m itli, s iv e s p e c ia lis h œ ~
r e d u m / i a t m e n t i o , s iv e n o n .
a° Le sens do la règle n’est pas précisément quo nous sommes pré
sumes avoir pensé à nos héritiers et ayants-cause, et avoir positivement
voulu stipuler pour eux ; car il est bien rare que les contractants y pensent,
positivement, et on ne présume pas ce qui arrive rarement. Le vrai sens
de la règle est seulement que le stipulant, qui n’a pas formellement res
treint la stipulation à sa personne, ne peut pas être supposé avoir voulu
exclure scs héritiers. Or celle présomption, nécessairement applicable à
toute espèce de stipulation, suffît toute seule, non pour en opérer la
transmission, car c’est la saisine seule qui l’opère , mais pour écarter les
obstacles qui pourroient l’arrêter ou la rendre inefficace.
Que le contrat soit intéressé ou bienfaisant, il n’importe (i). Puisque
(i) En matière de contrats, dit Ricard, la stipulation qui en fait le principal commerce oblige
dès-lors réciproquement les parties de l’accomplir au cas de la condition qui, à proprement parler^
ne passe que pour une restriction, pour le cas prévu par. les parties seulement, ei laisse au surplus la
convention pure et simple, de sorte que lechéance arrivant, la condition est cense'e comme non
écrite. Pour ce qui concerne le legs au contraire, la couilitiou en affecte tellement la disposition ct
la substance, qu’il ne subsiste absolument qu’avec e l l e ct que par elle ; de sorte que comme ce n ’est
p a s le titre de g ra tu it ou d ’onéreux qui p r o d u i t cette différence, mais la qualité de l acte, s ’il
est testam entaire, c’e st-à -d ire , s a n s stip u la tio n , et un p u r acte de la volonté d'une personne ,
�( 6° )
dans l’un et dans l’aulre la saisine y a lieu de plein droit, comme l’appe~
Jant en convient lui-m êm e, il faut bien qu’elle soit continuée dans la per
sonne des transmissionnaires. On ne peut pas les supposer exclus par le „
Stipulant,, lorsque celui-ci n’a pas prononcé leur exclusion;, o r , s’ils ne
sont pas cxclus, il est dans l’ordre des choses que, comme successeurs
universels ou singuliers du transmettant, ils succèdent à la saisine com
mencée en sa personne, comme à tous scs,autres droits, quand même il
n’auroit point du tout pensé à eux.
D’ailleurs on peut dire que tous ceux qui contractent, sans même qu’ils
aient jamais pensé à la transmission, ont cependant, du moins im p l i c i t e
m e n t et éminemment, une véritable intention de transmettre. En ofl'et,
quiconque stipule veut a v o i r , posséder, acquérir, en un mot ajouter ou
r é u n ir & son patrimoine ce qui fait l’ol»jet de sa stipulation, a d r e m j ' a m i l i a r e m r e s p i c i t , comme dit Yinnius; s’il ne stipule que conditionnelle
ment, il ne veut a v o ir que pour le cas de la condition., mais il veut a v o ir
pour ce cas-là en quelque temps que la condition puisse arriver : or, a v o ir
une chose, c’est incontestablement être en droit d’en jouir, faire et dis
poser comme de tous ses autres biens, de la vendre, de l’engager, delà
léguer, etc., et par conséquent de la, transmettre à sesayants-cause, à
plus forte raison à ses héritiers.
Ainsi quand même la transmission ne dériveroit que de l’intention detransmettre, comme cette intention se rencontre, non à la vérité e x p l i c i t e m e n t , mais du moins i m p l i c i t e m e n t et é m i n e m m e n t , dans toute
espèce de stipulation apposée à toute espèce de contrats , sans même que
ou s’i l est conventionnel et f a i t entre deux personnes, i l n ’y a pas de doute que les donations
suivies d’acceptation, p a rticip a n t à la nature de ces derniers actes, les conditions qui s’jr ren
contrent ont un effet rétroactij au jo u r de la do n a tio n , ainsi <[uc dans les autres contrats. El ail
leurs : si une donation sous condition estfa ite entre-vifs, quoique la condition u arrive qu’après
la mort du donataire, ses héritiers ne laisseront ¡¡as de. jo u ir du bénéfice de la donation, comme
ayant clé p a r f a i t e tiu moyen de ¡[effet rétro a c tif q u iT s f d onné à j a donation, du fo u r b u ’elle a
été passée; car, ajoute-t-il, uTn'cstpa's seulement la qualité de donation entre-vifs qui f a i t la
transmission au profit des héritiers du donataire, mais l ’effet rétro a ctif du droit et de !* posses
sion au jo u r du contrat. Traité des dispositions conditionnelles, chap. 5, § i , n. ao4. Tiaitc des
substitutions, chap. 4, partie première, u.. l4a et i44..
�( 61 )
le stipulant ait jamais pensé à scs héritiers; il seroit toujours vrai de dire,
d’après les lois, que les stipulations conditionnelles sont toutes transmissibles de leur nature, soit qu’elles se trouvent dans des contrats intéres
sés , soit qu’elles sc rencontrent dans des conlràts bienfaisants. II seroit
toujours vrai de dire que le transmissionnaire n’a rien à prouver, et que
c’est à celui qui prétend l’exclure à prouver son exclusion.
Nous convenons avec le sieur marquis de Mesmes que si la stipulation
étoit personnelle, la transmission n’auroit pas lieu en faveur des héritiers
du stipulant ; mais là personnalité ne se présume jamais. Pour la supposer
il f a u t ( dit M. Potlner en son Traité des obligations, t. i. p. 75 ) que
cela soit exp liq u é clairement dans la convention; et ainsi, ajoute-t-il,
de ce que la personne envers laquelle j e contracte qiieh/u engagement
est nommée p ar la convention, iln e s’ ensuit p as que Yintention des
parties ait été de restreindre à sa personne le droit qui en résulte ; on
doit penser au contraire qu’elle n’est nom m ée que p o u r marquer avec
qui la convention estfaites
Nous convenons encore avec Fontanella, qu’en fait de stipulations con
ditionnelles, lorsque la condition est perso’nnelle, c’est-à-dire de nature
à 11c pouvoir s’accomplir que dans la personne du stipulant, Quandà
apponitur irt personâ stipulatoris, la transmission ne peut y avoir lieu
qu’autant que le stipulant auroit lui-même recueilli l’objet de la stipula
tion par l’existence de la condition purifiée de son vivant; mais c’est parceque, comme il l’ajoute fort bien , la condition n’étant pas arrivée pendant
la vie du stipulant, son décès la rend impossible, et qu’ainsi il ne reste
plus d’espérance à transmettre. Ce cas n’est donc pas une exception à la
règle*générale du paragraphe E x conditionali, qui n’en reçoit aucune;
c’est seulement une espèce dans laquelle la règle du paragraphe ne peut
pas recevoir son application, pareeque le paragraphe, parlant de la trans
mission des stipulations conditionnelles, suppose que la condition puisse
encore arriver, quoiqu’après le décès du stipulant : or elle ne peut plus ,
arriver après son décès? si elle ne tlcvoil s’accomplir
en sa personne.
Pour appliquer à notre espèce le principe de Fontanella, il faudroit
prouver que la condition sous laquelle le retour a été stipulé ne pouvoit
�( 62 )
s’accomplir qu’en la personne du donateur el de son vivant; mais il n’en
est pas ainsi. L e fait du de'cès de la donataire sans enfants, qui fait la seule
condition du retour, pouvoit s’accomplir indifféremment du vivant du
donateur ou après son décès. Celte condition étoit absolument extrin
sèque à sa personne, pour nous servir des expressions de cet auteur, cl
dès-lors il est constant qu’elle n’a pas pu rendre la stipulation person
nelle.
Il est vrai que, suivant Iîicard et le journaliste des Audiences, les clauses
de retour doivent s’interpréter strictement; mais ils n’ont jamais conclu de
là qu’il fallût en empêcher la transmission. La seule conséquence qu’ils
aienttirée de ce principe est qu’il ne faut pas étendre ces sortes de clauses,
et qu’ainsi le retour étant stipulé pour le cas du décès du donataire sans
enfants, il ne falloit pas l’étendre au cas du décès de ses enfants sans
enfants.
O r, ce n’est pas donner de l’extension à une stipulation que de la sup
poser transmissible aux héritiers du stipulant. Cette transmissibilité est
une suite nécessaire de la saisine attachée à toute stipulation, et de l’in
tention à'avoir et acquérir quise rencontre dans tous les stipulants, lors
même qu’ils n’ont pas pensé à leurs héritiers ; car nous n’avons véritable
ment que ce que'nous pouvons leur transmettre.
Aussi, quoique dans le droit romain les stipulations proprement dites,
Solem nes verborum con cep lion es, fussent de droit étroit cl très-étroit,
quoiqu’on leur donnât le nom propre de contrats strictijuris, par oppo
sition aux contrats de bonne foi, quoiqu'on conséquence on les interpré
tât toujours en cas de doute contre le stipulant, quia debilitlegem aperhiis dicere contractm , ]a règle étoit cependant sans aucune exception
de les declarer transmissibles aux héritiers du stipulant, Gcncrahlcr sancimus om nem stipulalionem , etc.
>
Au contraire, les dispositions conditionnelles, qui cependant sont sus
ceptibles de l’interprétation la plus large, ne profitoient pas aux héritiers
de l’institué ou légataire décédé avant leur ouverture, à moins qu’ils n’y
fussent compris expressément; mais c’est pareeque la transmission dans
ce cas est impossible, comme nous l’avons observé déjà , à défaut de sai
\
�(63 )
sine préexistante. Dès-lors l’héritier de l’appelé ne pouvoit être admis à le
remplacer que par voie de vocation, comme appelé lui-même. Or la vo
cation doit être expresse et ne se supplée pas (à la différence de la trans
mission , qui est toujours de droit en cas de saisine préexistante), ¿ tliu d
est transmissio, et aliud est vacatio.
En deux m ots, toute stipulation conditionnelle est nécessairement
transmissible à l’héritier du stipulant, si la condition peut encore recevoir
son accomplissement, parcequ’au moyen de la saisine attacliée aux actes
entre-vifs, le droit qui en résulte a fait partie des biens du transmettant,
dès le temps même de l’acte. II n’est pas nécessaire pour cela de donner
à la clause aucune extension, pareeque c’est la loi seule, la force'de la sai
sine, et non pas l'intention positive de transmettre, qui opère la trans
mission. Il est vrai que la saisine elle-même dépend en quelque sorte de
l’intention du stipulant; mais c’est seulement en ce sens qu’elle ne s’ap
plique qu’aux droits que les parties ont eus en vue, et pour les cas qu’elles
ont exprimes. Du reste, une fois que la condition prévue par les parties
est arrivée, il devient constant que la saisine h eu lieu ab ini/io, et que la
transmission s’en est suivie, sans que les stipulants y aient seulement pensé.
Il ne pourroit y avoir de question que sur le point de savoir sous quelle
condition les parties ont entendu contracter,, si c’est seulement sous la
condition exprimée dans l’acte, ou si c’est encore sous la condition de la
survie du stipulant; mais pour suppléer cette seconde condition, lors
qu’elle n’est pas exprimée, il fuudroit ajouter à la lettre de la clause : or
c’est ce que la plus grande rigueur ne peut pas autoriser.
S E C O N D E P A R T I E .
Décisions des docteurs et des lois sur la transmission du
retour conventionnel en particulier.
Aussi Fontanclla décide-t-il affirmativement que le retour convention Uc pactiü
nel passe aux héritiers de celui qui l’a stipulé, quoique la condition du nuptialibus
clausula 4,
^ retour ne s’ac complisse qu’après son décès. E t quainvis non esset dietmn glossa ¿4,
n. a3 .
nisi quod reverlcrentur bona donata ad donatorem , nihilominiis
�( 64 )
..
reverti debuissent a d ejus hœ redem , ilio ante donatarium defuncto,
si posteà acfimpleretur co n d itio , quia contractus conditionalis trans_
mittitur a d hœ redes ; ex vulgan paragraphe), E æ con dilion a li.
Il s’objecte la loi Q u o d de pariter, ff. de rebus dubiis, qui paroit sup
poser le contraire ( i ) ; mais il re'pond avec Barlliole et les glossaleurs, qui
depuis ont été suivis par M* Potliier en ses Pandecles Jusliniennes, que
cette loi ne décide pas la question de retour dont il ne s’agissoit pas, mais
seulement une question de survie, savoir, qui des deux de la mère ou de
la fille, péries par incme accident, e'toitcenséô avoir survécu : Q u o d de
pariter mortuis tractavimus in aliis agitatimi est ut ecce, etc. ; qu’à la
vérité, la décision sur la question de survie présuppose le retour dont il
s’agissoit non transmissible, mais qu’apparemment le stipulant avoit ex
prim é, comme seconde condition du retour, l’événement de sa survie, et
que le jurisconsulte aura négligé de rapporter cette circonstance, parcequ’elle n’étoitpas relative à la question principale, ainsi que cela se voit
fréquemment dans les lois du Digeste et du Code.
Cette interprétation lui paroît d’autant plus nécessaire, que sans cela la
loi Q u o d d e p a r i t e r contrediroit manifestement la disposition absolue et
impérative du paragraphe E x c o n d i t i o n a l i , sur la transmission de toute
espèce de stipulation conditionnelle, et les décisions des lois Caius et A v ia
( dont il sera parlé tout-à-l’heurc), sur la transmission du retour en par
ticulier.
”
Il est vrai que Paul de Castres, Covarruvias etMcnocliius ont pris la loi
Q u o d de pariter dans un sens tout différent. Ils en ont conclu que la sti
pulation du retour de la dot pour le cas du décès du mari ou de la femme
pendant le mariage renfermoit tacitement la condition de la survie du
stipulant: habet ista stipulatio tacitam conditionem , si stipulalor sup erv ixerit; mais ils sont obligés de convenir en iniine temps que cette
(i) Quod de pariter mortuis tractavimus in aliis agitatum est ut ecce: Si mater stipulata est dotem
à marito mortuà filid in m atrim onio sibi reddi, et simul cùm filia periit, an ad hærcdem malris
actio ex stipulata competeret ? et divus Pius rescripsit non esse commissam stipulationem , quia
mater filiæ non supervixit : itom quaeritur si extraueus qui dotem stipulatila est, simul cuin marito •
decesserit, vel cum eà propter <|iiam stipulatili esset, an adhæredera actio competerei?
�( <35 )
décision qu’ils supposent à la loi Q u o d de p a rile r est singulière et sans
exemple : Casus est singularis in istâ lege , d it Paul de Castres, nec recordor alibi h oc vid isse : encore du moins, ajoute-t-il, lorsque le retour
est poûrlivoir~Tieu dans le cas du décès du mari p en d a n t le m a ria g e, i^
semble que la faveur des mariages futurs peut faire préférer la donataire
survivante aux héritiers du donateur, afin qu’elle ait une dot pour se
rem arier, ce qui est de l’intérêt public. I n hoc m ajor ratio quant in
p r im o , scih cetfa vo re dolis u t e x ed m u lie rp o ssit iterinn nubere. Mais
lorsque le retour est stipulé pour le cas du d éc è s d eîaT e mine p en d a n t le
m a n a g e, il n’y a pas même raison de faveur (à moins que ce ne soit pour
favoriser le second mariage du mari survivant ) ; se d in p rim o casu
non sic.
Si nonobstant ces raisons pérem ptoires, Paul de Castres et ses secta
teurs ont persisté dans leur interprétation, il ne faut pas croire qu’ils aient
entendu pour cela se départir des décisions d u paragraphe E x condition a li et des lois Caius et A v ia . Ils conviennent qu’en général le retour
conventionnel est transmissible comme toute autre stipulation condition
nelle; seulement ils en exceptent le cas particulier qu’ils supposent dans
la loi Q uod de p a r ile r, c’est-à-dire, celui où le retour a été stipulé pour
avoir lieu, m ortu â f d lâ i n m A T R I MON 10 , ou m ortuo IN M A T R I
m o n i o m an to; de sorte que lorsque le retour est stipulé sous toute autre
condition que celle du décès du mari ou de la femme p en d a n t le ma~
n a g e , i n m a t r i m o n i o ; lorsque, par exemple, comme dans notre
espèce, il est réservé pour le cas du décès de la femme non précisém ent
p e n d a n t le m ariage, mais en général po u r le cas' de son décès sans en
fants, pendant le mariage ou en viduité, alors, suivant les mêmes doc
teurs, les principes reprennent leur em pire, la transmission du retour
s’opère de plein d ro it, on ne sous-entend plus la condition de la survie du
donateur, et l’on suit sans difficulté les règles générales sur la transmission
des stipulations conditionnelles, et notam m ent les décisions des lois Caius
et A v ia .
Celte doctrine se trouve fort bien explique'e p ar Pierre Barbosa, chan
celier de P ortugal, l’un des principaux sectateurs de Paul de Castres. C’est.
0
�( ^6 )
sur la loi C a i u s , if. s o lu lo m a l r i m o n i o , versiculo q u o d c ù m ita . Après
avoir conclu de celle loi et de la loi ¿ d v ia , codicc d e j u r e d o t i w n , que
le retour conventionnel est transmissible, il s’objecte la loi Q u o d d e p a r ite r , qu’il entend dans le même sens que Paul de Castres, Covnrruvias
et Menoehius ; mais il y répond en disant que celle loi n’a lieu que pour
le cas particulier dont il y est parlé, lorsque le retour doit avoir lieu m o r t u â i n M A T n i M O N i o J iltâ . N e g u e o b s t a t d ic t a l e x Quod de pariler,
q u ia l o q u ï t u r q u a n d o q u is s t i p u l a t u r d o te m s ib i r e d d i , m o r t u â
IN
M A X R I M O N I O f i l i d ; n a m tu n e t a c i t a s u b in te llig ilu r c o n d itio s u p e r v i v e n t i œ , u t ib l t r a d u n t d o c t o r e s ; s e d s i g e n e r a l i t e r c o n c e p t a s i t s t i p u
la tio n p r o c e d e r e t i d q u o d s e n t i t is t e x l u s c u m s im ilib u s .
Ainsi la loi Q u o d d e p a r i t e r , de quelque manière qu’on veuille l’en
tendre, est sans application a noire espece ; car il ne s’agit pas dans la
cause deTetour stipulé pour avoir lieu, m o r t u d i n m a t r i m o n i o f i l i â .
D’ailleurs le mari ne gagnant plus la dot par sa survie, comme dans l’an
cien droit, la faveur de son mariage Futur ne milite plus contre les héri
tiers du donateur, et l’intérêt public n’est plus compromis par la trans
mission. En vain diroit-on que le mari survivant profite encore aujour
d’hui, à cause delà communauté, de la moitié de la somme constituée en
dot à sa femme. Il faudroit au moins que la somme n’eût pas été stipulée •
propre de communauté : or, dans l’espèce de la cause, les 3o,ooo liv. don
nées par le sieur Lhérilier ont été stipulées propres.
Il n’en est pas des lois C a iu s et A v i a , comme de la loi Q u o d d e p a r i
le r . Elles sont toutes deux très précises pour la question qui nous divise.
Dans la première ( i ) , il s’agissoit d’une dot donnée au mari par l’aïeul
(i) Caius Se'i'iis avus maternus Sei® uepti <jusberat in patris potestate, certam pecunUe quantitàtem dotti nomine Lucio Tilio marito dedit, et instrumento dolali tjusinodi pacumi et stipulalio—
nem complexus est,si iuler Titium Luciuminaritum eiSeiam divortium sineculpù mulieris factum
esset, dos omnis uxori vel Caio Seì'o avo materno redderetur reslituereturque. Quaeio, cùm Seius
avus maternus statini vità defuncti!» sii, et Seia posteà sine culpà suà diverter.t, vivo patre suo
in cujus potestate est, an et cui actio ex hoc pacto et slipulalione compelat, et utrum ha=redi av
materni ex stipulatu, ali nepti? Respondí in persona quidem neptis viileri inutiliter sti}.ulationetn
esse couceptam, quoniain avus maternus ei stipulatila propomtur ; quod cùm ita est, hxredi stipulatoris, quandocunaque direrterit mulier, acùo competere videtur-
�( 67 )
nialerncl de la femme, et par celui-ci slipule'e re'versible au profit de la
femme, oy de lui donateur, en cas de divorce san? la faute de la femme.
L e divorce arriva, mais le donateur qui s’étoit réservé le retour (du moins
en icco n d ) étoit prédécédé!; nonobstant ce prédécès, le jurisconsulte
(supposant nulle la stipulation faite en premier au profit de la femme ,
quia nem o a lteri stipulavip o te s t) décide que les héritiers du donateur
doivent profiter du retour en qualité de tra:ismissio.inaires, comme auroit pu faire le donateur lui-menie. Q u o d c ù m ita e st, hœ redi stip u la to n s , quandocum que diverterit millier, actio com pelere videtu r.
La loi A v ia n’est pas moins expresse. La question étoit desavoir si le
retour de la dot, n’ayant été réservé que par un simple pacte, et non par
une stipulation en forme, il étoit transmissible aux héritiers du donateur.
L ’empereur répond qu’il faut distinguer si la dot, dont le retour a été
réservé par le pacte est une dot profeclicc, (c ’est-à-dire donnée par celui
qui a la puissance paternelle) ou si elle est adventice. Lorsqu’elle est profectice, c o m m e en ce cas le donateur est assuré du retour légal qui n’est
pas transmissible, on suppose qu'il s’en est contenté, et que c’est pour
cela qu’il n’a pas eu recours à une stipulation en forme; mais lorsque la
dot est adventice, telle que celle donnée par les étrangers ou les ascen
dants maternels qui ne peuvent pas prétendre le retour légal, alors le re
tour qui en a été réservé par un simple pacte est transmissible aux héri
tiers du donateur. A v ia tua eo n im quee p ro J iliâ tua in dotera d é d itt
etsiverb o ru m obligatio non intercessit, aclionem e x fid e convcntionis
a d te, s i hœres ex titisti, tran sm itiere p o tu it , nec enirrTëadem causa
est patris e t m a tn s paciscentium ; q u ippe m atris p a c tu m actionem
•prœscriptis verbis con stitu it; p a tr is , dotis actionem conventione simp lic i m inim e creditu r innovare.
Quelque claires que soient ces deux lois, il s’est cependant trouvé
un docteur (i) q u i, pour les concilier avec la décision attribuée par Paul
de Castres et autres à la loi Q u o d de p a r ite r , a essayé de leur donner une
autre interprétation. Par exemple, il suppose que dans 1espèce de la loi
(i) Barthélemi Socin, sur la loi Quod de pariter.
�( 68 )
A v ia , la donatrice avoit survécu à l’ouverture du retour qu’elle s’étoit
réservé, et par rapport à la loi Caius , il prétend que cVst la stipulation
expresse faite en premier au profit de la femme mariée qui a fait présu
mer de la part du dotateur (pour le retour stipulé ensuite à son profit )
une dérogation à la disposition prétendue de la loi Q u od de pariter ;
mais cette double solution se réfute d’ellc-même. En effet, pour ce qui
est de la première, il est sensible que si la donatrice avoit survécu, il n’y
.auroit pas eu de distinction a faire entre le pacte de l’ascendant maternel
et celui du père, pour déclarer le premier transmissible, et non pas l’autre :
tous les deux auroient été également transmissibles, puisque le retour
même légal se transmet, lorsqu’une fois il a été acquis au père par sa sur
vie. A l’égard do la loi C a ius, il n’est pas possible de concevoir que la
circonstance de la stipulation expresse de retour faite en premier au profit
de la femme ait pu influer aucunement sur la transmissibilité de celle
faite en second par le dotateur au profit de lui-même ; il est évident que
la décision de là loi auroit été la même, quand cette circonstance ne s’y
seroit pas trouvée.
Aussi cet auteur finit-il par reconnoîlre que ces solutions sont plus sub
tiles que solides, et qu’il faudroit bien se garder de les suivre dans la pra
tique, dans les jugements : cogita lam en quia pulchra est conclasio ,
N O N T A M E N F O R T E I N J U D I C A N D O ESSET A B A L I A O P I N I O N E
RECEDENDUM.
E t effectivement, comme il le dit fort bien au même endroit, si ce
n’étoit le double sens dont la loi Q uoil de pariter paroît susceptible , il
n’y auroit pas un seul docteur dans tout,le monde entier qui n’opinât pour
la transmission du-retour conventionnel dans tous les cas. N o n esset
doctor in Jiiundo quiconlrarium non consuleret, si non vidissct tslutn
textum .
T R O I S I È M E
P A R T I E .
E x a m e n de la Jurisprudence*
1° Suivant Papon, au titre des Donations, art. 38 , il a été jugé que
la rétention fa ite p a r un d o n a te u r q u e si le donataire meurt sans en-
�(
).
J a n ts , la chose donnée retournera au don ateu r sans fa ir e m ention
d ë fsie n s, est réelle'et non p e rso n n e lle , p a r ain si transm issible à l ’he- *
ritier du donateur, s’il se trouve m o r t, lorsque la con dition d 'ic d ltT
rétention a dvient.
2° M. Maynard, 1. 8. c. 33. rapporte que par sentence de la sénéehausse'e de Lauserre, le retour stipulé par un oncle donateur au pays de Querci,
pour le cas du décès de son neveu donataire sans enfants, ledit cas étant
arrivé, quoiqu'après le décès du donateur, fut ju^é transmissible aux
héritiers du donateur, n o n o bstan t le défau t de ce m o t sien ou a ulrs.
e’quipolent.
...»
3 ° Le même M. Maynard rapporte que sur l'appel du cette sentence
par arrêt rendu à son rapport, au mois de janvier 1574-j coniirmalil de
la sentence, le retour fut adjugé aux héritiers du donateur.
4° Fonlanella nous assure que la même chose a été jugée contre lui même, le 10 avril 1G09, par le consistoire de la principauté de Catalogne.
Conatus f u i defendere q u o d non p o tera n t ( dotem vindicare hærcdcs
donatoris præmorlui) fu n dans intentionem in dispositione legis Quod de
pariter, et eorum quee super ea dicunt superius allegati de subintelligen tid cotulilionis superviventiœ , se d non p o tu i oblinere; im o d ecla - _
ra tum fu it expresse sub die 10 y lp r d is anno 1G09, itifa vo rem hœ redum ; et cela pareequ’il n’y avoit pas de preuve que le donateur eût
limité le retour au cas de sa survie, su m en do expresse m otivum qu od
non con staret con ceptam fu isse stipulationem respectu reversionis a d
donatorem , siisJilice su pervixisset, ac p ro in d è regulando eum casum
ex dispositione p a ra g ra p h i E x conditionali sim pliciter conceden/i
transm issionem a d h œ redes, qu ando non aclest expressa conditio
superviventiœ.
*
5° La même chose a encore étédécide'e
présente par Mes
d a n s
l ’ e s p è c e
Blaru, Normand, L e Clerc de Yeaudonne et Guéaux deRevcrsoaux, com
missaires nommés par le conseil pour juger les contestations relatives a la
succession du sieur JLhéritier donateur. E11 effet, par leur arrêt de partage,
ils ont réservé aux parties, par un acte séparé, l’espérance du retour sti
pulé par le sieur Lhéritier en ces ternies : les parties on t encore l’espé
ran ce, le cas arrivant, de la réversion de la som m e de
3qqoo
livres
'
�( 7°*)
donnée en dot p a r le sieur Lhéritier père à m adam e la marquise de
R a vig na n , sa ( b e l l e ) nièce.
6° Enfin la sentence dont,eSt appel, rendue sur les plaidoiries solen
nelles des parties pendant cinq audiences, a jugé en faveur des héritiers
du donateur, sur le fondement que la condition exprimée p arle dona
teur pour donner lieu au retour s’étoit. vérifiée : attendu le décès de la.
dem oiselle R a c in e , veu ve D a m p u s, sans enfants.
L e marquis de Mesmes auroit bien voulu pouvoir opposer à cette suite
de décisions quelques décisions contraires capables de les balancer. Mais
quelques recherches qu’il ait pu faire, il ne lui a pas été possible d’en
produire une seule; en vain excipe-t-il de l’arrêt rapporté par Mornac ^
au titre de dote profectilia. Il y étoit question du retour d’une dot cons
tituée par mi père naturel a sa fille bâtarde, et par conséquent profeclice,
comme le dit Mornac lui-même et comme le prouve fort bien H cnrys,
]. G. c. 5 . part. 3o, où il e'tablit que le retour légal a lieu au profit du père
naturel pour la dot par lui constituée, comme étant censée prqfectice ,
à cause de l’obligation où il est de doter; or il ne s’agit point ici d’une
dot profeclice.
D’ailleurs, si l’on examine bien l’espèce de l’arrêt de Mornac, on verra
qu’il n’est pas même précis pour le cas de la dot profeclice. En effet, Moi'nac dit lui-même que le retour avoit été stipulé seulement pour le cas du
décès de la fille sans enfants. O r, la fille n’éloit pas décédée sans enfants,
puisque scs enfants lui avoient survécu. D ecesserat presbyter POST e a q u e s p v r i a A C L I BE RT . Il est vrai que les enfants étoient dé
cédés sans enfants, et c’est apparemment sous ce prétexte que les héri
tiers du jirêtre dotateur revendiquoient la d ot, en étendant la condition
du décès sans enfants , au cas du décès, et des enfants sans enfants.
M a i s c o m m e l’ont fort bien observé Ricard etle Journaliste des Audiences,
les stipulations en général et celles de retour en particulier étant de droit
étroit, ne doivent pas être étendues d’un cas à un autre. Dès-lors, on ne
pouvoit pas adjuger le retour aux héritiers du prêtre dotalcur. Lui-même
auroit été exclus à défaut d’événement de la condition prévue (i).
(i) Ageliatur de lVcsbytcro qui cùra donaret filiæ sjmriæ 3oo aureos iudotem, conditioner
�( 7/ )
Si des jugements nous passons au suffrage des auteurs français, nous
v e rro n s que la question y est toujours décidée uniforme'ment en faveur
des transmissionnaires, notamment lorsque la donation est faite par au
tres que les ascendants (comme par exemple par un bel-oncle), notam
ment lorsque le donateur, étant plus âgé que le donataire, a cependant
prévu non seulement le décès du donataire sans enfants, mais encore le
deces de ses enfants sans enfants ou avant leur majorité.
L a réversion conventionnelle, dit Le Brun, traité des Successions,
]. i. c . 5 . sect. 2, passe a nos héritiers si nous ne l’avons limitée, ce qui
se f a it quelquefois, en ne la stipulant qu’au cas du prédécès du do
nataire ; mais quand nous Vavons stipulée simplement au cas du dé
cès du d onataire sans enfants, alors nous avons parlé pour nos hé
ritiers ou ayants-cause.
Quant a la réversion co nventionnelle , dit Lacom be, au mol Réver
sion , elle ne concerne vas m oins les héritiers du d onateur qui l’a sti
p ulée , que sa personne m ême. N am plerum que ta/n hœredibus nostris quant nobismelipsis cavemus, 1. 9. de Prob. s lin s i si un ascendant
fa it donation à son fils ou à sa f i lle , « condition de réversion, si le
donateur meurt sans e n f a n t l e s choses données passent a u x héri
tiers du donateur p rédécédé, si elle n’a été limitée.
L e retour conventionnel, dit 1auteur de la nouvelle collection de Ju
risprudence, au mot Retour, n’a d ’autres règles que celles de la con
vention............. et com m e les conventions passent in hæredes et ad
hæredes, il s’ ensuit que si le donateur prédécède, la réversion doit
appartenir à ses héritiers qui le représentent, lorsque la condition
sous laquelle elle est stipulée est arrivée, à moins que la réversion
n’eût été stipulée personnelle, et qu’elle n’ ait étélim iléepar des clauses
qui l’em pêchent d’être transmise a u x héritiers.
Domat, en son traité des Lois Civiles sur le Retour, après a vo ir décidé,
illam tabuli3 n u p t i a l i b u s adjecerat (si sine l i b e r i s filia d e c e s s e r i t , dos a d se reverterctur) nullà factà
mentionc hæreduin. Suscepti crani liberi ex eo matrimonio q u i b u s superstilibus decesserai Presby
ter, pusteàque spuria ac i i i e r F i ^ î û n l liæredis PresbyterTdolem illam u tprofeciitiam ex clau»«14 reversionis.... à petitione sui suromoli sunt.
1
�( 72 )
conimc tous les auteurs ci-dessus cités, qu’en général le retour stipulé
par un ascendant ou tout aulre donateur doit se régler comme les autres
conventions, et non à l’inslar du retour lég a l, ajoute que cela est encore
p lu s ju s te p o u r les donateurs autres que les ascendants. La raison
qu’il en donne est que les donateurs étrangers (tel qu’éLoit le sieur Lhéritier par rapport à la demoiselle Racine, sa belle-nièce ), n’ayant pas la
même affection pour la famille de leurs donataires, on présume encore
plus aisément d’eux que des ascendants, qu’ils ont voulu préférer leurs
propres héritiers a la famille de celui contre lequel ils ont stipulé le re
tour.
Enfin, suivantIlem js, quoiqu’en général le donateur, même ascendant,
qui se réserve le retour soit censé le faire tant pour lui que pour ses
héritiers, cette présomption légale devient bien plus forte encore, lors
que, comme dans notre espèce, il a prévu non seulement le décès du do
nataire sans enfants, mais encore le décès de scs enfants avant leur ma
jorité. E n effet, dit-il, quoique le p ère su rv iv a n t, l’ordre de la nature
en so it tro u b lé, c’est p o u rta n t chose a ssez co m m u n e, m ais qiCun
père pen se .survivre a sa fille e t au x enfants qu’elle p e u t laisser, qu'il
étende si loin sa p e n sé e , c’est ce qu’on y,e p e u t p a s présum er. D o n c ,
ajoute-t-il, qu an d le p ère a stip u lé que la d o t sero it réversible, s i sa f ille
décédoit sans enfants ou scs enfants sans enfan ts, il ne s ’est p as
p ersu a d é que to u t cela p û t arriver lui' viva n t, et p a r con séqu en t il a
bien entendu q ue cette stipu lation f û t aussi bien profitable à ses héri
tiers qu’à lu i-m êm e, au trem ent il n’au roit p a s eu une visée s i longue,
et s’il n’avoît cru que de stipu ler le retour p o u r lu i, il en au roit res
treint la condition e lle s term es, l i s e sero ït contenté d é p o r te r dît p r é
décès de sa fille sans enfanU, et il n’auroit p a s ajo u té et de scs enfants
sans eiifail
L e marquis de Mcsmes oppose à ces autorités le sentiment de Bouclieuil, de Bretonnier sur Henrys, et de M°. L aR ouvière; mais Boucheuil
ne se décide que d’après l’arrêt de Mornac, qui, comme nous l’avons vu,
n’a pas de rapport à l’espèce. Bretonnier se décide sans donner aucune
raison de son avis; ainsi on ne peut pas deviner quel a été son motif:
�(
)
d’ailleurs, l’espèce sur laquelle il donne son avis, qui est celle de Henrys,
est bien différente de la nôtre, où le donateur est un bel-onclc, et par
conséquent un étranger; au lieu que dans l’espèce de H enrys, c’est un
père assuré du retour légal de la dot profeclice par lui donnée. Par rap
port à Me. La Rouvière, il ne c^evroit plus être nommé dans cette cause,
d’après les preuves qui ont été administrées au châtelet, que cet auteur
n’a pas connu les premiers principes ‘delâTm aüère, et qu’il n’a pas en
tendu les docteurs par lui cités.
*
CONCLUSION.
Nous ne croyons pas qu’il reste la moindre difficulté dans cette cause;
car il ne faut pas regarder comme telle l’opinion isolée de deux auteurs
induits en erreur par des autorités mal entendues. C ’est toujours aux
principes qu’il en faut revenir. O r, les principes élémentaires du d ro it,
ceux dont n o u s avons été rebattus dans les écoles, et qui retentissent
j o u r n e l l e m e n t dans les tribunaux, sont que les stipulations condition
nelles se transmettent à l’héritier du stipulant, nonobstant le prédécès de
celui-ci, que les actes entre-vifs, même conditionnels, opèrent la saisine
in instanti, que les conditions y ont un effet rétroactif, que, suivant la
règle le m ort saisit le v i f les héritiers succèdent à tous les droits dont
leur auteur est décédé saisi, qu’ils n’en pourroient être privés que par
une volonté expresse du stipulant qui auroit formellement restreint la
stipulation à sa personne, que c’est à celui qui les prétend exclus à prou
ver leur exclusion, que les conventions sont toujours censées réelles, que
la personnalité ne s’y suppose jam ais, qu’elle doit être prouvée par des
expressions qui la nécessitent, etc.
L e marquis de Mesmes ne doit pas se flatter que la cour déroge en sa
faveur à ces principes consacrés par l’antiquité la plus respectable, adop
tés par toutes les nations policées et qùi' font une partie essentielle de la
législation universelle et du droit des gens.
11
En vain voudroit-il en éluder l’application par des distinctions imagi
naires; l’esprit actuel de notre jurisprudence est de prévenir, autant qu’il
est possiblej toute incertitude dans les jugements, en n’admettant que
10
�C 74 )
des principes clairs, et en rejetant toutes les distinctions arbitraires que
ia subtilité des docteurs avoit multipliées à l’infini. Ce seroit aller directe
ment contre cet esprit, et nous rejeter dans le chaos affreux d’incertitude,
dont la bonté du prince et la sagesse de la cour travaillent tous les jours
à nous retirer, que d'admettre les distinctions imaginées par le marquis
de Mesmes pour le besoin de sa cause.
Les principes ne doivent être limités que par des exceptions aussi clai
rement établies et aussi notoires que le principe même. Telle est, par
exem ple, l’exception qu’ une jurisprudence constante, uniforme et ayant
force de loi a établie pour le cas précis de la stipulation de reprise de l’ap
port èn communauté p arla femme renonçante. L a personnalité de cette
stipulation (unique dans son espèce, comme l’observe M c. P otliier, en
son traité des Obligations , à l'endroit déjà cité) est aussi notoire que la
réalité de toutes les autres; et en conséquence, il n ’y a ja m a is de diffi
culté lorsque le cas de cette exception se présente. Il n’en est pas de
même de celle qu’imagine aujourd’hui le marquis de Mesmes. Elle n est
autorisée par aucune lo i, aucun usage. E n vain voudroit-on l’assimiler à
la première. L a différence est des plus frappantes.
En effet, la stipulation de reprise de l’apport en communauté est con
traire à toutes les règles de l’égalité, qui fait l’ame des sociétés. Elle change
la société des conjoints en une véritable société léonine, où la femme
est assurée des profits sans courir aucuns risques ; en conséquence une
stipulation pareille seroit proscrite dans une société ordinaire, comme
contraire au droit naturel. Si elle est tolérée dans la société conjugale,
c’est uniquement à cause de la grande faveur des contrats de mariage,
qui autorise toute espèce de clause, lorsqu’elle ne va pas jusqu’à offenser
les bonnes mœurs ; au contraire la stipulation de retour ne r e n f e r m e rien
que de très conforme aux premiers principes du droit d es gens, étant
permis à tout donateur. 4’imposer à sa libéralité telle charge qu’il juge.à
propos. Dès-lors on ne doit pas être surpris que la jurisprudence des
arrêts ait déclaré la première stipulation personnelle, et non pas l’autre.
,
Quod contra juris rationem introduction est non est producendum
ad consequentias
,
�( 75 )
Indépendamment de cette considération particulière aux clauses de
reprise, qui peut-être a paru suffisante pour les faire déclarer person
nelles, il y en a une générale tirée des principes du droit, qui a pu encore
conduire à la même décision. C’est que la condition sous laquelle est sti
pulée la reprise de l’apport de la femme en communauté, c’est-à-dire, sa
renonciation à la communauté, est purement potestative , étant au pou
voir de la femme stipulante de renoncer ou de ne pas renoncer. O r,
presque tous les anciens docteurs ont soutenu que ces sortes de condi
tions ( si p e tie r o , si renuntiavero, etc.) étoient personnelles et ne pouvoient s’accomplir que dans la personne du stipulant, quia viden tur
a p p on i in persond stipulatoris; et effectivement ces conditions paroissent se référer directement à la personne du stipulant pour leur exécu
tion. Il n’en est pas de même du cas de décès du donataire sans enfants,
qui fait la condition ordinaire du retour. Cette condition est casuelle} et
non potestative. Elle n’est au p o u v o i r d ’a u c u n e des p a r ties contractantes.
Elle est a b s o l u m e n t extrinsèque à la personne du donateur stipulant,non apponitur in p erson d stipulatoris, pour nous servir des expres
sions de Fontanella. 11 n’y a donc aucun prétexte de la faire déclarer per
sonnelle, et dès-lors c’est incontestablement le cas d’y appliquer les prin
cipes généraux qui ont été établis pour la transmission des stipulations
conditionnelles, et notamment la disposition du paragraphe E x con d itionali et des lois Caius et A v ia .
M. B À R E N T I N , a v o c a t - g é n é r a l .
Me. L E S P A R À T , avocat.
B u r e a u l’aîné, procureur.
�
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Factums Marie
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jean-François. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bellart
Bonnet
Delvincourt
Lacalprade
Barentin
Lesparat
Hureau l'aîné
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
nullité du testament
fideicommis
jurisprudence
dot
stipulation
Description
An account of the resource
Consultation pour les sieurs Delsol, frères ; contre la dame veuve Vigier-d'Orcet, leur sœur consanguine [suivi de] Arrêt du Tribunal civil de première instance d'Aurillac [suivi de] Précis pour le sieur René-Louis Lhéritier et consors, intimés ; contre messire Joseph, marquis de Mesmes, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Mame frères (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1760-1809
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
75 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0629
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0531
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
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avancement d'hoirie
contrats de mariage
dot
droit de retour
fideicommis
jurisprudence
nullité du testament
stipulation
substitution
Successions
-
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PDF Text
Text
M EM OIRE
P OUR
Sieurs Jean-François D E L S O L aîné, habitant
de la ville d' Aurillac, et Gabriel-Barthélemy
D E L S O L - V O L P IL H A C
habitant de la
ville de Paris.
C O N T R E
Dame Jeanne - Marie D E L S O L ,
Vigier-D orcet.
veuve
En présence du sieur D E S P R A T S ., habitant
de la ville d’Aurillac.
L
A
dam e V i g i e r - D o r c e t ,
propriétaire sous une condition
résolutoire, d 'u ne fortune très-considérable, traduit aujourd’hui
ses freres devan t les T r ib u n a u x , et les oblige à p r o u v e r , a v a n t
l’événement de la condition; qu’ils ont un droit incontestable,
A
�si cette condition se purifie, aux Liens que le sieur Delsol,'
leur p è r e , lui a donné par le contrat de son mariage , avec
stipulation de retour, en cas qn'elle mourût sans enfans, ou_ses
eiifans sans descendans.
Cette dem ande prém aturée, dont les annales de la juris
prudence n’offrent aucun exemple , a sa source dans l’éloignement où l’on a toujours tenu la dame Dorcet de sa famille , et
dans l’impatience où sont les personnes qui l’entourent, de s’as
surer , par des voies indirectes , avant son décès , un patrimoine
que les liens du sang , l’ordre établi par les lois et le vœu de
la nature lui prescrivaient de conserver intact a ses proches.
Les premières règles-du d ro it, les maximes de la jurispru
dence , sur la stabilité de laquelle portent l’ordre public et la
tranquillité des citoyens, les décisions de tous les auteurs , ré
sistent avec tant de force et de clarté aux volontés de la dame
D o rce t, que tout esprit raisonnable n’hésitera pas à prononcer
en faveur des sieurs Delsol.
Cette manière d’envisager une cau se, cette précision qui en
écarte tout ce qui y est étranger, l’babitude de ne voir qu’avec
les yeu x de la l o i , de ne parler et de ne juger que comme
elle , sont ordinairement le partage des Magistrats et des Juris
consultes. Le Public, aussi juste sans doute, mais nécessairement
moins éclairé , a souvent des opinions qui l’entraînent, des
préjugés qui le subjuguent ; les égards qui lui sont dûs exigent,
dans des affaires d’une importance aussi majeure que celle qu’on
v a faire connaître , une discussion détaillée , sans laquelle la
vérité ne pourrait percer jusqu’à lui.
Les sieurs Delsol n’ont besoin, pour dissiper toutes les illusions,
que de rendre compte des dispositions du père com m un, et
d’observer que , dans tous les actes* l’intention où il était de
conserver à sa famille une fortune qu’il avait acquise en grande
p a rtie , se manifeste ouvertem ent, et perce même dans une
foule de circonstances dont il est inutile de rendre compte
pour le moment.
�m
■’
'FAIT.
•■
Des deux mariages du sieur Delsol étaient issus plusieurs
enfans.
/
La demoiselle Marie D elso l, aujourd’hui veuve D orcet, fut
l’unique fruit de son premier mariage avec la demoiselle Thomas.
■ Le 2 Juin 1760 , la demoiselle Delsol contracta mariage avec
le sieur V ig ie r-D o rce t, receveur des tailles de l’élection de
Mauriac.
L e sieur V ig ie r épousait la iille d’un homme qui avait acquis
ùne fortune immense ; aussi les libéralités qu’il lit en sa faveur
répondirent-elles à la réputation dont il jouissait.
Il lui donna d’abord, par donation entre-vif, en propriété
et jouissance, la terre du Claux et une somme de 10,000liv.
et par une seconde disposition, il s’engageait de 11e point ins
tituer d’autre lieritière qu’elle.
Mais il porta en même tems ses vues sur sa postérité ; il
prévit le cas où sa lille n’aurait pas d’enfans , et celui où ses
enfans mourraient sans descendans, et dans ces deux hypo
thèses , il apposa à ses libéralités une clause de retour qu’il est
essentiel de mettre sous les yeu x des M agistrats, avec l’ensemble
de la clause qui renferme toutes ses dispositions.
» Ledit S .r Delsol ayant le mariage pour a g réab le, et ayant for>» mé la demande en délaissement, aux requêtes du palais à Paris,'
» de la terre et seigneurie du Claux et autres biens situés en
« cette province d’A u v e rg n e , dépendans de la succession de
» défunt sieur de Fortisson , et par lui abandonnés à ses créan» cie rs, faute de paiement des sommes dues au sieur D elsol,
» comme subrogé au lieu et place du marquis de Montlezun et
» de la dame de Fortisson, son épouse ; et cette demande en
» délaissement venant à lui être a d ju g ée, donne, audit c a s ,
» par donation entre-vif pure et simple , à la demoiselle Delsol,
» sa fille , ci-présente et acceptante , et autorisée, en tant que
» de besoin, par ledit sieur de Y i g ie r , son futur ép o u x, par
A 2i
�( 4 )
» avancem ent d’iioirie , le domaine , terre et seigneurie du
» C la u x , paroisse de Naucelles , en quoi que ladite terre et
j> domaine du Claux puissent consister, aux mêmes charges et
» conditions que le délaissement lui en sera fait et adju gé,
» conformément à la demande qu’il a formée aux requêtes du
» p a la is, sous la réserve des autrçs biens dont la demande a
» été formée par la même requête ; et au cas où ladite demande
» en délaissement desdits Liens ne lui serait pas ad ju gée, ledit
» sieur Delsol, pour dédommager sadite fille dudit domaine et terre
» du C la u x , lui donne et délaisse toutes les créances qui lui
» sont dues sur lesdits biens . en capital et accessoires, avec
» pouvoir audit sieur futur époux d’en exiger le paiem ent, et
» d’en fournir toutes quittances et décharges valables, à la charge
» par lai de le reconnaître, comme il s’y o b lig e, sur tous et
» clia cu n s ses biens présens et à v e n ir , pour rendre et restituer
» le tout à qui de di’oit appartiendra, le cas de restitution arrivant.
» Ledit sieur Delsol a aussi donné, par même donation entre» v i f , à ladite demoiselle D elsol, sa fille, acceptante et auto» risée comme dessus , la somme de 10,000 liv . , qu’il a tout
» présentement comptée et délivrée audit sieur de V ig ier ,
» futur époux , lequel comme content, en a quitté et quitte
» ledit sieur D elsol, et a reconnu ladite somme sur tous ses
y biens et ceux de la dame de Moissier sa mère , présens et à
» v e n ir , pour la rendre et restituer, le cas de restitution arri» v a n t, à qui il appartiendra.
» Et à l’égard du surplus des autres biens qui se trouve* ront rester audit sieur Delsol lors de son décès , icelui a
» promis de n'instituer d'autre héritière que ladite demoiselle
» D elsol, sa f i l l e , sous la. réserve de l’usufruit de tous lesdits
1» biens institués , et de pouvoir vendre et engager lesdits
>» b ien s, ainsi qu’il trouvera à propos , tant à la vie qu’à la
» mort, et encore de pouvoir disposer d’une somme de 10,0001.,
» et n’en d isp o san t p a s , ladite réserve tournera au proiit d<? '
» sadite fille,
�( 5 )
» Et enfin, à la charge de payer à la demoiselle L a g a rd e ,
» sa belle-m ère , au cas où elle survive audit sieur B e ls o l, une
» pension annuelle et viagère de 600 l i v . , payable de six en
» six m ois, et d’avance ; et au cas ou ladite demoiselle D e lso l,
» future épouse, viendrait à décé.der sans enfa n s, ou ses enfans
» sans descendons, ou sans disposer valablement, ledit sieur
d Delsol se réserve expressément le droit de réversion et de retour,
» tant des biens donnés que réservés, sans qu’il puisse êtva
» dérogé, par sa dite fille , future épouse , audit droit dô
» réversion, par aucune disposition ni autres actes à ce contraires*
L e sieur D elso l, donateur, qui avait passé à de secondes
noces avec la demoiselle Dubois de Fontenilles , est décédé en
1780, laissant plusieurs enfans de ce mariage.
Peu de jours avant son décès , il avait fait un testament dans
lequel il instituait son fils aîné , et successivement ses autres
enfans , par ordre de primogéniture , ses héritiers universels ,
voulant expressément q u e, dans le cas où la dame Jeanne-Maria
D e lso l, épouse du sieur de V ig ier , viendrait à décéder sans enfa n s ou descendons , son héritier recueille et profite du droit de
réversion stipulé par le testateur dans le contrat de mariage da
sa fille avec le dit sieur de Vigier, etc.
Ce testam ent, qui fut déclaré nul pour vice de forme seu
lem ent , expliquerait suffisamment, s’il en était besoin , les
intentions du sieur Delsol; il y manifeste formellement la volonté
de transmettre à ses enfans , en vertu de la clause du retour
qu’il s’était réservé , la condition a rriv a n t, les biens qu’il avait
donnés à sa fille du premier lit. Cette réflexion , qu’on pou rrait
regarder peut-être comme indifférente , est c e p e n d a n t trèsim p o rta n te , ainsi que les sieurs Delsol le dém ontreront dans
le cours de leurs moyens.
Q uoiquil en soit, après le décès du père commun , la dame
D o rcet, en sa qualité de donataire un iverselle, s est mise en
possession d’une fortune qu’on peut évalu er, sans exagération,
�( 6 )
à, tin million , 'valeur de ce tems ; ( l ’actif mobilier'montait- à
plus de 709200 liv. )
.
• *.-c
. La majeure partie de cette fortune a été engloutie en peu
d’années. L a dame D o rcet, après avoir épuisé les créances
mobilières, a vendu tôus les immeubles qu’elle a trouvés à vendre*
et cependant elle n’ignorait pas que son père l’avait grevée d’un
droit de retour transmissible à ses héritiers : elle n’ignorait pas que
le donataire, possédant à charge d’un retour conventionnel, ne
pouvait disposer des biens donnés, au préjudice du droit de
retour; m ais, quoique devenue veu ve depuis 1785, quoiqu’elle
soit dans un âge très-avance , au lieu de jouir tranquillement
des débris d’un patrimoine im m ense, pour cette p ro v in ce,
elle a manifesté ouvertement la volonté de faire passer dans
des mains étrangères, des biens que les lois lui commandaient
de co n s e r v e r dans sa famille. E lle 'a vendu au sieur Desprats,
par acte du i 5 A v ril 1806, un pré appelé de Concourt, situé
dans les environs d A u rillac, moyennant le prix et sommé de
¡quarante et quelques mille francs.
L e sieur Desprats n’a pas été aussi confiant que les autres
¡acquéreurs de la dame Dorcet; il paraît, qu’ayant eu connaissance
du contrat de mariage du 2 Juin 1760, et de la clause particulière
du retour que le sieur Delsol père s’était réservé, il a refusé de
payer le prix de l’acquisition qu’il avait faite, à moins que la
dame Dorcet ne lui fournît caution, et il a , en effet, m otivé
son refus , sur ce que la dame Dorcet ne possédait le pré d<3
Cancourt, qu’en vertu des dispositions que le sieur Delsol avait
faites, dans son contrat de m ariage, avecjle sieur D orcet; que
d’après ces dispositions, elle n’avait pas une pleine et entière
p rop riété, mais seulement une propriété conditionnelle et réso
luble , la condition arrivant, parce que feu sieur Delsol s’était
réservé le droit de retour, dans le cas ou elle mourrait sans
enfans, ou scs enfans sans descendans, en lui interdisant toutes
dispositions ; que ce droit subsistait malgré son prédécès , en
faveur de ses autres enfans, d’où il suivait que le sieur Desprats
�était en danger cTéviction, et partant fondé à faire résoudre la
v e n te , ou à ne payer que sous caution.
T el fut le langage que tint le sieur Desprats à la dame D orcet,’
lorqu’elle voulut obtenir le paiement du prix d e là vente.
L a dame D o rcet, offensée d ’un refus aussi extraordinaire,
a voulu en rendre les sieurs Delsol , ses frères, responsables :
et comme ils sont appelés par les liens du sang à recueillir les
biens sujets au droit de retour, après son d écès, elle les a
traduits devant vous, en même tenis que le sieur Desprats; ce
d ern ier, pour voir ordonner l’exécution de l’acte de vente du
pré de C an court ;
Et les sieurs D elso l, pour voir dire que la clause de son
contrat de mariage avec le sieur Dorcet, en date du 2 Juin
1760, relative au droit de retour qui y est stipulé, est éteinte
par le prédécès du sieur Delsol p è r e , ou que ce droit a été
recueilli par elle , en sa qualité d’héritière instituée, et, dans
aucun cas, ne pouvait l'empêcher de disposer; que d’ailleurs ce
droit de retour était une substitution fidci-commissaire, abolie
par les lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792; qu’ain si,
sous tous les rapports, la clause était caduque et nulle.
Les sieurs Delsol, voulant rester étrangers aux démêlés survenus
entre Desprats et leur sœur, avaient d’abord formé la résolution
de ne pas discuter, du vivan t de la dame D orcet, un droit qui
n’est pas encore ouvert; aussi opposèrent-ils, contre leur mise
en cause, une exception aussi simple que péremptoire ; ils dirent
que la stipulation dont il s’agit, n’ était qu’une clause condition
nelle , dans le cas où leur sœur viendrait à décéder sans enfans,
et que, jusqu’à ce que cette condition fût accom plie, ils ne
pouvaient avoir qu’une simple espérance, mais non pas UT1
droit ouvert,* qu’ils ne pouvaient exercer aucune action, puis
que leur droit n’était pas ouvert ; qu’ils ne pouvaient non plus
renoncer a ce droit , puisque toutes les lois défendent de
renoncer, ou se départir des espérances acquises, lorsque les
droits ne.sont pas encore ouverts; qu’au surplus, la renonciation
�.
( 8 )
serait encore illusoire , puisque , dans le cas ou ils viendraient
à prédécéder leur sœur, cette espérance serait transmise à leurs
enlans , indépendamment de leur volonté et de tout acte qu’ils
pourraient consentir ; qu’en conséquence , ils ne pouvaient
<]¿fendre à l’action qu’on[intentait contr’eux, et qui était prématurée,
mais qu’ils se réservaient de poursuivre tous les elîèts de là
stipulation qui pourraient tourner en leur la veu r, lorsque les
conventions insérées dans ladite stipulation seraient accomplies )
et que leurs droits seraient ouverts.
Il était donc Lien évident qu’aucun Tribunal, où la cause eût
été discutée, ne pouvait forcer les sieurs Delsol à s’expliquer
sur les prétentions qu’on leur supposait, comme héritiers naturels de leur p è r e , à un droit non encore ouvert.
Mais ils n’opposaient cette exception que pour l'honneur des
r è g le s ,
pour ne pas plaider avec leur sœ ur, et pour son seul
in térêt, car ils ne peuvent être effrayés sur l’événement d’une
cause, jugée d’avance en leur faveur, par les lois les plus
Tonnelles, par les décisions les plus respectables. A u ssi, vont*ls proposer avec la plus aveugle confiance, les moyens qui
doivent faire proscrire une prétention qui choque ouvertement
les principes généraux sur la transmission de toutes les stipula
tions conditionnelles en gén éral, les lois et les opinions des
auteurs, la jurisprudence unanime sur la transmission du droit
de retour conventionnel, en particulier; qui dénature cette espèce
de stipulation , jusqu’à lui supposer des effets diamétralement
opposés à ceux qu’elle produit dans son exécution.
MOYENS.
Les sieurs Delsol vont donc établir, en suivant le plan que
paraît avoir adopté la dame D o rce t, i.° qu’en p rin cipe, la
stipulation du droit de retour, faite par le donateur, au cas où
le donataire décéderait sans enfans, ou ses enfans sans descen
d a is , est, de sa nature, transmissible aux héritiers du stipulant,
nonobstant
�( 9 )
>
nonobstant le décès du donateur avant le donataire; qu'ainsi/
dans l’espèce particulière de la cause , la dame Dorcet n’ayant
pas d’en fans, les sieurs D elsol, héritiers naturels du donateur,
ont été subrogés en son lieu et p la c e , et ont continué en leur
personne, la saisine dont il était revêtu ;
2.° Que les lois nouvelles abolitives des substitutions, n’ont
pas atteint le droit de retour t qui n’a aucune ressemblance avec
une substitution , soit dans sa nature , soit dans son caractère,
soit dans ses effets-
3 .° Que la qualité (l’héritière instituée de son p è r e , n’a pas
donné à la dame Dorcet le droit de recueillir , à ce titre , l’efièt
d’une stipulation faite contr’elle.
4 .0 Et enfin, qu’en aucun c a s, elle n’a pas le droit de dis
poser des objets soumis au droit de retour.
I.re
L a première proposition ne présente , les sieurs Delsol ne
craignent pas de le dire , aucune difficulté.
Il n’en est pas de la réversion conventionnelle comme de la
réversion légale ; dans celle-ci, c’est la loi qui vient au secours
d’un père qui a négligé de stipuler le retour de ce qu'il a donné ;
elle ne veut pas qu’il souffre à-la-fois une double p e rte , celle
de sa fille et celle du bien qu’il lui avait donné : Ne et Jilicc
annssœ et dotis damnum seniiret. Tout est personnel dans le
m otif de la loi ; elle n’a que le père seul en vue. A in s i, lorsque
1 ordre de la nature n’a point été troublé, que le père est mort
avant la fille, quand, par la suite, celle-ci mourrait sans enfans , la réversion légale ne s’étend pas aux héritiers du père.
Mais lorsqu’il s’agit d’une stipulation de réversion, on doit,
se decider par d autres règles. Il est de principe, que le droit
de retour stipulé par le donateur, même pour lui seul, se transïUCt
ses iieiit,içrs ; Içs héritiers n’ont pas besoin de la vocation
P roposition
�( 10 )
de l’homme pour profiter des droits dont leur auteur est décédé
saisi ; ils n’ont besoin que de celle de la loi qui les saisit de tous
les droits du défunt, qui les subroge à sa saisine , en la conti
nuant en leur personne.
Il leur suffit donc que celui auquel ils sont appelés à succéder
ait été vraim ent saisi du droit qu’ils réclam ent, et que ce droit
ait fait partie de ses biens.
O r, Jes contrats, même conditionnels, saisissent toujours à
l’instant m êm e, sans attendre l’événement de la condition; les
actions qui en résultent, quoique non encoi’e ouvertes , sont in
bonis du stipulant. Contractus et si concütionalis , tamen ex prœr
senti vires accipit, dit Vinnius. In contraclibus , id tempus spectatur quo contrahimus, dit la loi 18, dig. de verb. oblig.
De l à , cette règle générale qu’on trouve écrite dans tous les
livres élémentaires , et notamment dans les Instituts : que les
stipulations conditionnellès se transmettent aux héritiers, quoique
le stipulant soit décédé avant l’événement de la condition, quoi
que l’expression n’en soit pas dans l’a c te , par la raison qu’on
11’est jamais censé stipuler pour soi uniquement, mais aussi pour
ses successeurs. E x stipulatione conditionali tantum spes est debiturn ir i, camque ipsam spem in hœredem transmittimus, si priùs
cjuàni conditio extet , mors nobis contingat. L iv . 3 , tit 16 ,
p. 4. Cum qui sub aliquâ conditione stipulatus fu e rit, posteà,
existente conditione, hœres ejus agerepotest: même liv, tit. 20, § 24.
Qui paciscitur sibi hccredi que suo pacisci intelligitur, dit aussi
une règle de droit bien connue.
Et cette rè g le , qui est posée aussi par le Gode N ap o léo n ,’
s’ applique aux stipulations conditionnelles , comme à toutes le§
autres : les lois sont expresses. Envain voudrait-on apporter
quelque e x c e p tio n à cette règle ; elles décident qu’on doit n’en
admettre aucune , et par conséquent que les stipulations condi
tionnelles se transmettent, soit qu’011 ait fait mention des héri
tiers, soit qu’on n’en ait pas fait mention : generaliter sancinuis
omnem s tip u la tioncm, sWc in dando, sivc infacicndo, stvc mixte.\
�( 11 }
ex dànda et faclcndo viveniatur, et ad liŒTedes et contrh hceredes
transmit t i , sive specialis liæredum liât mentio, sive non : 1. i3,
cod. de contract et comm. stipul.
On ne peut donc* pas prétendre, d’ après un texte aussi général,
aussi absolu, que le stipulant, qui n’a voulu parler que de luimême , qui n’a pas nommé ses héritiers , ait entendu restreindre
la stipulation à sa personne ; car la loi Utrum , dig. de pactis ,
répond que la stipulation n’en est pas moins réelle. Plerumque
enim , ut Pedins a ït , persona pacto inseritur, non est personale
p actu m fiat, sed ut démonstretur cum quo pactum factum est.
Charondas , dans ses pandectes , nous donne ce principe
comme une véritable règle du droit français , q u il a placé
_ parmi les autres règles, en ces ternies :
» A u x contrats, on regarde le tems qu’on contracte ».
» Cette rè g le , dit Charondas , appartient principalement aux
contrats conditionnels, car de ceux qui sont purement faits,
» n’y a doute ».
» Tout contrat conditionnel, si au tems que nous contrac» tons, il est valable , a effet et exécution quand la condition
» est ad ven u e, encore que celui qui a promis soit mort............
» Aussi /’héritier du stipulâteur décédé auparavant l’événem ent
» de la condition, peut agir incontinent ex conditionali, parce
» que pendant la condition , celui qui a stipulé est réputé avoir
y> été créancier ».
Il n’y a donc pas la moindre difficulté sur ce p rin cip e, qui_
ne s’applique pas seulement aux conditions stipulées dans les
contrats intéressés , mais aussi à celles qui sont renfermées dans
les contrats bienfaisans ; et pour l’établir, il s u f f i r a i t d ’observer
que llicard et une foule d’autres auteurs le d é cid e n t très-posi
tivem ent ; mais cette question est traitée par un des plus profonds
Jurisconsultes de nos jours , avec une profondeur remarquable.
)» I l est fau x, cli 1- i l, que les contrats intéresses soient les
seuls dans lesquels le stipulant est censé avoir parlé pour ses
héritiers la règle est générale pour toute espèce de contrais,
B3
�( "
5
puisque les lois n’ont fait aucune exception puis qu’au contraire
elles ont exclu toute exception par la généralité et l’universalité
absolue de leurs expressions : generalifer sancimus omnent
stipulationem................. iransmitti, sive specialis hœredum liât
inentio, sive non ».
» L e sens de la règle n’est pas précisément que nous sommes
présumés avoir pensé à nos héritiers et ayant-cause , et avoir
positivement voulu stipuler pour e u x , car il est Lien rare que
les contractans y pensent positivem ent, et on ne présume pas
ce qui arrive rarement. L e vrai sens de la réglé est seulement
que le stipulant qui n’a pas formellement restreint la stipulation a sa
personne , ne peut pas etre suppose avoir voulu exclure ses
héritiers. Or , cette présom ption, nécessairement applicable
ii toute espèce de stipulation, suffit toute seu le, non pour en
opérer la transmission, car c’ est la saisine seule qui l’opère ,
mais pour écarter les obstacles qui pouiTaient l’arrêter ou la
rendre inefficace ».
« Que le contrat soit intéressé ou bienfaisant, il n’im porte,
puisque dans l’un et dans l’autre, la saisine y a lieu de plein
droit; il faut bien qu’elle soit continuée dans la personne des
transmissionnaires. On ne peut pas les supposer exclus par le
stipulant, lorsque celui-ci n’a pas prononcé leur exclusion ; o r ,
s’ils ne sont pas exclu s, il est dans l’ordre des choses que,
comme successeurs universels ou singuliers du transmettant, ils
succedent a la saisine commencée en sa personne, comme à
tous ses autres droits, quand même il n’aurait point du tout
pensé à eux ».
« En d e u x mots , toute stipulation conditionnelle est nécessai
rement transmissible à 1 héritier du stipulant, si la condition peut
encore recevoir son accomplissement, parce qu’au m oyen de
la saisine attachée aux actes entre-vifs , le droit qui en résulte
a fait partie des biens du transm ettant, dès le tems même de
l’acle. 11 n’est pas nécessaire, pour cela , de donner à la clause
aucune extension, parce que c’est la loi seule, la force de la saisine,
�( >3 )
et non pas l’intention positive de transmettre, qui opère la
transmission. Il est vrai que la saisine elle-même dépend, en
quelque sorte , de l’intention du stipulant ; mais c’est seulement
en ce sens qu’elle ne s’applique qu’aux droits que les parties
ont eu en v u e , et pour les cas qu’elles ont exprimés ; du
reste, une fois que la condition prévue par les parties, est
a rriv é e , il devient constant que la saisine a eu lieu ab in itio,
et que la transmission s’en est su ivie, sans que les stipulans y
aient seulement pensé ».
Ainsi s’exprimait M. L ’-esparat, lors de l’arrêt célèbre de 1767,’
et l’on verra bientôt que sa doctrine prévalut sans aucune
difficulté.
Il ne peut donc pas s’élever aujourd’hui la moindre controverse
raisonnable sur ces principes appliqués, soit aux contrats inté
ressés , soit aux contrats bienfaisans.
Mais appliqués au droit de retour conventionnel, en particulier,
il y a , s’il est possible, bien moins de difficulté encore.
Deux fameuses lois romaines décident très-formellement la
question, en faveur des héritiers du stipulant, c’est la loi Caius
et la loi Avia.
L a loi Caius avait pour objet une dot donnée au mari par
l’aïeul maternel de la fem m e, et réversible à cette femme
en cas de divorce, intervenu sans sa faute; le divorce arriva.'
mais le donateur, qui s’était réservé le retour, était prédécédé:
nonobstant ce prédécès, le Jurisconsulte décide que les héritiers
du donateur doivent proiiter du reto u r, en qualité de transmissionnaires, comme aurait fait le donateur lui-même.
Respondi in persond quidem neptis videri inutiliter stipuhitioncm
esse conceptam , quoniàm açus malernus ci stipulalus proponitur;
quod cùm ùa est, hœredi stipulatoris, quandocumque divcrtcnt
niulicr, cictio compctcrc vidcluv.
L a loi ydvia n est pas moins expresse. L a question était de
savoir si le retour de la dot, n’ayant été r é se rv é que par un
simple p acte, et non par une stipulation en forme , il était
�( *4 )
transmissible aux héritiers du donateur ? La loi la résout en ces
termes :
A sia tua earinn qucc profil'nî tua in dotcm dédit, et si verborum
obligatio non intercessit, actionem ex Jide convention is ad te , si
hœres ex titisti, transmittere potuit. Voilà donc deux textes Lien*
précis , qui décident q u e l e retour conventionnel est transmissible
aux héritiers du donateur, quoique celui-ci soit décédé avant
l ’événement de la condition, sous laquelle il avait stipulé' le
retour à son profit.
Et ces décisions des lois romaines , sont devenues aussi celles
de tous les arrêts et de tous les auteurs, depuis les plus anciens
jusqu’aux plus modernes.
Papon, dans son recueil d’arrêts notables, au titre des dona
tions, art. 38 , dit qu’il a été jugé que « la retention faite par
un donateur, si le donataire meurt sans enfans, la chose
» donnée retournera au donateur, sans faire mention des siens,
» est réelle et non personnelle, par ainsi transmissible à l’héritier
» du donateur, s’il se trouve m ort, lorsque la condition d’icelle
» retention advient »;
M. M ayn ard , L iv . 8, Chap. 3 3 , dit que , par sentence de
la sénéchaussée de L au zerte, le retour stipulé par un oncle
donateur, au pays de Querci, pour le cas du décès de son neveu
donataire, sans enfans, ledit cas étant a rriv é , quoique après
le décès du donateur , fut jugé transmissible aux héritiers du
donateur, nonobstant le défaut de ce mot sien, ou autre équipollent.
M . M aynard ajoute que, sur l’appel de cette sentence, par arrêt
rendu à son rapport, au mois de Janvier 1674, conlirmatif de
la sentence, le retour fut adjugé aux héritiers du donateur.
Cette jurisprudence a été lixee irrévocablem ent par un arrêt
récent, qui a jugé en faveur des héritiers du donateur, contre
l’héritier de la donataire, par contrat de mariage.
Eu voici l’espèce , telle qu’elle est rapportée dans la dernière
collection de jurisprudence. V . Retour.
« L e sieur L h é ritier, par le contrat d.ç m ariage de demoiselle
�( '5 )
Marie Albertine-Racine , sa belle-nièce, avec le marquis de
R a v ig n a n , du 18 Mars 17 12 , lui avait donné 3o,ooo//, avec
la clause que ladite somme retournerait audit sieur Lheritier, au
cas de décès de la demoiselle future épouse, sans enfan s , et encore
qu'il y eût d&s enfans, et qu'ils vinssent à décéder avant leur majorité.
L e donateur est décédé en iy 3o ; le 20 Novembre 1764, la
demoiselle Racine , donataire , est décédée sans avoir laissé
d’cnfans, ni de son premier mariage avec le marquis de R avign an ,
* ni de son second mariage avec le comte de Dampus.
Après son décès, les enfans du donateur demandèrent au
marquis de Mesmes, donataire universel de la demoiselle Racine,
veu ve Dampus, la restitution des 3o, 000//, données p arleu r père,
conformément à la réserve stipulée p a rle contrat de 1712.
La cause portée au châtelet de Paris, il y intervint, le 29
Juillet 1766, sur les plaidoiries respectives des parties, pendant
cinq audiences, sentence par laquelle, attendu le décès de la demoi
selle Racine, veuve Dampus, sans enfans, le marquis de Mesmes
est condamné à restituer aux enfans du sieur Lhéritier, les 3o, 000,7
dont il avait stipulé la réversion. L e marquis de Mesmes interjeta
appel de la sentence du châtelet; mais par arrêt du mardi 17 Février
1767, rendu en la grand-chambre, conformément aux conclusions
de M. l’avocat-général, Barentin, la sentence fut unanimement
confirm ée, après des plaidoieries très-solennelles ».
« L ’appelant, dit l’additionnaire de Lebrun, invoquait en sa
faveur plusieurs lois m alentendues, un arrêt du 6 Mai 1614
rapporté par M ornac, ( où il s’agissait d’un retour stipulé par un
pere naturel, dotant sa fille qui laissa des enfans, au cas que celle-ci
décédât sans enfans); l’avis de Boucheul, de Bretonier sur Henrys,
et de Larouvière, en son traité du retour ;| mais M. L’esparrat,’
avocat des intimés héritiers du donateur, dans un mémoire où
il a traite a fond la matière , développa les lois , invoqua les
suffrages des plus savans auteurs et de la jurisprudence , et
éta b lit, sans réplique , que le droit de retour, ainsi que les
stipulations conditionnelles, se transmettent à l’héritier du stipu,-
�( 16 )
lant , nonobstant le prédécès de celui-ci ; que les actes entrevifs , même conditionnels, opèrent la saisine in instanti ; que
les conditions y ont un efïèt rétroactif; que , suivant la règle, le
mort saisit le vif, les héritiers succèdent à tous les droits dont
leur auteur est décédé saisi ; qu’ils n’en pourraient être p riv és,
que par une volonté expresse du stipulant, qui aurait fôrmellement
restreint la stipulation à sa personne; que c’est à celui qui les
prétend exclus, à p r o u v e r leur exclusion; que les conventions
sont toujours censées réelles ; que la personnalité ne s’y suppose
jamais,* q u elle doit être prouvée par des expressions qui la '
nécessitent ».
Cependant, comme le dit M . L ’esparat en rendant compte de
cet arrêt, la cause avait ete plaidée tant au châtelet qu’au
- parlem ent, par M. T ro n cliet, et c’était bien le cas de lui
appliquer ce que V irgile avait dit d’Hector: Si Pergama dextra
defendí potuissent, etiàm hác defensa fuissent ; mais malgré les
grands talens et les prodigieux efforts du défenseur, qui passait,
d ès-lors , à bien juste titre, pour un des plus profonds Juris
consultes de ce tem s, tous les Magistrats , ainsi -que l’avocatgénéral, Barentin, qui portait la parole, reconnurent facilem ent,
comme avaient fait les premiers Juges , que pour cette fo is,
M . Tronchet s’était trom pé; qu’en effet, la prétention de son
client qu’il avait défendu avec tant de z è le , était évidemment
subversive des principes gén éraux, sur la transmisión de toutes
stipulations conditionnelles ; qu’elle était contraire à toutes les
décisions des docteurs et des lo is, sur la transmission du retour
conventionnel en particu lier, et qu’eniin elle était également
contraire à-la jurisprudence établie par tous les jugemens rendus
sur cette question.
Si des arrêts on passe au suffrage des auteurs, on verra que
la question y est toujours décidée uniformément, en faveur des
transmissionriaircs , notamment lorsque le donateur, étant plus
âgé que le donataire, a cependant p réyu ? non-seulement le
décès
�( ' 7 ') '
décès du donateur sans enfans, mais encore le ‘décès de ses
enfans sans descendans.
» La réversion conventionnelle, Mit Lebrun, traité des succès» sions, L iv. i.,C h a p . 5 , Sect. 2, passe à nos héritiers, si nous ne
» l’avons limitée , ce qui se iait quelquefois , en 11e la stipulant (
qu’au cas du prédécès du donataire ; mais quand nous l’avons
» stipulée simplement, au cas du décès du donataire sans enfans,
» alors nous avons parlé pour nos héritiers ou ayant-cause ».
« Quant à la réversion conventionnelle, dit Lacombe , au mot» réversion, elle ne concerne pas moins les héritiers du donateur.
» qui l’a stipulée, que sa personne même. JSam plerumque tain
» Jiœredibus nostris quàm nobismetipsis caçemus. Loi 9, dig. deprob.
» A in s i, si un ascendant fait donation à son fils ou à sa lille ,
» à condition de réversion , si le donateur meurt sans enfans,
» les choses données passent aux héritiers du donateur prédécedé,
» si elle n’a été limitée ».
Suivant M. Henrys, quoiqu’en général l’ascendant donateur
qui se réserve le retour, soit censé le faire tant pour lui que
pour ses héritiers, cette présomption légale devient bien plus
forte encore , lorsque j e donateur a p r é v u , non-seulement le
décès du donataire sans enfans , mais encore le décès de ses
enfans sans descendans : « En e ife t, d it-il, quoique le père
» survivant , l’ordre de la nature en soit troublé, c’est pourtant
» chose assez commune; mais qu’un père pense survivre à sa
» iille et aux enfans quelle peut laisser; qu’il étende si loin
» sa pensée , c’est ce qu’on ne peut pas présumer. Donc, a jo u te * t-il, quand le père a stipulé que la dot serait r é v e r s ib le , si
* la lille décédait sans enfans , ou ses enfans sans enfans, il
» ne s’est pas persuadé que tout cela pût a rriv e r, lui v iv a n t,
» et par conséquent il a bien entendu que cette stipulation fût
» aussi bien profitable à ses héritiers qu’à lui-même ; autrement
» il n aurait pas eu une visée si longue; et s’il n’avait cru stipuler
» le retour que pour lu i, il en aurait restreint la condition
i et les termes ; il se serait contenté de parler du prédécès
�( .1 8 ,3
» de sa fille sans enfans, et il n’aurait pas ajouté : et de ses
» enfans sans enfans.
L ’opinion de cet auteur , qui marche toujours dans ses
décisions, à la lumière des vrais principes , mérite ici d’autant
plus de considération, qu’independamment de son mérite per
sonnel , il nous apprend lu i-m e m e qu il a d’abord balancé sur
la question ; mais c’est ce qui donne un plus grand poids à
sa décision. Un avis qui est le fruit d’une longue et mûre
réflexion, est bien plus respectable qu’un jugement précipité,
donné sur la première idée dont on est saisi.
A la vérité , B o u ch e u il dans son traité des conventions de
succéder, Bretonnier sur H enrys, et M.e L arouvière, avocat
au p a r le m e n t de Provence , paraissent etre d’un sentiment
co n tra ire ,' mais Boucheuil ne se décide" que d’après l’arrêt de
M o rn ac, qui n’a pas de rapport à l’espèce. Bretonuier a fondé
pareillement son sentiment sur l’arrêt de Mornac et sur celui
rapporté au journal du p alais, sous la date du 26 août 1682.
M a is, outre que Bretonnior n’a pas bien connu l’espèce et les
circonstances de cet a rrê t, puisqu’il dit que les Juges de Riom
avaient jugé contre la réversion, et que l’arrêt confirma leur
sentence, tandis que c’est précisément tout le contraire , les
Juges de Riom ayant ordonné la restitution en faveur du frère
donateur, cet arrêt n’a pas jugé la question agitée et résolue
par M. Ilenrys,
M. Henrys donnait son avis sur une question pareille à cello
qui nous occupe en ce moment : il se demandait si la stipulation
de réversion, en cas du décès du donataire sans enfans, ou
de ses enfans sans descendans, était transmissible aux héritiers
du donateur, au cas que celui-ci vint a prédécéder ses enfans,
et l’on vient de voir que sa décision ne laisse rien à désirer*
L ’arrêt de 1682 a jugé , mais n’a ]?as jugé antre chose, qu’un
frère ayant doté sa sœur, avec stipulation de retour, au cas
qu’elle mourût avant lu i, sans enfans, ne pouvait pas J'airo
uçage de cette clause , pour répéter la dot dans la succession
�( >9 )
du fils de la donataire, qui avait vécu six ans après elle /
parce que la condition sous laquelle le retour était stip u lé,
n’était pas a rriv é e , et que la donataire avait laissé un enfant
qui avait recueilli.
Ainsi donc , il faut écarter de la cause l’opinion de Bretonnier :
soit parce que c’est une opinion solitaii’e , qui a été proscrite par
tout ce qu’il y a de plus respectable en autorités , soit parce qu’elle
n’avait pas en vue la question de cette cause , et qu’en l’examinaut
de près , on voit qu’il a voulu dire uniquement qu’il ne faut
pas trop étendre les stipulations de retour, et qu’ainsi le retour
étant stipulé pour le décès du donataire sans enfans, il ne faut
pas l’étendrc au cas du décès de ses enfans sans enfans.
Par rapport à M .' Larouviere, on n’en parle i c i , que parce
que probablement la dame Dorcet voudra s’aider de son opinion;
mais il suffit, pour donner une idée du poids qu’elle m érite, de
dire, qu’il fut prouvé lors de l’arrêt de 1767; que les Jurisconsultes
même les plus m édiocres, ont reconnu très-facilement depuis
que cet auteur n’avait pas connu les premiers principes de la
matière , et qu’il n’avait pas entendu les auteurs par lui cités.
A in s i, il n’y a pas une seule l o i , pas un seul auteur, pas
un arrêt qui favorise la prétention de la dame Dorcet ; tout
co n co u rt pour établir la proposition des sieurs D elsol, que le
droit de retour, stipulé par leur père lors du mariage de la '
dame D o rcet, e s t, de sa nature , transmissible , le cas prévu
arrivant ,■il n’y a peut-être pas un seul point de droit sur lequel
les lois soient plus précises, les suffrages des auteurs plus unanimes,
et la jurisprudence plus ancienne, plus uniforme et plus con stan te.
L ’espèce particulière de cette cause facilite l’ap p lica tio n de
ces principes ; le sieur Delsol père a stipulé, lors du contrat
de mariage de sa fille avec le sieur D o rce t, le droit de retour
de tous les biens dont il la gratifiait, dans le cas où elle décé
derait sans enfans , ou ses enfans sans descendons. La dame
Dorcet n’a pas eu d’enfans de son mariage ; son âge la met
dans l'impuissance d’en avoir aujourd’h u i, quand elle passerait à
G 'Z
�( 20 )
de secondes noces ; ses frc re s, héritiers naturels du donateur?
doivent donc profiter, après son décès, des biens grevés du
droit de retou r, c ’est-à -d ire , de l’universalité des biens laissés
par le sieur Delsol à sa fille aînée.
L e sieur Delsol n’avait pas besoin, pour leur transmettre ce
droit , de stipuler expressément pour lui et pour les siens ,
puisqu’en p rin cip e, le droit de retour stipulé par le donateu^
se transmet toujours à ses héritiers.
L e redoublement seul de la clause , qui. est un m otif détermi
nant pour tous les auteurs, et notamment pour M. H en rys,
établirait clairement l ’intention du donateur, quand elle ne
serait pas m an ifeste d après les en constances de cette cause ;
d ’ a p r è s
c e l l e
surtout que , par son testament de l’année 1 7 8 0 ,
annullé pour vice de forme , cette clause de retour est renou
velée , le cas prévu par la stipulation arrivant.
I l n’y a donc plus de doute sur le m otif, sur l’objet de cette
stipulation ; c’était pour ses héritiers, et non pour l u i , que le
sieur D elsol, père commun, se réservait le droit de retour';
cette convention eût été fort inutile pour lu i, puisqu’il aurait
eu le droit de retour sans stipulation, en vertu des lois romaines I
qui régissaient notre p rovin ce, et par exprès , en vertu de lq.
loi Jure siiccursum.
C’est donc aux sieurs D elsol, transmissionnaires et ayant-cause
de leur p è re , que les biens sujets au droit de retour doivent
appartenir après le décès de la dame Dorcet.
Dira-t-on, comme on l’a annoncé, qu’en supposant, en thèse
gén érale, qu’un droit de retour conventionnel, soit de sa nature
transmissible , il faudrait, dans l’espèce particulière de cette
cause, restreindre l’application de ce principe aux objets com
posant la donation entrcrvifs, faite par contrat’ de mariage ;
mais qu’en ce qui concerne lp$ biens dont le sieur Delsol
gratifiait la dame D orcet, sa fille, a titre d’institution contrac
tuelle, cette institution n’ayant, de sa nature, effet qu’après le
décès de l’instituant, elle n’est pas susceptible de réversion à
son profit, et ù plus forte raison, au profit de scs héritiers.
�C elle objection peul paraître spécieuse au premier coup-d’œil ;
mais un moment d’attention suffit pour se convaincre qu’elle
n’est pas Solide.
I l est essentiel d’abord d’observer, d’après tous les auteurs, et
particulièrement d’après R icard , Furgole et Potliiér, que l’on
peut apposer un droit de retour à toute espèce de libéralités, et
par exprès, qu’on peut l’apposer à une institution contractuelle.
Ce principe ne peut éprouver aucune difficulté. Mais le droit
de retour, apposé à une institution, est-il de sa nature transmis
sible aux héritiers de l’instituant ?
L'affirmative de cet te question est également incontestable.
L ’institution contractuelle, est comme la donation entre-vifs, un
contrat, une obligation que contracte l’inlituant envers l’institué,
de lui laisser tous ses biens; elle ne diffère de la donation entre-vifs,
qu’en ce qu’elle est faite sous la condition particulière d elà survie
du donataire. Mais cette condition particulière n’empêche, pas
que l’instituant contractuel ne puisse faire résilier ou révoquer
la libéralité , si telle ou telle condition a r r iv e , n’importe en
quel tems , et que cependant elle puisse avoir jusques-hi tout
son e/Ièt,* en ce cas , les biens qui en sont l’objet, comme étant
retournés à la masse de l’hérédité et réunis au patrimoine du
donateur, appartiennent à ceux q u i, lors de l’arrivée de la
condition résolutoire , se trouvent représenter le donateur ou
instituant ; ces représentons ne reprennent pas les biens eu
question , en qualité de substitués au donataire ; c’est le donateur
lui-même, toujours existant dans leur personne, qui reprend sa
chose, comme ayant cessé d’appartenir à l’institué, au moyeu
de la résolution de l’institution qui a eu lieu par 1 événem ent,
comme le donateur ou ses représentons reprennent la choçe
donnée, lorsqu’il y a survenance d’enfant, même posthume,,
quoique le posthume ne soit né que depuis son décès.
Ainsi donc, que le sieur Delsol donateur fût ou non desaisi,
an moyen de l’institution contractuelle qu’il f a i s a i t en faveur
tle sa ¿Ile, sous une condition résolutoire, cela serait fort iudij>
�( 22 )
ïl.e
J 'K O P O S IT IO :*.
férent, et la résolution de cette convention serait évidemment
opérée , le cas arrivant.
En un m ot, le retour qui s’est fait ex causa antiquâ et inherenle
contractui donationis, doit avoir son eïïèt, tant pour l’institution
que pour la donation; la condition, lorsqu’elle est accom plie,
a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté ;
les effets de la stipulation, le cas arrivant, sont donc transmissibles,
soit que la condition soit apposée a une institution, soit qu’il
s’agisse d ’une donation entre-vifs, pure et simple.
Mais le droit de retour n’a-t-il pas éle aboli par les lois de
la révolution, et notamment par les lois des 25 Octobre et 14
Novem bre 1792 ?
C ’est la seco n d e question que présente cette cause, question,
qui véritablement 11’en est pas une.
Et d’ab o rd , deux lois de la révolution se sont occupées du
droit de retour; la prem ière, c’est la loi du 17 Nivôse an 2}
la deuxièm e, c’est la loi du 22 Ventôse suivant.
Mais que portent ces lois ?
L a loi du 17 Nivôse an 2 , a posé dans le titre intitulé de
la succession des ascendans , des règles pour établir q u e,
dans tous les cas , les ascendans étaient toujours exclus par
les héritiers collatéraux qui descendaient d’éux ou d’autres
ascendans au même degré ; et c’est après avoir développé
ces règles dans quelques articles , que la loi dit à l’article 74 :
» Les biens donnés par les ascendans à leurs descendans avec
» stipulation de retour, ne sont pas compris dans les règles ci5) dessus , ils ne font pas partie de la succession des descendans
» tant qu’il y a b RU au droit de retour ».
Cet article n introduit donc aucun changement dans l’ancienne
législation, relative au droit de retour ; il déclare même que
cette législation doit toujours être suivie, pour tout ce qui s’était
fait sous son empire , car c’est le déclarer positivem ent, que
¿ ’affranchir le droit de retour des règles nouvelles que la loi
établissait, et de décider que tant qu’il y a y ait lieu à ce droit,
�(» 3 )
les Liens donnés ne faisaient pas partie de la succesion des
descendans.
»
»
»
»
»
»
A l’égard de la loi du 23 Ventôse , l’article 5 porte « qu’il
n’est rien innové par l’art. 74 du décret du 17 Nivôse , à
l’égard des donations antérieures, au 5 Rrumaire, aux effets
du droit de retour lég a l, dans les pays et pour les cas où ce
droit avait lieu ; que néanmoins il 11e pourrait être exercé
sur les Liens du donataire acquis à la République, par droit
de confiscation, ou autrement ».
Cet article conserve les effets du retour lé g a l, pour tous les
pays où il avait lieu , relativement aux donations antérieures
au 5 Brum aire, comme l’article 74 de la loi du 17 Nivose ,
conserve l'effet du droit de retour conventionnel, relative
ment aux mêmes actes.
On ne peut donc pas dire que l’une ou l’autre des lois qui
viennent d ’être citées , ait apporté le moindre changement au
droit de retour, consacré jusqu’alors par l’ancienne législation,
ni qu’elle lui ait porté la moindre atteinte. Il ne faut donc
pas parler de ces deux lois, qu’on invoqua sans aucun succès,
lors de l’arrêt célèbre rendu dans l’affaire de la dame de
N availles, ,dont on parlera tout à l’heure.
Mais peut-on opposer avec plus de succès les lois de 1792
qui ont aboli les substitutions ?
Remarquons d’abord , que les lois du 17 Nivôse et du 23
Ventôse an 2 , postérieures aux lois de 1792, abolitives des
substitutions, ont con servé, comme nous, venons de l’établir,
les effets des stipulations de retour, et ceux du retour lé g a l,
dans les pays et pour les cas où ce droit avait lieu , à 1 égard
des donations antérieures au 5 Brumaire an 2 , et c’est deju
une preuve positive que. les lois,- qui ont aboli les substitutions,
n’avaient pas eu en vue les stipulations de reLour.
Mais peut-on même trouver quelque ressemblance entre uno
�( 24 )
stipulation, de retour et une substitution, soit dans la nature, soit
dans le caractère'et les effets de ces deux espèces d’actes ?
Quest - c e , d’abord, qu’ une substitution?
« C’est une disposition par laquelle le donataire, l’iiéritier
» institué ou le légataire , est chargé de. conserver et de
rendre à un tiers ».
Telle est la définition qu’en donne le code c iv il, à l’art. 896,
et c ’est aussi celle des anciennes lois et des auteurs qui ont
traité de cette matière.
« Il y a substitution , dit M. Merlin , toutes les fois que
dans un acte de libéralité, la personne gratifiée est chargée de
rendre à une personne gratifiée en second ordre, la chose qui
lui a été donnée ; il y a substitution, toutes les fois qu’il y a
deux donataires ou légataires apelés successivem ent, l’un qui
reçoit directement de la main du donateur, l’autre qui ne reçoit
de la main du donateur, que par le canal du premier donataire;
il y a substitution, toutes les fois que le donataire direct sert en
quelque sorte d’entrepôt, pour faire arriver l’objet de la donation
-au donataire substitué; en un m o t, il y a substitutions toutes
les fois que le donateur a voulu que le second donataire n’ari’ivât
à la chose donnée, qu’après qu’elle aurait été possédée , pendant
1111 teins quelconque, par le prem ier; dès que ce vœu p araît, il
y a charge de rendre , et. par conséquent substitution Jidei
commissaire ».
Ainsi , d’après cette doctrine , dans une substitution Jidei
commissaire, il entre nécessairement trois personnes; celle qui
donne, celle qui est gratifiés à la charge de rendre, et celle
à qui l’on doit rendre.
L a substitution fidei commissaire renferme donc, à proprement
parler, deux donations; lu n e au profit de celui qui doit rendre,
l ’autre au profit de celui à qui doit être rendu l’objet donné.
Mais le second donataire 11e devant recueillir qu’après le
prem ier, ces donations doivent être successives. « Il fau t, dit
l'eregrinus ( de Jidei commissionis, art. 17 , n,° x. ) que les deux
gratifiés
�( 25 )
gratifiés soient appelés à recueillir successivement et non pas
concurremment, ordi-nesuccess'wo et non conjunclivo seusimultaneo».
Dans le droit de retour, au contraire, au lieu que le donateur
soit chargé de rendre à des tiers, c’est, le donateur lui-même qui,
en supposant la condition apposée par le contrat, intervenue,
reprend lui-même la chose qu’il avait donnée, et en redevient
le propriétaire , comme il l’était avant la donation, et avec
les mêmes droits qu’il avait avant.
A u ssi, M. Merlin prévoit-il cette question dans le répertoire
de jurisprudence ,
Substitution, et il la résout en peu de mots.
« La clause de retour au profit du donateur, constitue-t-elle
un fidci commis ? N on, parce q u ’ on n ’y trouve point une cliai’ge
de rendre à un tiers, gratifié en second ordre; on ne peut donc
la considérer que comme une donation à tem s, et c’est ainsi
que les lois la caractérisent.
A la vérité, le donateur meurt quelquefois avant l’événement
de la condition , et ce sont ses héritiers q u i, une fois que la
condition est arrivée, prennent sa place, et se saisissent des choses
qui étaient l’objet de sa donation; mais les héritiers du donateur
ne sont pas des tiers , ils ne sont pas gratifiés en second ordre ; ce
sont des représentons du donateur, qui continuent, pour ainsi
dire, sa personne, deviennent les maîtres de toutes les propriétés
qui lui appartenaient, exercent tous les droits qui étaient en sa
puissance, sont soumis aux mêmes charges auxquelles il était
o b lig é, en un m ot, sont absolument à sa p la c e , et sont, en
quelque sorte , ce qu’il était lui-même.
C ’est là la décision des lois, et c’était même une règle de droit.
Jlœredcm ejusdem potestatis jurisque esse cujus Jiat defunctus
constat, dit la loi 69, dig. de regulis juris.
L a loi 12, Cod. de acquir. velamitt. hcered. dit aussi: hœrcsin oninc
jus mortui non tantum in singularum rerum dominium succedit.
Ce principe est écrit aussi dans tous les auteurs.
« L ’héritier succédant aux biens et aux c h a r g e s , dit Dom at,
se met en la place du défunt, et sa condition est
raême »,
�. {aG 5
Les héritiers diffèrent même si peu du défunt, en matière de
stipulations , et sont, au contraire , tellement identifiés avec lu i,
qu’ils entrent par la force de la loi dans ces stipulations, pour
ainsi d ire , malgré lui ; qu’ils y entrent sans qu’il les nom m e,
sans qu’il s’occupe de leur intérêt, sans qu’il le prévoie , et qu’il
suffit qu’il ait stipulé pour lu i, et qu’il n’ait pas formellement
déclaré qu’il n’entendait stipuler, que pour lui-m êm e, pour qu’il
ait dans le même tein s, et par cela seu l, stipulé pour eux.
Les héritiers ne sont donc pas des tiers à l’égard du défunt ; ils
sont le défunt lui-m êm e, et dès - lors la stipulation de retour
dont ils sont dans le cas de jirofiter, n’a rien de commun avec
les substitutions qui ne regardaient jamais que des tiers.
C e p e n d a n t , ce sont les substitutions ét uniquement les substi
tutions, que les lois de 1792 ont entendu abolir, c’ est-à-dire, les
actes connus pour te ls , les dispositions qui portent ce titre , et
non pas des actes o ù , par des interprétations subtiles , on
prétendrait trouver un caractère ou un résultat analogue à celui
des substitutions , ce qui n’a pas été l’intention de ces lois.
Deux espèces de motifs ont déterminé les Législateurs à abolir
les substitutions.
D’abord, le m otif politique, qui a été de détruire le préjugé,
d’après lequel les biens n’étaient conservés dans une famille ,
qu’en sacrifiant tous ses membres , pour réserver à un seul l’éclat
de la fortune, ce qui était inalliable avec les principes que la
révolution avait introduits.
Et ensuite, le motif de l’égalité, qu’011 avait commencé à
établir entre les enfans, pour les successions , et qu’on avait lo
projet de rendre absolue, comme otil’a exécuté, en effet, depuis.
O r, aucun de ces deux motifs n’existait pour le droit de retour,
et au contraire, le droit de retour, envisagé sous le rapport des
enfans, héritiers de leur père donateur, rentrait même parfai
tement dans les vues des Législateurs d’alor6 ; car il avait pour
çflèt de faire revenir dans les mains de tous les enfans, ce qui
�t 27 )
était sorti de celles du père , pour appartenir à un seul ; ce'qui
était précisément l’opposé des substitutions, qui attribuaient à
lin seu l, ce qui naturellement aurait dû appartenir à tous.
Mais indépendamment de ces puissantes considérations , il est
impossible même de tro u ver, entre le droit de retour et une
substitution, la plus légére ressemblance.
Tout le monde sait que les substitutions étaient des disposi
tions émanées uniquement de la volonté d’un seu l, et qui se
passaient dans l’absence et sans le concours de ceux qui
pouvaient en être l’o b jet, comme dans les testamens ou même
dans les contrats de m ariage, où les substitués n’intervenaient
pas ; ( e t on sait qu’il était bien rare qu’ils y intervinssent ,
puisque la plupart du tems même ils n’étaient pas nés).
A u lieu que le droit de retour n’était pas une disposition,
un acte émané de la pure volonté du donateur ; c’était une
convention, un p a c te , un contrat qui était fait entre le do
nateur et le donataire, et qui supposait nécessairement le concours
et la réunion des deux volontés.
Les principes à cet égard sont connus , et les effets d’une
disposition conditionnelle sont bien difïérens de ceux d’ une
stipulation.
Les dispositions conditionnelles de l’iiomme ou de la loi ne
se transmettent pas à l’héritier de l’appelé décédé avant l’évé
nement de la condition. ( Et voilà pourquoi le retour lé g a l,
les jid ei commis ne sont pas transmissibles). Mais, c’est parce que
les héritiers ne recueillent du chef de leur auteur que le droit
dont il est décédé saisi. Or , les dispositions -conditionnelles ne
saisissent qu’au moment de leur ouverture ; jusques-là, elles ne
sont point in bonis de l’appelé. Si donc , à la différence des stipu
lations conditionnelles, et notamment des stipulations de retour,
qui, comme on l’a établi , sont transmissibles, et ont un effet
rétroactif au jour auquel la convention a été contractée, les dis*
D a
�( »8 )
positions conditionnelles ne saisissent qu’au moment, de leur ou
verture, les substitutions qui ne sont évidemment que de pures
dispositions, ne peuvent être régies par les mêmes règles que
les stipulations conditionnelles , et par exprès , que les règles
applicables au droit de retour conventionnel.
Sous aucun rapport d o n c, la stipulation de retour n’a rien de
commun avec les substitutions , qui ne regardaient jamais que
des tiers, tandis qu’encore une fois, les héritiers du donateur ne
sont pas des tiers, puisqu’ils ne sont pas gratifiés en second ordre.
On ne peut donc pas pretendre, de bonne fo i, que les lois
abolitives des substitutions ,•aient atteint les stipulations de retour.
