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Lettre à Mr GODEMEL
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E vous e n v o i e , M o n s i e u r , un précis hiftorique de la conduite
que j’ai tenue depuis que je fuis C u r é , & des persécutions que
j’ai éprouvées. C ’eft fur ce précis que je v e u x être jugé , & non
fur toutes les calomnies
qu’on
répand de toute part pour me
perdre dans l’efprit du Public.
Je fus ch a rg é , prefque malgré m o i , de la Cure d’Effiat en 1783.
Cette Paroiffe étoit alors dans la dernière misère , par les fuites d’une
grêle qui avoit enlevé toute fa récolte.
Bien convaincu qu’un des
premiers foins d’un Curé e ft de chercher à fo ulager les malheu
reux ,
je formai une a ffociation de perfonnes charitables qui fe
chargèrent d’élever les enfans orphelins , ou appartenans à des
parens chargés de famille ; de leur apprendre à tra v a ille r , & de les
nourrir des reffources que je pouvois me procurer.
Elles firent
plus : des fonds que je pouvois a v o i r , elles ont fouvent acheté
du bled & d’autres objets de première néceff i té pour les rem ettre,
dans les temps de misère , au plus bas prix poffible ; ce qui a
o p é r é , à plufieurs reprife s , un bien inappréciable dans la Paroiffe
& dans tous les environs , au vu & au fu de tout le monde.
Les perfonnes vertueufes qui font à la tête de cet établiffement,
ne bornoient pas leurs foins à cet objet : dans le dehors , la vifite
des malades , la confolation des m alheureux, la diftribution des
aumônes ; voilà une partie de leurs follicitudes , de manière que
toute la Paroiffe en tiroit une utilité réelle. Les vieillards incapa
bles de gagner leur v i e , & les eftropiés rccevoient de leurs mains
ce qui étoit néceffaire à leur fubfiftance.
Les femmes de la Pa-
roiff e qui ne trouvoient pas de l’ouvrage a ille u rs, n’avoient qu’à
s’adreffer à elles pour s’en procurer. A v e c toutes ces précautions
je ferois venu à bout de détruire la mendicité dans ma Paroiffe ,
j’oferois ajouter la fainéantife , & d’y établir une certaine a ifa n c e ,
fi j’avois été fécondé , comme je devois l’être , par les perfonnes
qui poûvoient & qui auroient dû le faire.
A
�Mais l'envie &' la h a in e , fous l’ènvëloppe d’un faux zèlp-, v i n
rent me contrarier dans mes opérations. D es perfonnes d»nt je ne
pouvois approuver la c o h ’luite'V commencèrent à répancïft qu’il ne
convenoit pas à un Prêtre de fe mêler de pareilles entreprifes. O n
chercha à débaucher ceux dont je pouvois me fervir pour l’exé
cution de mes p ro je ts , à m’enlever mes amis , à infpirer de la mé
fiance à*ceux qui me procuroient des reiTources pour m’aider dans
mes opérations : enfin on engagea les perfonnes qui me faifoient
des avances en coton pour la filature que j’avois é t a b li e , à prendre
toutes les meiures poflîbles pour me com prom ettre, ou pour me
forcer à vendre à perte.
Qe
pareils bruits m ’occafionnerent des
pertes confidérables *&n*eifirent beaucoup au crédit que mon ètabliffemint
p ouvoit a\*oir. Les créanciers ne furent pas les feuls
qu’on chercha
à prévenir &
à animer contre moi. O n engagea
ceux qui achetoient la filature, à profiter des circonftances. C e u x
même qui me devoient , en profitèrent pour refufer de me p ayer
w des fommes confidérables qui me font encore dues. J’en ai vu à
qui .j’avois prêté ou fait prêter , répandre de tous côtés que je
leur devois.
, •
O n ne s’en tint pas là. Il falloit aufli chercher à prévenir M.
l’Evêque & mes fupérieurs majeurs contre moi ; & pour y par
venir plus a iié m e n t, on interpréta jufqu’à
mes intentions. Selon
mes calomniateurs , toutes mes opérations partoient
d ’un efprit
mercantille qui ne convenoit pas à un prêtre ; rien n’étoit innocent
dans toutes mes avions : fous un extérieur de charité, je cachois
la plus vile ambition. Les demandes les plus juftes m’étoient refufées : toutes les ames
baffes, des domeftiquss mçme étoient
chargés d’épier toutes mes aftions , de me fuivre dans tous mes
pas ; on ne manqua pas non plus d animer & de prévenir çontrç
moi la partie la moins faine de ma Paroiffe, J’avois beairïéclamer,
demander à être entendu , crier a 1 injuftice , je r^ji jamtis pu*
parvenir à me faire e n te n d re depuis )>Jiis de quatre ans que mes
ennemis font acharnés à ma p^.te*v
V o y a n t enfin qu’on n’a v o i t ' p u
engager
m£s c r é a n c ie r s , *ni
�njes fnpérieurs à me pour(uivre. ave c vigueur , on chercha à
engager ¿es perfonnes qui avoient des
les g a r d e r , &
effets en nantiffement à
à me. contrarier au lieu de me favorifer dans la
vente , comme je les en avois prié.
Pendant un v o y a g e que je fis en Bourgogne pour me procurer
les reffources dont je p ouvois avoir befoin & fermer la bouche a
mes ennem is, ils répandirent* d,e tous cotés que je ne reviendrois
p lu s , qu’on alloit nommer un Curé à ma place , & que mes créanciers
courroient rifque de perdre tout ce qui leur étoitdû. D es bruits pareils
produifirent l'effet qu’on devoit en attendre : quelques-uns de mes
créanciers s’emparerent fans formalités , des bois , des b e ftia u x ,
des toiles de. c o t o n . . . . ; d’autres firent faifir mes métiers & les
meubles qui étoient dans l ’établiiTement, ce qui fournit le préteXie
de chailer tous les enfans qui y gagnoient leur v ie . O n auroit bien
defiré que ces mêmes métiers euffent été enlevés fur le champ ;
car c’eft à cette filature qu’on en v o u lo it: 1 orgueil de mes adverfaiies ou plutôt leur envie ne pouvoir la fouffrir. D ailleurs on regardoit cette opération comme un coup auquel je ne pourois pas
ré fifter, & un vrai m o yen de me forcer à quitter ma Paroiffe &
la maifon.
Inftruit de pareilles m e n é e s, je revins promptement! fans a vo ir
terminé les er.gagemens que je me propofois de prendre.
A mon
a r r i v é e , je tranquillifai une partie de mes créanciers ; j aurois du
attaquer ceux qui s’étoient payés de leurs mains , & qui s obftinoicnt de retenir en
leur puiffance des objets plus que fuffifans
pour affurer leur créance : mais la bonté de mon cœur fut tou
jours une des principales caufes de mes malheurs.
Je n ai jamais
fu attaquer perfonne , & me faire violence pour demander ju ilice .
fouffrir & faire du bien , v o ilà les deux difpofitions qui dominèrent
toujours fur mon ame. J’entrai e n fu ite , par intermédiaires, en ex
plication
avec quelques-uns de mes cor.freres qui auroient dus
rougir eux-mêmes de tout ce qui étoit arrivé à leur inftigatioR.
Je leur repréfentai que j’avois pour près de IJCOO liv. e n t o i le s ,
en beftiaux , en bâtimens , en fonds de terre & en cotcfi filé ; qu iL
m’é;oit
encore dû des fommes confidérablcs , & que n ayant pas
A X
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touché la plus grande partie des honoraires de ma C i r e , comme
le portoit l’a ile de ma prife -Je poíTe¡fion , j’avois au m o:ns }000
à réclamer , qu’on ne pouvoir me refufer , attendu que je ne
Jes demandais que pour le foutien de l’établiiiement de c h a r it é ,
que j’avois formé.
T outes ces repréfentations f irent »inutiles , & au lieu d’appaifer
mes créanciers, on ne cherchoit qu’à animer ceux qu’on cro yo it
les plui propres à me pourluivre & a féconder les m auvaik s in
tentions de mes a iverfaires. O n auro't defiré fur-tout qu’un d ’entr’eux pût obtenir contre moi une fentence de prife de corps ,
afin de forcer par-là M. l’Evêque & mes fupérieurs majeurs a me
de il tuer-
I s auroient
réiiffi certainem ent. s’il avo it été poifible
de me tra luire devant des juges qui euffent pu fe laifler prévenir ;
mais heureufement j’avois à faire à un juge ferm ï & incapable de
prévention. Convaincu de mon innocence & d-; la malice de mes
e m e n i s , il fit pour moi tout ce que le vice des lo ix permet de
faire pour la difenfe des innocens perfécutés.
T e l étoit l’état de
mes affaires & l’acharnement de mes adver-
fa ir e s , lorfqtie la ré volu tio n que nous v o y o n s s’o p é r e r , vint ra
nimer mes efpérances & déconcerter leurs trames. Je ne foupirois
qu’après le moment oii il me feroit permis de réclamer la juftice
que je de-ntndo.s inutilement depuis plufieurs annjes.
C ’eft dans
cette vue que je me tranfjortai à P aris, au mois de mai de rn ie r,
tant pour implorer le fecju rs
les droits de ma Cure.
de mes amis , que pour faire régler
La lenteur des opérations de l’ Affemblée
m’y retint plus long temps que je n’avois cru : mais je ne voulus
pas revenir que la conftitution du Clergé ne fut te r m in é e , & que
je n’enfle fait décider mes prétentions.
perdu de
vu e ,
La haine ne m’avoit pas
& un incident fort fimple procura à mes fupé
rieurs une occafion & un homme tels qu’ il les falloit pour w c faire
a r r ê t e r , & me forcer à donner ma démifllon.
Le 10 du mois de ju ille t , le S’r, M o llé , dodleur en m édecine,
a : procura un billet de caiiTe de 200 liv. pour e n v o y e r en p ro
vince ; je lui avois promi» de le lui remettre dans la huitaine : je
le p ouvois d’autant plus aifénunt ,
qu'on devoit m’apporter d e i
�15/
fonds avant l'époque
*
jamais mémorable du 14. Le lundi 12 J e
Sr. Mollé , pouffé je ne fais par q u i , vint me trouver & n e dit
avec menaces qu ’il lui falloit la fomme fur le champ ,0:1 qu’il me
feroit un mauvais parti.
J’eus beau lui protefter que j’avois fait
une perte qui me mettoit dans l’impoffibilité de le faire dans le
moment , qu'il falloit attendre au lendemain , je ne pus rien ob
tenir. V oyan t enfin qu’il me feroit impoflible de l’a p p a ife r, qu’il
étoit capable de faire un éclat dangereux, peut-être de fe porter
a un mauvais coup dans la violence , je lui propofai d’aller avec
moi trouver le Procureur-général de la C on grég a tion , qui ne pouv o it pas me refuier une pareille fo m m e , fur - tout après les der
niers décrets de l’Afl'emblée nationale , qui me regardoient comme
tous les autres Curés.
Le Sr. Mollé accepta la propofition avec d ’autant plus de faci
lite que j ’ai lieu de croire que tout étoit c o n c e r t é , & que l’on fe
propofoit de faiiir avec empreflement cette
occafion pour me
compromettre. J’allai donc dans la maifon des PP. de l’O ratoire,
rue St. H on oré, fur les neuf heures & demie du foir. Conduit chez
le Procureur général, à peine daigna-t-il m’écouter : je m’étois at
tendu à ce retus , mais je voulois reiler dans la maifon jufqu’au
lendemain , tant pour ma fureté , que pour la tranquillité du Sr.
Mollé. Celui-ci après m’avoir quitté pendant quelque temps pour
aller parler à des perfonnes de la Communauté que je me difpenferai de nom m er, revint me trouver, m’accabla d’infultes & d ’avan i e s , & finit par me faire conduire au corps«de-garde qui eit dans
la maifon même des PP. de l ’Oratoire.
Le Sr. Mollé après m’avoir dit tout ce que la violence put lui
d;fter , prit le parti de fe retirer. Le chirurgien des PP. de l’O ra
toire eut alors la compla.fance de me propofer de monter dans fa
c h a m b r e , où je paiTai la nuit fur un fauteuil. Le Frcre Lamare me
vit le lendemain au m atin, & caufa avec m o i , fans favoir ce qui
m’étoit arrivé. Sur les huit à neuf heures arrive le Sr. Mollé q u i ,
après de nouvelles in fu lte s, demande un billet que je lui donnai
«levant le chirurgien, mais q u’il fe garda bien de produire au D iftr itt, étant plus avantageux pour lui de me faire pafier pour un
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efcroqueur que pour un débiteur. Après cette o p é r a tio n , if fortit
pour aller voir le P e r e Poiret ; le Secrétaire-greffier .devant lequel
je devois être traduit, le vit aufli : ils ne me le cacherent ni l’un ni
l'autre , ajoutant que le Pere Poiret les avoit fortement engagés à
me traiter ave c toute la rigueur poilible , qu’il leur avoit même
dit
que j’étois un mauvais fujet , & qu'on ne me regardoit plus
comme de l’Oratoire. Malheureufemtnt j’ignore le nom des perfonnes qui fe trouvoient au D i f t r i d , lorfqu’ils me firent cet aveu.
; Sur les onze heures, le Secrétaire-greffier me fit venir pour en
tendre la dépofition du Sr. Mollé ; quelqu’interprétation qu’il ait
voulu donner à mes intentions, il ne put m'accufer d’autre chofe
que de lui a vo ir emprunté un billet de 200 liv. , dont je devois
lui faire le montant dans la huitaine. Malheureufement pour moi
il n’avo it pas voulu recevoir un b ille t, lorfqinl me le prêta. Cette
dépofition finie, on me conduiftt dans une ch am bre: en y a lla n t,
je dis que j’avois befoin de prendre quelque chofe ,
on eut la
cruauté de me répondre que fi j ’avois de l’argent , on iroit chez
tin ttaiteur me chercher ce que je voudrois ; fur ce que je dis avec
fermeté qu'étant dans une maifon de l ’Oratoire , je n ’avois pas
befoin de payer ma nourriture, on m 'envoya de l’eau & du pain
de la cuifine. J’eus beau demander un peu de vin pour mes dou
leurs d’efto m ac, il fallut m’en pafler.
Sur les fix heures du foir , on m ’e n v o y a chercher par 4 fufilîers
qui ne me parlèrent pas en foldats citoyens , mais en vrais fateflites. Arrivé au Comité qui fe tient dans une chambre des PP. de
l’O r a t o ir e , le Secrétaire-greffier me demanda ma réponfe à la dé
pofition du Sr. M ollé , que je lin fis ecrire j il me demanda aufli
quels étoient mes fujets de plainte contre mes fupérieurs : je fus
fort furpris d’une pareille queftion ; préfumant néanmoins qu’elle
n’etoit pas faite fans m o t i f , je fis écrire tout ce dont j’avois à m e
plaindre ; & comme je n’eus pas de p®ine à croire que l’on fe
férviroit du Sr. Mollé
à
donner ma
&
désniifion
du Secrétaire-greffier pour me forcer
qu’on cherchoit
à m’extoxquer par une vo ie pareille ,
dépofition
,
une
proteftatîon
bien
depuis
long - temps
je fis inférer dans ma
claire
contre
tout
ce
�qu’on pourroît exîgôr de moi par furprife e u par v io le n c e , avant
qu’on m’eût donné uny confeil &
qu’on m’eût fait conduire au
Com ité des rapports , où j’avois une chofe efienticlle a commu
niquer à un D éputé de l’Aiîemblée Nationale.
J’eus foin aufll de
réclamer les droits de l ’h o m m e , notamment le décret qui défend
d’arrêter perfonne fans une fentence préalable.. . . Enfin je fis inférer
une plainte formelle du refus qui m’avoit été fait de me donner
à manger......... Ma dépolition auroit été bien plus en r è g l e , £ je
n’avois été prefle p a r le feribe qui ne tarda pas à fentir qu’il.s’étoil
chargé d ’une mauvaife commiiîion , & à me faire éprouver fa mauvaife humeur .• néanmoins il eut l’attention de me faire apporter
de fon h ô t e l, un morceau de jambon a vec du vin. Après un pareil
f o u p e r , je demandai à paiTer dans une chambre pour m ’y repofer ,
ce qui me fut refufé ; & comme fi on avo it cherché à me procurer
tous les défagrémens p oifibles, fur la plainte portée contre une
perfonne acculée
de v o l , on fit venir , une fille publique avec
d’autres gens de cette efpèce qui s'entretinrent devant m o i , pen
dant toute la nuit , de toutes les horreurs qui fe commettent au
Palais royal. Quand on les auroit p ayés pour cela , ils n’en auroient
pas dit davantage : jugez de mon inquiétude & de ma contenance
au milieu d’une pareille compagnie.
Le lendem ain, jour à jamais mémorable du 14 ju ille t, jour qui
fera époque dans ma vie comme dans les annales du m o n d e , le
• Greffier alla communiquer ma déposition au Pere P oirC t, fupérieur d e
la nu ifon , M. D u p o n t , Préfident du Com ité , qu’on avo it fait venir
pour en prendre co n n o ifla n ce, le v it auiïï: ils ne purent me cacher
ni 1 un ni l ’autre qu’elle l’avoit fortement c h o q u é ; je le crois : les
plaintes qu’elle co n tie n t, lont fortes; mais le Pere Poiret doit fe
rappeler qu’elle ne contenoit que le réfumé de ce que je lui avois
écrit plufieuri fois. Néanmoins je crus reconnoître à leur langage
q u e l l e avoir fait fon e ffe t , & qu’on étoitdifpofé à m ’accorder ce que
je demandois.
En conféquence je commençai A me tranquillifer ,
& je ne crus pas devoir profiter des Gardes nationales du dépar
tement du P uy -d e -D ôm e , qui vinrent s’aflembler fou9 la fenêtre
du diflrift où j’étois détenu. J’envifagccis moins., dans un é c la t,
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les avantages que je p ouvais en retirer, que la h o n tî qui pouvoit
en réjaillir i'ur toute la congrégation , fi mon affaire devenoit pubü q ie. C e qui acheva
de me tromper , c’eit que toute la journée
je fus affez bien traité ; qu’on me permit même d aller avec un
g a rd e , au partage des troupes nationales, dans la rue St. Honoré.
L e .S r. P ayen , commiffaire de quartier , en exercice ce jour- 3à ,
ne m ’enferma qtie pendant qu’il alla diner. Les PP. de l ’Oratoite
me firent apporter à manger , la premiere fois par un petit dom eftique, la fécondé par un jeune Frere dont j ’ignore le nom.
Sur les dix heures du fo ir } le Greffier me p ropora une chambre
que j ’acceptai avec plaiiir , v u
le befoin que j ’avois de repos ,
mais que j’aurois furement refufée fi j’avois connu la mal-propreté
du lit *, j ’aurois à coup sûr préféré de paffer encore une nuit fur
un fauteuil. Avant de m’y rendre, j’avois prié le Greffier de me
faire ouvrir le lendemain de bonne heure , parce que j’avais des
lettres preffées à é crire , & une perfonne à voir avant fon départ;
ajoutant que fi on me faifoit manquer l ’un & l’a u tre , on me fercit
un tort irréparable.
Le Greffier me promit de m’accorder ma dem ande, mais il ne me
tint pas p a r o le ; & il me la'.fla enfermé jufqu’à fix heures du f o ir ,
malgré tout ce que je pus lui faire dire pour lui rappeler fa prameffe. Arrive alors dans ma chambre le commiffaire Payen qui me
préfente de la part du Pere P o ir e t , une formule de démiflîon à figner.
Jugez de ma furprife & de mon indignation. - - A v a n t t o u t , lui disje » vous devez m ’accorder d’aller au Comité des rapports,comme
je l’ai demandé dans ma dépofition. — La chofe eft fort inutile , on
ne vous l’accordera p a s ; il faut ch o ifir, ou de figner , ou d’aller
à la Force. - - Comment a la Force , lui dis-je ; avez-vous une fentence contre moi ? ai-je été condamné? mon procès eft-il fait?
une fimple dépofition e(t-elle fuffifante pour faire emprifonner un
h o m m e , fur- tout un homme de
mon caraftère, —
N’im p o rte ,
ajouta-t-il , v o y e z & décidez-vous. Je ne parlerai pas ici de l’ar
gent qiie les Oratoriens
prétendent avoir été donné ; j ’aitendrai
q u ’ils aient produit leurs preuves.
Je représentai enfuite au commiffaire de quartier que j ’avois
�té i
9
contrafté des dettes étant C u r é , pour un établiiTement de charité
que j avois formé dans ma P a ro iffe , & qu’il me reftoit pour plus
de 1 2000 liv. tant en fonds de terre & en bâtimens , qu’en mobi
liers ou provilions , que par conséquent il m’éroit impoiT.ble de quitt er
Effiat dar.s ce trcment : toutes ces reprcfentations furert inutiles.
V o y a n t enfin que ma préfence alloit ctre absolument néceffa;re en
A u verg n e , je pron is de figner ma démiifi }n , comme le feul m oyen
que j ’avois pour obtenir
ma liberté.
Lorfque je fignai cet a & e ,
j ’étois bien c o n v a :r.cu que le décret qui concerne la nomination
aux C u re s, étoit fanftion né; mais je me gardai bien d’en parler au
Sr.
Payen. Je ne lui dis pas non plus que dans ma dépofition ,
j ’avois protefté contre toute furprife & toute violence qui pouvoit
m’être faite : je voùlois abfolument être libre pour me faire rendre
juftice.
Sur ma promeiTe, on me ccnduifit au C o m it é , où le Secrétairegreffier commença par exiger une lettre dans laquelle je déclarois
au Pere Poiret que je renonço s à la congrégation. Avant de la
f a i r e , je repréfentai que cette lettre étoit fort inutile , qn’on lui
a v o it dit
plufieurs fois que je n’étois plus de la co n g rég a tio n ,
qu’en conféquence
1 p ou v oit fe difpenler d’infifter fur cet article.
Sur de nouvelles i n f s n c e s , j'écrivis au Pere Poiret & non au régime,
que je renonçois à la congrégation , regardant cette lettre exigée
de m o i , non con me un acte , mais comme une preuve ; qu’on me
regardoit encore tomm e membre de la congrégation , & que l’in
dignité des traitemens que j'avois reçus retomboit fur le régime
même.
Le Sr. Lavau nie conduifit enfuite chez deux notaires : ne les ayant
pas tr o u v é s , il me ramena à la maifon de St. Honoré. Sur les huit
heures
& demie du foir ,
le même accompagné du Sr. P a y e n ,
me reconduilit chez M. Monot ,
notaire royal ; ils firent dreffer
l ’stte eux-m êm es fat. s que je difle un m o t , excepté au moment où
M,
Monot
crut de oir me queftionner.
A tout ce qu’ il put me
demander , je ne réj ondis autre chofe finon que je me portois bien ,
& que je n’étois pas fe u . Je ne fis rucune ri j rélcntatic n li r te ut
ce qu’il mit de plu», dans la crainte que l’on ne me conduifit de
�«
•
/
nouveau
IO
au diftri& , où
je
favois
trop bien comment on i;cnd
juftice.
Q u an d l ’a£le fut f i n i , je demandai à en prendre note avant de
le iigner ; mais on me promit de m’en donner copie auiîi-tôt que
je l’aurois figné : & quand l’opération fut faite , les Notaires s’étant
parlé tout bas, ils répondirent que je n’a v i i s qu’à revenir le len
demain & qu’on me la donneroit : ils vouloient apparemm ent m’em
pêcher de
faire un
regrer ; ils ne me cacherent pas même leur
crainte , ce qui donna beaucoup d’inquiétude aux deux tém oin s,
que je
me hâtai de
quitter de peur d'être arrêté de nouveau.
D a n s tout ce que je viens de d i r e , je ne puis citer d’autres perfonnes que les Notaires & les membres du diflrift qui m’avoient
accompagné ,
mais je protefte , devant D i e u , que je r.e fais que
rapporter les chofes comme elles le font paiTées. Avant de quitter
les triiles inftrumens de mon m alheur, j’eus la précaution de les
prévenir que le Sr. Nlollé avo it un billet à m o i , & qtie mon in
tention étoit de le retirer moi-même.
J’errai une bonne partie de la nuit fans favoir quel parti pren
dre. Le lendemain de grand m a tin , j ’allai au champ de mars faire
ma priere fur l’Autel de la liberté ; jugez des réflexions que je dus
y fa ir e , je me déterminai enfuite à aller paffer quelques jours à
F on ta in e b le a u , pour y réfléchir à mon aife : mon intention étoit
de revenir enfuite à Paris , mais ayant trouvé com pagnie, je partis
pour EfHat , jugeant bien que ma préfençe y feroit néceflaire au
moment où la nouvelle y arriveroit. Le mardi 20 , je donnai à M.
le M a i r e , pour remettre au Pere P eirier, fupérieur de l’EcoIe-milit a ir e , une lettre dans laquelle je le prévenois que ma démiifion
ayant été f o r c é e , je comptois r e g r e t te r , & qu’en conféquence il
convenoit de tenir la chofe fecrette , de peur d’éclat ; mais la nou
velle s’étoit déjà
répandue.
Je ne dirai rien fur tous les bruits
& les calomnies qu’on fe hâta
de répandre en même temps fur
mon compte.
J’allai enfuite à R i o m , où je me hâtai de faire fignifier mon re
gret au Général de l’Ordre , au Supérieur de la maifon , & au
Greffe eccléfiaftique, afin que perfonne n en prétendît caufe d’igno-
f
�II
rance. Le 2^ je me prérentai à la facriftie pour faire mes fondions.
Toiîtes les avenues étoient remplies de PP. de l ’Oratoire : on ne
laiffa entrer dans la facriftie avec moi , que M. le Maire & un
autre témoin
quoique pluiieurs habitans demandaient à être ad
mis. Sur la demande que je fis au Supérieur de me délivrer les
les regifttes & les ornemens p o u r 'd ir e la Mefle , il me répondit
que ne me reconnoiffant plus, ni comme membre de la congréga
tion , ni comme Curé , il ne fouffriroit pas que je fifle aucune fonc
tion. Je lui demandai enfuite qu’il exhibât une nomination , une
prife de poiTeffion & un titre qui l’autorisât à ce refus ; après cela
je fis dreffer a & e , & je me retirai pour éviter tout éclat.
Depuis cet a & e , j’ai obtenu un certificat honorab'e de la partie
la plus refpettable des habitans de ma P a ro ifle , auxquels fe font
joints M. le Maire & le plus grand nombre des Officiers municipaux.
Le 1 4 , je fis afligner le Supérieur à paroître à la première audience;
mais au lieu d’attendre la décifion , il alla chercher le Pere A lbiac,
pour qui il avo.t obtenu de nouvelles prov.fions datées du 9 a o û t ,
& un rifa daté du 16 , quoique mon regret eût été fignifié aux
fupérieurs majeurs & au Greffe eccléfiaftique, avant la fin de juillet.
L e Pere Albiac piit poiïeiïîon le 1 7 , en ca ch ette, n’ayant avec lui
que trois té m o in s, dont deux font gagés par la maifon des PP. de
l’Oratoire ; le roifième leur devant beaucoup eft auffi comme à leur
diipofition.
11
auroit été plus naturel d’y appeler M. le Maire if
les Officiers m unicipaux, mais on craignoit peut-être quelqu’oppofiiion & on v^uloit profiter du moment où j’étois âbfent. J’efpere
que le nouveau régime ne fouffrira plus de pareilles
fupercherics.
U n afte de prife de pofleifion eft comme un afte de m a ria g e , il
ne fauroit être trop public.
�Quc/ïiens à examiner.
1 L E
Secrétaire & le Commiffaire de quartier avoient-i!s le droit
d’ arrêter & de garder en chartre privée un Prêtre & fur-tout pour
une fimple dette ?
2
Le Diftrict tenant fes féances dans la maifon des PP. de l’Ora
toire , peut-on dire avec vérité que ceux-ci aient ignoré la détention
du fieur P y dans une de leurs chambres?
3°. Le fufdit Py ayant protefté , dans fa dépofition au District, contre
toute furprife & toute violence , avant qu’on lui eût donné un confeil ,
& qu’on l’ eût conduit au Comité des rapports , peut-on dire que la
rénonciation à la congrégation , & fa démiffion aient été des actes
libres ? Le Pere Poiret fait lui-même le contraire , & il ne peut nier
que tout a été fait par fes ordres.
4 °. Les deux Notaires ne peuvent pas nier que le fieur P y a été
conduit chez eux , par MM. Lavau & Payen qui l’avoient gardé
jufqu’à ce jour. E ft-il probable que le fieur Py eût été chercher de
pareils témoins pour affifter à la démiffion , fi elle avoit été libre ?
5 . Que les Notaires & les PP. de l’Oratoire difent qui a préfenté
la démiffion au Supérieur majeur & à M. l’Evêque : ceux-ci ne diront
certainement pas quelle leur a été préfentée par le Curé d’ Effiat.
6°. Les Notaires , s’ils n’avoient pas été du complot, auroient bien dû
remarquer que l’acte n’étoit pas libre ; lorfqu’ils reconnurent les deux
témoins qui n’auroient furement pas quitté leur di f t r ict, pour accompagner
le Curé d’E ffi a t , s’ils n’avoient pas eu peur qu’il ne s’échapât...............
Pourquoi lui refufa-t-on copie de fa démiffion ?
7 ° . P eu t-on croire qu’un Prêtre libre & en bon fens, ait pu renoncer
à fa Cure & à fon état , dans les circonftances actuelles ; fe mettre ainfi
à la merci de fes ennemis , & fe priver d’une des plus grandes reffources qu’il put avoir ?
^
Le fieur Py ayant fignifié fon regret , & n’ y ayant perfonne de
pourvue lorfqu’il fe préfenta pour faire fes f onctions, quel droit M.
Perrier , Supérieur de la maifon d’Effiat , avoit - il de s’oppofer à ce que
le fufdit Py exerçat fes fonctions ? La nomination qui a été faite depuis
du Pere Albiac , prouve bien qu’il n’avoit pas accepté la Cure luim é m e , & que par conféquent il ne pouvoit pas fe prévaloir des provifions qu’on lui avoit envoyées.
9'J. Si M. l’E v êquer fon grand Vicaire & le Pere Albiac avoient été
bien inftruits de cette tram e, ils ne fe fero ient furement pas expofés
à un pareil compromis, comment a-t-on pu leur repréfenter la démiffion comme purement libre ?
1o u. Si la démiffion e ft nulle, l’Evêque & les Supérieurs majeurs
peuvent-ils fe réunir pour dépofer le Curé d’Effi a t , fans lui faire fon
procès? L ’arrêt du Confeil qu ils citent en leur faveur, pourroit-il être
regardé comme loi à préfent que tout actte de defpotifme eft prohibé ?
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Godemel. 1790?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
démission forcée
prêtres
oratoriens
bienfaisance
filatures
mendicité
diffamation
créances
saisie
prison
Description
An account of the resource
Titre complet : « Lettre à Monsieur Godemel, juge de Justice de Riom sur les injustice que M. B. Py curé d'Effiat a éprouvées » .
Titre manuscrit.
L'auteur a édité en 1790 à paris, chez Devaux, l'ouvrage suivant : Esprit d'une constitution nationale, par un curé de campagne, [Par M. Py, curé d'Effiat en Auvergne] / Jean-Baptiste Py.
Table Godemel : démission : un curé qui a renoncé à la congrégation des pères de l’oratoire et a donné sa démission de sa cure, peut-il exciper de surprise et de violence ? S’il a signifié son regret, avant son remplacement, a-t-on pû s’opposer à ce qu’il exerçât ses fonctions ? a-t-on pu lui nommer un successeur avant de lui avoir fait un procès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1790
1783-Circa 1790
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1009
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Effiat (63143)
Rights
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Domaine public
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bienfaisance
Créances
démission forcée
diffamation
filatures
mendicité
oratoriens
prêtres
prison
saisie
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Text
____
6a
J U G E M E N T
D u Tribunal civil de premiere instance de l'arrondis
sement de R iom, département du Puy-de-Dôme
,
Rendu le 20 mai 1812,
Entre sieur
t
J oseph
J O U B E R T , demandeur;
E t si eu r J o s e p h C O U R B Y - C O G N O R D , d é f e n d e u r .
P O I N T
D E
D R O I T .
Y a-t-il urgence ?
L e sieur Courby d oit-il être condam né comme stellionata ire , et par corps , à la restitution du p rix des actes de ventes
et cession dont il s'a g it, pour n'avoir pas déclaré les hypo
thèques légales et conventionnelles qui grévaient les objets
par lu i vendus ou hypothéqués ?
D o it- il être condam né à des dom m ages-intérêts?
E st-ce le cas d’ordonner l'exécu tion du jugem ent par pro
vision , sans préjudice de l'appel et sans caution ?
MOTIFS
S
ur
ET
DISPOSITIF.
quoi,
Apres que la cause a été plaidée solennellement aux audiences
des 3 o a v ri l, 6 , 7 et 14 m a i , et qu’à l ’audience dudit jour 14
m a i , le tribunal a continué sa délibération à cejourd’h u i , à
ladite audience, il a été rendu le jugement suivant:
E n ce qui touche la demande en renvoi de la c a u s e , pour
être fait droit à tour de rôle ;
Attendu , en fait, que le sieur Joubert a demandé que la
cause fût jugée à bref d é l a i , parce qu’il s’agissait d’objets trèspressans pour lui ; que la contestation présentait à décider une
1
!
�question de contrainte par corps, qui exige la plus grande
célérité; que la cause fixée d’abord pour l ’audience du dixhuit décembre mil huit cent onze , et par suite des délais
que les circonstances ont nécessités , et par les remises de
mandées par le sieur C o u r b y , n’ a pu être jugée jusqu’à ce
jour , ce qui fait un délai de plus de cinq mois ; qu ’ainsi le
sieur Courby ne peut se plaindre de n’avoir pas eu le lems
nécessaire de préparer ses moyens , et que dans la réalité il
a occupé deux audiences pour le développement de sa cause;
Attendu enfin que les articles cinquante-quatre et soixantesix du décret im pé rial, du trente mars mil huit cent h u i t ,
concernant la police des tr i b u n a u x , autorisent le président à
fixer , d’après l’exigence des cas , celles des causes qui doivent
être jugées à bref délai ; que par toutes ces raisons, la de
mande du sieur C o u r b y , en renvoi de la cause pour être
jugée à tour de rôle, ne paraît q u ’ un prétexte dilatoire qui
ne peut être accueilli ;
E n ce qui touche le stellionat reproché au sieur C o u r b y ,
dans les difTérens actes passés entre lui et le sieur Joubert ;
E t d’abord ce qui concerne les vices argués, dans la vente
du onze avril mil huit cent se p t, et le moyen »tiré d e ce
que l’immeuble vendu était lors du contrat grevé d’une mul
titude de créances au-dessus de sa valeur ;
Attendu q u ’il est constant par le jugement d’ordre , qui a eu
lieu à Thiers , pour la d i s t r ib u t i o n du prix de cet hé ri ta g e ,
qu’à l’époque
de
la v e n t e , cet immeuble était absorbé par
une foule de créances antérieures; que la plupart étaient exi
gibles , et du fait personnel du sieur Courby ; q u ’il ne p o u
vait les ignorer ; en sorte q u ’en vendant ce fonds au sieur
J o u b e r t , Co ur by était comme assuré de n’y avoir qu’une pro^
priété précaire et momentanée ; qu e néanmoins il l ’a vendu
comme une propriété solide et iucommutable ; que par là il
a sciemment trompé son acquéreur; que si, en principe, celui
qui vend l’immeuble, qu’il sait ne pas lui appartenir, c o m
met un stellionat, il doit en être de même de celui qui
�(3)
vend un héritage tellement grevé de ses propres dettes, q u ’il
est à la veille d ’en être exproprié ; il est évidemment de mau
vaise f o i , et doit être soumis à la même peine du stellionat ;
Attendu que plusieurs arrêts anciens n’ont pas hésité de
prononcer celte peine contre les débiteurs de mauvaise foi,
q u i , étant notoirement insolvables, contractaient des engamens q u ’ ils savaient bien ne pas pouvoir remplir ; que la
saine morale applaudit à la sagesse de ces décisions ; qu ’elle
est appuyée par l’autorité de docteurs recommandables; qu’auoune loi ne s’oppose à en faire l’application à des cas sem
blables ; et que la justice, animée du même esprit, dans tous
les t e m s , doit se complaire à confirmer ces principes ;
Attendu que l ’hypothèque spéciale , donnée pour sûreté à
celte vente r ne peut mettre le sieur Courby à l ’abri du stel
lionat , puisque le champ de la Ro uc he , qui forme cette h y
pothèque , et qui fait partie du bien de Bicon , était égale
ment à cette époque absorbé par des créances énormes, aux
quelles le sieur Courby avait affecté ce bien de 13icon en to
talité;
que ces créances qui lui étaient personnelles présen
taient une somme de plus de 210,000 francs, à laquelle se
joignaient encore les créances auxquelles le domaine avait été
assujetti par son vendeur immédiat; de sorte que ce bien de
Bicon était hypothéqué, au 11 avril 18 0 7,3 une masse énorme
de près de 3 oo,ooo francs; que par conséquent l ’hypothèque
donnée à cette première vente était aussi illusoire que la v e n te
m ê m e ; qu ’elle n’était qu’ une fraude ajoutée à une première
f i au d e , et provoquait aussi la peine du stellionat ;
Attendu que pour s’y s o u s t r a i r e , le sieur Courby allègue va i
nement qu ’il n’a déclaré ni l’héritage ve n d u , ni l ’objet donné
en hypothèque, libre de toutes charges, ni sujet à des hy p o
thèques moindres que celles qui y étaient assises; et que son
silence à cet égard le met ù l’abri des rigueurs de la l o i , q uj n’a
attaché le stellionat qu’a u ne déclaration expresse de franchise;
Une telle prétention doit être rejetée; car si, dans l’ancienne
jurisprudence, la déclaration de franc et quitte devait être expresse
�(4)
pour encourir le stellionat, c’est parce qu’à cette é po que , les
engagemens passés par actes publics grévaient de droit d’une
hypothèque tacite et générale tous les immeubles présens et à
venir du débiteur; de sorte qu’après une première hypo thè que ,
il pouvait encore en constituer de nouvelles, parce que, dans la
généralité de ses biens, dans l ’obscurité de ses affaires, on ne
pouvait reconnaître si les nouvelles hypothèques étaient bien ou
mal assises ; on ignorait si les biens à venir ne couvriraient pas
l ’insuffisance des biens actuels; par conséquent rien ne pouvait
asseoir un motif déterminé de stellionat, au moins d ’une décla
ration précise de franc et quitte; mais il n ’en est pas de même
dans le système hypothécaire a c tu el , car l ’hypothèque étant tou
jours conventionnelle, spéciale, et limitée aux seuls biens pré
sens , le débiteur connaît avec certitude les hypothèques et toutes
les autres charges dont il a grévé ses immeubles; si donc il les
vend comme propriété solide, ou s’il les donne pour hypothèque
sp éci ale, les connaissant absorbés par des créances antérieures,
il sait qu’il ne donne qu’une sûreté imaginaire, et q u ’ un gage
pe rf id e ; il sait q u ’il trompe, et la loi qui oblige le créancier à
prendre une hypothèque spéciale, se rendrait complice de la
fraude, si elle ne la punissait pas;
Attendu q u ’on invoque mal à propos l ’article 2059 du Code
Napoléon, comme ayant fixé les seuls cas du stellionat; c’est
une erreur ; il est évident que les termes de cet article ne font
q u ’annoncer en général quelques e sp è ce s de stellionat, sans
prétendre les désigner toutes; ils sont seulement indicatifs et
non limitatifs des cas du stellionat, c’est ce q u ’on apprend par
la discussion au Conseil d’Etat ; M . le Conseiller d’Etat R é a l
ayant observé que l’article ne spécifiait pas tous les cas du stel
lionat, M . le Sénateur Tronchet répondit que Varticle avait
é té rédigé en fo rm e gén érale , afin de ne rien préjuger sur le
régime hypothécaire ; or le système hypothécaire, en ordonnant
la spécialité des hypothèques, a v o u lu , sans doute, q u ’e lle pro
duisit un effet réel; un effet qui la tirât du vague de l’incertitude
générale et clandestine; il a voulu que la spécialité présentât un
�gage capable de rassurer, et qu’elle ne iût pas un pie'ge à la
bonne foi du créancier ;
.
