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Text
MEMOIRE
P O U R
D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
J u l ie n
CONTRE
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son mari yjuge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de Brioude ;
D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E ,fille majeure,
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit P i e r r e D A L B IN E et de ladite
D E J A X , son épouse ,
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit
Montbrizet-Gizaguet ;
' Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la lo i, pour éluder la
prohibition de la loi, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lois, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? Telle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�(2)
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame Dalbine, tous l’effet d’un plan cons
tamment suivi, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfans ; savoir, Julien, V ita l,
Antoine premier, Antoine second du nom , et AnneMarie Dejax, première du nom.
Julien, V ital, et Antoine premier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
Anne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
Tartel; elle a survécu à son mari, et vient elle-même
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
A n toin e D e ja x , second du nom , s’est marié avec M arieTh érèse D elchier.
De ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
Julien Dejax, appelant;
Anne-Marie Dejax, seconde du nom, veuve Peyronnet j
E t Agnès D ejax, épouse du citoyen Dalbine, juge.
Celle-ci a eu , de son mariage avec ledit Dalbine, trois
enfans; A n n e-M arie, qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et Marie Dalbine*
Telle est la généalogie des parties»
�Anne-Marie Dejax, première du nom, veuve Tartel,
n’avoit point eu d’enfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien, V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom, l’avoient prédécédée. Antoine, second du
nom, laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les lieritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’Antoine, second du nom, il n’en
restoit que trois , par le décès de Vital-François.
A nne-M arie D ejax, seconde du nom , s’est mariée
en 1770, avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
mariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien Dejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de sa part, même de ses fa its et pro
messes , et entièrement aux risques, périls et fortune
du donataire.
Lu s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
1
Il n’en a pas-clé de même pour la dame D albinc.
Par son contrat de mai'iage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit •, elle lui a donné, en outre, une
somme de 2,000 fv., payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
Le 19 novembre 1778 , elle dispose en faveur de
A 2
�C4 )
Anne-Marie Dalbine , sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. La donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géi’a et administra à son gré ; elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
On va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit»
Les actes vont se succéder.
i i novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
que, si les quittances en avoient été fournies par la dame
D albine, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-même, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vue*, de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novembre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame Dalbine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée do
Tusage delà vue; se réservant, est-il ajouté, la consti
tuante , de toucher et recevoir elle-même les sommes qui
seront payées par ses débiteurs} de manière que lu datne
�(5)
Dalbine sera censée rüavoir absolument rien reçu en
vertu des présentes ; et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 \ la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixième,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
Le 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. La donation fut évaluée à
une somme de 11,600 fr ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la minute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
Le 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lui avaient été adjugées moyennant
�( 6)
la somme de 2,95o f r . , mais auxquelles elle avoit fa it
des réparations considérables, pour, par la dame D albine, jou ir d'icelles dans Vétat où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,221 j\
par elle déjà payée ¿1 la nation, et à la charge âe payer eï
la nation le restant de Vadjudication. I<e contrat 11e man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r .,
qui devoit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220 fr.
Ce n’étoit point assez. 21 vendémaire an cinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, mari d’AiméMarie Dalbine.
Par cet acte, il est dit que la dameDejax, veuve Tartet,
a fait vente à Montbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-devant religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé parla nation; 30. de
tous les m eubles, outils aratoires, et généralement de tous
les meubles étant au pouvoir du métayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître dudomaine de Vazeliettes , sous la réserve de Tusufruit
de tous les objets vendus. La vente est faite moyennant la
somme de 25,000 francs, dont le contrat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et les capitaux des reinboursemcns qui étoient
faits par les débiteurs.
�6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la niece, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c'est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so?nmes , tant en principaux,
intérêts que fra is , ainsi, est-il ajouté , que le montant
du prix de la vente de Vazeliettes par elle consentie au
profit de défunt Gizaguet, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé à son gré, soit ¿1 payer partie de ses
dettes contractées, ou à ïentretien de sa maison ou
autrement, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insiiffisans pour fo u rn ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
Enfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8, par
lequel, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame Dalbine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
E lle est décédée le 4 vendém iaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-dire , dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. Elle a
fait citer à ces fins le cit. Dejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
Le cit. Dejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
�(S )
19 messidor de la même année, la dame Dalbineet son
m ari, les enfans Dalbine, c’est-à-dire, Marie Dalbine,
Pierre Dalbine et Anne-M arie D albine, veuve Montbrizet-Gizaguet ;
Savoir : la dame Dalbine et son mari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, Pierre, et Anne-Marie Dalbine, veuve Gizaguet, enfans dudit Dalbine, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
Et encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germ inal an 5 , du domaine et métairie de Vazeliettes
et du Poux, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été «tatué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D ejax, et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Yazeliettes et le P o u x, et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en être délaissé à
la dame Dalbine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D ejax, veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, revenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : Dans la
moitié pour Xinstitution de la dame D albine, sont com
prises toutes lesfacultés de disposer de la défunte,faites
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2; en con
séquence la disposition du sixièm e, enfaveur des enfans
D albine, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( IO )
consentemenths avons m is, sur ce chef> hors d*instance,
sa u f à sc pourvoir contre leur mère> ainsi qu’ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’un mois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du mobilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux; n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. Le jugement oixlonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante delà succession de la défunte,et de rendre comptey
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belmont, notaire.,
. Condamne le citoyen D ejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
Le citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes :
i° . La donation faite, en faveur des enfans Dalbine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation ^du iy floréal an 2 , à l’acqui
sition des deux maisons nationales;
3°. La vente du 21 vendémiaire an 5 , consentie au
citoyen Montbrizet-Gizaguet ;
�Et enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
- La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte dé démontrer la négative.
i Donation du 17 germinal an 2.
Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d'état. Les enfans Dalbine l’ont reconnu eux-memes ;
ils ont déclaré ' qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an 2 y qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
On a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine; mais
on s’est abusé;
L ’art. X V I porte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l’avenir à la faculté de
disposer j au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage dés successions; savoir , du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux ; et du dixième ;
si l’on a dés héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendi*e la lo i, què de penser
qu’ellé a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu’après avoir défendu d’avantager directement les successibles j elle a permis de les avantager indirectement.
Ce seroit preter une absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que ië successible v i t , ses en
fans ne sont point en ordre de succéder \ il leur fait
B 2
�( 12 )
obstacle. Mais il est certain aussi, que le père'et le fils
ne sont censés, en droit’, faire qu’une seule et même per
sonne. Pa ter et filin s un a eaàemque persona.
La loi, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. Or , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
l’enfermer un avantage indirect ?
La coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens paraphernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres à qui le m ari puisse ou doive
succéder ,*parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donnèr indirectement ce qu’on ne
peut directement.
Et, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit commun , et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rap
porter il la succession ce qui «voit été donné au petitfils; et, respectivement, le petit-fds ce qui avoit été donné
au père?
La loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
autorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite à retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixième, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�(i3)
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
' L ’article X X I porte que si le donataii’e ou héritier
institué est- en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
"Et l’article X X IIporte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
- Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r, auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaire?
L ’article X X V I defend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif ; et
il est ajouté, ou à ses descendons. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
D ira-t-on que la loi ayant parlé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant n’a pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( i4 )
siorii E n fin , la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre ses puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 17 nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’an des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition -f
comme faite indirectement au profit die l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée nulle, d’abord en
première instance, au tribunal d’arrondissement de cette
commune) et ensuite sur l’appel en ce tribunal.
«
Subrogation du 17 jlo rca l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na~
tionales, n’est évidem m ent qu’une donation déguisée sOus
le nom de vente.
Ce n’est pas sans doute par la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger de la natiire de l’acte, mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, et consacré par les lois.
Parmi les différons textes de lois, on peut citer la loi
SuJpitius, au digeste, D e donationibus inter virum et
uxoram, et la loi Niidâp au cod. D e contrahenda emp~
tionex
�( i5 )
Papon , sur la loi Suïpitius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à chose que la loi ne permet, 1 on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et juge
« qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’un de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner , fait, par testament ou conti'at entre-vifs,
« confession que l’autre lui a prêté, ou employé à ses
« affaires, ou délivré, ou remis en ses mains certaine
« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
« fait tel p rêt, ou remis, employé, ou délivré la somme.,
« La simulation, dit le mémo auteur dans. un auti'e
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat, chose dont
« néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap*
« parence pour le contrat passé entre les parties. Un
« homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r ix , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
« si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera nulle, comme le dit Ulpien. »
Et Papon cite ladite loi ISudâ.
« Quoique les parties, dit Ricard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 16 )
« un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
eu provoquent la nullité.
• A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer : Dans un acte
devant notaires il faut, dit-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
public, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport à l’officier public.
Et de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, Plu s valere quod agitur, quàrn quod sirnulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’efl
détermine pas toujours la nature; si,malgré la dénomina
tion
�C r7 )
tion que les parties lui ont d o n n ée, on peut l ’arguer de
simulation et de fraude , comment s’établit maintenant
cette simulation et cotte fraude ?
Par les circonstances. .
t raus ex circonstantiis probarî potest, dit D um oulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F raus, dit énergiquement d’Argentré, sur l’article
CGXCVI de la coutume de Bretagne , probatur conjecturis antecedentibus , consequentibus et adjunctis.
Falsissim im i, a jo u te-t-il , quod quidam putaverunt non
nisi instrumentis probarî posse; facta enim extrinsecus
fraudent potiùs probant, quia nemo tarn supinus e s t ,
ut scribi patiatur quœ fraudulenterfacit.
La fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. De la vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
Citerons-nous encore Denizard. lies donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 17 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile: aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect-, au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mômes auteurs, les principales
circonstances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La première, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas personasfacilè prœsumitur.
C
�( 18 )
La seconde , la non-nécessité de vendre, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
La troisième, si les actes sont géminés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
certitude.
En un m ot, comme dit d’A rgentré, dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les circonstances antécédentes et
subséquentes.
La parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r ix , tout se rencontre ici. Le notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
n a n te s , on ajoute les circonstances antécédentes et subsé
quentes ; si l’on juge, pour rappeler les expressions de
d’Argentré, ex adjunctis, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
La dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et de l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
et interdit toutes donations, à charge 4e rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou ù ses descen-
�( 19 )
dans; et de ce que cet article ne parle que des ventes a fonds
perdu, la dame Dalbine et son mnri n’ont pas manque
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire , autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la maxime, Inchtsio unius est exclusif) chenus.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’anmille pas; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55e. question :
« A ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion, et
« sans aucun des vices qui pourraient annuller le
« contrat. »
Fixons-nous sur ces dernières expressions.
On voit qu’on n’a pas môme osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes simu
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. Le doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
des ventes faites de bonne fo i, et non en fraude; des.
ventes sincères, et non des ventes simulées. On voit
même, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
« Sur la cinquante-cinquième question, ¿jjue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
G a
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commerv ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion, ni
« défaut de payement. »
Qu’induire de là ? La question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
à un héritier présomptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée ?
Cette question est sans doute bien diiféi’ente.
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeîiettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de 25,000 francs,
numéraire métallique, laquelle somme, e st-il dit, la
venderesse reconnaît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 25,000 francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? Et si cette somme avoit été
payée comptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves,tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son armoire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
• Mêm<^circonstances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix; point d’attestation tic
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
Mais, de plus, réserve de la part de la venderesse de 1 usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, tresordinaire au contraire dans les donations ; réserve qui
seule suffiroitpour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l’article X X V I de la loi du 17 nivôse.
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds perdu, prohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement dfes
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame Dalbine, du domaine de Fontanes , domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-Marie Dalbine,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2, procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
La loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? Elle inter
pose ses enfans.
; Donation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�(
22
)
alors disponible, envers les non successiblcs, c’est-à-dire,
du sixième.
La q u o t i t é disponible, o u , pour mieux dire, qu’elle
croyoit disponible, étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveugle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été payée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seroient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C ’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendém iaire an 5.
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame Dalbine ait fo u r n i quittance aux
débiteurs, c’est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes sommes, tant en principaux, in
térêts que fr a is.
Et il est ajouté, ainsi que le montant du prix de la
Vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x.
Pourquoi cette dernière mention ? Q u ’ e t o i t - i l besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la vente? N’étoit-ce pas elle-même
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre comptable , des sommes par elle reçues et quit~
tancées ; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’achève-t-il pas de décéler
la fraude ?
Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa maison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa vie, même du
domaine vendu ; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
Enfin, testament du 9 messidor an 8, qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
On a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
La lo i, a-t-on d it, ne défend que les ventes h fonds
perdu, faites à des successibles. O r, ic i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu ; e t, d’un autre côté, n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger h la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa
succession.
La donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme?Ne profite-t-elle pas aux enfans communs? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner à la femme et aux enfans ? La
�( H' )
loi ne défend-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement , et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la circonstance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au mari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
Autre jugement du tribunal d’appel séant à Rouen,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
Voici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« Deux questions ont été posées :
« La première consistoit à savoir quelles sont les con« ditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
« fait par un père, à l’un de ses enfans ou de ses gendres.
« La seconde avoit pour objet de reconnoitre si Le« monnier, acquéreur, avoit rempli les conditions néces« saires pour la validité de son acquisition.
« Le tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la pre« mière de ces questions , que les principes et la juris« prudence, fondés sur l’art. CCC CX X X 1V de la cou« tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( *5 )
« ticle IX de la loi du iy nivôse an 2, se réunissent pour
« établir qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
ft père l’un do ses enfans, 11’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le jusle prix de
« la chose acquise, et qu’il justifioit de l’emploi des de« niers de la vente, au profit du vendeur.
« Et sur la seconde question, il lui a paru que L e« monnier n’avoit point rempli les conditions requises
« pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
cc sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point unepreuve
« de l’emploi des deniers , en faveur du vendeur, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par Dumoulin, en ces termes :
« Conclusum quod in venditionefactâjilio velgenero,
« confessio patris non valet de recepto, etiamsi nota
is. rius dicat pretium receptum coram se.
• « D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’Eure, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réform é ; et le contrat de vente, passé par le défunt
« H erm ier à L em onnier, son gen dre , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testament du 9 messidor an 8.
Un premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour quel département il étoit
établi. Titre Ier. scct. II , art, X II de la loi de ly y i.
Une seconde nullité, de ce qu’il n’a pas désigné le n°.
de la patente. Loi sur les patentes*
D
t
�( 26 )
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse, c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surnom , et non par son vrai nom.
L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r,
celui qui ne signe pas son vrai nom ne signe véritable
ment pas.
Le nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement siuver/zat ; il
devoit signer Ci'oze.
Un décret de l’assemblée constituante, du 19 juin 1790,
art. 11, porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille.
Autre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X \ III y
porte, qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera que leur nom patronimique, c’està-dire , de baptême, et celui de la famille, et leurs fonc
tions ou professions.
6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter de nom ni de prénom, que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécutif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�( 27 )
On citera l’ordonnance de Henri II, de i 555 , qui a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citera l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article GGXI, qui porte les mômes dispositions.
Et, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
même, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de famille, après avoir déclaré son prénom : Ego
Joannes...................testarnentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. Singulos testes, dit cette loi, qui testamento adhibenturproprio chirographo annotare convenit, quis, et cujus testamentum signaverti. Il faut que, par l'acte même, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le témoin, quel
est ce témoin. Un surnom peut être commun à plusieurs.
Le nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne signe pas par son nom , est comme s’il ne
signoit pas.
Le testament est donc nul ; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
. Dans tous les cas, le testament ne pourrait avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( .2 8 }
seulement qu’elle n’en auroitpas disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D ans la moitié, est-il dit,
pour Cinstitution de la dame D albine, sont comprises
toutes les facultés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ites depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. On ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2,
ou, pour mieux dire, à celle du 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible-, et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi il faudroit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible, et la donatiap>du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son'contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à A n n e -M a r ie D albine-, en tant du m oins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyi'onnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
Le jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
On voit combien cette cause est importante. Elle n’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt le
succès qu’elle attend , il n’y auroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. L e s fraudes, déjà trop
communes, se multiplieroient ; la loi seroit sans objet ; la
�(2 9 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a-t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreroient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G E S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d R i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d’appel. — A n 11.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
successions collatérales
donations
coutume d'Auvergne
droit intermédiaire
doctrine
nullité du testament
surnoms
défaut de nom patronymique
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
testaments
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
Description
An account of the resource
Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Jospeh Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1771-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0716
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0932
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Fontanes (domaine de)
Brioude (43040)
Rights
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Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
défaut de nom patronymique
doctrine
donations
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
successions collatérales
surnoms
testaments
ventes
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MÉMOIRE
^ y?
POUR
L e s s ie u r s A nnet et M
ichel
B O N H O U R S , d ame A
nne
BONHOURS
et le s i e u r J e a n - B a p t i s t e C E L M E , son m a r i , et le s i e u r L o u i s COUR
B O N H O U R S , t u t e u r l é g a l d e ses e n f a n s m i n e u r s , to u s p r o DE
p r i é t a i r e s , h a b i t a n s la v i l l e d e M o n t f e r r a n d , Intimés;
-—
CONTRE
D a m e A n t o i n e t t e B R U N , veuve en premières noces du sieur
G u i l l a u m e B U J A D O U X , et sieur J o s e p h V E R N I E T T E ,
son second m a r i , marchands , demeurant en la 'ville de
Clermont , Appelans.
S ans d o u t e , le droit de transmettre sa fortune à un héritier de
son choix est u n des droits les plus précieux de la société. Tout
acte qui renferme l ’exercice de ce droit, lorsqu’il se présente revêtu
des formes légales et des caractères de la sincérité, mérite la pro
tection de la justice.
Mais aussi la justice frappe toujours de sa réprobation l ’acte
mensonger que l ’on ose faire apparaître sous les couleurs de la
vérité. E lle sait déjouer les manœuvres criminelles, à l ’aide des
quelles on voudrait substituer la fiction à la réalité.
Dans le procès qui s’agite, la dame V er n ie tte , égarée par une
basse cu pi dité, n ’a pas craint de s’arroger la qualité de légataire
universelle du sieur B r u n , son frère. On l ’entend dire et répéter
(que c ’est là un don de la gratitude, de l ’amitié fraternelle. A l ’en
tendre, que n ’a - t - e l l e pas fait pour la mériter! Soins attentifs,
égards , peines , sacrifices , rien n ’a été épargné pour embellir
l ’existence du sieur Brun , ou p o u r la soulager dans les tristes
années d ’une vieillesse infirme.
Q ue faisaient pendant ce tems-là les enfans Bonheurs, neveux
du sieur B r u n ? Ils oubliaient leur oncle, qui disait, s’ il faut en
croire la darne V e r n ie t te , avoir depuis long-tems à s’en plaindre.
C e langage de la dame Verniette respire l ’exagération et la ca
lomnie. Il est démenti par les nombreux élémens de la cause.
La correspondance du sieur Brun , les enquêtes, sagement a p
préciées, réduisent à leur juste valeur les assertions de la dame
Verniette. C e q u ’elles apprennent, c ’est que la dame Verniette,
en attirant son frère à C le r m o n t , eu le recevant chez elle, était:
�w
.
( * >
dominée par l ’arrière-pensée de s’emparer de toute sa fortune. E lle
savait q u ’ il chérissait les enfans Bonhours, ses neveux ; elle chercha
à les lui rendre odieux. Elle prit soin de les éronduire, toutes les
fois q u ’ils se présentaient pour rendre leurs devoirs à un bon parent.
Doux et tim id e, affaibli par les souffrances', et privé souvent de
l ’usage de sa raison, le sieur Brun était entièrement sous la domi
nation de sa sœur : elle le tenait en charte privée.
C e t état moral ne permettait pas au sieur Brui', de nommer un
héritier testamentaire, quand il l ’eut voulu.
Non; jamais il ne voulut donner tout son patrimoine à la dame
V er n ie tte , et dépouiller ainsi de leur part les Bonhours, ses neveux,
dont il n ’avait point eu à se plaindre. Jamais, dans sa nombreuse
correspondance, dans ses propos, il 11e laissa pressentir une pareille
disposition.
Aussi l ’étonnement fut général, quand on parla dans le public
d ’un testament olographe, qui attribuai t à la dame Verniette toute
l ’ hérédité du sieur Br u n . On ne pouvait y croire : chacun voulait
voir cette pièce.
Tous ceux qui la virent soupçonnèrent sa sincérité; elle apparut
comme une œuvre de fraude.
Les enfans. Bonhours durent l ’a tt a q u e r, par respect même pour
la mémoire de leur oncle. S ’ ils eussent gardé le silence, on aurait
pu l ’accuser d ’injustice a leur égard.
Si le blâme de la société retombe sur la dame V e r n ie t te , elle ne
doit l ’imputer q u ’à elle-méinc. Pourquoi tant d ’avidité? N ’était-ce
pas un assez beau lot que la moitié d ’ une succession qui s’élève à
plus de Go,000 fia lies ?
L ’écrit informe sur lequel elle fait reposer sa prétention n ’a pas
été tracé par la main du sieur Brun . Il n’émanerait pas dans tous
les cas d ’ une volonté libre.
L a vérification qui en a été déjà faite par experts 11e mérite point
de confiance. Les premiers juges l’ont rec onnu’, ils en ont ordonné
une nouvelle.
La p reu ve , qui avait été offerte par la dame Verniette et or
donnée par la C o u r , n ’a point été administrée*, au contraire, le
résultat de celte mesure ajoute encore aux moyens qui tendent à
démontrer la fausseté ou l ’illégalité du testament attaqué.
FATTS.
L e sieur Brun , chirurgien à Montferrand, avait eu trois enfans,
un fils et deux tilles. __________
�T ^ J
Antoinette B r u n , l ’une de ces filles, s’était mariée en premières
noces avec le sieur Bujadoux; en secondes noces, elle est devenue
réponse du sieur Verniette. Ces époux soilt appelans dans la cause.
iV!ici)elle B r u n , sœur de la dame Verniette, avait épousé le sieur
Bonliours, propriétaire à Montfcrrand. Elle est décédée depuis
plusieurs années, laissant cinq enfans, qui sont les intimés.
L e sieur B r u n , frère des dames Verniette et Bonliours, est dé
cédé, sans postérité, depuis 1824. Leu r père était mort quelques
années auparavant.
La surcession du sieur Brun fils est assez considérable- elle est
toute mobilière. Elle se compose du bénéfice de son commerce du
fruit de ses économies et de la valeur de sa part dans l ’hérédité
paternelle.
L a dame Verniette a fait apparaître un prétendu testament,
sous la forme olographe, qui lui assurerait l ’intégralité de la suc
cession de son frère. C ’est l ’appréciation du mérite de ce testament
qui fait l ’objet du procès.
L e sieur Brun fils avait été d ’abord élève en pharmacie. Il aban
donna cette carrière pour embrasser le commerce, et vint demeurer
à Paris en 1802. Il choisit la commission. Il expédiai-t les diverses
sortes de marchandises q u ’on lui demandait. Originaire de Montferrand, les envois de marchandises q u ’il faisait à C l e r m o n t durent
être fréquens, et ses recouvremens dans la même proportion , ce
qui mult iplia les relations q u ’il eut avec cette ville durant un grand
nombre d ’années.
Les élémens de la cause n ’apprennent point quelles furent pen
dant long-tems les personnes chargées de sa confiance à Clermont.
Seulement ia dame Verniette produit plusieurs lettres dont les dates
sont postérieures à 1820, et desquelles il résulte q u ’aux tems où ces
lettres étaient écrites, la dame Verniette était chargée par le sieur
B r u n , son frère, de faire quelques recouvremens. Il l ’accuse même
par fois de négligence à ce sujet.
C e n ’est assurément pas 1111 sentiment de prédilection qui portait
le sieur Brun à s’adresser quelquefois à la dame Verniette pour
l ’aider dans ses recouvremens. Il 11e pouvait la préférer à la dame
Bonliours, qui était alors décédée depuis long-tems; et celte der
nière eu t-e lle vécu, comme elle habitait Montferrand et que sa
famille était nombreuse, elle n aurait pu servir les intérêts du sieur
B r u n , sou frère, sans nuire beaucoup aux siens; inconvénient qui
ne*se rencontrait point à l ’égard de la dame Ver niette, qui a tou
jours habité Clermont.
�I
T T T
L a clame Verniette veut s’emparer exclusivement île l'affection
(le son frère. Toujours, dit-elle, exista entr’eux la plus vive amitié;
amitié q u ’avait entretenue un échange mutuel de soins, de services
et d ’attention , et qui engageait le sieur Brun à venir de tems en
tems à Clermont pour passer quelques semaines avec elle.
A u contraire, dit-elle encore, les rapports du sieur Br un avec la
dame Bonhours et sou époux étaient nuls ou peu agréables; il
éprouvait même pour eux une sorle cl’éloigneinent , dont i l est
in u tile de -rechercher les causes, mais q u ’il a manifesté dans p l u
sieurs circonstances.
C e langage, suggéré par une Lasse c u p i d ité , est outrageant pour
la mémoire de la dame Bonhours. Il est hautement démenti pur
diverses lettres que rapportent les intimés, et qui renferment des
témoignages d ’affection et de confiance de la part du sieur B run
pour les époux Bonhours et leurs enfans; démenti encoie par les
nombreux témoignages invoqués pour éclairer la justice, il n est
rien moins que justifié par la correspondance dont se prévaut la
dame Verniette. O ù sont donc les preuves de sa perfide allégation?
Quelles sont donc les circonstances qui manifestent Véloignem ent
q u ’elle suppose avoir existé entre le sieur Br un et les époux Bon
hours? On la défie même d ’indiquer des causes qui eussent dû
amener ce prétendu-éloignement.
E lle a calomnié la mémoire deson frère.Non, il n ’eut paspour elle
une amitié exclusive. O u i , la dame Bonhours, son époux et ses
enfans , ont partagé son affection , et n’ont rien fait pour démériter.
L o r s q u ’ il venait en Au vergne, avant la-mort de sou p è r e , il té
moignait à ses sœurs une égale affection; et s’il avait quelque pré
férence , c’était pour la dame Bo n h o u r s, bonne mère et bonne
épouse. Tantôt à Montferrand, chez son père ou chez sa sœur; tan
tôt à C le r m o n t , chez la dame Bu jadoux (depuis Verniette), et chez
des amis, il recevait partout un bon accueil.
A u voyage q u ’il fit en 1818 pour le partage de l ’ hérédité pater
nelle, il résida à Montferrand plus long-tems q u ’à Clermont. La
veille de son arrivée était décédée la dame Bonhours, sa sœur; il
en témoigna les plus vifs regrets à son .beau-frère.
11 faisait des cadeaux à la dame Bonhours, à sou époux et à ses
enfans. Il en recevait d ’eux. C ’était ordinairement quelques fûts
tie vin blanc., quelques paniers de pommes choisies que sa sœur et
son bcait-lrèie lui adressaient à Paris. La vérité de cette allégation
est établie par su correspondance avec, les époux Bonhours.
La mort de la dame Bonhours lui causa beaucoup de chagrin. Il
�----------------------------- m
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témoigna sa douleur à son beau-frère. Il le plaignit, en l ’assurant
de son inaltérable amitié, avec ce ton de sincérité qui part du cœur.
C e t événement, si funeste pour les en fans Bonhours, livra le
sieur B r u n , leur oncle, à toute l ’obsession de la dame Verniette.
L ’amitié q u ’il portait aux neveux, bien q u ’elle lut sincère, ne
pouvait pas être aussi vive que celle q u ’il avait eue pour leur mère:
il les connaissait moins.
La dame* V e r n i e t t e , qui convoitait la succession du sieur B r u n ,
craignit moins alors de voir déjouer ses manœuvres pour éloigner
les eu fans Bonhours et leur enlever l ’aiFection de leur oncle. Elle
cherchait à l'aire parade d ’un atLacheinent sans bornes pour un
frère qui sans doute lui laisserait en récompense toute sa fortune.
On ne doit pas s’étonner si, postérieurement à 1820, la correspon
dance du sieur Brun est plus active avec la dame Verniette q u ’avec
le sieur Bonhours et ses enfaris. Une sœur, qui montrait tant d'a
mitié et un zèle aussi apparent pour les intérêts de son frère, de
v a i t , par rapport à ces intérêts, l ’emporter sur des neveux à qui
leur grande jeunesse et leur position 11e permettaient pas de rendre
service à leur oncle. Mais cette correspondance ne prouve p o i n t ,
elle n’indique pas même que son affection leur fut aliénée. Il se
souvint toujours q u ’ils étaient les enfans d ’une sœur chérie.
Au mois de lévrier 1821, et non en 1822, comme elle le dit dans
son mémoire, la dame Verniette se rendit à Paris. A l'entendre,
elle accourut en cette ville, n ’écoutant que khi affection et aban
donnant son ménage et son commerce pour venir entourer de ses
soins un frère malade.
On ignore si le sieur Brun était alors malade; plusieurs lettres
' q u ’il écrivait à sa sœur, dans les mois de janvier et de lévrier,
persuadent le contraire; mais ce qui est positif c ’est q u ’elle était
indisposée en arrivant à Paris; que durant le séjour d ’environ deux
mois q u ’elle lit en cette ville, elle éprouva une forte maladie.
Dans une lettre que le sieur Brun écrivait au sieur Verniette son
beau-frère, sous la date du 29 avril 1821 , il lui annonce que la
dame Verniette part de Paris dans deux heures; « il faut croire,
« ajo ut e-t-i l, q u ’elle s’est rétablie bien promptement, et j ’ai fait
« pour le mieux pour vous la renvoyer en bonne santé et en m eilleu r
« et al (¡ue j e ne l ’ai reçue. »
C e n’était donc pus pour donner des soins h son frère malade que
la dame Vcrnielte était venue à Paris, mais bien pour satisfaire sa
curiosité, et plus encore, aiin de faciliter le traitement de la
maladie dont elle se son lait atteinte.
�tq
( c )
•
L e sieur B r u n avait subi plusieurs faillites. L e chagrin q u ’ il en
éprouva altéra sa santé, qui devint de plus en plus chancelante.
Bientôt arrivèrent les infirmités, et il sentit q u ’il était teins d ’a
bandonner le commerce, de liquider ses affaires , et de réunir sa
for tu ne, q ui était toute mobilière, et qui s’élevait à plus de
60,000 fr.
L a dame Verniet te le savait. Trouver le m oyen de s’approprier
cette fortune fixait continuellement son attention. Elle'sollicita son
frère de se retirer à Clermont. E lle offrit de le recevoir chez elle,
et même d ’envoyer son mari pour prendre soin de lui dans son
voyage. C ’est ce q u ’apprennent deux lettres écrites par le sieur
B r u n , les 26 août 1822 et 8 octobre 182,3.
L a i re de ces lettres apprend aussi toute la peine que ressentait
le sieur Brun d ’être forcé d ’abandonner ses habitudes commerciales.
On voit q u ’à ce sujet il a soutenu une longue lutte avec lui-même.
C e n ’est pas lui q u i , par initiative, a résolu de se retirer à C l e r
mont. Il n ’a fait que céder aux instances de sa sœur, et il n ’a fallu
rien moins, pour l ’ y déterminer, que des infirmités croissantes et
diverses attaqu es, qui le plaçaient momentanément dans un état
de paralysie.
En fin le commerce et P a r i s sont abandonnés par le sieur B r u n ,
q u i arrive à C le n n o u t le 2 novembre 1823. C ’est de ce jour q u ’était
d ’abord daté le testament produit par la dame V e r n ie t t e , tant
elle avait hâte de s’assurer sa proie; depuis on a pensé q u u n e date
plus récente, écrite même par surcharge , conviendrait mieux.
Quoi q u ’il en soit, la dame Verniette a fait apparaître un écrit
q u ’elle prétend être le teslameut de son i r è r e , el q u i est ainsi
conçu :
« Ceci est mon tesmament
« J’ institue mon héritière universelle
« Ma sa u r Antoinette Brun
« A C le rmont-Ferrand , le vingt-trois novembre
« Mil huit cent vingt-trois
B R U N ( M iciiei ,)
Bien de plus informe que ce prétendu testament. Il est écrit eu
six ligues, dont, aucune n’occupe la largeur de la page. Plusieurs
mots sont surchargés. On a employé trois sortes d ’encre. L ’écriture
et la signature n'ont aucune ressemblance avec les écritures el les
signatures qui se trouvent dans la nombreuse correspondance du
sieur B r u n , produite au procès.
On ne peut se faire à l ’idée que le sieur Brun qui écrivait assez
.
�7
correctement, et qui avait la prétention de bien écrire, soit l’auteur
d ’un pareil écrit. Il ne l ’aurait pas laissé subsister tel q u ’il est. Il
aurait eu plutôt recours au ministère d ’un notaire, pour exprimer
régulièrement ses dernières volontés.
Cependant le sieur Brun n ’était arrivé à Clermont que pour
être mis en charte privée chez la dame Verniette, q u i , à ce sujet,
avait intimé ses ord es à son mari et à ses enfans. On l ’obsédait :
on voulait l’isoler de ses connaissances, de ses amis, excepté de ceux
qui de vaieut lui parler constamment dans l ’intérêt de la dame
Verniette. On voulait sur-tout empêcher que les enfans Bonhours,
ses nev eu x, eussent accès auprès de lui. On redoutait l'affection
q u ’ il leur portait; on travaillait à les faire oublier.
Malgré tant de précautions pour les tenir éloignés, deux des
enfans Bonhours, l ’ainé et le plus jeune, an premier jour de l ’année
1824 , surmontant tous les obstacles, parvinrent jusqu’à leur oncle.
Vainement 011 avait cherché à les éconduire. Le sieur Brun expritna
son mécontentement de ce que l'on repoussait ses neveux. 11 té
moigna beaucoup de plaisir de les voir, en les engageant à revenir.
Les souffrances physiques avaient affaissé les forces morales dans
la personne du sieur Brun. E t encore ce qui lui restait de f.icultés
intellectuelles était-il absorbé par des assoupissemens fréquens. Si
le sentiment n’était pas encore é t e i n t , sa raison affaiblie le livrait
entièrement à la domination de la dame Verniette. Il la craignait
et tremblait devant elle. On le traitait comme une personne inca
pable de se conduire seule. Quand il sortait la dame Verniette le
faisait accompagner. S ’il échappait à cette active surveillance, ce
qui lui a r r i v a i t très-rarement, 011 faisait courir après lui : on le
cherchait comme un prisonnier qui a brisé ses fers, tant 011 craignait
ou q u ’il ne révélât au public le traitement q u ’on lui faisait subir
et l ’isolement o ï l on le plaçait, si momentanément sa raison pouvait
lui permettre cette révélation, ou q u ’il ne rendit ce même public
témoin de l’absence de sa raison.
Dans une circonstance, étant parvenu à s’échapper, il était
a r r i v é seul chez le sieur Bergougnoux, pharmacien, son ancien ami,
à qui il s’était plaint de ce q u ’on le tenait en charte pr ivée, et
même de ce q u ’on exerçait sur lui des sévices, tandis q u ’au contraire
011 prétendait q u ’il rendait malheureuses les personnes qui l’appro
chaient pour lui donner dès soins.
C ertes, un pareil langage est loin d ’annoncer que les soins que
prétend avoir prodigués la dame Verniette lui avaient mérité
toute la gratitude de sou frère et obtenu son affection exclusive.
*C*
�Il éloigne au contraire la pensée que le sieur Brun ait jamais eu la
volonté d ’oublier entièrement les enfans Bonhours ses nev eu x,
pour assurer à la dame Verniette l’ universalité de sa fortune.
L a dame Verniet te alla plus loin. Elle trouva sans doute avan
tageux q u ’ une partie de cette fortune passât dans ses mains, même
du vivant du sieur Brun.
U n e procuration générale, portant pouvoir de régir et a d m i
nistrer tous biens; de poursuivre le recouvrem ent de toutes
créa n ces; de donner q u it ta n ce , etc., parut un moyen assez
plausible d ’atteindre ce b u t ( O n se rappelle que la fortune du
sieur Brun était toute mobilière); peut-être aussi voulait-on avoir
la signature du pauvre m alade, tracée en présence d ’un officier
ministériel, afin d ’en faciliter l ’imitation.
C ett e procuration est faite selon le vœu de la dame Verniette.
E l l e porte les signatures de M£* Asteix et Costes, notaires recevant.
TJn incident grave se rattache à la manière dont cet acte fut
confectionné. C ’est le sieur Anglade, aujourd’ hui notaire à Cornon,
et alors maître clerc du sieur A s te ix, qui fut chargé de rédiger
l ’acte. Pour le faire, il dut se transporter chez la dame Verniette.
Il trouva le sieur B r u n , m ala de, souffrant, abasourdi. Les
réponses du malade étaient faites péniblement et presque toujours
par monosyllabes. L e sieur Anglade déclare formellement q u ’il ne
vo ulut point rédiger l ’acte sans en référer au sieur Asteix ; ce q u ’ il
aurait fait s’ il eût trouvé le mandant bien portant. Il fallut que le
sieur Asteix, notaire, vint lui-même chez la dame Verniette pour
connaître l ’état du sieur B r u n , q u i , pendant la lecture de l ’a c t e ,
serait tombé dans un assoupissement et n ’aurait signé l’acte
q u ’après l ’assoupissement dissipé. On ne peut q u ’applaudir à la
délicatesse du sieur Anglade. Nous reviendrons plus lard sur sa
déposition et sur celle de ¡VIe Asteix, que nous mettrons en parallèle.
L e sieur Brun mourut le 29 octobre 1824* L ’ homme moraî.
était déjà éteint chez lui depuis plusieurs mois.
La dame Verniette put alors manifester sa prétention. On lui fit
entendre, sans doute, que par un reste de convenance, et peut-être
encore pour éviter des incidens qui contrarieraient ses vues , il ne
fallait pas q u ’elle présentât, elle-même à la justice le prétendu
testament de son frère. C e fut Me F a b r e , notaire à Clermon t qui
fut chargé de ce soin.
Requis par le sieur Bonhours et ses enfans, MM. Costes, juge de
paix, et llozier, son greffier, devaient se transporter dans l’apparteinent où était décédé le sieur Br un , pour y apposer les scellés.
�•
_
\ V J
-- -----------
Mais ils en furent dispensés par la présentation que leur fît du
testament prétendu la dame Vern iette, q u ’assistait un clerc de
M e Fabre.
Toutefois, cet écrit, examiné par ces deux fonctionnaires publics,
fut frappé de leur réprobation comme on le verra plus bas.
Après l ’accomplissement des formalités exigées en pareil cas,
l ’écrit fut déposé dans les mains de M e Fabre, notaire.
Une ordonnance du 3 décembre i 83 o envoya latlame Yerniette
en possession de l ’ hérédité du sieur Brun.
L ’apparition de cet écrit excila l ’étonnement général. Quo iq u’elle
connût l ’avidité de la dame Verniette, la famille Bonhours ne
jüouvait d ’abord croire k tant d ’audace. Il fallut pourtant se rendre
à l ’évidence du fait.
Bieniot elle se mit en mesure de signaler à la justice cette œuvre
de déception, si l ’on osait s’en prévaloir.
Un e assemblée de f a m ill e, réunie le i 5 janvier 1 8 2 5 , autorisa
Bonhours père à réclamer comme tuteur de ses cnfans, le partage
de l'hérédité du sieur Brun. Si dans la délibération du conseil de
fam ille, on garda le silence sur le prétendu testament, c’est q u ’il
n ’était pas encore légalement connu, et q u ’on espérait encore que
la dame Verniette n ’oseraii le produire et en soutenir la sincérité
devant les tribunaux.
L a demande en partage fut formée le 4 février i 8 a 5 .
E t bientôt après, la dame Verniette fit signifier le prétendu
testament.
A la vue de cet écrit informe, le sieur Bonhours et ses enfans
restèrent convaincus de sa fausseté. Ils savaient d ’ailleurs q u ’avant
la date que l ’on avait donnée au prétendu testament, l ’affaiblis
sement complet de ses facultés morales avait laissé le sieur Brun
dans un élat habituel d'imbécillité et même de démence.
lis déclarèrent alors q u ’ils ne connaissaient ni l ’écriture ni la
signature qui constituaient l ’acte produ it, et formèrent opposition
à l’ordonnance d ’envoi en possession. Ils soutinrent en même tems
que l ’état mental du sieur Brun ne lui aurait pas permis d ’exprimer
une volonté libre et éclairée, même en se reportant à une époque
antérieure à la date du prétendu testament.
U n e vériiication fut ordonnée par un jugement du 3 décembre
1825. LeS experts nommés pour procéder à cette opération étaient
les sieurs Im b ert , avoué à C le rm o nt, Bonjour et Cavy_, notaires.
Sans doute, sous le rapport des qualités qui constituent l'honnèie
Jiomme et le rende.it recomrnauduble aux yeux de ses concitoyens;
3
�sans doute aussi sous le rapport du talent qui rend propre h Lien
remplir l ’emploi d o n f o n est inve sti, il e û t été très-difficile de
trouver une plus forte garantie que celle q u ’offraient les trois
experts nommés.
Mais à côté de tous ces avantages ne se rencontraient pas, on
pe ut le dire parce que l ’événement l ’a justifié, les connaissances
spéciales et nécessaires pour bien re m plir’ la mission qui leur était
confiée. L e résultat a prouvé en effet que l ’art plus ou moins
conjectural de vérifier les écritures leur était peu familier.
L e dépôt du prétendu testament au greffe du tribunal civil de
Clerrnont fut suivi d ’un procès-verbal de description sous la date
du 8 avril 18*26."
'
Diverses pièces de comparaison furent présentées. Les unes
étaient authentiques, les autres sous seing privé.
U n procès-verbal du 17 juin admit les unes, rejeta les autres.
Des pièces produites--par les Bonhours, sont admises quatre lettres
des 17 mai et 29 novembre 1 8 1 5 , 18 août 18 18, et 9 janvier 1821 ;
un acte sous seing ptivé du 6 mai 1818 e t , 11 actes authentiques
de différentes dates et portant la signature du sieur Brun.
T.a dame Verniette avait présenté un grand nombre de lettres;
7 seulement sont admises : elles portent les dates des 2 , 2 1 et 3 1
juillet 1821 , 1 1 juillet et l\ octobre même an n ée, 19 juin et
5 novenibie 1.822.
E lle observe que l ’admission des lettres produites est nécessaire
pour faire connaître la différence qui est survenue dans les é a i t u r e s
et signatures du sieur B r u n , à raison des attaques et m aladies
q u ’ il a éprouvées.
Les experts procèdent à la vérification ordonnée. L e u r procèsverbal est dressé. 11 est clos le 11 août 182G.
Jettons-y un coup d ’œil rapide.
L a dame Verniette, clans scs dires aux experts, articulconze faits,
dans l ’espoir q u ’ils y verront autant de-motifs de proclamer la sin
cérité du testament. L ’énonciation de ces faits devant les experts
était inutile : elle ne pouvait avoir pour b ut que de leur rendre
favorable la cause de la dame Verniette.
E lle ajoute que si quelque différence se remarque dans les écri
tures et signatures du sieur B r u n , cela ne provient que des attaques
et m aladies q u ’ il a éprouvées, ce qui est établi par diverses lettres,
dans lesquelles il dii qu il a la main trem blante et q u ’il n’écrit
q u ’avec beaucoup de pe in en t de difficulté.
�Voici maintenant une analyse rapide des opérations des experts
vérificateurs.*
i° Ils remarquent que « la physionom ie , qui résulte de l ’assem, « blage des caractères du testament, s ’éloigne de celle q u ’off.e la
« contexture des onze lettres missives comparées. Cependant en
« descendant dans les détails de la comparaison, on est obligé de
« reconnaître que la conformation de beaucoup de mots entiers et
« de chaque caractère est très-ressemblante à celle des mots sein« blables et des caractères isolés des lettres missives; q u ’ainsi la
« différence de physionomie des caractères paraît provenir de ce
« que celle de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur et clif« j i c u l l e ', tandis que celle des lettres missives annonce une plus
« grande faci ité d ’exécution.»
C ette dissemblance remarquée par les experts était décisive. L a
physionomie de l éc riture, comme celle de l ’homme^ constate
l'identité.
La ressemblance de quelques caractères, de quelques syllabes,
de quelques mots, n ’avait rien de déterminant. L ’imitation aurait
été bien maladroite si elle ne s’était étendue jusques-là. Il es’t donc
facile de trouver dans onze lettres de trois ou quatre pages cha
c u n e , des mots, à plus forte raison, des syllabes, des caractères
ressemblans ; toutefois il suffit du rapprochement de ces lettres,
de leur comparaison avec la pièce arguée de faux, pour faire
ressortir une diflérence matérielle et frappante;
2° Les experts disent que les actes et titres authentiques qui
leur sont produits ne présentent q u ’un seul mot sur lequel ils
aient à porter leur examen; c ’est la signature du sieur B r u n ; et
à L’exception de ce lle apposée sur la minute de la pr o cu r at io n ,,
reçue A sta ix , le l\ février 18 2 4 , toutes les autres signatures, q u i
ont entr elles et avec ce lles q u i terminent les lettres missives ,
beaucoup de sim ilitu d e , en ont très-peu avec ce lle qui se trouve
su r la p iè ce dentée.
Cet te signature de la procuration Astaix a plus particulièrement
frappé l ’attention des experts. « Llle s éloigné, d i s e n t - i l s , du
«' caractère de la signature ordinaire du sieur Br u n ; mais 011 ne
« peut se refuser à lui trouver une grande ressemblance avec celle
« du testament : ils ne doutent pas q u e lle s aient é té toutes d e u x
« produites p a r la même main. »
Ces explications ne sont rien moins que décisives. Elles décèlent
tout l ’embarras des experts pour asseoir leur opinion. Cette opinion
n ’a rien de ferme, lien de positif : elle reste flottante. Toutes les
�i#
.
i 12 )
frvO sîgnatures l^es pièces comparées, excepté celle (le la procuration
^
de 1824? ont beaucoup de similitude entr’elles et en ont très-peu
avec c e lle de la p iè ce déiùée. Encore les experts reconnaissent-ils
que cette signature de la procuration s’éloigne du caractère de la
signature ordinaire du sieur Brun . E t c ’est pourtant par la ressem
blance de deux signatures isolées que les experts ont déterminé leur
opinion. L ’erreur palpable dans laquelle ils sont tombés ressort et
de leur propre langage et des lacunes q u ’offrent leurs opérations.
Nous le prouverons en son lieu ;
3 ° L a comparaison de quelques-uns des caractères qui forment
les mots de la pièce déniée, avec les caractères des lettres missives,
établit aux yeux des experts une conformation peu exacte, quoique
cependant il y ait assez de ressemblance avec d ’autres lettres.
Les experts qui sont entrés dans des détails m in utie ux , et que
les meilleures intentions ont toujours animés, nous nous plaisons
k leur rendre cette justice, les experts ont négligé un objet trèsim p o r tan t, l ’examen des surcharges q u ’offrent plusieurs mots du
prétendu testament, qui est pourtant on ne peut plus laconique;
4 ° Enfin 011 arrive au résumé qui exprime l ’avis des experts; le
voici :
« Par suite de l ’examen et des observations qui précèdent, les
« experts ont formé leur opi nion , et déclaré, à 1 unanimité, q u ’il
« demeure évident p o u r e u x que l ’acte soumis à leur vérification
« a été écrit et signé de la même main qui a tracé les caractères de
« comparaison. »
C er te s, les premières remarques exprimées pa rle s experts, sur
tout cette dissemblance de physionomie q u ’ils avaient si bien re
connue ne semblait pas devoir amener la conclusion q u ’ils ont
adoptée.
La vérification opérée était loin d ’être satisfaisante. E lle ne pré
sentait point à la justice les garanties, qui seules pouvaient en
faire sanctionner le résultat.
L e sieur Bonheurs et ses enfans la critiquèrent. Ils en signalèrent
les lacunes et en démontrèrent l ’insuffisance : une nouvelle véri
fication lut demandée.
Ils offrirent subsidiairement la preuve de différons faits q u ’ils
articulèrent. Parmi ces faits étaient ceux-ci :
Le sieur Brun avait toujours vécu en bonne intelligence avec son
beau-I1ère et ses neveux Bon hou rs ;
E t a n t tombé malade-à la fin do 1 S a3 , le sieur Verniette alla le
chercher k Paris, et le conduisit à C le r m o u t; depuis cette époque,
�( - 13 )
.
.
w
la dame Verniette avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour
éloigner de lui le père et les enfans Bonhours;
La plupart du tems, lorsqu'ils venaient le voir, ils étaient re
poussés avec rudesse;
La dame Verniette le tenait en charte privée, pour empêcher,
autant q u ’il était en elle, q u 'il eût des communications avec ses
parens et amis;
E l l e ' l e maltraitait et il en faisait ses plaintes à ceux qui pou
vaient l ’aborder;
II avait fréquemment des attaques, qui lui faisaient perdre con
naissance, et qui l ’avaient réduit à un état d ’im bécillité.
Ces faits ne sont pas seulement vraisemblables, ils sont vrais et
graves; les enquêtes l ’ont prouvé.
La dame Verniette essaya de les combattre en les présentant
comme erronnés, invraisemblables, non pertinens, en même tems
q u ’elle soutenait que le rapport des experts était tout-à-fait con
c lu an t , et que la justice devait s’empresser de lui en accorder l ’ho
mologation.
Elle fut trompée dans son attente. U n jugement du 2 3 avril 1827
ordonna une nouvelle vérification, et la confia aux sieurs IÎugues,
instituteur et maître d ’écriture à Clermont, et Cailhe et De Murât,
experts écrivains à Kiom.
L a vérification ordonnée sera faite sur les pièces de comparaison
admises entre les parties.
Les experts s’expliqueront sur les surcharges qui existent dans
le testament, notamment sur le mot v in g t, et sur la date qui
existait avant. Us examineront si ce mot vingt a été tracé par la
même main qui a écrit et signé le testament. Ils pèseront enfin dans
leur sagesse les doutes que peuvent faire naître les réflexions
exprimées dans les motifs du jugement.
Ces m otifs , qui sont nombreux, annoncent dans les premiers
juges la conviction que ce testament n ’était pas sincère. On voit
que cette conviction est née de l ’examen qu ils en ont lait euxmêmes, et du rapprochement avec les pièces de comparaison.
Après avoir rappelé, ce qui est vrai, que la science des experlsvérificateurs, en matière d ’écritures et signatures, est conjecturale;
q u ’ils 11e sont obligés d ’adopter leur opinion q u ’autant q u ’elle s’ac
corde avec la leur, et que tout en rendant justice à la moralité et
aux lumières des experts qui ont opéré, leur rapport laisse beau
coup à désirer, les premiers juges expriment les circonstances qui
leur ont fait sentir la nécessité d ’une nouvelle vérification.
�S
A ';-.'
( *4 )
' C ’est d ’abord la conviction que beaucoup de m o ts , beaucoup de
caractères des lettres missives ne ressemblent pas du tout à ceux du
testament ;
Q u ’il y a d ’autant moins lieu de tirer avantage de la ressem
blance de quelques traits, q u ’ il faudrait q u ’un faussaire (Vit bien
maladroit po u r ne pas imiter en quelques points ré critur e q u ’il
cherche à contrefaire;
C ’est que la signature du testament, bien q u ’elle ait paru aux
experts ressemblante à celle de la procuration de 182.4, ne ressemble
en réalité à aucune de celles qui se trouvent sur les pièces de com
paraison; et cependant quelques-unes de ces pièces sont d'une date
peu éloignée de celle du testament : deux entr’autres ne sont anté
rieures que d ’un mois et quelques jours;
Q u e les deux signatures du testament et de la procuration ne
présentent pas de similitude si parfaite q u ’on puisse en induire la
sincérité du testament;
Q u ’il y*a dissemblance de conformation dans la lettre finale ¡7./ \
Q u e le prénom , M i c h e l, qui se trouve à la suite de la signature
du testament, n ’est point contenu dans les autres pièces produites,*
Que*récr itur e du testament, d ’ une exécution plus pénible que
celle des lettres missives, doit, par cette raison, paraître suspecte;
Q u ’il y a dans le testament plusieurs mots écrits sans gène et
avec facilité, notamment ceux de la dernière ligne;
Q ue les experts avaient négligé de parler d ’ un point très-impor
t a n t , celui des surcharges qui se rencontrent dans le testament,
notamment au mot v in g t, qui est écrit en encre plus noire, et q ui
parait couvrir le mot de u x; lequel dernier mot indiquerait le jour
de l’arrivée du sieur Brun à C l e r m o n t , et jetterait du louche sur
la sincérité du testament; car il n’c.'t pas présumable que le jour
même de son arrivée le sieur Br un se fut occupé d ’ un acte aussi
important.
L e laconisme du testament frappe vivement les premiers juges.
Les circonstances ne l ’exigeaient pas, Il parait, au contraire, q u ’il
facilitait l ’ imitation.
Ces motifs, largement déduits par les premiers juges, sont puissans, Si le rapport des oxperts-vérificateurs avait laissé à la dame
Verniette un pressentiment de succès, l’ illusion fut,dissipée par le
jugement qui apprécie ce rapport.
La dame Verniette comprit alors tout le danger d ’ une nouvelle
vérification. Klle 11e pouvait se dissimuler que des circonstances
nombreuses cl entraînantes surgissaient contre la sincérité du tes-
�( -5 )
fit
l a m e n t ; que le seul examen de cette pièce ne pouvait laisser de
doute sur sa fausseté.
E l l e veut de tout son pouvoir empêcher la nouvelle vérification*
elle forme appel du jugement qui l ’ordonne; elle se rattache for
tement au rapport d ’experts, pour lesquels les premiers juges n ’ont
pas eu d ’égard; elle prétend q u ’il est concluant, q u ’il mérite toute
confiance ; cependant elle n ’est pas tellement convaincue de ce
q u ’elle essaie de persuader aux autres, q u ’elle n ’emploie devant la
C o u r ses plus grands efforts à faire admettre la preuve d ’une série
de faits q u ’elle articule comme devant établir la sincérité clu tes
tament. Elle y inet tant d’insistance, la preuve sera si entraînante,
q u ’elle repoussera la nécessité d ’une nouvelle vérification.
L a C o u r , dans sa sagesse, dut ordonner cette preuve.
C ’est ainsi q u e , par son arrêt du i 5 juillet 1829, elle dispose:
« Atten du que, d ’après la nature de l ’affaire et les circonstances
« qui s’y ra t ta ch en t, il ne peut q u ’être utile pour la découverte
« de la vérité, de corroborer l ’existence du testament dont il s’agit
« par des preuves testimoniales; que cette marche est admissible,
« soit dans l ’esprit, soit dans la lettre de la législation romaine et
« de la législation du Code civil:
« Par ces motifs,
« L a C o u r , sans p ré ju d ice des Jin s et moyens , tant de f a i t que
« de droit j qui demeurent réservés aux parties sur le f o n d ,
« ordonne, avant de faire d r o i t , que dans le mois à compter de la
« signification du présent arrêt, faite à avoué en la C o u r , les
« parties d ’Allemand feront preuve, tant par titres que par
« témoins par-devant M. V e r n y , conseiller-auditeur, commis à
« cet effet;
« i° Que la dame Vernietle et ses filles ont soigné le sieur Brun ,
« tant à Paris q u ’à C le r m o n t , pendant les dernières années de sa
« vie, clans les maladies que celui-ci a essuyées, ou à raison de ses
« infirmités;
« 20 Que le sieur B r u n , voulant venir se fixer à C lerm ont à la
« fin de 1823, invita le sieur Vernie!te à venir le chercher à
« Paris, et que le sieur V er n ie tte , cédant à cette invitation, se
« rendit effectivement à Paris et revint à Cle rm on t avec le sieur
« Brun , qui depuis, jusqu’à son décès, a continuellement habité
« avec les époux Verniette;
« 3 ° Q u e le sieur B r u n , depuis son arrivée à Clermont ju sq u’à
« son ‘décès, a reçu et rendu de nombreuses visites et est allé
“ dîner plusieurs fois chez des personnes avec qui il avait eu
�« d ’anciennes relations; que d ’ailleurs il sortait fréquem ment,
« soit pour se promener, soit pour voir ses amis;
« 4 ° Q u ’il a souvent exprimé à diverses personnes son affection
« particulière et sa reconnaissance pour la dame Y e rn ie t ie sa
« sœur, ainsi que sa v o lo n té de lu i donner toute sa fo rtu n e y
« 5 ° Qu e lorsque son testament eut été f a it, ce testament a été
« présenté à des jurisconsultes pour savoir s’il était régulier;
« 6° Qu e depuis la date de ce testament, le sieur Br un a d é cla r é
« p lu sieu rs f o i s q u i l avait d on n é toute sa fo rtu n e à la dam e
« V ern iette sa sœ ur ;
« S a u f aux parties de Godemel (les Bonhours) toute preuve
« contraire dans le même délai, dépens réservés. •>
L a preuve, mise à la charge de la dame Verniette eùt-elle été
complètement faite, n'aurait pas pour conséquence absolue d ’assurer
le triomphe de la prétention de la dame Verniette. Seulement elle
aurait pu la rendre plus spécieuse et entourer de quelque faveur
l ’appréciation matérielle du testament; mais cette preuve n ’a point
été administrée. Si quelques-uns des faits interloqués semblent
établis, d ’autres et les plus importans ne le sont pas. Au contraire,
il ressort des témoignages invoqués que le sieur B run chérissait les
enfans Bonhours comme ses autres parens; q u ’ il n’a jamais rien
d i t , rien fait, qui annonçât de sa part l ’intention de les frustrer
de sa succession; que d ’ailleurs, pendant la dernière année de sa
v i e , l ’affaiblissement de ses facultés intellectuelles ne lui aurait
pas permis d ’exprimer à ce sujet une volonté légale.
L ’analyse des enquêtes amènera aisément la preuve de cette
proposition. Mais comme nous devons suivre l’ordre de discussion,
adopté par la dame Verniette dans son mémoire, nous nous occu
perons en première ligne du rapport des experts.
MOYENS.
L a daine Verniette divise sa discussion en i paragraphes :
i° Examen du rapport des experts;
s>.° Exam en de l ’enquête.
Nous ajouterons un 3 ",e
dont l ’objet sera de démontrer que
le sieur B r u n , au tems de son décès, même à l'époque à laquelle
on reporte la date du prétendu testament, était incapable de lester.
S I".
E x a m en d u rapport des experts.
C e r a p p o r t , dit-on , était aussi satisfaisant que décisif. Puis
arrive l ’éloge obligé des experts, dont l ’opinion est si positive, si
�bien appuyée sur de nombreuses et de puissantes raisons, q u ’elle
mérite toute confiance et ne souffre pas de contradiction. Toutefois
on veut bien descendre ju s q u ’à réfuter les futiles objections que
les intimés ont osé élever contre ce rapport et contre le testament.
C e langage de la dame Verniette, qui affecte beaucoup de
confiance dans la bonté de sa cause, ne peut rendre concluant un
rapport qui ne l ’est pas, ni valable, comme testament, l ’œuvre
d ’un faussaire.
A peine le prétendu testament a-t-il paru, que son état informe
sa contexture insolite fixent l ’attention de tous ceux sous les yeux
desquels il est mis.
M. Costcs, juge de paix , le sieur Rozier son greffier,
M. Chassaing, juge au tribunal civil de Clermont, n’y voient q u ’un
écrit irrégulier et auquel il est impossible d ’accorder quelque
confiance. Ils le frappent de leur réprobation.
Il est difficile, en effet, de ne point s’arrêter à cette opinion,
quand on a vu et examiné l ’écrit; mais du moins n ’y a-t-il pas eu
possibilité de repousser les violens soupçons q u i , dès le premier
moment de son apparition, se sont élevés sur sa sincérité.
L a nécessité d ’une vérification a été reconnue judiciairement.
Il fallait des experts pour l ’op ércr, mais il les fallait capables de
bien remplir la mission qui leur était confiée, c ’est-à-dire, possé
dant les connaissances spéciales qui constituent l ’art de vérifier
les écritures et signatures.
II ne suffit pas que l ’on ait sous plusieurs rapports beaucoup de
ta len t , beaucoup de connaissances, un caractère honorable, une
impartialité qui pe se démentit jamais; avec tous ces avantages, si
l ’on n’a pas les connaissances spéciales qui rendent propres à faire
telle chose, on ne peut convenablement apprécier cette chose.
« Experts sont des gens versés dans la connaissance d ’une science,
« d ’ un a r t , d ’ une certaine espèce de marchandises ou autres
« choses, lesquels sont choisis pour faire leur rapport sur quelque
« point de f a it, d ’où dépend la décision d ’une contestation, et
« q u ’on ne peut bien entendre sans le secours des' connaissances
» fjui sont pro/uns a u x personnes d ’une certaine profession..........
« Par exemple, s’il s’agit de vérifier une écriture, on prend pour
<« experts des maîtres écrivains, et ainsi des autres matières. »
Encyclopé die, verbo experts.
Même avec les connaissances spéciales en matière de vérification
d ’écritures, il est facile de s’abuser sur la ressemblance; à plus forte
�ï
.
) 1 }
raison, en est-il de même si l ’on est étranger ou peu familier avec
ces connaissances.
C ’est ce qui a fait dire à M. T ou ll ier, droit civil, tome 8 de la
troisième édition, page 8/jG, n° 2 3 5 . « Rien en général de plus
« incertain, rien qui soit si peu digne de déterminer l'opinion,
« que l’avis donné par les experts sur la comparaison des écritures,
« lorsqu’il n ’est pas soutenu par d ’autres preuves, au point q u ’on
« doit moins le considérer comme une preuve que comme une
« simple présomption, comme un moyen qui peut éclairer le
•« magistrat et le guider dans la recherche de la vérité. »
De l à , cette conséquence forcée que plus il y a d ’incertitude pour
obtenir un bon résultat d ’ une pareille opération, plus il importa
d ’être sévère sur le choix des expeits qui doivent en être chargés.
Cett e sévérité n ’a point été apportée dans le choix des experts
auteurs du rapport critiqué. Faute de connaissances spéciales, ils
ont évidemment mal rempli la mission qui leur était confiée. L e u r
manière d ’apprécier le prétendu testament, et leur langage décèlent
l ’embarras et l ’incertitude qui les dominaient. Il semble q u ’ils
impliquent contradiction avec eux-mêmes, si l’on compare leur
remarque la plus importante avcc les minimes détails dans lesquels
ils sont descendus et la conclusion q u ’ils en ont tirée.
C e qui les frappe d ’abord, c’est que la j)hysionom ie qui résulte
de l ’assemblage des caractères du testament s’éloigne de c e lle
q u ’offre la contexture des onze lettres missives comparées.
Voilà une observation dominante. On recherche par la compa
raison s’il ÿ a identité entre des physionomies; et l'examen apprend
que cette identité n ’existe pas; q u ’il n’y a pas ressemblance entre
les physionomies comparées. Cependant c ’est par la ressemblance
que se constate l ’identité.
Pour expliquer cette dissem blance , qui les a frappés, les experts
disent q u ’en descendant dans les détails de la comparaison , on est
obligé de reconnaître que la conform ation de beaucoup de mots
entiers et de chaque caractère, pris isolément de la pièce indi qu ée ,
est très-ressemblante à celle des mots semblables et des caractères
isolés des lettres missives; et q u ’ainsi la différence de physionomie*
des caractères paraît provenir de ce que celle de la pièce déniée a
été exécutée avec pesanteur et d i f f i c u lt é , tandis que celle des
lettres missives annonce une plus grande facilité d ’exécution.
L explication n’est pas heureuse. Klle est en opposition avec la
cri table acception du mot..physionom ie.
L a physionomie de l ’écriture comme celle de l ’ homme se c o m p o s e
�( >9 )
fc/pa
d ’ un assemblage de traits et non pas de chaque trait pris isolément.
On voit chez les hommes une foule de visages qui présentent
dans certains traits isolés la ressemblance la plus frappante. Celte
ressemblance existe tantôt aux yeux,, tantôt au n ez , tantôt à la
Lo uche, et de même des autres parties qui composent le visage.
Parfois même elle embrasse presque tous les traits; et pourtant
lorsqu’on vient à considérer dans leur ensemble, tous ces traits,
ce qui seul constitue la physionomie, on ne trouve plus de ressem
blance véritable, quoique la ressemblance partielle subsiste.
Il en est de même des écritures. La comparaison de plusieurs
pièces d'écriture, qui se ressemblent, avec une autre pièce q u ’on
attribue à la même m ai n , peut offrir dans quelques lettres, dans
quelques mois même des traits de ressemblance plus ou moins
saillans; mais la ressemblance cesse quand la pièce d ’écriture est
considérée dans son ensemble. Alors reste une différence de p h y
sionomie que l ’on ne peut méconnaître.
On s’étonnerait si une pièce d ’écriture, signalée comme l ’œuvre
d ’un faux, ne présentait pas quelques traits isolés de ressemblance
avec les écritures véritables de celui auquel on l’attribue. Il faudrait
que le faussaire, qui s’est mis sous les yeux les écritures véritables
q u ’il veut im iter , fût bien maladroit , pour ne pas réussir à
donner le change sur quelques ¡»oints. Pour peu q u ’il ait du savoirfaire, il-parviendra toujours à imiter quelques lettres, quelques
mots entiers; mais l ’imitation n ’atteindra jamais ou presque jamais
la physionomie que forme l ’ensemble de l ’écriture.
La ressemblance de physionomie dans l’ensemble de diverses
pièces d ’écriture peut se reconnaître a i s é m e n t a l o r s même que
quelques-unes de ces pièces sont écrites avec plus ou moins de
hardiesse, en traits plus ou moins déliés, plus ou moins renforcés.
L e faire habituel de l ’écrivain surgit toujours au milieu de ces
variantes.
L a différence dans la physionomie des écrits est donc le principal
moyen qui puisse faire connaître s ils sont vrais ou faux. L t dans
l ’espèce cette différence demeure frappa 11Le aux yeux mêmes des
experts qui onl vérifié le prétendu testament.
Q u ’imporle après c e la q u ’ilsaient remarqué de la similitude dans
la conformation de quelques lettres et de certains mots de la pièce
arguée de faux', avec des lettres et des mots des pièces de compa
raison. Il en résulterait tout au plus que le faussaire aurait obtenu
une imitation partielle; mais imitation manifestement insuffisante
pour imprimer à l’écrit qui eu est l’œuvre les caractères de la sin-
�M
.
.
.
( 20 )
Les détails minutieux auxquels se sont livrés les experts, pour
laire disparaître cette différence de ph ysionom ie, q u ’ils avaient
remarquée avant t o u t , loin de justifier leur opinion définitive,
prouvent seulement q u ’ils n ’ont point épargné les efforts pour la
rendre spécieuse.
Mais en portant ainsi leur investigation sur la pièce déniée, ils
ont négligé des observations très-importantes. Ils n’ont rien dit des
surcharges, rien sur l ’empreinte d ’une griffe soigneusement effacée,
et qui indiquait sans doute le fonctionnaire qui avait fourni la
feuille sur laquelle est écrit le prétendu testament.
Cependant les surcharges à plusieurs mots sont remarquables,
sur-tout au mot vingt du millésime. Le mot vingt a été évidem
ment posé sur le mot d e u x ,%i[\x\ fut écrit primitivement. Les lettres
en sont formées par des traits larges et épatés, et avec une encre
beaucoup plus noire que celle qui a servi à écrire le mot pr im itif
d e u x et les autres mots du testament qui ne sont pas surchargés.
Les surcharges, autres que celles du mot v in g t, sont opérées avec
un certain soin. A-t-on voulu renforcer une écriture trop déliée,,
trop facilement exécutée, pour la faire apparaître d ’une exécution
plus difficile et plus conforme à l ’état de souffrance de ceiui q u ’on
v ou la it en faire croire l’auteur? On ne craint pas d ’adopter l'affir
mative comme une vérité.
Il parait que les experts n’ont vu dans ces surcharges q u ’une
écriture exécutée avec pesanteur et difficulté. Mais alors on de
mandera pourquoi la première et la dernière ligne de l ’écrit, et
plusieurs mots des lignes intermédiaires, sont écrites couramment,
sans pesanteur, sans difficulté? On ne pressent point de réponse
satisfaisante à cette question , dans le système des appelans.
Us ont cl t q u ’il était inutile de constater les surcharges, parce
que telles q u ’elles sont elles n ’infirmeraient point le testament. Il
en serait ainsi peut-être si d ’ailleurs le testament était reconnu
sincère. Si la signature comme l ’écriture n ’en était pas déniée; s’il
ne s’agissait que d ’une irrégularité. Mais les surcharges que présente
un testament argué de faux dans tout son ensemble, doivent, fixer
l ’attention de la justice, comme pouvant aider à la découverte de
la vérité.
C e n ’est pas sans m otif non plus que l ’empreinte de la griffe a
été effacée très soigneusement. On ne voulait pas sans doute que
l ’on put s ' i n f o r m e r auprès de la personne qui aurait fourni la feuille
de papier, à qui et à quelle époque elle aurait délivre celle feuille,
tant 011 craignait les rapprochemens, qui plus tard pouvaient avoir
�D ’autres singularités ont échappé h l ’attention des experts : c’est?
la pose des lignes; ce sont les fautes grossières d ’orthographe.
L e sieur Brun avait de l ’éducation ; il écrivait assez correcte
ment, sous le rapport du style; il faisait rarement des fautes d ’or
thographe. Les experts avaient dû s’en convaincre en lisant, en
examinant sa nombreuse correspondance. Eli bien ! les cinq lignes
qui formeraient le testament n ’occupent point toute la largeur du
papier; elles laissfcnt à droite et à gauche deux grandes marges;
elles sont d ’inégale longueur. La première,' la troisième et la cin
quième, ne sont que des demi-lignes. 11 est difficile de découvrir le
m o t if qui a pu porter l ’écrivain à couper ainsi les lignes; à moins
que l ’on ne suppose que la signature qui est au bas est sincère, et
q u ’ayant été surprise en blanc au sieur B r u n , on a voulu faire con
corder la signature avec le corps de l ’écrit, de manière à ne pas
laisser trop d ’intervalle entre la dernière ligne et cette signature.
E t comme le faussaire aurait commencé trop h a u t, que ce q u ’ il
avait à écrire pouvait être aisément compris dans deux lignes et
demie, et q u ’il s’en serait aperçu assez tôt, en tronquant les lignes,
au lieu de trois il en aurait fait cinq.
Deux fautes d ’orthographe grossières se remarquent dans l ’écrit.
A la première ligne, au lieu de testament 011 à écrit tesmarnent ;
à la dernière ligne, le mot ving t, écrit par surcharge, n ’a pas de t.
L e sieur Brun 11’aurait pas fait de pareilles /ailles, s u r - t o u l la
première. Son amour-propre l ’aurait porté à refaire le testament
après l ’avoir l u ; car ayant survéi u de plusieurs mois à l ’écrit par
lequel il aurait transmis à un seul de ses païens toute son hérédité,
il n’eut pas manqué de lire et de relire cet acte 1111 grand nombre
de fois, lui qui avait toujours montré beaucoup d ’ordre et de soin
dans l'administration de ses affaires. Il parait que l ’on avait d ’a
bord donné au prétendu testament la date du deux novembre, qui
était précisément le jour de l ’arrivée du sieur Brun à Clermont ;
mais comme l ’on s'aperçut q u ’il n ’aurait pas élé présumable q u ’à
un pareil jour il se fût occupé d ’un acte aussi important, on subs l i l u a , par surcharge, le mol v m g l au mot d e u x .
L e laconisme insolite du testament élève aussi contre la sincérité
de cette pièce le plus violent soupçon. Ilien qui n’y soit absolument
indispensable. O11 voit que le faussaire avail hâte de terminer son
œuvre.
A toutes ces réflexions, qui démontrent largement la fausseté du
rorps de l’écrit, vient se joindre la remarque encore plus accablante,
que la signature, mise au bas, 11’esl pas celle du sieur Brun.
�y.?
rCW?
.
)
Les experts qui ont examiné et comparé les nombreuses signa
tures du sieur B r u n , apposées, soit sur des lettres missives, soit
sur des actes authentiques, ont remarqué que la signature du pré
tendu testament s'éloigne du caractère ordinaire de la signature du
sieur Brun . De toutes les signatures prises en comparaison , une
seule leur a paru avoir de la similitude avec la signature déniée;
c ’est celle de la procuration reçue Astaix, notaire^ le 4 février 1824.
O n ne peut se refuser, disent-ils, à lui trouver une grande ressem
blance avec celle du testament.
Mais celte ressemblance avec une signature u n i q u e , lorsque la
dissemblance avec une foule d ’autres signatures est frappante, estelle suffisante pour convaincre de la sincérité de la signature déniée?
L a dissemblance q u ’ils ont reconnue 11e repousse-t-elle pas celte
conviction ?
E t d ’ailleurs, la ressemblance q u ’ils ont cru apercevoir est loin
d ’être parfaite. Q ui sait si le b ut de la procuration du 4 lévrier 1824
n ’avait pas été d ’obtenir sur un acte authentique la signature du
sieur B r u n , afin de pouvoir l ’imiter sur le testament que l ’on v o u
lait créer? Alors , l ’imitation opérée avec soin, a dû établir entre
les deux signatures une espèce de similitude.
Toutefois, entre les deux signatures, il y a beaucoup d<? diffé
rence : celle de la pr ocurat ion, qui serait postérieure de plusieurs
mois, est mieux faite, plus hardie; celle du testament est gênée;
elle annonce le travail méticuleux d ’une servile imitation. L a lettre
finale n n ’a pas la même conformation dans les deux signatures.
Dans l ’un e, celle du testament, le dernier jambage de la lettre n
est supérieur et bouc lé; dans l ’autre, celle de la procuration, ce
dernier jambage est inférieur, et forme dans son entier la figure
informe du chiffre 3 . O11 pensera difficilement q u ’une même main
ait tracé ces deux lettres. Bien plus, la signature du testament est
suivie du prénom M ic h e l, qui 11e se trouve sur aucune des nom
breuses pièces qui ont servi de comparaison. L e faussaire a voulu
trop bien faire; c’esl ici le cas d ’appliquer l’adage nimia /trecaulio
do/us.
T an t et d ’aussi notables dissemblances, d ’aussi étranges irrégu
larités dans la confection matérielle du prétendu testament., 11e
permettent pas de le considérer comme vrai; elles en font ressortir
la fausseté; elles détruisent l'opinion hasardée des experts, qui
n ’ont pas su les apprécier; elles font du moins sentir la n é c e s s i t é
d ’ une nouvelle vérification; par des personnes que leurs connais
sances spéciales rendent propres à une semblable mission,
�( . 23-7
-</£
L ’écrit dénié n ’est donc pas encore un titre : il reste avec toutes®
ses imperfections. Peti importe q u ’il ne soit combattu que par des
héritiers collatéraux. La dame Y e r n ie t te , qui s’obstine à s’en pré
valoir, n ’est aussi q u ’une héritière collatérale, qui vou dra it, par
la manœuvre la plus criminelle, dépouiller les Bonhours, ses ne
ve u x, de droits non moins sacrésoque les siens.
S ’il n ’y a pas déjà conviction entière de la fausseté du testament,
il y a au moins la plus grande incertitude sur sa sincérité; et cer
tes, l ’enquête à laquelle a fait procéder la dame Yerniette n ’a
aucunement dissipé cette incertitude.
S II*
E xa m en des enquêtes.
A v an t de démontrer que celle de la dame Yerniette n ’est rien
moins que concluante, posons les faits interloqués.
i° L a dame Yerniette et ses filles ont soigné le sieur B r u n , tant
à Paris q u ’à C l e r m o n t , pendant les dernières années de sa vie, dans
les maladies que celui-ci a essuyées, ou à raison de ses infirmités;
2° L e sieur B r u n , voulant venir se fixer à Clermont à la fin de
18 23, invita le sieur Yerniette à le venir chercher à Paris; celui-ci
cédant à cette invitation, se rendit effectivement à Paris, et revint
*à Clermont avec le siaur B r u n , qui depuis, jusqu’à son décès, a
continuellement habité avec les époux Verniette;
3 ° L e sieur B r u n , depuis son arrivée à Clermont jus qu’à son
décès, a reçu de nombreuses visites, et est. allé diner plusieurs fois
chez des personnes avec qui il avait eu d'anciennes relations; d ’ail
leur s, il sortait fréquemment, soit pour se promener, soit pour
voi r ses amis ;
4 ° Il a souvent exprimé à diverses personnes son affection parti
culière et sa reconnaissance pour la dame Y ern ie t te, sa sœur, ainsi
que sa v o lo n té de lu i laisser toute sa fo rtu n e y
5 ° Lorsque son testament eut été fa it , ce testament a été pré
senté à d e s jurisconsultes, pour savoir s’il était régulier;
6° Depuis la date de ce testament, le sieur Brun a déclaré p lu
sieurs f o i s q u ’il avait donné toute sa fortune à la dame Y ern ie tte ,
sa sœur.
Les trois premiers faits, isolés des trois derniers, seraient sans
importance. Les trois derniers ofirent plus de gravité ; car, s’ils
étaient établis, ils prouveraient que le sieur Brun avait voulu
donner sa succession à la dame Yerniette ; q u ’il a déclaré l ’avoir
donnée, et que l ’acte qui renfermait le don avait été soumis à
l'examen de jurisconsultes.
�2
Recherchons maintenant si la preuve offerte par la dame Verniette a etc administrée; et l ’appréciation des témoignages invoqués
nous conduira à un résultat négatif.
C hacun des faits interloqués est complexe ou composé.
L e premier est attesté partiellement. Plusieurs témoins déposent
q u ’à son arrivée de Paris à C le ft n o n t, au commencement de no
vembre 182 3, le sieur Br un vint habiter chez le sieur Verniette ;
q u ’il y demeura ju sq u’à sa m o r t , arrivée en octobre 1824; q u ’il
f ut fréquemment m alade, et q u ’il reçut les soins de la famille
Verniette. Mais la preuve de ces particularités était inutile; elles
n ’ont jamais été désavouées. Il en résulte seulement que, durant la
dernière année de sa vi e, le sieur Br un a logé à Clermont chez la
dame Ve rnie tte , et y a été plus ou moins bien soigné. C e n ’est pas
là seulement ce q u ’ il fallait prouver. L a preuve devait encore s’é
tendre à des soins donnés pendant plusieurs années, tant à Paris
q u ’à C le rm o n t ; et il n’est pas établi, il n ’est pas vrai que la dame
Verniette ou ses filles soient venues à Paris pour soigner le sieur
B r u n dans sa maladie. On en a fait courir le b r u i t ; deux témoins
m êm e, le cinquième et le treizième, semblent en attester la vérité
d ’après des ouï dire; mais ce b r u i t , qui repose sur deux voyages
que la dame Verniette et l ’une de ses filles-auraient faits à Paris, à
deux époques différentes, est démenti par la correspondance même
du sieur Brun.
L a dame Verniette fit un voyage à Paris au commencement de
1 8 2 1 ; elle y séjourna quelque teins dans la maison de son frère.
L e principal m o t if qui T y attira fut moins le désir de voir son
frère, que l’espoir de trouver des ressources pour obtenir la guérison
d ’une maladie dont elle était atteinte. Elle n ’y vint donc pas pour
donner des secours au sieur Brun . C ’est ce q u ’apprennent deux
lettres q u ’ il écrivait les 29 avril et 4 mai 1821. Dans la première,
adressée au sieur V e r n ie t te , il dit : J ’a i f a i t p o u r le m ieu x p o u r
v o u s la renvoyer (la dame Verniette) c m bonne santé et en m eilleu r
état que j e ne l'a i reçue.
L ’ une des filles de la dame Verniette était la filleule du sieur
B r u n ; il voulait la faire venir à Paris. 11 s’eft explique dans une
lettre du 9 février 1823 , écrite au sieur Jarton aîné. « ,1e fais venir
« mon espiègle de filleule Amélie; çà lui fera du b ie n ; c’est l ’àge
« pour faire ce petit voyage, »
C e 11e fut point l'espiègle Amélie qui fit le voya ge , mais bien
mademoiselle A g a t h e , sa sœur, qui vint passer auprès de son oncle,
à Paris, cinq ou six semaines, 11011 pour être garde-malade, mais
�^ :*:> ; ----- -------------------- --------- ----pour j o u i r , sous les auspices cle son oncle, de quelques-uns des
agrémens qu'offre cette ville,
Il est. constant désormais que la dame Verniette ni ses filles ne
sont point allées à Paris pour porter des secours au sieur B r u n ,
pour le soigner dans ses maladies, et q u ’elles ne lui ont donné
de soins que pendant la dernière année de sa vie , q u ’il a passée
à Clermont.
- L e premier fait, gisant en preuve, n ’est donc pas établi, puisque
des diverses circonstances qui le composent, une seule est attestée
par les témoins.
L e second l’ait comprend deux circonstances. L a première est de
savoir si c’est le sieur Brun q u i , de l u i - m è m e , avait pris la réso
lution de venir à Clermont et invité le sieur Verniette à venir le
chercher à Paris : la seconde, si après son arrivée à Clermont il
avait continuellement habité avec les époux Verniette ju s q u ’à
son décès.
L a vérité de cette dernière circonstance n ’a jamais été méconnue
par les Bonhours. 11 ne fallait pas d ’enquête pour l ’établir.
A u contraire, la première circonstance n ’est aucunement jus
tifiée. Plusieurs témoins de l ’enquête directe parlent de l ’invitation
du sieur B r u n , du voyage fait par le sieur Verniette à Pari s, pour
en ramener son beau-frère, niais ils ne disent absolument rien sur
la cause première de cette démarche.
L a dame Verniette désirait attirer et fixer son frire à Clermont.
E n offrant de le recevoir et de le garder au sein de sa famille, elle
avail une arrière-pensée que l ’événement a mise au grand jour.
E l l e était persuadée que le sieur Brun ramènerait avec lui sa
f o r t u n e , qui était toute mobilière. L e m ot if ap par en t, q u ’elle
a vo uait, était de l ’entourer de scs soins; le m oti f réel était de
s’emparer plus aisément d ’une hérédité assez considérable, à l’ex
clusion des autres parens. Elle a travaillé à son projet avec per
sévérance.
E lle avait rencontré pendant quelque lems un assez grand
obstacle dans l’attachement du sieur Brun pour ses habitudes com
merciales. Il ne se rendit à ses sollicitations que quand les attaques
q u ’il éprouvait, devenant plus fréquentes, et ses souffrances aug
mentant chaque jour, il perdit l'espoir de voir rétablir sa
nié, et
senli la nécessité d ’abandonner entièrement son commerce.
Dans une lettre du 26 août i 8 '->.3 , le sieur Brun écrivait à sa
sœur : « T u m ’as déjà dit dans ta lettre du 4 août que ça me ferait
« deux saisons, en parlant sans doute des eaux de Néris et des
�T
v\( vendanges, de p a rtir v ite > p o u r p o u v o ir en p ro fite r, mais as-tu
« réfléchi si je le pouvais.» 11 ajoute, q u ’il eût été trop inquiet d ’a
bandonner une maison q u ’il avait formée depuis 12 ou i S a n s . . . Mon
intention depuis p lu s d'un an , et j e dois te l ’avoir dit 3 a é té de
céd er ma suite d'affaires.
C e langage était tenu à la dame Ve rn iette, en réponse à la lettre
q u ’elle avait écrite le 4 du même mois.
E n septembre 1 8 2 3 , elle écrivait à son frère pour l ’inviter à
venir à C le r in o n t, d ’où ils seraient partis pour ÜNéris, où la dame
Ver niette voulait aller, espérant que les bains lui feraient du
bien. E lle le pressait, beaucoup de v e n ir .......
A i n s i , c’est la daine Verniette qui in v ita it, qui pressait son
frère. Déterminé à se rendre à l ’invitation, il en instruit sa sœur
par sa lettre du 8 octobre 1823.
U n passage de cette lettre est rappelé dans le mémoire de la
dame Verniette. Il apprend que le sieur Brun voulait écrire pour
demander que l’on fit p artir le sieur V erniette sou beau-frère,
mais ([ue M. Jarton ou M. Vauglade lui avait dit que cela était
i n u ti le , puisque Ï\J. Bard avait écr t à ce sujet, en lui marquant
de ne pas perdre de teins. Là se termine la citation imprimée par
la daine Verniette. Elle pourrait laisser croire que c’élait le sieur
B run qui avait demandé de son propre mouvement que le sieur
Verniette vint le chercher à Paris. La suite du passage cité per
suadera le contraire. « Je suis lâché que ça se trouve environ dans
les vendanges, continue le sieur B r u n , cependant puisque vou s
l ’avez offert > je pense que ceia se peut.
Plus de doute désormais que le sieur Brun ne soit venu de Paris
à Clerinont habiter chez sa sœur, que sur l’invita lion et l’offre de
celle-ci et de son époux. Il est prouvé que ce n’est pas lui qui a
pris l'initiative. Il n ’a fait que céder aux sollicitations de sa sœur,
sans se douter des vues q u ’elle avait sur sa fortune , et sans lui
accorder une affection exclusive. L ’amour de son pays natal le
ramenant à C le rinont, il 11e pouvait refuser l ’asile qui lui était
offert.
L e troisième fait interloqué a pour objet de détruire cette asser
tion des intimés , que le sieur Brun était tenu en charte [»rivée.
La preuve faite a-t-elle eu ce résultat? Non sans doute.
Que le sieur Brun ail dîné plusieurs fois chez lesieur Jarton aîné,
qui était 1 ami intime des époux V er n ie tte , ainsi que le déposent
le premier et le second témoin, cela ne prouve pas q u ’il fût libre
�de èes actions. Pour assister à ces dîners il était toujours accompagne
de quelques personnes de la famille Verniettc.
II en était de même lorsque sa santé lui permettait de rendre des
visites, d ’aller à la promenade.
L e quatrième témoin, le sieur Bonna baud , médecin, déclare
que le sieur Brun lui a rendu plusieurs visites sans être accompagné
de personne; mais une foule d ’autres témoins, qui l ’ont vu sortir
plus ou moins fréq uem m ent, soit pour des visites, soit pour la
promenade, l ’ont toujours ou presque toujours vu accompagné,
tant on exerçait sur lui une active surveillance.
L e troisième et le quatrième témoin de l ’enquête contraire par
lent d ’une circonstance où il s’était échappé de chez la dame Vern ie t te , et était venu se réfugier chez eux. Peu de minutes après,
la dame Verniette était chez le sieur Bergougnoux pour ramener
son frère. E lle se plaignit de ce q u ’o’n avait ofïert à celui-ci un
demi-verre de vin et un biscuit pour le fortifier. Elle semblait se
plaindre de ses procédés. Il lui répondit avec un ton de colère :
« Vous meniez, madame, vous prétendez que je vous bats, c'est
« au contraire v o u s q u i me battez. » E n causant, le sieur Brun
avait dit q u ’on le tenait en charte p riv é e, et q u ’il était mal chez
sa sœur. Il témoigna au sieur Bergougnoux la crainte d ’en être mal
accueilli, parce q u ’on l ’avait aâsuré que le témoin avait couru de
la haine pour l u i , et q u ’on lui avait d éfen du de v e n u 'le voir.