Cette question n'est cependant pas nouvelle,* elle a été jugée
en Thèse par la Cour de Cassation dans l’affaire de N availles,
où le sieur Larregoyen, qui s’opposait au droit de retour, argu
mentait aussi des lois de 1792, qui abolissent toutes les substi
tutions non ouvertes de l’art. 896 du Code N a p o l é o n qui les
prohibe pour l’a v en ir, et de l’art. g 5 i du même Code qui prohibe
toute stipulationconditionnelle de retour des choses données,au pro
fit d’autres que le donateur personnellement, et survivant à l’événe
ment de la condition qui doit donner ouverture au droit de retour.
En effet , a-t-on dit , nul doute que l’on doit regarder
comme une véritable substitution la stipulation expresse ou tacite
du droit de retour au profit d’autres que le donateur vivan t, lors
de son ouverture : o r , les substitutions non encore ouvertes lors
de la publication des lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792,
sont abolies par ces lois ; d o n c, toutes les stipulations de retour
au profit d’autres que le donateur , qui n’étaient pas encore
ouvertes à cette époque, sont pareillement abolies; et c’est p a r T
cette raison, a-t-on ajouté, que l’art. y 5 i du Code civil défend
de stipuler le retour au profit d’autres que le donateur survivant
à son ouverture.
^
O11 faisait aussi beaucoup va lo ir, pour le sieur Larregoyen,
ja circonstance particulière qu e, dans le fait, il s’était éçoul^
�(» 0 )
plus d’un siècle d’in tervalle, entre la stipulation de retour et
l’ouverture de ce droit au profit de la dame de N a va illes, re
présentant ceux qui avaient constitué la dot ; que pendant ce
tems , la dot donnée à la charge de retou r, avait passé succes
sivement dans sa descendance , par plusieurs inains , sans pou
voir être aliénée au préjudice du droit de retour qui pourrait
s’ ouvrir un jour, ce qui, suivant le défenseur de M. Larregoyen,
présentait tous les caractères d’une véritable substitution graduelle
dans la descendance de la donataire, et ensuite , en cas d’ex
tinction de celte descendance , en faveur de ceux q u i, pour
lors, représenteraient les donateurs.
M ais, M. D aniels, substitut de M. le Procureur - g én é ra l,
portant la p aro le, combattit fortement ce système ; il professa
le principe que le caractère du droit de retou r, qu’il considéra
sans aucune difficulté comme trausmissible aux héritiers du
donateur, était absolument étranger à celui des substitutions,
et que les stipulations qui le renfermaient n’avaient pas été
abolies par les lois de 1792.
» De ce que les substitutions testamentaires, et même celles
» abolies par contrat de mariage , disait ce M agistrat,' ont été
v abolies, il ne faut pas conclure qu’il en est la même chose du
» droit de retour. La disposition textuelle des lois ( celles du 17
» Nivôse an 2, art. 74, et du 23Ventôse suivant, art. 5 ) s’éléve» raient contre cette conséquence , puisqu’elles conservent le droit
» de retour ( en faveur d’autres que le donateur ) , lorsque les
» substitutions étaient déjà abolies.
*
>?
»
»
» D ’ailleurs, ajoutait-il, le droit de retour ne peut être assim ilé
à une substitution, lorsque le donateur exerce lu i-m êm e ce
droit; ce n'est donc pas non plus une substitution, quand ¡1
est exercéspar ses héritiers, qui ne représentent avec lui que
la même personne ».
Cette doctrine fut consacrée par la cour de cassation, par
i*rrût du 11 Frimaire an 14 , rendu en la section des requêtes,
�(30)
rapport de M. B o rel, sous la présidence de M. Muraire , eî
qui est rapporté au Journal des audiences d elà cour de cassation,
pour l’année 1 4 — 1806. La cour rejeta le pourvoi du sieur
Larregoye’n contre l’arrêt de la cour d’appel de P a u , qui avait
accordé le droit de retour.
« A ttendu, portent les motifs des Juges suprêmes, que les
lois du 17 Nivôse an 2 , art. 7 4 , et 23 Yentôse suivant,
art. 5 , ont conservé les effets des stipulations de retour, et
3> ceux du retour légal dans les pays et pour les cas où ce
a> droit avait lie u , à l’égard des donations antérieures au 5
» Brumaire an 2, et que, d’après les lois et d’après les différences
» qui ex isten t entre les droits de réversibilité conventionnels
3> et légau x, et les substitutions , on ne peut appliquer au droit
d> de retour, l’abolition prononcée par les lois des 25 Octobre
» et 14 Novembre 1792 ».
Cet arrêt qui a retenti dans toute la France pour avertir
les personnes q u i, comme la dame Dorcet, auraient pu croire
<[ue les lois de la révolution avaient assimilé les stipulations
■de retour aux substitutions, et les avaient abolies comme
e lle s , ne permet plus aujourd’hui d’établir une controverse
raisonnable sur ce point de droit , et de le faire revivre
«ivec le plus léger espoir de succès.
Aussi les sieurs Delsol ne pousseront-ils pas plus loin leurs
réflexions sur une question aussi solennellement a g ité e, et qui
a été jugée., après que tous les m oyens, pour ceux qui s’oppo
saient à la réversion , ont été discutés , avec une méthode ,
une profondeur et une sagacité remarquables.
Et envain la dame Dorcet dirait-elle , que dans cette espèce,'
il ne s’agissait que dune donation entre-vifs ,• mais que s’il
s’ était agi d’un di'oit de retour apposé à une institution contrac
tuelle , on aurait jugé qu’une telle stipulation était une véritable
substitution, abolie par les lois nouvelles.
Cette objection ne peut pas résister aux principes qu’on a
�(3 0
développés sur la différence qui existe entre la nature , le
caractère et les effets d’un droit de retour , et ceux d’une
substitution.
Qu’importe, en effet, que le 'd ro it de retour soit apposé à
une donation ou à une institution,' ce droit n’est toujours qu’une
condition casuelle , résolutoire ; il n’est toujours qu’une c o n v e n
tion ' entre le donateur et le donataire, qu’un droit que se
réserve le donateur de résoudre la donation ou institution, si
la condition arrive ; niais dans ce cas-la même , les héritiers du
donateur ne recueillent pas comme appelés en deuxième ordre ;
ils ne so n t, comme on l ’a v u , que les représentais du donateur ;
ils sont le donateur lui-m êm e, selon la belle fiction de la loi.
Dès-lors , toute idée de substitution s'efface d’elle-même, et
le donateur, en stipulant pour lui et non pour les tiers, n’a
pu faire une substitution.
Encore une fo is, il n’existe pas , il ne peut pas exister
de substitution dans une stipulation de droit de retour, quelle
que soit la nature de l’acte qui renferme cette stipulation; et
par une conséquence nécessaire, il ne peut pas en exister daus
l’espèce particulière de cette cause, où l’on a apposé un droit
de retour à des contrats , à des pactes qui saisissent les héritiers
du stipulant de tous ses droits, et qui les continuent en leur
personne.
M ais, dit la dam eD orcet, et c ’est là la troisième proposition
n exam iner, quand le droit de retour serait transmissible aux
héritiers du donateur, je ne serais pas moins propriétaire des
biens qui eu sont grévés, puisque je suis appelée comme héritière
de mon p ère, à recueillir sa succession, et qu’à ce titre, les
éflèts du droit de retour doivent me revenir.
Cette objection, dont il est impossible de pénétrer le sens, a moins
qu’on suppose qu’elle est d’une absurdité difficile à q u a lifie r , ne
repose, dans l'interprétation la plus favorable qu’on veuille lui
donner, que sur une confusion d’idées.
rri.e
P R O P O S IT IO N
�( 3a )
En eïïet, pour que la dame Dorcet piit s’accorder avec ellemême , il faudrait le concours de plusieurs choses. Il faudrait
d’abord, commencer par effacer du contrat de mariage de 1760,
la clause du retour que se réserva le sieur D elsol, donateur ; il
faudrait ensuite que le sieur Delsol fût mort sans représentans
au degré successible, autres que la dame Dorcet; il faudrait
enfin supposer que la stipulation de retour est, de sa nature,
personnelle, et par conséquent incommunicable aux héritiers
du donateur, nonobstant son prédécès.
O r , aucune de ces circonstances ne sé rencontre ic.û
I l existe dans le contrat de mariage de la dame D orcet, une
stipulation de retour, de la part du sieur D elsol, donateur, qui
ju i interdisait la disposition des biens dont il la gratifiait, qui les
réservait pour lu i, si elle n’avait pas d’enfans de son m ariage;
et ce droit de retour existe encore incertain, puisque la condition
n ’est pas purifiée par le décès de la dame Dorcet ; il existe,
•puisque l ’effet de la stipulation ne doit s’ouvrir qu’après le
décès de la ' donataire, cette stipulation étant, de sa nature',
transmissible aux héritiers du stipulant.
Mais , par cela seul que le droit de retour existe encore, et
qu’il n est pas ouvert, qu’il ne peut l’être même qu'au décès
de la dame D o rcet, il est évident, il est plus clair que le jo u r,
qu’elle n’a pas recueilli avant l’événement de la condition, un
droit qui ne doit s’ouvrir qu’après que cette condition se sera
purifiée , et qu’ainsi sa qualité d’héritière universelle , à la charge
du droit de retour, ne lui a pas conféré celui de profiter d’une
convention dirigée expressément contre elle.
Autrem ent, il faudrait dire qu’un droit stipulé contre la dame
D orcet, par son contrat de m ariage, avait été stipulé en sa
faveur ; il faudrait dire que la dame Dorcet s’est succédée à ellemême , de son v iv a n t, ou en d’autres term es, qu’elle doit
aujourd’hui recueillir comme héritière universelle de son père,
par son, contrat de m ariage, ù la charge d’une stipulation de
retour,
�( 33 )
t e t o u r e n cas de décès sans enfans, les Mens sujets à ce droit
d e retour, avant le terme apposé à la stipulation.
I l est facife de voir que cela ne peut pas être ainsi.
En deux m ots, le contrat de mariage donnait tout à la dame
Dorcet, excepté le droit de retour ; sa qualité de donataire et
d’héritière universelle, ne lui a donc assuré l’espoir de recueillir
les biens de son père , qu’à la charge du droit de retour ; mais
encore une fo is, elle n’a pas recueilli dans la succcession de
son p è re , les biens dégagés de la condition de retour , ( et cela
est impossible, puisque cette condition est subordonnée à son
décès, qui n’est pas encore arrivé ). Sa prétention manque
donc de toute justesse ; elle ne serait tout au plus qu’une pure
pétition de principes ; ce qui nous ramène nécessairement et
dans tous les cas, à la question de savoir si la clause de
retour était réelle ou personnelle, et si par conséquent, elle
est devenue caduque par le prédécès du sieur Delsol père, ou si
l'elfet en a été transmis à ses héritiers, autres que la dame Dorcet.
Or , les sieurs Delsol- ont établi qjLie la clause était réelle et
transmissible aux héritiers du donateur.
Ils sont donc, comme héritiers naturels de leur p ère, appelés
à recueillir l'elfet de la stipulation de retour, à l’exclusion de la
dame Dorcet contre laquelle a.été dirigée cette stipulation.
lleste à savoir maintenant, si elle a pu disposer des objets soumis
au droit de retour.
L a discussion sur cette question ne peut être ni longue ni
difficile.
C’est un principe certain, et qui n ’a même jamais été le sujet
d’aucune controverse, que le donataire ne peut rien faire qui
puisse anéantir ou dim inuer, de quelque m a n i è r e q u e ce soit,
le droit de retour, car autrement il serait bien inutile de le
stipuler, si le donataire pouvait y porter atteinte.
A u ssi, tous les auteurs, et notamment M. D o live, en ses ques
tions de droit, Ily. 4? cliap, 8 , nous apprennent-ils que
fàyeur
E
�(34 y
du di’oit de retour a été poussée si loin , que les choses données-,
retournent e x e m p t e s de toutes charges et hypothèques qui yv
avaient.été imposées p a r le donataire, et même que les aliéna
tions qu’il en avait faites sont cassées en faveur du donateur au
quel ce di’oit de retour est adjugé ; il n’y. a : d’exception à ’ cette
règle , dit D olive , que pour les biens donnés par les père et mère,
à leurs fils :en faveur du mariage , lesquels,. nonobstant le droit
de retour , sont hypothéqués subsidiairement à la restitution)
de la dot.
M. M erlin, dans le répertoire de jurisprudence, V . Réversion,'
se demande si le donataire peut aliener et disposer au préjudice
du droit de retour, et il s’explique en ces termes.
« Il n’y a aucune difficulté sur la n ég a tive, par rapport au
» r e t o u r conventionnel; comme il affecte les biens donnés par.
une clause expresse qui. fait ^partie de la donation m êm e, il
» est clair qu’il doit avoir son effet contre tous ceux qui les
» possèdent, n’importe à quel titre ; et c’est ainsi'qu’on le juge
x dans tous les Pplem ens. ».
Ces principes ont été consacrés par le Code N a p o l é o n . L ’art, 953 porfe : « L ’effet du droit de retour sera de résoudre
3> toutes les aliénations des biens donnés, et de faire reyenir ces
3> biens au donateur, francs et quittes de toutes charges et hypo3? thèques , sauf néanmoins l’hypothèque de la dot et des conven3» tions matrimoniales, si les autres biens de l’époux donataire ne
» suffisent p a s, et dans le cas seulement où la donation lui aura
3) été faite par le mémo contrat de mariage duquel résultent ces
» droits et hypothèques. »
C ’est donc une vérité incontestable , que la stipulation du droit
de retour lie les mains au donataire, et que celui-ci ne peut dis
poser à titre onéreux ou gratuit des biens qui y sont sujets ; o u ,
ce qui est la même chose, que les dispositions qu’il peut en avoir
faites ne préjudicient pas à ceux qui doivent profiter de.cette
stipulation , lorsque l'événement qui y a donné lieu est arrivé.
Mais- indépendamment du poiut de. d ro it, il existe-dans lo
�( 35 )
contrat de mariage de la dame D o r c e t une prohibition for
melle de la part du donateur, de porter atteinte, en aucune
manière , au droit de retour qu’il stipulait.
» Sans qu’il puisse être dérogé, par sadite fille , future épouse,
» audit droit de réversion , par aucune disposition ni autres
» actes à ce contraires. »
V o ilà une clause p roh ibitive, s’il en fut jam ais; elle interdit
à la dame D orcet, donataire , toutes dispositions des biens dont
la réversion est réservée. C’est là une des conditions de la
donation ; elle en fait p a rtie, et dès-lors point de doute qu’elle
ne doive avoir l'effet le plus rigoureux, puisqu’elle ajoute
encore, s’il est possible, à la sévérité des lois et des auteurs
qui mettent les personnes grévées du droit de retour, dans
une interdiction absolue de disposer.
Que reste-t-il maintenant à la dame Dorcet pour appuyer
sa demande ? Rien , absolument rien. Les dispositions des lois,
la jurisprudence , le sentiment de tous les auteurs , l’intention
manifeste du donateur, concourent unanimement pour écarter
dans tous les sens , l’idée même qu’elle puisse porter la plus
légère atteinte au droit que doivent recueillir les sieurs Delsol,
comme héritiers de leur p è r e , la condition prévue par le
contrat de mariage de leur sœur arrivant.
Les Magistrats, chargés par les lo is, de veiller à la conser
vation des patrimoines dans les familles , s’empresseront donc
de proscrire une démarche dont le but ( avoué publiquement)
est de dépouiller les héritiers naturels, malgré la volonté form elle de l’auteur com m un, pour enrichir des étrangers.
M . e B A S T I D , Avocat.
Me R A M P O N Avoué licencié.
1
M.e B O N N E F O N S , Avoué.
de
A
l ’imp r i m e r i e
A U R I L L A C ,
C A L D A G U É S et
PELLISSON,
IMPRIM EURS DE L A PRÉFECTURE DU CAN TA L.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jean-François. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bastid
Rampon
Bonnefons
Subject
The topic of the resource
successions
nullité du testament
fideicommis
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieurs Jean-François Delsol aîné, habitant de la ville d'Aurillac, et Gabriel-Bartélémy Delsol-Volpilhac, habitant de la ville de Paris. Contre Dame Jeanne-Marie Delsol, veuve Vigier-Dorcet. En présence du sieur Desprats, habitant de la ville d'Aurillac.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Caldagués et Pellisson (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1760-Circa 1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0531
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0629
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53842/BCU_Factums_M0531.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Paris (75056)
Claud (seigneurie du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
contrats de mariage
droit de retour
fideicommis
nullité du testament
substitution
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53785/BCU_Factums_M0401.pdf
6ca8a80a3be30a24eb331e1873abf0a3
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Text
PRECIS
EN R É P O N S E
POUR
T h é o d o r e et J u l e s d e V E Y R A C , in ti m és;
CONTRE
M ar ie
G I N O U X , Veuve de J
ean
- J acques de
V E Y R A C , appelante.
E s t - c e
bien d’elle-m êm e que la veuve V e y ra c a
voulu parler, quand elle imprime qu’elle ne désire que
la paix et le repos., qu’elle a toujours voulu être juste,
et qu’usant de tous les ménagemens q u ’exigeait sa
qualité de seconde m ère, elle en a rempli les devoirs
avec bienséance?
Il faut donc que les enfans V eyrac oublient que
depuis neuf ans elle relient la fortune de leur p è re ,
z
�v.
(a )
«ans qu’ils aient pu toucher aulre chose que quelques
minces revenus, arrachés en partie parties saisies-arrêts,
qu’elle a su encore neutraliser.
•
!
Il faut donc qu’ils oublient quatorze jugemens ou
arrêts qu’il a fallu obtenir contre elle , dans lesquels
elle seule a été condamnée aux dépens, et trois fois
en son nom personnel.
Il faut donc qu’ils oublient l ’expoliation m éditée,
sous son n o m , par un certain Lam bert, que la coup
a.condamné à restitution.
'
Il faut donc qu’ils oublient les calomnies et les li
belles qu’elle a plps d’une fois répandus contre une
famille respectable, à l’égard de laquelle elle devait
effectivement user de ménagemens, parce qu'indépen
damment même de ses chicanes, elle avait beaucoup
de choses à faire pardonner.
son
v i s a g e , et étudiant un rôle nouveau, a cru se rendre
plus recommandable en la cour, les enfans V eyrac ne
M a i s si la v e u v e V e y r a c , c o m p o s a n t a u j o u r d ’ h u i
sont point dupes de cet astucieux travestissement. Sa
conduile soutenue, pendant huit a n s , leur a prouvé
qu’une belle-mère n’est , le plus souvent, qu’un être ,
incorrigible et malfaisant, dont il ne faut attendre ni
procédés ni contrilion.
Ainsi la veuve Veyrac peut cesser la contrainle qu’elle
s’est imposée, et reprendre son caractère. Ceux qu’elle
a si long-iems outragés lui pardonneraient tout, si les
larmes dont elle se dit a b reu vée, étaient celles de la
�( )
3
pénitence ; mais quand des larmes ne font qu’un moyen
de procès , elles ne séduisent p o in t, et ne sont que
ridicules.
L ’objet principal de la contestation était terminé
entre les parties, après toutes les chicanes qu’il était
judiciairement possible de susciter aux enfans Veyrac.
Il était jugé qu’ils auraient 10,000 francs de rente
perpétuelle sur la succession de leur a ïe u l, outre les
droits de leur mère, et la succession d’un oncle.
L e tribunal du P u y , la cour d’appel, la cour de
cassation avaient décidé que cela serait ainsi ; mais la
veuve V eyrac a médité un m oyen de paralyser une
décision aussi bien consolidée; et cette attaque indirecte
de la chose jugée , est aujourd’hui l’objet du procès
pendant en la cour.
C ’est dans le contrat de mariage de François-Camille
de V e y ra c , et dans la clause même jugée p a rla cour?
que la veuve V eyrac puise ses moyens d’attaque.
Par l ’article 2 de ce contrat, du 19 janvier 1 7 8 5 ,
Jean-Jacques de V e y ra c , donne et constitue à Fran
çois-Camille de Veyrac son lils (père des intimés), d ix
mULe Livres de rente annuelle et perpétuelle, avec son
hôtel au P u y , et la moitié de ses meubles.
lui assure
de plus la moitié des biens dépendans de la succession
de la dame de Maison-Seule, mère du futur, pour en
11
j°uir après son décès; et enfin il lui donne la faculté
prendre dans ses bois celui nécessaire a l’ usage de
sa maison.
2,
�3
«
«
«
«
«
«
'
.
.
(
4
}
L'article
est ainsi conçu : <rDans la donation et
constitution ci-dessus de 10,000 francs de rente est
comprise la substitution faite au profit du futur par
le sieur de V eyrac de Maison-Seule son aïeul, dans
son testament. Comme aussi le fu tu r ne pourra point
rechercher ledit, seigneur son père, relativement à
l’inventaire de M. son oncle le chevalier de Veyrac*.
A rticle 4. «rLes autres biens dudit sieur de V eyrac,
«■en quelques nalures qu’ils soient , terres , contrats
« et autres, lui demeureront réservés, ainsi que les
« fruits des autres biens propres du fu tu r , desquels
« ledit seigneur son père a droit de jouir en vertu de
« sa puissance paternelle ; lesquelles clauses ont été
« expressément requises par ledit de Veyrac père (1)».
.Après le décès de François-Camille de V e y r a c , en.
l’an 6 , la famille, présidée par l’aïe u l, lui-m êm e, crut
devoir déférer la tutelle au sieur de G laven as, le beaufrère et le meilleur ami du défunt.
( 1 ) Ce contrat de mariage a une clause dé réversion, stipulée
au cas où le futur ayant des enfans, ils décéderaient. L a veuve
V e y ra c a jugé à propos (p ag. 6 de son mém oire) d’y lire : dé
céderait ; ce qui ôlerait aux enfnns de Camille tout l’effet du
contrat de mariage de leur père : cependant elle n’y insiste pas.
Mais elle devait dire à la cour que celte découverte n’est pas
nouvelle de sa part ; q u ’elle proposa ce moyen en l’an 7 , et
rendit nécessaire un compulsoire de la minute du contrat de
mariage. Il fut reconnu qu’il y avait ils décéderaient , et alors
la clause est devenue sans effet, parce que les enfans vivent. L a
veuve s’est tue depuis cette époque. Comment donc revient-elle
sur ses pas, quand tout est ju g é ?
�( 5 >
.
.
- Ce n’est pas sans adresse et sans mauvaise foi que
la veuve V eyrac parle de manœuvres employées par
la famille pour contrarier le vieillard sur ce point ;
elle sait mieux que personne que tout se passa de son
a v e u , parce qu’il partageait sincèrement les craintes
de toute la famille sur l’avenir que préparait sa seconde
femme aux enfans de son fils. Elle sait encore que le
sieur de Glavenas n ’ a c c e p t a , pour ainsi dire que malgré
lu i, une tutelle onéreuse; et les mineurs V eyrac se
plaisent à déclarer que sans lui ils n’auraient pas eu les
moyens de vivre, malgré leurs 10,000 fr. de rente, puis
que, pendant les interminables procès, suscités par leur
marâtre, elle a trouvé le secret de retenir leur fortune.
Voilà l’explication de l’une des calomnies de la veuve
Ve37rac : revenons maintenant aux premières causes du
procès, avec la b riévelé que com porte une cause , dont
tous les détails ont été rappelés dans des imprimés précédens , et qui n’a besoin que d’être réduite au seul
point de vue sous lequel elle se présente en la cour.
Jean -Jacques V eyrac é ta it, avant sa m o rt, livré
exclusivement aux volontés de sa femme et de ses con
seils. Contrariée de ce qu’il n’avait pas voulu la tutelle,
elle l1engagea à ne rien payer de la pension des mineurs,
ou plutôt elle refusa pour lui : et le tuteur se vit obligé,
plus d’un an après son entrée en exe rcice, d’obtenir
Une sentence le 2y thermidor an 7, pour se procurer le
paiement de la rente de 10,000 f r ., et faire régler ce
�•
( 6 }
,
dont le sieur de V eyrac père ne s’était pas retenu
l ’ usufruit.
Mais il est faux de dire que les saisies-arrêts furent
accumulées sur le sieur de Veyrac pour le priver de
tous ses revenus , et qu’il passa ses dernières années
dans un dénuement absolu. Ces faits sont de la pure
invention de Marie Ginoux; aucune saisie-arrêt n’eut
lieu pendant la vie du sieur de V eyrac ; on l’a défie
d’en produire une seule.
A compter du décès du sieur de Veyrac ( i . er bru
maire an 8 ) , il a fallu se résoudre h plaider avec la
v e u v e , pour ainsi dire, jour par jour.
Verbalisations sans fin à tous les actes et inventaires;
refus de délaisser le mobilier même des mineurs ; oppo
sitions sur oppositions h toutes les procédures et à toutes
les saisies-arrêts5 offres de payer tantôt les arrérages de
la renie de 10,000 fr. , tantôt le capital, puis révoca
tion de ses offres et désaveu : opposition à des jngemens passés en chose jugée , et appel de ceux qui la
déclaraient non-recevable : voilà en bref comment
s’est passé l’an 8.
I/an 9 fut employé h des discussions plus sérieuses,
mais moins rapides. Les mineurs avaienl pris des con
clusions générales pour le règlement de leurs droits j
la v e u v e , à la vérité , contesta tout > forma des de
mandes incidentes, mais sans concevoir même l’idée
de répéter les sommes énormes qui font le sujet de
sa demande actuelle.
�.
( 7 }
.
Cependant c’était alors le m om ent; car les mineurs
avaient conclu au paiement de toutes leurs reprises dans
tous les estocs de la famille de Veyrac.
Condamnée par défaut le 21 nivôse an 9 , la veuve
V eyrac forma opposition, et fut déboutée par jugement
du 14 germinal suivant; elle en interjeta appel.
L ’an 9 fut encore consacré à l’épisode de L am b ert,
qui ne dut pas préparer la cour à être très-favorable
à la veuve Veyrac.
L e jugement du 14 germinal an 9 fut confirmé par
la cour, le 28 pluviôse an 10 ; et la veuve V eyrac fut
condamnée aux dépens de la cause d’a p p e l, en son
nom personnel, et sans répétition, comme elle l ’avait
été déjà au P u y , pour les dépens de l’opposition. Elle
s’est pourvue en cassation, où elle a encore succombé.
Les points principaux du procès étaient jugés, ce
pendant il restait sept articles non éclaircis ; mais la
veuve V eyrac n’entendait pas se contenter d ’un aussi
petit nombre de difficultés ; aussitôt après son appel,
elle présenta requête au P u y , pour plaider en même
tems sur plusieurs nouvelles prétentions de sa part.
A v e c cette découverte inopinée, la veuve V eyrac a
trouvé le secret de prolonger la contestation pendant
près de sept ans; c’était là tout son but.
Car elle a eu la satisfaction de dire qu’avec tant de
j ugeniens et d’arrêts, les mineurs V eyrac ne sont pas
plus avancés en 1808 qu’en l’an 8.
�( 8 )
^
Ceci paraîtra sûrement une fable ; cependant rien
n’est plus réel> et voici par quel secret la veuve Veyrac
est parvenue à paralyser les arrêts de la cour.
•
En faisant donation de 10,000 fr. de rente à son
fils, M. de V eyrac père dit que dans La donation,
est comprise La substitution faite au profit du futur
par son aïeul,
' C'est là où la veuve V eyrac a pris son texte; elle
a dit aux mineurs V eyrac : « A y e z votre rente, j’y
« consens, puisqu’on m’y force ; mais dans votre renie
«
«•
«
«
est une substitution. D a n s cette substitution, se trouvent des dettes; et non-seulement ces dettes se com
posent des dots et légitimes que vous d e m a n d e z,
mais vous me devez vous-m êm e une foule d’arti^
* d e s , notamment la dot de votre bisaïeule, etc.»
C ’est dans ce raisonnement que le procès actuel a
pris sa source. Il est inutile de rappeler tous les chefs
de demandes décidés p arle jugement du P u y ; il suffit
de dire que les mineurs V eyrac s’en sont tenus de leur
part aux articles restés indécis en l’an 9.
Elle a formé six nouveaux chefs de demande qui
sont de prétendues dettes dé la substitution , et qui
sont au reste énumérées dans son mémoire (page 17).
L e tribunal du P u y a statué sur le tout, le 26 prai
rial an 12; il a pensé que les mineurs devaient avoir
leur rente franche et quitte, et en outre les succes
sions dont leur père ne s’était pas départi par son con
trat de mariage.
�.
(
9
}
A vant de suivre la veuve V eyrac dans ses demandes
et moyens, il faut d’abord savoir ce qui a été demandé
et jugé entre les parties avant ce procès, pour éviter
la confusion, et mettre la cour à portée de vérifier
tout d’ un coup ce qui a été jugé ou préjugé.
En Tan 9, les mineurs Veyrac demandèrent, i.° acte
de leur option de s’en tenir aux 10,000 fr. de rente ;
2.0
j oo fr. pour la moitié de la dot et reprises de la
38 5
3 5
dame Morges leur mère ; .° ,ooo fr. pour moitié de sou
mobilier ; 4.0 la moitié du mobilier délaissé par Jac
ques-Antoine de V e y ra c , bisaïeul; .° 22,000 fr. pour la
5
légitime de Jean-Hugues de V eyrac; 6.° l’exéculorialité du jugement du 27 thermidor an 7 , pour ladite
rente de 10,000 fr., paiement des arrérages et conti
nuation du paiement à ven ir; 7.0 le partage de la suc
cession deM arie-Anne Belut de Trinlinliac leur aïeule;
8.° la moitié des sommes reçues par Jean-Jacques
V e y ra c , pour les biens aventifs de la dame de Morges,
aïeule des mineurs; 9.0 la distraction définitive du m o
bilier de leur père; io.° i o fr. montant d’un billet
fait au tuteur pour vente d’un cheval ; n . ° la faculté
de prendre du bois à perpétuité , conformément au
contrat de mariage.
5
Loin de proposer aucuns moyens de compensation
conlre ces demandes, voici les conclusions que prit la
y^uve V e yra c, telles qu’elles sont consignées dans le
jugenQent définitif du 14 germinal an
A- ce qu’il lu i
3
�( IO )
fu t donne acte de ce que sur les articles i , 4 et 10, elle
s’ en rapportait à La prudence du tribunal, ainsi que
sur le paiement de la rente de 10,000 fr. et de ce quelle
consentait leur délivrer des à présent les titres en bonne
form e d ’ une créance de 2 ,000 fr . en capital} due par
la maison V o g u ié; sur le surplus des demandes à ce
que les mineurs en fussent déboutés, attendu qu’elles
n étaient pas établies.
5
E n expliquant ces conclusions, elle fit plaider sur
l’art. 2 des demandes, que si les mineurs établissaient,
par des quittances, que le défunt eût reçu 70,000 fr.
de la dame de Morges, elle ne ferait aucune difficulté
sur ce ch ef de demande; elle dit la même chose sur
l ’article .
3
Sur l’art.
5, elle objecta qu’on
11e justifiait ni le tes
tam ent, ni la consistance des droits de Jean-Hugues ,
et que d’ailleurs François - Camille de Veyrac avait
répudié à ladite succession.
Sur l’art. 6 , qu’elle ne contestait pas le paiement
de la rente de 10,000 fr. mais que les arrérages anté
rieurs à l’an 7 étaient surpayés.
1
Sur art. 7 , elle pretendit que la succession Trin tinhac était bien assurée pour moitié au père des
mineurs , par son contrat de m ariage, mais que ce
mot n’opérait pas une donation, sur-tout en D au phiné. Cet article fut au reste discuté par elle; en
point de droit, avec une extrême longueur.
�(II )
Sur l’art.-8 , elle dit qu’il fallait prouver que Jean
Jacques V eyrac avait donné des quittances.
Sur l’art. 9 , elle soutint que le père des mineurs
s’était emparé de la maison du P u y 5 et en avait dis
sipé la majeure partie.,
Sur l’art, i i , elle prétendit que la faculté de pren
dre du bois était personnelle au père des m ineurs, et
qu’il était ridicule de vouloir qu’elle s’étendît à sa
postérité.
¥
Voilà tout ce qui fut soumis aux premiers juges, et
par suite à la cour d’appel.
.
1
Les mineurs obtinrent la rente de 10,000 francs , a
faculté de prendre du bois, le partage des immeubles
Trintinhac, et une partie du mobilier. U n e preuve
fut ordonnée à l ’égard d’une autre partie dudit m o
bilier , et sur tout le surplus, il fut ordonné plus
ample contestation.
Comment donc la dame V eyrac , après des con
clusions et une plaidoirie aussi précises, a-t-elle pu
se démentir elle-même, au point de prétendre ensuite
. que la remise de la substitution mettait, sur le compte
de François - Camille de V e y r a c , toutes les dettes de
son ^aïeul?
Si cela eût été ainsi, comment donc la veuve V eyrac
a~t-elle consenti à subordonner le paiement de plu
sieurs deües à un simple rapport de quittances; c’était
■
4
�(
12
)
îë cas au contraire de soutenir qu’ elle ne devail rie n ,
et d’opposer des compensations.
Les demandes pendantes en l’an 9 présentaient le
cadre général de toutes les prétentions respectives; les
mineurs, qui n’avaient rien, étaient demandeurs, et
avaient réuni tous leurs chefs de demande. La tutrice
était défenderesse contr’eux, et demanderesse en par
tage conlre l’interdit ; elle avait aussi présenté à la
fois toutes ses prétentions.
Ses demandes ultérieures formées après Leju g em en t'
d é fin itif, où elle emploie quarante rôles à faire valoir
ses m oyens, sont donc des prétentions de mauvaise
f o i , et non-recevables?
Elle ne les présentait, disait-elle alors, que parce que
te jugem ent était exécutoire nonobstant Cappet. Elle
n'avait donc d’autre but que de paralyser des créances
Certaines par des prétentions imaginaires : et ce qu’elle
ne mettait en a v a n t. que comme une chicane a vo u é e,
elle le soutient aujourd’hui avec obstination.
Mais qu’est-il besoin de lins de non-recevoir contre
des demandes aussi déplorables? Suivons les moj^ens
de la veuve V e y r a c , et quelques réflexions suffiront
pour montrer qu’elle ne peut pas être de bonne foi
elle-même dans sa découverte.
La principale question à traiter n’est pas de savoir
si le contrat de mariage de 1787 contient La remise de
la substitution de l’aïeul, par Jean-Jacques V e y r a c , à
�( 13 ) _
.
son f i l s , mais si au contraire il ne contient pas la
remise de cette substitution par le f ils t au-profit du
père (i).
L a clause du contrat en effet ne laisse pas d’équi
voque, comme le dit fort bien la veuve de V eyra c
(page 39 de son mémoire),' «le sieur de V eyrac ne
«• donne 10,000 fr. de rente à son fils que pour s’ ac« quitter envers lui. Nemo liberalis, n isi Liberatus ».
Il est difficile d’être plus d’accord sur les principes,
et de l’être plutôt. Car les mineurs V eyrac adoptent
parfaitement celte première et fondamentale pensée
de leur adversaire.
Que résulle-t-il en effet de la clause du contrat, qui
ne peut pas s’interpréter de deux manières? C ’est que
Jean-Jacques de V e y r a c , grevé ou débiteur d’ une subs
t i t u t i o n , s’ e n est acquitté p a r le moyen du contrat.
C ’est là le contrat do ut des ; et comment conce
voir que celui que la veuve V eyrac dit acquitté par
le moyen d’une rente, qui est le prix de sa libération,
11’ait pas retenu pour son compte la chose même qu’il
payait de son argent?
Il faut encore ajouter, avec la veuve V e y r a c , que
sans cet arrangem ent, et si François-Camille V eyrac
n’avait pas eu droit à la substitution, son père ne lu i
aurait pas fa it une constitution aussi forte.
s
(0
T_.es motifs du jugement dont est appel, sur cette ques-
tl0" , sont au mémoire de la veuve V e y r a c , page a 2 , dernier
alinéa; \Q dispositif est page 3 z.
�(
*4
)
‘
.
L e p è r e a donc bien entendu s’ acquitter tout à la
fois des droits de son fils à,1a substitution, et de sa dette
paternelle pour l’établissement de ce fils ; c’est-à-dire,
qu’il a entendu payer ces deux objets.
;
Et de quelque terme qu’on se soit servi pour expri
mer cette intention, n’est-il pas de principe qu’elle se
détermine par la nature de l’acte, plutôt que par les
expressions dont on s’est servi. Potiùs id quod actum ,
quàrn quod dictum est.
'
I c i , ce qui a été convenu n’est obscur pour personne.
L e père s’est acquitté de la substitution en la payant
par une rente. L e fils y a consenti • et par conséquent
le père n ’a plus été grevé de cette substitution.
S’il n’en a plus été g r e v é , le fils a cessé d’y avoir
des droits; et dès-lors la mutation s’est opérée par cet
échange entre une rente et les droits dont il .donnait
quittance au père.
Si donc il y a dans cette convention res, consen
sus et pretium, comment s’obstiner à vouloir que celui
qui est devenu le propriétaire libre des biens substitués,
en ait cependant laissé toutes les charges à un autre?
Il serait inutile, d’après ces observations, de suivre
la discussion à laquelle s’est livrée la veuve V eyrac
pour prouver, par des lois romaines, qu’on peut faire
une restitution anticipée de fidéicommis, et que dès
cet instant les dettes de l’hérédité ont passé sur la tête
du propriétaire des biens substitues.
Certainement tout cela est incontestable; mais ou
en est l’application?
'
�( i5 )
Toute cette discussion est fondée sur un seul mot,
restitution anticipée des biens substitués; et ce mot est
de la pure invention de la veuve V e y r a c , car il n’est
pas au contrat de mariage.
A u contraire, il en résulte que le père a retenu pour
lui les biens substitués; et la veuve V eyrac en jouit.
Il suffit donc de lui rétorquer ses propres citations,
et de dire avec elle que les dettes et charges de l’h é
rédité sont à la charge de celui qui est devenu proprié
taire des biens substitués.
Jean-Jacques V eyra c fut libéré de la condition de
rendre; dès-lors les biens substitués ne sont restés dans
ses mains que deducto œre alieno.
C ’est une idée bien étrange que celle de la veuve
V eyrac : lorsqu’elle ne peut plus résister à payer la
r e n te , elle veu t la couvrir par des dettes. Elle prétend
que le donateur de la rente a sous-entendu que le
donataire resterait son débiteur d’une somme inconnue,
et que la chose donnée en resterait grevée. Conception
véritablement sans exemple.
■
Et si les dettes des biens substitués se fussent portées
à 240,000 fr., il en résulterait que le s.r de V eyrac aurait
donné la somme de 240,000 fr., sur laquelle il aurait
retenu 240,000 fr. ; c’est-à-dire, qu’il aurait donné zéro.
Si la veuve V eyra c avait transcrit (pag. 39) la fin
de l ’article 2 du contrat de mariage, cette fin aurait
évité le sens forcé qu'elle y donne. Comme aussi le
fu tu r ne pourra rechercher Ledit seigneur son père pour
�C 16 )
C inventaire de son oncle : cela suppose nécessairement
que si quelque chose est sous-entendu, c’est la répétition
de la même convention pour ce qui précède ; c’està-dire, q u il ne pourra rechercher son pere pour les
biens de la substitution.
L a veuve V eyrac a bien copié cet article 2, en la
page 5 ; mais les mots comme aussi y ont été négligés ;
cependant ils expliquent toute r i n t e n t i o n , et ils ôtent
absolument l’équivoque qu’elle a voulu faire naître
d’une remise anticipée de la substitution.
Il y aurait encore bien des choses à dire pour for
tifier cette démonstration \ mais ce ne serait que ré
péter ce qu’ont dit les mineurs, dans leur mémoire
publié en première instance (pag. 18 et suivantes), et
ce qu’a dit le curateur de l’interdit, en son mémoire
3
(pag. i ); il suffit d’y renvoyer. L a cour y appercevra
un fait très-important, c’est que la succession du substi
tuant a été évaluée à 867,499 livres ; ce qui faisait
pour la substitution 433,749 liv. 10 sous, que le père
des mineurs a abandonnés pour une rente de 10,000 fr.
Il pouvait aussi demander les fruits faute de publica
tion ; de sorte que son père ne lui donna pas même le
produit net de ce qu’il lui devait.
La veuve Veyrac criait ¿1 la collusion contre le cura- 1
leur de l’interdit , parce qu’il ne voulait pas être de
moitié dans s e s paradoxes. Mais le curateur lui répondit
qu’avant de plaider comme elle au hasard, il avait
consulté trois anciens jurisconsultes de Toulouse (mes
sieurs
�( 17 )
/■
.
sieurs G a r y , Lespinasse et L aviguerie), qu ils avaient
décidé en faveur des mineurs , et que cela faisait loi
pour lui, parce qu e, en le nommant curateur, on lui
avait recommandé d'être circonspect , et de ne pas
élever de difficultés déplacées. (Cette recommandalion
avait été faite aussi à la veuve V e y ra c , en la condam
nant trois fois aux dépens en son nom 5 mais elle n’en
a pas été corrigée.)
Les premiers juges ont donc déclaré qu’il ne résul
tait de la donation de 10,000 fr. de rente, aucune
charge de payer les dettes de la substitution au dona
teur. En conséquence , ils ont mis hors de cour la
veuve V eyrac sur tous ses chefs de demande, qui ne
prenaient leur source que dans ladite prétention.
Ainsi les mineurs V eyrac ne s’occuperont plus de
ces chefs de d em a n d e , que la veuve Veyrac a ren
voyés à la fin de son mémoire (pag. y ) 7 et qu’elle
5
ne fonde sur aucun moyen.
\
La première conséquence que tire la veuve V eyrac
de la démonstration q u ’elle croit avoir faite de la
remise de substitution , est de dire (pag. 46) que toutes
les demandes relatives à la restitution de la dot de la
dame de Morges (première femme de Jean-Jacques
V e y ra c ), s’écroulent, d’elles-mêmes.
Ceci était en effet très-conséquent. Mais la veuve
Veyrac avait, oublié que, lors du jugement de Tan 9 ,
e^e avait soumis ces chefs au rapport des quittances.
-
5
�( i8 j
: Aujourd’hui'ces quittances sont rapportées ; donc les
mineurs ont droit de réclamer cette dot, parce que
leur père ne s’est pas départi de la succession de sa
mère.
Il importe peu que les quittances aient été données
par Jean -Jacques V eyrac ou par son p è re , puisque
c ’est là une succession dont aucune l o i , ni aucune
convention ne prive les mineurs. Mais si cela impor
tait, il faudrait rectifier la citation que fait la veuve *
V eyrac : Pater pertes quetn est adm inistrado prœsumitur totum récépissé. Dumoulin dit : V ir penès
quem , etc. A la vérité, il ajoute une comparaison re
lative au père qui s’oblige avec le fils, c’est-à-dire, le
fils sous La puissance paternelle, comme la femme sous
la puissance maritale; et ce qui le p ro u v e , c ’est que
Dumoulin ajoute qu’il parle des femmes dont les biens
sont dotaaoc, et q u’il en serait autrem ent si elles étaient
communes.
Après avoir contesté la dot de la dame de M orges,
la veuve V eyrac dispútele trousseau (pag. 47 ) , parce
q u e , d it - e ll e , le mari l ’a gagné par sa survie, à la
charge des funérailles, ce qui est, si on l’en croit, une
une règle de droit commun.
L a veuve Veyrac ne se serait-elle point accom
modée en cela de la coutume d’Auvergne? Mais cette
coutume est étrangère à la cause : c’est le droit ro
main qui régit les parties; et il ne donne pas le trous-
�19
(
)
v
seau au mari. L a novelle 1 1 7 exprime les cas ou un
mari a quelque chose à espérer sur la succession de
sa femme ; mais il n’y est question ni de trousseau, ni
d’enterrement.
L a veu ve V eyra c combat le gain de survie de 7,000 f.
stipulé au profit de ladite dame de Morges. Ici c’est
dans une loi romaine qu’elle puise le principe que les
donations entre époux, quoique faites entre-vifs, sont
révocables, et qu’il faut la survie de 1 époux.
Cela est très-vrai pour les donations faites pendant
le mariage, constante matrimonio j mais quand il s’agit
d’ un don fait par le contrat de mariage l u i - m ê m e ,
tout est perpétuel et irrévocable , sur-tout quand on
en est ainsi convenu.
O r , le contrat de m ariage porte que le sieur de
V e y ra c donne à la dame de Morges la somme de
7,000 f r ., qui Lui appartiendra, et dont elle pourra d is
poser à sa volonté,
qu ’e l l e
s u r v iv e
ou p r é d é c è d e
,
qu’ il y ait des enfans ou non.
'
L à le m otif de prohibition des lois contre les dona
tions"^ conjugales n’existe plus, rie mutuo amore sese
invicem spolientur. D ’ailleurs, ce qu’a voulu une loi
générale cède à une convention sous la foi de laquelle
un mariage a été contracté, legem contractus d ix it.
1
/
Nous ne suivrons pas la veuve V eyrac dans sa dis
cussion sur divers articles des biens aventifs de la dame
f
6
�( 20 )
.
'
de Morges (pag. 49 et o)- les premiers juges s’en sont
retenu la connaissance ( pag.
).
. Elle adopte le legs de 10,000 fr. fait à la dame de
5
35
Morges , et offre de payer sous déduction d’un neu
vième. C ’est précisément ce qu’ont décidé les premiers
juges (pag. 3 4 ).
.
Quant au ch ef relatif à la légitime du chevalier de Veyrac, l ’adversaire la contesté par deux moyens; i.° parce
que c’est une delte de la substitution ; 2.° parce qu’il est
à présumer qu’elle a été payée,, et qiCelle croit être
certaine que la quittance est dans les papiers de la suc
cession. ’
D éjà il a été prouvé que ce premier moyen était
un songe, et le second est de la même nature.
C a r ia veuve Veyrac n ’a pas encore, donné assez de
gages de sa véracité, pour qu’on doive la croire sur pa
role dans ses simples présomptions. N ’a - t - e l l e pas eu
assez de neuf ans pour chercher dans les papiers de la
succession ?
•
'
Il s’agit d’une légitime due et non prescrite : il n'y
avait donc de griefs à proposer qu’avec une quittance?
C'est bien assez que les premiers juges n’aient pas
adjugé les 6,000 fr. demandés de plus. Mais si la veuve
a osé nier l'écriture du défunt, l ’interlocutoire qu’elle
a rendu nécessaire ne lui aura valu, que le plaisir de
plaider un peu plus long-tems, sans lui épargner une
condamnation.
�( 21 )
Faut-il la remercier de ce qu’ elle ne dispute pas
53
la condamnation de 75 fr. (page
); il semble qu elle
se fait violence en ne contestant pas cet objet ; mais
il est constaté par un billet du défunt.
L a veuve Veyrac se plaint d’être condamnée aux
intérêts des intérêts (page
) ; et elle prétend que
c’est un anatocisme, à la vérité adopté par le Code civil ,
54
mais qui en cela établit un droit nouveau.
,
C’est au contraire un bien vieux principe en F ra n c e ,
l
t
que les intérêts qui courent, ex natura rei, peuvent en
produire eux-m êm es, du jour de la demande : et pré
cisément les dots et les légitimes sont de ce nombre.
En cela les intérêts qui courent sans demande, ne
sont , à proprement parler , que Les fru its dus à la
fem m e et au légitimaire, du jour de l’ouverture de leurs
droits; et il n’y a pas d’anatocisme à ce que des fruits
produisent des intérêts.
'
Ce n’est point assez à la veu ve V eyrac de gloser
contre le jugement dans ce qu’il d it, il faut encore
qu’elle le blâme dans ce qu’il ne dit pas. » Les prê
te miers juges, d it-e lle (page
), ont bien imaginé
« de condamner la veuve Ginoux solidairement et
«■hypothécairement. Entre cohéritiers, il n’y a pas
55
. ff d’action solidaire ; mais on a pris à tâche de l’accacc hier par les condamnations les plus injustes».
/ *»
v
lamentation aurait dû être réservée pour un
�(
22
)
cas plus réel. Car précisément les premiers juges n’ont
pas condamné la veuve V e yra c solidairement.
Ils l’ont condamnée pour m oitié, et hypothécairement pour le tout. Cela est ainsi répété trois fois dans
le ju g e m e n t, c’e s t - à - d i r e , à chaque condamnation
(pages
,
et 37).
34 36
Cette disposition n’est-elle pas conforme aux anciens
principes, et à l’art. 873 du Code civil? la veuve Veyrac
a moitié dans la succession; donc elle doit supporter
les dettes personnellement pour sa part et portion , et
hypothécairement pour le tout.
L a veuve V eyra c n’a point encore assez d’un adver
saire, et elle rompt encore une lance contre l ’interdit,
parce qu’il a obtenu une condamnation d’intérêts de
puis le 28 août 1792.
Mais la veuve V eyrac, qui le met en qualité dans son
m ém oire, com m e intim é, n ’a point interjeté appel
contre lui. Sans doute elle l’avait oublié, ou elle s’en
repent ; et pour se consoler, elle crie dans le désert.
Théodore
de
VEYRAC.
M. e D E L A P C H I E R , ancien A vocat.
M. e G A R R O N , L icen cié-a voué.
A R I O M , D E L ’IM P . D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
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Title
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veyrac, Théodore de. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
contrats de mariage
substitution
droit romain
anatocisme
Description
An account of the resource
Précis en réponse, pour Théodore et Jules de Veyrac, intimés ; contre Marie Ginoux, veuve de Jean-Jacques de Veyrac, appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
Circa 1785-Circa An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0401
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
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Domaine public
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anatocisme
contrats de mariage
droit Romain
rentes
substitution
Successions
-
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Text
À at).
NOTE EN RÉPONSE
PO U R
JEAN R O U CH Y
CO NTRE
MICHEL DIERNAT, ARNAL
E T AUTRES.
On se propose d’etablir d’une manière succincte les six proposi
tions suivantes :
1 ° Jean Rouchy est légataire universel d'Antoine L a v e rg n e , son
oncle ;
2° La validité de ce legs universel est indépendante du sort de
la disposition particulière au domaine de Lon gevergne qu’on p ré
tend entachée de substitution j
�5 ° L e testament d’Antoiné; Layergne ne renferme pas de substi
tution;
4 “ Si ce testament renferme une substitution , elle n’est que no
minale, et doit être réputée non écrite par application des art. 8 i 5 ,
900 et 906 du code civil ;
5 ° Cette substitution ne, fût-elle.pas réputée non écrite , n’excé
derait pus les dispositions permises par la loi du 17 mai 1826.
6° Si cette substitution dépasse la limite de la loi de 18 2 6 , elle
doit être maintenue pour deux degrés et ne peut être annulée que
pour les degrés postérieurs.
§ I-,
Je a n Rouchy est légataire universel.
Nous disons qu’ il est le légataire universel de son oncle , parce
que, dans son testament, celui-ci lui a imprimé celle qualité presqu’à chaque ligne.
Parce qu’ il lui a conféré les prérogatives cl les charges de l’hé
rédité.
Parce qu’il a été investi du n o m , de la presque totalité de la for
tune du testateur.
Parce que l’intention de l’abbé Lavcrgn c de lui transmettre Funi-
veisurn jus de sa succession n'est pas douteuse.
Nos adversaires reconnaissent que l'institution d’héritier ou de
légataire universel n’ est assujettie à aucune forme particulière ,
qu’il faut avant tout rechercher et faire prévaloir la volonté du
testateur ; mais ils soutiennent qu’Antoine Lavcrgn c n'a ni fait, ni voulu
faire de Jean Rouchy son légataire universel ; que les qualifications
qu’il lui a données dans son testament se contredisent j que d’ailleurs
certaines dispositions de c e testament sonl exclusives do la qualité
'nie llouchy voudrait s arroger.
�Les raisons par lesquelles on lente d’ établir que l'abbé Larergne
n’a pas voulu nous faire son légataire universel ne nous semblent
guère convaincantes.
-
Qu'importe qu’il fut dominé par l’idée d’ériger en majorai son
domaine de L o n g e v e rg n e , par le désir de réglementer l’avenir?
Cotte idée se conciliait parfaitement avec *l'institution d’ un léga
taire universel. 11 a voulu certainement transmettre à l ’uu de ses
parents sou nom et la partie la plus précieuse de sa fortune, n’etaitcc pas vouloir l’appeler à continuer sa personne, à recueillir les
droits qui constituent une hérédité. C ’est vainement qu’on objecte
que le testateur n’avait pas pour Ilouchy d’aflection particulière ,
qu’il a même manifesté pour les Diernat une préférence d ’attache
ment, que 1age de Rouchy lui a seul valu fattribution du domaine
de Longevergne. Si les espérances que l’abbé Lavergne attachait
à l ’àge de Rouchy étaient de nalure à lui faire léguer le domaine de
Longevergne, ù lui faire transmettre le nom du testateur, comment
se seraient-elles opposées à ce qu’ il reçût de son oncle une institu
tion d’héritier qui éiail la consécration la plus, naturelle de ses
espérances. Mais il n’est pas vrai que l’abbé Lavergne n’eut pas
pour Jean Rouchy une prédilection manifeste; dans ses testaments
successifs de 1 855 , 1 8 5 7 , i S 3ç), 1 8 4 2 , 1 8 4 5 , il réitère avec une
rare persévérance les témoignages les moins équivoques de cette
prédilection. En est-il de même pour les Diernat? jNon certaine
ment , car la testament de. 1842 renferme in jln e une précaution
qui prouve qu’il n’avait pas même confiance dans Jeur probité.
O11 ne? prouve donc pas que l’abbé Lavergne n’ait pas voulu
faire de Rouchy son légataire universel; loin de là, c’est la p ré
somption contraire qu’il faut admettre.
V oyons maintenant ce quM a fait en réalité. Depuis le commen
cement jusqu’ù la (in du testament, presque dans chaque clause, il
l’a appelé son héritier, il l’a désigné comme sou héritier, il l ’a
traité comme son héritier.
�Cela équivaut-il à une institution? Nos adversaires soutiennent
que non, se fondant sur ce que nulle part on ne trouve en notre
faveur une disposition générale.
Il est vrai que celtQidisposition universelle manque dans le tes
tament; qu’imporle:si l'institution s’y trouve.
C’est l’erreur de nos adversaires de croire qu’un legs uuiversel
ne peut résulter que d’une disposition; ils oublient l'art. 1002 qui
porte expressément qu’il peut également résulter d'une institution
d’héritier.
.
La différence entre la disposition cl l'institution est facile à saisir.
P ar la première on donne l’hérédité elle-même , par la seconde on
confère une qualité dont les conséquences sont déterminées par la
loi. L e résultat au fond est le même; la forme seule est différente.
Ce qu'il fallait démontrer contre nous , c’est que nous ne pou
vons pas invoquer une institution; on ne l’a pas fait. Cette institulion résulte suivant nous d'une manière indubitable de ce que le tes
tateur, à plus de dix reprises, a nommé Jeau Rouchy son héritier.
Dire de quelqu’un, il est mon héritier, n’est-ce pas dire je v eu x
qu’il le soit. L ’aflirmation n'a-l-elle pas ici la valeur d’une injonction.
Pourrait-on craindre que le testateur eût mal exprimé sa peusée;
cette pensée serait-elle équivoque parce que le curé L averg n e.u ’a
pas toujours appelé Jean Rouchy purement et simplement son hé
ritier, parce qu'il T a parfois désigné ain si': mon donataire, mou
légataire, l’héritier du domaine de Longcvcrgne?
’ Jean Rouchy est le seul des parents de l'abbé Lavcrgne auquel
il ait donné cette qualité de donataire, de légataire, il iliisait donc
entr’eux une différence; tous les autres parents avaient cependant
des legs particuliers. Ces expressions, donataire, légataire, étaient
donc identiques u celle d’héritier , et ne pouvaient s'appliquer qu’à
un don, à un legs universel
Si le testateur , par exception, a appelé Rouchy héritier du do-
�-
5
-
maine de L o n g e v e rg n e , c’est à l'occasion d’ une disposition qui sc
référait à la possession de ce domaine.
Mais ce qui donne la mesure exacte de^l’expréssion d'héritier,
employée par lu i, ce qui en détermine invinciblement la portée,
c’est que l’abbé Lavergne a vérilahlementiraité Jean Rouchy comme
son héritier ; c’est qu’il l’a doté des prérogatives, c’est qu'il lui a
imposé les charges de cette qualité.
Iles prérogatives. Il aura le nom, il aura la fortune, le manoir;
il veillera aux honneurs funèbres ; lui seul, après le décès, pourra
s’introduire le premier dans le domaine de Longevergne; on devra
l’avertir immédiatement, tout devra se faire en sa préseuce.
¡.es charges. C ’est lui qui doit les acquitter toutes : celles qui sont
étrangères a la propriété du domaine de Longevergne , aussi bien
que celles qui sont assises sur les produits de cet immeuble princi
pal. Qu’ont de commun , par exem ple, avec l’attribution particulière
du domaine, le paiement à la commune d’une somme de i , 5 oo fr.
pour un cimetière ; le paiement de 4oo fr. au notaire, exécuteur tes
tamentaire, de 3 oo fr. à un filleul du testateur. En quelle qualité
Rouchy devra-t-il payer ces sommes? Esi-ce une charge de l’hérédilé , est-ce une charge du domaine; l’abbé Lavergne a pris
soin de l’ expliquer, car c’csl à R o u c h y , son héritier , qu’ il a im
posé ces diverses obligations.
‘ *y
1
f
Sans doute , il aurait été plus simple, plus conforme aux habi
tudes juridiques que l’ancien curé de Maintenon se bornât dans son
testament à instituer R o u c h y , sou légataire universel, et à indiquer
ensuite quels legs particuliers , quelles charges poseraient sur lui
en cette qualité.
Une tendance réglementaire fort apparente (favorisée peut-être
par l'habitude de la discipline sacerdotale ) a probablement contri
bué à lui faire adopter le détail minutieux de prescriptoins dans
lequel il semble se complaire. On conçoit aussi qu’un motif plus
sérieux , plus louable, l’ait déterminé à quelques-unes des précau-
fo c r
�Il
...
lions que son testament révcle. L e neveu qu’il choisissait pour son
légataire universel était enlevé par l u i , à une profession modeste,
pour devenir subitement un propriétaire important; n’y avait-il pas
à craindre que cette faveur de lu fortune ne le trouvât pas d’abord
complètement préparé à (ç n user avec discernement; qu’il ne man
quât d’expérience pour liquider sa position ; que scs autres parents ,
mécontents de la situation inférieure qui leur était faite, ne vinssent
lui susciter des difficultés , lui créer des entraves. C ’est, n’en dou
tons pas , pour éviter ce danger que le curé L av crg n c indique sur
<juels revenus , avec quels fonds, dans quel délai les legs particu
liers devront être payés ; qu’il distribue le capital des rentes qu'il a
sur l’iltüt; qu’il se garde , autant que possible, de constituer Jean
R o u c h y , débiteur personnel.
Si le curé Lavcrgnc n’a pas dit d’une manière générale que son
héritier serait tenu de toutes les charges de la succession, c’est qu’il
savait qu’il n’en laissait pas d’autres que celles exprimées au testa
ment. Supposons/cependant, qu’une dette inconnue eût été décou
v e rte , n’ eùt-ce pas été à Jean Ilouchy à l’acquitter, et les Diernat
ne lui auraient-ils pas renvoyé ceux qui se seraient adressés à eux?
Il y avait donc une véritable institution d’héritier.
L a circonstance , qu’eu outre de cette institution, le curé Lavergne aurait disposé taxativement envers son. héritier institué de
quelques-uns des objets compris dans l’hérédité est complètement
•indifférente. Quod ubiuidat, non vitiat. Le testateur posait à la fois
le principe cl les conséquences, voilà tout. La double disposition
se concilie facilement, au lieu de se contrarier.
Faut-il maintenant répondre à l’objection tirée de. l’art, aa du
testament relatif au mobilier? iNos adversaires y voient un partage,
une licitation qui prouve jusqu’à l’évidence que les héritiers d’An
toine Lavcrgnc n’étaient autres dans sa pensée que les héritiers du
sang. C ’est la une prétention vraiment chimérique; car le mobilier
est laissé en blitier à Jean Ilouchy et les sommes qu’ il est chargé
de délivrer soit à dés parents dans les proportions les plus inégales
�— 7 —
cl les moins,,confirmes à leurs prétendus amendements , soit a
des étrangers ne représentent pas la dixième partie de la valeur de
ce mobilier, tandis que Jean R ou chyi;qni ^.suivant la l o i , n’aurait
eu qurun 24m* a plus des t)| 10 pour luî seul
Nos adversaires ont repoussé l’application que nous avons faite à
la question des quelques règles d’interprétations empruntées à la
législation romaine ; ces règles sont cependant aussi celles de notre
droit; elles sont écrites dans les art. 1 i 56 et suivans du code civil,
et la loi romaine n’a fait que nous fournir un exemple. 11 ne faut
pas confondre ce qui tient à l'interprétation des actes avec ce qui
irént au fonds du droit.
Celle première thèse se réduit à des termes bien simples. Si M.
Antoine Lavergnc avait écrit dans son testament, j’institue Jean
Rouchy mon héritier, mon légataire universel; ou je veux- et j’en
tends que Jean Rouchy soit mon h é ritie r, personne , nous le
supposons, n’ bicrail aujourd’hui contester là légitimité de cette
institution."
S ’il avait dit . Jean Rouchy est mon héritier, ne rcconiiaitrait-on
pas encore que cette phrase est équivalente à celle-ci : Jean Rouchy
sera mon héritier , ou à celte auire : J e veux que Jean Rouchy
soit mon héritier. Car comment pourrait-on nier que celui de
la volonté duquel'il dépendait que la chose fut n’a pas manifesté
également sa Volonté en disant d’ une manière plus concise : celle
chose existe.
t
‘
'
Il s’est borné à appeler Jean Rouchy son héritier : cela, suivant
nous, suivant le bou sens, revient au même que s’il avait dit : Jean
Rouchy est mon héritier.
Ou trouverait-on la différence? Si Jean Rouchy n’étail pas son
hérilier, s'il ne voulait pas qu’ il le fut, comment, pourquoi rap
pellerait-il son héritier ?
Il dépendait évidemment de la volonté du
te sta te u r
de faire un
héritier ; — cette volonté pour se réaliser n’ était soumise à aucune
�!
»0É .
........................ ......... - S ; - rormc^partîcuïicrc'/'clie pôtitVàiÎ'sfe ‘formuler en quelques mois. L e s '
expressions' employées né pèrrticltent pas de doute sur la volonté.'i
La sagesse des Romains a décidé la question : Lucius fier es ne
--»fi - ■ • . )lunn'; noüiaoi^jb V ■
.
vaut pas moins que I aicius eslo. La première expression doit avoir
, •;.»
r . .. • njOi^.0D3a 2 i l . 'ïBi .
»
„
i l a merne force et doit..produire .les memes conséquences que l a
secon de, tantumdcmjJicimus.
S II.
L a validité de'ce legs universel est indépendante du sort de la ’
disposition particulière au domaine de Longevergne qu'on
prétend,entachée de substitution .
L es Diernatont prétendu , dans leur M ém oire, que si la qualité
de légataire universel existait au proih du sieur Rouchy., elle ne
pouvait résulter pour lui que de la disposition relative au domaine
de L o n gev erg n e; que si cette disposition est entachée de substitu
tio n , le legs universel doit l’êlrc également ; que l’on ne peut pas
tuer Ici legs comme particulier, cl le faire revivre comme universel.
Cette prétention ne repose que sur une confusion. Non ; il n’est
p ts vrai que la qualité de légataire universel nç résulte pour R o u
chy que de la disposition particulière au domaine ¡de Lon gevergne;
ce n’est pas là qu’il la puise, car elle n’y est pas meme mentionnée.
f,*est sur les articles 3 , 7 , 1 6 , 1 7 , 1 9 , 2 7 , 2 9 , 3 a , 5 2 , 55 , 55
qu’il la fonde , et ces articles sont complètement distincts de articles
1 et 2 qui s’odcnpént’sjiécialcmcnt et'exclusivement de la'propriété
de Longevergne.
Noire proposition , cil fait, demeure donc inattaquable; pour
rait-il , en droit, en être autrement ?
L ’article 896 prononce , il est v r a i , même à l’égard de l'héritier
institué, la nullité de la disposition par laquelle cet héritier est
chargé de conserver et de rendre. La conséquence de cette nullité
�est de ûiire annjuler pour tous 1m disposition yicieuse , de telle sorte
‘
• • 1 • •' ** • U VLlJ . 1
#
qu’elle soit considérée comme non écrite ^ o m m e n’ayant jamais
existé.
L e sort de l'objet compris dans la disposition annulée n’étant plus
réglé par elle, cet objet rentre dans la succession légale ou testa
mentaire du disposant, sans qu’ il y ait à s’inquiéter le moins du
‘inonde de la substitution par laquelle ou a voulu le frapper.
II peut arriver qu’un légataire universel profite en entier de
l’anuullation d’ une substitution et recueille ainsi une partie de l'hé
rédité q u i, sans cette annulation lui aurait complètement échappé.
Il peui arriver,'tout aussi bien , qu’il soit simplement exonéré de
la charge de conserver et de rendre, pourvu que son titre ne lui
eût pas été conféré par la disposition vicieuse, et que la substitution
ne frappât point sur la.totalité de l’hcrédite.
On ne faii pas alors revivre la disposition vicieuse; mais on main
tient la disposition valable, et on n’étend pas jusqu’à elle le vice qui
lui est étranger.
E xem p le. Pierre commence par instituer Paul son héritier uni
versel; il fuit ensuite divers legs particuliers; l’un.de ces legs est fait
à Jac q u e s, mais pour en jouir seulement après le décès de Paul.
Ce dernier legs renferme une substitution; Paul en fait prononcer la
tjnllilé et profite de l’annulation , comme il profiterait de celle de
touUiutrclcgs particulier, comme si au lieu d’êirc héritier testamen
taire, il était héritier du sang.
On ne peut pas lui opposer qu’il se met en opposition avec l’a r
ticle 8 qG; cet article est exécuté. Ce n’est pas en vertu de la dispo
sition qui renferme la substitution qu’il recueille l’objet substitué,
c’est en vertu d’une qualité étrangère à cette disposition.
Si on le décidait autrement on arriverait, sans raison , sans motif,
à restreindre l’étendue du legs universel. Ou diviserait une succes
sion en deux parts diÜ'érciücs, l’ une testamentaire, l’autre légale.
�On créerait des difficultés incalculables; on violerait gratuitement
la volonté du testateur.
La jurisprudence e s t , du reste, positive sur ce poin t, et nos ad
versaires , dans leur M ém oire, n’ont pas osé soutenir la thèse con
traire.
§ 111.
L e testament de l’abbé Lavergne ne renferme pas de
substitution.
Il y a pour toute substitution un caractère essentiel, fondamental ;
l’existence d'une double libéralité. 11 faut que les difïércnts appelés
soient saisis par la même volonté, que leurs droits procèdent de la
même origine ; il faut qu'il y ait une double disposition.
Rencontre-t-on ce caractère dans la clause relative au domaine
de L o n geverg n e; nous croyons pouvoir affirmer le contraire.
Aucune disposition n’est directement faite aux enfants , aux des
cendants du sieur R o u chy ; pour suppléer à cette absence de dispo
sition expresse, on est obligé de fa ire de l’ interprétation, de combiner
ensemble des clauses distinctes pour en tirer des inductions. O r ,
cette manière de procéder est proscrite par la loi (art 1 1 5 7 ) , par
une jurisprudence constante de la cour suprême (arrêts des 24 mars
1 8 2 9 , 5 juillet i 8 5 a , i 3 juillet i 8 3 4 -)
Toullier que nos adversaires nous opposent, dit nettement qu’on
ne doit reconnaître l'existence d’une substitution qu'autant que
l’acte litigieux renferme nécessairement la charge de conserver
et de rendre, et qu'il est impossible d'attribuer à l’acte un sens
différent capable de le valider.
Est-il v r a i , comme on l’a dit dans le mémoire auquel nous r é
pondons, que la volonté de l’abbé Lavergno de faire une substitution
î;c soit manifestée par les termes de la stipulation , par rénonciation
�de scs conséquences , par l'induction de ses motifs? C ’est ce qu’il
faut voir.
La stipulation ne contient de don qu’en faveur de Jean Rouchy ;
on lui fait don du domaine pour être entièrement à lui. Il doit en
être le seul et unique héritier. Si l’on parle de scs enfants , de scs
descendants , ce n’est que par voie dénonciation à l’occasion de la
libéralité faite à Rouchy lui-même; le doute subsiste tout au moins
sur le sens, sur la portée de cette énonciation , cl dans le doute , il
est plus naturel de penser que le testateur a voulu exprimer un fait
conforme aux lois de la nature , que de supposer qu'il a eu l’inten
tion de se mettre en opposition contre les lois de son pays.
Si la stipulation laisse du doute, est-il au moins levé par rénon
ciation de scs conséquences; énonciation qu’on prétend trouver
dans la clause 2 " , par laquelle le testateur défend de vendre , d’é
changer , de grever de dettes le domaine de Longevcrgne, sous
quelque prétexte que ce soit. On fait une pétition de principes en
supposant que l’interdiction de vendre est une conséquence de la
substitution. 11 aurait fallu d’abord démontrer l’existence de la subs
titution contestée avant de lui attribuer telle ou telle conséquence.
La clause relative à (’interdiction d’aliéner , loin de prouver
l’existence de la substitution , permet au contraire de penser qu’on
n’a pas voulu la créer.
Cette clause se présente en eflct plutôt comme la condition de
legs fait à Rouchy , que comme la suite de la disposition probléma
tique en faveur de ses enfants. Si la substitution existait, celle clause,
devenait inutile; les droits des appelés étaient garantis par l’inves
titure qu’ils recevaient; l’obligation imposée au grevé était alors
sans objet.
Quant aux motifs par lesquels le mémoire auquel nous répon
dons explique la substitution et le choix de Iloucliy pour-premier
appelé, ils nous paraissent bien peu décisifs.
�. L ’abbé Lavergne a dit quelque part dans son testament, qu’il ne
donnait pas son domaine aux D icrn at, parce qu’ ils n’étaient pas
mariés et jnlctaient -plus en âge de le devenir; il a paru penser
ailleurs quer Rouchy, plus jeune que les Dicrnat, pourrait avoir des
enfants et mèmq,des descendants.
On en tire la conclusion que Rouchy n’a été choisi que pour
organiser une substitution ; que le choix fait de sa personne prouve
l’existence de cette substitution.
Ce raisonnement n’est que spécieux. L a jeunesse de Rouchy,
l’ espérance probable qu’ il se marierait , qu’il aurait des en
fants, ont pu dans une certaine mesure déterminer l’abbé Lavergne
à en faire son héritier universel ou principal; mais celte pensée
ne conduisait pas nécessairement à une substitution. Les' donalions
faites par contrat de mariage , sont évidemment déterminées par
en sentiment de la famille; cela suflit-il pour les-déclarer entachées
de substitution prohibée ?
Toute l'argumentation qu’on nous oppose sur ce point tombe
devant un seul fait. Roucby n’était point marié lors du testament,
il ne l’est pas encore. Pourquoi l’abbé Lavergne , s'il ne voyait en
lui que l’instrument d’une substitution , ne lui a-t-il pas imposé ,
comme condition du legs de L o n g e v e r g n e , l’obligation de se ma
rie r; alors qu’il lui en imposait d’autres: celles de porter son nom
et’ d c n e pas aliéner le domaine. La substitution n’a donc pas été la
cause déterminante du legs.
.-,1
Mais ce n’est pas seulement parce que le testament ne renferme
pas de disposition caractérisée en faveur des seconds appelés que
lions soutenons qu’il ne contient pas de substitution ; nous disons de
plus i° que les seconds appelés ne sont pas désignés d’une manière
suffisante ; a" que le grevé aurait conservé le droit de disposer ;
5* que la réunion de ces deux circonstances rend impossible
l'existence d’ une double libéralité et d’un ordre successif qui sont
les caractères nécessaires de toute substitution.
�L'insuffisance de la désignation des seconds appelés n’est guère
contestable. Il semble bien d’abord si la 'substitution existe qu’elle
soit faite en faveur de ions les enfants el^descendants de Jean
l lo u c h y , quoique l’expression io«,r ne?IS’y l)*ôuve point. Mais
lorsqu’on lit avec attention l’ensemble des deux clauses n* i el n* a,
lorsqu’on y voit que les possesseurs du domaine seront obligés de
le laisser dans un certain étal d’entretien , que leurs successeurs
pourront demander des visites d’experts ; on est forcé de recon
naître que le testateur a prévu que les générations entières ne se
raient pas appelées, 'qu'une préférence pourrait être accordée à
tel,ou tel membre d’ une lignée. C ’était du reste le seul moyen
d'éviter le morcellement qu’il prescrivait.
Ajoutons à cela que l’ interdiction de disposer n’ayant pas été
imposée au g r e v é , cette faculté semble au contraire lui avoir été
réservée et qu’il résulte de la combinaison de ces divers éléments
que llouchy aurait eu le droit de choisir ou de ne pas choisir celui
ou ceux de scs enfants auxquels devrait passer l’immeuble substitué.
S ’il eri est ainsi, il est évident qu’ il y a incertitude absolue , quant
à la désignation des seconds appelés, et il ne l’est pas moins
qu’il n’y a pas d’ordre successif créé par le testateur-; ce n’est plus
en effet le testateur qui dispose , c’est le grevé qui dispose ou no
dispose pas, à son gré, comme il lui plaît et quand il lui plaît. Que
serait ce d'ailleurs qu’ un ordre successifqui n’aurait ni détermination ,
ni r è g l e , qui demeurerait soumis à toutes Icsoüvciüunlilés de la
fantaisie et du caprice ?
Il n’y a donc an lieu d'une substitution qu’une iiinliénabilité pro
hibée pat* la loi du 1 5 mars 1790 , et qui , aux termes de l’art, goo
du codc civil doit être considérée comme non écrite.
�S i le testament renferme une, substitution , elle n'est que nomi
nale et doit être réputée non écrite p a r application des art.
8 1 5 , (joo et (joü du codà ‘cii'il.
Celte proposition est. s’ il est possible, plus certaine encore que les
précédentes.
(
. Posons d’abord comme chose incontestée^ i* que la substitution,
si elle existe , a été faite au profil d’enfants à naître cl non encore
conçus au moment du décos du testateur; 2° qu’elle a été faite à
tous les enfauls de chaque génération avec interdiction dç vendre
ou de morceler.
Quelle en est la conséquence juridique?
L ’art, goô porte expressément que pour être capable'de recevoir
par testament, il faut être conçu au moment du décès du testateur.
Les enfants à naître du mariage de Jean Rouchy n’étant pas conçus,
cl n’étant pas capables de r e c e v o ir , la disposition qui les concerne
est donc nulle. O r , si celle disposition est nulle , nous ne trouvons
plus dans la cause l'existence d’une double libéralité; les appelés
n’ont plus de droit pour exiger la restitution du domaine; le grevé
n’a plus le devoir de le conserver ni de le rendre; la.substitution
s’évanouit.
:
L e législateur, dans l’art. 89G, 11’a voulu, n’a pu vouloir qu’an
nuler les substitutions q u i, sans la prohibition de cet article, au
raient été valables et susceptibles de produire des ciTets. Ricn «’ au
torise à en étendre la portée; les principes recommandent au
contraire de rcnicriner les nullités dans le cercle le plus étroit.
On nous objecterait vainement que les art.
10.^8, 1049» 1082
du Code civil et la loi du 17 mai 1 8 2 6 , permettent de disposer au
profit d’enfants à naître. Ces divers articles constituent une excep-
�-
.5 -
f (0
lion au droit commun ; ils ne dérogent pas seulement a l’art. 896,
ils dérogent aussi à l’art. 906. Mais celle dérogation se renferme
rigoureusement dans lu limite même de ces articles. E lle avait pour
but de diminuer, de restreindre la portée de l'art. 8 9 6 ; il serait
absurde de lui reconnaître un résultat directement contraire. O11
conçoit qu’on invoque ces articles dans l’ intcrèl du maintien d’une
disposition testamentaire ; on ne conçoit pas qu’011 les invoque dans
le sens de sa nullité.
II est vrai que Furgole , que Thévcnot-Dessaules , que tous les
anciens auteurs s’accordaient à considérer comme une substitution
fidéï-couimissaire la disposition en faveur d’un individu détermine
cl de ses enfants à naître. Cela é tait, en e ffet, conforme aux prin
cipes de l’ancien droit, l’ordonnance de 1 7 5 1 , permettant par scs
articles 1 1 et 12 , les libéralités en faveur de personnes non encore
conçues.
Mais la
faculté accordée par
cette ordonnance
a
été refusée par le Code civil. La disposition valable autrefois n(\
l’est plus aujourd’h u i; c'est celte différence dans la validité de la
disposition qui fait que la substitution existe sous une législation et
n’existe plus sous l’autre.
Cette vérité a été successivement mise en lumière d’une maniera
irrésistible par Rolland de Villargues ( numéro; 187 et suivants de
sou traité des substitutions), par Merlin (nouvelle édition des ques
tions de d ro it, tome dernier, p. 17 ) . Toullier (lome 5 , numéro
8 2 0 ) ; Duranton ( tome 8 , numéro 5 5 ) ; Dalloz , ( dernier volume
du Répertoire , page 1 7 7 ) , et plusicurs^autres auteurs se sont ap
proprié leur opinion. La jurisprudence l’a consacrée d’une manière
qui, aujourd’hui, peut sembler définitive. Nous pouvons citer no
tamment deux arrêts de la Cour suprême, rapportés dans IJalIoz,
18 2 7 . i. 85 cl i 8 5 5 . 1. 598.
Tous les deux ont décidé que l’exception faite à l’art. 90G, par
lé s a it. 1 0 4 8 , 10 ^ 9 0 1 1082 du Code c i v i l , devait se renfermer
dans les cas prévus par ces art., que dans tous les
autres
cas , eu
vertu de lu règle générale, les dispositions fuites eu faveur d’enfants
�non encore conçus, devaient être regardées comme nulles; qu’il
n'y avait pas lieu d’ induire, d’une pareille disposition, l'existence
d 'u n e ,
substitution, mais de la répnter non écrite, conformément à
l ’art. 900.
Comment nos adversaires pourraient-ils résistera cet accord si
complet des principes, de la jurisprudence, de la doctrine?
Il est encore un autre motif qui s’oppose à ce que la disposition
faite aux enfants à naître de Jean Rouchy puisse être considérée
comme écrite , et engendrer une substitution
Cette disposition n’est faite que sous la condition absolue de ne
pas morceler j c’est-à-dire de 11e pas partager. Elle est donc en
opposition formelle avec l’art. 8 i 5 du code civil; elle est de plus
matériellement inexécutable et physiquement impossible. Quel se
rait à la 4e > à la 5e génération le nombre des descendants de Routh y ? Personne ne saurait le dire avec certitude , mais le calcul des
vraisemblances donne des chiffres qu’il peut être utile de consulter.
IMus de mille personnes seraient, suivant les probabilités, dans un
avenir prochain co-propriétaires du domaine de Longevergne ; ne
serait-ce pas là une situation impossible?
Tout se réunit donc pour faire décider qu’ il n’y a point de substi
tution ou qu’ il n’y a qu'une substitution nominale dans le legs fait à
.lean Rouchy.
1 Lorsqu’il s’agissait d’apprécier des questions de cctlo naluro sous
l'empire d’une législation qui autorisait les substitutions , le magis
trat devait penser que le testateur n’avait rien écrit d’inutile ; il suffi
sait alors que l’interprétation qui créait la substitution fut possible.
Ou appliquait ainsi la maxime qui depuis a été écrite dans l’article
1 i 5 ~ : ¡ }otins ut valcat quant utpcrcat.
L e même principe doit produire aujourd’hui des conséquences
contraires. La substitution qu’ on admettait facilement lorsqu’elle
était valable , ne doit plus l'être , maintenant qu'elle est prohibée,
que lorsqu’elle est manifeste, inévitable.
�SV -,
C elle substitution ne fit-elle elle pas réputée non écrite, n excé
derait pas les dispositions permises par la loi de 1S26.
Nous pourrons cire très-brefs sur celtc proposition.
Nos adversaires invoquent la loi 220 du digeste d’après laquelle
Liberorum appellalione nepotes etprænepotes cœterique qui e x
his descctidunt continentur; ils soutienent que l’expression des
cendants correspond à celle d’ancêtres dans la ligne ascendante, et
que ces mots : de génération en génération en déterminent le sens
de telle sorte qu’il n’est pas possible de limiter à deux degrés la
substitution.
Nous renvoyons à Ricard, à ïh é v e n o t, à tous les anciens auteurs,
unanimes à enseigner que l’expression enfants n’ implique pas une
substitution graduelle ; à tous les dictionnaires qui établissent que ce
mot de descendants est susceptible d’une acception plus ou moins
étendue; à un arrêt de la cour de cassation du 5 février 1 8 5 5
(D. 1 — * 58 ), duquel il résulte qu'une clause p a r laquelle un
testateur déclarait que les institués ne pourraient vendre ni
aliéner ses biens sous quelque prétexte que ce fû t et qu’ils
seraientforcés de les laisser ci leurs enfants ou à leurs héritiers,
a pu être considérée comme 1 1 excédant pas les limites de la loi
du 17 m ai 182G.
• 1
Quant à ces mots de génération en génération (en admettant
qu’ity soi«*t sans importance , qu’on les ait mis au singulier plutôt
qu’au pluriel), ils n’indiquent pas la perpétuité qu’on veut en faire
découler, et expriment seulement un ordre successif. C ’est comme
si l’on avait mis de degré en degré. Or, les mêmes auteur.s ne trou
vaient pas cette dernière locution suffisante pour caractériser la
substitution graduelle, ils voulaient de plus y trouver un indice
d’une pensée de perpétuité : le mot à toujours ,• par exemple.
3
�L ’objeciion tirée de l’obligation imposée à Roucliy de trans
mettre à sa pospérité le nom de R o u c h y , n’a pas non plus une por
tée décisive, car la transmission du nom une fois opérée, se conti
nuait naturellement ct> n’élnit plus soumise à la possession du d o
maine.
S V I.
S i cette substitution dépasse la limite de la loi de 1 8 2 6 , elle
doit être maintenue pour deu x degrés et ne peut être annulée
que pour les degrés postérieurs.
Celte proposition peut être examinée à deux points de vue diffé
rents : celui du Code civil, celui de la loi du 17 mai 1826.
Celte dernière face de la question a été iraitce avec assez de soin
dans le mémoire précédemment publié pour le sieur Rouchy,
pour que nous puissions nous dispenser d ’y revenir. Il n’en est pas
de même de la première ; c’est d’elle que nous allons plus spécia
lement nous occuper.
Pour démontrer que la substitution doil être annulée pour le tout,
les Diernat présentent le système suivant :
,.{
L ’art. 8 9 6 , disent-ils , est le principe général. Sa rigueur a un
double motif : la nécessité d ’une clause pénale, l’indivisibilité de la
substitution.
Les art. 1048 et 1049 110 f ° nl fIuc constater une exception qui
doit être restreinte aux cas spécifiés.
Les inolifs qui ont dicté l’art. 896 s’appliquent aux substitutions
du 2* et du 5 e de g ré, avec plus d’évidence et de justice qu’à toute
mitre disposition iîdéï-connnissaire.
�L e lexie et l’csprîi ¿es art. 89G, 1048 et J049, s'accordent donc
pour repousser la prétention de Rouchy , qui voudrait que la subs
titution 11e fût annulée qu’au delà des deux degrés. iZ(
¡Vous ne dissimulons pas la force apparente de ce raisonnement.
Il ne résiste pas cependant à un examen attentif.
Est-il d’abord exact que l’art. 896 soit général et domine sans
exception toute la matière des substitutions?
L ’art. 8 9 7 , que nos adversaires semblent ne pas avoir aperçu ,
répond le contraire , car il porte expressément que les dispositions
permises aux pères et aux m ères, aux frères et aux sœurs , au
chap. 6 du titre 2* , sont exceptées des deux premiers paragraphes
de l’art. 89G, c’est-à-dire de celui qui prohibe les substitutions,
comme de celui qui les annule.
Commençons donc par tenir pour certain que les dispositions
permises par les art. 1048 et 1049 c. c. , ne sont ni prohibées , ni
annulées par l’art. 89G.
Voyons maintenant les termes de ces art. 1048 et 1049 combir
nés avec l'article i o 5 o.
k Les p è re s, les mères , les frères et les sœurs pourront donner
a à leurs enfants ou à leurs frères ou sœurs , les biens dont ils ont
» la faculté de disposer , à la charge de les rendre à tous leurs en» fanls nés et à naître , sans exception ni préférence d’àge ou de
» sexe, et au premier degré seulement.
•1 ‘ !
Une substitution faite conformément à ces règles , «à CCS diverses
conditions n’ est ni prohibée , ni annulée j elle est permise , elle est
légitime.
Aucun des nrt. 1048 , 1049 cl * ° 5o ne se réfère au moins no
minalement à l’art. 89G; il n’est dit dans aucun que leurs disposi
tions soient créées par exception à celles de l’art. 89G.
�11 est facile de comprendre pourquoi le législateur permettait la
substitution des art. 1048 et 1049 , pourquoi par l’a n. 897 il avait
excepte celte substitution particulière de la prohibition de l’art. 896.
L ’esprit d’inégalité , de privilège avait été sous l’ancienne mo
narchie la cause des abus inhérents aux substitutions ; on leur
reprochait avant tout d’amener la concentration des fortunes , de
changer l’ordre légal des successions. L ’art. 896 a été un hommage
rendu à l’esprit d’égalité. O r, la substitution des art. 1048 et 1049
avait le double mérite d’être rigoureusement conforme à l’ordre
légal des successions et au principe de l’égalité des partages. Ces
articles ne dérogeaient donc pas clans la réalité à l’arl. 8 9 6 ; -ils
dérogeaient bien davantage au principe de l’art. 9 0 6 , en validant
une libéralité faite à un incapable de re c e v o ir; mais l’intérêt des
familles qui devait faire admettre plus tard les stipulations contrac
tuelles de l’art. »082 justifiait complètement cette exception.
Voyons maintenant ce qui aurait du arriver sans le code c i v i l ,
antérieurement à la loi de 1 8 2 G , si une des personnes auxquelles
les art. 1048 et 1049 accordaient le droit de substituer au premier
degré seulement, avait substitué à deux degrés.
Celle substitution devait-elle être maintenue au premier d e g r é ,
ou devait elle périr pour le tout? Nous n’hésitons pas à dire qu’elle
aurait dû être maintenue dans la limite des art. 1048 cl 1049^
■■ ■
Ce ne serait certainement pas dans cos derniers articles qu’on
trouverait les moyens d’une annulation absolue et générale ; il n’en
résulte qu’une chose, c’est que la substitution permise à tel dcjgré
ne l’csi plus à tel autre; leur application naturelle, raisonnable, de
vrait donc être de valider pour ce qui est permis, d’annulerpour ce
qui ne l’est pas.
On ne les trouverait pas davantage dans l’art. 89G. Car cel arti
cle applicable à la partie de la substitution qui excède le premier
�degré, ne l’esl pas à celle qui se renferme dans les limites des art.
1048 et 1049.
L ’art. 896 n’ annule que ce qui est prohibé, il n’annule pas ce
qui est permis.
11 ne faut pas oublier que l’art. 897 porte expressément que
l ’art. 896 ne prohibe ni n’annule les substitutions des nrt. 1048 et
1049
C ’est donc ailleurs qu’il faudrait chercher les causes de la nullité
absolue.
Ce 11c seront p a s, quoi qu’en disent nos contradicteurs, des motifs
d’ intérêt public qui pourront jamais les fournir. Comment cet imércf
pourrait-il pousser à proscrire , à détruire ce qu’ il a fait établir dans
les art. 1068 et 10G9.
Serait-ce la crainte que le maintien partiel de la disposition 11e
favorisât des infractions fâcheuses.
Celte crainie serait chimérique, car l’intérêt des g r e v é s , de leurs
créanciers, s’ils en avaient , serait une garantie suffisante. E t puis
quel grand mal y aurail-il à ce que l’ordre des successions et le
principe d'égalité étant respectés , les propriétés demeurassent un
peu plus long-temps dans les familles.
II
n'y a donc pas à imaginer une clause pénale inutile ; il n’y a
surtout pas à l’appliquer lorsqu’elle n’existe point.
L a raison qui a déterminé , contradictoirement aux anciens prin
cipes , la nullité absolue prononcée dans l’art.
8 9 6 , c ’e st
l’inccrtiiude
sur la volonté du testateur qui aurait pu ne gratifier le grevé qu’en
�’ ' considération de l'appelé. Cette raison est évidemment inapplicable.
Peut-on penser qu’un p è re , qu’un frère n’ait donné à son enfant, à
son neveu , qu’en considération de son arrière-petit fils, de son arricre-ncvcu. IVaurait-il pas donné égalementsans celle considération?
Scs affections pouvaient-elles s’égarer ailleurs? Pouvaient-elles ctrc
aussi fortes pour celui qui n’était qu’ une lointaine espérance d’a v e
n ir , que pour cciix qui étaient le prem ier, le direct objet de leur
tendresse.
Il
faut aller plus loin; il faut créer une indivisibilité absolue de la
disposition. O r , comment justifier cette indivisibilité? les degrés
des générations ne sont-ils pas distincts; les dispositions qui s’appli
quent à chacun de ces degrés 11e peuvent-elles pas également être
distinguées? L ’indivisibilité ne se rencontre pas en fait; elle, ne sç
rencontre pas non plus dans l'intention du testateur. Comment la
concilier d’ailleurs avec l’ordre successif qui est l’élément essentiel
de touie substitution? Ce moyen croule comme les autres; il n’a ,
du reste, jamais été considéré comme sérieux même par ceux qui
ont soutenu l’opinion contraire à la nôtre, et pas un seul auteur ne
s’en est appuyé.
Riais si, môme sous l’empire du Code civil, la disposition exces
sive devait seulement être réduite , cela n’esl-il pas bien plus clair
encore depuis la loi du 1G mai i 82G, qui nous a ramenés purement
et simplement aux anciens principes.
Nous terminerons ce qui est relatif à l’examen de cette dernière
proposition, par une réponse aux critiques dont un illustre auteur,
]NJ. Toullier, a été l’objet de la part de 110s contradicteurs.
On reproche au savant jurisconsulte sous le patronage duquel
nous aimons à placer la démonstration qui précèd e, d’avoir émis
sur la question une opinion superficielle et de s’étre placé presqu’à
�la même page dans une contradiction manifeste. II est viai que son
.
. , , , -'i ,
", u iti't . , i j f , m'ï»!, '»:>?«;•
>
opinion est peu développée; cela ne prouve qu une cliose, c est
.
. îiciu î"*Qiîir rr .pv \
que la question ne lui paraissait point faire de dillicnlle. Quant
au reproche de contradiction, il est facile de l’en Justifier. RI.
,
„
1 3 .- 3 - t 2,'.!Î 9 - l ! l * . | ü V I J o r .
.
.
lo u liie r a raison dans 1 une et dans J autre de scs deux opinions,
pour l’art. i o 5 o comme pour l’art. io 4 8 . Pourquoi cela?
C ’est que lorsque la condition de l’art. i o 5 o n’est pas rem plie,
la faculté créée dans les art. 1048 et 1049 disparaît. On ne se trouve
plns alors dans le cas d’exception prévu pai’ l’art. 897 ; on retombe
purement et simplement sous le coup de l’art. 896. Tandis qu’ il
n’en- cst'pas ainsi, comme nous l’avons déjà prouvé , lorsqu'on res
pectant les prohibitions de cet art. i o 5 o , on dépasse la latitude
permise 'dans les articles précédents. M. Toullier n’a eu d’autre tort
que de ne pus joindre, dans les développements de son opinion, aux
motifs vrais qu’ il a tirés de l’intention du législateur, les arguments
plus positifs qu’il pouvait emprunter aux textes.
Nous avons rempli jusqu’au bout le devoir que nous nous étions
imposés; nous déposons la plume avec l’énergique conviction que
le testament du curé Lavergne doit être maintenu dans son intégrité,
avec la(ferme espérance qu’il le sera.
Non la justice 11e consentira pas à mutiler celle œuvre de vertu
et de sagesse; non elle ne supposera pas que le ministre de
Dieu , q u i , dans l’expression de sa volonté dernière , a montré le
patriotisme le plus élevé cl le plus pur, ait voulu se révolter contre
les lois de son pays. En présence des testaments successifs de l’an
cien curé de Maintenon , de sa persévérance à choisir pour son
héritier celui de scs neveux qui seul pouvait continuer sa famille,
la cour ne doutera pas qu’il n’ait é té , quoi que puissent dire les
sieurs D iernat, l’objet de son invariable prédilection ; elle ne vou-
�— 24 —
d ra pas que les bienfaits réfléchis de cet oncle respecté et c h é r i,
n’aient été pour lui qu’une cause d’embarras , de douleur et de
ruine.
Me DUMI R A L , Avocat-plaidant.
M e A L L E M A N D , Avocat-consultant.
M e L A M Y , Avoué.
R I O M . — A . J O U V E T , I m p r im e u r , l.i b r a ir e et lith ograp h e.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rouchy, Jean. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dumiral
Allemand
Lamy
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Note en réponse pour Jean Rouchy contre Michel Diernat, Arnal et autres.
Annotations manuscrites. « Point de droit »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3019
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3017
BCU_Factums_G3018
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53636/BCU_Factums_G3019.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53635/BCU_Factums_G3018.pdf
096dec0a05f329d8fa02e067225ff7d0
PDF Text
Text
M
E M
O
I R E
POUR
MICHEL DIERNAT, ARNAL
E T A U TR ES IN T IM É S ,
C ON T R E
JEAN ROUCHY,
Ap pelant.
L e curé de Maintenon, forcé de fuir son presbytère et sa patrie
pour rester fidèle à scs devoirs ecclésiastiques , a passé de longues
années sur la terre étrangère.
Admis comme instituteur dans les familles les plus riches de l'aristocratie anglaise, il a p u , par son travail, adoucir l'amertume de
ce temps d’exil si malheureux pour un grand nombre de nos com-
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7 2 patriotes ; ¡1 «a même préparé sur le sol étran ger, pour ses vieux
jours , une fortune qu’ il u’mirait pas pu attendre et qu’on ne doit
pas économiser dans les fonctions du sacerdoce français.
M. l’ahbé Lavergne a porté sur la terre étrangère les vertus du
bon prêtre, et par dessus tout, la bonté, la bienfaisance qu’il
trouvait dans son cœur et qui puisaient une nouvelle force dans ses
sentiments religieux. L e prêtre fiançais est resté, à cet égard , tout
ce qu’il était ; il ne s’est jamais démenti, et rie n , au surplus , dans
ses rapports avec les familles catholiques - anglaises , n’eût été de
nature à modifier scs inclinations charitables.
Mais , à l’àge où l ’homme moral se complote , à l’àgc où s’arrê
tent les tendances , les opinions, qui doivent être celles du reste do
la v ie , on ne passe pas les virjgt-cinq années réellement puissantes
de son existence, au milieu d’une nation arrivée à un haut degré de*
civilisation, en conservani complètement intactes les premières
idées de son éducation , les mœurs et les habitudes de sa patrie.
M. l’abbé Lavcrgne avait subi la loi commune.
L ’amour de la France ne s’était jamais éteint dans son c œ ur; tou
jours il avait montré désir, espoir de retou r; mais les principes sur
lesquels reposent les institutions do notre p a y s, surtout ses institu
tions nouvelles lui étaient tout-à-fa it étrangers.
llesté Français de cœ ur, il était devenu Anglais même dans les
goûts, les habitudes de la vie ordinaire; h plus forte raison, l’était-il
par les pensées qu’il avait puisées sur l'étendue du droit de disposer
au sein des riches familles Anglaises, dans ce pays où les institutions
sont si libérales cl les lois si aristocratiques , et où cette puissante
aristocratie ne vit et ne sc conserve que par les lois attributives des
propriétés immobilières et la faculté de substituer.
Peut-être plusieurs de scs jeunes élèves tenaient-ils ainsi des
majorats considérables , des dispositions qui avaient été faites bien
des années avant leur naissance.
�-
3 -
A iO
M. l’abbé Lavergne ne pensait pas que ce qui sc pratiquait si fré
quemment en Angleterre put être interdit en France.
11 faut bien admettre que les tendances de son esprit le portaient
à faire des substitutions , c a r, dans le mémoire auquel nous répon
dons, on reconnaît en analysant l’article 6 du testament, que la dis
position qu’il contient est une substitution prohibée.
Il est vrai que le sieur R o u c h y , héritier, comme les sieurs
Diernat et A rn al, a intérêt à en signaler une dans cette partie du
testament; maison ne veut pas en trouver dans les articles premier
et deuxième, qui concernent le sieur Rouchy.
Bientôt nous démontrerons que la substitution des articles p re
mier et deuxième est bien plus manifeste , bien plus étendue, bien
plus en opposition avec l’esprit et le texte de notre législation que
celle de l’art. 6.
Mais disons, avant tout, que quand on apprécie ce testament
dans son ensemble , on reste frappé de cette pensée que le testateur
a la ferme conviction qu’il peut disposer, en législateur suprême, de
la transmission de scs biens., de leur em p loi, et des moyens de
perpétuer son nom jusqu’à la fin des siècles.
S ’agit-il de cette propriété de Longevergne , acquise aux dépens
de son tra v a il, embellie par scs soins, l'immeuble le plus important
de sa fortune , le manoir de cet homme à qui la famille a été inter
dite et qui voudrait se survivre à perpétuité sur cette ierre, la puis
sance du testateur réglera la transmission à perpétuité.
S ’agit-il de son nom , qui va mourir avec lui , il l’attache au ma
noir dont la transmission est réglée par son autorité sans limites
et sans pensée de contrôle.
S ’agit-il d’un domaine moins important, celui de Labastide, il
veut bien s’arrêter à la quatrième transmission dans l’exercice de
cette puissance de réglementer les siècles.
S ’agit-il de ses bienfaits, de ces pensées libérales et religieuses
en même temps, que nous louons et que nous voudrions détacher
�v
— 4 —
de quelques prescriptions où perce la vanité humaine , admet-il
qu’un contrôle , qu’une surveillance de la loi ou de l’autorité soient
possibles. Non, c ’est l’homme mort qui doit avoir tout prescrit,
tout réglementé, et tout doit se courber dans les générations qui
vont suivre de siècle en siècle, devant cette inflexible volonté ; et
celte voix qui s’éteint veut, dans mille ans, dans deux mille anS,
parler encore aux générations futures, et veut parler pour ordonner.
Non , prêtre , vous vous trompez : accoutumé à des pensées de
toute puissance , vous avez exagéré l’humaine puissance.
L ’homme , après lu i, ne laisse rien sur cette terre.