Attendu q u ’on allègue, sans motifs, que le sieur Joubert a
connu ou dû connaître les charges du fonds vendu , et celles du
fonds qui lui a été hypothéqué; qu’il a pu consulter les registres
du conservateur, et qu’il doit s’imputer de n’avoir pas pris cette
précaution;
L e sieur Joubert a v a i t , sans contredit, celte faculté, mais
elle n’était pas une obligation pour lui pendant que la bonne foi
et le vœu de la loi obligeaient le sieur Cour by à. ne pas pré
senter une hypothèque frustratoire, une hypothèque spécieuse
plutôt que spéciale, car si la spécialité ne renferme pas la certi
tude d’ une garantie solide et d’un gage présenté d’une part, et
accepté de l’autre avec bonne fo i, elle manque son but ; la m a u
vaise foi continuera de profiter à son auteur, et le créancier
confiant, d’être victime de sa crédulité; q u ’il faut donc l'econnaître, dans la spécialité en elle-même, un supplétif de la décla
ration de franc et quitte; qu’elle en tient lieu pour les deux par
ties contractantes, et que le sieur C o u r b y , quoi qu’il n’ait pas
fait en termes exprès cette déclaration de franc et quitte, ne peut
se soustraire au stellionat; l’actiou a parlé aussi clairement que
les paroles;
En ce qui touche le vice résultant de ce que le sieur Courby
n’a pas déclaré expressément H y p o t h è q u e légale de sa femme,
soit dans la vente, soit en fixant l’hypothèque spéciale;
A t t e n d u , relativement au contrat de vente, que l'omission
du sieur C o ur by à cet égard le rendrait inévitablement coupable
de stellionat; néanmoins comme il a été établi, en l ’audience,
que le sieur Joubert avait dans la suite, et en 1808, purgé
l’hypothèque de la dame Courby sur le fonds vendu, en se con
formant aux formalités precriles pour cela ; que dès-lors le s.r
Jou b e rt, n’ayant plus en ce moment à craindre l’hypothèque
légale , est sans intérêt ; que l’intérêt est la règle des actions ;
le sieur Joubert cessant donc d’en avoir sur ce p o i n t , sa de
mande ne peut être accueillie ;
,
�Mais attendu q u ’il n’en est pas de même du cliamp de la
B o u c h e , donné en hypothèque; car cet héritage, ainsi que tout
le domaine de B ic o n , a été frappé de l’hypothèque légale de
la dame Courby ; et quoique le fonds vendu ait été purgé de
l’hypothèque de la fe m m e , le domaine de Bicon n’a pas pour
cela cessé d ’y être affecté; ce qui imposait au sieur Courby un
devoir absolu de la déclarer ; déclaration qui était de rigueur
étroite. L es art. 2 i 36 et 2194 du Gode ¡Napoléon en font une
nécessité indispensable aux maris. Les ternies de la loi ne per
mettent ni interprétation ni restitution, et la peine du stellionat,
prononcée conlre le mari qui ose y manque r, annonce l’impor
tance que le législateur a attachée à cètte déclaration;
Attendu q u ’il est inutile d ’alléguer que cette disposition de
la loi doit être entendue ci v il em e n t, et ne s’applique qu’au cas
où le créancier a pu ign orerle mariage, et par suite l’hypolhèque
légale, mais que le s.r Joubert n ’est pas dans cette position; oncle
et parrain du s.r Co u rb y , ayant même signé son contrat de m a
ri age , il connaissait parfaitement la qualité du sieur Courby, et
l’hypothèque légale de sa femme ;
R aisoqner ainsi, c’est se mettre en opposition avec les termes
et lresprit de la loi. E n eJFet, en pr&scrirant au mari de déclarer
l’hypothèque de sa fem me , les articles du Code ne se servent
pas d’expressions communes et vagues qui laissent entrevoir qu’il
peut y avoir lieu à des modifications. Ici tous les mots sont i m
périeux. Tje mari , dit la l o i , est tenu de prendre inscription sur
lui-m êm e ; s ’i l y d m anqué , il doit déclarer expressément l'h y
pothèque lég a le; sin o n , i l est rép u téstellio n a ta ire , e/, comme
t e l , contraignable par corps. Ainsi la loi ne pouvait employer
d ’expressions plus fortes et plus énergiques; l’obligation du mari
ne pouvait être gravée d’une manière plus profonde et plus
sensible ;
Cependant en prescrivant au mari ce devoir impérieux , le lé
gislateur avait à l ’esprit ces règles générales, que le mariage est
un fait public et 11c peut être ignoré de personne; que celui qui
contracte doit connaître la qualité de celui avec qui il traile; que
�C 7)
lestellionat étant un délit, il ne peut être attaché qu’à l ’inten
tion et au fait d’une tromperie caractérisée; malgré ces maximes
vulgaires, le législateur n’a pas laissé de prononcer en termes
formels la peine du stellionat contre le mari qui n’a pas déclaré
expressément l’hypothèque légale ;
L e motif s’en présente aisément; si la fe m m e , dispensée de
prendre inscription, n’en conserve pas moins son hypo thèq ue ,
c’est à condition que le mari y suppléera en requérant cette ins
cription sur lui-même; une grande faveur accordée à la femme
a du être compensée par une obligation rigoureuse imposée au
mari ; s’il a été juste de protéger la faiblesse de la fe mme, il a
été juste également que les tiers connussent, par le mari luim ê m e , l’hypothèque légale sur ses immeubles;
Attendu qu’il importe peu que les tiers aient pu par les re
lations sociales connaître l’existence du mariage, il est évident
que la loi n’a pas attaché sa volonté si impérative à la connais
sance d’un fait présumé bien connu de celui qui contracte; son
exécution commandée si inévitablement ne peut être soumise à
des présomptions plus ou moins fortes de la connaissance du
mariage; la loi est générale, expresse et' sans exceptions; la
modifier c’ est l’anéantir; mais si les tiers ont pu connaître le
m ar iag e, du moins ils ignorent et doivent ignorer si lors du
mariage l’hypothèque de la femme n’a pas été déterminée sur
quelques-uns des immeubles du m a r i , ils ignorent si pendant
le mariage l’hypothèque légale n’a pas été restreinte conformé
ment aux articles 2140 et 2144 du CodeNapoléon ; ces faits abso
lument inconnus aux tiers ont dû être expliqués par le mari; de
là cette nécessité d’une déclaration expresse de sa part; d e l à
enfin, faute d’y avoir satisfait, l’application de la peine du stel
lionat devient inévitable contre lui;
"En ce qui touche l’acte du 8 juillet 1808;
Attendu que par ce contrat il 11’a été cédé au sieur D um a y
qu’ une créance de 26,675 fr. comme étant due au sieur C o u r b y ,
par diiférens particuliers dénommés dans l ’acte; que de lelles
conventions ne présentent par leur nature q u ’une vente mobi-
�liairé de droits et actions; q u ’en principe les ventes de meubles
ne peuvent faire naître de stellionat, le stellionat n’étant at
taché qu ’aux seules ventes d’immeubles; q u ’ainsi la demande
du sieur Joubert en stellionat sous ce rapport n’est point re
cevais e ;
Mais attendu que pour hypothèque de celte venle mobiliaire
le sieur Cour by a spécialement affecté ce même bien de Bicon
déjà dévoré par ses dettes p e r s o n n e l l e s , en 1807, r:t qui depuis
avait encore été grévé par lui de nouvelles hypothèques pour
une somme de 22,000 fr. ; q u ’il est reconnu que dans cet acte de
cession le sieur Joubert n’a été que la caution du sieur Courby ;
que le sieur Joubert poursuivi et ayant paj’é est par la force.de
la loi expressément subrogé à tousles droits et privilèges du sieur
D u m a y ; qu’en les exerçant le sieur Joubert est fondé à relever
le vice radical attaché à l’hypolhèque donnée pour garantie à cette
cession ; que cette présentation d’ hypothèque étant entachée d’un
nouveau stellionat de la part du sieur C o u r b y , puisqu’elle ne
donne au sieur Joubert aucune sûreté quelconque sur cet immeu
ble déjà plusieurs fois consumé; qu’ainsi, le sieur Joubert est
fondé à réclamer contre le sieur Courby l’application du stellionat;
k la lo i ne protège que la bonne f o i ; elle punit le mensonge » ;
Attendu en outre que le sieur Co ur by , en constituant cette hy
pothèque spéciale a déguisé encore une fois l’hypothèque légale
de sa fem me; que p o u r couvrir cette résistance il ne peut allé
guer le vain prétexte que le s i e u r D i i m n y devait connaître son
maria ge , et par conséquent l ’hypothèque légale de sa femme
sur ce bien de Bicon ; q u ’une pareille allégation manifestement
repoussée par la loi en toutes circonstances deviendrait ridicule
à l’égard du sieur D u m a y représenté ici par le sieur Joubert ;
que par cette itérative violation de la lo i , le sieur Courby reste de
nouveau exposé à toute la rigueur des articles 2 i 3 6 et 2194 tlu
Code Nap o lé o n, sans que rien puisse l’en exempter;
E n ce q u i touche la vente du domaine de Sarliève;
Att en du que par ce contrat il fut convenu à la vérité que le
sieur Joubert supporterait quelques hypothèques inscrites sur ce
domaiue,
�C9 )
domaine, pour sûreté des ventes faites par le sieur Com-by et
qui sont spécifiées dans l’acte; que cette clause qui désigne
ainsi certaines hypothèques particulières fait entendre qu’il n’eu
existait pas d ’autres; qu’ une telle stipulation limitative renferme
une déclaration implicite de franc et quitte à l’égard des hypo
thèques non déclarées; que sans cette intention du sieur Cour by
la clause devenait surperilue; or en affirmant de la sorte posi
tivement pour les unes il a nié l’existence de toutes autres , sui
vent l’adage commun en droit, qui affîrmat de uno , negal de
ciltero\ que néanmoins outre les hypothèques que le sieur
Jouhert devait supporter, ce bien de Sarliève était encore hypo
théqué de vingt-cinq inscriptions du fait du sieur C o u r b y , les
quelles montent à plus de 120,000 f r . ; que le sieur Joubert,
exproprié du domaine de Sarliève, se trouve, par Peïïet de la
clause insidieuse ménagée par le sieur Co ur by , privé de la chose
par lui achetée, privé également du prix devenu la proie des
créanciers, et sans ressource sur le gage hypothéqué; o r , dans
une telle position , le sieur Joubert est bien fondé dans ses pour
*
suites en stellionat ;
Attendu que le stellionat se montre encore, faute par le sieur
Cour by d ’avoir déclaré expressément que l’hypothèque de sa
femme portait aussi sur ce domaine , objet de la vente; qu’ainsi
ce contrat appelle de nouveau l’application des articles 2 i 36 et
2194 du Code Napoléon ;
Attendu«que l’hypothèque légale de la dame Courby a été
également dissimulée, en constituant jjour la troisième fois le
domaine de Eicon pour l’hypothèque s p é c i a le de celte vente de
Sarliève; que le sieur Joubert est d ’autant plus fondé à relever
cette fraude du sieur C o u r b y , que déjà la dame Courby a exercé
sur ce domaine de Bicon les droits q u ’elle prétend lui a p p a r
t e n ir , portés par elle à 110,000 f r . , et qu’elle s’est fait attribuer
ce domaine par son ma ri; au moyen de quoi il ne reste au sieur
J o u b e r t , pour l’hypothèque qui devait garantir la vente, que
des recherches et des poursuites peut-être aussi infructueuses
q u ’elles seront multipliées;
3
�-i
( .0 )
Attendu q u e , pour échapper à ce dernier stellionat, on oppose
en vain que le sieur Joubert a déclaré, au c o n tr a t, avoir con
naissance de diverses hypothèques dont ce bien de Eicon était
grevé;
Cette clause doit être entendue raisonnablement et dans son
sens naturel ; le sieur Joubert, en disant qu’ il connaissait diverses
hypothèques sur le bien de B i c o n , a annoncé qu’à cette époque
il avait pris connaissance des inscriptions sur ce domaine; qu’il
avait consulté le registre du conservateur, car il ne pouvait les
connaître autrement; mais n’y ayant trouvé aucune inscription
de l’hypothèque légale, elle lui a été inconnue; il a dû croire
que ce domaine en était e x e m p t , faute par le sieur Cour by
d’avoir pris une inscription sur lui-même; et celui-ci y ayant
m a n q u é , il devait y suppléer par une déclaration expresse; celte
hypothèque de la femme est du nombre de ces charges qui
doivent ê t r e , d ’après la loi, nommément exprimées : indiget
sp ecia li nota y la connaissance ne peut s’en induire de termes
vagues et g é n é r a u x , tels que ceux par lesquels le sieur, Joubert
a dit connaître diverses hypothèques sur Bicon ; dès-lors, à dé
faut par le sieur Courby d’avoir énoncé l’hypothèque légale de
sa f e m m e , il s’est constitué de nouveau en stellionat, et ne peut
en éviter les conséquences;
(
E n ce qui touche les créances réclamées par le sieur J ou bert contre le sieur Courby ;
At tendu que le sie u r J o u b e r t r é c l a m e j u s t e m e n t l a s o m m e de
7,900 f r . , prix de la première vente , du 11 avril 1807; laquelle
a été affectée aux créanciers du sieur Cour by , utilement collo
ques, d’après le jugement d ’or d r e, qui a eu lieu au tribunal
civil de l ’arrondissement de Thiers ; les intérêts de cette somme
tels que de d r o i t , ainsi que les frais légitimes faits en consé
quence de cet objet ;
Q u ’il lui revient aussi la somme de 25,675 f r . , prix de la ces
sion portée en l’acte du 8 juillet. 1808, dont le sieur Joubert a
été caution envers le sieur D u m a y ; que le sieur C o u r b y , soit
dans un mémoire dis tribué, soit en l ’au die nce , a reconnu la
�légitimité de cette répétition , ensemble les intérêts tels que de
droit, ainsi que les frais faits par le sieur D u m a y contre le sieur
J ou be rt , pour contraindre ce dernier au paiement de la somme
par lui cautionnée;
Attendu q u e , relativement à la vente du domaine de Sa r
l i è v e , le sîeur Joubert a droit au remboursement de la diffé
rence qui existe entre le prix porté au contrat, qui est de la
somme de 74,074 f r . , et le montant de l’adjudication qui n’a été
porté q u ’à la somme de 5 6 ,000 Jr. , ce qui fait un déficit de
18,074 f r . , lesquels ne peuvent lui être refusés, d ’après l’art.
2191 du Code Napoléon , ensemble l ’intérêt tel que de droit,
et les frais autres que ceux dont l’adjudicataire peut être tenu ,
ce qui porte à la somme totale de 51,649 fr. les sommes li
quides, dues par le sieur Courby audit sieur Jou bert, non
compris les intérêts et frais , d’après le règlement ;
Que le sieur Joubert doit aussi être remboursé sur les 5 6 ,000 f.
de l’adjudication, des sommes qui seront attribuées aux créan
ciers , suivant l’ordre qui se poursuit actuellement au tribunal
de l’arrondissement de Clermont, sauf audit sieur Joubert à re
prendre en déduction dans l’ordre les collocations desdits créan
ciers , utilement colloqués, celles desdites créances qu’ il éta
blira avoir payées ; opération qui nécessite un compte à faire
entre les parties , après la confection de l’ordre ;
Attendu que pour se refuser au paiement de ces sommes at
tribuées au sieur J o u b e r t , et résultantes de la vente et adjudi
cation de Sarliève , le sieur Courby prétend, sans motifs, que le
sieur Joubert pouvait et même devait s’opposer à l’expropria
tion de ce bien , puisque , dit-il , le sieur D u m a y n’avait sur
ce domaine aucun droit personnel ni hy pothèque, et que ces
poursuites pouvaient aisément être écartées par le sieur Joubert.
L e sieur C o ur by est dans l’erreur; à la vérité , le sieur D u
may n’avait aucun droit , de son chef propre, sur le domaine
de Sarliève; mais comme représentant le sieur Destradat
ven
deur, comme subrogé à ses droits , le sieur D u m a y qui avait
payé-ledit sieur Destradat, était créancier pr ivi lé gié ; que c®
�titre était clairement énoncé dans la cession de juillet 1808;
que c ’est en cette qualité, que le sieur D u m a y a fait procéder
à la saisie immobiüaire de Sarliève; qu’il avait par conséquent
un liIre incontestable; que le sieur Joubert ne pouvait raisonnablgment élever de difficulté à cet égard ; que déplus, et en principe le
sieur Joubert, caution, n’é lait tenu d’intenter aucune contestation
sur le titre du créancier saisissant; q u ’il lui a suffi de dénoncer à
ter as, ainsi qu’il l’a fait, les poursuites du sieur D u m a y , pour
être à l’abri de toute critique; au moyen de quoi, sa réclama
tion soit du prix du domaine de Sarliève, soit des frais, qui
sont la suite de l ’expropriation ne peut lui être refusée ;
E n ce qui touche les dommages-intérêts demandés par le sieur
Joubert ;
At tendu q u ’o n ne peut se dissimuler les torts considérables
que le sieur Joubert a éprouvés à raison des trois actes dont il
s’a g i t , soit par les poursuites rigoureuses q u ’il a essuyées, soit par
les pertes qui ont été nécessairement la suite de ces rigueurs,
soit par le dérangement de ses affaires, résultantes des surprises
du fait du sieur Co ur by ;
A tte nd u que la contrainte par corps réclamée par le sieur
J o u b e r t , peut être ordonnée pour dommages au c iv il , lorsqu’ils
excèdent la somme de 3 oo f r . , suivant les dispositions de l’a r
ticle 126 du Code de procédure civile; que le sieur Joubert pré
sente ce m o y e n légal comme étant le seul qui puisse lui procurer
Une indemnité de ses p e rte s r u i n e u s e s ;
Attendu q u ’en évaluant d’office cette indemnité à la somme
de 8,000 f r . , et s a u f l’estimation par experts au choix des parties,
]e Tribun al croit entrer dans leurs vrais intérêts, et prévenir
par-là de nouveaux préjudices;
Attendu e n f l n . q u ’e n jetant un coup-d’œil sur le tableau gé
néral de la contestation , la justice ne peut voir sans improba
tion le s.r Courby se débarrasser, par des clauses frauduleuses,
de plus de 200,000 fr. de dettes, en charger le sieur Joubert ,
sous la forme de ventes trompeuses, épuisées par des c r é a n c e s
énormes , ou des hypothèques légales ; que néanmoins le sieur
�C
( ,3 )
C o u r b y , sons le nom et par le concert de sa f e m m e , a trouvé
le moyen de jouir tranquillement de son bien de Bicôn, c o m
posant presque toute sa fortune, pendant que le sieur Joubert,
son créancier légitime, a ébranlé la sienne considérablement ;
que la loi a voulu réprimer et punir de telles immoralités; que
c ’est pour cela q u ’a été établie la contrainte par corps, en m a
tière civile ; et que le sieur Cour by doit en ressentir les effets ;
P a r ces motifs ,
L E T R I B U N A L , par jugement en premier ressort, faisant
droit sur tous les objets de la contestation, et ayant égard à ce
qui résulle des trois actes des n avril 1 8 1 1 , g juillet 1809 , et
8 juillet 1808, déclare le sieur Courby stellionatpire , comme
a ya nt , dans lesdits trois actes, contracté envers le sieur Joubert
des
engagemens
pouvant se
q u ’il
savait ne pouvoir pas
rem pli r,
ne
dissimuler à lui - môme son insolvabilité , soit
pour avoir c a c h é , à dessein , les hypothèques dont étaient
grevés plusieurs des immeubles donnés en hypothèque spéciale,
soit principalement pour avoir dissimulé dans lesdils trois actes,
l ’hypothèque légale de sa femme , et avoir manqué d ’en faire
la déclaration expresse; en conséquence le condamne par corps
et prise de sa personne , en vertu des articles 2069, 2136 et 2 *94
du Code Napoléon , à payer au sieur Joubert dans la quinzaine
de la signification du présent jugement à personne ou à domi
cile , la somme de c in q u a n t o u n mille six cent quarante-neuf
francs, pour les créances liquides dues à ce dernier, e n s e m b le
les interels et frais tels que de droit ; à payer p a r e i l l e m e n t , dans
le meme dé lai, et aussi par corps, en e x é c u t i o n de l’article 126
du Code de procédure civile, la somme de 8,000 fr . à laquelle
somme le tribunal évalue d’office lesdommages-iiitérêis revenans
audit sieur Joubert, ensemble les intéiêts depuis la demande, si
mieux n ’aiment les parties faire estimer lesdils dommagesintérêts par les s.rs Creuzet, Tantillon et Ci onier , experts , ha
bitons à R i o m , lesquels resteront, aux termes de l’art. 3o5 du
Code de procédure civile , définitivement nommés , faute par les
parties,dans les trois jours de la signification du présent jugement
�C 14 )
à personne 011 à d omicile , de s’accorder sur le choix d’ un seul
ou de trois e x p e r t s , e t , conformément à l’article 3 10 du même
Code , d’en passer leur déclaration au greffe , dans le même
délai de trois jours; laquelle option lesdites parties seront tenues
de faire aussi dans la quinzaine de la signification du présent
jugement à personne ou à domicile, sinon et faute de ce faire
par l’une ou par l ’autre des parties, ladite fixation de dommngesintérêts à la somme de huit mille f r a n c s r e s te r a d é f i n i t i v e ; et
au cas d’option pour l’estimation par experts, le tribunal com
met M. le Président pour recevoir le serment desdits sieurs ex
perts.
E t avant faire droit sur le surplus des sommes qui pourron*
revenir au sieur J ou b e r t, pour raison de la vente du domaine
de Sarliève , surseoit jusqu’après la confection de l’ordre qui se
poursuit au tribunal d e C l e r m o n t , pour la distribution du prix
de ce domaine, po ur , ledit ordre achevé, les parties venir entre
elles à compte, relativement aux sommes que le sieur Joubert
pourra reprendre comme représentant ceux des créanciers uti
lement employés, et q u ’il a payés.
Sur le surplus des. d e m a n d e s, fins et conclusions, met les
parties hors de procès; condamne le sieur Courby aux dépens
et coût du présent jugement ; et ordonne , attendu ce dont il
s’agit, qu ’il sera exécuté nonobstant appel et sans donner caution.
Fait et prononcé, etc.
�C *5 )
C O P I E S
D E
L E T T R E S .
Clermont, le 10 avril 1809.
] V [ o N CHER J O U B E R T ,
J e viens de recevoir ta lettre avec celle de D u m a y . Il m’avait
écrit le même jou r, j’y avais passé : il n’a pas souffert de ses
intérêts, puisque je les avais réglés. J ’ai envoyé ta lettre à
M . L e b l a n c , qui est chargé de mes affaires et de la vente de
Sa rliève; il aura vu par*là combien on est injuste envers moi à
T h irrs. Il va écrire demain au Commissaire impérial à Thiei’S,
pour que mon alïaire envers les gens de Maison-Neuve n’éprouve
plus de retard. T u me mandes que tu veux m ’exproprier : la
marche que lu prendrais serait infiniment plus longue que celle
que je prends. Beaucoup de monde sont allés voir mon bien de
Sarliève : le tableau des revenus est de 5686 IV., et je le laisse à
2,000 f r . , ce qui n’est pas ch e r, à la porte de la v il le , et bien
â l i , comme il est.
J ’ai vu M . Du fo ur à Cl erm ont , je lui ai dit que je ne pouvais
payer qu’après avoir vendu. A v e c la meilleure volonté du monde»
je ne puis pas donner ce que je n’ai pas. T u me dis que je t'a i
m enti sur vies dettes ; M . L e b l a n c , qui a la note de tout ce que
je dois, peut édifier que je n’ai pas menti : à quoi que cela me
servirait, personne n’a pas jamais payé pour moi. Fais en sorte
que je n’éprouve pas de nouveaux frais, attendu que tu vois que
je suis en chemin de terminer mes affaires. Paries toi-mêine à
Soanen , ou si tu veux que je lui fasse écrire par M. L ebl anc : les
frais ne servent à rien q u ?à augmenter la somme.
J e te salue amicalement,
g
C O U R B Y - COGNORD.
? ’ ^e désire sortir plus ardemment que toij j’en prends bien 1®
Clermont, le 12 avril 1809.
M on
cher
J oubert,
Hier soir ôn me fit signifier à ta requête, une dénonciation
de prot êt , avec assignation à comparaître au Tribunal de c o m
merce de Thiers. L a personne qui me la donna , me fit voir une
lettre de Touraud, qui lui annonçait un effet de 10,000 l i v . , pro
testé faute d’acceptation, pour faire contre moi les poursuites;
je ne sais pas qui peut te porter à me faire manger de l ’argent; tu
sais bien que cet effet ne sera échu que dans dix-huit mois envi
�V'J
(
16
)
r o n , et que j e n’ai pas les fonds pour le payer. Si j ’avais de l’ar
g e n t , j’acquitterais celui de Soanen et de M. D u fo ur , qui sont
échus. J e n’ai jamais présumé que tu me voulus du mal; au
contraire, ne t’ayant jamais donné sujet à m ’en vouloir d’aucune
manière. T u as to uj o ur s paru tenir à mes intérêts ; tu sais que je
n ’ai pas mérité les désagrémens que j’ai éprouvé, d’après cela ,
je ne puis pas croire que tu veuilles me faire manger un couple
de mille livres en frais, qui n’entreront pas dans ta poche, et qui
sortiront de la mienne; ayant la certitude que je suis sur le point
de vendre mon bien pour terminer mes a ffaires. t u as du rece
voir une lettre de M. L e b l anc , qui est chargé de la vente; tu
peux voir chez lui l’état de ce que je dois, tu y verras que je ne
t ’ai point menti. Il fau t donc que lu arrêtes les frais de Soanen
et de M . Dufour : dès qu’ils ont attendu quelque tem s, qu’ ils
attendent un peu plus ; je ne puis pas prendre de mesures plus
vigoureuses pour sortir : personne ne m’a refusé du te n ,s ; i l n'y
aurait donc que toi.
J e t ’envoie le tableau des revenus de mon bien , pour te fa ir e
voir que je n’en demande pas même sa valeur, puisque je le
laisse à 92,000 liv., a u dernier prix. T u me renverras ce tableau
par l’exprès que je t’envoie, il me le faut ici. V a s tant chez
Soanen toi-même, s’il faut les intérêts échus, je ferai en sorte
de me les procurer pour te les les envoyer.
A d i e u je t’embrasse,
>
COURBY COGNORD.
P . S. Si tu persistes à vouloir me faire de la peine, je t’engagerai à
venir toi-même à Clermont, prendre connaissance de mes affaires chez la
personne qui en est chargée, d’après cela tu verras.
C l e r m o n t , le 27 avril 1809.
Monsieur Nicolo m ’a donné aujourd’hui d eux significations
de ju gem en t , l'un de Soanen , l'autre de M . Dufour-Riberolle.
A quoi cela te sers de m e faire des fr a is aussi considérables; si
tu vas de ce train pour les effets de Grangeon et celu i de d ix
m ille que t u as entre tes .mains, vous m’en taillerez du beau.
Pour éviter de me faire manger tout vif, je me rendrai à Thiers,
et consentirai une obligation qui ne me coûtera que onze francs
par mille,, au lieu que de cette manière, tu me ferais plus de
douze cents livres de frais. O n a dû te dire, l’autre j o u r , que
j’étais tombé de mon cheval, et que je ne pouvais pas marcher ;
mais avec certaine personne, il faudrait aller même si on était
mort. Je serai à Thiers dimanche ou lundi, sans faute.
J e te salue ,
1
,
Courby cognord. ;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Jugement. Courby-Cognord, Joseph. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Jugement du Tribunal civil de première instance de l'arrondissement de Riom, département du Puy-de-Dôme, rendu le 20 mai 1812, entre sieur Joseph Joubert, demandeur ; et sieur Joseph Courby-Cognord, défendeur.
copie de lettres.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1807-1812
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2220
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2219
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53449/BCU_Factums_G2220.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53447/BCU_Factums_G2218.pdf
4a8a66f0916fa09e48d15ae8c866ee1f
PDF Text
Text
COUR
M
E
M
O
I
R
E
IMPERIALE
DE RIOM.
POUR
1er. CHAMBRE«;
Le sieur J e a n -J o s e p h COURBY-COGNORD,
appelant;
C ON T R E
Le sieur
J e a n -J o sep h
JO U B E R T intimé.
L E sieur Courby est obligé dé défendre son honneur
et sa liberté, contre un oncle, contre un parrain.
En considérant ces d eu x titre s , il devoit s’attendre à
tro u v e r un p ro tecteu r, d ans le sieur J o u b ert :
- I l n’a rencontré qu’un ennemi. ,
L e sieur Joubert prétend q u ’on lui a laissé ignorer,
dans divers contrats, des hypothèques conventionnelles
ou judiciaires, et des hypothèques légales.
L a réponse du sieur Courby est simple.
i
i
�r
- v
( O
Parmi ces hypothèques, les unes étoient inscrites, et
le sieur Courby, dans les contrats qu’il a consentis, n’a
pas déclaré que ses Liens étoient libres;
Les autres étoient connues du sieur Joubert.
Cela est prouvé par plusieurs actes : signataire du
contrat de mariage de son neveu ; acquéreur des con
trats de rente qui formoient une partie de la dot mo
bilière de la dame C ourby; averti de la vente des im
meubles dotaux de sa nièce par alliance, le sieur Joubert
n’ignoroit pas les hypothèques légales de celle-ci. L u ii même a indiqué les moyens de les faire disparoître, et
en a dirigé l’exécution.
f Cependant il crie au 'dol ; il accuse son neveu de l’a«v o ir ir o m p é ; il le poursuit Rêvant les tribunaux comme
stellipnataire; il demande que la liberté lui soit ravie.
Pour repousser unqragrçssiojpt.injuste, le sieur Courby
est dans la triste nécessité d’indiquer la source de ses
malheurs, et de parjeç des dangereux secours.qu’il reçut
du sieur Joubert.
Les faits démontreront combien l ’accusation fut irré
fléchie.
La discussion fera voir dans quelle erreur sont tombés
les premiers juges.
t
i
L e s i e u r : C o u rb y, né de parens dont la fortune paroissoit considérable, avoit contracté' un mariage avan
tageux,
•
Son contrat de mariage avec la demoiselle Cognord
est du 18 brumaire an 7 ( 8 novembre 1798 ).
On y voit .que la future épouse upportoit une riche
�( 3 )'
dot en Biens m eubles,et immeubles; elle ÿ y constitua le
domaine de la Maison-Nieuve, sitilé dans la'commune de
Celles, des meubles meubjans, de l’argent et des contrais
de rente : ces divers objets sont détaillés dans l’acte.
L e sieur Joubert,' oncle du futur,, et qui avoit été
un des négociateurs du m ariage, assista ^u Contrat et le
signa; et dès cet instant au moins il connut en quoi
consistoient les biens que la dame. Courby remettait à
son époux*
. i f
L e sieur Gourby reçut lui-même de son père 30,000 f»
en avancement d’hoirie^
, .
, •
Une carrière commencée sous de si brillans auspices
sembloit promettre un avenir heureux.
Les circonstances en ont décidé autrement.
o ^
L e sieur Gourby père se jeta dans dçs; affaires rui
neuses , et bientôt ses dettes s’àcçruiènt dans une pro
gression effrayante.
<
Il eut recours à son fils.
Celui-ci n’hésita pas à remplir un d evoir; il aida-son
p ère, et dejion argent, et de son crédit.
C essecours retardèrent la ruine absolue du p ère,
mais ils préparèrent celle du fils.
Dès 1806, le fils avoit payé ou emprunté pour le
père plus de 80,000 francs ; c’est ce que prouvent deux
actes de vente passés entr’eux , l’un le
xnars, l’autre
le 7 août 1806, et destinés à, acquitter lés dettbs d it
père envers le fils.
? Par l’acte du 13 mars, le père vend au fils le bien
de B icon, situé près d’A rtonne, à la charge de payer
en son acquit une rente viagère de 3,600 francs, et-en
�(
4
)
outre, moyennant 70,000 francs’ qu’il reconnaît avoir
reçus en différentes fois avant la vente.
!
»
Il déclare qu’ une partie du prix a été employée à
acquitter des effets sur place, souscrits par lu i, et que
l’autre partie recevra le meme'emploi ; il1s’engage même
à faire exprimer cet emploi dans les quittances.
L a vente n’indique aucune espèce d’hypothèque qui
grevât le bien vendu.
! ?
L ’acte du 7 août contient, i ° . un traité sur une con
testation qui s’élevoit entre ïe: père et le fils, touchant
la première vente; 20. une seconde Vente d’une maison,
d’un jardin et d’un pré.
r; '
L a contestation avoit pour cause la rente viagère de
3,600 francs, qui s’étoit éteinte dans les vingt jours qui
avoient suivi le 13 mars.
’ ' ’
-'L e vendeur >et l’acquéreur ! prétendoiënt chacun de
voir profiter du bénéfice de l’extinction de la rente; ils*
transigèrent moyennant 17,500 francs, que le fils s’o
bligea de payer à des créanciers du père, indiqués dans
l’acte.
.*
}
. ■1
'>
La seconde vente eut pour prix une somme de 23,000 f . ,
sur laquelle le fils se retint 12,000 f r ., qui furent reconnus
avoir été payés par lu i, Ü des créanciers du p è re , outre
les 70,000 f r . , prix de la vente de Bicon.
Les 11,000 francs qui restoient dûs, furent stipulés
payables à des créanciers désignés.
A in si, au mois d’août de l’année 1806, le fils avoit
payé ou s’étoit chargé de payer pour le père différentes
sommes q u i, réunies, formoient-un total de 110 , 5oo fr.
T o u t est acquitté depuis long-teuips.
�(5)
- On conçoit que le sieur Courby n’a pu trouver dans
ses propres ressources le moyen de fournir à une somme
aussi considérable.
Il a dû avoir recours à des emprunts.
; Tous ceux qui savent combien la voie des emprunts
a été désastreuse à cette époque, combien elle l’est en
core aujourd’h u i , doivent prévoir quel sort menaçoit
le sieur Courby fils.
"
Les emprunts étoient faits à un taux excessif.
L e sieur Joubert a été un des prêteurs , et son taux
ne fut pas plus modéré que celui des autres : c’étoit,
diso it-il, celui de la place.
‘ f
Souvent aussi il fut caution ; jamais son cautionne
ment n’a été gratuit (i).
■y
L e 16 n o vem b re 1806, le sieur C o u rb y so u scriv it, au
profit du sieur J o u b e r t, une lettre de chan ge de 10,000 f.
p ayable à la fin de m ai 1810 .
L ’intérêt étoit confondu avec le principal; et nous
verrons bientôt que le sieur Joubert trouva le secret,
avant l’échéance, d’exiger un supplément d’intérêt.
Quelque temps avant cette époque, le sieur Joubert
s’étoit fait céder par son neveu les rentes dotales de la
dame Cognord , épouse de c e lu i-c i, ces mômes rentes
portées par le contrat de mariage de l’an 7. L es actes
de ratification passés en faveur du sieur Cognoi’d père,
ne laissoient aucun doute sur leu r origine. .
■;
L e sieur Joubert perçoit encore ces rentes.
(x) Le premier cautionnement que le sieur Joubert fournit
à son neveu, fut pour une somme de 10,000 fr. : ce, service
lui fut payé 1,200 fr. •
•###*
�C6 J
En 180 7, il demanda à son neveu , et ârraclia à' sa
foiblesse ou à la nécessit é , une indemnité pour les cautionnemens qu’il lui avoit fournis ou qu’il devoit lui
fournir.
Cette indemnité fut l’abandon du jardin et du pré
que le sieur Gourby avoit achetés de son père, au mois,
d’août précédent.
L ’abandon fi*t fait par acte du 11 avril 1807, sous
la forme d’une ven te, dont le prix fictif fut porté à
8,000 livres ^tournois, que le sieür Gourby reconnut
avoir reçues avant ces présentes, est-il dît.
Il ne reçut r ie n / il n’a jamais rien reçii pour cela.
L ’a’cte contient promesse de garantir, fournir et faire
valoir de tous troublés, évictions, dettes et hypothèques,
clause d’usage; et il se termine par une clause hypo
thécaire ainsi conçue :
« Pour l’entière exécution des présentes, les parties,
« chacune en ce qui les concerne, ont obligé leurs biens
« présens et à venir, et spécialement ledit sieùr Courby
« un téuement de terre de la contenue d’entour cinq
« cent quarante-huit ares, ou douze septerées mesure
ec locale, appelé le champ de la Rousse, faisant partie
c du domaine de Bicon , situé dans la commune d’A r« tonne , arrondissement de R iom , tel qu’il se limite et
« comporte, les parties n’ayant pu en donner les confins. »
Cet acte est un de ceux qui sert de prétexte à Faction
en stellionat, et qui fait dire au sieur Joubert qu’on l’a
trom pé, en ne lui indiquant pas les hypothèques inscrites
et les hypothèques légales qui grevoicnt tant l’objet
vendu que l’objet hypothéqué.
'*
Les hypothèques inscrites : la loi n’en prescrivoit pas
�. < 7 )
la déclaration , et le sieur Joubert pouvoit facilement
les connoître.
Les hypothèques légales : il les "connoissoit si bien
qu’il les fit purger, en déposant une expédition de la
vente au greffe, en notifiant l’acte de dépôt à la dame
Courby et au procureur im périal, en un m ot, en em
ployant les formalités voulues par la loi.
O n rapporte l’exploit de notification.
L e second acte qu’invoque le sieur Joubert, est du 8
juillet 1808.
, Les circonstances qui ont précédé ou accompagné cet
acte sont utiles à connoître.
L e sieur Courby étoit débiteur envers le sieur Destradat du reste du prix de l’acquisition d’un bien situé
à Sarliève, acquisition qu’il avoit faite dans un temps
prospère, en messidor an 10 et en nivôse an 11.
L e sieuç Courby étoit,, d’un autre côté, créancier
d’une somme de 26,000 livres tournois, reste du prix
de diverses-ventes des .biens de son épouse, /qu’il avoit
Aliénés à cause de leur éloigrçement.
Pour payer le sieur. D estradat, le sieur Courby se
procura de l’argent chez le sieur D um ay, banquier à
Clerm ont, qui paya au sieur Destradat ce que celui-ci
cxigeoit (1 ), et à qui le sieur Courby çéda, pour s’ac
quitter, les a6,ocoo francs qui lui é t o i e n t dûs p a r les
acquéreurs des. biens de sa femme.
(1) Ce que reçut en cet instant le sieur Destraclat, n’étoit
pas-la totalité de sa créance ; mais le reste lui fut payé le i3
du même mois , par le sieur Courby» Celui-ri rapporte la quit
tance finale et authentique.
-------- — •-----
�( 8)
La cession fut faite devant un notaire de Clerm ont,
par le sieur Gourby et par le sieur Joubert, conjointe
ment et solidairement.
‘ L ’acte énonce que les biens vendus composent le do
mairie de M aison-N euve, sis commune de Celles; c’est‘à-dire, ce domaine que la dame Courby s’étoit constitué
sous la même désignation dans son contrat de mariage,
auquel avoit assisté le sieur Joubert.
c 'L e sieur Destradat subroge le sieur Dumay à son pri
vilège de vendeur, et l’autorise à subroger lui-même à
ce privilège les tiers indiqués de qui il recevra les 26,000 f.
E u fin , les deux cédans donnent pour hypothèque,
savoir : le sieur Joubert, son bien de Vinzelles, et le
‘sieur C ourby, son bien de Eicon.
L ’un* et l’autre gardèrént le silence sur les hypothè
ques légales qui grevoient ces deux biens.
Ce silence est aujourd’hui un sujet de reproche de la
part du sieur J o u b ert, qui ne veut pas s’apercevoir que
s’il y eût alors un oubli plutôt qu’une faute, il y participa
en ne déclarant pas lu i- même les hypothèques légales
gue sa propre épouse avoit sur son bien de Vinzelles.
A u reste,-le sieur Joubert, qui se plaint seul de ce
silence , ne fut pas trompé par cet oubli commun; car
il sa v o it, comme nous l’avons déjà remarqué, que la dame
Courby avoit des hypothèques légales; l’acte de cession
même lui en renouveloit le souvenir, en lui indiquant
quels étoient les objets vendus.
- On doit reconnoître que le Sr. Joubert n’avoit paru à cet
dcte’ que pour prêter au Sr. Courby son cautionnement.
'Mais il ne s’y étoit décidé qu’à des conditions fort
onéreuses au sieur Liouruy.~
�(9
)
Ì
Quatre jours auparavant, et devant un notaire de
L e z o u x , il avoit exigé que son neveu lui abandonnât
cinq années du prix de la ferme du bien de B ico n ,
prix de ferme qui étoit annuellement de 6 ,z 5o fr.
L e transport énonce pour prix une somme de 27,000 f.
payée comptant.
#
*
Dans la réalité, le sieur Joubert ne paya que i 5,ooo f.
en effets de commerce (1), et souscrivit des cautionnemens
sur cinq autres effets s’élevant à 10,000 francs, à un an
d’échéance, et datés des 12 et i 5 juillet 1808. ”
L e sieur Joubert a dans la suite exigé qu’on lui fit
compte de ces effets, ainsi qu’on le remarquera bientôt.
Les spéculations du sieur Joubert sur les embarras qu’éprouvoit le sieur Courby, se remarquent encore dans une
opération peu importante, sans doute, mais très-caracté
ristique , qu’il se permit en avril 1809., .
Son neveu lui avoit souscrit, le 16 novembre 1806,
un effet de 10,000 francs, payable à la fin de mai 1810;
L e sieur Joubert fait protester cet effet faute d’accep
tation, le 10 avril 1809.
I l donne sa procuration pour poursuivre par toutes
les voies de droit ; et le n eveu , pour éviter les pour
suites, est obligé de consentir une obligation payable à
la même époque, mais augmentée d ’un supplément d’in
térêt porté par un billet particulier.
______
On l’apporte le protêt et la procuration ; ils furent
(1) Un de ces effets étoit dû par le sieur M ailli, propriétaire
à Ris. Son échéance étoit au mois de décembre suivant. Le
tieur Courby le négocia chez le sieur D u m ay, banquier.
%
27
�( 10 )
remis au sieur C o u rb y , lorsqu’il fit l’obligation qui est
elle-m ôm e rappelée dans une contre-lettre dont il va
être parlé.
.
..
,
r
Le. dernier acte sur lequel se fonde le sieur Joubert,
dans son action en stellionat, est du 9 juillet 1809.
Par cet acte, le sieur Courby vendit a.u sieur Joubert,
i ° . le corps de bien situé à Sarlièv.e , tel qu’il l’avoit
acquis du sieur D estradat, à l’exception des parties qu’il
avoit précédemment vendues au sieur Dumay.
20. D ifférens héritages provenant d’autres acquisitions
particulières, qu’il avoit réunis au bien principal.
Les récoltes pendantes et le prix de ferme de l’année
courant e , furent compris dans l’aliénation.
_ -La vente fut faite moyennant 74,074 f.; savoir, 4,074 f.
pour les récoltes et le prix de ferm e, et le surplus pour
les immeubles»
, L ’acquéreur est chargé de supporter diverses inscrip
tions conservatoires, -prises sur les biens ci-dessus vendus,
est-il d it, par les nommés Cornet d’A u z o l, le sieur de
L a ch en a l , et autres , a y a n t p o u r o b j e t l a g a r a n
tie
DES VENTES CONSENTIES PAR LE SIEÜR C O U R B Y ,
DES BIENS DE L A DAME C OGNORD, SON EPOUSE.
. On énonce aussi quelques autres-inscriptions conser
vatoires que l’acquéreur doit souffrir*
On ne dit pas d’ailleurs que le bien vendu n’étoit
grevé d’aucune autre hypothèque.
