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CON SU LTA TI ON S.
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a pris lecture, 1°. du.
contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
avec Marie-Léonarde Cornudet, du 14 mai 1778 2° du
contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte
Ducourthial, du 2 avril 178 3 30. d’un mémoire à con
sulter
E st d ’ a v i s q u e , d'après les anciennes et les nouvelles
lo is, le prem ier enfant mâle , issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec Marie-Léonarde Cornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son p è re , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
n oces, il avoit épousé Marie - Gabrielle de Villette. D e
ce premier mariage issut Gilberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen Maignol.
A
�CM
E n 1 7 7 8 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
n o c e s , M arie-Léonarde Cornudet.
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert D ucourthial, futur époux, instituehéritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un
des enfans qui naîtra du présent m ariage, et ce par préciput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que les futurs choisiront conjointement,,
par quelques actes que ce soit, ou qui sera choisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit;
et en cas que le choix rien ait pas été ¿fait, ladite ins
titution sera au projit de Vaine des m âles, s'il y a des
m â les, et s'il riy a point de m âles, au profit de îa în ée
des Jilies.
D e ce mariage sont issus trois enfans maies. Gilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793.
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant \ ni l’un ni l’autre n’ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, lie fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés,
par le contrat dé mariage de ses père et mère.
L ’édit des secondes noces, de i 56o, qui ne permet pas
à ceux qui sé remarient, et qui ont des enfans d’un premier
lit, de se donner réciproquement au delà de la portion de
l’enfant le moins prenant, avoit lait naître des doutes à cet
égard: on craignoit sur-tout en droit écrit, qu’en faisant
de pareilles institutions, ce ne fût un moyen de frauder la
loi ; mais la dernière jurisprudence, fixée par difl'érens ar
rêts, dontl’un du 29 avril 1719 , et l’autre du 11 août 1 7 4 ^
�(
3
)
.............................................................
rapportes par Lacombe, est que de pareilles dispositions
sont valables. C’étoit aussi la jurisprudence de la ci-devant
sénéchaussée d’Auvergne. L e dernier commentateur de la
coutume, tome II, titre X I V , art. X X V I , page 3^4 >raP" *
porte une sentence du mois de juin 1773 , qui confirme uni?
institution d’héritier, en faveur des eufans à naître d’un
second mariage. A in si, en ne consultant que l’ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput, le tiers des biens qui lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est de principe qu’un don fait de cette riianière,
n’est pas sujet à rapport, même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à la récla«
snation des exposans: on peut même dire qu’elles décident
la question en sa faveur.
,
Il est vrai que d’après les dispositions des art. X X III et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 ventôse de l’an 2, l’élection
laissée au choix de l’un des époux étoit nulle, si elle n’avoit
été faite que le 14 juillet 1789 et depuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité ù la succession
de ci/jus.
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du 5 b ru m a ire précédent, puisqu’elles ont été
annullées, quant à leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4 , soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourthial, à l’effet de savoir si h cette époque, il existoit
quelque loi qui put empêcher l’effet de la disposition faite
en faveuj* de l’exposant, par le contrat de m ¡r age de scs
père et mère : or, il n y avoit pas alors de loi qui eût prosA 2
�(
4
)
erit de semblables dispositions, et annuité des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d'avoir exercé
la facu lté d'élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
n’y en a pas depuis, attendu l’abolition de FeiFet rétroactif
L a loi du 7 mars 1793, antérieure au décès de Gilbert
Ducourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n’est relative qu’aux dispositions futures, n’a
néantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, etn ’o bligeoit point les père et mère à les révoquer : o r , ce n’est
point en vertu d’une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793, que l’exposant réclame le tiers des
biens dé son père, comme un don qui lui a été fait en préciput; il le réclame en vertu d’une disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu drune disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
E n e ffe t, l’article p re m ie r de la lo i du 18 p lu viô se d e r
n ie r , p o r te : « L e s a va n ta g e s, p ré lè v e m e n s , p ré c ip u ts, d o -
* nations entre-vifs, institutions contractuelles, et autres:
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
* stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du
« 7 mars 1793 ? et en ligne collatérale ou entre individus
« non parenS', antérieurement à la publication de la loi du
* 5 brumaire a'n 2, auront leur plein et entier effet, con
ic formément aux anciennes lo is, tant sur les successions
* ouvertes jusqruà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans un contrat de mariage, passé antérieurement à la loi
�du 7 mars 1793 ; à défaut d’élection de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroitdu mariage : il n’y a pas eu d’élection*, les père et
mère sont décédés avant les lois des 5 brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle; il doit par
conséquent en profiter.
Le père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature, ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée, si Ton fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l’avenir ; qu’elle n’anéantit pas
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. ( A rt. X X V I de la loi du 22 ventôse ).
O r,l’avantage dont il s’agit, est assuré à l’exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation de la loi du
7 mars 1793; mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni parla lo i, doit donc
avoir son effet, puisqu’elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mère avant la promulgation des lois des
5 brumaire et 17 nivôse de l’an 2.
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté , qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la m êm e loi du 18 pluviôse dernier.
Cetarticle est ainsi conçu :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
�(
6
)
« fonds perdu, qui ont été annullées par les art. XXlI et
« X X V d e la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet 1789,
« sont rétablies dans leur effet p rim itif, si elles ont été
« faites par acte ayant date certaine avant la publication de
« ladite loi du £7 nivôse ».
Des termes de cette lo i, il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à celle du 7 mars 17 9 3 , doivent être
maintenues: ainsi, l’exposant étant saisi de l'effet de l’insti
tution par le décès de son p è re , arrivé avant la publication
de la loi du 17 nivôse, on ne sauroit lui contester légitime
ment l’avantage qu’il réclame.
D é l i b é r é à R iom le 14 germinal an
française une et indivisible.
5 de la république
T O U T T É E , T O U T T É E , GASCHON.
f
LE SOUSSIGNE qui a yu la consultation ci-dessus et
des autres parts ;
, que s’il n’est pas impossible de tirer des lois nou
velles , quelques inductions favorables aux enfans du pre
m ier lit de G ilbert D ucourthial, les raisons déduites dans la
E stim e
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup à faire incliner en faveur de l’exposant. On pput même
ajouter aux raisonnemens delà consultation. En effet, en
supposant que par 1<; défaut d’élection, fait antérieurement
�(
7
)
à la loi du 7 mars 1793, la disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable; c’est que le
contrat de 1778 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit. Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’e u x , emporteroient dans sa succession un
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C est sous la foi de cette promesse irrévocable
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; par
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
enfans du même p è re , en se référant à celle du 7 mars
1793 j Que ce dont le- père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n'ont pas même entendu faire ,
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de même que
Ducourtliial père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second l it , de même les
lois nouvelles ne sauraient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
D é l i b é r é ùR îom , le 14 germ inal an
française, une et indivisible.
5 de la république-
DE VAL.
�m ém o ir e a c o n su l t e r
ET C O N S U L T A T I O N .
J_ E citoyen Titus s'est marié deux fois ; il a eu de son
premier m ariage, avec dame Marie Laurette , une fille
nommée G ilberte, et de son second, avec Suzanne D ailly,
trois en fan s, Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de mariage , Titus a institué pour son
héritier du tiers de tous ses biens présens et à v e n ir, l’un
des enfans qui naîtroit dudit mariage , et ce, en préciput
et avantage ; laquelle institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce lu t, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fû t; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fait, ladite
institution profiterait à Tainê des mâles ; et s’il n y a pas
de maies , à l’aînée des filles. Telle est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur à la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de 1 5,000 liv- 3payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
ons , sans intérêts qu’à défaut de payement terme par
terme î
�( 9 -V
.
^epne i;-et moyennant cette ¿constitution, il fut stipulé
q u ’elle demeureraitforclose dè.;lôütes succcssionsidirectes
et collatérales de l’estoc paternel, sous la réserve quil fit
de la rappeler <auxdites successions par quelquacte que ce
fû t : cet acte est de 1.783................. , a
.
;p
t - T itu s, père com m ua, est mort le 27. juillet 17 9 3 , l*
mère e$t morte avant, sans avoir fait de cliqix de l’un, des
eniàns, Il s’agit maintenant de'savoir , i° . :si -cette'Jinsti*
tuti( -, contractuelle.est valable en faveur des enfansldii
second lit,
ir î,> t *1_
• î\ j
-, •.juuiü .j.. i.j
a 0.' Si yen le supposant,n’y ayant paseu d’élection delà
part des père et m ère, 1c’est 1l’aîné mâle qui doit en pro
fiter; .
.. i •
• •;
. ... l'j'-- c . . [
30. Quels sont les droits delà fille du premier lit dans
la succession du père commun ? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle avoir son effet ?
... Enfin , y ayant des enfanfc mineurs, quelle doit être la
forme du partage ? -.¿j
•;
• • > Jnu ù
.
.
CO N SULTATION.
L e C O N S E I L S OU S SI G NÉ',’qui a lu les deux
contrats de mariage dont il s’a g it,
E
stim e
1
, sur les questions proposées,
1°. Que l’inst;itution contractuelle, faite par un père dans
son second contrat de mariage au profit des enians à naître
d’icelui, est valable et doit avoir sou exécution.
B
�( IO }
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs,
>et il paro ît qu’elle a été diversement jugée par les tribu
naux. ' '
r
"
*
v C e u x qui ont soutenu qu’elle étoit nulle, se sont fondés
sur ce que les enfans du second ,lit,, n’étaut encore Sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
jiî de haine’, les dispositions que l’un des conjoints fait
«n leur)faveur., ne sont censées faites qu’en contemplation
de l’autrejcorijoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d’une portion d’enfant, l’on a voulu
éluderda loi par une disposition'indirecte, èt que d'après
l ’/*dit'Adüscáecorides, inoces ,'Ujon me p ou voit donner aux
pères, mères et enfans du second mari ou autres personnes
•parod0l etj fraude .'intérpaiés. :J‘ •»
i„„» •’
Une femme, dit Chabrol, qui ne peut pas profiter de
ces libéralités pour elle-même, n’a pas moins d’empressexnentûài’les procurer, à ¿es; enfans à naître; s’ils lui survi
ven t, ils ont ce que leur mère n’auroit désiré avoir que
p o u r e u x j et s’ils lui pr<5décèdent, elle peut retrouver
souvent', dans leur succession, les biens qu’elle leur a
-r
-- s
r ««
» f - **
procure?.^
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i 588 ,
rapporté par Mo^tluolon., ,,
*
L e sècoàd qu’on trouve dans Soefve, du 18 juillet 1.645.
Un troisième recueilli par Brodeau sur L o u e t, L. Nsomm. 3 , du .3 août 1647.
.
1
quatrième ,!;qu’on ¡trouve au journal 'du .Balais ,
du 7 spptombre a 673.
1
Enfin ,1 cèlui connu saus :1e nom de Laparra, du 18
�mai 1736.,j rapporta .par l’Epine de GrainV[ille. Tous ,•
dit- on , ont an nulle des dispositions faites^en faveui- des
enfans à naître d’un second mariage.>
Mais si l’on se donne la peine d’entrer ten connaissance,
de cause de ces jugemens:, on s’aperçoit bientôt qu’iisi
sont rendus sur des circonstances particulières, et n’ont
aucune application à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de Montholon , d’après. Rousseau de
la C om be, n’a pas jugé la' question. « Il s’est trouve ,>
« dit-il, verbo Noces, qu’il,s’agissoit d?une donation faite.
« non à des enfans? d?un. second l i t , mais à des colla-?
ce .téraux. »
Celui de 1645 paroît avoir jugé qu’une mère remariée,
n’avoitpu donner aux enfans du second mariage ses meubles
et acquêts, et le quint de ses propres, au préjudice des enfans
du premier lit, dont la légitime n’avoji; cependant pasiété
blessée; mais indépendamment de l’injustice évidente qui,
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume diffé
rente de celle-ci, où les pères et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs enfans.
Celui de 1647 se trouve dans-tous les recueils^ il fut rendu
consulhs classibus ,• il annulla une donation contractuelle,
faite au profit d’enfans à naître , par une femme qui se
remarioit \ m a is B ro d e a u , qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation étoit tout-à-fait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite à l’exclusion perpétuelle des enfans
du premier lit , au point qu’à défaut denians du second
lit, les collatéraux étoient appelés.
Il n’est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
«mnuUée ; i° . elle, étoit faite ab irato> et 20. comme l’obB 2
�serve Chabrol > il est évident que le lllari aVoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
c o n tra ctu e lle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it, suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
d e son gendre, « et au cas qu’il riy ait pas d’enfans y lesdits
* biens appartiendront audit sieur de Saint-M artin seul r
* qui étoit le futur époux , et au x sien s, sans que les enfans
« du premier m ariage, n i les héritiers de ladite fu tu r e y
a puissent rien prétendre n i demander, sinon que ladite
« G uilbou, si elle survit, auquel cas elle jouira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour« neront aux héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrêt de 1673, a bien aussi annulléune donation faite
aux enfans à naître d'un second mariage; mais elle avoit
pour principal objet la fèmme ; c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit: « au f a i t particulier y
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
« du palais , il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère ; c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la passion extrême qu’avoit
te pour elle le sieur de Tersam , a été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
* qu’il ne pouvoit encore aimer. »
Cela est si vrai que Rousseau de la Com be, qui rapporte
aussi cet arrêt, verbo Noces, s’en fait un moyen pour prou
ver que les enfans communs, nés ou à naître, ne sont point
compris dans la prohibition, pourvu qii ils n aient servi
de prétexte pour donner au second conjoint.
E nfin, l’arrêt do 1738 de Laparra, a été rendu en pays
�..........................
( *3 )
cle droit écrit, où la mère succède à son enfant*, en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition ¿toit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; les
pai'ties et leurs biens étoient régis par une coutume qui
exclut les ascendans de la succession des descendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle.rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
declarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second mariage, entre le pays de
droit é crit, et celui de coutume.
Dans le prem ier, la seconde femme peut être l’objet de
la lib éralité d’un mari ; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eu x, à moins qu’il n’y
ait aucun parent de la ligne ; et dès lors la p ro h ib itio n ne
peut plus exister , puisqu’il n’y 'a plus d’intéressd.
M ais ce n’est pas seulem ent avec des raisonn em en s tranchans qu’ on v e u t écarter les p ré ju g és que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement form ée, soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in termini's, soit
par les nouveaux; et la presqu’universalité des auteurs,
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bien pro
noncée.
�c h .y
L e premier-arrêt qui ait admis l’institution d’héritier en
faveur des.en-fans a naître d un second mariage, est rapporté,
par C h opin , liv. 3., ehap. i ei‘. lit. 1er. sur ja coutume d'An
jou , en date du 7 septembre 1675.
L e second, du 19 juillet i 65g.} rapporté par Ricard
T r a it é des Donations, partie.3 , n°. 1243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite,
à des enfans à naître, par un troisième contrat de mariage:
c’est l’arrêt des Lagrange. On demandoit la réduction da
la donation, conformément à l'édit des secondes noces. La.
disposision fut confirmée pour le tout.
L e troisième,j ..se trouve au Journal des audiences,y sous
la date du 29 avril 1719 ; il fut imprimé-dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en fa
veur des enfans à naître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
L e quatrième est intervenu le 11 août 1740, au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Com be,
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrèt, Jacques de Gagnou
de. Vilène , lieutenant général des armées , âgé de soixantequinze ans , qui avoit un fils du premier litco n v o la n t en
secondes noces avec daine Claude-Antoinette Dassé, avoit
donné aux enfans de ce futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui pennettoit de donner à ses enfans- puînés. L a
donation a été confirmée eu faveur des enfans du second
mariage , quoique la dame Dassé eût la gajxle-/toble de
jîes cîïfans.
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui sq remarie, peut donner à ses en fans du second lit;
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans communs,
�( * 5' )
nés ou à naître, ne sont p a s compris dans la prohibition
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
sè remarie en pays de droit écrit ,1a donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
laveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas ù un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
■une exception au droit commun. T o u t le monde eonnoît
•les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C’étoit une dame d’Âlègre , qui avoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire la condition d’un enfarft
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par dès
considérations d'honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du J o u r n a l dù palais,
daus la cause jugée par l’arrêt de 1673, «que les législa'« teurs q u i se sont p a rticu lièrem en t attachés à former des
« obstacles au x secondes noces , n’eussent point parlé des
•«enfans, s’ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition ; mais ils n’avoient garde de penser à eux ; il
« y en a deux raisons sans répliqué. »
«La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autorisant les secondes noces,
« elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
.
�( i6 )
« en naissent, clans la possession du droit commun ; c'est-àa d ire , q u e comme ces enfans né sont pas encore au monde,
« et n éanm oin s-y doivent venir par une voie légitime > la
« loi ne peut pas avoir pour eux de l’indignation, qu’elle ne
r fonde jamais que sur un démérite naturel ou moral.
« La seconde raison est, que l’ordonnance ne peut com
te prendre les enfans communs dans la .prohibition, que par
ce les mêmes motifs quiy ont donné lieu, savoir, en faveur
« de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
et mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
a innocente des enfans, et sur-tout dans des enfans à naître,
* qui n’ont que le suffrage de la nature qui parle pour eux.
« Il ajoute que presque tous les docteurs avoient décidé,
« que la loi hcic ed icta ti , et l’édit des secondes noces, ne
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
« excité la libéralité des pères et mères, par leur mérite, par
* leur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
« que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
ce que leurs pères et mères pensent ¿\ eux avant leur nais« sance , et qu’ils se les représentent, comme s’ils étoient
« effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
ce contrats de m ariage, les enfans ù naître ont ordinaire"
et ment la meilleure part, »
Brodcau sur L ouet, lettre N , somm. 3 , n°. 12 , a traité
également cette question: et Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l’édit des
« seconds noces a lieu , non seulement ù l’égard des con« joints, mari ou femme , mais encore des enfans du
« prem ier ou du second m ariage........Mais néanmoins il
« est
�« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu a Tegard
¡k des enfa n s du prem ier lit de l’un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et m ê m e personne avec
« leurs père et mère , el qui est dans la prohibition de l'edit
« et non des enfans communs issus de leur m ariage, qui
« sont capables de recevoir toutes sortes à!avantages,
« s a lifia légitime aux enfans An premier l i t , si la coû
te tnme ne dispose du contraire; la présomption naturelle
« étant que la m ère faisant la donation , est plutôt portée
« par l’affection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
« le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. de secundis
jiuptiis, q u e B ro d e a u r a p p o r te , d écid e cette q u estion dans
les term es les plus form els : «
■potest vidua dare, non p?'o« vigno sedfdio cornmujii, nato ex secundis nuptiis : licet
« sit eadem ratio , non tamen idem ju s , q u ia jilio com« muni ut donet mater naturalis affectio f a c i t provigno
« ut donet noverca, maritalis ajfectus f a c i t , non certè
« novercalis,* provignum non semper accipiam pro percc sona supposita, sed excogitatamfraudent edicto inspi« cabor in provigno , non in f li o communi. »
B ro d e au cite les d eu x arrêts de i 5ç)5 et de 1 6 2 6 , q u i
o n t co n firm é de pareilles donations.
L e b r u n , traité des successions , liv. 2 , ch ap . 6 , sect.
distinction 2, est du même avis: « L e second conjoint, dit« i l , est la première personne prohibée , et nulle autre ne
« fest qu’à cause de lu i......... O n demande si les enfans du
« second mariage sont compris dans cette prohibition et il
« semble qu’ils n’y sont pas compris: car, si d'un côté on les
« considère comme les enfans du second con join t, de l’au»
G
�C 18 )
« tre, on les peut regarder comme leS enfans de celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
« de ses libéralités ».
« Si les enfans decelui à quiil est défendu de donner, sont
« dans la prohibition ; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner h ses propres enfans......... Il faut prendre en
« toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation;
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
cc que ces donations se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions.. . . Aussi nos
cf docteurs, entr’autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
« cod.deseciind. nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n'étoit pas compris dans l’édit ; ce que j’estime
« devoir avoir lieu, pourvu que les enfans n’aient pas
« servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color non jfuerit quœ situs, comme dit la loi item s i y r
uff. de sénat. Mace.d. et particulièrement pour l’espèce
• la loi suspitius 4 9 , j f . de donat. item s i color v eî
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœsitus , n ih il
« valebit traditio ,* id e s t, si hoc exigit uxor, ut aliquid
« ex ea re intérim commodisentiret m antus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu’en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari, à cause de la puissance pater
nelle; mais que hors ce cas particulier, les donations
fa ite s aux enfans com m uns, ne sont pas réputées com
prises dans fédit.
E nfin, le dernier commentateur de la coutume d’A u ver
gn e, traite aussi cette question dans le plus grand détail,,
�( 19 )
et après avoir rapporté les arrêts pour et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière jurisprudence -parait
décisive pour la validité de ces dispositions.
« Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740 j on*:
jUl^s*
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruitpas,
» puisqu’il est dû à la circonstance particulière du choix
« laissé à la seconde femme ; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
« pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
« venu des successions et donations en ligne directe, et
« oùles dispositions en faveur d’enfans à naître sont assez
« fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en« fanspersonnes prohibées, ne s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints , avec qui le mariage se contracte , et il
« suffit que la disposition puisse s'appliquer à d’autres causes
« que riinpression du conjoint, pour qu’elle doive avoir
« tout son effet. On doit plutôt rapporter la disposition à
« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
« combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, com« ment un second mari pouvant profiter directement au
«moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
«a naître seroient dans une plus grande prohibition que
« lui. Il nous semble donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition , saiif les exceptions légitimes
« dans des cas où il est visible que le donateur n’a eu d’autre
« motif que l'impression et la suggestion du nouveau con
te joint ou la volonté de l’avantager lui-même.»
Ainsi donc , il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune, faite par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
C 2
�(20)
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement delà disposition, puisqu’en cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoîent succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien, puisque la femme n’avoit pas d’autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice. Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps 5
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas, ni l’un ni
l ’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d’une disposition universelle; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au profit des mâles , à l’exclusion des
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
mariées par père et mère»
T o u t concourt d o n c , on le répète, à rendre cette dispo
sition inattaquable. Le droit d’é lire, accordé au survivant,
dans le cas où il n'auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne changcrien a cette décision, parce qu’il n’en résultoit au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première, ce qui est réellement
arrivé , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mari.
I» y a même plus, c’est que , sans les nouvelles lois, le
consultant n’eri auroit pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle éloit forclose, moyennant la dot à elle
�( M \
constituée, et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de
son père sans y être rappelée \ et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
ment qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis a l’aîné mâle du second l it , une
Buccession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
S e c o n d e
Q u e s t i o n .
N y ayant pas eu d!élection, tous les enfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition f
ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question peut avoir été controversée dans les temps
voisins de la loi du 17 nivôse an 2 , dont l’effet rétroactif
avoit tourné les têtes ; mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , (f avant ou depuis le 14 juillet 1 7 8 9 , auroit conféré
»au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« h éritiers dans ses b ie n s , l’ é le c tio n , si elle n’a eu lieu que
« le 14 ju ille t 178 9 o u d e p u is , d em eu re n u lle et de nul
« effet; et tous les h éritiers p ré so m p tifs, au préjudice dés
ir quels elle auroit été faite,sont, nonobstant toute exclu« sion, appelés à partager la succession de la même manière
* et par les mêmes règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. » .
L ’article suivant,porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier, néanmoins subordonnéaau cas
�« où un tiers ne disposeroit pas autrement des biens com
te pris en la même institution , sont nuls et de nul e iïe t, à
«dater du 14 jui^ct *789, si à cette époque le droit dé
« l'institué n étoit pas devenu irrevocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée avec lui. »
Mais, i° . cette loi ne peut avoir d’effet rétroactif; les
lois des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an 5 , ont confirmé toutes les dispositions irrévocables
de leur nature, faites avant la publication de la loi du 7 mars
*793>^u^a défendu toute espèce d’avantage en ligne directe,
ainsi que les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse an 2.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse an 5 , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
« an 2 , à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
« date certaine avant la publication de ladite loi du
« 17 nivôse, »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dernière loi.
Dans l’espèce particulière, la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est morte avant la r é v o lu tio n ,
.et le père, le 27 juillet 1793 * la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession ; il
faut juger l’institution dont il s’agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L ’on n’a pas oublié qu’à défaut d’élection , c’étoit lui
qui étoit appelé à la recueillir; et la mort du père, sans
l’avoir faite, équivaut ù un acte qui la coiitiendroit.
�( 23 )
• Ces principes anciens n’ont point été altères par les
nouvelles lois, parce que la succession s est ouverte avant
et dans un temps utile ; et on peut d’autant moins les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs,
et sur-tout par Ricard, traité des donations , partie i re*>
chap. 3 , section 12, n°. 672 et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers,comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’électiorr.
c< qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu u n , mais seulement le ch o ix de la personne
« entre un certain nom bre, ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui rogatus e s t, positum est om n ino, an velit
« restituere , sed qui potiùs restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé à l’au
dience de la grand’chambre , par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’a u tru i , quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterminé y
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au marnent où il écrivoit, particulièrement dans le-
�( h )
pays de droit écrit, où les maris et femmes ont coutunie de se déférer entreux cet honneur, de laisser
au survwant la liberté} de choisir un héritier universel entre leurs enfans j ce qu'ils pratiquent par le
principe d'une sage p olitiqu e, cl afin de transmettre
toute la puissance entre les mains de celui q u i survit,
tt lu i conserver, par ce m oyen, le respect de ses
enfans. »
L on volt donc que les principes anciens valident l’instilution dont il s’agit.
Les mêmes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas où le tiers, chargé d’élire,
ne feroit pas de ch o ix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement un des éligibles pour recueillir sa dis
position , i\ défaut d'autre ch o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par l’ex
tinction du droit d'élire, ou par la mort du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite. .
>
E nfin, les nouvelles lo is, au lieu de contrarier les1
anciennes sur ce point , ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l’on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an 5 , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la publication de la loi du T7 nivôse : ainsi l’élection
auroit pu valablement être faite ju sq u e -là , et par la
même raison, l’aîné maie avant été désigné pour la
recueillir, à défaut d'élection d’un autre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
Nous trouvons encore cette question décidée dans un
rapport
«
«
«
«
ce
«
»
»
�f 25 5 . .
- ,
■
■'nppott fait au nom d'une commission, pat* le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
•résolution par lui présenté, porte.que si-l’auteur de la
•disposition avoit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en avoit chargé, et s’il avoit nommé un
héritier ou légataire pour recueillir à défaut d'autre choix,
sa nomination , conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’élire ,
et l’ héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p ré v u , a recueilli seul h bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection le lui auroit
enlevé, ce qui n'est pas même proposable, elle n’en seroit
pas plus avancée, parce quelle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second l i t , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe.
ST r o i s i è m e
III.
Q u e s t i o n .
Quels sont les droits de la jille du premier lit ?
Cette fille a été forclose par son contrat de mariage*
mais la loi l’a relevée de cette forclusion. Le père n'est
mort qu'en juillet 1793; à cette époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793, avoient frappé,
«t elle est appelée à recueillir, en rapportant ce qu’elle
D
�à reçu , sa portion des deux tiers de la succession ah
‘in testa t, qui seront divisés entre tous les enfans par
égale portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau ; mais ce qu’elle
prendra dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira' sera dotal j si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra m oins, et lès autres héritiers feront
les prélèvemens de d ro it, de manière que l’aîné maie ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l'autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera, au prorata de son1émolument , lés autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de -230,000
y compris le rapport des i 5,ooo
la portion de l’aîné maie sera de 1 1 5,000
parce que
le tiers de 230,000 & est de 76,666 ^ 13 ^ 4
et que
le quart, dans le surplus, est de 38,333 ^*6^8
en sortô
que la fille du premier lit, conservant les i 5 ,ooo
argent,
n’aura plu s, en b ien s-fon d s, que 22,333
8
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineurs,,
le partage doit être fait en justice, et provoqué par un
majeur ; il ne pourrait avoir lieu sans cela.
DÉLIBÉRÉ à Clermont-Ferrand , le 19 nivôse an 9.
;
B O Y R O T , D A R T I S - M A R C IL L A T ■Je suis du même avis, et-par les mêmes raisonsP I C O T -L A C O M R K
�( v j.y L e soussigné, qui a lu la consultation cl "dessus, est
du même avis *, les motifs qui lui servent de fondement
sont trop anvpleroent discutés dans oetteconsultation, pour
qu’il soit nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
en faveur du consultant, c’est que sa mère avoit prédécéde
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793>
et qu’ainsi son droit à l’ institution étoit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2,(
D é l i b é r é à R io m , le 12 pluviôse, an 9 de la ré -i
publique.
TO U TTÉE.
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
D é l i b é r é à R io m , ,1e 2 ventôse, an 9 de la répu
blique.
PAGÈS.
L e soussigné est du même avis, par les mêmes m otifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de l’ancienne législation , encore ca
vigueur à l’époque de l’ouverture de la succession.
L e zz ventôse an 9 .
M A U GUE.
�Q U E S T I O N S PROPOSÉES.
G i l b e r t D U C O U R T H IA L , veufde Marie de Vîllette,.
contracta un second mariage le 14 mai 1778; il avoit'
une fille unique d’un premier mariage.
T ro is enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthial est décédé le 27 juillet 1793 ; sa
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
Il s'agit de régler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père commun.
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial de Lassuchette, fils
aîné du second l i t , croit avoir droit de prendre, dans
cette succession, un fiers en préciput et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, son
p è re , du 14 mai 17 78 , dont la teneur suit :
<r Ledit............futur ép o u x , en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à ven ir, Tun des enj'ans qui naîtra
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage *
« laquelle institution est faite en faveur de celui ou celle
k que les futurs époux choisiront conjointement, par
�2
9
)
« quelques actes que ce so it, ou qui sera choisi par ie
« survivant des deux futurs, auquel le droit en appar«• tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
k que ce soit ; et en cas que le choix rüen ait pas étéf a i t ,
« ladite institution sera au profit de Vainé des m âles,
« s’il y a des mâles , et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. »
Gilbert D ucourthial et sa seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre, sans avoir fait d’autre choix entre leurs
enfans com m uns, pour recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de Vainé des m âles, en cas qu’il
n’en fut pas fait d'autres.
En cet état, le citoyen Lassuchette, fils aîn é, e st-il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son p è re , a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vini des enfans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
2°. Que Xindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
la disposition ?
3°. Qu’elle n’ëtoit pas viciée non plus par la circonstance
que la seconde fem m e devoit concourir au choix de cet
héritier, dans le cas où il seroit fait du vivant des deus
époux, et même de l’élire seule, si elle avoit survécu ?
40. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans le cas, qui est arrivé, où il n y auroit
pas d’autre choix , étoit également une disposition valable
�( 3° )
dans le p r in c ip e , ci; quelle aoit produire son plein et
entier effet, nonobstant la révocation des dispositions de
ce g e n r e , prononcée par les articles X X III et X X I V
de la loi du 17 nivose an 2 , postérieure de cinq mois
au décès de Gilbert Ducourthial ?
5°. E n fin , que le décret du 7 mars 1793 , qui avoit
interdit tous avantages en ligne directe, quelques mois
avant le décès de Gilbert Ducourthial, n’est pas un obs
tacle non plus à ce que le citoyen Ducourthial fils aîné
profite d une disposition en préciput, qui a sa source dan9
un contrat de mariage antérieur de plus de quatorze ans
à ce décret.
Opi?iions du Conseil sur les questions proposées.
L a première observation à fa ir e , pour résoudre les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d'une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2 ; mais d’une
succession ouverte près de six mois avant cette loi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut rapportée par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
celte époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisième observation. Le sort de l'élection faile par
�( 3 0 #
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourr
thial - Lassuchette, fils aîn é, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas ou
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
m ère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé ayant la loi du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ,* car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils avoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
De ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées ; mais
■uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i ° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
valid ité, sous le régim e ancien, des donations de biens
présens et à v e n ir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de m ariage, en fa v e u r des erfans à naître du mariage y
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 1 7 31 , art. X V I I et X V I I I , et de 174 7, art. X II.
On ne sauroit non plus m é c o n n o ître la cap acité des
enfans d’ un second m a r ia g e , p o u r r e c e v o ir de pûreillcs
dispositions et en p r o fit e r , en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut permettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de ses
enfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
Auvei’gne, où étoient situés les biens de G ilb e rt Ducourth ial,)et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage,, sur ceux du second.
�. ( 3a' ) .
La seconde fem m e, il est v r a i, n’auroit pu être vala
blem ent instituée par son m ari, que pour succéder à une
' p a r t (Tarifant \ mais son incapacité,relative et limitée ne se
communiquoit point à ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en gén éral, ne fut jamais mise eu
question; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naîtroient du m ariage, étolent
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits h la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
1719 et i l août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage eu secondes noces,
aux enfans à naître du mariage, que çe qui y est véri
tablement; je veux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, qui, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir le sort
des enfans à naître du mariage, s’occupent de l'assurer A
l’avance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contracleut,
pt sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrêts notables do
la C o m b e .
donc
�donc pas surpris si tous les suffrages ?e sont reunis, depuis
soixante an s, pour en proclamer la validité.
D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec laquelle Gilbert Ducour thial use de la
faculté d'avantager l’un de ses enfans à naître du second
lit ; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; c’est-à-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gratifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauraient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes généraux, pour ne laisser voir
dans l’institution faite par Gilbert Ducourlhial en faveur
d un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
motif pour les tribunaux d'en ordonner l’exécution sans
hésiter.
a°. Mais on semble prétendre que l’institution dont il
s agit étoit vicieuse dans sa forme , en ce que rinstitué
etoit indéterminé , et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourrait être de quelque considération, s’il
s’agissoit d’une disposition postérieure à la loi du 17 nivôse
an 2, qui a aboli pour l’ avenir les dispositions dont l’ap
plication seroit laissée au choix d’un tiers.— Mais il s’agit
ici d’une disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que, loin que les donations et institutions électives fussent
E
�( 34 )
•prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X I I , L X III, I jX IV , L X V e tL X V I de l’or
donnance de 1735, sur les testamens, et par celle du mois
d’aout 1747 sur les substitutions, art. XII.
Enfin, les articles X X IIIe t X X I V de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 5 , lèvent tous les doutes; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r, l’institution dont le citoyen D ucourthial-Lassuchette réclame l'exécution, est dans ce casr
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur fils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’e u x , et
choisir un autre de leurs enfans pour recueillir à sa placer
ctoient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,,
dont le citoyen Ducourtliial-Lassuchette veut tirer avan
tage, n’étoit pas vicieuse dans son essence ; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conféré à sa
seconde épouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueille! oit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit d’élire lui offroit une perspective éventuelle, qui
pouvoit lui ouvrir des chances pour faire tourner le-don
à son p ro fit, quoique personne prohibée; et Ton cite en
faveur de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
�(35)
■
r-
r
fut jugé par l’ arrêt rendu entre la veuve et les enlans
Laparra, le 18 mai 173^*
La réponse est facile et tranchante. L ’arret de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L ’institution élective q u iï
annulla , étoit universelle , et réduisoit les enfans du pre
mier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mòre succédoit à Ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœurs consanguins.
Cette mère qui avoit survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession, consistant principalement
en mobilier; et elle avoit d’ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant de son mari, pour réduire à peu
près à rien les légitimes des enfans du premier lit. L ’in
dignation plaidoit la cause de ces victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence appeler l’arrêt qui an n u lla
1 institution contractuelle faite à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
O r , qu’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont il s’agit ici?
L institution de L a p a r ra é to it u n iverselle ; cellc-ci n'est
q u e d u tiers.
La seconde femme de Laparfa avoit survécu à son m a ri,
ets’étoit emparée de toute la succession , pour en détourner
la meilleure part à son profit. Ici la seconde femme de
Gilbert Ducourthial est mortelong-temps avant son mari,
et n’a profité, ni pu profiter de rien dans sa succession.
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
scs enfans, et elle pouvoit abuser du droit d’élire qui lui
avoit été confié, soit pour jou ir, eu retardant son ch o ix ,
E a
�( 36)
soit pour y mettre un prix et des conditions à son avantage.
La secon d e femme de Gilbert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à son
mari ; la coutume qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, l’auroit exclue de l’espoir d’y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’en
fant , dont il lui étoit permis de la gratifier ostensible
ment *, la médiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée, y auroit mis un obstacle invincibleIl n y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. Tout étoit fraude dans l’affaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci j la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
Voilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial a în é , qui s’évanouit.
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement, pour recueillir à défaut d’autre ch o ix , et
l'héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice delà disposition, toutes les fois qu’il
n’en étoit pas déchu, par un choix contraire.
L ’article X X I V de la loi du 17 nivôse, abrogea ces
règles pour Tavenir ; mais il en consacra les effets pour
le passé y en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
seroit devenu irrévocable par le décès de la personne
ayant droit de révoquer. ,
�C 37 )
.
.
, . ..
L ’article vouloit que le décès qui avoit rendu la dis
position irrévocable, fût antérieur au 14 juillet 1789mais cette rétroactivité est rapportée. Il suffit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
révoquer , soit antérieur à la publication de la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourthial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est conifirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
5°. Il reste la principale difficulté à éclaircir; elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en principe, que « la faculté de disposer de ses
« biens, soit à cause de m ort, soit entre-vifs, soit par do« nation contractuelle, en ligne directe, était abolie, et
« qu en conséquence, tous les descendans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
, Appuyés sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette , lui diront sans doute, « si vous
«échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
« parce que le décès de n o tre père est antérieur, au
«moins n’échapperez - vous pas au décret du 7 mars1
«17935 car notre P^re n’est m ort qu’après ce décret1,
« et conséquemment dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de sa succes« sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. » *.
L a réponse est dans les articles I et V II de la loi du
�( 38 )
18 pluviôse an 5 , qui détei-minent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
L793 , en ces termes:
t
çt Les avantages , prélèvemens , précïputs , donations
«entre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi« tions irrévocables de leur nature, légitimement stipuo lées en ligne directe avant la publication du décret du
« 7 mars 1793 ,,auront leur plein et entier effet, confor« mément aux anciennes lois , tant sur les successions
« ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur celles qui s’ouvriront
« à l’avenir. » ( Article I.er )
« Les élections d’héritiers ou de légataires.... qui ont
« été annullées par les articles........ de la loi du 17 nivôse,
«à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant, date
«certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. *
( Article V il. )
L e contrat de mariage du 1 4 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-di$tincles ; sa vo ir , une disposition princi-»
pale, qui étoit une institution du tiers des biens de Gilbert
Ducourthial en faveur de l’un des enfans à naître de son
second mariage, par préciput et avantage, et une disposi
tion secondaire, qui étoit la désignation particulière de
l’aîné des mâles pour recueillit’ ce tiers de.biens , dans lc>
cas où il ne seroit pas fait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition principale étoit pure , sans c o n d i t i o n ,
et irrévocable de, sa nature ,• eUe a,uro.it profité à tous les:
enfans du second l i t collectivem ent, à défaut de- choixvalable d’un seul d’entre eux,, pour recueillir exclusive-
�Trient ; la disposition secondaire , qui appliquent l a vantage du tiers à l’aîné des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et pou voit être ré v o q u ée , par 1 élection. d’un autre enfant.
' Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an 5 , qui viennent
d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
p ale; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
coivformément aux anciennes lois , puisqu'elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
, Quant à la disposition secondaire , elle est maintenue
par l’article Y I I ; car cet article rétablit dans leur effet
prim itif, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 1793, mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la loi du ijn iç ô s e
o-n 2. ; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse, seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée parle décret du 7 mars 179 3 , n’enïportoit pas la prohibition de choisir un d’entre plusieurs
éligiblds, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle , irrévocable de sa nature , qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans Tèspèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîn é, étoit
�. C 4° ) . A
antérieure, soit À la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 1793 ? puisqu’elle étoit contenue dans le contrat
même de 17 7 8 . Mais elle étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant l^;loi du ly nivôse , par le
décès de celui qui seul auroit pu la révoquer par un choix
contraire.
Ainsi la validité, sous tous les rapports, se trouve proüoiiçée sans équiyoque, par les deux textes précités.
O
b
j
e
c
t
i
o
n
.
L a validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
pu problème, à la bonne heure; mais la validité de l’élection.
conditionnelle deil’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
k l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine. Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur;, qui pouvoit jüsqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîn é, par le
choix d'un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
jl est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès, doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eut été
faite le 27 juillet 1793 seulement , jour du décès de Gilbert
Pucourthial père, il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée alors depuis plusieurs mois, en
ligne
�ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
*
•
non avenue.
’
R é p o n s e .
Ce raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i°. C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 , jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778, sous le
prétexte que le décret du 7 mars 17935 lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II d elà loi du 18 pluviôse an 5 ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l'intervalle de la loi du 7 mars 1793, à celle du 17
nivôse an 2 ; il maintient l’effet primitif de toutes celles
qui avoient précédé la publication de la loi du 17 nivôse,
indéfiniment sans exception, sans distinction entre celles
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793, et celles
qui etoient antérieures. Cette décision positive de la lo i,
au surplus , n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les tem p s; car dans tous les te m p s , on a v o it pensé
que celui qui clvoisissoit tin de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition p r é e x ista n te , ne faisoit point une
disposition nouvelle ; et conséquemment qu’il ne contrevenoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
Après cela , qu’importeroit donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîn é, en 1778 , dût
n’être considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne seroit
F
�( 4 0
pas moins vrai de dire qu’elle est‘textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, qui
e n co re une fois maintient indistinctem ent , toutes les
élections antérieures a la loi du 17 nivôse..
20. Les citoyens Ducourthial p u în é s n e se font pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à l’appui de leurs
prétentions le principe d’égalité des partages établi par
les lois de 1793 ^ et de l’an 2. Us ne veulent pas voir
que ces lois n’ont pas été faites pour régler les intérêts des
donataires entre eux, mais seulement pour régler les in—térêts des héritiers légitimes, mis en opposition avecceux des donataires. G’est cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien énergiquement exprimé dans l’articleL V II de la loi même du 17 nivôse, qui porte :
tr Le droit de réclamer le bénéfice de la lo i, quant aux
a dispositions qu’elle anmille, n’appartient qu’aux héritiers.
« naturels..»
Il est reconnu que la disposition, du tiers des biens de
G ilbert D u co u rth ial, qui est l’objet du litige , loin d’êtreannullée,. est au contraire maintenue par rapport aux
héritiers de G ilbert D u cou rth ial, en général; que le con
trat de 1778 , qui la contient , doit avoir sa pleine et en
tière exécu tio n , en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput , au préjudice de la
fille du prem ier lit, qui n’a pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens D u cour
thial p u în és, de plus grands droits qu’à leur sœur ; consé»
quennnent, dès qu’il n’attribue aucune part à cette fille
unique du premier lit, il n’en attribue aucune non plu$
à, ses frère s, sur le tiers des biens en litige.
�C 43 3
Cela posé, ce ne peut ôtre qu’en se présentant comme
^donataires concurremment avec leur frère aîné, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le tiers des biens , et en demander partage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D u«courthial en 1778, h celui des enfans à naître de son
« second mariage qu’il choisiroit, est bon en so i, et doit
* profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait en faveur d’aucun des trois.
« O r , il n y a point eu de choix valable, puisque le seul
«■qui ait été fait, celui qui étoit contenu dans le contrat
« merae de mariage , du 14 mai 1778 , a été annullé par
« le décret du 7 mars 1793. »
Hé bien! ce raisonnement, quand il ne seroit pas ren
versé par l’art. V II delà loi du 18 pluviôse, s'écarterait
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle généiale, que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
pi ohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héiitiers naturels en leur qualité d’héritiers seulem ent , et
non Par des donataires contre d’autres donataires. En
un m o t, les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu’en faveur des héritiers ; aucune n’a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen D ucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père com m un l’a avan-
'
r 2
�C4 4 )
tagé par l'acte le plus favorable de la société , par un contrat
de mariage : d’un préciput qu’il pouvoit lui ôter, mais
qu’il a voulu lui conserver. En vain ils feront des efforts,
pour se l’évolter contre la volonté paternelle , ils n’en;
feront que d’impuissans.
Paris par le jurisconsulte ancien sous-signé, le 8 germinal an g..
B E R G 1E R ,
D
é l i b é r é
à
L e C O N SE IL SOU SSIGN É qui a vu le mémoire à.
consulter et les diverses consultations au bas rapportées,
pour le fils aîné du second lit. de feu Gilbert Ducourthial.
de Lassucliette
des résolutions contenues d&ns ces consul-' tâtions. Trois questions y ont été traitées..
i° . Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens
faite en faveur des enfans du second lit, est valable?
2°. Si cette institution profite à tous les enfans} ou*
¡»u fils aîné exclusivement?
3°. Quels sont lés droits de la fille du premier lit?
L a première et la troisième question ne présentent
point de difficulté sérieuse..
Lors du contrat de m ariage, l’inégalité dé succession,
entre les enfans n’étoit pas prohibée; ils pouvoient être
" avantagés les uns sur les auti’es : on avoit éclairci et con
damné le doute , si des enfans du second lit pouvoient
être mieux traités que ceux du premier. Le contrat du,
E s t d ’a v is
�second mariage assura donc irrévocablement aux enfans*
du second lit ua avantage alors licite.
20. Par les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant, de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa ,
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avi'il 1791 rendit
ee rappel inutile; elle le fit clle-mcme en> prononçant
l'abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permet
taient d’exclure les filles. La fille du premier lit est donc
héritière comme >les autres enfans , sauf le rapport.de ce
qu’elle a reçu;
3 • Mais à qui appartiendra le tiers réservé dans' le1
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat a celui d’eux qui seroit choisi ,
et à. défaut, à lam é?, G est la seule question véritable-'
ment litigieuse..
Bans l’ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute. Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîné, que le contrat du
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit j le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna ii aucun des enfans à en. naître la.certitude de re
cueillir ce tiers. Uni seul y. étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant. Il est vrai
qu’à défaut de ch oix, l’aîné étoit appelé : il est vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an 5 , a confirmé , art. 1er. ]es
institutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de la loi du 7 mars 1793 , et que par l’ar
ticle V II, elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17
nivôse an 2 , les élections d’héritier, qui auroient été fa i-
�( 4M
tes par acte ayant diue certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse.Mais, dira-t-on, l’article V II n’est pas
a p p lic a b le , puisquil n y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et 1 article Iei*. n’est pas applicable
non plus , parce qu il n y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
■
7 mars 1793 , lui avoit ôté la faculté du ch oix, en dé
clarant que tous les descendans auraient un droit égal
sur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont e u , par la loi du
7 mars, un droit égal à ce préeiput qu’il avoit destiné
en se mariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus
été permis depuis le 7 mars 1793-, de disposer en faveur
de l’un, au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à ses parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués, et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
Mais le choix fut placé-dans l’institution même ; l’ins
tituant en se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut donc, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir,'si son père ne disposoit pas au-
�C 47 7
trement. H avoit donc sur ses frères qui n’étoient qu e ligibles, l’avantage d’être élu conditionnellement', c està-d:re, si le père ne térrioignoit pas une autre volonté.
La condition qui Tauroit dépouillé n’étant pas arri
vée , son droit remonte au titre qui lui fut donne par
le contrat, titre irrévocable de sa n a t u r e ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé a laissé subsister
^institution en faveur de l’aîné dans toute sa force-.
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com
mun des testateurs, l’aîné étoit l’objet dés choix et des
préférences; et si l’on se réservoit de p o u v o i r appeler
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans
le devoir que pour lui donner- des co-partageans. C’est
dans la même intention qu’afin que la réserve derchoisir
ne lui nuisît pas,, on déclaroit qu’à défaut d’élection il
seroit héritier.
L e défaut d’élection n’est donc que la ratification de
*|V •
linstitution de l’aîné, si un autre n’est appelé : o r, la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con-,
trat à. la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,
et nullement par la loi du 7 mars 1793^
Il
n’est pas même vi'ai que - cette loi eût ôté au père
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un
de ses enfans qu’à l’avenir , elle ne détruisoit pas
l’avantage déjà fait à celui des enfans qu’il éliroit, encore
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , en
cas de non élection.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir,
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre
.
�( 43)
irrévocable, elle ne pouvoil embrasser l’hypotlièse dont
il s’agit; car, ou elle empechoit le père d'élire, ou elle
lui en laissoil la faculté. Si elle lui en laissoit la faculté, il
pouvoil donc dans cette espece particulière avantager un
de ses enians : si elle empêchoit l’élection, elle auroit donc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde; elle auroit eu eiTet ré
troactif. Le père avoit donné. (U n e institution contrac
tuelle est une donation ). Le père avoit donné à un seul
parmi les enfans qu’il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il 11 y
avoit pas d’élection-, il y en avoit une bien expresse dans
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en
substituer une autre, elle doit avoir son effet.
Trois lois sont à considérer : celle du 7 mars qui abolit
pour l’avenir la faculté de disposer en ligne directe ; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures .et irrévocables.
La loi du 17 nivôse fut plus hardie', elle annulla ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
]e f4 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l'effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2, fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi jdu 9 fructidor an 3. Le donateur ou instituant,
décédé le 27 juillet 1793 , est donc mort sous l’empire
de la loi du 7 mars précédent, qui ne touchoit pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an 5 maintient expressé
ment , par l’article I.cr. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avaut la publication do
la
�( 49)
la loi du 7 mars 1793 ; et par l'article V I I , elle maintient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi du 17 nivôse.
O r , la disposition de 1778 est antérieure au 7 mars
* 793Elle est irrévocable de sa nature ; car elle est comprise
dans un co n trat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvoit être révoquée au préjudice
de l’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du choix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’institution en soi ne soit irrévocable: elle donne droit, et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne l’est pas : tous les
appelés ont l’espérance d’être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
L article V II de la loi du 18 pluviôse est décisif j il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses •
1 °, que l’élection antérieure au 17 niyôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 20. qye la loi du
7 mars 1793 n’avoit pas prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d’actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations, ou devenus tels par les événemcns, tels
G
�( 5o ')'
que les testamens après le décès de leurs auteurs ; que les
élections ne furent supprimées que par la loi du 17 nivô>e,
et que les corrections faites ù.cette loi les out rétablie^ pour
le passé.
> 7^1
. '
-’ .
O r , il s’agit ici d’une donation faite un entre plusieurs:
donation irrévocable et permise en 1778.
Il
s’agit de l’élection de ce donataire , faite dans la dona
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
Avant son décès arrivé en juillet 1793 , ou il eût pu en
appeler un autre , ou il ne l'auroit pas pu. A u premier cas,
il 11e l'a pas voulu ; sa volonté , que rien, ne génoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, l’élec
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit pas, doit être exé
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit : elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le contrat de mariage. Le dépouil
ler , ce seroit rétroagir ; ce seroit tomber dans cette absur
dité de le dépouiller , parce que la condition sous laquelle
le testateur l’avoit appelé ( le défaut d’autre ch o ix ), est
arrivée.
D É L IB É R É i\
Paris, le
2
germinal an 9.
SIM É O N . P O R T A L IS . M U R A I R E , président
au tribunal de cassation. F A V A R D .
L E C O N SE IL SO U SSIGN É , qui a lu une consultation
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données ¿1 Riom et à Clermont-Ferrand \
E s t n u m ê m e AVIS sur les trois questions traitées dans
çcs co n su lta tio n s, d o n t les résolutions sont uniformes,
�( Si )
Sur ïa première question, il est sans difficulté qu en 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde femme, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
autrement, un de ses enfans plus que l’autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
La jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui contractoit un nouveau mariage, ayant des enfans du premier,
de faire des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union, après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du it août 1740 , qui
est rapporté en forme avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
79. On trouve au même en droit, à la suite de l’arrêt du 11
août 1740 , un autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L institution d’héritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , étoit donc valable dans son principe.
Sur la d eu x ièm e q u e s tio n , cette lib é ra lité du père subsistoit dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est décédé, et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales:
G 2
�.
c
S
z
5
mais cette loi ne régloit que l’avenir, et non le passé.
L ’effet rétroactif attribué depuis aux lois des 5 b ru
maire et 17 nivose an 2 , en rétrogradant jusqu’au 14
juillet 1789, a été aboli, et par conséquent l’institution
d’héritier, qui avoit été détruite, est redevenue en pleine
Vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second lit , les autres
enfans ne peuvent le lui contester.
L e contrat de mariage de X778 ,. contient deux disposi
tions :1a première est une institution d’héritier pour untiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
ou le survivant d’eux voudront choisir ; la seconde est
une vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils aîn é, au défaut de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N ’y ayant point eu de choix ni par les père et mère,
conjointement, ni par le citoyen Ducourthial qui a sur
vécu , le fils aîné s'est donc trouve seul donataire, non,
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que le contrat de mariage renferme.
La loi du 7 mars 1793 n’a point défendu les élections
d’héritier ou de donataire à faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d’héritier ou de donataire n’est
point une donation proprement dite. Ce n’est que l'exé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions
sont de. droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1793 doit donc être restreinte dans le cas des.donations
postérieures à sa publication.
* I>’aillcurs; le fils aîné n’avoit pas besoin detre élu. Il
�(
6
3
)
•
•
.
tStoit institué éventuellement par le contrat de mariage
m êm e, dans lc'Càs où üri'aüttû que lui ne seroit pas
nommé.
i
v
r k afn i Vàrticle V II de ta loi du ià pluviôse an 5 , donnée
en explication du rapport de l'cfîet rétroactif, porte : « T^S
« élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
«perdu q u io n t été annullées par les articles X X III et
« X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
« 1789 , sont rétablies dans leur effet prim itif, s i elles ont
« étéfa ites par acte ayant date certaine avant la publi« cation de ladite loi du 17 nivôse. »
D e pareilles élections pouvoient donc s’effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l’espèce proposée, le citoyen
Ducourthial étant décédé le 17 juillet 1793, quand on
considéreroit le défaut de choix de sa part comme une élec
tion du fils aîné du second l it , cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les pèi*e et m ère, ou le survivant d'eux, n’éliroient pas:
ce qui met son droit hors de tout doute.
Il est m êm e o b se rv e r, q u e l’article V I I de la loi du 18
pluviôse ne parle point du cas où le donateur prévoyant
le défaut d'élection, a désigné éventuellement, comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fut recueillie.
Sur la troisième question, la fille du premier lit étant
exclue par la coutume, sa renonciation à la succession
future de son père n*a pas plus d’effet que lu forclusion
�( 54 )
légale. A in s i, elle a le droit de succéder avec ses frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793.
D é lib é r é
à Paris i par le citoyen F e r e y ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
F E R E Y,
** I
A R io m , de l'imprimerie de L a n d r io t , imprimeur du tribunal
d ’app
e l
An 9
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9]
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Touttée
Touttée jeune
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Pagès
Maugue
Bergier
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
partage
successions
secondes noces
conflit de lois
droit d'aînesse
Description
An account of the resource
Consultations [contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette avec Marie-Léonarde Cornudet et contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte Ducourthial, du 2 avril 1783]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1778-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0710
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Relation
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BCU_Factums_M0527
BCU_Factums_M0127
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droit d'aînesse
partage
secondes noces
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CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture, i°. du
contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
avec Marie-Léonarde Cornudet, du 14 mai 1778 ; 2°. du
contrat de mariage de Marie-JosephMaignoI avec Gilberte
Ducourthial, du 2, avril 1783; 30. d 'un mémoire à con
sulter ;
E s t D AVIS q u e , d'après les anciennes et les nouvelles
lois, le premier enfant m âle, issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec M arie-Léonarde Cornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son p e re , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
noces, il avoit épousé Marie-Gabrielle de Villette. D e
ce premier mariage issut Gilberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen Maignol.
A
�C* )
En 17 7 8 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
noces, Marie-Léonarde Cornudet.
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert Ducourthial r futur époux, institue
héritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un,
des enfans qui naîtra du présent mariage , et ce par préçiput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que les futurs choisiront conjointement,
par quelques actes que ce soit, ou qui sera Ghoisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit ;
et en cas que le choix ríen ait pas été fia it, ladite ins
titution sera au profit de Taîné des m âles, s’ il y a des
m â les, et s'il 71y a, point de mâles, au profit de Taînée
des filles.
D e ce mariage sont issus trois enfans mâles; G ilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793*
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant ; ni l’un ni l’autre n'ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, le fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés,
par le contrat de mariage de ses.père et mère.
L ’édit des secondes noces, de ï o, qui ne permet pas
à ceux qui se remarient, et qui ont des enfans d’un premier
lit, de se donner réciproquement au delà de la portion de
l’enfant le moins prenant, avoit fait,naître des doutes à cet.
égard: on craignoit sur-tout en droit écrit, qu’en faisant:
de p a r e i l l e s institutions, ce ne fût un moyen de frauder laloi ; mais la dernière jurisprudence, fixée par diiïérens ar
rêts , dont l’un du 29 avril 1719 , et l’autre du 11. août 1.740,,
56
�3
(
)
rapportes par Lacombe, est que de pareilles dispositions
Sont valables. C etoit aussi la jurisprudence de la ci-devant
sénéchaussée d’Auvergne. Le dernier commentateur de la
coutume, tome II, titre X I V , art. X X V I , page 354, rap«
p o r t e une sentence du mois de juin 1773, qui confirme une
institution d’héritier, en faveur des enfans à naître d’un
second mariage. A in si, en ne consultant que l'ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput,le tiers des biens qui'lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est de principe qu’un don fait de cette manière,
n’est pas sujet à rapport, même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à. la récla*
mation des exposans: on peut même dire'qu’elles décident
la question en sa faveur.
Il est vrai que d’après les dispositions des art. X X III et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 v e n t ô s e de l’an 2 élection
laissée au choix de l’un des ¿poux éLoit nulle, si elle n avoit
été faite que le 14 juillet 1789 etdepuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité à la succession
de cujus.
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du brumaire précédent, puisqu’elles ont été
armuUées, quant a leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4, soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourthial, à l’effet de savoir si à cette époque, il existoit
quelque loi qui pût empêcher l’effet delà disposition faite
en faveur de l’exposant, par le contrat de mariage de ses
père et mère : or, il n y avoit pas alors de loi qui eût pros
A 2
,1
5
�4
C )
crît de semblables dispositions, et annuité des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d’avoir exercé
la faculté d’élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
11 y en a pas depuis, attendu l’abolition de l’effet rétroactif.
La loi du 7 mars 179$ > antérieure au décès de Gilbert
Ducourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n'est relative qu’aux dispositions futures, n’a~
néantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, et nroblîgeoit point les père et mère à les révoquer : or , ce n’est
point en vertu d une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793 , que Fexposant réclame le tiers des
biens de son père, comme un d'on qui lui a été fait en pré
ciput; il le réclame en vertu d’une disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu d’une disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
En effet, l’article premier de la loi du 18 pluviôse der
nier, porte: « Les avantages, prélèvemens, préciputs, dô« nations entre-vifs, institutions contractuelles, et autre»
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
* stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du*
« 7 mars 1793, et en ligne collatérale ou entre individus
« non parens, antérieurement à la publication dé la loi du
k
brumaire an 2, auront leur plein et entier effet, con« formément aux anciennes lois , tant sur les successions
k ouvertes jusq’uà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir ».
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans nn contrat de mariage, passé antérieurement à la.loi
5
�1793
\
,
c ,5 ) .
du 7 mars
5a
d election de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroitdu mariage : il n’y a pas eu d’élection; les père et
mère sont décédés avant les lois des brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle ; il doit par
conséquent en profiter.
L e père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette-loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature 7 ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée f si l’on fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l’avenir \ qu’elle n’anéantit pas.
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. (A rt. X X V I de la loi du 22 Ventôse).
O r ,l’avantage dont il s’agit, est assuré à exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation delà loi du
rj mars 1793; mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni par la loi, doit donc
avoir son effet, puisqu elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mere avant la promulgation des lois des
brumaire et 17 nivôse'de l’an 2C :
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté , qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la même loi du 18 pluviôse dernier:
Celarticle est ainsi eoncu
9 :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
5
1
5
•
|
•
�.
C;6 .) ,
« fonds perdu, qui ont été annullées par les art. X X lI et
« X X V d e la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet 1789,.
«sont rétablies dans leur effet prim itif, si elles ont été,
« faites par acte ayant date certaine avant la publication d e|
« ladite loi du 17 nivôse ».
•
• Des termes de cette loii? il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à celle du 7 mars 1793, doivent être
maintenues: ainsi, 1 exposait étant, saisi de 'l'effet de l’insti
tution par le décès de son père, arrivé avant la publication
de la loi du 17 nivôse, on ne sauroit lui contester légitime
ment l’avantage qu’il réclame.
D é l i b é r é à R iom le -14 germinal an
5 de la république
française une et indivisible.
•
.
TOUTTÉE, TOÜTTÉE, GASCHON.
/
L E SOUSSIGNÉ qui a vu la consultation ci-dessus et
des autres parts j '
ques’il n’est pas impossible de tirer des lois nou
velles , quelques inductions favorables aux enfans du pre
mier lit de Gilbert Ducourthial, les
déduites dans la
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup à faire incliner en faveur de l ' e x p o s a n t . On peut rnême
a j o u t e r a u x r a i s o n n e m e n s d e l a c o n s u l t a t i o n . E u effet, en
supposant que par le d.éjjaut d’élection, fait antérieurement
E stim e,
r a i s o n s
�7
'
(
)
'
à la loi du 7 mars 1793, la disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable; c’est que le
contrat de 1778 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’eux ,emporteroient dans sa succession uu
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C’est sous la foi de cette promesse irrévocable,
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; p ar
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d’examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
enfans du. même p è re , en se référant à celle du 7 mars
793
I
><Iue ce dont le père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n’ont pas même entendu faire,
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de meme que
Ducourthïal père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second lit , de même les
lois nouvelles ne sauroient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
D é l i b é r é à Riom , le 14 germinal an
.française, une et indivisible.
5 de la république'
•
D E VAL..
V
�MÉMOIRE A CONSULTER
\
,
ET C O N S U L T A T I O N .
i_ iE citoyen Titus s est marié deux fois 5 il a eu de son
premier mariage, avec dame Marie L a u r e tte , u:ie fille
nommée Gilberte , et de son second, avec Suzanne Dailly
trois erifaiis , Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de mariage , Titus a institué pour son
hé ritier du tiers de tous ses biens présens et à ven ir, l’ un
des enfans qui naîtroit dudit mariage , et ce, en préciput
et avantage; laquelle .institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce fût, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fût ; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fait, ladite
institution-profiterait à ta în ê dès mâles ; et s’il n y a pas
de mâles , à l’aînée des filles. Telle .est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur ù la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de i ,oooliv., payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
pus f sans intérêts qu’a défaut de payement terme pac
terme j
5
�9
Ç ')
terme ; .et,,moyennant.ce.tte, çonstïtutîqn., ii^ fut stipulé
qu’qllp denp£ureroit forclose.de j t au tes;suçcesçjons directes
et collatérales de 1 estoc paternel, sous la réserve qu’il .-fit,
de la rappeler auxdifes,successions,par quelquacte que ce
fû t; ce,t,acte e s t d e ,i ^\ tl . ‘
T itus, père com m un,,est mort le 27 juillet 17.93;.la
mère est morte ,avant, sang avoir fait de choix de. l’uri des
enfans. Il s’agit m^intçnant de.savoir., ï ° . -si,cette, insti-,
tutiov h•-‘Atractuelle es t. valable en faveur des enfans ch*
second lit;
•
jm >
>«i . . *
2°. Si, en le supposant, n’y ayant pas eu d’élection de la
part des père et, mère ?1c’est' l’aîné mâle qui. doit .en pro
fiter j
j
(
j'.jr
3°. Quels sont les droits delà fille du premier,lit dans
la succession du père commun ? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle avoir son effet ?
. ''
• Enfin j y. ayant ,des enfi^ns.mineurs, quelle doit etre la
forme du partage? , * j
: 1 ; p '
-
78
:
'
'
” " CON
• 1•
» ».
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S ü L T A T I O N;
r.
■il') noii1" ^ . jJ >■
)
L e co n se il s o u s sig
contrats de mariage dônt'il s’agit,
E s t i m e , sur
:
n é
; qui a lu lès deux
* ■
les questions proposées,
_
■. <■
.
jp. Que^’institutionjcontractueile^faite par un.père dans
son second contrat de mariage au profit des pnfansjà naître
çl’icelui, est valable et ¿Qit avoir son exécution.
B
~
�.
.
( '1 0 l
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs¿
et il paroît qu’elle a été diversement jugée par' les tribunaui'.:, j
:
>
Ceux qui ont soutenu qu’elle étoit nulle, se sont fondée
sur ce que les enfans du second lit, n’étant encore sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
ni de haine, les dispositionsjqiië l’un dès conjoints fait
en leur faveur /ne-sont censées faites qu’en contemplation
de l’autre conjoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d une portion d’enfant, l’on a voulu
éluder la loi par une disposition indirecte -, et que d’après
l ’édit des secondes noces, lô n ne poüvóít donner aux
pères, meres et enfans du second mari ou autres personnes
par'dôï et fraude interposés.’
■
Une femme, dit Chabrol, qui iïe peut pas profiter de
ces libéralités pour elle-même, ha pas moins d’empresse
ment à les procurer à ses enfans à naître; s’ils lui survi
v e n t, ils ont ce que leur mère n’auroiï désiré avoir que
pour eux ; et s’ils lui prédécèdent, elle peut retrouver
souvent, dans leur succession, les biens qu’elle leur a.
procurés.^ v ‘
.
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i
,
rapporte par Montholon.
i
588
L é second qu’on írouve;dansiSoe{Ke >''du
juillet 1645.
Un troisième recueilli par ïirodeau sur L o u e t, L . N.
somm. 3 , du gsa'oíit
1
• ~Le'quotrièmü , 1qu’ôii t^bliVé au rjourilal dû Palais ,
dn.7'iséptembre 1673.
1
■
E n fin / ’celu i‘cirtinü soüs le hcUn ’ de LiâpaV'rà j du 18
�( H >
mai 1736, rapppr^ paritr % m e de^GraifiyilIe. T o u s,
dit-on, pot an nulle des çh^positioiis fîûte^ en faveur des
enfaus à naître ¿ ’un secpnd ¡mariage,
.
,, IV^is si l'on se donne la peine d’entrçr en connoissancç
de cause de ces jugpmerçs, on s’aperçoij: bientôt qu’il^
sont rendus sur des circonstances particulières, et n’ont;
aucune application, à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de Montholon , d’après ■
Rousseau dç
la C om be, n’a p^s jugp Iq. question. ? Il s’est trouvé ,
« dit-il, ¡y.erio'j^ocps, qu’ils’agissoit d’une donation faitç
« non à des enfqns d’un second lit , mais ià des colla,
c téraijx. »
'
■
Celui de 1645 paroît ¡avoir jugé qu’une mère remariée
n’avoitpu donner auxenfans du second mariage se^ meubles
et acquêts1, et le quint de ses propres, au préjudice des en fans
du premier lit, dont la légitime n’avoit cependant pas été
blessée; mais indépendamment de l’injustice évidente qui
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume diffé
rente de celle-ci, où les père6 et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs finfans.
'
Celui de 1647 se trouve dans tous les recueils ; il fut rendu
çonsultis çlasçibus • ilanjiull,a une donation,contractuelle,
faite au profit d.enfans à,n aître, par une femme qui se
remarioit; maisBrodeau, qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation était .tout-àrfait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite h l’exclusion perpétuelle des enfanf
du premier lit, au point qu’à défaut d’eniàns du secontf
Üt, les collatéraux étoient appelés.
.
Il n est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
annullée; i° . elle étoit faite ab iratoy et 20. comme l’obB 2
�.
.
,
.
(
«
)
.
.
.
.
.
.
serve Chabrol, il estévidènt que le mari avoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
contractuelle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it, suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
de son gendre, « et aü cas qu’il n y ait pas d’enfans , lesdits
« biens appartiendront audit sieur de Saint-M àriin seul \
tequi etoit le'futur époux, et aux sien s, sans que les eni’ans
« du premier m ariage, n i les héritiers de laditefu tu r e y
« -puissent rien prétendre n i demander, sinon que ladite
« Guilbou, s i elle survit ,•duquel cas elle jouira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour
« lieront au x héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrêt de 1673, a bien aussi annulléune donation faite
aux enfans à naître d'un second mariage; mais elle avoit
pour principal objet la femme 5 c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit: « au fa itp a rticu lier,
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
* du palais, il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère 5 c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la pa'ssion extrême qu’avoit
« pour elle le sieur de Têrsam , a1été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
»qu'il ne pouvoit encore aimer. »
’
Cela est si vrai que Rousseau de la Com beyqui rapporte
aussi cet arrêt!/verbo Noces, s’en fait' un moyen pour prou
ver que les enfans communs, nés oü à. naître,'ne' sont point
compris dans la prohibition,, pourvu qu’ ils n aient servi
de prétexte pour donner aü second conjoint,
'
E nfin, l’arrêt de 1738 de Làpàrta, a été rendu en pays
�X3
. . .
.
•., •.
(
) .. •
He droit écrit, ou la mere succède à son enfant: ; en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition étoit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; le3
parties et leurs biens étoient régis par une coutumç qui
exclut les ascendans de la succession desdescendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
déclarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second mariage, entre le pays de
droit écrit, et celui de coutume.
1
Dans le prem ier, la seconde femme peut etre I objet de
la libéralité d’un mari ; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eux, à moins qu’il n’y
ait aucun parent de la ligne ; et dèslors la prohibition ne
peut plus exister, puisqu’il n’y a plus d’intéressé.
Mais ce n’est pas seulement avec des raisonnemens tran-clians qu’on veut écarter les préjugés que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement form ée, soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in term inis‘y sort
par lés nouveaux; et la presqu’universalité des auteurs,,
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bieù pro»'
nonéée.
-
�.
.
. f *4 )
L e premier arrêt qui ait admis l’institution d’héritier en
faveur des enfans à naître d’un second mariage, est rapporté
par Chopin, liv. 3 , chap. ie r. lit. 1e1'. sur la coutume d'An
jou , en date du 7 septembre i y .
.
•
Le second, du 19 juillet 1659 , rapporté par R icard ,
Traité des Donations,, partie 3 , n°. 1243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite
à des enfans à naître, par un troisième contrat de mariage:
c’est l’arrêt des Lagrange, On demandoit la réduction de
la donation ? conformément à led it des secondes noces. La
disposision fut confirmée pour le tout.
L e troisième se trouve au Journal des audiences , soug
la date du 29 avril *
? ^ fut imprimé dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en fayeurdesenfansü naître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
L e quatrième est intervenu le 1 1 août 174° >au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Combe >
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrêt, Jacques de Gagnou
de V ilèn e, lieutenant général des armées, figé de soixantequinze ans, qui avoit un fils du premier lit , convolant eu
secondes noces avec dame Claude-Antoinette Passé, avoit
donne auxenfansde ce futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui permettoit de donner à ses enfans puînés. L3.
donation a été confirmée en faveur'des enfans du second
.mariage, quoique la dame Dassé eût la garde’-iioble de
¿es enfans»
■
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui se remarie, peut donner ¿ses enfans du secprid lit *
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans comipuns,
55
7*9
�. .
a
...
c 15 )
nés ou à naître, ne sont pas compris dans la prohibition,
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
se remarie en pays de droit écrit, la donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
faveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas à un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
une exception au droit commun. Tout le monde connoît
les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C ’étoit une dame d’-Alègre, quiavoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire ]a condition d’un enfant
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par des
considérations d'honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du Journal du palais,
dans la cause jugée par 1 arrêt de 1673? «que les législa% teurs qui se sont particulièrement attachés à former des
« obstacles aux secondes noces, n’eussent point parlé des
«enfans, s ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition; mais ils n avoient garde de penser ¿i eux ; il
« y en a deux raisons sans répliqué. »
«La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autoi’isant les secondes noces,
« elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
�.
i . 1? )
« en naissent, clans ïapossession du droit commun ; c’est-âe dire., que comme ces enfans ne' sont pas encore au monde,
•i ; a i •>.,
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venir pa'rune. voie
légitime , la
ij.;-.. :i ■ . ,
) ... . .¿i) y -i>• •>*?. •, • - i ' •
« loi ne peut pas avoir pour eux de 1indignation, qu elle ne
‘» fonde jamais que sur un démérite naturel ou.moral. .
«L a seconde raison^est, que l’ordonnance ne,peut com
te prendre les enfans communs dans la prohibition, que par
« les mêmes motifs qui y ont donné lieu, savoir , en faveur
a de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
« mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
çc innocente des enfans, et sur-tout dans des
enfans à naître,
1
qui n’ont que suffrage de la nature qui parle pour eux.
« Il ajoute que presque tous les docteurs avaient décidé,
« que la loi hâc echctati, et led it des secondes noces, rje
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
p excité 1a libéralité des pères et mères, par leur mérite, par
<r leur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
p que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
« que leurs pères et mères pensent à eux avant leur naisr
«sançe , et qu’ijs se les représentent, comme s’ils étoient
«effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
« contrats de m ariage, les enfans à naître ont ordinaire?« ment la meilleure part, » ,
Brodeau sur I^ouet, lettre N , somm. 3 , n°. 12 , a traité
également cette question: « Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l'édit des
« seconds noces a lieu , non seulement A l’égard des con
j o i n t s , mari ou fem m e, mais encore des enfans d\i
« premier ou du second mariage....... Mais néanmoins il
. « est
’
J
.
* î .
i
.
�*7
(
)
« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu'à Tégarâ
« des enfans du premier lit de 1 un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et même personne avec
c leurs père et m ère, et qui est dans la prohibition de l’édit
« et non des enfans communs issus de leur mariage, qui
c sont capables de recevoir toutes sortes d avantages,
c s a u f la légitime au x eirfans du -premier h t , si la cou« tume ne dispose du contraire; la présomption naturelle
k étant que la mère faisant la donation, est plutôt portée
k par l’afFection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
c le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. de secundis
nuptiis, queBrodeaU rapporte, décide cette question dans
les termes les plus formels : «■potest vidua dare, non pro« vigno sedjilio communia nato ex secundis nuptiis :licet
« sit eadem ratio , non tamen idem j u s , q u ia jilio com« m uni ut donet mater naturatis a ffectio fa cit provigno
« ut donet noverca, maritalis ajfcctus J 'a c it, noji certè
« nover'calis; provignum non semper accipiam pro per~
« s a supposita, sed excogitatamfraudem edicto inspi*
« cabor in provigno , non in jilio com muni. »
Brodeau cite les deux arrêts de iôgô et de 162.6, qui
ont confirmé de pareilles donations.
072
L ebrun , traité des successions, liv. 2 , chap. 6 , spet. ire>j
distinction 2, est du même avis: « L e second conjoint, dit—
« i l , est la premiere personne prohibée, et nulle autre ne
«r l'est qu*à cause de lu i.........Q n demande si les enfans du
tf second mariage sont compris dans cette prohibition, et il
« semble qu’ils n’y sont pas compris: car, si d*un côté on les
,c considère comme les euians du second conjoint, de l’auG
�( i8 )
« tre, on les peut regarder comme les enfans de celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
* de ses libéralités ».
« Si les enfans de celui à qui il est défendu de donner, sont
t< dans la prohibition; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner «\ ses propres enfans......... I l faut prendre en
« toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
« que ces donations se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions.. . . Aussi nos
« docteurs, entr autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
te cod. de secund, nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n’étoit pas compris dans l’édit; ce que j’estime
« devoir avoir lieu, pourvu que les enfans n’aient pas
a servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color non fu e r it quœ situs, comme dit la loi item s i 7,
«jf. de sénat. Maced. et particulièrement pour l’espèce
« la loi suspitius 4 9 , j f . de donat. item si color vel
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœ situs, n ih il
« valebit traditio ; id est, si hoc exigit u xo r, ut aliquid
« ex ea re intérim commodi sentiret m antus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu?en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari,-à cause de la puissance pater
n e l l e ; mais que hors ce cas particulier, les donations
J'aites au x enfans comm uns, ne sont pas réputées com
prises dans ledit.
'Enfin, le derniercommentateur.dela coutum ed’Auver
gne, traite aussi cette question dans le plus grand détail,
�*9
(
)
et après avoir tfappôiHé les- arre(s>pnur et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière Jurisprudence paraît
décisive pour la validité de ces dispositions.
« Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740, ont fixé la juris
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruit pas,
g puisqu’il est dû à la cii’constance particulière du choix
« laissé à la seconde fem m e; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
c pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
«venu des successions et donations en ligne directe, >et
c où les dispositions en-faveur d’enfans à naître sont assez
a fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en
« î&mpersonnes prohibées, 11e s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints, avec qui le mariage se contracte, et il
« suffit que la disposition puisse s'appliquer à d’autres causes
« que l'impression du conjoint, pour qu’eHe doive a'voii
« tout son effet. On'doit plutôt rapporter la disposition â
'« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
ce combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, corn
et ment un second mari pouvant profiter directement au
«moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
« à naître seroient dans une plus grande prohibition que
« lui. Il nous sembla donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition, sauf les exceptions légitimes
« dans des cas ou il est visible que le donateur n’a eu d’autre
« motif que 1 impression et la suggestion du nouveau con« joint ou la volonté de l’avantager lui-même. »
Ainsi d on c, il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune, faile par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
C a
�.
,
(
2 0
5
.
-
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement de la disposition, puisquen cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoient succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien j puisque la femme navoit pas d autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice. Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps 5
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas yni l’un ni
l’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d’une disposition universelle ; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d ’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au projit des m â les, à l’exclusion des.
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
.mariées par père et mère^
‘ Tout concourt donc, bn le répète, à rendre cette dispo~
silion inattaquable. Le droit d’é lire , accoi’dé au survivant}
dans le cas où il n’auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne change rien à cette décision, parce qu’il n’en résul
tait au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première,, ce qui est réellement
-arrive , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mariII y a même plus, c’est q u e , sans les nouvelles lois, le
consultant n’en auroit pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle étoit forclose * moyennant la dot à elle
�constituée? et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de;
son père sans y être rappelée ; et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
m ent qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis h l’aîné mâle du second lit, une
succession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
Seconde
Q uestion.
jV y ayant pas eu à*élection, tous les enfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition,
- ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question
peut avoir été controversée dans les temps
Voisins de la loi du 17 nivôse an 2., dont 1effet rétroactif
avoit tourné les têtes j mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L ’art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , «• avant ou depuis le 14 juillet 1789, auroit conféré
<r au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« héritiers dans ses biens, l’élection, si elle n’a eu lieu que
«le 14 juillet 1789 ou depuis, demeure nulle et de nul
« effet; et tous les héritiers présomptifs, au préjudice des
ri quels elle auroit été faite, sont, nonobstant toute exclu« sion, appelés à partager la succession de la même manière
* et par les mêmes règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. »
L ’article suivant porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier ? néanmoins subordonnée au cas.
�■
.
-
,
,
.
« où un tiers ne (ïïsposcroit fpâs autrement des biens comcc pris en la même institution , sont nuls et de nul effet, k
te dater du 14 juillet 1789, si à cette'époque le droit "de
« l'institué n’étoit pas devenu iri-évocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée aveclui. »
Mais* i° . cette loi ne peut avoir d’effet rétroactif ; les
lois des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an , ont c o n f i r m é toutes les dispositions irrévocables
de leur nature-, faites avant la publication de la loi du 7 mars
179 3,qui a défendu toute espèce d'avantage enlignedirecte,
ainsi que les élections faites avant la publication de là loi du
i 7 nivôse an 2.
I/article V i l de la loi du 18 pluviôse an , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
a an 2 , à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
«c date certaine avant la publication de ladite loi du
« 17 nivôse. »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dernière loi.'
Dans l’espèce particulière , la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est morte avant la révolution,
et le père, le 27 juillet 1793 '• la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession 3 il
faut juger linstitution dont il s’agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L ’on n’a pas oublié qu’à défaut d’élection , c’étoît lui
qui étoit appelé à la recueillir; et la mort du père, sans
l’avoir faite, équivaut à un acte qui la contiendrait,
5
5
�\
23
.
f
)
Ces principes anciens n’ont point été altérés par les
nouvelles lois, parce que la succession sest ouverte avant
et dans un temps u tile; et on peut d’autant moins'les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs
et sur-tout par Ricard, traité des donations , partie ire
chap. 3> section 12, n°. 572 et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un,
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers, comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’élection
« qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu’u n , mais seulement le choix de la persomie
« entre un certain nom bre, ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui rogatus e s t, positum est om ninb, an velit
*c restituere , sed q u i potiùs restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé h l’au
dience de la grand’eham bre, par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’autrui, quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterm iné,
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
' personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au moment ou il écriyoit ? particulièrement dans lé
�. , .
? 24 ) . •
ce pays de droit écrit, où les maris et femmes ont coua lume de se déférer entr’eux cet honneur, de laisser
te au survivant la liberté de choisir un héritier unicf versel entre leurs enfans ; ce qu’ils -pratiquent par le
r principe d'une sage politique , et afin de transmettre
ce toute la puissance entre les mams de celui qu i survit,
» ‘it lui conserver, Par ce m oyen, le respect de ses
» enfans. »
L 'on voit donc que les principes anciens valident l’ins
titution dont il s’agit.
Les memes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas ou le tiers, chargé d’élire,
ne feroît pas de ch o ix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement un des éligibles pour recueillir sa dis
position , à défaut d'autre ch o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par le x tinction du droit d’élire, ou par la mort du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite.
•
E n fin , les nouvelles lois , au lieu de contrarier les
anciennes sur ce p o in t, ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l'on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la publication de la loi du T7 nivôse : ainsi l'élection,
auroit pu valablement être faite jusque - là , t’t par la
même raison , l’aîné mâle avant été d é s i g n é pour la
recueillir, à défaut d’élection d'un autre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
Nous trouvons encore cette question décidée dans un
rapport
5
�5
t> )
iTapp'O’rt fait
nom d une commission, par le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
-résolution par lui présenté, porte que si: l’auteur de la
^disposition a voit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en a voit chargé', ët s’il avoit nommé un
-héritier ou légataire pour recueillir à défaut d autre choix*
sa nomination , conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’élire,
çt l’héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p ré v u , a recueilli seul le bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection, le lui auroit
en levé, ce qui n’est pas même proposable, elle n’en seroit
pas plus avancée, parce qu’elle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second lit , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe,
§.
T r o i s i è m e
111.
Q u e s t i o n .
Quels sont les droits de la fille du premier lit?
Cette fille a été foi close par son contrat de mariage;
mais la loi 1 a relevee de cette forclusion. Le père n’est
mort qu en juillet 1793? « celte époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793, avoient frappé,
et elle est appelée à recueillir, en rapportant ce qu’elle
D
�.
.
a re ç u , sa portion des deux tiers de la succession àb
intestat, qui seront divisés entre tous les enfans par
égaie portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau; mais ce qu’elle
prendra,dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de. son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira sei’a dotal; si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra moins, et les autres héritiers feront
les prélèveraens de d roit, de manière que l’aîné maie ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l’autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera , au prorata de son émolument, les autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de 230,000
y compris le rapport des i ,ooo
la portion de l’aîné mâle sera de 1 1 ,000
parce que
le tiers de 230,000
est de 76,666 ^ 13 J 4^v, et que
le quart, dans le surplus , est de 38,333 #"6*^ 8
en sorteque la fille du premier lit, conservant les * ,000
argent,
n’aura plus , en biens - fonds , que 22,333
6^ 8
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineursT
le partage doit être fait en justice, et provoqué par un
majeur; il ne pourroit avoir lieu sans cela.
5
5
5
D é l ib é r é à Clermont-Ferrand, le 19 nivôse an 9.
•
B O Y R O T , D A R T IS - M A R C I L L A T .
Je suis, du même avis, et par les mêmes raisons*
P IC O T -L A C O M B E L
�7
4
( z ')
'L e soussigné , qui a lu la consultation ci-dessus, est
du même avis; les motifs qui lui servent de fondement
sont trop amplement discutés dans cette consultation, pour
qu’il soit nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
en faveur du consultant, c’est que sa mcre avoît prédécédé
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793,
et qu’ainsi son droit à l’institution étoit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2.
D é l i b é r é à R io m , le 12 pluviôse r an 9 de la ré
publique.
'
TOUTTÉE.
'
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
.
+
D é l i b é r é à R io m , le 2 ventôse, an 9 dé là répu
blique.
PAGÈS:
L e soussigné est du même avis, par les mêmes motifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de 1 ancienne législation , encore en,
vigueur à l’époque de l’ouverture de-la succession.
L e 22 ventôse an 9,
MAÜGUE.
D 2
.
-
�Q U E S T I O N S PROPOSÉES*
C t i l b e r t D U C O U R T H IA L , veuf de Marie de Villette,.
contracta un second mariage le 14 mai 1778; il avoit
une fille unique d’un premier mariage*
Trois enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthiai est décédé le 27 juillet 1793 ; sa
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
il s’agit de régler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père commun..
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthiai de Lassuchette, fils
aîné du second lit, croit avoir droit de prendre, dan&
cette succession, un tiers en précipuf et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
• contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, sort
p ère, du 14 mai 17.78., dont la teneur suit :
* Ledit........... futur ép o u x, en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à venir , Vun des e?ifans qui naîtrai
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage *
k laquelle institution est faite en faveur de celui ou celle
* que les futurs époux choisiront conjointement,, pas-
�.
29
(
)
« quelques actes que ce soit , ou q u i sera choisi par le
c?' survivant des deux futurs , auquel le droit en appar-'
<r tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
« que ce soit ; et en cas que le choix rien ait pas été f a i t ,
« ladite institution sera au profit de Taîné des mâles ,
« s’il y a des mâles , et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. >3
Gilbert D ucourthial et sa seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre, sans avoir fait d’autre choix entre leurs
enfans communs , pour recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que’ le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de Vaîné des m âles, en cas qu’il
n’en fût pas fait d’autres.
En cet état, le citoyen Lassnchefte , fils a în é , est - il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son père, a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vun des enfans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
20. Que Yindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
la disposition ?
.
3«. Qu elle n etoît pas viciée non plus par Ta circonstance’'
que la seconde fem m e devoit concourir au choix de cet
héritier, dans le cas ou il seroit fait du vivant des deux
époux, etmeme de 1 élire seule, si elle avoit survécu ?
40. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte“
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans le cas, qui est arrivé, où il n’y auroit
pas d’autre ch oix, étoit également une disposition valable
�3
. .
( ° >
^
#
dans le principe , et qu’elle doit produire, son plein et
entier effet, nonobstant la révocation des dispositions de
ce genre, prononcée par les articles X X III et X X I V
de la loi du 17 nivôse an 2 , postérieure de cinq mois
au décès de Gilbert D u c o u rth ia l ?
°. E n fin , que le décret du 7 mars 1793 , qui avoît
interdit tous avantages en ligne directe, quelques mois
avant le.décès de Gilbert Ducourthial, n’est pas un obs
tacle non plus à ce que le citoyen Ducourthial fils aîné
profite d’une disposition en préciput, qui a sa source dans
un contrat de mariage antérieur de plus de quatorze ans
à ce décret.
5
Opinions du Conseil sur les questions proposées.
L a première observation à fa ir e , pour résoudre les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d’une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2 ; mais d’une
succession ouverte près de six mois avant cette loi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut rapportée par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
cette époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisièm e observation. Le sort de l’élection faite par
�#
C 31 )
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourthial -Lassuchette, fils aîné, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas où
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
mère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé avant la lo i du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ’ car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils avoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
De ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées 3 mais
uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
validité, sous le régime ancien, des donations de biens
présens et à venir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de mariage, en fa v e u r des enfans à naître du mariage T
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 1731 ? art. X V II et X V I I I, et de 1747, art. XII.
On ne sauroit non plus méconnoître la^ capacité des
enfans d’un second mariage, pour recevoir de pareilles
dispositions et en profiter, en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut permettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de ses
enfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
A uvergne, où étoient situés les biens de Gilbert D ucourtliial,) et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage, sur ceux du second.
�.
(
3
S
.
.
Xa seconde femme, il est vrai, n’auroit pu être vala*^
folement instituée par son m ari, que pour succéder à une
part dteiifant; mais son incapacité relative et limitée ne se
communiquoit point à ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en général, ne fut jamais mise eu.
question ; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naitroient du m ariage, étoient
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits A la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
*719 et 11 août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage en secondes noces,
aux enfans à naître du mariage, que ce qui y est véri
tablement ; je veux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, qui, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir le sort
dçs enfans à naître du mariage, s’occupent de l’assurer à
avance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contractent,
et sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
1
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrôts notables de
la Combe.
donc
�.
f 33 )
.
donc pas surpris si tous les suffrages se sont réunis, depuis
soixante ans, pour en proclamer la validité.
<- D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec laquelle Gilbert Ducourthial use de la
faculté d’avantager l’un de ses enfans à naître du second
lit; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; c’est-à-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gi'atifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauroient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes généraux, pour ne laisser voir
<ians l’institution faite par Gilbert D u courthial en faveur
d ’un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
m otif pour les tribunaux d’en ordonner l’exécution sans
hésiter.
'
2°. Mais on semble prétendre que l'institution dont il
s’agit itoit vicieuse dans sa form e, en ce que (in stitué
était indéterminé, et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourrait être de quelque considération, s’il
s’agissoit dune disposition postérieure à la loi du 17 nivôse
an 2, qui a aboli pour Lavenir les dispositions dont l’ap
plication serait laissée au choix d’un tiers. — Mais il s’agit
ici dune disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que; loin que les donations et institutions électives fussent
E
�34
'
C
')
.prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X II, L X III, L X I V , L X V e tL X V I de l’or
donnance de 1735, sur les testamens, et par celle du mois
d’août 1747 sur les substitutions, art. XII.
Enfin, les articles X X III et X X IV de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 5 , lèvent tous les doutes; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r , institution dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette réclame l’exécution, est dans ce cas,
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur fils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’eu x, et
choisir un autre de leurs enfans pour recueillir à sa place,
étoient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,
dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette veut tirer avan
tage , n’éloit pas vicieuse dans son essence; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conléré ¿1 sa
seconde epouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueilleioit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit delire lui olfroit une perspective éventuelle, qui
pouvoit lui ouvrir des chances pour faire tourner le don
à son p ro fit, quoique personne prohibée ; et l’on cite en
faveur de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
1
�.
. . . .
fut jugé par l’arrêt rendu entre la veuve et les enlans'
Laparra, le 18 mai 1736,
La réponse est''facile et tranchante. L ’arrêt de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L'institution élective qu’il
annulla , éfoit universelle ,'et réduis'oît les enlans du pre-’
iiiier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mère suc’cédoit à ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœùrs consanguins.
’
Cette mère qui aVoit'survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession . consistant principalement
en mobilier; et elle avoit d?ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant - de son mari, pour réduire à peu
près h rien les légitimes desènfans du premier -lit. L ’in
dignation plaidoit la cause de ces'victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence 'appeler l’arrêt qui annulla
l’institution contractuelle faite-à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
:
'
O r, qii’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont il s’agit ici?
' ‘
•
|
•
_
■
.
1
.
L ’institution de Laparra étoit universelle ; celle-ci n’est
que du tiers.
'
:
'
La seconde femmede Laparra avoit survécu à son m ari,
ets’étoit emparée débouté la succession , pour en détourner
la meilleure part <Y son profit. Ici ’la seconde femme de
Gilbert Ducourthialtîst morte long-temps avant son mari,
et n’a profité, rii'pu'profiter de rien dans sa succession. '
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
ses enfans,¿et‘elle' pouvoit abuser du droit d’élire qui lui:
avoit été confié, soit pour jo u ir, en retardant son ch oix,
E
2
�3*5
.
(
..
.
soit pour y mettre lin prix et des conditions à Son avantagé.
La seconde femme de Gilbert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à sont
mari ; la coutume qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, l’auroit exclue de l’espoir d y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’en
fant, dont il lui étoit permis^de la gratifier ostensible
ment ; la m édiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée ; y auroit mis un obstacle invincible..
Il n’y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. Tout étoit fraude dans l’afFaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci ; la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
Voilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial a în é , qui s’évanouit.
•
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement , pour recueillir à défaut d’autre choix , et
l’héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice de la disposition, toutes les fois, qu’il
n en ctoit pas déchu, par un choix contraire.
L article X X IV de la loi du 17 nivôse, abrogea ces.
règles pour Tavenir • mais il en consacra les effets pour
le p assé, en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
seroit devenu irrévocable par le décès de la . personne
ayant droit de révoquer..
• ...
'
•
�t
C37 )
L ’article vouloit que le décès qui avoit rendu la dis
position irrévocable, fut anteneur au ¡4 juillet 1789 !
mais cette rétroactivité est rapportée. Il suflit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
révoquer , soit antérieur à la publication de la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourthial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est confirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
•
°. Il reste la principale difficulté à éclaircir; elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en principe, que « la faculté de disposer de ses
cc biens, soit à cause de m ort, s o i t entre-vifs, soit par. do
te nation contractuelle, en ligne directe, étoit abolie, et
« qu’en co nséqu ence, tous les descéndans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
A p p u y é s sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette, lui diront sans doute, « si vous
«échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
«parce que le décès de notre père est antérieur, au
«moins n’échapperez-vous pas au décret du 7 mars
* 1793 > car no^re pere n est mort qu’après ce décret ,
« et conséquemment dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de sa succes« sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. »
5
La réponse est dans les articles I et V II de la loi du
�5
.
- / 38. }
.
t8 pluviôse an , qui déterminent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
1793 , ren ces termes :
«Les avantages i prélèvem ens, préciputs., donations;
«entre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi
t io n s irrévocables de leur nature , légitimement stipua lées en ligne directe avant la publication du décret du
« 7 mars 1793 > auront leur plein et entier effet, confor« moment aux anciennes lo is, tant sur les successions
« o u v e r t e s jusqu’à'ce jour, que sur celles qui s’ouvriront
« à l’avenir. » ( Article I.ei )
■
« Les élections d’ héritiers ou de légataires. . . . qui ont
a été anrrullées par les articles........ de la loi du 17 nivôse,
a à compter du 14 juillet 1789 , sont rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant date
« certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. »
( Article VIT. )
L e contrat'de mariage du 14 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-distinctes ; savoir , une disposition princi
pale , qui étoit une institution du.tiers des biens de Gilbert
Ducourtliial -en faveur de l’un deis enfans à naître de son
second mariage, par préciput et avantage , et .une disposi
tion secondaire, qui étoit la désignation particulière de
l’aîné des mâles pour recueillir ce tiers de biens, dans le
cas ou il ne seroit pas fait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition .principale étoit pure , sans condition,
et irrévocable de sa-.nature ,* elle auroit profité à tous les
enfans du second lit collectivement, à défaut de choix
valable d’un seul d’entre e u x , pour recueillir exclusive-
�.
. .
c 39 \
.
ïiient ; la disposition secondaire, qui appliquoit l’a
vantage du tiers à laine des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et pouvoit être révoquée, par l'é
lection d’un autre enfant.
Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an
, qui viennent
.d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
pale ; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
conformément aux anciennes lois , puisqu’elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
Quant à la disposition secondaire , elle est maintenue
par l’article V II ; car cet article rétablit dans leur effet
p rim itif, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 17935 mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la loi du 17 nivôse
an 2 ; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse,'seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée par le décret du 7 mars 1793, n’emportoit pas la prohibition de choisir un d’entre plusieurs
éligibles, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle, irrévocable de sa nature , qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans l’espèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîné, étoit
5
�,
.
.
.
(
4
0
]
.
,
antérieure, soit à la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 1793, puisqu’elle étoit contenue dans le contrat
rue me de 1778. Mais elle étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant la loi du 17 nivôse, par le
décès de celui qui sèul auroit pu la révoquer par un choix
contraire.
'
Ainsi la validité, sous tous les rapports, se trouve pn>
noucée sans équivoque, par les deux textes précités.
.
•
•
O
b j e c t i o n
.
!La validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
en problème, à la bonne heure; mais la validité de l’élection
conditionnelle de l’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
à l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine-Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur, qui pouvoit jusqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîné, p arle
choix d’un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
il est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès , doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eût été
faite le 27 juillet 1793 seulement, jour du décès de Gilbert
Ducourthial père, il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée alors depuis plusieurs mois, en
li^tlQ
�4
t
( 1 )
ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
non avenue.
?
•
.
R É PO
n
s E.
Ce raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i». C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 > jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778? sous le
prétexte que le décret du 7 mars 1793? lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II de la loi du 18 pluviôse an ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l’intervalle de la loi du 7 mars 1793, à celle du 17 .
nivôse an 2 5 il maintient l’effet primitif de toutes celles
qui avoient précédé la publication de la loi du 17 nivôse,
indéfiniment sans exception, sans distinction entre celles
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793?
celles
qui étoient antérieures. Cette décision positive de la lo i,
au su rp lu s , n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les temps; car dans tous les temps, on avoit pensé
que celui qui choisissoit un de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition préexistante, ne faisoit point une
disposition nouvelle ; et conséquemment qu’il ne contrevenoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
'• ’
Après cela , qu’importeront donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîné, en 1778, dût
n’être considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne seroit
F
5
�4
;
.
( 2o
pas moins vrai de dire qu’elle est textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, quiencore une fois maintient indistinctem ent, toutes les
élections antérieures à la loi du 17 nivôse.,
2°. Lés citoyens Ducourthial puîriés, ne’ se font' pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à l’appui de leurs
prétentions le principe d égalité des partages' établi par
les lois de 17935 et de la u 2,. Ils ne veulent pas voiique ces lois n’ont pas été faites pour régler les intérêts des
donataires entre eux, mais seulement pour régler les in
térêts des héritiers légitimes, mis en- opposition avec
ceux des donataires, Cest cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien énergiquement exprimé dans l’articleL V II de la loi même du 17 nivôse , qui porte :
«• Le droit de réclamer le bénéfice de la l o i, quant aux.
« dispositions quelle annulle,.n’appartient,qu’aux héritiers,
« naturels. »Il est reconnu que la disposition du tiers des biens de
Gilbert Ducourthial, qui est l’objet du litige, loin d’êtreannullée, est au contraire maintenue par rapport aux;
héritiers de Gilbert D ucourthial, en général ; que le con
trat de 1778, qui la contient, doit avoir sa pleine et en
tière exécution , en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput, au préjudice de la
fille du premier lit, qui n’à pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens Ducour-thial pûmes > de plus grands droits qu’à leur sœur \ conséquem m ent, dès qu’il n’attrihue aucune part u cette filleunique du premier lit, il n’en-attribue aucune non plus;
à ses. frères, sur le tiers des-biens en litige,.
.
�43
(
)
Cela posé, ce ne peut être qu«n se présentant comme
■donataires concurremment avec leur frère aîné, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le tiers des biens , et en demander par
tage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
.
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D utc courthial en 1778, à celui des enfans à naître de son
k second mariage qu’il choisiroit, est bon en soi, et doit
« profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait en faveur d’aucun des trois.
« O r , il n’y a point eu de choix valable, puisque le seul
r qui ait été fa it, celui qui étoit contenu dans le contrat
« même de m ariage, du 14 mai 1778, a été annullé par
« le décret du 7 mars 1793. »
H é bien ! ce raisonnement, quand il ne seroit pas ren
versé par l'art. V II de la loi du 18 pluviôse, s’écarteroit
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle gé*nérale, que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
prohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héritiers naturels en leur qualité d’héritiers seulement, et
non par des donataires contre d’autres donataires. En
un m o t,. les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu en faveur des héritiers ; aucune n’a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen DucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père commun l’a avan¥2
�44
C
)
t
tagé par l'acte le plus favorable de la société, par un contrat
de mariage: d’un préciput qu’il pouvoit lui ôter, mais
qu’il a voulu lui conserver. Eu vain ils feront des efforts
pour se révolter contre la volonté paternelle, ils n e a
feront que d’impuissans.
' D é l i b é r é à Paris par le jurisconsulte ancien sous
signé , le 8 germinal an p..
b
BERGIER.
Le
C O N SE IL SOUSSIGNÉ qui a vu le mémoire à
consulter et les diverses consultations au bas rapportéespour le fils aîné du second lit de feu Gilbert Ducourthial:
de Lassuchette
E st
d ’avis des résolutions contenues dans ces consul
tations. Trois questions y ont été traitées..
i°. Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens,,
faite en faveur dès enfans du second lit , est valable ?
2°. Si cette institution profite^ à. tous les enfans, ou:
au fils aîné exclusivement ?
3°. Quels sont les droits de là fille du premier lit? ’
L a première et la troisième question ne présentent
point de difficulté sérieuse*.
Lors du contrat de mariage, l’inégalité de succession;
entre les enfans n’étoit pas prohibée ; ils pouvoient être
avantagés les uns sur les autres :on avoit éclàirci et con
damné le doute , si des enfans du second lit pouvoient
jâtrc mieux traités que ceux du premier. Le contrat dii
�.
' c 45}
second mariage assura donc irrévocablement aux enfans
du second lit un avantage alors licite.
2o. Par les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avril 1791 rendit
ce rappel inutile; elle le fit elle-même en prononçant
l’abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permeftoient d’exclure les filles. La fille du premier lit est donc
héritière comme les autres enfans , sauf le rapport de ce
qu’elle a reçu■
30. Mais à qui appartiendra ïe tiers reservé dans le'
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat à celui d’eux qui seroit choisi ,
et à défaut, à l’aîné? C ’est la seule question véritable
ment litigieuse,,
__
Dans l’ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute; Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîné, que le contrat du’
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit , le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna à aucun des enfans à en naître la certitude de re
cueillir ce tiers. Un seul y étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant. Il est vrai
qu a défaut de ch oix, 1 aîné étoit appelé : il est vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an , a'confirm é, art. I e1-. les>
institutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de la loi du. 7 mars 1793 , et que par l’ar
ticle V II, elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17’
nivôse an z les élections d’h éritier, qui auroient été fai-
5
�4
( ^)
tes par acte ayant date certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse.Mais, dira-t-on, l’article V II n’est pas
applicable, puisqu’il n’y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et l’article Ier. n’est pas applicable
non plus , parce qu’il 11y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
7 mars 1 7 9 3 ? bii avoit ôté la faculté du choix, en dé-,
clarant que tous les descendans auroient un droit égal
sur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont e u , par 3a loi du
7 m ars, un droit égal à ce préciput qu’il avoit destiné
en se mariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus,
été permis depuis le 7 mars 1793, de disposer-en faveur
de l’un, au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à ses parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués , et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
•
Mais le choix lut placé dans l’institution même ; l’ins
tituant en se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut donc, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir, si son père ne disposoit pas au-
�#
C47
)
trement. H avoit donc sur sès frères qui n’étoient qu’cligililes, 1 avantage detre élu conditionnellement; c’està-dire, si le père ne lémoignoit pas une antre volonté.
La condition qui fautoit dépouillé n’étant pas arri
vée , son droit remonte au titre qui lui fut donné par
le contrat, titre irrévocable de sa nature ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé-a laissé subsister
l’institution en faveur de Taîné dans toute sa forcev
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com-mun des te s ta te u r s l’aîné étoit l’objet des choix et des-''
préférences; et si l’on se réservoit de' pouvoir appeler'
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans;
le devoir que pour lui donner des co-partageans. C’est
dans la même intention qu’afin que la réserve de choisir
ne lui nuisît pas, on déclaroit qu’à défaut d’élection il
seroit héritier.
L e défaut d’élection n’est donc que là ratification de
l’institution de l’aîné, si un autre n’est appele : o r , la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con
trat à la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,,
et nullement par la loi du 7 mars 1793:
Il n est pas meine vrai que' cette loi eût ôté au1 père*
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un*
de ses enfans qu à 1 avenir , elle ne détruisoit pas
l’avantage deja fait ¿t. celui des enfans qu’il éliroit, encore'
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , ew
cas de non électiou.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir'
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre
�43
(
)
irrévocable, elle ne pouvoit embrasser l’hypotlièse dont
il s’agit; car, ou elle empêchoit le père d’élire, ou elle
lui en laissoit la faculté. Si elle lui eu laissoit la faculté, il
pouvoit donc dans cette espèce particulière avantager un
de sesenfans : si elle empêchoit l’élection, elle auroitdonc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde ; elle auroit eu effet ré
troactif. Le père a v o it donné. (U ne institution contrac
t u e l l e est une donation ). Le père avoit donné à un seul
parmi les enfans qu il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il n’y
avoit pas d’élection-, il y en avoit une bien expresse dans
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en
substituer une autre, elle doit avoir son effet.
Trois lois sont à considérer : celle du 7 mars qui abolit
pour lïavenir la faculté de disposer en ligne directe; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures et irrévocables,
• La loi du 17 nivôse fut plus hardie; elle annulJa ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
le 14 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l’effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2 , fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi du 9 fructidor an-3- L e donateur ou instituant,
décédé le 2 7 juillet 1793 , est donc mort sous l’e m p ir e
de la loi du 7 mars précédent, qui ne to u c h o it pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an maintient expressé
ment , par l’article I.er. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avant la publication de
5
�4
C P )
-larïoi du 7 mars 1793 *, et par l’article V II* elle mairitient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi du 17 nivôse. ' ;
O r , la disposition de 1,778 est antérieure ’au. 7 mars
793-
X
’ #
'
•
•
Elle est irrévocable de sa nature; car elle est comprise
dans’ un contrat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvdit être;révoquée au préjudice
de 1’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du choix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’institution en soi ne soit irrévocable: elle donne droit et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne 1 est pas : tous les
appelés ont l’espérance d*être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
.
L ’article V II de la loi du 18 pluyiôse est décisif; il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
1 7 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses ;
1 °, que 1 élection antérieure au 17 nivôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 2 °. que la loi du
7 mars 1 7 9 8 n’avoit P a s prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations ; ou devenus tels par les événemens, tels
G
�5
I o )
que les testattierts après ïe décès de leur? auteurs ; qüe lei
élections ne furent supprimées que parla loi du' 17 nivôse,
et que les corrections faites à-cette loi les ont rétablies pour
le passé. ; ...••• ••-••• a - ■
'>
■
:J 1 *
4-.. ^
O r, il s’agit ici d’une donation faite à un entre plusieurs:
donation irrévocable-et permise en'1778. ' ; : '
Il
s’agit de l’élection de ce donataire , faite dans la’dona*
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
.
Avant son décès arrivé en juillet 1793 , ou il eût pu en
appeler un autre, ou il ne l’auroit pas pu. A u premier cas,
il ne Ta pas voulu ; sa volonté , que rien ne genoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, l’élecr
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit .pas, doit être exé-^
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit : elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le contrat de mariage. Le dépouil-p
1er, ce seroit rétroagir 5 ce seroit tomber dans cette absur--dité de le dépouiller, parce que la condition sous laquelle
le testateur l’ayoit appelé ( le défaut d’autre c h o ix ), esj;
arrivée.
D é l ib é r é à P a ris, le 2 germinal an 9.
SIM É O N , P O R T A L IS . M U R A I R E , président
au tribunal de cassation. F A V A R D .
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu une consultation
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données ù Riom et a Clermont-Ferrand ;
*
E st du même a v is sur les trois questions traitées dans
çes consultations dont les résolutions sont uniformes.
,
�51
C
)
Sur la première question, il est sans difficulté qu’eri 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Coraudet, sa seconde fem m e, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
au trem en t , un de ses enfans plus que l’autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
*
' La jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui con
tractait un nouveau mariage, ayant des enfans du prem ier,
de faire des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union , après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du i ï août 1 7 4 ° »
est rapporté en forme avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
' 79- On trouve au même endroit, à la suite de 1 ai'ret du 11
août 1740 , un autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L institution d hcritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , étoit donc valable dans son principe.
Sur la deuxième question, cette libéralité du père subsistoit dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est decédc ; et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales:
G 2
�.
*
:• • •■ S * ? ' ) •
fiîais cette1 loi ne^régloît1 que l’avenir, et non le passé.
L ’effet'rétroactif attribué depuis aux lois dés 5 bru
maire e t-17 nivôse 'an' 2 ,” en rétrogradant jiisqu’aV
juillet 1789, a été aboli, et par'conséquent rinstitutîorii
d'héritier, qui avoit été détruiteâ est redevenue en pleine
vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second lit., les autres
enfans ne peuvent le lui contesle.LV . ....
L e contrat de mariage de 1 7 7 8 contient deux disposi
tions; la première est uneinstitution d’héritier pour un tiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
pu le survivant deux* voudront ch oisir;,la seconde est
uu,e vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils a în é , au défaut, de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N ÿ ayant point eu de. choix ni par les père et mère
conjointement, ni par le citoyen Ducoui,thial qui a sur
vécu , le fils aîné s’est donc, trouvé seul donataire, non,
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que> le contrat de mariage renferme*
- .
La loi du 7, mars 1793 n’a point défendu Tes élections
d'héritier ou de donataire à< faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d'héritier oü de donataire n’est’
point une donation proprement dite* Ce n’est que l’e xé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions4
sont de droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1 7 9 3 doit donc être restreinte dans le.cas dus donations
postérieures à sa publication.
.
D ’ailleurs, le fils aîné n’avoit pas besoin d’être élu. I f
�t
"■
¿trnú IttstîWc* JétfCníUelíemenl páf* le Contrat de' mariage
mê me , d an síe Cas ôiYüii'ôütrê que lui fie seroit pas
nonmu*.
, r
■ , , . . , r f, ■ . ;
Enfin l’article V ï ï de Ta toi'dû.iÔ pluviôse an , donnée
•
*'
’,
*.£»v
'
y*
en explication du rapport de 1 effet rétroactif, porte : a JLes
c<élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
c<perdu qui ont été annullées par les articles X X III et
a X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
a 1789 , sont rétablies dans leur effet primitif, s i elles ont
a été fa ites par acte ayant date certaine avant la publi« cation de ladite loi du 17 nivôse. »
1
1
5
D e pareilles élections pouvoient donc s’effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l’espèce proposée, le citoyen
Ducourthial étant décédé le 17 juillet 1793» quand on
considéreroit le défaut de choix de sa part conime une clection du fils aîné du second lit, cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les père et m ère, ou le survivant d’eu x, n’éliroient pas :
ce qui met son droit hors de tout doute.
.
Il est même à observer, que l’article V II de la loi du 18
pluviôse ne pailc point du cas ou le donateur prévoyant
le délaut délection, a designe éventuellement, comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fût recueillie.
Sur la troisième question , la fille du premier lit étant
exclue par la coutume, sa r e n o n c i a t i o n l a succession
future de son père n A pas plus d’effet que la forclusion
�( 54 }
légale. A insi, elle a le droit de succéder avec ses frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793
Délibéré
à P a r i s , rpar le citoyen F e re y , ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
'
A
F E R E Y .
Riom, de l'imprimerie de Landriot, l'imprimeur du tribunal
d’ appel. — An 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9]
Creator
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Touttée
Touttée jeune
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Pagès
Maugue
Bergier
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
successions
partage
conflit de lois
droit d'aînesse
secondes noces
Description
An account of the resource
Consultations [contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette avec Marie-Léonarde Cornudet et contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte Ducourthial, du 2 avril 1783.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0127
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
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Domaine public
conflit de lois
droit d'aînesse
partage
secondes noces
Successions
-
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9cb91ddb519ef7845373117e5a0aabbf
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CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture, 1 du
contrat de mariage de G ilb ert D ucourthial de Lassuchette
avèc Marie-Léonarde Cornudct, du 14 mai 1778 ; 2°. du
contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte
D ucourthial, du 2 avril 1:783; 30. d’un mémoire à con
sulter ;
que , d’après les anciennes et les nouvelles
lois, le premier enfant m âle, issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec M arie Léonarde C ornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son pèr e , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
noces, il avoit épousé Marie - Gabrielle. de. V illette. D e
ce premier mariage issut Giiberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen M aign ol
E
st d’ a v is
A' '
�c o
En 1778 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
noces, Marie-Léonarde Cornudet,
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert DuCoürthial y futur époux, institua
héritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un
- des enfans qui naîtra du présent mariage ,, et ce par préciput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que le& futurs choisiront conjointement,
•par quelques actes que ce soit; ou qui sera phoisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit ;
et en cas que 7è ch o ix rten ait pas été fia it, ladite ins
titution sera au profit de Taîné des m âles, s’ il y a des
mâles , et, s'il n j a p o in t de mâles., au profit de ïaînée
des filles. , . : • •
D e ce mariage sont issus trois enfans milles. Gilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793.
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant; ni l’un ni l’autre n’ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, le fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés
par le contrat ’de mariage de ses père et mère.
. JL?édit óeVsecòndès noces, d e 'i o, qui ne permet pas
à ceux qui se remarient, et qui ont des enfans d’un premier
■' i
'
•
’1* * ) I ■
î
^‘
lit, de se donner réciproquement aù delà de la portion de
l’enfant le moins.prenant., a!voit fait naîtreJdes doutes à cet
’ s u ¿ i i - ' d r 011 éctit, qu’en faisant
dépareilles iins\ittitiops,V ce rie i&t un moyen de frauder la,
loi; mais la derniére^xjrispruçlchce, fixée par différens ar
rêts, don/: l’un du 29 avril 17 19, et Vautre'du 1.1 août 1740*
56
�3
r , ,>.
rapportés par Laeo-mbe, esfc c|ué de, pareilles dispositions
sont valables.
C’étoit aussiJ la
jurisprudence de la ci-devant
, . ! >») '
Zg.' Ul ' * §
1~ •
sénéchaussée d’Auyergjie. L e dernier commentateur de la
coutume>Jome Ü t it r e
yçage £$4* rap- t
porte.urçe,sentence du mois:<iÎe.ju,in j 773 *qui confirme unô 1
institution d’héritier,-en, faveur des-enfans à naître d’un.second mariage. A in si, en ne consultant que l’ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput, le tiers des biens qui lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est .de principe qu’ùn don faitde cette nlaniére,
n’est pas sujet à rapport^ même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à la récla
mation des exposans: on peut même dire qu’elles décident
la question en sa faveur.
. i)
i l est vrai que cTftprôs les dispositions des art» X X t li et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 ventôse de l’an 2 , l’élection
laissée au choix de l’un des époux étoit nulle, si elle n’avoit
été faite que le 14 juillet 1789 et depuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité à la succession
de ci/jus. •
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du brumaire précédent, puisqu’elles ont été
annuljées, quant à leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4 , soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourtliial, à l’effet de savoir si î\ cette époque, il existoit
quelque loi qui pût empêcher l’effet de la disposition faite
en faveur de. l’exposant-, par le contrat de mariage de ses
père et mère : o r, i l n y avoit pas alors de loi qui eût prosA 2
5
�crit de semblables dispositions, etannuïlé des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d’avoir exercé
la faculté d’élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
n’y en a pas depuis, attendu l’abolition de Teffet rétroactif.
L a loi du 7 mars 1793, antérieure au décès de Gilbert
D ucourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n’est relative qu’aux dispositions futures, n anéantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, et n’oblîgeoît point les père et mère à les révoquer : o r , ce n’est
point en vertu d’une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793., que l’exposant réclame le tiers des
biens de son père, comme un don qui lui a été fait en préciput; il le réclame en vertu d’une' disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu d’une disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
En effet, l’article premier de la loi du 18 pluviôse der
n ier, porte: « Les avantages, prélèvemens, préciputs, do
t a t i o n s entïe-vifs, institutions contractuelles, et autres:
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
» stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du
« 7 mars 1793? et en ligne collatérale ou entre individus
« non parens, antérieurement à la publication de la loi du
« brumaire an 2, auront leur plein et entier effet, con« formémcnt aux anciennes lo is , tant sur les successions
•t ouvertes jusq’uà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir ».
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans un contrat de mariage, passé antérieurement à la loi
5
�5
.
(
)
du 7 mars 1793; à défaut d’élection de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroit du mariage : il n’y a pas eu d’élection-, les père et
mère sont décédés avant les lois des brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle; il doit par
conséquent en profiter.
L e père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature, ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée, si l’on fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l ’a v e n i r j qu elle n anéantit pas^
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. (A rt. X X V I de la loi du 22 ventôse).
O r, l’avantage dont il s’agit, est assuré à l’exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation de la loi du
7 mars 17933 mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni parla lo i, doit donc
avoir son effet, puisqu’elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mère avant la promulgation des lois des
brumaire et 17 nivôse de l’an 2.
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté, qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la même loi du 18 pluviôse dernier.
Cetarticle est ainsi conçu:
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
5
5
�( 6 -y m
« fonds perdu, qui ont été antiullces par1les art. XXH et?,
« X X V de la loi du 1 7 nivôse, à compter du 14 juillet 178 9 ,
« s o n t ' rétablies dans leur effet pïim itif, si elles ont é té r
» faites par acte ayant date, ¡certaine avant la publication d a r
celadite loi du 17 nivôse ».- :
‘
' V
,
Des termes de cette loi , il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à cell&du17 mars 1793, doivent etre
maintenues : ainsi, l’exposant étant saisi de l’effet de l’insti
tution par îe décèsde son père, arrivé avant la publicationde la loi du 17 nivôse , on ne sauroit lui contester légitime-'
ment l’avantage qu’il réclame.
D É L IB É R É à Riôrïi le *4 germinal au
française une et indivisible.
i;!
5
de la r é p u b liq u e
’■
>’
TO U T T ÉE, TO U TTÉE, GASGHOJNT.
. LI£ S O U S S lé N Ê qui a yu la consultation ci-dessus.et"
•i 11 11, I •
'
j •
des autres parts ;
E s t i m e , que
s’il n'est pas impossible de tirer des lois nou
velles, quelques inductions favorables aux enfans du pre
mier lit de Gilbert Ducourthial, les raisons déduites dans la
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup ù faire inclinet^n faveur de l'exposant. On peut meme
ajouter aux raisonnerons de la consultation. En effet, en
supposant que par le défaut d’élection, fait antérieurement
�7
C )
à la loi du 7 mars 1793 » disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable ; c’est que le
contrat de 1 7 7 8 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit. Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’e u x , emporteraient dans sa succession uu
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C’est sous la foi de cette promesse irrévocable
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; par
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d’examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
'enfans du même père T en se référant à celle du 7 mars
1 7 9 3 , que ce dont le père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n'ont pas même entendu fairer
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de même que
Ducourthial père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second lit , de même les
lois nouvelles ne sauroient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
5
D é l i b é r é à Riom , le 14 germinal an de la républiquefrançaise , une et indivisible.
D E V A I> .
�. MÉMOIRE A CONSULTEE ;
ET C O N S U L T A T I O N .
L , e citoyen T itus s’est marié deux fois ; il a eu de son
premier m ariage, avec dame Marie L a u r e tte , une fille
nommée G ilberte, et de son second, avec Suzanne D ailly,
trois en fan s, Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de m ariage, Titus a institué pour son
héritier du tiers de tous ses biens présens et à v en ir, l’ un
des enfans qui naîtroit dudit m ariage, et ce, en préciput
et avantage \ laquelle institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce fût, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fût ; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fa it, ladite,
institution projiteroit à rainé des mâles ; et s’il n y a pas
de inâles , à l’aînée des filles. Telle est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur à la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de 1 ,000 liv., payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
ans , sans intérêts qu’à défaut de payement terme par
ternie i
5
�( g ) ' '
terme ; et moyennant' cette i constitution , il fut stipulé
qu’elle demeui'eroit forclose idei toutes successions directes
et collatérales de l’estoc paternel, sous la réserve qu’il fit
de la rappeler auxditessuccessions par quelqu’acte que ce
fût : cet acte est de 1783. r
T itu s, père com mun, est mort le 27 juillet 1793; la
mère est morte avant,.sans avoir fait de choix de l’un des
enfans. Il s’agit maintenant de savoir, i ° . : si cette insti
tution contractuelle est valable en faveur des enfans du
second lit;
"
1 ■ :i \>
i °. Si, en le supposant, n’y ayant pas eu d’élection de la
part des père et m ère, c’est l’aîné mâle qui doit en pro
.....:
'
fiter;
3°. Quels sont les droits de la fille du premier lit dans
la succession du père com m un? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle av o ir son elfet ?
Enfin , y ayant des enfans mineurs, quelle doit être la
forme du partage?
C O N S Ü LT ATION.
:
l'i
. 1
;
'
;
1,
I
* . .
■
-i i
>
•
T
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , q u ia lu les deux
contrats de mariage dont il s’agit,
E s t i m e , sur les questions p ro posées,
i°. Que l’institution contractuelle, faite par un père dans
son second contrat de mariage au profit des enfans à naître
d’icelui, est valable et doit avoir son exécution.
B
�C *0 ÎJ
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs,
et il paroît qu’elle a été diversement jugée par les tribu
naux.
Ceux qui ont soutenu qu’elle étoit n u lle, se sont fondés
sur ce que les enfans du second lit,, n’étant encore sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
ni de haine, les dispositions que l’un des conjoints fait"
en leur faveu r, ne sont censées faites qu’en contemplation
de l’autre conjoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d’une portion d’enfant, l’on a voulu
éluder la loi par une disposition indirecte, et que d'après
l’édit des secondes noces, Von ne pouvoit donner aux
jîères, mères et enfans du second mari ou autres personnes
par dol et fraude interposés.
Une fem m e, dit Chabrol, qui ne peut pas profiter de
ces libéralités p o u r elle-même, n’a pas moins d’empresse
ment à les procurer u ses enfans íi naître •, s’ils lui survi
vent , ils ont ce que leur mère n’auroit désiré avoir que
pour eux ; et s’ils lui prédécèdent, elle peut retrouver
souvent, dans leur succession, les biens qu’elle leur a
procu rés.
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i
,
rapporté par Montholon.
L e second qu’on trouve dans Soefve, du 18 juillet 1645.
Un troisième recueilli par Brodeau sur L o u e t, L . N.
somm. 3 , du 3 août 1647.
L e quatrièm e, qu’on trouve au journal du Palais ,
du 7 septembre 1673.
Enfin, celui connu SOus le nom de Laparra, du i&
588
�( ” )
tnai
rapporté pav l’Epine- d e . Graînvilie. T o u s,
dit-on, ont annullé des dispositions faites en faveur des
€nfans à naître d’un second mariage.
Mais si l'on se donne la peine d’entrer en connoissance
de cause de ces jugemens, on s’aperçoit bientôt qu'ils
sont rendus sur des circonstances particulières,, et n’ont
aucune application à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de M on tholon , d’après Rousseau de
la C om be, n’a pas jugé la question. « Il s’est tro u v e ,
« dit-il, verbo Noces, qu’il s’agissoit d’une donation faite
« non à des enfans d’un second l i t , mais à des colla« ter aux. »
’
Celui de t6^S paroît avoir jugé qu’une mère remariée
n’avoit pu donner aux enfans du second niariageses meubles
et acquêts , et le quint de ses propres, au préjudice des enfans
du premier lit, d o n t la légitime n'avoit cependant pas été
blessée; mais indépendamment de ¡’injustice évidente qui
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume dillerente de celle-ci, où les pères et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs enfans.
,
Celui de 1647 se trouve dans tous les recueils; il fut rendu
consultis classibus ,• il annulla une donation contractuelle,
faite au profit d’en fans à. n aître, par une femme qui se
remarioit; maisBrodeau, qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation étoit tout-à-fait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite à l’exclusion perpétuelle des enfans
du premier lit, au point qu’à défaut deniansdu second
lit, les collatéraux étoient appelés.
Il n’est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
annullée ; l °. elle étoit faitaaô irato, et 20. comme l’ob-*
J3 3.
�( 12 )
serve Chabrol, il est évident que le mari avoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
contractuelle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it , suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
de son gendre, « et au cas qu’il n y ait pas d’enfans , lesdits
« biens appartiendront audit sieur de Saint-M artin seul,
» qui étoit le futur ép ou x, et au x sien s, sans que les enfans
« du premier m ariage, n i les héritiers de ladite fu tu r e y
« puissent rien -prétendre n i demander, sinon que ladite
« G uilbou,' s i elle s u iv it, auquel cas elle jou ira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour« lieront au x héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrèt de 16 73 , a bien aussi annullé une donation faite
aux enfans à naître d*un second mariage,- mais elle avoit
pour principal objet la femme ; c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit : « a u jiiitp a rticu lier,
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
« du palais, il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère ; c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la passion extrême qu’avoit
cr'pour ellelesieurde Tersam , a été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
«■
qu’il ne pouvoit encore aimer, »
Gela est si vrai que Rousseau de la Com be, qui rapporte
auSsi cet arrêt, tyerboNoces, s*en fait un moyen pour prou
ver que les enfans communs,¡nés’ou à naître, ne sont point
compris dans la proliibition, pourvu qu ils n aient servi
de prétexte pour donner au secoiid conjoint.
Enfin j l’arrêt de 1738 de-Laparra, a été rendu en paya
�( 13 ^
de droit écrit, où la mère succède à son enfant ; en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition étoit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; les
parties et leurs biens étoient régis par une coutume qui
exclut les ascendans de la succession desdescendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
déclarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
'différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second m ariage, entre le pays de
droit <?crit, et celui de coutume.
Dans le prem ier, la seconde femme peut être Fobjet de
la libéralité d’un m ari; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eux, à moins qu’il nry
ait aucun parent de la ligne ; et dès lors la prohibition ne
peut plus exister, puisqu’il n’y a plus d’intéressé.
Mais ce n’est pas seulement avec des raisonnernens tranclians qu’on veut écarter les préjugés que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement formée , soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in terrninis, soit
par les nouveaux; et la presqu’universalité des auteursf
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bien pro*noncée.
�>4
, (
) .
L e premier arrêt qui ait admis l’insti liât ¡ou d’héritier en
faveur des enfans à naître d’ un second mariage, est rapporté
par Chopin, liv. 3 »chap. i er-tit. ie r. Sur la coutume d'An
jou , e n date du 7 septembre 1575.
L e second, du 19 juillet i 65 g , rapporté par R icard ,
T r a i t é des Donations, partie 3 , n°. *243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite
à des enfansànaître, par un troisième contrat de mariage :
c’est l’arrêt des Lagrange. On demandoit la réduction de
la donation, conformément à l’édit des secondes noces. La
disposisiori fut confirmée pour le tout. ■
L e troisième se trouve au Journal des audiences, sous
la date du 29 avril 17 19 ; il fut imprimé dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en faveurdesenfansà n aître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
• Le quatrième est intervenu le 11 août 1740, au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Com be,
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrêt, Jacques de Gagnou
de V ilè n e , lieutenant général des armées, âgé de soixantequinze ans , qui avoit un fils du premier lit , convolant eu
secondes noces avec dame Claude-Antoinette Dassé, avoit
donné auxenfansdece futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui permettoit de donner à ses enfans puînés. La
donation a été confirmée en faveur des enfans du second
mariage , quoique la dame Dassé eût la garde~?iuble de
ses enfans.
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui se remarie, peut donner ¿\ses enfans du second lit;
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans communs,
�15
c
)
nés ou à naître, ne sont pas compris dans la prohibition,
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
se remarie en pays de droit écrit, la donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
faveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas à un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
une exception au droit commun. T o u t le monde connoît
les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C ’étoit une dame d\Alègre, quiavoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire la condition d’un enfant
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par des
considérations d honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du Journal du palais,
dans la cause jugée par l’arrêt de 1673, «que les législa« teurs qui se sont particulièrement attachés à former des
« obstacles aux secondes noces, n’eussent point parlé des
« enfans, s’ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition ; mais ils n’avoient garde de penser à eux ; il
« y en a deux raisons sans réplique. *
« La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autorisant les secondes noces,
«elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
�Cl6)
« en naissent, dans la possession du droit commun ; c’est-à-.
« d ire , que comme ces enfans ne sont pas encore au monde,
« et néanmoins y doivent venir par une voie légitime , la
« loi ne peut pas avoir pour eux de l’indignation, qu’elle ne
r fonde jamais que sur un démérite naturel ou moral.
« La seconde raison est, que l’ordonnance ne peut com« prendre les enfans communs dans la prohibition, que par
cç les mêmes motifs q u iy ont donné lieu, savoir, en faveur
k de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
« mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
et innocente des enfans, et sur-tout dans des enfans à naître,
<rqui n’ont que le suffrage de la nature qui parle pour eux,
« Il ajoute que presque tous les docteurs avoient décidé,
« que la loi fiâc ed icta ti, et l’édit des secondes noces , ne
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
cç excité la libéralité des pères et mûres, par leur mérite, par
trieur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
c que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
« que leurs pères et mères pensent à eux avant leur nais-»
« sance, et qu’ils se les représentent , comme s’ils étaient
«effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
cf contrats de m ariage, les enfans à naître ont ordinaire« ment la meilleure part. »
Brodeau sur L ou et, lettreN , somm. 3 , n°. 12, a traité
également cette question: « Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l’édit des
« seconds noces a lieu , non seulement à l’égard des con« joints , mari ou femme , mais encore clés enfans du
« premier ou du second mariage....... Mais néanmoins il
« est
�*7
(
)
« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu'à Tégarà
« des enfans du premier lit de l’un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et même personne avec
ce leurs père et mère , el qui est dans la prohibition de l’édit
«et non des enfans communs issus de leur mariage, qui
« sont capables de recevoir toutes sortes d’avantages,
« s a iif la légitime au x enfans du premier l i t , si la cou« tume ne dispose du contraire; la présomption naturelle
« étant que la mère faisant la donation, est plutôt portée
« par l’affection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
« le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. desecundis
nuptiis, que Brodeau rapporte, décide cette question dans
les termes les plus formels : «■potest vidua dare, non pro« vrgno sedjîlio comjnuni, nato cx> secundîs nuptiis : licet
« sit eadem ratio , non tamen ulem jus , (juia jilio com« m uni ut donct mater naturalis affectio fa c it provigno
« ut do net noverca, maritalis ajfectus J 'a c it, non certè
« novercalis ; provignurn non semper accipiarn pro per« sona supposita, sed excogitalam fraudem edicto inspi« cahor in provigno , non in filio communi. »
Brodeau cite les deux arrêts de i5c)5 et de 1626, qui
ont confirmé de pareilles donations.
Lebrun , traité des successions, liv. 2 , chap. 6 , srct. i ro. f
distinction 2, est du même avis: ce L e second conjoint, dit« il, est la première personne prohibée, et nulle autre ne
«• l’est qu’à cause de lu i.........On demande si les enfans du
« second mariage sont compris clans cette prohibition, et il
« semble qu’ils n y sont pas compris: car, si d'un côté on les
« considère comme les euians du second conjoint, de l’au»
G
�( i8 )
« tre, on les peut regarder comme les enfansde celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
« de ses libéralités ».
« Si les enfans de celui à qui il est défendu de donner, sont
« dans la prohibition; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner à ses propres enfans......... Il faut prendre en
t<toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
« que ces donations‘se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions-----Aussi nos
« docteurs, entr’autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
« cod.de secund. nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n’étoit pas compris dans l’édit; ce que j’estime
« devoir avoir lieu , pourvu que les enfans n’aient pas
« servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color nonjfuerit quœsitus , comme dit la loi item si y y
«ff. de sénat. Maced. et particulièrement p o u r l’espèce
» la loi suspitius 49 ’ .lf' (^e d°nat' item si color Del
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœ situs, n ih il
« valehit traditio ; id e s t, s i hoc exigit u xo r} ut ahquul
a ex ea re intérim commodi sentiret maritus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu’en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari, h cause de la puissance pater
nelle; mais que hors ce cas particulier, les donations
fa ite s aux enfans com m uns} ne sont pas réputées com
prises dans Cédit.
Enfin, le dernier commentateur delà coutume d’A uver
gne, traite aussi cette question dans le plus grand détail,
�C t9 )
et après avoir rapporté les arrêts pour et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière jurisprudence -paraît
décisive pour la validité de ces dispositions.
1 « Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740, ont fixé la juris
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruit pas,
« puisqu’il est dû à la circonstance particulière du choix
« laissé à la seconde fem m e; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
« pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
«venu des successions et donations en ligne directe, et
« où les dispositions en faveur d’en fans à naître sont assez
« fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en« fans personnes prohibées, ne s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints , avec qui le mariage se contracte , et il
« suifit que la disposition puisse s’appliquer Ad autres causes
« que l’impression du c o n jo in t, pour q u ’elle doive avoir
« tout son effet. On doit plutôt rapporter la disposition à
« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
« combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, com« ment un second mari pouvant profiter directement au
« moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
« à naître scroient dans une plus grande prohibition que
Cc lui. Il nous semble donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition, sauf les exceptions légitimes
« dans des cas où il est visible que le donateur n’a eu d autre
« motif que l’impression et la suggestion du nouveau con« joint ou la volonté de l’avantager lui-même.»
Ainsi donc , il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune , faite par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
G 2
�C 20 )
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement de la disposition, puisqu'on cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoient succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien, puisque la femme n’avoit pas d’autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice, Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps ÿ
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas, ni l’un ni
l’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d ’une disposition universelle ; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au profit des nulles , à l’exclusion des
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
mariées par père et mère»
T o u t concourt donc, on le répète, à rendre cette dispo
sition inattaquable. Le droit d’é lire , accordé au survivant,
dans le cas où il n’auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne change rien à cet te décision, parce qu’il n’en résultoit au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première, ce qui est réellement
arrivé , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mari.
11 y a même plus, c’est q u e, sans les nouvelles lois, le
consultant n’en am-0it pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle étoit forclose, moyennant la dot à elle
�f « J .
constituée, et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de
son père sans y être rappelée \ et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
ment qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis à l’aîné maie du second lit , une
succession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
S e c o n d e
Q u e s t i o n .
N ÿ ayant pas eu d'élection, tous les eirfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition>
ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question peut avo ir été controversée dans les temps
voisins de la loi du 17 nivôse an 2 , dont l’effet rétroactif
avoit tourné les têtes \ mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L ’art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , «r avant ou depuis le 14 juillet 1789, auroit conféré
« au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« héritiers dans ses biens, l’élection, si elle n’a eu lieu que
«le 14 juillet 1789 ou depuis, demeure nulle et de nul
« effet; et tous les héritiers présomptifs, au préjudice dés
ir quels elle auroit été faite, sont, nonobstant touteexclu« sion, appelés à partager la succession de la meine manière
r et par les menies règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. >3
L ’article suivant porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier, néanmoins subordonnée au cas
�; c 20
& où un tiers ne disposeroit j>as autrement des biens com« pris en la même institution , sont nuls et de nul effet, à
«daterdu 14 juillet 1789, si ù cette époque le droit de
« l'institué n’étoit pas devenu irrévocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée aveclui. o
; jVlais, i° . cette loi né petit avoir d’effet rétroactif; les
lo is des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an , ont confirmé toutes les dispositions irrévocables
de leur nature, faites avant la publication de la loi du 7 mars
ï 793, qui a défendu toute espèce d’avantage en ligne directe,
•ainsi que les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse an 2.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse an , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
ce an 2 , à compter du 14. juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
« date certaine avant la publication de ladite loi du
5
5
17 nivôse. »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dôrnière loi.
>
Dans l’espèce particulière, la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est m orte avant la révolution ,
et le père, le 27 juillet 1793 : la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession; il
faut juger l’institution dont il s'agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L'on n’a pas oublié qu’à défaut cVélection , rétoit lui
qui étoit appelé à la r e c u e i l l i r ; et la mort du père, sans
l’avoir faile, équivaut à. uu acte qui la contieudroit,
k
�(
)
Ces principes anciens n’ont point été altérés par les
nouvelles lois, parce que la succession s’est ouverte avant
et dans un temps utile ; et on peut d’autant moins les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs,
et sur-tout par R icard, traité des donations , partie i re. f
chap. 3 , section 12, n°. 5yz et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un:
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers, comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’élection
« qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu’u n , mais seu lem en t le c h o ix de la personne
a entre u n certa in n o m b r e , ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui 7'ogatus e s t, positum est onuiino, an velit
« restituere , sed qu i potius restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé ù l’au
dience de la grand’eham bre, par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’autrui,' quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterm iné,
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au moment où il écriyoit, particulièrement dans le
�( 24 )
et pays de droit écrit, où les maris et femmes ont cou« (unie de se déférer entr eux cet honneur, de laisser
« au survivant la liberté de choisir un h éritier uni
té versel entre leurs enfans ; ce q iiils pratiquent par le.
ce p rin cip e une sage politique , et afin de transmettre
ce toute la puissance entre les mains de celui qu i survit,
» <it lu i conserver, par ce m oyen , le respect de «scs
>5 enfans. »
L ’on voit donc que les principes anciens valident l’ins
titution dont il s’agit.Les mêmes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas où le tiers, chargé d’élire,
ne feroit pas de choix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement mi des éligibles pour recueillir sa dis
position , & défaut d’autre c h o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par l’ex
tinction du droit d'élire, ou par la m o r t du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite.
E nfin, les nouvelles lois , au lieu de contrarier les
anciennes sur ce p o in t, ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l’on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la p u b l ’Cation de la loi du 17 nivôse : ainsi l'élection,
auroit pu valablement être faite jusque - là , et par la
même raison , l’aîné mâle avant été désigné pour la
recueillir, à défaut d’élection d’un antre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
JNous trouvons encore cette question décidée dans im
rapport
5
�5
f»
)
rapport fait ail nom d'une commission, par le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
Résolution par lui présenté, porte que si l’auteur de la
disposition avoit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en avoit chargé, et s’il avoit nomme un
héritier ou légataire pour recueillir à défaut d autre choix,
sa nomination, conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’é lire ,
et l’héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p r é v u , a recueilli seul le bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection le lui âuroit
en levé, ce qui n’est pas même pr o p o s a b le , elle n ’en seroit
pas plus avancée, parce q u ’elle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second l i t , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe,
§.
T
r o i s i è m e
III.
Q
u e s t i o n
.
Quels sont les droits de la jïlle du premier h t ?
Cette fille a été forclose par son contrat de mariage;
mais la loi l’a relevée de cette forclusion. L e père n’est
mort qu'en juillet 1793; à cette époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793» avoient frappé,
et elle est appelée à recueillir, ea rapportant ce qu’elle
D
�(26)
a reçu , sa portion des deux tiers de la succession ah
in testa t, qui seront divisés entre tous les- enfans par
¿gale portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau; mais ce qu’elle
prendra dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira sera dotal; si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra moins, et les auti’es héritiers feront
les prélèvemens de d ro it, de manière que l’aîné mâle ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l'autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera , au prorata de son émolument, les autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de 230,000 ir , y compris le rapport des 1 ,000
la portion de l’aîné mule sera de 1 1
parce que
le tiers de 230,000
est de 76,666 *t~
J 4 ^ , et que
le quart, dans le surplus, est de 38,333 ^ 6^ 8 ^ ; en sorte
que la fille du premier lit, conservant les i ,ooo
argent,
n’aura p lu s, en b ien s-fo n d s, que 22,333 ^ 6 ^ 8 ^ ..
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineurs^
le partage doit etre fait en justice, et provoqué par un
majeur; il ne pourroit avoir lieu sans cela.
5,000
5
5
D é l ib é r é à Clerm ont-Ferrand, le 19 nivôse an 9^
B O Y R O T , D A R T IS -M A R C IL L A T .
Je suis du môme avis, et par les mêmes raisons.
P IC O T - LA C G M BE ..
�27
(
)
L e soussigné, qui a lu la consultation ci-dessus, est
du même avis; les motifs qui lui servent de fondement
sopì trop auipk\n>entdiscutés cUns-cette^onsultation, pour
qü’il-sok nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
eu faveur du consultant, c’est que sa mòre avoit prédécédé
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793»
et qu’ainsi son droit à l’ institution, ¿toit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2.
D é l i b é r é à R io m , Je jE2 pluviôse, an 9 de la r é
publique.
r
tquttée.
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
D é l i b é r é à R io m , ,1e a ye^itôse, an 9 de la répu
blique.
PAGÈS.
*
L e soussigné est du même avis, par les mêmes motifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de l’ancienne législation, encore en
vigueur à l’époque dç l’puverture de la succession.
L e 22 ventôse an 9.
MAU G US*
�(i8)
Q U E S T I O N S PROPOSÉES.
CjX il e e r t D U C O U R T H IA L , veuf de Marie de Villette,
contracta un second mariage le 14 mai 1778} il avoit
une fille unique d’un premier mariage.
Trois enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthial est décédé le 27 juillet 1793 5 s&
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
Il s’agît de irégler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père c o m m u n .
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial de Lassuchette, fils
aîné du second lit , croit, avoir droit de prendre, dans
cette succession,, un tiers en préciput et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, son
p è re , du 14 mai 1778 , dont la teneur suit :
*
Ledit. . . . . . futur ép o u x , en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à ven ir, Vun des erifans qui naîtra
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage f
« laquelle institution est faite en faveur de celui ou.celle« que les futurs époux choisiront conjointement, par-
�*9
.(
)
a quelques acïes que ce soit, ou qui sera choisi par le
« survivant des deux fu tu rs, auquel le droit en appar» tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
* que ce soit et en cas que le"ch o ix nyeh ait pas été f a i t ,
« ladite institution sera au profit de Taîné des mâles
« s’il y a des m âles, et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. »
Gilbert D ucourthia l et sà seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre i sans avoir, fait d’autre choix entre leurs
enfans communs pour, recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de l’aîné des m âles, en cas qu’il
n’en fût pas fait d'autres.
En cet état, le citoyen Lassuchette, fils aîn é, e s t-il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son p ère, a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vun des eiifans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
’
2°. Que Yindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
îa disposition ?
3°. Qu’elle n’étoit pas viciée non plus par la circonstance
que la seconde Jèmrne devoit concourir au choix- de cet
h éritier, dans le cas où il seroit fait du vivant des deux
époux, et même de l’élire seule, si elle- avoit survécu ?
4°. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans Je cas, qui est arrivé, où il n’y auroit
pas d’autre ch oix, étoit également une disposition valable
�(3
■«)-.'
dan,sle ¡principe ,
, soUxPlein >et
èqtiex’ leè’ej:, ;uor^o.bsta*at5la rc^^^iqrjjd^s^^spfîÿitions e
«jgeij^^rpjçpnonçép paç
& , 2P£lV:
dç^a 'ioi*,du â- , pip^sg. flftA* ^ ^ w v u r e j d ç ^ ^ q n ^ ia
au cK’Ç&s de Gilbert P«c^r^ lw ftl?•-> nol u!ï1-uii * ''l.ii »
!. £?,,Enfin.r^qpeje^djicrgt dir^m .ars ,1793., ,qui avoit,
interdit tous avantages en ligne (directe, quelques mois
4
7
9
avant le dc^s,(^^Gilbei^)Dugourthi^V)\^^t:.¥l.a&. uri ^s“
tacle non ¡plus(à çe que/Jp jç^oypn iDiicpurtliif^iil^aj^é
profit^ d’une disposition ejti .pi^cipUft, ,qui a sa soj^rfe ;$atis
un contrat de mariage^ntéiieuf de ph ^ d e quatorze tans
à ce décret.
• O pinions du Conseil,sur les questions proposées.
•>
L a première observation à f a i r e , pour résoudre ¡les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d’une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2; mais d’une,
succession ouverte près de six mois avant cette lpi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut ra p p o rté par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
cette époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisième observation. Le sort de l’élection faite par
�(3 0
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourthial-Lassuchette, fils aîn é, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas où
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
'mère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé avant' la lo i du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ; car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils aVoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
D e ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que Ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées ; mais
Uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
validité, sous le régime ancien, des donations de biens
présens et h ven ir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de mariage, en fa v e u r des erifans à naître du mariage T
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 17 3 1, art. X V II et X V I I I , et de 1747, art. XII.
On ne sauroit non plus méconnoître la capacité des
enfans d’un second mariage, pour recevoir de pareilles
dispositions et eu p rofiter, en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut perinettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de sesenfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
Auvergne, où étoient situés les biens de Gilbert D ucourthial, ) et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage, sur ceux du second.
�32
/(
) .
La seconde femm e, il est v r a i , n’auroit.pu être vala
blement instituée pai\son mari,, que pour succéder à une
partd!eiifant\ mais son incapacité relative et limitée ne se
co m m uniquo it point à.ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en gén éral,,n e fut jamais mise eu
question ; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naîtroient du m ariage, étoient
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits à la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
1719 et 11 août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage en secondes noces,
pux enfans à naître du m ariage, que ce qui y est véri
tablement ; je yeux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, q u i, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir Je sort
des enfans’ à naître du mariage, s’occupent de l’assurer à
l’ayance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contractent,
et sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrêts notables de
Combe»
donc
�33
(
)
donc pas surpris si tous les suffrages se sont réunis, depuis
soixante ans, pour en proclamer la validité.
D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec--laquelle • Gilbert Ducourtliial use de la
faculté d’avantager l’un de ses enfans à’ naître du second
lit ; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; e’est-c\-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gratifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure,, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauroient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes g é n é r a u x , pour ne laisser voir
dans l’institution faite par Gilbert Ducourtliial en faveur
d un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
m otif pour les tribunaux d’en ordonner l’exécution sans
hésiter.
2°. Mais on semble prétendre que l’institution dont il
s agit étoit vicieuse dans sa form e, en ce que Tinstitué
étoit indéterm iné, et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourroit être de quelque considération, s’il
s agissoit d une disposition postérieure à la loi du i 7 nivôse
an 2, qui a aboli pour l’avenir les dispositions dont l’ap
plication seroit laissée au choix d’un tiers.-— Mais il s'agit
ici dune disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que, loin que les donations et institutions électives fussent
E
�( 24 )
prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X I I, L X III, L X I V , L X V e tL X V I de l’or
donnance de i7 3 5 >sur les testamens, et par celle du mois
d’août 1747 sur les substitutions, art. X IL
Enfin, les articles X X IIIe t X X I V de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 3 lèvent tous les doutes ; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées;
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r , l’institution dont le citoyen Ducourthial-Lassucliette réclame l’exécution, est dans ce cas,,
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur iils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’eu x, et
choisir un autre de leurs enfanspour.recueillir à sa place,
(koient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,,
dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette veut tirer avan
tage , n’étoit pas vicieuse dans son essence ; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conféré à sa
seconde épouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueille; oit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit d’élire lui oJFroit une perspective éventuelle, qui
pouvoil lui ouvrir des chances pour faire tourner le don.
à son p ro fit, quoique personne prohibée ; et Ton cite en.
l a v e u r de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
5
�035)
fut jugé par l’arrêt rendu entre la veuve et les enfans
Laparra, le 18 mai 1736«
- La réponse est facile et tranchante. L ’arrêt de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L ’institution élective qu’il
minulla, étoit universelle , et réduisoit les enfans du pre-»
xnier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mère succédoit à ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœurs consanguins.
Cette mère qui avoit survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession . consistant principalement
en m obilier; et elle avoit d’ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant de son mari, pour réduire à peu
près à rien les légitimes des enfans du premier lit. L in
dignation plaidoit la cause de ces victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence appeler l’arrêt qui annulla
l’institution contractuelle faite à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
O r , qu’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont ii s’agit ici?
L ’institution de Laparra étoit universelle ; celle-ci n’est
que du tiers.
La seconde femme de Laparra avoit survécu à son m ari,
ets’étoit emparée de toute la succession , pour en détourne!'
la meillcuve part à son profit. Ici la seconde femme de
Gilbert Ducourthial est morte long-temps avant son mari,
et n’a profité, ni pu profiter de rien dans sa succession.
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
scs enfans, et elle pouvoit abuser du droit d’élire qui lui
avoit été confié, soit pour jouir, ea retardant son choix ,
E a
�(3 0
soit pour y mettre un prix et des conditions à son avantage.
La seconde femme de Gilb ert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à son
m ari; la coutum e qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, fauroit exclue de l’espoir d y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’enian t, dont il lui étoit permis de la gratifier ostensible-,
ment ; la médiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée, y auroit mis un obstacle invincible.
Il n y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. T out étoit fraude dans l’afFaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci ; la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
V oilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial aîné , qui s’évanouit.
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement , pour recueillir à défaut d’autre ch o ix , et
l’ héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice delà disposition, toutes les fois qu’il
n’en étoit pas déchu , par un choix contraire.
L ’article X X I V de la loi du 17 nivôse, abrogea ces
règles pour f avenir ÿ mais il en consacra les effets pour
le p a ssé, en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
scroit devenu irrévocable par le décès de la personne
ayant droit de révoquer»
�:
.
^ 37, 5
L ’article vouloit que le décès qui avoît rendu là dis
position irrévocable y fût antérieur au 14 juillet 1789:
mais cette rétroactivité est rapportée. Il suffit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
ré v o q u e r, soit antérieur à la publication dé la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourtliial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,'
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est confirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
°. Il reste la principale difficulté à éclaircir ; 'elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en p r i n c i p e , que « la faculté de disposer de ses
« bien s, soit c\ cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par do« nation contractuelle, en ligne directe, étoit abolie, et
« qu’en conséquence, tous les descendans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
Appuyés sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette, lui diront sans doute, « si vous
« échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
« parce que le décès de notre père est antérieur, au
«moins n’échapperez - vous pas au' décret du 7 mars
*I
> car notre père n’est mort qu’après ce décret ,
« et conséquemmenl dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de 8a succesn sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. »
I
L a réponse est dans les articles I et V II de la loi du
5
793
�(38
(
;)
*8 pluviôse an , qui déterminent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
5
*-793 ? enjces termes :
,q^
! j. :
* y Les avantages , prélèvçm ens, préciputs , donations
« eiitre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi-;
« tions irrévocables de leur nature, légitimement stipuo lées en ligne directe avant la publication du décret du
a 7 mars 1793 , auront leur plein et entier effet, confor«.mément aux anciennes lois , tant sur les successions.
« ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur celles qui s’ouvriront
a à l’avenir. » ( Article I.er )
« Les élections d’héritiers ou de légataires. . . . qui ont
c été annullées par les articles.. : . . de la loi du 17 nivôse,
«.à compter du( 14 juillet 1789 , sont-rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant date
«certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. »
( Article V II. )
L e contrat de mariage du 14 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-distinctes ; savoir, une disposition princi
pale , qui étoit une institution du tiers des biens de Gilbert
Ducoürthial en faveur de'l'un des enfans à naître de son
second m arine') par préciput et avan tagen t une disposi
tion s e c o n d a i r e qui, étoit la [désignation particulière de
l’aîné des inâles poiir recueillir ce tiers de biens t dans le
cas où il ne seroit pasfait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition principale étoit pure , sans condition,
et irrévocable de sa nature ; elle aurait profité à tous les
enfans du second lit collectivem ent, à défaut dei choix:
valable d’un seul d’entre e u x , pour recueillir exclusive-
�( 3 9 ) .
m ent ; la disposition secondaire, qui appliquent da
vantage du tiers à l’aîné des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et< pouvoit être révoquée, par l’é
lection, d’un autre enfant.'
Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an
, qui viennent
d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
pale ; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
.1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
conformément aux anciennes lois , puisqu’elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
Quant à la disposition s e c o n d a ir e , elle est maintenue
par l’article V I I ; car cet article rétablit dans leur effet
p r im itf, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 1793, mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la lo i du 17 nivôse
an 2; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse, seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée par le décret du 7 mars 1793? n’ernportoit pas la prohibition de choisir un d entre plusieurs
éligibles, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle , irrévocable de sa nature, qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans l’espèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîné, étoit
5
�(
4
0
^
an térieure, soit à la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 17 9 3 , puisqu’elle éloit contenue dans le contrat
m ême de 1778. Mais^ elle, étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant la loi du 17 nivôse, par le
décès de celui qui seul auroit pii la'révoquer par un choix
contraire.
Ainsi la va lid ité , sous tous les rap ports, se trouve pro
noncée sans équivoque, par les deux textes précités.
O
b j e c t i o n
.
L a validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
en problème, à la bonne heure ; mais la validité de l’élection
conditionnelle de l’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
à l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine. Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur, qui pouvoit jusqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîn é, par le
choix d’un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
jl est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès , doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eût été
faite le 27 juillet 1793 seulement, jour du décès de Gilbert
Ducourthial père , il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée a l o r s depuis plusieurs mois, en
ligne
�C'4i )
ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
non avenue. ■
<* ■
R
é p o n s e
^
C e raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i°. C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 , jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778, sous le
prétexte que le décret du 7 mars 1793) lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II d elà loi du 18 pluviôse an ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l’intervalle de la loi du 7 mars 1793 5 à celle du 1 7
nivôse an 2 ; il maintient l’eilet p rim itif de toutes celles
qui avo ient procédé la publication de la loi du 17 nivôse,
nuiéjiniment sans exception, sans distinction entre celles >
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793, et celles
qui étoient antérieures. Cette décision positive de la loi,
au surplus, n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les temps; car dans tous les temps, on avoit pensé
que celui qui choisissoit un de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition préexistante, ne faisoit point une
disposition nouvelle • et conséquemment q u ’il ne contreveuoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
- Après cela , qu’importeroit donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîn é, en 1778, dût
n’ôtre considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne scroit
F
5
�C 4* . r
pas moins vrai de dire qu’elle est textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, quiencore une fois maintient indistinctem ent, toutes les
élections nntérieurés à la loi du 17 nivôse..
20. Les citoyens Ducourthial puînés, ne’ se font pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à. l’appui de leursprétentions le principe d’égalité des partages établi par
les lois de 1.793.,. et-de l’an 2. Ils ne veulent pas voir
que ces lois n’ont pas été faites, pour régler les intérêts des <
donataires entre eux, mais, seulement pour régler les in
térêts des héritiers légitimes, mis en opposition avec
ceux des donataires. C’est cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien, énergiquement exprimé dans l’articleL V II.d e la loi même du 17 nivôse , qui porte:
<r Le droit de réclamer le bénéfice de la lq i, quant aux;
« dispositions qu’elle annulle, n’appartient qu’aux héritiers,
« naturels. »
-.
Il est reconnu que la disposition du tiers des biens de^
Gilbert Ducourthial, qui est l’objet du litige, loin d’être*
annullée,. est au contraire maintenue par rapport aux
héritiers de Gilbert D ucourthial, en général.; que le con
trat de 1778 j qui la contient, doit avoir sa pleine et en
tière exécution, en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput, au préjudice de lafille du premier lit, qui n’a pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens Ducour-tliial puînés, de plus grands droits qu’à leur sœur ; consé-quemment, dès qu’il n'attribue aucune part à cette filleunique du premier lit, il n’en attribue aucune non plus,
à scs frères, sur le tiers des biens en litige..
�' { 43 ^ ,
Cela posé, ce ne peut être qu’en se présentant cornure
donataires concurremment avec leur frère aîn é, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le £[ers des biens , et en demander par
tage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D u« courthial en 1778, à celui des enfans à naître de son
« second mariage qu’il choisiroit, est bon en s o i, et doit
. « profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait eu faveur d’aucun des trois.
« O r , il n’y a point eu de choix valable, puisque le seul
<r qui ait été fait, celui qui étoit contenu dans le contrat
« même de m ariage, du 14 mai 1778 , a été annuité par
« le décret du 7 mars 1793- a
I l e bien! ce raisonnem ent, quand il ne seroit pas ren
versé par l’art. V II delà loi du 18 pluviôse, s’écarteroit
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle gé
nérale , que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
prohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héritiers naturels en leur qualité d’héritiers se u lem en t , et
non par des donataires contre d’autres donataires. E11
un m o t, les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu’en faveur des héritiers ; aucune n a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen DucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père commun l’a avauY 2
�tagé' par l’acte le plus favorable delà société, par un contrat
de mariage : d’un précipu t q u il pouvoit lui oter, mais
qu’il a voulu lui consei'ver. En vain ils feront des efforts
pour se révolter contre la volonté paternelle, ils n’en;
feront que d’impuissans.
D
élibéré
<\ Paris par le jurisconsulte ancien sous-EERGIER.
J U E C O N SE IL SOU SSIGN É qui a vu le mémoire à.
consulter et les diverses consultations au bas. rapportées
pour le fils aîné du secondait de feu Gilbert Ducourthial
de Lassuchette ^
E s t d ’AYIS des résolutions contenues dans ces. consul-tâtions. Trois questions y ont été traitées..
i°. Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens,,
faite en faveur des enfans du second lit, est valable ?
2°. Si cette institution profite à tous les enfans, ou;
au fils aîné exclusivement ?'
3°. Quels sont les droits de la fille du premier lit ? '
L a première et la troisième question ne présentent:
point de diiliculte sérieuse.
Lors du contrat de m ariage, l’inégalité de succession
entre les enfans n’étoit-pas1prohibée ; ils pouvoiènt être
avantagés les uns sur les autres : on avoit éclairci et condamné le doute , si des enfans du second lit pouvoiènt
être mieux traités que ceux du premier. Le contrat du;
�C 45 3
second mariage assura donc irrévocablement aux enfans;
du second lit un avantage alors licite.
20. P ar les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant, de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa ,
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avril 1791 rendit
ee rappel inutile ; elle le fit elle-même eu prononçant
l’abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permet-- toient d’exclure les filles. La lille du premier lit est donc
héritière comme les autres enfans , sauf le rapport de ce
qu’elle a reçu;
30. Mais à qui appartiendra le tiers reservé dans' le
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat à celui d’eux qui seroit choisi ,
♦et à défaut, à. l’aîné ? C’est la seule question véritable
m en t litigieuse.
Dans 1 ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute. Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîn é, que le contrat du
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit , le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna à aucun des enfans à en naître la. certitude de re-Gueillir ce tiers. Un seul y étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant.U est vrai
qu’à défaut de choix , l’aîné étoit appelé : il est. vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an , a confirmé", art. I er. lesinstitutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de*la loi du 7 mars X'793 5 et tjue par l'ar
ticle V II , elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17
nivôse an 2., les élections.d’héritier, qui auroient été fai—
5
�C .tf)
-tes par acte ayant date certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse. Mais, dira-t-on, l’article V I I n’est pas
applicable, puisqu’il n’y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et l’article Ier. n’est pas applicable
non plus , parce qu’il n’y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
7 mars 1793 , lui avoit ôté la faculté du ch oix, en dé
clarant que tous les descendans auroient un droit égal
6ur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont eu , par la loi du
7 mars, un droit égal à ce préciput qu’il avoit destiné
en se m ariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus
été permis depuis le 7 mars 1793, de disposer en faveur
de l’u n , au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à scs parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués, et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
Mais le choix fut placé dans l’institution mêm e; l’ins
tituant eu se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
-cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut'donc-, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir, si son père ne disposoit pas au-
�c 47 y
trement. Il avoit donc sur ses frères qui n’étoient qu’éligibles, l’avantage d’etre élu conditionnellement; c’està-dire, si le père ne témoignoit pas une autre volonté.
La condition qui l’auroit dépouillé n’étant pas arri
v é e , son droit remonte au titre qui lui lut donne par
le contrat, titre irrévocable de sa nature ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé a laissé subsister
Institution en faveur de l ’aîné dans toute sa force.
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com
mun des testateurs, l’aîné étoit l’objet des choix et des
préférences; et si l’on se réservoit de pouvoir appeler
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans
le devoir que pour lui donner des co-partageans. C ’est
dans la même intention quafin que la réserve de choisir
ne lui nuisît pas, on déclaroit qu'à.- défaut d élection il
seroit héritierLe défaut d’élection n’est donc que la ratification de
l’institution de l’aîné, si un autre n’est appelé : o r, la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con-*
trat à la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,
et nullement par la loi du 7 mars 1793;
Il n’est pas même vrai que cette loi eût ôté au’ pore
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un
de scs enfans qu’à l'avenir , elle ne détruisoit pas*
Tavantage déjà fait à celui des enfans qu’il éliroit, encore
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , cm
cas de non élection.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre-
�48
(
)
irrévocable, elle ne pouvoit embrasser l’hypothèse dont
il s’agit; car, ou elle empeehoit le père d’élire, ou elle
lui en laissoit la faculté. Si elle lui en laissoit la faculté, il
pouvoit donc dans cette espèce particulière avantager un
de scs enfans : si elle empêchoit l’élection, elle auroit donc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde; elle auroit eu effet ré
troactif. Le père avoit donné. ( Une institution contrac
tuelle est une donation ). Le père avoit donné à un seul'
parmi les enfans qu’il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il n’y
avoit pas d’élection; il y en avoit une bien expresse dans^
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en<
substituer une autre, elle doit avoir son efTet.
Trois lois sont i\ considérer: celle du 7 mars qui abolitpour l’avenir la faculté de disposer en ligne directe; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures et irrévocables.
La loi du 17 nivôse fut plus hardie; elle annulla ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
le 14 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l'effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2, fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi du 9 fructidor an 3. Le donateur ou instituant,
décédé le 27 juillet 1793 , est donc mort sous l’empire
de la loi du 7 mars précédent, qui ne touchoit pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an maintient expressé
ment , par l’article I.cr. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avant la publication de
la
5
�4
C S>)
la loi du 7 mars 1793 ; et par l’article V I I , elle maintient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi(du 17 nivôse.
O r , la disposition de 1778 est antérieure au 7 mars
*
793-
Elle est irrévocable de sa nature ; car elle est comprise
dans un contrat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvoit être révoquée au préjudice
de l’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du clioix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’ institution en soi ne soit irrévocable : elle donne droit et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne l’est pas : tous les
appelés ont l’espérance d’être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse est décisif ; il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses j
1 °, que 1 élection antérieure au 17 nivôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 2,0. que la loi du
7 mars 1793 n’avoit pas prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d’actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations, ou devenus tels par les événemens, tels
G
�5
( o )
que les testamens après le décès de leurs auïeurâ ; que les
élections ne furent supprimées que par la loi du 17 nivôse,
et que les corrections faites à cette loi les ont rétablies pour
le passé.
;
Q r , il s’agit ici d’une donation faite ù un entre plusieurs:
donation irrévocable et permise en 1778.
Il
s'agit de l’élection de ce donataire, faite dans la dona
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
Avant son décès arrivé en juillet 1793, ou il eût pu en
appeler un autre, ou il ne l'auroit pas pu. A u premier cas,
il ne l’a pas voulu \ sa volonté , que rien ne genoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, Télccr
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit pas, doit être exér
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit: elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le .contrat dje mariage. Le dépouil-r
1er, ce seroit rétroagir; ce geroit tom b er dans cetle absur-r
dité de le dépouiller, parce que la condition sous laquelle
Je testateur l’AVoit appelé ( le défaut d’autre ch o ix }, est
Arrivée,
f
D é l i b é r é à Paris, le 2 germinal an 9.
SIM É O N . P O R T A L IS . M U R A IR E , président
au tribunal de cassation. F A Y A R D .
LF, C O N SE IL S O U S S IG N É , qui a lu une consultation,
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données i\ Rioru et à Clermonl-Ferrand j
E s t d u m k m e a v i s sur les trois questions traitées dans
pes co n su lta tio n s, dont les résolutions sont uniform es,
�( Si )
Sur la p re m iè r e question, il est sans difficulté q u ’en 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
autrement, un de ses enfans plus que l'autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
L a jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui con
tractait un nouveau mariage, ayant des enfans du prem ier,
de faii’e des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union , après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du xt août 1740 , qui
est rapporté en form e avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
79. On trouve au même endroit, à la suite de l’arrêt du 11
août 1740," u n autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L ’institution d’héritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , etoit donc valable dans son principe.
Sur la deuxième question , cette libéralité du père sub
sistait dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est décédé, et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales :
G 2
�52
C
)
jîiais cette Ioï ne régloit que l’avenir, et non le passé.
? L ’effet rétroactif attribué depuis aux lois des 5 b ru
maire et 17 nivôse an 2 , en rétrogradant jusqu’au 14
juillet 1 7 8 9 , a été aboli, et par conséquent l’institution
d'héritier, qui avoit été détruite, est redevenue en pleine
Vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second l i t , les autres
enfans ne peuvent le lui contester.
L e contrat de mariage de 17 7 8 , contient deux disposi
tions :1a première est uneinstitution d’héritier pour un tiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
ou le survivant d’eux voudront choisir; la seconde est
une vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils a în é , au défaut de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N y ayant point eu de choix ni par les père et mère
conjointement, ni par le citoyen Ducourthial qui a sur
vécu , le fils aîné s’est donc trouvé seul donataire, non
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que le contrat de mariage renferme.
La loi du 7 mars 1793 n’a point défendu les élections
d’héritier ou de donataire à faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d’héritier ou de donataire n’est
point une donation proprem ent dite. Ce 11 est que l’exé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions
Eont de droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1793 doit donc être restreinte dans le cas des donations
postérieures à sa publication.
D ’ailleurs, le fils aîné n’avoit pas besoin d’être élu. Il
�3
(® )
étoit institué éventuellement par le contrat de mariage
m êm e, dans.le cas où un autre que lui ne seroit pas
nommé.
5
Enfin l’article V II de la loi du 18 pluviôse an , donnée
en explication du rapport de l'effet rétroactif, porte : « Les
et élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
ce perdu qui ont été annullées par les articles X X III et
« X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
« 1789 , sont rétablies dans leur effet prim itif, s i elles ont
« été fa ites par acte ayant date certaine avant la publi
c a tio n de ladite loi du 17 nivôse. »
D e pareilles élections pouvoient donc s'effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l ’espèce proposée, le citoyen
D u courthial étant décédé le 17 juillet 1793, quand on
considérerait le défaut de choix de sa part comme une élec
tion du fils aîné du second lit , cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les père et m ère, ou le survivant d’e u x , n’éliroient pas :
ce qui met son droit hors de tout doute.
Il
est même à observer, que l’article V I I de la loi du 18
pluviôse ne parle point du cas où le donateur prévoyant
le déiaut délection, a désigné éventuellement , comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fut recueillie.
Sur la troisième question , la fille du premier lit élant
exclue par la coutume, sa renonciation à la succession
future de son père n'a pas plus d’effet que la forclusion
�(
5
4
)
légale. A in si, elle a le droit de succéder avec scs frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793.
D é l i b é r é à P aris, par le citoyen F erey, ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
FEREY.
À R i o m , de l'Im prim erie de L a n d r i o t , im p r im e u r du trib u n a l
d ’ appel. —
An 9
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Toutée
Toutée
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Maugue
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
successions
contrats de mariage
testaments
droit d’aînesse
secondes noces
loi du 17 nivôse An 2
égalité des héritiers
rétroactivité de la loi
doctrine
application des lois dans le temps
coutume d'Auvergne
forclusion
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations.
Table Godemel : Election : l’institution sera au profit de l’ainé des mâles, et s’il n’y en a point au profit de l’ainé des filles. de ce mariage sont issus trois enfans mâles. Le père est décédé en juillet 1793, longtemps après sa femme, et sans faire d’élection. que devient l’institution ? deux systêmes : pour le fils ainé, 1° l’institution au profit des enfans du second mariage est valable, et doit avoir son exécution ; 2° n’y ayant pas eu d’élection, l’ainé des mâles désigné pour recueillir l’institution, doit en profiter seul pour le tiers qui en fait l’objet ; 3° la fille née du premier mariage, relevée de sa forclusion, prendra sa portion, c'est-à-dire le quart dans les deux tiers formant la succession ab intestat. pour les autres enfans, 1° la faculté d’opter ou d’élire accordée par Gilbert Ducourthial à sa seconde épouse, par leur contrat de mariage, donne lieu à la nullité de la disposition contenue dans ce contrat ; 2° en supposant que cette disposition ne fut pas nulle par le défaut d’une volonté libre, le fils ainé ne pourrait prétendre qu’il a été saisi du tiers, au préjudice des autres enfans ; 3° le fils ainé n’ayant pas été saisi individuellement, les enfans du second lit ne l’ont point été collectivement ; la condition attachée à la disposition ayant manquée, tous les enfans sont appelés à recueillir la succession, par égalité, comme héritiers de droit.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1778-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1101
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1102
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
application des lois dans le temps
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d’aînesse
égalité des héritiers
forclusion
loi du 17 nivôse An 2
rétroactivité de la loi
secondes noces
Successions
testaments
-
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G A S v e uv e de Gi l be r t
Barthom euf i n
C O N T R E J e a n -Bap
t i st e
Appellant.
t i m
é
e
Ba r t h o m e u f ,
Et contre F r a n c o i s
G abriel - A djutor
B a r t h o m e u f Intervenant
.
A près avoir fi fou ven t en ten du Jean
Baptifte Barthomeuf peindrere fon pere
c o m m e un vieillard imbécille pour
l eque l t outes les Volontés d’Anne Gas
étoient, des loix , apres a voir fi fouvent entendu ce
fils ingrat reprefenter ce père com m e un vil au
tomate , qui n a ete qu un inftrument de ruine pour
fa famille , on
n'apas du être fu rpris de ce que
f a Belle-M ère n 'eft a fes y eux, qu une marâtre
,
�l -AV
1
•arcificicufc, intéreiTcccruelle ; -piais ce qui eton:ncra fans doute c’eft J ’i'njù-tice des reproches dont
il accable cette malheureuie Veuve , c’eitTinjuiïice plus révoltante 'encôrè des demandés qu’il lui
forme ; c’eít en-fin la barbarie avec laquelle il la
traite^depuis longtemps.- Si la chaleur avec laquelle
jon 'a déclamé contre elle-avOit pu .produire FefFet
que fes ennemis en attendotent, ii la calomnie e'toit
parvenue à donner d’elle l’idée qu’elle vouloit en
donner-, il- efb temps que ces.injuftes préjugés difparoiiîent^ &L que l’infortunée qui réclame ici la
prote&ion de la C o u r , fott vengée avec éclat dé
l’inhumanité de fes oppreiTeurs. , vl
;
■o «
ï
A
l
,,
. . ,
Gilbert Barthomeuf, marie en premiere noccs
avec M agdelaine V-enteïon ,. en a eu Jean-Baptiffce & François-G^briel-Adjutor Barthomeuf.
Magdélainé" Ventelori étant décédée, Gilbert
Barthomeuf fc remaria avec Anne, Gas. Depuis ce:'dernier_‘>mánáge,''qúi*.fe fit au cpmmencenjerit 'de 17 6 0 , A nne G a i'a ' moins regar
dé les enfants de foii mari comme les .enfants d’une
étrangère que comme Tes propres' fc n iW s f& ils lui
rèndroîént euxr memeis cette 'juíVicC,'fi! úrí'criminel
intérêt n êtôuÎoiiPpas.it :c i i :d'é!îàJv,évité'dans leuV
i
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bouche.
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'' 'L a 'm a ïfô n c îe G ilbert B at^prticiïf étaniideve
nue 'p lu s^floriítante p a f 1<& íóínk de fa rVouvell^
�,
3!‘ .
. . . .
-
épouiè y il crut que la* recohnoifïàr.ce exigeoiin de*
liii qu’il l’en récompenfât ; il fit en coniéquence
un -teilàment le 27,(Septembre 17,6.5
par .ce'teftament il l’inftitua ion héritière par égale por-:; tion avec.Tes deux- enfants. Inde irœ., hinc.prima)
mali labes :vQ\\h. la feuler :caufe de ■
cette haine ■
inflexible que Jes parties adverfes( ont vouée à
A nne Gas ; voila pourquoi leàn-Baptifte BàrdiOrO
m eu f infulte à la mémoire de fonipere; ‘ivoilà pour-j
quoi ce pere i\’eft plus poiir luivqu’unb machine
qu’il fait gré au temps d ’avoir briiée , 6t dont il :
foule froidementt les ; relies..aux ripieds. . oq .,y, J.
- TGilbert Barthomeuf; 11’çft <mort que., quelquesannées après; le teiïamentrdont on vient de îparler.jp
les biens iqu’ib laiilà demeurerent indivis ;entrej.fa
veuve ôc fes enfants juiqu’au mois: de Janvier
1.772; mais à cette époque; ilsifurent tous parta-U
g é s, à l’éxceptiqn de ion;vin , qui ia été vehdii de-j
puis , & de,.les cu ves'& 'tonneaux qui iotit! encoret
dans le même état ou ils éroient alors.
La maifon qu’habitoit Gilbert Barthomeuf étant
échue a Anne G a s , elle ÿ continua.pciur ion comp
te le commerce qu’elle faifoitc auparavant poun la.;
communauté.
-* <
. i ‘»ri
Jean-Bapti lie Barthomeuf vôuluV auiTi eilà /er
de tirer parti des marçhandifcs qui e'toierit tombées
dans fon lot ; il buit hictt'icfîèt, ime;bo1u tiqub7 ôct
quoiqu’il- ne dût pas; s’y ennuyer , paiiquïil - n’y j
étoit jamais.,-il ne carda*pas de la>quitteV'pinir en»
prendre une autre , 0 1 1 par la même raiion, il ne
A 2
;
�4
dévoie pas s’ennüÿér davantage , 6c où pourtant
il fe déplut.encore. Toujours e rra n t, jouant fans
c.eiTe;, il marchoit à grands pas vers fa ruine ; il
s’en apperçut apparemment dans un de ces inftantsde réflexion ^auxquels-l’h o m m e'le plus diiïipéne
peut pas fe dérober; la peripecïive qu’il entrevit
l’effraya. rIl ie jetta aux genoux d’A n n e G a s , de^
cette A nn el Gas qu’il a. enfuite indignement vexée-,
qu’ils repréfente ¿aujourd’hui comme
un
monftre ; il lui avoua le défordre- de fes affaires;
il la conjura au nom de l’attachement qu’elle coniervoit pour la mémoire de fon mari de le laiiTer *•
demeurer avec elle , &: cette" femme trop indul
g e n t e . -pour pouvoir réfifter à >fes prieres & furtoutüà fes larmes,, confentit à tout-ce qu’il defiroit.
•; C o m m e il lui avolt promis une penfion de 30/
livres par m o is , il. ne- fongea pas-à la dédoirfma-1
ger de fa dépenfe par fon travail ’; il fe livra de-*
nouveau.à. fon goût, pour l’oifiveté & -p o u r le pla'H
fir , & il ne parut chez elle que deux fois par jour,
a midi & à huit heures.
- ^
- C o m m e n t l’arracher à l’inertie dans laquelle i l J
éioit plongé ? C om m ent rompre en lui cette habi
tude de ne rien faire qu’il avoit depuis fi long-*
temps contraâée ? C om m ent enfin briler le talis
man . qui Tenchàînoit dans ces lieux où l’attrait
impérieux du! jeu raiîêmbloit fes ¿mis? À n n é Gas
eiperé’q u e ’l’amour fcrarce prodige; elle‘veut le ma
rier , elle lui propofe c e ip ro je t, il y , fouie rit : il
recherche pluiieurs de’ fes concitoyennes, il- c n e it ,
_ A
t
t
*
�re fu fé , parce que fa réputation l’avoit devancé ; il
fent qu’il faut ou renoncer k trouver une compag
ne ou fe réhabiliter dans l’opinion publique ; il
prend un maître Diftillateur qu’il amene manger
avec lui chez fa Belle-Mere , emprunte d’elle de
quoi acheter des eaux-de-vie
d’autres choies
dont il avoit befoin , apprend à faire des liqueurs,'
en f a i t , les v e n d s, en touche l e ‘ p rix , le garde'
& ne paye ni ia peniion ni celle du Diftillateur
qui lui avoit enfèigné ion métier : il ne croyoit
pas encore être en iocieté de commerce avec A n n e
Gas ; ce n’eft que depuis quelques mois qu’il a rêvé
cette prétendue fociété.
En paroiiTant plus attaché à fon é t a t , il étoit
apparemment parvenu à d iflip e r, au moins en
partie , les idées défavantageufes qu’on avoit con
çues de lu i, car il s’établit enfin avec JeannePerrete-M ichelle Gaudin.
Q uelque temps après ce m ariage, dont A n n e
Gas fit tous les frais, Jean-Baptille B arth om eu f
6c fa femme s’étant unis pour tyrannifer cette
même A nn e G as,- elle fut forcée de leur déclarer
q u ’elle vouloit vivre feule, & qu’ils n’avoiènt à
ce moyen qu’à fe retirer chez eux.
Irrités tous deux de ce qu’elle ofoit fe laflèr de
leurs mauvais procédés , ils conipircrent de la
chailcr de fa propre maifon ; ils firent plus, ils
l’en chaifcrcnt en effet dans les premiers jours du
mois de Janvier dernier, & quand elle en fortic,
elle ne put obtenir d’eux qu’ un état des meubles
�6
&c des marchandées q u ’elle n’avoit pu renfermer
dans fa ch am b re , dont elle emporta la clef, après
avoir m i s , de concert avec e u x , une eipece de
icellé fur la porte ; fans afyle , fans a r g e n t, révol
tée de l’ingratitude de Jean-Baptifte Barthomeuf
- ôc de fon ép ou ie, elle alloit implorer iur le champ
l’autorité de la Jufticc contre eux. O n lui fit ac
croire qu’ils étoient difpofes à terminer à l’amiable,
&: elle fufpendit fes pourfuites. Elle vit qu’on la
jouoit, elle les reprit, & Jean-Baptifte Barthom eùf
fut a lig n é en la Sénéchauiiée de cette V ille le 17
du même mois de Janvier dernier.
L ’aSion qu’elle lui forma ten d o it, 1°. h ce qu’i l .
fut.tenu de déguerpir de fa m aiion, de lui en.laiffer la-libre jouifïànce, de lui laiiler en même»
temps celle des m archandées, meubles , effets ,
titres, livres de compte &: papiers généralement
quelconques qui étoient demeurés chez elle quand
il l’en avoit expulfée, <5c qu’au cas où il auroit
dégradé ou diverti les uns ou les autres des objets
qui viennent d’être déiignés, il feroit obligé d’en
payer la valeur à dire d’Experts.
a°. A ce qu’il fut également tenu de lui rendre
1 0 7 3 livres 1 5 . lois qu’elle avoit débourfés pour
lui lors de fon mariage. (<7) .
30. A ce qu’il fïic condamné à lui payer l a ’
iomme de 885 livres ,■a laquelle elle fe reftraig( . j ) O n v e r r a dans la requêre du
Janvie r de r ni er le détail
des différents articles de d é p e n f e qui c o m p o f e n t cette f o rn m e ,
�noir, tant pour fa peniion & celle de fa femme
que pour celle du ^Maître qu’il avoit pour appren
dre a diitiller.
4.0. A ce qu’il fut aufTi condamné a lui rendre
la fbmme de r o i 1 liv. 6 f. .qu’elle a payée à fa
décharge à différents Particuliers, dont elle rap
porte les quittances.
<j°.; A ce qu’il fût contraint à lui rendre ce
qu’elle avoit débourfé pour payer les impofitions
royales des biens dont il jo u it, &. pour faire cul
tiver* ces mêmes biens , dont il a feul perçu* le
produit.
6°. A ce qu’il fut condamné à lui payer 4000
liv. de provifion.
I l n ’eft pas une de ces demandes qui ne fut intômeftâble, cependant, comme elle connoiÎfoit l’en
têtement de ion A d v e r fa ir e , elle prévit que quel*
•ques juftesique puiïent être fes différents chefs
*de con clu fion s, elle alloit eiluyer mille chicanes!*
elle penfa donc qu’elle devoit chercher avant tout
a rentrer chez e lle , & a jouir de ce qui lui appartenoit ; elle préfenta à cet effet, le 16 Février
d ern ier, une requête à la Sénéchauffée de cette
V ille -,-p a r laquelle elle conclut premièrement à.
être provifoirement renvoyée en poiîefTion^de i^
Triàifôn , & a ce qu’il fût en cdnféquencê"brcion
né à Jean-Baptifte B arth om eu f & à* fa femm
d’en ' fo rtir à la première fom m atibn'qui leür
feroit faite
finon qu’il lui feroit p erm is; d
prendre m ain-forte pour les:.en -expulferuSeconf
V
�8
d e m e n t, à être pareillement renvoyée en poiîèfiîon de tous les m eubles, effets, marchandifes
& papiers qui étoient demeurés dans cette maifun lors de ia fortie , & à ce 'qu’il fut dreiTé
procès verbal du to u t,a in ii que de l’état oîi fe
trouvoit la fermeture de la porte de là chambre,
* Jean-Baptifte B arth om eu f n’ayant pas jugé à
.propos de comparoître fur cette demande provi
so ire , elle obtint contre l u i , le 22 du même mois
de Février dernier , une Sentence par défaut qui
lui a4jugea les conclufions qu’elle avoit priiès à
cet égard.
- A p p e l de cette Sentence en la C o u r par JeanBaptifte Barth om euf, dont le principal objet étoic
d ’éloigner la décifion de l’affaire. A r r ê t contra
dictoire du i ^ M a r s aufli derrfier , qui la coniîrr
me , à laj charge néanmoins parr A n n e Gas de
Jaiiièr à Jean-Baptifte B a rth o m e u f, pendant fix
m o is, l’appartement &: la boutique qu’il occupoii:
dans fa maifon.
M algré cet A r r ê t , Jean-Baptifte Barthom euf
.a gardé tous les meubles & toutes les marchan
dées d’ A n n e Gas , & ne lui a laiiïé l ’ufage. que
d’une feule chambre. Il a été dreile procès ver
bal de rla réfiftanec .qu’il ,a oppofçe aux décrets dç
la C o u rs ainii que^de l’ouverture qu’il a faite de
la chambre dans^ laquelle A n n e Gas avoit enfer. ip q ;fç£ J ? ijo u x ,.fç s;cpu verts 4 ’tf.rgcnt 7 fès dentel
les ., &cc. (a ) M ais il n’en a pas moins periifié
•'(j) Cctte^ niéme'joiivürturc ûil conitjtée, i°. par lü prjocès
dans
�dans ia rébellion aux ordres des Magistrats fou Verains , devant lefquels la conteftation eft pend a n té ,r & A nn e G a s } dont il menace tous les
jours la v i e & qui a dès-lors le plus grand
v e r b a l du 1 6 Mars dernier. 2°. Par une i n f o r m a t i o n faite à la
SénécliauiTée. O n a e n l e v é à, A n n e Gas , n o n f e u l e m e n t les
b i j o u x , les c o u v e r t s d ’a r g e n t & les d è n t e l l e s - q u e n ou s v e n o n s
d ’i n d i q u e r , mais e n c o r e f on l i n g e d e t ou te e f p e c e , & une
m u l t i t u d e d ’autres effets ; & c ’cft après cela q u ’o n a l ’a udac e
d e fe p l a i n d r e d ’èl le.
!
(a) J ea n- B a p ti ft e B a r t h o m e u f n e m an q u e r a pas d e fe récri er
c o n t r e cette i nc ul pa t io n :>voici p o ur t an t ce qui eft arrivé.
Il y a e n v i r o n d e u x m o i s cJu’A n n e G a s , - fe r eti rant ch'ez'elle
a v e c fa g a r d e , fur ies n e u f heures du f o i r . , t r o u v a la p o r t é
d e la m a i f o n f e rm é e ; e ll e h eur t a p lu fi e ur s fois fans q u ’ o p
v o u l û t l ’e nt e n d r e : l a ' d o m e f t i q u e , qui s'a'pperçut q u ’élie appell oit les v oi f in s , a y a h t enfirt r é p o n d u , Jean-BajStîfte Bai tÎi oü
f l i e u f lui cria '. A tten d s , c 'e fl moi. qui ouvrirai à cette B . . . .
ïà ; & il o u y r i t en effet ; mais à p ei ne é t o i t - e l l e entrée , que
l ’entraînant a up r è s - d e l ’e f ca li er , il dé c hi ra f e s- v é t e m e n t s fur
plie , & la f r a p p a avfcc i l- pe u d e m é n a g e m e n t , ’ q u e fa g a r d e
& la n o m m é e G o m e t l ’e m p o r t e r e n t d e h o r s fans i e nt i m e nt &
fans c onno if f a nc e .
L e ' j o u r m ê m e q u ’el le rentra c h e z el le en ve r tu d e l ’A r rê c
d u 1 9 M a rs de r ni e r , elle e f f u y a une i nf ul t e e n c o r e plus
v i v e , q ue la n o m m é e G o m e t p e ut e n c o r e attefter ; un autre
j o u r . . . . m a is i l f à u d r o i t écri re des v o l u m e s ; ii l’on Vouloir
r a p p e l l e r tous les outrages q u ’el le a ef fuyés : o n les niera ces
out ra ge s . P o u r fentir la foi que mérite cette dé n éga ti on , il fuffic
d e jetter les y e u x fur un écri t q ue Je a n- Ba pt i ft e B a r t h o m e u f
e n v o y a à fa B e l l e - M e r e , après une des fcenes d o n t no ils v e
n o n s d e parler. L e v o i l à cet écrit :
. J e fo u jfig n é reconnais , p a r un p eu trop de vivacité , avoir
m anqué de refpecl à ma B e lle - M e r e , dont j t me répens , & j ’a i
lieu d ’efpêrcr que p a r f a clémence ordinaire elle voudra bien ou
blier ma trop grande prom ptitude , & de me prendre fo u s f a m a
ternelle protection. J e la p r ie de ne p a s m 'abandonner ; j e liii en
a u ra i une éternelle reconnoiffance' : & c e f l dans ces gentiment s
ÿue j e J u is , & fe r a i toute ma v ie , fo n \élé & fid ele fe r v ite u r , Q
�intére tà é lo ig n e r d’elle un voifm auiïi dangereux,'
eft obligée de pourfuivre en la C ou r , a confir
mation définitive d u ; jugement provifoire de la
SénéchaufTée,,, d u ^ v f ' e v n e r dernier. • _
Jea'n-Baprifte Barthomcuf, pour retarder Ta con
damnation Taimamne^ "de faire intervenir FrançoisGabriel-Adjutor Barthom cuf en la caufe & de lui
Faire vdemander .un nouveau partage, ta n t. des-imi
meublas-que dés meùblesi1 & des marchandifes de
là fiicceiïion de Gilbert "Barthomcuf, -leur ..pere :
il l ’a enfuite fait départir de cette demande quant
a u x ’ immeubles , mais il l’a; laifle fubfiiter .quant
aux meubles & aux marchandifes. I l y a plus ; il
à oie ioutenir qu’il étoit en. ipciété.’de"commerce
avec A n n e Gas j
non content de vouloir,'à’ce
m o y e n , partager avec elle les marchandifes qui
fo n t tombées dans ion lpc .ôc celles, qu-elle-y a-join-f
tes depuis lé mois dé Janvier, il lüir;a en ' mcrac^
■
. , • .. riji <*t. L . iO' 'r •
i
%.in*
•*
temps forme une roule d autres aemandes*în ,
t
L a caufe a été portée a l’Audïence du 6 de ce
mois ; elle a été continuée le 8 ; on a prononça
un délioaré : comme rafFaire n’eit pasi iniiruite aii
1
MO
f i j ’oje me Jla tter cf un p a r e il litre ) Jpn irèsrjiu m iïc , très-ohéijf a u t , três-refpcchieux & très- d évou é F ils.
S ig n é , B A R T H O M E U F .
C e t h o m m e . qui p romet çoi r,i ifl e .éternelle recomgi^an^e > ce
\éU & 'fi& T t'ferv iiéu r , çe tr ès-h u m b le'très-o l> èiff.a rÿ 'ti tres-refipéciueux § i très-dévoué 'È its. n e ic ofouyient g j ù s . g u e r q - n i d e
c e qu'il \ Î j lire, ».ni* .des. qualités qu.’ il .s’çfl d on n é e s ; Anne. .Gas
efl: cjepeiVJ<1nc/ au'jo\irdMùù,/ç Jx q u ’cjjp, ctpit ai ors j'nv^s o n ne
la voit' pjus' /cles m ê m e s ÿ çt i x : o n a . t r u q u ’en la c a l o m n i a n t
pn p o u v o i t la ruiner^ & l ’ on n’ a p a s h é f i t é ^ o n l ’a c a l o m n i é e .
...............
d
�fo n d , & qu’en tout état de caufe il e(l de la plus
grande importance pour A n n e 'G a s qu’on ne 's’erï
forme pas une faüffe id ée, il éft indifp'enfable de
Retracer ici lés principes qui doivent -fervir dé ba1
fe a la décifion de la cohteftation.
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il^ étoit certain que la Ccnir n?évoqùera‘ pas le!
principal., on fe borneroit à établir que la Sen
tence de la Sénéchaufïée a bien ‘jugé-, en ordon1nant qu’ A n n e Gas ieroit-par'proYi^orí,- renvoyée
en poileifion de fa maiion, de fes meubles & de
fes marchandifes, & cette tâche ieroit d’autant
plus facile a rem plir, qu’on eft en état de démon
trer q u ’il y a réellement eu'ün'pàrtage/de'la-to,talité de la iucceiiion dé G ilbert Barthomeuf; ique
la maiion dans- laquelle cette Sentcnce' renvoya
A n n e Gas eft tombée dans fon ' l o t ,
‘ que rou
tes les marchandifes & tour le mobilier qui y étoient
lors de ia iortie lui appartiènnent : mais comme la
C o u r pourroit ionger h. évoquer le principal, on t
ne s’en tiendra pas la ; on prouvera’'encore qu’il n’y'
a jamais eu de iociétc entre A n n e Gas & Jean- Baptifte Barthomeuf ; que celui-ci doit par conféquent
h celle-là la totalité dcst différentes iommes qu’ellelui demande ^non feulement pour fà peniiôn, celle?
de fa fçmme & fcelle du Maître diltillateür qu’i l
avoit pris, mais,pour les dépenfes qu’elle a faites
à l ’occafion de*fon mariage ? pour les dettes qu’elle'
B 2
�Vf
i l
a acquittées à fa d éch a rg e , pour les impofitions
royales de fes biens qu’elle a payées pour l u i , &
pour les frais de culture de ces mêmes biens qu’elle
a toujours avan cés, quoiqu’il en retirât feul le
produit. O n prouvera enfin que de tous les chefs
de conclufions que Jean-Baptifte Barthom euf a
dirigés contr’e lle , il n’en eft point qui puiiîènt
être accueillis que celui qui concerne une iomme
de 500 liv. qu’ A n n e Gas a touchée du fieur de
Montuclas , & celui qui a pour objet la remife
des titres relatifs aux biens échus au lot de ce
même Jean-Baptifte Barthomeuf.
r
§ •
r -
Q u i l y a eu un partage de runiverfalité des biens
de la fuccejjion de Gilbert Barthom euf, & que
la Sentence, de la Sénécluiitjfée , du Z Z Février
dernier, a bien ju g é.
O u i , il y a eu un partage non feulement des
immeubles, mais encore de la totalité des meu
bles & des marchandifes dépendants de la fucceifion de Gilbert Barthom euf, & il en exifte une
foule de preuves, d’après lefquelles il a ’eft pas per
mis d’en douter.
L e 11 Janvier 1 7 7 2 les Parties partagèrent
leurs immeubles ; le lot d’A n n e Gas fut compoie ,
i°. d’une maifon iitiiée auprès de l’Hôpital G é
néral de cette V i l l e , &c cette maifon eil celle dont
�11 s’agit dans la Sentence de la Sénéchauffée. a 0. D e
12 œuvres & demie^de v ig n e , fituées au territoire
de Montjuzet. 3 0. D e. G autres œuvres de vigne,
au territoire des Neuf-ibleils, 4 0. D ’un journal -de
terre,- appelle le-terroir dë..la V ig n e & les lots
de Jean-Baptifte & de François-Gabriël-A'djutor
Barthom euf furent composés d’objets équivalents.
V1 , 0 o partagea ien m êm ë-tëraps, quelques effets
&c.) quelques marchandifes, 6c[ la portionrd’A n n e
Gas dans ce partage confifta en 98 livres "de pou
dre fine, 12 rames de papier commun & 10 poin
çons de vinaigre , auxquels on joignit! la gravelle
cjui étoit dans le grenier délia m a i i o n q u i l u r étoit
échue ;>les effets & marchandifes >qui’étoient dans
le grenier d ’iine autre, m aifon, fituée rüe de l’A n
g e , diftra&ion néanmoins faite des vieux drapeaux
qui s’y trouyoient, ô i les deux tiers des fommes
dueSjfur.le livre du commerce de. Gilbert Barthbm eu f ,gleiqûels deux tiers v quoiqu’ils m ontaient
a 1 1 3 7 liv. 6 f. 8 den. ne furent néanmoins é v a
lués entre les Parties que la fomme de 1000 liv.
Jeanr Baptifte ¿cFrançoisrGabriël-Adjutor Bartho
m e u f eurent'de. leur côté* d’autres marchandifes Ôg
d’autres effets , dont la valeur étoit au moins égale;
C e premier partage qui embraile , comme on
v o it , la totalité des immeubles <Sç une partie des
marchandifes de la fucceilion xle Gilbert Barthonieuf ,'f t it fait b l’amiable par) la; médiation dit
fieuiiBenoît, Aumônier de I’Hôpital Général^-du
fieur D u la c , M archand droguifte, du fieur L a-
�. H
morte , Banquier ^ & du :freurrBl'aieyroh , C u r e
de Saint-Adjutor , & i l ,fut - configné-dans un écrit
,qui porte qilC' /d^ Partieb fon t canvmiies'' de faire
dncéÿ'ammetw & feins -conteflation "le partage- des
<mèubfes-,' li‘ïg-C:0 inarchandijes vin & autres■effets
q u i ;dénièïiroiènt indivis , & que les chofes - qui
.aviendroient l\ chacun des->Copartageants rejlexoîcnt ?gi:atuitemenz ju fq u 7aui mois ° de'-'iSeptembre
'alorkï. prochain r .dàns, lesAizu'xj oà 'clles\ j c trou-veroienty.fi, celui d 'm tn èu x^ à qu i elle s j éclierroiait
■ne p ouvoit pas les déplacer^
- 1
'
.L e fécond partage que la' cVeuve de'G ilbert
zBaccHomeuf ¿k les enfants--'étaient 'Convenus 'd e
fa ire :inceffainment fut - effeâivem eni fait lie l-]‘ dit
-mémomois: de Janvier ’derniéri^-c^eft-li-dire', 'deux
jours après-le premier. Uitenfiles de cuifirie, linge*
marchàndifesy Irts-y tôut -y fut compris ; il rie reiVà
<Tihdivis : que rqu elqLies futailles & quelqtieS’ créan
tes! y.éreuiesjî dont on chargea AnnelGas* decfoire \
fi elle p o u v o ir, le recouvrem ent, & chacun s’ap
propria en coniéquence ce qui lui étoit échu. Jn
écrit du fieur Blàtcyron , C u r é de Saint-Adjutorj
et rit qui1 e ftd u 30 A v ril dernier. r ôc qu?on trouyérap arm i les’ pieces d?A n n e G a s , en fournit une
preuve fans répliqué.
L es objets qui échurent à A n n e Gas font énon
cés .cjaiis un.autre é c r i t , fans date & fans figna^
tùrc.,-màis qui/èfti.conftammeht de la main dû
Jban’- Baptifte Barthomcuf j & quiayant pour titre,'
Inventaire des meubles, inarchandijes & •autres
42
�cl 5
effets appartenants à la veuve Barthom euf, trou
vés. d'arts Ja piaifoti., vis-jbvisd’H ô p ita l Gérpéml^
au.Fauxbourg.\deSilQrg$:, :.achey.e des démontrer
la réalité,du .par^agQAVl^Jtiivcrralité des. meubles»,
.effets r&c marchand.ife.s- qui cômpofoicnt la fucceflio n de G ilbert B arih o m eu f, à l’exception cepend^s tuv-ç^ ftàesjfusaille^ik de>.c.réâiTces'-üont
j l Tctpit yqyeftiç.nv i l ‘ij’y, a qi]!un )mom.è.nt.s.Cet autre
éçrit.-eft auifi -daps ,1e dôflie’n d ’A n n e jG a s .
t j ’A !
j ; C e/n ’eft pas tout', quand^cette. .derniere . fut
chaflèe de,chez elle par JeanrBaptifie B a rth o m eu f
j l lui: donna ,-eppirne iious lavon s déjà dit >,un état
de ceux de fes meubles, ôc .eifets qu’elle. rn av.oir pû.
renfermer^darisjià çtambçe^'. & ivoici '.ce/quo n
lit dans, cet é ta t, p a g r i^ & .,a4 5 jDans le cuvage
■de, la m aijon-dç faipt^ G epçs^ il ^ cjltrouyé. ■
deux
grandes çuyes %deitxmoyennesv & [une^ petite £ deux
cuvettes , une .grande & y.ne\ moyenne ^ vingv. ba+
choies , tanty bonites-\que\ inauvaife.s. d fa x sjenuxry
un- entonnçir de bois : ôç après =ces mots on trou
ve. jjy N p ta ^ Ç e^ j k ( ë l k k i & effhtç- fp n i n n h
d iyis m yA nous :Jy■ le^Jleur B m k o m a ifi, kC u d \
ce qui,prou ve ?qu,e- t&ut Iç^irefe avortété pâVtafgé.’y
car c’eit ¡une maxime connue que , inchïjio Ainitfs
cjl- 'çxclufio alterius.' :r-V
1
' r‘ . V-\T
?«7.tUa de. pliisVexillGVdâ’n s l e s ^pi'eôcs de
B a p t i s e . Barfhbrüeüf \m:. projet-' dVrrarigemei'jt^
fair>cbç2i JVL.vl'ixLet jrparldtjuôl :cèQ i c & è vJèan'B^ptiite Barthomeiih a ZftoTiriêMSnYoiit-'avoué Tes
deux partages dont on vient de parlée. T l e pro1
3
«J
�»
Y6
•
ri
jet d’arrangement, qli’on“a apparemment fouilrait,
,jkiifq'u’ori'en a déiavoué les difpofitions à la derniere audience où la caufe a été plaidée “porte en
propres termes* «que tJédn-Bdpti/ïe B a rthom eu f,
fa ifa n t tant pour l u i , que pour Frdnçois-G abnelA d ju to r Barthom euf ¡ fo n frëre , approuve, rati
fia
confirme le partage qui a iétéjait le i l Jan
vier. vyj'Z.'Aàes r-iituneubles & dé ’pdrtie du ‘ mobiL
lier de .la fuccejjîorv d&feù- Gilbert Barthom euf;
q iL il reconnoît que lédip Jîeur Fràçois-Gabriël/ idjutor. Barthom euf a relu^fa part é portion d e
TO U T ZE^M O BbLlER Q U I - R E S T O I T A ' P A R '
TUGÈRr^ T A N T ' E N MEUBLES MEUBLANTS ,
ç iïlE N '.M A R C H Â N n is é s , E T Q Ü - f l n ' A PLUS
R I E N A P R É T E N D R E D A N S r T O U T LE MO
BILIER- D Q L A D I T E S U C C E S S I O N S I • CE
Wi’jÈJT ivE T I E R S DE S CUVES E T "•TONNEAUX
QUI . S ONT '■
>DANS LES CAVE E T yCUVAGES
D E .LA MA I S O N D E f S A Ï N T GE NE S ' ? ÉCHUE
A' S O N L O T , E T Q u ’i L • R E C O N N O I T É G A
L E M E N T Q U E T O U S LE S M E U B L E S ~MEU
B L A N T S Q U I S O N T D A N S LA M A I S O N O U
EST DECEDE' G ILBERT BARTHO M EU F, ET
D A N S CELLE QUI E S T ‘SITUE’E RUE D E
L'ANGE
A P P A R T IE N N E N T A ' L A D A M E
G AS., A¡NSIyQU’ILS SONT ENONCEES DAIs/S
f INVENTAIRE D U ' 3 JANVIER 'ijj'4 EN
SEMBLE TOUS LES AUTRES MEUBLES QUI
SONT D A N S LESDITÊS M A ISO N S EXCEPTE
,
,
UN L I T
,
&C.
7
}
,
?w ..................
t
’
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<3
L a veuve B arth om eu f rapporte enfin es quit
tances qui établirent non feulement que fes A d Verfaires ont touché le tiers du prix du vin &
de l étain de la fucceiïion de G ilbert Bartho
meuf, mais encor'e que Jean-Baptiile Barthomeuf,
1 un d’eux , lui a vendu une partie des marchandifès de ion lot.
‘
>
Peut-il maintenant refter quelqu’incertitude y
foit fur le partage de l’univerlalité des meubles
& marchandifes dont il s’a g ir , foit fur l’exécu
tion qu’il a eue ? il n’eft pas poifible de fe le
perfuader. Cependant fi l’on craint encore de pro
noncer contre Jean-Baptifte B a rth o m e u f, qu’on
appelle le iieur Benoit
le fieur Blateyron ;
qu’on appelle la nommée M arie-A nne D u b o jî;
qu’on appelle fa fille ; qu’on appelle un nommé
brançois Gie^ ; un nommé A n to in e ; une nom
mée M ichelle B u ffe t, &: mille autres, ils attefteront tous que ce même partage eft ré e l, qu’il
fut g én éral, que chacun des Copartageants iè
nantit fur le champ des objets qui lui étoient échus,
& que ceux qui formoient les lots d eJean-B ap tifte Ôi de François-G abriël-Adjutor B arthom euf
furent emportés dans la maifon qui cft fituée dans la
rue de l ’A n g e : les L o ix ne défirent que deux té
moins irréprochables pour conftater un fait, celuici fera certifié par dix , par v i n g t , s’il le faut ;
& ces dix ou ces vingt témoins, qui feront tous
irrécuiables , parleront tous plus affirmativement
& plus précilcment les uns que les autres ; ainii
C
�i8
n’ y ayant pas plus de doute fur l’exécution de
ce partage que fur fa réalité , il eft impoilibie à
Jean-Baptifte & à François-G abriël-Adjutor Bar
th o m e u f de l’attaquer autrement que par la voie
de la reftitution en en tier, encore iaudroit-il pour
cela qu’il y eût léfion.