L a loi civile a voulu encourager scs efforts et lui ménager à
l’heure suprême des consolations. Mais en créant le droit de dis
poser, elle devait se montrer sagement économe de ce d r o it , car
dans votre sylême , une génération pourrait l’absorber entièrement
aux dépens des générations futures.
Pour votre nom , vous vous trompez encore : de voire seule
puissance vous ne pouvez pas l’ imposer ; l’autorité supérieure a ,
de par la l o i , son droit de permettre , son droit de défendre.
Pour vos bienfaits eux-inèmes vous êtes dans l’erreur.
V os ¡mentions protectrices de la vieillesse et de l’eufancc méri
tent les respects de tous. Mais ne croyez pas qu’elles puissent,
qu’elles doivent être exécutées comme vous le prescriviez , sur le
vu seulement de vos ordres écrits.
Non , ici la loi veille encore.
Elle ne veut pas que par des libéralités exagérées , les membres
des familles déshéritées puissent devenir de nouveaux pauvres
qui auront recours à la charité publique ;
E lle ne veut pas que par des dispositions trop étendues pour des
corporations, des établissements de charité ou des fondations, des
masses trop considérables de propriétés se trouvent frappées de
main-morte, sorties du commerce cl de la circulation.
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5
-
¿if
Elle ne le veut pas , par les mêmes raisons qui s’appliquent aux
substitutions; seulement, à la différence de cc qui a heu pour lt*s
substitutions, ne pouvant pas créer une règle absolue pour ces libé-r
râblés , elle les a soumises à une approbation de l'autorité supé
rieure , et si l'autorisation a lieu , pour le tout ou pour partie , elle
réglemente cl surveille encore l'exécution.
Uisons-le sans crainte d’èlre démenti : M. l’abbé Lavergne, dans
toutes les parties principales de son testament, s'est exagéré la
puissance qu’il tenait de la loi de disposer de ses biens.
Ces dispositions de la loi se lienl à des principes d’ordre public ,
à l’organisation loutc entière des sociétés , et ne sauraient fléchir
devant une volonté particulière , qu’ il faut entourer sans doule de
respect et de protection , mais alors seulement qu elle s’est e xp ri
mée dans les limites de cc qui est permis à l ’homme.
On a pensé avec raison , dans le mémoire publié pour le sieur
Roucby , qu’il ne suffisait pas pour apprécier cette cause de meure
sous les yeu x do la cour les articles du testament qui servent de
base principale à la discussion , qu'il fallait que l’œuvre entière fût
connue des magistrats , et cependant, après avoir cilé le lexie des
art. I er et 2% on s’est borné à donner l’analyse des 5 a articles qui
suivent. Nous ne pouvons admettre ni l’exactitude de l’analyse ui
le système en lui-môme.
Quant à (’exactitude de l’analyse, nous pourrions signaler plu
sieurs omissions importantes. Nous n’en indiquerons qu’ une comme
exemple : Sur l’ai ticle 5 , après avoir dit que le testateur donne
aux Dieruat une somme de 8,ooo fr. à prendre sur le revenu du
domaine de Longevergne , on passe complètement sous silence les
dispositions finales, expression si nette de ses pensées, et qui portent :
« J e leur aurais donné le domaine s’ils se fussent mariés , mais
» leur grand i\ge a fait perdre tout espoir de mariage. «
Quant au système , nous l’avons tous dit dans les plaidoiries ,
c’csi le testateur lui-inèinc qu’ il faut lire dans l’expression littérale
�de scs pensées , c’esl lui qu’il faut juger , c’est le lexlc complet du
testament que nous mettons ici sous les j e u x de chacun des ma
gistrats.
Il sera imprimé à la suite de ce mémoire«.
Ce testament , dit-on dans le mémoire , avait paru conférer au
sieur Rouchy le titre et les droits de légataire universel ; aussi l’o r
donnance qui l’envoyait en possession eu cette qualité , avait-elle
été maintenue par un premier jugement du 12 janvier 1848.
C ’est là une erreur.
Des qu’il eut été formé opposition à l’ordonnance , Rouchy r e
connut parfaitement lui-même qu’il 11e pouvait pas espérer de se
faire déclarer héritier universel, et, à ce litre, saisi de l’ universalité
de la succession et des biens dont il n’aurait pas été disposé d’une
manière spéciale. Aussi s’empressa-t-il de form er, par conclusions
du 1 1 novembre 18 4 7 , unc demande incidente, tendante à ce que,
dans le cas où il serait seulement légataire particulier, les héritiers
naturels fussent tenus de lui faire délivrance.
Sur ces conclusions subsidiaires , il s’élève des difficultés de
forme; les Diernat et Arnal soutiennent qu’une demande en déli
vrance de legs particulier, est principale et 11e peut pas être formée
incidemment par conclusions , et le tribunal , loin de juger ou
même de préjuger que Rouchy était légataire universel, ordonne
par le jugement qu’on invoque , qu’il sera plaidé au fonds sur la
demande incidente de Rouchy tendante à la délivrance de son legs
particulier , demande qui soulevait celle de la validité de ce legs
grevé de substitution.
Ainsi, ce jugem ent, s’il préjugeait quelque chose , c’est que le
sieur Rouchy serait légataire particulier et non légataire universel.
On plaide donc au fonds.
E t alors sont tranchées, par le tribunal, par des motifs aussi
simples que nets, mais frappants de vérité, les questions qu’on sou
lève de nouveau devant la cour , et qu’on soutient entourées de
grandes didicullés, sans doute parce qu’on se préoccupe de l’iu-
�— 7 —
lerét qui y est attaché , plutôt que ties tonnes, du sens des disposi
tions mises en présence du texte et de l’esprit de notre législation.
Nous allons les discuter à notre tour , dans l’ordre où les adver
saires les présentent dans leur mémoire.
PREMIÈRE
QUESTION.
f.c sieur Rouchy est- il légataire universel de l’abbé Lavergne.
L a lecture attentive du testament que nous avons mis sous les
yeu x des magistrats devrait contenir toute notre réponse ; e t, eu
effet, dans quel article, dans quel passage, trouve-t-on de la p a r td e M #
l’abbé Lavergne la manifestation de la volonté que le sieur llouchy
recueille tous les biens dont il n’aurait pas nominativement disposé,
ou ce qui restera après les legs payés? Dans quelle partie l’appellet-il à l’ universalité de sa succession et à toutes scs éventualités? On
lie peut pas citer un seul texte.
Et comment nos adversaires pourraient-ils en trouver, eux qui
se montraient, dans la plaidoirie , si exigeants pour que les termes
fussent dispositifs.
Comment organise-t-on donc cette qualité de légataire universel
qu’on veut faire reposer sur la tète du sieur llouchy , et à laquelle
on a vu qu’il ne cr oyait pas lui-mème dans le principe.
On invoque l’art. 1002 du Code civil ; 011 se garde bien d’ v
joindre le lexte de l’art. io o 5 .
O11 cite différents textes du droit Romain , desquels il r é s u l te
que l’héritier créé par le testateur, succède à tous les droits du
défunt; qu’en droit romain, l’institution d’héritier se faisait de
diverses manières, et que l ’omission de quelques mots dans la ma
nifestation de volonté qui désignait l’héritier n’eimièchnit nas de 1
*
jV
�en conférer les droits par l’application de celle maxitnc .* Politis
voluntatem quatn verba spectari plaçait.
Parlant de ces premières idées , 011 ajoute : les art. i«T et 2« du
testament contiennent 1111 legs Irès-imporlant en faveur du sieur
Roucliy ; cependant ce n’est pas là précisément qu’on signale le legs
de l’ universalité; 011 s’en garde bien ; on tomberait sous le coup de
l’art. 896 ; mais on dit : après avoir fait ce le g s, le testateur parle
encore de Roucliy dans plusieurs passages de ce long testament ,
cl il le désigne ainsi : Roucliy , mon héritier; Rouchy, l’héritier du
domaine de Longevergne ; or il faut appliquer là ces lois Romaines
qui voyaient une manifestation complète de la volonté dans ces
mots :
Totius hæreditatis meœ dominus esto ;
I aicîus hæres esto , ou Lucius hæres , ou Lucius esto.
Loin de nous, la pensée de proscrire les citations puisées dans le
dioit Romain ; mais on nous accordera sans doute que ces citations
portent souvent à faux, et que cela doit être nécessairement lorsqu’on
les applique à des matières sur lesquelles nos législateurs ont cru
devoir s’écarter complètement des règles admises en droit Romain.
C/est ce qui arrive ici :
On reconnaissait, en droit Romain , que le testateur ne pouvait
commander qu’à l’héritier qu’ il instituait et non à l’héritier du sang
qui ne tenait son droit que de la loi ; aussi ne pouvait-on pas faire
des legs sans nommer un héritier, et si l'institution manquait , si
elle était nulle, les legs tombaient avec elle. Polhier , des dona
tions et testaments. Chap. 2. Scct. 1. § 1.
Cet héritier ne pouvait pas en même temps être légataire. Jlœ r e d i
à scineti[>so legari non potest (même auteur, chap. 3 , art. /}.)
»
« On 11e pouvait pas non plus, dans le droit Romain, dit G renier
( d is c o u r s historique, p. 2 8 ), mourir comme ayant fait une dis-
j- position testamentaire d’une partie de scs biens, cl 11’cn aya*:-
�-
9 -
/
» pas fait pour le surplus , ce que les lois Romaines rendaient par
» ces termes : parlirn testât us partim intestatus,... ce qui pro» duisit celle conséquence que l'institution d'héritier pour une
» partie de la succession , quelque modique qu’elle fut avait l'effet
» d’attribuer le tout à l’héritier testamentaire. »
E t c’est à ce sujet que M. Grenier dil : ces trois mots , Lucius
îiæres eslo faisaient un testament.
Ces règles n'étaient pas celles de nos coutumes; elles avaient au
contraire pour maxime : Fintitution d'héritier n'a lieu ; elles ne
permettaient pas aux particuliers, dit Pothicr , de se donner à euxînémcs des héritiers.
Les rédacteurs de nos codes ont admis, ont le voit .assez, d’autres
principes , d’autres règles ; ils ont permis de se donner un héritier
sous le nom de légataire universel , mais ils n’en ont pas fait une
condition de la validité du testament cl n’ont pas subordonné l’exis
tence des legs particuliers à celle du legs universel ; mais ils ont
reconnu qu’en présence des anciennes habitudes , on ne pouvait
pas imposer aux pays de droit coulumier les formules ordinaires
du droit écrit, et réciproquement.
« Toutes ces dispositions , d i lM . Grenier (t. r r , 5e édition ,
» p. 4 ? 5 ) qui tenaient à d’anciens usages des Romains qui depuis
* bien longtemps devaient nous être étrangers, ont enfin disparu de
» notre législation , on a cru toujours devoir permettre des dispo» positions sous le nom d'institution d'héritier par égard pour les
» anciennes habitudes contre lesquelles on lie sescrait pas clevé sans
» inconvénient ; mais il est indifférent que l’on qualifie celui ci qui
» on fu it des dispositions, d ’héritier ou de légataire. E n matière
» de testament ces mois : donner , instituer héritier, léguer, de» viennent par eux-mêmes sans conséquence. L ’objet essentiel, est
* que la disposition soit claire et précise. T el est le résultat de
» l’art. 9G7 où il est dit : Toute personne pourra disposer p a r
« testam ent, soit sous le titre d'institution (Théritier, soit sous
* le titre de legs , soit sous toute antre dénomination propre à
�» manifester la volonté , disposition que l’on retrouve dans la
» seconde partie de l’art. 1002. »
A in s i, tout le monde reconnaîtra qu’en droit Romain où on ne
pouvait pas faire un testament sans faire un héritier, on 11e dût pas
facilement admettre qu’un acte présenté comme
testament ne
contînt pas de nomination d’héritier, pour peu que les expressions
employées par le testateur fussent de nature à faire supposer qu’il
s’étaii conformé à cette prescription fondamentale de la loi.
M a is, parmi nous, il 11’en est plus ainsi : faites un légataire
universel ou n’en faites pas ; grevez ou ne grevez pas ce legs uni
versel de legs particuliers ; faites des légataires à titre universel
ou n’en faites pas , ne faites que des légataires particuliers ; grevez ,
si vous voulez, ces legs particuliers de certaines charges ou du
payement de certains legs particuliers , lout cela est dans votre
droit. 11 n’y a plus de forme spéciale.
Les maximes du droit Romain, que le testateur ne peut prescrire
qu’à l’héritier de son choix el non à celui du sang , qu’il n’y a pas
de testament valable sans désignation d’ un héritier, qu’on ne peut
pas m ourir, partirn tes talus , partim ¿nies lattis;
La maxime du droit couluiuier, d’après laquelle la loi seule et
non les personnes désignaient l’héritier, institution d'héritier n'a
lieu;
Tout cela est proscrit.
L a loi ne considère plus que la manifestation de la volonté ;
Pour la faire exécuter dans toute son étendue , si elle ne dépasse
pas ce qui est permis ;
Pour la restreindre, si elle dépasse certaines bornes ;
Pou r l'annuler en entier, si ces bornes sont dépassées de telle
manière, que les restrictions nécessaires ne produiraient pins
qu’ une volonté tellement tronquée qu’ il fut incertain qu’en cet étal
celte volonté fût encore celle du testateur.
�- IX -
'
/*6l
Mais encore en cet état, la nullité à la différence du droit romain,
ne porlc-t-clle pns sur le testament entier, mais seulement sur les
dispositions qui sont frappées par les proscriptions légales, et toutes
les autres, quelle que soit leur forme, universelle, à titre universel
ou particulier, restent debout, parce qu’elles restent des volontés
non douteuses.
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A présent, nous pouvons adopter, sans restriction et invoquer
nous-mêmes la maxime de la loi 10 1 de ni conditionibus testunien-
torurn voluntatem potins quant vetba cotis idc rare oporlet.
Cherchons donc celte volonté de bonne f o i , cl le texte qui est
sous les yeu x des Magistrats leur fournit tous moyens de contrôle.
Une première question se présente , et sa solution est de la plus
grande importance pour lever tous les doutes.
M. l’abbé Lavergnc pouvait, sous une dénomination quelconque
(le s termes ne sont pas à considérer), disposer de l’universalité de
scs biens, au profil de telle ou telle personne, et charger celte p e r
sonne de payer ou délivrer tous les legs particuliers qu’il lui plairait
de faire ;
Ou bien il pouvait faire des legs particuliers et dire qu’ une fois
ces legs payés ou p rélev é s, le surplus de scs biens appartiendrait à
telle ou telle personne.
Il pouvait employer l’un ou l’autre do ces m od es, en quelques
termes que cela fût dit, faisant passer la disposition universelle
avant les dispositions particulières , ou faisant l’inverse , grevant la
disposition université d’ un petit nombre de charges , ou , au con
traire, lui en imposant d ’ une importance telle, que le legs universel
fût, d’après l’état de la succession à sou ouverture, réduit à rien.
Cela serait insignifiant ; nous ne nous arrêtons pas à la formule
du langage ; nous ne nous arrêtons pas à l ’importance matérielle
des dispositions ; nous ne considérons que leur caractère de géné
ralité ou de spécialité ; si, d’une manière quelconque , il a exprimé
celte volonté, d’une part, de généralité de sa succession, quelle que
�fût sa valeur et, d'autre part, de spécialité , il y a un légataire, uir
héritier universel, il y a des légataires particuliers.
Mais il pouvait aussi disposer taxativement, nominativement d’un
certain nombre d’objets de sa succession, ou de tous les objets de
sa succession ; s’il l’a fa it , il y aura des légataires particuliers, plus
ou moins nombreux; et que certains de ces legs soient minimes,
que d’autres soient très importants , cela n’a aucune influence sur
leur caractère réel, il n’y aura»toujours que des legs particuliers, et
il ne lui était pas prescrit , de par la loi et sous peine de nullité,
comme en droit rom ain, de faire un légataire, un héritier universel.
A présen t, qu’a-t-il fait? Y a-t-il une seule disposition d'univer
salité, ou de ce qui restera, les legs payés ; il faut lire, et évidem
ment 011 n’ en trouve pas trace ; n’y a-t-il pas, au contraire, minu
tieux détails des objets immobiliers et mobiliers de la succession,
recevant tous une destination spéciale; encore une fois, il n’y a
qu’à lire.
Disons même q u e, dans les intentions qui animaient évidemment
le testateur, cela ne devait pas être autrement.
Aristocrate de goût et d’éducation , beaucoup plus que de nais
sance , il s’était fait un fief, c’était Longevergne, fruit de ses travaux,
et de ce qu’ il veut bien appeler scs faibles talents ; il faut y attacher
le nom du fondateur, le transmettre de génération en génération,
et pour cela ce ne sont pas les affections qui sont à considérer ;
j’aurais donné ce domaine aux D ie rn at, dit le testateur, mais pour
remplir mes v u e s, ils sont trop vieux, alors ce sera R o u c h y , cor
donnier à Ilouen , petit-neveu , et, pour le but que je «ne propose,
le petit-neveu de trciHe ans doit avoir le pas sur les neveux de
soixante.
Ce n’est pas là de la préférence dans l’ordre des aflfectious du
testateur, c’est le moyen d’assurer l’exécution d’une volonté qui ne
tient en rien à la personne de Rouchy.
Scs affections , quelles sont-elles, après cette idée fixe de création
d ’un majorai?
�—
i3 —
Sa famille, et les pauvres d’une manière générale. 11 esl donc de
toute évidence que , lors même qu’il mirait eu des valeurs beaucoup
plus considérables que celles dont il a disposé, il les aurait réparties
dans cet ordre d’aflection : rien dans le testament n’annonce une
préférence, et s’il y en a une, elle est énoncée dans la parlie finale
de l’art. 3 du testament, et cette préférence n’est pas pour le sieur
llouchy.
Ainsi, pas de dispositions à faire un légataire universel ; cela était
même contraire à cette pensée de tout faire émaner directement de
lui et de tout réglem enter, et aussi rien, dans les termes , qui soit
attributif de l’universalité.
M ais, dans diverses parties de son testament, disent les adver
saires, il üppelie llouchy , son héritier , ou L’héritier du domaine
de Longcvergne, et c’est en citant un axiome duquel il résulte qu’il
faut considérer la volonté plutôt que les mots , que , cependant on
veut de ce mol qui n’est accompagné d’aucune attribution, d’aucune
expression de volonté, qui reste à l’état de désignation, faire résulter
que M. l’abbé L a v e rg n e , a donné à U o u cliy, tous les biens dont il
n*a pas spécialement disposé, qu’ il l’a institué son légataire uni
versel ; en sorte q u e , certaines valeurs qui ont été omises dans les
dispositions toutes spéciales du testateur devraient appartenir à
llouchy et non aux héritiers , et que, si une succession de 200,000
francs était échue à M. Lavergne, sans qu’ il en eut eu connaissance,
ce serait encore au sieur llouchy qu'elle appartiendrai^, et non aux
héritiers du sang.
A l’appui du système qui attache tant d’importance à une qualifi
cation qu’on sépare de la disposition, 011 invoque un arrêt de la
Cour de Lim o g es, du 8 décembre 18 37 ( S . 3 q -2. 27 ).
Que la Cour veuille bien se mettre sous les yeux l’espèce dans
laquelle cet arrêt a été ren du , et elle y verra qu’ il y a dans le tes
tament institution formelle de légataires universels, cl que la dilliculté naissait surtout de ce que ces légataires universels étaient au
nombre de trois, sans être bien expressément conjoints dans la
disposition ;
�/x^
— »4 —
E t que néanmoins 1’arrètiste dans une note a soin de mettre le
lecteur en garde contre les applications qu’on pourrait faire de cette
décision.
Mais s i , comme le disent les adversaires , il faut considérer l'in
tention et non les paroles, ne faut-il pas par l'ensemble des disposi
tions du testateur, e t , par ses habitudes , chercher le sens que lu i ,
dans sa pensée, donne aux mots dont il se sert.
Suivant v o u s, Ilouchy , mon héritier; Rouchy , héritier de
Longevergne , n'est pas le synonime de R o u c h y , légataire du d o
maine de Longevergne auquel mon nom est attaché, et cependant
comment s’exprime le testateur dans l’article i " , en disposant du
domaine de Longevergne : Telle est mon intention qu 'il en soit
seul et unique iie iu t ie r . Comment s’exprime-t-il encore dans le
même article en disposant de ce domaine, il le donne ci l'exclusion
de scs autres patents et iieiutieiîs.
Donc le testateur attache aux mots héritier d ’un domaine , 1 a
môme portée, le même sens qu’aux mots légataire d ’un domaine.
Donc encore ses parents, dans sa pensée, restaient bien ses héritiers.
Car en parlant de R o u c h y , fh éritier du dom aine , il parle de scs
autres parents et les appelle ses héritiers.
$
En sorte que si on voulait que Rouchy fût légataire universel par
cette expression sans attribution autre que celle de legs spéciaux ,
les parents qui n’ont pas besoin eux d’attribution , pourraient égale
ment revendiquer la dénomination sous laquelle ils ont été désignés :
il les appelle ses héritiers.
Il est à remarquer q u e, dans le mémoire où on relève avec tant
de soins toutes les dénominations d’héritier employées par le testa
teur, celle de l’art, i " , appliquée à Rouchy cl qui devait frapper
la première l'attention, est la seule qui ait échappé au rédacteur.
Elle est cependant l’origine , la clef de toutes les autres dénomi
nations semblables.
II a dit que Rouchy serait, à l’exclusion de tous les autres héri-
�—
15
—
{¿ers , le seul héritier du domaine de Lon goverg n c, cl qu’il devrait,
lui cl scs descendants, porter son nom à perpétuité. H appelle par
lu suite Rouchy son héritier ou l'héritier du domaine de Lon gcvcrgne.
Et il est si vrai que celte dénomination en rapport, au surplus,
avec la formule usuelle en Angleterre, n’a d’autre source, d’autre
cause que celle qui procède de la libéralité des articles 1 “ et a,
que le testament ne contient pas d’autre disposition qui puisse y
fournir le moindre prétexte, que toutes celles qu’on y trouve la
repousseraient .au contraire.
Que donne-t-il, en effet, à Rouchy de plus quece qui est contenu
aux articles i er cl 2e?
A l’article 2 8 , il exprime la crainte que ses meubles soient brisés
par le transport d’une localité dans une autre, ce quiserait arrivé si
les héritiers en avaient faii le partage. Alors il les donne à R o u c h y ,
mais il veut qu’il paye à ses parents, pùur leur p a rt, différentes
sommes désignées.
Ainsi, sans une disposition expresse, les parents auraient partagé
le mobilier; il n’y avait donc pas de legs universel.
Il veut toujours qu’ils le partagent; mais , dans le seul but d’éviler une détérioration, il fait la licitation , et fait payer à chacun leur
part en argent; donc, dans sa pensée, s’ il a fait un légataire, ce qu’il
appelle un héritier dù domaine de Longcvergne , ¡1 n’a pas un seul
héritier de tout l’actif de sa succession. 11 laisse, pour héritiers, les
héritiers du sang , e t , dans Je mobilier , il a la précaution de faire
leur part.
A-t-on une part sans cire héritier?
On fait remarquer dans le mémoire que, par l’article 1 9 , le pro
priétaire de Longcvcrgnc est spécialement chargé de payer tous les
frais d’enterrcmciit.
Cette disposition, dans le cas même où elle serait isolée, pourrait
être invoquée contre le sieur Rouchy beaucoup plus qu’en sa (à-
�—
16
—
veur, car, s’il était légataire universel, celle charge pesait de droit
sur lui , et il était inutile de la lui imposer; mais il ne faut pas la
séparer de l’art. 54 où on voit que le testateur donne au sieur Rouchy 2,000 fr. à prendre , d it - il, sur les fonds du gouvernement ,
pour payer celte dépense.
A insi, il sait si bien que Roucby n’a rieu à prétendre en dehors
de son legs particulier de l’art. i cr, que , lui imposant une charge
un peu considérable, qui ne pourra pas être prise sur scs revenus
qui ne seront pas encore échus , il lui fait remettre une somme
spéciale pour payer ces frais.
E t il est tellement vrai que le ¿estateur sait qu'il n’a personne
qui soit spécialement saisi de l'universalité, par son testament, que
lorsqu’il ne peut pas connaître le montant d’une somme dont il veut
disposer, il crée une disposition spéciale de ce qu’ il pourra y avoir ,
ou du surplus.
A in si, la disposition du domaine de Longevergne est tellement
faite dans le seul but de satisfaire cette idée fixe de création de m a
jorai et de transmission de nom , sans intention aiFcclucuse cl per
sonnelle à Jean Roucby., qu’il veut que si, au moment de son décès,
il y a des revenus de ce domaine, échus et non payés , ils appar
tiennent au fils aîné des Julliard.
Ainsi, il ne peut pas bien faire son compte du capital des renies
s u r l 'E t a t , puisque ce capital est variable. Alors il se demande ce
que de viendra le surplus, après payement des dispositions écrites,
si surplus il y a; et comme ce surplus ne serait pas assez important
pour le laisser partager enire lous les héritiers, il le donne moitié
aux enfants d’Anioinc Roucby, de Labaslide, moitié aux enfants
Julliard.
Comment ensuite peut on attacher tant d'importance à ce (pii
n'est qu'une qualification , lorsque dans le testament lui-même ces
qualifications varient dans leur application à la même personne?
S ’il a dit : R o u c b y , mon héritier, dans certains articles,
A l'art. 8 il dit : R o u c b y, mon donataire ;
�— '7 —
Aux articles io cl 1 9 , le propriétaii e du domaine de Longc-
vcrgne;
A l’article 2 3 , Rouchy, mon légataire;
A l’article 2 9 , Rouchy, héritier du domaine de Longevergnc.
Dirons-nous, adoplant le système du sieur Rouchy : vous 11’ètes
que légataire du domaine, par cette raison qu’il vous a appelé lé
gataire , propriétaire , donataire du domaine ?
Non , nous ne le dirons pas; il ne s’agit pas , en cflfet, des expres
sions plus ou moins justes, plus 011 moins conformes au langage du
droit dont le testateur se sera servi dans la désignation d’un individu.
Il s’agit uniquement d’apprécier le fond des dispositions et d’eu
lixer le caractère.
O r, que donne le testateur au sieur Rouchy? il lui donne spé
cialement le domaine de Longevergnc et scs dépendances, et la
réalité est qu’il ne !ui donne pas autre chose, c a r , s’il lui attribue
les meubles meublants , il lui impose l’obligation la plus stricte d’en
payer la valeur qu’ il fixe, et à chaque héritier pour sa part.
S ’ il lui donne (art. 54), mie somme de 2000 fi\, il lui est prescrit
(art. 1 9 ) , de l’employer au paiement de tous les frais funéraires.
iNIais, dit-on, il faut considérer la prépondérance du legs fait au
sieur R ou chy, et on invoque l’opinion de M. G ren ier, pour faire
admettre que l’importance des legs peut servir à en fixer le carac
tère.
On n’a qu’à se mettre sous les yeux ce que dit M. Grenier au
passage cité (t. 1 " , p G5 i , 5e édition), et on verra que cet auteur
traite là des dispositions dans lesquelles il y a concours entre le
légataire universel cl un légataire à titre universel; qu’il explique
parfaitement les caractères des différents le g s, et que nulle part il
11e dit qu’un legs d’un objet ou de plusieurs objets déterminés peut
être considéré comme legs u niversel, parce que ces objets auraient
une grande valeur relativement à l’importance do la succession.
3
�&
~
1 8
“
Conmient eùt-il tenu ce langage , lui qui d i t , t. i f , 5K édition ,
p. 67G, que le legs de tous les bois, de tous les prés, n’est qu’un
legs particulier; que , par la même raison, il ne faut voir qu’un legs
particulier dans celui de tous les meubles et immeubles qui sont
situés dans un département, et qui ajoute : « le legs d’une succession
» écliue au testateur n’est aussi qu’un legs particulier, quelque
» considérable qu’elle puisse élre , et quand même elle fo rm e» rait lu totalité de la succession du testateur au moment de son
» décès. Tel est le résultat des art. 1 0 0 2 , io o 3 , 1 0 1 0 du Code. »
M. G re n ier, en tenant ce langage, s’appuie sur l’autorité de
Chabot.
llic a r d , des donations (art. 5 , n° 1 6 2 6 ) , nous donne p ar
faitement la raison de cette opinion.
Cet auteur examine la question de savoir si on considérera
comme legs universel celui q u i, fait en termes particuliers, com prendait cependant réellement tout ce que le testateur possédait
d ’ une certaine classe de biens.
E t Ricard dit que ce n’est pas un legs universel, « parce que ,
» dans les successions, nous ne considérons pas seulement le pré» sent et ce qui nous paraît, mais nous y comprenons aussi la pos» sibilitè et F espérance ; d’ailleurs le legs étant d’un corps parti» culier, la disposition est certaine cl arrêtée.»
Ici il s’agit bien plus positivement que dans les exemples que
nous venons d’emprunter aux auteurs, (Fun corps certain et arrêté.
L e testateur a voulu donner ce qu’ il désigne, il n’a pas voulu
donner autre chose; il n’ a pas voulu donner les éventualités de sa
succession ; attribuer plus d’ étendue ou un autre sens à scs dispo
sitions cc serait créer un testament.
D e même qu’un legs particulier ne perd pas son caracterc de
legs particulcr parce qu’ il est considérable ; un legs universel ne
cesse pas d’être un legs universel parce que ses résultats sont m i
nimes , et que même , charges payées , le légataire universel sc
trouve en définitive ne rien avoir. 11 serait facile d'en citer des
�— i9 —
exemples, et de prouver que, soit par la volonté du testateur, soit
par des circonstances imprévues, des legs universels se sont trouves
beaucoup plus considérables qu'on
ne
pensait , ou tout à fait
minimes. L e legs particulier est le legs certain , positif; le legs uni
versel est celui des éventualités.
Personne, dit-on , n’est chargé du payement des dettes; ce sera
donc le sieur Rouchy qui les payera? donc il est légataire universel.
On conçoit très-bien par quelle raison le sieur Rouchy rédam e
le payement des dettes , obligation qui n'aurait que des avantages ,
puisque le testateur avait fhit, pour le passif comme peur l’actif de
s i succession, des dispositions toutes spéciales, et que sa succession
n’est grevée d’aucune charge non prévue.
Mais s’il s'en découvrait, dira-t-on?
S'il s’en découvrait, elles seront à la charge des héritiers naturels
qui recevront aussi l’actif dont ibu’a pas etc disposé, cl il en existe.
Enfin, qu’on suppose un testament q u i , absorbant tout l’actif par
des legs particuliers, aurait omis de régler le payement des dettes;
qu’on suppose dans ce cas la renonciation des héritiers naturels,
en résulterait-il qu’il faut créer un légataire universel là où il n’y en
a pas? ¡Non, il en résulterait que le passifserait payé par une réduc
tion proportionnelle des legs particuliers (art. io a 4 -)
Dans le mémoire comme dans la plaidoirie , en voulant soutenir
que le legs fait au sieur Rouchy est un legs u n iversel, ou a été
conduit, par la force des choses, à en revenir aux dispositions des
art. i rr et a1' du testament; c l, en effet, le testateur n’ayant pas eu
réalité donné autre chose au sieur R o u c h y , il fallait bien faire r e
poser les prétentions sur ces articles.
On y esl conduit par la pente irrésistible du terrain.
Lorsq u ’ on dit que le legs doit être considéré comme universel
à raison surtout de son importance, quel est ce legs important dont
on veut parler ?
�Incoiitcsti\blemcnt celui (le L o n ge v erg tie , manoir principal, lit
plus importante des propriétés ; nous devons être nécessairement
d’accord, puisque, sans doute, la pensée du rédacteur du mémoire,
comme celle de l’avocat plaidant, qui l’a d’ailleurs nettement ex
prim é, ne peut pas s’appliquer aux meubles meublants donnés à !a
charge de les p a y e r , et aux deux mille francs donnés pour les
employer.
Ici le magistrat a devancé de beaucoup la réponse que nous
avions à vous faire, et il vous a dit : Mais si la qualité de légataire
universel résulte de la disposition relative au domaine de Lon gevergne , c’est là qu'on vous signale la substitution, et tout legs
grevé de substitution est atteint, par l’art. 89G, quel que soit son
caractère universel; particulier, ou à titre universel.
Cette objection admet-elle une réplique possible, à moins qu’il
ne soit permis aux adversaires de laisser tuer le même legs comme
particulier par l’article 89G, et de le faire revivre ensuite comme
universel.
Voilà les conséquences ou sont conduits même les hommes les
plus éclairés lorsqu’ils partent d’un système qui repose sur une
base fausse.
L a vérité doit se faire jour , elle ressort même des paroles et des
écrits qui la combattent.
Celle v érité, quelle est-elle en définitive?
C ’est que les qualifications, et dénominations diverses données à
Rouchy par le testament, procèdent toutes des dispositions des a r
ticles 1 et a oii ou voit même que Rouchy est appelé héritier a
cause du don du domaine, et qu’alors, pour fixer la qualité réelle
du sieur Rouchy vis-à-vis la succession , il ne s’agit que de déter
miner le caractère du legs contenu aux art. 1 et 2 , et les adver
saires l’ont fait eux-mêmes : c’est un legs particulier.
*
Qu’on réunisse d’ailleurs, si on veut, toutes les dispositions q u i ,
dans le testament, concernent Rouchy.
�— ai —
Art i ' r cl 2. L oîts
o du domaine de Lon covcren
n
D e,7 avec obliiiailon
O
de porter le nom et de transmettre à l’infini ;
Art. 22 Don des immeubles meublants, à la charge d’en payer
le prix.
Art. i g et 2/|. Don de 2,000 fi’ ., pour les employer aux frais
funéraires.
Puis des charges imposées à R o u c h y , mais toutes avec spécialité
et détermination complète , cl en même temps calculées dans le
cas même oii cela n’est pas e xp rim é , de telle manière qu’elles
puissent cire payées sur les revenus du domaine.
Voilà donc trois legs bien déterminés grevés aussi de charges
positives, sans que Rouchy ait rien à recevoir en sus , rien à payer
de pl us que ce ce qui est ordonné par le testateur. Y eùl-il cent legs
de même nature et faits à la même personne, et cent charges fixes ,
le nombre n’en changerait pas le caractère, il y aurait ccnl legs
particuliers.
Deux de.ces legs sont insignifiants ; ils n’ ont même que la déno
mination de legs. L ’autre a, au contraire, de la vale u r; le testateur
y en attachait beaucoup , par suite de l’organisation qu’il faisait.
Mais en définitive, Rouchy n’est pas compris pour autre chose
dans les volontés exprimées ; qu’à présent, à raison de ce qu’il lui
donne , le testateur qui ne connaît pas les qualifications légales ,
l’appèle son donataire , comme il le fait, le testament perdra-t-il
sa nature de testament pour devenir une donation ; qu’ il l’appèle
sou héritier ou l’héritier de L o n g e v e rg n e , ce qui est la même
chose dans sa pensée , entend-il pour cela lui donner plus ou moins?
Cela fera-t-il le s i e u r Rouchy légataire universel? Cela fera-t-il
q u e si le testateur eût laissé dans sa succession 100,000 fr. dont il
n’eût pas disposé, il serait réputé avoir voulu les donner au sieur
Rouchy ?
Il l’a. bien appelé aussi légataire. Rencontrant, cette fois, l’cxpression juste en droit, cela a-t-il plus d’ importance? Mais, 11011.
�Appliquez donc la maxime que vous invoquez ,potius volunlcilcm
qnam verba spectariplacuit , et reconnaissez en même temps qu’il
n’y a , en définitive, dans le testament, qu’ une seule disposition
d’où procèdent les dénominations diverses que le testateur donne
au sieur Rouchy , puisque, dans les deux autres également parti
culières et insignifiantes, au surplus, il ne reçoit que pour payer ;
reconnaissez que vous avez déterminé comme nous le caractère de
cette disposition , et qu’en définitive, celte détermination est même
sans b u t, sans résultat au procès, puisque, si elle contient une subs
titution prohibée , la nullité prononcée par la loi l’atteint dans tons
les cas et quelle que soit sa classification légale.
D E U X I E M E QUESTION.
L e testament du sieur Lavcrgne contient-il une substitution ou
seulement une défense d'aliener ?
L e texte de la disposition qui est sous les yeu x des magistrats
est trop clair et trop formel pour qu’il soit nécessaire de se livrer
à ce sujet à une longue discussion.
II est vrai que le testateur ne se sert pas de ces expressions : le
sieur Boitchy sera chargé de rendre ¿1 ses enfants , les enfants
de Ronchj-, au.v leurs, les enfants des enfants de llonchy, etc ;
car
pour exprimer une à une
toutes
les transmissions
qui
riaient dans la volonté, il n’y aurait pas de limites, cl c’est précisé
ment pour cela que la pensée ne pouvait se rendre que par une
disposition g é » é raie.
Ou
voudrait
pouvoir
soutenir
que
les
mois
charge
de
conserver et de rendre sont sacramentels , ei que sans leur emploi
il n’y a pas de substitution; si on ne va pas toul à fait jusques-là
011 en approche , car après avoir souligné les mois : charge de
�— »3 —
conserver et de ren d re , on dit qu’il faudrait les trouver expressé
ment écrits dans le testament, et on invoque l’opinion des auteurs
cl quelques arrêts.
Nous avons vérifié la plupart de ces citations et il faut recon
naître qu’elles ne sont pas heureuses. P o u rq u o i, par exem ple,
invoquer dans l’ouvrage de M. Toullier le n° 24 du tome 5 , où il
dit, ce qui est hors de doute : « C ’est celle charge imposée au grevé
» de c o n s e r v e r ses biens pendant sa vie et de les rendre à sa mort
» qui constitue ce que les auteurs appèlenl l'ordre successif. » Au
lieu de citer le passage du même auteur, au n<> 5 o , même v o lu m e ,
qui s’applique réellement à la question, car il dit : « toutes les fois
» que l’acte esl conçu de telle manière, qu’il renferme nécessairement
» la charge de conserver et de rendre; quoique non littéralement
•5» exprim ée, sans qu’ il soit possible de lui attribuer un sens différent
» propre à maintenir la volonté du testateur aux yeu x de la loi , la
» disposition est nulle comme renfermant une substitution ; elle est
» nulle quant à la substitution , parce qu’elle est contraire à la loi
» que le testateur avait voulu éluder; elle esl nulle quant à l’ insti» lution du legs principal , parce qu’il est certain que le testateur
» n’a voulu donner qu’à charge de rendre, et qu'il est incertain
» s'il eut voulu donner sans cette charge. »
Ces paroles, et nous pourrions en citer de semblables empruntées
à M. G renier, à Duranton, à ¡Merlin, Coin-Delille , T h é v e n o l, et
à la Jurisprudence, diseut toui'ce qu’il faut dire , et reproduisent
au surplus le texte de l’art. 896 qui, en frappant de nullité toute dis
position p a r laquelle le légataire sera chargé de conserver et de
rendre ¿1 un tiers , exprime très-bien qu’ il n’y a pas à ce sujet
d’expression sacramentelle , cl que comme dans toutes les dispo
sitions testamentaires, il ne s’agit que de chercher cl do recon
naître les volontés quels que soient les formules du langage et les
termes employés par le testateur.
Si à présent ont veut soutenir que dans le cas où les expressions
employées
peuvent naturellement recevoir un sens aulre que
�Jjb
— 2.4 —
celui d'une substitution prohibée , 011 doit croire que le testateur a
voulu faire ce qui était permis plutôt que ce qui lui était défendu.
¡Nous serons de l’avis de nos conlradicteurs.
Que disions-nous , en e ffet, en plaidant? Nous disions, lorsque
sous l’empire d’une organisation sociale qui puisait de la force dans
les substitutions, elles étaient vues avec faveur, 011 en reconnaissait
là où on n’en reconnaîtrait pas aujourd'hui. Ainsi ces mots : J ’ins
titue un tel et ses enjants étaient alors réputés contenir une v o
lonté de transmission successive. Aujourd’hui, si rien autre chose
n’expliquait la pensée, on pourrait ne pas y voir un ordre successif,
mais seulement une disposition conjointe, en ce sens que le père et
les enfants dev raient recueillir directement du testateur ensemble et
par portions égales.
On pourrait encore avoir du doute aujourd’h u i, si on disait:
J ’institue Pierre et après lui ses enfants , car le testateur a pu
vouloir prévoir le cas de son déccs avant Pierre et stipuler que
dans ce cas , il donne à ses enfants , disposition qui reste directe,
qui est une substitution vulgaire, parfaitement perm ise, et non la
substitution, avec ordre successifprévue et prohibée d’une manière
si formelle par l’article 896.
Mais ce doute pourrait encore disparaître devant l’ensemble des
dispositions du testament.
Mais ici, 011 le dem ande, le doute, l’incertitude la plus légère
sont-ils un instant permis , en face d’une disposition qui crée la
substitution en ternies formels , qui en dit toutes les conséquences,
qui attache à sa perpétuité, la perpétuité du nom , et. qui indique
que le choix du grevé a été fait uniquement dans cette pensée de
transmission, on sorte que la stipulation, les conséquences, les mo
tifs, tout s’y trouve.
La stipulation. Y a-i-il rien de plus précis que ces expressions :
« J e lui en fu is donÇii Ilo u ch y ), pour être entièrement à lui et
* ses descendants, après mu m ort , à l’exclusion de mes autres
�-
35
_
» parents cl héritiers , car telle est ma volonté qu’il en soit seul et
» unique héritier, lui et ses enfants, après lu i , de génération
» en génération .
Ajoutez à cela que i ous les héritiers, possesseurs de ce domaine,
présents el à venir d e v ro n t, comme condition absolue, renoncer
au nom de R ouchy , pour prendre et porter le nom de Lavergne.
A insi, nom et domaine, tout se transmet de génération en g é
nération, dans la famille Ilo u c h y , qui prend a la fois, l e bien de
L o n g e v e rg n e , renonce au nom Ilouchy et prend le nom de L avergne , de génération en génération.
L es conséquences. « L e domaine de Longevergne ne sera jamais
» vendu, échangé, morcelé, ni grevé de dettes, sous quelque
» prétexte que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque
» famille, lel que je l’ai laissé à ma mort. » Ce qui est aussi une
répétition de la stipulation.
Puis, tant l’idée de conservation et de transmission complète
existe , obligation à chaque possesseur successif de maintenir les
lieux dans leur état complet d’entretien, réparation et culture.
L es motifs du choix. « J e leur aurais donné ce domaine (aux
» Diernat) , s’ils se fussent mariés , mais leur grand âge a détruit
» tout espoir de mariage.
Si dans le mémoire auquel nous répondons, on n’eût pas passé
sous silence celle partie de Parlicle 5 du testament, on n’aurait pas
demandé comment il sc ferait que le testateur, pour remplir cette
intention de tranmission, eût choisi un homme qui n’était pas marié.
On demande là au testateur ce qu’il a eu le soin d’expliquer.
Ses affections seraient pour les Diernat ; niais il s’agit de l’accom
plissement de la volonté de transmission de génération en généra
tion ; ils sont trop vieux : Rouchy est jeune, et il est choisi unique
ment en vue de la substitution, en vue de ce que la loi défend. Sans
cela il ne l’eut pas élé.
4
�¡¿ fi
-
,6 -
M ais, dit-on , la disposition contient une interdiction de vendre ,
clause réputée non écrite , aux termes de l’article 90 0 , cl on va jus
qu’à dire : le tribunal qui en fait une substitution , a violé la
maxime (juod nullum est nidlum producit effectum.
Etrange application de cette maxime qui ferait que ce qui est
nul ne produirait pas môme une nullité ! ¡Nous n’avons qu’à ré
pondre : Vous avez raison, ce qui est nul ne produit aucun eflet.
L a loi dit que la disposition entachée de substitution disparaît en
entier, dans le legs lui-même comme dans la charge de rendre.
Ainsi, le legs fait au sieur R o u chy , dans les art. i tr et 2« du testa
ment ne produit aucun effet.
O u i, sans doute, il y a interdiction de vendre; mais cette inter
diction résulte implicitement de toutes les substitutions ; ici, elle est
exprim ée; si elle l’était sans que ce fût pour créer une substitution,
ce serait l’article 900 qu’il faudrait appliquer, car l’intention de
gratifier le sieur Rouchy personnellement resterait encore certaine.
Mais lorsque l’interdiction de vendre n’est exprimée que comme
conséquence de la substitution , c’est l’article 896, la loi spéciale de
la m atière, qui doit recevoir son application. ( V o y e z G renier,
troisième édition, p. 1 15 , n° 7.)
D ’autant plus que la piésomption de la loi est ici vérifiée par le
fait, qu’ il est certain que le testateur n’a donné à Rouchy que
poursubstituer, et que la substitution disparaissant, il ne voulait pas
que sa propriété de Longevcrgnc fut à lui.
Nous le comprenons, le système du mémoire doit convenir par
faitement au sieur Rouchy , il lui donne le legs et met au néant les
obligations qui l’accompagnent.
Mais ce système , sous prétexte de maintenir pour partie les in
tentions du testateur, n’en est-il pas la violation la plus manifeste?
N’a-t-il pas dit assez clairement : J e ne donne ce domaine au sieur
Rouchy que parce que je veux le maintenir dans l’état où je le laisse
à lout jamais; je veux le faire transmettre , par Rouchy qui n’est ici
�- *7 A ï)
qu’un m oyen, de génération en génération, sans cela je ne le lui
aurais pas donné, je l’aurais donné aux Diernat. E l on le donnerait,
ce domaine, à Roucliy , lorsqu’on reconnaît qu’on ne peut exécuter
sous aucun rapport la volonté réelle du testateur, celle pour l’ac
complissement seul de laquelle il l’a il passer le domaine par les mains
de Roucliy !
E t on appelle cela exécuter une volonté ! Mais si on voulait faire
accomplir la volonté seconde, alors que la première reste impuis
sante devant la l o i , ce serait aux Diernat qu'il faudrait attribuer la
propriété.
Cela ne se peut pas, parce que le testateur dit seulement ce qu’il
durait ja it s’il n’avait pas voulu fonder un m ajorai, et qu’on ne
peut faire exécuter qu’ une disposition précise.
Mais toujours est-il que lorsque la l o i , comme le disent tous les
auteurs , répute seulement qu’ il n’est pas certain que le testateur
eûl maintenu le legs dans le cas où il aurait su que la disposition do
transmission successive disparaîtrait, ici il est complètement dé
montré , prouvé que la substitution écartée, Roucliy ne serait pas
le légataire. Peut-on à présent, comme on le demande , écarter la
substitution et maintenir le legs , c’est proposer à la cour à la fois
]a violation de la loi cl la violation de la volonté du testateur.
L ’auteur du mémoire, l’avocat qui a plaidé pour le sieur Rouchy
sont d’accord avec nous , la volonté qui est en opposition avec les
principes fondamentaux de noire droit ne peut pas recevoir son
exécution; mais ne devraient-ils pas reconnaître en même temps
qu’alors que la voix qui aurait pu substituer une volonté licite à
celle qui ne l’est pas , ne peut plusT se faire entendre , c’est la loi
qui parle, et qu’elle appelle les héritiers du sang.
Les Diernat n’auront pas tout ce qu’ ils auraient eu si la volonté
du sieur Lavcrgnc pouvait encore ordonner. L e sieur Rouchy
recevra une portion beaucoup plus considérable q u e les Arnal. Mais
cette petite part les sortira de Pelai de domesticité dans lequel ils
�**" vivent. Faut-il, avec l’auteur du mémoire, tani gémir sur le sort de
l ’ouvrier cordonnier qui ne recevra pas un cliàteau , mais qui aura
des moyens d’existence assurés. Ne faut-il pas au contraire se féli
citer de ce que, dans la fortune d’un homme bienfaisant, la part de
tous se trouvera faite , la part des pauvres du village , la part des
pauvres de la famille.
TR O IS IÈM E QUESTION.
Y aurait-il même dans le testament une substitution, elle ne
serait pas prohibée.
Il faudrait, pour admettre celte proposition , que la substitution ,
une fois reconnue, put être renfermée dans les termes de la loi du
17 mai 1 8 2 6 , cl restreinte au second degré inclusivement. E st-ce
bien là ce qu’a voulu le testateur? Devons-nous, pour décider cette
question, nous liv r e r a des recherches nouvelles, afin de constater
de nouveau sa volonté? On comprend très-bien que l’appelant ait
pu diviser en deux questions ce qui a fait l’objet de la seconde et
de la troisième proposition de son mémoire. Dans l’une, il s’agissait
pour lui d’établir que les termes du testament renfermaient une
simple prohibition d’aliéner; il a pu se livrer sur ce point à une
discussion qui laissait en dehors le sujet qu’il traite dans la dernière.
Mais telles n’ont point été les conditions de la réponse qui lui a été
faite. P ou r établir qu’il existait dans le testament du sieur Lavergne
autre chose qu’une prohibition d’aliéner, nous avons été obligés de
prouver que ce testament renfermait une véritable substitution, et,
par suite, d’en démontrer les caractères cl l’étendue. Nous pourrions
donc nous en référer à cette partie de la défense présentée dans les
intérêts des héritiers du sang, et si nous passons à un examen spécial
de cette partie.de la discussion do nos adversaires, c ’est avec l’in
tention de choisir dans leurs arguments ceux qui appartiennent
d’une manière plus spéciale à celle nuance de la question.
�—29—
Jl
Leur argumentation sur cc point n’a qu’ un seul b u t , celui
d’établir que l'hypothèse des deux degrés suffit pour expliquer les
(ormes dans lesquels la substitution est conçue et assurer l’exécutiou
de cette partie du testament.
T
Nous avons déjà prouvé que les vues du testateur embrassaient
un avenir sans limites et l’esprit général de ses dispositions viendrait
ici protester , s’ il était nécessaire , contre le sens forcé que l’on
voudrait attacher à la lettre du testament. Mais la lettre et l’esprit
sont dans une harmonie parfaite à cet égard , comme il nous sera
facile de l’établir dans quelques rapides observations.
Les premières doivent porter sur la valeur des termes employés,
et ce qu’il y a de plus sûr, c’est de nous attacher à la définition
judiciaire qui a pu en être donnée. Nous sommes assez heureux
pour rapporter des autorités irrécusables sur ce genre de difficultés
qui présentent toujours un caractère assez grand d’indécision.
L a loi 220 au D . de vetbis significatione s’exprime en ces
termes : liberorum appcllationc nepotes et prœnepotes cœterique ,
qui e x his descendant continentur. Dumoulin applique «à notre
langue et à notre droit français celle signification du 11101 latin ;
c ’est ce qui résulte du passage suivant de son commentaire sur la
coutume de P aris, lit. i er, p. i 5 : « Verbum gallicum, enfant ,
» non est de se restrictum ad primurn vcl ad alium graduui ; sed
» iudiflerenter suppr.nit quovis dcscendenlcs , sicut verbum liberi
» in loge romanà. » E n fin , Ricard fait dans le même sens une
application plus directe de ce mot lorsqu’ il dit : L e mot enfant est
gênerai pour signifier tous les degrés de la ligne descendante ,
ce qui a lie u , soit qu'il s’agisse dem péc/ier Vouverture d ’un
Jidéïcommis , en conséquence de la condition , s ’il décède sans
enfants , ou de donner effet à une substitution au profit des
petits-enfants.
Cela ne veul pas dire que le mol enfants doive toujours s’enten
dre dans son acception la plus étendue, mais bien seulement que
celle acception csi susceptible de tous les degrés , suivant l'intention
�— 3o —
1
^
.
.
.
de celui qui en fait usage ci les circonstances dans lesquelles cet
usage a eu lieu.
Livrons-nous à celte double recherche pour le testament qui
nous occupe. Quel est le premier mot employé par son auleur en ce
qui touche la substitution, c’est celui de descendants : pour en
jouir, dit-il, cl ses descendants après ma mort; voila déjà une
première preuve que la pensée du testateur 11e s’arrête pas aux
premiers degrés. L e mot descendants 11e s’emploie jamais pour in
diquer uniquement les enfants et les petits-enfants ; ce serait lui
donner un sens impropre ; pour que l’expression soit juste, il est
nécessaire qu’elle désigne une longue lignée de personnes issues les
unes des autres , cl qu’elle p a rle , pour ainsi dire , d’un point fort
éloigné pour remonter jusqu’à l’auteur commun, embrassant alors
dans sa généralité , mais seulement dans ce cas , même les enfants
du premier degré ; c’est le mol de la ligne descendante qui corres
pond à celui d'ancêtres, dans la ligne ascendante. O r, nous défions
la vanité la plus ridicule d’oser appliquer celte qualification à l’uïeul
ou au bisaïeul. A in si, des le principe, nous voilà avertis par le
testateur lui-même; il veut étendre scs bienfaits sur une race tout
entière. C ’est donc dans le sens de cette première expression et
dans le sens conforme de la définition admise par les autorités citées
plus haut qiie l'auteur du testament continue en ces termes : lui et
ses enfants après lui, c’est-à-dire nepotes et prænepotes , cœ teri(jue qui e x eo descendebunt L ’explication qui suit immédiate
ment , de génération en génération , vient compléter la conviction
à cet égard. Celle locution est, en effet, des plus énergiques et ne
s’emploie jamais que pour indiquer une longue succession de per
sonnes ou de choses. Elle a passé dans le langage familier; chacun
de nous peut eu trouver cent exemples pris dans les habitudes de la
conversation et s’assurer , par lui-même, de l’étendue presque in
définie qui s'attache toujours à cette manière de s’exprimer. C ’esi
dans ce sens que les écriture? saintes entendent ces mots, de siècle
en siècle , qu’elles huit.suivre d’une si énergique explication. Il
n’existe qu’une différence, c’est que l’une de ces locutions s'applique •
�— 3 1 —-
«•tu cours du temps, l’outre à celui de l'humanité ; mais elles n’en ont
pas moins l’ une et l’autre un caractère biblique, qui doit conserver
à ces expressions toute leur force, lorsqu’elles se retrouvei.t sous
la plume d’ un prêtre.
L e mémoire du sieur Ronchy ne peut opposer sur ce point
qu’ une objection grammaticale que nous sommes obligés de repous
ser , d’abord au nom de la grammaire elle-m êm e, et pour le main
tien de scs règles. De ce que le mot génération est pris au singulier,
on v e u t conclure qu’il ne s’agit réellemçnt que de deux générations,
dont l’une serait indiquée par le premier emploi du mol génération,
et l’autre par le second emploi qui en esl fait; pour aller au-delà,
le mémoire eût exigé le pluriel. L e pluriel! lorsqu’ il s’agit d’indi
quer un ordre successif, le passage d’une chose à l’aulrc ! Mais
c ’eût été une faute gro ssiè re , en contradiction manifeste avec les
faits que l’on veut exprimer. Plusieurs générations ne succèdent
pas immédiatement à plusieurs générations, elles se suivent une à
une , dans l’ordre des temps, et pour aller de la première jusqu’à la
plus reculée, c’est toujours l’ une après l’autre qu’il faut les prendre;
c ’est donc au singulier que doivent se faire toutes les énonciations
de celle nature et jamais peut-être un plus long avenir n’a été prévu
ou annoncé que par ces mots : de génération en génération.
L a cour exigerait-elle une preuve de plus; qu’on veuille bien se
rappeler qu’une des conditions imposées par le testateur au léga
taire du domaine de Longevergne était d’abandonner sou nom pour
prendre le nom de son bienfaiteur. L e domaine cl le nom étaient
deux choses attachées l’ une à l’autre cl dont les destinées se con
fondaient dans la pensée de M. l’abbé Lavcrgne. Esl-cc à Ronchy
seul qu’il impose l’obligation de prendre et porter le nom de L a vergne? Est-ce uniquement à ses (ils ou à scs petits-fils? Non , c’cst
à sa postérité, à scs descendants garçons et Jilles. Comme la pos
session du domaine doit suivre celle du nom , c’est donc à sa pos
térité qu’il transmet l’un cl l’autre. Il est impossible que celte charge
de conserver cl de rendre soit censée ne plus exister après le second
�degré; c’est une prétention contraire au texte du testament , cl la
cour sait déjà qu’elle est encore plus contraire à son esprit.
QUESTI ON
SUBSIDIAIRE.
L e titre même de cette partie de mémoire détermine nettement
la position acceptée par les auteurs pour la dernière question dans
laquelle ils se réfugient. Ce titre suppose en cflet que les questions
principales ont déjà été décidées dans le sens contraire aux préten
tions de Rouchy. l.a qualité de légataire universel ne lui a pas
été attribuée p a r le testament, ou bien dans tous les cas, le legs
universel se trouvant entaché du mente vice que le legs particuliçr, la substitution fid éi commissaire n'en existe pas moins avec
tous scs caractères juridiques ; elle embrasse la descendance
entière du sieur Rouchy sans limitation ci un degré spécifié , et
ne peut être retenue dans les limites de la substitution légale ;
mais dans ce cas même, à en croire nos adversaires, la nullité ne
commence qu'avec la prohibition , et les tribunaux doivent dis
tinguer : annuler la disposition dans sa partie qui concerne les
personnes appelées ¿1 un degré prohibé , la maintenir à l'égard
de celles qui se trouvent ci un degré où la substitution est p e r
mise. Cette prétention , que l'on cherche à appuyer de l’exemple
des lois anciennes , suppose nécessairement l'impuissance d’appli
quer l’art. 89G aux dispositions qui rentrent dans le cas prévu par
la loi du 17 mai 18 2 G , lors même que ces dispositions excéde
raient les limites fixées par cette loi elle-même. C ’est prononcer en
un mot l'abrogation au moins partielle de cet article si important
île noire droit civil. Celle décision csi-clle admissible? ¡Nous
sommes loin de le penser cl nous espérons pouvoir porter jusqu'à
l'évidence la démonstration qui nous reste à faire sur ce point.
La question ne se présente pas seulement à propos de la loi du
1 7 mai 182G , (îl longtemps avant la publication de ce dernier acte
législatif, ou s’était déjà demandé si la clause ¡m iaule de l’art. 89G
�-
33 -
qui annule toute disposition portant substitution fidéi-commissaire,
pouvait être appliquée au cas ou une substitution faite suivant l’es
prit des an. 1048 et 1049 du code civil lui-mcnie, aurait dépassé
toutefois les bornes fixées par ces articles. Le mémoire publié pour
Iîoucfiy indique suffisamment que ses signataires avaient souvenir
de cette circonstance, mais ils regardaient la solution de la ques
tion agitée p a r eu x comme <Jouteuse sons les principes rigoureux
de l’article 8gf> du code civil, qui prohibait toute substitution et
qui annulait la disposition principale même à l'égard de dona
taire et de légataire, (p . 2G.)
C ’est là sans doute le motif qui les a empêchés d’examiner à ce
point de vue la question qu’ils ont mieux aimé porter sur le terrain
de la loi du 17 mai 18 26. Nous ne pouvons cependant restreindre
notre discussion à cette dernière partie, parce que l’ un de nos con
tradicteurs a repris dans la plaidoirie la thèse abandonnée dans le
mémoire , qu’au fond la loi du 17 mai 182G se confond pour nous
avec l’art. 8 g Sd u code civil,et que la décision pour la difficulté qui
nous occupe doit rester la même sous l’empire de deux législations
émanant des mêmes principes.
Nous allons donc examiner d’abord la question avec les termes
du Code civil, et par rapport aux articles
1048
et 1049 de ce Code.
Une’ premicre observation se présente à cet é g a r d , c’est qu’il ne peut
être dans ce cas nullement question de l’abrogation do l’art. 89G
comme dans le cas où il s’agit de la loi du 1 7 mai 1S26. Ces dispo
sitions du Code civil appartiennent au même titre, elles ont été
publiées en même temps . et pourraient tout au plus présenter
entre elles quelque opposition ou quelque antinomie. Il sera fa
cile de démontrer plus tard comment elles s’accordent et peuvent
trouver une exécution facile et simultanée; il convient d’examiner
avant tout le système qui nous est opposé.
Nos adversaires invoquent la maxime utile p er inutile non
vitiutur; mais il faudrait préalablement prouver que la substitution
faite au-delà du premier degré n’est qu’ une clause inutile, à laquelle
5
�¡¿tlai*loi n'attache aucun caractère réprouvé
34 par elle ; c’est là précisément
en quoi consiste la question , et l’invocation de la maxime rappelée
plus haut n’est qu’une véritable pétition de principes.
E lle ne peut donc dispenser nos adversaires d’examiner avec
nous les motifs de l’exception en vertu de laquelle une substitution,
que la loi déclare nulle au-delà du degré fixé par elle, ne devait
pas entraîner la nullité de la disposition principale dont elle fait
partie. L e C o d e , disent-ils, n’a point, en ce c a s , prononcé la
nullité de toute la disposition. C ’est encore là décider la question par
la question. Si l’on s’arrête aux termes isolés des art. 1048 et
io /j Q,
nos adversaires pourraient donner peut-être une apparence spé
cieuse à leur aflirmalion sur ce point; mais est-ce ainsi qu’il faut
procéder?
Une erreur de fait en quelque sorte sert de base à leur raisonne
ment. Ils semblent croire que la nullité de la substitution faite audelà du premier degré est prononcée par les articles que nous
examinons; il n’en est point ainsi. Que l’on pèse les termes dans
lesquels ces articles sont conçus, et il sera facile de se convaincre
qu’ils ne prononcent directement aucune nullité ; ils valident dans
les cas pour lesquels ils interviennent les donations par actes entre
vifs 011 testamentaires faites avec la charge de rendre aux
enfants du donataire , cm prem ier degré seulement ; ces dernières
expressions supposent une nullité préexistante en ce qui touche les
degrés inférieurs, niais elles ne la prononcent pas. Où donc est
écrite cette prohibition? Dans l’art. 8 9 6 , qui relié ainsi étroitement
aux art. 1048 et 1049 , proclame le principe, tandis que ces derniers
articles introduisent l’exception.
E n cilet, rappelons-nous les circonstances dans lesquelles sont
intervenues les dispositions qu'il s’agit d’ interpréter. Tout ce qui
avait trait aux substitutions avait été effacé de nos codes sous le ni
veau de l’égalité révolutionnaire ; la loi du
octobre 1 7 9 2 s’était
contentée de déclarer toutes substitutions abolies, sans autre com
mentaire que celui des événements au milieu desquels cette abolition
était prononcée.
�— 35 —
C ’est en l’an 1 1 qu’eut lieu la révision de cclte matière au sein
du conseil d’état ,
destiné à être
bientôt une des principales
institutions de l’empire qui se préparait. A cette époque transitoire,
il y a , sur cette matière, plus que sur toute autre transaction entre
les idées qui dominaient encore et celles dont on voulait assurer le
triomphe prochain. Cette double tendance, on pourrait dire cette
double nécessité, sc retrouve évidente dans l’ensemble des discus
sions remarquables qui ont eu lieu sur cclte grave question. C ’est
ainsi que les dispositions prohibitives de la loi de 17 9 2 ont été
proclamées de nouveau comme principe général, en tète de l’art.
8 9 6 , tandis que les dispositions contraires doivent être considérées
comme purement exceptionnelles et restreintes rigoureusement aux
cas qu’ elles ont prévus. Tout ce qui est en dehors tombe nécessai
rement sous l’empire de la règle commune. Tel est le sens du mot
seulement, employé par les art. io/{8 et 1049. Ils ne prononcent
eux-mêmes aucune nullité pour les autres cas de transmission avec
la charge de rendre, parce que le législateur savait très bien que
cette nullité avait été prononcée par lui de la manière la plus abso
lue dans l’art. 896.
Cette vérité ressort toute puissante du rapprochement des textes;
elle devient irrésistible par l’examen des discussions où se sont éla
borés les principes admis dans notre code civil. L à une discussion
unique a eu lieu , et elle a porté en même temps sur l'article 896 et
les art. 1048 et suivants. Ils forment la mémo pensée législative
chargée de donner satisfaction à tous les besoins du moment sur la
matière; c’est un tout indivisible qui n’a pas élé divise dans la dis
cussion prépatoire par le législateur cl ne peut être divisé dans scs
résultats par le pouvoir chargé de faire l’application d e là loi.
L ’art. 89G n’admet aucune exception, pas plus dans la disposi
tion principale ainsi conçue, les substitutions sont prohibées , que
dans sa disposition secondaire , ayant pour but d’annuler, à l’égard
de toutes les parties, toute disposition faite à la charge de conserver
et de rendre à un tiers. Si cet article était resté la règle unique de
la matière, aucunes dillicüllés ne pourraient évidemment s’élever
�Is 6
_
3« -
dans son application; non seulement les substitutions du second et
du troisième degrc seraient nulles, mais elles devraient aussi entraî
ner la nullité d elà disposition toute entière. Quel changement peut
donc résultera cetég crd d es termes des art. 1048 et >049? un seul :
celui qui consiste à excepter de la prohibition générale les dona
tions faites à la charge de rendre aux enfants du donataire, au
premier degré seulem ent ; mais cette exception doit cire restreinte
aux cas qu’elle spécifie, c’est ce qu’ indique l’expression seulement ,
employée dans l’article. C ’est, au reste, ce qui résullc de la na
ture des dispositions elles-mêmes et des principes qui règlent le
domaine du droit général cl celui du droit exceptionnel.'
Quelles sont les autorités citées à l’appui de l’opinion con
traire? Elles sont fort peu nombreuses; identiques dans leurs
moyens elles doivent également tomber devant la même réfutation.
M . Toullier a écrit sur la question une opinion qui paraît ne pas
avoir clé de sa part l’objet des méditations approfondies que le sujet
comporte. 11 l’exprime en quelques mots, comme en passant, et
l’appuie seulement sur les deux motiis que nous avons déjà réfutés;
le i ' r consistant à dire que le code n’a point prononcé la nullité de
toute la disposition lorsqu’il s’agit d’ une substitution fidcï-commissaire prolongée au-delà du degré légal; le deuxième tiré de la
maxime utile par inutile itou vitiatur. INous croyons avoir
démontré sufiisamment ce que de semblables arguments présentent
de futile et d’irréfléchi ; nous n’y reviendrons pas. Q u’il nous soit
seulement permis d’opposer à l’opinion de M. Toullier sur les art.
1048 et 1049 l’opinion de M. Toullier lui-même sur l’art. i o 5o du
même code.
On sait que ce dernier article avait pour but d’empêcher que la
charge de rendre put avoir lieu au profit d’un seul des enfants du
grevé ; il déclare donc que les dispositions permises p a r le s deux
articles précédents, ne seront valables qu’autant que la charge de
restitution sera au profit de tous les enfants nés ou à Huître. M.
Toullier pense qu’ une disposition faite à 1111 seul des enfants serait
nulle en totalité , c'est- à-dire que la charge de rendre 1i un ou
�1
^7
plusieurs enfants ne serait pas seulement invalide , mais encore
la donation directe fa ite au donataire ou au légataire grevé
( Toullier t. 5 , n° 7 2 8 ).
Après avoir professé de tels principes , c’est cependant dans 1«
il" qui suit immédiatement que M. Toullier change de langage et
de décision lorsqu’ il s’agit d’apprécier les résultats de la nullité qui
aurait pour cause l’obligation de conserver et de rendre au-delà
du premier degré.
Pourquoi cette distinction? Les articles io/J8, 1049 et i o 5o ne
sont-ils pas dans le même chapitre? Ne font-ils pas les uns et les
autres partie d’ un ensemble de dispositions intervenues sur la môme
matière, et soumises aux mêmes règles. Si les premiers échappent à
l’application de l’art. 89G, il doit en être de môme pour le dernier.
Nous irons même plus loin à cet égard et nous dirons q u e, si c e 1
argument de l’auteur, consistant à dire que le code ne prononce
point dans ce cas la nullité de toute la disposition , pouvait avoir ja
mais quelque chose de spécieux, ce serait dans l’cspcce de l’article
i o 5o ; car cet article prononce lui-mème la nullité à apprécier , et
il 11c s’explique point sur les conséquences qui peuvent atteindre la
disposition faite en faveur du donataire ; tandis q u e la nullité qui
frappe les substitutions du second degré et des degrés subséquents
a son origine ailleurs, dans les prohibitions générales de l’art. 89G
lui-même , et qu’ elle doit participer nécessairement à toutes les ri
gueurs qui lui servent de sanction.
Il est vrai que RI. Toullier donne un autre motif à la sévérité
qu’il déploie en ce qui touche la nullité prononcée par l’art. i o 5 o ,
dans le cas où la substitution ne serait pas recueillie par tous les en
fants du g re v é ; une pareille distinction , dit-il, ne pourrait être
fa ite que dans d is vues d'orgueil que la loi réprouve. Est-ce qu’il
Ii’y a pas un orgueil aussi grand à vouloir perpétuer une fortune
immobilière dans sa famille , de génération en génération? Est-ce
tpie l’on ne retrouve pas dans ce mode de substitution, et au plus
haut c h e f, toutes les raisons d’ordre public qui doivent la faire
prohiber comme la plus désastreuse de toutes? L ’aflinnative ne
�¡¿b*
-
38
-
pcul être douteuse. Cette contradiction d'avis prouve évidemmeni
que l’auteur s'est laissé entraîner à exprimer sur la question dont il
s’agit une opinion superficielle, cl la manière dont il a décidé celle
dont il s’est occupé en premier lieu, doit faire penser qu’un examen
plus approfondi l’ eùl ramené sur toutes les questions de même na
ture aux véritables principes de la matière.
L a cour connaît du reste les motifs qui ont fait introduire dans le
cod e, à la diflerence de ce qui existait dans les lois anciennes, une
prohibition qui frappe de nullité la disposition entière à raison de la
nullité dont se trouve frappée dans certains cas la clause de substi
tution. L e législateur s’est proposé un double but; il a voulu don
ner une sanction pénale à des défenses toujours éludées jusqu’à lui;
il a pensé que la donation faite sous la charge de rendre formait un
tout indivisible, en-dehors duquel on courrait le danger de ne plus
retrouver la volonté du donateur ou du testateur, et qu’il était im
possible de maintenir un acte semblable dans cet état d’altération
présumée. (M erlin, dict. de jurisprudence verb. substitution,
t. j*r, v. 1 4 . — pages 52 et 522 .) Ces deux motifs de la loi s'appli
quent aux substitutions du second et du troisième de g ré, avec plus
d’évidence et de justice qu’à toute autre disposition iïdci-commissaire.
Que la Cour veuille bien faire elle-même l’expérience de cette
application, cl elle restera convaincue qu’il n’existe pas sur ce point
de la cause une seule considération de nature à justifier un système
qui aurait pour résultat de soustraire à la sanelion pénale de l’art.
896 les substitutions les mieux caractérisées et les plus dangereuses,
celles en un mot que la loi a voulu atteindre par-dessus toutes.
Les mêmes raisons de décider peuvent-elles s’appliquer à la loi
du 17 mai 1826? Sans nul doute en ce qui concerne le plus grand
nombre d’entre elles , et pour arriver sous ce rapport a une dé
monstration complète , nous n’avons qu'une chose a faire , c’est
d'établir que la loi de 182G, fondée sur le même principe que les
art. 1 0 .'|8 cl 1049 i>’a fait autre chose qu’en étendre les dispositions
à un plus grand nombre de cas sans en changer le caractère.
�^9
Pour accepter celte v é rité , il suffit de lire attentivement les dispo
sitions de nos deux lois. L ’ intention du législateur est évidente, il
n’a entendu que modifier les articles du Code sur certains points ,
en les maintenant sur d’autres, et en laissant les dispositions nouvelles
comme les anciennes sous l’empire du droit commun de la matière.
L e projet de la loi du 17 mai 1826 renfermait, outre la disposition
relative aux substitutions, une disposition trcs-gravc qui fut rejetée
par les chambres, et qui tendait à créer un prcciput légal et obliga
toire en faveur de l’aîné miile de chaque famille placée dans de
certaines conditions de fortune. L ’ esprit qui avait inspiré celte
double mesure législative ne peut être douteux ; elle avait pour
but de reconstituer et de conserver en France des fortunes territo
riales propres à constituer une aristocratie nouvelle. Ce fut un des
actes les plus expressifs de la pensée qui dominait le gouvernement
, à cette époque , et l’on peut se rappeler encore combien furent
v ives les oppositions soulevées contre cette tentative. L e g ou ver
nement fut donc obligé d’agir comme celui de l’an II , et par des
motifs tout-à-fait analogues, il fit des concessions pour en obtenir.
L ’article relatif au droit d’aînesse disparut de la l o i , et l’on prit tous
les moyens d’amoindrir autant que possible fes autres modifications
introduites dans la partie si importante de notre Code civil sur les
substitutions.
C ’est ce qu’explique ires-bien le premier exposé des motifs de la
loi présentée d ’abord à la chambre des pairs, et qui est conçue en
ces termes :
« Ainsi, Messieurs, modifier les art. 10 4 8 , 1 0 4 9 0 1 i o 5o du
» Code c i v i l , et quant aux personnes seulement, étendre, mais
» seulement d’un degré, l’exercice de la faculté qu’ils accordent;
» permettre l’excrcice de cette faculté à toute personne ayant la
* capacité légale de disposer de ses biens; permettre aussi.qu’on
* en fasse usage au profit d’un ou de plusieurs enfants du donataire,
» au lieu d’exiger que la donation comprenne tous ces enfants ;
» mais en même temps ne rien changer à ce qui est déjà fixé pour
�» les biens; maintenir les bornes données à la quotité disponible, et
» renfermer dans ces bornes la liberté accordée aux donateurs et
» aux testateurs : lel est évidemment l’un des moyens les plus efTi» caces de favoriser la conservation des biens , sans choquer les
». mœurs et sans changer les bases de notre législation. »
T el est aussi le sens de cet antre passage pris dans l’exposé des
îuotils présenté à la chambre des députés :
« C ’est encore pour cela qu’on a jugé qu’il su disait de modifier,
» en mi petit nombre de points, les articles 1048 et «049 du Code
» civil, et qu’on devait se borner, i ° à rendre la faculté de substi* tu e r , à toutes les personnes qui ont la capacité légale de disposer
» de leurs biens ; 2# à ajouter un second degré au premier déjà
» établi p a r l e C o d e ; enfin à permettre d'appeler indifféremment
» un ou plusieurs enfants du g r e v é , selon la volonté de l’auteur de
> l’institution.
k T e l est, en effet, le projet de loi que nous soumettons à votre
» examen; telles sont les modifications qu’il a paru nécessaire de
» faire subir à cette partie du Code civil. *
L ’identité apparente de ces diverses dispositions législatives avait
semblé telle à tous les esprits, qu’ un magistrat qui faisait partie de la
chambre des députés , crut devoir proposer l’abrogation des art.
io/jS cl io.jg du C o d e , pour y substituer la loi nouvelle, et que M.
le garde-des-sceaux vint réclamer le maintien simultané des deux
lois, parce qu’elles n’étaient ni complètement différentes, ni com
plètement identiques entre elles. On lit dans sa réponse cette
phrase remarquable oii se trouve résumée en peu de mots toute la
vérité sur la question spéciale qui nous occupe : C elte disposition
est si loin d ’abroger les d eu x articles, qu’elle s ’appuie sur eu x ,
qu ’elle part de cette base pour s ’étendre plus loin qu'ils ne le
Jnnt eux-mernes.
La première conséquence à tirer de tout ce qui précède, cYst
que la loi du 17 mai 182G a été ramenée aux principes du Code
i
�—
4I
—
-Á ty
civil, qu’elle n’a entendu faire autre chose qu’étendre les disposilions
exceptionnelles que le premier législateur y avail déjà déposées et
que j devenue ainsi en quelque sorte partie intégrante du Code luim e m e , clic doil être soumise aux règles générales qui dominent
scs disposilions. O r n o u s savons déjà, qu’en matière de substitu
tions , le principe adopté csl celui qui est écrit dans l’art. 896, au
quel on doit conserver louic sa force.
L a seconde conséquence c’est que la loi de 18 2 6 n’a prononcé
contre cet article ni abrogation expresse ni abrogation tacite. E lle
soustrait à son empire les exceptions qu’ elle crée dans le sens et
l’esprit des art. 10 48 et 1049, mais tout ce qui csl en dehors de ces
exceptions nouvelles tombe sous le coup de la prohibition de l’art.
896 du code c i v i l , comme y tombaient, avant les modifications
qu’il a reçues en cette partie , tous les cas qui n’étaient pas compris
an nombre de ceux plus restreints formant les exceptions du code.
L e rnémoir.e publié dans l’intérêt du sieur Rouchy nous semble
contenir des raisons bien faibles en opposition de celles qui viennent
d’être développées. 11 donne pour tout motif à l’art. 89G , sur le
quel s’ est livrée une lutte si grave entre des régimes que les é v é
nements mettaient de nouveau en présence , Vintérêt des 'transac
tions commerciales et la plus grande fa cilité des 'ventes. Soit T
nous voulons bien raisonner dans cette hypothèse; mais que con
clure de ce fuit? L es législateurs de 18 2 6 avaient apprécié au
trement les intérêts de ces transactions ; ils ont aboli l’art. 8f)G
et la prohibition qu’il prononçait; la clause pénale de cet article
a dû disparaître avec la prohibition qui en était la cause. C es
sante causa, cessât ejjectus.
11 est superflu de signaler à Fatteiuion de la cour la forme de cc
raisonnement, réprouvée par l’école elle-même. 11 repose tout en
tier sur des inductions tirées d’une des propositions qui le consti
tuent à celle qui suit cl qui sont toutes contestables. Ainsi, il n’est
pas exact de dire dans le sens absolu du mémoire que les d eu x
législateurs ont apprécié différemment les intérêts des üansac0
�- ^ “
lions ; cela est vrai en cc qui touche le deuxième degré défendit
¿»y*
par le prem ier, autorisé par le second. Tous les deux retombent
d’accord sur le troisième degré, et comme la prohibition commence
à cc point pour l’un et l’autre , elle doit entraîner également sous
l’empire des deux lois toutes les conséquences pénales qui lui ser
vent de sanction. On pourrait prendre ainsi chacune des supposi
tions que nous venons de rappeler, et constater successivement la
fausseté de chacune d’elles et le défaut de rapports qui vicie leur
ensemble; mais il suflit d’avoir fait l’épreuve sur une seule pour les
avoir infirmées toutes.
Il
reste encore un argument contre lequel nous avons réservé
nos derniers efforts parccqu’il présente une apparence plus spécieuse
que les autres. L a loi du 27 mai 1 8 2 6 , disent nos adversaires ,
nous a ramenés complètement aux dispositions des ordonnances de
1 56 o et de 1 747 * Or, le plus savant commentateur de celte dernière
l o i , Thévenot Dessaules nous apprend que la nullité d’une'substi
tution au 5 e degré n'avait d’autre effet que de laisser les biens
substitués libres dans les mains de celui qui avait été appelé au
second degré. Pourquoi en serait-il autrement aujourd’hui sous une
législation analogue
D ?
Deux réponses sc présentent et qui sont toutes deux également
décisives : la première c’est qu’aucune des lois antérieures n'avait
attaché la nullité de toute la disposition à celle de la clause fidéïcommissaire, et que cette différence capitale entre les deux légis
lations explique les motifs qui devaient faire valider cette disposition
dans le premier cas, tandis qu’elle doit être annulée dans le dernier.
Nous répondrons en second lieu que les termes des deux légis
lations peuvent bien être les mêmes en cc qui touche les résultats ,
mais qu'elles ont l’une et l’autre un point de départ bien opposé et
procèdent de principes tout différents.
Quel était en effet le droit commun en cette matière sous l’empire
de l'ancienne législation ? C’était celui de la liberté la plus complète
en fait de substitutions. Les ordonnances de i 56’o et 1 «7.-f7 avait eu
�-
43 -
Â
pour but de les restreindre, comme il est facile de s’en convaincre
en lisant leur préambule; l’exception à cette époque consistait dan»
la prohibition, et Thévenot Dessaules, s'expliquant à cet égard
dans l’ouvrage invoqué contre nous , dit en termes formels , chnp.
4 , p. i r" , que les jidùï-commis sont optirni ju iis , en sot ie que
tout s ’y interprète et tout s’y juge de la manière la plus fa v o
rable.
Nous avons déjà établi que, depuis 1792 , c’est le principe con
traire qui a prévalu. 11 est écrit comme règle absolue et générale
au titre de l’art. 89G du code civil. La faculté de substituer forme
l’exception ; elle est stricti juris et doit être renfermée dans ses
termes les plus rigoureux.
L a conclusion de ces prémisses se déduit d’ elle-mème ; tout ce
qui était douteux ou obscur sur l’ancienne législation devait s’ inter
préter suivant l’esprit des ordonnances dans le sens favorable au
maintien de la substitution , tandis que sous l’empire de la loi nou
v elle, il faut interpréter contre elle tout ce qui peut donner lieu à
interprétation.
L a loi ne s’explique-t-elle pas d ’une manière formelle sur le
sort d’une substitution permise qui se trouve mêlée à une substi
tution faite pour un degré défendu ! C ’est le droit commun de la
matière qui doit être appliqué à défaut d’une disposition spéciale,
et nous savons que le droit commun des deux époques nous conduit
à des résultats tout à fait contraires : le maintien de la substitution
pour la première et sa nullité pour la seconde.
T els sont précisément les termes de l’cspccc créée par le testa
ment soumis à l'appréciation de la Cour. L ’abbé Lavergne pouvait
donner à son neveu en lui imposant la charge de rendre à scs enfants
jusqu’au second degré ; enfermée dans ces limites, l’institution eût
été valable , puisqu’elle se fût trouvée conforme aux dispositions
exceptionnelles de la loi du 17 mai 1 8 2 6 ; mais le testateur a tait
p lu s, il u imposé à tous ses successeurs de génération en génération
�•
~ 44 —
l'obligation de conserver et de rendre l'immeuble qui 11e devait
jamais sortir de la famille; c’est là une disposition inadmissible, une
clause que toutes les parties s’accordent à considérer comme nulle.
L a seule difficulté est d’apprécier la conséquence juridique de cette
nullité.
Sous l’empire des ordonnances de 15 7 0 et 17 4 7 la disposition
principale eût été valable , la substitution eût également produit scs
effets jusqu’au second degré inclusivement. Nul doute à cet égard ;
nous en avons dit les motifs. D ’une part ces ordonnances ne p ro
nonçaient en aucun cas la nullité de la disposition entière; d’autre
part elles avaient admis pour droit commun de la matière la validité
des substitutions. O r , les deux principes contraires sont écrits dans
la loi nouvelle, et un raisonnement analogue doit nous conduire à
une décision complètement opposée, la nullité de la disposition
principale elle-m êm e. Loin d’èlre défavorable à notre cau se,
l’exemple tiré de la législation ancienne vient donc lui prêter un
appui nouveau et inattendu.
INous ne connaissons aucun arrêt qui ail décidé formellement la
question soulevée; mais un grand nombre sonl intervenus depuis la
loi de 1 8 2 6 , étions ont appliqué l’article 89G du Code civil sans
exprimer un seul doute sur le maintien de ses dispositions. On petit
consulter le plus récent rendu par la Cour d’appel de Pau , le 2
septembre 1 8 4 7 , et qui est rapporté dans le recueil de Syeis, tome
4 9 , page i q 3 ; 011 y verra que la Cour y vise plusieurs fois la loi
de 182G , qu’elle puise dans les motifs de celle loi un moyen de
nullité pour le cas dont elle s’occupe , et que cependant elle n’hésite
pas à prononcer en même temps la nullité de la clause de substitu
tion et celle de la disposition principale.
Parmi les auteurs qui se sont occupés de la question, M. Tonllier
seul a exprimé une opinion-contraire et que nous avons déjà réfutée.
Une noie qui se trouve au 5e volume de la dernière édition du
Traité des Donations, de M. G re n ier, rappelle cette opinion et s’y
range; mais elle est évidemment écrilc sous l'influence exercée par
le nom du premier jurisconsulte sur l'esprit de l’auteur, M. Ancdot,
�— 45 —
tyf
jeune magistral de grande espérance , que les événements politiques
om rendu au barreau.
Les autres auteurs sont unanimes dans le sens de l’opinion déve- '
loppée par nous. On peut consulter avec utilité Rolland de Villargues, Vazeille, Dalloz, Coin de l’Isle et surtout Duranton, tom. 8,
n° 5 i. L ’espril et le texte de la nouvelle législation , la doctrine et
la jurisprudence, tout s’élève donc contre l’étrange prétention de
nos adversaires. La loi du 17 mai 1826 était en opposition avec les
mœurs de notre époque et de notre pays ; il n’a été fait aucun usage
de la faculié nouvelle qu’elle avait introduite; elle était en quelque
sorte frappée de désuétude, lorsqu’ une mesure récente est venue
prononcer contre elle une abrogation formelle ; comment pourraiton reconnaître à une loi aussi éphémèrp la puissance d'avoir effacé
de nos codes le principe en vertu duquel les substitutions avaient
été abolies? La cour 11e saurait accorder la sanction de scs arrêts à
une semblable doctrine.
Nous venons de parcourir dans. toute son étendue le 'ce rc le où
110s contradicteurs avaient eux-mêmes renfermé la discussion , et
nous pensons n’avoir laissé sans réponse aucune des objections sé
rieuses élevées contre le système adopte par les premiers juge.«.
Dans une cause de cette nature, les principes ont une importance
telle qu’on hésite à placer à côté du grand intérêt public de leur
conservation des motifs puisés dans des considérations d ’intérêt
personnel et de justice privée.
Mais s’il est des cas où l’on puisse se montrer moins scrupuleux
à cet égard , c’est surtout à propos des affaires où , comme dans
celle-ci , l’intérêt de la famille vient se confondre avec celui de la
société. Nous avons démontré en fait que l’abbé Lavergnc n’avait
été déterminé dans son choix pour Rouchy , qu’à raison des motifs
que la nullité des clauses de substitution doit anéantir. Ses affections
l’eussent dirigé d’un autre côté , et l’exécution de son t e s t a m e n t ,
réduite à la disposition principale, n’est plus conforme à sa volonté
réelle, on pourrait même dire à sa volonté exprimée. Celle exécu
tion serait-elle au moins plus conforme aux principes d ’un régie-
�.
m ent sage et équitable pour la distribution de la fortune de l’abbé
L a v ergne entre tous ceux que la loi et la nature appelaient à la
recueillir? On doit avouer que non ; si le testament s’exécute, quel
spectacle va nous offrir la famille de l’abbé L avergne? Un de ses
membres, appelé subitement d’une humble position à une grande ri
chesse, deviendra seul opulent au milieu de ses parents les plus
proches, réduits à l’état de besoin et de domesticité que de mauvais
sentiments une position semblable peut faire naître dans le cœur de
tous! Si au contraire une répartition plus égale pouvait faire parvenir
à chacun d’eux une partie de ce patrimoine trop riche pour un s e u l,
de meilleures dispositions pénétreraient dans chaque famille avec une
aisance plus grande. L e sieur Rouchy serait encore un des mieux
traités dans le p artag e, et son retour aux habitudes de sa vie toute
entière avec des conditions de fortune meilleures , pourrait lui pré
senter plus d'une compensation à un r ève non réalisé d’une richesse
qui ne fait pas toujours le bonheur.
Cette affaire peut du reste se résumer en peu de mots : Le testa
ment de M. l’abbé L a v ergne présente deux parties bien distinctes ;
l’une sacrée et pieu se, elle sera exécutée par les héritiers naturels
avec tous les scrupules de la piété qui l’inspira; l’autre en opposi
tion flagrante avec les mœurs et les lois de notre p ays, nous ne
l’aurons pas en vain dénoncée à la justice de la cour : nous sommes
surs de rencontrer en elle la fermeté de principes contre laquelle
une disposition semblable doit venir se briser.
DUCLOZEL,
SALVETO N,
T A ILH A N D ,
M IR A ND E ,
]
l Avocats.
J
ï
i A vouès-Licenciés
I
R I OM. — A. J O U V E T , I m p r i m e u r - L i b r a i r e , près le Palais.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Diernat, Michel. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duclozel
Salveton
Tailhand
Mirande
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Michel Diernat, Arnal et autres intimés, contre Jean Rouchy, appelant. Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3018
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3017
BCU_Factums_G3019
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53635/BCU_Factums_G3018.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
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c3836967b3b262ae0490d998b082550f
PDF Text
Text
POUR
J E A N
R O U C H I ,
Appelant,
CONTRE
MICHEL DIERNAT,
Et autres Intimés.
Un prêtre français , q u i , en 1 7 9 3 , s’était réfugié en Angleterre,
pour éviter les poursuites auxquelles l'exposaient sa qualité et son
refus de prêter serment à lu Constitution civile du clergé, a acquis,
loin de son pays , par ses travaux et par son industrie, une fortune
assez considérable.
Rentré en F ran ce, il s’est livré long-temps aux pieuses fonctions de
son ministère s a c r é , et lorsque l’âge et les infirmités lui ont com
mandé le repos, il s’est retiré dans le lieu qui l’avait vu naître , et à
destiné sa fortune entière, moins quelques legs particuliers, au
descendant de l’une de ses sœurs, à Jean R o u c h i, son neveu. Il
�l’a , en conséquence, déclaré son h é ritie r , dans plusieurs parlies
de son acte de dernière volonté.
Mais ce titre d'héritier ou de légataire universel lui a été con
testé par des parents collatéraux, et quoiqu’il eut été reconnu, par
le Président du tribunal, qui l’avait en voyé, à ce titre, en posses
sion de tous les biens de son bienfaiteur, il lui a été contesté devant
le tribunal entier, afin de parvenir à la nullité d’une des disposi
tions principales du testament, que l’on a supposée contenir une
substitution prohibée par la loi.
L e tribunal de première instance de Mauriac a admis ces préten
tions. li a refusé à Jean Rouchi le titre d’héritier de son grand-oncle;
il a considéré et annulé comme viciée de substitution, la disposition
principale faite en faveur de Jean R ou chi, et il en a attribué tous
les avantages
aux nombreux héritiers collatéraux du testateur.
u
Ce jugement blessait trop ouvertement les intentions que le testa
teur avait manifestées dans plusieurs testaments; il interprétait aussi
les lois sur les substitutions d’une manière trop rigoureuse, pour
pouvoir être respecté.
Jean Rouchi en a déféré l’examen aux hautes lumières de la
Cour de R io m ; il espère, il doit espérer une décision plus fa v o
rable, plus conforme à la l o i , plus en harmonie avec la volonté
évidente du testateur.
FAITS.
L e sieur Antoine Lavergne , ancien curé de ¡Mainteiion , dépar
tement d’Eu r-el-Lo ire , était né dans l'arrondissement de Mauriac,
département du Cantal.
Prêtre en 1 7 9 5 , persécuté pour ses opinions religieuses, il (ut
obligé de fuir et de se réfugier en Angleterre. L à , pendant un long
séjour, il acquit, parses soins, par scs travaux , parses économies,
une fortune assez importante.
Rentré en France dans 1111 temps plus prospère, il acquit des pro-
�priétés foncières dans l’arrondissement de ¡Mauriac, et notamment
le domaine de L o n D
" c - V e r"On c et divers autres immeubles.
Averti par son grand â g e , il voulut disposer de sa fortune ; il avait
deux sœurs seulement, ou leurs descendants. 11 fit choix , pour son
h é ritie r, de Jean Rouchi , qui était son petit n e v e u , et que
ce dernier titre recommandait plus particulièrement à sa bien
faisance.
Jean Rouchi n’élail pas marié et ne l’a jamais été :
il exerçait la profession de marchand bottier, en ¡Normandie, où il
avait un établissement, que les bienfaits de son oncle lui ont fait
perdre; en sorte que ces bienfaits, loin de lui être utiles, lui se
raient devenus désastreux, s’il en était privé aujourd’hui.
»
Quatre testaments successifs furent faits, dans la forme olographe,
par le sieur Lavergne ; le prem ier, le 12 octobre 18 5 7 ; le second,
le 20 septembre 18 5 9 ; le troisième, le 9 octobre 1 8 4 2 ; le qua
trième, le 10 août i 8 4 5 ; et dans toutes ses dispositions testa
mentaires, persistant dans ses intentions en faveur de son neveu ,
Jean Piouchi, il le nomme son donataire et son h éritier ,
L e dernier testament doit seul nous occuper.
P ar ce testament , le sieur Lavergne s’exprime ainsi :
« i° J e donne et laisse après ma mort à Jean R ou chi, cor» donnier-bottier à R o u e n , en Normandie , fils d’Antoine R o u c h i,
»
»
»
»
»
»
»
»
mon neveu et filleul, par ma sœur aînée , Jeanne Lavergne, propriétaire à Labastide, commune d’Anglards , le domaine de.
L o n g c - V c ïg n e , la montagne de V c r r ie r r c , et tout le bien que
j’ai acheté de la veuve Brcsson , ma voisine , ainsi que le moulin
avec toutes scs dépendances, maison, prés, terres cl jardin, le tout
situé à Lo n ge -V e rgu e , communes d’Anglards cl de Sl-Vincent,
tel que je l’ai acheté de M. J u g e , Chevalier de la Légiond’IIonncur, avec les fonds que j’ai gagnés si honorablement en
» Angleterre , par mon travail et mes faibles talents , pendant
>> vingt-huit ans d’émigration el de séjour que j’ai fait dans ce ro-
» yamne , pour me soustraire à la hache révolutionnaire qui inon• dait de sang tout Paris et les environs, à la fin de l’année mil sept
» cent quatre-vingt-onze; je lui en fais don pour être entièrement
�A **
-
4 -
» à lui, pour en jouir lui et ses descendants après ma mort, à l’e x -
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
a
»
»
»
»
»
■»
»
clusion de mes autres parents et héritiers. Car telle est ma v o lonlé qu’il en soit le seul et unique héritier, lui , et ses enfants
après lu i , de génération en génération, sous la condition et
l’obligation néanmoins la plus étroite, que tout héritier , possesseur et propriétaire de ce bien , de ce domaine, présent et à
venir, quel qu’ il soit, renoncera à son nom de famille, qu’il
portait auparavant, pour prendre et porter celui de Lavergnc. Il
en fera usage dans tous les actes et les écrits qu’ il passera et
signera pendant sa vie , et le transmettra à sa postérité , a scs
descendants, garçons et filles, qui renonceront au nom de
Ilouchi pour prendre et signer L a v e rg u e j
» a» L e domaine de Lo n ge -V e rgn c ue sera jamais vendu,
échangé, ni morcelé ni grevé de dettes sous quelque prétexte
que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque famille,
lel que je l’ai laissé à ma mort; les propriétaires, les possesseurs
de ce domaine seront obligés, à leur m o r t , de répondre des réparafions qu’il y aura à y faire, en le laissant. Chaque successeur
po u rra, en entrant en possession du domaine, demander, par
une visite d’e x p e rls , un dédommagement pour les réparations
» qu’il y aura à faire, pour l'entretenir, et le cultiver et l’exploiter.
Telle est la disposition principale de ce testament.
L e testament contient aussi diverses autres dispositions secon
daires.
I’ ar l’article 5 , le testateur donne aux D iernat, scs neveux par
sa sœur cadette, Françoise L a v e rg n c , la somme de huit mille
francs à prendre sur le revenu du domaine de L o n g e -V e rg u e , et
payable, dit-il, par Jean Rouclii, mon h é r itie r , en plusieurs
termes, à ceux des enfants Diernat qu’il désigne par leurs noms.
Par l’article 4 , il donne son bien paternel et maternel aux enfants
de Marie Alsac, femme Julliard , à la charge par eux de faire faire
tous les ans un service pour le repos des Aines île scs père et mère.
Par l’article 5 , il donne à Antoine Uouchi, son neveu, la p or
tion des biens paternels du testateur que cet Antoine Rouchi a prise
�.
5
.
.
dans le partage que celui-ci avait fait avec sa sœur aînée.
Par l’article 6 , il dispose de son bien dejLabastidc en faveur de
Virginie Valm ier, femme J u l lia r d , pour elle et ses enfants; et si
elle mourait sans enfants, il le donne, après la mort de celle-ci, à la
fille aînée de Jean llouchi, son neveu. Cette disposition renfermerait
peut être une substitution.
Par l’article 7 , il charge Je u n R o u ch i, son héritier j, est-il
d it, de payer en six ans, 6,000 francs aux enfants de Françoise
lunichy , veuve Arnal.
Par l’article 8, il veut qu c-Jeati R o u c h i , son donataire, renonce
en faveur de sa sœur aînée à son bien paternel et maternel.
Par l’article 9 , il veut que Jean llou elii, en entrant en jouissance
du domaine de L o n g e -V e rg n e , relire auprès de lui , loge et nour
risse son père et scs deux sœurs.
mi,
:
Par l’article 10 , il ordonne que le propriétaire de Longe-Vergne
fasse faire tous les ans, pour le repos-de son àme, 1111 service com
posé d’une grand’messe et de deux messes basses.
Par l’article 1 1 , il lègue à sa domestique une renie viagère de
six cents francs , à prendre sur le domaine de Lon ge-V ergne.
P ar les articles 1 2 et i 3 , il donne aussi à cctie domestique quel
ques objets mobiliers , en chargeant Jean Rouchi de lui payer les
six cents francs, et de lui rendre service tant qu’elle vivra.
Par l’article ¡ 4 , il lègue à l’église d’ Anglards, une somme de huit
cents francs qu’il laissera , dit-il, dans nue. malle qui ne sera ou
verte que par sa domestique, son h éritier, son exécuteur testa
mentaire et deux témoins.
Par l’article i 5 il destine, sur les fonds qu’il a à Paris , (‘>,000 (r.
pour fonder une école de garçons dans la paroisse d’ Anglard.
Par l’article if), il donne à la même paroisse 5 ,000 francs pour
fonder une école de jeunes (¡lies.
Par l’article 1 7 , il donne à la môme paroisse, i , 5oo francs pour
acheter un cimetière, en chargeant Jean R ou chi, son héritier,
d it - il, de payer cette somme à la paroisse dès qu’elle l’exigera.
�jx<)J*
— G —
Par l'article 18 , il s’occupe de ses luncraillcs.
P a r l'article 19 il déclare que le propriétaire de L o n g e - V e r g n e ,
Je a n R ouchi est particulièrem ent chargé et obligé de payer
toutes les dépenses de l’enterrement cl les honoraires des ecclésias
tiques, et de les remercier et de leur payer les dépenses qu’il feront
pour le dîner.
Par l’article 20 il laisse cent écus pour distribuer aux pauvres
qui se présenteront à son enterrement.
Par l’article 21 il fonde, dans l’église d’Anglard , un annuel de
quarante messes pour le repos de son âme.
Par l’article 22 il donne et laisse tons ses meubles à Je a n R ouchi ,
sous la condition qu’il payera aux D ie rn at, scs ne v e u x ,
des
sommes détaillées s’élevant à 1,2 0 0 fr.
Par l'article 2") il donne à l’église d’Anglard , les ornements
d’ une chapelle.