L e sieur Brun avait demeuré cinq ou six ans chez le sieur Ber
gougnoux, comme élève en pharmacie. Des liaisons,, d ’amitié en
étaient résultées en tr ’eux. La dame Verniette connaissait ces liai
sons ; elle les redoutait, comme une entrave à l ’accomplissement
de ses desseins sur la fortune de son frere; c est pour cela qu elle se
permit d ’employer la calomnie pour l ’éloigner du sieur Bergou
gnoux, chez qui elle montra tant de mécontentement de le trouver.
Le huitième témoin de la contr’enquête parle d ’ une circonstance
où le sieur Brun était arrive chez lui en l u y a n t , sous le pretexte
q u ’on voulait le faire confesser.
Le neuvième témoin atteste la même circonstance; de plus, il
déclare que plusieurs fois il a vu sortir de chez la dame Verniette
le sieur Brun , ayant l ’air de s échapper.
L e dix-septième témoin de l’enquête directe a vu le sieur Brun
se promener, mais toujours accom pagné de (ju eh ju u n de la maison
Verniette.
L e onzième témoin fait la même déposition ; il ne se rappelle
pas l ’avoir vu sc promener seul.
�(.
2
8
)
De même le douzième témoin.
De même le onzième de l ’enquête contraire.
L e treizième témoin de la contr’enquête était la sœur de lait du
sieur Br un. Elle va chez la daine Verniette pour le voir; les de
moiselles Verniette la refusent; elle insiste; alors elles lui disent de
repasser, que leur mère est absente, et q u e lle s n ont pa s la c l e f de
la cham bre du sieur B r u n .
Le témoin se présente un autre jour : nouveau refus. Elle eut
été éconduite encore cette fois, si le sieur Brun , de sa croisée, ne
l ’eùt aperçue dans la rue, et n ’eut exigé q u ’on lui permît l ’entrée
de sa chambre.
Le quatorzième et le quinzième témoins ont vu le sieur Brun qui
f u y a i t , et la dame Verniette et l’ une de ses filles qui le rejoignaient
et le forçaient brusquement à rentrer.
Les en fans Bonheurs se présentaient-ils pour voir leur oncle, la
dame Verniette et sa famille les repoussaient avec colère. On v o u
lait q u ’il restât isolé. Plusieurs témoins parlent de cette circonstance,
e n t r ’autres le neuvième témoin de la contr’enquête.
C om m en t, après de pareils témoignages, persister a soutenir que
le sieur Br un était libre dans ses actions? O u i , par fois on l ’a vu
seul, rendant quelques visites, ou se promenant; mais alors n’estce pas parce q u ’il avait échappé à ses gardiens, trompant leur v i
gilance? Et quand il ne pouvait mettre cette vigilance en d éfau t,
n ’était-il pas poursuivi par la dame Verniette 011 les personnes de
sa maison, jusques chez les amis ou les connaissances chez lesquels
il se réfugiait, et ramené comme un criminel qui se serait évadé?
N ’a-t-il pas dit lui-même q u 'il était tenu en charte p riv é e?
E t pourtant la dame Verniette ose soutenir q u ’ il était libre dans
sa maison! C ’est assurément là une singulière libert é, dont per
sonne ne voudrait.
L e quatrième fait, gisant en preuve, est que le sieur Brun avait
exprimé à diverses personnes son affection particulière et sa recon
naissance pour la dame Verniette, ainsi que sa volonté de lui laisser
toute sa jo r tu n e .
C e f a i t , qui est complexe, n ’est point é tab li, quant à la der
nière partie, (|ui est la plus impor tante, et qui consiste dans la
manifestation de donner toute sa fortune.
Que le sieur Brun ait toujours eu de l’aflVcliou pour la dame
V e r n ie t te , sa sœur, jamais ou a cherché à dire le contraire. Son
aileclion se reportait sur tous ses parens. La dame Bonheurs y avait
�une part non moins grande que son autre sœur; il aimait les enfans
Bonliours après comme avant la perte de leur mère.
L e dixième témoin de l'enquête directe, M. D e b e r t , juge de
paix , pense q u e , ju s q u ’au décès du sieur B r u n } i l a v é c u dans
la p lu s p a rfa ite a m itié et la m eilleure intelligence avec sa sœur
(la dame Bonliours), son beau-frère et ses enfans. La plus p a tfa it e union régnait, notamment dans cette famille en i8 r 8 ,é p o q u e
du partage de la succession du père.
Le treizième témoin de la contr’enquête atteste cette bon ne in
telligence avec la famille Bonliours. L e sieur Brun témoigna beau
coup de regrets de la perte de la dame Bonliours.
Selon le quatorzième témoin, le sieur Brun partageait son a f
fe c tio n entre ses d e u x sceui's.
Le quinzième dépose que le sieur Brun avait une même affection
pour les Bonliours et les Verniette. Il disait q u ’ils seraient tous
égalem ent ses héritiers.
Mais cette affection est exprimée par le sieur Brun lui-même,
dans des lettres q u ’il écrivait ¡1 sa sœur, la dame Bonliours, et no
tamment .dans une qui est sous la date du 29 novembre 181G. Il
embrasse la mère, les enfans et le mari, q u ’il aime bien , parce
qu i l rend sa sœ ur heureuse.
L e 9 janvier 1821 , il écrivait au sieur Bonliours père une lettre
qui renferme des expressions amicales. Il embrassait de cœ ur le
])èie et les enfans.
U ne autre preuve que la bienveillance de l ’oncle pour scs neveux
n ’avait point changé, c ’est le soin q u ’apportait la dame Verniette
d ’empêcher que les neveux n ’arrivassent jus qu’à l ’oncle.
n ’est
q u ’en forçant la consigne que deux d ’entr’eux étaient parvenus
auprès de lui ; ils en avaient été bien reçus.
II importerait peu q ue, dans deux ou trois circonstances, il les
eut mal accueillis. Une pareille réception s’expliquerait par son
état de souffrance, et encore plus par l ’ompire que la dame Verniette avait acquis sur un homme dont les facultés intellectuelles
étaient affaissées par les douleurs physiques. La dame Verniette
l ’obsédant continuellement voulait qu'il ne songeât q u ’à elle, et
q u ’il oubliât completlemenl les enfans Bonliours, ses neveux. Elle*
avait, d ’autant mieux réussi à le maîtriser et à s’en faire craindre,
q u e , mémo en é t a t 'd e santé, le sieur Brun était d ’ un caractère
f a ib le et tim ide ju s q u ’à la p u silla n im ité. C ’est ce qui est attesté
par le premier témoin de la c o n l r ’enquête prorogée, le sieur blatl.in,
�médecin, qui connaissait la maladie du sieur B r u n , et ses causes,
et avait été à portée d ’apprécier son moral.
On ne désavoue pas non plus que le sieur Brun n ’eùt reçu q u e l
ques bons offices de la dame Vern iette; mais ces bons offices étaient
réciproques. L e sieur B r u n , commerçant, avait des relations assez
fréquentes avec Clerinont : tantôt c’était des commissions de mar
chandises à prendre, tantôt des recouvremens à faire. L a dame
Verniette était dans le commerce; il n’est donc pas étonnant que
son frère correspondit quelquefois avec elle, pour l ’aider dans cer
taines opérations. Dans plusieurs lettres de 1821 et 1 8 2 2 , il lui
reproche sa négligence à faire ses commissions, même à lui répondre.
C er te s, ce n ’est pas là exprimer de la reconnaissance. S ’il en devait,
ce n ’était pas au point d ’absorber toute sa fortune.
Mais avant le prétendu te sta m e n t, avait-il exprimé à diverses
personnes la volonté de laisser toute cette fortune à la dame
Verniette sa sœur? On a vainement essayé d ’établir l ’affirmative.
Il fallait pour cela un plus grand nombre de témoignages que
ceux que la dame Verniette a péniblement recueillis.
C e l u i des sieur et dame Jarton ainé ne se rapporte pas au
quatrième fait^ mais bien à la seconde partie du cinqu ièm e, que
nous désignons comme un sixième fait. Nous l ’apprécierons en son
lieu.
L e sieur B o n n a b a u d , quatrième témoin de l ’enquête directe,
qui était le médecin du sieur B r u n , qui l ’a vu fréquemment , qui
avait sa confiance, ne l ’a jamais entendu parler de ses dispositions
bienveillantes en faveur de sa sœur, la dame Verniette.
U n seul témoin, le douzième, a entendu dire au sieur Br un :
Ce (¡lie j e p o ssè d e , j e le laisserai à ma sœ ur T'' en d ette , à q u i j e
conserve beaucoup de reconnaissance. L ’époque à laquelle ce
propos aurait été tenu n ’est point indiquée. 11 aurait été provoqué
par l ’invitation de se m arier , que le témoin faisait au sieur Br un
en plaisantant.
Ce tt e déposition , comme perdue au milieu de nombreuses
dépositions, n ’est fortifiée par rien. Il est étonnant ([lie le sieur
Pmin , s’il avait eu la volonté de tout donner à la dame Ve rn iette,
n’en eut point fait part à ses anciens amis, tels que le sieur
Bergougnoux , à scs vieilles connaissances, telles que la femme
Meteix.
Il est étonnant sur-tout q u ’il ne l ’eùt manifestée dans aucune
des nombreuses lettres q u ’ il écrivit h. la dame Vern iette, durant
les années 1 8 2 1 , 1 8 2 2 , 182.3, Faire espérer, même entrevoir à
�T ? n
cette sœur le don de toute sa fortune, eût été le meilleur moyen
de vaincre la négligence q u ’elle apportait h faire les commissions
dont il la cha rg ea it, négligence q u ’il lui avait reprochée dans
plusieurs lettres.
Ainsi le quatrième fait reste dénué de preuve.
Lorsque le testament eut été f a i t , la dame Verniette le présenta
à des jurisconsultes, pour savoir s’il était régulier. Tel est le cin
quième lait dont la preuve était offerte.
Deux jurisconsultes honorables ont été appelés en témoignage
sur ce fait.
jVL B i a u z a t , l ’ un d ’e u x , déclare que c’est lui qui a donné le
modèle du testament. Il ne peut se rappeler l ’époque précise à
laquelle on lui fit cette demande, ni la personne par qui elle fut
faite. Il a beaucoup réfléchi à cette dernière circonstance, dont il
sent toute l ’importance; mais la faiblesse de sa mémoire ne lui a
pas permis de se rappeler la personne qui a fait cette démarche
au près de lui. I l penche cependant à croire que c est la -dame
V ern iette elle-m êm e.
Plus t a r d , la même personne ou toute autre , lui présente la
copie du testament, q u ’il trouva conforme au modèle.
I l croit bien que le testament déposé au greffe et q u ’on lui a
représenté est le même.
La déposition de INI. Biauzat n ’a rien de positif., si ce n ’est q u ’il
a fourni le modèle d ’un testament.
Quelle est la personne qui lui avait demandé ce modèle? Il croit
que c ’est la dame Verniette; et il se trompe, d ’après la déclaration
de la dame Bernardin , neuvième témoin, qui affirme que c’est elle
qui a demandé et reçu le modèle du testament. A quelle époque?
M. B iauzat l ’ignore.
Il ignore également quelle est la personne qui lui lui a présenté
la copie du testament pour savoir si elle était conforme au modèle.
Il ne précise pas davantage cette seconde époque. L ’incertitude
q ui a présidé à cette déposition en détruit l'influence.
D ’ailleurs le jurisconsulte dit bien que la copie.du testament
q u ’on lui a présentée était conforme au modèle donné (sans doute
quant à la disposition , mais non quant à la confection matérielle;
car on ne peut penser q u ’ il l’eut tracé avec le même nombre de
lignes). Mais il ne s ’explique nullement sur la validité du testament.
A v an t la mort du sieur Brun aucun autre avocat n’a vu le
testament. La dame Verniette a prétendu q u ’elle l ’avait soumis à
l ’examen de M. Boii'ot oncle, qui lui avait déclaré que ce testa
�ment e'tait fo r t régulier. Elle avait instruit de cette particularité
la dame B e rn a rd in , saconfidente, son amie in t im e , celle qui avait
fait des démarches auprès de Me Biauzat.
L e témoignage de MeBoirot est venu démentir formellement cette
assertion. On connaît toute la loyauté de ce vénérable vieillard. Il
déclare sans hésitation et dans le langage le plus positif, que le
testament ne lu i a é té présenté , ni p a r la dam e V ern iette , ni p a r
personne de sa p a r t, soit avant, soit après le décès du sieur B run.
I l assure n ’avoir ja m a is vu ch ez lu i la dam e K ern iette et ne pas
la connaître.
T o u l ce q u ’on a dit et imprimé pour atténuer l ’effet cle cette
déposition , c ’est q u ’i l paraîtra p eu étonnant que Me Boirot ne se
soit pas rappelé un fait qui remonte à plus de 6 ans.
Nous arrivons au sixième fait interloqué. L a dame V ern ietle
s’était soumise à prouver q ue, depuis la date du testament, le sieur
B r u n avait déclaré p lusieurs f o i s q u ’il avait donné toute sa fo rtu n e
à la dame V er nietle sa sœur.
Des nombreux témoignages invoqués, quels sont ceux desquels
on voudrait faire surgir cette preuve?
On se complaît à rappeler celui du sieur Jarton a în é , qui est
lié d ’amitié avec les époux V e r n i e l t e , et qui déclare que le sieur
Br un lui avait manifesté des intentions bienveillantes pour la clame
V er nielte sa sœur, et qui lui avait d i t , à l ’époque où il fit son tes
t a m e n t, époque q u ’ il ne peut préciser, cjn’il avait e x é c u té ce q u ’il
avait toujours eu Vintention de fa ir e .
Mais tout cela signifie-t-il bien que le sieur Brun avait fait un
testament en faveur de la dame V e r n ie l t e , et lui avait donné son
entière hérédité? L'interprétation la plus large craindrait d'adopter
l ’affirmative. L e sien r Brun avait des intentions bienveillantes pour
la dame Ver niette , comme il en avait pour tous ses parons. Il a dit
q u ’ il avait exécuté ce q u ’il avait toujours eu l ’intention cle faire.
Mais q u ’a-l-il exécuté et eu faveur de q u i ? Il ne le dit point. S ’il
n’a exécuté que ce q u ’ il a toujours eu /’intention de faire, il n’a
point dépouiljé les enfans Bnnhours, ses neveu x, de toute partici
pation à son hérédité 5 ca r, lorsqu’ il écrivait à la dame Bonheurs
sa sœur des lettres qui renfermaient des expressions de la plus
franche amitié; que dans une de ces lettres, sous la date du 29
novembre 1 8 1 ( i , il lui disait : Jem b ra sse la m ère, les enfans et
le m ari que j'a im e b ie n , /Jarcequ' il rend ma santr heu reu se, il
n'avait assurément pas l'intention de frustrer de sa succession elle
et ses enfans. 11 11’avait pas celle int ention, quand il déplorait la
�. ( 33 )
’
V V
mort de cette sœur, q u ’il aim ait ; quand il eut témoigne tous ses ^
regrets au sieur Bonhours son beau-frère; q u ’il lui tenait un langage
affectueux dans une lettre du 9 janvier 1821 ^ q u ’il termina en
embrassant les Bonhours de cœur.
L ’intention q u ’il avait toujours eue était, n ’en doutons pas,
de laisser sa fortune àses deux sœursou à leursenfans. Cette intention
était le vœu de son cœur. Elle était commandée par ses affections.
Q u i osera assurer que ce n ’est pas cette intention q u ’il aura dit
au sieur Jarton aîné avoir réalisée ? L ’acte qui en ferait f0£
n ’apparaît point; mais on sait que la dame Verniette a fait main
mise sur l'intégralité de la succession, sans compte ni mesure
sans aucune espèce d ’inventaire. On pressent dès-lors quel aurait
été le sort d'un acte, qui aurait détruit son projet et anéanti le
testament, q u ’elle a osé produire.
Ai nsi , on ne trouve nulle part la preuve que le sieur Brun ait
déclaré, non p a s plusieurs f o i s , mais une seule fois, q u ’il avait
donn é toute sa fo rtu n e à la dame Verniette.
Le sixième fait reste donc dénué de preuves.
L e résultat de l ’examen et de l ’appréciation des enquêtes n ’est
point favorable au prétendu testament. Il est loin d ’en corroborer
V e x iste n c e . Il le la isso sous le poids de tous les vices q u ’on lui
reproche. La preuve offerte n ’est point administrée. N o n , il n ’est
pas prouvé que la dame Verniette et l ’une de ses filles soient allées
à Paris pour porter secours au sieur Brun dans ses maladies. Il n ’est
pas prouvé q u ’il eut, par initiative, invité le sieur Verniette a venir
le chercher à Paris pour le conduire à Clermont. Il est pr ouvé, au
con tr aire , que c ’était la dame Verniette qui l ’avait pressé de se
retirer à Clermont et de prendre chez elle un logement, offrant de
lui envoyer son mari pour l ’accompagner dans le voyage. Il n ’est
pas prouvé que le sieur Brun avait pour sa sœur, la dame Verniette
une affection exclusive, mais il est prouvé que la dame Bonhours
et ses en fans avaient part à cette affection.
II n ’est pas prouvé q u ’il jouissait de la plus grande liberté chez
la dame V er nietle ; mais il est prouvé q u ’il était gêné dans ses
actions; q u ’il était soumis à une active surveillance et tenu souvent
en charte privée.
Il n ’est pas prouvé q u ’il ait annoncé plusieurs fois le projet de
faire à la dame Verniette don de toute sa fortune, ni q u ’il ait dit
à plusieurs personnes q u ’il avait réalisé ce projet par un testament
ou par tout autre acte.
�r
_
•
( 34 )
Ja reconnaissance rlu sieur Br un et le don de toute sa fortu ne,
restent encore à établir, malgré l'interprétation favorable q u ’elle
s’est étudiée à prêter aux dépositions de certains témoins.
Que si les témoignages invoqués par la dame Verniette n ’ont
poi nt corroboré V existen ce du testament qu'elle prod uit, on peut
dire au contraire que plusieurs dépositions de la contr’enquête le
signalent comme un acte informe, irrégulier, comme un mensonge
que l ’on a osé présenter pour la vérité.
E n effet, il a suffi à MM. Costes, juge de paix, Rozier, greffier,
C u l h a t , géomètre, et B o i r o t , oncle et neve u, avocats, de voir
le testament, pour être frappés de ses irrégularités matérielles, et
pour manifester l ’opinion q u ’ils ne le croyaient pas sincère.
E t cependant les deux premiers avaient ainsi condamné ce tes
ta m ent, avant d ’être instruits de la démence dont avait été frappé
le sieur Brun.
s ni.
In c a p a c ité du sieur B run.
Pour faire un testament il faut jouir de ses facultés intellec
tuelles et avoir toute sa raison. Il faut aussi que la volonté du
testateur soit exprimée avec une entière liberté; q u ’elle ne soit
influencée, ni par la crainte, ni par la violence, ni par aucune
suggestion étrangère. Alors il y a capacité légale, autrement cette
capacité n ’existe pas.
Si nous supposons maintenant que le testament attribué au sieur
Brun est écrit de sa m a i n , il nous reste à rechercher si à la date
que porte le testament, le testateur avait la jouissance de scs facultés
morales, l ’exercice de sa raison, e t , en admettant l'affirmative,
s’il avait librement exprimé sa volonté.
Il n ’avait pas sa raison : de nom bi eux élémens concourent à le
démontrer. Il est certain q u ’avant de se retirer à C l e r m o n l , il avait
eu à Paris plusieurs atta qu es , qui avaient porté atteinte à sou
moral et le privaient de tems en teins de sa raison. T1 dit lui-même,
dans une de ses lettres, q u ’il perd la mémoire. Dans une a u t re,
sous la date du i ?. septembre i 8 a 3 , il se plaint d ’avoir un assou
pissement tous les soirs, de pleurer souvent de faiblesse, et d ’é
prouver un accès de jour à autre.
Le sieur Bergougnhoux père , troisième témoin de la contr euquêUî , alla voir le sieur B iu n à Paris, environ un mois avant que
celui-ci se retirât a (deiinont. «Je le trouvai , dit ce témoin , dans
« un état de démence piesqu’absolu ; il divaguait et ne répondait
« exactement à aucune de mes questions. Ses réponses, faisaient
�« rire deux domestiques à la garde desquels il était abandonné.
<. Je sortis de chez lui fort affligé de son état. » C ’est le lendemain
que le sieur Bergougnhoux, rencontrant le sieur Jarton aîné, l ’in
vita à prévenir ,1a famille du fâcheux état dans lequel était tombé
le sieur Brun. Il écrivit pour le même sujet à la dame Bergou
gnhoux son épouse.
Selon le septième témoin, le sieur Brun passait dans le voisinage
pour être tombé dans un état de démence. Il faisait, dit-on, des
extravagances. L a femme Ramade dit un jour au témoin que le
sieur Brun avait mis le f e u à de la paille dans l ’escalier de la
maison qu'il ha bita it, et q u ’on la v a it trouvé se chauffant à ce
fo y e r .
L e huitième témoin parle du bruit qui s'était répandu que le
sieur Brun avait perdu la tête, q u ’il faisait des extravagances. II
raconte que s’étant un jour échappé, il était venu se réfugier chez
le témoin et cherchait à s’y cacher. Ou lui a dit que le sieur Brun
était enfermé dans sa chambre par les personnes de la maison , dans
la crainte q u ’il ne s’échappât.
L e neuvième témoin rappelle le même fait.
Selon le quatorzième témoiu , 011 racontait que le sieur Brun
avait perdu la tête à Paris.
Le sieur B lati n , médecin connaissait les causes de la maladie du
sieur Brun . Il n ’a pas dù les révéler. Elles n ’ont pas peu contribué,
sans d oute, à le faire tomber dans l ’état d'aliénation mentale qui
parait avoir précédé sa mort. Il était aussi d ’une grande douceur
de caractère.
Ces témoignages géminés sont sans doutesuiiisans pour démon trer
([île le §ieur Brun était atteint de démence, même avant de quitter
Paris.
*
Mais la vérité q u ’ils proclament apparaît encore dans un plus
grand jou r, si l’on considère la confection matérielle du testament
et les circonstances dans lesquelles il est intervenu.
L e lecteur n ’a pas perdu de vue que le sieur Brun avait la
prétention de bien écrire, et q u ’en eftet il écrivait assez correcte
ment. Comm ent comprendre alors q u ’il e û t , avec discernement,
jeté sur une feuille dp papier quelques lignes inégales pour disposer
de toute son hérédité; q u ’il eut surchargé plusieurs mots, tandis
que d ’autres seraient traces nett em ent; q u ’il eût fait dans les
mots testament et vingt des fautes grossières d ’orthographe; q u ’il
eût. fait suivre sa signature patroniinique du prénom Michel, qu on
ne voit , nulle autre p a r t , accompagner sa signature.
�Non; il n ’aurait pas laissé subsister cet écrit informe sans
démentir son caractèr e, son amour-propre. Il l ’aurait recopié. Il
en avait eu la facilité, le teins, pu isq u’il a survécu près d ’un an
à la date de l ’écrit.
D ’ailleurs, on ne peut guère supposer que le sieur B r u n , qui
avait l ’intelligence des affaires, eût eu besoin d ’ un modèle pour faire
son testament olographe, ou bien s’il n ’avait pu lui-même rédiger
ses dernièies volontés, il se serait adressé à un notaire pour le
charger de ce soin.
Les précautions que l ’on a prises pour se procurer une feuille de
papier timbré et pour effacer l ’empreinte de la griffe qui aurait in
diqué le nom du fonctionnaire public, par qui cette feuille avait été
fournie, sont aussi un indice de fraude. On redoute la lumière. On met
à contribution la complaisance de certaines personnes. C ’est le sieur
G i l l e t , septième témoin de l ’enquête directe, qui est venu déclarer
q u e , sur l ’invitation de la dame Vern iette, il alla chercher chez
M e Roddier ou chez M. Bonnefoi ou chez Me Bergier , notaire, une
feuille ou demi-feuille de papier. Puis il ne peut préciser si c ’est
le mari ou la femme Verniette qui lui a fait l ’in vi tation , q uoi
q u ’ il ait d ’abord dit que c ’est la femme. Il ajoute q u ’il ne peut se
rappeler non plus si c’est lui ou l ’ un de ses ouvriers, qui serait allé
chercher ce papier, quoique d ’abord i l eût dit que c était lui-m êm e.
L a singularité de cette déposition est frappante.
C ’est la dame Bernardin, neuvième témoin, qui serait allée chez
M e Bi auzat demander le modèle du testament.
Mais ni la dame Bernardin, ni aucun autre témoi n, n ’ont vu le
sieur Br un copier ce modèle. Il n ’a dit à personne q u ’il eût fait un
testament olographe. Cette clandestinité est inexplicable. L e sieur
Brun n ’aurait eu aucune raison de s’y tenir. Il était maître de sa
fortune. Il n ’eut pas craint de manifester par un acte aussi positif
la prédilection exclusive dont la dame Verniette se dit l ’objet.
Qu e si l ’on admet que le testament est vraiment écrit par le
sieur B r u n , et que le testateur savait ce q u ’il faisait, ce testament
ne resterait pas moins vicié d ’ une nullité radicale, comme n ’étant
pas l ’expression d ’ une volonté libre.
E n effet, quand on a lu les enquêtes, 011 ne peut révoquer en
doute que le sieur Br un 11e fut tenu en charte privée. Il l ’a
dit lui-même au sieur Bergougnhoux. Plusieurs autres témoins
l ’attestent, et notamment le treizième à qui les demoiselles
Verniette répondirent, un jour q u ’elle insistait pour voir le sieur
�B run son frère de lait, qu*elles n avaient pas La c l e f de la chambre,
et que leur mère était absente.
La dame V er n ie tte , que l ’on dit douée d ’un caractère ferme
ju s q u ’à la rudesse, maîtrisait complètement son frère par la crainte
q u ’elle lui inspirait. ( O n a même vu q u ’il se plaignait d ’en être
b a t t u ) . Cette domination avait'été facile à acquérir par suite du.
caractère doux et timide du sieur Bru n, caractère que les souffrances
avaient achevé de rendre pusillanime.
Dans cet état m ora l, obsédé continuellement par la crainte que
lui inspirait son ty ra n , il ne pouvait exprimer de volonté.libre sur
le don de sa fortune. Aussi toutes les démarches qui ont facilité
le prétendu testament, sont-elles laites par la dame Verniette ou
par son ordre. Il semblerait q u ’elle dirigea la main qui l ’écrivait.
C ’est elle qui l ’avait en son pouvoir, et qui en f it , contre l ’usage,
la remise à un notaire.
T o u t , comme on le voi t, s’est passé à l ’égard de cet acte, d ’une
manière insolite, extraordinaire.
Ma inte na nt, q u e , selon M. Tou llier, un testament olographe
soit p lu s fa v o ra b le que le testament reçu p a r des notaires; que la
présom ption de sagesse soit toute entière en fa v e u r du testateur
<jui p ren d le soin d ’écrire ses dernières v o lo n tés, nous ne con
testons point cette doctrine; mais nous soutenons q u ’elle ne peut
recevoir d ’application à l ’espèce, parce que l ’écriture et la signature
ne sont point reconnues par les héritiers naturels q u i , au con
traire, en dénient formellement la sincérité; parce que la présomp
tion de sagesse, en faveur du testateur, disparaît devant le double
fait d ’aliénation et de charte privée.
Lorsque tant et de si graves circonstances s’élèvent contre la
sincérité du testament a t t a q u é , quelle confiance pourrait lui
accorder la justice? A h ! sans doute, si la C o u r , dans son amour
ardent pour la justice, ne frappe point immédiatement de sa répro
bation celte œuvre de fausseté et de déception, c’est que les intimés,
jaloux eux-mêmes de voir briller la vé r it é , n ’ont point formé
d ’appel incident pour amener une décision sur le fond, et q u ’ils
se sont bornés à demander la confirmation du jugement qui ordonne
une nouvelle vérification.
F O U L H O U X , A v o ca t.
MA RIE., L ice n cié -A v o u é .
R I OM ,
de
l ’i MPRIMERIE
De
salles
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bonhours, Annet. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Foulhoux
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
testament olographe
testaments
infirmes
conseils de famille
experts
faux en écriture
expertises graphologiques
signatures
témoins
démence
médecine légale
affection fraternelle
charte privée
abus de faiblesse
procuration
notaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieurs Annet et Michel Bonhours, dame Anne Bonhours et le sieur Jean-Baptiste Celme, son mari, et le sieur Louis Bonhours, tuteur légal de ses enfans mineurs, tous propriétaires, habitans la ville de Montferrand, Intimés ; contre dame Antoinette Brun, veuve en premières noces du sieur Guillaume Bujadoux, et sieur Joseph Verniette, son second mari, marchands, demeurant en la ville de Clermont, Appelans.
Annotations manuscrites.
« 19 mai 1931, 1ére chambre… Déclare le testament du sieur Michel Brun, du 20 octobre 1823, vrai et valable. »
Table Godemel :
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1802-1831
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2718
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2717
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53555/BCU_Factums_G2718.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
affection fraternelle
charte privée
conseils de famille
démence
expertises graphologiques
experts
faux en écriture
infirmes
médecine légale
notaires
procuration
signatures
Successions
témoins
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53554/BCU_Factums_G2717.pdf
8acb8c5aae0e52452e0bc041e6564460
PDF Text
Text
COUR ROYALE■
:
MÉMOIRE
DE RIOiM;
Dame
A n to inette
du sieur
B R U N ,
G u illa u m e
V E RNIETTE,
ve u ve, en premières noces,
B U J A D O U X ,
et sieur
J oseph
son second m ar i, marchands, ha-
b it a ns de la ville de C l e r m o n t , appelans ;
CONTRE
L e s sieurs A
n e
nt
et
M ic h e l
B O N H O U R S , dame
B O N H O U R S et sieur J e a n - B a p t i s t e
C E L M E son m ari, et le sieu r Lo u is B O N H O U R S ,
A n ne
tuteur lég a l de ses enfans m ineurs, tous proprié
taires, habitans de Clerm ont, partie de Montf errand,
Intimés.
P
armi
■- J
I re
•
les droits accordés par la loi civile à l ’homme
social, un des plus respectables est celui de trans
mettre son patrimoine à un héritier de son choix.
C hez tous les peuples, les législateurs ont protégé
l ’exercice de ce droit sacré qui nous f a i t , en quelque
sorte, revivre dans la personne dont les affections et
il |
'■
»!
'
POUR
M1
CHAMBRE.
f:
�les services ont mérité un dernier témoignage de nos
souvenirs et de notre reconnaissance.
Mais il est rare que les efforts de l ’intérêt privé ne
cherchent pas à. anéantir les dernières volontés d ’ un
testateur. Pou r tâcher d ’y parvenir, les collatéraux ne
manque nt pas de prétextes-, l ’homme q u ’ils ont oublié
pendant sa vie leur parait inju ste, s i, à sa m o rt, il les
oublie lui- même, s’il gratifie ceux q u i , dans tous les
instans de sa vie , lui ont consacré leurs soins, et q u i ,
pour embellir son existepce ou la soulager dans les
tristes années d ’une vieillesse infirme, n ’ont épargné ni
voyages, ni veilles, ni dépenses.
C ette cause présente un nouvel exemple de ces ten
tatives hasardées, contre sa propre conviction, par l ’es
prit de cupidité qui se laisse bercer de l ’espoir q u ’il
de vra , peut-être à l ’err eu r,
justice éclairée l u i refuserait.
une hérédité q u ’une
L e sieur B run a légué, par un testament olographe,
toute sa fortune à la dame V e r n ie t t e , sa sœur.
T o u t devait faire prévoir cette disposition.
U n e amitié toute particulière unissait le frère et la
sœur ;
C e l l e - c i avait recueilli dans sa maison un frère
infir me, qui avait quitté Paris pour être entouré des
secours d ’une sœur chérie. L à lui avaient été prodigués
les soins les plus m in u t ie u x , et tous les soulagemens
que des infirmités peuvent trouver dans les ressources
de l ’a r t , dans les attentions délicates des sentimens
fraternels;
11 ne voyait jamais les enfans Bonhours, qui sont
�ses neveux, il est vrai, mais dont il disait avoir depuis
long-tems à se plaindre.
L e sieur Brun a tracé, dans l ’écrit qui contient ses
de rnières volontés, des dispositions que son cœur lui
avait dictées; et son testament est tout à-la-fois un
monument d ’affection fraternelle et de gratitude.
Co mm en t pourrait-il être sérieusement critiqué?
Aussi dans l ’embarras où ils se tr ouv en t, les enfans
Bonhours qui attaquent le te st am en t, tantôt sou
tiennent q u ’il n ’est pas l ’oeuvre de la main du défu n t,
tantôt prétendent q u ’il n’est pas celle d ’un esprit sain
et intelligent; n'hésitant pas ainsi, pour se procurer
un succès illégitime, ou à accuser d ’ un faux la dame
Verniette, leur ta n te, ou à flétrir, par la supposition
de la démence, la mémoire de l ’oncle dont ils veulent
envahir la fortune.
Ces argumens, qui se détruisent l ’ un l ’autre par
une choquante contradiction, en les isolant même,
seront faciles à combattre.
^
Déjà une vérification par experts a fait justice de
l ’une de ces déplorables objections.
U n e preuve par témoins, en réduisant l ’autre à sa
vraie valeur, démontrera aussi qu'une volonté cons
tante et éclairée avait préparé, et a consommé les
bienfaits que le testateur s’est plu à répandre sur une
sœur q u ’il chérissait spécialement.
FAITS.
L e sieur Michel B r u n , dont le testa men t a donné
�lieu au procès, avait habité Paris pendant trente ans
environ.
D u r a n t cette longue absence, il n ’avait conservé de
relations intimes q u ’avec la dame Antoinette Brun sa
sœ ¡r, épouse du sieur Verniette, négociant à Glermont.
Il avait cependant une autre sœur, la dame Mich lie
B r u n , qui demeurait à Montferrand, où elle s’était
mariée avec le sieur Bonhours; mais les rapports du
sieur Brun avec cette sœur et avec l^-s Bonhours étaient
nuls ou peu agréables; il éprouvait même pour eux
une sorte d ’éloignement dont il est inutile de recher
cher les causes, mais q u ’il a manifesté dans plusieurs
circonstances.
Au contraire, il avait toujours existé entre lui et la
dame Yer niette une amitié v i v e , q u ’avait entretenue
un échange mutu el de soins, de services et d ’attentions,
et qui engageait le sieur B r u n à faire de tems en teins
■des voyages à C le :m o n t pour revoir sa sœur et pour
passer quelques semaines auprès d ’elle.
Dès 1802, il avait entrepris la commission à Paris-,
et souvent il envoyait à Glermont des marchandises de
diverses sortes. Sa sœur Antoinette lui procurait des
demandes 5 il la chargeait aussi de ses recouvremens.
Ces rapports d ’affaires ajoutaient à leur i n t im it é , et
line correspondance suivie existait entr’eux.
C ett e correspondance est établie par une foule de
lettres qui attestent aussi les sentimens affectueux du
frère envers la sœur; elle n ’a cessé q u ’en octobre 1823,
au moment oii le sieur Br un a quitté Paris pour venir
�habiter auprès et dans la maison même de la dame '
Verniette.
E n i 8 o 5 , il désira être parrain d ’une fille de sa sœur,
alors épouse du sieur Bujadoux; il fit , dans ce b u t , le
voyage de C le r m o n t , logea chez sa sœur, et passa deux
mois auprès d ’elle, sans autre table que la sienne.
E n 1809, il voulut goûter les plaisirs des vendanges
auprès de sa sœur; il occupa chez elle les mêmes appartemens que dans ses précédens voyages, fut traité de
la même manière, et ne la q u i t t a , elle et sa famille,
q u ’avec regret, lorsque ses affaires ne lui permirent
plus de prolonger son séjour. C e fut dans cette circons
tance, que le frère et la sœur se donnèrent réciproque
ment leur portrait.
.
Il serait superflu de parler des différens autres
voyages. Mais 011 ne doit pas passer sous silence celui
que fitle si eurB run, en 1 8 1 7 , q u ’avait rendu nécessaire
la mort de son père, et lors duquel eut lieu le partage
des biens de la famille.
Ces biens étaient situés à Montferrand , ce qui obli
geait M. Brun de se rendre fréquemment dans cette
ville où demeuraient les Bonhours. Cependant jamais
il n ’a couché chez eux; et lorsqu’il s'était vu dans la
nécessité de passer la journée à Montferrand, le soir il
revenait chez sa sœur Antoinette Brun, à Clermont.
L e sieur Brun avait souvent pressé la dame Verniette
de venir le voir à Paris. C elle -c i, mère de famille et
mar chande, n ’avait pu se rendre a son invitation.
Mai s, en février 18 22 , elle apprend que son frère
est malade. Alors l ’affection re m po rte , elle abandonne
�( 6 )
son ménage, son commerce, et va passer auprès de son
frère deux mois q u ’elle consacre à l ’entourer de ses
services. Ce n ’est que lorsqu’elle l ’a rendu à la santé,
q u ’elle quitte Paris pour revenir auprès de sa famille.
Cependant
plusieurs banqueroutes éprouvées par
le sieur Br un pendant l ’année 1 8 2 2 , lui causent des
chagrins qui bientôt altèrent encore sa santé-, des soins
cons'ans lui deviennent nécessaires. Il sent le besoin
de ne pas être livré à. des services mercenaires , e t ,
par une lettre écriteMe 9 février 1823 au sieur Jarton
aînéj marchand à Clermont^ il le prie de déterminer
une des filles de la dame Ve rnie tte , la demoiselle
Amélie Bujadoux sa filleule, à se rendre auprès de lui.
C elle -ci,
qui entrait alors comme novice dans la
communauté des Urs ulines , ne put se rendre auprès
de son oncle; mais elle fut remplacée par sa sœur ainée,
la demoiselle Agathe Bujadoux, q u i a prodigué pendant
plusieurs mois au sieur B r u n tous les services que son
état pouvait exiger.
Indisposée elle-même, et voyant son oncle en conva
lescence ,
la demoiselle Agathe revint auprès de sa
mère en juillet 1823.
L e sieur B run resta encore plusieurs mois à Pari s;
mais sa santé étant chancelante, et ses infirmités p a
raissant s’accroître, il vo ulut quitter les affaires et
venir se fixer à Clermont auprès de sa sœur.
A lo rs , pour se conformer aux désirs prcssans q u ’il
manifesta par plusieurs lettres écrites en octobre 1823,
le sieur Ve rniette son beau-frère alla le chercher.
A v an t de q uit te r Paris, il mit dans ses affaires lo
�( 7 )
'ìS V
plus grand ordre; il résilia le bail de son logement,
régla ses comptes avec ses commis, donna sa procuration
à un notaire de Paris, acheta une v o i tu r e , fit marché
avec un voiturier de Marvejols, et, voyageant à petites
journées, arriva à Clermont le 2 novembre, accom
pagné de son beau-frère Y e r n ie t te , chez lequel il alla
loger, suivant son usage,N.et dans la maison duquel il
est resté jusqu’à son décès.
Les jours qui suivirent l ’arrivée du sieur B run
furent employés par lui à rendre des visites à ses amis,
à régler différens comptes avec ses commettans, et à
quelques autres affaires.
L e i 5 novembre, il acheta divers objets à son usage;
le 1 7 , il acquitta de sa propre main une facture du
sieur Leg oy t et en signa l ’acquit (1).
L e 20 novembre, il fit le testament olographe, dont
les enfans Bonhours demandent la nullité.
C e testament est court; mais il contient tout ce qui
est nécessaire pour sa validité. L e içodèle en avait été
demandé à un jurisconsulte de Clermont. En voici les
termes :
« Ceci est mon testament^: »
« J’institue
mon
« Antoinette Br un.
héritière
universelle
ma sœur
A C le n n o n t-F erran d , le vingt
h novembre mil huit cent vingt-trois.
Signe Brun
« Michel. »
Depuis comme avant ce testament, le sieur Br un
a continué de sortir, le plus souvent seul; de visiter
(1) On rapporte cette facture et son acquit.
'
*
�ses amis; de diner chez eux ; de vaquer librement à
ses différentes affaires; enfin d ’agir et de parler comme
un homme qui jouit de toutes ses facultés morales.
Il donna notamme nt, le 4 février 1824? au sieur
Verniette une procuration qui fut reçue par le sieur
A s t a i x , notaire à C le r m o n t ,
et qui autorisait son
fondé de pouvoirs à traiter avee un sieur M alhie r ,
dont il avait été l ’associé à Paris.
C ’est seulement peu de mois avant sa m o r t , que,
son mal s’aggravant, il a cessé de sortir de la maison
de la dame V e r n ie t t e , où il occupait l ’appartement le
plus commode.
L e sieur Brun est décédé le 20 octobre 1824, laissant
à la dame Verniette une fortune modique , il est v r a i ,
mais précieuse pour elle, comme un gage del à tendresse
de son frère.
Telle est l ’analyse fidèle des faits qui ont précédé la
contestation actuelle.
L e testament fut présenté le 3 o octobre p a r M ' F a b r e /
notaire à Cle rm ont, au président du tribunal civil, L a
description en fut faite, et le dépôt ordonné entre les
mains du même notaire^, e t , par une ordonnance du
3 décembre su iv ant, la dame Verniette fut envoyée
en possession des biens de l ’ hérédité.
Cependant la famille Bonhours annonce bientôt des
projets hostiles.
L e i 5 janvier 1825, un conseil de famille est réuni
pour en obtenir une autorisation afin d ’agir en partage
de la succession de l ’oncle.
C e conseil de famille, dans la délibération d u q u e l il
�(
9
)
n ’est pas parlé du testament olographe, autorise l ’ac
tion en partage, quoique l ’un des parens, un oncle
maternel, refuse son consentement, la demande ne lui
paraissant pas fondée.
Alors, et par exploit du 4 février 1825, fut intro
duite l ’instance.
L a dame Verniette fit notifier le testament.
Les enfans Bonhours déclarèrent n ’en pas connaître
l ’écriture et la signature, et formèrent opposition à
l ’ordonnance d ’envoi en possession. Us alléguèrent aussi
que le sieur Brun ét ait, bien long-tems avant la date
du testament, dans un état d ’imbécillité et de démence,
qui ne lui aurait pas permis d ’exercer une volonté libre
et éclairée.
U n ju gem ent, du 3 décembre 182!}, ordonna une
vérification,
Imberl
et
ancien
nomma,
avoué,
pour experts,
Bonjour et
Cavy,
les
sieurs
tous les.
deux notaires l ’un aux Martres-de-Veyre , l ’autre à
Clermont.
L e choix de ces trois experts,
aussi habiles que
prudens, semblait devoir offrir la plus forte garantie
aux inquiétudes des parties et à la sollicitude de la
justice. O11 verra cependant q u ’ il n ’en a pas été jugé
ainsi.
Cependant des pièces de comparaison furent pré
sentées; les unes étaient authentiques, les autres sous
seing-privé.
Parmi les pièces autlientiques, la seule qui fut ré
cente, était la procuration du 4 février 1824, dont
nous avons déjà parlé, comme postérieure au testa
�ment.
C ett e
pièce
fut
présentée
par
les
enfans
Bonhours.
Les actes sous seing-privé consistaient principalement
en lettres écrites à diverses époques par le sieur Br un.
Les enfans Bonhours en présentèrent quatre dont
les dates étaient anciennes; la plus récente était an
térieure de près de quatre années au décès du sieur
Brun.
L a dame Yerniette consentit à les admettre pour
pièces de comparaison, mais à condition q u ’on a d
mettrait aussi beaucoup de lettres q u ’elle produisit
elle-même, et sur-tout celles qui étaient les plus rap
prochées de l ’époque du testament.
Il en fut autrement. Les plus rapprochées, c ’est-àdire les plus propres k éclairer les experts et la justice
furent rejetées par les Bonhours, qui ne pouvaient se
dissimuler le d a n g e r , p o u r e u x , de la comparaison de
ces écrits récens avec l ’écriture du testament.
Cependant les experts procèdent à la vérification
qui leur était confiée.
Dans leur procès-verbal ils transcrivent les dires des
parties. C eux des époux Verniet te rappellent en subs
tance les faits que nous venons d ’exposer, et la preuve
en est offerte.
Il est ajouté q u e , « s’il existe quelque différence
« entre les écritures et signatures du sieur Brun , cela
« ne peut provenir que des attaques et des maladies
« q u ’il a éprouvées; ce qui est établi dans différentes
« lettres q u ’ il a écrites à plusieurs personnes, dans
« lesquelles il leur dit q u ’il a la main tremblante, et
�(
11
)
« q u ’il n ’écrit q u ’avec beaucoup de peine et de diffi« culté. »
A l ’appui de leurs observations, les époux Vernielte
présentent aux experts plusieurs lettres et une facture
acquittée par le d é f u n t , trois jours avant la date du
testament.
Mais les experts-vérificateurs ne crurent pas devoir
faire usage de ces nouvelles pièces; et se fixant seule
ment sur les pièces adoptées dans le procès-verbal du
commissaire, les rapprochant de la pièce désignée, se
liv ra nt, d ’abord chacun à part soi, à l ’examen le plus
scrupuleux,
s étant ensuite com m uniqué leurs ré
f le x i o n s , ils s ’exprim ent ainsi :
« Nous avons remarqué que la physionomie qui
« résulte de l ’assemblage des caractères du testament
« s’éloigne de celle q u ’offre la contexture des onze
« lettres missives co m p ar ées.' C e p en d an t, en descen« dant dans les détails de la comparaison, on est
« obligé dé reconnaître que la conform ation de beau« coup de mots entiers et de chaque ca ra ctère, pris
« isolément de la pièce indiquée, est très-ressemblante
« à celle des mots semblables et des caractères isolés
« des lettres missives; et q u ’ainsi la différence de phy« sionornie des caractères paraît provenir de ce que
« celle de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur
« et d iffic u lté , tandis que celle des lettres missives
« annonce une plus grande facilité d ’exécution. »
Cet te explica Lion des experts paraîtra foit naturelle^
si l ’on considère que la plupart des lettres missives
étalonL anciennes, et q u ’elles étaient loutes antérieures
�aux attaques et aux maladies qui avaient causé à la
main du sieur B run cette pesanteur et cette difficulté
d ’exécution dont parlent les experts.
Ces hommes de l ’art eussent trouvé plus d ’identité
dans la physionomie, s’ils eussent pu employer, comme
pièces de comparaison, des lettres plus récentes, et
l ’acquit
écrit de la main du sieur Brun l u i - m ê m e ,
le 17 novembre 1 8 23, sur une facture due par le sieur
Lego yt .
Les experts considèrent ensuite les actes aut he n
tiques qui ne leur présentaient que des signatures
isolées et déjà anciennes. L e jplus grand nombre de
ces signatures remontaient à l ’an 1 2 , à l ’an i 3 *et à
l ’an 14 (1804? i 8 o 5 , 18 0 6 ) ; quelques-unes à 1 8 1 8 ;
une seule au 4 février 1 8 2 4 , c ’est-à-dire à une époque
rapprochée de celle du testament , qui est du 20
novembre mil h u it cent vingt-trois.
Les anciennes
signatures
paraissent aux
experts
présenter peu de similitude avec celle de la pièce déniée.
Mais la signature de la procuration reçue A s t a i x ,
notaire, le 4 février 1 8 2 4 , frappe particulièrement
leur attention.
« E lle s’éloigne,
disent-ils,
du caractère de la
« signature ordinaire du sieur B r u n ; mais 011 ne peut
« se refuser à lui trouver une grande ressemblance
« avec celle du testament; et les experts ne doutent
« pas qu e lles aient é té produites toutes d e u x p a r la
« même main. »'
Quo i de plus décisif q u ’ une telle opinion, fondée sur
un acte a u t h e n t i q u e q u ’avaient présenté les Bonh ou rs
�( i3 )
eux-mêmes comme pièce (le cQmparaison, et qui a été
fait presqu’à l ’époque tlu testament, c ’est-à-dire dans
un tems où le testateur était dans le même état p h y
sique, et éprouvait, pour écrire, la même pesanteur
de la main et la même difficulté d ’exécution, effet des
maladies q u ’il avait essuyées.
Les experts descendent ensuite dans des recherches
soigneuses sur la conformation de chaque lettr e, soit
du testament, soit de la.signature; et, comparant cette
conformation* à celle des lettres de la signature de la
procuration et même des caractères et des mots sem
blables q u ’ils aperçoivent dans les lettres missives, ils
démontrent que la même main a dù tracer ces différens
écrits.
Nous ne les suivrons pas dans des détails q u ’il serait
trop long même d ’analyser, mais qui prouvent avec
quelle exactitude, avec quel scrupule les experts se sont
acquittés du mandat que leur avait donné la justice.
Nous nous bornerons à transcrire le résumé de leur
avis. Il est ainsi conçu :
n
« Par suite de l ’examen et des observations qui
« précèdent, les experts ont formé leur opinion et
« déclaré, à Vunanim ité, q u ’il demeure évident pour
« eux que l ’acte soumis à leur vérification a etc écrit
« et signé de la même main qui a tracé les caractères
« de comparaison. »
L e résultat d ’ une telle vérification devait, il semble,
ne laisser aucune ressource aux tracasseries.
Mais les enfans Bonhours ne se découragèrent pas;
ils critiquèrent le procès-verbal des experts, et deman-
�dèrent mie nouvelle vérification 5 subsidiairement ils
offriient la preuve de diverses allégations hasardées,
par lesquelles ils prétendaient que le sieur Br un avait
.toujours vécu en bonne intelligence avec son beau- frère
et ses neveux Bonhours; q u ’étaiit tombé malade, à la
fin de 1823, le sieur Verniette alla le chercher à Paris,
et le conduisit à C le rm o u t; que depuis cette époque,
la dame Ver niette avait fait tout ce qui était en son
pouvoir pour éloigner de lui le père Bonhours et ses
enfans; que la plupart du tems, lorsqu’ils venaient le
voir, ils étaient repoussés avec rudesse sans être admis;
Qu e la dame Verniette le tenait en charte privée
pour empêcher, autant q u ’il était en elle, q u ’il eut
des communications avec ses parens et amis;
Que souvent elle le m altrait ait ,
et q u ’il en faisait
ses plaintes à ceux qui pouvaient l ’aborder;
E n f i n q u ’il avait f ré q u e m m e n t des attaques q ui lui
faisaient perdre connaissance, et qui l ’avaient réduit à
un état d ’imbécillité.
On ne fixait pas d ’ailleurs l ’époque à laquelle avait
commencé cet état d ’imbécillité.
Ces faits n ’étaient ni vrais ni vraisemblables, ni
pertinens. C ’est ce que démontra la dame Verniette
en demandant l ’ homologation du rapport des experts.
I,a cause portée h l ’audience,
le t r ib u n a l , par un
jugement du 23 avril 1 8 2 7 , n ’admit pas la preuve
offerte; mais par de longs considérans, déduits n o
t a m m e n t , de la faculté q u ’avaient les juges de 11e pas
adopter l ’opinion des experts, q u i , dans ces matières,
n ’est que conjecturale; du laconisme du testament qui
�( i5 )
lui parut prêter aux soupçons; de la circonstance que
la physionomie du testament s’éloignait de celle des
lettres missives; de celle q u ’à la signature du testament
était ajouté le mot M ic h e l 3 qui ne se trouvait pas dans
les autres signatures; de la différence que le tribunal
crut remarquer entre Vn finale de la signature du tes
tament et celle de la procuration ; enfin et sur-tout de la
surcharge du mot vin g t dans la date du testament; par
ces divers motifs, le tribunal ordonna une nouvelle véri
fication, en la confiant à MM. Hugues, C a il h eet Murât.
Ces experts furent chargés de s’expliquer sur les
surcharges qui existent dans le testament, notamment
sur le mot v in g t, et sur la date qui y existait avant;
d ’examiner si le mot vingt avait été tracé par la même
main qui avait écrit et signé le testament; de peser
enfin dans leur sagesse les doutes que pouvaient faire
naître les réflexions
énoncées
dans les motifs
du
jugement.
C e jugement se mb lait, par ses motifs au moins,
indiquer aux experts l ’avis q u ’ils avaient à exprimer; et
q u o iq u ’il réservât aux parties tous leurs moyens de fait
et de droit, sa rédaction présentait des singularités qui
devaient nécessairement faire éprouver quelque em
barras aux
personnes chargées de la nouvelle vén-
fiication.
On pouvait s’étonner aussi de ce que les Bonhours
n ’avaient pas été soumis à avancer les Irais de celle
seconde opération q u ’ils avaient demandée.
L a dame Verniette a interjeté appel de ce jugement.
Devant la cour, la dame Verniette a demandé l ’homo-
�logation du procès-verbal de vérification, et a renou
v e l é , subsidiairement, l'offre de la preuve des faits
q u ’elle avait consignés dans le rapport des experts.
Les Bonhours, en concluant à la confirmation du
ju gem ent, ont offert, aussi subsidiairement, la preuve
des mêmes faits q u ’ils avaient présentés eu première
instance.
L a C o u r a rendu , le i 5 juillet 1829, un arrêt ainsi
concu
«» :
« At te n du q u e , d ’après la nature de l ’affaire et les
« circonstances qui s’y rattachent, il ne peut q u ’être
« utile pour la découverte de la vérité, de corroborer
« l ’existence du testament dont il s’agit par des preuves
« testimoniales; que cette marche est admissible, soit
« dans l ’e s p r i t , soit dans la lettre de la législation
« romaine et de la législation du code civil,
« P a r ces m o t i f s ,
« L a C o u r , sans préjudice des fins et moyens, tant
« de fait que de d r o i t, qui demeurent réserves aux
h
parties sur le fonds, ordonne, avant de faire d r o i t ,
« q u e , dans le mois, à compter de la signification du
« présent arrê t, faite à avoué en la C o u r , les parties
« d ’ All em and feront preuve, tant par titres que par
« témoins, par-devant M, V e r n y , conseiller-auditeur,
« commis à cet effet:
« i° Que lu dame Verniette et ses filles ont soigné
u le sieur B r u n , tant à Paris q u ’à C l e r m o n t , pendant*
« les dernières années de sa vie, dans les maladies quo
« celui-ci a essuyées, ou à raison de scs infirmités;
« 20 Qu e le sieur Br u n , voulant venir se fixer à Cler»
�(
*7
)
« mont à la fin de 1823, invita le sieur Verniette à
/
« le venir chercher à Paris; et que le sieur Verniette,
« cédant à cette invitation, se rendit effectivement à
« Paris et revint à Clermont avec le sieur B r u n , qui,
« depuis, ju sq u’à son décès, a continuellement habité
« avec les époux Vern iette;
« 3 ° Qu e le sieur B r u n , depuis son arrivée à Cler« mont jusq u’à son décès, a reçu et rendu de nom« breuses visites et est allé dîner plusieurs fois chez
« des personnes avec qui il avait eu d ’anciennes rela« tions; que, d ’ailleurs, il sortait fréquemment, soit
« pour se promener, soit pour voir ses amis;
« 4°. Q u ’il a souvent exprimé à diverses personnes
« son affection particulière et sa reconnaissance pour
« la dame Verniette sa sœur, ainsi que sa volonté de
« lui laisser toute sa fortune ;
« 5 ° Que lorsque son testament eut été fait, ce
« testament a été présenté à des jurisconsultes, pour
« savoir s’il était régulier;
« Q u e , depuis la date de ce testament, le sieur
« Br un a déclaré plusieurs fois q u ’il avait donné toute
« sa fortune à la dame Ve rnie tte , sa sœur;
« S a u f aux parties de Godemel toute preuve con« traire, dans le même délai et par-devant le même
« commissaire, dépens réservés. »
Comm e 011 le v o i t , la C o u r a ordonne la picuve
offerte par la dame V e r n ie i le ; elle l ’a ordonnée parceq u ’elle l ’a considérée, non peut-être comme rigoureu
sement nécessaire, mais comme utile pour corroborer
V existence de testam ent; elle l ’a ordonnée en autoriT+
0
�sant seulement lesBonhours à faire la preuve contraire.
L ’on verra bientôt que tous les faits articules ont été
prouvés par la dame Ver niette , et que certains de ces
faits sont établis même par la preuve contraire, dont la
plupart des dépositions, d ’ailleurs, roulent seulement
sur de vagues propos ou sur des points non interloqués.
Mais, avant d ’entrer dans l ’exposé de ces preuves
orales, fixons-nous sur celles qui résultent de la vér i
fication de l ’écriture du testament.
DISCUSSION.
S I.
E x a m e n du rapport des experts.
Nous l ’avons dit en commençant : le rapport des
experts était aussi satisfaisant que décisif. 11 était
l ’ouvrage d ’hommes aussi éclairés que soigneux, et que
leur sévère impartialité a toujours désignés à la confiance
des tribunaux. Il a été le résultat de l ’examen le plus
m in u t ie u x , qui s’est fixé sur chaque m o t , sur chaque
lettre de la pièce déniée, pour les comparer aux mêmes
m ots , aux mêmes lettres que présentaient les pièces
reconnues.
Les experts n’ont épargné ni soins ni peines pour la
découverte de la vér ité; et leurs recherches les ont
conduits à déclarer, h l ’u n a n im ité, q u ’il demeurait
évident p o u r e u x que l ’acte soumis à leur vérification
avait été écrit de la même main qui avait tracé les
caractères de comparaison.
C e l t e opinion si positive, appuyée sur de nom
breuses et de puissantes raisons, dev rait, il sem b l o ,
�( *9 )
nous dispenser de combatiré en détail les argumens
des Bonhours.
Mais discutons-les rapidement.
L a physionomie de l ’assemblage des caractères du
t
testament s’éloigue, d i t - o n , de celle q u ’offre la con
texture des lettres missives;
L a signature du testament ne ressemble pas à celle
des pièces produites, si ce n ’est à celle de la procuration;
L a lettre n de la signature de la procuration diffère
de la même lettre dans le testament;
L e mot M ic h e l, ajouté à la signature du testament,
ne se trouve pas aux autres signatures;
Les
experts
n’ont
pas parlé des surcharges , et
notamment de celle du mot vingt ;
Enfin le laconisme du testament est frappant.
Telles sont les objections proposées. Reprenons-les.
L a différence dans la physionomie des écrits n ’est
pas un moyen sérieux. Les experts nous en expliquent
la cause; elle provient, disent-ils, de ce que l ’écriture
de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur et
difficulté, tandis que celle des lettres missives annonce
une plus grande facilité d ’exécution.
On pourrait ajouter que tous les jours l ’on remarque
quelque différence de physionomie dans les écritures
faites en divers tems, quoique par la même personne.
E l l e est produite par le changement de plume, d ’encre,
de disposition dans la m ai n , de soin dans celui q ui
écrit, de largeur ou de longueur donnée aux caractères
suivant le caprice de l ’écrivain.
Aussi tousles homuiesde l ’a r t , appelés à comparer des
�écrits, s’attachent-ils moins à la physionomie générale
q u ’à la conformation de chaque mot et cle chaque lettre.
C ’est ce q u ’ont fait les experts. Ils ont comparé
aux mots du testament une très-grande quantité de
mots semblables, pris dans les pièces de comparaison ;
et ils se sont convaincus, ainsi q u ’ils le déclarent,
d ’après la très-grande ressemblance, soit des caractères
isolés, soit de mots entiers, que la même main avait
écrit la pièce déniée et les pièces reconnues.
E n général, les lettres missives sont d ’une écriture
très-fine, et celle du testament est assez grosse. C ’est
une des principales causes de la différence des physio
nomies. C ett e différence n ’existe pas entre le testament
et l ’acquit écrit et signé, le 17 novembre 1 8 2 3 , par le
sieur B r u n , sur la facture du sieur L egoyt ; pièce qui
n ’est pas suspecte et dont parle un des témoins.
M a is, ajo ui e- t- on , parmi les signatures des pièces
de comparaison, il n ’y a que celle de la procuration de
1 8 2 4 , qui soit semblable à la signature du testament.
O n répondra q u ’il suffit de rapprocher toutes ces
signatures pour reconnaître que la dissemblance n ’est
pas réelle, et que, si elle est un peu apparente d'abord,
c ’es t,
comme nous l ’avons déjà d i t ,
à raison de la
finesse de la plume qui a tracé les signatures des pièces
de comparaison.
Aussi la dissemblance est d ’autant moins grande
que les signatures sont plus grosses. Par exemple, si
l ’on rapproche la signature du testament de celle d ’un
acte au t he n tiq u e , passé le 4 brumaire an 1 4 , devant
Gorse, notaire, on leur trouvera beaucoup d ’analogie.
�( 21 )
Toutes les diverses signatures indiquent, d ’ailleurs,
les mêmes mouvemens et les mêmes habitudes dans la
main qui a écrit.
A u reste,
n ’y eût-il même que la signature de la
procuration de 1 8 2 4 ,
qui fût conforme à celle du
testament,, ne suffirait-elle pas pour établir le mérite
de la pièce déniée? Ces deux actes, faits à deux époques
très-rapprochées, signés l ’ un et l ’autre en caractères un
peu gros, revêtus de signatures identiques, et annonçant
l ’un comme l ’autre de la pesanteur et de la difficulté
d'exécution dans la main, ces deux actes ne doivent-ils
pas se servir mutuellement de contrôle? E t si , comme
on ne saurait le contester, la signature de la procu
ration est vraie, comment pourrait-on douter de la
sincérité de celle du testament? ce n ’est pas au nombre
des pièces de comparaison, que l ’on doit s’arrêter dans
de telles vérifications. C ’est la nature de ces pièces,
c ’est le rapprochement de leurs dates avec celle de la
pièce déniée; ce sont enfin les dispositions physiques
où se trouvait le signataire, que l ’on doit sur-tout
* considérer, afin de reconnaître si la même main a réelle
ment tracé les diverses signatures.
Il serait superflu de se fixer sur u ne remarque faite
par les premiers juges; elle consiste en ce qu à la signa
ture
Brun
, le bas du dernier jambage de 1’« n ’est pas
abso lume nt le même dans les deux actes.
C ette différence, qui est fort légère, avait été aussi
remarquée par les experts; mais elle ne leur avait paru
digne d ’aucuneconsidération. Si les Bonhours l ’ont rele
vée,
c’est q u ’ils ont senti le besoin de faire valoir, même
�les plus futiles objections. Nous nous contenterons d ’y
répondre par une observation générale que f o n t, à ce
s u je t, les experts, et q u ’ ils appliquent en même lems
aux paraphes.
Voici leurs expressions :
« C ett e circonstance nous donne l ’occasion de rap« peler que la signature du sieur B r u n , soit dans le
« corps de l ’écriture, soit pour son paraphe, présente
« cles variations sensibles dans les lettres missives et
« dans les actes q u i nous ont é té présentés. »
Observation des plus justes,
et que l ’expérience
confirme tous les jours.
Q u e l ’on compare, en effet., de nombreuses signa
tures de q ui que ce soit, faites, sur-tout^ à des époques
différentes, on y trouver a, si l ’on v e u t , des caractères
généraux de ressemblance; mais si on les examine avec
trop de scrupule , on remarquera entre toutes des
différences sensibles, auxquelles pourraient s’appliquer,
et avec plus de force m êm e , les minutieuses critiques
employées par les Bonhours contre le testament du
sieur Brun.
L ’addition du prénom M ic h e l à la signature Br un
fournit aussi un argument aux Bonhours.
Mais que peut-on en conclure, si, comme les experts
l ’ont reconnu, le mot M ic h e l est écrit de la main du
d éfunt? lors même que le mot serait i n u t i l e ,
son
addition pourrait-elle nuire à la validité de l ’acte?
qui ne connaît la maxime : Quœ superabundant non
n ocen t? Q u ’on le supprime, si l ’on v e u t , le testament
u’eu sera pas moins valable,
�Mais , dira-t-on , le sieur Brun n ’était pas dans
l'usage de l ’ajouter à sa signature.
Q u ’importe? cette précaution annonce l ’importance
q u ’il attachait à son testament^ et le désir q u ’il avait
de ne laisser aucune équivoque sur la personne du
testateur. C a r le prénom M ic h e l devait aider à le faire
distinguer de toutes les autres personnes qui pouvaient
porter le nom de Brun.
Quelques surcharges dans le testament ont aussi
fixé l ’attention des premiers juges. Ils se sont plaints de
ce que les experts n’en avaient pas parlé.
L e silence des experts, à cet égard, prouve seulement
q u ’ils n ’ont pas pensé q u ’on dùl y attacher la moindre
importance. De légères surcharges, qui ne sont même
apparentes que sur le mot vingt de la da te , devaient
d ’autant moins fixer leur attention que la date était
très-facile à lire. Les experts, d ’ailleurs, ont fait tout
ce q u ’ils étaient chargés de faire; ils se sont assurés, et
ils ont déclaré que le testament entier, et par consé
quent le mot v in g t, un peu surchargé, étaient, comme
les autres, écrits de la main du défunt. Ils s’en sont
assurés par la vérification la plus détaillée et la plus
soigneuse. E n comparant, lettres par lettres, les mots
du testament aux mots des pièces de comparaison, a
ceux des lettres missives notamment, ils leur ont trouvé
une parfaite similitude; en sorte que les lettres de la
pièce déniée leu r ont p a r u , dis en t-i ls, porte/ / emp rein le du caractère habituel et involontaire (¡ne donne
la disposition des organes appliqués à l ’écriture. De
quelle conséquence, d ’après cela, pouvait être l ’appa-
�rence d ’ une surcharge? Pouvait-elle nuire à la validité
de la date? personne n ’ignore le contraire. On sait
que les règles de la loi du 25 ventôse an n ,
sur
les surcharges, ne sont pas applicables aux testamens
olographes.
« L a surcharge de la d a t e , non approuvée dans un
« testament olôgraphe, dit M. T o u ll i e r , n ’est pas un
« moyen de n u l l it é , s i , d ’ailleurs, la date est fixe
( D r o i t civil français, tome 6 , n° 3 6 7 ) .
C ’est aussi c e ’ que j u g e , en thèse, un arrêt de
cassation, du 11 juin 1 8 1 0 , rapporté dans tous les
recueils de jurisprudence (1).
Mais, a-t-on d it , le mot vin g t surchargé paraissait
couvrir le mot d e u x , q u i , se rapportant au mois de
novembre, serait précisément le jour de l ’arrivée du
sieur B run à C le r m o n t ; or, ajoute- t- on , il n ’est pas
présumable q u ’il se fût o c c u p é , ce j o u r - l à , de son
testament.
Ainsi on croit voir, c’est-à-dire on présume que le
mot d e u x a été remplacé par le mot 'vingt.
On présume aussi q u e , le jour de son arrivée de
P a r i s , le sieur Br un n ’a pas dû s’occuper de son testa
m e n t; et c’est en réunissant deux futiles présomptions,
q u ’on s’efforce de jeter de l ’ incertitude sur un seul
mot d ’ une date q ui cependant est très-fixe et très-facile
k lire. — Pitoyable argutie , q ui ne mériterait pas
même q u ’on la discutât!
A u reste, en examinant avec attention le mot sur-
(1) V . le Journal de Dcnevers, 8, i, 370, cl celui <le Sirey, io, 1 , 389.
�(
)
chargé, rien n ’est moins apparent mie la substitution
du mot vingt au mot d e u x . La surcharge parait plutôt
provenir de ce que le mot vingt ayant été d ’abord impar
faitement tracé, soit parle défaut delà plu m e, soit-par
toute autre cause, le testateur, en voulant réparer
cette imperfection , a surchargé les traits et appuyé
davantage sa plume, ce qui a noirci la teinte.
D ’ailleurs, c’est évidemment lamême plume, la même
encre, la même main qui ont écrit et cette surcharge
et le surplus du testament. C ’est ce que prouve l ’inspeclion de la pièce; c ’est ce qui résulte aussi du rap
port des experts, qui ont reconnu que tout avait été
écrit par l ’auteur des diverses pièces de comparaison;
c ’est même ce que démontre la plus simple réflexion.
C a r ne .serait-il pas absurde de présumer q u e , de tous
les mots qui composent le testament, un seul eut été
écrit d ’une main étrangère*!
Mais supposons même que le testateur eut d ’abord
écrit le mot d e u x , et q u ’il y eût, ensuite, substitué le
mot v in g t; quelle conséquence pourrait-on en tirer?
L e testament en serait-il moins valable? Le testateur
n ’était-il pas libre, n ’était-il pas capable de disposer,
le d e u x novembre, comme le vingt du même mois?
N ’avait-il pas aussi pu donner à sa disposition telle
date ou telle autre? ne se pourrait-il pas aussi q u ’il
ne l ’eut consommée par sa signature que le jour même
indiqué par la dernière date, surchargée ou non? Quelle
influence cela pourrait-il
avoir sur la validité du
testament? Portât-il même les deux dates du d e u x et
du v in g t,
4
le testament
olographe serait également
�à l ’abri de toute critique.
C ’est ce q u ’a décidé un
arrêt de la C o u r de cassation, du 8 juillet 1823 ( 1 ) .
C ’est trop nous arrêter, sans dou te, à cette vaine
objection.
Remarquons même que toutes les argumentations
contre le testament,
toutes les petites irrégularités
q u ’on lui reproche en indiquent la sincérité. C a r il
eût été facile de les éviter,
si le testament eût été
l ’œuvre d ’ une main coupable. Mais dans la sincérité de
ses dispositions, le testateur n ’a dû y attacher aucune
importance. Dans sa bonne foi, l ’ héritière n ’a pas dû
elle-même y faire att en tion; et sans cherchera engager
son frère à écrire un nouveau testament où nulle sur
charge n ’aurait été laissée, pour lequel, aussi, aurait
été employée une plume plus fine et plus propre à
donner au testament la physionomie des nombreux
écrits de son frère; sans faire retrancherde la signature
le prénom M ic h e l, q u ’elle savait bien ne pas y être
ordinairement joint; sans avoir recours enfin à aucune
de ces précautions qui décèlent plutôt le dol que la
franchise, la dame Verniette a accepté les bienfaits et
n ’a pas cru devoir s’occuper minutieusement de la
forme de chaque mot de l ’acte qui les consacrait. E l l e
ne po u v a it ,
d ’ailleurs, prév oir,
elle 11e devait pas
même supposer que les Bonhours se hasarderaient,
contre leur propre conviction, non pas à dénier, car
ils ne sont pas allés jusque-là, mais à dire q u ’ ils ne rc( 1 ) Journal de Sircy, tom. 25 , 1 , 3 1.
�( 27 )
connaissaient pas récriture et la signature du testateur.
Enfin les premiers juges se sont étonnés du laconisme
du testament.
Etrange objection ! comme s’il était nécessaire de
dire beaucoup de mois inutiles pour faire une dispo
sition vraie et une disposition saine.
C e laconisme s’exp lique, soit par l ’état physique
du testateur qui a voulu s’épargner les difficultés
d ’ un long écrit, la pesanteur de sa main ne lui per
mettant pas d ’écrire long-tems; soit par la circonstance
que c’est un jurisconsulte qui a donné le modelé du
testament et qui a dû le donner simple mais suffisant.
Le fait a été attesté par ce jurisconsulte lui-m èm e,
entendu dans la cause comme témoin.
L e laconisme critiqué n’a donc rien de surprenant;
on eût pu même être plus concis et notamment suppri
mer, à la signature le mot M ic h e l, qui était absolu
ment inutile.
Nous avons parcouru,
et nous avons réfuté, il
semble, toutes les objections élevées contre le testa
ment. Ce sont, cependant, ces faibles objections qui
avaient déterminé les premiers juges à repousser l ’opi
nion unanime de trois experts des plus recommanda7
bles , dont l ’ouvrage même signalait la scrupuleuse
exactitude comme la capacité; ce sont ces objections
qui les avaient déterminés à ordonner une vérification
nouve ll e, sous prétexte que l ’art des experts était
conjectural, comme si un nouveau rapport, fait par
de nouveaux exp erts, ne devait (rien présenter de
conjectural.
�L ’on remarquera aussi quelespremiers juges n ’ont pas
même chargé les Bonhours des frais de cette seconde vé
rification, quoique ceux-ci eussent d û , dans l ’exactitude
des principes, fournir même aux frais de la première.
C a r c’est à celui qui conteste l ’écriture et la signature
d ’un testament olographe, à démontrer q u ’il n’est pas
l ’ouvrage de la main du défunt-, c’est à lui à faire cette
preu ve , parce q u e , comme demandeur, il doit justifier
sa demande : a ctori incum bit probatio ; parce que le
légataire u n iv e rs e l,
envoyé en
possession
par une
ordonnance du jug e, comme l ’a été la dame Verniette,
a le titre en sa faveur, et que ce titre doit être exécuté
tant que sa fausseté ou sa nullité n ’est pas clairement
établie; parce q u e , d ’ailleurs, le dol et la fraude ne se
présument pas, et que c’est à celui qui les allègue à
les prouver ( C o d e c i v i l , art. i i i G ) .
Telle est la doctrine enseignée par M. T o u ll i e r , dans
son Droit civil français, tome 5 , n° 5 o 3 ; et cette doc
trine a été consacrée par plusieurs arrêts de cassation ,
deux desquels ont été rendus les 28 décembre 1824 et
10 août 1825 (1).
L a daine Verniette a le titre en sa faveur; elle est
non seulement en possession de fai t, mais encore en
possession de droit , en vertu d ’une ordonnance du
président du tribunal de C l e r m o n t , rendue conformé
ment à l ’article 1008 du Code ci vil; elle n ’a pas,
d ’ailleurs, à se défendre contre un héritier à réserve;
elle n’aurait donc rien à prouver elle-même; ce serait,
( 1 ) V o i r le J o u r n a l tic S i r e y , t o m e a 5 , i , pages i
l o m c a G , i , 1 17 , et s ui vantes.
,
58
et s u i v a n t e s ; et
�29 )
au contraire, à ceux qui l ’attaquent à tout prouver
(
pour justifier leurs prétentions; en sorte q u e , y eut-il
même du dout e, l ’exécution du testament devrait être
maintenue.
Mais s’il pouvait rester devant les premiers juges
quelque incertitude dans les esprits sur la sincérité du
testament, les résultats de l ’enquête offerte par la
dame Ver niette , et ordonnée par la co u r, la ferait
entièrement disparaître.
S2.
E xa m en de VEnquête.
L ’enquête est des plus satisfaisantes; c’est ce dont
il est facile de s’assurer en rapprochant de chacun des
faits admis en preuve, les dépositions qui s’y appliquent.
On devait établir, d ’abord, que la dame Verniette
et ses filles avaient soigné le sieur B r u n , tant à Paris
q u ’à C le r m o n t , pendant les dernières années de sa
v i e , dans les maladies que celui-ci avait essuyées, ou
à raison de ses infirmités.
Ces faits sont attestés par un grand nombre de
témoins.
t
L e premier témoin, M. .Tarton aîné, marchand a
C le r m o n t , déclare que « le sieur Brun avait desire
avoir auprès de lui une des demoiselles Bujadoux, dont
il était le parrain; mais que celle-ci n ayant pu se
rendre aux désirs du sieur B r u n , l ’ une de ses sœurs
partit à sa place, et fut accueillie et traitée avec les
marques de la plus entière bienveillance par son oncle. »
�L e témoin
ajoute que
« ce fut lui qui régla et
arrêta le départ de la demoiselle Bu ja doux. »
Il répond, sur l'interpellation de l ’avoué des Bon
h e u r s , « q u ’alors le sieur Br un avait ressenti à Paris
plusieurs attaques. »
Ce témoin dit aussi, « que le sieur B r u n , depuis
« son retour de Paris ju s q u ’à son décès, est constam« ment demeuré chez la dame Yerniette sa sœur, dont
« il a , aussi constamment, reçu les soins. »
L e quatrième té m oin, le sieur B o n n a b a u d , m é
decin ^ qui a soigné le sieur Brun depuis sou arrivée à
Clermont jus qu’à sa m o r t , parle du ton a ffec tu eu x
q u ’avait toujours le sieur Br un en adressant la parole
à sa sœur Verniette ou à ses nièces; il dit ne l'avoir
ja m a is rencontré se u l dans sa ch am bre, mais toujours
¿1 la com pagnie de q u e lq u ’ un de sa f a m i l le , p a rticu
lièrem ent de sa sœ ur et de l a j î l l e aînée.
Il
ajoute q u ’il
occupait
l ’appartement
le p lu s
agréable de la m a ison , ou auparavant i l avait v u la
dam e V ern iette m alade.
L e cinquième témoin a entendu dire par le sieur
B r u n que la fille aînée de la dame Y ern iette avait
f a i t le voyage de P a ris p o u r lu i porter des secours.
L e sixième témoin a vu cette demoiselle à Pa ris,
chez son oncle, qui était alors malade.
L a dame veuve Be rn a rd in , dont la déposition est
la neuvième,
« a été plusieurs fois témoin des soins
« empressés de la dame Y ern iet te pour son fière.
« Elle parle d ’ une c h a m b re qu e la daine Y e r n i e l l o
�( 3, )
« avait fait décorer pour recevoir sou frère, parce q u ’il
« avait l ’habitude d ’être bien logé. »
L e onzième témoin , perruquier du sieur B r u n , « a
« constamment observé q u ’il recevait, dans la maison
« de sa sœur, tous les soins q u ’exigeait son état. »
Il ajoute « q u ’il occupait une chambre au premier
« é t a g e , décorée à neuf. »
L e treizième témoin , sous-maîtresse dans l ’insti
tution de Madame Bachélerie, avait su d e là demoiselle
B u j a d o u x , avec qui elle était liée, q u ’elle allait à
Paris pour donner des soins à son
oncle.
Depuis
l ’arrivée à Clermont du sieur B r u n , elle a su que sa
sœur et sa nièce lui prodiguaient tous leurs soins.
L e dix-septième témoin, Jeanne P e t it , a vu les soins
donnés par la dame Verniette à son frère, notamment
d e u x ou trois mois avant, sa m o rt; elle les indique
et ajoute que ce soin lu i parut tellem ent répugnant
q u ’e lle dit à la dam e T^erniette , q u ’elle était bien
pauvre , mais q u ’elle ne le fe r a it p a s , quand on lu i
donnerait un louis p a r jo u r .
L e troisième témoin de la prorogation d ’enquête a
su que le sieur Brun a été soigné à Paris et à Clermont
par Madame Verniette et par ses demoiselles. Il a vu
la lettre par laquelle M. Brun avait prié sa sœur de
lui envoyer une de ses demoiselles pour lui donner des
secours dans une maladie dont il était alors atteint. Il
a vu aussi une autre lettre de M. Brun qui se loua it
des attentions de sa nièce ; et M. Brun lui en a parlé
lui-même depuis son arrivée à Clermont.
�Toutes ces dépositions ne laissent pas le moindre
doute sur le premier fait interloqué.
L e second fait tendait à savoir si le sieur Brun avait
invité le sieur Verniette à l ’aller chercher a Paris; si
celui-ci s’était rendu à cette invitation, et si depuis
son arrivée à C le n no nt ju squ’à son décès, le sieur
Brun avait
continuellement
habité avec les époux
Verniette.
Toutes les circonstances de ce fait complexe sont
tellement certaines, q u ’on n ’entreprendra pas, sans
d oute, d ’en nier aucune.
Qu e ce soit sur l ’invitation du sieur Brun , que le
sieur V e r n ie t t e , son beau-frère, est allé le chercher à
Paris et l ’a conduit à C l e r m o n t , c’est ce que prouvent
même plusieurs lettres du sieur Br un.
Dans une lettre du 8 octobre 1823, écrite à sa sœur,
il s’exprime ainsi : Je voulais écrire hier p o u r dem ander
que Von fa s s e partir v ite mon b ea u -frère y mais
31 . Jarton ou J^augelade, je crois, me d it q u ’ i l était
in u t ile , et que 31 . B a rd avait écrit en lu i marquant
de ne pas perdre de tems.
Dans une autre lett re, du même mois , au sieur
Verniette, il lui dit : T^olrc départ rn est tout-à-fait
nécessaire et même urgent.
Beaucoup de témoins parlent aussi de cette demande
du sieur B r u n , et du départ du sieur Verniette pour
ramener son beau-frère à Clermont.
C ’est ce que
déposent, notamme nt, le premier témoin, le huitième
et le neuvième de l’enquête directe, le premier et lu
troisième de la continuation do celte enquête.
�Qu ant à la cohabitation constante du sieur Brun
depuis son arrivée à Clermont ju sq u’à son décès, elle
n ’a jamais été désavouée par les Bonhours, q u i , au
contraire, en ont argumenté eux-mêmes. L a preuve
en résulte, d ’ailleurs, de l ’ensemble des dépositions
des deux enquêtes, dépositions dont plusieurs parlent
de la chambre décorée à neuf q u ’occupait le sieur Brun
chez sa sœur.
Par le troisième fait interloqué, la C o u r avait voulu
savoir si le sieur Brun , depuis son arrivée à Clermont,
avait reçu
•> ou rendu de nombreuses visites;/ s’il était
allé dîner chez des personnes avec qui il avait eu d ’an
ciennes relations,
et s’il sortait fréq uem m en t,
soit
pour se promener, soit pour voir ses amis.
Cela tendait à éclairer la C o u r sur l ’allégation des
Bonhours, qui prétendaient que le sieur Br un avait
toujours été tenu en charte privée.
Or,
jamais assertion
ne fut plus contraire à la
vérité. Elle est démentie par la plupart des dépositions
de l ’enquête directe, et même par plusieurs des dépo
sitions de l’enquête contraire.
Ces nombreuses dépositions attestent que le sieur
Brun était très-libre dans la maison de la dame Y e r niette; que ceux qui le connaissaient venaient l ’y voir;
que lui-même allait leur rendre des visites; q u ’il en a
rendu plusieurs, à son médecin notamment, sans être
accompagné de personne; qu il se promenait aussi sur
la place de Jaude, tantôt seul, tantôt avec la dame
Y e rn ie t le ou ses enfans.
Les huitième et onzième témoins de l ’enquête con-
5
�( 34 )
traire déclarent eux-mêmes avoir vu le sieur Br un se
promener, soit devant la porte de la maison Ve rn ie tte ,
soit sur la place de Jaude: ils ajou tent, il est v ra i ,
q u ’il était avec quelqu'un, de la maison V er niette;
mais ce n ’en est pas moins démentir l ’allégation de la
charte privée.
Il est certain, en effet, que le sieur B run n ’a cessé
de sortir et de se promener, ou seul ou en compagnie,
si ce n ’est lorsque l ’augmentation de sa maladie et ses
infirmités s’y sont opposées; c’est-à-dire, comme le dé
clare son médecin B on abaud , quelques mois seulement
avant sa mort.
Il est aussi prouvé par les enquêtes que le sieur Br un
a plusieurs foisdiné ou soupé chez d ’anciens amis. C ’est
ce q u ’attestent, notamment les premier et deuxième
témoins de l ’enquête directe, le troisième et le septième
de la prorogation d ’enquête.
D ’autres témoins ont vu dans diverses occasions le
sieur Brun diner en famille chez la dame Verniette sa
sœur.
L e quatrième fait interloqué tendait à la preuve que
le sieur Br un avait exprimé à diverses personnes son
affection particulière et sa reconnaissance pour la dame
Ve rn ie tte , ainsi que sa volonté de lui laisser sa fortune.'
Ge fait est attesté par beaucoup de témoins.
L e premier témoin, M. Jarton aîné, lié d ’amitié
depuis l ’enfance avec le sieur B r u n , déclare q u i l lu i
avait m an ifesté des intentions bienveillantes p o u r la
dam e V ern iette sa sœur, et q u ’à l ’époque où il fil son
testament, époque que le témoin ne peut préciser, il
�(
35
)
lui avait dit q u 'il avait e x é c u té ce q u i l avait tou
jo u r s eu l ’intention de fa ir e .
C e même témoin d i t , au contraire, sur une inter
pellation de l ’avoué des Bonhours, que le sieur Brun
ne lui avait jamais parlé, avec le ton de l ’affection, de
ses neveux Bonhours. 11 se rappelle q u e , fort peu de
teins après l ’arrivée du sieur Brun à C lerm o nt,
le
témoin et sa femme étant allés lui rendre visite, les
enfans Bonhours vinrent aussi le voir,
et q u ’ils en
furent mal accueillis ; que le sieur Br un leur avait
même dit : « Qu e venez-vous faire ici? je n ’ai pas
besoin de vous. »
L a dame Jarton, second témoin
raconte aussi le
même fait.
L e quatrième té m oin , le médecin Bonabaucl, a re
marqué le ton affectueux q u ’avait toujours le sieur
Bru n en adressant la parole à la dame Verniette et à
ses enfans. Il dit que jamais il ne lui a parlé des enfans Bonhours.
L e sieur Brun a dit au cinquième témoin, dans une
conversation, q u i l se trouvait p lu s h eu reu x dans le
sein de sa fa m ille 3 à C le r m o n t, que lorsqu’il en
était f o r t éloigné.
L e sixième témoin déclare que, « dans les différentes
« conversations q u ’il a eues à Paris avec le sieur Brun,
« il lui a paru que ce dernier portait plus d ’affection à
« la dame Verniette sa sœur, q u ’aux B o n h o u r s ,..........
« et que lorsqu’ il a entendu parler du testament du
« sieur B r u n , il n’en a pas été surpris. »
Le douzième témoin était dans la maison, un jour
�'( 36 )
où l ’un des enfans Bonliours se présenta à son oncle,
q u i le reçut assez froid em en t y le témoin lui ayant
fait observer que c’était son nev eu , il lui répondit
q u ’ i l le savait bien , mais q u ’i l ne v o u la it pas parler.
A une plaisanterie, lors d ’ une autre visite que le
témoin fit au sieur Brun , celui-ci lui répondit :
« Vous voulez que je me m arie, je suis infirme, je
« n ’ai pas une brillante fortune; j ’ai perdu beaucoup;
« heureusement j ’ai eu une bonne sœur et un beau« frère qui m ’ont été utiles (il parlait alors du sieur
« B u ja d o u x ) ; et ce que je possède, je le laisserai à
« ma sœur Verniette , à qui je conserve beaucoup de
« reconnaissance. »
L e troisième témoin de la continuation d ’enquête
déclare que le sieur Brun lui avait dit que la dame
Verniette et lui s’étaient toujours beaucoup aimés; que
« cette in t im it é , qui datait de l ’enfance, tenait à la
« conformité de leurs caractères, et à ce que la seconde
« femme de leur père les avait obligés, jeunes encore,
« de sortir de la maison paternelle. »
L e surplus de la déposition prouve aussi l'affection
particulière du sieur Brun pour sa sœur V e r n i e t t e . '
L a dame Verniette a v a i t , enfin, offert de prouver,
5 ° q-ue, lorsque le testament eut été fait, elle l’avait
présenté à des jurisconsultes pour
savoir
s’il était
régulier, et 6 ° que , depuis la date de cet a ct e, le sieur
Br un avait déclaré à plusieurs personnes q u ’ il avait
donné toute sa fortune à la dame Verniette sa sœur.