Les mêmes pieces qui étabïifïènt que la tota
lité des immeubles , des meubles & des marchandifes de la fucceifion de G ilbert B arth om eu f a
été partagée entre fes trois he'ritiers , établirent
auifi que la maiion qui eft: auprès de l’H ôpital
G én éral, & les meubles & marchandifes qui font
défignés dans l’inventaire du 3 Janvier dernier, ap
partiennent excluiivement à A nn e Gas, & i l ne faut
qu’une légere attention pour s’en convaincre.
Si les Parties adverfes ne peuvent pas défavouer qu’ il n’y ait eu un partage entre la veu
ve B arth om eu f & elles ; fi l’on ne peut pas1
contefter que > tout le mobilier & toutes les
marchandifes de la fucceilion de ce dernier
n’y aient été compris ; s’ il eft e'vident qu’il a
cté exécuté ; s’il eft d ém o n tré, non feulement
que k maifon d ’où Jean-Baptifte Barthomeuf à
chafte A n n e G a s , appartient à cette même A n n e
G a s , mais encore que les effets & marchandifes
qui y font lui appartiennent également, il eft pal-k
pablè que la Sentence de la Sénéchauffee du 22
Février à bien jugé en ordonnant qu’ elle feroit
provifoirement renvoyée en poiTeflion, tant de
cette maifon que de ces effets & marchandifes,
�/
19
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& il n’ y a par conféquent pas de difficulté à là
confirmer définitivement, (a)
:
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V
II.
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Q u i l n y a point,-de fociété de conïtiieïce entre
Jean-Baptijle Barthom euf & 'A nne Gàs.
_
!•
••
-I
O n a allégué qu’il y àvoit une ibciété de com
merce entre Jean-Baptifte B arth om eu f & fa BelleM ere. Il y a une fociété de commerce Jean-Baptifte B arth om eu f & la" Belle-M ere '! comment le
prouve-t-on?
; r
‘
- L ’A rticle <54. de l’Ordorlnance dé M oulins eft
conçue en ces termes : « P o u r obvier à la m ul» tiplication de faits que l’on a vu ci-devant être
» mis en avant en jugem ent, fujets à preuve de
» témoins & reproches d’ic^ux, dont adviennent
»» plufieurs inconvénients ôc involutions de pro» ces , nous avons ordonné & ordonnons que
(a) O n a o b j e & é à A n n e G a s q u ’el l e a fix lits, & q u e p ar
le partage il ne lui en feroi t é c h u q ue d e u x ; q u ’e l l e a c i n
quante dr ap s d e l i t , & q u ’il ne lui en f er oi t é c h u q ue v i n g t hui t , & c . & l ’o n a c o n c l u d e là q u ’il n ' y a v o i t pas eu d e 1
partage.
C e r a t i on n e me n t eft fans d o u t e admi ra bl e. C e p e n d a n t s’il n ’eft
p as i m p o f l i b l e q u ’A n n e Gas ait ou fait faire ou a che té la
majeure partie de ces lits & d e ces draps de lit , dep ui s le
pa rt a ge q u ’el l e articule , o n f ent que la di ffi cul té q ue fes A d v e r f a ï r e s é l e v e n t i t i ne fignifie a b f o l u m e n t r i e n . O r el le fe f oii mèt
à p r o u v e r q u ’ en effet el le a ou acheté ou fait faire , d ep ui s c e
p a rt a ge , tous les m e u bl e s & t ou t le l i n g e q u ’on t r ou v e r a c h e ï
elle , au de l à de ce q ui étoit t o m b é dans f o n lot.
�» dorénavant de toutes chofes excédants la iom» me 011 valeur de cent livres pour une fois payer,
» ferontpafïes contrats pardevant N otaires 6c T é • moins, par lefquels contrats feulement fera fait
„ ÔC reçu toute preuve èfdites maticres , fans re-”
„ cevoir aucunes preuves par témoins............ E n
„ quoi n’entendons néanmoins exclure les preu„ ves des conventions particulières, 6c autres qui
w feroient faites par ces Parties fous leurs feings ,
« fcéaux 6c écritures privés. »
L ’A r t. i du T itre a o de l’Ordonnance de 16 6 7
porte à peu près les mêmes diipofitions ; car il
exige aufîi qu’il foit paffé des actes pardevant N o
taires de toutes chojès excédant la fom m e ou va
leur de 100 livres.
L ’Ordonnance du Com merce , poftérieure aux
deux autres Ordonnances qui viennent d’être ci-'*
tées , veut enfin que toutes fociétés générales ou
en commendite fo ie n t rédigées par écrit, ou pardevant Notaires , ou fo u s fignatures privées , &c
que 1 extrait des fociétés entre Marchands & N é
gociants , tant en gros quen d é ta il, fo it régijlré■
au Greffe de la Jurifliclion Confulaire, s'il y en
a , f i non en celui de /'H ô te l commun de la V i l l e ,
& s 'il n ’y en a p o in t, au Greffe des Juges royaux
des lie u x , ou de ceux des Seigneurs, & l ’extrait
inféré dans un tableau expofé en lieu public ; le
tout à peine de nullité des acles & contrats paffés,
tant entre les A jfo ciés quavec leurs Créanciers
& ayant caufe.
�10
A ces difpofitions des Articles i & 2 de
rdonnance de 16 7 3 le Législateur a même ajou
té , art. 6 du même titre, que les Jociétés 11 au
ront effet à F égard des ¿4Jfociés, leurs V euves &
Héritiers , Créanciers & ayant caufe , que duj o u r
quelles auront été régijlrées & publiées au Greffe
du domicile de tous les Contractants , & du lieu
où ils auront M agajin.
L ’ Auteur des notes fur Bornier prétend à la
vérité que quelques précis que foient les termes
de ce dernier article , la formalité de l’enrégiftrement qu’il ordonne eil tombée en défuétude :
mais M o rn a c , la Peyrere , Ferriere , L a co m b e ,
Pothier , D énifart, attellent unanimement la néceffité de rédiger toutes ibeiétés par é c r it, &
de produire un contrat pardevant N otaire, ou au
moins un fous*ieing pour la prouver. L e dernier
de ces Auteurs dit de plus que fur la difpofition
de l’art. 1 du tit. 4 de FOrdonnance du com
m erce, dont le vœu eil que toutes lociétés géné
rales ou en commandites ioient rédigées par é c r it,
il eil intervenu un A rrêt au Parlement de Paris ,
au rapport de M . C h a rle t, en la premiere C h a m
bre des Enquêtes, le 23 Mars 1 7 4 6 , par lequel,
nonobllant beaucoup de préfomptions & même
quelques légers commencements de preuves par écrit,
qu’il y avoit eu fociéréentre Jean M ic h e l, pere, &
Jean Michel, ion fils, pour des entreprifes du pavé des
g r a n d s chemins du Bourbonnois, le Parlementa con
firmé une Sentence de la Sénéchauilée de M o u lin s ,
�du 1 7 Juin 1 7 4 3 , qui déboutait François Michel &
M arie Giraudet, fa femme, avant veuve de Jean M i
chel, fils, de leur demande en reddition de compte Ôc
partage de fociété, en affirmant par le Défendeur
qu’il n’avoiteu aucune connoiiTance de cette fociété.
D ’après ces loix & cette Jurifprudence 011.
fent que fi Jean-Baptifte Barthom euf perfifte à
foutenir qu’il y a eu une fociété de commerce
entre A n n e G a s & l u i , il faut néceiîairement qu’il
rapporte 011 un a&e pardevant N o ta ir e , ou au
moins un a£te fous fignature p rivée, qui conftate
cette même fociété , & que iàns le rapport decet a£te il doit être déclaré non-recevable dans
fa demande à cet égard.
Il obje&c qui! y a eu plufieurs affignations pofées a des Particuliers de cette V i l l e , à la requête
de la veuve Barthomeuf & f i l s ; que fur quelques-uns
de ces exploits il a été prononcé des Sentences ;
que ces Sentences font rendues en faveur de la
veuve Barthom euf & f i l s , & que des-lors il y. a
eu fociété entre la veuve Barthom euf & lui- Mais
il eft facile de réioudre cette difficulté.
Il étoit dû à Gilbert Barthom euf par différentes
perfonnes auxquelles il avoit fourni des marchandées,
on a afligné plufieurs de ces perfonnes avant le parta
ge de ià fucceffion; jufqu’à ce partage tout étoit com
mun entre fes héritiers ; ainii quand on a voulu récla
mer le paiement de ces créances on a été obligé d’agir
au nom de la veuve Barthom euf & fils. A partir
delà on voie que cette expreffion, la veuve Bar-
�;? / /
t homeuf à f i l s , indique bien une communauté, une
indivifion entre la veuve Barthom euf & les enfants
de ion M ari dans le droit de répéter les créances
dues a la fucceiïion de ce M a r i , mais ne prouve
pas qu’il y ait jamais eu une iociété de commerce
entr elle & eux. Il y a loin d ’une de ces chofes
à l’autre ; avoir des dettes a&ives à p artager, ré
clamer des créances communes en co m m u n , agir
au nom c o lle â if des Cointérefïes à ces créances ;
ce n’eit pas former une fociété de co m m e rce , c’eft
fimplement avoir des dettes a&ives a partager, c’eft
fimplement réclamer des créances communes en
commun , c’ eit fimplement agir au nom co lk £ i f des Cointérefles à ces créances ; ainii
de ce que des Débiteurs de la iucceifion de
G ilbert B arth om eu f ont été condamnés à payer
telles ou telles fommes a la veuve Barthom euf &
f il s , il ne s’enfuit nullement que la veuve Bar
thom euf & f il s aient été en fociété de com m er
ce ; tout ce qu’on peut valablement en in fé re r,
c’eil que les iommes dont on a répété & pourfil ivi ainfi le paiement, appartenoient alors inaivifé*
ment aux Héritiers de ce môme G ilbert Barthomeuf^
Héritiers du nombre defquels écoit A n n e Gas.
Q uand Jean-Baptifte Barthom euf produiroic
d ’autres Exploits 6c d’autres Sentences, qui pa-.
roîtroient les uns avoir été poiés, les autres avoir,
été rendues au nom de la veuve Barthom euf
f i l s , pour des fournitures de marchandifes poiîéricures au partage fait entre les P a ru e s, cette cir-
fik
�v >-
2-4-
A
confiance elle-même ne prouveroit pas q u ’il eut
exifté une iociété entre Jean-Baptiite Barthom euf
& fa Bclle-M ere , parce que cette énonciation
de la veuve Barthomeuf à f i l s ne fetrouveroit dans
les Sentences que nous fuppofons, que parla raiion
qu’elle feroit dans les Exploits fur lefquels elles auroientété rendues,ôcqu’eile n’auroit étéinféréedans
ces mêmes Exploits que par un effet de l’erreur de
l’Hiiiilier q u i , voyan t A n n e Gas & Jean-Baptiile Barthom euf demeurer enfemble , en auroit
conclu qu’ils étoientaifociés;fi ce n’eftpas ainfi que
cette énonciation s’ eft gliifée dans ces Exploits
& dans ces Sentences , on ne peut l’attribuer qu’à
une manœuvre de ce Jean-Baptifte B arthom euf qui,
voyant le commerce de la Belle-M ere dans un
état a (lez floriifant pour tenter fa cupidité, auroic
fait inférer fon nom à la fuite du nom de cette
derniere dans les Exploits qu’elle étoit forcée de
faire pofer à fes Débiteurs pour faire rentrer fes
fonds ; ce qui lui étoit d’autant plus facile , qu’écrivant &c marchant plus ailément qu’elle, c ’étoit
toujours lui qui faifoit les mémoires de iès four
nitures, & qui les portoit chez PHuiflier dont
on avoit coutume de fe fervir ; pour peu qu’on
veuille fc pénétrer de ces obiervations, pour peu
qu’ on daigne coniidérer que cette énonciation de
la veuve Barthom euf & f i l s eft ou l’eiîèt de Yer
reur , ou l’ouvrage de la fr a u d e , qu’elle n ’émane
point d’ Anne G as, qu’elle n’eft point iignée d ’elle
on ne pourra môme pas la regarder comme un
commencement
�commencement de preuve par écrit ; car enfin ,
quand un H u iilie r, ou quand Jean-Baptifte Bar
th om euf auroit écrit mille fois que Jean-Baptiile
B arthom euf eil en fociété de commerce avec A n n e
Gas , il n’ en réfulteioit rien. i°. Parce que l’art.
54. de l’Ordonnance de M o u lin s , & l’art. 2 du
tit. 20 de l’Ordonnance de 1667 , veulent qu’il
foit paifé des ailes de toutes choies en général
qui excédent la fomme ou valeur de 100 livres;
que l’Ordonnance du commerce exige, non moins
impérieufement , que toute iociété de commerce
foit confignée dans un écrit pardevant N o tai
r e , ou lous fignature privée , qui émane1des perfonnes qui s’ailocient enlemble ; que les L o ix du
R o yau m e rejettent par conféquent la preuve teftimoniale des lociétés de commerce, dont la maile*
excède toujours la fomme ou valeur de i o o l i v .
qu’un tiers qui écrit qu’ il y a eu ou qu’il y a une
iociété de commerce entre telle & telle perfonne,
n’eft & ne peut être qu’un témoin qui dépofe
que cette même fociété exiile ou n’exiile pas ; que
Pexillence d’une fociété ne peut être légalement
conilatée que par un a£le authentique foufcrit de
chacun des A iib ciés, & qu’à ce moyen tout écrit
qui ne feroit figné que d’un H u iilier, ou d’un
autre étranger quel q u ’il ioit, ne pouvant former
au fond qu’une dépofition fur un objet qui n’efb
pas fuiceptible d’ être prouvé par tém oins, il faut
évidemment le rejetter. 2°. Parce que tout ce que
D
�i6
Jean -B ap tifte B arthom euf pourroit également
écrire ou avoir écrit lui-même fur la prétendue
fociété dont il parle , ne formant non plus qu’une
dépofition fur cette fociété, & même q u ’une dépoiition d’un homm e dans fa propre c a u iè , on
doit encore moins s’y arrêter.
M a i s , pourfuit Jean-Baptifte Barthomeuf, j’ai
des fkâures qui ont auili été adreiîees a la veuve
Barthom euf & f ils . D es fa&ures adréifées a la
veuve Barthom euf & f i l s ! il eft étonnant qu’il y en
ait. Cependant il fe peut que Jean-Baptifte B ar
thomeuf, ayant fouvent écrit aux correfpondants de
fa belle-mere , au nom de cette même belle-mere,
on fe ioit en coniéquence imaginé qu’ils étoient
aiTociés l’un avec l ’autre ; il fe peut encore que
Jean-Baptifte Barthomeuf projettant dès-lors de
tracaiTer A n n e Gas ait fait accroire, de deiTeia
prémédité , a quelques-uns des marchands, avec
lefquels elle eft en relation d’affaires, qu’il y avoit
une fociété de commerce entr’elle & lui ; car s’ila aujourd’hui la mauvaife foi d’argumenter de
leur erreur, pourquoi ne ieroit-il pas capable de.
leur en avoir impofé exprès fur cet article ? mais
peu importe. A u petit nombre de fa&ures qui peu
vent être adreilées à la veuve Barthom euf à f i l s y
nous oppoibns une foule d’autres fa&ures qui ne
lont adreffées qiwz la veuve Bnrthom euf ; nous
joignons a ces fi&ures différents mémoires qui font
écrits de la maio même de Jean-Baptifte Bartho-
�.V
,
m e u f, 6c q u i, au lieu d’être intitulés mémo ire de
ce que tel ou tel doit à la veuve Barthom euf &
f i s , font feulement intitulés mémoire de ce que
tel ou tel doit à la veuve Barthom euf ; nous rap
portons d’ailleurs un livre journal qui prouve que
dans le temps où Jean-Baptifte Barthom euf étoit,
dit-on, en fociété avec A n n e G a s , il lui a vendu
pour 42. hv. d'huile de n o i x , pour Z 4 liv. de
fa x on j pour z y liv. de vinaigre, pour 4 8 liv.
d ’étain ou de p o i x , &c. & qui au bas de cette
lifte de marchandifes contient cette quittance écri
te de la propre main de ce même Jean-Baptifte
Barthom euf: pour acquit, B a rthom eu f nous ar
ticulons de plus que quand Jean-Baptifte Bartho
m eu f eft rentré chez fa belle-mere, après les par
tages qui avoient été faits entr’eux, il n’a rappor
té qu’une demi-balle . de cailônade , une demiballe de poivre, trente à quarante livres de iavon ,
quelques livres d’huile de noix , vingt-cinq livres
de chandelles , quelques fromages d’A u vergn e ,
cinquante livres de m erluche, deux barrils d’eaude-vie, contenants environ huit pots en tour , huit
ou neuf autres pots d’eau-de-vie, deux balles de
fe l, un tonneau de vinaigre , une centaine de topettes vuides, une cinquantaine de bouteilles, qui
pour la plupart étoient également vuides, &c plufieurs boëtes deftinées a tenir des marchandifes,
mais vuides encore ; nous ajoutons enfin qu’il de
voir la majeure partie de ces foibles objets a A n n e
D 2.
^
�2,8
Gas ; que c’eft la nommée M arie Faure qui eft
venue les prendre chez elle ; qu’il devoir le furplus à d’autres Particuliers auxquels elle en a foldé la valeur, & qu’ayant vendu tout cela quel
que temps après, il en a ièul touché le prix. C e s
faits une fois pofës, il eft de l’évidence la plus lumineufe que la fociété fur laquelle il infiftc
n’eft pas moins chimérique que le partage qu’il nie
eft réel.
. ■.
Si cette fociété avoit exifté il iè trouveroit des
lettres de change , des billets, des a£tes de toute
efpece fignéspar la veuvev Barthom cuf & Compa
gnie , ou par la veuve Barthom euf & Jfils e n COM
P A G N I E : or il n’y a ni lettres de c h a n g e , ni
billets, ni aâes quelconques qui foient lignés
ainfi. (<z)
(a) O n v oi r dans le P a r fa it N égociant q u ’ un fieur du C o u l dr é , qui p r é t e n do i t q u ’il y a vo i t eu une f oc ié té entre un i ieur
D u p i n & lin fils d e ce iieur D u p i n , n o m m é la T h é b a u d i e r e ,
& qui r ap p o r t o i t plufieurs arrêtés d e c o m p t e o u cette f oci ét é
p a ro i if oi t p ro uv é e , c o n f ul t a S a v a r y fur l'effet que des p i e ce s
d e cette e f p e c e p o u v o i e n t p r o d u i r e en pareil cas. Q u e r é p o n
di t S av ar y ? S a v a r y , ce m ê m e S a v a r y , d o n t l’habileté dans
l es matière» de c o m m e r c e ctoi t fi g é n é r a l e m e n t r e f p e & é e q u e
l e G o u v e r n e m e n t lui confia la r é d a & i o n de l’O r d o n n a n c e d e
1 6 7 3 , ce S a va r y e n f i n , d o n t tous les N é g o c i a n t s du R o y a u
m e ont toujours r e g a r d é les dé c i f i o ns c o m m e des L o i x , j u g e a
fans héfiter que les arrêtés d e c o m p t e du fieur d u C o u l d r é ,
n ’étant ni fignés D upin & Com pagnie , ni l ig né s D u p in & la.
Thébaudiere en Compagnie , o n ne p o u v o i t pas ( de q u e l q u e
maniér é q u ’ils fuiTent d ’ailleurs c o n ç u s ) en inférer q u ’il y
a vo i t une f oc ié t é entre le fieur D u p i n & le fieur la T h é b a u
diere. V . le Parfait N é g o c i a n t , Parère L X V .
�.
29
Si cette fociété avoit exifté, tous les correfponclants dont elle auroit tiré des marchandiies l’auroient fans doute connue. Toutes les faâures de
ces marchandifes feraient adrefîees ou à la veuve
Barthom euf & Compagnie, ou à la veuve Bartho
m euf & f i l s en Com pagnie, ou du moins à la
veuve Barthom euf & fils : or il n’y en a point
d’adrefTées à la veuve Barthom euf & Compagnie;
il n’ y en a point d’adreiTées à la veuve Barthom euf
& f ils en Compagnie, & il n ’y en a q u ’une ou
deux d’adreiTées à la veuve Barthom euf & f i l s ,
tandis qu’il y en a une multitude d’adreflées à la
feule veuve Barthom euf
Si cette fociété avoit exifté, Jean-Baptifte Bartho
meuf, en faiiant les mémoires des marchandiies qui
auraient été fournies par les deux afîociés, a telle ou
telle perfonne, ne les auroit jamais intitulés mémoires
de ce que tels ou tels doivent à la veuve Barthom euf; il
les auroit au contraire intitulés mémoires de ce que tels
ou tels doivent à la veuve Barthom euf '&f il s ; or nous
produifons plufieurs mémoires qui tous font fimplement intitulés mémoire de ce que tel ou tel
particulier doit à la veuve Barthom euf
Si cette fociété avoit exifté, toutes les marchan
difes des deux ailociés feraient dés cet inllant devenues communes entr’eux ; l’un n’en auroir pas
(vendu a l’autre, or Jean-Baptifte Barthom euf en
a vendu a la veuve Barthomeuf.
Si cette fociété avoit exifté, Jean-Baptifte Bar-
�3° ,
thom euf, après avoir débité le peu de caiTonade,
de p o ivre, de chandelles, d’huile & d’eau-de-vie
q u ’il a rapportés chez la veuve B a rth o m e u f, en
auroit infailliblement partagé le prix avec elle :
or il l’a gardé tout entier ce prix.
Si cette fociété enfin avoit exifté, les conditions
en auroient été rédigées par écrit, conformément
au vœu de l’article 54 de l ’Ordonnance de M o u
lins , conformément au vœu de l’article 1 du
titre 0.0 de l’Ordonnance de 1 6 6 7 , conformé
ment au vœu de l ’article premier du titre 4 de
^Ordonnance de 1 6 7 3 ; e^c aur°it été régiitrée
au Greffe de la JuriitliéHon Confulaire de cette
V ille , l’extrait en auroit été inféré dans un tableau,
expofé en lieu public, & cet extrait fèroit figné
d ’A n n e Gas & de Jean-Baptifte Barthomeuf, con
formément aux difpofitions de l’article i & de
l ’article 3 du même titre de la même Ordonnan
ce de 1673 , parce que perionne n’ignore que l’ar
ticle 6 de ce titre porte expreilement que fans cela
les Jbciétés n auront aucun effet, même à Végard des
ajjociés, leurs veuves & héritiers, créanciers ou
ayant cauje : or il n’y a point ici d’a&e de focié-'
té ; aucune des formalités qu’on obferve en for
m a n t une fociété n’ont été remplies, quoiqu’elles
ioient toutes de rigueur ; il y a p lu s, on ne trou
ve nulle part aucuns veltiges de ion cxiftence, &
il y a au contraire mille preuves qu’elle n ’a jamais
eu lieu.
�31
^5
Une fociété de commerce entre A n n e G as &
Jean-Baptifte Barthom euf! une fociété de com
merce entr’ elle qui eft a£tive , laborieufe , éco
nome , & lui qui eft in d o le n t, pareiTeux , pro
digue ! une fociété de commerce entr’elle qui
avoit encore ajouté de nouvelles marchandifes a
celles qui étoient tombées dans fon lo t, & lui
qui prefque fur le champ avoic difiipé toutes les
iiennes ! une fociété de commerce entr’elle qui
auroit fourni tous les fonds de cette fociété , ÔC
lui qui n ’y auroit pas même apporté de l’induftrie ! une fociété de commerce entr’elle qui au
roit tout avancé, qui feule auroit travaillé , 8c
lui qui n ’auroit rien avancé', qui n’auroit pas
travaillé , & qui ne lui laiiferoit même pas
prélever ce qu’elle auroit ii généreufement rifqué
pour former la maiîe du négoce pour lequel ils
fe ièroient afïociés ! N o n ; une pareille fociété
eft impoiïible , elle n’exifta jamais, (a)
(a) L e D é f e n f e u r d e Jean- Bapti fte B a r t h o m e u f , a y a n t a ll é
g u é à l ’ A u d i e n c e du 8 de c e m o i s q ue c ette f o c i é t é a v o i t été
avouée par A n n e Gas dans fa r e qu ê te d u 15 Janvier d e r n i e r ,
il eft p e u t - êt r e néceifaire d ’e x p l i q u e r à q u oi ce p r ét e n d u a ve u
ie réduit. A n n e G as a efTeftivement d i t dans la re quê te d on c
on p ar le , q u ’il lui r e v e n o i t des font ni es c o n f i d é r a b l e s p o u r
r ai fon des m a r c h a n d i f e s q u ’elle a f our ni es à J e a n- Ba p t i f t e
B a r t h o m e u f , p o u r v e n d r e dans l ’ une & l ’autre des B o ut i qu es
q u ’il a f u c c e i l i v e m c n t o c c u p é e s d ep ui s le p ar ta g e d e la i u c ceilion d e G i l b e r t B a r t h o m e u f , j uf qu ’à c e q u ’il f oit r e v e n u
c h e z elle ; & q u’il d e v o i t lui c o m p t e r d u p r o d u i t d e ces
m ar c ha nd i f es , p o u r en être le profit p artagé , fu iv a n t les con
ventions qu'ils avdient fa ite s ; mai s elle n’ a di t n u ll e p ar t que
,
�31
§. III.
Q ue Jean-Baptijle Barthom euf doit à A n n e Gas
les différentes jouîm es quel l e lui demande.
Puifqu’il n’y a point de fociété entre A nne
G as & Jean-Baptiite Barthom euf, pourquoi JeanBapcifte Barthom euf ne payeroit-il pas à A n n e
G as une penfion proportionnée au temps pen
dant lequel fa F e m m e , fon M aître D iihllateur
& lui ont habité Ôi mangé avec elle ? Pourquoi
A n n e Gas auroit-elle été obligée de le nourrir
& de le lo g e r , de nourrir & de loger fa Fem
m e , de nourrir & de loger ion M aître D iftillate'ur ?
Pourquoi ne lui rembourferoit-il pas ce qu’elle
a avancé pour lui lorfqu’ il s’eit marié?
Pourquoi ne lui rendroit-il pas ce q u ’elle a
payé d’ailleurs à fa décharge aux différents Par
ticuliers dont elle rapporte les quittances?
c et te f ociété a it continué q uand ils o nt été réunis dans la
m ê m e m a i f o n ; elle n ’a dit nulle part que cette f oci été ait
été une fo cié té générale : & de ce q u ’e ll e c o n v i e n t d e lui a vo i r
p r êt é p e nd a nt q u e l q u e t e mp s de l’ h u i l e , du f a v o n , du f u c r e ,
d o n t ils d e v o i e n t p a rt a g e r le pr of it e n f e m b l e , il ne s’enfuit
pas q u ’ils d o i v e n t é g a l e m e n t p ar ta ge r t ou t ce q u ’e ll e p o i f é d e ; il en réfulte au c ont r ai re q u’ ils n ’e toi ent aifociés que
p o u r cette hui le , c e f a v o n & ce f uc r e q u ’il a vo it e m p r u n t é d ’elle ;
c ar , p u i f q u ’ il faut e n c o r e le r ép é te r , inclufio unius ejî ex~
elujio alierius.
Pourquoi
�33
r .'Pburquoi ne. lui feroit-il pas. rai ion delce qu’il
-lui en a coûté pour acquitter les dmpofitions taÿales de les biens?
.c-tts?
Pourquoi enfinrne lui feroit-il pas âiiiTi ràifon
des frais de culture de ces mêmes biens, dès .que
<c’eft elle quilles a faits?< .i ; n'S' ( - r ¿.i :a.* ' ‘E lle ne doit rien perdre de tout ?cela-:;àl' ne
-faut pas qu’après avoir-été* injuriée;, pérféeutée,
chaflee de chez elle, diffam ée, battue y i. elle foit
encore ruinée.
."
i
.
§. I Vc.
f!
:
z!
; "-v
W -
-
!
{«'
:0'J
£ Î dL>
' l J ’ijq i'h 6\
Q ue de^zous les chefs de demande de^Jieah-Uapiïfic
Barthom euf i l rfy èn a aucun Aèfü.nd(' que celui
qui concerne les 500 liv. qu'elle a(\feçk du
- fle u r ■
M o n tu cla s, ' & j c e lu i iqïn r i):p our -0, bjèt la
' i£fnife.des titres 'relatifs.!aux biàw de, ceMnêpie
;■
>.\-Jean-Baptifle rBarthomeuf. 6 iriD;fj/b
xr< r V"'. 1
»r
Il eft évident,
. <
h'up L[ -1 ■ r» >
A I V Q u e er; mobilier dé lai fucceifiort cfo-Gilbert
Barthom euf ayant'îétéî partagé les d !i s&» 1 3.Jan
vier dernier, on ne ¿peut pasdèmandêr. aujourd’liiii
t^u’il le ibit encore.
. : îj ii . ’ ’
i.l 2/^ Q u e ii’y ayant point de focjeté.entre ;Anné
G as &c Jean-Baptille Barthomeuf, les marchant
difes-*énoncées dans rinvèntaire dû [£;du même
mois de Janvier dernier doivent toutes*'être adju»
gées à A n n e Gas.
‘
1
r:
�34
V o ilà donc déjà deux des.chefs de conclufion
■-de/Jean-Baptift:e?Barthomcuf qui; doivent être re
jettes.
[
' ^ L a réclamation c^u’il fait d’une fomme de 400
Iiv. que François-Gabriel-Adjutor B arth o m eu f,
fon fre re , a , félon lu i, donnée„ à ‘ A n n e G a s ,
mérite-ït-cllc d’être mieux- accueillie ? non : car
.A n n e Gas n?a jamais rien reçu de François-Gâbriel-Adjutor'Barthom euf : elle Failirme poiicivem e n t , on ne prouve pas le contraire ; 6c dès
qu’on ne prouve pas le contraire, on ne peut pas
ic diipenler de la renvoyer de ccrtc demande :
telle elt la rcglc : creditor 'qui pecuniam. petit numeratam, impUrc cogitin. Cod. de probatio/iibus.
L »I •
»
Jean-Baptifte 'Barthômeilf veut de plus qu’ A nne G as ait pris Une montre d or & une paire de
crochets d’argent h fa femme : A n n e G as réjtond
qu’il en impoic e n co re, ôc cette reponfe fuffit pour
détruire la fable qu’il avance.
.
11
veut enfin que fa bdlc-m crc ait enlevé à fa
femme une bague donc elle lui avoit clle-mcrne
fait préfent. Nouvelle anecdote, nouveau menfonge. Le fait elt q u ’A n n e Gas avoir prcté cette bague
à Jeannc-Pcrrctrc-Michcllq G o d in , ôc q u e lle l a
repriiè.
• ■« '
A l’égaid des <¡00 liv .. que le ficur Montuclas
(a) Si CrtJitor à ne p tttt ptettnijn , 0 ntgtr". tpjim
r j j f t , prviurt d tlt: J< r.- rtrjJTt. C loiT . ib fii.
�3$
lui a com ptées, clic confent à en faire raiion à
Jean-Baptiile Barthom euf fur ce qu’il lui doit.
Elle confent également à lui remettre les titres
quelle peut avoir a lui. Il n’étoit pas ncceilairc de
recourir aux voies judiciaires pour l ’y contraindre:
elle n’a pas befoin d’un A rrêt pour ctre jullc.
Après la difcuilion où l’on vient d’entrer, ou
ne penfc pas que la C o u r puifTe être incertaine fur
le parti qu’elle a a prendre ; la cabale qui fôllicite
pour Jean-Baprilte Barthom euf n’ayant rien de
iolide à oppofer aux moyens qui s’élèvent en fa
veur d ’A n n e G a s , vomira en vain des impoflurcs contr’ ellc ; elle brave le ilylet de la calomnie;
fa cauic cil trop équitable pour qu’elle puifle fuccom bcr devant des Juges integres.
C e s Juges fentiront qu’il cil indifpcnfablc de la
réintégrer dans fa m a iio n , qu’il cil indifpcnfable
de lui rendre tous íes meubles 6c toutes íes marchandifes , qu’il cil indifpcnfablc de condamner
Jcan-Baptillc Barthomcut à lui payer les différen
tes créances qu’elle répété d’ailleurs.
Ils fcnciront qu’indépendamment de ccs diffé
rents objets il lui taut des dommages 6c intérêts,
puifqu’clle a non ieulcmcnt été clu d c c de chc/
clic , nuis privée de íes m arch andées, dont le
débit lui auroit procuré un gain coniidcrable ,
fur-rout dans le temps des Poires qui fo n tà p r é fent toutes pafTccs.
IU fentiront que Frauçois-Gabricl-Adjucor
¿ó*
�Barth om euf, qui n’eft intervenu en la c a u fe que
pour demander des partages qui font faits depuis
lon g-tem ps, & qu’il n’y a aucune raifon de re
faire , doit être déclaré non-recevable dans fon
intervention.
.Ils fentiront enfin que ce François-G abriëlA d ju to r B arthom euf & Jean-Baptifte Bartho
m e u f, fon fre re , doivent fupporter tous les dé
pens de la conteftation , & c’eft ainfi ( nous
ofons le dire ) qu’ils prononceront.
Monf i eur T O U R N A D R E , Rapporteur.
M e. S A U T E R
• E A U
D E -B E L L E V A U D ,
Avocat.
C h a s s a i n g ,
A
De
Procureur.
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
l’imprimerie de P i e r r e VI AL L ANES , Imprimeur de s Domaines
du Roi, Rue S. Genès, près l’ancien Marché au Bled. 1774.
�
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[Factum. Gas, Anne. 1774]
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Tournadre
Sautereau de Bellevaud
Chassaing
Subject
The topic of the resource
testaments
partage
secondes noces
femme commerçante
captation d'héritage
violences sur autrui
vin
commerce
fraudes
commerçants
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Anne Gas, veuve de Gilbert Barthomeuf, intimée. Contre Jean-Baptiste Barthomeuf, appellant. Et contre François-Gabriel-Adjutor Barthomeuf, intervenant.
Publisher
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De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1760-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0510
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
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Clermont-Ferrand (63113)
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captation d'héritage
commerçants
commerce
femme commerçante
fraudes
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secondes noces
testaments
vin
violences sur autrui
-
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a7cd03188ce6c67eacf6dd76a9ee7c5f
PDF Text
Text
REPONSE
Des Sr. et Dme. DE LA ROQUE DE MONS,
intimés,
AU M É M O I R E
D e s sieur et dame H I L L I A R D , cotuteurs de la
demoiselle D u m o n t , appelans.
sieur et dame de la Roque exercent des droits
consacrés par la nature et les lois ; et si leur réclamation
contrarioit les sieur et dame H illiard, ils ne devoient la
discuter qu’avec calme et décence : ils eussent peut-être
persuadé alors qu’ils croyoient avoir une bonne cause,
et qu’elle pouvoit se passer de personnalités et de décla
mations. Mais ce n’est point là le plan qu’ont voulu suivre
L
ES
A
�( o
les sieur et dame Plilliard. Les personnalités leur ont paru
devoir tenir le premier rang dans leur défense *, les
moindres circonstances leur ont paru de grands moyens;
et s’il falloit les suivre pas à pas, il faudroit écrire pour
les voisins et les voisines, qui seroient peut-être fort en
état de juger une partie des faits articulés, et de les dé
m entir, plutôt que pour la cour qui n’a qu’une simple
question de droit ù juger.
A insi, pour être entendu de la cour, il suffit de mettre
sous les yeux les expressions même des.'actes qui cons
tituent le litige.
F A I T S .
L e sieur Jean D u m o n t, et la dame Procule P itat,
eurent de leur mariage trois enfanS , M arie, épouse du
sieur de V aure, M arguerite, mère de la dame delà Roque,
et A n d ré , père de l’appelante. .Les filles furent mariées
à- l ’âge de dix-sept ans.
'
L e contrat de la dame de V a u r e , en date du 19 no
vembre 17 7 5 , contient ce qui suit :
« En faveur du m ariage, les sieur et dame Dumont
« ont institué la demoiselle future, leur fille, leur hé« xùtière par égale portion* avec les autres enfans qu’ils
« auront au jour de leur décès, de tous les biens dont
« ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse
« qu’ils se font de la terre de M ont, consistante e n . . . . .
« avec les bestiaux qui pourroient la garnir , jusqu’à
« concurrence de 5ooo livres, ensemble tous les vaisseaux
«- vinaircs} ainsi que les meubles meublans . . . . . , ar-
�( 3 )
geiHerie, en l’état que le tout se trouvera au décès du
dernier mourant ; en outre la somme de 6000 livides
que lesdits sieur et dame Dumont se proposent d’em
ployer en acquisition de fonds, cens et devoirs, pour
être annexés à ladite terre, et en faire partie, pour,
par lesdits sieur et dame D u m o n t, ou le survivant
d’eux, disposer de ladite terre au profit de tels de leurs
enfans .qu’ils jugeront à propos, même de la future,
par quelqu’acte que ce s o it, d’entre-vifs ou à cause de
m ort, sous signatures privées ou par-devant notaire;
dans laquelle réserve les sieur et dame D um ont, père
et mère de la future, entendent être comprises toutes
constructions nouvelles : et dans le cas de non dispo
sition de leur p a rt, ladite terre de M o n t , avec les
bestiaux qui se trouveront la garnir, jusqu’à concur
rence de ladite somme de 5ooo francs, les vaisseaux
vinaires, meubles meublans, lin ge, batterie de cuisine
et argenterie, en l’état que le tout se trouvera, ap
partiendront à André D um ont, leur fils, lequel en
demeurera précipué, ainsi que des annexes qui auront
été faites à ladite terre , jusqu’à concurrence des
6000 livres; ladite institution faite sous ladite réserve,
et à condition de ladite disposition, et encore à la
charge , par la fu tu re, de laisser jouir le survivant
des père et m ère, de la portion qui lui seroit revenue
dans les biens du prédécédé : sans toutes lesquelles
charges, clauses et conditions, ladite institution n’auroit
été faite , et la future auroit été apanée moyennant
« la dot qui va lui être constituée. »
En avancement de leur future succession , lesdits
A a
�(4)
sieur et dame Dumont ont constitué en dot à la future
la somme de 30000 livres, et 10000 livres de bien paraphernal. L a disposition est terminée ainsi : « Sera
. «. néanmoins tenue ladite demoiselle future, de rapporter
« tant ladite somme de 10000 livres à elle donnée pour
« lui tenir lieu de bien paraphernal, que celle de 300001.
« à elle aussi donnée en avancement d’hoirie, pourvu
« que le payement en ait été fait lors de l’ouverture
« des successions des sieur et dame ses père et m ère,
« ou de moins prendre dans lesdites successions. »
Chaque fois que les sieur et dame Hilliard ont rap
porté les stipulations de ce contrat de m ariage, ils se
sont arrêtés après ces mots : en avancement de leur
fu tu r e succession, lesdits sieur et dame D um ont ont
constitué en dot j cl la, demoiselle ¿future , la somme
de 30000 livres. Ils ont affecté d’omettre la dernière
clause, qui caractérise de la manière la plus précise la
constitution faite à la future, et explique que les 100001.
sont un bien paraphernal; que les 30000 ne sont pas
une constitution dotale, mais un* avancement d’hoirie ;
que la future est tenue de rapporter le to u t, lors de
l’ouverture des successions de ses père et mère.
La mère de la dame de la Roque se maria le 10 fé
vrier 1777? avec le sieur Grellet de Beauregard. On lit
dans leur contrat que : « Dans l’esprit du contrat de
« mariage de demoiselle Marie Dumont, lcur= fille aînée,
« avec M. Joseph Rabusson de Vaure , passé devant
« R o llat, notaire, le 19 novembre 1 7 7 5 , les sieur et
« dame Dumont ont institué la demoiselle future leur
« héritière par égale portion avec les autres enfans<
�«
«
«
«
«
«
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«
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[
5
3
qu’ils auront au jour de leur décès, de tous les biens
dont ils mourront vêtus et saisis, sous la réserve expresse qu’ils se font de la terre de M o n t, telle qu’elle
est expliquée au contrat sus-daté, ensemble des autres
objets qui y sont détaillés, et de la somme de 6000 1.
dont il est parlé , p o u r, par lesdits sieur et dame
D um ont, ou le survivant d’e u x , dans les termes du
même contrat, disposer de ladite réserve au profit
de tels de leurs enfans, même de la future, par les
moyens et de la manière expliquée audit conti’at.
« Cette institution faite, en outre, aux mêmes charges
« que celles expliquées audit contrat; et en avancement
« de leur future succession, lesdits sieur et dame D u « mont ont constitué, etc., etc. » L a future est obligée
au rapport de tout ce qu’elle aura reçu. Il est bien exprimé
dans ce contrat que les sieur et dame Dumont se sont
réservé la terre de M ont avec les accessoires, pour en
disposer en faveur de tels de leurs enfans qu’ils jugeront
à propos ; mais ils ne disent pas qu’à défaut de dispo
sition, elle appartiendra par préciput à André D um ont,
et que sans cette disposition, ils auroient apané la
future : ce qui donne lieu de penser que leur volonté
n’étoit plus la m êm e, ou qu’ils craignoient que le ma
riage n’eût pas lieu si l’on pouvoit supposer que l’ins
titution de la future ne fût que conditionnelle.
En vain les adversaires prétendent - ils que ces mots ,
dans les term es, renferment les dispositions irritantes
par l e s q u e l l e s ils voudroient repousser les filles des sieur
et dame Dumont. 11 est de principe que les prohibitions,
de même que les peines, ne s’étendent pas au-delà des
�( 6 )
cas exprimes ce qui n’a été interdit qu’à une personne,
ne peut, par induction, être regardé comme interdit
à une autre. La disposition de la terre de Mont
étoit un objet assez important, pour qu’il fallût en faire
mention expresse dans le contrat de mariage de la dame
de Beau regard, si les père et mère vouloient qu’elle ap
partînt à André D um ont, en vertu de ce contrat. L ’institutiou de la mère de la dame de la Roque ne peut
être conditionnelle, lorsqu’il n’a été stipulé aucune con
dition dans son contrat ; le mot charges ne se rapporte
qu’à l’usufruit des biens du prédécédé, réservé en faveur
du survivant des père et mère : les contrats de bienfai
sance sont de droit étroit, tout y est de rigueur. Les
actes des 19 novembre 17 7 5 , et 10 février 17 7 7 , sont
des traités passés entre des familles différentes : les obli
gations de l’une sont étrangères à. l’autre.
ga
Marguerite D u m on t mourut le 8 avril 1783, huit jours
après avoir donné naissance à la dame de la Roque. La
dame Dumont ne survécut à sa fille qu’environ six mois:
• elle étoit commune en biens avec son mari ; il en con
serva la possession comme chef de la communauté, qui
se continua avec ses enfans.
André Dumont se maria en 1789. Il est dit dans son
« contrat: En faveur du présent mariage, le sieur Dumont
« père a institué et institue son fils, par égales portions avec
« ses deux sœurs, épouses de M M . Rabusson de Vaure
« et Grellet de Beauregard , de tous les biens meubles
« et immeubles dont il mourra vêtu et saisi ; et comme
« par le contrat de mariage de dame Marie Dumont ,
« épouse dudit Rabusson de V a u re, ledit sieur Dumont
�(7)
père, et ladite défunte Procule P itat, son épouse,
s’étoient conjointement réservé, même au survivant
d’eu x , la faculté de disposer au profit de tels de leurs
enfans qu’ils jugeroient à propos, et par tel acte que
bon leur semblerait, de la terredeM ont, consistante, ..
et en cas de non disposition desdits objets du vivant
desdits. sieur et dame Dumont , ils appartiendront
en toute propriété, et à titre de préciput, audit sieur
futur ép o u x, ainsi que les annexes qui auroient été
faites à ladite terre, jusqu’à concurrence de la somme
de 6000 francs.
« Et
mme ladite dame Pitat est décédée sans avoir
manifesté scs intentions à l’<5garcL de la réserve ci-dessus
désignée, ledit sieur Dumont père, usant de la faculté
de pouvoir disposer de là totalité desdites réserves,
déclare qu’il dispose, à titre de préciput, au prolit
dudit sieur futur époux, tant de ladite terre de M on t,
circonstances et dépendances d’icelle, que de tous les
autres objets ci-dessus spécifiés, et tel que le tout est
désigné et spécifié en ladite réserve portée au contrat
de mariage ci-dessus d até, des sieur et dame Rabusson
de Vaure ; p ou r, par ledit sieur futur, faire le prélè
vement et entrer en jouissance de ladite terre de M ont,
et de tous les autres objets compris en la présente dis
position , immédiatement après le décès dudit sieur
Dum ont; sous la réserve que se fait ledit sieur Dumont
p è re , de la somme de 30000 francs, à -prendre sur
ladite terre de M ont / pour en disposer en faveur de
' tels de ses enfans ou petits-enfans qu’il jugera à propos,
même en faveur dudit sieur futur, par tel acte d’entre-
�«f
«
«
ce
«
«
«
«
«
(
8
)
.
vifs, à cause de m ort, ou sous signatures privées, que bon
lui semblera ; et de suite ledit sieur Dum ont, en faveur
dudit mariage , a disposé et dispose en faveur dudit
sieur futur é p o u x , sur la susdite somme de 30000 fr.
réservée, de celle de 10000 francs ; de laquelle ledit
sieur son père se charge de lui servir l’intérêt au taux
de l’ordonnance, sans aucune retenue , jusqu’au remboursement, qu’il lui sera loisible de faire quand il
le jugera à propos.
« D e la même somme de 30000 livres, réservée par
« ledit sieur Dumont père, il a présentement disposé et
« dispose, en faveur de demoiselle Procule Grellet de
« Beauregard, sa petite-fille, fille de Jean-Baptiste Grellet
« de Beauregard, et de feue dame Marguerite D um ont,
« de la somme de 5ooo liv ., à prendre sur ladite réserve,
« payable après le décès dudit sieur Dumont père, seuec lem ent, par ledit sieur futur ép ou x, sans intérêts jus« qu’audit décès, après lequel ils auront cours au taux
« de l’ordonnance, jusqu’au remboursement, que ledit
« sieur futur sera tenu de faire dans deux ans du décès
« de son dit père; et dans le cas où ladite demoiselle
« Grellet, ou ses père et mère, contreviendraient direc
te tement ou indirectement à la disposition fa ite par ces
« présentes, de ladite terre de'M ont, en faveur du sieur
«f fu t u r ép o u x, la disposition de 5ooo livres, fa it e en
« fa v e u r de ladite demoiselle G rellet, sera et demeurera
k nulle et de nul e jfe t, et comme non fa ite ' pareille« ment, dans le cas où ledit sieur Dumont père ne dis—
« poseroit pas de son vivant des ï 5 ooo livres restantes
ft de la susdite somme réservée, elle demeurera réunie
« à
�( 9 )
« à ladite terre de M o n t, et appartiendra audit sieur
« futur époux, sous la réserve que ledit sieur Dumont
« père se fait de la jouissance, pendant sa v ie , de la
« susdite terre de M o n t, pour, après son décès, appar« tenir en toute propriété audit sieur futur époux et
« en avancement d’hoirie et de ladite institution, ledit
« sieur Dumont père a constitué en dot audit sieur futur
« la somme de.........etc., etc. »
Suivant la disposition de l’article 217 de la coutume
de Bourbonnais, sous l’empire de laquelle vivoient les
parties, la disposition de 5ooo francs, faite en faveur de
Procule G rellet, étoit nulle; la condition onéreuse dont
elle étoit grevée l’auroit aussi empêchée de l’accepter :
mais nu mois de brumaire an n , ie sieur D um ont,
présent au contrat de mariage de ladite Procule G rellet,
sa p e tite -fille, augmenta de 10000 francs l’avancement
d’hoirie promis à sa mère ; il stipula que 5ooo fr. seroient
rapportés au partage, et que les autres 5ooo non sujets
à rapport seroient payés sur la réserve qu’il s’étoit faite
en disposant de la tei’re de Mont.
A u mois de novembre i 8o 5 , le sieur Jean Dumont
décéda : c’étoit l’époque où ses enfans devoient faire
valoir leurs droits héréditaires. Les dames de Vaure et de
la R oque, après avoir fait examiner les contrats ci-dessus
cités, se sont empressées de déclarer qu’elles 11’entendoient pas contester à la demoiselle Anne Dum ont, fille
et unique héritiere d’André , la moitié de la terre de
M o n t, qui avoit appartenu au feu sieur Jean D u m o n t;
mais qu’elles se croyoient fondées à recueillir leur portion
dans l’autre m o itié, qui étoit la propriété de la dame
B
�( 1° )
Pitat, décédée avant le mariage d’André Dumont. Mères
de fam ille, et appelées par la nature et la loi au partage
égal de la succession de ladite dame Pitat, devoient-elles,
au préjudice de leurs propres enfans, abandonner à leur
cohéritière, qui recueillera les quatre sixièmes de cette
terre, la petite part que leur, attribue la coutume à
laquelle les parties étoient soumises ?
Les qualifications odieuses que les sieur et dame Hilliax-d
'ont données à la conduite des dames de Vaure et de la
R o q u e, et les inventives prodiguées dans le mémoire
!des adversaires, rejailliront sur leurs auteurs. Les sieur
et dame de la R oque, par attachement pour leur cousine
rgermaine, aimënt à se persuader qu’elle n’a aucune part
à cette indécente'diatribe.
;Lës tuteurs d e: mademoiselle ODumont troublent mal
% propos la cendre de son respectable aïeul, lorsqu’ils
disent qu’il l’a laissée dans l’abandon. On >trouverait les
preuves d’envois d’argent qu’il1lui a faits. Il est notoire*
daiis le pàj^s que quelques années avant sa mort, il la
fit venir d’une ville éloignée, où elle habitoit avec ses
tuteurs, auxquels il fit?passer pour les frais de voyage
et retour une somme plus!forte que celle qui étoit né'cessaire. Lorsque sa petite-fille partit, son trousseau étoit
bien différent de celui qu’elle avoit porté :,les autres
enfans du sieur Dumont auroient vu avec plaisir qu’il
eût fait davantage pour elle; mais-le désir de payer ses
dettes enchaînoit sa générosité.
Il n’est pas moins facile d’écarter le reproche que les
appelons font aux; dames de V a u re et de la R o qu e, sur
la conduite par elles tenue depuis le commencement du
�( II )
procès. A peine, disent-ils, la demande fut-elle formée,
qu’on vit les dames de Vaure et de la Roque poursuivre
l’audience avec une activité sans exemple, ü n croiroit
sur cette allégation que .lorsque, l’affaire'fut jugée, l’ac
tion étoit intentée depuis peu de jours : il s’étoit «coulé
une année entière ; on ne peut supposer qu’il ait été
employé des sollicitations pour obtenir, après un si long
temps, le jugement d’une affaire provisoire, en ce qu’elle
suspend le partage des successions des sieur et dame
•Dumont.
Les sieur et dame Hilliard se plaignent de ce qu’à
l’audience du 8 août, leur avocat ayant plaidé pendant
trois heures , les dames de Vaui-e-et de la Roque lais
sèrent obtenir un défaut; ils attribuent à des combinai
sons astucieuses, et à des manœuvres ténébreuses, une
chose fort simple. Il avoit été signifié, le 14 juillet pré
cédent, un écrit signé de M . Chabroud, intitulé : Notes
pour mademoiselle Dumont. Cet écrit fut envoyé aux
sieur et dame de la. R o q u e q u i' habitent le département
de la Creuse; ils l’avoient.fait.passer à leur conseil pour
y répondi-e;et leur avoué ayant reçu cette réponse peu
de jours avant le 8 août, n’avoit. pu se préparer à plai<der. L e sieur de V au re, qui avoit quelque répugnance
à plaider devant le tribunal dont il étoit membre, voyant
, que l’avoué des sieur et dame de la Roque 11’étoit pas
p r ê t , laissa prendre défaut.
Si le défenseur des sieur et damp Hilliard eût eu avec
ceux de- ses parties adverses d e s. communications ami
cales, ils l’eussent prévenu qu’il$. n e plaideraient pas à
cette audience. L ’avoué,des sieur et dame de la Roque
3 z
�( *4 )
clairem ent, dans le contrat de mariage d’André , son
fils; il y énonce les différens objets qui composoient la
réserve, et ne fait nulle mention des 6000 francs. Lorsqu’il
dit à la fin de sa disposition, que tous les objets énu
mérés appartiendront à André D um ont, il ajoute, ainsi
que les annexes qui auroient étéfaites à la terre de Mont,
ja sq u à concw'rence de 6000 francs. Lés titres d’acqui
sition et rachat de cens existoient alors; ces acquisitions
avoient été réunies à la terre de Mont : le sieur Dumont
vouloit qu’elles continuassent à en faire partie. Mais on
voit très-distinctement qu’il n’est pas entré dans la pensée
des instituans, qu’outre ladite terre et ses dépendances,
on pourroit encore exiger la somme de 6000 livres.
Par le contrat de mariage de son fils, le sieur Dumont
se dépouilla entièrement, quant à la propriété, de ce
qu’il vouloit lui donner. Les mots, avec les annexes qui
auroient été f a it e s , ne peuvent s’entendre que du passé,
et non d’acquisitions à faire dans la suite, pour joindre
à un objet, dans ce que le sieur Dumont avoit cédé
sa propriété. Il avoit si peu l’intention d’ajouter à la
valeur des choses par lui données, qu’il la diminua par
une réserve.
' Quant aux dépens, la demoiselle Dumont ayant suc
combé sur l’objet principal de la contestation, devoit
supporter une partie des frais. Les sieur et dame de
la R oque, en signifiant le jugement, se sont reservé de
poursuivre la réparation de ces deux griefs, pour lesquels
ilsseproposentd’interjeter incidemment appel. Les tuteurs
de mademoiselle Dumont sont appelans des dispositions
qui ont déclare huile la donation en préciputdè’ ld' terre
�(
)
de M ont, pour la moitié provenante du chef de la
dame Pitat. C’est sur cet appel qu’il faut en ce moment
se fixer.
MOYENS.
Il ne sera échappé à aucune des personnes qui ont lu
le mémoire de mademoiselle D um ont, que ce n’est pas
sur les dispositions de la coutume, qui fait loi entre les
parties, qu’elle fonde ses prétentions; elle n’en invoque
textuellement aucun article. E h ! comment eût-elle pu
s’en prévaloir, lorsqu’il n’en est aucun qui lui soit favo
urable ? C’est en citant des autorités et des préjugés pres
que tous puisés dans des ouvi'ages étrangers à la coutume
jie Bourbonnais , ou clans des îtianusevils inconnus aux
sieur et dame de l a vRoque, qu’elle prétend établir une
jurisprudence qui anéantiroit les dispositions de la loi
sous l’empire de laquelle vivoient les parties.
On pourrait soutenir que cette loi étant claire et pré
cise , les cours actuellement existantes doivent la faire
exécuter, sans égard pour une jurisprudence qui s’en
sçroit écartée. Mais ou verra dans la suite qu’à raison des
circonstances particulières de cette affaire, les appelans
ne peuvent tirer aucun avantage de la prétendue juris
prudence qu’ils voudraient faire admettre.
Désirant rapprocher les réponses des objections, afin
de rendre plus lumineuse la réfutation du mémoire de
leurs adversaires, les sieur et dame de la Roque auraient
voulu suivre l’ordre que les sieur et dame Hilliard ont
adopté : mais il y a dans leur mémoire tant de diffusion1
et d’incoJiérauce ! il faudroit revenir sans cesse sur ses
�c 16 )
pas. Il a donc paru plus simple d’établir quelques pro
positions qui détruisent de fond en comble le système
des appelans : on réfutera en même temps les objections
qui s’y rapportent.
PREMIÈRE
PROPOSITION.
L a coutume qui régit les parties est une coutume
d'égalité ; elle ne permettoit ni d'avantager
A n dré D u m o n t, dans les contrats de mariage
de ses sœurs, ni de les exclure des successions,
par dot ou apanage ¡ à moins que ce qui aurait
été donné à ce titre ne leur eût été irrévoca
blement acquis a Vépoque desdits contrats, et
sans être retenues dans la famille par une ins
titution; stipulation qui ne se trouve pas dans
ceux des dames de Vaure et de Beauregard.
Pour établir cette proposition et les suivantes , les
sieur et dame de la Roque n’ont pas cru devoir secouer
la poussière des anciens manuscrits des avocats de la
ci-devant province de Bourbonnais ; il leur a paru que
ceux qui ont des procès seroient trop malheureux, si
pour apprécier leurs droits il falloit fermer le livre de
la l o i , et y suppléer par les décisions de quelques
hommes plus ou moins éclairés. Cette manière de juger
seroit sujette aux plus graves inconvéniens. Un avocat
qui a fait prévaloir son avis, l’a consigné dans des notes
où
�( 17 )
oïl sans doute il n’a pas rappelé toutes les circonstances
qui auroient pu faire juger le contraire; dans le même
temps, son voisin rendoit peut-être une décision opposée.
Seroit - il juste de s’en rapporter à l’un plutôt qu’à
l’autre? N’cst-il pas plus raisonnable de laisser à l’écart
tous ces écrits p rivés, et de ne consulter que la loi à
laquelle les parties doivent obéir ?
Les contrats de mariage de tous les enfans des sieur
et dame Dumont ont été passés sous l’empire de la cou
tume de Bourbonnais. Cette coutume veut que les enfans
partagent également les biens des auteurs de leurs jours.
Les articles 217 et 219 prohibent toutes donations et
avantages en faveur des enfans, si ce n’est en contrat de
mariage. L ’article 321 ne leur permet pas de prendre part
à une succession comme héritiers et comme légataires.
M . A uroux des Pommiers, que nous citerons souvent,
parce que son commentaire a presque obtenu l’autorité
de la lo i, observe, sur l’article 317 de ladite coutume,
que « sa disposition a pour principe Végalité que la nature
« désire, étant juste que ceux qui sont égaux en nais« sance, et qui doivent l’être dans l’affection de leurs
« père et m ère, le soient aussi dans le partage de leurs
« biens. La donation entre-vifs a été exceptée, parce qu’il
« eut été difficile aux pères et mères de marier leurs
« enfans, s ils n’avoient pas eu la liberté de leur faire
« des donations entre-vifs en les mariant. »
Ce n’est donc que pour l’intérêt des mariés, et dans
leur contrat de mariage, qu’il est libre aux pères e t mères
de faire des donations entre-vifs à leurs enfans. Dumoulin,
sur le môme article de la coutume de Bourbonnais, dit
C
�C 18 )
que cela a été étendu aux ascendans , toujours en vue
de l’égalité -, façore œqualitatis.
On trouve à l’article 219 , nombre 13 et suivans, de
nouveaux développemens. M. A uroux s’y exprime en
ces termes : « Une condition pour la validité des insti« tutions contractuelles, est qu’elles soient faites en
« faveur des mariés ¿ ou de l’un d’eux, ou des descen
te dans du mariage. » C’est la disposition de notre cou
tume et de plusieurs autres ; tel est aussi le sentiment de
nos commentateurs. F a çor hujus paragraphi, dit M. de
Culant, nubentes tantum et ex eodem matrimonio des
cendentes affîcit, in tantum ut si institutio fa c ta ,fu e r it,
in gratia contrahentium, et aliorum no?i contrahentiu n i, pro portionihus contrahentium valent 3 et prç
non jiubentiuni parhbus corruat•
« Ainsi si un père fait une institution contractuelle
« en faveur de deux de ses enfans, dans le contrat de
« mariage de l’aîné des d eu x , il n’y aura que le seul
« aîné qui sera institué d’une institution contractuelle,
c< le puîné ne l’étant que par un acte' non valable à
et son égard -, la raison est que la faveur du contrat
« de mariage ne concerne que les mariés et leurs des-« cendans du mariage. » C’est le raisonnement de
M . Lebrun , Traité des successions, liv. 3 , cliap. 2, n°. 1 a.
D ’où cet auteur conclut que quoique la donation faite
aux futurs conjoints n’ait pas besoin d’être acceptée par
eux, néanmoins si elle conceraoitdes personnes étrangères,
elle devroit être acceptée par eux. M. le président B uret
pousse la chose si lo in , qu’il prétend qu’une donation,
faite en faveur de mariage à l’un des conjoints, dont il
�( z9 )
feroit sur le champ cession à une personne étrangère,
seroit n u lle, par la raison que cette donation ne seroit
pas censée faite au profit et utilité des m ariés, comme
le requiert notre article.
Par suite du même principe d’égalité, M . Auroux
décide, à l’article 321, qu’en ligne directe, le legs fait,
même au fils de l’h éritier, seroit déduit et précompté
sur la portion héréditaire du père.
Ce seroit une grande erreur de croire que l’article 305
a dérogé à cette égalité voulue par la coutume de Bour
bonnais ; il porte : c< Fille mariée et apanée, ne peut
« demander légitime ni supplément d’icelle. »
Les rédacteurs de la coutume , en déclarant forcloses
les filles mariées et apanées, n’ont pas eu intention de
les traiter moins favorablement que les garçons : ils ont
pensé qu’elles se marieroient plus avantageusement, si
au lieu de leur part dans une hérédité incertaine j on
leur constituoit une somme fix e , dont elles ne pussent
être privées par les événemens auxquels seroit exposée
la fortune de leurs père et mère.
« L ’apanage des filles, dit M . A u ro u x , sur cet article,
« ou leur exclusion de la succession de leurs père, mère,
« aïeul ou aïeule , même des successions collatérales,
« dans les termes de représentation établie par notre
« coutume en faveur des mâles , pour la conservation
« des familles, n’a rien d’injuste, parce qu’une succession
« pouvant diminuer, comme elle peut augmenter, cette
« incertitude fait que l’on suppose toujours de la justice
« et de l’égalité dans les exclusions tacites qui sont faites
C a
�( 20 )
cf moyennant un certain prix et une certaine récom« pense. »
L e texte et le commentaire de cet article de la cou
tume du Bourbonnais , font connoître qu’elle diffère
essentiellement de la coutume d’Auvergne. Dans cette
dernière, la fille mariée, dotée ou non, ne peut, suivant
l’article 20 du chapitre 1 2 , venir aux successions au
lieu que la coutume du Bourbonnais n’exclut que les
filles dotées et apanées.
Il sembleroit que la loi n’étant pas censée contenir des:
termes inutiles , il faut pour forclore la fille dans les
pays régis par la coutume de Bourbonnais , que son
contrat contienne dot et apanage. Mais les sieur et dame
de la Roque ne dissimulent pas que, par un usage peu
favorabLe au sexe le plus facile à opprim er, on considère
comme dotée et apanée toute fille à laquelle il a été
fait une constitution de dot irrévocable , sans aucune
réserve de participation à l’hérédité. On suppose que
les auteurs de ses jours ont entendu l’apaner, quoiqu’ils
n’aient pas dit que la dot qu’ils lui donnoient étoit à
titre d’apanage.
Appliquons ces principes à la cause, et prouvons que
les filles des sieur et dame Dumont n’ont été ni apanées
ni dotées.
Quoique les termes du contrat de mariage de la dame
de la R oque la mettent dans une position plus avan
tageuse , nous allons raisonner comme si toutes les sti
pulations du contrat de la dame de V au re se trouvoient
dans celui de la dame de Beauregard.
�C 21 )
Nous soutenons qu’il n’y a dans lesdits contrats ni
dot ni apanage.
Il n’y a pas d’apanage, parce qu’il y a institution : ces
deux dispositions sont incompatibles *, et'les auteurs
communs ont déclaré qu’ils n’apanoieni pas leurs filles.
Il n’y a pas de d o t, parce qu’il n’a été rien donné
irrévocablement : tout ce qui a été constitué aux filles
ne l’a été qu’en avancement d’hoirie, et à la charge du
rapport.
Les sieur et dame Hilliard seroient donc réduits, pour
combattre cette évidence de principes, à prétendre en
point de droit, qu’une fille peut être en même temps
lievititîre et apanée; m ais ce seroit une erreur choquante '
car par l’institution elle est retenue dans la maison
paternelle ; par l’apanage elle en est excluse : et on ne
peut tout à la fois être retenu dans la maison et exclu
de la maison.
O r, il a été fait une institution d’héritières en faveur
des dames de Vaure et de Beauregard , avec réserve
d’un objet dont la disposition pouvoit avoir lieu en leur
faveur ; elles n’ont donc pas été apanées.
Lorsque M . Auroux d it , dans son commentaii’e sur
l’article 305 de la coutume de Bourbonnais, « qu’une
« fille mariée par pèi'e et mère , à qui on a donné
« quelque chose de certain, est réputée apanée, et par
« conséquent excluse des successions, quoiqu’elle n’y ait
« pas expressément renoncé , et qu’on ne se soit pas
« servi du mot apané, attendu qu’il n’est pas nécessaire
« pour la validité de cette exclusion tacite et coutumière
�« qu’on se soit servi du mot apanê, pourvu qu’il y ait
« dotation faite à ladite fille. »
Il est évident que cet auteur s’exprime ainsirpour les
cas où les père et m ère, dotant leur fille, n’auroient pas
expressément énoncé s’ils entendoient qu’elle vînt ou
non à partage de leur succession; alors, d it-il, il y a
renonciation tacite et coutumière : mais cette renonciation
ne peut être supposée, lorsqu’elles ont été formellement
instituées héritières.
Après avoir fait l’institution avec réserve , et même
conditionnelle si l’on v e u t, les père et mère ont ajouté
que s’ils n’avoient pas fait cette institution, ils auroient
apané ; ce qui explique clairement qu’ils ont mieux aimé
faire l’institution que Fapanoge; car lorsqu’on annonce
que si on n’eût pas fait telle chose, on en eût fait une
autre, on dit positivement que c’est la première et non
la seconde qui a été faite.
Il est indifférent que les auteurs communs eussent pu
apaner, dès qu’ils n’ont pas usé de ce droit; s’ils eussent
fait un apanage de la manière voulue par la coutum e,
il eût été valable ; mais la disposition qu’ils ont préférée
étant prohibée par la l o i , doit être annullée.
Après l’institution , les père et mère ont dit qu’en
avancement de leur future succession, ils constituoient
en dot à la future la somme de. . . . qu’ils l’ont, par une
disposition subséquente, obligée de rapporter lors de
l’ouverture de leurs successions, ou de moins prendre dans
lcsdites successions. Les appelans voudroient adroitement
assimiler cette constitution de d o t, qualifiée d’avance-
�( *3 )
ment d’hoirie, et sujette à rapport, avec la dot dont
parle M. A u ro u x ; mais elles n’ont aucune analogie. Celle
qui est spécifiée par cet auteur, a lieu lorsqu’il n’a pas
été dit si la fille auroit ou non part aux successions; et
dans les contrats des dames de Y aure et de Beauregard,
elles ont été expressément instituéesliéritières. M . Auroux
dit positivement qu’il faut, pour la validité de la cons
titution de d o t, que la fille ait reçu un prix certain ,
une récompense qui soit hors des atteintes de tous les
événeinens : mais les sommes promises ou données aux
dames de Vaure et de Beauregard étant sujettes à rapport,
leur frère, héritier comme elles , devoit y prendre p a rt,
Js’il ii’en eût pas reçu d’égales.
Cette partie du commentaire de M . A uroux s’accorde
avec ce qu’il avoit précédemment énoncé, que l’apanage
des filles ou leur exclusion n’a rien d’injuste, parce que
les successions pouvant diminuer comme elles peuvent
augmenter, cette incertitude fait que l’on suppose toujours
de la justice et de l’égalité dans les exclusions tacites,
faites moyennant xin prix certain.
Les constitutions faites aux dames de Vaure et de
Beauregard, ne leur ont pas été irrévocablement acquises,
puisqu’on les a obligées d’en faire le rapport; ce n’est
pas un prix certain que celui qu’on n’est pas maître de
garder.
Afin de rendre cette vérité plus sensible , on a dit aux
adversaires : Supposons que postérieurement aux contrats
de mariage des dames de Vaure et de Beauregard, la
fortune des père et mère se fût évanouie ; et certes de
■pareils exemples ne sont pas rares. D ’après la loi qui
�Ch )
leur étoit faite dans leurs contrats, lesdites dames n’auroient pu s’empêcher de partager , avec l’héritière de
leur frère, tout ce qu’elles auroient reçu en avancement
d’hoirie.
Dans leur m ém oire, les adversaires cherchent à faire
entendre que ces dames, en renonçant à l’institution,
auroient conservé ce qu’elles avoient reçu , pourvu que
le fils eût trouvé sa légitim e, à défaut de laquelle la
fille même dotée est tenue de l’apporter.
Cela pourroit être vrai s’il n’y avoit dans les contrats
de mariage qu’une dot pure et simple.
Mais précisément les sieur et dame Dumont ont voulu
empêcher que les futures ne profitassent de la faculté de
retenir leur d o t , et ils ont fait ce qui étoit en eux pour
les
empêcher.
i ° . Ils n’ont donné cette dot qu’à titre d’avancement
d’hoirie.
20. Craignant qu’à ce titre encore les futures ne re
tinssent cet avancement, ils ont stipulé que la fu tu r e
seroit néanmoins tenue de rapporter la somme à elle
donnée en avancement.
Si les auteurs communs s’étant ruinés, les filles avoient
voulu garder ce qu’elles auroient reçu, avec quelle véhé
mence les adversaires ne se seroient-ils pas élevéscontre
cette prétention! Ils auroient dit avec raison qu’il n’y
avoit pas dans le contrat des dames de Vaure et de
Beauregard de constitution dotale; qu’il ne leur avoit
été rien donné ou promis qu’à titre d’avancement d’hoirie;
que tout ce qui a été reçu de cette manière est par sa
nature sujet à rapport, lors de l’ouverture des successions;
qua
e n
�( 25)
que par une stipulation bien expresse, à laquelle nulle
loi ne 9’opposoit, on les a obligées à ce rapport; qu’ainsi
leur frère doit en avoir le tie rs, étant institué comme
elles héritier pour cette quotité.
Ainsi les dames de Vaure et de la Roque , qui auroient été contraintes de partager avec l’héritière de leur
frère ce qu’elles avoient reçu, doivent, par réciprocité,
profiter des avantages que leur procurera le partage égal
des autres biens des successions communes.
f Les appelons ont dit que pour décider s’il y a eu un
apanage , il faut examiner si les père et mère ont eu
l’intention d’apaner , plutôt que les termes dont ils se
sont servis , voltmtatern potius quant vcrbci spectavi
placuitj mais il importe peu de rechercher l’intention ,
lorsqu’elle ne pouvoit suffire sans un prix certain qui
n’existe pas. Loin que cette intention ait été telle que
les sieur et dame Hilliard la supposent, elle étoit abso
lument contraire ; on en trouve la preuve dans le propre
contrat de mariage d’André Dumont. Si lors du contrat
de mariage de la dame de V a u re , dans lequel les père
et mère disent que sans l’institution ils l’auroient apanée,
leur intention eût été que cette clause produisît l’eifet
d’un apanage, personne ne devoit mieux le savoir que
le législateur de la fam ille, le sieur Dumont père; il
a prévu dans le contrat de mariage de son fils , le cas
ou la dame de la Roque se refuseroit à la délivrance
du préciput dont il disposoit en faveur d’André Dumont.
S’il avoit entendu, lors du mariage de ses filles, qu’elles
dussent etre regardées comme apanées, dans le cas oii
elles refuseroient d’exécuter les conditions attachées h
V
�( a6 )
l’institution, le sieur Dumont n’eût pas manqué de dire
que la dame de la R o q u e, si elle contestoit le don en
préciput, devoit être restreinte aux 40000 francs cons
titués à. sa m ère, en avancement d’h oirie, et que son
fils recueilleroit toute son hérédité.
A u lieu de cela, le feu sieur Dumont ne suppose
pas même que la dame de la Roque puisse jamais être
privée de sa part héréditaire, persuadé que le contrat
de mariage de la dame de Beauregard ne contenant
aucune disposition de préciput en faveur d’AndréD um ont,
la dame de la Roque pourroit le contester-, il lui fait
un don de 5ooo francs, si elle respecte la disposition
dudit préciput ; et en cas qu’elle ne veuille le souffrir,
il la prive de ce don. C’est, suivant le meilleur interprète
des c l a u s e s contenues dans les contrats de mariage des
filles, la seule peine qu’elle peut encourir. M algré la
grande envie qu’il avoit d’avantager son fils, le sieur
D u m o n t ne se croit pas autorisé à donner atteinte à l’ins
titution de ses filles : son fils n’est institué comme elles,
et conjointement avec,elles, que pour la même quotité.
Relevant avec l’apparence du triom phe, des objec
tions moins importantes, les sieur et dame Hilliard ont
passé celle-ci sous silence, quoiqu’elle leur eût été faite
dans tous les écrits signifiés en première instance ; ils
ont senti l’impuissance d’y répondre rien de plausible.
L e don de 5ooo francs fait à la demoiselle de Beauregard, dans le contrat de mariage de son oncle, étoit
radicalement nul, suivant les articles de la coutume déjà
cités, qui ne permettent de gratifier les enfans que dans
leur propre contrat de mariage. La condition apposée à
�( *7 )
cc don étoit d’ailleurs trop préjudiciable à la dame de la
Roque, pour qu’elle l’acceptât. Aussi n’a-t-elle jamais ré
clamé cette somme en vertu du contrat de mariage du 31
mai 1789. Mais le sieur Dumont père, présent au mariage
contracté par ladite demoiselle de Beau regard , le 30 bru
maire an 11 , augmenta de 10000 francs la constitution
faite à sa mère en avancement d’hoirie, et stipula que
de ces 10000 francs, 5 seroient sujets à rapport, s’ils
avoieiit été payés , et que les 5 autres seroient pris sur
sa réserve de la terre de Mont.
C ’est eh vertu de cette disposition affranchie de toute
condition, et faite dans le propre contrat de la dame
de la R o qu e, qu’elle a exigé ces 5 ooo francs, dont la
demoiselle Dumont lui sert l ’intérêt -, en attendant qu’elle
puisse les acquitter. Quant aux i 5 qui formoientle restant
de ladite réserve, le feu sieur Dumont en a fait donation
à la dame Narjot, fille de la dame de Yaure. Les tuteurs
de la demoiselle Dumont ayant formé demande en nullité
de cette donation, par la même requête qui a précédé
la demande en partage et délivrance de préciput, dirigée
contre la dame de Y a u re , les sieur et dame de la R oque,
ces derniers, pour ne pas surcharger d’un objet étranger
la contestation relative au partage et au préciput, à
laquelle les sieur et dame Narjot ne sont pas intéressés,
après avoir observé qu’il devoit être traité séparément,
sont restés spectateurs du débat qui existoit entre la
demoiselle D u m o n t, les sieur et dame Narjot.
Néanmoins la loi du 18 pluviôse an 5 , attribuant aux
héritiers non avantagés les réserves dont les instituans
D 2
�(
2 8
)
n’auroient pas valablement disposé, les sieur et dame des
la Roque ont pris devant les premiers juges des con
clusions tendantes à ce que la demoiselle Dumont fût
condamnée, si la nullité de la donation faite à la dame
Narjot étoit prononcée, à leur payer j 5oo francs faisant
moitié de la somme donnée, avec intérêts et frais. En
première instance, la demoiselle Dumont a été déboutée
de sa demande en n u llité, et condamnée à payer à la
dame Narjot les i 5ooo francs. On voit dans les motifs
des juges de Gannat, qu’ils ont été principalement dé
terminés par la considération que la demoiselle D u
mont étoit sans qualité pour contester ladite donation,
attendu que ce droit n’appartenoit qu’aux héritiers lé
gitimés;
O
" c’est-à-dire,* il la dame de V a u rc et à la dame
d e la R o q u e .
L e mémoire que les appelans ont fait imprimer ne
dit rien de ce qui s’est passé depuis ledit jugem ent,
entre la demoiselle Dumont et les sieur et dame Narjot.
Les sieur et dame de la R o q u e , qui n’en ont pas connoissance, doivent faire remarquer que si les sieur et
dame Hilliard ont interjeté appel vis-ù-vis des sieur et
dame N arjot, dans le cas où la cour prononceroit la
nullité de cette donation de iôooo francs, il y auroit
lieu d’adjuger la moitié de cette somme , aux sieur et
dame de la R oque, conformément aux conclusions par
eux prises en première instance, et à la loi du 18 plu
viôse an 5. Si au contraire les sieur et dame Hilliard
sont repoussés par la fin de non-rccevoir qui les a fait
succomber en première instance, les sieur et dame de
�( 29 )
'
la Roque entendent se réserver tous leurs droits à la
moitié de ladite somme de iôooo francs, pour les exer
cer quand et ainsi qu’ils aviseront.
SECONDE
PROPOSITION.
Tout don de préciput est formellement prohibé par
la même coutume, hors du contrat de Venfant
qui se marie. S i la jurisprudence Va admis, d’une
manière indirecte, dans les contrats de mariage
des filles instituées héritières, ce n est quautant
q u e lle s auroient été en même temps' dotées moyen
nant un p r ix certain et une récompense irrévo
cable.
i
Forcés de reconnoître dans leur mémoire qu’André
Dumont n’auroit pu être avantagé d’un préciput par le
contrat de mariage de ses sœurs, si cet avantage lui eût
été fait directement, les appelans se bornent à soutenir
qu’il a pu le recueillir par voie indirecte, à cause de la
condition mise à l’institution de ses sœurs.
Si on écoute la voix de la raison, il semble que toute
violation de la loi doit être également réprim ée, et que
le but du législateur est manqué s’il souffre qu’on ob
tienne par artifice ce qu’il a expressément défendu.
L ’article 308 de la coutume du Bourbonnais est ainsi
conçu :
. « Donations faites par père, mère ou autres ascendaos
« à leurs descendans, en préciput, en contrat de ma-
�( 30 )
« nage et faveur d’icelu i, ne sont sujettes à collation
« entre les donataires et leurs cohéritiers. »
Cet article est si formel qu’il n’a pas besoin de com
mentaire : ouvrons néanmoins celui de M. Auroux.
A p rè s avoir dit qu’il faut que le préciput soit donné
expressément à ce titre, il ajoute : « Une seconde condi« tion requise pour la validité du préciput, est qu’il
« soit fait en contrat de mariage et faveur d’icelui, ainsi
« qu’il est dit dans notre article; et la raison est qu’aux
« termes de l’article 217 suprà, les pères et mères ne
« peuvent donner entre-vifs à leurs enfans, hors contrat
« de mariage, » C’est l’observation de M. de Culant sur
notre article : « In gratiam contrahentïs matrimonium ,
« d it - il, alias m o r i b u s n o s tr is n o n v a l e t , hoc quia
« extra contraction matrimonii et ejus favorem non
« valet d o n atio facta liberis à parentibus. A rt. 217. »
M . A u ro u x ne compose pas avec la loi ; comme elle
il dit que le préciput n’est valable qu’autant qu’il est
fait en faveur de ceux qui se marient. L ’opinion de
M . de Culant, qu’il rapporte, n’est pas moins tranchante:
in gratiam contrahentis matrimonium et ejusjavorem ,
alias non valet.
« A la vérité, continue M . A u ro u x, par arrêt rendu
« au rapport de M . l’abbé Pucelle , le 22 mai 1 7 1 6 ,
« entre les dames Maquin et leur frère , le préciput
« de 30000 fr. fait au frère dans le contrat de mariage
« de ses sœurs, par les père et m è r e , fut confirmé :
« mais c’est parce que ce préciput étoit une clause et
« condition du rappel et institution desdites dames,
« sans laquelle réserve du préciput il étoit dit que
�yt
( 31 )
lesdits père et mère lesauroient apanées, et sous conVention que, où lesàites dames voudraient contester
ledit préciput, elles demeureraient apanées pour la
somme de 24000 fr a n c s chacune ; ce qui se pratique
ainsi dans cette province. »
Les appelans se sont persuadés que cet arrêt étoit
à leur avantage , tandis qu’il leur est absolument con
traire. M . A u r o u x , en rapportant les motifs qui ont
déterminé cet a rrê t, fait connoître qu’il n’est pas en
opposition avec ce qu’il a dit précédemment. Les mots
soulignés ci-dessus le sont aussi dans le commentaire
de M . A uroux ; ils contiennent la stipulation expresse
d’un apanage qui doit demeurer aux filles , et tenir
lieu de leur portion héréditaire r si elles ne veulent
souffrir le préciput. En disant qu’on a jugé ain si, par
cette raison, M . A uroux exprime d’une manière évi
dente que sans cette stipulation ont eût jugé différem
ment •, d’ou il résulte que les dames de Vaure et de
Beauregard, qui n’ont pas été apanées, et auxquelles
il n’a été rien constitué qu’en avancement d’hoirie, et
à la charge du rap p o rt, sont fondées à soutenir que
l ’arrêt de 1716 a préjugé p o u r, et non contr’elles.
Enfm M . A uroux qui avoit cité M . Menudel l’apporte
son avis, dans lequel cet auteur après avoir dit qu’on
reçoit le préciput dans le contrat de mariage des filles
instituées lieritieres à cette condition, conseille de mettre
dans le contrat que les père et mère ont doté la fille
de la somme de.... h la charge de venir à la succession
en la rapportant, et qu’où elle fourniroit débat contre
ledit préciput, ils déclarent qu’ils apanent ladite fille h
«
«
«
«
«
\
�( 3 0
la somme d e ....... parce qu’en mettant simplement la
clause qu’ils instituent ladite fille sous ledit préciput,
elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée, à défaut d’exé
cution de ladite clause , qui sonne toutes fois en une
institution conditionnelle, et que les mots qui seroient
dans le contrat, sans lequel préciput les père et mère
l ’auroient apanée, ne seroient pas un apanage form el,
mais plutôt une simple én'oncintion du dessein d’apaner,
lequel n’étant pas diserlement expliqué , ne l’empê
che roi t pas de venir à une succession ab intestat des
père et m ère, en rapportant. Laquelle objection n’est
pourtant pas considérable , parce que le mot de dot
emporte quant à soi l’apanage, lequel est valable ah'qito
dato 2>cl promisso de pressenti.
Quoique l’avis de M . Menudel ne soit pas rédigé avec
toute la clarté qu’on pourroit désirer, on y voit que
.la solidité des stipulations par lesquelles on voudroit
assurer au fils un préciput dans le contrat de mariage
de ses sœurs , est subordonnée à la constitution d’une
dot de prœsenti. Les mots laquelle objection n'est pour
tant pas considérable, se rapportent aux difficultés que
la fille élèveroit, en alléguant qu’elle n’a pas été expres
sément apanée; ce q u i, suivant M . Menudel et même
suivant M . A u ro u x , peut être suppléé par une consti
tution à titre de dot.
L ’arrêt du 22 mai 17 16 , comme l’avis de M . Menudel,
ne peuvent être opposés, parce que les contrats de ma
riage des dames de Yaure et de Beauregard ne con
tiennent pas les deux clauses d’institution conditionnelle,
et stipulation de dot, tenant lieu de la portion hérédi
taire.
�( 33 )
faire. Les auteurs communs n’ont ni apané , ni eu
l’intention d’apaner leurs filles.
A u décès de la dame D um ont, ses filles ont été saisies
du tiers qui revenoit à chacune d’elles dans sa succession,
par la règle le mort saisit le vif. L e sieur Dumont père
n’a pu, postérieurement à ce décès , transmettre à André
Dumont la moitié de la terre de M on t, qui avoit appar
tenu à sa mère. La donation faite audit André Dumont
ne peut être validée par la faculté d’élire que les père
et mère s’étoient déférée mutuellement. Nul ne peut
faire par autrui ce qu’il ne lui est pas permis de faire
lui-même. Dès que la loi municipale défendoit impé
rieusement à la dame Dumont d’avantager son fils dans
un autre contrat de mariage que le sie n , le pouvoir
donné au mari est vicieux dans sa source : tout ce qui
a été fait en vertu de ce pouvoir est nul.
Dans nos mœurs , le droit d’élire a toujours été
regardé comme abusif ; il doit surtout être rejeté lors
qu’on ne l’a déféré que pour se procurer le moyen d’avan
tager une personne prohibée. Celui à qui ladite faculté
d’élire a été donnée ne pouvoit la recevoir , parce que
les articles 226 et 227 de la coutume de Bourbonnais,
défendent, durant le mariage, toute association, dona
tion ou autre contrat entre la femme et le mari, même
les donations mutuelles, s’ils ont des enfans.
Vainement les sieur et dame Ililliard disent-ils que
la faculté d’elire seroit n u lle, si elle étoit confé rée par
disposition directe, mais qu’elle peut valoir comme con
dition de l’institution des filles; qu’elle ne conféroit
E
�( 34 )
aucun avantage à l’époux survivant ; qu’ainsi elle n’étoit
pas contraire aux lois prohibitives d’avantages entre
époux.
3N’est-ce pas un avantage bien ré e l, et d’une grande
im portance, que celui qui met à la disposition d’un des
époux environ la moitié des biens de l’autre? D ’ailleurs
la loi n’a pas fait de distinction -, elle a prohibé toute
association, donation ou autre contrat entre époux,
même les dons mutuels : sa disposition doit être exécutée
par tous ceux qui étoient soumis à son empire.
Ce qui sera dit ci-après sur la question de savoir si
les stipulations prohibées peuvent valoir comme condi
tion d’une institution, s’appliquera à cette faculté d’élire
que les appelans vouloient en première instance faire
valoir comme mandat ou procuration; moyen qu’ils
ont abandonné, parce qu’on leur a observé que tout
.mandat expire à la mort du mandant, et que les morts ne
sauroient contracter, ni en personne, ni par procureur.
’ Il y avoit un autre vice dans la disposition de la
terre de M on t, et la faculté d’élire qui s’y rapportoit.
: Cette terre étoit un acquêt de communauté dont le
mari est seul maître, suivant l’article 136 de la même
coutume : les dispositions que faisoit la femme relative
ment à un bien sur lequel elle n’avoit pas de droit
acquis, étoient une usurpation du pouvoir que la loi
donne au mari seul sur les biens de la co m m u n a u té . O n
peut, disent les appelans, disposer d’un droit éventuel;
cela est vrai : mais la dame Duinont n’a pas disposé
'hypothétiquem ent; elle a donné, comme a elle appar-
�>/
. (
3
5
)
tenant, un bien qui étoit entre les mains de son mari.
-Aux textes les moins équivoques de la coutume, aux
suffrages de ses plus habiles interprètes, les sieur et
dame Hilliard opposent les notes manuscrites d’un ancien
avocat de M oulins; ils disent que ces notes ont été com
muniquées aux sieur et dame de la R oque, qui ne les
ont p oin t/ vues, et seroient hors d’état d’en vérifier
l’écriture. Nous avons fait connoître à quels dangers on
s’exposeroit si on vouloit asseoir des jugemens sur de
pareilles bases.
Les sieur et dame Hilliard ont encore cherché à tirer
avantage d’une consultation obtenue, d is e n t-ils , par
M . de Vaure l u i - m ô m e , de M M . B o iro t, Bergier et
D artis, sous la date du 12 décembre i 8 o 5 . Les appelans
assurent qu’ils ont copie de cette consultation, que cepen
dant ils ne tiennent pas du sieur de Vaure.
Ces jurisconsultes ont été d’avis, et c’est une erreur
échappée à des hommes très - éclairés, que le préciput
devoit être relâché à la demoiselle D um ont, en vertu
de l’institution de ses tantes ; ils ont aussi décidé qu’on
ne pouvoit regarder comme valable la faculté que les
père et mère s’étoient donnée, et au survivant d’eux,
par le contrat de la dame de V a u re, de disposer de la
totalité de la terre de M ont, au préjudice de l’institu
tion faite au profit de ladite dame, par égalité avec ses
frère et sœurs, soit parce que la coutume contenoit
des prohibitions particulières pour les dispositions des
pères et mères à leurs enfans, et pour les dispositions
entre ép ou x, soit parce que la terre de M ont étant un
E a
�, ( 36}
acquêt de communauté, la dame Pîtat donnoit ce qui
étoit sous la puissance du mari seul; qu’ainsi la repré
sentante d’André Dumont ne peut avoir la moitié de la
terre de M on t, qui a appartenu à la succession de la
dame Pitat, en vertu de la disposition faite en faveur
d’A ndré D u m o n t, par son contrat de mariage.
Enfin ils ont décidé que la somme de 6000 livres,
réservée pour acquisition de cens, et dont les premiers
juges ont mal à propos attribué la moitié à la demoiselle
D u m on t, ne pouvoit lui appartenu'.
Les sieur et dame Hilliard s’emparent de ce qui est
à leur avantage, dans cette consultation, et rejettent
tout ce qui est contraire à leurs intérêts.
En coutume d’A u v e r g n e , l’exclusion de la fille mariée
est de droit -, elle ne peut venir aux successions que par
un rappel formel dé ses père et mère : mais il n’en est
pas de même ën Boui’bonnais, où la fille a des droits
égaux à 'ceux de ses frères, dans la succession de ses
père et mère ; que pour être privée de ses droits, il
faut qu’on lui en ait assuré le prix de manière qu’elle
puisse gagner comme perdre à cet arrangement, suivant
les événemens auxquels sera exposée ensuite la fortune
de ceux dont elle auroit été instituée héritière : d’où
résulte la nécessité de faire, avec l’institution condition
n elle, une constitution de dot irrévocable, afin que si
la fille n’accfcpte pas la première, elle soit forclose par
la seconde.
�(
TRO ISIÈM E
37
),
PROPOSITION.
S i les conditions apposées à une institution sont
contraires aux lo is , Vinstitué peut profiter de
l ’institution sans exécuter la condition ; il peut
aussi renoncer a Vinstitution ; et la fille qui n a
pas été apanée, ou à laquelle il n a pas été f a it
une constitution dotale} telle quelle doit être pour
tenir lieu d’apanage, vient à la succession comme
héritière naturelle et légitime.
Pour tacher de persuader qu’André Dumont a pu
être avantagé par préciput, dans le contrat de mariage
de ses sœurs, de la moitié de la terre de M o n t, qui
appartenoit à sa m ère, parce que la destination de ce
bien , et le pouvoir d’élire donné au survivant des
époux , étoient des conditions de l’institution , les appelans exposent dans leur mémoire (page 10 et suivantes),
que la raison dit à qui veut l’entendre, qu’il est loisible
à celui qui exerce une libéralité, d’y apposer telles con
ditions qu’il juge convenables, pourvu qu’elles ne soient
contraires ni aux lois, ni aux mœurs; que c’est à celui
qui est l’objet de la libéralité, à l’accepter ou à y re
noncer; mais s’il l’accepte, il doit remplir les charges
et conditions qui y sont imposées ;
Qu’A uroux et Lebrun décident qu’on peut faire
l’équipollent d’une institution contractuelle , au profit
d’autres personnes que les mariés, en instituant la per_
�t 33 )
sonne mariée à la charge d’associer ses frères et sœurs
pour certaine quotité de l’institution ; ce qui vaut à leur
profit comme une condition de l’institution, parce que
l’association étant une charge de l’institution dont elle
fait partie, l’ institué est dans la nécessité, ou de renoncer
à l’institution, ou de consentir à l’association;
Que deux frères s’étant institués réciproquement dans
le contrat de mariage de l’un d’eux, celle faite en faveur
de celui qui ne se marioit pas , valoit comme condi
tion; que l’article 1121 du Code Napoléon a consacré
ces principes ; que cette disposition au profit d’un tiers
peut être révoquée par l ’instituant, qui n’est pas lié ,
mais le donataire ou l’institué ne peut se dégager qu’en
renonçant au bienfait ;
Que des conditions pouvant être apposées à une ins
titution , on ne voit pas ce qui pourroit faire obstacle à
ce qu’un institué fût tenu de souffrir le prélèvement d’un
précipu t, comme condition de son institution ; qu’un
instituant pouvant faire passer à des tiers une quotité de
succession, comme condition de l’institution faite au profit
de celui qui se m arie, on doit à plus forte raison décider
qu’une disposition au profit d’un tiers, qui n’a pour but
qu’une chose déterminée, peut valoir comme condition
d’une institution, suivant la maxime qui peut le plus
peut le moins ; qu’il y a plusieurs décisions d’avocats de
M ou lin s, sur un manuscrit de l’un d’e u x , et un arrêt
du 22 mai 17 16 , cité par A u ro u x, et dont les circons
tances sont développées dans ledit manuscrit ;
Que les contrats de mariage des filles des sieur et dame
Dumont contiennent une institution restreinte par la sti-
�( 39 )
pulation d’une réserve modifiée par plusieurs conditions
qu’il a plu aux instituans d’y apposer, tellement liées
avec l’institution , qu’on ne peut en supprimer une sans
anéantir, dans le vœu des instituans, l’institution ellemême •,
Que l’objection tirée par les dames de Vaure et de la
R oque, des articles 217 et 226 de la coutume, dont l’un
s’opposoit à la disposition faite au profit d’André Dum ont,
dans le contrat de mariage de ses sœurs, et l’autre à la
faculté d’élire, se détruit, en ne confondant pas les dis
positions principales et directes avec les dispositions rela
tives et conditionnelles; que l’institution faite par un père
en faveur de deux enfans , par le contrat de mariage de
l’un d’eu x , étoit nulle à l’égard de celui qui ne se marioit
p as , tandis que si l’institution n’étoit faite qu’en faveur
de celui qui se m arioit, à la charge d’associer son frère,
la disposition étoit valable au profit de ce dernier, comme
condition de l’institution faite à son frère; de m êm e, en
coutume de Bourbonnais, la disposition faite par des
époux pendant le m ariage, au profit du survivant, de
l’usufruit des biens du prédécédé, étoit n u lle , comme
contenant un avantage prohibé, tandis qu’elle a toujours
été considérée comme valide, lorsqu’elle se rattaclioit à
une institution de leurs enfans , et qu’elle en étoit la
condition ; ce qui est attesté par A u r o u x , sur les arti
cles 226 et 227 ; que c’est sur ces principes que repose
la consultation de M M . B oirot, Bergier et D artis, dont
les sieur et dame Hilliard argumentent longuement.
Nous n’avons omis aucunes des raisons par lesquelles
�( 4° )
les appelans veulent établir que la fille d’André Dumont
doit avoir, par préciput, la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame P itat, comme étant une
condition de l’institution de ses tantes.
En analisant ces raisons, on voit d’abord qu’à l’art. 308
de la loi municipale , qui défend toutes donations en
préciput, si ce n’est dans le contrat et en faveur de
l’enfant qui se m arie, les sieur et dame Hilliard n’en
opposent aucun autre duquel on puisse tirer des induc
tions contraires; mais ils disent que suivant M . A u ro u x,
dont l’avis est conforme à celui de Lebrun, on peut faire
indirectement, et par condition apposée à une institution,
des dispositions en faveur d’autres que les mariés ; qu’on
peut instituer celui qui se m arie, à la charge d’associer
telle ou telle personne, et donner l’usufruit au survivant
des é p o u x , en stipulant cette condition dans une insti
tution.
La première réflexion qui se présente est que M . A uroux
q u i, dans son commentaire sur les articles 219 et 224,
indique le moyen de faire l’équipollent d’une institution
contractuelle au profit d’un autre que les mariés, en ins
tituant la personne mariée à la charge d’associer l’autre,
ayant établi de la manière la plus positive, lorsqu’il traite
du préciput, qu’on ne peut le donner qu’à celui qui con
tracte mariage, on doit en conclure qu’il n’en est pas de
l’association, dont la coutume ne parle pas, comme du
préciput sur lequel elle a une disposition prohibitive trèsexpresse.
Dans les pays où l’association est en usage, elle a lieu
autant pour l’avantage de l’institué que pour celui de
l’associé.
�(4 0
l’associé. Ce dernier est retenu dans la maison; il aide à
cultiver les biens, à faire valoir les entreprises de com
merce. Les sieur et dame Hilliard ont cité un arrêt rap
porté par M. A u ro u x , qui confirma une institution réci
proque , faite par deux frères dans le contrat de mariage
de l’un d’eux ; mais ils se sont bien gardés d’ajouter que
M . Auroux donne pour motif que c’étoit une convention
par l’effet de laquelle les deux frères couroient même
chance, et dont le bénéfice dépendoit uniquement de la
survie.
Ces stipulations, qui peuvent tourner au profit de
l’institué, ne sauroient être comparées avec un don en
p r é c ip u t, qui a essentiellement pour objet de détruire
l’égalité voulue par la coutume à laquelle les parties
étoient soumises.
Quant à l’usufruit, les appelans ont cité le n°. 30 du
commentaire de M . A uroux , sur l’article 327 de la cou
tum e, où il dit que les conjoints père et mère, mariant
leurs enfans, peuvent convenir, en leur faisant des do
nations ou les instituant leurs héritiers, que lesdits enfans
laisseront jouir le survivant de leurs père et m è re , ainsi
qu’il est dit dans l’article 281 de la coutume de Paris,
qui s’observe en Bourbonnais, suivant M M . de Culant,
D uret et Semin : E o casu , dit M . de Culant, Jilius
recipt'oce censeiur usum Jructum douasse superstiti.
Il résulte de ce passage, que le conjoint survivant n’est
pas censé tenir l’usufruit de l’autre conjoint, auquel la
loi interdisoit cette libéralité - qu’ ü la reçoit p a r l ’e ffe t
du consentement de l’héritier institué, sans doute m a je u r ;
car M . A uroux ajoute, dans le nombre suivant, qu’il
F
�faut , pour la validité de cette convention, qu’elle soit
faite avec tous les enfans héritiers, à mesure qu’ils se
marient. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il s’agit de déroger
à une loi précise, il ne faut pas raisonner d’un cas à un
au tre, n’y ayant jamais mêmes circonstances et mêmes
motifs.
L ’arrêt de 1 7 1 6 , cité dans les prétendues notes de
M . Beraud, et rapporté par M . A uroux loin d’être
contraire aux sieur et dame de la R o qu e, confirme les
principes- sur lesquels ils se fondent, attendu , comme
nous l’avons déjà d it , qu’il n’adjugea le- préciput qu’à,
raison de ce qu’y ayant dans les contrats des dames
M aquin , institution conditionnelle et apanage form el,
il falloit qu’elles prissent l’institution, ou qu’elles fussent
forcloses.
. M al à propos les appelans o n t-ils invoqué la dispo
sition de l’article 1121 du Code N apoléon, qui permet
de stipuler au profit d’un tiers, lorsque telle est la con
dition d’une donation que l’on fait à un autre ; cet article
suppose que la stipulation a pour objet une chose qui
n’est défendue par aucune l o i , sans quoi il seroit en
contradiction avec l’article 900, qui répute non écrite
toute condition contraire aux lois, et avec l’article 1108 ,
qui v eu t, pour la validité d’une obligation, qu’elle ait
une cause licite. La même raison écarte l’allégation que
les contrats de mariage sont susceptibles de toutes con
ventions; celles qui tendent à violer la l o i , ne sont pas
plus permises dans les contrats de mariage que dans les
autres actes.
Les appelans auroient beaucoup mieux fait de garder
�( 43 )
le silence sur la consultation de M M . Boirot, Bergier et
Da rtis , dont ils se prévalent, quant au point qui leur
est favorable , et qu’ils rejettent dans tous les autres. S’il
faut croire, sur l’allégation des adversaires, que ces juris
consultes, décidant quatre questions, ont erré dans les
trois où ils ont contrarié les prétentions de la demoiselle
Dumont , elle ne peut exiger qu’on prenne leur avis
pour guide en jugeant l’autre question, qu’ils ont décidée
contre les sieur et dame de Vaure.
En Bourbonnais, le mot dotée n’étoit synonyme d’a\panée que lorsque les père et m ère, mariant leur fille,
lui av o ie n t , avec intention de l’exclure de leur succes
sion, constitué un objet déterminé dont elle ne pou voit
être privée par les événemens auxquels leur fortune
seroit exposée, et qui formoit ainsi lejprix de la renon
ciation tacite que la fille étoit présumée avoir faite aux
Buccessions des auteurs de ses jours. Les sieur et dame
Dumont n’ont fait ni voulu faire une constitution de
ce genre.
■Le contrat de ‘mariage de la dame de 'Vaure contient
la preuve que dans l’intention des instituans le mot
dot n’étoit pas synonyme à'apanage ; car ils ont cons
titué une dot, et ont dit qu’ëlle n’étoit pas un apanage;
qu’ils en auroient constitué une à ce titre, s’ils n’avoient
mieux aimé instituer la'future comme ils l’ont ifait.
Ce ne sont pas les mots, comme les appelans l’ont dit
eux-m êm es, qu’il faut considérer en pareil cas, mais
la chose qui a été réellement faite par les père et mère.
O n t-ils privé la fille de la qualité d’héritière, si elle
n’acceptoit'pas l’institution'? L ’o n t-ils alors qfïranchie
F 2
�C44)
des charges et des inquiétudes de l’hérédité? L u i ontils donné le prix de sa renonciation tacite, en lui assurant
une somme qu’elle conserverait indépendamment de tous
les événemens ? Ne lui on t-ils réservé aucun espoir
successif? On pourrait dire, quand ils n’auroient em
ployé ni le mot d o t, ni celui d'apanage, qu’il y a for
clusion. Si au contraire la fille a été retenue dans la
fam ille, et instituée héritière; si ce qui lui a été donné
ou promis n’étoit qu’un avancement d’hoirie qu’on l’a
obligée de l’apporter, et q u i, par conséquent , n’étoit
pas une récompense certaine, eussent-ils dit expressé
ment qu’ils ont doté et apané leur fille, elle ne serait
pas forclose.
Les. auteurs communs attachoient si peu au mot dot
l’idée présentée par celui d'apanage, qu’ils se sont servi
des mêmes expressions dans le contrat de mariage d’André
Dumont ; il y est dit : « En avancement d’h oirie, le
« sieur Dumont père « constitué et constitue en d o t,
« au sieur futur époux , la somme de 40000 livres, qui,
« avec celle de 10000 livres provenante de la réserve,
« font 5oooo livres; laquelle constitution dotale sera
« imputée, etc. » Les mots constitué en dot et consti
tution dotale, employés et même plus répétés dans le
contrat de mariage du frère, que dans celui des soeurs,
ne permettent pas de douter qu’on 11’y attachoit pas.,
dans la famille, le sens que les appelans voudraient lui
donner pour le rendre identique avec celui d'apanage..
Ce qui a été dit précédemment , répond aussi à l’ob
jection que les père et mère pouvant livrer leur fille
�à une forclusion absolue, ont p u , à plus forte raison,
ne la forclore qu’en partie , et l’obliger à respecter la
destination d’un objet particulier : 011 ne conçoit pas
trop comment, dans la même succession, une fille peut
être héritière en partie, et forclose pour une autre partie.
Mais les instituans n’auroient p u , suivant la loi qui les
régissoit, forclore la fille par leur simple volonté ; elle
étoit appelée, par cette lo i, à partager leur succession;
on ne pouvoit la priver des droits qu’elle y avoit, que
par l’espèce de composition à forfait, qui se trouve dans
la constitution d’une dot certaine et irrévocable, tenant
lieu de cc qu’elle auroit recueilli dans des successions
qui pou voient diminuer comme augmenter.
L ’adage qui peut le plus peut le m o in s, est ici inap
p licable, puisque les père et mère 11’ayant pas constitué
à leur fille une dot telle qu’il la falloit pour opérer la
forclusion, ils ne pouvoient la priver ni de la totalité,
ni de partie de leurs successions. Eussent-ils pu la livrer
à une forclusion absolue en l’apanant, cette circons
tance est indifférente, dès qu’ils ne l’ont pas apanée. Il
en est comme si un particulier, voulant gratifier son
am i, lui faisoit vente d’un bien sans stipulation de p rix;
l’acquéreur n’acquerroit aucun droit par un pareil contrat,
quoiqu’il fût certain que le vendeur auroit pu valablement (
lui faire une donation cent fois plus considérable. Tant
pis pour l’avantagé, quand celui qui vouloit le gratifier
a fait ce qu’il ne pouvoit pas faire, au lieu de faire ce
qui eût été valable.
Il est certain que la terre de M ont n’a été mise hors
de l’institution faite en faveur de la dame de Vaure ,,
�( 4 0
qu’èn ce sens, qu’elle pouvoit ne pas la trouver dans
l’hérédité : c’est le seul effet qu’étoit susceptible de pro
duire la longue stipulation insérée dans son contrat de
mariage. La réserve de cette terre rendoit les instituons
maîtres d’en disposer par acte valable ; et si la dame
D u mont eût été présente au contrat de mariage de son
'fils , et lui eût donné en préciput sa moitié de cette
te rre , la fille d’A ndré D u m ont, à laquelle on ne con
teste pas l’autre moitié donnée par le père, auroit aùssi
recueilli celle-oi.
Non-seulement le contrat de mariage de la dame de
V a ure ne l’a point privée de l’espérance d’avoir part à
cet immeuble ; elle pouvoit ’môme l’avoir en totalité, si
ses père et mère en disposoîent en sa faveu r, comme
ils s’en étoient réservé le droit. A défaut de disposition
valable, cette terre rentroit dans la masse de l’hérédité,
et toiis ceux qui y venoient avec un titre universel devoient la partager.
A l’allégation, quon peut fa ir e indirectement ce qui
est prohibé ouvertement, les sieur et dame de la Roque
ont opposé la maxime bien plus digne d’être consacrée
par la justice, que la condition contraire aux lois ou aux
bonnes mœurs, est réputée non écrite; qu’ainsi, celui
qui en a été grevé n’est pas tenu de l’exécuter. 'Ils ont
v. soutenu que la loi ordonnerait vainement, s’il étoit permis
de se soustraire à son empire par des voies tortueuses et
indirectes ; rque cette vérité étoit écrite dans les anciens
livres, comme elle l’est dans les articles 900 et 1174 du
Code Napoléon; enfin, qu’elle avoit été proclamée par
plusieurs arrêts solennels.
�( 47 )
Denizart, dans sa collection de jurisprudence, au mot
Dispositions conditionnelles, n°. 2 1 , en cite un rendu
en la grand’chambre du parlement de Paris, le 13 mai
1762. Il s’agissoit d’une institution d’héritier faite par le
sieur de V auban , en faveur de son n eveu , à la charge
de laisser à la veuve la jouissance de plusieurs terres
situées dans des coutumes qui prohiboient les avantages
entre époux. L ’institution fut maintenue , et l’héritier
déchargé de la condition. Cet arrêt rendu sur les con
clusions de M. Joly de Fleury, est aussi rapporté dans la
collection des décisions nouvelles, vulgairement appelée
Nouveau D enizart, au mot Avantage prohibé. On y voit
que la veuve faisoit valoir que la disposition devoit être
exécutée en tout son contenu; que l’héritier n’étant ins
titué que sous cette condition, ne pouvoit se dispenser
de l’accomplir ; qu’à la difficulté qui naissoit de la con
dition sous laquelle l’héritier éloit institué, on observoit
qu’elle devoit être regardée comme non écrite, puisqu’elle
étoit contraire à la prohibition expresse de la coutume:
et il fut ainsi jugé.
Par un autre arrêt du 2 avril 176 2 , rapporté dans
la môme collection, le parlement de P aris, dans le ressort
duquel avoient été. passés tous les contrats de mariage des
enfans des sieur et dame D u m ont, consacra les mêmes
principes, et jugea de plus que la prohibition d’avan
tager, dans les coutumes qui la contenoient, étoit absolue,
et pouvoit etre opposée par tous ceux qui y avoient
intérêt, sans examiner si elle avoit été introduite en leur
faveur ou non.
Il seroit trop long de rapporter l’espèce de cet arrêt ;
�54>
( 48 )
il suffit de remarquer qu’on opposoit aussi à. l’héritier
qu’il n’étoit pas recevable à attaquer la principale dispo
sition de l’acte dont il tiroit lui-même son droit à l’hé
rédité ; que cet acte étoit un tout dont on ne pouvoit
diviser les dispositions; il répondoit que les lois 14 , au
digeste D e cond. et déni. , et la loi 9 , §. 10, D e hœred.
inslituend. , décident qu’une condition nulle peut être
attaquée par le légataire, sans qu’il soit exposé à perdre
son legs. M . l’avocat général écarta les fins de non-rece
vo ir, et se fonda sur ce que l’article de la coutume étant
impératif, la prohibition étoit d’ordre public, et absolue;
qu’elle avoit été introduite par les lo is, de peur que les
conjoints ne se dépouillassent trop facilement par un
amour m utuel, et plus encore pour enlever une source
de division dans les mariages, empêcher le plus adroit,
le plus intéressé de tromper l’autre, le plus violent, le
plus emporté , de forcer l’autre à donner : et toutes les
fo is, disoit ce magistrat, que quelqu’un pourra établir
un droit, une qualité, une action, la justice doit saisir avec
empressement l’occasion de faire prévaloir sur la dispo
sition prohibée de l’homme, la disposition prohibitive
de la loi.
Hors d’état de citer aucune disposition de la coutume,
ni aucun préjugé favorable au système qu’ils voudroieut
faire adopter, les appelans s’emparent de quelques phrases
d’un discours de ce très-savant jurisconsulte, qui remplit
avec tant de distinction l’une des places les plus éminentes
de l’ordre judiciaire. Mais dans la cause où M. Merlin
portoit la parole, il s’agissoit d’une condition d’épouser
telle personne ; condition qui, à l’époque où elle avoit
été
�(49 )
é,té imposée n’étoit pas illicLle ; et ici la condition a pour
objet un don en p récip u t, que le texte le plus formel
de la loi municipale défendoit de donner à l’enfant qui
ne contractoit pas mariage. M . M erlin disoit que si la
condition dont il s’occupoit devoit être considérée comme
illicite, elle conduiroit à dire qu’il falloit regarder comme
nulle l’institution faite sous cette condition.
Un pareil résultat ne procureroit aucun avantage à
la demoiselle Dumont : les dames de Vaure et de la
Roque se trouveroient placées dans la même position
que si elles s’étoient mariées sans contrat de m ariage,
ou si leurs père et mère n’avoient pas été présens à
leur contrat ; alors elles i-ecueilleroient toujours le tiers
de tous les biens de la dame P itat, leur m ère, décédée
intestat. L ’arrêt du 22 nivôse an 9 , dont les adver
saires isolent un considérant, se rapporte aussi à une
condition qui n’étoit point illicite ; et s’il y est dit que
dans les actes entre-vifs, il faut respecter la volonté de
tous, ce ne peut être que relativement aux actes synallagmatiques, consentis par des personnes capables de conI tracter, et non pour ceux où une mineure a été, en fraude
de la l o i , grevée d’une condition à laquelle il lui étoit
impossible de donner un consentement valable.
Par une bizarrerie bien extraordinaire, tout ce qui
est dit dans cette partie du mémoire des appelons est
en contradiction avec ce qu’on lit à la page i 5 , où parlant
de l’arrêt de 1716 , rapporté par A u ro u x , qui valida une
disposition en p récip u t, apposée comme condition à
une institution d’héritier, dans un contrat où on avoit
en même temps apané une fille majeure, les appelans,
G
�C5o )
disent que si cette clause de préciput eût été contraire
il la lo i, ainsi que le porte un des considérans du ju
gement de Gannat, elle auroit été réputée non écrite,
nonobstant la menace de forclusion ; qu’il a toujoui-s été
de principe qu’une clause pénale ne pouvoit valider
une clause contraire à la l o i , parce qu’autrement on
pourroit se réserver les moyens de violer la loi.
Les appelans conviennent ic i, d’une manière bien
expresse, que si les conditions mises à l’institution de
la dame de Vaure étoient contraires à la lo i, elles sont
censées non écrites. Il ne sagit donc que d’examiner le
fait; et pour cela il suffit de lire le contrat du 19 no
vembre 1775. La dame D um ont, en avantageant son
fils de sa portion de l,à terre de M on t, en cas qu’elle
n ’ e n d i s p o s â t ,pas autrement, et donnant à son mari le
droit de. la lui transférer, violait ouvertement les articles
3 1 7 , 219 et 321 de la coutume sous l’empire de laquelle?
elle v iv o it, qui défendent aux pères et mères d’avantager
leurs enfans, si ce n’est par leur.propre contrat de mariage,
ou p<jr legs tenant lieu de portion héréditaire; l’art. 227,
qui ne permet point aux époux ayant enfans de se-faire,
aucun avantage, mêmepardonmutuel', durant le mariage;
l’article 136, qui l’endant le mari seul maître de la com
munauté , prive la femme du droit de disposer des biens
qui la composent.
L a condition.de respecter le préciput eût-elle été
obligatoire'pour les dames de Vaure et de la R o q u e ,elles peuvent s’en dégager en s’en tenant à la qualité
d’hériticres naturelles et légitimes. Lq coutume du Bour
bonnais, aïticle.223, dit que rhéritier institué. est libre
�( 5i )
de renoncer. M . A u ro u x, sur cet article, observé què
celui qui a été institué héritier par son contrat de mariage,
peut renoncer, si bon lui semble } à la successiori de
l’instituant, quand elle est échue, par hl raison qüe
l’institution contractuelle n’a été introduite qu’eii faveur
des mariés et de leurs descendans, et qu’il est librë à tui
chacun de renoncer à une-cliose introduite en sa faveur^
joint que l’héritier contractuel n’étbit pas en état d’ac
cepter la succession lors de l’institution, puisqu’elle ri’étôit
pas encore ouverte, et qu’il n’a contracté que sur Ici
faculté d’être héritier s’il le véüt.
T o u s les auteurs que les sieur et damé ïlilliard ont
cités comme disant que des associations et ddns d’üsufrilit
peuvent être maintenus, s’ils sont une condition de l’ins
titution , se fondent sur ce que ¡’institué ne pèiit s’àin
franchir dé la condition qti’en renonçant à l’iilstitutioü ;
d’où il suit qu’au moyéii de èetté réiidficiatiüiri, l’insti
tution et les conditions qui ÿ tint été fiiisës sënt éorfime
non avenues.
O r , si l’institution n’existoit Jjaà,- l^îs dattieè dé Vâuf-ë
et delà Roqué, contre lesquelles il a ’ÿ à aucune forclusion
légale ni conventionnelle, cdirïttié ôn' î’à:prouvé ci-devant,
recueilleroient le tiers dé touté là succession dé là dame
1 itat, leur mère et aïeule, èri qualité de ses héritières
naturelles ét légitimes : on rie saüroit donc les en priver.
A la page 33 de leur m ém oire, les appelait ont cru
faire une forte- objection, en disant qu’ori petit opposer
aux- dames de Vaure e t de la Roque Qu’elles se p r é s e n te n t
pour succéder'en vertu dé leur institution, ou q u ’e lle s
renoncent à c& titré -q u e d&És lé prerûier cas, leur titré
G 2
�( 52 )
étant indivisible, elles doivent l’exécuter intégralement;
que, dans le second cas, n’étant plus instituées, elles ne
sont que dotées, et dès-lors forcloses de d ro it, parce
qu’aux termes de l’art. 3o 5 , et suivant la jurisprudence la
plus constante, toute fille simplement dotée est par cela
même apanée ; d’où il résulte qu’elles ne peuvent venir
comme héritières ab intestat.
On peut répondre aux appelans : Ce dilemme, qui
renferme la quintessence de tous vos moyens, n’est qu’un
tissu d’erreurs.
i°. En nous présentant comme héritières instituées ,
nous ne serions pas obligées d’exécuter intégralement
le titre qui contient l’institution; nous en séparerions
la condition de souffrir le préciput, le don fait à André
Dumont dans le contrat de mariage de ses sœurs, étant
prohibe par la loi qui nous régissoit. Nous profiterions
de l’institution comme s’il n’existoit pas de condition,
celles de ce genre étant réputées non écrites. Si ce qui
est prohibé ne pou voit pas être séparé de ce qui est permis,
on violerait les lois quand on voudrait.
Lorsqu’il est question d’une stipulation faite dans un
acte passé entre majeurs et usans de leurs droits, cha
cune des parties étant aussi coupable que, l’autre de la
contravention à la lo i, on annulle purement et simple
ment la convention. Mais ce qui a été stipulé dans le
contrat de mariage des dames de Vaure et de Beauregard,
n’est pas leur ouvrage : âgées alors d’environ dix-sept
ans, soumises à la volonté des auteurs de leurs jours,
qui dictoient la disposition, elles n’ont pu ni consentir
ni la combattre. Ce sont leurs père et mère qui ont
�( 53 )
cherché à se soustraire à la prohibition ; et malgré la
faveur que les appelans veulent qu’on accorde a ce qui
est fait indirectement, la prohibition doit produire son
effet.
2°. D e ce que les dames de Vaure et de Beauregard
ne seroient plus héritières instituées , en renonçant a
cette qualité , il ne s’ensuivroit pas qu’elles ne fussent
plus héritières : leur position seroit la même que si lors
de leur établissement il n’avoit pas été passé de contrat,
ou si elles s’étoient mariées avec les droits qu’elles
pourroient avoir. Alors la fille vient aux successions
comme héritière naturelle et légitime , et y prend sa
portion de tout ce dont les auteurs de' ses jours n’ont
pas valablement disposé ; filins aut Jilia ergo hcercs.
3 °. Ni l’article de la coutume que les sieur et dame
Hilliard ont cité,, ni la jurisprudence, ne disent point
que la fille simplement dotée est par cela même apanée;
ils ne regardent comme apanage que la dot qui a été
constituée avec intention qu’elle fût le prix de la portion
héréditaire ; prix qui doit être certain, et hors des at
teintes de tous les événemens auxquels est restée exposée
la fortune des père et mère. On a vu que celle des dames
de Vaure et de Beauregard n’étoit pas de ce genre.
Dans tous les raisonnemens qui se rattachent à leur
dilem m e, les adversaires ont oublié que les dames de
Vaure et de Beauregard étoient héritières naturelles et
légitimes des sieur et dame Dumont ; elles doivent, à
ce titre recueillir les mêmes avantages qu’avec celui
d’héritières instituées. Espérant arriver plutôt à leur but,
elles out réclam é, comme héritières naturelles et légi-
�Ç54 )
times, le tiers de tous les biens généralement quelconques,
appartenons à la dame Pitat, leur m ère, qui n’en a fait
aucune disposition valable : et dans le cas où il y auroit
quelque difficulté ( ce qui n’est pas vraisemblable ) à
leur adjuger ledit tiers de tous les biens de la dame
P itat, en leur qualité d’héritières naturelles, elles de
mandent qu’il leur soit adjugé en vertu de l’institution
contractuelle faite à leur profit par ladite dame Pitat.
On a démontré jusqu’à l’évidence que la constitution
qui leur a été faite en avancement d’h o irie, n’est point
uue dot tenant lieu d’apanage ; que leurs père et mère
n’ont pas eu l’intention de les apaner, et qu’ils n’auroient
pu le faire de cette manière : ainsi rien ne s’oppose à
ce qu’elles recueillent, comme héritières naturelles et lé
gitimes , le tiers de tous les biens de leur m ère, décédée
intestat. S’il ne leur étoit possible d’obtenir le tiers
desdits biens, qu’en qualité d’héritières contractuelles,
alors, mais seulement alors, il faudroit se fixer sur reflet
que doivent produire les stipulations contenues dans leurs
contrats de m ariage, et examiner si nonobstant la prohi
bition expresse de la coutume, la fille d’André Dumont
doit obtenir en préciput la moitié de la terre de M ont,
appartenante à la dame Pitat, qui n’en avoit pas disposé
valablement.
Que les sieur et dame Hilliard cessent de se persuader
qu’en répétant sans cesse qu’il faut que les dames de
Vaure et de la Roque soient, ou instituées, ou apanées,
on finira par les en croire sur leur parole. Elles ont
un double titre d’héritières, et peuvent préférer celui
qui leur est le plus avantageux, suivant la maxime
�( 55)
Quoties dupîici jure defertur hcereditas sublato novt
super est vêtus. La nature et la loi appellent tous le;
enfans à recueillir également les successions des auteurs
de leurs jours, lorsque les actes par lesquels on a voulu
donner atteinte à ce droit ne sont pas valables ; ou lorsque
l’enfant peut venir auxdites successions, sans se prévaloir
de ces actes, il est dégagé de toutes les charges et con
ditions qu’on a voulu lui imposer.
QUATRIÈME
PROPOSITION.
L e s dames de Vaure et de la Roque n o n t f a i t
aucun acte qui leur ait im prim é la qua lité (th é -
ritières instituées , ou dont on puisse induire
quelles se sont considérées comme apanées.
Ne pouvant se dissimuler que si les dames de Vaure
et de la Roque appréhendent la succession de la dame
P ita t, comme héritières naturelles et légitim es, il faut
regarder comme non avenues l’institution, et la condi
tion de souffrir le préciput, les appelans prétendent que.
les dames de Vaure et de la Roque ont exécuté san
reserve les contrats de mariage dont il s’agit; que pai
là; elles se sont rendues non recevables à les attaquer:
ils font: résulter cette exécution de ce qu’elles ont reçu
le tout , ou partie de leurs dots, du vivant de leurs
père et m ère, de ce que l’une:d’elles a reçu annuelle
ment depuis le décès de sa mère les intérêts de ce qui
lui était d û , et enfin de ce que Tune: et l’autre ont
t
> r.
�yÇ'-'
;
.
(-5 6 )
laissé jouir le survivant des père et mère des biens (lu
prédécédé.
Gene peut être, disent-ils, en qualité d’héritières na
turelles qu’elles ont reçu leurs constitutions de d ot; car
le droit de l’héritier naturel ne peut s’ouvrir qu’au
décès de la personne à qui l’on succède. Ce ne peut
être en qualité de filles mariées et dotées, car elles
auroient été forcloses et réduites à un apanage. Ayant
reçu en qualité d’héritières instituées, et l’institution
étant indivisible, elles n’ont pu la recueillir sans se
soumettre à relâcher à l’héritière de leur frère le préciput qui en est une charge.
.E lles ont aussi laissé jouir leur p ère, pendant plus
de vingt ans, de la succession de leur m ère, en vertu
de la condition qui avoit été apposée à leur institu
tion. La crainte révérencielle qu’elles allèguent est un
m otif chimérique; elles ne persuaderont à personne que
par le seul eifet de cette crainte elles aient ainsi laissé
jouir leur père d’une succession opulente, qu’elles pouvoient appréhender depuis plus de vingt ans, lorsqu’on
considérera surtout que depuis 1789, le sieur Dumont père
ne pouvoit plus disposer que d’une somme de iô o o o f.;
qu’il est d’ailleurs plus naturel d’admettre qu’elles ont
laissé jouir le père de lu succession de la dame P itat,
pour remplir l’obligation qui leur étoit imposée, comme
condition de l’institution, que de supposer qu’elles ont
agi^ainsi par le puéril motif d’une crainte révérencielle:
eussent-elles agi par cette crainte, elles ne pourroient
espérer d’être relevée de l’exécution de leurs contrats
de mariage, parce que l’article 1114 du Code Napo
léon
�Iéon consacre l’ancien principe, que la seule crainte révérencielle ne peut suffire pour fonder une action ; qu’il
y a parité çle raisons pour décider qu’elle ne peut jus
tifier une exception; que les lois romaines rejetoientla
crainte prétendue révérencielle , e t n’admettoient l’excep
tion de la crainte que lorsqu’elle étoit l’effet d’une vio
lence illicite, et contraire aux bonnes mœurs.
Nous avons rapporté très-fidèlement tout ce qui a
été dit par les adversaires pour fonder leur prétendue
fin de non - recevoir ; il sera facile d’anéantir ce fruit
d’une imagination féconde.
Il a été prouvé précédemment que lorsqu’un acte
contient des stipulations contraires aux lo is, on doit les
considérer comme non écrites, et exécuter l’acte comme
si elles n’existoient pas, n’y ayant à cet égard aucune
indivisibilité ; que si cette assertion pouvoit être con
tredite relativement aux actes passés entre majeurs, qui
étant tous deux coupables de la contravention à la lo i,
sont tenus de l’exécuter tel qu’il est, ou de consentira
son anéantissement total, il ne sauroit en être de même
d’une condition dont l’objet étoit prohibé , qui a ét<?
imposée à une mineure par ceux sous la puissance des
quels la nature et la loi l’avoient placée : ainsi les dames
de Vaure et de la Roque devant être dégagées de la
condition illicite qui leur a été imposée dans l ’institu
tion , leur droit n’en seroit pas moins certain quand
elles auroient exécuté sans réserve les contrats de ma
riage qu’on leur oppose.
Mais .nous allons démontrer que toutes choses sont
entières à leur égard.
H
�Il est bien constant qu’elles n’ont fait aucun acte dans
lequel elles aient pris la qualité d’héritières instituées.
Toutes les fois qu’on veut induire de quelques faits la
renonciation à un droit certain, tel que celui de renoncer,
il faut que lesdits faits soient tels qu’ils n’auroient pas eu
lie u , si ceux qui en sont les auteurs n’avoient été décidés
à prendre la qualité dont ils voudroient ensuite se dé
pouiller.
Ces principes sont v rais, même dans le cas où l’hé
ritier se seroit immiscé dans les biens de l’hérédité.
M . Lebrun, en son Traité des successions, liv. 3, chap. 8,
section 2 , rapporte ce que dit M. l’Epine de Grainville
à l’occasion d’un arrêt de 1724, qui jugea qu’ une dame
L eclerc, qu’on vouloit faire réputer héritière à cause
de diiFérens actes qu’elle paroissoit avoir faits en cette
qualité, avoit pu renoncer. Ce magistrat observe que
ledit arrêt sert à faire connoître qu’on ne doit se porter
qu’avec scrupule à déclarer héritier celui qui n’a pas
intérêt de l ’être ; que les actes qu’on peut lui opposer
ont souvent des motifs bien diiiérens, et que les seuls
qui doivent lui faire donner celte qualité sont ceux qui
établissent qu’il a voulu la prendre et s’en attribuer le
profit -, à quoi M . Lebrun ajoute qu’il suffit que l’on
puisse faire une chose en quelqu’autre qualité que celle
d’béritier, pour n’être pas réputé l’avoir faite en ladite
qualité d’héritier.
Les mêmes principes peuvent être invoqués par l’hé
ritier naturel et légitim e, exem pt, en cette qualité, de
toutes charges, lorsqu’on veut le faire déclarer héritier
contractuel pour l’obliger d’exécuter des conditions qui
lui ont été imposées en fraude de la loi.
�Il
ne résulte de la réception des sommes qui ont été
touchées par les dames de Vaure et de Beauregard, au
cune approbation de l’institution : ces sommes étoient la
représentation des alimens que les pères et mères doivent
à leurs enfans , comme ceux-ci en doivent à leurs pères
et mères lorsqu’ils sont dénués de biens. Ce qui avoit été
promis en avancement d’h oirie, n’avoit rien de commun
avec l’institution ; car on pouvoit instituer sans avance
ment d’hoirie, ou donner un avancement d’hoirie sans
institution. Ainsi ce qui a pu être reçu par les filles des
sieur et dame Duraont, en attendant l’ouverture de leurs
successions , ne les a point privées du droit d’examiner
dans la suite à quel titre elles dévoient appréhender lesdites successions.
L e second fa it, duquel on veut faire résulter l’appro
bation de l’institution, est la jouissance laissée au p è re ,
des biens de son épouse décédée.
A cet égard, les appelans ont trouvé commode de dis
simuler la réponse tranchante et décisive qui leur avoit
été faite en première instance. On leur avoit dit : Nos
père et mère étoient en communauté ; l’intérêt des dames
de Vaure et de la Roque étoit que cette communauté
ne fût pas rompue : or, la continuation n’auroit pu avoir
lie u , si les enfans avoient retiré des mains du sieur
Dumont les biens de leur m ère, dont les fruits appartenoient à la communauté. Ainsi la jouissance desdits
biens n’est pas restée au p è re , à cause de la condition
mise à l’institution , mais par un m otif bien différent,
et pour l’intérêt des héritiers de la dame Pitat.
N ’y eût-il pas eu de communauté, les d a m e s de Vaure
H ^
�( 60 )
et de la Roque n’auroient pas préjudicié à leurs droits,
en laissant jouir leur père de l’hérédité m aternelle,
pendant un temps moindre que celui qui est nécessaire
pour la prescription. Cette négligence à réclamer les
biens maternels est un fait négatif, qui ne sauroit être
considéré comme une approbation de l’institution.
Tous les jours on voit des pères privés de l’usufruit
par des secondes noces, sans que leurs enfans profitent
du bénéfice de la loi ; et jamais cependant on ne s’est
avisé de soutenir qu’ils dérogeassent à rien par ce silence,
ni même qu’ils fussent non recevables à former leur
demande en privation, après une longue jouissance du
père. L e silence des dames de Vaure et de la Roque
n’est donc ici qu’un effet de la révérence paternelle, et
de la crainte que la privation de cette jouissance n’en
gageât le sieur Dumont à frustrer ses filles de partie des
biens qu’elles espéroient trouver dans sa succession.
Les sieur et dame Hilliard ont opposé que depuis
1789 , le sieur Dumont n’avoit plus à sa disposition
que i 5ooofrancs ; que suivant le Code c iv il, la crainte
révérencielle ne pouvoit fonder une action; qu’il y avoit
même motif pour une exception ; que les lois romaines
n’acceptoient pas l’exception de la crainte révérencielle,
mais seulement celle qui étoit l’effet de la violence.
Relativement au ne jtejus J h cer et, il y a inexactitude
à dire que depuis 1789, le sieur D u m o n t ne pouvoit
disposer que de i 5ooo francs ; il pouvoit disposer de
» v in g t, la dame de la R oque n’étant pas saisie de la
somme à elle donnée dans un contrat qui n’étoit pas le
sien : mais ce n’est pas sur ces 20000 francs qu’il faut
�( 61 )
apprécier l’effet du mécontentement que ledit sieur D umont auroit pu concevoir. Il avoit la liberté de vendre ;
il pouvoit faire des dons, soit de la main à la main ,
soit par obligations simulées. Irrité contre sa fam ille,
son affection se seroit portée sur des étrangers.
L ’article 1114 du Code Napoléon, qui dit que la seule
crainte révérencielle ne peut pas fonder une action ,
fignifîe que celui qui voudroit revenir contre un acte,
sous prétexte qu’il ne l’a signé que par révérence pa
ternelle , ne seroit pas écouté, s’il n’alléguoit aucun
autre motif ; ce qui ne paroît pas comprendre le ne pejus
J 'a c e r e t , c’est-à-dire, une autre crainte bien plus forte,
celle d’être privé de la plus grande partie de l’h érédité,
sur laquelle on avoit droit de compter.
Si la crainte révérencielle ne peut suffire, suivant le
Code c iv il, pour fonder une action, il n’y a pas parité
de raisons pour l’exception ; c’est-à-dire, pour celui qui
étant maître d’exercer ou ne pas exercer un droit, sus
pend , par révérence paternelle, l’exercice de ce droit
durant le temps où il ne périclite pas. L ’enfant qui n’a
pas agi en pareil cas, a cédé à l’un des plus doux sentimens de la nature : il eût dû malgré la crainte révé
rencielle résister à son père, s’il avoit exigé un acte de
renonciation au droit qui lui étoit acquis; mais dès que
le droit ne se perdoit pas, on ne peut que louer l’enfant
d’avoir garde le silence. Elle seroit bien dure, la loi qui
placeroit une fille tendre et soumise dans l’alternative,
ou de priver ses enfans d’une partie de leur fortune,
ou de remplir d’amertume les derniers jours de celui à
qui elle doit la vie.
�( 62 )
La fin de n on -recevoir est le plus pitoyable des
moyens opposés par les appelans ; il seroit inapplicable
à la dame de la R o q u e, qui n’avoit que huit jours lors
qu’elle a perdu ;sa mère décédée avant l’accomplisse
ment de sa majorité. Les 6000 livres payées à compte,
sur ce qui lui a voit été constitué en avancement d’hoirie,
l’ont été au tuteur naturel de ladite dame de la Roque.
Par l’effet des nouvelles lois elle a atteint sa majorité
d ix -h u it mois avant la mort du sieur Dumont , son
aïeul ; mais dans cet intervalle il n’a été fait aucun acte
approbatif de l’institution; et aussitôt après la mort
dudit sieur Dumont elle a manifesté qu’elle entendoit
réclamer sa portion dans la moitié de la terre de M ont,
qui avoit appartenu à la dame Pitat; et par conséquent
ne pas approuver les actes qui.auraient dérogé à ce
droit.
CINQUIÈME
PROPOSITION.
Quand les termes des contrats de mariage des
dames de Vaure et de Beauregard , contien
draient constitution d’une dot, telle quelle doit
être pour former apanage ; quand il seroit dit
expressément que si elles contestoient le pre'ciput,
elles seroient réduites à cette d ot, il riy auroit
pas lieu de les déclarer déchues du bénéfice de
V institution, mais seulement dyordonner la dé
livrance dudit pre'ciput.
Les sieur et dame Ililliard ont souvent manifesté
�dans la cause un grand désir de dépouiller les dames
de Vaure et de la Roque de leurs droits héréditaires.
Espérant leur faire abandonner par la crainte une partie
de leur patrimoine, on a plusieurs fois fait circuler le
bruit qu’elles couroient risque d’être réduites à la somme
qui leur avoit été constituée en avancement d’hoirie ;
mais il faut rendre aux appelans la justice de dire qu’ils
ont eu la pudeur de ne pas prendre de conclusions à cet
égard devant les premiers juges. C’est une contradiction
dans leur conduite , de discuter en la cour d’appel un
objet qu’ils n’ont pas demandé en première instance.
Ils auroient fait vainement cette demande, même dans
le cas où les contrats de mariage dés daines de Vaure
et de Beauregard auroient contenu la stipulation la plus
expresse que si elles contestoient le préciput, la somme
constituée en avancement d’hoirie tiendroit lieu d’apa
nage. L e droit sacré qu’ont les enfans à la succession des
auteurs de leurs jou rs, eût fait regarder la peine comme
comminatoire : on eût ordonné la délivrance du pré
ciput, sans égard à la demande en déchéance de la por
tion héréditaire.
Les appelans nous ont eux-m êm es fourni la preuve
de cette assertion, à la page 14 de leur m ém oire, où
ils l'apportent, d’après M . Beraud, les circonstances de
l’arrêt de 17 16 , cité par M . A uroux. Les filles qui, lors
de cet arrêt, avoient contesté le préciput, étoient ma
jeures à l’époque de leur contrat de mariage; elles étoient
instituées héritières sous réserve de 30000 liv. données
en préciput à leur frère, et avec convention expresse
qu’où lesdites filles voudroient contester ledit préciput %
�'
( 64 )
elles demeureroient apanées à la somme de 24000 liv.
Cet apanage form el, et moyennant un prix certain, les
obligeoit à souffrir le p réciput, ou à se contenter de
l’apanage. L e premier tribunal ordonna que le fils prélèveroit ledit préciput.
Sur l’appel, l’intimé forma incidemment demande ten
dante à ce qu’en conséquence de la contestation du pré
cip u t, ses sœurs demeux-assent apanées, conformément à
la clause expresse stipulée dans leurs contrats de mariage;
mais l’arrêt qui intervint, en confirmant le préciput, mit
hors de cour sur la demande en déchance de la portion
héréditaire.
Les contrats de mariage des dames de Vaure et de
Beauregard les placent dans une position bien plus avan
tageuse que celle où se trouvoient celles qui donnèrent
lieu à l’arrêt de 1716. Les dames de Vaure et de Beauregard n’avoient que dix-sept ans lox’s de leurs contrats
de mariage, les autres étoient majeures; circonstance bien
importante. Il n’y a pas d’apanage, pas même de cons
titution de dot certaine, en faveur des dames de Vaure
et de Beauregard; les autres étoient expressément apanées
à une somme déterminée. Il étoit stipulé dans les contrats
de mariage de celles-ci que si elles contestoient le pré
ciput , elles demeureroient apanées à la somme qui leur
étoit constituée; tandis qu’au contraire les père et mère
des dames de Vaure et de Beauregard ont dit dans le
contx*at de la dame de Vaure qu’ils 11e l’avoient point
apanée ; et le sieur Dumont père a prévu , dans celui
d’ André D um ont, le cas où la dame de la Roque contesteroit le préciput. Loin de déclarer qu’en ce cas elle
ne
�( 65 )
ne pourroit exercer ses droits héréditaires, il s’est borné
à dire qu’elle devroit être privée de 5ooo, francs dont
il lui faisoit don sur sq réserve; et il n’a institué son fils
héritier que pour un tiers, conjointement avec ses sœurs :
de sorte que la demoiselle Dumont ne pouyroit réclame^
qu-delà du tiers des successions à partager, sans contre
venir de la manière la plus formelle au liti’e qui, lüi
assure en préciput la moitié de la terre de M ont, apparf
tenante au feu sieur Dum ont, son aïeul. Elle peut d’autant
moins contester les droits de ses cohéritières, qu’il n’çst
pus douteux que le feu sieur Dumont n’eût fait aucun
avantage audit André Dum ont, $’¡1 eût pensé que lui ou
ses représentai» essayeraient de dépouiller 1rs dames de
Voure et de Beeuregard d’une partie des droits coqsacrés
par leurs contrats de m ata ge, et jnême par celui dudit
André Dumont.
S I X I È M E
PROPOSITION.
L a disposition du jugement dont les sieur et danie
H illia rd sont appelans, doit être maintenue tant
en faveur des sieur et dame de Vaure, que des
sieur et dame de la Roque ; mais s 1il y avait
difficulté v is -à -v is des prem iers, il 11 en existe
aucune relativement aux sieur et dçime de la,
Roque.
$ ie n convaincus que les droits de la dame de V a u r e ,
leur t a n te , sont incontestables ? les sieur et dame de la
�(
66)
Roque ont toujours raisonné comme si le contrat de la
dame de Beauregard contenoit les mêmes stipulations.
Mais les clauses irritantes de celui de la darne de Vaure
n’ont pas été mises dans celui de la dame de Beauregard;
il n’y est fait nulle mention qu’en cas de non disposition
de la terre de M ont, elle appartiendra à André D um ont,
ni que l’institution des filles soit grevée de cette condition ;
il n’est pas exprim é, comme dans le premier, que sans
ces conditions l’institution n’auroit pas été faite, et qu’elle
eût été apanée : des clauses de cette nature ne peuvent
se suppléer. On dit bien que l’institution de la dame de
Beauregard est faite aux mêmes charges que celles expli
quées dans le contrat de la dame de V a u re, mais cela
ne peut s’entendre que de l’usufruit réservé en faveur du
survivant*, il n’est nullement parlé de conditions.
M al à propos les appelans prétendent-ils que le mot
charges comprend la réserve d’usufruit, et la destination
de la terre de Mont. Dans le contrat de la dame de V aure,
les instituans ont bien distingué ces deux choses. Lors
qu’ils stipulent la réserve d’usufruit, ils disent à la charge
de laisser jo u ir ; lorsqu’ils rappellent la destination de la
terre de M ont, ils se servent de ces mots, et à condition
de ladite disposition.
L e meilleur interprète des actes dont il s’agit étant sans
contredit le sieur Dumont père qui en est l’auteur, on
ne sauroit trop faire remarquer comment il les a entendus.
Toute sa pensée est dévoilée dans le contrat de mariage
d’André Dunoont : s’il lui donne le préciput, c’est, dit-il,
parce que la faculté d’en disposer lui a été attribuée par
la dame Pitat, son épouse, dans le contrat de mariage
�( 67 )
de la dame de Vaure. Il n’eût pas manqué d’exprimer
que cette faculté lui appartenoit eu vertu des contrats de
mariage de ses deux filles, s’ils eussent contenu les memes
stipulations.
Faisaut ensuite donation à la dame de la Roque d’une
somme de 5ooo f r ., il lui impose l’obligation de con
sentir audit préciput, et vent qu’elle soit privée de cette
somme de 5ooo francs , si elle ou ses père et mère con
treviennent à la disposition qu’il fait en faveur d’André
Dumout.
Eût-il pris tous ces moyens, s’il eût cru la dame de
la Roque obligée par le contrat de mariage de sa mère
à soutlrir ledit p r é c i p u t ? N ’auroit-il pas plutôt l’appelé
que c’étoit une condition de l’institution de la dame de
Beauregard, si vraiment son institution eût été condi
tionnelle ?
Ces réflexions sont simples •, elles portent la convic
tion dans tous les cœurs, malgré la subtilité avec laquelle
les appelans cherchent à les écarter : ils font des mots
dans ¿’esprit, un talisman qui suffit à tout. Mais qui
est-ce qui ignore qu’une condition à laquelle on voudroit
donner l’efTet de priver l’héritière instituée de sa portion
dans l’un des objets les plus considérables de la. sucession
qui lui étoit promise, devoit être exprimée avec d’autant
plus d’energie, qu’il est de principe que les peines ne
peuvent etre appliquées qu’à celui qui y a été positi
vement soumis?
La famille paternelle de la dame de la Roque a dû
penser que le contrat de-mariage de la dame de Be.'U regard seroit son unique loi ; elle étoit loin d’iniagiuer
la
;
*
�( 68 °
que dans ui^ coutume d’égalité , qui met les plus grands
obstacles aux dispositions en précipu t, André Dumont
en réclameroit un très - considérable , en vertu d’un
contrat de mariage qui n’étoit pas le sien, et dans lequel
il n’est pas même nommé.
S i , contre toute vraisemblance , la dame de Vaure
venoit à succomber, les sieur et dame de la Roque ont
lieu de croire que la disposition du jugement dont est
appel , qui a déclaré nulle la donation en préciput de
la terre de M o n t, pour la moitié provenante de la dame
Pitat , seroit toujours maintenue à leur égard. Ils ont
démontré précédemment que les mauvais raisonnement
sur lesquels les appèlans fondent une fin de non-recevoir
inadmissible, ne peuvent ‘s’appliquer ni à la dame de la
Roque , ni à la dame sa mère , à raison de minorité.
O n feroit des répétitions inutiles, si l’on suivoit les
sieur et dame Hilliard dans leur critique des motifs qui
ont déterminé les premiers juges, lorsqu’ils ont décidé,
sur les conclusions conformes du procureur im périal,
que la moitié de la terre de M on t, qui avoit appartenu
à la dame P itat, seroit partagée entre tous ses enfans ;
ils ont fait une juste application de la loi sous l’empire
de laquelle ils sont nés et ont toujours vécu. On iie sauroi't
douter qu’ils n’en aient saisi le véritable sens.
R É S U M É .
Il
résulte des propositions établies dans le present mé
m oire,
iu, Q u’André Dumont ne pouvoit recevoir aucun avan-
�( 69 )
tage de ses père et mère dans les contrats de mariage
des dames de Vaure et de Beauregard; que la dame Pitat
étant décédée avant le mariage dudit André D um on t,
il n’a pu recueillir dans tous les biens qui lui avoient
appartenu, qu’une portion égale à celle de ses sœurs.
2°. Que la disposition en préciput qui a été faite en
faveur du môme André D um ont, dans lé contrat de
mariage de la dame de V aure, étant prohibée formelle
ment par la coutume de Bourbonnais, à laquelle les
parties étoient soumises , doit être déclarée nulle et
comme non avenue.
3°. Qu’il en est de même de la faculté d’élire donnée
par ladite daine Dumoüt à son m ari, soit parce que ladite
coutume ne permettoit aucunes donations ni autres contrats
entre époux, soit parce que cette faculté d’élire ne pourroit être considérée que comme une procuration ou un
mandat; et il est de principe que tout pouvoir finit à la
mort de celui qui l’a donné.
4°. Que la disposition de la terre de M ont, ainsi que
la faculté d’élire, ne sauroiënt être maintenues, comme
étant une condition de l’institution faite dans le contrat
de mariage de la dame de V au re, attendu que les con
ditions' contraires aux lois ou aux mœurs sont réputées
non ecrites , et n’empêchent pas l’exécution de l’acte
dans lequel elles ont été mal A propos insérées ; qu’il
doit plus particulièrement en être ainsi, lorsque l’enfant
auquel la condition a été imposée, iie pouvoit, à cause
de sa minorité , donner aucun consentement qui lui fût
préjudiciable.
5°. Qu’il seroit également contraire aux lois et à la
�.
( 7° )
m orale, qu’on pût faire par voie indirecte ce qui est
expressément prohibé. Si quelques auteurs ont dit qu’en
contrat de mariage on pouvoit instituer avec l'obligation
d’associer une tierce personne à l’institution, et stipuler
un don d’usufruit en faveur de celui des instituans qui
su rvivrait, c’est parce que l’association peut procurer
des avantages à l’un comme à l’autre des associés; et ce
n’est pas comme donation, mais comme acte de reconnoissance de la part de l’institué, que la clause d’usufruit
obtient son effet. A u surplus, n’y ayant pas égalité de
raisons, on ne sauroit en induire qu’il est permis, malgré
la disposition de la loi m unicipale, et le sentiment de
ses plus célèbres commentateurs, de donner un préciput
à l’enfant qui ne contracte pas mariage.
6°. Que la coutume de Bourbonnais étant une coutume
d’égalité, les pères et mères ne pouvoient forclore leurs
filles de leurs successions, par le seul empire de leur
volonté : il falloit, pour lesapaner, qu’ils leur donnassent
un prix certain par la constitution d’une dot qui leur
fût irrévocablement acquise. Si quelques auteurs, et un
arrêt de 1716 , ont déclaré valable un préciput (donné au
fils, dans le contrat de mariage de ses sœurs, c'est parce
que leurs contrats contenoient deux stipulations bien dis
tinctes , institution sous la condition du préciput, et
apanage formel ; au lieu que les sieur et dame Dumont
n’ont rien constitué à leurs filles qu’en avancement d’hoirie,
et à la charge du rapport : ils ont expressément déclaré
dans leur contrat de mariage , et dans celui d’ André
D um ont, qu’ils n’avoient p a s entendu les apaner, ni les
priver, dans aucuu cas, du partage égal avec leur frère;
�( 71 )
et ce dernier n’ayant été lui-même institué que pour un
tiers , conjointement avec les dames de Vaure et de
Beauregard , n’a transmis à son héritière aucun titre
#en vertu duquel elle puisse prétendre au-delà de cette
quotité.
7°, Que les appelans peuvent d’autant moins tirer
avantage, relativement à la succession de la dame Pitat,
de la prétendue condition relative au préciput, que les
dames de Vaure et de la Roqu e ayant le droit de re
cueillir sa succession en qualité d’héritières naturelles et
légitimes, si cette condition étoit valide, elles s’en trouveroient dégagées en n’acceptant pas la qualité d’héritières
instituées, et s’en tenant à celle d’héritières naturelles
et légitimes.
8°. Que les dames de Vaure et de la R o q u e, qui
n’ont p ris , dans aucune circonstance , la qualité d’hé
ritières instituées, ne sauroient être privées du droit de
venir à la succession de la dame Pitat, comme ses héri
tières naturelles et légitim es, qu’autant qu’elles auroient
fait des actes incompatibles avec cette dernière qualité :
au lieu que les deux faits dont les appelans essayent de
tirer avantage, sont absolument insignifians ; la réception
du tout ou de partie de ce qui avoit été constitué en
avancement d’hoirie, n’ayant rien de commun avec l’ins
titution , et la jouissance laissée au père des biens de
son épouse étant une suite de la communauté conjugale,
dont la continuation ne pouvoit avoir lieu au profit des
etafans , qu’en par eux laissant cette jouissance à leur
père.
< 9°* Que nul des moyens opposés par les sieur et dame
�(7 0
Billiard, ne sont applicables à lu-daine de 1<>R oque, le
contrat do mariage de sa mère ne contenant aucune dis-'
position en faveur d’André D u m o n t, et à raison de
l e u r minorité , ni la dame de Beauregard, ni la dame de
la Roque n’ayant pu faire aucuns actes préjudiciables ;
do sorte que la disposition du jugement dont la demoiselle
Dumont est appelante, d o it, dans tous les ças, ■
être
confirmée vis-à-^vis des sieur et dame d elà Roque.
" P . 5 . Quoique dans.cette affaire il n’ait déjà été que
trop parlé de consultations, on ne peut se dispenser de
dire un mot sur celles que les appelans ont fait imprimer
à la suite de leur mémoire ; elles sont données par cinq
jurisconsultes , dont quatre avoient, avant le, commence
ment du procès, signé en faveur de mademoiselle Dumont
une autre, consultation, qui a été communiquée, et est
en quelque sorte une pièce du procès, puisque les tuteurs
l’ont présentée au conseil de fam ille, pour obtenir son
autorisation. Si la cour veut se la faire représenter, elle
remarquera qu’il existe une différence notable entre les
moyens sur lesquels la prétention de mademoiselle D u
mont étoit fondée dans la première consultation , et ceux
qui 6ont présentés dans le mémoire.
On soutenoit principalement dans la première consul?
tation , que la disposition faite par la dame P ilât, lors
du contrat de mariage de la dame de V n u re, devoit
valoir comme legs, ou disposition testamentaire en faveur
d’André Dumont ; mais les sieur et dame de la Roque
ayant démontré dans les écrits par eux signifiés en
première instance, que si la demoiselle Dumout obtenoit,
à
�(73 J
à titre de disposition testamentaire, la moitié de la terre
de M o n t, qui avoit appartenu à la dame P itat, elle ne
pourrait, suivant l’article 321 de la coutume à laquelle
les parties étoient soumises , prendre autre chose dans la
succession de ladite dame P ita t, parce que dans cette
coutume d’égalité, l’un des enfans ne peut être héritier
et légataire. Les appelans ont changé de langage, et mis
à la page 27 de leur m ém oire, qu’André Dumont ne
recueille point le préciput à titre de legs; qu'on ne lui
a donné ni légué la terre de M ont directement; qu’il ne
la recueille que par l’effet de la condition imposée à l’ins
titution des iilles. Ainsi la première consultation, et celle.'
qui ont a p p r o u v é le m é m o i r e , n ’ éta nt pas appuyées SUl’
les mêmes hases , il est probable que les avocats qui les
ont signées n’avoient pas suffisamment examiné.
D ’ailleurs, les unes et ¡les autres .paraissent données
sur un extrait du contrat Ide mariage de la dame de
V au re; extrait dans lequel a< été-«omise la clause qui
Pobligeoit au rapport de tout ce qui lui étoit promis
par ses père et mère. Cette clause formant la preuve
la moins équivoque que la dame de Vaure n’avoit pas
été d otée, dans le sens qui rend ce mot synonyme
d ’apanée, celte omission a pu induire en erreur les juris
consultes qui ont signé toutes lesdites consultations.
Les sieur et daine de la Roque auraient *pu en faire
imprimer un très-grand nombre.;■
-mais ;ils n’ont-pas cru
devoir faire usage de pareilles armes: ils citeront néan
moins des suffrages dont on doit faire d’autant plus do
cas que ce ne sont pas eux qui les ont provoqués.
E u l’i i n - 6 , lo feu sieur D u m o n t voula nt savoir quel
• IC
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'J '
�( 74 )
effet produiroient les lois nouvelles sur les dispositions
par lui faites, et etre instruit de celles qui lui étoient
encore,permises, lit faire un mémoire à consulter, qui fut
envoyé avec les copies des’contrats de mai'iage de ses trois
enfans, à un jurisconsulte très-distingué, alors membre du
conseil des anciens, et aujourd’hui du sénat. Ce juriscon
sulte s’environna des lumières de plusieurs membres des
conseils, qui s’étoient spécialement occupés des lois rela
tives aux successions. Parmi les questions proposées par
le feu sieur D um ont, étoit celle qui est l’objet du procès.
Dans la réponse qu’il reçut, il est dit que l’héritière
d’André Dumont ne peut à aucun titre recueillir la
moitié de la terre de M o n t, qui avoit appartenu à sa
mère; que les filles des sieur et dame Dumont, qui,
étant héritières naturelles et légitim es, n’ont pas même
besoin
de se prévaloir de l’institution faite en leur
faveur dans leurs contrats de mariage, doivent partager
cette moitié de ladite terre.
Après le décès du sieur D um on t, cette consultation
a été trouvée sous les scellés, et fait partie des papiers
de sa succession. Les sieur et dame de la Roque l’ont
citée dans les écritures par eux signifiées en première
instance. Si leur assertion eût été contredite, il eût été
facile au tribunal de se la faire représenter.
Les sieur et dame de la Roque éprouvent la plus
douce satisfaction h rappeler un autre fait cité dans la
même écriture, et dont ils ont la preuve. L ’ inventaire
du mobilier de M ont ayant donné aux héritiers l’occa
sion de manifester leurs prétentions respectives sur la
terre de M o n t, les appelans se firent autoriser par le
�(
)
conseil de famille à soutenir celles de mademoiselle Dumont, après .avoir obtenu la consultation dont nous avons
p a ilé, qu Jls communiquèrent aux dames de Vaure et
e la Roque. Elles s’étoient également consultées, et
voient une si grande confiance dans leurs moyens ,
q u e es n’hesiterent pas à proposer aux tuteurs de la
demoiselle Dumont de faire délibérer les jurisconsultes
qui avoient donné leur avis en sa fa ve u r, avec ceux
qui en avoient^ émis un contraire, et de se conformèr ‘â
«> ecision qui serait rendue par ce tribunal arbitral.
1 ous les risques d’un pareü parti S o ie n t poui les dames
f " Vaure c, de la R oql,e ; ^clles p W ô ic n t
r e v e n ir '
eontie ce. qL„ a u r o n s
mademoiselle
DiJniont « .r o * si «l]e m
voftlu. ^ ' C c a question',
apiès sa majorité ,‘ ce.qùe. les arbitres auraient'décidé.
Mais voulant 4 tout prix éviter un procès, et persuadées '
que ma emoiselle-Dumont ne reviendrait pas ccmtfç .ce
qui aurait clé jugff en- grand», .oonnoissdycc de icfu »
les dames 9 e V rnre « . de la Rbc/ue d é v o ie n t ardem
m en tq u e leiiï proposition -fût'accepté« : elle ne.'le fut
q u i! falloit plaider.
d* Ia ^
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“ ^ D u m o n t .é c r iiil...
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n’1n !!irn f°û'lu' i dCS întimées P^ouve que les Appëlansn . uioient ga, du les acctfseï' d'avidité', et d’avoii* voulu,
s le P'occs a ju g e r, firire*brillér leuV esprit aux dépans de la justice et de la l,„nne foi. Les efforts faits par
les dames de Vaure et a é 'V f c o q u c , pour éviter M
p io ccs, ont excédé les bornes de la prudence; et elles
evoitnt se croire exposees à aucuns reproches, en
�réclamant la foible portion qui leur revient d ans un
immeuble dont il n’a été fait, à leur préjudice, aucune
disposition valable. *
.
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Signé. L A R O Q U E
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TARDIF
/IfOif.
DE MONS
avoué licencié.
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. de la Cour d’a p p e l.— Juillet 1808.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De La Roque. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tardif
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse des sieur et dame de la Roque de Mons, intimés, au mémoire des sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
76 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1802
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1801
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53329/BCU_Factums_G1802.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53277/BCU_Factums_G1603.pdf
dbc8525fe9fbb08694164f53f67f527a
PDF Text
Text
PRECIS
COUR
D ’A P P E L
P O U R
SÉANTE
Sieur V i t a l D E D I E N N E , et dame J e a n n e - M a r i e
D E D O U H E T son épouse, appelans
C O N T R E
F
C
,
V E S C HA M B E S
veuve de Jacques
V a l a r c h e r , J e a n n e V A L A R C H E R , et A n
t o i n e F A U C O N son mari, intimés et incidemment
appelons.
rançoise
ette
contestation est la suite d ’une précédente, jugée par arrêt
de cette c o u r , du 2 thermidor an 8. Elle est tellem ent hérissée
d ’actes, q u ’on a cru ne pouvoir se dispenser d ’en présenter, avant
l ’audience, un aperçu.
François V esch a m b e s , bisaïeul des p a r t ie s , étoit propriétaire
d un domaine appelé de la B u tg e , de valeur aujourd’hui de plus
de 60000 francs.
A
A RIOM.
�'iV
f i )
II s’est m arié en prem ières noces avec M arie Jarrigo.
D e ce mariage sont issus quatre e n fa n s, Jacques, représenté
par les appelans, Jean, M arguerite i " . , et M arguerite 2'. du nom.
D e ces quatre enfans il en est décédé un avant le père, qui n ’en
rappelle en effet que trois dans le testament.
11 a contracté un second mariage avec Catherine C om bard.
D a n s ce contrat de mariage il com m ence par reconnoître à sa fu
ture épouse la som m e de 2700 francs; il réglé ensuite la légitimé
des enfans <ju premier lit. Il destine à Jacques Vescham bes une
som m e de 1000 f r . , à M arguerite 1” . du n o m , pareille somme
de 1000 f r a n c s , à M arguerite 2'. une somme de 700 fr a n c s , et
à Jean celle de 600 francs. 11 prévoit le cas où il décéderoit avant
son épouse; audit cas il lui assure et donne la jouissance d ’une
cham bre dans la m a i s o n , garnie de meubles nécessaires, et la
jouissance de la moitié de ses biens , tant qu ’elle demeurera en
•viduité. P ar une autre c la u s e , il donne par preciput et avantage
a u x enfa ns, est-il d i t , q u i proviendront du présent mariage, au
premier, soit f i l l e ou garçon, de son c h e f la somme deSooofrancs,
et a u x autres la somme de 1000 fra n cs. Il est enfin stipulé un gain
de survie réciproque de 100 francs.
D e ce mariage sont issus cinq enfans^ C ath erin e mariée au
sieur N a u f a r i, A n t o in e , P ierre , tf.onc*ww e , et M arguerite 5 '. du
nom mariée au sieur Roche.
L e 4 m ars 169G , testam ent par lequel il rappelle et confirm e
les destinations déjà faites aux enfans du prem ier lit dans son
second co n trat de m ariage.
Il lègue à A n to in e et C atherin e
•Veschambes , deux, des enfans du second lit , une som m e
de 1000 fr a n c s , et aux autres Irois 700 irancs seulem ent. V en an t
ensuite à l ’institution d ’h éritier, il déclare q u ’il nom m e pour son
héritière générale et universelle Catherine C om bard son épouse;
«V eut et entend que son héritière générale et uni verselle, C atherine
aC o m b a rd
son épouse, n o m m é e , soit privée de l’hérédité en cas
; m ais bien
sem b lera , sans
» q u ’elle vienne à convoler à de secondes noces
rendre
» l ’héréditc à tel de scs enfans que bon lui
qu ’elle
�YS
(3)
n soit tenue à aucune reddition de com pte; et quand la demoiselle
» Com bard viendroit à décéder sans avoir nom m é tel de leurs en» fans pour h éritier, veut et entend que ledit A n to in e Vescliam bes
» soit son vrai héritier qu ’il nom m e pour héritier des à présent
» audit cas et non autrement ; mais au choix et option de ladite
» C om b a rd d ’en nom m er un autre tel que bon lui s e m b le r a , ainsi
» que dit est. »
O n voit q u ’A n toin e n ’étoit no m m é qu’ à défaut d ’d c c tio n ; et la
veuve elle - mêm e n ’étoit tenue de remettre 1 hérédité, et d é lir e
entre les e n f a n s , q u ’en cas de convoi.
L e cas prévu n ’est point arrivé; Catherine C o m b a rd a demeuré
en viduité.
L ’institution faite en faveur de la veuve étoit susceptible d ’une
double réduction,
i°. L e s biens étant situés en pays de co u tu m e , elle ne pouvoit
avoir effet que pour le q u a r t, d ’après la disposition de la C o u tu m e ;
elle étoit de plus réductible à la portion d u moins prenant des
e n f a n s , d ’après l’édit des secondes noces.
F r ançois
cscham bes. est m o r j ^ I ç ^ f é v r i e g 1700.
Jacques V escfîam bes, enfant du premier li t , s’est marié en 1707
avec Geneviève la Vaissière.
En 1710 Catherine V esclia m b e s, une des filles du second l i t ,
a contracté mariage avec Jean N au fari, P ar leur contrat de mariage,
ladite C atherine C om b a rd l’a instituée son héritière générale et.
universelle, à la charge de payer aux autres enfans du second l i t ,
savoir, à A n to in e et Pierre V escliam bes, la somme de 200 fr a n c s ,
et aux autres la somme de 5 oo francs.
En 1738 Jacques V escliam bes, fils du premier li t , m arié avec
Geneviève la V a is s iè r e , fut prévenu d ’un homicide. Il fut obligé
de se réfugier en Espagne. 11 paroît qu ’il y eut une procédure cri
minelle instruite par contum ace, qui n ’existe plus. Il n ’en reste de
traces que dans un acte du 10 janvier 1757 , produit par les ad
versaires, par lequel le sieur de M o n t - Boissier, seigneur hautjusticier de la terre de C h e y la d e , fait remise et abandon à F ran A 2
�«
(4)
çoise Vescham bes et à Jacques V alarclier, du droit qu'il avoit aux
biens de Jacques V e s c h a m b e s , en conséquence du jugement de
m ort rendu par contum ace en la justice de C h e y la d e ; jugement
dont la date est en blanc.
1
Jacques Vescliam bes m ourut peu de temps après, dans les cinq
années de la contumace.
Il avoit eu de son mariage avec Geneviève la Vaissière six enf a n s , cinq filles, et un m â le , François 2*. du nom , qui n’ a pas
survécu long-temps à ses père et mère.
D e s cinq fille s, d e u x , Michelle et C a th e rin e, ont été mariées
du vivant du père avant le fatal.événem ent dont on vient de parler ;
par conséquent forcloses.
D e s autres trois fille s, l ’a în é e , Françoise V e s c lia m b e s , s’est
mariée avec Jacques V alarcher. C e sont les auteurs des intimés*
L a seconde, M arguerite , s’est m ariée en 1744 avec D a u sa t,
après la m o rt du père.
L a troisième, A n n e V e s c h a m b e s , s’est mariée avec D o uh et.
L e contrat de m ariage d ’A n n e V escham bes est du 16 juillet 1 7 4 4 :
elle étoit majeure.:.P.ar..ce contrat, de m j n a g n e l l e çlgnnajiouvoir
au mari de traiter, transiger, de ses biens d o ta u x , les partager,
mais non de vendre.
L e 20 du m êm e môis de juillet 1 7 4 4 > -^nnc V esch a m b es, sous
l ’autorisation de D o u h e t, son m a r i, et celui-ci en vertu dù pou
v o ir , est-il d i t , à lui donné par son contrat de m a riag e, cédèrent
et transportèrent à Françoise V e s ch a m b e s, et V alarcher son m a ri,
tous les droits que ladite Anfte V escham bes pouvoit avoir tant en
son nom que com m e héritière en partie de François 2”. du nom ,
son frère, dans les successions desdils Jacques V escliam bes et G e
neviève V aissières, et encore dans celle de François Vescham bes
1 " . du n o m , m oyenn an t la som m e de i 5 oo francs.
Peu après ce traité mourut A n to in e V escham bes, fils du second
lit de François.
A v a n t son décès il avoit fait deux dispositions en faveur de la
m êm e Françoise V esch a m bes, fem m e V alarch e r, qui s’etoit mise
à la tête de la maison.
�*
*î
( 5)
r P a r un premier acte du 14 ma* 1 7 4 4 > ^ lui fit donation de'tous
les droits, est-il d i t , à lui acquis tant par le testament de défunt
F ran çois VeScham bes, son père, qui l ’y n o m m a pour son héritier,
que par le décès de Catherine C o m b a r d , sa m è r e , et par s,es dis
positions portées dans le contrat de mariage de Catherine V e s •chambes, sœur du do nateur, avec d é fu n t N a u fa r i, nom s, raisons
«t actions rescindantes et rescisoires, sous la réserve d ’une somme
de io o o fr. à disposer.
P a r un second acte du 50 octobre 1 7
il disposa de cette
com m e d e 1000 fr . eneore en sa faveur.
A n n e V es clia m b e s, et D o u h e t son m a r i, qui avaient cédé leurs
droits par l’acte du s 5 juillet 1744> o n t eu f^e
mariage une
fille, Jeanne-M arie D o u h et , qui s’est m ariée avec V it a l de D ienne.
C e sont les appelans.
!
C e tte cession du 23 juillet 1744 ¿toit évidem m ent nulle. D o u h e t ,
par le contrat de m a riag e, avoit pouvoir de transiger, p artager,
m ais non de vendre.
En l’an 6 , ladite D o u h et et ledit V it a l de D ienne ont fait citer
au tribunal civil du C a n ta l ladite Françoise V esclia m b e s, et V a larcher son m a r i , en nullité de ladite cession, en partage de la
succession de Jacques V escliam bes et Geneviève la Vüi&sière, et
encore en partage de la succession d ’A n to in e V escliam bes 1 " . du
n o m , pour leur en être délaissé la portion qu ’A n n e V e s clia m b e s,
leur mère et b e lle -m è re , am endoit dans lesdites successions, soit
de son c h e t , soit du ch e f de François 2*. du n o m , son f r è r e ,
décédé ab intestat .
C o n tre la demande en partage des successions de Jacques V e s cham bes et Geneviève V aissiè re, les adversaires ont opposé la ces
sion. Ils ont soutenu que ce lle cession ne p o m o it être raisonnable
m ent attaquée, s o it d ’dprès le pouvoir donné par A n n e Vescliam bes,
alors m ajeure, à D ouhet son m a r i , dans son contrat de m ariage,
de traiter et transiger, soit d ’après le laps de temps qui s ’éloit
écoulé depuis la cession. Ils ont ajouté q u ’ils ne tenoient point
d ailleurs les biens co m m e héritiers de Jacques Vescliambes ; qu’ils
�H
C 6 )
r e jouissoient point à tilre d ’héritiers, q u ’ils jouissoient en vertu
île l’abandon fait en leur faveur, par le seigneur haut-justicier, de
l ’effet de la confiscation résultante du jugement rendu par contu~mace.
'•
Ces moyens ont été facilem ent écartés.
1
C on tre la demande en partage de la succession d ’A n to in e V e s ch am bes, ils ont rappelé le testament de François. Ils ont dit que
François par son testament avoit institué Catherine C o m b a rd
pour son héritière, et destiné à A n to in e une somme de 1000 francs;
q u ’A n to in e avoit ensuite disposé en leur fa v e u r , par les deux
donations ci-dessus, du m ontant de ladite destin ation, ensemble
de tous les droits à lui échus par le décès de Catherine C o m b a r d ,
desquels droits faisoit partie l’institution testamentaire faite en.
faveur de ladite C o m b a rd par François ; qu’A ntoine n ’avoit pas
d ’autres biens.
L e s sieur et dam e de D ien n e ont répondu que l’institution faite
en faveur de Catherine C o m b a rd étoit doublement réductible; que
la donation des droits échus par le décès de Catherine C o m b a rd
ne pouvoit dès-lors porter sur tous les biens de François.
A
quoi il a été répliqué par V escham bes et V alarch e r q u ’A n
toine leur ayant fait donation du m ontant de la destination à lui
faite par le testament du pcre , il étoit non-recevable, et les sieur
et dame de Dienne de son c h e f , à s’aider de la réduction, soit de
la C o u lu m e au quart, soit du retranchement de 1 edit des secondes
noces ; que si on prétcndoit q u ’ Antoine eût d ’autres biens on devoit
l ’établir. C e sont les propres termes de leur défense consignée dans
le jugement.
En cet état, jugement est intervenu au tribunal civil du Cantal
le iG ventôse an 8 , q u i , en ce qui concerne la demande en partage
de la succession de Jacques V escham bes et Geneviève la Vaissière,
a déclaré la cession du 35 juillet 1744 'm ile; a ordonné le partage
des biens dépendans de la succession de Jacques V escham bes et
Geneviève la V aissière, avec restitution des jouissances depuis lo
d é c è i , à l'exception des années pendant lesquelles avoit duré lo
�C i)
mariage dudit D oülict arec ladite A n n e V escliam bes, à la charge
de rapporter la som m e de i 5oo fr a n c s, prix du traité, perçue par
ledit Douliet.
- E t en ce qui concerne la succession d ’A n t o in e ;
»
A tten d u qu’ A n to in e ayant approuvé le testament de François
Vescfïam bes i*r. du n o m , en disposant de la destination à lu i
faite en faveur des défendeurs , les sieur et dame de D ten n e
ne pouvant s ’aider de son c h e f, n i de la réduction au quart>
d’ après la Coutum e, n i de la réduction a la part du\moins
prenant des en fa n s , d’ après l ’ édit des secondes noces ; que^ les
demandeurs n ’ont p oin t établi que ledit A n to in e eût d’ autres
b ie n s, que le montant de la destination à lu i fa ite par son p ère ,
e t les droits à lu i échus du c h e f de sa m ère , de tout quoi il a
d isp osé en faveur des défendeurs ; a débouté les sieur et dam e
de D ie n n e de leur demande.
: ,
Françoise V escham bes et V alarch er ont appelé de la première
partie du ju g e m e n t, qui ordonnoit le partage des successions des
dits Y esch am bes et la Vaissière.
y.
L e s sieur et dam e de D i e n n e , de leur c ô t é , se sont rendus in
cidem m ent a p p e la n s, en ce q u ’ils avoient été condamnés à rap
porter et faire compte de l ’entier prix du traité de 1744» prix
perçu par ledit D o u h e t , à la succession duquel ils avoient renoncé.
Ils auroient pu aussi interjeter a p p e l, en ce q u ’ils avoient été in
définiment déboutés de la demande en partage de la succession
d ’A n to in e à défaut d ’indication de biens , tandis qu ’ils auroient
d u etre déboutés seulement quant à présent. Ils crurent cet appel
sans objet. Ils étoient loin de prévoir la contestation qui leur a
été suscitée depuis.
Sur les appels re sp e ctifs, arrêt est intervenu le 2 thermidor
an 8 en cette c o u r , par l e q u e l,
E n ce qui louche l ’appel incident des sieur et dame de D ie n n e ,
attendu l’articulation fai le par 1rs adversaires , que lcsdits de
D ienne avoient fait acte d ’ héritier dudit D ouh et en s’emparant
du m o b ilie r , a o r d o n n é , avant faire d r o i t , la preuve de l'im
mixtion.
�X s )
Faisant droit sur l’appel principal de Françoise Vescham bes et
V a la r c h e r , a dit avoir été bien jugé.
Vescham bes et V alarch er se sont pourvus en la cour de cassa
tion contre la disposition de Jarret qui les blessoit, mais inuti
lem ent. *
N ’ayant pu réussir de ce c ô t é , ils ont cherché à venir à leur
bu t d ’une autre manière.
»
« Ils ont p r o d u it ,
i°. U n e r e n o n c ia tio n , ou actes énonciatifs d ’une renonciation
faite après la m ort de François Vescham bes par Catherine C o m b a r d , tant pour ses enfans que pour ceux du premier lit , à la
succession dudit V e s c h a m b e s , par acte reçu au greffe de la jus
tice de C h e y la d e , le 2 mars 1700;
20. U n bail à fe rm e consenti par Jacques V esch a m b e s, n onob
stant ladite renonciation du dom aine de la B u t g e , dépendant de
ladite succession, le i 5 avril 1700;
5% U n e ordonnance sur requête du juge de C h eylad e , du 10
avril 170 0 , qui autorise Jacques V escham bes à jouir des b i e n s ,
sans qu'on puisse en induire aucune qualité préjudiciable ;
4“. U n e vente d u 19 avril -1708, faite par ledit Jacques V e s
c h a m b e s, de trois septerées de terre dépendantes de la succession,
m o yenn an t la som m e de 560 fr. ;
5 °. U n acte du 22 décem bre 17 12 , reçu au g reffe de la m êm e
justice de C h e y la d e , par lequel Jacques V escham bes déclare ap
prouver la renonciation faite par Cath erin e C o m b a rd le 2 mars
170 0, pour, et en son nom ;
6°. U n e sentence du 14 m ars 1721 , rendue contre un créan
cier q u i , en conséquence desdites renonciations , congédie V e s
chambes des poursuites faites contre lui , s a u f au créancier scs
actions contre le curateur nom m é à la succession va ca n te , nomination qui est rappelée dans le vu de la sentence;
7 9. U n acte de ch eptel, du i ,r. octobre 1758, par lequel, après
la disparition de Jacques V escham bes , ses e n fa n s , et A n to in e
et Pierre V e s c h a m b e s , scs f r è r e s , fils du second U t, déclarent
avoir
�r 9 )
nvoir pris à li Ire de cheptel vingt-quatre va ch e s, et autres lêtes
de bestiaux pour garnir le d o m a in e;
8°. D es reçus de re n ie s , et extraits des rôles d'impositions
jusqu'en 1 7 ^ 7 ;
'
1
9°. U n e requête présentée par A n lo iiic Vcscîiàm bes a 1 éjection
de S a in t-F lo u r , le i 5 février 1 7 4 3 , ’daris laquelle il a exposé que
les percepteurs des années 1758 , 1759 et 174° »voient lait saisir
sur Jacques Y escham bes , faute de’ payement des impositions-,- les1
ir.uils pendans par r a c in e , desquels fruits ils s étoîent' rendus ad
judicataires co m m e des biens dudit Jacqües V e s c h a m b e s , ignôrant’
le testament de François Vescham bes , par lequel il avoit été ins-i
titué héritier ; q u ’il venoit de découvrir ce testament ; qu’étànt
héritier il ne pouvoit être adjudicataire de sa propre chose ; qu ’e n 1
¿onséquence il demandoit à être déchargé du prix de l ’ adjudica»-;
lion ; requête suivie de sentence adjudicative des coirclliSiohs, dû
22 du m êm e m o i s , rendue par d é f a u t , tant contre les consuls
que contre Jacques V escham bes.
De
tous ces actes
ils ont
.
conclu que Jacques
V esch a m
bes n^avoit absolument aucun droit sur les biens d e . Françoi'Sj
i ' \ du nom ; que , par s i renonciation et par lèi tèstament
de François , testament qui
avoit été- confirmé
par la sen
tence de l’élection de S a i n t - F l o u r , tous les biens etoient sur
la tête d 'A n to in e , dans la succession duquel A n to in e les sieur
et daine
de D ienne n ’avoienl rien
à réclamer , puisque , par
le m êm e jugement dont ils poursuivoient l’ex é cu tio n , ils avòient
été déboutés de leur deniimde en partage à cet égard ; que dèslors il ne d e v o i t e n t r e r dans le partage ordonné de la succes
sion de Jacques^STilnn>l w
que ses biens personnels , c ’est - à -
d ir e , les biens par lui a c q u is , consistant en un petit domaine
appelé de la C o s t e , et aucun de ceux ayant appartenu à F ran
çois. A insi
les biens
qui d ’abord ,
pouvoir s ’aider de la cession du
et
tant q u ’on
22 juillet
avoit
cru
1 7 4 4 , éloient sur
la tête de Jacques V e s c h a m b e s , se sont trouves (oui à coup
snr la tête d ’Antoine.
B
�i l
( 10 )
D e ces mêmes actes ils ont inféré de plus, i°. que Jacques V e s chambes ayant constam m ent joui, et n ’ayant joui que com m e créan
cier , sa succession étoit comptable de toutes les jouissances par
lui perçues jusqu’en 1738 , s a u f à lui faire raison de ses créances;
2°. Que la succession étoit pareillement comptable de la valeur
des fonds q u ’il avoit aliénés;
5 °* Q u ’elle étoit également com ptable du m o b ilie r , et notam
m ent du cheptel qu ’il avoit dissipé ; que le cheptel avoit été
tellement dissipé, qu ’après sa fuite ses enfans et ses frères avoient
été obligés de prendre d ’autres bestiaux à cheptel pour garnir
le dom aine.
L e s sieur et dam e de D ien n e
ont rép o n d u que la renon
ciation avoit été sans e f fe t , puisqu’il résultoit des pièces m êm es
produites ' par les adversaires q u e , nonobstant la renon ciation,
il avoit v e p d u , a f f e r m é , et constam ment joui.
Ils ont dit que quand on donneroit à la renonciation tout
son e f f e t , il auroit acquis un nouveau droit par les cessions ou
par
le décès ab intestat de presque tous les enfans
tant du
premier que du second lit.
Ils ont produit un acte du 21 octobre 1714» par lequel
M arguerite ,y e s c h a m b e s , autre fille du second l i t , en approu
vant , est-il d i t , tous actes c i - d e v a n t fa its.e t règlemens de ses
d r o its , cède et transporte audit Jacques V escham bes tous sesdits droits , parts et portions èsdites successions de ses défunts
père et mère et autres q u elco n q u e s, m o ye n n an t la somme de
750 fr. et une bourète de ¡vache; a u ( m oyen de quoi elle quitte
et renonce auxdites
successions > et ià toutes
autres
directes
et collatérales échues et à échoir g é y ^ ’alerrrrrtt quelconques.
E n cet é t a t , Jacques Y a la r ch e r est décédé. Françoise Vescham bes , sa femme , a repris l’instance. Jeanne V alarchcr et
A n to in e F a u c o n , ses gendre et fille , sont interven us, et ont
adhéré aux conclusions prises par leur beau-père et belle-mère.
Ils ont répondu à
l’acte du 21
octobre
1714 , produit par
les sieur et dam e de D i e n n e , que cet acte étoit nul
com m e
�<*>£■
( «
/
)
contenant une renonciation à des successions échues et à é c h o ir ,
uniquo pretio.
L a cause portée à l ’audience , jugement est intervenu le 8
prairial an 1 1 , contradictoire entre les p a rtie s, doht voici les1
principaux motifs et le dispositif.
‘
« A tten d u , est-il dit , enlr’autrés motifs , que Jacques Y e s » cliambes ayant renoncé à la succession de son père, ses en'ans
» ne peuvent pas prendre sa place et succéder à leur aïeul.
» ï°. Jacques V esch a m bes n ’étoit pas marie a 1 époque de la
» m o rt de son père ; il ne s’est m arié q u ’en 1 7 0 7 , et son père
» étoit m o rt avant le 2 mars 17 0 0 ; ses enfans n ’étoient à cette
» époque ni nés ni c o n ç u s , et la renonciation de Jacques V e s » chambes ayant un effet rétroactif au m om ent de la m ort de son
» père , ses enfans ne pouvoient pas venir à la succession de
» leur aieuli 20. L e s enfans de Jacques ne pourroient venir à
» la succession de leur aïeul que par représentation de leur
» père : il est de principe consacré par une jurisprudence irrévo» cable , qu ’on ne représente pas une personne vivante.
» A tten d u que par l ’acte du 21
octobre 1 7 1 4 » passé entre
» Jacques Vescham bes et Marguerite sa sœur , du second l i t ,
» par lequel ladite Marguerite a renoncé aux successions de ses
» père et mère , et autres collatérales échues et à échoir , au
» profit
de
Jacques ,
m o yenn an t 760 fr . et
une
bo u rète,
>> ladite M arguerite a déclaré q u ’elle avoit fait des actes , par
» lesquels elle avoit réglé ses droits successifs dans lesdites suc» cessions; que la
som m e de y 5 o fr,
» légitime portion dans
les biens de
étoit sa
juste part
sesdits père
et
et
mère ;
» pour avoir une parfaite connoissance de leur co n sista n ce , et
» qu ’en subrogant par le m êm e
acte sondit frère à tous ses
» droits , pour par lui en avoir son recours sur lesdites succcs» sions , ainsi qu’il aviseroit, elle ne lui a point cédé scs droits
» rescindans et rescisoires, d ’où il résulte q u ’il n ’a e u , en vertu
* de cet acte de 1 7 1 4 » d ’autres droits que celui de demander
B 2
�(' «
)) à la succession de son
père la
)
somme
de 7 5o
fr. , et la
» bourète.
» A tten d u
q u ’ayant renoncé à la succession de son père ,
v Jacquçs Vescham bes s.eroit aujourd’hui non-recevable à criti—
» quer le testament dè son p ère ; et que cette fin de non-rece» voir ne peut être valablement opposée à un héritier repré;> sentant ledit Jacques.
» L e tribunal déboute les sieur et dame de D ien n e de leur de» m ande tendante à .ce que la.succession de Jacques V escham bes
» soit composée d ’une portion des biens de François Y escham bes :
» ordonne que la succession de Jacques Y escham bes sera com posée,
» 1°. du quart des biens de M arie la Jarrige sa m è r e , et des inté-
» rets à compter de 1 7 5 8 , époque à laquelle Jacques V escham bes
« s’est absenté, et a cessé de jouir en com m un des biens de F ra n » cois son, père; 20. des biens par lui acquis,, des jouissances telles
» q u ’elles sont fixées par le jugement du C a n tal , du iG ventôse
» an 8 ; 5°. de la somme de 7^0 fr. et de la valeur d ’une bou» r è t e , pour le prix de la subrogation à lui faite par M arguerite
» V e s c h a m b e s , sa sœur du second l i t , par l’acte du 21 octobre
» 171/f, avec intérêts à. compter de 17 3 8 ; 4 “. des créances que
» les parties de D u bois établiront avoir été payées par Jacques
» en l’acquit de la succession de François V escham bes , avec les
» intérêts à compter de 1 7 5 8 , si mieux n ’aiment les parties de
» D u bois rendre compte des jouissances du domaine de la B u lg e ,
» à compter de 1701 , jour du bail fait par Jacques Vescham bes
a des bienç.fje spn( p è r e , à la. déduction des nourriture et entre» tien des frères et sœur dudit Jacques; auquel c a s , le tribunal
)i ordonne que les intérêts des créances ci-dessus entreront dans
» 1.) tuasse de la succession de Jacques V es ch a m b e s, à com pter
» de l’époque où elles ont été pavées par ceux de la créance de
» 760 fr. et dç la valeur de la bom ète , et entreront dans la
» n ia s s e , de ladite successiot) à çpmptv«’ du 21 octobre 1714 , et
» ceux de la portion de la dot do Marie la Jarrige revenant à
» Jacquts V e s c h a m b e s , à compter de la m ort de François V e s -
�» c h a m b c s , sa u f aux demandeurs à lenir compte aux défendeurs
» des créances que ceux-ci prétendent et justifieront avoir payées
» en l’acquit de Jacques V e s c h a m b e s, suivant la liquidation qui
» en sera faite par les experts qui seront nom m és , et c e , sur les
» pièces que les défendeurs leur remettront : sur le surplus des
» d e m a n d e s, m et les parties hors de c o u r , dépens compensés. »
L e s sieur et dam e de D ienne ont interjeté appel de ce juge
m ent par acte du 6 germinal. L a veuve V alarcher s ’est rendue
aussi appelante par acte du 14 du m êm e mois , en ce que toutes
les conclusions par elle prises ne lui avoient pas été adjugées.
P endant que les parties étoient ainsi en instance au tribunal
de M u r â t , pour fixer la consistance de la succession de Jacques
V e s c h a m b e s , dont le partage a été ordonné par l’arrêt de celle
c o u r , du 2 thermidor an 8 , confirm atif à cet égard du jugement
de S a in t-F lo u r,
elles exécutoient l’autre disposition du même
a rrê t, q u i , avant faire droit sur l'appel incident interjeté p a r le s
sieur et dam e de D ien n e du jugement de S a in t-F lo u r, en ce que
par ce jugement ils avoient été condamnés à rembourser la somme
de i 5 oo f r . , prix du tra ité , nonobstant la renonciation faite à
la succession de D o u h e t , avoit ordonné une enquête sur le fait
d ’imm ixtion. 11 a été procédé de part et d ’autre devant le tri
bunal de M u r â t , com m is à cet e f f e t , à l’enquête et contreenquête.
L a cour a ainsi à statuer sur trois appels:
i°. Sur cet appel in cid e n t;
2°. Sur le nouvel appel interjeté par les sieur et dame de D ienne
du jugement de M u r â t , dont on vient de rendre co m p te;
E l sur l’appel incident de ce m êm e ju g e m e n t, interjeté par la
veuve V alarcher.
L e lout a été joint par arrêt du oo germinal dernier.
On ne s’occupera point ici du premier de ces trois appels; il
suffira de discuter à l’audience le mérite des enquêtes.
O n ne s’occupera que de l’appel respectivement interjeté par les
pnrlies du jugement de M urut , cl on ne proposera m êm e que
quelques réflexions.
�■ l*
( H
)
Depuis leur appel, les sieur et dame de D ie n n e , par la com
munication q u ’ils ont prise des pièces des adversaires, et par la
recherche des actes énoncés dans ces pièces , ont eu connoissance,
i°. D ’un acte passé entre Jacques V escham bes et Catherine
C o m b a rd le 3 mars 1710. Par cet acte , Catherine C o m b a r d ,
tant en son nom propre et privé que com m e m ère pieuse de ses
e n fa n s, et dudit François V e s c h a m b e s , a subrogé ledit Jacques
Vescham bes aux droits et hypothèques, part et portion que sesdits
enfans pouvoient prétendre sur la succession de leurdit défunt
p ère, soit par la destination portée au contrat de mariage de leur
feu père avec ladite C o m b a r d , qu’ autrem ent ; sa vo ir, pour C a th e
rine V e s c h a m b e s , fille a în é e, la som m e de 800 f r a n c s , et en.
p ayem ent d ’ic e lle , la maison , jardin et hérial , quatre brebis
et quelques m eub les; pour M arguerite et Françoise V e s ch a m b e s,
la somme de 600 fr. ch a cu n e ; et pour A n to in e et P ie r re , celle
de 55 o fr. chacun. L ad ite C o m b a rd , traitant ensuite de ses
droits personnels, cède et transporte audit Vescham bes tous ses
d ro its, est-il d i t , actions e t prétentions qu*elle a par préférence
sur les biens de Vescham bes son m ari, en quoi qu'ils consis
tent ou puissent co n sister, e t , par e x p r è s , le m ontan t de ses
conventions matrimoniales rappelées dans l’ acte , m o yen n an t la
som m e de 2700 fr. , dont partie est payée co m p ta n t, et le surplus
stipulé payable à terme. C e t acte a été découvert depuis l’appel'.
20. D u contrat de C atherine V esch a m bes l’alnée des enfans
du second l i t , du 14 mars 1 7 1 0 , par lequel elle se constitue par
exprès la maison , jardin et hérial à elle délaissés par le précédent
acte ; ce qui est de sa part une approbation dudit acte.
5°. D ’ un acte du 4 juin 1744* P ar lequel ladite Catherine V e s
chambes , fem m e N a u fa r y , alors v e u v e , cède et transporte à
Jacques V a la r c h e r , mari de Françoise Veschambes , c e qui pouvoit
lui rester du com m e héritière contractuelle de ladite Catherine
C o m b a r d , des causes du traité dudit jour 5 mars 1 7 1 0 , en ca-?
pilai ou intérêts , m oyenn an t la somme de 2000 fr,
�t)
( i5 )
4°. D ’un acte du i 5 février 1745 en Ire M arguerite Y e sclia m b e s,
qui avoit cédé ses droits à Jacques V e s ch a m b e s, par l ’acte du 21
octobre 1 714 rappelé ci-dessus, d ’une p a r t , et Valarclier d ’autre
p a r t , par lequel les parties , est-il d i t , étant venues à compte des
causes dudit tra ité , il s’est trouvé resté dû à ladite Y e s c lia m b e s ,
en capital ou intérêts, la somme de 749 fr* sur laquelle M arguerite
Vescham bes fait remise de celle de 124 f r . , et Y alarclier paye ou
s ’oblige de payer le surplus.
T e l est l’état de la cause.
Si le jugem ent de Saint - F l o u r , qui n ’ a point été attaqué
en cette p a r tie , avoit déclaré les sieur et dame de D i e n n e , à
défaut
d ’indication d ’autres b i e n s , no n -re ce va b le s
seulement
quant à présent dans leur demande en partage de la succes
sion d 'A n to in e , la question desavoir si les biens é to ien tsu rla tête de
Jacques ou d ’A n to in e seroit oiseuse ; ce qu ’ils n ’auroient pris dans
la succession de Jacques, ils l’auroient pris dans celle d ’A n t o in e ,
sa u f le prélèvement en faveur de V escham bes et V alarcher des
deux donations, de la destination paternelle, et des droits échus
de la m è r e , consistant pareillement dans la destination faite par
celle-ci.
Mais] le jugement les a déclarés indéfiniment non-recevables ,
et les adversaires se prévalent de cette disposition.
A v a n t , tout étoit à Ja cq u e s, et rien à A n t o i n e ; aujourd’hui
tout est à A n t o in e , et rien à Jacques.
L e s sieur et dame de D ien n e ont été exclus du partage de
la succession d ’Antoine. Il a été jugé e ffe c tiv e m e n t, et cette
disposition qui n ’a point été attaquée a acquis l ’autorité de la
chose jugée , q u ’ils n ’avoient rien à y réclamer.
M ais il a été jugé aussi que la succession consistoit unique
m ent dans la som m e de 1000 fr. destinée par le p è r e , et dans
les droits échus par le décès de la m è r e , droits qui se réduisoient pareillement à la destination faite
par lu mère dans le
�V!
( iS
co n lra l de mariage de
)
Callierine V cscham bes avec N a u f a r y ,
par lequel co n lra l de mariage la mère avoil institué ladite C a
therine Vcscham bes pour son héritière.
Les
adversaires ne peuvent pas scinder les dispositions du
jugement.
S ’ils ve u le n t,’ en vertu
du
ju g e m e n t , exclure
les
siéur et dame de D ien n e de la succession , il fa u t q u ’ils reconnoisscnt en même temps que cette succession se réduisoil aux
deux objets ci-dessus , à la destination à lui faite par le p ère ,
et à celle faite par la mère.
S ’il en étoit au tre m e n t, ils profiteroient de leur dol contre
la m a x im e , Nernini sua Jraus 'patrocinan debet.
L orsque pour parer au partage de la succession d ’A n t o i n e ,
ils ont borné la succession au m ontant de la destination pater
nelle
et
maternelle , lorsqu’ils ont
déclaré qu’ il n’ avait pas
drautres biens , ils ont volontairement renoncé à l’ effet de la
sentence de l ’élection de S a i n t - F lo u r , à l ’effet de la renoncia
tion de J a c q u e s , et de tous les autres actes q u ’ils opposent au
jourd'hui.
C e lle observation seule dispenseroit d ’entrer dans une plus
grande discussion ; mais allons plus loin.
P o n r r o i t - o n scinder le ju g e m e n t ; v o u d r o i t - o n
décision du
m o t if ,
faire abstraction
de
la
séparer
déclaration
la
des
adversaires ; il seroit facile d ’établir q u ’A n toin e n ’ avoit effec-*
tivement pas d ’autres biens.
C ’est une erreur d ’avancer qu'il étoit héritier institué du pèrer
il n ’avo it, par le testament du père , qu'une som m e de io o o fr,
A la vérité il est dit q u ’à défaut d ’élection de la part de la
mère , le père le no m m e dès à présent pour son héritier. Maid
ce n ’est q u ’à défaut d ’élection ; et la mère
elle-même n ’ étoit!
tenue d ’élire, e i d e remettre l’hérédité, q u ’en cas de convoi, L a
v o c a t i o n d ’ Antoine à l'hérédité, dependoit d ’une double condi
tion , du défaut d ’élection , et encore du cas de convoi ; et de
ces deux 'conditions subordonnées elle-mémcs l’une à l’autre , la
p rincipale, le cas du co n v o i, n ’est point arrivée. L a sentence de
l ’élecliou
�( *7 )
l'élection de Saint-FIour n ’a pu lui donner un droit qu’il n ’avoit
pas. Cette sentence porte sur un fait inexact. A u surplus , elle
a été rendue par défaut , et elle est susceptible, et d ’opposition,
et d ’appel ; les sieur et dame de D ienne sont encore en temps
utile pour l’attaquer. En e f f e t , par l ’arrêt du 2 thermidor an 8 ,
confirm atif à cet égard du jugement de Saint-FIour , la cession
faite par A n n e V escham bes et son mari de leurs droits dans la suc
cession de Jacques V escham bes , a été an n u llée, et les parties
remises au m êm e et semblable état q u ’elles étoient avant ladite
cession. L a cession est du a 3 juillet 1744*
sentence de l ’élec
tion de S a in t-F Io u r est de 1743. Il ne s’étoit écoulé entre la
sentence et la cession qu ’un an. À
l ’époque de la cession , les
sieur et dame de D ienne étoient donc en temps utile pour atta
quer la sentence, soit par la voie de l ’op p osition , soit par la
voie de l’appel ; et par l’arrêt de la cour ils ont été remis au
m êm e état q u ’ils étoient alors. O11 ne pense pas que les adver
saires insistent sur une sentence évidem m ent surprise à la reli
gion du tribunal qui l ’a rendue. D a n s tous les c a s , les sieur
e t dam e de D ie n n e déclarent subsidiairement s’en rendre inci
d e m m e n t appelans.
A n to in e n ’avoit donc , par le testament du
père , que la
som m e de 1000 fr.
P a r le décès de Catherine C om b a rd , il n ’a eu
également
q u ’une destination en argent. O n a vu que Catherine C o m b a rd
a institué pour son héritière Catherine V escham bes sa fdle aîn ée,
fem m e N a u fa r y .
Q u e les adversaires ne disent pas qu’ils sont également aux
droits de Catherine Vescham bes , au m oyen de la cession et subro
gation que celle-ci leur a consentie par acte du 4 juin 1744; car il
fa u t bien remarquer que cette cession n ’est que particulière. Par
cette cession , Catherine Vescham bes n ’a pas cédé la généralité
de ses droits ; elle n ’a pas cédé l’effet de l’institution contrac
tuelle faite en sa faveur par ladite Catherine Com bard : elle n ’a
cédé que le restant des sommes ù elle dues des causes du traité
C
�( i8
)
ilu S mars 1 7 1 0 , passé entre Jacques Vescham bes et Catherine
C om b a rd .
(¿u'on ne dise pas encore q u ’alors les biens aurolent appartenu
à ladite Catlierine V esch a m b e s, en vertu de l’institution faite en
sa f a v e u r , et que les sieur et dame de D ienne seroient également
sans dro it; c a r , indépendamment de l ’acte du 3 mars 1710 , par
lequel la mère, avant de marier sa fille, avoit déjà cédé et transporté
à Jacques Vescham bes tous les droits, actions et prétentions qu’elle
avoit sur les biens de son m a r i, lesquels n e pouvoient , par con
sé q u en t, faire partie de l’institution, on opposeroit la prescription
.de près d ’un siècle ; prescription que Catherine Vescham bes ne
pourroit écarter sous prétexte de co h a b itatio n , ayant été m a riée ,
et hors de la m a iso n , dès 1710.
E t cette prescription n ’a point p ro fité , m êm e en partie , à
A n to in e . Ici on com battra les adversaires par leurs propres armes.
-Leur défense contre la demande form ée par les sieur et dame de
D i e n n e , du c h e f d ’A n to in e , en réduction de l’institution faite par
François en faveur de Catherine C om b a rd , soit au quart d ’après
la C o u tu m e , soit à la portion de moins prenant d ’après l ’édit des
secondes n o c e s , défense consignée dans l ’attendu du jugement de
S a in t-F lo u r , a été q u ’A n to in e ayant approuvé la destination de lé
gitime à lui faite par le p è r e , il ne p ou v oit, ni les sieur et dame de
D ie n n e de son ch ef, demander laréduction. On va tourner contr’eux
le mêm e m oyen. L e légitimaire qui approuve la destination devient
étranger aux événemens de la succession ; il y est aussi étranger
que la fille forclose : il n ’a pas m êm e droit aux réserves coiiîuniières. C ’e s t , en effet , un principe constant , que le légitimaire
ne peut cumuler la destination et les réserves coutumières. A n
toine ayant approuvé la légitime n ’a donc pu p ro fiter, mêm e en
p a r t i e , de la proscription qui s’est acquise contre Catlierine V e s charnbes.
C V s t donc sans fondement , et contre la teneur des a ctes, que
les adversaires, changeant de langage, ont soutenu an tribunal de
M urât que la propriété résidoit sur la tête d ’A n toin e V escham bes.
�y
c 19 )
L e seul titre apparent à l ’appui de celte prétention in ju s te , est
la sentence obtenue en l ’éleclion de Saint-Flour. M ais cette sen
ten ce , contraire aux termes du te s ta m e n t, susceptible d ’être atta
q u é e , et attaquée en effet par l’appel incident qu ’on a déclaré in
terjeter , ne sauroit être d ’aucune considération.
V oudroit-on donner à cette sentence tout son effet ? elle a con
firmé le testam ent; elle a jugé que l'institution testamentaire devoit profiler à A n to in e : mais elle n ’a , ni p u , ni entendu donner au
testament plus d ’effet q u ’il 11c pouvoit en avoir. O r le testament,
s’il ne pouvoit êlre s u j e t , à l’égard d ’ A .n lo in e , au retranchement
de l ’édit des secondes noces , éloit toujours sujet à la réduction
au quart de la Coutum e. C ette sentence n ’auroil jamais opéré
contre Jacques Vescham bes une forclusion tolale.
E t qu ’on ne dise pas que Yattendu du jugement de Saint-Flour
a jugé que les sieur et d a m e de D ien n e ne pouvoient s’aider de
la réduction j car c ’est du ch e f d 'A n to in e , com m e A n toin e a ya n t
approuvé le testa m e n t, et non du ch e f de Ja cqu es, qui n ’a jamais
rien approuvé , et de la consistance de la succession duquel on ne
s’est m êm e pas occu p é, parce q u ’il falloit avant tout savoir si on
seroit admis au partage de sa succession, si le traité seroit annullé.
Sur qui résidoit la propriété du domaine ? non , encore une. fo is ,
sur la tête d ’A n t o in e , q u i, au contraire , étoit réduit à une légitime
en deniers , tant du c h e f du père que du ch e f de la mère , mais sur
la tête de Jacques , qui à sa portion directe réunissoit, ou à litre
successif par le décès ab intestat * ou par cession et tra n sp o rt, la
portion de presque tous les autres frères et sœurs.
N ous disons à titre successif: les deux enfans du prem ier l i t ,
Jean et Marguerite 1” . du n o m , sont décédés ab intestat cl sans
enfans.
P ar cession : Catherine C o m b a r d , par l ’acte m êm e du 5 mars
1710 , a cédé et les droits q u ’elle am endoit, et les droits et portions
héréditaires de chacun des enfans du second l i t , à la charge par
Jacques V esch a m bes de payer tant à chacun.
�( 20 )
Catherine Vescham bes a ratifié cet acte le le n d e m a in , en se
constituant dans son contrat de mariage ce qui lui avoit été assuré
par ce traité. Elle l ’a ratifié plus expressément encore , en cédant
depuis à V alarch er ce qui lui restoit du des causes dudit traité;
et V alarch er l’a approuvé lui-m êm e en prenant celte cession.
C o m m e aux droits de cette Catherine V escham bes Jacques V e s
cham bes a eu d r o it , non-seulement à la portion héréditaire qu ’elle
a m e n d o it, mais encore à la somme de 5 ooo fr. donnée par préciput au premier des e n f a n s , filles ou m â le s, à naître du mariage.
M arguerite 3*. du nom , veuve R o ch e , l ’a approuvé, el expres
sément par l’acte du 21 octobre 1 7 1 4 > e t ta citem en t, en ne reve
nant point dans les dix ans ni dans les trente.
V en on s au m o t i f qui paroit seul avoir déterminé les juges de
M u r â t à la renonciation de Jacques.
Quelle que soit cette renonciation , le jugement contient d ’abord
une erreur : A tte n d u , porte un des motifs , qu’ ayant renoncé à
la succession de son pcre , Jacques Vescham bes seroit aujour
d’ h u i non-recevable à critiquer le testament de son père. C ’est
en quoi les juges ont erré. Sans d o u te , pour demander la réduc
tion au quart portée par la C o u t u m e , il faut être héritier: mais
il n ’en est pas de mêm e pour le retranchement de l’édit des se
condes noces ; il n ’est pas nécessaire d ’être héritier pour demander
la réduction portée par l ’édit. Q u ’on lise P o t h ie r , L e b r u n , traité
des Successions; R i c a r d , nom bre
i
3 o i ; R e n u s s o n , t ra ité jie la
C o m m u n au té . L a raison e st, qu ’ils tiennent ce bénéfice d e l à lo i,
non com m e héritiers, mais co m m e enfans. L'institution faite par
le testament de François en faveur de Catherine C o m b a r d , n ’étoit
pas seulement réductible au quart d ’après la C ou tu m e ; elle étoit
encore réductible à la portion du
moins prenant par l ’édit des
secondes noces ; et quelque effet qu ’on veuille donner à la renon
ciation de Jacques V e s c h a m b e s , il auroit toujours eu droit au
retranchement. Pour l ’en exclure, il faudroit q u e lle comprit expres
sément le retranchement.
�- M ais quelle est c e lle renonciation ? D e quel poids peut être
une renonciation , qui n ’a été opposée q u ’aux créanciers pour sus
pendre leurs poursuites!, qui a demeuré sans effet dansila fa m ille ;
nonobstant laquelle il a j o u i , et non-seulement jo u i , mais -vendu,
et fait tous les actes de propriétaire.