Par les articles 24 , 25 et 26 il donne aux habitants de la vallée
de Lon ge-V ergne cl surtout aux habitants du village de Malaprade,
une somme de i , 5o o f r . pour fonder cl établir une succursale
dans leur village , voulant qu’on donne à cette église le nom de
la paroisse de L o n ge-V ergn e.
P ar l’article 27 il veut que les 1 1 ,0 0 0 fr. destinés à la fondation
des deux écoles de garçons et de filles , les 1 , 5oo fr. donnés pour
l’établissement d’une église , et G,000 fr. qu’il consacre à la distri
bution de 5oo fr. par an au x pauvres d’A n g lard, soient pris sur
une somme de /¡o,ooo fr. qu’il a déposée chez M. Ferrière-Lafitte,
banquier à Paris , et qu’à cet effet, on communique à celui-ci son
testament olographe qui se ra , dit-il, entre les mains de mon
h éritier ou démon exécuteur testamentaire.
Par l’arlicle 28 il donne quelques couverts d’argent à quelquesuns de ses héritiers naturels et à deux curés.
Par l’arlicle 29 il charge Je a n Ilo u c h i} héritier du domaine de
L o n g e -V e rg u e , de payer cent écus aux enfants d’un filleul.
�P ar l'article ,5o il donne au fils aine de Julliard , ce qui lui
resterait dù sur son prix de ferme.
Par l’article 5 i il recommande d’o u v rir, en présence de sa
domestique et.de deux témoins, doux malles qui se trouvent, dans
le cabinet de sa chambre.
Par l’article 32 il prie les personnes auxquelles il pourrait
confier son testament olographe, d’écrire , aussitôt après sa mort,
à Je a n Rouchi, cordonnier à Rouen, en Normandie, mon héritier,
dit-il , de se présenter sans délai pour prendre communication et
copie du testament, afin de pouvoir rég ler ses affaires , et remplir
les obligations auxquelles il aura à répondre ; il sera encore tenu
d ’avertir par un mol de lettre les autres donataires qui auront
quelque chose à réclamer dans ce testament.
Par l’article 35 il prie le curé d’Anglard d’empêcher que per
sonne n’entre dans la maison, dans le château , avant l’arrivée de
Je a n Rouchi ou de quelqu’ un envoyé de sa part et autorisé par
lui.
Par l’article 54 il donne à Jean R o u c h i, deux mille francs à
prendre sur les fonds du gouvernement, pour payer les honoraires
de son enterrement et les droits de mort.
Par l’article 55 il nomme, pour exécuteur testamentaire, INT.
P e rrie r, notaire à Mealct, et charge Je a n Rouchi , mon h éritier,
dit-il , de lui offrir /(oo f’r. pour le remercier de ses peines et de
scs bons conseils, et de lui prouver sa reconnaissance.
E t après avoir pris 5 8 ,ooo ir. sur les fonds du gouvernement
pour remplir les legs mentionnés dans le testament, il donna moitié,
du restant au fils aîné de Julliard et l’autre moitié aux deux filles
aînées de Jean Arnal.
Le testament est ccrit et signé par le sieur Antoine L a v c r g n e , à
L o n g e - V e r g n c , le lo a o û t 1 8 4 5 .
T el est ce testament dont nous avons cru devoir rappeler en détail
les diverses dispositions, pour prouver que le testateur avait disposé
de tous ses biens, qu’il a considéré et déclaré Jean Rouchi son
h éritie r, et qu’il l’a chargé en cette qualité de prendre immédia-
�lomcnt communication du testament , voulant qu’on l’avertisse
¡'t ce titr e . aussitôt après sa mort, pour qu’il puisse régler ses
affaires et.remplir les obligations auxquelles il aura à répondre.
L e sieur Lavergne décéda le 12 août 1 7
•
Une ordonnance de M. Mailhe , juge
à Mauriac et faisant
fonctions de président du tribunal , envoya sur requête , Jean
Rouchi en possession des
biens du défunt, comme étant sou
légataire universel.
Les Diernat et d’autres personnes , notamment les Alsac , se
disant habiles à se porter héritiers du,défunt, formèrent opposition
à celte ordonnance d’envoi en possession.
Mais elle fut maintenue d’abord par un jugement du tribunal de
première instance de Mauriac du 12 janvier 1 8 4 8 , qui ordonna de
plaider au fond, ensuite par un arrêt confirmatif du 5 avril 1849.
Revenus devant le tribunal de Mauriac, les Diernat et les
Alsac ont attaqué le fond du testament.
Par jugement du 2?, août 1 8 4 8 , ce tribunal a décidé 1 8 que le
testament 11e renfermait ni 1111 legs u niversel, ni une institution
d'héritier, qu’en considérant le sieur Rouchi comme légataire
universel du sieur Lavergne et en l’envoyant en possession des
biens, le président du tribunal avait mal interprété ce testament et
que son ordonnance devait être réformée;
2° Que ce testament contenait, par scs art. i*r cl 2e , une substi
tution qui s’étendait au-delà du deuxième degré des descendants
du légataire.
Lu conséquence, il a reçu les Dit ruât, Alsac et consorts,
opposants à l’ordonnance d’envoi en possession du 5 septembre
précédent; au fond, il a déclaré ladite ordonnance nulle‘et de nul
e ffe t , et statuant sur les dispositions des art. » " et a* du testament
dudit sieur Lavergne, il a déclaré les legs qui y étuient contenus
nuls cl de nul effet comme renfermant une substitution prohibée,
a débouté, en conséquence, Jean Rouchi de sa demande cl l’a con
damné aux dépens.
�L e sieur Rouclii a interjeté appel de ce jugement par exploit du
G décembre 1848.
:i,
,,
Cet appel saisira la Cour de Rioin de l'examen de plusieurs
questions d’une grande importance.
Ces questions consistent à décider :
j® Si le sieur Rouclii est ou non l’héritier 011 le légataire universe
du sieur Antoine Lavergnc ;
20 S ’il y a réellement substitution ou si l’ensemble du testament
ne prouve pas que le testateur a voulu moins substituer qu’ interdire
généralement l’aliénation du domaine compris dans sa disposition
principale ;
t/
5° S i , en supposant qu’il y eût substitution , elle ne devrait pas
être considérée comme restreinte aux enfants et pelils-enfanls du
donataire , et par conséquent reconnue valable ;
4° E t subsidiairement, si en la supposant même étendue au
troisième d e g r é , c’est-à-dire aux pelils-enfanls du donataire, elle
r.e devrait pas aussi être maintenue jusqu’au second degré , et
annulée seulement pour le degré ou les degrés postérieurs.
Examinons successivement ces diverses questions.
PREM IÈRE
La
loi déclare valable
Q UE STI ON.
toute disposition tcstamenta.re , ou
universelle , ou à litre universel, ou à lilre particulier , soit qu’elle
ail été fai le sous la dénomination dinstitution d 'h é ritie r , soit
qu’ellc ait été faite sous la dénomination de legs (Code civil, art.
J00 2 ); cet article assimile l’héritier au légataire universel.
O11 sait qu’ un héritier, qu’ un légataire universel succède à ions
les droits comme à toutes les charges du défunt, hercs ju ris
successor e st... et in omne ju s viortui ( L. g , § 12 de h ercd ib ’ts
m stitucndis , L,
de acquit, v e lo n iit hcrcd. )
�O r , l'institution d'héritier a toujours pu se faire de plusieurs
manières : elle se fait en déclarant un tel . ... maitre de toute son
hérédité Totius h œ redilalis m cœ dominus e s to , rectè insti-
tutiofit ( L . 4 8 , M arcian, Lib. 4 insiit. )
Elle se fait aussi quoique plusieurs de ces mots manquent dans
l’expression. Omissio alicitjus vo ca b u li iti heredis institutione
eam non vitiat, dit Pothier , dans son bel ouvrage des Pandectes
(L ib . 28, tit. 5 , de heredibus instituendis , n° 3 2 ) , et l'auteur cite
divers textes du droit romain :
V . G . S i ciiiteni sic scribat,
e s t o
;
licet non adjecerit,
creditnus solus nuncupaturn , minus scriptum.
E t s i ita ,
l u c i u s
e s t o
;
l u c iu s
h e r e s
;
tcintiimdem dicim us.
Ces observations sont fondées sur celle maxime si juste, si
ancienne et si connue même dans le droit nouveau : potms
voluntatem quani verba specturi plaçait.
O r , en parcourant le testament du sieur Antoine L a v e r g n c , il
est impossible de ne pas reconnaître que le testateur a toujours
voulu que le sieur Rouchi fût son seul héritier, c’est-à-dire sou
légataire universel.
Il Tavait voulu par scs trois premiers testaments de 1 8 0 7 , ‘^c
j S S q , de 1 8 4 2 ; il a .persisté dans celle ferme volonté et l’a con
sacrée dans son dernier testament du 10 août 1845.
Ou'on le p arcou re, en effet, et l'on y verra que Jean Rouchi
est le seul de scs parents que le testateur honore du titre de son
héritier.
11 le lui confère par l’article 5 de son testament.
11 le réitère par l’article 7.
11 le renouvelle par l'articlc 14 1 en prescrivant qu’une malle ne
soil ouverte que par sa domestique et son héritier.
11 le répète dans l’article 1 7 , en chargeant Je a n llo u ch i , son
héritier, de payer 1 ,5oo francs à la paroissed’Au"lard pour acheter
1111 Cimetière.
�Il déclare par l’arliclc 19 que Je a n R ou chiest particulièrem ent
chargé et obligé de payer toutes les dépenses dq l'enterrement et
les honoraires des ecclésiastiques ainsi que les dépenses qu’ils feront
pour leur diner.
Il veut, par l’article 27 , que les fonds qu’ il a chez le sieur F c r riè re , banquier à Paris, soient employés pour payer divers legs
particuliers, ol qu’à cet effet, 011 communique à ce banquier son
testament olographe qui sera, dit-il, entre, les | mains de mon
h éritier.
_.<nr,
Il charge par l’article 29 Jean R o u c h i, son h éritier Au domaine
de L o n g e -V e rg n e , de payer cent écus à un filleul.
<!''
Il prie par l’article 52 les personnes auxquelles il pourrait confier
son testament olographe , d’écrire aussitôt après sa mort à Jean
R ou chi, à R o u e n , en Normandie, mon h éritie r , dit-il, de se
présenter sans délai pour prendre communication ou copie du
testament, afin de pouvoir régler ses affaires.
Il prie aussi par l’article 55 le cure d’Anglard , de prendre des
mesures pour empêcher que personne n’entre dans la maison et
dans le château avant l’arrivce de Je a n R ouchi ou de quelqu’ un
envoyé de sa part.
Et pourquoi ces précautions? parce que, par l’article 2 2 , il •
donne tousses meubles, à Je a n R ouchi sous quelques charges.
E n fin , par l’article 3 5 , il charge Jean Rouchi, son h é r itie r ,
d’offrir 400 fr. au sieur P errier, son exécuteur testamentaire , pour
le remercier de ses soins et lui prouver sa reconnaissance.
Ainsi, en parcourant le testament entier du sieur Antoine L av e rgne, on voit qu’il a disposé de tous ses biens meubles et immeubles;
on y voit aussi qu’il a donné à Jean Rouchi scs biens meubles et la
plus grande partie de scs biens immeubles, sauf quelques legs
particuliers en faveur de ses antres parents.
On y voit surtout, qu’il a considéré Jean nonchi comme son
héritier ; que c’est à lui seul, à l’exclusion de tous scs autres parents,
qu’il attribue la qualité de son héritier, et par conséquent le ju s
�univers uni de son hérédité; c’est lui seul qu’il a investi de ce titre;
c’est lui seul qu’il a chargé de payer les charges de sa succession,
les legs dont il la grevait , les frais funéraires de cette succession ;
c’est lui seul qui devait surveiller, conjointement avec l’exécuteur
testamentaire, l’accomplissement des dons qu’il faisait, le paiement
des dettes dont elle serait chargée; c’est lui seul enfin qu il déclarait
son unique héritier.
Aussi le président du tribunal, M. Mailhe , magistral très ancien
et très éclairé, n’a-t-il pas hésité , sur la présentation du testament
olographe, à envoyer Jean Rouchi en possession de tous les biens
de l’hérédité, comme légataire universel ; cl si des ju g e s, plus
jeunes, moins instruits, ont réformé celle décision , on ne peut que
déplorer leur erreur, et reconnaître qu’ils n’ont pas refléchi sur la
vraie pensée du testateur, et qu’ils ont violé l’esprit du testament.
En vain se fondent-ils sur le don qui y en est fait , à d’autres
personnes , d’objets particuliers et notamment du petit domaine de
la Bastide.
Mais ce domaine était peu considérable.
Mais les legs particuliers étaient peu importants, comparés à la
fortune entière du testateur.
Mais ces legs particuliers ne détruisent pas la généralité du don
de l’hérédité, et ne dérogent pas à l’universalité de cette succession
qui est attribuée à Jean Rouchi. Car le titre d ’h é iit ic i , qui lui est
souvent donné dans le testament, lui conférait cette universalité et
des droits cl des charges attachés à l’hérédité.
C a r , d’ailleurs, c’est surtout l'intention du testateur, sa volonté
évidente, manifestée par l'ensemble du testament, que l’on doit
considérer, afin de s’assurer que le testateur avait réellement voulu
le gratifier du titre de son héritier u niversel, eu le nommant seul
son héritier. C'est, en effet, cette intention que l’on doit consulter;
potins voluntatcm quant v e rb a spcctari plucuil.
C ’est aussi dans ce sens que les auteurs de jurisprudence Ont
appliqué l'article 1002 du code civil.
�—
i3
—
A u ssi, M. G r e n i e r , clans un excellent ouvrage sur les donations
et les Testaments (tome i " de la seconde édition, page 5 i 5 ),»
d é c la re -t-il, que , » en droit, le mol univetsalitè a toujours été
» entendu dans le sens d’une prépondérance évidente, attachée au
» titre d’un légataire par rapport à celui des autres.
Ainsi , on peut donner la qualité de légataire ou héritier
» universel, i° à celui qui est appelé à recueillir là totalité de
» cette succession; 20 à celui qui ne recueillerait que les biens
» de cette succession , moins les réserves affectées à certains
» héritiers.
»
»
»
»
» 5° A celui qui se trouve en concours avec un légataire , non
d'u ne portion ou de quotité de biens d e la succession p rise
en masse , niais seulement d’objets qui doivent bien entrer en
contribution pour le payement des dettes et des charges de la
succession, tels que les imm eubles ou le m o b ilier , ou une quo-
» tilé fixe des immeubles ou du mobilier, mais auxquels le légis» laleur n’a pas attaché le titre d’universalité d’ une manière aussi
» évidente que celui qui est appelé à recueillir en misse le restant
» de l’hérédité. »
On remarquera q u e , dans l’espèce, aucun des legs particuliers
ne pourrait être soumis au payement des dettes et charges de
l’hérédilé.
Le sieur Rouchi devrait seul les acquitter toutes. O r , comment
le pourrait-il s’il était privé de la qualité d’héritier et de tous les
avantages attachés à ce titre.
Un arrêt de la cour de Limoges du 8 décembre 1 8 0 7 , a con
sidéré comme legs universel une disposition testamentaire , bien
que le testateur eut omis de disposer de quelques objets peu im
portants de sa succession, et qu’au lieu d’appeler les héritiers insl !tués à recueillir conjointement, il ¡»il, au contraire, attribué à
chacun d’eux un lot composé d ’objets déterminés ( V . cet arrêt
dans le journal de Sirey , 5 ç) , 2. 27).
/
�De moine , un legs qualifié d’universel par le testateur, ne cesse
pas d'avoir cc caractère, par cela seul que le testateur aurait dis
posé de la nue propriété de quelques-uns de ses biens au profit
d’autres légataires , en réservant seulement l’usufruit au profit du
légataire universel. (Arrêt de la cour de cassation du 20 novembre
)8 /j5 . Srrey, 4 3 , t.. i 8 5 ()). Il existe d’autres arrêts analogues.
.1
!. . .
.r.
Aussi, Vazcillesij dans sou traité des successions, sur l’article
i o o 5 , dit-il que loilegs ne cesse pas d’être universel, quoiqu’il
soit grevé de legs particuliers et même du legs à litre universel
défini par l’ article 1 0 1 0 , et il donne un exemple ainsi conçu :
« P au l, dit-il, est légataire universel , soit qu’il ait été institué
»
»
»
x
»
»
»
.héritier, ou que tous les biens lui aient été légués, à la charge
de payer une somme fixe ou de donner un objet déterminé à
P ie rr e , soit que le testament porte, en première ligne, le legs
de Pierre et ensuite le legs universel. Dans ces divers cas, Paul
est également h éritier an légataire universel, puisqu’il recueille
tous les biens sans partager avec personne , sous Ici distinction
seulem ent des objets déterminés qu’il doit remettre aux autres
» légataires. Aucun de ces légataires n’a de droits successifs. Paul
j> seul représente le défunt, universo ju r e , avec scs droits et ses
» obligations. »
Les autorités cl les arrêts que nous avons invoqués sont fondés
sur l'interprétation du testament, et ont pour base la m axim e,
vo/nntatern potins quant v e tb a specta rip la ça it.
Jean R o u c h i, auquel le testateur a attribué la plus grande partie
des biens de sa succession , auquel il a donné des valeurs d’une
prépondérance évidente sur les legs particuliers qu'il a déférés
aux autres légataires , qu’ il a qualifié même seul du titre de son
h éritier, et qu’il a chargé de payer à d’autres diverses sommes,
auquel ¡1 a tic plus confié le soin de scs funérailles et l’obligation
d’en faire les dépenses, cc Jean Rouchi a reçu évidemment du tes
tateur l’ universalité des droits de l’hérédité, et seul il doit profiter
de ses avantages, comme seul aussi il est grevé de ses charges.
V
�Et remarquons que le plus grand nombre des legs particuliers
sont faits à des parents , à des héritiers naturels du défunt, à des
personnes qui auraient à partager avec lui la succession qu’ils lui
disputent, et q u e , leurs legs n’ayant pas été faits par préciput ou
avec dispense de rapport, ils les perdraient si leurs prétentions
étaient accueillies.
Mais ces prétentions viendraient se briser contre le testament,
contre le titre d 'h é ritie r , o u , ce qui est la même chose, de léga
taire universel, qui a été attribué à Jean Rouchi, soit par les e x
pressions littérales et géminées de ce testament, soit par l’ensemble
«le cet acte de dernière volonté.
L ’examen de la question que nous venons de discuter rendrait
surabondante celle de toutes les autres questions proposées dans le
mémoire. Si Jean lîouchi était considéré et reconnu comme héri
tie r, c’est-à-dire comme légataire universel du sieur Antoine L a
v e rg n e , lui seul aurait le droit d’examiner la question de substitu
tion. Car celle substitution, fût-elle prononcée pour une partie de
l ’hérédité , lui seul devrait prolitor de la nullité qui en résulterait.
T ous les autres héritiers naturels, tous les intimés, par cria seul
qu’ils ne sont pas héritiers réservataires , seraient non rccevables
à soulever celte difficulté cl à soutenir que cette prétendue substi
tution était prohibée, puisqu’ils ne devraient pas profiter de celte,
prohibition et d’une nullité dont les conséquences et les avantages
ne devraient appartenir qu’au légataire universel. C ’est ce qu’a
décidé en thèse la cour de cassation, par un arrêt du 24 mai 1807 ,
rapporté dans le journal de S i i e y , t. 6 7 , 1, 5 1 7 . C ’est aussi ce
qu’avaii jugé antérieurement la cour cle Montpellier, parm i arrêt
du 10 février i 8 5 G, rapporté dans le même journal, t. 5G, 2 , 54g.
Car la nullité ou la caducité des legs particuliers profite à l’héritier
testamentaire seul ou au légataire universel, ainsi que l’ont décidé
de nombreux arrêts, ainsi que le déclarent aussi tous les auteurs et.
notamment Merlin , Grenier pour le nouveau droit , Hourjon et
J'othier pour l’ancien.
�DEUXIÈME
QUESTION.
L e testament du sieu r L avergne contient une prohibition
(Valiéner plutôt qu ’une substitution.
La loi prohibe les substitutions par l’article 89Ü du code civil ,
mais elle les définit expressément pur le même article , ainsi conçu :
« Les substitut ions sont prohibées.
» Toulc disposition par laquelle le donataire, l’héritier institué,
» ou le légataire sera chargé de conserver et de rendre ¿1 un
» tiers , sera nulle , même à l’égard du donataire , de l’héritier
» institué ou du légataire. » Des termes formels de l’article , il r é
sulte que, si le testateur 011 le donateur n’a imposé au donataire, à
l’héritier ou au légataire, ni la charge de conserver, ni la charge
de rendre ¿1 un tie rs , il n’y a pas de substitution.
Cependant, quoique ces charges expresses ne fussent pas écrites
dans la disposition , quelques personnes ont voulu trouver une
substitution dans l’ensemble des expressions qui constituaient cette
disposition.
Mais ce système inexact a été repoussé par les auteurs et par
les arrêts.
Parmi les auteurs, on peut citer T ou llier, tome 5 , n° 24 ;
Rolland de Villargues, n° ¡ 7.5 et suivants; Duranton , t. 8, 11*4 2 ;
Coin-D clille, n° 4 * •
Parmi les arrêts, 011 peut invoquer un premier arrêt de la cour
de cassation du 24 mars 1 8 2 9 , cl un second arrêt de la même
c o u r, du 5 juillet i 8 5 :i; un troisième arrêt de cette cou r, du 25
juillet 1854. Ces trois arrêts ont décidé en thèse que, s i Vobliga
tion de co n serva et de rendre n ’est p as littéralem ent e x p rim é e ,
le doute doit s'interpréter en fa v e u r de la disposition. C ’est
l'application de la maxime si connue : j>otius ut va len t actus
�—
I?
—
quani ut p erea t ( V . les arrêts cités dans le journal de S ire y ,
tome 2 9 , 1 , 2 9 3 ; tome 3 2 , 1 , 4 3 o ; tome 34 > i> $77- Les voir
aussi dans le journal de Dcnevers.)
Dans le testament du sieur L a v e rg n e , il n’existe pas de charge
de conserver; il n’existe pas aussi de charge de rendre à un tiers.
On 11c devrait donc pas y voir de substitution.
Mais, dit-on, il y a des expressions qui en tiennent lieu.
i° Jean Rouchi et ses descendants, ses enfants sont rappelés dans
la disposition principale ;
20 11 y a prohibition d’aliéner le domaine de Longe-Vergne; or,
ces termes , rapprochés entr’e u x , constituent une substitution per
pétuelle et prohibée.
Ainsi , contre les décisions des arrêts que nous avons rappelés ,
c ’est par une interprétation qu’on a cru découvrir une substitution
prohibée, c’est-à-dire que le doute qu’on se faisait a été interprêté
contre la disposition.
Mais cette interprétation rigoureuse était contraire aux principes
qui veulent que le doute soit interprété en faveur de l’acte.
Mais, d’ailleurs , rénonciation des descendants , des enfants, ni
même la prohibition d’aliéner’, n’autorisaient pas une telle inter
prétation.
i° Le don principal est fait à Jean Rouchi uniquement, sans
aucune charge de conserver et de rendre. Il y est dit, en effet :
« J e laisse à Jean Rouchi, cordonnier-bottier, à Rouen, en Nor-
» rnandie, le domaine de Lon ge-V ergne , etc.
11 est vrai que le testateur ajoute plus bas-:
« J e lu i en fa is don p o u r dire entièrem ent ¿1 lu i et p o u r en
» jo u ir lu i et ses descendants après ma m o rt , à l’exclusion de
» mes autres parents et héritiers; car telle est ma volonté, qu’il en
» soit le seu l et unique h éritier, lui et ses enfants après l u i , de
» génération en génération.
�—
b
i8
—
Là s’arrête la disposition.
L ’on voit que c’est Jean Rouchi seul qui est appelé à recueillir
le domaine.
Que c’est lui seul qui est déclaré par le testateur son unique
héritier.
S ’il y est parlé des descendants de celui-ci, le testateur y dit :
P o u r en jo u irt lu i et ses descendants , après ma mort; s’ il veut
qu’il en soit son seul et unique héritier, lui et ses enfants après l u i ,
de génération en génération , c’est parce qu’il sait q u e , suivant les
lois de la nature, et conformément aux règles ordinaires des suc
cessions, les enfants, les descendants jouissent après leur père , ot
lui succèdent de génération en génération.
L e testateur n'exprime ici qu’une pensée générale et commune à
tous les hommes , qui considèrent les enfants, les descendants
comme devant jouir après leur p è r e , comme destinés à lui su ccé d er.
D ’ailleurs, il n'institue pas les enfants, les descendants de Jean
Rouchi, ses héritiers, comme leur père qu’il déclare , au contraire,
son seul et unique héritier.
D ’ailleurs aussi, il ne charge pas Jean Rouchi de conserver et
de rendre à scs enfants , à scs descendants, le bien qu'il donne à
lui seul.
E t comment aurait-il pu choisir pour ses héritiers les enfants de
Jean Rouchi, puisqu’il n’en existait ni au moment du testament, ni
à celui du décès du testateur ?
Comment celui-ci aurait-il pu penser à substituer à Jean Rouchi,
son unique donataire du bien de Lon gc-V crgnc, les enfants que ce
Jean Rouchi laissait ou laisserait, puisque Jean Rouchi n’était pas
m arié, et même ne l’avait jamais été, au moment du décès de son
oncle ?
Que deviendrait enfin celte prétendue substitution , si Jean
Rouchi ne se mariait jamais ou ne laissait aucun enfant, aucun
descendant ?
�— 19 —
E l remarquez que le tcstaicur n’impose pas même à Jean Rouchi
l’obligation d e sc marier, cl que, par conséquent, le sieur Lavergne
ne peut avoir même l’cspcrance fondée que son donataire aura un
jour des enfants, des descendants qui pourraient recueillir les biens
donnés.
Nouvelle preuve, que rénonciation dans le testament, d’enfants ,
de descendants , ne sont que des expressions vagues, sans portée ,
sans consistance, échappées à un prêtre peu éclairé sur les lois
françaises, et qui, n’élant pas , au reste, contenues avec précision
dans les dispositions principales, ne peuvent ni en détruire, ni
même en faire suspendre l’exécution, sous prétexte de substitution.
Mais trouvera-t-on une substitution dans la prohibition d’aliéner
contenue dans le testament du sieur Lavergne?
« L e domaine de Longe-Vergne , y est-il dit, ne sera ni vendu ,
» échangé, ni m orcelé, ni grevé de dettes sous quelque prétexte
» que ce soit; mais il passera à chaque héritier, à chaque famille,
» tel que je l'ai laissé à ma m o rt, etc. »
Remarquons d’abord que cette prohibition n’est pas perpétuelle ,
comme on le suppose dans le jugement où l’on déclare la substitu
tion perpétuelle; en rapprochant la première partie de la disposition
avec l’intcrdiction de vendre.
Ce rapprochement est, d’ailleurs, vicieux sous plusieurs rapports.
i° La prohibition de vendre n’est pas déclarée faite au profil des
enfants et des descendants de Jean R o u c h i, donataire;
a0 Ne fût-elle fuite qu’à Jean R o u c h i, elle serait nulle comme
étant absolue , quoique temporaire seulement; comme restreinte
à la vie de ce Jean Rouchi , parce qu’elle établirait à son égard une
espèce de droit de main-morte , interdit par la législation nouvelle,
et notamment par l’article i*r du titre 2 de la loi du i 5 mais 179 0 ,
qui abolit « lout droil prohibitif des aliénations et dispositions, à
» litre de vente, de donation entre vifs ou testamentaire, et tous
» autres eil’cts de main-morte réelle, personnelle ou mixte, qui
» s’étendraient sur les personnes ou les biens ; »
�3° Celle prohibition serait nulle surtout si on l’appliquait à lous
les descendants de Jean R o u c h i, et si l’on considérait le testament
comme renfermant une prohibition p erp étu elle, parce qu’elle serait
contraire, non-seulement à la loi citée, mais encore aux bonnes
m œ u rs, à l’ordre public , qui veulent q u e le commerce des biens
soit libre ; elle serait nulle par suite comme impossible et proscrite
par l’art. 900 du Code civil, qui veut que les conditions impossibles,
et celles qui sont contraires aux lois et aux mœurs soient réputées
non écrites , et que , malgré leur abolition , la disposition entre vifs
ou testamentaire n’en reçoive pas moins sa pleine exécution.
C ’ est aussi ce qu’ a jugé en thèse un arrêl de la Cour de Paris,
du 1 1 mars 1 8 5 6 ; et telle est l’opinion de T o u llicr, dans son droit
civil français , tome 6 , n° 688.
E t remarquons que , s’il s’est présenté quelques décisions con
traires, ce n’est que dans les cas oii la prohibition de vendre n’était
que momentanée, et que surtout elle n’élail pas absolue.
O r , comment une obligation , une condition nulle, pourrait-elle
valoir pour faire reconnaître et déclarer l’existence d’unesubsliiution
prohibée? E t ne sait-on pas que ce qui est nul ne peut produire
aucun effet, suivant la maxime consacrée par la législation de tous
les temps : quod nnllum est, milium producit effectuai.
C ’est cependant cette maxime qu’a violée le tribunal de Mauriac,
en se servant de la prohibition d’aliéner, et en la rattachant à la
disposition principale du testament, pour en conclure que ce testa
ment renfermait dans son ensemble une substitution prohibée.
Si ce tribunal eùl réfléchi sérieusement sur le testament, il eût
reconnu que cette prohibition de v e n d re , d'échanger, de m orceler,
de g rever d’aucune dette, élail l’objet principal, l’objet même
unique de la pensée du testateur; que , dans son ignorance des lois
françaises, ou, dans leur oubli, il voulait surtout que son domaine
fût conservé dans la même situation, avec la même valeur qu’il
avait au moment où il le laissait; qu’il s’occupait peu d’une p ré
tendue substitution à laquelle il 11c songeait même pas, cl donl les
avantages n’auraient tourné qu’au proiit d’enfants qui n’ existaient
�pas au moment de son décès, et qui, peut-élre • »’existeraient
jamais; mais que so» seul désir, son désir évident était que son
domaine restât intact, et fût conservé dans toute la splendeur dont
il l’avait orné ; il voulait la conservation complète, intégrale de
son domaine; il rattachait en quelque sorte son existence morale,
sa renommée future , à la conservation de ce domaine
qu’ il
avait créé ou au moins embelli à l’aide de ses soins et de ses re s
sources, et dont il voulait prolonger la durée au-delà de sa vie
physique, en exprimant en quelque sorte le vœu d’immortalitc qui
germe dans le cœur de tous les hommes.
C ’est donc une prohibition d’aliéner, et non une substitution, qu’il
a établie par son testament; et puisque, d’aprcs l’art. 900 du C od e,
d’après toute la législation française, cette prohibition est nulle, elle
doit être annulée sans porter atteinte au don principal fait en faveur
de Jean R o u chi, en respectant ce don même , en ordonnant l’exé
cution , sans y porter atteinte à l’aide d’une prohibition illégale,
dont la nullité ne permet ni de s’en servir à établir une substitution
qui n’est pas expressément écrite dans l’acte , ni même de con
courir à l’idée de cette substitution.
Ainsi doit se décider la seconde question proposée.
TROISIÈME
Q UE S TI O N.
*
Y a u ra it-il même dans le testament une substitution, elle ne
serait p as prohibée.
Ici se présente une question d’interprétation qui, d’après les prin
cipes , doit toujours être résolue en faveur de l’acte testamentaire.
L ’art. S96 du Code civil prohibe les substitutions, c’est-à-dire les
donations ou les legs, faits à la charge par le donataire ou le légataire
de rendre à un tiers les objets donnés ou légués. Mais la loi posté
rieure du 1 7 mai 18 2 6 a modifié cette prohibition , en déclarant que
les biens dont il est permis de disposer « pourront être donnés avec
�charge de les rendre à un ou plusieurs des enfants du donataire,
ries ou à naître , ju squ'au d eu x ièm e degré inclusivem ent. »
*
Le testament du sieur Lavergnc donne, après sa mort, « à Jean
»
»
»
»
»
llouclii, son neveu , son domaine de ! .onge-V ergne ; il lu i en
fait don p o u r être entièrem ent ¿1 fu i, et pour en jo u ir, lui et ses
descendants, après sa m o r t ; ...... sa volonté est qu’il en soit le
seul et unique héritier, lui et ses enfants après lui , de génération
on génération. »
C ’est donc à Jean Rouchi seul que le domaine est donné ; c est
lui qui en doit être le seul et unique héritier.
Riais 011 supposant qu’on pût trouver une substitution dans l'addi.
lion de ces mots : p o u r en jo u ir lu i et ses descendants , ou dans
ceux-ci : q u 'il en sera le seu l et unique héritier, lui et ses enfants
après l u i , ces expressions ne constitueraient qu’ une substitution au
deuxième degré des enfants du donataire , telle qu’elle est autorisée
par la loi du 17 mai 1826.
C a r, d’un côté, l’expression pour en jo u ir lui et ses descen
dants après ma m o rt , 11e se trouve pas dans la clause principale,
constitutive du don fait à Jean Rouchi seul; elle n’est placée que
dans une addition indicative du mode de jouissance, c’est-à-dire
d’une jouissance qui doit naturellement passer aux descendants, si
le donataire 11’en dispose pas lui-tncme ; il n’y a , d’ailleurs , de la
part du testateur , aucune charge de conserver cl de rendre à ses
descendants.
I)’ un autre côté, les mots.fCJ descendants s’entendent naturelle
ment de ceux qui descendent en premier degré du donataire, lorsque
la clause elle-même ne dit pas (¡ne le testateur a entendu les appli
quer au second degré et à des degrés postérieurs, lorsque surtout
il 11'¡1 pas chargé expressément de conserver cl de rendre aux des
cendants du r>c et du 4* degrés.
Quant à la partie de la clause où il est dit que le testateur veut
que. Rouchi soit son seu l et unique h é ritie r , lu i et scs enfants:
a piès l u i , de génération en génération , ces expressions renfer-
�—
3 3
—
^
mcnl moins l'expression d’une volonté positive que l'indication de
ce qui se passe ordinairement; car les enfants sont ordinairement
les héritiers de leur auteur, cl c e de génération en génération. Les
mots enfants ne peuvent aussi s’entendre que des enfants au premier
d e g r é , aux termes de l’article 7 3 5 du Code civil, d’après lequel
chaque génération constitue un degré de parenté.
C ’est ainsi qu’ un arrêt de la Cour de Rouen , du 23 juin 1848 , a
décidé qu’ une substitution , faite conformément à l’a n . 10 48 du
Code c i v i l , c’est-à-dire à la cîiarge par les légataires de rendre les
biens à leurs enfants, ne comprenait pas même les petits-enfants,
et devait s’arrêter au i*r degré.
C ’est dans le même sens qu’ un arrêt de la Cour de cassation , du
5 février 18 5 5 , a jugé que la charge imposée par le testateur au
légataire, de conserver et de /(tisser les biens à ses enfants ou à
leurs héritiers, ne devait s’entendre que des descendants au premier
d e g ré , des enfants premiers appelés, le mot héritier n’étant souvent
employé que pour désigner les descendants au .premier degré. V .
ces arrêts rapportés dans le journal d e S i r e y , lomcs 49, 2, 1 8 1 , et
tome 55 , 1 , 87.
O11 devrait donc rigoureusement n’appliquer les mois descen
dants ou enfants , employés dans le testament , qu’aux enfants issus
au premier degré de Jean Rouchi. Car c’est le sens ordinaire attaché
à ces expressions.
Biais si, à cause des mots d e génération en génération, 011
veut entendre par l’expression les en fan ts , plusieurs degrés de
gén ération , au moins ne doit-on l’étendre qu’à deux d e g ré s, c’està-dire aux enfants et aux petits-enjants du donataire, cl cela soit
d ’après la lettre même du testament, soit d'après le sens naturel et
grammatical que présentent les mois d e génération en génération,En effet, i°le testament porle seulcmenu/e génèrationengénération
au singulier, cl non pas de générations en générations, au pluriel ;
il 11e s’applique donc littéralement qu’ aux d e u x g é n é r a t i o n s qui se
succèdent immédiatement.
�-
a4
-
?.■’ La volonté du testateur , contînt-elle , quelque vague qu'elfe
s o i t , une substitution , elle serait exactement remplie par la trans
mission des objets donnés aux pelrts-enfants du donateur. Car cette
transmission compléterait les deux*générations , sans compter le
donataire; l’une pour les enfants, l’autre pour les petits enfants.
Ainsi, sous ce rapport même, les dispositions de la loi du 17 mai
182G , seraient observées , lors même que le don du domaine de
Longe-Vergne renfermerait une substitution, puisque les enfants et
les petits-enfants du donataire seraient appelés à en recueillir les
avantages, et que la loi n'exige rieu de plus.
Pour étendre cette prétendue substitution an troisième, au qua
trième d e g ré , 011 à des degrés postérieurs, argumenterait-on de lu
clause relative
à la prohibition d’aliéner ,
d’é ch a n g e r, etc. ,
contenue dans une autre partie du testament.
I\Iais nous avons déjà fait remarquer que cette clause , étant
nulle, ne pouvait produire aucun effet; qu’elle ne devait être ratta
chée à aucune partie du testament; qu’elle ne pouvait, par consé
quent , pas plus servir à le faire annuler ou modifier , qu’elle 11e
pourrait être employée pour le faire valoir.
Au reste, les termes de cette clause sont absolument insignifiants
pour la question.
D ’une part , nous avons déjà fait observer qu’elle ne portait pas
une interdiction perpétu elle d’aliéner , en sorte que la prohibition
qu’elle contient doit se restreindre à Jean Rouchi lui-même et aux
degrés des enfants qui lui .seraient substitués , si substitution il y
avait.
D ’une autre part, la rédaction de la clause est en harmonie avec
cette idée restrictive. Car, s’il y est dit que chaque héritier, chaque
famille fera v érifie r, en entrant en possession du domaine , les r é
parations qu’il y aurait a faire pour l’entretenir , le cultiver et l’e x
ploiter , cette recommandation peut et doit s’entendre d’abord des
enfants au premier d e g r é , ensuite des enfants au second degré.
Ainsi les enfants au premier degré de Jean Rouchi , s’ils étaient
substitués , auraient à faire vérifier , à la mort de Jean Rouchi, do-
�nntairc, et conimc héritiers de celui-ci, les réparations dont le d o
maine de Lon ge-V ergne serait susceptible , pour le remettre dans
son premier état.
Et à leur tour, les enfants au deuxième degré de ce donataire,
ou ses petits enfants , auraient à provoquer une vérification sem
blable, comme héritiers des enfants du premier degré.
Ainsi se trouverait remplie la condition imposée à chaque héri
tie r, à chaque famille, à chaque possesseur de ce domaine , s’il y
avait réellement substitution, môme en faveur des descendants ou
des enfants du donataire, jusqu’au second degré.
On doit donc reconnaître qu’en supposant que le testament con
tienne une substitution, malgré l’absence de la charge de conserver
et de rendre , cette substitution doit se restreindre aux enfants et
aux petits-enfants de Jean R o u c lii, donataire.
Cette interprétation est recommandée par l’ensemble de la clause
constitutive de la donation.
E lle est exigée par ce principe conservateur qui veut que l’acte
soit interprété de manière à le faire valoir plutôt qu’à l’annuler.
E lle a été consacrée par les trois arrêts de la cour de cassation ,
des 24 août 1 8 2 9 , 5 juillet 186 2 , a 5 juillet 1 834 » ilue nous avons
ci-dessus cités.
E lle est en harmonie enfin avec les idées de justice , qui ne per
mettent pas que , pour annuler une disposition testamentaire , ou
suppose légèrement que le testateur a voulu violer textuellement
la l o i , dans ses règles fondamentales.
QUESTION
SUBSIDIAIRE.
Si, en s'écartant des principes que nous avons ci-dessus rappelés,
des arrêts que nous avons cités , des termes mêmes du testament,
sainem ent interprétés , 011 voulait y voir une substitution prolon\
�--- 26 --gce au-delà du second degré des enfants du donataire, cl s’étendant
au troisième degré ou à des degrés postérieurs, il serait légal et
juste , dans ce cas-là môm e, de prononcer comme on le faisait au
trefois , c’esi-à-dire de réduire la substitution aux deux premiers
degrés , en maintenant le don principal et la charge de conserver
et de rendre pour les enfants et les petits-enfants , en l’annulant
pour le surplus.
Une telle décison serait en harmonie avec la législation ancienne,
et elle ne blesserait pas la législation nouvelle.
E n effet, cela aurait pu paraître douteux sous les principes ri
goureux et absolus de l’article 896 du code c iv il, qui'prohibait
toute substitution, et qui annulait la disposition principale , même
à l’égard du donataire cl du légataire.
Mais ces principes extrêmes ont éié modifiés par la loi posté
rieure du 17 mai 1826.
Celle dernière loi n’a même rien de semblable à l'article i o 58
du code civil qui, en permettant à un père ou à une mère de donner
la quotité disponible à un ou plusieurs de leurs enfants , autorisait
ceux-ci à rendre les biens donnés aux cnfanls nés ou à naître au
p rem ier degré seulement ; en sorte que si la charge de rendre ne
devait pas profiler à 1011s les enfants du donataire, elle pouvait cire
considérée comme nulle.
Telle n’est pas la loi du 17 mai 182G.
Celle loi permet à toute personne , p è r e , mère ou étranger, de
disposer, aux termes des articles Q1 5 , 9 1 5 et 91G , de tousles biens
dont la disposition est permise par ces articles.
Elle autorise aussi à charger le donataire , quel qu’il s o i l , de
rendre les biens donnés , non seulement à tous ses enfants nés ou à
naître, mais à un ou à plusieurs d’entr’e u x , à son choix.
En 1111 m o l , celte loi du 17 mai 182G nous a ramenés aux dis
positions de l’ordonnance d’Orléans de
i 5 6 o , et de celle de
Louis X V , rendue en 1747 , sur les substitutions : La première
�~ 27 —
Jsb f
ordonnance déclarant, par l’article 5 9 , que les substitutions qui
seraient faites à l’avenir , 11e pourraient excéder d e u x degrés ,
sans y comprendre l'institution ou la première disposition; la se
conde ordonnance disant aussi, par l’article 5o , que toutes les
substitutions , en quelques termes qu ’elles soient conçues ,
POURRONT
S’É T E N D R E
AU-DELA
DE
DEUX
DEGRES
DE
n e
SUBSTITUES
,
outre le donataire, l’héritier institué ou le légataire.
La loi du 17 niai 1826 est absolument semblable aux ordon
nances de i 56o et de 1 7 4 7 ; elle ne s’exprime même pas en termes
aussi prohibitifs que ces anciennes ordonnances qui disaient que les
substitutions ne pourraient excéder deux d e g ré s, ne pourraient
s’ étendre a u -d elà de d e u x degrés , tandis que la loi de 18 2 6 se
borne à déclarer que les biens pourront être donnés à la charge de
rendre aux enfants jusqu’au deuxième degré.
On ne pourrait donc argumenter de cette loi de 1826 , comme
on l’aurait pu des expressions ne pourront, dont se servent les lois
anciennes, et in v o q u er, à l’égard de cette dernière l o i , cette
maxime ancienne : S y liaba
n o n
prœposita verb o p o te s t , tollit
potentiam ju ris et ja c li.
E t cependant, sous les anciennes ordonnances , une substitution
au troisième ou au quatrième degré 11c rendait pas nulle la dispo
sition principale, ni même la clause de substitution ; seulement il
en résultait que les substitutions étaient réduites aux deux degrés
autorisés par les ordonnances. C ’est ce que nous enseigne T hévenaut-Dessaules dans son traité complet sur l’ordonnance de
1 7 4 7 ; il le dit dans le chapitre 77 , au n° 1 1 1 2 , ou il déclare que
« le second substilué, qui a reçu les biens d’un premier substitué,
» possède,ces biens librement, sans charge de lideicommis , puis-
» qu’après les deux degrés , il né peut y avoir de substitution
» valable.
11 le répète au n° 1 1 i 5 , où il dit aussi que la substitution est
caduque au-deUi des d e u x degrés.
L a disposition était nulle au-delà de deux degrés , mais non
pour les deux degrés ni pour le don principal.
�—
28 —
Telle était la règle sous l’ordonnance de 1 7 4 7 ; telle elle doit
dire sous la loi du 17 mai 18 26, qui est conforme à cette ordonnance.
Mais appliquer cette nullité, soit au don principal, soit aux deux
degrés de substitution , c’est créer une nullité , c’est violer la
maxime : U tile p e r inutile non vitia lu r.
Argumenterait-ou de l’article 896 du code.
Mais l’argument ne serait pas exact. En défendant d’une manière
absolue de faire une substitution , l'article 896 devait imposer une
peine à celui qui violerait celte défense; de là la nullité qu’elle a
prononcée contre le don principal qui serait grevé de la charge
de conserver et de rendre.
Mais la loi de 1826 , en rétablissant l’ancien droit , a par cela
même aboli la clause pénale qui était infligée par le droit nouveau.
D ’ailleurs c’était dans l’intérêt des transactions commerciales,
c’était pour faciliter les ventes que l’article 896 avait prohibé les
substitutions.
Les législateurs de 1 8 2 6 , ayant apprécié différemment les in
térêts de ces transactions, ayant rétabli la faculté de substituer, telle
qu’elle était autorisée dans l’ancien droit, ayant aboli l’article 896
et la prohibition qu’il prononçait, la clause pénale portée par cct
article a dû disparaître avec la prohibition qui en était la cause,
cessante c a u sa , cessât effect us.
Pou r qu’elle eût été maintenue malgré la suppression de la loi
prohibitive, il aurait fallu que la loi de 1 8 2 6 , déclarât de nouveau
que cette peine aurait lieu pour tous les cas où il y aurait substitu
tion au-delà des premier et deuxième degrés autorisés par cette
loi. O r , elle 11c dit rien de semblable.
Aussi M. Toullier , dans son droit civil français, traitant une
question semblable, même avant la loi de i82t'>, sous l’empire seu
lement de l’article 1048 qui , par une exception particulière, p e r
mettait à un père de donner à son fils, à la charge de rendre à ses
enfants au premier degré seulement , décide-t-il v que la charge
�— '-»9 » de rendre aux petits - enin nls , serait nulle , mais que le surplus
» subsisterait , parce qu’en ce cas le code n’a pas prononcé la
» nullité de toute la disposition, et qu’on ne peut suppléer une
» nullité. » E l l’auteur rappelé la maxime utile p e r inutile non
'vitiulur (v. au lome 5 , n° 729. )
M. Toullier cile en note, à la même p a g e , l'opinion de M.
Daniels , magistral très-distingué de la cour de cassation , qui , lors
d’un arrêt du 5i mars 1807 , disait que la nullité de la clause de
restitution 1 1 opérait pas la nullité de l’institution. (V. l’arrêt dans
le journal de S irey, an 1807, r. p. 19 8, cl dans celui de Denevcrs,
lome 5 , an 1807 , pages 19 5 -19 8 .
Ainsi, même sur celte question subsidiaire , le jugement dont est
appel se serait trompé.
L ’on voit donc que le tribunal de Mauriac a mal jugé sous tous
les rapports.
.
Il a mal jugé en refusant de reconnaître dans le sieur Rouclii le
!
titre d’héritier, et par conséquent de légataire universel de sou
!
on cle, que celui ci lui attribuait, à l’exclusion de tousses autres
parents , dans de nombreux passages de son testament.
Il a mal jugé en croyant voir dans ce testament, une substitution,
tandis qu’il n’y avait réellement, et que le testateur n’avait voulu y
consigner qu’une prohibition d’aliéner , prohibition nulle de plein
d r o i t , mais qui laissait subsister le don principal et dont la nullité
11e permettait pas de s’en servir pour constituer une substitution.
Il aurait mal jugé lors même qu'il y aurait substitution , parce
que , par sa lettre , comme par son ensemble , le testament 11e
renfermerait qu’une substitution au 2* degré , qui était autorisée
par la loi du 17 mai 1826 ; parce qu’aussi la disposition devrait ,
au besoin, èlrc interprétée favorablement dans l’intérêt de la validité
de l'acte, potins ut valent quant ut perçut.
Il aurait mal ju gé, même subsidiaircmcnl, s’ il y avait eu une
substitution perpétuelle, en ne la restreignant pas aux deux pre-
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5
I
iL y
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-
3o -
miers degrés, comme cela avait lieu sous l’ordonnance de 174 7 »
à laquelle nous a ramenés la loi du 17 mai 1 8 2 6 ; il aurait mal jugé
en créant une nullité que cette dernière loi n’établissait pas, et en
considérant une clause de restitution comme une clause de nullité.
M e A L L E M A N D , Avocat consultant.
Me R O U H E R ,
> Avocats plaidants.
Me DUMIRAL , )
M e L A M Y , Avoue.
RIO M . —- A. J O U V E T , Imprimeur-Libraire, près le Palais.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rouchi, Jean. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Rouher
Dumiral
Lamy
Subject
The topic of the resource
testaments
prêtres réfractaires
émigrés
indivision
domestiques
écoles
enseignement scolaire
cimetières
fondation d'une paroisse
successions
legs
intention du testateur
substitution
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean Rouchi, appelant, contre Michel Diernat, et autres intimés.
Annotations manuscrites. 22 août 1848 : texte du jugement définitif.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1793-1848
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3017
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3016
BCU_Factums_G3018
BCU_Factums_G3019
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53634/BCU_Factums_G3017.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rouen (76540)
Maintenon (28227)
Anglards-de-Salers (15006)
Angleterre
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cimetières
doctrine
domestiques
écoles
émigrés
enseignement scolaire
fondation d'une paroisse
indivision
intention du testateur
legs
prêtres réfractaires
substitution
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53363/BCU_Factums_G1911.pdf
2c0715838d409fcbb2d0b96773720143
PDF Text
Text
R É P O N S E
POUR
L A
D A M E
D’ O R CET
Au M é m o i r e des Sieurs D E L S O L .
I■i;
:<
A
u
A U R I L L A C ,
D e l’imprimerie de V i a l l a n e s ,
1808
Père et Fils..
li.
�3o/
RÉPONSE
POUR
Dame J e a n n e - M a r i e D E L S O L ,
M. G a b r i e l - B a r t h é l e m y
d e
veuve de
VIGIER-
D O R C E T , Demanderesse;
CONTRE
Sieur J e a n - F r a n ç o i s
DELSOL
G a b r ie l-B a r t h é le m y
aîné et
DELSOL-
V O L P I L H A C , Défendeurs;
E n présence du S.r D E S P R A T S , aussi Défendeur,
L
’H o m m e ne s’est mis en société, il ne s’agite tant
sur
la t e r r e , que pour avoir des propriétés et en jouir. Enfant,
esclave m ê m e , il veut avoir un pécule. Il tient sur-tout à
la faculté de disposer ; c’est par elle q u e , durant sa vie ,
il s’attache tout ce qui l’entoure ; c ’est à elle qu’au déclin
de ses jo u r s , il doit l’espoir de revivre dans ses dernières
volontés et dans le souvenir de ceux dont il fut le bienfaiteur.
C e droit si p r é c i e u x , la dame D o rc e t le réclame auA
�TjûS.
( O
.
jourd’hui » en repoussant Xinterdiction que les sieurs D elsol
font résulter d’une clause de retour insérée dans son contrat
.
de mariage. ( i )
U ne demande aussi juste a sa source dans le désir que
nous avons tous, d’ordonner de nos biens à notre gré ;
E lle
a sa sou rce,
dans l’obligation impérieuse pour la
dame D o r c e t , de payer toutes les dettes de son m a ri, et
celles q u elle a contracté pour faire honneur à sa m ém oire;
E lle a sa source dans l’h ab itu d e, devenue un besoin pour
e l l e , de répandre autour de ses h abitation s, les secours
que l’aisance doit au m a lh e u r:
E t n o n , comme on le d it, page 2. du m ém o ire, dans
F éloignement où ton a toujours tenu la dune D o rcet , de sa
fam ille , et dans l'impatience où sont les personnes qui l'en
tourent de s'assurer par des voies indirectes , avant son décès,
un patrimoine que les lois du sang , l'ordre établi par les lots
et le vœu de la nature lui prescrivaient de conserver intact
à ses proches.
N on ! la dame D orcet ne s’est pas tenue éloignée de sa
fa m ille ;
et les sieurs D e ls o l , qu’ont-ils donc fait pour se
rapprocher d’elle ?
Élevés loin de leur soeur, ont-ils jamais appris à la con( 1 ) C ’ est, dit-on , page 2. du mémoire , une demande prématurée ,
'dont les annales de la jurisprudence n offrent pas £ exemple. . . . Si l’on
lit D en isart, au mot substitution, n.° 1 1 9 , i z o e t 1 1 8 , on y trouvera
trois arrêts des 3 août 1 7 3 5 ,
4. septembre 1 7 5 5 et 1 3 avril
qui ont prononcé sur des substitutions non ouvertes.
1767,
Veut-on donc ,
q u e , dé};\ paralisée dans son droit de pro priété, par le refus du sieur
Desprats, par les inscriptions hypothéquaires et les prétentions liautem nt
proclamées des sieurs D elsol, la dame Dorcet attende, pour s’en plaindre,
que la saisie de ses revenus la réduise ¿\ solliciter leur pitié !
�3o 3
3
(
;) .
naître et à l ’a im e r? A leur m ajorité, ils n’ont vu que sa
fortune et lui ont demandé compte de leur part :
aujour
d’hui ! . . . . ils veulent la sienne.
N on ! rien ne les autorise à suspecter ses intentions, à l’ac
cuser de voies indirectes. Ils savent bien qu’avec une ame
b o n n e , fra n c h e , généreuse, elle a une force de caractère
qui ne la laisse à la discrétion de personne.
N o n ! rien ne l’oblige à conserver son patrimoine intact.
Q u e lui servirait donc d’être riche et
lib re? C e que
la
nature aurait pu lui commander pour des enfans, la nature
se borne à le lui conseiller pour des collatéraux *, et la loi
lui
permet de gratifier ceux qui auront le mieux mérité
d’e l l e , proches ou étrangers. ( 2 )
Mais la réserve que le C o d e N apoléon ne fait pas en
collatérale, les sieurs D elsol veulent la suppléer en exhu
mant du contrat
de
1 7 6 0 , une clause qu’ils appelent de
réversion ; clause qui eût empêché l’acte qui la co n tie n t, si
elle eût eu
le sens
qu’ ils lui attribuent ;
clause éteinte
par le prédécès de leur père qui ne la stipula que pour
lui } clause dont l’effet se serait confondu dans l’ins
titution u n iverselle,
faite à
leur
sœur ;
clause
enfin à
laquelle ils ne croyent pas eux-m êm es, puisque, tout ré-
(2 ) Combien plus commode était la loi de l’an 2 q u i , créant des héritiers
nécessaires, dans toutes les lignes , à l’in fin i, les dispensait de tous
procédés, de toutes convenances , et ne leur laissait d’autre soin que
celui de consulter les tables
agréable d’ctre habile
de probabilité ! c’est alors
q u ’il était
succéder ! tout était profit ; si les collatéraux
étaient ric h e s , on a v a i t , malgré e u x , les cinq sixièmes de leurs b iens;
s’ils étaient pauvres , on n’était pas obligé de leur fournir des alimens.
Législation absurde, q u i , pour
serrer les liens de la parenté, avait
rompu tous les liens de la famille.
�( 4 >
.
cfcmment, l’un -deux a acquis et payé partie de ces mêmes
biens qu ils soutiennent inaliénables .
Système insidieux qui, soutenu par des inscriptions ima
ginaires, par des chicanes adroitement prolongées, par des
insinuations répandues et accréditées avec art , n’a d’autre
but réel que d’intimider ceux qui seraient tentés d’acheter
des biens de la darne D o r c e t , de la tenir dans des alarmes
perpétuelles, d’arrêter ses dispositions, par
la crainte de
ne léguer que des p r o c è s , et de s’assurer ainsi , par une
interdiction de fa it , une hérédité que la loi ne leur réserve
p a s , qui ne leur est point dévolue par la convention et
qu’ils dédaignent d’obtenir par des.voies plus libérales.
C ’est par une suite de ce système q u e , dans leur m é
moire ( 3 ) , les sieurs D elsol ont oublié les principales cir
constances de l ’afFaire. L a dame D orcet n’agira pas ainsi j
elle dira to u t, répondra à tout: et le public , pour lequel
un sens droit et l’équité sont toujours des guides su rs,
pourra facilement reconnaître, s’il est juste et raisonnable,
que la dame D o r c e t , héritière universelle de tous les biens
de sa fa m ille , soit réduite à un usufruit p ré ca ire , et n’ait
rien en propriété : oui rien , pas même une légitime pater
n e lle , pas même son patrimoine maternel.
F A I T S .
E n l’année
baillage
1 7 4 0 , le sieur Basile D e ls o l, procureur au
d ’A u r il l a c , épousa la demoiselle
T h o m a s , fille *
uniqu e, très-riche.
Il résulte
de
leur contrat
R û u ssy , n o ta ire ,
le
de mariage ,
passé
devant
20 n o v e m b re ,
- ( 3 ) Q u e l 1on dit néanmoins , pnge 2 , destiné à faire percer la vérité
jusque* au public qui a souvent des opinions qui l'entraînent, des préju gés qui le subjuguent.
�3o/
f 5 } .
i . ° Q u e le sieur D elsol se constitua une somme de 300 1.
qui fut reçue par la dame L a g a rd e , sa belle-mère. ( 4 ) j
Q u e celle-ci fit donation à sa fille de tous ses biens
m e u b le s , im m eubles, n o m s , droits et actions présents et
à venir > tant de son c h e f que de celui du sieur T hom as
son m a r i , et encor de celui d’autre Jean T hom as son beaupère, sous réserve de l’usufruit pour en v iv re avec le fu
tur époux ; e t , en cas d’incompatibilité, la D am e Lagarde
se réserva la moitié de la maison par elle acquise du sieur
Faucher ( 5 ) , l’ameublement nécessaire, le profit de son
com m erce et 1 0 0 0 liv. pour disposer, tout quoi reviendrait
à sa fille lors de son décès -,
- 3 . 0 Q u e les dames T h o m a s , mère et fille , donnèrent
pouvoir audit sieur D elsol d’exiger paiement des sommes
qui leur étaient d u e s d e vendre leurs biens meubles et im
meubles , aux conditions qu’il a v is e ra it, sans être garant de
l ’insolvabilité des débiteurs ni d’aucune réduction desdites
Créances > comme aussi de faire à leurs immeubles les répa
rations qu’il croirait utiles , lesquelles lui seraient reconnues
'sur la simple quittance des o u vriers}
4 . 0 Q u ’attendu que les dames T h o m as faisaient un c o m
merce particulier, elles pourraient le continuer en sociétéj
le sieur D elsol autorisant, à cet effet, sa future épouse ;
5.0 Q u e Françoise P ru n e t, veuve de Pierre Lagarde mar
chand , intervint pour donner à la demoiselle Thom as tous
ses biens présens et à venir.
( 4 ) Les sieurs D elsol disent néanmoins q u ’à cette époque le sieur
Delsol avait touché, pour ses droits héréditaires, une somme consi
dérable ; mais ils ne font que le dire , ils ne le prouvent pas,
( 5 ) Cette maison fut vendue par le sieur Delsol,
r
�(é)
' Cet acte qui rendait le sieur Delsol fnaître absolu des
biens des dames T h o m a s , dévoile l’origine de ceux qu’il
acquit depuis.
L a dame Lagarde , n’ayant d ’autre enfant que la dame
D elsol , regarda comme siennes les affaires de son gendre ;
elle lui communiqua
toutes ses
ressources, le cautionna
dans ses baux-à-ferme et ses différentes spéculations. D e tels
m o y e n s , dans les mains d’un homme aussi industrieux que
le sieur D e ls o l,
devaient nécessairement avoir de grands
résultats.
E n même temps la dame Lagarde continua son commerce,
de société a v e c sa f i l l e , et si héureusement qu’il serait at
testé, par tous ceux qui l ’ont c o n n u e ,
qu’à sa mort elle
avait une très-grande fortune. ( 6 )
L a dame Dorcet est le seul fruit de ce premier mariage
du sieur D elsol. A la mort de la dame T h o m as sa mère,
la dame L a g a r d e , son ayeule , v o y a n t que le sieur D elsol,
déjà v ie u x , était décidé à ne pas se rem arier, ne prit aucune
précaution pour faire constater les biens que laissait sa fille,
ni pour em p êch e r, à son d é c è s, la confusion des siens avec
ceux du sieur D elsol.
F ille unique et appelée à recueillir de grands b ie n s , la
demoiselle Delsol fut
recherchée par les meilleurs partis.
M . de V ig ie r - D o r c e t , ancien officier de c a v a le r ie , et re
ceveur particulier des finances des élections de St.-Flour et
de M au riac, héritier d ’une maison opulente, ancienne et
bien alliée, obtint l’agrément du sieur D elsol.
(6)
Les sieurs Delsol n’ont point parlé , dans leur m é m o ire, du
premier contrat de mariage de leur père, ni des biens des dames T h o m a s:
on aura occasion de remarquer d’autres oublis encore plus essentiels»
�3o/'
(
Les deux
7
)
familles s’étant communiqué
leurs intentions
respectives , le contrat de mariage fut passé le % juin 17 6 0 .
E n voici les principales clauses :
« L e sieur D e l s o l ..............donne par donation entre vifs
« pure et sim ple, à la demoiselle D elsol sa fille ci-présente
» et acceptante, et autorisée en tant que de besoin par ledit
»> sieur de V ig ie r son futur é p o u x , par avancement d’hoirie,
» le dom ain e, terre et seigneurie du C l a u x , parroisse de
'» Naucelles ; en quoi que ladite terre et domaine du C la u x
» puissent être et consister, aux mêmes clauses, charges et
» conditions que le
délaissement lui
sera fait et adjugé,
» conformément à la demande qu’il en a formé aux requêtes
» du palais . . . . et , au cas ladite demande en délaisse» ment desdits biens ne lui serait pas a d ju g é e , ledit sieur
» D e ls o l, pour dédommager sa fille dudit domaine et terre
» du Claux , lui donne et délaisse toutes les créances qui lui
» sont dues sur lesdits b ie n s , en capital et accessoires. . . ( 7 )
» Ledit sieur D elsol a aussi do n n é, par même donation
» entre vifs, à ladite demoiselle D elsol sa fille, ce acceptante,
»> autorisée comme dessus, la somme de 1 0 ,0 0 0 liv. qu’il a
» présentement délivrée et comptée . . . .
>♦ E t , à l’égard du surplus de ses autres biens qui se trou» veront rester audit sieur D elsol , lors de son d éc ès, icelui
»
»
»
»
a promis de n’instituer d’autre héritière que ladite demoiselle Delsol sa fille , sous la réserve de l’usufruit de tous
les biens institués, et de pouvoir vendre et engager lesdits
biens, ainsi qu’il trouvera à propos, tant en la vie qu a la mort,
(7)
Ces créances montaient à environ 60,000 liv . ; au to tal, les dona
tions du sieur Delsol n’étaient q u ’un à compte sur les biens de sa bellemère et 'de sa f e m m e , qu’il avait confondus avec les siens.
**'c
�. ( 8 )
» et encore de pouvoir disposer d’une somme de 10 ,0 0 0 liv .,’
» et n’en disposant p a s , la réserve tournera au profit de
» sadite fille; et enfin, à la charge de payer à la demoiselle
» Lagarde sa b elle -m è re , au cas elle survive audit si.eur
» D e ls o l, une pension annuelle et viagère de 600 liv.
» £ / , au cas ladite demoiselle future épouse viendrait à dé-
» céder sans enfans ou ses enfans sans descendans ou sans
» disposer valablement , ledit sieur D elsol se réserve expressemènt
» le droit de réversion et retour , tant des biens donnés que
» réservés , sans q u il puisse être dérogé, par sadite fille future
» épouse, audit droit de réversion , par aucune disposition
» ni autres actes à ce contraires ».
V o ic i maintenant les clauses relatives au sieur de VigierD o rcet : « Et ledit sieur de Vigier o n cle , pour et au nom de
» ladite dame de M o ssie r, usant du pouvoir donné à ladite
» dame p a r ledit feu de V ig ier son m a r i, dans son c ontr at
» de mariage du 1 1 février 1 7 2 7 , nomme ledit sieur de
» V igier aîné futur époux , pour recueillir l’effet de la
» donation de la moitié de tous ses biens, conjointement par
» eux faite au profit de celui de leurs enfans à naître
qui
» serait choisi par eux ou par l’un d’e u x .............
» Et en vertu du pouvoir spécial porté en ladite procuration,
» il a donné et donne , à titre de donation entre vifs , audit
» sieur de V igier futur é p o u x ,
tout le surplus des biens
» meubles et im m eubles, présens et à venir de ladite d a m e ..
» S e réserve de plus ladite d a m e , la liberté de disposer
» par acte entre vifs ou à cause de m o r t , d’une somme
»> de 1 0 ,0 0 0 liv. à prendre sur les biens par elle donnés. . . .
>► Se réserve pareillement ladite dame de V i g i e r , et pour
» elle , ledit sieur procureur constitué, le retour et reversion
» a elle et aux siens t des biens par elle donnés audit sieur
futur
�» futur époux , dans le cas où il viendrait à décéder sans
» enfans ou ses enfans sans d escendans, ou sans avoir va» lablement
disposé ».
( 8)
L e sieur de V ig ier-d ’O rcet mourut en 17 8 5 , après avoir
fait un testament par lequel il instituait la dame d’Orcet
son héritière universelle. Sa famille prétendit qu’il n’avait
pu disposer au préjudice du droit de re to u r, et que les mots
sans avoir valablement dispose , ne se referaient qu a ses
enfans et descendans; m a is , par arrêt du 18 novem bre,
1 7 8 5 , le testament fut maintenu. L e sieur d’Orcet laissait
des dettes immenses. L a dame d'Orcet qui ne s’était rendue
héritière bénéficiaire que pour honorer sa m ém o ire, en a
p a y é pour 90 0,0 00 l i v . , et il en reste encore pour une
somme considérable.
C e ne fut que plus de
11
ans après le mariage de sa
fille q u e , le 20 octobre 1 7 7 1 , le sieur Delsol en contracta
un second avec la
demoiselle Dubois. ( 9 )
T ro is enfans
en provinrent. Suivant le cours trop ordinaire des choses,
le sieur D elsol tourna toutes ses affections vers les fruits de ce
dernier h ym en. L a dame d’Orcet, sa fille, vivait à Mauriac ; il
était in firm e;
on parvint facilement à lui persuader qu’il
n ’était pas lié par le contrat du 2 juin 17 6 0 .
(8 )
C ’est envain que l’on chercherait cette clause dans le mémoire
des sieurs Delsol. Ils n’ont pas dit un seul mot qui put seulement en
faire soupçonner l’existence.
( 9) C ’est encore envain que l’on chercherait dans le mémoire du
sieur D e ls o l, la date de ce second contrat. D es deux mariages du sieur
D e ls o l, disent-ils, page 3 , étaient issus plusieurs enfans. Et comme ils
y pai lent de suite de celui de la dame d’O rce t, ceux qui ne connaîtraient
pas leur fam ille , seraient tentés de croire qu’ils assistèrent au mariage
(de leur sœur.
B
�.
C 1 0 •)
C ’est dans cette idée q u e , par celui du 20 octobre 1 7 7 1 ,
il avait donné la moitié de ses biens à l’un des enfans
naître de son second mariage.
C ’est aussi dans cette idée qu’il fit, le 1 1 juillet
à
17 8 0 ,
un testament par lequel , après avo ir légué 100 0 liv. à la
dame d’Orcet, et 6,0000 1. à chacun de ses trois autres enfans,
il institua pour son héritier universel, son fils aîné du second
li t , et à son défaut , ses autres enfans, par ordre de primo
geniture; voulant expressément q u e, dans le cas où la dame
d’Orcet viendrait à mourir sans e n fa n s, ou ses enfans sans
descendans, son héritier profitât du droit de retour par lui
stipulé dans le contrat de mariage de sa fille. ( 1 0 )
C es deux actes ne sont que des monumens de l’infirmité
du sieur D e l s o l , et de l’influence qu’on exerçait sur lui ;
car on lui faisait faire des dispositions gratuites, on lui fai
sait dire que le droit de retour passerait à son héritier
institué, tandis que depuis 1 7 6 0 existait l'institution contrac
tuelle qui conférait à la dame d’O rcet tous les biens, droits
et actions qu’il laisserait à son décès.
Q uoi qu’il en so it, à cette dernière époque il fut fait in
v e n ta ire , e t , en exécution de deux sentences du baillage
d ’A u rillac, des 19 août
1 7 8 1 et 1 2
décembre 17 8 3 , un
partage , par lequel il fut délaissé aux enfans du second l i t ,
trois douzièmes des biens héréditaires pour leur légitime de
droit. Les neuf autres douzièmes restèrent à la dame d’O rcet
en vertu de l’institution contractuelle.
Devenus m a je u rs, les sieurs D e ls o l, tant en leur nom que
comme cohéritiers de Sophie leur sœur , morte al> intestat ,
(10)
Il sera inutile de s’occuper de ce testament, qui a été déclaré
nul par sentence du 1 9 août
178 2,
�( 11 )
ont passé, avec la dame d 'O r c e t , les
ïo
ventôse et 23 germi
nal an 9 , deux actes séparés, dont voici
les principales
clauses ( 1 1 ) :
i . ° Les sieurs D elsol approuvent le partage des immeubles
de leur
p ère, fait par Lasmoles et D eveze , experts , en
vertu des sentences sus*énoncées }
2 .0 Ils cèdent a la dame d’O rcet le huitième revenant à
- chacun d’eux ( 1 2 ) dans l’argent c o m p ta n t, le prix du
m o b ilie r, les créances perçues, et leur part dans la somme
de 10,00 0 liv. portée par le contrat de mariage du z juin i j 6 o ,
en quoi que le tout puisse être et consister, sans autres réserves
que celles ci-après ;
3 . 0 L a dame d’O rcet leur cède une somme de 30,000 liv.
due à la succession par la dame Di:bois leur mère ; elle
consent qu’ils répètent contr’elle une somme de 14 ,2 5 5 liv.
• qu’elle lui a payé pour pensions j elle leur délaisse en pro
priété le domaine de Coussergues ( 1 3 ) ;
4 .0 E lle cède à l’aîné le quart des créances à recouvrer ,
et au cadet la liquidation de la charge de receveur
consignations ;
.
-
-
rg-
■
des
-------
( 1 1 ) Les sieurs Delsol n’ont point p a r lé , dans leur m ém o ire, des
sentences de 1 7 8 2 et 1 7 83 , ni du partage fait
des traités de l’an 9 , par lesquels ils
en conséquence , ni
ont reconnu leur
soeur pour
héritière universelle, sans aucune réserve : traités qui sont le résultat
de plusieurs mois de conférences entre trois Jurisconsultes que les parties
avaient pris pour arbitres.
(12)
Par le double lien , ils avaient succédé à Sophie leur sœur
germaine , à l ’exclusion de la dame d’Orcct. D c j - lo r s , les 3 douzièmes
se partageant entr’eux , cela faisait un huitième pour chacun.
( 1 3 ) Ce domaine provient de la succession de la dame Thomas.
�( 11 ) .
j . ° Les sieurs D elsol tiennent quitte ia dame d ’O r c e t , de
toutes restitutions de jouissances et intérêts ;
6.° La dame d’Orcet demeure chargée des dettes de la
succession.
A u moyen de ce , les parties se tiennent respectivement quittes
du passé jusques h u i , et promettent ne plus se rien demander
tune à l'autre
sans dépens de part ni d'autre
Parmi les biens restés à la dame d’O rc e t , était une partie
de la montagne appelée du Broussete; elle l’a vendue au sieur
D elsol aîné, par acte du 28 fructidor an 10 , m oyennant
12,0 0 0 liv. Il a p ayé 8,000 , et la dame d’ Orcet l’a tenu
quitte des 4,000 liv. restant, au m oyen de ce qu’il a re
noncé au quart des créances à recouvrer. L e sieur D elsol
n’a vu aucun danger dans cette acquisition.
Mais bientôt ç’a été tout autre chose. La dame d’O rcet
venait de vendre au sieun Desprats le pré de C a n c o u r ,
lequel fait partie des biens institués. Les sieurs Delsol ont
vu avec peine cette aliénation qui diminuait une succession
sur la q u e lle , en leur qualité de frères et héritiers présomptifs
de la dame d ’O r c e t , ils croyaient pouvoir fonder quelque
espérance.
Peu après a paru l’arrêt de la C o u r de cassation du 1 1
fiimaire an 1 4 , qui a validé un droit de retour c on ven
tionnel et coû tu mie r } auquel on voulait
suppressive des substitutions. Alors
appliquer la
loi
les sieurs Delsol ont
conçu l’idée de faire revivre la clause du contrat de 1 7 6 0 ;
et ils ont publiquement annoncé les droits qu’ils disaient
avoir sur les biens de leur sœur. ( 1 4 )
( 1 4 ) Aussitôt les créanciers de la dame d’Orcct ont pris l’é v e i l; ses
biens ont été couverts d’inscriptions, et elle a eu la douleur de v o ir
�3/s
( «} )
Instruit de cette clause et des prétentions des sieurs D elsol,
le sieur Desprats a craint qu’ils ne vinssent un jour l’évincer
de son acquisition, et il a refusé d ’en payer le prix. £ur
le commandement qui lui a été fait le n
juillet 1 8 0 6 , il a
répondu que le droit de retour étant une stipulation con
ditionnelle qui passe aux héritiers , il avait juste sujet d ’ap
préhender d’être troublé dans la propriété du pré de C a n co u r,
et de demander par conséquent à résoudre la vente , ou à
retenir le prix , ou à p ayer
sous caution.
Q ue pouvait faire la dame d’O rcet dans cette occurrence?
F ra p p ée, par le f a i t , d’une incapacité absolue de disposer
de ses biens, elle n’a pas eu à choisir parmi les m oyens
de la faire cesser ; il ne s’en présentait qu’un et elle l’a
saisi ; elle a demandé contre le sieur Desprats la conti
nuation de ses poursuites, et contre les sieurs D e ls o l, la nullité
de la clause de retour.
Ici ont commencé les chicanes des sieurs D elsol. Cités au
bureau de p a i x , l’aîné a répondu q u il ne connaissait pas le
contrat de mariage de sa saur ( 1 5 ) ; qu il ignorait si son père
y avait stipule un droit de retour ; quen le supposant a in si , il
n aurait qu une espérance, &c. . . . O n a prétendu pour le cader,
qu’il avait changé son domicile à P a r i s , e t , sous ce prétexte,
on a éludé la clôture du procès-verbal jusques au 1 1 août.
Assignés au trib u n a l, chacun d’eux a constitué son avoué ,
et, après avoir tergiversé pendant plus de huit m o is, ils ont
dans cette circonstance , que la crainte étouffait toutes les considérations
et jusqu’à la v o i x de l’amitié.
(15)
Il ne le connaissait pas ! et depuis plusieurs mois, il le poitait
dans sa poche, le lisant à tout le monde et ne parlant d’autre chose !
�( H )
dem andé, par des exceptions séparées, à être mis hors de cause,
s’agissant, disaient-ils, d’un droit non ouvert.
5 juin 18 0 7 . Jugem ent par défaut, qui leur a ordonné de
défendre au fond.
Ils ont fait signifier des défenses le 2 ju ille t, en protestant
de se pourvoir contre le jugement du 5 ju in ; c ’est-à-dire,
q u ’après avoir défendu, ils se réservaient de faire juger s’ils
devaient défendre.
C es neuf mois qui se sont écoulés entre l’assignation et le
jugement du 5 juin , les sieurs D elsol les
ont em ployés à
résoudre un problème qui les tourmentait fort. Il ne s’agissait
de rien moins que de faire, sur les biens de la dame d’O r c e t ,
des actes conservatoires de ce même droit de re to u r, qu’ils
soutenaient n’être pour eux qu’une espérance incertaine. D e là
sont venues deux inscriptions montant à ic o ,o o o l i v . , que les
sieurs D elsol ont pris sur tous les biens présens et à venir 'de
leur sœ u r, et le croirait-on? Pour sûreté de la créance résul
tante en leur fa veu r, de cette sentence du 29 août 1 7 8 2 , qui
avait ordonné le p a rta g e , et sur laquelle les parties avaient
irrévocablement traité , sans aucune réserve , par les actes de
l ’an 9 ; ces inscriptions, basées sur un titre étein t, ne pou
vaient se soutenir; mais elles avaient provisoirement l’effet
de frapper les biens de la dame d’O rcer.
L a nullité de ces inscriptions a été prononcée par jugement
contradictoire du 30 juillet 1 8 0 7 , auquel
ont
acquiescé en payant les dépens;
les sieurs D elsol
mais avant
qu’elles
fussent r a y é e s , ils les ont renouvelées par un autre de la même
somme de 1 0 0 ,0 0 0 liv. qu’ils ont prise en vertu du contrat
de 17 6 0 , sur les biens que la dame d’O rcet possède à Mauriac,
le 2 juillet d ern ier, c’est-à-dire le même jour qu’à A u rilla c ,
�( M )
en défendant au fond , ils se réservaient de faire juger qu’il
ne s’agissait que d’un droit non ouvert.
Q uoiqu’ils eussent donné leurs m oyens par é c r it , les sieurs
Delsol n’ont pas voulu les plaider à l’audience. L e 6 août ,
un second jugement par défaut a déclaré nulle la clause du
droit de retour , et ordonné la continuation des poursuites
contre le sieur Desprats.
Les sieurs D elsol ont formé opposition à ce jugement ; et
ce n’est qu’au mois de février 18 0 8 , qu’ils se sont enfin pré
sentés à l’audience o ù , sur plaidoiries respectives, il a été.
ordonné une instruction par écrit au rapport de M . le Président.
Pendant les plaidoiries, un mémoire a p a r u , dans lequel
les sieurs Delsol ont essayé d’établir quatre propositions :
i . ° Q u ’en p rin cip e, le droit de retour est transmissible
aux héritiers du donateur ;
2 . 0 Q ue ce droit n’est pas atteint par les lois abolitives des
substitutions ;
3 .0 Q u e l’institution faite en faveur de la dame d’O rcet ,
ne comprend pas l ’efFet d ’une clause stipulée contr’elle }
4 .0 Q u ’en aucun c a s , elle n ’a pas le droit de disposer des
biens soumis au droit de retour.
T e l est l’état actuel de l'affaire.
OBSERVATIONS
GÉNÉRALES.
Suivant l’ancien d ro it, le père était seul tenu de constituer
à sa fille une dot qui s’appelait profectice, et la fille mourant
pendant le mariage , la dot restait au mari. ( 1 6 )
(16 )
La mère n’ayant pas la puissance paternelle, ce qu’elle donnait
à ses enfans était adventif. Si elle les instituait par testament, ils étaient
réputés héritiers étrangers, heredes extranei. Instit. liy, 2 , tit. 1 9 ,
�( l 6 ) .
D e l à il arrivait que le père avait la douleur de perdre à
la fois et sa fille et la d o t, et l’on craignit avec raison que
Retour ¿¿gai.
cela ne refroidît la générosité des pères. C ’est ce qui fit
introduire le retour légal en vertu duquel le père reprenait
la d o t , si la fille mourait sans postérité.
Ju re succursum est p a tri , ut filiâ amissâ solatii loco cederet,
si redderetur ei dos ab ipso profecta , ne et filics amis sce etpecunia
damnum sentiret. Leg. 6. ff. de jure dotium.
Prospiciendum est enim ne hâc injecta fo rm id in e , parentum
circà liberos munificentia retardetur. Leg. z. cod. de bon. quce. iib.
L e retour légal avait lieu dans la jurisprudence française}
mais les parlemens y avaient mis différentes modifications.
D a n s la coutume de Paris les ascendans l’exerçaient à titre de
succession particulière.
Il a été maintenu 'par l ’art. 5 du décret du 23 ventôse
an i pour les donations antérieures au 5 brumaire.
L ’art. 7 4 7 du code N apoléon le rétablit comme droit
successif.
Retour
L e retour conventionnel est évidemment fondé sur les mêmes
conyentionnel, motifs que le retour légal. Le donateur est inspiré par la même
crainte qui a fait introduire c e l u i - c i ; et s’il stipule un droit
que la loi réserve tacitement pour l u i , c’est parce que la
stipulation a cet effet, que le donataire ne peut l’éluder en
disposant ; car c’est la seule différence qui existe entre le retour
légal et le retour conventionnel.
Il a été maintenu par l’art. 7 4 de la loi du 1 7 nivôse an 2.
L ’art. 95 r du code N apoléon permet au donateur de le
stipuler ; mais pour lui seulement.
extra m is. D e 1A vint une grande différence que l ’on aura occasion de
rem arq uer, entre le retour stipulé par le p è re , et le retour stipulé par
la mère.
Outre
�S i*
( *7 )
Outre ces deux m oyens de faire rentrer les biens donnes
dans le domaine du donateur, il en existait d’autres par lesquels
il pouvait obliger le donataire à les conserver et à les rendre
à d’autres personnes gratifiées en second o rd re , et alors ces
clauses étaient des substitutions.
Elles furent abolies par le décret du 1 4 novem bre 179 2 .Elles sont prohibées par Tart. 896 du code N apoléon.
C ela p o s é , la dame d’Orcet va considérer la clause dont
il s’agit, sous les deux rapports q u ’elle présente, ce qui divisera
la discussion en deux parties.
D ans la prem ière, elle prouvera que la clausç de réversion
des biens réservés est nulle et com m e non é c rite , ou que c ’est
une substitution abolie par la loi de 17 9 2 .
C et ordre paraît plus c la ir , en ce que la solution de cette
première difficulté, servant à en résoudre d’autres qui se pré
senteront dans la deuxième partie, cela épargne des répétitions.
D an s la se c o n d e , elle établira:
i . ° Q u ’en fait, le retour dont s’agit était purement personnel
au sieur D elsol ;
z .° Q u ’en d ro it, ce retour ne peut profiter aux sieurs
D elsol ;
3 . 0 Q u e , dans tous les cas, il tomberait dans l’institution, et
se serait confondu dans la personne de la dame d ’O r c e t ,
héritière universelle ;
4 . 0 Q u e , nonobstant la clause, elle pourrait dispose'r.
Les propositions des sieurs D elsol seront examinées et
débattues dans le cours de la discussion, selon qu’elles auront
trait à l’une de c e lle s - c i.
Substitutions,
�M
O
(
i8
)
Y
E
N
P R E M IÈ R E
S
.
P A R T IE .
BIENS R É S E R V É S
.
«<VW « W V ^ i
P R O P O S IT IO N .
La clause de réversion des biens réservés est nulle
et comme non écrite, ou cest un substitution abolie
- par la loi du 14. novembre 179 2A v a n t de discuter cette proposition, il faut se fixer sur
l ’effet de la clause par laquelle le sieur Delsol a promis de
n instituer d'autre héritière que la demoiselle D elsol sa fille.
A l’au d ien ce, les sieurs Delsol ont prétendu que ce n était
là qu’une promesse d’égalité, et q u e , par générosité pu re,
traitant avec leur sœur , ils l’avaient reconnue pour héritière
universelle.
L a dame d’O rcet a trop
sultes ( 1 7 )
bonne idée des trois Juriscon
qui préparèrent ces traités,
pour croire qu’ils
aient, hésité un instant sur sa qualité d’h éritiè re ; et il lui
est aujourd’hui permis de croire que les sieurs Delsol n’au(17)
M. Coffinhal, membre du Corps législatif, et MM. Vigier et
yerniols, avocats,
»
�5/cj
( *9 )
raient pas manqué alors l ’occasion de prendre une grande
partie des biens qui sont l’objet de leur sollicitude.
Q u i ne sait , au re s te , que la promesse d’instituer vaut
institution ? O n peut vo ir là-dessus, Lacom be , n .° premier;
Lebrun, liv. 3 , chap. 2 , n .° 4 4 i Catelan ,.tom. i . er, liv. 2,
chap. 4 4 ; Heftrys, liv. 5, chap. 4 , question 5 9 ; F u r g o l e ,
des donations, tom. 5 , page 1 0 4 , 0 1 1 il cite un grand nombre
d ’autres auteurs.
L a clause a donc le même sens qu’elle aurait, si elle était
ainsi conçue : « Le sieur D elsol ria institué d'autre héritière,
que sa fille ». E t lorsqu’en même temps il se réserve
de
pouvoir disposer d’une somme de 10 ,0 0 0 l i v . , laq uelle, faute
de disposition, tournera au profit de sa f i l l e , lorsqu’il la
charge de p a y e r , sur cette institution, une pension de 600 liv.
à la dame Lagarde son ayeule,- il faut fermer les y e u x à
la lum ière, ou convenir que c’est là une'véritable institution.
C 'est a in s i, au surplus, que l’ont reconnu les semences
de 1 7 8 2 et et 1 7 8 3 qui avaient acquis l’autorité de la chose
jugée par le partage fait avec la tutrice des sieurs D elsol j
d o n c , lorsqu’en l’an 9 , ils ont traité avec la dame d’O rc e t,
comme héritière u n iv e rse lle , ils n’ont pas été généreux , ils
ont été forcément justes.
M aintenant, lorsque le sieur D e lso l a stipulé la réversion
des biens réserves, de quels biens a-t-il entendu parler ? U ne
seconde lecture des clauses ne résoudra pas cette question;
et il n en restera que la conviction intime q u e ,p e u versé dans
le droit, quoiqu’il eût vu beaucoup d’affaires , le sieur D elso l
entassa sans ordre et sans ch o ix , dans ce contrat de ma
r ia g e , toutes les clauses
dont il avait des réminiscences,
et qu’il croyait analogues à ce qu’il voulait stipuler.
P o u rq u o i,
par
e x em p le, cette réserve de l’usufruit des
�( 10 )
biens institués, dès qu’il est de l ’essence de toute institution
de n’avoir d’exécution qu’à la mort de celui qui la fait ?
Pourquoi cette réserve de pouvoir vendre
et engager,
dès qu’il n’ assurait à sa fille que le surplus des autres biens
qui se trouveraient lui rester , lors de son décès ?
Pourquoi
cette réserve de pouvoir vendre et en g a ge r,
même à la mort ; com m e si on pouvait engager et vendre
par testament ?
Après, c e la , faut-il s’étonner q u e , de suite, il stipule la
ré versio n , tant des biens donnés que réservés * c’est-à-dire ,
des biens qu’il donne et des biens qu’il ne donne pas ?
M ais ces biens réservés, quels sont-ils ? C e ne sont pas
les biens institués; car lorsqu’il en a p a rlé , il les a appelés
biens institués. C e sont donc les
1 0 ,0 0 0 liv. dont il s’est
réservé la disposition.
Cependant les sieurs D elsol veulent que ce mot réservés
se référé aux biens institués.
Mais une institution contractuelle peut-elle être frappée
d’un droit de retour.
Q u ’e s t - c e d’abord qu’une institution contractuelle ?
« C ’e st, dit L e b ru n , liv. 3 , cliap. 2 , n .° 7 , une donation
» entre vifs du titre et de la qualité d ’héritier, lorsque la
» succession de l’instituant sera ouverte.
» C e n’est, dit F e rriè re , au mot institution , ni une donation
» entre v i f s , ni une donation à cause de m o r t , c’est un don
» irrévocable de succession.
» C ’est, dit Lacom be, n.° 1 .er, une donation du titre d’héritier.
» C ’est, dit C h a b r o l, chap. 1 4 , art. 1 6 , un don irrévocable
» des biens que l’instituant laissera à son décès ; il dispose de
» sa succession, il met l’héritier institué à la place de l’heritier
ab intestat.
�» C ’est, dît D enîsart, n .9 i et 1 4 , une disposition qui fait
»> un héritier indépendamment de la loi. L ’héritier contractuel
»> ne peut disposer des biens qui composent l ’hérédité avant
» l’ouverture de la succession; il ne peut ni les transmettre
» à ses h éritiers, ni les hypothéquer à ses créanciers, s’il ne
» les a lui-m êm e recueillis j et son droit devient caduc j s’il
» prédécéde ceux qui l ’avaient institué, parce que l ’institution
»> ne donne aucun droit à l’institué sur les biens présens. »
E n un m o t , c’est une disposition amphibie , un testament
irré v o c a b le , mais q u i, à l’instar de tous les testamens, ne
transmet les biens qu’au décès de l’instituant.
Q u ’e s t - c e maintenant que le droit de retour?
>► C ’est, dit Denisart, n .°
i . er, un droit par le m oyen
» duquel le donateur recouvre, par le décès du donataire, les
» choses qu’il lui avait données.
» C ’est, dit C h a b ro l, chap. 1 4 , art. 2 4 , un droit par leq u el,
» en donnant ses biens entre v i f s , on peut se réserver la réver» sion , dans le cas o ù le donataire viendrait à mourir avant
» le donateur.
» C ’est, dit F e rriè re , un droit en vertu duquel les immeubles
» donnés par les ascendans à leurs descendans retournent aux
» donateurs, lorsque les enfans donataires décédent sans hoirs.
» C ’e s t , dit D o m a t , lois c iv ile s , liv 2 , titre 2 , section 3 , le
» droit que peut avoir un d o nateu r, survivant à son donataire
» de reprendre les choses données. Ut quod dédit , iterùm a i
» eum reveriatur. Leg. fin . cod. commun, utriusq. judic.
, C ’est, en un m o t, un droit en vertu duquel les biens dont
le donateur s’est d essaisi, reviennent dans ses m ains, parce
que le donataire meurt avant lui sans postérité.
T out droit de retour doit donc être essentiellement de nature
à pouvoir profiter au donateur personnellem ent: les sieurs
�( “
)
D elsot reconnaissent e u x -m ê m e s
ce principe, car ils ne
cessent*de repéter dans leur m ém oire, et notamment page 9 ,
qu ils ont continué en leur personne la saisine dont le sieur D elso l
était revêtu.
'
Des-lors, il est impossible que le droit de retour soit apposé
dans un testament, ni dans une donation à cause de m ort,
ni dans une institution contractuelle, puisque les choses qui
en font l’o b je t , ne sont acquises à l ’héritier ou au donataire
que par le décès du testateur, du donateur ou de l’instituant;
les biens ne peuvent lui retourner, puisqu’il n’en a pas été
dessaisi, et de même que l’on ne peut re v e n ir, si l’on n’est
point parti, de même l ’on ne peut se réserver de reprendre
ce qu’on n’a pas donné.
Cela p o sé , de deux choses l’u n e; ou il faut rayer dans la
clause de réversion ces m o ts, tant que réservés, ou il faut dire
q u e , par rapport à ces biens, le droit de retour n’était qu’une
véritable substitution Fidéicommissaire abolie par la loi du 14
novem bre 1 7 9 2 .
E n effet, il est évident que le sieur Delsol ne pouvait se
réserver à lu i-m êm e la réversion de ces b ie n s, puisqu’il ne
les avait pas abdiqués et qu’il devait mourir
avant que la
Üame d’O rcet pût les a v o ir ; o r , il est aisé de comprendre que
le sieur Delsol n’a pas voulu dire :
Quand je serai mort, un j o u r , qu alors , en vertu de l'institution
contractuelle énoncée
dans le présent contrat, ma fille aura
recueilli ma succession, et que, postérieurement elle viendra à mourir
sans enfans , ou ses enfans sans descendans, ou sans valablement
disposer ; dans ce ca s , moi D elso l , me réserve la réversion des
biens qui auront composé mon hérédité.
C e serait supposer au sieur D elsol l ’idée la plus absurde
qui puisse entrer dans la tête d’un h o m m e , puisqu’elle repose
�3^ a
C *r)
toute entière sur une chose physiquement impossible et contre
nature.
U n e telle clause est nulle et reprouvée par les lois.
Quæ rerum naiurà prohibentur, millâ lege confirmant sunU
Impossibilium nulla obligatio. Leg. i8<j de regulis ju ris.
S i impossibilis condiùo ofrligationibus adjiciatur , n ih il valet
stipulaùo. Impossibilis autem condiùo habetur 3 cui natura
impedimenio est , quo minus existât , veluii si quis itci d ix e rii:
si digito ccelutn attigero , dare spondes ? Instit . i l de inutilib,
stipulât.
« Toute condition impossible........... est nulle et rend nulle
» la convention qui en dépend. Art. 1 1 7 2 du code N apoléon .
» Dans toutes dispositions, entre vifs ou testamentaires, les
conditions im possibles.. . . sont reputées non écrites. Art. 900.»
Et certes, il n’y avait pas plus d’impossibilité pour le sieur
D elso l à toucher le ciel avec le d o ig t, qu’à ressusciter, pour
succéder à sa fille.
L a réversion des biens réservés est donc une condition
impossible et contre nature } par conséquent, elle est nulle
et comme non écrite.
Cependant, les sieurs Delsol prétendent, page 21 , que ce
n’est là qu’une objection spécieuse, et q u e , d ’après tous les
auteurs et particulièrement d'après R ic a r d , Furgole et P oth ier ,
S o n peut apposer un droit de retour à toute espèce de libéralités , et
par exprès quon peut Capposer à une institution contractuelle. ( *# )
( 18 ) Quand les sieurs D elsol copient des consultations et des
m émoires, que des jurisconsultes vivans ont fait pour leur cause, ils
peuvent se dispenser de citer les auteurs; m ais, quand ils invoquent
R i c a r d , Furgole et P o th je r, pour appuyer une absurdité de nature à
Être a p e r ç u e par un enfant, ils doivent citer le livre et la page où
I
�(«4 )
Ces auteurs étaient trop instruits pour professer une telle
opinion. Leurs ouvrages sont pleins de maximes contraires.
R ic a r d , dans son traité des donations, 3«e partie, chap. 7 ,
section 2 , n .° 7 7 1 , d it : qu’il faut prendre garde que le
» droit de retour est absolument contraire à la nature des
» donations entre v i f s , dont l’effet est de transférer irrévoca» blement au donataire la propriété et la possession de la chose
» donnée
sans aucune apparence de retour au profit du
» donateur. C ’est la définition et l’essence de la donation
» entre vifs. D on ad o propriè appellatur, cùm dat aliquis ea
» mente, ut statirn velit accipieniis f i e r i , nec ullo casû ad se
» revertí. Leg. 1 , D ig . de donat.
C o m m e n t a u r a it - il
pu dire ensuite que l’institution qui
ne transfère ni propriété n i possession , était susceptible de
retour à l’instituant qui reste saisi de tout?
A u s s i, après avoir établi que les institutions et les legs
peuvent être conditionnels , il décide , d’après une foule de
lo is , dans son traité des dispositions conditionnelles, chap. 5 ,
section 2 , n .° 2 3 4 , que les conditions impossibles sont nulles
et/ie produisent aucun effet; de sorte quelles sont considérées
com m e non écrites. Impossibilis conditio in institutionibus et
legatis nec non in Jid e i commissis et ' libertatibus , pro non
scriptâ, habetur.
F u rg o le , des donations, tom 5 , page 1 7 1 , dit que les
donations, en contrat de m ariag e, sont susceptibles de toutes
sont leurs opinions, pour ne pas exposer le lecteur à croire, sur parole,
( et c’est peut-être ce qu’ils désirent ) ou à se fatiguer en vaines recherches ,
l et c’cst ce que le lecteur n’aime pas ). La dame d’Orcet doit ajouter
que nulle part, ces trois auteurs n’ont dit que le retour puisse être
ppposé h une institution contractuelle.
sortes
�C
)
sortes de conditions honnêtes et possibles; et, quoique les
institutions contractuelles fussent considérées, dans son parle
m ent, comme des donations entre v ifs , il atteste, page 1 1 3 ,
« qu’on juge que l’institution ou la promesse d ’instituer, qui
» sont la même c h o se ,
sont caduques par le prédécès de
» l’institué lorsqu’il ne laisse pas des enfans ; quoique le droit
» de réversion n ’ait pas lieu , suivant F ern a u d , n .° 9 , et M . de
» C atelan , liv. 4 1 chap. 1 2 ».
C e t auteur est donc bien éloigné de décider que la réversion
soit une condition possible dans une institution.
E n fin , Pothier q u i, dans son traité des donations entre v ifs,
se borne à indiquer l’origine du droit de retour , d it, dans son
traité des obligations, part. 2 , chap. 3 , art. i . er, § 2 , que la
condition d’une chose impossible rend l’acte nul, si elle es tin.
faciendo ; qu’elle n’a aucun effet, si elle est in non faciendo ;
et qu’elle est n u lle, sans vicier le l e g s , si elle est portée
dans un testament.
T o u t ce
que ces auteurs ont pu d ir e , comme tous les
autres, de relatif à cette m atière, se réduit à ce que toutes
les conventions et dispositions, soit entre v i f s , soit à cause de
m o r t , sont susceptibles de toute espèce de c on d ition s, pourvu
qu’elles ne soient ni im possibles, ni illicites.
A u s s i, ne pouvant citer ïeurs o p in io n s,
les sieurs D elso l
en émettent une de leur c r u , page 2 1 du mémoire.
L'institution contractuelle, disent-ils , est comme la donation
entre v if s , un contrat, une obligation que contracte t'instituant
envers l'institué , de lui laisser ses biens ; elle ne diffère de la
donation entre vifs } qu'en ce qu'elle est faite ious la condition
particulière de la survie du donataire.
Cela n’est pas exact. L ’institution n’a de commun avec la
donation entre vifs que l’irrévocabilité. L e donateur ne pro-
D
�t f )
ittet pas de laisser ses b ie n s , il les d o n n e, il s’en dépouille
actu : au lieu que l’instituant n’en peut être désaisi que par sa
m o r t , et l’institution est caduque s’il survit à l’institué.
M ais cette condition particulière de survie n empêche pas que
(
ï instituant contractuel ne puisse fa ire résilier ou révoquer sa
libéralité , si telle ou telle condition a rrive , n importe en quel
temps , et que cependant elle puisse avoir jusques-la tout son effet i
Il est impossible que l ’instituant révoque l’ institution et que
celle-ci ait jusques-là son e ffe t, puisqu’elle ne peut 1 avoir
q u ’après la mort de l’instituant. L a condition qu’on suppose,
ne p o u r ra , par conséquent, être un droit de re to u r, qui ne
peut avoir lieu que pour un objet précédemment transmis.
E n ce cas , les biens qui en sont Cobjet , comme étant retournés
à la masse de l'hérédité et réunis au patrimoine du donateur ,
appartiennent à ceux qu i, lors de l'arrivée de la condition réso
lutoire , se trouvent représenter le donateur ou l'instituant.