Ces deux faits ressortent aussi de l ’enquête.
Sur le premier des deux faits, M* B i a u z a t , avocat
�(
)
37
à C l e r m o n t , a déclaré que c ’était lui q u i avait donné
le modela du testam ent, qu i l s était attache a fcni'c
le p lu s b r e f possible , parce q u ’on lu i avait dit que le
testateur écrivait péniblem ent.
Il ajoute ne pas connaître la personne qui lui avait
demandé ce modèle; mais que plus tard on lu i présenta
la c o p ié de ce testament, écrite sur une dem i-feu ille de
p a p ier tim bré et signée de M ic h e l B r u n , ........ et q u ’il
trouvala copie conform e au m odèle q u ’il avait fo u r n i.
Sur la représentation faite à M e Biauzat du testa
m e n t, il a cru le reconnaître.
L e neuvième témoin , la veuve Be rnardin, a déclaré
être la personne qui était allée chercher le modèle du
testament chez Me Biauzat.
E lle ajoute que la dame Verniette lui avait dit avoir
consulté sur ce testament
fort régulier.
i\ l.
Boirot qui l ’avait trouvé
H
~ M. B o i r o t, entendu dans la contr’enquête, ne s’est
pas rappelé ce fait; ce qui paraîtra peu étonnant, puis
q u ’il s’est écoulé plus de six ans depuis cette époque.
L e sieur Gillet, horloger, septième témoin, est celui
qui procura à la dame Verniette la demi-feuille de
papier timbré dont 011 s’est servi pour la confection
du testament.
C 'é ta it,
dit-il, peu de
tems après
Varrivée du sieur Brun ci C lerm ont} et pendant q u ’on
fa is a it les vins.
Divers autres témoins parlent des dispositions testa
mentaires, comme leur ayant été déclarées par le
testateur lui-même. Il a d i t , notamment au premier
témoin, à l ’époque du testament, q u i l avait e x é c u té
�( 38 )
ce q u ’i l avait toujours eu l ’intention de f a i r e ; au
septième témoin , et à plusieurs reprises, en parlant
de la dame Verniette : e lle p ren d bien assez de peine
p o u r m oi; elle sera mon héritière, v o ilà mon héritière ;
au neuvième témoiu, q u i l avait tout donné à sa sœur.
Les dix-septième et dix-huitième témoins, Jeanne
Petit et Rosalie L e b o r o t , parlent du testament comme
ayant été fait peu de tems après l ’arrivée du sieur Br un
à Clermont.
L a dame B r u n en parla à l ’ une d ’elles à l ’instant où
il venait d ’ètre fait. L ’autre témoin voulait faire des
emplettes dans le magasin
de la dame Verniette ;
celle-ci, qui était dans la chambre de son frère, étant
appelée, ne descendit ,que pour l ’engager à repasser,
disant q u e lle était en a ffa ires/ que le sieur Brun 3 son
fr è r e , fa is a it son testament et lu i donnait tout ce
q u i l possédait.
L e même fait est déclaré par le quatrième témoin
de la continuation d ’enquête, comme l ’ayant appris
de son épouse, dix-huitième témoin.
On le voit. L ’enquête prouve les soins affectueux
donnés au sieur Brun , pendant ses maladies, soit à Paris,
soit à C l e r m o n t , par la dame Verniette et ses enfans;
E lle
prouve que ce fut sur la demande de son
beau-frère, que le sieur Verniette se rendit à Paris
pour le conduire auprès d ’ une sœur qui le chérissait,
et dont les secours lui étaient nécessaires à cause de ses
infirmités;
E l l e prouve q u ’ il est constamment resté chez cette
sœur; mais q u ’ il y jouissait de la plus grande liberté;
�q u ’il y recevait ses amis; q u ’il allait les visiter luimême et manger chez e u x ; q u ’il se promenait à son
gré, ou seul, ou accompagné de ses parens.
Elle prouve enfin son affection, sa reconnaissance
pour la dame Ver niette , ses projets plusieurs fois
annoncés de lui faire le don de toute sa fortune, et
l ’exécution de ce désir par uii testament dont il parle
so u v e n t, depuis sa d a te ,
comme é tant
une juste
récompense des services qui lui avaient été rendus.
Toutes ces preuves sont d ’autant plus puissantes
que l ’enquête contraire ne les affaiblit même pas.
Dans leur enquête contraire, les Bonhours se sont
principalement occupés de faits sur lesquels l ’arrêt
interlocutoire ne portait pas.
Ainsi ils ont fait entendre plusieurs témoins qui
ont déclaré q u ’ils avaient examiné Je testament, q u ’ils
l ’avaient comparé à des lettres missives qui leur avaient
été présentées par les Bonhours, et q u ’ils avaient cru
reconnaître une différence totale entre le testament
et les lettres.
C om m e si elle était digne de quelque considération,
l ’opinion de certaines personnes officieuses, q u i , sans
mandat de la justice, sur la seule invitation
des
Bo nh our s, et sans autres*renseignemens que ceux qui
leur étaient fournis par ces derniers , sans pièces de
comparaison si ce n’est quelques lettres anciennes; en
un mot, sans autre examen q u ’ un coup-d’œil vague et
sur la justesse duquel a pu influer même la préoccu
pation dont on les avait entourées;
comme si une
telle opinion pouvait être mise en balance avec l ’avis
�unanime de trois experts nommés par la justice, qui
ont opéré sur de nombreuses pièces de comparaison,
et qui ont apporté à l ’opération qui leur était confiée
la scrupuleuse attention que l ’impartialité de leur
devoir leur commandait.
L ’ un de ces témoins, le sieur C u l l i a t , expert, qui
a eu la complaisance de se prêtei* aux désirs des
Bonhours et d ’a l l e r , p a r c u r io s ité , d i t - i l , voir au
greffe du tribunal de Cle rmont le testament qui y
était déposé; le sieur C u llia t prétend avoir comparé
cette pièce à la
Mais ,
chose
procuration
singulière ,
du
lorsque
24 février
le
sieur
1824*
Cullia t
eut beaucoup parlé contre le testament, et de la diffé
rence que présentaient les signatures apposées aux deux
actes, le conseiller-commissaire de l'enquête lui ayant
présenté le testament,, il a déclaré ne p a s reconnaître
clans le testament dép osé la même p iè ce q u i lu i avait
é té présentée p a r M . F a u v e r te ix , greffier. Étrange
résultat qui prouve quel degré de confiance on doit
accordera toutes ces dépositions qui n’o n t , d ’ailleurs,
aucun rapport avec les faits interloqués!
Les Bonhours ont aussi (iherché à prouver que le
sieur Br un était en état de démence et 11e pouvait
pas tester; e t , dans ce b u t , ils ont fait entendre le
sieur
Bergougnoux ,
pharmacien
à
Cle rmont ,
et
quelques autres témoins qui n ’ont fait eu général que
redire ce q u ’ils tenaient du sieur Bergougnoux.
Si l ’on en croit le sieur Bergougnoux , il avait vu le
sieur Brun à Paris un mois avant l ’arrivée de celui-ci à
Cle rm on t; et il l’avait trouvé dans un état de démence
�presqu’absolue , divaguant et ne répondant
exacte
ment
dit-il,
à aucune
question;
il avait
même,
chargé le sieur Jarton ainé d ’en prévenir sa famille.
Plusieurs échos , parmi les témoins de la contre
en quête, ont répété la même chose, comme l ’ayant
apprise du sieur Bergougnoux.
Si le fait eût été interloqué, on eût pu interroger
sur ce point M. Jarton ainé, un des témoins de l ’en
quête directe, mais dont la déclaration a précédé celle
du sieur Bergougnoux.
L a déclaration de celui-ci n ’est, au reste, q u ’ une
marque de plus du zèle ardent du sieur Bergougnoux
pou r la famille B o n h o u r s , dont
on prouverait au
besoin q u ’il a dirigé tous les efforts ; elle ne fera ,
d ’ailleurs, aucune sensation, si l ’on considère q u ’elle
est démentie et par les lettres q u ’a écrites le sieur
Brun à l ’époque même dont parle le sieur Bergougnoux,
et par toutes les dépositions de l ’enquête directe, et
même par beaucoup de dépositions de l ’enquête con
traire, qui démontrent que l ’état moral du ’ sieur Brun
était parfaitement
sain , soit avant son départ de
P a r i s , soit depuis son arrivée à Clermout.
L e sieur Brun est arrivé à C le r m o u t , le deux no
vembre 1823 ; et dans les mois d ’aout, de septembre
et d ’octobre précédons, il avait écrit plusieurs lettres,
soit au sieur Jarton je u n e, soit a la famille Verniette,
qui prouvent, q u ’il s’occupait avec beaucoup d intelli
gence de ses affaires de commerce, et q u ’il raisonnait
aussi très-bien sur sa santé.
Dans une de ces lettres, qui est du 12 septembre,
6
�( 4* )
écrite en entier de la main du sieur B r u n , quoi
q u ’elle ait quatre grandes pages et plus de l o n g u e u r , “
le sieur B run donne à sa sœur des détails sur l ’aggra
vation de .sa maladie, sur ses dépenses, lçs tracasseries
q u ’il éprouve, la difficulté q u ’il a à vendre le fonds
de son commerce, etc.
Il y parle aussi clc M. Bergougnoux père q u i , est,
d it -il , toujours à Paris. T o u t le contenu de cette lettre
signale l ’inexactitude de l ’étrange déposition du sieur
Bergougnoux.
Les erreurs de ce témoin sont aussi démontrées par
plusieurs
autres lettres
écrites par le sieur B r u n ,
pendant ce mois d ’octobre 182.3, à la fin duquel il
partit pour Clermont.
Dans deux lettres du même
jour, 8 octobre, écrites l’ une à sa sœur, l ’autre à sa
filleule, dont fut porteur le sieur Jarton ainé qui re
ven ait de Pa ris, il se plaint encore de sa maladie; il
dit combien il est pressé de terminer ses affaires; il ex
prime son désir q u ’on fa s s e p a rtir v ile son beau-frère;
il parle des pertes q u ’il fait depuis un an dans son
commerce, des mesures q u ’ il va prendre pour se rendre
à Cle rm o n t.j T o u t ce q u ’ il écrit annonce une intelli
gence lu c id e , et sur-tout attentive à ses intérêts.
Aussi ne les négligea-t-il pas, ses intérêts, avant de
quitter Paris :
11 traita du fonds de son commerce;
Il prit des arrangemens pour la résiliation de son
loyer, en conservant seulement une d i a m b i c où fut
placé le mobilier q u ’il n ’emportait pas. Ces a rra ng e
mens furent consignés dans un acte sous seing privé.
�(
Nous
43
)
rapportons le double signé
"
du
^
propriétaire ;
celui-ci a entre ses mains le double signé du sieur
Brun ;
Il laissa une procuration authentique à M. L a b b e ,
notaire à N e u i l l i , pour terminer ses affaires;
Il acheta un cheval et une voiture pour voyager à
petites journées;
Il prit en un mot toutes les mesures,, toutes les pré
cautions que les circonstances et son état de santé
pouvaient prescrire à l’homme le plus soigneux, le plus
réfléchi.
L ’on sait, et l ’enquête nous l ’a appris, q u ’à l ’arrivée
du sieur Brun à C le rm on t, ses premiers soins furent
de rendre des visites à ses amis, à ses relations, et d ’en
recevoir d ’eux.
L e lendemain même de son a r r i v é e l e 3 novembre
1823 , il régla avec son voiturier les irais du voyage de
Paris, et en reçut une quittance qui est écrite sur son
agenda, au bas d ’un règlement fait de la main même
du sieur Brun.
L e 17 du même mois il acquitta une facture du
sieur Legoyt. L ’acquit,, p o u r solde de tout compte
ju s q u ’à ce j o u r , est écrit en entier, daté et signé de
la main du sieur Brun.
Le 2.4 février su ivant, il donna sa procuration au
sieur Verniette. Ce fut le sieur Astaix, notaire, qui
la reçuttémoin de la prorogay *) et ce notaire (sixième
^
^
lion d ’en q u êt e), déclare que le §ieur Brun lu i parut
j o u ir de toutes ses fa c u lté s in tellectu elles y que sur
�V
( 44 )
une première lecture qui lui fut faite par le notaire,
le sieur Br un fit quelques observations que personne
ne lui suggéra; q u ’après une seconde l e c t u r e , aussi
don née par le notaire, il prit la procuration et la relut
lu i-m êm e.
Sont-ce là des indices d ’imbécillité ou de démence?
Veut-o n s’assurer davantage de l ’état moral du sieur
B r u n , soit à P a ri s , soit à C le rm ont? q u ’on relise les
dépositions des témoins :
Celle du sieur Jarton jeune , à qui le sieur Br un
avait fait un dernier envoi de marchandises le 22 sep
tembre
1823 f cinq semaines seulement avant son
départ de Paris;
Celle du sieur Jarton a în é , qui était à Paris en
septembre*et en octobre 1 8 2 3 , qui y voyait fréquem
ment M. B r u n , qui rapporta des lettres de lui à sa
famille, q u i , certes, aurait bien remarqué le prétendu
état
de
démence
s’il
avait
été
réel ,
et q u i , au
contraire, déclare q u e , plusieurs mois après, à Clerm o n t , à l ’époque où le sieur Brun lui dit avoir mis
à ex écu tio n ses dispositions fa v o ra b les à sa sœ u r,
P O S S É D A I T T O U T E SA. R A I S O N ;
il
'
•Celles de presque tous les témoins de l’enquête
directe et de plusieurs témoins de l ’enquête contraire,
qui ont vu le sieur Brun se promener seul, ([ni l ’ont
visité, qui en ont reçu des visites, chez quelques-uns
desquels il a même d în é plusieurs fois;
C elle , sur-tout, du sieur Bon ab aud, médecin , qui,
ayant constamment soigué le sieur Brun ju s q u ’à son
#
�( 45 )
décès, é t a i t , plus q u ’ un a u t r e , à portée de ju ger de
la capacité morale de celui q u ’il traitait. O r , ce témoin
atteste que le sieur B r u n jo u issa it com plètem ent de
ses fa c u lté s i n t e l l e c t u e l l e s q u i l avait les fo rm es
très-polies
q u 'il mettait de la recherche dans ses
expressions , q u ’i l recevait toujours avec politesse et
reconnaissance les soins des personnes q u i l ’appro
chaient.
Il ajoute : que le malade a cessé de sortir de son
appartement quatre ou cinq mois avant son d é c è s ,
et que s ix ou sept semaines seulem ent avant sa m ort,
v
les attaques réitérées q u ’i l avait éprouvées , et q u i
depuis p lusieurs mois étaient devenues p lu s m ultipliées,
avaient éteint chez lu i toute sensibilité et l'avaient
rendu indifférent à tout ce q u i se passait autour de
lu i ; cependant il reconnaissait les pei'sonnes. q u i l ’en
touraient , et notamment son m éd ecin ; mais il ne
répondait p lu s que très-lentement et p a r m onosyllabes
a u x questions qu'on lu i adressait.
A i n s i , ce n ’est qu e s ix ou sept semaines avant sa
m o r t , que le sieur B r u n avait perdu sa sensibilité;
encore n ’était-il pas en état de dé m e nc e;
Mais depuis plusieurs mois ses infirmités l'e m p ê
chaient de sortir de son ap partement.
C ’e s t , sans d o u t e , celte dernière circonstance, effet
de la maladie et non .de la c o n t r a i n t e , qui a fourni au
sieur Bergougnoux et à quelques autres témoins de
l ’en qu êt e contraire , un
prétexte
pour
tenait le sieur B r u n en charte privée.
dire
q u ’on
�.)
( 46 )
Une autre partie de la déposition du sieur Bergougnoux annoncerait q u e , 25 jours seulement avant le
décès du sieur B r u n , celui-ci était venu chez l u i , lui
par ut bien porta n t, se plaignit de la dame Yerniet te
qui vint le chercher, et disait q u ’elle le maltraitait
et le tenait enfermé.
Comm ent conciliera-t-on cette promenade du sieur
B r u n , sa bonne santé, sa v i v a c i t é , avec son décès
survenu bientôt après, et avec son état physique attesté
par le médecin?
T o u t démontre que la déclaration du sieur Bergougnoux et celle de son épouse, comme celle des personnes
qui ont redit ce q u ’elles leur avaient entendu dire,
sont indignes de la confiance de la justice.
A u reste, ces prétendus faits n'étaient pas inter
loqués. L a dame »Verniette n ’aurait donc pas à les
combattre.
Ces faits n ’avaient pas même été proposés à la C our
lors de l ’arrêt. On s’était borné à offrir la preuve vague
de l ’imbécillité, sans cotter aucun trait q ui la caracté
risât , sans indiquer même l ’époque à laquelle on la
faisait remonter.
Enfin le moral du sieur Brun se fùt-il affaibli à la
fin de ses jours, et celui-ci eût-il été en état de démence
plusieurs mois avant son décès , quelle conséquence
pourrait-on en tirer contre le testament?
Ne.sait-on pas que ce testament, quoique olographe,
fait foi de sa date; et q u ’ il f aud ra it , par conséquent,
�prou ve r q u e la démence était complette au 20 novembre
1 8 2 3 , époque du testament ( 1 ) ?
O r , non seulement cette preuve n ’est pas faite, mais
il e s t , au c o n t r a i r e , démontré par l ’ensemble comme
par le détail des deux e n q u ê t e s , que le sieur B r u n
jouissait alors c om p le tt e m e nt de toutes ses facultés
intellectuelles.
Ne sait-on p a s , aus si , q u ’ un testament olographe
ne pou rrait être dé tru it , sous prétexte de d é m e n c e,
q u e par les faits les plus graves, les plus caractéris
tiques d ’u ne démence habituelle q u i ne fit pas même
supposer d ’intervalles lucides? C a r
« un
testament
« olographe est plus favorable que le testament reçu
« par des notaires. L a présomption de sagesse est toute
« entière en faveur du
testateur qui prend le soin
« d ’é rire ses dernières volontés. »
( T o u l l i e r , D r o it civil français, tome 5 , n° 5 8 ;
Dagnesseau ,
p la id o ye r sur le
testament
de l ’abbé
d ’Orléans. )
* '
Il
s’a g it , dans la c aus e , d ’ un testament olographe,
d ’ un testament dont la sincérité a été reconnue par
l ’avis unan im e de trois experts chargés de le vérifier,
d ' u n testament dont l ’existence est corroborée par une
preu ve aussi complette q u ’on p ou va it la désirer, d ’un
testament qu i est un acte de sagesse et de reconnaissance,
(1) Voir sur ce point du doctrine les Questions de droit de Mcrün,
au mot testament , $ 7; un arrêt df Cassation , du 11 juin 1810; un
anêt de la Cour du Puis, du 17 juin 1822; 1111 anêt de la Cour de
Riom , cause des héritiers De Rouzat, du 20 janvier 18¿4 i l‘l “ n autre
arrêt de cassation, du 29 avril i 8'<4.
L e pr emi er f i nôt est r appor té par D e n c v e r s , t o m e ' 8 , 1 , 2 7 0 ; le
sec ond, le troisic-me et le q u a t r i è m e par S i r c y , t o i n e a j , 33, et t ome
2 , 2 7 7 , e t , m ê m e t ome , 1 , 27C.
�( 48 )
et qui a été le prix des soins d ’une sœur particulière
ment, chérie. L a C o u r ne s’ exposera pas à anéantir les
derniers vœux d ’ un
testateur ; elle s’empressera de
consacrer par sa justice les bienfaits q u ’à sa mort il
s’est plu à répandre sur celle q u i , seule, pendant sa
v i e , s était devouee à soulager ses tristes infirmités.
V E R N I E T T E , née B R U N .
M e A L L E M A N D , A v o ca t.
M e G R A N E T , A v o u é -L ice n cié .
RIO M ,
IMPRIMERIE
DE
SALLES
FILS ,
PRES
LE
PALAIS
DE
JUSTICE.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brun, Antoinette. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Granet
Subject
The topic of the resource
successions
testament olographe
testaments
infirmes
conseils de famille
experts
faux en écriture
expertises graphologiques
signatures
témoins
démence
médecine légale
affection fraternelle
charte privée
abus de faiblesse
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Antoinette Brun, veuve, en premières noces, du sieur Guillaume Bujadoux, et sieur Joseph Verniette, en second mari, marchands, habitant de la ville de Clermont, appelans ; contre les sieurs Annet et Michel Bonhours, dame Annet Bonhours et sieur Jean-Baptiste Celme son mari, et le sieur Louis Bonhours, tuteur légal de ses enfans mineurs, tous propriétaires, habitans de Clermont, partie de Montferrand, intimés.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Démence. v. testament. : 2. quel doit être le caractère des faits tendant à établir l’état d’imbécillité ou de démence d’un testateur ? Vérification : Lorsqu’après vérification des écriture et signature d’un testament olographe, les experts ont déclaré, unanimement, dans leur rapport que l’écriture et la signature sont émanés du testateur et que le testament est sincère et véritable ; que cette opinion est fortifiée et corroborée par les preuves contenues dans des enquêtes judiciaires ; les juges ne font-ils pas sagement de refuser un amendement de rapport et une nouvelle vérification d’experts, s’ils reconnaissent que cette vérification prolongerait inutilement le procès, sans espoir d’obtenir de documens plus positifs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1802-1831
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2717
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2718
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53554/BCU_Factums_G2717.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
affection fraternelle
charte privée
conseils de famille
démence
expertises graphologiques
experts
faux en écriture
infirmes
médecine légale
signatures
Successions
témoins
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53364/BCU_Factums_G1912.pdf
1e706d0ae817c2978abc3de1a6355bc0
PDF Text
Text
CONSULTATION.
' « ' • Z T ' '<?*
L E C O N S E I L soussigné qui a pris lecture d’un
Mémoire a consulter pour le S t J e a n - P i e r r e
R O U B I N , et d’un extrait de testament y joint
est de l ’avis qui suit :
'
*
■
P O I N T S DE FAI T.
L e 20 floréal an X I , testament nuncupatif écrit, fait par le S .r Lhoste ,
dans le département de la Haute - Loire.
C e testament est conçu en ces termes :
« Le.
, par devant J e a n - François Mouras, notaire public........ ..
et témoins bas-nommés, fut présent J e a n L h o ste .. . . , lequel un peu
indisposé , néanmoins libre de ses sens , ainsi qu’il nous a paru ,
voulant profiter des dispositions des lois relatives aux lib é ralité s,
de gré nous a déclaré vouloir faire son testament nuncupatif écrit ,
et disposition de dernière volonté, qu'il nous a dicté mot à mot en la
forme qui suit :
» Il donne et lè g u e .. . .
» Et en tous ses biens présens et à v en ir, il a fa i t , institué, et de
» sa bouche , nommé Marguerite Reymond , sa fe m m e , pour héritière
» générale et universelle, à laquelle il se confie pour ses honneurs
» funèbres.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
» C'est ici le dernier testament dudit Lhoste , testateur , qui veut
qu’il vaille par forme de testament , donation à cause de mort et
codicille ; ce qui a été fait au lieu de. . . • maison et dans la cuisine dudit Lhoste , testateur , en présence de ( suivent les noms des
témoins au nombre de six ) , soussignés avec ledit Je a n Lhoste testateur : duquel présent testament avons fait lecture en entier audit
A
�( 2 )
» Lhoste, testateur , toujours en présence desdits témoins, au q uel, il
» a dit persister. »
Dans le mois de nivôse an X I I , décès du testateur.
Contestation sur la validité du testam ent, entre ses héritiers na
turels , et sa veuve , héritière testamentaire.
Celle-ci est venue aussi à décéder, laissant pour héritier le S.T Roubin,
consultant.
L e procès repris avec ce dernier est pen d an t, en première instance ,
au Tribunal civil du Puy.
P O I N T S
D E
D R O IT .
Il s’agit d ’apprécier les moyens de nullité que les héritiers naturels
opposent au S .r Roubin, représentant l’héritière testamentaire.
L e S .r Roubin propose à cet égard quatre questions, qui seront succes
sivement rappelées et discutées ci - après.
P R E M I È R E
QUESTI ON.
L e testament dont il s’agit, est-il susceptible d'être annuité pour n’a
voir pas été fait avec les formes voulues par le Code civil ?
N o n assurément.
C e testament fut fait le 20 floréal an X I.
E t la loi du i 3 du même mois qui fait partie du Code c iv il, et
qui règle les formalités à, suivre pour la validité des testamens, ne fut pro
mulguée par le chef de l'Etat que le 23 , de sorte que la promulgation
n ’en fut connue que le 28 dans le département de la Haute-Loire.
O r, le Code civil déclare lui - m êm e, art. 2 , que la loi ne dispose
que pour l’aven ir, qu’elle n ’a point d effet rétroactif ; et dans cet ar
ticle qui s’applique à tous les cas indistinctement, se trouve le principe
que la loi 29 , Cod. de testamentis; le chap. i .er de la nov. 66 de J u s t i n i e n ,e t l ’art. 80 de l’ordonnance de 1 7 3 5 , avaient nominativement
consacré à 1 égard des testamens : principe qui voulait que tous actes
de dernière volonté, faits dans la forme prescrite par la loi existante lors
de leur confection , eussent leur e f f e t , nonobstant toutes lois postérieures
qui dérogeraient ou innoveraient à la forme des actes de cette nature.
Peu importe donc , que J e a n Lhoste eut survécu à la promulgation de
la loi du i 3 floréal an X I.
Toujours est-il que son testament porte une date authentique et
antérieure à cette promulgation.
C ’en est assez pour qu’il doive être m ain ten u , si d'aillevrs il sc
trouve revêtu des formalités qu ’exigeait la l o i , au moment où il fut
rédigé.
�C 3 )
S ’il s’agissait d'une question rélative à la capacité du testateur J
ou à la portion disponible de ses biens , elle ne pourrait être dé
cidée que d’après la loi en vigueur au moment du décès.
Mais tant qu’il ne s’agit que de la forme du testament , la loi
du jour où il a été f a i t , doit seule être consultée.
L a question s’est présentée devant la Cour de cassation , dans
une espèce exactement s e m b la b le à celle proposée par le consultant.
U n arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles , avait déclaré va- labiés un testament et un codicille^ faits le 28 nivose an I X , et
23 ventôse an X , mais dont l ’auteur n’était décédé que dépuis
la promulgation de la loi du i 3 floréal an X I.
L a veuve de Villers se pourvut en cassation contre cet a r r ê t ,
sous prétexte que les deux actes de dernière volonté dont il était
q u estion , auraient dû être annullés comme ne^ se trouvant pas faits
avec les formes prescrites par le Code civil.
Mais par arrêt du i . er brumaire an X I I I , rapporté par D e n e v e r s ,
dans son Journal des audiences de la Cour de cassation, 2.e cahier
de cette même année , pag. 81 et suiv. , le pourvoi fut rejeté.
« Attendu que , quant à la forme des testamens et codicilles ,
» ils sont et restent réguliers , lorsqu’ils sont revêtus de toutes les
» formalités prescrites par les lois en vigueur dans le moment de
» leur confection, encore que ces formalités fussent par la suite chan» gées ou modifiées par de nouvelles lois..........»
du
L a première
consultant.
question
ne saurait donc
D E U X I È M E
être
jugée
qu’en
faveur
QUE ST I ON.
L e s héritiers naturels prétendent qu’en admettant que le testa
ment de J e a n Lhoste , doive être régi par les lois antérieures
au Code civil , il y a lieu de l’annuller comme renfermant une
contravention formelle à l ’art. 5 de l ’ordonnance de 1 7 3 5 , en ce
qu’il n’y est pas fait mention que les dispositions aient été écri
tes par le notaire qui l ’a reçu.
Sont-ils fondés dans cette prétention ?
L a négative n’est susceptible d’aucune difficulté sérieuse.
L art. 5 de l’ordonnance voulait bien que toutes les dispositions du
testament nuncupatif fussent, écrites par le notaire , mais il n ’exi
geait point qu il en fut fait mention.
Cet article voulait que le notaire, après qu’il aurait écrit toutes
les dispositions du testam ent, en donnât lecture en entier au
testateur.
A 2
�C 4
)
E t puis il ajoutait : de laquelle lecture il sera fait mention par
le notaire.
Mais remarquons bien qu’il ne s’expliquait ainsi , qu’à l’égard
de la lecture seulement , sans rien dire de semblable à l'égard
de lecriture. E t , d e là , il résulte évidemment qu’aux yeux de la l o i ,
la mention n’était nullement nécessaire à legard de l ’écriture.
Sans doute le testament nuncitpatif devait être écrit par le notaire >
et il était nul , s'il avait été écrit par tout autre.
Mais dans les contestations qui pouvaient s’élever à. cet é g a r d ,
tout se réduisait au peint de savoir si , dans le fait , le testament
se trouvait écrit , ou non , de la propre main du notaire : de sorte
que le sort du testament n’était subordonné qu’au résultat d’une sim
ple vérification.
C ’est donc en ce sens que l'article précité fut constamment en
tendu , et appliqué par la jurisprudence.
Tém oin entr’autres l ’arrêt du ci-devant parlement de Toulouse , du
2 8 août 17 4 2 , qui est rapporté par Furgole » dans son Traité des testamens, chap. 12 , n.° i 5 , et qui , avant de statuer sur la demande en
nullité d’un testament contenant la clause codicillaire , mais que les
successeurs ab intestat soutenaient être écrits par tout autre que le
notaire, ordonne qu’ils feraient vérifier ce fait.
A y m a r , sur l’art. 5 , de l’ordonnance de 1 7 3 5 , rapporte lin arrêt dir
ci-devant parlement de Paris, du 9 décembre 1 7 4 0 , q u i , sur une de
mande en nullité de la même nature » ordonne un pareil interlocutoireTout testament fait par acte public postérieurement à la promulga
tion des dispositions du Code c i v il, relatives à la forme des actes de
dernière volonté, doit porter avec lui la mention expresse qu’il a été
écrit par le notaire ; et pourquoi ? C ’est que le Code c i v i l , art. 9 7 2 ,
ordonne formellement cette mention, mais elle netait prescrite par au
cune loi préexistante ; jusques-là donc, elle n’était pas nécessuire.
T R O I S I È M E
Q UE S T I O N .
L e s héritiers naturels de J e a n Lhofte sont-ils fondés à prétendre que
le testament est n u l , en ce que le testateur n’y parle pas à la pre
m iè r e personne, c’est-à-dire, avec le pronom j e ; mais bien à la troisième,
c ’est-à-dire , avec le pronom il ; que d’ailleurs 1 institution à titre uni
versel y est faite avec trait au passé ( il a fa it, institué, e t c .) , au lieu
d ’être conçue au présent ( il f a i t , institué ) ; que de tout cela , il
résulte que le testament n’a pas été écrit tel qu’a dû le dicter le
testateur, et que les dispositions en sont moins l ’ouvrage de ce der
nier , que celui du notaire qui les a rédigées à son gré?
Tour donner à la discussion de cette question toute la clarté q u e lle
�( 5 )
e xig é , remarquons d’abo rd , que l’ordonnance de 1 7 3 5 eut pour o b j e t ,
ainsi qu’il est dit dans son préambule , non pas de faire un changement
réel aux dispositions des lois que les différentes Cours de l’Empire
avaient observées jusqu'alors , mais au contraire, d’en affermir l’autorité
par des règles tirées de ces lois m êm es, et appliquées d’une manière
précise , et propre à faire cesser le doute et l’incertitude.
Aussi maintint-elle , et les principes généraux du droit romain , par
rapport aux pays qui l’avaient ad o p té , et ceux des coutumes par rap
port aux pays qui se trouvaient régis par des statuts particuliers : de
sorte qu’elle ne s’attacha essentiellement q u à faire disparaître les abus
et les in co n v é n ie n s qui prenaient leur principale source dans les sentimens et les subtilités des interprètes ou des commentateurs , souvent
contraires les uns aux autres, et quelquefois aux lois mêmes ou aux
statuts qu’ils avaient prétendu expliquer.
Il est donc sensible que , parmi les formes testamentaires main
tenues ou modifiées par l’ordonnance , il 11e faut pas confondre celles
qui concernent les pays de droit é c r i t , avec celles qui s’appliquent
aux pays coutumiers.
Nous n’avons à nous occuper ici que des formes du testament nuncupatif écrit , et il suffira même de rappeler celles qui se réfèrent à la
question proposée.
Quelles étaient ces formes, avant l’ordonnance, dans les pays de cou
tume ? Quelles étaient-elles dans les pays régis par le droit romain l
E t en quoi l’ordonnance y a t - e l l e respectivement dérogé ou innové ?
Voilà ce qu’ il faut bien distinguer.
L e droit romain admettait le testament nuncupatif écrit ou solenn el,
et le testament purement nuncupatif, c'est-à d ir e , fait de vive voix et
sans écriture. Voyez la loi 2 1 , in princ. au Coil. de testamenlis , et les
§§ 3 et 1 4 , du tit. 1 0 , du liv. 2 , des instit. de Justinieu.
Quand le testateur voulait faire un testament nuncupatif écrit , il
pouvait ou en écrire les dispositions de sa propre main ou les faire
écrire par tout autre. Ensuite le testameni devait être revêtu du sceau
de sept témoins, à <jui Ion pouvait en laisser ignorer le contenu , et
en outre il devait etre souscrit et signé par le testateur , ainsi que par
les témoins en présence du testateur , et sans divertir à aucun autre
acte. Voyez les textes que nous venons de citer.
C es textes ne disent point q u e , dans le cas où le testateur em
ployait le ministère d’un écrivain quelconque pour écrire ses disposi.
tions , il fut nécessaire de faire mention qu’il les lui eut dictées.
Us ne disent même pas qu'il dût précisément les dicter : il on résulte
seulement qu’il devait déclare* ses volontés à l’écrivain, par lequel il les
Jui faisait rédiger par écrit.
�( 6 )
A la v é r ité , ce mot d icter, par rapport au testament, se trouve dans
quelques lois romaines , et notamment dans la loi 2 1 , versic. in omnibus
au Cod. de testam.
E t F u rg o le , chap. 2 , sect. i . r e , n .° 4 , se fonde sur cette loi , ainsi
que sur la loi 2 8 , ff. qui testam. fa cere possunt, et sur la loi 2 , §. 7 ,
ff. de bonorum -possessions secundum tabulas , pour dire « qu’il faut
» qu’il paraisse que le testateur a dicté le contenu du testament ou
» q u e , du moins, il est nécessaire qu’il n’y ait point de preuve ni de
» circonstance qui puisse faire présumer que le testateur n’a pas dicté
» sa volonté à l ’écrivain: c a r, ajoute cet auteur, ce serait alors non la
» la volonté du testateur de laquelle dépend la force et l’efficace du
» testam en t, mais celle de l ’écrivain. »
Mais d’abord, il paraît que , dans’ le langage du droit rom ain, le
mot dicter par rapport à un testam e n t, était synonyme des mots dé
clarer ou expliquer ses volontés ; et Furgole l’a lui-même entendu ainsi.
D ictare suum arbitrium , dit la première des lois ci-dessus citées.
Mais la seconde, dit simplement, que rien n’empêche qu’un esclave
appartenant même à un autre qu’au testateur, écrive le téstament par
l ’ordre de ce dernier. Servus licet a lien u s, jussu testàtoris teStamentum
scribere non prohibetur.
Et la troisième, après avoir dit que , si le nom de l ’héritier a été
effacé à dessein, il ne doit pas être admis à la succession prétorienne ;
ajoute : il en est de m ê m e , à l ’égard de l’héritier dont le nom a été
écrit à l ’insçu du testateur, ou sans que le testateur fut consulté ; car, on
regarde comme non écrit l’héritier qui n’a pas été écrit par la volonté du
testateur : Quemadmodùm non potest qui h<rres scriptus est non consulto
testatore : nam pro non scripto ; quem scribi noluit.
D ’après ces t e x t e s , il n’était nullement nécessaire qu’il parut que le
testateur eut précisément dicté ses dispositions , et qu’elles eussent
été littérallement écrites, telles qu’il les aurait dictées; mais il suf
fisait que le testateur eut déclaré ses volontés à l ’écrivain , et que ce
lui-ci en eut rédigé la substance , sans rien ajouter ou omettre qui fut
de nature à les contrarier. A u surplus voyez la loi 2 9 , au Cod. de testam entis, et les notes de Godefroi sur cette loi.
]1 est constant d ’ailleurs , que la loi romaine était entendue et ap
pliquée dans ce sens par la jurisprudence du ci-devant parlement de
Toulouse.
Entr’autres auteurs, voyez Cambolas , liv, 3 , chap. 12 , où cet au
teur observe , d’après la loi rom aine, et d’après un arrêt de ce parle
m ent, qu’un testament ne pouvait pas être valablement fait par signes;
mais q u ’il fa lla it , et que c ’était d’ailleurs assez qu’il parut que le tes
tateur eut parlé pour faire entendre ses volontés.
Souvent même on voyait des testamens faits par les simples mono-
�rî> y ï
C 7 )
syllables o u i, ou non, arrachées à des moribonds, sur les demandes qui
leur étaient faites par les notaires ou par des personnes intéressées ;
et ces testamens, quelques suspects qu’ils fussent , étaient déclarés valables-par les parlemens des pays de droit écrit. Voyez Cam bolas,
liv. 5 , chap. 5 , et Henrys , tom. i . e r , liv. 5 , question 3 i.
Ajoutons que les notaires étaient dans l’usage d ’écrire les testamens
en l’absence des témoins , et de ne les appeler que pour en entendre
la lecture.
C ’est pour rémedier à ces abus que l ’art. 5 de l'ordonnance de
1 7 3 5 , en statuant à l ’égard des pays de droit écrit , voulut que »
» lorsque le testateur voudrait faire un testament nuncupatif é c r i t , il
» en prononçât intelligiblement toutes les dispositions en présence au
» moins de 7 témoins , y compris le notaire , lequel écrirait lesdites
» dispositions à m.esure qu elles seraient prononcées par le testateur etc. »
Quant aux pays coutumiers , la coutume de Paris voulait, art. 289 ,
que le testament passé par-devant notaires , f u t dicté et nommé p a r
le testateur aux dits notaires, et qu’il f u t fa it mention audit testament
qu’il avait été ainsi dicté et nom m é, etc ; et la plupart des coutumes
avaient une disposition semblable.
Certaines voulaient ultérieurement qu’il fut fait mention que le tes
tament avait été dicté sans suggestion.
L e s parlemens des pays coutumiers étaient si rigoureusement atta
chés à ces dispositions de la loi municipale, qu’ils annullaient les tes
tamens pour la plus légère omission.
T é m o in , entr’autres l’arrêt du ci-devant parlement do Paris, du 1 4
juillet 1642 , (rapporté au Journal des audiences) , qui cassa un tes
tament fait dans le pays de Poitou , dont la coutume exigeait que le
testament portât qu'il avait été dicté et nommé sans suggestion d'au
cune personne, et qui le cassa par cette seule raison , qu’au mot sugges
tion , le notaire avait substitué le mot induction, quoique assurément
ce dernier terme fut assez équipollent.
L ’ordonnance voulut écarter ces vaines subtilités, dont l ’abus tendait
à rendre illusoire la faculté de tester.
* C ’est dans cet objet, qu’en statuant, par son art. a 3 , sur les testa
mens mincupatifs écrits à l ’égard des pays coutumiers , elle s’expri
mait dans les termes qui suivent : « Les testamens qui se feront de» vant une personne publique, seront reçus par deux notaires, ou par
» un notaire , en présence de deux témoins; lesquels notaires ou l ’un
» d ’eu x, écriront les dernières volontés du testateur , telles qu'il Us die» t e r a ....» Sans néanmoins qu'il soit nécessaire de se servir précisé
ment de ces termes : d ic té, nommé , tu et relu sans suggestion ou au
tres requis par les coutumes ou status.
�(
3
)
On voit qu a l ’égard des pays coutumiers , l’ancien législateur s’ex
prime bien autrement qu a l'égard des pays de droit écrit.
Pourquoi cette différence ? Pourquoi voulait - il que, dans les pays
coutumiers, les notaires écrivissent les dernières volontés du testateur
telles qu’il les dicterait ? C ’est que les coutumes exigeaient effecti
vement que les dispositions de dernière volonté fussent écrites telles
qu'elles étaient écrites par le testateur , et qu’il voulait maintenir
cette disposition h l ’égard des pays régis par ces coutumes , en déro
geant seulement à la nécessité de faire mention expresse de la dictée.
Pourquoi, au contraire, l’art. 5 qui statuait pour les pays de droit écrit
n eiriployait*il pas le mot d icter, mais se contentait d’ordonner que le
testateur prononcerait intelligiblement toutes ces dispositions, et que le
notaire les écrirait à mesure qu’elles seraient prononcées p a r le testateur>
C'est que la loi romaine, ou la jurisprudence des pays de droit écrit,
qui en. avait fixé le sens , n ’exigeait pas que le testateur dictât préci
sément ses dispositions, ni , par conséquent , quelles fussent littérale
ment é c rite s, mais voulait seulement qu’il les prononçât ou les déclarât
à l ’écrivain , et qu’elles fussent rédigées dans un sens correspondant à
ses volontés.
Aussi Furgole, en expliquant (chap. 2 , sect. 3 , n . ° 8 ) , l’art. 23 de
l ’ordonnance, relatif aux pays coutumiers, après avoir observé qu’il n’est
plus nécessaire d’employer les mots d ic té, nommé ou autres requis par
les coutumes ou statu ts, a jo u t e - t - il , « Il suffit seulement qu’il pa» raisse que le testateur a dicté ou expliqué sa volonté , ou du moins
» qu’on 11e puisse pas présumer le contraire.. . . »
Mais voici comment s'exprime le même auteur, en expliquant ( aux
n.oS i 3 et 14 de la même section) , l’art, 5 de l ’ordonnance concernant
les pays de droit écrit.
« Selon l’art. 5 , lorsque le testateur voudra faire un testament nuncupatif é c r i t , il devra i . ° en prononcer intelligiblement toutes les
dispositions , en présence au moins de sept témoins y compris le 110taire , c’est-â d ire , que le testatsur doit exprim er par sa voix le nom
des héritiers , les portions qu'il leur assign e, les legs , les fid e i commis
et autres choses qu'il voudra ordonner',
le notaire doit écrite les dis-,
positions à mesure qu’elles seront prononcées par le testateur, etc. »
Furgole va plus loin : après avoir observé ( chap. 8 , sect. i . re , n.° 59 ) ,
que d’après la loi 2 1 , if. qui testamenta fa cere possunt, le testateur
doit prononcer le nom de son héritier, ou le désigner d’une manière
certaine et indubitable , et qu’en conséquence l’ordonnance art. 2 , dé
clare nulles toutes les dispositionsftqui ne seraient fa ite s que par signes,
encore qu’elles eussent été rédigées par écrit sur le fondem ent desdits
signes ; il ajoute : « mais 011 ne doit pas induire que si un testateur
montrait
»
»
»
»
»
»
�( 9 )
•» montrait , par signes aux témoins et aux notaires, la personne qu’il
v voudrait faire h éritier, en déclarant qu’il l'institue héritier, une telle
5» institution fut nulle ; car l'ordonnance n’entend prohiber que les dis» positions où le testateur n’emploie que des signes sans aucunes paroles :
» ces signes étant presques toujours équivoques, et non lorsque le testa» teur p a r le , et qu’il dit que la personne qu’il montre et désigne de
» la main ou autrement , soit son héritier; auquel-,cas il ne peut y avoir
» ni doute ni équivoque, puisque le testateur déclare, de p a ro le, qu’il
» veut faire un h éritier, et que le signe ou la démonstration*n’est que
» pour fa ire connaître la personne de l’héiitier. Ainsi il ne faut pas
v croire que l’art. 2 de l’ordonnance , ait dérogé à la loi 58 de hered.
» instit. , ni aux autres lois'qui veulent que 1 institution où la personne
» de l ’héritier n'ëst: pas expressément 1 nomméé , et où: elle n’est qùè
» •simplement désignée^soit valable : ’elle ne défclare-huiles que les dis» positions qui sont totalement faites par sign es, et non celles qui sont
y mêlées de paroles et dé signes, et où les signes ne sont faits que pour
» désigner la personne' de ^héritier, ce qui résulte bien clairement de
» ces mots de l’ordonnance qui ne seraient fa ite s que par signes ; et cela
» est si v r a i , que l’art. 5 o.de la ¡même: ordonnance admet les désigna*-'
» lions pour faire connaître les personnes qui 'sont instituées. »
II est sensible que dans* ce passage,’ ainsi que dans le précédent',
Furgole raisonne sur une hypothèse • oûï le testament n ’a été ni litté
ralement dicté par le testateur , ni écrit par, le notaire tel qu’il au
rait pu être dicté; et il n’en décide pas moins, d ’après le texte même
de la lo i, que le testament est valablo.,
,
C e testament ne constate-t-il 1 pas que le testateur a f a i t j institue',
et de sa propre , bouche nommé Alarguerite R aym ond , sa fem m e pour
héritière générale et universelle en tous ses biens présent et à venir. E t une fois constant que le testateur a lui-même prononcé ses dis
positions, le vœu de la loi ne se trouve-t-il pas pleinement rempli?
O n pourrait, d’ailleurs invoquer, s’il en était besoin, les lois 7 , i 5
et 2 4 , Cod. de testam entis, qui voulaient qu'on ne s’arrêtât point à
de vaines subtilités, et qu'un testament ait son effet , en quelques
termes qu’il fut conçu , et nonobstant des erreurs de l ’écrivain , ou les
vices de rédaction , pourvu que la volonté du testateur se trouvât cons
tante. E rro re scribentis testamenlum ju ris solemnitas mutilari nequaquam
potest.—r- Quoniàm indignum est ab inanem observationcm irritas f i e r i ta
bulas et judicia mortuorum placuit ademptis his quorum imaginarius
iisus est institutioni hceredis verborum non esse necessarium observantium , utrùm imperativis et directis verbis f a t , aut ir fe x is . S c d quibus
libet confecta sententiis , vel in quolibet loquendi genere fo rm a ta institutio
valeat ; simodd per eam liquibet voluntatis intentio. _ Ambiguitaleque vel
B
�4u<»
(
io
)
im pcritiâ, vel desidio testamenta conscribentium oriuntur resecandas ess<t
censemus : et sive institutio hæredum post legatorum donationes scripta
sit, vel alia prœtermissa sit observatio, non ex mente testatoris, sed vitio
tabellionis vel allerius qui testamentum scribit , nulli licentiam concedimus p er eam occasionem testatoris voluntatem subvertere vel minuere.
Mais ce n’est pas tout : le testament porte , en toutes lettres , que
le testateur en a dicte' mot â màt les dispositions au notaire.
E t peu importe que cette énonciation précède l ’institution d’héritier.
Ricard , dans son Traité des donations , part. i .Te , n.° 1 5 1 8 , en
parlant des solemnités qu’exigeait la coutume de Paris antérieurement
à l ’ordonnance de 1 7 3 5 , se fait la question de savoir si les solen-nités des testamens ne peuvent être mises qu’à la fin.
» Il semble dit-ili, d!abord , que' les formalités regardant tous les
» testamens et étant nécessaire par e x . , qu’il soit entièrement dicté’
» parle testateur, et ensuite à lui lu et relu , la clause qui en fait men» tion , ne puisse être mise qu'à la fin ; d’autant qu’on ne peut paS'
» écrire , dans la v é rité , que ces formalités ont été gardées, avant que
» toutes les dispositions contenues au testament aient été achevées ,
» et que les témoins aient reconnu si le testateur a effectivement
» dicté son testament, et si le notaire l u i ^ n a fait la lecture réitérée. v
E t puis , Ricard réfute ce système en ces termes
» C ’a été pourtant avec raison , que cette opinion rigoureuse a été
9 rejetée ; parce que le testament étant individu et ne composant
» qu’un acte , il acquiert sa perfection en un moine tems : tellement
» qu(il n'importe pas en quel endroit du testament il soit fait men> tion qu’il a été dicté’ v lu et relu ; d ’autant que cette clause , en
» quelque lieu q u elle se trouve placée, a son rapport à tout l’a c t e ,
» lequel n'est conclu que par les signatures qui servent de sceaux ec
» qui font foi de la vérité de tout ce qui y est contenu : de sorte
» qu’il suffit que les solennités dont nous parlons aient été observées
» avant les signatures, et il est indifférent que la clause de d ic té ,
9 nommé, tu et relu , soit au commencement , au m ilieu , ou à la fin ,■
* pourvu que la solennité ait été gardée , et la clause rédigée p a r
» écrit , ayant que la partie, le notaire et les témoins aient signé. »
Ainsi , en supposant même que le testament d e J e a n Lhoste ,•
quoique fait en pays de droit é c r it , ait dû être dicté , et être lit
téralement écrit tel qu’il était dicté , sans qu’il eut suffi que le tes-tateur en prononçât intelligiblement les dispositions, les héritiers na-turels n’en seraient pas plus avancés, puisque le testament constate
qu’il a été dicté mot à mot par le testateur.
L a r t . 97a du code c iv il, veut que le testament par acte public soit
�4 °t
(
11
)
dicté par le testateur et écrit par le notaire te l qu'il est dicté, et
q u ’il en soit fait mention.
E h bien ! qu’un testament fait depuis la promulgation du codecivil,
constate qu’il a été dicté : croit-on que cette énonciation puisse être
emportée, parce que le testateur aura parlé, soit à la r.e re , soit à la
3 .eKle personne , ou qne les termes dont il se sera s e r v i , n’auront pas
été littéralement écrits par le notaire l Non , sans doute.
'Voici comment monsieur JVialeville > président de la Cour de cas*
sation , s’exprime à ce sujet , sur l ’art. 972 du Code c iv il, dans son
analyse raisonnée de la discussion de ce C o d e , au Conseil d’Etat.
» J e 11e crois pas que le notaire doive écrire en patois un testament
» que le testateur lui dictera dan? cet .idiome, ni même qu'il soit
» obligé de se servir des mêmes termes que le testateur, comme un
» auteur moderne, ( l’auteur, ou les auteurs des Pandectes françaises 1
» l a pensé ; le notaire est seulement obligé de rendre exactement le
» sens des dispositions que le testateur lui dicte , et c’est ainsi que
» les diverses lois qui ont exigé la d icté e , ont toujours été entendues. »
Ajoutons que la question s’est présentée devant la Cour d’appel de
Bruxelles’ dans l ’espèce suivante.
L e 3 ventôse ah X I I , Martin Ramaca fait un testament par acte
public , e t donne la majeure partie de ses biens à son épouse Anne
Catherine Meens.
C e testament porte qu’il a été dicté par le testateur, et néanmoins
toutes les dispositions en sont conçues à la troisième personne.
L ’héritière présomptive du testateur argu m en te, de l à , pour pré
tendre que le testateur n ’a pas dicté lui*même le testament tel qu’il
est é c r it , et qu’en conséquence , il doit ctre déclaré nul.
L e 16 prairial an X I I , jugement du T ribun al civil de Louvain ,
qui déclare le testament valable.
A ppel de ce jugement de la part de l’héritière présomptive.
L e 3 fructidor de la même a n n é e , arrêt de la Cour d’appel de
Bruxelles , qui déclare qu’il a été bien jugé , etc.
« Attendu que l’acte produit lait mention'expresse qu’il a été dicté
» par le testateur ; que rien ne s’oppose à ce que la disposition soit
» faite en 3 .me personne, puisque rien n ’empêche de dicter de cette
» manière ; que d'ailleurs foi doit être ajoutée à l’acte aussi long» temps que le contraire n’est prouvé; ce q u i, dans ce cas , ne pouvait
* se faire que par une inscription en foux. » '
Voyez cet arrêt dans la jurisprudence
Codé civil, l . er semestre
de l’an X I I I , tom. 3 , pag. ¿ 3 3 et suivantes. 1
Il est sensible, en effet , qu’un testateur' peut dicter ses volontés en
B 2
�(
J2
)
parlant à la 3 .me comme en parlant à la i*re person ne, et qu’il peut
de même les dicter en parlant avec trait au passé , tout comme eu
parlant avec trait au présent.
A u surplus, le testament de J e a n L h o ste , constate qn’il a lui-même
dicté mot-à-mot au notaire, et c’en est assez pour que tous les raisonnemens doivent se briser contre cette énonciation qui ne pourrait
être emportée que par la vole de l'inscription de faux.
L e 3 .me moyen de nullités échappe donc encore aux héritiers
naturels , sous quelque rapport qu’on l’envisage.
Q U A T R I È M E
QUE S T I O N .
L e testament fait par J e a n L h o ste , le 20 floréal an X I , posté
rieurement à la promulgation de la loi du 2 5 ventôse de la memê année r
contenant organisation du notariat , p e u t- il, d’après l ’art. 1 4 de cette
l o i , être considéré comme n u l, sur l e ‘ fondement qu’il n'y est pas
fait mention de la signature du notaire qui l’a r e ç u ,e t qni dailleurs
l ’a réellement signé.
L'art. 1 4 de cette loi du 2 5 ventôse an X I , porte r
» L e s actes seront signés par les parties, les témoins et les no» taires, qui doivent en faire mention à la fin de l ’acte.
» Quant aux parties qui ne savent
» notaire doit faire mention , à la fin
> tions à cet égard.
Point de doute qu'aux termes de cet
moins qui signent réellement l'acte , ne
le notaire qui ie reçoit.
ou ne peuvent signer ; le
de l'acte de leurs déclaraarticle, la signature des t é
doive être mentionnée par
Mais , d ’abord , on- pourrait peut-être soutenir avec quelque fon
dement que cette mention n ’est prescrite au notaire, que par rap
port à la signature des témoins , et non par rapport à sa propresignature.
On objectera que le notaire est lui-m êm e considéré comme témoin.
E t , en effet , il était considéré comme tel par l’ancienne légisîation concernant les testamens. S e p t témoins au m o in s, y compris
le n otaire, disaient l’article 5 de l ’ordonnance de 1^ 3 5 , relativement
au testament nuncupatif é c r it , et l'art. 9, de la même ordonnance
relativement au testament clos ou mystique.
Cette objection néanmoins ne serait pas absolument sans réponse.
M ais, admettons que l’art. 1 4 de la loi du 2S ventôse an X I , im^
pose au notaire l ’obligation de mentionner sa propre signature ainsi
que celle des témoins, dans les actes qu’il reçoit, et cette entente
de la loi e s t , en effet > la plus probable.
�(
i3
)
C ela posé , il reste à examiner si cet article s’applique aux testamens.
A vant de discuter directement cette qu estion, il ne sera pas hors
de propos de jeter un coup d’œil sur les lois et la jurisprudence
antérieures qui s’y référent.
L ’ordonnance de B lo is , du mois de mai i 5y g , voulait, art. i 65 »
que
tous notaires et tabellions , soit en pays coutumier ou de
» droit é c rit, fussent tenus faire signer aux parties et aux témoins
» instrumentales ,' s’ils savaient sign er, tous contrats et actes , soit
» testamens ou autres , qu’ils recevraient, dont ils feraient m ention,
» tant en la minute que grosse qu’ils en délivreraient , à peine
» de nullité desdits contrats, testamens ou actes; et qu’en cas que
>> les parties ou témoins ne sussent signer , lesdits notaires ou tabel» lions fissent. mention de la réquisition par eux faite auxdites parties
» et témoins de signer, et de leur réponse. »
Même disposition dans l’art. 84 , de l’ordonnance d’Orléans du mois
de janvier i 56 o , avec cette seule différence qu’il n’y était pas nomi
nativement parlé des testamens.
Comment ces dispositions furent-elles entendues dans l’usage ?
Vers le.m ilieu du 17 .e siècle, la question se présenta au ci-devant
parlement de Paris , dans une espèce où il s’agissait de décider si un
testament et un codicille , faits par le S r. Désespoir, et réellement si
gnés de lu i, étaient n u ls, en ce que les notaires n’avaient pas fait
mention qu’il eût signé. <
■ L e 7 mars 16 52 , arrêt qui nonobstant cette omission, déclara valables
le testament et le codicille.'
Voyez cet arrêt dans le Journal des audiences , ( tom. i . er , liv. 7 ,
chap. 5 , pag. 532 , édit. de 1 7 6 7 ) , avec l'extrait du plaidoyer de l’avo
cat général Talon , où l ’on remarque les expressions suivantes : » E n
» ce qui touche les solennités de la signature du d é fu n t , l’effet est
» plus puissant que la p arole, et est assez indifférent que les notaires
» aient écritt dans la minute que le testateur a sign é , p u isq u e , par
» e f f e t , il a. Signé, comme la coutume le désire. »
R icard , t Traité des donations , part. i . re, n.03 1628 et Ó 2 9 ) , et
Rousseau de Lacombe , ( Recueil de jurisprudence civile sur le mot
testament, se’ct.*3 , dist. i .r e , n.° 3 ) , observent d’après cet arrê t,
que « cette omission ( c ’est-à-dire , le défaut de mention de la si» gnature réellement apposée ) , ne rendait pas le testament nul ,
» et que la nullité irrogée par l’ordonnance de Blois , en ce qu’elle
» v o u la it-( ait. 1 65 ) , que le testament fut sign é, et qu’il en fut
9 fait mention , ne se rapportait qu’au défaut dè signature. »
; Cependant un arrêt rendu par le même parlement de Paris , le 9
C
�( H )
mars 1 7 3 0 , et rapporté par Dénizart sur le mor testam ent, n.° 7 7 ,
déclara nul un testament reçu par un notaire de Saint - Germainen-Laye , et deux témoins , parce qu’il n’y était pas fait mention de
la signature de ces derniers , quoiqu’ils l’eussent en effet signé. C e
même arrêt , rendu en forme de règlem ent, enjoignit aux notaires de
se conformer à l ’art. 1 6 5 , de l ’ordonnance de Blois.
L e parlement de Dijon adopta cette dernière jurisprudence de celui
de Paris , par arrêt du i . er avril 1 7 3 5 , rendu aussi en .form e de r è
glement.
Quant au parlement de Toulouse , il confirmait depuis , comme
avant l’ordonnance de Blois, les testamens non signés par les testateurs r
bien que le notaire eut omis d’énoncer la cause pour laquelle ils n’a
vaient pas signé. Voyez les arrêts rapportés par Cam bolas, ( liv. 2 r
chap. 44 ) ; p a r D c liv e , ( liv. 5 , chap. 5 ) , et par D espeisses, ( tir.
des testamens , sect. 4 , n.° 12 6 ).
A plus forte raison , ce parlement n’annullait-il point les testamen?
pour le défaut de mention de la signature du testateur ou des témoins,
lorsqu’ils avaient réellement signé.
Survînt l ’ordonnance de 1 7 3 5 , qui voulut que le testament m m cupatif é c r i t , fut signé par le testateur, parles témoins et par le notaire.
Cette ordonnance ajouta que , dans le cas où le testateur déclarerait
ne savoir ou ne pouvoir signer, il devait en être fait mention expresse.
E lle voulut également que si parmi les témoins , il y en avait qui
ne sussent ou 11e pussent signer dans les cas où il était permis d'en
employer de non-signataires, il fut fait mention qu’ils avaient été pré-sens , et qu’ils avaient déclaré ne savoir ou ne pouvoir signer.
Mais elle n’exigea point qu’il fut fait mention de la signature du
testateur, ou des témoins, et encore moins du notaire, lorsque leurs'
signatures respectives se trouvaient au bas du testament.
Aussi les parlemens mêmes q u i, jusqu’alors s’étaient rigoureusement
conformés à l’art. i 6 5 , d e l’ordonnance de B l o is , regardèrent-ils ce t
article comme tacitement abrogé par l’ordonnance de > 7 3 5 , en ce qu’il
prescrivait cette mention , à l ’egard des signatures existantes pa* le lait^
Tém oin l ’arrêt , par lequel le parlement de Paris postérieurement
à cette dernière ordonnance, confinïia , au rapport de M. Pasquier, un
testament fait dans la coutume d’A u v e rg n e , et réellement signé par
îes témoins, mais sans mention de leur signature dans le corps du
testament.
Témoin l ’arrêt du parlement de D ijon, du a 5 juin 177 8 , qui re
jeta la demande en déclaration de nullité d ’un testam ent, fondée sur
ce que le notaire qui lavait reçu et signé , n ’y ayait pas fait mention,
de sa signature.
�<oJ
( i5 )
V o y ez ccs deux arrêts et autres dans le Répertoire universel de
jurisprudence , à l ’art, signature , § 2 , quest. 3 .
L e s rédacteurs de cet article , expriment d ’ailleurs leur opinion en k
ces termes : « Il est à croire que ces décisions fixeront enfin la juris» prudence en faveur du parti qu’elles ont adopté ; du moins , il ne
» paraît pas que les principes permettent d ’en suivre un a u tr e , tant
» que le législateur ne jugera pas à propos d’ajouter au texte de
» l'ordonnance de 1 7 3 5 , une formalité que ni cette lo i, ni les pré» cé d e n te s, n’ont prescrites à peine de nullité. »
Une telle addition s e trouve-t-elle dans la loi du 2S ventôse an X I ,
ou si l’on v e u t, cette loi a-t-elle renouvellé l ’art. i 65 , de l ’ordonnance
de B lo is , en admettant que cet article eût prescrit, à peine de n u llité ,
la mention des signatures existantes dans le fait ?
Quelques observations suffiront pour établir la négative de cette ques
tion , à l’égard des testamens.
E t , d ’a b o rd , l’art. 1 65 de l’ordonnance de Blois , ne se bornait pas à
parler des contrats et actes en général ; mais elle comprenait nommé
ment les testamens dans sa disposition, au lieu que la loi du 2 5 ventôse
an X I , ne parle nominativement que des actes , et cette différence dans
les expressions du législateur, en indique déjà une dans son objet.
Il est vrai que le mot acte est un terme générique qui comprend
le testament, ainsi que le contrat.'Voyez, les notes de Guy-Coquille T
sur l’art. ¡65 de l’ordonnance de Blois.
Ma is la loi du 2 5 ventôse , a - t - e l l e en effet compris-les testamens
dans cetie dénomination générale d’actes ?
Non , certainement. Et pour s’en convaincre , il suffit de connaître
l ’objet de cette loi , et d ’en comparer les dispositions , ainsi que les
actes dont elle parle , soit avec la nature des testamens , soit avec les
formes que le Code civil a ultérieurement établies pour la validité de
cette dernière espèce d’actes.
Quel est-il l ’objet de la loi du 2 5 ventôse ?
C ’est d’organiser le notariat ; de déterminer le nombre , le place
ment et le cautionnement des notaires; les conditions requises pour leur
admission et le.mode de leur nomination ; leurs fonctions, leur ressort
et leurs devoirs; les cas de parenté et d ’alliance où ils doivent's’abs
tenir ; la forme de leurs acte s, et les obligations qu’ils Qnt à remplir
pour leur donner la forme authentique et le caractère de l’autorité pu
blique ; l’obligation d’en garder minute , et le droit d ’en délivrer des
grosses et des expéditions.
t,
Tout cela est étranger aux formes requises par la rédaction des tes
tamens, soit mystiques , soit faits par acte public.
L a loi du 25 ventôse an X I , ne déterm ine, par rapport à la r é d a o
�(
16
)
l i o n , que la forme des contrats ou actes synallagmatiques ou bilatéraux
passés devant notaires, sans s'occuper de la forme dés testamens.
E t c’est le Code civil qui règle les formes dans lesquelles doivent être
rédigés les testamens, sans s’occuper de la forme des contrats.
Cette proposition se justifie sous plusieurs rapports ;
i . ° L ’article 9 31 du Code civil veut : « Que tous actes portant dona» tion entre-vifs , soient passés devant notaires, dans la forme ordinaire
» des contrats. »
L e s articles subséquens fixent le mode dans lequel une donation doit
être acceptée pour être obligatoire ; et en e f f e t , ce n ’est qu’au moyen de
l ’acceptation faite par le donataire, que la donation entre-vifs prend le
caractère de contrat ou d’acte bilatéral.
Mais pourquoi le Code civil ne règle - t - i l pas d’ailleurs la forme de
la donation entre-vifs ? C ’est que cette espèce de donation , une fois
acceptée , est un véritable contrat, et que la forme des contrats se trou
vait déjà réglée par la loi du 2 5 ventôse , à laquelle il renvoie, en con
séquence , pour la forme dans laquelle doit être rédigée la donation.
Pourquoi , au contraire, le Code civil détermine - t - i l les formes aux
quelles il a voulu subordonner la validité des testamens ? C ’est que les
formes des testamens ne se trouvaient réglées ni par la loi du 2 5 ven
tôse , ni par aucune autre loi émanée du même législateur qui a suc
cessivement voulu tout régénérer.
20. L a loi dH 2 5 ventôse , avait statué , art. 1 0 : « Q ue les paren s, alli é s , soit du notaire , soit des parties contractantes , au„degré prohibé
par l'art. 8 , leurs clers et leurs serviteurs , ne pourraient être témoins. »
S i le législateur avait voulu que cette loi s’appliquât aux testamens
notariés , il n’aurait pas eu de nouvelle disposition à faire à cet égard
dans le Code civil ; et très-certainçment, il s’en serait référé à celles déjà
existantes.
M ais, au lieu de cela , il a expressément disposé, art. 9 7 5 : « que ni
» les légataires, à quelque titre qu’ils soient, ni leurs parens ou alliés ,
» jusqu’au 4 .' degré inclusivem ent, ni les clers des notaires par lesquels
» les actes seront reçus, ne pourront être pris pour témoins du testa» ment par acte public. »
E t remarquons bien que le Code civil ne porte aucune disposition de
cette nature , à 1 égard do la donation entre-vifs. Et pourquoi ! Nous l’a
vons déjà d it; c’est que cette donation est un con trat, et que la forme
des contrats se trouvait déjà fixée par la loi du 26 ventôse.
Cette loi v e u t , art. 9 , que les actes dont elle parle , puissent être
reçus par deux notaiies sans tém oins, ou par un notaire assisté de deux
témoins.
Mais le Code civil , art. 97 x , exige la présence de deux témoins ,
lorsque le testament par acte public est reçu par deux notaires, et la
présence de quatre témoins, lorsqu’il est reçu par un notaire seulement,
�</o >
( *7 )
A joutons, qu’à l’égard des actes réglés par la loi du 25 ventóse , les
témoins doivent être citoyens français, c’est à-dire, qu'ils doivent avoir
la jouissance des droits politiques; au lieu que pour être apte à être té
moin dans les testamens réglés par le Code civil , c'est assez qu’on ait
l’exercice des droits civils.
Ces différences furent t r è s - b i e n remarquées par le tribun Jaubert (de
la G iro nde) dans le rapport qu’il fit au T r ib u n a t , le 9 floréal an X I *
au nom d e l à section de législation , sur le projet de loi décrété le ï 3
du même mois , et dans lequel il s exprime en ces termes :
« Quelques observations sur les témoins testamentaires ; i . ° il suffit
» qu’ils jou issen t des droits civils ( à l’égard des testamens, art. 980 , du
» Code civil ) r tandis que pour les actes publics ordinaires ( réglés par
» la loi dix 25 ventôse ) , o ù , à la vérité il n’en faut que deux , il est in» dispensable qu’ils jouissent des droits politiques.
» 2 ° L e s légataires ne pourront être pris pour témoins dans un tes» tament par acte public. L e projet n’a pas dû répéter l ’exclusion pour
y le testament dont les dispositions sont secrètes. L ’ordonnance de 1 7 3 5 ,
* n’avait pas non plus interdit aux légataires, mêmes universels, de ser» vir de témoins dans les testamens mystiques.
» 3 .° L e projet dit aussi, que les clercs des notaires par lesquels les
;» testamens publics seront reçus, ne pourront être pris pour témoins.
» L e projet ne répété pas cetie exclusion pour les testamens mystiques.
y L a loi sur l'organisation du notariat, exclut absolument les clers des
» notaires.
» M ais cette loi générale ne peut être invoquée dans la m alilre des
» testam ens, pour lesquels une loi particulière règle tout ce qui est re la tif
> aux témoins. Il faut remarquer d ’ailleurs, que la prohibition ne cesse que
» pour l’acte de suscription , où la présence de six témoins est nécessaire. »
3 .° L e Co 'e c iv il, art. 9 7 1 et suiv. , règle spécialement avec la plus
grande précision, non seulement tout ce qui est relatif aux témoins tes
tamentaires , mais encore toutes les formes qui doivent être ultérieu
rement observées pour la validité des testamens.
D o n c, la loi générale sur l’organisation du notariat, est étrangère ou
inapplicable à tout ce qui concerne la forme des actes de dernière volonté.
4.0 L ’art, io o î , du Code civil porte : « L e s formalités auxquelles les
s> divers testamens sont assujettis par les dispositions de la présente sec» tion et de la précédente, doivent être observées à peine de nullité. »
Il est évident que cet article n’admet pas d ’autres nullités que celles
résultantes de l’inobservation des formes déterminées par le Code civil.
E t , par conséquent le Code civil doit seul être consulté pour la vali
dité ou l’invalidité d'un testament fait sous son Empire.
O r , le Code civil n’exige pas que le notaire fasse mention de sa si
gnature non plus que celles des tém oins, dans le testam ent, soit myslique , soit par acte public.
�( i8 )
A in si, un testament par acte public, fait depuis la promulgation du
Code civil, et réellement signé par le notaire et les témoins, serait incon
testablement valable, nonobstant le défaut de mention de leurs signatures.
E t nous avons vu que cette mention n’était pas non plus nécessaire dans
les testamens faits antérieurement à la loi du 25 ventôse.
Elle ne se trouve prescrite que par cette loi, à l ’égard dos actes sur les
quels elle dispose.
Mais n’est-il pas absurde de supposer que le législateur eut voulu
créer pour les testamens, qui se feraient dans le cours intervalle de
la promulgation de la loi du 25 ventóse, à la promulgation de la loi du
i 3 floréal suivant , une forme' particulière à laquelle ne devaient pas
être assujettis les testamens postérieurs , non plus que les testamens
antérieurs ?
N ’est-ce pas insulter à la sagesse et à la prévoyance du législateur que
de supposer qu'il ait voulu s’occuper des formes des testamens dans
une loi préparée et décrétée à une é p o q u e , où il avait déjà rédigé le
projet de loi, où se trouvaient spécialement réglées toutes les formes des
testamens, et qui devait incessamment faire partie du Code civil l
5 .° L a loi du 2 5 ventôse, porte avec elle la preuve matérielle qu’elle
11e s’occupe point de la forme des testamens , mais seulement de la
forme des contrats,
C ’est dans la section 2 , du tit. i . eT de cette loi , qu’il est question de
la forme des actes ; et, en e f f e t , cette section est intitulée : D e s actes ,
de leur fo rm e ; des minutes, des gro sses, expéditions et repertoires.
E h bien ! l’art. i . er de cette même section, qui est I’a n . 8 de la loi,
annonce déjà que le législateur ne va s’occuper que de la forme des con
trats : car déjà l’on y trouve le mot parties à côté du mot générique actes,
et l ’on sait qu’on ne peut figurer avec la qualification ou le caractère de
parties , que dans les actes où il s’agit dç contracter ou de former des
obligations réciproques.
Q u ’on lise ensuite les art. 1 0 , 1 1 , i 3 , 1 4 , 1 5 , 18 , 2 6 e t 3 o q u i rentrent
dans la même section : on y retrouvera et souvent répété , soit le mot
parties , soit le mot contractans.
Et les articles intermédiaires ne présentent d ’ailleurs rien de contraire
à la conséquence qui s’induit des articles que nous venons d’indiquer.
Sans doute , parmi les dispositions de la loi générale du 25 ventóse, il
en est qui , par leur nature et leur objet, peuvent s’appliquer aux testatnens; mais dans ces dispositions, il n’est nullement question de la forme
des actes considérés en soi.
Q u ’on reporte particulièrement son attention sur l’art. 14.
Il veut que les actes soient signes par les parties , les témoins et les
» notaires qui doivent en faire mention à la fin de l’acte. »
E t c’est précisément en vertu de cet article, que les héritiers naturels
de Je a n Lhoste prétendent faire annuller son testament.
�( *9
)
'
Mais cet article est évidemment inapplicable aux testamens , puisqu'il
ti’y est question que d’actes passés entre parties.
Q u ’on lise enfin l’art. 6 8 , il est conçu en ces termes :
« Tout acte fait en cçntravenlion aux dispositions contenues aux arti» d e s 6 , 8, 9 , i o , 1 4 , 2 0 , 52 , 6 4 , 6 5 , 66 et 67 est n u l , s'il n’est pas
3» revêtu de la signature de toutes les parties , et lorsque l ’acte sera re» vêtu de la signature de toutes les parties contractantes , il ne vaudra que
» comme écrit sous signature p rivée, sauf dans les deux cas, s’il y a lieu,
les dommages et intérêts contre le notaire contrevenant. »
C et article qui attache la peine de nullité à l’inobservation des dispo
sitions y mentionnees , ne peut certainement pas concerner la forme des
testamens, puisqu’il maintient comme actes sous signature p r iv é e , les
actes notariés qu'il rappelle , et qu’assurément , un testament par acte
public ne pourrait pas valoir comme acte sous signature p riv é e , ou comme
festament olographe.
E t i c i , il faut en dire autant des donations entre-vifs ; puisque l’ar
ticle 9 3 1 du Code civil , après avoir dit que tous actes portant donation
enlre-vifs , seront passés devant notaires dans la forme ordinaire des
contrats, ajoute indistinctement qu’il doit en rester minute , sous peine
de nullité , et qu'on ne pourrait pas prétendre qu’il restât minute d ’une
donation qui cesserait d’être considérée comme acte notarié,
De l’art. 68 de la loi du 25 ventôse , combiné avec l’art. 1 4 qu’il
ïappelle , il résulte qu'un acte notarié qui ne ferait pas mention de
la signature du notaire ou des notaires et des témoins , devrait être
déclaré n u l , sous les rapports d’acte notarié.
Mais que peuvent avoir de commun les art. 1 4 et 68 , avec la forme
des testamens , quand on voit qu’ils ne portent que sur les actes passés
entre parties contractantes, entre parties qui s’engagent, qui s’obligent
irrévocablement par des conventions ou des liens respectifs î
Cela n’e s t- il pas radicalement étranger à la forme des testamens en
général et particulièrement à la forme des testamens par acte p u b lic,
où le testateur parle et figure seul , et sans contradicteur , devant le
rédacteur et les témoins de ses intentions ; où il ne contracte p o in t ,
où il ne forme aucun lien obligatoire, où il ne fait que dicter une vo
lonté irrévocable à son gré.
Enfin , redisons - le encore, une loi spéciale qui fait partie du Code
civil , a fixé toutes les formes testamentaires , et a circonscrit dans
l’inobservation de ces formes, les nullités susceptibles d'être opposées
aux testamens.
C ’est donc dans cette loi spéciale, à l’égard des testamens faits depuis
sa promulgation , ou dans les lois spéciales anciennes à l'égard des tes
tamens antérieurs , et non pas dans la loi générale sur l ’organisation
du notariat, qu’il faut vérifier si un testament se trouve ou non rédigé
selon la loi.
�/,lû
*»•
(
20
)
Concluons que le dernier moyen de nullité allégué par les héri
tiers naturels de J e a n Lhoste , n’est pas plus solide que les trois
précédens.
Cette question, si la loi sur le notariat du 25 ventôse an X I , quant
aux formalités q u 'e lle prescrit pour les actes, était applicable aux testam ens, et si un testament était nul par le défaut de mention à la fin
de l’acte que le notaire a signé , a été jugée négativement par un arrêt
de la Cour d ’appel de Bruxelles , du 27 prairial an X I I . C et arrêt est
rapporté dans la jurisprudence du Code c iv il, tom. 2 , pag. 329 , et dans
les Annales du notariat, 1 8.e livraison, n .° du 1 .er fru ctid o r an X I I ,
pag. 4 3 1 . Il a été rendu dans la même espèce que celle discutée dans
la présente consultation , c ’est-à-dire , dans l’espece d ’un testament fait
dans l’intervale de la loi du 25 Ventôse an X I , sur le notariat, à celle
du 1 3 floréal sur les donations et les testamens.
Délibéré à Paris , le 7 février 18 0 6 , par nous anciens Jurisconsultes
Avocats en la Cour de cassation.
M A IL H E .
C H A B R O U D .
p a r tie
i
Au Puy
, D e l ' imprimerie
de
sig n é R o u b i n ,
J . B. L a
Com be.
1806.
I
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roubin, Jean-Pierre. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mailhe
Chabroud
Subject
The topic of the resource
testament nuncupatif
conflit de lois
code civil
rétroactivité de la loi
vices de forme
jurisprudence
droit romain
droit coutumier
droit écrit
doctrine
patois
signatures
notaires
témoins
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation. Le conseil soussigné qui a pris lecture d'un Mémoire à consulter pour le Sieur Jean-Pierre Roubin, et d'un extrait de testament y joint, est de l'avis qui suit.
Note manuscrite : « Voir arrêt au journal des audiences, 1809, p. 19. »
Table Godemel : Testament : 10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.B. La Combe (Au Puy)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
An 11-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1912
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Julien-Chapteuil (43200)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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Code civil
conflit de lois
doctrine
Droit coutumier
droit écrit
droit Romain
jurisprudence
notaires
nullité du testament
patois
rétroactivité de la loi
signatures
témoins
Testament nuncupatif
testaments
vices de forme
-
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7ac09658f8a50b982276f4b998986aba
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
POUR
J oseph
- R aymond - B énigne
,
F rançoise
et A l e x i s D E S A I G N A R D D E C H O U M O U R O U X , propriétaires, h abitans de la ville
d ’Ys s i ngeaux , i ntimés j
COUR
D ’A PP EL
C O N T R E
J
séant
,
M O N T E Y R E M A R D et
J a c q u e s- L o u is M ATH ON
son mari pro
priétaires , habitans du lieu du Bourg-Argental ,
appelans ;
u l ie
-A
n g é l i q u e
EN
,
,
P R É S E N C E
D u sieur G e o r g e s - F r a n ç o i s -A l e x i s D E L A -
,
R O C H E - N E G L Y D E C H A M B L A S pro
priétaire habitant du lieu de Chamblas, com
,
,
mune de Saint-Etienne-Larderol intimé.
P a r un acte sons seing p rivé , du 9 février 174 6 , enre
gistré le 10 octobre 1 7 53 , Catherine T r eveis et M arieM arthe T r e v eis sœurs, aïeule et tante de demoiselle M arieA
A RIOM.
�( Z )
.
.
* r'
M arthe-Françoise de Saign ard, demoiselle de Choum ouroux, donnèrent ordre à Pierre-Louis de Saignard de ^ o i^ -,
m ouroux de , pour et en leur n o m , donner et consti
tuer à demoiselle M arie-M artlie-Françoise 'de Saign ard,
sa fille , petite-fille et petite-nièce desdites daines T re v e is ,
dans le contrat de mariage qu’elle devoit contracter avec
FrançoispAm able de L a ro clie -N e g ly , seigneur de Cham b las, sa v o ir, de la part de Catherine T reveis , la somme
de io o o fr. pour être payée dans trois ans , à com pter
du jour dudit m ariage; et de la part de M arie-M artlie,
la somme de 3000 f r . , pour etre payée en trois payemens é g a u x , dont le prem ier devoit commencer un an
après la date dudit m ariage; et pour lesdites sommes de
1000 fr. et 3000 f r . , lesdites T reveis , chacune en ce
qui la concernoit , prom irent audit de Choum ouroux
de lui,Rembourser ou faire rem bourser icelles aux mêmes
te rm e s, attendu, l i t - o n dans l’acte, qu'U s'obligera de
les payer.
Quatre jours après , et le 13 du môme mois , M arieM artlie-Françoise Saignard de Choum ouroux contracta
m ariage avec François-A m able de L aroclie-N egly , sei
gneur de Chamblas. O n vo it dans le contrat que le sieur
de C houm ouroux et la dame B o n n a fo u x , son épouse ,
donnèrent et constituèrent à la future épouse , leur fille ,
une somme de 18000 fr. ; sa v oir, celle de 9000 fr. pour
droits paternels ; 2000 ir. du ch ef de la dame Bonna
foux ; 1000 fr. que le sieur C houm ouroux avoit ordre
de constituer à la future , du chef de Catherine T r e
veis, son aïeule m aternelle; 3000 fr. du chef de dame
M arthe T r e v e is , veuve P la n tie r, aussi de son ordre.
*1
\
.. *>l
�H'V
( 3)
C’est le payement de ces deux dernières sommes qui
a donné lieu à la contestation sur laquelle la cour a à
prononcer ; et il est inutile de rappeler ici d’oii provenoient ou devoient proven ir les autres 3000 fr. qui dé
voient parfaire la constitution totale de 18000 fr.
L e sieur de C h oum ouroux, tant de son chef que de celui
des dames T re v e is , prom it en son nom propre et p r iv é ,
et solidairem ent, de payer ladite constitution -, et à
compte d’icelle il fut par lui payé au sieur de C ham blas,
futur époux , au vu du notaire recevan t, lu somme de
4000 fr. O u t r e 2000fr. qui avoientétéconstitués àla future
ép o u se, dans le môme contrat de m ariage , par dem oi
selle M arie-A lexis Saignard de Cliazeaux, il restoit encore
à p a y e r, pour parfaire la constitution de 18000 fr. , une
somme de 12000 fr. qui fut stipulée payable en quatre
payemens égaux et annuels de 3000 fr. Suit ensuite
cette clause essentielle pour déterm iner l’origine des dif
férentes sommes formant la constitution totale: M o y en
nant laquelle susdite som m e de i i o o o f r . constituée à
ladite demoiselle ¿future épouse p a r ledit seigneur
de C houm ouroux et dame de B o n n a fo u x , ses père
et mère , elle a renoncé à tous ses droits paternels et
maternels , s a u f droit de succession , substitution , et
loyale échoite le cas arrivant.
L a môme année, et le 30 août 17 4 6 , Catherine T r e v e is ,
veuve de Georges Bonnafoux , au nom de laquelle le
sieur de Choum ouroux avoit constitué ù sa fille une
somme de 1000 fr. , fit son testam ent; entr’autres dispo
sitions , on y lit la confirmation du don qu’elle avoit fait
a sa p etite-fille. Cette confirmation est conçue en ces
A 2
�(4)
termes : P l u s , je confirme la donation que f a i j u i t e
à m adame M a rthe de S a i gnard de C h o u m o u ro u x ,
Jille ainée de M . de C houm ouroux et de dame C a th erine-Francoise B o n n a fo u x , m a jïlle , épouse de M . de
C h a m b la s, de la som m e de t o o o J'r.
Cette môme Catherine T reveis , veu ve B o n n afo u x,
avoit laissé de son mariage avec ledit Bonnafoux trois
filles; Catherine, qui contracta m ariage avec Jean-Gaspard
M onteyrem ard , représentée par J u lie-A n géliq u e M o n tcyrem ard et le sieur M a tlio n , appelans *, Françoise-H yacin th e, qui contracta mariage avec Louis de L a v a l , dont
les descendans ne figurent pas en cause d’appel -, et Cathe
rin e - F ran ço ise, qui épousa P ierre-L ou is Saignard de
C houm ouroux. D e ce mariage sont issus treize en fans,
n euf décédés sans p o stérité, et il n’en est pas question
dans la cause. M arth e, fille aînée, provenue dudit m ariage,
est aussi décédée le 4 juin 1756 : c’est celle q u i, dans son
contrat de m ariage avec le sieur de C ham blas, avoit été
gratifiée par les sœurs T reveis d’une somme de 1000 fr.
et de celle de 3000 fr. ; elle est représentée en la cause
par G eorges-François-A lexis L aroch e-N egly qui y figure
comme intim é. Les autres trois enfans existans s o n t,
Joseph-R aym ond-B énigne, Françoise et Alexis-Francoise
Saignard-Choum ouroux -, ils figurent en cause d’a p p e l,
comme intimés , contre L ouis M athon et son épouse ,
sur la demande en garantie qu’ ils ont exercée contr’eux.
L es trois filles de Catherine T r e v e is , veuve Bonnafoux ,
C ath erin e, F ran ço ise-H yacin th e et Catherinc-Françoise
Bonnafoux , furent instituées héritières par égale p or
tio n , par le testament de leur m ère ; et en exécution de
�( 5)
cc meme testament le partage fut effectué en trois lots
égaux , en 1763 , avec promesse de la part de chacune
d’elles de contribuer, pour un tiei’s au- payement des
dettes et legs dont la succession étoit grevée.
Il n’y avoit encore aucune disposition de la part de
M arthe T reveis , veu ve Plantier , tante commune y le
4 juin i y 56 , époque du décès de M arie-M arthe Saignard
de Chomnoui’o u x , épouse du sieur Ghamblas ■
, en sorte
qu’outre les 3000 fr. que
grand’tante lui avoit donnés
dans son contrat de m ariage, elle avoit à recueillir du
chef de Catherine-Françoise Bonnafoux , sa m è r e , con
curremment avec ses frères et sœurs-, le tiers dans sa suc-'
cession alors ab intestat: mais bientôt après, et le 31
adût 1 7 5 7 , ladite M arthe T reveis fit un testament par
lequel elle nomma et institua pour son héritière uni
verselle dame Catherine B o n n afo u x, sa n iè ce , veuve de
Gaspard M onteyrem ard, à la charge par elle de payer ses
dettes et legs. E lle décéda dans ces dispositions, le 17
janvier 1769 , laissant conséquemment à son héritière
instituée la charge d’acquitter les 3000 fr. promis par son
ordre à M arie-M arth e B o n n afo u x, dans son contrat de
mariage du 13 février 1746.
Peu de jours après sa m ort, e tle 6 février de l ’année 1769,
Catherine B o n n a fo u x , veuve M onteyrem ard , lit con
trôler le testament susdaté ; et comparaissant au bureau
du receveur du centième denier en qualité d’héritière
de dame M arthe T reveis , veuve Plantier , suivant son
testament du 31 août 1767 , elle fit sa déclaration sur
la consistance des immeubles dépendans de ladite suc
cession , qu’elle déclara consister seulement en un champ
sis à E x p a ly , de valeur de 800 fr.