IL en existoit réellement 'd’auFrës alors. L e sieur Jou-»
bert les connut; l’état lui en fut même remis par le
sieur Courby; et le sieur Joubert eut la précaution de
les vérifier au bureau de Clermon t, ce qui étoit facile :
�on étoit sur lès l i e u x c h e z le sieur Boutai, notaire à
Clermont.
A la fin de l’acte se trouve cette clause : « Le vendeur
« ............. a hypothéqué spécialement, pour la garantie
« de la présente ven te, son bien et domaine appelé
« Bicon , situé à . , ............lequel bien est déjà grevé de
« différentes hypothèques , dont l ’acquéreur déclare
avoir connoissance. »
T e l est l’acte que l’on présente encore comme ren-*
fermant un stellionat.
- •
La vente portoit quittance, quoique-le prix: ïi’dn eût
pas été payé. L ’emploi de ce prix fut fixé le même'jour
par une contre-lettre, (i)
(1) Voici cette contre:lettre : '
Nous soussignés, Jean-Joseph Joubert , propriétaire, ha
bitant au lieu du Brasset, commune de Vinzelles, et Joseph
Courby-Cognord, propriétaire , habitant de la commune de
Clerm ont, reconnoissons que la vente consentie cejourd’h u l,
par moi Courby, à moi Joubert, devant Boutai........ notaire,
du bien de Sarliève et dépendances, moyennant la somme de
soixante-quinze mille francs, dont l’acte porte quittance, a été
faite à la charge par moi Joubert, de payer en l’acquit de moi
Courby, i°. la somme de dix mille livres, montant de cinq lettres
de change souscrites par moi Courby, au p r o f i t de:moi Joubert,
et négociées par moi C ourby, au profit de différens individus,
par l’entremise de Grangeon fils , lesdites lettres de change
échéant le i 5 juillet présentmois; a°. la somme de a^Syliv. 12 s.,
due au sieur Souanen , en vertu de jugement rendu au tribunal
de commerce de Tliiers, 1q 18 avril dernier, et tant pour prin
cipal qu’intéréts et frais ;
'
3°. La somme de 2,325 francs, montant'd’une lettre de change
�(
1 2
)
> D e la lecture de cette contre-lettre naissent plusieurs
remarques.
i° . On s’aperçoit que les hypothèques inscrites sur
le bien de Sarliève étoient certainement connues du
sieur Joubert ; car celui-ci a la précaution de stipuler
qu’il conservera les titres des créances qu’il est chargé
de 2,000 francs, due au sieur Duffour, par moi Courby, sous le
cautionnement de moi Joubert;
4 °. io ,564 francs dûs par moi Courby, à la dame Forget-Lagrave, tant pour principal qu’intéréts et frais faits jusqu’à ce
jour;
5°. La somme de 10,216 francs , due par moi Courby, au sieur
Claude A lbert, de Riom , aussi pour principal, intérêts et frais,
jusqu’à ce jour; desquelles sommes, moi Joubert, promets et
m’engage à faire tenir quitte ledit Courby, et le garantir et indem
niser de toutes demandes ;
6°. A la charge aussi par moi Joubert, de tenir quitte ledit
Courby de la somme de 10,483 francs, montant du principal
d’une obligation de 10,000 francs, reçue Etournau, notaire,
consentie à mon profit par ledit Courby, échéant au mois de
mai de l’année prochaine, et le surplus pour frais ou différentes
autres avances faites par moi audit Courby;
70. Enfin, à la charge par moi Joubert, de me départir,
comme je me départs par ces présentes, en faveur dudit Courby,
de la cession qu’il m’a consentie devant Belligant, notaire à
L ezou x, le 9 juillet 1808, de la somme de 3 i , 25o francs, à pren
dre sur le fermage du bien de Bicon; laquelle cession, au moyen
des présentes , demeurera dès ce jour comme non avenue, ainsi
que la notification d’icelle faite à ma requête, au sieur Jouandon ,
fermier, autorisant ledit Courby à percevoir le prix dudit bail
à ferme, tout ainsi et de même qu’il avisera ; à l’effet de quoi je
lui en passerai à toute réquisition, acte de département, par-
�( i3 )
de payer, jusqu’à Veritière mainlevée de toutes les insc riptions sur le bien vendu.
2°. On y voit énoncé à l’art. 6 l’obligation de io,ooo f.
qui étoit le remplacement de la lettre de change du i 5
novembre 1806, et pour laquelle on retient 10,483 f . ,
devant notaire , ou lui fournirai procuration pour la percevoir et
toucher le prix chaque année sous mon nom , si bon lui semble,
le tout à ses frais.
Les titres desquelles créances, à l’exception néanmoins de
l’obligation consentie à mon profit, et l’acte de cession du prix
de la ferme de Bicon, resteront en mes mains jusqu'à l ’entière
mainlevée de toutes les inscriptions sur le bien vendu, à la
charge de rapporter les quittances desdits créanciers, dans les
deux années à compter.de ce jour.
En outre des sommes ci-dessus déléguées audit sieur Joubert,
ou quittancées par lu i, moi Courby reconnois aussi avoir reçu
du sieur Joubert, un billet de la somme de 3 , 3oo francs, payable
dans dix-huit mois, à compter de ce jour, sans intérêts, au sieur
Duffour-Riberolle, en acquit de moi Courby, et en diminution
de la créance à lui due en vertu des titres du 22 frimaire.an 1 4 ,
inscrite au bureau de Riom, le 3o frimaire an 14; le surplus de
laquelle créance restera à la charge de moi Courby.
J’ai aussi reçu, en addition du prix principal de ladite ven te,
la somme de 1,800 francs pour épingles, dont quitte.
Les présentes faites ëntrë'no'us, par forme de règlement définitif, et sans'qu’elles puissent donner lieu à aucuns nouveaux
comptes, reprises de part ni d’autre.
Car ainsi fait double entre nous et sous nos signatures, le g
juillet 180g.
Bon pour ce que dessus. Signé Joubert-Darrot.
Bon pour ce. que dessus. Signé Courby-Cognord.
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é n 'y comprenant "de prétendus frais "ou avances; les
483 francs se composent des .frais du notaire* e t 'd ’un
supplément d’intérêt.
3°. On y retrouve à l’art. I er. les 10,000 francs de
lettres de change cautionnées par le sieur Joubert en
juillet 1808, payables en juillet 1809, et dont le cau
tionnement avoit été en partie le prix du transport des
termes à écheoir de la ferme de Bicon.
4°. Il y est parlé à l’art. 9 de ce transport ; ie siéur
Joubert s’en départ.
L e sieur Courby doit à la vérité de déclarer que le
sieur Joubert réduisit pour cet objet sa créance appa
rente à la somme de 2.5, 5oo francs ou environ.
Il lui restoit encore un bénéfice énorme.
Cette vente du bien de S arliève, et l’emploi du prix
indiqué dans la contre-lettre, payoit tout ce qui étoit
clû au sieur Joubert, et délivroit lè sieur Courby du
plus dangereux de ses créanciers.
Les autres créances inscrites sur le bien Sarliève, ou
étaient déjà acquittées, ou étoient sur le^point de l’être.
Aujourd’liüi les dettes personnelles au sieur Courby
fils , et pour lesquelles des inscriptions avoient été prises
sur ses difï’érens biens, sont pour la plupart acquittées;
il a en son pouvoir les titres des créanciers.
* A insi , au mois de-juillet 1809,
au moyen de la
cession qu’il avoit faite en 1808 au sieur Dumay-j -sur
les acquéreurs des biens de son épouse, le sieur Courby
dcvoit se croire sur le point d’être libéré de la plus
grande partie de ses dettes hypothécaires. Il d e v o it, il
�( i 5 )
est v r a i, des sommes considérables à la dame Cognord ,
son épouse; mais il lui restoit pour le payement de
celle-ci le bien de Bicon.
L e sieur Joubert n’ignoroit pas la situation des af
faires du sieur C ourby; il connoissoit toute l’étendue
des créances de l’épouse ; aussi, à l’instant môme où il
acquéroit le bien de Sarliève, il demanda et il fut con*
venu devant le sieur Boutai, notaire, et devant M e. Si«monnet et M e. Bayle, avoués des parties, que le sieur
Courby céderoit à son épouse le bien de Bicon , pour
s’acquitter de tout ce qu’il lui devoit, et pour faire par
là disparoître les hypothèques légales.
Cette convention arrêtée ne put cependant pas rece
voir son exécution sur-le-cham p, parce que le sieur
Courby n’avoit pas les fonds nécessaires à l’enregistrement
d’un acte très-coûteux» :
, ,
, Pour se les procurer, il prit bientôt après, avec le
sieur Joubert, des arrangemens au moyen desquels Fa?
voué qu’avoit à Riom le sieur Jou bert, souscrivit pour
celu i-ci, le 5 novembre 1809, un bon de 2,720 francs,
à valoir, est-il dit, sur le montant de Tenregistrement
de la vente de B ic o n , à consentir par le sieur Courby,
à la dame Cognord, son épouse.
L e sieur C ou rb y, à qui le mandat fut remis, le porta
au sieur Boutai, notaire, qui fît l’acte de vente ou d’é
change, le 8 novem bre, qui le soumit à l’enregisfrement
le 18 , et qui reçut le 23 novembre 2 5 i 6 iivres 13 sous
à compte.
. . . .
L ’avoué, signataire du mandat, refusa-de .payer le sur
p lu s, comme étant un objet d’erreur entra le sieur
,
�J o u b e r t, pour lequel il Vavait f a i t , et le sieur Courby.
On rapporte le m andat, et la quittance à compte et
m o tivée, signée B outai, et écrite derrière le billet (i).
- Gomment, d’après un pareil acte de vente, auquel le
sieur Joubert a si évidemment participé, et qu’il a même
e x ig é , concevoir qu’il ait pu faire plaider , quelques
années après , qu’on lui avoit caché les hypothèques
légales de la dame Courby ?
Mais cet acte avoit besoin de l’homologation de la jus
tice; il n’a été homologué que le 22 mai 1812; e t, avant
ce jo u r, de nouveaux malheurs sont venus frapper le
sieur Courby.
(1) Ce mandat esc écrit de la main de Me. Simonnet. La
quittance, et l’observation qui la su it, sont écrites de la main
de Me. Boutai.
V oici la copie de l’un et l’autre : •
•
«
cc
«
«
te
«
te
cc
« Bon pour la somme de deux mille x vingt livres que je
payerai en l’étude et à Me. Boutai, notaire à Glermont, à
sa réquisition, et à valoir sur le montant de l’enregistrement
de la vente de Bicon, à consentir par M. Courby à la dame
Cognord , son épouse.
« Riom , le cinq novembre mil huit cent neuf, x sept cent.
« J’ai dit deux mille sept cent vingt liv. Signé Simonnet. »
I
cc Reçu de M. Simonnet deux mille cinq cent seize livres
treize sous, à compte du billet d’autre part.
« Ce 23 novembre 1809. Signé Boutai.
cc M. Simonnet n’ayant pas voulu acquitter le surplus du
mandat, comme étant un objet d’erreur entre le sieur Joubert
pour lequel il l’avoit fa it, et le sieur Courby qui m’a remis
ce mandat pour l’enregistrement de sa vente.
* te Cette erjreur provient d’une négociation d’effet. »
D ’un
�( 17 )
D ’un côté, les Acquéreurs des biens de la dame Courby
résistèreut au commandement de payer que leur fit faire
le sieur D um ay, cédataire du p rix; ils formèrent opposition à. ce commandement, sur le motif qu’ils étoient
en danger d’éviction, parce que les biens vendus étoient
dotaux; et ils furent autorisés, par un jugement, à sus
pendre leurs payemens.
Leur opposition avoit été dénoncée au sieur Joubert,
le i i août 1808 ; le jugement'lui fut notifié à la requête
du sieur D u m ay, le 11 juin 1809, avant même qu’il
achetât le bien de Sarliève.
D epuis, le sieur Dumay l’a poursuivi, comme cau
tion solidaire, en restitution du prix de la cession du
18 juillet 1808, et il l’a fait exproprier de ce même bien
de Sarliève, q u i, par adjudication définitive, du 13 dé
cembre 1 8 1 1 , a été vendu 56 ,100 francs.
11 est bon de remarquer que dans les immeubles saisis
et vendus, ne sont compris que ceux qui provenoient
du sieur Destradat, et non ceux que le sieur C ou rbyy
par des acquisitions particulières, avoit réunis au bien
de Sarliève.
L e sieur Joubert est encore en possession de ces héritages particuliers.
D ’un autre côté , les affaires du sieur Courby père
avoient em piré; son épouse fit jDrononcer la séparation
de biens; elle évinça des acquéreurs de ses biens dotaux
vendus par le m ari, et ceux-ci exercèrent leur recours
sur le prix du jardin et du pré que le sieur Courby fils
avoit acquis de‘ s o h 'p è fe , qu’il avoit vèndü luir-mêifTe
au sieur Jo u b ert, et que celui-ci avoit .revendu, le 4
"3
�c
1 8
\
octobre 1811 , au nommé Eloi G audicier, moyennant
'la somme de 6,913 francs 60 centimes.
Un ordre s’ouvrit pour la distribution du prix de
cette dernière vente; des créanciers du père seuls y pro
duisirent leurs titres, et y furent colloqués : c’étoient des
acquéreurs des biens de la mère.
Enfin, dans le même tem ps,la dame Courby-Cognord
fut elle-même troublée dans la propriété de Bicon, par
des créanciers du père; c’est-à-dire, par des acquéreurs
des biens d’une dame R ollat, épouse du sieur Courby
jeune ; acquéreurs qui avoient acheté sous la garantie
solidaire du sieur Courby père , et qui étoient aussi
menacés d’éviction.
1 La dam e Courby-Cognord dénonça au sieur Joubert,
comme possesseur alors de Sarlièvc, les poursuites di
rigées contr’elle.
’
Cette dénonciation n’a cependant pas eu de suites ,
les tiers acquéreurs s’étant désistés de leur action contre
_ la dame Courby.___
■
Telles furent Jes funestes circonstances qui vinrent
tout à coup accabler le sieur C ourby, et q u i, en excitant
dans le sieur Joubert une colère aveugle (1) contre son
n eveu , ont préparé l’action iujurieuse qui est soumise
à la Cour.
, .
'
~~
T
(1) On jugera de la haine du sieur Joubert, par un procédé
assez étrange. Afin de pouvoir contraindre son neveu par corps,
il avoit acheté contre lui une lettre de change du sieur Dumay ,
‘ et poursuivoit sous le nom de celui-ci. L e; sieur Courby alla
; payer le sieur D u m ay, et découvrit alors ces manœuvres.^
�( 19 )
.
^
L e 30 août 1 8 1 1 , le sieur Joubert cite le sieur
Courby en conciliation, et fait les réclamations les plus
exagérées.
Il dem ande,
i°. A raison de la vente du bien de Sarliève , pour prix
principal, frais ou dommages et intérêts. 97,680 fr.
20. A raison de la vente du jardin et
7,070
du pré.....................................
1
.
/>?/ fr. /s 10,970
l Jour dommages-intérêts. 3,000
j
3°. A raison de la cession de 18 0 8 ,
p o u r p rix p r in c ip a l............ 2 5,675 fr.
7
. . .
Pour dommages-intérêts. 10,000
}
- r
'
Il conclut à ce que le sieur Courby soit déclaré stellionataire, et condamné par corps au payement de toutes
ces sommes.
La conciliation n’a pas lieu.
L ’affaire est portée devant le tribunal civil de R io m ,
par exploit du 20 décembre 1811.
L e sieur Joubert, im patient,'ne veut pas attendre le
tour du rôle; il demande que la cause soit jugée comme
.cause urgente. Il obtient cet avantage, sur le motif que
la contestation présentoit ¿1 décider une question de
contrainte par corps, qui exige la plus grande célérité.
Bientôt ses autres vœux sont remplis; et un jugement
du 20 mai 1812 , en décidant qu’il y a stellionat, con
damne par corps le sieur Courby h payer des sommes
beaucoup plus considérables que les avances légitimes
du sieur Joubert.
.
La longueur des motifs de cette décision ne permet
3*
�pas de les transcrire. On les rappellera sommairement
dans la discussion, pour les réfuter.
Ils sont, au reste, indiqués par le dispositif, ainsi
conçu :
■ « L e tribunal, par jugement en premier ressort, fai« sant droit sur tous les objets de la contestation, et
« ayant égard à ce qui résulte des trois actes des 11 avril
a 1807, 9 juillet 1809, et 8 juillet 1808, déclare le
« sieur Coui-by stellionataire, comme ayant, dans lesdits
« trois actes, contracté envers le sieur Joubcrt des en« gageinens qu’il sa voit ne pouvoir pas rem plir, ne
« pouvant se dissimuler à lui-m êm e son insolvabilité,
« soit pour avoir caché à dessein les hypothèques dont
.« étoient grevés plusieurs des immeubles donnés en hya pothèque spéciale, soit principalement pour avoir dis—
« sim ulé, dans lesdits trois actes, l’hypothèque légale
« de sa fem m e, et avoir manqué d’en faire la décla« ration expresse; en conséquence, le condamne par
« corps et prise de sa personne, en vertu des art. z o 5g ,
« 2136 et 2Ï94 du Code Napoléon , h payer au sieur
« Joubert, dans la quinzaine de la signification du p ré -'
« sent jugement à personne ou à dom icile, la somme
« de 51,649 francs ( i ) , pour les créances liquides dues
« à ce dernier, ensemble les intérêts et frais tels que de
« droit ; à payer pareillement dans le même délai ,
« et aussi par corps, en exécution de l’article 126 du
« Code de procédure civile, la somme de 8,000 francs,
(1) Les 5 i , 64<^rancs qu’adjuge le dispositif du jugem ent,
comme créances liquides, se composent, d’après les moti/s ,
�'
t 21 )
à laquelle somme le tribunal évalue d’office les domr
mages-intérêts revenant audit sieur Joubert, ensemble
les intérêts depuis la demande, si mieux n’aiment les
parties faire estimer lesdits dommages-intérêts par. les
«
«
«
«
« sieurs Creuzet, Tantillon et Croisier, experts, habitant
« à R io m , lesquels resteront, aux termes de l’art. 305
« du Code de procédure civile, définitivement nommés,
« faute par les parties, dans les trois jours de la signir
« fication du présent jugement ù personne ou à dotni•« cile, de s’accorder sur le choix d’un seuliQU de tvois
« experts, e t, conformément à. l’article 305 du même
« Code, d’en passer leur déclaration au greffe dans le
« même délai de trois jours , laquelle option lesdites
« parties seront tenues de faire, aussi dan^ la quipzaine
« de la signification du présent jugement h personr^e oji
« à domicile , sinon et faute de ce faire par l’une ou par
« l’autre des parties, ladite fixation de donimages-inté« rêts à la somme de 8,000 francs, restera définitive ; et
« en cas d’option pour l’estimation par experts, le tri« bunal commçt M . le président pour veccyo.ir le serment
« desdits sieurs experts; et avant faire droit $uv le surplus
« des sommes qui pourront revenir au sieur Joubert.,
i°. D u prix de la vente du 11 avril 1807 . . . 7*900 fr.
20. Du prix de la cession du 8 juillet. 1808 . . . . 35, 675
û°. de la différence entre le prix de la. vente du
9 juillet 1809, et celui qu’a produit l’adjudication
du i 3 décembre 1 8 x 1 ................................., ? . * • '
*8.074
m T o t a l ................................................. ."v . . .
On démontrera l’erreur de cette liquidation.
51,649 fr.
�1«
«
«
«
«
«
«
«
«
'«
«
«
pour raison de la vente du domaine de Sarliève, sursoit
jusqu’après la confection de l’ordre qui se poursuit au
tribunal de Clerm ont, pour la distribution du prix de
ce domaine, pour, ledit ordre achevé, les parties venir
entr’elles à com pte, relativement aux sommes que le
sieur Joubert pourra reprendre, comme représentant
ceux des créanciers utilement em ployés, et qu’il a
payés ;
« Sur le surplus des demandes, fins et conclusions ,
met les parties hors de procès ; condamne le sieur
Courby aux dépens et coût du présent jugement, et
ordonne, attendu ce dont il s’agit , q u 'il sera exéculé nonobstant appel , et sans donner caution. »
A in si, ce jugement autorise à priver provisoirement
un citoyen de sa liberté, et à ne lui laisser qu’au fond,
'des prisons la faculté de faire entendre ses plaintes à la
Cour suprême.
L e sieur J o u b ert, prévenu qu’on étoit sur le point
*de demander des défenses contre une disposition qui
n’étoit fondée sur aucune lo i, a eu la prudence de ne
*pas en user.
„
<
■
. T e l est le jugement contre lequel s’est pourvu le sieur
Coui'by.
zi XI se propose d’examiner d’abord s’il y a stellionat ;
Ensuite- quelles sommes sont dues au sieur Joubert,
�c 23 )
<
:
P
.
rem ière
question
M s
.
Y a-t-il stellionat?
Cette question se subdivise.
: II y a stellionat, ont dit les premiers juges, parce
qu’on n’a pas déclaré les hypothèques inscrites.
Il y a stellionat, parce qu’on n’a pas déclaré les hy
pothèques légales et non inscrites.
Examinons la question sous ses .deux i-apports.
§ . I e1'.
Y a-t-il stellionat y à défaut de déclaration des créances
r
,
inscrites ?
La décision rendue sous le premier rapport doit éton
ner; elle nous prouve que l’érudition n’est pas toujours
une garantie sûre contre l’erreur.
Pour démontrer qu’il y àvoit stellionat, les premiers
juges se sont égarés dans des dissertations qui leur ont
fait oublier et les termes et l’esprit de la loi.
L ’article 2o 5g du Code a défini le stellionat ; ët cette
définition est tellement claire, qu’il est difficile de con
cevoir comment le sens a pu en être méconnu.
V o ic i de quelle manière elle est conçue :
« Il y a slellionat, lorsqu’on vend ou qu’on hypo
t h è q u e un immeuble dont on sait n’être, pas pro*« priélaire;
,
�(
( 44)
« Lorsqu’on présente comme libres des biens hypo« théqués, ou*qüè l’on déclare des hypothèques moindres
« que celles dont ces biens sont chargés.
L e premier cas est étranger à la cause; les deux
autres pourroient-ils s’appliquer au sieur C ourby?
Peut-on dire qu’il ait -présenté ses biens comme libres?
Peut-on prétendre qu’il ait déclaré que ses biens
étoient -seulement grevés d’hypothèques moindres que
les hypotlièques réelles ?
Peut-on soutenir, en un m ot, qu’il ait fait une décla
ration ‘mensongère ?
Car c’est dans le mensonge qu’est le délit.
O r , le silence ne constitue pas le mensonge.
Il faut une déclaration expresse, une déclaration con
traire à la vérité,»une déclaration q u i, trompant celui
avec qui l’on contracte , l’em pêche, par la confiance
qu’il accorde à l’assertion , de recourir aux registres
publics pour vérifier le fait.
C ’est cette fausse déclaration qui produit le stellionat.
Les termes de l ’article ie prouvent suffisamment.
La discufcsiôn qui eut lieu au Conseil d’état le démontreroit en core, s’il étoit nécessaire.
Plusieurs des conseillers d’état trouvoient même qu’il
'étoit inutile d'attacher une peine aussi sévère que la
contrainte par corp s , a l a f a u s s e d é c l a r a t i o n du
vendeur .
Mais on répondoit qu’à raison des inscriptions qui
-pouvoient survenir entre la vente et la transcription,
-et qui seroient quelquefois j frauduleusement ménagées
par le vendeur m êm e, on avoit intérêt d’exiger de lui
UNE
�C *5 )
UNE D ÉC L A R A T I O N q u i , le soumettant à la contrainte,
jp ar corp s, l'obligeât iVétre vrai.
On observoit que quoique dans le nouveau système
hypothécaire l’acheteur puisse vérifier les incriptions,
cette circonstance ne rédime point le vendeur de Vobli
gation de fa ire une DÉC LA RAT IO N EXACTE , n ii de la
peine attachée A LA FAUSSE DÉCLARATION.
On ajoutoit que quand le vendeur a des ‘ doutes, il
peut refuser la DÉC LA RAT IO N que Tacquéreur exige
pour payer.
r •;
r
- Mais que si on lui accorde un à-com pte, sur la DÉ
C L AR AT IO N qu’ il f a i t que son bien n’est engagé que
pour une certaine somme , . . . . . et que Vimmeuble sc
„trouve chargé d’une hypothèque beaucoup p lusforte, . . . .
il y a , de la part du vendeur, dol et escroquerie ; et
alors il est juste qu’il devieTine sujet à la contrainte
par corps.
A in s i, il a été reconnu au Conseil d’état que c’étoit
la fausse déclaration seule qui renfermoit le d o l, et
qui rendoit applicable la peine attachée à ce genre de
dol ou au stellionat.
Ne doit-on pas être surpris, d’après cela, de.ee qu’on
ait invoqué dans les motifs du jugement quelques ex
pressions de M . le conseiller d’état R é a l, pour en con
clure que les termes de l’article zo 5g du Code Napo
léon sont seulement indicatifs et non limitatifs des cas
du stellionat.
M . Réal d it, il est v r a i, que: « l’article ne prévoit pas
« tous les cas du stellionat ; qu ’il ne. parle pas de celui
* ou le vendeur? par une obÜgqtioa nouvelle, créeront
4
�(z6 )
«• üne hypothèque dans l’intervalle de la signature de
« l’acte de vente à la transcription. »
L e cas prévu par M. R é a l, pouvoit être dangereux
sous l’empire'de- la loi du n brumaire an 7 , d’aprèS
laquelle la transcription seule transféroit la propriété.
Il ne peut pas avoir lieu sous le Gode, la pïppriété étant
transmise, même à l’égard des tiers, dès l’instant où la
vente est signée.
A u reste, que répond-on à M . Real ? « M. Tronchet
« répond que l’article a été rédigé d’une manière gé-« n érale, afin de ne rien préjuger sur le régime hypok thécaire qui n’est pas encore fixé ; mais comme dans
« tous les systèmes il y aura toujours un intervalle où.
«c.il Sera possible au vendeur d’engager frauduleusement
«. la chose vendue, on a pensé que le remède contre
■
k ces fra u d es , seroit d’autoriser ï acquéreur à e x i g e r
« du vendeur UNE DÉC LARA TI ON qu i soumette celui-ci
* â '¡a wontrdinté par corps. »
: > Ainsi y c’èst toujours d’après la déclaration seule du
vendeur que doit se juger la fraude.
C’est i\ cette déclaration que sont réduits tous les cas
possibles du stellionat.
S’il déclare que son bibn eâtjfranc et q u itte, et qu’il
en impose, il est stellionatairc.
- S’il déclare que son bien n’est engagé que pour une
certaine som m e, et qu’il se trouve chargé iVune hy
pothèque beaucoup plus fo r te yil est encore stellionataire.
Mais s’il ne déclare rien, il n’est pas coupable,
La loi avertit l’acqüércur j elle l’autorise à exiger que
le vendeur s’explique.
• •
�C
î
S i l ’ocquéreur n?useopas de son droit’,; i l ia’h* pas 3îf sb
plaindre,; ,il n’est pas présumé avoir été trompé ; .iljest
présumé, au contraire, avoir vériiiéiles inscriptions exis
tantes, et n^avoir pas eu_besoin ^ d e m a n d e r au Ven
deur une déclaration.
»
!'i '
.-l vEn un ‘m ot, la loi est écrite, et cette loi est pénale.
Ses termes sont clairs, et n’attachent la pëitae qü’frune
fausse déclaration.
• i! ~
< -Les lois pénales ne s’étendent pas ; au contraire, odia,
r e s t r i n g e n d a i
i •.
On ne doit donc pas puiiirjle silence, qtièiüd la loi né
prononce de peine quë'contre le langage et lb mensonge;
Seroit-il nécessaire, d’après ces principes, de suivre
les premiers juges dans leurs dissertation^*, de .répondre
à l’argument qu’ils tirént de la prélènduè insolvabilité
du sieur Courbÿj, à Pépotjue des divers actes qu’il a
passés avec le sieur Joübërt; de réfuter l’application
de quelques anciens arrêts, qui avoient considéré comme
Btellionataires, des débiteurs ou dés'vendeurs qui n’avoient pas fait des déclarations de franc et qliitte? 1
-, Ces vains raisonnemens viennent tous se briser con tre
les termes de la loi.
*■
••
• Jr'îT •*!.
La loi ne punit pas de la contrainte par* corps l’in
solvabilité du débiteur.
C’est une faute, sans dotite, que de contracter quoique
insolvable;
•->
Mais ce n’est point un sfelliôhaf.
'
A u reste, le motif est même utië ‘èrreur d'e fait.
L e sieur Courby n’étoit pas insolvablb à l’époque des
divers actes; et ce qui le prouve ? c’est qit^il àlpnÿé, soit
4 *
�C 28 )
alors, soit".depuis', la plus grande partie de ce quMl'devoit| ¡personnellement à ses créanciers hypothécaires et
inscrits, et il a retiré les. titres de créance.
_ Aussi, aucun de ses créanciers personnels n’a produit
à l’ordre de la distribution du prix du pré et du jardin
venç^u au sieur Joubert, et revendu par celui-ci.
Ce sont les créanciers du père seuls qui ont réclamé
ce prix.
Aujourd’hui m em e^ il restera au sieur Joubert des
moyens d’être payé, soit à l’aide des 26,000 francs qui
sont encore dûs par les acquéreurs des biens de 'la dâme
Courby, soit sur la portion héréditaire du sieur Courby
dans la succession de sa mère. Ce dernier objet a même
été saisi par le sieur Joubert. .
Quant aux anciens arr.êts ,que l’on invoque, ces arrêts
se réduisent, à ce qu’il paraît,:à un seul,' du i^r. février
i 556 , rapporté, par- Louet sur Brodeaii, sommaire 18 ,
Ji.°. 8..
...
' , ¡îî
‘ 1•
• »
, Majs ,cet arrêt isolé,, et rendu sans doute dans de9
cii’constances particulières ,<.ne fa(isoit pas jui'isprudence.
( V oyçz ,ce, que dit A 11roux sur l’article 81 de la cou
tume du Bourbonnais, n°. 5. )
.
,|
D ’a ille u rs, ce n’est pas d ’après les anciens p rin cip e s,
mais d ’après la législation n o u v e lle , qu ’ on doit ju ger une
cause née sous l ’e m p ir e ,de cette législation.
Les lois romaines étoient fort vagues sur le stellionat.
Elles appeloient ainsi toute espèce 'de dol qui n’avoit
pas reçu d’elles un nom particulier; elles s’appliquoient
î\ upe foulejc^e cas.
[ it
. La jijrisprudpnce française a voit; restreint celte appli-
�■C
29
)
cation, et ne considéroit en général comme stellionataire que celui q u i, en obligeant son bien , le déclaroit
franc et quitte.
Mais comme aucune loi précise ne définissoit en France
le stellionnat, il ne seroit pas étonnant que quelques
arrêts, en l’absence de principes positifs, eus'sent varié
sur le sens attaché à ce mot.
Aujourd’h u i, une définition exacte ne permet plus
de variations.
Ces observations, nous les puisons dans les discours
même des orateurs qui ont préparé la loi.
. M . Bigot-Préameneu, dans l’exposé des motifs, après
avoir remarqué que jusqu’à présent aucune règlejixe
n'a voit été à cet égard établie , ajoute :
1
... « La contrainte par corps étant considérée comme une
« sorte de peine, il étoit nécessaire d e spécifier Ja faute
« qui la faisoit encourii’. L e stellionat a été réduit au
« cas qui avoit été le plus généralement reconnu comme
« distinguant ce genre de fraude. »
Il rapporte ensuite les termes de la loi;
M . Gax’xù, tribun, s’exprime ainsi : i'
t..
« Comme il s’agit ici d’une sorte de d élit, et d’une
« voie de.rigueur établie pour la plus grande sûreté du
« créancier, on ne peut qu’applaudir à l’idée qu’ont eue
« les auteurs du projet, de définir lé stellionat ; et là
« définition qu’ils en donnent résout tous les doutes
« et j i x e toutes les idées. »
Comment donc concevoir qu’on puisse négliger cette
définition, pour se jeter dans le vague et dans l’arbi-
�C< 30 }J
traire, que les législateurs ont voulu tprécisdment'faire
disparoître ?
•
' .
Remarquons, au reste, que le silence du débiteur ou
du vendeur n’est pas dangereux aujourd’h u i, -comme il
l ’étoit autrefois.
Autrefois, il étoit impossible aux tiers de connoîtreles hypothèques dont étoient grevés les biens de ceux
avec qui ils conlractoient ; en sorte que .s’ils oublioient
d’exiger une déclaration de franc et quitte, ils pouvoient
être facilement trompés par un débiteur insolvable.
A ujourd’h u i, grâce à la publicité des hypothèques,
introduite par le nouveau système, chacun peut-conn oitre,, en consultant les registres, la situation de celui
avec qui il veut contracter; et rarement on néglige cette
précaution, lorsque l’objet que l’on se propose est im
portant.
Cette considération puissante seroit >uni m otif suffisant
de la limitation apportée par la loi aux cas du stellionat.
E nfin, la loi est telle; il faut la respecter; et ce seroit la blesser., ce seroit vouloir être plus sage qu’elle^
m êm e, ce seroit ‘se montrer plus rigou reu x, que de
l’étendre à des cas qu’elle n’a pas prévus.
L a question de ste llio n a t, sous son p rem ier r a p p o r t ,
se réd u it donc à exam in er si , dans les trois actes qu e
l ’on oppose au sieur C ou rby, il y a eu de sa part une
jfausse déclaration.
Cet examen ne sauroit être long.
Dans les deux prem iers, celui du n avril 1807, et
eèlui du 8 juillet 1808, il y a" silence absolu sur les hy-
�-
,
( âI )
pothèques ; ainsi, point de prétexte pour dire qu’il y
a eu fausse déclaration.
Dans le troisièm e, du 9 juillet 1809, les premiers
juges ont cru trouver une déclaration implicite defr a n c
et quitte.
D éclaration implicite : que veut-on dire par là ? L e mot im plicite, signifie par induction.
*
O r , un délit tel que le stellionat ne se présume pas';
il faut qu’il soit évident. La l o i , pour le reconnoître,
ne se borne pas à des inductions ; elle veut une décla
ration formelle.
1
Mais quelle est la déclaration que présente l’acte du
9 juillet 1809?
E lle est relative à l’objet vendu.
'
L e sieur Courby charge l’acquéreur de supporter
quelques inscriptions conservatoires seulement, et qu’il
indique.
C ’est, d it-on , comme s’il lui avoit dit expressément
qu’il n’y avoit aucune autre inscription sur le bien vendu;
et, à l’appui de cette assertion, on cite la m axim e, qu i
dicit de u n o , 7iegat de altero.
Quel raisonnement!
L e sieur ‘Courby parle , cela est v r k i, de quelques
inscriptions conservatoires, dans l’acte de vente du' bieà
de" Sarliève.
Mais s’ il en p a rle, ce n'est pas pour dire que toutes
les inscriptions se réduisent à celles-là;
C ’est pour dire seulement que l’acquéreur ne pourra
pas en demander la radiation, et qu’il sèra tenu de les
supporter.
�( 32 )
En sorte q u e , relativement à toutes celles pour les
quelles l’obligation de les supporter n’est pas imposée,
l ’acquéreur a eu le droit d’exiger la radiation, et d’agir
à cet effet contre le vendeur ; et c’est en ce sens que
seroit vraie la maxime, qui dicit de uno, negat de altero.
Mais soutenir que parce qu’on a parlé au vendeur
de certaines inscriptions, pour un cas particulier, on a
entendu lui faire une déclaration implicite de fr a n c et
qiiitte pour toutes les autres inscriptions, en v é rité ,
c’est déceler son embarras dans la recherche des moyens;
c’est laisser apercevoir le peu de justesse de l’opinioa
que l’on défend.
A u x'este, ce foible argument est encore détruit par
la contre-lettre, où l’on vo it, i°. qu’il est parlé de plu
sieurs créances exigibles et inscrites, du payement des
quelles le sieur Joubert est chargé ; 2°. que le sieur
Joubert se réserve le droit de retenir les titres des
créances même qu’il payera , ju sq u ’il Ventière main
levée de toutes les inscriptions sur le bien vendu.
L e sieur Joubert connut donc toutes ces inscriptions.
Il les connut d’autant plus facilem ent, que l’acte se
passoit à Glermont m êm e, siège du bureau des hypo
thèques pour le bien vendu: l’état lui en fut remis, et
il les vérifia au bureau avant que l’acte de vente fût passé.
Ainsi disparoît le premier moyen adopté par le tri
bunal dont est appel.
Point de déclaration de franc et quitte, dé la part du
sieur Courby.
Point de déclaration que les hypothèques fussent
Vioipdres qu’elles ne l’étoient réellement.
Sous
�( 33 )
Sous; ce premier rapport ,, il n’a donc: pas .commis, d«
stellionat.
§? I I ,
Yt a -t-il stellionatfa u te de déclarattpn-,de$ hypothèques
légales 2
O n invoque les termes de l’article 2136, d.unCodp^
Napoléon.
Les termes de ce t article paroissent rigoureux.
Transcrivons-^les ; nous examinerons .ensuite quelle,en,,
doit êtreil’application.
A rt. 2136. « Sont toutefois,les, maris et les tuteurs.,
«.tenus de rendre publiques les,hypothèques dont.leura
« biens sont grevés, etjjà^cet effet,;do. requérir eux« mêmes, sans aucun d élai, inscription, aux bureaux à
«.ce établis, sur les immeubles à eux, appar.tenaqti,, et
« sur ceux qui pourront leur appartenir par. la suite*,
« Les maris et les.tuteurs q u i, ayant manqué, de, re«• quérir et de faire faire les inscriptions;oi;données pasi
« le présent article ,,auroient consenti ouilaissé prendre^
« des privilèges ou>des hypothèques sur leurs immeubles,
«r sans-déclarer expressément que lesditsimmeubles étoient
« aiFectés>à l’hypothèquer légale des femmes, et» des mi
te neurs, seront réputés- stellionataires:,.eb.cpn}me tels.
« contraignables par, corps. »
A in s i, à s’en tenir minutieusement h l’expression lit
térale de l’article, tous les maris, tous les tuteurs, qui
ne feroient pas une déclaration.eiigressp; des. hypqtUèquçs
légales, seroient stellionataires.
5
�.C 34 ^
Aucune considération, aucun m o tif, ne pourraient
les garantir de cette tache flétrissante.
•
^
Que de stellionataires en France ! que d’honnêtes gens'
confondus dans les prisons avec de vils criminels!
C a r, si l’on consulte les actes nombreux faits depuis
l’émission du Code, par les maris, par les tuteurs de tous
les rangs, de toutes les fortunes, à peine én rencontrerat-on quelques-uns où soit contenue cette déclaration ex
presse que paroît exiger la loi.
Tous -ces-maris, tous ces tuteurs, seront-ils également
réputés stellionataires? l’erreur sera-t-elle assimilée à la
mauvaise fo i? le silence qui n’a pas trompé sera-t-il puni
comme la fraude qui a nui ?
Non sans doute; on ne peut supposer dans le légis
lateur une injustice aussi choquante.
Si la lo i, dans sa lettre, présente une généralité qui ’
révolte, cherchons dans son esprit la restriction que
l’équité réclame.
’
Appliquons à cette loi ces principes immuables que
les lois romaines nous ont transmis, et que nous enseigne '
leur illustre interprète, le savant Dom at . 1
« Lorsqu’il arrive, dit ce grand jurisconsulte (i), que le
« sens d’une lo i, tout évident qu’il paroît dans les termes,
« conduirait à de fausses conséquences et à des décisions
« qui seraient injustes, si elle étoit indistinctement ap
te pliquée à tout ce qui semble compris dans l’expression»
« Car alors l’évidence de l’injustice qui suivrait de ce sens
(1) Lois civiles, livre préliminaire, titre i er. , section a , au
préambule»,
�k apparent, oblige à découvrir, par une espèce d’inter« prétation, non ce que dit la loi, mais ce qu'elle veut;
« et à juger par son intention quelle est l’étendue et
« quelles sont les bornes que doit avoir son sens. »
. C ’est surtout dans l’interprétation des lois pénales qu’on
doit appliquer cette sage règle.
~
Cherchons donc ce que veut l’article 2136 du Codé*
Napoléon, pour éviter Y injustice évidente qui résulteroit
du sens apparent.
Nos idées seront bientôt fixées, si nous considérons
l ’exposé des motifs de la loi sur le stellionat, et la dis
cussion que cette loi et l’article 2136 firent naître au
Conseil d’état.
« E11 matières civiles, la règle générale interdit la
« contrainte par corps ( Exposé des motifs. ). »
Cette règle si importante dans l’ordre de la soctfcté-jne doit recevoir d’exception que contre les débiteurs q u i,
par leur im m oralité, par leurs j fraudes, se sont rendus
indignes de toute protection.
Mais la fraude ne peut exister sans le concours de
deux circonstances.
Il faut, i° . qu’il y ait eu intention de trom per;
20. Que cette intention ait été rem plie, c'est-à-dire,
qu’on ait trompé réellement.
Il faut qu’il y ait eu intention de tromper.
Car c’est l’intention qui caractérise le d élit, qui eu
détermine la moralité ; c’est la mauvaise intention, le
inalurn consilium qui rend coupable : sans l’intention
frauduleuse, il ne sauroit y avoir de fraude, ni par con
séquent de stellionat.
#
�* ' « 'Lé^stellionat, dit M .'Portalis ( i ) , suppose toujours
« de la fraude ; ainsi tquand'il n’y a qu’erreur et bonne
« f o i ,’ il n’y a pas rde âtèllionat. »
Dans la cause, on ne pourrait reprocher au sieur Courby
q ue'd e l’erreur; sa ‘ bonne1foi d?ailleürs est'évidente.
^7 § i , dans les actes qu’il a passés'avec le sieur Joubert,
il n’a'pas déclaré expressément les'hypothèques légales,
ce " fut par oubli plutôt* que'parH'raude ; ce fut parce
qu’aucuns notaires n’avoient l’usage d’insérer> dans leurs
actes 'de pareilles'^déclarations ; ce fut par une erreur
commune, et que partageable sieur Joubert lui-m êm e,
ainsi que'nous l’avons déjà remarqué.