' E t qui oppose cette renonciation ? une fille du r e n o n ç a n t , F ra n
çoise Vescham bes , qui seroit elle-même exclu e, si la cour s’y
arrètoit.
C e lt e renon ciation, dans aucun cas , ne pourroit com prendre
que la portion directe ; elle ne pourroil comprendre les portions
q u ’il a acquises des frères et sœurs , ou par cession et transport,
ou par leur décès ab intestat , com m e on vient de l’expliquer.
E t dans ces portions des frères et sœurs il auroit r e p r is , en
p a r tie , m êm e la portion directe qui par la renonciation se trou
verait avoir accru à tous les frères.
L e bu t q u ’on se propose dans ce m om ent n ’étant que de don
n er une idée de la c a u s e , on ne s’étendra pas davantage. O n se
réserve de développer à l ’audience les m o yens qui se présentent
pour écarter cette renonciation.
O n ne dira également q u ’un m ot sur le m o t i f que les juges ont
inséré dans le ju g e m e n t, relativement à la cession faite par M a r
guerite V escham bes 3*. du nom , par l ’acte du 21 octobre 1 7 1 4 .
Ils ont décidé que cet acte n ’assuroit à Jacques V escham bes qu ’une
reprise de 750 i r . , et non le droit de réclam er la portion héré
ditaire de ladite M arguerite V es c h a m b e s; parce q u e , d ise n t-ils
elle a annoncé dans cet acte que ses droits avoient été précédem
m e n t réglés , et qu ’elle n ’a pas cédé les actions rescindantes et
rescisoires.
E t quel besoin avoit-elle de céder les actions rescindantes et
rescisoires, puisque c ’est avec Jacques V escham bes lu i-m êm e que
les droits avoient été précédemment réglés par l ’acte du 3 mars
1790?
Q u importe q u ’elle n ’ ait point cédé le« actions rescindantes et
�rescisoires , puisqu’elle n 'a point réclam é ; et que non-seulem ent
elle n ’a point r é c la m é , m ais que soit e lle , soit Jacques V a la r c h e r , on t tout a p p ro u v é , tout ratifié par l ’acte portant arrêté d e;
co m p te , du 15 février
M ' . P A G E S - M E I M A C , jurisconsulte»
M*. C R O I Z I E R , avoué.
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la C o u r d ’appel. '
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Dienne, Vital. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Croizier
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Sieur Vital de Dienne, et dame Jeanne-Marie de Douhet son épouse, appelans ; contre Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher, Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon son mari, intimés et incidemment appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53277/BCU_Factums_G1603.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cheylade (15049)
Le Buge (domaine de)
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
gain de survie
généalogie
homicides
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53664/BCU_Factums_M0123.pdf
d9f873d69dbf1788ba4e4554f184ae27
PDF Text
Text
S
p
r
é
c
i
ci
s Î
s
POUR
P I E R R E D E L E S V A U X , tuteur et légitime administrateur de ses enf'ans mineurs, et de défunte Élizabeth
Gendret, son épouse, intimé et demandeur en oppo- département
de
sition :
CONTRE
E L I Z A B E T H P O N C E T , veuve et commune d'A n toine G en dret, tant en son nom , q u'en qualité de
tu trice, à l' interdiction de L o u is G endret, son f i l s ,
cisela n te d'un jugement rendu au tribunal civil du
département de l'A llie r , le 14 therm idor, an 4 , et
défenderesse en opposition.
QUESTIONS.
U n inventaire infidelle et inexact, peut-il interrompre une
co m m u n a u té conjugale?
’
Le mariage de la fille, hors de la maison, es!-il suffisant pour
dissoudre la communauté Qui s,etoit continuée avec elle?
La demande en partage de la communauté, a-t-elle dû être
formée dans les dix ans de la majorité ? l’action a-t-elle pu être
exercée pendant la vie du père?
C e t t e cause fournit un nouvel exemple de l’avidité
d 'une seconde fem m e, qui cherche à dépouiller les enfans
♦
tr ib u n a l
civil
�B C2 )
.
,
du premier l i t , et soutient ses prétentions avec un achar
nement inconcevable.
Croit-elle donc mériter assez de faveur, pour faire fléchir
les principes les plus certains ; o u , a-t-elle conçu le dessein
de fatiguer un père de huit enfans, et d’obtenir, par lassitude
ou par surprise, ce que la justice ne sauroit lui accorder?
Depuis près de quatre ans, elle promène l’intimé de tri
bunaux en tribunaux : par-tout elle a succombé; mais elle
n’en retient pas moins dans ses mains toute la fortune de
son mari. Elle a su éluder jusqu’ici le partage d’une com
munauté opulente dont elle voudroit dissimuler les forcesj
elle a calculé, qu’en jouissant de tout, elle rendroit toujours
moins qu’elle n’a pris.
Il est temps que cette lutte finisse; il est temps qu’É lizabeth Poncet restitue, par un compte rigou reu x, tout ce
qu’elle retient si injustement.
Les faits qui donnent lieu à la contestation sont simples.
Antoine Gendret, beau-père de l’intim é, a été marié
deux fois; en premières noces avec Marie Genest, d’où sont
issus deux enfans, Louis et Elizabeth Gendret.
E n secondes noces, Antoine Gendret a épousé ÉlizabetH
Poncet; il n’est provenu de ce mariage qu’un seul enfant,
qui est interdit pour cause d’infirmité.
P a r le premier contrat de Gendret qvec Marie Genest,
du i 5 mai 17^7, il fut stipulé une communauté de tou?
biens meubles, et acquêts immeubles; et ce mariage n’a
duré que deux ans : Marie Genest mourut le 12 septembre
1759.
Le 18 février 1761, Antoine Gendret fit procéder, coa-
�C3 )
jointement avec ses sœurs, au partage des biens délaissés
par ses père et mère ; il acquit la portion du mobilier rêve»
nant à ses sœurs, moyennant une somme de 1951
qui,
jointe à celle de 5 oo
q u il étoit tenu de rapporter à la
masse, formoit celle de 2461 ir \ la totalité de cette somme
a été acquittée aux dépens de la communauté.
Quatre mois après, et le 8 juin 17 6 1, Antoine Gendret
convola avec Elizabeth Poncet. Six jours auparavant, il
feignit de faire procéder à un inventaire dissolu tif; il choisit,
pour y procéder, un expert à ses ordres, et qui étoit son
débiteur ; un seul jour suffit pour la confection de cet in
ventaire , et on n’est pas étonné qu’un acte fait dans un
aussi court délai, soit erroné et infidelle, et qu’il y ait
beaucoup d’objets omis,
_ I-e second contrat de mariage d’Antoine Gendret et
d Élizabetli Poncet, contient un nouveau pacte de co m m U '
nauté entre les deux époux; chacun d’eux d o ity confondre
une somme de 600 #*, pour y prendre part.
L e 22 janvier 1776, M arie-Élizabeth Gendret, fille du
premier lit , contracta mariage avec Pierre D elesvaux,
intimé : elle se constitua en dot tous les biens qui lui éloient
échus par le deces de Marie Genest, sa mère} ensemble la
portion qui lui etoit acquise dans les profits de la commu
nauté contractée entre ses père et mère. Antoine Gendret
déclare a ce sujet que, lors de son second m ariage, il fut
procédé à un inventaire dissolutif de communauté, suivant
lequel le profit se trouva monter à une somme de 6000
de laquelle il revenoit * 5oo ^ à Élizabeth Gendret, pour
sa moitié dans la portion qu’amendoit sa m ère, attendu
qu’il y avoit deux enfans du premier lit.
�..
.
( 4 ')
.
.
' L e pore s’oblige aù payement de cette somme', et se
■départ de tous les droits qu’il pouvoit avoir sur les bestiaux
qui garnissoient les immeubles de ses enfans, du chef de
-Marie Genest, leur m ère, ainsi que dë-tous les droits qu’il
clisoit lui être acquis sur les biens de ses enfans, notamment
des dettes par lui payées, dont il s’étoit fait réserve par
l’inventaire prétendu dissolutif.
’
' Antoine G en d ret constitue de son ch ef, à sa fille, pour
dot et apanage, là somme de 13600
au moyen de quoi
elle n’avoit plus rien à prétendre dans sa succession. Cette
som m e, réunie à celle de i5oo 1i~,' à laquelle le père prétendoit fixer-les profits de la com munauté, est stipulée
payable à difîérens termes; celle de 5ooo ^ seulement ne
p e u t être exigée qu’après son décès.
• Antoine Gendret, père, est mort depuis environ deux ,
ans.
' ■
■ Marie-Elizubeth Gendret et Pierre Delesvaux, son mari,
intentèrent la demande en partage de la communauté, et
soutinrent qu’elle s’étoit continuée avec les enfans du pre
mier lit; de sorte qu’il devoit en être attribué à ces derniers
un tiers, un second tiers à la succession paternelle, et un
troisième à Élizâbeth Poncet.
• Celle-ci soutint, au contraire, qu’il n’y avoit pas eu de
continuation de communauté; que celle qui existoit avec
la premièi’e femme, avoit été interrompue, par l’inventaire
prétendu dissolutif du 2 juin 1761. Elle insistoit sur le par
tage de la seconde communauté, en deux portions égales,
dont lu n e lui appartenoit, et dont l’autre devoit être attri
buée à la succession de son mari.
.
•
9
.■
�.
,
. c 5 }
Ces différentes prétentions furent d’abord ¡Portées devant
un tribunal de famille, où il s’éleva des discussions sans nom
bre, qui n’ont pu être ^’déesavant la suppression. Élizabeth
Gendret, et Pierre Delesvaux, son mari, se sont pourvus
au tribunal civil de l’Allier, par exploit du 2,5 floréal., an 4;
ils ont demandé que, sans s’arrêter à l’inventaire prétendu
dissolutif, du 2 juin 17 6 1, qui seroit déclaré nul et fraudu
leux, il seroit procédé au partage des biens meubles et im
meubles de la communauté existante entre Antoine Gendret
et Marie Genest, sa première femme, continuée pendant le
Second mariage avec Élizabeth Poucet,pour en être délivré
aux demandeurs leur portion aiFérente, conformément aux
lois.
Cette demande étoit fondée sur l’inexactitude et l’infidé
lité de l’inventaire du 2 juin. Prem ièrem ent, on avoitfait
porter, comme profit de com m unauté, les bestiaux qui
garnissoient le domaine de Marie Genest, t a n d i s que ces
bestiaux appartenoient évidemment aux enfans du premier
lit. G’étoit déjà, de la part de Gendret, une première infidé
lité, de les inscrire sur l’inventaire, parce que ce domaine
étoit garni de bestiaux, lors du prem ier mariage.
Secondement, Gendret avoit fait le partage des biens de
scs père et mère,avant l’inventaire;il ¿voit acquis la portion
du mobilier qui icvenoit a ses sœurs, et n’a pas porté sur
l’inventaire le prix de cette acquisition, quoiqu’il en appar
tînt évidemment moitié à la communauté.
L e 3 décembre 1767,acquisition d’un immeuble, moyen
nant la somme de 100
une de 600 le 18 février 1758,
une de 90 le 17 octobre de la même année, une de 40 le
�m
_
.
23 février 17 % , une de 120 le 20 janvier 17 6 1,une de'240
le 17 avril suivant; on ne trouve aucun de ces objets dans
l’inventaire du 2 juin.
Gendret a également omis les profits de la ferme d’un
domaine, qu’il avoit pris à ce titre le 10 novembre iy 58f
pour six années consécutives, moyennant 5 oo ^ par année;
il n ’ a pas fait mention d’une obligation de 73
5 ^, qui avoit
été consentie à son profit le 12 janvier 1759.
Il a gardé le silence le plus absolu sur la ferme de la cidevant commanderie du M ayet, dans laquelle il a fait sa
fortune, et dont il étoit fermier depuis 1760; il n’a pas inscrit
ïa somme de 89 10 qu’il avoit reçue à compte sur diffé
rentes obligations consenties à son profit; on ne trouve point
encore dans cet inventaire deux acquisitions par lui faites
les 27 avril et 27 août 1761 ; l’une de 240 ^ l ’autre de 300
dont le prix avoit été payé long-temps auparavant la passa
tion des actes; il a encore omis une somme de 120 ^ d’une
part, et celle de 1230 ^ d’autre, dontil étoit créancier depuis
le 21 mars 1760, et pour lesquels il lui avoit été délaissé en
payement différens immeubles, par contrats des n et 23
janvier 1762.
. ■
' U n inventaire de ce genre ne pouvoit pas interrompre
la communauté, puisqu’il' est inexact et frauduleux. L a
bonne f o i, la sincérité et l’exactitude la plus scrupuleuse,
doivent présider à un inventaire dissolutif, sur-tout dans
le cas d’un convoi, parce que la loi n’a plus la même con-,
fiance dans l’époux qui forme de nouveaux liens.
Cependant la veuve Gendret essaya d’écarter ces argumens victorieux ; elle, voulut distinguer la négligence de la.
�. ,
ï ^
fraude ; et, quoiqu elle ne put pas dissimuler les omissions1
dont se plaignoient les enfans du premier l it , suivant elle,
à peine son mari avoit commis de légères négligences.
Elle alloit jusqu’à prétendre que l’inventaire même étoit
inutile, et que le mariage de la fille, hors la maison pater
nelle , suiïïsoit pour interrompre la communauté. Mais *
comme Élizabeth Gendret s’étoit réservé expressément
tous les droits qui lui étoient échus du côté de sa m ère, que
cette réserve repoussoit l’objection d’Élizabeth Poucet, elle
crut pouvoir écarter la juste réclamation de Delesvaux, par
une fin de n on -recevoir; elle le soutint sans action, faute
de s’être pourvue en restitution dans les dix ans de majorité,
à compter de son mariage.
Cette fin de non-recevoir étoit un bien foible moyen«
Elizabeth Gendret pouvoit-elle perdre ses droits, parce
qu’elle avoit eu des ménagemens et des procédés pour son
père? pouvoit-elle se plaindre cl’une fraude par lui com
m ise, lorsqu’il avoit entre ses mains tous les titres, tous
les renseignemens qui pouvoient la faire découvrir ? Ce
n’est qu’après le décès de son père, qu’Élizabeth Gendret a
pu prendre connoissance des forces de sa succession; qu’elle
pouvoit etre éclairee sur ses droits. Ge n’est qu’à compter
de ce jour, qu’elle a pu exercer son action.
E n cet é ta t, et au moment où la cause alloit recevoir
’ sa décision, Élizabeth Gendret est décédée , laissant huit
enfans mineurs. Pierre D elesvaux, son m ari, a repris
l’instance, en qualité de tuteur de ses enfans, et la cause
portée à l’audience du tribunal civil du département
de 1 A llier, le 14 therm idor, an 4 , il y est intervenu un
�.
( .8
■
.
jugement q u i, « sans s’arrêter à la fin de non-recevoir ,
« opposée par Elizabeth Poucet, non plus qu’à l’inventaire
«du 2 juin 1 7 6 1 , qui est déclaré inildelle et insuffisant,
« pour opérer la dissolution de la com m unauté, et
* continuation de communauté qui avoit existé entre
« Antoine Gendret et sa première femme , Elisabeth
« Poncet et leurs enfans, faisant droit sur la demande
« formée par Élizabeth G en dret, et D elesvaux, son
« mari , condamne Elizabeth Poncet à ouvrir le partage
« des biens meubles et immeubles de la communauté
« existante entre Antoine G endret, et Marie G enest,
« sa première fem m e, et continuée pendant le second
«m ariage d’Antoine G endret.avec Élizabeth P o n cet,
« pour en être délivré auxdits Delesvaux et sa fem m e,
« le tiers du chef de Marie Genest ; auquel partage il
« sera procédé par experts, en la manière ordinaire ; et
« auxquels experts , tous titres , papiers et renseignemens
«concernant la com m unauté, et continuation d’icelle,
« seront communiqués par ceux qui en sont dépositaires ;
« lors duquel partage , Delesvaux sera tenu de rapporter
« la somme de i 5oo livres, reçue ci compte dans ladite
« communauté et continuation d’icelle j ensemble les
«intérêts, à compter du jo u r'q u e le payement en a
« été fait, comme aussi toutes autres sommes qu’il'pouiToit
« avoir reçues, ou qui auroient été payées en acquit et
« décharge d’Élizabetli Gendret ; dépens compensés,
« même le côut du jugement, lesquels dépens doivont etre
« employés en frais de partage. »
K
Élizabeth'Poncpt a poussé le délire jusqu’à interjeter
appel
�(9 )
appel de ce jugement; elle ne s’est pourtant pas aveuglée
jusqu’au point d’en espérer la réformation ; elle a sollicité
un arrangement, et ce n’étoit qu’un piège qu’elle tendoit
à la crédulité de l’intimé q u i, lorsqu’il étoit le plus
occupé d’un projet de conciliation, a reçu la signification
d’un jugement par défaut, que l'appelante a surpris devant
le tribunal d’appel. Il s’est empressé d’y former opposition.
Il va s’occuper de présenter ses moyens, et il parviendra
aisément à justifier le jugement rendu en cause prin
cipale.
L e premier principe, en matière de communauté,
est que la continuation a lieu entre les enfans du pré
décédé et le conjoint du survivant, toutes les fois qu’il
n’y a pas eu d’inventaire dissolutif > ou lorsque cet inven
taire est inexact ou infidelle. .
.• L ’article 240 de la coutume de Paris, et l’article 270
de la coutume de Bourbonnois, qui régit les parties,
portent expressément que la communauté se continue
avec-les enfans et le survivant des conjoints, si le sur
vivant ne fait aucun inventaire, partage, division, ou
autres conventions équipollentes à partage, dans qua
rante jours, à compter du décès du prem ier mourant.
•• La continuation de communauté, suivant la définition
qu’en donnent tous les auteurs, est une société légale
qui se forme entre le survivant de deux époux communs
en biens, et les héritiers du prédécédé. Il y a cette diffé
rence entre là communauté et la continuation, que la
première est une société conventionnelle qui n’a lieu que
par le consentement exprès ou tacite des deux époux 3
2
v
�\
( 1° )
B
la seconde, au contraire, est établie par la lo i, et a lieu
contre le gré de l’époux survivant qui ne remplit pas
les formalités prescrites pour empêcher cette continuation.
Pour dissoudre une communauté, il faut nécessairement
faire procéder à un inventaire dissolutif; mais qu’est-ce
qu’un inventaire dissolutif? c’est une description exacte,
fidelle et détaillée, des effets, meubles, créances et papiers
de toute espèce, qui composent la communauté. L ’in
ventaire , suivant l’expression des auteurs, doit être franc,
lo y a l, sincère , exact et iidelle ; les plus petites omissions,
quoiqu involontaires, rendent l’inventaire n u l, et n’em
pêchent pas la continuation de la communauté, C’est ce
qui a été décidé par un arrêt de règlement, du 4 mars 1727,
dont le m otif fut que le défaut de quelques formalités,
empechant la dissolution de la communauté , à plug
forte raison les omissions, quelles qu’elles soient, devoient
produire le même, effet, puisque ces formalités n’onfc
été établies , que pour éviter les omissions et les inexac
titudes.
,
- Pour qu’il y ait lieu à la continuation de com munauté,
il n’est pas même nécessaire qu’il y ait fraude de la part du
survivant • il suffit qu’il y ait négligence notable / parce
qu il doit veiller pour ses mineurs , à ce que l’inventaire
soit iidelle. Un arrêt de 1725 a jugé la question en thèse?
On va en rappeler l’ospèce.
>
Tie nommé D arm ancourt, perruquier, avoit. fait faire
un inventaire, dans lequel h vaisselle d’argent de la
succession étoit détaillée ; le nombre des pièces étoifc
é c rit, ainsi que le prix du marc ; mais la quantité de
�(M )
ïnarcè étoit en blanc ; l’étain étoit de même désigné,
le poids en blanc ; en pareille circonstance, il n y avoit
pas de fraude de la part du survivant; mais seulement
négligence de n’avoir pas fait' passer sur le ch am p , la
Vaisselle inventoriée, dont les pièces étoient d’ailleurs
suffisamment désignées, ainsi que le prix de la matière.
C ’étoit de sa part un pur oubli de n’avoir pas réparé
cette négligence, en faisant peser la vaisselle à la vacation
suivante; cependant, par sentence du chatelet, la conti
nuation de communauté fut ordonnée, et sur l’appel,
arrêt confirmatif. Une foule d’autres arrêts ont jugé la
question uniform ém ent; l’u n , du 12 mai 17 4 7 , dans la
cause de la ci-devant comtesse d’Arcourt ; un autre, du
12 septembre 176 2 , dans la cause de la veuve M ign ote,
'contre son 'fils ; un troisième , du 7 septembre 1758 5
dans l’espèce de cet a rrê t, Antoine A llo a rt, meunier à
Orléans, après le décès de sa fem m e, «voit fait faire
tin inventaire , daxis lequel il n’avoit pas déclaré trois
dettes actives ; l’une de 64
l’autre de 74 ^"10 J, 1 autre
de i 5o' i1~. L ’inventaire fut déclaré frauduleux, et il fut
jugé que la communauté avoit continué entre" le père
et les en fans du prem ier lit. *
Tous les jurisconsultes qui ont traité la m atière, ont
un langage uniforme sur cette question. Ferrières, sur
l’article 240 de la coutume d e.P aris; Duplessis, traité
'de‘la communauté de biens, liv. 3 ; Louet et Brodeau,
I.. G. somm. 30; le B ru n , P otliier, Lacom be, au mot
'■communauté, sect. 6 , part 4.
En appliquant ces principes à l’espèce, on voit que
•
2
�p
( 12 ■)
l’ inventaire, dont argumente la veuve G en d ret, est
défectueux, iniidelle et inexact, sous tous les rapports.
Il a été rédigé avec précipitation 5 un seul jo u r, une
seule vacation a suiïî pour détailler et estimer le lin g e ,
les meubles meublans, les denrées , les bestiaux des
dom aines, tout le mobilier de la communauté auM ayet ;
dans la même séance , 011 a fait aussi la description des
papiers.
.
Les effets de la communauté ont été évalués à vilpi*ix;
on en jugera par quelques exemples.
i
L etain est estimé 12 J la livre ; il en valoit alors pins
de 36 «A L a toile de plain est estimé 20 J l’aune j elle se
vendoit à cette époque plus de quarante. Sept cuves à
couler 70 poinçons, jauge du M ay et, sont éstimées i 5o
o r , une cuve a toujours valu à raison de 6 ^ ", par
chaque poinçon qu’elle contient ; celles-ci devoient donc
être portées au moins k 420 tf~. L e vin est porté à 10 8 J
le poinçon , et suivant les mercuriales de 1 7 6 1 , pour la
ville de Gusset, le poinçon valoit alors 20 ^ 10-f. Quatre
paires de gros bœufs limousins, ne sont estimés en tout,
que 700 a- : ils valoient alors au moins 300 ^ la paire.
On ne s’est pas même donné la peine de détailler la
quantité et la nature du bois de sciage : on l’a évalué en
niasse avec le bois à brûler. L ’argenterie n’a point été
pesée; on n’a pas spécifié le nombre des marcs; un
tapissier et un marchand de la campagne 1 ont estimée
en masse , sans observer aucune des règles prescrites pour
l'évaluation de l’argenterie; cette seule omission suffiroit
pour faire ordonner la continuation do la communauté ^
td’après Tarrêt de 17^ 5.
�. .
x? )
, Antoine Gendret a trompé ses enfans du premier lit-* en
.portant comme profits de la communauté, les bestiaux qui
garnissoient le domaine de Marie G enest, sa première
.femme ; il a omis les acquisitions par lui faites,et dont on
adonné précédemment le détail; les sommes qu’il avoit
payées à ses sœurs, lors de son partage; les obligations qui
lui étoient dues.
• Il a voulu faire un avantage prohibé à sa seconde femme,
en omettant dans l’inventaire les bénéfices de la ferme delà
ci-devant commanderie du M ayet, dans laquelle il est
.notoire qu’il a fait sa fortune.
Enfin, à l’époque de l’inventaire dissolutif, le plus âgé de
ses enfans du premier lit n’avoit pas même quatre ans; et
cette circonstance obligeoit le père à veiller encore avec plus
,de scrupule à l’intérêt de ses mineurs, et à ce que son inven
taire lût exact.
•
*
La veuve Gendret n’a pas pu dissimuler les omissions
dont se plaint l'intim é; mais elle a prétendu que la conti
nuation de la communauté étant considérée comme une
peine que la coutume prononce contre le survivant infidelle, <
la négligence ou l’oubli ne devoit pas être puni comme
une omission volontaire.Elle a dit que dans l’espèce les inté
rêts des mineurs avoient été conservés, puisque les objets
omissont constatés par desactes authentiques, que les enfans
ont touj ours pu se procurer dans les dépôts publics. Suivant
elle,les omissions ne sont pas assez considérables, pour les
regarder cômme frauduleuses; on peut tout au plus les
attribuer à l’oubli ou à une légère négligence, qui ne peut
entraîner la continuation de la communauté.
�'
.
(
1 4
)
,
•
•
.
.
La réponse à cette objection se tire des omissions même
dont on a donné le détail; de la vilité du prix dans la prisée
dti mobilier; de l'infidélité dans l’estimation de l’argenterie:
la fraude et l'inexactitude éclatent de toutes parts; et, si quel
ques objets omis sont constatés par des actes publics, il de
vient souvent impossible à des enfans âgés de trois ou
quatre ans, de découvrir, vingt ans après, des contrats
d’acquisitions, bien plus encore des obligations q u i,
d’après l'usage, ne portent pas minute, et ne sont expé
diées qu’en brevets.
O n ne pouvoit pas également vérifier ou connoître le
-produit des bénéfices qu’avoient faits Antoine Gendret,
dans la ferme du M ayet, et sur laquelle l’inventaire est
absolument muet.
Il est vrai que la veuve Gendret a voulu élever des
doutes sur l ’époque où Antoine Gendret'a été fermier1;
elle a prétendu qu’il ne pouvoit pas l’être, lors de
l’inventaire de 1761 , parce qu’en i j 5j , il avoit été
consenti un bail de ferme du même o b jet, à Élizabeth
B o rn e , mère d’Antoine G endret, pour six, années con
sécutives.
Mais on a levé cette équivoque, par le rapport de
l’extrait mortuaire d’Élizabeth Borne. Elle est morte
en 1759, et Gendret, son fils, s’est subrogé à sa jouissance.
L e 6 novembre 1760, il s’est fait consentir un nouveau
bail, en son nom, pour cinq années qui de voient prendre
cours au premier mai - 1761. Dans ce bail Antoine
"Gendret y prend la qualité de fermier actuel de h eommanderie; cc qui prouve invinciblement qu’il étoit fermier
�c
. 1
5
\
antérieurement à l’inventaire dissolutif- p^r conséquent
cette jouissance précédente devoit entrer dans la com
munauté.
. A u surplus, d’après les arrêts qu’on a cités , et l’opinion
des auteurs les plus accrédités, il faut tenir pour certain
que les plus petites omissions, quoiqu’involontaires,
1a plus légère, négligence, suffiraient pour opérer la
continuation de la communauté; à plus f o r t e raison doitelle continuer dans l’espèce, o\i l’inventaire est frauduleux,
inexact, incçmplet et infidelle.
.. .
c On. passe maintenant à la seconde question, qui-est de .
savoir- si le mariage' de Marie -É lizabeth Gendret,, hors
la maison paternelle, a pu dissoudre la-communauté.
Ç é jà on doit considérer que le mariage d’Élizabeth
G en dret, avec Pierre JDelesvaux, n’a été contracté que
le 2 janviep 1776 , lorsqu’elle étoit encore pn minorité ;
i l n y a pas de doute, même dans le système de la veuve
Gendret, que la communauté se seroit continuée au moins
jusqu’à cette époque ,• mais ce seroit contre l’évidence
et, contre les principes qu'on voudrait soutenir, que-le
marjage de la fille , hors la,m aison, suffit pour dissoudre
Ja çommunauté.. Ce ¡points de jurisprudence a été jugé
par plusieurs, arrêts. On cite avec avantage, celui qui
est rapporté dans Bardet, sous la date du premier août
1640,, dans la >cause de Marie Esm ond, contre son frère.
Çpt, ?rret a jugé en thèse que même en pays de -droit
écj’i t , où la communauté ne peut avoir lieu,.que par une
stipulation expresse , elle n’étoit point dissoute par le
mariage et la dot constituée à la fille. O n rappeloit dans
�, (.i 5 )
.
les moyens du frère, l'opinion de Dumoulin , sur l’art.
270 de la coutume du Bourbonnois, qui pense que le
mariage de la fille empêche la continuation; mais malgré
cette autorité, il fut jugé que la communauté avoit
continué.
Cet arrêt est d’autant plus rem arquable, 1°. que la
fille , dans l’espèce, avoit renoncé à la succession échue
de sa m ère; 20. que la succession étoit en pays de droit
é crit, où la communauté n’est pas légale , où elle ne
peut avoir lieu que par la stipulation expresse des époux ;
ce qui pourrait ne la faire considérer que comme une
société ordinaire, qui se dissout par la mort de l’un des
associés. Cependant, M. l’avocat généralTalon soutint que,
dès qu’en pays de communauté , il y avoit continuation
de com m unauté, à défaut d’inventaire dissolutif, par
identité de raison, elle devoit être continuée en pays
récri par le droit romain : l'intérêt dr>s encans l’emporta
sur toutes les subtilités du droit. '
=
Ici, Élizabeth Gendret est encore plus favorable. Elle
habite en pays de communauté légale; elle n'a pas renoncé
à la succession échue de sa m ère; elle se lest au con
traire expressément constituée; elle ne-peut donc pas
avoir interrompu une communauté qui fait partie de
cette succession.
Ha question, a été discutée par A uroux des Pommiers j
sur l’art. 270 de la coutume de Bourbonnois. II cite
plusieurs jugemens conformas à l’arrêt qu’on vient de
rappeler; néanmoins il semble incliner en faveur de
l'opinion de D um oulin, mais toujours dans l’hypotèse
où
�( *7 )
où la fille auroit renoncé par son mariage à la succes
sion échue.
»
Cette autorité ne peut donc s’appliquer à l’espèce,
puisque Elizabeth Gendret s’est constitué toUs les droits
de sa mère. Au surplus, l’avis de D um oulin, et celui
d’A uroux ont été contredits par tous les auteurs qui ont
écrit sur cette m atière, et sur-tout par les jurisconsultes
modernes. L e b ru n , traité delà communauté ; Ferrières,
dans sa nouvelle institution coutumière, tom. 2, tit. 3 ,
de la continuation , etc. de Laurières dans sa note sur la
règle 11 de Loisel; P o th ier, traité de la communauté, liv.
d eu x, page 4 87, enseignent tous que le mariage de la
fille n’est pas un acte suffisant pour dissoudre-la commu
nauté à son égard, et qu’elle en est quitte pour rapporter
ce qu’elle a reçu pour cet objet. Enfin la question a été
jugée en thèse, par un arrêt récent, du 3 mai 1758, dans
la coutume de Bourbonnois.Cet arrêt, connu sous le nom
des V id a lin , a décidé que la communauté avoit continué
au profit des filles V id a lin , nonobstant les clauses de re
nonciation insérées dans leurs contrats de mariage ; et,
quoiqu’il leur eût été constitué et payé différentes sommes,
pour la portion quipouvoit leur revenir dans la com mu
nauté.
Ce qui tranche d’ailleurs toute espèce de difficulté,
c’est la circonstance que M arie-Elizabeth Gendret étoit
mineure lors de son mariage'; car tous les auteurs qui ont;
professé une opinion contraire, et qui ont pensé que le
mariage pouvoit interrompre la communauté, conviennent
néanmoins que cette interruption ne peut avoir lieu à
l'égard des mineurs.
3
�r ( i 8 ')
Il ne reste donc plus qu’à examiner le dernier moyen
proposé par la veuve Gendret, qui consiste à soutenir que
la femme 'Delesvaux auroit dû se pourvoir dans les dix
ans , à compter de sa majorité.
' Ce système est contraire à tous les principes reçus. Il
est bon d’observer ici, qu’il n’est pas du tout question d’une
demande rescindante ou rescisoire, qui doit être formée
dans les dix ans de la m ajorité, d’après l’art. 134 de l’or
donnance de 1539. Il s’agit tout simplement d’une de
mande en partage de la communauté; o r , personne n ignore quune demande en partage ne se prescrit que
par trente ans continuels et accomplis, et la prescription
ne pou voit commencer à courir que du jour du décès
du père. •
Il peut d’autant moins y avoir lieu à une demande
•*
il
• •
• 9•
rescindante ou rescisoire, que Marie-Elizabeth Gendret
n’a point renoncé à la succession échue de sa mère.
Y eut-elle expressément renoncé , on ne pourroit lui
opposer de fin de non recevoir, pendant la vie de son
père ; la prescription ne peut commencer qu’au moment
oii on est en état d’agir : or , Marie-Élizabeth Gendret
ne pouvoit pas agir .pendant que son père v iv o it; tous
ses titres, ses facultés , étoient entre les mains de son
p ère, son tuteur’naturel ; elle ne pouvoit pas vérifier si
l’inventaire étoit exact ou frauduleux; en eût - elle la
faculté, le respect et la confiance qu’elle .devoit avoir
dans la tendresse de son père, ne lui permettoit pas
d’en user.
D ’un autre côté, le délai pour demander compte d’une
�( i9 )
communauté continuée, ne peut courir que du-jour où
elle est légalement dissoute i jusque-la les communs ne
prescrivent pas les uns contre les autres; l’époux sttrvivivant administre tant pour lui que pour ses enfans;
et il en/est des communs comme des cohéritiers qui
cohabitent ensemble et jouissent indivisément; la pres
cription ne court pas tant que dure la jouissance iudivise;
elle ne commence à courir, que du jour que cesse cette
jouissance.
E nfin, fû t - il question d’une demande rescindante,
Faction en restitution seroit encore admissible, même
après les dix ans de m ajorité, par la raison que toutesles fois qu’il y .a fraude ou d o l, ce, n’est jamais qu’à
compter du jour où la fraude est découverte, que la
prescription peut cou rir, d’après l’article 44 de l’ordon
nance de i 5 io.
O r, la femme Delesvaux n’a découvert et n’a pu dé
couvrir les vices de l’inventaire du 2. juin 17 6 1, les
fraudes, les infidélités et les omissions dont elle se plaint,
qu’après le décès de son père, dans la succession duquel elle
a trouvé des renseignemens qui lui étoient inconnus, et
qu’elle ne pouvoit se procurer pendant la vie de son p ère,
qui avoit tant d’intérêt à les cacher. O r, tant qu’elle n’a pas
connu la fraude, elle a été dans l’impossibilité d’agir; elle
n ’a pu attaquer 1 inventaire. On ne peut donc lui opposer
aucune fin de non recevoir; et cette proposition paroît si
évidente, qu’elle ne mérite pas de plus grand développe
ment.
On pourrait ajouter qu’en coutume de Bourbonnois, le
�p ère, n’ayant que la garde , devient aussitôt après qu’elle
est finie, un v éritable tuteur; qu’il en contracte toutes les
obligations, principalement celle de rendre compte de sa
gestion ; que l’action en reddition de compte dure trente
ans, à compter de la majorité; qu’ainsi l’action de la femme
Delesvaux seroit toujours entière sous tous les points de
vue.
'
Que faut-il de plus pour établir le bien jugé du jugement
dont est appel? La veuve Gendret auroit du se rendre
justice à elle-même, et éviter une publicité qui ne fait hon
neur ni à sa délicatesse, ni à la mémoire de son mari.
Ainsi semble, à R io m , le 28. germ inal, an 5 de la
république française. P A G E S .
A R IO M , D E L ’IMPRIMERIE DE LAN D RIO T.
;
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Delesvaux, Pierre. An 5]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
secondes noces
jurisprudence
partage
coutume du Bourbonnais
fraudes
inventaires
communautés
Description
An account of the resource
Précis pour Pierre Delesvaux, tuteur et légitime administrateur de ses enfants mineurs, et de défunte Élizabeth Gendret, son épouse, intimé et demandeur en opposition ; contre Élizabeth Poncet, veuve et commune d'Antoine Gendret, tant en son nom, qu'en qualité de tutrice, à l'interdiction de Louis Gendret, son fils, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil du département de l'Allier, le 14 thermidor, an 4, et défenderesse en opposition. Questions. Un inventaire infidelle et inexact, peut-il interrompre une communauté conjugale ? Le mariage de la fille, hors de la maison, est-il suffisant pour dissoudre la communauté qui s'étoit continuée avec elle ? La demande en partage de la communauté a-t-elle dû être formée dans les dix ans de la majorité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 5
1757-An 4
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0123
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0122
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Vendat (03304)
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inventaires
jurisprudence
partage
secondes noces
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e2acd482897ab348b2ed44075fa67236
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Text
i
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-
ït
■;
RÉPONSE
.) *
C O U R
IM P É R IA L E
DE RIOM.
‘ )rî
I r e CHAMBRE.,
Aux observations de la dame K E M P F E R D E
PLO BSH EIM , appelante d’un jugement
rendu au Tribunal civil de cette ville de
R iom , le 28 août 1 8 1 3 ;
POUR
Le Général TERREYRE et la dame BEAUFRANCHET D'A YAT, son épouse }
intimés.
L e s s ieur et dame Terreyre ne se sont jamais flattés
qu’un premier jugement mît un terme aux débats qui
se sont élevés entr’eux et la dame K em pfer; ils s’attendoient dès l’origine à parcourir tous les degrés de juri
diction : mais ils sont disposés à la suivre, et ne craignent
pas un nouvel examen.
Les deux questions que fait naître la dame Kempfer
�( o
ont été résolues par les premiers juges, d’après les vrais
principes; les motifs du jugement font honneur à leur
sagacité; et la dame Kempfer, pour les réfuter, s’est plus
occupée de discussions grammaticales que du point de
droit.
L e don mutuel porté au contrat du 19 brumaii’e an
4 , et qualifié de donation entre-vifs, avoit-il un effet
présent? devoit-il etre réglé par la loi alors existante,
quoique la succession du général d’Ayat ne se soit ou
verte que sous l’empire du Code Napoléon?
Telle étoit la première question. Les premiers juges
ont pensé que la loi du 17 nivôse an 2 , qui étoit aloi's
en vigueur, devoit régler les conventions matrimoniales;
ils l’ont décidé en point de fait et en point de droit.
En point de fait, ils ont judicieusement remarqué que
la clause du contrat contenoit trois objets bien distincts.
« Par le premier, les époux sc donnent réciproque« ment tout ce dont la loi leur permet de disposer en
« faveur l’ un de l’autre, y ayant des enfans, soit du
« présent m ariage , soit d’un précédent; pour par le
« survivant en jo u ir à compter du décès du premier
« mourant, suivant et aux termes de la lo i, sans être
« tenu de donner caution ,* seulement à la charge de
k l’inventaire.
« 2°. Les époux stipulent que dans le cas où ln loi
te donneroit plus de latitude à ces sortes de dispositions
« ( toujours en cas d’enfans ) , la donation mutuelle re« cevra cette plus grande étendue, pour en jo u ir aux
« termes de la lo i, sans donner caution ,* mais à la
« charge de faire inventaire. »
�. (s,
..
3°. Enfin , et toujours par la même clause, « les
« époux conviennent que s’il n’y a aucun enfant lors
« du décès du premier m ourant, ils se donnent mu« tuellement tous leurs biens, pour par le survivant en
« jou ir et disposer en toute propriété , et comme de
« choses à lui appartenantes. »
De ces trois dispositions, ainsi spécifiées et distinctes,
les juges dont est appel ont tiré la conséquence que tant
qu’il y a voit des enfans, les époux avoient eu respecti
vement l’intention de ne se donner qu’un simple usufruit;
et qu’ils avoient fort bien prévu le prédécès des enfans,
seul cas où ils ont voulu se donner la propriété.
Ils ont ajouté que le mot unique jo u ir, la précaution
de dispenser du bail de caution , l’obligation de fa ire
inventaire , exprimoient sans équivoque leur intention;
qu’ainsi, en point de fait, la dame Kempfer ne pouvoit
rien exiger en propriété, dès qu’il existoit des enfans
des deux unions précédentes.
La dame K em pfer, dans les observations qu’elle vient
de publier, trouve ce raisonnement fort étrange. L e mot
jo u ir , dit-elle, s’entend d’un propriétaire ainsi que d’un
usufruitier; il exprime également l’eifet du droit dont
chacun use; il ne peut servir, isolément pris, à fixer
l ’étendue du droit même ; et c’est à la disposition prin
cipale qu’il faut recourir, pour connoître si c’est comme
propriétaire ou comme usufruitier que l’on jouit.
Sans vouloir suivre la dame Kempfer dans ses longs
raisonoemens sur la valeur et la fo rce des mots , on
6’étonne qu’elle ait passé sous silence la troisième partie
de la clause, qui contient le don en propriété des biens
i *
**''
"
�(4
),
en cas de prédécès des enfans,;., elle y auroit vu peutêtre que les époux, n’ont pas commis. d'erreurs d'in*
telligence, et qu’ils ont senti la valeur et la fo rc e des
m ots; car, dans cette dernière disposition, ils ne se
sont pas contentés de se servir de ce mot jo u ir , ils ont
ajouté, et en disposer en toute propriété, comme de
choses appartenantes a u survivant; ils ne se sont pas
dispensés alors du bail de caution , ni asservis à un in
ventaire : ils ont donc bien su faire la différence entre
l’ usufruit et la propriété.
D ’ailleurs, quel est le grammairien ou le juriscon
sulte qui osera soutenir que ces expressions pour en jo u ir
sans être tenu de donner caution , et à la charge de
fa ir e inventaire , valent un don en propriété? n’est-ce pas
au contraire manifester d’ une manière précise l’intention
et la volonté de ne faire qu’un simple don d’usufruit?
car le bail de caution-ne peut convenir qu’à l’usufruitier.
La charge de faire inventaire répugne à toute idée de
propriété.
1
Les époux ont trouvé sans doute que la loi les restreignoit dans leurs affections, en ne permettant de donner
que l’usufruit de moitié; ils ont pu espérer qu’ils seroient
autorisés peut-être à donner la jouissance du tout, et ils on£
voulu profiter d’une loi plus libérale, qui donneroit plus
d’étendue à leur jouissance; mais ni l’un ni l’autre n’ont
voulu dépouiller leurs enfans d’ une portion quelconque
de propriété, puisqu’ils ont prévu le cas de prédécès
de ces mêmes enfans, et que ce n’est qu’alors qu’ils se
font donation de la propriété.
La dame K.empfcr? pour appuyer le système bizarre
�( 5 )
qu’elle a adopté , est allé chercher le gain de survie
de 5o,ooo francs qui .précède le don mutuel, et veut y
trouver la preuve que les époux ont voulu se donner
line .propriété si la loi le permettoit.
*
, ' Les intimés n’ont pas assez $ intelligence pour sentir
la force de cet argument.
j' Ils ne conçoivent pas qu’un gain de survie à prendre
sur le m obilier, d’après la prisée de l’inventaire, et
sans crue, puisse faire1 croire que le don mutuel pos
térieur pou voit être en propriété. Pourquoi y auroitil un gain de survie, s’il y avoit une donation de pro
priété? car l’un est exclusif de l’autre; mais les intimés
diront toujours que les époux n’ont pas laissé ignorer
leur intention lorsqu’ils ont voulu se gratifier d’une pro
priété; car le gain de survie n’est pas accompagné d’une
dispense de bail de caution, ni de ¡’obligation de faire
inventaire.
i
Cette disposition, d’ailleurs, est isolée et distincte ;
elle n’a rien de commun avec les autres ; elle étoit il
lusoire, inutile, puisque tous les gains doivent se con
fondre dans la portion disponible; elle ne peut donc
servir d’exemple, encore moins d’argument, dès qu’il
n’y a aucune conséquence à en tirer.
En voilà bien assez sur les mots; il est temps de passer
aux choses.
'
'
• Les premiers juges ayant dit qu’en point de fait les
époux n’.ivoient voulu que se donner une jouissancef
ont décidé, en point de droit, que la loi en vigueur
au temps du contrat devoit régler les conventions ;
�C 6 )
qu’ainsi la dame Kempfer ne pouvoit exiger autre chose
que l’ usufruit de moitié des biens.
Ils l’ont ainsi décidé, d’après Dumoulin, Duplessis,';
l’auteur du nouveau Traité des donations, des arrêts
anciens, et des arrêts récens de la Cour de cassation ( i) ,
et par la raison que le don mutuel est une véritable do
nation entrç-vifs, qu’il en a le principal caractère, qui
est l’irrévocabilité, et qu’ il investit immédiatement les
époux de l’espoir successif, à l’instant du contrat^de
mariage.
. j
\
.
.. Les juges dont est appel ont d it , avec une grande
justesse, qu’aussitôt qu’ un-contrat de mariage a été con
senti entre des individus, la loi en vigueur s’en empare,
elle y met son empreinte, en détermine irrévocablement
les effets, et garantit par là Pimmuabilité des engogemens.
Si ce lien de droit pouvoit, par la convention ou
le caprice des époux, être subordonné à une loi future,
il n’existeroit plus, et les conventions seroient livrées
à une fluctuation indéfinie. -Agir ainsi, c’est appeler,
c’est introduire l’effet rétroactif d’une loi nouvelle, c’est
renverser la base fondamentale de notre législation.
L e Gode Napoléon ne peut donc influer sur un con
trat de mariage du 19 brumaire an 4 ; il a été passé
sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 , et ne peut
se soustraire à'son autorité. Les articles 13 et 14 de cette
loi fixent à l’usufruit de la moitié des biens toutes les
(1) Voir le mémoire, pages 18 et suiv.
�( 7 )
libéralités permises entre époux, en cas d’enfans. La loi
est impératiçe et irritante ; elle reçoit nécessairement
son exécution dans la circonstance.
Voilà ce que la dame Kempfer appelle un raisonnement étrange ,* est-elle plus séduisante dans son système?
De tels caractères, dit-elle, ne conviennent pas aux
libéralités portées en son contrat de m ariage; la dona
tion qu’elle réclame étoit subordonnée au décès du mari
donateur, quoique qualifiée de donation entre - vifs ,*
elle avoit été faite in contemplatione mortis ,* elle ne
devoit être prise que sur les biens que laisseroit le
donateur à son décès; il pou voit les aliéner, les dissi
p e r, etc.
V o ilà, il faut en convenir, des raisons déterminantes;
c’est comme si ou osoit soutenir qu’une institution d’hé
ritier, faite avant les lois prohibitives, doit être subor
donnée à l’article 9 13 du Code Napoléon , parce que
l’instituant n’est décédé qu’après la publication du Code.
En effet, une institution d’héritier n’est faite aussi que
in contemplatione mortis ,* elle est subordonnée au décès
de l’instituant, qui peut aliéner, dissiper pendant sa vie.
Cependant on a toujours pensé qu’une institution portée
en un contrat de mariage étoit une donation entre-vifs
de la qualité d’héritier; que les effets devoient en être
réglés par la loi en vigueur au temps du contrat, et
que le Code ne disposoit que pour l’avenir.
L article iert ¿Je la loi du 18 pluviôse an 5 ne d it-il
pas aussi que toutes dispositions entre-vifs et irrévocables,
antérieures à l’émission des lois nouvelles, doivent se
régler conformément aux anciennes lois?
�C 8 )
O r , le don mutuel porté au contrat de mariage est
aussi une donation entre-vifs, q u i, comme l’institution
contractuelle, porte sur la succession , q u i, comme elle;,
ne doit prendre effet qu’au décès du donateur, dont l’exé
cution est renvoyée à l’événement , mais qui saisit dès
l ’instant même, et ubi eaiiem ratio ibidem jus.
_ La dame Kempfer ne veut rien passer aux premiers
juges; leurs décisions dii>e?~ses sont autant d'erreurs ,*
ils se sont permis de dire qii’elle manquait de respect à
la loi existante : c’est une idée faus-se cachée sous de
grands mots. .
Mais il n’y a pas Ridée fausse ; omnis idea est vera :
voilà la première règle qu’on apprend en logique; et les
premiers juges n’ont-ils pas pu penser et dire, sans blesser
la dame K em pfer, que s’en rapporter à une loi future
c’est dire que la loi actuelle est mauvaise, qu’on ne veut
pas s’y conformer, et qu’on en attend une meilleure? Ce
sera , pour contenter la dame Kempfer , offenser le lé
gislateur , et non la loi. Mais il n’en sera pas moins vrai
qu’on est obligé de se soumettre à la loi existante ; que
s’en référer à une loi future c’est introduire un effet ré
troactif, ce qui seroit une monstruosité en législation.
I/O dame Kempfer cite, à l’appui de son système, un
arrêt de la C ou r, du 29 janvier 1 8 1 2 , qui ne reçoit
aucune application à un don mutuel. Il s’agissoit, dans
la cause de la dame C lary, d’une institution faite sous
la loi du 4 germinal an 8 : les père et mère instituoient
le contractant pour la portion en préciput que la loi permettoit de donner à l’ouverture de la succession.
L a Cour pensa que l’institution n’étoit pus faite sous
une
�( 9 )
une loi prohibitive; que la loi du 4 germinal an 8 per
mettait la disposition d’ une portion virile en préciput;
que la disposition n’étoit pas annullée, quoiqu’elle fût
excessive; qu’elle étoit seulement sujette à réduction , et
que cette réduction devoit s’opérer par la loi du décès.
La Cour n’auroit pas jugé ainsi, si l’institution a voit été
faite sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ; et, comme
on le v o it, l’espèce est bien différente , et n’a aucune
analogie avec une donation entre-vifs portée par contrat
de mariage.
M ais, dit la dame K em pfer, la loi du 17 nivôse an 2
n’est pas -prohibitive, et les premiers juges eux-mêmes
n’ont pas osé le dire; ils ont seulement dit que cetle loi
étoit impérative et irritante • et encore une discussion
grammaticale sur la différence qu’on doit faire entre une
loi prohibitive et une loi impérative. Mais on passe sur
la loi irritante ; car cette expression est encore plus forte
que celle de prohibitive , puisque tout ce qui est irritant
ne laisse rien subsister de contraire ; il casse et annulle
tout ce qui ne seroit pas conforme. C’est ainsi qu’on l’en
tend au palais; et on dira à la dame K em pfer, pour la
contenter, que c’est encore la définition qu’en donne le
Dictionnaire de l’Académie.
Les premiers juges se seroient-ils donc encore trom
pes, lorsqu’ils ont dit que la loi étoit irritante , c’està-dire, prohibitive ? Que porte l’article 1 3 , §. 2 ? « S’il
« y a des eufans de l’union, ou d’ un précédent mariage,
« ces avantages, au cas qu’ils consistent en simple jouis« sance, ne pourront s’élever au delà de la moitié du
a revenu des biens, etc. »
/
�( IO )
N e pourront : si ce ti’est pas là du proh ibitifj on ne
s’y connoît pas ; voilà pour les avantages déjà existans.
Pour ceux qui auront lieu à l’avenir, la loi leur donne
la plus grande latitude, tant qu’il n’y a pas d’enfans ;
mais, s’il ÿ en a , elle convertit ou l’éduit ces avantages
à l’usufruit de moitié, coiiformément à Varticle 13 cidessus.
D onc, s’il y a des enfans, les avantages autorisés ne
pourront excéder l’ usufruit de m oitié; donc la loi est
prohibitive.
Il est très-vrai qùe le système restrictif de la loi n’est
pas pour les libéralités entre ép o u x, tant qu’il n’y a
pas d’enfans; elle a voulu leur donner la plus grande
latitude, parce que les libéralités entre époux sont la
plus douce récompense de la tendresse et de l’affection
qu’ils se doivent mutuellement.
'
Mais la préseoce des enfans fait cesser cette latitude;
la loi les protège, elle veille à leurs intérêts, elle les
préfère aux époux, à qui elle interdit alors d’aliéner;
elle arrête les mouvemens de la séduction de la femme,
ou de l’empire du mari ; et tout rentre dans l’ordre,
du moment que l’intérêt des enfans est à couvert.
Car il faut bien remarquer ici que la loi ne fait au
cune différence entre les premières et les secondes noces;
la disposition est la même. Mais combien il eût été
dangereux de permettre des avantages en propriété, en
faveur d’un second époux! l’appât d’un nouveau lien
auroit souvent fait sacrifier les enfans d’une première
union. La loi a donc sagement prévu tous les excès aux
quels peut se porter une tendresse aveugle, plus sou-
�Vent un intérêt sordide, et n’a permis que des dispo
sitions de jouissance, en réservant toujours la moitié
libi’e pour les cnfans.
Il y a cette particularité dans la prétention de la dame
K em pfer, qu’on pouri’oit placer au chapitre des con
tradictions, c’est que tout en voulant la loi libérale du
17 nivôse an 2 , qui favorise les époux, qui leur permet
tout, sauf réduction en cas d’enfans, elle veut cepen
dant s’en référer à une loi restrictive, en haine des
secondes noces , et qui rappelle la loi romaine Hac
edictali actione , ainsi que l’édit des secondes noces.
Elle ne peut avoir que le quart , d’après le Code,
tandis qu’on lui offre la m oitié, d’après la loi qui régit
son contrat. Mais la dame Kempfer est opulente ; la
succession du général d’Ayat n’a pour tout immeuble
que la terre de ce n om ; elle ne peut se diviser com
modément : la dame K em pfer, en conséquence, veut
une propriété; elle fera liciter, elle se rendra adjudi
cataire du patrimoine de la dame T e rrey re , elle le
transmettra à ses enfans du premier lit. Voilà l’objet
de son ambition, voilà son unique désir ; elle compte
sur ses moyens bien au-dessus des facultés de la dame
T erreyre; et de là ces dissertations sur les mots employés
par les premiers juges, et sur les lois prohibitives ou
impératives.
La dame Kempfer termine sa discussion par la citation
d’un arrêt de la Cour, du 21 juillet dernier, qui n’a en
core aucune similitude. Un père avoit constitué à sa fille,
en la mariant, un avancement d’hoirie de 2,000 francs.
On doit toujours présumer qu’un avancement d’hoirie
2 *
�( 12 )
n’excède pas les facultés du constituant à l’épôque où il
est fait, qui est la seule qu’ il faut considérer.
Il est de principe généralement reconnu que l’héritier
peut s’en tenir à son avancement d’ hoirie, en abdiquant
la qualité d’héritier; mais si à l’époque de l’ouverture
de la succession la fortune a dim inué, si l’avancement
d’hoirie est excessif et blesse la légitim e, on peut l’atta
quer par la voie du retranchement jusqu’à concurrence
de la légitime. C’est ce qu’a jugé la Cour. La loi du
17 nivôse an 2 ne s’opposoit nullement à ce que le père
fît un avancement d’hoirie à sa fille en la mariant. Pour
juger s’il y a excès dans cet avancement, il faut néces
sairement attendre l’ouverture de la succession, et régler
l’eifet de cet avancement d’après la loi du décès, parce
que l’avancement d’hoirie n’est pas considéré comme un
avantage ou une donation, ce n’est qu’un délaissement
par anticipation d’une partie des biens du*constituant. La
Cour, en se conformant au principe qui veut que l’hé
ritier puisse s’en tenir à sa constitution, a décidé que la
fille Dumas étoit maîtresse de conserver son avancement
d’h o irie, ou que si les autres cohéritiers vouloient la
forcer à venir au partage, ils seroient tenus de lui dé
laisser le quart en préciput, parce q u ’ alors ils n’a voient
point à se plaindre, et qu’ils consei’voient la réserve de
la loi.
Quel rapport peut avoir cet arrêt avec le don mutuel
porté au contrat de l’an 4 ? On le cherche vainement;
on ne voit pas surtout comment la dame d’Ayat peut en
tirer la conséquence, ou qu’elle doit avoir le quart en
propriété, ou qu’011 doit lui donner 3,000 fi\ de rente,
/
�C 13 )
' 5 o,ooo fr. une fois payés; plus, la jouissance delà moitié.
On ne s’attendoit pas à cette conclusion , puisque, dans
•l’un comme dans l’autre cas, tous les avantages doivent
être restreints à la quotité disponible.
La dame Kempfer a-t-elle mieux raisonné sur cette
'question que les juges dont est appel ? C’est ce que la
fCour saura apprécier. On passe maintenant à la seconde
"question.
Par le premier contrat de mariage du sieur Beaufrancliet d’Ayat avec la dame Guyot de Mongran , du 2 août
17 8 3 , le sieur d’Ayat (article 8) « constitue à son épouse
« une somme de 4,000 fr. de rente de douaire préfix /
« dans le cas o ù , lors de la dissolution du mariage, il
« y auroit des enfans vivans issus d’icelui ; le fonds au
« denier vingt duquel douaire sera propre auxdits en « fa n s et aux leurs , de leur côté et ligne. »
C’est de ce mariage qu’est issue la dame Terreyre. Le
sieur d’Ayat a fait divorce avec la dame de M ongran,
qui est encore vivante; il a épousé bientôt après la dame
Kem pfer, qu’il a fort bien traitée par son contrat.
Mais aujourd’hui qu’il s’agit de faire le partage, la
dame Terreyre a demandé le prélèvement du fonds du
douaire de sa m ère, qui est hors la succession du père
du moment du contrat qui le constitue.
L a dame Kempfer s’oppose à ce prélèvement, sur le
fondement que la dame Terreyre est héritière de son
p ère, et qu’aux termes de l’article z 5 i de la coutume
de Paris, nul ne peut être tout à la J'ois douairier et
héritier .
�( H )
' Les premiers juges n’ont pas adopté cette nouvelle
prétention.
>'
■' « Ils ont pensé qu e, d’après la coutume de Paris,
le douaire est une créance établie par la lo i; que ce
n’étoit pas une légitime, puisque le douaire n’est sujet
ni aux hypothèques ni autres charges après le mariage;
« Que le père une fois dépouillé des objets du douaire,
n’en avoit plus la libre pi’opriété ; qu’elle étoit dévolue
aux enfans, puisque le douaire leur est propre.
a L e douaire jouissoit de la faveur la plus étendue;
il n’étoit pas sujet à prescription pendant la vie du père;
il n’étoit purgé ni par le décret intervenu sur les biens
du père, ni par les lettres de i*atificatiou obtenues contre
lui.
y
ce II n’éprouvoit aucun retranchement, soit pour former
la légitime des enfans du second lit, soit pour fournir
à la constitution du douaire du second mariage; il se
prenoit sur les biens substitués comme sur les biens libres;
et on ne peut concevoir qu’une propriété si privilégiée
en faveur des enfans du premier lit, ait pu être légè
rement anéantie par une donation postérieure au profit
d’une seconde femme.
« Si l’ imputation ou le rapport fictif que demande
la dame Kempfçr avoit lieu , tout le privilège du douaire
s’évanouiroit, la dameTerreyre seroit comme n’en ayant
jamais été saisie, et le sieur d’Ayat comme n’en ayant
pas perdu la propriété.
« L e douaire ne peut être confondu dans la succes
sion que dans le cas de partage seulement en ligne di-
�( r5 )
rcctc. La dame Kem pfer, en se mariant, a nécessairement
connu le douaire dont étoit grevé son mari par son
premier contrat; elle a su que cet objet éloit retranché
des biens de son époux, qui n’en étoit plus le maître;
elle n’a pu y placer un espoir successif, ni le comprendre
dans la donation qu’il lui faisoit.
« La dame Kempfer détourne de leur vrai sens les
articles de la coutume de Paris qu’elle invoque; c’étoit
une coutume d’égalité en ligne directe ; elle ne devoit
pas permettre de confondre entre cohéritiers la qualité
de douairier et d’héritier. La jurisprudence avoit quel
quefois admis ce principe en faveur des créanciers de la
succession , mais là se boruoit la rigueur de l’incompa-'
tibilité, ainsi que cela résulte de la note de Dumoulin (i).
L a dame Kempfer n’est ni héritière ni créancière de la
succession d’Ayat ; elle ne peut donc exiger le rapport
du douaire, etc. »
La question a été parfaitement appréciée par les pre
miers juges, et il est aisé de justifier leur décision. In
dépendamment des autorités invoquées dans le premier
mémoire des sieur et dame Terreyre (2), on-ne peut
s’empêcher de mettre sous les yeux de la Cour la disser-*
tation qui se trouve dans le Nouveau recueil de juris
prudence. On sait que l’article douaire a été composé
par M«. Levasseur, jurisconsulte distingué : on peut dire
qu’il a traité la matière ex pnyfesso dans cet article. Voici
comment il s’exprime, tome 7 , au mot D ou aire, § . 1 2 ,
( 1 ) V o ir le prem ier m é m o ire , page 29 .
(?) Ibidem, et pages suivantes.
�^
. t y 1 *'
( 16 )
page 2 13. Il rappelle la disposition de l’article 25 i d elà
coutume de Paris, nul ne peut élre héritier et douairier
ensemble. « L ’incompatibilité de ces deux qualités, dit-il,
« n’est pas considérée comme une incompatibilité abso« lue; c’est une incompatibilité relative aux seuls héri
te tiers , afin d’empèclier que les enfans qui réunissent
« les deux qualités ne soient pas plus avantagés que ceux
c< qui n’ont que le titre d’héritier. L ’héritier douairier
« est tenu de rapporter à ses cohéritiers le bénéfice qu’il
« retire du douaire : tenetur doariurn conferre , a dit
ce Dumoulin ; et ce rapport annulle son avantage.
« L ’incompatibilité des qualités d’héritier et douairier,
a n’étant que relative aux seuls héritiers , rien n’em« pêche l’héritier présomptif de réunir ces deux qua« lités contre les douairiers. L ’héritier présomptif qui
« accepte et la succession et le douaire, est tenu, comme
« héritier, au rapport des avantages qu’il reçoit comme
« douairier; mais il n’est tenu à ce rapport qu’envers
« ses cohéritiers .
Pour expliquer sa pensée, M e. Levasseur suppose un
exem ple: « Un père veuf laisse, dans la coutume de
« Paris, une succession composée de 40,000 francs de
« biens sujets au douaire, et exempts de toutes dettes;
« il laisse aussi 20,000 fr. d’autres biens. 11 s’y trouve
« 10,000 francs de dettes certaines, et 30,000 fr. d’uûe
« dette incertaine réclamée contre le père, mais sur la
« validité de laquelle il y a procès.
« Deux enfans sont appelés î\ la succession, et sont
« d’avis différons.
a L e prem ier, regardant la dette réclamée comme
valable,
�( 17 )
k valable, ne veut pas soutenir le procès, et renonce
« à la succession , pour s’en tenir à son douaire. Le
« second, au contraire, accepte la succession, et reprend
« l’instance. Il pourra cumuler, vis-à-vis de son frère
« renonçant, la qualité de douairier et d’héritier, parce
« qu’ il n’est tenu envers son frère d’aucun rapport.
« En vain son frère lui opposera la disposition de la
« coutume; il répondra : L ’effet de la réunion des deux
« qualités est de m’obliger à rapporter, comme liéri« tier, le bénéfice que je puis avoir comme douairier;
« mais ce rapport n’est dû qu'aux héritiers, et mon
c< frère n’étant pas h éritier , ne peut exiger aucun
« rapport ; je p u is, à son égard , cumuler les deux
« qualités. »
V o ilà, sans doute, qui est déterminant. L e douaire
n’est pas une donation, mais une dette du père. Si la
jurisprudence a étendu l’incompatibilité des deux qua
lités jusqu’aux créanciers, il n’y a pas d’autre raison,
sinon que le douairier, se rendant héritier pur et simple,
est tenu indistinctement de toutes les dettes. Ainsi il n’est
pas étonnant q u e, respectivement aux créanciers, on
ne puisse cumuler les deux qualités. En effet, le douai
rier qui renonce à la succession, pour s’en tenir à son
douaire, est dispensé du payement des dettes; celui, au
contraire, qui accepte la qualité d’héritier, est tenu des
faits du défunt qu’il représente in univers um jus.
Mais si le douairier, au lieu de se porter héritier pur
et simple, n’accepte la succession que sous bénéfice d’in
ventaire , alors il pourra cumuler les deux qualités,
même vis-à-vis des créanciers; il n’est dans ce cas que
3
�( rS )
créancier- comme e u x , et ne confond pas ses: àdtrons
personnelles avec celles de l’hérédité. f C’est ce qui a été
jugé par un arrêt de 17 8 2 , rapporté par M e. Levasseur,
à la saite de sa discussion, et sur les conclusions de
M . l’avocat général Seguier, dans la cause du comte de
Montzonne. Ce savant magistrat donne en maxime que
le douaire n’est ni une hérédité, ni une légitim e, ni
enfin un bien qui vienne aux enfans à titre successif ;
il établit cette différence entre l’héritier et le douairier,
en ce que l’hérédité consiste uniquement dans les biens
que le défunt a laissés à sa mort, et tels qu’il les a laissés,
chargés de toutes ses dettes. L e douaire , au contraire >
est une portion déterminée des biens que le père possédoit, non au moment de sa m ort, mais à L’instant de
son mariage ; portion que le père n’a. pas pu depuis
aliéner ou grever d’hypothèque; qui n’étoit plus' en sa
disposition au moment de son décès- : le douaire est
exempt et franc de dettes. Ces caractères sont diamé
tralement opposés à ceux de l’hérédité ; et l’on peut
dire avec vérité que les biens sujets au douaire sont
bien dans le patrimoine du père, pendant sa v ie ; mais
ne font pas partie de sa succession...........
Plus loin , ce magistrat s’étonne qu’on ose soutenir
que le douaire est une espèce d’hérédité, une légitime;
il lui paroît évident que le douaire n’a rien de com
mun avec l’hérédité; et après avoir poussé cet argument
jusqu’à' la démonstration, M . Seguier en conclut que
des créanciers n’ont aucun droit d’opposer à l’héritier
bénéficiaire l’incompatibilité des qualités d’héritier et de
douairier. L ’arrêt fut conforme à ses conclusions.
�î *9 )
i O n né craint pas de s’égarer avec d’aussi grands mon
idoles. On avoit soutenu en première instance que la dis*
position de la coutume, art. 2.51 , n’étoit pas plus forte
que celle qui dit que nul ne peut être héritier et dona
taire ; et que cependant le donataire n’étoit tenu au
rapport, que vis-à-vis de ses cohéritiers en ligne directe,
par la seule raison que la coutume de Paris étoit une
coutume d’égalité. On n’avoit pas dit, comme le prétend
ia dame Kem pfer, que le douaire préfïx étoit une do
nation, mais on avoit prouvé que le douaire, soit qu’on
le considère comme une créance, soit qu’on le regarde
comme une donation, étoit hors la succession du père;
que le rapport n’en étoit du qu’entre enfans, et non
envers tout autre : on croit avoir parlé le langage de la
raison , et énoncé les véritables principes.
On se doute bien que la dame Kempfer n’est pas dè
cet avis, et qu’elle commence par soutenir que la dis
position de la coutume de Paris est générale, absolue,
et ne souffre aucune exception; que c’est une espèce
de légitime, quoique M . Seguier ne conçoive pas com
ment on ose le prétendre.
' L a dame Kempfer cite Potliier, Lebrun, Ferrîères,
qui tous ont parlé en termes généraux et ont supposé
■le concours des enfans; car, hors ces cas, on a vu que
Pothier et Ferrières ne sont pas de cette opinion. Mais
il est rigoureusement vrai qu’entre enfan-s le douaire
■provenant de la substance du père, dort être rapporté
à sa succession, si on veut v e n ir en partage; sans quai
-l’égalité seroit blessée.
L e droit de demander le rapport ou la restitution^
3 *
�( 20 )
appartient même aux créanciers, s’ écrie la dame Kem'pfer;
et il n’y a rien d’étonnant, puisque, comme le dit Pothier,
l’enfant qui réunit les deux qualités de douairier et d’hé
ritier, ne peut pas être débiteur de lui-même; puisque
celui qui est héritier est tenu des faits du défunt, par
conséquent de toutes les dettes qu’il a laissées. Et qu’estce que cela prouve pour la dame Kem pfer, qui n’est
ni héritière ni créancière ?
Mais arrive une prétention nouvelle que la dame
Kempfer n’avoit pas encore fait éclore. Suivant elle, il
n’y a plus de douaire ; le Code Napoléon n’eri a pas
établi; la succession du général ne s’est ouverte que sous
ce Code; par conséquent l’héritier ne peut plus réclamer
de douaii’e, même vis-à-vis des tiers. Elle cite l’opinion
de l’auteur des Questions transitoires, et le nouveau
Traité des donations de M . Grenier.
A la v érité, elle convient que ces auteurs n’ont parlé
que du douaire couium icr , qui appartient à la femme
par la force de la l o i , et non par le fait de l’homme.
Mais la citation du nouveau Traité des donations n’est
pas bien choisie, au moins pour la première question ;
car l’auteur y prouve en principe qu’un contrat doit être
réglé par la loi du moment, et non par la loi du décès;
et lorsque le contrat est antérieur à la loi du 17 nivôse
an 2 , et au Code Napoléon, l’auteur accorde à la femme
même le douaire coutumier, quand bien même la suc
cession du mari ne s’ouvriroit qu’après le Code; seule
ment il ajoute que les statuts et coutumes étant abrogés,
les enfans ne pourroient par réclamer le douaire coutu
mier.
�2#
v
*X<t
Mais cette opinion peut-elle s’appliquer au douaire
préfix ou conventionnel, dont l’effet est de faire disparoître le douaire coutumicr? Une convention solennelle
portée par contrat de mariage, et sous la foi de laquelle
les enfans ont vu le jour, peut-elle recevoir la plus légère
atteinte par une loi postérieure, lorsque la convention
a eu un effet présent, lorsque le père a mis hors sa suc
cession un capital qui n’a jamais pu en faire partie, que
les enfans n’out pu recueillir à titre d’héritiers , mais
bien à un titre.particulier de créanciers, ou, si on veut,
<le donataires ? C’est ce qu’on n’oseroit soutenir sans
blesser la plus saine doctrine.
• L ’arrêt relatif au tiers coutumier de Normandie, rentre
¿ans les mêmes principes que ceux invoqués par les au
teurs cités : c’étoit un don .statutaire, où il n’y avoit rien
du fait de l’homme, et qui a été abrogé par la loi du
17 nivôse an 2 , ainsi que par le Code.
Cependant la dame Kempfer termine par dire que la
darne Terreyre doit cesser d’invoquer la vieille coutume
de Paris. L e reproche est plaisant! L a darne T erreyre,
loin de l’invoquer, n’a cherché qu’à répondre à l’appe
lante , qui la rappelle à tout propos.; elle a voulu que
cet article fût sainement entendu et sagement interprété;
et c’est encore une des contradictions familières à la dame
Kempfer. Elle est aussi fort mécontente des premiers
juges, à qui elle reproche une interprétation fo r c é e ,
des erreurs érigées en principes. La C o u r leur rendra
plus de justice ; elle a souvent reconnu la sagesse de leurs
décisions.
La dame Terreyre observera cependant qu’il s’est glissé
/
�(22)
dans le dispositif du jugement u n e erreur q u i pourroit
lu i être préjudiciable, et ce ne peut être que p a r une
confusion des conclusions de la dame Kempfer ; car le
tribunal, tout en jugeant que la dame Kempfer est une
simple usufruitière de la moitié des biens, que le douaire
est hors la succession du général d’A y a t, ordonne ce~
pendant que les biens seront visités par des experts, qui
diront s’ils doivent être licites, et, dans ce cas, ordonne
la licitation. Ce seroit accorder à la dame Kempfer tout
ce qu’elle désire. Mais s’il peut y avoir, lieu à licitation
entre cohéritiers, on ne peut l’ordonner avec l’usufrui-»tier, ni forcer le propriétaire à vendre son bien.
L a dame Terreyre se propose de faire rectifier cette
e rre u r, et se réserve même , s’il en est besoin , d’inter
jeter un appel incident quant à cette disposition.
'
P A G E S , ancien avocat.
—
M e. M A R I E , avoué licencié .
A RIO M , d e l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire i
r u e d e s Taules, maison L a h d r i o t . — Février 18 14 .
�
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Terreyre, Denis. 1814]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse aux observations de la dame Kempfer de Plobshein, appelante d'un jugement rendu au Tribunal civil de cette ville de Riom, le 28 août 1813 ; pour le Général Terreyre et la dame Beaufranchet d'Ayat, son épouse, intimés.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2212
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53441/BCU_Factums_G2212.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53437/BCU_Factums_G2208.pdf
d8b1e544e312fc0fef6fdad6a90d6fdb
PDF Text
Text
M. D e n i s T E R R E Y R E , Général de brigade ,
~ Baron de l'Em pire, l'un des Commandans
de la Légion d’honneur , et dame A nneP a u l i n e - V i c t o i r e LO RS DE BEA U F R A N C H E T - D’A Y A T, son épouse, au
torisée en justice, défendeurs;
CONTRE
Dame J o s é p h i n e K E M P F E R D E P L O B S H E I M , veuve en premières noces , de
Georges
Huet
Berlem bourg
•
de
, et
Seign -W ittgn estein -
en secondes noces de
Louis-Charles-Antoine
L
o rs d e B e a u f r a n -
, Général de brigade , In s
pecteur général des haras de l'Empire ,
demanderesse.
ch e t-d A ya t
^
�( 2)
Q U E S T IO N S .
i°. L es dispositions entre époux, stipulées en con
trat de m ariage, doivent-elles se régler par la loi en
vigueur à Vépoque du contrat, ou par la lo i existante
à Vouverture de la succession de Vépoux prédécédé?
2°. Une fille , unique héritière de son père, peut-elle
prendre tout à la fo is les biens de îhérédité et le douaire
préjix q u i lu i est propre; ou , en d’autres termes, pe«/elle être douairière et héritière ?
JVîX a d a m e T e r r e y r e , fille unique du général d’Ayat,
n’a point à se reprocher un premier acte d’hostilité envers
la seconde femme de son père; c’est elle qui la provoque
par une demande exagérée qui a suivi de près la mort
du sieur d’Ayat.
Madame Terreyre ne doit à une seconde femme aucuns
sacrifices d’intérêt; elle n’est pas tenue aux mêmes égards,
à la même déférence qu’elle doit à sa m ère, pour qui
elle conserve toute la tendresse, tout le respect d’une
fille bien née : mais il suffisoit que la dame Kempfer
fût légalement la veuve du général d’A yat, pour que
sa fille désirât terminer aimablement toutes discussions.
Elle n’a pu y parvenir; elle est traduite en jugement,
et la défense est de droit naturel.
. L ’héritière du sang doit compter sur la faveur des
magistrats, lorsqu’elle défend son patrimoine contre
�l’ambition et la cupidité d’une seconde femme, qui a
trouvé le moyen de s’approprier une partie de la for
tune de son m a ri, que la nature et la loi destinoient à
sa fille unique. Mais madame Terreyre ne prétend à
aucune faveur ; elle demande justice , et se flatte de
démontrer que la'dame Kempfer est mal fondée dans ses
prétentions.
»
*
F A I T S .
L e sieur Beaufranchet-d’A yat contracta mariage avec
dame Elisabeth Guyot de Mongran , le 2 août 1783.
Il fut stipulé entre les époux une communauté conju
gale dans laquelle chacun devoit confondre une somme
de 30,000 francs.
Il est dit que le sieur de Beaufranchet se marie avec
les droits à lui appartenans, qui consistent i°. dans la
somme de 100,000 francs dont il lui a été fait donation
par un sieur abbé V an ier, lors du contrat de mariage
de la dame sa mère , et sous la charge de l’usufruit au
profit de cette dernière;
2°. Dans ce qui peut lui revenir, soit dans les biens
de la succession de son père, à raison des 40,000 francs,
fonds de douaire constitué par le sieur d’Ayat père à
la dame son épouse, et stipulé propre aux enfans du
mariage , soit dans les biens de la succession de son
aïeul.
La dame le Normand, mère du sieur d’A yat, lui cons
titue, en avancement de sa succession, 5 ,000 francs de
rente, au capital de 100,000 francs, qui lui appartiennent
1 *
�w
x
. •
( 4■
;
légitirnexiieut'idahs les 10,000 francs rde rente sur les se
crétaires du ro i, constitués par le contrat énoncé et daté.
La mère constitue, en outre, une somme cle 100,000 f r . ,
dont elle se réserve l’usufruit. ; t..ÀL .
t-uü v;
« Par une clause) expresse, portée en l’article 8 de ce
contrat, «.Je sieur d’A y a t constitue à son épouse une
« somme de 4,000 francs de rente de douaire préfix,
« dans le cas o ù , lors de la dissolution du mariage, il
cc y auroit des enfans vivans issus d’icelui; le fonds au
« denier vingt duquel douaire sera propre auxdits en« f a n s et aux leurs, de leur côté et ligne. »
Ces conventions sont les seules utiles à rappeler.
Il est né de ce mariage deux enfans; un iils, et une
fille qui est la dame Terreyre. Le 29 prairial an 2 , le di
vorce a été prononcé entre les époux, pour cause d’in
compatibilité d’humeur et de caractère. '
, L e 4 pluviôse an 3 , il y eut transaction entre les époux
divorcés; les droits de la dame Mongran furent liqui
dés et réglés; elle renonça à la,communauté conjugale;
il fut convenu que l’enfant mâle seroit à la charge du père,
et que la fille seroit remise à sa mère. Depuis, l’enfant
mâle est décédé.
,
'
L e 19 brumaire an 4 , sous l’empire de la loi du 17
nivôse an 2 , il y a eu un second contrat de mariage entre
le général d’A y a t, divorcé d'avec la dame G uyot-M ongrau, et avec laquelle il a liquide les droits ¿1 elle ap
partenait s , et Charlotte-Josépliine Kempfer, veuve de
Georges H uet, « ayant trois enfans de son mariage
.« avec le défunt, pour lesquels, comme leur tutrice lio« notaire et spécialement autorisée, elle a renoncé, cou-
x
�( 5 )
« jointement avec les tuteurs onéraires, à la succession
« de leur père, quant aux biens situés sur le territoire
« de la France, pour quoi elle n’est tenue à aucun compte
«^de tutelle. »
Les époux excluent le régime de la communauté;
« ils doivent jouir, à part et divisément, de leurs biens
« et revenus, à l’effet de quoi, la future demeure au« torisée à r é g ir , gouverner et administrer ses bieos
« et revenus, jouir, faire et disposer de son mobilier;
« en un mot, elle reçoit le pouvoir le plus étendu pour
« l’administration et la disposition de ses biens, et le
« futur promet avoir le tout pour agréable.
« Le futur a doué et doue la future de 3,000 francs
« de rente nette, et sans retenue, de douaire préfix, dont
« elle aura droit à compter du jour que ce douaire doit
« avoir lieu, sans être tenue d’en former demande en jusc< tice; le fonds duquel douaire sera propre aux enfans
'a à naître du futur mariage. »
Cependant, et nonobstant le douaire ci-dessus constitué,
le général d’Ayat se réserve la faculté de vendre tout
ou partie des immeubles qu’il possède, sans pouvoir être
inquiété ni recherché par les acquéreurs, pour raison de
ce douaire.
« Le survivant des deux époux doit prendre, h titre
« de gain de survie, sur les biens les plus clairs et les
« plus appareils du premier décédé, jusqu’à concurence
« de la somme de 5o,ooo francs, soit en deniers comp
te tans, soit en meubles et effets, suivant la prisée de
« l’inventaire et sans crue, soit sur les autres objets déte penduns de la succession, ainsi que le survivant avisera.
�N
( 6 )
a
«
«
«
«
«
tt
«
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a
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a
«
«
«
«
a
«
a
«
«
«
«
«
«
«
« Les meubles et effets mobiliers qui se trouveront
dans les maisons appartenantes à l’un ou à l’autre des
futurs époux , seront et appartiendront à celui des
deux auxquels la maison dans laquelle se trouvent les
objets mobiliers appartiendra. »
II n’y a d’excepté que « les habits, linges, hardes et
autres effets, par leur nature emportant l’usage particulier de celui des époux qui ne sera pas propriétaire de la maison ; le tout sans qu’il soit besoin, par
celui des futurs à qui appartiendra la maison, de
justifier d’aucunes quittances.
« L e loyer des lieux qui seront habités conjointement
par les futurs époux, seront payés chacun par moitié;
les baux en seront passés au nom de l’un et l’autre;
les meubles et effets mobiliers qui les garnissent, seront achetés et payés aussi chacun pour m oitié, sans
qu'il soit besoin, par les futurs, de justifier d’aucunes
quittances respectives ; pour q u o i, en cas de décès de
l’un ou de l’autre, les meubles et effets mobiliers seront partagés entre le survivant et les héritiers du
premier décédé, par m oitié, à l’exception néanmoins
des objets tels que linge de corps, de ménage, vêtemens , hardes , bijoux , argenterie, q u i , par leur nature, indiqueroient l’usage personnel de l’un des futurs,
ou porteroient son chiffre ou marque particulière; tous
lesquels effets derniers énoncés, appartiendront, d’après la marque ou indication, soit à l’époux survivant , soit aux héritiers du prédécédé.
« Dans le cas où l’un des époux auroit acquis seul
aucun effet mobilier- étant dans l’habitation coinl
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(7 )
mune, et q u i, par sa nature, n’indiqueroit aucun
usage particulier, il lui appartiendra, en justifiant
par lui de quittances, soit par-devant notaires, soit
sous signature p rivée, de la part des ouvriers et fournisseurs qui auront vendu et livré l’effet mobilier par
lui réclamé.
« Le survivant des époux a la faculté de garder tout
ou partie des effets mobiliers garnissant leur habitation commune, suivant la prisée de l’inventaire, et
sans cru e, sauf à imputer le montant des effets mobiliers sur l’effet de la donation qui va être ci-après
faite, et qu’on va littéralement transcrire.
« Les futurs époux, voulant se donner des preuves
de leur amitié réciproque, se f o n t , par ces présentes ,
donation m utuelle, p u re, simple et entre-vifs, l’un
à l’autre et au survivant d’e u x, et acceptée respectivement par le survivant, de tout ce dont la loi leur
permet de disposer en faveur l’un de l’autre, au jour du
décès du premier mourant, ayant enfans d’un prê
mier mariage, ou de tout ce dont la loi leur pér
mettra de disposer aussi en fa v e u r l’un de Vautre,
au jo u r du décès du premier m ouran t, dans le cas
oü la loi donneroit plus de latitude à ces sortes
de dispositions, p ou r, par le survivant des futurs,
en jouir à compter du décès du premier mourant, sui
vant et aux termes de la lo i, sans être néanmoins
tenu de donner a u c u n e ca u tio n , et seulement à la
charge de faire faire fidèle inventaire des biens du
prédécédé.
« Dans le cas o ù , au jour du décès du premier mou-
�«
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( 8 )
rant, les époux ne laisseroient aucun' enfant, soit du
précédent, soit du futur mariage , les futurs époux se
fout donation, toujours acceptée respectivement, de
tous les biens meubles et immeubles qui se trouveront appartenir au premier mourant d’eux , au jour
de son décès, h quelque somme qu’ils se trouvent
monter, et en quelques lieux qu’ils se trouvent dûs
ou situés, pour par le survivant jouir, faire et disposer
du tout en toute propriété, et comme de chose à lui
appartenante, à compter du décès du premier mouran t. »
•
:>
Telles sont les principales conventions de ce mariage.
Comme elles sont en général insolites , il étoit difficile
de les analiser plus brièvement. Les amis .du général,
qui en eurent connoissance, remarquèrent qu’il n’avoit
pu résister à la séduction, et lui reprochoieut d’avoir
oublié les deux enfans qu’il avoit encore à ce moment,
d’avoir même donné plus qu’il n’a v o it, en constituant
un douaire au capital de 60,000 f r . , un gain de survie
de 5o,ooo fr. au profit de sa femme , et en outre une
donation mutuelle, qu’il étendoit à tout ce que les lois
présentes et futures pourroient permettre de plus libéral.
On observoit encore que ces clauses multipliées, re
lativement au mobilier, étoient autant d’avantages in
directs au profit d’une seconde femme. Mais la dame
Terreyre doit garder le silence ; elle ne s’écartera jamais
du respect qu’elle doit a la mémoire de son père. Ce
n’est pas à elle qu’il appartient de blâmer sa conduite.
Elle n’avoit rien fait qui dût. lui faire perdre sa ten
dresse : s’il fut entraîné par les charmes d’uu nouveau
lien ,
�2JÔ
( 9 )
lien, la loi vient au secours de l ’enfant du premier lit,
pour arrêter la main prodigue d’un p è r e , d’un époux
trop généreux, qui s’oublie ou s’égare dans les bras d’une»
seconde femme.
Cependant il paroît que le général d’Ayat n’a pas
exécuté littéralement les conventions du contrat de ma
riage, relativement aux baux à loyer, qui devoient être
passés au profit des deux époux. Il avoit un loyer à
Paris : deux baux sont rapportés; l’un, du premier no
vembre 1806, pour trois, six ou neuf années; un se
cond, du premier nivôse an 13 , pour vingt et un mois :
dans ces deux baux le général d’Ayat y figure exclusi
vement ; la dame Kempfer n’y est pour rien.
La défenderesse s’est mariée avec M . le baron Terreyre,
le I er. octobre 1810. L e général d’A y a t , son p ère,
lui a cédé en toute propriété, et à titre d’avancement
d’h oirie, i ° . une rente de 600 fr. par a n , à prendre
et avoir dans celle de 1,360 fr. de rente perpétuelle,
inscrite à son profit au grand livre de la dette publique,
et 2°. le tiers d’une somme de 100,000 fr. de principal,
exigible au décès de la dame douairière le N orm and,
aïeule paternelle de la dame T e r re y r e , affectée sur la
terre Soisy-sous-Etiolle, près Corbeil. Mais comme la
dame le Normand en a la jouissance viagère, le sieur
de Beaufranchet, pour indemniser sa fille de la nonjouissance du tiers de cette somme, promet et s’engage
d’acquitter à la dame sa fille, annuellement, et à la fin
de chaque année, une rente de i , 5oo f r . , à compter
du jour de la célébration du mariage : la rente doit
se prendre sur la somme de 8,000 fr. d’appointemens
�> ,
i
( 'io )
provenans de la place d’inspecteur général des haras,
pendant aussi long-temps qu’il conservera cette place.
Dans le cas où il viendroit à la perdre, sans en obtenir
d’autre équivalente, la rente de i , 5oo fr. sera réduite
au quart de la pension de retraite qui lui sera allouée
dans la partie des haras.
Cette constitution singulière n’a pas besoin de com
mentaire ; elle prouve la vérité de ce que disoient les
amis du général, qu’il avoit donné à sa seconde femme
plus qu’il n’avoit.
L e général d’Ayat est mort à Vichy-les-Bains, le 2
juillet 1812. Sa veuve requit l’apposition des scellés,
q u i, en effet, furent apposés le 6 du même m ois, au
château d’A y a t , par le juge de paix du canton de SaintGcrvais.
L e 12 juillet 18 12 , il fut procédé à l’inventaire des
effets qui se trouvoient dans l’appartement de V ic h y , où
le-général étoit décédé.
L e i 5 du même mois de juillet, inventaire au châ
teau d’Ayat. Les scellés avoient également été apposés
à Paris, dans l’appartement que le général avoit à titre
de loyer; et le 4 novembre 1812, il a été procédé à
l’inventaire et à la vente des meubles qui s’y trouvoient,
par un commissaire priseur, suivant l’usage.
Ces formalités remplies , la dame Terreyre et son
époux n’avoient qu un seul désir, celui de terminer
amiablement toutes affaires d’intérêt avec la veuve de son
père; mais la dameKempfer s’est pressée d’en venir aux
voies judiciaires.
Quelle étoit cependant sa position? elle devoit plus
�qu’un autre des ménagemens à la fille unique de celui
que la loi lui permet d’appeler son époux ; elle ne pouvoit surtout ignorer que les prodigalités du général se
réduisoient à la quotité permise par l’article 14 de la loi
du 17 nivôse an 2, qui régissoit alors les conventions
matrimoniales; que le général n’avoit pu déroger à son
premier contrat de mariage, au douaire de 4,000 francs
qu’il a voit assuré à la dame Mongran,sa première épouse,
et dont le capital étoit propre aux enfans du premier lit.
Que restoit-il donc à la dame Kempfer? Son douaire,
son gain de survie s’évanouissent; tout se réduit à l’usu
fruit de la moitié des biens laissés par le général, déduc
tion faite des 80,000 francs qui appartiennent à la dame
Terreyre, en vertu du contrat de mariage de sa mère.
Il sembloit donc qu’il n’y avoit pas matière à discus
sion; mais la mère du général est toujours existante; elle
est usufruitière du capital de 100,000 francs, qui com
posent la succession du général d’A y a t, et la dame
Kempfer n’avoit rien à prendre dans ce moment. Elle a
cru sans doute intimider par des prétentions; et le 5
janvier 1813, elle a fait citer au bureau de paix M . et
madame Terreyre; elle expose qu’aux termes de son
contrat de mariage, du 19 brumaire an 4 , les époux se
sont donnés au survivant d’eux , tout ce dont la loi alors
existante leur permettoit de disposer, et même tout ce
dont la loi qui existeroit au décès du p r e m i e r mourant leur
permettroit de disposer en faveur l’un de l’autre ;
Que le sieur Beaufranchet étant décédé sous l’empire
du Gode Napoléon, la disposition devojt être régie par
les règles de ce Code; qu’en conséquence, d’après l’ar-
�( 12 )
ticle 1098 du Code, la dameKempfer a le droit de récla
mer contre l’enfant du premier mariage du sieur d’A yat,
le quart, en toute propriété, de tous les biens de celui-ci ;
Qu’elle auroit en équivalent le droit de demander
ce dont la loi existante au temps du mariage permettait
de disposer, c’est-à-dire, d’un côté, l’usufruit de la moitié
de tous les biens du général d’A y a t, de même que le
dixième en pleine propriété de ses biens, et ce confoi’mément aux articles 14 et 16 de la loi du 17 nivôse
an 2, et à l’article 6 de la loi du 18 pluviôse an 5 ; que
ces droits auraient lieu en sa faveur, indépendamment
de tous autres droits ou reprises qu’elle pourroit avoir
sur la succession de son m ari, résultans , soit de son
contrat de mariage, soit de toutes autres causes qu’elle
se réserve expressément de réclamer lors du partage des
comptes et liquidation à faire entre les copartageans. Mais
elle veut bien se contenter pour le moment du quart en
propriété.
Elle expose encore que les biens immeubles dépen
dons de la succession ne sont pas susceptibles d’être par
tagés commodément, et avec avantage, entre les parties;
elle demande qu’à sa requête, poursuite et diligence,
il soit procédé à la vente sur licitation, et à l’estimation
des immeubles, sur le cahier des charges qui sera a cet
effet déposé au greffe, après que toutes les formalités
prescrites par la loi auront été observées.
L e 11 janvier i 793 > Pr °cès verbal de non-concilia
tion. L e 18 du même mois de janvier, assignation en ce
tribunal, pour être condamné à venir à division et par
tage de tous les biens meubles et immeubles délaissés par
�( 13 )
le général d’A y a t , pour en être attribué un quart en
toute propriété à la demandei’esse ; elle conclut de nou
veau k la licitation-, et en attendant qu’elle soit faite,
elle demande un« provision de 10,000 francs, sous la ré
serve expresse de tous autres droits résultans de son
contrat de mariage.
L e 25 janvier, les sieur et dame Terreyre ont fourni
leurs défenses , et se sont principalement occupés de la
demande en provision ; ils ont rappelé les dispositions
du premier contrat de mariage, contenant une constitu
tion de douaire de 4,000 francs de rente, au principal
de 80,000 francs, propre aux enfans à naître du mariage.
Cet objet appartient à la dame T erreyre, et doit être
prélevé avant tout, indépendamment de toutes disposi
tions libérales du second contrat.
Tous les avantages faits au profit de la seconde femme
doivent se réduire à l’usufruit de la moitié des biens
restés libres entre les mains du général; il ne pouvoit,
aux termes de l’article 14 de la loi du 17 nivôse an 2 ,
donner autre chose que cet usufruit, et tous les avan
tages matrimoniaux se confondent dans cette jouissance
sans pouvoir l’excéder.
L ’article 16 de cette loi ne s’applique pas aux époux
qui ne peuvent rien se donner en propriété, lorsqu’il
y a des enfans du mariage, ou d’une union précédente.
La dame Terreyre donne les mains au partage, sous
cette modification; elle remarque, avec fondement, que
la dame Kempfer, très - opulente, paroît bien pressée
d’obtenir une provision, puisque, lors de sa demande,
il n’y a voit pas six mois que la succession était ouverte,
�W>
\ V i
(H ) '
et que son héritiere n’avoit encore perçu aucunes jouis
sances; elle ne trouve pas qu’il y ait de modestie à de
mander 10,000 francs pour la première fois.
’
La dame Terreyre se plaint que la dame Kempfer ait’
abusé des clauses de son contrat, relativement au mobi
lier, en enlevant celui d’Ayat pour meubler celui de Blot,
dont elle a fait l’acquisition peu de temps avant le décès du
général d’Ayat. Peu importeroit qu’elle l’eût enlevé avant
bu après la mort du général. Dans le premier cas, ce seroit
un avantage frauduleux; dans le second, ce seroit spo
liation, et la dame Kempfer n’en seroit pas moins pourvue
d’un objet dont elle doit rendre compte.
Elle ajoute que les provisions ne sont dues qu’en ligne
directe, entre cohéritiers; que la dame Kempfer n’est
point cohéritière, et qu’enfin toute provision est inutile,
lorsqu’on donne les mains au partage, et que la cause est
en état de recevoir un jugement définitif sur le fond.
Les répliques de la dame Kempfer ne valent pas la
peine d’être analisés; on ne fera mention que de ce qu’il
y a de plus saillant, pour donner une idée de son extrême
sensibilité, et de sa grande modéi'ation.
Elle est lasse cCattendre, et six mois de veuvage lui
paroissent un siècle. Ce que dit la dame Terreyre, res
pectivement au mobilier, est aussi étrange qu'in jurieux,
et rempli de la plus révoltante imposture. Elle fait grâce,
en se bornant au quart des liions; elle pouvoit exiger
l’usufruit de moitié, et un dixième-en propriété. Mais
une donation entre-vifs, portée par contrat de mariage,
n’est qu’un testament, une simple expectative, qui doit
se régir par la loi en vigueur à l’époque de l’ouverture
�( i 5 )
de la succession. La dame Kempfer's'embarrasse fort
peu de ce que contient le contrat de mariage de la dame
de Mongran ; elle ne le connoît ni ne le veut connoître*
La dame Terreyre a accepté la succession de son père;
elle a cessé d'être douairière, conformément aux articles
2Ôo et 2Ôi de la coutume de Paris, qui ne permet pas
de confondre ou de réunir les deux qualités ; ainsi il
faut retrancher le douaire.
Mais reprocher ù la dame Ivempfer d’avoir spolié le
château d’Ayat! n’est-ce pas une véritable calomnie?
L e soi-disant château d 'o y a t étoit une des plus mes
quines gentilhomeries de /’A uvergne, inhabitée depuis
plus de trente ans avant l'époque où les temps forcèrent
la dame d 'A y a t à y venir chercher un asile. L e général
d’A y a t n'a dans aucun temps acquis de meubles ; ce
serait avec les vieilleries vermoulues de ses a ïe u x , que
la dame JLernpfer aurait meublé à la înoderne son
château de B lo t , etc. , etc.
La dame Kempfer adresse ensuite quelques petits
reproches à la dame Terreyre ’ « elle avoit dit à la
« veuve qu’elle avoit donné des ordres d’apposer les
« scellés sur les appartenions qu’occupoit le général
« d’Ayat à P a ris, et elle avoit donné des ordres con« traires! les scellés n’y ont pas été apposés de suite;
« la dame Terreyre et son mari eu avoient toutes les
« clefs , entr’autres celle du petit coflre du secrétaire.
« Llle refusa d’aller au mois de septembre à Paris , et
« trouva mauvais que la dame K em pfer y eût envoyé
a sou gendre. »
Il est assez bizarre que la dame Keinpfer se permette
�c'UV
( i 6 )
ces petits reproches, et se gendarme si fort sur le terme
de spoliation ; qu’elle se réserve même de se pourvoir
en réparation d’injures contre la fille de son mari, sur
tout avec son contrat à la main , et son acquisition de
la terre de Blot. Mais ce qui paroîtra plus extraordi
naire, c’est de voir toutes,fes clefs entre les mains du
portier, les scellés apposés le 21 septembre, à la requête
du fondé de pouvoir de la dame K em p fer, l’inven
taire fait bientôt après, ainsi que la vente des meubles,
sur les poursuites et en présence de la veuve, qui n’a
pas eu la témérité de réclamer, ni de se plaindre; et
qu’ensuite, six mois après, elle vienne, en récriminant,
rappeler la clef d’un petit coffre que la dame Terreyre
n’a jamais eue en son pouvoir, puisqu’elle n’est allée
à Paris que lors de la vente des meubles.
Ce n’est là qu’un misérable commérage, qui ne sauroit
atteindre la dame Terreyre ; et personne ne croira que
le général son é p o u x , qui a toujours marché dans la
voie de l’honneur, se soit abaissé jusqu’à ces vils détails.
C’est même beaucoup trop s’en occuper ; et puisque
les sieur et dame Terreyre sont obligés d’entrer en lice
avec une veuve si pressée, mettant de côté la demande
en provision, qui n’est que ridicule, on croit devoir
discuter le fond de la cause, et examiner le mérite des
prétentions de la dame Kempfer.
La défense se divise en deux parties. Dans la première,
on prouvera que la dame Kempfer ne peut obtenir que
l’usufruit de la moitié des biens du général d’A y a t, que
tout se réduit h cette quotité de jouissance, et que son
contrat doit se régler d’après la loi du 17 nivôse an 2.
Dans
�( 17 )
Dans la seconde, on établira que la dame Terreyre a
le droit de réunir et de cumuler les deux qualités de
douairière et d’héritière, dès qu’elle est fille unique ;
que la disposition de la coutume de Paris ne reçoit au
cune application à l’espèce .particulière, et que le rapport
du douaire n’est dû qu’entre cohéritiers.
,j
,
' uc.'
1
,(
L a dame Kempjer doit être réduite à Vusufruit
de la moitié des biens délaissés par le général
d'Ayat
.
C’est un principe constant qu’une donation entre-vifs
doit se régler par la loi existante à l’époque où elle a
été faite. Il y a cette différence entre une donation et
un testament; c’est que la première a un effet présent,
qu’elle lie les parlies au moment même où elle est faite,
par cela seul qu’elle est irrévocable, tandis que le tes
tament étant ambulatoire et révocable à volonté jus
qu’au décès du disposant, n’a d’effet qu’au moment de
la m o rt, et par conséquent doit se régler par la loi
existante à l’ouverture de la succession. Cette distinction
a été parfaitement établie par le savant Ricard, dans son
Traité des dispositions conditionnelles, et personne n’oseroit entreprendre de contester une vérité aussi généra
lement reconnue.
La dame Kempfer en conviendroit elle-même; mais
elle veut établir une différence entre une donation mu-
3
�. TT1
' '
tuellej’ dont l’effet est renvoyé au décès du premier des
époux , ePune donation entre-vifs qui reçoit son exécu
tion au moment même. Elle pense que ce n’est qu’une
donation à cause de m ort, unJvéritable testament, qui
doit par conséquent se régler par le 1 Code Napoléon’*,
dès que la succession du général d’Aÿat est ouverte sous
l’empire du Code.
Dumoulin, sur l’article 291 d elà coutume de Bour
bonnais, a embrassé une opinion toute contraire; il dis
tingue la disposition de l’exécution : l u donatione sunt
duo dispositio et executio : dispositio vero statun ligat
nec suspenditur , et ab eâ j i t denominatio j ergo non
annuïlatur licet executio habeat tracturn.
L e don mutuel entre époux , dont l’exécution est ren
voyée au, moment du décès, doit-il être considéré comme
une véritable donation entre-vifs ? Voilà ce qu’enseigne
Duplessis, dans sa quarante-septième consultation : « La
« donation mutuelle est une véritable donation entre« v ifs , qui lie les parties au moment même où elle est
« faite; elle en a le principal caractère, qui est l’irrévo« cabilité........... Son exécution, à la vérité, » t remise
« au temps de la mort ; elle ne doit avoir d’effet que
« par le décès d’un des contractans; e t ‘par rapport à
« chacun d’e u x , elle est suspendue par l’incertitude de
« l’événement : mais dans la donation, il y a deux choses
« à considérer, la disposition et l’exécution de l’acte.
« Lorsque la disposition a lié sur-le-champ la liberté
« des parties contractantes, c’est une véritable donation
« entre-vifs, quoique son exécution ait trait à la mort. »
M . Grenier, dans son Traité des donations, tome/2 ,
�iv&
C 19 )
deuxième édition , pages 148 et 149, aux notes, professe
la môme doctrine.
Trois arrêts du parlement de Paris, en date des 14
février 1633, *7 février 1642, et 30jaoût 1675 ( tome 1,
Journal des audiences , et tome 2 du Journal du palais),
ont décidé que la donation mutuelle , loin d’être con
sidérée comme une donation à cause de m ort, devoit
être réputée donation entre-vifs, et comme telle jugée
non réductible ni sujette au retranchement que souffrent
les donations testamentaires. Le motif de ces arrêts est
que le droit étoit acquis dès l’instant de la donation, qui
demeuroit parfaite, absolue et irrévocable au même
moment quelle étoit passée.
Pareille question a été jugée deux fois, et de la même
manière, par la Cour de cassation.
Le premier de ces arrêts est du 18 mai 1812; il est
l’apporté dans Sirey, premier cahier de 1813, page 12
et suiv.; en voici l’espèce. Le 6 ventôse an 6 , mariage
du général W irion avec Marguerite Raclot; les deux
époux se donnent mutuellement tous leurs biens à venir
par une clause ainsi conçue : « Les futurs époux se font
« don mutuel, indéfini et irrévocable, le premier mou« rant nu survivant, de tous les biens généralement
« quelconques que délaissera le premier m ourant, pour
a le second être saisi cCiceux sans qu’il y ait inven
ta taire. »
M ort du général W irio n sans enfans, en 1809: son
père lui survit, et demande le quart de sa succession , en
vertu de la disposition du Code Napoléon; la veuve
conteste, et oppose sa donation.
r
3*
'&<*
�*
( 20 )
L e père embrasse le même système que la dame
Kempfer. Ce don mutuel nefrappoit que sur des biens à
venir; l’effet en étoit renvoyé à la mort; ce n’étoit qu’un
testament qui devoit se l’égler par la loi de l’ouverture
de la succession. Un jugement du tribunal de la Seine
adjuge la demande du père ; appel en la Cour impériale
de Paris ; arrêt du 6 août 1810, qui infirme et ordonne
l ’exécution pure et simple du don mutuel. L ’arrêt donne
pour motifs que les lois n’ont pas d’effet rétroactif;
que le caractère d’irrévocabilité attaché aux donations
de survie, singulières ou réciproques, stipulées par con
trat de mariage dont elles sont une condition, les cons
titue de véritables donations entre-vifs, qui ne peuvent
être soumises, dans leur exécution, qiCà la loi du contrat.
Il considère enfin que la donation portée au contrat de
mariage du 16 ventôse an 6 , a été faite sous l’empire
de la loi du 17 nivôse de l’an 2 , qui n’attribuoit au
cune réserve héréditaire aux ascendans.
Pourvoi en cassation, où le père renouvelle les mêmes'
moyens de défenses; la veuve lui oppose une foule d’au
torités , et notamment celles qu’on vient de rappeler, et
dont on a vérifié l’exactitude.
« La Cour, attendu que le don mutuel entre époux,
« fait par contrat de mariage, met le donateur dans
« l’incapacité de disposer ultérieurement de ses biens;
« d’où il suit qu’il est irrévocable, et, par une eonsé« quence nécessaire, qu’il doit se régir par la loi du
« temps où il a été f a i t ; que si, par la nature des choses,
« son exécution est purement éventuelle, cette éventua« lité se rattache à l’époque de la disposition, puisque
�«
«
«
«
c’est elle qui constitue le droit du donataire; — que
ce droit étant acquis d’une manière irrévocable, ne
peut être altéré en tout ou en partie, par une législation qui lui est postérieure;
« Que la prohibition de l’effet rétroactif des lois
« est en effet l’une des bases fondamentales de notre lé« gislation , et que ce seroit violer le principe établi par
« l’art. 2 du Code Napoléon, que de faire prévaloir les
« dispositions de ce Code aux lois existantes à l’époque
« de la convention ;
« Attendu que l’art. 9 1 5 du même Code, sur lequel le
« demandeur fonde son ouverture de cassation, n’a disposé
« que pour l’avenir; que cela résulte non-seulement de
« sa combinaison avec l’art. 2 , mais même de ses propres
c< termes, pris dans leur sens littéral; qu’ainsi le don mu
te tuel que se firent les époux W ir io n , par leur contrat
te de mariage du 6 ventôse an 6 , n’a pu recevoir aucune
te atteinte des dispositions de l’article 9 1 5 , qui n’a acquis
te le caractère de loi qu’en l’an 12 ; et que loin de
te violer ledit article, l’arrêt attaqué a fait une juste ap
te plication de l’article 2. Rejette. »
L e second arrêt rapporté dans le même recueil, pre
mier cahier de 18 13, est du 9 juillet 1812.
Le 18 mai 1785, contrat de mariage de Marc-Urbain
Leclerc et de Victoire-Antoinette Maussaire; les époux
se firent un don mutuel de tous biens, aux termes de
la coutume de Paris, sous l’empire de l a q u e l l e ils dé
clarèrent se marier.
Leclerc, à l’époque de son mariage, avoit une fille
�îib
u
( 22 )
naturelle, reconnue par son acte de naissance; elle s’étoit
mariée avec un sieur Abadie , le 23 fructidor an 11.
>
Leclerc meurt le 26 juillet 1809, sous l’empire du Code
Napoléon. La veuve réclame tous les biens du mari, en
vertu de son don mutuel. La fille demande la réserve sur
les biens donnés, aux termes des articles 754 et 757 du
Code Napoléon. Jugement du tribunal de la Seine, qui
affranchit le don mutuel de tout retranchement, sur le
fondement que le don mutuel par contrat de mariage est
une véritabledonation entre-vifs, qui n’est soumise,quant
à son étendue et à ses effets, qu'aux lois existantes à
Vépoque du contrat ; qu’à l’époque du contrat la loi
n’accordoit aucun retranchement en faveur des enfans
naturels.
L e 22 février 1 8 1 1 , arrêt confirmatif de la Cour im
périale de Paris. Pourvoi en cassation, et toujours avec
le même système que le don mutuel, par contrat de
mariage, n’est point une donation entre-vifs, mais une
donation à cause de m ort, soumise au retranchement
et aux réserves, d’après les lois existantes à l’époque du
décès du donateur.
A rrê t, sur les conclusions de M. le procureur général
M erlin, qui rejette, par les mêmes motifs que le précédeat.
Il est donc bien constant quVw don mutuel est une vé
ritable donation entre-vifs, qui lie les parties dans le mo
ment même, à raison de son irrévocabilité, et q u i, par
conséquent, ne peut se régir que par la loi du contrat.
Comment dès-lors la dame Kempfer peut-elle invoquer
�(. 23 )
l’article 1098 du Code Napoléon, lorsque son contrat
a été passé sous la loi du 17 nivôse an 2? ne seroit-ce
pas évidemment donner un effet rétroactif au Code Na
poléon, au préjudice de l’article 2 du même Code? Peu
importe que l’exécution d’une donation entre-vifs soit sus
pendue, qu’elle ne puisse avoir effet qu’à la mort du do
nateur; elle n’en a pas moins un effet présent, en ce qu’elle
met le donateur dans l’impuissance de disposer de ses
Liens à titre gratuit. Ainsi il faut dire, avec Dumoulin
et Ricard, que la donation étant irrévocable, caractère
qui détermine la substance et la qualité de da donation,
doit se régler par la loi existante au moment de la do
nation , et que le moment de l’exécution est absolument
indifférent pour en déterminer la nature et les effets.
L e don mutuel porté par le contrat de mariage n’a
donc d’autre régulateur que la loi du 17 nivôse an 2.
Les lois futures ne pouvoient avoir aucune influence sur
un don mutuel, qui a un effet présent; et rien de plus
inutilè que la clause qui se réfère aux lois à venir.
Il reste à démontrer à la dame Keinpfer qu’elle s’abuse
encore dans sa prétention, en supposant que si la dona
tion doit se régler par la loi du 17 nivôse an 2, elle doit
avoir l’usufruit de m oitié, et le dixième en propriété.
Pour prouver son erreur, il faut rappeler notamment
les articles 13 et 14 de cette même loi. La première partie
de l’article 13 donne aux époux la plus grande latitude
dans leurs bienfaits, lorsqu’ils n’ont pas d’enfans, et la
loi interprétative du 22 ventôse ajoute que c’est une
latitude politique, qui fait assez apercevoir que le sys-
�\W \
( M )
tème restrictif n’est pas pour les libéralités entre ép o u x,
lorsqu’il n’y a pas de descendans.
Mais en même temps , si la loi a voulu laisser aux
époux tous les moyens de se faire des avantages singuliers
ou réciproques, elle a aussi veillé sur le sort des enfans;
et la seconde partie de cet article 13 porte textuellement :
« Néanmoins, s’il y a des enfans de leur union, ou d’un
cc précédent mariage, ces avantages, au cas qu’ils concc sistent en simple jouissance, ne pourront s’élever au
« delà de la moitié du revenu délaissé par l’époux dé« cédé ; et s’ils consistent en des dispositions de propriété,
« soit mobilière , soit immobilière, ils seront restreints
« à Vusufruit des choses qui en seront Vobjet, sans
« q u ils puissent excéder la moitié du revenu de la
« totalité desdits biens. »
Il convient de s’arrêter un instant sur ces dernières
expressions de l’article. A moins de se refuser à l’évi
dence , toutes les libéralités, en cas d’enfans, ne peu
vent jamais excéder la jouissance de la moitié des biens;
et l’époux s u r v iv a n t ou donataire, ne peut, en cas d’enfans,
rien recevoir en propriété ; la loi le borne à un simple
usufruit. Si la donation est faite en propriété, elle est
réduite à la jouissance, et si cette jouissance encore excède
la moitié des revenus ,*elle est réduite à cette moitié.
L ’article 14, qui suit, se référé en entier à l’article 13 ,
en permettant encore aux époux, pour l’aven ir, de se
faire des avantages par quelque acte que ce soit ; il ajoute :
a Sauf néanmoins leur conversion ou réduction en usu« fr u it de m o itié, dans le cas où il y auroit des enfans,
« conformément à Varticle 13 ci-dessus. »
Ce6
�*ÎC K
( 25 )
—
Ces deux articles s’appliquent uniquement et exclusi
vement aux donations faites entre époux. La loi s’oc
cupe ensuite de toutes autres dispositions qu’elle veut
permettre au profit des tiers; elle y met la plus grande
parcimonie, et exclut absolument les successibles, parmi
lesquels elle établit la plus stricte égalité.
Cependant, par l’article 16, elle autorise pour l’avenir
la disposition du dixième de son bien, si on a des hé
ritiers en ligne directe , ou du sixième , si l’on n’a
que des héritiers collatéraux, « au profit d’autres que
« des personnes appelées par la loi au partage des succes« sions. >3
Il est vraiment curieux d’entendre la dame Kempfer
s’appliquer le bénéfice de cet article , et réclamer le
dixième en propriété des biens du général d’A y a t , lors
qu’ il est décidé , par les articles précédens , qu’en cas
d’enfans, tous les gains, tous les avantages se confondent
dans la jouissance de moitié, et ne peuvent l’excéder;
lorsqn’enfin la loi décide que les dons en propriété sont
restreints à l’usufruit des choses qui en sont l'objet.
Comment ne pas voir que l’article 16 ne se rapporte
qu’à des tiers, et non aux époux; à des étrangers, à des
amis , pour laisser des moyens de récompenser le zèle
ou l’affection d’un am i, d’un parent non successible ;
mais que les époux ne sont pour rien dans cette dispo
sition ? Si en effet le général d’Ayat s’étoit contenté de
donner a sa seconde femme le dixième en propriété , le
don seroit réduit à l’usufruit de ce dixième; il a donné
à sa libéralité toute la latitude permise; elle doit donc
4
�( * 6 ) ..............................
aller jusqu’à l’usufruit de m oitié, mais rien au delà.
La dame 'Kempfer invoque , à l’appui de son système,
l’article 6 de la loi du 18 pluviôse an 5 ; et cette dé
couverte n’est pas heureuse. En effet, pour bien entendre
cet article, il faut connoître le précédent, qui s’occupe
des actes de dernière volonté, maintenus par l’article 4.
La loi veut qu e, lorsque ces actes contiennent tout à
la fois des dispositions ù titre universel, et des legs par
ticuliers , les dispositions universelles et les legs parti
culiers soient réduits proportionnellement, et au marc
la livre des valeurs que chacune des dispositions devoient
produire net par les anciennes lois, à celui qui en étoit
l’objet.
Mais par l’article 6 , les avantages entre époux, main
tenus par les articles 13 et 14 de la loi du 17 nivôse
an 2 , sur ¡’universalité des biens de l’auleur de la dis
position , ne s’imputent point sur le sixièm e ou le
dixième déclaré disponible entre toutes les personnes,
par l’article 16 de la même lo i, et n’entrent point en
concurrence avec les autres légataires, dans la distribu
tion au marc la liv re , ordonnée par l’article précédent.
Cela ne veut dire autre chose, sinon que les libéra
lités entre époux ne reçoivent aucun retranchement par
le legs du sixième ou du dixième; qu’il n’y a pas de
concurrence entre les époux donataires et les légataires.
Mais la loi suppose évidemment que les légataires de
cette quotité sont autres que les époux, et ne peuvent
pas être les époux.
Ainsi donc , et en terminant sur celte première partie
�m
( 27 )
de la cause, le don mutuel, porté par le contrat de
mariage du 19 brumaire an 4 , le douaire et le gain de
survie, constitués par le même contrat, se confondent
dans les avantages autorisés par l’article 14 de la loi du 17
nivôse an 2 , et se réduisent à l’usufruit de la moitié des
biens libres qu’a laissés le général d’Ayat lors de son décès.
On dit les biens libres; car il ne faut pas oublier que
le général d’A y a t , par son premier contrat de mariage
avec la dame Mongran, du 2 août 1783, avoit constitué
à sa femme un douaire de 4,000 francs de rente, dont
le principal étoit stipulé propre aux enfans à naître du
mariage. L e général d’Ayat n’a pu déroger à celte dona
tion par des dispositions ultérieures, et son second contrat
ne doit y porter aucune atteinte.
Madame Terreyre, fille unique provenue de ce pre
mier mariage, doit don c, avant tout, prélever cette
somme de 80,000 francs, qui fait le capital du douaire,
et qui lui est propre : elle a justifié de ce contrat, qui
a été communiqué à la demanderesse.
« Mais cette disposition lui est absolument indifférente,
« dit madame Kempfer; elle ne peut en rien changer ses
« droits, ni la position des défendeurs à son égard. La
« dame Terreyre a accepté purement et simplement la
« succession du général son père : dès l’instant qu’elle a
« été héritière, elle a cessé d’être douairière, suivant les
« articles 260 et 2Ôi de la coutume de Paris ; elle ne peut
« pas confondre les deux qualités. C’est donc sans but
« comme sans utilité qu’elle excipe du contrat de sa
« m è r e , qu’elle rappelle une disposition relative à un
4*
tu
�vn.
i
( i8 )
« douaire p ré fix , qu’elle auroit elle-même effacée par
« son propre fait. »
11 faut prouver h la dame Kempfer que madame T erreyre, iille unique, a pu être tout à la fois douairière
et héritière, et que la demanderesse s’iibuse encore dans
sa prétention. C’est la seconde partie de la cause, qui,
comme on vo it, n’est pas la moins importante.
§. I I .
Madame Terreyre, fille unique, a le droit de réunir
les deux qualités de douairière et dhéritière de
son père > et peut prélever le fonds de douaire
avant Vexercice des droits de la seconde femme
.
L ’unique moyen opposé par la dame Kempfer, soit
dans ses répliques, soit dans les consultations qu’elle a
obtenues , est tiré de l’article 2Ôi de la coutume de
Paris, qui porte : « Nul ne peut être héritier et douai« rier ensemble, pour le regard du douaire coutumier
« ou préfix. »
Il en résulte, dit-elle, que d’une manière indéfinie,
généi'ale et absolue, un enfant ne peut jamais en aucun
cas réunir les deux qualités d’héritier et de douairier.
Cette proposition , prise dans un sens aussi absolu,
est une erreur combattue par les.auteurs les plus ac
crédités.
Il faut bien se pénétrer d’abord d’un principe qui
aide à expliquer dans quel sens on doit entendre l’ar-
�( *9 )
ticle 2Ôi de la coutume de Paris. Cette coutume étoit
une coutume d’égalité, o ù , du moins en ligne directe,
les enfans étoient obligés au rapport de tout ce qui leur
avoit été donné par leur père ou mère, lorsqu’ils venoient à leur succession; ils ne pouvoient garder les dons,
legs ou douaire qu’en renonçant à la succession ; on ne
pouvoit être héritier et donataire ( art. 303 et 304). C’est
dans le même esprit que la coutume a d it, article 25 i ,
que nul ne peut être héritier et douairier ensemble. Et
pourquoi, nous dit Dumoulin,,sur l’article 178 de la cou
tume de Senlis, qui a la même disposition que celle de
Paris? Quia débet doarium conferre : arrestum fatn os uni vigilia natalis JDomini 1536.
I/enfant ne peut donc cumuler la qualité de douairier
et d’héritier que parce qu’il doit le rapport du douaire.
A qui ce rapport est-il dû? Il ne peut l’être qu’aux co
héritiers ou aux créanciers , parce que le rapport n’est
dû que dans ce cas. Si donc il n’y a qu’un enfant, et
qu’il n’y ait pas de créanciers, le rapport du douaire n’est
pas d û , l’héritier peut cumuler les deux qualités.
Cette conséquence résulte de l’article 262 de la même
coutume, qui porte « que celui qui veut avoir le douaire,
« doit rendre et restituer ce qu’il a eu et reçu en ma« viage, et autres avantages de son père, ou moins
« prendre sur le douaire. »
Ferrières, sur cet article 2Ô2, n°. 4 , tient « que ce
« rapport est introduit tant en faveur des enfans qu’en
« faveur des créanciers; en faveur des enfans , parce que
« les uns seroientplus avantagés que les autres; ilsseroient
�C 3° )
plus avantagés que ceux qui seroient héritiers, étant
déchargés de toutes dettes et hypothèques.
a La faveur des créanciers oblige aussi à ce rapport;
car un père ayant épuisé ses biens par des donations
faites à ses enfans en avancement d’hoirie, ou pour
les marier, et ayant pour cet effet créé des dettes, les
enfans prenant encore pour leur douaire une grande
partie de ses biens, les créanciers qui certant de damno
vitando, seroient en danger de perdre tout ce qui leur
seroit dû. »
Enfin, n°. 6 , Ferrières donne en maxime que ce rap
port n’a lieu qu’en faveur des enfans, pour conserver
entr’eux l’égalité , et à l’égard des créanciers.
' L ’annotateur de Ferrières ajoute que cet article est
clair, qu’il ne mérite pas d’explication ; ce n’est propre
ment que la suite du précédent. Car, comme le fils ne
peut pas être héritier et douairier, il faut qu’il rapporte
tout ce qu’il a reçu de son p è re , ou qu’il souffre qu’on
en fasse la diminution sur le douaire, parce que tout
ce que le père donne est présumé donné en avance
ment d’hoirie.
. Qu’est-ce en effet que le douaire préfix stipulé propre
aux enfans à naître du mariage? Ce sera, si l’on veut,
une créance établie sur les biens du p è re , mais ce ne
sera pas moins un bienfait exercé par le père, une do
nation en faveur des enfans. O r , le rapport d’un bien
fait, d’une donation, n’a jamais lieu qu’entre héritiers ,
afin d’établir entr’eux l’égalité; car voilà l’unique motif
du rapport. O r , il ne peut utre question d’égalité qu’entre
«
a
'
«
«
«
«
cc
a
«
�2U
( 31 )
héritiers, et jamais entre un enfant, et des étrangers
qui viennent en vertu de dispositions à eux faites. Ces
dispositions sont réputées de droit être bornées à ce
qui reste de lib re, distraction faite des objets donnés,
q u i, par cela m êm e, ne sont plus dans la succession.
La dame Kempfer invoque l’autorité de Pothier ,
Traité du douaire, pour établir qu’en aucun cas, et en
aucune sorte de manière, l’enfant ne peut être tout à
la fois héritier et douairier ; mais elle n’est pas allée
assez lo in , et n’a pas voulu lire ce qu’ajoute P o th ier,
page 439. Elle y auroit vu que si un enfant ne peut
cumuler les deux qualités, c’est parce que le douaire,
comme tous les autres avantages, soit que l’enfant les
tienne du père par des donations, soit qu’il les tienne
du bénéfice de la loi ( le douaire coutumier ) , doivent
être rapportés et conférés.
Il est vrai que Pothier en vient à ne plus supposer
un concours d’enfans, dont l’un seroit douairier, et les
autres non : il dit alors que le douaire étant une dette
de la succession , cet enfant, héritier de son p ère, ne
peut pas être débiteur de lui-même.
M ais, dans ce cas, Pothier suppose le concours de
l’enfant unique douairier , avec les créanciers de la suc
cession , et c’est une suite de ce qu’il avoit dit précé
demment ; car autrement, s’il n’y avoit aucune espèce
de concours de l’enfant douairier , soit avec d’autres en
fans, soit avec des créanciers delà succession, tout ce qu’il
,diroit seroit sans objet, et même absurde : aussi il ex
plique bien vite sa pensée, car il examine de suite si
�l’enfant peut être tout à la fois douairier, et héritier
sous bénéfice d’inventaire. Il distingue alors deux cas ;
celui où l’enfant douairier concourt avec d’autres enfans,
et celui où le concours auroit lieu avec des créanciers
de la succession.
Pour le premier cas, il prononce que l’enfant est tenu
au rapport, parce que l’enfant douairier, quoiqu’ héri
tier sous bénéfice d’inventaire, n’en est pas moins hé
ritier ; en sorte qu’il cumuleroit toujours ces deux qua
lités, ce qui ne se peut pas à l’égard des eufans.
Dans le second cas, l’auteur décide que l’héritier bé
néficiaire peut, vis-à-vis des créanciers, être héritier et
douairier. La raison en est, dit-il, que l’effet du bénéfice
d’inventaire est de conserver à l’héritier qui y a recours
tous les droits et recours qu’il a contre la succession; et
le douaire n’est autre chose qu’une créance.
Ce que Pothier ajoute est important. « A l’égard de
« l’objection qu’on fait, que la coutume dit absolument
« et indistinctement qu’on ne peut être héritier et douai<c n e r 7 je réponds qu’il est dit pareillement qu’aucun ne
« peut être héritier et donataire ,* néanmoins tout le
(t monde convient que cette maxime n’a d’application
« que vis-à-vis les cohéritiers de l’enfant donataire, aux« quels, lorsqu’il est héritier , il doit conférer et rnp« porter tout ce qui lui a été donné__ Pourquoi ne
« dirait-on pas pareillement que la règle n ul ne peut
« être héritier et douairier, n’a d’application que vis« à-vis les cohéritiers du douairier , auxquels l’enfant
« qui se porte héritier doit rapporter et conférer son
douaire,
�( 33 )
« douaire, d’autant que c’est le sens dans lequel l?a en
te tendu Dumoulin en sa note ?
r
En un m ot, quel est le principe) abstraction faite de
l’opinion des auteurs ? C ’est que tout rapport ne peut
avoir lieu qu’entre cohéritiers. Le Code Napoléon nous
a d on n é, sur ce poin t, des règles qui ne font pas droit
nouveau, et confirment les anciens principes. L ’art. 843
dit que tout héritier, môme bénéficiaire, doit l’apporter
à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt; ce qui
s’accorde parfaitement avec la doctrine de Potliier.
L ’article 85 y dit que le rapport n’est dû que par
le cohéritier à son cohéritier,* « il n’est pas dû aux
« légataires ni aux créanciers de la succession. » S i, dans
l’espèce particulière, les créanciers pouvoient prétendre
au rapport du douaire, ce n’est que par le motif qu’en
donne Ferrières, que le p ère, en créant des dettes, les
créanciers seroient en danger de perdre ce qui leur est dû.
Mais la dame Kempfer ne pouvant figurer, ni comme
enfant, ni comme créancière de la succession de son
m ari, ne peut demander un rapport à l’enfant unique
de son mari ; elle doit se borner à exercer ses droits
sur l’usufruit de la moitié des biens laissés par son mari ;
c’est-à-dire, ceux qui restent libres, distraction faite des
objets donnés, qui ne peuvent être dans la succession.
En un mot, il n’y a aucune différence entre la maxime
nul ne peut être donataire et héritier, et celle qu’elle
invoque , nul ne peut être héritier et douairier ,• et
comme la demanderesse n’auroit aucun titre pour de
mander à la dame Terreyre le rapport d’une donation,
�Jft»
s........
.
( 34 )
elle n’a pas plus de droit de lui demander le rapport du
douaire.
Voilà à quoi il faut se réduire; et puisque la dame
Kempfer est lasse d’attendre, il ne s’agit que de pro
noncer sur le fond : la matière est suffisamment disposée
pour recevoir un jugement définitif.
M e. P A G E S , ancien avocat.
M e. S I M O N N E T ,
avoué licencié;
A R IO M de l’im p. de T H IB A U D , im prim . de la C our im périale, et libraire,
ru e des T a u le s, m aison L andriot . — A vril 1813.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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A name given to the resource
[Factum. Terreyre, Denis. 1813]
Creator
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Pagès
Simonnet
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour M. Denis Terreyre, Général de brigade, Baron de l'Empire, l'un des Commandans de la Légion d'honneur, et dame Anne-Pauline-Victoire Lors de Beaufranchet-d'Ayat, son épouse, autorisée en justice, défendeurs, contre dame Joséphine Kempfer de Plobsheim, veuve, en premières noces, de Georges Huet de Seign-Wittgenstein-Berlembourg, et, en secondes noces, de Louis-Charles-Antoine Lors de Beaufranchet-d'Ayat, Général de brigade, Inspecteur général des haras de l'Empire, demanderesse. Questions. 1°. Les dispositions entre époux, stipulées en contrat de mariage, doivent-elles se régler par la loi en vigueur à l'époque du contrat, ou par la loi existante à l'ouverture de la succession de l'époux prédécédé ? 2°. Une fille, unique héritière de son père, peut-elle prendre tout à la fois les biens de l'hérédité et le douaire préfix qui lui est propre ; ou, en d'autres termes, peut-elle être douairière et héritière ?
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2208
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53437/BCU_Factums_G2208.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53278/BCU_Factums_G1604.pdf
f702618a802fe521ab0e4208200b6974
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m em oire
.
�Sí
G E N E A L O G I E
DES
PARTIES.
F ra n ço is V e s c lia m b e s,. m arié d eu x fois.
E n secondes noces
a
C a th erin e C o m b a rt.
E n p rem ières noces
M a rie la J a rrig e.
JeanJacq ues,
a
C la u d e .
G e n e v iè v e
la
V a is s iè r e .
M a rg u e rite . M a rg u e rite .
fo rclo se ,
à
F ran ço is
S am son .
C a th e rin e ,
idc n i
à
F ra n ço is
V escham bes.
,
M a rg u e rite , F ra n ç o ise ,
a
Ja cq u es
A n to in e
V a la rc h e r.
D a u z a t.
I
Jeanne,
à A n to in e
F au co n ;
intimés
et
appelan$.
A
¡E n grem y.
!---M ich elle ,
F ra n ço ise
F ra n ç o is ,
m ort sans
p o sté rité
après
le père.
M arg u e rite
à
N . R och e.
A n to in e ,
a in stitu é
Jacques
V a la rc h e r.
C a th e rin e ,
P ie r r e ,
à
m ort sans
Jean
p o s té rité ,
N au fa ri.
a in stitu é
M a rg u e rite
fpm m e
P ierre.
D a u za t.
I
A nue,
à
Jacq u es
de D o u e t.
I
Jeann e,
v îta l
de D ien n e;
appelons..
=JÎ
�P RECI S
E N
R E P O N S E ,
POUR
F r a n ç o i s e V E S C H A M B E S , veuve de Jacques
V a la rch er
; J e a n n e V A L A R C H E R , et
A n t o i n e F A U C O N , son mari , intimés et
incidemment appelans ;
CONTRE
Sieur
D E D I E N N E , et dame J e a n n e M a r i e D E D O U E T , son épouse, appelans
d'un jugement rendu au tribunal civil de M urat,
le II prairial an I I .
L A
V ita l
dam e de D i e n n e o c cu p e dep u is
lon g -tem p s les
t r i b u n a u x , d ’u ne v ie ille r e c h e r c h e sans i n t é r ê t , q u i jus
q u ’ici n ’a e u d ’au tre o b je t q u e d e d iv u lg u e r les m alh eu rs
d e sa fa m ille.
A
�H
( O
Un succès éphémère l’a enhardie dans ses prétentions ?
mais sa proie lui échappe au moment de la saisir ; et si
les intimés avoient été assez heureux pour avoir dans
les mains les titres, dont ils justifient maintenant T l’arrêt
de la cour, du 2 thermidor an 8 , auroit décidé dans un
sens tout contraire.
Mais aujourd’hui les suites de cet arrêt ne sont plus
effrayantes. La dame de Dienne a attaqué, contre ses inté
rêts , un traité de famille qu’elle devoit respecter. Il est
prouvé qu’elle a. plus à rendre qu’elle ne doit espérer
de recouvrer ; elle essaie de lasser la patience de ses cohé
ritiers par des discussions sans nombre ; elle ne viendra
pas à to u t de ses desseins ", elle succombera dans ses.
prétentions..
O n va présenter l’aperçu de cette cause * on élaguera
tous les détails inutiles. La généalogie jointe au mémoire
apprend l’état et les qualités des parties. On analisera
rapidement les titres qui ont donné lieu à la contes^
tation.
F A I T
S.
O n voit que François Veschambes, auteur commun
des parties , a été marié deux fois; qu’il a eu quatre
enfans d’un premier mariage, et cinq du second.
Far son second contrat de mariage avec CatherineCômbart, du février i
, sa seconde épouse se cons
titue une somme de 2700 fr. dont 300 pour meubles.
François Veschambes légitime ensuite ses enfans du pre
5
685
mier lit¿ et ceux (l u* pourront naître du nouveau mariage..
�JS
f
>
3)
Il constitue à Marguerite Yeschambes, sa fille aînée , une
somme de iooo fr. ; à autre Marguerite, 700 f r . , et à Jac
ques Veschambes, 1000 fr. ; et donne, par préciput et
avantage , aux enfans qui proviendront de son second
mariage, et au premier qui naîtra , soit fille o u garçon,
la somme de 3000 fr» de son clief, et aux autres, une
somme de 1000 fr.
L e 24 mars 1696, F r a n ç o is V e s c h a m b e s fit son tes
tament; il légua à A n t o i n e et Catherine Veschambes,
ses enfans du second l i t , et à chacun, une somme de
1000 f r . , et aux autres trois enfans la somme de 700 fr.
chacun.
Il institue pour son héritière générale et universelle
Catherine Com bart, son épouse, à la charge de payer
les légitimes , tant des enfans du premier que du second
lit. Il veut qu’en cas de convoi, sa femme soit privée de
l ’hérédité; qu’elle la rende à un de ses enfans, et du tes
tateur , que bon lui semblera , sans qu’elle soit tenue à
aucune reddition de compte ni payement de reliquat.
Si sa femme vient à décéder sans avoir fait son choix,
il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héri
tier; mais cette disposition est toujours subordonnée à
l’élection de Catherine Combart.
François Veschambes, testateur, est mort le 23 février
*1700. L e 21 mars suivant, sa veuve prenant la qualité de
tutrice des enfans, tant du premier lit que du second, répu
dia a la succession de son m ari, par acte mis ou greffe de
la justice de Cheylades : il fut nommé un curateur à la
succession vacante ; mais , dans la même année, Jacques
Veschambes, fils aîné du premier l i t , représenté par
A 2
�4
(
).
toutes les parties , et se disant créancier de la succes
sion de son père, obtint une ordonnance du lieutenant
général de Saint-Flour , qui lui permit de jouir des
biens de la succession répudiée, sans qu’on pût en induire
aucune qualité préjudiciable.
Jacques Veschambes s’empara commodément de l’uni
versalité des biens; il afferma, le 13 avril 1700, à un
nommé Hugues Chevalier, un domaine appelé de la Buge.
Cette ferme fut consentie pour six années, moyennant 26
quintaux de fromage pour chacune d’elles : une partie
du prix de la ferme est déléguée à un sieur Dusaillant,
créancier personnel de Jacques Veschambes.
En 1706, un sieur D a n ty , ci’éaneier du père, trouvant
Jacques en possession des biens, le fit assigner en paye
ment de ses créances. En défenses, il oppose la répu
diation du 21 mars 1700, et soutient qu’il ne jouit
des biens que par permission de justice , et comme /
créancier.
L e 19 avril 1708, Jacques Veschambes vendit deux
prés de celte succession, moyennant 360 francs, au sieur
de Cheylades.
L e 31 mai 1708, Jacques Veschambes prit à titre de
bail emphitéotique, du sieur Dusaillant, un petit domaine
situé à la Buge, et voisin de celui de son père, moyen
nant la rente annuelle de 60 francs remboursable en deux
payemens.
Ce premier contrat fut résolu faute de payement5 mais
il lui fut consenti un second bail le 17 septembre 1729.
Il fut procédé à Pifrpcntement des héritages vendus; et
il résulte, du procès verbal des experts, que ce bien est
�(5)
d’une contenue de 12 journaux de p r é , et une septerée
et demie de terre en champ ou jardin.
On voit, d’après tous ces actes, que Jacques Veschnmbes- n’avoit d’auLres propriétés que le petit domaine qui
lui fut concédé à titre de bail emphitéotique. Il ne jouissoit que précairement des biens de son p è r e , et sous le
prétexte qu’il en étoit créancier. Cependant les appelans
veulent faire usage d’un-acte en date du 3 mars 1 7 1 0 ,
par lequel Catherine Combart avoit subrogé Jacques
Veschambes à tous ses droits et hypothèques sur la
succession de son mari. On verra bientôt qu’ils ne peuvent
tirer aucun avantage de cette prétendue subrogation qui
n’a jamais eu aucun effet.
Jacques Veschambes étoit lui-même si convaincu que
la succession de son père étoit absorbée par les dettes,
que, par acte mis au greffe de Cheylades en 1 7 1 2 , il
vient déclarer qu’il a connoissance de la répudiation
faite en son nom, le 21 mars 1700, par Catherine Com
bart, sa belle-mère : il adopte cette répudiation, et la
ratifie, et répudie de nouveau, en tant que de besoin.
Il fait un usage continuel de cette répudiation contre
les créanciers de son père. Une sentence du i mars
1 7 2 1, rendue au bailliage de Cheylades, le renvoie d’une
demande formée contre lui par un nommé M e y, mar
chand ù Billom, attendu la répudiation par lui rapportée,
et sauf aux créanciers à se pourvoir contre le c u r a t e u r
& la succession vacante. Dans cette sentence est visée
l’ordonnance rendue par le lieutenant général de SaintFlour, qui lui permet de jouir des biens de son père
sans se porter héritier.
5
�(6)
Le 21 mars 1729, Jacques Veschambes maria Michelle,
sa iille, avec François Samson ; il lui constitua une
somme de iôoo francs qui dans la suite a été payée
par Jacques Valarcher, représenté par les intimés.
L e 23 novembre 1735 , mariage de Catherine Ves
chambes , autre fille de Jacques , avec François Ves
chambes. L e père lui constitue une somme de 1400 fr.
qui a encore été acquittée par Jacques Valarcher.
Ici commencent les malheurs de la famille. En 1738 ,
Jean Naufary fut tué par Jacques Veschambes, son beaufrère. Ce dernier prit la fuite , et il fut rendu contre lui
un jugement par contumace, qui le condamna à la peine
de mort. Cette sentence fut suivie de la confiscation de
ses biens ; elle fut même exécutée par effigie; mais on ne
rapporte pas le procès verbal d’exécution.
Jacques Veschambes, en fuyant, vendit tout le mo
bilier mort et v if de la succession de son père, et laissa les
biens dégarnis de bestiaux.
L e premier octobre 1738, Antoine et Pierre Vescham
bes, frères, Marguerite, Françoise et Anne Veschambes,
nièces d’Antoineet Pierre, se virent obligés de prendre
à cheptel , d’un sieur Teillard , marchand ù M u r â t ,
vingt-quatre vaches suivies de dix ve a u x , quatre bourrets et deux doublons, m o y e n n a n t 868 francs ; ils ache
tèrent les meubles et outils d’agriculture nécessaires h
l’exploitation des biens : le prix de ce cheptel a encore
été remboursé par Jacques Valarcher.
Ces précautions n’empechèrent pas la saisie de tous les
fruits, de la part des collecteurs, pour les années 1738,
1739 et 1740. Antoine et Pierre Veschambes s’eu ren
dirent adjudicataires.
�f
7)
.
Antoine Veschambes ayant pris connoissance des pa~
piers de la famille , découvrit le testament de son père,
¿le 1696. Il apprit, par cet acte, qu’à défaut d’élection
faite par Catherine Com bart, sa m ère, le titre universel
reposoit sur sa tête. Il fit contrôler ce testament le premier
décembre 1741, se porta héritier de François Veschambes,
son p è re , et obtint, le 22 février 1743* ^ l’élection de
S ain t-F lour, une sentence qui déclara toutes les saisiesde fruits nulles, en fit main-levee à A ntoine Vesehambes,
comme propriétaii’e des biens. Cette sentence fut signifiée
le 23 février 1743, tant aux saisissans qu’à Pierre et
Jacques Veschambes, au dernier domicile de ce dernier,
en parlant à son fils. Cette sentence n’a jamais été atta
qu ée, et a acquis l’autorité de la chose jugée.
L e premier février 1 7 4 1 , Françoise Veschambes con
tracta mariage avec Jacques V alarcher; elle se constitua
tous ses biens , sans entendre néanmois^/àm? aucun acte
préjudiciable.
L e 14 mars 1744, Antoine Veschambes, qm étoit en
possession de tous les biens de Jacques, son père, en vertu
de son testament, fit donation au profit de Jacques Valarclier, de tous les droits par lui acquis, tant par le tes
tament de François Vescham bes, son père , que p a rle
deces de Catherine Com bart, sa mère. Cette donation
comprend même les droits rescindans et rescisoires ; elle
contient tradition actuelle et réelle; elle a été insinuée et
revêtue de toutes les formalités prescrites. Jacques V a îa relier s’est mis en possession de tous les biens de François
Vescham bes, a payé tous les créanciers qui se sont
présentés, et a joui de tous les biens sans trouble de^
puis, le moment de celle donation»
�(8 )
L e 31 mai 1744, mariage de Marguerite Veschambes,
autre fille de Jacques, avec Antoine Dauzat. Pierre Ves
chambes , son oncle consanguin, l’institue son héritière
universelle.
L e 4 juin 1744, traité entre Catherine Veschambes ,
veuve de Jean N aufary, et Pierre Naufary, son fils et
son héritier, et Jacques Valarcher, par lequel la veuve
Naufary et son fils cèdent à Valarcher tous leurs droits,
et tout ce qui peut leur rester dû sur la succession de
Françoise et Jacques Veschambes, en vertu du traité
passé entre Jacques Veschambes et Catherine Combart,
le 3 mars 1710.
L e 16 juillet 1744, mariage d’Anne Veschambes, mère
et belle-mère des appelans, avec Jacques de Douet. Par
ce contrat, Anne Veschambes, majeure, donne pouvoir
à son mari de rechercherions ses biens, traiter et tran
siger d’iceux , et en donner quittance.
L e 23 juillet, même année, cession de Jacques de Douet
au profit de Jacques V alarch er, de tous les droits suc
cessifs paternels et maternels d’Anne Veschambes , même
de ceux qui pouvoient lui revenir du chef de François
Vescham bes, frère et beau-frère commun: cette cession
fut consentie moyennant i 5 oo francs et quelques meubles,
le tout payé par Jacques Valarcher.
La condamnation de mort prononcée contre Jacques
Veschambes avoit entraîné la confiscation de ses biens.
M . de Montboissier, seigneur haut-justicier les réclamoit :
le 10 janvier 17 6 7, il se départit de tous scs droits eu
faveur de Jacques Valarcher et de Françoise Veschambes,
moyennant 60 francs de rente annuelle, et sans retenue;
plus,
�fo j
plus, 300 francs pour frais faits au bailliage de Saint-Flour,
et à Cheylades. Cet acte prouve que tousses biens du fu
gitif consistoient dans le petit domaine qu’il avoit pris
en empliitéose du sieur Dusaillant. L a confiscation ne
frappoit que sur cet objet.
L e 4 juillet 1757 , traité portant cession entre Fran
çois Vescliambes , mari de Catherine, à Jacques Valarc h e r , moyennant une somme de 2200 francs, payée par
ce dernier.
L e p r e m i e r février 1780, mariage de Jeanne V a la r-'
cher, fille de Jacques, avec Antoine Faucon ; elle est
instituée lieritière universelle de ses père et mère, et de
Marg uerite Vescliambes, femme Dauzat, sa tante.
La paix de la famille n’avoit plus été troublée jusqu’au
30 brumaire an 6, que la dame de Dienne et sou mari
imaginèrent d’attaquer les intimés en partage des succes
sions de Jacques Vescliambes et Geneviève la Vaissière^
leurs aïeux communs, pour leur en être délaissé leurs
portions afférentes, ainsi que ce qui devoit leur revenir
par le décès des deux mâles qui avoient profité du droit
d’accroissement d’Anne ? Michelle et Marguerite Vescliambes.
. ..
Les intimés opposèrent à cette demande le traité du 16
juillet 1744; mais les appelons demandèrent la nullité
de ce traité, sur le fondement que Jacques de Douet
n’avoit pas eu la faculté de vendre par son contrat de
mariage; que des-lors il qvoit aliéné des biens dotaux,
contre la prohibition de la coutum e; et ils c h e r c h è r e n t à
prouver que la demande en nullité 11’étoit pas éteinte
par la prescription.
B
-M
�Ils voulurent encore écarter le traité fait avec M . de
Montboissier, et soutinrent que la confiscation n’âvoit
pu avoir lieu, dès qu’on étoit hors d’état de rapporter le
procès verbal d’exécution du jugement de mort.
Toutes les prétentions, les défenses et les explications
données par les parties, n’avoient pour objet que les biens
2?ersonnels de Jacquds Vescliambes ; et sur ces contestations
il intervint au tribunal de S a in t-F lo u r , le 13 ventôse
an 8, un jugement qui déclare nul le traité du 23 juillet
1744, passé entre Valarcher et Jacques de Douet ; con
damne Valarcher et sa femme à venir à partage des biens
de Ja cques Veseham bes et Geneviève la V a issièr e ,
pour en etre délaissé aux appelans un sixième de leur
chef, un tiers dans le sixième que François Veseliamhes,
frère , décédé ab intestat, amendoit de son chef; un tiers
dans les deuxf autres sixièmes que ce même frère amendoit dans les successions du chef des deux filles forcloses ,
avec restitution des jouissances et dégradations depuis le
décès de Jacques Vesehambes et Geneviève la Vaissière.
On excepte de la restitution des jouissances toutes les
a n n é e s qu’a duré le 'mariage de Jacques de Douet avec
A nne Vesehambes. La dame de Dienne est tenue de rap
porter la somme de i oo francs, prix du traité de 1744 ,
et elle est également chargée de conférer proportionnel
lement 'les deux dots des iilles foi’doses ; elle est débou
tée dé sa» demande relative au partage de la succession
cl’Antoine Vesehambes; il est ordonné que les parties
conviendront d’experts, pour procéder au partage; les
dépens sont compensés pour etre employés en frais de
5
partage.
�Appel de ce jugement de la part du sieur Valarchev
et de Françoise Veschambes. La dame de Dienne et son
mari interjettent aussi appel incident de ce jugement, en
ce qu’ils avoient été condamnés au rapport de la somme
de i oo francs reçue par leur père; ils prétendent devoir
être déchargés du rapport de cette somme, parce qu’ils
ne sont pas héritiers de Jacques de D o u e t, leur père et
beau-père.
Il est bon de remarquer que l’appel de Valarcher et
sa femme étoit restreint au seul chef du jugement qui '
avoit prononcé la nullité du traité de 1744, et que, de
leur côté, les sieur et dame de Dienne ont respecté ce
.jugement, quant au chef qui les déboutoit de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Veschambes,
ainsi que de celui qui rejetoit également leur demande
en réduction du testament de 1693, à. raison de ce que
les biens étoient situés en coutume, et que le testateur
n’avoit pu donner que le quart. On ne s’est pas occupé
de ces deux objets , parce que tout est jugé entre les
parties sur ces deux points, et qu’il est inutile de grossir
le volume de la procédure qui n’est déjà que trop con
sidérable.
5
Sur les appels respectifs, arrêt de la cour,, du 22 ther
midor an 8, qui confirme le jugement du tribunal de
Saint-Flour, respectivement à la nullité du traité, et or
donne, avant faire droit sur l’appel incident, que Valar
cher et sa femme feront preuve, tant par titre que par
témoins , que la dame de Dienne a fait acte d’héritier
de Jacques de Douet, son père, en s’em p aran t de tout
B a
�m
( 12 )
ou de partie de sa succession, sauf la preuve contraire:
la moitié des dépens est réservée.
>
? En-vertu de cet arrêt, les experts ont été nommés
pour procéder au parLage. Valarelier et sa femme de
leur côté ont fait procéder à l’enquête sur l’appel incident.
La dame de Dienne a fait aussi une enquête contraire.
Les experts nommés se transportèrent pour vaquer
à leurs opérations ; il fallut établir la consistance de la
succession de Jacques Veschainbes, auteur commun; il
n’avoit laissé autre chose que le petit domaine qu’il avoit
pris à titre d’emphitéose du sieur Dusaillant; et encore
falloit-il en distraire le principal de la rente empliitéotique, qui avoit été remboursé par Jacques Vala relier.
La modicité de cette succession fait disparoître le
prestige. La dame de Dienne voit évanouir ses préten
tions chimériques, ses calculs exagérés, et alors elle veut
soutenir que les biens de François Veschambes, père de
Jacques, doivent entrer dans le partage; elle veut qu’on
y comprenne le grand domaine de la Buge qui avoit
appartenu à François.
Elle feignoit sans doute d’ignorer les répudiations
réitérées de Jacques Veschambes, son aïeul, l’institution
de François, son bisaïeul, au profit d’Antoine; elle vou■
loit mettre également de coté la disposition du jugement
de Saint-Flour qui la déboutoit de sa demande, soit en
réduction du testament de François, soit en partage de
la succession d’Antoine. Les opérations des experts furent
arrêtées; et, le i cr. messidor an 9 , nouvelle demande
des appelanSj tendant ù ce que la succession de Jacques
�3
( ï )
Vcschambcs fût composée, non-sculcmcnt des b'ens pr.r
lui acquis, mais encore cl’un dixième dans la succession
mobilière et immobilière de François Vcschambcs, son
p ore, eu égard au nombre de neuf enfans , Catherine
Combart comptant pour un ; d’un quart dans ceux de
sa mère, eu égard au nombre de quatre enfans; et qu’en
suite les jugemens des 16 ventôse et 22 thermidor an 8
fussent exécutés suivant leur forme et teneur.
C’étoit évidemment revenir contre la chose jugée.
I-e sieur Valareher et sa femme soutinrent qu’ils
étoient non-recevables dans leur demande ; ils récla
mèrent différons prélèvemens sur les biens personnels
de Jacques et sur ceux de François, son fils. Jeanne
"Valarclier, femme F au con , en sa qualité d’héritière
instituée de Marguerite Veschambes, femme Dauzat,
sa tante, demanda à être reçue partie intervenante pour
assister au partage. Toutes les parties ainsi réunies, les
intimés opposèrent que le testamént avoit été approuvé,
et que 'toutes demandes en réduction, comme toutes
réclamations contre la qualité d’Antoine , héritier ins
titué, scroieut évidemment prescrites, si déjà la question
n’étoit jugée, soit par le jugement de Saint - Flour et
1 arrêt de la cour d’appel, soit par la sentence de l’élec
tion de Saint-Flour , signifiée en 1743 , et qui n’étoit pas
attaquée. E11 conséquence les intimés conclurent que sans
s’arrêter à toutes ces demandes, il fût expédié à Jeanne
Valareher , intervenante dans les biens p e r so n n e ls de
Jacques, du chef de Marguerite Veschambcs , femme
D auzat, sa taule, un sixième qui étoit sa p o rtio n affé
rente; que la nia: se de la succession de J a c q u e s suroit
�^14^
seulement composée des biens désignés au bail ernpliitéotique de 1729 ; que cette succession seroit respon
sable, envers Valarclier et Françoise Veschambes, de
l’entier mobilier mort et v if , provenu de la succession
de François Vescliambes , dont Jacques s’étoit emparé et
qu’il avoit vendu lors de son évasion ; qu’elle seroit éga
lement responsable des jouissances par lui faites des biens
de François, depuis 1706 jusqu’en 1738, ainsi que des
intérêts des jouissances et du mobilier; que ces divers
objets seroient imputés et précomptés sur la portion
qu’amendoient les appelans ; que la dame de Dienne fût
condamnée à rembourser préalablement, et avant toute
mise en possession, et toujours dans la proportion de son
amendement, les dots de Miclielle et Catherine Vescliambes , les dettes de la succession de Jacques acquittées par
Valarclier, avec les intérêts ; que de cette succession seroit
distraite la somme de 300 francs que Jacques avoit donnée
à titre de préciput h M iclielle, sa fille, femme Samson,
et qui avoit été payée par Valarclier.
Les intimés firent en même temps donner copie de
tous les titres qu’on a analisés jusqu’ic i, notamment du
bail du 13 avril 1700, consenti par Jacques Vescliambes,
du domaine de la Buge, appartenant à François, son père;
de la répudiation de Jacques Veschambes, du 22 no
vembre 1712; de la sentence du i mars 172 1, rendue
entre Jacques Veschambes, et M e y , marchand à Billom ,
qui décharge Jacques Veschambes des condamnations,
attendu sa répudiation; des extraits des rôles de contri
bution , qui prou voient la jouissance précaire de Jacques
Veschambes.
5
�4
( i5 )
V oici le détail des prélèvemens demandés par lesr
intimés.
D ’abord, comme on l’a d it, la restitution du mobi
lier et des jouissances, les dots de Miclielle et de Cathe
rine Veschambes, le remboursement de la valeur actuelle
des biens immeubles de François Veschambes, vendus
par Jacques au sieur d’Estaing, seigneur de Cheylades,
le 19 avril 1708, la c o m p e n s a tio n jusqu’a due concur
rence avec les jouissances adjugées aux appelans, d u
capital de cheptel du 24 octobre 173^*
Plus, le remboursement des dettes de la succession de
Jacques Veschambes, payées par Jacques Vala relier; les
quelles dettes consistent, i ° . en la somme de 1200 f r . ,
prix principal de la rente empliitéotique de 1729, ainsi
que les arrérages d’icelle, suivant la quittance; 20. la
somme de 261 fr. 90 cent, due i\ René Teillard par
défunt Jacques Veschambes, en vertu de jugemens qu’on
rapporte, tout quoi a été payé par Jacques Valarelier ,
suivant un traité du 26 mai 1744; 30. la somme de 398 fr.
payée pour frais de la procédure criminelle, ainsi qu’il
résulte du traité du 10 janvier 1767; 40. une somme de
63 fr. due par Jacques Veschambes ¿1 défunt GuyonD a u ty , par obligation du 29 décembre 1708, et dont la
condamnation fut prononcée avec les intérêts contre V alarelier, par jngement du
décembre 1761 ; ». en une
somme de 329 fr. avec les intérêts, due par Jacques Vcschambes à sieur Jean-Baptiste Teillard, par obligation
du 19 juin 1736; 6°. une somme de 162 fr. pour arré
rages du bail à rente de 1729, ou blé prêté à défunt
Jacques Veschambes par un sieur llaynal de Tissonuières,
5
5
5
�( x6 )
fermier de Cheylades, et dont la condamnation avoit été
prononcée par sentences des 20 avril 1736 et 23 février
17 3 7 , signifiées le 10 septembre 1758; suivies d’autre
sentence contre Yalarcher et sa femme, du 17 octobre
1758; 7U. une somme de 169 fr. provenant d’arrérages
de la rente de o fr. portée au bail de 1729, et dont la
condamnation avoit été prononcée en faveur de Gilbert
Lagravières, par sentence du
août 1752; 8°. une
somme de 36 fr. pour reste de celle de 80 fr. due
par défunt Jacques Veschainbes à Catherine, sa sœur,
suivant une reconnoissance par lui souscrite, et suivie
d’une sentence de condamnation.
Les intimés se réservèrent tous autres droits.
I-es sieur et dame de Dienne, à leur tour, en persistant
à demander que la succession de Jacques fût composée
de sa portion dans les biens de François, demandèrent
la réduction des avantages faits par défunt François
Vcschambes, au profit de sa seconde femme. Ils pré
t e n d ir e n t que Jacques Vcschambes étoit aux droits de
Marguerite, enfant du second l it , suivant une cession
du 21 octobre 17 14 ; ils demandèrent la portion de
cette Marguerite ; ils conclurent encore à ce que la succes
sion de Jacques fût composée du quart des biens délaissés
par Marie Jarrige, sa mère, d’un tiers de sixième qu’amendoit François V e s c h a in b e s , frère d’A n n e, et décédé
ab in testa t, sans postérité, le tiers de l’accroissement
revenant à François Vcschambes dans les deux sixièmes
qu’amendoit les filles forcloses.
5
5
Cet acte du 21 octobre 1714? ne contenoit pis une
cession de droits successifs de la part de Marguerite Vescluiinbes,
�( *7 )
cbambes , mais seulement un transport d’une -somme ue^
y o fr. que Marguerite Vescbambes prétendoit avoir a
répéter. Il étoit donc ridicule que les sieur et dame de
Piçnne voulussent prétendre que ce transport faisoit cesser
M e t de la répudiation de 1712. C’est ce que repondi-^
rent Jacques Valarclier et sa,femme, et c?cst le,dernier
acte de Jacques Valai’é h e r, qui décéda bientôt après
Jeanne Valarclier, qui ne figuroit d’abord que comme,
partie intervenante, s’est subrogée au lieu et place de son
père; et en cet état, la cause portée eq. l’audience du 11
prairial an x 1 , jugement contradictoire au tribunal civil
de M urât, qui , faisant droit sur toutes les demandes,
déboute les sieur et dame de Dienne de leur demande
tendant à ce que la succession de Jacques Vescbambes
fûteomposée d’une portion des biens deFrançois; ordonne
que cette succession de Jacques sera composée, i°. du
quart des biens de Marie la Jarrige , sa ,mère et des
intérêts à compter de 1738 , époque de l’absence de Jac
ques ; 20. des biens par lui acquis , et des jouissances telles
qu’elles sont fixées par le jugement du tribunal civil du
Cantal , du 16 nivôse an 8 ; 30. de la somme de 760 f r . ,
et de la valeur d’ une bourrète pour le pr,ix de la subro
gation faite à Jacques par Marguerite Vesclnambes, sa
sœur du second lit , le 20 octobre 1 7 1 4 , avec intérêts
h compter de 1738 ; 4«. des créances que la dame de
Dienne et son mari établiront avoir été payées par Jacques
en l’acquit de la succession deFrançois , avec les intérêts
à compter de 1738 , si mieux n’aime la dame de Dienne
rendre compte des jouissances du domaine de la Buge ,
appartenant à François Vescbambes, depuis 1701 ? jour
C
5
�c« Ÿ
du bail fait par Jacques Veschambes, des biens de son
p è r e , sous la déduction de la nourriture et entretien
fournis aux frères et sœurs de Jacques ; auquel cas le
tribunal ordonne que les intérêts des créances ci-dessus
courront à compter de l’époque où elles ont été payées ;
que ceux de la créance de yôo fr. entreront dans la
masse, à compter du premier octobre 17 14 , et ceux de
la portion de la dot de Marie la Jarrige revenant à
Jacques Veschambes , à compter de la mort de Fran
çois , sauf aux sieur et dame de Dienne à tenir compte
aux Valarcher des créances dont ils justifient le paye
ment , suivant la liquidation qui en sera faite par les
experts nommés par les parties, et qui continueront de
procéder au pai’tage. Sur le surplus des demandes, les
parties sont mises hors de cause , les dépens sont com
pensés pour être employés en frais de partage.
Ce jugement est m otivé, i°. sur la répudiation faite
par Catherine Combart, comme tutrice des enfans du
premier et du deuxième l i t , le 2 mars 1700; 2°. sur
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, du
10 avril 1701 , qui permit à Jacques Veschambes de
jouir sans qu’il puisse être réputé héritier; 30. sur la
répudiation de Jacques Veschambes, du 22 décembre
1712 ; 40. sur la sentence du 14 mars 1721 , qui renvoie
Jacques Veschambes de la demande d’un créancier du
père ; renvoi motivé sur sa répudiation ; °. sur le bail
de ferme du i avril 1700 , et sur tous les actes de Jac
ques Veschambes qui prouvoient qu’ il n’avoit jamais
voulu prendre la qualité d’héritier de son père.
Les premiers juges se fondent encore sur le principe
5
5
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( '9 )
qu’il faut être né et c o n ç u pour succéder ; et que Jacques
Vesehambes n’étant pas encore marié loi’s de sa répudia:- ,
tino, ses enfans ne pouvoient se dire héritiers de leur aïeul.
Par un autre motif du jugement, il est dit que le
transport de Marguerite Vesehambes ne peut donner
aucun droit d’hérédité, parce qu’elle n’avoit vendu qu’une
créance , et n’avoit pas même pris cette qualité.
L e tribunal civil a encore pense que Jacques Vescliambes , a ya n t r e n o n c e a la succession de son p e r e ,
n’étoit pas recevable à critiquer son testament; mais sur
la demande en rapport des jouissances faite par Jacques,
des biens de son père, il a paru aux premiers juges que
tous les enfans avoient joui en commun, et qu’il n’étoit
pas même établi que Jacques Vesehambes eût vendu et
dissipé le mobilier de son père.
Ce jugement ne faisoit pas le compte de la dame de
Dienne qui voyoit évanouir toutes ses espérances , et
elle s’est déterminée à en interjeter appel purement et
simplement; et Françoise Vesehambes et la dame Valar
cher, sa fille, se sont elles-mêmes rendues incidemment
appelantes, en ce que la dame de Dienne n’avoit pas été
condamnée à rendre compte des jouissances perçues par
Jacques Vesehambes dans les biens de François, à res
tituer le mobilier mort et v if qu’il a voit vendu ou dis
sipé ; en ce que ce jugement avoit ordonné que la somme
de 750 f r . , prix du traité du premier octobre 17 14 ,
seroit portée dans la succession de Jacques Vesehambes;
et en ce que les dépens avoient été compensés, pour être
employés en frais de partage. Les intimés ont conclu à
ce que, en émendant quant ù ce le jugement, la dame
C 2
S
�v»;
(
20 \
de D ie n n e fût Condamnée à restituer ces jouissances avec
intérêts, le mobiliër mort et v if iiussi avec intérêts; qu’elle
fût déboutée de sa demiinde relativement au second chef.
f 1‘
I
If-'
f
et qu’enfin elle fût condamnée au x dépens.
Il
fulloit bidri aussi faire statuer sur l’appel incident
interjeté par la dame de D ien n e, du jugement du 16 ven
tôse, an’ Ô, en ce qu’elle avoit été condamnée au rapport
de la somme de i 5 oo fr. , prix de la cession consentie
par Jacques de D ou et, son p è re , en 1744. On se rap•pelle que la cour avoit interloqué les parties sur ce
point ; elles ont enquêté respectivement : les enquêtes
ont été signifiées ; là dame Faucon s’est fait subroger
au lieu et placé de son Jpère; les deux appels ont été
joints par arrêt de la c o u r, et les parties en viennent
aujourd’hui sur le tout. ‘
On sent qu e, d’après l’analise de tous les actes dont
les parties argumentent respectivement, cette cause né
cessite un grand détail auquel on 11e veut pas se livrei*
dans ce moment. On se Contentera de présenter les prin
cipaux moyens des intimés, pour ¿lire confirmer le ju
gement dont est appel dans la partie qui réduit la suc
cession de Jacques Véschambes à sa juste valeur, et pros
crit les prétentions exagérées des appelans.
L e jugement de Saint-Flour , en date du 16 ventôse
an 8 , a débouté les sieur et daine de Dienne de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Vescliambes. Cette disposition’du jugement est indéfinie; aucune
des parties iieTa attaquée dans ce chef : il y a donc chose
irrévocablement jugée, et tftut ce que proposent les appelans à cet égard est 'plus que subtilité.
�in
#
*
c
)
Ils prétendent que, dans le motif de ce jugement, il
y est dit que les sieur et dame de Dienne n’ont pas établi
qu’Antoine Veschambes eût d’autres biens que le mon
tant de la destination à lui faite par son p è r e , et les droits
à lui échus du chef de sa mère.
Aujourd’hui on prétend qu’Antoine est héritier uni
versel de François, son p ère, en vertu du testament de
1696 : il a donc plus que la d e stin atio n qui lui avoit etc
faite ; dès-lors le dispositif doit être subordonné aux
motifs -, ot comme les sieur et dame de Dienne n’ont été
déboutés qu’à raison de ce qu’Antoine n’avoit alors que
sa légitime, ils rentrent dans leurs droits, dès qu’il en
avoit davantage.
Vouloir subordonner le dispositif du jugement aux
motifs qui précèdent, ce seroitun système nouveau. Tous
les jours on rend des jugeinens sages et justes dans leurs
dispositions, quoique les motifs puissent être critiqués :
mais ce n’est que le dispositif qui juge , qui règle les
droits des parties ; et ici la disposition est indéfinie : tout
est terminé pour la succession d’Antoine.
D ’ailleurs, les premiers juges 11’ont-ils pas dit égale
ment qu’Antoine avoit approuvé le testament de son père;
que les sieur et dame de Dienne ne pouvoient s’aider de
son chef, ni de la réduction au quart, d’après la coutume,
ni de la réduction à une portion d’enfunt moins pre
nant , d’après l’édit des secondes noces. Voilà donc d’au
tres motifs qui sufïisoient bien pour faire débouter les
sieur et dame de Dienne. Ce qu’on a dit de plus , quoique
indifférent dans la cause , n’étoit que pour fortifier davan
tage la proposition qui étoit adoptée; c ’ e s t - à - d i r e , quo
/
�les sieur et dame de Dienne étoient étrangers h la suc
cession d’Antoine Vescliambes.
Mais quand on admettroit que le motif n’est pas judi
cieux , tous les jours on confirme les dispositions d’un
jugement sans s’arrêter aux motifs ; et si la chose n’étoit
pas irrévocablement jugée , les intimés n’auroient-ils pas
un moyen plus puissant encore à opposer aujourd’hui ;
le titre universel d’Antoine Vescliambes , son appréhen
sion des biens en vertu de l’institution portée au testament
de son père , la sentence de l’élection de Saint-Flour
q u i , en cette qualité , lui a fait main-levée des saisies de
fruits, sa longue possession depuis cette époque, et enfin
la donation qu’il a faite au profit de Jacques Valarcher.
Mais les sieur et dame de Dienne prétendent que c’est
une erreur d’avancer qu’Antoine étoit héritier institué .
de son j)ère ; qu’il n’avoit qu’une somme de iooo fr. par
ce testament. A la vérité ils conviennent qu’il étoit ins
titué à défaut d’élection de la part de sa mère ; mais ils
soutiennent que la mère ne devoit élire qu’en cas de
convoi ; que le cas prévu n’est pas arrivé , puisque Cathe
rine Combart est restée veuve.
C ’est étrangement raisonner, et commenter singulière
ment un testament qui n’a rien de louche ni d’équivoque.
On voit clairement que François Vcschambcs n’a voulu
faire , au profit de sa femme , qu’une institution fidu
ciaire. A la vérité il veut qu’elle soit privée de l’hérédité
en cas de convoi ; mais, dans un cas contraire, elle doit
également rendre l’hérédité à tel de ses enfansque bon lui
semblera , sans qu’elle soit tenue à aucune reddition de
compte. Dès-lors le convoi Pobligeoit d’abandonner l’hé-
�( 23 )
l'éclîté et de rendre compte ; la viduité l’astreignoit seu
lement à la rendre sans aucun compte de gestion. Aussi
le testateur ajoute-t-il, que dans le cas où sa femme
viendroit à décéder sans avoir nommé tel de leurs enfans
pour h éritier, il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héritier ; il le nomme dès à présent audit
cas et non autrement ; c’est-à-dire , en cas de décès de
sa femme sans élection. O r, Gathex-ine Combai*t est mox*te
sans élire : c’est donc Antoine qui seul a été valablement
saisi de l’institution ; et en supposant que les sieur et dame
de Dienne n’eussent été déboutés de leur demande en
partage de cette succession que parce qu’Antoine n’avoit
qu’une simple légitim e, ilfaudroit aujourd’hui les déclarer
non-recevables, dès qu’Antoine étoit héritier universel.
Les sieur et dame de Dienne, tournant toujours autour
d’un cex’cle v ic ie u x , disent qu’au moins Antoine n’a eu
de Catherine Combart, sa mèx’e , qu’une destination en
argent. C’étoit Cathexùne Veschambes , sa fille aînée ,
femme Naufaiù, qui avoit été instituée son héritière.
Si Catherine Yesclxambes a fait une cession au pi’oiit
de Jacques Valax-clier , cette cession ne comprend que
des créances des sommes elle l’estées dues -, mais qu’ im
porte au sieur et dame de D ien n e, et que peuvent-ils
avoir de commun avec Catherine Combart? d’une p a r t ,
cette dernière n’avoit porté qu’une dot m obilière, et de
l’autre, les sieur et dame de D ie n n e , qui représentent
un enfant du premier lit , ne pourroient avoir x*ien à
prétendre sur les biens Combart , qui appartiennent
exclusivement aux enfans dxx second lit.
Antoine Veschambes étoit donc le seul px’opriétaxrc des
�( M )
Liens de François. Jacques avoit répudié à la succession
de son père ; s’il a joui des biens , ce n’est point à titre
d’héritier ; il n’en a joui qu’en vertu de l’ordonnance
du lieutenant général de Saint-Flour : sa répudiation a
été produite en jugement , et lui a servi à écarter les
demandes des créaciers de son père. Depuis 1738 , c’està-dire, depuis soixante-quatre ans , Antoine Veschambes
a joui de tous les biens comme héritier : la sentence de
l’élection de Saint-Flour lui a donné cette qualité.
L a dame de Dienne a bien senti que cette sentence
étoit un obstacle invincible à sa prétention ; mais elle
prétend que cette sentence est susceptible d’être attaquée,
et elle déclare en interjeter incidemment appel. Il faut
convenir que cet appel incident est d’un grand poids
contre une sentence qui a été signifiée à Jacques Ves
chambes en 1743 , et qui n’a jamais été attaquée par lui
ni ses descendans.
On a vu également que Jacques Valarcher réunissoit tous les droits de ses beaux-frères et belles-sœurs ,
par les différentes cessions dont on a fait le détail. Les
sieur et dame de Dienne veulent écarter ces différentes
cessions par un acte du 3 mars 1710 , qui émane de
Catherine Combart ; et 011 lui fait dire qu’elle cède ses
droits personnels , ainsi que les droits et portions héré
ditaires de chacun de ses enfans, à Jacques Veschambes ,
à la charge par lui de payer une somme à chacun , sui
vant le règlement fixé par cet acte.
Mais Catherine Combart n’avoit pas qualité pour traiter
valablement des biens doses enfans; elle n’en étoit pas
même la tutrice ; elle ne prend d’autre titre que celui
de
�'
.
(
2 5
)
'
âe mère pieuse. D ’ailleurs cet acte n’a point eu d’exécu
tion ; Jacques Veschambes n’a jamais rien payé du prix ;
les sieur et dame de Dienne n’en rapportent point de
quittances, et sont dans l’impossibilité d’en rapporter;
enfin cet acte n’est qu’un simple transport de créances
que lesenfans pouvoient avoir en vertu du testament de
leur père. Jacques Veschambes n’y pi’end point la qualité
d’héritier de son pèi*e ; Catherine Combart n’y a que celle
de créancière : cet acte n’auroit donc jamais eu l’effet de
faire c o n s id é r e r Jacques Veschambes comme héritier de
François ; et la preuve qu’il n’a jamais voulu l’être, résulte
de sa répudiation et de la sentence rendue contre M e y ;
tous ces actes bien postérieurs ù la prétendue cession
de 1710.
Les sieur et dame de Dienne dissertent longuement
sur la question de savoir si Jacques Veschambes seroit
aujourd’hui non-recevable à critiquer le testament de
son père. Ils savent bien que le jugement de Saint-Flour
a encore rejeté cette prétention ; mais ils croient pou
voir revenir sur cet objet : ils soutiennent qu’il n’est pas
nécessaire d’être héritier pour demander la réduction
portée par l’édit des secondes noces. Suivant e u x , un
fils du premier lit qui a répudié à la succession de son
p è r e , peut tout de même demander le retranchement
de l’é d it, parce qu’il tient ce bénéfice de la l o i , non
comme héritier , mais comme enfant.
En lisant cette dissertation, on peut douter que la dame
de Dienne ait bien compris ce qu’elle vouloit dire. : En
effet, où pourroit la conduire cette réduction ? elle ne
conccraeroit que Catherine Combart qui scroit réduite à
D
0,
�( *6 )
#
une portion d’enfant moins prenant, et q u i , par le tes
tament de son m a ri, n’étoit elle-même qu’héritière fidu
ciaire ; mais alors cette réduction ne profiteroit qu’à l’hé
ritier institué, et cet héritier , c’est Antoine Veschambes.
Jacques qui avoit répudié à la succession de son père,
ne pou voity rien prétendre ; la dame de Dienne n’amendoit rien du chef d’Antoine : c’est encore une chose jugée.
L a cession de Marguerite Veschambes , troisième du
nom , ne oontenoit qu’un transport d’une créance de
y o fr.; ainsi tout ce qu’a dit la dame de Dienne sur ce
point, est une énigme dont on attend la solution ou h
m o t, lorsqu’elle donnera plus de développement à ses
moyens.
Vient l’appel incident de la dame Valarcher et de sa
fille. L e jugement dont est appel a dispensé la dame de
Dienne de restituer les jouissances que son père avoit
perçues dans la succession d’Antôine Veschambes. Elle
est également dispensée de la restitution du mobilier
mort et v if, ainsi que des intérêts du tout. Cependant
il est reconnu par toutes les: parties que Jacques Ves
chambes a joui de tous les biens de son père; qu’il a
vendu et dissipé une portion des immeubles ; qu’il a
également dilapidé le mobilier mort.et vif, et qu’il s’en
fit une ressource , lors de son é v a s io n .
La dame de Dienne même se fait un moyen de la
jouissance de son père, pour soutenir qu’il étoit héritier.
Les intimés prouvent au contraire, soit par la répu
d i a t i o n personnelle de Jacques Veschambes, soit par
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, soit
enfin par la sentence rendue contre M e y , créancier de
5
�«1-2&
\
'
( 27 )
la succession de François Veschambes, que la jouissance
de Jacques n’étoit que précaire ; qu^il n’a possédé ces
biens que sous le prétexte qu’il étoit créancier; et dèslors il en doit nécessairement la restitution, sauf la comr
}
pensation jusqu’à due concurrence , avec les créances
qu’il pourrait avoir acquittées; et il est prouvé qu’il n’en
avoit payé aucune.
' P a r quelle fatalité les juges dont est appel n’ont-ils
donc pas adjugé cette restitution de jouissance, ainsi
que celle du m obilier?
'
1
Ils ont donné pour motif qu’il paroissoit que tous les
enfans avoient joui en commun. Mais, i°. rien n’établit*
cette jouissance commune; il n’y avoit pas même de;icrt-fT
habitation entre les parties. 20. Eli Vdmett.-ùnt 'cette co
habitation , tous les enfans étoient d’un fige à gagner
leur nourriture et entretien , surtout dans la condition
des parties. Il est d’ailleurs établi que Jacques V es
chambes seul avoit ailcrmé‘les'biens ; que le •prix de la
ferme étoit délégué à ses créanciers'personnels , notam
ment au sieur Dusaillant. Le'prix des ventés par lui con
senties a également tourné ù son profit. Ce bail à cheptel
de 1738 prouve encore que Jacques Veséhîimbes avoit
vendu tous les bestiaux. :L a disposition du j u g e m e n t est
donc erronée et injuste en cette partie. E t certes ! si
quelqu’un peut invoquer1 là faveur dans iine cause' de
ce genre , elle serait toute pour ce cohéritier soigneux
et diligent qui a payé les dettes, traité' avec le père de
la dame de Dienne, sur la foi de s;6h 'c o n tr a t de ma•
•
'
f*
n a g e , et qui, quarante ans après, se voit assailli d'une
! ’
*
*
•
•
|
�[ 28 )
demande qui a tout l’odieux d’une vieille recherche ,
absolument sans intérêt.
Les intimés n’ont-ils pas à se plaindre aussi de ce que,
sur une demande exagérée qui tend à revenir contre
la chose irrévocablement jugée, qui a occasionné des
frais aussi considérables, les dépens aient été compensés
pour être employés en frais de partage.
Cette-espèce de compensation fait que chacun supporte
les dépens dans la proportion de son amendement, et
il en résulte que la dame de Dienne n’ayant qu’une
portion très-exigu ë à réclamer dans la succession de
Jacques Yeschainbes, son aïeul, succession qui par ellemême est déjà très-modique, feroit supporter aux intimés
la,presque totalité des dépens qui au moins doivent être
la peine du plaideur téméraire.
, Reste l’appel incident interjeté par la dame de Dienne,
du jugement de Saint-Flour, du 16 ventôse an 8 , qui
l’obligeoit au rapport de la somme de i oo francs,
reçue par son pèi*e. Cet appel ne fait pas honneur à
la délicatesse de la dame de Dienne ; elle ne pouvoit
se soustraire à ce rapport qu’en répudiant à la succession
de son père. En même temps qu’elle attaque la répu -'
diation de son aïeul, et qu’elle veut prouver qu’il est
héritier, elle n’honore pas assez la mémoire de son père,
pour accepter sa succession ; elle veut qu’il soit mort
ir. solvable. Cependant elle s’est emparée de son mobi
lier , de ses armes ; on a vu son mari revêtu de l’habit
écarlate qu’avoit porté défunt son père. O r , d’après
Duplcssis , il n’en faudroit pas autant pour la faire
répu ter
5
�4 «.
U )
( 29 )
réputer héritière. A u surplus, la discussion des enquêtes
respectives apprendra à la dame de Dienne qu’elle auroit
dû au moins s’éviter ce désagrément, et qu’elle ne peut
se dispenser du rapport qu’on lui demande? auquel elle
a été si justement condamnée.
M e. P A G E S ( de R io m ) , ancien avocat
Me. B R U N ,
avoué.
//fcfc f^ r ,-----<*■
S w
Ÿ/~~JtOfc
A R IO M , de l'im primerie d e L a n d r i o t , seul im prim eur de l a
C our d ’appel.
_
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veschambes, Françoise. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
experts
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher ; Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon, son mari, intimés et incidemment appelans ; contre sieur Vital de Dienne et dame Jeanne-Marie de Douhet, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de Murat, le 11 prairial an 11.
Arbre généalogique
Notation manuscrite : 3 ventôse an 13, 1ére section, jugement, après délibéré, statue sur infinité de questions soulevées dans les plaidoiries, et même pendant le délibéré, après production d'une grande quantité de titres et pièces, fixe les droits des parties dans diverses successions et détermine les bases du partage, rapports et prélèvements. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1604
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1603
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53278/BCU_Factums_G1604.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
experts
gain de survie
généalogie
homicides
longues procédures
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53073/BCU_Factums_G0912.pdf
d6a93be88614a1bb15afb6133451669a
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Text
PRÉCIS
Pour le Citoyen N I C O L A S T A P H A N E L , Juge d
e
Paix , demeurant en la ville d’Arl e s , Département du
Puy-de-Dôm e.
N
OEL
T A PH A N EL
q u i, en 17 3 9 , avait fait une in s ti- T R IB U N A L .
tution contractuelle pure et simple au profit de Pierre Taphanel
son fils, la ratifie en 174 8 , lors du second mariage de celui-ci. Sa
ratification est conçue en ces termes : « En faveur duquel mariage
» ledit Taphanel Père a ratifié l'institution, qu’il a ci-devant faite
» au profit dudit Taphanel son fils , par son premier contrat de
» mariage d u 4 .m ai 17 3 9 a v e c
clauses expresse que lesd its
» T a p h a n e l p e re et f i l s ne p o u rro n t a v a n ta g e r les e n fa n s du
» p r e m ie r et d u seco nd l i t , les uns p lu s que les autres.
Est-ce Noël Taphanel ou Pierre Taphanel qui a disposé ? C ’est
là la seule question d u procès,
Un grammairien dem ande comment il est «permis de douter
que N oel Taphanel a seul dicté une ratification à laquelle il am i s
une condition qu’il a cru utile aux enfans du premier lit. :
Un sophiste , oubliant qu’il est dans l’ordre des probabilités
qu’ une fem m e prendra sur Pierre Taphanel un ascendant,préjudiçiable aux e nfans du premier l i t , et profitable, à ceux du second
li t , qu’il est encore plus vraisem blable qu’elle en concevra l’espoir ,
suppose que c’est elle qui- a exigé une-promesse d’égalité dans le
partage d e s biens de Pierre Taphanel. entre les enfans des deux
lit s , que cette promesse d’égalité est une des conditions du m ariagej
et qu’elle a été souscrite.par; Pierre T a p h a n e l,
U n premier, tribunal préfère la convention éerite au système. Un
second tribunal se laisse éblouir. et substitue une convention à celle
qui est insérée dans l’acte de 174 8 . C ’est au tribunal suprême à
décider lequel des deux s’est conformé à la raison et aux lois.
A
DE
c a s s a t io n . \
�Avant de développer les principes qui doivent amener la solution
de la difficulté que l’on a fait naître sur cette affaire , il est néces
saire de rappeler quelques faits.
Pierre Taphanel se marie en 17 5 9 ; ses F ®re et m ^re l'instituent
""iStrr héritier universel. L ’institution contractuelle est conçue en ces
termes : « D e la part dudit Noël Taphanel et de la demoiselle
» Audrand , ils ont institué et instituent ledit Pierre T aphanel,
» leur fils, futur époux , pour leur v ra i, unique et univenel héritier
« de tous leurs biens , meubles et im m eubles, nom s, droits, raisons
» et actions généralement quelconques. »
De ce mariage sont issus Nicolas Taphanel et une sœur , dont
il a acheté les droits.
Après la mort de Marie-Anne Luzuy , Pierre Taphanel se remarie
en 17 4 8 .
■
*"■! >'r
Noël Taphanel ratifie, par le contrat qui contient les conventions
civiles de ce second m ariage, l ’institution contractuelle qii’il avait
faite en 17 3 9 .
connaît les termes dans lesquels cette ratification
est conçue. On sait que Noël Taphanel déclare qu’il ratifie l’ins
titution avec clause expresse que les enfans des deux lits ne pour
ront être'avantagés les uns plus que les autres..
D e ce second mariage sont issus Renée et Suzanne Taphanel.
Noël Taphanel meurt :; Pierre Taphanel , son fils , 'recueille sa
succession.
f
;
Nicolas Taphanel se marie en 177 9 ; Pierre T ap h an el, son père
l’ institue son héritier ünivéJ-sèl et le charge de payer Une légitim e
déterminée à chacune dé ses sœurs consanguines.
Pierre Taphanel meurt le 4 nivôse an 3 ; le 2 1 ventôse suivant
Renée et Suzanne Taphanel , autorisées par leurs m aris, font assigner
Nicolas Taphanel , leur frèrô , pour le faire condamner à venir au
partage des biens de le u r; pére commun.
Un jugemenr par défaut , du 1 j frimaire an ■; , ordonne ce
partage, pour être délàisiée aux deux filles la portion qui leur
est due.
Ce jugement est signifié
Nicolas Taphanel , qui déclare qu’ il
�a /s
(3)
consent de donner à chacune de ses sœurs le douzième qui lui
revient.
Elles soutiennent alors qu’il leur revient à chacune le q u art, et
demandent qu’en expliquant le jugement du i ^ frim aire , il soit
dit qu’elles prendront chacune le quart au lieu du douzième.
Dès ce moment les parties discutent la question de quotité.
R enée et Suzanne Taphanel invoquent le contrat de mariage de 1 748 ,
et disent que , d’après cet acte , le partage doit être fait par portions
égales.
£•
Nicolas Taphanel leur oppose le contrat de 17 3 9 >‘l1” porte une
institution pure et simple au profit de son père ; il dit qu’aux termes
de l’article 1 7 , verset 14 de la coutume d’ Auvergne, Pierre Taphanel
et les enfans du premier lit ont été saisis de l’institution , que l’ins
titution étant irrévocable, elle n’a pas p u , en 1748 , être grévée
d’ une condition. Que la condition est déclarée nulle par l’ordon
nance de 1 7 3 1 et celle de 1 7 4 7 , et qu’ainsi Pierre Taphanel a pu
disposer, comme il l’a fait en 17 7 g , des biens qu’il a reçus de
son p è re , d’où il conclut que Renée et Suzanne Taphanel, n’ ont
droit chacune qu’à un douzième de sa succession.
Un jugement du 25 floréal an <j , déclare la condition imposée
par Noël Taphanel à la ratification contractuelle nulle et de nul
eiiet ,e t ordonne que Renée et' Suzanne Taphanel prendront chacune
un douzième des biens composant la succession de Pierre Taphanel.
Sur l’ap p el, le tribunal du Puy-de-D ôm e ju ge, le 2 6 floréal an 9 ,
que la condition insérée dans le contrat de mariage de 174 8 est
une loi des deux fam ille s, et qu’elie est imposée au père et au fils,
et non par la père à son fils. En conséquence , il ordonne que
Renée et Suzanne Taphanel prendront chacune un quart de la
succession de Pierre Taphanel.
On voit que les principes résistant à ce que Noël Taphanel
m e t, en 1 7 4 8 , une condition à une institution pure et sim ple,
faite tjn 1 7 ^ 9 , 011 a cru ne pouvoir accorder à Renée et Suzanne
Taphanul la moitié des biens de Pierre Taphanel , qu’en dénaturant
la clause insérée dans l’acte de 1748. Il faut d o n c, pour apréci.r
m
*
�ÎlSA
«US
(4 )
Je système adopté par le tribunal d’nppel, examiner les termes de
l’acte et sepénétrerdes motifs qui ont amenéla stipulation ¿ont il i’agir.
Une seconde femme met tous ses soins à faire oublier celle
qu'ellef rem place, et à diminuer par degré et pre^qu’in^ensiblemtnt
l'affection de son mari pour des erriàr.s qui n^ sont pas à elle. Elle
parvient souvent à diriger son attachement sur les enfans du second
lit. Une multitude d’exemples nous attestent cet arCendant des
'secondes femmes sur leurs maris. Aussi l’intérêt des enfans rend-il
les secondes noces peu favorables ; aussi les lois ont-elles pn.s:rk
des bornes aux avantages que la seconde femme peur attirer sur elle.
' Noël Taphanel a craint que les nouveaux liens que son fils allait
contracter ne fussent nuisibles aux enfans qu’il avait eu de - son
prem ier mariage. Il a cru devoir prendre des précautions contre
l’ascendant , que très-probablement la seconde femme prendrait
sur son mari. 11 a voulu que son fils ne; pur pas avantager les
enfans du second lit au préjudice de ceux du premier lit ; il a
,
consenti , à ce p rix, de ne pouvoir lui-mêrhe leur faire aucune
libéralité. Il a dicté la stipulation qui donne lieü au procès. Ce qu’il
a fait pour les enfans du premier l i t , on veut aujourd’hui le
retourner contre eux. On veut, renonçant à toute espèce de pro
babilité , et contre les termes même de la stipulation , supposer
qu’elle n’est pas l’ouvrage de Noël Taphanel ;itnais qu’ elle a été
exigée par la fam ille de la seconde femme.
M ais, i ° . la rédaction de la clause ne permet pas cette suppo
sition ; i ° . l’esprit de la convention est totalement opposé.
La ratification de l’institution contractuelle est faite par Noèl
T aphanel, et immédiatement après l’avoir ratifiée, il est d i t , avec
clause expresse ; ces mots avec clause expresse qui commencent
l ’énonciation de la condition mise à la ratification sont une dépen
dance de ce qui précède la ratification , et la condition sont liées
dans une même phrase, et certainement s’il n’y avait entr’elles
cette relation de dépendance , les mots renfermant la cause d’égalité
auraient
séparée.
fait
la matière d’ une phrase entièrement distincte et
�2J J
(s
;
L ’esprit de la stipulation est tout aussi opposé au sens que l ’on
s'efforce de donner à cette clause.
D ’ un côté , Noël Taphanel craint l’inflaence d’ une seconde
'femme sur l’esprit de son fils , il redoute des dispositions préju
diciables aux enfans du premier l i t , qu’il a affectionné ; il s’efforce
d’y mettre des entraves, il met à sa ratification une condition dont
il ne prévoit pas l’inutilité.
D ’un autre côté, Pierre Taphanel ne veut pas montrer la moindre
opposition à son p è re , qui pouvait nuire à l’institution de 1 7 3 9
par des ventes. Il consent à tou t; mais il ne veut rien. Certaine
ment ce n’est pas lui qui a désiré de renoncer au droit de faire
des dispositions. Dès lors ce n’ est pas lui qui a voulu la stipu
lation dont il s’agit. Les adversaires de Nicolas Taphanel n’es inc
pas le supposer.
Ce n’ est pas non plus la nouvelle femme ; elle n’avait pas assez pett
de confiance dans sus charmes pour croire qu’elle ne prendrait
aucun empire sur l’esprit de son m ari, qu’elle n’exercerait aucune
influence sur ses dispositions. Ce n’ est donc pas elle qui a voulu
cette stipulation , dont on s’ efforce de méconnaître l’esprit.
Mais si ce n’ est ni cette jeune fem m e, ni Pierre Taphanel qui ont
exigé cette clause, c’est donc Noèl Taphanel. E t en effet lui seul
avait à s’occuper des intérêts des enfans du premier lit.
Si la lettre et l’esprit de la clause se réunissent contre la pré
tention des enfans du second l i t, comment a-t-on pu l’anéantir?
N ’est-il pas évident que la condition imposée par Noël Taphanel,
en 1 7 4 8 , à une institution pure et simple , faite en 1 7 3 9 , est
prohibée par l’ordonnance de 1 7 3 1 , qui déclare les donations
entre-vifs irrévocables ; par celle de 17 4 7 , qui , par le même
principe , réprouve tout changement à une institution contractuelle;
et enfin à l’ article 1 7 , chapitre 14 de la coutume d’Auvergne , qui
porte que l’institution saisit les contractans et les descendans d'eiu*
tant seulement.
Les juges du tribunal d ’appel n’ont pas méconnu les principes,
et les adversaires de Nicolas Taphanel n’ont pas entrepris de les
<Ji4
�combattre ; mais on a cru pouvoir substituer une clause non con
venue à une clause convenue ; on a cru pouvoir se donner le droit
de changer une clause claire , en supposant qu’il y avait lieu à
interprétation , et l’on s’est flatté d’échapper à la censure du tribunal
suprêm e, parce que là où il y a lieu à interprétation , il est presque
impossible de trouver qu’il y ait ouverture à cassation.
Sans doute une clause douteuse doit être envisagée sous différens
rapports, et ces divers rapports sont un grand obstacle à la cassation ;
mais s’il était permis de dénaturer des conventions claires sous le
prétexte frivole de les interpréter , les tribunaux pourraient, à leur
gré , se jouer des traités faits entre les parties , et violer impuné
ment l’ordonnance de 1 51 o , qui prescrit de les exécuter, et ce serait
en vain que l’on aurait institué un tribunal de cassation pour ramener
à l ’exécution des lois les tribunaux qui les violent.
A insi, nul doute qu’il n’ y ait lieu de casser un ju gem en t, lorsque
le tribunal , sous le voile de l’interprétation, viole une convention
form elle et claire. O r, dans l ’espèce , la lettre et l’esprit de la clause
se réunissent pour démontrer que Noël Taphanel a lui seul dicté
la condition qui donne lieu au proecs , et cette condition ( les
adversaires de Nicolas Taphanel en conviennent ) est nulle si elle est
l’ouvrage de Noël Taphanel seul. En effet, comment ne pas aperce
voir qu’elle est en opposition avec l’irrévocabilité des donations
entre-vifs , prononcée si formellement par les ordonnances de 1 7 3 1
et 174.7 , et avec la substitution vu lgaire, écrite dans l’art 17 du
titre 14. de la coutume d’Auvergne ?
Peu rassurés sur la possibilité de persuader que la condition
dont il s’agic n’a pas été l’ouvrage de Noël Taphanel s e ul , tandis
que la lettre de la clause l’annonçait très-clairement, les adversaires
de Nicolas Taphanel ont essayé d’insinuer que cette condition était
une loi des deux familles : mais qui ne sait pas que ce qui était
interdit îi No.il Taphanel par des lois précises lorsqu’il aurait voulu
le faire , sans aucune impulsion étrangère, n’aurait pas pu devenir
licite par l’intervention de cette impulsion étrangère.
Ain i , il faut écarter cette considération d’ une convention sup-
� it
( 7)
posée entre les deux fam illes, et conséquemment l'interprétation
que l’on s'est permise pour changer totalement la nature d’ une
condition que l’on a senti être en opposition avec les lo is , et dès
lors ramener cette affaire à des termes simples et vrais.
Noël Taphanel met une condition à une institution pure et simple.
Cette condition est nulle et ne peut être considérée que comme
désir impuissant de l’aïeul de conserver à ses petits-enfans, qu’il
chérissait, une propriété qui , une fois sortie de ses mains, était
entièrement a la disposition de son fils , son héritier contractuel ;
et ce désir , il faut croire qn’ il n’ a pas été tout à fait inutile, lorsque
l ’on voit Pierre Taphanel disposer au profit de l’aîné des enfans
du premier lit.
La condition , ouvrage de Noël T aphanel, nulle même quand
elle eut été mise du consentement de Pierre T ap h an el, son fils,
nulle aux termes des lois générales et de la loi locale des parties ,
n’a donc pas pu être un obstacle à l’institution contractuelle, faite
en 1 7 7y au profit de Nicolas T ap han el, et dèî lors cette dernière"
institution doit être exécutée.
La question de l’irrévocabilité de l’institution contractuelle a été
agitée en la sénéchaussée-d’ Auvergne en 1 7 5 0 , et ce tribunal juge
quq le père instituteur , et le fils institué, n’avaient pas p u , par un
testament qu’ils avaient 'faits conjointement, en faveur d’un enfant
d’ un second l i t , changer l’ ordre légal établi par l’institution et
blesser les droits de l’enfant du premier mariage qui avait été saisi
du bénéfice de l’institution. Ce jugement est rapporté par C h ab ro l,
dernier commentateur de la coutume, tome 2 , page 288.
Auroux des Pomiers a examiné la même question dans son com
mentaire de la coutume du Bourbonnois ; il d it, sur l’article 1 1 1 ,
que le consentement de l’héritier institué à ce que l’instituant fasse
des dispositions qui iraient à détruire l’effet de l’institution,ou même
à une deuxième institution , ne serait pas suffisant pour les faire
subsister. A in si, d it-il^ si..celui qui a été institué héritier _par^ son
contrat de mariage , passe à de secondes noces du consentement
de l’instituant, et que l’ instituant, de concert avec l ’institué , réitère
'"<■*
�(8)
l’ institution avec clause qu’elle profiterait aux enfans du second lit
comme à ceux du premier , cette deuxième institution , quoique
faite du consentement de l’héritier institué, et môme à sa réqui
sition , sera n u lle, et les enfans du second lit ne pourront en tirer
avantage. Il invoque l’opinion de Lebrun et de Lauriére.
' Il est à remarquer que dans cette dernière espèce, on pouvait
dire que la condition était la loi des deux familles ; cependant, on
n’a pas cru que cette circonstance pût valider ce qui était contraire aux
ordonnances et à la coutume.
- Il doit donc rester pour constant que l’institution pure et sim ple,
faite en 1 7 3 9 , n’a pas pu, en 1 7 4 8 , être soumise à une condition ,
même du consentement de Pierre Taphanel , que cette condition
est nulle aux termes des ordonnances de 1 7 3 1 et 1 7 4 7 , et de l’article
1 7 du titre 14 de la coutume d’ Auvergne ; qu’ainsi Pierre Taphanel
a pu , nonobstant cette condition nulle , disposer, en 17 7 9 au profit
de Nicolas Taphanel en l’instituant son héritier , et qu’avoir ordonné
un partage égal de la succession de Pierre T ap han el, au mépris de
l’institution contractuelle de 1 779 , et en validant la condition de
174 8 , c’ est avoir violé le s principes consacrés par les ordonnances
de 1 7 3 1 , 17 4 7 etla
coutume d’Auvergne , et en même temps les
lois romaines sur les conventions, et l’ordonnance de 1 5 1 0 qui en
ordonnent l’exécution, d’où il résulte nécessairement que le jugement
du
'
<: ■
floréal an 9 doit être cassé.
1
'1
Le Citoyen LO M BARD Q U IN C IE U X , R ap po rteu r.
Le Citoyen
'
Le Citoyen H O M , D éfenseur.
1
Commissaire.
r
- A :P A R IS. -De l ' i mprim erie D 'É G R O N , rue des N o y e rs, n°. 24.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Taphanel, Nicolas. 1801?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lombard Qunicieux
Hom
Subject
The topic of the resource
testaments
secondes noces
irrévocabilité
contrats de mariage
lésion enfants premier mariage
coutume d'Auvergne
réserve héréditaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour le Citoyen Nicolas Taphanel, Jude de Paix, demeurant en la ville d'Ardes, Département du Puy-de-Dôme.
Table Godemel : institution d'héritier contractuelle : les premiers juges avaient adopté la première interprétation, mais la cour, en infirmant, a consacré la seconde.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie d'Egron (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1801
1739-1801?
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0912
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0911
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53073/BCU_Factums_G0912.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ardes (63009)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
irrévocabilité
lésion enfants premier mariage
réserve héréditaire
secondes noces
testaments
-
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a2e84655464e1d58a0469488a8e93e36
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MÉMOIRE
POUR
Les sieur et dame H I L L I A R D , cotuteurs de la demoiselle
D u m o n t , appelans;
C O N T R E
Les sieurs et dames R A B U S S O N - D E V A U R E
D E L A R O Q U E , intimés .
et
U
n e disposition de p r è c i p u t , faite e n f a v e u r d ’un fils p a r ses père et m è r e , dans les
contrats de m ariage de ses deux soeurs , c o m m e c o n d i t i o n de n on-a pa na ge et d ’une ins
titutio n c o ntractu elle à leur p r o f i t , est-elle v a l a b l e , lors surtout que par le contrat d e
mariage du f i l s , le père su rvivan t a su rab on d am m en t confirm é cette disposition , en
v ertu de la facu lté q u e s’en étoient réservée les insti t u a n s , c o m m e con d itio n de cette
m êm e institution ?
T e l l e e s t , dans l ’expression la plu s e x a c t e , la question soumise à la décision de la C o u r .
I l y auroit lieu de s’étonner , sans d o u t e , q u ’elle ait pu faire d ev an t les premiers juges
u n sujet sérieux de c o n t r o v e r s e , si l ’expérience n’a voit appris q u ’i l n ’est r i e n , en juris
p r u d e n c e , que l ’a v e u g le m e n t de l ’intérêt personnel ou le d élire de la présom ption n ’ait
ch erch é à r en d r e problém atique.
C ette cause sem ble destinée à offr ir à la m éd ita tio n un de ces exem ples frappans d u
plus grand excès où l ’on ait pu porter l ’abus du sophisme : on seroit tenté de croire que
les dames D e v a u r e et de la R o q u e n ’ont eu po u r b u t , dans cette en treprise, q u e de faire
briller leur esprit aux dépens de la raison et de la bonn e foi.
O n ne leur enviera pas ce fr iv o le avantage.
Forts de la justice de leur cause , les sieur et d a m e H illia r d n ’e m p lo iro n t que des armes
q u e' lle puisse a v o u e r ; ils se contenteront d ’opposer la vérité à l ’e r r e u r , la droiture à
l ’artifice et aux détours. L e reste sera l’ouvrage de la Cour.
Ils savent que les prestiges d ’une fausse é l o q u e n c e , et tous les tours de force de l ’esprit
hum ain , ne pe uve n t en im poser q u ’à des esprits superficiels.
I l s savent q u e , devant des magistrats intègres et éclairés , quels que soient les efforts
d' une cu pid ité en d é l i r e , le talent et la ruse ne peuvent su p pléer au bon d r o i t , et q u e
toutes les ressources de l'esprit sont v a in e s, q uan d elles heurtent de front la justice et la
Vérité.
F A I T S.
D u m a r i a g e de Jean D u m o n t a v e c P r o c u l e P i t a t , sont issus trois enfnns , savoir M
arie
M arguerite et A n d ré D um ont.
�( 4 )
L e 19 n ovem bre 1775 , M a rie D u ra o n t c o n tra c ta mariage a v e c M . Claude-Josepli
llab u sson -D eva u re.
L ’acte de leurs c on v en tion s m atrim oniales contient la clause suivante :
« E n faveur du mariage , les sieur et d a m e D u m on t ont institu é la demoiselle fu t u r e ,
leur fille , leur h éritière par égale portion avec les autres enfans q u ’ils auront au jou r de
leu r décès , de tous les biens dont ils m ou rro n t vêtus et saisis, sous la réserve expresse
qu'ils se font d e la terre d e M o n t , consistante en un c h â te a u , p r é s , terres, vignes, dîm es ,
c e n s , rentes , quatre domaines , un m ou lin et deux locateries , avec toutes les c irc o n s
tances et d épendances de lad ite te rr e , en q u oi que le tout puisse consister , a vec les bes
tiaux qui garnissent ladite terre ou p o u rr o ie n t la garnir à leur décès , jusqu a c o n c u r re n c e
de
5 ,ooo
liv r e s, en sem ble tous les vaisseaux vin a ir es, c u v e s , foudres et autres qu i se tr o u
vero nt dans ladite terre, ainsi que tous les meubles meublant les appartemens d u d it château
de M o n t , lin g e s , batteries de c u i s i n e , a rg e n te r ie , en l ’état que le tout se trouvera au décès
du dernier m ouran t desdits pére et m ère ; en o u t r e , la som m e de 6 ,0 0 0 liv. que lesdits
sieur et d a m e D u m o n t se proposent d ' e m p l o y e r en acquisition de fonds , cens et devoirs
po ur être annexés à ladite terre et en faire partie ; p o u r , par lesdits sieur et d am e D u m o n t ,
ou le survivant d ‘e u x , disposer de ladite terre au profit de tels de leurs enfans q u ’ils juge
ront à p r o p o s , m êm e de la future , par q u e lq u ’acte que ce soit d ’entre-vifs ou à cause de
i n o r t , sous signature p rivé e ou par- devant n otaire ; dans laquelle réserve les sieur et dame
D u m o n t , père et m ère de la fu ture , en tendent être com prises toutes constructions n o u
v e lle s, am éliorations et réparations utiles et d ’agréinent q u ’ils pourront a voir faites, et le
survivant d ’eux , dans les biens com posant ladite réserve ; et d ans le ca s d e non d isp o si .
d o n d e leu r p a r t , ladite terre de M o n t , avec les bestiaux q u i se trouvero nt la g a r n i r ,
j u sq u ’à c o ncurrence de ladite som m e de
5 ,000
fr a n cs , les vaisseaux v in a ir e s , meubles
m e u b la n s , l i n g e , batterie de cuisine et a r g e n te r ie , en l ’état que le tout se t r o u v e r a , a p
p a r tie n d r o n t , en tou te p r o p r ié té , à A n d r é D u m o n t, leu r f i l s , lequel en demeurera,
précipité , ainsi q u e des annexes q ui auront été faites à ladite te r r e , jusqu’à c o n c u r re n c e
de ladite som m e de 6,000 l i v . ; ladite institution faite sous la d ite réserve , et à condition,
d e la d ite d isp o sitio n , et encore à la c h a r g e , par la f u t u r e , de laisser jou ir le survivant
de ses père et inére de la portion qu i lui seroit revenue dans les biens du p r é d é c é d é ; sans
toutes le sq u e lle s c h a r g e s , cla u ses e t c o n d itio n s , la d ite in stitu tio n n ’a u r o i t é t b
f a i t e , et la future auroit été apanée m o y en n a n t la d ot qui va lui être constituée.