�*0%
( 6 )
Cette qualité prise par la veuve M onteyrem ard, jointe à
une foule d’autres circonstances également déterm inantes,
servira à apprécier les moyens employés par les appelans,
pour se faire considérer .seulement comme héritiers béné
ficiaires de la veuve Planticr.
L ’époque fixée par le contrat de mariage de 1746 ,
pour le payement de la somme de 14000 fr. restée due
pour le payement de la dot de l ’épouse du sieur L aroch eNegly-Cham blns, étoit déjà passée; mais des circonstances
particulières déterm inèrent le sieur de Chamblas et son
épouse à ne pas en exiger le payement.
T o u s les enfans de Clioum ouroux étoient célibataires;
et l’espoir de réunir un jour l’entière succession C h oum ouroux fit suspendre jusqu’en l ’an 5 l ’action des enfans
L aroclie-N egly.
M ais les mêmes considérations qui suspendoient l’exer
cice de l’action de la fam ille C ham blas, n’em pèclièrent
p'as la dame C lioum ouroux et son mari de rappeler
Catherine Bonnafoux , veuve M onteyrem ard , à l ’exé
cution de ce à quoi s’étoit obligée M arthe B on n afou x,
sa tante , et qui l’avoit instituée son héritière. L a veu ve
P la n tie r, comme on l’a déjà v u , avoit chargé le sieur
de Clioumouroux; de constituer pour elle à sa fille , lors
de son mariage avec le sieur Chamblas , une somme
de 3000 IV. qu’elle de voit lui rembourser dans trois ans.
E lle 11’avoit pas com pté celle somme de son v iv a n t; et
quoique ledit Clioum ouroux n’eût pas payé cette somme
à sa fille qui ne l’avoit pas encore dem andée, il n’eu
rappela pns moins à la dame veuve M onteyrem ard l’obli
gation où elle é to it, com m e héritière de sa tante, d’ac-
�( 7 ) .....................................
quitter les 3000 fr. qu’ il a voit constitués à sa fille en
vertu des ordres qu’il en avoit reçus : de là les lettres
en réponses qui form ent la cote 6 de la production prin
cipale des sieur et dames C lioum ouroux.
Dans une prem ière , Catherine Bonnafoux , veuve
M on teyrem ard , offre à madame de Clioum ouroux , sa
sœur , d’en passer par l’arbitrage de celui qu’elle choisira
pour leurs intérêts *, et ces intérêts n’avoient d’autre objet
que le payement des 3000 fr.
Dans une seconde, qui suppose la demande en paye
ment de cette somme m otivée sur l’acte sous seing p rivé
dont on a rapporté les dispositions, elle demande à sa
sœur une copie des billets souscrits par la veu ve P la n tie r,
sa tanle , et un état de tout ce qui pou voit être dû à la
maison C lioum ouroux par ladite Plantier. Cette lettre
est du 13 mars 1760.
D ix ans a p rès, manifestation des mêmes intentions de
la part de C laude-M ichel M on teyrem ard, fils et h éritier
de ladite Catherine Bonnafoux.
P ar une troisième le ttre , qui est présum ée une réponse
à une réitération de demande de la part de la maison
G houm ouroux , il olfre à sa tante C lio u m o u ro u x, par la
m édiation d’ un parent et ami co m m u n , le délaissement
d’ une vigne pour entier payement de ce qu’il peut devoir
à la maison C lioum ouroux , du ch ef de la veuve P lan
tier , en parlant toutefois, pour faire accepter ses offres,
d’un projet de répudiation ; répudiation qu’il 11’étoit plus
à temps de faire.
P ar une quatrième lettre écrite à la dame Clioum ou
ro u x , sa tante , le 17 septembre 17 6 9 , il prétexte des
�c 8 ')
embarras de fa m ille, afin d’obtenir d’elle encore quelque
temps pour parler de leurs affaires.
Enfin , par une dernière lettre qui est datée de 17 7 0 ,
il cherche à intéresser la commisération de sa tante; il
prétend qu’il ne retirera pas ou n’a pas retiré de la suc
cession Plantier la somme de 3000 fr. qu’on lui dem ande;
il dit que sa succession 11’a été acceptée par sa m ère que
sous bénéfice d’inventaire ; qu’ il y auroit trop à perdre
de prendre la qualité d’héritier pur et simple , qualité
cependant que sa m ère et lui avoient prise ; et il l’invite
à avoir pitié de lui et de sa misérable situation.
T elles é to ie n t, dans ces temps plus reculés , les inten
tions des auteurs des appelans. lia dette fut toujours
par eux reconnue ; et la production des lettres qu’ils
écrivirentalors va bientôt contraster avecle plandedéfense
des mariés M onteyrem ard et M athon , d’une manière qui
ne fait honneur ni à leur lionne foi ni à leur délicatesse.
L e mariage de J o se p h -R a y m o n d -B én ig n e Saignard
de Choiim ouroux avec la dame de C o lo n n e , dont elle
a eu un enfant encore existan t, ayant absolument fait
évanouir l’espoir que les enfans Laroche-N egly avoient
eu de recueillir l’entière succession C lio u m o u ro u x , ces
derniers manifestèrent aux frères et sœurs Choum ourou x l ' i n t e n t i o n où ils étoient de les actionner en paye
m ent de la somme de 3300 fr. d’une p a r t , et de celle
de io o o francs d’autre part, que leur père s’étoit obligé de
donner à leur m ère pour et au nom de Catherine T rev e is , veuve Bonnafoux , et de M arthe sa sœ ur, veuve
Plantier.
Les frères et soeurs C lio u m o u ro u x , menacés de pour
suites
�suites judiciaires , voyant que les invitations verbales et
par écrit qu’ils avoient faites aux M onteyrem ard n’avoient
produit d’autre eiFet que de conserver leur action au
b e so in , se décidèrent enfin à em ployer d’autres voies
pour forcer Ju lie-A n g éliq u e M onteyremard , et Louis
M atlion son m a ri, à leur payer cette somme de 4000 fr. ;
et par l’exploit des 6 et 18 prairial an 7 , ils firent
saisir et arrêter entre les mains d’un nom m e B on n eville,
débiteur des appclans, tout ce qu’il pouvoit leur devoir:
mais les appclans avoient eu la précaution de se faire
sousem-e par ledit Bonneville un billet payable au p o r
teur ; ils en ont été payés ; et ces deux saisies-arrets n’ont
conséquemment produit aucun effet.
Les menaces des enfans L aroch e-N egly ne tardèrent
pas à s’effectuer; et le 2 5 prairial an 7 , F ran çois-A lexis,
faisant tant pour lu i que pour ses frères et sœurs et
b e lle s -s œ u r , cita en conciliation le sieur C houm ouro u x et ses deux sœm*s en payement de la somme de
18000 f r . , montant de la constitution de dot de sa mère.
D e u x jours ap rès, et le 27 p r a ir ia l, le sieur de C lioum ouroux et ses deux sœurs citèrent aussi en conciliation
les mariés M atlion et M onteyrem ard , et le sieur L ou is
de L a va l-d ’A rle m p d e , h éritier pour un tiers par repré
sentation de Françoise-H yacinthe B on n afoux, sa grandm ère, de Catherine T r e v e is , femme B onnafoux, bisaïeule
des parties , à l’eifct de les indemniser ou rem bourser
chacun en droit soi de la somme do 4000 fr. qui étoit
à leur c h a rg e , aux offres de payer le surplus de la
dot demandée par les enfans Laroche-N egly.
Les parties com parurent au bureau de paix le 27
B
�(-1°)
messidor an 7 ; et ce ne fut pas sans étonnement que
les frères et sœurs Choum ouroux virent com paraître un
nomm é Biaise B o rt, fondé de pou voir des mariés M allion
et M o n teyrem ard , à qui ils curent l'im pudeur de faire
déclarer pour eux que l’action des frères et sœurs Glioum ouroux étoit n o n -receva b le, parce qu’elle étoit pres
crite et m al fondée , parce que leur créance n’étoit pas
établie , et parce qu’ils n’en avoient jamais entendu
p a rle r: q u a n ta u sieur de L a v a l, il ne com parut pas.
L e procès verbal de non-conciliation fut suivi d’une
assignation au tribunal civil de la Ilau te-L o ire, à la requête
du sieur Choum ouroux et de ses sœurs , donnée tant
aux mariés M atlion qu’au sieur de L a v a l, le 11 ther
m idor suivant.
U n prem ier jugement joignit la demande en garantie
à la demande principale qui avoit été form ée par les
enfans L aroch e-N egly , et accorda à ces derniers 1111e
provision de 3000 fr. contre les frères et sœurs C h ou
m ouroux : cette provision a été payée.
L a demande principale des enfans L a r o c h e -N e g ty ,
outre la demande en payement de 18000 fr. pour la cons
titution de dot faite à leur m ère , avoit encore pour
objet le partage de la succession C h o u m o u ro u x, pour
leur en être délaissée, du ch ef de leur m ère, la portion
qu’elle y amendoit du ch ef de ses irères et sœurs décédés,
oncles et tantes des demandeurs. Sur celle dem ande, des
arbitres avoient été nommés en l’an
5 entre toutes les
parties intéressées ; mais les arbitres 11’avoient pas encore
prononcé.
L es parties en étant venues à l’au d ien ce, au tribunal
�( ii )
de la H autc-I.oire , sur la demande en partage , sur la
demande en payement de la d o t, et sur la demande en
garantie , il y in te rv in t, le 6 germ inal au 8 , un juge
ment q u i, sur la demande en partage , ordonna que
les arbitres respectivement nommés procéderoient ,
dans le délai d’ une décade , au partage des successions
dont il étoit question ; et avant faire droit sur la
demande en payement de la somme de 4000 fr. cons
tituée à la dame Laroche-Negly , du ch ef de Catherine
et M arthe Trevcis , ordonna , sur la demande des mariés
M atlion et M onteyrem ard, qui avoient eu la mauvaise
foi de désavouer la signature desdites T reveis apposée
au sous seing p rivé du 9 janvier 17 4 6 , que par des
experts-écrivains dont les parties conviendroient dans
le délai d’une décade , il seroit procédé à l ’aveu et reconnoissance, par comparaison d’écritu re, de leurs signa
tures.
Les parties n’ayant pas exécuté la prem ière disposi
tion de ce jugem ent, et les arbitres n’ayant pas. prononcé ,
le môme trib u n al, par un second jugement du 24 prai
rial an 8 , ordonna le partage des successions des frères
et sœurs Chouniouroux , décédés, pour en être attribuée
aux en fans Laroche-N egly la portion qu’ ils y am endoient;
il condamna de plus les frères et sœurs C h oum ou roux
ù .payer aux L a r o c h e -N e g ly la somme de 14000 fr.
restée due sur la constitution faite à leur m è re , sauf à
eux ù exercer leur garantie contre les débiteurs princi
paux de partie de cette même dette. L e jugem ent a été
e x é cu té , le partage a été fait; sur les 14000 fr. pour
final payement de la d o t , ic o o o fr. ont été payés par les
B 2
�-M
C 12 )
frères et sœurs C h o u m o u ro u x, en sorte que toute la
contestation, par suite de l’exécution de ce ju g em en t,
se borne à savoir qui doit payer les 4000 fr. du ch ef des
sœurs T reveis : aussi n’est-ce que pour la seconde dis
position de ce jugem ent que les parties ont contesté dans
la suite.
E n exécution de cette dernière disposition du juge
ment , des experts furent en effet nommés par-devant
le tribunal civ il d’Yssingeaux , q u i , après la nouvelle
organisation ju d icia ire, remplaça le tribunal civil du
département. Chainpanhac et P o u z o l, experts nomm és,
convinrent unanimement dans leur rapport du 30 pluvise an 9 , que les signatures apposées à l’acte sous seing
p rivé étoient vraim ent celles des sœurs Catherine et
M arthe Treveis.
L e 8 therm idor an 9 , les appelans firent signifier un
m ém oire dans le q u e l, sans contester les qualités des par
ties , et sans exciper d’aucun m oyen de nullité contre la
procédure , ils se bornèrent à soutenir que l’action des
frères et sœurs C houm ouroux étoit prescrite; dans tous
les c a s , qu’ils ne pouvoient être condamnés qu’en qua
lité d’héritiers bénéficaires ; et ils insistèrent ensuite sur
la nullité de la saisie faite à leur p ré ju d ice , saisie q u i ,
comme on l’a observé , n’em pécha pas la par lie saisie de
payer : ce qui rend ce dernier ch ef de conclusion sans
objet.
E n cetétat, et après plusieurs autres actes respectivement
signifiés , les parties en vinrent à l’audience du 14 fruc
tidor an 9 , jour auquel il intervint au même tribunal un
jugement qui a appointé les parties en d ro it, écrire et
produire.
�( i3 )
Ce fut donc sur productions respectives de la part
des appelans , des sieurs Choum ouroux et des enfans
Laroche-N egly , qu’il fut rendu sur rapport au tribunal
d’ Yssingeaux, le i5 floréal an 10 , contradictoirem ent
entre toutes les parties qui sont en cause sur a p p e l, et
par défaut contre le sieur de L aval qui a acquiescé aux
condamnations prononcées contre lui , le jugem ent sur
le m érite duquel la cour a à prononcer. Ce jugem ent
est également sage dans ses motifs et dans son dispo
sitif. Les motifs ont déjà été transcrits tout ail lon g dans
le m ém oire im prim é des appelans ; on se bornera à en
rappeler le dispositif ; il est ainsi conçu :
« L e tribunal, disant droit aux conclusions principales
«
«
«
«
«
prises par les frères, sœurs et b e lle -sœ u r L aroch eN e g ly , sans avoir égard à celles des frères et sœurs
C houm ouroux, non plus qu’à celles des mariés M atlion
et M onteyrem ard -, vidant l’interlocutoire porté par
le jugement du 6 germ inal an 8 , hom ologue la re-
«
«
«
k
«
lation rendue par les experts C ham panliac-V illeneuve
et P o u z o l, les 7 et 8 pluviôse an 9 ; en conséquence,
déclare la procuration p riv ée , passée le 9 février 1746
par Catherine et M arie-M artlie T reveis sœurs, en faveur de Pierre-Louis Saignard-Choum ouroux , avouée
« et reconnue de conform ité à l’édit de 1684-, e t, saus
« avoir égard aux üns de non-recevoir opposées par les
« mariés M athon et M onteyrem ard , desquelles elles de« meurent dém ises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Choum ouroux à faire payement aux frères, sœurs
« et belle -sœur L a ro ch e-N egly, de la somme do 3666 liv.
« 13 sous 4 deniers, pour reste de la dot constituée à
�«
«
«
«
«
«
«
«
( 14 )
M arthe Saign ard -C h ou m ou rou x leur m è re , lors de
son contrat de mariage avec A m able L aroch e-N egly,
du 13 février 17 4 6 , et ce avec les intérêts encourus,
savoir, de la somme de 666 livres 13 sous 4 deniers,
depuis le 14 février 1749; de la somme de 1000 francs,
depuis le 14 février 174 7 ; d’autre somme de 1000 fr .,
depuis le 14 février 1 7 4 8 ; et enfin , de la somme
de 1000 francs, depuis le 14 février 1749; sous toutes
« les déductions et distractions de droit ; condamne les
« frères et sœurs Choum ouroux aux entiers dépens envers
cc les L aroch e-N egly. Comm e aussi disant droit aux con« clusions prises par les frères et sœurs C h o u m o u ro u x,
« demeurant les instances jointes, sans avoir égard à la
« demande en m ain-levée provisoire et définitive des ban« nim ens mis au préjudice des mariés M athon et M on« teyrcm ard , entre les mains du sieur B onneville , a con
te
«
«
«
damné et condamne le sieur d’A r le m p d e , et les mariés
M athon et M onteyrem ard , en leur qualité de cohéritiers de Catherine T reveis leur bisaïeule, à relever et
garantir conjointement les C h oum ouroux , pour lu
« somme de 666 livres 13 sous 4 deniers, dont la con« damnation se trouve prononcée contr’e u x , en faveur des
« L a ro ch e -N e g ly , et ce avec les intérêts depuis le 14 fé« vrier 17 4 9 , sous toutes déductions et distractions de
« d ro it; et , sans avoir égard aux conclusions subsidiai« res et principales prises p-ir les mariés M athon et M011« tevrem ard, dont les a dém is, les a condamnés et con« dam ne, en leur qualité de successeurs à Catherine B011« n afouv. héritière de M arie-M arlh e T r e v e is , à relever
« et garantir les C houm ouroux de lu condamnation con-
�( i5 )
tr’eux prononcée de la somme de 3000 fran cs, et ce
« avec les intérêts depuis les époques fixées et adjugées
« aux L a ro ch e-N eg ly , et sous les mêmes déductions et
« distractions ; a condamné conjointem ent les mariés M a
te thon et M onteyrem ard, et d’A rlem p d o , ù un tiers des
« dépens, tant de la demande principale que de celle en
« garantie, non compris les frais de la vérification des
« signatures des sœurs T re v e is , ensemble le rapport des
« exp erts, lesquels dépens demeurent à la charge des
« mariés M ath on , ensemble les autres deux tiers des d é-
k
« p e n s, ainsi que les deux tiei’s du coût du ju g em e n t,
« l’autre tiers devant être supporté conjointem ent par les
>« M athon et d’A rlem pde. »
C ’est de ce jugement dont la dame M allion et son
mari ont interjeté appel. E11 prem ière instance 011 ne
s’etoit occupé que du fond de l ’affaire , et les appelans
ne s’étoient pas imaginés p ou voir arguer de nullité toute la
procédure tenue par les frères et sœurs Choum ourpux à
Yssingeaux. M a is, plus pénétrans en cause d’appel , ils
ont produit contre toute la pi-océdure une foule de nul
lité s , q u i, si elles eussent réellem ent existé , nuroient
-cté couvertes .par la défense an fond devant les p re•mieis juges. Les exploits introductifs d e -l’instance , et
tous les actes de la. p ro cé d u re , ont été par eux argués
de nullité , parce qu’ils ne contiennent pas les prénom s
et les qualités des parties , parce qu’ils 11e sont pas
libellés , et parce que le sieur C houm ouroux et le sieuv
Chamblas ont form é leur demande , et poursuivi l’ ins
tance comme procureurs fondés de leurs frères et
sœurs.
�( i6 )
Les frci’es et sœurs C houm ouroux ont suffisamment
répondu à ces moyens de nullité dans leur écritu re;
et les appelans., dans leur m ém oire im p rim é , semblent
eux-m èm esfaire justice de semblables m oyens, en ne les
rappelant que par form e dénonciation et sans y insister.
V enons donc avec eux à la discussion du fond ; e t ,
pour les suivre dans leur plan de défense , examinons
successivement les trois propositions qu’ils ont fait dériver
de l ’exposé des faits et de la procédure.
P r e m iè r e proposition d isc u té e p a r les a p p e l a i s .
L a donation portée au con trat de mariage de 1746
est-elle obligatoire p o u r M a rie-M a rth e T reçeis ou
les appelans q u i la représentent ? A -t-o n pu f o r m e r
une action c o n tr e u x p o u r cet o b je ts
Cette prem ière proposition ne contient pas à beaucoup
près la question à ju g e r; elle n’a jamais été proposée ni
discutée dans le cours de l ’instance , soit en cause prin
cipale , soit dans les écritures faites en a p p e l, jusqu’à la
signification du m ém oire qui la contient. E lle supposeroit que, d’après le contrat de m ariage du 13 février 17 4 6 ,
les eafin s Laroche - N egly auroient form é une action
directe contre les appelans ; et son examen ne tendroit
qu’à discuter la question de savoir si , en vertu de la
clause insérée au contrat de m ariage de M arthe C hou
m ouroux avec le sieur de L a r o c h e - N e g ly , ceux-ci ou
leurs héritiers auroient à exercer une action directe contre
les mariés M atlion et M onteyreinard. C ’est en elï'et sous
ce
�. ( 17 )
ce point de vue qu’elle est discutée dans le m ém oire
signifié •, et cette discussion, sur laquelle on s’est com plai
samment appesanti , sort absolument de la question à
juger. Il n’y a p a s, dans l’espèce , d’action directe de la
part des L aroclie-N egly contre les appelans : ce n est
pas aux appelans que les L a ro clie -N e g ly ont demandé
les 4000 fr. ; il n’y avoit rien de douteux entr’eux et
le sieur de C lio u m o u ro u x , père de la dame LaroclieN egly. L e sieur Clioumouroux lu i constitue une dot ,
tant de son chef que par l’ordre des dames T re v e is, veuves
Plantier et Bonnafoux ; il p r o m e t, tant de son ch ef que
de celui des dames T re v e is, en vertu de la procuration
desquelles il a g it , de payer le montant de la constitution
qu’ il fait à sa fille : rien d’incertain dans cette clause;
l ’exécution de cette obligation ne dépend pas de causes
étrangères : peu im porte que la procuration soit ou non
annexée au contrat de m ariage, pour donner aux futurs
l ’assurance que cette constitution totale leur sera payée.
Cette clause , dans tous les c a s, doit produire tout son
eiîet respectivement à eux ; elle ne peut pas devenir inu
tile par le refus que fèroient les dames T rev eis de
ratifier les ordres ou procuration par elles donnés. Q ue
l’ordre fût révoqué ou non , que l’action résultante de
cet ordre fût ratifiée ou non ; dans ces deux cas point
d’ incertitude de la part des contractons, leurs droits n’en
sont pas moins assurés : l’obligation personnellem ent
con tractée, et solidairement en l’une et l’autre q u a lité ,
en son nom p erso n n el, et com m e ayant ordre de la
part de ses tantes , par le sieur Clioum ouroux , leur
assuroit toujours l’exécution des conventions m alriinoC
�( 18 )
niales. E t en effet, les enfans L a ro ch e-N eg ly , sans s’oc
cuper des dames T reveis , n’ont vu que le sieur C h o u m ouroux com m e seul obligé respectivement à eux ; ils
n’ont dirigé leur action que contre ses héritiers , et ils
ont obtenu contr’eux tout ce qu’ils auroient pu obtenir
contre lui-m êm e , le payement de l’entière constitution ,
sauf à eux à faire discuter la question de garantie avec
les appelans.
C ’est cette seule question de garantie qui a été, devant
les prem iers ju g e s , et qui est encore aujourd’hui l’objet
de la contestation qui divise les parties ; et sans s’occuper
de l’arrêt rapporté par M . L ép in e de G r a in v ille , arrêt
qu’il est inutile de v é r ifie r , p u isq u e, dans aucun cas,
il ne sauroit s’appliquer à l’espèce sur laquelle la cour
a à p ro n o n c e r, au lieu de la question proposée , nous
en poserons une autre qui dérive plus naturellement de
l’exposé de toute la procédure.
P r e m i è r e
Le
q u e s t i o n
a
j u g e r
sous seing -privé souscrit p a r les
.
deux sœ urs
Treveis , le 9 f é v r ie r 1 7 4 6 , étoit-il obligatoire p o u r
elles ?
P ar ce sous seing p r iv é , les deux sœurs Catherine et
M arie - M arthe T reveis chargent le sieur Choum ouro u x
de constituer à sa fille , dans son contint de
m ariage arrêté avec le sieur de Laroche-N egly , l’une une
somme de 1000 fr. , et 1’autre une somme de 3000 fr. ;
les 3000 fr. payables en trois termes annuels et égau x,
�S\
Jté
( 19 )
dont le prem ier devoit échoir un an après le m ariage:
elles s’obligent à lui rem bourser ou faire rem bourser lesdites sommes aùx mêmes term es, attendu q i ï i l s obligera
de les payer.
Cette procuration est aujourd’h u i reconnue et v eriflée,
elle doit donc obliger les dames T reveis ou leurs héritiers,
si réellem ent le sieur de Choum ouroux a constitué à.
sa fille cette somme •, or , il est incontestable qu’en effet,
lors du contrat de mariage de sa fille, il lu i a constitué
pour ses deux tantes cette somme. Il n’a pas, il est v ra i,
relaté dans l’acte la procuration sous seing p rivé’ en vertu
de laquelle il agissoit, parce qu’alors elle n’étoit pas sou
mise à la form alité de l’enregistrement ; mais il a textuel
lement déclaré que c’étoit par l’ordre des damés T reveis
qu’il constituoit ¿t sa fille cette somme de 4000 fr. faisant
partie d’une constitution plus considérable. A u surplus,
nanti de la procuration qui lu i assuroit le rem bourse
ment de ce qu’il auroit avan cé, il en a fait son affaire
personnelle relativem ent aux deux contractans, à qui il
devoit être indifférent alors qu’il y eût procuration, quant
à ce , de la part des sœurs Treveis.
L e sieur Choum ouroux ayant rem pli les intentions de
ses tantes , et s’étant engagé personnellem ent ;\ payer
pour elles la somme de 4000 f r ., maintenant que ses
enfans sont condamnés à payer cette somme com m e ses
h é ritie rs, leur garantie contre les héritiers des dames
T reveis est incontestable ; la promesse de rem bourser
subsiste dans sa force , et elle est obligatoire pour eux.
L e seul moyen apparent de p ou voir la contester seroit
de dire que cette somme de 4000 f r . , comme le surplus
C 2
�1L
C 2° )
de la constitution , a été faite par le père de son ch ef:
mais la lettre de l’acte écarte cette supposition ; il y dit
que c’est par l’ordre des dames T reveis. Il y a plus ,
c’étoit une chose reconnue par toutes les. parties p ré
sentes au contrat de m ariage , et notamment par les
contractans ; car on lit dans le m êm e acte que la future
ép o u se, m oyennant îa susdite somme de n o o o fr. à
elle constituée par ses père et m è r e , renonce à tout
droit paternel et m aternel ; elle reconnoit donc qu’il
n’y avoit de constitution du ch ef de ses pèi’e et m ère
que p o u r une somme de i io o o fr. ; le surplus , pour par
faire celle de 18000 f r . , n’étoit donc p a s, d’après la science
certaine de la fu tu re , constitué par le père et la m ère de
leu r chef j les 4000 fr. n’étoient donc pas donnés et consti
tués par le père de son c h e f, parce qu’alors la constitution
par lui faite, au lieu d ’être de 11000 f r . , auroit été de
18000 fr ., ou tout au moins de iô o o o fr.
L e système des adversaires, qui tend à soutenir que
la procuration est postérieure au contrat de m a ria g e,
est d’abord im aginé sans aucun intérêt *, car enfin , dans
cette hypothèse , l’autorisation , la procuration , ou , si
l’on v e u t, la ratification de ce qui auroit été fait par le
sieur C lioum ouroux , quoique d’une date« postérieure
au contrat de m ariage, n’en seroit pas moins obliga
toire pour les deux sœurs T reveis. M ais il y a p lu s,
ce système ne peut se soutenir; la procuration n’a pas été
relatée , parce qu’elle n’étoit pas encore contrôlée : toutes
les présom ptions tendent à détruire ce système ridicule.
Quand on n’a pas un o rd re, et un ordre par écrit, pour
constituer une somme aussi considérable, on 11’énonce pas
�f a
O O
r
.
,
dans un acte si solennel, et en présence de deux familles
réu n ies, que c’est par ordre de tierces personnes que
l’on constitue telle ou telle -autre- somme en dot:. Il y a
p lu s , les intimés ne sont pas réduits à invoquer de
simples présomptions ; ils trouvent dans deux actes la
preuve par écrit de l’antériorité de la procuration au
contrat de mariage. Catherine T réveis , veu ve Bonnafoux , dans son testament du 30 août 1746 , confirm e
la donation par elle faite ¿1 la dame L aroch e - N egly
d’une somme de 1000 fr. ; il n’y :a pas d’autre donation
-
que la constitution énoncée au contrat de mariage. A ù
contrat de m ariage, ce n’est pas Catherine T reveis qui
donne et co n stitu e, c’est le sieur C h oum ouroux qui
donne et constitue pour elle ; il faut donc une manifes
tation de sa volon té avant le contrat de m ariage : cette
manifestation se trouve dans la procuration. L ’acte sous
seing p rivé est donc antérieur au contrat de m ariage :
et il en est de la procuration de M arthe T reveis , veu ve
P la n tier, comme de celle de Catherine sa sœur-, le m êm e
acte sous seing privé contient les deux procurations.
E n second lieu , on trouve encore la preuve de cette
antériorité dans le contexte même de la procuration. L es
deux sœurs s’obligent à rem bourser à leur neveu les
deux som m es, celle de 1000 fr. et celle de 3000 f r . ,
attendu qu il s obligera de les payer. L e sieur C h ou
m ouroux , lors de la p ro cu ratio n , ne s’étoit donc pas
encore obligé *, il ne s’est obligé que par le contrat de
mariage-, donc le contrat de m ariage est postérieur à
la procuration. Celte conséquence , n’en déplaise aux
appeluns , est un peu plus juste que celle qu’ ils ont tirée
�( 2 2 )
de la même clause dans leur m ém oire im p rim é, page 20.
L a preuve , disent-ils , que cette prétendue procuration
est postérieure au contrat de mariage , résulte des
term es dans lesquels elle est conçue ; il J u i t obliger
les constituantes à lu i rem bourser les som m es , attendu
q u 'il s'obligera de les payer. Les appelans et les intimés
partent du même principe; ils en tirent une conséquence
opposée : la cour pèsera dans sa sagesse quelle est celle
qui est la plus juste,
<
M ais pourquoi les appelans s’épuisent-ils en de vains
efforts pour contester une garantie qu’ils ont eux-m êm es
form ellem ent reconnue? T e l est en général l’em pire de
la vérité sur ceux q u i , mentant à leur conscience j cherclient à s’aveugler sur son existence ; elle përee souvent
au m ilieu même des désaveux de ses détracteurs ; et c’est
ce dont les appelans nous ont fourni la preuve dans
leur écriture et leur m ém oire en cause d’appel. T o u t
en contestant d’abord l’existen ce, et ensuite la validité
de l’obligation contractée par la procuration sous seing
p rivé du 9 février 17 4 6 , ils ne peuvent soutenir jusqu’à
la fin un désaveu et une résistence aussi déloyale ; ils
reconnoissent l’un et l’autre, et il leur échappe des aveux
qui seuls suliiroient pour détruire le plan de défense
qu’ ils ont adopté. A u dernier rôle de leurs griefs signi
fiés le 18 therm idor an j i , ils reconnoissent que la
demande principale des enfans Laroche^Ncgly a pour
objet la condamnation d’une somme de 18000 fr. à lu
charge des héritiers Choum ouroux., ot que la demande
eu garantie de çes derniers a pour •objet.le rem bourse
ment de 4009 fr. , dont 3333 f r . sont ¿1 leur charge.
�( 23 )
N ’est-ce pas convenir de'la m anière la plus form elle qüe
la procuration sous seing p riv é est vraim ent obligatoire
pour eux ? i N ’est-ce pas d étru ire1tout ce qu’ ils avoient
déjà dit et écrit pour contester la garantie ? N ’est-ce pas
reconnoitre qu’ilsson t vrahnent débiteurs de cette somme
envers les héritiers C houm ouroux ? ........
Dans leur m ém oire signifié en iorm e de salvation, on
vo it encoreile même aveu , sinon d’une m aniéré bien ex
presse, au moins d’une manière im plicite. Dans les questions
par eux p o s é e s e t dans la suite de la discussion de ces
mêmes questions, ils s’occupent'uniquem ent de l’obliga
tion que pouvoit avoir contractée M arie-M arth e T r e veis ; ils ne parlent plus de celle contractée par sa sœur*
Catherine ; ils passent en conséquence condam nation ën f
ce qui concerne cette dernière : aucune réclam ation ,
quant à ce ; tous leurs griefs portent uniquem ent sur les
3000 fr. promis par la veu ve Plantier. M ais en ne par
lant plus de l’obligation contractée par Catherine pour
une somme de 1000 f r . , n’est-ce pas reconnoitre la
légitim ité de celle de 3000 fr. souscrite par M arieM arthe sa sœur ? L ’une et l’autre ont la m êm e causé","
la même o rig in e , la même date ; elles sont l’ une et
l ’autre souscrite dans le m ême acte : cet acte n’est pas
susceptible d’être scindé , il faut qu’il vaille pou r l’une
et pour l’autre , ou qu’il ne vaille pour aucune. Si l’obli
gation de 1000 fr. est obligatoire pour C ath erin e, il
faut que celle de 3000 fr. soit aussi obligatoire pour
M arie - M arthe : reconnoitre qu’on est débiteur de la
p rem ière, c’est reconnoitre que l’on doit payer la seconde;
no pas opposer la prescription contre la prem ière créance,
�\\
(H )
c’cst s’interdire la proposition du m oyen de prescrip
tion contre la seconde. O r , en ne demandant pas dans
leur m ém oire la réform ation du jugement dont est appel j
quant à cette prem ière créan ce, les appelans l’ont for
mellement approuvé en cette partie ; cette approba
tion entraîne , par une suite nécessaire, l’approbation de
la seconde. O utre les moyens déjà proposés , il résulte
donc des écrits et m émoires signifiés en cause d’appel
par les mariés M atlion et M onteyrem ard, il résulte même
du contexte durjugcm ent dont est appel q u i, dans un
de ses m o tifs, ¿ a v a n t d ern ier, nous apprend qu’ils n’ont
élevé aucune contestation sur la demande en payem ent
de la somme,de io o o fr. du chef de Catherine T re v e is;
il résulte d o n c, disons - nous, une fin de non - recevoir
contre tous les moyens qui tcndroient à atténuer l’ob li
gation contractée, par M arie -.M arthe T reveis de rem -,
bourser au sieur Clioum ouroux la somme de 3000 f r .’
qu’il devoit payer pour elle.
L es appelans pou rsu ivans, sur leur prem ière p ro p o -i
sition , prétendent inférer la nullité de la procuration
de ce qu’elle n’a pas été rédigée par-devant notaire. Ils ne
von t pas jusqu’à soutenir qu’ une procuration d o it, pour
être valable , être faite par-devant notaire ; mais appli
quant aux procurations les dispositions de l'ordonnance
do 1731 qui n'a trait qu’aux donations, ils veulent faire
dépendre la validité de la procuration des mêmes prin
cipes qui règlent et qui fixent le sort des donations. M ais,
pou r toute réponse à cette objection , il suffira de dire
que l'acte de
1746 11e fut jamais une
donation , et
qu’il ne doit pas être jugé d’après les formes et les prin
cipes
�St
( *5 )
cipes qui ne s’appliquent qu’aux donations entre-vifc.
Présenter aussi, comme le font les appelans , cet acte
comme une contre-lettre au contrat de m ariage, c’est
abuser des expressions , et vo u lo ir absolument faire
prendre le change sur la définition des choses : par
contre-lettre , en fait de contrats de m ariage , on en ten d,
d’après la définition de tous les auteurs , une convention
qui attaque les termes ou la substance d’un contrat de
mariage , qui en détruit les clauses , qui les altère , les
dim inue ou y déroge. M ais a ces caracteres , pou rrat-on jamais reconnoitre l ’acte sous seing p rivé de 1746 ?
Les clauses du contrat de m ariage du 13 février 1746
ne sont-elles pas, quant à leur exécu tio n , absolument in dé
pendantes de ce même sous seing p rivé ? Relativem ent aux
futurs constitués, et au père constituant, sont-elles donc
susceptibles de la m oindre altération , de la m oindre
modification ? Ne restera-t-il pas tou jou rs, indépendam
ment de la procuration , une constitution en totalité , et
telle qu’elle a été promise ? L a fam ille L aroch e-N egly
n’a-t-elle pas toujours la certitude du payement de c«tte
constitution , d’après l’obligation q u ’en a contractée le
sieur Choum ouroux , sauf à lui ou à ses héritiers à
exercer leur recours contre les dames T reveis ou leurs
héritiers. Cette idée de contre-lettres apposées à un con-'
trat de mariage sort donc absolument de l’espèce à jun-er
et l’application n’en est ni juste ni raisonnable.
Passant de cette prem ière proposition u une seconde,
les appelans soumettent à l’examen de la; cour la question
de savoir si l’action des héritiers Choum ouroux n’est pas
prescrite : de là la seconde question.
D
ÍV
�( *6 )
S e c o n d e
>
p r o p o s i t i o n
.
>
TJ action dirigée contre les appelons est - elle ou non
prescrite ?
P o u r établir que cette action est p rescrite, les appelan s, il faut en co n ven ir, auroient bien dû être au moins
un peu plus exacts dans la relation des dates d’où ils
sont partis pour faire com m encer la prescription de l’ac
tion ; on n’auroit pas alors à leur reprocher presqu’autant d’erreurs que de mots dans plusieurs pages du
second paragraphe de leur m ém oire. Us supposent d’abord
que la dame Laroche-N egly a survécu plus de quinze
ans à M arie-M arth e T reveis sa grand’tante ; son acte de
décès est produit au procès, cote 4 de la production Choum o u ro u x ; elle est décédée le 4 juin 1 7 56. M arie-M arthe
T reveis, sa grand’tante, est décédée le 17 janvier 1759-, au
lieu d’avo ir survécu à la veu ve P lantier elle l’a donc
précédée. Ils mettent aussi en fait que l’on n’a pas osé
faire paroître la procuration du vivant de l’aïeule ou de
la tante \ mais la procuration a été contrôlée en dé
cembre 1 7 5 3 , cinq ans avant le décès de M arie-M arthe
T reveis arrivé en janvier 1769. Partant de ces points
de faits dont la fausseté est d ém o n trée, les appelans en
tirent des conséquences qui doivent nécessairement
crouler avec les principes dont ils les font dériver.
M ais leu r'b u t est d’établir une prétendue prescription
qui n’exista jamais que dans leur imagination ; le but des
héritiers C houinouroux est de p rou ver qu’ il n’en existe
�3
C 27 )
pas. Rétablissons les dates, et démontrons que l’action
n’est pas prescrite : nous intervertirons l ’ordre adopté,
par les appelans, et nous établirons d’abord que l’action
principale n’est pas p rescrite, et ensuite qu’il en est ,de
même de l’action en garantie. - ,
c, ■- '
. M arie-M artlie C houm ouroux a contracté m ariage avec
le sieur de L aro ch e-N egly, le 13 février 1746-, l’échéance
des termes de pnyemens pour la somme de 3000 francs
contestée, puisqu’il ne s’agit que de cette som m e, d’après
le mémoire des appelans, et d’après le consentement par
eux donné devant les premiers juges, relativem ent au
payement de leur quote part de la somme de 1000 fr.
du chef de Catherine T r e v e is , est fix é e , par le contrat
de m ariage, au 13 février 1749 : c’est de cette dernière
époque seulement, ainsi que les appelans en sont convenus
dans leur m ém o ire, que doit com m encer à cou rir la
prescription.
Si la prescription eût pu courir contre la dame Cham blas constant son m ariage, il se seroit écou lé, jusqu’à son
décès, sept ans trois mois vingt-un jours utiles à la pres
crip tio n , et non pas plus de d ix ans, comme le sou
tiennent les appelans aux pages 22, 23 , 25 et 26 dq leur
m ém oire: ce qui écarte absolument la discussion à laquelle
ils se sont livré s, et qui devient dès-lors inutile et oiseuse.
L e père Chamblas est aussi décédé le 4 décem bre 1783:
en supposant, ce qui n’est pas, que la prescription, eût
pu courir contre ses enfans pendant sa su rvie, il y auroit
eu encore de prétendue prescription jusqu’à ladite époque
un laps de temps de vingt-six ans trois m ois; du 4 dé
cembre 1783 jusqu’à lu demande du 25 prairial an
cor-
�(28}
responclant au 14 juin 17 9 8 , il se seroit écoulé un laps
de temps de quatorze ans neuf mois dix jours de vrai-1
m ent utiles à la prescription; en sorte qu’en calculanttout le temps interm édiaire depuis le 13 fév rier 1749
jusqu’au 2.5 prairial an 7 , sauf ensuite la distraction du
temps pendant lequel la prescription a été interrom pue,
il se seroit écoulé un laps de temps de quarante-huit ans
quatre mois. M ais du nom bre de ces années il faut dis
traire d’abord les vingt-six ans trois mois qui se sont
écoulés depuis le 4 juin 176 6 , époque du décès de M arieM arth e G houm ouroux, épouse du sieur Cham blas, jus
qu’au 4 décem bre 17 8 3 , époque du décès de ce d ern ier7
ce qui laisseroit seulement vin g t - deux ans et un mois
d’utiles à la prescription. Si l’on doit en effet distraire
ces vingt-six ans trois m o is, dès q u e, par cette distrac
tio n , il ne reste plus que vin gt-deu x ans un m o is, il est
inutile de s’occuper de la question qui tendroit à savoir
si la prescription a pu courir contre la m ère constant le
m ariage, puisqu’en supposant môme l’affirm ative de cette
p ro p o sitio n , il n’y auroit jamais que vingt-deux ans et
un mois drutiles à la p rescrip tion , et non plus de trente
a n s, comme le supposent les adversaires.
M ais la prescription a - t - e l l e été suspendue pendant
les vingt-six ans trois mois qui se sont écoulés depuis le
déct& de M a r ie - M a r th e Choum ouroux jusqu’au décès
du sieur Cham blas, son m a ri? V o ilà la question de la
solution de laquelle d ép en d , en grande partie, le sort
de la demande principale dans, le système des adver
saires, parce q u e , d’après e u x , le moyen de prescription
n’aurait été couvert ni par les lettres ni par les autres
�( i9 )
moyens que les intimés ne font valoir que surabondam
ment pour écarter un m oyen aussi odieux*
S o u te n ir, comme le font les app elans, que la pres
cription court contre le fils de fam ille constant l’ usufruit
de son p ère, c’est heurter de front tous les principes reçusen cette m atière, c’est vo u lo ir m éconnoître l’opinion de
tous les auteurs> la jurisprudence des arrêts, et m&ftie
celle de la cou r d’appel q u i, par divers arrêts, a consacré
le principe contraire. Ce système erroné vient se briée#
contre une foule d’autorités égalem ent respectables : l*atiteur des M axim es journalières du ci-devànt parlem ent dé
P ro v en ce, L o u et et B rodeau, P o th ier, D u n o t, des arrêts
rendus au parlem ent de T ou lou se en 1695 et eri 17 0 2 ,
C atelan, que les adversaires osent in v oq u er, tom e 2 ,
liv . 7 , chap. i 5 , pag. 484, From ental, Serres en ses Ins
tituts, liv . 2 , tit. 8 , pag. 19 3 , ne permettent plus aujour
d’hui de controverser une semblable question. L ’opinion
de ces divers auteurs, les lois romaines sur lesquelles ils
l?ont basée, et les arrêts1 qu’ ils in vo q u en t, sont littéra
lem ent transcrits dans le m ém oire signifié par les frères
Choum ouroux , en prem ière instan ce, le 17 messidor
an 9 , cote 23 de la procédure principale-, et l’on se b or
nera à y renvoyer les appelans, pour éviter des rép éti
tions inutiles, et d’autant plus inutiles que la jurisprudence
de la cour d’appel est, quant à c e , irrévocablem ent fixée.
L a demande principale des en fans L aroch c-N egly n’étoit donc pas prescrite à l’époque de la demande par eux'
formée.
Mais la demande des frères et sœurs Choum ouroux
n’étoit-elle pas elle-même prescrite au m oment où ils l’ont
�IU
C 30 )
exercée contre les mariés M athon et M onteyrem ard? Ces
derniers soutiennent l ’affirmative de cette proposition. Il
n ’y a e u , disent-ils, aucune m inorité dans la fam ille Choum ouroux qui ait pu suspendre ou arrêter le cours de
cette prescription; elle a commencé le 13 février 17 4 9 ,
elle a donc été accomplie le 13 février 1779. M ais, pré
sumant bien que tous les moyens em ployés pour écarter
la prescription de l ’action j)rincipale concourent égale
ment à conserver en son entier l’action en garan tie, ils
veulent que l’action C houm ouroux contr’eux soit une
action prin cipale, distincte et indépendante de celle des
frères et sœurs L aro clie-N cgly : mais comment l’établir ?
I.e père C h o u m o u ro u x, disent-ils, a promis en son nom
personnel de faire le payement de la totalité des sommes
constituées, et de là ils en concluent qu’il n’a pas agi
en qualité de m andataire, et que sa fille et ses enfans
n’ont aucune action contre l’aïeule ou la tante, 11 n’a pas
agi en qualité de mandataire! le fait est fa u x ; il a expres
sément déclaré qu’il ne constituoit la somme de 4000 fr.
que par l’ordre do ses tantes. Il s’est obligé personnelle
ment ! le fait est vrai ; mais il s’est aussi obligé solidai
rem ent comme constituant de son ch ef, et comme ayant
ordre de constituer du ch ef de ses tantes. Les futurs ou
leurs enfans ne dévoient s’adresser qu’à lui pour être
payés de cette somme de 4000 fr. ! cela peut être; mais
l ’action qu’ils dirigeroient dans la suite contre l u i , par
une conséquence forcée, devoit seulement être le prin
cipe et la cause de l’action que le sieur C houm ouroux
au ro it, dans ce cas, à exercer lui-même contre la suc
cession de scs tantys, 011 vertu de l ’ordre qu'il eu avoit
N-
�( 31 )
reçu : jusque-là, n’ayant rien payé pour elles, il n’avoit
rien à leur dem ander, et l’obligation contractée par elles
dans le sous seing p rivé du 9 février 17 4 6 , se rattachoit
à l’exécution du contrat de m ariage; elle ne devoit leur
être rappelée que lorsqu’il auroit payé ou lorsqu’il auroit
été actionné pour payer : de là le caractère distinctif de
sa dem an de, qui ne peut être absolument considérée
comme une demande prin cipale, mais bien comme une
action en garan tie, nécessairement liée avec l’action prin
cipale dont elle n’est qu’une suite et une conséquence.
E n un m ot, le sieur Choum ouroux ou ses héritiers n’ont
eu intérêt d’agir contre la succession des dames T reveis
que lorsque les enfans L aroch e -N e g ly ont exercé leur
demande directe contr’eux : cette demande a été exercée
contr’eux en l’an 7 ; en l ’an 7 ils ont form é leu r demande
en recours; les mariés M athon et M onteyrem ard n’ont
donc pas m êm e à leur opposer un instant de prescription.
Ce n’est donc pas pour user de leur dernière ressource,
que les frères et sœurs C houm ouroux ont em ployé dans
leur production les lettres dont nous avons déjà p arlé ;
ce n’est que par surabondance de m oyens, et pour dém on
trer à la cour que tout l’odieux de cette fin de nonrecevoir doit uniquement retom ber sur le sieur M athon
et son ép ouse, et non sur leurs auteurs, qui n’eurent
jamais l’indélicatesse et la mauvaise foi de désavouer une
dette aussi légitim e. D ire que ces lettres ne contiennent
pas une explication précise de l’objet particu lier, c’est
tout au moins prouver que l’on n’a pas voulu se donner
la peine de les lire. L a seconde lettre parle des billets
souscrits par la veu ve Plantier ; la troisièm e parle du
�M
( 32 )
délaissement d’une v ig n e , en payement de ce que l’on
doit à la maison C h oum ou roux, du clief de la veu ve
P lan tier; et la dernière, qui est de 17 7 0 , parle textuel
lement d’ une.somme de 3000 francs demandée. L a p ro
duction de ces lettres, et surtout de la dernière, sufiiroit
Lien sans doute pour faire absolument évanouir et dis—
paroître le moyen de presci’iption indélicateinent im aginé
par les adversaires. D e 1770 à 17 9 8 , époque de la de
m ande, il n’y auroit pas les trente ans utiles ù la presr
cription.
M aintenant que nous avons suffisamment établi que
la procuration du .9 février 1746 étoit obligatoire pour
la veu ve Plantier ou pou r ses h éritiers, qu’il y a eu ap
probation de cette dette dans les écrits des adversaires,
qu’au surplus ni l’action principale, ni l’action en garan
tie, ne sont éteintes par la prescrip tion , venons à l’exa,.men de la. dernière, proposition qui form e le §. I l l du
m ém oire im prim é.
T R O I S I È M E
PROPOSITION.
P e u t-o n f o i r e considérer les appelons com m e héritiers
purs et simples de M a r ie - M a r t h e Treveis?- ou au
contraire doit-on se borner à leur dem ander le compte
b é n é f i c i a i r e de la succession de la veuve P la n tie r ?
C ’est ici le deruier retranchement des adversaires. Celte
question , qu'ils «voient à peine lait naître dans leurs
griefs, est présentée avec un développem ent plus étendu
dans leur m ém oire : mais ils ne seront pus plus heureux
dans
�6
( 33)
.
'
dans ce dernier moyen que dans les précédens. L es appelans sont héritiers purs et simples de M a rie -M a rth e
T re v e is , et ils doivent être condam nés, en cette q ualité,
à rembourser aux. frère et sœurs C h oum ouroux la somme
de 3000 f r . , ensemble les intérêts.
Rapellons succinctement les principes sur cette ques
tion ; rapprochons ces mêmes principes de la conduite
des appelans ou de leurs auteurs, et de ce rapprochem ent
résultera la conséquence forcée qu’ils ont dû être con
dam nés, non en qualité d’héritiers bénéficiaires, mais en
qualité d’héritiers purs et simples.
L ’héritier bénéficiaire , d’après la définition de tous
les auteurs, est celui qui en appréhendant une succession
en a fait constater le montant par un inventaire fait dans
le temps et dans les formes déterminées par la l o i , et q u i,
par cette précaution , s’est mis dans le cas de ne répondre
des dettes et des faits du défunt que jusqu’à concurrence
de la valeur des biens dont la succession est composée.
O r , à ces caractères reconnoîtra-t-on la qualité d’h é
ritier bénéficiaire de M arie-M artlie T re v e is, d’abord dans
Catherine B on n afoux, ensuite dans C laude-M ichel M o n tê yiem a rd , son fils, et ensuite dans l’épouse du sieur
M athon ?
O n convient d’a b o r d , avec les app elans, qu’en pays
de droit écrit il n’est pas d’ une indispensable nécessité
d’obtenir du prince des lettres de bénéfice d’in ven taire,
pour être admis à prendre la qualité d’héritier bénéfi
ciaire •, mais au moins il est indispensablcment nécessaire
de prendre cette qualité. O r , voyons d’abord si Catherine
Bonnafoux a pris cette qualité.
E
�(
34
)
L a requête du 13 février 1769 ne prouve et n’établit
d’abord rien de semblable : c’est une simple mesure de
précaution qu’elle croit devoir prendre avant de se dé
term iner, d it-elle, à l’acceptation ou à l ’abandon de la
succession de M arie-M arth e T i’eveis. Cette succession ne
pou voit lui être o n éreu se, elle en connoissoit alors la
consistance, elle connoissoit toutes les affaires de sa tante,
elle étoit intéressée dans son commerce. D ’ailleurs, en
1 7 5 4 , et le 12 a v r il, la veu ve Plantier avoit fait ellem ême son in ven taire, il avoit été écrit de sa main ; alors ,
elle n’avoit pas fait son testam ent, qui est sous lu date
du 31 août 1 7 5 7 ; il avoit été com m uniqué à tous les
prétendant droit à sa succession; à Catherine B onnafoux,
qui conséquemment en avoit une connoissance suffisante;
à la branche C houm ouroux : aussi trouve-t-on dans les
papiers relatifs à cette aifaire une copie de ce même in
ven taire, écrite par feu Pierre-Joseph Saignard de C lioum o u ro u x, décédé en maison de réclusion, et avant que
l ’action ait été introduite : à la branche L a va l ; et la preuve
de ce fait résulte d’ une copie du même inventaire, écrite
par la dame L a v a l, qui est décédée depuis plus de vin gtcinq ans (1). O r , cet inventaire fait par la veuve Plan
tier quelques années avant sa m o rt, portoit son actif à
7Ô5oo f r . , son passif à 38100 fr. ; il restoit conséqueininent de net une somme de 36400 f r . , et dès-lors l’incer
titude dont parloit Catherine Boim afoux n’étoit donc
(1) Ces deux copies fo n t partie du résidu : on a cru inutile (l’on
faire une production n o u velle, la qualité d ’héritier pur et simple
étant suffisam ment établie par les pièces produites.
�( s 5 )
vraim ent que de style, et elle n’eut môme pas alors l’intenlion de répudier la succession de sa tante.
A u surplus, eût-elle été vraim ent incertaine sur ce
qu’elle avoit à faire , elle n’avoit pas rem pli alors les
form alités requises pour eti’e admise dans la suite au
bénéfice d’inventaire; l ’inventaire qui fut fait à sa re
quête auroit d û, pour être rég u lier, être précédé d’ une
assignation à toutes les parties qui pouvoient y avoir in
térêt ; elle auroit dû notamment y appeler les créanciers
connus et certains de M arie-M artlie T reveis : la dame
Laroche-N egly ou ses héritiers étoient bien ses créanciers
connus et certains, d’après le contrat de m ariage de 174 6 ,
ou au moins P ie rre -L o u is Saignard de C houm ouroux
qui avoit constitué par son ordre ; et cependant ni les
L aro ch e-N egly, ni le sieur de C houm ouroux ne furent
appelés. E lle n’auroit donc pas rem pli à leur égard, les
formalités requises pour être admise au bénéfice (l’in
ventaire : c’est ce que nous enseigne Serres en ses Insti
tu ts , liv. 3 , tit. 1 9 , pag. 3 1 5 , et une foule d’autres
auteurs qui ont écrit pour le pays de droit écrit.
Mais Catherine Bonnafoux e û t-e lle fait faire un in
ventaire ré g u lie r, elle n’en seroit pas moins héritière
pure et simple de M arie-M artlie T re v e is , et cette qualité
auroit passé sur la tête de l’appelante, sa p e tite -fille .
Il est de principe que la qualité d’h éritier est indélé
b ile , et que celui qui a pris une fois cette q u alité, en
faisant acte d’héritier pur et sim ple, ne peut ni l’abdiq u er, ni la m odifier: Q u i sem cl h care s , semper h ocres.
L e 6 février 1759 , sept jours après l’ouverture du
testament de M arthe T re v e is , Catherine Bonnafoux comE 2
�t
c.36)
paroît au bureau du centième denier a u P u y ; et là , en
qualité d’héritière de la veuve P la n tier, suivant son tes
tament du 31 août 1 7 5 7 , elle fait la déclaration des im
meubles à elle échus dans cette succession. V o ilà la qua
lité qu’elle ne peut plus abdiquer : pro hœrede gerere
non tam Jxicti quam a n im i est. L o i 20 , au ff. de a cq u irejida vel am ittendà hœ reditate. G erit pro hœrede q u i
anim e agnoscit saccessionem licet n ih il attingat hœ reditarium . Ib id . liv . 88. C ’en étoit donc fait; d’après cet
acte elle n’étoit plus recevable à se porter héritière
b én éficiaire, et tous les actes postérieurs où elle auroit
ensuite pris cette dernière qualité ne pourroient effacer
la prem ière, pou r laquelle elle avoit déjà fait son option.
Cette qualité d’h éritière pure et simple fut encox-e
reconnue en elle par le sieur M onteyrem ard son iils;
l ’on vo it en effet que le 7 septembre 17 6 9 , il donna à
M . Chazeaux de C h ou m o u rou x, son cousin, une procu
ration pour toucher d’une denjoiselle M agdeleine D u m as,
veu ve R o c h e , une somme de i 5o fr. qu’elle devoit à la
succession de la veuve P la n tie r, dont sa iiière étoit héri
tière. Cette p ièce, surabondamment produite sur ap p el, ne
fait que confirm er, soit en point de fa it, soit en point de
d ro it, que Catherine Bonnafoux étoit héritière pure et
simple de sa ta n te , et que cette qualité a m êm e été re
connue par son fils.
Cette qualité , qui auroit passé de droit à son fils ClaudeM chel M o n teyrem ard , lui fut encore irrévocablem ent
acquise par son propre fait. O11 ne contestera sans doute
p:is le principe qui nous est enseigné par Serres au lieu
déjà c ité , page 3 1 7 , que l’on fait aclc d’héritier exprès-
�(
37
)
3
sèment par le seul fa it3 lorsque l ’héritier légitim e ou
institué fait quelque acte qu’ il ne pourroit faire qu’en
qualité d’h é ritie r, comme s’il dispose en maître des biens
de la succession par vente ou autrement. T e lle e s t, en
effet, la disposition de la loi 20 déjà citée, pro hccrcde
gerit q u i a liqu id gerit tanqucim hœres.
O r , c’est précisém ent ce qu’a fait Claude-Michel M o n teyrem ard, fils à Catherine Bonnafoux : par acte notarié
du g décem bre 1761 , il a v e n d u , avec promesse de faire
v a lo ir , fo u rn ir et garan tir, un champ dit d’ E xp aly , à
M e. Claude G e n a y , procureur. Ce cham p dépendoit de
la succession de M arthe T re v e is ; et la déclaration de
Catherine B o n n a fo u x, dont nous avons parlé plus h a u t,
ne laisse aucun doute à cet égard. L e principe ci-dessus
invoqué trouve donc ici son application.
A in s i, sans qu’il soit besoin d’avoir recours à une
foule d’au torités, sans qu’il soit nécessaire de rapporter
l ’espèce d’un arrêt rendu au parlem ent de T o u lo u se , le
31 août 1 7 7 2 , arrêt qui a jugé la question in ten n in is ,
et qui est rapporté par Boutaric en ses Instituts, p. 3 18 ,
et de plusieurs autres, et notamment d’un arrêt du par
lement de Paris , du 18 février 1784 , rapporté au R é
pertoire de jurisprudence au m ot h é r itie r , page 3 6 3 ; il
demeure pour constant que C la u d e -M ic h e l M o n t e y r e mard , soit comme h éritier de sa m ère , soit par son
propre fa it, étoit h éritier pu r et simple de M arie-M arth e
Treveis. L ’appelante, sa fille et son h é r itiè r e , ne peut
aujourd’hui se dépouiller d’une qualité qui a irrévoca
blement passé sur sa tête avec la succession de son père.
Son mari et elle ne sont donc plus rccevables ù. se porter
�aujourd’hui héritiers bénéficiaires de la veu ve Plantier;
ils ne sont plus recevables à répudier une succession que
leur père et leur aïeule ont si form ellem ent acceptée : ils
ont donc dû être condamnés comme héritiers purs et sim
ples, et non comme héritiers sous bénéfice d’inventaire.
L es moyens surabonderoient pour mettre à découvert
toute la mauvaise foi des appelans, et pour justifier dans
toutes ses dispositions le jugem ent dont est appel. M ais
à quoi bon entrer dans une plus longue discussion ? L e
droit des intimés est suffisamment établi par les motifs
qui lui ont servi de base; motifs que les appelans ont
eu soin de transcrire en entier dans leur m ém oire. Les
rapporter littéralem ent et ne pas les r é fu te r , c’est en
quelque sorte reconnoître la légitim ité des condamna
tions prononcées contr’eux. L e but des intimés ne fut
jamais d'accabler tout à c o u p , p a r des poursuites rigou
reu ses, la dame M a th o n , cette orpheline si intéressante,
cette orpheline qui semblerait vou loir évoquer les mânes
de son aïeu le, de son père et de son tu teu r, pour leur
demander des renseignemens, des titres et des com ptes(i).
( i ) L a dam e M a t li o n , qui prétend q u ’on a voulu abuser de son
état d ’ignorance, et n ’avoir aucune pièce en son pouvoir, a cepen
dant produit au procès l’inventaire fait les 16 janvier 175«) et jours
suivans, après le décès do la veuve l ’inntier, clos meubles et e ile ls
composant sa succession; elle a cependant produit la requête pré
sentée par son aïeule pour faire apposer les scellés sur les effets de
la m êm e succession, et celle présentée pour parvenir à l ’ouverture
du testament; elle a cependant un arrêté «le compte entre la darne
B o n n a fo u x , sa gran d’m ère, et la veuve Plantier, duquel il r< suite
q u ’il y avoil société de com m erce c n tr ’cllcs; elle a cependant tous
�f t
\
Ils n’ont pas colludé avec le sieur L a r o c h e -N e g ly ( 1 ) .
il sont d'autre intention que d'éxiger de la dame
M athon l’ex écution des obligations contractées par M a rieMarthe , treveisveuve P la n tier d o n t elle est h éritière
par représentation d e s e s auteurs. Si elle n’eut pas eu
l’indélicatesse ,d'opposer une p r e s c r ip tio n c h im é r iq u e ,
les frères et sœurs C h oum ouroux n 'a v o ie n t p a s b e s o i n ,
p our écarter un m oyen si o d ieu x,d
ir
efa
contraster
sa co n d u ite et so n lan g ag e avec la co n d u ite et les écrits
de son père e t d e so n a ie u le . L a fa m ille C h o u m o u ro u x
tient à honneur de ne pas chercher à écarter une demande
légitim e, celle du sieur L a r oche-N egly , par une prescrip
tion odieuse. P ou rqu oi ces sentimens ne sont-ils pas com muns aux appelans .e t a u x in t im é s , q u i d e s
uns les
autres, sortent de la même souch e?
M . C A T H O L , rapporteur.
M e. T A R D I F ,
avoué.
les papiers de la fa m ille , sans en excepter ceux qui serviroient à
établir la légitimité de la demande des intimés : mais ces papiers,
com m e on le présume b ien, sont ceux dont elle a le m oins besoin
dans la cause, et qu’elle a eu grand soin de ne pas produire.
( 1) il y a si peu collusion entre les frères et sœurs C h ou m ou ro u x
et le sieur L a ro che - N e g l y , que ce d e rn ie r, en vertu du jugem ent
du P uy qui lui accordoit une provision de 3ooo f r . , avoit f ait
saisir et arrêter le prix entier des fermages dûs à la maison C houmouroux par divers particuliers. C e lt e saisie fut faite par R e d o n d ,
huissier, le 11 vendémiaire an h uit.
A R l O M , de l ’imprimerie de L a n d RI o
C o u r d ’appel.
t
,
seul imprimeur de la
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J ía / « ¿ t s i a » H ,
Cm o u itfr ,
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Saignard de Chomouroux, Joseph-Raymond-Bénigne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Joseph-Raymond-Bénigne, Françoise et Alexis de Saignard de Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; contre Julie-Angélique Monteyremard, et Jacques-Louis Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu du Bourg-Argental, appelans ; en présence du sieur Georges-François-Alexis de Laroche-Negly de Chamblas, propriétaire, habitan du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Larderol, intimé.
Table Godemel : Donation : 9. une donation faite au nom d’un tiers, par contrat de mariage, en 1746, et sans procuration annexée, est-elle obligatoire pour celui au nom duquel elle a été faite ? Si celui qui s’est porté fort a rempli la donation, a-t-il une action en garantie contre le tiers dont il avait reçu procuration par acte sous signature privée ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1746-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1602
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1601
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53276/BCU_Factums_G1602.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
donations
droit écrit
expertises graphologiques
experts
inventaires
signatures
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53275/BCU_Factums_G1601.pdf
cbb9dc38f64aa2c6cd8d9b4abe9c2bc1
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Text
■îi
GÉNÉALOGIE DES PARTIES.
N.............
Treveis.
C ath erin e,
à
Georges Bonnafoux.
2
Françoise-Hyacinthe,
à
Louis Laval
d’Arlempde.
Catherine,
à
Gaspard
Montereymard.
I
Laval-d’Arlem pde,
Marie M a rth e ,
morte sans p o sté rité ,
A
a
Bénigne Plantier.
5
CalherineFrançoise,
a«
Pierre
SaignardCliom ouroux.
IVIicliel.
JulieAngélique,
M arieM a rlh e,
à
FrançoisAm able
LarocheNegly.
à
Jacques
M athon,
appelans.
2
GeorgesFrançois,
JosephBênigne,
intim é.
intimé.
5
Joseph
R aym on d ,
A lexisFrançoise,
intim ée.
intim é.
intim ée.
4
JeanneM drieM artlie,
intim ée.
*¡
4
2
LouiseFrançoise,
�M
É
M
O
P O U
I
R
E
R
Dame J u l i e - A n g é l iq u e M O N T E R E Y M A R D , et le
sieur J a c q u e s M A T H O N , son m ari propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental,appelans d’un jugement
rendu au tribunal d’Yssingeaux le 1 5 floréal an dix ;
C O N T R E
'! .
COUR
D’APPEL
’
SÉANTE
Les sieurs J o s e p h - R a y m o n d , B é n i g n e , A l e x i s - AR I O M .
F r a n ç o i s e S A I G N A R D - C H O M O U R O U X ,p r o
priétaires, habitans de la ville d 'Yssingeaux, intimés ;
et encore C O N T R E
••
n
G eo rg e- F r a n ç o is - A l e x i s L A R O C H E - N E G L Y ,
propriétaire, habitant du lieu de Ch am blas commune
de Saint-Etienne-Lardey r o l, intim é.
Q U E S T IO N P R IN C IP A L E .
Une donation faite au nom d’un t iers par contrat
de mariage, et sans procuration de sa p a r t, est-elle
obligatoire pour celui au nom de q u i elle est f a i t e ?
Ct
a h e r i n e et Marthe T re v eis étoient sœurs. Là pre
mière épousa Georges Bonnafou x et eut trois enfans,
■A
�C2 )
Catherine, Françoise-Hyacinthe, et Catherine-Frnnçoise.
La seconde épousa Bénigne Plantier; elle est morte sans
enfans. Catherine Bonriafoux, première fille de Catherine
T reveis, s’est mariée avec Gaspard Montereymard, et a
eu de son union M ichel M ontereym ard, d’où est issue
dame Julie-1A n géliqu e, épouse de sieùr Jacques Mathon.
Ce,sont les appçlan's. ;î ; a,/ > •'
!
•- r
Françoise-Hyacinthe JBonnafoux a contracté mariage
avec un sieur Loüi$, delLaval-d’Arlerripde , et a eu un lils
qui a figuré dans la cause principale, mais n’est pas
partie sur l’appel.
^
^
Catherine-Françoise, mariée à Pierre Saignard-Chom ouroux, a eu douze e n f a n s il n’en existe plus que
trois et les enfans d’un auti'e. Les trois existans, parties
au procès comme intimés, sont Joseph Raymond, LouiseFrancoise, et Alçxi$7Françpise.
»
7
.. ■ ;
'
:I T >
M arie-M artlie , quatrième enfant , épousa FrançoisAm able Laroche-Négly ;'il en est provenu quatre enfans:
Georges-François, l’un d’eux,'est seul en cause sur l’appel.
L e 13 février 1746, par le contrat de mariage de M arieMarthe Saignard- C hom oroux, avec François - Am able
L aroch c-N egly, se? père et mère lui constituèrent une
somme de 1800b
savoir /celle de 9000 ^ pour droits pa
ternels , 2000 /tVdii clief m a t e r n e l , 1000 ^ que le père
a ordre de constituer à la demoiselle future épouse,
du c h e f de darne Catherine Ti'eveis, aïeule maternelle
de cette dernière, 3 0 0 0 du chef-de darne M arie-M arthe
T reveis, veuve de M . P la n tier, aussi de son ordre,
1000 tt du c h e f de)
:J ea n - A y m é de Saignard-deChoinouroux j aussi.de> son^ordre y en tant moins des
�( 3 ) '
droits légitimaifes qui -peuvent lui être dûs du chef
desespère et m ère, et finalement la somme de 2000 ir
que demoiselle ; M arie - Alexis de Saignard, présente,
donne et c'onstituoi de son fchef.
; ; ¡;
•>: « Laquelle entière constitution, e$t-il ajouté >ledi l.sieur;
« de Chom ouroux, tant. de son chef que' de celui des
« dames Treveis aïeule et tante, etc. a promis et prom et,
« en son propre et privé n o m , et solidairem ent, payer. »
' L e père p aye, en effet, jusqu’à concurrence.! de
12000 tr. Cette dernière som m e est-stipulée remboursa
ble en payemens égaux et annuels d elà somme de 3000
chacun, à commencer en un an lors prochain, et succes
sivement d’année en année, sans iiité,rêts qu’à défaut de
payement.
.
•
r
L ’aïeule ni là tante ne sont présentes à ce contrat.
L e 30 avril de la même année 1746, Catherine Treveis,
aïeule de la dame Laroclie-Negly, fit son testament , et con*
firma la donation de 1000 1t'. portée par le contrat de
mariage de sa petile-fillé.
)(
L e 30 août iy ô y , Marie-Marthe Treveis ^veuve Plan?
lie r , fit aussi son ■
tëstament. Il contient quelques legs
p ieu x , et une institution universelle, au profit de Ca-ttherine Bonnafoux , veuve Montci’eymard , mère de?
appelans , ! et garde le (silence le plusrabsolu sur la dona
tion de 3000 1f~ que! Louis +■
Pierre Saignard-de-C ho-r
m ouroux, disoit avoir faite par so 7i ordre à la dame
L aroclie-N egly, sa fille, lors de son contrat de mariage.
La succession de M arie-M arthe Treveis étoit fort obér
ree : la dame Bonnafoux ne voulut, l’accepter que par
bénéfice d’inventaire, lorsqu’elle connut le testament. Elle
A 2.
�( 4 - ) - .....................................................
fit procéder à l’inventaire, après en avoir obtenu la per
mission , avec assignation aux parties intéressées. La dame
Laval seule s’y fit représenter pour réclamer une somme
de 2000
qui lui avoit été constituée par la défunte,
lors de son contrat de mariage de 17 2 7; mais la dame
Saignard ne s’y présenta point.
Suivant les titres qui ont été trouvés dans les papiers
de la dame Bonnafoux, et qui sont écrits de sa main, l’actif
de la succession de la dame veuve Plantier, dans laquelle
on comprenoit une maison sise en la ville du P u y , se
portoit à 26900
et le passif à 29300
encore ne
comprenoit-on pas dans le passif ni la créance de 2000
de la dame L a v a l, ni la prétendue créance de 3000
répétée par la dame Laroche-Negly.
A in s i, la dame veuve Plantier ne laissoit pas suf
fisamment pour acquitter ses dettes, et il est établi par des
quittances, dont on est en état de justifier, que la dame
Bonnafoux a payé au delà de l’actif, comme aussi qu’elle
a remboursé à la dame Laval les 2000 ^ qu’elle avoit
droit de répéter.
La succession de M arie-Martlie T reveis, veuve Plan
tier, ne s’est ouverte qu’en 17^9, deux ans après qu’elle
eut fait son testament. La dameiLaroche-Negly, sa petitenièce, lui a survécu pilus de iquinzé ans, et le mari de
celte dernière a vécu plus de: vingt-quatre ans après la
grand’tante de sa femme; 'L es deux , époux , le mari
surtout , maître de la dot mobilière , n’a jamais réclam é,
n i contre la grand’tante , ni) contre ses héritiers , le
montant de la donation portée en son contrat de mariage.
Cependant le sieur Saignard Cliom ouroux; son beau-
�( 5 y
p è re , avoit contracté l’obligation personnelle d’acquitter
le montant de la dot constituée de son chef ou de l’ordre
prétendu de la veuve Plantier; il en avoit payé une partie
et avoit pris pour le surplus des termes rapprochés qui
depuis bien long-temps étoient échus.
En général, et surtout en pays de droit écrit, la dot
est censée payée après dix ans, à compler du dernier
terme échu ; le mari en devient seul resp on sable : c’est
ainsi qu’on le jugeoit constamment au parlement de T o u
louse , dans le resso rt d u q u el les parties sont domiciliées.
Ce n’est qu’en l ’an y , et par acte des 18 floréal et
7 prairial de la même année, c’est-à-dire, cinquante-trois
ans après le contrat de mariage de la dame Laroche-N egly,
que les héritiers Saignard-Chom ouroux imaginèrent
une forme de procédure toute nouvelle, et qui a dû paroître extraordinaire, même à Yssingeaux,
A van t aucune demande formée par les héritiers de la
dame Laroche-N egly, les héritiers Saignard firent faire
des saisies-arrêts, connues dans le pays sous le nom de
bannimens ) entre les mains d’un sieur Bonne ville, comme
des biens du sieur Matlron et de son épouse, pour sûreté
du payement de la sommede 4000
constituée, par ordre
et pouvoir écrit donné par Catherine et Marie T reveis, à
la dame de Laroclie-Negly , et que ses héritiers, est-il
d it , étaient sur le point de demander en justice.
Il est bon de remarquer que ces héritiers Saignard, si
prevoyans, commençoient leurs poursuites avant aucune
action des Laroche-Negly, et sans avoir aucun titre confie
les appelans. Cependant personne n’ignore qu’on ne peut
faire de saisies-arrêts qu’en vertu d’un titre authentique,
�c 6 3
ou qu’au moins pour suppléer au titre il faut une per
mission de la justice.
Cette saisie étoit donc irrégulière et nulle ; mais encore
elle est faite à la requête du sieur Saignard et de ses deux
sœurs, c’est-à-dire, sans énoncer le prénom de celui qui
est nom m é, et sans qualifier autrement les demoiselles
Saignard, que de cette m anière, ses deux sœ urs, qu’il
ne nomme pas. T elle est la manière de procéder dans
le pays.
lies appelans n’ayant pas voulu s’expliquer sur cette
saisie, on fit alors paroître les Laroche-Negly , qui in
tentèrent leur demande en payements de la dot de
leur m ère, ainsi que des droits successifs qui dévoient
leur révenir dans les successions de leur oncle et tante :»
c’est ainsi qu’ils s’expliquent. L ’action est intentée par
Georges-François Laroclie-N egly, fa isa n t tant pour lu i
que pour ses frère et sœurs ÿ il cite le sieur Saignard
et ses deux sœ urs, dans les mêmes termes, et sans au
cune énonciation, ni du prénom du frère, ni du nom
des deux sœurs.
'
;
L e 27 prairial an 7 les appelans reçoivent une dénon~
dation de la cédule des Laroclie-N egly en ces termes :
A la requête du cit. Saignard et de ses deux sœurs.
Saignard demande à être concilié sur faction en garan
tie de la demande du sieur de L aro clie-N egly, pour
raison de la somme de 4000 rh constituée à leur mère ,
pour le compte et par l’ordre de Catherine et Marie-*
Marthe Treveis.
Saignard notifia, par la même copie, un écrit sous
seing privé , portant pou voir, delà part de Catherine et
�(7 )
M arie-M arthe T reveis, de constituer à M arie-M artheFrançoise Saignard la somme de 4000 ^ , et sous leur
obligation
de rembourser la somme à Pierre-Louis Sai©
gnard, attendu qu’il s’obligera de les payer. Cet acte pro
duit au procès par les intim és, sous la cote prem ière,
est signé du seul nom de Plantier, sans énoncer le nom
propre de M arie-M artheTreveis, ni la qualité de veuve;
il est sous la date du 9 février 1746 , il n’a été enregistré
que le 10 décembre 1753.
L e 11 thermidor an 7, les appelans, ainsi que le sieur
I ia v a l, qui n’est pas partie sur l’appel, furent assignés,
toujours à la requête de Saignard et de ses deux sœurs,
comme dans la cédule : on ne donne pas plus de quali
tés aux assignés ; l’huissier ne dit pas môme qu’il s’est
transporté à leur dom icile, mais seulement avoir donné
une copie à la dame M ath on , trouvée à M ontfaucou,
sans apprendre comment elle se trouvoit là.
S;)ignard , pour lui et ses sœurs, assigne pour voir
joindre la demande en garantie à la demande prin
cipale; e t, sans libeller autrement sa demande, ni pren
dre de conclusions précises, il demande seulement qu’on
lui adjugé toutes celles prises dans sa cédule, et toutes
les autres qu’il trouvera bon de prendre dans le cours de
l ’instance.
L e 11 fructidor a n 7 , jugement qui joint les demandes
principales et récursoires, et adjuge au sieur LaroclieNegly une provision de la somme de 3000
contre
Sut gnard et ses sœurs.
Les appelans contestent cette demande en recours par
tous les moyens qui militent en leur faveur, et qui se
�( 8 )
ront développés dans la suite; ils désavouent également
les signatures apposées au bas de l’écrit qualifié de pro
curation du 9 février 1746.
>
L e 6 germinal an 8 , il est rendu un second jugement
où tous les cohéritiers Laroche-Negly et tous les Saignard se trouvent en qualité, sans l’avoir été dans les
exploits introductifs, et sans être intervenus; qui, considé
rant que sur les demandes en partage les parties sont
convenues d’arbitres ( les Laroche-Negly et lesSaignai’d ),
ordonne que dans une décade les arbitres procéderont au
partage ; e t, avant faire droit sur la demande en payement
des 4000 tf", ordonne la vérification des écritures et signa-,
tures Treveis, apposées en la procuration rapportée par
Saignai'd, sur pièces de comparaison.
On assigne les appelans, en vertu de ce jugement, pour
nommer des experts ; ce n’est plus au lieu de Bourg-*
A rgentai, qui est leur domicile, mais en la ville du Puy.
Les experts sont nommés : après de grandes circonlocu
tions, et à travers une foule d’incertitudes, ils inclinent
à penser que la signature est sincère.
Les appelans contestent. Ils ne sont pas héritiers purs
et simples do M arie-M artlic Treveis. Catherine Bonna-*
foux n’avoit accepté la succession de sa tante que par
bénéfice d’inventaire. L a donation de M arie ^M arthe
Treveis étoit nulle. L e tiers n’avoit pas de pouvoir. L ’écrit
enregistré en 1753 étoit insuffisant. On ne peut faire de
donation au profit d’un tiers, sans procuration de sa part,
et annexée à l’acte portant donation. L ’action dirigée
contr’eux étoit d’ailleurs éteinte par la prescription; ce
n’est pas après cinquante-trois ans de silence qu’on pou*
voit former une semblable demande.
�(9 )
Les parties sont appointées sur toutes ces discussions ;
et enfin, le i 5 floréal an 10, a été rendu, à Yssingeaux,
uu jugement définitif, par forclusion , contre le sieur
Laval. En voici la teneur :
« Le ti-iLunal disant droit aux conclusions principales
* prises par les frères, sœurs et belle-sœ ur Laroclietç N egly, sans avoir égard à celles des frères et sœurs
« Chom ouroux, non plus qu’à celles des mariés M atlion
c? et Montereymard ; vidant l’interlocutoire porté par
« le jugement du 6 g e rm in a l an 8 ; homologue la re« lation rendue par les experts Champanliac-Villeneuvc
« et P ouzol, les 7 et 8 pluviôse an 9 * en conséquence,
« déclare la procuration privée, passée le 9 février 1746
« par Catherine et M arie - M arthe Treveis sœurs, en
« faveur de Pierre-Louis Saignard-Chomouroux, avouée,
« et reconnue de conformité à l’édit de 1684; et, sans
a avoir égard aux fins de non-recevoir opposées par les
« mariés Mathon et Montereymard, desquelles elles dc« meurent démises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Chomouroux à faire payement aux frères, sœtlrs.
« et bslle-sœur Laroclie-Negly, de la somme de 3666 ***
« 13^ 4$n, j pour reste de la dot constituée à Marthe Sai« gnard-Chomouroux leur m ère, lors de son contrat de
« mariage avec Am ablc Laroche-N egly, du 13 février
« 1746, et ce avec les intérêts encourus, savoir, de la
K somme de 666
13«/ 4^v > depuis le 14 février 1749;
« de la somme de 100 0^ , depuis le 14 février 17 4 7 ;
« d’autre somme de 1000
depuis le 14 février 1748;
« et enfin, de la somme de 1000
depuis le 14 février
“ 1749 » sous toutes les déductions et distractions de
B
�( ÏO }
« droit ; condamne les frères et sœurs Chomouroux aux
« entiers dépens envers les Laroclie-Negly. Comme aussi
« disant droit aux conclusions prises par les frères et
« sœurs Chom ouroux, demeurant les instances jointes,
« sans avoir égard à la demande en main-levée provi« soire et définitive des bannimens mis au préjudice des
« mariés Mathon et M ontereym ard, entre les mains du
« sieur B onneville, a condamné et condamne le sieur
« d’A rlem pde, et les mariés M athon et M ontereymard,
« en leur qualité de cohéritiers de Catherine Treveis
« leur bisaïeule, à relever et garantir conjointement les
« Chomouroux., pour la somme de 666
13^ 4-^, dont
a la condamnation se trouve prononcée eontr’e u x , en fa« veur des Laroclie-N egly, et ce avec les intérêts depuis
« le 14 février 1749, sous toutes déductions et distrac« tions de droit; et, sans avoir égard aux conclusions
« subsidiaires et principales prises par les mariés Mathon
« et M ontereym ard, dont les a dém is, les a condamnés
« et condamne, en leur qualité de successeurs à Cathe« rine Bonnafoux, héritière de Mai*ie-Marthe Treveis,
« à relever et garantir les Chomouroux de la condam« nation contr’eux prononcée de la somme de 3000
« et ce avec les intérêts depuis les époques fixées et
« adjugeés aux L a ro c lie -N e g ly , et sous les mêmes
« déductions et distractions ; a condamné conjointe« ment les mariés Mathon et Montereymard, et d’A r « lempde, â un tiers des dépens, tant de la demande
« principale que de celle en garantie, non compris les
« frais de la vérification des signatures des sœurs T re « -yeis, ensemble le rapport fies experts , lesquels dé-
�( 11 )
pens demeurent à la charge des mariés Ma th on , ensemble les autres deux tiers des dépens, ainsi que les
deux tiers du coût du jugem ent, l’autre tiers devant
être supporté conjointement par les Mathon et d’Ai>
lempde. »
Ce jugement est fondé sur une foule de motifs qu’il
est important de connoître pour les apprécier.
Les premiers juges posent d’abord les questions sui
vantes :
« Les réclamations de la famille Laroche-N egly, contre
« les frères et sœ urs Saignard, sont-elles prescrites?
« La prescription a-t-elle pu courir étant sous la puis« sance paternelle ? Préjugeant la prescription inter« rompue, faut-il porter la même décision à l’égard de
« la demande en garantie formée par les frères et sœurs
« Chom ouroux, contre les mariés M athon et M onle« reym ard, et le sieur Laval-d’Arlem pde ?
« Faut-il considérer les mariés Mathon comme liéri« tiers purs et simples, ou comme héritiers sous béné« fïce d’inventaire de M arie-Marthe T reveis?
« La main-levée, définitive ou provisoire, réclamée
« par les mariés M athon, peut-elle leur être accordée?
a Considérant que toute prescription n’a pu courir
« contre les enfans Laroche-N egly, pendant le vivant de
« leur père ; que tous les auteurs du parlement de Tou« louse enseignent unanimement que le fils de famille
« privé par la loi de l’usufruit de ses biens est censé
K ignorer ses droits ; qu’ayant les mains liées pendant
« le vivant de son p è re , et n’ayant pas l’exercice de ses
« droits et de ses actions, toute prescription, soit d’un
B a
'«f
«
«
«
«
�t iO
héritage ou d’une action , doit dormir et demeurer
suspendue , contra non valentem , etc. L e Journal du
Palais de Toulouse rapporte deux arrêts, du mois
d’août i 6 ç 5 et 1702, conformes à cette doctrine; il y
est dit : Quoique le père soit le maître des actions à
l’égard de son fils , cependant nous jugeons que la
prescription ne court contre le fils de famille que
depuis qu’il est sorti de la puissancee paternelle.
« Considérant que les enfans Laroche-Negly ne peu-*
vent être assimilés à des mineurs qui doivent se faire
restituer dans les dix ans de leur majorité; qu’il existe
même une différence bien prononcée par la lo i, entre
le mineur et le fils de famille ; que le mineur a le
libre exercice de ses actions.; il est nanti de ses titres,
et présumé avoir la jouissance de ses droits assisté d’un
curateur; il peut ester en jugement : le fils de famille,
au contraire, est privé de l’usufruit de ses biens; la
loi ne lui accorde aucune action pour agir ; il ne peut
ester en jugem ent, et la prescription ne reprend son
cours que dès l’instant qu’il se trouve affranchi de la
puissance paternelle.
« Considérant que la dame Cliom ouroux, femme Laro clie -N e g ly , ayant contracté mariage le 13 février
1746, et étant décédée le 4 juin 1766, il ne court sur
sa tête que dix ans trois mois de prescription utile ;
qu’ayant été interrompue pendant le vivant du père
des frères et sœurs Laroche-Negly, n’ayant repris son
cours qu’A l’époque de son décès, arrivé le 4 décembre
1783, il ne s’est écoulé , jusqu’au jour de l’introduc
tion de l’instance, qu'un intervalle de quinze ans, ce
�( 13 )
« qùi forme ün total de près de vingt-six ans-, qu’il fai« loit trente- années utiles pour opérer la prescription
« de l’action des frères et sœurs Laroche-Ncgly.
r
« Considérant que les experts ayant décluré les signa
it tures de Catherine et de M a r i e -M arthe Treveis sin« cères et véritables, on ne peut se méprendre sur l’in« tention de ces deux sœurs, manifestée dans la procu« ration du 9 février 1746 ; que la constitution de
« 4000 if faite à la mère des enfans Lnroche-Ncgly, p;,r
« “Louis Chomouroux son p ère, n’est que l’exécution (le
« la volonté des sœurs Treveis; que Louis Chomoui:ou;x
k ne peut être considéré que comme le mandataire de$« dites sœurs, ou tout au plus comme leur cautiçn ;
« que, dans ces deux cas, la prescription n’ayant pqs
« couru, ou ayant été interrompue sur la tête des suc« cesseurs de Louis Chom ouroux, elle doit subir le même
« sort vis-à-vis les représentais des sœurs T reveis, étai^t
« de principe certain qu’il n’y a que l’extinction de l’obl;•« gation principale qui entraîne celle de l’obligation
« accessoire, et que ce n’a été que du jour que les frères
« et sœurs Laroche-Ne^ly ont formé leur demande ju« diciaire contre les successeurs de Louis C hom ouroux,
« que ceux-ci ont pu former leur demande contre les
« mariés M athon, pour l’objet des 4000 ^ donnés par
« les sœurs T i’eveis.
« Considérant que Catherine Bonnafoux , aïeule.,des
« mariés M athon, et héritière deM arie-M arthe Treveis,
« ayant requis, par sa requête du 13 février 1759, la
« faction de l’ inventaire et l’appréciation du mobilier
« délaissé par la dame M arie-M arthe T rev eis, pour en
�( 14 )
« connoître la consistance avant de se déterminer à ac« eepter ou abandonner ladite hérédité ; qu’ayant fait sa
« déclaration au bureau de l’enregistrement, où elle ne
« prit point la qualité d’héritière sous bénéfice d’inven
te taire ; qu’ayant constamment joui les biens de M arie« M arthe T reveis, en ayant disposé comme de sa chose
« propre, et sans avoir jamais pris la qualité d’héritière
cc sous bénéfice d’inventaire; qu’ayant encore sollicité,
« par lettres, des délais pour payer, on ne peut se dkk penser de la regarder comme héritière pure et simple,.
« et s’étant déterminée, après la faction de l’inventaire,
« à accepter purement et simplement.