L e sieur Courby fut d’ailleurs de bonne fo i, et ce
qui1le p ro u ve, c’est que¿;*lors de ces divers* actes , il ne
toucha aucune somme.
Dans l’acte d u '8 juillet- 1808,1’le prix^de la cession
qü’il faisoit fut payé 'en entier là^M.^Destradat.
Dané l’acte du 9 juillet* 1809, les 70,ooosfrancs, prix
de la vente, furent laissés en totalité au -sieur Joubertr
‘qui fut chargé °de p ayer des créanciers qui n’étoient
pas présens.
Si le si eut Courby eût été de ^mauvaise f o i, ‘n’eût-il
pas exigé au moins une partie de ces sommes considé
rables? eût-il consenti à vendre au sieur Joübert« une
propriété d’une graride valeur, sans rien recevoir, et
précisément pour commettre:un stellionat, et pour s’ex
poser aux dangers‘et à la honte que traîne à sa1 suite
u n pareil délit ?
(i)Proc. verb. du Conseil d’état, séance du 16 frimairaan 12.
�C 37 )
Toutési les .circonstances yjtoutes le%présomptipns mo
rales se réunissent donc pour-démontrer qu’il n’y u eu
qu'erreur et bonne f o i , , e t;par conséquent, qu’il u’y a
'■pas'-de'Stelliouat.
, ■■ .
Mais quelle qu’eût été m ê m e .l’iq.tention, du sieur
-G ou rb y, il faudroit, pour queJe-sieur Jouberfe fût fondé
.♦à -se plaindre ^ qu’il^eût : été réellement trom pé, .parole
-silence du.sieur Gourby;sur.lesaliypothèques^légples.'
■
„Q u’on- parcoure ,,ien jçffet }es>d'iççuçsioiîs rqu^putt,pré
paré au Conseil d’état l’adoption;de 1’r.^ticlç? aig6.
L a : loi n’a pas entendu exjger sous: des peines aussi
rigoureuses, une déclaration qui 6eroitCjinutile ; elle* a
ordonné cette déclaration afin,[de,pourvoir à ce que des
tiers ne fussent^pas,,trompés (i). r
Si donc le tiers avec qui >Ie^mari< a traitéf.conaojssoit
l’existence des hypothèques légales ,f le défqut-de décla
ration ne lui a pas nui ; il nerpeut;p asen argumenter,
i -parce qu'il n’a pas été trompé.
Cette vérité est. indiquéenparj la, simple bon ¡sens^et
osiül’onddésire !des- exemples de son application, on .peut
* en trouver dan^des ¡auteurs ^pecta})lesnqui l’ont invo
quée dans un cas bien plus grave que jle simple silence,
dans lencas même d’unQ ^ fa u ^ déclaration.
L a déclaration de; franc et quitte jijquapd-eJle.jéJpit
‘'-»contraire ùi la. vérité ,r.étqit ¡autrefois, généralement ,Tegardée comme caractérisant . le;,.stc>llÎ0Euit de 4 ar niapière
. 'lajtmoina équivoque.
»Cependant, ,si ,le. créancier à, qui ella ¡6toit- faite-¡ea
'
, ■
■....... ■
■
■
— •------- 1- , ■
(i)' Exposé des motifs.
—
�C 38 )
avoit'coniiü'le ménsorige'ien la recevant, il n’avoit pas
le*droit dé s’en plaindre'.'
Pourquoi1? Parce qu’il n’avoit pas été trompé : non
videtur enim deceptus qu i credidit assertioni quam
scitbat esse falsain.
>
’
^ ‘ Telles 'étoient lés- règles du droit français ; règles équi
tables ‘. que la raison accu eille, et que nous attestent
M . Louet s u r!Brodeau ( sommaire 18 , n°. 4 ) , M . A u t o u x et M . le président D u re t, sur l’article 81 de la
coutume du Bourbonnais.
' Ainsi le mensonge même n’étoit pas pun i, lorsque ce
mensonge* 71'avoit pas trompé.
A plus forte raison le silence doit-il être pardonné,
lorsque ce silence n’a causé aucune erreur.
^..jEjcammons si le sieür Joubert a connu Pexistcnce des
hypothèques légales.
*
Il assure les avoir ignorées*
! 1
i
i
Cependant, oncle et parrain du sieur Courby, il a été
un des négociateurs de son mariage;
li a assisté au contrat de mariage, où la dot mobilière
de la dame Courby est détaillée article par article, et il
a signé ce contrat ;
'■
"■
■
Il a acheté, dès 1806, les rentes dotales désignées dans
le contrat de mariage ; on lui a remis les actes de rati
fication, consentis en laveur du sieur Cognord père, et
il perçoit encore ces rentes.
A nous arrêter même h ces premières circonstances,
ne p ou rro lt-on pas dire qu’elles sont suffisantes pour
démontrer la connoissance des hypothèques légales de
la dame C ourby, de la part d’un parent aussi proche,
�( (39
)
qui a signé Tacté mêmé constitutif de ces hypothéqués,
et qui est devenu acquéreur d’une partie de la dotim obilière pour laquelle elles existènt. . j
!■
Mais poursuivons.
;
ot /i»
[ " ¡i'i-'
L e i i avril 18 0 9 ,jle sieur Joubert achète du.,sieur
Courby umjardin et un pré. 1 ) 1 >
br; n')?. xOn ne lui déclare pas les hypothèques légales ; et
cependant il dépose son contrat au greffe; il fait noti
fier l’acte de dépôt à la femme et au procureur impérial.
En un m o t, il purge ces hypothèques l égales. : t>
< Il les connoissoit donc, quoique non déclarées.
Et n’est-ce pas un jeu, que de dire que les hypothèques
légales ont été purgées seulement pour l’immeuble vendu,
et non pour l’immeuble donné en hypothèque, comme
garantie de la re n te ? , •
:> :
v fi
. Que signifie ce raisonnement , quant à la question?
D étruit-il le fait de la connoissance des hypothèques
légales, connoissance prouvée par les formalités même
qu’on a remplies? . :r - - -x
‘ ( ; :
L e sieur Joubert pouvoit-il ignorer,que l’hypothèque
légale s’étendoit sur tous les biens du m ari; qu’elle
grevoit l’objet qui lui étoit donné pour gage, comme
l’objet qui lui avoit été vendu?
<
;
Pouvoit-il croire à une réduction de cette hypothèque
générale, tandis qu’aucune déclaration, aucun indice
même ne lui faisoit présumer cette réduction. . - ;
L e sieur Joubert ne sauroit échapper à une preuve
aussi forte, émanée de son propre fait. ;
' ,
Il a connu l’existence des hypothèques légales.
�............. C(4or))
L o llb i lui apprenoitique1ces hypothèques'grevoient,
tous; les biens du mari;
•:
Cette connoissance positive qu’iba eue dès le premier^
acte qu’il a passé avec le sieur Courby, ne lui permet
pâs'd’allëgüèruson ignorance^lorsi des .actesi postérieurs.
L e second acte, celui du 8 rjuillet‘>i8ô8,/ne'Contient)
rien qui'-pût détruirela connoissanceiacquiseï précédem
ment par le sieur iJouberti
A u contraire; on y parle: deà ventes consenties'par
le sieur Courby ; des biens qui-composent* le domaine
de M aison-N euve, sis commune de)Celles<; c’est-à-dire,
qu^om appreùd auLsieur Jôubert la- vente de ce. même
bieii' qu’il1 avoit entendu la dame Courby se constituer!
sous là' même désignation, dans» lé contrat-de» mariage
auquel il avoit assisté; en sorte qu’ont lui donnoit-. par
là'uninoüVeV avisd è l’existence des hypothèques,légales.
(Cet a v is 'lui? fu t renouvelé»; soit par Facteidu r i août
i8 o 8 y queMüii-fit notifier1 le* sieur D u m a y ,.p o u r lui.
apprendre la résistance des acquéreurs et le* motif sur
lfequell ils se foüdoient; soit par 1le jugem ent qui autoïifcoit ces acquéreurs à ne pas payer, jugement qui lut
fut signifié’ le 20 juin 1809.
Cet avis fut encore répété-avec lestexpressions les plus
formelles dans l’acte de vente du biem de> Sarliève, du
9 juillet 1809, puisqu’on^ soumet formellement le sieur
Joubert à supporter les inscriptions prises pour la gatantie des rentes consenties par le sieur Courby, des
biens de la dame Cognord, son épouse.
Quoi de plus positif que ces-expressions !
Quoi
�( 4i )
Quoi de plus clair et de plus propre à apprendre l’exis
tence des hypothèques légales qui étoient acquises à la
fem m e, sur les biens du m ari, par. le fait de la vente
des immeubles dotaux !
:
. N ’a-t-on pas même le droit de dire que l’on trouve
dans cette phi’ase la déclaration expresse des hypothèques^
légales, exigée par la lo i? .
,
j On remarque aussi dans cet acte du 9 juillet 1809, une
déclaration importante faite par le sieur Joubert.
1
. En recevant pour hypothèque et comme garantie de
la vente, le bien cfe B ico n , il déclare qu’il cpnnoît les
différentes hypothèques dont ce bien rét oit déjà grevé.
. « Lequel bien est déjà g re v é vde différentes liypothè« ques dont l’acquéreur tdéclare avoir connoissance. »
Dira-t-il, avec lespremiers juges, que cette déclaration
ne doit s’appliquer qu’aux hypothèques inscrites; tandis
qu’il parle de différentes hypothèques ; tandis, que, par
ces expressions générales, il les comprend* toutes, de
quelque espèce qu’elles soient ; tandis qu’il est prouvé
surtout qu’il connoissoit alors les hypothèques légales. ;
'E n fin , aura-t-il recours à une vaine subtilité, et sou
tiendra-t-il que s’il ne peut, en son nom , agir en stellionat, il le peut au moins au nom du sieur Dum ay,
créancier, aux droits duquel il est subrogé comme
caution.
Miserable et dernière •ressource, qu’il est facile de
détruire.
t .
On pourroit répondre d’abord que la caution n’est
subrogée que lorsque le payement est effectué.
O r , le sieur Dumay n’est pas encore payé.
6
�( 42 )
- M ais, sans employer même ce moyen de droit, deux
puissans motifs feroient disparoître la distinction.
Prem ièrem ent, il est un principe certain en «morale
et en législation :
•
Celui qui a participé à une fraude, ne peut en ar
gumenter contre le coupable. S i duo dolo m a lo jècer in t ,
invicem de dolo non agent.
' Si une faute a été commise le 8 juillet 1808, à l’égard
du sieur D um ay, par-le silence gardé sur les hypothè
ques légales qui grevoient les biens du sieur C ou rb y,
le sieur Joubert, qui s’engageoit solidairem ent, a par
ticip é'à cette faute, puisque les hypothèques légales lui
étoient connues à lui-même, ainsi que nous l’avons prouvé.
Il
en a commis en outre une semblable, et qui lui
ést personnelle, en gardant aussi le silence sur les hy
pothèques légales dont étoit chargé son bien de V in zelles, qu’il donnoit pour hypothèque de son propre
engagement.
•
*
■ A in s i, le sieur Joubert n’a le droit de faire aucun
reproche au sieur Courby.
Secondement, il a toujours été de principe que les
actions pénales ne se transmettent pas. ' '
' Les lois romaines présentent beaucoup d?exemples
de cette vérité.
*
■. f .
L ’héritier même à qui la loi accorde le ju s universum ,
n’a cependant pas le droit de poursuivre l’application
d’une p ein e, lorsque l’action n’a pas été commencée
^par le défunt.
L a subrogation aux droits, que. la lo i «accorde à la
çaution y n’emporte que les droits ordinaires, les droits
�¿
43)
pécuniaires, et non le droit extraordinaire d’agir'en
stellionat.
Lorsque le créancier direct n’exerce pas lui-même
l ’action pénale, il est présum é, ou remettre la peine ,
ou n’avoir pas de motifs réels de se plaindre.
. Qui pourroit, en effet, nous apprendre, si ce n’est le
sieur Dumay en personne, qu’il n’a pas eu connoissance
des hypothèques légales, qu’il a cru qu’il n’en existoit
pas; en un m o t, qu’il a été trompé. *
Un tiers ne peut tenir ce langage en son nom , et priver
ainsi celui qu’il accuse des moyens de faire tomber l’ac
cusation par les questions qu’il feroit devant la justice
au sieur Dumay lui-même.
' Toutes ces raisons démontrent que le sieur Joubert
n’auroit le droit d’agir en stellionat que s’il avoit été
trompé personnellement.
O r , il est prouvé qu’il ne l’a pas été par le silence
dont il se plaint.
•
- Il est prouvé qu’il connoissoit l’existence des hypo
thèques légales, et qu’une déclaration lui étoit par con
séquent inutile.
,
.
Il
est prouvé même qu’il a provoqué la vente du bien
de B ico n , par le sieur Gourby à son épouse , pour ac
quitter celle-ci de ses reprises dotales.
Cela est prouvé par les deniers qu’il a fournis pour
l’enregistrement de cette vente.
Cela seroit prouvé par témoins, s’il étoit nécessaire,
et avec des circonstances qui démonti’eroient l’odieux du
prétexte d’ignorance et de fraude qu’emploie aujourd’hui
le sieur Joubert.
6 *
�( 44 )
Comment donc le sieur Joubert a-t-il pu s’aveugler
assez lui-même pour croire qu’il en imposeroit à la jus
tice, pour crier au d o l, signaler le sieur Courby comme
stellionataire, le dénoncer à l’opinion et aux magistrats,
demander vengeance contre lu i, et attenter à sa liberté?
E t quel est celui qu’il attaque avec cet acharnement?
Un neveu ! un filleul ! ! !
C ’est trop nous occuper d’un stellionat imaginaire.
Examinons les condamnations pécuniaires.
i
Seconde
question
T
'l
.
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert
L e tribunal dont est appel condamne le sieur Courby
à payer au sieur Joubert, i° . 51,649 francs en princi
paux liquidés par le jugement;
2°. 8,000 francs pour dommages et intérêts;
Et cela outre les sommes que le sieur Joubert pourra
avoir le droit de réclamer par Tévénement de la distri
bution du prix de l’adjudication du bien de Sarliève.
Les 51,649 francs liquidés se composent,
D u prix entier dé la vente du 11 avril 1809. 7,900 fr.
D u p r ix de la cession du 8 ju illet 1808. . . . 25,675
D e la différence entre le prix de la vente
du 9 juillet 1809, qui étoit de 74,074 f r . , et
le prix de l’adjudication du 13 décembre 1 8 11,
qui est de 56 ,100 fr. : cette différence est portée
à ............................................................................... 18,074
1 Ces divers principaux ont été alloués avec intérêts.
La liquidation renferme diverses erreurs.
�Première erreur.
Relativement aux objets acquis le n avril 1807, par
le sieur Joubert, et qu’il a revendus au nommé Gaud ic ie r, le 4 octobre 1811 , son acquéreur n’a pas été
dépossédé ; seulement il a été obligé de rapporter à un
ordre le prix de la seconde vente.
Ce p rix étoit de 6,913 francs 60 centimes.
' L e sieur Joubert a été privé de ce second prix , par
la distribution qui en a été faite aux créanciers du sieur
Courby père.
Mais il n’a été privé que de cela; il ne devoit donc
pas réclamer davantage; et le jugement a mal jugé en
lui accordant 7,900 fr.', au lieu de 6,913 fr. 60 centimes,
montant de sa perte réelle.
Quant aux 18,074 f r ., différence fixée entre le prix de
la vente de 1809, et celui de l’adjudication, il y a eu, de la
part des premiers juges, erreur de fait et erreur de droit.
Erreur de fait.
.
^ L a vente de 1809, faite au'm ois de juillet, comprenoit non-seulement les immeubles,‘ mais encore la récolte pendante, et le prix de fermé de l’année; et ces
derniers objets, dont a profité le sieur Joubert, étoient
portés dans le prix total pour 4,074 francs, ce qui réduisoit à 70,000 francs celui des immeuBles.
C’étoit donc cette dernière somme seulement que les
premiers juges, dans leur système inêm er devoient com
parer au prix de l’adjudication.
Encore devoient-ils déduire des 70,000 francs la valeur
de plusieurs héritages qui n’a voient pas été saisis, et
qui n’ont pas été vendus, comme nousTî>vons pré^XT
demment remarqué.
�Ces diverses déductions auroient réduit à beaucoup audessous de 18,000 francs, la différence des prix des deux
ventes.
Mais il y a erreur en droit dans la décision dont est
appel.
Cette décision est fondée sur l’art. 2 19 1, qui n’a pas la
moindre application à la question.
L e sieur Joubert n’a pas été évincé comme acquéreur;
il a été exproprié comme débiteur solidaire ou comme
caution, faute de payement.
,
Que peut-il donc exiger?
,
L e remboursement de ce qu’il aura payé pour le sieur
jCourby, débiteur,direct, et les intérêts de cette somme, à
titre de dommages et intérêts. (V o y . Code N apoléon,
art. i i 53 .)
Son bien vendu aux enchères est présumé avoir été
yendu à la vraie valeur qu’ il avoit à l’instant de la vente.
Dans tous les cas, s’il lui étoit dû des dommages et
intérêts, ce ne seroit que suivant la différence qui se
■trouveroit entre le prix de l’adjudication et la valeur
réelle du bien adjugé , considérée à l’époque de l’adju
dication ; o r , cette différence ne pourroit être appréciée
.que par des experts.
Une autre erreur du jugement est relative aux 8,000 fr.
de dommages et intérêts, qu’ils ont accordés au sieur
.Jou b ert, outre les 18,000 francs de supplément de prix.
C’est évidemment avoir accordé deux fois des dom
mages et intérêts pour le meme objet.
N i l’une ni l’autre somme n’étoient dues. L e sieur
Joubert n’a droit qu’à la restitution de ce qu’il aura payé,
et aux intérêts.
�'
^
(( A47 )ï
C’est par corps que le sieur Courby a été condamné
à payer les 8,000 f r ., et on s’est m otivé, pour prononcer
cette contrainte, sur le pouvoir discrétionnaire, accordé
aux juges par l’article 126 du Code de procédure.
Sans doute les magistrats ont ce pouvoir; mais la loi
ne leur a confié ce dangereux droit, qu’en leur recom
mandant la plus grande prudence, et la modération la pluà
scrupuleuse dans l’exercice d’une si puissante autorité.
: C ’est pour les cas d’un dol évident et d’un tort causó
par la fraude à l’homme confiant, qu’ils doivent réserveé
l’usage de l’arme que la loi a mise dans leurs mains.
- Nous avons démontré que le sieur Courby n’avoit
point trompé le sieur Jo u b ert, et qu’il étoit malheu
reux plutôt que coupable.
‘
A in si, quand il auroit dû des dommages et intérêts,
on ne devoit p^s l’y éondamner par corps.
Telles sont les erreurs nombreuses que renferme la
décision des-premiers juges.
' La plus grave est celle relative au stellionat. ‘
>•
* - Dépositaires de l’honneur et de la liberté de leurs
concitoyens, avec quel soin les magistrats ne doivent-1ils pas conserver ce précieux dépôt ?
Sans doute ils doivent punir les coupables ; mais ce
n’est qu’en apportant la plus sage circonspection à l’exa
men des preuves, avant de prononcer qu’il y a délit.
L e stellionat est un délit ; il ne peut donc y avoir
de stellionat sans intention criminelle , sans fraude.
^ L ’intention même ne sufliroit pas pour constituer le
d é lit, si cette intention perfide n’avoit pas été remplie
si le créancier n’avoit • pas été trom pé1 réellement.
�( 48 )
L e sieur Joubert se plaint de ce qu’on ne lui a pas dé
claré les hypothèques inscrites et les hypothèques légales.
Les hypothèques inscrites : il pouvoit les connoître.
Les registres publics lui étoient ouverts; il les a même,
vérifiés.
•
.
.. Les hypothèques légales.: il les a connues. Cette vérité
est démontrée, non par des présomptions vagues, mais
par des preuves écrites , consignées dans un grand
nombre d’actes où le sieur Joubert a été présent, ou qui
lui ont été notifiés.
A in s i, le sieur Joubert n’a pas été trompé.
'
,
E t comment l’auroit-il été par un jeune homme sans
expérience, lui d’un âge beaucoup plus avancé , lui
depuis long-temps exercé aux affaires? •
r .
Ses plaintes, ses allégations de fraude, son accusation,
ne sont donc que les cris d’une colère aveugle ;
Cris impuissans devant des magistrats impassibles;
Cris qui doivent indigner dans la bouchetd’un oncle,
d’ un parrain;- qui se déclare le persécuteur de celui-là
mêm e que la nature, la religion lui imposeroient le
devoir de protéger et de secourir.
j
•
Signé C O U R B Y .
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT,.— Mars 1813.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Courby-Cognord, Jean-Joseph. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant ; contre le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé.
note manuscrite : « jugement confirmé par arrêt du 5 mai 1813. Voyez les motifs à la suite du mémoire de l'intimé. Il y a pourvoi en cassation. »
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2219
BCU_Factums_G2220
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53447/BCU_Factums_G2218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53523/BCU_Factums_G2608.pdf
bda2ba2b2fdc629a98ca2b4962352323
PDF Text
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GENEALOGIE
P IE R R E G U E Y F F I E R ,
A
JE A N N E M A R T IN O N .
M A R IE .
JEAN, f i e
3 avril
1 7 60.
M A R G U ER ITE ,
à
M arie-A nke S o lé u a g e , f le i 3 septembre 1773.
M A U H I C E , p rêtre ,
né en 1 7 1 9 ,
et *1" en 179G.
A N T O IN E .
LO U IS.
P IE R R E .
à
P IE IU IE -J O S E P H
Nozerine.
F R A N Ç O IS ,
G U I L L A U M E , "j* le 28 août
à
à
Jeanne Lémovd.
P IE B R E -J O S E P H ,
ab sen t.
A g k è s - F s a n ç o is e L a m o th e , ’ {* en l ’ an 12 .
A N T O IN E ,
A ppelant.
J E A N -B A P T IS T E ,
n é le 20 ju in
17G0 ,
m ajeu r e n i j 85 ,
A N T O I N E T T E , n é e le 16 ju in 1768 ,
à
m aje u re e n 179 3 .
A m a b le B a t o l ,
Intimes.
A N T O IN E ,
n é le 3 n o v e m b re *774 >
m a je u r en i ; 9 5 ,
�MEMOIRE
COUR R O Y A LE
D E RIO M .
POUR
LE
SIE U R
G U E Y F F I E R D E L ’E S P IN A S S E ,
ancien A vo cat, A p p ela n t;
CONTRE
Sieur
J e a n -B a p tis te
sieur
A n to in e
G U E Y F F IE R -D E L A IR E ;
G U E Y F F IE R D U B U ISSO N ;
dame A n t o i n e t t e G U E Y F F I E R , et S r A
B A Y O L son m ari, intimés.
m a b le
Usucapio........ hoc est f i nis sollicitudinis ac periculi litium.
( C i c e r o , orat. pro Cæcinîi).
L a prescription est fondée sur le droit naturel, qui
attribue la propriété ,au possesseur : l ’intérêt public
l ’a fait admettre par le Droit c iv il, qui en a déterminé
les conditions et les eff e t s.
Chez tous les peuples, les législateurs ont considéré
la prescription comme nécessaire pour assurer les
I
« 'C„i l A“M L"'I v 7
'
bt
�fortunes, fixer l'incertitude des domaines, mettre un
terme aux dangers des procès, punir même la négli
gence de ceux q u i, pouvant avoir des droits, tardaient
' trop à les exercer, et protéger la sécurité des possesseurs
_ ou de leurs héritiers.
Ces considérations ont fait appeler la prescription
la patrone du genre hum ain, et en ont dicté les diffé
rentes règles. La loi présume que ceux qui n ’ont pas
agi dans le délai q u ’elle fixe, n ’ont eu aucun intérêt
à agir, ou ont voulu faire la remise de leurs droits ;
elle décide que celui qui a possédé pendant ce délai
est le vrai, est le seul p r o p r i é t a i r e , p a rc e que la pos
session est le signe de la propriété. E n conséquence,
elle le dispense de toute autre preuve que de celle de
sa possession j elle n ’exige pas de lui q u ’il produise
des titres p o s i t i f s , p ar ce q u ’il p e u t ne pas les c o n n a î t r e ,
parce q u ’ils ont pu disparaître dans la nuit des tems,
parce q u ’enfin, après le tems fixé pour la prescription,
il n’a pas dit les conserver avec une soigneuse sollici
tude.
Ces principes salutaires, qui offrent les seuls moyens
de défense que
rance de ce qui
à de vieilles et
bienfaisans ont
d ’anciens propriétaires, dans l ’igno
s’est passé autrefois, puissent opposer
à d ’injustes prétentions, ces principes
été invoqués par le sieur Gueyifier de
l'Espinasse dans une cause où leur application parais
sait aussi naturelle q u ’équitable : ils ont c e p e n d a n t
été écartés sous le prétexte le plus futile.
U n héritier bénéficiaire qui , pendant plus de
trente années, a joui à ce titre et exclusivement de
�l ’hérédité entière, 3 etc cependant sssiniilc u un pos
sesseur précaire, et déclaré incapable de prescrire ,
pour avoir ob te n u , contre un curateur au béné
fice d ’inventaire, une sentence q u i, pour ses créances
p e r s o n n e ll e s , l ’autorisait à faire vendre les biens ou à
s’en mettre en possession pignorative.
Jamais l ’héritier n’avait usé de cette dernière faculté,
dont il n’avait pas besoin, et qui ne lui offrait aucun
avantage : toujours il avait agi,'seulement comme héri
tier, dans ses actes d ’administration comme dans la
plupart de ses actes judiciaires, dans ses rapports avec
les créanciers de l ’hérédité comme dans ses traités
avec l ’un de ses co-successibles.
C e p e n d a n t s on titre d ’héritier, qui était tout à-lafois son vrai titre, son titre u n iqu e, et un titre u tile ,
puisqu’il lui attribuait la propriété de l ’hérédité, ce
titre important et indélébile avec lequel on ne pou
vait contester la prescription, a été méconnu en lui 5
et on lui a attribué un titre vicieux, un titre précaire
q u ’il n’a jamais e u , afin d ’accueillir une action depuis
long-tems éteinte, afin de le contraindre au partage
d’une succession ouverte depuis 1760, en déconfiture
alors, liquidée à grands frais depuis, et à laquelle
n avait pas voulu prendre part autrefois, lorsqu’elle
était en ruine, celui-là même au nom de qui des parens collatéraux la réclament aujourd’hui q u ’ils savent
q u ’il serait difficile, après plus d ’un demi-siècle, de
réunir les preuves de tous les sacrifices faits pour
acquitter les dettes héréditaires.
�(4 )
FAITS.
L e sieur Jean Gueyffier, ayeul des parties, avait
épousé Marie-Anne Soléliage en 1 7 1 7.
De ce mariage étaient nés cinq enfans mâles. Mau
rice, né en 1 7 1 9 , décédé en 1 7 9 6 ; Pierre-Joseph
Gueyffier de L on g-Pré, dont l ’appelant est le fils ;
François Gueyffier, qui 11’est pas représenté dans la
cause-, G u illau m e, qui a laissé deux fils et une fille
(ce sont les intimés); et autre Pierre-Joseph Gueyffier
• du Buisson, absent depuis 17 6 3 , époque à laquelle il
se rendit aux îles françaises en Amérique.
L ’hérédité de l ’ayeul Jean Gueyffier est l ’objet de
la cause. Les intimés en demandent le partage, non
du chef de G u i l l a u m e l e u r père, q u i a v a i t cédé ses
droits à son frère Pierre-Joseph de Long-Pré, mais du
chef de Maurice, leur oncle,
dont ils sont héritiers
partiels.
L e contrat de mariage des ayeux communs est du
27 juin 17 17 .
L e père de Jean G ueyffier, futur époux, était alors
décédé. Sa mère, la dame Martinon, l'institua son
héritier de tous les biens q u ’elle laisserait à son décès,
sous la réserve de quelques objets qui devaient faire
partie de l'institution , si elle n ’en disposait pas au
trement .
L lle déclara substituer à la propriété d« tous scs
biens celui de ses petits-enfans mâles dont son fils
ferait choix; e t, à défaut de choix, l ’ain^ d ’entr’e u x ,
�(
5)
pourvu q u ’il ne fut pas entré clans l ’Ordre ecclésias
tique.
1
Ôn r e m a r q u e clans ce contrat une preuve des désor
dres q u ’éprouvaient déjà les affaires du sieur Jean
Gueyffîer.
Il y fut stipulé q u e Y usufruit des biens
substitués ne pourrait être saisi p ar les créanciers du
fu tu r époux.
La dame Martinôn décéda sans avoir fait d’autres
dispositions.
L ’aîné des enfans Gueyffîer, le sieur M aurice,
reçut les Ordres sacrés.
L e puîné, Jean-Joseph Gueyffîer, pèreclel'appelant,
fut institué par son c o n t r a t de mariage, du 2. août
1 7 4 5 , l ’héritier universel de son père, qui se réserva
1 5,ooo francs pour la légitime des autres enfans. Il
fut aussi choisi pour recueillir l ’effet de la substitution
faite par la clame M artinon, son ayeule. L a dame
Soléliage , sa mère , lui fit don d ’une somme de
3ooo francs,
payable après son décès.
Cependant, loin de s’améliorer, la fortune du
sieur Jean Gueyffîer père devint de jour en jour
plus en désordrej et la clame son épouse fut obli
gée de demander une séparation de biens, q u ’elle fît
prononcer en 17 5 1.
Le sieur-Gueyffîer décéda en 17G0. Sa succession
était grevée de dettes considérables.
U n inventaire fut dressé, le 27 juin 17G0, à la re
quête de Pierre-Joseph G ueyffîe r de L o n g -P r é , son
fils, en présence de la dame Soléliage, sa veuve. Le
sieur Piene-Joscpli Gueyffîer du Buisson y assista ,
�K
(6)
faisant tant pour lui que pour ses autres frères; et,
sans vouloir prendre, en leur nom , de qualité, il se
borna à faire, pour eux et'pour lu i, des réserves de
leurs droits.
L e sieur Gueyffier de Long-Pré fut chargé des
objets inventoriés. Il se mit aussi, dès cet instant ,
en possession de tous les biens de l ’hérédité.
L o rs de l ’inventaire, le sieur Gueyffier avait dé
claré n’accepter la succession que comme héritier
b én é fi ci a i r e.
L e 27 juillet suivant, il ré it é ra cette déclaration,
par acte au greffe, et renonça même à l ’institution
iV héritier.
Le
3o
juillet 1760, il fit nommer un curateur au
bénéfice d ’inventaire.
Le 14 a o û t, en vertu d ’ordonnance obtenue le 1 1 ,
sur requête, il assigna ce curateur en paiement de ses
créances contre la succession,
L e i£> novembre 1760, il ob tin t, en qualité d ’hé
ritier de la dame M artinon, son ayeule, et à d’autres
titres, une sentence par défaut, q u i, liquidant scs
créances, condamna le curateur à lui payer en capi
taux la somme de
36,485
francs, avec des intérêts
remontant, pour certaines sommes, à des époques fort
reculées. Les frais de la demande furent liquidés k
1 8 9 francs. L a sentence se termine par une d i s p o s i t i o n
qui était alors une sorte de formule employée dans
toutes les sentences semblables.
E lle permet au sieur de Long-Pré de jo u ir jtigno-
�(7 )
rativement, et de se mettre en possession des immeubless
si m ieux il n aim e les fa ir e saisir et ven dre, etc.
On sait que cette permission de jo u ir pignorcitivem ent 3 s i m ieux n aime fa ire saisir et vendre , était
une dispos it io n de stile qui autrefois, en Auvergne
s u r - t o u t , terminait toujours les sentences des condam
nations obtenues par les créanciers contre les débiteurs.
Déjà en possession, en sa qualité d ’héritier bénéfi
ciaire, non seulement des.im m eubles, mais encore de
tout le mobilier de la succession, le sieur Gueyfiier
de Long-Pré ne pouvait pas penser à prendre une nou
velle possession des immeubles, s e u l e m e n t à titre
pignoratif. Aussi ne il t-il aucun acte tendant a executer, en ce point, la sentence qu il venait d ’obtenir.
On ne rapporte aucune prise de possession de sa part.
Il continua de posséder comme il possédait auparavant,
c’est-à-dire en qualité d ’héritier bénéficiaire, et passa,
en cette qualité, quatorze diiTérens baux à ferm e, de
puis le 9 décembre 17G0 jusqu’au 3o décembre Ï7 6 1.
Ces baux seront produits.
:
L e sieur Gueyfiier lit plus : bientôt il opta pour la
saisie réelle. Afin d ’y parvenir, il fit faire au curateur,
1« 7 février 1 7 6 3 , un commandement recordé, con
tenant signification de la sentence du i 5 novembre
*760; commandement que suivit uu procès-verbal de
saisie réelle; celte saisie fut aussi signifiée au curateur,
avec une nouvelle notification de la sentence.
Alors le commissaire aux saisies réelles de la séné
chaussée de Riom fit procédai’ , le if> juin 17 6 3 , au
bail des immeubles saisis. Le sieur G u eyfiier, déjà
�possesseur de ces immeubles, et de quelques autres ,
s’en rendit fermier judiciaire.
Nous disons de quelques autres, car la saisie réelle
et le bail ne comprenaient pas tous les immeubles de
l ’hérédité. On n’avait pas saisi notamment des vignes
situées à Costecirgues, et plusieurs rentes foncières ou
autres.
Cependant des créanciers de Ja succession poursui
virent le sieur Gueyfiler comme héritier bénéficiaire5
et une eentence de la sénéchaussée d ’Auvergne, du 23
août 1 7 6 4 , le condamna à rendre compte du bénéfico
d ’inventaire.
- L e sieur Gueyffier présenta ce compte le
3o
no
vembre de la même année. On y voit qu 'il porte ,
dans le chapitre des recettes : i° le produit de tous
les b ie ns d e p u i s l ’o u v e r t u r e de la succession j u s q u ’il la
date du bail judiciaire} 20 celui des renies et des
vignes jusqu’à la date du compte, parce q u ’elles n’avaient
pas été saisies.
Ce compte, rendu judiciairement, est une nouvelle
preuve que le sieur
Gueyffier de Long-Pré n’avait
jamais possédé, ne possédait pas même alors à titre
pignoratif.
Le premier bail judiciaire n’avait été passé que pour
trois années, si lant la saisie reellc dure, porte le
procès-verbal.
Ces troià ans étant expirés, un second bail judi?
ciaire fut aussi passé, le 10 avril 1 7 6 6 , pour trois
années, avec la même restriction, si tant la saisie
réelle dure.
�L e sieur Gueyfiier de Long-Pre se; rendit
encore
fermier judiciaire.'
Mais il ne cessa pas de se considérer et d ’agir comme
bénéficiaire; car, le 10 août de la même année,
h é r i t i e r
il donna à ferme , en sa qualité d ’héritier, un immeuble
dépendant de l ’hérédité; et, les années suivantes, il
traita, aussi en la même q u alité, soit avec le sieur
Guillaume G ueyfiier, son frère, père des intimés ,
soit avec les créanciers de la succession, i
'*
L e traité fait avec Guillaume Gueyfiier est du 26
juillet 1767. Celui-ci y agit* pour lui et pour la dame
Soléliage, leur m ère, créancière de la succession.
Il réclame pour la mère des sommes dues en vertu
du contrat de mariage, du 27 juin 17 17 .
Il demande, de son chef, une légitime de rigueur,
et prétendait avoir le droit de l ’exiger même sur les
biens compris dans la substitution.
Le traité fait connaitre le peu de ressources que
présentait alors l ’hérédité. On y dit que sa valeur
était absorbée par des dettes, même antérieures au
contrat de mariage de 1 7 1 7 ; il y est aussi reconnu
que la dame Soléliage avait obtenu sa séparation de
biens en 1 7 5 1 .
Par cette transaction, le sieur Gueyfiier de LongPré s oblige, non seulement; comme héritier, riiaià
encore en son propre nom , ;i payer à sa mère son
douaire annuel, h l u i f o u r n i r , pour logement,* une
chambre m eublée, et h servir les intérêts d ’une somme
de 700 francs, qui lui restait due sur sa dot pécu
niaire.
•’
'r
z
�w
( 10 )
Il promet aussi à son frère une somme de
5oo
fr.,
pour lui tenir lieu de légitime paternelle; et Guillaume
Gueyffier lui cède tous les droits q u ’il pouvait pré
tendre, tant sur les biens compris dans la substitution,
que sur ceux de Jean Gueyffier son père.
E n conséquence , les parties renoncèrent U tout
procès.
L e sieur Gueyffier de Long-Pré prit ensuite des
arrangemens avec, les créanciers ; il acquitta leurs
créances; et il obtint la main-levée des oppositions
q u ’ils avaient formées à la saisie réelle. On rapporte
six de ces mains-levees : les a u t r e s , et même tous les
actes d ’arrangement, n ’ont pu se retrouver : près de
soixante ans d ’intervalle en ont fait perdre les traces;
en sorte que les héritiers du,sieur Gueyffier de LongPré seraient aujourd’hui privés de la r e s t i t u t i o n des
sommes payées par leur père, si la prescription n ’écartait pas l ’action en partage à laquelle ils résistent.
Muni des traités q u 'il avait faits, le sieur Gueyffier
présente, le iG mai 1770 , en qu a lité cVhéritier p a r
bénéfice cVinventaire de Jean G uey ffier, son père ,
une requête en radiation de la saisie réelle. Il y parle
des arrangemens q u ’il a pris avec les créanciers, des
main-levées d ’opposition q u ’il a obtenues. Il demande
la permission d assigner, soit les créanciers encore
opposans, soit le commissaire aux saisies réelles, soit
le curateur au bénéfice d ’inventaire.
L a permission fut accordée; une assignation fut
donnée aux parties intéressées; e t , par sentence du
17 août 1670, contradictoire avec le curateur et
�certains créanciers opposans, par défaut faute de
plaider, contre les autres et contre le commissaire aux
saisies réelles, la radiation de la saisie fut ordonnée.
En
rayan t
la saisie, la sentence fit disparaître les
droits dû commissaire, et par conséquent les effets du
bail judiciaire, q u i , d’après ses termes m êm e, ne
devait pas durer plus que la saisie, q u i, d ’ailleurs,
était expiré depuis la fin de 17 6 8 , et qui n’avait pas
été renouvelé.
Il est fâcheux pour la justice que cette sentence
n’ait pas été connue en première instance, et q u ’elle
n ’ait été retrouvée q u e d e p u is le j u g e m e n t 5 sans doute
elle eût évité a u t r i b u n a l de Brioude l ’erreur grave
d an s l a q u e l l e il est tombé 5 car elle ne laissait pas de
prétexte pour considérer, au moins depuis 1770 , le
sieur Gueyffîer de Long-Pré comme possesseur à titre
pignoratif, lui qui avait obtenu la sentence en qualité
d ’héritier bénéficiaire , et qui , dès ce m om ent-là
su r-tout, n ’eut plus que ce titre d ’héritier bénéficiaire
personnellement, et celui d ’héritier pur et simple,
comme cédataire des droits de G u illa u m e, son frère,
pour jouir de la succession du père commun.
Plus de trente ans se sont écoulés, même depuis
cette sentence, avant que la possession exclusive du
sieur Gueyffîer de L o n g - P r é ne fût troublée par la
demande en partage su r laquelle la C our aura à pro
noncer. Seulement il paraît que Guillaum e Gueyffîer,
père des intimes , avait demande la rescision de la
cession de droits d u 26 juillet 17G75 mais les deux
�^ V, *
( 12 )
frères traitèrent sur cette dem ande, par acte du 10
mai 1775.
C e Guillaum e Gueyfiier décéda le 28 août 17 7 8 ,
après avoir fait un testament en date du 7 juin 1 7 7 7 ,
par lequel il avait institué son épouse son héritière
universelle. Il parait que celle-ci avait formé contre
le sieur Gueyfiier de Long-Pré, en 17 9 3 , une demande
en partage de la succession de Pierre-Joseph G u e yfiie r,
second du n o m , q u ’elle disait mort aux îles. Cette
demande n ’a pas eu de suite; et même, par acte passé
le 4 b r u m a i r e an 12 entre la dame veuve de Guillaume
Gueyfiier et ses enfans (les i n t i m é s ) , elle a reconnu
q u ’elle n’avait aucun d ro it, soit à la succession de
Pierre-Joseph G ueyfiier, leur oncle \ soit à celle de
M arie-Anne Soléliage, leur ayeule.
Maurice G ueyfiier, frère du sieur de Long-Pré, et
onc le des i n t i m é s , est décédé en j u i l l e t 1796. Il
n ’avait ni accepté, ni répudié la succession de Jean
G u e y fiie r,
son père; il 11’en avait par conséquent
jamais demandé le partage. C ’est de son chef aujour
d ’hui que ce partage est réclamé.
C etle demande 11’a été intentée q u ’après la mort
du sieur Pierre-Joseph Gueyfiier de L on g-P ré, contre
Antoine Gueyfiier de Lespinasse, son fils. Elle fut
formée par exploit du 3 floréal an i 3 ; elle avait été
précédée de deux citations en conciliation, l’ une du
18 thermidor an 12, qui avait été abandonnée, l ’autre
du i 5 pluviôse an i 3 , qui avait été suivie d ’ un procèsverbal de non conciliation, du 19 du
mois.
Par ces divers exploits, les trois enl'ans de Guillaume
�Gueyffier ‘ réclamèrent le partage de la succession de
Jean Gueyfiier et de celle de Marie Soléliage , leurs
a y e u x , pour leur en être attribué un cin qu ièm e,
comme r e p r é s e n t a n t G u illa u m e , leur p ère, et le tiers
de deux autres cinquièmes, comme héritiers de Mau
rice et de Pierre-Joseph Gueyffier, deuxième du nom ,
leurs oncles.