T o u t-à -l’heure on faisait opérer la résolution au profit de
l’instituant, à présent c’est en faveur de ses héritiers ; mais
il ne s’agit donc pas d’un droit de reto u r, parce que l’instituant
n’a pu leur transmettre un droit qui ne pouvait s’ouvrir en sa
personne.
C’est le donateur lui-même, toujours existant dans leur personne,
qui reprend sa chose , comme ayant cessé d'appartenir à l'institué,
au moyen de la résolution de Cinstitution qui a eu lieu par
l'événement.
M a is , encore une f o i s , les r e p r é s e n t a i de l’instituant ne
peuvent pas re p re n d re, par retour, des biens qui n’ont passé
que par sa mort à son héritier ; et s’ils ont droit de les reprendre
après que l’institué les a recueillis, ce ne peut être que com m e
gratifiés en second o r d r e , et alors il y a fideicommis.
Comme L donateur , ou ses représentans reprennent la chose
�'
3i r
( 17 3
'donnée , lorsqu 'il y
a survenance d'enfant , même posthume ,
quoique le posthume ne soit né que depuis son décès.
L a révocation s’opère alors en vertu de la loi qui attache
3 la donation la condition si sine liberis ; la donation est résolue
au profit du donateur qui s'est ex p ro p rié , (x amiquâ causa
et inherente contractui. Mais il est impossible que le retour
apposé à une institution ait jamais ce résultat, puisqu’il ne
peut résoudre, au profit de l’instituant, une disposition qui
ne prend effet que par sa mort. L e reto u r, en ce cas , n’est
qu’une stipulation de caducité; o r , il est clair com m e le jour,
que l’institution ne devenant c a d u q u e , que par le prédécès
de l’instituant, la caducité ne peut jamais s’ouvrir en faveur
de ses héritiers, puisque dès le moment de sa m ort, l’institué
se trouve saisi et ne peut être dépossédé , à moins qu’il n’y
ait fidéicommis.
Il faut donc répéter que la réversion des biens réserves est
nulle et com m e non-écrite.
E t que gagneraient les sieurs D e lso l à ne pas le rayer
de la clause? lisseraient alors dans la deuxième h yp oth èse,
et forcés de convenir que le retour des biens réservés n ’est
q u ’ une véritable substitution abolie par la loi du
14
no
vem bre 1 7 9 2 .
Q u ’est ce qu’une substitution fidéicommissaire ?
« 1 1 y a fidéicom m is, dit M . M e r lin , questions de droit,
# tom. 8 , page 4 8 8 , toutes les fois q u ii existe une disposition
» par la q u e lle , en gratifiant quelqu’un , on le charge
» de rendre l ’objet de la libéralité à un tiers que l’on en
» gratifie en second
ordre.
A in si,
dans une
disposition
» fidéicommissaire, il entre nécessairement tiois personnes
» celle qui d o n n e , celle qui est gratifiée à la charge de
» rendre et celle à qui l ’on doit ie nd re »,
�« L es substitutions sont p ro h ib ées, dit l’art. 896 du Code
» N a p o l é o n , et afin qu’on n’équivoque pas sur le m o t , il
» ajoute : toute disposition par laquelle le donataire, l’héritier
» institué ou le légataire sera chargé de conserver et de rendre
» à un tiers j sera nulle, même à l’égard du donataire, de
» l’héritier institué ou du légataire ».
E t , dès le 1 4 novembre 17 9 2 , une loi avait aboli toutes
les substitutions non ouvertes et en avait attribué les biens à
ceux qui en étaient saisis.
L a charge de conserver et de rendre à un tie r s , voilà le
caractère distinctif de la substitution, quelle que soit d’ailleurs
la disposition qui la contient.
C ’est, conformément à cette règle , que l’art. 898 du C o d e
porte : « que la disposition par laquelle un tiers serait appelé
» à recueillir le don , l ’hérédité ou le legs , dans le cas où
» le donataire , l’héritier institué ou le légataire ne le recueil» lerait pas , ne sera pas regardé comme une substitution et
» sera valable ». L a raison en e s t , qu’en ce c a s , il n’y a pas
charge de conserver et de rendre, puisque le premier gratifié
n ’a pas recueilli , et que le second appelé prend la libéralité,
sans intermédiaire , et de la main même du donateur.
11 sera maintenant facile de discerner si la réversion des
biens réservés forme une substitution.
L e sieur Delsol pouvait stipuler pour lui , et même pour
les siens, le retour des biens qu'il donnait} c’est-à-dire du
domaine du C la u x et des 1 0 ,0 0 0 liv.
Mais il est démontré qu’il ne pouvait se réserver de repren
dre les biens qu’il ne donnait pas; c’est-à-dire les biens compris
dans l’institution contractuelle.
Cependant le contrat de mariage ne parle que du sieur
�( *9 )
D elsol. ' C ’est lui qui se réserve le droit de réversion } il nô
parle pas même de ses parens.
Il faut donc se prêter aux besoins des sieurs D e l s o l , et
supposer, avec e u x , que les héritiers du sieur D elsol sont
implicitement compris dans la mcme ré s e rv e , suivant les lois
relatives à la transmission dont ils ont fait un si pompeux
étalage. Cette supposition ne suffira pas pour lever la difficulté;
c a r, si la stipulation est censée avoir étç faite implicitement
en fa ve ur des h éritiers, il n’en est pas moins vrai q u ’elle
com prend, en termes fo rm els, le sieur D elsol ; et on a établi
l ’impossibilité que les biens compris dans l’institution retour
nassent jamais à lui.
11 faut donc pousser la complaisance jusqu’au b o u t , et
supposer que le sieur D elsol a voulu se. conserver à lui-même
le droit de retour des biens donnés , et qu'il n’a pas voulu
se conserver à lu i, (puisque cela ne pouvait pas être) , mais
à ses héritiers, le droit de retour des biens
réservés.
Si les sieurs D elsol trouvent une hypothèse plus favorable,
ils n ’ont qu’à l’indiquer.
Alors la clause sera censée rédigée en ces termes :
« A l’égard du surplus de ses autres biens qui resteront
» audit sieur Delsol , lors de son d é c è s, icelui promet de
» n’instituer d’autre héritière que la demoiselle D elsol sa fille,
» sous la réserve de l’usufruit, etc. ; et, au cas où ladite demoi» selle Delsol future épouse, viendrait à décéder sans enfans,
» ou ses enfans sans descendans, ou sans disposer valablement,
»
»
»
»
il réserve expressément à ses héritiers le droit de réversion
et retour des biens réservés , sans qu’il puisse être dérogé
par sadite fille future ép ou se, audit droit de réversio n , par
aucune disposition ni autre acte à ce contraire ».
D ’a b o rd , la clause ainsi conçue profite toute entière à la
�C 3° ) ,
dame d’O r c e f; car n’y ayant de vocation que pour les héritiers
du sieur D e ls o l , le retour suit sa succession , de laquelle il
li e pouvait être séparé que par la vocation d’autres personnes
que les héritiers ; o r , la dame d’Orcet étant grevée du droit
de retour > et en même temps héritière u n iverselle, il y a
confusion , ainsi que cela sera plus amplement démontré.
Mais ce n’est pas tout : que l’on suppose encore que toute
autre personne que la dame d’ Orcet ait succédé aux droits
du sieur Delsol ; celui dont il s’agit i c i , ne sera jamais qu’une
substitution fidéicommissaire, puisque la dame d’Orcet aura
été chargée de conserver et de rendre ; et qu’alors il y aura ,
dans la disposition, les trois personnes dont le concours forme
la substitution.
}
Q uand un donateur stipulait à son profit la réversion
des biens qu’il d on n ait, c’était un vrai droit de retour ; quand
il le stipulait aussi pour ses héritiers, c ’est qu’il prévoyait
le cas où le retour ne s’ouvrirait pas de son vivant. Ces
réserves n ’avaient rien de commun avec la substitution fideicom m issaire, abolie par la loi du 1 4 novembre 17 9 2 . E t
c’est ainsi.qu’il faut entendre l’arrêt d e là C o u r de cassation
rendu le 1 1
frimaire an 1 4 ,
entre les héritiers de la de
moiselle R osalie Lalanne et la dame de N availle.
Les sieur et dame Bidon de S t - M a r t i n , en mariant en
1 6 9 4 , la demoiselle Ursule de St.-Martin leur fille au sieur
L a la n n e ,
lui constituèrent, par son contrat de m ariage,
une dot de 18,000 l iv . , il fut stipulé par une clause expresse,
qu’en cas de
dissolution du mariage sans enfans ou leur
postérité légitime défaillant, la dor retournerait soit aux père
et mère qui la constituaient, soit à leur fils et à ses héritiers.
V o ilà une donation entre vifs avec stipulation d’un véritable
droit de retour en’ faveur, des donateurs, de leur fils et de
�33/
( s1 )
ses héritiers. Cette stipulation était d’ailleurs conforme
au
statut coutumier de N avarre qui régissait les parties et leur
contrat.
L a postérité de la d a m e ' Ursule de St.-M artin , épouse du
sieur L a la n n e , s’est éteinte par la décès de R o salie Lalanne
morte sans enfans en 1 7 9 3 . Le sieur L a rre g o ye n était son
h éritier; la dame de N availle descendant des sieur et
dame de St.rMartin , réclamait la dot de
18 ,0 0 0 l i v . , en
vertu du droit de retour que ceux-ci s’étaient ré serv é, non
seulement pour eux mais encore pour leur fils et ses héritiers.
Fallait-il rejetter cette demande, sous prétexte que le con
trat de mariage de 16 9 4 renfermait une substitution fideicommissaire? L a C our de cassation s’est prononcée pour
la n é g a tiv e , et les motifs de son arrêt sont faciles à saisir.
Il s’agissait d’abord d’une donation entre v ifs; et en second
lieu , les donateurs s’étaient réservé à e u x , à leur f i s et à ses
héritiers , un droit qu’il était impossible de qualifier autre
ment que d ’un droit de re to u r; puisque, en vertu de cette
clause, l’objet donné pouvait retourner aux donateurs d’où
il était provenu.
Il était perm is, à cette époque, de stipuler le retour au
profit du donateur et de ses héritiers; o u , ce qui revient au
m ê m e , de d écla re r, que dans le cas où le donateur ne vivrait
pas à l’époque de l’ouverture du droit réservé, le droit serait
transmissible à ses héritiers, et cette convention avait
été
formellement stipulée dans la donation.
A la vérité, le contrat de mariage de 1694 présentait une
substitution fidéicommissaire en faveur des descendans de
la dame Ursule de St.-M artin, fille alors dotée, et cette
substitution était en même temps fondée sur les coutumes de
N avarre et de Béarn
par ce m o y e n , les père et m è re , en
�( 3 0
dotant leur fille , l’avaient chargée de conserver et de rendre
à ses enfans, et ceux-ci aux leurs, à l’in fin i, la chose donnée j
et cette stipulation, conforme à la coutume lo cale, emportait,
il n’y
a pas de doute, un véritable fidéicom mis, dans la
ligne de la dame Ursule de St.-M artin; mais ce n’était pas
en vertu de cette substitution , dont l’abolition était avouée,
que la dame N availle réclamait la dot ; elle n’était pas même
de la ligne qui seule était appelée au fidéicommis ; elle n’in
voq uait, à l’appui de sa dem ande, que le
droit de retour
stipulé par les donateurs , à leur profit , à celui de leur fils
et de ses descendans ; et ce droit a paru trop clairement
conservé par la loi du 1 7 nivôse an 2 , pour que les tri
bunaux ayent pu le déclarer aboli.
Tel
est le résumé de l’espèce de
cet
arrêt, d’après le
compte qu’on en voit dans le journal des audiences. L ’on
se rend néanmoins avec peine à l’idée qu’une clause qui dort
ainsi plus d’un siè cle, et s’éveille tout-à-coup pour transporter
des biens qui ont fait so u c h e , d’une famille dans une autre,
ne renferme rien qu’un simple droit de retour, sans qu’il
y ait charge de conserver et de rendre. Il faut avouer q u e ,
si ce n’est pas une substitution, cela en a b ie n , au premier
coup-d’œ i l , la ressemblance et les effets.
M a is , qu’y a-t-il l à , au surplus ,„ d’applicable à l ’espèce
actuelle ? Il est d’abord constant q u e , lorsqu’il s’ agit de qualifier
une convention ou le droit qui en résulte, c’est plutôt la
nature des choses
que les expressions
parties, qui doivent servir
em ployées
par les
de régie.
ln contractibus, rei veritas potiiis quàm scriptura perspici
débit. Leg. I. Cod. P lu s val. quod agit.
N on quod scriptum , sed quod gestum est , inspicitur. P lu s
actum quam scriptum valet* Leg. 3 et 4 . Cod. eodem.
Q u ’importe
�333
C h
)
Q u ’importe, par conséquent, que le sieur Delsol ait qualifié
de réversion ou de retour 3 la stipulation dont s ’a g i t , si
la chose n’y est pas ; s i , à l’égard
des biens réservés s le
contrat renferme une véritable substitution fidéicommissaire ;
s’il est même impossible qu’il
contienne une autre dispo
sition ? T out est dit alors ; on naura pas à s’arrêter aux
m o t s : o r , il serait difficile de trouver une vérité plus in
contestable que celle-ci.
En effet, il est p ro u vé, jusqu’à l’é v id en c e,q u e celui qui dis
pose par testament, par tout autre acte à cause de mort
ou par une institution contractuelle, ne peut se réserver le
retour de sa libéralité, puisqu’elle ne peut être recueillie
qu’après sa mort.
Il est prouvé de m êm e, que tout droit de retour doit
nécessairement pouvoir s’ouvrir au profit du donateur.
D o n c , toutes les fois que le disposant stipule la réversion
pour d’autres que pour lui , toutes les foi* qu’il appose la
condition de retour au profit de quelqu’u n , des biens qu’il
ne transmet à son héritier qu’à son d écès, il charge cet
héritier de conserver sa libéralité et de Ja rendre au tiers
appelé au retour. Il y a alors trois personnes dans la dis
position , celui qui fait la libéralité, celui qui doit d’abord
la recueillir et celui auquel
elle doit être rendue. Il y a
donc fidéicommis.
O r , ces trois personnes seraient dans la clause de réversion
des biens réservés ; le sieur D elsol instituant, la dame d’Orcet
qui devait recueillir à sa m o r t, et les parens du sieur D elsol
auxquels les biens devaient être ren d us, le cas arrivant.
Veut-on plus de dévéloppement ?
Q u e dans une disposition contractuelle, un père nomme
un de ses enfans son héritier u n iv e rse l, et qu’employant
E
�( 34)
les mêmes termes que le sieur D e ls o l, il déclare q ue, dans
le cas où cet enfant vienne à mourir sans enfans, e t c ., les
biens institués retourneront à ses plus proches parens, sans
qu’il puisse être dérogé, e t c . , ne sera-ce pas une substitution
fïdéicommissaire ?
L ’enfant ainsi institué, sera chargé de conserver et de rendre,
il sera charge de conserver , parce que le disposant lui a
défendu de d éro g e r, par un acte quelconque, à la reversion.
11 sera chargé de rendre , non pas au disposant qui sera
mort quand sa disposition s’ouvrira , mais à un tiers ; et
voilà ce qui constitue le fidéicommis prohibé par la loi
de 17 9 2 et par le C o d e N apoléon.
Il n’en est pas de même du droit de retour ; il ne sup
pose essentiellement que deux personnes, le donateur qui se
dessaisit entre vifs de la propriété , et le donataire qui accepte.
C ’est uniquement pour son profit personnel que le donateur
se réserve le retour. C ’est une clause résolutive, dont l’événe
ment doit faire rentrer l’objet donné dans le domaine de
celui d’où il p r o v ie n t , comme s’il n’en était jamais sorti;
enfin, une clause qui réserve au donateur mêm e, la faculté
de rentrer dans sa propriété ex antiquâ causa.
Si les anciennes lois permettaient au donateur de stipuler
en même temps la réversion au profit de ses héritiers, il
fallait cependant qu’il commençât toujours par en faire la
réserve à son profit, et que cette réserve pût avoir
en sa
personne:
effet
les héritiers ne venaient alors que par
représentation et pour recueillir l’effet d’un droit qui faisait
partie de sa succession , d’un droit enfin q u i , originairement
acquis au do n ateu r, leur avait été transmis par son décès,car s’ils l’avaient pris dans la succession du d onataire, il
y aurait eu fidéicommis.
�2>3J
( 35 )
O r , dans une
institution contractuelle qui ne doit être
exécutée que lorsque le disposant ne sera p lu s,
comment
pourrait-il profiter lui-même du droit de réversion ? Toute
clause qui renferme une pareille absurdité doit être réputée
non é c rite ; et si on
veut la faire passer à d’autres qu’à
l ’instituant, l’héritier est alors charge de conservera t de rendre,
et il y a fidéiccmmis aboli par la loi du 14 novembre
1 7 9 2 . C e n’est plus une réversion que l’instituant a voulu,
mot y qui dans sa signification emporte l’idée du retour de la
chose donnée dans la main d’où elle est partie; c ’est une vraie
restitution dont l’héritier a été grevé en faveur d’un tiers ;
et il est bien évident que de pareilles dispositions sont ann u llé e s, n’importe qu’elles se trouvent dans un testament ou
dans une institution contractuelle.
Il est inutile de pousser plus loin cette discussion ; elle
est venue à des démonstrations si sim ples, si claires que ce
serait servir les sieurs Delsol que de les réfuter plus long-temps.
Ils n’insistent sur une prétention si extraordinaire, que pour
opérer une diversion. Ils n’affectent, sans espérance et sans
raison , des droits sur les biens qu’ils appèlent réservés , que
pour amener les esprits qui craignent les embarras et
difficultés
d ’un long
d é b a t , à se
les
relâcher sur les biens
donnés pour les dédommager de c e u x - c i; à p ro p o se r, en
un m o t , ce q u ’on appèle une compensation.
Cette vieille
r u s e , praticable quand il s’agit de faits embrouillés ou de
torts réciproques , ne réussira pas ici. On ne compense pas
les clauses d’un contrat de mariage ni les questions de droit.
E t , sur cette première partie d e l à discussion , il n’y a pas
de milieu : I9 .clause de
réversion des biens réservés est
nulle et comme non écrite, ou c’est une substitution abolie
par la loi du 1 4 novembre 17 9 2 .
�DEUXIÈM E
B I E N S
PARTIE.
D O N N É S .
I . re P R O P O S I T I O N .
En fait, la clame de réversion est purement personnelle
au sieur Delsol.
\
T o u s ceux qui pensent que la stipulation du retour pro
fite aux héritiers du donateur, lorsqu’il vient à mourir avant
de l ’avoir recueillie, avouent néanmoins que cette transmission
ne doit pas
avoir lieu lorsqu’il
a limité la réserve à sa
personne, et qu’il ne s’est point occupé de ses héritiers. Les
sieurs D elsol en conviennent ( 1 9 ) ; c’est d’ailleurs décide
par l’art. 1 1 2 2 du code N a p o lé o n , qui est en cela simple
ment déclaratif des anciens principes.
« O n est censé avoir stipulé pour soi et pour ses héritiers
» et ay an s-cau se, à moins que le contraire ne soit exprimé
» ou ne résulte de la nature de la convention ».
Ainsi , avant d’examiner si le retour dont il s’agit est en
droit transmissible aux héritiers du sieur D e l s o l , il convient
de vo ir s i, en fa it, il n’a pas été restreint à sa personne.
D ’a b o rd , le contrat fut fait en 1 7 6 0 , dans un temps où
l ’on était bien loin de reconnaître que le retour passât aux
héritiers. Les auteurs étaient partagés ; ils s’opposaient réci
proquement des textes de lois et des arrêts: mais ceux qui
( 1 9 ) Pages 1.2 , 16 et 1 7 du mémoire.
�33/
(
37
)
avaient écrit le plus récem m ent, étaient contre la transmis
sion ( 2 0 ) . L ’arrêt de 1 7 6 7 q u i, selon les sieurs Delsol (p a g e
14
du m é m o i r e ) , a fix é irrévocablement la jurisprudence,
ne fut rendu que 7 ans après le contrat de 17 6 0 .
L e sieur D e ls o l, homme d’affaires,
savait donc que la
Stipulation du retour ne profitait pas aux héritiers. T o u t au
m oins, on accordera qu il 11 ignorait point que la question
ne fût très-controversée; dès-lors, s’il avait intention que sa
réserve allât plus loin qu’à sa personne, la prudence lui faisait
un devoir de s’en expliquer d’une manière positive.
O n accordera sans doute aussi
que deux familles
qui
allaient s’allier ensemble par un contrat solenn el, setaient,
suivant l’usage, communiqué les dispositions, quelles enten
daient mutuellement y insérer; on ne peut supposer qu’un
acte de cette im portance, que le mariage le plus considérable
qui se fût vu de long-temps, ait été fait ex abrupto et sans
qu’on ait observé les procédés et les convenances usitées
en pareil cas dans toutes les familles.
L e sieur Delsol savait donc que la dame de V ig ier ferait, à
son f i l s , donation de ses b ie n s , et s’en réserverait le retour à
elle et aux siens ; e t , ce fut par suite
de cet arrangement
préliminaire , que la dame de Vigier donna à son beau-frère
la procuration en vertu de laquelle il stipula dans le contrat
les conventions précédemment arrêtées.
Et, réciproquement, la famille de V igier savait que le sieur
D elso l donnerait à sa fille le domaine du Claux et 10 ,0 0 0 1.,
qu’ il 1 instituerait héritière et qu’il se réserverait pour
seulement le droit de retour.
lui
E t , pourquoi cette différence dans les deux clauses ? E lle
( 1 0 ) Boucheul écrivait en 1727, et Arnaud de la Rouvière, en 1737.
�( 5» )
était dictée par la nature et par la différence des positions
o ù se trouvaient les donateurs.
L a dame de V igier ayant plusieurs enfans , il paraissait
convenable que la réserve fut faite pour eux comme pour elle.
Le sieur D e ls o l, au contraire, n’avait que sa fille ; il était
v e u f depuis long-tem ps, et son âge et son goût n’annon
çaient pas qu’il eût l’idée de passer à des secondes n oces;
il n’avait aucun proche parent qui pût partager son affection,
qu’il portait toute entière sur sa fille unique : quel eût donc
été le but d’une réserve de retour pour les siens ? Est-ce
pour des collatéraux éloignés et avec lesquels il ne vivait
p a s , que le sieur Delsol aurait stipulé cette réserve et la
défense d’aliéner ? Peut-on croire qu’il fut assez injuste que
de préférer de tels parens à sa fille unique, et qu’il aimât
mieux leur laisser, plutôt qu a elle , la disposition de sa
fortune ? S’il eût annoncé cette intention , la famille de
V igier y aurait-elle consenti ? Aurait-elle souffert que la
demoiselle D elsol ne pût disposer de rien envers son mari,
tandis que celui-ci conservait la liberté de lui faire passer
tous ses biens? O n le demande ; de bonne f o i , le sieur
D elsol aurait-il osé le proposer ? V o ilà pourquoi il ne stipula
que pour lui.
Encore moins eût-il osé annoncer qu’il entendait réserver
le droit de retour pour des enfans d’un second lit ? Pou r
quoi dissimuler ce que personne n’ignore ?
L a famille du sieur d’O rcet, s’ unissant à celle du sieur Delsol,
payait-elle un tribut au préjugé qui faisait rechercher l’alliance
de familles privilégiées?
Suivait-elle les spéculations de ceux qui se relâchent sur les
dots des fille s, dans l’espérance d’avoir part au crédit et à la
protection des pères qui ont des postes éminens ?
�( 39 )
L e sieur D o rcet enfin, était-il entraîné par une de ces in
clinations décidées qui, franchissant les distances et rapprochant
les extrêmes, amènent souvent des unions mal assorties et
rarement heureuses ?
R ie n de tout cela. Il faisait ce qu’on appèle un mariage
de fortune ; il épousait une fille unique et très-riche héri
tière ( 2 , 1 ) ; le sieur D e ls o l , à son to u r, trouvait dans son
gendre une fortune plus considérable que la sienne, une place
singulièrement recherchée , une alliance très-honorable.
C e rte s , personne ne doute que la demoiselle Delsol ne fût
jamais devenue dame d’O r c e t , si elle eût été réduite à dis
puter contre son père ou ses héritiers, les lambeaux du
patrimoine maternel qu’il avait confondu dans le sien ; s’il
eût dit qu’il se remarierait, que des enfans d’un autre lit
viendraient d’abord prendre une légitime sur ses b ie n s, et
puis prétendre
au reste en vertu du retour ; qu’a in si, la
dame d’Orcet n’apporterait à son mari que l’espérance d ’avoir,
pendant q u elle v iv r a it , l’usufruit de ses biens3 en échange"
de la faculté qu’il avait de lui laisser tous les siens en pro
priété. U ne telle inégalité dans des conditions de cette im
portance , eût à coup sûr révolté le sieur d’Orcet et ses
parens; il est clair que le mariage n’ aurait pas eu lieu. Mais
n o n , le sieur D elsol ne pensait pas plus à sa progéniture
du second lit qu’à ses collatéraux ; il ne pensait q ua lui
et à sa fille ; et voilà encore une f o i s , pourquoi il ne sti
pula le retour que pour lui.
(ii)
La dame d’Orcet peut dire avec v é r ité , qu’elle-même ne de
sirait pas cette union, et qu’elle ne fit qu’obéir à son père: elle doit
ajouter qu’elle n’a jamais eu à s’en repentir ; le sieur d ’Orcet n’a cessé
de lui donner des preuves de sa tendresse, et son testament renferme
la plus signalée de toutes,
�,
( 40 )
E t , peut-on s’y méprendre en lisant la clause, en la com
parant à celle de la dame d e V i g i e r ? Celle-ci , dans
sa
procuration, et son procureur fo n d é , dans le contrat, réser
à elle et aux siens. Assurément, les parties
contractantes ont attaché une idée , un sens à ces derniers
vent le retour
mots : Les contrats entre vifs , dit G u e re t, journal du palais,
tom. 2 , pag. 36 2 , sont toujours des actes étudiés, faits dans
la liberté toute entière de l'esprit ; concertés , arrêtés entre plu
sieurs parties qui s éclaircissent tune
l'autre , et dont toute
tapplication est de ne rien oublier de ce qui peut servir à fa ire
connaître leurs intentions. Ce ne sont pas les clauses mentales
qui font les contrats, ce sont les clauses écrites , cest le con
sentement mutuel et respectif des contractans ; o r , une partie
ne consent pas à ce quune autre pense, elle ne consent quà
ce quelle exprime, et tout ce qui nest pas exprimé est hors du
contrat et nen fait point partie . Il a donc été convenu, d’après
la signification naturelle de cette condition , que le sieur
ef Orcet venant à mourir sans enjans , ou ses enfans sans descendans, ou sans avoir valablement disposé 3 les biens donnés
retourneraient à la dame sa m ère, et au cas qu’elle fût morte,
aux siens } c ’est-à-dire, à ses autres enfans. T e lle a é t é 'la
condition apposée par la dame de V ig ier à sa libéralité.
E t maintenant, lorsque le sieur D elsol a dit : qu'au cas la.
demoiselle sa fille viendrait à mourir sans enfans , ou ses enfans
sans descendans, ou sans avoir valablement disposé , i l se réserve
expressément le droit de réversion des biens donnés , sans q u 'il
puisse être dérogé, etc. Les parties ont certainement attaché
une idée , un sens différent à cette expression si peu semblable
à l’autre. Il a donc été c o n v e n u , d’après la signification na
turelle de cette c o n d itio n , que "la dame d’O r c e t , mourant
dans le cas prévu , les biens retourneraient au sieur Delsol j
�3^7
( 4 0
mais que s ’il était mort avant sa fille , ils ne retourneraient
pas aux siens qui n'étaient, lors de la convention, que des
collatéraux si étrangers au sieur D e ls o l, qu’il ne les avait pas
même appelés au contrat. T e lle a encore été la condition
imposée par le sieur Delsol à sa donation.
D on c i l est exprimé et i l résulte de la nature de la convention,
que la réserve est limitée au sieur Delsol.
C e qui le prouve de plus en plus, c’est la défense de déroger
au
droit
de retour ,
qui ne peut être que relative à sa
personne. Il avait permis à sa fille, comme à ses petitsenfans, de disposer ( 22 ) ; car le retour ne devait avoir lieu 3
qu’autant qu’il n’y aurait ni en fa n s, ni disposition j et à la fin
de la clause , il lui defend d’y déroger par aucun acte. Cette
contradiction apparente s’évanouit dès que cette défense n’a
d’autre durée que sa vie. Il était naturel que , survivant à sa
fille, il rentrât dans ses b ie n s , et que , la prédécédant, elle eût
pour disposer, la latitude que devait avoir sa descendance ;
sans quoi,il aurait eu plus de prédilection pour ses futurs petitsenfans que pour sa fille j ce qui est contre toute vraisemblance.
Par ce m o y e n , les deux parties de la clau se, qui se contra
rient et s’exclu en t, obtiennent un sens raisonnable et conforme
à la commune intention des parties j ce qui est le m ode d’in
terprétation indiqué par les lois.
(12)
Il a été jugé par l’arrêt du 18 janvier 1 7 8 8 , que les m ots, ou sans
avoir valablement disposé, qui sont dans la clause de retour stipulée
p a r l a dame de V igier, pour elle et les siens, s’appliquaient au sieur
d’Oicet comme à ses enfans, puisque le testament qu’il avait fait en
faveur de sa fe m m e , au préjudice de ses frères, a cté confirmé. Par
conséquent, les mêmes mots répétés dans la clause stipulée par le sieur
D e ls o l, pour lui et non pour lui et pour Us siens, s’applique également
à la dame d’Orcet.
F
�.................................... (
4 0
Quoti'es in siipulatìonibus ambigua oratio est, commodissimum
est id accepi quo res de quà agitur in tuto sit. Leg. 86. f f. de
verbo, oblig.
Qiiotiès idem, sermo duas sententias exprim it , ea potissimùs
accipietur , quce rei gerendce aptior est. Leg. 6y. de Reg. ju ris ,
« Toutes les clauses des conventions s’interprètent les unes
» par les autres , en donnant à chacune le sens qui résulte
» de l’acte entier. Art. 1 1 6 1 du code Napoléon ».
U n e autre preuve se tire de l’institution universelle, q u e ,
dans la clause précédente, le sieur D elsol venait de faire en
faveur de sa fille.
Q uoi 1 elle était déjà nommée héritière de tous les biens,
de tous les droits qu’il laisserait à sa m o rt; elle était préférée,
com m e elle devait l’être , à des collatéraux qui n’ont jamais
de place dans le cœur d’un p è r e ; et l’on v e u t, qu’un instant
après, il soit subitement pris de tendresse pour e u x , au point
d’interdire sa fille unique et de les appeler à recueillir, libre
ment et sans condition , ces mêmes biens qu’il rend indispo
nibles dans ses mains !
Supposera-t-on en co re, et qu’est-ce q u ’une invraisemblance
de plus ? que le sieur Delsol pensait alors
aux enfans qu’il
a u ra it, douze ans après, d’un second mariage contracté à
l’âge de plus de soixante
ans ? Mais s’il
aimait
tant
ces
collatéraux , s’il avait l’ espérance d’être encore père, pourquoi,
à l ’exem ple de la dame de Y i g i e r , ne réservait-il pas le retour
pour les siens ? Pourquoi faisait-il, en faveur de sa fille, une
institution
universelle qu’il a depuis inutilement essayé de
révoquer , lorsqu’en effet on lui a suggéré l’idée qu’il n’avait
pas en 17 6 0 ?
Les sieurs Delsol répèteront-ils ce qu’ils ont d it , pages 5 et
20 du mémoire, que le testament de leur père est une preuve
�^3
(
43
)
manifeste de l’intention qu’il avait de leur transmettre ses biens
par le m oyen du retour?
O u i , ce testament prouve le dessein qu’avait le sieur Delsol
en 1 7 8 0 , lorsque, subjugué par sa seconde épo u se, il s’imagi
nait pouvoir disposer, à titre gratuit, des biens qu’en 1 7 6 0 il
avait assurés à la dame d’Orcet ; m ais, n est-il pas aussi une
preuve nouvelle , qu’en stipulant la réversion , il n’avait point
pensé à des enfans d’un autre lit ? S’il y eût pensé, n’aurait-il
pas stipulé pour lui et pour les siens , en copiant la clause
que la dame de V igier écrivait sous ses y e u x ? E t , s’il avait
cru que la sienne, telle quelle est, pouvait profiter à ses
en fan s, quel besoin avait-il de tester pour renouveller une
disposition faite dans le contrat de 1 7 6 0 ? Il est clair , au
contraire, que ce testament n’a été suggéré que pour détruire
ce contrat, et que l’extension du retour aux enfans du second
lit j n’y a été insérée , que pour donner à la clause un sens
auquel personne n’avait pensé en 17 6 0 .
Il ne faut pas supposer au sieur D elsol des intentions qu’il
n’a jamais eu. Il est évident, pour tout esprit raiso n n a b le ,
que, dans les circonstances où il se trou vait, il a voulu assurer
tousses biens à sa fille ; et, sans d o u te , q u a l’exemple de
tous les pères, il regrettait de ne pouvoir lui en donner davan
tage. Il a craint qu elle ne mourût avant l u i , sans postérité \
e t , pour ne pas perdre et sa fille et ses b ie n s , il a aussi voulu
que ceux-ci lui revinssent, mais il n’a pas porté plus loin sa
pensée.
Les sieurs Delsol disent so u ve n t, et par exprès, page 2 0 ,
que le redoublement de la clause fait présumer que le sieur
D elsol a pensé à ses héritiers. Mais peut-on invoquer des
présomptions, lorsque le contrat d e / 17 6 0 fournit une preuve
positive dans la différence des deux clauses de retour? N ’est-il
�(44)
pas visible q u ’ en se réservant expressément, c’est-à-dire, e/î
réservant à soi la réversion , tandis que la dame de V igier
la stipulait pour elle et pour les siens , le sieur D elsol n’a agi
que pour l u i , alors que la dame de V ig îer agissait pour elle
et pour ses enfans S Peut-on , après c e l a , proposer une inter- ,
prétation aussi contraire à la lettre de la clause ? Et ne voit-on
p a s , en mêm e-tem ps, que le sieur Delsol avait intérêt à la
stipuler pour l u i , afin d’empêcher sa fille de disposer à son
préjudice ; effet que ne pouvait produire le retour légal ? En
un m ot, quiconque lira ces clauses sans prévention , sera con
vaincu de cette vérité : le sieur D elsol s’ est préféré à sa fille ,
mais il a préféré sa fille à tout ce qui n’était pas lui.
C e sens contente à-la-fois le cœur et l ’esprit. Il découle
naturellement des différentes clauses de l ’ acte. Elles n’ont
rien d’incohérent, rien de contradictoire, rien qui pût effa
roucher quelqu’une des parties contractantes ; rien qui répugne
aux convenances qu’elles devaient o b s erve r, ni aux conven
tions qu’elles devaient réciproquement agréer dans un contrat
qui était le résultat de leur volonté commune.
Q u e l’on adopte le système des sieurs D e ls o l , et cet accord,
que la vérité seule peut produire , disparaît aussitôt,
ou n’a
plus que des stipulations disparates et révoltantes, des clauses
barroques et contradictoires, un sens absurde et inextricable.
A lors , il faut avoir une fôi assez robuste , pour croire que
la réserve de la dame de V i g i e r , pour elle et les siens , n’a
pas plus d’effet que la réserve du sieur D e lso l, pour soi expres
sément.
Q u e le sieur D e l s o l , faisant sa fille héritière, lui préféré
cependant des collatéraux pour lesquels il ne stipule rien.
Q ue la famille de V ig ie r , faisant une alliance avec la fo r
tune , a néanmoins la sottise de consentir des clauses qui
�'b ’f S
( 45 )
permettent au sieur d’Orcet
femme a sans que celle-ci
moindre chose.
de donner tous ses biens à sa
puisse jamais le gratifier de la
»
Q u e le sieur D elsol se réserve sérieusement de revenir de
l ’autre monde pour succéder à sa fille 3 après que celle-ci lui
aura succédé.
E t , qu’après sa m ort, le droit de retour , dont il aura été
saisi de son vivant , ne sera pourtant pas dans son hérédité
avec toutes ses autres a ctio n s, & c . & c .
M ais, qu’importe aux sieurs Delsol , d’insulter ainsi aux
facultés intellectuelles de leur père ? Q u e leur importe de
mépriser l’amitié de leur sœ ur, pourvu q u e , par a r r ê t , ils
parviennent a obtenir ses biens ? Les aveugles ! ils ne vo'ient
pas que la simple raison détruit tout leur système, et qu’à moins
de la renier volontairem ent, on ne peut sacrifier, comme eux
à l’injustice , la vérité à l’invraisemblance et le bon.
sens à l’absurdité.
Il
est donc v r a i, qu’ en fa it, le retour était personnel au
sieur Delsol, et que par conséquent, son décès l’a rendu caduc.
L e sieur D elsol n’ayant pas examiné cette proposition, la
dame d’Orcet n’a pas d’autres objections à réfuter.
E lle croit laisser dans les cœurs cette satisfaction qu’on
éprouve à l’apparition d’une vérité que l’on désire; et, dans
les esprits, cette v iv e conviction qui n’est jamais que le ré
sultat de la juste combinaison des actes et des principes.
Les autres propositions ne seront donc que subsidiaires#
r
�II.e P R O P O S I T I O N .
En droit,
' I
ls
le retour ne peut profiter aux sieurs
Delsol.
se sont trompés, les sieurs D e ls o l , s’ils ont cru que
la dame d’Orcet contesterait le principe de la transmission
q u ’ils ont invoqué dans leur mémoire.
Certes , quand les
lois anciennes et nouvelles ne le consacreraient p a s, la raison
seule dirait que celui qui acquiert, de quelque manière que ce
so it, définitivement ou sous cond ition , acquiert pour lui et
pour ses héritiers; tout comme celui qui s’o b lig e , oblige
également ses héritiers et ayans-cause.
M a i s , la raison dit pareillement, qu’il n’y a pas de principe
san^ exception ; que, par exemple, la transmission n’a pas lieu,
quand il s’agit d’un droit qui n’en est pas susceptible par luimême ou par les circonstances de la stipulation ; et v o i l à pour
quoi l’art. 1 1 1 2 du code N apoléon, résumant les anciennes lois,
a dit : « on est censé avoir stipulé pour soi et pour ses héri« tiers et ayans-cause, à moins que le contraire ne son exprimé,
» ou ne résulte de la nature de la convention ».
L a dame d’O rcet a prouvé dans la proposition précédente,
que le contraire était exprimé dans la donation de 17 6 0 . Il
faut voir maintenant si le contraire ne résulte pas de la nature
de cette donation.
D ’a b o rd , l’on ne peut nier qu’il y a beaucoup de stipula
tions qui ne passent pas aux
héritiers ; et ce sont toutes
celles q u i , par leur n a tu re , leur m otif ou leur o b jet, sont
bornées aux personnes des contractans.
Dans cette c la sse ,
>1 faut nécessairement ranger tous les contrats d’usufruit , de
rente viagère et tous autres de ce g e n re , q u i, quoique obli-
�'
t 47 )
gatoires pour les débiteurs et leurs héritiers,
cependant transmissibles à
ceux des
ne sont pas
créa n ciers, par
la
ra iso n , qu’à l’égard de ceux-ci , ils ne contiennent que des
conventions purement personnelles.
Dans cette classe, il faut ranger encor toutes les obligations
qui ne peuvent être exécutées que par les personnes mêmes
qui les ont consenties, parce qu elles ont pour objet des faits
personnels aux débiteurs qui ne peuvent être parfournis par
leurs héritiers ( 23 ).
Dans cette classe, il faut ranger toutes les conventions qui
prennent uniquement leur source dans des intérêts, dans des
motifs personnels au stipulateur. T e lle e s t , par exem ple , la
réserve faite par la fe m m e , de pouvoir reprendre, en cas de
renonciation à la communauté, tout ou partie de ce q u ’elle
y aura mis. Cette faculté se restreint aux objets désignés dans
le contrat ; elle ne s’étend pas aux enfans, si elle n’est accordée
qu a la femme ; les héritiers ascendans ou collatéraux, n’en peu
vent profiter, si elle n’est stipulée que pour la femme et les
enfans. H e n r y s , tom. 2 , l i v . 6 , quest. 3 , art. 1 5 1 4 du code.
D ans cette classe, enfin, il faut ranger le droit de retour,
lorsque le donateur ne l’a pas réservé pour d’autres que pour lui.
I c i , les sieurs Delsol vont s e c r ie r , que c’est déroger aux
lois qu’ils ont cité et notamment à la loi gènèraliter sancimus.
M ais, pourquoi y déroge-t-on pour les conventions d’usufruit,
de rente viagère? Parce qu’il est de la nature de ces contrats,
que l’ usufruit et la tente soient bornés à la personne du créan
c ie r , même sans stipulation particulière.
Pourquoi y déroge-t-on pour toutes les obligations qui ne
( * 3 ) Voyez Pothier, traité des obligations, part. 3. chap. 7. art 3.
§ 3 et suivans,
�( 4» )
peuvent être parfourhies que par ceu xq u i les ont contractées?
Parce que l ’objet de ces obligations est un se rv ic e , un travail,
une chose enfin q u i, dépendant de l’industrie ou du talent du
débiteur, ne peut être exécutée par ses héritiers.
Pourquoi y déroge-t-on pour toutes les conventions basées
sur des motifs personnels au stipulateur, comme dans le cas
prévu par l’art. 1 5 1 4 du c o d e ? Parce que la réserve faite
dans cette espèce, par la fem m e, étant une exception au droit
com m un, doit, comme toutes les exceptions, être restreinte au
cas exprim é; et parce que , cette réserve étant inspirée à la
femme par des motifs dont elle seule est juge, il ne convient
pas que ses héritiers puissent user d’une faculté remise à sa
seule prudence.
O r , le droit de retour n’est qu’une exception au droit
c om m u n , puisqu’il est absolument contraire à la nature des
donations entre v ifs , dont l'effet est de transférer incommur
tablement au donataire la propriété et la possession de la
chose donnée, sans aucune espérance de retour au profit du
7
donateur. R i c a r d , 3 , c partie, chap. 7, section 2 , Leg.
de donat. ( 24 )
Il est d ’ailleurs fondé sur des motifs personnels au donateur,
car celui-ci ne le stipule que pour ne pas s’exposer à perdre
à la fois ses biens et la personne qu’il gratifie; et toutes les
considérations qui l’y portent, sont prises dans son intérêt,
puisqu’ il n’y parle que de lui. L e retour conventionnel est la
copie du retour légal. C ’est un emprunt que l ’homme fait de
la loi.
M a is, disent les sieurs D e ls o l , page 1 2 et 13 , « le donateur
» qui réserve le retour n’a pas besoin de parler de ses héritiers*.
(
m
) V o yez çi-dessus, page 2.4.
c’est
�( 49 )
» c’est la loi seule , la force de la saisine et non pas l’intention
» positive de transmettre qui opère la transmission.il est vrai
» que la saisine elle - même
dépend en quelque sorte de
» l’intention du stipulant; mais c ’est seulement en ce sens
» qu’elle ne s’applique qu’aux droits que les parties ont eu
» en vue et pour les cas qu’elles ont exprimé ».
Les sieurs Delsol affectent de confondre entièrement les
deux principes de la transmission en général, et de la saisine
en matière de contrat conditionnel, au point q u e , selon ce
systèm e, toute saisine opérerait une transmission nécessaire 3
ce qui n ’est ni ne peut être si universel.
En effet, la transmission dans les contrats qui en sont
susceptibles, dérive de la r è g le , pîerumquè tam kœredibus
quam nobismetipsis cavernas.
• E t , dans les stipulations conditionnelles, la saisine résulte
de l’acte entre vifs. L a condition arrivant à effet rétroactif au
jour du contrat en faveur du stipulant, et l’espérance de la
recueillir passe à l’héritier, si la convention n ’ a rien qui s’y
oppose.
M ais il est si peu vrai que la transmission soit la suite de
cette saisine, qu’au contraire, celle-ci se continue dans la per
sonne de l’héritier, par la seule raison
qu’elle est censée
stipulée pour l u i , comme elle l’était pour celui qu’il représente.
L ’acte entre vifs
ne saisit et ne peut saisir que selon
l’intention des parties et dans les termes de leur convention.
Lorsque la stipulation est personnelle, comme dans les con
trats dont on vient de parler, la saisine n’a lieu quen faveur
du contractant, et l’effet rétroactif de la condition ne s’opère
que pour lui.
C ’est ce que Fontanella explique disertemcnt en ces termes:
D isposiùo dictiparagraphe ex conditionali siipulatione , inter
G
�C 5° )
alias limitztiones cjtias recipit , una est , ut non habeat locum
quando condiùo apponitur in persona stipulatoris ; tunc enim cùm
conditio dejiciat per mortem ipsius, contingentem ante mortem
alterius, non restai aliquod in conditionale , quod ad heredem
transmittatur , et sic non liabet locum dtspositio predict a qutc
transmissionem concedit ; Loquitur enim in aliis conduiombus
extrinsecis , non residemibus in persona stipulatoris , qvce non
dejiciunt per illius mortem , sed adhiic pendent, veluti si navis
ex asiâ venerit , vel alias , non verô in his quce, resident in
ejus personam et per ejus mortem deficiunt. L ’auteur cite Faber s
B a rth o le , Alexandre et d’autres D o c te u rs, et la lo i, si decem
ciim periero.
D o n c , la transmission ne dérive pas de la saisine, mais
de. la règle plerumque.
D o n c , pour décider si la stipulation conditionnelle passe
à l’héritier, il faut préalablement voir si elle est réelle ou
personnelle.
D o n c , si la loi dit en général que ex stipulatione conditio-
nali spes a d heredem transmittitur
ce n’est qu’en conséquence
de la règle générale plerumque.
D o n c , la transmission n’a pas lieu et la saisine est bornée
au stipulant, toutes les fois que la condition ne regarde que
sa personne.
Dans le plus grand nombre des contrats intéressés, la trans
mission s’opère, parce que chaque stipulant non tàm personam
quàm rem familiarem respicit.
Dans les dispositions testamentaires, il en est autrement ;
si le legs est con d ition n el, le légataire ne transmet pas son
droit à son héritier , s’ il décédé avant l’événement de la
condition , parce que le testateur est présumé n’avoir pensé
qu à la personne du légataire et non à celle de son héritier
�3
s,
( 51 )
qu’ il ne connaissait pas. N on idem est 'm conditionalibus legatls ,
dit V innius, sur le § ex condidonali , quià stipulationes etiam
conditionales ex prcesenti vires accipiunt, quamvis obligatio in
suspenso sit , legata autem derniim ciim deberi incipiunt.
.Et dans les donations, la transmission n ’a lieu qu’autant
que la condition est réelle.
R i c a r d , ( des dispositions conditionnelles, chap. 5, sect. i , )
a dit avec raison , que la condition n’empeche pas la saisine
qui résulte de la donation, et q u e, par suite , la condition a
un effet rétroactif.
Mais il n’a dit nulle part que la transmission ait lieu en
matière de donation conditionnelle, par le seul effet de la
saisine et sans qu’il soit besoin de consulter l’intention, des
parties sur l’étendue et la nature de la condition. Il n’a dit nulle
p a rt, que le retour stipulé par le donateur , doive s’étendre à
l ’héritier, et il a encore moins dit que cette extension fût une
conséquence de la seule saisine résultant de la donation. Il
ne pouvait ainsi confondre l’effet rétroactif de la condition
avec la transmission du droit conditionnel.
D o n c , la question actuelle gît à savoir si la stipulation
est réelle ou personnelle, ou pour mieux d ire , s’il y a lieu à
l ’application de la règle plerumqu'e.
Il faut observer ici que cette règle est un principe particulier
aux contrats onéreux et intéressés ; mais il n’en doit pas être
ainsi des contrats gratuits. L ’esprit d’intérêt dicte les premiers,
ad rem jam iliarem respic'nur. L ’esprit de bienfaisance préside
aux derniers, ut liberalitatem' et munijicentiam exerceat. Et la
loi gcneraliter sancimus , ne parle pas des dispositions ; elle ne
concerne que les stipulations , omnem stipulationem .
C ’est une pure équivoque de dire que la clause de retour
est une véritable convention : c ’en est une en ce sens, que
�(50
le donataire qui accepte la d o n atio n , s’oblige à exécuter les
c ha rg es sous lesquelles elle est faite ; mais cette convention
n’est que l’accessoire de la d on ation , c’est une condition
que le donateur impose à sa l i b é r a l i t é c ’est une loi qu’il
dicte à son donataire; et de là vient que si celui-ci la trouve
trop d u re, il peut répudier la donation ; ce qu’il ne pourrait
faire, si c’était une véritable convention qui ne se résout
que comme elle se fo rm e, par le consentement mutuel des
parties. C ’est donc par les principes des donations, qu’il faut
en interpréter les conditions.
O r , on l’a déjà dit, il est de l’essence de la donation,
d’emporter en faveur du donataire, la propriété absolue de
l ’objet donné. D at aliquis eâ mente, ut statim velit accipientis
f i e r i , nec ullo casû ad se reverti , et propter nullam aliam
causant ja c it quam ut liber alitatem et munificentiam exerceat^
et hœc propriè donatio appellatur. Leg. I , f f de donat.
Sans doute le donateur peut mettre des bornes à sa
l i b é r a li t é , m a is il d o it le s .e x p liq u e r . T oute ch a rg e, toute
condition qui tend à restreindre la libéralité, est de droit
étroit, comme contraire à l’essence de l’acte. Elle s’interprète
par l’esprit général de c e lu i-c i, qui est la libéralité et l’expro
priation.
Le donateur est présumé avoir voulu donner tout
ce qu’il n’a pas expressément retranché; il a dû clairement
designer les bornes dans lesquelles il voulait renfermer sa
donation. Ces maximes vraies pour toutes les donations,
le sont encore plus pour celles faites en contrat de mariage,
où la faveur du donataire est plus grande, où la libéralité
est présumée plus entière, où tout est de rigueur, parce que
tout y est réfléchi.
Q u e . les sieurs
Delsol
disent
maintenant, pourquoi la
transmission s’opérerait, lorsqu’il résulte de la clause, que la
�( 53 )
-condition est toute personnelle au stipulateur ; lorsque la
transmission est contraire à la nature de l’a c te ; lorsqu’enfin
elle est reprouvée par une loi formelle ? O r , ces trois raisons
se remontrent ici :
1 . ° S’il est vrai que la saisine ne peut se continuer
dans les héritiers, quand le contrat est fondé sur un d ro it,
un o b je t , un intérêt renfermé dans la personne du stipulateur,
pourquoi aurait-elle lieu dans le retour que le donateur n’a
stipulé que pour lui? N ’est-ce pas letendre à un cas non
exprimé par les parties? N ’est-ce pas aggraver une condition
qu’elles ont clairement expliqué,, et qu’il leur eût été facile
d etendre , si elles l’avaient voulu ? Q ue dans les conditions
qui peuvent indifféremment s’accomplir de leur vivant ou
après leur m o rt, il y ait transmission; que dans une vente
sous faculté de rém éré, par e x em p le, l’efFet de cette con
dition résolutoire concerne réciproquement les héritiers du
vendeur et de l’acheteur, cela se conçoit ; mais il en doit être
autrement, lorsque
la condition
tombe sur
la personne
même de l’une des parties; lorsqu’ il est évident, comme
dans l’espèce actuelle, que la condition a pour borne la vie
de celui qui l’a imposée pour son seul intérêt. N on habet
loctim quandb conditio apponitur in personâ stipulaioris.
2.° Il a été démontré que le retour est une exception au
droit com m un, absolument contraire à l’essence de la dona
tion entre vifs. O r , il est de r è g le , que les exceptions ne
s’étendent pas ; et certes , il serait bien plus contraire à la
nature de la donation, que la saisine du retour stipulé pour
le seul donateur, passât encore à ses héritiers.
3 .0
U ne loi s’y oppose, et les sieurs Delsol l’auraient déjà
remarqué, s’ils avaient lu la fin de la loi A v ia , dont ils
n’ont rapporté que le commencement: nec enim , ajoute-t-elle,
�C
5-4
)
eadem causa est patrls et mairis paciscentium ; qiùppe malris
pacium actionem prescriptis verbis constituit ; patris , doits actionem profectitice nomine competentem, conventions simplici
minime creditur innovare.
« C a r , il y . a de la différence entre le pacte du père et
» celui de la mère , au sujet de la dot ; en effet, il résulte
» du pacte de la mère l’action prescriptis verbis ; mais celui
du père ne
peut c h a n g e r,
par une simple convention,
» l’action de la dot profectice ».
Cette différence vient de ce que , dans le-droit R om ain ,
l’action de la dot profectice qui n’était autre chose que le
retour l é g a l , n’avait lieu que pour le p è r e , seul tenu, par
suite de la puissance paternelle, à doter sa fille. « C ’est là,
» disaient feu M M . Léo n et Babille , dans une consultation,
» le principe
général
qui veut , qu’en matière de retour
» conven tionnel, on distingue celui qui est stipulé par la
» m ère, de celui qui l’est par la p è re , et que celui-ci n’ait
» précisément d’autre effet que le retour lé g a l, si le père
» ne s’en est formellement e x p liq u é ,
de
manière à
» donner plus d ’étendue qu’il n’en a régulièrement,
lui
en vertu
» du droit commun ».
O r , de droit c o m m u n , le retour légal a-t-il jamais pro
fité aux héritiers du donateur ?
D o n c , en p rin cip e , le retour conventionnel du père est
restreint à
sa p erso n n e, toutes les fois qu’il
ne l’a
pas
étendu à ses héritiers.
D eux fameuses lois , disent néanmoins les sieurs D e ls o l ,
page 1 3 , décident formellement la question en faveur d es'
héritiers du stipulant :
L'u n e est la loi Ga'ius , 45 f f , soluto mairimonio .
L ’autre cst la loi A v i a , (5 c o d , de jure dotium,
'
�( 55 )
V o ici' l’espèce de la première de ces lo is :
« Gaius-Seius, ayeul maternel de Seia qui était sous la
»> puissance paternelle, a donné en d o t , pour sa petite-fille,
» à Lucius-Titius son m a r i, une certaine somme d’argent.
»> Dans le contrat qui contient les conventions d o tales, on
» a inséré cette clause qui a ete confirmée par une stipu» lation : si le divorce s'esi fa it entre les conjoints , sans faute
» de la part de la fem m e , toute la dot sera rendue à la femme
» ou à son ayeul maternel. On demande si l’ayeul maternel
» ve na nt à mourir aussi-tôt après cette convention , et
» qu’ensuite le divorce soit arrivé sans la faute de la fem m e,
» mais du vivant du père , sous la puissance de qui elle
» était, la stipulation produit encore une action et à qui
» cette action est acquise , si c’est à l’héritier de l’ayeui
» maternel ou à sa petite-fille.
L e jurisconsulte répond ; « il est vrai que cette stipula» tio n ,
faite par l’ayeul
m atern el, ne peut avoir a u cu n _
» effet dans la personne de la petite-fille, parce que cet
» ayeul a stipulé au profit de c e lle -ci, et qu’il est de règle,
» qu’on ne peut pas stipuler pour autrui; ainsi, l’action que
» produit cette stipulation , paraît appartenir à l’héritier de
» l’ayeul , hœredi stipulatoris actio competere videtur ►>,
D e ce fragment de texte , les sieurs Delsol infèrent que
le retour se transmet aux héritiers,- mais il n’était pas du
tout question de cela dans cette espèce.
L a dot n’avait pas été donnée à S e ia , et ne p o u v a it même
pas lui etre utilement constituée, parce que Seia était sous
la puissance paternelle; l’ay eu l maternel, contractant avec le
m a r i , avait stipulé un cas de
restitution de la d o t , et il
n’était question que de l’exécution de cette clause ; de p l u s ,
le divorce s’étant fait sans la faute de la fe m m e , le mari
�t
56
).
ne pouvait retenir la d o t , il devait donc la ren d re, non
à la femme , pour qui on n’avait pu stipuler , mais à l’ayeul
ou à ses héritiers ; le jurisconsulte devait donc répondre
comme il l’a fa it ; et cela ne ressemble en rien à la trans
mission du re to u r ; mais cela y ressemblé encore m oins, si
l’on achève de lire cette loi dont
aussi omis la fin.
« C e p e n d a n t, continue
les
sieurs
Delsol ont
le jurisconsulte, il faut d i r e ,
» dicendum est , que la dot peut être valablement payée à
» S e ia, quoiqu’elle n’ait pas d’action pour l’exiger, comme
» si l’ayeul avait stipulé qu’on donnerait une chose à lui
» ou à un tiers ; il sera même accordé à la petite-fille une
» action utile, en conséquence de cette convention de l’ayeul,
» afin qu’elle ne soit pas privée de l’avantage qu’il a voulu
» lui faire ; car la faveur due aux mariages et l'affection
» naturelle de l’ayeul pour sa petite-fille, doivent faire
» adopter ce parti ».
En core un c o u p , cela est étranger à la question dont il
s’agit ic i; et s’il en résulte quelque induction, c ’est que la
faveur due au mariage et à l’enfant donataire, doit
faire
écarter les héritiers du donateur.
V o ic i l’espèce de la loi A v ia .
« V otre ayeule a pu vous transmettre, si vous ave^ été son
» héritier, l’action qui résulte de la convention pour les choses
» qu’elle a données en dot pour votre fille , quoique l ’obli» gation des paroles ne soit pas intervenue ; car il y a de la
» différence, etc ».
O n ne voit pas quel parti les sieurs Delsol peuvent tirer
d une décision pareille. D ’une part, l’Empereur répond à
Sulpitius, que l’action n’a pu lui être transmise qu’autant qu’il
a ete héritier, si heures extitisti, ce qui prouve que cette
action
�'b J t
( 57 )
action aurait suivi la succession testamentaire; car, Sulpitius
n’étant que petit-fils, était exclu de la succession ab intestat
par les enfans de l’ayeule. D'autre p a rt, cette même loi fait
la distinction dont on a déjà parlé entre la convention stipulée
par la mère et celle stipulée par le père, et décidé formellement
que celle-ci n’a pas d’autre effet que le retour lé g a l, lorsqu’il
n’y a pas de stipulation plus étendue; ce q u i , loin défavoriser
le système du sieur Delsol, le renverse entièrement.
Ces deux lois sont donc loin de décider la question en
faveur des héritiers du donateur. E lle est de
plus jugée
çontr’eux par la lo i, quod de pariter 1 7 , f f ’, de rebus dubiis.
« La question qui a été agitée au sujet de plusieurs personnes
» qui meurent ensem ble, a été aussi traitée, par rapport à
» d’autres espèces; par e x e m p le , une mère constituant une
» dot à sa fille , a- obligé le m a ri, par une stipulation, à lui
» rendre cette d o t, dans le cas 011 la fille viendrait à mourir
» pendant le m a ria g e ; la mère est morte en même-temps,
» avec sa fille: les héritiers de la mère auront-ils, contre le
» m a r i, l’action provenant de la stipulation qu’elle a fait avec
>► lui ? L ’Empereur Antonin a' répondu, que cette stipulation
» ne donnerait point d’action contre le m a ri, par la raison
» que la mère n’a point survécu à sa fille ; quià mater filiez
» non supervixit.
L a stipulation du r e to u r n e passait donc pas aux héritiers
du donateur , à moins d’une convention expresse ; car, la fille
étant morte pendant le m ariage, le cas de la restitution était
o u v e r t , et il ne s’agissait pas de savoir qui de la mère
ou de la fille avait su rv é c u , mais bien si le mari devait
rendre la dot aux héritiers de la m ère, an ad heredem matris
actio ex stipulatu competeret. Peu importait que la fille fût
décédée avant ou après la m è r e 5 c a r , si elle était morte
H
�.
O8)
.
avant la m ère, celle-ci avait eu l’action et l’avait transmise
à ses héritiers ; et si elle était morte après la m è re , la saisine,
r é s u lta n t de la stipulation en faveur de la m ère, s’était con
tinuée, depuis sa m o r t , dans ses héritiers. Si d o n c , l’Empereur
a dit que la stipulation ne leur profitait p a s , attendu que la
mère n’a point survécu à sa fille , c’est parce qu’il a reconnu
qu'elle était personnelle à la mère et non réelle , et q u ’il
ne pouvait y avoir de transmission.
L a jurisprudence est-elle plus claire et plus uniforme que
les lois ? Les sieurs D elsol citent trois arrêts.
L e premier est celui dont parle P a p o n , au titre des d o
nations, art. 38. Mais
cet auteur n’indique ni la d a t e , ni
l ’espèce de ce ju gem en t, ni le tribunal qui l’a rendu.
L e sec o n d , qui est de 1 5 7 4 , est rapporté par M aynard,
liv . 8 , chap. 3 3 . Mais cet arrêt est du parlement de T o u
louse , qui s’est tellement écarté du d ro it, que , contre ses
dispositions formelles , il accordait le retour légal aux col
latéraux , même aux étrangers.
L e troisième est celui que le parlement de Paris rendit le
1 7 février 1 7 6 7 , entre les sieurs Lheritier et le marquis de
Mesmes. M a i s , il faut convenir que si jamais il a été permis
de faire fléchir les p rin cip e s, c ’était bien dans cette occasion.
L e sieur Lheritier ayant des enfans légitimes, avait donné '
à une belle-n ièce, c’est-à-dire à une étrangère, une somme
de 30*000 liv. qui lui retournerait , au cas du décès de la
donataire sans enfans ou de ceux-ci avant leur majorité. L a
faveur des enfans injustement dépouillés pour enrichir uti>
étranger, un grand seigneur , dût beaucoup influer sur cette
décision.
Mais ccs arrêts sont contredits par d’autres.
M o rn ac , sur la loi 5 t de ju re dotium7 en rapporte un du
�3 icj
t 59 )
19 mai ¡ 6 1 6 , qui a rejette la transmission. Les sieurs D elsol
diront en v^ in , qu’il s’ agissait d’un cas différent. Mornac qui
avait vu rendre cet a rrêt, pose ainsi la-question. Quœsitum
est in edictali auditorio , an stipulations reversionis conceptâ in
personam donantis in dotem , si donatarius sine hberis decesserit,
ju s iüu d revers ionis , ad heredes donatoris transeat ; dicimus
v u lg o , si le droit de reprise et de réversion passera aux
héritiers du donant ? Et l’arrêt a jugé la question contre
les héritiers , ut qui in stipulationem deducti non essent, parce
qu’ils n’étaient pas dans la stipulation.
L ’arrêt de 1 6 8 2 , rapporté par Gueret, au journal du palais,
est encore cité contre la transmission, par tous les auteurs
qui la rejettent. N o n , qu’il ait jugé la question en th è se ,
mais en ce qu’il a formellement reconnu le prin cipe, que le
retour doit être renfermé dans les termes de la stipulation.
L e donateur lui-même fut écarté du retour qu’il s’était réservé,
au cas qu’il n’y
eût pas d’enfans; parce que le donataire
avait laissé un enfant
qui cependant était
mort avant le
donateur. Gueret a fait là-dessus une discussion lumineuse
qui développe les vrais principes, et dont Bretonier fait l’éloge.
O n est encore moins satisfait, si l’on interroge les auteurs.
Les sieurs Delsol citent Lebrun.
Ils citent Laco m be ,• m ais, mal à p ro p o s, car il leur est
contraire. A u n .° 2 , Laco m be dit ce que les sieurs D elsol
ra p p o rte n t, page 1 7 du mémoire : on voit que dans ce para
graphe il ne fait que rappeler l’avis de Lebrun aux n.os 3 5 et 3 6 ?
duquel il renvoie. Et au dernier § de ce même n .° 2 , Lacom be
émet son opinion en ces termes : « Bretonier sur H e n ry s
» eodem , est d ’avis contraire avec raison, parce que la réversion
» conventionnelle dépend entièrement de la stipulation des
�( 6 0 ). . ,
» parties ». E t B r e t o n ie r ,à l’endroit cité par L a c o m b e , réfute
le système de la transmission.
Ils citent H enrys. Cet auteur avait d’abord adopté la v is
opposé à la transmission ; mais il en c h a n g e a , d’après M aynard,
et son principal m otif est q u e , le père stipulant le retour de
la d o t , si sa fille meurt sans en fan s, ou ses enfans sans descendans , ne s’est pas persuadé que cela pût arriver de son
v iv a n t , et n’a eu une visée si longue , que parce qu il a pensé
à ses héritiers; mais ne peut-on pas répondre, avec G u e re t,
que dan£ un contrat entre v ifs , où plusieurs parties arrangent
ensemble leurs con v en tio n s, il n’y a rien de m ental; qu’une
partie ne contracte pas selon les pensées de l’autre, mais selon
ce qui est écrit ; qu’il est inutile de recourir à des présomptions,
quand les parties ont clairement manifesté leur idée et qu’il
leur était facile de l’étendre par d ’autres stipulations ; qu’enfin,
on ne peut croire que le donateur a pensé à ses héritiers,
parce q u ’il a parlé de ses p e t it s - e n fa n s , p u i s q u e , dans moins
d’un a n , la condition prévue pouvait s’accomplir. Dans l ’es
pèce actuelle, par exem ple, la dame d’O rcet pouvait m ou rir,
laissant un enfant, et celui-ci mourir peu après, sans descen
d a is. Il ne fallait pas même un a n , pour que le sieur Delsol
vît arriver le cas dont il redoutait les suites ; et c’est cette
crainte et non la pensée de ses héritiers, qui lui a suggéré la
clause du retour.
Enfin , à l’audience ,
les sieurs D elsol ont cité C h a b r o l ,
qui se fonde sur H en rys et sur l’arrêt de 17 6 7 .
A ces auteurs , la dame d’O rc e t en oppose un plus grand
de jure dotium, Bretonier ,
sur H e n r y s , tom. 2 , liv. 6 , quest. 3. G u e r e t , journal du
palais. D o m a t, lois civile s, liv. 2 , tic. 2 , sect. 3. B o u ch eu l,
nombre. M ornac , sur la loi 5.
�( 6 i )
conventions de su c c é d e r, chap. 1 2 , n .° 7 1 . Arnaud d e là
R o u v iè re , traité du droit de retour.
Les sieurs D e lso l récusent M o r n a c ; mais on a déjà vu que
c ’est sans raison.
Ils récusent B reto n ier, parce qu’il s ’ est trompé ou qu’il a
seulement voulu d ire , qu’il ne faut pas trop etendre le retour.
Po u r toute réponse, il suffit de lire l’auteur. Après avoir parlé
d ’H e n ry s, de M aynard , de P a p o n , de L e b r u n ,
il d it :
« n o n o b s ta n t toutes ces autorités, j ’ai bien de la peine à me
» ranger à cette opinion ; ma raison est, que dans cette occa-
» sion il s’agit d’une réversion conventionnelle qui dépend
» entièrement de la stipulation des parties; o r , les stipulations
» sont de droit étroit et ne s’étendent, pas d u n cas à un
» autre , & c ».
Us récusent B o u c h e u l, parce q u ’il cite l’arrêt de M o r n a c ;
m ais, outre que cet arrêt est dans l’esp èce, Boucheul se fonde
encore sur d’autres arrêts de 1 5 8 4 et 1609 .
Enfin ils récusent Arnaud-Larouvière , comme ne connais
sant pas les premiers principes de la matière; tandis qu’il a
fait., sur fe droit de re to u r, un traité complet qui est géné
ralement cité.
Mais la vérité sortira-t-elle de ces lois qui se contredisent,
de ces arrêts qui se con trarien t, de ces auteurs dont les opi
nions se balancent ?
N on. Les lo is! elles sont tirées du code des R o m a in s, qui
avaient, sur la d o t, des pratiques inconnues dans notre légis
lation ; les usages de ce p eu ple, qui donnaient au mari la
dot de la femme décédée en m a ria g e , ( ce qui nécessitait la
stipulation dotem reid i
contre le mari )
rendent
peut-être
étrangères à la question actuelle, des décisions qui pourraient
bien être uniquement relatives au cas où la stipulation de
�(
■)
•restitution de dot devenait une convention entre le donateur
et le m a r i , et où il ne s’agissait pas de la considérer comme
une -charge imposée à la d onation, au profit du do n ateu r,
contre le donataire.
Les arrêts ! Celui de 1 574 est du parlement de Toulouse ;
ceux de 1 6 1 6 et de 16 8 2 sont au contraire de celui de Paris ;
et l’arrêt de 1 7 6 7 , qui est le seul rendu depuis les deux autres >
j i ’a certainement pu fixer la jurisprudence. Est-ce là cette série
non interrompue de décisions u n ifo rm es, qui transmettant
d ’âge en âge un point de doctrine , commande l’assentiment
universel et supplée au silence de la loi ?
D ’ailleurs, on ne peut se dissimuler que le retour con ven
tionnel étendu aux héritiers, a les effets de la substitution ,
puisque le donataire et ses enfans ne pouvant disposer, sont,
par le fait, chargés de conserver et de rendre ; ce qui fait
dire à R ic a r d , n.° 7 9 8 , que le droit de retour est une véri
table espèce de fidéicommis 3 sujet à l ’ h y p o t h è q u e de la dot
com m e les biens substitués, ainsi que l’a jugé le parlement
de T o u lo u se , par arrêt de 1 5 9 0 . Cetfe analogie a dû néces
sairement influer sur les arrêrs rendus en matiète de retour.
O r , ceux qu’opposent les sieurs D e lso l, datent d’un temps
où les substitutions conjecturales étaient admises. Celui de
1 7 6 7 a lui-même statué sur une stipulation faite en 1 7 1 2 . E t
i c i , il s’agit d’une clause insérée dans un contrat de 1 7 6 0 ,
postérieur à l’ordonnance de
1 7 4 7 > qui a défendu d’établir
aucune substitution sur des conjectures. ( Art. 1 9 ) .
Les auteurs ! L e plus grand nombre et sur-tout les plus récens,
ont écrit contre la transmission. Mais des opinions qui ne réunis
sent pas l’approbation générale , peuvent-elles servir de règle?
O ù donc sera le terme de cette incertitude ? O ù se prendra
Je motif de décision ?
�3^3
Dans le code des Français.
E t , que les sieurs D elsol ne crient pas à l ’efFet rétroactif.
11 ne s’agit pas de prononcer sur une clause expresse d’un
acte antérieur au c o d e , car il n’y a pas de stipulation en faveur
des héritiers du sieur Delsol ; et la question actuelle ne serait
pas agitée, s’il avait réservé le retour pour les siens.
Il ne s’agit pas de juger contre une législation préexistante
ou contre une jurisprudence reconnue.
11 ne s’agit pas d o te r aux sieurs D elsol un droit a cq u is;
car ils ne prétendent qu’à une expectative con d ition nelle, et
la difficulté consiste à décider s’ils peuvent l’avoir.
Il s’agit seulement de résoudre une question qui n’est clai
rement tranchée ni par les lois , ni par les arrêts, ni par les
auteurs; et, nul doute a lo rs, que l’autorité du code ne doive
prévaloir.
« Est-il v r a i , messieurs, d isait, au tribunal de la Seine,
» M . Jo u b e rt, Procureur im périal, dans une
question qui
» présentait la même difficulté ( 2 4 ) . Est-il vrai que le code
» civil ne doive avoir aucune influence sur vos décisions,
v dans les contestations sur des droits qui lui sont antérieurs ?
» Cela est v r a i , sans doute , quand il existe, pour décider
» les q uestions, des lois claires et précises , ou< ce qui n’est
» guère moins respectable,
une jurisprudence
constante et
» invariable .
(24 )
Il fallait juger s’il y avait péril d’cviction pour une vente passee
en l ’an 3 , et interpréter la lo i 1 8 , § i . er, ff. dt ptriculo et commodo rei
venditœ. C e magistrat a fait décider la question par l ’art.. 16 53. du c o d e ,
dont le moindre bienfait n’est pas d’av o ir mis fin sur cet objet com m e
sur beaucoup d’autres, à toutes les subtilités du droit
dt la cour dt cassation , an 1 3 .
Romain. Jurisprudence
�*¿4
C ¿4 )
» M a is , lorsqu’on ne vous présente, pour motifs de décision
» que des lois obscures où chaque partie trouve ce qu’elle
» v e u t , que des arrêts qui s’anéantissent, que des auteurs qui
» ne sont pas d’accord ;
» S ’il se présente alors un code destiné à f ix e r à jamais nos
» relations civiles et sociales , q u i , repoussant cet esprit no» vateur, auquel nous devons tant de funestes essais, n’a fait
» que réunir les lois que l ’expérience des siècles a rendu éter>♦ nelles comme celles de la nature ; un code rédigé par les
» hommes les plus recommandables par leurs vastes lumières ;
>> sur la rédaction duquel tous les S a v a n s , tous les Magistrats
» de l’Empire ont été appelés à donner leur avis ; ce code ne
» devra-t-il pas être le guide le plus s û r , l ’autorité la plus
» respectable que nous puissions vous offrir ? Et lui préférer
»
v
»
»
une jurisprudence versatile ou des auteurs qui se contredisent, n e serait-ce pas imiter la folie de ces n a v ig a t e u r s
q ui, après l’invention de la b o u s s o l e , s’o b s t in a ie n t à suivre
les é to ile s q u i le s a v a ie n t si s o u v e n t é g a ré s » ?
A la v o ix de cet éloquent M agistrat, le code s’ouvre de
lui-même.
A
rt.
»
m z . « O n est censé avoir stipulé pour soi et pour
» ses héritiers ou ayans-cause , à moins que le contraire 11e
» soit exprimé ou ne résulte de la nature de la convention.
A r t . nyç). « L a condition accomplie a un effet rétroactif
» au jour auquel l’engagement a été contracté. Si le créancier
» est mort avant l’accomplissement de la condition, ses droits
» passent à son héritier.
A
rt.
g b i. « Le donateur pourra stipuler le droit de retour
» des objets d o n n és, soit pour le cas du prédécès du donataire
» seul, soit pour le cas du prédécès du donataire et de ses
» doscendans.
Ce
�( «s )
» C e droit ne pourra être stipulé qu’au profit du donateur seul ».
A in s i, le code admet le principe de la transmission, pour
toutes les conventions qui en sont susceptibles. A r t . n z z .
Il consacre la saisine résultante du contrat et l'effet rétroactif
de la condition. A r t . 117 9 »
Mais, il reconnaît que le retour conventionnel,étant emprunté
du retour l é g a l , et d ic te, comme c e lu i-c i, par des motifs per
sonnels au donateur, n’est pas susceptible de transmission ; que
la sa isin e n e peut en passer aux héritiers, et il en restreint
la stipulation au donateur. A r t . g b i .
E t , ce qui prouve évidemment que cette disposition a été
universellement considérée comme un corollaire des anciens
principes, c ’est q u e , ni dans les observations des T rib u n s,
ni dans la discussion du Conseil d e ta t, ni dans les discours
prononcés au C orps législatif, elle n’a éprouvé aucune opposi
tion i et il n’a été rien dit qui puisse amener à croire que l’on
faisait une loi nouvelle. C ’eût été cependant un point assez
essentiel pour fixer l’attention de quelqu’u n , parmi les nom
breux collaborateurs du code. ( 2 5 )
__________________ ♦ ________________________________________________
(25)
Les sieurs D elsol se debarrassent de l’art. 9 5 1 , d’une manière
tout-à-fait aisée. Ils disent, dans leurs défenses, signifiées le 1 juillet 18 0 7 ,
q u e , « l’on peut assurer d’avance, qu’à la première révision du code c iv il,
v une disposition subversive de tous les principes reçus, et qui forme
» antinomie com plète avec l’art. 1 1 7 9 qui a paru postérieurement, sera
» nécessairement reform ée;et que la transmissibilité sera, comme aupara»> vant, consacrée par les lois et exécutée par une jurisprudence uniforme ; »
C ’est-à-d ire, en d’autres term es; que les auteurs du code se sont trompés.
Les sieurs D elsol ne leur feraient pas ce reproche, s’ils voulaient ne
pas confondre ce que le code a distingué. L’art, n z z retrace la règle
pltrumquï. L ’art. 1 1 7 9 rappèle l’eflet rétroactif de la cor.dition;et l’art. 9 5 1 ,
appliquant les deux autres, décide que le retour
est
au
nombre
I
des
�J&
( 66 )
L e s sieurs D e ls o l, diront-ils que l’art. 9 5 1 prohibe seulement
la stipulation du retour pour les héritiers du donateur, mais
qu’ il ne décide pas que les héritiers ne succèdent point à la
réserve qu’il en a faite pour lu i; qu’ ainsi, on n’en peut inférer
qu’il a terminé l’ancienne controverse ?
Il est facile de v o ir , qu’en disant, par l’art, u z i , que l’on
stipule pour ses héritiers, à moins que le contraire ne soit
exprim é) ou ne résulte de la nature de l’a c t e , le code n’a
fait que retracer la règle plerumquè.
E t , en d is a n t, par l ’art. 9 5 1 , que le retour ne peut être
stipulé que pour le donateur s e u l , le code a seulement fait
l’application de cette règle.
Mais, il en résulte nécessairement qu’il reconnaît et rejette
la transmission du retour, comme contraire à la nature des
donations ; e t , en cela, il ne détruit ni législation, ni juris•
/
,
prudence antérieure. Raisonner autrement, ce serait soutenir,
qu’aujourd’hui m êm e, la réserve du retour pour le donateur ,
passerait aux héritiers , m a lg r é l’article 9 5 1 , et a u r a it indi
rectement l'effet qu’il refuse à la stipulation expresse, en faveur
des héritiers.
*
Et ce qui rend cette application du code juste et raisonna
b le , c’est qu’elle coïncide parfaitem ent, soit avec les princi
pes , soit avec la stipulation.
A v e c les principes: parce que le droit de retour est conconditions et conventions non transmissibles aux héritiers. Les sieurs
D elso l veu len t, ail contraire, d’après le § ex conditionali stipulationc,
que toute condition soit nécessairement transm issible, sans distinction
de celles q u i , par la nature de l’acte ou l’intention des p a rtie s, sont
personnelles au stipulant. T oute leur défense repose sur cette erreur; et
quoiqu’cue so; t ¿yidente et heurte également les anciens et les nouveau x
principes, ils sont condamnés h la soutenir jusqu’à la fin.
�3 (T>
C
traire à l’essence de la
* 7
)
donation entre vifs ; qu’il est une
exception et doit être, par conséquent, restreint dans les bornes
que le donateur a posé; qu’il contrarie la faveur des mariages,
la liberté des dispositions, la circulation des propriétés ; qu’il
prend enfin sa source dans des motifs personnels au donateur,
comme le retour légal dont il est 1 image.
A v ec la stipulation : parce q u e lle ne parle que du donateur;
quelle a été faite en 1 7 6 0 , temps où les maximes consacrées
par les arrêts de 1 6 1 6 et 1 6 8 2 , et professées par B re to n ie r,
par Boucheul, par Arnaud de la R o u v i è r e , q u i, les derniers
avaient traité cette matière, donnaient la prépondérance aux
adversaires de la transmission , et que les parties s o n t , indé
pendamment du fa it , censées avoir contracté suivant l’opinion
dominante ; de sorte que la clause trouve sa décision dans
les mêmes principes qui présidèrent à son origine.
Il est donc vrai de dire qu’en droit ,
profiter aux
le retour ne peut
sieurs D elsol.
III.e
P R O P O S I T I O N .
Dans tous les cas, taction du retour tomberait dans
l'institution et se serait confondue dans la personne
de la dame d’O rc e t, héritière universelle.
L
a
dame d’O rcet aurait pu,sans danger, se borner à prouver,
ainsi qu’elle l’a fait dans sa première proposition , que la
clause du retour était purement personnelle à son père ; ce
n’est que pour suivre les sieurs D elsol dans toutes les parties
de leur système et en faire v o ir le peu de fo n d e m e n t, sous
tous ses rapports, qu’elle s ’est prêtée à examiner trois propo
sitions subsidiaires.
�( 68 )
Dans l’une, elle vient d’établir, qu’en d r o it , le retour ne
peut profiter aux sieurs Delsol.
Dans c e lle -c i, elle va démontrer que l’action qui aurait
pu en résulter, se serait confondue dans l’institution universelle.
Il a été prouvé dans la première partie des m o y e n s , que
réservés ne pouvait concerner que les
10 ,0 0 0 liv. dont le sieur Delsol s’était réservé la disposition,
parce qu’il-avait autrement désigné les biens institues, et que
le retour des biens
ceux-ci n’avaient pu être frappés de re to u r, parce qu ils ne
pouvaient retourner au sieur D e lso l, après sa m o rt, ni passer^
à ses enfans du second l i t , sans fidéicommis.
L ’institution doit donc être considérée comme pure et simple.
O r , cette institution est universelle; elle comprend tous
les biens, tous les droits, toutes les actions et généralement
tout ce qui pourrait appartenir au sieur D e ls o l , au temps de
sa m o rt; et il n’en avait été distrait que 10,0 0 0 liv. q u i, faute
de disposition , devaient y rentrer.
C ’est donc la dame d’O r c e t , héritière instituée, qui seule
représente le sieur Delsol.
Hœres in omne ju s m oriui, non tantum, singularum rerum
dominium sutcedii. L eg 3 3 , j f d e acquir . , vel omit, hered.
Hccreditas nihil aliud est quam successio in universum ju s
quod dejunctus habuerit. Leg. G z , j f de. reg. ju r.
Bona ità accipienda sunt , universitatis cujusque successionem,
quâ succeditur in ju s demortui : suscipiturque ejus rei commodutn. N am , sive solvendo sunt bona , sive non sunt : sive
damnum habent , sivelu crum : sive in corporibus sunt , sive in
actionibus , in hoc loco , propriè bona appellantur. Leg. 3 ,
J f de bonor. posess.
M aintenant, si l’on suppose que le droit de réversion des
biens donnés, peut être transmis aux sieurs D e ls o l, ce ne
�( ¿9 )
sera pas comme étant directement appelés en leur qualité
d ’enfans du second lit de leur p ère, car il n y a pas de v o
cation pour eux dans la clause, et il ne pourrait y en avoir,
puisqu’il ne pensait pas alors au mariage qu’il n’a contracté
que 1 1 ans après ; ce ne sera donc que comme héritiers du
sieur D e ls o l; et sans doute, q u a cet ég ard , ils ne récuseront
pas leur propre autorité,
« L e droit de retour, stipulé par le donateur, disent-ils,’
» page 9 , même pour lui s e u l, se transmet aux héritiers : les
» héritiers n ’ont pas besoin de la vocation de l’homme pour
» profiter du droit dont leur auteur est mort saisi ; ils n’ont
» besoin que de celle de la loi qui les saisit de tous les droits
» du défunt, qui les subroge à la saisine, en la continuant
» en leur personne.
Et page z 6 , « les héritiers différent même si peu du défunt,
» en matière de stipulation, et s o n t , au contraire , tellement
» identifiés avec l u i , qu’ils en tren t, par la force de la loi ,
» dans les stipulations , pour ainsi d i r e , malgré lui ; qu’ ils
» y entrent sans qu’il les no^nme, sans qu’il s’occupe de leur
» intérêt, sans qu’il le prévoie ; et qu’il suffit qu’il ait stipulé
» pour lui et qu’il n’ait pas formellement déclaré qu’il n’enten« dait stipuler que pour lui-même , pour qu’il a it , dans le
» même temps et par cela s e u l, stipulé pour eux ».
Les sieurs D elsol n’ont pas sans doute fait attention, qu’en
raisonnant a in si, ils plaidaient pour la dame d’Orcet ; leur
père a fait une institution universelle, et ce n’est pas en leur
fa v e u r; c a r , en 1 7 6 0 , ils étaient dans le néant et personne
ne pensait à eux ; c’est au profit de la dame d’Orcet. Il faut
donc qu’ils reviennent sur leurs pas , et qu’à la place de
ce
mot héritiers, qui leur a si souvent échappé , ils substituent
c e lu i- c i, enfans qu parens.
�( /
Mais il ne suffira pas de faire cette correction ; il faudra
aussi démentir les deux lois et Domat , qu’ils citent à la fin
de la page 25. Il fa u d ra , de plus, désavouer la loi A via ,
qu’ils in v o q u e n t, pages 13 et 14 .
Dans cette loi , l’Empereur ne dit à Sulpitius, que
son
ayeule a pu lui transmettre l’action qu’elle avait pour les
choses données à la fille de Sulpitius, qu’autant qu’il a été
son héritier, si heures extitisti. Il était en effet évident que Sul
pitius étant exclu de la succession légitime de l’a y e u l e , par
les enfans de c e lle -c i, elle n’avait pu lui transmettre cette
action , que par testament, si hczres extitisti.
L a même décision se trouve dans le § pâte r de la loi 4 0 ,
ff de pactis.
Dans cette esp èce, un père mariant sa fille unique, lui
promet une dot dont il paie la rente, et stipule que si la fille
meurt sans enfans pendant le mariage (auquel cas la d o t,
selon le droit du digeste , appartenait en entier au mari )
son frère , son héritier pourra retenir la moitié de cettedot ;
depuis, lui étant survenu des enfans qu’il a institués héritiers
par testament, on demande si cette stipulai ion profite aux
enfans ou au frère du donateur; Papinien répond : E a con-
vendo libens posteà suszeptis et hœredibus testammto reliais
proderit , cùm inter contrahentes id actum sit ut hœredibus cou
su la tur , et illo tempore quo pater altos filio s non habuit in
fratrem suum judicium supremum contulisse videatur.
E t , C u ja s , sur cette, l o i , ajoute : Actum fra tri ut hæredi
consistit in personâ cujucumque hccredis, non in personâ jratris
qui non extitit hczres : ergo et in personâ hccredis extranei, nedàm
in personâ f i l i i hccredis instituù .
D o n c , en pareil c a s , les enfans ne succèdent pas à l’action,
comme enfans du stipulateur, mais comme ses héritiers institués,
�( 70
et en vertu de la disposition qui leur transmet tous ses biens i
au point que, si un étranger était institué h é ritie r, c’est à lui
que l’action appartiendrait,
au préjudice des enfans.
D o n c , les sieurs D elsol, n ’étant pas héritiers de leur père,
ne p e u v e n t , de leur propre a v e u , revendiquer une action
qui n’est pas attachée à leur qualité d enfans du sieur D e ls o l,
et qui suit, comme tout ce qui lui appartenait, le sort de
son hérédité.
*
'
Les sieurs D elsol n’étant pas directement appelés comme
enfans ni d’aucune autre m anière, ne peuvent avoir plus de
droit que n’en auraient les autres parens de leur père. Sup
posé , en effet, qu’il ne se fût pas remarié et q u ’ il n’eût laissé
que la dame d’Orcet et ses autres parens qui ne sont connus
de personne, pas même des sieurs D e ls o l: on le demande,
serait-il entré dans l’idée de quelqu’un , que la dame d’O rcet
n’était pas propriétaire absolue des biens de son père ? Si un
collatéral eût consulté sur les prétentions que font valoir les
sieurs D e l s o l , on lui aurait certainement répondu que, n’étant
ni hériiier institué , ni appelé par la c la u se , il était sans qualité.
E t , parce que les sieurs D elso l sont venus au monde, 1 2 ans
après la clause , ils p o u rro n t, ce que n’aurait pu ce collatéral,
tandis qu’ils ne sont , comme l u i , ni appelés spécialement,
ni institués héritiers par aucune disposition! N o n . Eadem
causa , idem jus.
Pour se convaincre de plus en plus de toute la fausseté
de leur sy stèm e, il suffit d’en examiner les conséquences:
elles ne vont à rien
les principes.
moins q u ’à choquer la raison et tous
Ils prétendent, page 33 , que le contrat de mariage donne
tout à la dame d’O r c e t , excepté le droit de retour j qu’en
�( 71 )
fnême-temps, ce droit est transmissible, et qu’ils sont appelés
à le recueillir, comme héritiers de leur père.
M a i s , n’est-il pas constant que la dame d’O rcet est son
héritière universelle , et que l’institution qui lui a fait passer
tous ses biens, n’est, ni n’a pu être grevée de retour ?
Com m ent pourrait-il donc se faire que la dame d’O rc e t,
ayant en sa faveur une institution un iverselle, il existât
n éan m o in s, dans la succession de son p è re , un d ro it, une
action quelconque, qui fût retranchée de cette institution,
lorsque rien n’en a été distrait par la clause qui la contient ?
C om m ent pourrait-il être que la dame d’Orcet, prenant tous
les b ie n s, comme héritière contractuelle, il restât quelque
chose de l ib r e , pour les héritiers naturels ?
,
Il y aurait donc deux successions ; l’une conventionnelle,
qui comprendrait tout, hors le retour; et l’autre
intestat ,
qui ne comprendrait que le retour seul.
M ais cela est-il possible ? L ’institution contractuelle de tout
ce que l’instituant laissera à son d écès, n’est-elle pas un titre
u n iversel, comme le testament ; et l ’héritier ne prend-il p a s,
dans les deux c a s , tout ce que le défunt possédait ?
Il n’est pas de principe plus constant que celui de l’indivi
sibilité de la succession : l’héritier ne peut en accepter une
partie et rejetter l’autre; sa qualité est universelle; et ne fût-il
institué qu’en une partie, il serait héritier pour le tout. D e là
est venue cette règle du droit R o m ain : Ju s nostrum non patitur
cundcm in paganis ( 2 6 ) , et testato et intestato decessisse, eaî unique
rerurn nattiraliter inter se pugna est , testants et intes-
m u s, Leg. y , f f de reg. ju r.
(16 )
Id est in rebus p a g a n i, re i non militis.
Ñeque
�( 75")
Nequè etiim idem ex parte testatus, et ex parte intestatus
decedere potest. Instit. b de hered. instit,
Domat, lois civ. , l i v . , tit. i , sec. i , et liv. 3, tit. 1 , sec. 9 .
C ’est ce qui fait dire à M. M e r lin , dans son répertoire
universel de jurisprudence, au mot condition , q u e , « Si une
» seule personne est instituée héritière en une partie de la
» succession, et sous condition pour 1 a u tre , elle recueillera
» la succession; parce que la moitié qui lui est donnée, sous
» con d ition , n’appartenant à p erso n n e, se réunira à l’autre,
» par droit d’accroissement.
» Q ue la raison de cette décision sort de ce prin cipe,
» qu’un testateur ne peut pas laisser sa succession tout-à-la-fois
» par testament et sans testament, partim testatus, partïm in » testatus. C ’est pour éviter ce partage choquant d’une chose
» indivisible , que le droit d’accroissement a été introduit dans
» les successions. A in si, ajoute-t-il, l’institution conditionnelle
» d’une partie de la succession 3 ne peut avoir aucun effet
» lorsqu’elle regarde la même personne que l’institution pure
» et simple ».
Ces règles de l’indivisibilité de l’institution , s’appliquent à
celle de la dame d’Orcet ; quoique portée dans un contrat
de m ariage, elle n’était pas moins re n v o y é e , pour l’exécution,
au décès du sieur Delsol ; elle a tous les effets d’un testament.
L a dame d ’Orcet a donc réuni sur sa tête toutes les actions
que pouvait exercer son père ; et si l’on s’obstine à vouloir
que le droit de retour lui ait su rvécu , il a nécessairement fgic
partie de sa succession y il était in bonis , et dès le moment
du décès du sieur D e l s o l , il s’est éteint par la confusion qui
s est faite dans la personne de la dame d O r c e t , des deux
qualités de créancière et de débitrice du même objet. A rt .
13 0 0 du code Napoléon .
K
\
�( 74 )
I l en est autrement, lorsque c’est un étranger ou un colla
téral qui donne et se réserve le retour pour lui et pour ses
héritiers , en cas de décès du donataire sans enfans ou que,
laissant des en fans, ceux-ci viennent à mourir sans postérité.
L ’héritier du donateur et celui du donataire sont différens. L a
qualité de donataire et celle d’héritier du donateur ne se
rencontrent p a s; et par conséquent, il n’y a pas ljeu à l’ex
tinction du droit de retour qui marche avec la succession
du donateur, de même que la chose donnée marche avec
l’hérédité du donataire. C e sont des lignes ou des descendan
ces qui communément ne se confondent pas. E t en effet, il
n’ y avait pas eu de confusion dans l’espèce de l’arrêt du 1 7
février 1 7 6 7 , car il n’y aurait pas eu de p ro cès, si la de
moiselle R acin e eût été instituée héritière du sieur Lhéritier.
Q u e l’on compulse tous les auteurs, tous les recueils d’arrêts,
on ne trouvera aucune espèce pareille à c e lle -c i, où la do
nataire est en même-temps héritière un iverselle, grevée de
r e to u r d an s u n e
q u a l i t é , et a p p e lé e d a n s l’a u tre à r e c u e illir
toutes les actions du donateur.
Les sieurs Delsol n’ont aucun titre pour empêcher cette
confusion. Ils n’avaient qu’un droit à la succession de leur
p ère, et ils l ’ont consommé. Il leur revenait une légitime; ils
• l ’ont prise en biens héréditaires dont ils disposent à leur gré; ils
- l’ont prise sur les biens donnés dont la valeur a été rapportée
à la succession ; ils ont reconnu leur sœur pour héritière uni
ve rselle; ils l’ont chargée d ’acquitter les dettes de l’hérédité;
ils n’ont fait aucune réserve ; quelle pourrait donc être leur
qualité? Héritiers naturels: ils sont exclus par l’héritière
générale contractuelle. La disposition de leur père ne contient,
en leur f a v e u r , aucune vocation
particulière au droit de
retour. 11 a donc suivi le cours de la succession.
�T>yj
\
y
^
( 75 )
O n ne contestera pas, sans d ou te, que l’héritier contrac
tuel ait tous les d ro its, toutes les prérogatives de l'héritier
légitime et testamentaire.
Dans les institutions contractuelles, dit Dénisart, au mot
institution , n.° 7 , 9 , 1 0 , 1 1 et i a , même dans celles qui
changent le cours ordinaire des successions, l ’institué est un
héritier trè s.-p a rfa it et très-véritable ; il représente aussi par
faitement la personne du défunt que l ’héritier légitime,* il est,
comme l u i , saisi de la succession ; la règle le mort saisit le
v i f 1 a lieu en faveur de l’une et de l’autre espèce d’héritier:
et en c e l a , cet auteur n ’est que l’écho de tous ceux qui ont
parlé des institutions contractuelles.
Les sieurs Delsol objecteront-ils, comme ils l’ont fait dans
leurs défenses et à l’audience, que leur père a v o u lu , que
si la dame d’O rcet mourait sans enfans, les biens donnés
revinssent
à lui ;
q u e , ce cas a rrivan t, ils
ne
peuvent
revenir à e lle ; car autrement ce serait un cercle v ic ie u x ,
et la clause eût été inutile, puisque la dame d’Orcet aurait
eu les biens sans la clause et malgré la clause.
Mais les sieurs Delsol.sont seuls dans le cercle v ic ie u x , en
faisant cette objection; car ils partent du point en contesta
t io n , comme s’il était décidé en leur fa v e u r: et leur raison
nement n’est fondé que sur cette double e rre u r, que le retour
n’est pas personnel au sieur D e l s o l , et qu’il leur
nommément à eux.
11 est évident que, sans la c la u se, il n’y aurait pas
entre les parties ; la dame d’O rcet aurait les biens
tablement, en vertu des dispositions universelles de
a profité
de procès
incontes
son père.
E t malgré la clause , elle doit aussi les a v o ir , parce qu’il
est établi que le sieur D elsol ne l’a stipulée que pour lui ;
q u elle est devenue caduque par sa m o r t , et
qu’alors
même
A'.r-i
�(70......................
qu’on voudrait faire passer aux héritiers la réversion des biens
d onnés, la dame d’Orcet étant seule héritière , les sieurs Delsol
n’étant appelés ni comme enfans, ni d’aucune autre manière,
l ’action que produit le retour, se confond dans l ’institution,
tout comme s’y seraient confondus tous les droits, toutes les
actions que le sieur D elsol aurait pu avoir personnellement
à exercer contre sa fille. A rt. 1300 du code Nvpoléon.
L a c la u se , entendue dans son vrai sens et selon les prin
cipes , n’était dirigée contre la dame d’O rcet qu’en faveur de
son père seul; voilà pourquoi il 11e l’étendit pas aux siens,
et q u ’au contraire } il les priva non seulement de ce droit,
mais encore de tout ce qu’il laisserait en mourant.
L a dame d’Orcet prend
donc les biens, conformément
à la clause. S i , par un sens fo rc é , les sieurs D elsol lui don
nent une plus grande extension , c’est peine perdue pour eux ,
car ils ne sont pas en position pour en profiter ; et a lo r s
m ê m e , la d a m e d ’ O r c e t p r e n d e n c o r e les b ie n s , m a lg r é la
clause qui se perd dans l’institution universelle.
L ’objectioii des sieurs Delsol se rétorqu e, en définitif,
contre eux ; car ils veulent avoir les biens sans la clause qui
ne les appèle p a s, et malgré la clause qui ne parle que de
leur père, et ne peut leur profiter.
IVlais, disent enfin les sieurs Delsol, pag. 3 1 et 3 2 du mémoire,
« pour que la dame d’Orcet pût s’accorder avec elle-même,
» il faudrait 'd’abôrd commencer par effacer du contrat de
'» mariage de 1 7 6 0 , la claüse'du retour quese réserva le sieur
*» D e lso l, donateur. Il faudrait ensuite que le sieur Delsol fût
» mort
¿ans représentai« au dégré successible, autres que
» la dame d’Orcet. Il faudrait enfin supposer que la stipu» lation de retour ci t, de sa nature, personnelle e t , par
�2>yy
( 77 )
» conséquent, incommunicable aux héritiers
du donateur,
!» nonobstant son prédécès.
» O r , le retour est stipule dans le contrat de 1 7 6 0 ; et il
» existe encore , puisqu’il ne doit s’ouvrir qu’à la mort de
» la dame d’Orcet. D ès qu’il ex iste , elle n’a pu le recueillir
» avant l’événement de la condition, et sa qualité d h é ritiè re,
» à la charge du reto u r, ne lui confère pas un droit dirige
» contre e l l e , autrement il faudrait dire que la dame d’O rcet
» s’est succédée à elle-m êm e, de son vivant etc. ».
V o i l à , sans d o u te , ce que les sieurs .D elso l ont cru
pouvoir dire de plus fort. Mais se so n t-ils bien entendus
e u x -m ê m e s ?
D ’a b o r d , ils doivent bien se garder de commencer par effacer
du contrat de mariage de 1360 , la clause du retour que se réserva
le sieur D elsol ; car s’ils l’eiFacent, ils effacent aussi leur pré
tention ; tout est fin i, et même leur raisonnement.