« Considérant que M ichel M ontereymard, fils de Ca« tlierine Bonnafoux, et père et beau-père de Marie
« M athon, a réclam é, par lettres, des termes, et offert
« des biens fonds en payement; qu’il a accepté purement
« et simplement la succession de Catherine Bonnafoux
« sa mère ; qu’il a vendu le champ porté dans la décla« ration faite au bureau de l’enregistrement, sans pren« dre la qualité d'héritier bénéficiaire de sa mère et de
« la dame Treveis ; que la femme M athon a pareille« ment accepté la succession de M ichel Montereymard
« son p è r e , sans réclamer la division do la succession
« de M arie-M arthe Treveis ; qu’il s’est en conséquence
« opéré une confusion dans ces' diverses successions.
« C o n sid é ra n t que le délai pour délibérer présup« pose que l’héritier a la liberté d’accepter ou d’aban« donner; que s'il laisse passer plus de quarante jours
« après l’inventaire fait de son consentement, sans expli« quev ses intentions, il est tenu de se départir de la
�t 15 )
« faculté que la loi lui accorde, d’accepter sous be-ne■
« iice d’inventaire ; qu’alors la loi le répute héritier pur
« et sim ple, et le prive de la faculté de répudier.
«
«
«
«
« Considérant que ne s’étant élevé aucune contestation à raison du don de i o o o ^ , fait par Catherine
Treveis à la mère des enfans Laroche - Negly ; qu’ il
résulte du testament de cette dernière, que les mariés
Matlion et d’Arlem pde sont cohéritiers, pour un tiers,
« <le la <lanse Catherine T r e v e is ; l’on ne peut se dis-
« penser d ’en
pro n o n ce r la jccmcLamnation en fa v e u r des
« -enfans L a r o c h e -N e g ly .
« Considérant enfin qu’ un débiteur ne peut obtenir
« ‘la main-levée définitive ou provisoire, qu’autant qu’il
« justifie de sa libération , etc. etc. »
T e ls sont les nombreux motifs du jugement : il étoit
impossible de les analiser ; on ne peut les faire com
prendre qn’en les rapportant dans leur intégrité.
La dame Montereymard et son mari en ont interjeté
appel. Ils ont attaqué ce jugement par des vices de form e,
«t des moyens au fond. Ils ont remarqué que les exploits
Introductifs, tous les actes de la procédure, ainsi que les
:jugemens rendus, ne contenoient pas les prénoms d u '
frère Saignard, les noms de ses sœurs , ni les qualités
des parties, qu’aucun des exploits de demande n’étoil
libellé.
Ils ont invoqué l’article i ev. du titre -2 des A jo u rnemens, de l’ordonnance de 1667, qui porte « que les
« ajournemens et citations, en toute matière, et en toutes
* juridictions, seront libellés , contiendront les co n c lu -
�( i6 )
or sions, et sommairement les moyens de la demande, L
« peine de nullité des exploits ; »
I/article 2 du même titre, qui dit que les huissiers
exprimeront le domicile et la qualité des parties, ausJ
à peine de nullité.
Les appelans ont encore observé que Saignard, comme
Laroclie-N egly, ont toujours procédé comme procureurs
fondés. Les citations et les assignations, tant de Saignard
que de Laroche-N egly, sont données à leur requête, tant
pour eux que pour leurs frères et sœurs.
Quant aux saisies-arrêts, les appelans en ont égale
ment demandé la nullité. Il est de règle constante qu’on
ne peut faire saisir et arrêter qu’en vertu d’un titre au -y
thentique, ou au moins en vertu d’une permission dej
la justice. Ici les Saignai*d, ou du moins le frèi’e , tant
pour lui que pour ses sœurs , avant aucune demande
formée par les Laroch e-N egly, avant que la prétendue
procuration sous seing privé fût vérifiée en justice,
enfin, avant d’avoir un titre quelconque, s’est permis
de faire saisir et arrêter, de son autorité, les revenus des
appelans, entre les mains du sieur Bonneville.
Cette manière de procéder est inouïe et choque toutes
les règles connues. Les appelans insistent sur ces vices
de forme, que la cour appréciera dans sa sagesse. La loi
prononce; il n’est pas possible de s’écarter de sa dispo
sition : les formes sont conservatrices de la propriété,
et il est très-im portant, surtout pour le pays d’ Yssingeaux, que la cour apprenne enfin, par un grand exem
ple, qu’on doit procéder d’une manière conforme ù la loi.
' Les appelans ne s’étendront pas davantage sur cette
matière
�i7 y
matière qui pourra donner lieu à des observations plus
amples lors du rapport : ils se hâtent d’examiner le fond
de lu contestation.
On peut la réduire h trois propositions :
i° . La donation portée au contrat de mariage de 174^* > '
est-elle obligatoire contre M arie-M arthe Treveis ou les *
appelans qui la représentent ? A - t - o n pu former une
action contre eux pour cet objet?
20. Cette action, si elle a existé , ne seroit-elle pas
prescrite ?
dans tous les cas, faire considérer les
appelans comme héritiers purs et simples de M arieMarthe T reveis? ou au contraire devroit-on se borner à
leur demander le compte bénéficiaire de la succession
de la veuve Plantier?
30. Pourroit-on,
§
Ier-
La donation portée par le contrat de mai'iage de
M arie-M arthe Saignard-Chomouroux , du 13 février
1746 , a été faite par Pierre Saignard-Chomouroux, son
p è re , en ces termes : M ille livres que le père a ordre
de constituer à la demoiselle future épouse , du c h e f
de dame Catherine Treveis , aïeule maternelle de cette,
dernière. T ois mille livres du c h e f de dame M arieM arthe Treveis , veuve de M . P la n tier , aussi par
i on ordre , etc.
Il n’y a point de procuration rapportée de la part de
celles dont on dit avoir l’ordre ; il n’en existe pas d’annexée au contrat : aussi voit-on que le père ■
s’ob lige, en
C
�( i s y
son propre et privé nom , au payement des sommes
constituées.
Il falloit bien que le constituant le prît pour son compte.
Les clauses cl*un contrat de mariage ne doivent pas être
douteuses ; son exécution ne doit pas dépendre de causes
étrangères. Cependant sans l’obligation du père il n’y
auroit eu rien cle certain ; le contrat n’eût plus été un
acte constant et indépendant, quoique l’engagement eût
été formé dans l’espérance d’avoir la somme promise.
Aussi est-il certain, en point de droit, qu’une donation
ne peut être faite au nom d’un tiers sans procuration de
sa part ; une promesse faite au nom d’un tiers ne l’en
gage pas ; elle peut devenir inutile par le refus de la
ratifier; toutes les promesses faites par contrat de mariage
sont irrévocables de leur nature. On ne /peut donc point
autoriser , surtout dans un contrat de mariage, des dis
positions q u i, pouvant être révoquées ou ne produire
aucun eiTet, laissent les parties contractantes dans un
état d’incertitude qui répugne à la nature du contrat.
M . l’Epine de Grainville rapporte un arrêt du 28
février 1726 , qui a jugé conformément à ces principes.
Dans l’espèce de cet arrêt , un particulier appelé Jean
Gaugery avoit fait à Antoine son frè re , et par le contrat
de mariage de ce dernier , une donation de tous les
biens présens et à venir que lui et Marie sa sœur , avec
laquelle il vivoit en commun , auraient au jour de leur
décès. Cette donation étoit faite comme se portant fort
pour M arie, et sans procuration : la donation étoit du
27 juillet 1690, et Marie l’avoit ratifiée le i 5 novem
bre : Marie mQiirut et laissa pour héritiers tous scs
�( x9 )
n eveu x, et entr’autres les enfans d’un quatrième frère
nommé M arcou.
Ces derniers demandèrent la nullité de la donation
faite au nom de M arie, sans procuration de sa p art,.et
soutini’ent que la ratification postérieure de leur tante
•n’avoit pu valider un acte nul dans son principe. L ’arret
déclara la donation nulle, sans aucun égard aux moyens
que faisoient valoir les enfans du donataire, qui prétendoient que la ratification devoit avoir un effet ré
troactif, puisqu’elle ne laissoit aucun doute sur le pou
vo ir que Jean avoit eu de M arie pour faire la donation.
Il est vrai qu’il s’agissoit dans l’espèce d’une donation
de biens à venir, qui ne peut avoir lieu que par contrat
de mariage ; mais cette circonstance ne change rien aux
principes qui s’opposent à ce qu’on ne puisse stipuler au
nom d’un tiers sans son aveu. Une ratification posté
rieure est presque toujours l’effet de la séduction ou
de la complaisance. O n peut arracher le consentement
par importunité , et pour ne pas compromettre celui
qui a pris sur son compte de contracter sans pouvoir.
Ce seroit en quelque manière forcer la volonté , et
engager un tiers malgré lui-même ; ce qui pourroit en
traîner les plus grandes conséquences.
En vain les intimés voudroient-ils opposer l’acte sous
seing privé , qu’ils datent du 9 février 1746 , et pap
lequel l’aïeule et la grand’tante sembleroient avoir donné
ordre à Pierre Saignard de faire cette constitution pour
leur compte. D ’abord , cette prétendue procuration
n’a été enregistrée que le 10 décembre 1763 j c’est-àd ire , sept années après le mariage : elle n’a donc de
C 2
�C( 20')
date qu’à cette époque ; et encore n’est - ce pas une
ratification de la libéralité , mais seulement une autori
sation de donner, qu’on voudroit faire remonter avant le
contrat de m ariage, et dans un temps où elle n’existoit
pas ? Ce retard dans l’enregistrement prouve que Pierre
Saignard avoit été assez imprudent pour vouloir en
gager Catherine >Treveis et sa sœur , à leur insu ; et
comme il s’étoit obligé personnellement au payem ent,
il a voulu avoir un titre, qu’il a sollicité et obtenu de
la complaisance ou de la foiblesse de deux iemmes qui
n ’ont osé lui refuser. La preuve que cette prétendue
procuration est postérieure au contrat de m ariage, ré
sulte des termes dans lesquels elle est conçue ; il fait
obliger les constituantes à lui rembourser les sommes,
attendu q iiil s'obligera de les payer.
O r , comment concevoir qu’on a prévu que Saignard
s’obligeroit à payer ces sommes. Si véritablement il y
avoit eu un pouvoir valable , rien de plus inutile que
l’obligation personnelle du père; il étoit si simple de
prendre une procuration , de l’annexer au contrat, et
de faire faire la donation par celui qui auroit rempli
la procuration. Il est inusité , il est inouï , de faire
obliger quelqu’un.pour celui qui donne; c’est déjà faire
douter de la solvabilité du donateur ; c’est au moins lui
faire injure ; et ce n’est pas ainsi qu’on honore un contrat
de mariage.
Il est bien démontré que le pouvoir n’existoit pas
lors du contrat de mariage. Dans la suite > la procu
ration qu’on a rapportée sous seing privé , ne pouvoit
avoir aucun effet. Cet acte sous seing privé contient une
�f 2ï )
véritable donation entrc-vif's ; e t , d’après l’ortlonnan-ce
de 1731 , une donation n’est valable qu’autant qu’elle
est faite devant notaire. « Tous actes portant donation
« entre-vifs seront passés devant notaires, et il en rcs« tera minute, à peine de nullité. » ( A rticle i er. de l’or
donnance. )
On sent aisément le motif de la loi , lorsqu’elle a
ordonné impérieusement cette formalité. Une des qua
lités essentielles de la donation e n tre -v ifs est l’irrévocabilité. Un acte sous seing privé n’a aucune date cer■tüine; tous actes emportant hypothèque, faits postérieu
rement, lui seroient préférés; ce seroit donc, com m el’avoit
dit Ricard antérieurement à l’ordonnance , traité des
D onations, partie i re. , chap. 4 , n. 881 , tomber dans
l’inconvénient de la règle donner et retenir, si les dona
tions demeuroient sous seing privé jusqu’au décès du
donateur , parce qu’ il auroit toujours conservé par ce
moyen la liberté de faire qu’elles ne subsistassent plus;
■enfin rien ne seroit plus facile que de supposer de fausses
donations.
En un m o t, il n’ existoit aucune obligation des deux
femmes Treveis lors du contrat de mariage de 1746.
Pierre Saignard a. tout pris sur son compte- Un acte
•sous seing privé ne peut produire aucun effet h côté
¿ ’un contrat de mariage ; ce seroit une véritable contrcïettre au co n trat, et toute contre-lettre au contrat de
mariage est absolument n u lle , ù moins qu’elle ne soit
signée de tous ceux qui étoient présens au mariage.
On ne sauroit donc se tenir trop en garde contre un
acte produit cinquante-trois ans après le mariage. Inde-
�( 22 )
pendamment des motifs de suspicion qui naissent aiséïnent contre une production tardive , la procuration est
irrégulière et nulle : Pierre Saignard n’a pas reçu une
autorisation suffisante ; les femmes Treveis pou voient
révoquer ce pouvoir sous seing privé ; elles n’ont pas
valablement, donné : d ès-lors il est impossible que ce
prétendu pouvoir puisse faire naître une action contre
les appelans.
§ IICette action, dans tous les cas, étoit prescrite à l’époque
où elle a été exercée. La dame Laroclie-Negly , mariée
en 1746 , et qui fut l’objet de la prétendue donation,
a survécu plus de quinze ans h M arie-M arthe T reveis,
sa grand’tante ; son mari a vécu plus de vingt-quatre
ans après : jamais on a osé faire paroître la procuration,
du vivant de l’aïeule ni de la tante. L a femme ni le
mari n’ont jamais réclamé de leur vivant. Toutes lés
sommes promises par le contrat de mariage devoient être
payées quatre ans après ; comment concevoir que les
sieur et dame Laroche-Negly eussent constamment gardé
•le silence, s’ils n’avoient pas reçu le montant de la consti
tution portée au contrat de mariage.
En pays de droit é c rit, et notamment d’après la juris
prudence du parlement de Toulouse, où les parties sont
domiciliées , le mari devient responsable de la d o t ,
quand même il ne l’auroit pas reçue , s’il ne s’est fait
payer par le constituant, au temps et au terme porté par
le contrat de mariage. Catelan , tome 2 , liv. 4 , dit que
le mari est responsable de la dot constituée par le père t
�(i 23 )
de la fem m e, lorsqu’il a demeuré dix ans après la célé
bration ou le terme du payem ent, sans en faire demande
à son beau-père.
A la vérité , continue Catelan, on ne lui impute pas
s’il n’a pas pressé son beau-père pendant les dix pre
mières années; mais s’il a laissé passer dix ans sans en
faire demande , cette patience trop longue tourne en
négligence, et le charge de cette d o t , comme s’il l’avoit
reçue. Ce n’est pas alors le cas de la l o i, où la femme ne
peut imputer au m a ri, cur non u rserit, et il y a un
grand milieu entre presser et laisser passer dix ans sans
foire de poursuites. D ix ans sont d’ailleurs un temps que
les lois mettent souvent en usage , et qu’elles emploient
pour termes et pour bornes en bien des rencontres. Catelan
rapporte cinq arrêts à l’appui de son opinion : l’u n , de
1664; un second, du mois d’avril de la même année;
un troisième , du mois de mai i 665 ; un autre, du mois
de septembre 1696; et le dernier, du 9 février 1699.
Ce long espace de dix ans , à compter des term es, sans
aucunes poursuites , doit faire présumer le payement ;
et cette' présomption ne devient-elle pas une certitude ,
lorsqu’on voit que non-seulement le mari ni la femme
n’ont rien réclamé pendant leur v i e , mais que ce n’est
qu’en l’an 7 , cinquante-trois ans après , que les héritiers
Saignard forment cette demande contre les appelans?
Ceux-ci sont donc encore dans l’exception de la pres
cription trentenaire : il n’y a eu dans la famille CI10^mouroux aucune, minorité qui ait pu suspendre ou
Jarrêter le cours de cette prescription ; elle a commencé
13 tévi-icr 1749, échéance des termes de payement ;
elle a donc été accomplie le 13 février 1779.
�( 24 )
Les frères Saignard - Chomouroux sont obligés de
convenir qu’il n’y a point eu dans leur famille de mino
rité interruptive de la prescription ; mais ils voudroient
éluder l’exception, sous un prétexte frivole. Ils préten
dent que leur action contre les appelans n’est autre chose1
qu’une demande en garantie, qui ne pourrait prescrire
qu’autant que la demande pi’incipale des Laroclie-Negly
serait elle-même prescrite : ils s’efforcent ensuite d’éta
blir que l’action principale des Laroclie-Negly est tou
jours entière.
Pour répondre à cette objection, il faut d’abord exa
miner la nature de l’action que les Chomouroux vou
droient exercer contre la dame Mathon. Il est facile de
prouver que c’est une action principale, distincte et in
dépendante de celle des frères et sœurs Laroclie-Negly.
En effet, la constitution portée au contrat de mariage
de 17 4 6 , a été faite par le père Chomouroux à sa fille.
Il annonce bien à la vérité qu’il avoit ordre de la faire
du chef de l’aïeule et de la tante ; mais il prom et. en son
nom personnel, de faire le payement de lu totalité des
sommes constituées.
O r , dès que le père s’est obligé en son nam , qu’il
n’a point agi en qualité de mandataire , sa fille ou ses
enfans n’avoient aucune action contre l’aïeule ou la tante;
ils ne pou voient s’adresser qu’à leur p è re , qui seul étoit
débiteur.
La procuration du 9 février 1746 ne donne pas au
père Chomouroux le droit de se pourvoir contre les
constituantes , eu garantie de l’action que les frères et
sueurs Larocho-Ncgly exerceraient contre lui en payement
des
�( *5 )
des sommes constituées. L ’aïeule et la tante promettent
seulement à leur neveu de lui rembourser ou faire rem
bourser ces sommes, attendu qu 'il s'obligera de les
payer. Ce ne seroit donc jamais qu’une action en rem
boursement que le père Chomouroux auroit pu former
contre les constituantes ; action absolument distincte et
indépendante de celle des enfans Laroche-Negly. Si donc
l’action des Chomouroux est principale et indépendante ,
ils ont dû l’exercer dans un temps u tile, c’est-à-dire, avant
trente ans, à compter de l’échéance des termes*, ils ont
dû m êm e, avant cet intervalle, faire reconnoître le titre
d’où ils prétendent faire dériver leur action.
Il seroit donc fort inutile de vérifier maintenant si
l’action des L aro ch e-N egly contre les Chomouroux est
toujours entière ; cette question est sans intérêt pour les
appelans : mais il seroit encore facile de prouver que
même la demande des Laroche-Negly étoit éteinte par la
pi'escription, au moment où ils l’ont exercée.
Il ne s’agit point ici d’un immeuble dotal, qui ne peut se
prescrire pendant le mariage, ou pendant l’usufruit du
p è re , mais bien d’une somme m obilièi'e, dotale à la vé
rité, mais dont le mari ou le père étoit le maître, et qu’il
avoit seul le droit de recouvrer.
Catelan, tom. 2, liv. 4, chap. 45 , enseigne que la pres
cription d’une somme due à la femme court en faveur de
son débiteur, quoique la femme ait constitué à son
mari tous et chacun ses biens, et que la prescription n’eût
pas commencé avant le mariage. Il y a cette différence
entre le fonds dotal et une somme m obilière, que le
premier ne peut prescrire pendant le mariage. La raison
D
�(26)
de cette différence est prise de ce que la loi J u l'a défen^dant toute aliénation d’un fonds dotal, en défend par
conséquent la prescription; mais la loi J u lia ne défen
dant pas l’aliénation d’une dette, rien n’empêche que la
prescription ne courre en faveur du débiteur. On ne peut
opposer, ajoute Gatelan, la règle qui dit que la prescrip
tion ne court pas contre celui qui ne peut a g ir , et que
la femme ne pouvant pas agir pendant le mariage contre
son débiteur, il semble qu’il ne peut pas lui opposer de près- ,
cription; d’autant qu’à l’égard du débiteur il suffit qu’il y ait
une personnequi puisse agir, à qui la somme appartient pen
dant le mariage, tel qu’est le m ari, qui d’ailleurs, pouvant
retirer payement de la dette, et libérer le débiteur, doit
nécessairement donner lieu au cours de la prescription.
Prœ scrihens solventi sim ilis est. L e laps de trente ans fait
présumer que le payement a été fait au mari.
Serres, dans ses Instituts, liv. 2 , tit. 8 , est du même sen
tim ent; la loi J u lia , d it-il, ne s’applique qu’au fonds
dotal, mais non à la prescription d’ une dette.
Cette doctrine , bien constante dans le ressort du parle
ment de Toulouse, s’applique parfaitement à l’espèce. La
prescription a commencé à courir depuis 1749* L e père
Laroche - Negly n’est décédé que le 4 décembre 1783,
trente-quatre ans après l’échéance des termes. L ’action de
ses héritiers est donc également prescrite.
En vain les enfans Laroche-Negly voudroient-ils éta
blir une différence entre la femme et les enfans mineurs
&ous la puissance paternelle; en vain voudroient-ils pré
tendre que la prescription ne court pas contre ces derniers
pendant la durée de l’usufruit : ce seroit une erreur en
�C ¿7 )
point de d roit, quia abi eadem ra tio , ibidem jus. L e
père n’a-t-il pas le d roit, comme le mari , de faire le
recouvrement des sommes mobilières qui reviennent à ses
mineurs? n’a-t-il pas la faculté d’agir ? n’est-il-pns de
principe que les créances personnelles d’un mineur, pourvu
d’un tuteur, peuvent prescrire pour le débiteur, sauf
le recours des pupilles contre le tuteur? Mais, dans tous les
cas, les enfans Laroche - Negly n’en seroient pas plus
avancés en point de fait. M arie-M arthe Saignard, leur
m ère, a vécu jusqu’en 1774» il s’étoit déjà écoulé vingtcinq ans utiles pour la prescription ; ce n’est que quinze
ans après la mort de leur père que les enfans LaroclieNegly se sont pourvus : leur action, sous tous les rapports,
étoit également prescrite.
Les intimés ne peuvent se refuser à l’évidence ; ils voudroient user de leur dernière ressource, et produisent
trois lettres qu’ils attribuent l’une à l’aïeu le, les deux
autres au père de la dame M atlion : ces lettres, nonreconnues ni vérifiées, et sur lesquelles il s’élève des
doutes, ne peuvent influer sur le sort du procès.
1
La prem ière, prétendue écrite par la veuve Montereyrnard, est sous la date du 13 mars 1760: il en résulte qu'à
cette époque, et plus d’un an après la mort de MarieMarthe Treveis , Catherine Bonnafoux n’avoit aucune
connoissance de ce prétendu titre de 1746 ; depuis ce
moment jusqu’à la demande, il s’est écoulé trente-neuf
ans.
Celles que l’on dit écrites par M ichel Montereymard ,
n ont aucun rapport avec la procuration. Il ne peut s’oc
cuper d’affaires avec Clioinouroux, et prie d’attendre qu’il
D 2
�( 28 \
en ait terminé d’autres. Il se plaint ensuite de ce qu’on lui
demande quelque chose sur la succession de M arie-M arthe,
et finit par dire qu’il renoncera à la succession si on exige
le payement de ce qui pourroit être dû. Mais nulle part
on ne voit aucune explication précise de l’objet particulier ;
tout annonceroit, au contraire, qu’il n’en avoit aucune
connoissance. E nfin, l’une de ces lettres, sans date, est
adressée au sieur L a v a l, et ne peut se trouver dans les
mains des Chom ouroux que par un abus de confiance : et
L aval n’avoit pas craint lui-même de faire assigner la dame
Mathon pour une somme de 2000^ qu’il prétendoitlui
être due; mais on rapporta la quittance donnée par son
père ù. l’aïeule de la dame Mathon. Il paroît plus que vrai
semblable que toutes les affaires de famille étoient termi
nées depuis long-temps. On voudroit abuser du peu de
connoissance qu’a la dame M athon de ce qui s’est passé
dans la fam ille; mais un silence de cinquante-trois ans,
sans aucunes poursuites, est un obstacle insurmontable.
L a demande actuelle a toute la défaveur d’une vieille
recherche : en point de droit elle n’est pas fondée, en
point de fait elle est prescrite.
§. I I I .
Xæs appelans, dans tous les cas, ne sont pas héritiers
purs et simples de M arie-M arthe T reveis; Catherine
Bonnafoux leur aïeule n’a accepté la succession que par
bénéfice d’inventaire.
Ce n’est que très-subsidiairement, et pour ne rien né
gliger co cour souveraine, que les appelans réclament
�( 29 )
contre le chef du jugement qui les a condamnés comme
héritiers purs et simples. Ils croient avoir dém ontré, i° .
qu’il n’existe aucune obligation des deux femmes Treveis;
2°. que les intimés n’ont aucune action contre eux; 30. que
cette action, dans tous les cas, est éteinte parla prescription.
Mais on se rappelle que lors du décès de M arie-M arthe
Treveis, du 16 janvier 1769, les scellés furent apposés
sur ses meubles et effets, à la diligence de dame Catherine
Bonnafoux, aïeule de la dame Mathon. Sa requete, du 13
février de la même année 1759, présentée au sénéchal
du P u y , tend à la vérification et levée des scellés apposés
par le même juge. Cette requête est suivie d’une ordon
nance de transport pour la vérification des scellés qui
avoient été apposés le 16 janvier précédent, même jour
du décès. Vient ensuite l’inventaire fait par le même juge
en présence du procureur du r o i, après assignation à toutes
les parties intéressées, mais hors la présence des père et
mère des appelans, quoiqu’ils y eussent été appelés. Depuis,
Catherine Bonnafoux n’a pris d’autre qualité que celle
d’héritière bénéficiaire ; c’est en cette qualité que , le 8
novembre 1769, elle fait commandement à plusieurs dé
biteurs de la succession ; c’est en la même qualité que, le
31 mai 1759, elle acquitte une dette de la succession au
profit de Maximilien Gautier-la-Boulaye, créancier de
cette succession.
L ’inventaire n’a jamais été attaqué de fraude ou d’o
mission; il contient rémunération de tout ce qui compose
la succession, ornnia jura successionis.
Les poursuites actives et passives n’ont été faites qu’en
cette qualité d’héritière bénéficiaire; les appelans pro
�duisent ces actes anciens qui doivent faire foi pleine et en
t iè r e , d’après la maxime ln antiquis enunciativa pro
bant. Ces actes remontent à plus de quarante-cinq ans. En
pays de. droit écrit, il n’étoit pas nécessaire d’obtenir des
lettres de bénéfice d’inventaire; la déclaration de l’héri
tier et l’inventaire suffisoient pour attribuer la qualité.
Gomment donc les premiers juges se sont-ils déterminés
à condamner les appelans comme héritiers purs .et sim
ples , parce qu’ils nuroient accepté purement et simple
ment la succession de leur père et aïeule? cette circonstance
peut-elle influer sur la succession de M arie-M arthe T reveis ? l’une n’a rien de;commun avec les autres, et c’est une
injustice de plus, contre laquelle les appelans sont bien
fondés de réclamer.
Ils ne sont parvenus à réunir quelques pièces de famille
qu’avec des soins infinis et des recherches multipliées dans
les dépôts publics. Lai dame Ma thon-, orpheline, fut mise
en tutelle dès le plus bas âge ; son tuteur est décédé sans
lui avoir rendu compte de sa gestion, et elle s’est vaine
ment pourvue pour obtenir au moins la remise de ses
pièces; elle se voit accablée tout à coup par des pour
suites rigoureuses des Chom ouroux, q u i, abusant de son
ét.'.t d’ignorance, ont voulu surprendre sa foiblesse; ils
sont allés jusqu’à.provoquer la demande des enfans Larochc-Negly avec lesquels ils sont d’accord; ils ont attendu,
pour frapper des coups plus certains, que l’aïeule, le père,
el le tuteur de la dame Ma thon fussent décédés; c’est alors
qu’ils ont cherché- ù faire sortir du tombeau de la pres
cription, des titres surannés et nuls ; ils ont osé repro
duire une vieille recherche que lcux’s auteurs avoienteon-
�( 31 )
damnée à l’ oubli : mais leurs intentions perfides ne p e u
ven t être couronnées d’aucun succès; ils ont n é g lig é o u
m éconn u les premières règles de la pro céd u re ; le titre
q u ’ ils in v o q u e n t, et q u ’ils ont sorti de la poussière, est
irrégulier et nul. T o u t p r o u v e qu e depuis lo n g -te m p s
les affaires de famille étoient terminées. E n f in , la pres
cription , ce remède l é g a l , vient au secours des appelans;
et certes il ne fut jamais m ie u x appliqué.
M.
C A T H O L ,
M e. P A G E S
r a p p o r te u r .
( d e R iom ) , a n c ie n a v o c a t.
M e. V A Z E I L L E ,
avoué.
ARIO M ; de l' imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de
la Cour d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montereymard, Julie-Angélique. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Julie-Angélique Montereymard, et le sieur Jacques Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'Yssingeaux le 15 floréal an dix ; contre les sieurs Joseph-Raymond, Bénigne, Alexis-Françoise Saignard-Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; et encore contre George-François-Alexis Laroche-Negly, propriétaire, habitant du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Lardeyrol, intimé. Question principale : Une donation faite au nom d'un tiers, par contrat de mariage, et sans procuration de sa part, est-elle obligatoire pour celui au nom de qui elle est faite ?
Arbre généalogique.
Table Godemel : Dontation : 9. une donation faite au nom d’un tiers, par contrat de mariage, en 1746, et sans procuration annexée, est-elle obligatoire pour celui au nom duquel elle a été faite ? Si celui qui s’est porté fort a rempli la donation, a-t-il une action en garantie contre le tiers dont il avait reçu procuration par acte sous signature privée ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1746-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1601
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1223
BCU_Factums_G1602
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
donations
droit écrit
expertises graphologiques
experts
inventaires
signatures
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53181/BCU_Factums_G1223.pdf
affa94a4d1854b1f53e3b42f4c8bbc74
PDF Text
Text
JSt
MÉMOIRE
p
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J £ i rtl
lU tV U lO
r
.
i**Ur-iy$,
Dame J u l i e - A n g é l i q u e M O N T E R E Y M A R D , et le
sieur J a c q u e s M A T H O N , son m ari, propriétaires, habitans d u lieu de Bourg-Argental,appelans d’un jugement
rendu au tribunal d’Yssingeaux le 1 floréal an d ix;
5
C O N T R E
Cour
D ’a p p e l
SÉANTE
L e s sieurs
J
oseph-
R
a y m o n d
, B
én ig n e
, A
lexis
-
a r io m.
S A I G N A R D -C H O M O U R O U X ,pro- =
priétaires, habitans de la ville d 'Y ssingeaux, intimés ;
F
rançoise
ET
G
ENCORE
C O N T R E
L A R O C H E -N E G L Y ,
propriétaire habitant du lieu de Cham blas, commune
de Saint-Etienne-Lardeyrol , intimé.
eorge-
F
rançois-
A
lexis
Q U E S T IO N
P R IN C IP A L E .
Une donation fa it e au nom d'un tiers , par contrat
de mariage, et sans procuration de sa p a rt, est-elle
obligatoire pour celui au nom de qu i elle est faite ?
C a t h e r in e et Marthe T r eveis étoient sœurs. La pre
mière épousa Georges Bonnafoux, et eut trois enfans,
A
i
j'
£
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. *
A 4»
Vv*Àà
-
Ht.
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%. . Catherine, Francoise-Hyacintlie, et Cathei'ine-Francoise.
seconde épousa Bénigne Plantier; elle est morte sans
enfans. Catherine Bonnafoux, première fille de Catherine
xi+* Treveis, s’est mariée avec Gaspard M ontereymard, et a
eu de son union M ichel M ontereym ard, d’où est issue
dame Julie-A ngélique, épouse de sieur Jacques Mathon.
Ce sont les appelans.
Françoise-Hyacinthe Bonnafoux a contracté mariage
avec un sieur Louis de Laval-d’Arlem pde , et a eu un fils
qui a figuré dans la cause principale, mais n’est pas
partie sur l’appel.
Catherine-Françoise, mariée à Pierre Saignard-Chom ouroux, a eu douze enfans ; il n’en existe plus que
trois et les enfans d’un autre. Les trois existans, parties
au procès comme intimés, sont Joseph Raymond, LouiseFrancoise,
et Alexis-Francoise.
»
M arie-M arthe , quatrième enfant , épousa FrançoisAm able Laroche-Negly ; il en est provenu quatre enfans:
Georges-François, l’un d’eux,est seul en cause sur l’appel.
L e 13 février 1746, par le contrat de mariage de MarieMarthe Saignard-Cliom oroux , avec François - Am able
L aroche-N egly, ses père et mère lui constituèrent une
somme de 18000 ft~; savoir, celle de 9000 pour droits pa
ternels, 2000 1i~ du chef maternel, 1000 ^ que le père
a ordre de constituer à la demoiselle fu tu re épouse,
du c h e f de dame Catherine Treveis, aïeule maternelle
de cette dernière, 3000 *** du c h e f de dame M arie-M arthe
T reveis, veuve de M . P la n tie r , aussi de son ordre,
1000
du c h e f de M . J e a n -A y m é de Saignard-deC hom ouroux, aussi de son ordre, en tant moins des
~1
7
3
�JZ
( 3 )
droits légitimaires qui peuvent lui être dûs du chef
de ses père et m ère, et finalement la somme de 2000 ***
que demoiselle Marie - A lexis de Saignard, présente,
donne et constitue de son chef.
« Laquelle entière constitution, est-il ajouté, ledit sieur
« de Chom ouroux, tant de son chef que de celui des
« dames Treveis aïeule et tante, etc. a promis et prom et,
a en son propre et privé n om , et solidairem ent, payer. »
L e père p a y e, en effe t, jusqu’à concurrence de
12000 t t . Cette dernière somme est stipulée remboursa
ble en payemens égaux et annuels de la somme de 3000 ^
chacun, à commencer en un an lors prochain, et succes
sivement d’année en année, sans intérêts qu’à défaut de
payement.
I/’aïeule ni la tante ne sont présentes à ce contrat.
L e 30 avril de la même année 1746, Catherine Treveis,
aïeule de la dame Laroche-Negly, fit son testament, et con
firma la donation de 1000 ^ portée par le contrat de
mariage de sa petite-fille.
L e 30 août 1757, Marie-Marthe T reveis, veuve Plant ie r , fit aussi son testament. Il contient quelques legs
p ie u x , et une institution universelle, au profit de Ca
therine Bonnafoux , veuve Montereymard , mère des
appelans, et garde le silence le plus absolu sur la dona
tion de 3000 ^ que L o u is-P ierre S a ig n a rd -d e -C h o
mouroux disoit avoir faite par s o j i ordre à la dame
Laroclie-N egly, sa fille, lors de son contrat de mariage.
La succession de M arie-M arthe Treveis étoit fort obé
rée : la dame Bonnafoux ne voulut l’accepter que par
bénéfice d’inventaire, lorsqu’elle connut le testament. Elle
A 2
>5
�. U )
fit procéder à l’inventaire, après en avoir obtenu la per
mission, avec assignation aux parties intéressées. La darne
Laval seule s’y lit représenter pour réclamer une somme
de 2000
qui lui avoit éLé constituée par la défunte,
lors de son contrat de mariage de 172 7; mais la dame
Saignard ne s’y présenta point.
Suivant les titres qui ont été trouvés dans les papiers
de la dameBonnafoux, et qui sont écrits de sa main, l’actif
de la succession de la dame veuve Plantier, dans laquelle
on comprenoit une maison sise en la ville du P u y , se
portoit à 26900
et le passif à 29300
encore ne
comprenoit-on pas dans le passif ni la créance de 2000
de la dame L a v a l, ni la prétendue créance de 3000
répétée par la dame Laroche-Negly.
A in s i, la dame veuve Plantier ne laissoit pas suf
fisamment pour acquitter ses dettes, et il est établi par des
quittances, dont on est en état de justifier, que la dame
Bonnafoux a payé au delà de l’actif, comme aussi qu’elle
a remboursé à la dame Laval les 2000
qu’elle avoit
droit de répéter.
La succession de Marie-Mnvthe Treveis, veuve Plan
tier, ne s’est ouverte qu’en 17^9, deux ans après qu’elle
eut fait son testament. La dame Laroclie-N egly, sa petitenièce, lui a survécu plus de quinze ans, et le mari de
celte dernière a vécu plus de vingt-quatre ans après la
grand’tante de sa femme. Les deux époux , le mari
surtout, maître de la dol mobilière , n’a jamais réclamé ,
ni contre la grand’tante , ni contre scs héritiers, le
montant de la donation portée en son contrat de mariage.
Cependant le sieur Saignard Cliom ouroux, son beau-
�( 5 )
p è re , avoit contracté l’obligation personnelle d’acquitter
le montant de la dot constituée de son chef ou de l’ordre
prétendu de la veuve Plan lier ; il en avoit payé une partie
et avoit pris pour le surplus des termes rapprochés qui
depuis bien long-temps étoient échus.'
, .
Eu général, et surtout en pays de droit écrit, ¡la- dot
est censée payée après dix ans, à compter du dernier
terme échu ; le mari en devient seul responsable : c’est
ainsi qu’on le jugeoit constamment au parlement de T o u - A
lousc , dans le ressort duquel les parties sont domiciliées.
-C e n’est qu’en l’an 7 , et par acte des 18 floréal et,;
7 prairial de la même année, c’est-à-dire, cinquante-trois j
ans après le contrat de mariage de la dame Laroclie-N egly,
que les héritiers Saignard - Chomouroux imaginèrent
une forme de procédure toute nouvelle, et qui a dû paroître extraordinaire, même à Yssingeaux.
A vant aucune demande formée par les héritiers de la
dame L aroclie-N egly, les héritiers Saignard firent faire
des saisies-arrêts, connues dans le pays sous le nom de
bannim ens, entre les mains d’un sieur Bonneville, comme
des biens du sieur Matliori et de son épouse, pour sûreté
du payement de la sommede 4000 lf~, constituée, par ordre
et pouvoir écrit donné par Catherine et Marie Treveis, <1
la dame de Laroclie-N egly, et que ses héritiers, est-il
d it , étaient sur le point de demander en justice.
Il est bon de remarquer que ces héritiers Saignard , si
prévoyans, commençoient leurs poursuites avant aucune
action des Laroclie-N egly, et sans avoir aucun titre contj e
les appelans. Cependant personne n’ignore qu’on ne peut
faire de saisies-arrêts qu’en vertu d’un titre authentique,
�w
\ u .
(
6)
;
ou qu’au moins pour suppléer au titre il faut une per
mission de la justice.
Cette saisie étoit donc irrégulière et nulle ; mais encore
elle est faite à la requête du sieur Saïgnard et de ses deux
sœurs, c’est-à-dire, sans énoncer le prénom de celui qui
est nom m é, et sans qualifier autrement les demoiselles
Saignard, que de cette manière , ses deux sœ urs, qu’il
ne nomme pas. T elle est la manière de procéder dans
le pays.
Les appelans n’ayant pas voulu s’expliquer sur cette
saisie, on fit alors paroître les Laroche-Negly , qui in
tentèrent leur demande en payement de la dot de
leur mère , ainsi que des droits successifs qui devoient
leur revenir dans les successions de leur oncle et tante :
c’est ainsi qu’ils s’expliquent. L ’action est intentée par
Gcorges-François Laroclie-N egly, fa isa n t tant pour lui
que pour ses fr èr e et sœurs ; il cite le sieur Saignard
et ses deux sœ urs, dans les mômes termes, et sans au
cune énonciation, ni du prénom du frère, ni du nom
des deux sœurs.
L e 27 prairial an 7 les appelans reçoivent une dénon
ciation de la cédule des Laroche-N egly en ces termes:
A la requête du cit. Saignard et de ses deux sœurs.
Saignard demande à etre concilié sur l’action en garan
tie de la demande du sieur de L aroclie-N egly, pour
raison de la somme de 4000 ^ constituée à leur mère ,
pour le compte et par l’ordre de Catherine et M arieMarthc Trcveis.
Saignard notifia, par la même copie, un écrit sous
seing privé } portant pou voir, delà part de Catherine et
�7
• ' •
(
)
M arie-M arthe T reveis, de constituer à M arie-M
arthe-j
' '
Françoise Saignard la somme de 4000 ^ , et sous leur
obligation de rembourser la somme à Pierre-Louis Sai
gnard, attendu qu’il s’obligera de les payer. Cet acte pro
duit au procès par les intim és, sous la cote prem ière,
est signé du seul nom de Plantier, sans énoncer le nom
p r o p r e de M arie-M artlieTreveis, ni la qualité de veuve;
il est sous la date du 9 février 1746 , il n’a été enregistré
que le 10 décembre 1753.
L e 11 thermidor an 7, les appelans, ainsi que le sieur
L a v a l, qui n’est pas partie sur l’appel, furent assignés,
toujours à la requête de Saignard et de ses deux sœurs,
comme dans la cédule : on ne donne pas plus de quali
tés aux assignés ; l ’huissier ne dit pas même qu’il s’est
transporté à leur dom icile, mais seulement avoir donné
une copie à la dame Ma thon , trouvée à M ontfaucon,
sans apprendre comment elle se tx-ouvoit là.
Saignard, pour lui et ses sœurs, assigne pour voir
joindre la demande en garantie à la demande prin
cipale; e t, sans libeller autrement sa demande, ni pren
dre de conclusions précises, il demande seulement qu’on
lui adjuge toutes celles prises dans sa céd u le, et toutes
les autres qu’il trouvera bon de prendre dans le cours do
l’instance.
L e 11 fructidor an 7 , jugement qui joint les demandes
principales et récursoires, et adjuge au sieur LaroclieNegly une provision de la somme de 3000 ^ contre
Saignard et ses sœurs.
Les appelans contestent cette demande en recours par
tous les moyens qui militent en leur faveur, et qui se-
�( 8 )
'ront développés dans la suite; ils désavouent également
les signatures apposées au bas de l’écrit qualifié de pro
curation du 9 février 1746.
L e 6 germinal an 8 , il est rendu un second jugement
où tous les cohéritiers Laroche-Negly et tous les Saignard se trouvent en qualité, sans l’avoir été dans les
'exploits introductifs, et sans être intervenus; qui, considé
rant que sur les demandes en partage les parties sont
convenues d’arbitres ( les Laroclie-Negty et les Saignard),
ordonne que dans une décade les ai’bitres procéderont au
partage ; e t , avant faire droit sur la demande en payement
des 4000 tl~, ordonne la vérification des écritures et signa'tui-es Treveis, apposées en la procuration rapportée par
Saignai'd, sur pièces de comparaison.
On assigne les appelans, en vertu de ce jugement, pour
nommer des experts ; ce n’est plus au lieu de BourgArgental, qui est leur domicile, mais en la ville du Puy.
Les experts sont nommés : après de grandes circonlocu
tions, et à travers une foule d’incertitudes, ils inclinent
à penser-que la signature est sincère.
ï^és appelans contestent. Ils ne sont pas héritiers purs
et "simples de Mnrie-Marthe Treveis. Catherine Bonnafoux n’avoit accepté la succession de sa tante que par
bénéfice d’inventaire. La donation de M arie-M arth e
Treveis étoit nulle. L e tiers n’avoit pas de pouvoir. L ’écrit
enregistré en 1763 étoit insuffisant. On ne peut faire de
donation au profit d’un tiers, sans procuration de sa part,
et annexée à l’acte portant donation. L ’action dirigée
contr’eux étoit ’ d’ailleurs ' éteinte par la prescription; ce
'uVst pus après cinquante-trois ans de silence qu’on pouvoit former une semblable demande.
�C 9)
Les parties sont appointées sur toutes ces discussions;
et enfin, le i floréal an 10, a été rendu, à Yssingeuux,
un jugement définitif, par forclusion , contre le sieur
Laval. En voici la teneur :
« Le ti'ibunal disant droit aux conclusions principales
« prises par les frères, sœurs et belle-sœ ur Laroclie« N egly, sans avoir égard à celles des frères et sœurs
« Chom ouroux, non plus qu’à celles des mariés Ma thon
.< et Montereymard ; vidant l’interlocutoire porté par
« le jugement du 6 germinal an 8 ; homologue la re« lation rendue par les experts Champanhac-Villeneuve
« et P ouzol, les 7 et 8 pluviôse an 9 ; en conséquence,
« déclare la procuration privée, passée le 9 février 1746
« par Catherine et Marie - Marthe Treveis sœurs, eu
« faveur de Pierre-Louis Saignard-Chomouroux, avouée,
« et reconnue de conformité à l’édit de 1684; et, sans
a avoir égard aux fins de non-recevoir opposées par les
« mariés Mathon et Montereymard, desquelles elles de« meurent démises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Chomouroux à faire payement aux frères, sœurs
« et b^lle-sœur Laroche-Negly, de la somme de 3666 ^
« 13^ 4 ^ , pour reste de la dot constituée à Marthe Sai« gnard-Chomouroux leur m ère, lors de son contrat de
« mariage avec Arnable Laroche-N egly, du 13 février
ce 1746, et ce avec les intérêts encourus, savoir, de la
« somme de 666 ^ 13^ 4 ^ , depuis le 14 février 1749;
« de la somme de 1000 ^ depuis le 14 février 1747;
« d’autre somme de 1000 , depuis le 14 février 1748;
« et enfin, de la somme de 1000
depuis le 14 février
ce 1749; sous toutes les déductions et distractions de
5
B
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*
f 10 )
droit; condamne lés frères et sœurs Cliomouroux aux
entiers dépens envers les Laroclie-Negly. Comme aussi
disant droit aux conclusions prises par les frères et
sœurs Cliom ouroux, demeurant les instances jointes,
sans avoir égard à la demande en main-levée provisoire et définitive des bannimens mis au préjudice des
mariés Mathon et M ontereym ard, entre les mains du
sieur Bonneville, a condamné et condamne le sieur
d’Arlem pde, et les mariés Mathon et M ontereymard,
en leur qualité de cohéritiers de Catherine Treveis
leur bisaïeule, à relever et garantir conjointement les
Cliom ouroux, pour la somme de 666 ^ 13^ 4 ^ , dont
la condamnation se trouve prononcée contr’e u x , en faveur des Larochc-N egly, et ce avec les intérêts depuis
le 14 février 1749, sous toutes déductions et distractions de droit; et, sans avoir égard aux conclusions
subsidiaires et principales prises par les mariés Mathon
et M ontereymard, dont les a dém is, les a condamnés
et condamne, en leur qualité de successeurs à Catherine Bonnafoux, héritière de M arie-M arthe Treveis,
h relever et garantir les Cliomouroux de la condam
nation contr’eux prononcée de la somme de 3000
et ce avec les intérêts depuis les époques fixées et
adjugeés aux L a ro c lic -N e g ly , et sous les mêmes
déductions et distractions ; a condamné conjointement les mariés Mathon et Montereymard, et d’A r lempde, à un tiers des dépens, tant de la demande
priucipalc que de celle en garantie, non compris les
frais de la vérification des signatures des sœurs T re veis , ensemble le rapport des experts ; lesquels dé-
�/ 4*
( 11 )
pcns demeurent à la charge des mariés M atlion, ensemble les autres deux tiers des dépens, ainsi que les
deux tiers du coût du jugem ent, l’autre tiers devant
être supporté conjointement par les Mathon et d’A rlempde. »
1
Ce jugement est fondé sur une-foule de motifs qu’il
e s t important de connoître pour les apprécier.
Les premiers juges posent d’abord les questions sui
vantes :
« Les réclamations de la famille Laroche-Negly, contre
« les frères et sœurs Saignard, sont-elles prescrites?
« La prescription a-t-elle pu courir étant sous la puis« sance paternelle ? Préjugeant la prescription inter« rompue, faut-il porter la môme décision à l’égard de
« la demande en garantie formée par les frères et sœurs
« Chom ouroux, contre les mariés Mathon et M onte« reym ard, et le sieur Laval-d’Arlempde ?
« Faut-il considérer les mariés Mathon comme héri« tiers purs et simples, ou comme héritiers sous béné« fice d’inventaire de Marie-Marthe T reveis?
' « La main-levée, définitive ou provisoire, réclamée
« par les mariés M athon, peut-elle leur être accordée?
« Considérant que toute prescription n’a pu courir
« contre les enfans Laroche-Negly, pendant le vivant de
« leur père; que tous les auteurs du parlement de Tou« louse enseignent unanimement que le fils de famille
« privé par la loi de l’usufruit de ses biens est censé'’
« ignorer ses droits; qu’ayant les mains liées pendant
« le vivant de son père, et n’ayant pas l’exercice de ses
« droits et de ses actions, toute'prescription, soit d’un
B 2
«
«
«
«
«
�IfvC
C 'i a -)
«. héritage, ou d’une action , doit dormir et demeurer
suspendue , contra nonvcilentem , etc. L e Journal du
Palais , de .Toulouse rapporte deux arrêts , du mois
d’août. 1695 et 1702, conformes à cette doctrine ; il y
est dit : Quoique le père soit le maître des actions à
[ l’égard de son fils ,, cependant, nous jugeons que la
prescription ne court contre le fils de famille que
depuis ,qu’il est sorti de la puissancee paternelle.
« Considérant que les enfans Laroche-Negly ne peu
vent être assimilés à des mineurs qui doivent se faire
restituer dans les dix ans de leur majorité; qu’il existe
même une différence bien prononcée par la lo i, entre
le mineur, et le fils de fam ille; que le mineur a le,
libre exercice de ses,actions; il est nanti de ses titres,
et présumé avoir la jouissance de ses droits assisté d’un
curateur; il peut ester,en jugement : le fils de famille,
au contraire, est privé de l’usufruit de ses biens ; la
loi ne lui accorde, aucune action pour agir ; il ne peut
ester en jugem ent,,et la prescription ne,reprend son
cours que dès l’instant qu’il se trouve affranchi de la
puissance paternelle. .
.
« Considérant,que la dame Chom ouroux, femme La
roche - N e g ly , ajTant contracté mariage le 13 février
1746, et étant décédée le 4 ju in ;i
, il ne court sur
sa tète que.dix ans trois mois de prescription utile;
qu’ayant été interrompue pendant le vivant du père
des.frères et sœurs Laroche-Negly, n’ayant repris son.
; cours qu’à l’époque de son décès, arrivé le 4 décembre
1783, il ne s’est écoulé, jusqu’au jour de l’introduc
tion de l’instance, qu’ un intervalle de quinze ans, ce
756
�Sé&
c
1
3
)
« qui forme un total de près de vingt-six ans; qu’il fai
te loit trente années utiles pour opérer la prescription
« de l’action des frères et sœurs Iiaroche-Negly.
« Considérant que les experts ayant déclaré les signa« tures de Catherine et de M arie-M arthe Treveis sin« cères et véritables, on ne peut se méprendre sur l’in« tention de ces deux sœurs, manifestée dans la procu« ration du 9 février 1746 ; que la constitution de
« 4000
faite à la mère des enfans Laroche-Negly, par
« Louis Chomouroux son père, n’est que l’exécution de
te la volonté des sœurs Treveis; que Louis Chom ouroux
« ne peut être considéré que comme le mandataire des« dites sœurs, ou tout au plus comme leur caution ;
« que, dans ces deux cas, la prescription n’ayant pas
« couru, ou ayant été interrompue sur la tête des suc« cesseurs de Louis Chom ouroux, elle doit subir le même
« sort vis-à-vis les représentais des sœurs T reveis, étant
« de principe certain qu’il n’y a que l’extinction de l’obli« gation principale qui entraîne celle de l’obligation
« accessoire, et que ce n’a été que du jour que les frères
« et sœurs Laroche-Negly ont formé leur demande ju« diciaire contre les successeurs de Louis Chom ouroux,
« que ceux-ci ont pu former leur demande contre les
« mariés M athon, pour l’objet des 4000 ^ donnés par
« les sœurs Treveis.
« Considérant que Catherine Bonnafoux , aïeule des
« mariés M athon, et héritière de Marie-Marthe Treveis^
« ayant requis, par sa requête du 13 février 1759, la
« faction de l’inventaire et l’appréciation du mobilier
« délaissé par la dame M arie-M arthe T re veis, pour en
�c 1 4 }
« connoître la consistance avant de se déterminer à ac
te cepter ou abandonner ladite hérédité; qu’ayant fait sa
« déclaration au bureau de l’enregistrement, où elle ne
« prit point la qualité d’héritière sous bénéfice d’inven« taire ; qu’ayant constamment joui les biens de M arie« Marthe T reveis, en ayant disposé comme de sa chose
« propre, et sans avoir jamais pxùs la qualité d’héritière
« sous bénéfice d’inventaire; qu’ayant encore sollicité,
« par lettres, des délais pour payer, on ne peut se dis« penser de la regarder comme héritière pure et simple,
« et s’étant déterminée, après la faction de l’inventaire,
« à accepter purement et simplement.
« Considérant que M ichel Montereymard, fils de Ca« tlicrinc Bonnafoux, et père et beau-père de Marie
« M athon, a réclam é, par lettres, des termes, et offert
« des biens fonds en payement; qu’il a accepté purement
te et simplement la succession de Catherine Bonnafoux
« sa mère ; qu’il a vendu le champ porto dans la décla« ration faite au bureau de l’enregistrement, sans pren« dre la qualité d’héritier bénéficiaire de sa mère et de
cc la dame T reveis; que la femme Mathon a pareille-'
« ment accepté la succession de M ichel Montereymard
« son père , sans réclamer la division de la succession
« de M arie-M arthe T reveis; qu’il s’est en conséquence
« opéré une confusion dans ces diverses successions.
cc Considérant que le délai pour délibérer présupcc pose que l’héritier a la liberté d’accepter ou d’abancc donner; que s’il laisse passer plus de quarante jours
« après l’inventaire fait de son consentement, sans expli« quer scs intentions, il est tenu de se départir de la
�M S
5
( i )
r faculté que la loi lui accorde, d’accepter sous béné« fice d’inventaire; qu’alors la loi le répute héritier pur
« et simple, et le prive de la faculté de répudier.
«
«
«
«
«
«
«
« Considérant que ne s’étant •élevé aucune eontestation à raison du don de iooo ^ , fait par Catherine
Treveis à la mère des enfans Laroclie-N egly ; qu’il
résulte du testament de cette dernière, que les mariés
Matlion et d’Arlempde sont cohéritiers, pour un tiers,
de la dame Catherine Treveis ; l’on ne peut se dis—
penser d ’en prononcer la condamnation en faveur des
enfans Laroche-Negly.
« Considérant enfin qu’ un débiteur ne peut obtenir
« la main-levée définitive ou provisoire, qu’autant qu’il
« justifie de sa libération, etc. etc. »
Tels sont les nombreux motifs du jugement : il étoit
impossible de les analiser ; on ne peut les faire com
prendre qu’en les rapportant dans leur intégrité.
La dame Montereymard et son mari en ont interjeté
appeL Ils ont attaqué ce jugement par des vices de form e,
et des moyens au fond. Ils ont remarqué que les exploits
introductifs, tous les actes de la procédure, ainsi que les
jugemens rendus, ne contenoient pas les prénoms du
frère Saignard, les noms de ses sœurs, ni les qualités
des parties, qu’aucun des exploits de demande n’étoit
libellé.
<
Us ont invoqué l’article I er. du titre 2 des A jou rnemens, de l’ordonnance de 1667, qui porte « que les
« ajournemens et citations, en toute matière, et en toutes
« juridictions, seront libellés, contiendront les conclu-
ou?
�( 16 )
t< sîons, et sommairement les moyens de la demande, i
« peine de nullité des exploits ; »
L ’article 2 du môme titre, qui dit que les huissiers
exprimeront le domicile et la qualité des parties, ausr
à peine de nullité.
Les appelans ont encore observé que Saignard, comme
Laroche-N egly, ont toujours procédé comme procureurs
fondés. Les citations et les assignations, tant de Saignard
que de Laroche-N egly, sont données à leur requête, tant
pour eux que pour leui’s frères et sœurs.
Quant aux saisies-arrêts, les appelans en ont égale
ment demandé la nullité. Il est de règle constante qu’on
ne peut faire saisir et arrêter qu’en vertu d’un titre au
thentique , ou au moins en vertu d’une permission de
la justice. Ici les Saignard, ou du moins le frère, tant
pour lui que pour ses sœurs , avant aucune demande
formée par les L aroche-N egly, avant que la prétendue
procuration sous seing privé fût vérifiée en justice,
enfin, avant d’avoir un titre quelconque, s’est permis
de faire saisir et arrêter, de son autorité, les revenus des
appelans, entre les mains du sieur Bonneville.
Cette manière de procéder est inouïe et choque toutes
les règles connues. Les appelans insistent sur ces vices
de forme, que la cour appréciera dans sa sagesse. La loi
prononce; il n’est pas possible de s’écarter de sa dispo
sition : les formes sont conservatrices de la propriété,
et il est très-important , surtout pour le pays d’ Yssingeaux, que la cour apprenne enfin, par un grand exem
ple, qu’on doit procéder d’une manière conforme à la loi.
Les appelans ne s’étendront pas davantage sur cette
matière
�7
( i )
matière qui pourra donner lieu à des observations plus
amples lors du rapport : ils se hâtent d’examiner le fond
de la contestation.
On peut la réduire il trois propositions :
i° . La donation portée au contrat de mariage de 1746,
est-elle obligatoire contre M arie-M arthe Treveis ou les
appelans qui la représentent ? A - t - o n pu former une
action contre eux pour cet objet?
. 20. Cette action, si elle a existé , ne seroit-elle pas
prescrite ?
30. Pourroit-on, dans tous les cas, faire considérer les
appelans comme héritiers purs et simples de MarieM arthe Treveis? ou au contraire devroit-on se borner à
leur demander le compte bénéficiaire de la succession
de la veuve Plantier?
§ Iert
La donation portée par le contrat de mariage de
Ma rie-Marthe Saignard-Chomouroux , du 13 février
'17 4 6 , a été faite par Pierre Saignard-Chomouroux, son
p è r e , en ces termes : M ille livres que le père a ordre
de constituer à la demoiselle fu tu r e épouse , du c h e f
de daine Catherine Treveis , aïeule maternelle de cette
dernière. Tois mille livres du c h e f de dame M arieM arthe Treveis , veuve de M . P lan tier , aussi par
son ordre , etc.
11 n’y a point de procuration rapportée de la part de
celles dont on dit avoir l’ordre ; il n’en existe pas d’annexée au contrat : aussi voit-on que le père s’o b lige, en
C
�(' 18 )
son propre et privé nom , au payement des sommes
constituées.
Il falloit bien que le constituant le prît pour son compte,
lies clauses d’un contrat de mariage ne doivent pas être
douteuses ; son exécution ne doit pas dépendre de causes
étrangères. Cependant sans l’obligation du père il n’y
auroit eu rien de certain ; le contrat n’eût plus été un
acte constant et indépendant, quoique l’engagement eût
été formé dans l’espérance d’avoir la somme promise.
Aussi est-il certain, en point de droit, qu’une donation
ne peut être faite au nom d’un tiers sans procuration de
sa part ; une promesse faite au nom d’un tiers ne l’engage pas ; elle peut devenir inutile par le refus de la
ratifier; toutes les promesses faites par contrat de mariage
sont irrévocables de leur nature. On ne peut donc point
autoriser , surtout dans un contrat de mariage, des dis
positions q u i, pouvant être révoquées ou ne produire
aucun effet , laissent les parties contractantes dans un
état d’incertitude qui répugne à la nature du contrat.
M . l’Epine de Grainville rapporte un arrêt du 28
février 1726 , qui a jugé conformément à ces principes.
Dans l’espèce de cet arrêt , un particulier appelé Jean
Gaugery avoit fait à Antoine son frè re , et par le contrat
de mariage de ce dernier , une donation de tous les
biens présens et à venir que lui et Marie sa sœur , avec
laquelle il vivoit en commun , auroient au jour de leur
décès. Celte donation étoit faite comme se portant fort
pour, M arie, et sans procuration : la donation étoit du
27 juillet 1690, et Marie l’avoit ratifiée le i novem
bre : Marie mourut et laissa pour héritiers tous ses
5
�*9
(
)
n eveu x, et entr’autres les enfans d’un quatrième frère
nommé M arcou.
Ces derniers demandèrent la nullité de la donation
faite au nom de M a rie , sans procuration de sa p a rt, et
soutinrent que la ratification postérieure de leur tante
n’avoit pu valider un acte nul dans son principe. L ’arrêt
déclara la donation nulle, sans aucun égard aux moyens
que faisoient valoir les enfans du donataire, qui prétendoient que la ratification devoit avoir un effet ré
troactif, puisqu’elle ne laissoit aucun doute sur le pou
voir que Jean avoit eu de Marie pour faire la donation.
Il est vrai qu’il s’agissoit dans l’espèce d’une donation
de biens à venir, qui ne peut avoir lieu que par contrat
de mariage ; mais cette circonstance ne change rien aux
principes qui s’opposent à ce qu’on ne puisse stipuler au
nom d’un tiers sans son aveu. Une ratification posté
rieure est presque toujours l’effet de la séduction ou
de la complaisance. O n peut arracher le consentement
par importunité , et pour ne pas compromettre celui
qui a pris sur son compte de contracter sans pouvoir.
Ce seroit en quelque manière forcer la volonté , et
engager un tiers malgré lui-même ; ce qui pourroit en
traîner les plus grandes conséquences.
Eu vain les intimés voudroient-ils opposer l’acte sous
seing privé , qu’ils datent du 9 février 1746 , et par
lequel l’aïeule et la grand’tante sembleroient avoir donné
ordre à Pierre Saignard de faire cette constitution pour
leur compte. D ’abord , cette prétendue procuration
n’a été enregistrée que le 10 décembre 1763-, c’est-àd ire , sept années après le mariage : elle n’a donc de
C 2
�*
(
20
)
date qu’à cette époque ; et encore n’e s t-c e pas une
ratification de la libéralité , mais seulement une autori
sation de donner, qu’on voudroit faire remonter avant le
contrat de mariage, et dans un temps où elle n’existoit
pas ? Ce retard dans l’enregistrement prouve que Pierre
Saignard avoit été assez imprudent pour vouloir en
gager Catherine Treveis et sa sœur , à leur insu ; et
comme il s’étoit obligé personnellement au payem ent,
il a voulu avoir un titre, qu’il a sollicité et obtenu de
la complaisance ou de la foiblesse de deux femmes qui
n’ont osé lui refuser. La preuve que cette prétendue
procuration est postérieure au contrat de m ariage, résulte des termes dans lesquels elle est conçue ; il fait
obliger les constituantes à lui rembourser les sommes,
attendu q u il s'obligera de les payer.
O r , comment concevoir qu’on a prévu que Saignard
s’obligeroit à payer ces sommes. Si véritablement il y
avoit eu un pouvoir valable , rien de plus inutile que
l ’obligation personnelle du père; il étoit si simple de
prendre une procuration, de l’annexer au contrat, et
de faire faire la donation par celui qui auroit rempli
la procuration. Il est inusité , il est inouï , de faire
obliger quel ju’un pour celui qui donne; c’est déjà faire
douter de la solvabilité du donateur ; c’est au moins lui
faire injure ; et ce n’est pas ainsi qu’on honore un contrat
de mariage.
Il est bien démontré que le pouvoir n’existoit pas
lors du contrat de mariage. Dans la suite , la procu
ration qu’on a rapportée sous seing privé , ne pouvoit
avoir aucun effet. Cet acte sous seing privé contient une
�//<
\
( 21 )
véritable donation entre-vifs ; e t , d’après l’ordonnance
de 1731 , une donation n’est valable qu’autant qu’elle
est fuite devant notaire. « Tous actes portant donation
« entre-vifs seront passés devant notaires, et il en res
te tera minute, à peine de nullité. » ( Article I er. de l’or
donnance. )
.
:
On sent aisément le motif de la loi , lorsqu’elle a
oi'donné impérieusement cette formalité. Une des qua
lités essentielles de la donation entre-vifs est l’irrévocabilité. Un acte sous seing privé n’a aucune date cer
taine; tous actes emportant hypothèque, faits postérieu
rement, lui seroient préférés; ce serait donc, commel’avoit
dit Ricard antérieurement à l’ordonnance , traité des
Donations, partie i ]e. y chap. 4 , n. 881 , tomber dans
l’inconvénient de la règle donner et retenir, si les dona
tions demeuraient sous seing privé jusqu’au-décès du
donateur , parce qu’il aurait toujours conservé par ce
moyen la liberté de faire qu’elles ne subsistassent plus;
enfin rien ne serait plus facile que de supposer de fausses
donations.
En un mot , il n’existoit aucune obligation des. deux
femmes Treveis lors du contrat de mariage de 1746.
Pierre Saignard a .tout pris sur son compte. Un acte
sous seing privé ne peut produire aucun effet k côté
d’un contrat de mariage ; ce serait une véritable contrelettre au contrat , et toute contre-leltre au contrat de
mariage est absolument n u lle , à moins qu’elle ne soit
signée de tous ceux qui étoient présens au mariage.
On ne saurait donc se tenir trop en garde contre un
acte produit cinquante-trois ans après le mariage. Indé-
*
�( )
22
pendnniment des motifs de suspicion qui naissent aisé
ment contre une production tardive , la procuration est
irrégulière et nulle : Pierre Saignard n’a pas reçu une
autorisation suffisante ; les femmes Treveis pouvoient
révoquer ce pouvoir sous seing p riv é ; elles n’ont pas
valablement donné : d ès-lors il est impossible que ce
prétendu pouvoir puisse faire naître une action contre
les appelans.
§ II.
""
. s
¡
.
• Cette action, dans tous leseas, étoit prescrite à l’époque
où elle a été exercée. L a dame Laroche-Negly , mariée
en 17 4 6 , et qui fut l’objet de la prétendue donation,
a survécu plus de quinze ans à M arie-M arthe T reveis,
sa grand’tante ; son mari a vécu plus de vingt-quatre
ans après : jamais on a osé faire paroître la procuration,
du vivant de l’aïeule ni de la tante. La femme ni le
mari n’ont jamais réclamé de leur vivant. Toutes les
sommes promises par le contrat de mariage devoient être
payées quatre ans après ; comment concevoir que les
sieur et dame Laroche-Negly eussent constamment gardé
le silence , s’ils n’avoient pas reçu le montant de la consti
tution portée au contrat de mariage.
En pays de droit é c rit, et notamment d’après la juris
prudence du parlement de Toulouse, où les parties sont
dom iciliées, le mari devient responsable de la d o t ,
quand-même il ne l’auroit pas reçue, s’il ne s’est fait
payer,par le constituant, au temps et au terme porté par
le contrat de mariage. Catelan , tome 2 , liv. 4 , dit que
le mari çst responsable de la dot constituée par le père
�23
(
)
de la femm e, lorsqu’il a demeuré dix ans après la célé
bration ou le terme du payem ent, sans en faire demande
à son beau-père.
A la vérité , continue Catelan, on ne lui impute pas
s’il n’a pas pressé son beau-père pendant les dix pre
mières années; mais s’il a laissé passer dix ans sans enfaire demande , cette patience trop longue tourne eu
négligence, et le charge de cette d o t , comme s’il l’avoit
reçue. Ce n’est pas alors le cas de la l o i, où la femme ne
peut imputer au m a ri, cur non urserit ,* et il y a un
grand milieu entre presser et laisser passer dix ans sans
faire de poursuites. D ix ans sont d’ailleurs ün temps que
les lois mettent souvent en usage , et qu’elles emploient
pour termes et pour bornes en bien des rencontres. Catelan
rapporte.cinq arrêts £i l’appui de son opinion : l’un, de
1664 ; un second, du mois d’avril de la même année;
un troisième , du mois de mai i
; un autre, du mois
de septembre 1696; et le dernier, du 9 février 1699.
Ce long espace de dix ans , à compter des termes, sans
aucunes poursuites , doit faire présumer le payement;
et cette présomption ne devient-elle pas une certitude ,
lorsqu’on voit que non-seulement le mari ni la femme
n’ont rien réclamé pendant leur vie , mais que ce n’est
qu’en l’an 7 , cinquante-trois ans après , que les héritiers
Saignard forment cette demande contre les appelans ?
Ceux-ci sont donc encore dans l’exception de la pres*cription trentenaire : il n’y a eu dans la famille Chomouroux aucune minorité qui ait pu suspendre ou
arrêter le cours de cette prescription ; elle a commencé
le 13 février 1749? échéance des termes de payement *
elle a donc été accomplie le 13 février 1779.
665
�( H )
• Les frères Saignard - Cliomouroux sont obligés de
convenir qu’il n’y a point eu dans leur famille de mino
rité interruptive de la prescription ; mais ils voudroient
éluder l’exception, sous un prétexte frivole. Ils préten
dent que leur action contre les appelans n’est autre chose
qu’une demande en garantie, qui ne pourroit prescrire
qu’autant que la demande principale des Laroche-Negly
seroit elle-même prescrite : ils s’efforcent ensuite d’éta
blir que l’action principale des Laroche-Negly est tou
jours entière.
Pour répondre à cette objection, il faut d’abord exa
miner la nature de l’action que les Chomouroux vou
droient exercer contre la dame Matlion. Il est facile de
prouver que c’est une action principale, distincte et in
dépendante de celle des frères et sœurs Laroche-Negly.
E n effet, la constitution portée au contrat de mai'iage
de T746 , a été faite par le père Chomouroux à sa fille.
Il annonce bien à la vérité qu’il avoit ordre de la faire
du chef de l’aïeule et de la tante ; mais il prom et, en son
nom personnel, de faire le payement de la totalité des
sommes constituées.
O r , dès que le père s’est obligé en son n om , qu’il
n’a point agi en qualité de mandataire , sa fille ou ses
enfans n’avoient aucune action contre l’aïeule ou la tante;
ils ne pouvoient s’adresser qu’à leur p è re , qui seul étoit
débiteur.
. X a procuration du 9 février 1746 ne donne pas au
père. Chomouroux le droit de se pourvoir contre les
constituantes , en garantie de l’action que les frères et
sœurs Laroche-Negly exerccroient contre lui en payement
des
�S i)
(25)
des sommes constituées. L ’aïeule et la tante promettent
seulement à leur neveu de lui rembourser ou faire rem
bourser ces sommes, attendu q u i l s'obligera de les
payer. Ce ne seroit donc jamais qu’une action en rem
boursement que le père Cliomouroux auroit pu former
contre les constituantes ; action absolument distincte et
indépendante de celle des enfans Laroche-Negly. Si donc
l’action des Chomouroux est principale et indépendante,
ils ont dû l’exercer dans un temps u tile, c’est-à-dire, avant
trente ans, à compter de l’échéance des termes; ils ont
dû m êm e, avant cet intervalle, faire reconnoître le titre
d’où ils prétendent faire dériver leur action.
Il seroit donc fort inutile de vérifier maintenant si
l’action des L aro ch e-N egly contre les Chomouroux est
toujours entière; cette question est sans intérêt pour les
appelans : mais il seroit encore facile de prouver que
même la demande des Laroclie-Negly étoit éteinte par la
prescription, au moment où ils l’ont exercée.
Il ne s’agit point ici d’un immeuble dotal, qui ne peut se
prescrire pendant le mariage, ou pendant l’usufruit du
p ère, mais bien d’une somme m obilière, dotale à la vé
rité, mais dont le mari ou le père étoit le maître, et qu’il
avoit seul le droit de recouvrer.
Catelan, tom. 2, liv. 4, chap. 45 , enseigne que la pres
cription d’une somme due à la femme court en faveur de
son débiteur, quoique la femme ait constitué à son
mari tous et chacun ses biens, et que la prescription n’eût
pas commencé avant le mariage. Il y a cette différence
entre le fonds dotal et une somme m obilière, que le
premier ne peut prescrire pendant le mariage. La raison
D
«".<
�vO
f î6)
de cette différence est prise de ce que la loi JuVa défen
dant toute aliénation d’un fonds dotal, en défend p ir
conséquent la prescription ; mais la loi J u lia ne défen
dant pas l’aliénation d’une dette, rien n’empêche que la
prescription ne courre en faveur du débiteur. On ne peut
opposer, ajoute Catelan, la règle qui dit que la prescrip
tion ne court pas contre celui qui ne peut a g ir, et que
la femme ne pouvant pas agir pendant le mariage contre
son débiteur, il semble qu’il ne peut pas lui opposer de pres
cription; d’autant qu’à l’égard du débiteur il suffit qu’il y ait
une personne qui puisse agir, à qui la somme appartient pen
dant le mariage, tel qu’est le m ari, qui d’ailleurs, pouvant
retirer payement de la dette, et libérer le débiteur, doit
nécessairement donner lieu au cours de la prescription.
Prœ scribens soh’enti sim ilis est. Le laps de trente ans fait
présumer que le payement a été fait au mari.
Serres, dans ses Instituts, liv. 2 , tit. 8 , est du meine sen
tim ent; la loi J itlia , d it-il, ne s’applique qu’au fonds
dotal, mais non à la prescription d’une dette.
Cette doctrine , bien constante dans le ressort du parle
ment de Toulouse, s’applique parfaitement à l’espèce. La
prescription a commencé à courir depuis 1749. L e père
Laroche - Negly n’est décédé que le 4 décembre 1783,
trente-quatre ans après l’échéance des termes. L ’action de
ses ■
héritiers est donc également prescrite.
En vain les enfans Laroche-Negly voudroient-iïs étabJ’r une différence entre la femme et les enfans mineurs
sous la puissance paternelle; en vain voudroient-ils pré
tendre que la prescription ne court pas contre ces derniers
pendant la durée de l’usufruit : ce seroit une erreur en
�( 27 )
point de droit, quia ubi eadem ratio, ibidem jus. L e
père 11’a-t-il pas le d roit, comme le mari , de faire le
recouvrement des sommes mobilières qui reviennent à ses
mineurs? n’a-t-il pas-la faculté d’a g ir ? n’est-il-pas de
principe que les créances personnelle^ d’un mineur, pourvii
d’un tuteur, peuvent prescrire pour le débiteur, sauf
le recours des pupilles contre le tuteur? Mais, dans tous les
cas, les enfans Laroche - Negly n’en seroient pss plus
avancés en point de fait. M arie-M artlie Saignard, leur
itière, a vécu jusqu’en 1774 ; il s’étoit déjà écoulé vingtcinq ans utiles pour la prescription; ce 11’fest qüe quinze
ans après la mort de leur pèrë que lès enfans Laroche-Negly se sont pourvus : leur action, sous tous les rapports,
étoit également prescrite.
Les intimés ne peuvent se refuser à l’évidence; ils voudroient user de leur dernière ressource, et produisent
trois lettres qu’ils attribuent l’une à ra ïeu le , les deux’
autres au père de la dame Mathon : ces lettres, nonreconnues ni vérifiées, et sur lesquelles il s’élève des
doutes, ne peuvent influer sur le sort du procès.
La prem ière, prétendue écrite par la veuve Monte-'
reymard, est sous la date du 13 mars 1760 : il en résu Ite qu'à
cette époque, et plus d’un an après la mort de MarieMartlie Treveis , Catherine Bonnafoux n’avoit aucune
connoissance de ce prétendu titre dé 1746 ; depuis ce
moment jusqu’à la demande, il s’est écoulé trente-neuf
ans.
Celles‘que l’on dit écrites par M ichel Montereymai-d ,
rt’ont aucun rapport avec lap rocu ration .il ne peut s’oc
cuper d’affaires avec Chom ouroux, et prie d’attendre qu’il
D a
�c 28 )
en ait terminé d’autres. Il se plaint ensuite de ce qu’on lui
demande quelque chose sur la succession de M arie-M arthe,
et linit par dire qu’il renoncera à la succession si on exige
le payement de ce qui pourroit être dû. Mais nulle part
on ne voit aucune explication précise de l’objet particulier;
tout annonceroit, au contraire , qu’il n’en avoit aucune
connoissance. E nfin, l’une de ces lettres, sans date, est
adressée au sieur L aval, et ne peut se trouver dans les
mains des Chomouroux que par un abus de confiance : et
Laval n’avoit pas craint lui-même de faire assigner la dame
M athon pour unè somme de 2000^ qu’il prétendoitlui
être due; mais on rapporta la quittance donnée par son
père à l’aïeule de la dame Mathon. Il paroît plus que vrai
semblable que toutes les affaires de famille étoient termi
nées depuis long-temps. On voudroit abuser du peu de
connoissance qu’a la dame M athon de ce qui s’est passé
dans la fam ille; mais un silence de cinquante-ti’ois ans,
sans aucunes poursuites, est un obstacle insurmontable.
L a demande actuelle a toute la défaveur d’une vieille
recherche : en point de droit elle n’est pas fondée, en
point de fait elle est prescrite.
§. I I I .
Les appelans, dans tous les cas, ne sont pas héritiers
purs et simples de Marie-Marthe T reveis; Catherine
Bonnafoux leur aïeule n’a accepté la succession que par
bénéfice d’inventaire.
Ce n’est que très-subsidiairement, et pour ne rien né
gliger en cour souveraine, que les appelans réclament
�( 29 )
contre le chef du jugement qui les a condamnés comme
héritiers purs et simples. Ils croient avoir démonti-é, 1°.
qu’il n’existe aucune obligation des deux femmes Treveis;
20. que les intimés n’ont aucune action contre eux; 30. que
cette action, dans tous les cas, est éteinte parla prescription.
Mais on se rappelle que lors du décès de M arie-M arthe
Treveis, du 16 janvier 1769, les scellés furent apposés
sur ses meubles et effets, à la diligence de dame Catherine
Bonnafoux, aïeule de la dame Mathon. Sa requête, du 13
février de la même année l ’j ôg, présentée au sénéchal
du P u y , tend à la vérification et levée des scellés apposés
par le même juge. Cette requête est suivie d’une ordon
nance de transport pour la vérification des scellés qui
avoient été apposés le 16 janvier précédent, même jour
du dé_cès. Vient ensuite l’inventaire fait par le même juge
en présence du procureur du r o i, après assignation à toutes
les parties intéressées, mais hors la présence des père et
mère des appelans, quoiqu’ils y eussent été appelés. Depuis,
Catherine Bonnafoux n’a pris d’autre qualité que celle
d’héritière bénéficiaire ; c’est en cette qualité que , le 8
novembre 1759, elle fait commandement à plusieurs dé
biteurs de la succession ; c’est en la même qualité que, le
31 mai 1759, elle acquitte une dette de la succession au
profit de M aximilien Gautier-la-Boulaye, créancier de
cette succession.
L ’inventaire n’a jamais été attaqué de fraude ou d’o
mission ; il contient l’énumération de tout ce qui compose
la succession, omnia jura successioms.
Les poursuites actives
passives
et
n’ont été faites qu’en
cette qualité d’héritière bénéficiaire j les appelans pro-
�3
(' ° )
duisent ces actes anciens qui doivent faire foi pleine et en
tière, d’après la maxime h t antiquis enunciativa pro
bant. Ces actes remontent à plus de quarante-cinq ans. En
pays de droit écrit, il n’étoit pas nécessaire d’obtenir des
lettres do bénéfice d’inventaire; la déclaration de l’héri
tier et l’inventaire sufïisoient pour attribuer la qualité.
Comment donc les premiers juges se sont-ils déterminés
à condamner les appelans comme héritiers purs et sim
ples , parce qu’ils auroient accepté purement et simple
ment la succession de leur père et aïeule? cette circonstance
peut-elle influer sur la succession de M arie-M arthe T reveis ? l’une n’a rien de commun avec les autres, et c’est une
injustice de plus, contre laquelle les appelans sont bien
fondés de réclamer.
Ils ne sont parvenusu réunir quelques pièces de famille
qu’avec des soins infinis et des recherches multipliées dans
les dépôts publics. La dame Mathon-, orpheline, fut mise
en tutelle dès le plus bas age; son tuteur est décédé sans
lui avoir rendu compte de sa gestion, et elle s’est vaine
ment pourvue pour obtenir au moins la remise de'ses
pièces; elle se voit accablée tout à coup par des pour
suites rigoureuses des Chom ouroux, q u i, abusant de son
étit d’ignorance, ont voulu surprendre sa foiblesse; ils
sont allés jusqu’à provoquer la demande des enfans Laroche-Negly avec lesquels ils sont d’accord; ils ont attendu,
pour frapper des coups plus certains, que l’aïeule, le père,
et le tuteur de la dame Mathon fussent décédés; c’est alors
qu’ils ont cherché.à faire sortir du tombeau de la pres
c r i p t i o n cíes titres surannés et nuls ; ils ont osé repro
duire une vieille recherche que leurs auteurs a voient con-
�>¿1
31
(
)
damnée à l’oubli : mais leurs intentions perfides ne peu
vent être couronnées d’aucun succès; ils ont négligé ou
méconnu les premières règles de la procédure; le titre
qu’ils invoquent, et qu’ils ont sorti d e la poussière, est
irrégulier et nul. T out prouve que depuis long-temps
les affaires de famille étoient terminées. Enfin, la pres
cription , ce remède légal, vient au secours des appelans;
et certes il ne fut jamais mieux appliqué.
M. C A T H O L ,
rapporteur
.
M e. P A G E S ( de Riom ),
M e. V A Z E IL L E ,
.
ancien avocat.
avoué.
i
A RIOM, de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de
la Cour d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montereymard, Julie-Angélique. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Julie-Angélique Montereymard, et le sieur Jacques Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'Yssingeaux le 15 floréal an dix ; contre les sieurs Joseph-Raymond, Bénigne, Alexis-Françoise Saignard-Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; et encore contre George-François-Alexis Laroche-Negly, propriétaire, habitant du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Lardeyrol, intimé. Question principale : Une donation faite au nom d'un tiers, par contrat de mariage, et sans procuration de sa part, est-elle obligatoire pour celui au nom de qui elle est faite ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1746-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1223
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1601
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
donations
droit écrit
expertises graphologiques
experts
inventaires
signatures
Successions
-
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b8dec1dffd266e36187183d1139588b7
PDF Text
Text
IJ b t)
---- ------
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GENEALOGIE
DES PARTIES.
Pierre D ejar,
marié à
Jacqueline Chassaing.
Julien,
décédé sans
postérité.
s.
V ital,
décédé sans
postérité.
Antoine Ier.
décédé sans
postérité.
ont donné tous leurs biens
à Julien Dejax.
4
Antoine II,
marié â
Marie-Thérèse
Delchier.
Anne-Marie,
mariée au cit.
T artel,
de cujus.
I
S
3
4
Vital.
Julien,
AnneA gnès,
François, appelant. Marie , mariée à
Pierre
mariée à
décédé
Peyronnet. Dalbine ,
sans poster.
intimés.
i
2
Joseph,
AnneMarie ,
intimé.
mariée à
Robert
Gizaguct >
intimée.
3t
3
M arie,
intimée.
�MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame A g n è s D E JA X , et le citoyen P i e r r e
D A L B IN E , son mari, juge au tribunal d’ar
rondissement de Brioude;
J o s e p h D A L B IN E , M a r i e D A L B IN E , et
A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert
C r o z e - M o n t b r i z e t - G i z a g u e t , tant en
son nom que comme tutrice de ses enfans,
tous intimés :
CONTRE
J
D E J A X , homme de loi, habitant de la,
ville de Brioude, appelant d’un jugement rendu
au tribunal de cette même ville, le 6 messidor
an 10.
u l ie n
S o u s l’empire des lois prohibitives, les transactions
les plus ordinaires étoient toujours suspectées de fraude
l’injustice, la cupidité, l’ambition, avoient u n champ
vaste pour leurs spéculations ou leurs calculs. Quelle jouis
sance pour le cit. D e ja x , connu pour avoir la passion
A a
�<1« procès! Il doit sans doute regretter le temps où la
loi du 17 nivôse étoit en vigueur. II paroît que la loi du
4 germinal an 8 lui a singulièrement déplu; il sera bien
plus irrité contre le code civil, qui permet des dispositions
universelles en ligne collatérale; et son moment n’est pas
bien choisi pour attaquer des règlemens de famille dictés
par la reconnoissance, ou des ventes aussi sincères que
légitimes.
Ce n’est pas assez pour le cit. Dejax d’avoir obtenu,
par importunité ou par lassitude, la majeure partie de
la succession de l’un de ses oncles, d’avoir été donataire
universel de deux autres, il est jaloux de la plus légère
préférence de la tante qui lui restoit. Il l’a négligée dans
sa vieillesse; l’auroit abandonnée à des soins mercenaires,
sans la généreuse bienfaisance de la dame Dalbine : mais
aujourd’hui il en veut à sa succession; et tous les actes
qu’a faits la dame Tartel sont à ses yeux des libéralités
frauduleuses et déguisées, que la loi proscrit et lui réservoit exclusivement.
Ses prétentions sont défavorables et odieuses, sa récla
mation impolitique et injuste, attentatoire au droit sacré
de propriété : en l’adoptant, ce seroit récompenser l’in
gratitude, blesser la reconnoissance, et proscrire les con
ventions les plus légitimes.
( 4 )
F A I T S .
La dame D ejax, veuve Tartel, de la succession de la
quelle il s’agit, a été la bienfaitrice de toute sa famille.
Elle donna une somme de 3,000 fr. à Anne-Marie Dejax,
femme Peyronnet, lors de son contrat de mariage.
�( 5 )
¿ tff
Elle fit également un don de 6,000 fr. à Julien D ejax,
son neveu, appelant, lors de son mariage avec la demoi
selle Croze, du 20 novembre 1771. Ce sacrifice fut absolu
de sa part, et sans aucune réserve d’usufruit.
Le 9 décembre 1 7 7 1 , Agnes Dejax épousa le citoyen
Dalbine, et la dame Tartel lui fit donation de quelques
immeubles situés àFontanes, évalués à 5 ,000 francs, et
non d’un domaine, comme le prétend Dejax,- plus, d’une
somme de 2,000 fr. ; mais elle se réserva, pendant sa vie,
l’usufruit des objets donnés.
L e 19 juin 1778, la dame veuve Tartel fit donation à
Anne-Marie D albin e, sa petite-nièce, de six parties de
rente au principal de 4,000 fr.
L e 17 germinal an 2, elle fit donation du sixième de
ses biens à A n n e -M a rie , Joseph et Marie Dalbine, ses
petits neveu et nièces.
Le 6 messidor an 8, elle a fait un testament par lequel
elle a institué pour son héritière de la moitié de tous ses
biens, par préciput et avantage à ses autres héritiers de
droit, Agnès D ejax, femme Dalbine.
Telles sont les libéralités qu’a exercées cette femme
bienfaisante. Mais le citoyen Dejax conviendra lui-mème
qu’Agnès, sa sœur, méritoit quelque préférence, et devoit
obtenir la première place dans l'affection de sa tante.
Depuis longues années la dame Dalbine lui a rendu les
services les plus empressés et les plus généreux. La dame
Tartel, indépendamment des infirmités qui accompagnent
la vieillesse, étoit atteinte d’une cécité complète; sa nièce
ne l’a pas quittée, lui a prodigué ces tendres soins qui con
solent les malheureux et les dédommagent des privations.