Cette action resta long-tems sans poursuites ; elle
fut renouvelée par exploit du 9 novembre
1812,
négligée ensuite, reprise avec plus d ’activité en 1820,
enfin jugée le
23 mai
1821.
Le sieur Gueyfiier de Lespinasse avait employé en
défense des moyens puissans.
A la d e m a n d e en partage de la succession de Marie
Soléliage, il avait opposé une répudiation.
Contre celle de l ’héritier de Jean G ueyffier, il avait
fait valoir :
i° Les actes des 26 juillet 1 7 6 7 , et 10 mai 177Î),
contenant cession de droits successifs par Guillaume
G ueyffier, père des demandeurs}
20 Le défaut de preuves du décès de Pierre-Joseph
Gueyffier, absent 5
3° Une
prescription plus que trentenaire, qui avait
Anéanti les droits que pouvait avoir, soit ce PierreJoseph G ueyfier, soit M aurice, son frère.
Tous ces moyens paraissaient sans réplique.
Cependant le tribunal de Brioude se borna à dé
bouter les demandeurs de leur action en partage de la
succession de Marie Soléliage, et de celle q u ’ils avaient
�formée du chef de G u illau m e, leur père, relativement
aux biens de l ’ayeul.
Il les déclara non-recevables, quant h présent seule
ment , dans l’action exercée du chef de l ’absent ;
E t il accueillit leur demande du chef de Maurice,
leur oncle, en considérant comme précaire la possession
paisible et exclusive, pendant plus d ’un demi-siècle,
du sieur Gueyfiiier de Long-Pré et de son fils (i).
( i ) Voici le texte des motifs d u jugement sur cette difficulté prin-p,
cipale :
« Considérant qu après le décès de J e a n G u c y filer, ayeul des parties,
et de la succession de cujuSy arrive le 2 avril ï ^ 6 o t Pierre-Joseph
G ueyffier, son fils aîné et son héritier institué, renonça à son i n s t i
t u tio n , par acte du 29 ju ille t, même an n ée, et se porfa son héritier
bénéficiaire, inventaire préalablement fait desmpubles, titres et papiers
dépendans de la succession, en présence de ses autres cohéritiers ; q u e ,
p e u de tems après, il fit n o m m e r u n c u r a t e u r à c e l t e s u c c e s s i o n , contre
laquelle il forma une demande tendant à être envoyé en possession
pignorative des biens en dépendant,
ou à être autorisé à les faire
vendre en la manière accou tum ée, pour être payé des reprises ou
avances qui lui étaient dues par cette succession ; q u e , sur cette de
m ande, intervint sentence par défaut contre le curateur, le 12 novembre
1760, qui adjugea les conclusions des demandeurs; qu ’en vertu de cette
senten ce, il préféra posséder pignorativement les biens de cette suc
cession, au lieu de les faire vendre; qu ’il le s fit néanmoins saisir réelle
ment à sa requête, et s’en rendit le fermier judiciaire; que c ’est ce
qui résulte d ’ un procês-verbal qu’ il fit dresser de ces biens, saisis lo
2 juillet 1763 ; saisie réelle à laquelle cependant il parait qu ’on n’a pas
donné de suite ;
« Considérant que la partie de Mallye ne peut méconnaître cello
sentence, qui est l’ouvrage de son au teu r, des faits
te n u e ,
et
que les parties de Jonquoy peuvent
succès ; qu en vain la partie de Mallyo so
la
duquel
elle est
1»< opposer avec
retranche
dans la qualité
d héritier bénéficiaire, prise par sou a u te u r , pour établir qu’il lui
�( *5 )
Tel est le jugement que le sieur Gueyffïer de Lespinasse a soumis à l ’examen de la C o u r , en interjetant
¡¡ppgj par exploits des et Q^aout 1821.
Ses moyens sont aussi simples que décisifs.
L a fa c u lt é d’accepter la succession de Jean Gueyfiier
a été perdue pour les intim és, par plus de trente ans
de prescription.
L a propriété des biens de cette succession a été
suffisait de cette qualité pour se maintenir dans la possession des Liens
dépendans de la succession de cujus ; qu ’ il n’est pas moins vrai qu ’on
doit supposer à son auteur un intérêt quelconque pour a v o i r p r é f é r é de
se f a i r e envoyer en possession p i g n o r a t i v e d e c e s m ê m e s b ie n s , en vertu
de c e t t e s e n t e n c e o b t e n u e c o n t r e un c u r a t e u r de son choix , et a 1 insu
de ses c o h é r i t i e r s ; q u ’ il n ’ e n a pas moins changé volontairement le titre
de sa possession, dans le dessein sans doute de faire voir qu’ il abandon
nait cette succession pour en jouir avec plus de sécurité ; que cette
sentence a été exécutée ; que cette exécution résulte de la qualité de
ferm ier, qu’il a prise, et que cette qualité suppose une possession or
donnée par Justice; et que cette possession ne p o u v ait, dans l ’espèce ,
que se rattacher à la possession pignorative qu ’ il avait obtenue par la
sentence de 1760; que dès-lors la partie de M allyc ne peut se plaindre
que les parties de Jonquoy invoquent contr’ellc un titre que son auleur
s’est créé lui-même dans son intérêt personnel, et qui existe dans toute
sa force, sur-tout lorsqu’ il s'agit d'écarteF un m oyen de prescription
°pposé par un héritier à ses cohéritiers,
sacrée ;
qui réclament une dette
" Considérant dès-lors que la possession de la partie de M a l l y c , ou
son auteur , n’est fondée que sur la sentence du 12 novembre 17G0 ;
qu’ elle n’a joui, par elle ou par son auteur, que pignorativement de ces
biens, que comme un gage de sa créance; qu’ une pareille jouissanco
n ’est que précaire, et ne peut produire une prescription utile, quelque
tems qu ’ elle ait durée ; q u ’il f a u t , pour acquérir une pareille p r e s c r ip
tio n , jouir animo dom ini; et que £a jouissance n ’a pas de
th 'c , etc. >1
caisc-
/
�acquise à l ’appelant par une possession utile et plus
que trentenaire.
Il suffirait, pour le succès de la cause de l ’appelant,
de démontrer une seule de ces propositions.
Il prouvera surabondamment q u ’elles sont toutes
les deux également vraies.
•
P R E M IÈ R E PR O PO SITIO N .
L a fa c u lté d ’accepter la succession de Jean Gueyjfier
a été perdue par p lu s de trente ans de prescription. >
«
Fixons les faits et leurs dates.
Jean Gueyfiier est décédé le
3 avril
1760.
A son décès, sa succession n ’a été acceptée que par
Joseph Gueyfiier de Lon g-P ré, son fils, soit lors de
l ’inventaire du 27 juin 1760, soit par un acte au
greffe, du 27 juillet suivant.
Maurice G u eyfiier, prêtre, au nom duquel agissent
les intimés, n ’accepta point alors, n’a point accepté
depuis.
Il est décédé, en 1 7 9 6 , sans avoir rien fait, sans
avoir exprimé aucune intention qui put être consi
dérée comme un acte d ’héritier.
O r , de 17G0 à 1 7 9 6 , trente-six ans s’étaient écoulés,
c’est-à-dire, plus d ’années qu il n ’en fallait pour le
cours de la seule prescription admise en Coutume v
d’Auvergne , et de la plus longue de celles connues
dans le Droit romain.
A sa m ort, ses uoveux, enfans de G u illaum e, ont
�( 17 )
encore gardé le silence; ils ne l ’ont rompu q u ’en i 8o 5 ,
pour réclamer judiciairement le partage de la succes
sion de Jean Gueyffier, dont ils ont pris alors, pour
la première fois , la qualité d ’héritiers du chef de
M a u r i c e , leur oncle.
Quarante-cinq ans d ’abstention permettaient-ils
encore à ces prétendus héritiers de se présenter pour
accepter enfin une succession si long-tems abandonnée
par eux, et qui cependant n’était pas vacante, puisque
le sieur Gueyffier de Long-Pré l’avait acceptée luimême dès son ouverture?
L ’article 789 du Code civil répondra à la question
en ces termes :
« L a f a c u l t é cV accep ter ,
ou de répudier une
« succession , se prescrit par le laps de tems requis
« pour la prescription la p lu s longue des droits
« immobiliers. »
O r , si l ’on consulte l ’article 22G2 du C od e, qui
fixe la durée de la prescription la plus longue^ on y
verra que cette durée est de trente ans :
« Toutes les actions, tant réelles que personnelles,
« sont prescrites par trente ans, sans que celui qui
« allègue cette prescription soit obligé d’en rapporter
<( nu titre, ou q u ’on puisse lui opposer l’exception
“ déduite de la mauvaise foi. »
Les textes des deux articles sont clairs et formels.
Mais, dira-t-on peut-être, que sert ici le C o d e ,
puisqu’il s’agit de droits ouverts avant son émission?
Nous pourrions nous borner à répondre que le Code
n’a pas établi un principe nouveau, et q u e , dans cette
3
�( i8 )
partie de notre droit comme dans le surplus, les nou
veaux législateurs se sont bornés à recueillir et à.
réunir en un seul corps les principes épars dans les
lois romaines, les statuts coutumiers, les autorités des
arrêts et les opinions des jurisconsultes.
Il n’est pas difficile, au reste, de prouver q u ’autre
fois, comme aujourd’ h u i, la f a c u lt é d'accepter une
succession se prescrivait par trente ans.
- Suivant le Droit romain, la prescription de dix
ans, appelée prœscriptio longi temporis , ne suffisait
pas pour d é t r u i r e l ’ a ct io n en pétition d ’hérédité. C ’est
ce que décide la loi 7 , Cod. D e petitione hœreditalis.
Pourquoi ? parce que les droits personnels n ’ é t a ie n t
pas effacés par cette sorte de prescription. C ’est la
remarque de Godefroi sur cette loi : Personales
actiones decennio nul viccnnio non tolluntur.
Mais la prescription de trente ans éteignait l’action :
P etitio hœreditatis prescribitur triginta annisj ajoute
Godefroi.
Cette prescription de trente ans s’appliquait à toute
espèce d’actions, soit spéciales, soit universelles, soit
personnelles. Elle s’étendait même à celles q u i, dans
l ’ancien droit, étaient désignées sous le nom de perpé
tuelles. La loi 3 , C . D e p r œ s c r ip tio n e 3o v e l /|0
annoruinj s’exprime ainsi :
S ic ut in rem sp écia les, ita de universitate ac per
sonales actiones ultra triginta annorum spntimn
minime protendantur......... Jfœ aillent actiones anno
triginta contmuis cjclinguantur (pue perpétua vulebantur.
�!9
L e président Faber, dans son code, rappelle cette
règle :
Il est permis à l ’héritier naturel, dit-il, de ne pas
prendre de qualité, tant q u ’il a le droit d’accepter la
succession, c ’est-à-dire pendant trente ans : Tarn d ik
eniiii tacerè illi perm ittitur, quàrn cliü liberum est ci
aclire hœreditatem, id est, usque ad triginta annos
(Voyez livre 6 , titre 11 , yjef. 46 ).
C ’est dire assez clairement que l ’héritier qui ne
s’explique pas dans les trente ans perd le droit d ’acçepter l’hérédité.
Dans la définition 11 du titre x i , l ’a u t e u r a jo u t e
que l ’héritier qui n ’ a ni r é p u d ié ni a c c e p t e , est tou
jo ur s ad m i s si b le h a p p r é h e n d e r 1 hérédité, pourvu que
ce soit dans les trente ans : Salvum illi erit ju s
adeundi quandocumquè
dum modo
intrà triginta
annorum. Le m o tif de cette restriction est indiqué
dans une note : c’est parce que le droit d ’accepter une
hérédité se prescrit par trente ans, comme tous les
autres droits perpétuels. Jus adeundi præscribitur
hodiè spatio triginta annorum , ut et cœtera ju r a
perpétua. A l ’appui de cette note, l ’auteur cite la
loi 3 , C. de prœscrip. 3o v e l /jo annorum.
Ainsi, dans
appelé par la
trente ans sans
Il ne lui était
la pureté du Droit romain, celui qui,
loi à une succession, laissait écouler
se porter héritier, était privé de ce litre,
plus permis d ’accepter l ’hérédilé.
Dans le Droit français, où était admise la maxime:
N u l n ’est héritier qui ne v e u t, comment la même
prescription n’aurait-elle pas frappé celui qui aurait
�gardé trente ans de silence absolu depuis l ’ouverture
de la succession ?
,
■
«
«
«
«
«
«
«
u
u
«
« L ’usage de la prescription, dit l ’immortel auteur
des Lois civiles, n ’est pas seulement d ’acquérir la
propriété à ceux qui ont prescrit par la possession,
et de dépouiller les propriétaires qui ont laissé
prescrire; mais il y a encore un autre usage des
prescriptions, où la possession n ’est pas nécessaire,
qui est celu i tVanéantir les droits et actions q u ’on
a cessé d ’exercer pendant un tems suffisant pour
prescrire. Ainsi un créancier perd sa dette, et tous
droits et actions se perdent, quoique ceux qui en
sont débiteurs ne possèdent rien, si on ne dem ande ,
« ou si on cesse d ’exercer le droit pendant le tems
« réglé par la loi. »
L ’application de cette doctrine aux droits d ’un
h é r i t i e r p r é s o m p t i f est aussi facile que naturelle : il
a la faculté d ’accepter; mais il la perd, cette faculté,
si trente ans s’écoulent sans q u ’il l ’exerce. Alors le
titre d’héritier et les droits qui y sont attachés n’existent
plus pour lui.
Furgole, dans son Traité des Testamens (chap. 10,
section i re, n° i 5y ) , enseigne la même doctrine :
« Afin qu ’on soit recevable à accepter une hérédité,
« il faut venir dans les tfcrns marqués par les lois, et
« que le droit de 1 héritier n ait pas été éteint par la
« prescription. »
lia loi 8, cod. de ju r e d e lib ., décide q |ie “ le
« droit d’accepter une hérédité n ’est pas sujet à la
<< prescription de long-tems, c’esL-îi-dire de di xans.
�( ai )
' M A
« Il n’est donc su jet qu’à la prescription de trente ans
«
l ’ouverture-, et quoique certains auteurs aient
d e p u i s
« cru que la faculté d’accepter une hérédité ne se
« perd pas par la prescription de trente a n s, il n’y a
« pas liç£ de douter que l ’opinion contraire ne soit
« c e r t a i n e , parce que le laps de trente ans est le
a terme fatal de toutes les actions personnelles ».
h . 4 et tôt. , tit. C. de prœscript. 3o v e l 40 annorum.
L ’auteur ajoute cependant qu e, si l'héréd ité était
v a ca n te, et sur la tête d ’ un curateur qui serait un
simple dépositaire, elle pourrait être acceptée pendant
trente ans.
M.
M e r l i n e x a m i n e la q u e s ti o n avec sa profondeur
or d in a ir e (i)* Il cite les o p in io n s de Sand et de V oet,
auteurs B e l g e s , sur la faculté q u ’a l ’héritier naturel
de délibérer pendant trente ans, s’il n’est pas poursuivi,
nemine urgente; mais sur la nécessité où il est d ’ac
cepter dans les trente ans, pour ne pas être exclu de ce
droit : Antequhm tempore ah adeundd hœreditate
excludatur.
Il rapporte aussi et développe l ’avis de Furgole.
En fin il détermine les conséquences de cette doctrine:
« Pour nous fi.\/er sur ce point important, d it- il,
<( nous devons rechercher quelle e s t , relativement
“ aux successions *qni vsont restées vacantes pendant
« trente ans , l'eflet de la prescription du droit
« d ’accepter. Cet effet est très-bien déterminé par
« Gomès, dans ses f^ariœ l'esolutiones, t. 1 , ch. 9 ,
0)
Voyez R épertoire, au mot J U iU ier, section 3 , paragr. i Cï.
�i
( 22 )
« n° 2 7 , ju s adeundiprœ scribiturper triginta annos^
« undc si infrà eos hceres.... N on adivit hœredilatem
« sibi delatam e x testamento v e l ab intcstato, amittit
\
« cam ,etdevplviturproxim ioriingraduipsiusdefuncti.
« A in si, par la prescription, du droit (^accepter,
« il s’opère une dévolution de ce droit aux parens du
« de gré qui suit immédiatement celui dans lequel se
« trouvent les parens qui en o n t, pendant trente ans,
« négligé l ’exercice. »
I
L ’auteur suppose que tous les héritiers au premier
degré o n t né gligé p e n d a n t trente ans d ’user de leurs
droits; ce q u i, en fa isa nt d is p a ra ît re ces droits, pro
duit la dévolution de l ’hérédité en faveur des hé rit ie rs
d ’un degré inférieur.
z
. A plus forte raison doit-il en être ainsi, lorsqu’un
des héritiers au premier degré a accepté la succession ;
à sa portion doit alors accroître celle de ses cohéritiers,
q u i , par trente ans de silence, ont perdu la faculté
d ’accepter.
Cette doctrine était applicable sur-tout en Auvergne,
dont la loi municipale (art. 2 , tit. 17 ) déclare que
tous droits et actions corporels ou incorporels se pres
crivent, acquièrent et perdent p ar le laps et espace
de trente ans.
Tels étaient les principes sous lesquels s’était ouverte
la succession de Jean Gueyfiier père, décédé à Brioudc.
Il avait laissé cinq enfans appelés à la recueillir;
mais ils pouvaient ne pas répondre à cet a p p e l : car
on n’est pas héritier malgré soi. Pour q u ’ ils devinssent
héritiers, il iulluic q u ’ils acceptassent; sans accepta-
*
�( >3 )
lion ils étaient seiilement héritiers présumés, avec
la faculté de devenir héritiers réels. Mais cette faculté
devait être exercée dans le délai fixé par la l o i , c’està-dire , a v a n t les trente ans. Elle s’est éteinte en eux,
s’ils n ’en ont pas u sé , et si d ’autres héritiers ont
accepté eux-mêmes. ,
O r , c’est précisément ce qui est arrivé. L a succes
sion de Jean Gueyffier n’a jamais été vacante. Le sieur
Gueyffier de Long-Pré l ’a acceptée, dès son ouverture,
sous bénéfice d ’inventaire.
L e sieur Guillaume Gueyffier, après s’être abstenu
pendant quelques années, l ’a aussi a c c e p t é e , meme
, purement et simplement, en cédant ses droits hérédi
taires, moyennant un prix, au sieur de Long-Pré ,
son frère.
A insi, ce dernier a été saisi de l ’hérédité, non seu
lement comme héritier bénéficiaire, mais encore comme
héritier pur* et simple , puisqu’il représentait son
cédant.
11 a seul possédé, dès le décès du père com m un, le
titre d ’h éritier, le j u s et nomen hceredis.
Ce titre d’ héritier, ce j u s et nomen hceredis, il l ’a
possédé exclusivement, et sans trouble, pendant plus
de trente ans.
Qu importerait donc que le sieur de Long-Pré eût
ou non été détenteur aussi des immeubles de la suc
cession ?
Fiit-il vrai même que ces immeubles avaient été
détenus précairement, tout détenteur précaire ne les
aurait possédés que pour le sieur de Long-Pré, parce
�<ÎJK
(»4
5
q u e, scs frères s’étant abstenus, lui seul, qui avait
accepté, était seul aussi rhomme'de la succession, en
était le vrai propriétaire et le vrai possesseur.
Ce titre d ’ héritier, dont il a joui sans partage
p e n d a n t le tems le plus long que les lois fixent
pour la prescription, ce litre d ’héritier, il a le droit
de continuer d’en jouir aussi sans partage, et de l’op
poser à des personnes qui ont dédaigné la succession lors
q u ’elle était embarrassée, onéreuse, et une occasion de
tracasseries et de sacrifices. Il a le droit de leur dire que
leur abstention pendant p lu s de 4o ans, et l ’occupation
du ju s et nomen hœredis, par lui s e u l , pendant ce long
période, leur ont fait perdre la faculté d ’accepter u n e
hérédité qui n ’est devenue aujourd’hui liquide que
par ses soins, affranchie de charges q u ’à ses frais, et
qui offrirait p e u t - ê t r e quelqu’avantage, mais s e u l e m e n t
j>arce que les titres des dettes acquittées se sont la.
plupart égarés, et parce que les sommes considérables
employées à satisfaire les créanciers ne seraient pas ,
dans les comptes du partage, considérées comme valant
plus aujourd’hui q u ’en 1760; tandis que la valeur des
biens s’est beaucoup accrue , tandis que les mêmes
sommes, si elles eussent servi alors à acquérir des
immeubles, au lieu de payer les dettes héréditaires ,
auraient produit au sieur de Long-Pré une valeur plus
que triple.
Cette première dissertation suffirait pour repousser
les prétentions tardives des intimés, et pour démon
trer l’erreur du jugem ent, quand il serait vrai que le
sieur Gueyffier n’aurait pas possédé pendant trente
�(
*5 )
ans, ou n’auïait possédé que pignorativement les biens
de la succession en litige.
Mais, sous ce second rapport aussi, l ’erreur du ju
gement est palpable.
D E U X IÈ M E PR O PO SIT IO N .
)
L a propriété des biens de la succession a été acquise
à Vappelant par une possession utile et p lu s que
trentenaire.
Pour, motiver leur décision, les p re mi er s ju g e s ont
dit :
Que le sieur G u e y f f i e r de Long-Pré fit nommer un
curateur à la succession de son père;
Q u ’il forma contre ce curateur une demande [ten
dante à être envoyé en possession pignorative des biens
de la succession ; '
Q u ’en exécution de cette sentence,' il préféra pro
fite r pignorativement des b ien s , que de les fa ir e
vendre ; q u ’il les f i t saisir réellem ent 3 et s ’en rendit
ferm ier ju d icia ire ; que l ’exécution de la senténce ré
sulte de la qualité de fermier q u ’il a prise ;
Q u e c e l t e q u a l i t é de f e r m ie r suppo se u n e possession
01 donnée p a r
la J u s t i c e ; et q u e c e t t e possession
ne
p o u v a i t , dans l ’esp èce, se r a t t a c h e r q u ’à la possession
p ig n o r a t i v e q u ’ il a v a i t o b t e n u e ;
Que dès-lors sa possession et celle de scs héritiers est
fondée seulement sur la sentence du i5 novembre
17G0; qu ’ils n’ont joui du bien que pignorativement,
4
)
�( ’G )
et Comme du gage de leur créance; q u ’une pareille
jouissance n’est que précaire, et ne peut produire de
prescription.
Tels sont, en analise, les motifs du jugement.
Ces motifs prouvent que les faits n ’ont été ni bien
connus, ni bien appréciés : ils présentent beaucoup
d ’idées fausses ou contradictoires.
Il y a eu erreur de f a i t , lorsqu’on a dit que le
sieur de Lon g-P ré avait formé contre le curateur
une demande tendante à être envoyé •en possession
pignorative .
L e seul bu t q u ’il ait e u , q u ’ il ait pu avoir en
agissant contre le curateur, a été de faire liquider
ses créances.
Q u ’avait-il besoin d ’un envoi en possession pigno
rative?
Déjà il avait pris la qualité d ’hériter bénéficiaire;
déjà, en cette q u a lité , il était en possession des biens.
.Cette possession réelle et légale rendait absolument
inutile pour lui une sentence d’envoi en possession
nouvelle. Mais il lui était utile d’obtenir la liquidation de
ses créances , ainsi q u ’uue condamnation exécutoire
contre une succession q u ’il n ’avait acceptée que sôus
bénéfice d ’inventaire, et dont les actions et les biens
étaient, par cette précaution, séparés de ses propres
actions et de ses biens personnels.
Tel fut le m otif qui 1# détermina
faire nommer
un curateur au bénéfice d ’inventaire, à assiguer ce
�(
27 )
curateur en paie men t, (le ses ciéances, e t a. faire pro
noncer la sentence du i 5 novembre 1760.
Cet te sentence liquide les créances à la somme de
36,485 francs de pr inci pa ux , por tant intérêt depuis
lo ng -t em s. C ett e'l iqu id a ti o n est la disposition princi
pa le de la sentence.
Il est vrai q u e , dans une disposition secondaire, il
est ajouté :
* « Pour parvenir au paiement des condamnations
« ci-dessus prononcées, tant en principal et intérêts
« que frais et dépens, permettons au suppliant de
« jouir pi gnorativefnent, et se mettre en possession
« des immeubles des successions des dits P i e r r e (1) et
« Jean G u e y f f ic r , si m ieux ri aime les faire saisir et
« vendre par décret en nos audiences, en la manière
« ordinaire. »
On voit que la sentence n ’envoyait pas directement
en possession pignorative.
Seulement elle permettait de jouir pignorativement,
et de se m ett re, à cet effet, en possession.
C ’était une faculté q u ’elle accordait, et non une
possession q u ’elle attribuait sur-le-champ.
C ette faculté pouvait être exercée ou négligée.
Cett e faculté était même subordonnée à. une action
qui devait en précéder l ’exercice, si m ieux il r i aime
fa ire saisir et 'vendrej dit la sentence.
A i n s i, pour jouir pi gnorativem ent, il eût fallu que
( . ) Pierre Gucyfficr ¿Lait le père de Jean <pi lui aYait succédé. Le?
deux successions étaient confondues.
�le sieur de Long-Pré fit quelqu’acte tendant à sa mise
en possession pignorative ; q u e , par exemple, il dé
clarât au curateur q u ’il entendait opter pour la jouis
sance pignorative ; q u ’il l ’assignât pour assister à une
prise de possession, faite en exécution de la sentence*,
et q u ’il fit dresser un procès-verbal de cette prise de
possession.
O r , le sieur Gueyffier de Long-Pré n ’a jamais fait
d ’actes semblables ; jamais il n ’a usé de la permission
de jouir pignorativement ; jamais il ne s’est mis en
possession , à cet eft'et, des immeubles de la succession;
jam ais, par conséquent, il n’a opté j>our cette faculté
que lui donnait la sentence.
C ’est donc une idée fausse, que celle qui suppose
q u i i a j o u i pignorativement.
A u contraire, il a opté pour la seconde faculté q u e
lui d o n n a i t la s e n t e n c e ; celle de fa ire saisir et vendre 3
par décret, les immeubles de la succession.
Cette seconde faculté était en opposition avec la
première. Il lui était permis de jo u ir pignorativementy si mieux n ’aimait fa ir e saisir. Il a fait saisir :
donc il n’a pas voulu jouir pignorativement.
C ’est encore une idée fausse, et contradictoire en
quelque sorte avec elle-même, que de rattacher la
jouissance comme fermier judiciaire, à la jouissance
pignorative permise par la sentence de 17G0.
Possesseur à litre pignoratif et fermier judiciaire
sont deux qualités incompatibles.
Le possesseur à titre pignoratif a y a n t , dans la sen
tence d envoi en possession, uu lin e pour jou ir, n ’a
�(
29
)
pas besoin de s’en procurer un nouveau en affermant
judiciairement.
L e possesseur à titre pignoratif jouit en son propre
n o m , administre les biens à son g r é , en conserve la
j o u i s s a n c e , tant qu ’il n’est pas payé de sa créance*, il
fait les fruits siens, et les compense ou intégralement,
ou jusqu’à due concurrence , avec les intérêts de ce
qui lui est dû.
L e fermier judiciaire, au contraire, ne jouit qu'au
nom du commissaire aux saisies réelles ; il ne conserve
la jouissance que pendant la durée de son bail ; il
doit en payer annuellement le prix au commissaire 5
c’est ce dernier seul qui est le vrai administrateur des
biens saisis.
La saisie réelle, suivie d ’un bail judiciaire, détruit
même le titre pignoratif, si le possesseur laisse exé
cuter ce b a i l , que ce soit lui ou un tiers qui devienne
fermier judiciaire; car alors les immeubles passent
sous la main de la Justice : ils ne sont plus en la
possession du créancier, et sa jouissance p i g n o r a t i v e
disparait.
C ’est donc une grande erreur que d ’avoir confondu
la jouissance pignorative avec celle d ’un fermier judi
ciaire , et de s’être servi, contre le sieur Gueyffier de
Long-Pré, de cette dernière qualité, q u i, comme 011
le verra, n ’a été en lui que momentanée, pour lui
attribuer la qualité de possesseur à titre p ig n o ra tif,
q u ’il n’a jamais eue.
M ais, pour prouver de plus en plus le mal-jugé de
la décision des premiers juges,
rappelons quelques
�PM
(
3o
)
principes, rattachons-y les faits, et déterminons les
conséquences de ce rapprochement.
D ’Argentré, sur Particle 265 de la Coutume de
Bretagne, chapitre 5 ; M. M erlin, dans son Répertoire
de Jurisprudence, au mot Prescription (section i re,
§ 5 , art. 3 , n° 5 ) , posent des règles propres h. lever
tous les doutes, et q u ’il est utile de transcrire :
« i° Celui qui a un titre est présumé posséder en
« vertu et en conformité de ce titre : c’est la cause
« appavente de sa possession, et rien n ’est plus naturel
« que de les référer l ’ un à l ’autre. Les lois ont pris
« d ’ailleurs soin d ’assurer ce principe : A d primor« clium iitu lij dit un texte célèbre du Droit romain,
« semper posterior form atur eventus, ( C ’est le texte
de la loi unique, au Code de imponendd lucrativd
descriptione. )
« 2° Celui qui a plusieurs titres est censé posséder
« plutôt en vertu de ceux dont la validité n ’est pas
« susceptible de contradiction, que de ceux dans les« quels on peut trouver des défauts ou des nullités.
« I I peut même 3 sur-tout quand i l est défendeur ,
« rapporter sa possession à ce lu i des titres q u ’il ju g e
« ii propos, pourvu q u ’en le faisant il ne choque pas
« trop la vraisemblance.
« 4° Quand il n ’y a pas de circonstances ou de
« raisons pressantes pour faire présumer q u ’ou a pos« scdé pour un au tre, c’est pour soi-i»^mc qu on est
« censé l’avoir l’a it. »
�’
% V
( 31 )
Toutes
ces
règles ont un trait direct à la difficulté
qui s’est élevée dans la cause.
Quel t i t r e avait le sieur Gueyffier de Long-Pré
p o u r posséder? et, en supposant qu ’il en eût p l u
s i e u r s , quel est celui dont il a fait dès l ’origine et
c o n s t a m m e n t usage? quel est le seul même qu ’il ait
conservé depuis 17 70 ?
La réponse à ces questions se trouve dans le résumé
des faits.
•v. L a succession de Jean Gueyffier s’ouvre le
1760.
3
août
Dans un inventaire du 27 juin', et par un acte au
greffe, du 27 juillet de la même annee, le sieur
Gueyffier déclare accepter cette succession sous béné
fice d ’inventaire.
Ainsi, dès l ’ouverture de la succession, il prend la
qualité d ’héritier; il est investi de ce titre , qui est
indélébile, comme on le sait : Q ui sem el liceres semper hœres.
Ce n ’est pas tout; il se met en possession, en sa
qualité d ’héritier bénéficiaire, de tous les biens meu
bles et immeubles de la succession. L ’inventaire du
27 juin 17G0 en fait foi, quant au mobilier. L e fait
est attesté, quant aux immeubles, par quatorze baux
passés dans les années 17G0 et 1 7 6 1 , par lesquels, en
qualité d ’ h é r it ie r b é n é f i c i a i r e , il donne à ferme des
biens de l ’hérédité.
-.
Il fa it, il est v r a i, liquider ses créances person
nelles; il obtient des, condamnations considérables
contre un curateur de la succession bénéficiaire ; ou
�■t f t f
(30
lui permet (le se mettre en possession pignorative, si
m ieux il n’aime fa ir e saisir et vendre.
Mais il n ’use pas de la première faculté; il ne se
sert que de la seconde : il fait saisir.
Pendant cette saisie, et pour ne pas perdre la
possession q u ’il avait eue dès le moment du décès du
père, il se rend, il est encore vrai, fermier judiciaire.
Mais la saisie réelle q u ’il fait faire, le bail judi
ciaire q u ’il accepte, ne l ’empêchent pas de posséder
encore, de se considérer lui-mêm e, et d ’être considéré
par les autres, même par la justice, comme héritier
bénéficiaire.
I l continue de posséder à ce titre ; car le mobilier
de l’hérédité, plusieurs rentes et une vigne qui en
dépendaient n ’étaient pas compris dans la saisie réelle;
et il en garde la possession.
I l se considère lui-m ém c comme héritier bénéfi
ciaire ; car il passe un bail en cette qualité, le 10 août
1766.
I l est considéré comme te l , non seulement p a r luim êm e, mais encore p a r la ju stice .
Car les créanciers le poursuivent et le font con
damner, en cette q u alité, par sentence du 23 août
1764$ et- c’est en cette qualité q u ’il rend judiciaire
ment un compte de bénéfice d ’inventaire; compte dans
lequel il porte en recette la valeur du mobilier, celle
des jouissances devons les immeubles jusqu’à la date
du bail judiciaire, les jouissances postérieures même a
ce b a i l , pour les rentes et les vignes q u i n’avaient pas
¿té saisies; compte où il porte, eu dépense, diverses
�V * *
( 33 )
sommes payées aux creanfciers de la succession ; compte
qui
jusqu’à l ’évidence, q u ’il n’avait jamais
p
r
o
u
v
e
'
cessé de jouir comme héritier bénéficiaire.
B i e n t ô t il traite avec son frère G u i l l a u m e , reçoit
dans l ’acte la qualité d ’ héritier bénéficiaire, et achète
les droits.d’iin héritier pur et simple.
E n fin , voulant faire disparaître la saisie réelle, il
prend des arrangemens avec les créanciers; il demande,
en qualité d ’héritier bénéficiaire , fait prononcer, aussi
en cette qualité, la radiation de la saisie, et annulle
ainsi les baux judiciaires, q u i, déjà même, étaient
expirés, n ’avaient pas été re no u ve lé s , et q u i, d ailleurs,
d’après une clause expresse, ne devaient durer q u ’au
tant que la saisie.
Comment d outer, d ’après ces circonstances, que ce
n ’est ni pignorativement, ni précairement, mais que
c est comme héritier, comme propriétaire, que le sieur
Gueyffier de Long-Pré a toujours joui des biens de. la
succession ?
N ’a-t-il pas le droit de dire, en invoquant la pre
mière règle ci-dessus rappelée, q u ’il faut considérer
1 origine de sa possession pour en apprécier les effets?
et fIue ? puisqu’au moment de l'ouverture de la
succession, il s’est déclaré héritier bénéficiaire; puisqu a ce moment même il s’est mis en possession
des biens en cette qualiié ; puisque c’eât, en cette
qualité aussi-qu’il a rendu compte du mobilier reçu ‘
lors de l'inventaire, et des jouissances perçues dès la
première année*, n’a-t-il pas le droit de dire q u ’il est
�n
(
34
)
présumé avoir possédé en conformité de son titre
d ’héritier ? A d primordium titu li semper posterior
fo rm a lu r eventus.
N ’a u r a i t - i l pas aussi le droit, s’il y avait du doute,
d ’invoquer la seconde règle ? e t , en supposant q u ’il
eût eu réellement plusieurs titres de possession, n’au
rait-il pas le droit de choisir le titre valable plutôt que
le titre vicieux, e t, lui sur-tout qui est défendeur,
de rapporter sa possession à sa qualité d ’héritier,
plutôt q u ’à un titre précaire?
Ne serait-il pas même autorisé à soutenir que s i ,
suivant les jn’incipes, le détenteur précaire possède
pour le propriétaire, et si la possession du premier
sert au second ( i ) , sa possession, même à un titre
précaire pendant un certain tenis, n’aurait pu servir
à d’autres q u ’à l u i - m ê m e , en sa q u a l i t é d ’ h é r i t i e r ?
C ar lui seul ayant accepté la succession, c’était lui
seul aussi q u i, pendant cette possession, aurait été le
vrai propriétaire des biens de l ’ hérédité, les autres ne
pouvant le devenir avec l u i, q u ’en prenant un ti t re
d ’héritier q u ’ils avaient refusé lors de l’inventaire.
Enfin le sieur de Long-Pré et son fils ne seraient-ils
pas fondés à remarquer, suivant la dernière règle de
M. M erlin, q u ’ils sont présumés avoir possédé pour
eux-mêmes , puisqu'il n ’y a pas de circonstances ou
de îaisons pressantes p o u r f a it e pre'sutner cju ils ont
possédé pour un autre?
( i ) Voyez Dunod , Traile do la
»ïliclcs 2228 et a» 3G.
P rescrip tio n
, cl». 7 , cl Code civ il,
�E t pour q u i a u r a i e n t- il s possédé?
S e r a i t - c e .
pour les autres enfans de Jean G u e y filer?
Mais ils ne s’étaient pas portés héritiers.
S era it- ce pour les créanciers de la succession ?
Mais ils avaient été désintéressés.
Serait-ce pour la Justice ou pour le commissaire
aux saisies réelles, chargé par elle d ’administrer les
biens saisis ?
Mais les biens saisis ne formaient pas tous ceux de
l ’hérédité.
Mais la Justice n ’est pas propriétaire des biens
qu’elle fait administrer : on ne peut d o n c pas posséder
pour elle.
Mais enfin la Justice elle-même avait dépouillé' le
commissaire aux saisies de son administration , en
rayant la saisie réelle par la sentence du
17
août
1770, rendue avec le commissaire, avec le curateur
au bénéfice d ’inventaire, et avec tous les créanciers.
Celte sentence nous fournirait un nouveau moyen,
s’il était nécessaire 3 car les moyens abondent dans
cette cause.
On sait que le possesseur, même précaire, peut
prescrire, lorsque le titre de 6a possession se trouve
interverti.
G est un principe élémentaire, que celui qui pos
sède précairement commence à posséder pour soi x
comme m aître, par la déclaration de sa volonté.
« Le propriétaire qui le sait et qui le souffre, dit
« D unod, est ccnsu avoir abandonné la possession
« qu’il avait.
�if'f-y
(
3C
)
« Ainsi, non seulement le fermier, mais encore le
« créancier, le dépositaire, l ’administrateur du bien
« d’a u tru i, le vassal, l ’emphitéote, le censitaire,
« l ’usufruitier, la douairière, et généralement ceux
« qui ont la possession d’a u t r u i, changent leur pos<< session lorsqu’ils le veulent, et q u ’ils le déclarent
ft ¡par des faits et des actes extérieurs. C ’est ce q u ’on
« appelle une interversion, une contradiction, relativejp,e,nt à laquelle on prescrit; car l ’on u ’acquiert
« par cette voie que ce que l ’on a déclaré vouloir
« possédçr. >f
Le
ticle
Code civil a résumé ces p r i n c ip e s d an s l ’ar
2238.
' L eu r application à la cause est facile.
Les faits et les. actes prouvent que le sieur de LongPré a toujours-joui comme héritier de tous les biens
meubles o f i m m e u b l e s de la succession de son père ,
à l ’exception, de ceux q u ’il fit saisir réellement luimèxue, en qualité de créancier, par procès-verbal du
27 avril 1763.
Il
devint fermier judiciaire des immeubles saisis ;
çt ¿i, sous ce rapport, on le considérait comme dé
tenteur précaire do, ces immeubles, au moins est-il
certain que sa possession précaire aurait cessé avec le
b a il, avec la saisit* réelle, dont la sentence de 1770
prononça la radia lion.
.CeUo sentence, il la fil rendre en (¡milité d’hériüu*'
b/MiéJicinire.
' ■
, j
1 H l'obtint contre toutes les parties intéressées., et
même contradictoirement contre lu curateur au béné-
�c
37
)
•fice d ’ i n v e n t a i r e , c’est-à-dire contre l ’ homme qui re
présentait la s u cc e s si o n , lorsqu’ il ne pouvait pas, dans
les a ctions q u ’il a v a i t à exercer, la représenter
lui-
meme.
Cette sentence f a it main-levée au sieur Gueyffier
de la saisie r é e l l e e t
nulle et sans ejjet.
ordonne q u e lle
demeurera
E n traitant d’abord, comme héritier bénéficiaire, avec
les créanciers opposans à la saisie réelle; en demandant
ensuite, en cette qualité, contr’eux et contre le cura
te u r, la main-levée de cette saisie; en la fa is a n t pro
no n c e r avec eux et le c u r a t e u r , t o u j o u r s en qua lité
d'héritier 3 le sieur de Long-Pré aurait fait évidemment
disparaître le titre précaire, dont la saisie réelle était
la base. Des cet in stan t, s il a possédé les immeubles
saisis, ce 11’est plus comme fermier, ce n’est plus pour
le commissaire aux saisies réelles ou pour les c r é a n
ciers , c’est comme héritier seulement; car il n ’avait
plus d ’autre titre de possession.
D ’ailleurs, comme créancier seulement, il n ’aurait
pas eu qualité pour faire rayer la saisie ; il 11’avait
CG droit,
les autres créanciers étant désintéressés ,
qu en sa qualité d ’héritier, c ’est-à-dire de propriétaire
des immeubles saisis.
Ainsi,, les poursuites faites pour parvenir à la main
levée de la saibic, et la sentence qui la pr ononce, sont
des actes de propriétaire, sont des actes d ’interversion
de toute possession précaire antérieure, et d ’une in
terversion d ’autant plus puissante, q u ’elle a. été faite
�t**
(38 )
en présence de la Justice, et consacrée par son autorité,
D onc, en négligeant même les années antérieures,
au moins depuis 1770 le sieur Gueyffier de Long-Pré
a possédé comme propriétaire ; et par sa possession il a
pu prescrire.
O r , de 1770 à i 8o 5 , date de la demande, trentecinq années se sont écoulées, c’est-à-dire, cinq ans
de prescription de plus que la loi n ’en exige.
Opposerait-on q u e , ne jouissant que comme h é r i
tier b é n é f i c i a i r e , le sieur de Long-Pré n ’a pu prescrire?
L ’objection serait futile.
D ’un côté, le sieur de Long-Pré, comme acquéreur
des droits de Guillaum e G ueyffier, qui était héritier
pur et simple, avait succédé à cette qualité.
D ’un autre côté, personne n ’ignore q u ’entre un
h é r i t i e r b é n é fi c ia i r e et u n h é r i t i e r p u r et s im p l e , il
n ’y a de différence q u ’en ce que le premier n ’e§t pas
tenu des dettes au-delà des forces de la succession.