E n second lieu , qu’importe que le sieur D élsol ait laissé
des enfans d’un second lit ou des collatéraux à un dégré quel
conque ? Il est clair que ne les ayant pas appelés au retour,
en leur qualité d ’enfans ou de collatéraux , ils ne peuvent
y venir que comme héritiers.
En troisième lieu, pour que la clause soit communicable
aux héritiers, il faut auparavant décider q u ’ elle.n’est point
personnelle: or , la dame d’Orcet croit avo ir clairement établi
que la clause ne concernait que le donateur : et maintenant,
quand le retour pourrait passer aux héritiers, il faut voir s’il
ne tombe pas dans l’institution.
O r , ici les sieurs Delsol se trompent ( page 3 1 )., s ’ils
pensent trouver de l'absurdité et une conjusion d'idées dans
la proposition de la dame d'Orcet.
E n effet, ils partent de cette id é e , que le retour existe
�( 78 ,)
encore jusqu’à son décès, et quêtant héritière, à charge de
retour, elle ne peut recueillir un droit qui ne s’ouvrira qu’à
sa mort.
Mais d ’une part, le retour n’a pu atteindre l’institution
contractuelle. L ’absurdité de l’opinion contraire est d’une telle
évid ence, qu’elle a frappé jusques aux sieurs Delsol ; car, s’ils
trouvent absurde que la dame d’O rcet puisse recueillir, de
son vivant y un droit qui ne devrait s’ouvrir qu’à son décès,
ils conviennent bien qu’il ne l ’est pas moins que le sieur
D e lso l ait pu se réserver celui de reprendre les biens réservés
qu’il ne donnait pas et qu’il ne devait transmettre que par
sa mort.
S ’il est une fois constant que le retour n’est, ni n’a pu être
apposé à l’institution contractuelle, a lo rs , la dame d’Orcet
n’est pas héritière grevée de retour; il n’est plus question
que de celui des biens donnés, et il est tout simple que la
dame d’O rc e t , héritière u n iverselle, succède à une action
que l’on suppose avoir pu se trouver in bonis de son père.
Il est au contraire absurde
de soutenir, qu’il a pu laisser
quelque droit qui ne soit pas recueilli par celle qui le repré
sente in universum ju s.
S i , par h a z a rd , aujourd’hui l’on découvrait un contrat
conditionnel, au profit du sieur D e ls o l, et que la condition
vint à s’accom plir: si , par ex em p le, la donation de 17 6 0
avait été faite à un étranger, avec réserve de retour pour le
sieur D elsol et les siens, au cas que le donataire mourût sans
enfans, et que ce droit vint à s’o u v r ir: si e n fin , la dame
d’O rcet avait elle-même contracté, en faveur de son p è re ,
une obligation p a y a b le , au cas qu’elle fût héritière de son
mari 9 lequel cas est arrivé : serait-ce au profit des sieurs Delsol
ou de
la dame
d’O r c e t ,
que toutes ces actions s e r a ie n t
�( 79 )
ouvertes? T o u t le m o n d e , sans doute répondra, que ce 6erait
pour elle.
D ’autre part, où est donc ce droit qui existe encore jusqu'au
décès de la dame d ’ Orcet ? Il faut bien qu’il réside dans quelqu’un.
Les sieurs Delsol ne cessent de dire que la saisine se continue
dans la personne des héritiers : les héritiers sont donc saisis.
M ais où sont les héritiers du sieur Delsol ? Il n’y en a d’autre
que la dame d’Orcet. L ’institution n’est faite qu’en sa faveur.
Les sieurs Delsol ne sont venus que comme enfans ,
prendre une légitime dans les biens institués ; ils l’ont prise
aussi dans les biens d on n és, qui , encore une f o i s , ont été
rapportés au partage; en sorte que Io n peut dire, en toute vérité,
que la donation n’existe p lu s , et que tous les biens du sieur
D elsol sont confondus dans la succession que les sieurs
Delsol ont reconnu, par les traités de l’an 9 , appartenir à leur
sœur , à la charge d’en p ayer les dettes.
E t , c ’ est ce que décidaient, dans leur consultation , M M .
Léon et B a b ille , à la lecture de cette clause de retour des
biens donnés et réservés. « Il est impossible d’admettre ,
v disaient-ils, que le sieur Delsol ait stipulé ce retour pour
» d’autres que pour lui seul ; parce q u e , si on le suppose
» prédécédé, il n’a et ne peut avoir d’autre héritier que sa
» fille q u i , ayant une fois recueilli à ce titre , ne peut dé» sormais être évincée de son hérédité par qui que ce s o it ,
» dès qu’elle n’est pas grevée de substitution. C ’est là une vérité
» qui se montre avec tant d’év id en c e, qu’elle est encore plus
» facile à sentir qu’à exprimer ».
Après de telles autorités, l’on peut répéter sans crainte ,
q u e , dans tous les c a s , l ’action du retour tomberait dans l’ins
titution , et se serait confondue dans la personne de la dame
d’Orcet , héritière universelle.
�’( 8 ° )
IV .'
P R O P O S I T I O N .
Nonobstant la clause, la dame d’Orcet pourrait disposer,
«
C
e l l e -ci
e s t , sans contredit, la plus subsidiaire de toutes ;
mais elle sert à faire vo ir combien est inutile et déraisonnable
le système des sieurs Delsol.
Ils veulent que leur père , se réservant le retour des biens
donnés 3 ait en même-temps stipulé pour ses héritiers.
Q uel est donc l’effet du retour ainsi transmissible ?
Il en a d eux.
D ’a b o r d , celui de perpétuer les biens donnés dans la ligne
de la dame d’O r c e t , afin que le dernier de ses descendans,
venant à mourir , sans avoir valablement disposé , les biens
passent aux héritiers du donateur. L ’on supposera m êm e, si
l’on v e u t , q u e le s ie u r D e l s o l a v o u lu c e t effet, en défendant
à sa fille tout acte contraire.
Il y aura donc substitution dans la ligne de la dame d’O rc e t,
puisqu’elle et ses descendans, à l’infini, seront chargés de con
server et de se rendre successivement les biens donnés.
Mais cette substitution a été, sans c o n t r e d i t , abolie. M .
Daniels l’a formellement reconnu, lors de l’arrêt du 1 1 frimaire
an 1 4 .
« Il y a d’a b o rd , a dit ce Magistrat , dans là stipulation
» du contrat de mariage de 1 6 9 4 , un droit de retour, consis» tant en ce que la dot était réversible à la ligne masculine;
» il y a ensuite dans le même contrat une substitution, en ce
w que la donataire a été chargée de conserver et de rendre
» aux enfans et ceux-ci aux leurs, à l’infini, la chose donnée...
» Les
�3?»
C8 0
» Les substitutions testamentaires ont été abolies ; celles ren» fermées dans les contrats de m a ria g e , l’ont été aussi. . . .
» La substitution établie par le contrat de mariage de 1 694
# a donc été abolie ».
L e second effet du retour transmissible devrait être, de faire
passer les biens à une autre ligne, ou si 1 on v e u t, aux héritiers,
par la défaillance de la ligne de la dame d’Orcet.
L e sieur D elsol n’a pas voulu cet effet-là. Il ne l’a pas
rendu nécessaire, puisqu’il a permis aux enfans et descendans
de la dame d’O r c e t , de disposer des biens donnés : ou ses
enfans sans descendans , ou sans avoir valablement disposé. ,
est-il dit dans la clause.
A i n s i , les enfans et les descendans de la dame d’O rcet
auraient eu la faculté de d isposer; et ce n’est qu’autant qu’ils
n e n auraient pas fait usage , que le retour aurait eu lieu.
D o n c , la défense faite à la dame d’O r c e t , de déroger au
retour , n est pas prise dans l’intérêt de la ligne appelée à le
re cu e illir; c a r , si elle eût été inspirée par ce m o t if, elle
eût été étendue aux enfans.
D o n c , la dame d’Orcet * n’ayant pas d ’enfans à qui elle
doive transmettre les b ien s, le m otif de la défense de déroger
s’évanouit ; et la substitution, dérivant de cette défense et de
l’obligation de conserver et de rendre aux enfans,
étant
d’ailleurs abolie par la loi de 1 7 9 2 , il est clair qu’elle a le
'droit de disposer.
C ’est ainsi que l’a entendu M . Daniels , dans la suite de
son plaidoyer. « Dans les parlemens de Dijon et de P a r is ,
» a - 1 - il d it, la seule faculté de disposer de la dot, au préjudice
» des collatéraux , n excluait pas le droit de retour; il fallait
» encore exercer cette faculté. O r , encore une fo is , R o sa lie
» Laianne ne l’a jamais e x e r c é e } le droit de retour a donc dû
L
�( 8 0
»> avoir tout son effet. Dans la coutume de N a v a r r e , la subsj> titution n’avait lieu qu’en faveur des descendans de la fille
» dotée ; elle était le m o yen d’assurer à la ligne masculine
» l’exercice du droit de
retour que la coutume lui avait
» accordé. C e m oyen n’existait plus depuis l’abolition des
» substitutions; mais dans l’espèce, R osalie Lalanne n’a pas
» disposé de la dot constituée en 1 6 7 4 , à Ursule St.-Martin.
» La dame de Navailles a donc pu réclamer cette dot à titre
» de réversion , comme dans les ressorts des parlemens de
» Paris et de D i j o n , elle aurait pu la ré cla m e r, nonobstant
» la faculté qu’avait la fille d o té e , d’en anéantir l’effet par
» une disposition contraire ».
M a i s , cela n’a - t - i l pas été ju g é , même
avant la loi
abolitive des substitutions, et à l’occasion du contrat de 17 6 0 ?
L a réserve du retour stipulé par la dame de V i g i e r , pour
elle et les s ie n s , était aussi subordonnée au cas où le sieur
d ’Orcet mourrait sans enfans, ou ses enfans sans descendans,
ou sans avoir valablement disposé. Ses héritiers naturels ont
en vain soutenu que la faculté de disposer n’était accordée
qu’aux enfans j l’arrêt du 18 janvier 178 8 , a décidé quelle
s’étendait aussi au sieur d’Orcet.
L a clause concernant la dame d’O r c e t , est littéralement la
même.
L a défense de déroger au retour, n’était prise que dans
l ’intérêt de sa descendance ou dans celui du sieur D elsol.
C e m o tif n’existe plus.
Cette défense produisait d’ailleurs une substitution qui est
abolie.
D o n c , la dame d’O rcet peut disposer.
Les sieurs Delsol invoquent vainement les principes pour
en conclure que le donataire grevé de retour ne peut aliéner.
�383
Ils vont même ju s q u ’à citer l’art. 9 52 du co d e , qui n ’ est que
la conséquence de cet article 9 5 1 , qu’ils ont condamné à la
réformation.
Certainement, le retour conventionnel a l’effet d’empêcher
et de résoudre les aliénations faites par le donataire; mais
il ne peut ici avoir ce résultat, parce que la clause porte ces
mots : ou sans avoir valablement disposé. L e sieur D elsol a
donc voulu que la stipulation ne privât pas la ligne de la
dame d’O r c e t , de la faculté de disposer j ce qui réduisait cette
stipulation aux effets du retour légal.
Ils invoquent aussi la fin de la clause qui défend à la dame
d’Orcet de déroger au droit de retour ; mais l’objection a été
levée d’avance. Cette p ro h ib itio n , dont on a précédemment
expliqué les m o tifs, n’a plus d’application , dès que le sieur
D elsol est mort , dès que la dame d’Orcet n’a pas d’en fan t;
e t , dans aucun cas elle ne pourrait avoir effet, dès que dans
la ligne de la dame d’O r c e t , elle aurait produit une véritable
substitution.
R É S U M É .
I
R eb elle dans tous les sens, au système des sieurs D e l s o l ,
la clause du contrat de 17 6 0 se refuse à toutes les interpréta
tions qu’ils veulent lui donner.
S ’a g it-il des biens réservés /
Cette énonciation s’applique , malgré eux , à la somme de
10 ,0 0 0 liv. dont le sieur D elsol s’ est réservé la faculté de
d isposer; lorsqu’il a parlé des biens compris dans l’institution,
il les a qualifiés biens insinués ; et quand il s’agit d’une charge
rigoureuse , inusitée , indiget speciali designatione , et l’inter
prétation est toute contre celui q u i, dictant la lo i, a p\i? a dû
mieux s’expliquer.
�.
(§4)
,
'
Persistent-ils à étendre ce mot réservés^ aux biens institués ?
Ils tombent dans une alternative dont le résultat leur est
toujours contraire.
O u la clause est nulle et comme non écrite , parce q u elle
est subordonnée à une condition impossible et contre nature,
le sieur Delsol ne pouvant revenir de l’autre monde pour
recueillir le droit de retour de ces b ie n s, qui n’ont passé
que par sa m o r t , à son héritière universelle.
O u là clause renferme une substitution fidéicommissaire ;
parce que le
retour ne pouvant jamais s opérer au profit du
stipulateur, ne peut passer à d’a u tres, qu’autant qu’ils sont
gratifiés en second ordre ; l’héritière ayant
priété ,
recueilli la p ro
ne peut être chargée de conserver et de rendre à
d’autres que lui , sans qu’il y
ait trois personnes comprises
dans la stipulation , et par conséquent, sans qu’il y ait fidéicommis aboli par la loi du 1 4 novembre 17 9 2 .
S ’a g it-il des biens donnés ?
i . ° L a réservé du retour est évidemment personnelle
au
sieur D elsol.
C ’est l’expression littérale de la clause.
C ’est l’intention commune des parties, déterminée p a rle s
circonstances où elles se trouvaient.
Il
réserva le retour à soi expressément,
lui s e u l, parce q u ’il n’avait qu’un
c’est-à-dire , pour
enfant; parce
que le
mariage n’aurait pas eu lie u , s’il eût parlé d’autres héritiers ;
parce qu’il ne pouvait penser à des collatéraux qu’ il n’avait
p a s , ni à des enfans d’ un second mariage qu’il ne contracta
que plus de onze ans après.
L a dame de V igicr réserva le retour à elle et aux siens ÿ
parce qu’elle avait d’autres enfans.
E lle lê p o u v ait; elle le v o u lu t; elle le fit. L e sieur Delsol
�3 Hi
C 85 )
le
pouvait de même ; il ne le fit point : d o n c , il ne le
voulut pas.
Subsidiairement :
2 .0 La transmission du retour aux héritiers du donateur,
n’était formellement consacrée par aucune loi. La jurispru
dence n’était ni constante , ni reconnue. Les auteurs se con
tredisaient. L ’opinion'dom inante repoussait cette o p in io n ,
lorsque le contrat a été passé. C ’est donc le nouveau code
q u i , destiné à fixer toutes les incertitudes, à terminer toutes
les controverses, doit décider la difficulté ; et il y a d’autant
moins d’effet rétroactif, que le principe qu’il p o se, est con
forme aux règles
du droit j à la lettre de la clause et à
l’intention évidente des parties.
3 . 0 L e système de la transmission est infructueux pour les
sieurs Delsol.
Ils ne sont appelés ni comme en fan s, ni d’aucune autre
manière. Ils ne peuvent venir comme héritiers ; c a r , il n’y
en a d’autre que la dame d’O r c e t , q u i , instituée par son
contrat de m ariage, et ne pouvant l’être à charge de re to u r,
représente exclusivement le sieur D elso l , réunit sur sa tête
tous les d roits, toutes les actions qu’il a laissé, et éteint, par
la confusion, celles qu’il aurait pu avoir contr’elle.
4 .0 E n fin , toutes ces hypothèses n’empêcheraient pas la
dame d’O rcet de disposer. L a défense de déroger au retour,
était prise dans l’intérêt de sa ligne j elle cesse avec le motif
qui l ’inspira , et ne serait d’ailleurs , qu’une charge de con
server et de rendre, qui ne peut aujourd’hui recevoir d’exé
cution. L a dame d’Orcet a donc le droit qu’auraient eu ses
descendans, qui pouvaient disposer des biens donnés
le
retour étant réduit par la clause m êm e, aux simples effets du
retour légal.
I
�T>V*
¿y »;
S
(.8 6 )
D o n c , sous tous les rapports, le refus que fait le sieur
Desprats de payer le prix du pré de C a n c o u r, est mal
fondé. La prétention des sieurs D e ls o l, qui lui sert de m o
tif, ne peut se soutenir; et le jugement par défaut, qui ,
sans avoir égard à la clause de ré versio n , a ordonné la
continuation des poursuites , doit être maintenu.
M agistrats! prononcez. L a dame d'O rcet attend votre
décision avec la confiance et la sécurité que doivent inspirer
sa cause et ses juges.
Jusques ic i, elle n’a tenu que le langage de la raison.
S ’il fallait parler à vos cœurs , elle dirait :
3’ai passé ma vie à liquider les biens de mon père ( 2 6 ) ;
j ’en ai ve n d u , à la vérité, pour payer les dettes de mon
(26)
Pages 6 et 7 de leur m ém oire, les sieurs D elsol portent à un
m illio n , vaieur de ce temps, les biens de leur père. S ’il faut les en c ro ire ,
la majeure partie de cette fortune a été engloutie tn peu d ’anncesi La dame
d 'O rc et, aprts avoir ¿puisé les créances mobilières , a vendu tous les immeu
bles q u elle a trouve à vendre. Ils terminent en lui imputant îe dessein
avoué publiquement de Us dépouiller, pour enrichir des étrangers. C ’est ainsi
que , pour se rendre intéressans, ils calomnient jusqu’il ses intentions.
Lors du partage fait en 1 7 8 5 , les immeubles du sieur D e ls o l, y
compris le domaine du C l a u x , furent estimés 15 0 ,8 7 2 l i v . ; les sieurs
D elsol en ont pris le q u art, qui fut d élivre en nature
leur tutrice.
Les effets appréciés dans l’inventaire fait en 17 8 0 , se
montaient
h 2 1 7 , 3 9 2 liv . ; mais, comme il y avait en outre des objets non déter
m in és, le vérificateur du contrôle é v a lu a , d’o ffic e , tout le m obilier h
23 0 .0 0 0 liv . et perçut le droit sur cette somme.
Pourquoi donc les sieurs D elsol (page 6 )
le portent-ils A plus de
70 0 .0 0 0 liv . ? Quel peut être le but de cette erreur de 500,000 liv»
d’autant plus inexcusable, q u ’ils ont en leur pouvoir
une expédition
de l’in ven taire, et que la discussion, dont les traités de l’an 9 ont été la
suite , leur a fait connaître le véritable état de la succession ? C ’est que
�.3-S7
( ÿ7 )
é p o u x , mais j*ai réparé, amélioré et conservé la plus grande
partie de ces biens, malgré la tourmente révolutionnaire.
E t , nouveau T an ta le, il me serait défendu d’y toucher!
Frappée
d’interdiction, i\ ne me serait
pas permis de
repousse r la calomnie par des bienfaits !
J e ne pourrais secourir l^s malheureux , recompenser de
vieux domestiques, léguer un souvenir a 1amitié!
sans cela , ils n’auraient pu dire que, dans peu d’années, la dame d’Oi'cet
en a dissipé la majeure partie. C ’est qu’il était écrit que les sieurs D elsol
ne seraient exacts sur rien.
M algré tous les soins que s’est donné la dame d ’O r c e t, m algré toutes
les poursuites qu’ elle a fait fa ire , elle n’ a pu recouvrer que 1 86,000 liv .
y compris les sommes dues par la dame D u b o is, veuve du sieur D elsol ;
sur quoi l ’on a déduit les reprises que la dame d’Orcet a pu justifier par
é c rit; 6 o ,o o o liv . qu’ il a fallu payer pour sommes dues par la caisse
des consignations; enfin, les dettes de la succession, sans m im e y
comprendre les legs portés au testament du sieur D e lso l, que la dame
d ’Orcet a p a y é s , quoiqu’ il ait été déclaré nul. Le reste de l’ac tif a
été réduit à presque rien par les insolvabilités ; par le défaut de titres ; par
l’abolition des arrérages de rente ; par les remises ordonnées par le sieur
D e ls o l, dans un état confié à son directeur; enfin, par les pertes résul
tantes des paiemens reçus en assignats.
B r e f, il est résulté du compte présenté en l’an 9 , qu’il ne
revenait
aux
sieurs D elsol que 20,00 0 liv . pour leur quart de l’ac tif réel ; et cependant
la dame d’Orcet a cédé au sieur D elsol aîné, i . ° 15 ,0 0 0 liv . dues par
sa m è re; z .° 4 ,0 0 0 ljv . à prendre sur e lle , pour excédent de pensions
par elle reçues; 3 .0 la m o itié 'd u domaine de Coussergues ; 4 .0 le quart
des créances à recou vrer, qu’il a depuis abandonné pour 4 ,0 00 liv . ,
dans la vente de la montagne du 28 thermidor an 10. Le sieur D elso lVolpilhac a traité sur les m êm es'bases; excepté qu’au lieu du quart des
créances à re c o u v re r, la dame d’Orcet lui a cédé la liquidation de
l’ofiice de receveur des consignations, tombé dans le tiers
objet sur lequel elle a éprouvé une perte de
30,000 liv,
consolidé
•
�Ç S« )
,
D e l’opulence où j'ai v é c u , de l’abondance oii je vis en
core , un mot pourrait me précipiter dans la misère ! Expropriée
du peu de biens que j’aurais de libres, saisie peut-être dans
tous mes re v e n u s, je serais condamnée à connaître le besoin,
à traîner, dans le désespoir, des jours trop lens à fin ir , dont
le dernier accomplirait la condition tant désirée !
E t , sous mes y e u x , les sieurs Delsol disposeraient, à leur
p laisir, des biens qu’ils ont pris dans cette même succession
o ù se confondirent celles de m on ayeule et de ma m ère!
Sous mes y e u x , ils vendraient mon héritage m aternel,
que je leur ai donné en paiement de leur légitime ( 2 7 ) 1
¿conduits par tous les tribunaux , qu’auront-ils perdu ? rien*
V o ilà comme la dame d’Orcet les dépouille pour enrichir des étrangers!
T elle est cette fortune tant exagérée! T el est ce m obilier p ro d igieu x,
pour lequel cependant, les sieurs D elsol n’ ont pris sur la dame d’Orcet
qu’ une inscription de 10 0 ,0 0 0 liv . !
En même temps qu’elle liquidait la succession de son p è re , la dame
d’Orcet s’occupait aussi de celle de son mari qui laissait plus de dettes
que de biens. Malgré qu’elle ait vendu beaucoup de ces b ien s, et qu’elle
ait aussi aliéné une partie des siens pour p ayer ces dettes qui s’élevaient
à plus de 900,000 liv . ; elle doit encore; une partie considérable de cette
som m e;, mais ceux des biens de son mari qu’elle a con servés, valent plus
que ceux qu’elle a vendus de la succession paternelle. T elle est cette femme
qui dissipe tout !
Sans doute que »pour plaire aux sieurs D e lso l, il faut que la dame
d’Orcet conserve scrupuleusement ses capitaux ; qu’elle les accroisse
en économisant sur ses reven u s, et qu’elle ne dispose de rie n , pour
tout laisser à des frères qui ne se souviennent d ’e lle , que lorsqu’il
s’agit de sa fortune.
(17 )
Partie du domaine de C ou ssergues, que le sieur D elsol cadet
possédait en en tier, par les arrangemens qu’il a faits avec son frè re ,
a etc vendue^ L a yente du surplus est actuellement affichée-
�(
89)
Ils pourront encore obtenir de la nature, ce que la justice
ne leur doit pas. Ils auront la ressource d ’un dernier appel
au cœur d ’une sœur généreuse: ils savent bien, que pour celle
qui n’a pas le bonheur detre m ère, des frè re s, pour peu
qu’ils le veuillent, sont toujours sûrs de tenir lieu d’enfans (28).
(2 8 ) Ainsi se réalisera le voeu du code Napoléon.
Ne rien réserver pour les collatérau x, c’est leur dire de tout mériter :
conception morale et profon de, q u i, prenant les hommes tels qu’ils sont,
se sert de leurs défauts m êm e, pour les obliger à devenir ce qu’ils
doivent ê tr e
Signé D e l s o l - V i g i e r .
v
M . D E L Z O N S , Présid ent, Rapporteur.
L A B R O , Avoué.
I
�.•l i l j i - j j j i u
T
F
A I T S ,
A
B
L
E
vmm
.
.....................................................................
O B SERVAT I 0 N S
page 4
G É N É R A L E S ................................... 1 5
M o y e n s . — I .re P a r t . — B
i e n s
r é s e r v é s
.
L a clause de reversion des biens réservés est nulle et
comme non écrite
18
Ou c 'est une substitution abolie par la loi du 14
Novembre 1792 .......................................................................... 27
II.e
Part.
—
B
i e n s
d o n n é s .
E n f a i t , la clause de réversion
est purement personnelle au sieur D e ls o l , . . .
I .re
Proposition. —
36
II.e Proposition. — E n droit, le retour dont s'agit , ne
' peut profiter aux sieurs Delsol .
I I I . e Proposition.
. . . . . . .
46
— Dans tous les cas l 'a c t i o n du
retour tomberait dans l'institution et se serait confondue
dans la personne de la dame d'O rcet , héritière universelle.
67
\
I V . c Proposition.
— Nonobstant la clause , la dame
d Orcet pourrait d is p o s e r . ................................
R
80
é s u m é ........................................................................................ 85
N o te sur la valeur réelle de la succession du sieur Delsol.
86
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jeanne-Marie. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delzons
Labro
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
annulation du testament
fideicommis
jurisprudence
dot
stipulation
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse pour Dame Jeanne-Marie Delsol, veuve de monsieur Gabriel-Barthélemy de Vigier-Dorcet, demanderesse ; Contre sieur Jean-François Delsol aîné et Gabriel-Barthélemy Delsol-Volpilhac, défendeurs ; En présence du Sr Desprats, aussi défendeur.
table des matières.
Table Godemel : Retour : 3. peut-on stipuler, dans un contrat de mariage, un droit de retour tant pour une donation que pour une institution ? un droit de retour est-il transmissible aux héritiers du donateur, sans stipulation ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Viallanes (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1760-1809
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
89 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1911
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1910
BCU_Factums_M0531
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53363/BCU_Factums_G1911.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Marmanhac (15118)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
annulation du testament
avancement d'hoirie
contrats de mariage
dot
droit de retour
fideicommis
jurisprudence
stipulation
substitution
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53362/BCU_Factums_G1910.pdf
be2b0dab7e6427c106479f39efad3794
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
P O U R
LES SIEURS DELSOL, FRERES;
CONTRE
LA
DAM E
VEUVE
LEUR
SOEUR
V IG IE R -D ’O R C E T ,
CONSANGUINE.
( V o i r , pour le fait et les questions élevées à ce sujet, la Sentence ci-join te, du 22
août 1808, intervenue depuis la première Consultation, et dont lesdits sieurs D e lsol
sont appelants ; voir en outre (pour plus grand développement des principes consacrés
par l’A rrêt solennel du 17 février 176 7, sur la transmissibilité du retour conventionnel)
la copie ci-jointe du Précis qui a étc imprimé pour lo rs, et auquel renvoient les
Consultations. )
PARIS,
D E L ’I M P R I M E R I E D E M AM E F R È R E S .
1809.
�PREMIÈRE CONSULTATION.
F A IT S E X P O SÉ S.
L
e
S O U S S I G N É , auquel il a été exposé,
Q ue, par le contrat de mariage passé entre le sieur GabrielBarthélemi de Yigier et la demoiselle Delsol de Volpilhac, en
1760 , à Aurillac, le sieur Delsol père a donné à la future sa
fille , ce acceptante , et par avancement d’hoirie , les domaine
et terre Duclaux , en quoiqu’ils puissent consister, aux mêmes
charges et conditions que le délaissement lui en seroit fait el
adjugé, conformément aux demandes par lui formées aux re
quêtes du Palais} et, a défaut d’adjudication de ladite demande
en délaissement, il a donné à ladite future toutes les créances
qu’il avoit à exercer sur lesdits biens en capitaux et accessoires;
Que , par le même contrat , ledit sieur D e l s o l père a en
outre donné à ladite future sa fille la somme de 10,000 liv.,
qui a été délivrée audit sieur futur époux; qu’à l’égard du sur
plus de ses autres biens qui se trouveraient lui rester lors de
son décès, il a promis de n’instituer d’autres héritiers que
ladite future sa fille , sous la réserve de l’usufruit de ces
mêmes biens , qu’il pourrait cependant vendre eL e n g a g e r tant
a la vie qu’à la mort, et sous la réserve en ou tre de pouvoir dis
poser d’une somme de 10,000 l iv ., qui resterait a ladite future,
s’il n’en disposoit [»as ; comme aussi à la charge par sadile fille
de payer Goo liv. de pension à la dem oiselle Lagarde, sa bellc1
�/
( 3 )
mère , si celle-ci survivoit à lui donateur; qu’enfin le sieur
Delsol père s’est réservé expressément (pour le cas où ladite fu
ture épouse décèdei’oit sans enfants, ou ses enfants sans des
cendants et sans avoir disposé valablem ent), le d r o i t d e
r é v e r s i o n , ta n t d e s b ie n s d o n n é s q u e r é s e r v é s , s a n s q u ’i l
p u t ê t r e d é r o g é p a r s a d i t e j i l l e a u d it d r o i t d e r e v e r s io n , p a r
a u c u n e d i s p o s i t i o n , n i a u tr e s a c t e s à c e c o n tr a ir e s ;
Q u’en conséquence, le sieur Delsol père a cru pouvoir dispo
ser du droit de réversion qu’il s’étoit réservé, comme d’un droit
qu’il avoit in b o n is , et faisant-partie de son patrimoine , ainsi
qu’il résulte de son testament fait en 1780, annulé poux vice
de forme seulement, par lequel il appeloit son fils ain e, et
successivement 6es autres enfants, par ordre de primogeniture,
à profiter de ce même droit;
Que ledit sieur Delsol père , décédé depuis, a transmis né
cessairement à ses héritiers tous les droits, même éventuels,
dont il étoit saisi, et, par conséquent, le droit de réversion
qu’il s’étoit réservé expressément pour le cas du décès de sadite
fille sans enfants , et de ses enfants sans enfants, et qu’ainsi ils
ont l’espérance , le cas arrivant, de recueillir, comme effets de
la succession de leur père , les biens dont il a stipulé le retour
à son profit, c’est-à-dirc non seulement ceux qu’il avoit donnés
irrévocablement sous la seule réserve du retour, sans même en
retenir l’usufruit, mais encore ceux qu’il avoit compris dans
rinstitution contractuelle de sa fille, avec réserve de pouvoir les
vendre ou engager (même d’eu jouir en usufruit sa vie durant),
et que cependant il n’a ni vendus ni engagés ;
�Mi
(
3
Avis y relatif.
E s t d ’ a v i s que les enfants et héritiers Delsol sont saisis de
tous les biens et droits dont leur père est décédé saisi, et qu’en
cette qualité ils ont droit, la condition du retour arrivant, à
tous les fonds et créances qu’il a pu donner à sa fille en la
m ariant, tant ceux par lui donnés irrévocablemeut que ceux
pour lesquels il l’a instituée s o n héritière contractuelle, c’est-àdire même à ceux desdits fonds et créances qu’il s’étoit réservé
de pouvoir vendre ou engager, et que cependant il n’a ni ven
dus ni engagés 5
Q u’en conséquence lesdits héritiers, comme propriétaires et
créanciers conditionnels, sont fondés dès à présent, non pas à
intenter aucune action pour revendiquer les fonds en question,
ou pour exiger le paiement des créances dont il s’a g it, mais à
faire tous actes conservatoires de leursdits droits éventuels {art.
i i 80 du Code civil) , notamïnent à requérir toutes transcrip
tions et inscriptions nécessaires dudit contrat de mariage , aux
bureaux de la conservation des hypothèques , dans les arron
dissements desquels sont situés les fonds en question, ou cent
affectés à l’hypothèque desdites créances ; le tout à reflet d'em
pêcher que leur sœur et autres possesseurs desdits fonds, ou
les débiteurs desdites créances, puissent préjudicier aux droits
éventuels de propriété et d’hypothèque des requérants; comme
aussi à défendre à toute demande qui seroit formée contre eux
à fin de radiation desdites transcriptions et inscriptions.
�O B S E R V A T IO N S .
Principes sur la transmissibihté des stipulations
conditionnelles.
Il ne s’agit pas ici d’un retour lé g a l, qui sans doute ne seroit
pas transmissible aux héritiers du donateur décédé avant son
ouverture.
C ’est par convention, par stipulation expresse que le donateur
s’est réservé ce droit pour l’exercer, comme tous ses autres droits,
par lui-mème ou par ses ayants-cause, quels qu’ils fussent, le
cas de la condition arrivant.
A la vérité, ce n’est qu’ une espérance jusqu’à l’arrivée de la
condition, du moins tant qu’il est possible que la condition ar
rive ou n’arrive pas) , e x stipulatione conditionali tantiim
spes est debitum ir i , In st., §.- 4 > D e verborum obligationibus ; mais cette espérance est transmissible, eamque ipsam
spem in hœredem transmittimus , s i, priusquàm conditio
e x s t e t , mors nobis contingat, ibidem. E t la raison en est que
dans les contrats la condition a effet rétroactif au temps de
l’acte , quasijam contracta in prœteritum em ptione , Leg. 8,
if. D e periculo et commodo rei venditœ ; Leg. 78 , lï’. D e
verborum obligationibus y Leg. iG , if. D e solutionibus et
libérât ionibus.
A in si, la condition une fois arrivée , la stipulation a le même
effet que si elle avoit été faite sans c o n d itio n : C iim en irn s e m e l
c o n d itio e x t i t i t , p e r i n d è h a b e tu r a c s i illo te m p o r e q u o s t i p u la tio i n t e r p o s i t a e s t , s in e c o n d itio n e f a c t a e s s e t , Leg. 11,
S* 1 j if- Q u i p o ti o r e s . Car dans les stipulations011 ne considère
�f4
'
■( 5 )
que le temps où le contrat est Fait: Quia in stipulationibus tem■ pus spectatur quo contrahimus. Leg. 18 , v e rs., F iliu sfa miliaSj ÎT. D e regulis juris.
E n fin , il n’est pas nécessaire que la condition arrive pendant
la vie du stipulant : Ciim quis sub aliqucî conditione stipulatus fu erit, posteà existente conditione hceres ejus agere
potest, In st., p. 25 , D e inutilibus stipulationibus.
Ils ne souffrent aucune exception.
Cette règle ne reçoit aucune exception , pas même pour les
faits stipulés sous condition , quoiqu’ils pussent paroître person
nels de leur nature : Generaliter sancimus omneni stipulationem , sive in dando, sive in faciendo , sive m ixta e x
dando et faciendo inveniatur , et ad liœredes et contra hceredes transniitti, sive specialis hceredum Jiat mentio , sive
non. Leg. i 3 , Cod. D e contrahendd et committendd stipu-
latione y c a r, comme le dit Pedius , Leg. 7 ,
8 , ff. D e
pactis : Plerumquè persona pacto inseritur , non ut personale pactum J ia t, sed ut demonstretur curn quo pactum
factuni est.
A in si, l'héritier n’a pointa prouver que son auteur a voulu
stipuler pour lui \ c’est à celui qui le prétend exclu par la stipu
lation à prouver sa prétendue exclusion : Quamvis verum
est quod qui excipit probare debet quod excipitur, attarnen
de ipso dun taxat, at non de hcerede ejus convenisse petitor, non qui excip it probare debet. Leg. 9 , if. D e probationibus etpraïsuniptionibus. E t l’on décidoit en conséquence
que, le fils de famille qui a stipulé sous condition ayant été en
suite émancipé, l’action appartient an père, quoique la condition
�( 6 )
soit arrivée depuis l'émancipation. Leg. 78 , ff. D e verborum
obliga tion ibus.
En un m o t, comme le dit Jean-Jacques Schüts dans son
Compendium ju r is , au titre D e pactis : Conditio casualis
suspendit actiîs perfectionem , adeo ut ipsum ju s in suspenso s it , et tantum spes sit debitum iri , fjuce tamen spes
in conventionibus hoc fa c it , ut quis creditor dicatur, atque
res ipsius bonis annumeretur . . . . h inc apparet, pendente
conditione y aliquid subesse quod conventionem sustentât >
atque sic obligationem tanquam in utero materno latere ;
c’est un enfant dans le ventre de sa mère , q u i , une fois venu
au monde, est réputé né dès le moment de sa conception: Undè
conventiones conditionales e x pressenti vires accipiunt,
quod seciis est in legatis ; ut itaque conventio conditionalis obligationem producat , conditio casualis omnino e x pectanda e s t . . . . conditione autem sem el existente, perin dè habetur ac s i ab initiopure conventumesset, et statim ve~
nit ac cedit dies.
s
Pas même pour les contrats bienfaisants. Arrêt solennel
¿1 ce sujet de 176']'.
Ces décisions s’appliquent non pas seulement aux conditions
stipulées dans les contrats intéressés , mais aussi h celles des
contrats bienfaisants.
Cependant La Rouvière a prétendu le contraire dans son
T r a i t é du droit de retour, liv. i cr, chap. i 3 , où il veut que le
retour stipulé par les donateurs , pour le cas du décès du dona
taire sans enfants, ne soit pas transmissible aux héritiers du do
nateur, décédé avant l’événement de la condition; et il se fonde
�(
7 )
sur la loi Quod de pariter , ff. D e rebus dubiis, qui, dans le
fait, ne décide qu’une question de survie (comme le soussigné
l’a démontré dans la seconde partie de* son précis , imprimé en
17675 pour le sieur Réné Louis, l’héritier et consorts, contre
le marquis de Mesme, appelant de sentence rendue au parc
civil du Châtelet de Paris , le 29 juillet 17G6, après cinq au
diences.)
M ais, comme l’a démontré pareillement le soussigné dans la
même partie de son précis, la loi Caïus , 45 , ff. Solato matrimonio , et la loi A via , 6 , au Code , D e jure dotium , déci
dent au contraire que le retour conventionnel est transmissible
aux héritiers du donateur , quoique celui-ci soit décédé avant
l’événement de la condition sous laquelle il avoit stipulé le re
tour à son profit. E t c’est aussi ce qui a été jugé en grande connoissance de cause, dans la première cause du rôle d’après la
Chandeleur, par arrêt solennel du parlement de P aris, en la
grand’chambre, le 17 février 1767, qui confirme ladite sentence.
Cependant la cause de l’appelant avoit été plaidée, tant au
Châtelet qu’au parlement, par M. Tronchet, et c’étoit bien le
cas de lui appliquer ce que Virgile avoit dit d’IIector : St Per~
gama dextrd defendi potuissent , etiam hac defensa fu is
sent. Mais malgré les grands talents et les prodigieux efforts
du défenseur, qui passoit dès-lors à juste titre pour un des plus
profonds jurisconsultes de ce temps, tous les magistrats, ainsi
que l’avocat général Barcntin , qui portoit la parole, reconnu
rent facilement, comme avpient fait les premier? juges, que
pour cette fois M. Tronchet s’étoit trompé ; qu’en effet la pré
tention de son client, qu’il avoit ilcfpudu avpc .tflnt de zèle,
étoit évidemment subversive des principes gén éra^ sui'lii trans
mission de toutes stipulations conditionnelles, q uçjle étoit con-
�(S)
traire à toutes les décisions des docteurs et des lois sur la trans
mission du retour conventionnel en particulier, et qu’enfin
elle étoit également contraire à la jurisprudence établie par tous
les jugements rendus sur cette question, comme le soussigné
l’avoit démontré dans les trois parties de son précis imprimé.
L es lois nouvelles n’y ont point dérogé.
On a cependant tenté encore dans ces derniers temps de re
nouveler la même prétention, en soutenant que le droit de re
tour , stipulé par le donateur , ne pouvoit avoir lieu qu’à son
profit personnellement, c’est-à-dire autant seulement qu’il survivroit à l’événement de la condition du retour qu’il se réservoit; mais il falloit pouvoir mettre en avant de nouveaux pré
textes, autres que ceux qui ont été proscrits si solennellement
par l’arrèt du 17 février 17O7.
O n a cru les trouver d ans la loi des 25 octobre et i/j novem
b r e 17 9 2 , qui abolit toutes les substitutions non encore ou
vertes, dans l’article 896 du Code c iv il, qui les prohibe pour
l’avenir, et dans l’article 9 5 i du même Code, qui prohibe
toute stipulation conditionnelle du retour des choses don
nées , au profit d’autres que le donateur se u l, et survivant
à l’événement de la condition qui doit donner ouverture au
retour.
E11 effet, a-t-011 dit, nul doute que l’on doit, regarder comme
une véritable substitution la stipulation expresse ou tacite du
droit de retour au profit d’autres que le donateur vivant lors de
son ouverture : or les substitutions non encore ouvertes lors de
la publication de la loi des ii> octobre et i/| novembre 1792
sont abolies par cette loi ; donc toutes les stipulations de retour
�,
( .9 )
au profit d’autres que le donateur, qui n’étoient pas encore ou
vertes à celte époque , sont pareillement abolies; et c’est par
cette raison, a-t-on ajouté , que l’article g 5 i du Code civil dé-,
fend de stipuler le retour au profit d’autres que le donateur sur
vivant à son ouverture.
Tels sont du moins les nouveaux moyens qui ont été em
ployés au tribunal de cassation par J\Î. M éjan, défenseur de
M. Larregoyen contre la dame de Navailles, pour faire casser,
s’il avoit été possible, le jugement de la Cour d’appel de Pau ,
du 19 thermidor an 1 2 , confirmatif de jugement du tribunal
de première instance de Saint-Palais., rendu au profit de la
dame de Navailles.
.
•
Mais, sans avoir égard h ces prétendus moyens , par arrêt •
rendu le 11 fi’imaire an i4> en la section des requêtes, au rap
port de M . Borel, sous la p'résidence de M . M u r a ir e , et qui est
rapporté au commencement du troisième cahier du Journal des
audiences du Tribunal de cassation ; pour l’an 14— 1806 : L a
C o u r, attendu qu’on ne peut appliquer au x droits de retour
labolition prononcée p a r le s lois des 25 octobre et 14 no
vembre 179 2, a rejeté la demande en pourvoi dont il s’agissoit.
On faisoit cependant beaucoup valoir pour M. Larregoyen
la. circonstance particulière que, dans le fait, il s’étoit écoulé un
siècle d’intervalle entre la stipulation de retour et l'ouverture
de ce droit au profit de la dame Navailles, représentant les
sieur et dame M artin, dotateurs , dont elle descendoit ; que
pendant ce temps la d o t, pnreux donnée à leur fille à charge
de retour , avoit passé successivement dan« sa descendancc^Kir
plusieurs mains, sans pouvoir être aliénée au préjudice du droit
de retour qui pourroil s’ouvrir un jour , ce q u i, suivant le de1
�fi*'
( 10 )
fenseur du sieur Larregoyen, présentoit tous les caractères d’une
véritable substitution graduelle dans la descendance de la do
nataire , et ensuite , en cas d’extinction de cette descendance ,
en faveur de ceux qui pour lors representeroient les donateurs.
Mais (comme l’a observé M. Daniels, substitut du procureur
général, portant la parole) de ce que les substitutions testa
mentaires et même celles établies par contrat dé mariage ont
été abolies , il ne faut pas conclure qu’il en est de même du droit
de retour. L es dispositions textuelles de la loi (celles du
17 nivose an 2, art. 74>
ventôse suivant, art. j , )
s'élèveraient, ajoute-t-il, contre celte conséquence, puis
qu'elles conservent le droit de retour (en faveur d autres que
le donateur) lorsque les substitutions étoient déjà abolies.
D 'a illeurs , disoit-il encore, le droit de retourne peut être
assimilé à une véritable substitution , lorsque le donateur
exerce lui-même ce droit y ce n'est donc pas non plus une
substitution quand il est ex e rcé par ses héritiers qui ne re
présentent avec lui que la même personne y et de la il coneluoit que les juges, tant de première instance que d’appel ,
avoient fait une juste application des lois de la matière (comme
l’a reconnu la Cour par son arrêt de rejet du iG frimaire an i/j.)
E lles ne le pouvoient même p a s , quand les rédacteurs en
auroient eu f intention .
En vain insisteroit-on encore, malgré le préjuge de cet airêt , sur ce que l’arlicle (j5i du ('ode civil a prohibé toute
stipulation de retour au profit d’autres que le donateur vivant;
en vain vondroit-on eu conclure que les rédacteurs de l’article
out considéré comme des substitutions véritables les stipula-
^
�2+>\
C 11 )
tions de retour qui ne profiteroient qu’aux représentants du
donaleur après sa m o it , et qu’ainsi ils ont entendu abolir tous
les retours conventionnels ' qui n’auroient été ouverts , posté
rieurement au décès des donateurs, que depuis l’abolition des
substitutions.
Quand même il s e r o it possible de supposer aux rédacteurs un
pareil m o tif, et que ce niotii prétendu est le seul qui ait dé
terminé la rédaction de l’article, l’intention qu’on leur suppose,
ne feroit pas loi toute seule et par elle-même, puisqu’elle n’a
pas été érigée en loi; car autre chose est la loi, et autre chose est
le m otif qui a pu déterminer à la proposer , comme, en fait de
dispositions testamentaires, autre chose est la disposition et au
tre chose est le m otif ( c a u s a d a n d i ) qui a pu la dicter : R a tio
le g a n d i l e g a to n o n c o h œ r e t , le m otif de la disposition n’en
lait pas partie. L e g . ^■3. , p . G, ÎT. D e c o n d itio n ib u s e t d e m o n s tr a tio n ib u s e t c a u s is q u œ in te s ta n ie n to s c r ïb u n tu r . E t
tout ce qui rés ulteroit de cette supposition, c’est que l’article
951 seroit indubitablement un de ceux qu’il faudra rapporter
lorsqu’il sera question de la révision du Code civil; car com
ment pourroit-on laisser subsister une loi dont le seul m otif auroit été de donner lÿuu (sans cependant l’ordonner) à l'abolition
de droits acquis par des conventions qu’autorisoient les lois et
la jurisprudence antérieures.
Ajoutez que la loi de 1792, qui abolit les substitutions"non
encore ouvertes , est odieuse par elle-même , .comme contraire
au droit commun établi de temps immémorial par tontes les
lois antérieures rendues sur ce lait, et sur-tout à cette raison
écrite qui depuis tant de siècles est r e co n n u e par tous les peu
ples polices comme le Code universel du genre humain. Aussi
n’a-t-elle pu être provoquée que par des circonstances impérieuses,
�A
»»
( 12 )
seules capables de la justifier ; mais au moins ne doit-on pas
l’appliquer à ce qui ne porte pas la dénomination expresse de
substitution, qnand même il en auroit d’ailleurs le caractère
et l’cflet sous une dénomination différente ; a plus forte raison
ne doit-on pas l’étendre à des stipulations conditionnelles qui,
saisissant à l’instant même le stipulant, et ses ayants-cause con
sidérés comme la continuation de sa personne,' ressemblent
aussi peu à une substitution que le jour ressemble à la nuit. E t
il faudra*toujours en revenir à dire avec la loi que ce qui a
été établi contre la raison et les principes du droit ne doit pas
être tiré à conséquence : Quod contra juris rationem receptu m est non est p r o d u c e n d u m ad consequentias . Leg. \[\ ,
i 5 et 16, il'. D e le gibus y Leg. i / j i , If. D e regulis juris.
Il y a plus; c’est que quand même la nouvelle loi auroit abolien
termes textuels, et très expressément, tous les retours conven
tionnels qnin’auroient été ouverts que depuis celle de 1792, con
cernant les substitutions, etaprès le décès des donateurs, une pa
reille loi, attendu le vice radical de rétroact ivité dont elle se trouveroit infectée, ne seroit pas susceptible d’exécution en cette par
tie. En vain voudroit-on l’assimiler à la loi qui abolit les substitu
tions établies par actes antérieurs à sa promulgation, mais qui
n’étoient pas encore ouvertes pour lors. Il y a bien de la diffé
rence entre l’une et l’autre, car les substitutions qui ne sont que
des dispositions en faveur de tiers non présents ni acceptants
ne peuvent saisir l'appelé qu’au moment de leur ouverture , et
même autant-seulement que l’appelé: l’acceptera pour lors ; jus
que-là le substitué n’a aucun droit acquis; et par conséquent la
loi a pu , sans porter atteinte à rm véritable droit de propriété 7
Abolir tonies les substitutions qui viendroient à s’ouvrir par la
suite, quoiqu'elles fussent établies par des actes antérieurs.
�-?3a
*
( 13 )
Il n’en est pas de même des’ stipulations conditionnelles. E n
effet, quoiqu’il n’en résulté qu’un droit éventuel, une simple
espérance, comme le disent les Institutes, elles saisissent de ce
droit, à l’instant m êm e, le stipulant, et dans sa personne ses
ayants-droit, c’est-à-dire ceux qui le représenteront, quant à l’ob
jet de la stipulation, lors de l’événement de la condition sous
laquelle la stipulation a été faite et conservée ; or il résulte'né
cessairement de là que toute loi postérieure qui aboliroit ces
droits éventuels enlèveroit de fait au stipulant, dan£ la per
sonne de ses ayants-cause , des droits acquis dont ils étoient sai
sis, ce qui seroit une atteinte formelle au droit de propriété.
E nfin la lettre même de la clause en question nécessite
rait, en tant que de besoin, la transmissibilité du retour
qui y est stipulé*
À ces considérations générales, toutes péremptoires, nous
en joindrons une particulière, et qui toute seule suffiroit, en
tant que de besoin, pour trancher la question ; c’est que les
propres termes dans lesquels est conçue la stipulation condi
tionnelle de retour dont il s’agit assurent textuellement et
littéralement ce droit aux ayants-cause tlu stipulant, quels qu’ils
soient, comme au stipulant lui-mêine, le cas de la condition
arrivant; et que, de plus, les mêmes termes sont formellement
exclusifs de toute substitution.
E t d’abord, que dans l’espèce le droit de retour soit assuré,
en tant que de besoin, par les termes mêmes de la stipulation
du donateur, à ses ayants-cause, comme au donateur lui-mènic,
ou plutôt au donateur dans la personne de ses ayants-droit, au
„cas d’événement de la condition, en quelque temps que ce soitj
j k
;
�*K.
( 4 )
c’est ce qui résulte évidemment de cc que ce retour.est stipulé,
nommément, pour les biens formant l’objet de l'institution con
tractuelle de la donataire; car assurément il étoit impossible que
le retour de ces biens particuliers qui n étoient donnés qu’à titre
d’institution, et par conséquent sous la.condition de la survie
de la donataire au donateur, s’ouvrit jamais pendant la vie de
celui-ci. E t puisque cependant il s’éloit réservé pour lui-même,
et non pour aucun tiers après lu i, ces mêmes biens à.titre de
retour conventionnel, il falloit bien que sa reserve put profiter
à ceux de ses ayants-cause et transmissionnaires à titre universel
ou particulier q u i, lors de l’ouverture du retour par lui réserve,
le représenteroient pour cet objet, comme ne formant à cet
égard qu’une seule et même personne avec lui. Autrem ent, sa
réserve n’eût pu profiter à personne en aucun cas, et la clause
auroit été illusoire.
E lle sujfiroit aussi toute seule pour écarter toute idée
d e s u b s titu tio n .
Mais il est également sensible que le donateur en stipulant le
t<
ï \.ouypour
lui, et non pour aucun autre que lui-même, a néces
sairement exclu toute substitution; car enfin, comme^lc disoit
M. Daniels, portant la parole pour le ministère public en lu
Cour de cassation, il est impossible de se substituer soi-même à
son donataire pour la chose donnée.
Il est bien vrai que le donateur qui stipule le’retour pour
lui-même seulement, et non pas pour des tiers après lui, le sti
pule aussi nécessairement pour ses ayants-cause et transmissionnaires, soit qu’il doive en profiter de son vivant, soit que par
l’événement, le droit qu’il s’est réservé ne s’ouvre qu’après sa
�-?
35"
( i5 )
m ort, à moins qu’il n’ait formellement excepté ce dernier cas
par sa réserve, comme par exemple en stipulant le retour a son
profit, pour le cas seulement du prédécès du donataire.
Mais ces transmissionnaires et ayants-cause ne forment avec
lui qu’une seule et même personne, qui a toujours été saisie
ah initio, tant de son vivant que depuis son décès, du droit
éventuel qu’il s’étoit réservé, comme de tous ses autres biens,
sans attendre l’événement de la condition.
Ainsi, il est impossible^de les supposer substitués par le do
nateur au donataire, et tout ce qui résulte de la réserve de re
tour stipulée par le donateur pour lui-même seulement, et non
pour aucun tiers après lui, c’est que la condition du retour ar
rivant , le donataire cesse d’être propriétaire de la chose don
née, c’est que la donation qui lui avoit été faite est alors réso
lue ou 1évoquée 5 c est enfin que le donateur en la personne de
ses ayants-droit, en conséquence de sa réserve, se trouve avoir
recouvré sa propriété dont il 11e s’étoit dessaisi que sous une con
dition résolutive qui a eu lieu *, c’est en un mot que cette pro
priété s’est réunie de plein droit à son patrimoine aussitôt l’ar
rivée de la condition résolutive apposée à la donation : or cer
tainement il est bien permis aux donateurs , nonobstant l’abo
lition de toutes substitutions, de stipuler qu’en tel ou tel cas
leurs donations seront résolues de plein droit, ab initia, comme
si elles n’avoient jamais existé, ou pour la suite seulement,
comme dans le cas de larévocalioiules donations pour cause de
snrvenance d’enlantsj le tout, soit que la condition résolutoire
arrive de leur vivant, soit qu’elle n’arrive qu’après leur mort :
car les conditions résolutives produisent leur cflei, lors même
qu’elles n’arrivent «ju’après la mort du stipulant , ce qui 11’em- '
pêche pas que l’acte résolu n’ait subsisté jusque-là, s’il n’a pas
J.l
�x
( i6 )
etc autrement convenu. Leg. i 5 , in princ., (T. D e indiem addictione.) V oyez aussi la loi finale au Code, D e legcitis.
L e s observations précédentes sont également applicables
aux institutions contractuelles sous conditions résolu
toires.
Il en est de même incontestablement des donations par forme
d’institution contractuelle, q ui, suivant Potliier, Laurière, et
tous nos autres auteurs, ne différent des autres donations en
tre-vifs qu’en ce qu’elles sont laites sous la condition particu
lière de la survie du donataii'C, et en ce que le donateur peut
encore , nonobstant la donation, s’aider des choses qui y sont
comprises , par contrats intéresses , tels que la vente ou l’hy
pothèque , mais non pas en disposer à titre graduit par dona
tions entre-vifs , institutions 011 le’gs.
En effet, l’instituant contractuel doit aussi pouvoir stipuler
que sa donation s e r a résiliée ou révoquée, si telle ou telle con
dition a r r i v e par la suite, n’importe en quel temps, et que ce
pendant elle aura jusque-là tout son eilet; mais en ce cas les
biens qui en sont l’objet, comme étant retournés à la masse de
l'hérédité, et réunis au patrimoine du donateur, appartiennent à
ceux qui lors de l’arrivée de la condition résolutoire se trouvent
représenter ledit donateurou instituant j eiassureincnt ceux-ci 11e
r e p r e n n e n t .pas les biens en question en qualité de substitués au
donataire ; c’est le donateur lui-inème, toujours existant dans leur
p e r s o n n e , qui reprend sa c h o s e , comme ayant cessé d’appartenir à
l’institué, au moyen delà résolution de l’institution, qui aeu lieu
]i:ir l Ï ! \ è n e m e n t , comme le donateur ou s^s représentants re"p rn n in u la chose donnée, lorsqu'il y a survenance d’eniants,
�22>ï
(
17 }.
même posthumes, quoique le posthume ne soit né que depuis
son décès. Autrem ent, il faudroit dire, ce qui est absurde, que
le vendeur ou ses héritiers, rentrant dans la propriété de la
chose vendue par l’eiTet de la résolution de la Vente, ou de la
rescision du contrat, reprennent la chose vendue comme substi
tués à l’acheteur. E t il faudroit conclure de là ( ce qui seroit
encore plus absurde, s’il est possible), qu*attendu l’abolition de
toute substitution, il n*est plus permis de vendre sous condition
résolutive, ni de faire résilier aucun contrat de vente, non
plus que de disposer par donation, institution ou legs, sous
condition résolutive. Mais il faudroit aussi, avant tout, effacer
du Code civil les articles 953, 960 , 962, 963 et 966, relatifs
a la révocation des donations de toute espèce pour cause de
survenance d’enfants , même posthumes, qui ne seroient néfc
que depuis le décès du donateur; il faudroit notamment sup
primer ledit article 963, en ce qu’il suppose qu’au cas de la sur
venance d’enfants du donateur ( avant ou après son décès ) le
retour s’opère , non pas, à proprement parler ; par voie de ré
version à sa personne, mais bien plutôt par voie de réunion à
son patrimoine de tous les objets qui en avoient été distraits à
titrp lucratif, et par conséquent au profit de ses représentants ,
si la réunion ne s’opère qu’après son décès (les biens çompris
dans la donation révoquée de plein droit r e s t e r o n t d a n s
LE PATRIMOINE DU DONATEUR , LIBRES DE TOUTES CHARGES
ET HYPOTHÈQUES DU CHEF DU DONATAIRE
, etc.)
m
Conclusion ,
Tout ceci posé, nul doute que les représentants du sieur
Delsol, donateur , sont fondés à requérir, dès à présent, toutes
3
�C' i s )
transcriptions et inscriptions nécessaires pour assurer la conser
vation (le leur droit de retour, à l’effet de prevenirles atteintes
qui pourroient y être portées par la donataire et autres posses
seurs des biens sujets à réversion , ou par les débiteurs des
créances qui tiennent lieu de ces mêmes fonds.
On peut d’autant moins leur contester ce droit, que le retour
dont il s’agit doit nécessairement s’ouvrir un jour à leur profit,
ou au profit de leurs transmissionnaires et ayailts-droit, par le
fait du décès de la donataire sans enfants , attendu qu’elle n a
pas eu d’enfants , et que son âge avancé ne loi laisse plus d’espérancc d’en avoir.
Délibéré UParis parle soussigné ancien avocat, ce vingt-sept
juin dix-liuit cent six.
LESPARAT.
�% 3cj
(
T9
)
KUJJWHMii fim ii tULM
SECONDE CONSULTATION
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu copie (ci-jointc)
(lu jugement l’endu en première instance par le tribunal civil
d’Aurillac , le 2 2 juillet 1808 , entre les sieurs Delsol frères, et
la dame veuve Vigier d’Orcet, leur sœur consanguine; ensemble
les mémoires imprimés qui ont étépré&ntés au tribunal pour le
soutien de leurs prétentions respéctives ;
E s t d ’ a v i s , par les raisons déjà exposées en sa Consultation
délibérée le 2 7 j u i n 1 8 0 6 , ainsi que da n s les o b se r v a tio n s par
ticulières sur chacun des motifs dudit jugement, qui lui ont
été communiquées, et encore par les autres raisons qui seront
déduites ci-après ;
Que les sieurs Delsol frères; sont bien fondés dans leur appel
dudit jugement, en ce que par icelui la stipulation de retour
réservé p a r le sieur D elsol père , dans le contrat de mariage
de la dame d'O rcet, sa f il le , a été déclarée personnelle au
dit sieur D e ls o l, et caduque par son prédécès. Q u ’en effet,
(bien loin que le retour réseryé soit devenu caduc par le prédé
cès du sieur Delsol père, qui l’a stipulé) * il ne peut manquer
de s’ouvrir un jour et d’opérer la réunion effective «1 son patri
moine, des choses sujettes audit droit, au moyen de ce que la
dame d’O rc e t, sa fille, qui n’a pas d’enfants, et qui est actuelle
ment hors d’àge d’en avo ir, décédera nécessairement sans en
fants.
1
�(
20
)
Les premiers juges avoient encore élevé deux autres questions, l’une (qui est la première des trois posées dans leur ju
gement) étoit de savoir quels biens avaient été et pouvoienl
être compris dans la clause de retour réservé par le sieur
Basile D e lso l, dans le contrat de mariage de la dame d’ Orpet sa fille $ et l’autre de savoir si, dans le cas de transmissïbilité, ce droit de retour ne se seroit pas confondu
dans la personne de lq dame d’ Orçet avec sa qualité d’héri
tière contractuelle de son père ; mais leur jugement n’a dé
cidé que cellç de savoir si là réserve du retour dont il s’agit
étoit limitée à la personne du sieur Delsol, ou si au contraire
elle avoit pu être tran sm ise a ses héritiers } et c’est aussi la seule
dont la solution doit nous occuper , comme étant la seule qui
soit à juger sur l’appel de leur sentence.
Ce n est pas qu’ils n’aient émis dans les attendus de leur ju
gement leur opinion sur les deux questions qu’ils ont laissées
indécises j mais cette opinion n’y est présentée que pour justi
fier leur jugement sur celle qu’ils ont décidée : or l’appel dont
il s’agit ne peut porter que sur ce qui a été jugé effectivement,
quelle qu’ait pu être d’ailleurs leur opinion sur d’autres ques
tions restées indécises.
J. L a stipulation du retour par le sieur D elsol père étoii
in rem , et pourquoi ?
Quoi qu il en soit au surplus , nous observerons d abord îi
cet égard que, si la stipulation dont il s’agit a été jugée per
sonnelle au stipulant, et par conséquçnt non transmissible, c’est,
comme l’exposent les premiers juges dans leurs inotils, parceque le sieur Delsol n’a pas stipulé nommément pour ses ayants-
�*4i
(
).
(¡cause, et sur-tout p a r c e qu’en stipulant le reto’ur pour le cas pré
vu par sa stipulation, il ne l’a pas réservé aux s ie n s en particu
lier, comme l’a fa it, dans le même contrat de mariage , la mère
du futur en dotant son fds.
Mais c’est précisément parceque le sieur Delsol entendoit ré
server un retour vraiment réel, in rem , à la masse de son par
triinoine , en faveur de t o u s ceux auxquels il pourroit importer
que le retour eût lieu qu’il l’a stipulé en termes généraux ,
non e x c lu s if s d’aucune classe de ses ayants-cause , et non pas
seulement pour sa personne ou les siens. Taie pactum non in
personam dirigitur, sed cùm generale s i t , locum inter hcèredes habebit. Leg. !±i, ff. D ep actis.
II. C o n s é q u e n c e s q u i s e r o ie n t r é s u l té e s d e la p e r s o n n a l i t é
d e s a s tip u la tio n p o u r l u i e t l e s siens s e u le m e n t.
Dans le fait, le sieur Delsol père n’avoit pas alors d’autre en
fant que la future sa fille. Peut-être même supposoil-il, attendu
son état de viduité , qu’il n en auroit jamais d’autre : or dans
cette supposition , si par l’événement le retour stipulé ne
s’ouvroit qu’après son décès, soit par le décès de sa fille sans en
fants, soit par le décès des enfants de sadite fille, après leur
mère, sans descendants d’eux, il ne poiivoit plus être représenté
par aucuns siens proprement dits , mais seulement par des col
latéraux très éloignés qu’il ne connoissoit même pas (comme l’a
dit et répété souvent la dame Dorcet elle-m êm e), ou par d’au
tres successeurs qu’il’ se seroit créés à lui-même par titres uni
versels ou singuliers.
Si donc il n’avoit stipulé le retour que pour lui et les siens t
comme avoitfuitlu mère du futu r, alors le retou r n’au roit eu
�*
T-
( 22 )
lieu qu’en sa personne , ou celle des sie n s, c’est-à-dire pour
le cas sexxlernent de sa survie, ou- de celle d’aucuns des siens
à l’ouverture dudit droit ; et ce droit n’auroit profité à son dé
faut qu’à celui ou ceux d’entre les siens qui auroient existé pour
lors. Eux seuls en effet se seroient trouvés composer la classe ou
espèce particulière et déterminée d’ayauts-cause, à laquelle auroit été réservé le retour : or, comme le dit la loi 80, il. D e regulis ju ris y In toto ju re y generi per speciem derogatur ;
et comme le dit aussi la loi 99, p. 5 , ÎT D e legatis 3° , Semper species generi derogat. E n un m o t, nuls autres ayantscause du sieur Delsol stipulant n’y auroient pu rien prétendre ,
à quelque titre que ce f û t , ni comme héritiers légitimes ou cib
i n t e s t a t mais non siens , ni comme héritiers irréguliers ,
ni comme héritiers institués , ou légataires, soit universels, soit
à titre universel (c’est-à-dire pour par lie ) , ni comme légataixes particuliers, ni comme donataires entre-vifs ou à cause de
m ort, ni comme cessionnaires à titre onéreux, ni pnfin comme
créanciers chirogniphaires ou hypothécaires, quoiqu’intérêt que
ces différentes classes d’ayants-cause pussent avoir à ce que la
réunion effective à son patrimoine des biens donnés et réservés
leur en eût assuré la conservation; alors en effet, au moyen du
prédécès de ceux dans la personne desquels seulement le retour
auroit pu s'opérer , toute réunion au patrimoine, du stipulant
seroit devenue impossible.
Ainsi le sieur Delsol se seroit interdit, pour ce cas particulier,
toute espèce «le disposition, tant d e s biens donnés (pic* des biens
réservés, et par conséquent de tous ceux.qui, lors île son dé
cès, a u r o i e n t pu composer son patrimoine , quoique tous fuss<“iu stipulés réversibles, si sa fille décédoit sans enfauts, ou si
les eulums de sa fille décédoieut eux-mêmes sans descendants :
�(
*3 )
or assurément, le cas arrivant que sa fille décédât après lui sans "
enfants (comme il arrivera bien certainement), ou que lés en- fants de sa fille décédassent après lui et leur mère sans enfants ,
comme il étoit alors très possible, il étoit bien plus naturel qu’en
ce cas tous ses biens stipulés réversibles retournassent et se réu
nissent à son patrimoine en faveur de ceux qui y auraient in
térêt , et qu’à cet effet le retour fût stipule par une clause gé
nérale , c’est-à-dire à la masse de son patrimoine , plutôt qu’à
lui-même et aux siens personnellement , à l’exclusion de tous au
tres ayants-cause 5 car n’y ayant encore alors personne qui pût
l’intéresser^ au défaut de sa fille et des enfants de sa fille ou de
leurs descendants (puisqu’il n’avoit pas encore d’autres successibles que des collatéraux fort éloignés qu’il ne connoissoit même
pas ) , il devoit préférer tous les autres ayants-cause qu’il pourroit avoir, ou se créer à.Iui-même, à ceux de sa fille décédante
sans enfants, qui ne pouvoient que lui être étrangers, si luimême restoit en viduité. C ’est même probablement par cette
raison qu’il a interdit très expressément à sa fille toute disposi
tion préjudiciable au droit de retour qu’il stipuloit par une
clause générale et sans aucune limitation ; et s’il n’a pas étendu
cette prohibition aux enfants de sa fille, lors même qu’ils décèderoient après lui et leur mère sans descendants d’eux (quoi
qu’en cç cas ils fussent pareillement grevés du retour à son pa
trimoine, tant pour les biens donnés que pour les biens réservés) ;
si même au contraire il leur a permis audit cas toute disposition
des biens en question *, si enfin il a stipulé à cet effet que ledit
retour à son patrimoine n’auroit lieu qu’autant qu’ils seroieiit
décédés sans descendants d’eux, et sans avoir disposé , c’est
évidemment pareeque (à la différence de leur mère , sa fille ,
qui dans le cas où elle survivroit à son père décédé en viduilé t
�( *4 )
ne pouvoit avoir pour successibles que des collatéranx fort éloi
gnés , et peut-être même inconnus) eux au contraire, décédant
ensuite après leur mère et sans descendants d’eux , avoient du
moins pour successibles, à défaut du sieur Delsol leur aïeul
maternel, d’autres parents très proches dans la personne de
leurs oncles paternels, frères de leur père; alors en effet le sieur
Delsol n’avoit aucune raison suffisante d’empecher que les en
fants de sa fille, décédant sans enfants après lui et après leur
mère, pussent disposer des biens dont il stipuloitla reversion ; car
ces mêmes enfants ayant audit cas pour successibles des oncles
paternels, ou leilrs enfants, le sieur Delsol pouvoit facilement
supposer que les enfants de sa fille ne seroîent pas tentés de dis
poser au profit d’étrangers , au préjudice de patents aussi pro
ches, et que , s’ils usoient de la liberté qu’il leur laissoit de dis
poser , ce ne seroit qu’en faveur de ceux de ces parents dont la
position particulière exigeroit qu’ils fussent plus avantagés qua
les autres*
«
III. I l n'en étoit pas du retour stipulé parla mère du fu tu r,
comme de celui stipulé par le sieur Delsol.
Il n’en étoit pas de même du retour stipulé par la mère dû
futur pour elle et les siens, en cas de décès de son fils sans en
fants , ou des enfants de son fils sans enfants et sans avoir dis
posé ; en effet, la mère du futur ayan t, lors du mariage de son
fils, plusieurs autres enfants, ne pouvoit penser qu’à assurer à
ces autres enfants le retour des biens qu’elle donnoit au futur ,
son fils , si celui-ci décédoit sans enfants , ou si ces enfants détédoient eux-mêmes sans descendants : or il lui suflîsoit à cet
filet de stipuler le retour pour elle et les siens personnellement,
�*<s
(
25 )
c’est-à-dire à l’exclusion de tous autres ayants-cause} el cepen
dant de laisser non seulement aux enfants de son lils , mais à
son fils lui-même, la liberté de disposer ; n’étant pas à présumer
que celui-ci, s’il n’avoit pas d’enfants, voulût user de cette fa
culté au préjudice de sa propre mère , ou de ceux qu’elle appeloit les siens (frères, sœurs, neveux ou nièces d eson ditfils),
si ce n’est en faveur de ceux d’entre eux d o n t, comme il vient
d’être d it , la position pourroit exiger qu’ils fussent plus avan
tagés que les autres. E t c’est aussi tout ce que le mandataire de
la dame veuve d’Orcet, porteur de sa procuration rédigée à Mau
riac , et comparant pour elle au contrat de m ariage, étoit
chargé de stipuler, sans pouvoir s’en écarter, ni y rien changer.
I V • Peut-être le sieur D elsol auroit-il stipulé le retour dans
la même form e que la mère du futur , s ’il avoit été dans le
même cas.
Il en auroit peut-être été de même de la stipulation du sieur
Delsol père , s’il avoit été dans le même cas ; mais n’ayant pour
lors d’autre enfant que la future, s’il avoit restreint de même
à sa personne et aucc siens le retour qu’il stipuloit, cette res
triction aiyroit eu rinconvénient d’annoncer des espérances d’a
voir d’autres enfants d’un second mariage; et quoiqu’il ne pen
sât peut-être pas alors à se remarier , il auroit au moins donné
lieu par-là au futur et à la famille du futur d’exiger de lui qu’a
vant tout il s’expliquât sur ce point. Q ui sait même s’il n’auroit
pas fallu leur donner des assurances positives que ce qu’ilspouvoient craindre n’arriveroit pas ?
L) ailleurs il pouvoit très bien se faire que, le cas prévu du re
tour arrivant, il n’existât aucun parent successible du sieur
�*
( 36 )
Delsol père capable de le représenter, ou qu’il n’y en eût que
de très éloignés qu’il n’auroit jamais connus; et c’est même ce
qui seroit nécessairement arrivé, s’il étoit resté veuf : or il étoit
bien naturel qu’il p û t, au moins pour ce cas particulier, se don
ner par actes entre-vifs ou de dernière volonté, à titre gratuit
ou onéreux , tel successeur universel ou singulier qu’il jugeroit
à propos, à l’eiïet de recueillir, en tout ou. partie, le bénéfice
du retour en question. ■
.
Il de voit donc, comme il l’a fait, se réserver le retour par une
stipulation générale , de manière que le cas prévu arrivant, en
quelque temps que ce f u t , de son vivant ou après sa m o rt, il
y eût lieu au retour in rem , ou a son patrimoine, en faveur de
ses ayants-cause, ou de qui de droit, et non pas seulement k sa
personne ou a u x sie n s, à l’exclusion de tous autres ayantscause, le tout sans que la donataire , sa fille , pût préjudicier
ou déroger à ce droit de retour par aucune disposition.
V . L es premiers juges ont supposé que la personnalité delà
stipulation du retour par le sieur D elsol résultoit de la dé
fense qu’il a faite à sa fille d ÿ déroger. Combien cette
supposition est absurde !
0
Cependant, s’il faut en croire les premiers juges, la défense
faite par le. sieur Delsol père k la dame d’O rcet, sa fdle, de dé
roger au droit de retour qu’il stîpuloit, prouverait au contraire
qu’il ne l’a stipulé (pic pour lui personnellement, n’étant pas
présumable , disent-ils , qu’il mit sa fille (lors unique) dans
un tel étal d'interdiction (pour le cas oii elle décéderait sans
<:<il'ants; car c’est de ce rasumquement qu’il s’agit) , et ce enf a
veur de parents éloignés avec lesquels il iiavoit aucune re-
�( 27 )
lation , que les parties même ne connoissoient p a s , ainsi
que la dame d ’Orcet Ta plusieurs fo is dit et écrit , sans que
ce fa it ait été désavoué.
Il auroit donc été bien plus convenable, suivant eux , que- le
sieur Delsol père se mit lui-mème dans l’interdiction , et ce en
faveur des étrangers que sa fille, décédante sans enfan'cs, jugeroit à propos.de préférer à tous les ayants-cause qu’il se seroit
créés à lui-même , ou à ceux qui (comme il pouvoit arriver, et
comme il est arrivé effectivement) lui seroient survenus : or
on sent combien est absurde une pareille supposition.
V I. L institution contractuelle de la dame d’ O rcet, qu i, sui
vant les premiers ju g e s , prouverait la personnalité de la.
s tip u la tio n du retour par le sieur D elso l s o n p è r e ,
e n d é m o n tr e a u c o n tr a ir e la r é a lité .
Enfin , suivant les mêmes, la limitation du retour dont il s’a
git à la personne du stipulant résulteroit Sün -
de la
circonstance que le sieur D elso l , après avoir fa it à sa
f ille une donation entre-vifs, Va instituée en même temps
son héritière universelle ; en effet, ajoutent-ils, il seroit ab
surde de supposer qu’il eût fa it et voulu faire , contre cette
héritière , une réserve qui ne devoit et ne pouvoit profiter
qu’à elle-m êm e , puisqiien admettant la transmis s ibilité du
retour, cette transmission ne pouvoit avoir lieu qu’en faveur
de cette même héritière.
Mais ils supposent par-là que l’institution contractuelle de
la demoiselle Delsol par son père est une institution pure et
simple , q u i, une fois ouverte au profit de l’instituée par le pré
décès de l’instituant, ne pouvoit cesser en aucun temps d’avoir
tout
�U <*
t'V '
( *8 )
IoîiL son effet, qu’en un mot cette institution n’étoit affectée
d’aucune condition résolutoire , tandis qu’au contraire cette
même institution ( qui à la vérité ne pouvoit être révoquée
par aucun acte postérieur ) devoit cependant se résoudre de
plein d ro it, comme la donation, par le seul fait, du décès de
l’instituée sans enfants , ou de ses enfants sans descendants et
sans avoir disposé ; car c’est ce qui résulte textuellement de la
clause par laquelle le sieur Delsol (après avoir promis de n’ins
tituer d'autre héritier que la future sa Jille dans les autres
biens ( non donnés ) qui se trouveront lui rester lors de son
d écès ) s’est réservé , (pour le cas où ladite future sa fille décèderoit sans enfants , ou ses enfants sans descendants, ou sans
avoir valablement disposé ) , le droit de réversion et retour ,
tant des biens donnés que réserv és , sans qu’il puisse être
dérogé par sadite Jille audit droit de réversion par aucune
disposition, n i autre acte à ce contraires. O r, bien loin que
cette clause puisse faire présumer la personnalité du retour-stipulé par le sieur Delsol père , comme le prétendent les pre
miers juges , la v é r it é e st au co n tr a ir e qu’il en résulte une
nouvelle preuve de sa transmissibilité ; et ce la , quand même on
voudroit ne comprendre dans la classe des biens réservés dont
la réversion est nommément stipulée , que ceux non donnés
qui existoient pour lors , et qui lui seroient restés lors de son
décès , à l’exclusion de tous ceux qu’il auroil acquis depuis sa
stipulation } car enfin il est bien évident que le. droit de retour
(qui pouvoit s’ouvrir pendant la vie du stipulant pour lesbicris
qu’il donnoit) ne pouvoit s’ouvrir qu’après sa m o rt, pour les
biens réservés , soit que (comme on n’en peut douter) il ait
entendu désigner par biens réservés ce qu’il appelle dans le
même acte les biens institués (c’est-à-dire la totalité de ccux
�(
)
non donnés qui luiresteroient lors de son décès, et généralement
tous ses biens, à l’exception des biens donnés, et de ceux qu’il
auroit depuis vendus ou engagés), soit même , qix’il n’eut en
tendu comprendre sous cette dénomination que ceux des biens
non donnés qu’il possédoit lors du contrat de mariage de sa
fille et qu’il auroit conservés jusqu’à sa mort.
E t qu’on ne dise pas , comme l’ont fait les premiers juges ,
que les mots, biens réserves, ont échappé à Vinadvertance
du rédacteur , qui (suivant eux) navoit que les notions les
plus obscures sur la nature et les effets des institutions
contractuelles ; car ce sont bien plutôC les premiers juges
eux-mêmes q u i, comme on l’a pu voir d éjà , et comme on le
verra encore plus particulièrement ci-après , sont dans le cas
qu’on lei^r fasse ce reproche \ et au surplus , quoi qu’il en soit,
ils ont bien prouvé par-là qu’il étoit absolument impossible ,
malgré toutes leurs subtilités, et pour ainsi dire leurs tours de
force j de restreindre aux biens donnés un retour stipulé pour
les biens tant donnés que réservés. Il faudra donc toujours
en revenir à dire que le retour des biens réservés (q u i, dans
tous les cas, sont nécessairement des biens non donnés) , ne
pouvant sîouvrir avant la mort du, stipulant, étoit bien cer
tainement transmissible à ses héritiers ou autres ayants-cause ;
or, il devoit en être de même du retour des biens donnés , puis
qu’il est stipulé par la même clause et dans les mêmes termes.
V II. Lorsque le retour s'ouvrira par le fa it du décès de la
dame d ’ Orcct sans enfants , son institution contractuelle
sera comme non avenue.
Peu importe enflu que la dame d’O rcct, en sa qualité d’hé-
�( 3o )
ritùrc instituée contractuellement, soit quant à présent la seule
représentante de son père. D u moment que le retour s’ouvrira
par le fait de son décès sans enfants , elle n’aura plus été héri
tière contractuelle , attendu la clause résolutoire apposée à son
institution. A lors, en effet, il sera vrai de dire qu’elle n’aura
été qu’héritière ab intestat de son père, concurremment avec
ses frères, c’est-à-dire pour partie seulement} et par consé
quent elle n’aura laissé dans sa succession , à ses ayants-cause,
quels qu’ils puissent ê tre , que sa part afférente dans tous les
objets dont la réversion au patrimoine de son père aura eu lieu
par le fait de son dticès sans enfants.
Il est vrai , comme l’observent les premiers juges , qu’en
droit romain une institution d’héritier par testament (autre
que celui fait ju re militari) n’auroit été susceptible d’aucune
limitation ou résolubilité, quand même cet héritier testamen
taire n’auroit été institué que e x re certd, ou pour une certaine
quotité , telle que la moitié ou le tiers de l’hérédité, ou à
compter de tel temps , ou enfin jusqu’à tel temps; qu’en effet
l’héritier ainsi institué par testament valable , éKint seul insti
tué , auroit é t é , de d ro it, héritier pour le to u t, pour tous
les cas et pour tous les temps , sauÇ seulement les droits des légitiniaires ; mais c’est pareeque chez les Romains personne ne
pouvoit mourir partitn testatus , partirn intestatus (à moins
qu’il n’eut testé jure militari) ; car , comme l’observe Pérez en
ses Institutes impériales , e x institutione hœredis ad certum v e l e x certo tempore facta sequeretur quod quis dece-
dere posset, pro parte testatus , et pro parte mtestatus.
�VIII. L es institutions contractuelles, inconnues chez les Ro
mains , n’ont rien de commun avec leurs institutions tes
tamentaires.
Il n’en est pas de même des institutions contractuelles abso
lument étrangères au droit romain, et qui cependant ont été
admises dans les ci-devant provinces dites de droit éci'it, comme
dans tout le surplus de l’ancienne France ; en effe t, suivant
tous nos auteurs ( q u o i q u e disent au contraire les premiers juges),
ces institutions d’héritier par contrats ne ressemblent aucune
ment aux institutions testamentaires des Romains , si ce n’est
à celles faites ju re militari, ou à leurs legs universels , soit aux
legs de toute l’hérédité ou de tous les biens, soit aux legs de •
partie de l’hérédité ou de partie des biens, partis etpro parte ,
(que notre Code civil qualifie legs à titre universel), avec cette
différence seulement que nos institutions contractuelles, d’ori
gine française et absolument inconnues chez les Romains, sont
irrévocables comme tenant de la nature des contrats, tandis
que les legs et autres dispositions testamentaires de toute es
pèce peuvent toujours être révoquées par le testateur jusqu’à
son décès.
IX . Autrement elles ne pourroient jam ais avoir lieu pour
partie , tandis que , suivant P o th ier, elles ont lieu in
contestablement pour partie comme pour le tout.
S’il en pouvoit être autrem ent, il faudroit aller ju s q u ’à dire
que l’institution contractuelle pour partie des biens ou de l’hé
rédité, ou même seulement pour quelques uns des corps certains
qui la composent, auroit l’effet d’une institution universelle
pour toute l’hérédité ; car c’est ce qui résulteroit du principe
�(
32 )
posé par les premiers juges (dans le second a tte n d u de leur troi
sième question), que l in s titu tio n c o n tr a c tu e lle f o r m e u n v é
r ita b le h é r iti e r
q u i n e d if f è r e q u e d e
n o m de i ?h é r it ie r
(des Rom ains), q u a n t a il u n iv e r s a l it é
d u t it r e : or personne jusqu’à présent n’avoit osé mettre en
avant une hérésie aussi monstrueuse, et il étoit réservé aux pre
miers juges d’en faire la base de leur jugement.
Il leurauroitcependant suffi, pour se garantir d’un pareil écart,
de consulter sur cette matière nos auteurs élémentaires, tels
que Pothier, dans son introduction au titre 17 de la coutume
d’Orléans. Us y auroient vu , par exemple, iila fin du n° 17 de
l’appendice de cette introduction, que l’institution contractuelle
y est définie la donation que quelqu'un f a i t de s a s u c c e s s io n
t e s t a m e n t a ir e
e n to u t o u e n p a r t i e , p a r c o n tr a t d e m a r i a g e , à T u n e d e s
p a r t i e s c o n tr a c t a n t e s , o u a u x e n f a n ts q u i n a îtr o n t d u f u t u r
m a r ia g e y au n° i l \ du même appendice, que d e m ê m e q u e la
s u c c e s s io n te s t a m e n ta i r e d a n s l e s p r o v in c e s ou e lle e s t a d
m i s e y fa it cesser la s u c c e s s io n l é g i t i m e e t ab i n t e s t a t ,
d e m ê m e la succession contractuelle f a i t cesser la s u c c e s
s io n lé g itim e o u ab intestat p o u r le t o t a l , lo r s q u e l'h é r itie r
c o n tr a c t u e l a é t é in s ti tu é h é r i t i e r p o u r le t o t a l , o u p o u r l a
p a r t ie p ou r l a q u e l l e i l a é t é i n s t i t u é ; d’où il conclut, à la
fin dudit n° 24 , que, lo r s q u e T h é r itie r c o n tr a c t u e l é t r a n g e r
a é t é i n s ti tu é s e u le m e n t p o u r u n e p o r t io n , puta p our
l a m o it ié , i l s u c c è d e a u x p r o p r e s ,
de m êm e q u a u x au
t r e s b ie n s , pour ¡.a p o r t io n p ou r l a q u e l l e i l a é t é in s
t i t u é , e t q u e l'h é r itie r li g n a g e r ab intestat « y s u c c è d e q u e
pour c e t t e m o i t i é ; et ensuite au 11"
25 qui suit,
q u e Tenf a u t
héritier c o n tr a c t u e l d e so n p è r e , pour u n e c e r t a i n e porTION y im:ta POUR UN TIERS OU POUR UN QUART, n ’eST PAS
�ZS3
(
33 )
OBLIGÉ E N V E R S SES FRÈRES E T SOEURS, H É R I T I E R S L É G I T I M E S
ET
AB
I NTESTAT
POUR
LES A U T R E S
P O R T I O N S , CM
rapport
de ce qui lui a été donné ou légué p a r son père.
X . D a n s les p ays de droit écrit elles ont lieu pour partie et
p a r conséquent ad tempus ou ex tcm porc , un sur-tout
qu'elles y
sont considérées comme de véritables dona
tions entre-vifs.
Dira-t-on qu’il n’en étoit pas de même dans nos provinces cidevant régies par le droit écrit ? Mais s’il est vra i, comme le
dit Laurières (au sommaire du n°
23 du chapitre premier de
son Traité des institutions et substitutions contractuelles), que
ces institutions ont pris leur origine des lois romaines qui
permettaient a u x soldats
iiv p r o c in c t u
de s'instituer héri
tiers p a r des pactes réciproques de su ccéd er , il en résultera
nécessairement que les institutions contractuelles, comme les
legs universels , ou à titre universel, peuvent avoir lieu, même
en pays de droit é crit, ou pour un temps seulement, ou à par
tir de tel temps, ou pour partie seulement de l’hérédité ou des
biens , ou même pour un tel corps héréditaire , etc. ; car as
surément 011 ne pouvoit pas appliquer à celui qui testoit ju re
militari , la règle : N em o potest decedere partim te status
partim intestatus.
C ’est ce qui résultera pareillement de ce que dit et répète
s o u v e n t le même auteur , notamment au n° 23 de son chap. 3 ,
et au chap. 4 , n°» 8 et suivants , que les institutions contrac tu elles, en pays de droit écrit> sont réputées vraies dona
tions entre-vifs d<; biens présents et à venir, par lesquelles
linstituant s’interdit la fa c u lté de disposer non seulement
5
V
�(
34 )
à titre g r a t u i t , ruais mêm e à titre onéreux, p a r ve n te, hy
pothèque ou autrem ent, s i ce n’est pour pressante et ur
gente nécessité y car on co n v ien d ra sans d o ute q u e les d o n a
tions p e u v en t se faire p o u r n ’av oir eiïet q u e j u s q u à tel te m p s ,
o u à co m p ter de tel te m p s , elc. E t il faut b ie n q u e le sieur Del
sol p è r e , re c o n n u p o u r p r o c u r e u r très i n s t r u i t , ait eu connoissance de cette j u ris p ru d e n c e , p u is q u ’il a cru d evoir se réserver
l’u su fru it de ce q u ’il appelle les biens institués (c e st-à -d ire de
ceux p o u r lesquels il in stitu o it sa fille son h éritière contrac
tuelle) , ainsi q u e la faculté de p o u v o ir les v e n d re o u engager.
X I . L ’héritier institué contractueîlement ne poun'oit être
a ss im ilé ,
suivant L,aurières , m ême en p ays de droit
é c r it, qu’à l'héritier des Romains institué in castrensibus,
ou ju re m ilitari.
Si donc o n v o u lo it a b so lu m e n t assimiler l’h é ritie r institu e
e o n tra ctu c lle m e n t a l’h é ritie r-in stitu é d u d ro it ro m a in , ce n e
p o u rr o it ê tre a u m oins q u ’à l’h é ritie r institu é in castrensibus ,
o u p a r testam en t fait ju r e m ilitari, q u ’il fa u d ro it le c o m p a re r 5
et c’est aussi ce q u ’a fait L a in iè re s au n° i 5 6 d u d it chap. 4 > ° ù
il re m a rq u e q u e , quoiqu’il y eut accroissem ent de l ’institué
i n b o n is castuf. n s ib u s
à r héritier
au i n t e s t a t
il n’y avoit pas accroissem ent de l ’héritier
quand il répudiait , à l'héritier institue
in
du soldat,
,
c a s t h e n s i nus y
a h in t e s t a t
après q u o i il ajoute : /¿ 7 , par la m êm e raison , il n y apas a c
croissement parm i nous de l'héritier al) intestat a l héritier
contractuel , ou aulégataire universel d ’une portion de biens,
(quoifju’i l y ait accroissem ent du légataire universel, ou de
Vhéritier contractuel , d'une portion de biens ou de succès-
�ZSs
1
/
(
35 )
s ion , ci l’héritier ab intestat), parceque , comme on Fa d it,
l ’héritier ab intestat est héritier solidairement de tous les
biens du défunt, au lieu que l’héritier contractuel, ou le lé
gataire universel, n’étant supposé successeur q u e d ’ u n e
p a r t i e s e u l e m e n t , il ne peut rien prétendre a u - d e l a d e
l a p a r t i e q u i l u i e s t d o n n é e , Fusage étant certain par
m i nous que chacun peut mourir p a r t i m t e s t a t u s , p a r
t i m i n t e s t a t u s , comme les soldats romains ; car , comme
le remarque très bien Loisel (liv. 2, t. 5 , règle 2 1, de ses Institutescoutumières), nos Français comme gens de guerre ont
reçu plusieurs patrimoines , et divers héritiers , d'une même
personne : or il faut convenir que ces propositions sont toutes
précisément les contradictoires de celles que les premiers juges
ont cru nécessaire de consigner dans les motifs de leur jugement,
pour le justifier autant qu’il étoit en eux.
X II. I l résulte évidemment de tout ce que dessus que le
sieur D e lso l a stipulé un retour à son patrimoine in rem ,
et qu au contraire celu i stipulé p a r la mère du fu tu r étoit
personnel à elle et aux siens.
Tout ceci posé , il doit maintenant demeurer pour constant
et suffisamment démontré, que si l’on voit, dans le même con
trat de mariage, d’1111 coté, le sieur Delsol père se réserver, par
une clause générale , le droit de réversion ou retour pour le
cas du décès de sa fille sans enfants , ou des enfants de sa fille
sans descendants , avec stipulation expresse que sadite fille ne
pourroit déroger à ce droit de retour par aucunes dispositions ,
ou autres actes à ce contraires, et cependant, que les enfants de
sadite fille , pareillement grevés dudit droit de retour, pour le
�Cas de leur décès sans descendants, pourroient faire telles dis
positions qu’ils jugeraient il propos ; si en même temps on y
voit d’un autre coté la mère du fu tu r, qui stipùloit le retour
pour elle et/é?.f sien s , en cas de décès de son fils sans enfants,
ou des enfants de son fils sans enfants, ne point défendre a son
fils de déroger audit droit de retour par aucunes dispositions ,
mais au contraire laisser aux enfants de son fils et a son fils luimême toute liberté a cet égard , ce n’est pas, comme l’ont sup
posé les premiers juges dans leurs motifs, que les contractants
aient entendu restreindre au sieur Delsol père personnellement
le retour qu’il stipùloit, et cependant assurer à tous'les ayantscause de la mère du futur le retour qu’elle se réservoit. Leur in
tention au contraire étoit évidemment, à raison de la différence
des circonstances ou chacun se trouvoit pour lors, que le retour
stipulé par le père de la future eût lieu généralement comme
retour ou réversion in rem à son patrimoine, en faveur de tous
ceux qui auroient intérêt à ce que son patrimoine fut conservé
dans son intégrité , mais que celui stipulé par la mère du futur
fut seulement personnel à elle et aux siens .
X III. Principes élémentaires sur la transmis s ibilité de tou
tes stipulations conditionnelles, tant suivant le droit ro
main que suivant le Code Napoléon. L a présomption lé
gale de leur h é a l i t é ne peut être balancée que par des preu
ves écrites dans la clause même de leur personnalité.
Voilà ce q u e les prem iers juges a u ro ie n t vu dans les stip u
lations de re to u r d o n t il s’a g i t , s i , au lieu de s’a rrê te r à de p ré
tendues conjectures toutes insignifiantes q u ’ils o n t entassées
sans uu-.m u c , co m m e sans d is c e rn e m e n t, dans leurs m o tifs, ils.'
�-Î/J
( 37 )
avoient considéré , ainsi qu’ils le devoient, que la stipulation
de retour dont il s’agit est une de celles dont le vrai sens, dé
terminé par la loi même , n’a jamais été abandonné à l’interpré
tation arbitraire des juges, et qu’au surplus, comme ils en con
viennent eux-mêmes dans leurs motifs, toute stipulation de re
tour est, de droit, transmissible aux ayants-cause du stipulant,
lorsque celui-ci ne l’a pas limite à sa personne.
A la vérité , ils supposent en meme temps que cette limita
tion est de droit, et qu’elle doit se suppléer lorsqu’il n’a rien été
dit de contraire ; mais ils ignorent donc, ou feignent d’ignorer ,
que tout au contraire les lois, tant anciennes que nouvelles ,
ont érigé en présomption légale, à laquelle on ne pourroit op
poser aucune autre espèce de présomption ou conjecture, celle
résultante de ce que le stipulant n’a pas exclus, en termes ex
près, du bénéfice de sa stipulation conditionnelle, et de celle de
retour en particulier, ses héritiers ou ayants-cause.
Cependant ils ne pouvoieut méconnoitre cct adage si sou
vent rappelé dans les livres élémentaires, tels en particulier que
les Institutos, et aujourd’hui consacré en tant que de besoin par
le Code Napoléon, que le bénéfice des stipulations condition
nelles se transmet nécessairement aux ayants-cause du stipulant
décédé avant l'événement de la condition : E x . stipulatione
condition ali tantimi spes est debitum i r i ,. eanupie ipsarn
spem in liœrcdem transnnttimus, si priusfjuàm conditio éxtet mors nobis contingat. Inst., p. 4, D e'vcrb. oblig. Ciun(pus s ub conditionc stipuJatus fu e r it , /¿cet ante conditio nern decesserit, posleh existente condilione heures ejus
agere potest. I n s t . , p.
D e inutil, stipul.
Ils auroient dû savoir au moins que, . s u i v a n t 1article 1179
du Code Napoléon , la condition accomplie a un effet ré-
�(
38 )
tr o a c tif a u jo u r a u q u e l le n g a g e m e n t a é té c o n tr a c té , e t q u e,
s i le c r é a n c i e r e s t m o r t a v a n t l a c c o m p l i s s e m e n t d e la c o n
d it io n y s e s d r o its p a s s e n t à s o n h é r itie r . Q u ’ainsi, com m e
le décide l’article 1 122 d ud it C o d e , o n e s t c e n s é a v o ir s tip u l é
p o u r s e s h é r iti e r s e t a y a n t s - c a u s e , à m o in s q u e le c o n tr a ir e
n e s o it e x p r i m é , o u n e r é s u l t e d e l a n a t u r e m ê m e d e l a
c o n v e n t io n
(co m m e , par exem p le, parcequ’il s’agiroit d’un
droit d’usufruit ou d’u sa g e , ou de to u t autre d roit personnel au
stip u la n t, mais non pas bien certa in em en t, com m e l’insinuent
les prem iers ju g e s, parceque quelques circonstances p ourraien t
donner lieu de le faire soupçonner.) E n fin , ils auraien t dù. con
clure de là que l’ayant-cause du stip u lan t, quel q u ’il s o i t , et en
q u elqu e tem ps que la condition a rriv e , n’a point à p rou ver que
son au teur a vou lu stipuler p our ceux q u i le représenteraient
lors de l’arrivée de la condition ; q u ’en un m ot c’est à celui qui
le prétend exclus par la stip u lation , à le p ro u ve r, c’est-à-dire,
suivant l’article 112 2 dud it C o d e , à prou ver que cette exclusion
est écrite dans la stipulation m êm e. Q u a m v is v e r u m e s t q u b d
q u i e x c i p i t p r o b a r e d e b e t q u o d e x c i p i t u r , a tt a m e n d e ip s o
d u n t a x a t , a t n o n d e h œ r e d e e ju s c o n v e n i s s e , p e t i t o r , n o n
q u i e x c i p i t , p r o b a r e d e b e t. L eg. 9 , fi. D e p r o b e t p r œ s .
Q u ’en elfet., il y a en ce cas présom ption vraim en t légale ,
j u r i s e t d e j u r e } que la stipulation est in r e m , et non pas
lim itée à la personne d u s tip u la n t, com m e le soussigné 1 a déjà
dém ontré dans sa Consultation p récéd en te, délibérée le 27 juiu
i8of>, et com m e il l’avoit dém ontré avec bien plus de d éve
loppem ent encore dans son Précis ( c i- jo in t ) , im prim é en 17G 7,
pour les sieurs L h éritier , F ourrroi et consors , contre le m ar
quis de IMesme , et sur lequel est interven u l’arrêt solennel du
>7 lé \ rit* i- même année : or une présom ption de cette esp èce,
�contre laquelle on ne doit adm ettre aucune présom ption con
traire, ne p ourroit être balancée ou détruite que par des
preuves positives et bien form elles, e v i d e n tis s im is e t in s c r ip tis h a b i t i s , com m e le d it la loi 2 5 , p. 4 , i n j i n e ,
if. D e
prob. e t p r œ s .
Il faudrait donc dém ontrer par écrit, c’est-à-dire, com m e le
porte ledit article 1 1 2 2 , par les expressions m êm es d e l à stip u
lation, que celui q u i a stipulé sous condition (qu oiqu ’il n’ait
pas parlé de scs ayants-cause) a cependant tém oigné vo u lo ir les
e x c lu re , ayan t par exem ple déclaré expressém ent ne vo u lo ir
stipuler que p our le cas où il su rvivrait à l’événem ent de la con
dition.
A u tre m en t, et à défaut de preuve écrite de cette espèce , il
sera toujours censé , com m e le d it V in n iu s, a d r e m f a m i l i a r e m r e s p e jc is s e } c’est-à-dire avoir vou lu a c q u é r ir , ou con
server, ou rep ren d re, et avoir en pleine propriété ( le cas de la
condition a r r iv a n t, en q uelqu e tem ps que ce fû t) , ce q u i fait
l’objet de sa stipulation con dition n elle, le to u t à reffet de pou
v o ir disposer librem ent par actes entre-vifs ou à cause de m ort
du droit éventuel q u i en résu lte, com m e de tous ses autres
d roits, soit ouverts-, soit seulem ent éventuels : or tel est le cas
où s’est trouvé le sieur D elsol père , q u i, en stipulan t un droit
de retour auquel sa fille 11e pourroit déroger par aucim es dispo
s i t io n s (q u o iq u e les enfants de sa fille le p u ssent) 11’a
aucun de scs ayauts-cause du bénéfice de sa stipulation-
exclus
�( 4o )
X IV - Preuves p a r le testament du sieur D e ls o l , et par les
consultations qu’il avoit prises d ’avance sur ce point, q u il
étoit bien convaincu de la r é a x i té de sa stipulation.