.« E n a va n c em e n t de leur future s u c ce ssio n , lesdits sieur et d ame D u m o n t ont constitué
en dot à la dem oiselle f u t u r e , leur f i l l e , la somme de
3o,o oo
l i v . , e t c . , etc. »
L a dot de M a r ie D u m o n t , épouse de M . D e y a u r e , lui a été payée pendant la vie de ses
pè re et mère.
E n 1 7 7 7 > Marguerite D u m o n t c o n tra c ta mariage a vec M . G r e l l e t de Beauregard.
U n e clause de leur contrat de m ariage est ainsi conçue :
« L e s sieur et d am e Dui.nont, dans l’esprit d u contrat de m ariige de m adem oiselle
M a r iç D u m o n t , leur fille a î n é e , avec M . J os e ph llabusson-Devaure , passé devant Ilolla t,
n o ta ire , le 19 n o ve m b re 1 7 7 5 , ont institué la demoiselle f ut ur e leur h é r i t i èr e par égale
p o rtio n avec les autres enfans qu ils auront au jour «le leur d é r è s , de tous Us biens d o n t
ils mourront vêtus et s.iisis, sous la réserve exp resse q u ’ils se font du la terre d e M o n t ,
telle: q u 'e lle est exp liq u ée au contrat sn sd atè , ensem ble des autres objets qui y sont
d é ta illé s , et de la som m e de G,000 iiy . dont il est p a r l é , p o u r,p u r lesdits sieur et dama
�(5)
'
(ül
D u i n o n t , ou le survivant d ’ e u x , dans le s term es d u m im e c o n t r a t , disposer de lad ite
réserve au profit de tels de leurs e n f a n s , m êm e de la f u t u r e , p a r ¿es m o y e n s e t d e la
m a n ière expliqués audit contrat.
« Cette institution faite en outre a u x m êm es ch a rg es que celles expliquées a u d it
contrat. Et en a v a n c e m e n t de leur future succession , lesdits sieur et dame D û m e n t o n t
c onstitu é en d o t à la demoiselle future , la somm e de
3 o,o oo
livres , e tc. »
L a d am e G r e lle t de Beauregard a r e ç u , pe n d a n t la vie de ses père et mère , à co m p te
de sa constitution d o ta le, une som m e de 6,000 f r a n c s , et elle a tou ché annuellem ent
les intérêts du surplus de sa dot.
E n 1 7 8 3 , P ro c u le P i t a t , m ère et aïeule des p a r tie s , d é c é d a ; Jean D u m o n t , son
d a r i , lui survécut.
C e ne fut q u ’en 1789 q u ’i l maria A n d ré D u m o n t , son f i l s , à demoiselle M a rie Sopliie-B arth e le m i G i b o n t , a ctu ellem en t épouse du sieur H illiard .
L e contrat de m ariage contient les dispositions suivantes :
« E n fa veur du présent m ariage, est-il d i t , le sieur D u m o n t père a institué et institue
i o n fils, son héritier par égale p o rtio n avec ses deux soeurs , épouses de M M . Rabus*onD e v a u r e et G r e lle t d e Beauregard , d e t ous les biens m e u b l e s et im m eub les d o n t il m ourra
Vêtu et saisi ; et c o m m e par le c on tra t de m ariage de d a m e M a r ie D u m o n t , épouse d u d i t
R a b u sso n -D e v a u re , ledit sieur D u m o n t p è r e , et ladite d éfu n te P r o c u le P i t a t , son épouse,
s'étoient co n jo in tem e n t réservé^ m êm e a u survivant d ' e u x , la fa c u lté de disposer au
profit de tels de leurs enfans q u ’ils jugeroient à p r o p o s , et par tel acte que b o n leur
s e m b l e r o i t , de la terre de M o n t , consistante en u n château , p r é s , te rr e s, d î m e s ,
YÎgnes , c e n s , r e n te s, quatre d o m a i n e s ,
un m ou lin et deux lo c aterie s, avec les c i r
constances et d ép en dan ces de ladite terre , en q uoi que le tout p u t consister, a vec les
bestiaux qui garnissoient lad ite te r r e , ou po urroien t la garnir à leur décès , ju s q u ’à c o n
c u rr e n c e de la somm e d e 5,000 l i v r e s , ensemble tous les p r e ss o irs, vaisseaux v i n a i r e s ,
c u v e s , fou d res, et autres qui se trouveroient dans ladite terre , ainsi que tous les meubles
m eublan t les appartemens d u d it château de M o n t , linge , batterie de cu isine , a r g e n te r ie ,
en l ’état que le tout se tr o u v ero it au décès du d ern ie r m ou ran t desdits sieur et d a m e
D u m o n t , père et mère ; et en cas de n on disposition desdits objets du v iv a n t desdits sieur
et d am e D u m o n t , père et m è r e , ils a p p a rtien d ro n t en toute p r o p r i é t é , et à titre de préc i p u t , audit sieur futur ép o u x , ainsi que les annexes qui auroient été faites à ladite t e r r e ,
jusqu à c o n c u r re n c e de la som m e de G,000 francs.
« E t com m e ladite d a m e P it a t , épouse d u dit sieur D u m o n t père, est décédée sans avoir
manifesté ses intentions à l ’égard de la réserve ci-dessus d é s i g n é e , ledit sieur D u m o n t père
usant de la faculté de po u voir disposer de la totalité desdites r é se r v e s, d éclare qu'il dispose
à titr e d e p r è c i p u t , au profit d u d it sieur futur é p o u x , t a n t d e la d i t e terre d e M o n t ,
circonstances et dépendances d ’i c e l l e , que d o tou s le s a u tr e s o b j e t s c i - d e s s u s s p é c ifié s ,
et tel que le tout est d é sig n é e t s p é c ifié en la d i t e réserve p o r tée a u co n tra t d e m a r ia g e
c i- d e s s u s d a té d e s s ie u r e t d a m e R a b u sso n -D e v a u r e . N e font pas partie de la présente
disposition , les grains, vins et autres denrées qu i se trouveront dans les d épendances d u d it
château de M o n t , à l ’ép oq ue du décès d u d it sieur D u m o n t pere , p o u r , par ledit sieur
fu tu r , faire le p rélèvem ent et en trer en jouissance de ladi te terre de M o n t , et d e to u s le s
a u tr e s o b je ts c o m p r is en la p ré sen te d i s p o s i t i o n , im m éd iatem en t après le décès d u d i t
sieur D u m o n t , sous la réserve q ue se fait ledit sieur D u m o n t père de la som me de 3o,o oo 1.
2
�à p ren d re sur lad ite terre de M o n t , p o u r en disposer en faveur de tels de ses enfan* ou
petits-enfans q u ’il jugera à propos , m êm e en fa veur dud it sieur futur époux, par tel acte
d ’entre-vifs , à cause de m o r t , ou sous signatures privées , que b o n lui semblera. Et de suite
le d it sieur D u m o n t , en faveur d u d it m a ria ge, a dispose et dispose en fa veur dud it sieur
fu tu r époux , sur la susdite som m e de
3 o,ooo
livres réserve e, de celle de 10,000 livres ; d e
laq u elle som m e de 10,000 livres présentement disposée en fa veur dudit sieur futur é p o u x ,
led it sieur son père se charge de lui servir 1 interet au taux de l ’o r d o n n a n c e , sans aucune
reten u e des im positions créées et à cré er, jusqu’au rem boursem ent, q u ’il lui sera loisible
de faire q u an d il le jugera à propos.
» D e la m ême som m e de 5 o,o oo livres réservée par ledit sieur D u i n o n t p é r e , il en a
présentem ent disposé et dispose en faveur de demoiselle P ro c u le G r e l le t de Beauregard ,
sa petite f i l le , fille de J e a n - B a p t i s s e G r e lle t de Beauregard et de feue d am e Marguerite
D u r a o n t , ses pére et i n è r e , de la som m e de 5 ,000 liv. à prendre sur lad ite réserve, payab le
après le décès d u d it sieür D u m o n t père se u le m e n t, par ledit sieur fu tu r é p o u x , sans
intérêt j u sq u ’audit d é c è s , après lequel ils auront cours au taux de l'o r d o n n a n c e , jusqu’au
r e m b o u r s e m e n t , que ledit sieur futur sera tenu de faire dans d eu x ans du décès de sondit
père. Et dans le cas où ladite dem oiselle P roc u le G r e l l e t , ou ses père et mère , con tre viendroienl. d ire ctem en t ou in d ir ec tem e n t à la disposition faite par ces présentes de ladite
terre de M o n t , en faveur du sieur fu tu r époux , la di s p os i t i o n des 5 , 000 livres faite en
fa v e u r de ladite d e m o i s e l l e G r e l l e t , sera et dem eurera nulle et de nul e f f e t , et c o m m e
n o n faite. P a r e i l l e m e n t , d a n s le cas où ledit sieur D u m o n t père nedisposeroit de son v i v a n t
des z5 ooo livres restantes de la susdite som me r éservé e, elle demeurera réunie à ladite
terre de M o n t , et a ppartien dra a ud it sieur futur é p o u x , sous la réserve que led it sieur
D u m o n t pére se fait de la jouissance , pe n d a n t sa vie , de la susdite terre de M o n t , pour,
après son décès , appartenir en toute prop riété a ud it sieur futur époux ; et en avancem ent
d ’iioirie , et de lad ite institution , led it sieur D u m o n t père a constitué en dot audit futur
la som m e d e ....... , etc. , etc. »
C ’est de ce mariage d ’A n d r é D u m o n t a v s c M à r ie - S o p lu e - B a r th e le m i G i b o n t , q u ’est
issue A n n e D u m o n t , appelante du jugem ent rend u par le tribunal de G a n n a t , le 26 dé»
c ein b re 1S07.
S o n p è r e , m ort v ic tim e des temps désastreux de la r é v o l u t i o n , la laissa dans les
lien s de la m inorité , où elle est en core.
P riv é e de cet a p p u i , la m ineu re D u i n o n t espéroit trouver dans la tendresse de son
a ï e u l , un supplém ent naturel à la tendresse d 'u n père : son espoir fu t déçu .
L a perte irréparable de l ’auteur de ses jours , devint po u r elle u n e source intarissabla
de pertes nouvelles : elle fit refluer, e x c lu s iv e m e n t, sur les dames D ev au re et de la
R o q u e , toute l ’affection de son aïeul.
Il n ’est personne dans la ville de G a n n a t qui ne sache que la daine D evaure , d e-.
Ve n u e l ’objet d e la p r é d ile c tio n du sieur D u m o n t père , depuis la m o r t de son fils, f u t
con stam m e n t
aussi
l ’objet de ses largesses ut d e ses libéralités.
T a n d is que cet a ï e u i , q u i jouissoit de plus de 20,000 liv. d e rente , et ne dépensoit
pas 2,000 francs par an , faîsoit passer le surplus de ses revenus a ses deux filles , la
d em oiselle D u m o n t , en tièrem ent aband o nn ée aux soins de sa inere, n a jamais reçu de
«on grand -père le plus léger secours.
C e p e n d a n t , ce sont ces d a in e s; c ’est la daine D eyaure , e l l e - m ê m e , avantagée da
�\o
3
( 7 )
plus de 100,000 fr. par des dons manuels ou par des donations d é g u isé e s, soit sous la
form e de contrats onéreux , soit sous le n om de personnes interposees ( * ) , qu i sans res
p e c t pour la m ém oire de leurs père et m è r e , et foulant aux pieds , de la inaniere la
plus sc an d ale u se, le p a c te de famille le plu s s a c r e , dispu tent a la dem oiselle D u m o n t
u n p réc ip u t q u i , lors m êm e q u ’i l n ’auroit pas été aussi lé g itim e m e n t acquises son p e r e ,
n ’auroit dû leur paroitre q u ’ un foible d éd om m a ge m en t des pertes immenses q ue lu i a
causées une révo lu tio n qui a dév oré tou te sa f o r t u n e , avec son m alheureux pere.
L e c œ u r se brise à cette i d é e , les moeurs f r é m i s s e n t , et l ’étonnem ent b a la n c e l i n dign ation ! ...................
Le
3o
brumaire an n , le sieur D u m o n t père in t e r v in t au contrat de mariage de la
dame de la R o q u e , et il réitéra à son profit la d isposition de
le contrat de mariage d ’A n d r é D u m o n t.
5 ,ooo
francs déjà faite par
Il in t ervin t pareille m ent au contrat de mariage de la demoiselle Devau re , avec le
sieur N a r j o t , passé d evant M e. Hue. , notaire à G a n n a t , le 4 ju in 1804 , et lu i fit d o
nation de la somme de i 5 ,ooo fr. par lui
c ette donatio n que sc dirigeoit un des
la d e mo i s e l l e D u m o n t au t r i b u n a l d e
d u contrat , a concouru au j u g e me n t !
réservée sur le p r é c ip u t de son fils. C ’est contre
cl-iefs de c o n clu sion de la d em and e portée par
G a n n a t ; et cepend ant le n ota ire , réd acte u r
......................
E n l’année i 8o 5 , Jean D u m o n t est d éc éd é , laissant p o u r h é r i ti e r , i°. la dame Rab usson -D evaure ; a0, la daine de la R o q u e , sa p e tite-fille, p a r représentation de M arguerite
D u m o n t ', sa m è r e ;
3°.
A n n e D u m o n t , représentant A n d ré D u m o n t , p récipué.
A u décès de Jean D u m o n t , les scellés fu rent apposés ; i l fu t p r o c é d é .à leur rec o n noissance en p résence de toutes les parties intéressées ; et l ’on se disposoit à effectuer le
partage des b ie n s , lo rsq u e les dames D e v a u r e et de la R o q u e d é c larèren t ha u tem e n t l'in
tention où elles ètoient de refuser à la d em oiselle A n n e D u m o n t le relâc h em e n t de la
m o itié du p r é c ip u t du c h e f de leur m ère.
Les sieur et dame M illiard , cotuteurs de la dem oiselle D u m o n t , r é s o l u r e n t , dèslors , de r éc la m er en ju stic e l ’exécution pleine et entière des contrats de m a ria ge
corrélatifs des i y n ovem bre i j j 5 , 9 février 1 7 7 7 , et
testée a vec une insigne mauvaise foi.
3i
mai 1 7 S 9 , qui leur étoit c o n
A p rè s avoir tenté en vain les prélim inaires de la c o n c ilia tio n , ils traduisirent les
dames D evaure et de la R o q u e , d evan t le tribun al de p r e m iè r e instan ce de l ’arrond ijsem ent de G ann at , et y prirent des conclusions t e n d a n t e s ,
« i°. A ce qu il plut au tr ib u n a l, en c e q u i lo u c h e le p r é c i p u t , ord onn er q u e les
c ontrats de m ariage susdatés , de M a rie D u m o n t a v e c le sieur C laud e Rabusson-D evaure ,
de M arguerite D u m o n t avec le sieur G rellet de Beauregard', et de feu A n d r é D u m o n t
a vec M a r ie - S o p h ie - B a r tlifle m i G ib o n t , seroient exécutés selon leur form e et te n e u r , et
n ota m m en t dans leurs dispositions relatives a u p r é c ip u t attribué à A n d ré D u m o n t ; en
( * ) Il est do n o t o r i é t é p u b l i q u e q u e dans un t e m p s où Io s i e u r D e v a u r e c t o i t o b é r é , il e s t d e v e n u
a c q u é r e u r , sans b o u r s e d é l i e r , de d e u x d o ma i n o s a p p a r t e n a n s a ux mi n e u r « D s y a t , q u * > * ' ant^ a v e n t e ,
e t o i e n t d é b i t e u r s d e s o m me s c o i u i d é r a b l o s e n v e r s le s i eur D u m o n t p è r e . —-
der ni er a également
t r a n s mi s un d o m a i n e , par v o i e d e f i d é i c o mmi s , au s i e u r D o v a u r o ; et H y a , à c e t é g a r d , p r o c è s
p e n d a n t e n t r e le« pa r t i e s au t r i b u n a l do G a n n a t . — E n f i n , on «ait qu' i l » a c h e t é , au n o m d u s i e u r
Devaure
un e m d u o n s i t u é e à M o u l i n s , m e do la C o r r o y e t i e ; e t l ’o n sait e n m ê m e t e mp s q u * l e i
f a cul t é s d u ¿i our D e v a u r e u e l u i o n t j amai s p e r m i s do fiiirc d e s a cqui s i t i ons *
�( 8
)
c o n s é q u e n c e , que les sieur et d am e H i l l i a r d , ès qualités qu'ils p r o c è d e n t , seroient au
torisés à p r é l e v e r , avant partage des successions de feu Jean D u u io n t et P rocule P i t a t ,
po u r et au nom de A n n e D u m o n t , leur mineure , représentant feu A n d r é D u m o n t , son
père , la to ta lité d e la terre d e M o n t , circon sta n ces et d ép en dan ces , et autres o b jets
désignés et spécifiés en la reserve portée aux susdits contrats de m a ria g e , q u ’ils én u m é
rèrent en l ’e x p l oi t de d em ande ; de tous lesquels o b je ts , lesdites dames R a b u sso n -D e va u re
et de la R o que , seroient tenues de Faire le r e lâ c h e m e n t, et de souffrir la distraction et
le p r é lè v e m e n t avant p a r ta g e , com m e co n d itio n de leur in s titu t io n , en ex écu tio n de
leurs contrats de mariage, si mieux elles n ’aim o ient s’en tenir à leurs c on stitu tion s dotales,
form ant apanages; les c o n d a m n e r , en outre , aux dépens sur ce c h e f ;
« 2U. Et en ce q u i tou che le surplus d es biens composant lesdites su c ce ssio n s, o rd on n er
q u ’il seroit p r o c é d é au partage , c o n fo rm é m e n t à la loi ; q u ’en cas de contestation sur la
p a r t a g e , les contestans seroient condam nés aux d é p e n s , le s q u e ls , au cas c o n t r a ir e ,
seroient p rélev és sur la chose. »
A peine la d em a n d e fu t-elle f o r m é e , q u ’on vit les dames D ev a u r e et de la R o q u e p o u r
su ivre l ’a u d ie n c e avec une a ctiv ité sans exem ple. O n céda à leurs vives s o llic it a tio n s , et la
cause fut appelée le 8 août 1807 ; l ’avoca t de la dem oiselle D u m o n t fut en tendu pend ant
trois heures c o n s é c u ti v e s , en présence de l ’avocat et des avoués de ses parties adverses ;
mais , en même temps , par l’effet d ’ une c o n tra d ictio n bizarre , et par suite de pratique!
se c r è te s , de com bin aisons nstucieuses, de m an œ u vres ténébreusement o u r d i e s , qu’il eût
été d ifficile de p r é v o ir , et dont il ne seroit peut être pas impossible d ’expliquer les motifs ,
les dames D ev a u r e et de la R o q u e se laissèrent cond am ner p a r d éfau t.
C e tt e c o n d u ite ne parut pas à tout le inonde exempte de blâine et de reproches : elle
fou rnit un a lim ent à la censure pub lique ; elle servit de texte aux entretiens des gens d u
i n o n d e ; elle d o n n a lieu à une foule de réflexions satyriques et d ’interprétations m alignes.
Les uns parurent surpris q u e les dames D e v a u r e et de la R o q u e n ’eussent fait paroitre à
l ’a u d ie n c e un a vo c a t et des avoués, que po u r a ssister à la p la id o ie r ie de leur adversaire,
et laisser p re n d re un ju ge m en t par d éfa u t. Étrangers à la tactiqu e du palais , et ne c o n noissant po in t les d étours obscurs de la c h i c a n e , ils im aginèrent que la parole avoit ex p iré
sur les lèvres des défenseurs ; et de ce q u ’ils n ’avoient rien répond u , ils en c o n c lu o ien t
assez judicieusem en t en apparence , q u ’ils n ’a voie n t rien eu de bon à répondre.
D ’a u tre s, plus sévères dans leurs d é c i s i o n s , plus délicats sur les b ie n séan c es, et no
p o u va n t supposer q u ’on en m é c o n n û t à c e point les règles au barreau , c r u r e n t vo ir , dans
cette c o n d u ite étrange , un oubli de toutes les c o n v e n a n c e s , un p r o c é d é n o u v e a u , tout
à la fois injurieux p o u r l ’avoca t de la dem oiselle D u in o n t , et irrévéren t po ur le tribunal
q u i en étoit le témoin.
L e sieur D ev a u r e , po ur c a lm e r l ’o p in io n p u b liq u e , qu'une pareille jonglerie a voit sou
lev ée c o n tre lui , ch erch a à pallier sa c o n d u i t e , en la c oloran t par des m otifs qui respiroient la plus p u r e délicatesse.
I l p ré te n d it q u ’il n ’auroit été n ullem e n t
convenable
à ses intérêts de laisser ren d re
u n juge m en t c o n t r a d i c t o i r e ; q u ’en supposant q u ’il eût gagné son procès , on n ’au roit
pas m anqué de dire q u ’il l ’a voit gagné p a r un ju g em en t d e faveu r ; »-t que dans la
supposition r o n t r a i r c , la d écision de ses collègues eut été contre lui un préjugé grave aux
y>ux de la C o u r d'appel. Il d on na sa parole d honneur ^ l avocat de la demoiselle D u m o n t ,
q u ’il ne foruaeroit p o i n t o p positio n au jugem ent par défaut.
�O n ignore ce q u ’est devenue c e t te p a r o le d 'h o n n e u r ; niais l ’opposition ne tarda
pas à paroître.
S u r cette o p p o s i t io n , la cause portée à l ’a ud ie n ce du n
d éc em b re 1S 0 7, fut de
nouveau d isc u tée ; et après plusieurs p la id o iries , il i n t e r v i n t , après un d é lib é r é , un
ju ge m en t c o n tra d icto ire , le 26 décem b re su iv a n t , dont la demoiselle D u m o n t est a p p e
lante , et dont il im p o rte d ’analiser les dispositions et les motifs.
C e jugem ent d éclare nul et de n ul effet la donation en p r é c i p u t d e la terre d ç M o n t ,
faite par le sieur D u m o n t père , en fa veur d ’A n d r é D u m o n t , son fils, p o u r la m o itié
de ladite terre, provenante du c h e f de la d am e P ro c u le P ita t , son épouse; et o rd on n e
en c o nséquence q u ’elle fera partie de sa succession a b in ts e ta t.
I l déclare b on n e et valable la d onation faite à A n d r é D u m o n t , de la somme de
6,000 f r a n c s , faisant partie de la réserve exprim ée aux contrats de m a r i a g e d e s dames
D ev a u r e et de Beauregard , mais seu lem ent p o u r la m o itié de cette somme , d u c h e f d u
pere , sa u f l’im putation , jusqu’à due c o n c u r r e n c e , dans le cas où les sieur et d am e D u inont père et m ère, au roient e m p lo y é cette som m e en acquisition de fo n d s ; e t , dans
le cas contraire , i l autorise la dem oiselle D u m o n t à faire , sur la masse de la. succession ,
le prélèvem ent (le la som m e de 3 ,000 francs.
L e s m o t i f s de c e j u g e m e n t s ont ,
« i°. Q u ’une réserve faite a v e c stipulation que la disposition en sera faite en faveur
de celui des enfans q u ’il plaira à l ’instituant c h o i s i r , n ’ôte p o in t à l ’institué le droit de
r ec u eillir sa po rtio n dans l ’objet réservé , lorsque l’instituant d écèd e sans disposition ;
« 20. Q u ’A n d ré D u m o n t n ’a pu être saisi de ladite terre de M o n t , par la clause de
destination apposée dans les contrats de m ariage des dames D ev au re et de B e a u re g a rd ,
i°. parce q u ’il étoit étranger à ces deux contrats , et q u ’il est de p r in c ip e que les contrats
ne peuvent va lo ir q u ’entre les contractan s ; a0, p a rce que , d ’apré* les dispositions de
l ’article 219 de la coutu m e de B o u r b o n n a i s , la d o n atio n de préciput ne p o u voit v a lo ir à
son profit, q u ’autant q u ’elle auroit été faite par son contrat de m aria ge;
«
5°.
Q u e P rocu le P i t a t , mère des p a r tie s, étant d écéd ée avant le mariage de son fils ,
et n’ayant pas été à portée de faire , en sa faveur , la disposition de p r é c ip u t q u ’elle lui
destinoit , dans la form e q u ’ ind iq ue l ’art. 21g de la c o u t u m e , ses trois enfans o n t été
saisis de sa succession entière au m o m e n t de son décès ;
« 4 • Q u e 1rs cla u se s, charges et conditions apposées aux institutions des dames D e
vaure et de Beauregard , étant contraires à la l o i , d o iv e n t être réputées non écrites ;
«
5
. Q u A n d ré D u m on t n ayant pu être saisi de la m oitié de la terre de M o n t , du c h e f
de sa m è r e , par la clause de destination , n ’a pu l ’être non plus par la disposition de la
totalité la terre , faite à son profit par son père , en vertu de la fa culté qui en avoit été
donnée au survivant d e u x , par la raison q u e , dans la coutum e du B ou rb on n a is, les
époux ne p o u vo ie n t se transm ettre d ’autre don que la jouissance m u tuelle des meubles
et acquêts , et dans le cas seu lem ent où il n ’exi stoi t pas d V n fa n t de leur union ;
« 6°. Q u e cette disposition de la coutum e , p r o h ib itiv e de tous avantages entre époux ,
e x c lu t tout d ro it d ’é l e c t i o n , q u i , sous l ’em p ire du d ro it r o m a in , c o » ,I|,t: S0,1S ' e mpire
des coutum es , a toujours été Considéré c o m m e a b u s i f , et pre.sqn* toujours déclaré n u l ;
“ 7°- Q u e l'inexécution des c o n d itio n s apposée» aux i nst i t ut i ons des 'lames D e v a r r e e t
de li^aurpgard , ne constitue contre elles au cu n apanage , parce que si l e j s u u r et dame
D u m o n t eussent vo u lu que leurs filles fussent réduites ù un apanage , ils se soroient se 1 vis
�C 10 )
d'expressions qui ne Iaisseroient a u c u n d o u te sur leur volonté ; d ’où il résulte qne la
m oitié de la terre de M o n t , faisoit partie a b in t e s t a t de la succession de P ro ru le P i t a t ,
et qu’elle doit être partagée c o m m e le surplus des biens com posant la succession. »
T e l s sont les dispositions et les m otifs du jugement dont la demoiselle D u m o n t est
appeIante‘
M O Y E N S .
P o u r éta b lir q u ’il a été mal jugé au jugem ent dont est appel , et que les premiers
juges ont m éc o n n u les vrais principes de la matière , la dem oiselle D u m o n t a une d ouble
tâche à rem plir.
E l l e divisera la discussion de cette cause en d eu x p a rties.
L a prem ière aura p o u r but de justifier la demande , par elle f o r m é e , en p rélèv em e n t
d e la t o t a lité du p r é c ip u t a ttribué à A n d r é D u m o n t , son père , par les trois contrats
de m ariage corrélatifs de 1 77 5 , 1777 et I 7^9 ‘
L a d euxièm e aura po u r objet la refu tation des m otifs erronés qui ont servi de base
à la décision des premiers juges.
P R E M I È R E
P A R T I E .
La demande de la demoiselle Dumont, en prélèvement de la totalité du
préciput y doit être accueillie.
P o u r d é m o n t r e r ce t t e assert i on , o n é t a bl i r a t r o i s p r o p o s i t i o n s .
£ « p r e m i è r e : Q u e les dames D ev au re et de la R o q u e sont aujourd’hui n on recev a b les à renoncer aux institutions faites à leur p r o f i t , po u r se dégager des charges
et c o n d itio n s qui en fon t partie.
L a d e u x iè m e : Q u e , si elles accep ten t l ’in s titu tio n , elles ne peuvent l ’a c c e p te r p o u r
p a r t i e , et se dispenser d ’en a c c o m p lir les c o n d i ti o n s , au nom bre desquelles se trouve
la destination de précipu t en faveur d'Andre^ D u m o n t.
L a t r o i s i è m e : Q u e , si elles renoncent au bénéfice de leur in stitu tion , en supposant
q u ’ell es y fussent encore rec e v a b le s, elles doivent être réduites à un apa na ge, fixé par
leur constitution dotale.
p r e m i è r e
p r o p o s i t i o n
.
F in d e non-recevoir.
C ’est u n p r in c ip e de tous les temps , que l ’exécution volontaire des actes em porte la
r en o n c iatio n à tous les moyens et excep tions q u ’on auroit pu opposer contre eux.
O r , les dames D ev au re et d elà R o q u e o n t e x é c u té , sans réserve, les contrats de m ariage
d o n t est question , pendant une lon gu e suite d ’années.
C ’est un fait c o n s ta n t, q u ’ elles on t reçu tout ou partie des capitaux de leurs dots ,
d u vivant de leurs père et m è r e ; que l ’ une d ’elles a reçu a n n u e lle m e n t, depuis le
décès de sa m ère , les intérêts de ce qui ¡lui restoit d û ; et qu’elles o n t , l ’une et l’autre ,
exécuté la c o n d itio n im posée à leur institu tion , de laisser jouir le survivan t des père
et mère , des biens du p red e cé d é .
Q u e les dames D ev au re et de la R o q u e veu ille n t d o n c nous dire en quelle qualité
elles ont ainsi reçu leurs constitutions de dots.
D ’a b o r d , c e n e p e u t ê t r e e n q u a l i t é d 'héritières
naturelles
: c a r l e d r o i t d ’h é r i t i e r
�( I I )
. . .
.
.
n a t u r e l n e p e ut s ’o u V r i r q u ’ au dè c ès de la p e r s o n n e à q u i l ' o n s u c c è d e , viventis nullus
h xres.
C e ne peut être non plus en qualité de filles m a r ié e s et (lo tê e s : c a r , s il en étoit
ainsi , en
r e c e v a n t leur d ota tion
elles
auroient été forcloses de la succession de
leurs père et mère , et réduites à un apanage ; tou t le inond e sait q u e , dans la c o u tu m e
du Bourbonnais , toute fille dotée à q u i l ’on a voit donné en m ariage q u elq u e chose
de certain , étoit répu tée apanée et excluse des successions , q uoiqu'elle n y eut pas
expr»ssément r e n o n c é , et q u ’on ne se fût pas servi d u m o t apanage.
C e n ’est d o n c évid em m en t q u ’e n q ualité d ’ h è r iliè r e s in s titu é e s qu'elles ont reçu
leurs constitutions dotales : — mais , en ce c a s , on sera forcé de co n v en ir que l ’institution
est in d iv is ib le ; que les dames D ev a u r e et de la R o q u e n ’ont pu la r e c u e illir sans se so u
m ettre à l'a ccom p lissem en t des conditions qui y sont a pposées; et que rien ne peut les
dispenser de r e l â c h e r , à la représentante de leur f r è r e , -le p r é c ip u t qui lui a été attribu é
c o m m e charge de leur institu tion .
Les daines D e v a u r e et de la R o que pe u ve n t d ’autant m oin s éch a p p er à cette c on sé
q u e n c e , q u ’elles ont déjà exécuté , en partie , les charges de l ’in stitu tion , pe n d a n t plus
de vin g t ans , en laissant jouir le sieur D u m o n t père de tous les biens de la succession
de leur m è r e , en vertu île la con d itio n qu i avoit été apposée à leur institution.
E n vain allègu en t - elles q u ’elles n ’ont laissé jo u ir leur père de s biens dép en dan s de la
succession d e leur m è r e , que par l ’effet d 'u ne c r a in te rèv è r en cielle ■ne p e ju s fa c a r e t.
C ’est se jouer de notre c ré d u lité , que de p r étend re substituer ainsi une vaine allégation ,
un m o tif chim ériq u e et supposé , une exception gratuite et r i d i c u l e , à un m o t i f certain ,
c on n u , d é te r m i n é , q u i d érive d ’ une obligation qui leur est imposée par leurs contrats de
m ariage.
L es dames D ev a u r e et de la R o q u e ne persuaderon t à personne q u ’elles aient ainsi laissé
jouir leur père, par le seul effet d 'u n e c r a in te r è v è r e n c ie lle , d ’une succession o p u le n te
qu’elles pou vo ient appréhend er il y a plus de v in g t a n s , lo rsq u ’on considérera surtout que,
depuis 1 7 8 9 , le sieur D u m o n t père ne p o u v o it plus disposer que d ’ une somme de i 5 ,ooo fr.
. Ajoutons que , q u an d la justice doit c h e r ch e r des règles de décision dans la conduite des
parties , c ’ est m oin s dans des allégations supposées que dans des motifs apparens q u ’elle
doit les puiser ; et il est plus naturel d ’adm ettre que si les dames D ev a u r e et de la R o que
ont laisse jou ir leur père de la succession de P roc u le P i t a t , elles n ’ont fait en cela que
rem p lir une obligation qui leur étoit imposée c o m m e con d itio n de leur in s titu tio n , que
de supposer qu elles on t ainsi agi par le p u é ril effet d ’une prétendue crainte r èvè re n c ielle.
M a i s , lors meme qu on supposeroit q u ’elles n ’ont agi que par crainte r è v è r e n c i e l l e ,
pourroient-elles esperer d è t r e relevées de l ’exécution de leurs contrats de mariage? N o n ,
sans doute.
C ’est un ancien p r in c ip e consacré par l'a r t. 1 1 1 4 du C o d e N a p o lé o n , que la seule c rainte
r èvèrencielle envers les père et m è r e , ne peut suffire pour fonder une action : il y a parité
de raison pour d é c id e r qu’elle ne peut non plus justifier une exception. T e l étoit le v œ u
des lois ro m ain es, qui n ’admettoient l ’e x c e p tio n de c r a i n t e , q u e l orsqu elle étoit l’ effet
d une violence illicite et c on tra ire aux bonnes moeurs , s e d v im a c c ip im u s a tr o c e m e t
earn <jnœ a d versn s b on os m ores f i a t ( L o i 3 , f f . f/itod tn elu s c a u s a . ); niais q u i rej.etoient
toute crainte prétendue r èv è re n c ielle. ( L o i
d e r itu n u p tia r itm , — L o i 3.6, f f . de.
pignorilr. e t h y p o th . — L o i 2 , c o d . q u i e t a d v e n u s q u o s. )
�C o n c lu o n s J o n c que les daines D e v a u r e et d e l à R o q u e seroient aujourd’hui non recevables à renoncer au b énéfice de l ’institution , pour se dispenser de rem p lir les dispositions
q u i en font partie.
DEUXIÈME
PROPOSITION.
S i le s d a m e s Devait?/* e t d e la R o q u e a c c e p te n t l'i n s t it u t i o n , e lle s d o iv en t a c c o m p lir
la c o n d it io n d e p r è c ip u t q u i y e s t a p p o s é e en fa v e u r d ’ A n d r é D u m o n t.
C e tte p r o p o s i t i o n est c om p lex e ; elle nécessite l ’examen des trois questions suivantes :
i ° . D e s c o n d i t i o n s p e u v e n t - e l l e s êtr e a p p o s é e s à une i n s t i t u t i o n ?
, ■•
2°. U n p r é c ip u t peut-il être une c o n d itio n d ’institution?
5 °.
L e précipu t don t i l s’a g i t , a-t-il été attribué à A n d r é D u m o n t , c o m m e c o n d itio n
de l ’institution de scs soeurs ?
§. Ier. D e s c o n d itio n s p e u v e n t-e lle s être a p p o sé e s à une in s titu tio n ?
P o u r Vaffirm ative s ur c e t t e q u e s t i on , il suffiroit d ' i n v o q u e r l ’a u t o r i t é d e la raison ;
e l l e d i t à q u i c o n q u e v e u t l ’e n t e n d r e , q u ’i l est l o i s i b l e à c e l u i q u i e x e r c e un e l i b é r a l i t é ^
d ' y a pp o s e r telles c o n d i t i o n s q u ’il j u g e c o n v e n a b l e s , p o u r v u q u e l l e s ne s o i ent c o n t r ai r e s
n i a u x lois , n i a u x b o n n e s m œ u r s ; u nicuiqite lic e t m odum quem v o lu erit lib e r a lita ti
suce apponere : c ’est à c e l u i qui est l ’obj et d e l a l i b é r a l i t é , à l ’a c c e p t e r o u a y r e n o n c e r ;
m a i s s’il l ’a c c e p t e , il est d e ra i s o n qu' i l ne pui sse la s y n c o p e r , e t q u il soi t t enu d e 1 a c c e p t e ^
in tég r a lem e n t , a v e c les c h a r g e s et c o n d i t i o n s q u i y s ont i mposées .
M ais i n d é p e n d a m m e n t de l'autorité de la r a i s o n , on peut en core se pr év a lo ir de l’op inion
des j u r i s c o n s ul t e s anciens q u i o nt traité la matière des institutions conditionnelles.
A u r o u x , sur la c o u tu m e d u b o u r b o n n a is , et L e b r u n , en s on T r a ité d e s s u c c e s s io n s ,
apr ès a v o i r d é m o n t r é q u e l ' i n s t i t ut i o n c o n t r a c t u e l l e ne peut être v a l a b l e m e n t faite , d ’ una
m a n ière d i r e c t e , q u ’au prof i t et ut i l i t é des ma r i é s et des d e s c e n d a n s d u m a r i a g e , et q u e t
f ai t e au prof i t d ’a ut r e s , e l l e est a b s o l um e n t nul l e et c a d u q u e , di s e n t q u ’ on p e u t f ai re i n
d ir e c te m e n t u n e i n s t i t u t i o n v a l a b l e au prof i t d un t i e r s , en 1 a p p o s a n t c o m m e c o n d itio n
à l ' i n s t i t ut i o n f ai t e au profi t des c o n t r a c t a n s ma r i ag e .
« Il y a , dit le premier de ces auteurs , un m oyen de faire
1 equipollent
d une institution
c o n t r a c t u e l l e , au profit d ’autres personnes q u e des mariés , en instituant la personne
mariée à la charge d ' a s s o c i e r ses frères et soeurs , par ex em p le, pour une certaine q u otité
de l'in stitu tio n ; ce qui v a u t, au profit des frères et sueurs, com m e u n e c o n d i t i o n de
l'institution. [ A r t . 2 1 9 , «°. 28 .)
a C a r , ajoute le même com m entateur , l'association étant une cliarg« de
.
1 institution
d o n t e l l e f a i t p u n i t * , l’ institué est dans la nécessité ou d e r e n o n c e r à l ’ i n s t i t u t i o n , ou
d e c o n s e n t i r a l ’a s s o c i a t i o n . { A r t . 2/,4 , n ° . 8 . )
« Il y a plus , ajoute-il , r est qu'à l'égard de deux institutions r é c ip ro q u e s , faites par
deux fières dans le contrat de m triage de l'un , il a été d é c id e que celle faite en faveur
du frère qui ne c o n t ra c ta it pas mariage , par celui qui c o n t r a c t o i t , ¿ to it v a la b le , et cç
à cause de la ré c ip ro c ité d-s institutions. M o nsieur le Rapporteur s'explique , et dit que
les institutions des deux frères fia n t réciproques , 1 institution que l’un avoit faite au
profit de l'autre , étoit u n e c o n d itio n de celle don t il se trouyuit en même temps bien
gratifié ; d ’où il restoit à c o n c lu r e que r e l l 1* faite en f av e u r d u frere q u i n e c o / ttr u c io it
p a s m a r ia g e , deyoit valoir 10/n/ne c o n d itio n . . . • ,
�( *3 )
« C ’est ce q ui fu t jugé au rap port d e M .
de
V
ienne
r e n d u en la g r a n d ’c h a m b r e , le î a mars 1756. ( I b i d .
, par arrêt du parlem ent de P a r i j ,
9 , à l ’a d d it io n . ) >»
On peut d o n c , suivan t cet a u te u r , apposer d e s c o n d itio n s a une in s titu tio n ; il y a
p l u s , une institution qu i ne va u d roit pas , dans certains cas , com m e disposition d i r e c t e ,
peut va loir c o m m e c o n d it io n d ’une autre institution régulièrem ent faite ; et il nous
atteste que telle étoit la ju risp ru d e n c e sous l'e m pire de la coutum e du Bourbonnais.
L e b r u n , en so n T r a ité d e s s itc c . , liv .
cette doctrin e.
3,
c h a p . a , rc°s. i 3 e t 45 , professe égalem ent
'
Ce po in t de d ro it n ’est pas n ou ve au ; il a toujours été perm is de stipuler a u p ro fit d 'u n
t i e r s , lorsque telle étoit la c o n d itio n d ’ une d on atio n q u ’on faisoit à un autre.
On peut consulter le litre 1er. J u i ; V- 4 5 du D ig e s te , qui en fournit plusieurs exemples,
n otam m ent la lo i
58 e t
suiv. ; ainsi que la l o i 10 ^ ff. d e p a c t i s d o ta lib u s .
L e C o d e N a p o l é o n , art. 11 a i , n ’a fait que m ain tenir et consacrer les anciens p rincipes
à cçt égard ; il est ainsi c o n ç u :
« O n p e u t p a r e i l l e m e n t s t i pu l e r au prof i t d 'u n tie r s , l or s q u e tel l e est la c o n d itio n
d un e s t i p u l a t i o n q u ' o n fait p o u r s o i - m ê m e , ou d ’ une d o n a tio n q u e l'o n f a i t à un a u tr e ;
c e l ui q u i a fuit c e t t e s t i p u l a t i o n ne p eut pl us la r é v o q u e r , si le tiers a d é c l a r é v o u l o i r en
profiter. »
D an s ce cas , la disposition au profit du tiers va ut c o m m e co n d itio n de la donation ;
et elle d ev roit être exécutée à l’égard de ce tiers , d it M . G r e n i e r , q u o i q u ’il ne l ’eût
pas acceptée , pa rce que la d on atio n subsisteroit a vec toutes ses cond itio ns , en vertu de
l ’a ccep tation que le donataire en auroit faite , en supposant q u e lle s n’eussent pas été r é
voquées par le donateur. {Traité d es donat. , tom. \ ,p a g . a 3 j.( «°. 7 4 . )
A la v é rité , cette disposition au profit d'u n tiers , q u i vaut c o m m e c o n d itio n d ’une
institution , ne jouit pas de toutes les prérogatives de l'institution elle-mêm e ; le tiers désigné pour r e c u e illir l ’objet de la disposition, n ’en est p>s saisi irrévocablem ent : elle peut
être révoquée au gré des c ap rices de l ’in s titu a n t, à la différence de l'institution , q ui n’es-t
pas révocable.
C ’est en c e sen s, et uniquem ent p a r c e q u e le d o n a te u r ou l ’ in s titu a n t
n 'e s t p a s lié , q u ’on p e u t dire que la disposition cond itio nn elle n ’est pas confirmée par
la faveur du c o n tra t , c o m m e l’institution.
Mais cette faculté de révo ca tion ne com péte q u ’à l ’instituant ou don ateur ; de ce qu’il
n est pas lie envers le tiers désigné , il ne s’ensuit pas que le donataire ou l’institué ne le
soit p a s : une charge a-t-el le été imposée à ce d e r n i e r , il ne d épend pas de lui de s’y
soustraire. Il peut être contraint à s’y c o n fo rm e r , soit par le donateur ou l in s t i t u a n t ,
soit s u b o r d o n n p m e n t, par le tiers d é s i g n é , si l’instituant est d écédé sans l’avoir revoquee*
•C est une loi qui lui a été imposée c o m m e c o n d itio n du b ie n fa it ; il ne peut s en dégager
q u V n renonçant au bienfait lui-mêm e.
L a l égi s l at i on n o u v e l l e a m o d i f i é , â quelques égards , l es p r i n c i p e s anci ens s ur ce t t e
m a t i è r e , en c e q u ' e l l e ne p e r m e t pl us à cel ui q u i a fait la s t i pul a t i o n de la r é v o q u e r ,
l o r s q u e le tiers a d é c l a r é v o u l o i r en prof i t er.
M a i s c e c h a n g e m e n t de l égi sl at i on n i nfl ue
en 111*11 sur la s o l ut i on d* la d i f f i c u l t é q u ’o n é l è v e à la d e mo i se l l e D u u i o n t .
D e s c o n d i t i o n s p e u v e n t d o n c être a ppos ée s à une i n st i t ut i on.
§. I I .
U n p r é c ip u t p e u t - il ¿tre une c o n d i t i o n d in s titu tio n ?
S i , cotnmc on c ro it l ’avoir dém on tré , des conditions pe uve n t être apposées à une i n s
�( i4 )
ti t ut i on
on n e v o i t pas ce q u i p o u r r o i t f ai re o b s t a c l e à ce q u ’ un i nst i t ué f ût t e n u d e s o uf f r i r
l e p r é l è v e m e n t d ’u n p r é c i p u t , c o m m e c o n d itio n d e son i nst i t ut i on.
O n v i e n t de v o i r q u e s u i v a n t
le s e n t i m e n t
d ’A u R O u x , d e L e b r u n , et de t ous les
a ut eur s q u i o n t traité la ma t i è r e des i n s t i t u t i o n s , o n p eut f ai re passer à des tiers une
q u o tité d e s ucce s si o n , c o m m e c o n d i t i o n d e l ' i n s t i t ut i o n f ai t e au profi t de c e l u i q u i se
m a r i e : à c o m b i e n p l us f orte ra i s o n do i t - o n d é c i d e r q u ’une d i s p o s i t i on au p r of i t d ’ un
t i e r s , q u i n ’a p o u r b u t q u ' u n e c h o s e p a r t ic u liè r e , q u ’ un co rp s c e r ta in e t d é te r m in é ,
p e u t v a l oi r c o n n u e c o n d i t i o n d ’ un e i ns t i t u t i on : c est l e cas d ’a p p l i q u e r la m a x i m e q u e ,
q u i p e u t le p lu s p e u t le m o in s , m in u s l i c e t c u i et p lu s ; et la r c g l e in eo q u o d p lu s
s i t sem p er i n e s t e s m in u s. ( L o i 11 o , Jf. d e reg u lis j u r i s .)
C e q u e la ra i s o n p a r o i t l é g i t i m e r , l ’aut o r i t é des a n c i e n s a vo c a t s d e la s énéchaussée du
B o u r b o n n a i s l e c o n f i r m e d e la m a n i è r e la mo i n s e q u i v o q u e .
O n p e u t p r o d u i r e , à l ’a p p u i de c e t t e a s s e r t i o n , p l u s i e u r s d é c i s i o n s d e M M . H e u i l : l a r d , T o u r î t , D u r y , C h a r r i e r et B e r a u d , é c r i t e s de la i nai n de ce de r n i er , â
l a m a r g e d ’u n a n c i e n c o m m e n t a i r e de la c o u t u m e de B o u r b o n n a i s ,
par P a v o n , l equel
a a p p a r t e n u à M . B e r a u d , l ’u n des p l us c é l éb r é s j ur i s co ns ul t es q u ’ait p r o d u i t cette
province.
« L e 7 j u i l l e t 1 7 6 1 , d i t - i l , M M . H e u i l l a r d , D u r y , T o u r e t et mo i a v o n s d é c i d é
q u e d e h u i t enf ans q u a v o i en t les sieur et d a m e Bo n n c l a t , en a y a n t i n s t i t ue q u a tre lie*
ri t i ers p a r égal e p o r t i o n a ve c les a u t r e s , sous lu réserve d'une, somm e de s i x m ille
liv r e s, p o u r en d i s p os e r p a r quel s actes q ue r e f ut d ’e n t r e - v i f s , o u à cause d e m o r t ,
a v o i e n t d i s p os é i n f r u c t u e u s e m e n t de la m o i t i é de ce t t e rés er ve au p r of i t de G i l b e r t ,
l eu r fils p u î n é , p ar le c o n t r a t de m a r i a g e de P a u l , l ’a î n é , p o u r la d i s p o s i t i on n ’a v o i r
p a s été a c e r p t é e p a r G i l b e r t , ce t t e d i s p o s i t i o n n ’a y a n t a u c u n c a r a c t è r e d ’actes e n t r e
v i f s , ou à cause de m o r t , p a r l esquel s les p è r e et mè r e a v o i e n t rest rei nt la f o r me de l eu r
d i s p os i t i o n ; q u e c e t te d is p o s itio n ne v a lo i t q u e p o u r la p o r tio n d e P a u l , co m m e
c o n d itio n d e son i n s t it u t io n , et a t t r i b u t i o n de l ’a ut re m o i t i é de la ré s er ve q u i lui a v o i t
été faite p a r son c o n t r a t de ma r i ag e . ».
Ce s j ur i s c o n s u l t e s , en d é c i d a n t q u e la d i s p os i t i o n f ai t e p a r l e c o n t r a t de ma r i ag e d e
P a u l , au prof i t de G i l b e r t , v a l o i t , p o u r la p o r t i o n de P a u l ,
c o m m e c o n d i t i o n de
so n i ns t i t u t i on , ont f o r m e l l e m e n t d é c i d é q u e le p r é l è v e m e n t d ’ une s o m m e , o u d ’un
c o r p s c e r t ai n , p o u v o i t être app o s é c o m m e c o n d i t i o n a une i n s t i t u t i on .
A u t r e d é c i s i o n , d u i 5 j ui l l et 1 7 7 a : « P a r l e c o n t r at de ma r i a g e d u s i eur G o s s e a v e c
E l i s a b e t h L a p l a n c h e , G i l b e r t L a p l a n c h e a i ns t i t u é l a di t e É l i s a b e t h s o n h é r i t i èr e p a r
ég a le p o r tio n a v e c ses autres enf ans , so u s u n e réserve d e f o n d s d e v a le u r d e q u in z e
m ille f r a n c s ; p a r le m ê m e a c t e , G i l b e r t L a p l a n c h e a di sposé de tro is m ille livres sur
c e t t e réserve , au prof i t <1’A n t o i n k L a i - l a n c h e , s on f i l s , P o u r *a p r e n d r e et p r é l e v e r
a v a n t tout p a r t ag e de la s uc c e s s i o n .
G i l b e r t L a p l a n c h e étant m o r t le 17 s e p t e mb r e 1 7 7 1 ,
il s’est agi ent re les e n f an s G o s s e , A n t o i n e et M. tri e L a p l a n c h e , n o n ma r i é s , c o m m e n t
d e v a it s e p re n d r e le p r é c ip u t.
MM. D u r y ,
Les p ar t i e s a y a n t c o m p r i s et
n o m m é p o u r arbi tres
C h a r r i e " e t m o i B i r a u j > , nous a v o n s a m p l e m e n t agité la q u e s t i o n ,
si le p r é c i pu t d e v o it être p r it en en tier sur la p o r t i o n d e la réserve a f f é re nt e aux e nf an s
G o s s e , ou s ’ils n e d e v o i e n t y c o n t r i b u e r
que
p o u r l e u r p o r t i o n v i r i l e . No u s é t i ons
d ’a c c o r d q ue Ma r i e L a p l a n c h e , non mariée, , n e d e v o i t pas y c o n t r i b u e r . P a r s e n t e n c e
a rbi t ral e du i 5 jui l l et 1 7 7 2 , n o u s a vo n s j u g é , c o n t r e I’ayi s d e M . D u r y > q u e le p r é -
�Ul
'W *
( ï5 )
c i p u t d e v a n t se p r e nd r e p a r p r é l e g s avant -partage , l es m i n e u r s G o s s e n ' y c o n t r i b u o i e n t
que pour un tiers ; q u ' A n t o i n e L a p l a n c l i e , p r é c i p u é , e n c o n f o n d o i t u n ti ers en sa p e r
s o nn e , et q u ’il p e r d o i t l e tiers au r e s p e c t de M a r i e L a p l a n c l i e , non m ariée. »
Il résul te é v i d e m m e n t de c e t t e s e n t e n c e a r b i t ra l e , q u e les trois j u r i s c o n s u l t e s q u i 1 o nt
r e n d u e ét oi ent d 'a v is unanim e q u e l e p r é c i p u t v a l o i t c o m m e c o n d i t i o n de 1 i n s t i t u t i o n
d ' E l i z a b e t h L a p l a n c l i e , et q u e M a r i e L a p l a n c l i e , n o n m a r i é e , ni p a r c o n s é q u e n t i n s
t i t u é e , ne d e v o i t pas y c o n t r i b u e r ; en sorte q u ’i l s n e d i f f é r o i e n t d o p i n i o n q u e s ur la
q u e s t i o n de s a v o i r si le p r é c i p u t s eroi t pri s e n e n t i e r sur la p o r t i o n d e la r es er ve a f f e r e n t e
aux mi n e ur s G o s s e , e nf ans d ’E l i z a b e t h L a p l a n c l i e , i n s t i t u é e , o u s'ils n e d e v o i en t y c o n
t ri b u e r q u e p o u r l e u r p o r t i o n v i r i l e .
,
Ce s aut ori t és i m p o s a n t e s , é ma n é e s des pl us fidèles i n t e r p r è t es d u d r o i t c o u t u m i e r q u i
r égi s s oi t la p r o v i n c e d u B o u r b o n n a i s , d o i v e n t être d u p l us g r a n d p o i d s dans la d é c i s i o n
d e c e t t e cause.
M a i s elles se t r o u v e n t e n c o r e étayées p a r une j n ri spru den ce q u e s on a n c i e n n e t é n e
r e n d q u e p l u s r e s pe ct ab l e .
C ’est ce q u e nous assure A u h o u x - D e s p o m m i e r s , en son Com m entaire sur l ’ art. 3 o 8 ,
n°. 5 , où il r a p p o r t e un arrêt du 22 mai 1 7 1 6 , q u i a j ugé v a l a b l e un p r é c i p u t a t t r i b u é à
u n m â l e p a r las c o nt r at s de ma r i ag e de ses soeurs, c o m m e c o n d i t i o n d e l e u r i n s t i t u t i o n .
C e t arrêt q u ’ A u n o u x ne fait q u ’i n d i q u e r , se t r o u v e a m p l e m e n t d é v e l o p p é , a v e c les
c i r c o n s t a n c e s q u i l ’a c c o m p a g n è r e n t , dans les not es m a nu s c r i t e s de M . B t R A u n , d o n t
c o m m u n i c a t i o n a été d o n n é e aux d a me s D e v a u r e et d e la R o q u e : l ' i m p o r t a n c e d e c e t t e
cause nous Tait un d e v o i r d ’e n t r a ns c r i r e l i t t é r a l e m e n t l ’e x t r a i t , tel q u ' i l existe dans la
s ource q u e nous i n d i q u o n s .
« A u r e s pe c t d u c o n t r a t d e m a r i a g e , y est-il d i t , n a î t un e que s t i on , s a v o i r , si la c o u
t u m e a p r é t e n d u q u e , p o u r la v a l i d i t é du p r é c i p u t , i l f u t néce s sa i r e q u ’il f ût fait p a r le
c o n t r a t du p r é c i p u é , ou si le mâl e n ’ é t a n t p o i n t en âge ou s i t uat i on de se m a r i e r , ses pèr e et
i n er e p e u v e n t , pur le c o n t r a t d e ma r i a g e d ’ une de ses soeurs, faire a u d i t mâ l e p r é c i p u t va l a bl e?
« C e t t e q u e s t i on f ut agi tée e n l ' a nn é e 1 7 1 6 , s u r u n a p p e l d ’ u n e s en t e n c e d e m o n s i e u r
l e s é n é c ha l , r e n d u e par d é f a u t , au prof i t de M . S é b a s t i en M a q u i s , a v o c a t , l e 29 août
1 7 1 4 , co n t r e d a m e A n n e M a q u i n , é po us e du si eur P a l i e r n e d e l ’ E c l u s e , et d a m e
M a r i e - E l u a b e t h M a q u i n , épous e d u s i eur D e s b o u c h a i n s , soeurs d u d i t S é b a s t i en
M a q u i n , l esquel l es lui c o n t e s t o i e nt u n p r é c i p u t de trente m ille liv res , q u i a v o i t été
r é s e r v é p a r le c o n t r a t du l adi te A n n e M a q u i n , p o u r en di s pos er au p r of i t des m â l e s , tel»
et ainsi q u e b o n s e m b l e r o i t au s i eur Sé bas t i en M a q u i n et E l i s a b e t h P i e d e m e s , p è r e et
m è r e des part ies ; de l a quel l e s o m m e ils a v o i e n t di s pos é au p r o f i t de S é b a s t i e n , l eu r fils,
p a r le c o n t r a t d e l adi te M a r i e E l i z a b e t h M a q u i k . L a c l a u s e d u d e r n i e r c o n t r a t é t o i t
t out -à-f ai t re l at i v e au p r e m i e r , et ell e étoi t
1 o n ç u e en ces t e r me s t
« C o n s o m m a n t le c h o i x rt la di s pos i t i on q u e se s ont réser vés d e l adi te s o m m e de trente
mille, livres , à c e t é g a r d , ils o n t d é c l a r é q u ’ils e n t en d e n t q u e ce t t e s o m m e soit pri se et
Pr é l e v é e après l eu r dé c è s , par f o r m e de p r é c ip u t , p a r S é b a s t i e n M a q u i s , l eu r fils ,
»ans q u e l edi t p r é c i p u t p r é j u d i r i c au p a y e m e n t de la s o m m e de vingt-quatre u n
q u i l ui sera fait p o u r l ’ég.ilcr a v e c les de mo i s e l l e s ses s œ u r s l o r s de son élu
e l i vr es
i ssei nent o u
a u t r e m e n t , ainsi q u ’ils a v i s e r o nt ; sans l a q u e l l e rés er ve de p r é c i p u t l esdi ts p è r e et mèrede l a f ut ure l’auroi ent a p a n é e , c o m m e il leur est p e r mi s p ar la c o u t u m e de c e t t e p r o v i n c e , ,
et sous c o n v e n t i o n q u ’o ù la f u t u r e v o u d r o i t c o n t e s t e r l edi t p r é c i p u t , e l l e demeurera; ero
•
�( 16 )
e f f e t a pa né e p o u r l a d i t e s o m m e d e v i n g t - q u a t r e m i l l e l i v r e s . L a s e n t e n c e r e n d u e f aut e d e
c o m p a r o i r , ' p o r t o i t q u ' a v a n t d e p r o c é d e r au p a r t a g e , l edi t S é b a s t i e n M a q u i n p rélèvera it
la s o m m e d e t re nt e m i l l e l i v r e s p o u r le p r é c ip u t à l ui a c c o r d é , e n s e m b l e le s in t é r ê t s ,
p o u r mo i t i é , d u j o u r d u dé c è s de sa m è r e , et de l ’aut re m o i t i é à c o m p t e r s eu l eme n t d u
j o u r du d é c è s du s i eu r M a q u i n pèr e.
« L e s d a m e s a p p e l a n t e s , p o u r f ai re i n f i r m e r la s ent ence , se f o n d o i e n t s u r l ’art. 3 o 8 ,
et p r é t e n d o i e n t q u e le p r e c ip u t ne p o u v o it être la is s é q u e p a r le c o n tr a t d e m a ria g e
d u p r é cip ité ; q u ’a i n s i , il f a l l o i t e n t e n d r e c e s t e r m e s , en fa v e u r d 'i c e l u i m a ria g e. E l l e s
a j o u t o i e n t q u e l ' i n t i mé ne p o u v o i t qua l i f i e r l edi t act e d e d o n a tio n e n tr e - v ifs , p a r c e
q u ' i l n ’a v o i t pas a c c e p t é ; q u e s’il di s o i t q u e c e f ût un e d o n a t i o n à c a us e d e m o r t , i l ne
p o u v o it être h é r itie r e t lé g a ta ir e ; q u e bi e n étoi t v r a i q u ’en c o n s é q u e n c e d e la ré s er ve
f a i t e , le si eur M a q u i n p è r e p o u v o i t d i s p os e r , ma i s q u Jil ne l ’a v o i t pas f i i t v a l a b l e m e n t
p a r un a c te étran g er à l'i n t im é ; e n f i n , q u e la s i eur M a q u i n pèr e ri avait p u , p a r une
s t ip u la tio n p é n a le , fai re Val oi r u n e c l a u s e n u l l e et c o n t r a i r e à la loi .
« L ’i n t i m é , e n r é p o n s e , se s er vi t d e qua t r e p r i n c i p a u x m o y e n s ;
« i ° . Q u e la loi n ’é t o i t p o i n t c o n ç u e en t e r me s p r o h i b i t i f s , et p a r c o n s é q u e n t p o u v o i t
p e r m e t t r e une s t i p u l a t i o n c o n t r a i r e ; q u e sa p r é t e n t i o n n e t o i t p o i n t c o n t r a i r e à la l o i ;
q u e le p r é c i p u t é t o i t f ai t à d e s c e n d a n t , e n c o n t r a t de mari . i ge et en f a v e u r d ' i c e l u i ,
p u i s q u 'i l é t a it le p r i x d u r a p p e l d e s f i l l e s , q u i a u r o ie n t été a p a n ées sans l edit p r é c i p u t ;
« 2°. Q u e cette prétention éto it suivant l ’esprit de la c o u t u m e , qui tendoit , par le s
a r t. S oi ,. 3o 5 , Z07 , 3 i o et S i 1 , à la faveur des mâles, au préjudice des filles ; que la c o u
tu m e n’a réprouvé les avantages faits par donations en tre-vifs, testamens et autres actes
p a r tic u lie r s , que parce que lesdits actes étoient p a r t ic u li e r s , et que 1rs avantag-s auroient
pù être faits à l ’ in sçu e t s a n s le c o n s e n te m e n t d e s a u tres e n f a n t , c.e que l'on ne p o u v o it
présum er en un c o n tr a t d e m a r ia g e , qui est un acte pu b lic et c o m m u n à toute la famille ;
« 3 ®. Q u e le* a pp e l a n t e s a v o i en t c o n s e n t i a u d i t p r é c i p u t , et q u ’il n ’y avoi t p o i n t de
s t i pu l a t i on p é n a l e , ma i s q u e c ’étoi t u n e c o n v e n t i o n faite a v e c fille m. i jeure;
«
4°.
Par l ’u sa g e de la p r o v i n c e , é ta b li par l ’extrait de tr e n te - n e u f c o n tr a ts d e m a
r ia g e , c o n te n a n t p a r e ille c la u s e , le rn n iij d e la s e n te n c e , une a tte s ta tio n d e s a v o ca ts
du barreau d e la sénéchaussée, d e s p r o c u r e u r s , et un c e r tific a t d e s notaires-,
« E t sur l ’a p p e l , l ' i n t i m é a y a n t f o r m é i n c i d e m m e n t d e m a n d e à ce q u ’en c o n s é q u e n c e
d e la c o n t e s t a t i o n q u i é<oit f ai t e et f o r m é e du p r é c i p u t , les a pp el a nt e s d e me u r a s s e n t
a p a n é e s , c o n f o r m é m e n t a \i cl a us e de s c o n t r a t s d e mari age.
« L e 22 mai 1 7 7 6 . au r a p po r t d e M . l ' a b b é P ucf . l l f , i nt e r v i nt arrêt :
« L a • o u r m i l l 'appt-l Uiion
n é,int t o r d o n n a q u e c e d o n t a voi t été a p p e l é s o r t i r o i t
ef f et ; et s ur la d e m a n d e d * .Sébastien M a q u i n , à fin d e d é c h é a n c e d u r a p p e l , m i t les
p a r t i e s l\ors d e c o u r ; c o n d a m n a le» «pr i a nt e s à l’a m e n d e , et tant el l es q u e leurs ma r i s
a u x troi s qua r t s de> d é p r n i , l ' a ut r e q u a r t c o m p e n s é . »
L ' e s p è c e d e c e t arrêt a ht p l i M g m n d e . m. dngi r avec, c e l l e q ui f.i■
t la ma t i è r e d e la c o n t e s
t at i on p e n d a n t e e n t r e la d e mo i s e l l e Du mo nt n tes part ¡es ad verses : on pou 1 roi t m ê m e s o u
t e n i r q u e ces d e u x e spè ces sont i d e nt i q u e s ; la s eul e d i f f é r e n c e q u ' ou y d é c o u v r e est q u e ,
di t q u e si la f ut ur e cont es t e le p r e c i p u t , ella dem eurera
apanée à la soin me de v i n g t m i l l e li vres ; t andi s q u e , dans n o t r e espéc./j, il est dit q ue , sans
da n s l ' es pèce de M a Q U I N , il
les c h a r g e s et c o n d i t i o n s de l ’i n j t i t u t i u n , la f ut u r e aurait été apanée à la s o m m e q u i l ui
est c o n s t i t ué e en d o t . .
�M3
(
17
)
L a demoiselle D u m ô n t fait Cette rem arq u e , parce q u ’il convient en tout de rendre
hom m age à la vérité, et q u ’elle veut prouv er à ses adversaires q u ’elle ne ch erch e à a ffoiblir
aucune de leurs objections : mais on leur prouvera bientôt que cetle variante ne doit être
d ’aucu n e considération dans la c a u s e , et q u e , dans l'u n et dans l ’autre c as, i l y a apanage,
s’il n ’ y a pas institution.
Q u a n t à présent , la seule conséquence à tirer de l ’arrêt de 171(1, est q u 'il a jugé in
te r m in is , q u ’une disposition de p r é c ip u t est valable lorsqu'elle est a p p o sé e , com m e con*
d ition j à une institution.
Q u ’on ne dise pas que l ’a rrêt a ainsi jugé , à raison de la m enace de forclu sio n , d o n t les
effets se fussent réalisés si l’on n'eut po in t a cc o r d é le précip u t.
*
O n répondra que la clause de l ’apanage est étrangère à la question de valid ité de préCiput ; que si cette clause de p r é c ip u t avoit été contraire à la l o i , ainsi que le porte un déj
considerans du jugement de G a n n a t , e lle a u r o it été réputée non é c r i t e , n o n o b sta n t la
m e n a c e d e fo r c lu s io n . Il a toujours été de p rincipe q u ’ une c la u s e p é n a le ne p o u v o il
v a li d e r une c la u s e c o n tr a ir e à la l o i , parce qu’autrem ent on pourroit se réserver le s
m o y en s d e v io le r lu lo i à son gré.
Il faut d o n c tenir po u r constant que si cet arrêt à d éc laré la disposition du p r é c ip u t
valable , c ’est parce q u ’une pareille disposition , q uoique faite hors le contrat de mariage
du précipué , n ’a rien de contraire à la l o i , lorsqu ’elle est une con d itio n d ’institution.
L a r a i s o n , l ’autorité des jurisconsultes de la sénéchaussée du B o u rb o n n a is, et la juris
p r u d e n c e , con cou ren t à établir q u 'u n p r é c ip u t p e u t être une c o n d itio n d 'in s t it u t io n .
§. III. L e p r é c ip u t d e la terre d e M o n t d o i t être a ttr ib u é à A n d r é D u m o n t , co m m e
la c o n d itio n d e l'in s t it u tio n d e s e s sœ urs.
P o u r se c o nvain cre de cette v é r i t é , il suffit d ’analiser la clause des contrats de mariage
des soeurs d ’A n d t é D u m on t.
Cette clause contient une institution restreinte par la stip u la tion d'une réserve , et
modifiée par plusieurs conditions q u ’il a plu aux instituans d 'y apposer ; condition» te l
lem en t liées et fondues dans un m êm e c o n t e x t e , a vec la clause d ’in stitu tion , q u ’il est i m
possible d en supprim er une par la pensée, sans a n é a n tir,d a n s le voeu des instituans, l’in i titutio n elle-inêiue.
Par cette clause , les père et m ère in stituen t leurs f i l l e s , sous une réserve déterminée ,
dont ils auront la faculté de disposer.
Ils instituent sous la c o n d itio n que si l ’un d ’eux d éc c d e Sans avoir dispôso de la
portion de la réserve , le survivant aura le droit de disposer de la totalité.
Ils'instituen t sous la c o n d itio n que s’ils d écèd en t l ’ un et l ’autre sans a vo ir disposé de Ia
réserve, elle a p p a r tien d r a , en toute propriété , à A n d ré D u m o n t , leur fils, à titre de p ré
c ip u t. « l a d i t e in s tit u tio n f a i t e , est-il d i t , so u s l a d i t e réserve, e t à c o n d td o n d e lad is p o s itio n . »
Enfin , ils instituent sous la c o n d itio n que la future laissera jouir le
survivant
des pere
et m ère, de la portion qui lui seroit revenue dans les biens du p r é d é c é d é .
S a n s to u te s le s q u e lle s c h a r g e s , c la u s e s et c o n d i t i o n s , e s t i l ajouté , la d i t e i n s t it u
tio n n ‘ a u ra it été f a i t e , et la future auroit été «panée moyennant sa constitution dotale.
Cette clause contient év id em m en t tro is c o n d i t i o n s , auxquelles les pere et in tre des d e
moiselles D u m o n t on t entendu sub ordo nn er l ’institution faife à leur profit.
.
5
* i{
�O r , deux de ces conditions se sont accom p lie s dans l ’intérêt d ’A n d ré D u m o n t .
E n effet, une prem ière con d itio n a ttachée à la cause d'institution , est q u ’en cas de
non disposition, la terre de M o n t appartiendra íi A n d r e D u m o n t . O r, P rocu le Pitat est d é
cédée sans a v o ir disposé de sa m oitié de la réserve ; l ’év én em en t de la c o n d itio n a d o n c
assuré à A n d r é D u iu o n t la m oitié de cette terre p a r v o ie d e d e s tin a tio n .
U n e d euxièm e con d itio n apposée à l'institution , est q u ’en cas de non disposition de la
part du p r é d é c é d é , le survivant aura le d roit de disposer de la totalité de la réserve. O r ,
cette seconde c o n d itio n s’est a c c o m p lie , au profit d 'A n d r é D u m o n t , par son contrat de
m ariage , en 178g ; la moitié de cette terre , d u c h e f de la mère , lui a donc encore été assurée
par v o ie d 'é le c tio n .
Il y a donc double m o tif de d é c id e r que le p réc ip u t appartient à la représentante d ’ A n
d ré D u m o n t , par la raison q u ’il lui a été a c q u i s , ou p a r v o ie d e d e s tin a tio n , ou pur v o ie
d ’ éle c tio n -, à moins q u ’o n ne d écid e q u 'il lui a été acquis p a r l'u n e e t l ’a u tre v o ie s
réu n ies.
O n persistera sans doute à soutenir que ces deux cond itio ns doive n t être réputées non
écrites , c o m m e contraires à la loi ;
Q u e la c la u s e d e d e s tin a tio n de la terre de M o n t au profit d ’A n d r é D u m o n t , hors son
contrat de mariage , est une c ontraventio n à l ’ art. 217 de la coutum e du Bourbonnais ;
E t que la f a c u l t é d ’ élir e donnée au survivant des père et mère , est contraire aux dispo
sitions de l ’ a rt. 226 de la mêm e cou tu m e.
I l c o n v ien t d ’a p p réc ier cette objection , et de la réduire à sa juste valeur.
E n ce qui con cern e la c la u s e d e d e s tin a tio n de la réserve , au profit d ’ A n d ré D u m o n t ,
à titre de p r é c i p u t , com m e cond itio n de l'institution de ses soeurs, on a déjà vu q u e , suivant
l'o p in io n des jurisconsultes les plus éclairés de la ci-devant sénéchaussée du Bourbonnais,
u n e telle disposition étoit valable ; et que cette opinion n étoit point une inn ov atio n en
ju risp ru d e n c e , puisq u 'elle se trouve consacrée par un a r r ê t , q ui rem onte à 1716.
. P o u r c o n c ilie r cette jurisprudence avec l ’a rt. 214 de la coutume , tout consiste à ne pas
confo nd re les dispositions p r in c ip a le s et d ir e c t e s , avec les dispositions r ela tiv es et c o n
d itio n n e lle s .
Ain si , par exemple , une donation p r in c ip a le ¡ q u ’ un pere auroit faite à son Fils , d ’ u n e
m a n iè r e d i r e c t e , et com m e disposition p r in c ip a le , par le contrat de mariage d ’un de
ses frères , seroit n u lle , parce q u ’une telle donation est prohibée par l ’ a rt. 217.
M ais il n ’en est pas de même d ’une d i s p o s i t i o n r e l a t i v e et i n d i r e c t e , qui se rattache c o n
d itio n n e lle m e n t à une d i s p o s i t i o n p r in c ip a le >teHe q u ’une i n s t i t u t i o n , et qui doit suivre
le sort de cette i n s t i t u t i o n , dont elle est une d é p e n d a n c e ; en sorte que c ’est moins la
d i s p o s i t i o n rela tiv e qu il faut c o n s i d é r e r en elle-m êm e , et i s o lé m e n t , pour juger de sa
V a l i d i t é , que la d i s p o s i t i o n p r in c ip a le à laquelle elle se r a tta c h e , et dont elle fuit essen
tiellem ent partie.
C e n ’est pas seulem ent en matière de p réc ip u t que la loi v a l i d o i t , com m e c o n d itio n
n e lle s , des dispositions qu’elle prohiboit lorsqu’elles étoient p r in c ip a le s et d ir e c te s .
C ’est ainsi q u e , c o m m e on l ’a déjà d i t , l ’institution faite par un p è r e , en faveur
de deux en fa n s, par le contrat de mariage de l’un d ’e u x , étoit n u lle à l ’égard de c elu i
qui ne sem.irioit pas ; tandis que
51 l'institution
n ’étoit faite q u ’en faveur de celui qui se
i n a r io i t , à la charge d a s s o c ie r son frère , la disposition étoit v a la b le au profit de ce der
nier , coim ne c o n d itio n de l'institution fait« à l ’autre.
�iJ i
( \9 )
C ’est ainsi q u ’en coutum e du B o u r b o n n a i s , la disposition faite par des époux pendant
le mariage , au profit du s u r v i v a n t , de l ’usufruit des biens du p réd é cé d é , étoit n u lle ,
c o m m e contenant un avantage p rohib é , tandis q u ’elle a toujours ete consid érée c o m m e
v a la b le lorsqu’elle se raltach oit à une in stitu tion de leurs enfans , et qu elle en étoit la
con d itio n ; ce q ui nous est attesté par tous les com m entateurs , et n otam m ent par
A uroux
, su r le s are. 226 , n°. 10 , et 227, «°.
3 o.
Il ne faut d o n c pas s’étonner si les adversaires on t c r u raisonner juste dans leur
système , en parlant d e l'a r t. 217 de la c o u tu m e ; leur erreur pr o v ien t de ce q u ’ils o n t
fait une confu sion p e rp étu elle des clauses constituant une donation p r in c ip a le , avec les
dispositions relatives et c o n d itio n n e lle s , q u i se régissent par des régies de droit b ien
différentes.
C est sur les principes que nous venons de d évelopp er , que repose essentiellement une
consultation signée de trois jurisconsultes recom inandablcs de C l e r m o n t , M M . B o i r o t ,
B
ergier
et D
artis
, sous la date du 12 d é ce m b r e i 8o 5 .
D a n s c e t t e c o u s u l t a t i o n , d e m a n d é e et o b te n u e p a r M . D
evaure
lu i- m ê m e , d o n t
les a p p e l a n s o n t sous les y e u x une c o p i e f i dè l e me n t c o l l a t i o n n é e s ur c e l l e q u i est d a n s
le* ma i n s des i n t i m é s , ces j u r i s c o n s u l t e s o n t f o r m e l l e m e n t d é c i d é q u e le p r é c i p u t
d e v o i t être r e l â c h é à la d e mo i se l l e D u i n o n t , e n v e r t u d e la c o n d i t i o n app o s ée à l ’i n s
titu tio n de ses tantes.
« L a coutum e du B o u r b o n n a is , d isen t-ils, étoit une co u tu m e de forclu sio n légale:
on lit dans l ’a rt.
5o 5 ,
que toute fille mariée et d o té e , ou , ce qui est s y n o n y m e , a p a n è s
par ses père et mère , est forclose de toutes successions directes et collatérales.
« La dame D ev a u r e , mariée et dotée par ses père et m è r e , étoit d o n c forclose de
droit par leur seul silence , et par le seul effet de la loi m unicipale.
« A u lieu de cette forclusion r ig o u reu se , les pcre et mère l ’appellent à leur succession ,
mais ils l'a ppellent a vec d e s m o d ific a tio n s ; ils veulent bien q u ’elle soit leur héritière
par égalité avec sa sœ u r et son fr c r e , mais non pas dans l'universalité de leurs biens;
ils en exceptent la terre de M ont.
« Peut-on dire que cette exception ne leur fu t pas permise ? pouvant livrer leur fille
a une forclusion absolue , ne pou voient-ils pas laisser du m oins subsister cette f o r
clusion pour une partie quelconque de leur f o r tu n e , ou pour tel et tel objet p a rticulier ?
« C o m m e on le dit v u l g a i r e m e n t , qui peut le plus peut le moins : les sieur et d ame
D u m o n t pouvant priver leur fi!le de leur succession , pouvoient à plus forte raison ne
1 en priver qu en partie ; et s ils ont voulu que la forclusion subsistât pour celte p a rtie ,
leur volonté doit être accom plie.
<( O r , cette volonté a été e i p r i m e e de la manière la p lu s ex p r esse dans le contrat de
mariage de la dame D evau re , en ce q u ’il y est dit form ellem en t que la dame D evau re
n est 'usfituée leur héritière q u ’à cond itio n q ue la terre de M o n t demeurera exceptée do
cette in s titu tio n ; que sans cette c o n d itio n l'in stitution n ’ a u r o it p a s été f a i t e , et la
ju tu r e a u r o it é t é a p a n é e m o y en n a n t la d o t q u i v a lu i être c o n s t i t u é e .
Apanage qui auroit produit lo u t son effet pour la succession d 0 1° dame D u m o n t ,
Puisqu’elle est décédée en l 7 86.
« La conséquence de tout ce q u ’on vient de dire , c ’est que si la représentante d ’A n d ré
D u m o n t conserve la terre de M o n t en p r é c i p u t , et sp écialement la moitié qui en a a p
partenu à la dame D u m o n t , ce 11’est pas en vertu de la disposition q ui en a été faite en
�( 20
)
faveu r d ’A n d r é D u m o n t , par son contrat de mariage du S i niai 1 7 8 9 , disposition q ui
étoit nulle p o u r la portion de la daine D u m o n t d é c é d é e ; mais parce que c ’étoit u n e
CONDITION EE l ' î NSTITUTION F AI T E AU PROFIT DE LA DAME D E V A U R E , Une ex cep tion
à l'in stitu tion de cet objet p a r t i c u l i e r , pour lequel les sieur et dam e D u m o n t ont voulu
laisser subsister la forclusion pron on cée par la c o u t u m e , forclu sio n à laquelle ils n’ont
Voulu déroger que pour le surplus de leurs biens.
« C ’est à ces idées simples que doit se réduire la question proposée; envisagée sous ce
po in t de vue , la décision 11’en peut être fa vorable à la dame D evaure. »
A in si s’e x p r i m e n t , dans l ’avis donné à la dam e D ev a u re , ces ju ris c o n s u lte s , don t
l ’aut6riié imposante ne sauroit être suspecte.
O n objectera peut-être , contre cet a v i s , que la forclusion légale ne peut être p artielle;
que l ’apanage est une sorte de fo r fa it qui tient lieu de la succession ; q u ’on ne peut être
apanée p o u r partie et héritière po ur p a r tie; que ces deux qualités sont in c on ciliables.
O n con v ien d ra d e la vérité de ces p r i n c i p e s , en matière de forclusion lé g a le, lors
q u ’elle a lieu dans le silence des parties , et p a r le se u l e ffe t d e la lo i m u n icipale.
ft^ais il n ’en est pas de m êm e lorsque les père et m è r e , dérogeant à cette forclusion
l é g a l e , appellent leur fille à leur succession par une institution contractuelle. Ils peuvent
alors faire l ’équ iva len t d 'u n e forclusion p a r tie lle , en imposant des charges et des c o n d i
tions à l ’institution , parce que les charges et conditions sont le prix de la n on-forclusion
légale , et de son rappel à la succession conven tion nelle ; aussi ces jurisconsultes ont-ils
form ellem en t d é c id é que la demoiselle D ü m o n t d ev oit conserver le p r é c i p u t , parce que
c'éto it u n e c o n d i t i o n d e l ’ i n s t i t u t i o n faite aux dames ses tantes.
Il reste à examiner quels pe uve n t être les effets de l ’espèce de f a c u l t é d ’é l i r e donnée
au s u r v i v a n t , par la clause q ui l ’autorise à disposer d e la to ta lité de la réserve.
I l est à peu prés indifférent à la d em oiselle D u m o n t q u ’on valide ou non les effets
de l ’é l e c t i o n faite dans le c o n tra t de mariage de son pére , puisqu’il est démontré
q u ’elle a un titre Incontestable au p r é c ip u t dans la d estin a tion prim itive de la terre
d e M o n t , au profit d e son p è r e , con n u e charge e t co n d itio n d e l'in stitu tio n de»
dames D evaure et d e Beauregard.
Mais il i m p o r t e , p o u r l ' h o n n e u r de s p r i n c i p e s , d e d i s c u t e r e n c o r e , s ous c e p o i n t
d e v u e , la q ue s t i o n d e la v a l i d i t é d u p r é c i p u t .
1
Les j ur i s c o n s ul t es d o n t i l v i e n t d ’être p a r l é , o n t é mi s l ’o p i n i o n q u e c e t t e f a c u l t é
to’ ÉLi RE é t o i t n u l l e , et q u e la d e mo i se l l e D um on t n e p o u v o i t r é c l a m e r l e p r é c i p u t ,
d u c h e f de P r o c u l e P i t a t , q u ’en v e r t u d e la cla u se co n d itio n n e lle d e destination .
E n rendant hom m age aux vastes ronnoissances de ce» j u r i s c o n s u l t e s , 1« demoiselle
D u m o n t se perm ettra de penser q u ’ils o n t erré sur ce p o i n t , et que leur erreur provient
d e ce q u ’ils ont considéré cette fa c u lté d ’électio n . en elle-m êm e , d ’une manière a b
solu e , et Art l iso la n t de l institution dont e lle éto it une d es co n d itio n s ; tandis q u ’il
falloit ra iso n n er, dans l ’e sp èc e, sur cette fa c u lté d ’é lir e , c o m m e ils ont raisonné sur la
disposition de préciput par la v o ie de la d estin a tion con dition n elle.
O n distinguoit autrefois deux sortes de dispositions subordonnées à la fa c u lté d ’elire :
— l u n e de ces espèces con ten oit un don fait à qu elqu ’ un avec charge d e rendre à un
tiers q u ’ il pourroit élire ; il y avoit là év id em m en t substitution fidéicommissaire.
L 'a u tre espèce avoit lieu lorsque la disposition étoit faite, indéfiniment ou parmi plu«ieurs personnes in d iq u é e s, à celui qui seroit élu par le tiers désigné ; elle ne c o n teu o it
�Ü?
( 2t )
aucun avantage au profit de Celui q u i devoit ¿lire ; et c ’est dans cette espèce que rentre
]a fa culté donnée au s u r v iv a n t, dans les contrats de mariage des dames D ev au re et de
Beauregard.
O n p o u r r o i t d o n c s o ut e n i r q u e ce t t e di s p o s i t i o n , p a r cel a seul q u ’elle n e c o n f è r e a u
cun é m o lu m e n t au s u r v i v a n t , ne c o n t r e v i e n t p o i n t aux l oi s p r o h i b i t i v e s d a v a n t a g e s e n t re
é p o u x ; et c e p e n d a n t ces j ur i s c o n s ul t e s ne f o n d e n t la n u l l i té de la di s pos i t i on f a c u l t a t i v e
d o n n é e au s u r v i v a n t , q ue sur ce q u ’ell e est c o n t r a i r e d l'a r t. 227 de la c o u t u m e , q u i n e
p e r m e t a u c u n a va nt a ge e nt r e ma r i et f e m m e , q u e c e l u i d u d o n m u t u e l des me u b l e s et
a c q u ê t s en u s u f r u i t , et dans le cas s e u l eme n t o ù ils n' ont p o i n t d ’e nf a n t d e l e u r u n i o n .
M a i s suppos ons q u ’il y e û t dans c e t te f a c u lt é d 'é l ir e un a va n t a g e q u e l c o n q u e au prof i t
du s u r v i v a n t , la n u l l i té d« la d i s p os i t i o n d e v r o i t - e l l e s’e n s ui v r e ?
C ’est i c i q u ’il c o n v i e n t d e r a p p e l e r la d i s t i n c t i o n des di s p o s i t i o n s p r in c ip a le s e t d i
r e c te s d ’a v e c les d i s p o s i t i o n s rela tiv es e t c o n d itio n n e lle s .
Sa ns d o u t e d e u x c o n j o i n t s , q u i p a r le c o n t r a t de m a r i a g e de l ’un d e l eurs e n f a n s , o u .
p a r t o u t a ut r e a c t e , d o n n e r o i e n t au s u r v i v a n t d ’e u x , d a n s le u r in térêt r e s p e c t if , et
p a r une cl a us e d ir e c t e e.t p r in c ip a le , la f a c u l t é de t r a ns me t t r e t out o u p a r t i e d e la suc*
c e s s i on d u p r é d é c é d é à un h é r i t i e r à é l i r e , f er oi ent u n e s t i pu l a t i o n n u lle , c o m m e co n t r ai r «
aux lois p r o h i b i t i v e s d ’a va n t a g e s e nt re é p o ux .
M ais il en est bien autrement lorsque cette faculté est donnée au survivant des c o n
jo in ts, par les contrats de mariage de leurs enfans , c o m m e ch a rg e e t c o n d itio n e x p r e s s e
d e leu rs in s titu tio n s .
L a raison e st, c o m m e on l ’a déjà d i t , q o e ce qui ne vaut pas dans un ca s com m e d i s
position p r in c ip a le , peut v a lo ir com m e disposition c o n d itio n n e lle .
C ’est a i n s i , on le r é p è t e , que le don fait par c o n jo in ts pendant le mariage , au profit
du s u r v i v a n t , de l ’usufruit des biens du p réd é cé d é , est nulle c o n n u e contenant un a va n
tage prohibé , tandis q u ’elle est v a la b le lorsqu'elle se r a tta c h e à u n e in s tit u tio n et
q u 'e lle en e s t la c o n d itio n .
C ette distinction est fon d ée sur ce que les c on v en tion s m atrim on iales sont susceptible#
de toutes sortes de clauses et c o n d itio n s qui n ’ont rien de contraire a u x bonnes m œ u rs,
et sur ce q u ’on ne pe u t pas séparer la r e n d itio n de la libéralité à laquelle elle est atta
chée , q u i s e n tit c o m m o d u m s e n tir e d e b e t e t onu s.
O r , c ’est com m e c o n d itio n de l ’in stitu tion des dames D e v a u r e et de Beauregard q u e
les sieur et dame D u m o n t o n t respectivem ent d o n n é , au su rviv an t d ’eux , la faculté de
disposer de toute la réserve ; c e q u i résulte de ces mots : « sa n s to u te s le s q u e lle s c la u s e s ,
c h a rg es e t c o n d itio n s , la d it e in s titu tio n n a u r o it été f a i t e . »
D ’où il y a lieu de c o n c lu re que la d isposition faite par Jean D u m o n t p è r e , de U
m oitié de la réserve , du c h e f d e P ro c u le P it a t , par le c o n tra t de mariage de 178 9 , en
faveur d ’A n d ré D u m o n t , est valable ; ce qui d o n n e surab on d am m en t à la r e p r é s e n t a n t *
d A n d ré D u m o n t un double titre à cette réserve.
t r o i s i è m e
r « o r o s i t [ o k.
S i les d a m e s D eva u re e t d e la R o q u e r e n o n c e n t an b én éfice d e le u r in s titu tio n ( en
su p p o sa n t q u 'e lle s y s o ie n t en co r e r e .c e v a b lc s, e lle 1 d o iv en t ê tte r é d u ite s à un
a p a n a g e , f i x é p a r le u r c o n s titu tio n d o ta le .
C e tt e prop osition ne p e u t f<*ire la matière du plus léger d oute : elle se trouve parfai-
6
�fv
( 22 )
teraent établ i e , et p a r l a
b o n n a i s , et p a r l e
pacte
l o i m u n i c i p a l e qui régissoit l ' a n c i e n n e p r o v i n c e d u B o u r
d e f a m i l l e q u i f ai t la l o i de toutes les par t i e s .
E lle est établie par la loi m u n icipale.
T o u t l e i n o n d e sait q u e , p o u r q u ’u n a p a n a g e f û t v a l ab l e c o m m e f o r c l u s i o n l é g a l e ,
c i n q c o n d i t i o n s é t a i e n t req-uises ;
i ° . Q u e la personne apanée fût une fille , et i l n ’im portoit qu’elle fut noble ou r o t u
r iè r e , majeure ou m i n e u r e , po u rv u q u'e lle eut l ’âge compétent p o u r le mariage ; a0, q u ’elle
fût mariée ;
ascendant ;
5 J.
5 °-
dotée ; 40. que la constitution dotale fût faite par père et mère ou autres
qu elle fut payée , en tout ou en partie , du v iv a n t des père et m ère.
E t il n ’étoit pas nécessaire , pour que l’apanage eût lieu , q u ’o n se fût servi du m ot
a p a n a g e : c ’étoit un point r o u tn m ie r incontestable , que la sim ple dotation d ’une fille
einportoit apanage et exclusion des successions de ses père et mère.
C 'est ce que nous attestent A
uroux,
D
fcullant
, D
urit
, G
enin
, V
incent
et
J a c q u e s P o t i f . r , a ncien s com m en tateu rs de l a coutu m e du Bourbonnais.
« U n e fille qu i a été m a riée , dit A
uroux
, par père ou par m ère , aïeul ou aïeule, et
à qui on a d onné en mariage quelque chose de certain , est réputée a p a n é e, et excluse
par conséquent des successions exprimées dans n otre a r tic le , q u o iq u ’elle n 'y eût pas expressement r e n o n c é , et q u ’on ne se soit pas servi, du m ot a p n n è ou a p a n a g e ; car il n ’est
pas nécessaire, po u r la valid ité de cette exclusion t a c it e et c o u tu m iè r e , q u ’on se soit
servi du mot a p a n é e , po u rv u qu’il y ait dotation f.iite a la fille , etc. »
O r , les d a me s D e v a u r e et de Beaur»-gard o n t é t é m a r iée s et d o té e s p a r l e u r s pèr e et mè r e ;
elles o nt r e ç u , du v i v a n t desdi ts p è r e et mè r e , tout o u p ar t i e de l eurs dot s ; il est d o n c
d a n s le voeu de la loi q u ’elles soi ent a p a n é e s , si elles ne s ont i nst i t ué es .
Ain.'i , lors même que lessieur et d.une D u m o n t ne se seroient point expliqués s u r l e u r
intention que leurs filles fussent apanées dans le cas ou elles n’accepteroient point l'ins
titu tio n avec ses charges , il faudroit nécessairement con clu re de leur reno nciatio n à l'ins
t i tu t io n , qu'elles demeurent apanées par la seule force des dispositions coutumiéres.
M ais cet apanage résulte e n outre
du p a c t e de f a m i l l e
qui fait la loi des parties.
L ' i n t e n t i o n des s i eu r et d.itno D u m o n t , q u e les d a m e s D e v a u r e et de Beauregard s oi en t
a p a n é e s si elles n ’a c c e p t e n t l eur i n s t i t ut i o n a v e c ses charges et conditions , est écrite eu
Oros
'
c a r
ac i è r e s dans leurs, c o n t r a t s d e ma r i a g e .
« De s i n s t i t u t i o n s l eur f u r e n t a c c o r d é e s , d i t M . C
iiabroud
dans nne c o n s u l t a t i o n d u
2 3 j ui n 1^07 , d o n t les i n t i m é s o n t une- c o p i e , à la c h a r g e d e la r é s ç r v e d e la terre d e
M o n t , à la c h a r g e d e la d i s p os i t i o n q u i s er o i t fai te de cett e t er re p a r les i n s t i t u a nt o u
l e s u r v i v a n t d ’e u x , à la c h a r g e d e ta d e s t i n a t i o n à A n d r é D u m o n t à d é f a u t de d i s p o ï i t i o n ; et les d o n s d e 40,000 l i y . en a v a n c e m e n t d e s uc c e s s i o n , e n t r è r e n t d a n s la i nèoi a
co mbin aison d ; volonté.
« C e q u ' i l f au t c h e r c h e r dans les d e u x c o n t r a t s , c ’rst l ’i n t e n t i o n des i n s t i t u a n s ;
v o lu n ta tr m p o t in s q u a n t v erh a s p e c iu r i p la ç a i t . ( L . 2 1 9 . f j . da v e r ho ru ni s ig n if. )
« O r , après a vo ir énum éré fes <h.irges qu'ils imposent aux instituées , ils fout é> rire que
ta n s to n te s c e s c h a r g e s , c la tts e s et c o n d itio n s , la d i t e in s titu tio n n ’ a 11ro it été f u i t e ,
et la d i t e f u t u r * a u r o it été tl p a n ce m o y en n a n t la d o t q u i a lla it lu i c tr - c o n s titu é e .
a Q u e signifie c e l t e ex p l i c a l i o n , qui n e s t pas là sans d e s s e i n , si c e n est q u e la l oi
*st L i t e à l’i nst i t ué e d ’.ic< o m p l i r les c h a r g e s et c o n d i t i o n s , ou d e r e n o n c e r à l 'i ns t i
t u t i o n , e t , d a n s c e c a s , de n ’être p l u s qu^un c fillo apai i ee et e x c l uo ? »
�( 23 \
*9
T o u t est i c i c o n d itio nn el : l'apanage ou l ’in s titu tio n , voilà l ’alternative qui est offerte
aux dames D evaure et de la R o q u e .
Il y a in s titu tio n , si les instituées se soum ettent aux obligations q u ’on leur i m p o s e ;
auquel c a s , les constitu tion s de 40,000 liv . sont u n avancem ent de l ’avantage q u i en
résultera.
S i , au c o n t r a i r e , les instituées se refusent à leurs obligations , les institutions disparoissent , et les constitutions ne sont plus q ue des fixations d ’a p a n a g e , d ’où résulte
l ’exclusion.
T e l l e fut év id e m m e n t la vo lo nté des in s titu a n s, et elle est la règle des deux institutions ;
p rim u m lo ciim o b t i n e t , rég it q u e c o n d itio n e s . ( L o i 19 , f f . d e e o n d it. e t d e m o n st. )
Osera-t*on dire , avec les intim és , que la clause ne contient point un apanage formel ;
q u ’elle ne manifeste que l ’intention où étoient les pere et mère d ’apaner leurs filles , dans
le cas ou elles n ’eussent p o in t été instituées sous des charges ?
U n e par ei l l e o b j e c t i o n s er oi t d ’a u t an t pl us i n o p p o r t u n e , q u e , c o m m e o n l ’a dé j à d i t ,
l o r s m ê m e q u e les s i eur et d a m e D u m o n t n ’a u r o i e n t pas e x p r i m é l eu r v o l o n t é , ell es
n e n s er oi ent pas m o i n s a p a n é e s , en r e n o n ç a n t à l ’i n s t i t u t i o n , p a r l e seul ef f et de l ’e x
c l u s i o n t ac i t e et c o u t u i n i è r e q u i r é s u l t e d e l e u r d o t at i o n .
M a i s c o m m e n t oser s o u t e n i r de b o n n e f oi q u e les s i eu r et d a m e D u m o n t n o n t pas
- suf f i samment m a ni f e s t é l e u r v o e u , l or s q u' i l s d é c l a r e n t s u b o r d o n n e r à des c o n d i t i o n s le
n o n - a p a n a g e d e l eur fille , et l eur r a p p e l à la s uc c e s s i on .
On le r é p è t e , ce pacte de fam ille auroit dû être sacré p o u r les dames D e v a u r e et de la
R o q u e ; rien ne d ev oit les dispenser d ’en exécuter religieusem ent le contenu.
.
Il devoit être d ’autant plus respectable à leurs y e u x , qu'il ém anoit d'un père et d ’une
m ere qui avoient été les artisans de leu r fo r tu n e , et q u i ont laissé une succession opulente
à des filles in g ra te s , qui insu ltent à leur m é m o ir e en foulant aux pieds leurs dernières
dispositions , lorsqu’elles d evoien t être p o u r elles des lois saintes et in v io lab les.
M ais il y a plus : tout ho m m e sensé ne verra dans une telle ob jec tio n q u 'u n e m isé
rable subtilité , q u ’un jeu de mots p u é r i l , qui fait d égén érer la cause en pure l o g o m a c h ie ,
in d ig n e de la majesté de la justice et de la sagesse de ses ministres.
E ll e avoit été pressentie par un drs c om m en ta teu rs de la co u tu m e du B o u rb o n n a is.
« N ous r e c e v o n s , d it M e n ü d e l , le précipu t au profit des uiâles au contrat de mariage
de la fille mariée et instituée héritière avec les frères, à la charge d u dit précipu t au profit
des f r e r e s , parce que les ascendans qui instituent p o m o ie n t apaner la fille , auquel cas la
r enonciation eût profité auxdits mâles. »
« Mais po u r «ter tout doute , a jo u t e - t - i l , il est à p ro p o s de d ire que les père et mère
®nt doie la fille de la som m e d e .......... à l.i charge de ve n ir à la succession en r ap p o rta n t,
que ou elle fuurniroit débat con tre ledit précipu t , déclarent qu'ils apanent ladite filla
6 la somme d e ..............p a r ce qu en mettant sim plem ent la clause q u ’ils instituent ladite
le sous ledit p r è r .ip u t, «lie peut dire q u ’elle n’a pas été apanée à défaut de l’exécu tion
e ladite clause , q u i so n n e to u te fo is e n i n s t i t u t i o n c o n d i t i o n n e l l e , et que les mots q u i
*®roient dans le contrat , sans lequel p réc ip u t les père et mère J'auroient n p a n e e , ne son t
P « un apanage f o r m e l , mais plutôt une sim ple énonciation d» dessein d ’apaner , le q u e l
n tant pas disertemeut exp liq u é , ne d*-vroit pas l'em pêcher de venir aux successions 11&
intestat des pere et m ère , en rapportant : laquelle o b je c t io n 11 est pourtant pas c o n s id é **
�( 24 )
ible , parce que le mot de b o t emporte quant à soi l ’ a p a n a g e
ral
p re ssen ti. »
On
v o i t que le c o m m e n t a t e u r M
enudel
,aliquo dalo de
a v o i t p r é v u ce t t e p u é r i l e o b j e c t i o n , e t
q ue l cas il en fait !
Il dit
par form e de c o n s e i l , et p o u r ôter tout prétexte aux subtilités de la c h i c a n e ,
q u 'il vaut mieux rédiger la clause de telle m a n i è r e , p lu tô t que de telle a u tre ; mai*
elle n ’en s o r t i r o i t pas moins effet , suivant l ui , parce que le m ot de d o t em porte tou
jo u r s quant à so i l apanage.
A in si , la question se trouve résolue , in te r m in is , par lin des hom m es les plu*
habiles et les plus expérimentés dans l'in telligen ce et l'interprétation de sa cou tu m e , par
un de ceux même qui l’ont com m en tée .
E t les dames D evaure et de la R o q u e auroient pu se flatter de réussir dans leur
tém éraire entreprise !
Osons le dire : s’il en étoit ainsi , il n ’y auroit plus rien de sacré parm i les h o m m e s ;
n u l a cte ne seroit A l’abri des atteintes de la cu pid ité et de la mauvaise foi. L ’effronterie pou rroit se jouer im p u n é m e n t de la foi des traites, et 1 ho m m e de bien deyroit
d outer de la justice u m n e .
D E U X I È M E
P A R T I E .
,
L e ju g em en t dont est a p p e l repose sur des m otifs insignifians ou erronés.
Si
m ité
la
dem oiselle
D u m o n t a , ainsi q u ’o n le p e n s e , c o m p lètem en t justifié la l é g it i
de ses prétentions , on d evra nécessairement en c o n c lu re q ue les premiers juge*
ont erré dans leur d éc isio n .
Mais pour ne rien laisser À désirer dans cette cause , elle va soumettre au creuset
de la discussion le s p r é te n d u s p r in c ip e s qui ont servi de base à leur jugement.
P b e m i e ' b m o t i f . « Une réserve faite avec stipulation que la disposition en sera f,iita
en faveur de^celui des enfans qu'il plaira à l ’in stitu a n t de c h o i s i r , n o t e point à l'in s
titu é le d ro it de r e c u e illir sa po rtio n dans 1 objet r e s e r v e , lorsque 1 instituant d ecede
sans d i s p o s i t i o n . »
RÉr ONSE. C ette prop osition est incontestable : elle étoit vraie sous lV m p ire de l ’or
d o n n a n c e de i 7 5 i , com m e elle l'est e n c o re a u jo u r d 'h u i , depuis que l'a rticle a de la
lo i du 18 p lu v iô se an
5
¡1 été abrogé.
M a is reçoit-elle applicatio n à l’e s p è c e ?
P o u r soutenir avec succès l'a ffirm ative , il faudroit que les sieur et d am e D u m o n t
e u s s e n t fait une réserve sous la seu le stipulation qu'ils p o u r r o i e n t en disposer en f.ivour
de c elu i de leurs enfans q u ’il leur p la iro it choisir.
Il f a u d r o i t faire disparoitre de l ’institution la clause , q u 'en cas de non disposition da
leur part , la réserve appa rtien droit à A n d ré D u m o n t à titre de p r é d p u t .
Il faudroit faire disparoitre de l ’institution la clause , qu en cas de non disposition d«
l ’ un d ’eux , le survivant pourra disposer de la totalité de la réserve.
Il faudroit f.iire disparoitre d u contrat de m ariage d ’A n d ré D u m o n t , la disposition d«
cette réserve effectuée ji.tr le sieur D u m o n t pare.
Il f a u d r o it, eu un m o t , c h a n g e r l ’état de la question.
C e p rem ier u i o t i f est d o n c en tièrem ent insignifiant.
�( *5 )
D e u x i è m e m o t i f . « A n d ré D u m o n t n ’a pu être saisi dé la terre de M o n t , par la clause
de destination , i°. parce qu'il étoit étranger aux contrats de mariage de ses soeurs , et q u ’il
est de principe que les contrats ne pe uve n t valoir q u ’entre les contractans ; z a. parce que
d après lesdispositions de T a rt. 219 de la coutum e du B ourbonnais, la donation ne p o u voit
Valoir à son p r o f i t , q u ’autant q u ’ elle auroit été faite par son contrat de mariage. »
ïlÉroN SE. Les-contrats ne pe uve n t valoir q u ’entre les contractans ; mais aussi doivent«
ils va loir entre les contractans ta n q u à m so n a n t ; o r , les sieur et dame D u m on t , c o n
tractans , n o n t in s titu é les dames Devaure et de Beauregarcl , q u ’à la charge de souffrir
la distraction de la terre de M o n t , destinée à celui des enfans qui seroit c h o i s i , et à A n d ré
D u m o n t , à d é fa u t da c h o ix . La cou tu m e du Bourbonnais qui permettoit cette institution,
ne s opposoit point à ce qu elle fut modifiée et grevé« de cette charge ; et la lo i ayant été
ainsi faite p a r les in s titu a n s, et n ’étant point c ontraire à la c o u t u m e , il n ’ y a pas da
m oyen légitim e de ne pas l ’e x é c u te r , à moins q u ’on ne renonce à l ’institution ; auquel
c a s , il ne reste plus qu une simple d o t a t i o u , e m p ortan t e x c lu s io n c o titu m iè r e , et par
conséquent a p a n a g e.
l i n v a i n d i r o i t - o n q u A n d r é D u m o n t n ’a y a n t pas f i guré au c o n t r a t , n« p e u t en r e q u é r i r
1 e xé c u t i o n : un e a c t i o n u t i l e a t o u j o u r s é t é a c c o r d é e d a n s le d r o i t , au tiers dé s i g n é , p o u r
f ai r e v a l o i r l u i - mê me , à son p r o f i t , la v o l o n t é d u d o n a t e u r , j n x t à d o n a to r is v o lu n ta le m .
N ou s avons d ém ontré que l ’ancien d roit accord oit cette action ; et l’art. 1121 du C o d e
N a p o l é o n , qui n ’est q u ’un résumé des principes à cet é g a r d , les consacre de nouveau.
C est ainsi que celui qui étoit institué sous la c o n d itio n d ’associer son frère, n’auroit
pu se dégager de la c o n d itio n , sous le prétexte que son fic re n’étoit pns partie co n tra c
tante au contrat.
L a demoiselle D u m o n t sera toujours fondée à dire aux dames DeVaure et de la R o q u e :
Ou vous vous présentez pour succéder en vertu de votre titre d ’in s titu tio n , ou bien vous
renoncez à ce titre ; dans le premier c a s , votre titre est in d iv is ib le , et vous devez l ’exécuter
in tégralem en t; dans le second c a s , n ’étant plus institu ées, vous n ’êtes que d o t é e s , et
dès-lors vous êtes f o r c lo s e s d e d r o i t , parce q u ’aux termes de l ’article 3o5 , et suivant la
ju risp rud ence la plus constante , toute fille sim plem ent d o té e est par cela m ême a p a n é» ;
d où il résulte que vous ne pouvez venir c o m m e héritières a b in te s ta t.
« M a i s , dit-on , suivant l ’art. 219 de la coutum e , la donation ne pouvoit valoir «u profit
d A n d r é D u i n o n t , qu autant q u ’elle auroit été faite par son contrat de mariage. »
O n ne répétera po in t i c i tout ce q ui a été dit p r é c é d e m m e n t , sur la différence essen
tielle qui existe entre une donation d ir e c t e et p r in c ip a le , et une disposition rela tive et
c o n d itio n n e lle attachée à une donation principale , d on t elle est une dépendance , et dont
®lle doit suivre le sort.
Kn d év elop p an t les vrais principes sur cette matière , on croit avoir réfuté d ’avance , et
Ur>e manière victorieuse , l ’ob jec tio n proposée.
M ais on léc a r te ra plus vic torieu se m en t e n c o r e , par l ’ exemple déjà rapporté.
ne institution faite au profit de deux fr è r e s , est nulle à l’égard de celui qui ne se mae l,i<s , tandis que si l ’on n'institue que celui qui se marie sous la condition que son frère
issoi ie à I i n s t i t u t i o n , e l l e v a u d i a au prof i t d e c e d e r n i e r , c o m m e c o n d i t i o n de l 'i ns
t i t u t i o n fa |le |vllltri,
C e d e u x i è m e m o tif est d o n c erroné, et c o n t r n i r e ¡1 une jurisprudence de plusieurs siècles.
T-Ro x s i e m e
motif.
« P r o c u l u P i i a t , ui ère des p ar t i e s , é t a n t d é c é d é e a v a n t le ma r i a ge
�( 36 )
d e son fils , et n ’a y a n t pas été à p o r t é s ,1e f ai re , en s* f a v e u r , la di s pos i t i on d e p r ê c i p u t
q u ' e l l e lui d e s t i n o i t , da ns la f o r m e q u ’i n d i q u e l ’ a rt, z i g de la c o u t u m e , ses trois enfans
ont é t é saisis d e sa s uc c e s s i o n au m o m e n t de son d é c è s . »
HÉroNSF.. C e m o t i f rentr e dans le p r é c é d e n t ; i l s up po s e q u e la t er r e de M o n t n ’ a pu être
a t t r i b u é e à A n d r é O ü i n o n t , p a r la d o u b le c o n d itio n app o s ée à l ’i ns t i t ut i o n de ses soeurs :
le c o n t r a i r e
ayant
Q uatrièm e
é té p r o u v é , on se di s p e n s e r a de r é p é t e r c e q u i a déj à été di t .
m o t i f
. « Les cl auses , c h a r g e s et c o n d i t i o n s a pp o s ée s a ux i n s t i t u t i on s des
d a me s D e v a u r e et de B e a u r e g a r d , é tant c o n t r ai r e s à la loi , d o i v e n t être r é p ut é e s n o n
é cr i t es . »
R é i ’O n s f . A u c u n e loi ne d é f e n d d ’i mp o s e r à u n i nst i t ué la c o n d i t i o n de s o u f f r i r le p r é
l è v e m e n t d ’un p r ê c i p u t ; et , au c o n t r a i r e , o n a t o u j o u r s t enu p o u r p r i n c i p e q u e les c o n
v e n t i o n s m a t r i m o n i a l * * é t o i e n t s us c e pt i b l es de toutes sortes d e cl a us es et c o n d i t i o n s q u i
n ’o nt r i en de c o n t r ai r e aux b o n n e s m œ u r s . '
L a r ai s on d i t
q u e des c o n d i t i o n s p o u v a n t êtr e apposées à un e l i bé r a l i t é , r i e n n e s’o p
p o s e à c e q u e le p r é l è v e m e n t d ’un p r ê c i p u t soit u n e de ces c o n d i t i o n s .
L e sentiment des auteurs, l ’autorité des anciens jurisconsultes de la sénéchaussée du
B o u r b o n n a i s , une jurisprudence d ’un siècle , tout atteste q u ’une telle c ond itio n n’a rien
d 'illicite et de con tra ire à la loi.
. C e m o t i f est d o n c e n c o r e e rroné.
M a i s ce n'est pas tout ; il est e r r o n é sous u n a ut r e r a p p o r t q ui a é c h a p p é aux p r e mi e r s
Ils avoient sans doute p e rd u de vue la différence que les lois romaines ont tracée entre
les cond itio ns illicites apposées d a n s le s te s t a m e n s , et les conditions illicites apposées
d a n s le s c o n tr a ts .
L e s p r e mi è r e s y aux t er mes d e la lo i 1 0 4 , §. i , f f . d e Irg a tis x ° . , et de la loi
3,
f f . do
c o n d itio n ib u s et d e m o n s tr a tio n ib n s , s ont r é put ée s n o n é c r i t e s , v itia n tu r e tn o n v itia n t.
L e s s e c o n d e s , au c o n r a i r e , v i c i e n t r a d i c a l e m e n t les cl a us es a u x q u e l l e s elles s ont a p
p o s é e ; , e t e m p ê c h e n t q u ’il en naisse a u c u n e o b l i g a t i o n : c ’est c e q u e d é c i d e n t e xp r e s s é me nt
l a loi 3 i , ff. d e o b lig u tio n ib n s e t a c t io n ib u s , et la lo i 7 , f f . d e v erb o ru m o b lig a tio -
n ib u s ; et c ’est ce q ui a été j ugé p ar d e u x arrêts de l a c o u r de c a s s a t i o n, des a z n i vô s e an q ,
et 6 floréal an n , r a p po r t é s p a r M . M f . r l i n , e n ses Q u e s t . île d r oi t . , v e r b . c o n d i t i o n .
I l s’agissoit , dans la d e u x i è m e e s p è c e , d ' u n e i nst i t ut i on c o n t r a c t u e l l e ;i l a quel l e on a v o i t
i m p o s é la c o n d i t i o n que l ' i nsti t ué ép o u ser a it te lle p erso n n e ; c o n d i t i o n q u e le d e m a n d e u r
en ca s s a t i o n s o u t e n o i t i l l i c i t e , et c o m m e t el l e r èp u to it non é c r ite .
« Q u a n d nous s u p po s e r i o n s , di sai t M . M b b l i n , q u e la c o n d i t i o n i i n p o s é e à M a g d e l c i n e
f î i r o i r , d ’é po us e r Pit-rre R o b y , d û t être c o n s i d é r é e , d ’apr ès le» I o n r o m a i n e s , c o m m e
i l l i c i t e , d é s h o n n ê t e et i m m o r a l e , à q u e l l e c o n s é q u e n c e c e t t e s u p p o s i t i o n nous c o n d u i r o i t eUe ?
« El le n ous c o n d u i r o i t
di r e , , n o n pas q u e la
condition
d é po us e r d o i t , d ' a p t è s les
lois
r o m a i n e s , être r e g a r d e s c o m m e non é c r i t e , mais, q " « l'in s t it u tio n c o n tr a c tu r llu f.iite
sous cett e c o n d i t i o n , d o it Ptre regarda 9.c o m m e n u lle d a n s son p r in c ip e ; »
et
il f o n d e
cette dé c i s i o n sur les lois r o m a i n e s citées,.
JLa lo i
, f f île oblig. fit n c tio m b u s , et les co n s u l er an s de 1 arrêt de la C o u r de c a s
sati on , d u 22 n i v ô s e an q , d o n n a n t p o u r m o t i f de cette d i f f é r e n c e e n t re IVffrt dt*$ c o n d i ù o n s i l l i ci t es apposées r.ux t o s l a m e n s , et ce l l e s appos ées aux n c t i s e n t r e - v i f s , q ue ces
�(2 2
( %1 '
de r n i e r s actes s ont l’o u v r a g e de pl us i eur s p e r s o n n e s q ui s t i p u l e n t s e l o n l e u r s vues et leurs
i n t é r ê t s ; e n sort e q u e ces c o n d i t i o n s e l l e s - mê me s o n t dû e s s e n t i e l l e me n t e n t r e r dans le*
c o m b i n a i s o n s de leurs v o l o n t é s , et q u' i l faut r e s p e c t e r la v o l o n t é d e t o u s , om nium volu n ta tes speclantur.
A la vé r i t é , l'a r t. 900 du C o d e N a p o l é o n a d é r o g é au d r o i t r o ma i n , en c e q u e d a n s les
d o n a t i on s e n t r e - v i f s , il r é p u t e n o n écri t es , c o m m e da ns les testatnens , les c o n d i t i o n s i m
p ossi bl es , et ce l l e s q u i s er oi ent c o n t r ai r e s aux moeurs et à la l oi ( Répert. du ju r is p . , p a r
M .
M
e r l in
, verb.
co n d itio n
) ; mai s le c h a n g e m e n t de l égi s l at i on n e p eut a vo i r a u c u n e
i n f l u e n c e s ur le sort d ' u n e co nt e s t a t i o n q ui d o i t se j ug e r d ’a pr ès les l oi s a n c i en n e s .
A i n s i s’il étoi t possi bl e de s u p p o s e r q u e h c o n d i t i o n d o n t il s’agi t f ut c o n t r a i r e a ux l o i s ,
les daines D e v a u r e et d e la R o q u e n e s er oi ent pas da n s u n e p o s i t i o n p l u s f a v o r a b l e ; c a r la
n u l l i t é d e la c o n d i t i o n e n t r a î n a n t cel l e de l ’i ns t i t u t i o n , ces d a m e s se t r o uv e r o i e n t r é dui t e s
a u n e s i mp l e d o t a t i o n , q u i o p é r e r o i t u n e f o r c l u s i o n l égal e.
Sous tous les r a p p o r t s , c e q u a t r i èm e m o t i f d u j u g e m e n t est d o n c u n e c o n t r a v e n t i o n à
tous les p r i n c i pe s .
C i n q u i è m e e t s i x i è m e m o t i f s . « A n d ré D u in o n t n'a pu être saisi de la m oitié de la
terre de M o n t , d u c h e f de P rocule P i t n t , par la disposition qu'en a faite son père à son
profit , en vertu de cette faculté réservée au survivan t , parce que ce droit d ’élection est
contraire à la coutum e du B ou rb on nais, suivant laquelle les époux ne p e u ve n t se d on n e r
que la jouissance m utuelle des meubles et acquêts , et dans le cas seulement où il n ’existe
pas d ’enfant de leur n nion. »
R
é po n se
.
L a d e mo i s e l l e D u m o n t a c o m p l è t e m e n t ré f ut é ce m o t i f da n s c e q u ’elle a d i t
sur les effets de la fa cu lté d 'é lire : p o u r ne pas se l i v r e r à des r é p ét i t i on s f as t i di eus es , e l l e
se c o n t e n t e r a de r a p p e l e r q u e , dans l ’ e s p c c e , l a f ac u l t é d o n n é e au s u r v i v a n t n ’e m p o r t e
p o i n t de s ubs t i t ut i on f î d è i c o i n mi s s a i r e , q u ’ell e ne l ui c o n f è r e a u c u n é m o l e i n e n t ; q u e s o u s
c e p o i n t de v u e , elle n ’est p o i n t c o n t r a i r e aux lois p r o h i b i t i v e s d ’a vant age s e nt re é po ux .
Q u e dans t o us les cas, si une telle f a c u l t é n e p o u v o i t v a l o i r c o m m e d i s p o s i t i o n p r i n c i pa l «
et d i r e c t e en f av e u r d u s u r v i v a n t , ell e do i t s ort i r effet c o m m e c o n d i t i o n d ’i nst i t ut i on ;
p a r la m ê m e rai son que le d o n d ’usufrui t des bi ens d u p r é d é c é d é en f av e u r d u s u r v i v a n t ,
q u i e m p o r t e p r o f i t , et qui ne peut a v o i r effet c o m m e d i s p o s i t i o n p r i n c i p a l e , est n é a n m o i n s
Val abl e q u a n d il est u n e d é p e n d a n c e d ’i n s t i t ut i o n c o n d i t i o n n e l l e .
S t p T i E M n e t dei\ n i e r MOTi r. « L ’i n e x é c u t i o n des c o n d i t i o n s ne c o n s t i t ue , c o n t r e les
dai nes D e v a u r e et de la R o q u e , a u c u n apa na ge , p a r c e q u e si les s i eur et d a m e D u m o n t
eussent vo ul u q u e leurs fille» f ussent ré dui t e s à un a p a n a g e , ils se s er o i en t s ervi s d ' e x p r e s
sions q u i ruî l aissrroi ent a u c u n d o u t e sur l eur v o l o n t é . »
RiïrONSF.
L o r s m e ne q u e les s i eur et d une D u m o n t n ’ a u r o i e n t p i s ma ni f e s t e 1 i n
tent i on o ù ils e t o i e nt q ue l eurs filles f ussent a panées si ell es n ’e x é c u t o i e n t pas les charges
*t c o n d i t i o n s de l eu r i ns t i t ut i o n , il est é v i d e n t q u e p a r le seul
fait
de l eu r
renonciation
a 1 i ns t i t ut i o n , elles se t r o u v e r o i e n t f orcl os es d e p l e i n dr oi t , en v e r t u des d i sp os i t i o ns
de la c o u t u m e . L a d e mo i se l l e D u m o n t se c r o i t di s p e n s é e d e r a p p e l e r i ci les p r e u v e s i rr é•istibles q u ’e l l e en a d o n n é e s .
Mais qui pourroit douter de l'intention des père et mère , lorsqu ils disent fo r m elle
m en t que sans toutes les cla u se s, cjiargfs et c o n d i t i o n s attachées à l institution leurs
filles n auroient point été instituées , mais apanées 11 leurs constitutions dotales ? .N'est-ce
pus le cas de répéter sans cesse , p o tiù t voluntatem quàm verba sp ccta ri p la ça it..
J J t
�A p rè s avoir réfuté lts m otifs du jugem ent dont est appel , il reste à la dem oiselle
D u m o n t à repousser quelques objections qui lui on t été faites en première instance , et
qu'on ne m anquera pas , sans d o u t e , de reproduire devant la cour.
Prem ière
oBJfcCTioN.
C e t t e o b j ec t i o n est p a r t i c u l i è r e à la d a m e de la R o q u e ; ell e
d i t : « P a r le c o n t r a t de m a r i a g e
d e la d a m e G r e l l e t d e B e a u r e g a r d , m a mè r e , les
si eur et d a m e D u m o n t , en se ré s er va nt la t er re de M o n t , n ’o nt pas-di t q u 'à d éfa u t de
d isp o sitio n , e lle appartiendrait à A n d r é D um ont. »
R
éponse.
L a clause du contrat de m ariage de la dame de Beauregard fournit la r é
ponse à cette objection.
E l l e p o r t e q u e le c o n t r a t est f ai t d a n s l'e s p r it d e c e l ui de m a d a m e D e v a u r e .
I l y est d i t q ue la rés er ve est f aite te lle q u 'e lle est exp liq u es a u d i t c o n t r a t .
11
y est ajouté que l'institution est faite sous les mêm es charges.
Q u o i de plus p o s itif! Si le contrat est fait dans le même e sp r it, si la réserve est la-
m êm e , si l ’institution est faite sous le s mêm es charges , il faut vouloir fermer les yeux
à la lu m iè r e , et m anq u er de bonne f o i , pour ne pas conven ir q u ’il existe entre ces deux
contrats une parfaite conform ité.
E n e f f e t , si l ’o n n e s o u s - e n t e n d da ns le s e c o n d c o n t r at t o ut e s les cl auses d u p r e m i e r ,
i l ne sera pas passé da n s le m êm e e s p r it.
S i l ’o n r e t r a n c h e la d e s t i n a t i o n au profi t d ’A n d r é
D m n o n t , e n cas d e n o n d i s p o s i
t i o n , la ré s er ve ne sera p l us t e l l e q u e l l e e s t e x p l i q u é e da ns le p re mi er co nt r at , et l’o n
n e p o u r r a pl us d i r e q u e l a s e c o n d e i n s t i t u t i on est sujette a ux m ê m e s c h a r g e s q u e la p r e
mière.
D isons
d o n c q u e la d e s t i n a t i o n au profi t d ’ A n d r é D u m o n t existe p a r m i les c o n d i t i o n s
i m p o s é e s à la d a m e d e B e a u r e g a r d , c o m m e e l l e existe p a r m i ce l l e s i mp o s é e s à la d a m e
Devaure.
M a is ind é pen d am m e n t de cette clause de d estin a tio n , on trouve dans le c on tra t de
m adam e de Beauregard une des conditions de {"imùUiûon form ellem en t exp rim ée, c ’est
c e lle q ui d on ne au s u rviv an t la faculté de disposer de toute la réserve ; et l'on sait que
cette condition a eu son a cc o m p lisse m en t dans le c o n tra t de 17^9 • au profit d A n d re
D um on t.
D
e u x iè m e
oisjectiom
.
« L a terre de M ont étoit un conquét de c o m m u n a u té , d on t la
d a m e D u m o n t a été incapable d e disposer pe n d a n t tout le cours de sa vie ; d o n c elle est
to m b ée dans l'hérédité. »
R éponse.
Q u ’on suppose une fem m e mariée qui a d i s p o s é d e tous Us biens q u V lla
laissera à ion d é c è s , par institution c o ntractu elle ou par te sta m ent, et q u'on rétorque
l'a r g u m en t.
Il l ’en suivra que la part de cette fem m e , dans l e s c o n q u i t s de com m unauté , ne devra
pas être com prise dans la disposition , parce q u e l l e aura été incap able d 'en d isp oser
pendant sa vie. Q uelle conséquence nbsurde ! qu elle l o g i q u e !
Sans doute la d a m e D u m o n t n ’auroit pu di s p o s e r , d'u ne manière a c t u e lle , de sa moitié
do la terre de M o n t , du viv an t de son m a r i , sans son concours ; mais ri< n ne s’opposoit
à ce q u e lle en disposât év en tu ellem en t , dans le cas où elle ne seroit pas aliénée à
1ep oque
de son dérès.
le sort de l'institution elle-même ; o r , Témolument
d e l’i n s t i t ut i o n est p u r e m e n t éventuel', o n n ’e n est saisi q u ’au d é c è s d e l ' i n s t i t u a n t ; et
L a c o n d i t i o n de p r è r i p u t suit i c i
�( 29 )............
jusque-lá ¡1 n ’y a rien de certain que le titre d ’h é r i t i e r , puisque l'in stitua n t peut faite
tou te sorte de contrats à titre onéreux.
A u s s i a-t-on t ouj ours d i s t i n g u é , dans l ’i ns t i t ut i o n , le titr e d ’h é r i t i e r , q u ’elle c o n f è r e
ir r é v o c a b le m e n t , d ’a v e c l'é m o lu m e n t , q u i n e se d é t e r m i n e q u ’au d é c è s , p a r c e q u e
j us que-l à l ’i nst i t ué n ’est saisi d e ri e n.
T
koisiéme o b ject io n .
« Dans la coutum e du B o u rb o n n a is, on ne p o u v o it être héritier
et légataire ; or, si la représentante d ’A n d ré D u m o n t r ec u eille p r é c i p u t , elle sera tout à
la fois héritière et légataire, elle réunira deux qualités incom p atib les ; elle ne peut d o n c
p rélev er le préciput et ve n ir à l'h érédité. »
R
éponse.
Confusion d ’idées , fausse application de principes : — A n d r é D u m o n t na
recueille point le p r é c ip u t à titr e d e legs-, on ne lui a légué ni donné la terre de M o n t
directem ent , et par une disposition p r in c ip a le e t is o lé e ; il tie la r ec u eille que parce
que c e s t une con d itio n im posée
à l ’institution des fille s, qui sans cela eussent été
apanées ; auquel cas A n d r é D u m o n t a u ro it recu eilli l’hérédité entière , ce qui lui eut
été bien plus avantageux.
Q u o n se r a p p e l l e c e q u i a déj à été d i t t o u c h a n t la d i s t i n c t i o n des d i sp os i t i o ns p r in
c ip a le s et c o n d itio n n e lle s , le s e n t i me n t des j u r i s c o n s u l t e s d e la s é n é c ha u s s é e du B o u r
b o nn a i s , et c e q u i a été j u g e p a r 1 a r r ê t de 1 7 1 6 ; et l ' o n sera c o n v a i n c u
q u e ce t t e
o b j e c t i o n n' est q u e l e f r u i t d e l ’i g n o r a n c e 011 d e la ma u v a i s e foi.
Q
u a t r iè m e
O
b je c t io n
.
« A la inort de m adame D u m o n t , disent les a d versa ires, la
m oitié de la terre de M o n t a dû résider sur la tête d 'A n d r é D u m o n t s e u l , ou sur la têts
de ses héritiers a b i n t e s t a t ; o r , ajoute-t-on , si elle a résidé sur l.i tète d ’A ndré D u m o n t
s e u l, vous devez renoncer à l ’argum ent tiré de ce que le su rviv an t a eu le d ro it de lui
d o n n e r cette m o i t i é , par son contrat de mariage de 17S3. »
R
éponse.
C e t t e o b j e c t i o n n ’est q u ’ un p a r a l o g i s m e q u i se r é f u t e e n de ux mot s,
O u l ’on soutient que la disposition faite en vertu de la fa cu lté d ’élire est nulle» ou ort
r ec o n n o it q u ’elle est valable.
D an s le p rem ier cas, il faut réputer c o m m e non aven ue la disposition faite en vertu
d u droit d élection ; et alors il sera vrai de dire q u ’à l’instant du décès de P rocule P i t a t ,
la propriété d e la moitié de la terre de M o n t a résidé in c o m in u ta b lem rn t sur la tête
d A n d r é D u m o n t , par la destination con d itio n n elle a c c o m p lie à son profit.
Dans le s e c o n d c a s , c o m m e i l y a v o i t d e u x c o n d i t i o n s a pp o s ée s à l ’i n s t i t ut i o n , il f a u
d r a di r e q u a u dé c è s d e P roc u le P i t a t , la saisine par v o i e d e d e s t i n a t i o n n etoi t qu eV e n t u e l l e , q u e l l e etoit e l l e - i n e me c o n d itio n n e lle et s u b o r d o n n é e à l ’é l e c t i o n à f ai re p ar
le pére s u r v i v a n t .
E n sorte que s’ il n’eût po in t fait d e l e c t i o n a vant son d é c è s , la saisine, par voie de
destination, seroit devenue d é fin itiv e et a b s o lu e ; et q u ’ayant fait une élection en faveur
du sieur D u m o n t, cette élection n ’a fait que confirm er la destination originairement faite.
L ’objection ne conduit d o n c à rien de favorable au système des a d v e r s a i r e s . o b j e c t i o n . « E n renonçan t à l 'i n s t i t u t i o n , les dames D«y.iurn et de
B e a u r ig r1, j , l e resi ent point apanées; il im p liq u e c o n t r a d i c t i o n de ronsn ltrer c o m m e
C inquièm e
apanage une dot constituée en avancem ent d 'h oirie , et qui p** s " j * ,te *'1 rapport. »
R ù t o n s f . . O r , jc lle j e l'obscurité dans la m a tiè r e , par une p e rp étu elle confusion des
lu oti el d ts choses.
8
�Sans cloute, on ne peut être apanée et héritière tou t à la f o i s , mais i l faut être
n é c e s s a i r e me n t l ’une o u l ’a ut r e .
E n v o u s i n s t i t u a n t h é r i t i èr e s sous des c o n d i t i o n s , il Falloit b i e n v o u s d o t e r e n a v a n
c e m e n t d ' h o i ri e ; ma i s c e t a v a n c e m e n t d ’h o i r i e se r é f è r e à l ’i ns t i t u t i on d o n t e l l e f ai t
p u r t i e , et s up p o s e s o n a c c e p t a t i o n . S i l ’i n s t i t ut i o n est a c c e p t é e , e l l e ne p e u t l ' êt re q u ’a v e c ses c h a r g e s et c o n d i t i o n s . S i
elle n ’est p o i n t a c c e p t é e , t oute la cl ause d i s p a r o i t , et il n e reste p l us q u ’ un e d o t a t i o n ,
q u i n ’est et n e do i t êtr e , dans l e v œ u d e l a c o u t u m e et de s p è r e et m è r e , q u ’un
apanage.
Q ue
les dai nes D e v a u r e et de B e a u r e g a r d s o i e n t d o n c c o n s é q u e n t e s et d ’a c c o r d a v e c
e l l e s - mê m e s ! Si elles r e n o n c e n t à l ’i n s t i t u t i o n , i l n e l eu r est pl us p e r m i s d ’en i n v o q u e r
l es d i s p os i t i o ns p o u r se s o us t r a i r e à l ’a p a n a g e .
S i x i è m e o i ï j e c t i o k . « P o u r q u ’une d o t soi t r é p u t é e a p a n a g e , il f aut q u ’e l l e soit c e r
t ai ne , et non s u je t te à ra p p o rt; o r ,
si les aut eurs c o m m u n s s’é t o i e nt r u i n é s , A n d r é
D u i n o n t a u r o i t p u f o r c e r ses soeurs au r a p p o r t : o n n e p e u t d o n c pas c o n s i dé r e r l e u r d o t
c o m m e un apanage. »
R é p o n s f . Il n ’est pas v r a i q u e les d a me s D e v a u r e et de B e a u r e g i r d eussent été forcée«
d e r a p p o r t e r l eurs d o t s , si les a ut e ur s c o m m u n s s et oi e nt r u i né s , p o u r v u t o u t e f o i s q u e
l e fils e ut t r o u v é sa l é g i t i m e dans la s u c c e s s i o n ; elles a u r o i e n t é i é b i e n f on d é e s
à
l ui d i r e :
N o u s r e n ô n r o n s à l ’i n s t i t u t i o n p o u r n o u s en t eni r à not r e d o t q u i c o n s t i t u e n o t r e a p a n a g e .
Il
n ’est pas vr ai n o n p l us q u ’ une Fille a p a n é e s o it d is p e n s é e d u rapport d a n s to u s
le s c a s ; ell e est au c o n t r ai r e t e n ue d e r a p p o r t e r , q u a n d les aut res enf ans ne t r o u v e n t
( L e b r u n , d e s S u c c e s s . , liv. 3 , c h a p . 8 ,
A u n o u x , su r l ’ a rt. 2 1 9 , n°. 7 9 , a u x a d d it io n s . )
pa s l e u r l é g i t i m e .
Il
sect. i ,
7 3 ; et
y a c e t t e d i f f é r e n c e , q u e la fille a p a né e est e xcl us e d e l a s u c c e s s i o n , sans p o u v o i r
d e m a n d e r un s u p p l é m e n t de l é g i t i m e ( A r t . 2 1 9 , n°. 6 7 . ) ;
T a n d i s q u ’e l l e est o b l i g é e d e r a p p o r t e r p o u r la l é g i t i m e d e ses f rères et soeurs.
L e r a i s o n n e m e n t des a d v e r s a i r e s , sur c e p o i n t c o m m e s u r t o us les a u t r e s , r e p o s e d o n c
4Ur d e faux p r i n c i p e s .
R É S U M É .
i
°.
L e s dai nes D e v a u r e et
i n s t i t u t i o n s faites
à
de
la
Roque
s ont a u j o u r d ’h u i non
reccvables
à
r e n o n c e r a ux
l eur p r o f i t , p o u r se d é g a g e r des c ha r g es et c o n d i t i o n s q u i en f o n t p a r t i e
i n t é g r a n t e , p a r c e q u ’elles o nt a c c e p t é ces i n s t i t u t i o n s , e n e x é c u t a n t , d e p u i s le dé c è s de
l e u r m è r e , et p e n d a n t u n e l ong ue s ui t e d ’a n n é e s , les c l a us es d e leurs c o n t r a t s de mari age.
C e t t e e x é c u t i o n rés ul t e d e ce q u ’ elles o nt r e ç u t out o u p a r t i e des c a p i t a u x de l eurs d o t i
d u v i v a n t d e l eurs pèr e et mè r e ; d e c e q u e l ’ un e d ’elle» a reçu a nn u e l l e m e nt , d e p u i s le
d é c è s d e sa m è r e , les i ntérêt s de ce qui l ui res t oi t d û , et d e c e q u e l l e s o n t l ’une et l ’aut re
a c c o m p l i la c o n d i t i o n i m p o s é e à l eur i n s t i t u t i o n , d e l aisser j o u i r l e s u r v i v a n t des p è r e et
m è r e des bi ens d u p r é d e c é d e .
O r , elles n ’o n t p u t o u c h e r l eurs d o t s q u e c o m m e filles m a r ié e s e t d o t é e s , ou c o m m e
h é r itiè r e s in s titu é e s .
A i » p r e m i e r c a s , elles sont a p a n é e s , et f o r c l o s e s d e s s u c c e s s i o n s d e leurs p è r e e t m è r e .
�A u secon d c a j , elles on t a ccepté l ’institution , et se tr o u v e n t soumises à l'e xécution
des charges qui en font partie.
2". A u F o a » , le p r é c ip u t attribué à A n d ré D u m o n t doit sortir son effet p a r suite
de la d o u b le c o n d itio n a ttachée à l ’institution des filles.
C ette double c o n d itio n réside dans la d estination de la t e r r e , au profit d A n d r é
Dutnont , en cas de non disposition ; et dans la fa cu lté d ’élire attribuée cousine c o n
dition de l'in s titu tio n , au su r v iv a n t des père et m è r e ; lesquelles conditions ont reçu
leur accomplissement.
5 °. Si les dames D evaure et da la R o q u e reno ncen t à l ’institution , elles dem eurent
apanées à leurs constitutions d o ta le s , p a r ce que tel est le voeu form el de la cou tum e du
Bourbonnais , et le voeu du pacte de fam ille qui fait la loi de toutes les parties.
Si toutes ces résolutions po u voie n t faire la matière du plus léger d o u t e , il faudroit dire
qu il n’y a rien de certain en jurisprudence ; que le flambeau de la loi n’est q u ’une fausse
lu eu r qui égare ; que les p r in c ip e s d u d ro it ne sont que des erreurs a ccréditées , et
que 1 evid ence m êm e peut être réd u ite en p r o b lè m e .
S ig n é H I L L I A R D et B a r t h e l e m i G I B O N T , c o tu te u r s.
M ' . J U T I E R , a voca t.
M e. H U G U E T , avoué l ic e n c i é .
v
Les anciens Jurisconsultes soussign és, sp écia lem en t attachés au ministère de la justice,
qui ont lu avec attention le M é m oire fait pour la dem oiselle A n n e D u m o n t ,
E stim en t que les propositions qui y sont discutées sont résolues d ’après les plus saines
maximes du d r o i t , en matière d ’institution c o n t r a c tu e lle , et p a rticu lièrem e n t d ’après
la jurisprudence qui a fixé sur ce po in t la juste a p p lic a t io n des dispositions de la
coutum e du Bourbonnais ;
Q u e l ’institution faite en fa veur des sœurs d ’A n d ré D u m o n t , dans leurs contrats de
m a r ia g e , est in d iv is ib le; q u ’on ne peut en détruire les ch a r g e s, sans la détruire elle-m êm e;
que 1 acceptation de l’institution entraîne nécessairement l ’a ccom p lissem en t des conditions
qui y sont apposées , lesquelles ne sont contraires ni aux lois , ni aux bonnes moeurs ; que
le p réc ip u t a ttribué à A n d r é D u m o n t , doit par con séqu e n t faire partie des droits de sa
fille qui le represente , c o m m e c o n d itio n form elle de l ’institution de ses soeurs ; que c ’est
là un pacte de fam ille consacré par plusieurs actes , auquel on peut d ’autant m oins porter
atteinte q u ’il a été exécuté ;
'
Qu ainsi la dem oiselle D u m o n t doit obtenir la réform ation d u ju gem ent rendu par 1«'
tribunal c i v i l de G a n n a t , le 26 décem b re 1807.
d é l i b è r e à P a r i s , le i /j. m ai x8o8.
B E R N A R D I.
B.
M.
D E C O MB RO U S S E.
#
V u le M é m o ire des tuteur» de la dem oiselle D u m o n t , contre les sieurs e t
�( 32 )
dames R a b u s s o n - D e v a u r e et de l a R o q u e , signé des t u t e u r s , e t de J u tie r ,
a v o c a t , et H u g u e t , a vou é ;
. ,
. ,
.
L e C onseil pense que le précipu t d e la terre de M o n t doit être adjugé en entier
à la m i n e u r e ; et que le jugem ent du tribunal de G ann at , dont les motifs sont
très-clairem en t réfutés dans le M é m o i r e , doit être infirmé.
A P a r i s , le 1 5 juin 1808.
C H A B R O U D .
* M A I L H E.
POIRIER.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Hilliard. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jutier
Huguet
Bernardi
Decombrousse
Chabroud
Mailhe
Poirier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés de biens entre époux
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans ; contre les sieurs et dames Rabusson, de Vaure et de la Roque, intimés.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1803
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1801
BCU_Factums_G1804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53330/BCU_Factums_G1803.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés de biens entre époux
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53328/BCU_Factums_G1801.pdf
de7d1531659c918e7438d1ead83cd2ec
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Text
PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Les sieur et dame RABUSSON DE V A U RE,
intimés ;
CONTRE
Les sieur et dame H IL L IA R D , cotuteurs de
demoiselle D
umont
, appelans.
Le s sieur et dame Rab usson de V au re sont divisés
d’intérêts avec la demoiselle D um ont, leur nièce. Ils ont
proposé leurs moyens avec modération , mais ils se
plaignent à juste titre du ton d’aigreur qui règne dans
la défense de leurs adversaires.
Les expressions outrageantes sont répandues avec pro•. !
A*
• ' -i .
■.,
■ . - ■-/
.'■■y ,
. •■•l *-w. h ■'
�( 2)
fusion. On lit à chaque-page, artifice, ruses, détours,
cupidité en délire, tours deforce de l’esprit hum ain, etc.
L e cœur de la clame Ililliai’d se brise, les m œ ursfré
missent , Vétonnement balance îindignation, parce que
les cohéritiers de la demoiselle Dumont réclament leur
portion héréditaire dans les biens maternels.
C'est fouler aux -pieds, de la manière la plus scan
daleuse, le pacte defa m ille le plus sacré, que de disputer
à. la demoiselle Dumont un préciput qu’on devroit s’em
presser de lui accorder, quoique les lois le lui refusent,
pour la dédommager des pertes immenses qu’elle a faites.
On ose rappeler la mort tragique d’un père infortuné,
lorsque la dame Hiliiard, son épouse, s’est remariée dans
la première année de son deuil; et c’cst dans les bras
d’un second ¿-poux qu’elle vient faire parade d’une ten
dresse exclusive pour sa fille du premier lit.
On accuse un ancien magistrat, qui jouit à juste titre
de l’estime publique, dé s’étre enrichi des dépouilles de
son beau-père, d’avoir acquis sans bourse délier, en
puisant dans celle du sieur Dumont. Et si on en croit
la dame H iliiard, la dame de Vaure a été avantagée de
plus de i ooooo francs, par des dons annuels ou par des
donations déguisées
Cependant le sieur de Vaure n’a point augmenté sa
fortune; il est, comme;dans les premières années de son
mariage, au-dessus des besoins, jamais obéré parce qu’il
n’emprunta jamais; et la note qui le concerne personnel
lement est d’autant plus indécent«5* que
dame Hiliiard
ne peut ignorer l’emploi qu’a fait M . Dumont de ses
revenus; elle sait qu’il a payé plus de 130000 francs de
�( 3 ),
dettes, comme, par exemple,"33140 fi\ aux créanciers
de son fils, premier mari de la dame ïliliiard; 3200b.fr.*
aux héritiers Dumont-Lacliassagne ; 6000 fr. au sieur
Chabot, de Moulins ; ôooo fr. à la dame Beaufort, de
Montluçon ; 4000 fr. au sieur Chaudillon, 4000 fr. à la
dame Lagrange, de Chantelle; 2Ôooo fr. restés dûs sur
le prix des domaines de Saulzet*, 20000 fr. au sieur de
D ouzon, à qui il payoit encore 3000 fr. de rentes via
gères, etc., etc.
- Les sieur et dame de Vaure répondent par des faits à
des assertions injui’ieuses, et fort inutiles pour la cause.
Ils finiront par observer que la dame Hilliard avoit toutes
sortes de motifs pour être plus modeste ; qu’elle donne
un mauvais exemple ci sa fille, qu il fuuOruit entretenir
dans de plus douces pensées ; elle devroit surtout lui
rappeler qu’elle a reçu souvent de son aïeul des témoi
gnages de tendresse, et que la dame de V au re, sa tante,
lui a donné des preuves multipliées de son affection,
pendant un an qu’elle a été confiée à ses soins. •Les déclamations de la dame Hilliard ne font point
ornement dans une cause dégagée de toutes circonstances,
et qui ne présente que des questions purement de droit.
La terre de Mont est l’objet du litige; c’est un conquôt
de communauté des sieur et dame D u m o n t, auteurs
communs des parties.
Ils étoient domiciliés, et la terre de M ont est siluée en
coutume de Bourbonnais.
- Cette coutume admet l’égalité la plus parfaite entre les
enfans; elle ne permet aux pères et mères de disposition*'
A a
�(4)
libérales qu’autant qu’elles sont faites par contrat de ma
riage au profit des contractans.
L e mari est le chef de la communauté ; il dispose seul,
à titre onéreux ou gratuit, de tous les acquêts, pendant
la durée du mariage.
Mais du moment de la dissolution il cesse d’être le
chef; il n’est qu’un simple associé, et ne peut plus par
conséquent disposer que de sa portion.
Maintenant la dame Dumont a - t- e lle pu faire une
donation en préciput à son fils, d’un conquêt de com
munauté, du vivant de son m ari, et par le contrat de
mariage de ses filles?
A - t - e l l e pu transmettre à son mari le droit d’élire*
c’est-à-dire, le droit de faire ce qu’elle.
pouvait faire
elle-même? L e mari a - t - i l p u , après la dissolution du mariage r
donner à son fils la portion qu’amendoit sa femme dans
un conquêt de communauté ?
Telles sont les questions principales; et il ne faut pas
recourir à des tours de Jbrce de Yesprit humain pour
les résoudre. A la vérité la dame Hilliard ne les a pas
présentées ainsi y mais elle trouvera bon que chacun les
pose à sa manière.
Si on daigne ensuite descendre jusqu’aux questions,
secondaires,
Des filles peuvent-elles être tout à la fois apanées et
retenues ?
L ’institution faite en faveur de lat dame de Vaure estelle grevée de la condition irritante d’abandonner à son
frère la terre de M ont en préciput ?
�( 5)
Peut-on éluder la disposition prohibitive de la lo i,
par des conditions illicites ?
Les premiers juges se sont avisés de décider négati-r
veinent ; et suivant la dame H illiard , c'est h délire de
la présomption.
Ne seroit-ce pas porter trop loin l ’abus du sophisme.
que de tenter de justifier cette décision ?
Au moins la dame Hilliard ne se plaindra pas que
les intimés aient voulu fatiguer son attention, ou lasser
sa patience leur tâche ne sera ni longue ni pénible.
Déjà les sieur et dame de la Roque qui ont le même
intérêt, ont publié leur défense; les règlemens de famille
sont connus ; les motifs et le dispositif du jugement sont
rapportés - il faut surtout éviter ic» ^¿p4titions»
L a première question se divise en deux parties : la
dame Dumont a-t-eîle p u , pendant le mariage, disposer
d’un conquêt de communauté au profit de son fils ?
p o u v o i t-elle le faire, dans tous les cas, par le contrat
de mariage de ses filles ?
Prem ière partie. L e mari est le chef et le maître de
la communauté j il a le droit exclusif de donner, vendre
et aliéner h sa volonté les meubles et les acquêts faits
pendant le mariage ; mais il ne peut le faire que par
contrats entre-vifs, et non par contrats ayant trait à la
mort : telle est la disposition de l’article 236 de la cou
tume de Bourbonnais, qui est en ce point conformé à
toutes les coutumes de communauté.
La femme qui est en la puissance de son m ari, n’a
aucune participation aux objets communs, si la coutume
restreint le droit du mari aux Contrats entre - vif3 ?
�( 6)
M. Auroux nous en donne la raison sur l’article cité,
n°. 7. Il dit que « si le mari pouvoit disposer par contrats
« à cause de m ort, la disposition tomberoit dans un
« temps auquel le droit du mari cesse, et que la femme
« commence à y avoir un droit effectif.
'« Pendant le mariage, le droit de la femme sur les
« acquêts, n’est^ qu’un droit ha bitu el• mais il devient
« actuel après la dissolution de la communauté; ce qui
« fait qu’on dit que le mari vit comme maître absolu, mais
« qu’il meurt comme associé. » Ce n’est donc que pen
dant le mariage qu’il peut disposer en maître de tous
les acquêts ; sa volonté fait la l o i , et la femme est obligée
de la respecter; elle ne prend ni ne peut prendre aucune
part aux dispositions des Liens de cette nature.
La femme ne peut môme disposer de ses propres
qu’avec le consentement de son mari, et sous son autorité;
comment auroit-elle donc eu le droit de donner à son
fils moitié de la terre de M o n t , q u i , de l’aveu de tout
le inonde, est un conquêt de communauté ?
Comment surtout auroit-elle pu donner à son fils cette
moitié, par le contrat de mariage de sa fille, lorsque
• l’article 217 de la coutume de Bourbonnais porte en
termes précis que « les père et m ère, ou F un d’e u x ,
« ne peuvent donner entre-vifs à leurs enfans , hors
« contrat de m ariage, soient leidits enfans émancipés
« ou non ? »
« La disposition de cet article, dit A u r o u x , n°. 2 ,
« a pour principe l’égalité que la nature désire entre
« les enfans, étant juste que ceux qui sont égaux en
u naissant, et qui doivent l’être dans l’uffectiou de leurs
�( 7)
« père et'mère, le soient aussi clans le partage de leurs
« biens. »
Auroux ajoute, n°. 3 , que « cette prohibition de la
« coutume s’entend directement et indirectement, et par
« quelque manière que ce soit. » Suivant cet auteur,
n°. 8 , la donation faite hors contrat ne profiteroit pas
au donataire, quand il voudroit renoncer à la succession
pour s’en tenir à son don ; et Decullant, bien pénétré
de la prohibition absolue de la coutume, s’exprime ainsi :
eritm cum paragraphus noster intendat œqualitatem
ínter liberos, ut notât MoHnœus, et non excipiat nisi
donationern fa cta m façore m atrim onii, censeo extra
hune casum prohiberi donationern cuidonatarius etiarn
cibstinendo ab hcereditate non possve *tar-e.
Passant à l’article 219 de la même coutume, les do
nations, conventions, institutions d’héritiers, faites en
contrat de mariage, sont bonnes et valables au profit
et utilité des mariés et de Vun d'eux, ou des descendons
du mariage ; ce qui veut dire que ceux qui contractent
mariage, ou les descendans, peuvent seuls profiter des
avantages stipulés. Favor hujus paragraphi, nubentes
tantum , et ex eodem matrimonio descendentes, ajficit
in tantum , ut si institutio fa c ta fu e r it in gratiam
contrahentium et aliorum non contrahentium , pro
portionibus contrahentium valeat, et pro non nubentium partibus corruat.
Voilà sans doute une décision précise et absolue, et
on ne peut en tirer d’autre conséquence, sinon que la
dame Dumont n’a pas eu le droit, pendant le mariage,
de s’occuper, encore moins de disposer de tout ou de
�( 8 ) ■
partie d’un conquêt de communauté; 2 °. qu’en lui sup
posant un droit quelconque, elle n’auroit pu le donner
à son fils que par son contrat de mariage.
E t certes, si elle ne pouvoit pas disposer, à plus forte
raison n’a-t-elle pu conférer à son époux le droit d’élire
son fils ou tout autre, pour recevoir ce bienfait; car le
droit d’élire suppose un droit préexistant plus étendu.
A vant de transmettre le pouvoir de ch oisir, il faut
pouvoir donner; ainsi, par exem ple, une femme mi
neure ne pourroit donner à son mari la faculté d aliener
ses biens, puisqu’elle ne peut elle-m êm e les vendre;
ainsi, la femme qui se trouve dans la prohibition de
disposer, ne peut transmettre à un tiers la faculté de
choisir un de ses enfans pour recevoir une libéralité de
sa part, lorsqu’elle ne peut par elle-même exercer cette
libéralité.
D ’ailleurs le droit d’élire que donneroit un époux à
l’autre, ne se ro it-il pas en contravention formelle à
l’article 226 de la coutum e, qui prohibe les avantages
entre m ari, femme et enfans, par dispositions entre-vifs
pendant le mariage? Cette prohibition, dit encore Auroux,
s’entend tant directement qu’indirectement. Cet auteur
regarde unjidéicom m is notamment comme une manière
indirecte d’éluder la défense de la lo i, et veut que celui
à qui on donne ne puisse faire la donation à la personne
prohibée, ni la retenir pour lu i, mais il doit y renoncer
«n faveur de l’héritier.
Un fidéicommis a beaucoup de similitude avec le droit
d é lire ; et cette option a été regardée comme une manière
indirecte d’éluder la prohibition de la l o i, par un arrêt
du
�( 9 )
du 18 mai 1736, rapporté p a r 'l’Epine de Grainville.
L ’arrêt ari nu lia une institution faite par un père au profit
de l’un de ses enfans qui seroit choisi par sa seconde
femme, par cela seul que l’option de l’enfant institué
avoit été donnée à la seconde fem m e, qui ne pouvoit
recevoir qu’une portion d’enfant moins prenant.
Ce droit d’élire doit donc être regardé comme non
avenu.
La dame Dumont a prédécédé son mari ; son fils ne
s’est marié qu’après la mort de sa mère; tous les enfans
ont été saisis des biens maternels, et notamment de la
portion des acquêts qui l’evenoient à leur mère : le sieur
D um ont pere n’n pin»
cjn’iin simple associé. Comment
auroit-il pu dès-lors donner à son fils la portion d’acquêt
dont les héritiers de sa femme étaient saisis? Ce seroit
évidemment disposer de la chose d’autrui, puisquè les
héritiers maternels avoient un droit actuel à la moitié
de tout ce qui compose la communauté. Cette proposi
tion est trop claire pour avoir besoin d’un plus grand
développement. Pourquoi d’ailleurs se livrer à des dis
sertations oiseuses, lorsque déjà les sieur et dame de la
Roque ont présenté leurs moyens avec la plus grande
étendue? La dame Hilliard diroit peut-être que les sieur
et dame de Vaure ont voulu fa ire briller leur esprit,
ou séduire par le prestige d'une fa u sse éloquence.
On va passer aux questions secondaires ; on discutera
ensuite rapidement les fins de non-recevoir qu’oppose la'
d me Hilliard.
La dame de Vaure, par son contrat de mariage, est
instituée héritière par égalité avec les autres enfans? sous
B
�( IO )
la réserve expresse de la terre de Mont, pour en disposer,
de la part des père et mère, au profit de tels de leurs
autres enfans qu’ils jugeront à propos, même de la future.
On a prétendu faire résulter de cette clause que la dame
de Vaure étoit bien retenue dans la maison pour tous les
biens de la succession, mais qu’elle étoit apanée et exclue
l’elativement à la terre de Mont, d’après l’article 305 de
la coutume de Bourbonnais, qui est une coutume d’ex
clusion.
On se fonde sur une consultation donnée par trois
jurisconsultes de Clermont, à la dame de Vaure ellemême, et dont on dit avoir une copie collationnce.
Etoit-il bien permis à la dame Hilliard d’argumenter
d’LUie Consultation confidentielle, donnée à la partie ad
verse, quand bien même la dame de Vaure auroit eu
la franchise de la communiquer? Ce n’étoit point ainsi
qu’on en usoit autrefois au barreau ; mais la dame Hilliard
nous apprend qu’on voit tous les jours des choses nou
velles.
Il est rare cependant qu’on soit obligé de discuter, et
qu’on oppose à une partie la consultation qu’elle a de
mandée dans son intérêt : mais en mettant le procédé à
l’écart, on prouvera que ce système est erroné dans le
fait et dans le droit.
Dans le fait, parce que la dame de Vaure est retenue
dans la maison même pour cet objet; les père et mère
lui laissent l’espoir successif comme «ux autres enfans,
en se réservant la liberté d’en disposer à son profit.
Dans le droit, parce qu’ une fille ne peut être en même
temps apanée et retenue, forclose dans une portion des
�C 11 )
biens, et héritière dans l’autre. Cette singularité impli
quèrent contradiction. L ’apanage est une exclusion absolue;
tellement que la fille apanée devient étrangère à la suc
cession, et qu’un cohéritier pourroit exercer contr’elle
la subrogation d’action, si elle achetoit un droit indivis
d’un autre cohéritier.
La forclusion est une dénégation de la qualité d’hé
ritier ; l’une ne peut subsister avec l’autre. Comment
seroit-il possible que, d’une part, la fille n’eut pas le
droit de porter un œil curieux dans les affaires et les.
papiers de famille, de connoître la consistance d’une suc
cession , et qu’en même temps elle eut tous les droits de
l ’ h é r i t i e r , d e t o u t v o i r , d e tout examiner, de provoquer
le partage?
La dame Hilliard a prévu l’objection-, elle convient
même du principe que les deux qualités sont inconci
liables; mais elle voudroit le restreindre à un cas où il
ne peut jamais avoir lie u , à une forclusion légale pro
noncée par le seul effet de la loi municipale.
C’est ce qu’il est difficile de comprendre. On ne con
cevra jamais ^comment il pourra arriver, lorsque la for
clusion est légale, qu’elle sera partielle ; car ici tout ou
çien.
Ma ¡menant qu’est-ce qu’une forclusion convention
nelle? Toujours la même chose qu’une forclusion légale,
surtout dans une coutume d’exclusion, où la renonciation
de la fille est comptée pour rien , ou du moins est con
sidérée comme surérogatoire, d’après la loi du 18 plu
viôse an 5 .
Et qu’on ne dise pas que le père a le droit de faire
B *
�C 12 )
eette bigarrure, d’apaner sa fille dans une partie, de la
retenir dans l’autre : du moment qu’il honore sa fille de
la qualité d’héritière, cette qualité est indivisible; elle
efface toute idée de forclusion et d’exclusion. Il en est
ici comme des testamens chez les Romains, où le testateur
ne pouvoit mourir partim testatus, partim intestatus.
Ces idées sont simples, n’ont rien d’exagéré, et répondent
suffisamment à la proposition des sieur et dame Hilliard.
D e u x i è m e q u e s t i o n . L ’institution faite au profit
de la dame de Vaure ne contient point la condition
irritante d’abandonner à son frère la terre de Mont en
préciput. L e rédacteur du contrat n’a stipulé que des
clauses inutiles relativement à cet immeuble.
En effet, les père et mère se sont réservé deux choses
qui n’étoient pas à leur pouvoir. La première, est celle
où il est dit que les père et mère se réservent le droit
de disposer de la terre de M o n t, au profit de celui de
leurs enfans qu’ils jugeroient à propos, même de laju tu r e .
Ils trompoient la dame de Vaure lorsqu’ils lui ont donné
cet espoir. La coutume ne leur auroit permis une dis
position au profit de la dame de V aure, qu’autant qu’elle
auroit été faite par contrat de mariage : dès qu’ils la
marioient sans disposer de cet objet à son profit, ils ne
pouvoient plus le faii’e dorénavant, pas même par tes
tament ; car dans cette coutume on ne pouvoit cumuler
la qualité d’hériter et de légataire : voilà donc une clause
inutile et trompeuse.
Par la seconde, il est dit qu’en cas de non disposition ,
la terre appartiendra à leur fils qui ne contracte pas ;
cette clause n’étoit pas plus utile que la première. André
�'■ '
( 13 )
Dumont, étranger à ce contrat , n’étoit pas saisi -, il ne
pouvoit l’être valablement que par son conti’at de ma
riage.
Gela posé, la terre de Mont a toujours demeuré dans
la succession ah intestat • et chacun des enfans successi
vement institué par égalité, a dû espérer que tant qu’il
n’y auroit pas de disposition expresse de cet immeuble
par le contrat de mariage de l’un d’e u x , il auroit un droit
égal dans la terre de Mont : cet espoir est devenu une
certitude pour la portion maternelle, dès que la mère
est morte avant le mariage de son fils, et sans en avoir
disposé par le contrat de mariage de la dame de Beauv e g a r d , sa s e c o n d e fil lu.
Qu’importe maintenant que la mère, qui ne pouvoit
pas donner un conquêt de communauté, qui n’auroit pu
disposer d’un propre que par le contrat de mariage de
l’un de ses enfans , ait ajouté que « l’institution de la
« dame de Vaure n’est faite que sous la condition de
« cette disposition, à la charge par elle de laisser jouir
« le survivant des instituans, de la portion qui lui seroit
« revenue dans les biens du prédéccdé, sans lesquelles
« charges et conditions l’institution n’auroit été faite, et
« la futui*e auroit été apanée moyennant la dot qui va
« lui être constituée. »
Ce n’est là qu’une tournure indirecte pour éluder une
loi prohibitive ; et on ne peut le faire, d’après Auroux,
par quelque manière que ce suit ; s’il en étoit autre
ment, la prohibition de la loi seroit inutile, et les hommes
ne manqueroient pas de moyens pour l’éluder. Dans une
coutume d’égalité, il faut surtout bien se g a r d e r d’établir
�( i4 )
un intermédiaire dont on pourroitse servir pour gratifier
tel enfant au préjudice de tel autre : cette vérité avoit
été bien sentie lors de la publication delà loi du 17 nivôse
an 2. On sait que le système restrictif de cette loi n’étoit
pas pour les libéralités entre époux; elle leur donnoit
au contraire la plus grande latitude lorsqu’il n’y avoit
pas d’enfans; et bientôt les époux voulurent se servir de
cette faculté , pour transmettre tout ou partie de leurs
biens à des parens incapables, en imposant cette con
dition aux donations qu’ils se faisoient de l’un à l’autre.
Ils se servoient de l’argument favori de la dame Hilliard :
« Il dépend de celui qui donne, d’imposer à ses libéra« lités les conditions qu’il lui plaît. » Mais la loi inter
prétative du 22 ventôse an 2 , questions 11 et 13, vint
annuller toutes ces conditions comme 11’étant que des
fidéicommis , ou des intermédiaires pour contrarier le
système de la loi.
N ’y a - t - i l pas ici même raison? Les sieur et dame
Hilliard pouvoient-ils faire disparoître leur incapacité,
ou contrarier le principe de la loi municipale, par des
conditions illicites , ou par un intermédiaire qui détwuiroit le système d’égalité proclamé avec autant d’éDergie, en termes irritans et prohibitifs, ne peuvent
les père et mère donner, etc. ?
Mais, dit la dame Hilliard, malgré la p r o h i b i t i o n de
l’article 2 1 7 , malgré la disposition de l’article 219, qui
dit que les dispositions ne saisissent que les contractons,
il est cependant un moyen de faire l’équipollent d’une
institution au profit d’autres personnes que des mariés.
Ce moyen, Auroux l’indique sur l’article 219, n°. 28;
�( i5 )
il consiste à instituer la personne mariée , à la charge
d’associer ses frères et sœurs à l’institution : par cette
voie, les associés, quoique non contractans, sont saisis
de leur portion , par cela seul que l’association est une
charge de l’institution.
O r , la condition du préciput n’est autre chose qu’une
condition de l’institution ; donc André Dumont a été
valablement saisi du préciput, quoique non contractant.
Voilà bien l’objection dans toute sa force.
Il est aisé d’y répondre. On convient que la charge
d’associer a été admise en jurisprudence ; on s’est fondé
sur l’avis du jurisconsulte en la loi Cum ex filio , ff. D e
vulg. et pupill.
Maïs quelle différence énorme
entre l’association, et la condition qu’on voudroit lui assi
miler!
Dans le cas de l’association , l’institué est saisi du titre
universel : c’est lui qui a tout ; l’associé ne tient rien de
l’instituant-, il ne le prend que de l’institué. C elui-ci a
des chances favorables à courir, comme, par exemplè,
le prédécès de l’associé, même avec enfans, car les enfans
ne seroient pas associés : hœres socii m eiy non est socius
m eus; la révocation de la charge ou de la condition, car
l’instituant peut révoquer toutes les clauses onéreuses, et
ne le peut qu’en faveur de l’institué.
I c i , au contraire , la dame de Vaure n’avoit rien à
gagner, et tout a perdre; elle n’étoit point saisie du titre
universel; le père ne pouvoit plus révoquer la condition
à soi] profit, et sa disposition n’avoit d’autre objet que
d’éluder la prohibition de la loi : ce n’étoit pas un titre
honorable qu’il vouloit donner h sa fille; il cherclioit un
�( i6 )
moyen d’avantager son fils, dans le cas où il ne pourroit
pas le marier ; de faire en un mot ce que la loi lui défendoit.
Gomment une semblable condition seroit-elle licite? ne
faudroit-il pas rayer absolument l’art. 217 delà coutume?
La dame ïïillia rd , poussée jusqu’au dernier retran
chement, n’a plus d’autre refuge que son arrêt de 1716;
elle se plaint de ce qu’ Auroux en a parlé trop légè
rement : mais cet arrêt unique est bien plus développé
dans un manuscrit qu’elle a le bonheur de posséder. E t
il a jugé en thèse, qu’une institution pouvoit être grevée
d’un p récipu t, au profit d’un non contractant, lorsqu’il
a été la condition de l’institution faite au profit d’une
fille q u i , sans cela, eût été apanée.
Ce manuscrit, quel qu’il soit, p o u r r o i t - il balancer
l’autorité de la loi et en modifier la rigueur? Auroux
en avoit bien assez dit sur l’arrêt invoqué par la dame
Hilliard.
Ce commentateur éclairé commence à poser en prin
cipe , sur l’article 308 de la coutume , n°. 4 , que le
préciput n’est valable qu’autant qu’il est fait en contrat
de mariage, et en fa v e u r d’icelui ,* il rappelle les termes
de l’article 217 , et l’observation de Decullant.
« A la vérité, ajoute-t-il, nombre suivant, par arrêt
« du 22 mai 1716 , le préciput de 30000 francs fait à
« Sébastien M aquin, par le contrat de mariage des dames
« ses sœurs , fut confirmé ; mais il étoit dit par leur
« contrat de mariage que dans le cas où lesdites dames
« voudraient contester ledit préciput, elles demeureroie fit
« apanées pour 24000Jfrancs chacune. »
Et c’est à raison de l’apanage si disertement exprimé,
quç
�( 17 )
que l’arrêt jugea la validité du préciput ; aussi MenudeL
dit-il que c< pour ôter tout doute, il est à propos de
« dire par le contrat, que les père et ruère ont doté la
« fille de la somme de.......... ., à la charge de venir à
« la succession en rapportant; et qu’où elle fourniroit
« débat’ contre ledit préciput, déclarent qu’ils apanent
« ladite fille de la somme d e ........., parce qu’en mettant
« simplement la clause qui/s instituent ladite fiile sous
« ledit préciput, elle peut dire qu’elle n’a pas été apanée,
« à défaut de l’exécution de ladite clause , qui sonne
« toutefois en une institution conditionnelle, et que les
« mots qui seroient dans le contrat, sans lequel préciput
cî les pere et incit* 1 iiuioicnt
te
«
«
«
^ ne sct*oient pcïS UD.
apanage formel, mais plutôt une simple énonciation du
dessein d’apaner, lequel n’étant pas disertement expliqué, ne l’empêclieroit pas de venir aux successions
des père et mère, en rapportant. »
Dans le contrat de mariage de la dame de V au re , il
n’y a point comme dans celui des dames M aq u in , que
si elle conteste le préciput, elle sera apanée à la somme
d e . i l y est seulement dit, que sans les charges et
conditions, l’institution n’auroit été faite, et la future
auroit été apanée moyennant la dot qui va lui être
constituée. 11 n’y a dans ce contrat qu’une simple énon
ciation du dessein d’apaner, et non un apanage précis;
dès-lors on ne pourroit même appliquer l’arrêt de 1716.
On ne doit pas dissimuler que M enuàel ne trouve
pas l’objection considérable, parce que, suivant ce com
mentateur, le mot dot emporte avec lui l’apanage; mais
ce n’est pas là l’opinion d’/luroux , qui tranche la
G
�( 18 )
question, et ne considère pas l’arrêt de 1716 comme
devant faire la règle : il en rend compte comme d’une
exception particulière , unique ; et il est remarquable
que sur une question aussi importante, et dans un temps
où tout étoit en faveur des mâles, il n’y ait qu’un seul
préjugé rendu dans des circonstances particulières qui
ne se rencontrent pas dans l’espèce.
Que sera-ce donc aujourd’hui que les lois nouvelles
se rapprochent davantage de l’égalité entre les enfans;
et que le Code Napoléon est plutôt restrictif que libéral,
lorsqu’il s’agit de dispositions en ligne directe !
Eh ! pourquoi s’occuper si long-temps du contrat de
mariage de la dame de Vaure ? Ce n’est point en vertu
de ce titre qu’elle vient à la succession de la mère ; les
choses ne sont plus au même état : le père a fait des
dispositions particulières dans le contrat de son fils, qui
font disparaître les clauses des contrats précédens. L a
dame de Vaure se présente pour recueillir la succession
maternelle, ouverte ab intestat, ou ce qui est la même
chose, sans aucun règlement valable.
La dame Hilliard qui redoute cette manière toute
naturelle de se présenter, la prétend non recevable à
abdiquer un titre onéreux.
Elle a exécuté, dit la dame Hilliard, les clauses et
les conditions de son institution; elle a reçu, par exemple,
son avancement d’hoirie : mais c’est encore chose nou
velle , que de faire résulter une iin de non-recevoir
d’une action si simple. Où a-t-on trouvé que l’héritier
qui reçoit un avancement d’hoirie, c’est-à-dire, une chose
qui lui donne la qualité d’héritier, qui est promise avant
�( j9 y
l’ouverture de la succession, qui est sujette à rapport
lors du partage, et qui n’est donnée qu’en attendant le
partage, soit non recevablè à venir à la succession comme
héritier ab intestat ?
Ce n’est pas sérieusement, sans doute, que la dame
Hilliai-d propose cette objection; elle ne peut pas ignorer
que tant que l’héritier ne s’est pas immiscé, il a toujours
>le droit d’abdiquer un titre onéreux, pour s’en tenir à
la qualité d’héritier ab intestat.
Mais la dame de Vaure a laissé jouir son père des
biens de son épouse, et ce ne peut être qu’en vertu des
clauses de son contrat qui lui en imposoit l’obligation :
donc elle a exécuté les conditions de son institution.
Singulière conséquence. Quoi! la dame de Yaure, patrespect pour son père, n’a pas voulu provoquer un par
tage ; elle a désiré dans son intérêt qu’il n’y eût pas
d’inventaire dissolutif, et que la communauté se con
tinuât -, elle a craint, si on v e u t , que ses recherches
donnassent de l’inquiétude ou du chagrin à son père,
qui avoit une longue habitude d’administration; et elle
seroit non recevable !
La crainte révérencielle , dit la dame H illiard, ne
peut suffire, ni pour fonder une action, ni pour justifier
une exception; l’article 1114 du Code Napoléon con
sacre ce principe.
Ce n’est pas là ce que dit le Code : il dit bien que la
seule crainte révérencielle ne suffit point pour annuller
un contrat, lorsqu’il n’y a pas eu de violence exercée ;
mais il faut entendre sainement cette disposition, c’està-dire, que si la dame de Yaure avoit passé un acte, 1111
�(2 0 )
traité avec son p è re , et qu’elle attaquât cet acte par le
seul motif de la crainte révérencielle; si elle n’étoit pas
dans la dépendance de son p ère; si son consentement
avoit été libre, et qu’elle n’eût point, d’autre motif à
opposer ce ne seroit pas suffisant pour faire annuller
l’acte.
Mais ici il n’y a point d’acte, point de consentement:
on n’oppose à la dame de Vaure que son silence ou son
inertie; on ne lui fait d’autre reproche que d’avoir resté
dans l’inaction pendant la vie de son père; ce seroit lui
donner tout au plus l’avis de demander la restitution
des jouissances perçues par le père, si d’ailleurs elle ne
préféroit la continuation de la communauté.
L es sieur et dame d e Vaure ne pousseront pas plus
loin leurs observations : ils se proposent de développer
leurs moyens avec plus d’étendue, lors de la plaidoirie
de la cause ; ils se sont expliqués sans prétention ; et
quoiqu’ils eussent dû s’attendre à quelques égards de la
part de leur nièce ils ne cesseront d e lu i donner des
exemples de modération et de décence.
Signé R A B U S S O N D E V A U R E .
DUM ONT DE VAURE.
*
M e. P A G È S (de R iom ), ancien avocat,
«
M e. V E R N I È R E , avoué.
I
A
R IO M ,
11
de l’imprimerie de T h ib a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Juillet 1808.
�
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rabusson de Vaure. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jutier
Huguet
Bernardi
Decombrousse
Chabroud
Mailhe
Poirier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour les sieur et dame Rabusson de Vaure, intimés ; contre les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans.
Particularités : notation manuscrite : texte complet de l'arrêt 1ére section 5 août 1808.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1801
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1804
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
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016408d74087b43887969fe420af51be
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Text
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y f L l WHfÆTTO^
S E C O N D MÉMOIRE
POUR
M e. J
e a n
- N azaire
BAGÈS ,
A vocat
en
Parlement, & M e fï r e A n t o i n e de P O N S , Chevalier,
Seigneur de Beleftat., fon curateur, à l’effet de l’autorifer,
Défendeurs & Demandeurs.
,
C O N T R E M e. C h a r l e s J U G E Procureur en la
Cour Pere légitime adminiftrateur de fes Enfans, héritiers
de défunte M a r i e B A G E S leur M ere ayant repris
,
&
,
en fon lieu & place; Sieur F
& Demoifelle E l i s a b e t
lui autorifée Demandeurs
,
h
&
,
rançois
,
MALBET
,
,
B A G È S fa Femme de
Défendeurs,
L e s Demandeurs abandonnent les principes pour fe livrer
à leur imagination. Ils cherchent à fixer en leur faveur les
doutes quJils élevent fur l’interprétation du teftament du
fieur B agès, par la confidération de la tendreffe paternelle
qui porte à croire que le teftateur n’a pas voulu établir une
é g a l i t é confidérable dans le partage de fes biens t entre
A
�des enfans que la nature lui rendoit également chers. Mais
ils ont à combattre, un fils unique qui fonde fa réclamation
non - feulemént fur-le-texte de la loi municipale de la Pro
vince , mais encore fur l'intention manifefte du teftateur.
E t cette l o i , bien loin de n’autorifer qu’à regret une diftribution inégale de la fucceilion du fieur B agès, y applaudit
au contraire, pourvu que les avantages foitnt réunis fur
la tête du .mâle.
..
„
Aufli la Cour a interprété plufieurs fois des teftamens
conçus dans les mêmes termes que celui dont il s'agit, en
faveur du mâle qui étoit dans la poikion de M e. Bagès.
Quoique les filles , appuyées de l’avis des Avocats du
Parlem ent, aient à chaque fois combattu avec force l ’opi
nion de Bafmaifon qui s’élevoit contr’e lle s , néanmoins le
fentiment de ce Commentateur., o u p o u r mieux dire, les
principes particuliers de notre Coutume ont toujours triom
phé. C r o i r a - t - o n que la vérité ne foit point fortie de ce
choc d’opinions fi fouvent répété ? Croira - t - o n que la
Cour l’ait toujours abandonnée pour ne faifir toujours que
de fauiies lueurs? V oilà cependant ce que les Demandeurs
entreprennent de perfuader.
O n doit donc être bien étonné de leur ton affirmatif
qu’on fe feroit tout au plus permis, quand on auroit eu à
démontrer des vérités mathématiques. Toutes leurs propoiitions fo n t, félon eu x , autant de vérités auxquelles il faut
fe foumettre, ou renoncer à jamais à rien prouver aux hommes.
A u contraire, les raifonnemens de M e. Bagès font des erreurs
groifieres qui fo n t honte à la raifon ; des rêveries (juils rougiflent de ‘ difeuter férieufement. Ils ne fe confolent qu'avec
peine fur Je fort de M e, Bagès qui eft condamné à ne rien
�5
voir jufqu’à ce que le célébré A bb é (a) qui a rendu aux muets
un équivalent de l ’organe dont la nature les avoit prives, aura,
découvert un Jecret plus.merveilleux encore, le fecret de'fairet
voir ceux qui ferment les y e u x à la lumiere. C e ton ne doit;
pas même avoir le mérite d’éblouir. I l ne prouve que l’énthoufiafme^ & la prévention : la vérité i perfuade plus dou-i
cernent,
.
' :
• '
I
I
l eft inutile d’établir la faveur que la Coutume d’Auvergne
donne aux mâles, & les précautions que fes rédaSeurs ont'
prifes, foit pour leur affurer les portions des filles forclofes
exclufivement aux filles non m ariées, foit pour empêcher
leur pere de les priver de cette réferve. Les Demandeurs
en conviennent eux-mêmes (page j ). « Un pere, difent-iis,
« n’eft pas le maître d’interdire à fes enfans m âles, par fou
» teftament, l'exercice du droit d’accroiiTement fur les ré» ferves coutumieres, s’il ne les dédommage pas d’a ille u rs,>
» en les gratifiant du quart difponible. Mais en léguant le
» quart difponible aux m âles, il peut les réduire à l ’alter» native d’abdiquer ou fa libéralité ou raccroiiTement des
» trois quarts.
Il s’agit donc de favoir fi le fieur Bagès"pere a entendu
priver fon fils du droit d’accroifiement, en confidération du
legs q u il lui a fait du quart de fon bien ; s’il ne lui a fait
ce legs que pour le dédommager de la perte des réferves cou
tumieres; fi en un mot ce legs eft conditionnel.
Les Demandeurs 3 au lieu de difcuter Amplement cette'
s\1 *
v a ) Affurément l’Abbé de l’F.pée n’auroit jamais cru trouver place dans u’n
mo»e relatif à une queilipn d’accroiiTeinenc en Coutume d’Auvergne. -
A 2
J«
�*
queftion , invoquent, à toutes les pages de leur M ém oire,
l ’article f o du titre ia de notre C outu m e, comme une loi
particulière qui accable M e. Bagès, ôc à laquelle Bafmaifon
n’a point fongé lorfqu’il s’eft décidé contre les filles.
Mais l’ufage que les Demandeurs font de cet article, ne
peut que produire une confufion dans les idées 6c faire
perdre de vue l’état de la queftion. En e f f e t , comment
s’explique cet article? & héritier ab-inte(lat injiitué par tejiament ou non, qui fciemment accepte aucuns legs à lui faits
par le défunt, ou fatisfait à aucuns des légats fa its par ledit
défunt ou autrement, agrée en aucune partie ledit teflament\
il approuve toute la difpofition & ordonnance d'icelui défunt,
& ejî abfolument tenu de la garder & accomplir, fans q u il
puifje s’aider de la réduction au quart introduite par la Coutume.
O r , qu’y a - t - i l dans cet article qui ne foit abfolument
conforme au droit commun du Royaum e & que l ’on ne trouve
dans les L o ix R o m aines, & notamment dans la L o i Parent'ibus, §, qui autem, Cod.deinojf. teflam.l Q u ’en réfulte-t-il?
que l’on ne peut pas divifer la volonté d’un défunt; que l ’on
ne peut pas l’invoquer & la rejeter tout-à-la-/ois; que pour
peu que l’héritier ab-inteflat approuve le teftament^ il eft
obligé de l’exécuter en entier. S i , par exemple, il paie des
legs excédans le quart qui étoit feulement difponible, il ne
peut plus enfuite attaquer ces legs & demander qu’ils foient
réduits au quart.
Mais cette vérité, à laquelle M e. Bagès avoit rendu hom
mage dans fon premier M ém o ire, ne porte aucune lumiere
iur la difcution de la conteftation. Avant de dire que M e*
B a g è s, en demandant le quart & l ’accroiiTement, divife A*
volonté de fon p ere j il faut prouver que le teftateur a eu
�s
la volonté de ne dohner à fon fils que le quart feul y fana
l’accroiifement, ôc non l'un & l ’aütre. O n comprend aifément que la demande que M e. Bagès a formée du q u a rt,
ne peut être une approbation de la condition quJil feroit
privé de l’ accroilTement, fans prouver auparavant que cette
condition a été impofée au legs du quart.
V oilà donc la queition principale à laquelle l ’ a p p lic a tio n
de cet article de la Coutume eft néceflairement fu b o rd o n n é e ."
T o u t fe réduit donc à découvrir quelle a été la volonté du
fieur Bagès; c ’eft-à-dire, à l’interprétation de fon teftament :
& toute autorité qui n’apporte pas de lumieres fur cette
interprétation doit être écartée.
V e n o n s à ^interprétation, ôc rappelions les termes du
teftament qui en font l’objet. L e teftateur, après avoir légué
le quart de fes biens à fon fils, ajoute qu’à l'égard des autres
trois quarts, ils feront partagés , par égales portions, entre
Ifabeau & Marie & ledit J ea n -N a v ir e B a gès, fe s trois enfa n s & de ladite Dame Marguerite Faucher, qui font fe s héri
tiers de droit, attendu q u il a fuffif animent doté fe s fille s de
fon premier mariage.
Les Demandeurs s’appefantiffent finguliérement fur ces
m ots, par égales portions. L e teftateur, difent - ils, en or
donnant que les trois quarts de fes biens fe partageroient,
par égales portions, entre trois de fes enfans, n’a - t - i l pas
entendu que chacun dJeux prendroit un tiers dans ces trois
quarts ? Ces expreflions peuvent - elles fignifier que l’un des
trois prendra quatre parts à lui f e u l , ( page i $ ) ?
^ C e raifonnement féduiroit peut-être, en préfentant comme
tfolés ces m o ts, par égales portions. Mais il ne faut pa* le 6
�6
détacher de c e u x -c i, qui fo n t fe s héritiers de droit, & qui
fuivent les dénominations des trois enfans. O n a prouvé ,
dans le premier Mémoire de M e. Bagès ( page 6 & 7 ) , qu’il
réfultoit du rapprochement de toutes ces expreiTions, que le
teftateur n’avoit voulu voir dans fes trois enfans de fon fé
cond mariage, que des héritiers tels que la Coutume les lui
donnoit pour les trois quarts qui lui reftoient après le legs
qu’il avoit déjà fait; qu’il avoit entièrement abandonné ces
trois quarts au vœu de la Coutume.
Les Demandeurs répondent à cette obje&ion « que cette
» qualité d’héritiers de droit du fils & des filles non mariées,
» a bien déterminé la préférence que le teftateur leur a don» née fur fes filles du premier lit , dont il confacre l’exclu» fion légale j mais qu'il n’a pas voulu s’y référer pour la
» proportion du partage;
bien loin de dire qu’ils par» tageroient félon l ’ordre de d ro it, il a dérogé à cet or» dre , en ordonnant un partage par portions égales ,
» ( page 16 ).
C e t a veu , de la part des Demandeurs, que la qualité
d’héritiers de droit des enfans du fécond lit, a déterminé
l ’exclufion des filles du premier mariage, ne peut être que
très - avantageux à M e. Bagès. Cependant on eit forcé de
convenir que cettequalité n’a pointété la caufeprincipalement
déterminante de Texclufion de ces filles. L e teftateur nous
explique lui-même la raifon de cette exclufion, c ’ ejl q u il
les avoit fuffifamment dotées.
C e n eft pas que le teftateur ne fonge bien à la qualité
d'héritiers de droit des enfans du fécond l i t , mais c'eft uni
quement pour la leur c o n f e r v e r p o u r manifefter qu’il ne
vouloit y porter aucune atteinte. L e teflament préfente cette
�7
id ée, quoique le teftateur. ait dit que les-trois quarts feroient
partagés, par portions égales, entre fes enfans du fécond
lit; parce que tout de fuite il ajoute, qui fon t fe s héritiers
de droit; c’eft - à - d i r e q u e le teftateur veut qu’ils foient tels.
Ces derniers termes ont le même fens que fi le fieur Bagès
avoit dit nettement qu’il entendoit que le partage fe fit félon
l'ordre de droit.
' ■Si le teftateur a dit que le partage des trois quarts fe feroit,
par portions égales, c’eft ou parce que ignorant le droit d'accroiiTement, il a cru que fes héritiers, par l’effet du droit,
devoient rigoureufement partager les trois quarts félon le
nombre de têtes ( a) , ou parce qu’il a entendu parler d’une
( a ) Les Demandeurs ont d it, (p a g e 19 & 2.0 ) qu’en fuppofant que cett*
erreur de la part du fieur Bagès eût donné lieu à la difpofition des trois quarts,
par égalité, entre les enfàns du fécond l i t , cette difpofition n’en feroit ni moins
refpeftable ni moins efficace , parce que la fauffeté de la caufe impulfive ne vicie
pas le legs.
M a is 'les Demandeurs font dans l’erreur. Dans l’hypothefe , la caufe qui auroit
«lifté la difpofition du fieur Bagès feroit une caufe finale & non une caufe im
pulfive. La caufe eil fimplement im pulfive, lorfqu’elle ne regarde que l’intérêt
du légataire. Par exemple , fi le teftateur legue une fomme pour des frais de
prêtrife, ou d’ingrès en R eligion , ou pour acheter tel héritage, le légataire
obtiendra la dtlivrmce du legs', fans fe faire ni Prêtre ni Religieux, fans acquérir
l’héritage indiqué. La caufe finale eft celle fans laquelle il paroît que le teftateur
n’eût point légué ; & la faufleté de cette caufe vicie le leg s, quoiqu’il n’en foit pa*
de même de la caufe impulfive, à laquelle feule fe rapportent les autorités invoquées
par les Demandeurs. On trouve cette diftinrtion dans tous les livres relatifs à la ma>& même dans Fbrgole fi’fouvent.cité par les Demandeurs, TraitéJis Tejlamcns „
*kap-" s,
3} rt, s & fuiv. « La difpofition, d i t - i l , ert encore nulle, fi d ie
* pour fondement, ou pour caufe finale , un fait erroné, fans lequel le tefta-
�8
égalité relative à la lo i; ceft-à-dire, en comprenant, fous le
nom du m âle, les filles mariées, aux droits defquelles il étoic
fubrogé par le miniftere de la Coutume; mais toujours eft-il
certain que fa derniere intention a été que le partage des
trois quarts fe fit entre les enfans du fécond l i t , félon la
loi. L e teftateur ne leur fuppofe pas la qualité de fe s héritiers
de droit, comme l ’ayant eue feulement avant la difpofition.
des trois quart s , par égales portions ; il la leur fuppofe, il
la leur donne même après cette difpofition. Auroit-il nommé
fe s héritiers de droit des enfans dans lefquels il auroit déjà
eu l’intention d’effacer cette qualité ? Il a donc fournis au.
droit le partage des trois quarts de fa fucceilion.
Mais le guide le plus fûr qu’on puiiTe fuivre pour appn>
fondir la difpofition d'un teftateur, c ’eft d’examiner le m otif
qui l ’a di£tée. O r , quel eft le m otif du fieur B agès, lorfqu’il
laiiTe les trois quarts de fa fucceilion à fes enfans du fécond
lit? c e j l , dit-il, attendu q u il a Juffifammentdotéfes filles defort
premier mariage, lefquelles il entend quelles ne puiffetit rien pré
tendre dans fa fuccejfion. V o ilà donc tout l’efprit qui anime le
teftateur; il eft rempli d'une feule penfée; il n’a qu’un feul
b u t, c ’eft d’exclure fes filles de fon premier mariage. Mai*
fi en les excluant il eût eu en vue de déroger à la Coutume
relativement aux trois quarts entre les enfans du fécond lie*
n’auroit-il pas d'abord expliqué bien précifément cette vo
lonté ? n’en auroit-il pas die le motif? Q u o i donc! le tef» teur ne l’auroit point faite; il cite plufieurs loix, & il ajoute : « Cela a l‘eJ
» quand mime la difpofition ne feroit fondée que fur une erreur de droit con-
» fidérée comme la caufe finale. Cet Auteur fe fonde fur l’Arrit cité par
Oolive , dont on a rapporté l’cfpece dans le premier Mémoire de Me. Bagi*.
tateur*
�9
tateur, en excluant de fa fuccefïîon fes filles du premier
l i t , le faifoit furabondamment, la loi avoit déjà prononcé
cette exclufion; cependant comme il eft rempli de cette in
tention , il la développe bien, clairement ; il fait plus , il
en explique les motifs , ôc l ’on voudroic perfuader que ce
teftateur aufli foigneux eût eu le deflein de déroger à la loi
la plus impérative., fans expliquer ni ce deflein ni fes’ mo
tifs , fans dire qu’il privoit fon fils de raccroiiTement,
parce qu’il l ’en dédommageoit par le legs du quart ( a) !
En un m ot, fuivant les Demandeurs, il y auroit deux
différentes difpofitions d'ans cette phrafe : E t à l'égard des
autres trois quarts , ils feront partagés, par égales portions,
entre Jfabeau & Marie & ledit Jean-Na^aire B agès, fe s trois
cnfans & de ladite Dame Marguerite Faucher, qui fon t fe s
héritiers de droit. Une premiere d ifp o fit io n p a r laquelle le
teftateur auroit voulu q u e , malgré le vœu contraire de la
Coutum e, les enfans du fécond lit euiTent partagé les trois
quarts, par égalité, fans que le fils pût exercer le droit
d'accroiflement ; & une fécondé difpofition, par laquelle il
auroit voulu exclure de fa fucceilion fes filles de fon premier
mariage. Mais le teftateur ne donne qu’un feul m otif qui
fe référé à tout ce qui précédé, attendu, dit-il, q u il a fu fJifamment doté fe s trois filles de fon premier mariage : o r, s’il
eût eu en vue deux difpofitions, il n’auroit pas expliqué le
m otif de l’u n e, fans rendre compte du motif de l’autre. Il
n’ y a qu’un fe u l m otif, parce qu’il n’y a eu qu’une feule dif(<*) Les foins que prend le teftateur pour exclure les filles mariées, prouvent
^u’il ignoroit la fordufion légale & l’accroiirement, on ne peut donc lui fuppofer
lnt«ntion de priver fon fils de ce dernier droit.
B
�lo
pojîtioti. S’il y avoit en deux d'ifpofitions, il y auroit eu deux
motifs.
Voyons comment les Demandeurs répondent à ce moyen.
« L e m ot, attendu, d ife n t-ils, renferme le motif de la dif» pofition qui le précédé , d ’accord ; mais ce motif bien
» faifi ne re n v e rfe -t-il pas la prétention de M c. Bagès, au
» lieu de l ’appuyer ? le teftateur preferit l ’égalité entre
» fes trois enfans du dernier lie, attendu que fes filles du
» premier lit ont été fufiifamment dotées, ' page 21 ).
Ainfi donc., fuivant les Demandeurs, l’unique motif qui
fe trouve dans le teftament s’adapteroit également aux deux
difpofitions qu’ils y fuppofent. Selon eux le teftateur a ratifié
Vexclufion légale de fe s fille s du premier Ut, attendu qu elles
ont été fujjifamment dotées ; félon eu x , le teftateur a de plus
preferit l'égalité entre fe s trois enfans du dernier lit , toujours
par le même m otif; attendu que fe s fille s du premier Ut ont
été fujjifamment dotées.
Mais il n’y a aucune analogie entre ce m otif & l’ordon
nance de l’ég a lité, c ’e ft-à -d ir e , la privation du droit d’accroiiTement qu’on fuppofe que le teftateur a voulu prononcer
contre fon fils. Si le fieur Bagès eût voulu configner dans
fon teftament cette privation, il en auroit donné pour motif,
attendu que j'a i dédommagé mon fils par le legs du quart ;
s’il dit feulement, attendu que j'a i fujjifamment doté mes trois
fille s de mon premier mariage, c’eft parce que dans la difpofition qui précédé, il n’eft occupé que de la feule idée
de laiifer les trois quarts de fes biens à fes enfans du fécond
l it , à l ’exclufion des filles du premier mariage, fans vouloir
altérer la difpofition que la loi faifoic de ces trois quarts
entre ces trois enfans du fécond lie.
�Les Demandeurs font une autre réponfe qui n’eit guère
plus raifonnable que la premiere. « L e teftateur., difen t-ils,
» entend que fes filles du premier lit ne puiifent rien pré» tendre dans fa fucceilion. Cette exclu fion, qui accom» pagne l’ordonnance de l’égalité entre les trois enfans du
» fécond lit , ne ren ferm e -t-elle pas éminemment l’exclu» fion du repréfentant'que la loi mettoit à la place des filles
» du premier lit ?
Mais cette obje&ion fuppofe toujours que le pere a entendu
priver le fils de i’accroiiïement, par conféqueut elle fe réfute
par les mêmes moyens qu’on a déjà déduits. L e teftateur a
bien exclus de fa fucceilion les filles du premier lit ; mais
il n’en réfulte autre c h o fe , fi ce n’eft qu’ il s’eft réuni à la
loi pour confirmer, en faveur de fon fils., le droit de les
repréfenter. Pour que le fils eût perdu ce d r o it , il faudroit
que le pere l’en eût bien expreffément privé. Or., c ’eft ce
qu’ il n’a ni fait ni voulu faire.
*
L e s Demandeurs ont été également dans l ’impoiTibilité
de répondre aux moyens qui s’élevent en faveur de M c.
B a g è s , pour prouver qu’ il peut invoquer avec autant de
fuccès l’ efprit du teftateur, que la lettre du teftament.
C ’eft à l’efpritj dont le teftateur paroît avoir été anim é,
qu’il faut principalement s’ attacher pour s’ aifurer de fon in
tention. Les loix publiques ont été rédigées par les plumes
les plus habiles ; cependant elles font fouvent obfcures, parce
qu’ il y a dans le langage beaucoup d’imperfection, comme
dans tout le refte de ce qui tient à l’humanité. Auifi les Légiflateurs nous difent qu’ il faut fouvent négliger les termes de
a loi pour en pénétrer le fens ôc confidérer quelle a été
�fon intention. Sclre verba legis non ejl fcire legem. A com
bien plus forte raifon doit-il en être de même des teftamens
qui font rédigés avec moins de foin que les loix , & par
des perfonnes bien moins exercées dans les affaires. Il n’eil
donc pas étonnant que la loi 1 0 1 3ff. de condit & demotijirat.
s’explique ainfi in conditionibus tejlamentorum voluntatem po~
tiùs quant verba confiderari oportet. C ’eft par cette raifon
que les Juges font autorifés à interpréter largement les dernieres difpofitions des défunts. In tejlamentis pleniàs voluntates
tejlantium ihterpretantur nous dit la loi \2 , ff. de regul.
Juris.
O r , en premier lieu, M e. Bagès étant le feul enfant qui
pût perpétuer le nom du teftateur, croira-t-on que c e lu i-c i
a voulu le priver des avantages que la Coutume lui aifuroit ? peut-on même le préfumer, lorfqu’on voit que ce pere
n’a pris la peine de faire un teftament, que pour ajouter aux
faveurs de la loi celles qui dépendoient de fa volonté ? C e
fils eft fon héritier teftamentaira, & dès-lors dans le doute
tout doit s’interpréter en fa faveur. C ’eft ce que nous enfeigne
le favant Ricard, Traité des Donations, fécondé partie, ch. 4 ,
71. 12.6. La réglé la plus générale, d i t - i l , qui puiffe f e propofe r à ce fu je t , 6* qui contient éminemment en fo i toutes les
autres, ejl que p&ur iexplication des donations & des tejlamens, il fa u t3 avant tout & fu r -to u t confidérer la perfonne
de celui qui difpofe > & avoir égard à fa volontéy enfuite la
faveur de l héritier tient le fécond lieu ; & enfin la perfonne
du légataire ou du donataire ejl la moins confidérable.
Q u e répondent les Demandeurs ? « Ils font paifés ces
» fiecles de barbarie, où la folie de perpétuer fon nom >
» rendant l ’homme traître à la nature5 rempliiToit les cloî-
�13
» très & la fociété de triftes vi&imes immolées à 1 établifle» ment d’un aîné. Si l’on paie encore un tribut a 1 idole
» du préjugé, au moins o u b lie -t-o n rarement que I o n eil
» le pere de tous fes enfans.
- V oilà peut - être de belles phrafes, mais rien de plus.
i° . L a loi municipale de la Province , à laquelle fes
moeurs 6c fes ufages font conformes, permet une inégalité
entre les enfans dans le partage des fucceflîons. E lle fait
p lus, elle invite à avantager les mâles, puifque en certains
cas elle les favorife elle-même fans le fecours de la volonté
de leur p e r e , pour la conservation des maifons du pays. Par
combien de raifons prifes dans la politique ne pourroit-on
pas juftifier les vues de cette loi? Mais ceferoit lui faire injure
que de l ’entreprendre; on doit s’y foumettre avec confiance,
parce qu’elle a pour elle au moins le préjugé de la fageife.
A h ! fi dans des fiecles reculés, qu’on appelle aiTez légère
ment des fiecles de barbarie,'une augmentation de fortune
en faveur des enfans qui perpétuent les noms des familles,
a paru aux Légiflateurs un moyen propre à leur confervation; peut - on penfer différemment dans des temps où la
c o r ru p tio n des moeurs a rendu la fortune encore plus néceffaire à l’illuftration (a ) 1
a0. 11 y a une très-petite différence entre ce que les
filles du fécond lit auront dans la fucceffion de leur p e re ,
diftra&ion faite du quart fie de l’accroifTement dans les trois
quarts reftans, ôc^ce qu’elles auroient e u , fi elles euffent
fuccédé ab-inteftat. E n e i f e t , le fieur Bagès pere ayant
laiffé fix enfans, les portions des Dames Juge & Malbet
( a ) Dans tous les Etats policés , on a permis des teilaroens >& dans pluiieurs
ex«lufion ^es fiMcs en a été l’objet.
�T4r
n’auroient été qu’ un fixieme : o r, malgré les prélevemens de
M c. B a g è s , il leur reviendra ou à leur repréfentans un hui
tième : leurs portions ab-intèjîat ne reçoivent donc d’autre
diminution que celle qu’y apporte l ’avantage du quart qui a
été fait à leur frere unique; avantage qui eft fans doute m o
dique relativement à l’ufage de la Province, dans laquelle
les inftitutions contractuelles font fréquentes. Du fixieme au
huitième y a - t - i l une il grande difproportion? E ft - c e - là le
partage du lion, tout d'un côté?
A la vérité M e. Bagès aura un autre bénéfice outre le
quart; mais comment? C ’eft parce qu’il prendra les portions
des filles fo rclo fe s, qui font aufii d’un huitième, en rappor
tant leurs dots. Mais ce bénéfice ne nuit en aucune maniéré
à la Dame Alalbet ôc aux repréfentans de la Dame Juge.
Il fe prendra feulement fur les filles mariées, du vivant du
pere. C e font elles feules qui y perdent ; & fi la Coutume
ne donnoit pas ce bénéfice à M e. B agès, les Demandeurs
n Jy gagneroient rien, parce que les filles mariées viendroienc
fans doute prendre au partage leurs portions afférentes dont
l ’exiftence feule du mâle les prive. O ù eft donc l ’injuftice
fur laquelle les Demandeurs fe font récriés avec auifi peu
de réflexion ?
D ’ailleurs p enfera-t-on que le teftateur ait eu quelque
peine à réduire fes filles non mariées à un huitième de fa
fucceifion, lorfqu’on apprendra qu’il n’avoit donné à chacune
de fes filles de fon premier mariage , qu’environ la vingtième
partie de fes biens. En 1 7 J 1 , il maria Anne Bagès avec ls
fieur P a g e s , & il lui conftitua une dot de 2,400 liv. feu
lem ent, fans efpoir fucceflif. En 1 7 ; 7 , M arie-Thérefe B a gèi
fut mariée avecleiieiif G ladelj ôcforclofe moyennant
�E n 176 0 , Marguerite Bagès époufa le fieur Pradier, & Ton
pere lui. donna pour toute dot 2,^00 liv. C e qui rend ces
dots encore plussmodiques, c’eft que près de la moitié n a été
Jftipulée payable qu’après le décès du fieur Bagès. Ces trois filles
fe font mariées félon leur état :1e teftateur devoit préfumer qu’il
en feroit de même des deux filles de fon fécond lit, puis
qu'elles avoient une fortune bien fupérieure., malgré le pré
lèvement du quart & de l’accroifiement, & ces v u e s ont été
'juftifiées par l’événement. Comment donc fe pérfuader que le
fieur Bagès pere a voulu donner à chacune de fes filles non *.
mariées la quatrième partie de fa fucceifvon? T e lle eft cepen
dant la prétention des Demandeurs.
En fécond lieu., on a prouvé dans le premier Mémoire
de M e. Bagès ( pag. p & 10 ), qu e, félon le fyftême des D e
mandeurs, fon pere auroit voulu faire un teftament ridicule.
E n effet , l’accroiifement étant plus confidérable que le
q u a rt, il n’auroit pu raifonnablement propofer à fon fils
de renoncer à cet accroiffement, pour s’en tenir au legs
du quart.
Les demandeurs répondent que le droit d ’accroiffement,
confiftant dans la moitié de la fucceilion, étoit prefque en
tièrement abforbé par le rapport des dots des trois filles
forclofes, qui réunies montent à plus de 10,000 liv.
Mais ils.ne font pas plus exa&s dans leurs calculs que dans
•leurs, raifonnemens. Il a été fait entre les parties, en 178 0 , un
•partage provifionnel, dans lequel M e. Bagès s’eft réfervé tous
fes droits. Lors de ce partage tous les biens-fonds dépendans
de la fucceifion ont été eftimés amiablement à la fomme de
4 *>ooo liv. Dans cette fomme on n’a pas compris les beftiaux
**** domaines, le mobilier, les papiers & autres effets montanç
�i6
au moins à 8,000 livres ce qui fait en tout £0,000 livres.
C ’eft fans raifon qu’on prétend que lors du teftament les
immeubles du fieur Bagés n’étoient pas d'une fi grande va
leur; qu’ils ont augmenté de p rix, comme tous les autres
fonds, par l'effet d’une révolution imprévue; qu’ainfi lors
du teftament le quart excédoit le droit d’accroiifement.
Il eft aifé de répondre à cette obje&ion. Depuis le décès
du pere, les héritages de fa fucceifion ont été confidérablement dégradés; enforteque, malgré l ’augmentation furvenue
en général, ils valoient moins lors du partage, que lors du
teftament. D ’ailleurs les héritages, même lors du partage,
valoient bien plus de 42,000 liv. Il eft d’ufage de faire dans
les actes ces fixations le plus bas qu’on p e u t , fie perfonne
n ’en ignore le motif. O n peut donc porter la fucceiïïon pa
ternelle à 5*0,000 liv.
M e. Bagès devoit donc avoir 2 0 0 0 liv. pour fon droit
d’accroiiTement; c Jeft-à-dire, la moitié de la fucceiïïon. Sur
q u o i, diftrattion faite, non pas de 10,000 liv. comme les
Demandeurs le prétendent, mais feulement de 7,poo liv.
pour les dots conftituées aux trois filles forclofes, refte la
fomme de 17,100 liv. revenante à M e. Bagès. O r , le quart
de la fucceifion ne montant qu’à 12,^00 liv. ce quart a-t-il
pu être légué à M e. B a g ès, pour le dédommager de 17,100 liv.
dont fon pere ne pouvoir pas le priver ? Encore ne faut-il
pas omettre une circonftance qui diminue finguliérement le
l e g s , c eft que le fieur Bagès a entendu que la Dame Fau
c h e r, fon époufe, auroit la jouifiance du quart jufqu’à 1*
majorité de fon fils; c'eft-à-dire, pendant dix-huit ans.
M a is , quand on compenferoit les beftiaux , meubles SC
papiers avec la prétendue plus value des fonds, on ne pour
ront
�roit jamais dire que le teftateur a eu l’intention de pri
ver fon fils de raccroiflem ent, en le dédommageant par
*
•
le quart; parce qu’il n’y auroit également aucune proportion
entre l’un & l’autre. L a fucceilion, fous ce point de vu e ,
montant à 42,000 liv. la moitié pour l’accroiifement, diftraction faite de 7,5500 liv. formeroic un objet de 13,100 liv. &
le quart ne fe porteroit qu’à io ,? o o liv. O r , un pere ne
prendroit pas la peine de tefter, pour propofer à fon fils
de prendre, ou 13,100 liv. qui lui appartenoient d é jà , ou
i o , j o o liv. feulement, à n'en jouir qu’après dix-huit ans.