Julien Dejax , au contraire, s’occupoit peu de sa tante
�(6)
pendant qu’elle a vécu ; il n y pense que depuis qu'elle
est morte ? parce qu’il est très-habile à succéder. Il lui
sera sans doute difficile d’attaquer des libéralités que les
lois autorisent : mais il fait l’énumération des ventes que
la dame Tartel a consenties 5 il est donc essentiel de les
rappeler.
L e 31 août 1791, le cit. Dalbine se rendit adjudicataire,
au ci-devant district de Brioude, de deux maisons natio
nales, moyennant la somme de 2,960 fr.; et l’adjudication
lui fut faite au nom de Marie Dejax, veuve Tartel.
L e 26 floréal an 2 , cette dernière subrogea Agnès
D e ja x , autorisée de son m a ri, à l'effet de ces deux adju
dications, à la charge par elle de payer 1,950 francs qui
étoient encore dûs à la nation ; de payer le montant d’un
devis qui avoit été donné pour quelques réparations; et
moyennant le remboursement qui fut fait de deux sommes
qui avoient déjà été payées par la dame Tartel; savoir,
celle de 1,221 fr. d’une part, versée à compte du prin
cipal ou intérêts dans la caisse du receveur, et celle de
1,200 fr. pour les réparations déjà faites.
L e 24 v e n d é m i a i r e an 5 , la dame veuve Tartel a vendu
à Robert Croze-Gizaguet, époux d’Anne-Marie Dalbine,
sa pciitc-nièee, un domaine appelé de Vazeliettes, l’a su
brogé à une vente nationale de partie d’un domaine appelé
le Poux, et lui a également cédé les meubles qui garnissoient ce domaine de Vazeliettes, dont l’inventaire est
annexé au contrat.
Cette vente est faite sous la réserve de l ’u sufruit de tous
les objets vendus et des bestiaux du domaine, moyennant
la somme de 25,000 fr. qu’elle reconnoît avoir reçue
comptant lors de lu vente,
�La dame veuve Tartel est décédée le i^r. vendémiaire
an 9 , c’est-à-dire, qu’elle a survécu quatre ans à la vente
par elle consentie au profit de Robert Crozc de Gizaguet.
Après son décès, les intimés espérèrent, pendant quel
que temps, que le cit. Dejax n’éleveroit aucune contesta
tion ; il sembloit se rendre justice : il nomma son arbitre,
fit estimer les fonds, et on procéda à l’inventaire du mobi
lier; cet inventaire fut écrit par son fils en sa présence.
Mais bientôt il changea d’opinion. Il éludoit toujours
les propositions qui lui étoient faites : la dame Dalbine
se vit contrainte de le faire citer pour procéder au par
tage des biens délaissés par la dame veuve Tartel.
C ’est alors que le cit. Dejax manifesta ses intentions
hostiles. Il demanda d’abord la nullité de la donation faite
par la tante commune, le 17 germinal an 2, du sixième
de tous ses biens au profit des enfans de la dame Dalbine,
sa nièce ; 20. il attaqua l’acte de subrogation de floréal
an 2 , au profit de la dame Dalbine ; 30. il conclut à la
nullité de la vente faite au profit du cit. Robert CrozeGizaguet, le 24 vendémiaire an 5 ; 40. il soutint la nul
lité du testament du 9 messidor an 8 , qui attribuoit â la
dame Dalbine la moitié des biens de sa tante, en prdeiput;
5 °. il prétendit que la dame Dalbine, épouse M ontbrizet,
devoit lui faire raison des arrérages d’une rente d’un setier
seigle, faisant moitié d’une rente de deux setiers par elle
perçue d’un nommé Poughon de Reillac, tant avant
qu’après le décès de la dame Tartel; 6°. il conclut h ce que
la dame Dalbine fût tenue de déposer, entre les mains de
tel notaire qui seroit commis, tous les titres, papiers et
docuinens de la succession, pour que chacune des parties
pût en prendre communication, ainsi qu’elle aviseroit.
�m
Il prétendit que la dame Dalbine devoit demeurer cau
tion de toute prescription qui auroit pu s’opérer depuis
le décès de la tante commune jusqu’au dépôt des titres
de créance ; il demanda qu'elle fût tenue de faire raison
de tous les arrérages de rente , baux à ferme, et géné
ralement de tout ce qu’elle peut avoir perçu des créances
dépendantes de la succession ; que tous les biens meubles
et immeubles , effets , créances , composant cette succes
sion , même ceux dont la dame Tartel avoit disposé
entre-vifs, en faveur de ses héritiers de d ro it, fussent
rapportés à la masse commune par les détenteurs, avec
restitution de jouissances et intérêts, depuis le décès de
la dame T a r te l, jusqu’au partage effectif.
Enfin il conclut subsidiairementdans le cas où tout
ou partie des actes attaqués ne seroit pas annullé, et que,
par l’effet de ceux conservés, ou de tout autre disposi
tion non contestée, plus de la moitié des biens de la
dame Tartel se trouveroit absorbée , il fût ordonné que
les dernières dispositions de la dame Tartel seroient re
tranchées jusqu’à due concurrence , de m a n iè re qu’il
restât toujours à diviser la moitié des biens meubles et
ijnmeubles composant cette succession.
Le eit, D e ja x , en expliquant ses prétentions, se fond o it , pour la nullité de la donation de germinal an 2 ,
du sixième des biens, i°. quant aux meubles, sur ce
que cette donation n’en contenoit pas l’é la t, quoiqu’il
11 y eût qu’une tradition feinte. Par rapport aux im
meubles , il prétendoit que la loi du 17 nivôse ne permeltoit pas la forme des donations entre-vils; et que la
dame Tartel ne pouvoit disposer du sixième de ses biens,
que
�(9)
que par donation pour cause de m ort, ou par testament.
La subrogation de floréal an 2, étoit suivant lui une
libéralité déguisée , faite au profit d’une successible. La
dame Tartel avoit éprouvé une lésion énorme, en ce qu’elle
avoit acquis dans un temps où les assignats perdoient peu
de leur valeur 5 tandis qu’ils étoient discrédités à l’époque
de la subrogation, en supposant même qu’elle en eût
reçu le remboursement, ainsi que cela a été dit dans l’acte.
Il prétendoit encore que cette maison avoit acquis une
grande valeur dans l’intervalle, par la démolition de plu
sieurs biltimeùs nationaux , qui auparavant embarrassoient ou obscurcissoient les avenues de la maison.
La vente du domaine de Vazeliettes étoit aussi une
donation déguisée, faite à vil prix au gendre d’une successible, à un homme dont la fortune ne lui permettoit
pas de payer 25 ,ooo fr. comptant. A l’entendre, cette
vente étoit faite sans nécessité, sans cause, sans emploi
du p rix , qui auroit dû se trouver dans sa succession ,
quatre ans après son décès.
Le testament du 6 messidor an 8 étoit encore n u l ,
parce que le notaire n’avoit pas indiqué pour quel dé
partement il étoit établi ; l’un des témoins n’avoit pas
signé son vrai nom ; ce même témoin étoit parent avec le
gendre de celle au profit de laquelle les dispositions étoient
faites ; enfin , on n’avoit pas suffisamment désigné le
huitième témoin , qui avoit été appelé à raison de la
cécité de la testatrice.
Le cit. Dejax, dans toutes ses demandes, a eu le désa
grément de ne pas trouver de son avis des cohéritiers qui
avoient le même intérêt. La dame veuve Pcyronnet a
B
�demandé acte de ce qu’elle consentoit au partage de ïa
succession de la dame veuve T arte!, conformément à son
testament ; 2°. de ce qu’elle n’entendoit point contester
la vente du domaine de Vazeliettes et dépendances, faite
au profit de Robert Croze-Gizaguet, ni aucune des do
nations partielles faites par la dame veuve Tartel.
Les petits-neveux, donataires du sixième, ont consenti
que la donation demeurât sans effet quant au mobilier ;
mais ont demandé son exécution, par rapport aux im
meubles.
L a dame Dalbine, de sa p a r t , a soutenu que la subro
gation faite à son p ro fit, le 27 floréal an 2 , n’étoit pas
du nombre des actes prohibés par la loi ; que toutes les
circonstances en prouvoient la sincérité ; que la loi ne
défendoit pas de ve n d re , et qu’elle validoit ce qu’elle
n’annulloit pas.
A l’égard du testament, le notaire avoit désigné le lieu
de sa résidence, qui est la ville de Brioude, et cette dé
signation étoit suffisante. 20. Les noms et prénoms de
Montbrizet-d’A uvernat, un des témoins, étoient expli
qués dans le testament. Dans tous les actes publics et
p riv é s, jamais ce témoin n’avoit signé d’autre nom que
celui de d’Auvernat. Ce témoin n’est pas parent de l’hé
ritière instituée. La parenté n’est pas une cause de prohi
bition. Et l’ordonnance de 1735 ne dit pas qu’on désignera
nominativement le huitième témoin, qui doit être appelé
pour cause de cécité.
La dame veuve Montbrizet , comme tutrice de ses
enfans, a observé, relativement à la vente du domaine
de Vazeliettes, qu’elle étoit consentie en faveur du mari
�d’une personne non successible. Elle a prouvé que la
prohibition rigoureuse de la loi ne s’étendo-it qu'à ceux
qui étoient appelés au partage de la succession. Son mari,
acquéreur , étoit d’ailleurs étranger à la dame Tartel :
les biens, quelle lui transmettoit, à titre de vente, passoient à tout autre famille que la sienne. Il est invrai
sem blable qu’elle l’eût préféré, si elle avoit eu des in
tentions libérales. Croze-Gizaguet trouvoit, dans sa for
tune , et dans son emploi de capitaine de gendarmerie,
des ressources suffisantes pour payer le montant de cette
acquisition: la dame Tartel avoit survécu quatre ans à
cette vente , et devoit naturellement en avoir employé
le prix à ses affaires ou à ses besoins, dans un age sur
tout où ils se font plus impérieusement sentir, et où les
infirmités augmentent nécessairement les dépenses.
Ces défenses si simples devoient faire présager à Julien
D ejax, quelle seroit l'issue des prétentions de ce collatéral
avide. L e jugement dont est appel « l’a débouté de
» sa demande en nullité, tant contre la subrogation à la
vente des deux maisons nationales, consentie par la
» dame Dejax, veuve Tartel, au profit de la dameDalbine,
» par acte du 26 iloréal an 2 , que de la demande en
» nullité de la vente du domaine de Vazeliettes, au profit
» de Robert Croze-Montbrizet, du 21 vendémiaire an 5 ,
i, et encore de celle intentée contre le testament de la
» dame Tartel, en date du 6 messidor an 8.
» Il est ordonné que les vente, subrogation et testa•» rnent sortiront leur plein et entier effet; il est donné
» acte aux parties de ce qu’elles s’en réfèrent A leur
» qualité d'héritiers, et offrent de rapporter tout ce qu’elles
B 2
�%j
( 12 )
,» tiennent à titre de libéralité particulière, et ce, de la
» môme manière qu’elles l’ont pris ou dû le recevoir. En
» conséquence il est dit que , par experts nommés par les
« parties ou pris et nommés d’office, il sera procédé au
» partage des biens meubles et immeubles provenans
» de la succession de la dame Tartel , pour en être
» délaissé à la dame Dalbine, héritière testamentaire,
» une moitié en cette qualité, et un tiers dans l’autre
» moitié comme successible ; le second tiers au cit. Dejax ;
>? et le dernier i\ la dame Dejax , veuve Pcyronnet ;
>) auquel partage chaque partie rapportera les jouissances
» perçues dans les immeubles, suivant l’estimation qui
» en sera faite par les experts, et les intérêts, revenus
» et autres objets dépendans de la succession, sauf tous
» les prélèveinens de droit que chacune d’elles aura droit
» de faire.
3) Il est ajouté que dans la moitié pour l’institution
» de la dame Dalbine, sont comprises toutes les facultés
» de disposer de la dame Tartel, faites depuis la publi» cation de la loi du 17 nivôse an 2 : en conséquence
« la disposition du sixième en faveur des enfans Dalbine
» demeure sans effet quant à présent; ils sont mis de
» leur consentement hors d’instance pour ce chef, sauf
» i\ se pourvoir contre leur mère ainsi qu’ils aviseront.
3) Il est ordonné q u e , dans le délai d’un mois à compter
» de la signification du jugement, le cit. Dejax sera tenu
» de faire faire inventaire du mobilier, papiers et titres
3) de créances laissés par la dame Tartel à l’époque de
t> son décès, si mieux il n’airue s’en rapporter h l’élat
3) qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera
3) censée faite le délai passé.
�éii&
( 13 )
» Il est encore ordonné que la dame Gizaguet sera
» tenue de rapporter le contrat de rente annuelle d’un
» septier seigle, qui fait partie intégrante de la succession
» de la dame T a rte l, et à en rendre compte suivant le
» prix des pancartes des années par elle perçues depuis
» l’ouverture de la succession , sauf au cit. Dejax de
» faire raison de ce qu’il a touché de la même rente.
» Sur le surplus des demandes respectives, les parties
» sont mises hors de jugement; e t, en cas d’appel, il est
» ordonné que tous les papiers et titres de créances
» dépendans de la succession de la dame Tartel, seront
» déposés ès mains du cit. Bellemont, notaire public de
» B rioude, désigné par les parties, et commis par le
» tribunal ; et le cit. Dejax est condamné aux dépens
» envers toutes les parties. »
Il est bon de connoître les motifs qui ont déterminé
ce jugement ; on verra qu’ils sont tous marqués au coin
de la sagesse, de l’équité et de la raison.
Eu ce qui touche la subrogation faite au profit de la
dame Dalbine , « il est dit que cette forme d’acte n’a
» point été interdite par la loi du 17 nivôse an 2 ; que
» le législateur , en interprétant dans ses décisions sur
» diverses questions relatives à ses efFets, a décidé que
j) ce qui n’étoit pas annullé par la loi étoit validé par
» elle.
» Qu’en anéantissant les ventes à fonds perdu entre
» successibles, la loi n’y a pas compris les autres transac» tions commerciales, contre lesquelles on n’invoque ni
» lésion ni défaut de payement ; que l’acte prouve que
» le prix dont il porte quittance a été compté, et que
�r' * ,
(
1 4 ) ......................................
» le surplus Ta également été, ainsi qu’il résulte des quit» tances rapportées. »
En ce qui concerne la vente du domaine de Vazeliettes,
faite au profit de Robert Groze de Gizaguet, on remarque
« que Robert Gizaguet n’étoit point dans la ligne de
» ceux sur qui frappe la prohibition des nouvelles lois,
» qu’il n’étoit ni successible ni me me époux de succcssible.
» On observe que la jurisprudence constante du tri» bunal de cassation, est de ne point ajouter à la rigueur
» des prohibitions des lois, mais au contraire de se ren» fermer dans le texte précis de ces prohibitions, sans
» les étendre.
» Les ventes pures et simples et a prix fixe ne sont
» pas interdites en faveur des successibles ; et quand
» bien même Robert Croze-Gizaguet eût été successible
» de la dame Tartel, la vente n’en seroit pas moins valide
» et inattaquable, tant qu’aux termes précis des lois on
» ne l’argueroit pas de fraude ou de lésion. Enfin il
» est d it, dans cet acte, que le prix en a été compté
» présentement i\ la dame Tartel ; et dès-lors on ne peut
élever aucun doute sur ce point de fait. »
Eu ce qui touche les nullités résultantes contre le tes
tament, « Attendu que la loi, sur l’organisation du nota» ria t, astreignant les notaires à indiquer le lieu de
» leur résidence et du département, n’a eu en vue que
» d’empêcher les fraudes qui pourroient être commises
» par des hommes qui usurperoient faussement la qua» lité de notaire, ou par des notaires même, recevant
» des actes hors de l’arrondissement pour lequel ils sont
» institués ; mais qu’un notaire, en indiquant le Heu de
�C 15 )
» sa résidence, fait connoître assez qu’il ne sort point
» des limites qui lui sont fixées, et satisfait suffisamment
» à ce que la loi lui impose; que s’il falloit annuller les
y> actes dans lesquels la désignation du département est
33 omise, ce seroit porter le trouble et la confusion dans
» la société.
» Attendu que d’Auvernat , l ’un des témoins, a été
» désigné par le notaire sous les noms et prénoms portés
>3 en son acte de naissance, de Jean-Baptiste Croze-Mont>3 brizet-d’A uvcrnat, et que par sa signature d’Auvernat
>3 il a suffisamment attesté sa présence audit acte.
33 Attendu que dans tous les actes généralement quel33 conques il ne signe que d’A u vern at, et qu’il n’est connu
33 dans le public que sous ce nom.
33 Attendu que sa pai-enté avec la fille et les petits33 enfans de l’héritière testamentaire ne dérive que du
33 lien d’affinité , ne suffit point pour annuller un acte
33 auquel il n’est appelé que comme témoin.
33 Attendu que la loi n’impose point aux notaires l’obli33 gation de désigner nominativement lequel des témoins
33 a été appelé en huitième par le motif de la cécité de la
33 testatrice, et qu’il suffit, aux termes de l’ordonnance
33 sur les testamens , que le nombre des témoins requis
3î soit constaté.
33 Attendu que le cit. Dejax ne demande point à être
33 admis à prouver le dol et la fraude dans les actes qu’il
33 attaque, ni que ces actes aient été l’effet de la sng» gestion ou de la violence.
» Attendu que les successibles ne peuvent cumuler
» les qualités de donataire et d’héritier.
�(
1
6
3
» Attendu que la faculté de disposer étant bornée à
» la moitié, par la loi de germinal an 8 , toutes les dis—
» positions qui excéderoient cette quotité doivent y être
» restreintes. »
Tels sont les motifs qui ont déterminé la décision des
premiers juges j ils sont certainement très-judicieux. Il
s’agit d’examiner si les objections du cit. Dejax, qui a eu
le courage d’interjeter appel de ce jugem ent, peuvent
balancer ces motifs , et faii’e annuller des conventions
légitimes.
1
D onation du 17 germinal an 2.
Le cit. Dejax d’abord pouvoit s’épargner une discus
sion oiseuse sur la validité ou la nullité de cette dona
tion du sixième, faite au profit des petits-neveux de la
dame Tartel. Le jugement dont est appel ordonne que
cette disposition demeurera sans effet, et la réunit à la
disposition de moitié, faite au profit de la dame Dalbine.
Mais s i , en thèse générale, on devoit examiner le
mérite de cette donation , il seroit aisé d’établir qu’elle
doit avoir son exécution, puisque les donataires ne sont
point successibles de la donatrice.
En effet, l’article X V I de la loi du 17 nivôse permet
de disposer du dixième de son bien en ligne directe, ou
du sixième en ligne collatérale, au profit d’autres que
des personnes appelées par la loi au partage des successio?is : donc, on ne peut tirer''cl’autre conséquence de
cet article, sinon que tous ceux qui ne sont point appelés
au partage sont susceptibles de recevoir la disposition de
cette quotité. Les argumens les plus simples sont les
meilleurs;
�*
é& r
C 17 )
meilleurs ; toutes les subtilités , tous' les raisonnemens
captieux disparoissent devant les termes de la l o i , qui n’a
exclu que ceux qui sont appelés directement au partage,
et ou ne doit point étendre les prohibitions.
On trouveroit encore la preuve, que le descendant du
successible, loin d’être exclu par la loi, est au contraire
capable de l’ecevoir. L ’article X X II lui permet de profiter
de la retenue, quoique son ascendant prenne part à la
même succession.
Loin de nous ces discussions inutiles sur l’incapacité
des enfans! Pourquoi rappeler cette maxime ancienne:
P a te r et filiu s un a eademque p eisona ? V o u d ro it-o n
faire concourir l’ancienne législation avec la nouvelle?
lorsque la loi veut qu’elles n’aient plus rien de commun
par la suite, ainsi que cela est dit textuellement par la
réponse à la question 47 de la loi du 22 ventôse an 2.
Si l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse a compris les
descendans du successible dans la prohibition des ventes
à fonds perdu , le motif en est assez expliqué dans la loi
du 22 ventôse. Ces ventes à fonds perdu , dit-on, sont
une source trop fréquente de libéralités indirectes. C’est
une exception qui confirme la règle. Ces sortes de vente
même ne sont annullées q u ’autant q u ’elles seroient sus
pectes ; elles peuvent être validées par le concours ou
le consentement des autres successibles. Mais précisément,
parce que la loi a compris dans cet article les descendans
du successible , qu’elle ne les a point nommés dans les précédens, on ne doit pas raisonner d’un cas ¡\ un autre ,
ni exclure d'oflice ceux que la loi n’a pas déclarés inca*
pables.
C
�.
c
i
8
)
Il
faut au surplus laisser au cit. Dejax le plaisir de
dire que cette donation est nulle pour le mobilier. L ’ar
ticle X V de l’ordonnance de 1731 le veut ainsi; les intimés
y ont consenti ; enfin cette donation n’a aucun effet par
rapport au cit. Dejax: pourquoi donc a-t-il pris tant de
peine, pour discuter un point qui n’est pas contesté,
et pour lequel il n’éprouve aucune perle ?
Subrogation du 17 Jloréal an 2.
Par cet acte, la dame veuve Tartel a subrogé la dame Dalbine sa nièce à une acquisition nationale. Le prix étoit
encore dû en majeure partie ; cette subrogation n’est faite
qu’à la cliarge de verser dans la caisse du district tout
ce qui n’a pas été payé; elle est faite sans aucune garantie ;
les sommes que la dame veuve Tartel avoit payées sont
infiniment modiques; et il faut avoir une grande manie
du procès pour attaquer une subrogation qui présente
aussi peu d’importance. Cependant, le cit. Dejax épuise
les autorités , se livre à une intempérie de citations pour
prouver la simulation de cet acte; il met à contribution
les lois et les auteurs , dans une matière où il y a peu
de décisions certaines, et où tout dépend des circons
tances ou des présomptions.
L e savant Ricard , dans son traité des donations, pre
mière partie, cliap. III, sect. X V I , nomb. 767, dit bien
qu’une vente étant passée entre personnes qui sont prohi
bées de se d onner, peut être prise pour un avantage
indirect, et que des présomptions violentes pourroient
quelquefois suffire : comme si le donateur venoit à décéder
�C *9 )
bienfôt après une semblable vente simulée , et que le
prix fût considérable , sans qu’il se trouvât dans sa mai
son aucune somme proportionnée aux deniers qu’il dé
tro it avoir reçus, et que d’ailleurs il ne parût pas qu’il
en eût fait aucun emploi dans ses affaires; avec quoi
qu’autre conjecture résultante du fait particulier. Ricard,
comme on le voit, ne se décide pas légèrement à prononcer
la nullité d’un contrat de vente. La présomption la plus
forte suivant lu i, c’est lorsque le vendeur décède bien
tôt après : on peut alors supposer aisément que ce ven
deur , mortellement atteint, cherche à transmettre ses
propriétés , à titre gratuit, à celui qu’il préfère ou qu’il
affectionne le plus. Tel est le malheureux effet des lois
prohibitives, qu’on cherche toujours à les éluder, surtout
dans ces derniers momens. M ais, il n’est pas dans la na
ture qu’on cherche à se dépouiller , lorsqu’on a l’es
poir de jouir encore : on préfère souvent un héritier à
tout autre, rarement on le préfère à soi-même; et, parmi
nous, les donations entre-vifs deviennent infiniment rares.
Et peut-on ici argumenter de présomptions, de fraude
ou de simulation , lorsqu’on voit que la dame veuve
Tartel a subrogé en l’an a , et n’est décédée qu’en l’an 95
lorsqu’il est établi, que le prix, ou au moins la majeure
partie de la subrogation, étoit encore dû par l’adjudica
taire; qu’il a été payé à la caisse nationale par la subro
gée? Alors, sans doute, doivent disparoître toutes ces
conjectures , tous ces moyens banaux de simulation ,
qu’on voudroit faire résulter de la loi N u d a , ou de l’au
torité de Papon , q u i , même sur la loi Sulpicius , nç
passe pas pour avoir toujours dit la vérité.
G a
�L e célèbre Gochin plaidoit sans doute pour un homme
qui comme Dejax ne revoit que simulations; et le plai
doyer d’un orateur fameux peut donner de grandes leçons,
et apprendi’e à bien discuter; mais on ne doit pas le citer
comme un ouvrage doctrinal.
D ’ailleurs si la loi du 17 nivôse a défendu de donner,
elle n’a point défendu de vendre; et le législateur veut
bien nous apprendre lui-même que la loi valide ce qu’elle
n'annulle pas.
Vente du 24 vendémiaire an
5 , au profit du cit. Gizoguet.
Cette vente est faite en l’an 5 au profit d’un étranger
à la venderesse ; mais cet acquéreur étoit le gendre de
la dame Dalbine \ et comme il est dans le système de
Dejax d’étendre les prohibitions, il veut les porter à
l’infini : quoique l’objet vendu passât à une famille étran
gère à la dame Tartel, qu’il appartînt aux héritiers Montbrizet plutôt qu’aux héritiers Dalbine, cependant Dejax
veut encore que cette vente soit simulée.
L e tribunal de cassation n’a pas pensé comme le cit.
D ejax, lors d’un jugement du 6 prairial an 10, qui a
confirmé une vente à fonds perdu , faite à l’ascendant
d’un successible. Samuel Dalau avoit vendu tous ses biens
à Marie Bonnau, veuve Dalau, sa belle-sœur, moyennant
une rente viagère. Samuel Dalau n’avoit point d’enfant,
et les cnfans de Marie Bonnau, ses neveux, étoient du
nombre de ses successibles. Les autres héritiers attaquoient
cette vente de nullité; ils se fondoient sur la disposition
de l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse; ils rappeloient
�¿ iï/
( 2ï )
toutes les autorités qu’invoque le cit. Dejax, et ne inanquoient pas de dire que les arrêts avoient toujours confondu
le père avec le fils, d’après la maxime : P a ter et filiu s
una eademque persona. Le tribunal d’appel de Poitiers,
sans égard pour cette maxime , avoit validé la vente :
pourvoi en cassation; et, comme le tribunal de cassation
apprend qu’on doit restreindre les lois prohibitives, il
est à propos de rappeler les motifs qui l’ont déterminé
à l’ejeter le pourvoi.
« Considérant que l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse
» an 2 , est prohibitif, et ne peut par conséquent s’éten» dre d’un cas à un autre.
» Considérant qu’il ne comprend que les successibles
» et leurs descendans, et que s’il y a quelques inconvé.» niens de ne l’avoir pas étendu, soit aux descendans,
» soit à l’époux en communauté avec le successible, ou
» avec les descendans du successible, il y en auroit encore
» davantage, à créer, sous le prétexte d’analogie, des
» prohibitions que la loi n’a pas établies.
» Considérant que créer ces nouvelles prohibitions, ce
» seroit ( quelque justes qu’elles puissent être ) entre» prendre sur l’autorité législative ; ce qui, dans l’espèce,
.» seroit d’autant moins pardonnable, qu’il n y avoit pas
» de question plus controversée avant la loi du 17 nivôse,
» que celle de l’étendue des prohibitions : d’où il suit que
» c’est en connoissance de cause que les législateurs l’ont
» restreinte expressément aux successibles et à leurs des-•» ccndans.
*■ » Considérant enfin qu’il ne peut pas y avoir ouverture
■
x> à cassation d’un jugement auquel on ne peut faire d’autre
�( 22 )
» reproche que d’être conforme à la lettre de la lo i, etc.
Tels sont les véritables principes en matière de prohi
bition. Cette décision de l’autorité normale doit servir
de règle invariable en cette matière. Il en résulte que
Robert Croze- Gizaguet n'étoit pas personne prohibée,
quoiqu'il fût l’époux de la descendante du successible;
qu’il pouvoit traiter, acquérir delà dame veuve Tartel:
e t , en écartant aussi victorieusement la prohibition , on
fait disparoître toute idée de simulation ou de déguise
ment du contrat.
Les conventions doivent être généralement exécutées:
tous les efforts des tribunaux doivent tendre à valider
les actes plutôt qu’à les annuller, Ut potiùs actus valeat,
quàm ut pereat. Nulle présomption de fraude dans la
vente dont il s’agit: celle qui a si fortement touché Ricard,
la mort prochaine du vendeur, ne se rencontre pas dans
l’espèce particulière , puisque la dame Tartel a survécu
quatre ans à cette vente. Et s’il falloit annuller tous les
contrats qui portent quittance, il faut convenir qu’il n y
auroit plus rien de solide ni de certain parmi les hommes.
Dans les mutations actuelles, presque toujours les con
trats portent quittance, quand bien même le prix ne
seroit pas entièrement payé. On y supplée par des effets
ou des reconnoissauces particulières, pour éviter de plus
grands droits.
Ici le prix principal n’est pas exorbitant, et ne choque
en aucune manière la vraisemblance. D e quel droit le
cit. D ij ax voudroit-il scruter la solvabilité ou les res
sources du cit. Gizaguet ? JN'est-il pas notoire cp.i'il apparterioit à une famille riche, qu'il avoit uti patrimoine con-
�e*s)
sidérable, un emploi dont les appointemens étaient de
3,000 francs par année? ne sont-ce pas là des ressources
suffisantes pour payer une somme de 2Ô,ooo francs? pourroit-on , sur des prétextes aussi légers, dépouiller une
famille , des orphelins, d’un bien légitimement acquis ?
quiconque oseroit le penser , n’auroit aucune idée des
principes du droit et de l’équité.
L e cit. Dejax , dans son aveuglement, va jusqu’à cri
tiquer les intentions libérales et bienfaisantes de la dame
Tartel; il rappelle avec affectation ses dispositions anté
rieures et subséquentes : pourquoi a - t - i l oublié celles
dont il a été l’objet, et dont il étoit si peu d ig n e, puis
qu’il attaque la mémoire de sa bienfaitrice ? N ’a-t-il pas
reçu d’e lle , en se mariant, une somme de 6,000 francs,
avec tradition réelle ? tandis que les libéralités faites aux
autres ont toujours été grevées de l’usufruit envers la
donatrice.
Pourquoi n’a-t-il pas dit qu’il étoit donataire universel
de deux de ses oncles, qu’il a profité exclusivement de
leui’s dépouilles, et que la dame Dalbine , sa sœ ur, en
a été privée ; que par ces donations il a trouvé le moyen
de réunir, en majeure partie , les biens de Julien, son
oncle, premier du nom? Il a craint sans doute de justes
reproches d’avidité, lorsqu’il se montre aussi jaloux de
ce que sa sœur a reçu la récompense des soins les plus
tendres et les pins assidus. Dans son humeur inquiète,
il va jusqu’à reprocher les quittances et la décharge que
la dame veuve Tartel a données à sa nièce pour la gestion
de ses biens ou la perception de ses revenus. Mais la darne
Tartel devoit-elle quelque chose sur ses revenus au cit.
�(*4 )
Dejax ? n’étoit-elle pas au moins la maîtresse d’en dis-’
poser à son gré? Si la dame Dalbine a pris la précau
tion de se faire donner une décharge, c’est qu’elle avoit
la procuration de sa tante, et qu’elle devoit craindre ,
avec raison, que son frère lui demandât compte de son!
mandat ; mais on ne voit rien là que de très-ordinaire.
La dame Tarte! a pu dissiper ses revenus comme ses capi
taux , sans que personne eût le droit de critiquer sa con
duite; elle en a fait tel emploi que bon lui a semblé; et*
ce n’est pas la première fois que des collatéraux avides
ont été trompés dans l’espoir qu’ils avoient de trouver
des capitaux ou des deniers à la mort de celui dont ils
convoitoient la succession.
La coutume de Normandie ne les leur a pas fait rendre;
et l’article C C C C X X X IV , qui a servi de base à un jugement
du tribunal d’appel de R o u e n , rapporté au mémoire
du cit. Dejax , ne reçoit aucune application à une suc
cession ouverte en droit écrit.
Testament du
6
messidor an 8.
Le notaire qui a reçu ce testament , en désignant la.
ville de Brioude, a-t-il dû désigner le département dans
lequel il étoit domicilié? A-t-il dû faire mention du nu
méro de sa patente? Ou défie le cit. Dejax de citer
aucune loi qui oblige, à peine de nullité, les notaires
d j désigner leur département ou le numéro de la pa
tente: ils n'ont même jamais pratiqué cet usage, lorsqu’ils
reçoivent dans les villes de leur résidence, et pour des
personnes qui y sont domiciliées. La désignation du dé
partement
�c »5 r
partement ne seroit utile qu’autant qu’on recevroit un
acte pour un tiers étranger au département .dans lequel
il transige ou fait un te s ta m e n t, parce qu’il peut y .avoir
des formes ou des règles différentes de tester d’un dé
partement à l’autre : mais, dans ¡l’espèce, cette mention
n ’avoit aucun but; et, comme l’ont observé les premiers
juges, la désignation de la résidence á Brioude étoit sans
contredit suffisante. Les huissiers seuls saut astreints par
les lois à rappeler le numéro de leur patente : les no
taires auro'ent dû être dispensés d’en prendre ; et la
nouvelle loi qui organise Je notariat, les en dispense
expressément
L e témoin jMontbrizet d’A uvernat, en signant sim
plement siuvem aty ne i ’a iait que d*après l’usage cons
tant où il est de signer ainsi ; c’est .ainsi iqu’il a signé le
contrat de mariage de son frère; c’est ainsi qu'il a signétous les actes publics ou iprivés, depuis iqu’il a ^exercice
de ses droits ; et îles 'intimés rapportent un acte de no
toriété qui le constate,»etiqui apprend même qu’il n’est
pas connu ni ¡désigné sous d’autre nom.
O n a satisfait à tout ce qu’exige la loi qui veut qu’on
prenne le nom de sa famille, en rappelant dans les qua
lités 'des témoins le prénom »et 'le noni de la famille du
témoin d'Auvernat.
La parenté de ce témoin avec Robert Groze-Gizaguet,
époux de la petite-nièce délia testatrice, n’ast point une
incapacité:'Fur-gtile, des=testamens, chapitre III, section;
I I, nombre <10,' nous'donne^en/pvincipe jque les parons
collatéraux'peuvent être-témoins aux teslamens'de leurs
parens,*et qu'on'doit dirç la même>chose d(;s parens de
D
�( 2 6 )
l’héritier ; car le paragraphe X , aux instituts, de tcstam.
ordin. n’exclut du témoignage le père et les frères de l’hé
ritier, qu’autant qu’il est en la puissance de son père,
et que ses frères sont aussi en la puissance de leur père
commun; à plus forte raison le parent du parent de l’hé
ritière peut-il être témoin dans un testament.
L e cit. Dejax n’insiste pas fortement sur ces singuliers
moyens de nullité ; mais il se plaint de ce qu’en sup
posant ce testament valable, les premiers juges n’ont pas
compris dans la disposition de moitié toutes les dispo
sitions faites antérieurement à la loi du 17 nivôse. C’est
une erreur de sa part; et les premiers juges ont sage
ment restreint cette confusion aux dispositions faites de
puis la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
Point de doute d’abord pour les objets vendus, qui
sont hors de la succession du testateur; et il doit en être
de même pour les donations entre-vifs faites dans un
temps utile , parce qu’une donation a le même effet
qu’une vente ; elle dépouille le donateur, dès l’instant
même : les objets anciennement donnés ne peuvent faire
partie d’une succession ouverte sous l’empire des lois
nouvelles.
L e cit. Dejax a la prétention d’intéresser le public dans
la décision de cette cause. On ne voit pas trop comment
l’ordre public seroit troublé, parce que le cit. Dejax
n’auroit pas une portion égale dans la succession de sa
tante. Mais la société seroit bouleversée, si les 'conven
tions des hommes pouvoient être anéanties sous des
prétextes futiles; si des ventes ou des mutations qu’il im
porte de faciliter et d’assurer, pouvoient être annullées
�6r S
(2 7 )
par des chimères ou des allégations de fraude. Ce seroit
porter atteinte au droit de propriété, au droit le plus cher
à l’homme, de dispenser ses bienfaits, de récompenser le
mérite ou de protéger la foiblesse, si on s’écartoit jamais
du respect qu’on doit avoir pour les volontés du défunt.
L e code civil nous rappelle sagement à des idées plus
saines, à des principes plus sages, en rendant aux testa
mens toute leur ancienne faveur. Aujourd’hui nous pou
vons répéter cette maxime des Romains : Quidquid legass i t ita lex esto !
P A G E S ( de Riom ) anc. jurisc.
V A Z E I L L E , avoué,
Ç & ÏU ,U. &
J i
^
V
^
A*
n
‘------- ~ * '
<U ~»
A RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — An 11.
�
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Agnès. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès (de Riom)
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Dame Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal d'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, tant en son nom que comme tutrice de ses enfans tous intimés : Contre Julien Dejax, homme de loi, habitant de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au tribunal de cette même ville, le 6 messidor an 10.
Annotations manuscrites : « 8 prairial an 11, jugement du tribunal d'appel, déclare la vente du 24 vendémiaire an 5, nulle, en l'assimilant aux ventes à fond perdus, prohibés par l'article 26 de la loi du 17 nivôse an 2. recueil manuscrit, page 738. »
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1771-An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0932
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0931
BCU_Factums_G0716
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53093/BCU_Factums_G0932.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53092/BCU_Factums_G0931.pdf
07705c8bb6750aa819b06d59728dd19e
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Text
MÉMOIRE
P O U R
J u l ie n D E J A X , homme de lo i, habitant de la com
mune de Brioude, appelant ;
C O N T R E
A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e D A L B IN E ,
son m a ri, juge au tribunal de première instance de
l'arrondissement de B riou d e;
D A L B IN E , M a r i e D A L B I N E , fille majeure
et A n n e - M a r i e D A L B IN E , veuve de Robert CrozeM ontbrizet-G izaguet, en son propre et privé nom ;
tous enfans dudit PlERRE D A L B IN E , et de ladite
D E J A X , son épouse ;
J oseph
E t encore ladite M a r i e D A L B IN E , veuve Gizaguet,
au nom de tutrice de ses enfans m ineurs, et dudit
Montbrizet-Gi zaguet ;
Tous intimés.
D
actes faits en fraude de la l o i , pour éluder la
prohibition de la lo i, doivent-ils être maintenus? Les
juges, établis pour le maintien des lo is, doivent-ils en
autoriser l’infraction ? T elle est la question que cette cause
présente.
A
ES
�C2 )
Ce n’est pas un seul acte que le citoyen Dejax attaque;
c’est une suite, une série d’actes; tous l’ouvrage de l’am
bition de la dame D albine, tous l’effet d’un plan cons
tamment su iv i, du plan conçu et exécuté de le dépouiller
de la portion que la loi lui assuroit dans la succession
d’une tante commune.
F A I T S .
D u mariage de Pierre Dejax avec Jacqueline Chassaing, sont issus cinq enfuns; savoir, Ju lien , V ita lt
Antoine prem ier, Antoine second du n om , et A n n eM aric D ejax, première du nom.
Julien , V ita l, et Antoine prem ier, sont décédés sans
postérité. Il ne s’agit point de leur succession.
A nne-M arie Dejax a contracté mariage avec le citoyen
T a rtel; elle a survécu à son m ari, et vient elle-m êm e
de payer le tribut. C’est son décès et sa succession qui
donnent lieu à la contestation.
Antoine D ejax, second du nom , s’est marié avec M arieThérèse Delchier.
D e ce mariage sont issus quatre enfans :
Vital-François, décédé sans postérité;
^
Julien D ejax, appelant;
Anne-Marie D ejax, seconde du nom , veuve Peyronnet ;
E t Agnès D e ja x , épouse du citoyen D albine, juge.
Celle-ci a e u , de son mariage avec ledit D albine, trois
enfans; A n n e -M a rie , qui a épousé, en l’an 3 , Robert
Croze-Montbrizet-Gizaguet; et Joseph, et M arie Dalbine.,
Telle est la généalogie des parties.
�(3)
Anne-M arie D ejax, première du nom , veuve T artel,
n’avoit point eu d’cnfans de son mariage ; ses quatre
frères, Julien , V ita l, Antoine premier et Antoine se
cond du nom , l’avoient prédécédéc. Antoine, second du
nom , laissoit seul des enfans : ces enfans étoient les hé
ritiers naturels, et les seuls héritiers de ladite Dejax.
Des quatre enfans d’A ntoine, second du nom, il n’en
restoit que tro is, par le décès de Vital-François.
Anne - Marie Dejax , seconde du n o m , s’est mariée
en 1770 , avec Emmanuel Peyronnet. Par le contrat de
m ariage, la tante lui assura la somme de 3,000 francs,
payable après son décès, en effets de la succession, bien
et dûment garantis.
Julien D ejax, appelant, s’est marié en 1771. Par son
contrat de mariage, elle lui a donné des effets ou créances
mobiliaires évaluées à la somme de 6,000 francs; mais
sans garantie de 'sa p a rt, même de ses f a i t s et pro
m esses, et entièrement aux risques, périls et fo rtu n e
du donataire.
Là s’est borné le cours de ses libéralités envers la
dame Peyronnet et l’appelant.
Il n’en a pas été de même pour la dame Dalbine.
Par son contrat de mariage de 1771 , elle lui a fait
donation du domaine de Fontanes, sous la réserve seu
lement de l’usufruit -, elle lui a donné, en o u tre , une
somme de 2,000 f r . , payable après son décès, en argent,
ou effets de la succession.
Cette première libéralité a été bientôt suivie d’une
seconde.
L e 19 novembre 1 7 7 8 , elle dispose en faveur de
A 2
�(
4
)
Anne-M arie D alb in e, sa petite nièce, de six contrats
de rente foncière, sans autre réserve également que de
l’usufruit. L a donation est acceptée par le père.
Peu de temps après, elle eut le malheur de perdre la
vue; la dame Dalbine sut profiter de cette circonstance.
Sous prétexte d’être plus à. portée de lui prodiguer ses
soins , elle s’établit dans la maison avec ses enfans.
Elle eut bientôt acquis un ascendant souverain.
Elle géra et administra à son gré -, elle percevoit arbi
trairement les revenus et les capitaux.
O n va voir la preuve de l’empire qu’elle exerçoit.
Les actes vont se succéder.
i r novembre 1793, premier acte. On appelle un no
taire. La tante déclare devant ce notaire, que les sommes
qui avoient été comptées par ses débiteurs, à différentes
époques , avoient été par elle reçues et employées ; et
q u e , si les quittances en avoient été fournies par la dame
D a lb in e, sa nièce, c’est parce que la déclarante n’avoit
pu les donner elle-m êm e, étant depuis long-temps privée
de l’usage de la vu e; de laquelle déclaration elle requiert
le notaire de lui donner acte.
28 du même mois de novem bre, correspondant au 8
frimaire de l’an 2, procuration générale de la tante à la
dame D albine, pour recevoir, non-seulement les revenus,
mais les capitaux des créances, remettre les titres, et faire
quittance de tout ou de partie des sommes, ne pouvant
la constituante , est-il d it, quittancer, étant privée de
Yusage de la vue ; se réservant, est-il ajouté, la constituante, de toucher et recevoir elle-même les sommes qu i
seront payées par ses débiteurs, de manière que la darne
�ékf
(
5 )
D albine sera censée rî’avoir absolument rien reçu on
vertu des présentes j et par conséquent dispensée de ren
dre aucun compte.
Une pareille procuration étoit une véritable donation,
et en avoit tous les effets.
Bientôt intervint la loi du 17 nivôse an 2 ; la tante
ne pouvoit plus alors avantager cette nièce si chérie : on
imagina une couleur.
La loi du 17 nivôse permettoit de disposer du sixièm e,
en faveur des non successibles ; on imagina de porter sur
les enfans les libéralités dont la mère n’étoit plus sus
ceptible.
L e 17 germinal an 2, on lui fait souscrire, en faveur
des trois enfans de la dame D albine, une donation du
sixième de tous les biens meubles et immeubles présens,
sous la réserve de l’usufruit. L a donation fut évaluée à
une somme de 11,600 f r ., savoir, 10,000 fr. pour les
immeubles, et 1,600 fr. pour les meubles. Il n’y a point
eu d’état du mobilier annexé à la m inute, et l’acte ne
dit point, et ne pouvoit dire qu’il en avoit été fait tra
dition réelle, puisque la donation porte réserve d’usu
fruit.
L ’ambition de la dame Dalbine n’étoit pas encore
satisfaite.
L e 17 floréal an 2, on fait consentir un autre acte ,
celui-ci directement au profit de la dame Dalbine. On
prend la couleur d’une vente.
Par cet acte, la tante subroge la nièce, objet de sa
prédilection, à l’acquisition de deux maisons nationales ;
lesquelles, est-il dit, lu i aboient été. adjugées moyennant
�(
6
)
la somme de 2,950 J r . , mais auxquelles elle avait fa it
des réparations considérables, pour, par la dame JDalb in e, jo u ir d'¿celles dajis l’état où elles se trouvent, à lacharge par elle de lui rembourser la somme de 1,22 i f .
par elle déjà payée à la nation, et à la charge de payer à
la nation le restant de Vadjudication. L e contrat ne man
que pas de porter quittance de la somme de 1,221 f r . ,
qui de voit être remboursée; il porte aussi quittance des
réparations, évaluées à la somme de 1,220f r .
Ce 11’étoit point assez. 21 vendém aireancinq, nouvelle
libéralité sous la même couleur.
Cette fois on imagina de faire consentir la vente au
cit. Robert Croze-M ontbrizet-G izaguet, mari d’AnneMarie Dalbino.
Par cet acte, il est dit que la dam eD ejax, veuve Tartet,
a fait vente à M ontbrizet-Gizaguet, i°. du domaine de
Vazeliettes, bien patrimonial; 20. du domaine appelé le
Poux , ayant appartenu aux ci-d evan t religieuses de
St. Joseph, tel qu’il avoit été adjugé par la nation; 30. de
tous les meubles, outils aratoires, et généralement de tous'
les meubles étant au pouvoir du m étayer, comme aussi de
tous les meubles garnissans la maison de maître du
domaine de Vazeliettes , sous la réserve de Iusufruit
de tous les objets vendus. L a vente est faite moyennant la
somme de 25 ,000 francs , dont le con trat, comme de
raison, porte quittance.
Cependant la dame Dalbine continuoit, en vertu de la
procuration du 8 frimaire an 2, de percevoir, et les revenus
des biens, et lus capitaux des remboursernens qui étoient
faits par les débiteurs.
�ÙJ.Y
(7)
6 frimaire an 7 , acte devant notaires , par lequel la
tante, toujours docile aux impressions de la nièce, après
avoir rappelé la procuration du 8 frimaire an 2, déclare
que, quoique la dame Dalbine ait fourni quittance aux
débiteurs, ainsi qu’elle y étoit autorisée par ladite procura
tion , c ’est cependant elle, déclarante, qui a reçu et
touché les différentes so m m es, tant en p rin cip a u x,
intérêts que f r a i s , ain si, e st-il ajouté , que le montant
du p rix de la vente de azehettes par elle consentie au
profit de défunt G iza g u et, le 4 vendémiaire an 5 ,
dont elle a disposé ¿1 son gré, soit à payer partie de ses
dettes contractées, ou à Ventretien de sa maison ou
autrem ent, attendu que ses revenus sont depuis long*
temps insujfisans pour fo u r n ir à ses dépenses journa
lières; de laquelle déclaration elle requiert acte.
E nfin, pour couronner cette série de libéralités envers
la même personne, testament du 9 messidor an 8 , par
lequ el, usant de la faculté que lui accordoit la loi du
4 germinal de la même année, elle a disposé en faveur de
la dame D albine, par préciput et avantage , de la moitié
de tous ses biens.
»
Elle est décédée le 4 vendémiaire an 9 , âgée de quatrevingt-neuf ans.
Après son décès la dame Dalbine a provoqué la pre
mière le partage de la succession ; c’est-à-diie, dans son
sens, des objets dont la défunte n’avoit point disposé par
les actes entre-vifs dont on vient de rendre compte. E lle a
fait citer à ces fins le cit. D ejax et la veuve Peyronnet, par
exploit du 26 germinal an 9.
L e cit. D ejax, de son côté, a fait citer, par exploit du
+»t)
�( 8 ) '
i g messidor de la même année, la dame Dalbine et son
m ari, les enfans D albine, c’est-à-dire, Marie D alb in e,
Pierre Dalbine et A n n e-M arie D alb in e, veuve M ontbrizet-Gizaguet;
Savoir : la dame Dalbine et son m ari, pour voir déclarer
nul et de nul effet l’acte de subrogation, du 17 floréal an 2,
à l’acquisition des deux maisons nationales; voir dire que
'lesdites maisons seroient comprises dans le partage; se voir
condamner à rendre et restituer les loyers depuis la subro
gation , avec intérêts du montant depuis la demande ; pour
voir pareillement déclarer nul le testament du 9 messidor
an 8 , comme non revêtu des formalités prescrites par
l’ordonnance ;
M arie, P ie rre , et Anne-M arie D albine, veuve Gizagu e t, enfans dudit D albin e, pour voir déclarer nulle et
de nul effet la donation du sixième des biens meubles et
immeubles, du 17 germinal an 2 ;
E t encore la dame Gizaguet, au nom de tutrice de ses
enfans , pour voir déclarer nulle la vente consentie, le
21 germinal an 5, du domaine et métairie de Vazeliettes
et du P o u x, et des meubles, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis la vente.
Il a encore conclu, contre la dame veuve Gizaguet, à ce
qu’elle fût tenue de rendre et restituer les arrérages par
elle perçus, tant avant qu’après le décès de la défunte, d’un
setier seigle faisant partie d’une rente de deux setiers
seigle , due par Jean Pouglieon.
Il a conclu à ce qu’il fût sursi au partage demandé par
la dame Dalbine, jusqu’à ce qu’il auroit été statué sur les
demandes ci-dessus.
Il
�( 9 )
Il a conclu subsidiairement au retranchement et à la
réduction des donations à la moitié des biens, en remon
tant de la dernière à la première.
La cause portée à l’audience sur les deux citations ,
c’est-à-dire, sur celle en partage donnée à la requête de la
dame Dalbine , et sur celle du citoyen D e ja x , et avec
toutes les parties, jugement est intervenu le 6 messidor
an 10, qui a débouté le citoyen Dejax de sa demande en
nullité, tant de la subrogation consentie par la défunte
au profit de la dame Dalbine à l’acquisition des deux mai
sons nationales, que de la demande en nullité, formée
contre la veuve Gizaguet, de la vente du domaine de
Vazeliettes et le P o u x , et encore de la demande en nul
lité du testament; a ordonné en conséquence que lesdites
ventes, subrogation et testament, sortiroient leur plein et
entier effet ; a ordonné le partage, pour en Être délaissé à
la dame D albine, comme héritière testamentaire, une
moitié par préciput, et un tiers dans l’autre moitié comme
successible, et les deux autres tiers de ladite moitié, un au
citoyen D ejax, et l’autre à la citoyenne D e ja x , veuve
Peyronnet; auquel partage, est-il dit, chacune des parties
rapportera les jouissances perçues des immeubles, et les
intérêts, x’evenus, et autres objets dépendans de ladite suc
cession , sauf tous les prélèvemens de droit que chacune
d’elles auroit droit de faire. Il est dit ensuite : D a n s la
m o i t i é your Îinstitution de la dame D a lb in e , sont com
prises toutes les facultés de disposer de la défunte,fa ite s
depuis la publication de la loi du 17 nivôse an 2 ; en con
séquence la disposition du sixièm e, en fa v eu r des enfans
D a lb in e, demeure sans effet quant à présent, et de leur
B
�( 10 )
consentement les avons m is, sur ce c h e f , hors d'instance,
s a u f ii se pourvoir contre leur m ère, ainsi q u ils avise
ront. Il est de plus ordonné que, dans le délai d’ un m ois, à
compter de la signification dudit jugement, le cit. Dejax
sera tenu de faire faire inventaire du m obilier, papiers et
titres de créances laissés par la défunte à l’époque de son
décès, si mieux n’aime le cit. Dejax s’en rapporter à l’état
qui en a été dressé par son fils, laquelle option sera censée
faite ledit délai passé. L e jugement ordonne en outre que
la dame Gizaguet sera tenue de rapporter le contrat de
rente annuelle d’un setier seigle, qui fait partie inté
grante de la succession de la défunte, et de rendre compte,
suivant le prix des pancartes, des années par elle perçues
depuis, sauf au citoyen Dejax à faire raison de ce qu’il a
touché de la même rente.
Sur le surplus des demandes respectives, met les parties
hors de jugement; et, en cas d’appel, ordonne le dépôt
des papiers entre les mains de Belm ont, notaire.
Condamne le citoyen Dejax aux dépens.
L e citoyen D ejax a interjeté appel de ce jugement ;
et c’est sur cet appel que les parties sont en instance en
ce tribunal.
L e citoyen Dejax a attaqué de nullité divers actes r
i° . L a donation faite, en faveur des enfans D albine,
du sixième de tous les biens meubles et immeubles
présens ;
2°. L ’acte de subrogation, du 17 floréal an 2, à l’acqui
sition des deux maisons nationales ;
30. L a vente du 21 vendémiaii*c an 5 , consentie aij
citoyen Montbrizct-Gizaguet ;
�C ^ }
E t enfin, le testament de la défunte, du 9 messidor an 8.
La disposition du jugement qui valide ces actes doit-elle
être confirmée ? On se flatte de démontrer la négative.
D onation du 17 germinal an 2.
- Cette donation est d’abord nulle quant aux meubles,
faute d’état. Les enfans D albinel’ont reconnu eux-mêmes;
ils ont déclaré qu’ils n’y insistoient pas.
Mais elle est également nulle pour les immeubles ; elle
est postérieure à la loi du 17 nivôse an -2, qui a interdit
tout avantage en faveur d’un successible, au préjudice
des autres.
O n a cru éluder la prohibition, en dirigeant la libé
ralité en faveur des enfans de la dame Dalbine ; mais
on s’est abusé.
- L ’art. X V I p orte, à la vérité, que la disposition géné
rale de la loi ne déroge point à l ’avenir à la faculté de
disposer, au profit d’autres que des personnes appelées
par la loi au partage des successions; savoir, du sixième,
si l’on n’a que des héritiers collatéraux; et du d ixièm e,
-si l’on a des 'héritiers en ligne directe.
Mais ce seroit bien mal entendre la lo i, que de penser
qu’elle a voulu par là autoriser les avantages indirects ;
qu?après avoir défendu d’avantager directement les suctessibles, elle a permis de îles avantager indirectement.
Ce seroit prêter u n e ‘absurdité et une inconséquence au
législateur.
Il est certain q u e, tant que le successible v it , ses en
fans ne sont point en ordre ide >succéder ; il leur fait
B a
�(12) t
obstacle. Mais il est-certain aussi, que le père et le fils
ne sont censés, en droit, faire qu’une seule et même per
sonne. P a te r et filius una eademque persona.
L a lo i, en interdisant tout avantage entre cohéritiers,
n’a fait que rendre générale, et étendre à toute la France,
la disposition des coutumes d’égalité. O r , dans les cou
tumes d’égalité, auroit - on autorisé ce qui auroit paru
renfermer un avantage indirect?
L a coutume d’Auvergne défend à la femme de dis
poser, non-seulement de ses biens dotaux, mais encore
de ses biens parapliernaux, au profit de son mari. L ’ar
ticle ajoute, ou autres et q u i le m ari puisse ou doiçe
succéder ; parce qu’inutilement une personne seroit prohi
bée , si on pouvoit lui donner indirectement ce qu’on ne
peut directement.
E t, sans se renfermer dans les coutumes particulières,
on le demande : de droit com mun, et suivant les lois de
rapport entre enfans, le père n’étoit-il pas obligé de rappoi’ter à la succession ce qui avoit été donné au petitfils-, et, respectivement, le petit-fils ce qui avoit été donné
au père?
L a loi du 17 nivôse en renferme elle-même une dis
position tacite.
On sait qu’elle annulloit toutes les dispositions faites
par personnes décédées depuis le 14 juillet 1789 : elle
aulorisoit cependant celui au profit duquel la disposition
annullée avoit été faite h retenir la quotité disponible,
c’est-à-dire, le sixième ou le dixièm e, suivant que le do
nateur avoit ou n’avoit point d’enfans ; et, en outre, autant
de valeurs égales au quart de sa propre retenue, qu’il
�( i3 )
avoit d’enfans, au temps où il avoit recueilli l’effet de la
disposition.
L ’article X X I porte que si le donataire ou héritier
institué est en même temps successible, il ne pourra
cumuler l’un avec l’autre, c’est-à-dire, la retenue et la
part héréditaire; il est obligé d’opter.
E t l’article X X II porte, L e descendant du successible,
qui n’a aucun droit actuel à la succession, et qui en fait la
remise d’après une disposition annullée, peut profiter de
la retenue, quoique son ascendant prenne part à la même
succession.
Si le descendant du successible n’avoit pas été regardé,
par la loi même, comme ne faisant qu’un avec ceux dont
il a reçu le jo u r , auroit-il fallu une disposition expresse
pour l’autoriser, en ce cas particulier, à cumuler la re
tenue et la part héréditaii’e?
L ’article X X V I défend les aliénations à fonds perdu,
qui pourroient être faites à un héritier présomptif; et
il est ajouté, ou à ses descendans. La loi a donc regardé
bien expressément les enfans du successible comme ne
faisant qu’une seule et même personne avec le successible.
Dira-t-on que la loi ayant pai*lé des descendans dans
cet article, et n’en ayant pas parlé dans l’art. X V I , elle
n’a pas voulu les comprendre dans ce dernier article ?
Mais il faut penser, au contraire, que si le mot descen
dant riz pas été expressément compris dans l’art. X V I ,
c’est parce que ce mot a échappé au législateur, lors de
la rédaction de cet article, et qu’ensuite il l’a ajouté à
l’art. X X V I , pour réparer en quelque sorte cette omis-
�( 14 )
sion. Enfin, la question a été expressément jugée dans
la cause de Soulier aîné contre scs puînés.
Soulier aïeul avoit fait une institution de tous ses biens
en faveur de son aîné, sous la réserve de disposer du
quart; lequel quart, à défaut de disposition, seroit néan
moins de la comprise de l’institution. L ’aïeul est décédé
en l’an 7, postérieurement à la loi du 1 7 'nivôse an 2,
mais antérieurement à celle du 4 germinal an 8. Par son
testament il avoit disposé du dixième de ses biens en
faveur d’un des enfans dudit Soulier, son petit-fils. Les
frères et sœurs de Soulier ont attaqué cette disposition,
comme faite indirectement au profit de l’aîné; et la dis
position a été effectivement déclarée n u lle , d’abord ren
première instance, au tribunal d’arrondissement'de cette
com mune, et ensuite sur l’appel'en ce tribunal.
Subrogation <du i j jîo r c a l an 2.
Cette subrogation à l’acquisition des deux maisons na
tionales, n’est évidemment qu’une donation déguisée sous
le nom de vente.
Ce^n’est pas sans doute jpar la dénomination donnée à
un acte qu’il faut juger'de la nature de l’acte., mais par
l’intention que les parties ont eue.
Ce principe ne sauroit être'contesté ; il est enseigné
par tous les auteurs, 'et consacré par les lois.
Parmi les diilerens textes de lois, on'peut citer'la-loi
Sufpitius , au digeste, D e dohationibus inter virum et
ujcorem, et'la loi Nudâ>, au cod. <De mntrahenda emptione.
�¿i/
( i5 )
P a p ó n , sur la loi S ulp itius, s’exprime ainsi : « S i ,
« pour donner couleur à cliose que la loi ne perm et, l’on
« prend titre permis, sera toujours l’acte suspect, et jugé
a qu’on l’a voulu couvrir de ce pour le faire valoir;
« comme si l’uñ de deux conjoints interdits et empêchés
« de soi donner, fa it, par testament ou contrat entre-vifs,
« confession que l’autre lui a p rê té , ou employé à ses
« affaires, ou d é liv ré , ou remis en ses mains certaine
.« somme, ne pourra ledit créancier, ainsi confessé, s’aider
« de telle confession, sans premier faire preuve qu’il a
k fait tel p rê t, ou remis, employé, ou délivré la somme.
« L a simulation, dit le même auteur dans un autre
« endroit, se pratique de différentes manières; l’une, et
« première, est de faire paroître, par contrat , chose dont
«x. néanmoins le contraire est entendu entre parties : ce
« sera acte imaginaire, qui n’aura autre chose que l’ap« parence pour le contrat passé entre les parties. U n
v homme empêché, par la coutume du lieu, de donner à
« un autre, pour la volonté qu’il aura de le gratifier,
« simulera de lui vendre à certain p r i x , qu’il confes« sera avoir reçu ( c’est ici précisément notre espèce ) :
«f si cette simulation est prouvée, sans doute la vente
« sera n u lle , comme le dit Ulpien. »
E t Papon cite ladite loi Nudâ.
« ’ Quoique les parties, dit R icard, et après lui Chabrol,
« tome II, page 381, aient déguisé du nom de vente une
« donation, elle passe pour un titre gratuit et pour une
« véritable donation ; de sorte qu’elle en reçoit toutes les
« lois, comme elle en a les principales qualités. Ainsi
�( 1 5 }
cc un semblable contrat étant passé entre personnes qui
« sont prohibées de se donner, il sera pris sans difficulté
« pour un avantage indirect, et sujet à la prohibition
« de la loi. »
Ce seroit donc une erreur manifeste de s’attacher à la
dénomination d’un acte, et de ne pas en pénétrer l’esprit.
Vainement les parties ont-elles voulu voiler leur inten
tion, et la présenter sous une autre forme que celle d’une
libéralité : les précautions concourent souvent à la trahir;
et les présomptions qui s’élèvent en foule contre un acte
déguisé, acquièrent bientôt le degré d’une certitude, et
ea provoquent la nullité.
A ces autorités qu’il soit permis d’ajouter celle du
célèbre Cochin, dans son 177e. plaidoyer :Dans un acte
devant notaires il faut, d it-il, distinguer deux choses, le
fait et l’écriture, scriptum et gestum. La simulation con
siste en ce que les parties déclarent, devant un officier
p u b lic, qu’elles font entre elles une certaine convention,
quoique réellement elles en exécutent une contraire.
L ’acte est simulé, si l’on prouve que l’on a eu une inten
tion contraire, et qu’on l’a exécutée. La simulation est un
genre de faux ; mais le faux ne touche pas sur l’acte en luimême. C’est un genre de faux par rapport aux parties,
mais non par rapport ;'i l’officier public.
E t de là, le principe consacré, même par une règle de
d ro it, P lu s valcre quod agitur, quiim quod simulatè
concipitur.
S’il est constant que la dénomination d’un acte n’en
détermine pas toujours la nature; si, malgré la dénomina
tion
�6o ï
C 17 ) f
tion que les parties lui ont donnée, on peut l’arguer de
simulation et de fraud e, comment s’établit maintenant
cette simulation et cette fraude ?
Par les circonstances.
Fraus ex circonstantiis probari potest, dit Dumoulin
sur l’article III du titre X X X I de la coutume de Nivernais.
F r a u s , dit énergiquement d’A rgentré, sur l’article
C C X G V I de la coutume de Bretagne , probatur conjectu ris antecedentibus , consequentibus et adjimctis.
F a lsissim u m , ajoute-t-il ,q u o d quidam putaverunt non
n isi instrumentis probari posse ’ fa c ta enim extrinsecùs
fra u d em potiüs probant, quia nemo tam supinus e s t ,
ut scT'ibi patiatur quœ fra u d u len terfa cit.
L a fraude, dit Coquille, s’enveloppe toujours, et cherche
à se déguiser. Elle ne seroit pas fraude, si elle n’étoit
occulte. D e là vient que les seules conjectures et présomp
tions servent de preuve.
. Citerons-nous encore Denizard. Les donations indi
rectes, dit cet arrétiste, au mot, avantage indirect, n° 1 7 ,
sont les plus fréquentes, et la preuve en est beaucoup plus
difficile : aussi n’exige-t-on pas de ceux qui les attaquent,
qu’ils rapportent une preuve complète de la fraude ; de
simples présomptions suffisent, parce qu’on ne passe point
des actes pour constater l’avantage indirect; au contraire
on cherche avec attention à en dérober la connoissance.
Quelles sont, d’après les mêmes auteurs, les principales
cii’constances qui doivent faire déclarer un acte simulé ?
La prem ière, si l’acte est passé entre proches. Fraus
inter conjunctas persoîiasfacile prœsumitur.
C
�(
18)
■La seconde , la non-nécessité de ven d re, s’il n’existe
aucun vestige du prix.
L a troisième, si les actes sont gém inés; alors la pré
somption de simulation acquiert un nouveau degré de
cei'titude.
En un m ot, comme dit d’A rg en tré , dont nous avons
rapporté les expressions, les juges ne doivent pas se fixer
seulement sur l’acte attaqué, ou sur les circonstances qui
ont pu accompagner cet acte au moyen de la passation,
mais encore sur toutes les cii'constances antécédentes et
subséquentes.
L a parenté, le défaut de nécessité de vendre, le défaut
de vestige du p r i x , tout se rencontre ici. L e notaire
n’atteste point la numération des deniers. Il n’est point dit
que la somme a été comptée au vu et su du notaire ou des
notaires soussignés, ainsi qu’il est même de style, lorsque
l’argent est effectivement compté.
E t si, à ces circonstances, qu’on peut appeler environ
nantes , on ajoute les circonstances cmtécédentes et subsé
quentes ; si l’on ju g e , pour rappeler les expressions de
d’A rgen tré, ex adjim ctù, et ex antecedentibus et consequentibus, restera-t-il le moindre doute?
L a dame Dalbine et son mari ont excipé, en première
instance, et dè l’article X X V I de la loi du 17 nivôse, et
de la réponse à la 55e. question de celle du 22 ventôse.
L ’article X X V I de la loi du 17 nivôse déclare nulles,
pt interdit toutes donations, à charge de rente viagère ou à
fonds perdu, soit en ligne directe, soit en ligne collaté
rale, faites à un des héritiers présomptifs ou à ses descen-
�( *9 )
dans; et de ce que cet article neparle que des ventes à fonds
perdu , la dame Dalbine et son mari n’ont pas manqué
d’en induire que cet article, par une conséquence néces
saire, autorise les ventes qui ne sont pas à fonds perdu,
d’après la m axim e, Inclusio unius est exclusio alterius.
Ils se sont aidés ensuite de la réponse 55 e. de la loi du
22 ventôse, qui déclare que la loi valide tout ce qu’elle
n’annulle pas ; mais cet article de la loi du 22 ventôse,
qui détermine le sens de l’art. X X V I de celle du 17 nivôse,
bien loin d’être favorable à leur système, leur est con
traire. Voici ce que porte la réponse à la 55 e. question :
« À ce qu’en expliquant l’article X X V I de la loi du
« 17 nivôse, relatif aux ventes à fonds perdu faites à des
« successibles, il soit décrété que les ventes faites à autre
« titre, antérieurement à cette lo i, soient maintenues,
« quand elles ont eu lieu de bonne f o i , sans lésion , et
« sans aucun des vices q u i pourroient amiullcr le
« contrat. »
Fixons-nous,sur,ces dernières expressions.
O n voit qu’on n’a pas même osé mettre en question,
et proposer au législateur de décider si des ventes sim u
lées devoient être maintenues. Une pareille question n’en
étoit pas une. L e doute ne pouvoit s’élever qu’à l’égard
.des ventes faites de bonne f o i, et non en fraude ; des
•ventes sincères, et non des ventes simulées. O n voit
m êm e, dans l’exposé de la question, qu’il s’agissoit de
ventes faites antérieurement à la loi.
Que répond le législateur?
a Sur la cinquante-cinquième question, ÎJue la loi
« valide ce qu’elle n’annulle pas; qu’ayant anéanti, entre
C 2
�( 20 )
« successibles, les ventes faites à fonds perdu depuis le
« 14 juillet 1789, sources trop fréquentes de donations
« déguisées, parce que les bases d’estimation manquent,
« elle n’y a pas compris les autres transactions commer
ce ciales, contre lesquelles on n’invoquoit ni lésion , ni
« défaut de payement. »
Q u’induire de là ? L a question qui divise les parties
est-elle donc de savoir si une vente faite de bonne fo i,
a un héritier présom ptif, est valable? On ne l’a jamais
contesté, et on en conviendra encore, si l’on veut. Mais
en est-il de même d’une vente qui n’en a que le nom ,
qui n’est véritablement qu’une donation déguisée?
Cette question est sans doute bien différente.
,
Vente du 21 vendémiaire an 5 , du domaine de V a zeliettes et du P o u x , au citoyen Gizaguet.
Elle est faite moyennant la somme de a 5 ,ooo francs,
numéraire m étallique, laquelle som m e, e s t- il dit, la
vendercsse reconnoît avoir reçue présentement dudit
Gizaguet.
Mais d’abord à qui persuadera-t-on que le citoyen
Gizaguet ait payé comptant 2Ô,ooo francs, dans un temps
où le numéraire étoit si rare ? E t si cette somme avoit été
payée com ptant, n’en seroit-il pas resté quelques ves
tiges? la défunte n’en auroit-elle pas fait quelque emploi?
ou si elle avoit gardé cet argent stérile dans son arm oire,
ne se seroit-il pas trouvé, au moins en partie, à son décès?
Memqfcirconslances environnantes. Point de nécessité
de vendre ; point d’emploi du prix ; point d’attestation de
�( 21 )
la part du notaire, que les deniers ont été comptés sous ses
yeux.
M ais, de plus, réserve de la part delà venderesse de l’usu
fruit; réserve très-rare dans les ventes véritables, trèsordinaire'au contraii’e dans les donations; réserve qui
seule s u f f i r o i t pour faire déclarer l’acte n u l, aux termes de
l ’article X X V I de la loi du 17 nivôse. .
En effet, une pareille réserve convertit la vente en une
vente à fonds p erd u , pi’ohibée par l’article X X V I , à
moins qu’elle n’ait été faite de l’exprès consentement des
héritiers.
Circonstances antécédentes et subséquentes.
Première donation du 9 décembre 1771 , envers la
dame D albine, du domaine de Fontanes, domaine d’une
valeur considérable, et encore d’une somme de 2,000 fr.
En 1778, seconde donation, à Anne-M arie D alb in e,
aujourd’hui veuve Gizaguet , de six parties de rentes
foncières.
11 novembre 1793, quittance et décharge de toutes les
sommes perçues parla dame Dalbine, provenantes non-seu
lement des revenus, mais encore du remboursement des
capitaux.
8 frimaire an 2 , procuration générale et illimitée de
percevoir revenus et capitaux, avec dispense de rendre
compte.
L a loi du 17 nivôse intervient, Elle ne peut se faire
donner à elle-même. Qu’est-ce qu’elle imagine ? E lle inter
pose ses enfans.
D onation, du 17 germinal an 2 , de toute la quotité
�alors disponible, envers les non successibles, c’est-à-dire,
du sixième.
L a quotité disponible, o u , pour mieux d ire, qu’elle
croyoit disponible , étoit épuisée. Elle imagine un autre
moyen pour envahir le surplus des biens. Subrogation,
du 17 floréal an 2 , moyennant 1,221 fr., d’une part, et
1,200 fr. d’autre, dont le contrat porte quittance ;
Quittance illusoire ! En effet, on a vu que la défunte
étoit aveu gle, et presqu’anéantie par l’âge. Elle avoit
donné à sa nièce la procuration la plus ample; elle l’avoit
constituée maîtresse. En supposant que la somme eût été
véritablement comptée , la dame Dalbine se seroit donc
payée à elle-même : elle auroit pris d’une main ce qu’elle
auroit donné de l’autre.
Somme illusoire ! En supposant qu’elle eût été p ayée,
elle l’auroit été en assignats presque de nulle valeur ;
en assignats qui seraient provenus de la gestion même
qu’elle avoit des biens de la défunte.
C’est à la suite de ces actes qu’est conçue la vente
du 21 vendémiaire an 5 .
6 frimaire an 7 , déclaration de la défunte, attestant
que, quoique la dame D albine ait fo u r n i quittance au x
débiteurs, c'est cependant elle déclarante qui a reçu et
touché les différentes som m es, tant en p rincipaux, in
térêts que fr a is .
E t il est ajouté, ainsi que le montant du p rix de la
vente du domaine de Vazeliettes et du P o u x .
Pourquoi cette dernière mention ? Q u’étoit-il besoin
de faire déclarer à la défunte que c’étoit elle qui avoit
perçu le prix de la ven te? N ’étoit-ce pas elle-m êm e
qui l’avoit quittancé dans le contrat ?
�C 23 )
Que la dame Dalbine se soit fait donner une décharge
des sommes dont elle pouvoit craindre qu’on cherchât à
la rendre com ptable, des sommes par elle reçues et quit
tancées; c’est ce qu’on conçoit : mais des sommes qu’elle
n’a point quittancées ; c’est ce qui ne s’explique pas aussi
facilement.
Cet excès de précaution n’a ch è v e-t-il pas de décéler
la fraude ?
.. Il est dit, dont elle a disposé à son gré, soit à payer
partie de ses dettes, soit à Ventretien de sa m aison, ou
autrement : déclaration démentie, i°. par l’existence des
dettes, au moment du décès de la défunte; 2°. par la
réserve de l’usufruit des biens pendant sa v ie , même du
domaine vendu; usufruit plus que suffisant pour subvenir
à sa subsistance.
E n fin , testament du 9 messidor an 8 , qui termine cette
chaîne de dispositions.
A-t-on jamais vu une plus grande réunion de circons
tances ?
Tous ces actes s’interprètent l’un par l’autre.
. O n a cru avoir trouvé une réponse victorieuse.
L a l o i , a-t-on d it , ne défend que les ventes à fonds
perdu, faites à des successibles. O r, i c i, la vente n’a point
été faite à fonds perdu; e t, d’un autre c ô té , n’est point
faite à un successible, puisque le citoyen Gizaguet étoit
étranger à la défunte, et ne pouvoit jamais venir à sa,
succession.
L a donation faite au mari ne profite-t-elle donc pas à la
femme ? Ne profite-t-elle pas aux enfans communs ? Donner
au m ari, n’est-ce pas donner1ù la femme et aux enfans ? L a
�(H )
loi ne défen d-elle donc que les avantages directement
faits aux successibles ? Ne défend-elle pas également les
avantages faits indirectement, et par personnes supposées.
On ne voit dans cette interposition de personnes qu’un
excès de précaution ; et c’est cet excès de précaution qui
caractérise la fraude.
Un jugement du tribunal d’appel du département de
la Seine, du 12 messidor an 9 , conforme aux conclu
sions du ministère public, confirmatif de celui du tri
bunal civil de Chartres, rapporté dans le journal du
palais, prouve assez que la cii'constance, que la vente
a été consentie, non à la femme successible, ou descen
dante de successible, mais au m ari, n’est pas une égide
contre la nullité prononcée par la loi.
A utre jugement du tribunal d’appel séant à R ouen ,
dans l’espèce duquel le contrat portoit que le prix avoit
été payé comptant, en présence du notaire.
V oici la question et les termes du jugement, tels qu’ils
sont rapportés par le journaliste.
« D eux questions ont été posées :
«
«
«
«
te
te
te
« La première consistoit à savoir quelles sont les conditions qui peuvent rendre valable un contrat de vente
fait par un père, à l’un de scs enfans ou de ses gendres.
« L a seconde avoit pour objet de reconnoitre si L e inonnier, acquéreur, avoit rempli les conditions nécessaires pour la validité de son acquisition.
« L e tribunal d’appel de Rouen a pensé, sur la prê
mière de ces questions , que les principes et la juris
prudence, fondés sur l’art. C C C G X X X IV de la coû
tume de la ci-devant province de Normandie, et l’ar
ticle
�( 25 3
r ticle IX de la loi du 17 nivôse an 2, se réunissent pour
« établix* qu’un contrat de vente d’immeubles, fait par un
« père à l’un de ses 'enfans, n’étoit valable qu’autant que
« l’acquéreur prouvoit qu’il avoit payé le juste prix de
« la chose acquise, et qu’il justiiioit de l’emploi des dea niers de la vente, au profit du vendeur.
« E t sur la seconde question, il lui a paru que L e « monnier n’avoit point rempli les conditions requises
c< pour valider son acquisition ; qu’en vain il s’appuyoit
« sur ce qu’il étoit dit dans le contrat, que le payement
« du prix de la vente avoit eu lieu en présence du notaire ;
« attendu qu’une telle énonciation n’étoit point une preuve
« de l’emploi des deniers, en faveur du ven d eu r, mais
« qu’elle étoit plutôt un moyen de couvrir la fraude, selon
« le principe établi par D um oulin , en ces tex-mes :
ce Conclusum quod in venditionefactâ filio velgenero,
« conjessio patris non valet de recepto , etiam si nota« rius dicat pretium receptum coram se*
cc D ’après ces considérations, le jugement du tribunal
« civil de l’E u re, qui avoit déclaré la vente valable, a été
« réformé ; et le contrat de v en te , passé par le défunt
« Hermier à Lem onnier, son gendx’e , a été déclaré frau« duleux et nul. »
Testam ent du 9 messidor an 8.
U n premier moyen de nullité résulte de ce que le
notaire n’a pas énoncé pour que^ département il étoit
établi! Titre I er. sect. I I , art. X II de la loi de 1771.
U,ne seconde nullité, de,ce qu’il n’a pas désigné le ü °.
dç la patente. L o i sur les patentes.
D
�(26)
Une troisième nullité bien plus frappante, et à laquelle
il n’y a point de réponse , c’est le défaut de signature
d’un des témoins numéraires qui n’a signé que par son
surn om , et non par son vrai nom.
“ L a loi veut que le testament soit signé de tous les té
moins qui savent signer; si le testateur est aveugle, il faut
appeler un huitième témoin également signataire. O r ,
celui qui ne signe pas son vi’ai nom ne signe véritable
ment pas!
j
L e nom de famille du témoin étoit Croze; son sur
nom , Auvernat : il a signé simplement A uvernat ■il
devoit signer Croze.
^ Un décret de l’assômblée constituante, du 19 juin 1790,
art. I l , porte, qu’aucun citoyen ne pourra prendre que
le vrai nom de sa famille,
t A utre décret du 27 novembre 1790, pour la forma
tion du tribunal de cassation : ce décret, article X V I I I ,
p o rte , qu’aucune qualification ne sera donnée aux par
ties; on n’y insérera quedeur nom patronimique, c’està-d ire, ' de baptêm e, et celui de la fam ille, et leui's fonc
tions ou professions.
-* 6 fructidor an 2 , nouveau décret de la convention
nationale, par lequel il est prescrit, qu’aucun citoyen
ne pourra porter dç nom ni de prénom , que ceux expri
més dans son acte de naissance ; et que ceux qui les ont
quittés seront tenus de les reprendre : loi dont la plus
stricte exécution a été ordonnée par arrêté du direc
toire exécu tif, du 19 nivôse an 4.
Mais voudroit-on regarder ces lois comme l’effet de la
révolution, et ne pas s’y arrêter ; on en citera d’antérieures.
�C 27 )
'
On citera l’ordonnancé de Henri I I , de 1 5 5 5 , q u i a
enjoint à tous les gentilshommes de signer du nom de
leur famille, et non de celui de leur seigneurie, tous actes
et contrats qu’ils feront, à -peine de nullité desdits actes et
contrats.
On citei’a l’ordonnance de Louis X I I I , de 1629 ,
article C G X I, qui porte les mêmes dispositions.
E t, pour remonter à ce qui s’observoit chez les Romains
m êm e, Cujas a conservé dans son commentaire les for
mules des testamens. On y voit que chaque témoin signoit
son nom de fam ille, après avoir déclaré son prénom '.Ego
J o a n n es.................... testamentum subscripsi; ce qui est
conforme à la loi Singulos, X X X , D e testamentis. S in gulos testes, dit cette lo i, q u i testarnento adhibenturproprio chirographo annotare con çen it, quis, et cujus testamentum signaçerit. Il faut que, par Vacte m êm e, on
puisse savoir quel est celui qui a signé; que l’acte même
apprenne à ceux qui ne connoissent pas le tém oin, quel
est ce témoin. U n surnom peut être commun h plusieurs.
L e nom de famille est le seul nom propre et distinctif.
Enfin l’ordonnance exige que tous les témoins signent.
Celui qui ne. signe pas par son n o m , est comme s’il ne
signoit pas.
L e testament est donc nul; et on ne peut assez s’étonner
que le tribunal de première instance l’ait déclaré valable ;
qu’il ait pareillement déclaré valables les autres actes entre
vifs, dont on a rendu compte.
Dans tous les cas, le testament ne. pourroit ' avoir son
entier effet : la loi du 4 germinal an 8 permettoit à la
défunte de disposer de la moitié de ses biens; mais autant
�( 2 8 ) .................................
seulement qu’elle n’en auroit pas "disposé par des libéralités
antérieures.
Les premiers juges l’ont reconnu eux-mêmes, puisqu’ils
ont inséré dans le jugement: D a n s la m oitié, est-il d it,
pour Vinstitution de la dame D a lb in e , sont comprises
toutes les fa cu ltés de disposer de la défunte ,* mais ils
ont ajouté, fa ite s depuis la publication de la loi du
17 nivôse an 2. O n ne craint pas d’avancer qu’ils ont erré
en cela. Si la libéralité antérieure à la loi du 17 nivôse an 2 ,
ou, pour mieux dire, à celle dü 5 brumaire an 2, excédoit
la moitié, on ne pourroit pas la faire réduire. Mais si elle
n’excède pas, elle doit être imputée sur la moitié dispo
nible; et c’est mal à propos que les juges ont distingué les
libéralités antérieures ou postérieures à la loi du 17
nivôse.
Ainsi ilfau d roit, dans tous les cas, imputer sur la quo
tité disponible , et la donation du domaine de Fontanes,
faite à la dame Dalbine par son contrat de mariage , et la
donation des six parties de rentes foncières, faite en 1778,
à Anne-M arie Dalbine; en tant du moins que ces dona
tions excéderoient celle faite à la dame Peyronnet et au
citoyen D ejax, dans leur contrat de mariage.
L e jugement dont est appel auroit donc encore mal jugé
en ce point.
O n voit combien cette cause est importante. Elle n ’inté
resse pas seulement le citoyen Dejax ; elle intéresse encore
le public. S’il étoit possible que la dame Dalbine obtînt Îe
succès qu’elle attend ,'il n’y aüroit plus de rempart contre
l’avidité d’un cohéritier ambitieux. Les fraudes, déjà trop
communes, se multi£lieroient; la loi seroit sans objet; la
�. ( 29 )
volonté du législateur, impuissante. Comment la dame
Dalbine s’est-elle flattée de faire adopter un pareil système?
comment a -t-elle pu penser que des juges éclairés et
intègres consacreraient une suite d’actes aussi évidem
ment frauduleux ?
P A G È S -M E IM A C , jurisconsulte.
P É R I S S E L , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L A N D R I O T , seul imprimeur du
T ribun al d’appel. — A n 11.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Julien. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Périssel
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
procuration
droit intermédiaire
biens nationaux
ventes
nullité du testament
coutume d'Auvergne
droit matrimonial
jurisprudence
droit romain
doctrine
signatures
surnoms
nom de famille
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Julien Dejax, homme de loi, habitant de la commune de Brioude, appelant ; Contre Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal de première instance de l'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, fille majeure, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, en son propre et privé nom ; tous enfans dudit Pierre Dalbine et de ladite Dejax, son épouse ; Et encore ladite Marie Dalbine, veuve Gizaguet, au nom de tutrice de ses enfans mineurs, et dudit Montbrizet-Gizaguet ; tous intimés.
Table Godemel : Testament. un testament contenant, pour signature d’un témoin, un surnom au lieu de son nom de famille, doit-il être déclaré nul ? Avantage indirect : 1. une donation du sixième des biens faite. 2. une subrogation à l’acquisition d’immeubles, consentie en l’an 2, au profit d’un successible, peut-elle être considérée comme une donation déguisée sous la forme d’une vente ? en faveur des enfants d’un successible, sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2, qui interdirait tous avantages en faveur d’un successible, au préjudice des autres, est nulle.
il en est de même de la vente d’immeubles, sous réserve d’usufruit, consentie au mari d’une fille des successibles, qui doit être assimilée aux ventes à fonds perdu, à moins du consentement de la part des successibles ; surtout si les circonstances de la cause font supposer l’intention de faire une libéralité déguisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1770-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0931
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0716
BCU_Factums_G0932
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53092/BCU_Factums_G0931.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vazeliettes (domaine de)
Poux (domaine du)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
biens nationaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit intermédiaire
droit matrimonial
droit Romain
jurisprudence
nom de famille
nullité du testament
procuration
signatures
Successions
surnoms
testaments
ventes
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MEMOIRE
P O U R Me. P i e r r e E S T O P Y D E S V I G N E T ,
Procureur en la Sénéchauffee de Bourbonnois ,
Siege Préfidial & autres Jurifdic t ons de Mou
lins, Intervenant & Demandeur.
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J e a n V 1 C H A R D le jeune &
e l l e T A L O N ,fa femme, Défendeurs.
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U ’un débiteur qui eft faifi réellement dans
fes biens & qui a vu un premier T ri b u
nal confirmer cette faifie réelle, paroiffant
d’une part accablé fous le poids de fa trifte
fituation dont il exagere encore la détreff e , & fe croyant d ’autre part en droit de
préfenter finon le créancier qui l’a pourfuivi, comme un
tyran , du moins les Officiers de Juftice qui ont occu
pé ou inftrumenté contre l u i , comme des fatellites inhu
mains qui auroient violé toutes les réglés pour faire de fes
biens la proie de leur infatiable cupidité; q u ’un tel hom
m e , parvenu aux pieds du Tribunal fupérieur, cherche &
trouve à faire pafler l'enthoufiafme de fa douleur vraie ou
fauff e dans lam e d'un D efenfeur généreux & fenfible ,
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i
qui par état d’ailleurs doit haïr ce qui lui paroît l ’injuftice,'1
& s ’enflammer à l’afpett du malheureux qui réclame les fecours de fon éloquence :1a conduite du client eil dans la
nature ; celle du patron eft de fon devoir.
Q u e ce même débiteur, toujours ulcéré & croyant
toujours avoir lieu de l’être, parlant enfuite par l’organe
q u ’il aura rempli de fon feu , dans un écrit rendu public,
à des Juges fléaux de la v e x a t io n , & qu’il regarde com
me les vengeurs de fon infortune ; faifant dans cet écrit
le tableau le plus touchant de fon état ; y peignant des
couleurs les plus noires tant les procédures de la faifie réel
le que la Sentence qui les a confirmées ; & tonnant fans
ménagement contre celui q u ’il fe perfuade être l ’auteur de
ces procédures pour lui fi odieufes ; que ce débiteur , difons-nous, trouve tous fes lefteurs difpofés à entrer dans
fes pei nes , & à partager même ion indignation & c on
tre les procédures & contre leur auteur : c’eft ce qui
fait honneur à l ’humanité. Plaindre les opprimés, déteiler
les opprefTeurs, ell le partage des coeurs honnêtes.