Aussi voit-on que le sieur D elso l, toujours bien convaincu de
la l'éalité de son droit en a disposé par testament peu de jours
avant sa m ort, comme d’un droit vraiment réel m rem , quoi
que ce droit purement éventuel ne dût s’ouvrir, suivant toutes
les apparences , qu’après sa mort et même bien long - temps
après.
Effectivement par ce testam ent, après avoir institué son fils
aîné et successivement ses autres enfants, par ordre de primogéniture, ses h éritiers u n iv e r s e ls , il avoit déclaré vouloir e x
pressément que, dans le cas où la dame Jeanne-Marie Delsol,
épouse du sieur de V ig ie r , viendroit à décéder sans en
fants ou descendants , son héritier recueille et profite du
droit de réversion , par lui stipulé dans le contrat de ma
riage de sa fille avec ledit sieur de V ig ier, etc. E t si ses
dispositions à cet égard n’ont pu recevoir aucune exécution, c’est
u n i q u e m e n t parceque le testamenta été déclaré nul pour vice
de forme. Comment en effet auroit-il pu douter un instant de
son d ro it, lui q u i savoit bien n’avoir pas limité sa stipulation
au cas de sa survie , et qu’il ne s’agissoit pas d’un droit d’usu
fruit ou d’usage, ni d’aucun autre droit personnel de sa nature?
Il avoit bien présumé cependant que sa fille , en cas qu’elle
lui survécût, prétendroit le retour éteint par le seul fait de sa
survie, et qu’alors elle s'opposerait à l’exécution de toute espèce
de disposition qu’il aurait cru devoir en faire, pour le cas oii il
«’ouvrirait en quelque temps que ce fût.
En conséquence il avoit pris dès l’année 1 7 7 1 , neuf ans avant.
�■Z
(4 0
sa mort, (un mois avant son second mariage) la précaution de con
sulter M. Chabrol, jurisconsulte deRiom, regardé pour lors a bien
juste titre comme l’oracle de la province; et ce jurisconsulte, quoi
qu’il ne connût pas encore l’arrêt de 1767 qui a fait cesser tous les
cloutes sur ce point, avoit répondu par sa consultation du 24 sep
tembre 1771 (conformément h. la décision de Henrys sûr sem
blable espèce) que M. Delsol ayant stipulé le. retour, en cas de
décès, non seulement de sa fille, mais des enfants de sa fille sans
d e sce n d a n ts (comme il n’étoitpas vraisemblable qu’il eût entendu
survivre aux enfants de sa fille et à leurs descendants, et qu’il eût
étendu si loin sa pensée; comme d’ailleurs il est de principe que
les stipulations son censées faites, tant pour les stipulants que
pour leurs héritiers ou ayants-cause), il devoit être supposé
avoir entendu que cette réserve et convention s’étendroient
bien loin } etpouvoient durer encore après lui.
Il en a été de même de MM. Audran le jeune, Ceuttes et
Ducrochet, jurisconsultes distingués de Riom , qu’il a encore
consultés les i 5 décembre 1778 et 2 janvier 17 7 9 , plus d’un an
avant sa m ort, et q u i, en lui faisant la même réponse, l’ont
appuyée de nouvelles autorités notamment de -celle de l’arrêt
solennel de 1767 , qu’ils présentent comme ayant levé tous les
doutes sur ce p o in t, s’il pouvoit y en avoir encore.
X V . E n v a i n v o iu lr o it- o n a s s i m i l e r là s tip u la tio n d u r e to u r
in rem à u n jid é i c o m m is .
Mais, disent encore les premiers juges (dans le septième a t
te n d u do leur première question), la c la u s e p a r la q u e lle le
s ie u r D e l s o l a v o u lu f a i r e r e n tr e r d a n s s a f a m i l l e , a p r è s s o n
d é c è s e t c e l u i d e s a f i l l e , le s b ie n s r é s e r v é s ou i n s ti tu é s , n e
G
�(4 0
p o u r r o i t ê t r e e n v is a g é e q u e c o m m e u n e c h a r g e d e f i d é i c o m i
m i s } c o m m e u n e v é r it a b le s u b s titu tio n d o n t i l a u r o it v o u lu
g r e v e r s a J i l l e , e t la q u e lle
s e r o i t a b r o g é e p a r le s lo is d u
i4 n o v e m b r e 1792. Ainsi ils supposent que le retour dont il
s’agit seroit un retour à la f a m i l l e du sieur Delsol en particu
lier, à l’exclusion de tous ses autres ayants-cause, tandis que
dans le fait c’est un retour indéfini et illimité à son patrimoine,
et par conséquent à ses ayants-cause, quels qu’ils puissent être,
c’est-à-dire un retour à lui-même, dans la personne de ceux qui
à son défaut le représenteront pour les choses sujettes à ce droit,
lors de son ouverture. O r , certainement ou ne pourra jamais
concevoir que le retour à son patrimoine, ou à soi-même, soit
une véritable substitution fidéicommissaire. Il faudrait au moins,
- pour constituer une telle substitution , que ce retour eut été
stipulé en faveur de tiers, autres que les représentants néces
saires du stipulant, pour venir en second ordre après celui qu’il
a gratifié directement; ou si l’on veut encore, au profit du
moins d’une classe p articu lièr e et déterminée de ses représen
tants et ayants-cause , à l’exclusion de toutes les autres classes ,
comme, par exemple , au profit des s ie n s seulement.
Il ne peut pas en être de même du retour indéfini stipulé par
une clause g é n é r a le , sans aucune espèce délim itation, tel que
celui stipulé par le sieur Delsol père, à raison des circonstances
particulières oii il se trouvoit, comme 011 l’a vu ci-dessus; eu
effet, il y « cette différence entre le retour conventionnel et la
substitution fidéicommissaire, que le retour général et indéfini,
a p p o s é pour tel cas, à une convention quelconque, même à
celle de succéder, la résout, et fait rentrer, le cas arrivant,
tous les biens dont il avoit été disposé sous cette condition, par
donation ou institution , dans le patrimoine du stipulant, pour
�les remettre entre ses mains, ou à son défaut dans celles de ses
représentants, qui ne sont à cet égard et pour ce qui concerne
cet objet que la continuation de sa personne. Aussi voit-on que
la loi du 17 nivose an 2 (quoique les substitutions fidéicommissaires fussent alors abrogées) a conservé les retours convention
nels dans leur intégrité, et qu’en conséquence la Cour de cas
sation, par son arrêt du 11 frimaire an 14 (dont le soussigné a
rendu compte dans sa Consultation de 1806) , a maintenu un
droit de retour indéfini et illimité, comme n’ayant rien de com
mun avec la substitution fidéicommissaire, quoique son ouver
ture n’eut eu lieu que plus d’un siècle après le décès du donateur
qui l’avoit stipulé.
1. D e V e x p o s é c i - d e s s u s r é s u lte la s o lu tio n d e s tr o is
q u e s tio n s p o s é e s p a r l e s p r e m i e r s j u g e s .
De tout ce qui vient d’être exposé résulte incontestablement
la solution de la seconde des trois questions posées par les pre
miers juges , qui étoit de savoir s i la r é s e r v e d e r e to u r s tip u
lé e p a r le s ie u r D e l s o l p è r e é t o it li m i t é e à s a p e r s o n n e , e t
p o u v o it ê t r e tr a n s m is e à s e s h é r iti e r s : or cette question est la
seule qu’ils aient jugée , et par conséquent la seule qui soit à
juger sur l’appel; mais il en résulte encore, en tantque de besoin,
la solution des deux autres questions qu’ils ont pareillement
posées (quoiqu’ils n’aient pas pris sur eux de les juger, s’étant
contenté à cet égard d’émettre leur opinion). En ciï’ct la pre
mière de ces deux questions étoit de savoir quels biens ont été
et pouvoient être compris dans la clause par laquelle le sieur
Delsol s’est réservé le retour, et l’autre de savoir si, dans le
cas de transmissibilité , ce droit tic retour 11c seroit pas confon
�( 44 )
du dans la personne de la dame d’Orcet avec sa qualité d’he'ritière contractuelle de son père : or on a vu ci-dessus, d’une part,
que la stipulation de retour par le sieur Delsol père comprenoit
en termes exprès les biens par lui donnés à sa iille, et en outre
la totalité des biens non donnés qu’il laisseroit au jour de son
décès ; et d’autre part, que le retour ne devant s’ouvrir que par
le fait du décès de la dame d’Orcet sans enfants (c’est-à-dire lors
de la révocation de son institution contractuelle ) , il étoit im
possible que ce droit de retour, en quelque temps qu’il s’ouv r it , se confondit un seul instant dans sa personne avec sa qua
lité d’héritière contractuelle de son père ; et l’on a vu de plus
que la dame d’O rcet, qui n’a pas d’enfants, étant actuellement
hors d’àge d’en avoir, le droit de retour dont elle est grevée ne
peut manquer de s’ouvrir un jour au profit de ceux qui se sont
trouvés être héritiers ab intestat du sieur Delsol père décédé
sans avoir testé valablem ent, c’est-à-dire au profit de la dame
d’Orcet elle-même pour sa part héréditaire, et pour le surplus
au profit des sieurs Delsol, ses frères} le tout attendu que l’é
vénement de la condition apposée au retour (comme toute es
pèce de condition apposée à une stipulation), a un effet rétroac
tif au jour même de la stipulation, comme on l’a vu ci-devant:
or il résulte de là, en dernière analyse, que les sieurs Delsol frères
ont été bien fondés à exercer les actes conservatoires de leur
droit, quoique ce droit ne soit qu’éventuel-, et ils doivent croire
que c’est aussi ce qui sera jugé sur leur appel par les magistrats
supérieurs qui en sont saisis.
Délibéré à Paris par le soussigné ancien avocat, ce 24
mars 1809.
LESPARAT.
�( 44
L
e
b is
)
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a pris lecture des deux
consultations délibérées et rédigées par M. Lesparat, les 27 juin
1806 et 24 mars 1809, ensemble du jugement rendu en pre
mière instance par le tribunal d’Aurillac, entre madame d’Orcet
et MM. Delsol, le 22 juillet 18085 vu d’ailleurs le précis imprimé
sur lequel est intervenu l’arrêt solennel du 17 février 1767,
adopte entièrement tous les principes déduits dans les deux con
sultations précitées, où la doctrine sur les clauses de retour est
établie avec un jugement exquis et une clarté parfaite. Il s’ho
nore sur-tout de professer, avec le respectable jurisconsulte qui
en est l’auteur, l’opinion que l’article 951 du Code Napoléon,
quelles qu’aient été les intentions de ses illustres rédacteurs (ce
qui est fort inutile à approfondir), n’a nulle influence sur une
question qui procède d’une convention faite avant le Code; et à
ce sujet il croit devoir observer que si (par application de ce
principe sur l’impossibilité de donner effet rétroactif aux lois )
on croit devoir contester à l’article 1179 du Code Napoléon
(quoique confirmatif d’un droit antérieur) toute influence sur
la question de présomption légale pourla réalitédu retour, celte
présomption légale se retrouve, quant à l’espèce, dans le droit
romain, qui, lors des conventions, éloit la loi coërcitivc des
parties domiciliées en pays de droit écrit. L e Conseil pense donc
�(
44 *<” ' )
que îe jugement du tribunal de première instance sera réformé
sans coup férir par la cour d’appel, et que la stipulation de re
tour sera réinvestie de tous les effets que lui a assignes la volonté
des parties.
D élibéré à P a ris, ce 17 mai 1809.
BELLART,
B O N N E T , D E L V IN C O U R T , L A C A L P R A D E .
�N
a p o i
. . É O N , PAR LA GRACE DE DlEU ET LES CONSTITUTIONS DE l ’ E m -
ï i r e , E m p e r e u r d e s F r a n ç a i s , R o i d’ I t a l i e , e t P r o t e c t e u r d e l à
C o n f é d é r a t i o n d u R k i n , à tou s p r é s e n ts et à v e n i r , S a l u t :
L e T r i b u n a l c i v i l d e p r e m iè r e in s ta n c e é t a b li à A u n l l n c , c h e f -lie u
..de p r é f e c t u r e d u d é p a r t e m e n t d u C a n t a l , a r e n d u le j u g e m e n t s u i v a n t :
E n t r e d a m e J e a n n e - M a r i c D e ls o l , v e u v e d e s ie u r G a b r i e l - B a r t b é l e m y
V i g i e r - d ’O r c e t , h a b i t a n t d e la v ille d e M a u r i a c , d e m a n d e r e s s e en e x e c u tio n d e j u g e m e n t d u six a o û t d e r n i e r , et d é fe n d e r e s s e en o p p o s i t i o n ,
c o m p a r a n t e p a r M e. L a b r o , son a v o u é , d ’ u n e p a r t ;
S i e u r P i e r r r - F r a n ç o i s D e l s o l , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d e la ville d ’A u r il l a c , d é f e n d e u r et o p p o s a n t , c o m p a r a n t p a r M ' . R a m p o n , son a v o u é ,
d ’a u t r e p a r t ;
S i e u r G a b r i e l - B a r t h é l e m y D e l s o l , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d e la ville
d e P a r i s , aussi d é f e n d e u r et o p p o s a n t , c o m p a r a n t p a r M e. B o n n e f o n s ,
son a v o u é , d ’a u tr e p a r t ;
E n p r é s e n c e d e s ie u r A n t o i n e D e s p r a t s , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d u d i t
A u r i l l a c , aussi d é f e n d e u r , c o m p a r a n t p a r M ' . M a n h e s , son a v o u é , d ’a u t r e
part :
O u ï le r a p p o r t d e l ’ in s la n c e d ’e n tr e les p a r t i e s , fa it p u b l i q u e m e n t à
l ’a u d i e n c e p a r M . D i l z o n s , p r é s i d e n t , m e m b r e d e la L é g i o n d ’I I o n n c u r ,
en e x é c u t io n du j u g e m e n t d u d i x - n e u f l é v r i e r d e r n i e r , à l’a u d i e n c e d u
v i n g t - u n j u i l l e t , et a p r è s q u ’il en a é l é d é li b é r é à la c h a m b r e d u co n s e il,
en e x é c u t io n d u j u g e m e n t d ’ h ie r v in g t-u n j u i l l e t ; v u le p r o c è s , les c o n
c lu s io n s d e sd its sieu rs P i e r r e - F r a n ç o i s et G a b r i e l - B a r t h é l e m y D e l s o l ,
t e n d a n t à ê t r e r e ç u s o p jio sa n s au j u g e m e n t r e n d u p a r d é fa u t fa u te d e
p l a i d e r , le six a o û t d e r n i e r , q u e fa isa n t d r o i t su r l e u r o p p o s i t i o n , le d it
j u g e m e n t lû t d é c h iré nul et de n u l cil’e t , a u p r i n c i p a l la d a m e d ’ü r c e t
fû t d é c la r é e pur< n ien t et s im p le m e n t non r e c e v a b l e d an s sa d e m a n d e , o u
en tous cas déboutée*, sous l.t r é s e r v e q u e font les s ie u r s D e l s o l , d e x e r
ce. c o n t r e tous d é t e n t e u r s des bi ens s o u mi s au d ro it d e r e t o u r les d ro its
e t a ctio n s r é s u l u n s d e le u r s q u a lité s d e t r a n s m is s io n u a ir e s , ainsi qu'il»
�#,*j v
(
46 )
a v i s e r o n t , et q u e la d ain e d ’O r c e t so it c o n d a m n é e a u x de'pens -, v u les
c o n c lu s io n s d e la d a m e d ’O r c e t , te n d a n t e s à c e q u e les sieu rs D e lso l fu s
se n t d é b o u t é s d e l ’o p p o s itio n p a r e u x forme'e p a r l e u r r e q u ê t e d u v i n g t trois a o û t d e r n ie r a u j u g e m e n t d u six d u m ê m e m o is , q u ’il fû t o r d o n n é
e n c o n s é q u e n c e q u e le s u s d it j u g e m e n t se ro it e x é c u t é s u i v a n t sa fo r m e
e t t e n e u r , e t q u e lesd its sieu rs D e ls o l fu s se n t c o n d a m n é s a u x d é p e n s •
v u aussi les c o n clu sio n s d u s ie u r D e s p r a t s , t e n d a n te s a ce q u ’il fu t d o n n é
a cte d es o ffres q u ’il a v o it to u jo u r s faites d e p a y e r le p r i x d e spn a c q u isi
t io n , en , p a r la d a m e d ’O r c e t , lu i d o n n a n t b o n n e et su ffisante c a u t i o n ,
o u e n fa isa n t j u g e r la v a l i d i t é d e son p a i e m e n t vis-à-vis des sieu rs D e ls o l
ses f r è r e s ; en c o n s é q u e n c e , et d an s le cas o ù elle p a r v i e n d r o i t à fa ire j u
g e r p a r j u g e m e n t en d e r n i e r r e s s o r t , q u e le d r o it d e r e t o u r d o n t s’a git
est i r r é v o c a b l e m e n t é t e i n t , q u e lesd its sieu rs D e ls o l fu ssen t c o n d a m n é s
a u x d é p e n s d e la c o n t e s t a t io n , m ê m e vis-à-vis d e lu i D e s p r a t s j et a u cas
c o n t r a i r e o ù le t r i b u n a l d é c i d e r o i t q u e le d ro it d e r e t o u r p e u t s o u v r i r
e n c o r e en f a v e u r des sie u r s D e l s o l , en ce c a s , q u e la d a m e d ’O r c e t fu t
d é c la r é e n o n r e c e v a b l e d a n s sa d e m a n d e en p a i e m e n t d u p r ix d u p r é
d e C a n c o u r , q u ’elle fû t c o n d a m n é e à r e s t itu e r les six ce n ts fr a n c s p a r
clic r e ç u s , a v e c les in térêts l é g i t i m e m e n t d u s , et en o u t r e en six m ille
fr a n c s de d o m m a g e s - i i i té r ê t s r é s u lla n s d e l ’é v i c t i o n , et en tous les d é
p en s.
D a n s le fa it, en l ’a n n é e i / 4o , le s ie u r B a sile D e ls o l , p r o c u r e u r au
b a illia g e d ’ A u r i l l a c , é p o u s a la d e m o is e lle T h o m a s ; d e c e m a r ia g e il
n’issut q u ’ u ne fille q u i se m a r ia a v e c le s ie u r d e V i g i e r - d ’O r c e t ; d an s leu r
c o n t r a t d e m a r i a g e , d u d e u x j u i n 1 7 G 0 , le s ie u r D e ls o l d o n n a p a r d o n a
tio n e n tr e - v ifs p u r e et s i m p l e , à la d e m o is e lle D e l s o l , sa fille , p a r a v a n
c e m e n t d ’h o ir i e , le d o m a i n e , te r re et s e ig n e u r i e d u C l a u x , 011 q u o i q u e
l a d ite t e r r e et d o m a in e d u C l a u x p u iss e n t ê t r e et c o n s is t e r , a u x m ê m e s
c l a u s e s , c h a r g e s et c o n d itio n s q u e le d é la is s e m e n t lui en sera fa i t , c o n f o r
m é m e n t à la d e m a n d e q u ’ il en a fo r m é e a u x r e q u ê t e s d u p a la is, et au
cas où ladite d e m a n d e en d é la is s e m e n t d esd its bien s ne lui se ro it pas a d j u g é e , ledit D e ls o l , p o u r d é d o m m a g e r sa fille d u d i t d o m a in e et te r re du
4
�|f C
( 47 )
C l a u x , l u i d o n n a et délaissa toutes les c r é a n c e s q u i l u i éto ien t d u e s p a r
lesd its b ie n s en ca p ita l et a ccesso ires; le sieu r D e ls o l d o n n a aussi p a r
m ê m e d o n a tio n e n tr e - v ifs à la d ite d e m o ise lle D e ls o l sa fille la s o m m e
de d ix m ille l i v r e s , q u ’ il p a y a c o m p t a n t ; et à l ’é g a r d d u s u r p lu s de ses
a u tr e s b ie n s q u i se t r o u v e r o ie n t rester a u d i t s i e u r D e ls o l lors d e son d é
c è s , il p r o m i t d e n’in s tit u e r d ’a u t r e h é r itiè r e q u e la d e m o is e lle D e ls o l,
sa fille, sous la r é s e r v e d e l’u su fr u it d e tous les L iens in s tit u é s , e t d e p o u
v o i r v e n d r e e t e n g a g e r lesd its b ie n s ainsi q u ’il j u g e r a à p r o p o s , ta n t en
la v i e q u ’à la m o r t , et e n c o r e d e d isp o ser d u n e s o m m e d e d ix m ille l i v . ,
e t n ’en dispo sa n t p a s , la r é s e r v e to u r n e r a a u p r o fit d e sa d ite fille; et a u
cas o ù la d ite d e m o is e lle f u t u r e é p o u s e v i e n d r o i t à d é c é d e r sans e n fa n ts,
o u ses en fa n ts sans d e s c e n d a n ts , o u sans d is p o s e r v a l a b le m e n t , le d it s ie u r
D e ls o l se r é se r v a e x p r e s s é m e n t le d r o it d e r é v e r s io n e t r e t o u r , t a n t des
b ie n s d o n n é s q u e r é s e r v é s , sans q u ’il p û t ê t r e d é r o g é p a r sa fille f u t u r e
é p o u s e a u d i t d r o i t d e r é v e r s io n p a r a u c u n e d is p o sitio n n i a u tr e s actes
a c e c o n tr a ir e s. P a r le m ê m e c o n t r a t , le s ie u r d e V i g i e r o n c l e , p o u r et
a u n o m d e la d a m e M o i s s i e r , u s a n t d u p o u v o i r d o n n é à la d i t e d a m e p a r
le s ie u r de V i g i e r , son m a r i , d a n s son c o n t r a t d e m a r i a g e d u o n z e
fé v r ie r 1 7 2 2 , n o m m a led it sieu r d e V i g i e r f u t u r é p o u x , p o u r r e c u e illir
l'effet d e l a d o n a t i o n d e la 'm o itié d e tous ses b ie n s p a r e u x fa ite a u p r o fit
d e c e l u i d e le u r s e n fa n s à n a ître q u i se ro it ch oisi p a r e u x o u p a r le s u r
v i v a n t d ’e u x ; e t en v e r t u d u p o u v o i r sp écial p o rté en lad ite p r o c u r a t i o n ,
il d o n n a à l it r e d e d o n a t io n e n t r e - v i f s a u d i t s ie u r d e V i g i e r , fu t u r
é p o u x , t o u t le s u r p lu s des b i e n s , m e u b l e s et i m m e u b l e s , p r é se n ts et à
v e n i r d e la d ite d a m e , et r é se r v a à l a d ite d a m e V i g i e r la l ib e r t é d e d is p o
se r p a r a c te e n t r e - v i f s o u à ca u se d e m o r t d ’ u n e s o m m e d e d ix m ille
l i v r e s à p r e n d r e s u r les b ie n s p a r elle d o n n é s ; se r é se r v a p a r e i l l e m e n t ,
la d ite d a m e V i g i e r , ( e t p o u r elle led it s i e u r p r o c u r e u r c o n s tit u é ) , le r e to u r
et r é v e r s io n à elle et a u x siens des b ie n s p a r elle d o n n é s a u d i t sieu r fu tu r
é p o u x , d an s le cas o ù il v ie n d r o it à d é c é d e r sans e n fa n t s , ou ses en tants
sans d e s c e n d a n t s , o u sans a v o ir v a l a b l e m e n t d isposé. — C e ne fu t q u e
p lu s d e o n z e ans a p rè s le m a r ia g e d e sa fille q u e , le v in g t o c t o b r e 1 7 7 1 ,
le s ie u r D e ls o l en c o n t r a c t a u n s e c o n d a v e c la d em o ise lle D u b o i s . D a n s
I
a
�ce s e c o n d c o n t r a t d e m a r i a g e , les é p o u x d o n n e j i t la m o it ié d e le u rs
b ie n s à u n d e s en fants à n a ître q u i se ro it ch o isi p a r e u x ou p a r le s u r v i
v a n t. — L e 1 1 ju illet 17 8 0, le s ie u r D e ls o l fit u n t e s t a m e n t p a r le q u e l , a p rè s
a v o i r l é g u é m ille liv r e s à la d a m e d ’O r c e t , et so ix a n te m ille liv r e s à c h a
c u n d e ses trois e n f a n l s , il in s titu a p o u r son h é r itie r u n i v e r s e l son fils
a în é d u s e c o n d l i t , e t , à son d é f a u t , ses a u t r e s e n fa n ts p a r o r d r e d e p rim o g é n it u r e , v o u l a n t e x p r e s s é m e n t q u e d a n s le cas o u la d a m e d ’O r c e t
v ie n d r o it à m o u r i r sans e n fa n ts, o u ses en f a nt s sans d e s c e n d a n t s , son h é r i
t ie r p r o fitâ t d u d r o it d e r e t o u r p a r l u i s t i p u l é d an s le c o n t r a t d e m a r i a g e
de sa f i l l e . — C e t e s t a m e n t fu t d é c l a r é n u l p o u r v i c e d e f o r m e p a r se n
te n c e d u b a illia g e d ’A u r i l l a c d u v i n g t - n e u f a o û t 1 7 8 2 , l a q u e l l e o r d o n n a
le p a r t a g e d e la s u c c e s s io n d u s ie u r D e ls o l , p o u r eu ê t r e d éla issé a u x
en fa n ts d u s e c o n d l i t trois d o u z i è m e s p o u r l e u r lé g it im e de d r o i t , e t les
n e u f a u tr e s d o u z i è m e s
à la
d a m e d ’O r c e t , en v e r t u d e l ’in s titu tio n c o n
tr a c t u e lle . L e p a r t a g e fu t ainsi e x é c u t é . — D e v e n u s m a j e u r s , les sieurs
D e ls o l f r è r e s , tant en l e u r n o m q u e c o m m e co h é r itie r s d e S o p h i e , l e u r
sœ u r m o r t e a b i n t e s t a t , o n t p a ss é a v e c la d a m e d ’O r c e t , les d ix v e n t ô s e
et v i n g t - t r o i s g e r m i n a l a n n e u f , d e u x actes sé p a r é s p a r l e s q u e ls les sieu rs
D e l s o l , en a p p r o u v a n t le p a r t a g e d e s i m m e u b l e s d e l e u r p è r e , c é d o ie n t
à la d a m e d ’O r c c t le h u i t i è m e r e v e n a n t à c h a c u n d ’e u x d an s l ’a r g e n t
c o m p t a n t , le p r i x d u m o b i l i e r , les c r é a n c e s p e r ç u e s , e t l e u r p a rt d an s la
s o m m e d e d ix m ille liv r e s p o r t é e p a r le c o n t r a t d e m a r ia g e d u d e u x ju in
1 7 G 0 , en q u o i q u e le t o u t p u iss e ê t r e et c o n s i s t e r , sans a u tr e s réserv es
q u e celles c i - a p r è s : ( l a d a m e d ’O r c e t d e m e u r e c h a r g é e d es d e ttes d e la
su cc essio n ; au m o y e n d e ce , les p a r t ie s se t ie n n e n t r e s p e c t i v e m e n t q u itte s
d u passé jusqu'à hujr, e t p r o m e t t e n t n e p lu s se rie n d e m a n d e r l ’u n e à
l ’a u t r e . ) —
P a r m i les b ie n s restés k la d a m e d ’ O i c e t é t o it u n e p a r t ie de
la m o n t a g n e a p p e lé e d e B r o u s s e t t c -, e lle l ’a v e n d u e a u s ie u r D e ls o l a în é ,
p a r a c te d u v i n g t - h u i t f r u c t id o r an d i x , m o y e n n a n t d o u z e m ille l i v r e s ,
d o n t il a p a y é h u i t m ille l i v r e s , e t la d a m e d ' O r c c t l ’a te n u q u i tt e des
q u a t r e m i lle liv r e s r e s t a n t e s , au moyen d o c e q u ’il a r e n o n c é au q u a r t
des c r é a n c e s à r e c o u v r e r . — L e s i e u r D e ls o l n’a v u a u c u n d a n g e r d an s
t c ite a cq u isitio n . — L e q u i n z e a v r i l 1 8 0 G , la d a m e d ’O r c e t v e n d it au
�■¿71
(
49 )
s ie u r D e s p r a ts u n p r é a p p e l é d e C a n c o u r , l e q u e l fait p a rtie d es b ie n s
d u s ie u r D e ls o l. — P e u a p rè s a p a r u l ’a r r ê t d e la c o u r de c a s s a t i o n , d u
o n z e fr i m a i r e a n q u a t o r z e , q u i a v a l i d é u n d r o i t d e r e t o u r c o n v e n t i o n
n e l et c o u t u m i e r , a u q u e l o n v o u lo i t a p p l i q u e r la loi s u p p r e s s iv e d es
s u b s titu tio n s . A l o r s l e s ie u r D e s p r a t s , c r a ig n a n t à to r t d ’é tre u n jo u r
é v i n c é d e son a c q u i s i t i o n , r e fu sa d ’en p a y e r l e p r i x - s u r le c o m m a n d e
m e n t q u i lu i a é t é fait le o n z e j u i l l e t , il a r é p o n d u q u e le d ro it d e r e t o u r
é t a n t *une stip u la tio n c o n d itio n n e lle q u i passe a u x h é r i t i e r s , il a v o it
ju s t e s u je t d ? a p p r é h c n d e r d ’é tre t r o u b l é d a n s la p r o p r i é t é d u p r é de
C a n c o u r , e t d e d e m a n d e r p a r c o n s é q u e n t a r é s o u d r e la v e n t e , o u à r e
te n i r le p r i x , o u à p a y e r sous ca u tio n . C e r e fu s o b li g e a la d a m e d’ O r c e t
à se p o u r v o i r en j u s t ic e , et à d e m a n d e r c o n t r e le s ie u r D e s p r a t s la c o n
tin u a tio n d e ses p o u r s u i t e s , et c o n t r e les sieü rs D e ls o l la n u l l it é d e la
cla u s e . C ité s a u b u r e a u de p a i x , l ’aîn é a r é p o n d u q u ’il n e
p a s le c o n t r a t d e m a r i a g e d e sa s œ u r ,
4j u ’il
connoissoit
i g n o r o i t si son p è r e a v o it
s t ip u lé u n d r o it d e r e t o u r , q u ’e n le s u p p o s a n t a i n s i , il n’a u r o i t q u ’ u n e
e s p é r a n c e . O n a p r é t e n d u p o u r l e c a d e t q u ’ il a v o i t c h a n g é son d o m i
cile à P a r i s , e t sous c e p r é t e x t e o n a é l u d é la c l ô t u r e d u p r o c è s - v e r b a l .'
j u s q u ’ au o n z e a o û t. A s s ig n é s a u t r i b u n a l , c h a c u n d ’e u x a
constitué
a v o u é , et a p rè s a v o i r t e r g i v e r s é p e n d a n t p lu s d e h u i t m o i s , ils o n t d e
m a n d é p a r des e x c e p t i o n s sé p a r é e s à ê t r e m is h o r s d e c a u s e , s’a g i s s a n t ,
d is o ie n t - ils , d ’u n d r o it non o u v e r t . D a n s
cet
é t a t , la c a u s e p o r l é e à l’a u
d ie n c e d u c i n q ju in 1 8 0 7 , il i n t e r v i n t u n j u g e m e n t p a r d é fa u t q u i o r
d o n n a q u ’ils d é f e n d r o i e n t a u fo n d . Us o n t fa it sig n ifier d es d é fe n s e s le
d e u x j u i l l e t , en p r o t e s ta n t d e se p o u r v o i r c o n t r e le ju g e m e n t, d u c in q
ju i n . Q u o i q u ’ils e u ss e n t d o n n é le u r s m o y e n s p a r é c r i t , les s ie u r s D elsol
n ’o n t pas v o u l u les p l a i d e r à l ’a u d ie n c e . L e six a o û t u n s e c o n d j u g e m e n t
p a r d é f a u t a d é c la r é n u lle la cla u s e d u d r o it d e r e t o u r , e t a o r d o n n é la
co n t in u a tio n d es p o u r s u it e s c o n t r e le s ie u r D e s p r a t s . L e s sieurs Delsol
o n t f o r m é o p p o sitio n à c e j u g e m e n t , e t c e n’est q u e le d i x - n e u f fé v r ie r
180 8 q u ’ ils se so n t en lin p r é s e n té s à l’a u d i e n c e , o ù , su r plaid oiries res
p e c t i v e s p e n d a n t q u a t r e a u d i e n c e s , il a été o r d o n n é u n e in s tr u c tio n p a r
é c r it au r a p p o r t d e M. Del/.ons, p r é s i d e n t .
�D a n s le d r o i t , la ca u se pre'sente à j u g e r ,
Q u e l s b i e n s o n t é t é , e t p o u v o i e n t ê t r e c o m p r i s d an s la c la u s e d e r e
i°
t o u r r é s e r v e 'e p a r le s ie u r B a z i l e D e ls o l d a n s le c o n t r a t d e m a r ia g e d e
la d a m e d ’O r c e t sa fille ;
2° S i c ette r é s e r v e é t o it l im it é e à la p e r s o n n e d u s ie u r D e l s o l , o u p o u v o i t ê tre tra n s m is e à ses h é r i t i e r s ;
3°
S i d an s l e cas d e la t r a n s m is s i b i l i t é , c e d r o i t d e r e t o u r n e se seroit
p a s c o n f o n d u d a n s l a p e r s o n n e d e la d a m e d ’O r c e t a v e c sa q u a li t é d ’h é r i
tiè re c o n t r a c t u e l le d e son p è r e .
S u r la p r e m i è r e q u e s t i o n , a t t e n d u ,
i ° Q u e , c o n f o r m é m e n t a u C o d e c i v i l , d an s l ’i n t e r p r é ta t io n d es c o n
v e n t i o n s , o n d o i t p l u t ô t r e c h e r c h e r q u e l le a été la c o m m u n e in t e n tio n
d e s p a rties c o n t r a c t a n t e s , q u e s’a r r ê t e r a u sens littéral des t e r m e s ;
q u e les te r m e s s u s c e p t ib le s d e l i e u x sens d o i v e n t ê t r e p ris d a n s c e l u i q u i
c o n v i e n t l e p l u s à la m a t iè r e d u c o n t r a t ; q u e to u tes les cla u s es des
c o n v e n t i o n s s’i n t e r p r è t e n t les u n e s p a r les a u t r e s , en d o n n a n t à c h a
c u n e l e sons q u i r é s u lte d e l’a c te e n t i e r ; q u e , d an s le d o u t e , les c o n
v e n t io n s s’i n t e r p r è t e n t c o n t r e c e l u i q u i a s t i p u l é , o u q u i p o u v o i t faire
la loi ;
2 “ Q u e l’o b j e t d u d r o i t d e r e t o u r c o n v e n t i o n n e l est d e faire r e n t r e r
d an s les cas p r é v u s , d a n s le d o m a in e d u d o n a t e u r , les ch o ses p a r lu i
d o n n é e s ; q u e d è s - lo r s , o n n e p e u t le s u p p o s e r o u l'a d m e t t r e q u e d an s
les
c o n v e n t i o n s e t cas o ù un d o n a t e u r s’est d é p o u i l lé d e sa p r o p r i é t é ,
et p e u t en su ite la r e p r e n d r e ;
3°
Q u e le s ie u r D e ls o l a y a n t fait u n e d o n a tio n e n tr e - v ifs à sa fille, et
l’a y a n t , p a r le m ê m e c o n t r a t , in s titu é e son h é r itiè r e u n i v e r s e l l e , il se ro it
c o n t r a d i c t o i r e et c o n t r e la n a t u r e d ’ u n e in s titu tio n q u e la r é s e r v e d e r e
t o u r p a r lui stip u lé e en m ê m e t e m p s , »’ a p p l i q u a i a u x b i e n s q u i faisoient
l'o b je t d e c e t t e i n s tit u tio n , d o n t la p r o p r i é t é e t to u te d ispo sitio n à titre
o n é r e u x ne laisso ie n t pas d e reste r en son p o u v o i r , et d o n t ¡1 ne se d é p o u illo it p a s ; q u ’ il se ro it d ès-lo rs r id i c u le d e s u p p o s e r q u 'il so n g e o it à
faire r e n t r e r d an s ses m a in s ce q u i n'en so rto it p a s , et n e p o u v o it p a s
f'n sortir de son v iv a n t ;
�(
4°
)
Q u e l e sens d e l’a c t e e n t i e r , e t l ’i n te n tio n b i e n c o n n u e d es p a rties
é t o it d ’a s s u r e r , d ès l ’i n s l a n t , à la d a m e d ’O r c c t , à lit r e d e d o n a t a i r e , et
t a n t en n u e p r o p r i é t é q u ’ u s u f r u i t , u n e p a r t i e d e la f o r t u n e d e son p è r e ,
e t le s u r p lu s a p r è s sa m o r t , sans q u e la d o n a ta ire p û t c e p e n d a n t d is p o
ser d e r i e n , au p r é j u d i c e d e son p è r e , d an s les cas p r é v u s p a r la cla u s e
d e r e t o u r -,
5°
Q u ’il s’e n s u it d ès-lo rs q< e , q u o i q u ’on lise d a n s c e l t e c la u s e q u e le
s ie u r D e ls o l se r é s e r v e le d r o it d e r e v e r s io n et r e t o u r , t a n t d es L ie n s
d o n n é s q u e r é s e r v é s , les p r i n c i p e s c i - d e s s u s é n o n c é s p e r m e t t e n t d ’a u
t a n t m o in s d e s u p p o s e r q u e , p a r les m ots d e b ie n s réservés, les p a rtie s
a v o i e n t e n t e n d u les b ie n s d e l’i n s t i t u t i o n , q u e p e u d e lig n e s a u p a r a v a n t
elles les a v o i e n t d é sig n é s sous le n o m d e b ie n s in s titu és ; q u ’il est p lu s
n a t u r e l d e c r o i r e q u e les m o ts b ie n s réservés o n t é c h a p p é à l’i n a d v e r
t a n c e d u r é d a c t e u r ; d ’a u t a n t p lu s q u e t o u t e la c o n t e x t u r e d e la p a r t ie
d u c o n t r a t d e m a r i a g e , q u i c o n c e r n e les d is p o sitio n s d u s ie u r D e l s o l ,
p r o u v e q u e c e r é d a c t e u r a v o it les n o tio n s les p l u s o b s c u r e s s u r la n a t u r e
e t les effets des in s tit u tio n s c o n t r a c t u e lle s ;
G° Q u ’il se p e u t e n c o r e ( c a r t o u t e c o n j e c t u r e est a d m is s ib le d a n s l ’in
t e r p r é t a t i o n d ’ u n e c la u s e aussi e x t r a o r d i n a i r e ) q u e , p a r r e t o u r d es b ie n s
r é s e r v é s o u in s titu é s, o n a it v o u l u e n t e n d r e l a c a d u c i t é d e l’ in s titu tio n
e n cas d e p r é d é c è s d e l ’h é r itiè r e in s titu é e et d e ses e n fa n ts ;
7 ° Q u e s’il fallo it d o n n e r q u e l q u e s e n s , q u e l q u e s effets à la c la u s e d e
r e t o u r d es b ie n s réservés, y r e c o n n o i t r e les b i e n s d e l'in s titu tio n , e t
s u p p o s e r q u e le bieur D e ls o l v o u lo i t les fa ir e r e n t r e r d a n s sa fa m ille
a p r è s son d é c è s e t c e l u i d e sa fille -, c e t t e c la u s e c o n t r a r i a n t é v i d e m
m e n t la n a t u r e e t les p r i n c i p e s d u d r o i t d e r e to y ir, n e p o u v o i t ê t r e e n
v is a g é e q u e c o m m e u n e c h a r g e de f i d é i c o m m i s , c o m m e u n e v é r it a b le
s u b s t it u t io n d o n t i l a u r o i t v o u l u g r e v e r sa f i l l e , e t la q u e l l e s e ro i t a b r o g é e
p a r les lois d u q u a t o r z e n o v e m b r e 1 7 9 2 .
S u r la s e c o n d e q u e s t i o n , a t t e n d u ,
i°
Q u e q u o i q u e la m a j o r i t é d es a u t e u r s , c l p l u s i e u r s m ê m e
très
e s t i m a b l e s , a ie n t le m i q u ’en g é n é r a l r e li e t d e la stip u la tio n de r e t o u r
c o n v e n t i o n n e l , e u f a v e u r d u d o n a t e u r , sans q u ’il f û t la it m e n t i o n d e ses
�V
' *
( 5 2 }
h é r i t i e r s , éto it tra n s m is sib le à son h é r itie r c o m m e to u te a u t r e s t i p u la t i o n ,
m ê m e c o n d i t i o n n e l l e , a p p o s é e d a n s les c o n t r a t s ; q u o i q u ’il se t r o u v e
m ê m e d e u x a rrêts q u i l ’a v o i e n t ainsi j u g é , to u s s’a c c o r d e n t c e p e n d a n t à
d i r e , et la saine raison suffit p o u r p r o u v e r , q u e c e tte transm issibilité ne
p e u t a v o i r lieu l o r s q u e la st ip u la t io n d e r e t o u r a été lim it é e à la p e r
son ne du d on ateu r ;
2° Q u e , d a n s l'e s p è ce a c t u e lle , c e t t e l im it a t io n à la p e r s o n n e d u sieur
D i lsol r é s u lte é v i d e m m e n t , soit d e la c i r c o n s t a n c e q u e la d a m e de
V i g i e r , m è r e d u f u t u r é p o u x , l u i fa is a n t d o n a t io n d e to u s b i e n s , s’en
r é s e r v a l e r e t o u r p o u r elle et les sien s , t a n d is q u e le s i e u r D e ls o l n e le
r é s e r v a q u e p o u r lu i j q u e c e t t e d if fé r e n c e r e m a r q u a b l e d a n s les d e u x
cla u ses in sérées d a n s le m ê m e a c t e , d ’a illeu rs p a r f a i t e m e n t s e m b l a b l e s ,
a n n o n c e c l a ir e m e n t q u e les p a r t i e s v o u l o i e n t , q u a n t à c e , l e u r d o u n e r
u n e é t e n d u e d if fé r e n t e ;
3°
Q u e c e t t e d iffé r e n c e d an s la s t i p u la t i o n s’ e x p l i q u e e n c o r e p a r la
c i r c o n s t a n c e i m p o r t a n t e q u e la d a m e d e V i g i e r a v o it p lu s ie u r s e n f a n t s ,
p o u r le s q u e ls sa s o l li c i t u d e m a t ç r n e ll e l ’e n g a g e o it à c o n s e r v e r scs b i e n s ,
a u lie u q u e le s ie u r D e ls o l u ’a v o i t q u ’ u n e fille u n i q u e , e t a u c u n p r o c h e
parent ;
/|° Q u e la p r o h i b i t i o n si e n tiè r e , si a b s o l u e d e d i s p o s e r , q u e l e s ie u r
D e ls o l i m p o s o i t à sa fille , p r o u v e e n c o r q q u ’ il ne st ip u lo it q u e p o u r lu i
n ’ étant pas p r é s u m a b l e q u ’il m i l sa fille d an s u n tel é ta t d ’iu tc r d ic tio n
en fa v e u r de parents éloignés , avec lesquels il n ’a voit aucunes rela
tio n s, que les parties m êm e ne connoissoient p a s , ainsi que la dame
d'O rcel l’a plusieurs f o i s dit et écrit , sans que le f a i t ait été désa
voué,
5°
Q u e c e t t e lim itatio n r é s u lte s u r - t o u t d e la c i r c o n s t a n c e q u e l e s i e u r
D e l s o l , a p r è s a v o i r l’a it à sa fille u n e d o n a t io u e n i r e - v i i s , l’in s tit u a n t en
m ê m e t e m p s son h éritière u n i v e r s e l l e , il s e n tit a b s u r d e d e s u p p o s e r
q u ’il e u t fa it et v o u lu faire c o n t r e c e t t e h é r itiè r e m i e r é s e r v e q u i ne d e vo it <;t n e p o u v o it p r o fite r q u ’à e l l e - m ê m e , p u i s q u ’en «d.Tietlaut le s y s
t è m e de tra iism U s ib ilité d u d r o it d e r e t o u r , c e l l e tra n s m is sio n u ’a u r o it
p u a v o ir lieu q u ’e n f a v e u r d e c e t t e m ê m e héritière*.
�Z7S
(
53
)
S u r la tro isiè m e q u e s tio n , a t t e n d u ,
i ° C o m m e il v i e n t d ’ê t r e d i t , q u e l'a c tio n r é s u lta n t e d ’ u n e r é s e r v e
d e r e t o u r , m ê m e i n d é f i n ie , n e p o u v o i t p r o f it e r q u ’a u x h é r itie r s c o m m e
fa isa n t p a r t i e d es a ctio n s h é r é d it a ir e s ;
a 0 Q u e , d a n s l ’e s p è c e , la d a m e D o r c e t , é ta n t s e u le h é r itiè r e u n i v e r
s e lle , fo r m e u n v é r i t a b le h é r itie r q u i n e d ifféré q u e d e n o m d e l ’h é r itie r
t e s t a m e n t a i r e , q u a n t à l’ u n iv e rs a lité d u t i t r e ; q u e c e t t e i n s tit u tio n m e t 1
l ’i n s tit u é à la p l a c e d e s h é r itie r s d u s a n g , et l e cas a v e n a n t , l e saisit d e
to u s les d ro its d e l’h é r é d it é ;
3°
Q u e les a u t r e s e n fa n ts m ê m e d e l ’i n s t i t u a n t , s u i v a n t les p r i n c i p e s
u n i v e r s e l le m e n t r e ç u s lors d u d é c è s d u s i e u r D e ls o l , p e r d o i e n t p a r l’effet
d e c e tte in s tit u tio n la q u a li t é d ’h é r itie r s et n e c o n s e r v o ie n t q u ’u n s im p le
d r o i t à u n e p o r t io n d e s b i e n s à t it r e d e l é g i t i m e ;
4°
Q u e dès-lors la r é s e r v e d e r e t o u r t r a n s m is s i b l e , q u o i q u e d ir ig é e
c o n t r e u n h é r itie r i n s t i t u é , ( s ’il é to it p o s s ib le d e la p r é s u m e r ) , se se ro it
c o n f o n d u e a v e c l’eiTet d e l’i u s t itu t io n p a r le c o n c o u r s d e d e u x qu a lités
d e d o n a ta ire g r e v é e d e r e t o u r , e t d ’h é r itiè r e se u le a p p e l é e à en p r o fit e r .
L e T I U B U N A L d é b o u t e les sieu rs J e a n - F r a n ç o i s et G a b r i e l - B a r t h é l e m y D e ls o l d e l’o p p o s itio n p a r e u x fo r m é e a u j u g e m e n t p a r d é f a u t fa u te
de p laid er,
d u six a o û t 1 8 0 7 , o r d o n n e q u e c e j u g e m e n t se ra e x é c u t é
selo n sa fo r m e et t e n e u r ; en c o n s é q u e n c e , d é c l a r e p e r s o n n e lle a u s ie u r
D elsol p è r e , e t c a d u q u e p a r son p r é d é c è s , la s t i p u la t i o n d e r e t o u r p a r
lu i r é s e r v é e d a n s le c o n t r a t d e m a r ia g e d e la d a in e d ’O r c e t sa f i l l e , o r
d o n n e q u e les p o u r s u i t e s c o m m e n c é e s c o n t r e le s ie u r D e s p r a l s s e r o n t
c o n t i n u é e s , en cas d e r efu s u l t é r i e u r d e sa p a r t d e p a y e r les t e r m e s d u
p r i x d e la v e n t e d u p r é d e C a n c o u r à p r o p o r t i o n d e l e u r é c h é a n c e ,
ainsi q u e d es i n t é r ê t s , to u s d é p e n s c o m p e n s é s e n tr e toute.1« les p a r t i e s ;
a tt e n d u la p r o x i m i t é d es sieu rs D e ls o l et d a m e d ’O r c e t , q u e les p r e m ie rs
n ’oiit pas p r o v o q u é l’i n s t a n c e , et a t t e n d u q u e le s ie u r D e s p r a t s a p u a v o ir
j u s q u ’a un c e r t a in p o i n t un ju s te s u je t d e c r a in te su r la v a lid ité d e son
a cq u isitio n et la s û r e t é d e ses f o n d s ; e t s e r a , le p ré se n t j u g e m e n t c o m m e
fo n d é en t it r e , e x é c u t é v i s - à - v i s le s ie u r D e s p r a l s , n o n o b s t a n t e t sans'
�A
( 54 )
■
p r é j u d i c e d e l ’a p p e l , à la c h a r g e n é a n m o in s p a r la d a m e d ’O r c e t d e d o n
n e r , e n cas d ’a p p e l , b o n n e e t su ffisa n te c a u tio n a c o n c u r r e n c e d es ca
p i t a u x e x ig ib le s . F a i t e t juge' a u t r i b u n a l c iv il d e p r e m iè r e i n s t a n c e ,
é t a b li à A u r i l l a c , ch e f-lie u d e p r é f e c t u r e d u d é p a r t e m e n t d u C a n t a l , le
v i n g t - d e u x ju ille t m il h u i t c e n t h u i t , s é a n t s , m e s s ie u rs D e lz o n s présir
d e n t , m e m b r e d e la lé g i o n d ’h o n n e u r ; D e lz o r t s et L a v a l , ju g e s . M a n
d o n s et o r d o n n o n s à to u s hu issiers s u r c e r e q u i s d e m e t t r e le p r é s e n t
j u g e m e n t à e x é c u t i o n , à n o s p r o c u r e u r s p r è s les t r i b u n a u x d e p r e m ie r e
i n s ta n c e d ’y tenir la m a i n , à to u s c o m m a n d a n t s et o fficiers d e la fo rce
p u b l i q u e d e p r ê t e r m a in - f o r te l o r s q u ’ils e n s e r o n t l é g a l e m e n t r e q u is . E n
fo i d e q u o i l e p r é s e n t j u g e m e n t a e t e s ig n e p a r le p r é s i d e n t e t p a r le
greffier. Signé à l a m i n u t e , m o n s ie u r D e l z o n s , p r é s i d e n t ; e t B r u n o n ,
g reffier. P o u r c o p i e c o n f o r m e à l’e x p é d i t i o n , signé L i b r o , a v o u é .
�PRÉCIS
P O U R le sieur René-Louis L H É R IT IE R et consors, intimés ;
CO N TR E
m essire J
oseph
, marquis de M E S M E S ,
appelant.
L e s ieu r L o u i s L h é r i t i e r , p a r le c o n t r a t d e m a r ia g e d e d e m o is e lle M a r i e A l b e r t i n e R a c i n e , sa b e l l e - n i è c e , a v e c le s ie u r m a r q u i s d e R a v i g n a n , d u
i S m a r s 1 7 1 2 , a p r o m is d o n n e r à la d e m o i s e l l e , lors f u t u r e é p o u s e , la
som m e d e
3o,ooo
l i v . , q u ’il l u i a e f f e c t i v e m e n t p a y é e p e u a p r è s ; m a is il a
été stipule' en m ê m e tem p s que ladite som m e retonrneroit audit sieur
L h éritier, donateur , en cas de décès de la dem oiselle fu tu r e épouse
sans enfants, et encore e n cas qu’il y eût des e n f a n t s , et qu'ils v in s
sent à décéder avant d’ être p o u rv u s , ou avant d’ avoir atteint l’âge
de majorité.
L a d o n a t a ir e n ’a v o it alors q u e v i n g t - t r o i s ans e t d e m i , l e d o n a t e u r e'toit
d an s la s o ix a n t iè m e a n n é e d e son â g e , e t il a v o i t d e u x e n fa n ts m â le s âgés
l ’u n d e d i x - s e p t a n s e t l’a u t r e d e tre iz e ( 1 ) . C ’est d o n c é v i d e m m e n t p o u r
scs enf.ints et h é r i t i e r s , e n c o r e p l u t ô t q u e p o u r l u i - m ê m e , q u ’ il s tip u lo it
c e l l e r é s e r v e , d o n t il ne p o u v o i t p a s sc fla tter d e p r o f it e r p e r s o n n e l le
m ent.
Q u o i q u 'il en s o i t , le d o n a t e u r est d é c é d é en 178 0. L o n g - t e m p s a p r è s ,
et le
3o
n o v e m b r e 1 7 G 4 , la d em o ise lle R a c i n e , d o n a t a i r e , est d é c é d é e sans
a v o i r laissé d ’e n fa n t s , ni de son p r e m ie r m a r ia g e a v e c le sieu r m a r q u is de
IlavifFiinn, n i (]c son s e c o n d m a r ia g e a v e c le s ie u r c o m t e d e D a in p u s .
E n c o n s é q u e n c e , les in t im é s , c o m m e r e p r é s e n t a n t le sieu r L o u is L l i é -
( 1 ) L a i n e , conseiller au p a r l e m e n t , a s u rv é c u au don ate u r »011 p è re , dont
¡1 a lierite.
Il est a u -
jou rd hui rep rése nté p.ir les i u i m i é a , scs h éritier* b é néficiair es , nui t o u t en m ê m e te m ps h é rit is rs
su bstitués du d o n a t e u r leur oncle .
x
PREMIERE
CAUSE
«lu rôle d*
Paris
(de 1767.)
De la trans
mission des
stipulations
condition nelles , et
de celles de
retour en
particulier
�( 56 )
r i t i e r , d o n a t e u r , o n t f o r m é c o n t r e l e sieu r m a r q u i s d e M e s m e s , d o n a
t a ir e u n i v e r s e l d e l a d e m o is e lle R a c i n e , v e u v e D a m p u s , e t c h a r g é à ce
titre d e ses d ettes a n t é r ie u r e s a u p r e m i e r a v r i l I749> l e u r d e m a n d e e n
r e s t i t u t i o n des
5o,ooo
liv . d o n n é e s p a r l e u r a u t e u r , c o n f o r m é m e n t à la r é
s e r v e s tip u lé e p a r l e c o n t r a t d e 1 7 1 2 .
L a ca u se p o r t é e à l ’a u d i e n c e d u p a r c c i v i l d u C h â l e l e l d e Paris^ il y est
i n t e r v e n u le 29 ju i lle t d e r n i e r , s u r le s p la id o ir ie s r e s p e c ti v e s d es parties
p e n d a n t c i n q a u d i e n c e s , s e n t e n c e p a r l a q u e l l e , attendu le décès de la
dem oiselle R a cin e , veuve D a m p u s , sans enfants , le m a r q u i s de
M e s m e s , son d o n a t a ir e u n i v e r s e l , est c o n d a m n é a r e s t itu e r a u x in tim é s
les
3o,ooo
liv . d o n t la r é v e r s io n a v o i t été' s tip u lé e p a r l e u r a u t e u r . C ’est
d e c e t t e s e n t e n c e q u e le m a r q u i s d e M e s m e s est a p p e l a n t . I l n e se ra p a s
d ifficile d ’en é t a b li r le b i e n j u g é .
A c e t e f f e t , n o u s e x a m in e r o n s les p r i n c i p e s g é n é r a u x s u r la tr a n s m is
sion d e t o u t e s st ip u la t io n s c o n d itio n n e lle s ; les d écisio n s d es d o c t e u r s et
des lois s u r l a t ra n s m is s io n d u r e t o u r c o n v e n t i o n n e l en p a r t i c u l i e r , et
l ’é ta t a c t u e l d e l à j u r i s p r u d e n c e s u r c e l t e q u e s tio n .
P R E M I È R E
P A R T I E .
Principes généraux sur la transmission de toutes stipula
tions conditionnelles.
U n seul m o t su ffît p o u r ju s tifie r l a s e n t e n c e d o n t est a p p e l , c’est q u e
la c o n d itio n so u s la q u e lle le r e t o u r a é t é r é s e r v é , se t r o u v e a u j o u r d ’hui
p u riG ée p a r le d é c è s d e la d e m o is e lle R a c i n e , d o n a t a i r e , sans en fa n s.
I n u t i l e d ’o p p o s e r q u e le d o n a t e u r es t d é c é d é a v a n t l’é v e n e m e n t d e la
c o n d i t i o n . C e t t e c ir c o n s t a n c e est d es p lu s i n d i ffé r e n t e s , p a r c c q u e le r e
t o u r a é t é st ip u lé p o u r a v o i r l i e u , n o n en cas d e p réd e ce s , mais s im p le
m e n t en cas d e déco* d e la d o n a t a ir e sans en fa n ts : o r , c e l t e c o n d i t i o n se
t r o u v e p u r if ié e p a r l 'é v é n e m e n t .
Il est v r a i q u e les h éritiers d u d o n a t e u r n’o n t p a s été a p p e lé s n o m m é
m e n t à r e c u e illir le p r o fit d u r e t o u r ; m ais les h ér itier s n’o n t p a s bes o in
d e la vo ca tio n de l ’h o m m e p o u r p r o f il e r des d ro its d o n t l e u r a u t e u r est
�Zï<j
(
5 7
3
d é c é d é saisi ; ils n’ o n l besoin q u e d e c e lle d e la lo i q u i les saisit d e tous les
d ro its d u d é f u n t , q u i les s u b r o g e à sa saisine en la c o n t in u a n t en l e u r p e r
so n n e. E n c o n s é q u e n c e , il l e u r suffit q u e c e l u i a u q u e l ils s u c c è d e n t ait été
v r a i m e n t saisi du d r o it q u ’ ils r é c la m e n t, q u e cc d r o i t a it fa it p a rtie d e ses
bien s. O r les a ctes e n t r e - v i f s , m ê m e c o n d i t i o n n e l s , saisissent to u jo u r s à
l’in s ta n t m ê m e , sans a tt e n d r e l'é v é n e m e n t .d e la c o n d itio n . L e s a ctio n s q u i
en r é s u l t e n t , q u o iq u e non e n c o r e o u v e r t e s , so n t in b o n is d u s tip u la n t :
c o n t r a c t a s , c ts i c o n d i l i o n a l i s , t a in e n e x p r æ s e n t i v i r e s a c c i p i t , d it
V i n n i u s . I n c o n lr a c tib u s ici t e m p u s s p c c t a t u r f/no c o n lr a h u n u s , d it la
loi 7 8 , ÎT. d e v e r b . o b lig .
D e l à , cette r è g le g é n é r a le r e b a tt u e d an s tou s les liv r e s é l é m e n t a i r e s ,
e t n o t a m m e n t d an s les I n s t i l u t e s , q u e les stip u la tio n s c o n d itio n n e lle s se
tr a n s m e t te n t à l’h é r i li e r , q u o iq u e le st ip u la n t soit d é c é d é a v a n t l’é v é n e
m e n t de la co n d itio n . E x s t i p u l a t i o n e c o n d i t i o n a li t a n t u m s p e s e s t d é
b ita n t i r i , e a m q tie ip s a m s p e m in liœ r e d e m t r a n s i n i ll i n m s , s i p r iiis
q u a n t c o n d it io e x s t e t , m o r s n o b is c o n t i n g a t , liv .
3.
t. i(>. p. /(. C iitn
q u is suf> a l iq u d c o n d i l io n c s t ip u la lu s J i i e r i t , p o s t e à e x is t e n t e c o n d i t i o n e , h œ re s e ju s a g e r e p o t e s t , m ê m e liv . t. 20. p.
25 .
E n v a i n v o u d r o i t - o n a p p o r t e r q u e l q u ’e x c e p t i o n à c e tte rèijle ; les lois
d é c i d e n t q u ’o n n’en d o it a d m e t t r e a u c u n e : G E N E R A L I T E R s a n c im u s
om n e
ni s t i p u la t io n e m siv e in d a n d o , s iv c i n f a c i e n d o , s iv c m i x t a e x
d a t u lo e t f a c i e n d o in v e n ia t u r , e t a d h æ r e d e s e t c o n t r a h œ r e d e s I r o n s mittir S I V E S P E C I s / L I S I I Æ l l E D U M F I s iT M E N T I O , S I F E NO N:
j iv . i 3 . co d . d e c o n tr a li. et c o m m . s t ip n l.
E n va in o p p o s e r o i t - o n q u e le s t ip u la n t q u i n’ a p a r lé q u e d e l u i - m ê m e ,
q u i n’a pas n o m m é ses h é r i t i e r s , a e n t e n d u r e s t r e i n d r e la stip u la tio n à sa
p e r s o n n e ; la lo i r é p o n d q u e la s lip u la t io n n ’ en est p a s m o in s r éelle : p l e r in n q u o c n i m , u t P e d i u s a i t , p e r s o n a p a c t o i n s e r it u r , n o n u t p e r s o n a le p a c t u m J i a t , s e d u t d c n i o n s t r c t u r c u m q u o p a c l u m j a c t u u i e s t ,
liv . 7 . p. U tr u r n . II'. d e p a c t is .
P o u r to u t d ire en un m p t , l’h é r itie r n ’i ^ i o i n t à p r o u v e r q u e son a u t e u r
a v o u lu s t ip u le r p o u r lu i. U lui sufTit q u ’il n ’y ait pas eu d ’ in te n lio n de
l’e x c lu r e . O r c e tte inten tio n n ’est pas à s u p p o s e r lo r s q u 'e lle n’ est pas c x -
8
�i * /
( 58 )
primée. C ’est à ceux q ui le p ré te n d e n t exclus a prouver son e x c lu sio n :
Quamvis verum est qu od qui ex cip it, probare débet quod excipitur ;
at tamen de ipso dum taxat , at non de hcerede ejus convertisse petitor,
non qu i excip it, probare débet ; liv. 9. fi. de prob. et prœf.
Il en est autrem ent des dispositions (1) conditionnelles de 1homme ou
de la loi. Elles ne se transm ettent pas à l’héritier de l’appelé décédé a vant
l ’événem ent de la condition , ( et voilà p ourquoi le retour légal n’est pas
transm issible) mais c ’est p a re eq u e les héritiers ne recueillent du cliel de
leur a u t e u r , et com m e transm issionnaires, q ue les droits dont il est dé
cédé saisi : o r les dispositions conditionnelles n e Saisissent qu au m om ent
de leur ouverture. Ju sq u e-là elles ne sont point in bonis de l’appelé.
Inu tilem ent le testateur en auroit-il ordon né la transmission ; elle 11’a u -
Traité
tions^c^g. I’° ‘ l Pas
pour c e la , dit R i c a r d , p a reeq u e le testateur 11epeut pas donn. G5o.
ijer à ses dispositions un effet rétroactif, que les lois leur r e fu s e n t, ni
o p é re r une transmission qui n’est l’ou vrag e q ue de la lo i, et q ui ne d érive
pas de l’intention de rh om nie. Il est vrai que dans ce cas l'héritier v ie n droil de son c h e f et en son n o m , c o m m e appelé lui-m êm e en vertu de la
vocation expresse du testateur; mais il 11e viend roil pas com m e transmisNoalis <!e sionnaire, ce qui est bien différent à tous égards, s lliu d entm est transtransm is-
sione,
au
commence -
.
7-
»
uussio, et aima est vocalto.
Si d o n c la transmission a lieu p our les stipulations conditionnelles } et
non p o u r les dispositions, cela ne vien t p a s , com m e 011 v o i t , de la diffé
rence d'intention, p uisque l’intention m êm e expresse est incapable d’op é
rer la transmission dans les dispositions conditionnelles ; il est évide nt
q u e c’est la saisine seule q u i tra n s m et, pareeq u e la transmission n’est
elle-m êm e qu’une continuation de saisine.
L e sieur marquis de Mcsmcs , don t les prétentions ne s’accorden t pas
a vec ces p r in c ip e s , fait tout son possible p o u r en éluder l’application ;
(1) Ijx ditpniiüon proprement dite, par opposition aux Mipulations, c»t un acte pur de la volonté
qui te pastr hori la présence, et utuJa participation île celui qui tu est l'objet. 'I'* Iles sont lu dispotiliont UMaim-ulairt v Telle* »ont ¡uistt les substitutions contenues dam lit acte» entre-vif», nuxqml» le tub»tilu<! n'intervient pas; car tfl^mtcrvenoil pour acerpter, il »croit donataire comlitionni-1, '■
<l'acte s. roit ù »ou égard uu patte, mlc convention, uu contrat, une «tipulatiou, et non pat
une tliipotition.
�fo r c é d e c o n v e n i r q u e tous a clcs e n t r e - v i f s , p u r s e t sim ples ou c o n d i t i o n
n e ls , saisissent a c t u e ll e m e n t et n é c e s s a ir e m e n t, il ne v e u t c e p e n d a n t pas
r e c o n n o î lr e q u e la transm ission en d o iv e ê tre la s u itç ; il a im e m i e u x la
faire d é r i v e r d e la p r é s o m p t io n g é n é r a le , q u ’en s t i p u la n t p o u r n o u s ,
n o u s so m m e s cen sés a v o ir p a r lé p o u r nos h é r i t i e r s ; p u i s , r e str e ig n a n t
c e tte p r é s o m p t io n a u x seuls co n tr a ts in téressés, il en c o n c l u t q u e la tra n s
mission des stipu la tion s co n d itio n n e lle s n ’a p a s lie u l o r s q u ’elles se r e n c o n
t r e n t d an s les c o n tr a ts bienfaisants.
M ais i ° il est fa u x q u e les c o n tr a is intéressés so ien t les seuls d an s les
q u e ls le s t ip u la n t e s t. ce n sé a v o ir p a r l é p o u r ses h é r i t i e r s ; la r è g le est
g é n é r a le p o u r t o u te es p è ce de c o n t r a t s , p u i s q u e les lois n ’o n t fait a u c u n e
e x c e p t i o n , p u i s q u ’a u c o n t r a i r e elles o n t e x c l u to u te e x c e p tio n p a r la g é
n é ra lité e t l’ u n iv e rs a lité a b so lu e d e le u rs expression s. G e n e r a l i t e r
s a n c im u s O M N E M s t i p u la t i o n e m ...........t r a n s m it li, s iv e s p e c ia li s h c c r e d u m f i a t n i e n t i o , siu c n o n .
2° L e sens d e la r è g le n’est pas p r é c i s é m e n t q u e n o u s so m m e s p r é
su m é s a v o ir p e n se a nos h é r itie r s et a ya tils -ca u se , e t a v o i r p o s i t i v e m e n t
v o u l u st ip u le r p o u r e u x ; c a r il e s l b ie n r a re q u e les c o n t r a c t a n t s y p e n se n t
p o s i t i v e m e n t , et o n n e p r é s u m e pas ce q u i a r r i v e r a r e m e n t . L e v r a i sens
d e la r è g le est s e u le m e n t q u e l e s t i p u l a n t , q u i n ’a pas f o r m e lle m e n t res
tr e in t la stip u la tio n à ça p e r s o n n e , n e p e u t pas ê tre s u p p o s é a vo ir v o u lu
e x c l u r e ses h éritiers. O r cette p r é s o m p t i o n , n é c e s s a ir e m e n t a p p lic a b le à
to u te e s p è c e d e s t i p u la t i o n , suffit to u te s e u l e , n o n p o u r en o p é r e r la
transm ission , c a r c ’est la saisine se u le q u i l’o p è r e , m ais p o u r é c a r t e r les
ob sta cle s q u i p o u r r o i e n t l'a r rê te r ou la r e n d r e inefficace.
Q u e le c o n t r a t soit in téress é ou b i e n f a is a n t , il n ’i m p o r t e ( i ) . P u i s q u e
~
----
i
—
(i) En matière de contrats, dit Ricard, la siipulalion qui en fait le principal commerce oblige
dès-lors réciproquement les parties de 1 accomplir au cas de la condition qui, \ proprement parler
ne passe que pour une restriction, pour le cas prévu par les parties seulement, et laisse au surplus la
convention pure et simple, de sorte que l'échéance arrivant, la condition est censée comme non '
écrite. Pour ce qui concerne le legs au contraire,"la condition en affecte tellement la disposition C|
la substance, qu il ne subsiste absolument qu’avec elle et que par elle ; de sorte que comme ce n’est
pas le titre ¡legratuit ou d'onéreux </ui produit cette différence, mais la qualité de l'acte, s’il
esl testamentaire, c’est-à-dire, sans stipulation, et un pur acte de la l olonté d'une personne
�( G» )
d an s l'u n et d a n s l ’ a u l r c la saisine y a lieu d e p lein d r o i t , c o m m e l ’a p p e
lan t en c o n v i e n t l u i - m ê m e , il fau t b ie n q u ’ elle soit co n tin u é e d an s la p e r
so n n e des tra n sm issio n n aires. O n n e p e u t p a s les su p p o s e r e x c lu s p a r le
S t ip u la n t, l o r s q u e c e lu i-c i n ’a p a s p r o n o n c é l e u r e x c lu s io n ; o r , s’ils ne
so n t p a s e x c l u s , il est dans l ’o r d r e d e s ch o ses q u e , c o m m e su cc e ss e u rs
u n iv e r s e ls du sin g u lie r s d u t r a n s m e t t a n t , ils s u c c e d c n t a la saisine c o m
m e n c é e en sa p e r s o n n e , c o m m e à to u s ses a u t r e s d r o i t s , q u a n d m e m e il
n ’au ro it p o in t d u t o u t p e n s é à e u x .
D ’a illeu rs 011 p e u t d ir e q u e to u s c e u x q u i c o n t r a c t e n t , sans m e m e q u ’ils
a ient jam ais p e n sé fi la t r a n s m is s i o n , o n t c e p e n d a n t , d u m o in s implicite
ment et é m i n e m m e n t , u n e v é r i t a b le in te n tio n d e t r a n s m e t tr e . E11 e f f e t ,
q u i c o n q u e s t ip u le v e u t avoir, p o s s é d e r , a c q u é r i r , en u n m o t a jo u te r o u
réunir à son p a tr im o in e ce q u i l'ait l’o b je t de sa s t i p u l a t i o n , ad rem fa m iliarein respicit , c o m m e d it V i n n i u s ; s’il n e s t ip u le q u e c o n d itio n n e lle
m e n t , il n e v e u t avoir q u e p o u r le cas d e la c o n d i t i o n , m ais il v e u t avoir
p o u r ce cas-là en q u e l q u e t e m p s q u e la c o n d itio n p u iss e a r r i v e r : o r , avoir
u n e c h o s e , c ’est in c o n t e s t a b l e m e n t ê t r e en d r o it d’en j o u i r , faire e t d is
p o s e r c o m m e d e tou s ses a u tr e s b i e n s , d e la v e n d r e , d e l’e n g a g e r , d e la
l é g u e r , e t c . , et p a r c o n s é q u e n t d e la t r a n s m e t tr e à ses a y a n t s - c a u s e , àp lu s forte raison à scs h é r itie r s.
A in s i q u a n d m ê m e la tra n sm issio n ne d é r iv e r o it q u e d e l ’in ten tio n d e
t r a n s m e t t r e , c o m m e cette i n te n tio n se r e n c o n t r e , non à la v é r it é expli
citement , m ais d u m oins implicitement et éminemment , d an s t o u te
espèce d e s tip u la tio n a p p o sé e à to u te e s p è c e d e co n tr a ts , sans m ê m e q u e
oü s’il est conventionnel et fait entre-deux personnes, il n’y a pas dt doute que les donations
suivies d'acceptation , participant ù la nature de ces ilerniers actes, les conditions qui s'y rentfinirent ont un effet rétroactif au jour de ta donation , ainsi que dans les autres contrats. Et ailleur»: si une donation sous condition estfaite entre-vifs, quoique la condition n'arrive qu’après,
la mort du donataire, ses héritiers ne laisseront pas îlejouir du bénéfice de la donation, comme
ayant été parfaite, au moj en de Veffet rétroactif qui est donné à la donation, dujour qu'elle a
été passée; car, ajoute-t-il, ce n'est pas seulement la qualité de donation entre-vif» qui fait la
transmission au projit des héritiers du donataire, mais l'effet rétroactif du droit et de /- posses
sion au jour du contrat. Trait« île» ilisi>ovtions touditiounclU», chap.
•ui 'lUuuoa»( dr*i>. •*, partie ¡înroiire, U- l ia cl lit.
5, $
r, u. aol. Ti aile t\«i
�Z % 2 >
( 61 )
le s t ip u la n t ait ja m a is p en se à ses h é r i t i e r s ; il sero it to u jo u rs v r a i de d i r e ,
d ’a pres les lo is , q u e les stip u la tio n s c o n d itio n n e lle s so n t to u tes tra n s m is sibles d e l e u r n a t u r e , soit q u ’elles se t r o u v e n t d a n s d es c o n trats in té r e s
sés , soit q u ’elles se r e n c o n t r e n t d an s des co n tr a ts b ie n fa is a n ts. Il se ro it
to u jo u r s vrai d e d ir e q u e le transm issio nn aire n’a rien à p r o u v e r , e t q u e
c ’est à c e lu i q u i p r é t e n d l’e x c l u r e a p r o u v e r son e x c lu s io n .
N o u s c o n v e n o n s a v e c le sieu r m a r q u is d e M e s m e s q u e si la stip u la tio n
e'toit p e r s o n n e l l e , la transm ission n’au r o it pas lie u en f a v e u r d es h éritiers
d u s t i p u la n t ; mais la p er so n n a lité ne se p r é s u m e jam a is. P o u r la s u p p o s e r
i l f a u t ( d it M . P o t h i e r en son T r a i t é des o b l i g a t i o n s , t. 1. p . ^ 5 ) q Ue
c e la s o it e x p l i q u é c la ir e m e n t d a n s la c o n v e n t io n ; e t a in s i , ajoute-t-il
d e c e q u e la p e r s o n n e e n v e r s la q u e lle j e c o n t r a c t e q u e lq u ’ engagement
e s t n o m m é e p a r la c o n v e n t i o n , i l n e s 'e n s u it p a s q u e V intention d e s
p a r tie s a it é t é d e r e s tr e in d r e à s a p e r s o n n e le d r o it q u i e n r é s u lt e ; o n
d o i t p e n s e r a u c o n tr a ir e q u ’ e lle n’ e s t n o m m é e q u e p o u r m a r q u e r a v e c
q u i la c o n v e n t io n e s t f a i t e .
N o u s c o n v e n o n s e n c o r e a v e c F o n l a n e l l a , q u ’en fait d e s tip u la tio n s c o n
d itio n n e lles , lo r s q u e la c o n d itio n est p e r s o n n e lle , c’ e s t - à - d i r e d e n a t u r e
à n e p o u v o ir s’a c c o m p li r q u e d an s la p e r s o n n e d u s t i p u l a n t , Quandà
apponitur in personâ stipulatoris , la tra n sm issio n n e p e u t y a v o i r lieu
q u ’a u t a n t q u e le s t i p u la n t a u r o it lu i - m ê m e r e c u e illi l ’o b je t de la s t i p u l a - *
lion p a r 1 e x is te n c e de la co n d itio n p u r ifié e de son v i v a n t ; niais c ’est pa rc eq u e , c o m m e il 1 a jo u te fo rt b ie n , la c o n d itio n n’éta n t pas a r r iv é e p e n d a n t
la vie d u s t i p u l a n t , son décès la re n d i m p o s s i b l e , et q u ’ainsi il ne reste
p lu s d ’e s p é r a n c e à t r a n s m e ttr e . C e cas n’est d o n c pas 1111e e x c e p tio n à la
r è g le g é n é r a le d u p a r a g r a p h e
Ex
conditionali, q u i n ’en reço it a u c u n e ;
c’ est s e u l e m e n t u n e e s p è c e d an s la q u e lle la r è g le d u p a r a g r a p h e ne p e u t
p a s r e c e v o i r son a p p l ic a t i o n , p a r e e q u e le p a r a g r a p h e , pai lant d e la trans
m ission des s tip u la tio n s c o n d itio n n e lle s , s u p p o s e q u e la co n d itio n puisse
e n c o r e a r r i v e r , q u o i q u ’a p r è s le d écès d u s t i p u l a n t : or elle ne p e u t p lu s
a r r i v e r a p rè s so n d é c è s , si elle ne d e v o i t s’a c c o m p li r q u ’en sa p e r so n n e .
P o u r a p p l i q u e r a n o tre e s p è c e le p r i n c i p e de F o n l a n e l l a , il f a u d r o i t
p r o u v e r q u e la c o n d itio n sous la q u e lle le r e to u r a é lé stip u la ne p o u v o it
�s’ a c c o m p li r q u ’e a la p e r s o n n e d u d o n a t e u r e t d e son v i v a n t ; m ais il n’ en
est pas aiusi. L e fa it du d écès d e la d o n a t a ir e sans e n fa n t s , q u i fait la se u le
c o n d itio n d u r e t o u r , p o u v o it s’a c c o m p l i r in d i f f é r e m m e n t d u v i v a n t d u
d o n a t e u r ou a p rè s son d écès. C e l t e c o n d i t i o n é l o i t a b so lu m e n t extrin
sèque à sa p e r s o n n e , p o u r n o u s s e r v ir d e s e x p r e ss io n s d e c e t a u t e u r , et
d è s - lo r s il est co n s ta n t q u ’ elle n’a p a s p u r e n d r e la stip u la tio n p erso n
n elle.
I l est vra i q u e , s u i v a n t R i c a r d e t le j o u r n a li s te des A u d i e n c e s , les clauses
d e r e t o u r d o i v e n t s’i n t e r p r é t e r s t r i c t e m e n t ; m ais ils n ’o n t jam a is c o n c lu de
l à ^ u ’il fallût en e m p ê c h e r la transm ission. L a se u le c o n s é q u e n c e q u ’ils
a ie n t tirée de ce p r i n c i p e est q u ’il n e fa u t p a s é t e n d r e ces sortes d e c la u ses,
e t q u ’ainsi le r e t o u r é ta n t s tip u lé p o u r le cas d u d écès d u d o n a ta ire sans
e n f a n t s , il n e fa llo it pas l’é t e n d r e a u cas d u d écès d e ses en fa n ts sans
e n fa n ts.
O r , c e n’est pas d o n n e r d e l’ex ten s io n à u n e stip u la tio n q u e de la s u p
p o s e r t ra n s m is sib le a u x h éritiers d u stip u la n t. C e t t e tra u sm issibilité est
u n e su ite n é cessa ire de la saisine a tt a c h é e à t o u t e stipulation , et d e l ’in
ten tion A'avoir et a c q u é r i r q u i se r e n c o n t r e dans tous les s t i p u l a n t s , lors
m ê m e q u ’ils n ’o n t p a s p e n s é à le u r s h é r i t i e r s ; ca r n o u s n’avons v é r i t a b le
m e n t q u e c e q u e n o u s p o u v o n s l e u r tra n s m e t tr e .
A u s s i , q u o i q u e dans le d ro it ro m a in les s tip u la tio n s p r o p r e m e n t dites,
Solemnes verborum conceptiones , fussen t d e d r o it étro it et très-étroit,
q u o i q u ’on l e u r d o n n â t le n o m p r o p r e de c o n tr a ts striclijuris , p a r o p p o
sition a u x co n trats d e b o n n e f o i , q u o i q u 'e n c o n s é q u e n c e 011 les i n t e r p r é
tât to u jo u r s en cas d e d o u t e c o n t r e le s t i p u l a n t , quia debuit legan aper-
tiùs dteere rontraclui, la r è " l c é t o it c e p e n d a n t sans a u c u n e e x c e p tio n
d e les d é c la r e r t r a n s m i s i b l e s a u x h éritiers d u s t i p u l a n t , Gcncruhter san-
cimus otnneni slipulationem , etc.
A u c o n t r a i r e , les d ispositions c o n d i t i o n n e l l e s , q u i c e p e n d a n t sont su s
c e p t i b l e s d e l'in te r p r é ta tio n la p lu s la r ^ e , 11e p r o lito ie n t pas a u x héritiers
do l’ in stitu é o u lé g a ta ir e d é c é d é a v a n t l e u r o u v e r t u r e , à moins q u ’ ils n y
fussent c o n q u i s e x p r e s s é m e n t ; mais c’ est p a r e e q u e la transm ission d an s
ce cas est i m p o s s i b l e , c o m m e n o u s l’a v o n s o b s e r v é d éjà , à d é fa u t de sai-
�£%$
( 63 )
sine p r é e x ista n te . D è s - l o r s l’h éritier d e l’a p p e l é ne p o u v o i t ê t r e a d m is à le
r e m p la c e r q u e p a r v o ie d e v o c a t i o n , c o m m e a p p e l é l u i - m ê m c . O r la v o
catio n d o it ê tre e x p r e s s e et n e se s u p p lé e pas ( à la d iffé r e n c e de la tra n s
mission , q u i est t o u jo u r s d e d ro it en cas de saisine p r é e x i s t a n t e ) . A liu d
est Iransmissio , et aliud est voccitio.
En
d e u x m o t s , to u te stipu la tion c o n d itio n n e lle est n é c e ss a ir e m e n t
tra n sm issib le à l’h é r itie r d u s t i p u la n t , si la c o n d itio n p e u t e n c o r e r e c e v o i r
son a c c o m p li s s e m e n t , p a r e e q u ’au m o y e n de la saisin e a tt a c h é e a u x actes
e n t r e - v i f s , le d ro it q u i en résu lte a fait p a rtie des b ie n s d u t r a n s m e t t a n t ,
d è s le t e m p s m ê m e d e l’acte. Il n’ est pas n é cessa ire p o u r cela d e d o n n e r
à la cla u s e a u c u n e e x t e n s i o n , p a r e e q u e c ’est la loi s e u l e , la fo r c e d e la sai
s i n e , et non pas l ’in ten tio n p o sitive d e t r a n s m e t tr e , q u i o p è r e la t r a n s
m ission. Il est vra i q u e la saisine e l l e - m ê m e d é p e n d en q u e l q u e
sorte
de
l ’inten tio n d u s t i p u la n t ; m ais c’ est s e u le m e n t en c e sens q u ’ elle ne s’ a p
p l i q u e qu^aux d ro its q u e les p a rtie s o n t eus en v u e , et p o u r les cas q u ’ elles
o n t e x p r im é s . D u r e s t e , u n e fois q u e la c o n d itio n p r é v u e p a r les pa rties
est a r r i v é e , il d e v i e n t co n s ta n t q u e la saisine a eu lieu ab inilio,. et q u e la
transm issio n s’en est s u i v i e , sans q u e l e s s li p u l a n t s y a ie n t s e u le m e n t p en sé.
Il ne p o u r r o i t y a v o i r d e q u e s tio n q u e s u r le p o i n t d e sa v o ir sou s q u e l le
c o n d itio n les p a rtie s o n t e n t e n d u co n tra cter^ si c’ est s e u l e m e n t sous la
c o n d itio n e x p r i m é e d an s l’a c t e , o u si c ’ est e n c o r e sous la c o n d itio n d e la
s u r v i e d u s t i p u l a n t ; m ais p o u r s u p p l é e r c e l t e s e c o n d e c o n d i t i o n , lo r s
q u ’elle n ’est pas e x p r i m é e , il f a u d r o it a jo u te r à la le t tr e d e la c l a u s e : o r
c ’est ce q u e la p lu s g r a n d e r i g u e u r n e p e u t pas a u t o ris e r .
S E C O N D E
P A R T I E .
Décisions (les docteurs et des lois sur la transmission du
retour conventionnel en particulier.
A u ss i F o n t a n e lla d é c i d e - t - i l a f f i r m a t i v e m e n t (pie le r e t o u r c o n v e n t i o n -
n c pactis
n c l passe a u x h é r itie r s d e c e lu i q u i l’a s t i p u l é , q u o i q u e la co n d itio n d u
r e t o u r ne s 'a c c o m p lis se q u ’uprès son d écès. E t quann’is non esset dictum
nisi <juod rcverlcrentur bona douai a ad do/mtorem , nihilominùs
6lo9,a J*>
�( 64 )
reverli debuissent ad ejus hœredem , ilio ante donatarium defuncto ,
si pos tea adimpleretur conditio, quia conlractus conditionalis transmittitur ad hceredes; ex v u l g a r i p a r a g r a p h e ) , E x condilionali.
Il s’o b j e c t e la loi Q uod de pariter , ff. de rebus dubiis, q u i p a ro ît s u p
p o s e r le co n tr a ir e ( i ) ; niais il r é p o n d a v e c B a r t h o le et les g lo ssaleu rs , q u i
d e p u i s ont é té su ivis p a r M e P o t h i e r en ses P a n d e c t e s J u s l i n i e n n e s , q u e
c e l t e loi n e d é c i d e pas la q u e s tio n d e r e t o u r d o n t il 11e s’agissoit p a s , mais
s e u le m e n t u n e q u e s t i o n d e s u r v i e , s a v o i r , q u i des d e u x de la m è r e ou de
la fille , p é r ie s p a r m ê m e a c c i d e n t , é to it cen sée a v o ir s u r v é c u : Q uod de
pariter mortuis tradavimus in aliis agitatimi est ut ecce, etc. -, q u ’à la
v é r i t é , la d écisio n s u r la q u e s tio n d e s u r v i e p r é s u p p o s o le r e t o u r d o n t il
s’ agissoit non t r a u s m i s s i b le , m ais q u ’ a p p a r e m m e n t le s t i p u la n t a v o it e x
p r i m é , c o m m e se c o n d e c o n d itio n d u r e t o u r , l ’é v é n e m e n t d e sa s u r v i e , et
q u e l e ju risc o n su lte a u r a n é g lig é d e r a p p o r t e r c e l t e c i r c o n s t a n j p , p a r c e q u ’ elle n’éto it pas r e la tiv e à la q u e s tio n p r i n c i p a l e , ainsi q u e cela se vo it
f r é q u e m m e n t d an s les lois d u D ig e s t e et d u G o d e .
C e l t e i n t e r p r é ta t io n lu i p a ro ît d ’a u t a n t p lu s n é c e ss a ir e , q u e sans cela la
l o i Q uod de pariter c o n l r e d i r o i t m a n i fe s t e m e n t la d isp o sitio n a b s o lu e e t
i m p é r a t i v e d u p a r a g r a p h e E x condilionali , su r la transm issio n de t o u te
e s p è c e d e stip u la tio n c o n d itio n n e lle , et les d écisio ns d es lois Caius et ^ivia
( d o n t il sera p a rlé t o u t-à -l’ l i e u r e ) , su r la transm issio n d u r e t o u r en p a r
tic u lie r .
11 est
vrai q u e P a u l d e C a s t r e s , C o v a r r u v i a s et M e n o c h iu s o n t pris la loi
Q uod de pariter d an s u n sens to u t d iffé r e n t. Ils en o n t c e n c l u q o e la sti
p u la t io n d u r e t o u r d e la d o t p o u r le cas d u d é cè s d u m a r i o u d e la fe m m e
pendant le mariage r e n f e r m o it ta c it e m e n t la c o n d itio n d e la s u r v i e d u
s t i p u la n t : habet ista stipulatio tacitam conditionem , st stipulator su-
pen'ixcrit ; m ais ils sont o b lig és d e c o n v e n i r en m i m e t e m p s q u e c e t t e
(1) Quoil de parilcr mortui» tractavimus ¡11 aliis agitatimi e»t ut eccc: Si mater stipulata c»t dotem
k marito, morlui filiâ in matrimonio libi rrddi, et «imul cùm Filia periit, au ad liæredem malrit
aclio ex »tipulatu competerci ?et divu» Pin» rcicripjil non eue comtimiam stiptilalioncm , quia
maicr l'ilia 11011 »npervixil; itom quæritur »i extraneus qui dotem »(ipulatus c»t, »imnl cmn marito
decencril, vd cum eâ propter quam »tipulatu» e»»et, an ad hæredem actio competerei ?
�(
65
)
d é c isio n q u ’ ils s u p p o s e n t à la loi Q u od de pariler est sin g u lière et sans
e x e m p l e : Casus est singularis in istâ lege, d it P a u l d e C a s t r e s , nec re-
cordor alibi hoc vidisse: e n c o r e d u m o i n s , a j o u t e - t - i l , lo r s q u e le r e t o u r
est p o u r a v o i r lie u d an s le cas d u d é cè s d u m a r i pendant le mariage , i^
s e m b le q u e l a f a v e u r d e s m a r ia g e s fu tu rs p e u t fa ire p r é f é r e r la d o n a ta ire
s u r v i v a n t e a u x h é r itie r s d u d o n a t e u r , afin q u e l le a it u n e d o t p o u r se
r e m a r i e r , c e q u i es t d e l’in t é r ê t p u b l i c . I n hoc major ratio quant in
p r im o , scilicetfavore dotis ut e x eü millier possit iteruin nubere. M ais
l o r s q u e le r e t o u r est s tip u lé p o u r le cas d u d e c e s de la f e m m e pendant le
mariage, il n’y a pas m ê m e raison d e f a v e u r ( a m o in s q u e c e n e soit p o u r
fa v o r is e r le s e c o n d m a r i a g e d u m a ri s u r v i v a n t ) ;< sed in prim o casu
non sic.
S i n o n o b s t a n t ces raison s p é r e m p t o i r e s , P a u l d e C a s t r e s e t scs s e c t a
teu rs o n t p ersisté d an s l e u r i n t e r p r é t a t i o n , i l n e f a u t ’p a s c r o i r e q u ’ ils a ie n t
e n t e n d u p o u r cela se d é p a r t i r des d é cisio n s d u p a r a g r a p h e E x condition
nait e t d es lois Caius et A v ia . Ils c o n v i e n n e n t q u ’e n g é n é r a l le r e t o u r
c o n v e n t i o n n e l est t râ n s m is sib le c o m m e t o u te a u t r e s t i p u la t i o n c o n d i t i o n
n e lle ; s e u le m e n t ils e n e x c e p t e n t l e cas p a r t i c u l ie r q u ’ ils s u p p o s e n t d an s
la loi Q uod depariter, c’e s t - à - d i r e , c e l u i o ù le r e t o u r a été s t ip u lé p o u r
a v o i r l i e u , moriuâ fih â i n m a t r i m o n i o , o u mortuo i n
m a tr i-
m o n io marito; d e so rte q u e l o r s q u e le r e t o u r est s t i p u lé sous t o u te a u t r e
c o n d itio n q u e c e lle d u d écès d u m a r i o u d d la f e m m e ' pendant le m a
riage , /JV Mu4. t r i m o n i o ,* l o r s q u e , p a r e x e m p l e , c o m m e d a n s n o t r e
e s p è c e , il est r é s e r v é p o u r le cas d u d écès d e la f e m m e nort précisément
pendant le mariage, m ais en g é n é r a l p o u r le cas d e son d é c è s san s e n
fa n t s , p e n d a n t le m a r ia g e o u en v i d u i t é , a l o r s , s u i v a n t les m ê m e s d o c
t e u r s , les p r i n c i p e s r e p r e n n e n t l e u r e m p i r e , la t ra n s m is sio n d u r e t o u r
s’o p è r e de plein d r o i t , o n n e s o u s - e n te n d plits la c o n d i t i o n d e la su r v ie d u
d o n a t e u r , e t l’on s u it sntMrdiiTicullé les règlds gériérales stir la transm ission
des s tip u la tio n s c o n d i t i o n n e l le s , et n o t a m m e n t les d écisio ns des lois Caius
e t A via.
C e t t e 'd o c t r i n e se t r o u v e fo rt b ie n e x p l i q u é e pat- P i e r r e D à r b o s a , c h a n
ce lie r d e P o r t u g a l , l’un d es p r i n c i p a u x s e c ta te u rs d e P a u l d e C a str e s. C ’est
9
�sur la loi C a iu s, iF. soluto m atrim onio, versiculo quod ciim ila. A p res
avoir c o n clu de cette loi <Tt de la loi udvia, co d ice de ju r e dotiuin, q u e
le re to u r conventionnel est transm issible, il s’ob jecte la loi Q u o d d e p a -
riter, q u ’il entend dans le m êm e sens que P a u l de Castres, C ovarru vias
et M en o cliiu sj mais il y ré p o n d en disant q u e cette loi n ’a lieu que p our
le cas particulier dont-il y est p a rle, lorsq ue le reto u r doit a voir lieu m or-
tud IN M A T R I MO N I O Jiliâ. N equ e obstat dicta le x Q u o d de pariter,
quia ïoquitur quando quis stipulatur dotem sibi red d i, mortud i n
M A T R iM O N lo J ilid ; nam tune tacila subintelligitur conditio supervivenliœ , ut ibi tradunt doctores; sed si generaliter concepta sit stipu
lation procederet id q u o d sentit is textus cum sim ilibus.
A in si la loi Q u o d de p ariter, de q u e lq u e m an ière q u ’on veuille l ’en
t e n d r e , est sans application à notre e s p è c e ; car il ne s’agit pas dans la
cause de retour stipulé p o u r avoir l ie u , m ortud IN M A T R I m o n i o J iliâ.
D ’ailleurs le mari ne gagnant plus la dot par sa s u r v ie , com m e dans l’a n
cien d r o it, la faveur de son m ariage fu tu r ne milite plus contre les lie n tiers d u d o n a te u r , et l’intérêt p u b l ic n’est plus com prom is p ar la trans
mission. E n vain diroit-on q u e le mari su rviv an t profite encore a ujour
d’h u i , à cause de la c o m m u n a u té , de la moitié de la som m e constituée en
dot à sa fem m e. Il faudroit au moins q ue la som m e n’eût pas été stipulée
p r o p r e de co m m u n au té : or, dans l’espèce de la cause, les
3o,ooo
liv. don-
ue'es p a r le sieur L h éritier ont été stipulées propres.
Il n ’en est pas des lois Caius et A via, c o m m e de la loi Q uod de p ari-
ler. Elles sont toutes d e u x très précises p our la question qui nous divise.
Dans la prem ière ( i ) , il s’agissoit d ’une dot donnée au m ari p ar l’aïeul
(l) Caïii» Seïus avm maternui Seïæ ncpli quæ erat in palri» poleilate, certain pecuniæ (juantila1cm dolis iiominc Lucio Titio marito dédit, et instrumcnlo dotali ejiumodi paclmn et alipulationcm coinplexus csl, *i inter Titium Lucium marilum et Sciaiu divoçtuim«incculpa mulieris factum
e»»et, do» omni» uxori vel Cai'o Seïo avo tnalerno rcdderctur reslihienlurque. <^u*ro, ciim Seïu»
avm malermi» ttaliin vità diTunctu» »it, et Scïa
sine etilpu mà divertir t, \ivo pâtre ma
>» cujui potcslale est, a» et ciù aclio ex hoc pacto et slipulationc compelat, et utriim liturrdi av
inalttm ex itipulatu, au uepti? Ilc»]>ondi ni penona nmilim ncpli» videri iiiulililer ttipulatiourm
tu« loiicepuin , «piouiam avu» inalermis «i ttipul; tu» propomlur ; quod_ciim ila e»t, lnmdi $iipulatori», «jviaudocuiuquc direrterit muiicr, aclio competcrc videtur.
�(
67 )
m a t e r n e l de la f e m m e , et p a r c e l u i - c i s t i p u lé e re'versible a u p r o fit de la
f e m m e , o u de l u i d o n a t e u r , en cas d e d i v o r c e sans la fa u te d e la f e m m e .
L e d iv o r c e a r r i v a , m ais le d o n a t e u r q u i s’éto it r é s e r v é l e r e t o u r ( d u m oin s
en s e c o n d ) é t o it p r é d é c é d é , n o n o b s t a n t c e p r é d é c è s , le ju r is c o n s u lt e
( s u p p o s a n t n u lle la stip u la tio n faite en p r e m i e r a u p r o f it d e la fe m m e ,
quia nem o altcri stipularipotest) d é c id e q u e les h é r i t i e r s d u d o n a t e u r
d o i v e n t p r o f it e r d u r e t o u r en q u a lité d e t r a n s m is s io n n a ir e s , c o m m e a u r o i t p u faire le d o n a t e u r lu i- m ê m e . Quocl cùm ita est, hceredi stipulatoris, quandocum que divcrtcrit rnulicr, actio cornpelere videtur.
L a loi ¿Lvia n’ est pas m o in s ex p resse. L a q u e s tio n e to it d e s a v o ir si le
r e t o u r d e la d o t , n ’a y a n t été r é s e r v é q u e p a r u n s im p le p a c t e , et n o n p a r
u n e st ip u la t io n en f o r m e , il é to it t r a n s m is sib le a u x h é r itie r s d u d o n a t e u r .
L ’e m p e r e u r r é p o n d q u ’il fa u t d is t in g u e r si la d o t , d o n t le r e t o u r a été
r é s e r v é p a r le p a c t e est u n e d o t p r o f e c t i c e , ( c ’e s t - à - d i r e d o n n é e p a r c e l u i
q u i a la p u iss a n ce p a te rn e lle ) o u si elle est a d v e n t i c e . L o r s q u ’ elle est p r o
fe c t i c e , c o m m e en ce cas le d o n a t e u r est a ss u ré d u r e t o u r lé g a l q u i n ’es t
p a s t r a n s m is s ib le , on s u p p o s e q u ’il s’en est c o n t e n t é , e t q u e c’est p o u r
ce la q u ’il n ’a p a s eu r e c o u r s à u n e st ip u la t io n en f o r m e ; m ais l o r s q u e la
d o t est a d v e n t i c e , telle q u e ce lle d o n n é e p a r l e s é t r a n g e r s o u les a s c e n
d a n ts m a te r n e ls q u i n e p e u v e n t pas p r é t e n d r e l e r e t o u r l é g a l , a lo rs le r e
t o u r q u i en a été r é s e r v é p a r u n s im p le p a c t e est t r a n s m is s ib le a u x h é r i
tiers d u d o n a t e u r . A via tua corum q u c e p ro fd id tua in dotem d é d it ,
etsiverborum obligatio non interccssit , actioncm ex Jid e convcntionis
ad te , si hœres extitisti, transmittere p o tu it, nec cnim cadem causa
est patris et matris pacisccntium ; quippe matris p a ctu m actioncm
prœscriptis verbis constituit; p a tris , dolis actionem conventione sim p lici minim e creditur innovare.
Q u e l q u e cla ires q u e so ie n t ce s d e u x l o i s , il s’ est c e p e n d a n t t r o u v é
u n d o c t e u r ( i ) q u i , p o u r les c o n c i l i e r a v e c la d é c is io n a t t r ib u é e p a r P a u l
d e C a stres et a u tr e s à la loi Q uod de pariter , a essayé d e l e u r d o n n e r u n e
a u t r e i n t e r p r é t a t i o n . P a r e x e m p l e , il s u p p o s e q u e d a n s l ’e s p è c e d e l à loi
(ijlia r th c le m i S ocin, sur la loi Q u o d <U p a r ittr.