L ’héritier bénéficiaire est d ’ailleurs propriétaire des
biens de la succession. Il en est saisi, p a r la lo i,
comme l ’ héritier pur et simple. E11 les administrant,
en les possédant, il administre, il possède sa chose. 11
peut en d is po s er même à son gré. S ’il^ les vend sans
form alités, la vente est valable, parce q u ’elle est faite
p a r le vrai propriétaire. Seulement il se rend alors, à
l ’égard des créanciers, héritier pur et simple.
Donc l’ héritier bénéficiaire peut prescrire comme
tout autre héritier.
Les idées qui conduisent à cette conséquence sont
trop élémentaires en droit, pour q u ’il soit nécessaire
�c 39 )
•.
*
de preuves. On peut, au reste, consulter Furgole
(Traité des T e s t a m e n s , chapitre 10, section 3 , n° 3 );
Merlin (Répertoire de Jurisprudence, au mot bénéfice
«l’i n v e n t a i r e , n° 2 1 ) ; Chabot de l ’Allier (Traité des
Successions, sur l ’article
).
E n fin , invoquerait-on de vaines considérations ,
déclamerait-on contre la prescription, la présenteraiton comme un moyen odieux, et que l ’on doit chercher
à éluderj si quelques circonstances y prêtent?
Il
serait superflu de répondre à ces déclamations;
depuis long-tems elles ont été répétées, et depuis longtems aussi elles ont été appréciées à leur juste valeur.
Les législateurs, qui les connaissaient, n ont pas hésité
cependant à maintenir une règle bienfaisante, néces
saire pour protéger la propriété, et sans laquelle tout
lie serait que tro u ble, désordre et incertitude dans les
fortunes«
C ’est, au reste , h des prescriptions courtes q u ’elles
s’appliqueraient , c'est-à-dire à ces prescriptions de
quelques mois ou de quelques années, qui sont subor
données à l'affirmation du débiteur, mais non à la
prescription trentenaire, qui n’est soumise à aucune
condition , qui fut toujours considérée comme équi
valant à un titre, que toutes les nations policées ont
admise, dont d’Argentré et les auteurs les plus dis
tingués ont fait l’éloge, et que Cassiodore a éloquem
ment appelée le seul port où les hommes soient à l’abri
des orages de la société : H ic unus inlcv humanas
procclliis portus.
l u de quelle faveur les circonstances de la cause ne
�P
t J5
(
4°
)
doivent-elles pas entourer cette prescription, qui tend
à consacrer une possession paisible de plus de soixante
ans !
L ’hérédité
était à son
ouverture plus onéreuse
q u ’utile.
Grevée de nombreuses dettes, elle n’eût pu suffire
ii les acquitter, si les biens eussent été vendus alors.
Pour en juger, q u ’on se rappelle q u e , dès 17 17 ?
les affaires de Jean Gueyffifer étaient en désordre 5
q u ’une séparation de biens fut obtenue contre lui en
1 7 5 ï ; q u ’en 1760, le sieur de Long-Pré accepta sa
succession, seulement sous bénéfice d ’ i n v e n t a i r e ; q u ’ il
crut même nécessaire de renoncer à l'institution d’hé
ritier faite en sa faveur; et que les autres enfans,
quoique tous majeurs, quoique tous représentés dans
l ’ i n v e n t a i r e , ne v o u l u r e n t pas p r e n d r e la qualité
d ’héritiers.
Que Ton considère aussi que les biens saisis avaient
été affermés, en justice,
35o
francs seulement.
Q u ’on fasse attention au grand nombre des créan
ciers opposans, sans y comprendre le sieur Gueyffier
de L o n g -P ré , créancier de 3G,ooo francs de capitaux,
et d’intérêts considérables.
C e n ’est pas sans réflexions, que Maurice Gucyffier,
majeur avant
17G0, mort seulement en 1 7 9 6 ,
n ’a
jamais demandé lui-même sa portion •d ’ une hérédité
dont il avait connu les charges et le peu de v a l e u r .
C e n’est pas sans réflexions aussi, p e n t - ê u e , qu au
jourd'hui des parons collatéraux la réclament en son
nom. Ils n’ ignorent pas que le sieur Gueyffier do
�( 4< )
ai«
Long-Pré est m o r t depuis long-tems. Il est mort après
- l a pr e sc ri p ti on a c q u i s e , à u n e époque où il devait
croire q u e t o u t danger de procès avait cessé. Il est
m o r t et avec lui ont disparu une partie de ses titres
et p eu t -ê tr e ses principaux moyens de défense. Son fils,
q u i ne peut connaître ce qui s’est passé dans des tems
r e c u l é s , son héritier, contre lequel seul l ’action a été
formée, doit-il être entendu avec défaveur, lorsqu’il
propose un moyen que la loi protège, un moyen que
la loi lui fo u rn it, pour suppléer aux titres qui se sont
égarés, aux traités que son père a dû faire avec les
créanciers de la succession, aux a r r a n g e m e n s q u ’ il a
p ris p e u t -ê tr e même a ve c ce M a u r i c e G ueyffier, du
c h e f d u q u e l on a g it aujourd’h u i; arrangemens dont
les traces ont pu s’effacer dans le cours de près d ’un
demi-siècle ?
E t comment aurait-il conservé des droits 'a l ’héré
dité, le sieur Maurice G ueyffier, qui avait cessé
d’être exposé au paiement des dettes héréditaires?
Plus de trente ans de prescription l ’avaient libéré à
l ’égard des créanciers, qui ne l ’ont jamais poursuivi.
N ’est-il pas juste aussi que plus de trente ans de
prescription l ’aient privé
de tout, droit aux biens
d’une hérédité dont il n ’avait plus à redouter les
charges ?
Dans la cause, la prescription se présente sous un
double rapport pour repousser la demande en partage :
Prescription du droit d ’accepter contre Maurice
Gueyffier ou ses représentons, qui ont laissé écouler
quarante ans sans prendre la qualité d ’héritier ; et
�‘i j i
(
42
)
prescription d ’autant moins équivoque, que la suc
cession
ritier,
ce long
le sieur
n’est pas
le ju s et
intervalle,
G u e y ffier
restée vacante, car le titre d ’hé
nomen hœredis ont été pendant
et sans interruption, occupés par
de Long-Pré ou son fils;
Prescription de la propriété des biens de l ’hérédité,
que le sieur de Long-Pré a possédés seul, sans trouble
et sans interruption, aussi pendant plus de trente ans,
non à titre pignoratif, non même par suite d ’une
saisie réelle, puisque la Justice avait annulé cette
saisie dès 1 7 7 0 mais animo dom ini, en qualité de
vrai m aître, de seul propriétaire, qualité nécessaire
ment attachée à celle d ’héritier q u ’il avait prise dès
1760 et q u ’il a constamment exercée depuis.
N ’a - t - i l pas dû se reposer avec sécurité sur une
prescription ainsi doublement car actérisée ?
N ’a-t-il pas dû croire q u ’enfin était arrivé pou r lui
et pour ses enfans l ’heureux terme de toute inquiétude
et de tout danger d ’un procès? U sucapio ............. hoç
est finis sollicitudinis ac periculi litium,
Me A L L E M A N D , Avocat.
Me G R A N E T , L icencié-Avoué.
R IO M ;
IM P R IM E R IE
DE
SA LLE S,
P R ÈS L E
P A L A IS
DE
JU S T IC E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gueyffier de l'Espinasse. 1830?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Granet
Subject
The topic of the resource
successions
prescription
absence
renonciation à succession
séparation de biens
arbre généalogique
possession pignorative
saisie
créances
vin
preuves de décès
colonat
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Gueyffier de L'Espinasse, ancien avocat, appelant ; contre sieur Jean-Baptiste Gueyffier-Delaire ; sieur Antoine Gueyffier du Buisson ; dame Antoinette Gueyffier, et Sr Amable Bayol, son mari, intimés. Usucapio….hoc est finis sollicitudinis ac periculi litium. (Cicero, orat. Pro Caecinâ).
Annotations manuscrites.
annotations manuscrites : texte de l'arrêt.
Table Godemel : Absent : 2. le décès d’un individu à Saint Domingue est-il suffisamment établi par un acte en forme authentique indiquant le jour du décès, son nom de famille et l’un de ses prénoms, bien que, contre les termes de la déclaration du 9 avril 1736, il ne mentionne pas non plus la qualité ; à moins que l’on établisse qu’un autre individu du même nom ait résidé dans l’isle et y soit décédé à la date de l’acte rapporté ; surtout, si l’identité résulté d’autres documents et des faits de la cause. Renonciation : 14. l’enfant, héritier institué, qui, après avoir fait procéder à l’inventaire du mobilier existant au décès de son père, a renoncé à son institution d’héritier contractuel, pour n’accepter la succession qu’ab intestat et sous bénéfice d’inventaire ; qui a fait nommer un curateur au bénéfice d’inventaire et obtenu, contre lui, sentence de condamnation pour un capital de créances assez considérable, avec permission de se mettre en possession des immeubles de la succession, ou de les faire vendre par placard ; qui s’est réellement investi de fait de l’universalité des biens ; n’a joui, à titre de propriétaire, que du cinquième formant sa portion virile, et à titre pignoratif des autres quatre cinquième, en qualité de créancier.
Quelque longue qu’ait été sa possession, il a joui aux mêmes titres, s’il n’a pas manifesté expressément une volonté contraire ; il ne peut, dès lors, opposer aux autres enfans, ses cohéritiers, aucune prescription. malgré le nombre des actes de possession qu’il a pu faire, il ne peut résister au partage, ni se refuser au rapport des biens et jouissances, sauf à prendre le cinquième qui lui revient en qualité d’héritier bénéficiaire.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1830
1760-1830
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2608
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2609
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53523/BCU_Factums_G2608.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Saint-Ilpize (43195)
Saint-Germain-Lembron (63352)
Saint-Domingue
République dominicaine
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence
arbre généalogique
colonat
Créances
possession pignorative
prescription
preuves de décès
renonciation à succession
saisie
séparation de biens
Successions
vin
-
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9aad24efaa8885eca62418e5dea806ad
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EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D } Jurisconsultes
POUR
Sieur A n to in e VIDAL, Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs , et
V ID A L , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition
C
Le sieur
,
a t h e r i n e
contre
R E D O N C H A T , propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
ean
F rançois
,
ar ie
n n e
�EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D Jurisconsultes ;
POUR
Sieur A ntoine V I D A L , Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs, et C a t h e r i n e VIDAL , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition;
Le sieur
,,
CONTRE
,
,
R E D O N C H A T propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
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,
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nn e
Martin Garcellon , propriétaire de deux domaines appelés
Tougouse et Blaval , transmit sa succession à Guillaume Garcellon, dit G uillen, marié à Marguerite D ufayct.
A
�CD
L e mariage desdits Guillaume Garcellon et Marguerite Dufayel
donna le jour à huit enfans :
Antoinette, qui fut mariée à Benoît Jam y , et desquels descen
dent les appélans ;
Martin , mort en 1 7 1 7 , et dont la postérité s’est éteinte;
Sim on, mariéà Agnès Ferluc, décédé en 1 7 1 6 , laissant quatre
enfans, l’cprésentés par AntoinetteBèrc, veuve Tabarier, et par
Marie Vidal , épouse de Martin Hébrard, qui 11e sont pas en
cause sur l ’appel ;
Pierre, décédé en 1 7 1 9 , et auquel on n’a pas connu de pos
térité ;
M arguerite, morte sans postérité ;
Catherine', morte fille en 1702;
Antoine, mort en 1735;
E t Jean , curé de St.-Projet , mort en 1721 ;
Tou s, à l’exception de Jean, curé de St.-Projet, répudièrent
çiux successions de leur père et aïeul. Jean Garcellon les accepta
sous bénéfice d’inventaire.
M artin, Simon el Pierre Garcellon, z .e , .e et 4 .' enfans de
Guillaume Garcellon et de Marguerite Dufayet étaient associés
dans un commerce: leur association avait existé avec Pierre
J fincher.
3
31
L e 4 septembre 1709 Blancher leur céda son fonds de com
merce , et dissout la société avec eux. Les frères Garcellon s’obli
gèrent de lui- payer une somme de 19,000 francs, et se char
gèrent d’ncquilter les dettes de la société.
Pour sûreté et acquittement du prix de la cession, les frères
Guiccllon subrogèrent Blancher aux hypothèques par eux ac
quises sur les successions de Martin et Guillaume Garcellon,
leur aïeul et père.
A u x termes de leur association , les survivans succédaient au
promim- déc'édé. Ils laissèrent beaucoup de dettes, el point d’iminrublo*.- I.our actif consistait dans le fondsde commerce et dans
les créances q u ’ils s’étaieut faites contre les successions de leur
�3
(
)
père et aïeul, et qu’ils avalent déclaré s’ élever à i i , d j 5 liv. S s.
Les enfans de Martin et Simon répudièrent aux trois succes
sions. L e sieur Blancher , leur créancier , lit nommer Pierre
Espinasse curateur aux hoiries vacantes. .
Ces enfans de Martin et de Simon Garcellon furent pourvus
d’un tuteur: ce fut Pierre Garcellon que l’on c r o i t être leur
grand-oncle.
L a succession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, ouverte
comme on l ’a vu en 1721 , le 21 septembre, fut dévolue à Antoi
nette Garcellon , femme J a m y , aux enfans de Simon Garcellon t
venant Jure suo , par représentation de leur p ère, et à Antoine ,
7 .' enfant, désigné dans la généalogie. Alors les enfans de M ar
tin n’existaient plus.
Antoinette Garcellon demanda le partage de la succession au
tuteur des enfans de Simon Garcellon et à Antoine G a r c e l l o n ,
dit cadet. Ceux-ci contestèrent sa demande , sur le fondement
qu’elle avail été f o r c l o s e .
Par sentence du
mai 1720, rendue au bailliage de Salers,
5
elle fut admise au partage; mais il ne fut pas fait.
Parurent les créanciers des successions de Martin , Simon et
Pierre Garcellon, qui réclamèrent leurs créances sur les domaines
de Tougouse et Blaval, hypothéqués aux sommes duesauxdites
successions, par celles de Martin et G u illau m e, aïeul et père.
Jean et Catherine Blancher, se disant héritiers bénéficiaires
de Pierre Blancher leur frère et oncle, formèrent demande contre
Antoine Garcellon, dit cadet, Pierre Garcellon tuteur des enfans
de Martin et Simon Garcellon, et Antoinette Garcellon, Benoît
Jamy son mari, au paiement de la somme de 19,000 fr. à eux
due en vertu de l ’acte de cession de commerce du 4 septembre
*709Une sentence du 12 mai 172Ï) ordonna que les Blancher corninuniqueraionl leurs titres de créances , et que les Garcellon et
J a m y , héritiers ab intestat de Jean Garcellon praire, qui était
héritier bcnc/iciaire de Martin et G uillen G a r te llo n , scs père
A 2
�et a ïe u l, communiqueraient
faits à Pierre Blanclier ;
U )
les quittances et états de paiemens
Ordonna que le sieur P ra d el, le curateur à l’hoirie desdits
M a rtin , Simon et Pierre Garcellon, et autres intéressés, seraient
appelés en particulier et mis en cause.
Par autre sentence du 19 juin 1728, rendue entre les mêmes
parties et Pierre Espinasse curateur aux hoiries vacantes , et les
créanciers connus desdites successions, il fut ordonné que tous
les meubles et effets délaissés par les Garcellon frères , au jour
de leurs décès, en quoi qu’ils consistent et puissent consister, et
par exprès l’effet de la subrogation du paiement de la somme de
19,000 fr. mentionnée au contrat du 4 septembre 1709, avec les
intérêts du jour de la demande formée contre Jean Garcellon
prêtre , en qualité d'héritier de Martin et G uillen Garcellon ,
èes père et a ïe u l, seront rapportés et mis en masse ; auquel rap
port seront tous détenteurs, dépositaires ou débiteurs contraints,
et notamment Antoine Garcellon, Antoinette Garcellon, femme
Li&
Jamy, etPierre Garcellon tuteur, à celui delà somme de 19000 fr.,
à laquelle ledit Jean Garcellon prêtre, en qua lité d'héritier de
ses père et aïeul avait été condamné.
Premier juillet 1733, sentence de la sénéchaussée d’Auvergne
sur l ’appel des deux précédentes, contre Antoine Garcellon, dit
ca d et, Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs de Martin
et Simon G arcellon, appelant d ’une part ; Jean Blancher et
Louise Blancher, sa nièce, héritiers de Pierre Blancher, inti
més, d’autre part;
E t lesditsBIancher, demandeurs en assistancede cause , d’une
part; et Benoît J a m y , en qualité de légitime administrateur de
scs en fans , et d’Antoinette Garcellon, Catherine Jamy , fille
dudit Beuoîtet de ladite Antoinette Garcellon , et Fiancois Doinal
son mari , défendeurs , d’autre part ;
Confirme les sentences de 1725 et 1728; cc faisant, condamne
1rs
appelons, en qua lité d'héritiers purs et simples de Jea n
Garcellon prêtre , icelu i héritier de M artin et G uillen Gar-
�J3
(5) •
cellon , personnellement pour leurs parts et portions , et hypo
thécairement pour le tout, à payer aux intimés les sommes dues
à P ierre, Simon et Martin G a rcello n , en vertu des titres de
créances, énoncés au contrat du 4 septembre I7°9» aux(l ue^s
Pierre B la n d ie ra été subrogé.
Déclare la sentence commune à Benoît et Catherine Jamy ,
dans les qualités dans lesquelles ils sont pris ; les condamne
personnellement et hypothécairement au paiement des mêmes
sommes.
Déclare affectés et hypothéqués au, paiement d’icelles, les
biens immeubles des successions de Martin et Guillaume Gar
cellon , permet de les faire saisir et vendre en la manière or
dinaire.
On rapporte ici ces faits pour établir que Jean Garcellon,
curé de S a in t-P ro jet, n’était pas héritier de Martin , Simon et
Pierre Garcellon a^ant laissé des e n f a n s , et dont les successions
avaient d ’a i l l e u r s été répudiées ; et pour justifier l ’appel d’un
jugement qui condamne les appelans , en qualité d’héritiers de
Jean Garcellon , au paiement de la dette de Simon et Pierre
Garcellon.
Ces faits Rétablis par les pièces à l ’a p p u i, écarteront les énon
ciations vagues et furtives insérées dans des actes de procédures
postérieures , et à la faveur desquelles les intimés veulent sou
tenir que Jean Garcellon était héritier, et a été déclaré héritier
de Martin , Simon et Pierre Garcellon.
L es faits qui suivent, sont propres à la cause.
En vertu de la sentence du i . er juillet i j
, les Blancher firent
33
saisir réellement les domaines de Tougouze et B la v a l, provenus
de Martin et ensuite de Guillaume G arcellon, par procès-verbal
du 26 mai xy35.
L a saisie fut suivie jusqu’à la sentence d’attestation, cepen
dant il ne parait pas qu’il y ait eu de bail judiciaire dépouillant
les débiteurs , et mettant les biens sous la main du ballistre judi
ciaire , jouissant pour les créanciers saisissans et opposans.
A3
d
�<
C6 )
Un arrêt du 11 mars 1786, rendu au parlement de Paris, entre
les s i e u r s Bertrandy, successeurs dqs Blnncher, d’une p a r t, Gas
pard Delprat , mari d’Antoinette Garcellon , l ’une des filles de
Simon Garcellon , Pierre Hébrard , Catherine Domal son épouse,
Marie Domal, Joseph Fiiiol son mari , d’autre part , en con-.
damnant de nouveau lesdits Hébrard et Domal , au paiement de
la somme de 19,000 francs, et intérêts, ordonna qu’il serait fait
déduction sur lesdites condamnations, entre antres articles , de
la somme de 31,924 francs , valeur des jouissances perçues par.
les enfans Bertrandy et leurs auteurs, depuis et compris xy ,
35
date de la saisie réelle, jusques et compris 177ÎÎ. En sorte que
cet arrêt, rendu en ce point sur les offres de Bertrandv , décide
qu’il n’y a point eu de bail judiciaire des domaines saisis , et
q u e les Bfanchor et Bertrandy en ont successivement jo u i, dès
l ’iuslant du procès-verbal de saisie réelle jusqu’en 1776. Cette
remarque est essentielle; elle fera un moyen de la cause.
• Dans la suife , des jugemens de 1793 et 2 frimaire an 6 , ont
ordonné la radiation de la saisie réelle , ét renvoyé en possession
des biens saisis, les successeurs des héritiers de Jean Garcellon,
curé de St.-Projet.
E n cet élal de choses , le sieur Jean S a lv y , Marie Pvedonchat
son épouse, Jacques, A n n e , Jeanne-Françoise et Marie Pvedon
chat, intimés, sortirent de la poussière une sentence incompé-,
tente et injuste, rendue à la juridiction consulaire deClermont,
par défaut, en 1721 , contre Jean Garcellon , curé de St.-Projet,
peu de jours avant son décès, et dont 011 n’avait pas osé suivre
l’exécution.
Celte sentence , obtenue par Guillaume Kedonchat, aïeul des
intimés , condamne consulairenicnl cl par corps , Jean Garc'dlon , curé, en qualité d’héritier en partie de Pierre Garcellon »
ion IVère, au paiement de- la somme de ,4.% liv. s. ; elle est
3
3
au si rendue contre Antoine Garcellon cadet , et Pierre Gnrr»*!!oii, tuteur des enfans de Martin et Simon Garcellon , aus-ii
héritier* eu partie de Pierre Garcellon leur ouclc, et do Martiu
�V ?
.
)
et Simon leurs pères. Nous remarquons que chacun est con
damné personnellement pour sa part seulement, et qu’ainsi la
(7
dette fut divisée. Autre remarque, le tuteur fut aussi condamne
à aller en prison pour ses pupilles.
Guillaume Redoncliat fit signifier cette sentence suivant que
l’atleste un original d’exploit rapporté le 17 mai 1721 ; et il faut
croire que les parties condamnées 11’en eurent pas connaissance.
Après trente-trois ans de l ’obtention de cette honteuse sentence,
nulle par incompétence , absurde par les condamnations par
corps prononcées contre le curé de St.-P rojet , pour la dette
d ’autrui et contre un tuteur; injuste encore dans la condamna
t i o n personnelle, et en qualité d’ héritier de Pierre, Martin et
Simon Gnrcellon, p r o n o n c é e contre les non-successeurs. Jacques
3
'lledonchat né en 1706 , lit le o juillet 1764, une opposition
irrégulière à la saisie réelle faite à la requête de défunt Jean
B la n ch er, d e s biens i m m e u b l e s d e s s u c c e s s i o n s répudiées de
M artin, S i m o n et P i e r r e G a r c e l l o n , sis ès villages de Tougouze
et Blaval s u r le curateur , à ladite succession.
Nous disons cette opposition irrégulière, parce qu’elle ne frappe
pas sur la saisie réelle faite sur Benoît J a m y , François Domal
son gendre, Antoine et Pierre Garcellon , par procès-verbal du
26 mai 17.35 ; et que la saisie réelle non datée , des biens des
successions répudiées de Martin , Simon et Pierre Garcellon ,
snr le curateur auxdites hoiries , est étrangère aux appelans et à
celle des domaines de Tougouze et Blaval. L ’on établira dans
la discussion la nécessité d’ une opposition bien positive, datée,
et bien précisée.
Il n’y eut pas de notification de cette opposition sourde.
Antoine Raoux, Jean S alvy, Marie, Anne lledonchat et autres,
l’ont réitérée plus régulièrement au mois de décembre 1783.
En 1787 , les Salvy et lledonchat ont fait assigner M argue
rite Garcelon fille , Pierre lLcbrnrd, veu f de'Catherine Domal,
Antoine V id a l, appelant, et Marie llébrard son épouse , Joseph
J i l i o l , Marie Domal son épouse, Gaspard D e lp ra t, en qualité
�C8 )
<le père et légitime administrateur de Joseph Delprat , fils et
héritier d'Antoinette Garcellon, pour voir déclarer exécutoire
co n ti’eux les billets souscrits par Simon et Pierre Garcellon , et
la sentence consulaire de 1721 , rendue contre Jean Garcellon et
autres, et pour être, en conséquence, condamnés, même soli
dairement, à payer en deniers ou quittances la somme principale
de
3,456 liv. 3 s. avec les intérêts depuis l’opposition formée aux
scellés des effets desdits feus Garcellon.
A la dénomination des parties assignées, l’exploit n’énonce pas
la qualité dans laquelle ils sont pris,et on ne la trouve pas claire
ment dans le corps de l’exploit. Il y est dit : « Pour en qualité,
« tant de leur chef que de celui de leurs auteurs et prédécesseurs,
« même ledit sieur Hébrard d’usufruetuaire des biens de défunte
« d em oiselle........... Domal son épouse , d’héritiers et jouissant
« les biens des successions desdits défunts sieurs Garcellon ;
« v o i r , etc. »
Cette -assignation a été suivie d’une sentencr par défaut,
faute de comparaître , en date du i . er juin 1787, adjudicative
de la demande ; la sentence paraît avoir été signifiée le 3 août de
la même année.
Airectant toujours par principes héréditaires de surprendre
des condamnations, notifiées sous la cheminée, et de laisser
écouler de longs délais avant de faire connaître les jugemens, afin
d’acquérir la force delà chose ju g é e , les intimés ont demeuré dans
l’inaction jusqu’au 29 nivôse an 1 2 , époque à laquelle ils ont
fait signifier le jugement de 1787 , avec commandement de
payer. L a signification a été suivie d ’une saisie-arrêt, qui a
empêché le sieur Vidal de toucher une somme de ,000 francs,
3
de hquelle il est en souffrance.
V i d a l , en sa qualité de légitime administrateur de ses enfans
mineurs, et Catherine Vidal sa fille majeure, sont appelans de
t>c jugement , et r.'est de cet appel qu’il s’agit.
Mous ferons remarquer q u ’Anloinette fierc, veuve Tabarier,
Marie Vidal et Antoine ilélnard son m a ri, 11e sont pas appe
la is
�'»>
.
*
lans du jugement qui les frappe cependant ; qne la crcance des
intimés , supposée légitime , et exigible des héritiers des débi
teurs originaires, serait due en entier par lesdits Berc et V i d a l ,
comme descendans de Simon Garcellon qui avait souscrit les
billets qui forment les titres primitifs de créances; qui aussi ont
fait assigner les intimés pour justifier de leurs titres de créances,
et qui seraient garans des appelans , s’ils supportaient quelques
condamnations.
Qu’ainsi c’est purement par hum eur, que les intimés se sont
adressés aux appelans, et par obstination qu’ils résistent à leurs
défenses.
B
�CONSULTATION.
Ï^ E
C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examiné avec la plus
scrupuleuse attention toutes les pièces, procédures, sentences,
arrêts et jugemens relatifs à l’aiFaire pendante à la cour d’appel
de R i o m , entre le sieur Antoine V idal , légitime administra
teur de ses enfans, héritiers de feue Marie Hébrard leur mère,
et Marie V i d a l , m ajeure, sa fille aînée, appelans d’un jugement
rendu au ci-devant bailliage de Salers , le i . er juin 1 7 8 7 , et
les héritiers R edo n chat, intimés,
E s t D’a v is , i.° que l’appel de la sentence p ar défa u t du i .e*
juin i 'j ñ j est receivable, quoiqu’il n’ait été interjeté qu?après les
dix ans, à compter de l’exploit de signification qu’on en rapporte,
principalement, parce que les condamnations qu’il prononce tom
bent sur des m ineurs, et que l’appel n été interjeté avant qu’il
y eût dix ans de majorité d’écoulés ;
2 .0
Que cet appel est fondé parce qu’il adjuge une créance
illégitime dans le principe, et d’ailleurs éteinte par une double
prescription, avant la demande.
Justifions ces deux propositions.
PREMIÈRE P R O P O S I T I O N .
L 'a p p e l e s t rcccv a b le.
Quel est le délai dans lequel était recevablc l’appel des jugejnens rendus par les tribunaux de l’ancien régime;, lorsqu’ils
étaient susceptibles d’etre attaqués parcelle voie? il fallait dis
tinguer: après trois ans écoulés depuis la signification , légale
ment faite, celui qui avait obtenu la sentence pouvait sommer
le condamné d’en interjeter ap p el, et s’il n’y avait pas d’appel.
�dans les six mois à compter de cette sommation , il n’était plus
recevable. (A rt. 1 2 , tit. 27 de l ’ordonnance de 1667).
Si le condamné venait à mourir dans les trois ans, ses héri
tiers , majeurs, avaient une année de plus de délai , et six mois
encore après la nouvelle sommation qui lui était faite d’appeler.
( A r t. i . Ibid. )
A défaut des sommations ci-dessus , les sentences n’avaient
force de chose jugée qu’après dix ans , à compter du jour de
leur signification. (A rt. 17 ).
5
Ajoutons que ces fins de non. recevoir n’avaient point lieu
contre les mineurs , pendant le tems de leur minorité, et jusqu’à
ce qu’ils eussent vingt-cinq ans accomplis, terme après lequel
les délais commençaient seulem ent à courir. ( A rt. 16 ).
Cette exception, en faveur des mineurs , eût été suppléée de
d ro it, quand elle n’aurait pas été littéralement écrite dans l ’or
donnance , car il est de règle générale , que les p r e s c r i p t i o n s de
toute espèce, sont suspendues pendant la minorité, a moins qu’il
n’y ait dans la loi une disposition contraire pour quelques cas
particuliers.
Appliquons ces règles à l'affaire présente.
L e jugement du 1 .« juin 1787 ne fut point rendu contre des
mineurs; mais Marie Hébrard , épouse du sieur V i d a l , l’une des
parties condamnées , mourut en 1789 , deux ans après le juge
ment , et laissa trois enfans en bas âge : le plus âgé des trois était
Catherine V idal qui n’avait alors que sept à huit ans; les autres
deux sont encore mineurs; la prescription a donc dormi pendant
tout cet intervalle de tems , et conséquemment elle était loin
d’ôtre accom plie, lorsque l’appel du 14 pluviôse an 12 fut in
terjeté.
Marie Domal , autre partie condamnée par le même jugemriit du 1 .cr juin 1787 , céda scs droits sur les biens de la famille
(-»nrcellon au sieur Vidal qui n’accepta la cession qu’au nom de
scs ciilaus mineurs, en qualité do tuteur légal et administrateur
légitime de leur personne et biens , par acte du dix-sept juillet
U 2
�(
12
)
i?9 7 ( 0 - A c^,te ^l)ôrPie >lesdix-ans accordés à la cédante, pouf
appeler de la sentence de 1787, n’étaient pas encore complète
ment révolus ; car ce jugement n’avait été signifié que le 3 août
17B7, conséquemment le 17 juillet 1797, il n’y avait encore que
neuf’ ans onze mois quatorze jours d’utiles pour la prescription
d’écoulés. Alors elle fut suspendue par la minorité des cédataires (2 ), d’où il suit que l ’appel est venu dans un teins utile ,
aussi bien en ce qui concerne Marie D o m a l, qu’en ce qui con
cerne Marie Hébrard , épouse du sieur V id al , représentés l’un
et l ’imtre par les enfans V idal.
Cependant il est possible que Catherine V id al ait tardé plus'
de seize jours après sa majorité à former son appel ; alors en
joignant les neuf ans onze mois quatorze jours qui avaient couru
sur la tète de Marie D o m a l , avant qu’elle cédât ses droits, au
tems intermédiaire entre le jour de la majorité de Catherine
V id a l et l’acte d’appel, on pourrait peut-être trouver dix années
utiles d’écoulées contr’e lle , et conséquemment la prescription
aurait été accomplie pour le tiers qu’elle amendait dans la ces
sion de Marie Domal ; mais , dans ce cas , la suspension de la
prescription pour tous droits corporels el incorporels, pronon
cée par la loi du 20 août 1792 , viendrait à son secours, et la
mettrait encore à l’abri de la lin de non recevoir. Cette l o i , tit. 3,
art. 2, porte en effet : que « L a prescription pour les droits cor« porels et incorporels appartenant à des particuliers, demeure
«
«
*
«
suspendue depuis le 2 novembre 17ÎÎ9 , jusqu’au 21 novembre 1794 , sans qu’elle puisse être alléguée pour aucune
partie du teins qui se sera écoulé pendant le cours desdites
cinq aimées». O r , si l’on retranche ces cinq années des dix
années, et quelques jours seulement de majorité, qui peuvent
5
(1) 28 Mcîiiilor an , voir le jugement du tribunal civil, du 2 frimaire
011 6 , au v.° du premier feuillet.
(2) Bomjon, Droit commun de la France, tom. 2, p. 573 j lien ris, Louet
el lhüdtauj Duplessis, etc.
�avoir couru , soit sur la tête de Marie Doraal cédante, soit sur
celle de Catherine V id a l cédataire, il ne restera guère que la
moitié du teins nécessaire pour la prescription du droit d’appeler.
On dira peut-être que l ’article cité de la loi du 20 août 1792 >
doit être sainement entendu ; que la suspension de la prescrip
tion qu’il prononce, n’est pas générale et indéfinie ; que le légis
lateur n’avait en vue d'affranchir de prescription que les rentes
foncières, constituées, et autres redevances quelconques, etqu’elle
est sans application aux a u t r e s actions. Sans prétendre que la loi
dont il s’agit, s’applique à toutes sortes de prescription indistinc
tement , on lest en droit de soutenir que l’on n’en abuse p a s ,
lorsqu’on l’invoque uniquement pour soutenir que l’appel d’un
jugement par défaut , inconnu de l ’appelante , serait venu à
tems, quand il aurait été .interjeté quelques jours, ou quelques
mois après les 10 ans de majorité, à la suite d’une révolution
pendant laquelle l’état de l’ordre judiciaire et des tribunaux a
subi tant de variations. S ’il est u n e m a t i è r e , en e f f e t , ou la pres
cription ait dû être suspendue pendant les troubles, l’agitation et
les bouleversemens de la révolution , c’est bien certainement la
prescription du droit d'appeler des jugem enspardéfaut, faute de
comparoir, rendus avant la révolution, soit à cause de la per
suasion où l’on était généralement que la faculté d’appeler de
cette classe de jugemens , durait o a n s , soit à raison de l’incer
titude où l’on était jeté sur la manière de procéder en cette m a
3
tière, par les variations continuelles des tribunaux et de l ’ordre
judiciaire.
N ’hésitons donc pas à conclure de tout ceci que l ’appel du sieur
V id a l au nom de ses enfans m ineurs, tant du chef de Marie
Ilébrard leur mère que du chef de Marie Domal femme Filiol ,
leur grande tante, et celui de Catherine V id a l sa fille ainée du
même chef, ont été formés à tems, e t s o n t rccevables sacs diüicuhe.
Voyons maintenant s’ils sont fondés.
�Preuves de la seconde proposition.
L ’appel du sieur V i d a l , au nom de scs enfnns mineurs et da
Catherine V idal sa fille a in é e , est bien fondé.
L a sentence rendue, le i . er juin 1787, nu bailliage de Salers,
dont l’appel est à ju g er, fu t prononcée ,
i.° Contre Pierre Hébrard, veu f de Catherine D om al, en qua
lité d’usufruitier de ses biens.
Antoine V i d a l , en qualité de mari de Marie Hébrard, et son
épouse héritière de Catherine Domal sa mère;
Joseph Filiol, en qualité de mari de Marie D om al, et contre
son épouse;
Tous représentés maintenant par les appelant.
2.0
Contre Gaspard Delprat, veuf d’Antoinette Garcellon , et
contre Marguerite Garcellon , sa belle sœur fille majeure, repré
senté par les héritiers D elprat, par Martin Hébrard , Marie V idal
son épouse, Antoinette I erc veuve de Joseph T a b a rier, qui ne
sont point appelons.
Son dispositif est ainsi conçu : « Nous avons contre les dé« faillans donné défaut, et pour le profit, faute par V idal et
3
« Filiol d ’avoir autorisé leurs femmes , avons ¡celles autorisées
«
«
«
«
«
k
«
<r
«
en justice............... D éclarons exécu to ire, contre lesdits Garcellon , Hébrard, Domal et Delprat, en qualité, tant de leur
chef que de celui de leurs ailleurs, même ledit Hébrard , d ’usufruitiers des biens de ladite défunte Catherine Domal son
épouse, d'héritier et jouissant lesbiensdesdits sieurs Garcellon,
tant lesdits billets, exploits , sentence et oppositions, en date
des 20 septembre et 16 novembre 1716, 28 et o août 1719 ,
2 mai 1720 , 11 mars et 17 mai 17 2 1, o juillet 1754, et z
décembre 17^3.
3
3
En conséquence, condamnons les défaillant, èsdits noms et
qualités, chacun personnellement pour la part c l portion dont
�5
*¿5
( i )
ils sont héritiers des défunts G a rcello n , et hypothécairement
pour le to u t, à payer aux demandeurs, en deniers ou quittances
valables , la somme principale de 3 , 4 0 6 livres, avec les intérêts
d’icelle depuis l’opposition formée aux scellés apposés sur les
efiels desdits feus sieurs Garcellon, et en tous frais et dépens; le
tout adjugéparlasentencedudit jour n mars 1 7 2 1, ainsi qu’aux
frais de mise d’exécution ; condamnons en outre les défaillans
aux dépens de la présente instance ;
Disons enfin que lesdits Y id a l et Filiol seront tenus d’indiquer
des biens de leurs fem mes, etc.
Les appelans ont à se plaindre de ce jugement sous deux
points de vue ;
E n ■premier lie u , parce qu’il fait revivre, en ce qui concerne
les appelans, une vieille créance dont l’origine était illégitime ,
et qui avait été éteinte depuis long-tems par la prescription ,
lorsque le tribunal de Salers en ordonna le paiement.
E n second lieu , parce qu’il condamne hypothécairement leurs
auteurs , au paiement de la créance entière.
Ces deux griefs exigent d ’être développés séparément pour
éviter la confusion qui est Pécueil le plus à craindre dans cette
affaire extrêmement compliquée.
P R E M I E R GR I E F .
Prescription.
L e Dernier des titres de créance, produit par les intimés lors
du jugement du i . er juin 1787 , est une sentence obtenue par
Guillaume lle d o n clm t, leur a u te u r, contre Jean G arcellon,
prêtre, curé de Si. P ro jet, Antoine Garcellon son frère, comme
héiit iers, en partie, de Pierre Garcellon leur défunt frère , et
encore contre autre Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs
de Martin et de Simon Garcellon , héritiers, en partie, de Pierre
premier, leur o n cle, ainsi que de Martin et de Simon , leur
père, le 11 mars 1 7 2 1 , signifiée à domicile, le 17 mai suivant.
sè
�( ,ï 6 )
Depuis cette éqoque jusqu’à la demande en déclaration de ce
jugement exécutoire, formée par les intimés, le 2 mai 1787 ,
on trouve un intervalle de tems de 66 ans. Les intimés prétendent
(m a ïs sans le justifier), que Guillaume Redonchat mourut en
1720; qu’il laissa Jacques Redonchat son fils mineur, et que la
prescription dormit jusqu’en 17 3 1, époque à laquelle ce fils at
teignit sa majorité. Ce fait n’est pas établi ; mais en le supposant
vrai, et quand il ne faudrait partir, pour compter la prescription,
que de 1781 , il resterait toujours , de cette dernière époque à
56
l’année 1787, époque de la nouvelle demande,
ans, conséquemment un intervalle presque double du tems nécessaire pour
acquérir la libération de la créance dont il s’agit, dans une cou
tume comme celle d’A u vergn e, où tous droits et actions se pres
crivaient par le laps et espace de 00 ans continuels et accomplis,
d ’aprcs l’article II, titre 17 de la coutume. Les intimés essayent
d’écarter ce moyen tranchant; mais y réussiront-ils? On va en
juger par la discussion des objections sur lesquelles ils fondent
leur espoir.
P r e m iè r e o b je c tio n con tre ta p rescrip tio n .
L e s biens de la famille Garcellon furent mis en saisie réelle,
en l’année 1735, à la requête d’un sieur Bertrandy , créancier,
et les biens saisis furent administrés jusqu’en 1786 par le com
missaire aux saisies réelles, qui jouit au nom de tous les créan
ciers du saisi, et qui par conséquent conserva les droits de tous.
De 1721 îi 1735 il 11’y aurait que 143ns d’utiles, quand même
011 ne défalquerait pas le teins de la minorité de Jacques RedonL-hat. La prescription a dormi pendant la durée de la saisie réelle
jusqu’en 1786. D e cette dernière époque a la demande sur la
quelle es» intervenu le jugement de 1787, dont ¡1 y a appel ,011
11e trouve p is deux mis; d’où il suit que c’est une illusion de mettre
quelque confiance daus la prescription de la créance.
Réponse.
�( «7 )
Réponse.
'
&
C ’est pour la première fois qu’on a prétendu que la saisie réelle
des biens du débiteur interrompt la prescription, n o n seulement
en faveur du créancier saisissant, ce qui n’est pas douteux, mais
encore à l’égard de tons les créanciers indistinctement, du jour
de sa date, ou si l’on v e u t, de sa notification au débiteur saisi.
On a toujours pensé et avec raison,
i°. Que la prescription était interrompue en cas de saisie réelle,
A l’égard du saisissant, par la simple saisie notifiée, et du jour
de la notification ;
. A l’égard des créanciers opposans, du jour de leurs opposi
tions qui leur rendent l’effet de la saisie réelle commun.
2°. Que le cours de la prescription reste suspendu, tant a l égard
du poursuivant, qu’à l’égard des créanciers opposans , pendant
tout le tems qu’il y a des baux judiciaires, par la raison que le com
missaire aux saisies réelles jouit au nom de tous les créanciers,
de l’immeuble saisi q u i est leur gage, et dont les fruits ^doivent
se distribuer, comme le prix de la vente, par ordre d’hypothèque.