E n f i n , s’ il reftoit encore quelque doute fur la queftion de favoir fi le fieur Bagès a é té , ou non, dans l'inten
tion de priver fon fils de l’accroiflement dans les trois quarts,
dans ce doute même il faudroit fe décider pour la négative,
par la raifon que M e. Bagès tient raccroiflement de la C o u
tume, & que fon pere eft préfumé avoir voulu conformer fon
intention au vœu de cette loi. T e lle eft la do&rine de
F aber, de error, pragmatic. decad. 5 $ , err. 1 ; fe d quia in
dubio, dit-il, f i non aliud de tefiatoris volúntate appareat, credendus f u prudens quilibet tefiator, eum voluntad fuœ ordinetn
prefcripjijfe, quem fuccefiioni intefiati le x preferibit. N ec enim
aut prudentius aut certius ullum potefi ejje confilium quàm
legis.
C ’eft ce que nous enfeigne encore M e. G u iñ é , Auteur
auili judicieux que favant,dans fa neuvieme regle du droit
de repréfentation. Le principe, d i t - i l , des pays régis par le
droit civ il, efi de mettre la difpofition de l'homme au-deffus
de celle de la lo i, Utique quiifque legaifit ita jus efto . . . .
mais le principe de notre pays coutumier efi au contraire. Nous
C
�18
ejîuncns la loi plus f ig e que /’homme, & nous faifons prévaloir
fa difpofition au-dej}us de celle de l’ homme , autant de fois que
cela Je peut faire ,fa n s contrevenir direclement à la difpofition du
teflateur. I l ne/l permis dans notre ufage de difpofer que de
certaine nature de biens, & ju fq iià certaine quantité, & même
fou s des conditions & des formalités fatales ; de forte que quand
dans la difpofition du tejlateur, ilfe trouve quelque choje d obfcur,
ou fu jet à interprétation, il le fa u t interpréter & le rapprocher
autant qu il ejl pojfible ( fans détruire la volonté du tejlateur ),
à la difpofition de la Coutume. M. H en rys, tom. 2, liv. 4 ,
queft. 1 2 4 , n. 2 & 3, fait la même diftin&ion ôc expofe les
mêmes principes.
G u in é , en en faifant l’application, décide une queftion qui.
a beaucoup d’analogie à celle qui nous divife. Il fuppofe que
le teftateur ait dit qu’il laiiToit fes biens à fes plus proches
parens, & que ce teftateur laiife des freres & des neveux
qui , en général, & fu r-to u t à Paris, feroient habiles à lui
fuccéder par fouches. Il demande enfuite fi les neveux font
exclus on non par le teftament. Quoiqu’il paroiife que le
teftateur a voulu inftituer fes freres qui font fe s plus proches,
cependant Guiné d é c id e , en réfutant l ’opinion de A leLegrand fur la Coutume de T r o y e s , que les neveux & les
freres doivent recueillir conjointement la fuccellion; parce
que la loi met les freres & les neveux du déj'unt en même
degré ( en ce qui concerne l'habilité de fuccéder ) ; & il fa u t
préfunier que le tejlateur les a confidérés de même maniéré que
la Coutume les confidere. T e l eft encore l’avis de Someren
qui a écrit dans cette matiere avant G u in é , & dont ce der
nier Auteur rapporte les termes.
O r ; fi dans ce cas on a penfé que la proxim ité* dont parr
�loit le teftateur devoit être celle de la lo i, quoique le tefîateur n’annonçât en aucune maniéré cette intention; quoique
à prendre les termes du teftament, il eût feulement defigné
fes plus proches en degré & non fés plus’ proches relative
ment à l ’habilité que donnait la Coutum e, par l’effet de la
repréfentation; à plus forte raifon doit-on croire que le fieur
B a g è s , en difant que les trois quarts de fes biens feroien:
partagés entre fes enfans du fécond l i t , par égales portions,
a eu en vue l’égalité de la l o i , fans faire abftradion dans la
perfonne du m Ue, de fa prérogative de repréfenter les filles
mariées, fur-tout dès que le fieur Bagès a témoigné ènfuite
par ces mots, qui font fe s héritiers de droit, qu’il n’a point
voulu déroger à cet égard à la difpofition de la loi.
P a s s o n s a£tuellement aux autorités qui s’appliquent plus
dire&ement à notre efpece. O n veut parler des Sentences
de la C o u r , qui ont jugé la queftion en thefe en faveur
du m âle, & du fentiment de Bafmaifon qui y eft con
forme.
*
A Tégard de ce Commentateur les Demandeurs n'ont,
pas tout - à - fait ofé perfifter à foutenir qu’il n'avoit écrit
que des rêveries ; mais ils ont fait tous leurs efforts pour
obfcurcir le paifage où il traite la queftion. C e f t avec rai
fo n , difent-ilsj qu 011 a cité ce paifage comme un oracle:
c en eft un dans toute la force du term e, parce qu’il en a
toute l’ambiguité.
Mais rapportons le paifage de Bafmaifon. C e t Auteur
obferve d’abord que Yaccroïjjement de la portion de la fille
viariee compatit avec les légats & libéralités tcjlamentains
f ails aux mâles ; fit après en avoir donné plufieurs raifons,
C 2
�20
éc entr’autres celle qu'il ne fe fait point de compenfation.
de deux gains, quand l ’un & l ’autre ne viennent point de la
même perfonne & de la même maint c ’e ft -à -d ir e , que l ’un
dérive de la l o i , & l ’autre de la volonté du pere j il
ajoute.
O r 3 le légat fe prend fu r toute la fucceffion , par la
dlfpofition & provifion de l’ homme, au contraire, laccroijjement f e prend par le bénéfice de la Coutume & par la fubrogation des perfonnes, en ce que le mâle repréfente la fille
mariée, pour prendre fa portion ; ce qui fa it que fi le p ere,
la mere ou autres lignagers infiituent c o n j o i n t e m e n t
héritiers, par leur tefiament, les mâles & les fille s à marier,
& q u il y ait fille s mariées, du vivant du pere, quand bien
tous les héritiers injïitués accepteront le tefiament, p o u r t a n t
L E S M A L E S N E SE R O N T P O IN T E X C L U S D E LA PO RTIO N
> d’autant que l ’approbation que les
mâles ont fa ite du tefiament, ne nuit point en leur nom pro
pre , en tant qu’ils fo n t héritiers infiitués au droit difiind &
féparé qui appartient aux mâles, & qui ne prend point fon ori
gine ni du tefiament ni de la volonté tacite du tefiateur, &
procédé de ce que le mâle repréfente la fille mariée qui pourroit demander réduction du tefiament au quart, & venir en par
tage des trois quarts de la fucceffion, ce que les mâles peuvent faire au nom de la f i l l e } & prendre fu r les trois quarts
la portion des fille s mariées, 6* ce f a i t , partager le furplus
de la fuccejfion in viriles, avec tous les héritiers infiitués 3
d e s
f i l l e s
SANS
PAR
d
'a
QUE
LES
m a r i é e s
LAPPROBATION
M ALES,
c c r o i s s e m e n t
INDUISE
DU
TESTAMENT
CONFUSION
DU
FAITE
DROIT
qui appartient aux mâles ex perfonâ
de leurs fccurs mariées, & par le bénéfice de la Coutume.
�21
E t c*ejl ce qui a lieu nonobjlant que le tejlateur ait voulu
rendre égaux les héritiers injlitués ; ce q u il fa it en tant qu ils
fo n t appelles en leurs noms propres en partage ( a ) .• M A I S
n
'a
y a n t
e x p r e s s é m e n t
QU*IL I N S T I T U E
M ENT, SANS
LESDITS
d é c l a r é
MALES
QUE LES M A L E S
L'ACCRO ISSEM EN T
RIÉES , LESDITS
DES
s a
v o l o n t é
ET FILLES
ÉGALE
PU ISSE N T S*AIDER
PORTIONS
M ALES POURRONT
DES
FILLES
PRENDRE
DE
M A-
LEDIT
ACCROISSEMENT.
Il y a tant de clarté dans le développement de l ’opinion
de Bafmaifon , &. tant de folidité dans fes motifs
qu’ il
n’eft befoin de faire aucune réflexion pour démontrer l’ une
& l’autre.
A quoi fe réduit l’ interprétation des Demandeurs? Baf
maifon, difen t-ils, fuppofe que le teftateur a fimplement
appellé au partage des trois quarts le mâle & les filles à
m arier, fans s’expliquer fur la proportion du partage, fans
dire s’il fera égal ou inégal. A lo r s , quoiqu’ il femblât que
ces trois quarts duifent fe divifer par têtes , fuivant cette
réglé, ubi partes adjeclce non fu n t, cenfentur œquales ; néan
moins les mâles feront comptés pour autant de têtes qu’ ils
repréfentent de filles mariées, parce que la loi le voulant
ainfi, le teftateur, en gardant le filence, eft cenfé s’en être
rapporté a elle, bien loin d y déroger. Mais ce fera différent
fi le teftateur a inftitué les mâles & les filles également. C e
'm o t , également, renferme une volonté énixe de déroger à
la loi; il a la même énergie, la même efficacité, que fi le
teftateur eût d it, fans que les mâles puijfent s’aider de l ’ac-
r» ( a ) Voyez la premiere Edition de Bafraaifon«
�croisement. O r , le fieur Bagès pere ayant ordonné le partage
des trois quarts de fes biens entre fes trois enfans du fécond
lit , par égales portions, & ces termes, équivalant à celui d'é
galement , ils emportent auifi l ’idée de la prohibition de
l ’accroiffement.
Mais ce fens ne fe préfentera jamais à Tefprit de tout
.lecteur impartial. 11 importe peu dans l’idée de Bafmaifon, que
le teftateur ait dit que les trois quarts feroient partagés entre
Je-mâle & les filles à marier, ou par égalité, ou égale
ment, ou par égales portions, ou même qu’il en ait Am
plement. ordonné le partage entr'eux. Il n'entend faire
aucune différence entre toutes ces manieres de difpofer,
qui effectivement doivent toutes avoir le même effet ,
fuivant cette reg le , ubi partes non fu n t adjeâœ, cenfentur
œquales.
Cet auteur fuppofe qu’il paroît réfulter des termes du tef
tament l ’idée d’établir une parfaite égalité quant aux trois
quarts entre le fils & les filles; & c e jl ce qui a lieu, dit-il,
nonobjlant que le tejîateur ait voulu rendre égaux les héritiers
injUtués en ce qu ils font tous appellés en leurs noms propres
en partage, c’e ft-à -d ir e , en femblant faire abftra&ion dans
la perfonne du mâle, du droit de repréfenter les filles forclofes. Néanmoins Bafmaifon décide que fi le teftateur n’a
pas dérogé par une volonté bien exprefie à la loi qui s’oppofe
à cette égalité, le mâle, outre le quart qui lui a été lé g u é ,
prendra raccroiffement dans les trois quarts reflans. Pour
qu’on puiffe dire que le teftateur ait voulu déroger à une
loi amTi impérative que celle de l ’accroiflement, pour qu’il
paroiffe qu’il n’a légué le quart que conditionnellement, &
en confidération de la privation de l'accroiftement qu’il a
�23
entendu prononcer contre le fils, il ne fuffit pas qu il ait dit
qu’il inftituoit le fils ôc les filles également quant aux trois
quarts, il faut qu’il ait encore ajouté fans que les mâles
puîffent s’aider de l’accroijjenient, ce n'eft qu’alors que le
legs efl conditionnel.
La négative, par laquelle la phrafe de Bafmaifon com
mence* en gouverne tous les membres. O n pourroit, fans
rien changer au fens, la rendre de cette maniéré. Mais Jî
le tefîateur na point exprejfément déclaré fa volonté q u il itiftitue les mâles & les filles également y s \ l na pas dit encore,
fans que les mâles puîffent s'aider de l'accroiffement des por
tions des f i le s mariées, les mâles pourront prendre l'accroiffenient.
Si ce n’eft pas l'a le fens de ces termes , fans que les
mâles puîffent s'aider de l'accroiffement, ils n’en auront
aucun , parce qu’ il eft impoflible de leur en donner d’au
tre. Il faudra donc les regarder comme des pléonafmes
ridicules.
Les Demandeurs croient prévenir cette obje&ion 3 en difant que Bafmaifon n a employé ces termes que pour un plus
grand développement de fon idée , pour mieux la faire fentir.
E h l vraiment fans doute, ces termes font le figne d’une
idée. Mais quelle ef t-el l e? C'eft que fi le teftateur ne les
a pas employés, il ne peut jamais être confidéré comme
ayant voulu déroger à la loi de l’accroiffement, au préju
dice de fon fils, quelqu’idée d’égalité que préfente d’ailleurs
le teftament quant aux trois quarts. Quand ces expreifions
-conditionnelles manquent, il faut croire que le teftateur n’a
entendu parler que d’une égalité relative à la divifion éta
blie par la Coutume.
�24
A udi ce n’eft qu’en défigurant entièrement le paflage de
Bafm aifon, que les Demandeurs ont entrepris de prouver
q u e , fuivant ce Commentateur, le mot également équivaut ÔC
a la même force que c e u x - c i, fans que les mâles puijjent
s'aider de ïaccroiffement, & qu’il ne faut que l’expreiïion ou
du premier ou des derniers. Il n’y a abfolument rien dans le
pairage de l’Auteur qui indique qu’il ait eu cette idée ;
fie tous fes termes n'ont été employés que pour exprimer
bien difertement l ’idée contraire.
P a r rapport aux deux Sentences de la C o u r , rappor
tées dans la note manuferite de M e. Gilbert Marie , les
Demandeurs perfiftent toujours à dire « que l ’exiftence
» légale de ces Sentences n’eft point prouvée; qu’il fe» roit facile de les trouver au G reife, fi elles n’étoient
» pas chimériques, & que cependant elles ne font pas pro~
» duites.
Mais les Demandeurs ne pourront plus faire ce reproche :
on a trouvé ces Sentences au Greffe & elles feront jointes
à la produ&ion de M e. Bagès. Celle qui a été rendue dans la
famille des TitaiTon., eft en date du iy juillet lô^o ; & celle
d’entre les héritiers du Chanoine U rio n , d’Aigues-Perfe*
eft du 9 feptembre 1662.
L a premiere de ces Sentences n’étant point datée dans
la note de M e. M arie, on auroit été dans rimpoifibilité de
la trouver au Greffe. Mais on a fait cette découverte, avec
le fecours d’une autre note manuferite de M e. Conful 3 annota
teur de Bafmaifon, dans laquelle cette Sentence s’eft trouvée
datée; & M e.C onful annonce qu’il a tiré fa note des manuferits
de M e. d’A n jo ly , A v o c a t, dont le nom eft encore c o n n u au
Palais.
�Palais. O n va tranfcrire la note de M e. Conful qui forme
une nouvelle autorité en faveur de M c. Bagès. Quoi quen
tiennent les Avocats de la Cour, quand le pere legue le quart
aux mâles > ù les itijlitue pour le furplus avec les f ille s , on a.
toujours jugé en ce Siège que la portion des filles accroît aux
mâles tant feulem ent, bien quon die que le teflament cfi un
acte. indivis, fie judicatum pour les Titajfon, en ce Siège ,
le i 5 ju illet zô^o.
Ce que le P araphrajle rapporte a été obfervc au partage, de'
la fuccejjion de Meffire Antoine de M urât, Criflopke de Murât
J'on frere, Secrétaire du Roi , ayant pris le droit d’ accroijje- •
ment avec le légat du, quart. E x d’A n joli (a).
Mais, ajoutent les Demandeurs, les efpeces particulière»
de ces Sentences ne font point connues.
( a ) Me. Andraud eft dépofitaire du manuferit d’où cette note a été tirée. Il s’eft
rendu certain que Me. Conful en eft l’Auteur. Ce Jurifconfulte a occafion de d ire,
fans fe nommer, qu’en une certaine année il étoit échevin de Riom & que M.
Dubois étoit ion collègue. Et M e. Andraud a vérifié fur les Regiftres de la V ille
qu’en l’année indiquée, Me. Conful étoit effectivement échevin avec M . Dubois.
D ’ailleurs il y eft parlé des notes faites fur la paraphrafe de Bafmaifon, comme
étant l’ouvrage de l’Auteur même du manuferit. On a tout Heu de préfumer que
ce manuferit précieux dans lequel on trouve rapporté un nombre prodigieux de
Sentences de la C o u r, a fervi de matériaux à un ouvrage entrepris par M e. Conful
fur notre Coutum e, dont Mes. Berroyer & de Lauriere parlent dans la Bibliothèque
des Coutume»y ou que peut-être il eft une partie de cet ouvrage. « On prétend,
" difent ces Jurifconfultes, au mot Auvergne , page 84, que; Me. Conful, qui a .
M fait des notes fur Bafmaifon, avoit auifi laiffé un Commentaire entier, dont une
>J partie s’eft perdue chez feu M . de Joncoux, Avocat au Parlement, qui étoit
^ du pays. Si le Compatriote qui a ce fragment, a autant,de zelç pour le public
” Hu en avoit M , de Joncoux, il fera bientôt réuni & ' confacré à leur commune
* Patrî«.
.
.j
s.i
ii Xivii
D
�z6
11 eft aifé de réfuter cette obje&ion.
Quoiqu'on ne trouve pas dans ces deux Sentences les
termes des teftamens qui faifoient la difficulté, parce que les
pieces y font Amplement défignées ôc datées, fans qu’on
faife aucune mention de leur teneur., on ne peut douter que
ces Sentences n'aient jugé en thefe la queftion qui nous
divife.
i° . Leurs difpofitifs le prouvent. Ils portent que les mâles
prendront au partage, en vertu du droit d’accroifTement, les
portions des filles forclofes, outre & par-deffus le quart fi
eux légué en préciput, & ce privatïvement & à /’exception des
autres fille s non mariées par le pere.
2°. D ’après le récit de l'efpece de la Sentence de 1 662 y
rapportée par M e. M a rie, on voit qu’elle étoit abfolument
femblable à la nôtre. Sed quid in hac fp e cie ? dit-il, le pere
donne le quart en préciput à fe s mâles , & au réfidu de f i s
biens > les inflitue 6* fe s filles à marier , héritiers p ar
égales portions. On juge en ce Siège pour Vdccroifjement
etiam in hac fpecie. O r , il faut, fans doute, s’en rappof"
ter à ce que nous attefte M e. M a r ie , puifqu’il avoit écrit
pour les filles qui demandoient le partage des trois quarts
dans la fucceiïion du Chanoine Urion. Cela eft prouvé p3^
le vu de pieces de cette Sentence. Avertijfement, y
d it , des Défendeurs, figne M arie, Avocat en ce Siège. M *Marie dit que les Avocats du Parlement s’étoient d é c id é
en faveur des filles; & efFe&ivement le même vu de pieces
fait mention d'un avis de Confeil, figné Chambeu & Cantoh
Avocats à P aris, employé pour plus amples avertiffemenst
de la part des fille s . Mais ce Jurifconfulte foumet fon o p i
nion à la Jurifprudence de la Cour. Contra judicatum, dit-il*
�27
in nojîra Curia, & cela a pajfé en maxime pour le droit d ac~
croisement. Il fait prévaloir les raifons qui. ont donné lieu a
cette Jurifprudence aux moyens qu’il avoit déduits pour les
filles, & qu’il expofe en fubftance.
3°. L ’efpece de la Sentence de 1630, rendue entre les
TitafTon, eft bien conftatée par la note de M e. Con ful, en
ces termes, quand le pere legue le quart aux mâles & les
infiitue pour le furplus avec les f ille s , on a toujours ju g é , &c.
6c encore par c e u x - c i, ce que le Paraphrajle rapporte a été
obfervé au partage de la fuccejfion de Mejfire Antoine de
Murât. O r , il n’y a pas d’équivoque fur l ’efpece propofée
dans la paraphrafe de Bafmaifon. E t ce qui ;pt*ouve l’exaclitude de la note de M®. C o n fu l, c ’eft qu’il d it, quoi qu}en
tiennent les Avocats de'la Cour, c’eft-à-dire, du Parlement;
& , en effet, la Sentence de 1630 énonce encore leur
confultation en faveur des filles. Mais les mâles en rapportoient une autre ou des Avocats du Parlem ent, ou de ceux
exerçans en ce Siège.
E nfin, les Demandeurs fe retranchent fur une obje&ion
qui eft ridicule. Ils difent que « fi les Sentences de la
» Cour font réelles; ellfes font intervenues, fans doute j
» fur des teftamens, où le prélegs du quart en faveur des
» mâles avoit été fuivi d’une fimple inftitution, tant des
» mâles que des filles dans les trois quarts, fans exprefllon
» formelle de L’ égalité, comme dans l’efpece propofée par
» Bafmaifon.
O n a déjà remarqué que la différence que les Deman
deurs mettoient dans la maniéré d’exprimer j de la part du
d a t e u r , l’égalité dans les trois quarts entre lé mâle &
D a
�as
les -filîes à marier, étoit chimérique. L Jinftitutio.n pure &
fimple qui feroit faite à leur profit quant aux trois quarts,
emporteroit la même idée d’égalité qui pourroit être atta-J
chée à ces m o ts , également, par égales portions. Il s’agit
feulement de favoir il dans les efpeces des Sentences j il
réfultoit de la lettre du teftament, c^ue le pere avoit paru
vouloir rendre égaux le fils & les filles non mariées, quant
aux trois quarts, fans s’expliquer fur le droit du fils de
repréfenter les filles forclofes. O r , on ne fauroit douter
que les efpeces de ces Sentences ne fuifent telles n on-feu
lement d’après les termes dans lefquels s’expliquent M ts.
Marie & C o n fu lj en les rapportant, mais encore d'après les
moyens que les filles employoient & ceux qu'on leur oppofoit. L e tejlametit ejl un aâe individu, difoient les filles,
les mâles ne peuvent pas approuver la difpofition à eux faite
du quart en préciput, qu’ils n’approuvent en même temps la
difpofition faite en faveur de leurs fœurs non mariées des
portions des filles forclo fes, fans égard pour raccroiifement. Les mâles répondoient : Après le légat du quart,
linflitution aux trois quarts rejlans eft inutile, puifque les
trois quarts fon t acquis aux héritiers ab - inteftat s fans y
pouvoir être contrevenu. N ’eft-il pas évident que le teftament préfentoit l’idée d’égalité quant aux trois quart* entre
le fils & les filles? Mais cela ne fuffifoit pas relativement
aux principes particuliers de notre C o u tu m e , parce quâ
le pere nJavoit pas dérogé expreifément à la loi de l ’accroiifement ; il n’avoit pas déclaré qu’il n’avoit fait le
legs du quart à fon fils, que fous la condition qu’il ne prendroit pas raccroiifement dans les trois quarts reftans. E t
voilà pourquoi les filles fuccomberent. O r , cette condi-
�39
tion manque également dans le teftament du fieur Bagès.
Il
y a plus, la qualité d‘héritiers de droit que le fieur Bages
pere a donnée à fon fils & à fes filles non m ariées, le m otif
de fa difpofition, qu’il a expliqué, font des circonftances du
plus grand poids pour M e. B agès. Elles prouvent que fon
pere n’a entendu parler que d’une égalité relative à la lo i,
& non d’une égalité abfolue. Ces circonftances ne fe rencontroient point dans les efpeces des Sentences de la C our;
cependant elles ont jugé en faveur des m âles, & elles ont
été recueillies par les Jurifconfultes , comme devant faire
ceffer toutes les incertitudes qui s’étoient préfentées fur la
queftion qui nous divife. Les demandeurs peu ven t-ils fe
flatter férieufement de les faire renaître?
«
Monfieur le L I E U T E N A N T - G É N É R A L , Rapporteur.
M e.
G R E N IE R ,
A vocat.
H o
m j
Procureur.
*> k '2/
, *
A R lO M ,chez
S'
M artin
-----®
. 0 -/ 1
, v------ » , ______
D É G O U T T E , Imprim eur-Libraire,
près la Fontaine des L ig n es, 1782.
�
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Factums Baron Grenier
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bagès, Jean-Nazaire. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Hom
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Second mémoire pour maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine De Pons, chevalier, seigneur de Belestat, son curateur, à l'effet de l'autoriser, défendeurs et demandeurs. Contre maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de ses enfans, héritiers de défunte Marie Bagès, leur mère, ayant repris en son lieu et place ; sieur François Malbet, et demoiselle Elisabeth Bagès, sa femme, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs. Note manuscrite : « par sentence du 19 août 1782 au rapport de M. de Sampigny, lieutenant général jugé en faveur du sieur bagès unanimement. Les juges étaient au nombre de seize. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
BCU_Factums_B0110
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0111
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Rights
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secondes noces
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testaments
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MÉMOIRE
PQ U R
Me J
e a n
N a za ir e
Parlem ent, & Meff i re A
n t o in e
B A G È S , A vocat
en
D E P O N S ., C h evalier,
S eign eu r, Marquis de B elleftat, fon curateur
à l ’effet
de l'autorifer, Défendeurs & Demandeurs.
C O N T R E M e C h a r l e s J U G E , Procureur en la Cour
Demoifelle M a r i e B A G E S , fo n époufe de lui autorifée Demandeurs & Défendeurs ;
E t encore contre Sieur F r a n ç o i s M A L B E T , Bourgeois
Demoifelle E l i s a b e t h B A G È S , f o n épouf e , auffi
de lui autorifée y Intervenans & Demandeurs.
ù
Voluntatis defuncti quæftio in æftimatione Judicis ef t
L . 7 Cod. de Fidéic,
M
E. Bagès réclame , dans la fucceffion de fon p ere,
le quart quJil lui a légué par fon teftam ent & encore les
Portions des filles forclofes en vertu du droit d'accroiffeA
�m ent., dont Ton pere n’a ni entendu ni pu le priver. Les
Demandeurs foutiennent que d’après cet a¿te , M e Bagès
n’a que le droit de prendre ou le quart ou l ’accroiffem ent,
mais qu’il ne peut pas demander l ’un ‘Ôc l ’autre. O n fe propofe d’établir que les principes ôc la jurifprudence s’élevent
à l’appui de la prétention de M e Bagès.
J f
X
Æ
A
fieur Jean B agès, bourgeois, a été marié deux
fo is , & a laiiTé fix enfans. Il a eu trois ‘filles de Ton pre
mier mariage avec la. demoifelle D aureilhe, & .de Ton fécond
mariage avec la demoifelle F a u c h e r f o n t 'iiîu s M e Bagès
& autres d'eux filles qui font les dames Juge & M albet.
D é fu n t
L e s'tro is filles du premier lit ont été mariéès du vivant
de leur pere,* fans réferve d ’eipoir fucceiïif : favoir; l’une
avec le.fieur G la d e l, N otaire, à Saint-Ylaire ; l’autre avec
le fieur P a g è s , bourgeois a L avou tte ; & la troifieme avec
le fieur Pradier, marchand à Brioude. Ces trois filles font
par conféquent forclofes de la'fucceilîon de leur perej d’après
la Hifpofition de notre Coutume.
• L e 20 avril 1765 , le fieur Bagès fit fon teftam ent, dont
on croit devoir tranfcrire ici les ternies.
. ,
D onne & lègue ledit fieur tefiateur a Jean-Nai^aire Bagès ,
f o n fils & de dame Marguerite Faucher, le quart
'quatrième
■partie de tous & un chacun fe s biens , meubles & immeubles,
en quoi quils puiffent confifter : la jouijfance duquel quart
çi-dejfus dànrre, ledit fieur tefiateur veut & entend • quelle
'■appartienne à .ladite dame Faucher , fo iv époufe, fiifqües à
4a majorité dudit Jean-Na^aire Bagès ,'leù r f i l s , dont il lui
�en fa it legs; & à Fégard des autres trois quarts, ils feront^
partagés par égales portions entre Ifabeau & M arie , & ledit
Jean-Naraire Bagès, fe s trois enfa n s , & de ladite dame Mar
guerite Faucher , qui fo n t fe s héritiers de droit, attendu qu il
a. fiffifa m m e n t doté fe s trois filles de fon premier mariage
avec demoifelle Catherine Daureilhe ; lefquelles il entend quelles
ne puiffent rien prétendre dans fa fucceffion.
Long-tem ps après le décès du iieur Jean B agès, la dame
Juge a fait aiîigner M e B agès, pour venir à divifion 6c par
tage de la fucceffion paternelle. L a dame M albet eft inter
venue dans l’inftance j pour adhérer aux conclufions prifes
par fa foeur.
M e Bagès a déclaré qu’il confentoit au partage ; mais il a
ioutenu qu’il devoit prélever d’abord fur la m afle.de la fuc
ceffion, le quart qui lui a été légué., ôc qu’il devoit enfuite
prendre" dans les trois quarts reftans fa portion , ainfi que
celles des trois filles forclofes, en rapportant les dots qui
leur ont été conftituées ; que la fucceffion devoit être divifée
en huit portions, dont fix appartenoient à M e Bagès rfavoir;
deux qui font le quart dont il eft ■
légataire ; trois comme
repréfentant les trois filles forclofes , & une qu’il amande
de fon ch ef, comme héritier; enforte que les dames Juge
& M albet étoient réduites chacune à un huitième.
E lle^ o n t combattu ce calcu l, en foutenant que le pere
par fon teftament avoit difpofé par égalité des trois quarts
de fa fucceffion entre les trois enfans de fon fécond ma
riage ; que ces m o ts , par égales portions, excluoient M e
Bagès du droit d’accroiflem ent.. Elles ont prétendu qu’il
réfultoit de cesr termes que le. legs n’avoit été fait au. fils
que fous la 'condition .q u il ne pouvait pas. demander; la c n
A z
�4
croiffement. Si vous contrevenez, ont-elles d it, à la condi
tion fous laquelle ce legs vous a été f a it , vous devez le
perdre ; ou , en l ’acceptant, vous devez renoncer à l ’accroiffement.
O n va démontrer que cette prétention eflr fondée fiir uneerreur..
■
&
nJignore que-dans notre Coutum e les por
tions des filles forclofes accroiflent aux mâles exclbfivem ent
aux filles non m ariées, & que le pere ne peut les en priver
direftement ni indire&ement. O n ne fuit point dans la ju rifprudence la Note- de M e Charles D um oulin , fur l ’art.
3 1 du tit. 12 j N ijî difpofitum fu erit in . . . . tejlamento parentis:
L e mâle tient Kaccroiflement de lavloi qui ne peut pas être
détruite par la volonté du pere.
Il faut cependant convenir que M e Bâgës ne pourroit pas
demander tout-à-la^-fois le quart des biens de fon pere ÔC
le droit d’accroiiTement, fi le legs de ce quart lui eût été
fait fous la condition qu elles filles^mariées participeroient
aux portions des filles forclofes. I l s’éleveroit alors con
tre lui ce principe fi connu, que-le teftateuf'peut'm ettre à
fa libéralité telle condition qu’il lui plaît.
Mais le teftament du fieur Bagès n ej renferme point cette
condition : on ne peut l’en faire réfulter de quelque maniéré
qu’on l ’interprete, foit qu’on s?arrête à 1la lettre, foit qu’on
cherche à en pénétrer l’efpriti
. U n legs eft conditionnel lorfque le teftateur déclare net
tement qu’il n’appartiendra au légataire-, qu’à condition qu’il
fera une certaine chofe> ou qu’un certain événement arriP ersonne
~h~ I V iT V U
i a o dir jë j y
�vera :on en trouve quelques formules dans les loix. Si Titius
in Capitolium, afcenderit, f i navis e x AJtâ venerit, fi cutrt
Titiâ- nupferit ei talem fundum do y lego. V o ilà une difpofition conditionnelle. T itius ne pouvoit pas demander fon
legs j s’il n’ ëtoit monté au Gapitole ^ fi le vaifieau n’étoit
revenu d’A fie , s’il n’avoir pas époufé' T itia.
Pour qu’une difpofition ait les cara&eres d’une condition,
il faut qu’elle paroiiTe avoir occupé le teftateur autant que
fa propre libéralité; qu’elle ait été même le premier objet
qui fe ioit préfenté à fon e fp rit, de maniéré que le legs:
lui foir. entièrement fubordonné, & qu’il s’évanouiifè, fi la
condition n’eft pas exécutée. Si Capitolium afcenderit, ei
talent fundum do.
Rapprochons ces idées fim ples, mais vraies du teftament
du fieur B agès, & examinons s’il renferme la condition fur
laquelle les Demandeurs fe fondent.
I l lègue lè quart de fon bien à fonr fils ; il eft' vrai qu’il
ajoute qu’à l'égard des autres trois quarts, ils feront parta
gés par égales portions entre l u i '& fes fœurs non mariées;
Mais cette derniere claufe ne préfente certainement pas une
condition-dont le legs du quart doive dépendre. L e ; teftateur
ne dit pas qu’il entend déroger au droit d’âccroiiTement dé
féré au mâlè par la C o u tu m e, en confidération du legs qu’il
lui fait; il ne dit & il n’infinue nulle p art, que la privation
de l’accroiflement ait été la caufe impulfive de fa libéralité;
O n ne peut donc pas fuppléer cette condition., dès qu’elle
ne réfulte en aucune maniéré du teftament.
I l eft d’ailleurs de toute impoiïibilité de fuppofer que le
teftateur ait été animé de cet efp rit, il l’on fait attention
^u itig n o ro it le- droit d’açcroiffement que la,Coutum e réfer-
�6
voit à’ fon fils: O n n’eft pas réduit ici à une fimple préfomp-,
tion de cette ignorance, qui cependant fuffiroit en matiere
d’interprétation ; la preuve en réfulte du teftament même :
en ■effet rappelions la fécondé claufe. E t à L'égard des
autres trois quarts , ils feront partagés par égales portions en
tre Ifabeau & Marie & ledit Jean-Naraire B agès , fe s trois
enfans & de ladite damé Marguerite Faucher , qui fo n t fe s hé
ritiers de droit. N e réfuite-t-il pas évidemment de ces exprefiiofis , qui fo n t fe s héritiers de droit, que le (leur Bagès a
cru que fa fuccelïion étoit déférée par égales portions à fon
fils & à fes deux filles non mariées? Il ne lègue à fon fils
que le qu art, parce que c Jeft la feule délibation que la loi
lui permette de faire à fon hérédité; & s’il dit que les autres
trois quarts appartiendront par égales portions à fes trois enfans du fécond lit , cJeft parce qu’il ignore que la loi en difpofe différemment; mais.il eit certain qu’il n’entend pas bleiTer
cette loi. & intervertir l’ordre qu’elle établit dans fa fucceffion entre fes enfans, puifqu’ii les confidere comme fe s hér
ritiers de droit. Il les fuppofe plutôt fes héritiers des trois
quarts, qu’il ne difpofe des trois quarts en leur faveur.
Plus on approfondit ces' mots ,. qui fo n t fe s héritiers de
droit , plus on eft convaincu que le teftateur a entendu abanr
donner ces tr,oi§:quarts au voeu de.la Coutum e. E n effe t, s’il
eût voulu qu’ils euilent été,divifibles pat^égaleç, portions
entre fes trois enfans du Tecond' lit , malgré la diipofitiorç
contraire dç la Coutum e, il n’auroit pas pu d ire^ u e quant
à cette partie de. fa fu cceifion , fes enfans étoienty^i héritiers
de droit,' parce que de droit ce partage np doit' point^ fe faire
par égalité. Si donc il dit que. ces trois quarts, fe,partageront
en tue eux par égalas portions, & que néanmoins .il les appelle
�7
fes' héritiers de droit, il en réfulte nécéÎTairetnent cette co’nféquence, qu’il a cru que d’après le droit, ce partage devoit
fe faire par égales portions.
C e qui achevé de perfuader que dans cette d a u fe , E t a
l’égard des autres trois quarts > ils feront partagés par égales
portions entre fe s trois enfans & de la dame Faucher , qui
fo n t fe s héritiers de droit , le teftateür n’a pas entendu déro
g e r a la difpofition' que la loi> faifoit en faveur de fon fils :
ce font les termes qui fuivent immédiatement. Attendu qu i l
afijjîfaniment doté fe s trois filles de fon premier mariage avec
demoifelle Catherine Daureilhe , lefquelles il entend quelles
ne puiffent rien prétendre dans fa fucceffion. C e m ot, attendu ,
renferme fans doute le m otif de la difpofition qui le précédé ;
il prouve que dans cette difpofition, le teftateür s’eft..unique
ment occupé à aiïurer par fürabondance les trois-quarts de
fa fucceffion à fes enfans du fécond Ht exclufivement à ceux
du prem ier, & abftra&ion faite du plus ou moins que ceux
du fécond lit amandoient- dans ces trois quarts. L e ’ teftateur
a mis en oppofition les enfans du premier lit avëc ceux du
fécond; mais il n’a ’pas entendu mettre en oppofition les en
fans du fécond lit entr’eux ; il a voulu qu’ils fuiTent, quant
aux trois quarts , f e s héritiers de droit; & il importe peu qu’il
ait dit que la divifion s’en feroit par égales portions , dès que
tout prouve que ces mots contiennent Amplement une énon
ciation erronée fans difpofition.
Si'donc le teftateür avoit difpofé par une claufe encore plus
expreife''des trois quarts de fa’TücceiIion par égalité entre les
trois enfans du fécond lit > il ne l ’aurôit fait qué parce qu’il
croyoit’ que la 'lo i1 le voulôit ainfi. Cette difpofition feroit
1effet de l’ignorante;-dès^lors elle ne pourroit fubfiiter. E li
�8
effet, il n 'y a point de volonté fans confentem ent; & comme
le confentement n’eft autre chofe que la détermination d’un
jugem ent libre & éclairé, on ne fauroit voir de confentement
là où l ’on n’apperçoit que les traces de l'erreu r; non videtur
confentire qui errât. C ’eft d'après ce principe qu’un arrêt du
Parlement de T o u lo u fe , du
août 1630, Rapporté par M .
D o liv e , queft. notab. liv. y , chap. 1 8 , a annullé un legs
fait par un teftament. O11 croit devoir en rapporter l'efpece.
Pierre Bonecarrere., en mariant M etigineBonecarrere,fa fille,
avec Bernard D aries, lui avoit conftitué en dot 1 jo écus., & en
dédu£tion,illuienavoit payé 80: de ce mariage naquit Margue
rite Daries. M engineBonecarrere vint à décéder, & M arguerite
D a rie s, fa fille , mourut aufli bientôt après, biffant Bernard
D ariesj fon pere, & Pierre Bonecarrere, fon aïeul maternel.
E n cet état., Pierre Bonecarrere fit fon teftam ent, par le
quel il déclara qu’il vouloit que la fomme reliante de la dot
par lui conilituée à fa fille ., fût payée à Bernard Daries >
fon gend re, comme fuccejfeurz fa fille , petite-fille du teftateur. Après le décès de Pierre Bonecarrere, fes enfans nonfeulement contefterenr à Bernard Daries le paiement du reftant de la dot qui lui avoit été lé g u é , mais encore ils lui
demandèrent la reftitution de £0 écus qui lui avoient été payés
à compte de cette même dot; ils attaquèrent le legs de nullité
fur le fondement que Pierre Bonecarrere avoit ignoré que
la dot qu’il avoit conftituée à fa fille devoit lui revenir par
droit de retour., & qu'il avoit penfé que cette dot appartenoit à fon gendre3 comme héritier de M arguerite D aries,
fa fille ; ce qui réfultoit de ces t e r m e s comme fuccejfeur à
une fienne unique fille . A v e c quelque force que Bernard Daries
argumentât
�9
argumentât du teftament., il fut débouté de Ta demande en
paiement du reftant de la d o t , qui lui avoit été lé g u é , & il
fut encore condamné à rendre la partie quJil en avoit reçue.
L'arrêt fut fondé, au rapport de M . D o liv e , fur ce que le
teftateur croyait erronément, 6* par une faufje préfuppofition,
qu’ il devait à fon gendre la fomme rejlante de la confïitution
dotale...................q u i l efi vraifemblable q u il ignoroit le droit,
& principalement celui du retour qui ejl un des plus fubtiles
& des moins connus en jurifprudence . . . . . que les légats
conçus fous faujje caufe fon t quelquefois anéantis par l'excep
tion du dol, lorfqu il appert que le défunt fans cette erreur
ne fe fû t pas porté à les faire. Suivant la loi y z , §. 6> ff. de
condit. & demonjl. fed plerunique. exceptià doli locunt habebit ,
f i probetur alias legaturus non fuiffe.
JVlais fi Ton pénétré encore l ’intention du fieur Bagès
p ere, on ne penfera jamais qu’il ait entendu priver fon fils
du droit d’accroiflement. C e fils unique qui pouvoit feul per
pétuer fon nom , étoit l’objet de fon affe£tion. Il veut donc
le gratifier de tout ce que la loi permettoit de lui donner ;
cependant il feroit allé contre fon b u t, s’il eût voulu ôter
à fon fils le droit d’accroiifem ent, puifque ce droit forme
un objet plus confidérable que le quart, d’après la m odicité
des dots qui ont été conftituées aux filles forclofes.
I l y a plus. Selon le fyftême des D em andeurs, le fieur
Bagès pere auroit voulu faire un teftament ridicule : en effet,
s’il eût connu le droit d’accroiffem ent, comme ils le prétendent,
il auroit en même temps prévu que, malgré fa difpofition ,
fon fils auroit eu le droit d’opter entre le legs & Taccroiffem en t, dont il ne pouvoit pas le priver ; mais il auroit bien
compris que fon fils auroit opté le droit d’accroiffem ent,
comme étant plus avantageux, & q u e, par conféquent, fon
B
�teftament devenoit inutile. Q uoi donc! le Heur Bagès auroit
propofé à fon fils, par fon teftament, ou de préférer un legs
bien moindre à raccroiflem ent qui lui appartenoit d éjà, ou
de s’en tenir à l’accroiiTement! O n ne peut pas fuppofer aufli
peu de réflexion dans un atte de derniere volonté.
A uifi Bafmaifon qui traite la queftion qui divife les Parties,
dans fa paraphrafe fur l’art. 31 du tit. 12 de notre Coutum e,
la décide en faveur du mâle : entrautres raifons qu’il donne,
de fon avis, il dit que toutes difpofitions teftamentaires doi
vent être réduites au quart; que s’il n'y avoit point de mâle.,
les filles mariées pourroient fe plaindre de ce que leur pere a
difpofé à leur préjudice, d’abord du qmrr (?n Firniurdirrr >lf ^
êt enfuite d’une partie des autres trois quarts en faveur de leurs
foeurs non mariées. Elles auroient inconteftablem entledroitde
demander la réduüiondes difpofitions du teftament au quart., &
de venir en partage des trois quarts reftans; que comme l’exiftence feule du mâle empêche les filles forclofes de demander
cette rédu£tion, le mâle qui les repréfente peut exercer ce
d ro it, & faire réduire les difpofitions teftamentaires au quart;
que la qualité de légataire ne fauroit former aucun obftacle à
l ’exercice de ce droit, de la part du mâle., parce que les deux
qualités de mâle & de légataire ne fe confondent point dans fa
perfonne, & que conféquemment il peut prendre tout-à-la-fois
le quart qui lui a été légué & encore les portions des filles for
clofes dans les trois quarts reftans. Il ajoute que le legs du quart
doit fe prendre fur toute la maife de la fucceifion, & l ’accroiflement fur les trois autres quarts, malgré l’approbation que le mâle
auroit faite du teftament, & nonobftant que le teftateur ait voulu,
rendre égaux les héritiers inftitués , ce qu’ilfa it en tant q u ils fo n t
appellés en leurs noms propres en partage y mais n a y a n t expreffément déclaré fa volonté q iîil inftitue lefdits mâles &filles égale
�m ent , fans que les mâlespuiffait s aider de Vaccroiffement des
portions des filles mariées 3 lefdits mâles pourront prendre ledit
accroiffement (a ).
O n ne fauroic rien voir de plus précis en faveur de M e
Bagès. N e réfulte-t-il pas de ces expreiïions, que pour qu’il
ne pût pas demander l ’accroiflem ent, il faudroit que fon pere
eût expreflfément déclaré qu’il nepourroit s’aider de ce droit,
au moyen du le g s ? Sans cette claufe conditionnelle, rien ne
prouve que le pere a voulu priver fon fils du droit d ’accroiiTement qu’il ne connoiffoit pas.
E n fin , la queftion n’eit pas nouvelle; elle a déjà été foumife plufieurs fois au jugement de la C our qui lJa toujours
décidée en faveur du mâle qui étoit dans la même pofition que
M e Bagès. C ’eft ce qui réfulte d’une note manufcrite de M e
G ilbert M arie, A vocat en ce S iè g e , qui vivoit dans le fiecle
dernier. O n va tranfcrire cette note. Sed quid in hâc fpecie? Le
pere donne le quart en préciput à fe s mâles} & au réfidu de fe s
biens les inflitue & fe s filles à marier héritiers par égales por
tions. On juge en ce Siège pour Vaccroiffement etiam in hâc
fpecie. M ais le teftament étant un acte individu , j e dirais le
contraire , & que Vaccroiffement ría lieu ,• & fie confultum à
Patronis Parlamenti in nofirâ Confuetudine , ciim aliud fit fia tuendum in fucceffionibus delatis ab intefiato, & in fuccejfionibus delatis ex teftamento. Contrà judicatum in nofirâ Curiâ ,
en la caufe des Titaffon ; 6* cela a pajfé en maxime pour le droit
d accroiffement ; car après le légat du quart, ïin jïitution aux
trois quarts refians ejl inutile, puifque les trois quarts fo n t acC a ) On tranferit ce paflage de Bafmaifon , d’après l’édition donnée par lui-inême, & non d’après celle qui a été donnée par Me. Confuí, où-il s’eil
gliiTé une faute qui donneroit lieu à un contre-fens ; & c’eft ce qui a fait dire
»pparemtnent aux Demandeurs que ce paflage eft obfcur, & qu’il n’y regne
pas une merveilleufe logique.
’
¿
B a
�12
quis aux héritiers ab intejlat, fans y pouvoir être contrevenu.
E t encore ainfi ju g é fu r le commencement de feptembre 1662., au
Rapport de M . B lic h , Lieutenant-Général> en la fuccejjiondu
Chanoine Urion, d’Aigues-perfe, contre les enfans de la fille
non mariée par Ces pere & mere ains Jeulement après leur dé
cès , au profit des Urion mâles, freres du défunt.
Dans cette efpece les filles non mariées étoient bien plus
favorables que les dames Juge & M albet : en effet leur pere
les avoit inftituées fes héritieres dans les trois quarts. D ’ail
leurs il n’y avoit pas une preuve certaine, comme dans notre
eip ece, qu’il ignoroit le droit d accroiflement réfervé au mâle
par la Coutume. Néanmoins parce que le legs n’étoit point
conditionnel, les filles fuccomberent ; &. un A vocat qui a
joui d'une grande réputation., attefte qu ila paj fée n maxime,
que dans ce cas le droit d’accroiifement a lieu en faveur
du mâle.
Il ne refte a&uellement qu’à réfuter les obje&ions des cohé
ritiers de M e Bagès.
l re O
r
ejec
+p j n s e
te^ament
un a^ e indivifible. Une de fes claufes
renferme une condition relativement aux autres : il faut l’ap
prouver ou le rejeter en entier.
Pr*nc>pe eft étranger à la queftion. Pour qu’on put
l ’oppofer à A le B ag ès, il faudroit que fon pere eût entendu
déroger à la loi qui lui réfervoit l ’accroifTement, & que cette
privation fût une condition du leg s; alors il eft certain que
M e Bagès ne pourroit pas divifer fon titre. Mais lorfqu’un
te fta te « fait un legs particulier d’un objet dont la loi ne lui
permet pas de difpofer, s’il n’a pas déclaré qu’il entendoit dé
roger à cette loi ^ & s'il n’a pas chargé expreiTément fon hé-
�13
ritier inftitué ou fou légataire univerfel, de faire valoir le
legs particulier, malgré la prohibition de la lo i; alors ce legs
sJévanouit, quoique les autres difpoiitions du teftament fu b fiftent. Un exemple rendra cette vérité fenfible. Suppofons
qu’un particulier, dans la Coutum e de P aris, ait donné par
teftament une maifon qui faifoit tous fes propres ; il eft cer
tain que quoiqu’il ait des meubles & des acquêts confidérab le s, qui dans cette Coutume font entièrement difponibles
fans affeftation à aucune lig n e , fon légataire particulier ne
peut avoir que le quint de la maifon léguée : les autres quatre
quints demeureront à l’héritier du teftateur, fans que le léga
taire univerfel des meubles & acquêts, foit tenu de faire récom penfe au légataire particulier de ces quatre quints fur les
meubles ôc acquêts, fi le teftateur ne l ’a expreifément ainfi.
ordonné par fon teftament. C ette jurifprudence eft enfeignée
par Bacquet dans fon T raité des D roits de Juftice, ch. 2 1 ,
n. 160 ; elle a été confirmée par un arrêt du 15 juin 1673
rapporté au Journal du Palais, & par d’autres arrêts bien
plus récens recueillis par D e n ifa rt, au m ot réferves coutum itres , n. 17 & fuivant. L e fondement de cette jurifpru
dence eft dans l’article 205 de la Coutum e de Poitou. C e t
article défend de donner par donation entre-vifs, ou tefta
m ent, plus du tiers des propres , & il ajoute que fi le tefta
teur donne ou lègue une plus grande partie de fes propres
d’une lig n e , le légataire ou donataire n'aura pour cet excé
dent aucun recours fur les autres héritages du donateur. L ’au
teur du Journal du Palais obferve que comme il n’y a aucune
Coutume qui en ce cas marque la com penfation, il faut fuivre celle de Poitou qui dit formellement quJil n’y en peut
avoir.
. 4
.
�14
L ors de ces arrêts les légataires particuliers ne man
quèrent pas de raifonner comme font les Demandeurs,
ÿ n teftament eft un atte indivifible. L e légataire univerfel doit nous dédommager de la réduction du legs parti
cu lier, ou il doit céder tous les objets diiponibles; mais ces
raifonnemens ne purent fe foutenir à côté des principes. Il
eût fallu que le teftateur eût irnpofé à fon légataire univerfel l ’obligation de fuppléer à la rédu&ion des legs parti
culiers.
I I O bjec .
L es Demandeurs oppofent que perfonne n'eft préfumé
ignorer le dro it; que par conféquent il n e ft pas permis de
fuppofer que le Heur Bagès pere ait ignoré le droit d’accroiffement que la Coutum e réfervoit à fon fils.
réponse
I I eft vrai qu’en général la loi ne préfume point qu’on
ignore le droit; mais ce n’eft là qu’une préfomption. O r ,
comme toute préfomption difparoît devant la v é r ité , il eft
certain qu’on ne peut pas raifonnablement fuppofer qu’un
teftateur ait connu un point de dro itj lorfqu'il eft prouvé
par fon teftament m êm e, qu’il l’a ignoré.
L e lég a ta ire, qui fut condamné par l ’arrêt cité par M .
D o liv e j & dont on a déjà rapporté l ’efp e c e , faifoit bien
valoir ce moyen ; mais on n’y eut aucun égard , par les raiions déduites par M , D o live. E t ne p e u t , d it-il ,fe r v ir de dire
que le tejlateur a erré en droit , & que l’erreur du droit n e ji
pas f i favorable comme l’ignorance du f a i t ; car à cela il y a
plufieurs réponfes, i°. Cette dijlinclion d'erreurs ejl bien confidérable en madère..de contrats; mais en f a it de tejlamens ,
comme quoique le teflateur errc3 il n importe} parce que nous .
�ne confidérons en ces difpojitions que la volante qui fa u t
aujfi bien , lofquelle fe trouve enveloppée dans l ignorance u
droit , comme dans l'ignorance du fa it. Errantis enitn nul us
efi confenfus.
L
es
Demandeurs oppofent à M e Bagès une fin de non I I I O
b JEC.
recevoir qu'ils font réfulter de la difpofition de l'art. jo du
tit. 12 de notre C outu m e, qui porte que l’héritier ab inteftat
ou teftamentaire qui accepte un legs à lui f a it , approuve
par-là le teftam ent, ôc ne peut plus enfuite demander la rédu&ion au quart. Cette l o i , difent les Dem andeurs, n’a pas
befoin de commentaire. M e Bagès accepte le legs du quart
à lui fait par le teftament de fon pere; il demande l’exécu
tion de ce legs; donc il approuve toute la difpofition & or
donnance du défunt ; donc il eft tenu de l’accomplir en en
tier : or le défunt a voulu que les trois quarts de fes biens
fuiTent partagés par égalité entre le fieur Bagès & fes deux
focurs du fécond lit ; donc il doit confentir au partage.
1
C e raifonnement renferme une pétition de principe. Pour r é p o n s e
que les Demandeurs euifent pu dire que M e B a g è s, en ac
ceptant le legs du quart, a approuvé la difpofition que fon
pere a faite à fes trois ertfans du fécond lit , des trois quarts
de fes biens, par égales portions, au préjudice du droit d’accroiiTement 3 ils auroient dû prouver que cette difpofition,
qu’ils comparent à tm légat exifte. O r , on a déjà établi que
la claufe du teftament relative à ces trois quarts ne contient
qu’une fimple énonciation fans difpofition, & que s’ il y avoit
une difpofition, elle feroit nulle parce quë le teftateur igno
rait le droit d’accroiffemônt que la Coutum e réfervoit à fon
�'l'tf
fils. C e ne feroit qu'autant que le teftateur auroît déclaré
qu’il entendoit déroger à cette loi en confidération du le g s,
qu’on pourroit oppofer à M e Bagès qu’il doit adopter ou
rejeter en entier le teftam ent, félon le droit commun du
R o ya u m e, auquel il n’eft fait aucune exception par cet ar
ticle de notre Coutume.
Auifi Bafm aifon, à l ’endroit déjà c ité , enfeigne que dans
notre efpece l ’approbation que les mâles auroient faite du
teftam ent, c ’eft-à-dire, la demande de leur legs ne les em
pêche pas de réclamer leur droit d’accroiiTement qu'ils tien
nent de la loi à laquelle le pere ne peut déroger que par une
condition impofée au legs.
Ainfi dès que M e Bagès n’a approuvé en aucune maniere
la prétendue difpofition des trois quarts, au préjudice de fon
droit d’accroiiTement j dès que d’entrée de cau feil a demandé
ce d ro it, & en même temps le legs du q u a r t o n ne peut
lui oppofer aucune fin de non recevoir.
I V O b je c .
L e s Dem andeurs, ou au moins les fieur & dame M a lb et,
ne pouvant pas contefter l'application du paflage de Bafmaifon
à notre efp ece, ont cru combattre cette autorité, en difant
que ce Commentateur auroit befoin lui-même d'un commen
taire à rendroit cité ; ...............q u il ejl tombé dans une grande
méprife ; .................. quex certes , s’il fa llo it relever tous les
rêves de fo n Commentaire , ceux qui le contioiffent, & qui fo n t
inflruits de la Jurifprudence , conviendront que la lijle n e n fe
roit pas courte.
REPONSH.
a été confidéré c o m m e un favant par tous
.
_
.
v
.
» i l
fes contem porains} dans un iiecle ou régnoit le gout de la
fcience
B
a s m a i s o n
.
�fcience du D roit. L e célébré M e Charles Dum oulin 1a h o
noré de fon eftime ; M es Conful & P ro h et, qui connoiffoient
fans doute notre C outum e, ont fait l ’éloge- de fa paraphrafe.
Jufqu’à préfent il a été , pour ainfi d ire, conventi q ü o n y
trouvoit le développement du fens de la Coutum e ; une connoiiTance parfaite des L o ix Rom aines ôc des traits d’érudition
dans l’Hiftoire Sainte & Profane; cependant les Demandeurs
n’y voient que des rêves ! cela prouve qu’il y a certains lec
teurs pour lefquels Bafmaifon auroit befoin d'un Commen
taire.
%
C ’ e s t avec la même folidité & le même agrément dans le y
fty le, que les Demandeurs ont réfuté la N o t e manufcrite de
M e Gilbert Marie. On a trouvé, difent-ilsj dans .une trèsvieille Coutume d'un très-vïeux Jurifconfulte la note de deux
très -vieilles fentences. Nous répondrons que la vieillejfe
Jiefl pas ici un titre au refpecl-, ( C ’eft fans doute la
jeune Aie ) que l’ exijlence légale de ces fentences n e jl point
prouvée > ni l ’efpece fu r laquelle on prétend quelles ont été
rendues.
I l neft pas exa£t de dire que la N o te manufcrite laifle
à defirer l’efpece fur laquelle les fentences dont elle fait men
tion ont été rendues : il fufïit de la lire pour fe convaincre
du contraire.
O bjec.
réponse
Il
n’eft pas plus raifonnable d’objefter que l’exiftence légale
de ces fentences n eft point prouvée. Il a été reçu jufqu’à
préfent qu on pouvoit préfenter comme des autorités, même
ans un traité do&rinal, des jugemens qui font recueillis par
es Jurifconfultes connus. Si la critique des Demandeurs étoit
a optée, quel crédit auroient la plupart des Commentaires 3
�iS
& fu r-to u t celui d e 'M . A uroux des Pommiers fur la C o u
tume de Bourbonnois ? O n pourroit peut-être dire avec v é rité,
que ce qui fait le principal mérite de ce Com m entaire, eftim é 'à jufte titre , c’eft la compilation que kl ’Auteur a faite
avec difcernement des notes manufcrites des anciens M agiftrats ou Jurifconfultes de la SénéchaufTée de M oulins, tels
que M M . D ecu llan t, Semin , M en u del, Herouis , V in c e n t,
B riro t, B a u g y , B erg ier, & c . M o rn ac, cet Auteur qui s’eft
autant piqué d’exa£titude que de p u reté, n’a pas craint de
rapporter des jugemens d’après des notes manufcrites de Ju
rifconfultes connus : quelquefois même il n’en cite pas les
Auteurs ; il dit fur la loi
ff. de ufufr. in fine. Ulti-
mum hoc Senatus- Confultum ex manufcripto ejl Patroni
v eteris/ O n fait journellement ufage au Palais de ces autorités,
& on ne les a jamais vu com battre, en difant que ce font
de très-vieilles fentences recueillies par de très-vieux Jurifcon
fu ltes dans de très-vieilles Coutumes.
Mais , difent les Dém andeurs, fi ces fentences eufient fixé
la Jurifprudence’,' quand elles ont été rendues, elles auroient
été recueillies par M e Prohet qui a dû profiter des lumieres
de M e G ilbert M arie, fon beau-pere.
O n ignore actuellement les circonftances qui ont pu déro
ber à M e Prohet la connoiiTance du manufcrit d’où cette note
a été tirée. C e qu’il y a de vra i, c ’eft que s’il étoit permis de
fortir des bornes de la difcuflïon du procès, pour faire l ’apo
logie de ce m anufcrit, on convaincroit que M e Prohet s’en
feroit fervi u tilem en t, s’il l’eut connu. O n a recueilli dans
le manufcrit plufieurs fentences & arrêts rendus fur des ma
tières intéreifantes qu'on ne trouve pas dans le Commentaite.
Certains jugemens , rapportés par M e P ro h et, font dans le
�19
m anufcrit, mais avec le récit de l’efpece omife par le C om
m entateur, qui cependant i n f l u e beaucoup fur l ’ idée qu il faut
fe former du préjugé. I l y a plus : M e Prohet y eft quelque
fois réformé ; par exem ple, fur l’art, 1 du tit. 2 3 , il cite un arrêt
rendu entre la dame N od iere, époufe du fieur de V illem o n t,
& le fieur F a y o lle t, fous la date de l’an 1 6 8 1 . L a copie de
cet arrêt, fignifiée à Procureur, eft dans le manufcrit;, mais
il eft daté du 27 mai 1682; & l’on y voit que la dame N od iere,
lors de la fentence & de l’arrêt, étoit veuve de M e C o n fu l,
A vo ca t, exerçant en la Cour. Ces obfervations ont été faites
par l’Auteur du manufcrit qui remarque l’erreur de M e Prohet.
E nfin, ce qui eft fans doute un titre de recommandation pour
cette note m anufcrite, c’eft qu’elle a été tranfcrite & recueil
lie avec foin par feu M e Brugiere de Barante.
M e Bagès peut donc invoquer en fa faveur les principes,
l ’autorité particulière de Bafmaifon & la Jurifprudence de la
C o u r , formée par plufieurs jugemens rendus après la difcuffion la plus opiniâtre : s’il échouoit avec de pareils garans,
y auroit-il une vérité en Jurifprudence qu’on n’effayât de
rendre problématique ?
Monfieur le L IE U T E N A N T - G É N É R A L > Rapporteur
.
Me G R E N I E R , Avocat.
H o m , Procureur.
A R I O M , ch ez M a r t i n
D E G O U T T E , Imprimeur - Libraire ,
près la Fontaine des L ignes, 1781.
�
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Factums Baron Grenier
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A name given to the resource
[Factum. Bagès, Jean-Nazaire. 1781]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Hom
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire pour maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine de Pons, chevalier, seigneur, marquis de Bellestat, son curateur, à l'effet de l'autoriser, défendeurs et demandeurs. Contre maître Charles Juge, procureur en la Cour ; demoiselle Marie Bagès, son épouse, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs ; Et encore contre sieur François Malbet, bourgeois, et demoiselle Elisabeth Bagès, son épouse, aussi de lui autorisée, intervenans et demandeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1781
1765-1781
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
BCU_Factums_B0108
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0110
BCU_Factums_B0111
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lavoûte-Chilac (43118)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
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3165fdc4966a60d05146bd2a44a09d30
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Text
HILLIARD , cotuteurs
D u m o n t , appelans;
P o u r les sieur et dame
de la demoiselle
RABUSSON
D E VAURE et D E L A R O Q U E intimés.
C o n t r e les sieurs et dames
,
L E S O U S S I G N E , qui a lu le mémoire imprimé
pour les sieur et dame H illiard, cotuteurs de la demoi
selle D u m o n t, appelans, contre les sieur et dame R a
busson de V a u re, et contre le sieur de la Roque, intimés-,
qui d’ailleurs connoissoit déjà la contestation, sur les
pièces originales qui lui avoient été communiquées à
P a ris, afin de connoître son opinion,
E s t d ’ a v i s que la prétention des sieur et dame
Rabusson de V a u r e , et du sieur la R o q u e , est absolu
ment destituée de fondement, et que le jugement rendu
par le tribunal civil de Gannat doit être infirmé.
O u n’a pu soutenir cette prétention qu’en se créant
Une fausse logique, à l’aide de laquelle on n’a pas craint
d’attaquer tous les principes.
Quand il y auroit quelque subtilité dans les raisonnemens des sieur et dame Rabusson de V au re, et du sieur
de la R o q u e , cette subtilité n’échapperoit certainement
pas aux lumières de la cour d’appel ; mais il est constant
A
�•> I
(
2 )
que ces raisonnemens n’ont pas même le triste mérited’etre subtils.
L e droit de la mineure Dum ont prend son fonde
ment, et dans les clauses des conti'ats de mariage de Marie
et Marguerite D u m o n t, filles de Jean Dumont et de
Procule P it a t , et dans les dispositions de l’article 3 o 5 >
de la coutume du Bourbonnais.
On sera dans la v é r i t é , en conciliant les unes avec
les autres , en considérant les conventions établies dans
les contrats de mariage comme des modifications à la loi
municipale ; modifications uniquement avantageuses aux
filles qui se marioient, et contre lesquelles elles s’élèvent
avec une injustice qui tient du ridicule. En partant de
là , on sera conduit à cette, conséquence certaine, que
M a r i e et Ma rg u er it e D um ont n’ont dû avoir que la partie
des biens de leurs père et mère qui leur a été assurée
par leurs contrats de mariage , et que tout le surplus
est devenu le patrimoine d’A n d ré Dumont.
R e m e t t o n s -nous encore sous les yeux les clauses du
contrat de mariage de Marie D u m o n t, fille aînée, en
observant qu’elles feront connoitre aussi les clauses du
contrat de mariage de Marguerite D u m ont, fille puînée,
parce que, malgré quelques réflexions qu’on a faites pour
établir une différence entre ces clauses, il sera aisément
reconnu , lors de la discussion générale des mo yens , qu’il
n’y en a aucune, et que les clauses du second contrat se
réfèrent entièrement à celles du premier.
Les filles furent instituées héritières par égales portions
avec les antres enfans; mais ce fut en même temps sous
la r é s e r v e expresse que Jean Dumont et Procule Pitat.
�(3 )
se firent de la terre de M on t et autres objets. Il fut dit
que les sieur et dame D u m o n t, ou le survivant (P eu x,
pourroient disposer des objets réservés, nu profit de tels
de leurs enfans qu’ ils jugeroient à propos , môme de la
future, par quelqu’acte que ce fût. Il fut ajouté que dans
le cas de non disposition de la part des père et m è r e ,
la terre de M o n t , et les autres objets réservés, appartiendroient en toute propriété à André D u m o n t, leur
fils, lequel en demeureroit précipité.
A la suite de ces dispositions 011 inséra encore la clause
suivante : « L a d ite institution f a i t e sous ladite réserve,
« et ¿1 condition de ladite disposition , et encore i\ la
« charge par la future de laisser jouir le survivant de
« ses père et mère de la portion qui lui seroit revenue
« dans les biens du prédécédé ; sans toutes lesquelles
« charges , clauses et conditions ladite institution
« n ’ a u r o i t é t é f a i t e , et la future auroit été apanée
.« moyennant la dot qui va lui être constituée. »
V ien t ensuite la constitution de dot, faite en avance\ ment des futures successions, de 30000 livres.
Procule Pitat décéda en 1783, sans avoir fait d’autres
dispositions que celles contenues dans les contrats de
mariage de ses filles.
A n dré D u m o n t, son fils , se maria en 1789.
Par son contrat de mariage, Jean D u m o n t, son père,
rappelant le défaut de dispositions ultérieures de la part
de Procule P ita t, son épouse, et la faculté de disposer
accordée au survivant d’eux par les contrats de m a r i a g e ,
disposa à son prolit de la totalité des réserves portées
par ces mêmes contrats.
A 2
�( 4 )
'
r
.
Contester cette disposition, en ce qui concerne Procule
P it a t , c’est attaquer l’évidence. Cette disposition doit
autant avoir son effet que celle faite personnellement par
Jean Dumont.
P o u r s’en convaincre encore plus, il faut rapprocher
des conventions et des faits qu’on vient de rap p o rter,
les dispositions de l’article 305 de la coutume de Bour
bonnais : « Fille mariée et apanée par père ou par
« m è r e , aïeul ou aïeule paternels ou maternels , après
« le décès de ses père ou m ère, aïeul ou aïeule paternels
c< ou maternels, ne peut demander légitime ni supplé« ment d’icelle, ni aussi venir à succession collatérale,
« dedans les termes de représentation, tant q u 'il y a
'« mâle ou d e s c e n d o n s d e m â le , soit mâle ou femelle,
« héritant ès-dites successions , combien qu’elle n’y ait
« expressément ren on cé, etc. »
A quoi se réduisent les conventions établies par les
contrats de m ariage, combinées aVec les dispositions de
la coutume.
Il n’est pas exact de d ir e , ainsi que le répètent sans
cesse les intim és, et comme on le voit dans le jugement
dont est appel, que Jean D um ont et Procule Pitat n’ont
pas apané Marie et Marguerite Dumont; que s’ils eussent
voulu que leurs filles fussent réduites à un apanage, ils
se sei’oient servis d’expressions qui ne laisseroient aucun
doute sur leur volonté.
Q u’ont fait Jean D um ont et Procule Pitat? Ils avoient
le pouvoir de forclore ou apancr leurs filles, et de les
réduire à une dot; mais par attachement pour elles, pour
les marier pins avantageusement, et dans les vues d’un
�(
5 )
arrangement salutaire à leur fa m ille , ils ont voulu ne
pas exercer en son entier la faculté que leur donnoit la
loi. Ils ont jugé à propos de limiter le droit de forclore;
mais la limitation d’un droit n’en est-elle pas l'exercice
même ? et celles contre lesquelles l’exercice de ce droit
pouvoit être dirigé dans toute sa fo rce , peuvent-elles
se, plaindre d’une limitation qui est entièrement à leur
avantage ?
Sans doute M arie et Marguerite D um ont ont reçu,
par leurs, contrats de m ariage, le droit de participer,
comme héritières conventionnelles, aux successions de
Jean D um on t et de Procule P ita t; mais ont-elles été
investies de ce droitt d’une manière indéfinie ? Ce droit
art^il été la base fondamentale des conventions de leurs '
contrats de m ariage? a - t - i l été accordé comme étant
l’effet d’une volonté absolue de Jean Dum ont et de
Procule Pitat? art-il été créé dans toute l’étendue possible,
sans conditions, abstraction faite des dispositions de la
loi municipale, et de la faculté de forclore qu’elle attribuoit à J e a n .D um ont et à Procule P ita t?
Il faudroit aller jusque-là pour soutenir la prétention
dep intimés ; aussi n’onti-ils pas manqué de se placer
dai^SiCette position»
Mais p o u r. peu qu’on réfléchisse suv. les dispositions
faite? , paTf.les contrats, d e , mariagi?. , on est convaincu
quelles n’ont,jamais-étç détachées de l'influence que la
loi municipqlç exçrçoitsur lç sort de M arie et Margperiter
Durp.qotj au mpment de leu 3ç;rnqpiage, lorsque la volonté
desppère; etf mère, concouroit ,qvoç le yœ,u de. la loi..
Lovsqu’jlos’agit/ d’intçrprétqp dps clauses do, contrats
A 3
�de m ariage, de démêler les vues qui ont présidé à des
arrangemens de fam ille, on ne doit pas toujours être
asservi à un ordre d’écriture. O r , en se pénétrant de
l ’ensemble des dispositions des contrats de mariage de
M arie et Marguerite D u m o n t , il devient évident pour
tout homme qui recherche la vérité de bonne fo i, que
l ’apanage ou la forclusion moyennant une d o t , ont été
la première idée qui se soit présentée à l’esprit des contractans, et que la seconde idée a été la limitation de
ce droit que les père et mère n’ont point voulu exercer
dans toute la rigueur.
L ’attribution que Jean D um ont et Procule Pitat ont
accordée à leurs filles, du droit de leur succéder, mais
non par égalité avec leur fils, et sous des réserves posi--'
tives et déterminées, stipulées en faveur de ce fils auquel
la l o i , de son propre ministère, les déféroit; cette attri
bution, disons-nous, n’a pu être autre chose qu’une
exception h la forclusion , ou une limitation du droit
de forclore. L e droit de succéder qu’ont eu Marie et
M arguerite D u m o n t, n’est point émané de la loi ; il a
été l’effet de la volonté des père et mère : ceux-ci avoient
le droit de les en p r iv e r , ils le leur ont accordé, mais
ils ne l’ont pas fait pleinement ; ils ont mis des bornes
à ce d ro it; ils ont voulu qu’il ne portât que sur une
partie des biens ; et en voulant cette restriction, ils ont
entendu que le restant des biens demeurât sous l’empire .
de la loi qui les attribuoit au fils, s’il n’en étoit pas
privé dans la suite par la volonté des père et mère.
T o u t ce qu’on vient de dire résulte de ces termes qui
s’élèveront toujours avec la plus grande force contre la
�C7 )
prétention des intimés : « Ladite intitutîon fa it e sons
« ladite réserve, et à condition de ladite disposition..,. « sans toutes lesquelles charges , clauses et conditions
« ladite institution n ’ AUROIT é t é F A I T E , ET LA
« f u t u r e a u r o i t é t é a p a n é e moyennant la dot qui
« va lui être constituée. »
Si Jean Dum ont et Procule Pitat eussent apané
M arie et Marguerite Dum ont moyennant une dot ,
elles n’auroient rien à prétendre dans les successions de
leurs père et mère ; Jean D um ont auroit eu seul le droit
de recueillir ces successions, en payant les dots. C ’est
un point qu’on ne r év o q u e pas en doute.
E t parce que Jean D u m o n t et P r o c ul e Pitat ont
voulu adoucir le sort de leurs filles ; parce qu’ils ont
voulu modifier en leur faveur le pouvoir qu’ils tenoient
de la lo i; parce qu’ils ont accordé qu’elles eussent, môme
à titre d’héritières conventionnelles, une partie de leurs
biens, outre la dot qui leur étoit constituée, mais en
réservant le restant et en confirmant la destination que
la loi en faisoit à leur fils, on prétendroit qu’il est résulté
de là que les filles sont devenues tout à coup habiles à
succéder, comme si leurs père et mère n’avoient jamais
eu le droit de les priver de leurs successions, comme s’il
n’y avoit point eu d’enfant m â le , et de la même manière
que si le droit de forclore les filles, y ayant un enfant
m âle , n’eût jamais existé !
Quelles sont les personnes qui pourront jamais être
convaincues de la vérité d’une pareille proposition ? C ’est
un principe élém entaire, indiqué par la seule raison ,
que celui qui peut le plus, peut à plus forte raison le
�moins. Jean Dum ont et Procule Pitat pouvant priver,
leurs filles du droit de leur succéder, moyennant les
dots qu’ils leur assuroient, pouvant le faire sans qu’ il y
eût de leur part aucune disposition en faveur de leur
fils ? celui-ci tenant les
* biens de la seule volonté de la Loi,
on sent qu’à plus forte raison ils ont pu relever leurs-,
filles de la forclusion coutum ière, sous des conditions,
et que ces conditions forment une loi domestique qu’il
n’est pas permis aux filles d’enfreindre.
Il y a eu un avantage pour les filles à être relevées^
de la forclusion ; cet avantage, on l’a teim de la conven
tion ; il y a été apposé des conditions. O r , on ne peut
profiter de l’avantage sans se soumettre aux conditions
sous lesquelles il^ a été fait : voilù les premières, notions
de droit contre lesquelles il est impossible qu’on s’élève
avec succès.
!
Il n’y a pas eu de convention simple et absolue/, i l i;
n’y a eu qu’une convention modifïcative de la lpi. La^.
convention a déféré aux filles une partie des biens, outre,
la d o t, et la loi a exercé tout son empire sur le surplus r
des biens;'elle les a réservés au fils, d’accord avec le vœu.,
des père et mère. Ceux-ci ont .voulu, ou qu’on s’en tînt
à la convention telle qu’elle étoit ré g lé e, et avec toutes,,
ses conditions , ou qu’on fût renvoyé à la loi. O r , la loi
perinettoit la forclusion, et les père et mère ont déclaré,)
qu’ils vouloient cette forclusion, si les filles ne se teupient
pas a la convention : « 'Sans toutes lesquelles charges,
« '.clauses et conditions ladite., institution rtauroit été
« f a i t e , et la future auroit été apanée m oyennant la
« dot (lui va lu i être constituée, y
�( 9 )
.
..
On 11e conçoit donc pas qu’on puisse dire qu’il n’y a
pas eu d’apanage dans les contrats de -mariage de Marie
et Marguerite Dumont. Celui qui auroit pu être entiè
rement libéré en donnant un écu, ne le seroit donc pas
parce qu’il en auroit voulu donner cinq ?
D u raisonnement des intimés il résulteroit encore que,
dans les principes de la coutume de Bourbonnais, un pèi’e
qui auroit eu un fils et deux filles, se seroit trouvé dans
celte nécessité absolue, ou de forclore ses filles de sa suc
cession , moyennant une d o t , ou d’assurer une égalité
pai'faite entre le frère et les sœurs : système dont l’ab
surdité se sent sans aucun effort de raison. T^a loi qui
to lé r o it, à l’égard des filles, une rigueur admise dans
des vues de bien public, permettoit sans doute un adou
cissement, bien loin de vouloir en punir des pères et
mères et ceux des enfans qui étoient l’objet de celte
rigueur.
L e second moyen sur lequel les intimés se fo n d e n t,
consite à dire qu’ André Dumont n’a pu prétendre dans
la succession de Procule Pitat une portion de biens plus
considérable que ses sœurs, parce qu’il n’y a point eu
en sa faveur une disposition directe de la part de P ro
cule Pilât.
En raisonnant ainsi on élude la question qui est
juger, pour en présenter une qui n’existe pas.
On ne sera jamais dans la question , tant qu’on di
visera les conventions portées par les contrats de mariage1
de Mario et de Marguerite D u m o n t, tant qu’on iso l cm
l’ensemble de ces conventions des dispositions de l’art. 306’
delà coutume de Bourbonnais, qui en sont le régulateur..
Il est probable
qu’on
uc désavouera
P:ts *c
principe 1
�.que les contrats de mariage ont toujours été susceptibles
de conventions et de conditions qui ne blessent ni les
mœurs ni l’ordre public. Si cela est certain, il l’est éga
lement que Marie et Marguerite Dumont n’ont dû suc
céder à leurs père et mère que sous les conditions et
réserves stipulées dans leurs contrats de mariage.
An dré Dumont a puisé pour lui ou sa descendance.,
le droit de succéder à Procule Pitat comme à Jean D u
m o n t , dans la disposition de la lo i, tant que Procule
Pitat et Jean Dum ont ne se départii'oient pns de la fa
culté qu’ils avoient de forclore ou apaner leurs filles
moyennant une dot. Ils n’ont pas voulu cette forclusion
pleine et entière ; ils y ont dérogé dans l’intérêt de
leurs filles : mais le droit de succéder de celles - ci n’a
,dû être que partiel; ce droit a dû être mesuré par la
dérogation même apposée par les père et m ère, surtout
dès qu’ils ont déclaré qu’on ne pourroit diviser les con
ventions sous lesquelles les filles étoient mariées, et que
sans l’espoir que ces conventions tiendroient telles qu’elles
étoient réglées, les filles auroient été apanées moyennant
la dot qu’ ils constituoient de suite.
Les parties, lors des contrats de mariage, et d’après
ce qui y a été convenu, ont donc été dans une position
telle, que tout ce que les filles ont dû avoir dnns les
successions de leurs père et m ère, elles n’ont pu y pré
tendre que parce que leurs père et mère n’ont pas voulu
les en priver en les livrant à toute la rigueur de la loi;
et que tout ce dont il n’étoit pas disposé en faveur des
filles, demeuroit sous l’empire de la loi, et revenoit par
cela seul à A ndré D u m o n t, à moins que ses père et
mère n'eussent voulu , d’après la réserve particulière
�(
11 )
qu’ils s’en étoient faite, o n tr a r ie r le vœu de la loi par
leur volonté.
Il n’a donc point fa llu , en faveur d’A n d ré D u m o n t,
de disposition directe de tout ce qui n’étoit pas donné
précisément à ses sœurs ; la simple réserve du surplus
des biens devenoit, par la force des clioses, par la com
binaison de la loi municipale avec les conventions des
contrats de mariage des sœ urs, une saisine en faveur
d’A n d ré D um ont : cette saisine auroit pu être anéantie
par les père et m è r e , par l’effet de l’exercice du droit
qu’ils s’étoient réservé, de disposer îY leur gré des biens
qui n’étoient pas assurés aux filles. Ma i s ce droit n’ayant
pas été e x e r cé , et au contraire Jean D u m o n t ayant dis
posé des biens réservés en faveur d’A n d ré D u m o n t ,
tant pour lui qu’en vertu du pouvoir que lui avoit
conféré Pi'ocule Pitat, en ce qui la concernoit, tous les
biens, excepté la portion qui en avoit été donnée à Marie
et Marguerite D u m o n t, ont été irrévocablement assurés
à A n d ré Dumont. t a loi et la volonté de ses père et
mère ont concouru pour en fixer la propriété sur sa tete.
A i n s i , tout se réduit à ce moyen inattaquable , que
Ma rie et Marguerite Dum ont ne peuvent succéder que
comme leurs père et mère ont voulu qu’elles succédassent;
qu’elles ne peuvent venir à leurs successions qu’en rem
plissant les conditions qui leur ont été im posées, parce
que c’est un des premiers principes du droit et de l’équité
que personne ne peut diviser son titre. Les-premiers juges
seront sans doute les seuls qui penseront que « les clauses j
« charges et conditions apposées aux i n s t i t u t i o n s des daines
« de Vaure et de Beauregard , étant contraires-à la lo i,,
�( 12 )
S ’il y a quelque ch ose de contraire à la
craint pas de dire que c’est cette opinion
choque la raison ; elle attaque la doctrine
auteurs ; elle est combattue par la pratique
l o i , on ne
m êm e; elle
de tous les
de tous les
temps.
Telles sont les réflexions, auxquelles le soussigné croit
devoir se borner , parce qu’il les regarde comme seules
décisives. Il lui suffit de renvoyer, relativement à tous les
autres moyens qui ont été opposés par les intimés , et
au défaut de fondement des autres motifs du jugement
qui est attaqué, au mémoire imprimé et distribué pour
la mineure Dumont. Elle peut se reposer sur la discussion
lumineuse et savante qu’il ren ferm e, et qui décèle un
vrai talent. La justice oblige même d’avouer qu’on trouve
dans ce mé moi re les réflexions que le soussigné vient de
faire, parce qu’il ne laisse rien à désirer.
Si le soussigné a présenté ces réllexions , s’ il ne s’est
pas contenté de donner un simple assentiment aux motifs
développés dans, le mémoire , c’est parce qu’il a cru
devoir prouver de plus en plus qu’ il a sur la question
une opinion fortement prononcée. Il a en effet la con
viction q u e les moyens des intimés sont, à proprement
parler, des chicanes créées par l'imagination, dans la vue
de priver la mineure Dumont d’un patrimoine acquis à
son malheureux père , aussi solidement et aussi légale
ment qu’ il ait été possible.
Délibéré à R iom, par l’ancien jurisconsulte soussigné,
ce 26 juillet 1808.
G R E N IE R
( du Puy-de-Dôme ).
A R I O M de 1’im p rim e tie do T h i b a u d - L a n d r i o t , im p rim e u r de la C o u r d ’appel.
�
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Factums Godemel
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Description
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A name given to the resource
[Factum. Hilliard. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
contrats de mariage
communautés
dot
forclusion
fils avantagé
successions
avantages prohibés
préciput
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour les sieur et dame Hilliard, cotuteurs de la demoiselle Dumont, appelans ; contre les sieurs et dames Rabusson de Vaure et de la Roque, intimés.
Table Godemel : Préciput : 2. une disposition de préciput, en coutume de Bourbonnais, faite en faveur d’un fils par ses père et mère, dans les contrats de mariage de ses deux sœurs, comme condition de non apanage et d’une institution contractuelle à leur profit, est-elle valable, lors surtout que par le contrat de mariage du fils, le père survivant a surabondamment confirmé cette disposition, en vertu de la faculté que s’en étaient réservée les instituants, comme condition de cette même institution ? les sœurs instituées peuvent-elles soutenir que la réserve et dispositions faites en faveur de leur frère, étranger à leurs contrats de mariage, ne pouvaient leur enlever leur portion dans l’objet réservé, cette disposition n’ayant pas été faite dans son propre contrat de mariage, aux termes de l’article 219 de la coutume ? peuvent-elles à leur institution pour se dégager des charges et conditions qui en font partie, et demander le partage par égalité ? Ou, au contraire, en cas de renonciation, devraient-elles être réduites à l’apanage fixé par leur constitution dotale ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1775-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1804
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1802
BCU_Factums_G1803
BCU_Factums_G1801
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saulzet (domaine de)
Deux-Chaises (03099)
Mont (terre de)
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Information about rights held in and over the resource
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avantages prohibés
communautés
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
dot
fils avantagé
forclusion
préciput
secondes noces
Successions
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5f679000c0f8cc6c0bda8cba0701972f
PDF Text
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M É M O IR E
À
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T
E
A
R
T
,
I
O
N
,
D U C O U R T H I A L et
M a r i e - J o s e p h M A I G N O L son m ari, et les
citoyens D U C O U R T H I A L - L A S U C H E T T E
enfans
G i lb e r t e
puînés de Gilbert Ducourthial;
C O N T R E J e a n - B aptiste - G ilbert
D U C O U R T H I A L ainé.
G ilbert
D U C O U R T H I A L , ayant eu un enfant d’un
premier mariage avec Marie - Gabrielle Devilletto , savoir
• Gilberte Ducourthial f épouse du citoyen Maignol contracta*
.un second mariage avec Léonarde Cornudet , le 14 mai 1778.
Il y avait entre eux une grande disproportion d’âge : Léonarde
Cornudet n’avait que 2 3
ans, et Gilbert Ducourt h i al en avait plus de 45.
‘
,
'
�•1
Par ce second contrat cle m ariage, Gilbert Ducourthial ins
titua pour son héritier du tiers de tous ses biens présens et à
venir , l’un des enfans qui naîtrait .dudit m ariage, et c e , en
préciput et avantage ;• laquelle institution était faite en faveur
de celui ou de celle que les futurs choisiraient conjointement,
par quelque acte que ce f û t , ou qui le serait par le survivant
des deux futurs ép o u x, auquel le droit en appartiendrait , par
clause expresse. Et dans le cas où le choix n’en eût pas été
fait, ladite institution profiterait à l ’aîné des m âles, et s'il n’y
avoit pas de mâles, à l’aînée des filles.
La fille du premier lit fut mariée le 8 avril iy .
Léonarde Cornudet mourut à-peu-près dans le même temps.
Gilberj^Ducourthial est mort le 27 juillet 179^, sans avoir fait
aucune disposition.
On demande l’avis du conseil sur les droits respectifs de l’enfant
du premier m ariage, et de ceux du second*
83
C
O
N
S
U
L
T
A
T
I
O
N
.
-
L E C O N S E I L s o u s s i g n é , consulté sur les droits res
pectifs des enfans du premier et du second mariage de Gilbert
Ducourthial , et après avoir vu plusieurs consultations produites
par l’aîné du second lit, recueillies en
pages d’impression ,
format in-4°. ;
54
qu’il se présente une question préalable : elle
consiste à savoir si la-faculté d’opter ou d’élire, accordée par
Gilbert Ducourthial à Léonarde Cornudet, sa seconde épouse ,
par leur contrat de mariage du 14 mai 1778 , ne donne pas lieu ’
à la nullité de la disposition contenue dans ce même contrat. *
E s t i m e
Si cetie nullité devait a^oir lieu , i l .n ’y aurait plus
diffi
cultés : la succession de Gilbert Ducourthial serait alors dévolue
�3
à tous les enfans du premier et du second mariage , sans dis
tinction , et par égalité.
Mais à supposer que l’on ne se décidât pas pour cette nullité ,
il s’agiroit de savoir s i , d’après la nature de cette disposition , et
d’après l ’effet de la loi du 7 mars 1793, le fils aîné pourroit
prétendre qu’il a été saisi du tiers des biens, en préciput.
Et enfin , a négative de cette proposition devant être adoptée,
il s’élèvera une nouvelle question. 11 faudra examiner s i , quoique
la fille du premier lit ne fût pas fondée à soutenir q u e, dans
le principe , la disposition contenue au second contrat de ma
riage de son p è re , n’a pu être validée, néanmoins la manière
dont cette disposition s’est évanouie, ne l ’appelle pas à recueillir
le tiers, par égalité avec les autres enfans , en sa seule qualité
d’enfant , et abstraction faite de celle d’enfant du premier
mariage.
C’est sous ces trois rapports, qu’il est forcé de considérer les
contestations qui s’élèvent. Cet examen demande une grande
attention , parce que les circonstances ne sont pas ordinaires,
et qu’elles appellent l ’application de l ’ancienne et de la nouvelle
1
législation sur les dispositions des biens.
PREMIERE
La
QUESTION.
circonstance, de La fa cu lté d ’opter ou d ’élire, ac
cordée par Gilbert Ducourthialà Léonarde Cornudet,
sa seconde épouse, par leur contrat de mariage du 1 4
mai 1 7 7 B , ne donne-t-elle pas lieu à la nullité de la
disposition contenue dans ce même contrat?
Ne considérons point en ce moment la nature de la dispo‘ sition faite par Gilbeft D ucourtliial, relativement aux enfans à
naître de son second mariage , n’y voyons qu’une disposition
A
2
�* v*
4
quelconque ; supposons-la pure et simple , même irrévocable ,
et néanmoins , sous ce point de v u e , cette disposition a été frappée
de nullité.
La question de savoir si un pére qui se remarie , ayant des
enfans d’un premier mariage , peut valablement avantager les
enfans à naître du second m ariage, a été dans les tribunaux ,
le sujet d’une véritable difficulté. Le dernier commentateur de
la coutume de la ci-devant province d’Auvergne, qui régit les
parties et leurs biens , a traité la question avec étendue , sur
l ’article 26 du titre 14, section 6. Les consultations annoncent
que c’est même dans cet ouvrage que l’on a puisé les autorités
qu’on employe ; ainsi , en suivant la marche de la discussion
lumineùse de cet auteur , on invoque une autorité qui ne peut
être suspecte à Jean-Baptisté-Gilbert Ducourthial, puisque luimême s’en fait un appui.
O r, la lecture de cette dissertation apprend que cette ques
tion a fait difficulté , non-seulement sous le rapport de la pro
hibition de l’édit des secondes noces , mais encore parce qu’une
disposition de cette nature paroissait destituée de motifs raison
nables ; des enfans à naître n ’étant encore susceptibles , de la
part de leurs père et mère , ni d’am our, ni de liaine , les dispo
sitions qu'un conjoint se hâte ainsi de préparer en leur faveur, 11e
sont censées faites (ju en contemplation de l'autre des conjoints •
elles sont plutôt l ’ouvrage de la suggestion que d’une volonté
libre.
On convient cependant qu’il résulte du rapprochement de tous
les arrêts, que dans la règle générale, un pére en se remariant ,
peut instituer pour héritiers, un ou plusieurs enfans à naître du
second m ariage, ou même tous, quoiqu’il y ait des enfans de
piécédens mariages. On avoue encore que telle est la jurispru
dence , quoiqu’on ne doive l ’attribuer qu’à un relâchement des
vrais principes.
�Jt)
5
Mais en même temps, on soutient, même d’après les arrêts,
qu’il se fait exception à cette règle générale , lorsqu’il y a des
circonstances qui indiquent que le père a agi par l ’effet d’une
impression étrangère uniquement dirigée, contre les enfans du
premier mariage , et l’une de ces circonstances se rencontre
dans l’espèce; c’est le droit accordé à la seconde épouse d’opter
entre l ’un ou l ’autre des enfans, pour lui faire recueillir la dis
position.
C’est ce qui a été jugé en thèse et en grande connaissance de
cause par l'arrêt du ci-devant parlement de Paris, du 18 mai
4
17 5 5 , rapporté par Lépine de G rain ville, page 21 - Les faits et
les motifs du jugement sont rapportés au long par l’arrêtiste ; et
l ’on voit que l’arrêt a été ren d u , non pas en contrariété des
préeédens arrêts q u i, ainsi qu’on en convenait alors , avaient
établi la règle générale , qu'une disposition pouvait être faite en
faveur d’enfans à naître, mais attendu la circonstance particu
lière q u i, comme dans le cas de qnelques-uns des arrrêts précédens ; devait former une exception à cette réglé. Cet arrêt
mérite d’autant plus de considération, qu’il a été rendu pour des
parties de la même province que celles qui sont en contes
tation.
En voici l ’espèce :
Jean Lapparra avait eu des enfants d’un premier mariage.
Eu 1697, il épousa en secondes noces Marie-Gabrielle Lavergne ;
et son contrat de mariage contenait cette clause :
« Et par même faveur dudit m ariage, ledit Lapparra a promis
» d’instituer, comme dès-à-présent il institue tel des enfans mâles
» qui naîtront du présent mariage , héritier de tous et un chacun
« les biens dont il se trouvera saisi lors de son décès , ou tel
» qui sera jugé capable par lui , nu à son défaut par ladite
» future c/jouse , préalablement déduit la légitime de ses autres
» enians , et autres charges s’il y en a.
�^
» Jean Lapparia mourut le
6
5 août
3
i y r, et laissa trois enfans
>< mâles de son second mariage. Gomme , pendapt sa vie, il n’avait
>1 point choisi , entre les trois enfans du second lit, un d’entr’eux
» pour être son héritier universel, Marie-Gabrielle Lavergne , sa
» v e u v e , se servit de la faculté qui lui était accordée par le
« contrat de mariage; et par acte du 21 décembre 17 3 5 , elle
» nomma Antoine Lapparra, un des trois enfans mâles du second
» l i t , héritier universel de Jean Lapparra pére.
» Les enfans du premier lit, peu de temps après la mort de leur
» père , formèrent contre Antoine Lapparra une demande en
» partage, et prétendirent que l'institution contractuelle était
» nulle.
» La demande portée au bailliage d’A u rilla c, il y était inter» venu sentence le g juillet 1734, q u i, en déclarant nulle Cins» titution contractuelle, avait ordonné le partage égal entre tous
» les enfans, tant du premier que du second lit.
» Sur l ’appel de la part d’Antoine Lapparra , la sentence fut
« confirmée au rapport de M. A n g ran , en la quatrième chambre
» des enquêtes. »
L ’auteur rapporte les moyens déduits de part et d’autre ; on
y voit figurer tous les arrêts dont il est parlé dans les consulta
tions -, et après avoir exposé les principes développés par celui
en faveur duquel l’option avait été faite de la part de la m ère,
il ajoute : « Ces principes ont paru être approuvés dans les opi>i nions ; et si l option n eut j/uint été laissée à la m are, on
>ï aurait orilotinc l cjcecution île l institution, j\lais cette option
» do n n ée h la mère , a paru être un moyen sûr de se procurer
« un avantage indirect : elle lui donnait une autorité sur ses
»
«
»
»
enfans , dont elle pouvait abuser : elle pouvait choisir celui
qui se soumettait plus volontiers des conditions avantageuses
pour e lle , et exiger de l’un de ses enfans l’avantage que son
mari n’avait pu lui faire directement. Il est vrai qu’un acte qui
�» aurait contenu ces conditions, aurait p u , dans la suite , être
» déclaré nul ; mais elle pouvait s’assurer ces conditions par des
» moyens secrets, et par des actes déguisés. Il suffit qu’une seconde
» femme puisse retirer un avantage indirect d’une disposition
» pour qu’elle soit nulle. »
Cet arrêt a invariablement fixé la jurisprudence des tribunaux,
et sur-tout de ceux de la ci-devant province d’Auvergne. Les
dispositions en faveur des enfans du second lit , subordonnées
à l’option conférée à la seconde femme , y ont toujours été dé
clarées nulles , soit dans les tribunaux, soit par l’application de
cet arrêt , faite dans des consultations qui prévenaient les
procès.
La question n’est donc pas de savoir s i, en général, des insti
tutions d'héritier, faites à des enfans à naître d’un second ma
riage , sont valables en elles-mêmes : elle consiste à examiner sv
elles ne sont pas viciées par la circonstance de la faculté d’opter
ou d’élire entr’eux , accordée à la seconde femme.
O r, c’est ce qui a été précisément jugé par cet arrêt : il est
conforme à la saine raison. Le bon ordie ne permet pas de
consacrer toute libéralité qu’on ne peut rapporter à une volonté
libre , mais seulement à des insinuations venant d’une seconde
femme, ou de sa famille. Gilbert Ducourthial était beaucoup
plus âgé que sa seconde femme qui n’avait que
à
4
V > . di*r üij*- ans. Il oublia qu’il avait une fille de son premier ma
riage , et il n’était pas principalement animé du désir d'investir
un enfant mâle d’une grande partie de sa fortune, comme on
le dit dans les consultations, puisqu’il est dit dans le c o n t r a t ,
que le choix pourrait être fait entre tous les enfans à n a î t r e , et
qu’à défaut de ch o ix, le tiers était destiné à l ’a î n é des mâles , et
s’il n’y avait pas de m âle, à l’uincc des filles.
On ne peut qu’être étonné que les auteurs d’une des con su l'
tatiuns
, juives
18
et
u ), invoquent l’opinion du dernier co n v
�s
m cntateur de lu c o u tu m e , à l'appui de la validité de la dispo
sition dont il s’agit.
C et a u t e u r , après avoir rapporté les arrè:s , dont le dernier
est du i i août. 1 7 4 0 , desquels il résulte qu’en général une insti
tution con tractuelle, faite par un second contrat de mariage, en
faveur des enfans à naître, est valable, s’explique tout de suite ainsi :
« Cependant un autre arrêt du 18 mai 17 3 6 , rendu pour cette pro» v in c e , au rapport de M . A n g r a n , entre les nommés Lapparra,
» d’A u r i l l a c , a déclaré nulle une institution d’héritier, faite par
» u n second contrat de m a r ia g e , en faveur des enfans à naître. J ’ai
* » lu l ’expédition de cet arrêt, et il est rapporté par M . Lépine
» de G rainville, au x arrêts de la quatrième chambre des enquêtes.
» M ais il y avait une circonstance <jui tirait la décision des
»
règles générales. L e père avait institué celui de ses enfans
» inâles à n a îtr e , qui serait choisi par lui , et à son défaut par
» sa future épouse. Il y avait quatre enfans du premier l i t , trois
» mâles et une
fille.
L e c h o is laissé à la fe m m e , qui pou-
» <vait lui donner des moyens de profiter de la disposition
» indirectem ent, détermina le jugement. M . de Grainville
» assure que , sans cette circonstan ce, l ’institution eût été dé» clarée v a l a b l e , et il en était bien in s tr u it, puisqu’il était 1111
» des jugys;.»
•
A in s i l'auteur distingue la thèse générale du cas d ’exception ,
et il adopte l ’arrêt pour le cas d ’exception. Il ne faut doirtf pas
référer son opinion entière â la thèse générale.
D a n s toute sîl dissertation , il a marqué cette
nous
semble d o n c , en se ré su m a n t, page
exception : il
355 , «
» générale est pour la validité de la disposition ,
que la règle
sa u f les exccp-
» dons légitimes dans des cas où il est visible que le donateur
» n ’a eu d ’autre m o tif que l'impression et la suggestion du n o u » veau c o n j o i n t , ou
la volonté de l ’avantager l u i- m ê m e . Ces
>» MOTII'S SE KENCONTHAIENT DANS 1,’ a IIKÈT DE LAPPAnRA ,
et
» l ’espèce
^
�"9
» l’espèce tle celui de 167? , ( qui avait aussi annullé une
x pareille institution contractuelle ) était bien peu favorable :
»> un mari de qualité disposait, de la totalité de ses meubles et
» acquêts au préjudice d’un 111s du premier lit , en faveur, des
» enfans à naître d’un second, mâles et Jilles indistinctement. »
On voit donc toujours deux choses : la règle générale et les
cas d’exceptions ; et l ’auteur marque continuellement la cir
constance de l ’arrêt de Lapparra , comme un cas tVexception.
Il réunit son suffrage au poids de l ’arrêt.
Aussi l ’auteur de la consultation , en rapportant le dernier
passage du commentateur, s’arrête-t-il à ces mots , nu la volonté
de Vavantager lui-même. Mais le reste explique toute l’opinion
du commentateur , et en le supprimant, ce serait ne pas rendre
le sens dans lequel il s’est exprimé sur le cas d’exception dont
il s’agit ici.
M ais, d it-on , pages 12 et i , l’arrêt de Lapparra, a été
rendu en pays de droit écrit , où la mère succède à son en fan t.
en sorte que l’on pouvait dire que la disposition était faite en
3
faveur de la femme , puisqu’elle pouvait en profiter : au lieu
que dans l ’espèce , les parties et leurs biens étaient régis par
une coutume qui exclut les ascendans de la succession des
descendans.
Il est impossible , sous tous les rapports , d’être touché de
ces observations.
En pays de droit écrit, la mère ne succédait à l’enfant qui
pour une portion v irile , lorsqu’il y avait d’autres enfans.
En pays de.coutume , à la vérité , la mère ne lui aurait pas
succédé quant aux propres ; mais elle lui a u r a i t s u c c é d é seule
et exclusivement aux autres enfans , quant à la totalité des
meubles et acquêts, suivant l ’article 3 du titre 12 de cette cou
tume ; et les fruits et revenus même des propres , tombaient
dans les meubles et acquêts. D e plus, l a mère pouvait, en pays
li
�10
de coutum e, recevoir de la part d’un de ses enfans, une dona
tion de tous les biens même propres, ou la disposition d’un
quart par testament. Et enfin, les propres pouvaient être déna
turés et vendus. Le prix en serait devenu acquêt , et la mère y
aurait succédé, d’après la maxime qu / fa u t prendre les succes
sions en L'état oïù elles se trouvent.
7
Aus«i , qu’on lise les moyens respectifs allégués lors de l’arrêt
56
de i y
, et rapportés par Lépine de Grainville ; qu’on fasse
attention aux moiifs de l ’arrêt, et on sera convaincu que l’obser
vation de l'auteur de la consultation n’a influé en aucune ma
nière : le moyen ne fut pas même présenté. Personne ne con
naissait encore mieux que le dernier commentateur de La
coutume , et les Hits invoqués par l’auteur de la consultation ,
et les circonstances de l’arrêt avec ses m otifs, et cependant il
n’a pas imaginé que ces faits dussent introduire une différence
dans la manière de décider. Il invoque l ’arrêt comme une déci
sion générale, qui devait s’appliquer tant aux pays de coutume
qu’à ceux de droit écrit. Son opinion, comme celle qui a donné
lien à l’a rrêt, est que la seule circonstance de la faculté d'opter
ou d’élire, donnée à la seconde fem m e, suffit pour annuller la
disposition , et cette circonstance ne se trouvait dans aucun des
autres arrêts.
35
L ’auteur d’une des autres consultations , page
, après avoir
employé les moyens qu’on vient de réfuter, en ajoute un autreIl dit que d:m§ l’aifaire Lapparra , « cette mère qui avait, sur» vécu à soa m ari, avait spolié scandaleusement la succession,
» consistant principalement en mobilier , et elle avait: d’ailleurs
>> pratiqué toutes sortes de fraudes du vivant de son m ari, pour
» réduire à-pcu-pi è.i à rien les légitimés des en fans du premier
» lit. L'indignation plaidait la catr.e de ces victimes délaissées,
» et l’on peut , en conséquence , appeler l'arrêt qui anmtU.i
�&
ir
» 1’institution contractuelle faite à leur préjudice , un
» ab irato. »
arrêt
Mais où a-t-on puisé tous ces fuits? Lépine de Grainville a
rapporté , selon sa coutume , avec la plus grande exactitude ,
les faits et les moyens respectifs. C’est aussi ce qui a donné un
si grand poids à cet a rrêt, dont la sagesse a généralement sub
jugué la raison , et il n’en dit pas un mot. Cet arrêt a été cons
tamment suivi en jurisprudence , même au ci-devant présidial
d’Aurillac , où les faits devaient être bien connus ; on l’a vu
journellement citer dans les qonsultations, et jamais il n’a été
rien dit de ce qu’on avance. Le dernier commentateur, qui sans
doute connaissait les faits et l’espèce de l ’a rrêt, puisqu’il s’ex
plique ainsi : j'a i lu l’ expédition de cet a rrêt, garde aussi , à
cet égard , le plus profond silence. D'après cela, on laisse à juger
de quel poids peut être une telle assertion. On serait autorisé à
croire que l’auteur de la consultation n ’avait point sous les yeux
le recueil de Lépine de Grainville.
Mais , dit - on , dans l ’espèce de Lapparra , l ’institution était
universelle; ici elle n ’est que d’un tiers. La veuve avait survécu ;
ici c’est le mari.
Il est aisé de sentir que ces circonstances sont absolument in
différentes pour la décision.
Pourquoi la disposition a-t-elle été déclarée nulle ? C’est uni
quement parce qu’elle renfermait un vice , qui devait la laire
rejeter. On ne pouvait y voir une volonté libre et éclairee. O r,
ce vice frappe la disposition , quelle qu’en soit la quotité. On ne
peut pas plus adjuger un tiers qu’une moitié , sans une dispo
sition valable , et dans l’espèce , il n’y a pas eu de disposition
valable.
On doit porter .encore plus de sévérité sur les dispositions en
coutume d’Auvergne qu’en droit écrit ; elle ne leur a pas donné
B 2
�autant de latitude que les lois romaines , puisqu’elle n’a point
admis l ’institution testamentaire, et qu’elle n’a permis que le legs
du quart par testament.
Q u’importe ensuite que dans l ’espèce de l’arrêt la femme eût
survécu , et.qm ci ce soit le mari? Cette circonstance n’a pu inJluer sur la décision. Il a toujours fallu remonter à la source ,
initia inspecte*, pour juger la disposition. Il faut faire de même
ici , puisque , quoique le mari ait survécu , l’espèce n’a pa*
changé; il n’y a .eu de sa part aucun acte, après le décès de sa
seconde femme , par lequel il ait entendu approuver la dispo
sition ; et on prétend que Jean-Baptisle Gilbert D ucouiihial a
été saisi du tiers , en vertu de cette même et seule disposition
sur laquelle Gilbert Ducourtliial n’a pu s’expliquer, par l’effet
de la loi du 7 mars 1793.
Dans l’espèce qui se présente , l ’opinion consacrée par la juris
prudence est encore bien plus applicable que dans celle de l’arrêt
de Lapparra , puisque dans l’espèce de cet arrêt, le père avait ins
titué tel des enfans à naître, qui sera jugé capable par l u i , o u ,
à son défaut. , pur ladite future épouse. Au lieu que dans l’espèce
actuelle , l’institution était faite en faveur de celui ou de celle
que les futurs choisiraient conjointem ent, ou qui le serait par
le survivant des deux futurs époux.
Dans l’espèce de l’a rrêt, le père demeurait encore maître
jusqu’à un certain point de sa disposition. Il pouvait la diriger
seul et à son gré , au profit de l’un des enfans à naître , qui
serait par lui ju gé capable. Il pouvait le faire sans le concours
de sa seconde femme. Celle-ci 11 avait un libre exercice de vo
lonté, à cet égard , qu’après le décès de son mari , ou à son
d é fa u t, par ladite fu ture épouse.
JMais , dans l’espèce qui se présente , le père avait aliéné sa
volonlé. Il ne pouvait rien faire seu l, lant que vivrait sa femme,
�6Ÿ
13
qui était infiniment plus jeune que lui. Leur concours était né
cessaire pour une disposition, en faveur de celui ou celle que
les futurs choisiraient conjointement.
IL est donc impossible de v o ir, dans tout c e la , d’autre volonté
que celle de la seconde femme. C ’est elle qui dispose et non le
mari, qui ne peut résister à la séduction , et qui se livre au joug
qu’on lui impose.
Par tous ces motifs , on est convaincu que la disposition portée
au contrat de mariage du 14 mai 1778, quelle qu’en soit la na
ture, doit être déclarée nulle. Il résulte de là que tous les enfans
doivent avoir un droit égal aux biens de leur père. Cela étan t,
toutes autres difficultés disparaissent.
Cependant quand on supposerait, pour un m om ent, que la
nullité que l’on vient de proposer ne fut pas admise , les enfans,
autres que le iils aîné , auraient, encore des droits sous un autre
point de v u e , et c ’est par cette raison (pion est fo rcé , quoique
subsidiairement , d’examiner les autres questions que Ion a déjà
annoncées.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
E n supposant que la disposition portée par le contrat
de mariage du 1 4 mai 1 7 7 b , ne f u t pas nulle par le
défaut d ’une volonté lib ic, J e a n -B a p tiste Gilbert
JDucourthial pout rait-il prétendre qu il a été saisi du
tters au préjudice des autres enjans ?
Il faut partir
législation, lant
cation de la loi
thial , fils aîné
d’un point constant , qui est que , suivant la
ancienne que n o u velle,» l’époque de la publi
du 7 mais 1 7 9 ', .ban- liaptiste-Gilbert Ducourdu second lit , n’avait aur.un droit acquis en
ro
�■14
vertu dos seules dispositions contenues da îs ljseco n d contrat de
mariage de Gilbert D u co u rth ial, son père.
Il devait recueillir l ’effet de la disposition, si le père ne faisait
pas un aulre choix. Ce droit était donc subordonné à la volonté
du père, et celui-ci pouvait manifester cette volonté jusqu’à son
décès; ensorte que les avantages que pouvait avoir Jean-Bap tisteGilbert Ducourthial dépendolent entièrement de l’état des choses
lors du décès de son p ère, et jusques-là il n’était saisi d’aucun
droit.
Cette vérité est si constante, elle est tellement fondée sur les
simples lumières de la raison , qu’on peut se dispenser de l’étayer
sur des autorités. On se contentera de rappeler l’article 16 de la
loi du 22 ventôse an 2. Cet article , qui a toute la force légis
lative , et qui consacre seulement un p rin cip e, doit irrévoca
blement fixer les idées sur la nature de la disposition dont il
s’asrit.
O
On y voit que l’on desirait l ’explication du législateur sur
ce point : « à ce que toutes dispositions faites avec la réserve de
» les révoquer , et toutes donations subordonnées au changement
» de la volonté du donateur n’a ie n t, à quelque titre qu’elles
» aient été faites, d’autres règles ni d’autres effets que ceux
» propres aux dispositions à cause de mort. »
Le législateur f.iit la réponse suivante , consacrée en loi :
« qu’il résulte bien assez évidemment, et d»> l'ensemble de la
» l o i , et des seuls termes de la raison , que les dispositions
» révocables au seul gré du donateur, ne so n t, dans quelques
*> actes qu elles aient été inscrites, que des dispositions à cause
» de m ort, puisque jusques-là le donateur a pu les changer. »
A in s i, c’est nu moment où Jean-IJaptiste-Gilbert Ducourthial
n’avait aucun droit acquis sur la succession luture de son père ,
qu’a é té ‘émise la loi du 7 mars 17f)3, qui est ainsi conçue :
« La Convention nationale décrète que la fa cu lté de disposer
�15
» de ses b ien s, soit à cause de m ort, soit en tre- vifs , soit par
» donation contractuelle, en ligne directe, est abolie ; en con» séquence, que tous les descendans auront un droit égal sur
« le partage des biens de leurs ascendans. «
11 est incontestable que dès la publication de cette lo i, les
enfans Ducourthial ont eu un droit égal à la succession de leur
père. Il n’y avilit point de disposition en faveur de l ’un d’eux
exclusivement aux autres, ou , ce qui revient absolument au
même, il n’y avait point de disposition irrévocable ; le sort des
enfans dépendait de la volonté du père , de sa fa cu lté de dis
poser , et c’est cette fa cu lté de disposer qui a été abolie par la
loi. Ce père, comme tous les autres, qui n’avaient pas fait alors
de dispositions fixes et irrévocables, n’a pu avoir d’antre volonté
«pie celle de la loi ; il a dû laisser ses biens à ses enfans , de la
manière dont la loi le voulait, c’est-à-dire , par égalité.
Pour le décider ain si, il n’a fallu que le principe consacré
par la loi du y mars 1793. Les dispositions des articles
et
24 de la loi du 17 nivose an 2 ; celles de plusieurs articles des
lois des 22 ventôse et 9 fructidor suivans, qui ont appliqué l’effet
23
de la loi du 7 mars 1793 , à certains cas particuliers , ne sont
point des dispositions nouvelles; elles 11e sont que la déclara
tion des conséquences du principe consigné dans la loi du 7
mars i7<p.
11 est vrai que ces lois donnaient à celle du 7 mars 179^
effet rétroactif, en en faisant remonter l’effet jusqu’au 14 juillet
*7^9’> 01 e’est: avec raison que cette rétioaction a été r a p p o r t é e
par les lois des 9 huctidor an 5 , 3 vendémiaire an 4 , eL
plu
viôse an .
Mais aussi faut - il garder de se m é p r e n d r e sur l’effet et la
durée de celle rétroaction, et ii cet: égard, les consultations
produites par Jean lkptiste-Gilbert. D u c o u r t h i a l , ne présentent
pas des idées nettes.
5
�Il y avait rétroaction, en ce que la loi du 17 nivose voulait
qu’on réglât j par l ’effet de la loi du 7 mars 1793, les disposi
tions même irrévocables qui avaient été faites avant l’émission
de cette loi, en remontant jusqu’au 14 juillet 1789. Mais il n’y
avait pas de rétroaction dans la loi du 17 nivose, en ce qu’elle
prescrivait relativement aux dispositions qui n’étaient pas irré
vocables lors de la promulgation de la loi du 7 mars 17¡) .
Dans ces cas, la loi du 7 mais 179Ô était le vrai régulateur;
et l ’on peut dire que les articles
et 24 de la loi du 17 nivose,
5
23
et un grand nombre d’autres articles , soit de cette lo i, soit de
celles des 22 ventôse et g fructidor an 2 , n’auraient point existé ,
qu’ils auraient été jugés inutiles, si on n’eût pas eu l ’intention
d’établir une rétroaction du 7 mars 1793 au 14 juillet 1789, contre
laquelle il était dans l ’ordre qu’on s’élevât.
A in s i, quoique le conseil soussigné n’ait pas plus approuvé
que les auteurs des consultations produites par Jean - lîaptisteG ilbcrt Dueourlhial , la rétroaction de la loi du 17 nivose , il
est toujours d’avis, qu’à moins de renverser tous les principes de
la législation, dont la loi du 7 mars 1793 fait la base, et qui
n été maintenue par toutes les lois postérieures , il faut assigner
les limites de cette rétroaction dans l ’intervalle du i/j juillet 1789,
à la publication de la loi du 7 mars 1793, en ce qui concerne la
ligne directe.
En supposant donc que Gilbert Ducourtliial eut disposé du
tiers des biens en faveur de son fils aîné, dans l'intervalle du i/v
juillet 1789, a la publication de la loi du j mars 1793, par un
acte irrévocable , tel qu un contrat de mariage 011 une transac
tion , 011 q u e , dans le meme intervalle, il fût décédé sans avoir
fait de disposition, il est hors de doute que son fds ainé serait
laisi du tiers.
A u premier ca s, il aurait été saisi par une disposition irrévo
cable, qui , ayant même été faite en faveur de tout autre en fan t,
uuralt
�Yt
17
aurait également son effet. A u second ca s, le défaut de dispo
sition de la part de Gilbert D ucourthial, aurait opéré la confir
mation de celle du contrat de mariage du 14 mai 1778 , parce
qu’a y à n t, avant le 7 mars 179^, une volonté , une liberté de
disposer, son silence serait considéré comme une confirmation
de la destination faite dans le contrat du 14 mai 1778 j eri
faveur du fils aîné, en cas qu’il n’y eût pas de disposition
contraire.
Dans ces deux cas, la loi du 7 mars 1795 serait sans application,
parce qu’elle n’a jamais dû dépouiller d’un droit acquis avant son
émission.
Mais n’y ayant eu aucune disposition irrévocable en faveur
d’aucun des enfans, avant la publication de cette lo i, et Gilbert
D ucourthial n’étant décédé qu’après, par conséquent aucun des
enfans n’ayant été saisi avant cette époque, on ne conçoit pas
comment ils n’ont pas dû être appelés par égalité.
A ussi, tout ce qu’on vient de dii’e est-il parfaitement confiimu
par l’article premier de la loi du 18 pluviôse an .
« Les avantages, y est-il d it, prélévem ens, préciputs, dona-
5
» tions entre - v ifs , institutions contractuelles et. autres disposi» tions, irrévocables de leur n ature, légitimement stipulées en
» ligne directe avant la publication de la loi du 7 mars 179^,
» et en ligne collatérale ou entre individus non parons, anté» rieurement à la publication de la loi du
brumaire an 2 ,
» auront leur plein et entier e ffe t, conformément aux anciennes
5
» lo is, tant sur les successions ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur
» celles qui s’ouvriraient à l’avenir. »
Cet article iixe d’une manière précise tout l’effet de la loi du 7
mars 1793.
La loi du 17 nivose an 2 détruisait toutes dispositions, même
celles qui étaient irrévocables, faites à partir du 14 juillet 1789.
Il y avait là une rétroaction. La loi du 18 pluviôse, en consé-iC
�qiioncn de celles des 9 fructidor an 0 et 5 vendémiaire an 4 ,
veut supprimer cette rétroaction, et dès-lors elle conserve les
dispositions faites du père aux enfans , entre le 14 juillet 1789
et la publication de la loi du 7 mars 1793, qui les a abolies, et
elle laisse subsister celles faites en ligne collatérale , jusqu’à la
publication de la loi du
brumaire an a , qui était la première
qui eut défendu ces sortes de dispositions ; mais en même temps
5
elle explique quelles sont les dispositions qui doivent subsister ,
ce ne sont que les dispositions irrévocables de leur nature.
O11 sent aisément l ’énergie de ces expressions. La loi ne peut
rappeler les dispositions irrévocables de leur nature que par
opposition aux. dispositions révocables, ou, ce qui est de même,
qui n’assuraient aucun droit; et ayant donné aux premières seules
le privilège de la stabilité, il est sans doute forcé de conclure que
les dernières n’ont dû avoir aucun effet.
Il 11’est pas inutile de remarquer la marche du législateur
'Après avoir
rappelé les avantages, prélévemens , préciputs ,
donations entre-vifs et les institutions contractuelles, il prévoit
bien qu’il y a d’autres espèces de dispositions; et quelles qu’elles
soient, il a le soin de les comprendre sous ces mots : et autres
dispositions irrévocables de leur nature. 11 serait difficile de
concevoir comment il serait possible de ne pas comprendre , dans
les termes de cet article, les dispositions de la nature de celles que
peut présenter le contrat de mariage du 14 mai 1778.Elles p0UVaient
être irrévocables ou incertaines , selon ce qui se serait passé mais
toujours avant, la publication de la loi du 7 mars 1795. V oilà
l ’époque
laquelle il faut se référer pour juger du caractère de*
stabilité ou d’instabilité do toutes dispositions quelconques.
En un m ot, le principe de l ’égalité, consacré par la loi du 7
mars 1795 , n’a pu porter sur les libéralités qui étaient irrévo
cables avant la publication de cette lo i, parce que c’eût été lui
donner un effet rétroactif en dépouillant des citoyens d'un droit
�x9
acquis. Mais tout ce q u i, à cette époque , n’était pas irrévo
cable , tout ce qui était versatile, ou , ce qui est de m êm e, tout
ce qui dépendait entièrement de la volonté de l'hom m e, a été
nécessairement soumis à ce principe d’égalité. A lo r s , aucun
citoyen n ’a été dépouillé; la loi n’a eu ni pu avoir égard a des
intentions d’un p ère, qu’il était d’ailleurs impossible de connaître,
puisqu’elles pouvaient varier jusqu’au décès.
Examinons actuellement les raisonneinens déduits dans les
consultations produites par Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial.
Les auteurs de ces consultations , se sentant gênés par l’effet
qu’a dû avoir la loi du 7 mars 179$, de rendre inutile toute
disposition qui n’aurait pas eu un caractère dirrévocabilité,
avant la publication de cette l o i , se sont efforcés de faire con
sidérer le droit de Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial comme
n’ayant jamais dû être soumis à l’empire des nouvelles lois ,
comme émanant d’un titre qui leur est bien antérieur : ils le
fondent sur le contrat de mariage de son père , du 14
mai 1778.
» L ’avantage dont il s’a g it , est-il dit page
5
et à plusieurs
» autres , est assuré à l ’exposant, non par une dispositiou pos» térieure à la promulgation de la loi du 7 mars 1793, mais par
« une disposition bien antérieure , puisqu’elle remonte au 14
mai 1778. >»
Selon e u x , le droit de recueillir le tiers , de la part du fds
aîné , lui aurait été acquis dés cetinslant : «Dans tous les temps
» on avait pensé que celui qui choisissait un , de plusieurs éligibles,
» pour recueillir une disposition préexistante, ne faisait point
» une disposition nouvelle , et conséquemment qu’il ne contrc» venait point aux lois prohibitives des nouvelles dispositions ».
Page 41. Les mêmes idées se reproduisent encore ailleurs.
ous ces raisonneinens ne sont propres qu’à jetter du louche
C 2
�STir ce qui no l ’est certainement pas. Ils disparoissent en réta
blissant les idées simples et vraies. D e quelque manière qu’on
décompose les clauses du contrat de mariage du 14 mai 1778 ,
on ne prouvera jamais qu’elles présentent en faveur du fds aîn é,
une disposition irrévocable , lors de la publication de la loi du 7
mars 179?) ; et c’est à ce point unique que se réduit la difficultéLe contrat de mariage ne contient aucune disposition effective.
Il n’y a tout au plus qu’une disposition éventuelle , qui pouvait
produire un effet ou s’évanouir au gré des père et mére , ou du
survivant de l ’un d’eux
E lle est subtantiellement et littéralement une destination du
tiers à l ’un des enfans qui Serait choisi, et à défaut de choix ,
à l ’ainé des mâles : il existait donc en la personne du père , à
l ’instant de la publication de la loi du 7 mars 1795, la faculté
de faire passer le tiers et même le surplus, à celui de ses enfans
que bon lui aurait sem b lé, sauf la légitime des autres, et de
rendre sans effet la simple destination déjà faite dans le contrat
de mariage du 14 mai 1778 , au hazard et en faveur d’un in
dividu inconnu et qui n’existait même pas.
A u surplus , on pourrait, comme a fait le législateur, dans
dans l ’article 6 de la loi du 22 ventôse an a , et dans l ’art. i er.
de la loi du 18 pluviôse an , ne point s’occuper des dénomi
nations qu’on doit rigoureusement attacher aux dispositions. Ce
dernier article, auquel on ne peut faire le reproche de rétroac
tio n , et dont le but a été au contraire de la faire cesser, ne
5
conserve que les dispositions irrévocables de leur nature, anté
rieures à la publication de la loi du 7 mars 1793 , et par con
s é q u e n t il a n nulle celles qui ne l’étaient pas à cette époque.
Il résulte de ces termes , que le législateur y a employés , et
autres dispositions irrevocables de leur nature, que la 'lo i 11e
distingue les dispositions quelles qu’elles puissent être, que par
�i 1
yj
tir
cette seule marque caractéristique , tVirrévocables ou non-irré
vocables.
Mais à quoi bon s’efforcer-de prouver qu’à l ’époque de la loi
du 7 mars 1793 , il n’y avait aucune disposition, irrévocable ¡en
faveur du fds aîné? Cette proposition est tellement vraie q uelle
n’a pu être mieux prouvée que par ce qui à été dit par les auteurs
des consultations.
Non-seulement ils conviennent qu’avant cette époque Gilbert
D ucourthial pouvait disposer de ses biens en faveur de celui
de ses enfans que bon lui aurait semblé ; mais ils soutiennent
encore qu’il a p u , même après la publication de la loi du 7
mars 179^ , faire passer le tiers en préciput à l’un des enfans
mâles autres que l’a în é , en exerçant le droit delire porté au
contrat de mariage du 14 niai 1778.
Cela ne résulte-t-il pas de ces expressions de la page 47 du
volume des consultations ? « 11 n’est même pas vrai que cette loi
» ( d u 7 mars 1793 ) eût ôté au père, le droit de choisir ; car
» ne lui inhibant d’avantager un da ses enfans, qu’à l’avenir,
» elle ne détruisait pas l’avantage déjà fait à celui des enfans
» qu’ il élirait. »
Ne trouve-t-on pas la même proposition dans ces expressions
de la page 48. « Car ou la loi du 7 mars 179^ empèchoit le
» père d’élire , ou elle lui en laissait la /acuité. Si elle lui en
» hiissait la faculté , il pouvait donc , dans cette espèce parti» cu lière, avantager un de ses enjans : si elle empêchait l ’é» lectio n , elle aurait donc détruit une disjwsition c o n tr a c tu e lle
» et par conséquent irrevocable. »
La încme proposition se reproduit encore dans ces expres
sions de la J>nge <)- « La disposition de 1778 cst irrevocable
» de sa naluro ; car elle est comprise dans un contrat de
» mariage.
4
» O.uund on dit qu’e lle pouvait être révoquée au préjudice
'
�n (Je l'aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été exercée,
» et q u i, quoique son exercice eût appelle un autre, héritier,
» ne changeait pas la-nature de la disposition , n’empèchait pas
» q u ’ u n s e u l parmi plusieurs, ne fut irrévocablement favorisé. »
On retrouve encore la même idée à la pagè o. !
On est bien éloigné d admettre , qu’après la publication de la
loi du 7 mars 1796, Gilbert Ducourthial aurait pu disposer du
tiers en question , comme bon lui aurait semblé , même en
faveur jd e . tout autre enfant que l’aîné , et les auteurs des consul
5
tations n’ont été obligés de hazarder une opinion aussi surpre
nante, que par la nécessité où ils se sont vus d’invoquer à l’appui
de leur système , la lettre de l ’art. 7 de la loi du 18 pluviôse j
dont on parlera bientôt.
Mais au moins conviendra-t-on que dès qu’ils attribuaient
cette faculté à Gilbert Ducourthial , même après la publication
de la loi du 7 mars 1793, ils devaient renoncer , à moins de
tomber dans une contradiction sensible, à l ’idée de la prétendue
irrévocabilité de la disposition du tiers dont ils disent que le fils
aîné était saisi par le seul effet des clauses du contrat de ma
riage du 14 mai 1778. Une disposition qui peut disparaître au
seul gré du disposant ; qui peut être portée sur toute autre tête,
peut-elle raisonnablement être transformée en une disposition,
irrévocable de sa nature ? Comment donc a-t-on pu dire , dans
un langage assez intelligible quoiqu’un peu enveloppé , contenu
dans un très-petit nombre de lignes trés-rapproehées, que la
disposition dont il s’agit était irrévocable ; qu’elle avait saisi ,
avant le 7 mars 17 9 3 ,0 1 que cependant elle n’assurait r ie n ,
puisque , même après , elle pouvait être détruite, et que tout
autre enfant pouvait en devenir l ’objet ?
Venons aux inductions que l’on lire de l’article 7 de la loi
du 18pluvio.se.
On est obligé de convenir qu’avant la loi du 7 mars 1795,
�Jean-Baptiste-Gilbert Ducourtliial n’était point saisi du tiers ;
que son père avait la fa cu lté -d'en disposer ; que cette faculté
a été abolie par cette loi; il est constant que celle du 18 plu
viôse, article i er. , n’a voulu laisser subsister que les dispositions
irrévocables antérieures à la publication d e là loi du 7 mars 17ÇP;
n importe tout cela , il résulte , dit-on , des expressions de l'ar
ticle 7 de la loi du 18 pluviôse, que Jean - Baptiste-Gilbert
D ucourthial doit avoir le tiers, en préciput. •
Cet article , est-il toujours dit dans les consultations, a voulu
que l ’on considérât comme existante , même après la publica
tion de la loi du 7 mars 1795 , la destination du tiers faite en
faveur de Jean-Baptiste-Gilbert D ucourtliial, par le contrat du
14 niai 1778 , jusqu’à une élection contraire que Gilbert
D ucourtliial avait eu la liberté de faire ; et comme il est dé
cédé avant le 17 nivose, sans faire une élection contraire , le
décès a opéré la confirmation de celle qui existait déjà dans le
contrat du 14 mai r778. En un m ot, on propose de donner à ce
qui s’est passé entre la publication de la loi du 7 mars 17g3
et la publication de celle du 17 nivose, le même effet qu’au
raient produit les mêmes circonstances dans l ’intervalle du 14
juillet 1789, à la publication de la loi du 7 mars 1793.
Telles sont les propositions que présentent les consultations.
. O n est forcé de dire que si jamais on pouvait les adopter ■
>
il 11’y aurait ni raison, ni principe dans l ’article 7 de la loi du
18 pluviôse ; il serait en opposition manifeste avec l’article i er.>
et l’esprit 11e se familiariserait jamais avec les conséquences absunies qui en résulteraient.
il faudrait admettre que, même après la p u b l i c a t i o n de la loi
du 7 mars 179^, Gilbert Ducourtliial aurait pu f«irp passer le
tiers de ses biens en préciput l’un de ses en fans mâles, autres
que l’aiué. Aussi les auteurs des consultations, comme on vient
de le voir, ont-ils été obligés d’aller jusques-li.
�7»
Vi
H
Mais à qui pcrsuadcra-t-on que Gilbert Ducourthial ait eu
cette faculté, et qui ne verra pas dans celte proposition, une
aberration de principes?
C o m m e n t l ’exercice d’une pareille faculté aurait-il pu se sou
tenir?. E t Jean-Baptiste Gilbert Ducourthial lui-m êm e, ne se
se ra it-il pas élevé avec force contre cette disposition ? Il n’au
rait pas fallu un grand effort de logique pour proposer ce dilême à son père.
Ou je suis saisi du tiers par les dispositions de votre contrat
de mariage , ou je n’en suis pas saisi. ( On trouve l ’un et l’autre
dans les consultations : il faut cependant convenir que çe 110
doit être que l’un ou l ’autre. )
A u premier c a s , vous ne pouvez plus disposer de ce tiers à
pion préjudice. J’invoque la disposition première.
A u second cas, vous ne pouvez pas plus disposer de ce tiers
en faveur de l ’un de mes frères. J’invoque pour y avoir ma
portion, la loi du 7 mars *793.- Vous voudriez faire usage d’une
faculté de disposer d’une partie de vos biens , et vous ne le
pouvez pas , puisque cette loi a aboli toute fa cu lté de disposer
de tout ou de partie de ses b iens, en faveur d’un enfant au pré
judice des autres. E lle exige l ’égalité entre eux.
O n serait curieux de savoir comment il eût été possible do
répondre à ce dilême.
(Je raisonnement n’eût rien perdu de sa force, quand il serait
38
vrai , comme on l ’a dit à la page
des consultations, que l ’on
eût dû voir dans le contrat de mariage , du 14 mai 1778 , une
institution contractuelle du tiers en faveur des enfans du se
cond l i t , q u i, à défaut de ch oix, les eût saisi cumulativement
par exclusion à la Aile du premier lit; ( ce qu’on examinera,
dans la discussion de la troisième question ) dans ce cas m êm e,
la loi du 7 mars 179^ aurait eu pour le tiers entre les trois enfans
du second lit , le même effet qu’elle aurait eu pour le surplus
des
�3
z5
-fies biens entre eux et la fille du premier mariage. Le tiers
serait alors devenu un patrimoine particulier aux enfans du se
cond l i t , pour lequel chacun d’eux avait droit de réclamer l’é
galité. prescrite par la loi , tant qu’aucun d’eux n était saisi
d’nuoune partie; et de même que les deux enfans puînés du
second lit étaient bien en droit en vertu de la loi du 7 mars
1793 , de réclamer leur portion du tiers, leur frère aîné ne
pouvant invoquer une disposition irrévocable de ce tiers en sa
faveur , de même aussi Jean-Baptistp-Gilbert Ducourthial , tou
jours dans l’hypothèse , aurait réclamé sa portion du tiers , en
vertu de cette même loi.
Gilbert Ducourthial n’a pu croire raisonnablement, après la
loi du 7 mars 1793 , qu’il eût le pouvoir dont on le gratifie au
jourd’hui, pour soutenir un système contre lequel la raison et
les lois s’élèvent. Il a dû forcément considérer comme éteinte ?
même pour le tiers, toute faculté de disposer q u ’i l avait avant la
. loi du 7 mars i-7y3. l i a senti, comme tous les autres pères qui
n ’avaient pas fait de disposition irrévocable, qu’il n’avait plus de
v o lo n té, qu’il ne devait avoir que celle de la loi qui prescrivait
l ’égalité.
Mais la fa c u lté de disposer qu’il avait ayant disparu , on ne
peut pas plus lui supposer l ’inlention de laisser le tiers au fils
aîné, que celle de le donner aux deùx autres enfans ou à l ’un
d’eux. Il a pu avoir la dernière intention comme la première.
Chacun des enfans peut également s’emparer du silence du
pere. Jcan-Baptisie-Gdbert Ducourthial dirait-il qu’il l ’a garde ,
parce qn il a voulu lui laisser le tiers dont il n’y avuit en sa faveur
qu’une simple destination. Mais , les autres e n tans diraient aussi :
' le père voulait nous gratifier du tiers, ou au moins nous y rap
peler ; sa volonté première et non moins prononcée, était que
chacun de ses enfans pût être son héritier du tiers, selon qu’il
�l’aurait avisé ; mais il a gardé le silence , par la seule raison
qu’après la loi du 7 mars 1793 , il n’a plus eu de volonté, cette
loi disposait de ses biens pour lui. T elle a été, en effet, l ’idée de
tous les pères qui se sont trouvés dans le cas où était Gilbert
D ucourthial ; et dans plusieurs endroits , ils n’auraient pas trouvé
de notaires qui eussent voulu rédiger une disposition contrariée
par la loi qui réclamait impérieusement l ’égalité.
Que résulterait-il donc du système des auteurs des consulta
tions? C’est qu’on adjugerait au fils aîné le tiers , en préciput ,
d’une fortune considérable, sans qu’il y eût h proprement parler
de disposition de la part du père. On ferait taire le vœu de la
nature; on renverserait la loi q u i, de concert avec elle réclamait
l ’égalité, sous le prétexte d’une intention supposée, en vertu d’un
silence qui n’a pu être que l ’effet de. l ’absence de toute volonté
de la part du p ère, la loi faisant sans lui la distribution de ses
biens.
A in s i, en donnant un véritable effet rétroactif à l'article 7 de
la loi du 18 pluviôse , une législation établie par la loi du 7
mars 1793 , uniquement en faveur des enfans puînés, maintenue
par toutes les lois postérieures , et sur-tout par l ’article i £r. de
cette même loi du 18 pluviôse , cette législation , dit-on, tour
nerait tout à coup contre les mêmes enfans qu’elle a voulu
favoriser ! On assurerait à l’aîné ce qu’il est incertain que le père
eût voulu lui laisser, ce dont il est possible qu’il eût voulu le
p r i v e r , pour eu gratifier les enfans puînés!
Mais est-il bien vrai que des conséquences aussi contraires à
la raison et û la justice, qui sont l’amc des lois, résultent de la
lettre de cet article 7 11 est ainsi conçu :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à fonds
» perdu , qui ont élé annulléts par les articles
et
de la
,1 loi du 17 nivôse , à compter du 14 juillet 1789 , sont rétablies
» dans leur effet p rim itif,si elles ont été faites par acte ayant
7
23
�Si.
2-7
» date certaine avant la publication de ladite loi du 17 nisose».
Il est d’abord à propos d’examiner si les dispositions de cet
article , de quelque manière qu’on veuille les entendre , peuvent
se rapporter à l ’espèce dont il s’agit.
O n sera bien fondé à écarter sans ressource toutes les induc
tions qu’on ne cesse d’en tire r, si les articles a et 26 de la loi
du i7n ivo se auxquels il se réfère , sont étrangers au cas qui se
3
présente.
O r , il paraît démontré qu’aucun de ces articles ne peut sc
rapporter à l’espèce.
L ’article 26 a trait aux donations à charge de rentes viagères
ou ventes 11 fon ds perdu, en ligne directe ou collatérale , à l ’un
des héritiers présomptif ou à ses ascendans ; elles y sont annullées
depuis et compris le 14 juillet 1789.
C ’est ce dont il n’est point ici question.
23
L ’article
porte que « Dans le cas on un époux décédé ,
» avant ou depuis lo 14 juillet 1789, aurait confère au conjoint
» survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs héritiers danssesbiens,
» l ’élection , si elle n’a eu lieu que le 14 juillet 1789 , ou depuis,
» demeure nulle et de nul e ffe t, etc. »
Ce n’est pas là non plus le cas dont il s’agit.
La différence d’un cas à l ’autre est en effet sensible. L ’arliclc
2.0 de la loi du 17 nivose suppose que l ’auteur de la disposition
était décédé avant le 7 mars 1793 , et que le sort de cette dis
position dépendait à cette époque de l ’élection d'un tiers dépo
sitaire de la confiance et des intentions de l’auteur de la dis
position. On ne peut raisonnablement faire une différence entre
l’un des époux chargé d’élire, et toute autre personne. Telle
est d’ailleurs la disposition de l’article 3 de la loi du 9 fruc
tidor an 2. Il y est d it: « L ’article 2 de la loi du 17 nivose
» demeure déclaré commun au cas même où la faculté d’élire a
3
D 2
f
�Il
28
» été conférée à tous'autres qu’à des ép o u x , si l'élection n’a eu
» son effet que le 14 juillet 17S9 ou depuis ».
O r , dans l ’espèce, l ’auteur même de la disposition vivait à
l ’époque de la publication de la loi du 7 mars 1795. C’est à
lui seul qu’ap^arténait l ’élection et non à tout autre ; c’est en
son pouvoir qu’était la fàculté de laisser le tiers au fils aîné,
ou de'le lui retirer. Il pouvait même en gratifier tout autre en
fant; il pouvait faire plus encore, il pouvait instituer un seul
héritier universel. Aucun individu n’était dans son secret, il n’y
avait personne qui fût chargé de l ’exécution de ses (intentions.
Lui seul les connaissait, lui seul pouvait les diriger à son gré
jusqu’au dernier moment de sa vie.
L ’article 7 de la loi du 18 pluviôse ne doit pas être détaché
de l ’article a de la loi du 17 nivôse. Il ne parle que des mêmes
élections , de celles qui ont été annullées par cet article
. Il
3
23
se réfère donc nécessairement à une élection qu’aurait pu faire
un tie r s , en conséquence de la disposition d’un défunt.
Mais , dans l ’espèce , ce n’était pas l ’état des choses à l ’époque
du 7 mars 1793. Cet état eut été tel si Léonarde Cornudet eût
survécu à son mari. Mais cet état n’existait pas dés q u elle était
décédée depuis longtemps , et que Gilbert D ucourlhial vivait.
Ce serait en vain qu’on aurait recours à des analogies, à dos
parités , pour faire rentrer le cas où se trouvent les parties dans
celui énoncé dans l ’article a de la loi du 17 nivose.
3
Quoique dans une matière aussi abstraite, susceptible de tant
de combinaisons , il soit difficile d’entrer dans la pensée du lé
gislateur, on peut cependant dire qu’il serait possible qu’au 18
5
pluviôse an , 011 eut ainsi raisonné : « La loi du 7 mars 1793
» a aboli la fa cu lté de disposer de ses biens. Elle 11’a pas eu en
» vue une disposition déjà faite p’ir un d éfu n t, subordonnée
>, néanmoins ù une faculté d’élire conférée à uu tiers que les
�29
»
»
»
»
éligibles auraient pu actionner en justice pour qu’il eut à faire
un choix entre eux. Cette faculté d’élire a été seulement abolie
par l ’article 25 de la loi du 17 nivose ; donc elle a pu être
exercée jusqu’à la publication de cette loi. »
O r, il n’est pas là question, comme ici, d’une faculté qu’avait
un individu relativement ci scs propres biens. Ce dernier cas
tombe évidemment sous la dispositions de la loi du 7 mars 179^1
qui porte : « La faculté de disposer de ses b ien s, soit à cause de
» m ort, soit entre-vifs, soit par donation contractuelle , en ligne
» directe , est abolie. »
Ce n ’est pas qu’en revenant à des principes qu’on croît surs
et qui sont une conséquence de la loi du 7 mars 179^ > on ne
pense bien q u e , même dans le cas de la faculté d’élire qui
devait être exercée par un tiers, l ’élection était éteinte, par le
seul effet de cette l o i , comme dans le cas d’une faculté relative
aux propres biens d’un individu ; mais il est toujours vrai que
ce sont deux cas différens, et il suffit que lors des modifications
apportées par la loi du 18 pluviôse, ils aient pu n’être pas
considérés sous le même point de vue , pour que la disposition
législative qui se rapporte à l ’un d’eu x, ne doive pas être ap
pliquée par extension à l ’autre.
O u cette différence , dans l ’idée du législateur, a élé fondee
en raison , ou elle a été l’effet de l’erreur. Dans un cas comme
d ms 1 au tre, on irait contre son intention, en appliquant sa
disposition à tout autie cas que celui qui a été prévu; cette
extension seiait encore plus dangereuse , si l ’on apercevait de
erreur dans sa décision pour le cas prévu. Il aurait lui-meme
a .ce réjouir cl en voir d i m i n u e r les progrès. Le domaine ut. er
1
1
reur doit être aussi restreint que lY'inpire de la raison doit être
étendu.
Ce qui achève de prouver jusqu’à quel point , dans une pa
reille matière , les moindres nuances peuvent avoir porté de
�hk
« îf
30
changement quant aux décisions; c’est la circonstance que dans
l’article 7 de la loi du 18 pluviôse an 5 , le législateur n’a pas
voulu rappeler l ’article 24 de la loi du 17 n ivose, qui est ainsi
conçu : « Tous actes portant institution nominative d’un héritier ,
» néanmoins subordonnée au cas où un tiers ne disposerait pas
» autrement des biens compris en la même institution sont nuls
» et de nul effet, à dater du 14 juillet 1789, si à cette époque
» le droit de l’institué n’était pas devenu irrévocable , soit par
» le décès du tiers , soit par transaction authentique passée avec
» lui. »
L ’espèce dans laquelle se trouvent les parties n’est pas exac
tement la même que celle prévue dans cet article. Le contrat
de mariage du 14 mai 1778 , contenait une disposition du tiers
en faveur du fils aîné , subordonnée néanmoins au cas où le
père n’en disposerait pas autrement. Il y a toujours la diffé
rence que dans l’espèce de l’article , la faculté de disposer au
trement appartient à lin tiers, et l’auteur de la disposition était
réputé décédé avant le 7 mars 1793 ; au lieu que dans l ’espèce
actuelle la faculté de disposer autrement était au pouvoir du
père même , auteur de la désignation , et qu’il existait au 7
mars 1793.
Cependant si on devait faire un rapprochement de l ’espèce
actuelle à l’un ou l’autre des deux articles
et 24 , ce serait
plutôt au dernier.
E h bien : le législateur , dans l’article 7 de la loi du 18 p lu
23
viôse, a eu des raisons de marquer une différence entre l’espèce
de l ’article 24 et celle de l’article
, puisqu’il ne parle pas de
23
l’article 24 ;
ne fait Pas porter sur cet article les modifica
tions qu’on prétend qu’il a voulu apporter à l’article
, dont il
25
parle seulement.
On ne dira p as, sans doute, que c’est par une omission sans
conséquence que le législateur n’a pas rappelé l ’article 24 dîyis
�JP
5'
l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse, et qu’il a entendu confondre
ses dispositions avec celles de l ’article 2.0.
Cette manière de raisonner, dans une matière telle que celle
*
dont il s’agit, serait une source de graves erreurs.
Le législateur avait sous les yeux quatre articles , qui se sui
vent , les articles 20 , 24 , 26, 26. 11 ne porte son attention , et
n ’applique par conséquent ses nouvelles dispositions quJà deux
de ces articles , qui sont les articles 2.0 et 26 ; il omet les deux
articles intermédiaires , et l ’on voudrait persuader qu’il faut
suppléer d’oflice l ’insertion de l ’un ou l’autre de ces deux
articles !
D ’ailleurs le législateur a le soin de caractériser de manière
à ne pouvoir s’y méprendre , les articles auxquels s’appliquait la
nouvelle disposition législative. Il ne parle pas vaguement des
articles
et 26. Il rappelle le sujet de chacun d’eux. L es élecLions il’héritier ou de légataire , voilà ce dont il était question
seulement dans l ’article a . L ’article
n’était point relatif aux
élection s, ce mot môme 11’y est pas prononcé. Il est dit ensuite,
23
3
24
et les ventes ¿t fo n d s perdu. C’est - là un des sujets de l ’ar
ticle 26.
A in si, le législateur rappelle tout à la fois les articles
et
26, avec les cas auxquels ils avaient trait. Comment voudraiton hazarder d’appliquer sa disposition à d’autres articles qui
23
sont relatifs à d’autres objets?
Le législateur a donc voulu laisser subsister , quant au fond }
l ’article 24 , ainsi que 1’articly 2Î> , qui est relatif à une espèce
particulière de libéralité. « Les d i s p o s i t i o n s alternatives, y est-il
» d it, comme celles par l e s q u e l l e s le donateur a v a i t promis de
» nourrir et d’entretenir le donataire , ou de lui donner une
» somme déterminée en cas que l e u r h u m e u r cessai de sympa>> thiser , sont maintenues comme donations entre-vifs, si elles
» sont antérieures au 14 ju illet.1789. »
■
�51
Il y a v a it, à la vérité , clans les dispositions de ces deux ar
ticles , la retroaction, en. remontant de la loi du 7 mars 179^ ,
au 14 juillet 1789. Mais le législateur ne s’en est pas occupé ,
parce que cette rétroaction était détruite par l ’article premier de
de la même loi du 18 pluviôse, et par les précédentes, dont on
a déjà parlé. A insi, il a soumis les dispositions de ces deux articles
à la loi du 7 mars 1795, et à l’article premier de la même loi
du 18 pluviôse.
Q u’on ne perde pas de vue que le législateur, dans cette ma
tière comme, dans plusieurs autres, a souvent statué autant par
omission que par énonciation,v.n laissant subsister une législation
ancienne pour les cas om is, et. en faisant des dispositions nou
velles seulement pour les cas énoncés. On en trouve un exem ple,
.même dans l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse , dont il
s’agit ici.
Il y est d it, les élections d ’héritier ou de légataire , et les
ventes i l fo n d s perdu , qui ont été annullées par les articles
3
n et 2G cle la loi du 17 nivose. L ’article 26 était relatif aux.
ventes à fon d s perdu. Mais ce n’était pas le seul objet dont il y
fut fait mention. Cet article porte : toutes donations ¿1 charge
de rentes viagères, ou ventes à fon ds p erd u , en ligne directe
ou collatérale , etc. Cependant l ’article 7 de la loi du 18 plu
viôse ne parle pas des donations à charge de rentes viagères.
O r , pourrait-on dire qu’il L ille les y suppléer, et les confondre
avec les ventes à fon ds perdu ?
L a difficulté qui se trouve dans l ’article 7 de la loi du 18
pluviôse an
5,
dérive de ce qu on a rassemblé dans ce seul ar
ticle deux objets absolument disparates , savoir : les élections
d'héritier ou de légataire, et les ventes ¿1 fon ds perdu.
11 se pouvait qu’on 11e dût pas appliquer aux ventes <ï fonds
perdu la même disposition législative qu’aux élections d ’héritier
ou de légataire. Les vendes à fonds perdu n’étaient pas dans la
classe
�5/
33
cîaise des dispositions ordinaires , on pouvait ne pas les consi
dérer comme ayant été frappées par la loi du 7 mars 179^ , et
dès-lors ayant été seulement annullées par la loi du 17 nivose, il
pouvait paraître juste de laisser subsister toutes celles qui avaient
été faites jusqu’à la publication de cette loi.
Mais les élections d’héritier ou légataire eiaient évidemment
des dispositions gratuites, soumises comme toutes les autres, a
la loi du 7 mars 1793. L ’article a de la loi du 17 nivose ne
contenait pas , à ce su jet, une disposition nouvelle. Il n’était
3
qu’une déclaration de la conséquence du principe consigné dans
la loi du 7 mars 1793, et son unique but était de reporter l ’effet
de cette dernière lo i, jusqu’au 14 juillet 1789. Il ne s’agissait
donc, lors de loi du 18 pluviôse, que de détruire cette rétroac
tion , en conservant les élections faites jusqu’à la publication de
la loi du 7 mars 1793.
Ainsi, en entrant dans le sens et dans l ’esprit de l ’ensemble d elà
loi du 18 p l u v i ô s e , il faudrait entendre distributivement les termes
d e l’art. 7 si elles ont été faites par acte ayant date certaine avantï
la publication de ladite loi du 17 nivose. Ces termes devraient
être appliqués seulement aux ventes à fo n d s perdu. Mais leur
application ne peut se faire aux élections d’héritier ou de lé
gataire , parce que dans l’article premier il y a nécessairement
un régulateur pour ces sortes d’actes. Ils rentrent incontesta
blement dans les dispositions de biens, abolies par la loi du 7
mars 17 9 3 , et l’article premier de la loi du 18 pluviôse n’a
voulu conserver que les dispositions de biens qui s e r a i e n t irré
vocables à 1 époque de la publication de la loi du 7 mars 179^ ,
sous quelque dénomination que fussent ces dispositions.
On pourrait encore observer que s’il était vrai que le légis
lateur eût voulu donner effet aux élections jusqu’à la publication
de la loi du 17 nivose , il aurait entendu que pour assurer le
-Port d’une élection postérieure au 7 mars 1793, il faudrait an
E
�moins qu'elle eût été faite expressement par un acte ayant
une date certaine avant la publication de la loi du 17 nivose,
c’est-à-dire, que dans l ’intervalle de la publication de la loi du
7 mars 1797) , à celle de la loi du 17 nivose , il devrait y avoir
une confirmation de la destination du tiers, portée par le contrat
de mariage du 14 niai 1778, afin qu’on fût assuré de la persé
vérance d’une volonté depuis le premier mars 1793 , sans qu’on
pût y suppléer par le décès ; car la loi ne parlant point du cas
du décès , ne fait pas marcher cette circonstance d’un pas égal
avec l’élection constatée par un acte.
M ais, quoi qu’il en soit de cette dernière interprétation , qui
ne serait certainement pas déraisonnable , toujours est-il certain
que de quelque manière qu on entende l ’article 7 , il est im
possible d’en appliquer les dispositions à l’espèce dont il s’agit.
On est fondé à faire ce dilême. Ou le cas en question ne peut
être rangé sous aucun des articles de la loi du 17 nivose, ou
s’il peut être compris dans un de ces articles, c ’est seulement
dans. l’article 24 ;
dans un cas comme dans l’autre , on ne peut
lui appliquer l ’article 7 dé la loi du 18 pluviôse an 5.
Aussi lit-on dans une des consultations, page
: « il est
» même à observer que l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse , ne
55
» parle point du cas où le donateur prévoyant le défaut d’élec» tio n , a désigné éventuellem ent, comme i c i , celui des éligibles
n par lequel il entendait que la donation fût reueillie. »
Dans quelque sens que cet aveu ait été fa it,, il en résulte
toujours que l'article 7 de la loi du 18 pluviôse ne parle point
du cas dont il s'agit, et d’après tout ce qu’on a dit, la seule
conséquence qu on puisse en tirer , est que sa décision est sou
mise à la loi du 7 mars 1793 , et à l ’article premier de la loi du
5
18 pluviôse an .
Tout se réduit donc à ce point. Lors de la publication de la
loi du 7 mars 1793 , Gilbert Ducourlhial avait la Jacuité de dis
�poser-\dv scs 'biens , ou , ce qui est de m ê m e , i l n’y en avait
pas eu de sa pari mie disposition .qûii'-fût-irrévocable ; -donc 5
■soit vn ver lu de celte lo i , soit en vertu 'de l ’article .premier de
la loi du 18 pluviôse , sesenfaus o n td iï avoir -un droit égal sur
la partage de ses biens.
'Enfin, l'auteur d’une deis -consultations, pages 42;e£-45 , a pvé-
lendu qu’il s’élevait de l ’article -Ciy ‘de lkiloi du iy-nivose an 2 ,
une ‘fin de noii‘-recevoir contre les citoyens Ducourtliial' puînés :
« ils ne veulent pas'voir , d it-il, -que ‘les lois de 1793 et^de Uan 2,
'» n’ont pas été faites pour régler les intérêts des donataires>entre
» eux , mais seulement pour régler les intérêts des héritiers lé» 'gitimés , m is ‘en opposition SaVfcc1 c6ux des donataires. C ’est
» cependant ce qui est bien textuellem ent et bien énergiquement
» exprim é dans F article
de la loi du 17 nivose. »
'
Personne iiè Verra de qiieTautfelir’thì la consultation veut; qu’on
v o ie , et l ’ohjection paraîtra toujours étonnante quelque soin
qu’il ait pris pour la faire entendre.
L ’article 57 est ainsi con çu : « L e droit de réclamer le bénéfice
>1 de la l o i , quant aux dispositions q u ’elle an nulle, n ’appartient
»> qu’a u x liêritiérs 'riatttfels ,‘ fet à dater sfeiileihèüt
»
du jo u r où leur
droit'est oiïvért, seins qüe , jiièqu’à t e t t e épòque , il y ait lieu à
» aucune institution de fruit. »
Cet article n’a voulu dire autre chose, si ce n’est que le droit
de réclamer la n u llité , ou la rédüction-dë la disposition ^appar
tenait pas à l'auteur même de la disposition. Q u ’il pouvait seu
lement etre exercé par ses héritiers ,•<?£ à dater s e u l e m e n t du jo u r
ou leur droit est ouvett-^ c’est-à-dire, après son décès.
. V o ilà h qüoi se borne le sens de cet a rticle , et on peut dire
quei cela est bien téxtuellcm etit et bièn érïergiqucm'enl exprim é
par le législateur -lui - m êm e, dans l’article 44 de la loi dut 2a
Ventose an 2.
i Question.' « A ce qu’il's o it1in terdit, d’une manière précise à
E 2
�» col ni qui a fait depuis le 14 juillet 178 g , ou qui fera à l’avenir
» une donation entre - vifs , soit en faveur de mariage , soit en
» avancement d’hoirie ou autrem ent, de réclamer personnel» lement contre l’effet de sa propre libéralité, et sauf aux héri» tiers , à son d écès, à faire valoir leurs droits.»
Réponse consacrée en l o i , « qu’elle est véritablement résolue
» par l’article 67 de la loi du 17 nivose. Q u’en effet l ’attribution
» faite par cet article aux seuls héritiers, et à dater seulement d«
» jour où leur droit est ouvert, décide bien nettement que nul
» droit à cet égard ne réside dans la personne du donateur
» máme. »
Il serait inutile de faire de nouvelles observations pour réfuter
|ine semblable objection. •
.
v ■
T R O Í S I E ME
QUESTION.
Jean-Baptiste-Gilbert DucoartfiiciL n’ayant pas été saisi
du tiers , ce tiers doit-il appartenir a u x seuls en/ans
du second lit à titre d ’éligibles dans Le principe , à
L'exclusion de Gilberte D u co u rth ia l, fille du premier
Lit ?
Cette question que l ’on va discuter , en faisant toujours abs
traction du moyen de n u llité , qui a été l’objet de la première
est une des plus délicates qui puissent se rencontrer. Sa discus
sion exige la plus grande attention. O11 11’a pas m êm e, k propre
ment parler, à combattre, a cet égard , les consultations pro
duites par Jean-Itoptiste-Gilbert D ucourthial, puisque les diffi
cultés qu’elle présente n’y sont pas prévues. O11 s’est contenté de
dire que si le droit d’avantager du tiers l’un des en fans du second
lit eut été éteint par l ’cflct de lu loi du 7 mars 1796 , au moins
�*
y
ce tiers serait réversible sur eux collectivem ent, sans que Gilberte
’Ducourthial pût y rien prétendre.
Mais en y réfléchissant, on sera convaincu que cette opinion
n ’est point fondée, et que la caducité de la faculté d’élire fait
rentrer le tiers dans la succession, qui doit être partagée par éga
lité entre tous les enfans.
Il est bien important de saisir le genre et le but des disposi
tions contenues au contrat de mariage du 14 mai 1778.
« Gilbert Ducourthial, en faveur du présent m ariage, institue
» héritier du tiers de tous ses biens , présens et à ven ir, l'un des
» enfans qui naîtra du présent m ariage, et ce par préciput et
» avantage ; laquelle institution est faite en faveur de celui ou
» celle que les futurs époux choisiront conjointement, par quel» qu’acte que ce soit. »
Il est impossible de voir là une institution contractuelle du
tiers , en faveur de toute la postérité qui devait provenir du
second mariage. Il n’y a d’appelé que celui ou celle que les fu
turs choisiraient, ce qui est bien différent.
Voici le véritable sens d’une pareille disposition : « Si quelqu’un
» de mes enfans dôit avoir, en vertu de la présente disposition,
» le tiers de mes biens en p récip u t, ce sera celui des enfans du
» présent mariage , qui sera choisi. >»
Mais ce n’est pas dire que , « si aucun ne peut être choisi , tous
» les enfans du second mariage auront le tiers en préciput. »
Ce serait supposer une seconde disposition, qu’il est impossible
de trouver dans le contrat , et il est de principe qu’on 11e doit
point donner d’extension aux dispositions , sur-tout au préjudice
des héritiers du sang , tels que des enfans. Le d r o i t que leur
donnent la nature et la lo i, ne peut être m o d i f i é que par une
disposition précise , et toujours réduite à sa v é r i t a b l e valeur.
Il faut ne pas détacher la disposition du m o d e qui la dirige. Ce
Xie sont pas tous les enfans qui sont appelés. Celui - là seul est
�ap p elé, qui sera élu. C’est donc un seul pris isolément qui est
appelé, et celle vocation est subordonnée à son élection ; mais
tous les enfans du second mariage ne sont nulle part appelés co l
lectivem ent, et si on se permettait une pareille interprétation, ce
serait entièrement dénaturer les clauses du contrat, et supposer
dans la volonté du disposant ce qui n’y est pas.
L ’idée de vouloir que si le tiers était prélevé en préciput, ce
ne fut que par l’un des enfans du second lit qui serait ch o isi,
peut subsister seule et séparément de l ’idée que si cette élection
devenait impossible, tous les enfans du second lit auraient le tiers,
exclusivement à l ’enfant du premier.
Ce sont deux idées, et par conséquent deux volontés différentes.
La première est textuellement écrite dans le contrat ; la seconde
ne s’y trouve pas.
Il n’y a rien d’extraordinaire à vouloir qu’un seul des enfans
du second lit fût gratifié du tiers; mais que si la condition sous
laquelle il devait lc tr e , qui était Yélection , devenait impossible,
ce tiers demeurerait confondu dans la succession. Le tiers répartj.
sur toiis les fenfans du second lit, pouvait ne pas paraître au dis
posant un avantage assez considérable pour opérer une gratifica
tion conforme à ses vues : il a pu vouloir , dans ce cas, y appeler
tous ses enfans indistinctement.
Q u ’on suppose, tant qu’on voudra, qu’il ne prévoyait pas la
distribution forcée du tiers entre tous ses enfans indistinctem ent,
parce qu’il ne soupçonnait pas l’impossibilité de l’élection. Dés
que ce cas est arrivé, il suffirait qu’on ne pût savoir ce qu’il
eût fait, s’il 1 eut prévu, pour q u o n s en tienne à la disposition
telle qu’elle est écrite. On peut interpréter une volonté obscu
rément énoncée ; mais une volonté claire et précise ne peut être
dénaturée en y en ajoutant une autre.
En un m o t, la disposition dont il s’agit présente une vocation
bien déterminée et subordonnée à une condition.
�Cÿb
39'
V
Elle est dirigée au profit (l'un seul (les eufani du second l i t ,
et cet enfant devait être celui qui serait élu. La condition
n’ayant pu avoir lieu , il est impossible de voir de vocation , et dèslors tout rentre dans la règle générait; qui appelle tous les enfaus.
T elle est sans doute la règle générale : la disposition exclu
sive contre plusieurs ou l ’un d’e u x , n’en est qu’une exception,
et il est incontestable que les exceptions ne doivent point rece
voir d'extension.
T ou t ce qu’on vient de dire ne reçoit aucun changement par
la clause qui suit : « Et en cas que le choix n’en ait pas été fait,
» ladite institution sera au profit de l’aîné des m âles, s’il y a
» des mâles, et s’il n’y a point de m âle, au profit de l’aînée des
>» filles. »
Cette clause,au contraire, ne fait que prouver que jamais, dans
l’esprit du disposant, il n’y a eu l ’idée du concours de tous les
enfans du second lit pour recueillir le tiers des biens.
11 appelle l ’un d’eux ; c’est celui qui sera élu : il suppose ensuite
qu’il n’y ait pas de ch o ix; mais alors il n’appelle pas tous les
enfans du second lit; il persévère toujours dans son idée, il dé
signe seulement un de ces enfans. Toujours ce n’est qu’un des
enfans qui doit recueillir le tiers en préciput, et il n’y a jamais
de vocation pour les enfans du second lit collectivement.
Gilbert D ueourthial, en disant : et en cas (/ue le ch o ix rien
ait pas été f a i t , suppose toujours qu’il aura ou son épouse, si
elle eût survécu, la possibilité de faire un choix. Il croit tou
jours que si son fils aîné a le tiers , ce sera parce que la désigna
tion sera confirmée , ou par un nouvel acte , ou au moins par
la perseverance dune volonté libre, jusqu’au décès du survivant.
La disposition n’était une vraie disposition , elle n’a dû com
mencer à prendre effet qu’au décès ; c’était s e u l e m e n t â cette époque
qu’il devenait certain (jue l’enfant désigné
un choix contraire.
n ’a v a i t
point à craindre
�/
4°
.
A insi, sous tous les rapports possibles, la disposition reste dans
les formes d’une vocation de Yun des »nfans, subordonnée à la
condition qu’il sera élu. La possibilité de l'extinction de la faculté
d’élire n’a point été prévue.
Il n’y avait cependant rien de plus vrai que la possibilité de
cette extinction , puisqu’elle est avouée par l ’auteur de l ’une des
consultations, page
. « La disposition principale ( l’institution
» contractuelle du tiers) dit - i l , était pure, sans condition et
>1 irrévocable de sa nature. Elle aurait profité à tous les enfans
» collectivem ent, ci défaut de ch o ix valable d’un seul d'entre
» eux pour recueillir exclusivement. »
Si un choix non valable eut donné lieu à l ’extinction de la
faculté d’élire , à plus forte raison est-elle résultée de l ’impossi
bilité où s’est trouvé Gilbert Ducourthial d’exercer ce droit, par
l ’effet de la loi du 7 mars 1795.
38
Il est vrai que , dans le cas de cette extinction , l ’auteur de
la consultation dit que l ’institution du tiers aurait profité à tous
les enfans du second lit , sous le prétexte que c’était une dispo
sition principale sans condition et irrévocable ; mais c’est ce qu’il
s'agissait de prouver, et on a déjà démontré le contraire.
L a question qui se présente a exercé les auteurs, et tout ce qu’on
vient de dire est conforme au résultat de leur doctrine.
Ce qui était propre à induire en erreur, c’est ce qu’avait d it
R icard, dans son T raité des substitutions, traité e. , partie 2e. ,
chapitre 1 i e. , n°.
. « Mais bien que la faculté donnée ¿1 l ’hé» ritier de choisir un fidéi-commissaire entre plusieurs, fasse une
» c o n d itio n à 1 égard de celui qui doit être choisi, il est pour» tant pur et simple a l’égard de tous en général; ensorte q u ’il
» ne peut leur être ôté que sous cette condition , laquelle , si
65
3
*> elly m anque, et que l’héritier meure sans faire son élection }
« Ici fïdéi-commis doit être partagé également entre tous. »
Mais R i c a r d , com m e l ’observe son dernier annotateur, n ’avait
point
,
�y
. r
.
.point mis 1a dernière main à ce chapitre ; qui n’ est qu'une
.ébauche. Tous les auteurs q u i, depuis, ont approfondi la question,
,ont rétabli les principes en restreignant l'opinion de Ricard, au
¿seul .cas auquel elle devait être appliquée d'après le §. liogo de
,1a loi.6 7 , ff. de legatis a0, sur lequel il se fonde.
Ile n ry s, liv. 6 , quest. a , explique ce §. Piogo ; il démontre
.qu’il ,est seulement dans le cas d’un testament contenant une
.institution d’h éritier, à la charge par cet héritier de rendre , à
-titre de lidéi-com m is, l’hérédité à celui des affranchis du défunt
.que Ijqii semblerait à l ’héritier. Rogo fundum cum morieris ,
5
restituas uni e x libertis cui voles. O r , dans ce cas, si- l’héritier
iidéi->commissaire ne veut point é lire , ou néglige de le faire, il
est forcé,de donner le bénéfice de l’institution à tous les éligibles^
à moins que le testateur en eût désigné un auquel la restitution
.dût^e faire e n (cas de non élection.
Mais pourquoi cela ? « C’e st, comme dit J’a u te u r, parce que ,
.» dans l ’espèce proposée , il est bien au pouvoir de 1 héritier
-*> fidéi-çommissaire .^l’en élire un ou de n’en élire aucun; rnais
-»<en négligeant d’é lire, il n’est pas juste qu’il s’exempte pour
,>' cela du lidéi-commis, et qu'il le ¡retienne. U serait absurde que
.» sa négljgence ¡pu ,sa;mauyai$e foi lui fut profitable, et que le
.» ¡profit qu’il en tirerait l ’obligent à ne,ppint élire................ ,11 ne
.» -reste -partait qu’à l ’obliger à lais$çr à ,tous ,ce , qu’il n’a voulu
.h bailler à fin s e u lyct qu’il ne peut pas,garder. ,»
•
, U ilie^ ’agit pas ici d e ,c e la ,ie t ;hors ce xCas,,1’auteur s’ep.
tient à la règle, que Ce qui n’est d on n é, çomnie dans,l’espèce »
.qii^i ¡un t^.C^^., n’<ist pojnt: donné à tçus les éligibles. 11 dit que
.cette règle résulte. même <du §. Rpgo ,,cité par ,J\icard , puisque
•le législateur ,y dit q u e, daris .ee o.as particulier, il arrivera ce
tqui est çofitrp le vflroitcoin}nyn. que pe q u i n’est donné qu’à un
6eul pourra être demandé par tous. Itaque eveniet ut quod uni
.tfatiwi .estt, .yivis pl^ribus ¿im tj pçtcre fiçn p o tsit, seil omne$
'
'
«
�*
42.
pctrnt quod non omnibus datum e s t, et « toujours pour empê» cher que le testateur ne soit trompé par l’héritier ( fuléi» commissaire ) et parce que la loi présum e, que si bien il n’a
» entendu laisser l ’héritage quVi un s e u l, il a pourtant voulu
» qu’il demeure plutôt à tous ceux qu’on pouvait élire qu’à son
« héritier ( fidéi-cominissaire ) et qu’ieelui ne se prévalût de sa
négligence ou de sa perfidie. » Il fallait, dans ce cas, que les
éligibles eussent collectivement l ’hérédité, ou qu’elle restât à
l ’héritier institué chargé de la ren dre, et ce dernier parti eût été
absurde. L ’institution testamentaire , suivant la jurisprudence
rom aine, devant avoir son e ffet, il était forcé de le lui donner
conformément au §. R o g o , et d’exclure les héritiers de droit.
La question a été traitée encore avec plus d’étendue par Sudrc,
auteur d’observations , trés-estimées sur le Traité des élections
d ’h éritier, contractuelles et testamentaires de J^ulson^ conseiller
au parlement de G renoble, pag. 64 et suiv. édit. de 1753.
Sudre s’est attaché à prévenir l’abus qu’on pouvait faire de la
manière dont s’est expliqué Ricard. Il dit que « les lois qui ont
>, établi la maxime du concours (d e tous les éligibles à défaut
» d’élection ) sont toutes dans le cas que la faculté d’élire a
» été commise à Yhéritier ou au légataire qui était grevé de
>. rendre. » Il traite la question pour le cas où la faculté d’élire
serait séparée de l’institution, et serait donnée à un tiers comme
nn simple ministère. L ’on sent qu’il ne peut y avoir aucune
différence de ce cas à celui où l ’élection aurait appartenu à l ’auteur
même de hi disposition, comme dans l ’espèce.
O r , dans le cas proposé, l’auteur, en analysant l ’opinion de
Ricard , en rend ainsi le résultat : Q u’encore qu'il semble que
la donation soit fa ite à un s e u l, toutefois la vérité est que la
disposant donne à tous, sinon q u il aime m ieux fa ir e un ch o ix
cn lrcu x.
C ’est sur cette idée que l ’on se fonde pour soutenir que si le
�43
fils aîné n’était pas saisi du tiers , il appartiendrait k tous les
enfans du second lit exclusivement à Gilberte Ducourthial.
Eh bien ! c’est contre cette même idée que Su rire s’élève avec
force. ’
Il
dit que cette opinion est « formellement condamnée par
» les maximes de d ro it, et par la disposition de la loi. « Il établit
que les dispositions dont il s’agit sont en effet conditionnelles
dans leur substance, puisque c’est l'événement incertain, d’une
élection qui doit déterminer cette personne unique à laquelle
les biens sont destinés. Il n’est jamais permis, d it-il, de suppléer
des dispositions que le testateur a omises, et qui n’ont point de
fondement dans la lettre du testament. Peut-on d o n c , ajoute-t-il,
dans un fidéi-com rnis qui n’appelle qu'un des enfa n s, suppléer
d office une première disposition par laquelle tous les enfans
soient censés appelés.
E n fin, dit toujours l’auteur, nul des enfans n’ayant été appelé
qu autant qu’il serait é l u , nul aussi ne semble avoir de qua
lité pour être admis toutes les fo is qu’il n ’y a point d’élection ;
qu’a in si, par le défaut d’élection , tous sont d’échus de la con
dition du fidéi - commis , ncm inc elepto
dcjiciunt.
omjics conditione
Cet auteur se fonde sur H enrys, sur le président F a b e r, de
erroribus praginaticorurn d e c is , 5 5 , cap. 5 et G, qui s’explique
ainsi : F it non solurn prœter v e ib a , sed etiam prœter voluntatern ^
si quis dicat fidei-com m issum omnibus datum esse. Il i n v o q u e
opinion de Bornier sur Ranchin, inverbo fid éi-co m m is, art. i8 ,
et de M aynard, liv. 6 , chap. g.
tu rg o le parle encore de la question, traité des testamens ?
chap. y , sect. 0 , n . £>. « Mais on dem ande, d it-il, si une dis—
» position faite en faveur de l’une d’entre plusieurs personnes
» qui sera é lu e , est conditionnelle ou pure ? » T elle est sans
1
5
doute la question , puisque les auteurs des consultations préF ?
�44
tendent que la disposition était conditioûnelle seulement à l'égard
de celui qui serait élu, mais pure par rapport à tous les éligibles,
n’ayant pu y avc.ir d’élection.
L ’auteur établit que les lois sur lesquelles Ricard se fo n d e,
sont inutiles pour la question. 11 puise la décision du doute dans
la loi 24 , ff. clé legatis a0. « 11 faut d ire , selon lui , que la fa» culte d’élire forme une condiiion qui suspend le droit de ceu*
qui sont appellés en général, de même que le droit de celui
» qui doit être élu. » Et après avoir traité des cas autres que celui
dont il s’agit, il en revient à cette conclusion : « A in s i, il est
» certain en g én éral, et sans distinction, que la faculté d’éliré
rf renferme une condition qui suspend le droit de tous les éligibles
>1 jusqu’au temps que l ’élection doit être faite. »
Enfin, c’est ainsi que la question a été jugée en grande con
naissance de cause , par un jugement rendu par le tribunal civil
du département du Puy-de-D ôm e, seconde sectio n , le
nivose
5
an 6 , conformément aux conclusions du commissaire, entre des
nommés Souchaire.
Dans l ’espéee de ce jugem ent, un père qui avait deux enfans
du premier m ariage, s’était remarié avant la révolution. Il
institua , par le second contrat de m ariage, celui des enfans à
naître qu’il lui plairait choisir. Il n’avait fait aucune élection
lors de la promulgation de la loi du 17 nivose,' et il mourut
quelque temps après.
A ucun des enfans du second lit n’ayant été saisi ; Ce qui doit
également avoir eu lieu dans l ’espèce , quoique Gilbert D u couftliial soit décédé avant la publication de la loi du 17 nivosi; ,
ainsi qu’on l ’a établi en discutant la seconde partie, il ne s'éleva
qu’une seule question qui étitit relative aux intérêts respectifs des
enfans des deux inariagrs.
Ceux du prèmier lit réclamaient le partage de la succession pa»
portions égales avec ceux du second lit.
�4 5
Ceux-ci prétendaient être seuls en droit de recueillir l ’effet
de l’insdturion, sauf la légitime de droit des enfans du premier
lit. Ils se fondaient sur ce qu’ils étaient seuls éligibles ; et qu’à
défaut d’élection , les éligibles devaient tous concourir. En un
m ot, disaient-ils, il y a une institution contractuelle en faveur de
la descendance du second lit.
Les enfans du premier mariage répondaient qu’il n’y avait pas
d’institution , qu’il n’avoit dû y en avoir qu'au moment de 1 élec
tion ; que le père avait seulement entendu, ou qu’un des enfans
du second lit serait son héritier, ou qu’il n’en aurait aucun,, et
que dès-lors les enfans des deux lits seraient égaux ; que le droit
des éligibles avait été suspendu jusqu’à l ’élection , et qu’ils
n’avaient jamais été saisis.
•*<'
(
'
Le jugem ent, après une forte discussion, d’après les autorités >
et quoiqu’on eût principalement insisté sur l ’opinion de R icard,
rejeta la prétention des enfans du second m arîage, et ordonna le
partage par égalité entr’eux et ceux du premier.
Tant d’autorités et un jugement rendu en thèse sur la ques
tio n ', devraient sans doute, fixer les incertitudes, s’il pouvait y
en avoir.
Il
' i
'
n’y a point de préjugé à tirer de la forclusion contumière qui
semblait menacer Gilberte Ducourthial.
E lle n’élait pas forclose lors de la disposition dont il s’a g it ,
puisqu’elle n’était pas mariée alors; et les nouvelles lois, d’accord
avec la nature, ont effacé toute différence entr’e lle , et tout autr<2
enfant mâle ou fille non mariée.
D ’ailleurs , en coutume d’A u vergn e, le père pouvait donner
à sa fille même forclose, tous ses biens , et réduire les autres
enfans, même les mâles , à leur légitime. T el esc le résultat de'
l ’article 5o 'du titre 12 de cette coutume , et Cet!« jurisprudence
est attestée par tous les commentateurs. L e , père pouvait donc
disposer, en faveur de sa fille , des deux tiers de ses biens, sauf
�4 i
la légitime cle droit des enfans , autres que celui qui aurait été
appelé pour recueillir le tiers , si cette disposition ne fut pas
devenue caduque.
Enfïn, on ne contrarie pas ici une volonté de Gilbert Ducourtliial , qui eût eu pour fondement Ja puissance paternelle.
L'exercice de cette puissance ne peut être basée que sur un
discerneiuenl du père , d’après les qualités respectives de ses
enfans; et ici il s’était lié pour des individus qu’il ne connaissait
p a s, puisqu’ils 'n ’étaient point nés, et entre lesquels leur bas
âge, même à lépoque de son décès, l’aurait empêché de décider,
en connaissance de cause , quand il aurait pu disposer. La dispo
sition contenue au contrat de mariage du 14 mai 1778 , est
donc respectivement, à Gilberte D ucourthial, aussi défavorable
qu’il soit possible,
•
rti . .
R
É
S
U
M
É
.
La disposition contenue au second contrat de mariage de
Gilbert D ucourthial, est nulle en elle-m êm e respectivement à
Gilberte D u courthial, à raison de la faculté d élire , accordée
à-la seconde femme. Dès-lors, le partage doit avoir lieu par égalité
entre tous les enfans , tant du premier mariage que du second, et
les autres questions deviennent inutiles.
Mais à supposer que cette nullité, quoique bien fon dée, ne
fut pas adoptée, le tiers ne reviendrait pas pour cela à JeanJiaptiste-Gilbert Ducourthial. O n a démontré qu’il n’en a jamais
été saisi.
E t ne l ’ayant pas été individuellem ent, les enfans du second
lit ne l ’ont point ete collectivement,parce qu’il n’y avait de dispo
sition que pour celui qui serait é lu , et non de disposition pour
tous les éligihles, en cas de non-élection. La faculté d’élire étant
devenue caduque, la condition à laquelle la disposition du tiers
�47
était subordonnée, a m anqué, et dés-lors tous les enfans indis
tinctement sont appelés à recueillir la succession comme héritiers
de droit: Quos æqualis ju n x it natura, æqualis jungat gratia.
1
1
D élibéré à Paris par les jurisconsultes anciens soussignés 3
%
le 29 prairial an 9 de la République fran ça ise.
Signé G R E N I E R , ( d u P uy-de-D ôm e.)
DESEZE.
%
BIGOT-PRÉAM ENEU.
•
<
» «
A
P aris
, de l ’imprimerie du D épôt des lo is , place du Carousel;
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Desèze
Bigot-Préameneu
Subject
The topic of the resource
successions
contrats de mariage
testaments
droit d’aînesse
secondes noces
loi du 17 nivôse An 2
égalité des héritiers
rétroactivité de la loi
doctrine
application des lois dans le temps
coutume d'Auvergne
forclusion
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour Gilberte Ducourthial et Marie-Joseph Maignol son mari, et les citoyens Ducourthial-Lasuchette enfans puînés de Gilbert Ducourthial ; Contre Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial aîné.
Table Godemel : Election : l’institution sera au profit de l’ainé des mâles, et s’il n’y en a point au profit de l’ainé des filles. de ce mariage sont issus trois enfans mâles. Le père est décédé en juillet 1793, longtemps après sa femme, et sans faire d’élection. que devient l’institution ? deux systêmes : pour le fils ainé, 1° l’institution au profit des enfans du second mariage est valable, et doit avoir son exécution ; 2° n’y ayant pas eu d’élection, l’ainé des mâles désigné pour recueillir l’institution, doit en profiter seul pour le tiers qui en fait l’objet ; 3° la fille née du premier mariage, relevée de sa forclusion, prendra sa portion, c'est-à-dire le quart dans les deux tiers formant la succession ab intestat. pour les autres enfans, 1° la faculté d’opter ou d’élire accordée par Gilbert Ducourthial à sa seconde épouse, par leur contrat de mariage, donne lieu à la nullité de la disposition contenue dans ce contrat ; 2° en supposant que cette disposition ne fut pas nulle par le défaut d’une volonté libre, le fils ainé ne pourrait prétendre qu’il a été saisi du tiers, au préjudice des autres enfans ; 3° le fils ainé n’ayant pas été saisi individuellement, les enfans du second lit ne l’ont point été collectivement ; la condition attachée à la disposition ayant manquée, tous les enfans sont appelés à recueillir la succession, par égalité, comme héritiers de droit.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie du Dépôt des lois (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1778-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1102
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1101
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53130/BCU_Factums_G1102.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
application des lois dans le temps
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d’aînesse
égalité des héritiers
forclusion
loi du 17 nivôse An 2
rétroactivité de la loi
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53072/BCU_Factums_G0911.pdf
f663fb303c8466bf52c314fd2903d71a
PDF Text
Text
2 <b\
/y o
»
MEMOIRE
ET CONSULTATION,
P O U R
A Y M E T , notaire p u b l i c ,
S u z a n n e TAPHANEL son épouse; J e a n
SIAUD et Renée TAPHANEL son épouse,
appelans
CONTRE
Jacques - B é n ig n e
N icolas
P
TAPHANEL intimé.
IERRE T a p h a n e l , père com m un , contracta un pre
m ier m ariage, le 4 mai 1 7 3 9 , avec M arie-A n ne L u z u y .
N o ë l T a p h a n el et M a rie -A n n e A n d r a u d ,s e s p ère et
m è r e , l’instituèrent p o u r leur héritier universel de tous
leurs b ie n s , en quoi qu’ils consistassent, p o u r leur suc
céder après leur décès seulement.
\
A
�( O
D e ce mariage issurent N icolas T a p h a n e l in t im é , et
M a rie -A n n e T ap h an el m ariée avec le citoyen L a u r e n t ,
représentée par Nicolas T a p h a n e l, qui a acquis ses droits.
M a rie -A n n e L u z u y étant d é c é d é e , P ierre TaphaneJ
contracta un second mariage avec G ilberte A n d r a u d , le
3 mai 1748. N o ë l T a p h a n el son père v iv o it encoi’e ; mais
M a rie -A n n e A n d ra u d sa m è r e , étoit décédée. Il est im por
tant de se pénétrer des clauses de ce second contrat de
m a ria g e , relatives à la contestation, on va les transcrire.
« E n faveur duquel m a r ia g e , et p o u r aider à en sup<r porteries ch a rges, ledit T a p h a n e l père a ratifié l’ins«■titution q u ’il a ci-devant faite au profit dudit Tap hanel
« son fils, par son p rem ie r contrat de mariage avec
«■défunte M arie L u z u y , le 4 mai 1 7 3 9 , dûment con<r trôlé... avec clause expresse que lesdils T a p h a n el père
« et fils, ne pou rro n t avantager les enfans du p rem ie r
« et second l i t , les uns plus q u e les autr,cs ; p o u r r o n t
« néanmoins faire des héritiers ; et en ce cas, seiont tenus
« de choisir des enfans tant du p rem ier que du second
« l i t , en nom bre é g a l, lesquels seront institués héritiers
« p a r portion é g a le , et tous les autres enfans tant de l’un
«< q u e de l’autre l i t , constitués par égales portions. »
Suzanne T a p h a n el, épouse A y m e t , et R enée Taphanel,
épouse Siaud, sont issus de ce second mariage.
Nicolas T ap h an el contracta m a ria g e, le 22 novem bre
j 7 7 9 } Pierre Tap h anel père com m un , dont le pei’e étoit
alors d é c é d é , l’institua p o u r son héritier, à la charge
d'une légitim e envers ses autres enfans.
Pierre T a p h a n el décéda le 4 nivôse an 3.
L e i 5 frimaire su iv a n t, Suzanne et Renée T a p h a n e l,
?
�( 3 )
'
obtinrent contre leur frère un jugem ent par dé fa u t, au
tribunal civil du département du P u y - d e - D ô m e , par
lequel il fut condam né h ve n ir i\ partage des biens com
posant la succession de P ierre T a p h a n e l, p our leur en
être délaissé leur portion afférente, qui étoit un quart
p o u r chacune. Cette condamnation étoit fondée sur les
dispositions portées au second contrat de mariage de P ierre
T a p h a n el.
Nicolas Taplianel form a opposition à ce ju gem en t, et
sur celte opposition s il en est intervenu un second con
tradictoirem ent, rendu le a 5 floréal an
5,
par lequel
Nicolas T a p lia n el a été reçu opposant au p re m ie r; et
faisant droit au f o n d , sans s’arrêter ni a vo ir égard aux
clauses portées par le co n tra t de m a ria g e du 3 mai 1748,
qui sont déclarées nulles et de nul effet, il est o rd o n n é,
que les parties viendront à division et partage des biens
meubles et immeubles de la succession de Pierre T a p h a n e l
père com m u n , p o u r en être délaissé à chacune des deman
deresses un d o u ziè m e) auquel p a r ta g e , Nicolas T ap han el
rapportera le m o b ilie r, suivant l’inventaire qui en a été
ou dû être fait; s in o n , suivant la com m une ren o m m ée,
avec les intérêts depuis l’ouverture de ladite succession.
Il est pareillement o rd o n n é, que chacune des parties ra p
portera ce qu'elle se trouvera avoir to uch é, notamment
N icolasTaplianel, les jouissances des immeubles, à com pter
de l’ouverture de ladite succession, avec les intérêts du
jo u r de la demande.
Suzanne et R en ée T a p h a n e l, prétendent que ce juge
ment est mal r e n d u , en ce qu’il les réduit à une légitime
de droit ; que c’est sans fondem ent que les dispositions
A 2,
�4
(
)'
du contrat de mariage du 3 m ai 1748? ont été annullées,
et q u ’elles doivent avoir dans les biens de leur p è r e , la
portion que ce contrat de mariage leur assure, et dont
leur père n’a pu les p riv e r par l’institution universelle,
postérieurement faite en faveur de Nicolas T a p lia n e l ;
elles demandent au con seil, si elles sont fondées ou n o n ,
à interjeter appel du jugem ent du 25 floréal an 5 , et
dans le cas de l’affirmative, quelle est la portion qui doit
leur r e v e n ir , d’après les clauses du contrat de mariage
du 3 mai 1748.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , q u i a v u le m ém o ire
ci-dessus et tous les titres et pièces relatifs à la contestation r
E
st d’a v i s
, q u e Suzanne et R enée T ap lianel sont bien
fondées à interjeter ap p el du ju g e m e n t d u 2,5 floréal an 5*
Ses dispositions sont contraires aux principes ; mais on
ne doit pas en être éto n n é, parce qu’il paroît que la
cause n’a pas été présentée sous son véritable point de
vue. Il y a tout lieu de p résu m er, que si les m oyens qui
se présentent p our Suzanne et R enée T a p lia n el eussent
été d é velo p p é s, il auroit été rendu un jugem ent différent.
Pierre Taplianel d e vo it, à la v é r i t é , recueillir les biens
de son p è re , en vertu de l'institution contractuelle faite
en sa fa v e u r, dans son premier contrat de m ariage; mais
il n’en est pas moins vrai qu’il n’a pu en disposer en 1 7 7 9 ,
au profit de Nicolas T a p h a n e l, son fils, h titre d’institu
tion universelle, et réduire ses autres enfans à la légitim e
de droit. E n s’unissant avec G ilberte A n d ra u d , il a cou-
�( 5 )
tracté l’engagem ent de ne p ou vo ir choisir un h éritierp arm i
les seuls enfans de son prem ier mariage. C est sous la fol
de cet en g a g em en t, que ce m ariage a été con tracté, et
que les enfans en sont nés.
O a ne sauroit v o i r , sous aucun ra p p o r t, pou rqu oi
cette convention seroit nulle, et p o u r le dém ontrer, on
va établir deux propositions.
L a p r e m iè r e , que la disposition contenue au contrat
de mariage de P ierre T ap han el ,d u 3 mai 1748 , est l’o u
vrage de ce dernier; qu’ayant été saisi de l’institution contrac
tuelle à lui faite par son p è r e , dès qu’il lui a s u r v é c u , celte
disposition, très-valable en elle -m êm e, a eu l’effet de le
lier et de transmettre à ses enfans du prem ier et du second
m a ria g e , tous ses biens , inertie ceux provenans de cette
institution contractuelle, sous le m ode établi par ce contrat
de mariage.
L a seconde, que l’on ne peut v o i r , dans ce contrat de
m a ria g e , aucune dérogation ni modification et l’institution
contractuelle faite par N o ë l T a p h a n el à P ierre T a p h a n el ;
que N o ë l Taphanel n ’avoit aucun intérêt personnel à cette
dérogation . ou modification.
P r e m iè r e
P r o p o s i t i o n .
Il est incontestable q u ’une institution contractuelle porte
sur tous les biens présens et à venir de celui qui la fait 5
en sorte que s i , au m om ent de cette institution, l’instituant
est lui-m êm e institué d’une personne vivante; s’il lui survit
et que l'institution ait dès lors son e ffe t, les b ie n s , recueillis
liai* suite de cette institution , entrent dans la disposition
et doivent être réglés par cette disposition même.
A 3
�•
,
.
.( 6 )
Il n’est pas moins certain que les promesses d’instituer,
les promesses d’égalité ou les conditions que l’ on s’impose
dans le cas où l’on voud roit disposer de ses biens , sont va
lables com m e une institution, étant faites par contrat de
mariage en faveur des é p o u x , ou par ceu x qui contractent
m ariage en faveur de leurs enfans à naître. Ces sortes
d ’engagemens doivent être ré g lé s, quant à leurs effets,
com m e les institutions.
O r , P ierre T ap h an el a été saisi de l’institution contrac
tuelle à lui faite par N o ë l T a p h a n e l, son p è r e , puisqu’il lui
a survécu. L es dispositions q u ’il a faites de ses biens par
son contrat de mariage du 3 mai 1 7 4 8 , ou , ce qui revient
au m ê m e , les conditions qu’il s’est im posées, relativement
aux dispositions q u ’il pou rro it faire dans la suite, ont donc
eu tout leur effet , m êm e par rapport aux biens p r o
venus de 1’institution contractuelle faite par N o ë l Taphanel..
A in s i le contrat de m ariage de P i e r r e T a p h a n e l , du 3
m a i 1 7 4 8 , p orta n t la clause que : k L e sd its T a p h a n e l,
« -père e t f i l s , ne p o u rro n t' avantager les erifans du prê
te jn ie r et du secon d l i t , les uns p lus qu e les autres ;
« q u ils p o u r r o n t, n é a n m o in s, f a i r e des h éritiers , et
« q iîe n ce c a s , ils seront tenus de c h o is ir des
67f a n s
« tan t du p rem ier que du second l i t , en nom bre é g a l,
« lesquels seron t in stitu és p a r p ortion s égdles , 'e t tous
« les autres en fan s , ta n t de l ’ un qu e de l'a u tre l i t , cons« titués p a r égales portions. »
Cette clause a dû être pleinement exécu tée, et l’on ne
p o u r r o i t justifier, en aucune m an ière, la contravention
qui y a été faite par P ierre Taphanel. Il auroit pu insti
tuer , p ou r ses seuls héiütiers, les enfans à naître de son
�XV
(7
)
second mariage ou l’un d’eux , et l’on ne voudroit pas
qu’il eût pu s’engager , s’il vouloit faire des héritiers, de
les p r e n d r e , en nom bre égal, parmi les enfans des deux
m a ria g es, et de légitim er , à la même s o m m e , les enfans
de ces deux mariages, qui ne seroient pas héritiers! Il ne
faut pas un grand effort de raison p ou r sentir com bien
cette idée seroit révoltante. A u s s i, des clauses de la nature
de celles dont il s’agit , sont-elles fréquem m ent insérées
dans de seconds contrats de mariage , et journellem ent
l’exécution en est ordonnée.
O n v o i t , dans le jugem ent du
5
floréal an
5,
que le
prem ier tribunal s'est décidé sur ce que « Institution.
« d’héritier faite par N o ë l T ap h an el en faveur de P ierre
« T a p h a n e l, son fils , par son prem ier contrat de mariage
« du 4 mai 1 7 3 9 , a été pure et sim ple.»
« Q ue cette institution étoit ir r é v o c a b le , qu’elle ne
« pou vo it ê t r e , d’après les p rin c ip e s , grevée d’aucune
« condition, ni m odifiée, et qu ’ainsi la condition imposée
a par N o ë l T a p h a n e l, instituant, à la seconde institution
« par lui faite en faveur de P ierre T a p h a n e l, son fils,
« par son second contrat de mariage du 3 mai 1 7 4 8 ,
cc est évidem m ent n u lle , et doit être considérée com m e
« non écrite.
« Q ue le consentement donné par l’in stitué, dans son
« second c o n t r a t , ne doit être d’aucune considération ,
« étant présumé e x t o r q u é , et que l’institué étoit d’ailleurs
çc m ineur lors de celte dernière institution.
« Q ue P ierre Taphanel ayant recueilli l’effet de la precc m ière institution, et n’étant pas grevé par la seconde
« institution, a p u instituer valablem ent Nicolas Taphanel
A 4
�••
(
8
)
-
.
•
•
« son héritier contractuel, et réduire ses autres enfans
« à leur légitime. »
Il n y a pas un de ces motifs qui puisse soutenir le choc
de la discussion.
O n convient bien que l’institution contractuelle faite
par N o ë l Taplianel à P i e r r e , son fils, p ar le p rem ier
contrat de mariage de ce d e rn ie r, étoit pure et sim ple;
mais il ne sauroit en résulter aucune conséquence p o u r
annuller les dispositions faites par P ierre T aplianel luim ê m e , par son contrat de mariage.
L e prem ier tribunal semble avoir jugé dans le sens que
ces dispositions ne devoient pas être considérées com m e
étant du fait de P ierre T a p h a n e l, qu ’elles étoient l’o uvrage
de son p è r e , q u i , en abusant de son a u to rité , avoit dicté
ces dispositions à son fils, et avoit g re v é de cette condition
l’institution qu’il lui avoit précédem m ent faite; que le con
sentement que le fils avoit donné à cette c o n d i t i o n é t o i t
a bsolu m en t n u l , d’après ce que dit D u m o u lin dans un cas
tout autre que celui-ci : h ic consensus non v a le t, censetur
e x to rtu s ci paire.
Mais toutes ces idées sont autant d’erreurs manifestes.
Dans quel cas D um oulin s’est-il ainsi expliqué ? c’est
lorsque le fils institué, ou un institué q u elcon q u e, s’est
d é p a rti, du vivant de l’instituant et par son im p u lsio n ,
de feffet de l’institution : o r , ce n ’est pas ce dont il s’agit
dans l'espèce. E n effet, P ierre T ap lian el ne s’est pas départi
du bénéfice de l’ institution; au con traire, son père l’a
ratifiée, et cette ratification étoit absolument inutile, puis
qu’elle n’auroit pas moins existé sans cola.
Il est bien d it, ù la vérité, dans la suite, avec clause ex-
�.C 9 )
prepse que et.lesdits T a p h a n e l, père et fils, ne pourront
« avantager les enfans du prem ier et second l i t , les uns
a
«
«
«
plus que les autres ; qu ’ils p ou rront néanmoins faire des
héritiers , et qu ’en ce cas ils seront tenus de choisir des
enfans tant du p rem ier que du second lit , en nom bre
é g a l, etc. »
x .M a is, en p rem ier lieu , celte clause ne doit pas être
considérée com m e une condition expresse de la ratification
,de l’institution contractuelle déjà faite par le père. O n ne
sauroit donner à une condition l’effet d ’avoir g re vé une
ratification, lorsque cette ratification est évidem m ent vaine,
lorsque la disposition ratifiée devoitsubsister par elle-même
sans le secours d’aucune ratification.
E n second lieu , n o n seulem ent il n’y a pas de nécessité
de considérer ces ex p re s s io n s , avec clause e x p r e s s e , et
celles qui s u iv e n t, com m e une condition apposée à la
ratification de l’institution, m a is, au co n traire, c’est une
seconde clause absolument distincte et séparée de la pre
m iè re , avec laquelle m êm e elle est incompatible.
Il est évident q u ’après cette prem ière clause, on en a
com m encé une nouvelle qui a v o it p o u r but d'assurer une
égalité d’avantages entre les enfans du prem ier et du second
lit. O r , q u ’ importe que dans cette clause le père et Je fils
aient stipulé conjointem ent; le fils avoit la liberté de la
stipuler s e u l, et la présence du père ne sauroit vicier son
engagement. Il n’est pas rare de v o i r , dans un contrat de
m ariage, un père et son fils, son héritier contractuel,
marier le fils de ce d e r n ie r , et de vo ir le père et le fils,
instituant et institué, instituer conjointement le fils de
l’institué ; cependant il est hors de doute que si le fils insA
5
�f IO )
titué survit à son p è r e , l’institution faite par ce fils a tout
'son effet au profit de son institue, tant p our ses biens
'personnels que p ou r ceux provenant de la prem ière insti
tution.
J
» j
Q u e lle différence pourroit-on faire de ce cas à celui dont
il s’a g it ? P ierre T ap han el d e v o it , sans doute,-être occupé
;du sort de sa prop re postérité ; la famille A n draud , à
'laquelle il s’allioit, avoit le plus grand intérêt de veiller
a ce que les enfans de ce second mariage ne fussent pas
‘sacrifiés à l’avantage de ceux du prem ier lit.
r P ie rre T a p h a n e l, m û par tous ces m otifs , contracte
1’engagement de traiter avec une égale affection, et de
mettre dans la m êm e balance, les enfans de son second
mariage et ceux du premier. Cette convention est-elle pro
duite par un m ou vem en t qui ne soit dans le vœ u de la
na tu re? cet engagement est sans contredit plus digne de
;la protection des lo is, que celui qui nuroit consacré une
inégalité entre ses enfans; et cependant, une telle dis
position auroit dû avoir son effet.
D ’ailleurs, il pou vo it y a vo ir une raison pour faire
‘entrer N o ë l Tap han el dans cette cla u se, i\ l’effet de le
lier personnellem ent; abstraction faite de l’engagement
contracté par P ierre Taphanel.
E n effet, il ne faut pas perdre de • vu e que l’institu
tion contractuelle faite par N o ë l T h a p h a n e l, à P ie r r e ,
•l’a été sans réserve; cela é ta n t, N o ë l Thaphanel p ou
rvoit avo ir le d r o it, dans les principes de la coutume de
]a ci-devant province d’A u v e r g n e , de disposer jusques
et à concurrence du quart de ses bien s, autrement que
-par form a de;quote. Il p ou vo it faire cette disposition
�241
( 11 y
*
en faveur de tel de ses petits-en fan s-ou'.'de telle outre
personne qu’il lui a u r o itp lu de-.choisir. O n sait que cette
question est encore un sujet de controverse; que p lu
sieurs jurisconsultes se^ sopt décidés p our .cette faculté
de disposer (de la part de l'instituant., lorsqu’encore une
fo is , l’institution a.-.été faite §ans réserve; (,car s'il y a
des réserves, il p e u t disposer (de -.ces-réserves.) ; telle étoit
la jurisprudence de ¡plusieurs tribunaux. G’egt donc p our
que N o ë l T ap h an el ne pût faire une semblable dispo
sitio n , qu’il est entré,.dans tla clause. Mais Rengagement
contracté par Pierre T a p h a n e l, ne subsiste pas m oins,
et il est ridicule de ,prétendre qu'il est nul par la cir
constance, ¡que N o ë l T a p h a n el étoit présent. S ’il avoit
p u v a l a b l e m e n t m a l g r é cette circonstance., stipuler une
convention qui eût accumulé tous les avantages sur la
tête d’un seul de ses enfans, au préjudice des autres, à
plus forte raison , a-t-il pu en faire une qui a tous les
caractères de la sagesse et de la justice.
L e m oyen résultant de ce q u e , lors de son .second
contrat-de mariage du 3 mai 1 7 4 8 , P ie rre Taphanel
étoit m in e u r, ne seroit encore d’aucune considération,
p uisque, suivant la jurisprudence généralement observée
dans tous les tribunaux ,de la ci-devant province d’A u
v e rg n e , les mineurs de vingt-cinq ans pouvoient vala
blement f a i r e , en se m a ria n t, une institution contrac
tuelle en faveur de leurs enfans à naître.
C ’est ce qu’enseigne C h a b ro l, dans son com m entaire,
sur l’article X X V I .du titre T4,, tome 2 , page 329 : no
tamment. i\ la page 167 du m êm e v o lu m e, on trouve une
i’oule de jugemens qui out confirm é des substitutions,
�II&
(
)
qui sont des dispositions m oin s favorables que les insti
tutions, quoique du m êm e g e n r e , faites par m in eurs,
et dans les mêmes circonstances qui se présentent, c’està-dire, en présence du père qui s’éto it.d éjà lié par des
dispositions précédentes
envers son fils. Mais dans l'es
pèce présente, cette allégation de m in o rité , n ’a été qu ’un
prétexte p ou r inspirer plus de faveur sur l’intim é; l ’ex
trait de sa naissance qui la fixoit au 12 mai 1 7 2 3 , est
aujourd’hui reconnu inexact, et l’on en rapporte un plus
fidèle qui la détermine au 12 mars p réc éd en t; d’où il
résulte que P ierre T a p h a n el étoit majeur à l’époque de
son second contrat de m a ria g e , du 3 mai 1748.
A in s i, la circonstance de cette m a jo r ité , anéantit un
des motifs du jugem ent dont est appel ; elle démontre
victorieusement que les dispositions portées dans ce se
cond contrat de m ariage, sont incontestablement l’ou
v r a g e de P ie r r e T a p h a n e l ; il étoit en effet le magistrat
de sa fa m ille ; il a p u , m êm e du vivant de son père et
en sa p ré s e n ce , faire un règlem ent sur les biens qu’il
auroit en m ourant; et Teffet de l’institution, à lui faite
par N o ë l T a p h a n e l, se trouvant dans sa succession, il
est impossible de concevoir comment les biens provenans
de N o ë l, 11e seroient pas, ainsi que les[siens propres, sou
mis à ce règlement.
S
e c o n d e
P
r
o
p
o
s
i
t
i
o
n
.
O n a déjà établi que la disposition dont il s’agit, con
tenue au second contrat de mariage de P ierre T a p h a n e l,
étoit valab le, parce qu ’elle étoit son prop re ouvrage ,
1
�c 13 )
-et qu’elle avoit frapp é tous sesbienslpresbris e t it venir,
et par con séqu en t, : les biens qu ’il, devoit recueillir un
j o u r , en v e rtu de l’institution contractuelle à lui fa ite ,
e t qui a été ouverte à son p ro fit, postérieurement à ce
contrat de mariage.
:
j:
m),î
M ais, est-il dit dans un des motifs div ju g e m e n t, « l’ ins« titution contractuelle faite par N o ë lT a p h a n e l à P ie rre ,
« étoit irrévocable 5 elle ne p ou va it être d’après les prina c ip e s, grevée d’aucune' c o n d itio n , ni m ddifiée: ainsi,
V la condition imposée par N o ë l T a p h a n e l , instituant à
« la seconde institution, par lui faite en faveur de P ierre
« T a p h a n e l son fils, p ar son second contrat de mariage
« du 3 mai 1 7 4 8 , est évidem m ent nulle, et doit être contf sidérée com m e non écrite 33.
Si on se pénètre bien des clauses de ce contrat de m a
r ia g e , il est certain q u ’il n y a ni dérogation à l’institution
contractuelle faite par N o ë l Tap han el à Pierre son fils ,
ni modification de cette institution.
O n a déjà dit que N oël T a p h a n el n y a pas d é r o g é ,
puisqu’ il l’a au contraire ratifiée. Il est m êm e impossible
q u ’il ait entendu y d é ro g e r, parce que personne ne pour
v o it pousser l’ignoi’ance au point de croire cette déroga
tion possible.
Y a-t-il une'modification ? n o n ; car il est hors de doute
que Pierre Taphanel étoit assuré de*recueillir intégrale
m ent l’effet de son institution après le décès de son père.