Si cependant les prétendus oppreffeurs, fe faifant enten
dre à leur tour aux Juges & au Public , leur prouvoient clairement que celui qui fe difoit l’opprimé ne
l’eft que par fa réfiftance opiniâtre à remplir des engage
ments légitimes ; que fon créancier,moins opulent que lui ;
n’a ceffé de fe montrer débonnaire q u ’à la derniere e\trêmité ; q u e celui qu’on cherche à faire pafTer pour Ieminiftre intéreffé des rigueurs de ce créancier, n ’a eu ni pu avoir
aucune part aux procédure» q u ’on dit être fon o u v r a g e ;
que ces procédures d’ailleurs ne font autre chofe que les
armes mifes par la loi elle même entre les mains de tout
créancier contre tout débiteur; que fi ces armes étoient
odieufes , comme elles font rigoureufes , ce feroit. donc à
la loi qu’il faudroit s’en prendre ; que du refte le véritable
auteur des procédures attaquées ne s’y ell point écarté
d’un pas de ce qu’exigeoit ou comportoit fon miniilcrc ; &
qu’on ne fauroit lui imputer aucun a£le , aucun trait de
plume que la loi c on d a m n e, & que l ’ufage des licuxnc rendît
�3 .
indifpenfables : alors ne feroit-il pas pofîîble que la pitié,
que l’indignation ceffafient, ou même qu’elles changeaf'ient d’objet ?
N e feroit-il paspoflible que (fans parler ici du créancier)
on ne vit au moins dans celui à qui on imputoit les pro
cédures, qu’une vi&ime des clameurs artificieufes du dé
biteur fa if i, du zélé louable mais trompé de fon défenf e u r , & de la compaffion jufte mais trop prompte du
public : au lieu 'd’y voir le moriftre qu’on en avoir f a i t ,
en le donnant pour un Praticien ardent & avide , cher
chant une p ro ie , ayant vû dans le débiteur dont i l s'agit
un malheureux payfan fans défenfe, contre lequel i l croyoit
pouvoir impunément abufer des formes juridiques pour le
dépouiller de toute fa fortune ; oardiffant & machinant en
'conféquence dans la poufjîere de fon Etude la plus criante s
la plus vexatoire procédure qui fu t jamais ; comptant par
fes doigts la valeur des biens du débiteur, & combien il
fa llo it de fra is pour s’en rendre acquéreur parfon exécutoirefaifant en vingt-trois jours , pour une modique fotnme de
x S y livres ', celle de ib o o Ihtes de frais , qu i l [fe difpofôlt
de doubler dans un pareil délai, & de tripler dans trois fnois ;
ayant jetté un dévolut fu r uriè M ai fon & deux Domaines ,
qui compofoient tout le bien du1 débiteur à qui i l en vou'loit ; exigeant avec une hardieffe cinique que le p rix de ce
"bien fu tv é rfé tout entier datü f i s tnains ; ne craigriahtpds
vde‘prôteflcr dans un^'qclc authentique qu'il ne veût- quittér
'prife que lo rfq u il aura épuifé toute la fiibfiance' &• dévoré
toute la fortune de ce malheureux, non-miiTürà cutèm nifi
p l e i n cruoris liiruclo; s'étant fu it uh doux efpoir de faire
vendre àfon profit les biens de ce même, malheureux, & de le voir
enfuite à fa porte lui & toute fa fam ille y jo llic ite r vaine
ment le fecours. humiliànt deJ Faumône; ayant excédé lis
pouvoirs qu'il s'était fa it donnerpour àutorifer les vexations
qu il rnéditoit ; n ayant produit ces pouvoirs qu après coup ;
ayant prémuni le créancier du nom duquel il aInfo i l , d ’une
excellente contrc'lettre, pour le mettre a la b ti de tout \ &
‘enfin , ayant eu r e c o u r s pourfoutenir.enfuite la fatfieréelle
�4
fo n ouvrage contre le défaveu même du créancier , à
des moyens de fraude , nés-dans les méditations d ’une chi
cane obfcure , d'une mauvaife f o i profondément réfléchie,
■'& qui cacheroient les plus finguliers myfier es , ( i la pruden~
ce ne défendoit pas de les dévoiler ?
N o n il n’eil pas poiïïble que celui dont on écrit d e1
pareilles horreurs , pour des procédures qu’on lui attribue
mal-à-propos, ne foit pas plaint àfon tour des le&eurséquitables, & ne foit pas vangé hautement par la C o u r ,
devant laquelle on le déchiroit ainfi pendant fon abfence ;
fi ces procédures encore font démontrées juftes, légitimes ,
conformes aux règlements généraux de la matiere & aux ufages particuliers du Siege auprès duquel elles ont vu le jour.
Te ll e eft l’efpérance confolante dont ofe ici fe flatter
M e . E ftop y Defvignet , Procureur en toutes les Jurifdictions de U Ville de Moulins. C a r c ’eft de lui qu’on a fait
le portait qu’on vient de v o i r , ( e n affe&ant même de ne le
ualifier que du PraticienEûopy , du Praticien Def vig net ,
e lavide , de Tardent Praticien , ) dans un Mémoire im
primé & diftribué pour Jean Vichard & Gabrielle T a l o n
fa femme Laboureurs à L u f i g n y , débiteurs d’une fomme
de 287 livres envers Laurent Ribier Cabaretier à SaintBonnet , faifis pour cela réellement dans deux Domaines
& u n e Maifon à la requête de ce créancier, & Appellants
• vi?-à-v,is de l u i , en la C o u r , d’une Sentence fur produc
t i o n s refpe&ives de la Sénéchauflee de Bourbonnois ; qui
a prononcé la confirmation & ordonné la continuation
'de cette faifie ré el le , qu’on veut à toute force attribuer
aujourd’hui à M e . E ft op y D e fv ig n et , quoiqu’il ne l’ait
ni faite ni pu faire.
Déjà les couleurs de ce faux portrait de M e . Efliopy
Defyignct ont commencé d’être, effacées par un Mémoire
ue le créancier faillffant, que Laurent Ribier vient de
onner à la C o u r ; & où il a jurtifié la faifie réelle,
ainfj que les procédures acceiToircs, & la Sentence
dont Vichard & fa femme font Appellants.
Mais R i b i e r , n'ayant, à défendre que fa Sentence & fes
Q
3
�procédures, n’a pas plus appuyéfur les points où l’on avoit
chargé perfonnellement M e . Defvignet que fur lesautres:
il ne s ’eft occupé & a dû ne s’occuper que de fa caufe
& non de celle de M e . Defvignet. D ’ailleurs quand R i bier l’auroit plaidée cette derniere caufe , il n’auroit pas pu
demander pour M e . Defvignet la réparation des torts que
Vichard & fa femme lui ont faits par leur écrit. C ’étoit
là l’emploi de M e . Defvignet feul : eh ! quel intérêt n ’avoitil pas de le remplir lui-même?
Il eft donc accouru de Moulins aux pieds de la C o u r ;
il a quitté femme t enfants, affaires , pour défendre fa
réputation attaquée, & tout fon être enfin compromis ,
c\ar fans l ’honneur q u ’eft-ce que l’exiftence ? il eft inter
venu dans la caufe d'entre Vichard & Rib ier ; il y a de
mandé juftice contre Vichard des calomnies répandues
dans fon Mémoire ; il y a conclu à la publicité de la ré
paration pour répondre à celle de l ’infulte : on voit affez
les faits qui ont rendu néceflaires cette intervention &
ces demandes : il ne s ’agir que d ’en développer les moyens.
s. I.
Il faut d’abord examiner , parmi les traits lancés contre
Me. Defvignet par V i c h a r d , c e u x qui n’étoient pas de la
caufe de cet Adverfaire. Et certainement il n’eft point de
lefteur impartial qui du moins à une fécondé lefture ne
trouve beaucoup de ces fortes de traits dans le Mémoire
que nous combattons.
C a r indépendamment de cettedénomination outragean
te , répétée à prefque toutes les lignes, de Praticien E ft o p y ,
de Praticien D e fv ig n e t , de l’ardent Praticien , de l’avide
Praticien;ctoh-ï\ d’abord de la caufe deVichard de dire*que
Me . Defvignet cherchoit une proie , & que voyant dans lui
Vichard un malheureux pay fan Jans défenfe, i l croyoit
pouvoir abufer impunément des formes juridiques , pour le
dépouiller de toute fa fortune >
Le moment où Vichard peint-là Me. Defvignet cherchant une proie , eft un moment où aucune des pourfuites
*
�6
contentieufes n’avoit été faite , & où il n’étoit même pas
encore queftion de les faire. C e n’eft donc pas le fait de la
caufe & fon action unique , c’eft une difpofition d’efprit »
une habitude de cara&ere que Vichardprêteà M e . D e f v i g n e t •
dans cette cruelle phrafe. O r qui a dit à Vichard , contre
lequel M e . D e fv ig n e t , avant cette malheureufe affaire »
n’avoit jamais cté chargé par perfonne de faire faire la
moindre pouriuite , de faire donner la moindre aflîgnation ; qui lui a dit que M e . D e f v i g n e t , que cet Officier
public étoit par nature & parhabitude un homme tel qu’ii
l’a fait dépeindre ?
Etoit-il également de la caufe de Vichard qu’on lût dans
fon M é m o i r e * que Me. Defvignet ou le Praticien avide ,
( pour le nommer comme il le n om me ) avoit jette un dé-
voLut fur les deux Domaines & la Maifon de lui. Vichardt
& q u il comptoit déjà par fes doigts combien i l ja llo it faire
de frais pour s ’en rendre acquéreur par fon exécutoire ?
Q uelle idée affreufe de pareilles expreffions ne laiflentelles pas concevoir d’un Procureur ? mais n’efl*ce pas là
vifiblement un fimple crime de projet & d’intention, im.puté à Me. Defvignet uniquement pou rle rendre odieux ?
car quand la faifie réelle dont il s’agit entre les Parties
principales de ce procès., auroit du produire à M e . D e f
vignet autant de frais que la valeur des deux Domaines
& d e la Maifon de V i c h a r d , peut-on croire que M e . D e f
vignet n’eut pas plutôt employé le montant prétendu de
fon exécutoire aux affaires de fon E t u d e , qu’à l’acquifitijon d ’une chetive Maifon de payfan dans un Fauxbourg
de Moulins
de deux Domaines dans un Village où M e .
Defvignet n’a pas un pouce de te rr e, & qu’il ne connoît
môme que de nom ?
Etoit-il encore de la caufe de Vichard de faire impri
mer * que Me. Defvignet a demandé le prix delà vente de
fes biens avec une hardie]]c cinique , & aproteflé dans un acte
authentique qu i i ne veut quitter prife que Jorfqu'il aura
epuifé fa fubflance & dévoré toutefa fortune ? & d’appliquer
en conféqucnce à Me. Defvignet ce vers d’Horace , qui le re.
�préfenteroit fous l’image odieufe d’un infefte non moins
vil que fanguinaire : non miffura cutem ni(l plena cruoris
hirudo ?
j
E h ! quel efl: donc cet a&e authentique où M e . Def*
vignet auroit montré une hardieffe cinique par fes deman.
d e s , & auroit fait l’horrible autant que finguliere protefïation qu’on lui impute ? c’eft un commandement fait à
V ic h a r d , à la requête de R i b i e r , le 6 Août 1 7 7 2 , de payer
entre les mains de M e . Eftopy Defvignet le reftant "des
créances dues à lui Ribier & les dépens adjugés par la
Sentence du 4 du même mois ( c ’eit celle dont eil appel
de la part de Vichard contre Ribier. )
Mais Vichard veut ici faire prendre le change où il le
prend lui-même. L e reftant des créances de Ribier dont
il s’agiiToit dans le commandement, c’étoientles frais des
procédures de faifie réelle : & les dépens dont il y eil
auifi parlé étoient ceux de la Sentence confirmative. O r
c ’étoit Me. Defvignet qui avoit avancé tous ces frais &
dépens pour Ribier ; il étoit donc jufte qu’ils lui rentraffent, & que Vichard condamné par la Sentence à les
p a y e r , ¿es verfât dans Us mains de M e. Defvignet. Et voilà
ce que porte le commandement. Mais eft-il rien déplus
n a tu re l, de plus légitime & de plus fréquent dansl’ufage?
T o u s les jours un homme qui obtient contre un autre des
condamnations de dépens ne lui fait-il pas faire fommatiôn ou commandement de les payer entre les mains de
fon Procureur à qui il les doit, & ne protejle-t-il pas
( comme dans le commandement du 6 Août ) qu’à faute
de ce faire il y fera contraint, même par faifie réelle &
rente de fes biens , pour ¿e prix en provenant être verjè entre
les mains de ce Procureur ?
A qui donc Vichard croit-il parler quand il veut don
ner une chofe auifi fimple, auilî commune & pour ainfi
dire auifi ufuelle que les termes du commandement dont il
s’agit; pour une proteftation authentique de M e . I^efvig n e t , qu’il ne veut quitter pùfe iJ ue 10Tf t} u ^ aurci epuife
la fubfîancc & dévoré toute la fortune de lui Vichard : N ON
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M ISSU R A CUTEM N I S I PL E XA CRUORIS HJR UDO ?
Ces grands mots, dans l ’occafion où Vichard s’en fert ,
font abfolument vuides de fens pour tous les Magiftrats,
inftruits qu’ils font des réglés & de Pufage. Ces mêmes
mots font également frivoles pour tous Avocats & P ro
cureurs qui , en lifantle Mémoire de V i c h a r d , voudront
bien faire ufage de leurs lumieres & de leur expérience.
Ces mots enfin ne lignifient r i e n , même pour les moin
dres éleves du P a l a i s , à qui fix mois de travail dans une
Etude ont pu faire voir vingt commandements femblables ?
C e n ’eft donc qu’aux y e u x des feuls le&eurs non verfés
dans la pratique & dans le d ro it , que Vichard peut jetter
de la pouifiere , par toutes fes déclamations contre
M e . Defvignet au fujet de la teneur du commandement ;
il n’en peut donc réfulter que de la diffamation pour
M e . Defvignet auprès du vulgaire , & non pas des
m oye ns pour la caufe de Vichard auprès de fes Juges.
Etoit-ce enfin pour l ’intérêt de cette caufe de Vichard
^age 29 & 30. qu’il falloit qu’on lut dans fon Mémoire * que cétoit un
doux efpoir pour le Praticien E flo p y , après qu’i l auroit
fa it vendre les deux domaines & la maifon de Vichard , pour
le prix en provenant être verfé dans fes mains , de voir ce
malheureux & toute fa fam ille folliciter vainement à fa
porte le fecours humiliant de iaumône S
E h quoi Vichard ! vous cr oyez donc qu’il exifte quel
qu’un fur la terre pour qui ce foit un doux efpoir que
celui de faire des malheureux, pour rebuter cnfuite leur
miferc après l’avoir caufée ! mais que vous*a fait Me. Defvignet pour vous faire penfer q u ’il pourroitêtre ce tigre?
qui vous a révélé les dilpofitions iecrettesde fon cœur pour dire q u ’après qu’il auroit fait vendre h fon profit votre b ie n ,
vous folliciteriez vainement fa porte le fecours humiliant
de l ’aumône ?quc fait ici l'aumône & la facilité ou la dureté
de Me. Defvignet à cet égard pour votre procès ? &
quand cela y ferviroit, quels pauvres fe font inutilement
préfentés à la porte do M e . Defvignet ? quels font ceux
que fes exécutoires y ont conduits, parmi les parties adver-
�9
fes de Tes nombreux clients ? o u i , de Tes nombreux clients:
car enfin vous le forcez ici à vouç dire , malgré fa^répu
gn an c e, q u ’il a eu le bonheur d’çtre jufq.u’ici un'dés Pra*
cureurs de fa"Yillé lês'plus occupés.
■ > ~v
' Conciliez donc , fi vous le p o u v e z , aVec cette vérité
inconteftable les reproches que vous lui faites , lçs traits
dont vous le défigurez. C e Praticien avide , cet ardent Pra
ticien qui combine par fe s doigts les fra is qu’il doit faire
avec la valeur des biens qu'il veutVnvahïr, a v o i t p o u r t a n t ,
quand vous l’aVez dénigré par Votre M é m o i r ç , une de$
plus be lle s, des plus nombreufes , des plus'honorables
clientelles de la Sénéchauflee de Moulins. O r c ro yez -vo us
que ce foit en multipliant les frais qu’il fe.la fut faite , l u i ,
qui ayant acheté un titrée nu , il'y, A quatorze a n s ^ c o m
mença fôn‘ étude avec un quarrë de.p3piei‘!?tPenfez,-vouë
que toutes les affairés qu’il a fait;juger depuis ce témps-li
il les ait gagnées? qu’il n ’y en ait pas au contraire plùueur&
qu’il a perdues , & dont par cooféqueot‘les frais lui, ont
été payés par fes propres clients? Si donc Ces clients avoien.t
trouvé ces frais exce.iïifs, quelqùés-ufn5 d’eufr àu moins né
senferoient-ils pas p l a i n t , &"fon étude, tle feroit-ellé p ai
peu 5 peu devenue déferte ? £epcndant elle a a.çigmcnré d&
jour en j o u r : aucun de fes" client^ , qu’il f â c h é , n e T à
quitté par mécontentement perfonnel : tous ¡l’éftimbient,
le coniidçroient,plufieurs même étoientTés*apis particu
liers avant votre Mé m oir e; nédirtîmûloiiis'riçn ,'ils lefonc
encore depuis. Voulez-rvous q p ’il vouS~rnpiitré lés lettresqu’il en a reçues pour lui adouci’r l’amertume qiV’il à refletiti de vos traits ?
L
Mais il vaut mieux vous renvoyer h l’attcftation <Ju
Tribunal même .devant lequel il exerce fep fondions de;pijis i 4 années. Liiez cette ¡iiejce à là 'fin ‘de céf imprimé.
V o y e z y tous les Officiers-Magiftrats de’ là Sciiéchatiff’ée & Siege Préfidial ¡du Bourbonnois', Tém oins' dculaires , Cenfeurs & premiers ‘ Jugés-nés de la con^
düite & des démarches des Minières fubalternes de
la Juftice . A T T E S T E R D A N S L A C // A
RÈ
4 ■% »■ -j w î it i J*
C; J » .
�G iL "
10
D U C o n s e i l » que Me. EJlopi D efvignet , reçu Proçu reur en leur Siege depuis i j 6 o , en a rempli les foncH dons avec \ele t q u il ri'a donné L I E U A A U C U N E
:>, P L A I NT J E , que fa conduite leur a. toujours paru être à
» l ' a b r i D U P L U S L E G E R R E P R O C H E , & qu'il s'ejl
conformé aux Règlements , dans les procédures dont i l a
été chargé. »
Quelle différence entre M e . Defvignet peint par V i c h a r d , & Me. Defvignets peint par Tes J u g e s ? les deux
portraits font contradictoires, & il faut de toute néceffité que l ’un foie faux fi l’autre eft vrai. Mais quel eft le
f a u x ? quel eft le vrai ? cela peut-il donc faire un problè
m e , ou ne fuffiroit-il pas pour le réfoudre d’un fimple
.coup d’œil 1 fur les intérêts des deux Peintres? V i c h a r d ,
feul de fon b o r d , n’a befoin que de mentir avec fuccès
dans un M é m o i r e , fur le chapitre d’un homme inconnu
.au Tribunal où il le déchire ; pour empêcher la faifie réel
l e de f e s . b i e n s , éviter les dépens conhderables de deux
in ft an ce s, l’une principale, l’autre d’appel, & fe venger
de. cet homme qu’il regarde comme fon perfécuteur, dé
v o r é de la foif de fa ruine. Qua torze Magiftrats d’autre
p a r t , s’expliquant favorablement fur le compte de ce mê
me iiomm^ q u ’ils ont vu fe former fous leurs y e u x , dont
Ils ont éclairé tous les pas , trahiffent fans intérêt la v é
r i t é , leur devoir , Içur confciénce, en impofent aux J u
ges fouverains lueurs fupérieurs & à tout un public ; il
Tetir certificat eft menteur. Q ue l cil donc lefprit affez pré
venu pour ajouter foi au mal dii Memoire plutôt qu au
bien du certificat ; pour croire que la vérité naïve réiidc
fur les levres d ’un plaideur a u x . a b o i s , & que le menfonge impur eft forti çîo l’aiTembléc dés Juges du peuple ?
. , M^is dira-t-on les]faits ! Les faits parlent contre votre
Pr oc ure ur ; il y en a dans le Mémoire de Vicha rd : tout
xi y eft pas déclamation, tout n’ y . e f t pas lieu c o m m u n ,
.tout n’y eft pas étranger à fa caufe ; on y trouve des faits
¿raves-, des faits pofuifs : & vous ne les détruifezpas.
N o u s allons les détruire.
�L a caufe de Vichard en la C o u r étoit I’àppel par luiinterjette de la Sentence de Moulins du 4 Août 1 7 7 2 ,
qui profcrit les moyens de nullité par lui proposes con
tre les procédures de la faifie réelle de fes biens : entérine
les lettres de refciiîon que Ribier faifîffant avoit prifcscontre un défaveu & de M e . Deivignet & des pourfuites de
faifie réelle, qu’on avoit furpris de lui R i b i e r , dans le pro
cès verbal d ’offres du 18 Décembre 1 7 6 9 ; déclaré infufÆfantes les offres portées parcfcprocès verbal', en ce qu’éllesne conténoient pas les frais de la faifie réelle: débouteVichard & fa femme de leur oppofîtion à cette faifie : or
donne que les pourfuites en feront continuées, & condam
ne Vichard & fa femme aux dépens.
En cet é t a t , les faits de la caufe de Vichard , lorfqu’ila:
donné en la C o u r le Mémoire dont fe plaint ici M e . Defvignet pour ce qui le regarde , ces faits ne pouvoient
être, i ° . que les procédures de la faifie réelle ; 20. le défaveu de llibier inféré au procès verbal d ’offres; 3 0. les
lettres de refcifion prifes par Ribier contre ce défaveu.
4 0 & l ’inftru£lion faite à Moulins fur les demandes refpe£ïives ; l a v o i r , de Vichard en radiation & nullité dé
ia faifie réelle & en validité du défaveu , & de Ribier en
entérinement des lettres de refcifion.
11 faut donc voir fi fur chacun de ces quatre faits géné
raux les inculpations portées par le. Mémoire de Vichard
contre Me. Deivignet font jufles ou non. C a r ceft feu
lement au premier cas qu'il fera vrai de dire qu’il 'y a des
fa its contre lui ; comme il faudra dire au fécond cas , que
le Mémoire qui l’inculpe eft calomnieux.
O r P R E M I E R E M E N T , au fujet de la faifie r é e l l e , il
paroit q u ’on fait un crime à Me. Defvjgnet du fait mûme & de l’intention de cette faifie; qu’on lui reproché
en fuite de l’avoir faite pour une fomme trop modique.;
d ’y avoir procédé trop précipitamment; d’y avoir excé-B 2
.
�Gi€
t
'ii
dé Ton mandit, en ne fe bornant point à une faifie-exécution des meubles & beftiaux ou des fruits, qui fuffif o i e n t , dit-on , pour acquitter la (jette ; d’y avoir multi
plié , allongé & fait groiîbyer les actes , par envie d’émolûmenter ; d’avoir enfin commis dans ces a£tes plufieurs
nullités d’ordonnance.
V o il à en derniere analyfe tous les faits imputés à M e .
Defvignet par V i c h a r d , relativement aux procédures de
la faifii réelle -, nous dégageons en ce moment ces faits
de tous lés tdrmes injurieux qui les accompagnent dans'
le Mémoire , fauf à en rappeller quelques-uns dans la
difcuifion.
Mais avant que d’entrer dans cette difcuflïon , obfervons
que toute la procédure de faille réelle que Me. D e fv ig
net veut bien juflijîcr ici , n’eft pas de ion fait ni ne iauj
roit l'être en.point dô droit. C e ’iont les Huiifiers qui font
& qui doivent faire les faifies réelles & non pas les P r o
cureurs. Le miniftere de ces derniers y eft é t ra n g e r, au
moins jufqua la derniere c r i é e , ou jufqua ce qu’il y ait
quelque demande. Nous ne v o u l o n s , pour établir cette v é
rité , que le témoignage de Vichard lui-même, faifant écri
re dans fa requête introdüftive, au Sénéchal de M o u l i n s ,
du z8 Décembre 1 7 6 9 , c&s mots efléntiels : toutes les pro
cédures ( de faifie réelle ) que les fuppliants ( Vichard &
fa femme ) ont éprouvé , n'ont aucun rapport avec le mi
nifie rede Procureur ; l'acle en vertu duquel on les a pourfu iv is ejl notarié ; & toutes les procédures qu’on leur af a i
tes /ont ahf'olùment de la fonBion des Huiffiers , de forte
que tout Procureur paroît étranger à cette affaire , fi cen ejl
qu'on le confliiue ; mais le temps de fes fonctions dansfem blable matière n ’étant pas encore venu , cette conflitution ne
change rien.
Ainfi parlôit Vichard à M o u l i n s : Sc par une fuite de
fes principes qui font vrais à la lettre, il n’y faifoit aucun
reproche pcrfonnel à Me. Defvignet fur les procédures
de la faifie réelle. Par quelle fatale contradiction changet-il donc de langage au Tribunal fupéricur? Pourquoi des
�procédures qui , à M o u l i n s , ne préfentoient aucun crime
pour M e . D e f v i g n e t , font-elles en la C o u r autant de cri
mes pour lui ?
O n fait b i e n , dira Vichard , que quoique les Pr oc u
reurs ne paroiffent pas dans les faifies réelles, ce font eux
ou leurs Clercs qui font tout, ou du moins qui écrivent
to u t ; & que les Huiiîiers ne font que mettre leur nom ,
leur matricule, les dates & les parlant à , aux différents
aftes.
Mais Vichard fe trompe. T o u t ce q u ’il dit-là peut arriver
lorfque les Huiifiers ne font pas aiïez inftruits : mais on
connoît l’habileté de ceux du B o u rb o n n o i s, & Vichard
n’ignoroit pas que celui employé par Ribier n’avoit pas eu
befoin des fecours du Procureur.
D ’ailleurs, avec ce beau raifonnement,cette belle fcience
que les Procureurs font tout , & que les Huijjiers ne font que
des prête-nom, les Huiiliers font toujours les feuls garants,
aux y eu x des Magiftrats & de la loi, des vices des procédu
res d ’une faifie réelle. E u x feuls répondent en Jujlice de
ces procédures : fur eux feuls peut tomber la peine des
prévarications & des vexations quelles contiendroient ;
& un jugement qui en frapperoit d’autres têtes feroit illégal.
Mais malgré ces obfervations folides, viftorieufes fon
dées fur la loi , & d’après lefquelles il eft incontestable
que les procédures fur lefquelles nous nous trouvons ici
forcés par le Mémoire de V i c h a r d , de faire l’apologie
de Me. D ef vig ne t, étoient en point de droit comme en
point de fait abfolument étrangères à ce Procureur ( pour
nous fervir des propres termes de Vichard ) voci cette
apologie.
E t d ’abord n’eft-il pas bien fingulier qu’on impute à
M e . Defvignet le fait même de la faifie réelle confklérée
dans fon principe ? comme -fi Me. Defvignet avoit été
chercher le Créancier dans fon village de faint Bonnet
pour lui demander le titre qu’il avoit contre Vichard ,
fon débiteur, demeurant à Lufigny.^
Vichard devoit à ce créancier , ( à Ribier ) par obli-
�6n
14
*pa„e
gatîon en forme exécutoire du 1 Juin 1 7 6 9 , unefom»
me de 287 livres 3 fols 9 deniers , compofée de plufieurs dettes particulières , & entr’autres du montant de
cTeux obligations précédentes également en forme exécu
toire , & de 52 livres de frais de pourfuites que Ribier
avoit été forcé de faire , & qu’il avoit faires inutilement
pour raifon de ces deux obligations antérieures.
Cette obligation de 287 livres 3 fols 9 deniers du 2
Ju in 1 7 6 9 , Vichard devoit l’acquitter au 24 du même
mois ,
cIue ce ^a
^c r'r dans l’a^ e » & quand il
nous vient dire * qu’ il fut verbalement convenu entre les
parties que ce délai ne feroit pas rigoureux r on fait ce
qu’il faut penfer de ces allégations 'de prétendues conven
tions, verbalçs , lorfque les a£les les démentent.
" Q u o i qu’il en f o i t , Vichard ne paya point au terme :
en c o n f é q u e n c e le premier Juillet fuivant Ribier lui fit
faire un commandement préparatoire, mais qui ne produifit rien ; cependant Ribier attendit encore jufqu’au mois
de N ovem br e fans faire d’autres pourfuites. Mais alors
prefle lui-meme par la néceifité de fes affaires, il fe ren
dit à Moulins & remit fes titres à M e . Defvignet avec fa
procuration en blanc , fuivant l’ufage , en date du 7 du
même mois de No vem br e 1 7 6 9 , & par laquelle il donnoit pouvoir de faire faire à fa requête tous les acles de
commandement recordé, procès verbal de difcujfion , faifie
réelle & pourfuites jufqu à interpofition de decret & diflribution de deniers , de deux domaines & d’une maifon ap
partenants à Vichard & fa femme , à l'effet de procurer
au conflituant le paiement des créances à lui ducs , fuivant
fes titres , &c. &c.
M e . D e fv ig n e t , en conféquence de cette procuration,
remit les titres de Ribier à l’Huiifier Guillet , qui avoit
fait le commandement fimple du premier Juillet précé
dent , & qui fit le 9 du même mois de No vem br e un
commandement recor dé , que fuivit un procès verbal de
difcuifion de meubles ou plutôt de carence du 1 4 du
même mois , & enfin la faifie réelle des 16 & 1 7 .
�O r p eu t- on méconnoître dans tout cela l’intention &
la volonté marquée du créancier, de fe procurer le paie
ment de ion dû par la voie de la faifie réelle des biens
de Ton débiteur ? peut-on n’imputer qu’à Me. Defvignet
fi Ribier a pris cette voie rigoureufe ? peut-on dire que
c ’eft là une procédure ourdie & machinée dans la poujjiere
de l etude d un Praticien avide qui cherchoit une proie ?
peut-on dire même que Ribier n’eut pas eu pour ion dé
biteur , avant que d’en venir à cette extrémité, plus d’in
dulgence que l ’autre ne devoit en attendre?
L a faifie réelle eft rigoureufe fans doute , mais on ne
voit pas pourquoi on la taxeroit d ’être odieufe : les loix
l’autorifent formellement; & elles en rejettent tout l’odieux
fur le débiteur qui , par fon refus de payer , la rend néceffaire; c’eft ce que Ribier a démontre par fon mémoire.
11 y a plus , nous connoiiTons dans h droit & dans l’u.fage quatre fortes de contraintes ; la faifie arrêt des fommes
dues , la faifie exécution des meubles ou des fruits , la
faifie réelle des immeubles , & l’emprifonnement de la
perfonne dans certains cas. O r les loix permettent d’exert e r à la fois toutes ces contraintes : de forte qu’un créan
cier qui feroit porteur d’une condamnation par corps ,
pourrait dans le même temps arrêter les revenus de fon
débiteur , exécuter fes meubles , faire vendre fes immeu
bles par d é c re t , & emprifonner fa perfonne. On convient
que s’il le faifoit il paiferoit pour dur , mais il ne feroit
pas ce qu’on appelle réprehenfible aux yeux de la loi ,
puifqu’il ne feroit qu’uferdes droits qu’elle-même lui don
ne ; il manqueroit peut-être aux procédés , mais il feroit
à l’abri de toute animadverfion au côté des procédures.
Comme nt donc Vicliard a-t-il pu fe flatter de faire trouve r du crime & de la vexation de la part de Ribier &
de Me . Defvignet , dans le feul projet, dans le feul fait
d’une faifie réelle ?
;
. /
En fécond lieu , pour ce qui eft de la modicité c!e la
fo m m e d u e à R i b i e r , c’eft u n des points fur lef quelsyichard s’appuye le plus pour crier à Ja vexatjon , à l’m-
�\6
juftîce , faifant contrafter cette f o m m e , qui n?eft que de
287 livres , avec les frais de la faifie réelle qu’il fuppofe
Être de 1 5 0 0 livres , & cherchant à exciter davantage
l ’indignation par l’ idée de quinze cents livres de fra is 3
pour deux cents quatre-vingt-fept livres de capital.
Mais on verra dans la fuite q u ’il faut commencer par
retrancher plus de la moitié de ces prétendus quinze cents
livres de fra is. E n attendant , où Vichard a-t-il pris que
28 7 livres de capital fuiTent w/z<? fomme modique ? tout eil
refpeBif dans la nature des chofes. Mais d ’un côté 2 8 7
livres n’étoient pas fans doute une fomme modique pour
V i c h a r d , lui qui avant , qui depuis I3 date de fon obli
gation du 2 Juin jufqu’à l’inftant de la faifie réelle, n ’a
voir pas pu la payer même en partie, malgré les pourfuites antérieures à cette obligation & dont elle fait f o i ,
& malgré le commandement préparatoire , le comman
dement recordé & le procès verbal d e carence, poftérieurs*
II fallut même à Vichard pour chercher & pour trouver
cette fomme , félon lui fi modique, & pour l’offrir à Ilibier dans le deffein d ’arrêter les pourfuites de la faifie
réelle , il lui fallut vingt-cinq jours entiers. C a r malgré
la précipitation qu’il dit * avoir mife dans cette recher
che des 287 livres, après qu’il fut un peu revenu , d i t - i l ,
de la l’urprife où l’avoient d’abord jette ce q u ’il appelle les
effrayantes pourjuites de Ribier ; il y a vingt-fix jours d’in
tervalle entre la dénonciation d e l à faifie réelle à lui faite
le 23 N o v e m b r e , & fon procès verbal d ’offres du 18
Déce mb re.
D ’un autre côté 287 livres n’étoient rien moins qu’une
fomme modique pour Ribier. Cet homme n’a ni fonds ni
rentes. 11 vivoit dans fon Village du produit de fon C a ba
ret. O r les ch ofe s, encore un c o u p , font fortes ou modi
ques par relation.
. Mais ¿1 quoi nous amufons-nous i c i ? N o u s avons à dé
fendre du crime de vexation l’auteur d ’une faifie réelle ,
faite pour 287 livres: & nous avons à le défendre moins
devant ce public compatiffant & humain, qu’il eft aifé de
faire
�17
faire friffonner par ces feuls mots : quinze centsfrancs defrais
pour deux cents quatre-ving-jept livres de principal , mais
qui d’ailleurs ignore ce que c ’eft q u ’une faifie réelle &
pour quelle-fomme on peut l’a faire ; que devant des M a - •
giftrats auffi intègres qu’éclairés , qui favent quefuivant
la Jurifprudence & le fentiment des Auteurs, ilfuffitd'être
créancier d'une fomme qui pajfe cent livres pour pouvoirfaire
faifir réellement tous les immeubles d'un débiteur ; qu’il y a •
autant de formalités à ob fe rv er, & par conféquent autant
de frais à faire pour une faiiîe réelle , dont la caufe\ ne
feroit que de cinquante é c u s , que pour celle dont la ,
caufe feroit d’un million; & qu’enfin il faut également au*. :
tant de formalités & de frais pour un petit objet faifi que pour
un grand ; pour une chaumiere que pour un Palais.
Q uelle eft donc la réponfe la plus péremptoire que
nous puiifions faire à Vichar d- fur fon reproche a&uel?
c ’eft de lui oppofer les principes de la matiere qui dé
montrent la faufleté & la futilité de ce reproche. C ’eft
de lui dire , il ne s’agit pas ici de crier comme des enfanté,
au milieu d’autres enfants; nous combattons devant des
hommes identifiés, pour ainfi d i r e , avec la loi même ; c’eft
donc avec des armes tirées des arfenaux de la loi qu’il faut
nous attaquer & nous défendre. O r vous m’objeûez qu’une
faifie réelle eft vexatoire , fous prétexte qu’elle eft faite
pour une fomme trop modique de 287 livres ; mais en
cela vous ne pouvez vous appuyer d’aucune forte d’au
torité. Et moi je vous réponds que cette fomme de *87
liv. cil beaucoup plus forte qu’il ne faut pour autorifer une.
faifie réelle , fur-tout en Bourbonnois , où ilfuffiroit dé cent
livres. Et j'ai pour garant le C o m m e n t a t e u r de cette
c ou tu m e , qui fait notre commune loi. Et j’ai également
pour garant de la fufFifance , de la iurabondance même de
la fomme tous les Tribunaux de la France, fans peut-être
une feule exception ; car ceux q u i , comme le Châtelet de
Paris, ne fe bornent pas à cent livres pour autorifer une fdifie.
réelle , fe contentent tous de deux cents livres. J e fuis donc
ici dans les principes pour me défendre , & vous 11’y êtes
�pas en m’attaquant : votre moyen a&uel de vexation pré
tendue, n’eft donc pas un moyen juridique.
E n troijîemc lieu , 1e reproche de précipitation dans les
pourfuites n’a pas plus de fondement. D ’abord celui qui
11e fait que les procédures qu’il lui eft permis de faire par
la loi m ir n s , .& qui né les fait pas dans.un temps où la
loi lui défend de les faire, ne peut pas être accufé de les
avoir faites trop tôt. Mais il y a pl us : la loi forçoit ici
l ’auteur des procédures à ne pas perdre de temps.
E n effet la coutume de :B o u r b o n n o i s , l’Edit des criées,
c e lu i des Commiffaires aux faifies réelles, l’ufa ge.de la
Sénéchauffée de Moulins , tout en un mot exigeoit ,
i q u e la faiiîe réelle, une; fois fa it e, fût enrégiftrée au
Bureau des faiixes réelles & au Greffe de la Jurifdi£lion
dans les trois jours francs ; . i ° . que par la dénonciation
de la faiiîe réelle au faiii ( laquelle dénonciation 3 ainfi que .
les affiches , le créancier peut faire quand il lui plait, même
dès ïe lendemain des enrégiftrements;) ce même créancier,
indiquât le jour où fe feroient tant les affiches que les,
criées ; 3 0. que la premiere criée fût faite précifément
au bout de la quinzaine, à compter du jour de la dé
nonciation des affiches; 4°. & qu’enfin tout cela fût
exécuté à la lettre , à peine, de nullité pour un jour plus
tard.
O r examinons; mais faifons-le, pieccs S: règlements en
m a i n , car c’eft ainii qu’il faut agir pour ne pas argumen
ter , répondre & décider en aveugle dans ces matières ar
dues & peu communes.
: D ’abord la fai fie réelle eft des. 16 Si 1 7 No vem br e 1 7 6 9 ;
mais certes 011 ne peut pas dire quelle fut précipitée d’après
un commandement préparatoire du premier Juillet, un autre
recordé du 9 N o v e m b r e , & un procès verbal de difcuifion du 1 4 .
A l’égard de l’ enrégiffrement de cette faifie au Bureau
des faifies réelles il ell: du v i n g f, & renrégiftrement au
Greffe de la Sénéchauffée eft du 2 1 . Mais un jour plus
tard les trois jours francs depuis le 1 7 auroient été paffés,
�19
toyt fe feroit trouv^ nul\ il n’y avoit donc pas là en
core de précipitation..
‘
, Q u a n t ' à la dénonciation de la faifie réelle faite à V i - .chard, elle cil du 23 , & les affiches font du 24 : or nous
conviendrons que ces deux a£tes auroient pu être recu
lés , parce qu’à cet égard le créancier pouriuivanteft plus
maître de fa marche ; mais fi la loi ne l’oblige pas à la
;hàter cette m ar ch e, rien ne l’oblige non plus à la retarder;
;fur quoi donc fe fonderoit-on pour l’accufér de l’avoir
■précipitée? il p o u v oi t, pour la dénonciation & les affiches
feulement, faire plus tard les a ô e s ,qu’il a faits le 23 &
le 24 , tranfeat; mais il pouvoit auffi les faire ces jours-là
& même plut ôt , puifqu’à la rigueur le premier de ces
deux a£tes pouvoit fe faire, le’ 22 & lejfecond le 2 3 . Ces
deux a£les auroient même p r ê t r e faits plufieurs joiirs
auparavant: pour cela il n’y auroît eu qu’à faire enrégiftrer plutôt la faifie réelle , ce qu’il étoit libre au pourfui.vant de faire le jour même de fa date : ( car les trois jours
francs pour enrégiftrer font afin qu’on ne les laiffe pas
paffer ; mais il n’eil pas défendu de prévenir l’inftant de
l e u r expiration.)
Pour ce qui eft de la premiere c r i é e , elle devoit être
faite Jlriclemcnt dans la quinzaine cîu jour de la dénon
ciation des affiches, parce que l a (coutume & l’ufage de
la Jurifdi£lion le veulent ainfi ; or ces affiches faites le
24 N o v e m b r e f u r e n t dénoncces le vingt-cinq ; le jour de
J a criée tomboit donc forcément le dix D é c e m b r e , &
.c’eft précilément ce jour-là qu’elle fut faite.
Enfin cette premiere criée ( du dix D é ce m b re ) la feule
q u ’on ait faite, eft la dernicre des procédures contre les
quelles Vjchard eft fi fort animç.: cet Adverfaire fit fes
offres telles quelles le 18 du même m o i s , & tout ceffa dans
l’jnftant, quoiqu’on fut en droit de continuer les criées
nonobitam tout, fuivant l’article 1 4 3 de la coutume.
Maintenant quelle précipitation vexatoire peut-on re
procher à une- feule de ces procédures? ^
^
V o il à c e p e n d a n t ces p ro c é d u r e s dé no nce es à la févéC r
�20
rite de la Juilice & à l’indignation du public par le Mé"Pages iS & *9. moire de Vichard * ? quinze cents livres de frais faits en
2 j jours pour le paiement de %8y liv . belle phrai’e fans
doute & même vraie en tout ( il ce n’eft dans l ’exprefiïon de i 5 oo livres de fra is, laquelle , encore un c o u p ,
eft exagérée de plus de moitié. ) Mais combien, de
faifies réelles ont été conduites jufqu’à la premiere
criée , dans un temps encore plus c o u r t , & ont engendré
encore beaucoup plus de frais? Q u e Vichard s'informe
de cette vérité à fon Procureur à M oul in s , qu’il s’en in
forme à tous les autres Procureurs de cette derniere V i l l e ,
& à tous ceux du R o y a u m e qui ont eu des faifies réelles
dans leurs études. Sa phrafe eft donc de la déclamation toute
p u r e , propre , fi l’on ve ut , à é b l o u i r , à féduire même
q u el q u e s per fonnes, mais non pas à convaincre des
Magiftrats.
E n quatrième lieu , l'imputation faite à M e . Defvignet d’avoir excédé fes pouvoirs en"paflant jufqu’à la faific
réelle , au lieu de s’arrêter à l'exécution des meubles ,
fruits & beitiaux du débiteur, plus que fuflifants, dit-on,
pour acquitter la dette; cette imputation eit d’une fauffeté
démontrée par les termes feuls de la procuration que nous
avons tranferite plus haut.
E n effet, la procuration parle bien de difcuffion , mais
il n ’y eft pas dit que le Mandataire n ’iroit pas plus loin ;
le contraire même faute aux y eu x à la (impie leflure :
R ib ier charge fon Mandataire de lui procurer le paic~
ment de fes z 8 j livres , & cela par tous les acles de com
mandement recordé , procès verbal de difcuffion , faifte
réelle & pourfuites jufqu’à vente , interpofition de décret
ùdiflribuiion de deniers : tels f o n t , encore un coup , les
termes de' la procuration dont il s’agit, termes qui fonc
mèmode /7y/c dans toutes les procurations données c om
me celle-ci pour faire une laifie réelle. Peut-on dire d’aPage i j ;
près cela , comme fait Vichard , * qu'on lit dans cette
procuration quavant de procéder à la ¡aifie réelle R ibier
e n t e n d quon EPU ISE la voie delà diifcujfion.mobiliaire /
�21
Ribier n’entend pas qu’on épuïfe rien ; il entend qu’on lui
procure fon paiement , & voilà tout.
D ’ailleurs il plaît à Vichard de dire que le prix de fes
meubles , de fes beftiaux & de fes fru its, que celui même
des fruits fans le re fte , étoit capable de furpayer la dette.
Mais fi cela étoit , que ne les vendoit-il donc lui-même
ces fruits pour faire ce paiement ? averti qu’il étoit des
approches d’une faifie réelle par tous les a&es qui précé
dèrent , à partir du premier Juillet ; s’il avoit eu tous les
fr u it s , toutes les denr ées , tous les beiliaux & le mobilier
dont il parle , ne s’en feroit-il pas dépouillé volontaire
ment en tout ou en partie pourdéfintéreiTer fon créancier?
S ’il ne l’eut pas fait, il eft alors un débiteur de mauvaiie
f o i , qui felaifle faifir dans fes immeubles les mains gar
nies , & q u i dès-là eft indigne de la compafîion qu’il voudroit-exciter. O r comme bien certainement il ne l’a pas
fait ; s’il veut pafler ici pour avoir été dans le temps un
débiteur de bonne f o i , il faut qu’il convienne qu’il en impofe dans ce moment au fujet des beftiaux , des fruits &
du mobilier dont il fe vante.
Eh ! faut-il au refte d ’autre preuve aux yeux de la Jufti.
ce , comme quoi ce mobilier , & ces beftiaux & ces fruits
étoitnt des êtres de ra ifo n, qu e le procès verbal fait le 1 4
Novembre , deux jours’avant la faifie réelle ? Ce procès
verbal la contient cette fameufe difcuflion mobiliaire qu’o n
reproche tant & fi mal-à-propos à l’auteur des procédu
res de n’avoir pas faite ; mais l’Huiflïer qui fe préfentoit
pour faifir & exécuter les meubles, grains & beftiaux de
V i c h a r d , eut beau faire les perquisitions les plus amples
{/ans tout le domicile de ce débiteur & lieux circonvoijtns,
il n’y trouva que les meubles mis par l’Ordonnance à l’abri
de les pourfuites, & en conféquence il drelia fon procès
verbal de carence.
Cette prétendue carence , dit-on , n etoit qu un fimula-*
cre un jeu prémédité , une formalité vaine , pour avoir
occa’ fion de faire la faifie réelle dont évidemment on
avoit déjà préparé toutes les batteries, avant même défaire
�le procès verbal de carence ; car fans cela comment tant
d’ailes (î voifins qui ont paru coup fur c o u p , dont il y
a eu tant de copies & qui font fi l o n g s , auroient-ils pu
être prêts au jour & au moment ? On étoit donc d’avance
bien décidé à faire un procès verbal de carence , foit qu’il
y eût des meubles, foit qu’il n’y en eût pas : on vouloit
donc vexer le débiteur.
Vo il à ce que l’inattention ou la prévention peuvent
faire dire à tout hazard : voici ce que la connoifTance de
l’ufage , celle des faits, & le vu des pieces autorifent à
répondre avec certitude.
Dans l’u f a g e , quand un Huiflïer eft chargé de pourfuivre un débiteur jufqu’à la faifie réelle de fes biens, 6c q u ’il
veut cependant ou qu’il doit commencer par la difcuflion
mobiliaire, il s’informe préalablement s’il y a ou non chez
le débiteur des meubles faififfables ; & il s’en informe ou
par des émiflaires ou par lui-même , foit lorfqu’il va faire
les commandements préparatoires, foit en allant chez le
débiteur fous quelque autre prétexte, ou même e x p r è s &
fans prétexte. Si les connoiflances qu’il acquiert font pour
Vexiflence de meubles faififfables , alors il ne fonge po in ta
la faifie réelle , & i l fedifpofefeulementàexécuterces meu
bles. Q u e fi au contraire fes connoiflances font pour le
défaut de tous meubles , autres que ceux de l’Ord on na nc e ,
pour lors il fonge à la faifie réelle , & il en prépare les ma
tériaux , avant même , fi l’on v e u t , d e s ’être tranfporté au
domicile du débiteur pour y drefler le procès verbal de ca
rence des meubles ; mais en cela il ne fait rien de vexa toire & qui ne foit très-licite , puifque dans cette liypothefe 011 le fiippofe inrtruit que véritablement il n’y aura
pas de meubles faififlables.
O r ici , fans parler du commandement fimple du premior J u i l l e t , l’Huflicr avoit fait à Vichard ion comman
dement itératif le neuf Novembre , c’ei l- à-d ir e, cinq jours
avant le procès verbal de carence , lequel cil du 1 4 , &
fept jours avant la faifie réelle , qui fut commencée le feize
& linie le lendemain. Il avoit donc pu au plus tard ce
�23
jour-là n eu f Novembre fe convaincre du manque de meu
bles , & partant commencer dès ce moment à drefler les
a£tes de la faifie réelle. Mais depuis le neuf No vembre
jufqu a la veille de la premiere criée du 10 Décembre,
la feule qui ait été faire, il y a un mois tout entier, par
conféquent aflez & même plus de temps qu’il n’en falloit
pour que l’Huiflîer f e u l , avec tout au plus deux Copiftes,
nflent fucceflivement toutes les procédures qu’il y avoit
à faire jufques & compris la premiere criée.
Il y a plus, quand l’Huiflïer & les deux copiftes que
nous lui donnons feulement ( tandis qu’on fait que dans
ces fortes de cas ils en prennent des quatre , d z s fix , d es d i x ,
fuivant qu’ils font preiïés) quand l’Huiflîer avec deux c o
piées , difons-nous , n’auroient commencé à écrire que le
jour même du procès verbal de carence du 1 4 N ovem br e,
& après fa clôture, ils auroient encore pu drefler
copier aifément toutes les procédures dans l’efpace des
j o u r s , qui fe trouvent entre le 1 4 Novembre & le
9 Décembre , veille de la criée.
C a r il ne faut pas croire aux exagérations de Vichard
fur la longueur & le nombre des rôles de ces procédu
res. Il y a bien pour chacune, d’abord une minute ou
origin al , enfuitedesco/^'ei, &: enfin une expédition grojfoy é e : mais il ne faut pas mettre ici en ligne de compte ces e x
péditions grofloy'ées, parce que l’Huiifier les fait ou les fait
faire à fon aife après les opérations finies. Il ne faut donc
compterque lesoriginaux & lesco pies , comme le toutayant
c)ù être fait dans lecercle des vingt-cinq jours en queftion ,
parrro/iperfonnes ; f a v o i r , l’Huiflier & deuxeopiftes.
O r les a£tes dé procédures dont il s’agit coniîftent,
i #. Dans la faifie r é el l e, dont l ’original contient dix
rôles 3 & dont il a fallu une feule copie auflide d ix tôles ,
pour la dénoncer dans la fuite au débiteur; ce qui fait
pour la faifie réelle en tout vingt r ô l e s , c i ,
. . 20.
*2°. Dans l’exploit de dénonciation , dont t original con
tient quatre rôles & demi & la copie autant, ce qui fait
neuf rô le s, c i ,
.............................................................. 9 *
�6 a *6
* P^ge aj>.
r 24
3 ' . Dans les affiches de L u f i g n i , lieu de la fituation
des Domaines faifis, l’original defquelles affiches contient
dix-huit rôles , dont il a été fait quatorze copies , revenan
tes avec l’original à 270 rôles , c i ,
.
.
270.
4 ° . Dans les affiches de M o u l i n s , où eft fituée la Maifon auifi fa if ie , defquelles affiches l’original eft pareille
ment de 18 rôles, & les copies font au nombre de vingtdeux , ce qui fait pour l’original & les copies trois cents quatre-vingt-quatorze rôles , ci ,
.
.
394.
5 0. Dans la dénonciation des deux procès verbaux de.
ces affiches, laquelle dénonciation a deux rôles de minute
ou o r i g i n a l , à quoi ajoutant deux rôles auifi pour la
copie , enfemble trente-fix rôles pour la copie des deux
Procès verbaux de chacun 18 rôles , cela fait quarante
rôles en t o u t , ci ,
.
.
.
.
40.
6°. Enfin dans la premiere criée faite en trois procès
verbaux différents, parce qu’il a fallu la faire en trois
Eglifes différentes, l’original de chacun defquels procès
verbaux contient vingt r ô l e s , ce qui fait pour les trois
foixante r ô l e s , & autant pour la feule copie qu’il a fallu
de chaque procès verbal à fin de l'afficher', ce qui fait en
tout pour original & copie cent vingt r ô l e s , c y , . 1 20.
E n additionnant préfentement tous ces rôles il en réfulte un total définitif, non pas de 2 b i6 rôles ( comme il
cft dit au Mémoire de Vichard * ) mais bien de 853
r ô l e s , dont 1 1 2 d'originaux écrits à peu-près en expédition
de Notaire & fur du périt papier de deux fo ls la feuille , &
les 7 4 1 rôles reftants font les copies des uns ou des au
tres de ces mêmes originaux , c y ,
.
.
.853
O r diftribuez ce nombre de 853 rôles à trois hommes
feulement , cela ne. fait pour chacun que 284 rôles,
cy,
•
•
•
•
•
•
284*
Do nnez en fuite à chaque homme vingt-cinq jours pour
remplir ia tâche ; & vous n’exigez de lui qu’onze rôles &
quelques lignes par jour.
Mais quel eft le Scribe qui ne copiera pas en un jour
onze rôles d ’expédition de Notaire étant fur du petit
papier
�papier de deux fols ? ou plhtôt quel eft le Scribe qui n ’en
copieroit p a s , fans fe g ê n e r , vingt par j o u r ? Et d’après
cela que devient l’impofante obje&ion tirée de la préten
due préparation antérieure des a£les de faifie réelle, con-.
tre la fincérîté du procès verbal de carence ? ; * ; • "■'[
Il e llfa u x en lui-même ce procès v e r b a l , dit Vidhard
& la faifie réelle ( d u ) 6 Novembre ) en fournit la preu
v e littérale , puifqu’on y faifit tous les befliaux gros & menus gami(fants acluellemcnt les lieu x , d’où il s’e n f u it , fé
lon V i c h a r d , q u iln y a v o it p a s carence le 14 . Pourquoi
d’ailleurs, ajoute-t-il, l’Huiflîer, qui trouvoit des beftiàux
au moins ce même jou r 1 6 , n’en iaifoit-il pas une faifie
mobiliaire ? Enfin , pourfuir-il, je demande à faire preuve
par témoins que même le 1 4 , jour du procès verbal de
carence , il y avoit dans mes domaines plus de chofes
mobiliaires de toute efpece qu’il n’eri falloit pour vous
payer.
'
J
Les réponfes à tour cet argument f o n t , que de dire
qu’un a£le eft faux fans pafler à Vinfcription , c’eft abso
lument ne rien d i r e , le principe eit fur ¡k général : qu’il
eft auiTi de principe que fans cette infcription' on iveft pas
recevable à demander la preuve teftimoniale contre le co n
tenu en aucun a£le : que la preuve littérale que Viehard
croit trouver d e l à faufleté du procès verbal de carence,
dans la mention de beftiàux portée par celui de faifie réelle,
eft pitoyable aufli-bien que fa queftion , pourquoi l’Huiffier qui trouvoit des beiriaux en allant faifir réellement
n’en faifoit-il pas une faifie mobiliaire. Ca r enfin , quand
011 faiiît un domaine avec Us befliaux tant gros que' menus
qui le garniffent aclueltemeni, cela ne prouve pas plus
I ’exiftence aduelle d’aucuns beftiaiix, que la faifie réelle
qui feroit faite d’une Seigneurie avec mention e.Ypreiïe desarrieres-pefs, cens , rentes qui en dépendent, ne prouveroir
l'éxrftence atfuelle d'aucuns àtrieres-fiefs parmi les dépen
dances de cette Seigneurie.
■ ;
En point de droit les beftiàux, dans le Bourbonnoisnrrgulierement, font cenfés taire partie des domaines & mai»-
�f o :u de la c i m p a g i i î . Conféquemment quand on y faifit
un. d o n line , on Ja.it toujours mention des befliaux qui le
g x r n iffe n t qu’il y en aie ou non. C ’efttquand en fuite ou
procède au br.iil judiciaire qu’on détaille les beftiaux par
le menu , û efFeÜiveinent il s’en trouve ; & s’il ne s’en
trouve p a s , la mention qu’en faifoit le procès verbal de
la faifie réelle paiTe pour être , comme elle eft en e ff e t ,
fans confequence. Tel s font les ufages de la Province des
Pa rt ie s, (a) d’aprés leCquels elles doivent être jugées.
En cinquième lieu , l’accufation d ’avoir multiplié ,
a l o n g é , & fait groffoyer les a£les de procédure de faifie
ré elle, afin d e m o lu m e n te r, de confommer tous les biens
de Vichard en frais , de porter enfin ces frais à iboo liv.
dans vingt-trois jours ; cette accufation ( comme toutes
les autres) géant dans le mémoire de Vichard , n’eft plus
qu’un nain , ou plutôt difparoît entièrement à la difeufiion.
Les procédures nexcédent p a s , quant à un nombre foit
des originaux foit des copies, les règlements, l’ufage du T r i
bunal , & la nature des objets, (b) Commandement prépa
ratoire , commandement recordé , procès verbal de caren
ce de meubles , procès verbal de faifie r é e l le , dénoncia
tion de cette faifie contenant en même temps indication
des affiches & des c r ié e s , affiches fur les lieux de la fituation des objets faifis mifes à tous endroits où il eft d’ufage d ’en mettre ; procès verbal de dénonciation de ces
affiches à la partie faifie, & enfin premières criées. D ’omet
tre quelqu’une de ces procédures il y auroit eu nullité :
comment de les avoir faites y auroit-il vexation ?
L a longueur & le volume des a&es viennent du nom
bre des articles d'héritages faifis , articles au nombre de
cinquante-neuf, qu’il a fallu défigner en détail paf nature,
fm tation , tenants & aboutiiTants, à peine encore de
nullité.
( j ) V o y e z fur la fin du Mémoire imprime pour Ribier
l ’aile de notoriété du Barreau de Moulins.
(¿) Voyez le meme afte de notoriété.
�*7
M a i s , dir a-t-on, faifir tant de chofes'pour 28 7 livres
41’eft-ce.pas .vexer ?, .
..
N o n ce, nelt pas y.exerdes que la l o i ,le . permet ; la.
plus-pétition n’a p a s lieu en F r a n c e , mêjrie.enrçnatiere de,
faifie , dit d'Héificourt.. Q u i ne (ait que dans l’ufage.de tou*
les Tribunaux on^faifit toujours plus’.qu il n’eiîidû ? cela,
eft même néceffaire , fqit pour éviter qu’une plus ample
faifie que pourrait faire un autre,créancier, ne^çpuvt;îf.&:*
ne rendîrvaine cette première , foit.à, caufe .dés oréinciers
oppofantsqui peuvent furvenir en foule ; car.fi quplqu,’u.n
d’eux prim oitcn hypothéqué ou par un,privilège., Iq créan
cier pourfuivant qui n ’auroit iaifi que jufqu a.concurren
ce de ia créance , que ferviroit à ce pourfuivïmt la f»i,fie
qu’il a u r a i t . f a j t e ? exclus:dn parpge.des deniers'par U
préférence des oppofants fur l u i , il fai^droit , $ o s c qu’il
paffàtà une nouvelle faifie des autres biens du., débiteur
laquelle., fi.elle reflembloit à la premiere,, pourrait encore
& par les mêmes raifons en nécefliter une troifieme ? &
quelle ruine alors pour ce malheureux débiteur ?
Au reile les articles faifis.fontrici en grand nombre
mais cela ¡peut ne rien prouver au.total pour leur impor
tance. ,Deux Domaines à Lufigrii..&T,une Maifoû , ojj.plutôt une mafure , dans un Fauxb.ourg>:de Mo ul in s; voila
les trois corps de bien faifis. Nous ignorons fi c’étoient
j à toutes les poffeflions deV ic ha rd . Mais nous croy qns
favoir que la valeur dçs deux Domaines entiers ..(jdans
lefquels Vicharçj vient de nous’ apprendre par une der¿îiere requête qu’il ne lui ,en appartient qu’un huitième )
jj e va pas pour tous les deux & pour la totalité des
.deux à plus de iix mille livres. Et à legard de.la M a i f o n ,
il cil prouvé par pieces que V ic h a rd , lequel l’a vendue
lui-même depuis la.faifie , ne la vendue que cent foixantehuit livres. Q u i fait donj: fi par L’événement du décret
' le prix delà vente auroit fi fort excédé l’a créance de Ilib i e r , fur-tout pour peu qu’il y eut eu d’oppofants , comme
il y en avoit déjà plufieurs?
Q u e les proc éd ures a y c n t été dans,Ia fuite grojfoyée*,
�Go<>
c ’eftauifirufaçïedé
laSénecliauiTéede
Moulins,ufa^eattefté
o
#
,
7
O
par le certificat çlu premier Magiftrat du 5 iegequi fera impri
mé à la fin de ce M é m oi r e, & proüvé par u n e ‘ produflion
nouvelle “ d e R i b i é r : Les Hiiiifiers du Boiirbonnois gar
dent pardevérs e u x , jüfqu'à la petfé&ïon du décret; les
minutes de procédures dés faifies réelles qu’ils f o n t , &
ils les gardent comme garants de la validité de ces procé
d u r e , -dont :il? ont toujours été ndrriis dans l’ufage à
délivrer des expéditions grciTdyées.' Mais d ’un côté qurôn
fe rappèlle comment on groffoÿoit à Tépoque dont iL
s’agit ( e n - 1 ^ 6 9 ) : qu’on faiTe" attention auiîî que les
groiTes ,en queftionfont fur du petit papier à deux fols la
feuille,' & pour lors 011 verra s’évanouir cette énormité
& cette'yexation que Vichard voudroit-fiire t r o u v e r fert
’ Pages3 & 4. général dans le nombre des rôles cùi’il prend la peine *-de
c ompter/niais mal, pour les proceduri^fà-ftes, & de d e v i
n e r , mais encoreplus m a l,p oà r' ce lle à qui' aùroient été à
faire jufqu’à la derniere criée.
1
Enfin qu’il y ait pour i b o o liv . de frais dans les pro
cédures que nous défendons ; c’cfl: ce qui'eft prouvé faux
par l ’exécutoire m ê m e ‘ qui en fut décerné J i l ’Huiifier fur
fa requ&té contenant mémoire , & fur le Vu des p ie ce s,
p a r Ordonnance du Ju g e du 1 1 Dé cembre 1 7 6 9 . C e t
exécutoire en effet, où le J u g e ne retrancha du mémoire
d c l ’HiiiiTier que qüatre;yingt liv. porte feulement les frais
de Ces protéxlurcs à la fomme .de f}p t cents ' vingt-cin q
liv . quatri fo ls lix deniers: cb qui’ îait une différence de
7 7 4 liv. 15 fois ¿ deniers* c’eft-à-dire ( comme nous
l’avions déjà annoncé') de plus de moitié entre lé vérita
ble montant des frais & les hyperboles éternelles de ' V i
chard fur cet article..'
.
.
•'
' K t c ’eil en vain qu’on alléguerait que Ribier Uii-rrtcmc
préfentoit ces frais, comme un’ ôbjc’t d e ' l f r i o liv. p a r f e s
lettres de refcilion contre le pfocès verbal doffres du 18
Décembre. C a r par la le&uro de ces lettres on voit que
R i b i e r , en y parlant vaguement de plus de quinze ccnts
livres de dépens, comprenoit dans cette fomme tant les
�29
frais de la faifie réelle que les dépens de I’inftance en
nullité &r radiation qu i étoit déjà c o m m e n c é e .
Mais d’ailleurs quand Ribier auroit entendu que les
frais feuls de la faifie réelle fe montafîentà plus de quinze
cents liv re s , c’étoit une erreur de ia part qui doit de
meurer aujourd’hui pour reconnue d’après l'exécutoire : &
il^doit également demeurer pour confiant d’après cette
piece que yxb liv. 4 fols 6 deniers , & non pas quinze
cents liv . font le véritable montant des frais des procédu
res de faifie réelle dont il s ’agit.
O r quiconque réfléchira fur cette feule circonftance
que c’eft ici une faifie réelle , qu’en la SénéchaufTée de
M o u l i n s , par. un ufage immémorial , o n grofjoye les a£ïes
de procédures de faifie réelle qui font du miniftere des
Huiiïïers ( & tous le font ) ; que par ce moyen il y à
pour chaque a£le une minute , une expédition grofjoyée
& toutes les copies néceffaires, outre le tranfport & les
journées de l’Huiffier & de fes afliilams, ce qui fait en
core un article à part; que toutes ces chofes font ici en
trées.dans la çompofition des 7 1 5 liv. de l ’exécutoire;
q u ’il y eil entré la groffe du commandement prépara
toire du. mois de Juillet ; qu’il y eft entré les vacations
d ’un Commiffaire.à terrier & de cinq indicateurs pour
prendre Jes confins des héritages, celles de trois N o ta i
res pour leur affiftance aux criées ( fuivant le même ar
ticle 1 4 3 de la coutume ) , les frais & droits d enrégiftrements au Bureau des faifies réelles & au G re ffe , tk tous
Jes contrôles de tous les aftes.; quiconque, difôns-nous ,
à l'exemple des J u g e s , réfléchira à toutes,ces chofes fans
p r é j u g é , fans colcrc ôi fans, env ie, & connoitra la ma■tier.il,. fera bien éloigné de trouver cette e x o r b i t a n t ( dans
jzJ> liv.\ & non pas, ¿ 3,00 liv. de frais ) dont on a fait
pour.la pwnic(C fois , qi ‘h Cour'feulement, un crime .à
Me.. D c f v j g n e t , iequql n ’a.pas fait ces. frais & t<c pou‘voit pas les faire, mais bien / H uiffier , au nom de qui
-l’exécutoirp en a été délivré..
•
E tt (ixum e li»M a l f a , ,que toutes les. procédures ton-.
�s..
G 03.
3°
tentieufes foient nulles en elles-mêmes du coté de laform e ,
c’eft fur quoi nous nous référerons au Mémoire de R i bicrqui les a juftifiées de ce reproche : fur-tout nous nous
léférerons à la Sentence même dont e'ft appel entre Vichard & R i b i e r , par laquelle ces procédures étoient déjà
juftifiées, comme elles le font encore par leur conformité
avec le contenu en l’afte de notoriété du Barreau de
la Jurifditlion. Et certainement ces deux appuis d e sp r o
cédures ( la Sentence & l’a&e de notoritété ) paroîtiont
toujours inébranlables à des efprits judicieux qui ne le
persuaderont jamais que des procédures foient nulles 3 &
encore moins qu’elles foient vexatoires , lorfqu’ils les ver
ront porter l’attache des Magiftrats locaux qui 'les ont
fcrutées, & lorfqu’ils les fauront conformes à ce que les
Jurifconfuhes de l a :Province difent avoir toujours penje,
décidé & vu pratiquer & juger.
maintenant aux trois autres faits géné
raux de lac aufe de Vichard en la C o u r ; ce font, avons
nous d it , le défaveu prêté à Ribier dans le procès v e r
bal d’offres de V i c l u r d du 18 Décembre ; les lettres de
refcifion pril’e s par le même Ribier contre ce défaveu fuppofé ; & enfin l’irïftru'&ion faite à Moulins fur les deman
des refpeftives , d c Vichard en radiationde la faifie réelle,
& de Ribier en entérinement de fes lettres de refcifion.
Nous avons déjà vu que la Sentence donteft appel, enté
rinant les lettres , releve Ribier de fon défaveu prétendu ;
& rejettant les demandes de Vichard , ordonne la conti
nuation des pourfuites de la faifie réelle. Ces difpolitions
* Pa^epremiere ont attiré à la Sentence de la part de Vichard * la qualidsrmcfc.
fication de fingulicr monument de l'injujlice h u m a i n e .
P
our en v en ir
ijui réunit à l'injujlice la plus criante les contradictions les
plus bigarres & les plus groffieres , & qui ejl en tout point
l'ouvrage le plus vicieux que la Juflice (buveraine ait ja
mais eu à ptoferire. Mais ce n’eft pas de cela qu’il s ’agit
ici.
Auro.it-on pu croire que Vichard trouvât en la C o u r
de quoi déclamer contre M e . Défvignet à l’occafion des
�3i
trois objets en queftion ; 1 sdéfaveu , les lettres derefcifion
& l'inflruBion. Cependant que ne dit-il pas !
D ’abord , pour commencer par l'injlruclion , il accufe M e . Defvignet , quoique fans le nommer , d ’a
voir employé des moyens nés après coup dans les médi
tations d'une chicane objcure & d'une mauvaife f o i profon
dément réfléchie.
Mais c’eft là vifiblement un lieu commun , étranger à la
caufe , & que nous aurions peut-être dû placer i’o us la
premiere partie de ce Mémoire. Du refie les moyens em
ployés à Moulins pour Ribier étoient tracés à M e . Defvignet dans les confultations de trois Avocats au Parlement
de Paris, & dans l ’avis de fix Avocats à Moulins. Ces moyens
on triomphé devant les premiers Juges , & on efpére
q u ’ils triompheront de même en la Co ur .
A l ’égard du prétendu défaveu : ceux qui n ’auroient pas
lu le Mémoire de Vichard , (auront ici que ce fut dans
le procès verbal des offres faites par ce débiteur faifi,
à la perfonne & au domicile de Ribier fon créancier, le
18 Décembre 1 7 6 9 , huit jours après la premiere criée ;
ce fur dans le corps de ce procès verbal , dilbns ii ou s,
qu’on fie faire à Ribier le defaveu contentieux, en ces termes :
» lequel Ribier a d i t , que quoiqu’il ioit vrai que Me .
„ D ef vig ne t, à qui il a remis fes titres , ait fait procéder h
„ la fai fie réelle des fonds de Vichard , néanmoins lui
„ Ribier déclare que jamais i l ne lui a donné aucun ordre ,
•n &
qu’en conféquence I L L E D E S A V O U E dans ladite
„ pourfuite de faifie réelle , E T DE C HA RGE V i e i l A R D
„ D E S F R A I S de cette faifie , ainfi que des acles faits pour
» y parvenir ou qui ont fu iv i.»
^
Une telle déclaration, pour le dire en paffant, n’eft pas
même vraifemblable à la fimple infpe£tion. Auifi Ribier
a-t-il obtenu fans peine des premiers Juges l’entérine
ment des lettres de refcilion qu il avoit pnfes contre ;
& cela non pas, comme dit V i c h a r d , * parce que ces Juges
auroient crû voir dans ces lettres l'empreinte de la volonté * Page ir.
Jouve raine
à laquelle ils dévoient docilementfe conformer.,
<5 o ~ ,
�* Pjge 7*
mais parce qu’ils ont vu dans la déclaration l’empreinte
de la furprife, du d o l , de l’erreur de f a i t , & de la
léfion.
Q u o i qu’il en foit, Vichard prétend aujourd’hui * que
ce défaveu mettoit , dit-il, à découvert toute la manœuvre
de M e. Defvignet', que ce fut pour lui un coup de foudre
que quand il l’eut ap p ri s, il appella R i b i e r , lui fit des re
proches , des menaces, penfa même en venir aux voies de
fa it ; que ce créancier cependant fut d ’abord infléxibie ,
réitéra fon défaveu , & cria à la vexation dans les places
publiques , en préfence d’une foule d ’honnêtes gens ,
qui pourroient en dépofer ; & quefi bientôt après il de
vint plus complaifant & foutint avec chaleur ces mêmes
procédures qu’il venoit de défavo ue r, ce fu t à l'abri fans
doute d'une excellente contre-lettre, dont le Praticien com
promis eut fo in de le munir pour le fatisfairc , & emprunter
enfuite fon nom pour foutenir fes monflrueufes procé
dures , &c. &c.
Mais de bonne fo i , maintenant que l’on connoît toute
la marche , toute la régularité des procédures- de la faiile
réelle , & après que la faufleté du défaveu , par l’impoifibilité & l’invraifemblance de fa propre teneu r, frappe
, les efprits comme un grand jour frappe les y eu x ; que
voit-on dans tout le narré ci-deflus de V ic h a rd , répété
encore par lui à la page iz d e ’fon Mé m oi re , & (m algré
ces répétitions) auilïinvraifemblable que le défaveu même,
qu’y v o it -o n , autre chofe que l ’envie de faire trouver M e .
Defvignet pa r-tout, de lui fare des crimes de tout ?
Eli quoi ! le défaveu découvre , félon vous Vichard , la
mmœuvre antérieure de Me. Defvignet ? mais quelle manœu
vre avoit-il donefaite ? chargé le 7 No vem br e des titres & de
la procuration de Ribier pour le faire payer de fa créance
par les voies portées en cette pro curation, & nommément
par celle de la faific réelle , il avoit remis ces titres ù un
Huiifier qui avoit fait cette faifie , & vous appeliez cela
une manoeuvre !
V o u s voulez enfuite que le défaveu, furpris frauduletrfemcnc
�6~~>f
, 35‘
iement à R i b i e r , le 18 Décembre , ait été pour M e . Defvignet un coup de fo u d r e ; q u ’il s’en (bit emporté contre
R ib ier , jufqu’aux menaces & prefque juiqu’aux c ou p s!
M a is ce défaveu eût-il été auffi réel & auifi indeftru&ible q u ’il étoit faux & peu folide , qu’avoit à craindre'
M e . Defvignet des effets de ce défaveu , avec la procu
ration qui faifoit fon titre contre Ribier ?
Enfin vous voulez que R ib ie r, que vous peignez, d’abord
perfévérant dans le déf aveu, & le publiant dans les places^
& tout de fuite revenant fur fes pas & foutenant avec-'
chaleur les procédures défa vou ée s, vous voulez qu’il n ’ait
ce que vous appeliez ainji varié , que par le moyen d'une
excellente contre-lettre d e ‘ M e . Defvignet !:
Mais fur quoi fondé parlez-vous là de contre-lettre!’
E n avez-vous vu quelqu’une entre les mains de Ribier ?ce r
homme vous a-t-il dit qu’il en eut une ? l ’a-t-il dit à quel
q u ’un qui vous l ’ait répété? en appercevez-vous vertige^
dans les pieces de toute cette affaire? Me . Defvignet danstoutes les fuppofitions poflibles àvoit-il même befoin de
donner une contre^lettre à un client, contré lequel la feule
remife du titre auroit fait fa fureté, & dont il avoit en
outre la procuration exprefle pour faire faire toutes les
procédures dont il s ’agiifoit ? Cette procuration encore
un coup étoit du 7 No vembre & paffée devant Notaires;;
le prétendu défaveu de Ribier n’étoit que du 18 Déce m
bre ; & toutes les procédures avoient été faites dans l’inter
médiaire, & poftérieurement à la date de la procuration,,
puifque la premiere de ces procédures , le commande
ment recordé eit du 9 No vem br e. D ’ailleurs le procès«
verbal d’offres qui contenoit le défaveu netoit pas une piece dont on put jamais faire ufage contre Me. Defvignet:
ce n’étoit pas là un défaveu de Procureur. Ces fortes d’a&es1
font fujets à des formes particulières dont n’étoit ni n e ;
nouvoit être revêtu le procès verbal d ’offres. Me. D e f
vignet nfc pouvoit donc pas être compivmis, ni dans le fait,,
ni dans le d ro it ,n i dans la f o r m e , ni dans le-fond par t e
'
�<D'■j S
dcfaveu couché dans ce procès verbal : il n’a voit pas à crain
dre non plus d ’autre défaveu 3 de défaveu légal de la part de
Ribier dont il avoit ( on ne fauroit trop le répéter ) une pro
curation authentique ; il n ’avoit donc pas de contre-let
tre à lui donner : c’eil donc une calomnie à vous Vichard
d’avoir parlé dans votre Mémoire d ’excellente contre-
lettre.
Q ua nt aux variations qu’on allègue, dans la conduite
de R i b i e r , pour en faire des crimes à Me. D e fv ig ne t , elles
n’exiftent que dans l’imagination de fon Adverfaire. R i - ,
bier ne fut jamais dans le cas d’approuver un feul inftant
le défaveu de l ’afte d’offres. Il l’ignoroit même au moment
où l’on veut qu’il l’eut f a i t , au moment de la féance te
nue en fa maifon pour les offr e s, dont on avoit apporté
l’aile tout drefle avec le défaveu écrit d’a v a n c e , ainii q u ’il
paroît par l ’identité d ’encre & de caraûere. Ribier ne
s’apperçut donc de ce défaveu que lorfqu’ayant porté à
M e . Defvignet la copie q u ’on lui avoit laiifée du procès
v e r b a l , il y reconnut la fupercherie de cette piece dont
il avoit jufques-là ignoré la véritable teneu r, ainii que
l’annonce fa démarche même auprès de M e . D e fv ig n e t :
car il ne feroit pas allé trouver ce P ro c u re u r, & ne lui
auroit pas apporté bonnement fa copie de l’afte d’offres,
s’il eut fu ou s’il eut cru quelle contenoit fon défaveu.
Ribier ne varia donc jamais fur le défaveu prétendu ni
fur les procédures de la faifie réelle : & jamais M e . D e f
vignet ne fut dans le cas de le craindre & de lui donner
une contre-lettre pour foutenir fous fon nom ces procé
dures. C e fut Ribier feul qui les foutint de fon propre
m ou v e m e n t , en fon nom & à fes rifques, comme feul il
avoit intérêt de le faire. Et c’eil encore ce que ne permet
pas de révoquer en doute une nouvelle procuration qu’il
donna à Me. Defvignet le 27 Jan vi er 1 7 7 0 , à l’e ff et , y
eft-il dit , „ de continuer d'occuper pour lui dans la pour» fuite de la faifie réelle & fur les demandes de Vicharcl
„ en nullité & en radiation, & d’oppofer tous moyens
�(5~o )
'» convenables contre le défaveu du procès verbal d’of» fres. „
Mais à quoi penfons-nous ici d’invoquer & la procura
tion & la conduite de Ribier fur l’article du défaveu &
des procédures de la iaifie réelle, pour juftifîer M e . D e f
vignet ? Eh ! c’eft tout cela qui le condamne , vous dira
Vichard par qui tout cela eft foupçonné ou plutôt empoifonné ! il vous dira * que les procurations parurent "Pages 98c 10;
toutes deux à la fois , & cela feulement le 1 3 Février :
comme fi ce fait n’étoit pas de la derniere indifférence”, &
comme il même on n’auroit pas pu fe difpenfer de pro
duire dans aucun tem ps, vis-à-vis de V i c h a r d , des procu
rations qui ne font que le titre du Procureur envers fon
client 1 II vous dira * que toute la conduite de Ribier de ! Page S.
puis le défaveu préfente des faits bien Jinguliers , qui font
même inexplicables ; Vichard du moins nefe permettra pas
de les expliquer , i l en laijfe ¿e fo in à fes lecteurs , c’eft ain.fi
qu’il parle. Et ailleurs * en revenant au défaveu ;,il vous * Page 17.
dira encore que cette piece prèfente à la vérité les plus finguliers myfleres , mais qui n en font pas pour R ibier ; & il
vous ajoutera qu’ils n ’en feroient peut-être pas pour lui-mê
me Vichard, ft la prudence ne lui dêfendoït de lever le voile
qui les couvre.
.. .
•
A i n fi , comme on v o i t , Vichard ne fe contente pas dé
dire contre M e . Defvignet tout le mal qu’on en lit dans
fon M é m o i r e , il y veut encore qu’on en penfe davanta
ge ; il laiffe à fes lefleurs le foin de deviner : & il fe tait luimê m e, quoique fachant bien d'autres ckofes au fujet du de
faveu, car c’eft ce que veulent dire ces m ots , que les myf
leres de cette piece n en feroient pas pour l u i , Vichard , f i la
prudence ne lui defendoit de lever le voile qui les couvre.
Mais c’en eft t r o p , Vichard , & vous pouffez les gens
à bout par vos réticences, plus injurieufes cent fois que
les expreifions les plus emportées dont vous pourriez vous
fervir & que les faits pofitifs les plus graves que vous
articuleriez.
_
E x
�6^
36
•'
! r‘
E n effet , il vous vou s ex pliqu iez , il eft certain que
l ’on vous répondrait & que l ’on vous confondrait c o m
me on l’a fait jufqu’ici fur-tout ce que vous avez bien
voulu écrire contre Me. Defvignet. Mais comment v o u
lez-vous qu’on vous réponde fur ce que vous ne faites
que penfer ou que laiiTer à penfer aux autres ?
En cor e fi vous aviez un peu mis fur la voie l’imagina
tion de vos l e & e u r s , fi vous les aviez aidés ! mais ri en :
point de fecours de votre part. C a r enfin , de ce que vous
dites que les procurations ne parurent fubitement que le
1 3 F é v r i e r , vous ne voulez pas fans doute qu’on infère
qu’elles n’exiftoient pas auparavant ? Ces procurations ,
l’une du 7 No vem br e & l’autre du z7 J a n v i e r , font paffées chacune devant deux Notaires différents : elles fu
rent contrôlées avant la quinzaine du jour de leur date
fuivant lesEdits. Il faudroit d o n c , pour les fufpecter , re
garder comme coupables de f a u x , non feulement M e .
De fvignet & R i b i e r , mais encore quatre Notaires & un
Contrôleur.
D ’un autre c ô t é , quand vous parlez des myfleres du dé
faveu , lefquels ne feroicnt pas des myjleres pour vous fans
votre prudence , vous ne voulez apparemment pas que l’on
croie que ces my itérés feraient quélque ceffion des droits de
R i b i e r , que M e . Defvignet auroit prife de ce client contre
la prohibition des Ordonnances ? C a r outre que pour Iaiffer feulement entrevoir une imputation de cette atrocité
contre un Procureur , il faudroit en avoir la preuve for
melle ; c’efl que l’acceptation faite.par R ib ie r' le 18 D é
cembre du montant de la créance principale que vous
lui payâtes vous-mêmé & qu’il reçut & toucha de vos
mains , démontreroit ici bien fufïiiamment qu’il en étoit
le vrai propriétaire. Expliquez-vous donc encore un coup
Vichard , levez ce voile myftérieux que votre prudence
r e fp e & e : ou confentez de pafler pour un calomniateur
convaincu par votre réticence même ; car c ’cft la réglé
en matière de calomnie vague , où l’on 11e particularifa
�r i e n , afin d ot e r toute prife & tout moyen d’y répondre;
réglé enfeignée par ce génie fublime à qui cette Ville de
Clermont s ’honore d’avoir donné la naiflance. (c)
Enfin pour ce qui eft des lettres de refcifîoti prifes par
R ibier , elles fourniiïent encore à Vichard * les traits les * page 14 &
plus fanglants contre M e . Defvignet au Sujet du m oy e n ^¡vantes.
de ¿éfion , réfultant de la perte des frais de la faifie réelle
dont l’a&e d’offres contiendroit de la part de Ribier une
décharge. C e n’eft pas Ribier , d it-o n, qui perdra ces f ra is ,
puifque d’un côté il ne les a pas déboursés, comme le c on s
tate le commandement du 6 Août 1 7 7 2 , & que d’un au
tre côté il eft à labri de toute répétition de la part du Pra
ticien Defvignet qui les a frayés & avancés 8: qui doit les
perdre. D ifons-le avec confiance ( ajoute Vichard ) cet
avide Praticien N E S E R A - T I L P A S T R O P H E U R F U X s i
L A S E U L E P E I N E Q ü ’ ON L U I I M P O S E pour s'être joué
de la Juflice & de fes formes , c’efl de fupporter en fon nom
les dépens de fa propre procédure , de ne les pouvoir répéter
contre perfonne , & de perdre le fru it de fes vexations.
V o u s l’entendez, Magiftrats Souverains, qui devez nous
juger. V ou s entendez Vichard donner quittance à Ribier de
tous les frais que M e . Defvignet fon Procureur fondé a
avancés pour lui dans la faifie réelle. V ous l’entendez folüciter en même temps votre glaive , & marquer ce Pro c u
reur comme la vi&ime dévouée à fon tranchant. Mais
M e . Defvignet ne craint rien de R i b i e r , dont il a la P r o
curation ; & il eft également raffuré contre la févérité de
votre J u f t i c e , par vos lumieres , par la droiture de vos
c œ u r s , & par la régularité des procédures qu’on vous
dénonce.
.
Seroit-ce même affez que vous ne repriiliez pas ici
M e . Defvignet pour des procédures qui effc&ivement
n’ont rien qui puiffent le rendre réprehenfible ? ^ o n fans
doute, ce ne feroit pas aiTez. Eh ! qui ne voit que ce ne feroit
(c) Pafcal, 1 5 e. Prov.
�38 .
même abfolument rien pour l u i , & , ofons le dire , rien
pour vous & pour la Juftice , qui n’eft qu’un même avec
v o u s ? Pour l u i , qui n’eft pas intervenu dans une caufe
étrangère précifément afin de défendre des procédures
qui ne font pas de fon fait & q u ’un autre a défendues,
mais afin de fe plaindre des outrages qu’il a reçus à l’occafion de ces procédures. Pour vous & la J u f t i c e , qui avez
ici deux caufes à juger ; l ’une les procédures dont il s’a g i t ,
attaquées par le Mémoire de Vichard & qui font la matiere de fon Procès vis-à-vis de Ribier ; & l’a ut re, ce même
Mémoire de V i c h a r d , dans la partie qui intérefle M e .
Defvignet & qui fait le fujet de fes plaintes.
V o u s les jugerez donc fans les confondre ces deux
caufes, & vous les jugerez toutes deux contre V i c h a r d ,
qui les a fait naître toutesdeux. Dans l'une ^vous lui appren
drez par la confirmation de la Sentence au profit de
R i b i e r , qu’il faut qu’on remplifle les engagements qu’on
a c o n t r a & é s , & qu’il eft permis à tout créan ci er, porteur
d'un titre éxécutoire, de faire procéder fur les biens de
fon débiteur, même par la voie rigoureufe de la faifie
relie, pourvu qu’on y procède fuivant les formes que les
Règlements prefcrivcnt. D ans l ’autre , vous apprendrez
au même Vichard par. la fupprefîion de fon M é m o i r e ,
que vous ne fouffrez p a s , que vous ne fouffrirez ja
mais que des Plaideurs , aveuglés par l’intérêt & par la
h a i n e , viennent autour de votre Tribunal en impofer har
diment à des Défenfeurs pleins de z e l e , pour chercher à
vous tromper enfuite vous-mêmes f u r i e compte, ou de
leurs Parties adverfes , ou de ceux qui ont prêté leur
miniftere à ces Parties devant les premiers Juges .