Mais la jurisprudence n’a jamais donné à la saisie réelle l’effet
d’interrompre la prescription en faveur des créanciers non oppo
sans , parce que jusqu’à leur opposition ils sont étrangers à la
poursuite; elle est à leur égard res inier alios acta\ et au lieu de
conserver leurs droits sur l’im meuble, le résultat de la vente par
décret qui laterinine, devaitêtredepurgerleurhypothèque. En un
mot la saisie réelle seule n’a jamais été unepoursuite utile, en aucun
sens, aux créanciers qui négligeaient d’y prendre part, par une
oppositiou régulière. Les intimés doivent donc renoncer à l’es
poir qu’ils paraissent avoir conçu, de faire considérer la saisie
réelle de iy35 comme un acte interruptif par lui-mCme , et du
jour de sa date , de la prescription de leur créance.
Seconde objection contre La prescription.
' l i é bien ! soit : il fallait une opposition de la part de nos auteurs
G
'
i
�-* \ »
( i8 )
à la saisie réelle, avant l’accomplissement de la prescription de
leur créance, pour que cette saisie réelle conservât leur droit;
mais cette formalité conservatrice ne fut pas négligée, puisque
nous rapportons l ’opposition qu’ils formèrent à la saisie réelle
des domaines de Tougouse et de B la v a l, le o juillet 1754. Notre
créance n’était point encore éteinte, à cette époque, par la pres
cription , parce qu’elle avait, été suspendue par le décès de
■
3
Guillaume R ed o u ch at, créancier originaire, en 1 7 2 3 , et la
minorité de Jacques, son fils, jusqu’en 1731 : l’interruption qui
s’opéra alors effaça tous les tems antérieurs. Depuis 1754 jusqu’à
la radiation de la saisie réelle, elle a resté suspendue : nouvelle
interruption en 1783, par une seconde opposition, et en 1787,
par la demande suivie du jugement de cette date. A i n s i , point
de prescription; il n’y en a pas même l’apparence.
Réponse.
L e s intimés placent la mort de Guillaume Redonchat, qui
avait obtenu la sentence de 17.21 , au 27 décembre 1723 : c’est
l i n fait à vérifier. M ais, supposons qu’il soit e x a c t , la suspension
de la p r e s c r i p t i o n jusqu’à, la majorité de son fils, en 1781, en
sera la conséquence, il est vrai, et il en résultera qu’effectivement
les trente années nécessaires pour prescrire leur créance n’étaient
pas révolues lors de l’opposition formée le o juillet 1754. Mais
3
que gagneront les intimés à celle découverte, si l’opposition du
o juillet, dans laquelle ils placent toute leur confiance , 11’a
aucun rapport à la saisie réelle de 1735, à laquelle on voudrait
l’appliquer aujourd’h u i, pour mettre leur créance à l ’abri de la
prescription? Rien. Une opposition étrangère à la saisie réelle à
laquelle 011 voudrait la rattacher, se rangera nécessairement dans
la classe des chiffons inutiles. O r , ce fait que l’opposition de 1754
ne s’appliquait point à la saisie réelle de 1735, se démontre par
3
la simple lecture de la pièce : il en fut signifié copie en tête do
l’assignation pour comparaître au bailliage de Sulcvs, le 2 mai
�*9
(
) >
Ï7S7. Et que voit-on dans cet acte d’opposition? Jacques Hedonç h a t, fils et héritier de G uillaum e, comparaître au greffe du
bailliage de Salers, et déclarer quoi? q u 'il s'oppose à la saisie
réelle des biens meubles des successions répudiées de Martin ,
Simon et Pierre Garcellon , sis ès pillages de Tougouse et
B la v a l, sur le c u r a t e u r auxdites successions, à la requête de
fe u Jean B lan cher; à ce que sur le p rix qui proviendra des
dits biens ledit R edonchat soit pa yé de la somme de
liv.
en principal, portée par sentence de la ju rid ictio n consulaire
3436
de C lerm on t, du 11 mars 1721.
i°. L a saisie réelle du 26 mars 1785-n’avait été faite, ni sur
les biens des successions répudiées de M artin, Simon et Pierre
Garcellon, ni sur le curateur auxdites successions ; elle l’avait,
été sur B en o ît J a m y , et François D o m a l, son gen d re, co
dernier administrateur légitim e de ses enfans et de défunte
¿(Lnne J a m y , iceux héritiers de ladite A nne Jamy , leur mere,
et d’Antoinette G a r c e l l o n , leur a ï e u l e , qui étaient héritières en
partie de Jean G arcellon, curé de Saint-Projet ; sur Antoine
Garcellon, autre héritier en partie de Jean Garcellon, prêtre j
et sur Pierre Garcellon, tuteur des enfans de défunts Martin et
Simon Garcellon, lesquels étaient également héritiers en partie,
de leur propre chef, du même Jean Garcellon, prêtre, décédé le
31 septembre 1 7 2 1 , conséquemment après ses trois frères ,
( Simon, décédé le 26 septembre 1716 ; Martin, mort le i jan^
vier 17 x7, et Pierre, mort le 14 septembre 17x9. )
5
2°. Les biens saisis n’étaient pas ceux des successions répu
diées de Simqn, Martin et Pierre Garcellon,mais deux domaines,
l ’un appelé Tougouse, et l’autre appelé Blaval, provenus de la
Buccession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, et auparavant
de celles de Guillaume, ou Guillen Garcellon, débiteur de Blanch&r, saisissant.
3 .°
Enfin elle ne fut pas faite par un créancier des successions
répudiées de Simon, Martin et Pierre Garcellon frères, associés
pourle commerce; elle fut faite au contraire en vertudes créances
�y
\
que ces trois frères avaient cédées à Blancher, parlraitd du 8 no
vembre 1709 , sur les domaines de Tougouse et de B la v a l, pro
venus des successions de Martin i . er et de Guillen Garcelion ,
auxquelles ]es cédans avaient répudié, et qui avaient été recueillis
par Jean Garcelion prêtre (1).
Il n ’y a donc r i e n decominun entre la saisie réelle des domaines
de Tougouse et de Blaval par procès-verbal du 26 mars 178^ ,
dont les appelans ont fait prononcer la radiation, et la prétendue
saisie réelle faite sur un curateur aux successions répudiées des
frères Garcelion", à laquelle Jacques Redonchat forma opposi
tion en 1764.
On ne trouve entre ces deux saisies jéelles, l’une très-certaine,
et l’autre peut-être chimérique, ni identité de personnes, ni
identité de biens saisis. L a diversité des personnes est évidente;
la diversité des biens ne l ’est guère moins; car l’opposition porte
sur la saisie re'elle de biens que l’on désigne comme des héritages
épars et détachés, qui appartenaient aux successions répudiées
des frères Garcelion , marchands-associés dans les territoires des
villages de Tougouse et de Blaval ,au lieu que la saisie réelle de
1 7 3 5 , frappait sur deux corps de dom aine, provenant de la
s u c c e s s i o n de Jean Garcelion prêtre ; et il est bon de remarquer
que l’opposition de Jacques Redonchat se réfère si peu à la saisie
des domaines de Tougouse et de B la v a l, du 26 mars 1735, qu’elle
n’y est même pas énonce'e par sa date.
Voilà donc une opposition lout-à-fait étrangère , soit aux au
teurs des appelans qui n’y sont aucunement dénommés , soit i\
la saisie réelle faite sur eux et sur les autres co-propriétaires des
domaines de Tougouse et Blaval. Or , comment une opposition
qui 11’a de rapport ni avec les auteurs des appelans, ni avec
( 1 ) T o u s c e s faits sont c o n s i g n a s d a n s l e j u g e m e n t du t r i b un a l c i vil , d u
2 f r i ma i r e a n 6 ,
cluituséc
de
r e n d u a v e n les i n t i m é s ; et d a n s la s e n t e n c e d e la s é n é -
R iom ,
du
Gma i
p o u r s u i v a n t la s ai s i e r l c l l c .
177
6, r e n d u e
avec B e it r a n d y , créancier
�(• 21 )
leurs biens., et qui ne leur fut point notifiée dans le tems, paur-^
xait-elle avoir interrompu la prescription qui courait en leur fa
veur? Tout le inonde ne sait-il pas que « /’interruption civile
« n’opère pas régulièrement d’une personne à l’autre, ni d une
« obligation ou d’une action à une autre »,com m e le dit Dunod,
traité des prescriptions, page 61 ?
Concluons que la prescription a continué de courir après l’op
position faite sur un curateur qui n’avait aucun rapport avec
les auteurs des appelans , et qui ne les représentait à aucun
titre , comme auparavant ; et par une suite-qu’elle était acquise
depuis long-tems, lorsque les intimés voulurent rectifier leur op
position de 17^4 par une seconde mieux libellée et mieux ap
pliquée , qu’ils firent en 1783, et à plus forte raison, lorsqu’ils
formèrent en 1787 la demande accueillie par le jugement dont
est appel.
U11 moyen si décisiT dispense de faire remarquer d’ailleurs,
que l’opposition de 1754, e û t elle é t é a p p l i q u é e à la saisie réelle
de 1735 , et f a i t e r é e l l e m e n t s u r les auteurs des appelans, elle
n’aurait pas été plus efficace; et pourquoi ? parce que l’opposi
tion faite au greffe sans être dénoncée au saisi, n’interrompt la
prescription que dans le seul cas où la saisie réelle étant suivie
de baux judiciaires, constamment soutenus , par l’effet desquels
tous les opposans jouissent des fruits du gage commun de leurs
créances, en attendant que la vente judiciaire en soit consom
m ée, l’action de chaque créancier est conservée entière par cette
jouissance du commissaire , au nom de tous. Or , la saisie réelle
de 1735 , au lieu d’être suivie de baux judiciaires réguliers et
soutenus, 11e servit que de prétexte au sieur Blaneher saisissant,
et
après lui au sieur Bertrandy son héritier, pour s’emparer,
d’autorité, des biens saisis, et en jouir pignorativement ; si
bien que par arrêts de la Cour de parlement, des années 1779»
Ï786 et 178 7, les héritiers Eertrandy furent condamnés à ren
dre compte des jouissances de ces biens , à dire d’experts, de
puis et compris 1735 , jusques et compris 1775 , et à faire l ’im
�putation de ces jouissances sur leur créance. Ce n’est que posté
rieurement à 1777 , qu’il y eut des baux judiciaires réguliers et
sérieux. De là il suit que Blancher et Bertrandy ne jouirent de
1735 à 1775 des biens saisis que pour eux seuls exclusivement ',
çt non pour tous les créanciers ; conséquemment qu’ils ne con
servèrent à l’abri de la prescription, que leur créance seule.
M o tif de plus de déclarer celle des intimés prescrite , dans l'in
tervalle de 1721 à 1783, époque où ils firent, mais trop tard,
une opposition régulière sur la saisie réelle de 1735, accompa
gnée alors de baux judiciaires subsistans.
L e premier grief desappelans contre le jugement dont ils se
plaignent, résultant de ce qu’il a fait revivre contr’eux une
créance éteinte par la prescription , est donc invinciblement
justifié ; et Pinfirmation du jugement est d?autant plus inévi
table sous cc point de vue, que la prescription qui est ■ordinaire
ment un moyen odieux, se trouve une exception favorable dans
l ’çspèce , aliimdu que la prescription, dont les appelans invo
quent le secours , n’a éteint qu’une créance originairement illé
gitime , que Guillaume Rcaoncbal s’était fait adjuger en i j 2 i r
par des juges incompétens, contre de p r é t e n d u s h é r i t i e r s de
Pierre , Martin et Simon Garcellon, ses débiteurs, dont les suc
cessions étaient répudiées, ainsi que le prouve l’opposition fai té
par Jacques R e d o n ch a t, sou lils, en 1754, que nous venons
d ’analyser. L a surprise avait versé sur les auteurs des appelans
une dette qui leur était étrangère. L a prescription les en a libé
rés. Ce résultat n’est que la réparation d’une injustice; et c’est
un motif bien puissant pour que la Cour d ’appel s’empresse
d’accuLillir avec autant de laveur ce moyen de libération ,
qu’elle l'accueille avec répugnance , dans les circonstances
ordinaires.
Passons au second grief.
�(tf)
S
e c o n d
g
r
i e
f
.
,
L a solidarité hypothécaire est prononcée sans fonde
ment, entre tous les condamnés par le jugement
dont, est appet.
L e moyen de prescription peut être opposé en tout état de
cause, et sur l’appel comme en cause principale; mais il ne se
supplée point. Tous les condamnés, par le jugement de 1 7 8 7 ,
ont également droit de l’opposer; mais tous 11’ont pas pris la
voie de l’appel pour se mettre à même d'en faire usage : peutêtre même n’est-il plus tems pour eux de prendre cette voie. De
là il résulte que les condamnations prononcées contr’eux per
sonnellement subsisteront, nonobstant que les appelans soient
déchargés de la partie de la dette prescrite qui les regardait per
sonnellement. E n cet état de choses, si la condamnation soli
daire, prononcée hypothécairement par le jugement dont est
appel, subsistait, il en résulterait donc que les appelans, dé
chargés du paiement de la dette pour leur contingent person
nel, pourraient être contraints de payer par l ’effet de la solidité
hypothécaire, prononcée par le jugement dont est appel , le
contingent des autres condamnés, sauf leur recours; c’est à quoi
ils ne doivent pas rester exposés, par deux raisons : sa vo ir, en
premier lieu, parce que la solidarité hypothécaire qui a été pro
noncée l’a été sans fondement ; la seconde, parce que dans tous
les cas, la prescription qui les a libérés de l’action personnelle,
les a libérés également de l’action hypothécaire.
Nous disons que la solidarité hypothécaire pour la créance
en tière, a été prononcée sans fondement, et en effet, il est cons
tant et c’est chose jugée entre les parties , par jugement rendu
ou tribunal c iv il, le 2 frimaire an 6 , que les domaines de T ou gouse et de Blaval , dont les appelans possèdent la moitié qui
leur fut attribuée par ce ju geaien t; proviennent de la succès«
�( i-t )
sion de Jean Garcelon, prêtre , ouverte en 17 2 1, et qu’ils appar
tenaient à cette succession sans partage; enfin que les appelans
possèdent et n’ofijt;jouais possédé aucun autre immeuble de
la,famille Garcellon que.la.moitié de ces deux domaines.
J est également constant que Jean Garcellon , prêtrq, n’était
pas seul débiteur de la créance adjugée aux ailleurs des intimés
1
ppr la sentence consulaire du 11 m us 1721, ni à beaucoup près ;
qu’il n’avait été condamné, par cetté sentence, qu’à payer son
cbnfingenfcohime'béritier pour 1111’ qïiart de Pierre Garcellon,
fcèn défunt frère, conjointément avec Antoine Garcellon, son
aufrè frère survivant ‘avec les en fan s dé'M artin Garcellon , et
avec c ë u i de Simon Gitrcéllon : et attendu qu’ il résulte du même
jugémènt que Pierre (rarcéllou n’était îui-mêm'e débiteur que du
tiers de’ la créance entière, il est conséquent, que ce tiers distri
bué entre les quatre branches d’héritiers, né donnait à la charge
'dé Jean Gmvt,llôn"qu’un douzième de la dette (1).
T1 n'y avait aucune solidité entre les côndnmnés', et il ne pouVnit'pasj Vu avoir, puisque les condamnations n’étaient frtnddes
que sur dès actes sous seing-privc; de 1A , il résidte que les biens
clé Jean 'Garcelon n’étaient hypothéqués qu’au douzième de la
detlç entière , et par une dernière conséquence, que les appelans
rie possèdent que dés immeubles provenus de Jeîirt Garcellon ,
ils ne seraient tenus hypothéchirement que du douzième d e là
créhnce, pour lequel il y nvaif eu condamnation contre l u i , par
I.¥ sénU'iiéé de 1721, et quô la condamnation hypothécaire pro*
noiicée pour le tout ,r serait déntlée de tout fondement, quand
]aJércanéé subsistera il 'encore.1
Mais ce n’est pas tout : ■n-ou.*; ’avons prouvé que la prescription
î)vîiit éteint la créance èhtièré, long-tems' avant lé jugement de
( 1 ) P o u r h i c » e n t e n d r e c c ' f n ^ e m e n t do n t l e d i s p o s i t if est 1111 p eu c o n f u s ,
il f.iui s;* r a p p r o c h e r d e l ’ e x p l o i t d e d e m a n d e s ur leiji/el il fui r e n d u , et a u q u e l
î l ‘-e r^fêi t v
'u ■
■
■
■
;
!
S a 1e r s ,
�*5
'(
)
Salers. de l’année 1787 , dont est a p p e l, si les codébiteurs qui
11e sont point appelons , ont jugé à propos de renoncer ù la pres
cription en ce qui les concerne , ils n’ont pas eu le droit d ’y
renoncer au préjudice des appelans ; et ceux-ci ont incontesta
blement droit d’invoquer cette exception tutélaire, que la loi
leur oiïie pour se dispenser de payer la dette cCautrui.
R É S U M É .
\
Nous croyons avoir porté, jusqu’à la démonstration, la preuve
des assertions annoncées en commençant, savoir:
1.° Que l ’a p p e l, interjeté par les enfans V id a l, ou à leur notn,
du jugement rendu au bailliage de Salers en l’année 1787 , est
recevable, quoiqu’il n’ait pas'été intérjeté daiis les dix ans de la
signification , parce qu’il a cté interjeté dans les dix ans de la
majorité des appelans, et que toute prescription dort pendant la
minorité; notamment la prescription du délai d’appeler, aux
termes de l’art. 16 , titre 27 de l’ordonnance de 1667 ;
2.° Que cet appel est fondé, parce que la créance de
liv.
3,436
eu capital, et de plus de 80 ans d’intérêts, adjugée par la sen
tence attaquée, était illégitime dans l’origine , et doublement
prescrite lorsqu’elle fut adjugée ;
Que la prescription n’avait été interrompue par aucun acte
judiciaire utile, depuis 1721 jusqu’en 1787, et 11’avait été sus
pendue , par des minorités que pendant sept ans; •
.° Enfin que si les débiteurs de la plus grande portion de
3
cette cré.mce , ont jugé à propos de renoncer au bénéfice de la
prescription et de l’appel, les appelans ne peuvent pas souffrir
de leur résignation ou de leur collusion , et supporter , sauf leur
recours, la charge de la dette enliè’re, par l’ell'et d’une solidarité
hypothécaire, qui n’a jamais existé que pour une faible partie
de la dette, et qui est éteinte, pour le tout, par la même pres
cription qui les a libérés de leur contingent personnel.
D
�(26)
E n cet état, les appelans doivent attendre avec sécurité l ’évé
nement de leur a p p e l, qui ne peut que leur être favorable.
D
élibéré
à
3
C lermont-Ferrand , le 18 nivôse an 1 .
BERGI ER,
BEILLE-BERGIER.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu la présente consulta
tion, est du même avis, et par les mêmes raisons.
D é lib é r é
à R io m , le 20 nivôse an 1 3.
ANDRAUD.
O
B S E R
V A
T I O
N
S .
L
A Cour pourra se convaincre par l’examen des titres origi
naux de la créance, qu’une vente de fromage portée par la police
du 8 avril 17 19 , a eu pour prix l es deux b i l l e t s a n t é r i e u r s dont
il n’est fait aucune réserve, et q u i, à 16 fr. de différence près ,
font la même somme que le prix de la vente; que Guillaume
Redonchat fit au moins double emploi de 1664 livres lors de sa
demande eu 1720.
M.e V A Z E I L L E , avoué.
A "
à.
^
A ,
/t a t r J .
^VaV 6
À
R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J . C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Vidal, Antoine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
créances
tutelle
saisie
généalogie
prescription
droit intermédiaire
Bailliage de Salers
Description
An account of the resource
Titre complet : Exposé des faits, en suite desquels est la consultation de messieurs Bergier, Beille-Bergier et Andraud, Jurisconsultes ; pour Sieur Antoine Vidal, expert-géomètre et notaire public, en qualité de légitime administrateur de ses enfans mineurs, et Catherine Vidal, sa fille majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, commune de Saint-Christophe, appelans et demandeurs en opposition ; Contre le sieur François Redonchat, propriétaire ; Jean Salvy, notaire public, et Marie-Anne Redonchat, son épouse, intimés et défendeur en opposition.
Annotation manuscrite: « 17 prairial an 13, 1ére section. Attendu que depuis la signification du jugement du 1er juin 1787 il ne s'est pas écoulé sur la tête des enfants Vidal dix ans utiles de majorité. Reçoit l'appel sur le fond. »
Table Godemel : Appel : 6. l’appel d’une sentence rendue en 1787 est recevable, après les dix ans de la signification, s’il ne s’est pas écoulé dix ans depuis la majorité.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
Circa 1709-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Salers (15174)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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Bailliage de Salers
Créances
droit intermédiaire
généalogie
prescription
saisie
Successions
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53446/BCU_Factums_G2217.pdf
182fc95210992ac0f15bed221cb98486
PDF Text
Text
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MEMOIRE SOMMAIRE
P
O
U
R
J oseph G O U R B Y -COG N O R D , défendeur et
incidemment demandeur
CO N TRE
,
J o seph J O U B E R T . son oncle maternel. demandeur et incidemment déjendeur
i •
QUESTION DE STELLIONAT.
J suis débiteur du sieur Joubert, mon oncle , non
E
pas de 157,648 francs , comme il ose le publier pour me
discréditer et me perdre, mais de 26,000 livres tournois,
en capital, de dette certaine, et de trois ou quatre années’
A
�( O
d’intdret de ce capital, qu’il a été contraint de payer
pour moi au sieur D em ay, banquier, envers lequel il
s’étoit obligé solidairement avec moi.
Il est possible q u e , par le résultat d’une instance d’ordre
"poursuivie au tribunal de T h ie r s , pour la distribution
du prix de revente d’un jardin dont je lui avois fait
"présent, en paroissant cependant le lui vendre7 je lui
doive le remboursement de 6 qn 7,000 ÿr.q u e Godissier,
dernier acquéreur, auroit été forcé de payer aux créan
ciers inscrits de mon père, ancien propriétaire, sauf mon
recours.
Peut-être le dénoûment d’un autre ordre à faire pour
la distribution du prix de la revente du-domaine du
Petit-Sarliève, acquis de moi par le sieur Joubert, en
1809, et revendu sur lui par expropriation forcée, au
mois de novembre d ern ier,'ajo u tera-t-il à ses reprises
contre moi.
En tou t, sa créance, qui n’est encore ni liquide, ni
liquidée, p ourra s’élever à ‘40,000 francs,\naisvnon au
delà.
Je laisse à mes défenseurs le soin de discuter mes in
térêts sur le plus ou le moins dans la liquidation de ma
dette', mais mon honneur, ma liberté, je les défendrai
moi-même! Ma vive sensibilité à l’injure qui m’est faite,
n provoquant contre moi la contrainte par corps, comme
stellionataire, me tiendra lieu de talens. Quelle que soit
somme dont la liquidation future de mes obligations
me constitue d ébiteur, elle ne sera jamais le fruit ni
d*une infidélité, ni d’un manque d’honneur, qui doivent
faire peser surm oi" la' peine de la contrainte par corps.
�(3)
C ’est ce que j’espère démontrer jusqu’à l ’évidence, même
à la prévention.
Sans doute, le fourbe doit être condamné par corps
à la restitution des sommes qu’il a escroquées par les
manœuvres criminelles du stellionat : les bonnes mœurs
l ’exigeoient, et l’article 2069 du Code Napoléon le veut
impérieusement. Mais en même temps que la loi s’est
armée de sévérité contre l’impudent stellionataire qui
trompe de dessein prém édité, par des illusions et des
déclarations mensongères, la crédulité de ceux auxquels
il vend, ou donne des immeubles pour gage de sûreté,
elle a pris soin de prévenir les fausses applications de
cette mesure rigoureuse, en définissant avec1 précision
ce genre d?escroquerie, en ces termes:
« Il y a stellionat, lorsqu’on vend ou qu’on hypo« thèque un immeuble dont on sait rfêtte pas pro« priétaire;
>
' ^
*'• « Lorsqu’on présente comme libres des biens hypo
to•théqués,
« Ou que l’on déclare des hypothèques moindres que
« celles dont ces biens sont chargés. »
' ‘
; Á ces trois cas de stellionat, l’article 2136 en ajoute
un quatrième : il répute aussi stellionataires les maris ou
les tuteurs qui auroient consenti ou laissé prendre frau
duleusement des hypothèques sur leurs immeubles déjà
grevés de celles de leurs femmes ou des m in e u r s , sans
les avoir précédemment rendues publiques, ou sans les
déclarer à ceux avec lesquels ils traitent,
r Les créances qu?a contre moi le sieur Joüberf tirentelles'leur origine d’escroqueries de ce genre , le tribunal
A 2
�C4 )
doit me frapper de la-contrainte par corps sollicitée pâli
mon propre oncle. Malgré l’extreme dureté de ce parent
pour m’obliger'à réparer ma faute , j’aurai mérité ce
châtiment rigoureux et Je m’y résigne. Mais si je n’airien fait qui donne à ma dette une source coupable, rien
qui blesse la bonne fpi ni l’hoinneur *, dans ce cas il n’y
aura rien de punissable dans ma conduite. Car, en toutes
~rnatières ( comme le disoit M . le conseiller d’état Berlier,
lors de la discussion de l’article), la bonne f o i prouvée,
f a it disparoître'.te'délit, ¡-j f (
A lo rs , par.conséquent, au .lieu de nie frapper d’anath èm e, et" de paralyser ma triste existence par la con
trainte par corp s, le tribunal devra me protéger, et me
venger de l’atteinte portée à mon honneur, à ma répu
tation, et à mon cré d it, par, l’éclat d’une diffamation
calomnieuse,, aussi acharnée qu’elle est injuste.
v
Remontons donc à la source des créances que réclame
le, sieur Joubert, pour voir si elles sont, de ma part le
résultat des négociations et des pratiques insidieuses de la
fourberie; là est toutejla question»n fo l) r
i ) »
Je vais suivre, dans l’an^li^e de ces’ créances , l’ordre
chronologique de leur origine,, à -l’exemple du sieur
Joubert.
, '
'
-il .il
,
'
.fi. •
[
Première créance dérivant )d?un acte de vente*du n
avril 1807, 'i '■> r i
•
f •
L e 11 avril 1807, je vends en apparence, et je donne
ra réalité un jardin et un pré attenans, situés à T h ie rs,
au sieUi Joubert, mou oncle, qui exigea cette gratifica.
■
'■
•
�m
ft'oz?, *pn sus des,intérêts
, cours .énprme;tle la place,
oiir"me]iïitsstr ¿Tes fonçis. qu’il 111,’avoît pi-etés ou procures,
e t TM ^t^hlïrisf^^rédTt 'de'sa signature. L e prix f i c t i f
de la vente fut de 8,000 francs, que^ je reconütrsr avoir
reçus;comptant. ^ ’hypothéquai., à,la garantie, un héritage
dépendant de moq domaine de Bicon, sans dire si cet im
meuble étoit libre , OU; grevé d’autres hypothèques.
_ L e jardin vendu provenoit de mon père, et se trouvoit
frqppé“, de son chef*, de différentes hypothèques.' "
~
:~ T e sieur JouberÇ le revend environ 7,000 francs ; l’acquëi’eur fait transcrire, et notifier aux créanciers inscrits;
il s’introduit un ordre,ret le sieur Joubert assure, sans
l’avoir justifié encore, que le prix entier delà revente a été
absorbé pâTr,les collocations et rês fi'àTs^prçlre ; il demande
“que je l’en indemnise- Je,ne,m’y rêfusç pas, pourvu qu’il
justifie ce qu’il avance, sauf mon recours^cqntrejmqn père.
Mais a-t-il la voie de la contrainte par corps contre moi
pour cette créance!?jll le. prétend , parce que je me suis
rendu stellionataire, dit-il,’
pppr, avoir vendu comme
libres, le jardin e tle pré,donf il s’agit, , . ; .y, ,y
n|/if
2°. Pour avoir hypothéqué k Lla; garantie unr héritage
de Bicon , déjà grevé d’autres hypothèques, sans les
déclarer.
v Y
. , I: ; ..f - Je réponds, en premier lieu;:.^is^z Te contrat de vent«;
du 11 avril 1807 ¿-et i;QUgisspz»>|yous psi-Ziasgiirefl que je
yous vendis lç jardin ,efi le prçj J désijgnéjsj.daiis .cejcoulfa-t,
comme libres;thé bien! vou$, mentez à ki justice et au
public; il n’en est rient .Je vendis cet immeuble pure
ment et simplement* sans déclarer.,¡ni qu’il^étoit. libre,
ni qu’il ne l’étoit; pas ; et Uj n’y a point steUionat dans
�( 6 )
tm pareil silence; car la loi ne commande pas d’explication à ce sujet; elle se borne à punir les fausses dé
clarations.
ü n second lie u , vous dites que j’hypothéquai à là
garantie du jardin et du pré un immeuble grevé d’hypotlièques, sans les déclarer : cela peut être ; mais où est
la loi qui répute stellionataire ceux qui hypothèquent
des immeubles déjà grevés d’autres .hypothèques judi
ciaires ou . conventionnelles * „saris*. les..déclarer.?, P o u r
qu’il y ait stellionat dans l’affectation d’un immeuble par
h ypothèque, sans déclarer qu’il est déjà grevé d’autres
hypothèques, il fa u t, suivant l’article 2o5g.,. qu’il ait
été hypothéqué comme libr e , parce qu’alors, et alors
seulem en t, il y a mensonge et dissimulation fraudu
leuse;* et c’est ce qu’on ne trouvera pas dans le contrat
de vente de 1807.
ii ;
Troisièmement. Diréz-vo'us que"si la loi n’exige pas,
sous peine de stellionat, la déclaration de toutes les
.hypothèques dont un immeuble est grevé', lorsqu?il- est
hypothéqué de noüveau', l’article 2136 du Code exige
au moins la déclaration des'v’hypothèques légales de la
femme?
Mi
Je répondrai q u e, sans examiner dans le moment le
mérite de ce moyen, que ¡je' discuterai bientôt en analisant le second chef de 'fcréance * il "suffit, pour en
écarter l’influeûce sur celle1 dont i l 1 s’agit maintenant,
de savoir qué le sieur Jbubert se tint-si bien pour
averti de l’hypothèque légale de la dame G ognord, mon
épç>.uae,'qu’il' remplit^'frdù-f'la >purger, les formalités pres
crites par les articles 2ip $ et ¿Î94 du- Gode Napoléon,
�C7 )
et qu’il atteignit le but. L ’hypothèque fut purgée; dèslors le sieur Joubert n’en ayant point souffert, et ne pou*
vant plus en souffrir, il ne sei'oit plus recevable à la
prendre pour base d’une plainte en stellionat, quand il
y auroit été fondé dans le principe.
D euxièm e c h e f de créance, résultant de la cession
de 26,000 livres tou rn ois, fa it e au sieur D e m a y ,
le 4 janvier 1808. _
^
Nous fîmes solidairement, le sieur Joubert et m o i,
cession - transport au sieur Dem ay, banquier à Clerm ont, par acte passé devant Chevalier , notaire, d’une
créance de 26,000 livres tournois, qui; m’étoit persono e lle , en qualité de mari de la dame Cognord-Courby.,
sur les acquéreurs du domaine de M aison-Neuve, com
mune de Celles, moyennant un prix égal de 26,000 liv.
tournois, qui tourna entièrement à.ma libéi’ation envers
M . de Stradat , de qui j’avois acquisi le /domaine du
Petit-Sarliève. '
n
,1 p
,\\\
La cession fut faite, de notre part, avec promesse de
garantir, fou rn ir et fa ir e va loir, et même de payer
après un simple commandement. La rentréede la créance
cédée, éprouva des obstacles Vie, sieur D em ay,; cessionnaire, en prit occasion de s’adresser au sieur J o u b e r t ,
pour rie contraindre, par la saisie immobilière de son
domaine du"Petit-Sarliève, à remplir fengngement de
payer lui-m êm e, à défaut par les débiteurs d’acquittér
leur dette après simple commandement.
.-.i
l
L e sieur Joubert faisant le sourd, lei domâinè saisi
�C8 )
sur lui a été vendu par ' expropriation, pour acquitter
une dette qui est véritablement la mienne ,< mais^qu’il
avoit volontairement fait sienne, en contractant l’obli
gation de la payer solidairement avec^ moi. Il a donc
un recours contre, m o i, qui'suis le principal débiteur;.
Je ne me refuse pas à l’indemniser de ce qu’il a payé
pour m o i, ainsi que des frais de l’expropriation qu’il a
subie pour,l’acquittement de ma dette ; mais dois-je y être
condamné par corps? O u i, encore -une fois, si cette in
demnité dérive d’un stellionat ; n on , si elle n’a pas cette
origine impure. Eclaircissons'donc le fait.^ii
Trois siellionats sont réunis dans le seul acte de ces
sion de 1808, s.’écrie le sieùr Joubert.*]
i *f
Stellionat} en1 ce que vous avez'veîidd^une créance
qui ne vous appartenoit -pas^ puisqu'elle étoit u n 'çrix
de vente des' biens;‘de'votre'fem m e.
Stellionat, en ce que voùs! avez hypothéqué à la ga
rantie de la 'icession, ••v o tre. bien. jdeJBi çq n , ;déjà grevé
de nombve ^a.xiives'hy'pothèqÎies'^ans en déclarer aucune.
Stellionat, enfin, en ce que vous n’avez pas déclaré
nommément les hypothèques légales de votre épouse.
V oilà trois visions, fruit de la mauvaise fo i, répon
drai-je, et non trois stellionats.
C’est une première vision,'en effet, de prétendre que
je vendis, par l’acte de cession de 1808 , une créance qui
ne m’appartenoit pas1; car les capitaux dûs a la fem m e,
-même lorsqu’elle est mariée sous le régime d otal, appar
tiennent au mari tant qu’il n’y a pas de séparation de
biens, suivant l’axiome maritus dorninus dotis,* qu’il a
seul droit d’en poursuivre le recouvrement, d’en per"
"■
■
■ ’
cevoir
�(9 )
cevoir les intérêts, d’en recevoir le remboursement (art.
1549 du Code Napoléon) ; par une conséquence néces
saire, qu’il a droit de les céder; et q u e, lorsqu’il en fait
cession, comme lorsqu’il les reçoit im m édiatem ent, il
devient débiteur du montant envers sa fe m m e .
D ’un autre côté , il est bien singulier d’entendre le
sieur Joubert me qualifier de stellionataire, pour avoir
vendu la créance de ma femme ( non séparée encore
alors ) , lui qui fit cette vente solidairement avec moi %
et qui , en la faisant, vendoit bien plus que moi ce
qu’ i l savait ne pas lu i appartenir.
En troisième lie u , comment le sieur Joubert ou ses
conseils aveugles, n’ont-ils pas fait attention que la vente
d’une créance n’est pas la vente d’un immeuble, et qu’il
n’y a stellionat , suivant l’article zo 5g du C o d e , que
« lorsqu’on vend ou qu’on hypothèque un immeuble
« dont on sait n’être pas propriétaire ? ( i ) »
E n fin , je demande au sieur Joubert : Qui êtes-vous
pour élever la plainte en stellionat au sujet de la cession
de 1808? Fûtes-vous l’acquéreur ? non : vous fûtes le
covendeur. S’il y avoit eu stellionat, vous en seriez le
complice : il vous sied bien , après cela, de vouloir vous
en faire un titre à la contrainte par corps contre moi !
C ’est une seconde vision de chercher un stellionat
dans l’aflectation de Eicon ù la garantie de la créance
(1) La question de savoir si l’on appliqueroit la peine du stel
lionat aux v e n te s des m eu b les d ’a u tr u i , fut discutée avec beau
coup de sagesse et de profondeur, au Conseil d’état, à la séance
du 16 frim aire an 12. L ’opinion qui en restreignoit l'application
a u x seules ventes d’im m eubles prévalut.
B
�( IO )
c é d é e , sans déclarer les autres hypothèques conven
tionnelles ou judiciaires dont cet immeuble étoit grevé.
Je la dissiperai, en répétant ce que j’ai déjà dit dans
la discussion du premier chef de créance : la loi ne déclare
stellionataire que celui q u i, par des déclarations expresses,
trom pe, en présentant comme libres des biens hypo
théqués : o r , l’on n’a pas un pareil reproche à me faire.
J ’ajouterai que ce n’est pas au sieur J o u b ert, mon
covendeur, que je donnai une hypothèque sur Bicon ;
niais au sieur D em ay, acquéreur; que Joubert lui en
donna u n e , comme m o i, sur son domaine des Brassets y
et qu’il ne fit pas plus que moi la déclaration des autres
hypothèques dont ce domaine étoit grevé ; que tout
ce qu’il m’oppose, retombe sur l u i , et ne prouve que
l’aveuglement et de la mauvaise foi et de la passion qui
l’égarent.
Si le troisième stellionat qu’on prétend trouver dans>
la cession de 1808 étoit réel, le sieur Joubert l’auroit
encore commis en complicité avec m oi; ce qui sufliroit
pour lui fermer la bouche : mais il n’est, comme les
deux autres, qu’une pure vision.
On le puise dans l’article 2136 du Code Napoléon,
qui exige des mai-is, ù peine d ’ê tr e réputés steliionata ires, ou qu’ils rendent publiques les hypothèques
légales de leurs fem m es, en prenant des inscriptions
sur eux-mêmes, pour avertir les tiers avec lesquels ils
contracteroient qu’elles existent, ou qu’ils ne consen
tent et laissent prendre aucune hypothèque ou privilège
sur leurs immeubles, sans déclarer expressément que
lesdits immeubles étoient affectés à Fhypothèque légale
des J e 1unies.
�( II )
Je l’avoue, je fis avec le sieur Joubert, et comme lu i,
dans l’acte de cession de 1808, la faute, m o i, d?hypo
théquer mon domaine de Bicon, le sieur Joubert, son
domaine des Brassets, sans songer à. déclarer que ces biens
étoient grevés des hypothèques légales de nos femmes,
quoiqu’elles n’eussent pas été rendues publiques par des
inscriptions ; et nous fîmes ces fautes avec tous les maris et
tous les tuteurs de l’E m pire, qui ont consenti par contrat
ou laissé prendre par jugement des hypothèques sur
leurs im m eubles, depuis la publication du Code en
l’an 12. Nous ne craignons pas de dire qu’il n’en est pas
un auquel il soit venu en idée de déclarer à son créancier,
avant le jugement de condamnation qui doit donner
hypothèque générale sur tous ses im m eubles, qu’ils
sont déjà frappés des hypothèques légales de leurs femmes
ou de leurs mineurs ; et nous osons ajouter qu’il n’en
est pas un sur cent qui ait pris la précaution de dé
clarer ces hypothèques légales dans les autres contrats
par lesquels il a consenti des hypothèques convention
nelles.
Quelle est la conséquence ? Que si nous sommes
stellionataires, le sieur Joubert et m oi, et comme tels
contraignables par co rp s, pour les suites de toutes
les hypothèques que nous avons consenties ou laissé
prendre sans déclaration des hypothèques légales de nos
femmes et de nos m ineurs, tous les h o m m e s m a rié s et
tous les tuteurs de l’E m pire. tous les pères, toutes les
inères qui exercent la tutelle légitime de leurs enfans,
soïïTstellionataires, et c o n tr a ig n a b le s par corps comme
nous; de sorte qu’il ne fa u d ra pas compter les stellionataires par centaines, ni par milliers seulement, dans
B 2
�C 12 ■
)
l’E m pire, il faudra les compter par millions, et cela sans
que personne s en doute. Quelle effroyable loi que celle
qui auroit des conséquences si terribles! N on, il n’est
pas possible de. donner à l’article 2136 du Gode une
interprétation si alarmante pour la société entière, si
flétrissante pour tous les chefs de famille. Ecoutons
l ’auteur des Lois civiles, sur la manière dont il faut expli
quer et entendre, dans l’exécution et la pratique, les
lois q u i, pfises à la lettre, conduiroient à des déci
sions d’un danger effrayant, ou d’une injustice révol
tante. « Lorsqu’il arrive, dit ce grand homme ( 1 ), que
« le sens d’une lo i, tout évident qu’il paroît dans les
« term es, conduiroit à de fausses conséquences, et à des
« décisions qui seroient injustes, si elle étoit indistinc
te tement appliquée à tout ce qui semble compris dans
« l’exception, alors l’évidence de l’injustice qui suivroit
« de ce sens apparent, oblige à découvrir, par une espèce
« d’interprétation , non ce que dit la lo i, mais ce qu elle
« veut dire , et à juger sur son intention quelle est
« l’étendue et quelles sont les bornes que doit avoir
« son sens. »
C’est i c i , ou jamais, le cas d’appliquer celte sage
règle-, cherchons donc ce que veut dire l’article 2136
du Code N apoléon, puisque ce que paroissent dire ses
expressions, prises à la lettre, est d’une injustice évi
dente. La discussion du Conseil d’état ne nous laissera
pas long-tem ps dans l’incertitude ; nous y puiserons
l’esprit de la lo i, et nous ÿ verrons, comme dans les
. (1) Lois civiles, livre préliminaire, titre 1 " ., sections, au
préambule.
�( 13 )
discours des orateurs du G ouvernem ent, ces grandes
maximes :
« En matières civiles, la règle générale interdit la
« contrainte par corps. »
« Dans les exceptions, la loi recherche si la cause
« de la dette n'est pas telle, que le débiteur soit indigne
« de toute protection, >et s i, lorsque son immoralité
a ne l’expose pas à des poursuites criminelles, l’ordre
« social n’exige pas qu’elle, soit réprimée par la pri« vation de sa liberté , jusqu’à ce qu’il ait réparé sa
« faute en payant sa dette ( i ). »
V oilà la vraie pierre de touche. L e stellionat qui
donne lieu à la contrainte par corps, ne se rencontre
que là où il y a de l'im m oralité, de la fr a u d e , de la
su rp rise, de la part du débiteur dans la cause de la
dette. Jamais on ne doit donc le placer, là où il n’y a
eu que de l’inadvertance, ou de l’ignorance et de la
simplicité, sans mauvais dessein, et point de surprise
ni de mauvaise foi.