Il est vrai q u ’il résulte d’une clause p articu lière, que les
enfans du premier et du second lit devoient recueillir éga
lement le bénéfice de l’institution, ou que si l’on eut fait
des héritiers, ils devoient être choisis avec une certaine
�C X4 )
égalité parmi tous les énfans. Mais cette clause, 011 le ré
pète , a principalement concerné P ierre Tap han el ; il a pu
régler en présence de son p è r e , com m e seu l, le sort de ses
enfâns. N o ë l T a p h a n el n’y a eu aucun intérêt; s’il y en
avoit u n , ce n’a pu être que relativem ent au quart de ses
biens dont il auroit pu disposer , m algré l’ institution, dès
qu ’elle étoit sans réserve. Il faut donc prendre cette clause
distributivement; elle a dû a v o ir un effet p o u r chacun
d’e u x ,.e n ce qui les c o n c e rn o it, et chacun d’eu x a pu la
stipuler. U n fils saisi d’un espoir de succeder de la part de
son p è r e , p e u t , m êm e en présence de celui-ci , disposer
sur cet espoir de succéder; s’il vien t à se réaliser, cela est
incontestable.
Il ne reste qu ’une o b jection , q u ’il est utile de p révo ir
p ou r ne rien négliger. O n pourroit dire que Pierre T a
phanel pou vo it décéder avant Noël ; q u e , dans ce cas, les
enfans du prem ier m ariage au ro ien t dû seuls recueillir
l'effet de l’institution exclusivem ent à ceux du second m a
ria g e ; que cependant, d ’après la clause dont il s’a g it, les
enfans du second lit auroient concouru avec ceux du
premier.
M a is , i° . ce cas n’est pas arrivé , et les dispositions de
la part de P ierre T ap h an el auroient toujours dû avoir
leu r effet, dès que , lorsqu’il les a faites,.il étoit saisi d’une
espérance ; et que par l’événem ent cette espérance est de
ven u e pour lui uue c ertitu d e, par cela seul qu ’il a survécu
¿1 son père. Les dispositions q u ’ il a faites , m êm e du vivant
de ce d e r n ie r , doivent subsister.
2°. Il s’en faut bien q u ’ il soit vrai que les enfans issus
d’ un m a ria g e , en faveur duquel une institution contraç-
t
�% 4j
( -i5 )
tuelle a été faite , aient seuls le droit de la recueillir exclu
sivement à ceux de mariages postérieurs, lorsque l’institué
prédécède l’instituant.
¡ti
L a c o u tu m e , art. 17 du tit. 1 4 , s’explique ainsi : « E t
« saisissent lesdites donations et dispositions apposées èsdits
« deux contrats , et chacun d ’iceux au profit des contrac«r tans ledit m ariage et association , et descendans d’eux
« tarit seulement. »
" Ce sont ces dernières expressions qui ont fait naître la
questipn de sa vo ir, si y ayant des enfans d’un mariage
p o sté rie u r, ils n’étoient pas exclus par ceux du prem ier
mariage.
. M ais quand on veut se pénétrer de l’esprit de cet article
et des articles 26 et 2.6, qui sont rédigés à peu p rès de
m êm e , on est convaincu q u e la l o i , en apposant cette p aiv
ticule limitative ta n t se u le m e n t, n’a eu en vue que d’exclüre les collatéraux, et cela étoit nécessaire dans une cou
tum e qui exclût les ascendans de toutes successions de leurs
en fa n s, m êm e des biens par eu x donnés, s’il n’y a pas de
stipulation de réversion.
E u d isan t, et descendans d ’e u x ta n t s e u le m e n t, c’est
com prendre tous les descendans des mariés qui pourroient
être tous deux institués, ou de celui qui le scro it, s’il n y
en avoit qu’ un ; et il est impossible de t r o u v e r , dans cette
vocation générale , la distinction entre les enfans de ce
mariage et ceux de mariages postérieurs.
T elle est aussi la doctrine du célèbre D u m o u lin dans sa
note sur cet article : E x qu ocu m q u e m a trim on io. JO.
placct./f. de lib. et posthum . q u ia non f i t h ic restrictio a d
descendentes ejusdem m a tritn o n iin c c ù ifr à , §§• 2b et 26,
�( *S )
?iec utf. §. i , tit, i 5. C ’est aussi ce qu i a été jugé en thèse
par le fameux arrêt du 9 juillet 1 6 3 7 , rendu dans la fa
mille Chabanes sur la plaidoirie de L em aître.
t
Il est vrai que cette opinion a été attaquée p a r le dernier
com m entateur d e là coutume, sur cet art. 17 5il a embrassé
l ’opinion qui tend à exclure les enfans du second m ariage,
lorsqu’il en reste du prem ier.
11
• M ais quelque déférence que l’on puisse avoir p ou r l ’avis'
de ce co m m en ta te u r, il est impossible de l’adopter sans
heurter les idées de raison et de justice] Il est aussi réduit^
à combattre la décision de D u m o u lin , qui est p récise, e t’
d’une multitude d ’auteurs qui l’ont so u te n u e, il combatl’application à l’espèce de l’arrêt de la famille Chabanes.
Mais quand on a lu les éloquens plaidoyers de L em aître -j"
qu ’on trouve à la fin de ses œuvres avec l’a r r ê t , on estvraim ent étonné du doute élevé à cet égard.
D ’ailleurs une ré flex io n seule p rou ve com bien il seroit
injuste et ridicule de déférer l’institution contractuelle auxseuls enfans du p rem ier l i t , à l’exclusion de ceux d’un
second. Il faudroit, dans cette hyp o th èse, considérer tous
les enfans du p rem ier lit , dont le père auroit prédécédé
leur aïeul, com m e étant les héritiers directs de cet aïeul,
et réduire tous les enfans du second lit à partager entr’eux
la légitime qui devoit revenir au père, proportionnellem ent
ù ce qu’ils amenderoient dans sa succession : c’est aussi ce
qui a été observé par le dernier commentateur de la cou
tum e, com m e étant une suite de son op in ion . « Dans ce cas,
«• dit-il, page 297, où une institution d’héritier pareille est
« faite par un ascendant, les enfans du second lit y auraient
« néanmoins une lég itim e, à con curren ce de la p ortion
�C 17 )
t< p o u r laquelle ils représentent leu r p ère ,• mais si fin s « titution d’héritier étoit faite par un collatéral ou par uu
’ « étranger , ils n’auroient absolument rien à y p r é ci tendre. »
Il résulteroit donc de l à , qu’un fils institué, m ourant
avant son p è r e , laissant un enfant du prem ier m ariage,
et six du second, l’enfant du prem ier lit auroit dans la
succession de son a ïe u l , d'abord cinq sixièmes de son
" c h e f , ju r e s u o , ensuite le septième du sixième revenant
au père p o u r la légitim e de d r o i t , et que chacun des
autres six enfans, auroit un septième du m êm e sixièm e;
■c’e s t - à - d i r e , un quarante-deuxièm e. A u r o it - o n jamais
le courage d’introduire une jurisprudence aussi b a r
b a re?
A in si, en se résum ant, P ie r r e T a p h a n e l a fait une dis
position va la b le; il n’a fait que disposer de l’efTet de
l’institution déjà faite à son p r o fit ; il a pu le faire, et
cette institution s’ étant ouverte sur l u i , sa disposition
subsiste.
Cette disposition n’est point l’ouvrage de N o ë l T a p h a
nel : celui-ci n’a porté aucune atteinte à l’institution qu’il
avoit déjà faite; il n y a apposé aucune condition. Il n y
avoit aucun intérêt. L a vocation des enfans tant du second
que du premier m ariage, est l’ouvrage de P ierre T a p h a
nel. L a présence du père ne vicie point cette vocation.
Il a pu d’ailleurs n’entrer dans cette vo cation, que p our
s’engager à ne pas faire passer au x enfans du prem ier
\
�( i8 )
m ariage, préférablem ent à ceux du se c o n d , le quart q u i
étoit disponible en sa personne.
E n f i n , si tout ce q u ’on vien t de dire auroit d û avoir
lieu, m êm e sous l’ancien r é g im e , com m ent éleveroit-on
du d o u te , d’après les nouvelles lo is, q u i , en suivant le
v œ u de la n a tu re , ont ram ené l’égalité entre les enfans*
S’il y eût eu du doute autrefois, ce doute devroit aujour
d'hui disparoître.
Il ne reste qu ’à dire u n m ot relativem ent à la p o r
tion qu i revient a u x citoyennes Suzanne et R e n ée T a
phanel.
Il fa u t, à cet é g a r d , ne point perdre de v u e les termes
du contrat de mariage du 3 mai 1748.— « E te n c e c a s seront
a tenus de choisir des enfans tant du prem ier que du second
« l i t , en nom bre é g a l , lesquels seront institués héritiers
« par p o rtio n s égales, et tous les autres enfans tant de l’un
a que de l’autre l it , constitués par égales portions. »
Il résulte ‘d e cette clause, q u ’il n’étoit pas interdit à
P ierre T a p h a n e l d’ instituer Nicolas T a p h a n el p o u r son
h éritie r, com m e il l’a fait, mais qu ’il ne pou vo it l’ instituer
que p o u r m oitié ;. qu’il devoit réserver l’autre moitié à un
enfant du second lit : et dès qu ’il n’a pas choisi un héritier
p o u r cette m o it ié , parm i les enfans du second lit , tous
doivent concourir à recueillir cette moitié.
Cela étant, Nicolas T ap han el doit avoir la moitié de
la succession, en faisant face à la légitime de M arie-A n n e
T ap han el,sa sœur germaine; etSuzanne e tlle n é e T a p h a n e l
doivent avoir entr’cllcs l’autre m o itié : ce qui fait, p ou r
�243
( 19 )
c h a c u n e , un q u a r t , ainsi' q u ’elles y ont conclu par leur
exploit du 23 pluviôse an
D
élibéré
5.
à R i o m , le 8 prairial, an 6 de la R é p u
blique française, une et indivisible.
G R E N IE R .
L a présente consultation souscrite et approuvée par les
citoyens A N D R A U D ,
TO U TTÉ E ,
BERGIER
et B O I R O T , jurisconsultes.
¿UsaM
ff-
A R iom , de l’imprimerie de L a n d r io t , imprimeur du tribunal
d’appel. — An 9.
‘tJ
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aymet, Jacques-Bénigne. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Andraud
Touttée
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
testaments
secondes noces
irrévocabilité
contrats de mariage
lésion enfants premier mariage
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation, pour Jacques-Bénigne Aymet, notaire public, Suzanne Taphanel son épouse ; Jean Siaud et Renée Taphanel son épouse, appelans ; Contre Nicolas Taphanel, intimé.
Annotations manuscrites : « Le tribunal d'appel a infirmé le 26 floréal an 9, en adoptant les résolutions de la consultation. Recueil manuscrit p. 140 » .
Table Godemel : institution d'héritier contractuelle : les premiers juges avaient adopté la première interprétation, mais la cour, en infirmant, a consacré la seconde.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1801
1739-1801
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0911
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0912
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53072/BCU_Factums_G0911.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ardes (63009)
Rights
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Domaine public
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
irrévocabilité
lésion enfants premier mariage
secondes noces
testaments
-
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7d84790a0b78d752b32c3757ee42abda
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Text
55/
OBSERVATIONS
-o::ii. iiO -
oü
POUR
L e s e n fa n s V I R O T T E , d u
p r e m ie r l i t , in tim é s
e t a p p e la n s
■' . :;JJo : .
. •
C O N T R ‘E
La dame
et
,
D E L A I R E , veuve V i r o t t e ,
ses enfans appelans et intimés.
Anne
devise si fatale, cette devise : Calomnions,
calom nions , ne fut et ne sera jamais celle des enfans
V irotte, du premier lit, ni de leurs conseils. L ’auteur de
leur mémoire im prim é, tout jeune encore, est déjà connu
par ses lumières et une extrême délicatesse ; et l’on n’eût
jamais dû s’attendre à des sorties contre celui qui n’a écrit
que des faits vrais, des faits sur lesquels on lui a donné
des renseignemens certains. Mais nous avons à c o m b a t t r e
contre le machiavélisme le plus affreux. P la id o n s, plai A
C te t e
'Si
�, disent jio's adversaires *, dénaturons 1 ¿o«*, etc. ¿7
eii reste toujours quelque^chose.
r,
Les principe^ dé droit ^relatifs à la "colïtinuation de
communauté, ont été parfaitement développés par M e.
Pagès dans sa plaidoirie. Notre objet 'actuel est unique
ment de résumer quelques points de fait décisifs.
'■■■
! -
FO RM E.
4
Tout ce qui a rapport à l’inventaire de 1762 est abso
lument nul.
•
•
• P R E M I E I l r. ^ C T E .
' \ ‘ a i'M.ill
:d
. J . ::
' L)
L ’ordonnance du 23 janvierr*iy62, qui a permis d’as
signer les parens des mineurs V irotte, a été rendue sans
conclusions du ministère public.
On nous dit qu’il n’en falloit pas, et qu’aucune loi n’en
exigeoit.
Mais c’est parler contre tout ce qui se pratiquoit avant
la révolution dans toutes les juridictions, tant seigneu
riales que royales. Dans les seigneuriales, le procureur
fiscal étoit ce que dans les justices royales étoit le pro
cureur du roi ; et, dans les unes et les autres, il a toujours
été en pareil cas donné des conclusions.
Pour toute réponse aux objections des adversaires à cet
égard , nous les renvoyons h l’article 1 8 1 de la coutume
de Bourbonnais.
S e c o n d
a c t e
.
Dans sa requête, le sieur Virotte père n*a pas demandé
�( 3 )
__
M ï
permission d’assigner des amis ou voisins à défaut de
parens; il a demandé permission d’assigner des parens,
parce qu’il y en avoit assez dans les familles Brirot et
Virotte. L ’ordonnance du 23 janvier permet seulement
d’assigner des parens : l’on ne pouvoit s’en écarter.
O r, qu’a-t-il été fait ? L ’on a assigné quatre parens et
trois étrangers; parmi les parens il y en avoit deux pa
ternels et deux maternels ; parmi les étrangers étoit le
sieur Féjard père. Ce sieur Féjard étoit oncle de la dame
Anne D elaire, future épouse du sieur Virotte père (1).
Cette circonstance est très-considérable dans la cause.
Pour la faire bien ressortir, il suffit de donner quelque
attention à ce qui a précédé et suivi.
C’est le 23 janvier 1762 que le sieur Yirottepère présente
requête au juge de Montaigut-le-Blain ; il y expose qu’il
veut convoler en secondes noces , mais qu’auparavaut il
veut faire faire inventaire dissolutif de la communauté
d’entre lui et ses enfans.
Quinze jours après ( le 8 février suivant ) le sieur
Virotte père épouse la demoiselle Anne Delaire.
Du rapprochement de ces deux époques, il n’est per(1) Dans son mémoire imprimé la dame veuve Virotte a fait
dire , page 1 1 , qu’on n’établit pas sa parenté avec les Féjard,
q u o n en éta b lit e n co r e m oin s le d eg rc. Auroit-elle donc oublié
que ce sieur Féjard avoit épousé M arie D e la ir e , ta n te d e la
d a m e v eu v e V irotte ? Nous répondrons par l’acte de naissance
du sieur Féjard fils , en date du i 3 août 1735. Si l’on porte plus
loin la négation d’un fait notoire dans le canton, les e n fa n s
Virotte , du premier lit, se soumettent à prouver complètement
la parenté.
A 2
�( 4 ) •
sonne qui ne conclue qu’au 23 janvier le mariage étoit
arrêté. Ainsi il faut dii'e qu e, par affection , en janvier, le
sieur Féjard père étoit déjà l’oncle du 6ieur Yirotte père,
et que la famille Yirotte étoit déjà l’alliée de celle Delaire.
Eh bien ! c’est ce sieur F éjard , cet homme tout dévoué
ù la famille Delaire , que l’on prend pour délibérer
contre les mineurs Virotte. L ’on va plus loin ; quand
on s’en est servi comme délibérant, l’on en fait de suite
un expert pour estimer les objets à inventorier. Ainsi
l’oncle delà dame Anne Delaire joue ici deux rôles pour
opérer le mal des mineurs Yirotte.
Mais ce qu’il y a de plus étrange encore, c’est que
l ’on emploie un oncle de la dame Anne Delaire, pour
laisser de côté l’aïeul maternel des mineurs Virotte
( Antoine B rirot, docteur en médecine)^
Dans leur mémoire les adversaires on fait imprimer,
page 10 : a On voit un Antoine Brirot parmi les parens
« assignés, et cet Jbitoine B riro t 11e peut être que l’aïeul
« des mineurs.
« Ce n’est donc pas la faute du sieur Virotte, si le sieur
« Brirot n’a pas assisté à cette assemblée.
« Il est d’ailleurs de notoriété que le sieur Brirot étoit
« accablé d’infirmités, et hors d^état desortir de chez lui. »
On pourroit leur répondre qu’il y a de la mauvaise
foi dans ces deux assertions ; mais nous voulons nous
défendre sans injurier personne.
i ° . Antoine Brirot, assigné par l’exploit du 20 janvier
1762 , n’étoit point Antoine Brirot aïeul; il en étoit le
fils. Dans l’assignation, et dans le procès verbal d’assemblée
de 17 6 2 , il est qualifié bourgeois ,■ tandis que Vylntoine
�B riro t, a ïeu l , est constamment qualifié docteur en mé
decine , dans le contrat de mariage de 176 2, et dans des
actes de 1764 et 1784 , qui sont dans le dossier des mineurs
Virotte.
2°. On nie de nouveau, et avec vérité, qu’Antoine
Brirot aïeul fût infirme et hors d’état de sortir de chez lui.
D ’ailleurs on devoit l’assigner et le contumacer ; il n’y
avoit que ce moyen juridique de constater le fait contre
lui ; d’ailleurs encore, suivant M. A u ro u x, sur l’art. 180 ,
n°. 4 , l’aïeul maternel pouvoit se faire représenter par
un fondé de pouvoir. « Ceux qui sont appelés à la no
ce mination drun tuteur, dit cet auteur , y peuvent donner
<c leurs suffrages en personne , oie p ar -procureur fo n d é
cc de procuration spéciale, contenant le nom et la qua« lité de celui qu’ils nomment pour tuteur : tel est
« l’usage. »
L ’aïeul maternel étoit dans les circonstances le subrogé
tuteur légitime ; il l’étoit par l’effet de la loi : après le
sieur Virotte il étoit le seul ascendant existant.
Il doit en être d’un subrogé tuteur comme d’un tuteur;
les motifs et les règles sont les mêmes.
O r, l’article 177 de la coutume de Bourbonnais place
en première ligne la tutelle testamentaire, et la préfère
à toutes autres.
Viennent ensuite la tutelle légitime et naturelle., et
la dative.
Par l’article 17 8 , la légitime n’a pas besoin d’être con
firmée en justice.
L ’article 179 la défère à la m ère, et à défaut d’elle
« Vaïeul ou aïeule paternels ou maternels.
�( 6 )
Comment donc concevoir que l’on eût pu valable
ment se dispenser d’appeler à l’assemblée celui qui étoit
déjà le tuteur ad hoc, dont on avoit besoin pour faire
faire un inventaire dissolutif de la communauté ? On
avoit fait assigner les autres, pourquoi n’en avoir pas
usé de même envers l’aïeul maternel ?
Dire que le sieur Virotte père pouvoit assigner indis
tinctement des parens ou des amis, c’est aller ouvertement
contre la disposition de l’article 180 de la coutume de
Bourbonnais, portant : « Tutelle dative se doit donner
« p ar élection de parens et affins desdits mineurs de
« chacun côté E T A d é f a u t d e p a r e n s e t a f f i n s ,
« par élection de voisins jusqu’au nombre de sept pour
« le moins. »
De cette lo i, qui est celle des parties, il suit que l’on
ne pouvoit avoir recours aux amis ou voisins qu’à défaut
de parens et affins : tant qu’il y avoit des -parens et
affins , i l n ’ é t o i t pas permis de se servir d’amis OU voisins.
Dans la cause actuelle il falloit donc épuiser les parens
et qffitis Brirot, avant d’en venir à des amis ou voisins;
il falloit, en conformité de l’article 18 1 de la coutume
de Bourbonnais, assigner l’aïeul maternel.
Opposera-t-on que l’article i8o de cette coutume n’e6t
que pour les tutelles datives, et qu’on ne peut pas l’ap
pliquer à la nomination d’un subrogé tuteur?
D ’une part, dans l’usage l’on a toujours suivi l’art. 180
;
de la coutume de Bourbonnais pour ces nominations, et
cet usage vaut loi.
D ’autre part, si vous récusez l’article 18 0 , alors on
vous réplique par l’art. 17 9 , et l’on vous dit : « L ’aïeul
�( 7 )
« maternel étoit de droit le tuteur ad hoc ; vous en avez
« fait élire un autre qui n’est pas celui' désigné par la
« loi même : donc ce que vous avez fait est nul.
'
T
r o i s i è m e
a c t e
.
»■
Dans la nomination du subrogé tuteur l’on a fait rem
plir les fonctions de procureur fiscal par le sieur Féjard
fils.
■ *V ' . Met; j
i ° . On ne peut pas dire qu’il n’y falloitpas le concours
du ministère public; on seroit démenti par l’art. 18 1 de
la coutume de Bourbonnais, et par l’usage constant.
2°. L e sieur Féjard fils étoit cousin germain de la
future épouse du sieur Virotte père.
Dira-t-on qu’il n’eût été que récusable?
' Mais qui pouvoit être là pour proposer la récusation,
dans l’intérêt des mineurs V irotte? Tout étoit illégal,
'tout étoit monstrueux : personne ne les représentoit lé
galement, personne ne pouvoit parler pour eu:?u
3°. Dans le procès verbal on a qualifié le sieur Féjard
de substitut du procureur fiscal.
D ’une part, dans les justices seigneuriales les procuTeurs fiscaux n’avoient point de substituts : cela est connu
de tout le monde. L ’on défie les adversaires d’établir que
le sieur Féjard eût provisions ad hoc. L ’on a compulsé
les minutes des greffes, et il ne s’est trouvé aucune pres
tation de serment de sa part : il étoit donc sans caractère
public.
D ’autre part, le sieur Féjard n’étoit ni gradué ni c u r i a l ,
P » s même postulant. L ’on défie les a d v e r s a i r e s de rap-
�porter aucun autre acte judiciaire auquel il ait concourir.
L e procès verbal en question est le seul qu’il ait fait dans
toute sa vie. (Ses occupations se réduisoient à acheter et
revendre de^ grains. )
l ’ on ne peut nous opposer la loi Barbarius Philippiis.
Dans l’espèce, de cette lo i, celui dont on atLaquoit les
jugemens avoit la possession : il avoit rendu un grand
nombre de décisions : il y avoit erreur ^commune., Dans
notre cause, cette erreur n’existe pas, puisque le sieur
Féjard n’a fait qu’un acte judiciaire.
Mais., dit - o n , ce n’est pas le sieur \ irotte père qui
avoit mis là le sieur Féjard; c’étoit le bailli de Montaigut ; et vous êtes bien défavorables à attaquer, après
quarante-cinq ans de sa date, un acte qui n’est point du
fait du sieur Virotte père.
r ° . Nous réclamons à l ’instant où nous y avons inté
rêt. Notre intérêt n’est né qu’au décès du sieur Virotte
père, arrivé en i 8 o 5 . Jusque là no,us n’avions rien à direc
la communauté durcit encore, et nous ne connoissions
aucun des actes de 1762.
20. Quand il s’agit de nommer un contradicteur légi
time, c’est à celui qui en provoque la mesure à s’assurer
si les personnes qui y sont employées ont ou non carac
tère public ad hoc. L e plus grand vice d’un acte est
d’émaner d’un homme sans qualité.
Ainsi donc, point de contradicteur légitime, et nul
lité absolue de l’inventaire.
Q u a t r iè m e
�( 9 )
Q u a t r i è m e
'
a c t e
L'inventaire.
.
.
!
II a été fait en deux jours ( les 25 et 26 janvier 1762).
Dans la séance du 2 5 ¿'l’on inventorie ce qui est déclaré
être dans le domicile du sieur Virotte père.
Cette séance est close à six heures du soir : on s’ajoùrne
au lendemain deux heures de relevée. Il est dit que dans
l’intervalle les experts se transporteront dans les immeu
bles pour vérifier et estimer les bestiaux et les récoltes,
et en feront leur rapport.
A u 26 janvier le soleil n’est levé qu’à sept heures
vingt minutes : ces experts ne pouvant donc partir qu’a
lors, de sept heures vingt minutes à deux heures de re
levée , il n’y a qu’un intervalle de six heures quarante
minutes.
. ; :i ?•’>
'v,
<'
Pourtant les experts sont au rendez-vous de deux heures
de relevée, et font leur rapport au notaire, qui le con
signe dans l’inventaire.
A en juger par la relation en l’inventaire, les experts
auroient, dans un espace de six heures et quarante mi
nutes, dans un pays de terre forte, et en mauvaise saison,
i ° . fait dix lieues et un tiers (nous en avons fait le
calcul sur une carte géographique de Cassiny); 20. vérifié
et estimé les bestiaux et les récoltes de neuf gros domaines
et six locateries. Malgré le ah actu ad posse valet consecutio dont se servent les adversaires, cela n’est ni v r a i ni
vraisemblable; cela est physiquement impossible. Une idée
B
�(f *©.)
Lien plus juste se présente à la raison : tout a été fait sur
la simple déclaHation/duT sieur "\Jirotte père.
Aussi dans l’inventaire n’est-il pas dit que le sieur de
Finance, prétendu subrogé, tuteur, a accompagné les
experts dans leurs opérations. Il le devoit pourtant,
pour leur faine des obsenvàtjons utiles aux mineurs; pour
voit par) ses propres ÿeuxrsï ori< représentoit aux expèrts
tous les bestiaux;, t&ütës lesirécoltes^iOost de sa part une
négligence coupable qui fait qu?otir rie doit aucune foi à
l’inventaire, Jaa
;J r : .f •'*
'
u ■tu-, ■ ,! ,.t
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-,.r.üjirû-rr ISaussE# déclarations , et omissions* ‘ ■)««
•; : -1 ;!• , jll< • •! i-
'*
*"/Suri ce poiiib^a'coiir vcradraîbieni donner’t une atten
tion particulière)à'la.ci’itique infmimentoexacte;qu’eri ont
faite M es. Marnier et Pinot, jurisconsultes. Ils excellent
principalement, dans ‘les.questions de; communauté.
Ici nous nous contentons de relever trois arliclesi qui
étaient, très en, évidence /et sur lesquels on ne peut pas
«.’excuser en alléguant de l’inadvertance.
çi ■
L e premier porte sur le produit des grains, évalué par
les experts à liuit coupes le cent ,i tandis) que1 Jet journal
du père atteste qu’il en a tiré treize coupesj C’fcstlei 26
janvier qu’on arbitre à huit coupés y et o’est le 23 du
même mois., trois.’ jours auparavant, que le p ère, se
rendant compte à lui-même, écrit qu’il a affermé à treize
coupes. Il y a bien là au moins lata culpa.
- L e deuxième article est relatif aux’foins et pailles étant
(ïarisLi réserve ida sieur V i roi te père. A cet égard, pas
lurmot dans ¡ ’inventaire : il avoit pourtant dans ses écuries
�( 11 )
des bestiaux et deux chevaux. Qui .croira qu’en ijaiV^ier
il fû f sans foins,et sam "paille,Si?'3lie là jà.:la-iécolte. il ÿ
avoit encore six mois. L a présoinpftion;ré.toitidonfc q’iifil
yi aVoit provisions poür la nourriture sde !ces -animaux,
oh Veut - ou ne pascse contenter- de cette présomption ?
lies enfans V irotte, du premier lit, offrent de prouver
quîeu;jauviet‘,i,762 les fenils et granges de leur'pèré étôient
amplement garnis en foins et! paillés ; ils le peuvent avec
d’autant plus de sûreté, que dans la commune de Montaigut il y a plusieurs personnes âgées de quatre-vingts
ans.
>
1
L e troisième article est relatif au bail à ferme et à la
liève de la terre du Méage.
L e bail avoit été consenti’ au sieur Virotte père pen
dant la première communauté’; par conséquent les profits
en appartenoient à la commùnauté pendant toute la durée
du bail : en 1762 il y avoit encore plusieurs années à
courir.
i; f:
Que l’on ne dise pas que le sieur V irotte, obligé, après
1762 , à exploiter seul les fermes, seul il devoit en avoit
les bénéfices.
i ° . Il étoit le tuteur légitime de ses enfans mineurs;
à ce titre il étoit tenu d’aviser aux moyens d’exploiter
aussi pour eux.
2°. Pas de raison exacte pour attribuer exclusivement
au sieur Virotte père tous les produits d’une convention
faite au profit de la première communauté.
Ainsi donc le sieur Virotte père devoit faire i n v e n
t o r i e r le bail de la terre du M éage; ne Payant p a s fait,
*1 y a omission, et nullité de l’inventaire.
B z
�■' L ’on oppose en vain que s’il ne l’a pas fait, cela vient
de ce que le ‘bail étoit- sous'signature privée ÿ et qu’il eût
fallu le faire'Contrôler.1 ' i(j • .î-uj
a:
■ J;o 7 ;
.:i°. Ce: seroit une fraude que Fon auroit voulu faire
contre le fisc., et'on ri’est>pas recevable à se prévaloir de
sa propre fraude.
•f
'
j 2 °. Peu importoit la dépense du contrôle, quand il
s’agissoit d’assiii’er l’intérêt des mineurs. A u résultat ,
l’omission existe, et c’en est assez. ^
M ais, dit-on, le sieur Virotte ne pouvoit pas porter
dans son inventaire des objets éventuels, tels que lea
profits de la ferme;
i ° . Il devoit déclarer le bail.
- 2 °. A la fin du bail il devoit faire un supplément d’in
ventaire, et y consigner le compte des bénéfices. C’est
ainsi que cela a toujours été pratiqué en pays de com
munauté ; et le sieur Virotte père est mort sans avoir
rempli cette formalité.
Quant à la liève, elle devoit être comprise en l’inven
taire ; chaque article de recette faite avant le 20 janvier
1762 devoit être paraphé par le notaire ministre de l’in
ventaire, pour empêcher toute antidate pour ce qui étoit
encore à percevoir : l’on devoit faire le dépouillement
de ce qui restoit d û, et en porter le quantum dans l’in
ventaire.
: L e sieur Virotte père étoit un comptable qui rendoit
une espèce de compte en 17 6 2 ; il étoit obligé d’en re
présenter toutes les pièces justificatives, et de les faire
énoncer dans Tinventaire : il étoit forcé à le faire ainsi,
pour mettre ses mineurs à même de revenir un jour contre-
�( i 3 :)
les erreurs, contre les omissions, et les établir avec les
pièces inventoriées.
i.
,i->! i,r' :
- O r, on le demande, en l’état des choses, comment
établir des'erreurs,;commenté même pouvoir en coter?
"Le sieur Virotte déclare in globo qu’il a en argent ou
arrérages de cens la somme de 5oo francs ; il ne dit pas-,
tant en argent , tant en cens. E s t - il donc possible de
-démêler la vérité dans cela? E t le ¡moyen de revenir
contre les tromperies , s’il y en a !
»
M ais, dit-on, la liève n’appartenoit pas au sieur Virotte,
mais au seigneur : donc il ne pouvoit la faire inventorier.
Suivant M . A u ro u x, sur l’article 22 de la coutume
de Bourbonnais, n °. 1 7 , des reçus affirmés empêchoient
la prescription des cens.
Par l’article 4 2 2 , les seigneurs ou leurs fermiers étoient
obligés d’avoir des lièves en bonne et due form e, pour
par les censitaires y trouver la preuve de leur libération,
et encore les mettre à même de demander la restitution du
trop-payé , et cela avec dommages et intérêts. Chaque
fermier étoit tenu de faire une liève pour la durée de
son bail.
Cela posé, le sieur Virotte devoit avoir et avoit réelle
ment une liève de son fait : donc elle devoit être in
ventoriée.
,
4
La directe du Méage étoit très-conséquente : le sieur
Virotte père y a fait de gros> bénéfices. A l’audience
l’on convenoit que les enfans du premier lit avoient droit
d’en demander moitié ; M . le substitut de M . le p r o c u
r e u r général y avoit même conclu. Mais où est le m o y e n
d’opérer cet effet? Tous les papiei’s féodaux sont brfilés;’
�( r4 )
il n’en reste!aucun pour faire.,des comptes. L ’impossi
bilité du fait fera-t-elle que tout demeure confondu dans
dans la seconde communautér?aLn'raison én est révoltée.
° Que le sieur Virotte ait'fait inventorier son joürnal,
cela ne remédie pas aux vices que nous prouvons, par
ce journal même, contre l’inventairè.
i<>. Ce journal ji’-a pas été paraphé par le notaire .qui
îi fait l’inventaire de 1762 ( les paraphes qui y sont-ac
tuellement 11’ont été faits qu’en 1806)',- lors de l’inven
taire après le décès du père '). Ce journal pouvoit donc
être changé après coup; il pouvoit en être fait un autre
au soutien de l’énoncé en l’inventaire. D ’ailleurs, qui nous
assuré que c’est le journal inventorié qui paroît aujour
d’hui ?
20. L e contenu en un inventaire est pour instruire les
mineurs : tout doit porter minute. Si le journal eût été
perdu ou soustrait, qu’auroient pu demander les mi
neurs? Seulement 253 f r ., montant du dépouillement du
3 0. Notre position est la même que celle où un tuteur
auroit rendu compte à son oyant, et où, après la mort
du tuteur, l’on auroit trouvé chez lui des pièces probatives d’omissions, etc., et retenues par lui. L e sieur V i
rotte père retenoit son journal : on ne l’a trouvé qu’à sa
mort.
Que l’on cesse de crier que les erreurs, les omissions, etc.
sont minces en comparaison de la valeur de la succession
a partager.
L ’on sait bien que la somme de 3106 francs, montant
de l’inventaire de 17 6 2 , n’est rien en comparaison’ de
�( 1 5. )
600000 francs, valeur actuelle de la succession Virotte.
Mais c’est à l’état des choses en 1762 , qu’il faut re
monter; c’est l ’inventaire de 1762 qu’il s’agit de juger
sans pouvoir descendre à l’état-des choses en 1806, Ces
deux époques sont bien à distinguer. En 17 62 les mineurs
' Virotte ont-ils été lésés ? Voilà la question unique, ils
l'ont été énormément, cela suffit,
.
A q u o i b o n répéter à c h aque instant que les enfans
V irotte, du premier lit, tiennent ad pa rafa s epulas ?
Dans la-cause ce lieu commun est nul. Ils ne demandent
' que ce que la loi leur accorde et ce que le père vouloit
leur assurer., s’il n'avoit pas été surpris par la mort : cela
v aut infiniment mieux que les clameurs des adversaires.
La dame veuve Virotte renonce à un testament de 17 6 8,
que l’,on ne connoissoit pas A in si, nous n’avons que faire
de nous en occuper : aussi ne pourrôit-il lui se rv ir que
contre ses propres enfans, au moyen1 de l’ institution d’hé-»
ritier par égalité déjà faite en faveur des enfans du pre
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A R I O M , de l’imprimerie de T hibaud-LANDRIOT , imprimeur
de la C o ur d’appel. — Août 1807.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Virotte. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
livres-journaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Observation pour les enfans Virotte, du premier lit, intimés et appelans ; contre la dame Anne delaire, veuve Virotte, et ses enfants, appelans et intimés.
Particularités : Notation manuscrite : texte intégral de l'arrêt du 22 août 1807, Seconde section. Arrêt infirmatif sur plusieurs points.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1812
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1811
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1813
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53339/BCU_Factums_G1812.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
livres-journaux
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53338/BCU_Factums_G1811.pdf
d47079b0cd5c0a3994635d34b5a28a00
PDF Text
Text
'1
- h '■
A
5
M E S S IE U R S
DE L A C OUR D ’ APPEL,
»
A R I OM.
S u p p l i e n t humblement Jean-François V iro tte ,
propriétaire, habitant de la ville d’A y , arrondissement
de Reim s, département de la M arn e; sieur Antoine
D elaire, propriétaire , et dame Suzanne V iro tte , son
épouse, de lui autorisée, habitant à M ontaigut-le-Blain;
sieur Jean-François V iro tte, juge de paix du canton de
Lapalisse, habitant de la ville de Lapalisse; et dame Gil-
berte V iro tte , veuve en secondes noces de sieur Pierre
P la ce , officier de santé , demeurant en la commune de
Jaligny; tous enfans, héritiers et communs de feu sieur
M ichel Virotte et des parties adverses, intimés ;
Contre dame Anne D elaire, veuve et commune dudit
sieur M ichel V irotte; sieur Sébastien Virotte , proprié
taire; sieur Louis D esrois, propriétaire, et dame M ar guerite V iro tte, son épouse, de lui autorisée, tous h abitans de la ville de M oulins; sieur Hypolite de RuelleLargillère , et dame Suzanne V iro tte , son épouse, de
lui autorisée, habitans du lieu du V erger , mairie de
Saint-Voir; sieur Joseph Virotte-D uch arm e, proprié
taire , demeurant en la commune de M ontaigut-leBlain ; sieur Jean- H enri- Eléonore L eb ru n , p r o p r i é
taire, et dame Anne V iro tte, son épouse, de lui auto
risée, liabitans de la commune de Tréteau; sieur Antoine
A
�F aure, géom ètre, et dame Suzanne V irotte, son épouse,
de lui autorisée, habitans de la ville de Clermont-Ferrand , partie de Montferi’and , appelant de jugemens
rendus au tribunal civil de l’arrondissement de Lapalisse,
les 21 jan vier, 3 fé vrie r, 7 et 21 avril derniers, aux
fins des exploits , requête, ordonnance et exploits des 23
et 24 février, 20 et 24 a v ril, et 14 mai derniers.
Disant que par son arrêt du 18 du présent, la cour a
joint les divers appels des adversaires, pour qu’il n’y eût
plus qu’une seule contestation entre les parties, et pour les
terminer par un seul et même arrêt. Toutes les parties ne
peuvent être que parfaitement contentes d’une mesure
qui simplifie Ici marche des choses , et mène plus promp
tement à une fin..
Mais il seroit impossible que l’on incidentât sur la
forme dont les intimés attaquent l’inventaire du mois de
janvier 1762. C e t inventaire est très-sûrement n u l, d’une
nullité irrésistible ; la cour ne sauroit s’empêcher de le
juger ainsi. Mais on reproclieroit peut-être aux intimés
de n’avoir pas, par la voie de l’ap p el, saisi la cour d elà
connoissance de la validité ou invalidité de l’ordonnance,
du procès verbal des 23 et 25 janvier 1762 , et de ce qui
y est relatif.
A la rigu eu r, un appel n’est pas absolument néces
saire ; de suite on peut en venir à la nullité, et la faire
prononcer.
Mais , en toutes choses, il faut choisir le parti le plus
certain ; e t, dans le doute, il n’y a pas d’inconvénient à
interjeter incidemment appel de l’ordonnance du 23 jan
v ie r, et de tout cc qui a suivi.
�( 3 )
• Ce considéré, M essieurs, en en venant par les parties à
votre première audience, il vous plaise adjuger aux intimés
les conclusions par eux ci-devant prises , avec dépens; et
icelles reprenant, corrigeant et augmentant, donner aux
intimés acte de ce qu’en tant que de besoin ils interjettent
incidemment appel de l’ordonnance du juge de Montaigutle-Blain, du 23 janvier 1762 , du procès verbal du même
juge, en date du 25 dudit mois , contenant nomination
de curateur, permission de faii'e faire inventaire, et com
mission au premier notaire royal sur ce requis ; et c e ,
pour causes et moyens de nullité, tenir ledit appel pour
bien relevé;y faisant d ro it, en même temps que sur ceux
des adversaires, des jugemens des 21 janvier, 3 février,
7 et 21 avril derniers, par les motifs exprimés auxdits
jugemens, par ceux déjà développés par les intim és, et
notamment en ce qu i touche Vordonnance du 23 janvier
1762 ;
Attendu que par sa requête du 23 janvier 176 2 , le
sieur M ichel V irolte a exposé qu’il vouloit se remarier,
■et qu’il l’a effectué le 8 février suivant, c’est-à-dire, en
viron quinze jours après, avec la dame Anne D elaire,
ainsi qu’il résulte de leur contrat de mariage;
D ’où il suit q u e , dès avant le 23 janvier 1762 , ledit
remariage étoit arrêté, et que les deux familles avoient
entr’elles des rapports tels, qu’elles n’en faisoiçnt plus
qu’u n e , celle Delaire commandant absolument à celle
V irotte;
Attendu que par sa requête du 23 janvier 1762, le sieur
M ichel Virotte père n’avoit demandé permission d’assigner
A a
�(4 )
que des parens paternels et maternels de ses enfans mi
neurs, et non des amis à défaut de parens;
D ’où il suit que le sieur Virotte père reconnoissoit qu’il
y avoit réellement suffisance de parens des deux estocs ;
c a r, dans le fait, il y en avoit plus qu’il n’en falloit pour
compléter le nombre voulu par la coutume de Bour
bonnais et l’usage ;
A tten d u , en fa it, qu’il s’agissoit d’intérêts d’enfans mi
neurs , et que l’ordonnance du juge de Montaigut-leBlain, du 23 janvier 1762, a été rendue sans conclusions
préalables du ministère public;
Attendu, en droit, que le ministère public est le défen
seur légal des mineurs ; qu’il doit être ouï toutes les fois
qu’il est question de leur intérêt, et q u e, d’après la loi
et l’usage constant de toutes les juridictions de France,
il y a toujours eu en pareil cas des conclusions du mi
nistère p u blic ;
Attendu que par l’ordonnance du 23 janvier 1762 , le
juge de Monta igut-le-Blain a permis au sieur M ichel
V irotte d’assigner des parens paternels et maternels seule
ment , et non des amis, et que dès-lors le sieur Virotte
père devoit se renfermer strictement dans cette per
mission ;
Attendu néanmoins que par son exploit du 25 janvier
176 2 , le sieur Virotte a fait assigner sept individus,
, sans désigner le degré de parenté de chacun avec les
enfans mineurs V irotte, les indiquant seulement par les
expressions générales, tous parens -paternels, maternels
ou am is, et sans distinguer les parens d’avec les amis*,
�Attendu que le sieur V irotte père a laissé, et a même
affecté d’éviter des parens maternels de ses enfans mi
neurs , et en exprès le sieur Antoine B riro t, docteur en
médecine , leur aïeul, celui qui dans la circonstance étoit
le protuteur n é , le protuteur légitime de sespetits-enfans,
et cela pour appeler à la délibération des étrangers auxdits
mineurs, même des parens de la dame A nne D elaire,
seconde future épouse; par exem ple, le curé de Montaigutle-Blain, le sieur Barret, notaire, et le sieur François
Féjard, du R éag e, oncle de ladite dame Anne Delaire.
E n ce qui touche le procès verbal du 25 janvier 1762,
Attendu que dans icelui l’on à fait remplir par le sieur
Féjard fils, les fonctions de procureur fiscal;
Attendu que ledit sieur Féjard étoit cousin germain
de la future seconde épouse du sieur Virotte père, et
que le remariage étant arrêté dès avant ledit procès verbal,
il est inconvenant que l’on ait pris pour procureur fiscal
un individu tenant de si près à la dame Anne Delaire ;
Attendu que dans ledit procès verbal, ledit sieur Féjard
y est dit substitut du procureur ¿fiscal ÿ
Attendu que dans les justices seigneuriales les pro
cureurs fiscaux n’avoient point de substituts en titre, et
que le sieur Féjard n’étoit muni d’aucune provision à
cet égard ;
Attendu que dans le procès verbal du z 5 janvier 1762,
il n’est pas dit que le procureur fiscal en titre fût absent
ou légitimement empêché , et qu’il y eût dès-lors raison
pour le faire remplacer ;
D ’où il suit que l’ayant fait remplacer sans cause, ç a
etc dans la vue coupable d’éviter sa surveillance, pour
�( 6 \
mettre en son lieu un homme dévoué à la famille D elaire,
par ses rapports de parenté et d’aftection particulière ;
Attendu que dans les justices seigneuriales le procu
reur fiscal ne pou v o it , en cas d’empêchement légitim e,
être remplacé valablement q u e , ou par un grad ué, ou '
par un ancien curial; encore falloit-il que la qualité du
gradué ou cui'ial remplaçant fût exprimée dans l’acte
judiciaire auquel il participoit, parce que son pouvoir
de remplacer étoit attaché à son titre de gradué ou de
curiai ;
Attendu que, dans le fait, le sieur Féjard n’étoit ni
gradué, ni curial, pas même postulant en la justice de
Montaigut-le-Blain ; et que dans le procès verbal dont'
il s’agit il n’est pas exprimé qu’il fût ou gradué, ou curial,
pas même postulant ;
• D e tout quoi il résulte que ledit sieur Féjard n’ayant
point serment en justice , étoit sans caractère légal; que
dans ledit procès verbal il y a absence absolue du mi
nistère public, et que la nomination du curateur portée
par icelui est nulle;
Attendu dès-lors qu’il n’y avoit point contradicteur
légitime pour coopérer à l’inventaire et y représenter
les enfans mineurs V iro tte, et y défendre leurs intérêts;
et que ledit inventaire est n u l, comme étant fait con
tradictoirement avec une personne illégalement nommée.
En ce qui touche les omissions et fausses déclarations
bien constantes et bien prouvées dudit inventaire ;
Attendu que celles démontrées dans la cause forment
un total de plus de 8i 5 livres 12 sous, somme énorme
comparativement à celle de 1 inventaire, qui n’est que
�(7 )
de 3106 livres, puisqu’il en résulteroit une lésion de
plus du tiers au quart contre les mineurs V irotte;
A tte n d u les autres infidélités dont est vicié ledit inven
taire ;
Attendu que le fait que le livre-journ al du sieur
Virotte père a été compris en l’inventaire ne sauroit
remédier aux vices justement reprochés audit inventaire,
parce qu’un inventaire doit porter minute de tout son ■
contenu ; que l’on ne peut pas dire que ledit journal et
l’inventaire ne font qu’un même acte; que le journal
pouvoit être supprimé, et que dès-lors les mineurs Virotte
ne pouvoient avoir aucune assurance à cet égard ;
D ire qu’il a été nullement ordonné et procédé, par
les ordonnance, exploits, procès verbal et inventaires, des.
23, 25 et 26 janvier 1762 ; bien appelé : émandant,
déclarer le tout nul, irrégulier et de nul effet; ordonner
que l’amende de 3 francs sur ledit appel sera rendue;
dire qu’il a été bien jugé p a r les jugemens.des 21 janvier,
3 février, 7 et 21 août derniers, mal et sans cause appelé;
ordonner qu’ils sortiront leur plein et entier effet, et
condamner les appelans en l’amende de 10 francs et aux
dépens, même en ceux réservés, lesquels, dans tous les
cas, les intimés emploîront en frais de partage, pour en.
prélever le montant sur les biens à partager.
GOURBEYRE..
A R IOM , de l'im p rim e rie de T iii d a u d - L a n d r i o t , im prim eur.
de la C our d’appel.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Virotte, Jean-François. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
géomètres
Description
An account of the resource
Titre complet : A messieurs de la Cour d'Appel, à Riom [Jean-François Virotte contre Anne Delaire]
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1811
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1812
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1813
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53338/BCU_Factums_G1811.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
géomètres
secondes noces
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Text
141
i
* V* **î1
PRECIS
P O U R A n n e G O R C E , femme autorisée en justice
d’A n t o i n e
B A R T H O U L E , demanderesse en
C O N T R E ledit A ntoine B A R T H O U L E , laboureur,
habitant de Gerzat , défendeur.
LA séparation de b iens, dit l’auteur des lois civiles,
doit être ordonnée en justice , et avec connoissance
de cause, après des preuves suffisantes que le mauvais
être des affaires du mari et sonp eu de biens, mettent
en péril les biens de la femme. M. Domat n' a f a i t
que rendre le s lettres de l a loi 2 4 , ff- Soluto matrim.
et ; constat 'exindè dotis exactionem competere , ex quo
évidentissime apparuerit , mariti f acultates ad dotis
1
exactionem non sufficere.
$ 0 -1 1
ÿ l\ C ÌA ^uJ Cl¿>
Ü t^ /< L ./tl.t^ (U
séparation de biens.
*
~í<^a'{IL k
-
�( o
T elle est dans sa plus grande rigueur l ’exactitude
du principe de cette matière ; et peur le gain de sa
cause la demanderesse n ’a pas besoin de réclamer les
adoucissemens que la jurisprudence a souvent apportés
à cette extrême rigueur, en ordonnant la séparation
sans attendre que les affaires du mari fussent dans
un entier dérangement, et qu’il fût absolument ruiné;
mais dès là même qu’il avoit commencé à se mal conduire
dans ses affaires , et qu’on pouvoit lui reprocher des
dissipations d’une certaine conséquence. Il s’en faut
bien que le défendeur n’ait que ce reproche à se
faire ; il a dissipé tout son b ie n , et ce qui lui en
reste ne suffit pas pour combler les dissipations qu’il
a faites du bien de sa femme ; c’est ce qui deviendra
sensible par le plus juste calcul, auquel va conduire
le récit des faits les plus importans de l’affaire.
Élizabeth Galabru avoit épousé en premières noces
Bonnet Belonte : la demanderesse est la petite - fille
de Bonnet Belonte et d’Élizabeth Galabru.
Celle-ci passa à de secondes noces avec François
B aith ou le, et il n’y eut point d’enfans de ce mariage.
François Barthoule n ’avoit pas de biens ; il étoit
le premier valet d ’Élizabeth G alabru, lorsqu’il l’épousa.
E lle avoit trouvé un mobilier assez considérable dans
la succession de son m ari, et elle en avoit joui tous
les biens. Elle étoit de plus reconnue pour une excellente
administratrice, et seule elle étoit à la tête des affaires
de sa maison. Son second mari ne s’appliquoit qu’à
la culture des terres ; ensorte que les acquisitions en
grand nombre qui se firent pendant la durée du second
�( 5 )
m ariage, étoient vraiment le fruit des travaux et de
l ’industrie de la femme.
De si justes motifs engagèrent François Barthoule
à faire à Élizabeth G alabru, sa fem m e, le 3 1 août
I7 7 1 , une donation de tous ses biens présens. Indé
pendamment des immembles qui étoient d’une grande
valeu r, la donation contient l’inventaire d’un mobilier
très-considérable. Outre quatre-vingt-dix bêtes à cornes,
cinq jumens , quatre poulains et 206 bêtes à lain e,
on y trouve une grande quantité de meubles meublans ,
lits , lin ges, cuves, tonneaux, outils et instrumens d’a
griculture.
C ’est ici le moment de rappeler qu’Élizabeth Galabru
avoit retiré auprès d’elle , presque dès sa naissance,
A nne G o rc e , sa p etite-fille, qui est aujourd’hui la
dem anderesse, et qu’elle avoit conçu pour elle une
prédilection toute particulière.
*
Cependant la fortune de la maison s’étoit encore
accrue, lorsqu’en 1778 Élizabeth Galabru imagina de faire
le mariage desa petite-fille avecAntoine Barthoule, neveu
de son m ari, qui est le défendeur , et par le contrat de
mariage qui est du 12 février de cette même année , non
seulement Élizabeth Galabru lui transféra tout le bénéfice
de la donation que lui avoit faite son mari, le 31 août
1 7 7 1 , mais François Barthoule lui-même l’institua son
héritière universelle conjointement et par égale portion
avec Antoine Barthoule, son neveu, qu’il lui faisoit épou
ser; ensorte que de ce moment la demanderesse devint
propriétaire de tous les biens compris dans la donation
de 1 7 7 1 , et elle eut de plus l ’assurance de recueillir
A 2
�(
4
)
. .
’
à la mort de François Barthoule la moitié de toutes les
acquisitions qui pouvoient s’être faites dans la maison
depuis la donation. •
François Barthoule survéquit peu de temps à ce
m a r ia g e , et Élizabeth Galabru véquit encore trois ans
apr'es. Dans cet intervalle, elle avoit acquis quelques,
héritages; mais par son testament, pour remplir toute
justice, elle déclara qu’elle entendoit que-la propriété
de ces héritages eût le même sort que la succession deson mari ; c’est-à-dire, qu’elle fut partagée également'
entre Antoine Bathoule et Anne Gorce*.
C ’est ici le lieu de faire la remarque de faits intéressans : c’est que, lors de son mariage, la demanderesse
n’avoit que douze ans et quelques m ois, et qu’elle avoit;
à peine quinze ans à la mort de sa grand’m ère, au-lieu:,
que son mari avoit vingt-six ans1, lorsqu’elle l’épousa.
Après la mort d’Élizabeth Galabru , il -fut passé un
traité, le 15 janvier 1 7 8 1 , entre la demanderesse et
son mari et les père et mère de la demanderesse, pour
faire la liquidation da sa succession, et pour constater
les droits respectifs du mari et de la femme.
C e traité établit qu’après la distraction et le paiement
de tout ce qui pouvoit être dû par la succession au»
père et mère de la demanderesse , il restoit dans la»
maison un mobilier évalué à la somme de 18,33 5'^ I0 ,i r
dont il en appartient 5,021 '**' 5 J au«>défendeur; mais
les 1 3,3 14 ‘tl‘ 5 J - restans faisoienti constamment partie’
de la dot de la demanderesse : le reste de sa dot étoit
en immeubles valant plus de 30,000 ‘tt\ • • •
:
Fait constant établi au procès,1 et même par le>propre
�(
5
)
aveu du défendeur dans sa dernière écriture. C ’est que de
ce mobilier de plus de 18 ,0 0 0 ^ , il n’ en existe pas
pour un sou; le mari a tout dissipé absolument; il est
donc redevable à sa femme des 13,3 14
5 J qui 1 aï
appartenaient dans la valeur du mobilier. Voyons main
tenant quelles sont ses ressources pour y faire face.
On le défie d’en présenter d autres que celles qui vont
être expliquées.
11 lui appartient comme héritier pour moitié de François
Barthoule, son oncle, une moitié des héritages qui avoient
été acquis par celui-ci dans l’intervalle de la donation de
1 77 i au mariage des parties de 1778 ; il lui appartient
aussi en vertu du testament d'Élizabeth Galabru la moitié
des héritages qu’elle avoit achetés dans l’intervalle de la
mort de son mari à. la sienne.
Les prix réunis de toutes ces acquisitions, dont les con
trats sont tous joints à la production de la demanderesse
se portent à une somme de 12,767'***, dont moitié pour
le défendeur, qui est de 6 , 3 8 3 ^ , i o J . c i , 6, 3 8 3 ^ 1 0 J .
Il faut y ajouter le prix total d ’autres
deux acquisitions de fonls que fit le défen
deur , lui-même au moment de la mort
d Klizabeth Galabru , qui est de
1,5 9 6 '”’ .
Au moyen de quoi toute la fortune du
défendeur ne va pas au-delà. de la somme .--------------- ,
de
7 ,9 7 9 ^ . 10 J .
Mais il s’en faut bien que cette somme suffise pour
remplir la demanderesse du mobilier qui lui appartenoit,
qui a été dissipé , et qui fut évalué dans le traité de 1 78 1
A 3
�( o
à la somme de 1 3 , 3 1 4 * ' . Il y a par le calcul un déficit
démontré de 5,334 ’"*- I 5J - E lle risque encore de se
trouver en perte de plus de 2,000"^, à quoi peuvent s’éva
luer les gains de son contrat de mariage , dans le cas où
elle survivroit à son mari ; ce qui est tr'es-vraisemblable
dans l’ordre de la n ature, puisqu’il est beaucoup plus
âgé qu’elle.
Certainement il n’en faudroit pas davantage pour
prouver la mauvaise administration du mar i , et ses dissi
pations, et pour donner lieu à la demande en séparation
de biens. Un paysan sans fortune, arrivé domestique à
G erzat, qui a fait un mariage avantageux, dans lequel il
a trouvé quarante mille francs d’immeubles et un mobilier
de plus de dix-huit mille livres, et qui, dans dix à onze
ans a dissipé tout ce m obilier, 11e donne pas à beaucoup
près une bonne idée de sa conduite.
Mais il est bon encore d’esquisser les traits principaux
qui ont dû le conduire , et l’ont conduit en effet à cet
extrême dérangement, la paresse , le cabaret et le jeu.
L a paresse ! Comment pourroit-on mieux en juger que
par l’abandon absolu qu’il a fait de la culture de ses héri
tages , qu’il, s’est vu réduit à donner en ferme , après
avoir v e n d u tous les bestiaux et tous les agrès nécessaires
à leur exploitation ?
A l’égard du cab aret, les enquêtes font foi que c’étoit
son domicile le plus ordinaire, et cette conduite se
soutient toujours : son état d’ivresse est presque continuel.
Les enquêtes prouvent également sa passion pour le jeu,
•dans lequel même de sens froid il ne pouvoit qu’être dupe*,
bien plus encore lorsqu’il ¿toit pris de vin.
�( 7 )
Quand après cela on le voit encore dans les enquetes
vendre ses récoltes sur pied à vil prix , le recevoir , le
jouer sur le champ avec l ’acheteur, et perdre même audelà ; quand on le voit vendre des mayères un an et deux
ans avant le temps de la coupe, n’a-t-on pas le tableau le
plus complet, d ’un parfait dissipateur? et comment seroitil possible de lui confier encore l’administration des biens
de sa fem m e, dont il a consommé tout le m obilier, dont
cependant il n’a pas pu vendre les immeubles, parce qu’ils
étoient inaliénables, mais qu’il a réduits à l’état de la plus
grande dégradation ? objet dont la femme va encore se
trouver en perte, par l’insuffisance des biens du mari.
C et exposé exactement v r a i, et qu’il seroit impossible
au défendeur de démentir avec quelque pudeur, ne rend
pas difficile à croire sa négligence à payer ses créanciers,
même ses domestiques, les cens et rentes et les imposi
tions auxquelles le bien étoit asservi ; mais la preuve s’en
trouve d’ailleurs dans les poursuites qui ont été faites
contre lui ; on a réuni à cet égard plusieurs assignations
qui lui ont été données ; des sentences obtenues contre
lui , même en la juridiction consulaire ; des procès verbaux
de saisie et des procès verbaux de carence'de m eubles,
lorsqu’il a eu enfin tout dissipé. Les pièces s’en trouvent
en grand nombre dans la production de la demanderesse ,
et l’on conçoit aisément qu’il a dû lui en échapper encore
un plus grand nombre.
Il est aisé, après tout ce qu’on vient d’établir, d’écarte®
les moyens par lesquels le défendeur a tenté de se sous
traire à la demande en séparation.
Il avoit d’abord imaginé une action criminelle en sous-
�( s )
traction contre sa femme , et il paroîtroit qu’en effet la
plainte du défendeur étoit antérieure à la demande en
séparation, d’où le défendeur, dans sa derniere écri
ture , veut induire que la demande en séparation n’a été,
del à part de sa femme, qu'une récrimination. 11 n’est pas
difficile de rétorquer l'objection -, en démontrant au con
traire que c’est la plainte du défendeur qui est récriminatoire.
Il est bien vrai que l'assignation donnée sur la demande
en séparation n’est que du i 5 mai 1788 , et que la plainte
du défendeur est antérieure d’un jou r; c’est-à-dire, du 14
du même mois ; mais il avoit fallu de la part de la deman
deresse des démarches antérieures à l'assignation. E lle
¿toit alors encore mineure ; il falloit, pour agir contre son
jnari, qu’elle se fit nommer uri curateur ; il falloit de plus
qu’elle fut autorisée par justice. Or , des le 5 du mois de
mai, elle avoit demandé la nomination d’un curateur pour
former la demande en séparation, et cette nomination fut
faite par une ordonnance du même jour ; ensuite elle
forma sa demande par une requête qui fut répondue le 15
du même mois, d’une autre ordonnance qui 1 autorise en
justice , et lui permet d ’assigner son mari. Mais la plainte
du défendeur n’étant que du 14 mai, est par conséquent
postérieure, et ce n’est évidemment que sur la connois-,
sance qu’eut alors le défendeur dos démarches de sa
femme, pour former sa dem ande en séparation, qu il ima
gina de récriminer par’ une plainte en soustraction.
On ne s’appesantira point sur la suite de cette procé
dure criminelle qui a été convertie en procès civil , et
jointe à la demande en séparation, non plus que sur les
�( 90)
dépositions de l’information qui. fut faite en conséquence,
ni sur celles des enquêtes respectives faites en exécution
de la sentence interlocutoire qui a ordonné la preuve des
faits de séparation. Cette discussion a été faite pleinement
par la requête de la demanderesse, signifiée le 30 décem
bre 1 7 91 , et qui compose la cote 54 de sa production.
Sans y reven ir, il suffit de dire en général que les preuves
de soustractions se bornent à quelques linges , nippes et
hardes à l’usage de la demanderesse, qu’elle a soustraits
aux déprédations de son m ari, et qui seroient en tout cas
devenus la proie de ses créanciers i ce qui est prouvé par les
divers procès verbaux de saisie ou de carence, qui ont été.
faits dans la maison. L a demanderesse est bien excusable,
sans doute, de ne pas s’être laissé dépouiller d’une partie
des effets qui lui étoient les plus nécessaires,
5; ,
¿ Quant aux autres faits à la charge de la demanderesse,
il n’y en a aucun de prouvé. Toutes les dépositions, soit
de l’information, soit de l’enquête du défendeur, ne por
tent absolument que sur des ouï dire qui ne peuvent jamais
être admis comme preuves en justice, et l’on a parfaite
ment établi dans la requête du 30 décembre dernier, que
même la plupart de ces faits seroient insuffisans contre
une demande en séparation.
'
• Quelques témoins disent bien qu’ils ont ouï dire qu’il
a été fait des ventes du mobilier ; quelques-unes par le
mari et la femme conjointem ent, d’autres par la femme
seule ; mais de ce qu’il en avoit été fait par le mari et la
femme conjointement , il n’en résulteroit pas que celles,
qui auroient été faites par la femme seu le , l’auroient été
à L’insu. de son mari j il se présumeroit au contraire qu’elle
�(
10
)
n’avoit agi que par son ordre, et qu’elle lui avoit rendu
compte.
Mais une circonstance essentielle qui a été jusqu’à pr<!/sen t omise dans la défense de la demanderesse, c’est ce
qu’a déposé le sieur G e n est, curé de G erzat, témoin
d ’ailleurs très-suspect ( i ) , que trois ans après la mort
d Élizabeth G alabru, grand’mère de la demanderesse , le
mobilier de la maison étoit déjà presqu’entièrement dis
sipé. O r, que l’on fasse attention à l’âge qu’avoit alors la
demanderesse. On a déjà dit que lorsqu’elle se maria
en 1 7 7 8 , elle n’avoit que 1 2 ans et quelques mois ; elle
n ’avoit pas 1 5 ans à la mort de sa grand’mère décédJe en
1 7 8 0 , et c’est dans les trois ans de ce décès qu’a dis] aru
tout le mobilier valant plus de 18,000"^. Comment peuton en imputer la dissipation à une femme si jeune qu’on
ne pouvoit alors regarder que comme un enfant, et cela
sous les yeux d’un mari qui avoit une trentaine d’années.
Si la chose étoit possible, la faute en retomberoit entière
ment sur le mari ; lui seul pourroit se la reprocher, puis
qu’il avoit l’âge de raison, le droit, l’autorité, et la force
pour l’empccher.
Les autres imputations faites i\ la demanderesse dans
quelques dépositions, soit de l’information , soit de l'en
quête du défendeur relativement à sa conduite , ne por
tent encore que sur des ouï d ire, et la réfutation s’en
trouve aussi faite complètement dans la requête du 30
décembre dernier. 11 est d’ailleurs singulier qu’on reproche
à la demanderesse la fréquentation des bourgeois de
( 1
) Voyez
les objets de reproches proposés contre ce témoin.
�( 11 )
G erzat:pourquoi laisse-t-on ignorer que les plus notables
•de ces bourgeois, sont les proches parens de lademanderesse?
i
Il est vrai qu’il y a quelques faits plus graves encore
qui lui sont reprochés ; mais outre que les témoins n ’en
parlent aussi que par ouï d ire , et qu’ils sont incroyables
par leur invraisemblance , c’est qu’on ne peut les attribuer
qu’à la malignité , puisqu’ils n ’ont aucun rapport aux
faits qui avoient été- interloqués , et dont la preuve avoit
été ordonnée.
Si ces faits ont .été relevés dans la dernière écriture du
défendeur, on ne peut l’imputer qu’à une méchanceté
gratuite de la part de l’instigateur et du solliciteur connu
de cette affaire, et au trop de confiance du défenseur qui
ne lui a pas laissé appercevoir qu’il exposoit son client.
Aus si , la demanderesse ne veut-elle pas croire que son
mari ait ni connu ni avoué ces imputations qu’autrement
il auroit sans doute p ro d u it, par une accusation plus
éclatante, mais dans laquelle il auroit été facile à la
demanderesse de le confondre ; succès qui auroit entraîné
non une simple séparation de biens qui laisse au mari la
ressource d’obtenir des alimens sur les biens de sa femme,
mais une demande en séparation d’habitation qui le priveroit de cette ressource.
D on c, pour se résumer , il ne peut pas rester l’ombre
de difficulté sur le succès de la demande en séparation
de biens. L e mari est un dissipateur avéré ; il a consumé
en très-peu de temps plus de I 5>0°0
de mobilier
appartenant'à sa femme j il^s’en faut de plus de 5,000 *%
que son bien .puisse y Af^ij:e fiiç,e. L a femme s.era encore
�( 1 2 )
considérablement e n pe r t e : sur ses immeubles des dégradations que le mari y a commises ; elle court aussi le risque
de perdre tous les gains et avantages stipulés dans son
contrat de m ariage, en cas de survie. Il n ’y eut jamais de
circonstances qui commandassent plus impérieusement
une séparation de biens.
> •
M . F A Y D I T , Président , Rapporteur.
M i o c h e
aîné, Avoué
•tf
U;
*
t
,
i
,
A RIO M , DE L’IM P R IM E R IE D E L A N D R IO T .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gorce, Anne. 1792?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Faydit
Mioche
Subject
The topic of the resource
séparation de biens
secondes noces
débauche
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Anne Gorce, femme autorisée en justice d'Antoine Barthoule, demanderesse en séparation de biens. Contre ledit Antoine Barthoule, laboureur, habitant de Gerzat, défendeur.
Table Godemel : Séparation de biens
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1792
1771-Circa 1792
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1008
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gerzat (63164)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53106/BCU_Factums_G1008.jpg
Créances
débauche
secondes noces
séparation de biens
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52974/BCU_Factums_G0431.pdf
6b2568d916748da5aa6b72bbc832cbfe
PDF Text
Text
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M EM OIRE
PO UR Jean
C O NO R D , M archand,
Intimé
C O N T R E les f i eur & dame S A L V A G E
Appellants.
,
N acte foufcrit par une veuve, heriSM^*n-M
S•H+
Q
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Jr+î y tiere de fon m a r i, peut-il être any ;+
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„W¿4^
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I nulle, parce qu’elle convole en fé
D
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w',*+'X'*'V+'¥,+
+« t A +-ç-+
B ^ «*•■*•4*•b+-j»*fW**•* condes noces? & les cédules qu’elle
;.3)nr<S<)iirÆ a foufcrit pour de l’argent qu’on lui
a prêté méritent-elles le même fort? Les Appel
lants qui ont divifé leur défenfe , n’ayant cepen
dant qu’un feul& même Procureur, foutiennent
l'affirmative de cette propofition, & l’intimé la
négative ; il a pour lui les principes & la Sentence
des premiers Juges , & les Adverfaires ont pour
eux la mauvaife foi la plus marquée des fubterfuges & l'odieux menfonge.
A
a
�F A I T .
T
'■ La demoifelle.de RaiHgnac avoir époufc en
Ipremieres noces Michel Daldin de Fômblaves ; il ne
lurvêcut pas long-temps à ion mariage , il inilirua
fa femme ion héritiere univerlelle, i7& ailigna k
chacun de'fes enfants, une cerTâTnê“ léguime.
Un bienfait de-cette nature .dévoie, graver
en lettres d’or dans le cœur de cette Êpoufe
la mémoire d’un mari fi généreux, 6c ces mânes
devoient être refpe&ées ; mais ces larmes qu’il fie
d ’abord verfer fuient bientôt taries, ¿c bientôt
elle chercha un confolateur ( comme ça fe prati
que parmi le beau lexe ) qui pargeât avec elle les
embarras d’un nombreux doméftique. Salvage offrit fesvxdbuftes, fervices, les diffé
rents genres d’état qu’il avoit déjà embraile
devoient être auprès d’une veuve une vigoureuie
recommandation.
Fils d’un payiàn des montagnes d’A u v ergn e,
il fut d’abord deviné à..Pétat Eccléliaftique, mais
la nature parlant plup fermement chez lui que la
Théologie il quitta j e petit collet pour arborer
le froc ; l’état, de M o in e. ne s’accorda pas mieux
avec l’inco^ilançe de.fon caraftere & la fougue de
fes paillons r/\[ délaifïaf le C lo ître, &,fe prélenta
à. la dame; Daldin en qualité <de Précepteur , il
fut reçu; quel homme pour faire des cleves ! quel
Précepteur que le fieujç Salvage!
Soit qu’il s’ôccupat d‘e l’éiucation dès enfants
�ó jtí'
, 3 .->
, ,,
,
de cette veuve , Toit qu’il eut auprès d’elle d’autres ’
loins, l’intimé reçut le 13 M ai 1771 une lettre
de^la dame Daldin ,>ccmçue en ces termes :
- « Si vos affaires vou^ permettent-, M onfieur,
» de me fairel’honneurdeVeriirmanger ma Toupet
» V e n d r e d i prochain, vous me ferez un vrai plaifir;» j ’ a i b i e n des choies à vous communiquer, entr’au-*
» tres le parti d’une ferme dé 105 letiers de bled ;'
» je n’a i;voulu prendre aucun arrangèment1avec
» perfonne , fans avoir conféré avec vous , ce bled
» v o u s conviendra d’autant mieux qu’il fera por» table & méfurable chez vous. Je fuis, &c.'figné
» Raitinhac Daldin. »
;
-7
-w; 4 ...
C o n f o r m é m e n t à cette lettre l’Intiméfefendit chez/
cette veuve, & le3 Juin 1771 il fut pàiïeèntré les Par
ties un a&e ious leing privé, entièrement écrit de ;
la main de la dame Daldin ,ipar lequel ellé^onnà*
à titre de bail à ferme à l ’intimé pour néüfànneèsj
qui dévoient prendre leur- commencement a. la.
récolte, lors prochaine, le bled de tous íes Do
maines quelle avoit fous-fermé; & qui au total
formoient la quantité de H o <5 feûérs feigle il de
v o i r les recevoir aux mêmes pà£l:es & conditions
que s’étoient obligés de le foire iésious-ftrm iers,
par a£tes publics, dont elle fe chargea de remettre
lVvncdition en forme V l’intim é, pour lui fer- ■
vir & valoir ainfi quepdelraifon.
^
/
Par ce m ém eaâe-l'a .dame- Daldin s’efl 6bü~v:
gée de faire valoir & iemr ladite' fèrfiie'y& ‘ deW
pafler a&c public à lapremiere réquiiîtion de l’In
^9
�tim é, à la charge par ce dernier de payer h. cette
dam e, le i «5 Septembre lors prochain, la iomme
de 1680 livres , à quoi fe montent lefdits 105
fetiers bled feigle, à raifon de 16 livres le fetier,
prix convenu entre les P arties, iur lefquelles
i'ommes il pouvoit retenir 300 livres qu’elle
reconnoiifoit qui lui avoir avancé fur le prix de la
ferme le même jour que fe paflà l’acle ; &
pour les autres huit années enfuite l’intimé s’eft
obligé de payer le prix de laferme en deux termes ;
favoir, 814. livres à la Touilàints , 6c pareille
fomme à Notre-Dame de Mars.
L ’Intimé fit lignifier ce bail aux différents fous^
ferm iers, il perçut la.premiere année fans la moin
dre réiiftance les objets énoncés en fon b ail, &
donna quittance pouréviter une impofition de 300
*îiv. & lelon qu’il eft d’ufage dans la haute A u
vergne, non comme fermier, mais comme régifièur.
Quelque temps apres la dame Daldin eut befoin
d ’une fomme de 786 liv. elle eut recours à l’intimé
qui la lui prêta fous fon b ille t, qui eft du 3 Sep
tembre 1771, entièrement écrit & fignéd.efa main.
Le fieur Salyage a connoiilànce de tous, ces faits,
ils fe paifoient fous fes yeux , puifqu’il étoit alors
dans la maifon de la dame Daldin en qualité de
précepteur de fes enfants ; cette femme que l’état
de veuve lailoit d éjà, & qurprojéttoit de faire
entrer dans fon lit le fieur Salvage, craignant de
perdre par ce contrat tous les avantages que lui
avoit fait fon mari , même l’ufufruit des biens
�dont ilPavoit gratifiée, voulut s’aifurer Ton chauf
fage pour long-temps, & pouvoir le tirer .des bois
à elle délaifTés; elle pria le fieur Conord deconièntir à une vente fnnulée de 400 pieds d’arbresl ’in tim é , tout dévoué à cette dam e, voyant bien
d ’ailleurs qu’elle avoit des craintes chimériques
parce qu’on ne pouvoit la fruflrer de l’ufufruit
des biens dont elle avoit hérité , s’y prêta volon
tiers ; en coniéquence, par acte paiîé devant No
taire , cette dame parut lui vendre 400 pieds d’ar
bres pour le prix & fomme de 2000 liv. dont le,
même a&e portoit quittance.
Une contre-lettre que fit l’intimé détruifoit
cette vente. Il déclara qu’il ne s’yprêtoit que com
me faifant office d’a m i, que la vente n etoit que
fi&ive, qu’il 11’avoit jamais payé les 200 0 liv.
qu’elle énonçoit, mais il fe réferva par cette mê
me contre-lettre la force & l’exécution de Ton bail
à ferme , même fon a&ion, relativement au bil
let de la fomme de 786 livres que lui avoit conicnti la dame Daldin.
Tel étoit l’état des choies lorfque la dame Dal
din époufa le fieur Salvage, q u i, dans la vue de
faire perdre les créanciers de la dame Daldin y
imagina de faire inférer une claufe dans fon con
trat de m ariage, de laquelle il le promit bien de
faire ufage en temps & lieu , & pour qu’il ne fut
connu que lorfque les batteries qu’il drefîoit feroient prêtes. Ce contrat de mariage fut paifé à huit
lieues de l’endroit de leur réfidence , par un No-
�V :o
6
taire qui croit en même temps contrôleur. Il Te- fit
constituer en dot une fomme de n o o liv. à pren
dre par chacun an fur le bien le plus liquide de la
dame Daldin, cela, y eft-ii d it, pour fournir aux
dépenfes journalières de la maifon; aiîurément il
eft ailé de découvrir la fraude qui a di&é cette diipoiitiori ; Salvage n’a porté rien à cette femme,
& elle lui donnoit déjà une fomme de i i o o liv.
Quoi qu’il en io it , que quelque temps après'SaU
vage voulut changer les Dieux Pénates à Montpel
lier ; il détermina fa nouvelle époufe à l’y fuivre;
il fit traniporter fon mobilier chez l’in tim é, dont
la maifon fe trouvoit fur la route , il voulut bien
les.recevoir , il lui prêta même deux malles dont
il eut befoin.
Enfin l’intimé fe préfenta l’année 1771 pour
percevoir les cent cinq ietiers portés par fon bail ¿\
ferme, mais Salvage en partant avoit défendu aux
fous-fermiers de les délivrer, & l’intimé fe vit refufé le grain qu’il avoit affermé.
Dans cet é ta t, & le 30 Septembre 1772. l’in
timé alîigna la dame Daldin , époufe du iieur Salv a g e , en la Juftice de Faverolle , pour rèconnoître fon écriture & fignature appofée au bas
du prélcnt bail par elle confcnti en fa faveur, iinon , pour voir dire & ordonner qu’elle feroit
tenue pour avérée & reconnue , & le même jour
l’intimé fit des faiiies - arrêts entre les mains
des fous-fermiers , en ce qu’ils n’eulfent à délivrer'
aucuns grains, foit au fieur Salvage, foitàlafem nie,
�à peine de payer deux fois ; & en même temps il
alligna la dame Raftinhacau paiement de la fomme
de 780 liv. ,1 «5 il à lui due par billet du 3 Septem
bre 177 1 , & le fieur Salvage pour autoriier fà
femme, afin qu’elle pût efter en Juitice , comme
auffi à ce qu’elle fut condamnée à lui reftituer deux
malles qu’il lui avoit prêté au mois de Novem
bre lors dernier, fmon à lui payer la fomme de
40 liv. pour la valeur d’icelles, ainiï qu’à lui payer
la fomme de 5«5 liv. if .p o u r dépenfes à eux faites
dans l’auberge de 1Intimé.
La dameDaldin, fur cette aflignation & à l’inftigationdu fieur Salvage, débuta par caraêtérifer fa
mauvaife foi, elle dénia fon écriture & fignature, ap*
pofées au bail dont eit queftion, ce qui donna lieu à
une premiere Sentence , qui ordonna qu’elle feroit
vérifiée par Experts;cette impofture donna lieu à un
incident, pendant lequel Salvage demanda à être
reçu partie intervenante; en coniéquence il demanda
la nullité du bail à ferme & du billet dont eftqueition , fondé , difoit-il, fur ce que l ’un & l’autre
avoit été fait en fraude & au préjudice de fon
contrat de mariage, & pour la iiïreté de ce q u ’ il
prétendoit lui ctre dû : il conclut à ce qu’il lui fut
permis de faire faiiir & arrêter des biens apparte
nants à fon époufe ; Ordonnance intervint au bas
de fa requête qui le lui permit. Mais ce qu’il y a de
bien fingulier , & ce qui démafque cet homme
c’eft que par a â e du 28 Septembre il fit iàiiir &c
arrêter entre les mains de l’intimé les meubles ¿k
�\ y.o
'
8
effets'qu’il avoit d’abord dépofé chez lui & fait
enlever lui-même pour les faire tranfporterà Mont
pellier, où il avoit d’abord projette de faire foii
léjour.
L ’Intimé défendit à cette demande , & démon
tra par une requête du xy Novembre la fraude &
la coiluiion qui regnoient entre le fieur 6C la dame
Salvage , qui preifée relativement à la négation
qu’elle avoit fait de la fignature , ne put pas fou*
tenir l’impoiture plus long-temps , & par un a â e
du i Septembre 1771 elle déclara que fa figna
ture appoféc au bas du bail étoit véritable , ainfi
que celle appofée au bas du billet.
En conféquence Sentence intervint le 7 Janvier
1773 en j ufticede Faverolle, qui la déclara fincere & écrite de la main de la dame D aldin, ÔC
jugea que le bail auroit force d’a â e public.
Fondé fur cette Sentence l’intimé ne chercha
plus qu’à s’aiïurcr ce qui lui étoit d u , en confé
quence il préfenta requête au Lieutenant Général
de M ontpellier, par laquelle il demanda qu’il lui
fut permis de failir &
C de mettre fous la main de
juftice tout ce qu’il découvriront appartenir à la
dite Salvagc ; Ordonnance intervint fur fa requê
te, qui lui adjugea ies concluions. En vertu de
l’ordonnance appofée au bas de cette requête, Flntimé informé que les fieur 6i dame Salvage logeoient chez la dame R encher, fit faifir ôc arrêter
quatre malles qu’ils avoient chez elle ; ces quatre
malles furent même déplacées, & Gabriel Lapierre,
�¿ 1*3
9
re , Bourgeois, tic la ville de M ontpellier, fut
nommé gardien ; mais ces précautions furent inuj
tiles, Salvage étoit fur les lieux ; on verra qu’il
iiibtiliia même les yeux de la Juftice.
Lacauib s’inftruiiit de part & d’autre en la J u s
tice de Faverolle, ou Sentence intervint le 9 Mars
1773 >q11* a-autoriic la dame Daldin , l’a condam
née à ratifier le bail à ferme dont il s’agit dans trois
jours, lequel temps paiTé, a ordonné que la Sen
tence tiendroit lieu de ratification, 6c dans ce cas
a permis de dépofer es’ mains d’un Notaire ledit
bail à ferme, lequel feroit exécuté tant pour l’an
née derniere, préfente, que pour l’avenir, a donné
a£te à l'intimé des offres qu’il avoit faites d’en
payer le prix aux termes convenus, a condamné
ladite Raitinhac à payer à l’intimé la fomme de
786 liv. 15 fols contenue en fa promeiïè du fept
Septembre 1771, comme auifi à lui reftituer deux
malles garnies de peaux de fanglier, énoncées 6c
défignées dans l’exploit de demande, dans trois
jours de la fignification de la Sentence à domicile,
finon à lui payer la fomme de 40 liv. pour la valeur
d’icelles d’une part ; celle de 55 liv. 2. fols pour
dépenfes faites à l’auberge de l’intimé d’autre ,
avec intérêts du jour de la demande, en affir
mant par lui que la police de bail à ferme 6c
la promeiïè dont il s’agit étoient finceres 6c vé
ritables 6c non faites en fraude , que le montant
de cette même promeiïè , ainii que celui des
m alles, lui étoient légitimement dus; 6c ayant
B
�IO
égard à l’intervention dudit Salvage, a ordonne
que le bail à ferme 6c promeiîè dont il s’a g it, enfemble les condamnations ci-deilus prononcées
contre la dame Railinhac , ia femme, en faveur
de l ’intimé n’auroient ni ne produiroient aucun
effet contre ledit Salvage, Ta déclarée préférée,
privilégiée à l’intimé fur tous les biens de la dame
Raftinhac 6c de feu iieur Michel ü a ld in , Ion
premier m ari, pour la lomme de 1100 liv. qui lui.
cil annuellement due , 6c que ladite dame de Ralîinhac s’effc conitituée en dot envers lui, dans leur
contrat de mariage du i er. Novembre 17.7 i , i’a pa
reillement déclaré privilégie pour les arrérages de
ladite fomme de 1200 1. s’il lui en eil dû, à la charge
par ledit Salvage d’imputer ce qu’il auroitreçu, 6c
pour parvenir au paiement de ce qu’il étoit ou lui
feroit d û , enfemble de ce qui étoit dû à l’in ti
m é, a ordonné que les fermiers feroient tenus de
payer 6c vuider leurs mains en celles de Salvage
& de l’intimé : a ce faire qu’il feroient contraints
par toutes voies, qu’à ce faire la dame llaftinhaC
feroic tenue de leur ' remettre les expéditions
des beaux, fmon qu’ils feroient autorifés l’un 6c
l ’autre à les retirer aux frais 6c dépens de la
dite dame Raftiiihac, dont il feroient rembourfés
fur le finple reçu du N o taire, comme aufîi
a ordonné que les quatre Malles , dont il s’a
git , faiiies es mains de la dame Rainchet à la
requête de Salvage , 6c enfuite faifies 6c dépla
cées à la requête de l’intim é, 6c dépofées chez Ga-
�.
ó^ s
ir
briel La'picrrc , Bourgeois à M ontpellier, feroient
représentées, & d’icelles pris , tiré & remis à Sal
vage les effets à lui appartenants & perfonnels,
dont diftra&ion lui eft accordée , lui en fait main
levée définitive, a ordonné que le furplus des
effets appartenants à la dame Raftinhac , enfen ble
les Malles feroient vendus en la maniéré ordi
naire; que le prix en provenant feroit délivré,
diftraâion ’faite des irais'de juftice à Salvage ,
& enfuite à l’in tim é, en paiement de leur du , fi
tant pouvoir abonder, fi non en diminution , à or
donné qu’à cet effet tons gardiens &" dépofitaires feroient contraints à faire ladite représen
tation & remifè’. par-toutes voies dues & raifonnabies , même par corps, quoi faifant valablement
déchargés furie furplus des demandes dcs-Parties^
elles o n tfété miles hors de Cour & ’ de procès ,
dépens compeniés entre Salvage & l’intim é, la
d a m e Salvage»condamnée en tous les dépens en
vers toutes les Parties.
ritablement dû. Quoi qu’il en; fo it, l’intimé fomtfia 'les freur
damef^Salvage- j par a$ê dii pre*
n i e r M ai 1 7 7 3 r de feurôuvèioà. ^Audience pour*
être préients^à 1-affirmation ordonnée y
qu'il en
tendait faire, & procellad’ircterjettêrappel de'cette Sentence auxehefs qui lui failbient préjudice, ni
B Z
�11
Salvage ni fa femme ne daignerent comparoître, &
Sentence intervint, qui donna a â e à l’intimé de ce
qu’il juroit & aiïirmoit que le bailÔc la promeilè
à lui confentis étoient iinceres 6c véritables,
Peu de temps après l’intimé préfenta requête
au Bailliage de Saint-Flour, par laquelle il conclut
à ce qu’il lui fut donné a&e de l ’appel qu’il inrerjettoit de la Sentence de Faveroîle du 9 Mars:
lors dernier; i°. en ce qii’elle accordoit la préfé
rence au iieur Salvage , quoique le bail & la
promeilè fuilent déclarés bons & valables.
En ce que la vente de 4 malles iàifies à
Montpellier avoir été ordonnée purement & fimplem ent, & fans qu’il fut dit que les Parties ieroient préfentes ou duement appellées.
Et 30. enfin en ce quelle n’ordonnoit pas que
Salvage feroit tenu deIrendre compte des objets
par lui touchés & perçus ; comme aufli , à
ce qu’il lui fut permis de faire aiïigner en air
fiitance de caufe les nommés Tournelle , fer
mier du domaine de Faveroîle y, Jean G ibrat,
fermier du domaine de Lair ,
Jean Bou
cher , fermieri du ’ domaine de Hanvet , pour
voir dire qu’ils feraient tenus de juitifier de
leur quittance du prix de leurs baux de l’an»
née 1772/, finon fe voir condamner à-yuider leurs
majns^en celles, de l’intim é, tant pour ladite an
née que pour les années à venir
pendant le
cours de leur bail ; au furplus il demanda la con1
�firmation de la Sentence aux diipofitions qui con^
cernoient la dame Salvage.
. Au bas de cette requête intervint- Ordonnance
qui, en recevant appel de l’intimé, lui permit d’inti
mer fur icelui qui bon luifembleroit; la caufe s’y in f
truifit & les moyens refpeâifs des Parties y furent
développés avec la plus grande netteté & ,ayec
la précilion qui câractérife les ouvrages, des Avo
cats, de ce Si.cge, & Salvage bien connu y iubit le
jugement auquel il devoir s’attendre ; Sen
tence intervint, qui en ce qui touche l’appel in
terjette par la dame Salvage, autorilée en Juftiçe
par Sentence de Favcrolle du 9, Mars dernier la
dit qu’il avoit été bien, jugé par ladite^Sentencc' *
mal appellé, a ordonné qu a cet égard elle feroit
exécutée félon fa forme & teneur, p. condamné
la dame Salvage,en l!ainende & aux dépep?., &
iaifant droit fur l’appel interjettépar C onord(c’eiï
le nom de l’in tim é )d e cette même Sentence, en ce
qui regardoit la préférence adjugée audit Salvage,
»? a dit qu’il a mal jugé à cet égard , bien-appellé,
» emendant &: faiiànt. ce que le JugeZ/dont
appel auroit dû - fa ir e } . a fordonné.que^fur
» prix & grain de l’afferm&’de '177W ou autres
v objets faifis à la requête .de.,Conord, il feroit
».payé par■■1Bçivilçgçr,& préférence df laj fo ÿm e
^ d e v786,Jiv.;;i 5^ fois; portée ^ l a ^ r o m e f ï e du
» y Nqy(embr,c;, ij77:i, avec intérêts p^l ’que, de
tt droit, a.condamné le fieur Salvage 'aux dépens
à ion egrè rd ; &JFailant également droit ïu r la de*
�14
mande en affiftance de canfe
formée par les fieurs
Tourrete., Boucher 6c G ibrat, a mis les Parties
hors de C o u r, :*en affirmant cependant par cha
cun defdits fermiers 'que les quittances qui leur
ont été données par la dame Salvage le 18 Sep
tembre lors dernier, étoient iinçeres & véritables,
6c qvie le, tout aVoit été payé à l’époque des quittan
ces,'dépens compeniés entre Conord & lesfermiers,
que ce premier pourroit employer en frais & miie
d’exécution, ôc les fermiers en trais de laifie-arrêt :
a ordonné que le bail du 3 Juin 1771 feroit exé
cuté 4 eîdn la ‘forme; 6c teneur j a fait .defenfei
aux fermiers de payer-pendant la durée d ’icelui
1-e prix des" g r a i n d e leur bail à d’autres qu’à
Ç onord, à peine de tous dépens, dommages ôc
intérêts, a, condamné la dame Salvage à payer
ÿ r.Iqtimé l’excédant à quoi pourroient fe porter
I‘es grains fuivant l’évaluation de l’année 1772- ,
6c a condamné les fieur 6c dame Salvage aux dé*
pens:
- LTntiffié fit fignifier cette Sentenceauxfieiir 6c
danie Salvage i^C aux Sous-fermiers, afin qu’ils
'n,ert4 gnbrartènt,' 6cpâr c*!plojit du 14. dudit rnois
de Septembre \ il fit' affigner lefdits Gibrat ,
Boucher 6c Tourrete pour faire l’affirmation ordpViÏÏéepiir la1'Sentence dbnt noirè vénotns:de rappor
ter les'cÎifpoii'tiobs ,.6c les fieur 6c Jdalne'Saryage:7
pôur'y’ ê^ré p ré fe ts fr'bon l.eùif içrhbloit. 1
1 Dans ¿'et état les ficur 6c damé Salvage fé font
pourvus; en la C o u r , 6c fur requête non corn-
�^ *
muniquée y ont obtenu A rrêt, qui en les recevant
Appel iants de la Sentence du Bailliage cíe S. Flour,
a proviioirement ordonné que les Fermiers feroient1
tenus de vuider leurs mains en celles dudit S a lv a je,
l ’intimé dès-quil en eût connoiilànce y forma
oppoiition; mais fans y avoir égard , le fieur Salva
ge, en vertu de ce même Arrêt, enleva de force tous
lesgrainsqui faifoient laiureté de la créancedePintimé 6c l’objet de fon bail à.¡ferme.
C ’eil: ainii que la cauiè s’eil. engagée en la Cour
ou la dame Salvage a donné une requête, par la
quelle elle a prétendu que le-b ail à ferme q u i
fait le titre de l’in t im é lu i avoitété confenti pendant
ion fécond mariage-, qu’il étoit niil , ainii que la
promeiïe de 786 livres i<j fols , qu’on ne devoit pas avoir égard à jiléate, de cet a&c & (de
cette promeiïe ,' que celle du'"Contrôle fàifoit
feule la loi ; en conféquence elle a conclu à ce
que les Sentences’dè Faverolle & ’ de Saint-Floùr
fuiîènt infirmées, & à ce que le bail 6c 'la promeilè dont eft queftion fuifent déclarés. nulsJ&
cle nul effet.
Le même, jour le fieur. Salvage, Tous *îe nom
¿ ’un autre défenfeur, a donné de fon'côté une
r e q u ê t e , par laquelle il a beaucoup argumenté de
fon contrat de! mariage ; comme' fa femme il a
prétendu que le bail 6c la promeiîè que¿ rapporté
l’intimé avoient été antidatés:, en conféquence il
a concilia ce que l’appellation 6c ce dont eft ap
pel fut rais au néant, émendaiu à ce- qu’i l f u t
�1 6
ordonné que la Sentence de Faverolle du 9 Mars
fut exécutée félon fa forme & teneur, & à ce
que l’intimé fut condamné aux dépens.
. ■Tels, font les faits de la caufe dont on anroit
voulivéviter le long détail à la Cour, s’il ne nous
av.oit paru d’un grand fecours pour faire percer
la vérité à travers le dédale que lui offre par
tout le menfonge dans cette affaire ; l’on voit à
chaque pas la boiine foi luttant fans ceiTe contre
la rufe & l’artifice; mais les efforts des fieurs &c
dame Salvage feront auffi impuiffants qu’ils l’ont
déjà été devant les Juges de : Saint-Flour. Pour
donner quelqu’ordre à nos moyens, nous allons
les divifer en deux propofitions.
P R E M I E R E PROPOSITION.
B ien ju g é de la Sentence du B ailliage dû' SaintFlour. Réfutation des objecîions de la dame
_ Salvage. .
y , _
L a dame Salvage ayant follicité l’intimé de lui
affermer. 105* fetiers de fcigle, & lui ayant confenti en con férence un bail à ferme pour raifon
de ce même grainra raifon de 16 livres le fetier,
ne peut* revenir aujourd’hui contre cet a& e,qui
d’ailleurs a reçu fon exécution , puifque l’intimé
a perçu la premiere année les objets à lui affermés;
que d’un côté cette dame a reçu 400 livres d’épin-
�¿4/
17
gles qu’il ctoit convenu entre les Parties que Pintimé'lui donneroit, & que de l’autre l’intimé lur a
avancé une femme de 300 livres iur le prix de
la premierc année de l’objet de Ton bail. Il cft
entièrement écrit de la main de cette Dame &;
fcellé de fa fignattire : par quelle bizarrerie viencelle aujourd’hui défavouer un aQc qui eft ion
propre ouvrage ?„ mais, dit elle, cet a&e a été fait du
„ temps que j’étois en puiiïànce de mari;la date du
,, contrat doit en faire fo i, & c’eft cette même date
„ qui doit faire l’époque à laquelle les conventions
„ ont été laites. „
Cette objeâion eft bien miférable, & où la
dame Salvage a t-elle appris qu’on ne croyoit plus
à la date fouferite au bas des a&es par lcfqucls les
hommes fe lioient, mais bien qu’on s’en rapportoit à
celle du Contrôle toutes les fois qu’il naiiîoit des con
te dations par rapporta l’époque où ils étoient paiîes •
elle ignore donc que les aftes fous feing privé
font exécutés des 20 , 30 & 40 ans entiers, fans
interruption , fans qu’on foit dans la néceflité de
les faire contrôler, on n’en vient là que loriqu’il naît:
des conteftations entre les Parties, & que l’une
d’entr’elles fe refufe de remplir les engagements
qu’il a pris dans un aâe privé, alors l ’on le rend
public & authentique,-& pour cela on eft forcé
de le faire contrôler j c’eftce qui eft arrivé dans
notre efpece ; dans le cas contraire on fe difpenie
de ces formalités, &. les conventions n’en font
pas moins férieufes & exécutoires.
C
�%
*•
i8
Le bail à ferme confenti par la dame Salvage
a pour date le n
M ai 1 7 7 1 , le billet foulcrit
en faveur de l’intimé par cette même femme
eft du 11 Septembre fuivant, elle a pu prendre
fes engagements &; conftituer ces obligations,
elle n’étoit pas. en puiiïànce de m ari, ni fous
l ’autorité de perfonne ; elle jouifioit de fes droits
tant patrimoniaux que de ce dont elle avoit
hérité de fon mari ; elle eft donc non recevable
& mal fondée lur l ’appel qu’elle a interjetté de la
Sentence du.Bailliage de S. F lo u r, qui a ordonné
l’exécution du bail dont eft queftion , & le paie
ment du montant du billet par elle foufent au
fieur C onord; mais celui-ci lui rend juftice, il
n’attribue les démarches qu’elle a faite depuis le
premier a&e dans( cette affaire ]u(qu’aujourd’hui
qu’au fteur Salvage, qui lui a d iâ é fon rôle, &
qui lui fait tenir tel l’engage qu’il veut.
Les fervices multipliés que l’intimé a rendu
à la dame Salvage méritoient une recompenie d’un
genre différent,* elle fait mieux que pcrlbnne qu’il
eft incapable d’avoir antidaté le bail dont il
s’a g it, elle lui a rendu dans tous les temps la juftice
qu’il méritoit; pourquoi la lui refuie-t-elle au
jourd’hui? il ne s’eft cependant jamais démenti;
* L’Intim é a vin g t lettres dans fo n fac, écrites par. la dam e
D a ld in , par lefq uelles l ’on v o it qu’elle ne fe lafibit pas d ’im
p o rtu n er le fieur C o n o rd dans fes befoins , & que celui-ci lui
a rendu tous les fervices qui on t dépandu de lu i aveç le plus
gran d défintéreflem ent.
�1
9
*
fa probité efl: toujours la même , toujours inta&e ,
& à l’abri de tout reproche ; fi le bail n’eût pas été
fincere, l’intimé eut-il perçu la premiere année
les objets à lui affermés ? la dame Daldin l’eûtelle permis? ne s’y feroit-elle pas oppofée ? l’i n
timé auroit-il donné 400 livres d’épingle? auroitil avancé 300 livres fur le prix de la ferme? tous
ces faits avoués n’amenent-ils pas à la preuve
que le bail eft véritable & fincere? » mais les quit» tances que vous avez donné ( d it cette femme)
n prouvent que vous n’avez perçu que comme mon
» régiffeur.
La dame Daldin n’a pu faire fans doute cette
allégation férieufement. L ’Intime, dont la fortune
acheteroit trois fois celle de fes Adverfaires, a d’oc
cupations plus férieufes, & ne s’amufe pas à gérer
les affaires d’autrui. L ’exploitation de ces hérita
ges (Scle.commerce étendu auquel il iè livre dans fa
Province ne lui ont jamais laiifé le temps d’être le
.régiffeur de la dame Daldin. Il aété fon voifm, fon
am i, & comme tel il l ’a obligée très-fouvent, elle
lui a propoié une ferme de io<> fetiers fèigle, il l’a
acceptée, il l’a exploitée la première année, non
comme régiffeur, mais comme fermier, fuivant l’ufage de la haute Auvergne, pour éviter de payer
3 0 0 liv. de capitation, fournie à laquelle il aùroit
été impoié indépendeniment de celle qu’il payoit
déjà, ila donné quittance comme régiffeur, en eft-il
moins le fermier des objets qu’il percevoir ? Son
bail ôc laiicérité de cet a£le dépend t-il de la quaC 2
�I\
y*\
10
lité qu’il a pu prendre dans les quittances qu’il a
d o n n é e s n o n aiïurément, & s’eft s’accrocher 011
l’on peut que de donner l ’être à de pareilles ob*
je&ions : d’ailleurs la dame Daldin devoit d’autant
moins fe permettre d’en faire de pareilles, que tel eft
l’ufage de tons les fermiers de la haute A uvergne,
& qu’en cela l’intimé n’a fait que s’y conformer.
Lorfque la dame Daldin a prié l’intimé de p a t
fer avec elle un â&e fimulé , tel que la vente des
400 pieds d’arbres, il n’en a point fait un myfte re , il n’cn a point fait ufage , & il en eft con
venu ; telle a été fa conduite par rapport à la vente
des arbres dont il s’agit ; mais ce qui prouve démonftrativement que le bail à ferme des io«j fetiers
feigle eft véritable ôcfincere, c’eft fa date, c’eft l’ex
ploitation qu’a fait l’intimé la premiere année des
objets à lui affermés, c’eft l’argent qu’il a avancé
fur le prix de cette ferme, & enfin les réfervesqu’il
a fait dans la contre-lettre qu’il a donné pour l’anéantifîement de la vente des arbres dont on a
parlé, & dans laquelle l’on voit qu’il s’eft expreflément réfervé l'on a&ion & fes droits concernant
fonbail à ferme, & concernant le billet de 780
liv. 15 f. confenti en fa faveur, parce que réelle
ment ces a&es font finceres, &: qu’il a prêté cette
fomme à la dame Daldin ; ce qui fuiîk pour juilifier le bien jugé de la Sentence du Bailliage de
Saint-Flour, ik pour déterminer la Cour à la
confirmer.
�21
SECONDE .PROPOSITION,
B ien ju g é de la Sentence de Saint-F lour, en ce ;
q u eu e infirme celle de F averollequi avoit accordé
a Salvage unprivilege &préférence f u r TIntimé.
Les Juges de Favcrolle,’ en adjugeant le privilcge au iïeur Salvage fur l’intimé , ont jugé con-.
tre les principes, & ont autoriié l’expoliation qu’il
s’eft permife ; l’appel qu’en a interjetté le iieur
Conord eft des mieux fondé. Il eft créancier de la
dame Salvage de la fomme de 786 liv .. 1^ fols, 1
ainfi que le prouve le billet qu’elle a iouicrit de
^ette fomme en faveur de l’intimé ; elle a contrac
té cet engagement dans le temps qu’elle étoit veu
ve & qu elle l’a pu valablement : fi la Cour pou
vait admettre le fyftème de Salvage, il;en réfui- u
eroit que l’intimé perdroit fà créance,« parce que
>alvageeft dénué de tout, & que d’ailleurs la claue de ion contrat de mariage eft ¿faite, en fraude
le la loi & dans la vue de faire perdre aux créaniers de la dani£ S a lv a ^ c e quiwleur^eft légitime
ment d û ; mais on va plus loin, en iuppofant que
>alvage put être préféré pour la iomme de 1200
ivres à l’intim é, en réfulteroit-il que celuii ne put jouir de fon bail ; Salvage auroit feuement l’a&ion
de fe pourvoir en faiiie-arrêt entre7 1 .
.»
es mains de l’intimé qui les vuideront valablement
■n celles de Salvage jufqu’à concurrence^ la fom- r
«*> -
.
•-*-
.............- i
’ > •».*
....................................
.........................
____ „ £
�oài
v \*i
11
me de 1200 livres qui lui font alloués fur le prix
de fa ferme ; mais il n’en feroit pas moins vrai que
Salvage n’a pu s’approprier pour près de 1oooo
livres, en faifant vendre , foit le grain qui étoit
affermé à l’intimé , foit d’autres denrées dont il a
fait fa main pour s’affurer 1100 livres, &
que les vexations qu’il s’eft permis en vertu d’un
A rrêt fur requête , & nonobftant l'oppofition
qu’on y avoir formée , font repréhenfibles &
doivent lui mériter l’animadverfion d e la C our, à
la prudence de laquelle l’intimé s’en rapporte
pour raifon des dommages & intérêts qu’il a droit
de réclamer, provenants de l’inexécution qu’à eu
jufqu’ici le bail à ferme, fur les objers duquel il
avoit compté. Le Tribunal éclairé , devant lequel
eft foumife la conteftation, ne manquera pas de
les apprécier à leur jufte valeur, d’en adjuger à
l’in tim é , relativement à la perte que lui a occafionné la fufpenfion de l’exécution de fon bail , &
de confirmer la Sentence du Bailliage de SaintFlour dans tous fes Chefs.
'«A-'
»
D u
.
g
as
, Procureur.
-,
«
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
De l ’ Imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du R o i, Rue S. Genès, près l ’ancien M arché au Bled. 1 7 7 3 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Conord, Jean. 1773]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dugas
Subject
The topic of the resource
successions
secondes noces
actes sous seing privé
bail à ferme
fraudes
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean Conord, marchand, intimé. Contre les sieurs et dames Salvage, appelants
Table Godemel : Billet sous seing privé : Un acte souscrit sous signature privée par une veuve, héritière de son mati, peut-il être annulé après son convol à de secondes noces, ainsi que les cédules ou billets qu’elle a souscrits pour de l’argent qu’on lui a prêté, sur l’allégation que l’acte n’aurait été fait que pendant le second mariage et en fraude des droits de l’époux ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1773
1771-1773
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0431
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Val-d'Arcomie (15068)
Faverolles (15068)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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actes sous seing privé
bail
bail à ferme
fraudes
secondes noces
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53955/BCU_Factums_B0116.pdf
04f31eb2c9f0fa6f6fb5ee71b804499d
PDF Text
Text
M E M O I R E
POUR
M e P i e r r e A n d r a u d , Seigneur de Parpaleix ,
C onfeiller au Siege P réfidial de Clermont-F errand, I n t i m é
C O N T R E
M e M
L
le fieu r J o a c h i m D
a y et ,
escoroles ,
E cu yer,
&
N otaire , Appellans.
A décifion du procès dépend du fens que l’on doit donner
à une claufe contractuelle, & en derniere analyfe de l’a cc ep
tion d’un mot.
U n article de la Coutume d’ Auvergne déclare la fille mariée
du vivant de fes pere & mere forclofe de toutes fucceffions
au profit des mâles ; mais un autre article de cette même C o u
tume , permet au pere de déroger à l’exclufion de la l o i , de
l’anéantir ou de la limiter à fon gré.
Toutes les Parties étant
d’accord fur cette
pere , il s’agit uniquement de f a v o i r ce
voulu.
que
faculté du
le pere a
Jean G o d i v e l , vivant fous l’empire de la Coutume d’ A u
verg ne, a ftipulé qu’ Antoinette God ivel fa fille feroit forclofe,
m ais que la forclufion n’a uroit lieu qu’au profit des freres ger
mains feulement. A-t-il voulu que la renonciation fût reftreinte,
relativement aux freres confanguins ? ou n’a-t-il entendu donner
A
�aux premiers qu’une firnple préférence? la particule feulement
eft-elle un terme limitatif ? Annonce-t-elle une reilriilion ? ou
faut-il, en renverfant toutes les notions à cet égard , décider
a v é c les iîeurs Deicoro!es & M a y e t , que les mors >feulement
& préférablemtnt font deux termes fynonimes ?
T e l l e efl la premiere queftion fur laquelle il s’agit de pro
noncer.
La f é c o n d e , également fimple , eit de fçavoir fi le fieur
Andraud a pu acquérir les droits de différens cohéritiers dans
la fucceifion d’une parente commune, & fi ces d roi ts , légiti
mement acquis
7 doivent
lui être confervés.
F A I T .
Jean G o d i v e l , bifaïeul des P a rt i es , vivant en 1 6 8 4 , fut
marié deux fois. Il eut de fon fécond mariage fept e n fa n s ,
trois mâles &
quatre filles. L e premier ne lui en avoit donné
qu’ un , c ’ étoit un garçon, nommée Henri Godivel*
D e concert a v e c Magdeleine de M â c o n , f a fécondé fe m m e ,
il m a r i a , le 27 Mai 1 6 8 4 , Antoinette G o d i v e l , l’une de fes
filles.
Il eût p u , par le contrat de m a r ia g e , la réferver à tous fe»
droits. H lui étoit permis de déroger entièrement à la Coutume
qui prononçoit la forclufion * il fe borna à en reftreindre l'effet»
Antoinette Godi vel avoit des freres germains; Jean G o d i v e l
&
Magdeleine de M âco n voulurent que la forclufion eût lieu
à leur égard ^ mais ils voulurent en même tems que cette
forclufion ne pût profiter, en aucune maniéré, à Henri G o
divel , fils du premier l i t , qui étoit étranger à Magdeleine
de Mâcoh ,
qui avoit recueilli feul toute la
fucceffiorc
d’ Anne Andraud fa m e r e , premiere femme de Jean God ivel*
�3
En conféquence la claufe de renonciation fut conçue en
ces termes : « La future époufe ( Antoinette ) renonce à toutes
w fucceffions directes & collatérales ; mais elle y renonce au
» profit de [es freres germains s e u l e m e n t ».
Parmi les freres germains , le feul qui fût marié étoit Guil
laume Godi vel. Sa branche vient de s’éteindre dans la perfonne de Catherine Godivel fa derniere fil le , décédée au mois
de Dé cembre 1783.
Il s’eft trouvé pour recueillir fa fucceflion, d’ une p a r t , les
defcendans de Henri G o d i v e l ,
f re re
confanguin de Guillaume;
de l’autre, les defcendans des quatre fœurs germaines de ce
même Gu illaume, parmi lefquels on doit compter le iîeur
A n d ra u d , arriéré petit-fils d’Antoinette.
Il ne pouvoit plus être queftion de la renonciation de celleci , puifque cette renonciation n’avoit été faite qu’ au profit
des freres germains feulement, & qu’il ne fe trouvoit pas un
individu defcendant des freres germains; aufli les différens
cohéritiers n’ont-ils f a i t , à cette é p o q u e , aucune difficulté
d’admettre le fieur Andraud en concurrence ave c euv.
D ’abord ils l’ont nommé l’un des dépofitaires folidaires de
l’argent & effets trouvés fous les fc ell és , montant à une fomme
de 30221 livres.
Enfuite, lorfqu’on a procédé au partage de cette f o m m e ,
le fieur Andraud eft entré dans ce partage , fait fous fîgnatures
privées le 6 Février 1 7 8 4 , & il y a été dit exprefiément « qu il
» étoit héritier en partie de Catherine Godivel j q ui l agiiToit
« auffi comme fubrogé aux droits des fieurs Admirât S ey m ie r,
MPrêtre, & Admirât S ey m ie r, B o u r g e o i s , & encore à ceux
Mdu fieur Gi lb e rg u es , Prêtre ».
En effet, les fieurs S e y m i e r , formant ave c les fieurs Defcoroles & M a y et la branche de Henri G o d i v e l , avoient vendu
A 2
�4
leurs droits fuccefiifs au fieur Andraud, par a£te du 7 Janvier
1 7 8 4 ; & le iîeur Gilbergues avoi: cédé les fiens par un a i l e
du 17 du même mois. Le prix des acquifitions s’éievoit en t o - ‘
talité à près de 36000 livres.
Tour cela a été reconnu dans le partage du
6 Février;
le
fieur Andraud y a été admis, tant pour les droits dont il étoit
ceiïïonnaire, que pour fes droits perfonnels dans la fucceifion ;
il a concouru à toutes les opérations. Il a été dit que c’étoit defon confentement qu\ine fomme de 2400 livres étoit dépofée
chez un Notaire ; enfin , iur l’argent comptant, il a r e ç u , con
jointement av ec la dame de Maliargues, une fomme de 3600 L
fous les yeux & du confentement de tous les cohéritiers.
C e n’eft pas tout encore. Non-feulement les fieur D e f c o rôles & M a y e t ont admis le fieur Andraud com me héritier de
fon c h e f , & comme ceiîionnaire des fieurs Seymier &
Gil»
b e r g u e s , mais eux-mêmes, au mois de Dé cembre 1 7 8 4 , après
le partage des meubles trouvés dans une maifon de la fucceffion , ont vendu au fieur Andraud leur part & portion fur ces
meubles. Ils ont donc reconnu la qualité qu’ils conteilent main-tenant au fieur A n d r a u d , puifqu’ils prétendent que pour avoir
droit d’acquérir, il faut être du nombre des héritiers.
Cependant ces A d v e r f a i r e s , e n contradi&ion m an if ed ea ve c
e u x - m ê m e s , a voi en r, par un exploit du 3 Février 17 84 , formé
une demande en fubrogàtion contre le fieur Andraud , relati
vement aux droits par lui acquis deslieurs S ey m ie r, & le 9 du
même m o i s , trois jours après le partage , ils avoient demandéégalement à être Subrogés aux droits vendus par Je fieur Abbé
Gilbergues.
Par une fuite de cet étrange f y f t ê m e , ils ont foutenu, dans-«
une Requête préientée en la Sénéchauflee de Clermont le 23.
Mars fujvant, que le fieur Andraud n’avoit pu paroître dans le
�5
partage y ni comme héritier de Ton c h e f , ni comme ceilionnaire des fieurs Gilbergues & Seymier. Sur ce fondement iis
ont conclu « à ce que le fieur Andrjivid , comme repréfentant
» Antoinette Go d iv el ,ju t. exclus de la. ju cu ffion conrentieufe j
» q u ’il fût ordonné que la portion qu’il avoir, pnfe am partage,
» appartiendroit par droit d’accroiflunent à eux fieurs M a ye t &
» D ef co rol es, & aux autres portions héréditaires de leur bran» che ; en coniéquence, & attendu ( fuivant ç u x ) que.le fieur
» Ar.draud fe trouvoit étranger à la iucc/uTion , , q u ’il.s fuflent
» fubrogés aux droits par lui acquis des fieurs G i lb e r g u e s '&
» autres ».
Il n’a pas été difficile au fieur Andraud d’écarter ces pré
tentions.
,,
En premier li eu , il a démontré qu’Antoinette Godivel n’a voit
point été forclofe au profit de Henri G o d i v e l , ion frere confanguin. « La Coutume d’A uvergn e , a-t-il d i t , permettoir au
» pere de faire cefler l’exclufion en totalité, ou de la modifier
» par une réferve ; il n’y a que fa volonté à confulter » ; or , de
bonne-foi, eft-il poifible d’avoir le moindre doute fur la réferve,
lorfque la claufe contenant la renonciation p o r t e , en termes
expres t que cette renonciation aura lieu au profit des itères
germains feulem ent?
En deuxieme lieu, le fieur Andraud a établi que même dans
l ’hypothéfe ( fi évidemment fauffe ) où l’on pourroit regarder
Antoinette G o d i v e l , fon aïeule, comme forclofe , relativement
à un frere confangu:n , quoiqu’il eût été dit dans fon contrat de
mariage que la forclufion auroit lieu au profit des freres gervnzms feulement, il lui reiteroit encore des droits très ré els, fur
la fucceflion contentieufe , attendu qu’il avoit acquis ceux de
difFérens cohéritiers dont les titres n’étoient point conteftés, &
que ia demande en fubrogation formée par fes Adverfaircs,
nétoit foutenable à aucun égard.
�6
Enfin le fieür Andraud a prouvé que les fieurs M a y e t &
Defcoroles étoient non-recevables à prétendre qu’il dût être
exclus de la fucceffion, par la raifon qu’ils l’avoient déjà admis
au partage de différens objets de cette même fucceffion , &
avoient traité av e c lui comme ave c un véritable & légitime
héritier.
A ces moyens fi décififs, les fieurs Defcoroles & M a y e t
n’ayant oppofé que des fophifmes, les premiers J u g e s , bien
Convaincus que la réferve exprimée dans le contrat de mariage
d ’Antoinette Go d iv el ne pouvoit être anéantie, ont j u g é , c o n
formément à cettere ferve , que les defcendans de Henri G o d i
v e l ne devoient pas profiter de la renonciation , & en conféqu e nc e , par Sentence rendue fur produ&ions refpe&ives le
6
Juillet 1784 , ils ont« débouté les fieurs Defcoroles & M a y e t
» de leurs demandes, & les ont condamnés aux dépens ».
Notre o b j e t , djns ce m o m e n t , eft d’établir que cette Sen
tence , dont les Adverfaires ont interjetté appel en la C o u r , eil
conforme à l’équité , au texte & à l’efprit de la Coutume fous
l’empire de laquelle elle a été rendue.
M O Y E N S .
■
" Le fyilêirie des fieurs M a y e t & Defcoroles ayant deux par
ties, la défenfe du fieur Andraud doit en avoir deux également.
Ces Adverfaires prétendent que le fieur Andraud n’ eft point
héritier de Catherine G o d i v e l , & que par une conféquence de
cette propoiition , ils doivent être fubrogés aux droits par lui
acquis de diiFérens cohéritiers. Nous démontrerons, i ° . que la
qualité d'héritier de Catherine Go d iv el ne peut être contefiée
au fieur Andraud , à moins qu’on ne conteile l’évidence m ê m e ;
i ° . Q u e fous tous les rapports , la demande en fubrogation
formée contre lui eil abfolument infoutenable.
�7
s.
Ie'*
L e fieur Andraud efl-il dans le nombre des héritiers légitimes de
Catherine G od iv el ?
Sur quei prétexte voudroit-on écarter le fieur Andraud de
la fuccefîion dont il s’agit ? Sur ce qu’on prétend qu’ Antoinette
G o d i v e l , fon aïeule, a été fo r d o fe , fans reftriélion, de toutes
fucceifions directes & collatérales, & que par une fuite néceffaire dè cette forclufion, les ^defeendans d’ Antoinette n’ont
pu avoir, de fon c h e f , aucun droit fur ces mêmes fucceifions,
foit directes, foit collatérales.
C e prétexte, qui fera l’unique bafe du fyftême des Appel
o n s , eft de toute fauffeté. Antoinette G o d i v e l ne s’eft point
trouvée forclofe, fans reftri&ion ; il eft évident au contraire,
que la forclufion étoit reilreinte, & qu’elle l’étoit de maniéré
à ne pouvoir profiter à ceux qui en réclament 1’efïet aujourd’hui.
C/eft la loi du pays qui prononce la forclufion ; c’efl: le pere
qui peut réferver à fa fille les droits que lui donnoit la nature.
Ouvrons donc la Coutume d’ A u v e r g n e ,
pour connoître lai
difpofition de la Loi ; ouvrons le contrat de mariage d’Antoi
nette G o d i v e l , pour favoir ce que fon pere a voulu.
L ’article 25 de la Coutume d’Auvergne eft ainfi conçu :
« Fille mariée par le p ere, ou par l'ayeul paternel, ou par un
» tiers ou cPelle-même, lefdits p ere, ou ayeul paternel
mere
» vivans, douée, ou non , ait quitté, ou non, elle, ne Jes defeen» dans, ne peuvent venir à (uccejjion de pere, mere , frere^Jœur,
w ne autre quelconque , directe t ou collatérale , tant qu i l y a mâley
» ou defeendant de mâle , héritant efdites fuccejjions, fo it ledit
M defeendant m âle, ou femelle.,, finon quelle fû t mariée en pre•
» mieres nôces en la maifon de fefdits pcrej>u a y eu l, ou l'un d 'eu x.
�8
m
fa n s con{lituùon de d o t , auquel cas n e f l forclofe defdites Juc -
» cejjions ».
C e t article efl d’une rigueur fi ex trême, que s’il n’étoit mo
difié par un autre, dont nous parlerons dans un moment, il
feroit impoflible de ie' tolérer.
Les Auteurs qui ont écrit fur cette matiere ont penfé que
l’ ufage d’exclure les filles de toutes fucceifions dans la province
d’ A u v e r g n e , avoit été pris des anciens Germains, parmi lefquçls les filles n’ héritoient ni de leurs p er es , ni de leurs freres ;
mais ils ont remarqué une circonftance qu il efi: bien important
defai fi r, c’efl que chez les Germains, les filles n’avoient nul
befoin de d o t , les maris u’en exigeant point ( i ) . Il n’en efi pas
de même en Auvergne. Les Habitans.de cette Province ne
prennent pas leurs épouies fans dot : d’où il réfulte que la même
loi, f a g e & fans inconvénient chez les Germains,feroit barbare
dans nos mœurs.
A la prendre i i o l é e , &
fans modification, l’exdufion des
filles a paru une loi fi rigoureufe à D u m ou li n , qu’elle lui a fait
dire, qu’on prétention., en A u ve r gn e, que le mpt enfans, ne
cornpreno.it pas les filles. D icutu quod in A rverniâ, appellalippe liberoràm^ non venlunt fa m in e , cjuœ non computantur fu b
vulgari, enfans (2).
En un mot,toutesles confidérations générales, toutes celles de
l’équité & du droit naturel /eroient pour la reftriftion de la ford ufion des filles, fi cette forclufion n’étoit modifiée & reftreinte
par la loi même qui la contient. Mais afin qu’on ne croie pas
que pour la défenle du fieur A n d r a u d , nous avons befoin de
ces confidérations générales, nous nous hâtons d’obferver que
c e fi: par les termes de la C o u t u m e , & dans le fens le plus
*»■ »
1 1—
1 ■1
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-------------
1 —
—
( 1 ) T a c i t e , de morib. G e r m a n . C a p . 8.
( î ) C o n fu lt a û o n 5 6 , n ° . a ? .
rigoureux
�rigoureux qu’on voudra leur donner, ( pourvu qu’on ne les
dénature pas ) que le fieur Andraud veut être jugé.
L ’article 25 de la Coutume d ’ Auvergne prononce la forclu
sion dans les termes que nous avons rappellés ci-deffus; 11 n y
*3
à cet cgard aucune difficulté ;■mais ce qu’on ne peut aufli
nous contefter, c ’eft: que l’article 27 de cette même Cou tume
porte en termes exprès, que le pere , en mariant (a fille, en
premieres n o c e s , peut lui réferver tous fes droits fuccejjifs.
« L e pere &
autres afcendans, en mariant en premieres
» noces leur fille & autres delcendans en droite l i g n e , peuvent
»> réjerver à leurdite fille & autres defcendans en droite lig ne ,
» droit lucceflif de pere , mere & autres leidits parens ». V o i l à
Comment eit conçu l’article 27.
La difpofition importante que contient cet article n’eft pas
équivoque. L e p e r e , en mariant fa f i lle , a la faculté de lui
réferver tous fes droits, malgré la forclufion prononcée par
l’article 25 ; il peut donc les lai réferver en partie. Il peut
mod if ie r, reftreindre la renonciation , puifqu’il pourroit la
rendre abfolument nulle. C a r qui peut le plus peut le moins.
C ’eft une vérité qui n’a pas befoin d’être prouvée.
D ’après c e l a , il eft évident que la queftion fe réduit à fa v o i r ,
ii Jean G o d i v e l, en mariant Antoinette G o d i v e l fa fille, & lui
faifant ftipuler une renonciation , a voulu que cette renoncia
tion fût générale & a b i o l u e , qu elle profitât indiftin&emenc
à tous les enfans d’ Antoinette, ou fi au contraire, la forclufion
a été reftreinte.
Pour décider cette queftion, il fufïira, ainfi que nous 1 avons
d i t , d’ouvrir le contrat de mariage d Antoinette G o d i v e l , &
d ’y lire la claufe relative à la forclufion.
C et te claufe eft ainfi co nçu e: « moyennant ladite conftitu“ tlP n , la future époufe renoncera , de l’autorité du futur
B
�10
» é p o u x , à toutes fucceiïïons dire&es & collatérales, au prb*
» f i t de fe s freres germains s e u l e m e n t ».
Q u ’on écarte pour un moment tout intérêt perfonnel, &
qu’on nous dife s’il peut y avoir le moindre doute furia reftriction j le p er e, q u i , comme on eft forcé d’en c o n v e n i r , avoit
le droit de limiter l’exclufion de fa fille, a dit en termes ex
p r è s , que cette exclufion auroit lieu au profit des freres g e r
mains feulement', cela ne fera pas v r a i , fi les freres germains
ne font pas les fe u ls.qui en profitent, fi l’exclufion doit pro
fiter encore; à un frere ccnfanguin & à fes defeendans. C a r
fans doute on ne peut pas prétendre qu’une difpoiition ait lieu
en faveur d’une perfonne feulem ent, fi elle a lieu en faveur de
cette perfonne & en faveur d ’une autre. C ’efl: une vérité ma?*
thématique.. Il faut donc décider que la renonciation d’Antoi
nette Go d iv el ne dût avoir d’effet que pour fes freres germáins;
que ni Henri G o d i v e l , frere coníanguin,- ni íes defeendans',
n ’ont jamais pu en réclamer l’a v a n ta g e , ou bien il faut anéantir
la difpofition de Jean G o d i v e l , pere commun.
Nous pourrions nous en tenir au fimple énoncé de la claufe
qui contient cette difpofition , & qui , dans fon expréflioti
claire &
préciie, ne laifle aucun doute fur la volonté de Jean
God iv el ; mais indépendamment de l’acception des termes qui
ne
fouffrent pas deux interprétations, tout fe réunit d’ailleurs
en faveur du fieur Andraiid.
- i °. Il eil inconreftable que Jean G o d i v e l , pere d’An to ine tt e,
par la difpofition particulière inférée dans le contrat de ma
riage de fa fille , a eu intention de faire ce que la loi feule
ne faifoit pas. S’il eût voulu que l’exclufion fût. générale &
abf olu e, il n’auroit eu befoin de rien ftipuler à ce f u j e t j c a r
la Coutume excluoit la fille en termes formels des biens fournis
à fon e m p i re , & l’excluoit en faveur de tous les m â l e s , foit
�11
germ ain s, foit confanguins. L e pere a fait une difpofition;
cette difpofition n’eit pas pure & fimpîe ; elle contient une mo
dification. Q u e l l e que foit l’étendue de cette modification, il
eft confiant qu’iï y en a une. Premiere vérité, d’où il réfultc
que ce n’eft point la difpofition de la L o i , mais celle du pere
qu’il faut confulter. L e pere avoit la faculté de déroger à la
C o u t u m e , & il y a dérogé.
2°. Il fe trouvoit dans le fait des motifs bien capables de
le déterminer à reftreindre la renonciation de f a i l l e au profit
des freres germains. Antoinette G o d i y e l etoit née du fécond
mariage de Jean G o d i v e l a v e c Madeleine de Maçon. Elle
avoit trois freres & trois fœurs du même l i t , & fa mere etoit
vivante. Il n’exiiloit au contraire qu’un feul enfant du premier
mariage de Jean G o d i v e l ( c ’étoit Henri G o d i v e l , qui avoit
recueilli ou devoit recueillir feul la fucceflion d A n n e Andraud
fa mere ) ; préfum era-t-on que Madeleine de Maçon , mere
d ’ Antoinette G o d i v e l , eût confenti qu’en faveur de Henri
• G o d i v e l , qui lui étoit étr ang er, Antoinette Godivel fa fille
renonçât à toutes fucceflions dire£tes & collatérales ? Il faudroit q u e ll e eût eu bien peu de pouvoir fur Jean G o d i v e l fon
m a r i , ou que l’intérêt de fes enfans fût bien peu de chofe
à fes yeux. Jean Go d iv el lui-même ne pouvoit l’e x i g e r , &
il ne l’a ¡joint fait. T o u t cela a été reconnu & attefté par les
Adveriaires, page 5 de leur Mémoire im prim é, devant les pre
miers Juges. «Madeleine de M âco n , ont-ils dit, vo y o i t fans
» doute avec peine que Henri G o d i v e l , enfant du premier lit
» de fon m a r i , partageroit ave c Guillaume G o d iv el fon fus le
»> bénéfice de la forclufion. O n vpit que pour éviter ce partage,
» pour attribuer l’effet de la forclufion en efitiera Guillaume G o» d ivel, qui lui ¿toit ciujji cherquc Henri Godivel devoit lui être
y
�12“
__
i> indifférent, elle engagea Ton mari à diriger la renonciation
» au profit de G u i ll a u m e , & c. »
V o i là donc un motif puiifant, reconnu par toutes les Par
ties. Madeleine de M â c o n n’a pas voulu que la renonciation
de fa fille , faite atf profit de fes enfans mâles , freres germains
d’Antoinette , fût faite également au profit de Henri G o d i v e l ,
frere confanguin d’ Antoinette , mais étranger & indifférent à
Madeleine de Mâcon. Refte à fçavoir fi cette volonté , fi
naturelle & fi jufte, a été fuivie.
3 0. A l’infpeftion feule des termes de la renonciation, il
ri’éft pas poflible d’avoir fur ce point le doute le plus léger.
Jean G o d iv el a ftipulé que la renonciation d’Antoinette G o
divel fa fille profireroit aux freres germains feulement, enfans
de Madeleine de Mâcon. I c i , il faut l ' a v o u e r , nous fommes
embarrafles pour prouver que le mot feulement eft un terme limi
tatif; c ’eft le fort des vérités dont l’évidence eft p a lp a bl e , de
n’être point fufceptibles de démonftration. Nous en viendrons
perpétuellement à ce raifonnement auffi fimple que péremptoire : Jean G od i ve l a dit expreffément qu’ Antoinette fa fille
renonçoit au profit de fes freres germains feulement ; fi les
freres germains ne font pas les feuls qui profitent de la renon
ciation , fans doute cette renonciation n’eft pas faite au profit
des freres germains feulement. O r Henri G od i ve l n’étoit point
frere germain d’Antoinette ; il eft donc certain que la renon
ciation n’a dû profiter ni à Henri G o d i v e l , ni à fes defeendans,
ou bien il faut anéantir le mot feulement qui a reftreint cette
renonciation; il faut le regarder comme n’exiftant pas.
Nous avons fur le fens & la valeur de ce mot l’aveu impli
cite des Appellans.; ils conviennent q ue , lorfqu’un pere fait
renoncer fa fille aux fucccifions d i r e & e s , en ajoutant le mot
feulem ent, cette patticule lui réferve lesfucçeiîions collatérales;
�le pere a le même pouvoir pour limiter la renonciation , rela
tivement aux perfonnes, que pour la reftreindre relativement
aux chofes. D e même qu’il peut ftipuler que la renonciation
n’aura point lieu pour telle efpece de fucceifions, Toit directes,
Toit collatérales, il peut ftipuier également que la renonciation
fera fans effet, relativement à tels individus. Si donc lorfqu’il
a été dit que la fiile.renonçoit aux fucceifions dire&es feu le
ment , ce mot a fuifi pour lui réferver les fucceifions collaté
rales ; il eft inconteftable que lorfqu’il a été ftipulé qu’elle.renonçoit au profit des freres germains feulem ent, ce même mot
a fuffi pour lui réferver fes droits fucceilifs à elle ou à fes defc e n d a n s , dans le cas où il ne fe trouveroit en concurrence
qu’ un frère confanguin.
•
O
..
b j e c t i o n s . « Jean G o d i v e l , nous difent les fieurs De f-
» coroles & M a y e t , en itipulant dans le contrat de mariage
w d’Antoinette fa fille, quelle renonçoit au profit des freres
» germains feulement, n’a attaché à ce dernier terme que l’idée
»> de préférence des freres germains fur les freres confanguins’,
» en cas de concurrence entre eux.
» Cet te particule feulem ent, ne peut avoir un fens auifi
» etendu que ces mots: & non d'autres ,• & cependant fi le fieur
v> Go d iv el eût fait renoncer fa fille au profit des freres germains,
» & non d’autres, on ne pouvoit point encore confidérer ces
>* termes comme excluant les freres confanguins ».
» 11 n’y a aucune conféquence à tirer de ce que la renoncia» tion aux fuccefjions directes feulement, vaut réferve aux fuc» ceflions collatérales : dans ce c a s , la reftrièHon ne peut avoir
: » d’autre objet que de réferver à la fille les fucceifions colla» térales. Dans le cas, au contraire , de la renonciation faite
n par la fille , au profit de fe s freres germains feulement
3 l’objet
�•14
» eiV d'appliquer aux freres germains le profit de la renoncia*
» t i o n , à l'exclufîon des autres j en forte que la claufe opere fou
» e f f e t , en leur affurant cette préférence.
> » Enfin le Bru n, Auroux Defpomimiers, &
M e Chabrol»
■
» dernier Commentateur dè la Coutume d’A u v e r g n e , font
» d’accord pour décider que *la> renonciation faite par la fille
» au profit de fes freres germains feulement, ou de fes freres
» germains & non d’autres, ne vaut qu’une préférence en fa» veut de ceux au profit'defquels efl: dirigée la renonciation.
» D ’ailleurs, ajoutent les Adverfaires, ce n’eft point de la
» renonciation faite par Antoinette Godi vel que réfulte la for» clufion. Cet te forclufion efl: prononcée par la Coutume : la
» renonciation n’a rien ajouté quant à cet objet. A i n f i c e n’eft
» point cette renonciation qui doit fervir à borner l’étendue
» de la forclufion", mais la C o u tu m e , qui déclare la fille for» clofe *.
R é p o n s e s . O n auroit de la peine à cr o ire , fi on n’ en v o y o i t
la preuvet dans le. procès a£luel, que dans ce moment où la
langue eft f i x é e , il fe foit trouvé des hommes capables de
foutenir férieufement & co nf ta m m e nt , que ces mots: feulement
& préférablement, font deux mots fynonimes ; que le premier
n’annonce point une re fl ri & io n , mais une fimple préférence.
C ’eft c o m m e li l’on foutenoit que le mot tout ne comprend pas
le t o u t , mais feulement la plus grande partie de ce dont il eft
queftion. Il paroîtra faftidieux de revenir fans ceffe au même
raifonnement j mais fi l’on confidere que c’eft-là le point décifif
du procès, on fera m o i n s ,f é v e r e , & fans doute on nous per
mettra d’y ramener l’attention. Si Jean G o d i v e l avoit entendu
ne donner qu’une préférence aux freres germains, il auroit dit:
au profît des freres.germ ains, préférablement t premièrement, tant
�-M
q u d en exljlera. Au lieu de cela , il a fuit ftipuler que la for-'
clufion d’Antoinette G od i ve l auroit lieu au profit des freres
germains feulement. Il a donc voulu ( & fa volonté a été clai
rement ex primée) que les freres germains d’ Antoinette fuiTent
les feuls qui profitaient de la forclufion j c a r , on ne fçauroit
trop le répéter, fi les freres germains ne font pas les feuls ; fi
un frere confanguin ou Tes defcendans peuvent en profiter auifi,
il implique de dire que la forclufion ait lieu au profit des freres
germains feulement. Par ce dernier terme fe u l, il eft donc évi
demment démontré que Jean G od i ve l n’a point entendu don
ner une fimple préférence aux freres germains, mais qu’il a
formellement exclus le frere confanguin & fes defcendans.
Après avoir vu les fieurs Defcoroles & M a y e t prétendre
que la particule feulement n’eft; pas un terme limitatif, on n’eft:
pas étonné de les voir foutenir que cette même particule fe u
lement n’a pas un fens aufli étendu que ces mots : & nbn d'autres.
Cependant cette prétention n’eft pas moins étrange que la pre
mière ; elle n’eil pas‘ moins contraire aux idées & à l’exception
reçues. Lorfqu’après avoir défigné un certain nombre ou une
certaine claffe d’hommes, çn dit : tels individus, tellesperfànncs
feulement profiteront de t-elle difpofition, on entend que ces
perfonnes, ces individus feront les feuls qui en effet puiffent
profiter de la difpofition. S ’ils font les feuls, il eft bien conftant
«[u’il n’y en aura pas d ’autres : la particule feulement &
ces
pinots & non d'autres ^ ont donc un fens, une fignification abso
lument fynonimes. L ’acception étant attachée au mot par une
convention générale , de même que telle valeur à tel nombre ,
ces deux objets font fufceptibîes de la même démonftration.
C e font des vérités mathématiques, qu’il eft ridicule de con
tefter.
Les Adverfaires difent encore que quoique le mot feulement
�ï6
foit limitatif, lorfqu’il eil appliqué à telle nature de fucceffion , on ne peut pas en conclure qu’il le foit également lorf
qu’il eil appliqué à telle clafi'e d’individus. Cette diilinftion
/
eil imaginaire & infourenable. Si Iorfqu’ün pere a fait renoncer
fa fille aux fucceiïîons direfles feulem ent, on décide que par
ce mot feulem ent, il iui a réfervé lés fucceiîions collatérales ,
. pourquoi ne décideroit-on p a s , par le même principe., que
lorfqu’un pere a U\t renoncer fa fille au profit de fes frères
germains feulem ent, il lui a réfervé fes droits, eu égard aux
freres conlanguins ? C ’eft une chimère de prétendre que dans
le premier c a s , la reitndlion ne peut avoir d’autre objet que
de réferver à la fille les lucceiîions collatérales j &
que dans
le fécond , l’objet eil de donner une fimple préférence aux
freres germains. C ’ell réfoudre la queilion par la queilion. H
eil bien plus fimple &
plus vrai de dire que l'objet eil le
m ê m e , que la reilri6lion a une égale force dans les deux cas ;
x
que de même que dans le p r e m i e r , le pere n’eil affeété que
d’une i d é e , celle de réferver à fa fille le droit aux fucceiîions
collatérales, en ilipulant que la forclufion aura lieu pour les
fucceiîions dire£les feulement ; de m ê m e , dans le iecond , il
n’çft affefté que d’une i d é e , celle ’d ’exclure les freres confanguins du profit de la forclufion, en ilipulant que la fprclufiorç
aura lieu pour les freres germains feulement.
A u furplus, dans leurs obje&ions m ê m e s , il échappe aux
fieuts P e fc o r o le s & M a y e t de dire q u e , dans ce dernier c a s ,
l’objet eil d’appliquer ?ux freres germains le profit de la renon
ciation , à l'excluflon des autres, O n conçoit facilement co m
ment les freres confanguins péuvent être exclus, & cependant
profiter de la renonciation.
Les autorités ( fort inutiles d’ailleurs fur une queilion qu1
doit fe décider par les réglés du bon fens & de l’équité ) ne font
�17
pas plus favorables aux Adveri'aires que le raifonnetnent.
Ils cirent L eb ru n , Auroux des Pommiers & le dernier C o m
mentateur de la Coutume d’Auvergne.
Par rapport aux deux premiers qui ont é c r i t , non pour la
Coutume d’A u v e r g n e , mais pour celle de Bourbonnois, il etl
vrai que fur une queftion qui préfente quelqu’analogie avec
celle du p r o c è s , ils femblent décider que ces m o t s , & non
d'autres, n’operent point pour tous les cas une exclufion abiolue,
mais ils fe fondent fur l’article 307 de la Coutume de Bourbonn o i s , & voici d’ailleurs comment ils déiruifent eux-memes les
conféquences qu’on voudroit tirer de cette premiere partie de
leur décifion.
Lebrun, fur les articles 305 & 3 0 9 , qui portent, que fille
mariée & apanée ejl exclufe quand il y a des mâles ou des defcendans des m âles, parle de la renonciation faite par une fille
au profit de fort frere germain f e u l , s’exprime en ces termes :
« D è s que le pete a limité la renonciation de fa fille en faveur
» du frere germain , il l’a réfervée tacitement à l’égard des
» autres ; après quoi les freres confanguins ne f e peuvent plus
** prévaloir de l'exclufion coutumiere en faveur des m âles, puif» que la renonciation expreiTe n’eft qu’en faveur d’un frere
» g e r m a i n , & ' que quand le pere a fait une flïp u la ù o n , la Cou» tume qui nauro'u difpofé quen fa p la ce , ceffe de difpofer. C e
» qui eft d’autant plus juite, ajoute Lebrun , que c’eil le pere .
»> qui d o t e , & non pas la C o u t u m e , & qu’il fait ce qu il doit
» donner, à proportion de ce qu’il exige de fa fille, donnant
» plus, quand il lui laiiTe moins de retour aux fuccefiions de
* la famille , & moins, quand il lui donne plus d’efpérance de
>* pouvoir venir à fes fucceiïlons ».
O n ne fauroit defirer rien de plus f o r m e l , en faveur du
principe que nous foutenons.
C
�i8
Auroux de Pomm ie re s, fur l'article 307 de la même C o u
tume ( d e Bourbonnois) n. i o &
1 1 , décide « que fi la fille
» qui n’avoit qu’un frere germain au rems de fa renonciation,
>> renonce nommément ôc expreiTément en faveur de ce frere
» défigné par ion nom de b ap t êm e , cette renonciation ne pro» jiiera q u à lui J'eul, & non aux autres freres germains qui
» naîtront enfuite , & que ceux-ci ne pourront profiter de la
» renonciation , que dans le cas où elle feroir faite au profit
» du frere germain ¡fin e exprcjjione p articula rï&n 0mlni3 ».
Les fieurs Defcoroles Si M a y e t prétendent que ces Auteurs
ne raifonnent ainfi , que lorfqu’il s’agit de l’excl.ufion de freres
co nfanguins, parce q u e , difent-ils , la Coutume de Bourbonnois décide contr'eux. L ’obfervation n’eftp as e x a £ l e j c a r d’u a
c ô t é , Auroux & le Brun fe fondent fur des raifons générales>
- é g a l e m e n t applicables aux freres germains & aux confanguins,
& d’un autre cô té , Auroux des Po m m ie re s , dans l’endroit c i t é ,
ne parle pas du tout des freres confanguins. C ’eit précifénient de germain à germain qu’il annonce la reftriftion, dans
l e cas où la renonciation eÜ faite au profit de tel frere germain
nommément.
Q u a n t au dernier Commentateur de la Cou tume d’A u v e r
g n e , quelqu’eilimable que foit fon travail, nous n’héfiterions
point à le c o m b a tt re , & nous nous flatterions de le faire a v e c
fiiccès, fi fon opinion étoit telle que les Adverfaires le pré
tendent , mais il s’en faut du tout au tout. C e Jurifconfulte
foutient au contraire formellement le principe fur lequel le
fîeur Andraud appuie fa défenie.
Les fieurs M a y e t & D e fc o r o l e s f e font permis là-deflus une
petite infidélité, qui ne leur fera pas d’un grand avantage r
mais dont nous avons cependant le droit de nous plaindre.
V o i c i comment ils citent le paffage de M e Chabrol fui
�19
l’ article 25 de la Coutume d’ A u ve r gn e, fe£Kon 1 , page
373*
« La renonciation dirigée en faveur de tel maie, n a d autre
^
M objet que de donner la préférence à ce mâle fur les autres.......
» I l ne fufjîroit même pas qu’elle renonçât en faveur de tel de
» fes freres feulement ; il jaudroit en outre qu’elle eût ftipulé
*■
» que lui ou fa poftérité venant à défaillir, elles ou fes defeen-
.
» dans feroient habiles à fu c c é d e r , nonobftant l’exiftence des
» autres m â le s , & c . »
11
feroit bien étonnant que cet A u te u r , qui a donné une
;
Confultation abfolument contraire, fût tombé dans une pa
reille erreur. Cependant les Adverfaires le citent deux fois
dans leurs Salvations, & deux fois de la même manière.
Si 1’ on ouvre fon C o m m e n ta ir e , à l’endroit cité , on y lit :
« il eft certain que la renonciation dirigée en faveur de tel
» m â le , n’a d’autre objet que de donner la préférence à ce
» mâle fur les autres; mais (i celui-ci ou fa poftérité viennent
» à défaillir, les autres mâles reprennent leurs droits, parce
» que la Coutume exclut la fille en faveur de tous les mâles
» indiftin&ement » : la préférence donnée à l’un n’éteint pas
le droit des autres. = Enfuite au lieu de ces mots rapportés par
les fieurs Defcoroles & M a y e t : il ne fujfiroit mime pas quelle
renonçât en faveur de tel de fes freres feulem ent, l’Auteur dit au
contraire: « il faudroit flipuler expreffément que la fille renonce
» en faveur de tel de fes jieres feulement. . . . . .
M
Il eft vrai que frappé de la conteitation a£fcuclle , fur laquelle
il étoit confulté, précifément'à l’époque de fon commentaire,
il a ajouté çes mots ( comme pour indiquer une précaution
furabondante qui prévieudroit toute difficulté ) « & même ( i ) ,
» que lui ou fa poftérité venant à défaillir, elle ou les defeen-
(,■) Los
Ad-i
c«
Mdans deviendront habiles à fucc éde r, & c. » C e il ainfi, con-~exPrcffio,,s»ûi,
« n u e r A u t e u r , cejt par Je meme principe ( dit-ii plus b a i ) un Cens totalement différent
» n
1
•
offroientf
�20
*lecelui qu’ils »'qu’il ne fuffit p^s qu’ une iilie renonce aux fucceffions dîétabür. En » re&es pour avoir droit aux collatérales, fi elle n’ajoute
confequence , „ q U’e ÎIe ne renonce qu’aux fucceffions dire&es feulement
ils ont imagine
.
d’y fubftituer C e dernier membre
explique parfaitement
les termes qui
prenions*«*/ p ré c é d e n t, & dont les Adverfaires ont voulu tirer avantage
» faudroit en e n
outre y o ie .
»
»
Avec de pa-
jes
d én a tu ra n t.
1
5
c
La m me décifion fe retrouve en la fe&ion 5 du même
iin’eiTpas^nè chapitre. « Il faut quelque chofe de plus, y eft-H d i t , que la
n^pûtpr^T en" * ^lr,P^e renonciation aux fucceffions dire&es , pour emporter
ter com m e fa- » l a réferve des fucceffions collatérales par e x e m p l e , la pârvorable,
,
.
r ,
» t i c u i e l a x a t i v e tant feulement.
» L a particule feulement eit taxative & limitative. Il faut
»d on ne r un fens à chaque expreffion j &
une renonciation à
» telle fucceifion feulem ent, ne peut avoir d ’autre, objet que
» réferver les autres ».
Enfin, ce qui trancheroit toute difficulté, s’il pouvoit y en
avoir fur le fens de ces diiFérens pa fla g es , qui fans doute ne
paroîtront pas équivoques , c ’eft que l’A u t e u r , encore vi van t,
confuhé fur la queftion qui divife les Part ie s, a d éc id é, en
termes e x p r è s , que lorfque la renonciation étoit faite au profit
des freres gérmains feulem ent, ce mot feulement opéroit une
reftri ft ion , de maniéré que la fille n’étoit point forclofe , re
lativement aux freres confarvguins.
Il eft donc v r a i , ainfi que nous l’avons d it , que les fiems
Defcorolles & M a y e t ont ¿t la fois contre eux l’é qu it é , la loi& la décifion des Jurifconfultes»
C e s Adverfaires, aflez embarraiTés pour fixer le point de
leur d é fe nf e , ont
reconnu , page 9 de leur Mémoire im
primé, devant les premiers Juges ( & cet aveu fuffiroit pour
détruire leur fvftême fur la valeur du mot feuleme.nt') ils ont
xeconnu que s’il s’agiffoit d’interpréter la claufe du contrat d e
�21
mariage d’Antoinette G o d i v e l en elle-même, on ne pourroit
'pas douter que l'interprétation ne dût f c faire en fa v eu r du fleu r
Anâraud. :
lis font aujourd’hui dans la même perfuation. « M a i s , dl» fent i l s , ce n’eft point la renonciation d’Antoinette Godivel
» qui doit fervir à borner l’étendue de la forclufion, c’eit la
» Coutume qui déclare la fille forclofe ».
Nous répondrons à cet argument par le paiTage déjà cité
d’un Auteur que les Adverfaires prétendent leur être fav o
rable. « Dès que le pere a limité la renonciation de fa fille en
» faveur des freres g erm ai ns , il l’a réfervée tacitement à l’é» gard des autres ; après quoi les freres confanguins ne fe
>►peuvent plus prévaloir de V&xclufion coutumiere en faveur des
» mâles, puifque la renonciation expreffe n’eft. qu’en faveur
» des freres germains , & que quand le pere a fa it une filpula» tion , la Coutume , qui n auroit difpofé qu’en fa place , cejfe de
» difpofer; ce qui eft d’autant plus jufte, que c ’eit le pere
» qui d o t e , & non pas la Coutume , &
qu’il fait ce qu’il
» doit donner à proportion de ce qu’il exige de fa fille ».
C e pairage de Lebrun, appliqué il la queftion a&uel le , en
offre un réfumé exa£L
C e n eft point la forclufion prononcée pai la Coutume qu’il
faut co ni u lt er, mais la difpofition du p e r e , à qui la loi p er rnettoit de faire ceffer l’excluiion légale en totalité, ou de
la modifier par une réferve. Dè s que le pere a fait une ftipulation la Coutume cefïe de difpofer. Suivant cette ftipulation, la forclufion n’a dû avoir lieu qu'au profit des freres ger
mains feulement ; ni le frere confanguin , ni fes aefcendans ,
n ont pu en profiter. O r , dans ce moment-ci, il n’exifte pas un
feul individu dcfcendanr des freres g e rm a i n s , c’eft la fuccef-
�fion du dernier qui forme l’objet de la conteftation ; il eft donc
démontré que le fieur Andraud , defcendant d’Antoinette G o d i v e l , doit , en cette qua li té , être admis au partage de cette
même fucceflion.
C e t t e premiere vérité une fois bien co n fi a n t e , il ne fera
pas difficile d’établir que le fieur Andraud a pu acquérir les
droits de différens cohéritiers , &
que ces droits ne fçau-
roient lui être enlevés.
S-
I I.
Demande en fubrogation.
C et te prétention particulière des fieurs M a y e t & Defco rol es,
p ro fe ri te , ainfi qu’elle devoit l’ê t r e ,
par la Sentence dont
eft a p p e l , eft fondée encore fur la prétendue forclufîon d’A n
toinette G o d i v e l , relativement aux freres confanguins.
O n dit au fieur Andraud; Antoinette Go d iv el s’étant trouvée
forclofe , d ’abord au profit des freres germains, de préférence,
& enfuite , à défauts des freres germains , au profit des confm g u in s , ni elle , ni fes defeendans n’ont pu venir à fucceffi on s , foit d i r e & e s , foit collatérales; defeendans d'Antoinette
G o d i v e l , vous êtes d o n c , par une conféquence néceiTaire de
la forclufion , fans droit fur la fuccciTion de Catherine Godivel
"de euju s i vous devez être réputé étranger; par une extenfion
des loix,yoer dtvtrfas & ab A naflafio, la Jurifprudence permet
aux héritiers dtr le faire fubroger aux droits qu’un étranger
peut avoir acquis dans une fucceflion j vous ne pouvez donc
contefter la demande en iubrogation formée contre vous, re
lativement aux ventes qui vous ont été confenties par les fieurs
Seymier & Gilbcrgues.
�Vo il à le fyflême des fieurs Defcoroles & M&yet, Nous r é
carrerons par trois moyens également décififs.
i ° . Dans le point de d r o i t , les loix pe.r diverfas & ab A n a f
îafio (abftrattion faite du défaut de forcluiîon ) ne fçauroient
être applicables à l’efpece.
Ces lois dans l’origine n’ont eu pour objet que d’écarter les
acquéreurs des droits litig ieu x, efpece de gens avides &
peu
délicats, qu’ on voy oit à Rome de très-mauvais oeil, & qui ne
méritent pas plus de faveur parmi nous. Un acquereur de droits
fuccefiifs, n’eft point un acquéreur de droits litigieux. Il effc
vrai que par la Jurifprudence ces mêmes loix ont reçu l’extenfion d’un cas à un autre; mais cela a été fondé fur deux mo
tifs qui nous font attefles par les Adverfaires eux -m êm e s, & qui
très-certainement ne fe recontrent point ici.
« L e premier motif a é té , nous difent-ils ( i ) , d’empêcher
» que des étrangers ne portaient un ceil curieux & indiferet fur
» les affaires d’une famille ; le f é c o n d , que des cohéritiers ne
» fufTent pas expofés à effuyer le caprice & les vexations d’un
» nouveau copartageant , qui pourroit être de compofuion
» difficile , ou dont l ’infolvabilitê feroit naître des inquiétudes ».
D ’une p a r t , il eft impôflible d ’envifager le fieur Andraud
comme venant porter un ceil indiferet fur les affaires d’une
famille à laquelle il feroit étranger ; car non-feulement il n’eft
pas étranger à la famille, mais defeendant d’Antoinette G o
divel , feeur germaine de Guillaume G o d i v e l , d’où proviennent
les biens à partager; il fe trouve tenir de plus près que les
autres cohéritiers, ou du moins que les fleurs Defcoroles &
M a y e t , à Catherine G o d i v e l , de la fucceffion de cujus. D ’ail-
0 ) Mémoire imprimé devant les premiers Ju g es, p . a a.
�24
leurs, comment admettre ce prétendu mot if, Iorfqu’on voit
que le fieur Andraud a déjà eu le fecret de la fa m il le , qu’il a
été dépofitaire, qu'on l’a admis au partage, en un mot qu’il a
aiîiilé à toutes les opérations. D ’autre p a r t , le fécond motif
n’eil pas plus üdmiflible ; on n’a à craindre , ni c a p r i c e s , ni
v e xa ti on s , ni infolvabilité du fieur Andraud ; tous les cohé
ritiers favent qu’il a fait le bien de la fucceflion -, que ce n’eil
point pour gagner qu’il a a cq u is , mais pour diminuer le nombre
des copartageans : circonilance qui doit nécessairement tour
ner à l’avantage de tous. Il eft donc certain que les motifs qui
ont fait étendre les Lo ix per diverfas & ab A n a jîa jio , ne peu
ve nt recevoir aucune application contre le fieur Andrau. D ’où
il réfulte qu’on ne peut argumenter de ces L o i x , parce que
n’ayant point été faites contre les acquéreurs de droits fucceflifs, &
n’agiflant contr’eux que par-une extenfion que la
Jurifprudence leur a donnée fur tels motifs déterminés, dès que
ces motifs ne i’e rencontrent pas, l’ extenfion fi x é e , ou reftreinte par la Jurifprudence , doit ceffer d’ avoir lieu.
Il y a , au contraire , de très-fortes raifons de droit & d’é
quité pour confimier les acquifitionsfaites par le fieur Andraud,
&
rejetter la demande en fubrogation. D ’abord l’intérêt du
c o m m e r c e , que la liberté favorife, & auquel une trop grande
gêne , fur-tout lorfqu’elle ell fans fon de m en t, ne peut que
nuire beaucoup. C e c i n’eil qu’une raifon d’équité ; il y en a
une de d r o i t , tirée de ce que la Coutume d’Auvergne a eu en
vu e deux fortes d’héritiers, l’héritier ab im ejlat, & l’héritier
conventionnel. La fille, une fois forclofe, ne peut être héri
tière ab in teflai, que par le rappel : cela eil vrai ; mais elle
peut devenir héritière conventionnelle. C et te
faculté fuflit
pour donner le droit d'acquérir. S i , par quelque paéle que ce
�foît y on peut devenir héritier c o nv en ti on ne l, on eft à 1 abri
des demandes en fubrogation.
En un m o t , tout parle en faveur des a£tes confentis au fieur
Andraud par les fieurs Gilbergues & S e y m i e r ; rien ne pe.utleur
porter atteinte. Les L oi x qu’on oppoiè n’ont point été faites
pour des a£tes de cette nature ; & l’extenfion qu’on a donnée
à ces Lo ix ne peut avoir lieu dans l’e f p e c e , puifque les motifs
fur lefquels elle eft fondée , manquent abfolument. Premier
moyen contre les demandes en fubrogation.
2°. Les fieurs Defcorolles & M a y e t fe trouveroient, dans
tous les c a s , non recevables à oppofer les l o i x , per diverfas
& ab A n a fla jïo , parce qu’ils ont reconnu au fieur Andraud. la
qualité d’héritier. Ils l’ont admis au parrage du mobilier de la
fuccefîion. Le fieur Andraud a paru « comme héritier en partie
» de Catherine G o d i v e l , &
# fieurs Seymier &
comme fubrogé aux droits des
G i l b e r g u e s » ; il a concouru à toutes les
opérations ; il a été dit que c ’étoit de fon confentement qu’une
fomme de 2400 livres étoit dépofée entre les mains d’un N o
taire î enfin , fur l’argent c o m p t a n t , il a reçu une fomme de
3600 livres 9fous les y e u x & du confentement de tous les cohéri
tiers. D e s faits de cette nature ne peuvent être balancés par des
proteftations vagues & générales. Dans prefque tous les a i l e s ,
il eft de forme & d’ufage d’inférer des réferves &
protefta-
tions ; mais on n’y a aucun é ga rd , lorfque les faits font co n
traires.
Il y a une autre circonftance e n c o r e , c ’eft que les A d v e r
saires eux-mêmes, après le partage des meubles qui fe font
trouvés dans une maifon de la fucceflion , ont vendu leur part
fi" portion fu r les meubles au (leur Andraud. Les Adverfaires
prétendent que pour avoir droit d ’acquérir, & être à l’abri des
demandes en fubrogation , il falloit être héritier. O r , ils ont
D
�z6
regardé le fieur Andraud comm e ayant le droit d’acquérir t
puifqu’iJs lui ont vendu ; ils ont donc re co n n u , par cela ieul ,
qu’il éroit héritier, & qu’il ne pouvoit y avoir lieu à la iubrogation, ù moins qu’ils n’aillent jufqu’à prétendre qu’ils peuvent
fè faire iubroger à la vente qu il s ont faite au fieur Andraud.
D e tout c e l a , il réfulte une fin de non recevoir inconteiïable.
Second moyen contre les demandes en fubrogation.
Troifiemement. Quand on admettroit l’application des loix
pcr diverjas & ab Anajlafio , & quand on feroit abftra&ion de
toutes fins de non re cev oi r, le iÿftême des Adverfaires fur ce
point ne feroit fo u t en a b le , qu’autant qu’on fuppoferoic que
réellement le fieur Andraud elt étranger à la fucceflion de
Catherine G o d i v e l , fous prétexte qu’ Antoinette G o d i v e l , fon
a ïeule, a été forclofe ; o r , nous avons établi qu’ Antoinette
Go d iv el n’avoit point été f o r c lo fe , relativement à fon frerc
con-fanguin , puifque fon p e r e , qui avoit eu le pouvoir de
rendre la forclufion n u l l e , & à plus forte raifon , celui de la
reftreindre, avoit dit., en termes e x p r è s , que la forclufion
n’auroit lieu , qu’au profit des freres germains s e u l e m e n t , c e
qui étoit exprimer clairement qu’elle ne profiteroit point aux
freres confanguins. Il ne fe préfente , dans ce moment-ci, au
cun héritier defcendant des freres germains. U n feul s’étoit
m a r i é , & fa poftérité vient de s’éteindre dans la perfonne de
C atherine
Go d iv el.
11 ne
peut donc être que ft ion , en aucune
maniéré , de la prétendue forclufion j ou bien il faut anéantir
la réferve ftipulée par Jean G o d i v e l , réferve qu’il lui étoit
permis de faire , d’apres le texte formel de la loi.
S’il n’y a point de forclufion, le fieur Andraud eft héritier ,
Si par ce titre f e u l , fans avoir befoin de faire ufage des autres
moyens qui concourent ù fa défe nfe , il é c a r t e , fans retour, la
demande en.fubrogation.
�17
L e même m oy en é t a b l i t , inconteftablement, qu’il a eu le
droit de fe préfenter, comm e héritier de fon c h e f , & comm e
fubrogé aux droits des fieurs Gilbergues & S ey m ier .
Monf ieur C L É M E N T D E
G I V R Y , Rapporteur,
Me DE L A G O U T T E ,
A vo c a t.
B u s c h e , Proc.
c
A
PARIS,
chez P. G . S
i m o n
, &
N. H. N
y o n
Imprimeurs du P a rl e m en t , rue M ignon , 1 7 8 5 .
,
�
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Factums Baron Grenier
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Description
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A name given to the resource
[Factum. Andraud, Pierre. 1785]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Clément De Givry
De Lagoutte
Busche
Subject
The topic of the resource
forclusion
droit d'accroissement
secondes noces
généalogie
successions
coutume d'Auvergne
jurisprudence
doctrine
coutume du Bourbonnais
frères germains
Description
An account of the resource
Mémoire pour maître Pierre Andraud, seigneur de Parpaleix, conseiller au siège présidial de Clermont-Ferrand, intimé ; Contre le sieur Joachim Descoroles, ecuyer, et maître, notaire, appellans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez P. G. Simon, et N. H. Nyon, imprimeur du Parlement (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1785
1684-1785
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
BCU_Factums_B0116
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0115
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Coverage
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Olliergues (63258)
Clermont-Ferrand (63113)
Chanterelle (15040)
Rights
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coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
frères germains
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jurisprudence
secondes noces
Successions
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Text
t r ib u n a l
CT
MÉMOIRE
la p a lis s e .
POUR
Les enfans du premier lit de M i c h e l V IR O T T E ,
demandeurs ;
C O N T R E
A n n e D E L A I R E , sa veuve, et les enfans issus
de leur mariage} défendeurs.
sous l’empire du droit coutumier, et
particulièrement en Bourbonnais, interrompre une com
munauté conjugale, à laquelle des mineurs étoient inté
ressés, par un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du
survivant seul ?
• L ’inventaire authentique et solennel pouvoit-il être
remplacé par un autre acte qu’un partage?
P
OUVOIT-O N,
A
�( 2 )
Telles sont les deux seules questions que font naître
les prétentions des enfans du premier lit de Michel Virotte.
F A I T S .
Michel Virotte s’est marié en 1762, sous le régime de
la communauté, avec Anne Brirot.
D e cette union, sont nés quatre enfans. Ce sont les
demandeurs.
A nne Brirot décéda en novembre’ 1^56 .
Michel Vix’otte pensa , quelques années après cette
perte, à un autre établissement. 11 voulut, avant de se
remarier, interrompre la communauté qui existoit entre
lui et ses enfans. Soit que son cœur, préoccupé d’une
nouvelle passion, se fût entièrement fermé sur les intérêts
des demandeurs ; soit que la famille étrangère à laquelle
il alloit s’allier lui eut imposé des lois contraires a ses
sentimens , il prit des mesures qui tendirent ouvertement
à spolier les quatre orphelins laissés par sa première
femme.
Les demandeurs se plaisent à reconnoître que s’il n’a
pas eu la force de réparer dans la suite ce premier acte
de foiblesse, il n’en a pas moins été pour eux un père
affectueux et tendre; ils doivent même convenir, pour
rendre hommage à sa mémoire, qu’il a manifesté souvent
du repentir. Les obsessions d’une femme ambitieuse l’ont
empêché de x’éparer ses torts, par un acte de justice
éclatant; mais il a emporté dans la tombe la conviction
que l’acte qui causoit ses regrets, se détruiroit de lui-même.
L e 23 janvier 1762, il présenta requête au bailli de
�'
(
3
)
Montaigut-le-Blaîn, pour obtenir permission de convo
quer à jour et heure fixes, les parens paternels et ma
ternels de ses mineurs , au nombre indiqué par la cou
tume, afin de leur nommer entre eux un curateur ou
protuteur, en présence duquel il feroit procéder, par le
premier notaire l'equis, à l’inventaire nécessaire pour
opérer la dissolution de sa commuuauté d’avec Anne
Brirot.
Ordonnance lui fut octroyée le même jour pour le sur
lendemain.
Par exploit de Morand , huissier , du 25 du même
mois, jour indiqué en l’ordonnance, il assigna avant midi
les sieurs Nicolas F au vre , bourgeois à Floret ; FrancoisMarie Definance,châtelain de Chaveroche; Antoine Brirot,
François Senectaire, demeurant l’un et l’autre à Chave
roche ; François Fejard, demeurant à Montaigut; Fran
çois Desperier, curé du même lieu ; et Annet Barret,
notaire à Saint-Gerand-le-Puy, à comparoître tous dans
la même, journée, et à dix heures du matin , devant
M c. Louher, bailli, pour délibérer sur la nomination du
curateur ou subrogé tuteur.
Il est bon d’observer que les sept personnes assignées
se trouvèrent à propos à Montaigut pour recevoir les
copies de l’ajournement; car, on neconcevroit pas autre
ment la possibilité d’une réunion si prompte de tant de
gens habitant quatre communes différentes.
L e même jour, et à l’heure de dix de la matinée, la
délibération eut lieu. T^e sieur Fejard remplit les fonc
tions de procureur fiscal, et son iils celles de parent déA
2.
�(4 )
libérant. On choisit pour subrogé tuteur François-Marie
Delinance.
D e suite, et avant même que le procès verbal de l’as
semblée de famille eût pu être mis en règle, M e_Louher,
devant qui il avoit eu lieu , comme bailli, procéda, comme
notaire, à l’inventaire. François Fejard 7 qui avoit déjà
figuré à .titre de parent dans la délibération, remplit un
second rô le , eu opérant en qualité d’expert.
L ’actif entier de la communauté ne s’éleva qu’à 3106 fr.
L e 8 février 1762 , c’est-à-dire, douze jours après l’in
ventaire, Michel Virotte contracta mariage avec Anne
Delaire. Il fut stipulé que les futurs seroient communs,
suivant La coutume du Bourbonnais, en cas d’enfans seu
lement.
D e cette seconde union- sont nés six enfans. Ce sont les
défendeurs.
I ,e cœur d’un p è r e , quel qu e g é n é r eu x et droit qu’il
s o it , se laisse toujours entraîner par le penchant d’un
nouveau lien. S’il est assez ferme pour résister à toutes
les amorces d’une seconde femme adroite , il aime trop
son repos pour ne pas céd er, par le désir de la paix.
Cette vérité se présente ici dans tout son jour.
Les propres d’Anne Delaire out été l’objet continuel
de tous les soinsde Michel Virotte; il en a triplé la valeur
par des réparations de tout genre. Trois locaterics ont été
entièrement réédiiiées ; une quatrième a été accrue d’un
bâtiment.. Le domaine Ducharnea été refait prequ’à neuf;
les terres ont été closes de murs; les vignes ont été minées
à grands frais j des,plantations immenses out été faites. Il
�CHS
(5 )
y a peu d’héritages dans le pays qui présentent l’image
d’une aussi belle tenue.
Les propres d’Anne B riro t, au contraire, ont été abso
lument négligés. On diroit, à voir ce qui s’est fait à leur
égard , que c’est un étranger insouciant qui les a admi
nistrés. Antoine B rirot, aïeul des demandeurs, mourut en
1764. Ses meubles restèrent à la disposition de ceux de ses
héritiers qui liabitoient la commune de Chaveroche. Le
sieur Virotte n’en requit point l’inventaire; il signa aveu
glément un état sommaire qui lui fut présenté, comme con
tenant un détail exact des forces mobilières delà succession,
et dont l’estimation totale étoit d’une chétive somme de
20191 liv. 11 s. Les immeubles consistoient en trois gros
domaines de forte terre, des locateries, plusieurs maisons*
avec dès dépendances considérables, et des rentes ou rede
vances , soit en nature, soit en argent. Il vendit en sa
qualité de tuteur, aux autres cohéritiers, le septième qui
en revenoit h ses quatre enfans, moyennant la modique
somme de 5ooo francs,, payable à leur majorité ou lors
de leur établissement. 11 prit en nature sa portion des
meubles et des récoltes qui étoient dans les domaines, ou
des grains dans les greniers de la maison. L ’aliénation
étoit si funeste pour les demandeurs, qu’ils l’ont attaquée
en majorité , et se sont fait donner par les héritiers
Brirot une somme de 3000 francs, une maison, un pré,,
une locaterie, et différons- autres objets.
Par l’acte passé à cet égard , le 3 juillet 1784, il fufc
dit que comme les enfans Virotte n’étoient pas encore
suflisamment remplis de leurs droits par le désistement
d?liéritages qui leur étoit fait, et le payement des 3000 fr.r
�( 6 \
et que le sieur Michel Virotte père devoit aux cohéritiers
Brirot une indemnité quelconque, pour raison de la ga
rantie qu’il leur avoit promise, en vendant les droits de
ses mineurs, cette indemnité seroit fixée à l’amiable entre
le père et les enfans, et reviendroit à ces derniers pour
achever leurs portions dans la succession de leur aïeul
maternel. D e suite l’évaluation en fut faite à 4000 francs,
que le sieur Virotte paya à ses quatre enfans du pre
mier lit.
- Les demandeurs se sont mariés successivement, et ont
été institués héritiers du père commun par égales por
tions avec leurs frères et sœurs du second l i t , sauf un
préciput de 2000 fr. au profit de François Virotte, l’aîné
des enfans du premier lit.
Après avoir ramassé une fortune considérable, Michel
Virotte a payé le tribut à la nature. Sa vie avoit cto active
et p r o b e ; il ne se r eprochoit q u ’ un seul acte d’injustice,
l’inventaire du z 5 janvier 1762. Il seroit descendu dans
la tombe sans le moindre re g re t, s’il eût pu le réparer
solennellement. Mais les obsessions de sa femme avoient
redoublé dans les dernières années de sa vieillesse : toutes
ses démarches étoient épiées ; il falloit porter le trouble
dans sn propre maison , courroucer une épouse dont les
soins lui étoient indispensables , mettre aux abois des
enfans avides comme leur mère. Tant d’entraves l’arrê
tèrent; l’idée de revenir sur le passé le suivit jusqu’au
dernier soupir. Quelques instans avant, de trépasser, il
étoit entouré de sa nombreuse famille : Mes enfans,
dit-il d’une voix éteinte, vous m’êtes tous également
chers ; je désire que vous partagiez également ma for-
�3 tS
(7 )
tune. Je ne vous laisse point de mauvaises affaires: qu’un
sordide intérêt ne vous fasse pas troubler, par des procès,
l’union qui doit régner entre vous.
Patriarche vénérable, vous connoissiez bien le cœur
humain ! L ’expérience d’une longue carrière vous avoit
appris que l’ambition détruit les liens même de la nature!
A u moins vous avez emporté, avec la crainte qu’une
affreuse zizanie ne troublât l’harmonie de vos enfans , la
certitude que la justice répareroit vosfoiblesses. C ’est vousmême qui avez conservé les traces à la faveur desquelles la
vérité doit triompher. Grâces soient rendues à la droiture
de vos intentions! les matériaux immenses dont les de
mandeurs sont nantis suffisent pour détruire toutes leà
inquiétudes que vous avez emportées au tombeau.
. A peine le sieur Virotte a-t-il eu fermé les y e u x , que
les défendeurs se sont armés de l’inventaire du 20 janvier
1762, et qu’oubliant les derniers vœux d’un bon père,
ils ont manifesté l’intention d’envahir les quatre cinquièmes
de sa succession.
\
Leurs prétentions ont nécessité des mesures bien oppo
sées à la concorde qui leur avoit été recommandée.
;
Par acte du 19 juin dernier, il a été procédéàun inven
taire qui a duré près d’un mois. Des meubles considéra
bles dans la maison du défunt, beaucoup de blé dans les
greniers, une grande quantité de vins dans les caves, plu
sieurs créances actives, et une somme de 22129 francs
¿3 centimes, sont les principaux articles inventoriés.
C ’est dans cet état des choses que les enfans du premier
lit ont form é, devant le tribunal de première instance
de l’arrondissement de Lapnlisse, demande en partage de
la succession du père commun.
�(8 )
L e principal clief de cette action a pour objet de faire
admettre la continuation de la communauté d’entre
Michel Virotte et Anne Brirot ; sa première femme.
M O Y E N S .
Il ne peut point y avoir d’équivoque sur les principes
et la jurisprudence qui existaient au temps de l’inven
taire du s 5 janvier 1762. Il est incontestable qu’alors,
comme de tout temps, il falloit, dans le droit coutumier ,
pour interrompre une communauté conjugale avec des
mineurs, un inventaire régulier, loyal et fidèle. Cette règle
é toit fondée sur des considérations majeures, telles que
la faveur des contrats de mariage, l’intérêt dû aux miueurs , la sûi’eté des familles ; elle n’étoit pas contraire
aux lois romaines: l’adage M orte sofaitur s o c ie ta s , ne
c o n v e n o i t pas ù la c o mm un a ut é du mari et de la femme,
parce que dans la société ordinaire, la continuation donneroit des étrangers inconnus pour associés ; et dans la
communauté conjugale, le survivant n’a pour associés
que ses enfans, et n’a rien h craindre, puisqu’il est le
seul qui agisse. Les bons esprits la regardoient non pas
comme une institution funeste, ainsi que le prétend le
conseil des défendeurs, mais comme une sauve-garde
tutélairc. D ’Aguesseau , la lumière de la magistrature,
disoit que c’étoit une loi dont la disposition ne devoit
pas être restreinte , mais qu’il falloit favoriser, parce que
la jurisprudence l’avoit introduite dans toutes les coutumes
qui n’a voient point de dispositions précises sur la matière.
To u s les meilleurs auteurs ont tenu le même langage -,
et
�(9)
et l’on peut dire que c’eût été un blasphème, sous l’empire
des statuts coutumiers, que de contester la justice et la
vérité du principe. Il a été abrogé par le Code civil,
sous prétexte qu’il occasionnoit des procès : cette circons
tance est étrangère à la cause, puisque le Code n’a pas
d’effet rétroactif. L e législateur a cru y suppléer , en
privant le conjoint survivant, qui ne fait pas inventaire,
du revenu des biens de ses enfans, jusqu’à dix-huit ans,
et en permettant la preuve de la consistance des biens et
effets communs. N ’est-ce pas encore une porte ouverte
aux procès?
L ’inventaire devoit être solennel et exact. Les inexac
titudes et les omissions le frappoient de nullité , soit
qu’elles fussent frauduleuses , soit qu’on pût présumer
qu’elles avoient été commises sans malice.
Lacombe , au mot com m unauté, s’exprime ainsi :
« S’il y a des omissions dans l’inventaire , quoique
« d’ailleurs il soit revêtu des formalités requises, que
« même ces omissions soient involontaires , il ne doit
« produire aucun effet, parce qu’il faut que l’inventaire
« soit bon, fidèle et exact. Si le défaut de quelques for« malités empêche la dissolution de la communauté, à
« plus forte raison les omissions, quelles qu’elles soient,
« doivent-elles l’empêcher, parce que ces formalités
« n’ont été établies que pour éviter les omissions et
« l’inexactitude. »
Denisart enseigne aussi que les simples omissions ou
inexactitudes sulïisent pour faire annuller les inventaires.
Les auteurs de la Collection de décisions nouv el l es ,
disent :
B
�( 10 )
« Pour qu’il y ait lieu à la continuation de commu« nauté, il n’est pas même nécessaire qu’il y ait fraude
ç< de la part du survivant *, il sullit qu’il y ait de sa part
« négligence notable, parce qu’il doit veiller, pour ses
« mineurs, à ce que l’inventaire soit fidèle. »
, A rg o u , dans son Institution au droit français, déclare
affirmativement que dans les coutumes où il faut un in
ventaire pour dissoudre la communauté , cet acte doit être
solennel et parfait. 11 ajoute que si le survivant n’a pas
fait inventaire loyal et fidèle, et s’il a commis un recélé,
tel inventaire ne doit pas interrompre la communauté.
. Prévôt de la Janès, dans ses Principes de la jurispru
dence française, s’explique de la manière suivante, à l’ar
ticle continuation de communauté,
« Pour empêcher la continuation de communauté, il
k faut que le survivant fiasse un inventaire solennel et
« fidèle. »
. M . Merlin , cet oracle du barreau, dont la sagacité et
!a science font l’admiration du siècle, est d’avis, dans ses
Questions de droit, qu’il faut un inventaire solennel et
en bonne forme. Ecoutons-le raisonner.
« Et en effet, ôtez l’inventaire solennel, contentez« vous d’une- simple description , d’un simple mém oire,
« d’une fixation arbitraire , et qui ne seroit l’ouvrage
« que du survivant, dont le cceuv souvent pi’éoccupé
« d’une nouvelle passion , sacrifie tout pour la satisfaire,
« quelle ressource restera-t-il à ses enfans malheureux! »
A toutes ces autorités respectables se joint la juris
prudence des arrêts. On pourroit en citer un nombre
infini ; mais il suffit saus doute d’indiquer les plus rcmar-
�quableâ : ils sont rappelés par tous les livres qui ont traité
de la matière.
A rrêt de règlement, du 10 mai 17 2 7, qui exige que
l ’inventaire soit bon et loyal, c’est-à-dire, exact et fidèle.
A rrêt de 1725, qui a ordonné la continuation de com
munauté , sur ce qu’on avoit laissé en blanc le nombre
des marcs d’argent et le poids de l’étain , quoique le
nombre des pièces et le prix du marc fussent écrits , et
que l’étain y fût également désigné , quoiqu’il n’y eût
aucune fraude, mais simplement négligence et oubli de
la part du survivant.
• A rrêt du 12 mai 17 4 7 , qui a annullé un autre inven
taire, sur le fondement d’omissions et d’inexactitudes.
A rrêt du 12 septembre 1762, fondé sur ce que l’in»ventaire contenoit des déclarations qui n’étoient pas
exactes.
Cette jurisprudence n’a pas cliangé dans le nouveau
régime. Divers jugemens ont annullé des inventaires pour
simples négligences ou omissions. Les demandeurs cite
ront, entr’autres décisions , un jugement du ci-devant
tribunal de l’A llier, qui a annullé un inventaire, par le
seul motif qu’une cuve y avoit été omise : ce jugement a
été confirmé sur l’appel à Bourges; et une autre sentence
de M oulins, confirmée à G-uéret, par laquelle on a an
nullé l’ inventaire d’un maréchal ferrant, contenant l’omis
sion d’une enclume.
On s’est fondé sur le sentiment de Rcnusson et de
Potliier , pour prétendre qu’ il n’y a que les omissions
m a licie u se s qui puissent vicier un inventaire; mais, quant
& Rcnusson, son avis est facile à pulvériser. Il dit que
B 2 -
�( 12 )
la coutume de Paris n’a pas exprimé qu’il y auroit con
tinuation de communauté, lorsque l’inventaire ne seroit
ni bon , ni loyal, et que sa disposition ne doit pas être
étendue , parce qu’elle est pénale. C’est avec le langage
de d’Aguesseau que les demandeurs écarteront cette auto
rité. Cet orateur célèbre , dans son cinquantième plai
doyer, parloit ainsi : « On a voulu faire passer pour une
« loi pénale la loi qui établit la continuation de comrau« nauté : mais ce principe ne peut être admis. Pour en
« connoître le peu de fondement, cherchons les motifs
« de la continuation de communauté. » Quant à Pothier,
on prouvera plus loin que son avis est en faveur des de
mandeurs..
Ainsi donc le point de droit est constant; il faut un
inventaire solennel, régulier, exact et fidèle..
Passons au point de fait.
E t d’abordex;miinons si l'inventaire du z 5 <janvier 1762
est solennel et régulier.
La délibération- de parens qui a nommé le subrogé1
tuteur , et l’inventaire, ont été faits le même jour. L e
premier acte devort être en forme- authentique avant le
commencement du second : cela n’a pas pu. être1, puisque
l ’un et l’autre ont été commencés eu même temps. Il est
clair que la délibération n’ctoit ni rédigée, ni signée,
quand on s’e9t occupé de l’inventaire , ou plutôt que ces
deux actes ont été faits en même temps.. Y a-t-il là de
la solennité ? Est-ce ainsi qu’on procède ordinairement^
non-seulement dans les.affaires importantes, dans les cas
où la loi veut des précautions, mais même dans les cir
constances d ’ un chétif intérêt?. L e subrogé tuteur étoit le
�C 13 )
défenseur des mineurs. La loi entendoit l’opposer au sieur
Virotte père; elle ne vouloit ni connivence, ni accord
entre eux. Peut-on présumer qu’il y eût de la contra
diction de la part de l’un vis-à-vis de l’autre, quand onvoit une marche si rapide, si singulière , approuvée par
tou^deux?
On assigne sept personnes habitant quatre communes'
différentes ; et c’est le jour même où l’on veut les faire
op é rer, à la minute où l’on a besoin d’elles, dans la>
propre maison de celui qu’il faut surveiller, qu’on les
rencontre toutes à propos. Ce n’est pas le hasard qui les
a réunies; elles ont donc été prévenues. Pourquoi les
assigner? Ce n’étoit pas pour les rapprocher, puisqu?elles>
étoient ensemble. On opposera que l’assignation étoifc
inutile : par quel motif a-t-elle donc eu lieu? C’étoitr
n’en doutons pas, pour écarter toute idée de concert;',
mais la ruse a été grossière:.
C ’est le sieur Louher qui fait les fonctions-de bailli ett
de notaire; Il y avoit incompatibilité-, un fonctionnaire’
public ne peut pas se commettre lui-m êm e: la chose est'
inouïe.. Nouveau- m otif pour se convaincre que tout étoif
concerté;, que les parens r le-juge et* le notaire étoientiW
la dévotiom du sieur Virotte. ¿ ’étoient,. dit-on les per
sonnes les plus' remarquables’ du’ paya traisoni de- plus;*
les gens hunnêtes-soutconiian3:,,les hommes qui ne tiennent'à la société que par leur fovtune om leur- naissance, sontentièrement dominés par les. règles do la politesse et-du
bon ton ; étrangers-aux affaires-, ils- ne s’occupent que de$>
bienséances».Ce seroit un injure à leurs yeux que d’épier*-
I
�( 14 )
les démarches d’un voisin qui les accueille et seirible
vouloir leur ouvrir tous ses secrets.
François Féjard cumule à son tour deux qualités op
posées ; il délibère dans l’assemblée de famille, et opère
ensuite comme expert. Aucune loi écrite, dira-t-on, ne
s’y opposoit : le bon sens, la raison, les usages reçus repoussoient ce mode. L ’ordonnance môme de 1667 ne le
vouloit pas*, elle defend aux experts de boire ou manger
avec la partie. Il est bien évident que François F éja rd ,
qui s’étoit rendu bénévolement à la demande du sieur
V ir o tte , que l’huissier avoit trouvé logé dans la maison
du sieur V irotte, avoit bu et mangé avec lui.
L e fils Féjard exerce les fonctions de procureur fiscal;
il étoit cousin d’Anne Delaire. Le mariage de cette dernière
avec Michel Virotte s’est fait dans la même quinzaine.
L e but de la loi qui récuse les parens, est d’e mp êc he r l’in
f luence, la f aveur qui peut être le résultat d’une amitié
commandée par le sang. L e cousin d’Anne Delaire n’étoitil pas intéressé, le 2.5 janvier, à ménager, à servir le sieur
Virotte, comme il l’eût été deux semaines après, dès que
le mariage étoit convenu alors, et que c’étoit à cause de
cette union projetée que l’inventaire se faisoit? C’est donc
le cas d’appliquer la règle : Eadem ra tio , idem ju s.
Enfin les mineurs avoient encore, lors de l’inventaire,
leur aïeul maternel, le sieur Antoine Brirot. C’étoit
l’homme de tous le pays qui devoit être le plus intéressé
à servir chaudement leurs intérêts; son cœur devoit leur
être entièrement ouvert : on l’écarte de l’assemblée de
parens. Ou imagine maintenant d’opposer qu’il étoit in-
�(i5)
^
firme : c’est un fait faux. La preuve que Michel Virotte
ne vouloit pas l’avoir, résulte de ce qu’il ne l’a pas fuit
assigner.
Ces irrégularités sont frappantes ; elles écartent toute
idée de solennité; elles prouvent que l’inventaire n’a été
l’ouvrage que du survivant, parce que toutes les personnes
qui ont eu l’air d’y figurer n’ont été appelées que pour la
forme, et lui étoient dévouées. C’est le cas de s’écrier avec
M . Merlin : O tez ïinventaire solennel, quelle ressource
reste-t-il aux malheureux enfan s du survivant ?
On pourvoit citer indistinctement tous les objets portés^
dans l’inventaire du 25 janvier 176 2, comme évalués à des
prix si modiques, qu’il' est impossible de repousser les«
soupçons de fraude qu’ils font naître ; mais il suffit sans
doute d’en signaler deux ou trois..
Les articles 2, 4 , 5 , 9 et 14, contiennent la description;
de cinq lits, dont trois de maîtres et deux de domestiquesr
évalués au total à 186 francs. Cette estimation n’est-elle1
pas dérisoire? et peut-on la concevoir, quand on remarque1
que les cinq lits a voient six matelats, cinq couettes, cinq?
paillasses, sept couvertures, non compris les rideaux , les*
tringles en fer, etc. ? Dans le nombre étoit compris celui
du trousseau d’Anne Brirot, qurelle avoit apporté p o u r
200 irancs,. et auquel étoient ajoutés une1couverture en;
laine, une paillasse, deux matelats et des tringles; ilvaloit
seul pour le moins les 186 francs, montant de l’estimation.L ’article 12 concerne vingt-neut drap» de lits de’
maîtres, huit de domestiques, six grandes nappes, sept
petites, quatre-vingts serviettes et dix-huit torchons; le1
tout n’est porté qu’à 128 liv. 10 sous; c’est-à-d iro, ài
�c
1
6
3
17 sous la pièce; c’est-à-dire encore, à quinze fois au moins
au-dessous de leur valeur.
Les infidélités de l’inventaire sont encore plus frap
pantes.
L ’article 20 porte qu’il n’étoit d û , suivant le dépouille
ment du livre-journal du sieur Virotte, par le colon du
domaine Crolet , et par les métayers ou locataires des
biens de la dame Préveraud, de la terre du Ponçut et de
celle du M éage, dont il étoit fermier, que la somme de
deux cent cinquante-trois fra n cs.
Si l’on prend le livre-journal m êm e, d’après lequel
l ’inventaire fait cette indication, on trouve à ses folios 45,
58 , 71 , 11 0 , 113 et 1 2 3 , la preuve qu’il étoit dû huit
cent seize livres dix sous.
Peut-il >y avoir une infidélité plus considérable?
Les défendeurs croient pouvoir la couvrir, en disant
que le père commun a fait inventorier son livre-journal;
qu’il a été dès-lors de bonne foi ; qu’il n’auroit pas donné
des armes contre lui-même, si son intention eût été ma
licieuse ; que cela prouve que les différences qui existent
entre l’inventaire et le livre-journal ne sont- que l’elfet
d’une erreur involontaire.
L a réponse est toute simple. Que les fausses déclara
tions aient été malicieuses ou non, elles existent; et les
principes les considèrent comme suffisantes pour donner
lieu à la continuation de communauté.
L ’explication de la conduite du père commun est facile
pour les cœurs des demandeurs; ils répéteront qu’il cédoit
aux impulsions d’une famille exigeante; et que son amour
paternel l’emportant sur la nouvelle passion qui préoccupoit
�( 17 )
cupoit ses sens, il cherchoit lui-même à leur assurer les
moyens d’attaquer un jour l’ouvrage de sa foiblesse, et
les déposoit dans l’acte même qu’on le forçoit de faire
pour dépouiller sesenfans, afin que leur découverte devînt
moins difficile.
Il n’y a point de contradiction entre ce système et les
inductions tirées de la précipitation de l’inventaire, et du
dévouement des parens convoqués pour la délibération
de famille, aux volontés de Michel V iro tte, parce que
la conduite extraordinaire de ce dernier, avant l’inven
taire comme pendant sa durée, étoit toujours soumise
aux désii's d’une famille avide, par laquelle il étoit forcé
de se laisser diriger.
>
A u surplus, cette manière de voir les choses n’est que
pour l’intérieur des demandeurs. Il leur en coûteroit trop
d’accuser la mémoire d’un père qu’ils ont chéri et res
pecté jusqu’à son trépas, qui leur a laissé de longs regrets,
et dont la tendresse et les bontés ne s’effaceront jamais de
leur souvenir.
Mais peu importe pour la justice le prétexte des infi
délités dont l’inventaire fourmille; elle ne peut pas sonder
les replis du coeur humain : c’est le matériel des choses
qui la frappe. O r , des fausses déclarations nombreuses
existent; il faut qu’elle prononce avec sévérité les peines
qu’elles ont provoquées.
Il est dit au n°. 26 de l’inventaire, qu’il restoit dans
les domaines Barnier, Maillard et Protat, en blé non
battu, quatre mille cent gerbes de froment, et cinq cents
gerbes de seigle ; que le cent de gerbes de froment ne
pouvoit produire qu’une quarte de grains, et le seigle
G
�ÇiS)
dix coupes ; que cela étoit prouvé par les déclarations
des métayers, et la propre expérience des experts; et que
la grêle dont la récolte avoit été frappée étoit la cause
de la modicité de ce produit. L ’article porte tout le fro
ment à quarante-une quartes, et tout le seigle à six
quartes deux coupes : le prix du froment est fixé à 8 fr.
la quarte, celui du seigle à 6 fr.
Contradiction formelle avec le livre-journal, qui in
dique, pages 2 y 16 et 28, sous la date des 2b et 26 jan
vier 176 2 , que les gerbes produisoient plus de douze
coupes par cent.
Cette fausse déclaration est de vingt-quatre quartes de
grains pour trois domaines seulement : l’infidélité a dû
être la même pour la terre du Ponçut et celle du Méage.
L e livre-journal est muet sur ce point : mais dos que
l ’inventaire a porté le produit de ces deux fermes à la
même quantité de grains que celui des Bnrnier, Maillard
et Protat, la conséquence est qu’en effet ce produit étoit
le même.
Quelle soustraction ! . . . . Il n’y a pas une seule raison
à faire valoir pour l’effacer. C’est au même moment que
les deux opérations se font; elles se contredisent. L ’in
ventaire dit que les pailles ne rendoient que huit et dix
coupes de grains par cent; le livre-journal, sous la date
du même jour, annonce au contraire que ces pailles donno ient plus de douze coupes !. . . .
Viennent maintenant les omissions : elles ont un ca
ractère de gravité révoltant.
Elles portent, i°. sur une obligation de 319 hV. jg
consentie le 10 juin 1760, par les nommés Baflier, mé-
�*9 )
.
^
tayers du domaine Barnier, au profit de Michel Virotte;
J2°. sur une somme de 36 francs, payée avec les deniers
de la communauté, à la Saint-M artin 17 6 1, au sieur
de D o u zo n , en l’acquit des Baffier, en vertu d’un acte
du 2 septembre 1761 ; 30. sur le bail de la terre du
M é a g e , dont Michel Virotte étoit ferm ier, et d’une
somme de 464 liv. 6 sous 7 deniers, dont il étoit alors
en avance sur sa ferme, suivant une quittance du 14 mars
1762; 40. sur les foins de réserve produits par cinq prés,
avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit deux
chevaux ; 5°. sur les pailles des dîmes du M é a g e , qui
faisoient un objet de réserve; 6°. sur les Prébats, qui,
suivant le n°. 3 du livre-journal, faisoient un objet im
portant , à raison de l’importance des fermes.
L ’inventaire présente encore à la critique une infinité
d’articles.
L e sieur Virotte y dit qu’il n’avoit en argent monnoyé, ou qu’il ne lui étoit dû en arrérages de cens, sur
le terrier du M éage, que la somme de 5 oo francs; que
les habits, linges et bardes de la défunte avoient été
vendus , échangés ou employés à l’usage des mineurs.
Tous les bestiaux de ses biens et de ses fermes ne font
qu’une seule masse dans l’estimation.
Mais le sieur Virotte faisoit déjà de grandes affaires.
Gomment donc auroit-il eu si peu d’argent ?
Pourquoi n’a-t-il pas fait inventorier la liève qu’il devoit
tenir pour raison du terrier du Méage?
Peut-on présumer que les bardes d’Anne Brirot eussent
été employées pour deux petits garçons ? celle des deux
G a
�( 2° )
filles qui demeuroit avec le p è re , et qui avoit avoit à
peine six ans, pouvoit-elle les avoir usées en si peu de
temps ?
N ’est-il pas évident qu’il ne fut point fait d’estimation
des clieptels lors de l’inventaire ? Les experts, pour visiter
les divers domaines et locateries, auroient eu à parcourir
quatre à cinq communes éloignées les unes des autres.
Une pareille opération étoit-elle faisable en un jour qu’a
duré l’inventaire ? Les experts ne pouvoient pas être tout
à la fois à la maison du survivant pour apprécier les meu
bles, et dans les domaines pour évaluer les bestiaux.
S’il falloit, comme le dit Pothier , que les infidélités
fussent malicieuses pour donner lieu à la continuation de
communauté, son opinion s’appliqueroit parfaitement à
la cause. Cet auteur enseigne que l’omission est i-éputée
malicieuse, lorsque la multitude et la gravité des choses
ne permettent pas de penser q u ’elles aient pu échapper à
la connoissance du s u r v i v a n t , surtout lorsque ces choses
sont en évidence, et d’un usage journalier.
Pour la multitude des choses, elle est ici incontestable.
Pour la qualité, quoi de plus considérable qu’un tiers
de différence entre les grains inventoriés et les grains
provenus réellement de la récolte ! Quoi de plus grave
que la soustraction d’une obligation de près de 400 fr.
dans un inventaire qu’on ne fait pas monter ù mille écus
d’actif! Quoi de moins susceptible d’échappcr à la eonnoissance du survivant r que les foins que ses chevaux
mangent journellement, les pailles remplissant ses granges,
les bestiaux garnissant sa cour!
�( 21 )
Toutes ces présomptions de fraude , dira-t-on , sc dis
sipent, quand on voit que le sieur Virotte a fait inven
torier son livre-journal, qui mettoit au jour toute sa for
tune , toutes ces spéculations.
Cette considération a déjà été réfutée. Les demandeurs
répéteront qu’il y a eu fraude, dès que les infidélités et
les omissions avoient pour objet de-nuire aux mineurs.
Que le sieur Virotte ait agi par contrainte et pour plaire
à une femme qui le dirigeoit, ou qu’il se soit abandonné
librement à des vues spoliatrices et injustes, la fraude n’en
a pas moins existé..
Les défendeurs se font encore un moyen de ce que le
père commun n’a pas livré aux flammes le livre-journaL
qui décéloit ses omissions».
C’est un moyen pour les demandeurs, et non pour eux..
L a bonté de ce père vénérable lui prescrivoit de con
server soigneusement ce titre authentique, qui devoitun
jour faire réparer l’injustice dont il se repentoit..
Ainsi il est établi que l’inventaire n’étoit ni solennel,,
ni fidèle y et qu’il ne pouvoit pas interrompre la com
munautés
Cette interruption a -t-e lle pu résulter du mariage des.
demandeurs- hors la maison paternelle, avec dot du chef:
du père, ou du traité fait entre le père et les enfans,,
le 3; juillet 1784?
A u r o u x , sur l’art. 270 de la.coutume du Bourbonnais,,
n°s. 9 , 10 et n y cite un arrêt du 17 février 1610, par
lequel 011 avoit jugé que le mariage des enfans, hors*
la maison, paternelle, n’empèchoit pas-la continuation de;
�( 22 )
communauté. Ducher rapporte sur le même article le
célèbre arrêt des V idalin , du 3 mai i y 58 , qui a décidé
le même principe.
Voilà la jurisprudence bien établie.
S’il pouvoity avoir eu une jurisprudence intermédiaire,
il résulteroit de ces deux auteurs qu’elle ne s’est pas sou
tenue, parce qu’elle étoit contraire aux vrais principes.
IL n’a pas été question dans la transaction de 1784, de
la communauté, ni de sa continuation; on n’y a pas traité
de la validité ou invalidité de l’inventaire du 25 janvier
1762; et il a toujours été de principe que les transactions
n’engagent les parties que sur les objets dont elles ont
traité entre elles. Le sieur Virotte n’a jamais rendu son
compte de tutelle ; il ne leur a pas même fait raison du
mobilier, dont il a pris un septième dans la succession
d’Antoine Brirot. O r , il a toujours été de principe que
tout traité intervenu entre le tuteur et le mi ne ur devenu
majeur, est nul, s’il n’a été précédé de la reddition d’un
compte détaillé et de la remise des pièces justificatives.
Cette règle est consacrée de nouveau dans l’article 472
du Code civil.
Enfin , lors de la transaction , les demandeurs ne connoissoient ni l’inventaire , ni Je journal qui en démontre
‘ les inexactitudes et les omissions; cespièces étoient en la
possession de leur père et tuteur. Ce 11’est que depuis
son décès qu’ils en ont eu connoissance, et qu’ils ont
été à portée de faire valoir tous leurs droits.
A u total, suivant la coutume locale, comme d’après
tous les auteurs, il n’y a qu’un inventaire régulier et loyal,
�( 23
)
ou un partage, qui fasse cesser la communauté : ici il n’y
a qu’un inventaire plein d’irrégularités et de fraudes.
La première communauté n’a pas été partagée, puisque
les meubles même d’Antoine Brirot sont encore dûs aux
demandeurs, et que jamais il ne leur a été fait compte
de leur part dans les prétendues forces de la première
communauté : dès-lors la continuation est incontestable.
B O Y R O N - R O Z I E R , avocat et avoué,-
A R I O M , de l'imprimerie de T
h ib a u d - L a n d r i o t
de la Cour d'appel.
t
, imprimeur
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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A name given to the resource
[Factum. Virotte, Michel. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyron-Rozier
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les enfans du premier lit de Michel Virotte, demandeurs ; Contre Anne Delaire, sa veuve, et les enfans issus de leur mariage, défendeurs.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1814
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G1812
BCU_Factums_G1813
BCU_Factums_G1811
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coutume du Bourbonnais
secondes noces
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Text
MEMOIRE
P o u r A n n e DELAIRE,
veuve de
M ichel V irotte , et les s i x (Enfans
nés de leur mariage, appelans
C
L
les quatre Enfans du premier lit du
dit sieur V irolle, intimes.
o n t r e
’a p p e l, est, sur le fo n d , d ’un jugement par défaut du tribunal
de la Palisse.
L a dame V irotte e t ses enfans ont eu leurs raisons pour venir
directement aux pieds de la Cour.
Il a été répandu un mémoire im prim é, au nom des enfans du
premier lit du sieur V irolte.
' <
On y peint le sieur Virotte comme un père injuste, q u i , voulant
passer à de secondes n o ces, a pris des mesures qui tendaient ouver
tement à spolier les quatre orphelins laisses par sa première fem m e ;
A
�( 2)
E t la dame V iro tte com m e une fem m e am bitieuse, qui a obsédé
son m ari, pendant quarante-quatre ans qu’a duré leur union, pour
l ’empêcher de réparer ses torts par un acte de justice éclatant.
On n’opposera à ces injures que de la modération; on ne répondra
aux calomnies que par des faits.
L e sieur V iro tte , domicilié en Bourbonnais, a contracté un pre
mier mariage avec A n n e Brirot, le G août 1752.
Il fut constitué à A n ne B r i r o t , par ses père et m è r e , une dot de
2000 livres en deniers, et 4 ° ° livres de meubles.
O n voit dans le dernier feuillet du livre-journal du sieur V ir o tte ,
qu'il n ’a reçu de son beau-p ère, sur cette dot , ' que quelques
à-comptes, et de loin en loin.
Il eut quatre enians de ce m a ria g e , et il perdit sa fem m e au mois
de novembre 1766.
Il resta dans cet état de viduité jusqu’au mois de février 1 7 6 2 ,
q u ’il épousa A n n e Delaire.
11 prit la précaution, avant de contracter ce second m ariage, de
faire faire un inventaire dissolutif de la communauté qui avoit sub
sisté entre lui et A n n e B riro t, et qui avoit continué avec les quatre
enians qu ’il avoit eus de ce mariage.
C e t inventaire fut fait dans les formes usitées dans la Coutume
de Bourbonnais.
Cette première communauté n ’avoit pas élû irès-ajantageusc.
L e sieur Virotte et sa première femme étoienl entrés en ménage
sans avances , sans moyens pécuniaires.
Il s’éloit rendu fermier de quelques biens; mais les denrées
cloient au plus vil prix, com m e on peut le voir dans les pancartes
du t*mps. Une guerre désastreuse avoit tari toutes les sources de
la prospérité publique; et par surcroît d ’infortune, une grêle aff’r use avoit, en 1761 , dévasté toutes ses récoltes , et altéré la qua-
1 le
du
fieu
de grains qui avoient échappé à ce fléau.
O n ne doit donc pas être étonné que l ’inventaire dissolutif de la
irc.iiière communauté n ’ait donné q u ’un résultat do trois mille et
quelques cents livres.
�(
3
)
A près son second m ariage, les affaires du sieur V irotle commen
cèrent à s'améliorer.
L a paix de 1762 ranima l’industrie et le commerce. L e sieur
V ir o tte , secondé par une fem m e économe, active et laborieuse,
augmenta scs fe r m e s , se livra à l ’engrais des bestiaux pour la pro
vision de P a ris, fit de vastes entreprises sur les bois, et embrassa
tous les genres de spéculation dont les circonstances et les localités
pouvoient lui présenter les moyens. Sa fortune s’est accrue insensi
blem en t, et la seconde communauté a été portée ;'t un degré de pros
périté qui a excité l’envie des enfans du premier lit.
D e là , tous leurs efforts pour tenter de faire annuller l ’inventaire
destiné à dissoudre la première communauté contractée entre le sieur
V iro tte et leur m è re , et continuée avec eux jusqu’au second ma
riage du sieur V ir o tle avec la dame Delaire.
Pour parvenir a ce b u t, il a paru tout simple de calomnier les in
tentions du sieur V ir o t le , de le représenter, au moment de con
tracter une seconde union, méditant dans le silence et préparant
avec art des mesures propres à spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
On ne voit pas, à la vérité, ce dont il pouvoit spolier ces quatre
orphelins , car il étoit alors à peine au niveau de ses affaires. Mais
qu ’importe! a dit l ’auteur du m ém oire, calomnions, calomnions,
il en reste toujours quelque chose.
Cependant, ce père injuste, dénaturé, ne s’occupe, en contrac
tant un second m ariage, que de l’intérêt de ses enfans du pre
mier lit.
L a loi le rendoit commun avec sa seconde fem m e; il déroge a
cette loi j il stipule expressément, dans ce second contrat, que la
communauté n ’aura lieu e n lr ’e u x q u e dans le cas seulement que,
lors du décès de l yun ou de l’ autre des futurs, il y aura des en
fan s vivans du présent mariage, avec convention qu’ elle n’aura
pas lieu au cas contraire.
D e sorte que si la dame Delaire n’avoit pas eu d ’e n f a n t , elle étoit
condamnée à travailler gratuitement, pendant toute sa vie, pour
les enfans du premier lit, sans autre espérance qu ’un douaire préiix
de i/|0 f r ., stipulé par ce contrat.
�(
4)
On peut juger par là si lé cœur du sieur V irotte , préoccupé
d'une nouvelle passion , s’ étoit entièrement ferm é sur les intérêts
des demandeurs; si la fam ille étrangère, a laquelle il alloit
s'a llier , lui avoit imposé des lois contraires à ses sentimens.
M é m o ir e , page i .
L e sieur V iro lte ne se contentoit pas de s’occuper de la fortune de
ses enfans du premier lit, il ne négligeoit rien pour leur éducation.
D an s le premier â g e, il les a fait élever chez lui par des précep
teurs; de là il les a envoyés dans des collèges. Leurs études finies,
il les a tenus chez des procureurs; et enfin parvenus à 1 âge de de
venir eux—mêmes peres de fam ille, il leur a procure a tous des
établissemens avantageux.
Q u ’on lise leurs contrats de m a riag e, on les trouvera tous ins
titués par égalité avec les enfans du second lit.