Enfin par l’éclat & la publicité de cette fuppreifion d’un
Mémoire à qui l’impreflion a donné auffi la publicité la
plus g r a n d e , vous égalerez la réparation à l’injure: &
vou s continuerez de faire vo ir aux Habitants de quatre
Provinces q u e , lorfqu’ils viendront à votre Si eg ede m an
der vangeance des torts qu’ils auroient reçus loin de vous
�dans leur perfonne , dans leur honneur ou dans leurs
biens , ils n’auront pas à craindre que leurs Parties adverfes ne leur faflent impunément, fous vos y e u x , par
des fatyres perfonnelles , un tort plus réel & infini
ment plus fenfible que ceux qu’ils vous porteroient à
venger. S ig n é , E S T O P Y
D E SV IG N E T .
;
Monfieur VAbbé D E P O N S , Rappoteur.
V ‘
M e . R E C O L E N E , Avocat.'
+.\
»
t*.
C
t) .
h e v a l i e r
d
’U
l g a ü d
, Proc .
C E R T I F I C A T D E W s. L E S O F F IC IE R S
de la Sénéchaiijjée de Bourbonnois & Siege
Prcjidial de Moulins.
N
O u s Officiers , Magiftrats de la Sénéchauflee de
Bourbonnois & du Siege Préfidial-de Mo ul in s, cer
tifions & atteftons que M e . P i e r r e E S T O P Y D E S V I G N E T , reçu Procureur èfdits Sieges en lannee mil
fept cent fo ix a n t e , en a rempli les fondions avec %ele,
qu’il n’a donné lieu à aucune plainte ; que fa conduite
nous a toujours paru être à l'abri du plus leger reproche,
& q u i l s'ejl conformé aux règlements dans les procédures
dont il a été chargé en fa qualité de Procureur ; en té
moin de quoi lui avons délivré ces prefentes. F a i t &
arrêté en la Chambre du Confeil le dix Mars mil fept cent
foixante-quatorze. Signes , G r i m a u l d , Lieutenant G é
néral ; D e s b o u i s d e S a l b r u n e , Lieutenant Particulier;
P ierre
moùze
de
S a i n t c y , Doyen ; P a r c h o t
de
V
ille
-
, Pere; P r e v e r a u d ; B a r r u e l ; Ba r d o n n e t
d e G o n d a illy ; H o u d r y ; H eu ilh ard ; C habot ;
P a r c h o t d e V i l l e m o u z e , Fils; R i p o u x ; B u t a u x
�40
DU P o u x , Av ocat du R o i ; & C
onny de
V
alveron
,,
Procureur du R o i .
A
T T E S TA
T I O N.
N
O u s A n t o i n e G R I M A U L D , E cu yer,C on feiller du R o i , Lieutenant Général , Enquêteur &
C o m m i ffaire Examinateur en la Sénéchauffée de B o u r bonnois & Siege P ré fidial de Moulins , certifions & attes
tons à tous qu’il appartiendra que de tous les temps l ’ufage
de cette Sénéchauffée a été que l’H ui ffier roya l chargé dé
faire les poufuites d ’une faifie réelle, fuivant les Edits,.
Ordonnances & R è g l e m e n t s, eft toujours demeuré dépofitaire des actes par lui faits, étant garant, iufqu’à laperfect i o n du d é c r e t , de la faifie r é el l e, des formalités
des actes de la faifie réelle , & l’Huiff ier étant dépofitaire*
d ’iceux a toujours été admis & dans l 'ufage de délivrer
expédition des mêmes actes; en témoin de quoi nous avons:
donné la préfente atteftation, & avons figné avec notreGreffier, qui a appofé léfcel de cette Sénéchauffée. D o n n é ;
à Mo ulins, en notre H ô t e l , le ving-un A v ri l 1 7 7 4 .S ig n é,.
G R I M . A. U L D . Et plus bas ,, Sa _u l n i e r , Greffier..
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
D à - l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du Roi, Rue.S;.Genès , pres.l’ancien Marche.au Bled, 1774»-
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Estopy Desvignet, Pierre. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Pons
Récolène
D'ulgaud
Subject
The topic of the resource
créances
procédures
ventes en criée
ventes
saisie
signatures
lésion
huissiers
faux
affichage
contre-lettre
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Monsieur Pierre Estopy Desvignet, Procureur en la Sénéchaussée de Bourbonnais, Siège Présidial et autres juridictions de Moulins, Intervenant et Demandeur. Contre Jean Vichard, le jeune, et Gabrielle Talon, sa femme, Défendeurs. En présence de Laurent Ribier.
Table Godemel : Décharge : 1. le créancier qui a reçu le montant de sa créance, et ce, dans le procès-verbal d’offre, déchargé son débiteur d’une saisie réelle, poursuivie contre lui, en désavouant l’officier public qui l’a commencée, libère-t-il ce débiteur irrévocablement ? peut-il se pourvoir contre sa décharge, par lettres de rescision, si elle a été obtenue par dol et surprise ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0116
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0115
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52874/BCU_Factums_G0116.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lusigny (03156)
Rights
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Domaine public
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Contre-lettre
Créances
Faux
huissiers
lésion
procédures
saisie
signatures
ventes
ventes en criée
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106364973c6e47f0e16aa526df301e97
PDF Text
Text
M
E
S
POUR
M
I
Je
G
O
N
I
I
F
R
I
E
É
'V I C H A R D 'L a b o u r e u r , &
•
•/•
. •
fous fon autorité G a b r i e l l e T A L O N , fa
AN
femme , Habitants de la Paroiffe de L u fig n y ,
Appellants.
CONTRE
.
Laurent
R I B I E R , Caba-
retier, Habitant de la Paroif fe de St. Bonnet ?
Intimé.
C
Ette affaire préfente deux finguliers monuments de l’injuftice humaine.
Le premier eft une procédure énorm e,
pratiquée par un Praticien avide contre
un malheureux Payfan qui doit depuis quelques
mois 287 liv. à fon voifin , qui a engendré plus
'
A
�%
de ï 'Joo liv. de frais en 23 jours , * qui auraient
été doublés dans un pareil délai v &: triplés dans
trois mois ,■s’il^ri’avoit été arrêté par ‘des. offres;
'r n - .v
■.* V
• ."
I
reçues.
-•
, >
:
.
: L e fécond efl une Sentence qui canônife cette
procédure, &Í qui en ordonne la continuation, quoi
que les ofFrcroient acceptées. 6c 1,^créance quittan
cée q u e’le.-créaiñcier ait défavoué cette vexation f
q u ’il en aitrxpreirément déchàrgé-(on!débireHr
que cette'procédure (oit d’ailleurs viciée dans fa for
me par les nullités les plus nombreufes ôç les plus
littéralement prononcées par lesioix de la matiere.
Dans le faitr, le ■
%Juin, 1769-, Jean V jch ard .,
Laboureur, & Gabrielle T a ló n , íá fcniníé, cónièntircnt une obligation de la fomme de 287 liv.
3 f. j9-d. au profit du; nommé Laurent R ib ie r,
Cabaretier.
Cette obligation avoit pour caufes dès dépenfes
faites au cabaret de R ib,ier, quelques dettes étran
gères à Vichard & à la fem m e, dont ils voulurent
bien néanmoins fe rendre perfonnellement débi
teurs , & des frais d’ Huifïicr, dus au nommé G uill e t , montant à <51 liv. & quelques f o ls , pour Iciq u e l s Vrichard 5 c fa femme s’obligèrent envers R ib ie r , tk R ibier envers l’HtiiiTier G uillet par le
même a£tc.
1 * Ri bi er fixe Uii-miîmcécs frais & cette Tomme: vide fci lettres
obtenues en Chanceller ie le 7 Février 1 7 7 0 , & fa requête du
*3 du mê me mois.
�C e t t e o b l i g a t i o n , f o u i c r i t e l e ' % J ui n , fluri tipul é e p a y a b l e le 2,4 du; m ê m e m o i s ; mais>.il f u t c o n
v e n u v e r b a l e m e n t e n t r e les P a r t i e s .qiie.ee t e r m e
t r o p p r o c h a i n ne fero.it pas r i g o u r e u x , : & q u e Ri ^
b i e r l e u r d o n n e r o i t , des facilités p o u r f e l i b é r e r , &
en effet il p a r û t
en u f e r a in ii p e n d a n t q u e l q u e s
mois:;, ¿nais t o u t à : c o u p , da ns .les premiers; jm ir s
d e N o v e m b r e , fans xnitre..avis q u \ u V com m ande -*
m e n t . r e c o r d é , Và c b ar .d
fa f e m m e ' v i r e n t m e t t x e
t o u s leurs b i e n s en faifie réelle & p r o c é d e r auxTiices«
Ces biens confident en deux domaines, l’un
appelle du Boiit & l’autre des Çhantelliers ,• finies
dans la lïaroiiTe de Lufigny , & une maiion;iituée
dansla viliede M oulins, Fauxbourg des'Gàr.ccaux.
La faiiîc réelle en fut commencée le 1 6 N o
vembre , continuée le 17 , préientée an Bureau
du Gommiilàire aux failics réelles le 18., en’régiilrée le a.o , *enrégiilréc au Greffe de la Sélié-?
chauffée le 1 1 , & ’dénoncée le 2.3,
•
;
Le 24 on procède aux affiches à Lufigny & a
Aloulins. L ’Edit des criées de 1 <55 1 preferit ces
affiches à la pçrtc de l’Eglife Paroiffiale & à celle
des maifons fàiiies , ce qui les rédùiioit' à cinq .au
plus ; on les multiplie jufqu’à 34. ; les originaux
de ces affiches ont chacun 7 4 rôles d’expédition ,
on en fait par coniéquent 34.: copies qui forment
un total de 2.5 16 rôles, qu’il a fallu tranlcrire pour
cette feule opération , dans y comprendre les 148
rôles des expéditions originales.
■
C es affiches lon t dénoncées le ¿ 5 , & il en faut
A 1
�encore copie au domicile de la Partie faific , ainfi
que de toutes les pièces antérieures. .
: Enfin quinzaine après, le 10 Décembre, on pro
cède.a la premiere criée à tfrôisxndroits, différents.,
& ces trois criées forment'réunies 14.1 rôles d ’ex
pédition^ fans y.com prendre les minutes. .
II; reftoit h. faire .quatre criées ou liibhailations
q u i, à.24. l rôles chacune., devoient.encore formei*
un total deiçô^ rôles.¡d’expédition , non compris
les minutes: originales de ces pieces.
. Enfin ces cinq criées devoient êire fuivies de la
copie du t o u t , depuis & ; compris .le commande
ment recordé julqu’k la cinquième criée inclufivem enc, & Vichard le feroit encore vu accablé par
un nouveâu.volume d’environ quatre à cinq cents
rôles de minute.
:
- T elle ctoit la marche-de cette monftrucufe pro
cédure, ourdie & machinée dans.la pouifierc de l’é
tude d’un Praticien avid e, qui comptoit déjà par
les doigts combien valoient les deux domaines &
la maifon de Vichard , & combien il falloit faire
de frais pour s’en rendre acquéreur par Ion exécu
toire , lorlquc l’infortuné Vichard , revenu de là
iùrprifeque lui avoient d’abordcaulé cés effrayan
tes pouriuites, fc hâta d’en arrêter le cours.
. r11 chercha précipitamment les 187. liv. 3 fols 9deniers qui femblôient être le.prétèxte de ces vexa
tions , & fe lesjétant prôcurés:v .il fit faicè un acte,
inftrumcntairc à llib ier le 18 D écem bre, par 1er
quel il lu i’ fit des offres réelles de cette lomme
�principale de 18 7 .livres. 3 fols 9 deniers pour ¡le.
montant de l’obligation.,(&L<de celte de 12, [liv.■
;\6
iüls 3 deniers-, iâufà. parfaire 011.recouvreiY>poiir:;
l'es frais, autres néanmoins que ceux'deJàfajii'e réel
le, 6c de toute la procédure qui s’en,étoitenfuiviç, •
contre laquelle .il protefta d efe.p ou rvoir par les,
voies dd d ro it, xonim e étant nulle ^-précipitée &:
vexatoire. . -v;
c-mo o'ia.l
.» *
R ibier accepta les ;offres & fitiuncj réponfe àr.
cet a£te initrumentaire ,.qu’il eft eiîen.tiel; de tr a n s
crire dans fon entier , parce i que c’eft là le liegc:
principal du procès] ô . J 'ir , e.r¡î.:-îu , J
- n Lequeldit.Ribier a/aifcrcporife<j qu’ilé ilp r c t
». de recevoir.ladite ilonime ¡d&
vr.es 3 io ls » 9 deniers cnoncée en ladite obligation, laquelle
» il ne peut remettre quanDiii préfent^, attendu
' »•.. qu’il l’a remife entre! lek mains!:de;M^.:;;E/lopÿ^
n D efvigncts, Procureur,ipourfaird
n fuites ordinaires 'audit' Viahard & ¡{k fenime ; '
» que quoiqu’il foit vrai.que ledit’M e. Defvignets .
» ait procédé ou fait procéder, aj.nli^qu’il 3 ap^ris^
». par la voie .extraordinaire , Len: faiiÀnttjla Jàiiiçj
» réelle desrfonds dudit,.Vichnrd^ÔCj ià fe.ii/mc:) il ;
v déclare que jamais il ne luiaidomté auçuh ordre, ;
» qu’en conléquence il le déjav'oue- 'dans ladite
» pou yfuite de faijie■
■
réelle■
: que, quant .aux, a$es .
» de 'com m andem ent, laifie mob.iliaireck, au.tr.es \
» procès verbaux' , ioit dc-.-rebellion ou de.diicù(■
n fion, portant carence de meubles, s’il y enadefaits
». contre ledit Vichard ¿k fa fem m e, il entend êire
�(V
»vJpayé'-ckP montrant des frais d ’iceux ,/ fu iv a n tla '
«OûxÉilqvÜ! cti) fera. f i i lz \ xdrrmTe-irais /ordinaires
7J * f<£ ü L C %,* ^ -41
v tut
in.y
n L i. VJ ;
», w tix ' qui 1<mmfuïvi& ? " il en ■
déchhrgc ■
ledit *V i y>- àhitrd &foife.mmé T attendu qu’il n’a donné.au*-?
îv<4tiln *ofd-t>8 ;ni -poirvoir~à. P.rocureuri jii..■
H.uiilïer.
» pour faire cette pourfuite , & a reçu ladite,fom^r
niéide'a8'ÿaliirùs-j~ fo ls 9 idemersy<dosit quiti-r\tance^ quant à ladite: fomme de 12 liv. i 6 fols.
»>-'<3'deniers ^a déc|4ré'-ne jVpuloir la;recevoir fous >
}■
> les proteilations par lui ci-devaiit faites. » . v ’
; E t RifôVcr a f»gf>é 'fë i r ép o n fe ^ a n t fur l’originail!'q^e''i<iFila':ccipief.-de. cc;'proc<is' verbal qui cil <
produite au proçbs.
'
• En conféquence de cette acceptation , de la dé-chargé kl61R ibler ^,’& de ktiréferve par luiihiitepôur leS' frais-de pourfuites mobiliâires^ les Huif-:?
iiers^ont! frètire les 'i n . liv j..i6. fols ^ dent auxoffres Bc'pàyer lè'm ontant .de:ces. frais auifi-tôt"
après; la taxe', 'àüaüpren'iierc rpquifition.de R ibier •
& lors Jde 4 a-reitiiib-de l’obligation y.<!k ils o n t. fait-*
poiji*-1VichâVd & 'ia.fôhinie.Jtoiitcs réfer.ves &>■
prôt'cilatioiW^ & tnôtamnient de Je poutxoirpdur
ja ire ordonner la radiation de la JaiJie réelle
A V ï d û m e n t faite Jur- leurs- immeubles., & de •
répéter- toutes 'pertes ^ frais, déjiens^ dommages, :
intérêts Contre ’quiIcjl' airtfi ■qh\Lappartiendra. : •:
» Et aVons du tout fait & rédige, le preient
» proviès'verbal ledit jour ôc an en prêjhicc dud.
�» R ibier, auquel parlant à fa perfonnc nous avons
. délivré Qopic .du p réicn t..»
,
, ¡}
3 ' C;et .a&e:, le plus authentique qiii fut-, jamais,,
k , R1us à _l’abri* de . la iulpicion , puisqu’il cil fait
en préjènce de R i b i e r 6c ligné de lui tant fur
l’original que iur la copie, mettoic à. découvert
toute la,manœuvre dont Y ich ard croit y iftitae ;
R ib ie r, icrçanciçr.de'robligfitiori d e -2.87; }iy.de-*
iiroic jêtre payé., & cela etqiç .juiie , .mais, il çtoiç
bien éloigne de vouloir .ruiner fon débiteur, de
lui faire, fans intérêt perfoniiel, pour 1,500 liv. de
fraisait 0.3 joùçs7j c x to itià jl’pWjvragç de- l’argent
praticien,'ci ,qui ilî(avpit.eu,la foibleilè çl'e çonfieç
ion titre; •q,ui-çh^çhoicune proie.Trj& qui voyant
dans Vichard un malheureux’ payiàn iàns défenfe,
cr.oypir ppuvoir impunément ab.uier des fo rc e s
juridiques' pour'lq'.dépquiller de toute -ià .lortune.
t , Ce pr,qcès verbal tut pour .lui un, .coup, tle;four
d re , il appella R ibier, lui reprochaJbn. défaveu,
le menaça 6i faillit même en venir aux voies de
lait pour l’en punir, Ic Cabarecier fut d’abord in~
ilexi.ble, &• dan$ les premiers .monients il réitéra
cent fois cç .déiàvcu dans. les •places. publiques
ik ailleurs, en, préfcnce -d’une toule d’honnétes
gen s, qui feroient.tous en état d’attefter ce fair,
ii la preuve'ppijyoit en ctrç ‘ortjonpée. *
M ais bientpç il devint plus com plaifant, <Sc
* I / A p p e l l a n t a offert la
preuve dé c e fait e n caufe prin
77°*
e i p a l c par les écritures du ^ Mars i
�J
$6G
•
■
'
8
à* l’abri Tans doute d’une excellente contre-lettre,
dont le Praticien Compromis eut foin de le nlunîr ;,p dur le Satisfaire, on" le ‘ vit! prefqu’anÎfi-tôt
prêter foriinbrii -à:i un'langage tdui'contraire, &
lbuteriir avec chaleur cétte même procédure qu’il
venoit de défaÿouer. < ’
:
'" Les faits qui ont accompagné cette variation
fubite vont paroître bien fmguliers,' ils font mê
me inexplicables ; : V ichard du moins né fc per
mettra pas de les expliquer, il' en laifle le loin
à fes lecteurs.
Lbrfque Vichàrd fit des offres réelles à R ib ie r,
il avoir déjà formé dppbiitiçm1à la iaifiè réelU
à fin d’annulier ; il fe pourvut donct contre cette
faifie réelle fous un double point de v u e , ôc il en
demanda la radiation, foit comme nulle , foit en
conféquence de la décharge générale' qui lui en avoit
été donnée par R ibier par le procès verbal du
18 Décembre.
Cette demande fut formée à R ibier par ex
ploit du 2.8-du même m ois, & cet* exploit étoit
accompagné d’une nouvelle copie du procès ver
bal d’offres du 18. R ibier avoit eu deja bien du
temps pour méditer fur ce procès verbal & pour
en ientir les confcquences ; il ne lui étoit pas venu
en idée alors d’imaginer que tout ce qu’il con*
tenoit étoit l’effet de lafu rp rife, que les Huifïiers
l’avoient trompé , & qu’il avoit ligne fans favoir
ligner ; lorfqu’on lui remit de nouveau ce procès
verbal fous les yeux, il garda encore le plus pro-
�i r"
9
vforid‘ filence 'fur cette prétendue Îlirprife, fur :fqn
ignorance dâns l’àrt d’écrire 8c fur Pabus quelles
'H uifliers avôient tait déTæ main.rli~ ?S
'■
R ib ie r fit*plus, il défendit par ûrieires-longue
requête, fignifiée le 27 Janvier, à la demande en
' radiation’ de la iaifie réelle qui étoit'principale~ment farid'ée fù r ce-probes verbal 'd’offres’ & i qui
-e n é to it accc/mpagnée, & il fe contenta' de difc
*cuter tres-arriplement les- difierentës nullités oppofées par .Vichard contre la faifie réelle,'fans
faire la plus légère mention ’dé^cette pîece1èlïïh" ‘-tielle ,:;rti :désJmotifs quli} p ouvait avoir pbûr la
-‘■ïêtulèiO0 ' ;,‘fn
■
* 1{: 37 ^ i-’ lu- 'J 1 ^ " ?
: C e ne fut q u e le 13; Février Tuivarit que Ton
vit éclore fubitement une procuration donnée par
R ibier:, pôrtàntpoiivoir au Procureur fondé, dont
^le nom êil"eivblàncL de iaifir réellement & faire
■
;,vêndrerpar décret les'1domaines du Bout & des
Chanteiliers , & 'la maifon fi tu ce en la V ille de
M oulins, appartenants à Vichard & fa femme, le
tout pour Te procurer le paiement de la modique
Tomme de 2-87 liv.1portée en l’obligation du 2,
Juin précédent.
’
i
Cette procuration efl datée du 7 N o vem b re,
elle' eftpàr conféquenr antérieure à la iàifié réelle,
& par une prévoyancd finguliere que l’on ne peut
s’cmpccher d ’adm irerV’on a foin de ftipuler que
R ibier a déclaré ne fa voir Jigner, comme ii l’on
avoit voulu écarter d’avance les indti&ions que
■
' l’on pourroit "tirer d e:*la, fignatüre ' qu’il devoit
B
•
j
>
*
r
f
y
’
•
�j >6$
io
donner un mois après, en acceptant les offres de
fon débiteur & en défavouant la faifie réelle.
Cette premiere procuration a été accompagnée
d’une fécondé en date du 1 7 Janvier, par laquelle
R ib ier paroît donner pouvoir à M e. E ftopy
D efvignets de continuer d’occuper pour lui dans
la pourfuite de la faifie réelle, & fur la deman
de en radiation & en nullité de V ichard & fa
fem m e, & fur-tout d’oppofer tous les moyens
qu’il croira convenables contre le procès verbal
. d ’offres du 18 Décembre.
C et aStc ie termine par faire déclarer à R ibier
qu’il ne fait ni lire ni écrire, mais qu’il forme
lèulement quelques lettres, & que dans beaucoup
d’a&es qu’il a pailes, dans les uns il a préféré
de former ces lettres
dans d’autres il a pré
féré de déclarer ne favoir figner ; 6c que s’il a for
mé des lettres dans le procès verbal du 18 D é
cembre , c’efl: parce que les Huiifiers lui mirent
de großes lettres devant les yeux formant fo n nom.
E t à l’inftant, par,une maladreife fans exem ple,,
qui dévoile toute la manœuvre & qui contrédit
la prétendue im péritie, il dit qu’il va tacher d ’i
miter ces prétendues groifes lettres que lui ont
montre les Huiifiers pour en former fon nom , &C
en effet dans le meme ,inilant fa mémoire lui four
nit fidellcmcnt l’image de ces lettres que lui ont
préfentées les Huiifiers fix femaincs auparavant,
& il (igné fon nom au bas de cette procuration
avec des cara&crcs parfaitement reflemblants à
�11
ceux qu’il avoit tracés le 18 Décembre au bas de
l’original & de la copie du procès verbal d’offres.
Q u o i! R ibier ne lait pas figner, '& i l figne au1
bas de cettè procuration !
•
Il a fignédàns beaucoup d’autres ailes fans avoir
de maîtres , fans qu’on lui ait montré de groîles
lettres pour les im iter;. & il n’a pu ligner le 18
Décembre l’original & la copie de ce procès ver
bal qu ’à l’aide de ces groilès lettres mifes ious
fes yeux.
Il n’ a vu ces groilès lettres qu’un inftant le 18
Décembre , & ‘il les imite parfaitement à ‘l’aide d e :
fa mémoire le 1 7 Janvier.
Q u e d’inconféquences ! que d’abfurdités ! ce
pendant à l’aide de ces abfurdités & de quelques
autres , telles que la prétendue lézion qu’éprouvoit .Tardent A uteur de la iaiiie réelle, en ce qu’ il
perdoit'le fruit de 2,3 jours de vexation qu’il éva-lue à plus de i j o o liv. Il s’eft pourvu en la. Chan
cellerie du Palais à Paris le 27 Février 1770 , où
il a obtenu des lettres de reicilion contre le défaveu
& la décharge fouferite par Ribier dan$ le procès
verbal d’offres du 18 Décembre.
O n obtient tout en Chancellerie, & ces lettres
étoient fans coniéquence , cependant elles ont fait
impreiïion aux premiers Ju ges, ils ont cru y. voir
l’empreinte de la volonté fou veraine, 6c ils le ionc
docilement conformés à leur contexte, qu ils ont
pris pour bafe de leur déciiion)#qui eft conçue en
ces ternies :
B %
�» D ifo n s, fans nous/arrêter aux moyens de nul
lités propofées. par ledit Vicharcl & Gabrielle
T a lo n , :fa/femme, dans lefqiiel^ nous les décla
rons mal fondés, les déboutons d’içeux.,, & fai-,
iànt droit fur les c o n c lu o n s prifes par ledit R i
b ier, -ayant égard, aux lettres de refcijion par lui
■obtenues le y Février ly y o , nous ayons icellesentérinées ,, féquémment avons remis-les Par
ties au m ê ^ ç ;& fernblablcj état qu’elles étoient
avant le procès verbal d’offres du 18 Décembre
176 9 j relativement aux déclarations portées
;audit a&e fous, le nom dudit l,lib iç r, delquelles
nous l’avons déchargé ; ordonnons ;qne j<^.fufdit;
•procès;'verbal'’ d’offres au.rai,feulement ibji effet
quant aux fommes de 287 liv*. 2 f 9 d. d’une,
p art, 6c.de celle de i x liv. 16T. ^.d. d’autre,
i icelles reçues par le^it R ib ier :
fans: npus^/r-,,
: rèter auxd. offres portées an fuient procès vçrbalr
lefquelles; nous avons; déclarées. infuffcfantps ,
comme ;nc remplifïànt pas toutes les créances
dudit R ibier fans avoir,égard à .l’oppofuion,
. formée par ledit; Vichard & l^. femnyej, ;,de faquelle nous les avons d é b o u té ,.periimtpns^aud.
Ribier de commuer f i s pouijîiites : condamnons
ledit V id ia rd '& fa femme aux dépens ,* 6c au
-. coût &: levée de nptre ipréfente Sentence., .qui
j fera exécutée^par proviiîon aux charges,de J’O rt donnance.
i
:r / ;
: .j : - ,
• C e tte Sentence a été rendue le 4. A o û t 1 7 7 1 ,
expédiée précipitam m ent le mêm e j o u r , fig n ifiée'
�i 3,
à Procureur le <$, & à domicile Je 6 , avec com
mandement d’y fatisfaire.
a‘ Ce commandement n’eil: pas la pie£‘e la moins
curîeufe de cette affaire,' en voicî. l(b termes :
r
" » E t en vertu de ladite Sent'étice', j’afàuclit V i» chardÔc a ladite T a lo n , fa femriiè , audit domir
« cile, & parlant comme devant, fait comman» demént de par le'R o i & de Juftice' de fatidfai--» ' r é ' .payer'entre.le? niaiks 'de Me.'EJlopy] JQèf;’
» vipficts\^ ro cü rèu r es! J'ui‘iidi£tiôns Hé M ou linsv*^
I
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p 1
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» le réftant des créances q u ils d oiven t audit L a u - ’
« ,rent K il^ ier5 en rem bleie? dépens adjugés par là
»' S e n te n ce -¿ü d itjo îié*4 du préfentr h fo is , ç o ilt ,&t
n ' levée lde ïa m è m e ‘ b en te ri? c.''coûïÜie ’le ttiiit ayant 1
» a quoi de' iàtisfaire ledit Vichàrd! & fàv rcmme
Jairç pre
» prix èn "vràvenafn êtie 'Vfiféyéntre. Us mdins a
. T| f • I #; /| iJ'ïl
% HjJ hj. I . i 'i . VI. =/ 1J . !.i
: •' 1.
n M e. h lîo p u Udfvignets. ». . , ,
. *
. , ,
i1
Ï-Sfl-Sj M<?/Eft®yi3ervign¥ti ;cjifî^
eii1partie' au procès f îè W<fm2‘do rlitlièV 'elï' “¿rfjt&Vè *
de l^ÿplpÎV ¿‘màis-ï’ïl m \ ^ C
y m :& W e !:E P p y \
DePyigncis . s’i l ’ éfl >da quelque,/c h d fc , c Ît à M e . 1
E iîo V v "ü éfviàficis’^f côw VjSP
Vp
D cfvicn cts, y o u ï'lé prix '■m brminam ’étr'e-*vcrfP
j
P
. M ijî : 1 c- f: >. .-i, V ' . ; i .
.
dansJcs mains.
�Q uoi q in l en f o i t , Vichard & fa femme n’avoient garde dç fatis/aire M e .E ilo p y , on lçs fommoit de.,payer*Îa ¡créance due à k ib iè r , & cette
créance ne fubfiftpit plus ; la Sentence conftate
qu’elle étoitacquittée : fi o n :les fommoit de payer
des frais., il n’y en avoit point de liquidés , & le
paiement en étoit im poilible : a in fi, d’un côté on
exigeoit d’eux un paiement abfolument impoifible,
& de l’autre on proteftoit à défaut de ce paiement
dç cqntinuer fans retard la ïàifie réelle , &: de faire
v.endre tous les biens faifis; 6c en effet, des le 9
A o û t M e . Eftopy fe difpofo.it h. faire la féconde
criée, qui ^uroit encore fait dans un feul jour ü n ?
objet; de 14.1 rôles Tans les minutes originales ^
lorfque Vichard & fa femme arrêtèrent fes projets
par un appel qu’ils inteqetterent le 8 A o û t, veille
de ce ^Dimanche deftiné à la fecoride criée ,' duNà
renou^eller la premiere.
• V ich ard <Sc fa femme refpirent depuis ce mo
ment a l’ombre de cet appel &c de l’autorité de
la C ou r qui cil devenue l’arbitre ,de leur fort ; ils
li^bitçnt aujourd’hui fans crainte dans leurs foyefs; '
ils onÇjdeu.x fqis,depuis moiilbnnc tranquillement
les champs que. leur ont tranfmis leurs a ïe u x , & '
ils les cultivent journellement avec des mains îabprieufes &. pures^dans.cette ferme confiance que j
leur-jrifpire l(équité Çipxéme de la C ou r aüguftc.
qui entend leurs plaintes, qu’ils les cultivent pour •
eux mêmes .& non pour engraiiîèr de leurs dé
pouilles un Praticien avid e, qui a jetté un dévolu
�M
. iur leurs deux domaines ôc leur maifon , {mi exige
avec une hardieiîè ciniquei ¿jue le prix en J oirvcije
tout entier dansfe s mains ,
qiii ne craint pas de
protéfter dans un a&e authentiqbe qu’il ne veut
quitter prifè que lorfqu’il aura épuiie leur fubftanc e , &: dévoré toute leur fortune.1 x
N o n mijfura cutem n iji plena cruoris hirudo.
:
M O Y E N S .
■
>
L a Sentence dont efl appel a fait à Vichard ôc
ïà femme la double injuftice d’admettre les let
tres de refeifion obtenues par le Praticien E flopy,
fous le nom de R ibier ,, contre le déiàveu & la
'décharge de la faille réelle contenus au procès ver
bal du 1 8 Décembre,, ôçderejetter tous lés moyens
de iiuliité qu’ils oppofoient contre cette procédure.
Cette double injuftice p'réfente deüxrpoirûs de
• vue , fous lefquels il devient néceiîàire de difeuter
le mal jugé de cette Sentence, l’un principal ôc
* Tàutré fubiidiaire.
i
^ .
:I~ f Ilsdém ontreront en premier lieu'queladécharge
' contenuè au procès verbâl du 18 Décembre devoit feule déterminer la décifion des premiers Jug e s , parce qu’il efl de maxime qu’un créancier qui
reçoit,le montant de fa c r é a n c e , q u i décharge
Ton débiteur de telle ou telle pourfuite
le
libéré iàns retour , ce qui devenoit d’autant plus
rigoureux dans la thefe particulière, qu‘’il s a g ii1
foit d’une pourfuite odieufe 6c la plus vexatoire
�•: ■
a ~ ■r *>
'^r'^
•"i l) y ■ ■' ' il '
t ¿ o n d e s T ribu nau ^ e^ iT eat jam ais fpurrii iVxem jrfe.
j,. S u b fîd ia ire n ten t, 'én.m ettanta fe c a rt ce prem ier
m o y e n , ilsecaturoVent: que les nùllites-ians n om bre
qu i v ic p ie n t Jà faifie,. réelle nè pérm êttoien t pas
de la c o n f i r m e r : ,& d ’én ord on n er la con tinuation.
i.::»; ; / , L j ;• , 7 . .
' j . f r >7^. Ç i\VA p R i n r C I P A L . .
.5mT/j u,t
.
• .
A rrêtons-nouç'iurini^ nt à-l’époque du 18 Dé
cembre , jour des offres réelles faites par les A p - '-pellants'àR ibier.. v rif.
;r.. _ t
.... Ils lui roffrent.ïe pHtocmal ;cÎe"ià creançe¿qui-pft
de 2:87.liy - 3 | f _9-fl,'|^^ilfr:a1çcçp,te- 1
’•
Ils lui offrent i i . l i v . i,Ô £ 3 d.tpoùrles frais 3 e
.. .difcuifion
mobiliaire
„.il confent de., lès ;recevoir
. < . . " i l *.
.i. j ■
: I ./ , • w i.t . i ... .
•,
. ,après la taxe, JC * .. ,ji .y ,
;
(,• , . • :
, ¡ Ils fç plaignent de la faille réelle ôc-des prôcé. f dures monftrueuies^qui l’ont,fuiviç : il annoncé à
fes débiteurs qu’ il connoît ces pôurfiiitcs, qu’il a
été inftruit ppr la voie publique qu’elles ont été
faites par M e. D cfvig n ets, mai? que c’cft contre
ion intention , qu’il les défav.oW ,. 6c qu’il les en
décharge expreiiém ent, 6c il ligne cette décharge
fur l’original 6c fur la copie du prbcès-verbal.
En conféquence deqette décharge, de cette main
levée authentique de .la faifie réelle, les A p p el
lants en demandant la radiation, 6c il cil évident
qu’avec ceta & c à la main cette radiation ne pouvoit :pas leur, être refufee , fpuiiqu il contenoit la
quittance, de ,1a crcan<ie,' 6c. la n.ain-leyée ou la
décharge dé laiàiiie réelle de la part du créancier.
Si
�.
T7
Si dôhc.rdânsTefpece cette radiation a été.rejet
t e partles prèm iers J u g e s , ce n’a fp u ,être q u e 'p a r
l ’effet des Içttfes de refcifïon* obwiHieiiXbys-le rtom
de R ib ie r ,r g u i o n t ¡été entérinées p a t la §énten;çe
d'ont eft appel.
. 5 '
•' \ j ^ ~ ,-'f ... •
- A in fi toute I9. queflion fe réduit à favoir f i j ’a&e
4 u> i;8 'Deçem bre étoirTuicèptib!^ d-e/jxfciiipn
il les lettr.es onç été obtenuesTur'dep ^motifs- lé
gitimés. .i3 ; .r7:,;
*.” • j.o:i ^
• Remittendbus acliones fu a s aandus non ejl regrejjiis ; c ’eft un principe -tiré des-JLoj* romaines,
au -digeffce■
_de ■œàilitio edîcl'p. E t ;cç}principe i,, qui
n’efl.que l’expreifionidu bon fens.,(pàrq£ç iifnaltui
rel * qu’il fèrnbloit préiqu’miitile déj ririférer dLans
les L o ix poiîtives.
'
(
A ,!v ,
\
^
Jle/niuentibus açlionesïfiids. : çet,aâc d.u j 8 JDé^
cembrc cil une décharge authentique-de Ja iaifie
réelle; donnéej.par. û n c r é ariçier'à. fon.-.débitai r ,
le départ, le défi île ment d’une a£Hon, & d \irifi:ac?
tion défavorable , odieufepar elle-même , & plus
odieufe encore dans la .circonftance -particulière
que dans toute autre par la modicité-de Ton obj’er,,
par la précipitation avec laquelle elle a étéjourd.ie-,
par les procédures fruftratoires dont elle a été fiir-i
chargée , & parla ruine totale du débiteur qui en
étoit la fuite in é v ita b le ,■& q u e ;R ib ie rjn ’auroit puf
cauier fans, remords/
a
i ^
N o n dandus ejl rcgrejjiis. R ib ie r en donnant:
cette d éch arge, ce d éiift'em en t, s’eft donc exclu
to u t r e t o u r , toute efpece de reilitution<.contre la
C
�\S]
j'uiltce où la grâce qu’il faifoic-H "foh débiteur.
i; E t cètfc riiàKïnie'tfe trouve ¿oiïfacréê £>âi* Uh A r
rêt-du x<b M ars
13 ',:ic:icépar-'Baiîlt;r tôme pre-4
iriierV livré Ify 'tiW e '^ ë llà p ié r e ^ -, par'-lequei ürt
Appellant qui s’écoit déiiilé de ion appel, &? a'voie
enfuite obtenu des lettres royaux contre Ton défi fte nïè n t",'J fdt^dcôla ré- ~non:-pece Vâblc"Jd ans iW de-1
n àriâe M n - ^ ’êriterinc'nîéhc dbcês lettrées; i
M ais ce n’eft pas feulement parce que c’eft'ici
une déchargé, un départ, une remife d’adion que
llib ier^ o u le Praticien qui,agit1fous ion-nom , n’à
pas' dti ôtre ‘âjdmis à la rcfctlion ; cétte'-faveur dâ
lâ'Jlor,1 qiie^jDn^fte oorinoiilbit chez les RqmainS
qûè--» io n s;1<2 :titr6'd e bcn'fjficiünis pom hnnoncei?
que c’étoit une grâce, un bienfait contraire au droit
comrriüri ,*n-â-pà$»'éfc- introduite polir toutes fortes
dc:rriatkrÎ 5s.-î-,p;Ji:';i:i•,j< • , ; L:l■
, •••••’ ■1 ■'''
f rNôiï'iLifu)* tejlitiitiôi. .odiofa ,; dit l’ Auteuridti
traité dû l à rfcftiuuion-én‘ emicr ^ pagè 9 0 1., re
lativement iautfi prcfùriptions,
ailleurs , page
899 ^- o n y '4 'it'icncore cette;'prjécïcuic maxime ,’
r/ftiéiïi&l'etïaihvninonbus nqn.dam n.ad id 'quod
potuU 'î n ■
odiiïhi ¿¡venus ^uhm in'w ùliïam x-.tjus
tmdit. ' i!'J
1 '■ r
Ces maximes; femblent avoir été créées pour
le ois particulier qui ^nonç-diviic : 'la-faiiie réeüo
qui eil une dépofleflion f orcée y -qui- entraîne la
ruine' irifailUblc duliaiii', qui perd le débiteur fans
enrichir le Créancier, potiàs 111 odiuin airerius quàm
in utilitatcni ajus. raidit: c ’ cft dans to\ite. Ténergic
�S>>
¿ 9.
du term Q^r&flitutrç o d i o j a p rév u e ,p a r . cet 'A u
teur , ^ou plutôt«,c’çftji^né seilkùtiùiUn^lle.foi^jpJtfs
pdieufe>que[
e ffe & s fe p ^ ig
Çriptiary p o u r laquelle, iI ^ q v,oque;}CjCCte
ôc la !p oie enr principe.;., •>vjrr:nr: zo sjjo vnîrrom
. V e u t-o n au furplu^ Tuppofer pour 'un» inftant
que* la refciiioi^ foie ad m ijjiblç : c e n tre Gun. défilïc^
m ent quelconquq
c o n tre u n d^fiilçm ent, cl-une
faifie réelle Ja p iusrodieufe qui fu t mmais,, :il, .faut
d u moins avoir des m o tifs, ~oc d esm otifs.bien pujd-.
fants fans doute pour anéantir un.^a&e fait par un,
m a jeu r, deux fois; fignç p^n|ùi-njem e
parjdçyift
O flicie rs pub.liçs, qui en. a u g m ç ^ ^ i ^ aut^ epuçit^
O r , dc-.tous l
e
s
|
ccttKS
de refciiion’, obtenueis lous le n om d c tK ib ic rj il
iVv en a pas Un feu l;q u i:n e. fo it.u n p fauflete dé--,
* J
, f
m- r • • ot 'i * i' *^1 ~'1- - ri • ;W-^rîx
montrée, dans le. tau , .p^^aansjj^drpip.
du principe, k p lo t errçn £ ' g , P '
’ y i ’w o i
L e prem ier de -cesrnVqtys. conulte/ii .prutçn^fpv
que llib ie r ne fait ni lire, ni é crire , & q u e lle s
H u iiliers ont furpris fa^fignature cri l u ^ p n t p n t
de groiTes lettres qu’ils lu f o n t£ a itf.im ite iL lMnrr
/j ■
1
- .1 , 1 1. j
. ‘î ji - \ t-- *jri«
U n p o u rro it le c o n t e n t e r ^ r^ Q tfd re a cei^abfurdes im putations que la iignatùr.e dp;ftibi,çr étoix
fo rt peu néceflàire dans ce proebs verb al, que cellq
des, H u iiïic rs corçilatoit jufqu’à-l’inicriinion.de fau^x
. .i’ i : r - .1 '-i .* tjill.t/
- -i Iht UiM
l authenticite des faits qui .y £toient con ten u s.,,« :
; •( * ,
•'KW/r
V/î «sO.'Jj:».* ' i*1 v ' J *
que quand deux O fficiers s accorden t ppyr et/e
I î I
- ■ i,
i I !;() . r>., }J I v,r
fau ffa ircs, ce n eil pas rpour faire yn faux în im le,
6 c fans lequel leur a£Ve peut produire Ton .effet. .
C i"
�io
' 1 M ais quelqüe décifive que ioit cette réponiè
elle eft trop générale ,- ôc les Appellants ne ieroient
pas :íatisfálts.,‘; s’ils n’avoient dàns les circon£
tancés particulières de cette affaire la preuve dé
montrée que ce premier m otif des Lettres’ de refcifion e iM ’impoiKire la plus groiïiere qu’un plai
deur aux abdis'ait jamais pu le permettre.
•^Ribierj* dit-on , ne fait ni lire ni écrire, &c il
á figiré ; dans ftoiis; les aéleS qu’il (a paifé dans ia
vie'^' îr JJon n’en excepte cette fameufe procuration
du 7 Novem bre , qui a paru pour fa premiere
fois- le i 3 Février , dans laquelle , par une précaütiôn qt/i tient un peu trop de l’efprit prophé
tique, on lui fait déclarer qu’il ne fait figner.
T Ribier ne favo.it pas figner le 7 N o vem b re,
mais il figne le 2 7 Janvier fuivant, & il déclare
liü-même fclans1fa fécónde procuration datée de ce
jour 27 Janvier qu’il a figné dans. une foule d’autrçs aáes ; s’il a. ligné tant !de fois , il favoit donc
figner ? s’il fivoit ligner, il eft donc un impoileur ?
I l ajoute que J é s H utfficrs le furp iiren t en lui
m ontrant dô g folies lettres qui fôrm oiént io n nom /
qu’ils lui, firent imitó*. ,
•!
M ais fi le i'S Décem bre il n’a pu figner qu’a
l’aide de ces'grofles,lettres qu’on lui montroit ÔC
qu’on' lui fàifdit imiter , comment a-t-il pu ligner'
dans7tant ifautres^a&es b íi’pcrfónñe né fiïi traçoit1
de grottes lettres
ou il fignoitJfans maître'?
n’eft-ce pas la'le'co m b le de l’impofture Ôc de la
m»'il-adreile}
•
■
•
�ir
C e n’eft pas tout encore : s’il etoit vrai que cet
hom m e, qui avoit figné tant de fois fans maître ôc
fa,ns qu’on lui eût montré de groflès lettres à imiter,'
n’eut 'pu figner le 18 Décembre qu’à l aide de cette
imitation, comment feroit-il polfible que le 27 Jan
vier il eût p u , ie u l, & après une premiere leçon
d ’un inftant, donnée fix fèmaines auparavant, tra
cer les mêmes lettres de la même maniéré dans la
même foVme & dans le même ordre ? ;
'
Il n’y a point d’homme, quelqu’exerce qu’il /bit,
quelque fure que foit fà mémoire,qui après 4voir vu
un in ilan t, pour la premiere fois fix caracteres'inconnus , puiiîe fix fèmaines après iè les.peindre fi-*
delemènt 6c les tracer fur le papier dans le même
ordre , dans la même forme qu’ils lui ont été préientés ; &c ce dernier trait acheve de démafquer
l’impofture.
..
,, .
*
M a is que faut il de plus p o ù rd é m o n tre rla fa u fieté de cette prétendue fu rp rife, d on t on éxcipe
au jou rd ’ hui , que la conduite de R ib ie r lors d e '
ce procès verbal & poftérieurem ent à. cet aclé ?
I l reçoit alors l ’argent q u ’onJ fui o ffre, i l a c - '
cepte les o ffr e s , parce q u ’elles lui pàroiiîent iùffi.
fàn tes; il ne prétendra pas fans doute q u ’il, y ait
eu de la furprife dans cette a cce p ta tio n , il a bien
vu des efpeces , 1 il a bien fènti qu’il les.co m p to ir,
qu ’il les t o u c h o it , qu’ il le, les rendoit propres, &c
il efl évid en t qu’ il fe feroit bien gardé de lé 'fa ir e ,'
s’il avo it regardé ces offres com ir.e in fu ffilàn tès,
& fi fon intention n’avoit pa^ été telle q u e lle c il
/
�ax
rédigée , dans ce. 'procès v e rb a l, de toucher Ton
principal, de fqi.re i&xerl.cs frais de difcuifion mobiliairs.;&
décharger d,e la.fâifie réeller
, ..r t
Si d’ailleurs il y avoit eu quelque furprife de
pratiquée contre lui lors de la réda&iop de ce
procès v e rb a l, il n’auroit pas manqué l’inftant d’a
près, de fe tranfporter chez un N otaire , de proteiïer contre cette,Curprjiq , 6c de montrer par-là
combien ce procès verbal étoic contraire à ces vraies,
intentions; mais tout au contraire Ribier voit clorre
ce procès-verbal enJa prejènce , il en reçoit la co
pie v il la montre à tout venant, il cric luirmêmc
à la'vexation dans les places, publiques "; 6c lo r f
que le Praticien Efltopy lui reproche fon dë.iàveu ,
le menace de la. voix & du gefte, il le réitéré cent
6c cent fois, 6c lui reproche à lui-même l’abus qu’il
a fait de fon nom.
. T o u t le mois de Décem breTe paffë a in fi, f^ns
que R ib ie r' ait encore conçu la plus legere idée de
la furprïlç qu’on lui a faite ; Vichard fignific de
rcchcf le procès verbal du 18 D écem bre, il en fait
le principal titre de fa demandc:en radiation ; R ibicr voit de nouveau ce-procès v e rb a l, il examine,
cette demande*, il ÿ defend ; oppofe-t-il la fur
prife, le fa u x , Terreur, l’abus de fa iignature?
rien de tout cela , il ddeute des nullités , il garde .
ld plus: profond filcnce lu r cette piece importante,
6c fur. tous ¿es moyens dc fraude nés depuis d a n s
le s méditations d’une, chicane o b fa ir e , OC d’une
rûauyaife foi profondément réfléchie.
�■fy/
.
a
3,
.
Si jamais cependantia-veVitéiè'décëtë^c^il; dans
les premiers moments!, ^ c’eftïd&rts^’i'nftarlt niêrhè
‘que l’Homme tromp.é fe plaint* à' to ü tc e q ü i^ é ïk
vironn.e contrera iuprife^qu’on; lu i^ a -fa ir e 0qu’il
protefte contre la fraude 011 l’erreur ', ‘qu’il s’enïprefTe.de révoquer fa fignature ; & les cris publics
de R ibier contre les vexations de fon agent pré
tendu , fa défenfe à ladem anderen radiation? iàns
•ie.plaindre>,r fon »frlence de deux nioi$cfefôntJtôujours des preuves fans répliqué que cette préten
due furprife, imaginée tardivement pour tromper
la religion )du* Prince ,L e ft’la faûireté- la: plus fimpertinante & hla pluslmal-adtoite tque le -a é ii^ o ir
de caulè ait jamais enfanté y
- T .’ :
• ' £ ~:. Si le premier m otif inféré dans les lettres dé- re£ciiion elt' une. fauileté-démontrée, le fécond n^éil
pas plus'exaét r &i .n’étoitpaV.plus'proprtfà-faire réibinder la déihàvgCi au la;main-lcvéc iauthentique de
•la iàifie réelle'donnée par Ribier à fes débiteurs. f
- C e fécond m otif, c’éfh-la léfion que Ribier pré
tend éprouver p^cett& décharge yxn ce-qu elle lui
feroit perdre .toiisrles Jjrais de cette procédure, qui
forment,, eiVil dit , dans cesVlettres : un objet de
plus de i.5oo livres. ■. - ^
, oIcnti non,fît injuria yîious difent les régies de
<lroit xSclc bon ièns: .non iœditur.quifciens lœdituh;
I lib ie r ’¿ om ioiiÎbit la cfaiiie) réelle , il en 'd éch âvge
V ic h a rd &c fa fem m e , «ril-avoit été léie j c ’e ft'q ù ’vl
•aùroit voulu l’être , & fes plaintes contre cette prétfcndue léfton feraientm diicrettes.*
'
-Ji
-
**o v
�04
: O n pourroit en fécond lieu ioutenir avec le plus
gran4 avantage qu’il n’y a jamais de léfion dans la
.décharge que, donne un créancier à ion débiteur
d’une pm triùke'rigoureufe, 6c fur-tout lorfqu’il elt
démontré qije-cette pouriùite eft une vexation icrian
te , faite pour ¡attirer iur ion auteur i ’animadvèrfian
.des L c ix ,; r: «v
zm'' ,
•:
i M ais .ce qui ftranche toute difficulté fur ce point ^
jç?eit que dans:1e fait cette léfion ¡eil une vraie chij^ere, car il >eft confiant au procès que R ibier n’a
•fait dans, toute cette affaire, que prêter ion nom &
io n titre rr6c qu’il rn’a pas débourie une* obole. ;
•• L a preuve de ce fait réfiilte du commandement
du 6 A oût 1 7 7 2 , où -le Praticien Deivignets aniioncé que tout à été fa it &frayé par lu i, que c’eil a
lui , que tout eft dû., 6c ’ iomme en conféquence V i.chard 6c fà femme de le reconnoître pour leur feul
„créancier, 6c de payer à lui-même 7 à défaut duquel
paiçment il fait cette édifiante proteflation de con
tinuer fur le champ la iaifîe réelle y 6c de faire p ro
céder a la vente des biens iaifis , pour le prix en
provenant être verfé dans fes mains. -,
R ib ie r, on le répété:, n’a donc pas débourie une
obole, 6c jufqu’ici la prétendue léfion qu’il invoque
cft iàns objet : efl-elle mieux fondée dans le fu a ir , 6c
doit-il craindre que le Praticien O eivigncts ofe ja
mais répéter contre lui ces 1 ■Joo livres de frais qu’il
a faits a Vichard fous ion nom ?
; -Non fans doute , & c ’cil fiir quoi tout femblc de
voir le raffurcr : d’abord ion défàvcu qui préfente à la
vérité
�*5
.
' vérité les plus finguliers m yfteres, ^mais qui n’en
font pas pour Ribier , & qui n’en feroient peut-ctre
'pas pour- Vichard lui-même, fi la prudence ne lui
défendoit de lever le voile qui les couvre.
: A ce déiàveu ie réunit un fécond m oyen, qui
écarteroit encore toute eipece de répétition de la
part du Praticien Eftopy pour les frais de la faifie
réelle : ce moyen eft puife dans I a&e même du 7
N ovem bre, mis au jour le treize Février fuivant.
O n lit dans cette procuration qu’avant de pro
céder a la faifie réelle Ribier entend que l’on
épuiiè la voie de la difeuiïion mobiliaire, qui étoit
d’ailleurs de néceilité abiolue, comme on le verra
dans la fu ite , fur-tout dans la circonftance où il
ne s’agiiîoit que d’une dette très-légere, que la moin
dre diicuiïion mobiliaire pouvoit acquitter.
! O r , c’eft ce que le Praticien Eftopy s’eft bien
gardé de faire; iln ’yavoit pas un fol à gagner dans
une frniplè difeuiïion mobiliaire, il n’auroit pas eu
le plaiiîr de faire groiloyer par fes Scribes une volumineufe faifie réelle , de faire tranfcrire 34 fois
7 4 rôles de grofTe pour les 34. affiches qu’il a faites
au lieu des cinq que permettoit l’Edit des criées
il n’auroit pas fait groiloyer la premiere criée, qui
lui a produit un volume de 241 rôles d’expéditions, il
n’auroit pas eu la riante perfpe&ive de faire encore
groiloyer par la fuite 964 rôles pour les quatre autres
criées, de faire faire cette énorme copie du tout pour
iïgnifier à domicile, qui devoir monter a quatre à cinq
�i 6
cents rôles de minute , & fur-tout de mettre le dé
cret à fa fin , de faire vendre les deux domaines 6c
la maifon faifis, pour le prix en provenant être
verfé dans f i s mains.
Le Praticien E llopy calculoit trop bien pour ne pas
fe ménager cette heureufe aubaine; au lieu de faifir
des méubles, des foin s, des bleds, des beiliaux, il a
adroitement pratiqué un procès verbal de carence ,
par lequel il. a paru conilaté qu’il n’y avoit point de
mobilier fuiceptible de diiculïion, & fu r le champ
il a paile a la iaifie réelle.
Mais c’eil ce même procès verbal de carence qui
le condamne ; ce procès verbal eil un faux , & ce
faux cil: prouvé littéralement par les propres pieces
de l’intim é; en effet après avoir conilaté le 14. N o
vembre qu’il n’y avoit ni meubles’, ni autres objets
mobiliers dans la maifon de. V ichard &c dans, fes
domaines, l’Huiilier Guillet faifit les 16 & i j . du
même m ois, deux jours après, tous les beftiaux,
tant gros que menus, qui fo n t actuellement & qui
garnijj'ent lefdits lieux : ce font les propres expreflions du procès verbal de faifie réelle.
Com m ent pouvoit-il y avoir tant de beiliaux gros
& menus le 16 , s’il y avoit carence le 14 ? & puiique ce jour 1 6 Novem bre cet liu iifier iaiiiiloit
tout ces beiliaux , pourquoi ne pas en faire une fimple faifie mobiliaire , du moins de tous ceux qui 11’étoient pas deilinés au labourage, puifqu’il y en avoit
de gros & de mtnus , lorfque fur-tout cette fimple
iaiiie mobiliaire étoit conforme aux vues du Créan-
�r-.
^7
c ie r, & iuffifoit pour acquitter plufieurs fois une
modique dette de 2.87 livres? car il eft bon de iavoir
que les domaines du Bout 6c des Chantelliers ioiit
iîtués dans un pays de bois & de pacages , où les
beftiaux iont toujours très-nombreux, & forment le
principal revenu des domaines.
Si d’ailleurs ces deux domaines étoient garnis de
beftiaux gros 6c menus au mois de N ovem bre, il
eit d’une coniequencç néceiïaire qu’il y eût des foins
6c des pailles engrangés pour leur nourriture dans le
courant de l’hiver, 6c il n’eft pas poifible qu’il n’y
eut a cette époque ni bleds écoiiés dans les greniers,
ni bleds à ëcofîer dans les granges déftinées pour la
nourriture de Vichard 6c de ia famille.
C e procès verbal du 14 Novembre étoit donc un
faux palpable, 6c démontré tel par les pieces même
de rintim é; la prétendue carence du mobilier n’étoit
qu’un prétexte pour avoir occafion de faire la faifie
réelle ; ce mobilier exiftoit 6c n’a pas été diieuté ; le
Praticien Eftopy ne s’eft donc pas conformé à cette
procuration du 7 Novem bre', dans laquelle il met
toute fa confiance, d’où il réfulte qu’en adoptant
même cette procuration, 6c en mettant à l’écart le
déiaveu , il feroit toujours fans a&ion pour fes frais
contre Ribier , qui auroit à lui reprocher de n’avoir
p a s rempli fes vues, de n’avoir pas littéralement exé
cuté fes pouvoirs, 6c de ne s^être pas contenté d’une
faifie mobiliaire qui devoit fuffire pour lui procurer
le paiement de ia créance.
U n troifieme moyen qui écarte encore les vailles
D i
�r>
2.8
terreurs que pourroit avoir Ribier fur les répétitions
futures du Praticien E llo p y , c ’eit la nullité de toute
fa procédure.
Il eft de principe en matiere de faifie réelle, &
ce principe ne fera furement pas contefté , que
l’Huiffier qui exploite, & le Procureur qui rédige
& pouriuit la faifie réelle font également garants de
leur procédure , & que fi elle fe trouve vicieuiè ils
en perdent l’émolument, & font même dans le cas
de fupporter en vers le créancier toutes les pertes,
frais , dépens, dommages intérêts qui peuvent en
réfulter.
O r les Appellants établiront par la fuite que le
Réda&eur de cette procédure a entaifé dans les prin
cipaux a& es, & notamment dans la faifie réelle une
foule de vices de forme qui la rendent nulle & fans
effet, d’où il faut conclure qu’il ne peut y avoir lieu
a aucune efpece de répétition, ni contre R ibier, au
nom duquel a été ourdie toute cette procédure, ni
contre tout autre.
M ais ce qui femble encore devoir plus raifurer
Ribier contre toute répétition future de la part du
Praticien D eivign ets, c ’eft la nature même de cette
procédure, qui eit la vexation la plus criante qui ait
jamais été dénoncée à la jultice : comment dans
une Cour Souveraine, créée pour réformer les abus
de la procédure , & qui fèmble fur-tout avoir pris a
tache de punir avec la dernière févérité ces dé
prédations voilées des formes juridiques ; le Prati
cien Eitopy oferoit>il jamais répéter 1 500 livres de
�a?
frais qu’il aura faits en 23 jours contre un malheu
reux P a y ia n , fous prétexte de le contraindre au ‘
paiement d’une modique fomme de 287 livres quela
plus foible diicuiïion mobiliaire pouvoir folder ?
c
Difons-le avec confiance, cet avide Praticien ne
fera-t-il pas trop heureux, fi’la ièule peine qu’on lui
im pofe, pour s’être ainfi joué de la Juftice 6c de fes
formes, c’eft de iupporter en ion nom les dépens
de fa propre procédure, de ne la pouvoir répéter con
tre perionne, & de perdre le fruit de fes vexations ?
v Ribier peut donc déformais fe croire en fureté
contre les entreprifes du Praticien qui a abufé de
ion nom ÔC de fon titre pour faire ces 1500 livres
de frais ; fi ju f q u ’ic i il n’a pas débourfé une obole,
comme le conftate le commandement du 6 A oût
1 7 7 2 , il n’en débourfera jamais davantage , 6c il
n’exifte par coniequent à ion égard ni léfion actuel
le , ni léfion future dans la décharge qu’il a donnée
à ion débiteur par le procèsverbal du 18 Décembre.
Si quelqu’un.eft léie , c ’eft uniquement le Prati
cien E fto p y, qui fe trouve privé d’un travail,de 23
•jours, qui aura .en vain occupps une foule de Scri
bes a tranfcrire précipitamment la nijit;-£c le jour tou
tes les pieces de cette énorme procédure, à groiTo.yer la fa ifie réelle, à groiloyerles affichescompofées
■de 7 4 rôles chacune, h en faire,enfuite 34 copies
qui ont dû former un total dé..2 516 rôles mis en
m inute, h'groifoyer la premiere criée compofée de
•24.1 rôles, 6c qui perd fur-tout ce doux efpoir défaire
vendre les deux domaines 6c la maifou de Vichardj,
�3°,
pour le prix en provenant être verfé dans fes mains ;
& de voir ce malheureux & toute fa famille folliciter vainement à ia porte le fecours humiliant de
l’aumône;
R elie a difcuter le troifieme m otif de reicifion
inféré dans les lettres obtenues par Ribier ; ce m otif
confiile à prétendre que les Appellants n’ont pas ac
cepté la décharge contenue au procès verbal du 1 8
'Décembre, & que les Huiiïiers qui ont inftrumenté dans ce procès verbal n’ont pu l’accepter pour eux.
C e dernier m otif n’eft exact ni dans le fait ni
dans. le droit : dafts le fait/p arce qu’il eft établi
par les pièces du procès que Y ich ard & fa femme
nnt accepté cette décharge autant qu’elle pouvoit
Tetre , qu’ils ont manifeité fur ce point leur inten
tion par le fait & par les expreiîions les plus propres
h la conftater, & quele contrat judiciaire étoit formé
longtem ps avant que Ribier eut recours a larefcifion.
En effet, en conféquence de ce procès verbal,
Vichard & fa femme ont formé dès le 28 du même
m o i s de Décem bre une demande en radiation delà
faifie réelle, 6c pourfe còri formerà l’Ordonnance de
* 1 667 , ils ortt accompagné cette demande delà co
pie de ce procès verbal fur lequel elle étoit fondée,
&c dans les concluions de la requête contenant cet•tei dehìiindé^ ris oiit cxprcflémcnt demandé acte dit
'rapport de)]ce' procès verbal de réalifation d'offre
acceptation 'd'icdles & de décharge dudit jour 18
du prêjent mois , ce font les propres expreiîions de
¿cette requête.
•
•• 1
�* V ichard & fa femme pouvoient - ils accepter
plus expreffément &: former le contrat judi
ciaire d’une maniéré plus irrévocable que de deman
der a&e du rapport de ce procès <verbal &; de la
décharge y contenue ? &: n’eil-ce pas mentir con
tre le texte des pieces & en impofèr 'ouvertement
.que d’inférer le défaut d’acceptation de cette déchar
ge pour'motif déterminant des lettres de refcifioir?r
Q uant aux pouvoirs des H uiiiiersquel’on prétend
con teiler, il icroit très-indifférent aux Appellants
de les leur fuppofer plusj.qu moins étendus , puifqu’une décharge fous feing privé adonnée .par R ibier & acceptee par les Appellants , comme l’a été
la décharge contenue, au procès verbal- du i 8 D é
cembre dont ils ont demandé a£Be par requête, pro*
duiroit le même effet que la décharge la plus:au
thentique.
.y ■
il v ■o 1 > ■
>W."
.* Mais c’eil étrangement errer danslle.droit que
de fuppofer que des Huiiïiers qiiï font des protêts,
des offres réelles & une infinité d’autres.aÔes con
curremment avec les-Notaires, n’ont pas. les mêmes
pouvoirs qu’eux -danlce? -fortes d’aâ::s p o iirco n f
tater les dires des Parties, leurs réponfès , .-accepter
ce qui eft avantageux à rceux pour lefquels ils agifi
fè n t, proteltcr contre, ce .qui leur eiî contraire &
donner a tout ç q n e }’ad.efcQAtientj 1a même force
&; la même aitthqçticité^ que fi cet acte éteit revêtu
de la fignature dç deuxNotajres.
S’il y a concurrence dans cette partie entre ces deux
fortes d’Oificiers publics , il.elt d’une conféquence
�3%
.
.
.
,
.
...
•néceiîaire que leur fign ature produife les mêmes
effets aux y E u x -d e h tju ftic e , & donne la m êm e
►force'k tout] c e q iir e ft contenu dans leurs actes;
• ; -Air Îiirplus., comme ou I V déjâobfervé, cette
diicuiiion eft ier purement oiieufe ; la déchrge de
R ibier eft conftatée par un a&e authentique, elle
feroit fous fein gp rivéq u ’elkfièroit également irré
vocable , fur-tout d’après la requête a fin de radia
tio n , par Laquelle les Appellants ont demandé a&e
de cette décharge, d’où il faut conclure que dans
le droit comme dans lé fait ce troifieme m otif n’eft
encore qu’une erreur groiïiere ou une fauiïèté pal
pable,
!
A infi d o n c, ett réfumant cette diicuflion iùr le
mal-jugé principal de la Sentence dont eft appel, il
en réfulte bien clairem ent, en premier lieu, que la
décharge de la faifie réelle fouferite par Ribier dans
le procès verbal du 18 D écem bre n’étoit pas fufceptible de larefcifion, iuivant cette maxime tirée
de la loi quœntur: remirtentibus actiones fu a s y dan-dus non ejl regrejjiis.
En fécond lieu, que quand cette décharge n’auroit pas exclu par fa nature toute idée de rellitution,
les lettres de refcifion obtenues par Ribier étant obrcpticcs & fubrcj)ticcs, n’étant fondées que fur des
motifs démontres faux dans le fait comme dans le
droit, cette décharge du 18 Décem bre reftoit in
take , & devoit par conlequent déterminer les pre
miers Jurçes h prononcer la main-levée ou la décharge
de la faificréellcdcmandécpar Vichard & i a femme.
M ais
�M ais quand les’ Juges dont e il appel auroient pu
m ettre a l’écart ce prem ier m o tif de décifion , pouvoient-ils. du m oins s’em pêcher d’annuller cette iàifie réelle , & de fe déterm iner par les vices fans
n om bre dont elle eil in fe â é e ?
. - r ?■
e
M
a l
-
j u g é
'
s u b s i d i a i r e
.
'
N ullités de la Saijie réelle.
■ r
' •
'
A v a n t d’entrer dans la difcuifion de ces différen
tes n u llités, & de les analyfer en d é ta il, il eil bon
de rappeller par form e de prélim inaires quelques
idées générales , qu ’il ne faut jamais perdre de
vu e dans le cours de cette d ifc u ifio n , telles que
la m odicité de l’objet qui a fervi de prétexte à cette
m o n ilru e.'iè procédure.
L a fauilèté de la prétendue carence du m o b ilie r,
dont la plus légère d iicuilion auroit iiifE pour fo lder la créance.
L a m aniéré précipitée & vexatoire dont cette pro
cédure a été fuivie en preifant les in ila n ts, & en
m ultipliant in utilem en t, & prefque à I’infîni les
a&es les plus coûteux, tels que les affiches com p ofées de 7 4 rôles, répétées juiq u’à 3 4 fois.
E nfin, il ne faut jamais perdre de vue que c’eil
ici une matière de rigueur que les loix fe font plu à
furcharger de formes cmbarraiïïmtes, que toutes
les nullités y font fatales, & que le plus léger vice
entraîne la chute totale de la procédure.
E
�Si après s’&re bien pénétré de ces idées préli
minaires, on fait un examen exa& de cette procé
dure 6c des Loix locales qui ont dû la régir, on
remarque que la coutume de Bourbonnois, aux art.
1 06 6c 1 37 , exige que la faifie réelle foit précé
dée d’une difeuilion m obiliaire, Ôc que dans l’efpece le Praticien Eftopy a négligé cette formalité,
6c a procédé à la faille réelle fans avoir difeuté
le mobilier du débiteur, ce qui forme une premiè
re nullité qui vicie fa procédure.
O n s’attend, relativement a cette nullité, à deux
objc&ions de la part de l’Auteurde la faifie réelle,
l’une de f a it , l’autre de droit : il prétendra dans le
fait qu’il a rempli cette formalité par le procès ver
bal de carence, 6c dans le droit que cette formalité
a été abrogée pour les majeurs par l’Ordonnance
de 1 ^ 9 .
A l’égard du fa it, il a déjà été difeuté ; le pro
cès verbal de carence eft un faux manifefte, puifque deux jours après 011 faifit tous les bejliaux gros
& menus qui gamijjent actuellement les deux do
maines du Bout 6c des Chantclliers. Il exiftoit donc
du mobilier.; o r . i l eft prouvé par l’a&c même
de", prétendus carence qlic ce mobilier n’a pas été
difeuté, donc dans le fait cette formalité 11’a pas été
remplie.
Dans le droit c’eft une queftion fi cette fage
formalité exigée expreflement par le code romain,
6c de tout temps obfervée parmi n o u s, peut
être cenféc abrogée par l’Ordonnancc de 1539
�dans les coutumes que , comme celles du B our.bonnois , en ont une difpofition.particulière ?
• M ais quand dans la thefe générale cette for
malité ne feroit pas de rigueur, peut-o!n.,en dire
de môme dans le cas particulier où nous nous
tro u v o n s, où il s’,agiiîoit de la crpanc.ç la: .plus
m odique, que la moindre faifie, de fruits, ou la
d iic u iîio n d ’une trjcs-ioible^parçicj des beftiaux
pou voient folder.
., . ,
Ce cas a été prévu par Henrys dans fa ques
tion 1 7 du livre .3 ,de fes oeuvres, & par .Bretonnier , fon annotateur
ces; deux Auteurs
s’accordent à dire que quand les fruits de deux
.ou trois années fo n t fujpfants pour le paiement,
F 011 ne doit point fa ijir réellement lefo n d s, & faire
■
vendre les bien suies mineurs. ' ■ j> . ;
E t Bretonnier .ajoute,'; » {cc tempérament efl f i
» équitable q u i l doit avoir lieu pour les majeurs
» aufji-bien que pour Us mineurs, & pour les rir> ches comme pour les pauvres , car c ejl blejfer
» la jujlice aujfirbien que la charité' de fa ijir &
». faire vendre les héritages d- un débiteur, *quand
» les fru its de ces mêmes héritages fo n t Jiijjifants
» pour fitisja ire aux créanciers.
Q u ’a u r o i e n t d ife e s deux Aut eurs , fi au lieu
d’une dette qui ne pouvoir ctre payée que par
les fruits de deux ou trois ans, on leur eut préièntc la iaiiie réelle faite par le Praticien Èftopy
pour une fomme qu’une légère portiorî des fruits
d’une feule année, ou une très-mince partie des
�MJ
'
36
.
beftiau x inutiles au dom aine pou voic fo ld er?
C e cas particulier, nous dira-t-on, n’a pas été
excepté par POrdonnance de 1 5 3 9 , mais, il eit
des loix gravées dans tous, les cœurs honnêtes qui
portent l’empreinte de la nature, qui font plus
facrées encore que celles de nos recueils, & qui
doivent y.fuppléer lorfqu’elles font muettes.
Ces loix de la- nature nous enfeignent qu’il eil
dur , injufte, inhumain de mettre en décret, de
vendre à l ’enchere, de lacérer un malheureux dé
biteur <Sc de le dépouiller de toute fa fo rtu n e,
lorfqu’une portioncule de l'on mobilier auroit fuffi
pour le libérer.
Q ue faut-il de plus pour établir cette première
nullité réfultantc du défaut de difcuilion mobiliaire ? on eil aiîèz- fort quand’ orï a pour foi
H e n ry s, Bretonnier j' la nature, l’équitc ÔC la
raiion.
•
. . . .
Cette première nullité expédiée, la fécondé qui
fe prclente fc puife dans la circonitance que
l’Huiifier G uillet, qui a iouiçrit la failie réelle &c tou
tes les procédures qui l’ont précédée &: fuivie, a mis
a exécution ion propre titre', & av'oit un intérêt-per«
fonnel dans cette procédure.
11 cil dit dans l’obligation du 2 Juin, qui adon
né lieu a la iàifie réelle, qu’il eil dû une iomme de
5 1 livres a l’Huifficr Guillet pour frais qu’il a fait
h V ic h a rd , ce dernier s’oblige pour cette iomme
envers Ilibicr, & ail même inilant Ribier s’oblige
pour la même fomme envers l ’Huiilier Guillet.
�Et ce qu’il eil eifentiel d’obferver, c ’eil que V i
chard s’oblige à payer cette fomme ainfi que le furplus de l’obligation à Ribier le 24. du même mois
de Juin, & Ribier cette fomme à Guillet le même
jour.
D e forte que ces deux obligations, formées par le
même a&e , n’avoient qu’une même fource, un mê'
me terme , de maniere que l’Huiflier Guillet ne de«
voit naturellement être payé de íes .52 liv. par Ribier
que loriqu’il les recevroit lui-même de Vichard.
Lors donc qu’à cette époque du 24. Juin. V i
chard ne fatisfit pas à fon obligation, Ribier ne dut
pas mieux y iatisfaire de ion côté, <5c l’Huiiïier
Guillet étoit encore inconteilablcment fou créancier
loriqu’il a pourfuivi Vichard pour le compte
commun, ceil-à*dire, pour faire payer R ibier, <5c
pour retenir fur le tout les 52 livres qui lui étoient
dus.
O r s’il n’eil pas permis à un Huifïïer d’exploi
ter pour íes parents, s’il ne lui eil pas permis d’ex
ploiter en préfence des parties intéreifées , parce
que les Loix fuppofent que cette préfence pourrait
l’induire à vexation , * il ne peut à plus forte raifon
exploiter pour lui-même , quelque léger que foit
fon intérêt, des que cet intérêt cil perfonnel,
il doit s’interdire toute efpecc de fon & ion , &
tous les a&es qu’il peut faire font viciés de la
nullité la plus abibluc.
Cette nullité mérite d’ailleurs d’autant plus
* Or do n na nc e de Mo ul ins, articlç 31 .
*
..
�38
d’attention dans l’efpece, que l’intérêt de G uillet
dans cette pourfuite n’a peut-être pas peu contri
bué à la précipitation avec laquelle elle a été faite,
& a encore ajouté aux vexations du Praticien
Eftopy.
La troifieme nullité réfulte de Tele&ion de
domicile faite par llib ier dans la faifie réelle pour
Tefpace de 24 heures feulement dans les Paroiilès
de Luiigny & St. Pierre de M o u lin s, où font
fitués les immeubles i ai fis.
L ’article premier du titre 33 de l’O rdonnance de 1667 porte que tous exploits de iaifie
exécution contiendront l’éleQiion de domicile du
faifilfant dans la Vi l l e , B ourg ou V illages 011
la faifie exécution fera fa ite , ÔC cette formalité
e(t ordonnée à peine de nullité, fuivant l’article
19 de ce môme. titre.
L ’éleftion de domicile preferite par cette loi ,
n’efi: pas d’un inftant, d’un quart d’heure, ni de
tel autre efpace de temps déterm iné, elle eit in
définie &c doit durer auili l o n g - temps que
l’exécution ; c’eft la remarque de Jouile dans ion
Commentaire fur cct article , qui fur ces mots élec
tion de domicile , » obierve que plu/ieurs H u i f
» fiers fo n t dans Fufâge dans leurs exploits de ne
« faire pour leurs Parties élection de domicile que
» pour Z4 heures feulement ; mais, ajoute-t-il, il
» ejl évident que c'ejlpar abus & fans aucuns fou » dements , & qui l s firoient également fondés à la
» faire pour un temps encore plus court : ces fortes
�» d'élections de domiciles doivent être faites indé» jînim ent & fa n s aucune limitation de temps , &
» durent jujqu’à ce que Uinfance pour la Jaijie <£’
» emprifonnement J o it tei minée. »
Denizard fait la même obièrvation au mot faifie
réelle, n0. ^ . » E Ordonnance de i 6 6 j , titre y3 ,
» article 1 , e x ig e, dit-il, une élection de domicile
» permanente, & non de 2,4 heures pour une fim ple
» faifie mobihaire , & aplusforte raifonpour une
» ja ijie réelle dimmeubles.
Il 11a donc pas fufîi à R ib ie r , ou plutôt au zélé
Praticien qui a fait cette procédure fous ion n om ,
de ne faire que pouiTefpace de 24 heures cette élec
tion de domicile dans les Paroiilès de Lufigny &
de St. Pierre de M oulins, <Sccette omiiïion d’un
domicile indéfini 6c permanent eft encore une nul
lité décifive dans cette matière, défavorable par fa
nature , 6c mille fois plus défavorable encore dans
l’eipece particulière dans laquelle ie trouvent les
Parties.
Quatrième nullité. L ’HuiiTier G uillet, avant de
procéder a fon exécution , n’a pas appelle' deux
proches voifins pour y être préfents.
Cette nullité eft encore puifée dans le texte mê
me de l’Ordonnance de 1 6 6 7 , art. 4 du tit. 3 3 ,
qui eft ainii conçu :
» A vant d’entrer dans une maifon pour y iaifir
» des meubles ou effets mobiliers, 1 Huiiîier ou
» Sergent fera tenu d’appeller deux voifins au moins
» pour y être préiènts, auxquels il fera figner ion
�\
^°l
)
» exploit ou procès verb al, s’ils favent ou veulent
» fign er, finon en fera mention. »
Et. le. Commentateur ajoute , à peine âe nullité,
fuivant l’art. 19 ci-après.
C ïï texte eft clair, mais on en contefte l’applica
tion : Ribier prétend que cette Loi n’efl: faite que
pour les faifies mobiliaires, & qu’elle eit fans ap
plication à la faifie réelle.
Mais en premier lieu le procès verbal de faifie
réelle des 16 & 17 Novem bre contient également
une exécution mobiliaire , puifque l’HuiiTier
Guillet faiiit tous les bejhaux tant gros que menus,
qui font actuellement, & qui garnijjent lejdits
lieux.
A in fi, d’après Ribier Iui-m èm e, cette formalité
'étoit rigoureufement exigée par l’Ordonnance pour
cette faifie exécution , & fon omiiîion entraîne néceiTairement la nullité de ce procès verbal &c de
tout ce qui l’a fuivi.
En fécond lieu , pourquoi feroit-on difpcnfé de
’ fuivre dans les faifies réelles les formalités preferites pour les faifies exécutions ? Cette procédure plus
rigoureufe & infiniment plus importante, feroitclle donc moins folemnelle, & cxigeroit-clle un
moindre concours de yeux & de fignataires?
Cette formalité n’a , d it-o n , d’autre but que
d’empecber le divcrtiflèmcnt des effets torique les
HuiiTiers entrent dans les maiiôns pour iaifir.
M ais en procédant a la faifie réelle, les Huiiliers
ne font-ils pas entrés dans deux maifons des do
maines
�41
maines où il y avoir des meubles y dans des éta~
bleries oiV,il y^avoit des beiliaux, dans une maiibn JfiÇLiée_ en la V ille de'M oulins,' qui étoit égale
ment habitée par des locataires,- qu’on ne peut pas
liippoièr dépourvue de toute efpece de mobilier ; il
y avoit donc les mêmes riiques à courir , les mê
mes précautions à prendre, .ainii nulle différence
dans l’efpece entre la faifie réelle & la iàifie mobiliaire, & Ribier 11e iàuroit échapper à la rigueur
de la Loi.
Cinquième nullité. L ’HuiiIîer Guillet a faifi les
beiliaux fans les détailler,
' !L ’Ordonnance de 1667 porte, .art. 1 5 ,du, tit.
1 9 , les HuiJJiers ou Sergents Spécifieront par te
menu les ckofes par eux jaijics.
Et cette difpofition eil répétée dans l’article
6 du tit. 33 , en ces termes : les exploits eu pioces
verbaux de JaiJie & exécution contiendront par
le menu & en détail tous les meubles fa ifis &
exécutés.
L ’Huiifier Guillet a faifi en bloc & fans détail
tous les belliaux gros & menus qui garniffoient les
deux domaines du Bout Qc des Chantellicrs j ces
belliaux étoient bien conilamment mobiliers, ils
étoient par conféquent fournis a la difpofition de
ces deux articles, & la nullité efl encore ftns rcplique.
Il
cil d’ailleurs eiTentiel d’obfcrver que ce délai
étoit d’autant plus important dans l’efpece, que,
comme les Appcllants l’ont ,dcja obferve
les
F
�4-i
.
domaines du Bout & des Chantelliers font fitués
dans un Pays de bois & de pacage, où chaque do
maine nourrit iouvent ju itp ’à1concurrence de trois
pu quatre mille livres de beiliau x, & ou le profit
de ces'beiliaux forme le principal revenu des Pro
priétaires. ...
'' ' .Il n?y avoit \qu\m détail exa£l de ces beiliaux
qui put , lors de l'adjudication, influer fur les m ifes,
:6c faire connoître aux enchériffeùrs quelle étoit la
valeur des domaines qu’on leur propofoit d’acqué
rir , puiiqu’il y a dans cette partie de la Province
une différence totale entre* un domaine dégarni
de beiliaux,. & un domaine qui par le-détail fe
trouverait en avoir pour trois a quatre mille livrés.
Sixième nullité. La copie de la faiGe réelle n’eil
pas fignée des "mêmes témoins que l'original.
O n lit dans l’art. 7 du "même tît. 33 de I’O rdonnance de 16 6 7 , que la copie lainée aïi Saifi
J'era /ignée des mêmes ■
perfonnes -qui auront fig n é
L'original, toujours , à peine de nullité j fuivant
l’article 19.
L a loi cil encore pofitive , <Sc le fait eil confiant
que Jean Dupicli & Pierre Champagnail ont figne
la faifie réelle comme recors , &c que la copie de
cette faifie réelle a été fignée par Jean Duchemin <Sc
Jean Cnampagnnll.
M a is , dit Ribier., cette formalité.n’eil exigée
que pour les iaiiies mobiliaircs, & quant aux iailïcs
réelles elle cil ii peu eflentielle , qu’il n ’eilpas même
néceifaire d’en iignificr copie à la Partie iaifie.
�|
Cette obje£tion reçoit pluiieurs réponfes toutes
également fans réplique : la première , c’ert que le
! procès.:verbal des 1 6 & 17 Novem bre contient
1 une exécution mobiliaire comme une faifie réelle ,
puiique l’Huiflier faifit les beftiaux gros & menus
qui garnirent les deux domaines ; il devoit donc,
d’après Ribier lui-m êm e, & d’après le texte de la
loi y fatisfaire a cette formalité a peine de nullité.
• La fécondé , c’eft que c e tt e copie n’eft pas moins
ciTentielle pour la faifie réelle que pour la faifiemobiliaire elle eft d’abord ciTentielle dans-la thefe
générale & dans toute l’étendue du Royaume:,
comme on le voit dans d’H ericourt, traite de la
V en te des immeubles , iommaire 14 du chapitre 6 ;
ôc dans Néron , tome I er. notes fur 1 Editde 1 ^^1 ,
°u il rapporte la remarque de M . le Préfident leM aître, qui obferve que le propriétaire ■
doit être
inftruit par la lignification de la faille■
reelle, que.'
Je fu is d ’avis , d it-il, devoir etre ja it e , quoique
cette Ordonnance ne le renuiert pas.
Mais cette formalité eit encore plus rigoureufe
dans la coutume du Bourbonnois que dans toute au
tre, parce quelle contient fur ce point une difpofition particulière dans l’article 143., au titre des
exécutions
. C e t article porte , que le Sergent JigniJieraato
detteur, ou a i o n héritier apparent , ou au tiers dé
tenteur, a perionne ou domicile ladite main-mif 'e ,
cnfemble les ventes-ôc criées ès jours introduits
par la coutume.
„
�Signifier au dateur ladite mam-mife : cette Loi
eft impérieule , 6c il n’eft pas permis d’après un
texte auffi. précis de mettre en queftion fi dans
l’eipece l ’Huiflier Guillet a du lignifier la iàifie
réelle aux Appellants.
O r fi cette 'lignification étoit de rigueur., elle
étoit indiipenffablement prefcrite par la L o i locale
qui régit les Parties, peut-il y avoir quelque raiion pour la iùppofèr moins lolemnelle , moins 'rigoureufe que la lignification d’une fimple faifie
mobiliaire , qui n’eft par elle-même ni fi importante
ni fi défavorable aux yeüx de la L o i, ni ioumiiè
avec la même rigueur à la fatalité des formes
juridiques.
Cette fixieme nullité ne mérite donc pas moins
d’attention que toutes‘celles qui précédent; toutes
(ont fondées iiir le texte des Loix de la matiere,
& toutes s’appliquent dansTeipece à la plus odieufe,
la jîlus vexatoire procédure qui fut jam ais, formée
précipitamment, grofîie jufqu’au monftrueux, non
pas pour l’intcrct du créancier , que la plus légère
difcuiïion mobiliaire pouvoir fàtisfaire , mais uni
quement pour enrichir le Praticien E ilo p y , q u i ,
avec un titre de 287 livres a la main , croyoit pou*
voir impunément dépouiller Vichard & f à femme
de tous leurs biens 6c s’en approprier la valeurConcluons clolic que le mal-jugé fiibiidiaire de
la Sentence dont eit appel n’eft pas moins évident
que le mal-jugé principal, & q u e fous Pun-& Tau*
tre point de vue les premiers Juges n’ont pu Ce
- fi
�déterminer à confirmer cette procédure fans violer
toutes les réglés & commettre une injuftice énorme.
O n pourrait ajouter que cette Sentence réunit
à l’injuftice la plus criante la'contradiction la plus
bifarre dans fon contexte, en ce quelle ordonne la
continuation de la faifie réelle, & juge que la créan
ce eft acquittée, en ce qu’elle déclare des offres
fuffifantes & infuff i f antes tout à la fois ; mais ces
contradictions, quelques groffieres qu’elles foien t,
ne forment que de légeres nuances dans le tableau,
& les Appellants ne les relevent dans ce moment
pour montrer que c’eft en tout point que cette Sen
tence eft l’ouvrage le plus vicieux que la Juftice
fouveraine ait jamais'eu à profcrire.
Monf ieur l'A b b é D E P O N S , Confeillcr,
Rapporteur.
M e. B A L L E T ,
Avocat.
M i o c h e , Procureur.
a
D e
l 'I m p r im e r ie
d u
R o i ,
c l e r m
de P i
R u e
S .
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G c n è s ,
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VI A L L A N E S
p r è s
l ’a n c i e n
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M a r c h é
D o m a i n e s
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B ! e d .
1 7 7 4 .
�
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Vichard, Jean. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Pons
Ballet
Mioche
Subject
The topic of the resource
créances
procédure de ventes en criée
saisie
signatures
lésion
huissiers
faux
procédure abusive
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour Jean Vichard, Laboureur, et sous son autorité Gabrielle Talon, sa femme, habitants de la Paroisse de Lusigny, Appellants. Contre Laurent Ribier, Cabaretier, Habitant de la Paroisse de Saint-Bonnet, Intimé.
Table Godemel : Décharge : 1. le créancier qui a reçu le montant de sa créance, et ce, dans le procès-verbal d’offre, déchargé son débiteur d’une saisie réelle, poursuivie contre lui, en désavouant l’officier public qui l’a commencée, libère-t-il ce débiteur irrévocablement ? peut-il se pourvoir contre sa décharge, par lettres de rescision, si elle a été obtenue par dol et surprise ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0116
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52873/BCU_Factums_G0115.jpg
Coverage
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Lusigny (03156)
Rights
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Domaine public
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