�( 68 )
A v i a , la d o n a t r i c e a v o i t s u r v é c u à l’o u v e r t u r e d u r e t o u r q u ’elle s’éto it
r é s e r v é , e t p a r r a p p o r t à la loi Caius , il p r é t e n d q u e c ’ est la st ip u la t io n
e x p r e s s e fa ite e n p r e m i e r a u p r o fit d e la f e m m e m a r ié e q u i a fait p r é s u
m e r d e la p a r t d u d o t a te u r ( p o u r l e r e t o u r s t ip u lé e n su ite à son p r o fit )
u n e d é ro g a tio n à la d isp o sitio n p r é t e n d u e d e la loi Q uod de paritçr ;
m a is c e t t e d o u b l e s o lu tio n se r é f u t e d ’e l le - m ê m e . E n e ffe t, p o u r ce q u i
e s t d e la p r e m i è r e , il est s e n s ib le q u e si la d o n a t r ic e a v o i t s u r v é c u , il n’y
a u r o it p a s e u d e d is tin ctio n à faire e n t r e le p a c t e d e l’a s c e n d a n t m a t e r n e l
e t celu i d u p è r e , p o u r d é c l a r e r le p r e m i e r t ra n s m is sib le , et n o n p a s l ’ a u t r e :
to u s les d e u x a u r o i e n t é t é é g a l e m e n t t r a n s m is s i b le s , p u i s q u e le r e t o u r
m ê m e lé g a l se t r a n s m e t , l o r s q u ’u n e fois il a é t é a c q u is a u p è r e p a r sa s u r
v i e . A l ’é g a r d d e la lo i Caius , il n ’est pas p o s s ib le de c o n c e v o i r q u e la
c ir c o n s t a n c e d e la s t i p u la t i o n e x p r e s s e d e r e t o u r faite e n p r e m i e r au p r o fit
d e la f e m m e a it p u in flu e r a u c u n e m e n t s u r la t r a n s m is sib ilité d e ce lle
fa ite e n s e c o n d p a r l e d o t a t e u r a u p r o f it d e lui-m êm e,* il est é v i d e n t q u e
la d é c is io n d e la loi a u r o i t é t é la m ê m e , q u a n d c e t t e c ir c o n s t a n c e n e s’y
sero it p a s t r o u v é e .
A u s s i cet a u t e u r finit-il p a r r e c o n n o î t r e q u e ces s o lu tio n s s o n t p lu s s u b
tiles q u e solides^ et q u ’il fa u d r o it b i e n se g a r d e r d e les s u i v r e d an s la p r a
t i q u e , d an s les j u g e m e n t s : cogita famen </uia pulc/ira est conclusio ,
NON T A M E N FORTE TN J U D I C A N D O ESSET A B A L I A O P IN IO N E
RECEDENDU3I.
E t e f f e c t i v e m e n t , com m e il le d it fo r t b i e n a u m ê m e e n d r o i t , si c e
n ’ étoit le d o u b l e sens d o n t la loi Q u od de panier p;iroît s u s c e p t i b l e , il
n ’y auro it p a s u n seul d o c t e u r d a n s t o u t le m o n d e e n li e r q u i n’o p iïia t p o u r
d u r e t o u r c o n v e n t i o n n e l d a n s tous les cas. N o n esset
la transm issio n
doctor in mutido qui contrarium non consuleret, si non vulisset istum
texlum .
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0 1
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1
E.
E xa m en de la Jurisprudence.
S u i v a n t P a p o n , a u l it r e d es D o n a t i o n s , a rt.
38 ,
il a é té j u g é </uc
la rétention Jaitc p a r un donateur, (juc si le donataire meurt sans en-
�{
69 )
Ja n ts , la chose donnée retournera au donateiu' sans faire mention
des s ie n s e s t réelle et non personnelle , pa r ainsi transmissible à l’hé
ritier du donateur} s’il se trouve m ort , lorsque la condition d’icelle
rétention advient.
a 0 M. M aynard,
1. 8. c. 33. r a p p o r t e
q u c ' p a r s e n t e n c e d o la s é n é c h a u s
sée d e L a u s e r r e , le r e t o u r s t i p u l é p a r u n o n c l e d o n a t e u r a u p a y s d e Q u e r c i ,
p o u r le cas d u d é c è s d e so n n e v e u d o n a ta ire sa n s e n f a n t s , l e d i t ca s é t a n t
a r r i v é , q u o i q u 'a p r è s le d é c è s d u d o n a t e u r , fu t j u g é t r a n s m is s ib le a u x
h é r itie r s d u d o n a t e u r , nonobstant le défaut de ce mot sien ou autre
équip oient.
3°
L e m ê m e M . M a y n a r d r a p p o r t e q u e s u r l 'a p p e l d e c e tte s e n t e n c e
p a r a r r ê t r e n d u à son r a p p o r t , a u m o is d e j a n v i e r i S 7 4 5 c o n f i r m a t i f d e
la s e n t e n c e , le r e t o u r f u t a d j u g é a u x h é r itie r s d u d o n a t e u r .
4°
F o n l a n e l l a n o u s a ss u r e q u e la m ê m e c h o se a été j u g é e c o n t r e l u i -
m e m e , le 10 a v r il 1 6 0 9 , p a r le c o n s isto ir e d e la p r i n c i p a u t é d e C a ta lo g n e .
Conatus f u i defendere quod non poterant ( d o t e m v i n d i c a r e h rere d es
d o n a to ris p r æ m o r t u i )fundans intentionem indispositione legis Q u o d de
p a r i t e r , et eorum quee super ea dicunt superiiis allegali de subinlelli-
gentid condilionis superviventiœ, sed non potui oblinere; irno décla
ration f u i t expresse sub die 10 A p rilis anno 1 6 0 9 , infavorem hœred u m ; e t cela p a r c e q u ’il n ’y a v o it p a s d e p r e u v e q u e le d o n a t e u r e û t
lim i t é le r e t o u r a u cas d e sa s u r v i e , sumendo expresse motivum quùd
non constaret canceptam fuisse stipulationein respectu’reversionis ad
donatorem, si isfiliœ supervixisset, ac proindè regulando emn casuni
e x dispositione paragraphi E x c o n d itio n a li sunpliciter conccdenii
transmissionem ad hcâredes} quando non adest expressa condilio
superviventiœ.
5» L a m ê m e ch o se a e n c o r e é t é d é c i d é e d an s l ’e s p è c e p r é s e n t e p a r M e*
13la r u , N o r m a n d , L e C l e r c d e V e a u d o n n o e t G u é a l i x d e l l e v e r s c a u x , c o m
m issaires n o m m é s p a r le co n seil p o u r j u g e r les co n tes ta tio n s rela tiv es à la
s u cc essio n d u sieu r L h é r i t i c r d o n a t e u r . E n c û b l, p a r l e u r a r r ê t de p a r t a g e ,
ils o n t r é s e r v é a u x p a r t i e s , p a r u n a c t e s é p a r é , l’e s p é r a n c e d u r e t o u r sti
p u l é p a r le s ie u r L h é r i t i c r en ces t e r m e s : les parties ont encore Vespé
rance , le cas arrivant, de la réversion de la somme de 3 oqoo livres
�(■ 7 °
)
donnée en dot p a r le sieur Lhéritier père à m adam e la m arquise de
R a v ig n a n , sa ( b e l le ) nièce.
6°
E nfin la sentence don t est a p p e l , re n d u e sur les plaidoiries solen
nelles des parties p e n d a n t c in q a u d ie n c e s , a juge' en faveur des héritiers
d u do n ate u r, sur le fon dem en t q ue la condition ex p rim é e p a r l e do n a
te u r p o u r donner lieu au .retour s’étoit vérifiée : attendu le décès de la
dem oiselle R a c in e , veuve D am p us, sans enfants.
L e marquis de M esmes auroit bien v o u lu p o u v o ir opposer à cette suite
de décisions q u e lq u es décisions contraires capables de les balancer. Mais
q uelqu es recherches q u ’il ait p u fa ir e , il ne lui a pas été possible d’en
p ro d u ire u ne s e u le ; en vain e x c ip e - t-il de l’arrêt rap p orté p a r M o r n a c ,
a u titre de dote profectitia. Il y étoit question d u retour d ’une dot cons
tituée par un p ère naturel à sa fdle b â t a r d e , et p ar conséq uen t profectice,
c om m e le dit M o r n a c lu i-m ê m e et com m e le p ro u v e fort bien H c n r y s ,
].
6 . c. 5 . part. 3o,
où il établit q u e le retour légal a lieu au profit d u père
naturel p o u r la dot p a r lui co nstituée, co m m e e'tant censée profectice ,
à cause de l’obligation où il est de d o t e r ; or il ne s’agit p o in t ici d ’une
dot profectice.
D ’ailleurs, si l’on exam ine bien l’espèce de l’arrêt d e M o r n a c , on verra
q u ’il n’est pas même précis p o u r le cas de la dot profectice. E n effet, M o r
n a c dit lui-m êm e q u e le retour avoit été stipulé seulem ent p o u r le cas du
de'cès de la fille sans enfants. O r , la fille n’e'toit pas décédée sans enfants,
p u is q u e ses enfants lui avoient su rvé c u . D ecesserat presbyter p o s -
TEAQUE S PU R I A AC LIBERT. Il est vrai q ue les enfants éloient d é
cédés sans enfants, et c ’est a p p a re m m en t sous ce p n itex te que les héri
tiers du prêtre dotnteur reven d iqu oien t la d o t , en éten da n t la condition
du décès sans e n fa n ts , au cas du d é c è s , et des enfants sans enfants.
M ais c o m m e l’ont fort bien ob servé R ic a r d et le Journaliste des A ud ien ce s,
les stipulations en général et celles de retou r en p articulier étant de droit
¿ tr o it, ne doiv e n t pas être étendues d’ un cas à un autre. D ès-lors , on ne
pouvoit pas a d ju g e r le retour a u x héritiers du prêtre dotatcur. L u i-m ê m e
auroit Cté exclus à défaut d ’é vén em en t de la condition p r é v u e ( i ) .
(0 AgiVtiu
Ov l’rcibylcro qui cùm dmurct filia- »purin: 3oo aur«o> in<lol«Ri, condilionn«
�( V
)
S i des j u g e m e n t s n o u s passon s a u su ffra g e d e s a u te u r s fr a n ç a is , n o u s
v e r r o n s q u e la q u e s tio n y est to u jo u r s d é c id é e u n i f o r m é m e n t en f a v e u r
des t r a n s m is s io n n a ir e s , n o t a m m e n t l o r s q u e la d o n a tio n est faite p a r a u
tres q u e les a s c e n d a n ts ( c o m m e p a r e x e m p l e p a r u n b e l - o n c l e ) , n o t a m
m e n t lo r s q u e le d o n a t e u r , éta n t p lu s â g é q u e le d o n a t a i r e , a c e p e n d a n t
p r é v u n o n s e u l e m e n t l e d écès d u d o n a ta ire sans e n f a n t s , m a is e n c o r e le
d écès d e scs en fants sans en fants ou a v a n t l e u r m a jo rité .
L a réversion conventionnelle , d it L e B r u n , t r a ité d e s S u c c e s s i o n s ,
1.
i . c . 5 . sect. 2 } passe a nos héritiers si nous ne l’avons limitée, ce qui
se f a it quelquefois, en ne la stipulant qu'au cas du prédécès du do
nataire ; mais quand nous l’avons stipulée simplement au cas du dé
cès du donataire sans enfants , alors nous avons parlé pour nos hé
ritiers ou ayants-cause.
Quant à la réversion conventionnelle, d i t L a c o m b e , au m o l R é v e r
sion , elle ne concerne pas moins les héritiers du donateur qui l’a sti
p u lé e, que sa personne même. N a m pleru m qu e ta/n hœredibus no'stris quant nobisine/ipsis cavemus, i. g . d e P r o b . s lin s is i un ascendant
fa it donation h son fils ou à sa fille , à condition de réversion, si le
donateur meurt sans enfants, les choses données passent a u x héri
tiers du donateur prédécédé, si elle n’a été limitée.
L e retour conventionnel, d it f a u t e u r d e la n o u v e l l e c o lle c tio n de J u
r i s p r u d e n c e , au m o t R e t o u r , n’a d ’autres règles que celles de la con
vention ................ et comme les conventions passent in liæ r e d e s et a d
h æ r c d e s , il s’ensuit que si le donateur prédecède , la réversion doit
appartenir à ses héritiers qui le représentent, lorsque la condition
sous laquelle elle est stipulée est arrivée, à moins que la réversion
n’eût été stipulée personnelle, et qu'elle n’ait été limitée p a r des clauses
qui l'empêchent d’être transmise a u x héritiers.
Ï J o m a l , crt son traité d es L o i s C iv ile s s u r le R e t o u r , a p rè s a v o ir d é c i d é ,
illam labulis nuptiaUbus adjcccrat(ii siile liberis filia decesaerit, do» ad *e reverlerelur) nullà faci«
mcntioue Increduli). Susceplì crani liberi ex co matrimonio quibii* mperatilibu» decesserat PresbyIcr, postfà^uc spuria ac liberi re dim i htcrcdn rrc»bylm dytem illam utjprofecliliamex clan*
«ulA revcrtioni»....à politiouc iiU «liminoli iuut.
�(
72 )
c o m m e l o u s les a u t e u r s c i- d e s s u s c i t e s , q u ’e n g én ér a l le r e t o u r stip u lé
p a r un a s c e n d a n t o u t o u t a u t r e d o n a t e u r d o i t se r é g le r c o m m e les a u tr e s
c o n v e n t i o n s , e t n o n à l ’in s ta r d u r e t o u r l é g a l , a jo u te q u e cela est encore
p lu s ju s te p o u r les donateurs autres que les ascendants. L a raison
q u ’il en d o n n e est q u e les d o n a t e u r s é t r a n g e r s ( t e l q u ’ éto it le sieu r L h é r it ie r p a r r a p p o r t à la d e m o is e lle R a c i n e , sa b e l l e - n i e c e ) , n’a y a n t p a s la
m ê m e a ffectio n p o u r la fam ille d e le u r s d o n a t a i r e s , on p r é s u m e encor.e
p l u s a is é m e n t d ’e u x q u e d es a s c e n d a n t s , q u ’ils o n t v o u l u p r e f é r e r le u rs
p r o p r e s h é r itie r s à la faniille de c e lu i c o n t r e l e q u e l ils o n t s t ip u lé le r e
to u r .
E n f i n , s u i v a n t l l e n r y s , q u o i q u ’on g é n é r a l le d o n a t e u r , m ê m e a s c e n d a n t,
q u i se r é s e r v e le r e t o u r soit ce n sé le faire tan t p o u r lu i q u e p o u r ses
h é r i t i e r s , c e l t e p r é s o m p t io n lég a le d e v i e n t b i e n p lu s fo rte e n c o r e , lo r s
q u e , c o m m e d an s n o tre e s p è c e , il a p r é v u n o n s e u l e m e n t le d é c è s d u d o
n a ta ir e sans e n f a n t s , m ais e n c o r e le d é c è s d e ses e n fa n ts a v a n t l e u r m a
jo r ité . E n effet , d it - il , quoique le père survivant , l’ordre de la nature
en soit troublé, c'est pourtant chose assez com m une , mais qu'un
père p ense survivre à sa fille et a u x enfants qu’elle p eu t laisser, qu 'il
étende si loin sa p e n sé e , c’est ce qu’ on ne peut pas présumer. D o n c ,
ajoute-t-il, quand le père a stip u lé que la dot serait réversible, s i sa f ille
décédoit sans enfants ou scs enfants sans enfants, il ne s ’est-pas
persuadé que tout cela prtt arriver lu i vivant, et p a r conséquent il a
bien entendu que cette stipulation f û t aussi bien profitable h ses héri
tiers qu'à lui-m êm e, autrem ent il n ’auroit pas eu une visée si longue,
et s’il n’avoit cru que de stipuler le t'Ctour p o u r lu i, il en auroit res
treint la condition et les termes. I l se scroit'contenté de parler du p ré
décès de sa fille sans enfants, et il n ’auroit p as ajouté.et de ses enfants
sans enfants.
L e m a r q u i s d e M e sm e s o p p o s e à ces a u t o r i t é s le s e n tim e n t d e B o u c h e u il, d e l î r c t o n n i e r s u r l l e n r y s , et d e M r . L a R o u v i è r e ; m ais C o u c h e u il
ne se d é c i d e q u e d a p r è s l ’a r r ê t d e M o r n a c , q u i , c o m m e n o u s l ’a v o n s v u ,
i»’a pa*. dq r a p p o r t à l ’c s p è c c . B r c t o n n i c r so d é c i d e sans d o n n e r aucun*raison de .son a v i s ; am.si o n 11« p e u t pns d e v i n e r q u e l a été son m o t i f :
�( 73 )
d ’a ille u r s , l’e s p è c e s u r l a q u e l l e il d o n n e s o n a v i s , q u i est ce lle d e H e n r y s ,
est b i e n d i f fé r e n t e d e la n ô t r e , o ù l e d o n a t e u r est u n b e l - o n c l e , et p a r
c o n s é q u e n t u n é t r a n g e r ; a u lie u q u e d a n s l ’e s p è c e d e I i e n r y s , c ’ est u n
p è r e a ss u r é d u r e t o u r lé g a l d e la d o t p r o f e c t i c e p a r l u i d o n n é e . P a r r a p
p o r t à M e. L a R o u v i è r e , il n e d e v r o i t p l u s ê t r e n o m m é d a n s c e t t e c a u s e ,
d ’a p r è s les p r e u v e s q u i o n t é té a d m in is tr é e s a u c h â t e l e t , q u e c e t a u t e u r
n ’a p a s c o n n u les p r e m i e r s p r i n c i p e s d e la m a l i e r e , et q u ’ il n ’a p a s e n
t e n d u les d o c t e u r s p a r l u i cités.
C O N C L U S I O N .
N o u s n e c r o y o n s p a s q u ’il reste la m o i n d r e d if fic u lt é d a n s c e t t e c a u s e ;
c a r il 11c f a u t p a s r e g a r d e r c o m m e telle l’o p i n i o n iso lée d e d e u x a u t e u r s
i n d u it s en e r r e u r p a r des a u t o r i t é s m a l e n t e n d u e s . C ’est t o u j o u r s a u x
p r i n c i p e s q u ’ il en f a u t r e v e n i r . O r , les p r i n c i p e s é lé m e n t a i r e s d u d r o i t ,
' c e u x d o n t n o u s a v o n s é t é r e b a tt u s d a n s les é c o l e s , e t q u i r e te n tis s e n t
j o u r n e l l e m e n t d an s les t r i b u n a u x , s o n t q u e les st ip u la t io n s c o n d i t i o n
n e lle s se t r a n s m e t t e n t à l’h é r i t i e r d u s t i p u l a n t , n o n o b s t a n t le p r é d é c è s d e
c e l u i - c i , q u e les a c te s e n t r e - v i f s , m ê m e c o n d i t i o n n e l s , o p è r e n t la sa isin e
in inslanli, q u e les c o n d itio n s y o n t u n effet r é t r o a c t i f , q u e , s u i v a n t la
r è g l e le mort saisit "le v i f \ les h é r itie r s s u c c è d e n t à t o u s les d ro its d o n t
l e u r a u t e u r est d é c é d é s a i s i , q u ’ ils n’ e n p o u r r o i e n t ê t r e p r i v é s q u e p a r
u n e v o l o n t é e x p r e s s e d u s t i p u la n t q u i a u r o i t f o r m e l l e m e n t r e s t r e i n t la
s t ip u la t io n à sa p e r s o n n e , q u e c ’est à c e lu i q u i les p r é t e n d e x c l u s à p r o u
v e r l e u r e x c l u s i o n , q u e les c o n v e n t i o n s s o n t t o u j o u r s ce n sé e s r é e l l e s , q u e
la p e r s o n n a lit é n e s y s u p p o s e ja m a is , q u ’ elle d o i t ê t r e p r o u v é e p a r des
e x p r e s s io n s q u i la n é c e s s i t e n t , etc.
L e m a r q u i s d e M e s ni es 11e d o it p a s se fla tter q u e la c o u r d é r o g e en sa
f a v e u r à ces p r i n c i p e s c o n s a c r é s p a r l’a n t i q u i t é la p lu s r e s p e c t a b l e , a d o p
tes p a r to u tes les n a tio n s p o lic é e s e t q u i fo n t u n e p a r t i e essen tielle d e la
législa tio n u n i v e r s e l le e t d u d ro it d e s g e n s .
K n vain v o u d r o i t - i l on é l u d e r l’a p p l ic a t i o n p a r des d is tin c tio n s i m a g i
n a i r e s ; I e s p r it a c t u e l de n o t r e j u r i s p r u d e n c e c s t . d e p r é v e n i r , a u t a n t q u ’ il
est possib le., t o u t e i n c e r t i t u d e d a n s les j u g e m e n t s , en
n’admettant
10
({ue
�C
74
)
d es p r i n c i p e s c l a i r s , et en r e j c l a n t t o u t e s les d is tin c tio n s a r b it r a i r e s q u e
la s u b t i l it é d e s - d o ç t e u r & a v o i l m u lt i p li é e s à l ’infin i. C e sero it a lle r d ir e c t e
m e n t c o n t r e c e t e s p r i t , e t n o u s r e je t e r d a n s le c h a o s a f f r e u x d ’i n c e r t i t u d e ,
d o n t la b o n t é du p r i n c e e t la sa g esse d e la c o u r t r a v a i l le n t to u s les j o u r s
à n o u s r e t i r e r , q u e d ’a d m e t t r e les d is tin c tio n s i m a g in é e s p a r le m a r q u i s
d e M e s m e s p o u r le b e s o in d e sa ca u se .
L e s p r i n c i p e s n e d o i v e n t ê t r e lim it é s q u e p a r d e s e x c e p t i o n s aussi c la i
r e m e n t éta b lie s et aussi n o to ir e s q u e le p r i n c i p e m ê m e . T e l l e e s t , p a r
e x e m p l e , l ’e x c e p t i o n q u ’ u n e j u r i s p r u d e n c e c o n s t a n t e , u n i f o r m e et a y a n t
f o r c e d e loi a é t a b li e p o u r le cas p r é c i s d e la st ip u la t io n d e r e p r is e d e l ’a p
p o r t en c o m m u n a u t é p a r l a f e m m e r e n o n ç a r tte . L a p e r s o n n a li t é d e c e tte
s t ip u la t io n ( i i n i q u e d a n s son e s p è c e , c o m m e l’o b s e r v e M®. P o t h i e r , en
son tra,i.lé<lc& O b l i g a t i o n s , à l ’e n d r o i t d é jà c i t é ) est a ussi n o to ir e q u e la
r é a l i t é de* t o u t e s ,le s a u t r e s ; e t en c o n s é q u e n c e , il n’y a ja m a is d e diffi
c u l t é l p r s q u c le cas d e c e t t e e x c e p t i o n sc p r é s e n t e . Il n ’en est p a s d e
m ê m e d e c e l l e q u ’i m a g i n e a u j o u r d ’h u i le m a r q u i s d e M e s m e s . E l l e n ’est
a u t o r is é e p a r a u c u n e l o i , a u c u n u s a g e , . E n v a in v o u d r o i l - o n l’ass im iler à
la p r e m i è r e . L a d i f l e r p n c e e s t d es p lu s fr a p p a n t e s .
E n e f f e t , la st ip u la t io n d e r e p r is e d e l’a p p o r i en c o m m u n a u t é est c o n
tra ire à to u te s les r è g le s d e l ’é g a l i l é , q u i fait l’a nie des so ciétés . I'-lle c h a n g e
la s o c ié t é d es c o n jo in ts en u n e v é r i t a b l e s o c ié t é léo/imc, o u la f e m m e
est a ssu rée d e s p ro fits sans c o u r i r a u c u n s r is q u e s ; en c o n s é q u e n c e u n e
s t ip u la t io n p a r e il l e se ro it p r o s c r i t e d a n s u n e so ciété o r d i n a i r e , c o m m e
c o n t r a i r e a u d r o i t n a t u r e l . S i e lle es t t o lé r é e d a n s la s o c ié té c o n j u g a l e ,
c ’es t u n i q u e m e n t à c a u s e d e la g r a n d e f a v e u r d e s c o n t r a i s île m a r i a g e ,
q u i a u t o r is e t o u te e s p è c e d e c l a u s e , l o r s q u ’ elle ne va pas j u s q u ’à o ffe n s e r
le s b o n n e s m œ u r s ; a u c o n t r a i r e la s t i p u la t i o n d e r e t o u r n e r e n f e r m e rjeu
q u e d e 1res c o n f o r m e a u x p r e m i e r s p r i n c i p e s d u d r o i t d e s g e n s , é t a n t
p e r m is à t o u t d o n a t e u r d ’im p o s e r à sa l ib é r a li té telle c h a r g e qu 'il j u g e à
p r o p o s . D è s - lo r s 011 n e d o it p a s ê t r e s u r p r is q u e la j y r i s p r u d e n c e d es
arrêta a it d é c l a r é la p r e m i è r e s t i p u la t i o n p e r s o n n e l le , et non pas l’an Ir e .
Q u od contra ju r is ralioncM introductum est , non est produccudm n
adcorucifucntias.
�(
75 )
I n d é p e n d a m m e n t d e c e tte c o n s i d é r a t i o n p a r t i c u l i è r e a u x c la u s e s d e
r e p r i s e , q u i p e u t - ê t r e a p a r u su ffisante p o u r les fa ire d é c la r e r p e r s o n
n elles, il y en a u n e g é n é r a l e tirée d es p r i n c i p e s d u d r o i t , q u i a p u e n c o r e
c o n d u i r e à la m ê m e d é c isio n . C ’es t q u e la c o n d i t i o n so u s l a q u e l l e est s t i
p u l é e la r e p r is e d e l’a p p o r t d e la f e m m e en c o m m u n a u t é , c ’ e s t- à -d ire , sa
r e n o n c ia t io n à la c o m m u n a u t é , est p u r e m e n t potestative é t a n t a u p o u
v o i r d e la f e m m e s t i p u la n t e d e r e n o n c e r o u d e n e p a s r e n o n c e r . O r ,
p r e s q u e to u s les a n c ie n s d o c t e u r s o n t s o u t e n u q u e ces so r te s d e c o n d i
tio n s ( s i petìero , si renuntiavero} e t c . ) é t o ie n t p e r s o n n e l le s et n e p o u
v a i e n t s’a c c o m p l i r q u e d a n s la p e r s o n n e d u s t i p u l a n t , quia videntur
apponi in persond stipulatoris ; et e f f e c t i v e m e n t ce s c o n d i t i o n s p a r o i s s e n t se r é f é r e r d i r e c t e m e n t à la p e r s o n n e d u s t i p u la n t p o u r l e u r e x é c u
t io n . Il n’en est p a s d e m ê m e d u ca s d e d écès d u d o n a t a i r e san s e n f a n t s ,
q u i fait la c o n d i t i o n o r d i n a i r e d u r e t o u r . C e t t e c o n d i t i o n est casuelle, et
n o n p o te s t a t iv e . E l l e n’ est a u p o u v o i r d ’a u c u n e d e s p a r t i e s c o n t r a c t a n t e s .
E l l e es t a b s o l u m e n t extrinsèque à la p e r s o n n e d u d o n a t e u r s t i p u l a n t ;
non apponitur in persond stipulatoris, p o u r n o u s s e r v i r d e s e x p r e s
sio ns d e F o n t a n e l l a . Il n ’y a d o n c a u c u n p r é t e x t e d e la fa ire d é c l a r e r p e r
s o n n e l le , et d ès-lors c’ e s l i n c o n t e s t a b l e m e n t le ca s d ’y a p p l i q u e r les p r i n
c i p e s g é n é r a u x q u i o n t é t é é t a b lis p o u r la t ra n s m is sio n d e s s t ip u la t io n s
c o n d i t i o n n e l l e s , e t n o t a m m e n t la d is p o sitio n d u p a r a g r a p h e E x condi
tionali et d es lois Caius e t A via.
M.
B A R E N T I N , avocat-général.
M e.
L E S P A R A T ,
avocat.
H U R E A U l’a în é , p ro cu re u r.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jean-François. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bellart
Bonnet
Delvincourt
Lacalprade
Barentin
Lesparat
Hureau l'aîné
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
nullité de testaments
fideicommis
jurisprudence
dot
stipulation
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour les sieurs Delsol, frères ; contre la dame veuve Vigier-d'Orcet, leur sœur consanguine [suivi de] Arrêt du Tribunal civil de première instance d'Aurillac [suivi de] Précis pour le sieur René-Louis Lhéritier et consors, intimés ; contre messire Joseph, marquis de Mesmes, appelant.
Table Godemel : Retour : 3. peut-on stipuler, dans un contrat de mariage, un droit de retour tant pour une donation que pour une institution ? un droit de retour est-il transmissible aux héritiers du donateur, sans stipulation ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Mame frères (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1760-1809
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
75 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1910
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0531
BCU_Factums_G1911
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Marmanhac (15118)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
contrats de mariage
dot
droit de retour
fideicommis
jurisprudence
nullité de testaments
stipulation
substitution
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53147/BCU_Factums_G1119.pdf
0dc596c841fead0616fbffac542f970d
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Text
47/
CONSULTATIONS
t
POUR les frères et sœurs JOUVE-LADEVEZE, défendeurs
en cassation ;
CONTRE
Charles - Louis JO U V E - L A D E V E Z E ,
leur oncle, demandeur.
PREMIÈRE-
CONSULTATION,
Délibérée , le 3 Messidor an 6 , par le Consul
C A M B A CE RÈS.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , après avoir lu le mémoire à consulter,
( pour les frères et sœurs Jouve-Ladeveze ) , est d ’avis que la dona
tion de la moitié d ’un ja r d in , faite par Charles L a d e v e z e , dans le
contrat de mariage du 3
2
février 7
13
, à Jean-G abriel futur é po ux;
ou à un ou plusieurs enfans qu i seront procréés du présent mariage
toutes f o i s au ch o ix du donateur, contient un fidéicommis, en faveur
des enfans du premier lit de J e a n -G a b rie l Lad eveze, e t n e confère
aucun droit aux enfans nés de son second mariage.
Dans les causes ou il a fallu déterminer l'effet d'une disposition
3
pareille à celle qui se rencontre au contrat du 2 février 1737 , les
jurisconsultes ont pensé , et les juges ont décidé , que le donateur
avoit fixé sa volonté et sa libéralité , tant sur le futur époux que sur
ses enfans, à moins que le contraire ne fût établi par une disposition
subséquente : comme aussi , q u ’il étoit à présumer que le père étoit
seulement chargé de rendre les biens donnés à ses enfans, attendu
A
�¡o k
( a- )
q u e , s’il en ¿toit autrem ent, il faudroit supposer que l'auteur de la
disposition a voulu mettre, sur la môme ligne, des individus qui n’existoient pas encore, et celui pour lequel il avoit une véritable affection;
conjecture singulière , qui seroit tout à-la-fois contre la nature des
choses et contre l’ordre des affections.
D e - l à , cette maxime , que les enfans à naître sont appelas à la dona
tion ordine successwo après leur p è r e , et l’usage autorisé de convertir
la particule disjonctive ou en la conjonction e t , sans quoi la disposi
tion seroit inexécutable.
Aujourd'hui que toute jurisprudence interprétative est a b o lie, cette
manière de raisonner présente quelque chose d ’étrange ; mais les tri
bunaux ou les arbitres auxquels on la so u m et, ne doivent pas perdre
de vue, que les décisions qu'ils ont à prononcer en pareille occurrence ,
ne peuvent être rendues que par argument et par l’application que
l'on fait des loix romaines, du sentiment des docteurs , et des préjugés
de la jurisprudence.
-
O n a réuni, dans le mémoire, tout ce qu’il peut y avoir d'autorités
en faveur de l’avis que nous embrassons, ensorte q u ’il est inutile de
les rappeler ; ajoutons que rien n’établit que la donation n’ait pas été
faite dans l’esprit que l’on présume, et q u ’il est au contraire évident
que Charles Ladcveze a d'abord fixé sa volonté sur J e a n -G a b r ie l, et
ensuite sur 1rs enfans qui naitroient du mariage , à l’occasion duquel
il s’exproprioit de la moitié de son jardin.
Premièrement il a établi une ligne de démarcation , et mis une dif
férence sensible entre la donation des droits et prétentions qu’il p o u voit avoir sur les biens de V ita l-L ad ev e ze , père du futur épo ux, et la
donation de la moitié du jardin.
Dans la première, il n’est question que de Jean-Gabriel L a d c v c z c ;
c ’est lui seul que Charles a en en vue, et qu'il a voulu gratifier.
Dans la seconde, les enfans du donataire sont appelés, ce qui p ré
sente l’idée d'un fidéicommis.
E n second lieu, par la réserve du droit d'élire un des enfans , le
dtwatcur les a nécessairement coin pris dans la disposition, sans quoi
ils nauroicnl pas clé éligibles.
�4 ïï.
c 3 )
Enfin cette reserve se rattache nécessairement au fidéicommis ; car
a u t r e m e n t c’eut été opposer une substitution e x intervallo à la chose
d o n n é e , ce qui ne se pouvoit pas.
D ’après ce qui vient d ’élre d it, le conseil ne doute point que les
consultans qui représentent leur père, fils unique du premier mariage
de Jean-Gabriel L a d e v e z e , ne soient fondés dans leur demande en
délaissement de la moitié du jardin donnée par Charles Ladeveze à
leur ayeul ouàsescnfans. Il y a lieu de croire que les arbitres baseront
leur décision sur la loi
4 , au code de verbomm et rerum significatione,
et qu’ils n’oublieront pas que les contrats étant de droit é tr o it, il n’est
pas permis de penser que les enfans du premier lit de Jean-G abriel
L a d e v e z e , puissent être privés du droit qui leur a été acquis par l’acte
du a
3 février
1737.
D élibéré à P a r is, ce
3 messidor an
V I de la république.
Signé C A M B A C É R É S .
�\
(4)
DEUXIÈME
CONSULTATION,
Délibérée, le 3o frimaire an 10 , par le Cit. M ERLIJS,
alors Jurisconsulte, et depuis Commissaire du Gouver
nement près le Tribunal de Cassation.
X-iE SOUSSIGNÉ, qui a pris lecture; i ° . du contrat de mariage passé
au P u y , le z
3 février
entre Jean-Gabriel Jouve-Ladeveze et
Marie-Gabrielle Laurançon; 20. des jugemens du tribunal civil du
département d e l à H a u te -L o ire , du
pluviôse an 7, qui condamne
Charles-Louis Jouve-Ladeveze, à se désister, en faveur de Pierre-François Jouve-Ladeveze, de la moitié de jardin dont il est question dans
le contrat de mariage ci-dessus;
3 *. des mémoires imprimés
et produits
par les deux parties sur l’appel de ce jugement; 4°» du jugement du
tribunal d'appel de R io m , du 28 prairial an 9, qui confirme celui du
tribunal d e la H a u te -L o ire ; consulté sur la question de savoir si
Charles-Louis Jouve-Ladeveze, q u ’on assure s’étre pourvu en cassation
de ce dernier jugement, peut espérer de réussir dans sa tentative;
Estime que les enfans et héritiers de Pierre-François Jouve-Ladeveze
11e doivent nullement craindre le résultat des démarches de leur
adversaire auprès du tribunal suprême.
L e tribunal d ’appel de Riom a décidé, en confirmant le prononcé
des premiers juges, que la donation de la moitié de jardin dont il
s’a g it , navoit été faite à Jean-Gabriel Jouve-L adeveze, qu'à la charge
d'un fidéicommis en faveur des enfans à naître de son mariage avec
Marie-Gabiielle Laurançon.
A -t-il, par cette décision, porté atteinte à quelque loi ? Telle est
la seule question qui sera et pourra ôtre soumise au tribunal de cassa
tion, par le recours de Charles-Louis Jouve-Ladeveze.
Pour résoudre cette question, il faut d'abord se bien fixer sur la
date du contrat de mariage qui est jugé contenir fidéicommis.
�( 5 ).
3
Ce contrat est du a février 1787, c ’est-à-dire, d'une époque anté
rieure , de plus de dix ans, à l’ordonnance des substitutions.
Ce n’est donc ni l’esprit, ni la lettre de cette ordonnance, que l’on
doit prendre pour guides dans les recherches du sens dans lequel
doivent être entendus les terme? employés par l’auteur de la donation.
A in si, envain devant le tribunal de cassation argumenteroit-on
contre les enfans Ladeveze , comme on l’a fait devant le tribunal d ’ap
pel de R io m , de l’intention manifestée par le préambule de cette l o i ,
d ’exiger qu ’à l'avenir les donateurs et testateurs, lorsqu’ils feront des
fidéicom m is, expliquent leur volonté d ’une manière plus expresse
qu ’ils ne le faisoient précédemment.
Les enfans Ladeveze répondroient avec avantage,que, de-là même,
il suit que le législateur, en proscrivant, pour l'avenir, les conjectures
dans les fidéicom m is, les y a laissé subsister avec tous leurs effets
pour le passé.
Aussi doit-on appliquer à la donation consignée dans le contrat de
mariage du
février 1787, toutes les maximes du droit romain con
cernant les conjectures en matière de fidéicommis.
O r v o ici, enfr’autres, ce qu'on lit à cet égard dans la loi 6.+ , au
digeste de legatis 20. Com m e il ne s’a g i t , dit-elle, en fait de fidéi
commis, que de chercher une volonté précaire, on doit y admettre
les conjectures. In causa fid cicom m issi, utcunque precaria voluntas
(juœtcrctur, conjectura poluit admitti.
N
L a loi 57 , §. i cr., au digeste ad scnalus consultum trebellianum\
établit le même principe, et donne elle-même l’exemple de son appli
cation.
Il ctoit question de savoir si la p etite-fillcd’un testateur ¿toit
appelée au fidéicommis qu’il avoit créé. Les termes du testament
y>aroissoient la repousser; cependant la loi décide qu’elle doit être
admise , parce que , dans les substitutions fidéicommissaires, on ne
doit s'attacher qu’à la volonté du testateur, et que, dans l’espèce, sa
volonté d ’appeler sa petite-fille est manifestée par l’absurdité q u i ,
d'après l’ensemble du testament, caractériseroit sa disposition entendue
à la lettre : neptis quidem prim â f a c i e , propler condiiionis verba,
�( 6 )
non aâm itti videbatur; sed cum in fideicom m issis voluntatem spectari
conveniat, absurdum esse respondi,
cessante prima substitutione ,
partis neptiportionem den ega ri, quant totam habere voluit a vus, s i
iiovissim us f r a i ris quaque portionem suscepisset.
3
E t Cujas, tome i cr. , §. go , ne manque pas d'observer, d ’après ces
textes , que in causâ fideicommissariœ substitutionis , conjectura
voluntaiis su fficit, etiarn s i verba non suffiefant.
Peregrinus dit la même chose dans son traité de fideicom m issis ;
art. i 5 , n°. I er. , sufficit voluntas tacita et e x conjecturis colligibilis
( ce sont ses termes ).
Ces principes posés, examinons le contrat de mariage du 20 février
1737, et voyons si, des termes dans lesquels est conçue la donation,
q u ’il renferme, d ’une moitié de jardin, Je tribunal d ’appel de Rjom
a pu conclure , avec fondement, que cette donation contenoil un fuléicommis en faveur des enfansà naître du mariage, alors prochain, du
donataire.
P a r cet acte , Charles Jouve-Ladeveze , p rêtre, oncle du futur
époux, lui donne et cède dès-à-présent en ja v eu r du présent m ariage,
par donation entre-vifs, pure , parfaite et irrévocable, tous les droits et
prétentions qu’il peut avoir sur les biens de son père et de sa mère.
P a r une seconde disposition de ce contrat, il est dit : de p lu s , en
fa v e u r que dessus ( c’est-à-dire, du présent mariage ) , ledit Charles
Jouve-Ladeveze a aussi d on n é, p a r même donation que d essu s, au
dit J e a n - G abriel Jou ve-Ladeveze, son neveu, acceptant et remerciant
comme dessus , ou à un ou à plusieurs e n fin s qu i seront procréés du
présent m ariage, toutefois au ch o ix dudit Charles Jouve-Ladeveze,
prêtre , la m oitié du jardin planté en verger q u 'il a ........... en cette
vfflc........... sous la réserve des fru its pendant sa vie.
Arrêtons-nous d ’abord à une observation fort- importante; c’est q u e,
si la donation étoit faite aux futurs époux et à un ou plusieurs enfans
qui seront procréés du présent mariage, au choix du dohaleur,
il y
auroit évidemment fidéicommis.
Celle vérité qui doit être d ’une grande influence dans la ca u se , a
�C7 )
été niée et follement combattue devant le tribunal d'appel par le
demandeur en cassation ; mais il nous sera facile de la démontrer.
Il y a fidéicommis, toutes les fois qu’il existe une disposition par
laquelle, en gratifiant quelqu’un, on le charge de rendre l’objet d e là
libéralité à un tiers que l'on en gratifie en second ordre.
A in si, dans une disposition fidéicommissaire , il entre nécessaire
ment trois personnes, celle qui donne, celle qui est gratifiée à la charge
de rendre, et celle à qui l’on doit rendre.
La
disposition fidéicomrnissaiie renferme d o n c , à 'proprement
parler, deux donations, lu n e au profit de celui qui doit rendre,
l’autre au profit de celui à qui doit être rendu l’objet donné.
Mais le second donataire ne devant recueillir qu’après le p re m ie r,
ces donations doivent être successives.
11 faut,
dit Peregrinus ( i ) , que
les deux gratifiés soient appelés à recueillir successivement et non pas
concurrem m ent, ordine successivo et non conjunctivo seu simultaneo.
Parconséquent (ajo u te Thévenot-d'E ssaules , dans son traité des
Substitutions fidéicom m issaires, imprimé en 1778, page 7 1 ) si je dis:
j ’institue un tel et ses enfans, il «st clair qu ’il n 'y a p oint de J id é icom m is, vu que rien n'indique l'ordre successif. L e père et les enfans
sont gratifiés conjointem ent, ordine simultaneo, pour concourir et par
tager ensemble.
Mais, continue le m im e jurisconsulte, s i j e d is : j'in stitu e un te le t
après lu i ses enfans ; i l y aura fid é ico m m is, puisque les enfans sont
appelés pour recueillir après leur père et non pas concurremment
avec lui. D e m êm e, s i j e d is , j'institue un te l et ses h éritiers, i l y aura
fidéicom m is au profit des héritiers. C aries mots scs héritiers supposent
que le premier gratifié sera m o r t, quand c e u x -c i auront droit de
recueillir, le titre d héritier d'un te l ne pouvant être acquis
que
p a r son
décès. Autre chose seroit, s 'il y avoit\ j institue un tel, pour lu i, ses
hoirs et ayant cause. A lors i l n'y auroit point de substitution en
faveur des héritiers ou successeurs de l'institué. L es mots pour lu i, ses
hoirs et ayant cause , ne seroient censés relatifs q u à la transmission
( 1) A rt. »7 , i x et suiyaus.
�(
8
)
ou translation qu i a lieu de droit au profit des héritiers ou successeurs.
L in stituan t seroit réputé n'avoir p oint eu d'autre intention. S i cepen
dant i l étoit d it, pour lu i et ses hoirs m â les, i l y auroit substitution
auprofit des hoirs mâles. Car alors la disposition ne pourroit s'entendre
autrem ent, puisque l'ordre des successions légitimes y seroit interverti.
V o i l à , s'il nous est permis d ’employer cette expression, les avenues
et les alentours de notre question , bien éclaircis. Maintenant entrons
dans la question, e lle-m ê m e : que doit-on décider à l’égard d ’une
donation faite à un te l et à ses enfans à naître'?
Si cette donation est faite par un testament (répond Thévenot-Dess a u lcs, page 72 ) , i l ja u d ra distinguer. L es enfans qui se trouveront
nés lors du décès du testateur , qui est le moment où le legs prend
fo r c e , viendront au legs concurremment avec leur p è r e , n 'y ayant
rien qui nécessite à leur égard l'ordre successif.— I l y aura seule
m ent fidéicom m is au profit des enfans qu i naîtront après le décès
du testateur, attendu qu'ils n'ont pu concourir au moment où le
legs a pris fo r ce , et que néanmoins ils sont dans la vocation.
M a i s , dit encore le même auteu r, ( et c ’est ici l’endroit décisif
pour notre espèce ) , posons q u 'il soit dit dans une donation entre
vifs : J e donne à un te l et à ses enfans à naître , cela form erat - il un fidéicom m is en faveur des enfans à naître ? O u i, car le père
étant sa isi p ar la donation , et les enfans ne pouvant l'être , puisqu'ils
n'existent p a s , i l en résulte nécessairement l'ordre successif. L a pro
p riété ne pouvant être en suspens, le père est propriétaire du to u t, à
la charge de rendre à ses en fa n s, s 'il lu i en survient.
E t qu'on ne s’imagine pas que ce jurisconsulte ne l'explique ainsi
que relalivement aux dispositions ultérieures à l'ordonnance du mois
d'août 1747 ! cc
ajoute à la suite immédiate du passage que l’on
vient de transcrire, prouve démonstrativement le contraire. J e ne m'ar
rêterai pas davantage, dit-il, ¿1 donner des exem ples des termes qui
peuvent contenir implicitement l'ordre su ccessif, j e me borne à obser
ver qu'on ne doit supposer cet ordre su ccessif, qu'autant qu 'il y a
impossibilité d'admettre la vocation p a r concurrence, surtout depuis
! ordonnance
�/| £3
C9 )
l'ordonnance des substitutions, qui rejette absolument les iidéicommis
par conjectures.
A in s i, même depuis l'ordonnance de 1 7^ 71 la donation entre-vifs,
laite à un te l et ci ses en/ans à n a ître, renferme , en faveur de ceux-ci,
une substitution fidéicommissaire, parce qu'elle contient lordre suc
cessif’, c ’est-à-dire , le signe essentiellement caractéristique du fidéicommis.
M a is, dit-on, ce n’est que dans la donation ainsi faite par un père
à son fils, que celte doctrine peut être admise ; elle n’a pas lieu dans
la donation faite par un collatéral.
H é ! quel seroit donc le fondement d ’une pareille différence? Que
le donateur soit un ascendant ou un parent collatéral, la donation à
un te l et à ses enfans à n a ître, contient toujours l'ordre su ccessif ;
elle emporte donc nécessairement fidéicopmiis dans l’un comme dans
l’autre cas.
Aussi avons-nous remarqué que Thevrnot d'Essaules ne fait à cet
égard aucune distinction entre la ligne directe et la ligne collatérale.
E t V ed el ( i ) , que le demandeur en cassation invoquoit devant ®
1
tribunal d ’a p p e l, comme soutenant l'opinion contraire , dit expressé
ment : Cette m axim e que la donation au futur époux et à ses enfans ,
comprend les enfans comme véritables donataires , et comme appelés ,
ordine successivo , par fidéicom m is après leur père , a lieu , soit que
la donation ait été fa ite par un a scen d a n t, ou par un collatéral ou
étranger , parce que les enfans qui sont compris dans la disposition ,
n'étant pas encore nés , ne peuvent pas concourir, n i fa ir e part.
C est aussi en termes généraux , et comprenant le donateur ascen
dant comme le donateur étranger ou collatéral, que s’explique Serres
dans scs Institutions au droit fr a n ç a is , liv. 2 , lit. 7 , §. 2 : — Lors
qu'une donation entre-vifs, dit - i l , est Jaite à une telle personne et
à ses enfans nés ou à naître , dans ce c a s , les enfans s o n t, sans
contredit, regardés comme donataires en degré subordonné , et sont
censés appelés à la donation, ordine successivo, après leur père.
( 1 ) S u r C a te lla n , liv. 2 , ch ap . i 4.
13
�*1
C 10 )
O n sait au surplus que la jurisprudence du parlement de Toulouse
( dans le ressort duquel est née la contestation actuelle ) étoit aussi
uniforme que constante sur l'effet de toute donation à un tel et à ses
cnfans à naître, d ’emporter l’ordre successif et par suite le fidéicommis.
Il existe à cet égard trois arrêts très-précis.
M a y n crd , liv. , chap. 9 1 , en cite un du mois de mai 1078, rendu
5
à.son rapport , par lequel il a été ju gé, conformément à la doctrine
du docteur Etienne B ertrandi, tome
3, conseil
176 : Donationem f a c -
tam / ilio favore matrimonio et f iliis suis descendentibus e x matrimo
nio intelligi ordine successivo (1).
Il est vrai que, dans cette espèce, la donation avoit été faite par un
ascendant ; mais ce n ’est point là ce qui a déterminé l'arrêt. L ’arrêt
n'a eu pour m otif que cette maxime établie par M aynard au com
mencement du chapitre cité', q u e , de droit, les substitutions fidéicommiisaires sont faites, induites, présupposées et ramenées à l’effet, nonseulement par paroles expresses et formelles , mais encore par clauses
et paroles taisées , enveloppées et entrelacées, par lesquelles la volonté
du testateur, quant à c e , soit quasi déclarée, conjecturée et manifestée ;
— et il est inutile d ’observer que cette maxime s’applique aussi bien h
la donation faite par un étranger ou par un collatéral, qu ’à la donation
faite par un ascendant.
U n autre arrêt, non moins formel, est celui que rapporte C a tella n ,
liv. 3 , chap. 14 , sous la «late du i mai 1648. V o ic i les termes de ce
5
magistrat : — L a donation faite au futur époux et à ses cnfans, com
prend les enfans comme véritablement donataires et comme étant
appelés, ordine successivo, pour recueillir la donation après leur père,
et contient un fidéicommis en leur faveur..............C ’est ainsi que cette
question fut décidée ( au parlement de Toulouse ) le i
(1) Le
5 mai
1G48. —
d e m a n d e u r en cassation a e u , de va nt le tribun a l «l’a p p e l , le c o u r a g e de
se p rd v alo ir l u i - m ô m e d e cet a r r ê t , c o m m e ayant j u g é , en term es exprès , «ju’une
donation faite en co n trat de m a r i a g e p a r un p èr e à son fils et à scs cnfans à n a î t r e ,
ne r e n f f r iu o i l pas 1111 lidiiiconnuis : 011 p e u t j u g e r , p a r c e seul trait^ de la(id«ilité
de scs autres citations.
�4*5
( II )
U n ptre mariant Jean son fils, donne dans le contrat de mariage cer
tains biens au futur époux et à scs enfans ; un oncle f a i t aussi certaines
donations ù ce fu tu r époux et à scs enfans. Jean ayant eu de ce ma
riage Bernard et Françoise, mariant Bernard , lui donne la moitié de
ses biens, et promet de l'instituer en l’autre moitié. — Après la mort
de Jean , Françoise sa fille fait instance contre Bernard son frère en
délaissement de la moitié des biens donnés à Jean son père , et dit
que la donation étant faite à Jean et à ses enfans, contient une substi
tution fidéicommissaire en fa\eur de tous les enfans, qui sont tous
appelés par égales portions. — A u contraire, Bernard répliquoit que
la donation faite à Jean son père et à ses enfans, ne contenoit en fa
veur des enfans de Jean qu’unesubstitution vulgaire, qui avoit expiré en
la personne du p ère, lequel ayant survécu aux donateurs, avoit recueilli
l'effet de la donation. — Jugeant ce procès , on convint que si , dam
.un testament, la libéralité ¿toit faite à Jean et à ses enfans, il y auroit
seulement une s u b s t i t u t i o n vulgaire ; mais q u ’étant question d'une
donation entre-vifs faite à celui qui se marie , et à scs enfans à naître ,
«lie ne pouvoit contenir qu’une substitution fidéicommissaire.
Q u ’oppose à cet arrêt le demandeur en cassation ? U ne seule chose :
c ’est que la donation qui en ctoit l’ob jet, avoit été faite par un ascen
dant. — Mais il ne fait pas attention q u e , dans cette espèce, il y
avoit deux donations, l'une émanée du père du futur époux , l’autre
faite à celui-ci par son oncle , et que toutes deux ont été jugées contenir
iidéicomniis en faveur des enfans à naître. Cet arrêt a donc bien net
tement rejeté la distinction imaginée par le demandeur.
Le
3 °. arrêt
que nous avons annoncé, est du
3o
août 170G; il est
rapporté par Dejuin ( 1 ) , l’un des juges qui ont concouru à de rendre.
J jC 3o août
1Ü47, J can Meilhac premier donne, par contrat de
mariage, à Jean Meilhac son second fils et auxeniàns qui seront procréés
dudit mariage, la moitié de ses biens présens et à venir, et l'autre
moitié à la fin de ses jours, pour desdits biens pouvoir faire et dis-
(1) J o u r n a l (lu palais de T o u l o u s e , t o m e
5,
p a g . 245.
» a
�( 12
)
poser pftr ledit Meilhac fils et donataire, comme de sa chose propre,
tant en la vie, qu'en la mort. Question de savoir si cette clause ren
ferme une substitution fidéicommisiaire. Sentence de la sénéchaussée
de Nismes qui juge pour la négative. A p p el par Jean Meilhac troi
sième. Il se fonde sur ce que la donation n’étoit pas faite seulement à
Jean Meilhac second, mais encore à ses enfans.........Il citoit Catclan r
C am bolas, M eynard et Dumoulin. Jugeant ce grief, dit le magistrat
cité, on est convenu que la clause de donation faite au père et aux
enfans, contient un fidéicommis en faveur des enfans, quand on ne
peut pas présumer le contraire par une clause subséquente ; or , dans
celle espèce, on a cru que la faculté accordée au donataire de dis
poser des biens donnés comme de sa chose propre, tant en la vit
q u ’en la m o r t, faisoit présumer que le donateur n'avoit pas prétendu
faire un fidéicommis. Il a donc passé à débouter Jean Meilhac de son
grief, et en même temps de la demande en ouverture de la substitution;,
cependant la chose a souffert grande difficulté, plusieurs des juges
regardant cette dernière clause de style.
V o ilà qui prouve bien clairement, et que le parlement de Toulouse
t e n o i t invariablement à la maxime dont il est ici question, et que cette
xnaxiinc n’admeltoit dans sa Jurisprudence aucune distinction entre
le donateur ascendant et le donateur é t r a n g e r ou collatéral ; car D ejuin
ne distingue nullement entre l’un et l’autre, il parle au contraire de
la manière la plus générale, quand il dit qu’on est convenu que la
clause de donation faite au père et aux enfans contient un fidéicom
mis en faveur des enfans.
M ais, dit-on, il y a dans le recueil de Cambolas, livre
3 , cliap. 49,
des arrêts du parlement de Toulouse même , qui décident que la
donation en faveur d'un mariage et des enfans à naître de ce mariage,
ne contient pas de substitution fidéicommissairc en faveur de ceux-ci.
O u i, ces arrêts existent ; mais on auroit bieii dû, en les citant d'après
Cam bolas, remarquer avec ce magistrat, qu ’il en est autrement quand
la donation est faite expressément aux. enfans, c'est-à-dire, non-seule
ment en leur laveur, mais à eux.
Et en effet, dit Serres, à l'endroit indiqué ci-dessus, il ne faut pas
�4 ^
C i3 )
confondre le cas où une donation est faite en contrat fie mariage nu
futur époux et à ses enfans à naîti'2, avec le cas où la donation est
laite au futur époux en contemplation, ou en laveur du mariage et
des enfans qui en naîtront ; c a r , dans ce dernier cas , les enfans n'ont
aucun droit aux biens donnés; ils ne sont pas regardés comme appelés
de leur chef à la donation en degré môme subordonné , et ne sont
considérés tout au plus que comme la cause impulsive et non l’objet
final de la donation , ensorte que le père peut aliéner et disposer à
son gré desdits biens donnés, sans que les enfans puissent s’en plaindre,
ni révoquer les aliénations.
Calellan fait précisément la même distinction. V o ic i comment il
s’explique livre 2 , chap. i4- L a donation faite dans le contrat de
mariage au futur époux , en contemplation de mariage et des enfans
qui en proviendront, ou même faite en faveur du mariage et en préciput et avantage des enfans qui en descendront,
les enfans et ne leur donne aucun droit de leur ch e f
et ne contient aucun iidéicommis en leur faveur.
termine uniquement à la personne du futur époux,
ne regarde point
aux biens donnés,
Cette donation se
les enfans en sont
tout au plus la cause impulsive et non la cause finale. C ’est la doctrine
de D olive, livre
4,
chap.
5 , et
de Cam bolas, livre
3,
chap.
4g ,
con
firmée par les arrêts que ces auteurs rapportent. Mais la donation faite
au futur époux et à ses enfans, comprend les enfans comme véritable
ment donataires et comme étant appelés, ordine successivo , pour
recueillir la donation après leur père, et contient un fidéicommis en
leur faveur.
Cela posé, il ne nous reste plus, pour justifier le jugement du tri
bunal d ’appel de Riom , que de prouver qu’entre le cas d ’une donal ionfaite à un tel ou à ses enfans à naître, et le cas d'une donation faite à
un tel et à ses enians à naître , il n’existe , en point de droit , aucune
espèce de différence.
O r , là-dcsssus, écoutons Catcllan à l'endroit déjà cité. Ce que je
viens de dire que la donation faite en faveur du futur époux et de sesenfans contient un fidéicommis en faveur des enfans, doit avoir lieu,
lorsque la donation est faite au futur époux ou à ses enfans, comme
�(
i4
)
il fut jugé, après partage de la première, à la deuxième chambre des
enquêtes, et vidé à la grand’ehambre....... moi comparateur. V a la d a ,
m a r i a n t François V alada son fils, donne,
dans le contrat, certains
biens à ce fils ou à ses enfnns. D e ce mariage naissent trois enfans.
François V alad a, fils, meurt après, son père, et ses biens sontgénéralement saisis. Ses trois enfans demandent la distraction des biens donnas
par leur nyeul, à leur père et à e u x, et l’obtiennent par l’arrêt que je
rapporte. L a raison de la décision est prise de ce que la donation faite
au futur époux et à ses enfans , contient un fidéicommis en faveur des
enfans, comme j ’ai déjà dit : or il en doit être de même lorsque la
donation est faite au futur époux ou à ses enfans. Parce q u e ......... par
la loi cùm quidam , 4 an code de verborum et rerum sig n ificaiion c, si
l'institution , legs , fidéicommis ou donation est faite à un tel ou à
un t e l , la disjonctive est prise pour copulative.
L e demandeur en cassation a , devant le tribunal d ’a p p e l , beaucoup
disserté , beaucoup argumenté contre cet arrêt et contre les motifs qui
l ’ont dicté. Il ne nous sera pas difficile de répondre à toutes ses objec
tions.
Commençons -par poser les principes
fondamentaux de la
matière.
L es loix romaines nous ont appris, et notre propre usage nous a
confirmé que souvrnt la disjonctive OU s’emploie pour la copulative E T ,
comme souvent aussi la conjonctive e t s’emploie pour la copulative OU.
L a loi
53 , au digeste
de Vcrborum significaiionc, nous offre une
décision du jurisconsulte P a u l, ainsi conçue: Sœpè ita comparatum est
ut conjuncta pro dijunctis accipicntur et disjuncta pro conjunctis.
A in s i, la loi des douze Tables disoit : TJti quisque legassit super
pecunià tutclâve rci suœ, ita ju s esto\ et P a u l décide que , par tutel i h c , il faut entendre tuteldquc : curn d icitu r, ( c e sont scs termes )
super pecuniâ tutelâve rci suœ, tutor separatim sine pecunià d a n non
potest.
lit lorsque nous disons, continue P a u l, quod dedi aut donavi, la
particule aut doit s’entendre dans le sens conjonctif. E t cum dicimus
quod dedi aut donavi, utraque continernus.
Mais quelle sera la boussole qui dirigera le juge dans l'application
�( *5 )
de ccllc règle ? ¡1 ne peut pas y en avoir d ’autre que le sens nature]
de la phrase dans laquelle se trouve intercalée soit la disjonctive ou ,
soit la copulative et.
Ainsi lorsque je m ’oblige à vous livrer un champ ou une maison,
¡1
est bien évident que je ne vous donne pas à la fois la maison et le
champ, mais seulement l’un ou l’autre à mon choix.
Mais si je donne à vous ou à vos enfans telle m aison, vos enfans
sont incontestablement appelés à la donation , comme vous-même; et
il n'y a de difficulté que sur le point de savoir, s'ils y sont appelés
à titre de substitution vulgaire, s’il y sont appelés par fidéicommis, ou
s'il le sont comme co-donataires.
O r à cet égard il faut distinguer :
O u vos enfans existent au moment de la donation ,
O u ils n’existent pas encore.
A u premier cas il ne sont appelés ni comme substitués vulgaire
ment, ni comme fidcicommissaires ; ils le sont comme co -d on ata ires
et ils doivent concourrîr avec vous au partage de la chose donnée.
C ‘est la décision expresse de la fameuse loi cùm quidam au code de
verborum et rerum significatione. Com me ce texte a été invoqué de
part et d ’autre devant le tribunal d ’appel de R iom , et que, de' part et
d ’autre, il a donne lieu à de grands débats qui se renouvelleront vrai
semblablement devant le tribunal de cassation , il ne sera pas inutile
de le transcrire, ici en entier.
U n particulier (dit Ju slin ien , auteur de celte loi, ) voulant faire une
institution, un legs, un fidéicommis, donner la liberté à des esclaves,
pourvoir à la tutelle de scs enfans, s’étoit exprimé en ces termes :
J institue pour mon héritier tel ou tel ; je donne et lègue telle chose à
» tel ou Ici; je veux que tel ou tel de mes esclaves soit libre; je nomme
>» pour
tuteur à mes enfans tel ou tel. » Question de savoir quel
devoit être l’effet d ’une institution, d ’un legs, d ’un fidéicommis, d ’un
affranchissement , d ’une dation de tutelle ainsi exprimée? Devoit-on
regarder ces actes comme nuls P devoit-on en accorder le profit ou
en imposer la charge au premier des deux appelés disjonctivemenl,
qui se trouveroit en possession? devoit-on les admettre tous deux au
�C 16 )
bénéfice ou leur faire subir à tous (leux le fardeau de la disposition ?
e t , dans ce dernier cas, falloit-il établir un ordre successif de l’un à
l’autre? ou devoit-on les admettre coiicuremment ? Cùm quidam sic
vel institutioncm , vcl legatum , vcl fideicom m issum , vcl libcrtaiem ,
vel tutelam scripsissct, il.'e aut il/t m ih i hcres esto ; vcl il li aut illi do
lego , vel dari volo , vel ilium aut ilium libcrum , aut tutorem esse
volo vel jubeo ; dubitabatur utrum ne inutilis sit hujus m odi institutio
et legatum , et fideicom m issum , et libertas et lutoris datio ? an occupantis melior conditio sit ? an ambo in hujusm odi lucra vel muñera
vocentur ? an et secundùm aliquem ordinem admittantur ? an uterque
omnímodo ? Les uns vouloient qu e, dans le cas d ’une institution ainsi
conçue, le premier nommé fût considéré comme seul institué, et que le
second nele fût que comme substitué vulgairement. Cùm aliiininstitutionibus primum quasi inslitutum a d m itti, secundum quasi substitutum.
D'autres prétendoient qu e, dans le cas d’un Iegs[oufidéicommis exprimé
de cette manière, le dernier nommé devoit seul recueillir, comme ayant
pour lui la disposition la plus récente du testateur. A liiin fid eicom m issis
posteriorem solum fideicom m issum accepturum existim averint, quasi
recentiorc volúntate testatores utentem. Mais pour retracer une à une
loutes les disputes qui se sont élevées à cet égard entre tant d ’écrivains,
il ne faudroit rien moins qu'un gros volume ; car non-seulement les
jurisconsultes, mais même les ordonnances impériales qu'ils ont rap
portées chacun en faveur de son opinion, se sont divisés et ont varié
sur cette matière. E t si quis corum altcrcationes sigillatim cxponerc
m a lu crit, n ih il prohibât non leve libri volumen extendere , ut sic
exp lica n possit tanta auctorum varíelas cùm non solum juris auctores , sed etiarn ipsœ principales constitutiones , quas ipsi auctorcs
rctulcrunt, ínter se variasse videntur. 11 nous pareil donc plus raison
nable , en écartant tout ce cahos d'opinions et d ’arguincns, de déclarer
que la particule ou sera, dans le cas proposé, entendue dans le sens de
la particule ct\ de manière quelle sera réputée copulativo et consi
dérée comme une sorte de paradiazenze ( terme grec qui répond à
fausse disjonction ) ; au moyen de q u o i , le premier appelé sera
admis, sans que le second soit pour cela exclu. M ehus iiaque nobis
visurn
�AO ) s
(
l7
)
çisurn est, om ni hujus m odi verbositate exp losà , conjunctionem mit
pro et a ccip i, ut videatur copulativo modo esse prolata et magis sit
p aradiazcnsis, ut et pritnam personam inducat et secundarn non
rcpellat. C a r , d e m ô m e , p a r e x e m p l e , q u e , d an s l'a ction possessoire
a p p e lé e quod vi aut clam , la d is jo n c tiv e aut est é v id e m m e n t
prise
p o u r la c o n j o n c t i o n e t , d e m ô m e d an s toutes ces sortes d ’ institutions,
d e legs, d e f i d é i c o m m i s , d ’a ffr a n c h i s s c m e n s , d e d o n a t io n s , d e tutelles,
la d ispo sitio n d u testateur d o it être e n te n d u e d e m an ière q u e les d e u x
in d iv id u s q u ’il a ainsi n o m m é s , vien n en t é g a l e m e n t , et pa r égales
p o r t i o n s , à l’h é r é d it é , au legs, au f i d é ic o m m is ; q u e tou s d e u x reçoiven t
la lib e rté ; q u e tou s d e u x soient ap p elés à la tutelle. P a r - l à , p erso n n e
n e sera p r iv é d e l ’effet d e la libéralité d u testateur ; et il sera d 'a u ta n t
m i e u x p o u r v u a u x intérêts d es p u p i lle s , intérêts q u i n e p o u r r o ie n t q u e
so u ffrir b e a u c o u p des d o u te s q u e n o u s laisserions subsister à c e t égard .
Quemadmodum enim ( v e r b i g r a t i à ) in interdicto QUOD VI AUT CLAM
AUT conjunctio pro ET apertissime posita est; ita et in omnibus hujus -
m odi casibus, sive institutionum, sive legatorurn, sivefideicommissorum,
vel libertatum, seu tutclarum , hoc est intelligendum , ut ambo veniant
cerjud lance ad hœreditatem , arribo sim iliter legata accipiant, fid e icommissum in utrumque dividatur, libertas utrumque ca p ia t, tutoris
ambo fangantur officio, ut sic nemo defraudetur a commodo testaloris,
et major providentia pupillis inferatur: ne durn du bita tur, apud quern
debeat esse tutela , in medio res pupillorum depereant. M a i s n o u s n e
faisons cette d é c la r a tio n q u e p o u r le cas o ù c e sont des perso nn es q u i
se tro u v en t co m p rises dans u ne p h rase c o n ç u e d e la m a n iè r e ci-dessus
e x p o s é e ; si d o n c , dans u n e d ispo sitio n testa m e n taire, il n ’y a d 'a p p e lé
q u 'u n seul i n d i v i d u , et q u e les ch oses q u i en sont l’o b j e t , soient ainsi
laissées : « J e d o n n e , je lègu e , j e laisse p a r fi d é i c o m m i s à un tel ,
» TKLI.E OU t l l l e
c h o s e ; » alors 011 a p p liq u e r a à cette d isp o sitio n ,
les a n cien n es règles et les d écisions d e l'a n c ie n d ro it
(0 > a u x q u e lle s
( i ) S u iv an t lesquelles il n ’ y a de d o n n é , l é g u é o u (idéicoimnisse cjuc l ’ une des
choses ainsi e x p r i m é e s , l’o p tio n a p p a rten a n t alors soit à l ' h é r i t i e r , soit au léga
taire o u iid é ic o m in is s a ir e ; s uivan t les d istinctio n s établies p a r les lois d u digeste.
c
Lf. *.
�( 18 )
nous n'entendons porter aucune atteinte , ni innover , en aucune
manière, par la présente ordonnance. Sed hœc quidern sa n cim us,
cùm in personas hujus m odi proferatur scriptura. Sin autem una quid em est persona, res autem ¡ta dere lictae sunt, îllam aut illam rem
tib i d eleg o, perfideicom m issum relinquo, tune seeundum veteres régu
las et antiquas definitiones, vetustatis ju ra maneant incorrupta, nullâ
innovatione e x hâc constitutione introducenda. — C e que nous vo u
lons aussi avoir lieu dans les contrais. Quod etiam in contractibus
locum habere censemus.
V o ilà comment s’explique la loi cum quidam , et l’on voit qu ’elle se
réduit à deux dispositions.
L a première, q u e, dans toute plirasc, soit d ’un testament, soif d ’un
contrat ( i ) , qui défère une même chose à telles ou telles personnes , la
particule disjonctive ou doit être réputée copulative, et q u ’enconséqucnce, toutes les personnes nommées dans cette phrase doivent être
considérées comme appelées à la chose donnée, léguée, vendue, etc.
— M elius nobis visum e s t ......... Conjunctionem
aut
pro ET accipi ut
vidcatur copulatiço modo esse p ro la ta ..........ut et primam personam
inducat et secundarn non repellat.
L a seconde disposition est que , si
ensemble et unies par la particule ou
toutes à l’époque, soit du testament,
regarder comme appelées actuellement
les personnes ainsi appelées
réputée copulative , existent
soit du contrat, on doit les
et par égales portions à la
chose qui forme l'objet de l'un ou de l’autre acte.
Car, remarquons-le bien, c ’est de personnes actuellement existantes
que parle J u stin ien , quand il dit : In omnibus hujus m odi casibus ,
sii'c institutionum , sive legatomm , sive fideicom m issorum , vel lib cr taturn , scu tutclarum , hoc est intell/gcndum, ut arnbo veniant œquà
J.anrc..............
Et ce qui le prouve invinciblement, c ’est q u e, dans la loi cum quid a m , Justinicn s’occupe principalement de l'institution d'héritier, qui,
même au temps de J u stin icn , ne pouvoil avoir lieu qu'en faveur de
( i j Q u o i! çtiam in co n tra ctib u s lo cu m habere ce n ttm u s } «lit la l o i .
�*,
( *D )
personnes vivantes à l’époque du décôs du testateur ( i ) ; de l'affran
c h i s s e m e n t q u i , certes, ne pouvoit pas atteindre des êtres non encore
nés, puisqu’ils ne pouvoient pas encore être esclaves; enfin de la dation
de tutelle, q u i, par la nature et l’essence raêm» de son objet, ne pou
voit imposer ce fardeau qu'à des hommes actuellement existans, et
même parvenus à l’âge de majorité.
Que faut-il donc décider à cet égard dans le cas où , parmi les
personnes appelées à une même chose et unies par la particule ou r
il y en a qui n'existent pas encore au moment oii se fait la dispo
sition soit testamentaire, soit contractuelle?
C ’est i c i , comme l’on v o i t , le second des cas que nous avons cidessus distingués.
Justinicn ne l’a pas compris dans la loi cum quidam ; seulement il
résulte de la première partie de cette loi que , dans ce cas , comme
dans celui d'une disposition faite au profit ou à la charge de personnes
actuellement existantes, la disjonctive ou doit être entendue dans le
sens d e là conjonctive et. — Quelle raison, d ’ailleurs, y auroit-il de
ne pas assimiler entièrement, sur ce p o in t, l'un des deux cas à l'autre?
Mais le silence de Justinicn sur le cas dont il s’agit, ne nous laisse
point sans ressource pour résoudre notre question. Elle est même toute
résolue , par la combinaison de deux maximes qui , désormais, doi
vent être regardées comme incontestables.
L u n e , qu’entre la donation faite à un tel ou à un tel, et la dona
tion faite à un tel et à un tel , il n’y a ni ne peut y avoir aucune om
bre de différence.
L ’autre, qu e, parla donation entre-vifs faite à un tel et à scs enfans
à naître, ceux-ci sont appelés, non comme substitués vulgairement,
non comme co-donataires actuels , mais comme fidéicommissaires.
II résulte, en effet, du rapprochement de ces deux maximes, que ce
n’est ni comme substitués vulgairement, ni
c o m m e
co-donataires actuels,
mais seulement comme fidéicommissaires, que les enfans peuvent être
( i ) Voyez. In L ettre du c h a n c e lie r d 'A g u r s s e a u , an p a r l e m e n t d’A i x , d u 2>
n o v e m b r e 1 7^7 , co n ce r n a n t l'art. 4 9
l ’O r J o n n a n c e de 1 7 3 5 .
C a
t-
�•
i I
( 30 )
censés Appelés dans le cas d'une donation entre vifs faite à un te l ou à
scs en/ans à naîtra.
I ls
n e l e sont pas c o m m e su bstitu és v u l g a ir e m e n t ;
car, par
l’effet de la donation entre-vifs acceptée par le père des enfans à naître,
celui-ci se trouve immédiatement saisi de la chose d o n n é e , et par-là
même', la porte se trouve irrévocablement fermée à toute substitution
vulgaire. — ■On sait, et la loi
5 , aucode
de impulerum et aliis substi~
tio n ibu s, établit clairement que la substitution vulgaire n’étant faite
que pour le cas où le premier appelé ne recueilleroit pas la disposi
tion, elle s’évanouit nécessairement dès que la disposition a été acceptée
par le premier appelé.
I l s n e l e s o n t p a s c o m m e c o - d o n a t a i r e s a c t u e l s ; ca r, pour
ótre actuellement donataire, il faut exister. Celui qui n’existe pas, ne
peut être saisi de rien ; et cependant il est de l’essence de la donation
entre-vifs, que le donataire en recueille l’effet à l’instant môme où elle
reçoit sa perfection.
C ’e s t
donc co m m e
f i d é i c o m m i s s a i r e s q u ’il s s o n t a p p e l é s ;
et
.il faut bien qu’ils le soient comme tels, d'après les principes ci-dessus
retracés par Thévcnot-d'Essaulcs. — Répétons les termes de cet auteur,
ils sont décisifs : L e père étant saisi p a r la donation, et les enfans ne
pouvant lâtrc , puisqu'ils n'existent p a s, i l en résulte nécessairement
l ordre successif. L a propriJté ne pouvant ótre en suspens, le père est
propriétaire du tout à la charge de rendre à ses en fa n s, s 'il lu i en
survient.
Arrêtons-nous particulièrement à celle grande maxime, la propriété
ne peut être en suspens. — Elle est également établie par Peregrinus :
rerum d o m in io, dit-il ( i ) , in pendenti stare nequeunt; et Thévenotd'Essaules y revient encore, page 18S : les jurisconsultes romains ( c e
sont ses termes) étaient s i éloignés d'admettre la suspension de pro
p riété, que, pour éviter cet inconvénient, ils a voient imaginé de person
nifier Ih é r é d ité , en la rendant propriétaire des biens jusqu'il ce que
(0
J iJ e ic o m m U s is , art. /to ; n°. G.
�(> .
>
l'héritier le devint par l'adition ( i ) . Nous devons donc mettre cette
maxime au rang des vérités les mieux démontrées.
E t quelle est la conséquence , relativement à la donation entre-vifs
faite à un futur époux ou à ses enfans à naître? Bien évidemment il
en résulte que la propriété de la chose donnée, étant sortie des mains
du donateur , et ne pouvant pas reposer sur la tête d'enfans qui
n ’existent pas en co re, c'est sur la téte du futur é p o u x , qu’elle se fixe
immédiatement.
L e futur époux devient donc propriétaire d elà chose donnée,à l’ins
tant même où il accepte la donation.
Que peuvent signifier, d ’après cela, ces mots ajoutés à la donation ;
ou à ses enfans à naître ?
Signilient-il que les enfans à naître recueilleront la donation, si leur
père ne la recueille pas? no n , nécessairement non. L e futur é p o u x ,
encore une fois, recueille immédiatement la donation, il devient pro
priétaire de la chose donnée, par le seul effet, par l’effet immédiat de
son acceptation; il est donc impossible, métaphisiquement impossible;
que les enfans à naître ne soient placés dans la donation , que pour la
r e c u e i l l i r au défaut de leur père.
Il faut cependant donner un sens , un effet quelconque à ces mots,'
ou à ses enfans à naitre; cl le seul moyen d ’arriver à ce b u t, c ’est de
dire que la particule ou doit s’entendre comme s’il y avoit e t, que les
enfans sont appelés pour recueillir après leur père, que leur père est
à leur égard une sorte d ’entreposilaire qui doit faire arriver jusqu’à eux:
l’objet de la donation; qu ’ils doivent jouir de la chose donnée après
que leur père l'aura possédée, et par une conséquence aussi simple
qu'irrésistible , que leur père est grevé de fidéicommis en leur faveur.
Q u ’opposera a cette conséquence le demandeur en cassation ? sans
doute, il y opposera les mûmes objections qu ’il a inutilement fait
valoir devant le tribunal d appel. V oy on s donc quelles sont ces
objections.
(i)
J lw rrd ita s personam d e fu n c li m .ilin e t ( loi V ( I), tie a cq u iren d o r e r u n
do m in io ) d o m in i q u o d h cvredilatis f u l l ( t o i
80 D.
de tcg a tis 2"•).
�»
»
C
Première objection. L a loi cùm
)
quidam sur laquelle vous vous
appuyez pour convertir, clans la donation du
:>3 février
1787 , la dis—
jonctive ou en conjonctive, n'est relative qu’aux dispositions testamen
taires, et, parconséquent, inapplicable aux actes entre-vifs. Il est vrai
qu’à la fin de cette loi il est dit : quod etiarn in contraclibus locum
habere ccnsemus\ mais ces termes ne se réfèrent qu’à la disposition
immédiatement précédente, dont l’objet est de maintenir les anciennes
règles par rapport aux dispositions par lesquelles un testateur donne
telle ou telle chose.
Réponse : i°. Les enfans Ladevèze n’ont'pas précisément besoin de
la loi cum quidam , pour faire maintenir le jugement d u tribunal
d ’appel de R i o m ; il leur suffit q u e, môme d ’après les lois du dig este,
et notamment la loi
, de verborum significationc, la disjonclive ou
doive être convertie -en copulative , toutes les fois que le sens de la
53
phrase l’exige.
2 0. Ces expressions, quod etiam in contractibus locum habere censem us, qui terminent la loi cùm quidam , de quel droit le demandeur
les restrcint-if à la disposition immédiatement précédente ? Il y seroit
fondé, sans d o u te , si cette disposition formoil dans la loi un para
graphe séparé. Mais la loi toute entière n’est composée que d ’un seul
contexte ; il est donc bien naturel d ’en faire refluer les derniers termes
sur l’intégrité de la loi elle-même.
°. L a disposition de la loi qui précède immédiateifient les termes ,
3
quod ctiam in contractibus, locum habere censemus, celte d isp o sitio n
n’est là que pour faire exception à la règle généralement posée par
Justim en dans le corps de la loi. Si donc il étoit vrai que les termes,
quod etiam in contractibus locum habere censem us, se référassent à la
disposition immédiatement précédente , que significroient-ils ? tièscertainement ils signifieraient que l’exception établie par cette dispo
sition, est commune aux contrats et aux testamens. —
O r , que l’on
nous apprenne donc comment Justinien auroit pu excepter les con
trats , comme les testamens, de la règlegénéralc précédemment établie,
6i cette règlegénéralc n’ciU pas été elle-inéinc commune aux testamens
et aux contrats ? Aussi G odrfroi, dans une de ses-no)es sur la loi Cùm
�( s3 )
quidam , dîl-il expressément: Disjunctiva posita inter personas hono
râtes vel gravaias, t à m jn ultim is voluntatilus,'quàm in contractibus
pro conjunctùa habetur.
D euxièm e objection. V o u s prétendez appliquer la loi Cîim quidam
à un fidéicommis créé par un acte entre-vifs ; maisiil est notoire que
dans le droit romain , on ne pouvoit fidéicommisser que par tes
tament.
Réponse. Il est vrai q u e , par l'ancien droit rom ain, les testamens
étoient les seuls actes par lesquels on pût fidéicommisser. O n accordoit
bien au donateur entre-vifs une action pour répéter la chose donnée ,
quand le donataire n’accomplissoit pas la charge de rendre ; mais on
refusoit toute action au tiers en faveur duquel cette charge étoit op
posée. C ’est ce que nous apprend la loi
3,
au code de donationibus
quœ sub modo ( i ) . Mais celte même loi annonce que depuis quelque
temps, et par l'effet des ordonnances impériales, le substitué jiar do
nation entre-vifs, avoit l’action utile pour demander l’exécution du
fidéicommis (2); et elle maintient formellement cette nouvelle juris
prudence.
E t remarquez que cette loi est de beaucoup antérieure à la loi
cùm quidam. Celle-ci est de l’an
53 1 ;
celle-là, de l’an 2go.
Ainsi nul doute que la loi cùm quidam n’ait été faite pour les
fidéicommis contractuels, comme pour les fidéicommis testamentaires.
Troisième objection. L a loi cùm quidam parle de deux personnes
indifférentes, et entre lesquelles il n’y a ni sujet, ni raison de préfé
rence. Elle n’est point applicable , suivant P a u l de Castres, A lex a n d re ,
Fusarius-Dupemer , e t c ., au cas où la disjonctivc ou se trouve entre
(1) Q u oties d onatio ila c o n fic ilu r u t p o st te m p u i, id q u o d d on a tu m e s t , a l ii
i t s li t u a lt t r , veterix ju r is a u cto rila te rescrip tu m e s t , si is in quern lib e r a lita tis
co m p en d iu m c o n ftr e b a lu r , stip u la tila non s i t , p la c i t i f i d e non im pletA , e i q u i
lib e r a lita tis au cto r f u i t ........... c o n d i t i t i a c tio n is p ersecu tio n em com petere.
(a) S u d cù m p o ste ti benign A j u r i s interpretation s , d iv i p rin cip e s e i q u i stip u
l a t e non s i t , utile/n a ctio n em ju x t a d o na toris v o lu n ta lem } com petere a d m it c r i n t , a c tio ......... tib i a cco m o d a b itu r.
�(
24
)
des personnesinter quas cadit ordo affcctionis. O r , clans noire espèce;
on ne sauroit douter que le donateur n’ait voulu préférer son neveu
aux enfans qui pouvoicnl naître de son mariage.
Réponse. E h , sans doute, le donateur à préféré son neveu à scs
futurs petits-neveux! Aussi l’a-t-il appelé en première ligne; aussi at—il voulu q u ’ il jouît avant eux; mais que conclure de-là? Précisément
ce que nous soutenons, que le donateur a établi un ordre su ccessif de son
neveu à ses futurs petits-neveux, et que, par une conséquence néces
saire, il a substitué fidéicomrtiissairetnent ceux-ci à celui-là.
Q ue nous importe, d’après cela, l’exception que Fusarius, A le x a n
dre , Duperrier et P a u l de Castres mettent de leur propre autorité
à la disposition générale de la loi cum quidam , pour le cas où il existe
entre les personnes appelées ensemble par la disjonctive o u , ce qu'ils
nomment ordo caritatis et affectionis ?
Nous dirons cependant que cette exception n ’est pas admise par
tous les auteurs ; elle est combattue, et nous osons le dire, complète
4
ment réfutée par F urgole, sur l'art. 19 , de l’ordonnance de i j j- —
C e st la lo i ( dit-il après de longs développemens qu’il seroit inutile
de transcrire ici ) , c'est la lo i q u i, p a r sa toute-puissance, détermine le
sens des paroles, comme s 'il y avoit une conjonctive, lorsque l'alterna~
tive se trouve entre plusieurs personnes.......... et i l n'y a point de doute
que la lo i ne doive prévaloir sur les fausses opinions des auteurs qui
s'en sont éloignés pour mettre à la place leurs imaginations.
4
Quatrième objection. V ed cl sur Catellan, livre 2 , chap. ¡ , dit q u e ,
pour ce qui concerne la donation fa ite au fu tu r époux et à ses en fa n s,
la disjonctive ou n'est convertie en copulative e t , p a r ordre de succes
sio n , que quand la donation part d e là main d'un ascendant. O r , dans
notre espèce, c’est de la main d ’un collatéral, qu'est partie la donation.
Réponse. À coup sûr V c d e l est dans l’erreur, si, sans convertir la
particule ou en copulative, il n'est pas plus possible, dans le cas d ’une
disposition laite par un collatéral , que dans le cas d ’une disposition
laite par un ascendant, de donner un sens raisonnable, d ’attribuer un
effet quelconque, à la clause qui appelle un te l ou ses enfans à naître
— O r , nous lavons déjà dit, si, dans cette clause, vous ne pi Ole/, pas
�(
=5 )
une signification conjonctive à la particule ou, il est métaphysiquement
impossible , de quelque main que parte la disposition entre-vifs, de
lui donner un sens qui ait la moindre apparence de raison; et soit que
le donateur tienne au futur époux p a rle s liens de la paternité, soit
qu’il n’ait avec lui que des rapports de parent collatéral ou d ’ami,
il faut toujours revenir à cette vérité, aussi palpable que constante,
qu’après a v o ir , par sa donation acceptée , et parconséquent con
sommée , saisi le donataire de la propriété de la chose donnée, il ne
peut avoir appelé des enfans non encore existans à cette même pro
priété que par ordre successif, o u , en d'autres termes, à titre de fidéicommis.
Aussi voyons-nous que Furgole ne fait, sur cette matière, aucune
distinction entre le cas d ’une donation faite par un ascendant, et celui
d ’une donation faite par un étranger.
Serres confond et identifie également les deux c a s , Iorsqu’après
avoir établi qu’une donation étant faite à une telle personne et à ses
enfans à naître, les enfans sont, sans contredit, regardés comme do
nataires en degré subordonné, et sont censés appelés à la donation
ordine successivo après leur père ; — Il ajoute : on ju g e la même ch o se,
lorsque la donation est fa it e à un te l ou à ses en fa n s, cette particule
disjonctive ou se convertissant en la conjonctive e t , et contenant pareil
lem ent un fidéicom m is tacite au profit desdits enfans après père ou
mère.
Cinquième objection. V ou s supposez q u e, dans la donation du 27
février 17^7, la clause dont il s’agit ne présenterait aucun sens plau
sible , si l’on n’y substituoit la conjonction et à la disjonctive ou ; il n'y
a cependant rien de plus simple que de donnera cette clause, entendue
à la lettre, un sens tout-à-fait raisonnable : c'est de dire qu ’elle ren
ferme une substitution vulgaire; et en effet il est évident q u e le dona
teur qui ne se dépouilloit pas, puisqu'il se réservoit l’usufruit, n a
empoyé la disjonctive ou, que pour demeurer le maître, en cas de pré
décès de son neveu , et, dans ce cas seulement, de désigner parmi ses
futurs petits-neveux, celui ou ceux qui devroient recueillir l'effet de la
donation.
�>
'
(zG )
Réponse. II y a là autant d’erreurs que de mots.
i°. L e donateur s’est réservé l'usufruit, cela est vrai; mais conclure
de-Ià, comms le fait le demandeur en cassation, q u ’il ne s'est pas
désaisi de la propriété , c ’est une absurdité rare, pour ne pas dire,
monstrueuse. C ’éloit la conséquence directement contraire qu ’il falloit
en tirer: car la réserve de l’usufruit suppose nécessairement l’entier et
l ’actuel délaissement de la propriété nue. — Eli ! comment d ’ailleurs
auroit-il conservé une propriété dont il fàisoit, pour nous servir des
propres termes du contrat, DONATION ENTRE-VIFS, pure, parfaite et
irrévocable ?
2°. Ce n’est pas seulement pour le cas de prédécès de son neveu r
que le donateur se réserve le droit de choisir entre ses enfans à naître,
Celui qui devra recueillir après lui l'effet de la donation. Il se le réserve
purement et simplement ; il se le réserve dans les termes les plus géné
raux: ii se le réserve, par conséquent,pour l’exercer môme pendant la
vie de son neveu ; et assurément si le neveu eût eu plusieurs: enfans et
que le donateur en eût choisi un du vivant de leur p è r e , celui sur
lequel seroit tombé son choix, auroit eu la préférence sur ses frères ,
ni plus ni moins q u e , si l’élection n’eût été faite q u ’après la mort du
neveu donataire en première ligne.
°. Faut-il répéter que les premiers principes s’élèvent contre l’idée
d une substitution vulgaire , dans une donation entre-vils acceptée par
le donataire ? Faut-il répéter que la seule acceptation du donataire lait
3
manquer la condition essentielle, et, s/ne (jud non, de laquelle dépend
toute substitution vulgaire ? — Il est par trop pénible d'étre obligé de
revenir sur des vérités aussi simples, sur des règles aussi élémentaires.
S ixièm e objection. Mais vous ne faites point attention qu’il s’agit ici
(l’une donation par contrat de mariage, et qu e, dans un contrat de
mariage , on peut donner et retenir. Ces deux bases posées, n’est-il
pas clair que l'intention du donateur a été «le demeurer maître de sa
moitié de jardin, pour en transférer la propriété, soit à son neveu,
soit à l'un ou plusieurs do ses enfans, suivant qu'il lui paroitroit
convenable ?
Réponse. Non , certes, cela n'est pas clair, et c ’esl déjà beaucoup ;
�JoK
( -7 )
car pour casser le jugement qui a décidé le contraire, il faudroit que
b chose fût claire comme le jour.
Mais c’est trop peu dire : il est clair, plus clair que le jour mêm e,
que telle n’a pas été l’intention du donateur.
i°. Encore une fois, le donateur ne s'est réserré que l’usufruit; il
s'est donc exproprié; il n'a donc pas conservé le droit de disposer de
la propriété au préjudice de son neveu , en choisissant par la suite
l ’un des enfans à naître pour la recueillir même du vivant de leur père.
z°. A qui se réfèrent dans le contrat, les mots toutes fo is au ch o ix
de Charles L a d ev èze, prêtre? Ils se réfèrent au membre de phrase qui
les précède im m édiatem ent, et avec lequel ils ne font qu'un seul
contexte, c ’est-à-dire , aux mots ou à un ou plusieurs enfans qui seront
procréés du présent mariage. — L e donateur ne s’est donc pas réservé,
par ces term es, la faculté de choisir entré son neveu et un ou plusieurs
de scs enfans : les droits du neveu étoient invariablement fixés par 1 ac
ceptation q u ’il venoit de faire de la donation pure, parfaite et irrévo
cable de son oncle.
x
Septième objection. Supposons la loi cùm quidam applicable à I»
cause dont il s’agit. Dans cette hypothèse, le tribunal civil de la
H a u te - L o ir e , par son jugement confirmé par le tribunal d ’appel de
l l i o m , aura violé cette loielle-m êm e; car, d ’après la règle qu’elle éta„
b l it , les enfans devoient être considérés comme donataires actuels avec
leur père, et le bien donné devoit être censé leur avoir appartenu con
jointement avec celui-ci, dès le moment de la donation.
Réponse. Nous avons déjà détruit cette opinion en observant que
la loi cùm quidam contient deux dispositions bien distinctes:— Q u e ,
par 1 une , elle établit la nécessité de convertir la disjonctive ou en
copulative, lorsqu’elle se trouve entre plusieurs personnes appelées à
une môme chose. — Q u e , par l’autre, elle déclare que chacune de ces
personnes doit prendre sa portion virile dans la- chose donnée. — Mais
que si, comme on n’en peut douter, la première de ces dispositions
est applicable aux donations faites à telles personne ou à leurs enfans
a n aître, il n en peut pas être de même tic la seconde, puisque des
cnians non encore nés ne peuvent pas concourir avec leur père, et
D
3
�( sS )
qu e, de-Ià, résulte pour eux la nécessité de les considérer comme ap
pelés à recueillir après lui, c'est-à-dire, comme fidéicommissaires.
Ajoutons que Furgole ( i ) confirme par son autorité, et p arcelle
du président Favre, tout ce que nous avons dit à cet égard; après avoir
prouvé que , dans le cas d ’une disposition faite en faveur d'un te l
et de ses enfans actuellem ent e x is to n s, les enfans doivent concourir
avec leur père, il ajoute : s i les enfans appelés conjointement avec
leur p ère, ne sont pas encore nés ou conçus........... comme la disposi
tion en fa v eu r des enfans ne peut pas se vérifier et ne doit pas être
inutile, et que , s'ils n'existent p a s.....ils ne peuvent pas concourir, i l
fa u t qu'ils soient appelés, non p a r la vulgaire seulem ent, m ais succes
sivement par la fidéicom m issaire , comme s'explique fo r t bien M . le
président F aber, dans son code, livre G, titre 8, de f i n g , parce q u e ,
d'un côté, la vulgaire ne peut avoir lieu que quand ceux qui sont ap
4
p elés , existen t, esse enim debet cui datur ( lo i 1 , D . de jure codicillorum ) ; d'autre p a rt........ s'ils n'existent p a s , les paroles indiquent
le trait du temps auquel ils pourront concourir pa ir lcur existence :
p a r conséquent, afin que la disposition qu i regarde les e n fa n s, ne soit
p a s in u tile , i l f a u t la prendre dans le sens de la fidéicom m issaire.....
5
Selon certains auteurs, entrautres M. Meynard , livre.
, chap. Z ’j ,
lorsque les enfans sont appelés avec leur père p a r la disjonctive o u ,
ils ne sont censés appelés que par la vulgaire ; car s i le testateur
appelle Titius ou ses enfans, i l s'exprime de manière à fa ir e entendre
qu 'il ne veut appeler que Titius ou bien ses enfans, par l'alternative,
et non les uns et les autres p a r concours, n i par ordre su ccessif en
vertu de la fidéicom m issaire. . . . M ais les auteurs qu i ont raisonné
a in s i, n'ont pas f a i t attention qu'il y a un texte précis dans le droit ;
savoir, la lo i
4 i au
code de V erborum significationc , qu i a déclaré
d u n e manière expresse et précise, que, quand plusieurs personnes sont
comprises dans la même disposition p a r l'alternative ou la disjonctiv e , comme s 'il est dit : J e lègue à Tilius ou à Mœvius telle c h o s e ,
j institue Titius et Mœvius, j e substitue te l ou tel; c’est tout de même
( i ) S u r l ’article n j Ue l ’o rd o n n a n c e de J 747 *
�( 29 )
que si le testateur avoit dit : Je lègue à Titius et à Mœvius telle
chose; j ’institue Titius et M œ vius, je substitue tel ou tel ; ensorte que
tous sont appelés conjointement et p a r concours, de même que s'ils
avoient été conjoints p a r la copulative; pourvu néanmoins qu'ils soient•
vivans et existons , lorsque la disposition doit être e x éc u tée , comme
nous l'avons exp liq ué pour le cas de la vocation simultanée p a rla copulative........ voilà pourquoi i l fa u t appliquer au cas où deux ou plusieurs
personnes sont appelées à la même disposition p a r la disjonctive ou l'a l
ternative , ce que nous avons dit par rapport à celles qui sont (rppdécs
à la même disposition p a r la copulative.
%
Huitièm e objection. Dans les espèces dont s’occupe la lor cùm qui
dam , il n’y a q u ’une seule disjonctive, et dans le contrat de mariage
de 1 737, il s’en trouve deux : a donné........ audit Jean-G abriel JouveLadevèze, son neveu acceptant........ou à un on plusieurs des enfans
qu i seront procréés du présent mariage. .. .. dans votre systèm e, if
faut ou que les deux disjonctives subsistent, ou que l’une et l’autre
soient converties en copulative: au premier cas, point de fidéieommis;
au second, il faut dire qu’au fidéieommis sont appelés à la fois et un
,
et plusieurs en fa n s, ce qui présente un sens inadmissible par son absurdil’é même.
'
Réponse. L e demandeur sc seroit épargné cette objection s’il eût
bien voulu lire jusqu’au bout la clause de laquelle il argumente. L a
voici en entier : — A donné.......
audit Jean-G abriel Jouve-Ladevèze,
son neveu, acceptant et remerciant comme dessus ou à un ou plusieurs
des enfans qu i seront procréés du présent mariage, toutes fois au choix
dudit sieur Charles de Ladcvèzc, prêtre, la moitié du ja rd in , etc.
est évident, par ces mots, toutes fo is au choix dudit sieur Charles
11
de Ladevèze , prêtre, que l’intention de celui-ci n'a pas été de donner
en seconde ligne à un et a plusieurs de scs futurs petits-nevcux, niais
bien à un ou plusieurs d'entre eux qu’il se réservoit de désigner par
la saite.
Il
seroit donc absurde de donner un sens copulatif à la disjonctive
ou placée dans ce membre de phrase; et l’on ne p o u r r a i t l'interpréter
ainsi, que par une très-fausse application de la loi cùm quidam dont
�(
3o
)
l'auteur n'a jamais pensé à convertir la particule ou en copulalive ;
quand elle seroit employée dans des dispositions par lesquelles le tes
tateur ou donateur auroit expressément retenu l’option entre les deux
individus qu’il auroit appelés alternativement.
Mais s’en suit-il de-là que l’on ne doive pas entendre, dans le sens
co p u la tif, la première particule ou qui se trouve dans la phrase dont
il s’agit? N on certainement, et tout, au contraire, commande cette
interprétation.
Elle est commandée par l’impérieuse nécessité de donner un e ffe t,
q u e l q u ’il
so it, à la vocation des enfans à naître.
Elle est commandée par la certitude que , sans cette interprétation,
la vocation des enfans n’auroit ni effet, ni sens quelconque.
Elle est commandée sur-tout par une loi qui, par sa toute-puissance,
nous l’avons déjà dit d’après F u rg o le, détermine le sens des paroles
comme s 'il y avoit une conjonctive, lorsque l'alternative se trouve
entre plusieurs personnes.
T o u t se réunit donc pour justifier le jugement du tribunal d'appel
d e R io m , et pour assurer aux enfans Ladevèze le rejet de la demande
tendante à le faire casser.
Délibéré à P a r is , le
3o frim a ire
an 10 de la république.
M ERLIN .
. .
1 . - - ■— 1 1 1 ■
■
'
-E
D e l'imprimerie de LE N O R M A N T , rue des Prêtres S.-Germain-
l ’Auxerrois, N ° 2
4
.
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jouve-Ladevèze. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cambacérés
Merlin [= Merlin de Douais]
Subject
The topic of the resource
donations
substitution
franc-alleu
jardins
partage
critique du fideicommis
doctrine
prêtres
fideicommis
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations pour les frères et sœurs Jouve-Ladevèze, défendeurs en cassation ; contre Charles-Louis Jouve-Ladevèze, leur oncle, demandeur.
Table Godemel : Donation : donation faite, antérieurement à l’ordonnance de 1743, en faveur du mariage, au profit du contractant, ou, à un ou plusieurs enfans qui seront procréés dudit mariage, est une substitution fidéicommissaire, qui saisit exclusivement les enfans provenant de ce mariage.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Le Normant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1737-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1119
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1115
BCU_Factums_G1116
BCU_Factums_G1117
BCU_Factums_G1118
BCU_Factums_G1120
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53147/BCU_Factums_G1119.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
critique du fideicommis
doctrine
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fideicommis
franc-alleu
jardins
partage
prêtres
substitution