Les filles elles-mêmes, condamnées par la Coutum e à une forclu
sion rigoureuse, ont été instituées héritières par égalité avec leurs
frères des deux lits.
Enfin le sieur V iro tte n ’a fait qu ’un seul avantage dans sa famille,
et cet avantage est en faveur du fils aîné du prertiier lit.
Q uan t à la dame V ir o tt e , elle en appelle à la conscience de ses
adversaires ; c’est à eux-mêmes , et non pas à l’auteur du M é m o ir e ,
qu ’elle demande s’ils n’ont pas trouvé en elle une seconde mère ;
si elle ne les a pas traités, dans tous les instans, avec les mêmes
soins, avec la même tendresse que ses propres enfans.
E t en faudroit-il d ’autre preuve que l’union qu ’elle a su m ain
tenir pendant quarante-quatre a n s , entre ses enfanç et ceux du
premier lit, sans q u e , jusqu’au décès du sieur V ir o tte , cette union
ait été troublée par le plus léger n u ag e?
Q uan t au caractère d ’ ambilion qu’on lui reproche , ce n’est
encore qu’à l ’auteur du Mémoire qu’elle l ’im p u te , et non aux
enfans du premier lit.
A u surp'us, un mot suffit pour la justifier sur ce point.
A u moment de la mort de Son m a r i, les greniers étoient pleins
de g rain s, les caves pleines de v i n , et elle a remis près «le 24,000 fr.
en num éraire, sans qu'elle s'en soit réservé une obole.
�C ’en est assez sur le chapitre des calomnies ; il est temps de
revenir à la cause. . .
•
85
L e sieur V iro tte est décédé au mois de novembre i o .
U n inventaire , fait en présence de tous les intéressés, a constaté
l ’état de sa succession.
:
Mais les parties ont été divisées sur le mode du partage.
Les enfans du premier lit ont cru pouvoir critiquer l’inventaire
fait par le sieur V ir o tt e , au mois de janvier 17G2, destiné à dis
soudre la première communauté contractée avec leur mere. Ils
ont prétendu que cet inventaire étoit défectueux ; que la première
communauté n ’avoit pas été interrompue; que dès-lors la seconde
communauté devoit être partagée en trois portions égales entre eux,
la dame Virotte et.la succession du sieur V iro tte ; et c ’est dans ce
sens qu ’ils ont form é , au tribunal de la P alisse, leur demande en
partage, qui a été accueillie par le jugement par défaut dont la
dame Virotte et ses enfans sont appelans.
Les enfans du premier lit opposent deux sortes de m oyens contre
cet inventaire.
Les uns sont relatifs à la form e, les autres à de prétendues frau
des, erreurs ou omissions.
A v a n t d ’entrer dans la discussion de ces m o y e n s , il n ’est pas
hors de propos de la préparer par quelques réflexions préliminaires.
L a continuation de co m m u n a u té, contraire aux lois romaines
et en général à tous les principes reçus eu matière de société, etoit
autrefois inconnue en Bourbonnais.
On lit dans l ’ancienne Coutum e de cette province , rédigée en
ï
493 , ce
qui s u it , article 6 du titre des C om m u n a u tés :
K Item , l’on tient par ladite C o u tu m e , que les enfans étant en
» puissance de père, n'acquièrent point de communauté avec leur» dit pere ni ses personniers , supposé qu ils soient seigneurs do
» leurs biens, à cause et com m e héritiers de leur feue mère ou autre. »
Cette continuation de communauté a été introduite dans nos
usages par l’article u 8 de l ’ancienne Coutum e de Paris.
�( G )
Elle a depuis été étendue à beaucoup d ’autres C o u tu m e s , et
spécialement à celle de B o urbo nnais, rédigée en i
.
520
On lit dans l'article 2 7 o d e cc tte nouvelle C o u tu m e , que « si l’un
« des conjoints par mariage , ou autres communs personniers, vont
» de vie à trép as, et laissent enfans ou autres qui soient leurs lie—
» ritiers, et le survivant desdils conjoints ne fa it aucun inven~
» taire, partage ou autre convention éqwpollant à partage, dedans
» 4'o jo u rs, à compter du jour du trépas du prémourant, la com « munauté de biens se continue et conserve entre ledit survivant et
» lesdits enfans, pour la portion du d é fu n t, si bon leur sem ble; et
» néanmoins sont saisis et en possession de la succession de leurs
» père et mère trépassés, ou autres , desquels ils sont héritiers. »
Mais cette continuation de communauté a toujours répugné à
tous les bous esprits, comme n ’étant propre qu’à faire naître des
procès interminables dans les fam illes, et ù orner les tribunaux.
Aussi les célèbres jurisconsultes qui ont rédigé le nouveau C o d e ,
en épurant nos anciennes lois , se sont-ils empressés d ’abroger cet
usa g e , parce qu’ il e'toit la source de procès innombrables , a dit
T ro n c h e t, dans sa discussion au conseil d ’état, sur l’article 1442
du Code.
Berber a dit après l u i , que« T ro n cb e t a très-justement objecté
» les embarras de cette continuation de communauté ; mais ,
» ajoute-t-il, ils deviendroienl plus grands encore si le survivant
» des époux se rernarioit, car le nouvel époux entreroit aussi dans
» la société J c est ce qui avoit lieu dans le ressort de la Coutum e
» de P a ris, et de celles qui avoient admis la continuation d eco m )> munauté ; o r , ¡’on conçoit qu’une telle institution est essentiel» lement mauvaise. »
« Q u an ta la continuât ion de com m u nauté, dit encore T re illia r d ,
» après T ro n cb e t et B c rlier, on a toujours réclamé contre cette
» institution ; la section saisira avec avidité les moyens qui pour« ront être proposés pour suppléer à ce remède dangereux. »
Quoi qu’il en soit, celte institution de la continuation de com
m u n a u té, essentiellement mauvaise, et contre laquelle on a tou
jours réclamé, étoit en vigueur au moment où le sieur V irotte a
�(
7)
passé à de secondes noces. Il a donc dû faire, pour l’in terrom p re ,
ce que lui prescrivoit la Cou tu m e sous l’empire de laquelle il vivoit.
C e lte C ou tu m e exigeoit aucun inventaire , partage, ou autre
convention équipollant a partage.
E n remontant à ce qui se pratiquoit dans les temps anciens, nous
voyons que la jurisprudence étoit singulièrement favorable à cette
interruption de communauté.
N ous lisons dans le Prêtre , 2' cent. ch. 22 , « qu ’anciennem ent,
» suïficiebat de fa cto factum fu isse inventarium, licet minus so» lernne , et que par quelque acte, le père ou la mère survivant
» eussent témoigné qu ’ils n ’avoient plus do volonté de continuer
» ladite communauté. »
D u m ou lin avoit dit égalem ent, sur l'article i
de la Coutum e
de Blois, s a tis e s t co n sta re description ern honâ. f i t l f a c t a n i .
L a plupart des commentateurs de la C ou tu m e de Bourbonnais
ont adopté cette opinion, entr’autres, Jean D écidant, Louis Semin,
et François Déculant.
A-uroux rapporte les expressions de ce dernier co m m en tateu r,
sur le mot I n v e n t a i r e : « Etiani minus soient n e, dit-il, quia hoc
83
j) nostrum statutum hoc paragrapho tantiun requirit ad interrupn tionem societatis. I n v e n t a i h e , p a r t a g e , d i v i s i o n ou a u t r e
» CONVENTION ÊQUIPOLLENTE. Undb S u ffltit , ajoute-t-il, simpleX
» declaratio contrarice 'voluntatis , aut actus societatis derogato» nus. Ita semper v id i observari: ita asserit ). Joannes D écid a n tf
» cujus opimonis erat ) . Ludovicus Sem in. »
1
7
O n trouve une multitude d ’arrêls dans Brodeau sur L o u e t ,
let. C . som. o , et dans tous nos autres arrêtâtes, qui ont décidé,
conformém ent à c es principes, qu ’un inventaire, quoique défec
tueux, étoit suffisant pour interrompre la communauté.
O n voit dans l’ un de ces arrêts, du 20 février 1610, rapporté
par Pelens, dans ses Actions foreuses, liv. , act. o, que le prin
cipal m o tif qui détermina la C our à rejeter les moyens opposés
contre l’inventaire qui avoit été fait pour dissoudre la première
com m unauté, fut q U’il ne pnroissoit pas raisonnable d ’appeler les
3
5
3
enfuns du premier lit au partage de la seconde communauté, puis-
�( 8 } .
que le premier mariage navoit dure que trois ans , et le second
quarante a n s, pendant lesquels s’ e toit accrue la communauté
par Vindustrie de celte seconde femme.
L ’auteur nous dit que « la C o u r a.déclaré l’inventaire avoir eu
» assez de force pour dissoudre la communauté; ce sont, ajoute-t-il,
» les mêmes mots desquels a usé M . de Harlay . »
D e nos jours , M . Cocliin a rappelé ces principes, et les a fait
valoir comme étant dans toute leur vigueur, dans la cause de Pierre
T lié ro u e n n e , et Marie A n n e Pingard , sa fe m m e , contre M arie
Blan chard, et Christophe B l a n c h a r d , enlans du premier mariage
1
4
de ladite Pingard. T o m . * > Pag ‘ ^ *
Il s’agissoit, c o m m e dans l ’espèce, d ’une question de continuation
de c o m m u n a u t é , dans la Cou tu m e de Senlis, fondée sur les pré
tendues défectuosités de l’inventaire fait par M arie P ingard, avant
de passer en secondes noces avec le sieur Tliérouenne.
L a Coutum e de Senlis exigeoit, comme celle de Bourbonnais ,
un inventaire et rien de plus, et elle n ’admettoit même pas d ’acte
équipollent, com m e celle de Bourbonnais.
M . Cocliin observe que nous avons en France deux sortes de
C outum es, qui règlent de quelle manière la communauté peut être
dissoute ou continuée.
« L a première de ces C ou tu m e s, dit-il, est de celles qui deman» dent, pour dissoudre la com m unauté, un inventaire fait et parfait
» avec un contradicteur légitime, et qui soit clos; ce que l’on cotn» prend SOUS l’idée générale d ’inventaire solennel : telle est la C ou j> tume de P aris, dans les articles 2/,o et 241.
» L a seconde espèce de Coutumes est de celles qui demandent
» simplement qu ’il soit fait un inventaire, sans ajouter qu ’il soit
)> solennel, o u , ce qui est la même chose, fait et parfait.
» D ans ces C ou tu m e s, le moindre acle dérogeant à la com m u» n a u t é , suffit pour en empêcher la continuation , et un inventaire,
» destitué même des formes ordinaires, en opère toujours la disso» lu lion.
» C ’est ce que décident unanimement tous les auteurs qui ont
» traité la matière , ajoute M . Cocliin , et en particulier Lebrun ,
�C9 )
» dans son T r a ité de la co m m u n auté, liv.
3,
cliap.
3,
sf.ct. i " ,
v n 10 et suivans. »
11 cite
aussi les différens arrêts rapportés par Brodeau sur L o u e t ,
qui ont jugé q u ’un inventaire, quoique d é lic tu e u x , n'en étoit pas
moins suffisant pour interrompre la communauté.
L a dam e V irotte pourroit sans doute invoquer toutes ces auto
rités avec confiance ; et faisant surtout 1 application à 1 espèce de
Parrèt de 1 6 1 0 , elle pourroit d ir e , comme on le disoit lors de cet
arrêt, et avec bien plus de vérité, que le premier mariage du sieur
V i r o t t e , avec A n n e B r i r o t , n ’avoit duré que quatre ans; que la
première communauté étoit nulle ou presque nulle lorsqu elle est
entrée dans la maison du sieur V iro tte ; que le second mariage a
duré pendant quarante-quatre ans, pendant lesquels S est accrue
la communauté par son industrie , et par les fruits d ’un patri
m oine précieux, qui ont été versés annuellement dans celte com
munauté , qui ont singulièrement contribué à en accroître les bé
néfices; qu’il y auroit donc lieu de dire, avec M . le président de
Iia r la y , que l ’inventaire, quand on le supposeroit minus s o le m n e ,
auroit eu assez de force pour dissoudre la communauté.
L a dame V iro tte pourroit soutenir cette thèse avec d ’autant
plus d ’avantage, que le sieur V iro tte , non content d ’avoir fait faire
un inventaire pour dissoudre la communauté d ’entre lui et ses
enfans du premier l i t , avant de passer à de secondes n o ce s, a
en outre consigné dans son contrat de mariage avec elle,
u n e
décla
ration qui prouvoit de plus en plus son intention bien prononcée c e
dissoudre cette première com m unaulé.ElIeest conçue en ces termes.
» Déclarant avoir fait faire inventaire dissolutif de la co m m u » nautéqui étoit entre lui et ladite défunte demoiselle A n n e Brirot,
m devant L o u h e r , n o ta ir e , le
»> la Coutum e. »
25 janvier •1762,
conformém ent à
Mais tout ce qu ’on a dit jusqu’ici, est moins pour le besoin de
la cause que pour fixer les principes de la maliere.
L a dame V iro tte et ses enfans peuvent aborder avec sécurité
l ’examen des moyens que leur opposent les enfans du premier l i t ,
B
�( 10 )
contre la validité de l ’inventaire sur lequel est fondée l’interrup
tion de la première communauté.
En e f fe t , cet inventaire a été fait dans la form e la plus rigou
reuse et la plus solennelle.
L e sieur Virotte a commencé par faire assembler, devant le
juge des lie u x , le conseil de f a m ille , pour nom m er un subrogé
tuteur à ses en fans mineurs.
C elte assemblée a été composée de parens et amis des m ineurs,
tous gons recom mandables, et tenant le premier rang dans le pays.
Si l'on en croit l ’auteur du M é m o ir e , on a écarté, à dessein, de
cette assem blée, le sieur A ntoine Brirot , aïeul des m ineurs, qui
étoit le défenseur ne de leurs intérêts, et qui pouvoit, mieux que
personne, les garantir de la spoliation dont leur père cherchoit à
les rendre victimes.
M ais on voit un Antoine Brirot parmi les parens assignés, et
cet Antoine Brirot ne peut êlre que l’aïeul des mineurs.
C e n ’est donc pas la faute du sieur V ir o tte , si le sieur Brirot
n ’a pas assisté à celte assemblée.
Il est d ’ailleurs de notoriété, que le sieur Brirot éloit alors accablé
d ’infirmités , et bors d ’état de sortir de chez lui.
C 'est un ja it fauac , dit l ’auteur du M ém oire, page i .
E h bien! si la C o u r croit ce fait de quelque im portance, la dame
V ir o tle et ses en fans déclarent q u ’ils l’articulent d ’une manière
expresse, et qu ’ils offrent d ’en faire la preuve par toutes les voies
5
de droit.
Q uan t au subrogé tuteur ou curateur avec lequel devoit être
fait l’inventaire, il n ’a pas été du choix du sieur V i r o t l e , mais
de la famille assemblée, qui a jeté les yeux sur le sieur de Finance,
châtelain de Chavroche, proche parent des m ineurs, qui avoit
tellement la confiance de la famille B r ir o t, qu’il fut de rechef
n o m m é , en 1764» subrogé tuteur des en fans d ’Antoine Brirot.
C e t inventaire a donc été fait avec légitime contradicteur. C ’étoit la première et la plus importante formalité exigée par la C o u
tume de Paris et par les lois les plus rigoureuses sur la matière.
T o n s les autres moyens de forme, q u ’on oppose contre cet In
ventaire, ne sont que de pitoyables chicanes.
�1
( 11 )
T e l est le m oyen tiré de ’assignalion donnée le m êm e jour aux
sept parens ou amis qui se sont réunis pour le conseil de fam ille,
com m e si l ’on ne savoit p as, d ’une p a r t, que cette assignation étoit
superflue, puisqu’ils pouvoient se réunir volontairement chez le
j u8e > pour délibérer, sans assignation préalable, et d ’autre p a r t ,
q u ’il est tout simple que s’étant tous trouvés dans le même lie u ,
on leur ait donné en même temps l’assignation pour assister au
conseil de famille.
T e l est encore le moyen tiré de la circonstance que c'est le
sieur Loulier , qui après avoir tenu l’assemblée comme b a i ll i , a
l'ait l’inventaire com m e notaire. (*)
C o m m e si l’on ignoroit que presque tous les baillis des justices
seigneuriales étoient en mêm e temps notaires ; que ces fonctions
n ’avoient n e n d ’incompatible; que lorsque le sieur Louher travailloit à 1 inventaire com m e notaire, il avoit épuisé ses fonctions
de juge ; et qu enfin , tel étoit l’usage universel dans les campagnes,
usage tellement consacre, q u e, lut-il abusif, il iaudroit le m ain
tenir pour la tranquillité p u bliq u e, d ’après la m axim e tirée d e l à
loi Barbarius P hilip p us : Error communis f a c it fu s.
Il faut placer dans la m êm e classe des chicanes vraiment pi
toyables , le m oyen que l’on prélend tirer de la circonstance que
celui qui a fait les fonctions de substitut du procureur fiscal à
l’ assemblée de fa m ille , étoit cousin de la dame Dclaire.
Indépendamment q u ’on n'établit pas cette p are n té , qu’on en
établit encore moins le degré, où a-t-on pris qu’avant le mariage
du sieur V ir o tte avec la demoiselle D e l a i r e , ce prétendu cousin
d û t se récuser dans une assemblée de famille des mineurs V irotte
dans laquelle il n ’étoit pas question, et il nepouvoit pas être ques
tion de cette prétendue cousine ?
O n prétend encore que ce prétendu cousin n ’étoit ni gradué, ni
cu rial, dans la justice de M ontaigut-le-Blanc; mais il est permis,
après un demi-siècle, de tout hasarder sur des faits de ce genre.
(*) M. L o u h er étoit un notaire distinguo par *?s t.ileas, ses lum ières et ses v e rtu s ; il a
é té envoyé au tribunal révolutionnaire, avec M. et M m e. D avaux et 13......par G.....M. Louher
y a péri avec M . et Mme. U n a u * , lo 2 ; floréal an 2.
Lettres imprimen« de G ..... à Fouquier-T.tinville , des 1 6 ventoso et 14 cerminal an s- cer
tifiées pour copie conforme, par Paris , greffier du tribunal révolutionnaire.
�( l2 )
Sa présence au procès-verbal n’ est pas du fait du sieur V ir o lt e ; ce
n ’est pas lui qui l’y a appelé; et par cela seul q u ’il y a fait telle ou
telle fonction, il est présumé en avoir eu le droit, jusqu’à preuve
contraire.
C e n ’est pas une chicane moins pitoyable que le moyen q u ’on
prétend faire résulter de ce que le sieur Feyard a f a i t , dil-on , les
fonctions d ’expert dans l’inventaire, après avoir assisté au conseil
de famille.
L ’objet du conseil de fam ille étoit uniquement de no m m er un
subrogé tuteur qui eût qualité pour assister à l’ inventaire, com m e
légitime contradicteur; cette mission rem p lie, le sieur Feyard
pouvoit se livrer à toute autre fonction.
A u surplus, on ignore s i , com m e le prétend l’auteur du mé
m o ir e , le sieur F eyard a bu et mangé avec le sieur V ir o tte , pen
dant la durée de l’inventaire; c ’est un fait qu’il n’est pas facile
d ’éclaircir après
ans: mais ce qu ’il y a de ce rtain , c ’est que
c ’est abuser d ’une manière étrange de la disposition de l’ordon
45
nance de 1 6 6 7 , que de l’appliquer à ce cas, et q u ’il faut être ré
duit à une grande disette de m o yens pour en employer de pareils.
Après avoir ainsi épuisé sa critique sur la forme de l ’inventaire,
l ’auteur du Mémoire en vient aux erreurs, aux om issions, aux
prétendues infidélités de cet inventaire , au moyen desquelles le
sieur V irotte est parvenu a spolier les (¡uatre orphelins laissés
par sa première femme.
11 est encore b o n , sur ce point , de commencer par fixer les
principes de la matière. O n ne peut les puiser dans une source plus
pure que dans P o llu e r,
1 auteur le plus
accrédité du clroît coutu-
mier. Il s’exprime ainsi, dans son traité de la C om m u n au té, n° 79^:
« Q u oiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire , si elles ne
» sont pas malicieuses , les effets omis ayant pu échapper à la
» mémoire du survivan t, l ’inventaire ne laisse pas d ’être valable,
» et d'empêcher la continuation de communauté.
» L ’omission est présumée malicieuse, dit-il ailleurs, n° G88,
.» lorsque la m nltiludedes choses omises et la qualité de ces choses
)i qui éloient en évidence et d ’un usage journalier, ne permet pas de
�( i3 )
» penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du s u r v iv a n t,
» qui ne les a pas comprises dans son inventaire.
» L ’omission doil surtout êlre jugée m alicieuse, lorsque les effets
» om isdans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis la m ort ou
w pendant la dernière maladie du prédécédé, détournés du lieu où ils
» étaient, el portés hors la m aison, ou cachés dans quelque recoin. »
Si après avoir ainsi posé les principes de la matière, on passe aux
erreurs ou omissions qu’on reproche à cet inventaire, que voit-on?
U n e prétendue modicité dans l’estimation de quelques effets
mobiliers qui sont inventoriés.
Mais , d ’abord , nous répondrons ce que disoit M . Cochin à une
semblable objection , dans l’affaire de Marie P in g a rd , fem m e
T herou en ne :
« L a critique que l’on fait sur le prix des estimations , ne regarde
» point M arie Pingard; c ’est le fait des experts, qui se sont sans doute
» conduits suivant ce que leur conscience leur a dicté. »
2ent. t Ces sortes d ’estimations étant soum ises, en C ou tu m e de
Bourbonnais, au droit de crue ou parisis du cinquième en sus de
l’estimation des experts, elles ne dévoient pas être portées à une
valeur rigoureuse.
3 nt-,
en prenant pour exemple le lit qui faisoit partie du trous
seau d ’A n n e B rlro t, cette estimation est facile à justifier.
O n se plaint que ce lit n ’a été porté qu’à 100 francs dans l ’in
ventaire, tandis qu’il avoit été porté à 200 francs par son contrat
de mariage.
M ais qu ’on ouvre le livre-journal du sieur V ir o tte , dans lequel
il écrivoit jusqu’à scs plus secrètes pensées , et on y verra , au
dernier fe u ille t, qu’en se rendant compte de ce qu'il avoit reçu de
son beau-père, sur ce qui lui avoit été promis, il d i t , en parlant
de ce lit, estim é 200 francs par M . Drirot, mais c e s t trop cher.
On avoit promis au sieur Virotte pour 200 francs de m e u b le s;
mais on lui donnoit le moins q u ’on p o u v o it,e t il recevoit ce qu'on
vouloit lui d o n n e r, plutôt que de se brouiller ou d ’avoir dos con
testations.
11 avoit reçu ce lit pour 200 f r . , parce que son beau-père, qui
en avoit été lui-même l’appréciateur ; l ’avoit exigé ; mais ¡1 a voulu
�( H )
consigner cette injustice dans son registre, en faisant mention que
ce lit étoit porté à un prix excessif.
Est-il donc bien étonnant que ce même l i t , après avoir servi
d ix ans , n ’ait été estimé que xoo 1., et cela dans un inventaire qui
étoit soumis à la c r u e , ou au droit de parisis du cinquième en sus,
ce qui le portoit à
liv.
C e qu’on vient de dire s’applique également à l'estimation dulinge.
125
D ’une p a r t , cette estimation n’est pas du iait du sieur V ir o tte ,
et ne pourroit avoir aucune influence sur le sort de l’inventaire.
D ’autre p art, il ne faut pas perdre de vue que le sieur Virotte
n'avoit alors q u ’un très-petit m é n a g e , que son linge étoit form é
de la toile la plus grossière, qu ’il avo'it dû dépérir depuis le décès
de la dame B r i r o t , que sa maison avoit été abandonnée à des do
mestiques ; qu’enfin la crue ou le droit de parisis faisoit un de
voir aux experts de baisser le prix des objets in ven toriés, puisque
celui qui en demeuroit ch a rg é , étoit tenu d ’un cinquième en sus.
L ’auteur du M ém o ire passe ensuite aux infidélités.
« L ’article 20 porte, d it-il, q u ’il n ’éloit d û , suivant le dépouille» m ent du livre-journal du sieur V ir o lt e , par le colon du domaine
» C ro le t, et par les métayers ou locataires des biens de la dame
>> P r é v e r a n d , de la terre du P o n ç u t, et de celle du M é a g e , dont
» il etoit f e r m ie r , que la somme de 253 liv.
n Si l’on prend le livre-journal m êm e, d ’après lequel l’inventaire
» fait c e t t e indication, on trouve ses folios
,
, 71 , n o , i i 3
» et 123 , la preuve q u ’il étoit dû 816 livres 10 sous. »
5
45 58
L ’objection reçoit plusieurs réponses également décisives.
L a première est que l’inventaire constate que le sieur Virotte
a livré son journal au notaire qui procédoit à cet inventaire, pour
en faire le dépouillement.
C e qui établit,
d ’u n e
p art, que cette erreur, s’il y en avoit, ne
scroit pas son ouvrage;
D ’autre p art, q u ’il y mettoit toute la bonne foi, toute la loyauté
et tout l’abandon qui étoient dans son caractère.
2*'nt- , que ce qui exclut toule idée d ’infidélité, c ’est qu'après
avoir livré son journal pour en faire le dépouillem ent, il exige
�( i5 )
q u ’il soit inventorié, pour servir de m onum ent éternel de la droi
ture et de la loyauté de sa conduite.
C e n ’est pas tout; il continue de se servir du mêm e livre-journal,
d ’y écrire toutes ses affaires, et il a eu soin de le conserver jusqu’à
sa mort.
On ne craint pas de faire, à la mémoire du sieur V i r o t t e , l ’in
jure de dire que s’il a conservé si précieusement ce livre-journal,
c ’etoit pour assurer à ses enfans du premier lit les moyens d ’atta
quer un jour cet inventaire, et q u ’il les déposoit dans l ’acte mêm e
qu ’on le forçoit de faire pour dépouiller scs e n fa n s , afin que leur
découverte devînt moins difficile. M ê m ., page 17.
Malheur à l’homm e qui a pu concevoir une pareille pensée! Q uoi!
on pourra croire que le sieur V ir o tte , le plus respectable dos pères,
aura conservé avec so in , dans ses archives, son livre-journal pen
dant un dem i-siecle, dans 1 espérance q u ’après sa mort d deviendra
un brandon de discorde entre sa veuve et ses enfans des deux lits,
et qu'en descendant dans la tom b e, son ombre aura souri au plaisir
amer de les voir s’entredéchirer, et dévorer, en dissensions juridi
ques, la fortune q u ’il a pris tant de peine à leur amasser?
Revenons à des idées plus ju stes, plus naturelles et plus satis
faisantes pour le cœur humain.
L e fait seul que le sieur V iro tte a voulu que ce livre-journal
fu t inventorié, prouve invinciblement l’impossibilité qu ’il voulût
être in fid èle, et qu ’il voulût spolier les quatre orphelins laissés
par sa première fem m e.
C e fait seul prouve encore invinciblement l’impossibilité qu il f û t
infidèle, p u isq u e , dès q u ’il existoit une preuve écrite de cette
créance vraie ou prétendue, dans le livre-journal, et que ce livrejournal étoit inventorié, cette prétendue infidélité se réduisoit tout
au plus à une erreur de calcul, toujours sans conséquence, et qui
d ’iiilleurs n ’éloit pas du fait du sieur Virotte, mais de ceux à qui ce
journal avoil été livré pour en faire le dépouillem ent, com m e le
constate l’inventaire.
A u surplus, nous sommes bien éloignés de convenir de cette
erreur, même sous le point de vue d ’erreur de calcul. N ous n’avons
�( 16 )
pas dans ce m oment ce livre-journal sous les y e u x ; m a i s , d ’après
l ’habitude qu’ a l’auteur du M ém oire de tout hasarder, il est trèspermis de croire qu'avec un examen plus approfondi et fait sans
p ré v en tio n , on trouveroit un résultat bien différent de celui que
ce M ém oire nous présente.
A cette prétendue infidélité succèdent les fausses déclarations sur
le produit des gerbes de blé qui étoient alors engrangées. O r, ce pro
duit est fixé par approximation par les experts; il n ’est donc pas du
fa it du sieur V irotte. A in s i, nul reproche à lui faire, quand il y
auroit une erreur quelconque sur ce produit probable des gerbes de
b l é , qui n ’étoient pas encore battues.
M ais cette erreur n ’est encore que dans l'imagination de l ’auteur
du M ém oire.
L e produit des gerbes qui se Irouvoit écrit dans le livre-journal
au m om ent de l’inventaire, ne pouvoit pas être celui des gerbes
qui étoient engrangées, et qui étoient encore à battre.
Les inductions que l’on veut tirer de ce registre, qui porte,
d i t - o n , que le cent de gerbes produisoit douze coupes, tandis
q u ’il n ’est porté qu ’à dix dans l’inventaire, ne sont donc q u ’une
absurdité.
E t quand on voit que la discussion sur le produit présumé de
ces gerbes de blé se termine par cette exclam ation, « Quelle sous» traction ! . . . . . i l n’y a pas une seule raison à fa ire valoir pour
}) l ’effacer. », on croit voir la montagne en travail.
« V ienn ent maintenant les omissions, dit l’auleur du M ém oire;
» elles ont un caractère de gravité révoltant. »
Encore la montagne en travail.
5
L a première a pour objet une obligation de 5 1 9 liv. 1 s o u s , du
10 juin 1 7 6 0 , due par les nommés Baiier, métayers du domaine
Barnier.
C e tte omission est facile à justifier.
D ’abord, il n 'y a pas eu de soustraction , c ’est-à-dire d ’omission
volontaire et faite m alicieusem ent , puisque la pièce existe, et
�( 1
7
)
qu ’elle a été conservée par le sieur V ir o lte , pendant quarante-quatre
a n s, depuis cet inventaire.
2 ment. f cette obligation étoit rappelée sur le liv r e -jo u r n a l ,
44
au compte de ces m étayers, folio
* et
sieur V iro tte n ’a pu
avoir ni la volonté de la soustraire, ni la possibilité de la soustraire,
puisqu'il a livré lui-même son registre pour en faire le dépouille
m ent , q u ’il a ensuite exigé qu’il fût inventorié, et qu’il s’est sou
mis par là à le représenter dans tous les instans.
A u surplus, il est facile d’expliquer comment cette obligation a
pu échapper à ceux qui ont fait le dépouillement du livre-journal du
sieur Virotte.
, Il est probable que cette obligation est restée chez le notaire
qui l ’avoit reçue, et qu’on ne l ’aura pas trouvée parmi les papiers
du sieur V iro lte au m om ent de l ’inventaire.
E t il n ’est pas étonnant d ’ailleurs qu’on ait fait cet oubli, quoi
q u ’elle fût rappelée dans le livre-journal, la page 4 4 , où cette obli
gation étoit rappelée dans le compte des B a fïe r, se trouvant bâtonnée par e r r e u r , comme on le lit à la quatorzième ligne de ce
com pte, écrit de la main du sieur V iro tte :
« L e compte du & février 1761 est bon, quoiqu’ il soit barré;
)> c’ est une erreur. Signé Virotte.»
On conçoit q u ’en faisant le relevé de ce livre -jou rn a l, on n'a
pas dû porter son attention sur les endroits M to n n é s ; de sorte
que la mention de celte obligation a dû naturellement échapper
à celui qui faisoit le dépouillement du registre.
, C V st ainsi que s’explique cetle omission , la seule réelle, mais
faite si innocem m en t, que le sieur Virotte n ’a mis à l’éca rt, ni
l'obligation , ni le livre -jou rn a l où elle étoit relatée, et qu ’il a
au contraire voulu que ce livre-journal fût inventorié, com m e une
preuve irrécusable de sa bonne foi.
L e second article d ’omissions qu'on reproche à cet inventaire,
est d'une somme de
livres au total 011 de 18 livres pour la m o itié,
dont on suppose que le sieur V irotte a voulu spolier les quatre
56
orphelins de sa première fem m e.
G
�36
( »8 )
O r , ces
liv. avoient etc payées au sieur de Douzon par le sieur
V ir o tte , à la St. M artin 1761.
C 'étoit une dette de la co m m u n auté, qu’avoit payée le sieur V ir o tte , et qui ne devoit pas être portée en a ctif dans l’inventaire.
L e troisième a pour objet le bail de la terre du M é a g e , dont le
sieur Virotte étoit fe rm ie r , et une somme de 464 livres 6 sous 7
den iers, dont il é to it, d it-o n , en avance sur sa l e r m e , suivant
une quittance du 14 mars 1762.
O n n'a sous les y e u x , ni le l i v r e -jo u r n a l, ni cette quittance;
mais sa date seule, du 14 mars 17 6 2 , prouve le contraire de cette
avance prétendue, puisqu’elle est postérieure de près de deux mois
à l'inventaire, et plus d ’un mois au second mariage du sieur Virotte.
L e q u a t r i è m e e s t relatif, dit-on, aux foins de réserve produits
par cinq prés, avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit
deux chevaux.
N ous dirons ici avec M . Cocliin , dans la cause de M arie P in gard, « que pour établir une pareille omission, il faudroit établir
» q u ’il y avoit réellement des foins.
» Mais il d e v o it, dit-on, y en avoir, continue M . C och in .
« E t sur quoi, dit-il, est fondée cette nécessité ? D ’ailleurs, on
>”> inventorie ce qui est , et non pas ce qui doit être. »
A u surplus , il n’est pas même vrai de dire q u ’il dût y en avoir.
D ’a b o rd , il n ’est pas exact de dire que le sieur V iro tte eût des
bœ ufs gras dans ses écuries; on voit dans le livre-journal, page
3 i 4 , qu’il n ’a commencé ce commerce qu ’en 1771.
D ’ailleurs, le foin de réserve que l’on suppose avoir dû se trouver
chez le sieur V ir o t t e , au moment de l’inventaire, avoit dû être
cueilli au mois de juin 17G1. O r , il est naturel de croire que ce
foin avoit été vendu par le sieur V ir o tte , depuis le mois de juin
jusqu’à la fin de janvier su iva n t, époque de cet inventaire; sur
tout dans une année aussi désastreuse que l’année 17G1 , où le
sieur Virotte avoit perdu la presque universalité de ses récoltes
par la g r ê le , ce qui avoit dû le forcer d ’user de toutes scs autres
ressources pour payer le prix do ses fermes.
A quoi ou peut ajouter que le sieur V iro tte ayant pris de cep-
�C 19 )
taines quantités de foin en entrant dans ses fe rm e s, il devoil en
rendre pareille quantité à sa sortie; et sous ce point de vu e, ce fo in ,
s ’il s’en étoit t r o u v é , n ’auroit fait que représenter celui qu ’il auroit pris en entrant en fe rm e , et n ’auroit pas dû être in ve n to rié ,
comme ne formant pas un a ctif réel de la communauté.
L e cinquième est relatif à l ’omission des pailles des dîmes du
-Ménge, qui faisoient, d it-o n , un objet de réserve.
O n sait qu’en Bourbonnais, à mesure que les blés sont écossés,
on livre les pailles aux colons, pour la nourriture des bestiaux ou
pour faire des engrais; ni le propriétaire, ni le fermier, ne sont en
usage de se les approprier.
E t à raison de la grêle de 1761 , il y a tout lieu de croire q u elle s
furent bien loin d ’être suffisantes en
colons.
17G2 , pour les besoins des
E n fin , le sixieme article d ’omission est re la tif aux prebats ,
q u i , dit-on, suivant le 11»
du livre-journal , faisoient un objet
im p o rta n t, à raison de l ’importance des fermes.
Cet objet important est affermé 12 boisseaux au ferm ier des
Maillards.
3
C es 12 boisseaux, qui étoient sans doute du seigle, pouvoient
alors valoir 6 liv. à raison de la vilité du prix des denrées.
A i n s i , c'est un écu de
3
livres dont ce père injuste a voulu
spolier les quatre orphelins de sa première fem m e , lui qui en
passant son contrat de m ariage, quelques jours après, a la précau
tio n , pour ménager leurs intérêts, de stipuler qu ’il n ’y auroit
pas de communauté entre lui et la seconde f e m m e , s’il n ’y avoit
pas d ’enfcins de leur mariage.
A u surplus , pour entendre cet article, il faut savoir que les pré
bats sont des gerbes qu ’on est en usage, dans quelques domaines, de
battre une première fois légèrem ent, pour en extraire un premier
grain destiné aux semences, et que l ’on finit de baltre en hiver pour
achever d ’en tirer les grains qui y sont restés.
Il paroît qu ’il y avoit eu des prébats dans le domaine des M a il
lards, et que le sieur Virotte avoit affermé au métayer de ce do
maine le grain que ces prébals pouvoient produire, moyennant i a
boisseaux.
�( 20 )
C e t objet n ’a pas été omis dans l’inventaire ; il a été compris
dans le dépouillement général qui a été fait du livre-journal, pour
faire le relevé des dettes de ces métayers.
A in s i, cette prétendue omission n ’est pas seulement ridicule et pi
toyable en elle-même, elleestencore absolument contraire à la vérité.
L ’auteur du M é m o ire , après avoir épuisé le chapitre des omis
sions , ajoute que l’inventaire présente encore à la critique une
infinité d ’articles :
T e l s que la déclaration de oo livres en numéraire ou arrérages
de ce n s;
i
E t celle faite p a r le s i e u r Virotte*, portant que les habits, linges
et hardes d ’A n n e Brirot, sa première fem m e, avoient été vendus,
échangés ou employés à l’usage des mineurs.
5
Est-il étonnant, sur le premier article, que le sieur V iro tte n ’eût
pas une plus grosse somme en numéraire , après une grêle comme
celle qu ’il venoit d ’essuyer, et après avoir payé le prix de scs fermes,
dont les échéances étoient sans doute à N o ë l?
E t quant aux linge et hardes de la dame B r ir o t, estimés par
son contrat de mariage à 200 livres, le sieur V iro tte pouvoit-il en
faire un meilleur usage, que d ’employer pour ses enfans tout ce qui
en étoit susceptible? et ne devoit—il pas, en bon père de fa m ille ,
vendre et échanger le surp lus, com m e il l ’a fa it, pour en éviter
le dépérissement?
L a critique sur l ’article des bestiaux n ’est pas plus raisonnable;
tout étoit constaté par des baux à ch e te l, et tout consistait ü cet
égard dans quelque légère différence dans la perte ou le croit.
L ’auteur du Mém oire termine sa discussion sur cet inventaire,
par rappeler les expressions de P ollu er, et nous nous plaisons à les
rappeler com m e lui :
« Q u oiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire, si elles ne sont
» pas malicieuses, les eilels omis ayant pu échapper à la mémoire
» du survivan t, l'inventaire ne laisse pas d'être valable, et d ’em » pêcher la continuation d(T communauté. »
Nous répéterons avec lui que l’omission est présumée malicieuse,
�( 21 )
lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses
qui étoient en évidence et d ’un usage journalier , ne permettent pas
de penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivan t,
qui ne les a pas comprises dans son inventaire;
Que « l’omissiondoitsurtout être jugée m alicieuse, lorsque les ef» fets omisdans l ’inventaire ontété, par le survivant, depuis la m o rt
» ou pendant la dernière maladie, détournés du lieu où ilsé to ie n t,
« et portés hors de la maison ou cachés dans quelque recoin. »
Ici on ne voit rien de soustrait, rien deilû tou rn é, rien de caché.
T o u s les objets matériels sont représentés ; tout ce qui tient au
calcul est mis en évidence par l'exhibition du livre-journal, par
le dépouillement qui en est fait. S ’il se trouvoit que sur quelque
article ce dépouillement n ’eût pas été fait avec une exactitude assez
scrupuleuse, il ne faudrait pas l’imputer au sieur V iro tte , qui a
livré ce registre à honnête, au probe L oulier, notaire, chargé de la
confection de cet inventaire, et qui y mettoit tant de loyauté et de
bonne foi , q u ’il a exigé expressément qu’ il fû t inventorié, pour
être représenté dans tous les instans.
U n seul article peut laisser, au premierabord, quelque léger pré
texte à la critique; c ’est l ’obligation de ig francs.
1
3
Mais quand on voit que cette obligation avoit pu rester chez
le notaire qui l’avoit r e ç u e , et ne pas se trouver parmi les papiers
du sieur V ir o tt e , au moment de l’inventaire;
Q u ’il n ’avoit ni la volonté ni la possibilité de la soustraire, puis
q u ’elle étoit couchée sur son livre-journal inventorié, à l’article du
44
compte de ses métayers des Barniers, folio
»
Q ue ce compte avoit été rayé par erreur , comme on le lit dans la
note du sieur V iro tte , écrite et signée de lui au même folio, ce qui
avoit dû naturellement détourner l’attention de ceux qui faisoient
le dépouillement de ce journal;
Quand on considère, enfin , que le sieur V irotte a conservé pré
cieusement cette obligation jusqu’à sa m o rt; celle omission, qui
cesse d ’en être une, dès que l’existence du titre est constatée par le
journal inventorié, dépose hautement en faveur d e là bonne foi du
6ieur V iroU e ; et d e là loyauté de l’inventaire.
�( 22 )
A joutons q u e , s’il en étoit besoin pour la c a u s e , on pourroît
rappeler ce que dit le Prêtre : Sufficiebat de facto factum fu isse
inventariutn, licet minus solemne;
C e que dit Dum oulin , sur la Coutum e de Blois : Satis estcons-
tare descriptionem bond fid e factam ;
C e que disent François D é c id a n t, Jean Déculant et Louis Sem i n , commentateurs de la C ou tu m e de Bourbonnais, sur le m ot
I n v e n t a i r e : Eliani minus solem ne. . • sufficit simplex declaratio
contrariée 'voluntatis , aut actus societahs derogatorius : itasem per aiidi obserrari.
On pourroit dire que les nom breux arrêts cites par Brodeau sur
L o u e t , ont jugé que des inventaires , quoique d é fe ctu e u x , suffi
s s e n t pour interrompre la co m m u n auté, surtout dans les C o u
tum es qu i, com m e celle de Bourbonnais, n ’exigent q u ’aucun in
ventaire ( talis q u a h s) , partage ou autre acte équipollent;
Que dans la plupart de ces arrêts il étoit question d ’om issions,
çt m êm e de soustractions ;
Q u e dans celui de 1610, cité p ar P e le n s, « la
5e nullité
é to it,
)> dit l’a uteu r, qu’il y avoit eu plusieurs omissions j »
Q u e dans la cause plaidée par M . Cocliin , il étoit au$si ques
tion d ’omissions considérables.
O n pourroit enfin citer l’opinion de Renusson, dans son traité de
la C om m u n au té, part. , cliap. 2, n*
, et ce que dit son anno
ta te u r , page 284, qu’ un inventaire infidcle n’empêche pas Vinter
3
35
ruption de la communauté’.
A u surplus, on ne peut assez admirer la sagesse de ces décisions,
qui ten doientà faciliter par toutes sortes de moyens l’interruption
d e l à continuation de co m m u n a u té , lorsqu’on voit nos législateurs
reconnoltre que c’étoit une institution essentiellement mauvaise,
une source intarissable de questions épineuses, de difficultés inex
tricables, propres à mettre en défaut toute la sagacité des plus pro
fonds jurisconsultes, qui avoient donné lieu à des milliers de vo
lum es in-folio, dont les bibliothèques étoient encombrées; et que
le résultat le plus ordinaire de ces continuations de communautés
étoit la ruine assurée des enfans d ’un i°r , 2’ ,
3*,
et quelquefois
�♦
(
)
d ’un 4*lit, lorsqueles survivans des père et mère avoient successive
ment contracté plusieurs mariages.
Il est d ’ailleurs peu de cas où l’injustice de cette continuation de
communauté fût plus frappante que dans l’espèce.
Lorsque la dame V irotte est entrée dans la maison de son m a r i,
la fortune des quatre enfans du premier lit consistait dans la moitié
du montant de l’inventaire, qui étoit, au total, de io fr.
Ils ont donc été nourris, entretenus , élevés aux dépens de la se
3 6
conde com m u nauté; c’est cette seconde communauté qui a payé
et nourri les précepteurs; p ay é , pour les mâles, les pensions dans
les collèges, chez les procureurs; pour les filles, les pensions dans
les couvons; c ’est la seconde communauté qui a fait les irais de
leur établissement; c ’est encore en partie aux dépens de cette se
conde com m unauté, q u ’ils ont été dotés et constitués.
A in s i, non-seulement ils n ’ont pas contribué un seul instant au
b ie n , à l’avantage de cette seconde com m unauté, ni par leurs tra
v a u x , ni par leurs revenus; mais ils n ’ont cessé de l’épuiser par des
dépenses excessives au-dessus de leur état et de ce q u ’étoit alors la
fortune du sieur Virotte.
L a dame V iro tte ne rappelle pas ces dépenses pour en faire des
reproches aux enfans du premier lit; non-seulement son mari les
a faites de son consentement, mais elle y a contribué de tout son
pouvoir; elle mettoit sa gloire à les voir bien élevés; elle partageoit
leurs succès; elle sembloit enfin dans tous les instans se livrer à la
douce erreur de se croire leur propre m ère, et elle doit leur rendre
la justice de d ire , que jusqu’à l ’instant fatal qui lui a ravi le sieur
V ir o lt c , ils n ’ont cessé de lui témoigner de l’attachement, et les
égards que inériloient ses procédés généreux.
L a circonstance dont on vient de parler de l’établissement des
quatre enfans du premier lit, fait naître un nouveau moyen d ’in
terruption de la première communauté, que la dame V irotte et ses
enfans ne croient pas devoir négliger, quoiqu’il soit superflu, d ’a
près tous les autres m oyens qui s’élèvent en leur faveur dans cette
cause.
�(
^4 )
■ L a C outum e du Bourbonnais n ’e x ig e a n t, pour l’interruption de
la com m unauté, qu’aucun inventaire, partage, division, ou autre
convention équipollenle, on a toujours pensé dans cette C ou tu m e ,
que le mariage des enfans hors de la maison paternelle , produisoit
l ’effet d ’interrompre la co m m u n a u té, lors même qu’il n ’avoit pas
été fait d ’inventaire, surtout s’ils avoient été dotés et constitués à
une somme équivalente ou approximative des biens qu’ils étoient
en droit de prétendre du ch ef du conjoint prédécédé.
C ’est ainsi que l’a pensé D u m o u lin , le flambeau du droit cout u m ie r , dans ses notes sur cette C o u tu m e , que l’on doit regarder
com m e d'autant plus précieuses qu elles sont plus rapprochées du
temps de sa rédaction.
Coquille se propose cette question sur l ’art.
C ou tu m e du Nivernois :
4 du tit.
2 de la
« L a question est, dit cet auteur : L e père survivant n ’a point fait
» d ’inventaire, mais il a marié ses filles , et leur a baillé dot com » pétente; ou b ie n , a marié ses fils et leur a acheté office, ou leur a
» donné autre m oyen de vivre. Savoir si les enfans susdits auront
»
»
»
»
»
»
continué la communauté. Sur quoi j ’estime que p a r le mariage la
communauté a été suffisamment contredite, jaçoit que les enfans
n 'y aient expressément renoncé, suivant ce que dit D u m o u lin , en
l’ annotation sur la Coutum e de Bourbonnais, article 27 0 , et dit
avoir été jugé entre la veuve et les enfans de Denis G r o n , qui étoit
procureur en parlement. »
C e t a u teu r, qualifié de ju d ic ie u x , donne ensuite les raisons sur
lesquelles son avis est m o tivé, en ces termes :
« L a raison, selon mon a v is , est que les enfans ne peuvent et ne
» doivent avoir communauté universelle en deux lieux, quand en
» l’un des deux la personne n ’y est pas et n’y fait rien,"et il fait mé» nage et négocie à part où le père ne prend rien.
» E t encore pour ce que, ajoute-t-il, la dot de la fille ou le m oyen
» que le père a donné à son fils , tient lieu , et est comme sa part
» du droit qu ’il avoit en la masse de la communauté. »
T e l le est aussi l’opinion d ’Auroux-Dcsporumiers, sur la Coutum e
de Bourbonnais.
�(
25 )
h Après avoir cité un arrêt contraire, de 16 10 , et une sentence de
1 6 1 1, qu’il dit avoir trouvés dans un manuscrit d ’un certain M . Rougnon, il rapporte l’opinion du président D u re t, qui s’explique ainsi,
sur ces mots, E q u i p o l l a n t a p a r t a g e : V e lu tis i filia a superstite
nuptui tradita s i t , ejus respecta , actus est sufficiens ut societas
dissolvatur , quamvis expresse huic non renunciaverit; quo jure
utirnur.
Il
ajoute que Jean Déculant atteste dans ses notes sur cet article,
q u ’il l ’a toujours vu ainsi pratiq uer, qu’on ne consultoit p a s, et
q u ’on ne jugeoit pas autrement de son temps : Ita vid i sm iper ob-
servari in judicando et consulendo; et que la note de D u m ou lin
s ’applique aux mâles comme aux filles : Q uœ M o lin œ i nolula
non habet soliirn locurn in f ilia nupta et dotata, sed etiam in f ilio
cu i in matrimonium quid certuin fiie rit assignalum.
' « C 'e st aussi, dit A u r o u x , le sentiment de Jean F a u lc o n n ie r,
w dans ses observations sur le présent article. »
A u ro u x émet ensuite son opinion personnelle sur cette question,
en ces termes :
c
« C e dernier sentiment me paroît le plus conforme à l ’esprit de
» la C o u tu m e , et il me paroît qu ’en s'attachant aux ternies>de
» notre article, on ne peut point s’empêcher de d ire, que le père
» survivant et mariant ses onfans hors de chez lu i, et leur donnant
» une somme pour leur part dans les droits qui leur appartiennent
» par le décès de leur m ère, fait cesser à leur égard la contînua» tion d e là com m u nauté; car il ne peut pas, à ce qu il me paroît,
» mieux marquer la volonté q u ’il a de ne plus demeurer en co m » munauté avec son enfant, q u ’en le mariant hors de chez l u i , lui
» donnant ce q u ’il prétend lui appartenir, et souffrant qu ’il fasse
» un commerce et une communauté à part.
« Notre Coutum e, au présent article, ajoute Auroux, n edem an d e
m autre chose pour arrêter la c o n t i n u a t i o n de communauté , q u ’un
» inventaire ou partage , division ou autre convention equipollant
» à partage; o r , comment p e u t - o n qualifier le mariage d ’un e n f a n t ,
» sa séparation d ’avec son père, la dot q u ’on lui constitue pour ses
» droits acquis par le décès dosa xnère, autrement que de partage,
D
�(
26
)
» ou tout au m o in s , com m e parle la C o u tu m e , de convention équi-
» pollanl à partage ? »
* C e t auteur, dans sa cen t-tro isièm e addition, rappelle que l’art.
118 de l’ancienne C ou tu m e de Paris portoit, comme la Coutum e
de Bourbonnais, qu’il n ’y avoit point de continuation de com m u
n a u té , si le survivant des conjoints avoit fait faire inventaire, ou
autre acte dérogeant à la co m m u n a u té; que par suite de ces ex
pressions ^ on décidoit alors que les enfans dotés par le survivant
ne pouvoient plus demander la continuation de communauté, parce
que le contrat de mariage étoit une espèce de partage , et acte dé
rogeant à la communauté; que les réformateurs de la Coutum e ayant
supprimé ces term es , e t autres actes équipollens, l’inventaire fait
en bonne form e peut s e u l, dans cette C o u t u m e , dissoudre la
communauté.
« M ais, ajoute-t-il, com m e la disposition de notre C ou tu m e , au
» présent article 2 7 0 , n ’a pas été ré fo rm é e , il est vrai de dire
» que suivant cet a r tic le , et eu égard aux termes dans lesquels il
» est c o n ç u , le mariage de l’e n f a n t, hors de la maison du p è r e ,
» suffit pour dissoudre la com m unauté. »
Enfin , il rapporte une sentence de la sénéchaussée de M o u lin s,
rendue le 14 mars 1 7 2 7 , lui A u r o u x étant du nombre des juges,
par laquelle il fut jugé que « le mariage de M arie R a v e l, sa cons» titution de d o t , la nouvelle communauté contractée avec F ran » cois Boucaud , sa séparation et sortie de l ’ancienne com m u» n a u t é , son défaut de collaboration en icelle, devoient être re» gardés comme un partage ou actes équipollens à partage , dis» solutifs p a r conséquent de co m m u n a u té, aux termes de l’article
» 270 de notre Coutum e. »
Ici les quatre enfans du premier lit sont m ariés, plusieurs de
puis trente et quelques années.
T o u s ont été dotés, non-seulement de l’universalité de leurs
biens propres, mais encore en partie aux dépens de la seconde
communauté.
A u cun d ’eux 11’a mis sa collaboration dans cette seconde com-*
munauté.
�(
7)
2
"
T o u s sont sortis de la maison paternelle.
T o u s ont contracté une nouvelle communauté.
Dès-lors l'application de ce préjugé se fait de lui-même a l ’espèce.
M ais les parties se trouvent ici dans de Lien plus forts termes.
D u m o u lin , Coquille, D u r e t , D é c u la n t, Faulconnier, A u r o u x ,
supposent une communauté continuée entre un père et ses en fan s,
qui n ’a pas fait d ’inventaire qui ne s’est pas rem arié, qui n ’a pas
contracté une nouvelle communauté avec une seconde fem m e ,
et ils n ’hésitent pas à décider que la communauté est interrompue,
lorsque les enfans sont dotés et mariés hors de la maison paternelle.
1
A combien plus forte raison faut-il le décider ainsi, dans espèce
où il existe un inventaire fait dans le dessein de dissoudre la com
munauté ;
U n e déclaration formelle de celte dissolution, insérée dans le
second contrat de mariage du sieur V iro tte ;
U n e nouvelle communauté contractée avec une seconde femme ;
Quatre enfans dotés et mariés hors de la maison paternelle, et
qui tous ont contracté une communauté particulière, Jonc m é n a g é
et négocient autre p art, où le père ne prend rien , com m e le dit
Coquille.
A combien plus forte raison encore, doit-on le décider ainsi,
dans l’espèce où ces quatre enfans du premier lit n'ont contribué
eu rien à l ’avantage de cette seconde co m m u nauté, ni par leur
collaboration , ni par leurs revenus, où ils l’ont au contraire épuisee
dans tous les sens par leurs dépenses, et où cette s e c o n d e com m u
nauté n'a subsisté, n ’a prospéré que par 44 ans d ’économie, de
soins, de travaux de la dame V ir o tte , et par les revenus annuels
d ’un riche patrimoine, qui se sont confondus dans cette com m u
nauté ?
Q u ’oppose-t-on contre tant de moyens ? L ’ arrêt des V id a lin ,
3
58
rendu, d it-o n , le mai i y
, cité par Ducher.
C e t arrêt ne peut être mis en balance avec toutes les autorités
nous venons de citer.
O n sait d ’ailleurs que les arrêts dépendent le plus souvent des
que
circonstances , ou d ’une défense négligée.
�( 28 )
E t si on s’en rapporte à l ’auteur qui cite cet arrêt, on y remar
que que le père avoit institué ses enfans ses héritiers par égalité,
avec la condition ridicule de s’en tenir à une somme quelconque
pour leurs droits m aternels, sous peine d ’apanage, pour les filles,
et pour les m ales, d 'êt r e réduits à leur légitime.
.
O n ne voit pas q u ’il y eût eu un inventaire destiné à dissoudre
la co m m u nauté; une seconde communauté contractée par le sur
viva n t; une dot constituée aux enfans m ariés, bien supérieure à
leurs droits m aternels, et toutes les circonstances qui se trouvent
dans cette a ffa ire, et qui la rendent la plus fa vo ra b le , pour l ’in
terruption de la c o m m u n a u t é , qui ait jamais paru dans les tri
bunaux.
A jou tons que le sieur V iro tte a fait un traité avec ses enfans
du premier l i t , en 1 7 8 4 , qui forme encore une preuve nouvelle
de celle dissolution-de co m m u n auté, en ce qu e, par ce traité, le
sieur V iro tte a restitué à ses enfans les jouissances de certains
biens qui leur étoient propres, q u ’il avoit aliénés, tandis que ces
jouissances seroient entrées dans la c o m m u n a u té , si elle n ’avoit
pas été dissoute.
Mais tout ce qu’on vient de dire dans cette dernière partie de
la discussion, n ’est que par surabondance de droit.
L inventaire du mois de janvier 176 2 a été fait avec légitime
contradicteur ; il est lo y a l, il est de bonne foi. Il n'en eût pas
fallu davantage pour interrompre la communauté dans la Cou tu m e
la plus sévère; et ce n’est pas aujourd’hui qu ’il faut ajouter à la
rigueur des lois sur cette m a t iè r e , lorsqu il est réconnu que cette
institution étoit essentiellement mauvaise, et que les sages réfor
mateurs de nos usages gothiques, les rédacteurs du Code civ il, se
sont empressés de l ’abolir.
Signé V I R O T T E - D U C H A R M E , tant pour lui
que pour sa mère et ses frères et sœurs du second lit.
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
D E V È Z E , avoué.
A C L E R M O N T , d e l ’im p r im e r ie d e L AN D RIO , im p r im e u r du la P r é f e c t u r e .
�
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delaire, Anne. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Devèze
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
domaines agricoles
inventaires
communautés familiales
parsonniers
partage
livres-journaux
élevage
Description
An account of the resource
Mémoire pour Anne Delaire, veuve de Michel Virotte, et les six enfans nés de leur mariage, appelans ; contre les quatre enfans du premier lit dudit sieur Virotte, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 3
1752-Circa An 3
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0539
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigu-le-Blin (03179)
Rights
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Domaine public
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communautés familiales
coutume du Bourbonnais
domaines agricoles
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inventaires
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parsonniers
partage
secondes noces
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MEMOIRE
P o u r A n n e D E L A I R E , veuve de
M ichel Virotte , et les six Enfans
nés de leur mariage, appelans ;
les quatre Enfans du p rem ie r lit du
dit sieur V i r o l l e intimés.
C o n tr e
L ' a p p e l est, sur le fo n d , d’un jugement par défaut du tribunal
de la Palisse.
L a dame Virotte et ses enfans ont eu leurs raisons pour venir
directement aux pieds de la Cour.
)
Il a été répandu un mémoire imprimé, au n o m des enfans du
premier lit du sieur Virotte.
On y peint le sieur Virotte comme un père injuste, qui voulant
passer à de secondes noces, a pris des mesures qui tendoient ouver
tement à spolier les quatre orphelins laissés par sa premièrefemme
�( a )
E t la dame Virotte comme une femme ambitieuse, qui a obsédé
son mari, pendant quarante-quatre ans qu’a duré leur union, pour
l ’empêcher de réparer ses torts par un acte de justice éclatant.
On n’opposera à ces injures que delà modération; on ne répondra
aux calomnies que par des faits.
L e sieur Virotte, domicilié en Bourbonnais, a contracté un pre
mier mariage avec Anne Brirot, le G août 1752.
Il fut constitué à Anne B riro t, par ses père et m è re , une dot de
2000 livres en deniers, et 400 livres de meubles.
On voit dans le dernier feuillet du livre-journal du sieur Virotte,
qu'il n’a reçu de son beau-père, sur cette dot , que quelques
à-comptes, et de loin en loin.
11 eut quatre enfans de ce mariage, et il perdit sa femme au mois
de novembre 1756.
Il resta dans cet état de viduité jusqu’au mois de février 1762,
qu’il,épousa Anne Delaire.
Il prit la précaution, avant de contracter ce second mariage, de
faire-taire un inventaire dissolutil de la communauté qui avoit sub
sisté entre lui et Anne Brirot, et qui avoit continué avec les quatre
enfans qu’il avoit eus de ce mariage.
Cet inventaire fut fait dans les formes usitées dans la Coutume
de Bourbonnais.
Cette première communauté n ’avoit pas été très-avantageuse.
L e sieur Virotte et sa première femme étoient entrés en ménage
sans avances, sans moyens pécuniaires.
11 s’étoit rendu fermier de quelques biens; mais les denrées
étoient au plus vil prix, comme on peut le voir dans les pancartes
du t'Tnps. Une guerre désastreuse avoit tari toutes les sources de
la prospérité publique; et par surcroit d ’infortune, une grêle af
freuse avoit, en 1761 , dévasté toutes ses récoltes , ot altéré la qual.té du peu de grains qui a voient échappé à ce fléau.
On ne doit donc pas être étonné que l’inventaire dissolutifde la
j reniière communauté n’ait donne qu uu résultat de trois mille et
, quelques cents livres.
�( 3)
Après son second mariage, les affaires du sieur Virolte commen
cèrent à s'améliorer.
L a paix de 1762 ranima l’induslrie et le commerce. L e sieur'
Virotle, secondé par une femme économe, active et laborieuse,
augmenta ses ferm es, se livra à l’engrais des bestiaux pour la pro
vision de Paris, fit de vastes entreprises sur les bois, et embrassa
tous les genres de spéculation dont les circonstances et les localités
pouvoient lui présenter les moyens. Sa fortune s’est accrue insensi
blement , et la seconde communauté a été portée à un degré de pros
périté qui a excité l’envie des enfans du premier lit.
D e là, tous leurs efforts pour tenter de faire annuller l ’inventaire
destiné à dissoudre la première communauté contractée entre le sieur
Virotte et leur mère, et continuée avec eux jusqu’au second ma
riage du sieur Yirotte avec la dame Delaire.
Pour parvenir à ce but, il a paru tout simple de calomnier les in
tentions du sieur V iro tle , de le représenter, au moment de con
tracter une seconde union, méditant dans le silence et préparant
avec art des mesures propres à spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
On ne voit pas, à la vérité, ce dont il pouvoit spolier ces quatre
orphelins, car il étoit alors à peine au niveau de ses affaires. Mais
qu’importe! a dit l’auteur du mémoire, calomnions, calomnions,
il en reste toujours quelque chose.
Cependant, ce père injuste, dénaturé, 11e s’occupe, en contrac
tant un second mariage, que de l’intérêt de ses enfans du pre
mier lit.
L a loi le rendoit commun avec sa seconde femme; il déroge à
cette loi; il stipule expressément, dans ce second contrat, que la
communauté.n’aura lieu entr’eux que dans le cas seulement q u e,
lors du décès de l'un ou de Vautre des fu tu rs, il y aura des en
fa n s vivans du présent mariage, avec convention qu’ elle n'aura
pas lieu au cas contraire.
D e sorte que si la dame Delaire n ’avoit pas eu d ’e n f a n t , elle éloit
condamnée à travailler gratuitement, pendant toute sa vie, pour
les enfans du premier lit, sans autre espérance qu un douaire preiix
de i/|ofr., stipulé par ce contrat.
�On peut juger par là si le cœur du sieur V irotte , -préoccupé
d’une nouvelle passion , s’ étoit entièrement ferm é sur les intérêts
des demandeurs ; si la famille étrangère, à laquelle il alloit
s ’a llier , lui avoit imposé des lois contraires à ses sentimens.
M ém oire, page 2.
L e sieur Virotle ne se contenloit pas de s’occuper de la fortune de
ses enfans du premier lit, il ne négligeoit rien pour leur éducation.
Dans le premier âge, il les a fait élever chez lui par des précep
teurs; de là il les a envoyés dans des collèges. Leurs études finies,
il les a tenus chez des procureurs; et enfin parvenus à l’âge de de
venir eux-mêmes pères de famille, il leur a procuré à tous des
çtablissemens avantageux.
Q u ’on lise leurs contrats de mariage, on les trouvera tous ins
titués par égalité avec les enfans du second lit.
Les filles elles-mêmes, condamnées par la Coutume à une forclu
sion rigoureuse, ont été instituées héritières par égalité avec leura
frères des deux lits.
Enfin le sieur V i r o t t e n ’a fait q u ’un seul avantage dans sa famill e,
et cet avantage est en faveur du fils aîné du premier lit.
Quant à la dame V iro tte, elle en appelle à la conscience de ses
adversaires; c ’est à eux-m êm es, et non pas à l’auteur du Mémoire,
qu’elle demande s’ils n’ont pas. trouvé en elle une seconde m ère;
si elle ne les a pas traités, dans tous les instans, avec les mêmes
soins, avec la même tendresse que ses propres enfans.
Et en faudroit-il d’autre preuve que l’union qu’elle a su main
tenir pendant quarante-quatre an s, entre ses enfans et ceux du
premier lit, sans que, jusqu’au décès du sieur Virotte, cette union
ait été troublée par le plus léger nuage?
Quant au caractère d’ ambition qu’on lui reproche , ce n ’est
encore qu’à l’auteur du Mémoire qu’elle l’im pute, et non aux
enfans du premier lit.
A u surp'us, un mot suffit pour la justifier sur ce point.
A u moment de la mort de son m a ri, les greniers étoient pleins
de grains, les caves pleines de vin , et elle a remis près de 24,000 fr.
en numéraire, sans qu^ellc s^cn s.oit réserve une obole»
�¿ 5
C ’en est assez sur le chapitre des calomnies ; il est temps de
revenir à la cause.
L e sieur Virotte est décédé au mois de novembre i 8o 5.
U n inventaire , fait en présence de tous les intéressés, a constaté
l ’état de sa succession.
Mais les parties ont été divisées sur le mode du partage.
Les enfans du premier lit ont cru pouvoir critiquer l’inventaire
fait par le sieur V iro tte, au mois de janvier 1762, destiné à dis
soudre la première communauté contractée avec leur mère. Ils
ont prétendu que cet inventaire étoit défectueux; que la première
communaulé n’avoit pas été interrompue; que dès-lors la seconde
communauté devoit être partagée en trois portions égales entre eux,
la dame Virotte et la succession du sieur Virotte; et c ’est dans ce
sens qu’ils ont formé, au tribunal de la Palisse, leur demande en
partage, qui a été accueillie par le jugement par défaut dont la
dame Virotte et ses enfans sont appelans.
Les enfans du premier lit opposent deux sortes de moyens contre
cet inventaire.
Les uns sont relatifs à la forme, les autres à de prétendues frau
des, erreurs ou omissions.
A vant d’entrer dans la discussion de ces moyens, il n ’est pas
hors de propos de la préparer par quelques réflexions préliminaires.
L a continuation de communauté, contraire aux lois romaines
et en général à tous les principes reçus en matière de société, ctoit
autrefois inconnue en Bourbonnais.
On lit dans l’ancienne Coutume de cette province , rédigée en
i 4ç p , ce qui su it, article 6 du titre des Communautés :
« Item , l’on tient par ladite C outum e, que les enfans étant en
« puissance de père, n'acquièrent point de communauté avec leur» dit père ni ses personniers , supposé qu’ils soient seigneurs de
» leurs biens, à cause et comme héritiers de leur f e u e mère ou nuire. »
Cette continuation de communauté a été introduite dans nos
usages par l’article 118 de l’ancienne Coutume de Paris.
�»v i .
( 6 )
Elle a depuis clé étendue à beaucoup d ’autres C outum es, et
spécialement à celle de Bourbonnais, rédigée en i 520.
On lit dans l’article 2yodecette nouvelle Coutume, que « si l’un
» des conjoints par mariage , ou autres communs personniers, vont
» de vie à trépas , et laissent enfans ou autres qui soient leurs hé» ritiers, et le survivant desdits conjoints ne fa it aucun inven» taire, partage ou autre convention e'quipollant à partage, dedans
» 4° jours, à compter du jour du trépas du prémourant, la com» munauté de biens se continue et conserve entre ledit survivant et
» lesdits enfans, pour la portion du défunt, si bon leur semble; et
» néanmoins sont saisis et en possession de la succession de leurs
» père et mère trépassés, ou autres, desquels ils sont héritiers. »
Mais cette continuation de communauté a toujours répugné à
tous les bons esprits, comme n’étant propre qu’à faire naître des
procès interminables dans les familles, et à orner les tribunaux.
Aussi les célèbres jurisconsultes qui ont rédigé le nouveau C od e,
en épurant nos anciennes lois , se sont-ils empressés d ’abroger cet
usage, parce qu’ il étoit la source de procès innombrables , a dit
Tronchet, dans sa discussion au conseil d’état,*sur l'article i 44 2
du Code.
Berlier a dit après lu i , que« Tronchet a très-justement objecté
» les embarras de cette continuation de communauté ; niais ,
» ajoute-t-il, ils deviendroient plus grands encore si le survivant
» des époux se remarioit, car le nouvel époux entreroit aussi dans
» la société; c’est ce qui avoit lieu dans le ressort de la Coutume
» de Paris, et de celles qui avoient admis la continuation decom)) munauté; o r, l ’on conçoit qiCune telle institution est essentiel» lement mauvaise. »
« Quanta lacontinuation de communauté, dit encore T reilh ard ,
» après Tronchet et Berlier, on a toujours réclamé contre cette
» institution ; la section saisira avec avidité les mo y e n s qui pour» ront être proposés pour suppléer à ce remède dangereux. »
Quoi qu’il en soit, cette institution de la continuation de com
m unauté, essentiellement mauvaise, et contre laquelle on a tou
jours reclame, ctoit en vigueur au moment où le sieur Yiroltc a
�■ bsr
(
7
)
passé à de secondes noces. Il a donc dù faire, pour l'interrompre,
ce que lui prescrivoit la Coutume sous l’empire de laquelle il vivoit.
Cette Coutume exigeoit aucun inventaire, partage, ou autre
convention e’quipollant à partage.
En remontant à ce qui se pratiquoit dans les temps anciens, nous
■voyons que la jurisprudence étoit singulièrement favorable à cette
interruption de communauté.
Nous lisons dans le Prêtre , 2' cent. ch. 22 , « qu'anciennement,
)) sufficiebat de facto jactum fu isse inventarium , licet minus so» lemne , et que par quelque acte, le père ou la mère survivant
« eussent témoigné qu’ils n’avoient plus de volonté de continuer
» ladite communauté. »
Dumoulin avoit dit également, sur l'article i 83 de la Coutume
de Blois, satis est constare descriplionem bond fid°. factam.
L a plupart des commentateurs de la Coutume de Bourbonnais
ont adopté cette opinion, entr’autres, Jean Déculant, Louis Semin,
et François Déculant.
Auroux rapporte les expressions de ce dernier commentateur,
sur le mot I n v e n t a i r e : « Etiam minus solemne, dit-il, quia hoc
» nostrum statutum hoc paragrapho tanlùm requirit ad interrup» tionem societatis. I n v e n t a i r e , p a r t a c e , d i v i s i o n o u a u t r e
» c o n v e n t i o n é q u i p o l i - e n t e . Uudè sufficit , ajoute-t-il, sim plex
» declaratio contrarias voluntatis, aut actus societatis derogato» ri as. /ta semper vid i observari : ita asseril D . Joannes D écidant,
» cujus opinionis erat D . Ludovicus Semin. »
O11 trouve une multitude d ’arrêts dans Brodeau sur L o u e t ,
let. C. som. 3o , et dans tous nos autres arrêtistes, qui ont décidé,
conformément ;'i ces principes, qu’un inventaire, quoique défec
tueux, etoit suffisant pour interrompre la communauté.
On voit dans l'un de ces arrêts, du 20 février 1G10, rapporté
par Pelons, dans ses Actions [om ises, liv. 5 , act. 3o, que le prin
cipal motil qui détermina la Cour à rejeter les moyens opposés
contre l’invenlairc qui avoit été fait pour disaoudre la première
communauté, fut qu’il ne paroissoil pas r a i s o n n a b l e d appeler les
cniüns du premier lit au partage de la seconde communauté, puis~
�I
(8 )
que le premier mariage navoit duré que trois ans, et le second
quarante a n s, pendant lesquels s’ étoit accrue la communauté
par Vindustrie de cette seconde femme.
L ’auteur nous dit que « la Cour a déclaré l’inventaire avoir eu
» assez de force pour dissoudre la communauté; ce sont, ajoute-t-il,
» les mêmes mots desquels a usé M . de Ilarlay. »
D e nos jours , M . Cocliin a rappelé ces principes, et les a fait
valoir comme étant dans toute leur vigueur, dans la cause de Pierre
Tliérouenne, et-Marie Anne Pingard , sa fem m e, contre Marie
Blanchard, et Christophe Blanchard, enfans du premier mariage
de ladite Pingard. T o m . 1" , pag. 64.
Il s’agissoit, comme dans l ’espèce, d ’une question de continuation
de communauté, dans la Coutume de Senlis, fondée sur les pré
tendues défectuosités de l’inventaire fait par Marie Pingard, avant
de passer en secondes noces avec le sieur Tliérouenne.
L a Coutume de Senlis exigeoit, comme celle de Bourbonnais ,
un inventaire et rien de plus, et elle 11’admettoit même pas d ’acte
équipollent, comme celle de Bourbonnais.
, TV1 . Coc l i i n observe que nous avons en France deux sortes de
Coutumes, qui règlent de quelle manière la communauté peut être
dissoute ou continuée.
« La première de ces Coutumes, dit-il, est de celles qui deman» dent, pour dissoudre la communauté, un inventaire fait et parfait
» avec un contradicteur légitime, et qui soit clos; ce que l’on corn» prend sous l’idée générale d’inventaire solennel ; telle est la Cou» tume de Paris, dans les articles 240 et 241.
» L a seconde espèce de Coutumes est de celles qui demandent
» simplement qu’il soit fait un inventaire, sans ajouter qu’il soit
» solennel, ou, ce qui est la même chose, fait et p a r f a i t .
» D ans ces Coutumes, le moindre acte dérogeant à la commu» nauté, suffit pour en empêcher la continuation , et un inventaire,
» destitue même des formes ordinaires, en opère toujours la disso» lulion.
» C ’est ce que décident unanimement tous les auteurs qui ont
» traité la matière , ajoute M . Cocliin , et en particulier Lebrun ,
�( 9 )
» dans son Traité de la communauté, liv. 3 , chap.
>’ n io et suivans. »
3,
sect. i r” ,
11 cite
aussi les différens arrêts rapportés par Brodeau sur L ouet,
qui ont ju g ? qu’un inventaire, quoique défectueux, n’en étoit pas
moins suffisant pour interrompre la communauté.
L a dame Virotte pourroit sans doute invoquer toutes ces auto
rités avec confiance; et faisant surtout l’application à l’espèce de
1 arrêt de 1610, elle pourroit d ire, comme on le disoit lors de cet
arrêt, et avec bien plus de vérité, que le premier mariage du sieur
V ir o tte , avec Anne B r ir o t, n ’avoit duré que quatre ans; que la
première communauté ctoit nulle ou presque nulle lorsqu’elle est
entrée dans la maison du sieur Virotte; que le second mariage a
dure pendant quarante-quatre ans, pendant lesquels s,est accrue
la communauté par son industrie , et par les fruits d’un patri
moine précieux, qui ont été versés annuellement dans cette com
m unauté, qui ont singulièrement contribué à en accroître les bé
néfices; qu’il y auroit donc lieu de dire, avec M . le président de
Harlay, que l ’inventaire, quand on le supposeroit minus solemne,
auroit eu assez de force pour dissoudre la communauté'.
L a dame Virotte pourroit soutenir cette thèse avec d’autant
plus d avantage, que le sieur Virotte, non content d’avoir fait faire
un inventaire pour dissoudre la communauté d ’entre lui et ses
enfans du premier lit , avant de passer à de secondes noces, a
en outre consigné dans son contrat de mariage avec elle, une décla
ration qui prouvoit de plus en plus son intention bien prononcée de
ssoudre cette premiere communaulé.Elleest concueen ces termes:
» éclarant avoir fait faire inventaire dissolutif de la communautéqui étoit entre lui et ladite déiunte demoiselle A n n eB riro t,
»
Loulier, notaire, le a 5 janvier 1762, conformément à
» la Coutume. »
Mais tout ce qu on a dit jusqu’ici, est moins pour le besoin de
a cause que pour fixer les principes de la mal ¡ère.
a dame Virotte et ses enfans peuvent aborder avec sécurité
examen des moyens que leur opposent les enfans du premier lit,
B
�K*\.
(
10 )
contre la validité de l’inventaire sur lequel est fondée l’interrup
tion de la première communauté.
En effet, cet inventaire a été fait dans la forme la plus rigou
reuse et la plus solennelle.
L e sieur Virotte a commencé par faire assembler, devant le
juge des lie u x , le conseil de fam ille, pour nommer un subrogé
tuteur à ses enfans mineurs.
Celte assemblée a été composée de parens et amis des mineurs,
tous gens recommandables, et tenant le premier rang dans le pays.
Si l'on en croit l’auteur du M ém o ire, on a écarté, à dessein, de
cette assemblée, le sieur Antoine B r ir o t , aïeul des mineurs, qui
étoil le défenseur né de leurs intérêts, et qui pouvoit, mieux que
personne, les garantir de la spoliation dont leur père cherchoit à
les rendre victimes.
Mais on voit un Antoine Brirot parmi les parens assignés, et
cet Antoine Brirot ne peut être que l’aïeul des mineurs.
C e n ’est donc pas la faute du sieur V irotte, si le sieur Brirot
n’a pas assisté à cette assemblée.
11 est d ’ ailleurs de notoriété, que le sieur Tïrirot éloit alors accablé
d ’ infirmités , et hors d ’état de sortir de chez lui.
C e s t un fa it f a u x , dit l’auteur du Mémoire, page i 5 .
Eli bien ! si la Cour croit ce fait de quelque importance, la dame
Virotte et ses enfans déclarent qu’ils l’articulent d’une manière
expresse, et qu’ils offrent d ’en faire la preuve par toutes les voies
de droit.
Quant bu subrogé tuteur ou curateur avec lequel devoit être
fait l'inventaire , il n’a pas été du choix du sieur V ir o tte , mais
de la famille assemblée, qui a jeté les yeux sur le sieur de Finance,
châtelain de Chavroche, proche parent des mineurs, qu i'avo it
tellement la confiance de la famille Brirot, qu’il fut de rechef
n o m m é , en 1764, subrogé tuteur des enfans d ’ A n t o i ne lirirot.
Cet inventaire a donc été fait avec légitime contradicteur. C ’étoit la première et la plus importante formalité exigée par la Cou
tume de Paris et par les lois les plus rigoureuses sur la matière.
T o u s les autres moyens de forme, qu’on oppose contre cet in
ventaire, ne s o n t que de pitoyables chicanes.
�2 >6 \
( i 1 )
T e l est le moyen tiré de l’assignation donnée le même jour aux
6ept parens ou amis qui se sont réunis pour le conseil de famille,
comme si l’on ne savoit p a s, d ’une p a r t, que cette assignation étoit
superflue, puisqu’ils pouvoient se réunir volontairement chez le
juge, pour délibérer, sans assignation préalable, et d autre p a rt,
qu’il est tout simple que s’étant tous trouvés dans le meme lieu ,
on leur ait donné en même temps l’assignation pour assister au
conseil de famille.
T e l est encore le moyen tiré de la circonstance que c'est le
sieur Loulier , qui après avoir tenu l’assemblée comme b a illi, a
fait l’inventaire comme notaire. (*)
Com m e si l’on ignoroit que presque tous les baillis des justices
seigneuriales étoient en même temps notaires ; que ces fonctions
n ’avoient rien d ’incompatible; que lorsque le sieur Loulier travailloit à l’inventaire comme notaire, il avoit épuisé ses fonctions
de juge ; et qu’enfin , tel étoit l’usage universel dans les campagnes,
usage tellement consacré, que, fût-il abusif, il faudroit le main
tenir pour la tranquillité publique, d’ après la maxime tirée d e là
loi Barbarius P h i lippus : Error communis facit jus.
Il faut placer dans la même classe des chicanes vraiment pi
toyables , le moyen que l’on prétend tirer de la circonstance que
celui qui a fait les fonctions de substitut du procureur fiscal i
l ’assemblée de famille, étoit cousin de la dame Delaire.
Indépendamment qu’on n'établit pas cette parenté, qu’on en
établit encore moins le degré, où a-t-on pris qu’avant le mariage
du sieur Virotte avec la demoiselle Delaire , ce prétendu cousin
dût se récuser dans une assemblée de famille des mineurs Virotte
dans laquelle il n ’étoit pas question, et il ne pouvoit pas être ques
tion de cette prétendue cousine ?
N
O n prétend encore que ce prétendu cousin n ’étoit ni gradué, ni
curial, dans la justice de Montaigut-le-BIanc; mais il est permis,
après un demi-siècle, de tout hasarder sur des faits de ce genre.
(*)
Loulier ctoit un notaire diâtiü£uc par scs liio n s , »ci» lumière* et «es ver u s , il ^
ét é envoyé a u tribunal ré vol ut i onna i r e, a v r e M. et Mme . Da va u* et 15......par O ........M. Louher
y a péri a ve c M . et M m e. D a v a u x , lo 3 ’t llo -éal an a.
L e ttre s im prim ée» do G ..... à F o u ' | u i c r - T a i n v i l l e , 'les 16 ventoso e t i/( ge rm in al an 2 ; Cer
tifiée» pour copio c o n fo rm o , par P a ris , greffier du trib u n al ré v o lu tio n n a ire .
�( 12 )
Sa présence au procès-verbal n’est pas du fait du sieur Virotfe ; ce
n ’est pas lui qui l’y a appelé; et par cela seul qu’il y a fait telle ou
telle fonction, il est présumé en avoir eu le droit, jusqu’à preuve
contraire.
C e n’est pas une chicane moins pitoyable que le moyen qu’on
prétend faire résulter de ce que le sieur Feyard a f a it , dil-on , les
fonctions d ’expert dans l’inventaire , après avoir assisté au conseil
de famille.
L ’objet du conseil de famille étoit uniquement de nommer uit
subrogé tuteur qui eût qualité pour assister à l’inventaire, comme
légitime contradicteur; cette mission remplie, le sieur Feyard
pouvoit se livrer à toute autre fonction.
A u surplus, on ignore si, comme le prétend l’auteur du mé
m o ire, le sieur Feyard a bu et mangé avec le sieur V irotte, pen
dant la durée de l’inventaire; c’est un fait qu’il n’est pas facile
d ’éclaircir après /|5 ans : mais ce qu’il y a de certain , c ’est que
c’est abuser d ’une manière étrange de la disposition de l’ordon
nance de 1667 , que de l’appliquer à ce cas, et qu’il faut être ré
duit à une grande disette de m o y e n s pour en employer de pareils*
Après avoir ainsi épuisé sa critique sur la forme de l’inventaire,
l ’auteur du Mémoire en vient aux erreurs, aux omissions, aux
prétendues infidélités de cet inventaire, au moyen desquelles le
sieur Virotte est parvenu a spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
i l est encore bon, sur ce point , de commencer par fixer les
principes de la matière. On ne peut les puiser dans une source plus
pure que dans Polluer, l’auteur le plus accrédité du droit cou tumier. 11 s'exprime ainsi, dans son traité de la Communauté, n° 79^:
« Quoiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire , si file s ne
)> sont pas m alicieuses , les effets omis ayant pu échapper à la
» mémoire du survivant, l’inventaire 11e laisse pas d ’être valable,
» et d'empêcher la continuation de communauté.
» L ’omission est présumée malicieuse, dit-il ailleurs, n® 688,
» lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses
« qui étoient en évidence et d ’un usage journalier, ne permet pas de
�( i
3
)
» penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivant,
« qui ne les a pas comprises dans son inventaire.
» L'omission doit surtout être jugée malicieuse, lorsque les effets
» omis dans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis la mort ou
» pendantla dernière maladie du prédécédé, détournés du lieu où ils
» étoient, et portés hors la maison, ou cachés dans quelque recoin. »
Si après avoir ainsi posé les principes de la matière, on passe aux
erreurs ou omissions qu’on reproche à cet inventaire, que voit-on?
Une prétendue modicité dans l’estimation de quelques effets
mobiliers qui sont inventoriés.
Mais , d ’abord , nous répondrons ce que disoit M . Cochin à une
semblable objection , dans l’affaire de Marie Pingard, femme
Therouenne :
« La critique que l’on fait sur le prix des estimations, ne regarde
» point Marie Pingard; c’est le fait des experts, qui se sont sans doute
» conduits suivant ce que leur conscience leur a dicté. »
2pnt>, ces sortes d ’estimations étant soumises, en Coutume de
Bourbonnais, au droit de crue ou parisis du cinquième en sus de
l’estimation des experts, elles ne devoient pas être portées à une
valeur rigoureuse.
3 'nt-, en prenant pour exemple le lit qui faisoit partie du trous
seau d ’Anne Brirot, cette estimation est facile à justifier.
On se plaint que ce lit n’a été porté qu’à 100 francs dans l’in
ventaire, tandis qu’il avoit été porté à 200 francs par son contrat
de mariage.
Mais qu’011 ouvre le livre-journal du sieur V iro tte, dans lequel
il écrivoit jusqu’à ses plus secrètes pensées, et on y verra , au
dernier feuillet, qu’en se renflant compte de ce qu'il avoit reçu de
son beau-père, sur ce qui lui avoit été promis, il d it, en parlant
de ce lit, estimé 200 francs par M . Brirot, mais c ’est trop cher.
On avoit promis au sieur Virotte pour 300 francs de m e u b l e s ;
mais 011 lui donnoit le moins qu’on pouvoit, et il reccvoit ce qu on
vouloit lui donner, plutôt que de se brouiller ou d ’avoir des con
testations.
Il avoit reçu ce lit pour 200 f r . , parce que son beau-père, qui
en avoit clé lui-même l’appréciateur , l ’avoit exigé ) mais il a voulu
�t e
* ^ •
( 14 )
consigner celle injustice dans son registre, en faisant mention que
ce lit éloit porté à un prix excessif.
Est-il donc bien étonnant que ce même lit, après avoir servi
dix ans , n ’ ait été estimé que 100 1., et cela dans un inventaire qui
étoit soumis à la crue, ou au droit de parisis du cinquième en sus,
ce qui le portoit à i a 5 liv.
C e qu’on vient de dire s’applique également à l’estimation dulinge.
D ’une p a r t , cette estimation n’est pas du fait du sieur V irotte,
et ne pourroit avoir aucune influence sur le sort de l’inventaire.
D ’autre part, il ne faut pas perdre de vue que le sieur Virotte
n ’avoit alors qu’un très-petit m énage, que son linge étoit formé
de la toile la plus grossière, qu’il avoit dû dépérir depuis le décès
de la dame B riro t, que sa maison avoit été abandonnée à des do
mestiques ; qu’enfin la crue ou le droit de parisis faisoit un de
voir aux experts de baisser le prix des objets inventoriés, puisque
celui qui en demeuroit chargé, étoit tenu d’un cinquième en sus.
L ’auteur du Mémoire passe ensuite aux infidélités.
« L ’article 20 porte, dit-il, qu’il 11’étoït dû, sui vant le depouille» ment du livre-journal du sieur V iro tte, par le colon du domaine
» Crolet, et par les métayers ou locataires des biens de la dame
» Préverand, de la terre du Ponçut, et de celle du Méage, dont
» il étoit ferm ier, que la somme de 255 liv.
» Si l’on prend le livre-journal même, d ’après lequel l ’inventaire
» fait cette indication, on trouve à scs folios 45 , 58 , 7 1 , 110, n 3
» et 123 , la preuve qu’il étoit dû 816 livres 10 sous. »
L ’objection reçoit plusieurs réponses égalem ent décisives.
L a première est que l’inventaire constate que le sieur Virotte
a livré son journal au notaire qui procédoit à cet inventaire, pour
en faire le dépouillement.
C e qui établit, d ’une part, que cette erreur, s’il y en avoit, ne
seroit pas son ouvrage;
D ’autre part, qu’il y meltoit toute la bonne foi, toute la loyauté
et tout l’abandon qui étoient dans son caractère.
2«nt. t q UC ce qui exclut toute idée d ’infidélité, c’est qu'après
avoir livré son journal pour en faire le dépouillement, il exige
�a£j
( i5 )
qu’il soit inventorié, pour servir de monument éternel de la droi
ture et de la loyauté de sa conduite.
C e n’est pas tout; il continue de se servir du même livre-journal,
d’y écrire toutes ses affaires, et il a eu soin de le conserver jusqu’à
sa mort.
On ne craint pas de faire, à la mémoire du sieur V iro tte , l’in
jure de dire que s’il a conservé si précieusement ce livre-journal,
c ’éloit pour assurer ;t ses enfans du premier lit 1rs moyens d ’atta
quer un jour cet inventaire, et qu’il les déposoit dans l’acte même
qu’on le forçoit de faire pour dépouiller ses enfans, afin que leur
découverte devînt moins difficile. M êrti., page 17.
Malheur à l’homme qui a pu concevoir une pareille pensée! Quoi!
on pourra croire que le sieur Virotte, le plus respectable des pères,
aura conservé avec soin, dans ses archives, son livre-journal pen
dant un demi-siècle, dans l’espérance qu’après sa mort il deviendra
un brandon de discorde entre sa veuve et ses enfans des deux lits,
et quVn descendant dans la tombe, son ombre aura souri au plaisir
amer de les voir s’entredéchirer, et dévorer, en dissensions juridi
ques, la fortune qu’il a pris tant de peine à leur amasser?
Revenons à des idées plus justes, plus naturelles et plus satis
faisantes pour le cœur humain.
L e fait seul que le sieur Virotte a voulu que ce livre-journal
fût inventorié, prouve invinciblement l’impossibilité qu’il voulût
être in fidèle, et qu’il voulût spolier les quatre orphelins laisses
par sa première femme.
C e (ait seul prouve encore invinciblement l’impossibilité qu’il fût
infidèle, puisque, dès qu’il existoit une preuve écrite de cette
créance vraie ou prétendue, dans le livre-journal, et que ce livrejournal étoit inventorié, cette prétendue infidélité se reduisoit tout
au plus à une erreur de calcul, toujours sans conséquence, et qui
d ’ailleurs n ’étoit pas du fait du sieur Virotte, mais de ceux h «pii ce
journal avoit été livré pour en faire le dépouillement, c o m m e le
constate l’inventaire.
A u surplus , nous sommes bien éloignés de c o n v e n i r de cette
erreur, même sous le point de vue d’erreur de calcul. Nous 11 avons
�(
16
)
pas dans ce moment ce livre-journal sous les y e u x ; mais, d’après
l’habitude qu’a l’auteur du Mémoire de tout hasarder, il est trèspermis de croire qu'avec un examen plus approfondi et fait sans
prévention, on trouveroit un résultat bien différent de celui que
ce Mémoire nous présente.
A cette prétendue infidélité succèdent les fausses déclarations sur
le produit des gerbes de blé qui étoient alors engrangées. Or, ce pro
duit est fixé par approximation par les experts; il n’est donc pas du
fait du sieur Virotte. Ainsi, nul reproche à lui faire, quand il y
auroit une erreur quelconque sur ce produit probable des gerbes de
b lé , qui n ’étoient pas encore battues.
Mais cette erreur n’est encore que dans l'imagination de l’auteur
du Mémoire,
L e produit des gerbes qui se trouvoit écrit dans le livre-journal
au moment de l’inventaire, ne pouvoit pas être celui des gerbes
qui étoient engrangées, et qui étoient encore à battre.
L es inductions que l ’on veut tirer de ce registre, qui porte,
d it- o n , que le cent de gerbes produisoit douze coupes, tandis
qu’il n ’est porté qu’à d i x dans l’inventaire, ne sont donc qu’une
absurdité.
E t quand on voit que la discussion sur le produit présumé de
ces gerbes de blé se termine par celte exclamation, « Quelle sous}> traction ! ......... il n’ y a pas une seule raison à faire valoir pour
» l ’effacer. », on croit voir la montagne en travail.
« Viennent maintenant les omissions, dit l’auleur du Mémoire;
» elles ont un caractère de gravité révoltant. »
Encore la montagne en travail.
L a première a pour objet une obligation de 5 19 1!v. i 5 sous, du
10 juin 17G0, duc par les nommés Bafier, métayers du domaine
Barnier.
Cette omission est facile à justifier.
D ’abord, il n 'y a pas eu de soustraction , c’est-à-dire d ’omission
volontaire et faite malicieusement , puisque la pièce exibte, et
�& 6y
( 17 )
qu’elle a été conservée par le sieur Virotte, pendant quarante-quatre
ans, depuis cet inventaire.
2 ment. f cclte obligation étoit rappelée sur le livre-journal ,
au compte de ces métayers, folio 44 * et le sieur Virotte n’a pu
avoir ni la volonté de la soustraire, ni la possibilité de la soustraire,
puisqu’il a livré lui-même son registre pour en faire le dépouille
m en t, qu’il a ensuite exigé qu’il fût inventorié, et qu’il s’est sou
mis par là à le représenter dans tous les instans.
A u surplus, il est facile d’expliquer comment cette obligation a
pu échapper à ceux qui ont fait le dépouillement du livre-journal du
sieur Virotte.
Il est probable que celte obligation est restée chez le notaire
qui l’avoit reçue, et qu’on ne l’aura pas trouvée parmi les papiers
du sieur Virotte au moment de l’inventaire.
E t il n’est pas étonnant d ’ailleürs qu’on ait fait cet oubli, quoi
qu’elle fût rappelée dans le livre-journal, la page 44, où cette obli
gation étoit rappelée dans le compte des Bafier, se trouvant bâtonnée par erreur, comme on le lit à la quatorzième ligne de ce
compte, écrit de la main du sieur Virotte :
« L e compte du & février 1761 est bon, quoiqu’ il soit barré;
» c’ est une erreur. Signé Virotte.»
On conçoit qu’en faisant le relevé de ce livre-journal , on n'a
pas dû porter son attenlion sur les endroits b&tonnés ; de sorte
que la mention de cette obligation a dû naturellement échapper
à celui qui iaisoit le dépouillement du registre.
C ’est ainsi que s’explique celle omission, la seule réelle, mais
faite si innocemment, que le sieur Virotte n’a mis à l’écart, ni
l'obligation , ni le livre-journal où elle étoit relatée, et qu’il a
au contraire voulu que ce livre-journal fut inventorié, comme une
preuve irrécusable de sa bonne foi.
L e second article d ’omissions qu'on reproche à cet inventaire,
est d'une somme de
livres au total ou de 18 livres pour la moitié,
dont on suppose que le sieur Virotte a voulu spolier les quatre
orphelins de sa première femme.
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■■'J
(
i3 )
O r, ces 36 liv. avoîent été payées au sieur de Douzon par le sieur
Virotte, à la S t.M artin 1761.
C ’étoit une dette de la communauté, qu’avoit payée le sieur V i
rotte, et qui ne devoit pas être portée en actif dans l’inventaire.
L e troisième a pour objet le bail de la terre du Méago, dont le
s ie u r Virotte étoit fermier, et une somme de 464 livres 6 sous 7
deniers, dont il étoit, dit-on, en avance sur sa fe r m e , suivant
une quittance du 14 mars 1762.
On n'a sous les y e u x , ni le livre-journal, ni cette quittance;
mais sa date seule, du r4 mars 1762, prouve le contraire de cette
avance prétendue, puisqu’elle est postérieure de près de deux, mois
à l’inventaire, et plus d ’un mois au second mariage du sieur Virotle.
L e quatrième est relatif, dit-on, aux foins de réserve produits
par cinq prés, avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit
deux chevaux.
Nous dirons ici avec M . Cochin , dans la cause de Marie Pin—
gard, « que pour établir une pareille omission, il faudroit établir
» qu’il y avoit réellement des foins.
j> M a i s il d e v o i t , d i t - o n , y en a v o i r , c ont i nue M .
Cochin.
» Et sur quoi, dit-il, est fondée cette nécessité ? D ’ailleurs, on
» inventorie ce qui est , et non pas ce qui doit être. »
A u surplus, il n ’est pas même vrai de dire qu’il dût y en avoir.
D ’abord, il n’est pas exact de dire que le sieur Virotte eût des
bœufs gras dans ses écuries; on voit dans le livre-journal, page
3 14,
qu’il n ’a commencé ce commerce qu’en 1771 D ’ailleurs, le foin de réserve que l’on suppose avoir dû se trouver
chez le sieur V iro tte, au moment de l’inventaire, avoit dû être
cueilli au mois de juin 1761. O r , il est naturel de croire que ce
foin avoit été vendu par le sieur Virotte, depuis le mois «le juin
jusqu’à la fin de janvier suivant, époque de cet inventaire; sur
tout dans une année aussi désastreuse que l’année 1761 , où le
sieur Virotte avoit perdu la presque universalité de ses récoltés
par la grêle, ce qui avoit dû le forcer d ’user de toutes scs autres
ressources pour payer le prix de ses termes.
A quoi 011 peut ajouter que le sieur Virotte ayant pris de cer-
�(
*9 )
tames quantités de foin en entrant dans ses fermes, il devoit en
rendre pareille quantité à sa sortie; et sous ce point de vue, ce foin,
s i s en étoit trouvé, n’auroit fait que représenter celui qu’il auroit pris en entrant en ferme, et n’auroit pas dû être inventorié,
comme ne formant pas un actif réel de la communauté.
cinriuîcme est relatif à l’omission des pailles des dîmes du
éaSe » T ” faisoient, dit-on, un objet de réserve.
On sait qu en Bourbonnais, à mesure que les blés sont écossés,
on ivre es pailles aux colons, pour la nourriture des bestiaux ou
pour aire des engrais ; ni le propriétaire, ni le fermier, ne sont en
usage de se les approprier.
E l à raison de la grêle de i 76 i , il y a tout lieu de croire qu'elles
furent bien loin d’elre suffisantes en 2762 , pour les besoins dés
colons.
Enfin, le sixième article d ’omission est relatif aux prébats,
q u i, dit-on, suivant le n° 5 du livre-journal, faisoient un objet
important, a raison de l’importance des fermes.
Cet objet important est affermé 12 boisseaux au fermier des
Maillards.
Ces 12 boisseaux, qui étoîent sans doute du seigle, pouvoient
alors valoir^ liv. à raison de la vilité du prix des denrées.
A i n s i , c est un ecu de 3 livres dont ce père injuste a voulu
spolier les quatre orphelins de sa première fem m e , lui qui en
passant son contrat de mariage, quelques jours après, a la précau
tion pour ménager leurs intérêts, de stipuler qu’il n’y auroit
pas de communauté entre lui et la seconde fe m m e , s’il n’y avoit
pas d enfans de leur mariage.
A u surplus , pour entendre cet article, il faut savoir que les préats sont ( (.s gerbes qu on est en usage, dans quelques domaines, de
attre une premiere fois légèrement, pour en extraire lin premier
¿rain estiné aux semences, et que l ’on finit de battre en hiver pour
achever d’en tirer les grains q„i y S o n t rcst(:>s.
1 parolt
qu il y avoit ou des p r i a i s dans le domaine des Mailar s, et que le sienr Virotto avoit affermé au métayer de ce debois"0 ^ ^ra*n (luc ccs prébats pouvoient produire, moyennant 13
�Cet objet n ’a pas été omis dans l’inventaire ; il a été compris
dans le dépouillement général qui a été fait du livre-journal, pour
faire le relevé des dettes de ces métayers.
Ainsi, cette prétendueomission n ’est pas seulement ridicule et pi
toyable en elle-même, elle est encore absolument contraire à la vérité.
L ’auteur du Mémoire, après avoir épuisé le chapitre des omis
sions , ajoute que l’inventaire présente encore à la critique une
infinité d ’articles:
T els que la déclaration de 5oo livres en numéraire ou arrérages
de cens;
Et celle faite parle sieur V iro tle, portant que les habits, linges
et hardes d’Anne Brirot, sa première femme, avoient été vendus,
échangés ou employés à l’usage des mineurs.
Est-il étonnant, sur le premier article, que le sieur Yirotte n’eût
pas une plus grosse somme en numéraire , après une grêle comme
celle qu’il venoit d ’essuyer, et après avoir payé le prix de scs fermes,
dont les échéances étoient sa- s doute à Noël ?
E t quant aux linge et hardes de la d ame B r i r o t , estimés par
son- cont rat de mariage üi 200 l ivres, le sieur V i r o t t e pouvoit-il en
faire un meilleur usage, que d’employer pour scs enfans tout ce qui
en étoit susceptible? et ne devoit-il pas, en bon père de fam ille,
vendre et échanger le surplus, comme il l ’a fait, pour en éviter
le dépérissement?
L a critique sur l’article des bestiaux 11’est pas plus raisonnable;
tout étoit constaté par des baux à chetel, et tout consisloit à cet
égard dans quelque légère différence dans la perte ou le croit.
L ’auteur du Mémoire termine sa discussion sur cet inventaire,
par rappeler les expressions de Pothicr, et nous nous plaisons à les
rappeler comme lui :
k Quoiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire, si elles ne sont
» pas malicieuses, les effets omis ayant pu échapper à la mémoire
» du survivant, l'inventaire ne laisse pas d'être valable, et d ’em-
» pêcher la continuation de communauté. »
Nous répéterons avec lui que l’omission est présumée malicieuse,
�3
N
( 21 )
lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses,
qui étoient en évidence et d’un usage journalier , ne permettent pas
de penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivant,
qui ne les a pas comprises dans son inventaire;
Que « l’omission doitsurtout être jugée malicieuse, lorsque les ef» fels omisdans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis lamort
» ou pendant la dernière maladie, détournés du lieu où ilsétoient ,
» et portés hors de la maison ou cachés dans quelque recoin. «
Ici on ne voit rien de soustrait, rien de détourné, rien de caché.
T o u s les objets matériels sont représentés; tout ce qui tient au
calcul est mis en évidence par l’exhibition du livre-journal, par
le dépouillement qui en est fait. S ’il se trouvoit que sur quelque
article ce dépouillement n ’eût pas été fait avec une exactitude assez
scrupuleuse, il ne faudrait pas l’imputer au sieur V iro lte, qui a
livré ce registre à l’honnête, au probe Louher, notaire, chargé de la
confection de cet inventaire, et qui y mettoit tant de loyauté et de
bonne foi , qu’il a exigé expressément qu'il fût inventorié , pour
être représenté dans tous les inslans.
Un seul article peut laisser, au premierabord, quelque léger pré
texte à la critique ; c ’est l’obligation de 5 19 francs.
■ '
Mais quand on voit que cette obligation avoit pu rester chez
le notaire qui l’avoit reçue , et ne pas se trouver parmi les papiers
du sieur V iro tte, au moment de l’inventaire;
Q u ’il n’avoit ni la volonté ni la possibilité de la soustraire, puis
qu’elle étoit couchée sur son livre-journal inventorié, à l’article du
compte de ses métayers des Barniers, folio 44 ;
Que ce compte avoit été rayé par erreur, comme on le lit dans la
note du sieur Virotte, écrite et signée de lui au même folio, ce qui
avoit du naturellement détourner l’attention de ceux qui faisoient
le dépouillement de ce journal;
Quand 011 considère, enfin, que le sieur Virotte a conservé pré
cieusement cette obligation jusqu’à sa m ort; celle omission, qui
cesse d’en etre une, «les que l’existence du titre est constatée P,ir le
journal inventorié, dépose liaulcrnc.it en faveur de la bonne foi du
sieur V iro lle , et de la loyauté de l’inventaire.
« £
�*à
(
22
)
Ajoutons q u e , s’il en étoit besoin pour la cause, on pourroit
rappeler ce que dit le Prêtre : Sufficiebat de facto factum Juisse
inventarium , l/cet minus solcmne;
C e que dit Dumoulin , sur la Coutume de Blois : Satis estcons-
tare descriptionem bond fu ie factam ;
C e que disent François Déculant, Jean Déculant et Louis Se«
m in , commentateurs de la Coutume de Bourbonnais, sur le mot
I n v e n t a i r e : Etiam minus solem n e.. . sufficil simpleoc declaratio
contrariée 'voluntatis, aut actus societatis derogatorius : itasem per vid i observari.
On pourroit dire que les nombreux a rr ê ts cités par Brodcau sur
L o u e t, ont jugé que des inventaires , quoique défectueux, suffisoient pour interrompre la communauté, surtout dans les Cou
tumes qui, comme celle de Bourbonnais, n ’exigent qu’aucun in
ventaire ( talis qualis ) , partage ou autre acte équipollent ;
Que dans la plupart de ces arrêts il étoit question d ’omissions,
et même de soustractions;
Que dans celui de 1G10, cité par Pelens, « la 5* nullité étoit,
» dit l ’a u t e ur , q u 'i l y civoit e u p lu s ie u r s o m is s io n s y »
, Que dans la cause plaidée par M . C o c h in , il étoit aussi ques
tion d’omissions considérables.
On pourroit enfin citer l’opinion de Renusson, dans son traité de
la Communauté, part. 5 , cliap. 2, n ' 35 , et ce que dit son anno
tateur, page 284, qu’ un inventaire infidèle n’empêche pas Vinter
ruption de la communauté.
A u surplus, on ne peut assez admirer la sagesse de ces décisions,
qui tcndoient à faciliter par toutes sortes de moyens l’interruption
de la continuation de communauté, lorsqu’on voit nos législateurs
reconnoitre que c’étoit une institution essentiellement mauvaise ,
une source intarissable de questions épineuses, de difficultés inex
tricables, propres à mettre en défaut toute la sagacité des plus pro
fonds jurisconsultes, qui avoient donné lieu à des milliers de vo
lumes in-folio, dont les bibliothèques étoicnl encombrées; et que
le résultat le plus ordinaire de ces continuations de communautés
étoit la ruine assurée des enfans d ’un i ,r, 2", 5% et quelquefois
�Í 7A
(
23
)
d’un 4* lit, lorsque les survivans des père et mère avoient successive
ment contracté plusieurs mariages.
Il est d ’ailleurs peu de cas où l’injustice de cette continuation de
communauté fût plus frappante que dans l’espèce.
Lorsque la dame Virotte est entrée dans la maison de son m ari,
la fortune des quatre enfans du premier lit consistoit dans la moitié
du montant de l’inventaire, qui étoit, au total, de 3 io 6 fr.
Ils ont donc été nourris, entretenus , élevés aux dépens de la se
conde communauté; c’est cette seconde communauté qui a payé
et nourri les précepteurs; payé, pour les mâles, les pensions dans
les collèges, chez les procureurs; pour les filles, les pensions dans
les couvens; c’est la seconde communauté qui a fait les frais de
leur établissement; c’est encore en partie aux dépens de cette se
conde communauté, qu’ils ont été dotés et constitués.
Ainsi, non-seulement ils n ’ont pas contribué un seul instant au
bien, à l’avantage de cette seconde communauté, ni par leurs tra
vaux, ni par leurs revenus; mais ils n’ont cessé de l’épuiscr par des
dépenses excessives au-dessus de leur état et de ce qu’étoit alors la
fortune du sieur Virotte.
L a dame Virotte ne rappelle pas ces dépenses pour en faire des
reproches aux enfans du premier lit; non-seulement son mari les
a faites de son consentement, mais elle y a contribué de tout son
pouvoir; elle meltoit sa gloire à les voir bien élevés; elle partageoit
leurs succès; elle scmbloit enfin dans tous les instans se livrer à la
douce erreur de se croire leur propre mère, et elle doit leur rendre
la justice de dire, que jusqu’à l’instant fatal qui lui a ravi le sieur
V iro tte, ils n ont cessé de lui témoigner de l’attachement, et les
égards que méritoient ses procédés généreux.
L a circonstance dont on ■vient de parler de l’établissement des
quatre enfans du premier lit, fait naître un nouveau moyen d’in
terruption de la première communauté, que la d a m e Virotte et ses '
enfans np croient pas devoir négliger, quoiqu'il soit superflu, d ’apres tous les autres moyens qui s’élèvent en leur faveur dans cette
cause.
�L a Coutume du Bourbonnais n ’exigeant, pour l’interruption de
la communauté, qu ’aucun inventaire, partage, division, ou autre
convention e’q uipollente, on a toujours pensé dans cette Coutume,
que le mariage des enfans hors de la maison paternelle , produisoit
l ’effet d ’interrompre la communauté, lors même qu’il n ’avoit pas
été fait d’inventaire, surtout s’ils avoient été dotés et constitués à
une somme équivalente ou approximative des biens qu’ils étoient
en droit de prétendre du chef du conjoint prédécédé.
C ’est ainsi que l’a pensé D um oulin, le flambeau du droit coutum ier, dans ses notes sur cette Coutum e, que l’on doit regarder
comme d'autant plus précieuses qu’elles sont plus rapprochées du
temps de sa rédaction.
Coquille se propose cette question sur l’art.
4
du tit. 2 de la
Coutume du Nivernois :
« La question est, dit cet auteur : L e père survivant n’a point fait
» d ’inventaire, mais il a marié ses filles , et leur a baillé dot com» pétente; ou bien , a marié ses fils et leur a acheté office, ou leur a
» donné autre moyen de vivre. Savoir si les enf ans susdits auront
» cont inué la c o mm u n a ut é . Sur quoi j’estime que par le mariage la
« communauté a été suffisamment contredite, jaçoit que les enfans
» n 'y aient expressément renoncé, suivant ce que dit Dumoulin, en
» l’annotation sur la Coutume de Bourbonnais, article 270, et dit
» avoir été jugé entre la veuve et les enfans de Denis Gron, qui étoit
» procureur en parlement. »
C e t auteur, qualifié de ju d icieu x, donne ensuite les raisons sur
lesquelles son avis est motivé, en ces termes :
« L a raison, selon mon avis, est que les enfans ne peuvent et ne
» doivent avoir communauté universelle en deux lieux, quand en
» l’un des deux la personne n’y est pas et n’y fait rien, et il fait mé» nage cl négocie à part où le père ne prend rien.
n E t encore pour ce que, ajoute-t-il, la dol de la fille ou le moyen
» que le père a donne à son fils, tient lieu , et est comme sa part
» du droit qu’il avoit en la masse de la communauté. »
T elle est aussi l’opinion d’Auroux-Despommiers, sur la Coutume
de Bourbonnais.
�2>YJ
(
25
)
Après avoir cité un arrêt contraire, de i6 r o , et une sentence de
1 6 1 1, qu’il dit avoir trouvés dans un manuscrit d’un certain M . Rougnon, il rapporte l’opinion du président Duret, qui s’explique ainsi,
sur ces mots, E q u i p o l l a n t a p a r t a g e : V elu tisi /ilia à superstite
nuptui tradita s i t , ejus respectu, actus est sufficiens ut societas
dissolvatur, quamvis expresse huic non renunciaverit; quo jure
utimur.
Il
ajoute que Jean Déculant atteste dans ses notes sur cet article,
qu’il l’a toujours vu ainsi pratiquer, qu’on ne consultoit pas, et
qu’on ne jugeoit pas autrement de son temps : Ita vidi semper ob
servari in judicando et consitlendo; et que la note de Dumoulin
s’applique aux mâles comme aux filles : Ç u œ M olin œ i notida
non habet solùm locuni in Jilia nupta et dotata, sed etiam in Jilio
cui in matrimonium quid certum fuerit assignaturn.
« C'est aussi, dit Auroux, le sentiment de Jean Faulcom iier,
» dans ses observations sur le présent article. »
Auroux émet ensuite son opinion personnelle sur cette question,
en ces termes :
« C e dernier sentiment me paroit le plus conforme à l’esprit de
» la Coutum e, et il me paroît qu’en s’attachant aux termes de
» notre article, on ne peut point s’empêcher de dire, que le père
» survivant et mariant ses enfans hors de chez lu i , et leur donnant
» une somme pour leur part dans les droits qui leur appartiennent
» par le décès de leur mère, fait cesser à leur égard la continua» tion d e là communauté; car il ne peut pas, ù ce qu’il me paroît,
» mieux marquer la volonté qu’il a de ne plus demeurer en com» inunauté avec son enfant, qu’en le mariant hors de chez lu i , lui
» donnant ce qu il prétend lui appartenir, et souffrant qu’il tasse
» un commerce et une communauté à part.
« Notre Coutume, au présent article, ajoute Auroux, ne demande
» autre chose pour arrêter la continuation de com m unauté, rju’un
» inventaire ou partage , division ou autre convention équ'pollant
» a partage; or, comment peut-on qualifier le m a r i a g e d ’un enfant,
» sa separation d ’avec son père, la dot q u ’on lui constitue pour scs
» droits acquis par le décès de sa mère, aulrement que de partage,
D
�(
26
)
» ou tout au moins, comme parle la Coutum e, de convention équi» pollant à partage ? »
Cet auteur, dans sa c e n t - troisième addition, rappelle que l’art.
118 de l’ancienne Coutume de Paris portoit, comme la Coutume
de Bo u r b o n n a i s , qu’il n ’y avoit point de continuation de commu
nauté, si le survivant des conjoints avoit fait faire inventaire, ou
autre acte dérogeant à la communauté; que par suite de ces ex
pressions, on décidoit alors que les enfans dotés par le survivant
ne pouvoient plus demander la continuation de communauté, parce
que le contrat de mariage étoit une espèce de partage, et acte dé
rogeant à la communauté; que les réformateurs de la Coutume ayant
supprimé ces termes, et autres actes équipollens, l’inventaire fait
en bonne forme peut s e u l, dans cette C o u tu m e , dissoudre la
communauté.
« Mais, ajoute-t-il, comme la disposition de notre Coutume, au
» présent article 270, n ’a pas été réform ée, il est vrai de dire
» que suivant cet article, et eu égard aux termes dans lesquels il
» est conç u , le mari age de l’e n fa n t, hors d e la maison d u père,
» suffit pour dissoudre la c o m m u n a u t é . »
• Enfin , il rapporte une sentence de la sénéchaussée de Moulins,
rendue le 14 mars 172 7, lui Auroux étant du nombre des juges,
par laquelle il fut jugé que « le mariage de Marie Ravel, sa consji titution de d o t , la nouvelle communauté contractée avec Fran)> çois Boucaud , sa séparation et sortie de l'ancienne commu)) n a u lé , son défaut de collaboration en ¡celle, devoient être re» gardés comme un partage ou actes équipollens à partage , dis—
» solutifs par conséquent de communauté, aux termes de l’article
» 270 de notre Coutume. »
Ici les quatre enfans du premier lit sont mariés, plusieurs de
puis trente et quelques années.
T o u s ont été dotés, non-seulement de l’universalité de leurs
biens propres, niais encore en partie aux dépens de la seconde
communauté.
Aucun d’eux n ’a mis sa collaboration dans cette seconde com
munauté.
�SYY
(
27
)
'
T o u s sont sortis de la maison paternelle.
T o u s ont contracté une nouvelle communauté.
Dès-lors Inapplication de ce préjugé se fait de lui-même à l’espèce.
Mais les parties se trouvent ici dans de bien plus forts termes.
D um oulin, Coquille, D u re t , Déculant, Faulconnier, Auroux,
supposent une communauté continuée entre un père et ses enfans,
qui n ’a pas fait d’inventaire , qui ne s’esl pas remarié, qui n ’a pas
contracté une nouvelle communauté avec une seconde femme ,
et ils n ’hésitent pas à décider que la communauté est interrompue,
lorsque les enfans sont dotés et mariés hors de la maison paternelle.
. A combien plus forte raison faut-il le décider ainsi, dans l’espèce
où il existe un inventaire fait dans le dessein de dissoudre la com
munauté ;
U ne déclaration formelle de cette dissolution, insérée dans le
second contrat de mariage du sieur Virotte;
Une nouvelle communauté contractée avec une seconde femme ;
Quatre enfans dotés et mariés hors de la maison paternelle, et
qui tous ont contracté une comrpunauté particulière, fo n t ménage
et négocient autre part, où le père ne prend rien , comme le dit
Coquille.
A combien plus forte raison encore, doit-on le décider ainsi,
dans l’espèce où ces quatre enfans du premier lit n'ont contribué
en rien à l’avantage de cette seconde communauté, ni par leur
collaboration , ni par leurs revenus, où ils l’ont au contraire épuisée
dans tous les sens par leurs dépenses, et où cette seconde commu
nauté n a subsisté, n ’a prospéré que par 44 ans d’économie, de
soins, de travaux de la dame Virotte, et par les revenus annuels
d un riche patrimoine, qui se sont confondus dans cette commu
nauté l
Q u ’oppose-t-on contre tant de moyens ? L ’arrêt des Vidalin,
rendu, dit-on, le ù mai 1768, cité par Ducher.
Cet arrêt ne peut être mis en balance avec toutes les autorités
que nous venons de citer.
On sait d’ailluurs que les arrêts dépendent le plus souvent des
circonstances , ou d’une défense négligée.
�w
2 8
E t si on s’en rapporte à l’auteur qui cite cet arrêt, on y remar
que que le père a voit institué ses enfans ses héritiers par égalité,
avec la condition ridicule de s’en tenir à une somme quelconque
pour leurs droits maternels, sous peine d'apanage pour les filles,
et pour les m ales, d ’être réduits à leur légitime.
. On ne voit pas qu’il y eût eu un inventaire destiné à dissoudre
la communauté; une seconde communauté contractée par le sur
vivant; une dot constituée aux enfans mariés, bien supérieure à
l eurs droits maternels, et toutes les circonstances qui se trouvent
dans cette affaire, et qui la rendent la plus favorable, pour l’in
terruption de la communauté, qui ait jamais paru dans les tri
bunaux.
Ajoutons que le sieur Virotte a fait un traité avec ses enfans
du premier lit, en 1784, qui forme encore une preuve nouvelle
de cette dissolution de communauté, en ce que, par ce traité, le
Sieur Virotte a restitué à ses enfans les jouissances de certains
biens qui leur étoient propres, qu’il avoit aliénés, tandis que ces
jouissances seroient entrées dans la communauté , si elle n’avoit
pas été dissoute.
Mais tout ce qu’on vient de dire dans cette dernière partie de
la discussion, n ’est que par surabondance de droit.
L ’inventaire du mois de janvier 1762 a été fait avec légitime
contradicteur; il est loyal, il est de bonne foi. il n'en eut pas
fallu davantage pour interrompre la communauté dans la Coutume
la plus sévère ; et ce n'est pas aujourd’hui qu’il faut ajouter
la
rigueur des lois sur cette m atière, lorsqu’il est reconnu que cette
institution était essentiellement mauvaise, et que les sages réfor
mateurs de nos usages gothiques, les rédacteurs du Code civil, se
sont empressés de l ’abolir.
Signé V I R O T T E - D U C H A R M E , tant pour lui
que pour sa Mère et ses frères et sœurs du second lit.
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
D E V É Z E , avoué.
-à C L E RM O N T ,de l'imprimerie de LANDRIOT , imprimeur de la Préfecture.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delaire, Anne. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Devèze
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Anne Delaire, veuve de Michel Virotte, et les six enfans nés de leur mariage, appelans ; contre les quatre enfans du premier lit dudit sieur Virotte, intimés.
Table Godemel : Communautés : 2. pouvait-on, sous l’empire du droit coutumier, et particulièrement en Bourbonnais, interrompre une communauté conjugale, à laquelle des mineurs étaient intéressés, pour un inventaire infidèle, inexact, ouvrage du survivant seul ? L’inventaire authentique et solennel pouvait-il être remplacé par un autre acte qu’un partage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1762-1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1813
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1811
BCU_Factums_G1814
BCU_Factums_G1812
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53340/BCU_Factums_G1813.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-le-Blin (03179)
Treteau (03289)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53954/BCU_Factums_B0115.pdf
f2af31994fce61dc755f43c73a8eab19
PDF Text
Text
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f ie u r d e l a V e r g n è r e s , e n q u a lité d e p è r e & lé g it im e
a d m in iftra te u r d e D e m o if e lle A n n e D e f c o r o l e s , &
M e F r a n ç o is M a y e t , N o t a ir e R o y a l & P r o c u r e u r
d ’o ffic e e n la ju ftic e d ’O l i e r g u e s , D e m a n d e u r ,
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CO N TR E
M . M e P i e r r e A n d r a u d y Seigneur
de P a r p a le ix Confeiller du R o i , Juge-Magif t rat
en la Senechauffee & Siège Préfidial de ClermontFerrand, Défendeur.
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Andraud
ne peut réclamer le partage des biens de
Catherine G odivel, fans attaquer directement le texte
enotre
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coutum e, qui prononce la forclufion contre la fille
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�quî^iefl: m arine, père & mère vivans* iàns réferve d’efpoit*
.l*« )« !;c^ —iueceiTif. Il prétend que la renonciation qu’ Antoinette G odiy ^ ^ - v e l j fa bifaïeule, a faite en faveur d’un de fes frères feu lem en t,
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---- é — ------ cféroge à la forclufion, & a dû la rendre habile à fuccéder ,
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. <rrrypwv^£&~ ou ^ ce q Uj e ft. j g même , fes defcendans, dans le cas où la
j
*
poftérité de ce frère, au profit de qui elle a renoncé, viendroic
^
à s’ éteindre. M . Andraud foutient que les defcendans de l’autre
7 at
frère d’A ntoinette G odivel ne peuvent pas invoquer la fo'r¡¿gale; qu’ils ne font pas fondés en vertu du droit
^v<aa— d ’accroiflement que notre coutume donne aux m âles, à repréfenter A ntoinette G odivel au partage de la fucceflîon de Caî t ^ J L / ^ i^ / ^ Kjh e rin e . I l ne fera pas difficile d’établir que cette prétention
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eft une erreur.
Si M . Andraud eft exclus de la fucceflîon de demoifellé
Catherine G o d iv e l, comme on ne fauroit en d o u ter, il ne
j
peut y avoir de difficulté à adopter la demande des fieurs
'rxAH'Î)efcoroles ô t.M a y e t, tendante à être fubrogés à l’effet des
— cefïîons que M . Andraud s’eft: fait confentir par leurs cohé-
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r^^ers'
ei* ¿ tonn^ cl ue
Andraud ait avancé que les def■
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• . cendans d’une fille, en la fuppofant même forclofe, ne peuvent
y, / .t cS : ? 7 être écartés par l’a&ion en fubrogation ; qu’il fuffit que l’acqué-i
C - Ü ? r e u r foit parent pour.que cette action celle; qu-il importe peu
* * qu’il foit héritier ou non.
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&
M e Jean G o d iv e l, avocat, a eu deux femmes. D e fon premier
mariage avec demdifelle Anne Andraud, eftiilu Henri G odivel;
celui-ci & ClaudinfeBiaudinières, foh époufe, ont eu uiie fille
nommée M arie -J ean n e G odivel. C ette dernière a époufé
Erançûis-A dm irat-Seyinier ;-& -d é ce mariage elle a eu trois
�( 3 )
enfans; favoîr, le fieur A dm irât, prêtre, le fieur Adm irât',
bourgeois, ôc demoifelle Marie Admirât.
. Marie Admirât a contracté deux mariages : le prem ier, avec
le fieur M ayet, d’où defcend fieur François M a yet, un des
V*
demandeurs, fie le fécon d , avec le fieur D efco ro les, autre
-C.^. 0 des demandeurs.
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y v*-fcr*~t" Anne D efcoroles, dem oifelle, eft née de ce fécond mariage;
<r '^ >T'*eIle eft repréfentée dans l’inftance par fon p ère, comme légî^ time adminiftrateur de fes biens.
¿ J A’ ï , T e l eft l’état de la defcendance du premier mariage de M e
VC-.A-1 je an G o d iv e l, avec A nne Andraud. Paifons à fon fécond
'•
mariage avec demoifelle M agdeleine de M âcon.
^ ^ C e fécond mariage a donné le jour à fept en fan s, dont
trois mâles ôc quatre filles. Ces enfans fo n t, Guillaum e f
Jofeph, Em m anuel, Antoinette, Jeanne, M arie ôc Gabrielle.
r* "ll faut d’abord écarter deux des mâles; favoir, Jofeph ÔC
Emmanuel G o d iv e l, décédés tous deux prêtres. Leurs biens
fe trouvent confondus dans ceux de fieur Guillaum e G o d iv el,
leur frère, qui leur a fuccédé; enforte qu’on peut feindre qu’il
n'y ait eu que ce feul mâle de ce fécond mariage. C ’eft fur
quoi les parties font d’accord.
Guillaume G o d iv el, de fon mariage avec demoifelle Jeanne
de Saleffe, a eu quatre enfans, Charles, Catherine, M arie ôc
9utre Catherine. L es trois premiers font décédés fans poftér it é , & tous leurs biens ont pafTé à demoifelle Catherine
G o d ivel, fécondé du n o m , qui eft auiïi décédée fans poftérité
mois de décembre 1783 : c’eft le partage de fa fucceiïïon
9 Ul fait la matière du procès.
¿ .A l’égard de demoifelle A ntoinette G o d iv e l, l ’aînée des
^e s > elle. a eu [de fon mariage avec M e Martin* Garnaud
A z
�( 4 J
plufieurs enfans , du nombre defquels eft demôifelle Barbe
Garnaud qui s’eft mariée avec le fieur BeiTeire des Horts.
D e ce mariage eft iiTue la demôifelle BeiTeire} mère de M .
Andraud.
Par rapport aux trois autres filles, Jeanne, Marie & G abrielle G o d ivel, elles ont eu des defcendans dont il eft inutile
de s’occuper, par les raifons qu’on va expliquer
- Pour foulager l’attention des le&eurs, on mettra fous leurs
yeux le tableau de la généalogie.
D es quatre filles que M e Jean G odivel a eues de fon fécond
m ariage, A ntoinette G o d iv e l, l ’aînée, époufe du fieur G ar
naud, eft la feule qui fe foit mariée du vivant de fes père &
m ère ; les trois autres n’ont contra&é mariage qu’après leur
décès : c ’eft par ce m otif qu’on n’a pas fait figurer leur poftéritédansla généalogie. Elles n’ont point été forclofes : aufii,
leurs defcendans ne font point parties au p ro cès, & on ne leur
contefte pas le droit de partager la fucceifion de demôifelle
Catherine G odivel.
Par les articles de mariage d’Antoinette G odivel avec fieur
M artin G arnaud, du 27 mai 16 84, M c Jean G odivel & demoifelle Magdeleine de M â c o n , fes père & mère , lui conftituèrent une dot de 6000 livres, & on y ajouta la claufe fuivante
qui donne lieu à la conteftation : m oyennant ladite conflitution ,
ladite fu tu re époufe renoncera , de l'autorité dudit fu tu r époux ,
à toutes fuccejfions , directes & collatérales , au profit de fe s
frè re s germ ains fe u le m e n t , enfans de ladite demôifelle de M â co n ,
f a mère , & dudit fieu r Godivel.
O n conçoit aifément le m otif qui a donné lieu à cette claufe.
Suivant notre co u tu m e, la fille mariée du vivant de fes père
f>c m ère,-eft forclofe de toutes fucceiïions, direSes & colla-
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Jean
L
G o d i v e l ’;
Henri Godivel.
Catherine Blandinières,
Seymier,
G
o d i v e l
.
Antoinette.
Martin Garnaud.
Guillaume Godivel.
Jeanne de Salefle.
M arie-Jeanne Godivef.
François A d m irât-Seym ier.
Emmanuel
Adm irat-
s i e u r
2°. Magdeleine de Mâcon.
i° . Anne Andraud.
. . . . Adm iratSeym ier, prêtre.
e d i t
C h a rle s ,
fans poftérité.
Marie Adm irât-Seym ier.
2”. Joachim DefcoMayer.
rôles, demandeur.
I o. L e fieur
C atherine,
fans poftérité.
M arie,
fans poftérité.
Catherine}
de cujus.
B a r b e G a rn a u d .
.......... BeiTeire
des H o r t s .
. . . . BeiTeire.
. . . . Andraud.
bourgeois.
François M a y et,
demandeur.
A nne Uefcor oies»
M . Andraud y
défendeur.
T rois autres filles
qui ont des defeendans,
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�térales , Ti les père & mère ne lui réfervent refp ô ir’ fucceflif.
L ’intention du fieur G odivel & de la demoifelle de M âcon >
étoit bien de biffer leur fille dans l'interdiction prononcée par
la coutume ^ puifque, bien loin de ilipulcr qu’ils vouloient l’eâ
tirer, ils prenoient la précaution de la faire renoncer, o . r
M ais, fuivant la l o i , la renonciation dcvoit profiter*, n o n ’
feulement à Guillaum e G o d ivel, frère gërmain d’A ntoinette ,
mais encore à Henri G odivel , fon frère? confanguin ,• repréfenté par le fieur M ayet & la demoifelle Deicorolés. Perfonne n’ig n o re , & M . Andraud ne le contefte pas, q u e ,/
fuivant nôtre coutum e, la portion de la fille forclofe accroît à
tous les frères indiftin&ement , 'm êm e aux confanguins, au
moins quant aux biens paternels.
M agdeleine de Mâcon voyoit fans doute âvec peine, que H enri
G o d iv e l, enfant du premier lit.d e fon m ari, partageroit avec
Guillaum e G o d ivel, fon fik ’j le bénéfice de la f 11 Hifii m. O n
voit d o n c, que pour éviter ce partage, pour attribuer l’effet j *
de la forclufion en entier à Guillaume G o d iv e l, qui lui étoit
aufli cher que Henri G o d iv e l, devoit lui être indifférent, elle ,
engagea fon mari à faire ufagedu pouvoir que lui donnoit la ^
jurifprudence, à.diriger la:renonciation au profit de Guillaume
G o d iv e l, préféraWement àrHenri.îc
¡u, '
\
L a branche de Guillaume G odivel vient d efe perdre, dans
h perfonnede demoifelle Catherine .Godivel-, fa dernière fille ,
dépédée au mois de décembre 1783 : fa fucceflion eft ouverte
en pays de cou tu m e, & les immeubles y font fitu és.’
ç AuiTi-tôt après fo n / d é c è s tq ù s les héritiers collatéraux fe
font préfentés pour recueillir la fucceilion. L e partage à dû s’en
fajrei en autant.de portions que Guillaume G odivel avoit de
frères ou de fœurs; c’eft-àrdire, en cinq. Mais ^ les.defcendan* 1
de H enri G o d iv e l} outre leur portion ^devoient prendre^ en I
' '■
�0 ,6 )
vertu du droit d’accroiffem ent, la portion d?A ntoinette G o*
divel.
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N éanm oins, M . A ndraud, comme repréfentant Antoinette
G o d iv e l, s’eft placé au nombre des héritiers de Catherine. M»
E f c o t , confeiller en la C our des A id e s , en qualité de mari dé*
dame A ntoinette G arnau d, fe trouve dans la même pofition
que M . Andraud ; la dame Ton époufe eft petite-fille de demoifelle A ntoinette G odivel ; il s’eft auiïi préfenté comme héritier ; :
& fi l ’événem ent étoit favorable à M . Andraud , il éleveroit '
vraifemblablement la même prétention.
. Il dépendoit, de la fucceflion dont il s’a g it, un mobilier confidérable ; pour en éviter le dépériiTement, le fieur Gibergues
qui repréfente une des trois filles non forclofes de M c Jean
G o d iv e l, a requis l ’appofition des fcellés : fur fa requifition, le
juge de Befle en a fait la rémotion.
E n .ce t éta t,to u s les héritiers apparens ont fa it, le 6 février
dernier, un partage de l’argent ôc des meubles qui fe font trouvésdans la maifon de la demoifelle G o d iv e l, à l’exception cepen
dant de lafom m e de p 222 livres, qui a été diftraite & dépofée
entreles mains d’un' tiers, pourpayerles legs faits parla demoi-^
felle G o d iv e l, & les dettes les plus urgentes( 1 ).
M . Andraud eft entré dans ce p artag e, non feulement de '
fon c h e f, mais encore comme ayant acquis les droits fuccefifs
de trois cohéritiers ; fa v o ir, du fieur Gibergues & des fieurs
Adm irat-Seym ier s oncles du fieur M ayet & de la demoifelle
D efcoroles.
J
M ais M . Andraud ne fauroit induire de cette circonftance ,
_________ _________________________
1
( 1 ) C e t aéte contient quelques autres diipoiltÏDns qu’il eft inutile de
rapporter dans ce précis ; on s’en tient aux faits n écefftircs, pour l’intel- •
la ço n tsih tio n ,.
-
..
i
�( 7 )
une approbation de fa prétendue qualité d’héritier de lâ part des
demandeurs. C e partage ne porte que fur le mobilier de la D llé1.
G odivel ; il n’a pu être que provifoire : d’ailleurs, les droits
des parties n’étoient pas encore connus; les titrés n’étoient pas
rapportés : auiTi les parties, foit dans ce p artage, foit dans tous
les autres a£tes qui ont précédé & fuivi, ont eu la précaution
de ftipuler cette claufe : fans préjudice à nos qualités refpeâives\
prétentions, moyens de droit 6* de fa it, protejlatiotis, réferves,
demandes formées ou àformer . . . défirant tous d’éviter le dépérijfement du mobilier de cette fuccejfion. !i'
~
C e qui prouve au furplus, que même avant ce partage , les
demandeurs!, comme repréfentans Henri G o d iv e l, entendoient exclure M . Andraud, c ’eft qu’ayant été inftruits qu’il
avoit acquis les droits fucceffifs du fieur abbé A dm irat-Seym ier, ils s’em preffèrent, dès le 3 février 178 4; c’eft - à - dire,
avant le p artage, de le faire affigner pour être condamné à en
pafler fubrogation à leur p ro fit, fous les offres dé l’indemniferî.
L es fieurs D efcoroles 6c M a y e t, ayant appris e'nfuite que
M . Andraud avoit encore acheté les droits fucceffifs du fieur
G ibergues, ils l’ont également fait affigner, par exploit du p
février 178 4 , en fubrogation de-cette fécondé ceÎfion, fo'üç leè
mêmes offres de l’indem nifer, fur la repréfentatioii q u il feroit
des contrats d’acquifition.
'
;
• • V /,
t Dans le cours de 1 inftancc, les fieurs D efcoroles 6c M a ÿet,
ont demandé que M . Andraud fût exclus de la fuccefliôri dé
Catherine G o d iv e l, ôc qu’ils fufFent auto'rifés à 'y prendre
^• portion-que les defcendans - d,An'toinék'ef'G od ivel y au*oient prife ,'e n i fuppofant q u elle n’eût point été forclofe.
es feurs D efcoroles & M ayet ont encore infifté fur les demanc'es en fubrogation
à l’effet de ¿toutes les ceflibiis qui
^voient'dt’é confenties delà part de leurs cohéritiers.
�(•8 }
f r M.rrA'ndrâudtConteftei.toutes; ces' prétentions ; 'i l foutient
,qu’Arntoinette G o d iv e l, fa^bifaïeule, n’a point) été forclofe j
qü’à la v é r ité , ayant renonce, au profit de Guillaume G o d iv e l,
elle devoit être exclue de toutes fucceiïions, tant qu’il y auroit
eu des defcendansde Guillaume G od ivel; mais que la poftérité
de Guillaum e G odivel s’étant éte in te, les repréfentans d’A n
toinette G odivel ont recouvré leur habilité à fuccéder ; que
tîa renonciation d’A ntoinette G odivel a été conditionnée par
.ces ternies., au profit de [es frères germains feulem en t, ôt furtout par cette dernièrç expreifion , feulem ent; de manière que
.f0nrexclufi0n devoit feulement durer tant qu’il y auroit des
defcendans des frères germ ains, & qu’à défaut de ces defcendans , l’exclüfion s’évanouit.
,
. M . Andraud foutient encore.que quand il devroit être écarté
de la fucceifion de demoifelle Catherine G o d iv e l, à raifon
de la"forclufion d’A n to in ette, les'dem andeurs ne feroient
pas pour cela fondés dans leurs demandes en fubrogation,
parce qu’il eft parent, & que d’ailleurs il a déjà pris connoiffance des affaires de la fucceilion.
Pour combattre les moyens de défenfe d e M . A ndraud, on
va prouver rdeux propofitions.
L a prem ière, qu’Antoinette G odivel â été forclofe, & qu’au
défaut de poftérité de la part de Guillaume G o d ivel, les repré
fentans Henri G odivel ont dû remplacer A ntoinette G o d ivel,
au partage des fucceiïions collatérales.
L a fécon d é, ,que l’a&ion en fubrogatjon a lieu contre les
defcendans de la fille forclofe, ainfi que contre lesjétrangers.
■
PR EM IÈ R E PROPOSITION.
S ’il s’agiiToit d’interpréter la claufe du contrat de mariage
. ...
.
T .;rfi £ i v b w h .
d’A ntoinette
�^ ’Antoinette G o d ivel, en elle-m êm e, & en faifant abftraâion
des principes de notre coutum e; fi la queftion étoic purement
gram m aticale, nul doute que cette interprétation ne dût fe
faire en faveur de M . Andraud. Mais on eft obligé de porter
un jugement différent, fi on ne perd pas de vue ces principes.
I l eil donc néceflaire de les développer; c’eft avec leur lumière
que nous éclairerons les routes que l ’on doit fulvre dans cette
interprétation.
Suivant la difpofition de notre coutume’ ( art. 2 j du tit. 1 2 ) ,
la fille qui fe marie du vivant de fon p ère, qu’elle foit dotée
ou n o n , eft forclofe de toutes fucceilions directes 8c collaté
rales, tant qu’il y a des mâles ou defcendans d’eux. Pour
opérer cette forclu fion , il n’eft pas néceflaire que le père
indique que telle eft fa volonté ; il ne faut point de renon
ciation; la forclufion eft prononcée par la loi. D ès le moment
que la fille eft mariée, elle eft frappée d’une inhabilité de fuccé'd er, tant qu’il y a des repréfentans de fes frères, & cette inhabi
lité fe communique à tous fes defcendans; en un mot elle eft
retranchée de la famille.
Pour faire ceffer cette incapacité dans la perfonne de la
fille , il faut que le père en la mariant lui réferve expreffém ent l’efpoir de fuccéder ; qu’il la retienne dans fa famille
( art. 27 ).
;~*
Il eft également certain que la portion de la fille forclofe
appartient aux m âles, <^u à kyrs.repréfentan«. C ’eft la faveur
des mâles qui feuls perpétuent les m aifons, qui a donné lieu à
cette lo i; ce font donc eux qui en doivent profiter.
^ ne peut y avoir d’équivoque fur le m otif de la loi ; elle
^ expliqué e lle -m ê m e , & pour la cotifervation des maifons
U^U Pay s j a été avlfé par lefdits états, & c. ( art. 3 1 ) .
t •
1
^
�C10 )
j. *
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Loin d’ici ces déclamations que l'on s’eft quelquefois pef*
mifes trop légèrem ent contre cette lo i; ces reproches qu'oil
lui a faits d’avoir prodigué tous les avantages à un des fexes,
& d’en avoir entièrement privé celui q u i, fuivant nos ufag e s , bien plus que fuivant nos lo ix , ne peut fe reproduire
qu’en perdant fon nom. Ces plaintes frivoles ne peuvent
toucher le cœ ur des magiftrats auxquels l ’exécution de la loi
eft confiée : rien n’en prouve mieux la fagefie, rien ne juftifie
mieux fes vues politiques, que l’obfervation qu’on en a faite
jufqu’à nos jo u rs, & l ’exemple de plufieurs provinces du
royaume qui l ’ont adoptée.
toug j es auteurs jm5ug ,je nos principes fe font élevés
< ro
£
l avec force contre ces plaintes peu réfléchies. Ecoutons ce
, &.«u^&vy^**=^ q u e nous dit le favant M . Bouhier dans fes obfervations fur
la coutume de B ou rgogn e, qui à cet égard a des difpofitions
t>. vwaC,
à-peu-près femblables à la nôtre. I l ejl évident, d it-il, ( chap.
3.6 , tom. i er, pag. f 2p ), que le jlatat dont il s'agit n'a point
fa it par haine pour le fe x e 3 mais feulement en faveur des
m âlest & pour la eonfervation des biens dans les fam illes. I l
—— doit donc être tenu pour favorable. Celte réflexion fert à réfuce quon dit que l ’exclufion des fille s ejl contre le droit
'/A,.
f 0,nmun' Un ufage auffi ancien que la nation j que nos auteurs
7! *
regardent comme un point efjentiel au bien de l ’éta t, & qui
vp^ ¿¿m^, r
univerft lie ment reçu p a r -to u t, peut bien ctre appelé notre
CU<~.
'% o it commun, v U
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J1 ne faut donc pas s’étonner que toutes les difpofitions
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des pères de fam ille, qui ont paru tant foit peu douteufes
& équivoques aient été rapprochées des principes de la coutu m e, parce que le retour au droit commun eft favorable,
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que dans l ’incertitude un père eft préfumé avoir difpof4
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�( II )
'¿e Fes bien s, félon le vœu de la loi. I l n’eft donc pas extraor
dinaire que toutes les fois que des difpofitions louches ont
mis en oppofition la nature qui follicitoit lé g a lité , avec la loi
qui la défendoit, les magiftrats aient toujours fait pencher la.
balance du côté de la loi.
Ces exemples font en grand nombre. Un père en mariant
fa fille, J*^avoit-il f Mor'i é ^QS fucceffions dire&es., fans parler
des collatérales ? Dans ce c a s , quoique par un argument â
contrario fi puiflant dans le droit, on eût pu dire que le p ère,
en ne déclarant fa fille inhabile que pour les fucceffions
dire& es, avoit vraifemblablement entendu lui réferver les
collatérales, quoique la fille pût faire valoir cette maxime ,
iticlujîo unius ejl exclufio alterius : néanmoins les tribunaux
de la province ont toujours jugé que dans ce cas même la
fille étoit forclofe des fucceifions collatérales, & leurs ju gemens ont été confirmés par les arrêts. O n a penfé qu’au défaut
de renonciation exprefle pour les fucceilions collatérales, les
mâles pouvoient en exclure la fille, en vertu de la forclufion
légale, à laquelle le père n’avoit pas d é ro g é, & qui ne ceiïoit
de veiller pour eux. Pour que le père foit préfumé n’avoir
voulu exclure fa fille que pour les fucceffions dire&es, & avoir
défiré de lui conferver les collatérales, il faut qu’il ait marqué
bien manifeftement cette intention ; qu’il fe foit fe r v i, par
exem ple, de la particule lim itative feulem ent t o u , comme
on difoit autrefois, tant feulem ent.
Suppofons encore qu’un père ait un fils & plufieurs fillesy
dont les unes aient été mariées de fon v iva n t, fans réferve
^ eipoir fucceffif, & dont d’autres ne foient pas m ariées, fie
conféquenj- non forclofes; que dans cet état le père donne.
tfiftament le quart de fes biens à fon fils, 6c qu il dife,
a l ’égard des. trois autres quarts ils fero n t partages par égale*
�( I* )
portions entre le fils & les filles à marier} 6* non fore lofes ; ort
penferoit au premier coup d’œ il, d’après cette claufe, que fi
le fils prend le quart, les trois quarts reftans doivent être par
tagés égalem ent, ôc par têtes, entre lui & les filles non mariées.
R ien nê paroît plus impérieux que ces termes du père : par
égales portions entre le fils & les fil^s^à marier. O n ne croiroit
pas que le fils, lors du partage, dût àv'ôî'ffe quart qvMui a été
lé g u é , & prendre de plus dans les trois quarts reftans, les por
tions que les filles forclofes y auroient prifes, fans leur inhabilité.
Cependant, cette prétention de la part du fils a toujours été
accueillie à chaque fois qu'elle a été élevée : plufieurs fentences
de la fénéchauifée d’A uvergn e, anciennes & modernes, l’ont
ainfi jugé ( i ). O n a penfé, conformément à l ’opinion de
Bafm aifon, que le fils étoit toujours fubrogé par le miniftère
de la coutum e, à la place des filles forclofes; que le père, en
fe fervant de ces term es, à ïégards des trois autres quarts, ils
feront partagés par égales portions entre lefils & les filles à marier,
n'avoit pas eu en vue une égalité abfolue ; mais feulement une
égalité relative à la lo i; que pour que le fils rie pût pas toutà-la-fois réclam er, & le quart lég u é, & l’accroilfement dans les
trois quarts reftans, il faudroit que le père eût difertement
exprimé qu’il ne faifoit le legs du quart, qu a cette condition î
( i ) Cette queftion s’eft clevée en la féncchauflee d’Auvergne en
1 7 8 2 , entre le fïeur Bagès & M c Juge; elle a été décidée en faveur du
fils, par fentence du i y août 1782. Il n’y a point de doute fur l’eipece.
^ affaire a etc inftruite par M e Bergier Si par le defenfeur des fieurs
M ayet & Defcoroles. Cette fentence eft rapportée par le dernier com
m entateur, fur l’art. 31 du tit. 1 2 , pag. 4 6$; ¡1 cite les fentences anciennes
de 1630 & 1662 qui y font conformes. L ’on obferve que les expédi
tions çn furent produites au procès des fieurs Bagès fit Juge,
î» j
/
�0 3 ')
q u e , comme le dit Bafmaifon à ces m ots, par égales portions >
il eût ajouté ceu x - ci ^ fa n s que les mâles puiffent s'aider de
Vaccroiffement des portions des fille s mariées.
E n fin , on a douté fx le père voulant fordorre fa fille pouvoit la faire renoncer au profit d’un de fes enfans mâles exclufivement aux autres. Une fentence de la fénéchauflee d’A u
vergn e, du 17 juin i 5 j 4 , rapportée par Prdhet fur l’article 31,
a jugé que le père avoit cette faculté. Mais un arrct du 21 juin
174J , rapporté par L acom be, au mot renonciation y fe£t i ere,
n°. 2 4 , a jugé le contraire. Cet arrêt eft fondé fur ce qu e, fuivant la coutum e, le bénéfice de la forclufion accroît à tous
les mâles indiftin&ement, & qu’il ne dépend pas du père d’in
tervertir cet ordre.
EmpreiTons-nous cependant de rendre hommage aux prin
cip es, & convenons que cet arrêt n’a jamais fait jurifprudence
en Auvergne : on y a toujours penfé que le p ère, au moment
qu’il marie fa fille , pouvant lui réferver l’efpoir de fuccéder-,
peut auffi diriger, à fon g r é , l’effet de la forclufion, au profit
d ’un de fes enfans m âles, au préjudice des autres ; que pouvant
le plus, il peut le moins. Mais de ce que cette queftion a été
élevée & difcutée plufieurs fois, de ce qu'elle a ézë jugée difFé;rem m ent, il en réfulte au moins qu’il n y a pas de loi plus rellgieufement obfervée en A uvergne, quelafubftitution des mâles
à la place des filles forclofes.
Si l'on rapproche ces observations de la claufe inférée au
contrat de mariage d’Antoinette G o d iv e l, il eft impoiTible
4 e n;ç pas condamner le fyfteme de .M . Andraud.
M e Jean G odivel ôc M agdeieine de M acón , fon époufe,
mariant leur fille ,'n ’ont point déclaré quils voulaient la
•T.eteiùr dans leur famille : elle a donc été forclofe. L a coutume
"
‘ t
*
*
-
1
�C 14 >
& le filence du père ont concouru pour opérer cette fbrclufton ; mais le père ne s’eft même pas renfermé dans le filence;
il a indiqué une volonté exprefle de forclorre fa fille; il l ’a.
d o té e , fous condition qu’elle renonceroit. Comment donc
M . Andraud peut-t-il dire qu’A ntoinette G odivel n’a point
é té forclofe ?
i
A la vérité le p ère, féduit par les fol licitations de Magdeleine de M âcon , fa fécondé fem m e, a ftipulé que la renon
ciation , ou ce qui eit de même , la forclufion profiteroit
aux mâles du fécond l i t , par préférence à celui du premier.
Mais cette préférence ne fauroit renfermer une privation
générale & indéfinie du droit d’accroiflement contre le fils
a in é , frère confanguin de la renonçante.
>
D ’après la renonciation au profit des frères germains, ceux-cî
ou leurs defcendans devoient feuls remplacer la fille, lorfqu’il
écherroit des fucceifions collatérales; mais, en cas de défail
lance de la poftérité des frères germ ains, alors le frère con
fanguin devoit reprendre les droits que lui donnoit fa qualité
de mâle. L ’exercice de ces droits ne devoit être fufpendu que
pendant la durée de la poftérité des frères germains. L a defcendance des frères germains venant à s’éteindre, la fille ne pouvoit
pas efpérer de prendre part aux fucceifions collatérales, parce
qu’en vertu de la forclufion lé g a le , elle devoit être perpé
tuellement inhabile à fuccéder, au moins tant qu’il y auroit
des defcendans du frère confanguin. D ès Tinftant’de fon ma
riage, elle contra&oit cette incapacité; elle en étoit frappée
par le miniftère de la coutum e, & le père réuniifoit fa volonté
au voeu de cette loi.
■^
'r
L a renonciation exprefle & conventionnelle manquoit à 1«,
yérité au frère confanguin & à fes defcendans j maia ila pou-
�c
r
*
^
voient invoquer à leur fecours la forclüfion légale. M . An-*
draud ne peut contefter toutes ces propofitions, fans s’élever
contre les principes élémentaires de notre coutume.
M ais, dit M . A n d rau d , fi Jean G odivel s’étoit contenté
de dire que fa fille feroit tenue de renoncer, au profit defes
frères germ ains, je conviens qu’on pourroit foutenir qu’il a
Amplement voulu que les frères germains fuiïent préférés au.
confanguin , quant au droit d’accroiiTement ; quJil n’a pas
voulu priver de ce droit le frère confanguin, au défaut des
frères germains. M ais, continue M . A ndraud, Jean G o d iv el
eil allé plus loin; il a dit que la future renonceroit au profit
de fes frères germains feulem ent. Cette particule lim itative
feu lem en t, annonce que fon intention étoit que fa fille
ne fut forclofe qu’autant qu’il y auroit des defcendans des
frères germains, & qu’elle ne le fût pas, dans le cas de la
défaillance de leur poilérité. L'inhabilité de la fille, dit tou
jours M . A ndraud, n’étoit relative qu’aux frères germains:
ceux-ci difparoiflans, la fille ou fes defcendans devoient recou
vrer leur habilité à fuccéder , même quand ils auroient été
en concurrence avec les repréientans du frère confanguin.
V o ilà le principal moyen de M . Andraud} & on ne croit pas
l ’aifoiblir en le rapportant.
O n s’apperçoit au premier coup d’o e il, que M . Andraud
donne trop dextenfion au mot feulement. R ep o rto n s-n o u s
à l’époque du contrat de mariage ; faifons attention qu’il y
avoit deux cas à prévoir : d’abord la concurrence du frère
confanguin avec les frères germ ains. lprfqu’il écherroit des
fucceiTions collatérales; enfuite, la défaillance de la poftérité
freres germains 6c la préfence du frère confanguiu feul t
de fç8 defcendans. L e iieur G odivel s eil occupé d uns
�feule id ée; il n’a prévu qu’un feul cas; c’eft-à-dire, la con*
currence du frère confanguin avec les frères germains de la
future ; il a défiré qu’alors les frères germains fuiTent préférés
au confanguin, & cette préférence a dû avoir lieu entre leurs
defcendans.
M a is , le fieur G odivel n’eft pas allé plus lo in ; il n’a pas
prévu le cas de la défaillance des frères germ ains, & il n’a
pas ajouté que ce cas arrivant, le frère confanguin ne pourroit
point remplacer fa focur ; qu’en un m ot il n’y auroit de forclufion que refpe&ivement aux frères germ ains, & que ceux-ci
difparoifîans, la forclufion ceiferoit à l ’égard du frère con
fanguin.
C e qui préoccupe M . Andraud, c ’eft la confufion qu’il a
faite de deux chofes qu’il faut bien diftinguer; favoir, la for
clufion, ou ce qui eft de m êm e, la renonciation légale & la
direction de la renonciation. L a forclufion eft dans la loi ;
elle fubfifte dans toute fa force, fi le père n’y a pas dérogé i
o r , le p è re , en mariant fa fille , n’a pas di£té cette déroga
tio n ; fon premier m ouvement, au contraire, a été de faire
contracter par fa fille l ’incapacité déjà prononcée contr’elle
par la loi ; il l’a fait renoncer. A la vérité, il a dirigé l’effet de
cette incapacité au profit des frères germains; mais il n’a pas
fongé pour cela à l’effacer dans la perfonne de fa fille, en cas
qu’il ne reftât que le frère confanguin.
»
L ’on ne peut donc attacher à la particule feulem ent, que
l ’idée de préférence aux frères germains fur les frères con~
fano-uins, en cas de concurrence en treu x; mais il eft impoffible d’y attacher l’idée d’exclufion indéfinie contre le frère
confanguin, notamment dans le cas où les frères germains
n ’exifteroient plus.
�( 17 )
Quand on fiippoferoitque le fieur G o d iv e l, p ere, a compris
toute la'force & retendue'de'ce m o t , feulem ent, lorfqu il s en
eft fervi ; quand on admettroit qu’il l’a apprécié, comme auroic
fait le grammairien le plus fcrup uleux, qu’en réfulteroit-il ?
qu’il l’a employé pour fignifier , qu’au cas qu'il vînt à échoir
des fucceffions collatérales , & que tous fes enfans, ou leurs
defcendâ’ns fe préfentaiTent pour les recueillir , alors G uil
laume G o d iv e l, ou fes defcendans , feroient feu ls en droit de
prendre la portion d’Antoinette G odivel. V o ilà le terme où
peut nous conduire toute l’énergie de ce m ot, feule ment ; mais,
vouloir en faire ré fu lte r, qu’au défaut même des freres ger
m ains, le confanguin ne profiteroit pas de la forclufion , c e ft
fuppofer, dans la claufe, une idée fecondaire, ultérieure qu on
ne peut y trouver; une idée qui eft au delà de l ’étendue qu’on
peut donner à cette expreffion , feulement-, une id é e , dont
cette exprcifion ne fera jamais le figne, aux yeu x de tout homme
impartial: il y a plus, c ’eft prêter au fieur G o d iv e l, p ère, une
intention qu’il nJa jamais eue.
E n effet, le fieur G odivel paroît jaloux de la confervation
de fon nom ; il fonge à réunir fur certains de fes enfans mâles
les avantages de la fortune qui è'ft fi néceflaire à l’illuftration.
Mais fi leurs branches euffent dû difparoître, fes mouvemens
d’affedion ne feferoient-ils pas dirigés vers fon autre fils qui
feul pouvoit tranfmettre fon nom , & perpétuer fa famille ?
n entendoit-il pas faire paifer ces mêmes avantages fur la tête
de ce fils , dans le cas où les efpérances qu’il avoit conçues ,
Relativement aux autres, feroient vaines & illufoires. T e l a dû
tre 1 ordre naturel de fes idées ; mais s’il ne l ’a pas dit bien
1 ertem ent, la loi l'ordonne impérieufementpour lui.
ette particule, feulem ent, ne peut avoir un fens auilî étendu
Sue ces m ots, & non d'autres ; on ne pourroit que d ire} tout aq
C
�(
)
plus, que la p&rùjçulexqrfsrmje tacitement ce qui eftdit expreffémerit par ces m ots i & non d'autres. Cependant, Xuppofon^
que le fieur G odivel eût fait renoncer fa fille au profit de fes
frères germ ainç, & non d ’ autres, M . Andraud ne pourroit pas
faire confidérer ces termes , comme emportans rid ée de la
réferve des fucceifions en Javeur d’A ntoinette G o d iv e l, dans
Je cas où la poftérité des frères germains viendroit à manquer*
C ’eft ce que nous enfeigne le B ru n , dans fon traité desfucceiTions, liv. 3 } chap. 8,fe£t. i , n 9. 4.7 ; il parle pour la coutume
de Bourbonnois , où la forclufion a lie u , comme dans la n ôtre,
avec quelques différences cependant, qui font étrangères à la
queilion , &• qui n’empêchent pas l’application du fentimenc
de le Brun. Une fille mariée , d it-il, par fa mère 3fou s la cou
tume de Boutbonnois , renonce à toutes fuccejfions directes &
collatérales, au profit de R em i, fon frère, e t n o n d ’ a u t r e s :
Rem i meurt ; il s'agit de favoirfi les autres mâles profiteront de
fa fucceffion , à l'exclufion de laf ille renonçante , ou fi, elle y
viendra avec les frères. V o ilà certainement notre queftion.
L e Brun décide que dans ce c a s , la fille eft exclue par les
autres m âles, au défaut de R em i ; il dit l'avoir ainfi décidé en
arbitrage avec M M . Lapoue & B erroyer:il n'eft pas inutile de
rapporter les folides raifons de cette décifion. Quand,la renon
ciation , dit l ’auteur, ne peut pas avoir effet au profit de R e m i,
elle doit être exécutée au profit des autres mâles ; parce que la
f o r c l u f i o n légale vient au défaut de la renonciation expreffe . . .
L es mots y E T n o n d a u t r e s , 11,ajoutent rien à la renoncia
fion enfaveur de Remi : on entend, que tant que le frère préféré
pourra ven ir, il exclura les autres ; mais ces mots n opèrent plus
rien, quand il s'agit de la fucceffion même du.frère préféré, la
fénonciation devient pur€ & (impie
par confeqaent, au profit
¿e fqus les m âles, . , D ’a i l l e m , il y a bien de Ift. différence >
"
�C 19 )
éntrtles mots', é t n o n a u t r é ' M e N t } & Us mots ¡ e t n o n
d a u t r e s : les premiers fo n t condition, mais non les derniers ; & les derniers même ne p o ù r r o i e n t pas effacer une renonciation f
qui étant générale, ejlcenfée expreffe pour chaque renonciation
en particulier.
. ■, ' , . >
• 1
M. A u ro u x d e s P o m m ie rs , fur l’article 307 de la coutume de
Bourboftnois j n°. 1 2 , nous dit que le fentiment de le Brun ,
eft fuivi dans cette province. Si la fille mariée, d i t - i l , en cette ■
)
coutume 3 renonce aux fucceffions directes ou collatérales , au
profit de Jean t fon frère germain s e t n o n d a u t r e s , &que
Jean vienne à décéder avant elle j fans enfans, en ce cas , la .
renonciation qui rie peut pas avoir effet au profit de Jean , fera
exécutée au profit des autres frères germains ( 1 ) ; parce que la.
forclufion légale vient au défaut de laforclufion expreffe.
E n fin , le dernier commentateur de notre coutume , tom e
1er i page S73 , a adopté pleinement le fentiment de ces deux
auteurs; m ais, ce qu’il eft eflentiel de remarquer , c ’eft qu’il
prévoit le cas où l’on fe feroit fervi de la particule feulem ent :
de la manière dont il s’efl: exprimé , on ne peut douter qu’il
n’ait penfé que cette particule feulem ent feroit infuififante
pour opérer la réferve des fucceffions collatérales à la fille ,
dans le cas où la poftérité du mâle , au profit de qui elle auroit
renoncé , viendroit à manquer. Après s’ être expliqué comme
lç Brun ôc M. A u ro u x , il ajoute: Ilfa u d ro it Jltpuler exp/effém ent „ que la fille renonce en fa v e u r dé tel de fe s frères feu lem ent 3’ 6* m êm e, què; lui ou f a pofiérité , venant à d éfa illir, elle
ou fe s defeendans, deviendront habiles à fu ccéd er, nonobjlant
l exijîence des autres mâles , ou defcetidans et eux.
( 1 ) M. A uroux dit des frères germains , parce qu en B o u rb o n n o is,
^ forclufiçn accroît au profit des frères germains} cen eft q u aleu r défaut
4 ue les confanguinsou utérins y font appelés.
C a
�O n ne p e u t, à là v é rité, dilfimuler q u e M . Andraudproduit
line confultation de ce même com m entateur, par laquelle il
fem ble q u 'il a penfé que M. Andraud ne peut être exclus de la
fucceifion dont il s’a g it , parce qu Antoinette Godivelne sejlp a s
contentée de renoncer en faveur defe s frères germains 3 qu elle a
ajoute la particule taxativ estantfeulement, qui emporte la réferve
des fucceffions vis-à-vis les frères confanguins. O n eft prévenu
que M . Andraud préfente cette con fu ltation , comme l'arme
principale avec laquelle il entend combattre fes adverfaires.
M a is , il faut remarquer que la confultation a été donnée
avant que le commentaire parût. L ’auteur , dans cet ouvrage
deftiné à éclairer le public ,’ a mieux approfondi la queftion ; il
a été touché de l’avis de le Brun & de M . A u ro u x , qu’il cite :
il paroît avoir été frappé de ces mots , & non d'autres , qu’il
rapporte ; en conféquence , il n’a pas balancé à foutenir que la
particule s feu lem en t, n’étoit pas fuffifante pour opérer une
réferve en faveur de la fille , en cas de défaillance de la poftérité ,
du frère , au profit de qui elle renonçoit ; que le père auroit
dû annoncer, que dans ce cas, la fille ne feroit point forclofe a
refpetiivement aux autres frères. Seroit-il donc poiïïble dé
mettre en parallèle cet avis particulier , avec une opinion con - [
fignée dans un ouvrage doftrinal ( i’ ) ?
Mais , dit M . Andraud, lorfqu’un père fait renoncer fa fille
aux fucccOions dire&es , avec la particule taxative feulem ent,
cette particule a 1’cfFet de lui réferver les fucceffions collaté
rales : donc elle a dû opérer le môme effet dans notre efpèce y
au défaut de frères germains.
( i ) L ’efprit qui prefide au barreau , difoit M. de F ourcroy , nous
communique une certaine chaleur pour des gens , dont nous ne connoif-
fons fouvent que le nom, qui nous anime dans la défeniè de leurs intérêts}
-i ;
'
^ . fi;:
¡iu i-.r
J
�C « )
I l faudroît bien fe faire illufion pour ne pas fentir le vice
d e c e raifonnement. D a n sle fp è c e propofée par M . Andraud ,
le père ne peut être affe£té que d’une id ée; c’eft de priver fa
fille de toutes les fucceflions dire£tes & collatérales , ou , au
contraire, de ne la priver que des fucceiTions dire&es. A in fi,
lorfque le père ne fe contente pas de faire renoncer fa fille aux
fucceflions dire&es, & qu’il ajoute, feule ment, on ju g e , & avec
raifon, que cette particule annonce fuffifamment qu’il a voulu
reftreindre la renonciation aux fucceflions dire& es, & qu’il a
entendu réferver à fa fille les fucceflions collatérales. Il eft
im poflible, dans cette efpèce 3 de donner un autre fen sà cette
particule taxative.
M a is, dans l’efpèce aftuelle , il y a deux chofes que le père
pouvoit avoir en idée ; favoir, la forclufion & la direction de la
renonciatipn , au profit des frères germains. Il ne s’occupe pas
du premier objet; il nefonge pas à tirer fa fille de T efpèce de
profcription , dans laquelle la loi Tenveloppoit : il ne peut donc
pas s’être fervi du m o t, feulem ent, pour limiter l’étendue de
cette forclufion qu’il laifloit à la difpofition de la loi ; fon feul
defîein étoit de diriger l’effet de cette renonciation, en cas de
concurrence des frères: le m o t, feulem ent, ne doit être inter
prété que dans cette idée ; il ne peut donc s’en être fervi que
pour mieux marquer la préférence qu'il donnoit aux frères
germ ains, toujours dans la concurrence quJil avoit en vue.
M a is, il eft impoflible que ce m o t, feulem en t, préfente l’idée
d’une exclufion indéfinie du frère confanguin, en cas de défail
lance des frères germains. O n ne peut pas même en conjethirer
qui nous transforme en e u x , |& qui fait, par un échange merveilleux de
notre efprit avec le le u r, que nous celions d’ctre ce que nous fommcs ,
pour devenir ce qu’ils font,
1'
^‘ l
4
l
�( 22 )
cette volonté de la part du père : d’ailleurs, la loi d e là forclufion eft trop impériéufe en faveur des m âles, pour céder à des
conjectures ; elle ne peut difparoître que devant une volon té
clairement énoncée.
.
-i
SECONDE
p r o p o s it io n
:
j
M . Andraud étant exclus de la fucceilion de denioifelle
Catherine G o d iv e l, ne peut raifonnablement contefter lar
demande en fubrogation des ceflions qu’il s’eft fait con fen tir,
d’abord par le fieur Adm irat-Seym ier, p rêtre, & enfuite par
le Heur G ibergues, qui étoit déjà cddataire des droits fucceilifâ
du fieur Adm irat-Seym ier, bourgeois.
;
M . Andraud oppofe en vain qu'en qualité de parent, il ne
peut être écarté par la demande en fubrogation ; que cette
a£tion n a lieu que contre les étrangers. Cette jurifprudence a
été introduite par deux motifs : en premier lieu , pour empê
cher que des étrangers ne portaflent un œ il curieux & indis
cret fur les affaires d’une famille ; & , en fécond lie u , pour que
des cohéritiers ne fuifent pas expofés à eifuyer le caprice ôc
les vexations d ’un nouveau copartageant qui pourroit être de
compofition difficile, ou dont l’infolvabilité feroit naître deÿ
inquiétudes fur les garanties refpectivés, dont l’exercice pour
roit un jour avoir lieu. Ces motifs puiffans ont fait étendre à
cette efpècela difpofition des lo ix , per diverfas & ab Jînajiafio
cod. mandad, fuivant lefquelles le débiteur d’une créance liti-1
g ie u fe, peut fe rédimer de toute a£lion envers le cédataire dei
cette créance , en lui rembourfant le prix de la ceifion.
^
Il
eft donc indifférent que l ’acquéreur foit parent ou non?
L a loi n'a eu pour objet que de favorifer les cohéritiers ; il?
ont le même intérêt à écarter un parent qu’un étranger; Ici
parent peut apporter au partage des difpûhtiûnsr hainéufesôd
�C *3 )
proceiTives : plus il y a de copartageans, plus les opérations d u '
parcage fe com pliquent, plus les biens fe m orcèlen t, & par
conféquent plus ils diminuent de valeur. Ces motifs m iliten t,
en faveur des héritiers, contre un parent, avecla même force que
contre un étranger; ils peuvent d on c, dans un cas comme dans
un autre, implorer le fecours d e lalo i. En un m o t, un acqué
reur non héritier , quoique parent, eft étrangeràla fucceilion.
A u iïï, fuivant les auteurs qui ont traité la m atière, tout
acquéreur eft réputé étranger, s’il n’eft point héritier : on n’ en
connoît aucun qui ait diftingué d’un étranger le parent qui
n’eft point héritier , & cette diftin&ion ne leur auroit certaine
ment pas échappé, fi elle eût eu quelque fondement.
Mais la queftion n’eft pas nouvelle ; elle s’eft préfentée en
la fénéchauffée d’A uvergn e, dans l ’efpèce même où fe trouvent les parties. L e fieur B rugeron, d’A m b e rt, avoit acheté
lgs droits d’ ùn cohéritier, dans une fucceilion où il auroit été
ap pelé, fi la fille qu’il repréfentoit n’eût pas été comme A n to i
nette G o d iv el, frappée de la forclufion : un des autres coh é
ritiers exerça contre lui l’a&ion en fubrogation , & cette
demande fut accueillie par une fentence de 1 année 1768 ( 1 ).
M . Andraud oppofe encore que d’après le partage du 6 février
1784., dans lequel il èft entré , il connoît l’état de la fu c c e ffion , & que dès-lors les motifs de la l o i , en faveur des héri
tiers , ne fubfiftent plus.
M a is, 1
M . Andraud ne pourroit employer ce moyen avec
quelqu’apparence de fondem ent, qu’ autant qu’il y auroit eu
une divifion du patrimoine de demoifelle Catherine G odivel :
o r , peut-on confidérer du même oeil un partage provifoire de
( 0 Me Affolent a note cette fentence en marge du recueil d eL aco m b e,
au m o t tra n jp o r t.
�( h 5
ï ’argent & des meubles fait à la* hâte, pour en éviter le dépéJ
riifem ent, & dans un initant où les droits des parties n’étoient
pas connus ? N e refte-t-il pas à partager les principaux objets de
la fucceflion , des papiers & effets confidérables, & tous les
immeubles ? Pourquoi M . Andraud veut-il faire perdre de vue
les proteftations que les parties n’ ont ceifé de faire, foit dan*
le partage, foit dans les autres a£tes, de nepréjudicier en aucune
manière à leurs droits? & d’ailleurs a-t-on oublié qu’une des
demandes en fubrogation a été formée le 3 février, trois jours
avant le partage?
‘ 20. Quand il auroit été fait un partage même défin itif, cette
circonftance ne formeroit pas un obftacle a la demande en 1
fubrogation : c ’eft ce que nous enfeigne le B run, liv .4 ,c h a p . 2 ,.
fe£t. 5 , n • 6 j. Enfin j eflime, d it - il, que cette fubrogatiott
des cohéritiers a lieu au cas même que la vente fo it fa ite s après
que le partage a été exécuté & confommé par la même raifort
qui l peut furvenir des difficultés & des garanties.
* Q uelle idée d o it-o n avoir a&uellement de la fécu rité1
que M . Andraud afFe&e de faire paroître, de cette ardeur avec
laquelle il pourfuit le jugem ent du procès 3 & qui a mis fes
adverfaires dans la néceifité de développer avec précipitation
leurs moyens de défenfe ?
M onjieur B E R N A R D * rapporteur.
M e G R E N I E R , avocat.
L e b l a n c , procureur.
1
.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É qui a vu le mémoire*
E S T D ’ A V I S que la prétention de M . Andraud eft
Contraire aux principes particuliers de notre coutume.
On
•
�C
H
)
O n a toujours tenu pour certain que la renonciation, faite
par la fille , au profit d ’un de fes frères, n’eft qu'une préfé-r
rence en faveur de ce frère, en cas de concurrence entre lui
& le s ’autres. Mais cette renonciation ne tire pas la fille de
la forclufion v i s - à - v i s les autres frères. Enforte qu’au cas
que le fr è r e , au profit duquel la renonciation eft^faite ,
vienne à décéder, ou que fa poftérité vienne à s’étein d re,
les autres frères, ou leurs defcendans, doivent repréfencer,
au partage des fucceflions, la fille qui a ainfi renoncé. C es
frères font alors appelés par la renonciation générale qu’ ils
puifent dans la co u tu m e, & qui vient à leur fecou rs, au
défaut de la renonciation expreife.
Pour qu’ils fuflent privés de cet avantage, il faudroit que
le père eût ftipulé qu’en cas de défaillance du m â le , au
profit duquel la renonciation étoit fa it e , la fille recouvreroit l’habilité de fuccéder, & ne feroit pas forclofe refpettivement aux autres frères, ou leurs defcendans.
O r , il eft impoflible de voir cette condition dans le contrat
de mariage d’Antoinette G odivel.
M . Andraud oppofe que la particule taxative feulem ent
appofée à la renonciation aux fucceifions d ireiles, emporte
réferve des fucceflions collatérales, & qu’elle doit opérer
le même effet dans la claufe du contrat de mariage d’A n to i
nette Godivelle.
Mais ce raifonnement ne peut fe fouten ir, & il eft vifibJe
.qu'il n’y a point de parité entre les deux efpèces.
Quand une fille renonce aux fucceflions directes feulem ent ,
On juge que cette reftri&ion emporte une réferve tacite des
fucceflions collatérales, parce que cette reftri&ion porte fur.
la chofe m ê m e, ôc fur la fubftance.de la forclufion,.au lieu
�(» « )
que dans le cas particulier, là reftriction feulem ent n e s'applique
qu’au bénéfice de la forclufion, & n'en limite pas l’étendue«
Il
paroît qu’il y a encore moins de doute fur la ,feconde
propofition. Les defcendans d'une fille forclofe , quoique;
parens , peuvent être exclus par l ’action en fubrogation, lorf
qu’ils ont acheté les portions de quelques-uns: des cohéritiers;
ils font réputés étrangers, dès qu'ils ne font pas héritiers :
la jurifprudence paroît fixée à cet égard par la fentence de
1 7 68 , citée au m ém oire; & on en connoît d’autres qui y
font conformes. -,i‘ 1-
<;•
u ' D élibéré à R iom le 30 juin 1784. S ig n é , T O U T T É E ,
D E P A R A D E , L A P E Y R E , V E R N Y , T O U T T É E jeune,
G A S C H O N D É P A R A D E fils, B R A N C H E , G R E N I E R ,;
JO U R D E . r
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D É G O U T T E , Imprimeur
L IBRAIRE près la F ontaine des L ignes 1 7 8 4
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Descoroles, Joachim. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernard
Grenier
Leblanc
Touttée
Deparade
Lapeyre
Verny
Touttée, jeune
Gaschon
Deparade, fils
Branche
Grenier
Jourde
Subject
The topic of the resource
forclusion
droit d'accroissement
secondes noces
généalogie
successions
coutume d'Auvergne
jurisprudence
doctrine
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Précis pour messire Joachim Descoroles, ecuyer, sieur de la Vergnères, en qualité de père et légitime administrateur de demoiselle Anne Descoroles, et maître François Mayet, notaire royal et procureur d'office en la justice d'Oliergues, demandeur. Contre monsieur maître Pierre Andraud, seigneur de Parpaleix, conseiller du Roi, juge-magistrat en la sénéchaussée et siège présidial de Clermont-Ferrand, défendeur.
arbre généalogique
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1684-1785
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
BCU_Factums_B0115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0116
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Olliergues (63258)
Clermont-Ferrand (63113)
Chanterelle (15040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
généalogie
jurisprudence
secondes noces
Successions
-
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ac551de54d646534dda41ad10ef7f35c
PDF Text
Text
a g w t e g a ' ......
-
I/
........
&!L
ÿ t& s *
R E P O N S E
S OMM A I R E
,
M e C h a r l e s J U G E , Procureur
en la Cour , pere & légitime Adminiftrateur
de fon enfant , héritier de défunte M A R I E '
B A G É S , fa mere; Sieur F r a n ç o i s M A L B E T ,
& Demoifelle É l i s a b e t h BA G E S , fa femme ,
de l ui autorifée , Demandeurs & Défendeurs.
P o u r
,
,,
C o n t r e M ‘. J e a n - N a z a i r e B A G É S ,
A voca en Parlement & M effire A N T O I N E
D E P O N S Chevalier , Seigneur de Bélef t a t,
f on Curateur Défendeurs & Demandeurs.
L
esDemandeurs
ne fe feroient jamais
douté qu’ils puffent s’attirer le reproche
1
d’abandonner les principes dans cette
affaire , pour fe livrer à leur imagination,
ont dit que le fieur B a g é s, après avoir lè
gue par une premiere difpofuion de fon teftament
�le quart de fes biens en préciput à Ton fils aîné ,
avoit prefcrit le partage par portions égales des
autres trois quarts, entre ce même fils & Tes deux
fœurs à marier. Eil-ce-là un rêve creu x, enfanté
par une imagination prévenue ? Nous répéterons à
M e. Bagés: prenez le teftament de votre pere , &
liie z , vous verrez qu’il a dit que les trois quarts de
Je s biens feront partagés par égales portions entre
Tes trois enfants du fécond lit. Faut-il mettre l’ima
gination en travail , pour lire dans un a&e ce
qui y eft Îi littéralement écrit ? C ’eft pour obfcurcir
l ’évidence de ces deux lignes , qui parlent auiTi
clair aux yeux qu’à l'eip rit, qu’il falloit de grands
efforts d’imagination ; auiïi M c. Bagés en a-t-il fait
d’incroyables, mais de bien inutiles. Nous nous garde
rons bien de le fui vre dans les écarts où il s’eft jetté pour
nous y attirer. Le moyen le plus fur de porter la
conviàion dans tous les efprits, fur une vérité évi
dente, eft de la préfenter toute nue ; & quand on
fait des tentatives pour la voiler , & y fubilituef
l’illuiion, de la préfenter encore. A u lieu de nous
enfoncer avec M e. Bagés dans le puits où il aeÎTaye
de 1 enfévelir, nous la ramènerons au grand jour»
& pour toute réponfe aux commentaires interné'
rtables auxquels il s’eft livré , afin de faire céder
l’intention nettement exprimée du fieur Bages ,
f o n p e r e ,à une intention imaginaire & fa n tas
q u e, nous lui répéterons : „ il n’cft pas per'
�» mis d’étouffer la vérité par la fi&ion , & d a» bandonner le certain pour l’incertain. Le teilateur
a dit littéralement que les trois quarts de Tes biens
» (eroient partagés par portions égales entre fes trois
» enfants du dernier lit , cela eft très-clair affurément,
» tenons-nous y donc. ( a,)
La volonté du teilateur ainii affurée, refte à
examiner ii M e. Bagés eft recevable à la com( û ) Si M e. B 'g é s e u t voulu recueillir tous les paradoxes que la fubti.
licé a imaginés dans les fiécles où t l L ÎÜ BÜ BLregnoit dans l’ÉcoIe ic au
B a rreau , pout donner plus de crédit aux préfom ptions & aux co n je& u < rcs qu’ à la tealité , il auroit pu allonger fon M ém oire d ’une bien plus am
ple collection de citations captieufes, mais le regne de la raifon eft reve*
nu. C e n’ell p is feulem eit Furgules qui nous die que l’on ne laifTe plus à
l ’écart la vérité & la réalité pour courir après des om bres & des im ag i
nations , ( i ) Cujas avoit judicieufem ent rem arqué long-tem ps avant lui
( i) T o m . »«•
que tout ce que les intei prêtes ont dit fur les conjectures n’eft à peu près Pa8e 40
que v ifio n & m enlonge ; mendacijftma Junt omnia quee in hanc legem adnatarunt. ( i j E t M . D ;;m at s’exprim eainiî dansfes loix c iv ile s , i<?. partie , L iv .
^
. . I-°*
3e. Tic 1er. Se£tion 6e. “ Il faut diftinguer trois fortes d ’expreiïîons dans ^Uc ' PaSinvmh
» les Teftamentb ; la premiere de celles qui font parfaitement c la ire s , la
» féconde de celles qui font fi oblcures '¡u’ile ll im poflîble de leur donner
» un feus , & la troifieme de celles où il fe trouve q uelqu 'obfcurité, queU
» que am biguité , ou qtaelqu’autre défaut qui peut en rendre le fens in*
»> certain.
» Les expreffions parfaitement claires, co tv in u e -t-il, nefouflfrent point •
t» d interprétation pour en fixer & connoitre le fen s, puiique leur clarté les
» rend évidentes.
» Ec li la dilpofition du T eilateu r s’ y trouve expliquée bien nette» ment , & p récifem ent, i l faut s‘en tenir au fens qui paroit par î’exprejjion.
” Cum in va 6/j nulla ambiguitas efi , non debet admitu voluntatis quee/ho. Leg.
*î*^§. 1. fF. de légat. 3.
Cum euim manififliffimus ejl fenfus tejlatoris , verborum intcrpre:atio nujquàm
ie>
» ut melior fenfus exijîat. Leg. 3. in fin. cod. de liber, praei. vel ex hœred.
va anf ^ c^Pece ^es expreffions font très-claires. Les trois quarts feront
«Jq.* •{ par *galtjPortioni*\\ eft im poffible de trouver là de 1 équivoque ;
1C w futtt s'y tcnij littéralem ent> non debet admitti voluntatis ifacejho.
�^
4
battre. Il demande à prendre fur les trois quarts de
la fucceiîion de Ton pere , l’accroiflement des parts
héréditaires des filles forclofes, en rapportant lerrs
dots ; & en demandant cela , c’eft-à-dire , en com
battant le partage égal prefcrit par le teilateur, il
veut encore profiter du legs du quart en préciput.
Nous lui oppofons la réglé générale , qui ne per
met pas à celui qui veut profiter d’un teftamenr,
d’en divifer les difpofitions; qui lui impofe la 'nécefîité , ou de le rejeter en entier, ou de l’exé
cuter en entier. Nous lui oppofons en particulier
l’article 50 du titre iz de notre coutum e, qui
confacre fpécialement cette indivifibilité des difpofitions teftamentaires. Q ue nous répond M e. Bagés?
il commente à ion gré le commentaire de Bafmaiion fur notre coutume. Il fe tourmente , il s’a
gite , pour traveftir ce judicieux auteur en ridicule.
Il fe repofe fièrement fur deux anciennes fentences
qu’il a tirées de l’oubli du greffe , & dont il ra
conte les efpeces à fa maniéré. Foible reiTource
pour faire taire la voie impérieufe de la loi.
Bafmaifon étoit trop raifonnable , & la Sénécbauffée d’Auvergne fut dans tous les temps trop
attachée aux vrais principes, pour choquer de front
la difpofition textuelle de la coutume.
Si Bafmaifon a dit que le prélegs du quart en
faveur des mâles, n em p êih o t pas qu’ils ne priflent
laccroifTemcnt des parts des filles forclofes dans les
�trois quarts -, il n’a parlé ainfi, que pour les cas où
le teflrateur n’a pas ordonné le partage égal des
trois quarts , entre les mâles & les filles à m arier,
ou il n’a difpofé expreflément que du quart, & s en
eft rapporté à la loi pour le partage d3S trois
quarts *, cet auteur décide tout le contraire dans le cas
où le teftateur a prefcrit littéralement le partage des
trois quarts par égalité entre les mâles & les filles non
mariées ; il veut alors que la difpofition de la loi
difparoiiTe devant h difpofirion de l’homme. ProviJiQiie hornirus cejjat provijio kgis.
C ’eft ce qui a été démontré avec tant d’évidence
dans le premier Mémoire des Demandeurs , que
les efforts qu’a fait M c. Bagés , pour prêter à cet
auteur une opinion plus favorable à fon fyftêm e,
n’ont prouvé rien autre chofe que fon embarras.
Il ne trouvera pas plus de reffource dans les
deux fentences de 1 6 3 0 & 1 66z , qu’il invoque
comme ayant confacré fa prétention.
La le&ure attentive des expéditions de ces
fentences qui viennent d être produites , prouve
démonftrativement quelles font hors de toute ap
plication à l’efpece préfente.
Quelle eft en effet la queftion jugée par celle du
M juillet 1 6 3 0 ? U n iieur Titaflon avoit
laiifé quatre enfants m âles, trois filles mariées &
forcloses, & d’autres filles non mariées de fon vivant.
Il avoit fait un teftam ent, par lequel il avoit légué
purement & Amplement le quart de fes biens en
�6
préciput à trois de íes enfants m âles, fans qu’il paroiiTe qu’il eût difpofé des trois quarts, encore moins
qu’il eût prefcrit l'égalité dans le partage de ces trois
quarts entre les mâles & les filles non forclofes.
Il s’éleve une conteilation fur l ’accroifTement des
parts héréditaires des filles forclofes. Les mâles fe le
diiputoienc entr’eux : il y avoit plufieurs filles non
forclofes; une feule étoit intervenue, les autres n’étoient point en caufe. La fentence ordonna que le
droit d’accroiflement des parts & portions hérédi
taires des trois filles forclofes feroit commun entre
les quatre mâles ; & qu’en procédant au partage,
le quart & quatrième portion defdites parts hérédi
taires feroit délivré au Demandeur ( le fieur T itaifon , Chanoine ) & les autres trois quarts aux
Défendeurs ( fes trois freres ) outre & par deifus ,
le quart h eux légué en préciput , & ce privaùvejnent & a l'exception des autres jilles non mariées par
le pere, en rapportant néanmoins les dots des filles
forclofes.
Q ue juge cette fentence ? que le fimple prélegs
du quart en faveur des mâles ou de quelques-uns
d’eux , n’empêche pas les légataires de participer à
l’accroiiTement des parts héréditaires des filles for
clofes-, lorfque le teftateur n’a fait aucune dilpofition des trois quarts, & s’en eft rapporté à la lo i,
ou lorfqu’il n’a pas prefcrit l’égalité entre les mâles
6 1 les filles Jion m ariées, dans le partage des trois
�quarts. Rien de plus jufte : alors l ’ a c c r o i (Tement peut
être cumulé avec le legs du q u art, (ans divifer le
teftament, fans le combattre ; pourquoi donc ne pas
accorder aux légataires tout le bénéfice de la vo
lonté de l’homme & delà difpofition de la loi qui con
courent enfemble ? mais il ne s’agit pas ici de cet
te queftion. Dans l’efpece , leteftateur, en léguant le
quart à M e. B a g é s, a ordonné le partage des autres
trois quarts par portions égales entre Tes fœurs &
lui. D ’après une pareille difpoiition , on ne pourroit
cumuler le quart avec le bénéfice de raccroiffem ent,
fans divifer le teftament, fans combattre la volonté
exprefle du teftateur , & c’eft à quoi la loi réiifte.
Ainfi point de reifemblance entre la queftion jugée
par la fentence de 1 6 3 0 , &: celle fur laquelle la
Cour a à prononcer dans ce moment.
L a fentence de i 6 6 x e f t encore bien plus éloig
née de la queftion. On prétend en avoir trouvé
l ’efpece dans une note manufcrite de M e. M arie ; mais
cette note dont la fource & 1Auteur font également
ignorés, fe trouve ouvertement démentie par l’ex
pédition qui vient d’être produite On y voit clai
rement en effet que , dans l’efpece de cette fentence,
il n’y avoit ni prélegs du q u a rt, ni teftament. Il s’agiifoit de la fucceiîion collatérale du fieur U r io n ,
Chanoine, ouverte ab intejlat. Pierre & Adrien
^rion pourfuivoient le partage de cette fucceifion
contre les defcendants d’une fceur non forclofe. Les
�8
concluions qu’ils avoient pnfes font rapportées en
entier dans la fentence. Ils demandoient qu’il leur
fût délaifle cinq portions fur iix de la fucceiîion du
(leur Urion , Chanoine ; fa voir , deux de leur c h e f/
& les trois autres de droit d ’accroijfement par la ré
nonciation de Jeanne , Antoinette <§' M arie Urion ,
& la fixieme à tous les Défendeurs , repréfentants une quatrième fille non forclofe. (<?) La fentence
adopta ces conclufions : que jugea-t-elle donc ? une
queftion fur laquelle tous les fuffrages font réu
nis depuis long-temps ; fa v o ir, que les mâles -pro
fitent en pur gain de l’accroiflement de la
part héréditaire des filles forclofes, d^ns les iucceiïions collatérales. Mais qu’a de commun cette
queftion , avec celle qui divife M e. Bagés & les
Demandeurs ? ici il eft queftion de déterminer
l’effet d’un teftament, de lavoir s’il eft permis d’en
divifer les difpofitions, d’accepter [avantageux , de
rejeter l'onéreux ; là il n’étoit queftion ni de tefta
ment ni de prélegs II s’agiffoit d'une fucceiîion ouverte
ab imejlat. Et n’eft ce pas un temps bien perdu >
que celui qui a été employé à déterrer dans ntt
greffe une fentence auiîi étrangère à la conteftation •
Q u ’on nous dife tant qu’on voudra qu’une note
(a ) V o il\ une preuve bien claire que la fucceffion étoit o u v e rte -^ ,rt"
icjlat y p u if ue le partage croit dem andé fan«, prélèvement , fans
en vertu d ’aucune difpofition quelconque , & fuivant l'ordre de fuccei.
établi p arla coutume. Auifi ne trouve-t-on aucun teftament de vile dans
fenccnce.
i
- • _
manufcrite
�manufcrite de M e. M arie , avocat contemporain ;
qui avoit écrit au procès, préfente l’efpece de cette
fentence d'une maniéré abfolument conforme à celle
fur laquelle la Cour a à prononcer aujourd h u i, La
fentence paroit pour donner un démenti à la note,
& nous apprendre quel fonds on peut faire fur des
manufcrits obfcurs.
Concluons donc que M e. Bagés s’eft fait illufion,
lorfqu'il a cru fonder fon fyftême fur la jurifprudence. E t puifqu’il eft combattu par la raifon ,
p ar la loi générale de l ’indivifibilité des teftaments,
& par la difpofition particulière de notre coutume ,
la Cour pourroit-elle balancer à le profcrire?
Monficur LE L I E U T E N A N T -G É N É R A L ,
Rapporteur.
M e. B E R G I E R ,
A vocat.
J u g e , Procureur.
A
CLE RM O N T - F E R R A N D y
De l'imprimerie
d 'A n t o in e
D E L C R O S , Imprimeur du Roi. 1782;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Charles. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Juge
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Réponse sommaire, pour maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de son enfant, héritier de défunte Marie Bagès, sa mère ; sieur François Malbet, et demoiselle Elisabeth Bagès, sa femme, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs. Contre maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, et messire Antoine Depons, chevalier, seigneur de Bélestat, son curateur, défendeurs et demandeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie d'Antoine Delcros (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
9 p.
BCU_Factums_B0111
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0109
BCU_Factums_B0110
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53950/BCU_Factums_B0111.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vodable (63466)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53948/BCU_Factums_B0109.pdf
b1eced600405f635d60fc1b79f820968
PDF Text
Text
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MÉMOIRE
EN
R É P O NS E ,
P O U R M e. C h a r l e s J u g e , Procureur en la C o u r , Pere
& légitime Adminiftrateur de fes E n fan s, héritiers de
défunte Marie Bagès leur M e r e , ayant repris en fon lieu
& place ; Sieur F r a n ç o i s M a l b e t & D e m o ifelle E l i s a b e t h
B a g è s fa fe m m e, de lui autorifée, Habitans du lieu du
M o n te l Paroiffe d’A u to in g , Demandeurs & Défendeurs.
C O N T R E M e. J e a n - N a z a i r e B a g è s , A voca t en
Parlem ent, Habitant dudit lieu du Montel, même Paroif f e
d’ A u toin g ; & Mef f ire A n t o i n e d e P o n s , Seigneur,
Marquis de Belef t at, fo n Curateur, habitant en fo n Château
de Beleftat, Défendeurs & Demandeurs.
N
O a dit depuis lo n g - t e m p s , que le pour & le contre
vinrent au monde le même jo u r , & fe partagèrent le domaine
des pauvres têtes humaines. Il faut bien que cela foit , puifqu’il
A
�\
*
n’eft point de vérités, point de paradoxes, qui n’aient eu leurs
détracteurs & leurs apôtres; leurs triomphes & leurs revers.
I l eft pourtant rare de voir cette guerre d’opinions s’élever
fur des queftions auffi peu fufceptibles de co n tro v erfe , que
' ce lle qui divife M e. B agès & fes fœ u rs, ou leurs repréfentans.
I l s’agit de favoir fi M c. Bagès peut être admis au fingulier
p rivilege d’allier les deux contradictoires, à'invoquer & de com
battre tout-à-la-fois le teftament de fon p e r e , dJen accepter
T avantageux, & d’en rejeter Vonéreux. O n aura peine à croire
qu’il ait ofé préfenter férieufem ent dans les T ribunaux une pré
ten tion fi bizarre : toute TaiFaire eft cependant dans ces deux m oti.
JE1 « A
Le
fieur
X
ÜÛ
Bagès du M o n tel décédé en \~j6$ laiiîa fix
cnfans ; trois filles du premier l i t , m ariées, dotées & forclofes;
un mâle du fécond li t , ( c ’eft le D éfendeur. ) & deux filles non
m a rié e s, qui l’ont été depuis, l ’une au fieur M a lb e t, & l ’autre
à M e. Juge. I l fit un teftam ent, par lequel il légua le quart de
fes biens en préciput à M e. Jean-N azaire Bagès fon fils, & difpofa enfuite des trois autres quarts en ces termes : » E t à l ’égard
» des autres trois q u arts, ils s e r o n t partagés, par égales por»
»
»
»
tio n s, entre Ifabeau & ?viarie
fes trois enfansj qui font fes
qu’il a fuffifamment doté fes
m ariage. »
A s’en tenir à la lettre de ee
partage des biens du teftateur eft
& ledit Jean-N azaire Bagès
héritiers de droit., attendu
trois filles de fon premier
teftam ent, la proportion du
aifée à régler. Jean-N azaire
B agès doit prendre la m oitié de la maife e n tiere, la D am e
M alb et un q u art, & M e. Juge., au nom de fes enfans q u*
repréfentent leur m e re , un autre quart.
�3
M ais ce n'eft pas ainfi que M e. B agès 1 entend : le
teftament porte en ma faveur la difpofition du quart en précip u tj je l’a ccep te, nous d it-il; s’agit-il enfuite de partager
les autres trois quarts? je rejette le m êm e teftam ent, dont
je viens- d’accepter la difpofition avantageufe, ôc j’invoque
la loi : elle me donne le droit de repréfenter les trois filles
fo rclo fes; elle fait accroître leur portion à la m ien n e; j’ai
donc quatre parts à prendre dans les trois q u arts, ôc mes
fœurs du fécond lit^ ou leurs repréfentans, deux parts feu
lem ent. E n un m o t, le teftateur ne m 'a deftiné quJun tiers
dans les trois q u a r t s m a is la lo i m’en donne les deux tiers,
en rapportant les dots des filles fo rcloies; je me tiens à la loi.
T e l eft le fyftêm e du fieur B agès : il vou d roit adopter
le teftament de fon pere & le rejeter ; profiter de fes
difpofitions ôc les combattre; prendre le quart que la loi
ne lui donnoit p a s , qu’il ne peut tenir que de l’exécu
tion du tejlament, 6c refufer à fes fœurs Y exécution de ce
m ême teftament. Q uelle étrange alliance de Yacquiefcement
6c de la contradiBion ! E n vérité , elle fait honte à la M O Y E N S .
raifon. A u d i eft-elle condam née 6c par le droit com m un (a)
6c par le texte précis de la Coutum e q u i, dans l’art, j o du
tit. 1 2 , s’exprime ainfi : » L/héritier ab intejlat inftitué par
» teftament ou n o n , qui fciem m ent accepte aucun légat à lui
»
»
»
»
fait par le d éfu n t, ou autrem ent agrée en aucune partie ledit
teftam ent, il approuve toute la difpofition & ordonnance d’ icelui défunt 3 ÔC eft abfolum ent tenu la garder 6c accomplir. »
C ette lo i n’a pas befoin de com m entaire * elle eft auilï
( a)
Jurit ratio non iaducit divifionttn. volutitatu.
A 2
�4
impérieufe quJelle eft claire; & l'application en eft facile. M e.
B agès accepte le légat du quart à lui fait par le teftament
de fon pere ; il demande l ’exécution de ce légat y donc il
approuve toute la difpojîdon & ordonnance du défunt; donc
il eft tenu de la garder & accomplir en entier : o r , le défunt a
voulu que les trois quarts de fes biens fuffent partagés par
égalité entre le fieur B agès & fes deux focurs du fécond Ht;
donc il doit confentir à ce partage; il doit confentir à Taccom pliflem ent de cette difpofhion & ordonnance du défunt. Si
ce n’eft pas-là une vérité dém on trée, il faut renoncer à jamais
rien prouver aux hom m es; il faut effacer le texte de notre
C o u tu m e , ôc ne prendre déformais pour réglé d esju gem en s,
que l’arbitraire & le caprice.
PreiTé par l'évidence irréfiftible de ce raifonnem ent, & ne
fe flattant pas de parvenir à le ren verfer, s’il attaquoit en
fr o n t, M e. Bagès effaie de s'échapper par des faux-fuyans;
il louvoie & fe jette à côté de la queftion.
L a loi m ’aifure dans les réferves coutum ieres, nous d it-il,
Yaccroijjement des portions des filles forclo fes; c ’eft une illufion de croire que mon pere m’en ait privé par fon teftam ent;
il ne l ’a ni pu ni entendu, {a)
L ’obje& ion fe divife en deux branches, & fait naître deux
queftions. L e fleur Bagès pere avoit-il le pouvoir d’interdire
directement ou indirectement à fon fils i’exercice du droit
d’accroiffem en t? en a-t-il eu la vo lo n té?
L a premiere queftion ne roule que fur un jeu de mots. H
ne s’agit que de nous en ten d re, ôt nous fommes d’accord.
L e droit à.3accroijjement n'eft point à la difpoiltion d’un
( a ) Page zerc. du Mémoire du fieur Bagcs.
�teftateur! Q u e prétend-on dire par-là? Q u ’un pere n eft pas
le maître d’interdire à fes enfans m â les, par fon teftam en t,
l ’exercice du droit d’ accroijfement fur les réferves coutum ieres,
s'il ne les dédom m age pas d’ailleurs, en les gratifiant du quart
difponible ? R ie n de plus jufte.
M a is, en léguant le quart difponible aux m âles , ne peut-il
pas les réduire à l’alternative d’abdiquer, ou fa lib éra lité, ou
l ’accroiffement dans les trois quarts? M e. Bagès eft forcé de
convenir qu’il le peut (a)\ parce qu’enfin chacun eft maître de
modifier fa lib é ra lité , com m e il lui plaît. O r , le teftateur q u i,
com m e le fieur B a g è s, lègue le quart de fes biens aux m â les,
& prefcrit le partage des autres trois quarts par égalité, ne
fait rien autre chofe qu’ufer de ce pouvoir.
C ’eft moins alors la volonté du teftateur qui prive le m â le,
de l’accroiifem ent, que la volonté même du mâle qui l'ab d i
q u e , en acceptant un legs qui lui en im pofe tacitem ent la
néceifité. Il a l’option entre la difpofition de la loi & celle
de l’homme ; s’il préféré la difpofition de l’hom m e , peut-il
fe plaindre de l’obligation de s’y tenir qu’il s’eft im poiee par
choix ? Volenti non f i t injuria.
L es réferves coutumieres ne font pas moins facrées que Taccroiifem ent ; cependant l ’acceptation d'un legs déroge aux f££>> «
réferves coutum ieres: l’art. 50 du tit. 12 le décide textuellem ent.
L a prohibition de la fubftitution teftam entaire n'eft pas
moins exprefifément écrite dans la C o u tu m e , que la dévolution aux mâles de la part héréditaire des filles forclofes;
1?
9 ^ ?
;!
Pendant l’acceptation d'un le g s , de la part de l’héritier lé g i' ^ nr^ ÎU 1
tim e, éleve une fin de non recevoir contre cet h éritier, s’il o v y l
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attaque enfuite la fubftitution (a). P ourquoi la m êm e accepta
tion n’élevero it-elle pas la m êm e fin de non recevoir contre
l ’héritier qui voudroit trav erfer, à la faveur du droit d’accro iflem en t, l ’exécution du teftam ent qu’il a approuvé?
T o u t cela feroit v ra i, continue M c. B a g è s, » fi le legs du
» quart étoit fait fous la condition que les filles mariées par» ticiperoient aux portions des filles forclofes; » sJil é to it dit
que le m â le, en prenant le q u a rt, ne pourroitpoint s’ aider de
l ’accroiJJem.ent des fille s fo r c lo fe s , pour fe fervir des expref-vZ*'"* fions de Bafm aifon.
» M ais le teftament du fieur B agès ne renferme point cette
» condition : on ne peut l ’en faire réfulter de quelque ma» niere qu’on l’interprete, foit qu’on s’arrête à la le ttr e , foit
» qu’on cherche à en pénétrer l’efprit; » Sc puis l ’on entre
dans la difcuflion des marques cara&ériftiques du legs condi
-
c
y.
n
v<rxt^j
tionnel j dont on cite deux exem ples entre dix m ille.
V o ilà un fa u x -fu ya n t, & rien de plus. N on ., il n’y a pas
d
e
condition expreife attachée au legs du quart fait à
X
M e. B agès par le teftament de fon p ere; mais il y en a une
t v-N
tac^t e i ou p lutôt il y en a une légale qui nJeft pas moins puiifante. » L a condition de droit que nous pouvons appeller
•* » condition lég a le, parce que c’eft la lo i qui la fu p p lée, nous
»
»
»
»
dit le favant F u rg o le dans fon traité des teftamens ( a)>
doit opérer le m êm e effet que la condition de fait qui eft
exprim ée par le teftateur, vu qu’elle eft de m êm e nature»
parce que la puiifance de la lo i eft encore plus forte ôc plus
( a ) V o y e z l’Arrêt des Hureaux rapporté par Prohet fur l’art, jo du tit.
Nous en parlerons plus particulièrement à la page 13.
(tf) Tom. a, ch. 7, feft. a , nom. 3J.
�7
» énergique que celle du teftateur ». O r , le legs du quart
fait à M e. Bagès par un teftament qui prefcrit Xégaliie entre
le légataire & fes deux foeucs dans le partage des trois quarts,
,
eft une difpofition nécefiairem ent accom pagnée de la condition légale, qu’en profitant du legs en p récip u t, M e. B agès •
fe foum ettra à l ’égalité prefcrite pour le partage des trois
.
quarts; elle eft écrite dans l ’art. 50 de la C outum e déjà rap6 *^ °
pellé plufieurs fois.
C e t article ne fouffre point de divifion dans l’exécution
d’un teftament ; il impofe à l’héritier ab intejlat qui accepte
aucun légat à lui f a it par le défunt j la néceiïité abfolue de
garder & accomplir toute la difpojîtion & ordonnance du dé
fu n t , fans lim itation & fans réferve ; il approuve toute la
difpojîtion & ordonnance du défunt, & efl abjolument tenu le
garder 6* accomplir. A b s o l u m e n t ! N e v o i l à - t - i l pas une
condition bien impérieufement prefcrite? & peut-on dire après
c e la , que la néceifité d’exécuter un teftament dans tout fon
contenu ne foit pas toujours une condition légale de toute
forte de legs fait à l ’héritier lég itim e; une condition qui naît
de la nature même de la chofe (a) ?
M e. B agès infiftera; ce n’eft rie n , nous d ira-t-il, que cette
condition tacite & légale : il fa u t, pour réduire les mâles à
l ’alternative du quart en préciput ou de T accroiffem en t, que
le teftateur leur en ait impofé la condition exprejfe. Bafrcm fo n , le favant Bafmaifon l ’a dit. O ferez-vous élever vo tre v o ix
( a ) Bafmaifon , qui eft l’Auteur de prédileftion du fieur Bagès , s’exprime
en ces termes fur cet article 50 : » B ref : En quelque façon & maniéré que
» le lignager venant ab intejiat, agrée tant foit peu le teftament, recevant ou
» baillant, ou autrement de fait ou paroles, il ne pourra plus contrevenir à
» la volonté du défont. »
'
�9
contre Tes oracles? T ém éraires ! avec votre ton a g ré a b le ....
C e grand hom m e auroit befoin pour defcendre à votre petit
niveau.... il auroit befoin..... d’un com m entaire ( a ).
D ’ un com m entaire ! bien trouvé , M e. B agès ; l'antidote
eft excellen t pour guérir du Jiyle agréable ! H é bien ! nous
voilà réfignés : Com m entons : foit : Q u e l eft notre texte? C es
fix lignes de Baim aifon (b ) : E t nonobjlant que le tejlateur ait
voulu rendre égaux les héritiers injlitués, ce qu3il f a it en tant
qu ils fo n t appellés en leurs noms propres au partage ; mais
n’ayant exprejfément déclaré f a volonté q u i l injlitue lefdits
mâles & fille s également, fans que les mâles puiffent s'aider
de l Jaccroijfement des portions des fille s mariées, lefdits mâles
pourront prendre ledit accroijfement.
V o u s avez raifon , M c. B a g è s , voilà un oracle : ja
mais on n’en failit m ieux le ftyle & l ’am biguité. E h ! que
voyez-vous dans cet oracle? que fi dans un teilam ent qui lègue
aux mâles le quart en préciput., il n 'y a pas ces m ots facram en tels, s a n s q u e l e s m â l e s p u i s s e n t s ’ a i d e r d e
, ils auront
le droit de prendre l ’accroijfement avec le quart? O h bien ! nous
L ACCROISSEMENT
r-y.
o
u
DES
FILLES
M ARIÉES
y voyons toute autre chofe nous : Bafm aifon eft bien moins
exigeant à nos yeux qu’aux vôtres. I l nons fem ble que c e t
A uteur ne demande rien de plus pour em pêcher les mâles
d ’accum uler le quart avec l’accroiiTem ent, iinon que le teftate u r , après leur avoir légué le q u art, ait exprejfément déclaréfa
t
volonté q u i l inftitue lefdits mâles ù f i l e s é g a l e m e n t dans
'y les trois quarts. A votre avis le point eflentiel eft que le bé-
», l
-------------------- Sur
(a)
Pag. 17 du Mémoire de M e. Bagès.
,
¿u tlt#
- Çf
, ia, Coutume.
_
9
----------
néfice
�néfice de raccroîffem en t fo it nommément prohibé. A u n ô tre ,
la feule ch ofe néceifaire eft que le partage des trois quarts
par égalité foit littéralem ent preferit.
Q u an d il vous plaira , nous entendrons les m otifs de
vo tre opinion : v o ici les raifons de la nôtre. I l eft u n '
fait certain & bien évident , par le rapprochem ent des
différentes parties du te x te dont il s’agit de pénétrer le fen s;
c ’eft que Bafm aifon parle d'un teftateur qui a voulu rendre
égaux les héritiers qu’il a in jlitués, fa n s avoir expreffément
déclaré f a volonté q u i l injlitue les mâles & les fille s également. D es héritiers rendus é g a u x , Îans exprim er Yégalité !
C ela paroît une énigm e au prem ier coup d’œ il ; l’A uteur
nous en donne la c le f; il explique com m ent il entend qu’un
teftateur a voulu rendre égaux fes héritiers in ftitu cs, fans
exprim er l'é g a lité. Ce qu'il f a i t > nous d i t - i l , en tant q u i l s
fo n t appelles en leurs noms propres au partage. G ’eft com m e
s’il diioit : le teftateu r, en appellant les mâles & les filles au
p a rta g e , en leurs noms propres, fans s'expliquer fur la p ro
portion du p artage, fans dire s'il fera égal ou in é g a l, fem ble
n’avoir com pté que les tê te s , & s'être référé à la lo i qui veu t
que lorfque le teftam ent n’a pas réglé les parts entre les
héritiers n o m m é s, la fucceifion fe divife par têtes ; ubi
partes adje✠non fu n t , cenfentur aquales : cependant il n’en
fera pas ainfi dans notre C ou tu m e ; les mâles feront com ptés
non-feulem ent pour leurs propres tê te s , mais encore pour
autant de têtes qu’ils repréfentent de filles mariées. E t pour
quoi? parce que la lo i particulière de la province réglé ainfi
' le partagej fie que le teftateur, en gardant le filen ce, eft cenfé
• en être rapporté à e l le , bien loin d’y déroger.
M ais fi le teftateur a déclaré expreffément fa v o lo n té à 'in f
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�tituer les mâles & les fille s é g a l e m e n t , alors tout ch an ge;
difpofitione hominis ceffat difpofitio le gis. L e teftateur a recom
mandé Yégalité entre les mâles & les filles dans le partage des
trois quarts ; il faut s’y tenir : les mâles ne repréfenteront
chacun qu’une feule tête au p a rta g e, parce que le teftateur
l ’a ainfi voulu. E n un m o t, Bafm aifon n’adm et les mâles à
repréfenter les filles fo rclo fe s, que dans le cas où le teftateur
n'a pas exprejjement déclaré f a volonté d ’injlituer les mâles &•
les fille s é g a L E m e n t ; donc il les exclu t de cette repréfentation
toutes les fois que le teftateur a exprefjément déclaré fa volonté
d'inflituer les mâles & lesfilles é g a l e m e n t , La. conféquence eft
fans réplique. C e qu'il ajout e , fa n s que les mâles puijfent s'a i
der de l ’accroisement des filles mariées, n’eft que pour un plus
grand développem ent de fon id é e , pour m ieux la faire fentir;
mais le point uniquem ent eifentiel eft l ’expreffion de Y égalité >
qui em porte néceifairem ent avec foi l’exclufion de l’accroiifem ent avec lequel elle eft inconciliable.
T e l eft l ’e fp rit, le feu l véritable fens du paifage que nous
expliquons : lui en prêter un au tre, fuppofer que Bafm aifon
exige que le com m andem ent de Yégalité foit accom pagné de
la prohibition littérale de l ’accroiiTem ent, ce feroit fuppofer
que ce com m entateur donnoit plus d’im portance aux m o ts ,
qu’aux ch ofes; il é to it trop judicieux pour donner dans de
pareils écarts de raifon (a).
O r , fi le paifage tant cité de Bafm aifon fe réduit à c e la ,
(< j) D ’un autre côté, ce feroit le faire tomber en contradiilion trop formelle
avec ce qu’il dit ailleurs que de quelque maniéré , & pour peu que l'héritier
»grée le teflam ent, recevant , ou baillant, ou autrement, il ne pourra plu*
tantriv(tiir à la volçnU du défini.
�quel avantage en tirera M c. B a g è s? N e fera-ce pas nous, au
co n traire, q u i, en,nous rangeant fous la banniere de ce co m
mentateur j aurons droit de com battre M e. B ag ès avec fes pro
pres armes? nous lui dirons : Bafm aifon ne demandé rien autre
ch ofe pour exclurre les mâles du bénéfice de l ’accroifiem en r,
lorfqu’ils font prélégataires du quart, fi ce n’eft que le teilateur
ait preferit l'égalité du partage des trois quarts. V o u s êtes précifém ent dans ce cas. L e teftament de votre p ere, en vous avan
tageant du q u art, a preferit Y égalité entre vos fœ urs & v o u 9
dans le partage des trois quarts; refpe& ez fa v o lo n té , ou abdi
quez le q uart; voilà ce que vous dit l ’arc, j o de la C ou tu m e;
voilà ce que vous répété Bafm aifon que vous avez choifi pour
votre prote&eur (a).
M ais, la Jurifprudence, quJy répondrez-vous, nous dira M e.
B agès? e lle fe déclare pour m oi. O n a trouvé dans un ancien
manuferit de M e. M a rie , Jurifconfulteavantageufem ent connu
dans le dernier fie c le , la note de deux anciennes fen ten ces;
l ’une fans d a te , la plus récente fous la date du mois de feptem bre 1662* qui ont décidé la queftion qui nous d iv ife , &
qui l ’ont décidée en faveur des mâles.
N ou s répondrons que l’exiftence légale de ces fentence*
n’eft point p ro u vée; qu’il feroit facile de les trouver au g re ffe ,
fi elles n’étoient pas ch im ériq ues, & que cependant elles ne
font pas produites; que les efpeces particulières en font encore
(
) Au furplus , s’il ¿toit poifible de donner au partage de Bafmaifon don*
nous venons de faire l’analyfe, l’interprétation forcée & captieufe que lui donne
M e. Bagès, cette opinion augmenterait la lifte aflez nombreufe des erreurs de ce
Jurifconfulte q u i} quoique juftement célébré, n’étoit pas infaillible ; 6c une erreur
Bafmaifon n’effacerait pas U loi.
B 2
�moins connues ; que fi elles fon t ré e lle s , elles fon t interve
nues fans doute fur des teftam ens, où le prélegs du quart en
faveur des mâles avoit é té fuivi d’une fimple inftitution tant
des mâles que des filles dans les trois quarts, fans expreiïion
form elle de
ég a lité, com m e dans l ’efpece propofée par
Bafm aifon.
Q u ’à la v é r ité , la note m anufcrite parle de la prem iere de
ce s fentences
com m e ayant ju gé la queftion dans une
efp ece où les m âles & les filles à marier étoien t inftitués
par portions ¿gales dans les trois quarts ; mais que le J u rifconfulte qui la rapporte n’en donnant pas la d a t e , in
dique aiTez par-là qu’il n’en connoifloit pas perfonnellem ent
l ’e fp e c e , & n’en parloit que fur des o u i-d ire ; que d’ailleurs
il s’éleve avec force contre fa d écifio n , com m e contraire à
la grande réglé de l "mdivifibilité des teftamens. » M ais le tefta»• ment étant un aâe individu, j e dirois le contraire, & que ïa c » croisement lia lieu : » ce fon t fes expreifions. N ous ajoute
rons que les A vo ca ts du P arlem ent appuyoient de leurs fuffrages la réclam ation de ce Jurifconfulte. E t f ie confultum à
Patronis Parlam entif in noftra Confuetudine, cum aliud fît fiatuendum in JucceJ/îonibus delatis ab inteflato, & in fucceffionibus delatis e x tejlamento.
N ou s dirons de plus que ce n'eft pas fur une note incertaine
de deux fentences plus incertaines e n c o re , tirées au bout de
plus d’un fie c le , de la pouffiere d’un m anuferit ig n o r é , &
de l ’oubli g é n é ra l, que s’aiTéoit la Jurifp ru d en ce; que ces
fen ten ces l ’avoient fi peu fixée dans le tem p s, que P r o h e t,
qui a fait fon Com m entaire d'après les notes du même Jurif
confulte M arie ¡ f o n beau-pere, d’après fes m anuferits, n’en a
pat dit un
m o t ; & qu’il établit au contraire Xindivifibitit*
�abfolue du teftam ent en m axim e fur l ’article j o j où il
rapporte l’arrêt des H u reau x qui l’a con facrée dans les term es
les plus forts , en ordonnant l ’exécu tion d’ une fubftitutioty^
teftam entaire , con tre la prohibition form elle 6c irritante de
la Coutume, par la feule raifon que le légataire ayant accepté
,
le legs à lui fa it, i l devait accomplir toute l'ordonnance du défunt. C^ * '
L ’indivifibilité du teftam ent n’eft pas auffi refpeftée de nos
jo u rs, continuera M e. B agès. » Suppofons qu’un p a rticu lier, » » o y
» dans la C ou tu m e de P a ris , ait donné par teftam ent une
» m aifon qui faifoit tous fes propres, il eft certain q u e , q uoi» qu'il ait des m eubles & des acquêts confidérables, qui dans
&
» cette C outum e font entièrem ent difponibles fans affectation
»
»
»
»
»
»
»
à aucune lig n e , fon légataire particulier ne peut avoir que~^5?"
le quint de la m aifon lé g u é e ; les autres quatre quints
m eureront à l ’héritier du te fta teu r, fans que le légataire
univerfel des m eubles & acquêts fo it tenu de faire récom penfe au légataire particulier de ces quatre" quints fur les
meubles & acquêts, fi le teftateur ne l ’a expreifém ent ainfi
ordonné par fon teftament. »
L a comparaifon n’eft pas heureufe. M e. B agès ne v o it - il
pas que cette efpece n’a aucun rapport à l’indivifibilité du
teftam ent f que l’héritier des propres qui obtien t la rédu& ion
du le g s, n’ eft pour rien dans le teftam ent; que ce n’eft pas
lu i qui profite des biens d ifp o n ib les, mais bien le légataire
univerfel ? s’il étoic légataire u n iv erfel, s’il accep toit ce tte
q u alité, on ne l ’écou teroit pas dans fa réclam ation des quatre
quints des propres t à titre d’h éritier légitim e. A Paris on lu i
diroit : vous êtes légataire univerfel ; vou s ne pouvez pas vou s
préfenter com m e h éritier lé g itim e , ces deux qualités fo n t in
compatible E t par-tout : vous Êtes légataire univerfel j le
^y U
, -
v
’
‘
�I*
' : s •» n teftam ent eft indîvifible; vous ne pouvez pas en accepter unç
* -»»des difpofitions & com battre les autres.
.. F o rc é pied-à-pied dans tous Tes retranchem ens, M e. B agès
.
'•
.
,
’
-
fe retourne : p aflon s, fem ble-t-il nous d ire , que je n’aie pas
le droit de divifer le teftam ent de m on pere ; je n’en ai pas
’/befoin. Pour être en droit de conclurre de l ’indivifibilité du
teftam en t, » qu’en acceptant le legs du quart, j ’ai approuvé
<
» la difpoiition que mon pere a faite à fes fille s, mes
V » faires auroicnt dû prouver que cette difpoiition qu’ils comparent à un lé g a t, exijle. »
P ou r le coup voilà du neuf. O n veu t que nous prouvions
qu’un teftament q u i, à la fuite d’un legs du quart en p récip u t,
C J ltt iû f* '' /y&efasiporte en toutes lettres : » & à l’égard des autres trois q u arts, ils
feron t partagés par égales portions entre Ifabeau & M arie & ledit
Na^aire Bagès ( légataire du quart ) ; on veut que nous prouv ^ons cl ue ce teftam ent con tien t une difpofition des trois
* '¿ 0 — quarts ! nous d iron s, prene\ l ’aâe & life\.
Je lis , nous répondra M e. B a g è s , & je vois que le teftateur
^
ne sJeft pas arrêté à ces premieres expreffions ; à l ’égard des trois
*)
quarts, ils feron t partagés par égales portions entre Ifabeau, M arie & led. Naraire Bagès /fes trois enfans & de la dame Faucher :
jL vfi*
^
1
la difpofition feroit p arfaite, s’il s’en é to it tenu là ; mais ce
qui fuit la fait difparoître.. Il ajoute qu ils fo n t f e s héritiers de
droit; il explique pourquoi il le cro it ainfi ; attendu qu’il afuffîfam m ent doté f e s trois fille s de fo n premier mariage ; lefquelles
i l prétend quel le s ne puiffent rien prétendre dans fa ficceffion» P lus on approfondit ces m o ts, qui font f e s héritiers de
» droit, plus on eft convaincu que le teftateur a entendu aban*
» donner les trois quarts au vœ u de la C ou tu m e.
>■£*
» E t ce qui acheve de perfuader que le teftateur n’a pa*
�1?
» entendu déroger à la difpofition que la loi faifoit en faveur
» de fon fila, ce font les term es qui fuivent im m édiatem ent;
» attendu qu il a fuffifamment doté f e s trois fille s du premier
» mariage, & c . »
» C e m o t, attendu, renferm e fans doute le m o tif de la
» difpofition qui le précédé ; il prouve que dans cette difpo» fitio n , le teftateur s’eft uniquement occupé à aifurer par
» furabondance les trois quarts de fa fucceffion à fes enfans
» du fécond lit , excluiivem ent à ceu x du p rem ier, 6c abftrac» tion faite du plus ou du moins que ceux du fécond lit aman» doient dans les trois quarts . . . . . il importe fort peu
» quJil ait dit que la divifion s’en feroit par égales p ortions,
» dès que tout prouve que ces mots contiennent Am plem ent
» une énonciation erronée fans difpofitions. »
C Jeft donc ainfi q u e , jouant fur les m o ts, & gliifant de fubtilité en fubtilité , M e. B agès arrive à une conféquence ridicule,
Il veut perfuader que lorfque le fieur B agès fon pere a dit
que les trois quarts de fa fucceffion feroient partagés par por
tions égales entre íes trois enfans du fécond l i t , ces expreflions
ne fignifioient p a s q u e les" trois" enfans" appelle s prendront
chacun un tiers! qu’elles lignifient au contraire que l ’un des / -.*
trois prendra quatre parts a lui feul! allons; il faudra réform er
f r t .^ r , I
^ j
nos dictionnaires. D éform ais un partage par portions ég a les,
j*
fera celui du ly o n ; to u t d’un cô té . V o ilà bien la logique de
!
l’intérêt perfonnel qu‘rrâ*pporte to u t à fó iT m a is eft-ce c
e
de la raifon ? O n rou git de difcuter férieufem ent de pareille^
rêveries.
l
l
e
^
_
——
^ O u i j le teftateur auroit adopté un partage in é g a l, s’il avoitj *
.
^ftitué tout uniment fe s héritiers de droit, fans exprim er la
Portion qu’il deftinoit à chacun. E n s'en rem ettant ainfi au
***
i
\
.
i
3- *
Ji
^*
j
�frf
d ro it, il auroit confacré l’inégalité que la loi mettoit entre
fes trois enfans. Mais il ne s’eil pas exprimé ainfi ; il a réglé
la proportion du partage de la maniéré la plus précife & la plus
impérieufe. L es trois quarts s e r o n t partages par p o r t i o n s
é g a l e s Peut-on méconnoître une volonté fi nettement
développée ?
S i, en défignant les trois héritiers entre lefquels il vouloic
établir une égalité parfaite, quant au partage des trois quarts
de fa fucceifion, il a dit qu’ils étoient f e s héritiers de droit ;
il a dit vrai, puifque la loi les appelloit tous trois à fa fuccefc
fion ; il a manifefté en même temps la caufe impulfive de fa
difpofition ; il a envifagé fes enfans du premier 6c du fécond
lit. A l’égard de ceux du premier l i t , il a dit : je ne leur
dois rien; j’ai fuffifamment pourvu à leur fort; ils n’ont plus
rien à prétendre à ma fucceifion, & je les en exclus. Ceux
du fécond lit fixent enfuite fes regards paternels. Il dit : ils
n'ont rien reçu de m oi, la loi les appelle à recueillir ma fuc
ceifion ; mon affection les y appelle encore plus particulière
ment ; fie comme ils partaient également cette affedion, je
veux qu'ils partagent auifi é g a le m e n t les trois quarts de mon
'j>atrimoine que je leur deftine : ainfi leur qualité d'héritiers de
droit a déterminé la préférence que le teftateur leur a donnée
fur fes filles du premier lit, dont il confacre l’exclufion légale»
mais iljia pas voulu s’y référer pour la proportion du partage#
& , bien loin de dire qu’ils partageroient félon l’ordre àc
droit, il a dérogé à cet ordre, en ordonnant un partage p*r
portions égales. Lorfqu'un teftateur a exprimé fa volonté avec
cette n e tte té , il ne s’agit pas d’interpréter, il faut obéir#
» Quand une volonté eft exprimée par des paroles claires »
» & qui n’ont aucune am biguité, nous dit le favant F ur-
.
�17
» go le ( a ) , il n*eft plus permis de chercher une autre vcio n té
» différente ou co n tra ire , parce que ce feroit étouffer la v é » rité par la fi& io n , ôc abandonner le certain pour l’incertain. »
I l faut s’obftiner à ne pas vou lo ir lir e , pour foutenir que le
fieur B agès pere n'a confidéré fes enfans du fécond l i t , qu’en
les oppofant à ceu x du prem ier, abftra&ion faite du plus
ou du moins qu’ils am andoient dans fa fu cceiïïon & fans rien
régler à cet é ga rd ; lu i, dans le teftam ent duquel il eft te x
tuellem ent écrit que les trois quarts feront partagés par por
tions égales en treu x.
'
C ertainem ent le fieur B ag ès a envifagé fes enfans du fécond
l i t , e n le s oppofant avec ceu x du p rem ier, pour gratifier les
uns & ratifier l ’exclufion légale des au tres; mais il ne s'eft
pas arrêté là. I l a évidem m ent confidéré fes enfans du
fécond lit fous un autre r a p p o r t 6 c pour fixer leur fort en
tre u x ., puifqu’il a prefcrit le partage égal ent r eu x des trois
• quarts de fes biens. S i M e. B agès ne vo it pas c e la , c ’eft qu’il
ne veu t rien voir de ce qui bleffe fes intérêts.
I l n’eft pas moins inconcevable , lorfqu ’il dit qu’il v o it
bien dans le teftam ent de fon pere une énonciation de la
proportion
dans laquelle il fuppofoit que le partage de®
trois quarts de fes biens devoit être fait ; mais nullem ent une
àifpojîtion qui prefcrive cette proportion de partage. L o rfq u e
le célébré a b b é, qui a rendu aux m uets un équivalent de l ’or
gane dont la nature les avoit p riv é s , aura découvert un fecret
plus m erveilleux e n c o re , le fecret d éfaire v o ir ceu x qui ferm ent
les yeux à la lu m iere, nous ferons voir à M e. B agès dans le teftament defon pere la difpofition qu'il n 'y trouve pss. Jufques-là
-------------------------------- --------- -------- ---------------- ----- /. )
( a ) Des Teilam ens, tome i , ch, 7,*fe& . 4 , pag. ftij» 1
»
-1
)
�18
nous nous confolerons de fon obftin ation , bien convaincus que
les M agiilrats qui doivent nous juger t verront ce qu’il ne veu t
pas voir. N ou s nous bornerons à dire que M e. B agès fera le
feu l à ne pas trouver une difpofition bien p ré c ife , un legs
bien cara&érifé dans ces expreiïions du teftateur, qui fuivent
le prélegs du q u a rt, & à l'égard des autres trois quarts, ils
s e r o n t partagés par égales portions entre f e s trois enfans
& de la dame Faucher.
II n’y a point de term es façram entels pour les legs : de
quelque m aniéré quJun teftateur ait exprim é fa v o lo n té , elle
£
ij/
eft toujours efficace; il füffit qu’elle foit exprim ée. Otnne verhum fignificans tejlatoris legitimum fenfum 3 l e g a r e v c I
^ J ^ ^ ^ fid e ic o m m it t e r e v o len tis, u t i l e a t q u e v a l i d u m e s t (a).
O r , la v o lo n té du iïeur B agès pere fur le partage des trois
<
quarts de fa fucceflîon., n’eft-elle pas bien énergiquem ent e x
•
prim ée? les trois quarts s e r o n t partagés par portions égales.
C e tte expreifion feron t eft ce lle du com m andem ent : pourroiton donc ne pas reconnoître dans ce t ordre de partage im pé-
i
rieufem ent difté par le teftateu r, la lo i qu’il a faite entre fes
enfans ? & que fau t-il de plus pour cara& érifer une difpofition
teftam entaire, un legs?
M e. B agès infiftera encore : » Q uand le teftateur auroit
»
»
»
»
d ifp o fé, par une claufe plus expreilfe, des trois quarts de
fa fucceiïion par égalité entre les trois enfans du fécond
l i t , il ne l ’auroit fait que parce qu’il cro y o it que la lo i le
v o u lo it ainfi; cette difpofition ferôit l’effet de l'ignorance*
» dès-lors e lle ne pourroit fubfifter ( b) . »
( a ) L tg. 3 , communia de légat. & fideùom.
( i ) Page 7 du Mi®./de Me.
�*9
A in ii donc la v o lo n té la plus expreffe des teftateurs fera éter
nellem ent le jouet des vifions intérefTées de tout h é ritie r, dont
l ’avidité fans m efure ne fe croira pas aflfez bien partagée ! Si
le teftateur eût é té m ieux inftruit de l ’efprit du D r o it coutu m ie r, il n’eût pas voulu ce qu’il a voulu ! V o i là , il faut
l ’a v o u e r, une m éthode bien com m ode pour rayer dans un
teftament une claufe qui déplaît. M ais la ra ifo n , mais la loi
s’accom m odent-elles de ces fubterfuges?
L a raifon nous crie que c'eft folie d’abandonner le certain
pour faifir des peut-être. O r., qu’y a -t-il ici de ce rta in ? Q u e
ir
le teftateur a voulu le partage éga l des trois quarts de fee
biens entre fes trois enfans du fécond lit. A -t-il fu , ou n o n ,
que cette proportion de partage n’é to it pas celle de la lo i?
E n fuppofant qu’il Tait ig n o ré , qq’auroit-il fa it, s’il l ’eût fu?
A u roit-il difpofé différem m ent qu’il ne l ’a fait? V oilà., fi T on
v e u t, m atiere à des peut-être, mais c ’eft tout. O r , des co n
jectures incertaines, des p eu t-être, ne prévaudront jamais au
tribunal de la ra ifo n , fur une volon té certaine & littéralem en t
écrite.
C e que la raifon nous d it, la loi le confacre. U n teftateur
n’a pas, à perfuader; il com m ande : dès-lors il eft difpenfé de
//
rendre com pte des m otifs qui déterm inent fa libéralité. L a
validité du legs n’a befoin d’aucune autre bafe que la volon té
1
-JLJOd
.
qui le produit., f i t pro rationt voluntas. D e -là eft née ce tte
règle de d r o it, que la caufe purem ent impulfive exprim ée par
69 7^ -*^
le teftateur, pour faire con noîtte ce qui l’a engagé à d ifp o fer,
^
com m e il l’a fa it, n’eft pas attachée au le g s ; ratio legandi le- r
8 a*o non cohœret (a ). D ’où réfulte que la faufleté de ce tte
(*)
I
Tr*'1
cùm talc y * , §. falfam cmtfam, Jf, de {audition. & dtmonjkat.
*
s
CV
/ )
�20
caufe n’annulle pas la d ifp ofition , parce quJelle laiiTe fubfifter
la v o lo n té ; legato fa lfa caufa adjecla non nocet (a ).
Il eft donc aifé de voir qu’en fuppofant avec M °. B a g è s ,
que lorfque fon pere prefcrivit le partage égal des trois quarts
de fes biens entre fes trois enfans du dernier l i t , il étoit dans
la fauife perfuaiion que la C ou tu m e lui en faifoit la l o i ; en
fuppofant q u 'il n’eût été pouffé à difpofer a in fi, que par
l ’ignorance du droit j fa volo n té écrite n’en feroit ni moins
refpectable ni moins efficace; & pourquoi? parce que la fauffeté de la caufe impulfive ne vicie pas le legs (b).
(a)
Hitic & Ç. 5. fequent. injl. de legatis. Ricard, traité des donations,
troifieme partie, nom. 3 1 7 ; F urgole, des teftamens, tome a , chap. 7 , feit. 3 ,
nom. 8 & fuivans.
¥
( b ) Q u’on ne nous oppofe pas l’Arrêt de Bonnecarrere, rendu au Parlement
de Touloufe en 1630, & dont parle D olive, liv. j , ch. 17. i ° . Cet Arrêt a été
rendu dans un temps o ù , o*mme i’obferve Furgole, tome a , pag. 110 , n. 1 9 , le
Parlement de Touloufe donnoit beaucoup trop au preftige des conje&ures. a 0. De
quel poids peut paroître un A rrê t, lors duquel les opinions fe trouvèrent fi in
certaines, que Dolive remarque en finiflant, qu’il y eut fuccefiivement deux
partages aux deux Chambres des Enquêtes.
30. Enfin, il ne faut que lire l’efpece de cet A rrê t, pour fe convaincre qu’il
eft ici hors de toute application. La claufe du teftainent de Bonnecarrere qui
donnoit lieu au procès étoit conçue en ces termes : Item , a dit avoir marié feue
Mengine Bonnecarrere fa fille avec Bernard Dariés , à laquelle fu t promife la Jomme
de cent cinquante éeus petits ; de laquelle fomme en a payé une bonne partie, ainfi
qu appert de la reconnoijjance à laquelle il Je remet, & la fomme refonte veut en
tièrement être payée audit Dariés comme fuccejfetir à une Jienne unique fille , fille de
fille y 6' avec icelle fomme , l ’injiitue Jbn héritier particulier , & qu’ il ne puijfie rien
plus demander fur fes biens. » Il étoit évident d’un côté , que cetie cljule ne
contenoit aucune difpofition quelconque en faveur de Dariés, de la fomme qu’il
avoit déjà reçue fur la dot de fa femme, & qui devoit revenir au teftateur par
droit de retour, comme robfervoit M . D olive; il ne le doit pas moins que le tefta
teur , en difant qu’il vouloit que la fomme qu’il croyoit devoir encore fût payée ,
n’avoit pas voulu être libéral, mais fe libérer, ignorant que la loi le libéroit. Il ne
t ’agifloit donc pas d’un le g s, dont l’erreur de droit eût été la fimple caule impulfive ;
�21
M ais d’ailleurs M e. B agès s’abufe étrangem ent fur le point
de fait. Q u e lle vifion d’im aginer que fon pere nJa difpofé des
trois quarts de fes biens par égalité entre fes trois enfans du
fécond lit , que dans la faufle idée qu'ils étoien t f e s héritiers
de droit dans cette proportion ? I l les qualifie bien f e s héri
tiers de droit, & ils l’étoien t en e ffe t; mais il ne dit pas
qu'il les crût fes héritiers par égalité ; donc il n’eft pas vrai
de dire qu’il a fuppofé cette égalité ôc difpofé en co n féq u en ce;
il eft é v id e n t, au co n tra ire , qu’il l’a p re fcrite , parce qu’il
la defiroit. Il ne devoir pas com pte des m otifs qui l’ont dé
cid é ; fit pro ratione voluntas : cependant il a mis fes héritiers
dans fa confidence. A p rès avoir ordonné le partage égal des
trois quarts de fes biens entre fes trois enfans du fécond l i t ,
il déclare qu il difpofé ain fi, attendu qu il a fuffifamment doté
f e s trois fille s de fo n premier mariage , lesquelles il entend
q u elles ne puifjent rien prétendre dans f a fucceffion ; le m ot
attendu renferme le m o tif de la difpofition qui le p r é c é d é ,
nous dit M e. B a g è s: d’a cco rd ; mais ce m o tif bien faifi ne
renverfe-t-il pas la prétention de M e. B a g è s , au lieu de l’ap
puyer ? L e teflateur prefcrit l'é g a lité entre fes trois enfans
du dernier l i t , attendu que f e s fille s du premier Ut ont été
fuffifaniment dotées: donc il les regardoit com m e rem plies de
leurs portions héréditaires : il ne fe trom poit pas. A l'ép oq u e
de fon teftament , la valeur de fa fucceflion é to it inliniment au-deifous de celle qu’une révolu tion im prévue lui a
donnée depuis; & il n’y auroit eu pour e lle s , ou pour M e.
l*À'kfrat'-°n
te^ateur en étoit la caufe finale. E ft-il bien étrange après cela, que
rr t ait jugé que Dariés non-feulement ne pouvoir pas exiger le reliant à
dot^ ’•f 'a ^ot
k femme ) rnais qu’il devoit encore reftituer la partie de cette
avoit reçue? 11 n’y avoit point de legs en fa faveur,
/
�B a g è s , leur rep réfen tan t, aucun profit à prendre leur* parts
h éréd itaires, en rapportant leurs dots.
a 0. I l entend que f e s fille s du premier lit ne puiffent rien
prétendre dans f a fucceffion. C e tte exclu iion qui accom pagne
l ’ordonnance de l ’é ga lité entre les trois enfans du fécond
lit ne renferm e-t-elle pas éminemment T exclufion du repréfentant que la lo i m ettoit à la place des filles du prem ier
lit ? L e teftateur n*a-t-il pas marqué la v o lo n té la plus déci
dée que fes filles du prem ier lit ne fuifent com ptées pour
rien ni directement ni indireâement dans le partage des trois
quarts de fa fcceilio n ? que leur exiftence n’altérat point l ’é
galité de ce partage ?
/
V ain em en t M c. Bagès fe pare de fa qualité de fils unique;
vainem ent il nous d it q u e , pouvant ieu l perpétuer le .n o m
du teftateu r, il é to it feul l ’ob jet de fou affe& ion. Ils fo n t
paffés ces fiecles de b arb arie, où la fo lie de perpétuer fon
n o m , rendant l ’hom m e traître à la n a tu re , rempliiToit les
clo ître & la fo c ié té , de triftes vi&im es im m olées à l’établiifem ent d’un aîné. Si l ’on paie encore un tribut à l ’idole du
p r é ju g é , au m oins o u b lie-t-o n rarem ent que l ’on eit le pere
de tous fes enfans.
L e fieur Bagès s'en efî rappellé. Il m et d'abord fon offrande
aux pieds de l ’idole : le quart de la fucceifion lui eft deftiné
en p récip u t; mais le cri du fentim ent le ramene au ili-tô t à
fes autres enfans. S a follicitude paternelle balance leurs deitinées ; & , m efurant fes libéralités par leurs b efo in s, il or
donne entre fes filles & fon fils le partage é g a l des trois
quârts de fon patrim oine. Par cette fage diftribution il Satis
fait à la n a tu re, après avoir acquitté la dette,du préjugé. E t
M c. B agès vou d rait qire“Cet arrangem ent judicieux ne fû t que
�*3
le fruit de la m éprife ! C om m e l'in té rêt perfonnel aveugle !
- Mai6 enfin fur ce pied., Je teftateur aura fait u n teftam ent
rid içu lç, con tin u e-t-on j au lieu de gratifier fon fils a în é , il
lui aura m oins laifTé que la lo i ne lui donnoit.
L e fieur B a g è s ne m et pas plus de jufteife dans fes calculs
que dans fes raifonnem ens : quelle é to it donc la portion
des biens de fon pere que la loi lui r é fe r v o it, fo it de fon
c h e f, fo it du c h e f des filles fo r ç lo fe s , fit dont il ne pouv o it pas être privé ? L a m o itié , pas davantage ; & ce n’éto it qu'à la charge de rapporter les dots des filles forçlofes.
C e rapport de trois dots qui réunies s’é le v e n t à plus de
10000 liv. n 'é to it pas peu de ch ofe ; le teftam ent l’en difpenfe ; il lui attribue la m oitié de la fucceifion en l ’état où
elle fe trouvoit au décès du teftateu r, fans aucune ch arge de
rapport. N e vo ilà -t-il pas un avantage bien réel & bien confidérable? N ou s fommes en droit d'en con clu re que le teftam ent du fieur B agès pere donne beaucoup plus au fils que la
loi. R ie n ne peut donc juftifier fa réfiftance à s’y co n
form er.
C O N C L U S I O N .
A in fi difparoiifent toutes les illufions dont M e. B ag ès s'eft
bercé. D e u x chofes fon t égalem ent dém ontrées : la p rem iere,
que fon pere a pu preferire le partage é g a l des trois quarts de
fa fu cceifio n , en gratifiant fon fils du quart en p ré cip u t, pour
le dédom m ager de raccroiifem en t des p arts des filles fo rcio
n s ; la fé co n d é , q u 'il l’a voulu. P o tu it quod voluit. M e. B agès
ne fera que des efforts impuiifans pour obfcurcir l ’évid en ce de
ce* dçux aiTertions, & pour être admis à divifer un teftamenç
flue 1^ Coutum e & le d roit com m un d éclaren t indivijîble. Q u ’i l
'f
�24
op te e n c o r e , s’il le v e u t, entre la fucceff i on légitim e & la fucceff io n teftam entaire ; mais qu’il ne fon ge pas à profiter des
avantages du teftam en t, s’il ne veut pas fe foum ettre à fes difpofitions fans réferve.
M onfieur le L I E U T E N A N T - G É N É R A L , Rapporteur.
M e. B E R G I E R ,
A v o c a t.
JUGE,
P rocureur.
A R I O M , chez Ma r t i n D É G O U T T E , Imprim eur Libraire
près la-Fontaine des Lignes
1782.
•
'
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Charles. 1782]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Juge
Subject
The topic of the resource
forclusion
successions
coutume d'Auvergne
testaments
secondes noces
legs
droit d'accroissement
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour maître Charles Juge, procureur en la Cour, père et légitime administrateur de ses enfans, héritiers de défunte Marie Bagès leur mère, ayant repris en son lieu et place ; sieur François Malbet et demoiselle Elisabeth Bagès sa femme, de lui autorisée, habitans du lieu du Montel, paroisse d'Autoing, demandeurs et défendeurs. Contre maître Jean-Nazaire Bagès, avocat en Parlement, habitant du dit lieu du Montel, même paroisse d'Autoing ; et messire Antoine De Pons, seigneur, marquis de Belestat, son curateur, habitant en son château de Belestat, défendeurs et demandeurs.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782
1765-1782
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
BCU_Factums_B0109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0108
BCU_Factums_B0110
BCU_Factums_B0111
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vodable (63466)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d'accroissement
forclusion
jurisprudence
legs
secondes noces
Successions
testaments
-
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9c2e2211162a8f5fb1ec7928db621844
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Text
CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris, lecture
du contrat de mariage de M . Beaufranchet d’A y a t , avec
mademoiselle de Montgran , sa première fem m e, de son
contrat de mariage avec madame de W ittg e n ste in , qu’ il
a épousée en secondes noces, et d’un mémoire à con
sulter sur les questions suivantes :
P rem ièrem en t, madame veuve d’A y a t peut-elle ré
clam er, sur la succession de son m ari, en vertu de la
donation qu’il lui a fa ite, le quart des biens en toute
propriété , ou n’a-t-elle droit qu’à l’ usufruit seulement
de la moitié des biens ?
Secondement, madame Terreyre peut-elle prélever
le fonds du douaire de sa m è re , avant l’exercice des
droits de madame d’A y a t ?
E
s t im e
,
Q ue madame veuve d’A y a t a droit au quart en toute
propriété , des biens laissés par son mari ;
Que madame T erreyre ne peut prélever le fonds du
douaire de sa mère.
Selon l’ex p o sé,
Par les conventions matrimoniales de M . d’A yat avec
mademoiselle de M ontgran, passées en 1783, et soumises
à l’empire de la coutume de P aris, l’époux constitua à
son épouse un douaire préfix de 4,000 livres de re n te,
dont le fonds seroit propre à leurs-enfans.
1
�™ **
;
(o
L e divorce a dissous cette union , dont il ne reste
qu’une fille mariée à M . le baron Terreyre.
M . d’A y a t épousa en secondes noces mademoiselle
K e m p fe r , veuve de M . de W ittgenstein , dont elle avoit
trois enfans.
L e u r contrat de mariage, passé en l’an 4 , sous l’em
pire de la loi du 17 nivôse, contient, à la suite de divers
avantages faits par M . d’Ayat à madame de W ittgenstein , et dont le détail est actuellement inutile à connoître,
une clause dont voici les termes :
« Les futurs é p o u x , voulant se donner des preuves
« de leur amitié réciproque, se fo u t, par ces présentes,
« donation m utuelle, pure et simple et en tre-vifs, l’ un
« h l’au lre, et au survivant d’e u x , ce accepté respecti« vement pour ledit survivant, de tout ce dont la loi
« leur permet actuellement de disposer en faveur l’un de
«
«
«
«
«
l’autre, ayant enfans d’un premier mariage, ou tout
ce dont la loi leur permettra de disposer aussi en faveur
l’ un de l’autre , au jour du décès du premier mourant, dans le cas où la loi lors existante donneroit
plus de latitude à ces sortes de donations. »
E t pour le cas où il ne resteroit plus d’enfans à aucun
des é p o u x , quand arriveroit le décès du premier m ou
rant d'entr’e u x , ils donnoient au survivant la totalité des
biens de son époux décédé.
M . d’A y a t est mort en 1812. On a déjà dit que ma
dame T e r re y r e , sa fille , lui survivoit.
Des arrangemens pris avec mademoiselle de M ontgran,
depuis la prononciation du divo rce, mettent de ce côté
la succession de M . d’A y at à l’abri de toute réclamation.
�st€
(3)
Mais il s’élève entre madame veuve d’A y a t et madame
T e r r e y r e , les deux questions que l’on a posées, et que
l ’on va examiner.
C ’est au quart en toute propriété, des biens laissés
par son m ari, que s’étend la donation faite à madame
d’Ayat.
Elle survit à M . d’Ayat. E t les époux s’étoient réci
proquement d o n n é , en cas de survie, « tout ce dont
« la loi leur permettoit de disposer, ou tout ce dont elle
« leur permettroit de disposer en faveur l’un de l’autre,
« au jour du décès du premier m ourant, dans le cas où
« la loi alors existante laisseroit plus de latitude à ces
« sortes de donations. »
L a donation eut lieu pendant que la loi du 17 nivôse
an 2 conservoit sa force ; mais c’est sous l’empire du
Code Napoléon que M . d’A y at a cessé de vivre.
L a loi du 17 n ivô se, dans son article 1 4 , restreint
à l’usufruit de la moitié des biens , les avantages que les
époux stipuleroient entr’eux à l’a ven ir, dans le cas où il
y auroit des enfans; conform ém ent, ajoute la lo i, à l’ar
ticle 13 ci-dessus.
O r , l’article 13 réduit les avantages entre époux à
l ’ usufruit de la moitié des biens, lorsqu’il existe des enfiins, soit de leur union , soit d’ un précédent mariage.
M . et madame d’A y a t avoient des enfans de précédens
mariages; il en existe même encore : la loi du 17 nivôse
ne leur a donc permis de se donner que l’usufruit de la
moitié des biens.
L e Code N a p o lé o n , sous l’empire duquel est décédé
M . d’A yat , leur permettoit de se donner le quart des
2
»*:
�C 4 )
biens en propriété. C ’est la disposition formelle de son
article 1098, ainsi conçu:
« L ’homme ou la femme q u i, ayant des enfans d’un
a autre lit , contractera un second ou subséquent
« m a ria g e , ne pourra donner à son nouvel époux
« qu’ une part d’enfant légitim e, le moins prenant, et
« sans q u e , dans aucun cas, ces donations puissent
a excéder le quart des biens. »
Madam e Terreyre étant fille unique de M . d’Ayat
il n’y a point d’enfant qui prenne moins que le quart
des biens dans la succession de ce dernier. Il avoit donc
ta faculté de donner le quart de ses biens à madame'
d’A y a t , selon le Gode.
Mais le quart des biens eh toute propriété a plus de
valeur que l’ usufruit de là moitié des biens; il se ven
dront davantage.
Sans doute l’ usufruit de la moitié des biens peut finir
par valoir le quart en propriété. A u bout de vingt années,
il se trouve avoir produit une somme égale au prix du
fonds du quart des biens, et en outre, l’intérêt de cette
somme chaque année; s’il dure au delà, il produit encore
davantage; mais s’il dure moins aussi, il n’égale pas
le quart des biens. Cette valeur de l’ usufruiti est donc
aléatoire, au lieu que le quart en pleine propriété équi
vaut sur-le-champ et sans risque a un long usufruit de
la moitié de la succession; il y joint d’ailleurs les avan
tages d’une partie de cet usufruit, puisque la pleine pro
priété du quart des biens emporte l’ usufruit de ce quart.
Les avantages que le Code Napoléon permet de se faire
aux époux eu secondes noces, ont donc plus de latitude
�que ceux dont la loi du 17 nivôse leur conféroit la fa
culté de se gratifier.
Il s’ensuit que M . d’A y a t a fait à sa femme les avan
tages permis par le Code N apoléon; car il lui a donné
tout ce que la loi permettroit de lui donner, au jour du
décès du disposant, dans le cas où la loi alors existante
laisseroit plus de latitude que la loi du 17 nivôse à ces
sortes de donations.
Il lui a donc d o n n é, en définitif, la pleine propriété
du quart de ses biens, dans lequel madame d’A y a t doit
confondre tous ses autres avantages m atrimoniaux, parce
qu’aux termes de l’article 1098 du C ode, tous ensemble
ne doivent point excéder le quart.
O n soutient qu’il ne l’a pas pu. La donation est entre
v ifs , d it-o n ; d è s - lo r s elle n’a pu être valablement faite
que suivant la loi du temps de sa confection. On n’avoit
point la faculté de soumettre un acte irrévocable de sa
n a tu re , et dont tous les effets doivent être fixés au mo
ment où les parties le signent, à la fluctuation des lois
postérieures.
Mais d’abord il s’en faut beaucoup que la prévoyance
du Code c i v i l , et le renvoi à ses dispositions, fussent
contraires aux lois de ce temps-là. L e législateur luimême annonçoit souvent le C ode; lui-même il y renvoyoit souvent. T ém o in l’article 10 de la loi du 12 bru
maire an 2 , sur les enfans naturels, lequel porte :
« A l’égard des enfans nés liors du mariage, dont le
« père et la mère seront encore existans lors de la pro« mulgation du Code c i v i l , leur état et leurs droits se« ront en tout point réglés par les dispositions du Code. »
3
�(« )
On pourroit citer plusieurs autres exemples de cette
annonce légale d’ un Code prêt à paroître, auquel le lé
gislateur renvoyoit d ’avance la fixation des droits des
citoyens.
P o u r q u o i, lorsque deux époux se voyoient soumis à
des lois que leur auteur déclaroit être imparfaites et pro
visoires , et par lesquelles les volontés de ces époux
étoient gênées ; pourquoi leur refuser le droit de déclarer
eux-mêmes que si la loi actuelle se trou voit encore en
vigueu r au moment où la donation seroit recueillie, ils
conformoient respectueusement à ses règles leurs stipu
lations*, mais que si la loi promise, au co n tra ire,'éto it
promulguée avant que leur convention ne s’exécutât, et
si elle favorisoit le penchant qu’ ils avoient à ^’avantager
l ’un l’a u tre, ils entendoient profiter de ce perfectionne
ment de la législation, et de cette disponibilité plu&
grand e, qui seroit mieux d’accord avec leurs désirs?
Ils l’ont pu d’autant m ie u x , que les donations m u
tuelles, faites sous la condition de su rvie, bien qu’elles
soient qualifiées en tre-vifs, n’ont jamais été réputées
telles, mais seulement des donations ù cause de mort.
Elles en ont le caractère principal, en ce que le do
nateur se préfère au donataire, et ne se dépouille qu’en
m ourant; jusque-là il est lui-même aussi-bien donataire
que donateur. L e prédécès de l’un ou de l’autre déter
mine les qualités des parties : ce prédécès seul décide
qu’un tel est celui qui d on n e, un tel celui qui reçoit.
La C our de cassation, dans ses arrêts du ü5 ventôse an
1 1 , et du 8 vendémiaire
rapportés par M . Chabot,
en*son livre des Questions transitoires, au mot Donations
�entre ép o ux, a deux fois ainsi qualifié des donations sous
la condition de su rvie, faites dans l’intervalle de la loi
du 17 nivôse au Gode N apoléon; comme celle de M . et
de madame d’Ayat.
La C our de cassation a motivé ces arrêts, et particu
lièrement le prem ier, sur les anciennes ordonnances ; et
elle a décidé à plusieurs reprises que ces ordonnances
avoient conservé leur fo rce, même sous l’empire de la
loi du 17 n ivô se, dans tous les points que cette loi ne
décidoit pas, et que les ordonnances décidoient. O r , la
loi du 17 nivôse ne s’est point occupée de fixer les ca
ractères particuliers à chaque sorte de donation ( arrêts
de cassation, du 29 messidor et du a 5 fructidor an 113
Questions de d ro it, de M . M e r lin , tome 8 , p. 187 ).
Dès que la donation de M . et de madame d’A y a t est
une donation à cause de m o rt, il n’étoit nullement contre
sa nature qu’on s’y référât à la loi du temps du décès 5
il suffit que la quotité de la donation se trouve déter
minée dans le même temps que la personne du donateur
et celle du donataire. P a r cette clause elle l’étoit. Quand
des époux se donnent par contrat de m ariage, et dans
la forme entre-vifs, les biens qu’ils laisseront à leur décès,
clause dont la validité n’éprouve point de contestation \
ne rendent-ils pas également incertaine jusqu’à l’instant
de ce d è c è s, la quotité de la donation, que des aliéna
tions postérieures à l’acte peuvent réduire à rien ?
Les conventions matrimoniales sont irrévocables 9 il
est vrai ; mhis cela veut uniquement dire que l’on ne
peut rien changer ù la manière dont on les a constituées,
qu’il faut les exécuter telles q u ’on les a établies. L a do
�(8)
nation faite par M . et madame d’A yat étoit irrévocable
aussi : toutes les données nécessaires pour diriger dans
son exécution , la clause les contient; ce que Ton veut
y est nettement exprimé. Cherchez-vous quel est le do
nataire? voyez quel est le survivant. D é s ire z -v o u s de
connoître la quotité du don ? comparez la loi du temps
du décès du donateur à la loi du temps de la confection
de l’acte. D u moment que la donation fut signée, on
sut que les choses devroient s’y passer ainsi ; aucun des
époux n’y pouvoit changer dans la suite : leur conven
tion étoit donc irrévocable.
Enfin, le contrat existe; et ce n’est point par de vagues
argumentations que l’on renverse un contrat. Nulle loi
ne le prohibe ; il ne renferme rien de déshonnête ; il
doit être suivi ponctuellement.
Ce quart des biens , madame d’A y a t a droit de le
réclamer sur toute la succession, sans que madame T e r reyre puisse prélever le fonds du douaire propre aux
enfans du premier lit.
L e contrat de mariage par lequel M . d’A y a t créa ce
douaire, fut expressément soumis à la coutume de Paris.
O r , l’article a 5 r de cette coutume dit : « N ul ne peut
« être héritier et douairier ensemble pour le regard du
c< douaire coutumier ou préfix. »
E t madam eTerreyre s’est portée héritière de M . d’Ayat.
Elle prétendra que cet article n’a d’application que dans
le cas où il existe plusieurs héritiers. A lo rs ils se forcent
mutuellement au rapport; il ne leur est pas plus permis,
à l’égard les uns des autres, d’être à la fois héritiers et
douairieçs, que d’être héritiers et donataires; car le douaire
�(
9)
.
.
préfîx n’est autre chose qu’ une donation. Mais madame
Terreyre est fille unique; elle hérite seule : l’article s 5i
de la coutume de Paris ne la regarde donc pas.
Il suffîroit de répondre à madame T errey re, que la
coutume ne distingue en aucune façon l ’héritière uni
que de celle qui a des cohéritiers : « N u l ne peut être
« héritier et douairier, dit-elle, pour le regard du douaire
« coutumier ou préfix. »
Mais on peut entrer dans le détail des motifs de cette
décision , sans craindre que l’examen la rende moins sa
tisfaisante.
Pothier s’explique clairement à ce sujet. « L e douaire,
«
«
«
«
«
«
dit-il, est une dette de la succesion du père envers
ses enfans. L e fils, unique h éritier, étant en cette qualité seul tenu de toutes les dettes de la succession de
son père, il ne peut pas être débiteur du douaire envers lui-même ; il ne peut pas en être à la fois le débiteur et le créancier : ce sont deux qualités qui se dé-
« truisent nécessairement » (T ra ité du d ouaire, n°. 360).
L ebrun semble encore être entré plus avant dans l’es
prit de cette disposition de la coutume. V o ic i quelles
sont ses paroles :
« A l’égard de l ’incompatibilité des qualités d’héri« tier et de douairier, elle est un droit universel en
« ce royaum e, parce q u e , si l’on considère le douaire
« comme une créance , elle se confond dans la qualité
« d’héritier; et si on le regarde c o m m e un titre lucratif,
« il ne peut pas concourir avec la succession qui est de
« la même nature. Aussi l’on dit communément que le
« douaire tient lieu de la légitim e, et que celle-ci tient
/
�( 10
« lieu de la succession » (Success., liv. 3 , cliap. 7 , n°. 18).
L e b r u n , comme on le v o it, ne fait point dépendre
son avis de l’article z 5 i de la coutume de Paris; il le
tire du droit commun de la F ra n ce; et les raisons qu’il
donne sont d’une telle solidité , qu’elles s’appliqueroient
au contrat de mariage de M . d’A y a t avec mademoiselle
de Montgran , fût-il étranger aux dispositions de la cou
tume de Paris.
L e douaire, en effet, étoit une portion des biens du
père assurée aux enfans, pour le cas où il rendroit sa
succession mauvaise; c’étoit une précaution prise en fa
veu r des enfans contre les malheurs de l’administration
de leur père. Mais lorsque l’enfant accepte la succession
m ê m e , c’est qu’il y trouve plus d’avantage que dans le
douaire; il recueille alors tout ce dont le père n’a pas
valablement disposé d’ailleurs. V o tre père a vo u lu , pourroit-on lui d ire, que vous eussiez au moins le montant^
du douaire; mais il n’a pas vo u lu , quand vous recueillez
plus que le douaire, que vous mettiez à part, sans la
com pter, cette portion qu’il vous assuroit en cas de mal
heur ; il n’a pas entendu vous autoriser h contrarier par
là les autres dispositions qu’il a faites.
U ne autre raison de décider également, admise dans
la jurispi'udence, est celle-ci :
L a portion la plus forte que puisse recevoir une
épouse en secondes noces, quand son mari a des enfans
du premier l i t , c’est une part d’enfant le moins prenant.
A in si, madame d’A y a t est donataire d’une part d’enfant
le moins prenant. Mais comment la part d’enfant jdoiteile se régler? P o u r la bien connoître, il faut voir ce
�que pourroit faire un enfant à la place de la veu v e, et
ce à quoi il auroit droit; car voilà ce qui a été donné
à la veuve. Elle doit l’avoir si ce don n’excède pas la
quotité disponible relativement à elle. O r , un autre en
fant mis à la place de la veuve empêch eroit de prendre
le douaire; et comme rien ici n’a été donné à titre de
p récip u t, le second enfant auroit la moitié de tous les
biens : ce seroit là la part d’enfant. La loi ne veut pas
que lorsque cette part est donnée à l’épouse e n secondes
noces, elle excède le quart des biens. Elle ne l’excèdera
donc point; mais il n’y a nul prétexte raisonnable de la
réduire plus bas.
U n arrêt de la Cour d’appel de Paris, rendu le 20
février 1809, a notamment consacré cette doctrine dans
la cause de M M . Jonnery et Sirot.
D
é l i b é r é
à
Paris, ce 30 novembre 1 8 1 2 .
BELLART, DESÈZE.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, impritn. de la Cour im périale, et libraire,
rue des T aules, maison L a n d r i o t , — Juillet 1813.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beaufranchet d'Ayat. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bellart
De Sèze
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2210
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
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Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
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f7dba76bfa3ed43b145937137b9518b4
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Text
C O N S U L T A T IO N
S u r le douaire stipulé en coutume d'Auvergne ,
en cas de viduité seulement
Le
, qui a vu le
contrat de mariage de Joseph Delafarge et de
Marie - A n n e Urion , du 17 janvier 1 7 7 6 , et
l ’assignation donnée à la requête de ladite MarieA n n e Urion et de Joseph D ufraisse, son second
mari, à Antoine Delafarge , son fils du premier
mariage, le
nivôse dernier, et auquel il a été
exposé que Joseph Delafarge est mort au mois
de mai 1793 ,
c o n s e il
s o u s s ig n é
23
E S T I M E que la demande en continuation
de paiement du douaire, formée par la mère
contre le fils, est parfaitement ridicule et abso
lument mal fondée,
A
c
�( 2- )
A
époque du contrat de mariage de 1 7 7 6 ,
et encore à celle du décès de Joseph D elafarge,
nous étions gouvernés par les dispositions de la
coutume d’Auvergne. O r , en Auvergne il n ’y
avoit point de douaire coutumier ; la femme ,
devenue v e u v e , ne pouvoit en prétendre contre
la succession de son mari, qu’autant qu’il lui en
avoit été constitué par son contrat de mariage.
Par la m ê m e raison qu’elle ne pouvoit pas
exiger un douaire, s’il ne lui en avoit pas été
^ constitué , aussi ne pouvoit-elle le demander que '
tel et de la manière qu’il avoit été stipulé.
D ’un autre c ô t é , l’usage le plus général de la
province étoît de ne constituer le douaire que
pour le temps de la viduité ; et p eut-être sur
cent contrats de mariage n ’en trouveroit-on pas
d e u x où la restriction du douaire , au temps de
la vid u ité, ne fût pas e x p r e s s é m e n t c o n v e n u e ?
D ans notre u sage, le douaire ne pouvoit donc
être considéré que comme un secours donné à la
fem m e devenue veuve , pour soutenir le nom et
l ’état du mari q u e lle avoit perdu. Ainsi , lors
qu’elle en perdoit le nom par un second mariage,
et qu’elle prenoit letat d u n nouveau mari,il n ’eût
pas été juste, sur-tout lorsqu’elle avoit des enfans ’
du premier mariage , d’enrichir le second mari
aux dépens des enfans du premier.
1
�fû ï
3
<.U
'
(
)
D ans le dernier état du droit romain, et par
la disposition de la novelle 2 2 , chapitres 43 e t ^
44 , la condition de ne point passer à d e ^ T * * ^
secondes noces , étoit valable
soit qu’elle
imposée par le mari dans une disposition qu’il
2t 2M *-*-'•
fa'isoit en faveur de sa fe m m e , soit qu’elle le fût/~v.»*LtM^hL..
par tout autre que le m ari, et elle emportoit
perte de la disposition par la feitime qui
trevenoit à la condition.
D ’ailleurs, on ne regardoit pas la disposition^'/'**^. * ti.
. faite par le mari en faveur de la femme pendant^
qu’elle demeureroit veuve , comme une interdic- ' * t • ¿ L . K
i
.
.
,
fa * .
tion de se remarier, mais seulement comme une
consolation et un soulagement que le mari lui
accordoit pendant sa viduité : hœc conditio , si
vid.ua erit , cum vidua e r it, non indicit viduitatem , sed solarium viduitati prœbet : c ’est ainsi
que s’en exprime élégamment j e savant Cujas ,
dans son commentaire de la novelle 22 ; de
même G o d e fro y , sur la loi dernière, au code de
indicta viduitate.
O n peut même dire que le douaire constitué
en A u v e r g e , pour avoir lieu pendant la viduité
seulem ent, ne peut pas, à proprement parler,
être considéré comme une disposition conditionnelle ; c’est seulement une disposition de la qua
lité de celles que Ricard appelle donations tem-*
A 2,
3
�(
4
)
poraires ou à tem p s, trait, des disp. cond. n. 7 ;
et les jurisconsultes font une distinction entre
la disposition d’usufruit faite par un mari à sa
fem m e, à condition de ne pas se remarier, et celle
de l’usufruit dont elle jouira, tandis qu’elle de
meurera en viduité : la première devenoit caduque
par l’effet du second mariage ; c etoit le cas de
la caution mucienne qui obligeoit la femme à la
restitution des fruits qu’elle avoit perçus pendant
sa vid uité, si elle venoit à passer à de secondes
n oces; au lieu que la disposition faite pour jouir,
tant quelle demeureroit veuve , n etoit en effet
qu’une disposition temporaire, qui se divisoit en
autant de dispositions, in singulos anno s , pour
chaque année de la vid uité, après laquelle seule
m ent la disposition cessoit, mais sans restitution
des fruits du temps antérieur.
D ’après c e la , et d’après la clause d’un contrat
* de mariage qui n ’accordoit un douaire à la femme
que pendant le temps de sa viduité seu lem en t,
certainement dans l’état de nos anciennes lois ,
une femme qui se seroit remariée, n ’auroit pas
eu l’impudeur de demander la continuation du
douaire.
Y auroit-il donc dans les lois survenues depuis
la révolution, y en auroit-il q u e l q u ’une qui auto
risât là femme remariée à exiger la continuation
�(
5
)
d un douaire stipulé en cas de vidurté seulement ?
11 paroît par la demande que la femme Dufraisse
vient de former contre son fils du premier mariage ,
qu’elle veut faire regarder la disposition de. son
contrat de mariage pour le •douaire, restreint au
temps de sa viduité , comme une clause impérative
et prohibitive, gênant la liberté de se remarier ,
et par cette raison proscrite par l’article Ier. de la
loi du
brumaire, an 2 , et l’art. 12 de celle du,*
J 7 nivôse, même année.
d " ' 11 y a deux réponses à cette objection.
i°. L a clause dont il s’agit n ’est par elle-même
ni impérative ni prohibitive. C e n ’est point une
disposition conditionnelle qui ait commandé à la
femme de ne point se remarier, qui lui ait dé
fendu de le faire ; c’est seulement une disposition
temporaire qui a été faite en sa faveur pour tout
le temps qu elle seroit veuve; et le second mariage
est si peu une condition imposée à la disposition,
q u e , venant à se remarier, la femme n ’auroit pas
été privée de son douaire pour le temps qu’elle
seroit demeurée veuve; au lieu qu e, si la disposition
lui eut été faite à condition de ne pas se remarier,
en se remariant, elle eût été, suivant nos anciennes
lois, sujette à la restitution des fruits qu’elle auroit
perçus pendant sa viduité. T elle est en effet la doc
trine des jurisconsultes, et particulièrement celle de
5
�C 6 )
Pérégrinus ,V<? Jpdeicommissis, art. t t , n°s. 122 et
, rappelée par les annotateurs de Ricard, des
dispositions conditionnelles, n°. 2 5 2 ; 'e n un m o t,
la disposition n ’emporte avec elle aucune prohibi
t io n de se remarier, aucun commandement de
garder la viduité, non indicit viduitatem, comme
.dit C ujas, ce n ’est qu’une consolation et un secours
qui lui est accordé pendant qu’elle demeurera
v e u v e , sed soLatium. viduitatiprœbct. Autre chose
est de détourner de se marier par l’imposition d’une
peine; autre chose d’inviter à la viduité par une
récom pense, dit Maynard en ses arrêts, tome
page 321 ; aliud est à nuptiis pœnâ deterreri, aliud
ad viduitatem prœmio invitari. D ès que la veuve
Delafarge., par un second mariage, est devenue
fem m e Duf'raisse, elle ne doit plus avoir c e q u in e
lui avoit été donné que comme une consolation
pendant sa viduité, consolation dont elle n ’a plus
besoin.
Il doit donc paroître évident que les nouvelles
lois de brumaire et de nivôse, seroient dans tous
.les cas sans application à la clause du premier con
trat de mariage de la femme Dufraisse, et que
cette clause n’est ni impérative ni prohibitive.
Mais il y a une seconde réponse à son objection.
Il doit paroître certain que ce ne scroit que par
lin effet rétroactif des deux lois de brumaire et de
123
�({(
(7
)
n iv ô se , que la femme Dufraisse pourroit s’en pré
valoir contre la clause expresse du contrat demariage
de 1 7 7 6 , antérieur de plus de, 1 7 ans à ces lois ,
et contre les lois qui étoient alors en vigueur, et
qui letoien t encore au décès du premier mari. E lle
ne pourroit pas dire en effet qu’avant l’existence
de ces lo is, elle auroit pu seulement hasarder la
prétention qu’elle élève aujourd’hui; elle eût été
alors sans doute rejetée avec indignation r elie sera
bien forcée d’en convenir. Donc il est évident que
c’est l’effet rétroactif de ces lois qu’elle invoque.
O n vient de prouver cependant qu’elles n ’ont pas
d’application à l’espèce. Mais quand elles auroient
pu s’y appliquer, ce n ’eût é t é .encore une fois que
par 1 effet- rétroactif qui y avoit d’abord été attaché.
O r, l’effet rétroactif étoit d’une souveraine injus
tice; et les législateurs, forcés de la reconnoitre, se
sont vus obligés de la corriger, en rapportant cçt
effet rétroactif par la, loi du 9 fructidor dernier. '
Ainsi le contrat de mariage étant de 1 7 7 6 , par
conséquent antérieur aux lois de b ru m a ire et de
n ivose, la mort même de Delafarge, premier mari,
étant aussi antérieure à ces lois, leurs dispositions,
fussent - elles applicables à l’esp èce, 11e peuvent
plus frapper sur un acte et sur un événement qui
les ont précédés, et la prétention de la'femme D u
fraisse se présente aujourd’huf avec autantr çTimpu-
Of
�ilk
.T »
8
8
Ÿ f * ' ^ deur qu’elle auroit pu le faire avant des lois qu’elle
r f f f invoqueroit d’ailleurs sans aucun fondement ,
t f ,ak ^ quand même leur effet rétroactif n ’auroit pas été
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rapporté.
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Délibéré à R i o m , le 10 pluviôse, an quatrième,
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T O UT TE E ,
G R A N C H IE R ,
T O U T T É E , fi!s ; P A G È S .
• N ota . L e citoyen Delafarge ; en faisant imprimer cette
consultation pour sa défense , croit devoir observer q u e ,
plein d’amour pour sa m ère, il n’a garde de lui imputer
une action q u’ il est persuadé qu’elle désavoue dans son
c œ u r : il ne l'attribue qu'a la c u p id ité d 'u n s e c o n d mari
qui d’ailleurs, suivant la pensée d’un ancien jurisconsulte,
doit avoir en haine les enfans du premier mari ; c um eos
o d io e i s i t m an ifcstum . L e citoyen D elafarge est douloureu
sement affecté de ne pouvoir arracher de sa mémoire do
tristes souvenirs.
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RIOM, DE L’IMPRIMERIE DE LANDRIOT,
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delafarge, Joseph. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Toutée
Granchier
Toutée, fils
Pagès
Subject
The topic of the resource
douaire
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
secondes noces
conflit de lois
droit intermédiaire
droits de la femme
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation sur le douaire stipulé en coutume d'Auvergne en cas de viduité seulement.
Anotations manuscrites, énoncé du jugement. « Il n'y a pas de rétrocativité » etc.
Table Godemel : douaire : en auvergne, il n’y avait point de douaire coutumier, il fallait qu’il fut stipulé, et on ne pouvait le demander que tel et de la manière qu’il l’avait été. L’usage était de ne les instituer que pour le temps de la viduité. cette disposition purement temporaire n’était nullement prohibitive et ne restreignait pas la liberté de convoler. seulement le secours donné à titre de consolation cessait. - les lois intermédiaires ont-elles modifié ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1776-Circa An 4
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1207
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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conflit de lois
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
douaire
droit intermédiaire
droits de la femme
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53440/BCU_Factums_G2211.pdf
9a52301b93bc3141f65a2ddaea0f271e
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
P O U R
COUR
IMPÉRIALE
DE RIOM.
La dame K IM PFER DE P L O B S H E IM ,
veuve du Général d’A yat , appelante ;
■" c»*»»»«.
CONTR E
Le
Général T E R R E Y R E
—L
et son épouse
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intimés
A
L dame d’Ayat avoit porté devant le tribunal civil
de l’arrondissement de Riom des réclamations fondées
sur une clause formelle de son contrat de mariage, et
° 7
7
sur des principes qui paroissoient certains.
Cependant ses réclamations n’ont pas été accueillies.
L e sens naturel des expressions du contrat a été détourné par une interprétation forcée.
Les principes ont été méconnus.
Les droits d’un héritier naturel ont été fixés , non
d’après la loi en vigueur au moment de l’ouverture de la ..
succession, mais d après une loi depuis long-temps abolie.
L e douaire a été considéré comme une créance or■»
d
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L ’enfant a été autorisé à se porter à la fois douairier
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et héritier, à p rélever, au premier titre, le douaire
qu’il réclamoit, et à prendre, au second , la totalité
d’une réserve légale qu’il lui a été permis de cumuler
avec le douaire.
Lésée par des erreurs de fait et par des erreurs de
d ro it, la dame d’Ayat a dû demander à des magistrats
supérieurs un nouvel examen de sa cause.
C’est sur la jurisprudence mêmé de la Cour que re
posent plusieurs des moyens qu’elle invoque; c’est dans
les sources les plus respectables qu’elle puise les autres:
avec des secours aussi puissans, elle doit espérer de
faire disparoître toute équivoque, toute confusion de
principes, de ramcnci’ les questions à leur vrai point,
et d’obtenir la réformation d’un jugement où l’on ne
reconnoît pas le tribunal qui l’a rendu.
Deux questions principales avoient été soumises aux
premiers juges, et développées dans des mémoires res
pectifs :
L ’une, si la dame d’Ayat devoit avoir le quart en
propriété des biens laissés par son mari ;
L ’autre, si la quotité à laquelle cette dame avoit droit
devoit ôtre fixée d?après la masse totale des biens du
m ari, sans aucun prélèvement.
Ces deux questions ont été décidées négativement par
le tribunal de première instance.
C’est sur cette décision que l’on se propose de sou
mettre à la Cour quelques observations.
La première question roule sur les termes et sur les
effets du contrat de mariage de la dame d’A y a t , en
date du 19 brumaire an 4-
�(3 )
L es avantages stipulés par le contrat sont de quatre
sortes.
i°. Un douaire préfix de 3,000 francs de rente nette
et sans retenue, attribuée à la future épouse.
2°. Un gain mutuel de 5o,ooo francs à prendre par
le survivant sur le plus clair des biens du prédécédé.
30. Une disposition en faveur du survivant des deux
é p o u x , « de tout ce dont la loi leur permet de dis—
« poser en faveur l’un de l’autre, ou de tout ce dont
« elle ieur permettra de disposer aussi en faveur l’un de
« l’autre, au jour du décès du premier mourant d’eux,
« dans le cas où la loi alors existante donneroit plus
« de latitude à ces sortes de donations, p ou r, par ledit
« survivant des futurs é p o u x , en jouir à compter du
« décès dudit premier mourant, suivant et aux termes
« de la lo i, sans être néanmoins tenu de donner aucune
« caution, et seulement à la charge de faire faire fidèle
« inventaire des biens du prédécédé. »
40. Une disposition universelle de tous les biens en
propriété, dans le cas où le premier mourant décéderoit
sans enfans (1).
La dame d’Ayat se restreignoit, pour tous ces avan
tages , à la propriété du quart des biens laissés par son
mari, quotité déclarée disponible en sa faveur par l’ar
ticle 1098 du Gode Napoléon, sous l’empire duquel est
mort le général d7Aj*at.
Et remarquons que la valeur de ce quart est beau(x) V o ir, pour les autres détails des conventions matrimo
niales, le mémoire de madame d’A yat, pages 3 et 4.
I *
32$
�t
^4 ^
coup au-dessous de celle des diverses dispositions que
l’on vient d’analiser.
L e tribunal de première instance a réduit tous les dons
au simple usufruit d’une portion des biens du général.
11 seroit trop long de transcrire tous les motifs d’après
lesquels il déclare s’etre déterminé.
En voici le résumé :
En comparant la troisième et la quatrième clause, les
premiers juges ont cru voir dans la troisième un simple
don de jouissance, pour le cas où il y auroit des enfans,
et dans la quatrième, un don de propriété, mais dans
le cas seulement où il n’y auroit pas d’enfans.
Cette opinion devient évidente, disent-ils, par l’em
ploi des mots pour en jo u ir , qui n’indiquent qu’une
simple jouissance, et par la précaution de dispenser de
donner ca u tion , mais de soumettre àfa ir e inventaire •
ce qui auroit été superflu, si l’on avoit entendu attri
buer une propriété.
Passant ensuite à l’examen de la nature de la dona
tion, ils soutiennent, en point de droit, qu’elle est une
véritable donation entre-vifs ,• qu’elle doit être régie
par la loi en vigueur au temps où elle a été faite; que
les époux n’ont pu s’en référer à la loi future sans
manquer de respect à la loi existante; et que cette loi
future ne pourroit elle-même, sans rétroagir, donner
quelque valeur à un don fait sous l’empire d’une autre
loi qui étoit impérative et irritante.
Examinons et la justesse de l’interprétation adoptée
par les premiers juges, et la vérité des principes dont
ils ont argumenté.
�C 5 )
L ’interprétation est contraire aux termes de la clause
et à l’intention évidente du donateur.
Les termes de la clause sont clairs.
On donne d’abord tout ce que la loi du moment autorise
à donner.
M ais, comme cette loi restreignoit les dons à un simple
usufruit, on prévoit le cas où une loi nouvelle surviendroit, où elle accorderoit plus de latitude aux donations
entre époux, et l’on donne, dans ce cas, tout ce dont la
lo i existante au jou r du décès permettrait de disposer.
Quoi de plus clair que ces expressions? quoi de plus
positif? quoi de plus formel? leur sens n’est-il pas trop
évident pour avoir besoin de quelqu’interprétation? et
vouloir les interpréter n’est-ce pas chercher à les obs
curcir pour en détruire l’effet?
Donner tout ce dont la loi du décès permettra de dis
poser, c’est faire un don en propriété, si cette loi le
permet ; c’est faire un don en usufruit seulement, si la
loi n’autorise rien de plus.
Mais, dit-on, les mots pour en jo u ir , qui se trouvent
dans la suite de la clause, sont indicatifs d’un simple usu
fruit.
Etrange raisonnement! comme si le mot jo u ir ne s’entendoit pas d’un propriétaire ainsi que d’un usufruitier.
L e propriétaire jo u it, l’usufruitier jouit lui-méme, et
chacun au titre auquel il possède. L e mot j o u i r exprime
également l’eiïet du droit dont chacain use; d’ailleurs il
ne peut servir, isolément pris, ù fixer l’étendue du droit
même; et c’est à la disposition principale qu’il faut re
courir, pour connoître si c’est comme propriétaire 011
comme usufruitier que l’on jouit.
�(6 y
A u reste, dans la clause il est dit :
« Pour en jouir à compter du décès du premier mou« rant, suivant et.a u x ternies de la loi. a
A in s i, dans cette seconde partie de la clause, comme
dans la prem ière, c’est à la loi existante au moment du
décès qu’on s’en réfère pour fixer l’étendue et la nature
du droit de jou ir, et c’est comme s’il avoit été dit :
« Pour en jo u ir comme propriétaire , si la loi le
a permet ;
et Pour en jo u ir comme simple u sufruitier, si la loi
« le veut ainsi. »
Une dernière objection est tirée de ce qu’à la fin de
la clause il est ajouté : Sans êti'e tenu de donner caution,
mais à la charge dé fa ir e inventaire.
La dispense et la charge, a-t-on observé, ne peuvent
s’appliquer qu’à un usufruitier, et prouvent par consé
quent que l’on a entendu faire seulement un dan ea
usufruit.
L ’on n’a pas voulu remarquer que ces expressions
finales n’avoient été employées qu’hypothétiquement.
La clause renfermoit tout à la fois le don de la quo
tité fixée par la loi existante, et le don de la quotité qui
seroit disponible d’après la loi du décès.
L e premier don n’étoit que d’ un usufruit ; et il étoit
incertain si la loi future autoriseroit un don en propriété.
Dans cette incertitude, et dans le cas o ù , la loi ne
changeant pas, la libéralité se trouveroit réduite à un
usufruit, il falloit bien prévoir les dispenses et les charges
que l’on vouloit stipuler pour l’usufruitier.
C’est ce que l’on a fait par les expressions finales ci-
�( 7 )
.
' 3?*
dessus rapportées. Ces expressions ne signifient rien autre
ch ose, si ce n'est que pour la portion d’usufruit qui
pourroit se trouver dans la libéralité précédemment faite,
on seroit dispense de donner caution et chargé de faire
inventaire.
Mais prétendre que ces expressions changent le sens
de la disposition principale par laquelle on s’en est
référé à la loi môme pour l’étendue de la libéralité ;
soutenir que le don n’est que d’un usufruit, quoique la
loi attribue une portion en propriété, c’est s’arrêter à
de vaines subtilités; c’est substituer des idées arbitraires
à la volonté du donateur; c’est, en un mot, anéantir
la donation sous prétexte d’en fixer les vraies limites.
Comment concevoir, en effet, qu’on eût déclaré donner
tout ce dont la loi du décès permettrait de disposer,
si l’intention des parties eût été seulement de faire un
don d’usufruit?
Supposeroit-on qu’en prévoyant le cas où la loi future
-accorderoit une plus grande latitude pour les dispositions
entre ép o u x , on n’avoit cependant pas pensé que cette
latitude pourroit s’étendre jusqu’aux dons en propriété?
* Où imagineroit-on que la valeur et la force des mots
employés dans la disposition n’ont pas été senties par
'des contractans dont le rang et l’éducation ne peuvent
cependant faire présumer des erreurs d’intelligence aussi
(graves ?
Mais il est dans le contrat de mariage une disposition
particulière, q u i , si elle eût été considérée par lés pre
miers juges, auroit levé tous leurs doutes sur l’intention
du donateur.
�( 8)
Nous voulons parler du don mutuel de 5o,ooo fr.
Ce don mutuel est attribué en propriété au survivant
des époux; il est suivi immédiatement de la disposition
générale d’après laquelle le survivant doit avoir tout ce
dont la loi du décès permettroit de disposer.
Cette dernière donation comprenoit dans sa généralité,
même le don des 5o,ooo francs fait dans la phrase pré
cédente ; et les deux libéralités portées par le même con
trat devoient servir l’une à l’autre de règles d'interpré
tation. Il est en effet de principe consigné dans l’article
1161 du Code, que « toutes les clauses des conventions
« s’interprètent les unes par les autres, en donnant à
« chacune le sens qui résulte de l’acte entier. »
• En fixant leur attention sur ce don de 5o,ooo francs
en propriété, les premiers juges auroient dû, il semble,
ou attribuer cette libéralité telle qu’elle étoit faite, ou
reconnoître au moins que la volonté des donateurs, ma
nifestée par l’ensemble de leurs dispositions, avoit été
que le survivant d’eux eût en propriété la quotité décla
rée disponible par la loi du décès.
Ces idées simples ont cependant été méconnues.
Sans égard pour le don particulier de 5o,ooo fr. en
propriété, sans respect pour les termes de la donation
générale de tout ce qui seroit disponible d’après la loi
du décès, on a décidé en fait que l’intention des deux
époux avoit été seulement d’attribuer un usufruit au
survivant.
Cette décision sur le fait, sur Vintention, est trop
choquante, est d’une erreur trop palpable, pour qu’il
soit nécessaire de la combattre plus long-temps.
Passons
�( 9)
Passons à quelques observations sur le point de droit.
L e jugement décide en point de droit,
Que la disposition portée par le contrat de mariage
de madame d’Ayat est une donation entre-vifs,*
Que s’en référer à la loi future, c’étoit manquer de
respect à la loi existante;
Que la loi future ne pourroit, sans rétroagir, consacrer
cette disposition ;
Enfin, que d’après la loi existante, la disposition n’avoit
pu être faite.
Ces diverses décisions sont autant d’erreurs.
L a disposition ne constituoit pas une donation entre
vifs.
Une donation entre-vifs dépouille le donateur, et saisit
sur-le-champ le donataire ; l’un ne peut plus aliéner
les objets donnés ; l’autre, comme propriétaire, en
dispose à son gré, et les transmet à ses héritiers, quoi
qu’il meure même avant le donateur.
De tels caractères ne conviennent pas aux libéralités
contenues au contrat de mariage de la dame d’Ayat.
La donation que réclame la dame d’Ayat étoit su
bordonnée au décès du mari donateur ; elle avoit été
faite in contemplatione m ortis, et sub ejits commémo
ra tione.
Elle ne devoit être prise que sur les biens que laisseroit le donateur à son décès; celui-ci pouvoit d’ailleurs
aliéner, dissiper même pendant sa vie.
Enfin il falloit, pour que la donation eût lieu, que
la femme survécût au mari; si elle eût prédécédé, elle
xi’auroit pas été donataire, mais au contraire donatrice.
�Ces conditions, ces effets caractérisent une donation
à cause de m ort, et démontrent l’erreur de la qualifi
cation de donation entre-vifs, employée dans les motifs
du jugement.
La donation dont il s’agit n’a de commun avec les
donations entre-vifs que son irrévocabilité; c’est d’ailleurs
une vi'aie donation à cause de mort.
L a seconde erreur du ju g e m e n t n’est pas moins frappante.
Les expressions manquer de respect a la. loi exis
tante , énoncent une idée fausse cachée sous de grands
mots. La loi est impassible; en sorte que si l’on agissoit
contre ses défenses, ce seroit le législateur plutôt que
la loi qu’on offenseroit.
Mais peut-on dire que c’est manquer de respect au
législateur, que de s’en référer à sa volonté, que de
donner, s’il le permet, et seulement jusqu’à concurrence
de ce dont il permettra de disposer? Un pareil don
n’est-il pas un acte de soumission plutôt que d’irrévéx’ence? Et surtout, lorsque le législateur annonçoit luimême, comme il l’avoit fait en l’an 2, la promulgation
prochaine du Code c iv i l, n’étoit-il pas permis de pré
voir l’existence de cette loi future, et de s’en rapporter
à ce qu’elle ordonneroit ?
La Cour a fait déjà justice de cette singulière ob
jection, en déclarant valable une disposition semblable,
par un arrêt du 29 janvier 1812, dont l’espèce est rap
portée dans le mémoire de la dame d’A y a t , pages 21
et suivantes.
L ’arrêt répond aussi à la troisième objection tirée
de la prétendue rétroactivité de la loi nouvelle.
�Donner ce iîont une loi future permettra de disposer,
c’est faire une donation conditionnelle ou éventuelle; la
loi future est la condition ou l’événement : si elle est
promulguée, il n’y a pas de rétroactivité dans la lo i;
mais la volonté de l’homme opère son effet par l’accom
plissement de la condition ou de l’événement prévu.
Examinons si la loi du 17 nivôse an 2 s’opposoit à
la validité de la donation, quelle qu’en soit même la
nature, soit qu’on la considère comme donation entre
vifs ou comme donation à cause de mort.
Remarquons d’abord que les premiers juges n’ont pu
dire que cette loi fût prohibitive, quoique cette idée
eût prêté un grand appui à leur système.
Ils ont seulement dit que cette loi étoit impérative
et irritante.
O r , on connoît la différence entre le& lois prohibitives
et les lois im pératives, quant à leurs effets.
Les premières rendent nuls les actes faits contre leur
prohibition.
Les secondes sont purement réglementaires ; et les
règlemens qu’elles contiennent, sur les successions no
tamment, ne sont applicables qu’aux successions ouvertes
sous leur empire.
La loi du 17 nivôse an 2 renferme diverses règles sur
le partage des successions, et sur la portion que doit y
prendre chaque héritier.
Elle ne s’exprime point d’ailleurs en fermes prohibitifs,
quant aux donations; elle ne prononce ni incapacité de
donner, ni incapacité de recevoir.
11 y a plus; le système restrictif qu’elle établit relati-
�( 12 )
vement aux libéralités en général, ne s’applique pas aux
dispositions entre époux.
Cette vérité est indiquée par l’article 14 de la loi du
17 nivôse an 2 , et démontrée par la réponse à la dixième
question insérée dans la loi du 22 ventôse an 2.
P a r Varticle 14 de la loi de nivôse, où il est dit qu’à
l’égard de tous avantages............. qui pourroient avoir
lieu à l’avenir , « soit qu’ils résultent des dispositions
« matrimoniales, soit qu’ils proviennent d’institutions,
« dons entre-vifs, ou legs faits par un mari à sa femme
« ou par une femme à son m ari, ils obtiendront éga
ie. lement leur effet, sauf néanmoins leur conversion ou
« réduction en usufruit de m oitié, dans le cas où il y
« auroit des enfans, conformément à l’art. 13 ci-dessus. »
P a r la réponse à la dixièm e question de la loi de
ventôse, où le législateur s’exprime d’une manière bien
remarquable :
« L e système restrictif n’est pas pour les dispositions
« entre époux, sauf la réductibilité à l’usufruit de moitié,
« en cas qu’il y ait des enfans. »
Ainsi les dispositions entre époux , quelqu’étendues
qu’elles soient, sont valables en elles-mêmes;
Seulement elles peuvent devenir susceptibles de ré
duction.
Mais le droit de demander la réduction, à qui appar
tient-il, et de quel jour est-il acquis?
Ces questions ayant déjà été traitées dans le mémoire,
on se bornera ici à quelques réflexions.
La loi du 17 nivôse accordoit aux enfans le droit de de
mander la réduction des dispositions entre époux, comme
�( 13 )
à tous les liéritîêi'S en g é n é r a l c e lu i de" fa ire a n riu ller les
lib é ra lité s excessives attrib u ées à des tiers.
Mais aux termes de l’article ô j de cette lo i, le droit
n’étoit acquis aux héritiers que du jour où la succession
leur étoit échue.
Ce droit appartiendroit sans doute aux héritiers d’une
succession échue pendant l’existence de la loi du 17 ni
vôse an 2, parce que ces héritiers tiendroient leur droit
de la loi môme.
Peut-on dire qu’il appartient aussi aux héritiers d’une
succession ouverte seulement depuis le Code Napoléon,
après l’abolition de la loi du 17 nivôse an 2 ?
A vant l’ouverture de la succession les héritiers n’avoient
aucun droit acquis.
A l’ouvertùre de la succession ils n’ont pu en acqué
rir qu’en vertu d’une loi existante.
Une loi morte n’agit pas; elle ne peut produire aucun
effet, ni attribuer aucun avantage.
Ce seroit donc dans le Code Napoléon seul qu’il
faudroit chercher le droit accordé à ces héritiers. O r ,
le Code ne permet de demander la réduction des dis
positions antérieures au décès d’un père , qu’autant
qu’elles portent atteinte à la réserve légale attribuée
aux enfans , et jusqu’à concurrence seulement de celle
réserve léjg.de. ( V . les art. 920 et 9 2 1.)
Donc si le donataire se contente, pour tous les dons
qui lui ont été faits, de la quotité déclarée disponible
par le Code, cette quotité ne peut lui être refusée.
Cetle conséquence est le résultat d’un principe-élé
mentaire qui nous enseigne que toute succession doit
être régie par lu loi en vigueur ù l’instant où elle s’ouvre.
�( i4 )
L e principe et la' conséquence ont ¿té appliqués pûr
plusieurs arrêts de cassation rapportés dans le mémoire
de la dame d’Ayat (pag. 19 et suivantes), relativement
à des donations faites par contrats entre-vifs, sous l’em
pire même de la loi du 17 nivôse an 2.
; Les libéralités a voient été, il est vrai, déguisées sous
la forme de vente.
. Mais le déguisement étoit reconnu ; les arrêts con
sidèrent les actes comme contenant des donations , et
jugent la question de droit d’après ce point de fait. Les
donations furent maintenues parce que les donateurs
étoient morts sous l’empire du C o d e , et que les objets
donnés n’excédoient pas la quotité disponible fixée par
la loi nouvelle.
Ce qui a été décidé pour des libéralités indirectes,
mais reconnues, doit l’être, et à plus forte raison, pour
des libéralités franches et directes.
Les principes sont les mêmes dans les deux cas, quant
aux effets de la loi de nivôse; et l’on ne prétendra pas
sans doute que la fraude a dû obtenir devant les tri
bunaux plus de faveur que la vérité.
A u reste, la question a été jugée par la Cour de Riom,
pour une libéralité directe, dans la cause des Dumas et
Defarge.
L ’arrêt est du 21 juillet dernier : en voici l’espèce.“
Par le contrat de mariage de Louise Dumas, passé le
21 messidor an 7 , Benoît Dumas, sou père, lui avoit.
promis une somme de 2,000 francs.
L e père meurt sous l’empire du Code Napoléon, sans
avoir payé; la fille répudie la succession, et demande le
paycmeut à son frère, uu des héritiers naturels du père.
�( i5 )
340
L e frère soutient que le don excède la portion hérédi
taire de la sœur; que la loi du 17 nivôse a n -2 ne permeltoit pas au père de faire le moindre avantage à l’un
de ses eufans, et que la fille n’a droit qu’au partage par
égale portion.
- Ces moyens sont rejetés par un jugement fondé sur le
motif « que les successions doivent se régler suivant les
« lois en vigueur au moment de leur ouverture. »
Devant la C ou r, le frère, en soutenant la nullité du
don de 2,000 francs, ajoute que ce don excédoit même
le quart, quotité disponible d’après le Code. '
La Cou r, déterminée par les motifs exprimés au ju
gement, l’a confirmé , « si mieux n’aime l’appelant,
« e st-il d it , offrir partage à la partie de Marie (1),
« auquel cas ladite partie de Marie prélèvera le q u a rt,
w et partagera les autres trois quarts açec les autres
« cohéritiers. »
Cet arrêt a jugé la question dans l’espèce peut-être la
plus difficile, puisqu’il s’agissoit d’ un don fait en ligne
directe, et à un successible.
Le don a cependant été déclaré valable , au moins
jusqu’à la concurrence de la quotité disponible fixée par
le Code.
L ’application de ces principes et de ces arrêts à la cause
de la dame d’ A yat, est aussi simple que naturelle.
L a dame d’ A yat est donataire d’un revenu annuel de
3,000 fr. , d une somme en propriété de 5o,ooo f r . ,
(1)
l’arrét.
Le cédataire de la sœur : c e lle - c i est aussi partie dans
�2#
(
16
)
enfin de tout ce dont lu loi existante au décès de son
mari permettroit à celui ci de disposer.
C ’est en 1812 que le mari est décédé.
E lle a donc le droit de dem ander, ou qu’on lui ac
corde tous ses avantages m atrim oniaux, ou qu’on lui
délaisse la quotité disponible au moment du décès, c’està-dire , le quart en propriété , attribué à une seconde
épouse par l’article 1098 du Code Napoléon.
E x a m in o n s la secon de q u estion .
L e quart doit-il être pris sur la masse totale des biens
qu’a laissés le général d’A y a t , ou la dame T e r re y r e ,
unique enfant du g é n é r a l, a-t-elle le droit de prélever
avant partage 80,000 francs de douaire, et de prendre
les trois quarts du surplus ?
P o u r soutenir que le prélèvement devoit avoir lieu ,
le général Terreyre et son épouse avoient dit dans leur
mémoire que le douaire étoit une donation , et que le
rapport des donations étoit dû seulement entre cohéri
tiers, mais non en faveur d’un autre donataire comme
la dame d’Ayat.
A cette objection la dame d’A y at avoit répondu de
deux manières :
D ’abord , que le douaire n’étoit pas une donation
ordinaire, mais une espèce de lég itim e, un don con
ditionnel subordonné au cas où l’enfant douairier ne
se porteroit pas héritier de son père ;
Ensuite, qu’en considérant même le douaire comme
1
une donation ordinaire, la chose donnée à l’enfant devoit
s’ im puter.sur la légitime ou sur la réserve léga le, et
devoit par conséquent entrer, au moins fictivement,'
dans
�( Ï7 )
dans la masse , afin de fixer la quotité disponible ea
faveur de la dame d’Ayat.
• Les premiers juges n’ont adopté ni l’une ni l’autre de
ces opinions.
- Ils ont. dit que le douaire étoit une créance établie
par la lo i sur les biens du père;
< Que ce n’étoit ni une donation’ ordinaire, ni une
légitime ;
Que l’enfant en étoit saisi dès l’instant du contrat de
m ariage, et que le père n’étoit que l’usufruitier du
fonds du douaire;
Que le rapport n’en étoit dû qu’éntre cohéritiers, ou
quelquefois à des créanciers, pour prévenir les fraudes
qui pourroient être commises;
’
Enfin, que la dame Terreyre avoit deux qualités dis
tinctes, celle de douairière, en vertu de laquelle elle avoit
le droit de prélever sa créance sur la succession, et celle
d’héritière, qui l’autorisoit à faire fixer la quotité dispo
nible, en ne considérant comme masse de la succession
que ce qui resteroit après la distraction du douaire.
« A ces raisonnemens la dame d’Ayat répondra,
i °. Que c’est parce que le douaire n’est pas une donation
ordinaire, qu’on ne doit pas lui appliquer les principes
sur les rapports en matière de donation, et qu’on ne
doit pas dire, contre le texte précis de la loi, qu’on peut
etre à la fois douairier et héritier ;
2°. Que la dame Terreyre ne pourroit, même en re
nonçant à la succession de son père, réclamer aujour
d’hui le douaire, en invoquant une coutume depuis long
temps abolie;
3
�'
C *8 ) _
3°* Enfinj que le douaire pût-il être'réclamé,'et quellè
qu’en fût la nature, ce seroit cependant une portion dô
l’hérédité qui devroit'entrer dans la masse pour la fixa
tion de la quotité disponible.
.
-j->
Le douaire n’est pas une donation'ordinaire;: on peut
le définir,
Une espèce de légitime, qui, du consentement du père,
est attribuée aux enfans par la loi ou par la convention,
mais daûs le cas seulement où ils ne recevraient pas
d’autre patrimoine. J
1
«
Nous disons une espèce de légitime.
M . Pothier emploie la môme expression dans son
Traité du douaire ( n°. 293 ).
M. Lebrun, dans son Traité des successions (liv re 3 ,
chapitre 7 , nos. 24 et 28 ) , nous enseigne que le douaire
tient lieu de la légitime ; que 1-es coutumes accordent le
douaire, au lieu de légitime et d ’alim ens,* et il en con
clut ( n°. 26 ) que le douaire et la légitime ne peuvent
se cumuler 7 parce que ce sont des titres lucratifs qu i
ne peuvent concourir dans Me même sujet.
M. Ferrières, sur l’article 249 de la coutume de Payis,
n°» 2 , dit que la coutume a voulu, par le moyen du
douaire, assurer aux enfans des alimens et une légi
time. Il répète, sur L’article 2Ô2, n°. 2 , que le douaire
tient lieu de légitime à Venfant7 à laquelle on impute
tout ce qui lu i a été donne.
L e douaire est donc réellement une légitime admise
en France dans le droit coutumier, par imitation de la
légitime ordinaire étnblie par les lois romaines.
�( 19 )
Nous avons dit que le douairo n’étoit attribué aux
enfans que du consentement du père.
On distingue deux sortes de douaires, le douairepréfix,
qui est stipulé dans le contrat de mariage, et le douairo
coutumier, qui, dans le silence, des parties contractantes,
est établi par la loi.
L e douaire, même coutumier, dépend de la volonté
du père.
Car on peut stipuler dans le contrat qu’il n’y aura
de douaire ni pour la femme ni pour les enfans.
On peut aussi, en accordant un douaire à la femme,
priver les enfans de la propriété de ce douaire (i).
L e douaire n’est donc pas* comme l’ont dit les pre
miers juges, Une créance imposée par la loi sur les biens
du p ère, puisqu’il dépend de son consentement exprimé
ou tacite, et qu’il n’existe par conséquent que par l’effet
de ce consentement.
Enfin, nous avons observé que le douaire n’étoit at
tribué aux enfans que pour le cas où ils n’auroient
pas d’autre patrimoine.
Cette vérité résulte-des articles 25o , s 5 i et z 5z de.-la
coutume de Paris (?).
D e l’article i 5o , d’après lequel le douaire appartient
aux enfans , seulement s’ils ne se portent héritiers de
leur père, -et s'ils s'abstiennent de prendre sa succession.
(1) Voir Pothier, article agS, n°. 5 , et article 294» etHenuseon, Traité du douaire, chapitre 5 , n°. 26.
(2) Voir ce qui a été dit sur cette question dans le mémoire
de la dame d’A y a t, pages aG et suivantes.
3 '*
�( *à ) r ^
D e l’article 25i, qui est la conàéqüènce du précédent, et
qui porte : « Nul ne peut être héritier et douairier en« semble, pour le regarddesdouairescoutumierset-préfix. »
Et remarquons que ces deux articles s’expriment d’une
manière générale, absolue, applicable à tous les cas / qu’ils
n’admettent aucune distinction, et qu’ils ne permettent
pas de dire que leurs règles n’ont lieu qu’entre cohéritiers.
jDe Varticle 262, qui ajoute :
,
‘
)
« Celui qui veut avoir le douaire doit rendre ou res~
« tituer ce qu’il a reçu en mariage, 'et autres avantages
« de son père , ou moins prendre sur le douaire. »
Rendre et restituer, ou moins prendre, expressions
aussi claires que propres à fixer les idées sur la nature
et les effets du douaire •, expressions bien différentes de
celles employées par l’article 304 de la même coutume,
sur les rapports des donations.
Par ce dernier article, ce ne sont que les enfans venant
à la succession du père ou de la mère qui doivent rap
porter ce q u i leur a été donné.
Et dans quel but ?
’ P o u r être mis en partage entr'eux.
Dans l’article 2Ô2 il ne s’agit pas de rapport, mais de
restitution.
Ce ne sont pas les ertfans venant à la succession qui
restituent, mais les enfans qui, sans être héritiers, sont
seulement donataires.
Enfin , ce n’est pas pour que les objets soient mis en
partage en tr'eu x, que les enfans les restituent, mais au
contraire pour n’y prendre aucune part, puisque leur
qualité de douairiers s’oppose à ce qu’ils puissent con
courir au partage.
�( 21 )
< 50
Aussi le droit d’exiger l’imputation des dons sur le
douaire appàrtient-il môme aux créanciers dont les titres
sont postérieurs aux actes constitutifs du douaire et des
donations.
1
' C’est ce qu’attestent tous les auteurs qui ont traité cette
matière, et notamment Renusson, cliap. 6 , nos. 5 et 6;
Lebrun , dont l’opinion est transcrite dans lé mémoire
de la dame d’A yat, page 30; Pothier, nos. 352 et suiv.'
Ces auteurs ne fondent pas leur décision sur le danger
des fraudes, comme l’ont pensé les premiers juges. Et
de quelle fraude, en e fîet, pourroient se plaindre des
créanciers dont les droits n’existoient pas lorsque les do
nations avoient été faites?
Ils la fondent sur ce que « le douaire est loco legi« tim œ , et que in légitimant omnia computantur,* d’où
« s’ensuit que le douaire tenant lieu de légitim e, il faut
« imputer sur le douaire comme sur la légitime tous les
« avantages qu’on a reçus du père (1). »
Toutes ces règles, et les motifs qui leur servent de
base , démontrent que le douaire n’est accordé qu’en
remplacement de l’hérédité et de la légitime, et que par
conséquent l’enfant douairier qui se porte héritier, et
qui trouve dans cette hérédité la valeur de son douaire,
ne peut tout à la fois, et prélever ce douaire, et réclamer
dans le surplus des biens, au préjudice des donataires du
père, une légitime dont le douaire étoit destiné à lui
tenir lieu.
(1) y . le petit Commentaire de Claude Ferrières, sur l’art.
de la coutume de Paris.
25a
‘t y * -
�C ’est donc une grande erreur de la part des premiers
juges , que d’avoir comparé le douaire à une créance
ordinaire appartenante à l’enfant sur les biens du père*
et indépendante du droit d’hérédité.
L ’erreur des premiers juges paraîtra plus frappante
encore sous un autre rapport.
La dame Terreyre ne pourroit aujourd’h u i, même
quand elle auroit renoncé à la succession de son père,
réclamer le douaire en vertu de la loi ancienne.
M . Chabot de l’A llier et M. Grenier ont traité l’un,
et l’autre la question de l'effet du douaire coutumier,
lorsque la succession d’un père marié sous l’empire des;
anciennes lois, ne s’étoit ouverte que depuis la promul
gation de la loi du 17 nivôse an 2, ou depuis le Code
Napoléon (1).
.L’un et l’autre décident que les enfans ne peuvent
pas .demander le douaire.
« Leur droit à cet égard, dit M. Grenier, doit être
« assimilé à un droit su ccessif qu i doit être réglé par
« la lo i q u i régit à Tépoque du décès.
« A in s i, ajoute le même auteur, tes enfans ne pou,r~
« roient pas réclamer contre des tiers la distraction,
« du douaire. »
M. Chabot remarque aussi que le douaire des enfans,
quoiqu’il ne pût être exigé que par ceux qui renonçoient
à la succession de leur père, n'en était pas m oins, dans
(1)
V oir les Questions transitoires de M. Chabot, au mot
Douaire des enfans, et le Traité des donations de M. G renier,
édit. i'n~4° . , tome a , page 11G.
�( 23 )
la réalité, un'droit 'successifs qui commef tons les bulreâ
droits successifs, déçoit être réglé par la loi existante
au moment de Touverture de la succession.
Le principe sur lequel se fondent ces auteurs .non-?
veaux, est conforme à l’idée que les auteurs anciens
avoient eux-mêmes du douaire.
Ils le considéroient comme un droit successif.
Aussi ne l’attribuoient-ils qu’aux enfans qui étoient
vivons au décès du p è re , et qui étoient habiles à succéder.
Par la profession religieuse, parla condamnation d’une
peine capitale, les enfans ayant perdu l’état civil, etr?é~
tant pas habiles à succéder, n'ont pareillement aucun
douaire, dit Pothier, n°. 349.
« Ceux qui ont été exhérédés par leur père, pour
« une juste cause, observe le même auteur, n’ayant
« plus de droit à la succession, n’ont plus pareillement
« aucun droit au douaire. »
Selon Renusson Ci), l’enfant exhérédé est exclu du
douaire de même que de l’hérédité.
« La raison est , continue l’auteur , que le douaire
« est une portion des biens du père, et de son héré« d ité; comme son exhérédation l’exclut de l’hérédité,
« son exhérédation l’exclut aussi du douaire. »
Tous ces principes démontrent que les enfans ne sont
pas saisis du douaire dès le temps du mariage (2); que
(1) Chapitre 6 , n", 17.
(2) M. Pothier enseigne, aux n°\ 327 et 332, que le douaire
n’est ouvert, et que les enfans n o n sont censés saisis , qu’au
temps de la mort du pére.
�( 2*4 )
leur droit ne s’ouvre qu’à l’instant où le père meurt; et,
par conséquent, que c’est la loi en vigueur au moment
du décès qui doit seule servir de règle à leurs réclama
tions.
Il suit de là que si la loi existante au moment du
décès du père n’accorde pas de douaire aux enfans, ceuxci ne peuvent en demander.
C’est aussi ce qui a été jugé par plusieurs arrêts rendus
depuis la loi du 17 nivôse an 2, soit relativement au
douaire, soit par rapport au tiers coutumier, qui étoit
une espèce de douaire admis dans certaines provinces.
• On se bornera à citer les motifs d’un arrêt du 29 mes
sidor an 12.
« Considérant que la propriété du douaire, conférée
« aux enfans par l’article 399 de la coutume de Nor« mandie, n’étoit point une propriété pleine, parfaite,
« absolue, irrévocable; qu’elle n’étoit qu’une expectative
« conditionnelle, qui donnoit plutôt un droit d’hypo« thèque sur l’immeuble à ce destiné, le cas arrivant,
« qu’ une véritable p r o p r ié té ............. qu’ainsi cette ex« pectative a pu être enlevée aux enfans par une loi
« subséquente au mariage, et antérieure à la mort du
« p è r e , sans faire produii’e à cette loi aucun elïet ré« troactif. »
Il est évident que ces motifs s’appliquent à la loi du
Code sur les successions, comme à celle du 17 nivôse,
puisque l’une ne reconnoît pas plus que l’autre le douaire
en faveur des enfans.
La dame Terreyre ne peut donc invoquer une ancienne
coutume depuis long-temps anéantie, pour réclamer et
surtout
�( 25 )
S / i
surtout pour prélever sur une succession ouverte depuis
le C ode, un douaire qiie la loi nouvelle ne lui attribue
pas.
Mais enfin, que lèdouaire puisse ou non être réclamé,
et qu’on le considère, ou comme un avantage émanant
de la loi ancienne, ou comme une libéralité accordée
par le père, il ne doit pas être cumulé avec la réserve
légale établie par la loi nouvelle.
L a réserve légale est aujourd’hui ce qu’étoit autrefois
la légitime; l’une et l’autre mettent hors de la disposition
du père une portion de son patrimoine, afin de l’attri
buer à l’enfant, pour pourvoir à sa subsistance et à son
établissement.
Mais l’enfant qui est déjà pourvu sur les biens du
p è r e , n’a rien à réclamer ; le douaire tenant lieu de
légitim e, selon tous les auteurs, doit aussi tenir lieu de
la réserve légale. '
En vain diroit-on que c’est une dette du père ; la
légitime est aussi considérée comme une dette; une do
nation même, lorsqu’elle a été faite et non exécutée,
est aussi une dette du donateur.
Mais le douaire et la donation ne sont pas des dettes
ordinaires. L e douairier et le donataire sont des créan
ciers à titre lu cra tif, et non des créanciers à titre oné
reux. O r , il est de principe que tout ce que l ’en fan t
reçoit de son père à titre lu cra tif \ doit servir d’abord
à acquitter la dette de la nature, cest-à-dirc, la légitime
ou la réserve légale (i).
(1) Voir ce qui a été dit à cet égard dans le mémoire de la
4
�Réclamer le douaire et la réserve cumulativement ,
c’est tout à la fois blesser l’intention du père et les dis
positions de la loi.
. L ’intention du père; car en stipulant le douaire, ou
en y consentant, le père n’a-pas voulu s’astreindre à:
payer au même enfant deux légitimes; savoir, le douaire,qui est une espèce de légitime, aux dépens de ses biens
présens, et la légitime.de rigueur ou la réserve légale,
aux dépens des biens qu’il laisseroit a son décès. Le
père qu i, par la promesse du douaire, a assuré à son
enfant une portion de son patrimoine, a entendu s’af
franchir de toute autre obligation, et pouvoir disposer
à son gré du surplus de ce patrimoine. . : '
>
L ’intention du père doit être respectée.
Cette intention est d’ailleurs en harmonie avec les
principes du Code Napoléon. '• i
\, \
L ’article 1098, qui est la règle de la cause, autorisoit
le général d’Ayat à donner à sa seconde épouse le quart
de ses biens, le quart de son hérédité entière.
r
L e douaire est une portion de Vhérédité; il doit
donc être confondu dans la masse pour la fixation de
la quotité disponible; et pourvu qu’il n’excède pas les
trois quarts réservés à la dame T e r r e y r e , celle-ci n’a
pas à se plaindi*e.
,
La dame Terreyre ne peut nier que la valeur du
douaire ne soit inférieure à celle des trois quarts de
dame d’A ya t, pages 33 et suivantes. V oir aussi le Traité des
donations de M. G renier, édition in -g '., tome 2, pages 335 et
000.
�( 27 )
3J &
l'hérédité : elle n’éprouvera donc aucun retranchement
sur les trois quarts ni sur le douaire.
Donc le quart demandé par la dame d’Ayat doit lui
être accordé, s’il lui a été réellement donné.
O r , nous avons prouvé , en discutant la première
question, que cette donation existoit.
Comment donc a-t-on pu en contester l’exécution?
Une interprétation fo rcée, des erreurs érigées en
principes, foible soutien des prétentions de la dame
T erreyre, seront appréciées par la Cour à leur juste
valeur ; et la dame d’Ayat doit espérer de voir ac
cueillir ses réclamations , puisqu’elles sont fondées , et
sur les dispositions formelles de son contrat de mariage,
et sur le texte précis de la loi.
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. V A Z E I L L E , avoué licencié,
A RIO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des T au les, maison Landriot. — Février 1814,.
** ~
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Kempfer de Plobsheim, Charlotte-Joséphine. 1814]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour la dame Kimpfer de Plosheim, veuve du Général d'Ayat, appelante ; contre le Général Terreyre et son épouse, intimés.
Note manuscrite : « jugement confirmé, par arrêt du 18 février 1814, voir journal des audiences p. 59. etc.»
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2211
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2212
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53440/BCU_Factums_G2211.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53438/BCU_Factums_G2209.pdf
62c953af3fe1b7ea9464ee5a4e27e2c9
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Text
M É MO I R E
EN
R É P O N S E ,
P o u r dame C h a rlo tte -J o s é p h in e K E M P F E R
D E P L O B S H E IM , veuve en premières noces
de M. le comte de la maison régnante de
Sa y n
et W
ittgenstein
- B erlenbourg,
et en secondes noces de M. Louis- CharlesAntoine
de
B eaufranchet
d
A y a t,
général de brigade, inspecteur général des
haras de l’E m p ire, demanderesse;
C o n t r e M. D e n i s T E R R E Y R E
général de
brigade, baron de l'Em pire, l'un des commandans de la légion d'honneur ; et dame
A nne - P a u l in e
-
V ic t o ir e
B E A U F R A N C H E T
D E
D' A Y A T son
épouse, autorisée en justice, défendeurs.
M
Kempfer de Pl obsheim , veuve du général
d’A y a t, réclame des avantages qui lui sont assurés par
son contrat de mariage.
ADAME
�C * )
Elle eût désiré éviter des discussions judiciaires.
Elle a tenté des moyens de conciliation ; on les a
repoussés.
Elle a proposé des arbitres; on les a refusés.
Elle s’est vue alors obligée d’agir devant les tribunaux.
Ses demandes sont légitimes; on les lui conteste ce
pendant : mais ce n’est pas assez.
Les calculs de l’intérêt ont exalté les passions de ses
adversaires ; et les observations les moins convenables,
les imputations les plus hasardées comme les plus inju
rieuses, sont venues se mêler à leurs moyens de défense;
la mémoire d’un père n’a pas même été épargnée, dans
le but indiscret de blesser sa veuve.
L a dame d’Ayat n’exigeoit pas de sacrifices d’intérêt;
elle n’en auroit pas accepté. On n’ignore pas qu’elle eût
été disposée plutôt à en faire elle-même.
Mais elle avoit droit de compter sur les égards qu’on
se doit, même entre étrangers, et dont il est étonnant
que la dame et le général Terreyre se soient écartés.
La dame d’Ayat n’imitera pas l’aigreur du ton qu’ils
ont adopté ; elle exposera ses moyens avec la simpli
cité qui convient à une bonne cause; elle prouvera que
c’est la loi du temps du décès qui doit fixer la quo
tité des avantages qui lui ont été promis, et que cette
quotité doit être prise sur la totalité des biens du gé
néral d’Ayat.
F A I T S .
Le général Beaufranclict d’Ayat avoit épousé en pre
mières noces la dame Elisabeth Guyot de Montgran.
�m
( 3 )
L eur contrat de mariage est du 2 août 1783.
L ’article 8 de ce contrat est le seul essentiel à connoître. Voici comment il est conçu.
« Ledit sieur futur époux a donné et donne à ladite
« demoiselle future épouse , 4,000 livres de rente
« de douaire préfix, dans le cas où, lors de la disso« lution dudit mariage, il y auroit des enfans vivans
« issus d’icelui ; le fonds au denier vingt duquel douaire
« sera propre auxdits enfans et aux leurs, de leur côté
« et ligne. »
Ce mariage a été dissous le 29 prairial an 2 , par un
divorce *, et le 4 pluviôse an 3 , une transaction régla et
liquida tous les droits de la dame Montgran.
Deux enfans étoient nés de ce mariage \ un seul, la
dame T e rre yre , a survécu à son père.
En l’an 4, le général d’Ayat rechercha en mariage la
dame Kempfer, veuve de M . de Sayn - Wittgenstein,
Sa recherche fut agréée, et le contrat de mariage fut
dressé le 19 brumaire an 4.
Par l’article i^r. de ce contrat, les futurs époux e x
cluent le régime de la communauté.
Par l’article 3 , il est convenu qu’ils jouiront à part,
et divisément, de leurs biens, et l’épouse est autorisée
à disposer de son mobilier et de ses revenus.
Par l’article 4 , le futur doue la future « de 3,000 fr.
« de rente nette, et sans retenue de douaire préfix.........
« le fonds duquel sera propre aux enfans à naître dudit
* futur mariage. »
L ’article 5 attribue au survivant des époux un gain
m
�( 4 )
de survie de 5o,ooo francs , à prendre sur le plus clair
des biens du premier décédé.
L ’article 6 porte que les meubles et les effets mobiliers qui se trouveront dans les maisons appartenantes à
l ’un ou à l’autre des époux, appartiendront aussi au
propriétaire de la maison, sans qu’il ait besoin d’aucune
quittance, à l’exception seulement des habits, linges,
hardes, et autres effets qui, par leur nature, seront à
l’usage particulier de l’un des époux.
D ’après l’article 7 , le loyer des lieux qui seront habités
conjointement -, sera payé par moitié, et les meubles et
effets mobiliers qui s’y trouveront, seront aussi présumés
appartenir par moitié aux é p o u x, mais sous l’exception
de ceux que leur nature ou des marques particulières
indiqueroient appartenir à l’un d’eux seulement.
L ’article 10 charge chacun des époux de contribuer
pour moitié aux dépenses du ménage.
L ’article 11 doit être transcrit littéralement, comme
renfermant la clause sur laquelle roule la discussion.
a Les futurs époux , voulant se donner des preuves de
« leur amitié réciproque, se fo n t, par ces présentes,
« donation mutuelle , pure, simple et entre-vifs, l’un à
« l’autre, et au survivant d’e u x , ce accepté respectivement
( « pour ledit survivant, de tout ce dont la loi leur per« met de disposer en faveur l’un de l’autre, ayant en« fans d’un premier mariage, ou de tout ce dont la loi
« leur permettra de disposer aussi en fa v e u r Yun de
« Vautre, au jo u r du décès du premier mourant d'eux,
« dans le cas où la loi lors existante donneroit plus
�«
«
«
«
«
«
C 5 )
de latitude à ces sortes de donations , pour par ledit
survivant desdits futurs époux, en jouir à compter du
décès dudit premier mourant, suivant et aux termes
de la loi, sans être néanmoins tenu de donner aucune
caution, et seulement à la chai’ge de faire faire fidèle
inventaire des biens du prédécédé.
« Dans le cas où, au jour du décès du premier mou« rant desdits futurs époux, il ne laisseroit aucun en« fant, soit du précédent, soit du futur mariage, les« dits futurs époux, pour ledit survivant, se font do« nation, toujours ce accepté respectivement pour ledit
« survivant, de tous les biens meubles et immeubles qui
« se trouveront appartenir au premier mourant d’eu x,
« au jour de son décès, à quelque somme qu’ils se trou« vent monter, et en quelques lieux qu’ils se trouvent
« dûs et situés.
« Pour par ledit survivant jouir, faire et disposer du
« tout en toute propriété, et comme de chose lui ap
te partenante, à compter du jour du décès dudit premier
« mourant. »
Telles sont les conventions de ce contrat de mariage;
conventions par lesquelles la dame Terreyre et son époux
ont été prodigues d’observations assez singulières.
A les en croire, les amis du général d’Ayat remar
quèrent qu’il n’avoit pu résister à la séduction ; ils lui
reprochoient d’avoir oublié les deux enfans qu’il avoit
alors, etc.
On n’a pas réfléchi, en alléguant ces remarques et ces
reproches, que les libéralités des deux époux étoient ré
ciproques ; q u e , dans l’article 1 1 notamment 7 le gé
�( 6 )
néral d’Ayat recevoit, par une disposition générale, le
don de tout ce que la dame Kempfer pouvoit lui donner
alors ou pourroit lui donner à l’avenir; et que la dame
Kempfer avoit elle-même trois enfans de son premier
mariage, qu’elle n’avoit cependant pas intention d’ou
blier, mais envers qui sa fortune lui permettoit d’etre
généreuse, comme elle l’étoit envers son futur époux.
La dame et le sieur Terreyre ne l’ignorent pas; la
fortune de la dame d’Ayat étoit très-considérable; celle
du général étoit modique : celui-ci trouvoit donc, dans
des libéralités réciproques, un avantage bien supérieur
à celui qu’il offroit lui-même.
Pourquoi donc de vaines déclamations?
Pour colorer ses plaiutes, la dame Terreyre présente
un tableau de la fortune de son père, qu’elle tire des
articles de son propre contrat de mariage avec le géné
ral Terreyre.
Que pourroit signifier ce tableau, puisque la dame
d’Ayat s’est restreinte au quart des biens de son mari?
Il signifieroit seulement que par les dons mutuels, la
dame d’A y a t , en donnant beaucoup, recevoit peu.
L a dame T erreyre, qui accuse son père de prodiga
lités, et qui conteste aujourd’hui si amèrement les droits
d’une belle-mère dont elle n’eut jamais à se plaindre,
auroit dû reconnoitre que c’est à cette belle-mère cepen
dant qu’elle doit la conservation de la terre d’A y a t, un
des plus précieux objets de la succession.
Elle n’ignore pas que le général d’Ayat vouloit la
vendre; qu’il avoit même envoyé à cet effet une pro
curation et un projet de division de la terre en plusieurs
�C7 )
lots, pour la facilité des ventes, et que son épouse n’a
usé de son influence sur l’esprit d’un époux qui la chérissoit, que pour empêcher une vente si nuisible aux
intérêts de la dame Terreyre.
On rapporte la preuve écrite de tout ce qu’on avance.
Ce fut le 2 juillet 1812 que la dame d’Ayat eut le
malheur de perdre son é p o u x, qui lui fut enlevé aux bains
de V ichy par une mort subite : une lettre du 3 juillet
lui apprit ce cruel événement.
La dame d’Ayat habitoit alors à B lo t, dans son châ
teau, à plusieurs lieues de distance d’Ayat.
L ’on a osé dire qu’à-la nouvelle du décès, elle avoit
fait enlever le mobilier d’A y a t, pour meubler Blot.
La dame d’Ayat ne s’abaissera pas à l’épondre à cette
odieuse accusation.
Mais comment a-t-on pu la hasarder ?
La dame Terreyre et son mari a voient-ils pu oublier
les faits récens qui la détruisent ?
La nouvelle fatale ne fut connue de la dame d’Ayat que
le 3 juillet.
L e 4, elle écrivit à M. le juge de paix pour l’inviter
à apposer les scellés sur le mobilier d’A yat, qui étoit
confié aux soins des domestiques.
L e 6, les scellés furent, apposés; et les domestiques,
sur la réquisition du juge de paix, aflirmèrent devant
lui qu’ils n’avoient soustrait ni vu soustraire aucun objet.
Ce magistrat choisit en même temps deux gardiens
des scellés.
L e 1 4 , les scellés furent vérifiés et reconnus intacts,
en présence du général Terreyre et de son épouse ; toutes
�( 8 )
les clefs furent remises à c e u x - c i; tous les objets qui
garnissoient le château leur furent délivrés du consen
tement du fondé de pouvoir de la dame d’ Ayat. Ils ne
firent aucune réclamation alors; plusieurs mois se sont
écoulés sans qu’ils en aient fait ; bien plus, ils ont rendu
à la dame d’A y a t , sur sa demande, quelques objets qui
lui appartenoient, et qui étoient l’estés au château.
Gomment se fait-il donc qu’ils n’aient pensé à ces pré
tendus enlèvemens, que lorsque la dame d’Ayat a ré
clamé ce qui lui étoit dû ?
La dame Terreyre et son mari avoient été beaucoup
moins exacts eux-mêmes. Ils avoient entre les mains, de
puis le 12 juillet, la clef du cofFre du secrétaire qu’avoit
laissé à Paris le général d’Ayat.
Ils s’étoient chargés de faire apposer les scellés sur
le mobilier.
Ces scellés n’ont pourtant été apposés que le 21 sep
tembre , sur la réquisition de la dame d’Ayat.
Cependant celle-ci n’a élevé aucun soupçon , et n’a
fait aucune remarque ; elle croit à l’honneur dans les
autres, parce qu’elle est incapable elle-même de manquer
à ses règles; et si elle rappelle ce fait à ses adversaires,
c’est uniquement pour qu’ils puissent apprécier leur
propre conduite à son égard.
Ce fut à Paris que la dame d’Ayat fit proposer au
général Terreyre, par un notaire respectable, des moyens
de conciliation qu’il rejeta, et des arbitres qu’il refusa.
L a dame Terreyre et son époux s’étoient emparés
de toute la succession, des meubles et des immeubles ;
ils ne vouloient pas de conciliation; ils ne vouloient pas
de
�( 9 )
de décision arbitrale; il falloit donc provoquer contr’eux
une décision judiciaire.
La dame d’Ayat les cite en conciliation , le 5 janvier
1813; elle expose ses droits; elle réclame le quart de la
totalité des biens de M. d’Ayat.
Les cités comparoissent au bureau de paix , par un
fondé de p o u v o ir, mais pour déclai’er que ce n’est que
pour obéir à la loi.
Une demande en provision.est formée le 7 mars 1813.
Cette demande choque la dame Terreyre ; elle re
marque que la dame d’Ayat est très-opulente , et n’a
pas besoin de provision.
Qu’importe! celle-ci ne jouissoit d’aucune partie de la
succession. La dame Terreyre et son mari possédoient
tout ; on leur avoit délivi'é le mobilier d’A y a t, celui
trouvé à V ich y , estimé, y compris l’argent, 2,714 fr. ;
le prix du mobilier de Paris, vendu, tous frais déduits,
3,614 fr. 60 c. ; ils avoient touché 1,200 fr. sur la solde
de retraite du g é n é ra l, 1,293 fr. sur son traitement
d’inspecteur gén éral, les termes échus des rentes sur
l’état ; ils avoient perçu les récoltes des immeubles.
A ussi, pour repousser la demande en provision , la
dame Teri’eyre n’a trouvé qu’un moyen aussi étrange
qu’illégitime ; elle a prétendu que la dame d’A y a t ,
aussitôt qu’elle.eut appris la mort du général, s’occupa
de spolier, de dévaster entièrement la maison cC\A yat,
et d’en transporter tous les effets et mobilier de toute,
espèce dans le château de Blot.
Imputation d’autant plus extraordinaire, que la dame
Terreyre sait bien qu’aucun meuble n’a jamais été acheté
�Cio)
par le général, que les meubles antiques qui garnissoieni
Ayat s’y trouvent encore, et que le château de Blot n’a
que des meubles modernes , tous achetés par la dame
d’Ayat.
Imputation tardive, après avoir assisté à la rémotion
des scellés, et avoir reçu tous les objets mobiliers sans
aucune réclamation, sans aucune réserve.
Imputation imprudente, et qui n’est qu’une misérable
chicane à laquelle il est surprenant que la dame Terreyre
ait eu recours.
La dame d’Ayat a toujours eu de l’affection pour la
dame Terreyre; elle eut oublié les injures. Elle n’exigeoit
qu’une rétractation; on ne l’a pas faite. Elle a demandé
justice; elle l’obtiendra.
Quant à la provision, c’est un objet peu important,,
aujourd’hui que la dame d’Ayat a consenti elle-même à
joindre le provisoire au fond; et c’est des questions prin
cipales seulement que nous devons nous occuper.
D eux questions ont été discutées dans le mémoire
publié par la dame Terreyre.
En adoptant le même ordre, nous prouverons d’abord
que la dame d’Ayat a droit, non à un simple usufruit,
mais au quart en propriété qu’elle réclame.
Ensuite, que ce quart doit être pris sur la totalité des
biens du général d’A y a t , y compris môme les 80,000 fr.
de douaire que la dame Terreyre croit pouvoir prélever.
�2b
( »
)
§. Ier.
La dame d'Ayat a droit au quart des biens en
propriété.
Par l’article n du contrat de mariage, du 19 brumaire
an 4 , les deux époux se donnèrent mutuellement tout
ce dont la loi leur permettrait de disposer enjfaveur
l’un de Vautre au jo u r du décès du premier mourant.
L e Code Napoléon, loi en vigueur à l’instant du décès
du général d’A y a t, autorisoit un don du quart. (V oyez
l’article 1098. )
Ainsi ce quart a été attribué à l’épouse par la dispo
sition éventuelle.
Mais on critique cette disposition ; on prétend qu’elle
doit être réduite à l’usufruit de moitié des biens, con
formément à la loi du 17 nivôse an 2.
Une donation mutuelle, d i t - o n , est une donation
entre-vifs ; c’est la loi en vigueur au temps du contrat
qui doit la régir : tels sont les principes; telle est l’opi
nion des auteurs, et notamment de Duplessis; telle est la
jurisprudence des arrêts.
S’il étoit nécessaire de discuter ces principes, on pourroit démontrer qu’un don mutuel, un don de quart est
réellement une disposition à cause de mort ; qu’il n’a
de commun avec une donation entre-vifs que son carac
tère d’irrévocabilité ; que d’ailleurs il n’a aucun effet
présent, puisque le donateur peut, pendant sa v ie , dis2 *
�( 12 )
poser de tout, puisque la mort seule lui donne ouver
ture, et en fixe l’étendue.
On pourroit rappeler les termes de l’article 284 de la
coutume de P aris, loi du contrat de mariage, qui porte:
Un don mutuel de soi ne sa isit, avis est sujet à déli
vrance : preuve évidente qu’un pareil don ne peut être
assimilé à une donation entre-vifs, qui saisit sur-le-champ,
et pour laquelle on n’a jamais dit que la délivrance fût
nécessaire.
On pourroit enfin invoquer l’opinion de Dumoulin
sur l’article 187 de l’ancienne coutume; celle de Ferrières,
et de beaucoup d’autres auteurs, qui tous distinguent le
don mutuel de la donation entre-vifs.
Mais ce luxe d’érudition seroit superflu pour la dé
cision d’une question tout à fait étrangère au cas dont
se sont occupés les auteurs et les arrêts invoqués dans le
' mémoire de madame Terreyre.
Que disent les auteurs, et que décident les arrêts cités?
Qu’une donation mutuelle est irrévocable, en ce sens
que si elle a été autorisée par la loi existante à l’instant
où elle a été faite, elle n’a pu être détruite ou restreinte
par une loi postérieure.
Et sur quel principe sont fondées ces opinions, ces
décisions ?
Sur un principe reconnu de tous les temps, consacré
par toutes les législations, et consigné dans l’article 2
du Code Napoléon , qui nous enseigne que la loi n'a
point d'effet rétroactif.
Dans la cause , il ne s’agit point d’anéantir ou de
�( 13 )
réduire, en vertu d’une loi nouvelle , un don valable
ment fait sous l’empire d’une loi ancienne.
Il s’agit d’examiner si deux époux ont pu se faire
mutuellement un don conditionnel, et subordonné à
l’émission d’une loi future.
Ramenée ainsi à ses vrais termes , la question est
résolue, soit par les principes, soit par la jurisprudence.
Un principe élémentaii’e nous apprend que les con
trats de mariage sont susceptibles de toute espèce de
conventions , -pourvu qiCelles ne soient pas contraires
au x bonnes mœurs.
Ce principe est écrit dans l’art. 1387 du C ode, que
l’on ne considérera pas sans doute comme formant un
droit nouveau.
' 'O r , que pourroit-on trouver de contraire aux bonnes
mœurs , dans une disposition par laquelle on se réfère ,
pour la quotité que l’on entend donner, à celle qu’une
loi future déclarera disponible ?
Certes, on ne peut supposer qu’une loi future établisse
des règles immorales.
Dira-t-on que c’est manquer de respect pour une loi
existante?
Ce seroit pousser le scrupule bien loin, et témoigner
pour une loi momentanée et qui a cessé d’exister, plus
de vénération que n’en montroient ses auteurs eux-memes
qui , à l’époque où ils la publioient, la présentoient
comme passagère, et annoncoient la promulgation pro
chaine d’un Code civil. ( Y . loi du 22 brumaire an 2 ,
article 10. )
�C 14 )
^ On sait aussi que les conventions conditionnelles ont
toujours été .permises.
Les donations conditionnelles notamment étoient ad
mises dans notre droit, et un de nos plus célèbres auteurs
a fait un traité particulier sur ces sortes de dispositions.
11 est possible cependant qu’on n’eût pas prévu autre
fois une condition semblable à celle écrite dans la clause
que nous examinons.
Mais qu’importe que l’on puisse ou non citer des
exemples! il n’en est pas moins vrai qu’on ne peut con
tester la vérité du principe qui autorise les dons condi
tionnels; il n’en est pas moins vrai que la condition ac
complie a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement
a été conti’acté.
La conséquence de ces observations est simple, et nous
conduit à dire que puisqu’une loi nouvelle a autorisé
à disposer du quart en propriété, et puisque.cette loi
a été émise avant le décès du général d’A yat, c’est-àdire, avant que le don mutuel fût ouvert, c’est à la quo
tité fixée par cette loi nouvelle que doit s’étendre une
donation tout à la fois mutuelle et conditionnelle.
Donc la dame d’Ayat a droit au quart en propriété.
M ais, dira-t-on, une donation môme conditionnelle
ne peut être valable, si elle est prohibée par la loi
existante, parce qu’alors il y a incapacité de donner d’un
c ô té , et incapacité de recevoir de l’autre.
Cette objection , qui seroit la plus forte, repose sur
une fausse base.
L a loi du 17 nivôse an 2 ne prononçoit aucune pro-
�C 15 )
hibition , n’établissoit aucune incapacité de donner ni de
recevoir d’un époux à l’autre.
Ce seroit même tomber dons une grande erreur, que
de juger de l’esprit de la législation d’alors , relativement
aux époux, par l’esprit de cette même législation, re
lativement aux successibles, et surtout aux héritiers en
ligne directe.
Un décret du 7 mars 1793 a voit aboli la fa c ilité de
disposer de ses biens en ligne directe.
L ’article 16 de la loi du 17 nivôse an 2, sans pro
noncer de prohibition »positive en ligne collatérale,
n’accordoit cependant la faculté de disposer d’un dixième
ou d’un sixième de ses biens, qu’au profit d’autres que
des successibles.
Mais il n’en étoit pns ainsi entre époux ; le législa
teur leur avoit accordé la plus grande latitude pour les
dons qu’ils voudroient se faire, parce que son but avoit
été de favoriser les mariages.
Seulement il avoit autorisé les enfans, s’il en existoit
à l’instant du décès de l’époux donateur, à faire réduire
les dons à l’usufruit de la rnoité de tous les biens.
.• Voici comment s’exprime l’article 14 de la loi de
nivôse an 2.
« A l ’ égard de tous autres avantages échus et recueillis
a postérieurement ( au 14 juillet 1789 )> ou qu i pour« ront avoir lieu ¿1 l'avenir , soit qu’ils proviennent
« d’institution , dons entre-vifs , ou legs faits par un
« mari à sa fem m e, ou par une femme à son m ari,
« ils obtiendront également leur effet, sauf néanmoins
a leur conversion ou réduction en usufruit de moitié ?
�il6)
« dany le cas où il Y a m o 't des en fa n t, conformément
« à l’article 13 ci-dessus. » ' ' .
On remarque dans cet article deux dispositions dis
tinctes.
La première, qui est absolue , dont l’effet est présent,
et par laquelle les dons même universels sont autorisés
entre mari et femme.
La seconde, hypothétique et éventuelle, qui permet
aux enfans de demander la réduction en usufruit de
moitié.
Ainsi la disposition même universelle n’est pas dé
clarée nulle par la loi ; cette disposition est valable en
elle-même ; seulement elle est susceptible d’être réduite
à l’usufruit, sur la demande des enfans, s’il en existe au
décès du donateur.
; Nous disons, s’il en existe au décès du donateur,
et nous le disons avec la loi elle - m êm e, dans son
article 57.
a L e droit de réclamer le bénéfice de la loi, quant
« aux dispositions qu’elle annulle, n’appartient qu’aux
« héritiers naturels, et à dater seulement dü jou r où
« leur droit est ouvert, sans qu e, jusqu’à cette époque,
«r il y ait lieu à aucune restitution de fruits. »
Les termes de cet article sont aussi clairs que pré
cieux pour la solution de la question qui nous occupe.
L e droit de réclamer le bénéfice de la loi n’appar
tient q u a u x héritiers naturels, et à dater seulement
du jo u r où leur droit est ouvert.
Ainsi les enfans de l’époux donateur ne sont pas
saisis, dès l’instant de la donation, du droit d’en de
mander
�1
mander la réduction en usufruit, ou de la faire annuller
quant à la propriété, ce qui est la.même chose.
Ce droit ne leur est attribué qu’à l’instant où ils
succèdent; s’ils meurent avant l’ouverture de la succes
sion, ils ne trasmettent pas à des héritiers collatéraux
un droit qui ne leur a jamais été acquis, et la dona
tion universelle subsiste quant à la propriété même.
C’est aussi ce dont on n’a jamais douté. Jamais des
héritiers collatéraux n’ont élevé la prétention de faire
réduire à l’usufruit de moitié une donation faite entre
époux, sous l’empire de la loi de nivôse an 2, sous
prétexte qu’il existoit,des enfans à l’époque de l’acte.
Mais pourquoi n’a-t-on pas élevé cette prétention?
Parce qu’on étoit convaincu que la donation étoit
valable en elle-même, qu’elle étoit seulement suscep
tible d’être réduite. Car, si elle avoit été nulle dans
son origine, ab initio , elle n’eût pu devenir valable
ex post f a c t o , par un fait postérieur et étranger au
donateur comme au donataire. On connoît la maxime
« quod initio vitiosum e s t , non potest tracta temporis
.« convaîescere. »
- . Ces observations nous conduisent à une dernière con
séquence.
- Si la donation n’étoit pas nulle dans son origine; si
elle étoit seulement susceptible de réduction en usu
fruit; si le droit de réclamer cette réduction n’a pas été
acquis aux enfans, dès l’instant même de la donation;
si, d’après l’article 57 de la loi de nivôse, ce droit ne
devoit leur être attribué qu’il dater du jo u r où ils deviendroient héritiers, on peut dire qu’ils n’en ont jamais
3
�X 18 )
été saisis, lorsque la succession s’est ouverte sous l’empire
du Gode Napoléon.
En effet, la loi de nivôse an 2 pou voit leur faire
concevoir une espérance , mais ne leur conféroit aucun
droit. Cette loi établissoit une règle dont l’effet étoît
renvoyé au temps de l’ouverture de la succession, et
qui ne pouvoit s’appliquer par conséquent qu’aux suc
cessions ouvertes sous son empire.
Et en vertu de quelle loi des enfans demanderoientils aujourd’hui la réduction à l’usufruit ?
Seroit-ce en vertu d e là loi du 17 nivôse an 2? On
leur répondroit que cette loi n’existe plus, qu’elle a
été abolie par le Code Napoléon.
Seroit-ce en vertu du Code même? On les renverroit
à l’article 1098, qui autorise le don du quart en pro
priété , et à l’article 920, qui n’admet les demandes en
réduction que lorsque les dispositions excèdent la quo
tité disponible.
Remarquons que raisonner ainsi ce n’est pas donner à
la loi nouvelle un effet rétroactif. La loi ne rétroagit que
lorsqu’elle enlève un droit acquis sous l’empire d’une
loi antérieure. Dans la cause, on ne se propose pas d’en
lever à la dame Terreyre un droit qui lui fut acquis;
sa qualité d’héritière ne lui a été attribuée que par le
Code, puisque le général d’Ayat est décédé en 1812:
elle ne peut donc réclamer plus de droit que le Code
Napoléon n’en attache au titre qu’elle reçoit de cette
loi même.
Les principes que nous invoquons sont consignés dans
plusieurs arrêts.
�C
r9 )
• Un premier arrêt de cassation, du i 5 brumaire an 14,
les a appliqués au cas o ù , par une donation faite en
l’an 4^ et déguisée sous la forme d’une vente, un sieur
Bruley avoit disposé de la totalité de ses biens.
- Mais il étoit mort sous l’empire du Gode civil.
Les héritiers du sieur Bruley prétendoient que la
disposition devoit être régie par la loi en vigueur au
temps de l’acte, et en demandoient la nullité.
Celte demande, accueillie en première instance, fut re
jetée par la Cour de Dijon , dont les motifs pourroient
être littéralement opposés aux prétentions de la dame
Terreyre.
En voici quelques fragmens :
« Que la prohibition faite par la loi du 17 nivôse,
« de iminuer la réserve légale des cinq sixièmes des
« biens au profit des héritiers, n’opéroit qu’une nullité
« relative de la partie des libéralités qui excéderoit la
« quotité disponible; que c’est ce qui résulte évidemment
« de l’article 57 de cette loi, qui s’explique ainsi : ¿1 dater
« seulement du jo u r oit leur droit est ouvert ; que la
k loi fait donc dépendre la nullité du cas de l’ouverture
« du droit des héritiers présomptifs ; que c’est donc à
« cette époque qu’elle fixe l’examen de la validité de
« l’acte. D onc, s’il ne s’ouvre pas de droits à leur profit,
ce ou, si Vacte ne blesse pas Vétendue de leurs droits,
« lors du décès , ces héritiers ne sont pas x’ecevables à
« critiquer l’acte.............................; que s’ il s’agissoit de
« la capacité absolue d’ une personne, l’acte seroit ra
te dicalemcnt n u l, pour avoir é té ' fait dans un temps
ce où elle étoit absolument incapable de disposer, comm’o
�«
«
«
k
pendant une interdiction subsistante; mais qu’il en
est autrement de la disponibilité bornée à telle quotilé de biens; qu’à cet égard on ne consulte que le
temps du décès, etc. »
L e pourvoi contre cet arrêt fut rejeté, et l’on re
marque dans les motifs de l’arrêt du rejet ,
Que l’arrêt attaqué, en décidant que les héritiers ne
pouvoient être investis du droit d’attaquer l’acte qu’au
moment du décès de leur auteur, s i ce droit existoit
à celle époque , « et que les demandeurs n’ont pas
« trouvé ce droit dans sa succession, d’après le chan
te getnent de législation, n’a pu violer et n’a pas violé
« l’article énoncé de la loi du 17 nivôse an 2 , qui
« avoit été abrogée pendant la vie du vendeur (1). »
Un autre arrêt de cassation, du 22 août 1810, juge
aussi qu’ une donation en faveur même d’un successible, étoit valable, quoique faite sous l’empire de la
loi de nivôse au 2 , parce que le donateur étoit décédé
sous l’empire de la loi du 4 germinal an 8, qui permettoit de donner aux héritiers naturels.
L ’arrêt cité casse une décision contraire de la Cour
de Rouen.
On lit dans les motifs,
« Que si l’on considère l’acte comme une donation
« déguisée, par l’interposition de la personne du sieur
« Labarbe, devenu depuis le mari de la demoiselle A n -
(1) Voir cet arrêt dans le journal de Denevers, année 1806,
pages 3 9 -4 3 .
�« gélique-Flore Breant, cette donation n'auroit été que
« réductible ;
« Qu’en effet, la loi du 17 nivôse an 2 n’établissoit
« pas une incapacité absolue dans la personne d’un suc« cessible, mais annulloit seulement, pour le maintien
« de l’égalité , l’avantage fait à l’un des héritiers au pré« judice des autres;
« Que le droit de ceux-ci n’a pu prendre naissance
« qu’il Vinstant du décès de la dame veuve Sain son ,
« et tel que le J ix o it alors la loi du 4 germinal an 8 ,
« qui ne prononçoit en leur faveur qu’une réserve de
« moitié des biens de la donation, etc. (1) »
Si ces principes sont applicables, même à des dons
faits à des successibles, à l’égard desquels la loi de ni
vôse an 2 n’autorisait aucune disposition, à plus forte
raison sont-ils vrais relativement à des libéralités entre
les époux q u i, d’après cette l o i , pouvoient se faire mu
tuellement des dons universels, sauf la réduction à l’usu
fruit de moitié des biens, s’il y avoit lieu.
Les mêmes principes ont été consacrés par un arrêt
de la Cour impériale de Riom , rendu le 29 janvier
dernier ; en voici l’espèce :
Par un contrat de mariage, du 13 fructidor an 10 ,
les père et mère de la demoiselle l’Espinat lui avoient
fait une donation entre-vifs, et par préciput, du huitième
de leurs biens présens, e( en outre ils l’avoient instituée
héritière d’une semblable portion dans leurs biens à
(1)
Voir cet arrêt dans le journal de Denevers, année 1810,
pages 439— 441.
�venir, même ¿tune plus grande quotité tant desdits
biens présens qu'à v en ir, si les lois existantes lors de
îouverture de leurs successions, leur permettaient une
disposition plus ample.
La mère est décédée le 30 messidor an 12 , sons l’em
pire du Code.
'
L a demoiselle l’Espinat et le sieur Clary, son mari,
ont réclamé dans les biens de la mère le quart en préciput, quotité disponible fixée par le Code.
Cette demande a été contestée par les mêmes moyens
qu’invoque la dame Terreyre, et l’on a soutenu que la
quotité de la disposition de voit être réglée par la loi
en vigueur au temps du contrat. C’étoit la loi du 4
germinal an 8 , qui ne permettoit de donner qu’une por
tion d’enfant, un huitième.
L e tribunal civil d’Aurillac a accordé le quart, et la
Cour a confirmé cette décision, dont elle a même adopté
les motifs. En voici le texte :
« Attendu que les contrats de mariage sont suscep« tibles de toutes les clauses qui ne sont point contraires
« ni aux lois ni aux bonnes mœurs ; que la disposition
« portée au contrat de mariage de madame Clary n’a
« rien que la loi réprouve, puisque madame de Boussac,
a sa mère, ne l’a instituée que de ce dont la loi exis
te tante lors de son décès lui perinettroit de disposer;
« qu’ une pareille disposition ne porte aucun préjudice
« aux autres enfans, qui rCont droit qu'aux réserves
« que la loi du décès leur assure, réserves auxquelles
« il n’est pas porté la moindre atteinte par l’institution
a dont il s’agit, et que la jurisprudence ne donne même
�ô û l
«
«
«
«
«
•t*3 )
.............
aux puînés d’action pour attaquer les libéralités faites
sous la forme de ventes ou d’obligations déguisées,
que jusqu’à concurrence seulement des atteintes que
ces actes peuvent porter aux réserves que fait eu leur
faveur la loi de l ’ouverture de la succession. »
Tous ces arrêts sont décisifs pour la question. L e der
nier surtout a prononcé sur une clause absolument sem
blable à celle du contrat de mariage de la dame d’Ayat.
Gomment le résultat de la cause actuelle pourroit-il
être différent ?
,
On doit donc en convenir.
La loi du 17 nivôse an 2 n’étoit pas prohibitive, sur
tout entre époux.
.
•
Elle n’établissoit ni incapacité de donner, ni incapa
cité de recevoir.
Les droits de réduction qu’elle attribuoit aux héritiers
ne devoient être ouverts pour ceux-ci qu’au jour de l’ou
verture de la succession.
Ce droit n’a jamais été ouvert pour la dame Terreyre,
parce que la loi du 17 nivôse an 2. étoit abolie à l’ins
tant du décès du général d’Ayat.
L e Code Napoléon seul doit régir une succession ou
verte sous son empire.
Seul il doit déterminer la quotité réservée à la dame
Terreyre; et par conséquent le quart des biens du gé
n é ra l, portion disponible fixée par le Code, appartient
à la dame d’Ayat.
Il nous reste a prouver que ce quart doit être pris
sur la totalité des biens, sans aucun prélèvement.
*oí
�C H
)
§. I I .
L e quart doit être pris sur la totalité des biens,
sans aucun prélèvement.
La dame Terreyre veut prélever sur la masse de la
succession de son père une somme de 8o,ooo fi\, fonds
du douaire, et prétend que ce n’est que sur le reste des
Liens que la dame d’Ayat doit obtenir l’usufruit de
moitié ou la propriété du quart.
Pour justifier sa prétention, la dame Terreyre dit que
le douaire est une donation, et qu’une donation n’est
pas sujette à rapport, excepté entre cohéritiers.
L ’objection renferme une double erreur.
L e douaire n’est pas une donation.
Fût-il même considéré comme donation, il n’en devroit pas moins être rapporté , au moins fictivement,
pour servir à former la masse des biens, et à calculer
la quotité disponible.
L e douaire n’est pas une donation.
Tous les auteurs reconnoissent cette vérité ; la nature
du douaire et son objet ne permettent pas de l’assimiler
aux donations.
Pothier notamment, dont la dame Terreyre a invoqué
l ’opinion, s’exprime ainsi en parlant du douaire des
enfans (i) :
(i) Voir le Traité du d o u a ire,« 0. 292.
�( 2 5 }
« Ce douaire, de même que celui de la femme, n’est
« pas regardé comme une donation que l’homme fasse
« aux enfans qui naîtront de son mariage. »
L ’auteur conclut de cette proposition que le douaire
n’est pas sujet à l’insinuation , ni même au retranche
ment , pour la légitime des autres enfans.
Cet auteur s’occupe plus particulièrement de la nature
du douaire, dans d’autres parties de son ouvrage, et il
le définit ,
’ « Une dette qui procède de l’obligation que les coû
te tûmes imposent à tout homme qui se marie, d’as« surer, sur les biens qu’il a en se mariant, aux en« fans qui naîtront du mariage, de quoi leur fo rm er
« un patrim oine.............
« XJne espèce de légitime que la loi ou la conven
te tion du contrat de mariage assure, dans les biens de
« l’homme qui se marie, aux enfans qui naîtront du
« mariage, pour pourvoir à leur établissement (i). »
Ferrières, sur la coutume de P aris, Lebrun , dans son
Traité des successions (2), disent aussi que le douaire est
accordé aux enfans pour leur tenir lieu de légitime et
d'alimens.
Le douaire pouvoit d’autant moins être considéré
comme une donation ordinaire, sous l’empire de la cou
tume de Paris, que la loi l’accordoit lorsque la conven
tion ne l’attribuoit pas.
( 1 ) V o ir ie m êm e T ra ité, nos. 6 et agS.
(2) Voyez Ferrières, sur l’article 252 de Paris, n°. 2, et Lebrun,
Traité des successions,'liv. 3 , cliap. 6 , n°. 28.
4
�(26)
D ’après les articles 247 et 248 de cette coutume, la
femme avoit un douaire coutumier quand on ne lui
fixoit pas un douaire conventionnel-, et d’après les ar
ticles 249 et 2 55 , le fonds du douaire coutumier ou
préfix étoit propre aux enfans nés du mariage.
Mais comme la loi ou la convention n’a voit eu
pour but que d’assurer aux enfans un patrim oine, une
espèce de légitim e, des ali m ens, pris sur les biens du
p ère, le douaire cessoit ou se restreignoit lorsque les
enfans devenoient les héritiers du père, ou lorsqu’ils
recevoient de lui des dons qui pouvoient leur fournir
tout ou partie du patrimoine qui leur avoit été des~
tiné par le douaire.
D e là les règles écrites dans les articles 25o , 25 i et
2.52 de la coutume de Paris.
L ’article 25 o n’accorde le douaire qu’aux enfans qui
s’abstiennent de prendre la succession de leur père.
« Si les enfans venant dudit mariage, dit cet article y
« ne se portent héritiers de leur père, et s’abstiennent
k de prendre sa succession, en ce c a s , ledit douaire
« appartient auxdits enfans, purement et simplement,
a sans payer aucunes dettes procédant du fait de leur
« p è r e , créées depuis ledit m ariage, et se partit le
« douaire, soit préfix ou coutum ier, entr’eux,sans droit
« d’aînesse ou prérogative. »
L ’article 261 ajoute :
« Nul ne peut être héritier ou douairier ensemble,
« pour le regard du douaire coutumier et préfix. »
Ces deux articles ne doivent pas se séparer; le second
n’est que le corollaire du premier»
�( 27 )
: L e premier pose le principe ;
L e second renferme la conséquence.
Par le prem ier, le douaire n’est accordé aux enfans
que d’une manière hypothétique et conditionnelle.
Jusqu’au décès du père, le droit des enfans, ou douaire,
n’est qu’informe , et peut avorter ou défaillir, selon
les expressions de M. Pothier.
A u moment du décès, les droits des enfans sont ou
verts; mais alors les enfans ont deux sortes de droits,
entre lesquels ils peuvent choisix*.
Ils peuvent êtx*e héritiei’s ou douairicrs, à leur gréi
S’ils acceptent le titre d’héiùtiers, et les avantages qui
sont attachés à ce titre, leur di'oit au douaire s’efface;
c’est comme si ce droit n’avoit jamais existé pour eux.
La raison en est qu’en acceptant la succession ils
trouvent dans l’hérédité même le patrim oine, la légi
time , les alimens que le douaii-e étoit destiné à leur
fournir; alors le vœu de la loi et l’intention du père
sout remplis ; et ce sei-oit au contraire blesser ce vœu
et cette intention , que d’attribuer aux enfans à la fois;
et le douaire, et l’hérédité, c’est-à-dix*e, deux avantages
dont l’un n’est attribué qu’à la place de l’autre.
S i , au contraire > les enfans s’abstiennent de la suc
cession , alors le cas du douaire se présente : par leur
option ils deviennent douairiers, et ils obtiennent ainsi
les alimens et la légitime que leur pèx*e et la loi avoient
voulu leur assurer.
f
Cette distinction est importante; elle est fondée sur la
nature même du douaire , et elle explique pourquoi
certains auteurs, et notamment Pothier, ont pensé que
4 *
�c
2
8
}
l’enfunt qui avoit accepté la succession sous bénéfice
d’inventaire pouvoit réclamer son douaire.
Remarquons d’abord que Pothier ne parle pas de
l ’héritier pur et simple , et qu’on ne croit pas qu’on
puisse citer aucun auteur qui ait pensé qu’on pût être
à la fois héritier pur et simple, et douairier,
Pothier même suppose que l’héritier bénéficiaire aban
donne tous les biens de la succession ( 1 ) , et il pense
que dans ce cas, comme il ne retient rien absolument,
il a le droit de demander son douaire; il cite même un
arrêt du 4 mars 1750, qui a admis l’enfant à renoncer
ù la succession qu’il avoit d’abord acceptée sous bénéfice
d’inventaire , et à demander le douaire.
F errières, sur l’art. 25 2, n°. 3 , pense que l’héritier
même bénéficiaire ne peut pas ensuite renoncer à cette
qualité, et retourner au douaire ,• cette opinion paroît
plus conforme aux principes, et à la maxime qu i sernel
hœres semper liœres.
Renusson trouve la question très-ardue ( 2 ) ; il l’exa
mine soit relativement aux créanciers, soit relativement
aux cohéritiers, et il se décide en faveur de l’enfant q u i,
selon lui , en rendant compte de la succession , peut
renoncer ¿1 sa qualité d’héritier pour être douairier.
On voit que les auteurs même les plus favorables à
l’enfant , ne l’admettent à réclamer son douaire que
lorsqu’il ne recueille rien dans la succession , et même
lorsquV/ renonce à la qualité d’héritier.
( 1 ) V oyez n°. 35 i.
(2) V oyez Traité du douaire.
�( 29 )
Ainsi l’opinion même de ces auteurs est d’accord avec
la distinction que nous avons faite, et que nous avons
tirée de la nature du douaire.
S’ils accordent le douaire à l’enfant, qui d’abord avoit
eu l’imprudence de se porter héritier bénéficiaire, c’est
seulement parce que cet enfant ne trouve pas dans l’héré
dité les alirnens, la légitim e, le patrimoine que devoit
lui procurer le douaire; en sorte que l’enfant est alors
précisément dans le cas pour lequel ce douaire lui avoit
été promis.
Mais dans un cas contraire, et lorsque l’enfant prend
d’une autre manière sur les biens du père ses alimens
et sa légitime, il n’a pas droit au douaire.
C ’est ce dont on se convaincra de plus en p lu s , en se
fixant sur les termes de l’art. 2Ô2 de la coutume de Paris.
Voici comment est conçu cet article :
« Celui qui veut avoir le douaire doit rendre et res« tituer ce qu’il a eu et reçu en mariage, et autres avan« tages de son p è r e , ou moins prendre sur le douaire. »
Les termes de l’article sont précieux.
Il n’est pas dit doit rapporter, mais doit rendre et
restituer............. ou moins prendre sur le douaire.
En sorte que ce n’est pas à titre de rapport que le fils
doit restituer les dons, ou moins prendre sur le douaire,
c’est parce que le douaire devant tenir lieu de légitime
ou d’alimens, il diminue lorsque la légitime et les ali
mens ont été en partie fournis par d’autres avantages.
Et remarquons qu’il est reconnu par tous les auteurs
que cette restitution des avantages ou cette diminution
du douaiic peut être exigée non-seulement par les co-
�( 30 *
héritiers du douairier, mais aussi par les créanciers du
père, postérieurs même, soit au contrat de mariage, soit
aux donations (1).
L eb ru n , en rappelant la règle, observe,
« Que cette incompatibilité du don et du douaire se
« pou voit opposer par des créanciers postérieurs à l’un
« et à l’autre, parce que s’ils ont dû connoître la con« dition de celui avec qui ils contractoient, ils ont aussi
« dû s'attendre au rapport du douaire, qu i est fo n d é
« en COUTUME et dans l ’ i n t e n t i o n du père, qui ne
« doit qu’une fois des alimens à ses enfans, et qu’ils sont
« subrogés à cet égard a u x droits du p ère, pour de« mander ce rapport et cette imputation aux enfans
» douairiers. »
Si le douaire étoit une donation, certainement le
rapport ne pourroit pas en être demandé.
Personne n’ignore que des enfans donataires de leur
père , quoique par plusieurs actes diiférens, n’auroient
à craindre aucune action des créanciers postérieurs.
Ce n’est donc pas sur les principes généraux relatifs
aux rapports en matière de succession, mais sur des
principes particuliers, produits parla nature.du douaire,
qu’est fondée la règle de l’imputation des dons sur le
douaire.
N o u s disons d e Fimputation ,• cette expression est celle
(1)
Voyez Pothier, Traité du douaire, n°. 352 ; Renusson,
même Traité, chap. 6 , n°. 6; Ferrières, sur l’art. 262, n°. 4 ;
Lebrun, Traité des successions, livre 3 , chap. 6 , n°. 28.
�( 3' )
qu’emploie Pothier en traitant la question ; c’est aussi
la plus propre à indiquer la règle.
En effet, c’est moins un rapport que doivent les enfans,
qu’un retranchement qu’ils éprouvent proportionnelle
ment à ce qu’ils ont reçu.
L e douaire, d’après la coutume comme d’après Vin
tention du p è r e , n’étant accordé que pour remplacer
la légitime, doit diminuer ou disparoître, selon que
cette légitime est en partie payée ou totalement rem
plie.
- Il diminue, s i, par des libéralités antérieures à son
décès , le père s’est acquitté en partie de l’obligation que
la loi lui imposoit, en donnant à ses enfans une partie
de son patrimoine..
- Il disparoît, s’il laisse à ses enfans sa succession , et
que ceux-ci l’acceptant trouvent par là dans l’hérédité
la légitime, le patrimoine que le douaire leur assuroit.
En un mot, le père et la coutume ne promettoient aux
enfans que le douaire. Ce douaire devoit leur tenir lieu
de tout patrimoine, et les enfans, à l’ouverture de la
succession du père, devoient, ou se contenter du douaire,
ou y renoncer pour prendre l’hérédité; mais ils ne pouvoient avoir l’un et l’autre avantage : et se porter héri
tiers, c’étoit ne pas vouloir être douairiers.
C ’est donc bien vainement que la dame Terreyre ré
clame le prélèvement du douaire, et se plaint qu’on
veuille la soumettre au rapport de cet avantage.
Elle n’a pas de douaire à prélever; car son droit
au douaire ne devoit s’ouvrir qu’au décès de son
�¿to i
C 32 "J
père (1) ; et puisqu’elle a accepté l’h érédité, elle n’a
jamais été saisie de ce droit : par la même raison, on
n’a point de rapport à lui demander.
Si l’on pouvoit, au reste, considérer le douaii’e comme
une donation ; si l’on pouvoit supposer que la dame
Terrej^re en a été saisie, et que l’acceptation de l’héré
dité n’a pas fait disparoître son droit, il seroit facile de
démontrer qu’elle en doit le rapport, au moins fictif,
pour servir à fixer sur la masse entière des biens la va
leur de la portion disponible.
r L e sieur d’Ayat a donné à son épouse la quotité dis
ponible établie par le Code.
Cette quotité étoit-elle du quart de la totalité des
biens ? Telle est la question.
Pour la résoudre, examinons si le quart de la tota
lité seroit ou non sujet à réduction.
Mais comment doit se former la masse pour déter
miner la réduction ?
L ’article 922 du Code nous l’apprend.
« La réduction se détermine, dit cet article, en for« mant une masse de tous les biens existans au décès
« du donateur ou du testateur; on y réunit fictivement
a ceux dont il a été disposé par donation entre-vifs,
« d’après leur état à l’époque de la donation, et leur
a valeur au temps du deces du donateur; on calcule sur
« tous ces biens, après en avoir déduit les dettes, quelle
(1) V o yez Potliier , Traité du d ou aire, n°. 332.
« est,
�(33 )
« est,: eu égard*à la qualité des héritiers qu’il laisse,
« la quotité dont il a pu disposer. »
Ainsi les biens donnés doivent être réunis au x biens
existans au décès, pour calculer la quotité disponible.
L ’article 921 déclare que « la réduction des disposi« tionç entre-vifs, ne pourra être demandée que par
« ceux au profit desquels la lo if a it la réserve. »
Il ajoute que les donataires, les légataires, les créan
ciers ne pourront demander cette réduction, n i en profiter.
Mais la loi ne fait de réserve qu’au profit des enfans
qui déjà n’ont pas reçu sur les biens de leur père une por
tion de ce que le législateur a voulu qu’on leur attribuât
L ’enfant donataire ne peut demander la réserve; il
ne peut même en profiter, si ce 11’est jusqu’à la concur
rence de ce qui lui manque, dans l’objet donné, pour
atteindre la valeur de la quotité réservée.
S i, pour la preuve de cette vérité, il étoit nécessaire
d’invoquer des autorités, on pourroit en citer de nom
breuses et des plus respectables.
La réserve légale est aujourd’hui ce qu’étoit autrefois
la légitime; et personne n’ignore que l’enfant légitimaire
étoit obligé , même à l’égard d’un héritier ou d’un
donataire étranger, d’imputer sur sa légitime tout ce
qu’il avoit reçu du défunt.
M . le procureur général Grenier traite cette question
ex professo, dans son excellent ouvrage sur les dona
tions et testamens; il la traite relativement à la réserve
établie par le Gode; il est de l’avis de l’imputation des
dons antérieurs au décès : il s’appuie de l’opinion d’un
grand nombre d’auteurs anciens, et il remarque qu’il
n'est pas un auteur, au moins de sa connaissance, ,
3Ȇ
Ht
�...................................
(
34 )
qui ait professé une doctrine différénie. Ori ne saüroit
mieux faire que de renvoyer à une dissertation aussi
lumineuse que profonde (i).
• D ’après l’article 1098 du Code Napoléon, le général
d’Ayat pouvoit disposer en faveur de sa seconde épouse,
d’une portion d’enfant le moins prenant , sans que ce
pendant la disposition pût excéder le quart des biens.
La dame Terreyre est l’unique enfant : la dame d’Ayat
doit donc avoir le quart des biens ; en sorte que la ré
serve légale pour la dame Terreyre est des trois quarts.
Remarquons même que la loi se sert de cette expres
sion générale, le quart des biens; expression qui indique
que les biens entiers doivent servir à l’attribution du
quart, et qui ne permet pas d’accorder à la dame Terreyre
le prélèvement qu’elle demande.
A u reste, il suffit qu’elle n’ait droit qu’à la réserve
légale, pour qu’elle doive imputer sur cette réserve tous
les dons qui lui ont été faits; car le père, en respectant
cette réserve, avoit le droit de disposer de tout le surplus
de ses biens.
M . Grenier a examiné aussi la question relativement
à une donation faite par un époux à une épouse en se
condes noces (2). Il observe avec beaucoup de raison
qu’il s’agit moins, dans des cas semblables, d’une ques
tion de rapport, que d’une question de réduction ou de
retranchement, puisque le rapport fait par l’enfant n’est
pas r é e l, mais seulement fictif. Il pense que les enfans
(1) Voyez Traité des donations et des testamens, n°. 5g5 et
suivans , deuxième édition, in-/?. , tome 2 , page 53i.
(2) Voyez le môme Traité» n05. 499 et 5oo, tom. 2, p. 167.
�doivent rapporter à -la succession de leur père tout ce
qu’ils ont reçu de l u i , afin de mettre à portée de cal
culer ce que le second époux peut demander,■et il cite
un arrêt du 2 avril 1683.
Cet arrêt ( 1 ) a décidé eu effet que des enfans d’un
premier lit étoient obligés de rapporter ce que leur mère
leur avoit donné avant son second mariage , ou de
moins prendre dans le partage de sa succession avec le
second mari, donataire.
L a même, question/a été jugée depuis le C od e, par
la Cour impériale de Paris, par un arrêt du 20 février
1809 , que cite M . Pailliet (2) dans une note sur l’ar
ticle 1098.
A in s i, considéré comme donation, le douaire seroit
sujet à un rapport au moins fictif.
Nous disons f i c t i f , parce que ce rapport n’auroit pas
pour but d’enlever à la dame Terreyre la moindre partie
des 80,000 francs donnés, mais seulement de servir au
calcul de la valeur du quart disponible, quart qui seroit
ensuite payé aux dépens des biens libres.
Quel que soit donc le caractère que l’on suppose au
douaire, le résultat sera le m êm e, et la dame d’A yat
aura toujours le quart de la totalité des biens du général.
Mais un douaire n’est pas une donation ; ce n’est qu’un
avantage conditionnel, accordé seulement pour le cas où
l’on ne seroit pas héritier, et qui disparoît dès l’instant
où l’hérédité est acceptée.
( 1 ) Voyez-le au Journal des audiences, tome 3 , page 682.
(2)
Voyez la seconde édition du Manuel du droit français,
par M. Pailliet, avocat.
�La dame Terreyre est héritière ;
Elle n'est donc pas douairière,
E t par conséquent il ne peut être question du pré
lèvement des 80,000 francs.
La discussion à laquelle nous nous sommes livrés s’appliqueroit aussi au cas où la quotité disponible seroit
seulement de l’usufruit de moitié des biens, au lieu d’être
de la propriété du quart.
Mais cette question que nous avons examinée la pre
mière, n’est pas plus douteuse que l’autre.
C ’est la loi du décès qui seule doit régir la succession
ouverte sous son empire;
C ’est elle qui a fixé les droits de l’héritière naturelle ;
C ’est elle par conséquent qui doit régler la quotité
disponible, avec d’autant plus de raison, que la loi
de nivôse an 2 ne prononçoit aucune prohibition absolue,
et n’établissoit entre époux aucune incapacité de donner
ni de recevoir.
Donataire de tout ce dont la loi en vigueur au temps
du décès du donateur a permis de disposer , la dame
d’Ayat réclame le quart; elle en a le droit ; et c’est elle
surtout qui ne doit pas les moindres sacrifices à ceux
qui ont cru pouvoir se dispenser à son égard même des
moindres ménagemens.
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. R O U H E R , licencié avoué.
A R IO M , de l’imp. de TH IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
ru e des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1813.
�
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[Factum. Kempfer de Plobsheim, Charlotte-Joséphine. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Rouher
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Charlotte-Joséphine Kempfer de Plobsheim, veuve, en premières noces de M. le comte de la maison régnante de Sayn et Wittgenstein-Berlembourg, et en secondes noces de M. Louis-Charles-Antoine Lors de Beaufranchet d'Ayat, général de brigade, Inspecteur général des haras de l'Empire, demanderesse ; contre M. Denis Terreyre, général de brigade, baron de l'Empire, l'un des Commandans de la légion d'honneur ; et dame Anne-Pauline-Victoire de Beaufranchet d'Ayat, son épouse, autorisée en justice, défendeurs.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2209
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53105/BCU_Factums_G1007.pdf
12e5348ac31f21ac7038873264ddcb9c
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Text
MÉMOIRE
SIGNIFIÉ
POUR
CO NTRE
L
R
a y m o n d
P ie r r e
DURAND,
P A IL L E R ,
Intimé.
Appellant.
A réclamation la plus favorablement accueil
lie par la Loi , eft celle d’un mineur qui de
mande à rentrer dans la poffeffion de fon bien ,
foit qu’il en ait été dépouillé par les artifices d’un
tuteur înfidele , foit qu’il ait été furpris par les
promeff es d’un acquéreur rufé , foit q u ’il ait été
rrahi par fa propre foibleffe & le peu d’étendue
de fes lumieres , foit enfin que fon pere ait ordon
né ou permis par fes difpofitions la vente des biensimmeubles de fes enfans encore mineurs.
L ’Intimé eft dans ce dernier cas ; mais , fuivant
A
�nos ufages , un pareil pouvoir eft n u l, ou du
moins ne difpenfe pas le tuteur de l’obfervation
des folemnités prefcrites pour l’aliénation des biens
des mineurs. D ’ailleurs Marguerite Durand, à la
quelle ce pouvoir de vendre avoit été confié ,
ayant convolé en fécondés noces , en auroit été
dès-lors privée : on prouvera clairement toutes
ces vérités dans la difcuiiion des moyens.
F A I T .
Antoine Durand , pere de l’intimé , étoit pro
priétaire d’un domaine aiTez confidérable , fis au
lieu d’EfpinaiTe ; un mariage de fantaiiie l’unit
avec Marguerite Durand ; quatre enfans en font
provenus, deux garçons & deux filles, qui décé
dèrent bientôt après leur pere. L ’Intimé eft du
nombre des garçons , & a acquis les droits de
Ton jifere ; de forte qu’à lui feul appartient l’entiere hérédité d’Antoine Durand.
Une mort prématurée enleva ce dernier dans
le temps que l’intimé étoit encore dans l'enfance.
Pendant qu’Antoine Durand étoit accablé de
la maladie qui le conduifit au tombeau , on le
follicita, on le preiïa de faire des difpofitions ,
, dont le principal objet étoit l’intérêt delà Durand,
fa femme ; de-là le teftament du 1 1 Janvier 1 7 5 1 ,
qui fait la bafe des prétentions de TAppellant : il
eft donc eiTentiel de connoitrç ce qu’il renferme.
�Antoine Durand légua à Tes deux garçons 10 0
liv. à chacun , & 400 liv. aux filles ; l’entier ufufruit de Tes biens à Marguerite Durand , fa fem
me , & inftitua pour fon héritier , celui de fes
enfans qui feroit choifi par la Durand , & cela
quand même elle paiferoit à des fécondés noces •,
& parce que, ( ejl-il ajouté, ) Le tejlateur a plujîeurs
dettes contractées par fis auteurs , & qu 'il n a au
cuns deniers ( a ) pour les acquitter ; qu'il prévoit
que le paiement n en peut êtrefa it quenjonds,
pour éviter lesfra is des pourfuites des créanciers &
le com s des intérêts ; ( c ) i l donne plein pouvoir
& puijfance a ladite Marguerite D urand , fa fem
me , de vendre , aliéner , engager des biens-im
meubles de la fiiccefjîon du tejlateur 9 à telle perfonne , & pour tel p r i x , claujes, charges & condi
tions quelle trouvera à propos , pour le paiement &
acquittement des dettes pajjives du tejlateur , qui
veut que les ventes , aliénations & engagemens
quelle fera foient a u jji valables que s'ils étoient
faits par le tejlateur ; qui charge fon héritier de
les exécuter entièrement félon leur forme & teneur,
( a ) Il avoir des beftiaux , des meubles Sc des effets , ainfi que le
teftament le prouve.
( b ) Antoine Durand iè tro m p o it, puifque l’in tim é , avant fa m a
jorité , avoit acquitté partie des dettes ; elles étoient d'ailleurs en ren te,
011 ne pouvoit prePer pour le paiement. _
_
_
.
( c ) Les intérêts ni les rentes ne pouvoient courir fur les mineurs ,
puifque cela concerr.oit la Durand , com m e légataire de l’ulufiuit ,
& les créanciers n ’ont jamais fait des pourfuites.
A
Z
^
�4
_
t
à peine d'être privé de l'hérédité par le feu l refus
d'exécuter lefdites ventes.
S’il étoit permis à un teiîateur d’ordonner la
vente de fes biens immeubles, qui , en échappant
à fes mains défaillantes, fe lencent en celles de
fes enfans pour former leur patrimoine , on ne
fauroit , il faut l’avouer , donner un pouvoir plus
ample & plus abufif : en effet, Antoine Durand
permet à fa femme , pour lors encore mineure ,
d ’aliéner fes biens immeubles au prix quelle ju
gera à propos, fans aucune néceffite ni fans confulter perfonne. Que vont devenir les biens des
pupilles ? La convoitife effrénée des voifins eft
bientôt leur patrimoine, ii les Loix n’euiFent veillé
à leur confervation.
Quelque ample que fût le pouvoir, Marguerite
Durand ne s’en fervit point pendant qu’elle refta
veuve; attachée à fes enfans par la tendreffe ma
ternelle , elle avoit confervé leurs biens immeu
bles , provenus du chef de leur pere, pendant
fon veuvage ; mais l’inconilance, qui n’eil que trop
commune au fexe, ayant porté la Durand à con
voler en fécondés noces avec Jean Gaillard ,
Huiflîer fubalterne , qui avoit pour toute fortune
trois enfans du premier mariage , & nombre de
dettes paflives , & pour toute induftrie , fa profeiïïon d’Huiiîier à exercer dans un village : ce
fécond mariage ayant procuré une nouvelle îiombreufe fam ille, créé des befoins., on fongea à fe
�procurer des reiîources ; la plus commode
plus ai fée & la-plus sûre fut de -vendre la ma
jeure partie des biens immeubles des pupilles ,
parce qu’on ^profitoit des épingles & des remifes
que faifoient les créanciers en recevant des Tom
mes dont on .crèiyoit encore le paiement éloigné.
Le convoi; de la Durand arrivé , l’intimé &
fon fre.re, à la réquiiition du Miniilere public ,
furent pourvus d’un tuteur. ^Dès-lors il n’y avoit
que ce’ tuteur qui eût l’adminiilration des biens de
l ’intimé ; cependant, fans confulter ce tuteur ni
aucun parent , on commença à vendre les fonds
les plus précieux des mineurs, parce que c’étoient
les plus recherchés.
L ’Appellant , quoiqu’inftruit de tout ce qui
s’étoit paiTé dans la famille de l’intimé , & con
vaincu qu’on ne pouvoit aliéner les biens immeu
bles des pupilles, voulut cependant profiter de
l occafion & du bon marché ; en conféquence , &
par contrat du 3 Mai 1 7 5 7 , Gaillard & la ‘ D u
rand , eux feuls, en vertu du pouvoir contenu dans
le teftament d’Antoine Durand , firent vente à
1 Appellant des héritages dont le défiftement a été
ordonné par la Sentence dont eft appel , moyen
nant la fomme de 860 liv. dun côté , & 48 liv.
d’autre , tandis que cela valoit beaucoup plus.
Gaillard & fa femme reçurent & quittancèrent
les 48 liv. & il fut dit que les 860 liv. feroient
payés; fa voir , 399 liv. à Jean Vigouroux , à lui
�6
-
reftée due , tant du capital de ia rentt de 25 liv.
annuellementy -que pour les arrérages ■& frais de
la pouriuite fur placard, qui avoit été faite contre
défunt Antoine Durand ; mais on l’altermoya à
10 0 liv. par année.
Et pour les 460 liv. reftant, il fut ajouté que
cette fomme feroit payée au plus ancien créan
cier de la fucceiTion du pere de l’intimé, fans en
indiquer aucun , parce que nul ne preffoit.
L ’Appellant dit avoir payé cette derniere fom
me à des créanciers , cela le peut ; mais il n’en
eil pas moins vrai que ces créanciers 'étoient tran
quilles , & qu’il n’y avoit aucune néceflité de
vendre.
Il
en eil de mcme pour la créance de Vigouroux , outre qu’il n’avoit fait aucune pourfuite ,
c’eil qu’il réfulte de la vente , que fa créance étoit
en rente ; il ne pouvoit donc exiger le capital ,
& le revenu étoit à la charge de la Durand.
L ’Intimé, devenu feul propriétaire de tous les
bFèns laifles par fon pere , a fait affigner 1Appellant devant le Juge dont eil appel, en nullité de
la vente de 1 7 5 6 , & en défiilementdes héritages
vendus, avec offre de payer le prix. Une Sentence
par défaut du 3 Juillet 1 7 7 6 , a adjugé les conclu
rions ; on a interjetté appel en la Cour ; il s’agit de dé
montrer que cet appel a été hafardé fans ombre
de fondement. En dilcutant les moyens, on par
lera des griefs que l’Appellant oppofe pour la faire
�réformer , & en même-temps , l’on en fera voir
la futilité.
M O Y E N S.
Rien n’eil fi expreiTément défendu , foit dans
le Droit Rom ain, foit dans le Droit François ,
que l’aliénation des biens immeubles des mineurs ;
auffi toutes les fois que le tuteur va contre ces défenfes, & fait des aliénations des biens de fes pupilles. , ceux-ci font en droit d’y rentrer & de faire déclarer
l’aliénation nulle ; cela n’a jamais fait un problème ,
quand même le prix auroit tourné au profit des
mineurs} quand même la vente ne contiendroit
point de léfion , & la raifon eil qu’il eil plus utile
aux mineurs de conferver leurs héritages que d’en
avoir le prix , & de quelque maniéré que l’on
s’y foit pris pour faire la vente , foit par tranfaftion , échange ou autres a&es , cela eil indif
fèrent , l’aliénation eil toujours nulle de plein
droit. ( a )
( « ) Imperatoris Severi oratione prohibiti funt tutores prxdia ruftica
uburbana diftrahere , L . i , fF.de reb eor. qui fub tur. fu n t , non
^er vf?ndicionem ruftica prxdia fuburbana pupilli alienare prombentur , fed neque tranfaftionis rationc , neque pcrmutatione , &c
m ulto rnagis donatione vel alio quoquom odo ea transferre fine de
creto p o flu n t, L . 4 , au co I. de prard. He aliis reb. m inor, fi fun
dus lit fterilis , vel iàxofiis , vel peftiliens , videndum eil an alienare
cum p o in t; &c Im perator Antonius & D ivus.pater ejus in h x c verba
refcripferunt quod allegatis infruttuofum eflc fundum quern ven dere
yultis m overe nos poteft , d im utique pro fru& uum m o d o p m iu m
inventurus fit. L . 13 , au. ff. j e reb. eor. qui Tub tut- fu n t,S c d o m u s
& cocteraom nia im m obilia in patrimonio m inorum perm ancant; L . 1 2 .
ft. de ad m in , tut.
ve
�8
Non feulement l'aliénation des biens immeubles
’ des mineurs eil défendue par les Loix Romaines ,
mais encore plus expreiTément par le Droit Frarçois : deux Arrêts de règlement du Parlement de
Paris prononcent ces défenfes en teiiçes[»âût|nt
clairs qu’impérieux & précis ; l'e prefrîiifer jffe
l’année 1 63 0 ( a ) & l'autre de
)
ils forment a&uellement- le Droi^x(HjSînun*de
France.
.
Î p '*
A la difpoiition dé. .ces, Arrêts' cfe règlement >,
on peut ajouter la déciiron d'e:. Tiiït. 3. Suffît. 13
de notre Coutume , qui interdit: -la^ibçrté aux
mineurs de difpofer de leurs biëps*î,iinmeubles fans l’autorité de leur curateur
lç dé
cret du Juge , lequel ne s'accorde qu’après l’avis
des parens, affiches,appofées, & qu’il'« ft^ rp u vé
qu’il y a néceiîité d’aliéner , & avec toiftp^ces
précautions , les Auteurs difent qu’il n ’ a pks^çncore de sûreté , parce que les biens des mineurs
( a ) Il cil du 9 A vril 16 5 0 , rapporte au Journal des Audiences ;
tom e 1 , porte , , , faifant droit fur les conclufions de M . le Procureur
général du R o i , ordonne qu’après l ’avis des parens pris pour l’aliéna-,
tion des biensdes m ineurs, publications feront faites q u l’ aVc civil du C M telet de Paris , des chofes à vendre , tk affiches m ife.î,; •pffÆ1 être en
fuite p r o c é d é i l’ad ju d ication , au plus offrant & d o r $ c r c^ic^ infleur,
à peine de-nüllité. “ ■
. • . -r
.
( b ) Il cft iia-m im e'.TouroaJ >^en ,dtitfc*dtt‘ 18 Février 1 7 1 1 , &
porte , & ordonne f|üe - l’ A d è j , d ei
du 9 Avril 16*30 fera
exécuté ; en cotïféqiicnce , fc fo $
^ fs.P rcvô ts de Paris & tous
autres Ju ges , 'cri honiiilqga’it îïs ^ S s is 'd e s partiiîs des mineurs , por
tant que leurs biens
Vendus »"'‘¿l’iiÆ b flilÎï que la, vente ne fera
faite qu’après la p u blication , affiches Ôc remifes ordii.aiies de accou
tumées.
ne
�9
ne peuvent être validement aliénés : car, fi le tu
teur n’a pas des fonds en fes mains pour acquit
ter lesr'sçkttes j il doit plutôt emprunter que de
de la vente de 17 S7 » Ie tuteur de
I f i S S E n i fa mere n’avoient pas befoin , ni dempriant^Sir
vendre pour payer des dettes ,
puifquè
r é a o ^ |® î^ * a i foit de pourfuites ,
/ & la créaiTSSB||^^^®qaLtta ; ou du moins que l’in
time
?. p ay era i! nommé Vigouroux,
é to it.u r^ ^ g fa l de rente : a-t-on jamais vu que
la JjiftjBp& t aiitorifé l ’aliénation des biens d un
mineigr^jijLr éteindre les capitaux des rentes ?
Inutilement l’Appellant dit que Gaillard & fa
femme ¿h*en uferent amii, que pour éviter les frais
qu’oqfêprbit pu faire; puifque , il un pareil moyen
étoi^i^outé, ce feroit en vain que les Loix auroient défendu ces aliénations ; à la moindre me
nace des pourfuites on pourroit les faire ; mais loin
d’ici de pareilles idées, car ce n’eft pas aifez que
(Es alienum urgent, il faut creditor urgent ; ainii,
de quelqi^/dette qu’un mineur foit accablé, tant
que le ÿr<pi|cier ne prefFe pas & ne met 'pas le
feu dans lesbierçis, il faut que le tuteur. r d* celui
qui en tient lieiiM^pô^^r^icjuille
Pas
permis de p rév e^ r5$^ m ^ ^ to iên ivr^ ^ aire fous
prétexte d’éviter <Je6 proceaures riiineufes il faut
qu’il attende., & fi le créancier , par des confidérations dont le contre-coup retombe fur le mineur,
B
�IO
eft dans Tinaftion , le tuteur doit fuivre Toh exem
ple ; quoique la dette croifle par les arrérages
qui s’accumulent. Ici la dette ne pouvoit augmen
ter , parceque les arrérages n’étoient pas à la charge
des mineurs, tous les créanciers étoient tranquilles.
Pourquoi donc la vente en queflion ? y avoit-il
quelque nécefîité ? avoit-on confulté la famille , le
tuteur obtenu la permiiîion d’aliéner , fait des
affiches ? rien du tout ; parce qu’aucun parent n’y
auroit confenti, & encore moins la Juitice per
mis l’aliénation.
L ’Appellant a donc dû prévoir que la vente
qu’on lui faifoit étoit nulle , il ne devoit pas ache
ter. Il a encore dû confidérer que ce n’étoit pas
pour l’intérêt des mineurs qu’on vendoit , mais
pour celui de Gaillard & fa femme, qui vouloient
profiter des remifes des créanciers, des 48 .liv.
qu’on toucha, & des épingles.
Envain l’on dit que cette fomme de 48 liv. fut
employée pour payer un expert qui avoit fait l’eftimation des héritages vendus, puifque, d’une part,
aucune eftiination ne paroît; d’autre p a rt, il e n ^ ^ 1
coûté au plus 6 liv.
Mais à fuppofer pour un moment que Gaillard
& fa femme n’euiTent profité de rien, & que leur
mobile fut l ’intérêt de l’intimé , cela feroit é g a l,
ce dernier feroit toujours fondé de dire , d’après
M. DagueiTeau , Pladoyer 1 5 , pag. 3 67 , por
tant la parole dans une hypothefe femblable à la
�(SLÏ
II
nôtre. « Nous n’accufons point ic i, difoit-il, le tu» teur de fraude , de collufion , d’intelligence
avec l’acquéreur ; mais le mineur n’eil pas moins
» à plaindre, lorfqu’il eil dépouillé de fon bien
» par la négligence de fon tuteur , que lorfqu il
» en eil privé par fa corruption : « tutorurgenubus
creditoribus , rem pupillarem bonâfi.de ven d idit....
qiLczro cum urgentibus creditoribus difiracla fit nec
de Jordbus tutoris meritb quippiam dici potejl, an
pupillus in integrum rejlitui potejl? Refpondi cognit â causa æjlimandum : nec idcirco , J i juflum fit
rejlitui, denegandum id auxilium quo tutor deliclo
vacaret, L. 4 7 . jf. de minorihus J
. La faveur des pupilles eil ii grande & leurs
caufes accueillies avec tant de bonté , que les
Loix leur rendent les biens de leurs ancêtres ,
quoiqu’ils aient été vendus leurs juiles prix , &C
avec les folemnités prefcrites , par la feule confidération qu’ils font fortis de leur famille. C ’eil
.ce qui nous eil atteilé par M. Leprêtre ( a ) & par
Henris , ( b ) ce dernier en parle en ces termes.
« L ’aliénation des biens des mineurs eil chatou» lieufe, quelque aifurance qu’on y cherche r^il
» n’y en a point , & quelquefois ce font le pré» cautions qui nuifent : qu’on prenne l ’avis des
« parens , qu’on demande permiflion au Juge ,
( a ) C ent. } ,c h a p . 4 5.
( b ) L iv . 4 , chap. 6 , queft. z i .
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quon faiTe publier les héritages, quonles faiTe
eftimer par experts, & qu'après tout cela le
Juge interpofe Ton décret , le mineur peut encore rentrer dans fon héritage , s’il fe trouve tant
foit peu léfé, & rapporte des Arrêts conformes «.
Cette Jurifprudence eft fondée fur la Loi 3 5
de minorib. qui décide que le feul intérêt d’affection iufïït pour faire reftituer les mineurs. Dans
le Traité de minorité, page 5 ^ 7 , on trouve d’au
tres Arrêts qui ont affermi la.même Jurifprudence.
Bretonnier atteile que le Parlement a rendu
plufieurs Arrêts en forme de règlement, qui permettent aux mineurs de rentrer dans leurs héritages vendus par leur tuteur ou par eux-mêmes,
avec reiKtution des fruits.
Augeard ( a ) rapporte un Arrêt du 19 Février 1 7 0 4 , par lequel il fut jugé que l’aliénation des
biens d’un enfant mineur , faite par fa mere, fa
tutrice , fans avis des parens , fans autorité de
Juftice & fans difcution préalable des meubles ,
¿toit nuHe ^e ple^n droit » ^ans
^ût néceflaire
de prendre des lettres de refciiion.
Baflet ( b ) rapporte un autre Arrêt du 7
Août 1 6 6 4 , qui permit à un mineur de rentrer
dans fon fonds que fon pere avoit vendu pour
( a ) T o m . 1 , chap. 46.
,
( b ) T o m , 1 , liv. 4 , tir. 1 6 , chap.
t
4
,
�dettes urgentes du fils, quoiqu’il n’y eût point de
léfion; & ajoute , qu’on ne s’arrêta point à la ré
ception du p rix , faite par le fils , qu’on vouloit
faire confidérer comme ratification ; car c’étoit ,
dit-il , un a£e qui ne valide jamais ce qüi eii nul
dans fa fource.
Albert ( a ) rapporte auiîi un Arrêt du Par
lement de Touloufe , de l’année 1 6 5 4 , qui dé
clara nulle la vente faite par une mere qui avoit
l’ufufruit des .biens de, iès enfans , à deux créan
ciers du p ere, quoiqu’on eût obfërvé les folemnités de Juitice.
A ces autorités ajoutons la circonilance que
•la vente dont il s’agit n’a pas été faite ni par le
tuteur , ni par le pupille ; ils n’ont pas même éré
confultés ; c’eft par une mere remariée & par lé
fécond mari , de leur feule autorité , fans aucun
pouvoir ni fans aucun ,intérêt pour le mineur,
fans avoir obfervé aücunT
e des folemnités prefcrites pour l’aliénation des biens des mineurs. Une
pareille vente peut-elle fe foutenir ? on ne le penfè
pas.
1
Aufli 1 Appellant, autant convaincu que péné-1
tre que toute vente des biens des mineurs eil nulle
de plein droit , hors d’état de pouvoir la foutenir,
en la confidérant fur fes véritables attributs, a cher
ché à éluder l’objet de la conteilation, pour la pré( a ) Lett. M , chap.
20 de la
nouvelle édition.
�!2>o
i
14
fenter fur un point de vue chimérique, s’il faut en
croire l’Âppellant.
:
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, t4 + / 4 t\ ^ { / L
O B JE C T IO N S
DE
LAPPELLAN T.
En efFett*il ne s’agit pas ici de l’aliénation des biens
d’un mineur, mais de l ’exécution de la volonté du
.pere de ce mineur, qui, maître de fes biens &
de les donner à qui bon lui fembloit, il a pu en
•difpofer en faveur de fa femme ou de fes créan
ciers , ou de ceux qui ont acquis fes biens : qu’il
•les eût donnés à fa femme, ou permis de les ven
dre , pour les faire paiTer à d’autres en acquittant
fes dettes , cela eil égal, parce qu’Antoine D u
rand a fuffifamment manifeilé fon intention , qui
étoit de diilraire des biens de fa fuccefîion , tout
ce qui feroit aliéné. De-là on a tiré la conféquenc e , que ce qui eil aliéné n’a jamais fait partie du
patrimoine des mineurs , & qu’on n’avoit pas befoin d’obferver aucune des folemnités qui font en
ufage pour l’aliénation des biens des pupilles , le
pouvoir étant dans le teilament.
Tels font les moyens que l’Appellant fait valoir;
qu’il eil facile d’en diiliper les trompeufes illufions !
Premièrement, le pouvoir donné par Antoine
Durand de vendre fes biens, qui, à l’inftant de
fon décès devoient faire le patrimoine des mi
neurs , ne fauroit produire aucun effet ni difpenfer d’obferver les folemnités prefcrites en pareil cas.
*i
�•
?
Secondement, quand ce pouvoir feroit' -vali
de en général, il feroit toujours nul dans l’hypothefe préfente , à caufe du convoi de la Durand ,
a laquelle le pouvoir avoit été donné.
}
Troiiiémement, les biens vendus appartiennent
a 1Intimé & étoient , au temps de la vente , le
patrimoine de deux pupilles. Développons ces
vérités , & reprenons la premierc de ces propo
sitions.
/ RE. R É P O N S E A U X O B JE C T I O N S .
Suivant le droit naturel, la propriété finit avec
la vie du propriétaire. Celui-ci doit abandonner ,
fans regret & fans retour , des objets qui échap
pent à fes mains défaillantes, & enfévelir fon em
pire avec lui fous la même terre dont on couvre
fon cercueil.
Il
eil vrai que fur cet article , comme fur bien
d autres, le droit civil a dérogé aux principes qui
paroiiTent au premier coup d'œil être ceux de la
raiion & de l’équité , foit qu’on ait voulu ména
ger aux mourans un motif de confolation dans
cet înilant funefte , où tout s’évanouit pour eux ,
foit qu’on ait fongé à contenir les héritiers , en
laiiTant partie de leur fort à la difpofition du pere,
qui , en difant le dernier adieu à fes enfans , eft
le maître de récompenfer ou de punir les ferviees & les outrages qu’il en a reçus. Les Loix ont
�1 6
au pere le privilege de prolonger ,
"ën la pe?fonne de celui qu’il veut favorifer, fa jouiffance au-delà même de fa vie , & de dominer
dans un avenir dont il eft exclus. De-là le droit
d’énoncer au lit de la mort des volontés qui font
refpe&ées , lors même que la bouche qui les a
di&ées eft fermée.
Mais ce pouvoir , quelqu’étendu qu’il ait été
chez les Romains, n’a pas été donné aveuglement,
ayant fa fource dans la Loi ; il eft indifpenfable
qu’il foit fubordonné à cette même Loi. De-là il
fuit que le teftateur ne peut faire fes difpofitions,
.que de la maniéré que la Loi ie lui permet. Le
pere de famille doit une légitime à fes enfans ,
s’il fait teftament , la Loi l’oblige des faire de
legs à tous fes enfans , de les honorer du titre
d’héritiers. Si le pere méprife cette difpofition de
la Loi , elle s’arme de fon pouvoir , & déclare
nulles les difpoiitions.
Les Loix défendent auffi de difpofer en faveur
de certaines perfonnes, fi le teftateur va contre
cettç défenfe , la Loi déclare également nulle la
difpofition, parce qu’elle ne communique jamais
fon pouvoir ni fon empire qu’autant qu’on Ce con
forme à çe qu’elle prefcrit ; fon intention n’a ja
mais été d élaver au-deiïus <i’e|le~même la volonté
cju pere de fhn^jlle, mais de le tenir dans les borpcs du pouvoir qui lui eft accordé.
.
Les Loix , les Arrêts de règlement, la Jurifprudence
�}7
.
prudence défendent l ’aliénation des biens des mi
neurs ; par conféquent un teilateur ne peut la
permettre ; s’il le fait, cette permiflion n’eil d’au
cune coniidération , parce quelle eft contraire à
ce que la Loi exige pour l’aliénation des biens
des mineurs, qui eft prohibée fans aucune diftinction, & ou la Loi ne diftingue p a s , nous ne de
vons pas diilinguer : ubi L ex non diflinguit, ncc
nos dïjlïnguerc debemus.
Ce n’eil pas la premiere fois qu’on a vu des
acquéreurs des biens des mineurs fe préfenter
avec des ventes faites en vertu d’un pareil pou- _
voir ; mais quel égard y a-t-on eu ? aucun. Louet
& Brodeau ( lettre A , Som. 5 ) citent des Arrêts
qui ont jugé la queilion & déclaré^ nulles de
pareilles ventes, quoique le pere%*£ ordonné l’a
liénation.
Brodeau en parle en ces termes : » c’eft une
» réglé & une maxime certaine que l’immeuble
» d’un mineur qui eft fous la prote£tion des Loix
» & de la Juilice, ne tombe point dans le com» merce & ne peut être vendu , foit en pays
» Coutumier , ou en pays de Droit écrit, fi non
» fous les formalités & folemnités publiques de
» la faifie & criées, fuivie d’une vente & adju» dication par décret , conformément à l’Ordon» nancedes criées, e t l a d i s p o s i t i o n p r i v é e
»
d
’u n
»
q u i
P A R T IC U L IE R
o r d o n n e
PAR
so n
t e s t a m e n t
,
la vente & aliénation de fes
C
�i8
» biens , ne peut déroger au droit public , ni
» empêcher que les Loix & les Ordonnances
„ aient lieu.,,
A plus forte raifon aujourd’hui on ne doit pas
s’occuper d’une pareille permiiîion , puifque nous
avons deux Arrêts de règlement rendus ¿»-depuis
le décès de Brodeau , qui , en renouvellant les
défenfes d’aliéner fans néçeiîité les biens des mi
neurs , n’ont fait aucune diftin&ion du cas où le
pere a permis de les vendre , d’avec celui ou il
n’en a pas parlé.
Si nous confultons les Auteurs, tous nous ap
prennent qu’on n’a aucun égard à la permiiîion de
vendre les biens des mineurs, accordée par le perer,
& qu’on la regarde comme non-écrite. C eft l’a
vis de Mornac , fur la Loi / / , ff. comm. pmdior.
d’Automne , fu r la Loi 3 , cod. quod decret. opus
nonejl ; de Bugnon , des L oix abrogées \ de Boniface , tom. 4 , tit. / , chap. // , pag. z z G ; de
Lapeyrere, L . M . n °. 3 3 ; & s’il en étoit au
trement , il feroit impoifible de garantir le patri
moine facré des pupilles d’une ruine totale , &
des pieges quipourroient être tendus, à l ’exemple
de ce qui eit arrivé à l’intimé , puifque fa mere
(k. fon parâtre , fans aucune néceilité & à vil
prix , ont vendu les héritages les plus précieux
qu’eût l'intimé.
Louet, au lieu cité , & plufieurs autres A u
teurs , atteilent qu’on n’obferve point en France
�T9
la Loi j . cod. quand, dec. op. non ejl. Has Leges
in Gallia non objervari tradit. Saude deprohib. rer.
aliénât, part. / , cap. / , ri. /04. Gronévcngen ,
fur le tit. du cod. quando decret. opus non ejl.
Cette dérogation eit fondée fur une Jurifprudence univerfelle , ejl Je ries perpetuo rerum judicatum.
Les Loix ne font faites que pour diriger les hom
mes , elles doivent fouvent être exécutées d’une
maniéré bien différente quelles ne l’étoient chez
les Romains. On doit plutôt confulter 1efprit de
la Loi que les termes; c’eft l’accomplir ôc non
la modifier : c’eil ce que les Arrêts ont f ai t, en
ne permettant pas qu’il foit libre à un tuteur de
vendre fans formalité les biens des pupilles, non
ambigitur Senatum ju s facere p o jje. L. c) , jf . de
legib.
Ajoutons encore, que quand même la Loi i e.
cod. quando decret. opus non e jl, feroit en ufage ,
elle diipenferoit feulement du décret du Magiftrat ; mais il faudroit toujours les affiches , encheres, criées & fubhaftation, & une eilimation
précédente, fuivant l’ Arrêt de 1 6 4 7 , rapporté par
Bonifacc.
II. R É P O N S E
AUX
O B JE C T I O N S
D ’après ces obfcrvations, l’on pourroit fe difpenfer d’entrer dans l'examen, fi Margùerite Du«
,nind a perdu par fon convoi les avantages que
C i
�fon mari lui avoit faits ; aufîi ce ne fera que fubfidiairement que ce fécond objet fera difcuté.
Obfervons d ’abord que la veuve qui convole
en fécondés noces, ayant des enfans du premier
mariage , perd d’un côté la propriété des avan
tages par elle reçus de fon mari ; d’autre côté ,
la tutelle qui lui eil déférée de droit , & par
conféquent tous les pouvoirs que fon mari peut
lui avoir donné.
Envain l’Appellant obje&e qu Antoine Durand
étoit le maître de donner à fa femme ou à des
étrangers les héritages vendus ; de plus, en vain en
core il ajoute , que par ce motif il na pu per
mettre la vente ; puifque, d’un côté, il n’eft pas ici
queftion d’examiner ce qu Antoine Durand pouvoit faire, mais ce qu’il a fait ; d’autre côté, faudroit-il faire valoir un legs fait à une perfonne in
digne , à caufe qu’on aura pu donner à une autre
la même fomme ?
Suppofons néanmoins pour un moment qu’A n
toine Durand eût fait fa femme héritiere, ou lui
eût donné les héritages vendus, l’intimé ne feroit
pas moins en droit de rentrer dans la poiTeiîion de
ces héritages, par la raifon que la veuve,qui con
vole en fécondés noces, perd dès ce moment la
propriété (Je tous les avantages quelle a reçu de
fon premier mari, & ii elle a fait vente de l’ob
jet qui lui avoit été donné, cette vente devient
nulle de plein droit, & les enfans peuvent faire
�157
11
défifter les acquéreurs ; il l’Appellant doute de
cette vérité, il peut s’en inftruire dans Ricard ,
partie 3 , chap. 9 , n°. / j/ 8 . Dans Pothier , traité
du mariage, tom. 2., n°. 6 17.
O r * étent démontré que le convoi auroit eu
l’effet de révoquer les ventes que la Durand au
roit pu faire en qualité de propriétaire, àfortiori3
le pouvoir d’aliéner fans obferver aucunes folemnités, en le fuppofant pour un moment, que ce
pouvoir fut valide, ( & qui n’eit pas,ainfi qu’on Ta
prouvé. ) Que l’Appellant reconnoiiTe donc la
nullité de la vente & le bien-jugé de la Sentence
dont eft appel ?
Dira-t-on , que fuivant la Jurifprudence a&uelle , le cenvol ne fait pas perdre le droit d’é
lire un héritier, & que , par parité de raifons ,
il ne doit pas faire perdre le pouvoir de ven
dre ?
D ’après ce qu’on a démontré , qu’on n'a aucun
égard au pouvoir de vendre les biens des mineurs,
on pourroit méprifer cette obje&ion ; mais pour
enlever à TAppellant tout prétexte d’incident, &
ecarter tout ce qu’on peut nous objefter , obfervons qu’il y a une grande différence entre le pou
voir d’élire & celui de vendre; en nommant l’hé
ritier , on ne fort pas les biens de la famille , &
la mere remariée ne profite de rien , au lieu que
fi elle avoit le pouvoir de vendre pour le prix
qu’elle jugeroit à propos , il ne tiendroit qu'à la
�femme de ruiner fes mineurs , & elle pourroit
aifément faire paifer leurs biens à fon fécond mari
ou à fes e n f a n s du fécond lit. De la conféquence
que, quand le pouvoir de vendre les biens des mineurs
pour payer leurs dettes, feroitvalide en général , il
- faudroit la rejetter dans l’hypothefe : eh ! quoi, fi
Marguerite Durand eût étéinflituée héritière pure
-& fimple, les ventes quelle auroit faites feroient nul
les , & l’on ofe foutenir celles qui ont été fai
tes- après le convoi , fans aucun droit ni qua
lités ?
Par ce convoi, Marguerite Durand a non-feu
lement perdu tous les avantages & pouvoirs à elle
donnés par fon premier mari , mais encore la
•tutelle & toute forte d’adminiilrations des biens
de fes mineurs. C ’efl la difpofition de l’article
i l du tit. i i de notre Coutume , & l’avis
unanime de tous les Auteurs qui ont traité cette
matiere , notamment de Faber, en fon cod. liv. $ ,
tit. 2/ ; & cela a lieu quoique la mere ait
commencé la geftion, ainfi que nous l’apprennent
Boerius , Lanchius, Belordeau , Charondas, Def•peiffes &• autres.
Le convoi ayant donc dépouillé Marguerite
Durand de tout pouvoir , de toute adminiftration , elle n’avoit nul droit , nulle qualité pour
confentir la vente , elle étoit étrangère ; l’adminiftration des biens avoit paifé en la perfonne du
tuteur; il n’y avoit donc que ce tuteur qui fût
�en droit de vendre, s’il y avoit eu neceffite, tan
dis que Ton ne l’a pas' même confulte : il faut »donc
regarder la vçnte de 1 7 5 7 comme faite par
des personnes étrangères, fans aucun., pouVoir j ni
qualité , puifque celui qu’ils ont ■ dit avoir; du
chef d’Antoine D urand, en conféquence de fon
teilament , ne pouvoit rien produire dans le gé
néral ; & au fait particulier , il étoit nul & ré
voqué par le convoi en fécondés noces de la D u
rand.
A u fur plus , ce pouvoir ne pouvoit avoir plus
d’effet que fi Marguerite Durand avoit. été inftituée héritière pure & iïmple , ôt'l’on a démontré
que les ventes qu’elle auroit faites comme héritiere , feroient devenues nulles par fon convoi ;
après cela il y a de la déraifon d’ofer foutenir la
vente dont eft queflion.
v D e quelle maniéré qu’on confidére le teila
ment d’Antoine Durand , il ne. fauroit valider
la vente dont il s’agit. D ’un côté , fi l’on regar
de la permiiîion d’aliéner comme un mandat ,
outre qu’on n’y a aucun égard j ainfi qu’on l’a
prouvé, c’efl que ce mandat auroit ceifé par le
décès d’Antoine Durand : d’un autre côté , Ci
on le confidére comme libéralité en faveur de la
D urand, par fon convoi elle en a été privée ,
& ce même convoi l’a exclufe de toute îadminiilration des biens de fes enfans.
�>*
2-4
III. RÉPONSE AUX
t
OBJECTIONS.
Refte à examiner fi les biens qui ont été vendus à l’Appellant appartenoient à des pupilles à
l’époque de la vente de 1 7 5 7 .
On pourroit fe borner à demander à l’Appellant, fi ces biens n’avoient pas été vendus, à qui
appartiendroient-ils aujourd’hui ? Il eft de la derniere évidence que ce feroit à l ’intimé ; donc
ces biens lui appartenoient en 1 7 5 7 , époque de
la vente : & l ’intimé étant alors pupille c’eft par
conféquent aliénation des biens des mineurs.
Pour prouver ces vérités , ?obfervons que , fuivant le Droit Rom ain, la propriété n’eft jamais
en fufpens; au moment de la mort du pere elle
paff e aux enfans; de forte quon ne confidére
que ce feul inftant pour la capacité ou incapa
cité de ceux qui peuvent prétendre à une fucceffion ; c’eft la difpofition des Loix des douze tables,
les plus anciennes de toutes les Loix Romaines.
L e x duodecim tabularum eum vocat ad hereditatem , qui vivente co de cujus bonis quæritur , in
retum natura fuerit.
S i intef latus moriturcui J uus extabit heres, agnams proximus fa m oliam habeto.
Si ces maximes font certaines dans le Droit ci
vil , elles font encore plus confiantes dans le Droit
coutumier : la preuve en eft contenue dans la feule
expofition
[
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Darnd, Raymond. 1780?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
secondes noces
créances
tutelle
experts
jurisprudence
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié, pour Raymond Durand, intimé. Contre Pierre Pailler, appellant.
Document incomplet. S'arrête page 24.
Table Godemel : Pouvoir : le pouvoir donné par le père, en son testament, à sa femme à laquelle il confère l’usufruit de ses biens, de vendre, aliéner, engager des biens immeubles de la succession, pour le paiement et acquittement des dettes passives, a-t-il dispensé la veuve des formalités prescrites pour l’aliénation des biens de mineur, ses enfants étant en minorité ? les ventes ont-elles pu être consenties, par elle, après son convol et sans consulter le tuteur nommé à ses enfants? les mineurs, parvenus à leur majorité, ont-ils le droit d’actionner les acquéreurs en désistement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1780
1752-Circa 1780
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1007
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Espinasse (63152)
Rights
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