O r , je vous le demande, sieur Joubert, avions-nous,
vous et m o i, le moindre dessein de tromper le sieur
D em ay, lorsque, dans l’acte de 1808, nous lui con
sentîmes hypothèque de garantie, sur nos biens de Bicon
et des Brassets, sans lui déclarer qu’ils étoient déjà grevés,
le m ien, des hypothèques légales de ma femme, et les
Brassets, des hypothèques légales de votre épouse ?
rîmes-nous autre chose, en cela, que suivre le torrent
de l’exem ple? stipuler comme tout le monde stipuloit
(1) D iscours de M . le C o n seiller d’état Bigot de Préam eneu,
présentant la loi relative à la contrainte par corps.
�^ ( *4 )
alors et stipule encore aujourd’hui ? Si nous ne parlâmes pas
des hypothèques de nos femm es, fut-ce par dissimula
tion et pour donner une fausse confiance au sieur D em ay,
o u , seulement, parce que nous n’y songeâmes pas plus
que le notaire, ni le notaire pas plus que nous?
L e sieur Demay n’ignoroit pas que nous étions mariés
l’un et l’autre ; et connoissant ce fa it, ne devoit-il pas
en conclui'e que nos épouses avoient des hypothèques
légales sur nos biens ? Donc il ne fut pas trompé ; donc
il n’y eut point de stellionat dans cette négociation.
A tout prendre, quand la subtilité auroit donné une
action en stellionat au sieur D em ay, contre nous d eu x,
vous appartiendroit-il, à vous , mon com plice, de l’exercer contre m o i, pour l’indemnité que je vous dois ?
à v o u s, mon on cle, qui aviez été un dès négociateurs
de mon mariage ; qui aviez assisté au contrat et à la cé
lébration ; qui connoissiez si bien les hypothèques légales
de ma femme , que vous aviez rempli les formalités
nécessaires pour les purger sur la vente de 1807 ? contre
m o i, qui ne vous ai donné aucunes hypothèques quelcon
ques pour l’indemnité que vous réclamez aujourd’hui ?
En voilà trop pour écarter toute action de stellionat
de la part du sieur Joubert contre m o i, pour raison de
la créance de 2.6,000 fr . r e m b o u r s é e au sieur D em ay,
ou qui est au moment de l’être par la distribution du
prix de la vente du Petit-Sarliève. Il n’y a eu de ma
p a rt, ni fourberie, ni mauvaise fo i, ni fraude, ni sur
prise, soit envers le sieur D em ay, qui ne s’en est jamais
plaint, soit envers vous. Il n’y a donc pas eu de stellionat
répréhensible; car le stellionat, je ne saurois trop le répé
te r, consiste essentiellement, iniquem ent dans le dessein
de tromper.
�( i 5 )
Venons à la troisième créance, par laquelle le sieur
Joubert prétend aussi me terrasser avec l’arme du stel
lionat. ,
!1 .
Troisièm e créance.
¡,
Je revendis au sieur Joubert, par contrat du 9 juillet
1809, la principale portion ,du petit domaine de Sarliève,
que j’avois précédemment acquis de M . de Stradat. L e
prix de cette revente fut de 74,000 francs : le contrat
en porte quittance ; mais il est reconnu et justifié par
écrit que je n’en reçus pas un centime. L ’acquéreur se
le retint en payement de différentes sommes que je lui
de vois, ou pour acquitter les dettes dont je le chargeai.
Il fut convenu, par une clause expresse, que le sieur
Joubert soufïïiroit les hypothèques conservatoires des
acquéreurs des biens de mon épouse ainsi que celles
des créanciers envers lesquels il étoit tenu de me libérer;
et j’hypothéquai encore à la garantie de la vente mon
domaine de B icon, que j’ai cédé depuis à mon épouse,
par voie d’échange et remploi de ses propres aliénés,
à l’instigation du sieur Joubert lui-même, et par con
ventions arrêtées entre nous , au même instant où la
vente de Sarliève fut passée, afin de faire cesser par ce
moyen le péril d’éviction dont se sont prévalus les acqué
reurs des biens de mon épouse, pour refuser de payer
les 26,000 livres tournois en capital, dont ils x’estent dé
biteurs sur les p rix , au sieur D em ay, à qui nous avions
cédé solidairement cette créance, par l’acte du 4 janvier
1808, et de rendre ce capital et les intérêts arriérés,
libres et disponibles.
{
"w
L e sieur Joubert ne peut désavouer les conventions
�.( i 6 )
faites entre nous, au sujet de la vente que je fis à mon
épouse du bien de Bicon. L e sieur Joubert exigea cet
échange; les sieurs Simonnet et B ayle, qui furent pré
sens à la vente de Sarliève , en déposeroient s’il le falloit.
Cela résulte d’un écrit du sieur Simonnet qui avoit la
confiance du sieur Joubert.
Aujourd’h u i, le sieur Joubert se présente à la justice
comme ayant été évincé et exproprié de ce domaine,
par l’effet des poursuites de mes créanciers inscrits, et
il en conclut que je suis tenu envers lui de la restitu
tion du prix d’acquisition de ce domaine, des loyaux
coûts, de 5o,ooo francs de dommages-intérôts; mais il
'n’en imposera pas à la justice par ce détour artificieux.
S’il a été exproprié, ce n’est pas qu?il ait éprouvé la
moindre poursuite, de la part de mes créanciers inscrits,
pour l’obliger, ni à leur rapporter le prix de son ac, quisition, pour être distribué, ni à les payer ou à dé
laisser le fonds h ypoth équé, en conformité des articles
2167 , 2168 et 2169 du Code. Il n’a pas reçu une
seule sommation hypothécaire. S’il a été exp ro p rié,
ce n’est pas comme détenteur d'un immeuble hypothé
qué aux créanciers de son vendeur, c’est seulement comme
personnellement obligé envers le sieur D em ay, et sur
la poursuite de ce créancier , faute de payement des
26,000 liv. tournois qui lui avoient été cédées par l’acte
— du 4 Janvier 1808, avec promesse de fo u r n ir et fa ire
yaloir^~rnéme de payer lui-même après commande
ment. Dans cet état de choses , il est évident que le
sieur Joubert, n’ayant été ni dépossédé, ni exproprié
par action hypothécaire, du c h e f de son vendeur, il n’a
point fa c tio n en garantie et indemnité à exercer, pour
"
*-------------------------------------------raison
�( 17 )
raison de l’inexécution du contrat. La seule indemnité
à laquelle il puisse prétendre, se réduit au rembour
sement de 26,000 francs, qu’il a été ou sera contraint
de payer pour moi au sieur D em ay, comme obligé soli
daire , par l’acte de 1808, des intérêts de ce capital,
et des frais de l’expropriation qu’il a soufferte à l’oc
casion de cette créance, de laquelle je me reconnois
son garant, et qui est la même que celle que je viens
d’analiser au paragraphe précédent. L ’indemnité que je
lui dois à ce sujet ne prend pas sa source dans le contrat
de vente de 1809 ; elle la prend dans la cession du 4
janvier 1808.
Il suit de là que quand il y auroit dans la vente de
1809, quelques germes d’une action en stellionat, ce
seroit sans conséquence pour la cause, dès que je ne suis
passible d’aucune condamnation motivée sur l’inexé
cution de ce contrat, j v
""TVÎais trouve-t-on même des germes de stellionat dans
les stipulations de ce dernier contrat ? Non certes ; car
il est bien plus exempt de toute imputation de fraude
et de surprise, qu’aucun des deux actes précédens dont
je viens de justifier la pureté.
i®. Le bien de Bicon, hypothéqué à la garantie de ce
dernier acte, comme à celle des prem iers, n’a pas plus
été déclaré libre d’autres hypothèques par c e l u i - c i q u e
par ceux-là; au contraire, il fut dit qu’il étoit déjà grevé
d’inscriptions dont l’acquéreur déclara avoir connoissance.
20. 11 n’a pas gardé , comme les autres, un silence
absolu sur les hypothèques dont il étoit déjà grevé.; au
contraire, il en déclare plusieurs, pour cliargprjexpvessèment le sieur Joubert de les supporter.
�( 18 )
3°. On me reproche de ne pas les avoir déclarées toutes;
et s’il en existoit d’autres, soit conventionnelles, ni ju
diciaires, que celles que mon acquéreur devoit supporter,
les causes en avoient cessé avant l’action en stellionat du
sieur Joubert, ainsi que je peux l’établir. Mais quand
il en auroit existé quelques antres, où est la loi qui me
frapperoit de la peine du stellionat, pour ne pas les avoir
déclarées?
Je lis bien dans l’article 2059 du Code, qu’il y a stel
lionat lorsqu’on présente comme libres des biens hypo
théqués, ou qu’on déclare des hypothèques moindres que
celles dont ces biens sont chargés; mais je ne vois là rien
autre chose, si ce n’est que celui qui déclare des biens
entièrement libres est stellioncitaire, si ces biens sont
hypothéqués, et que celui qui les déclare libres de toute
hypothèque, si ce n’est de telle et de telle qu’il désigne,
est stellionat aire aussi, dans le wcas où sa déclaration se
trouve infidèle ; et pourquoi ? parce que tous deux
ont trompé. Mais je n’y vois que cela; et tout homme
sensé et de bonne foi ne pourra rien y voir de plus.
O r , qu’est-ce que tout cela a de commun avec l’état
de la question ? Quand je déclarai certaines hypothèques
dans le contrat de vente de 1809, ce ne fut pas dans
Tintérêt de Pacquéreur, ni pour obéir à aucune injonc
tion de la lo i: je les déclarai seulement dans mon intérêt
personnel, et pour obliger l’acquéreur à les souffrir, sans
pouvoir exiger que je lui en rapportasse mainlevée. Une
déclaration faite dans ce sens et pour ce but, 11e devoit
pas être générale et de toutes hypothèques, parce que
je ne prétendois pas assujétir l’acquéreur à les supporter
toutes : elle devoit jm .contraire être limitée à celles que
�( i9 )
j’entendois qu’il supportât; et c’est prendre les choses à
rebours^que de vouloir faire sortir de là une dissimu
lation frauduleuse et caractéristique du stellionat. En
déclarant certaines hypothèques ^ je n’ajoutai pas que,
soit le bien vendu, soit le bien hypothéqué, étoient
libres de toute autre hypothèque. C’est tout ce qu’il faut
savoir, pour voir disparoître jusqu’à l’ombre du stellionat.
4°. La vente de 1809 est également plus à l’abri de
censure que celles de 1807 et de 1808, relativement au
défaut de déclaration des hypothèques légales de ma
¿femme , qui frappoit le domaine de Bicon , hypothé
qué à la garantie de cette dernière vente ; car elle n’a
pas gardé un silence absolu sur ces hypothèques légales,
comme les précédentes, puisqu’elle parle des hypothèques
de garanties des acquéreurs des biens de ma fem m e,
pour obliger le sieur Joubert à les supporter.
Comment p ôu rroit-il, après cela , rester des nuages
sur la pureté de ma conduite dans toutes les négocia
tions qui ont eu lieu entre le sieur Joubert mon oncle
et m oi?
E n fin , la vente de 1809 fut suivie, le même jo u r,
d’un acte sous seing p riv é , dans lequel on voit que le
sieur Joubert n’avoit pas payé le prix de la vente, quoi
que le contrat en contînt quittance. Dans l’acte sous seing
p r iv é , le sieur Joubert s’obligea à acquitter le prix en
différentes délégations; et il fut ajouté que les titres des
créances resteroient entre les mains du sieur Jo u b ert,
j u s q u ’à rentière mainleyée^de joutes les inscriptions eq
général qui existoient sur le bien vendu.
Il fut convenu,,, à cet effet,- que j’aurois deux années
pour me libérer envers tous mes créaücfeïs;
�( 20 )
Il ne peut donc pas y avoir de stellionat, puisque le
sieur Joubert fut chargé d’acquitter une partie des ins
criptions, et que je m’obligeai de payer les autres, et
d’en rapporter mainlevée dans le délai prescrit. Il est
im possible, dans cette position, de m’accuser de réti
cence et d’infidélité. Toutes les idées du sieur Joubert
sur le stellionat, sont contraires aux principes, ou aux
actes qui lui sont personnels. Si l’une des parties pouvoit
mériter des reproches pareils, il est évident que c’est le
sieur Jo u b ert, qui dissimule tout ce qui s’est passé entre
lui et m o i, ou qui voudroit, au mépris des lois les plus
claires, les plus positives, obtenir des condamnations
contre lesquelles s’élèvent sa propre conscience et les
raisons les plus évidentes.
Je m’arrête, et j’attends sans crainte pour mon hon
neur et ma lib erté, le jugement d’un tribunal qui ne
connoît que la loi et la justice.
L E jurisconsulte ancien soussigné, croit la justification
du sieur Joseph Courby, de toute tache de stellionat,
portée jusqu'à la démonstration, dans le mémoire q u i
précède.
.
D é lib é r é à Clermont-F errand} le 26 avril 1812.
Signé E.B E R
GIER.
f
A. RIOM de l’imp. d e THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison Landriot. — Avril 1812,
�
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[Factum. Courby-Cognord, Joseph. 1812]
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stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
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An account of the resource
Titre complet : Mémoire sommaire pour Joseph Courby-Cognord, défendeur et incidemment demandeur ; contre Joseph Joubert, son oncle maternel, demandeur et incidemment défendeur. Question de stellionat.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1807-1812
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2217
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2219
BCU_Factums_G2220
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52921/BCU_Factums_G0313.pdf
1dee169b01e1a0265096222e0f03fb6f
PDF Text
Text
P R É CI S
PO U R
M ichel P O U G E T &
M ar i e- A nne
B O N N E F O U X , fa fe m m e , Appellants,
CONTRE
BarTHELEMY L A C O M B E ,
Intimé,
L Sentence du 7 M a i 1 7 6 1 , dont il
A
||4t^
eft principalement queftion, a deux,
difpofitions ; par la prem iere, Lacom be eft autorifé à fe mettre en poffe f
fion des héritages provenants de la dot
de la femm e dudit P o u g e t, jufqu’à ce qu’il foit
rem pli de fa créance.
E t par la feconde, il eft d it, fi mieux n’aime ledit
Lacom be les faire fa ifir & vendre fur placard en
l’A u d ien ce, en la maniéré ordinaire , pour fur les
deniers en provenant être ledit Lacom be payé de
fon d u , fi tant peut abonder, finon en diminution,
A
�Pouget a exécuté la premiere partie, non feu
lement en laiiTant jouir Lacom be de fes b ie n s,
mais encore en lui faifant des offres de lui payer
c.e qui lui ieroit d û , dédu&ion faite de ces jouif*
ianccs.'
Lacom be n’a pas voulu exécuter cette partie de .
la Sentence , il a pris la fécondé partie , c ’eil-à-dire,
qu’il a fait ven d re, ou pour mieux d ire , i l s ’eitfait
donner les biens defdits Pouget pour le prix qu’il
a v o u lu , tel :eft l’effet des ventes fur placard qui
fe font dans des V illa g e s ; perfonne n ’ignore la
façon dont s’y rend la juiKcc & le peu d’ordre que
fo n y garde; en prenant ce dernier p arti, il n’eft
pas douteux que Lacom be devoit fe conform er aux
Ordonnances : P ouget & fa femme iont appellants
de toute la procédure que ledit Lacom be a tenu
contr’eu x, & c’eft à ce point ieul que fe réduit
la préfente conte llation.
Lacom be, quia opté la voie de la faifie, qui eft la
plus rigoureuiè , s’eit donc fournis à fuivre les O r
donnances littéralem ent, & d’avance l’on peut af*
iurer qu’il n’en a pas rempli une feule des difpofi-\
tions eifentielles^'c-’eft ce que l’on va prouver.
•
F
A
1
V
T.
L a co m te cil créancier defdits Pouget & fa fem
me , en vertu d’un exécutoire du Parlement du- 17
M ars 1 7 6 1 , de 13 4 7 livres 1 fol 3 deniers; en
vertu de cet exécutoire il a fait faire un cornman-
�3
demerit auxdits P ouget le 6 A v ril 1 7 6 1 de lui en
payer le montant ; cet exécutoire étoit ailurement
attributif de junfdi&ion - au Parlem ent , piiiiqü’il
étoit émané de fon autorité ; mais comme cespoûrfuites qu’il auroit fallu faire en vertu de cet exécu
toire n ’auroient pas rempli fes vues iniques, il a
pris un -parti qui y étoit rconforme ; qui a été .dé
faire afligner lefdits P o u g e tJdeva.nt le .1Juge de
M ôntvalat J pour; être condarnirti Jà lui payej: les in
térêts defdites 1349 livrés 1 fol 3 deniers, voir
dire que les héritages confinés dans fa requête feroient déclarés affe&és .& hypothéqués à; ia créa li
c e , qu’ il lui fut permis de s’eiî mettre1en poiîèiTion
6c en, jouir jufq u’a ce qu’il fu t rempli de-ia'créance en principal , intérêts &c frais, ii mieux il n’aimoit faire faiiir & vendre fur fimple placard aux A u
diences des-Juges lefdits héritages, pour le p rirlu ie n
être délivré juiqu’à concurrence de fon dir: fur cette
demande il a , le 7 M a i, obtenu une Sentence par
défaut contre lefdits Pouget, par laquelle il s’e ilfa it
adjuger iesconclufions. C ette Sentence a été fignifiée
le même jour étant par défaut , Pouget avoit hui
taine pour y form er oppofition ; mais dès le 9 du
même mois Lacom be fit faire auxdits Pouget
un commandement ; le 1 du même mois il fit
faire un exploit auxdits Pouget qui contient 7 ex
ploits ; d’abord c’eft un commandement en vertu
’ dudit exécutoire & de la Sentence , ‘ ce com man
dement tendoit a faire la faiiie-exéciicion des meu
bles dudit Pouget.
A
2,
�2®. I l dit qu’il e flfo rti de la maifon pour f o n r
mer les voifins d ’ètre préfents à ladite faiiie , &
rentré dans la maifon , & après perquifition qu’il
y a fa ite , il n’a trouvé aucuns meubles exploitables.
3°. D ans le même a&e il dit q u ’il déclare auxdits P ou get qu’ il va procéder par faifie fiir pla
card fur les biens immeubles defdits P o u g e t , &
effe&ivem ent il paroît dans cet a â e qu’il a été
to u t d e fu ite fur les lieux pour faire ladite iàifie.
4.0. Il revient de ladite faifie à la maifon defdits
P o u g e t , il leur dénonce le placard qu’il dit avo ir
mis aux lieux faifis.
t
50. L eu r donne aiïïgnation à com paroir le 17
dudit m o is , au devant de la porte de l’E glife P a ro iiïia le , pour voir faire la le&urc dudit placard
qu’il affichera.
6°. Il donna aiïignation a P o u get Ôc fa femme
à comparoir dans trois jours pardevant le Juge
de M o n tv a la t, pour vo ir liquider les intérêts du
montant dudit exécutoire.
7 0. Enfin, il donne encore audit Pou get une autre
aifignation pardevant le mcme Juge à l’A udience
des criées, qui feront tenues de huitaine en huitai
ne , pour être préfentala vente & adjudication, qui
fera faite au plus haut metteur ik enchériileur,
après trois tenues.
D e forte que voilà fept a£tcs dans un même
e x p lo it, dont leldits P o u g e t n’eurent pas la moin
dre connoiiFance , tout fc faifoit par un Praticien
qui ne fortoit pas de ion manoir; l’Huiifier favoic
�Jol ’
à peine iïg n e r , toute la procédure fut confomméc ^
6c Lacombe fe fit adjuger, les biens defdits P o u cet
par le Juge de M o n tv a la t, le 28 Juillet’ 170 V ,1
pour le prix qu’il voulut, c’eft-à-dire, en deux mois.
P o u g e t & ia femme voyant Lacom be en p o t
feiïion de leurs biens, pènfoient que c étoit hypothé
cairement , conformément à la première difpofition de la Sentence'du 7 M a i 1 7 0 1 , ne rinterrôm?
pirent point (parcç que cela les libérait d ’autant,,)
jufqu’âu
A o û t 1 7 7 0 , qu’ils le firent aiïigner pardevant le même Juge de M ontvalat pour iè défifter de la jouiifance defdits héritages : Lacom
be fournit des défenfes'jcontre cette demande lé
16 A o û t 1 7 7 0 , & fe§ moyens fe reduifirent à|dire
que Pouget & fa femme devoient jiiftilicr leur dei*
mande, c’efl-dire, qu’ils devoient établir quc-La^
combe jo u iilo itd e leurs bièns il fa voit bien qu’ils
n’avoient point de copie de^ tpute.ila procédure
qu ’ilavoit faite contr’ eûx , ôt encore moins delà pi-en
tendue adjudication, qu’il n’ofoit pas faire paroître,
en connoiiïànt toute l’ erreur j mais lefdits Pou*
g e t , en ayant eu connoiilànce par d’autres voies
que par lu i, formèrent oppoficion à toutes Tes
pourfuites duditLacom be , par leur Requête du 1 0
A o û t 17705 ils reprirent leurs conclufions, & offri
rent de payer audit Lacombe ce qui fe trouverait lui
être dû par le compte* qui ferait fait. L ’on ne
rapportera pas ici une multitude de procédure qui fe
fit devant le Juge de M o n tvalat, dans laquelle
Lacom be ne vouloit pas taire paroître fon adjudi*
6
^
�catio n , ôc'fourenoir q\Vé(c’ étoit.a P o u cet à lui ju ilifîer. ; le Procuçcur dCiSupplîan t' ayant ,vü qtfe le Jùge
de ' M on tvaiat rv q u lo ^
Laccmibe
‘ioiitç n îria Sentence,/trouva
etdit, plus^i propos
cle hé point com paroître'à i’À udiciice ; ce qui fit
que le.
Septembre 17^ 0 al intervint Sentence ,
qü irdéclarc leichts P o u g ^ ^ o n re c e v a b le s ta n t en
)éur' 'demande' en défilienitnt desJf^nds' vendus
& : ad juges Kpar Sentence ikV i l Juillet 1 7 6 1 -,
qu’en l’oppofition qu’ils ;aVoient formée à ladite
adjudication ; leidits P o ijgc t ' 1i nte r j et te r en.t ‘a ppel
^ eçctiëSerjtencc a R io m
ïeïtérer.r; Iç’urt oiîrêÿ ,
çjuf furent ^refiifées par'^Lacom bc ; le 'Procureur
"dc‘JR 10m • làiiTa condamner lefdits Pougé't par
Sentence' par défaut du 30 Janvier 1 7 7 1 , dont
les^Suppliants bnt.interjetté appel cri,la C o u r par
aciç'du 11 ¡^ v n l 177,2!, .‘q ui a ¿te'fait en pârlant
aiidit lJâcom bc/qu i contient de la part dudit P oü *get dés ‘offres réelles & à deniers découverts
'a u n e Tomme de 720 livres, fau f h augm enter s’il
y échoit', à là1charge par Lacom bc de fe dcliiler
‘dés héritages dont effc queftiori ; Lacom be refufa
‘dé recevoir lefditês offres, même de iigrier; aujour
d ’hui il dénie ce refus , mais l’exploit fait foi en
Ju Îiicc julqu’aTinfcription de faux , qui n’eft point
arrivée ici.
Entrons actuellement dans l’examen de la pro
cédure imaginée par un Praticien ignorant, qui n’a
eu p^ur objet que de dépouiller leidits Pouget de
leurs biens pour en faifir ledit Lacom bc.
�_
/ '
2>o»
Lacom be avoit- deux voies qui lui étoient indi
quées par la Sentence qu’il .âyoit fait rendre pour
iè procurer ion paiement.
')
L a premieré, de fe mettre en poiIèiTion des Liens
defdit P ouget pour en jouir pignorativemént ; la
fécondé, de les faire faifir & ve n d re ; mais en
adoptant cette dern,iere il fe„ ibumettoityà remplir
toutes les formalités preferites par lés O rdonnan
ces ; les formalités en pareil cas font la. loii.des
Parties ainfi que celle des J u g es, & elles doivent
être obiervées avec la derniere rigueur ; l’on a vu
ci-deiTus que toutes les formalités;auxquelles ledit
Lacom be s eft reftreint ,1ça;éiç de faire un, feul'ade
qui en contiejit ièpt. t .. , ;
?. t . v d n n
E t celles qu’il devoit remplir-, étoient première
ment de faire les pourfuites au. Parlement d e.P aris,
parce que le titre eft émané de-cette Ç qui:
lieétoit la ieùlejqüi en pUt cbnnoître; ¡ d 1 ;J>. .. /‘ p
2.®. E n 'vertu d’un titre exécutoire, lorique l’ont
veut pailèi* à la iàifie des immeubles d’un -débitenr,
il faut lui iaire faire un commandement recôrdé
n’y en à p(j>i[nt eu, d e r fait.
-j r.2r'3).;I *•..!}
: ‘ 3°. D u commandement recofdéj'a,l.a-fait fie 'réelle [
il doit y avoir 24. heures d’intervalle ( pour doh-j
ncr au débiteur le temps de pouvoir ic libérer ) à ■
lafai’iic réelle.j
elle a été faite dans ld même jmomeht par lé: mêm^- -aûe que le pro/ces ^verbal. dé<>
carence.
1
4 0. Cette laiiie réelle' doit contenir ùn çtabHflement de Commi.iTaire , parce qu’il .faut 'dépouiller .
~°C
�■
8
le débiteur de fon bien pour le mettre ions la main
de la Juftic'e , ôc il >n’y en a point eu.
5°. Cette iaiiic réelle doit être eriregiftrée au Bu
reau du Com m iflàire aux fëifies réelles d ansles fix
m ois, à peine de nullité ; la C ou r vient de le juger au
rapport-de M M . de C h a n a t-& de Beileyre de
jDianne, &i celle-ci ne la point été du tout.
- ' °. Elle doit être enrégiftrée au Greffe de la
Juftice où l’on entend pouriùivre la faifie réelle,
parce que c ’eft cet enrégiftrement qui faifit le Ju
ge de la faifie réelle, & celle dont il eft queftion
n ’a été enrégiftrée en aucun Greffe. ‘
: “ 7 0.'N o n feulement la faiiie réelle doit être dé
noncée , mais encore tous les enrégiftements.
• 8°. L ’affiche doit indiquer le jour auquel il fera
procédé à la vente : l’aflignation donnée à P ouget
ne: défigne aucun jour.
9°. Il faut que la faifie des biens foit publiée, non
iè'ulement dans la Juftice où elle iè p ou rfu it, mais
encore dans la Juftice royale , parce que cette*pubIication»eft celle qui annonce au public la vente
des biens , & que iè bornant à la publication dans
la Ju fticefeign eu riale,cen ’eftpoint remplir le vœu
de l’O rd o n n an ce, qui veut qu’une vente de biens
iài/is foit publique.
i ô°. 11 falloit faire faire trois publications a l’E glifc & aux T rib u n au x, &: il paroît qu’il n’en a été
fait qu’une.
11°. Il falloit faire certifier ces publications par
les Juges fupéricurs chargés de cette partie
af-
6
�3o>
figner en fuite la Partie fur laquelle la faifie eit faite,
pour difcuter la iaifie
en faire prononcer la validité.
12°. Il falloir en fuite mettre un dernier pla_card & une derniere publication indicative du jour
de la venie.
A ucun es de ces formalités n’ont été obfervées
par Lacom be ; les pourfuites étoient faites en ver
tu d’un exécutoire du P arlem en t, c’étoit au P arle
ment qu’il falloit en fuivre l’exécution ; point de
commandement recordé , point détabliilèment de
C om m iiîâire ; une feule affiche dans le V illage qui
ne parle point du jour de l’adjudication ni de la ven
te ; point d’enrégiitrement en aucune Jurifdi&iou ;
point decertificat d e là validité delà procédure*.point
de placard de quarantaine ; p o in ttie délai : aucune
des formalités portées par les Ordonnances n’a été
obfervée , ainfi toute la procédure faite par Lacom
be eit donc nulle de nullité d’Ordonnance ; la
C o u r foumifè aux Ordonnances ne peut fe difpenfer de la déclarer nulle & vexatoire.
M a is, dit L aco m b e, les faifies fur placard ne font
tenues d’aucune form alité, une feule affiche fuffit :
mais où cft l’O rdonnance qui appuyé le diicours
de L aco m b e, car tous les uiages doivent avoir une
baie pour être valables ; & ce n’eit pas le fentiment
de quelque miférable Praticien qui fera une loi
contraire aux Ordonnances.
L ’on.connoît bien des ufages pour la vente des
biens de peu de valeur; mais Lacom be n’a pas plusfu ivi ceux-ci que les autres.
B
�Lorfqu’il cil queilion de la vente d’un immeu
ble de peu de valeu r, on en fait d’abord la faifie
réelle qui contient l’établiiTement de Com m iiTaire,
parce qu’il faut abfolument dépouiller la partie fai
lle pour mettre le bien fous la main de la Jufticé,
&: en fuite l’on demande l’envoi en poilèffion des
b ien s, procès verbal d’eftimation préalablement fait
judiciairem ent, l’on demande l’homologation de ce
procès verbal <Sc l’adjudication des biens pour le
prix porté au procès v e rb a l, Lacom be n’a rien fait
de femblable.
Il y a encore une autre form e qui s’emploie pour
la vente des rentes fur le R o i , les offices &c les li
citations , mais dans toutes il faut une faifie réelle,
établilTement de Com m iiTaire, quatre publications
indicatives des jours de la vente , ces dernieres
s’appellent des ventes a la barre de la C o u r , l’on
n’en connoît point d’autre. Il n’y a qu’une forte
de façon de dépouiller le propriétaire de fon héri
tage , c ’efl: de fuivre très-régulierement les formali
tés preferites par les Ordonnances ; fi l’on ne s’y
conform e p a s , tout ce que l’on fait eft n u l, &c ne
peut rien produire.
D ans cette Province l’on a établi une autre for
me de procurer au créancier ion paiem ent, c’eit
de lui donner la jouiiïànce de l’héritage jufqu’à
fin de paiement de fa créance ou jufqu’aux offres
de lui rembourfer fa créance , c ’cft celle que l’on
envifage com me vente fur placard , mais qui ne
produife qu’ une vente a tem ps, & pour en jouir
�3o7
II
précairement. Pouget & fa femme ont dès le com
mencement de la conteftation, c ’eft-a-dire, le 20
A o û t r 7 7 o offert le paiement de ce qui refteroit
dû audit Lacom be, dédu&ion faite des jouiiïances
depuis dix années qu’il jouiiïoit des héritages defdits
Pouget.
C e s offres ont été réitérées par requête du 2.2,
Février 17 7 2 -, & enfin par un exploit donné à
Lacom be du 1 1 A v ril 1 7 7 2 , a deniers découverts
d’une fbmme de 72 0 livres, que ledit Lacom be
refufa. Les offres ont été réitérées en la C o u r , &
c ’eft en cet état qu efe trouvent les Parties. L ’on obfervera en finiifant que ces biens font des biens
d otau x, qui nepouvoient être ni faifis ni vendus fur
ledit P ou get, aux termes de l’article 3 du titre 14,
de la coutume de cette P ro vin ce , qui déclare nulle
toute aliénation faite par la femme des biens do
taux pendant la durée de fon m ariage, & à plus
forte raiion loriqu’il n’eft queftion, comme dansl’eipece préfen te, que de paiement de frais d’un
procès qui cil toujours du fait & à la charge du
mari feul.
Lacom be s’eft mis en poiîeffion des héritages
de P o u g e t, & il en jouit depuis que la Sentence le
lui permettoit ; Pouget lui demande h rentrer dans
fon bien en lui payant ce qui lui reftoit d û , compeniation faite des revenus defdits héritages fur
la créance:rien n’eft: affurément plus jufte.
Lacom be foutient la Validité de fa procédure ,
fondée fur un ufage qu’il dit exifter , mais ufage
�que l’on ne trouve écrit dans aucune loi ni dans
aucun A u te u r, ufage contraire aux coutumes &
aux O rdonnances, ainfi ufage que quelques Pra
ticiens ignorants ont introduit dans leur v illa g e ,
dans lequel ils ont écrafé de malheureux payfàns
au point qu’il ne leur reftoit que des yeux pour
'pleurer leur malheureux fo rt, n ’ayant pas de quoi
aller porter leur plainte a des M agiftrats trop
élo ignés.
A ujourd’hui qu’ils ont l’avantage d’avoir la C o u r
dans le fein de leur P ro v in ce , ils font à portée de
réclamer leur droit, & de faire profcrire toutes ces
‘ vexations ; c’ eft ce que Pouget attend de la Juftice
de la C o u r , qui sûrement déclarera toute la pro
cédure faite par Lacom be nulle , vexatoire &
contraire aux Ordonnances , renverra ledit Pouget
dans la poffeflion de fes b ien s, en payan t, com m e
: il a toujours o ffe rt, ce qu’il pourra devoir audit L a
com be , compte fait des jouiffances , & condam
nera ledit Lacom be aux dommages-intérets dudit
' Pouget & en tous les dépens.
Mr. D E C H A M P F L O U R , Confeiller
‘Rapporteur.
,
J o u r d a n , Procureur.
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ^
De l’ imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du R o i, Rue S. G e n è s , près l ’ancien M arché au Bled. 1774.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pouget, Michel. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
de Champflour
Jourdan
Subject
The topic of the resource
créances
hypothèques
créances
saisie réelle
procédure de saisie
placards
usages locaux
saisie
publicité
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Michel Pouget et Marie-Anne Bonnefoux, sa femme, Appellants. Contre Barthélémy Lacombe, Intimé.
Table Godemel : Déclaration d'hypothèques 2. le créancier qui a obtenu une sentence déclarant certains héritages affectés et hypothéqués à sa créance, avec permission de s’en mettre en possession et d’en jouir jusqu’à ce qu’il fut rempli de sa créance en principal, intérêts et frais, si mieux il n’aimait les faire saisir et vendre sur simple placard, pour le prix lui en être délivré jusqu’à concurrence de son dû, optant pour cette dernière voie, est-il tenu de remplir toutes les formalités prescrites par les ordonnances, sous peine de nullité et de dommages-intérêts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1761-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0313
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chaudes-Aigues (15045)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52921/BCU_Factums_G0313.jpg
Créances
hypothèques
placards
procédure de saisie
publicité
saisie
saisie réelle
usages locaux
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52873/BCU_Factums_G0115.pdf
106364973c6e47f0e16aa526df301e97
PDF Text
Text
M
E
S
POUR
M
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G
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I
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'V I C H A R D 'L a b o u r e u r , &
•
•/•
. •
fous fon autorité G a b r i e l l e T A L O N , fa
AN
femme , Habitants de la Paroiffe de L u fig n y ,
Appellants.
CONTRE
.
Laurent
R I B I E R , Caba-
retier, Habitant de la Paroif fe de St. Bonnet ?
Intimé.
C
Ette affaire préfente deux finguliers monuments de l’injuftice humaine.
Le premier eft une procédure énorm e,
pratiquée par un Praticien avide contre
un malheureux Payfan qui doit depuis quelques
mois 287 liv. à fon voifin , qui a engendré plus
'
A
�%
de ï 'Joo liv. de frais en 23 jours , * qui auraient
été doublés dans un pareil délai v &: triplés dans
trois mois ,■s’il^ri’avoit été arrêté par ‘des. offres;
'r n - .v
■.* V
• ."
I
reçues.
-•
, >
:
.
: L e fécond efl une Sentence qui canônife cette
procédure, &Í qui en ordonne la continuation, quoi
que les ofFrcroient acceptées. 6c 1,^créance quittan
cée q u e’le.-créaiñcier ait défavoué cette vexation f
q u ’il en aitrxpreirément déchàrgé-(on!débireHr
que cette'procédure (oit d’ailleurs viciée dans fa for
me par les nullités les plus nombreufes ôç les plus
littéralement prononcées par lesioix de la matiere.
Dans le faitr, le ■
%Juin, 1769-, Jean V jch ard .,
Laboureur, & Gabrielle T a ló n , íá fcniníé, cónièntircnt une obligation de la fomme de 287 liv.
3 f. j9-d. au profit du; nommé Laurent R ib ie r,
Cabaretier.
Cette obligation avoit pour caufes dès dépenfes
faites au cabaret de R ib,ier, quelques dettes étran
gères à Vichard & à la fem m e, dont ils voulurent
bien néanmoins fe rendre perfonnellement débi
teurs , & des frais d’ Huifïicr, dus au nommé G uill e t , montant à <51 liv. & quelques f o ls , pour Iciq u e l s Vrichard 5 c fa femme s’obligèrent envers R ib ie r , tk R ibier envers l’HtiiiTier G uillet par le
même a£tc.
1 * Ri bi er fixe Uii-miîmcécs frais & cette Tomme: vide fci lettres
obtenues en Chanceller ie le 7 Février 1 7 7 0 , & fa requête du
*3 du mê me mois.
�C e t t e o b l i g a t i o n , f o u i c r i t e l e ' % J ui n , fluri tipul é e p a y a b l e le 2,4 du; m ê m e m o i s ; mais>.il f u t c o n
v e n u v e r b a l e m e n t e n t r e les P a r t i e s .qiie.ee t e r m e
t r o p p r o c h a i n ne fero.it pas r i g o u r e u x , : & q u e Ri ^
b i e r l e u r d o n n e r o i t , des facilités p o u r f e l i b é r e r , &
en effet il p a r û t
en u f e r a in ii p e n d a n t q u e l q u e s
mois:;, ¿nais t o u t à : c o u p , da ns .les premiers; jm ir s
d e N o v e m b r e , fans xnitre..avis q u \ u V com m ande -*
m e n t . r e c o r d é , Và c b ar .d
fa f e m m e ' v i r e n t m e t t x e
t o u s leurs b i e n s en faifie réelle & p r o c é d e r auxTiices«
Ces biens confident en deux domaines, l’un
appelle du Boiit & l’autre des Çhantelliers ,• finies
dans la lïaroiiTe de Lufigny , & une maiion;iituée
dansla viliede M oulins, Fauxbourg des'Gàr.ccaux.
La faiiîc réelle en fut commencée le 1 6 N o
vembre , continuée le 17 , préientée an Bureau
du Gommiilàire aux failics réelles le 18., en’régiilrée le a.o , *enrégiilréc au Greffe de la Sélié-?
chauffée le 1 1 , & ’dénoncée le 2.3,
•
;
Le 24 on procède aux affiches à Lufigny & a
Aloulins. L ’Edit des criées de 1 <55 1 preferit ces
affiches à la pçrtc de l’Eglife Paroiffiale & à celle
des maifons fàiiies , ce qui les rédùiioit' à cinq .au
plus ; on les multiplie jufqu’à 34. ; les originaux
de ces affiches ont chacun 7 4 rôles d’expédition ,
on en fait par coniéquent 34.: copies qui forment
un total de 2.5 16 rôles, qu’il a fallu tranlcrire pour
cette feule opération , dans y comprendre les 148
rôles des expéditions originales.
■
C es affiches lon t dénoncées le ¿ 5 , & il en faut
A 1
�encore copie au domicile de la Partie faific , ainfi
que de toutes les pièces antérieures. .
: Enfin quinzaine après, le 10 Décembre, on pro
cède.a la premiere criée à tfrôisxndroits, différents.,
& ces trois criées forment'réunies 14.1 rôles d ’ex
pédition^ fans y.com prendre les minutes. .
II; reftoit h. faire .quatre criées ou liibhailations
q u i, à.24. l rôles chacune., devoient.encore formei*
un total deiçô^ rôles.¡d’expédition , non compris
les minutes: originales de ces pieces.
. Enfin ces cinq criées devoient êire fuivies de la
copie du t o u t , depuis & ; compris .le commande
ment recordé julqu’k la cinquième criée inclufivem enc, & Vichard le feroit encore vu accablé par
un nouveâu.volume d’environ quatre à cinq cents
rôles de minute.
:
- T elle ctoit la marche-de cette monftrucufe pro
cédure, ourdie & machinée dans.la pouifierc de l’é
tude d’un Praticien avid e, qui comptoit déjà par
les doigts combien valoient les deux domaines &
la maifon de Vichard , & combien il falloit faire
de frais pour s’en rendre acquéreur par Ion exécu
toire , lorlquc l’infortuné Vichard , revenu de là
iùrprifeque lui avoient d’abordcaulé cés effrayan
tes pouriuites, fc hâta d’en arrêter le cours.
. r11 chercha précipitamment les 187. liv. 3 fols 9deniers qui femblôient être le.prétèxte de ces vexa
tions , & fe lesjétant prôcurés:v .il fit faicè un acte,
inftrumcntairc à llib ier le 18 D écem bre, par 1er
quel il lu i’ fit des offres réelles de cette lomme
�principale de 18 7 .livres. 3 fols 9 deniers pour ¡le.
montant de l’obligation.,(&L<de celte de 12, [liv.■
;\6
iüls 3 deniers-, iâufà. parfaire 011.recouvreiY>poiir:;
l'es frais, autres néanmoins que ceux'deJàfajii'e réel
le, 6c de toute la procédure qui s’en,étoitenfuiviç, •
contre laquelle .il protefta d efe.p ou rvoir par les,
voies dd d ro it, xonim e étant nulle ^-précipitée &:
vexatoire. . -v;
c-mo o'ia.l
.» *
R ibier accepta les ;offres & fitiuncj réponfe àr.
cet a£te initrumentaire ,.qu’il eft eiîen.tiel; de tr a n s
crire dans fon entier , parce i que c’eft là le liegc:
principal du procès] ô . J 'ir , e.r¡î.:-îu , J
- n Lequeldit.Ribier a/aifcrcporife<j qu’ilé ilp r c t
». de recevoir.ladite ilonime ¡d&
vr.es 3 io ls » 9 deniers cnoncée en ladite obligation, laquelle
» il ne peut remettre quanDiii préfent^, attendu
' »•.. qu’il l’a remife entre! lek mains!:de;M^.:;;E/lopÿ^
n D efvigncts, Procureur,ipourfaird
n fuites ordinaires 'audit' Viahard & ¡{k fenime ; '
» que quoiqu’il foit vrai.que ledit’M e. Defvignets .
» ait procédé ou fait procéder, aj.nli^qu’il 3 ap^ris^
». par la voie .extraordinaire , Len: faiiÀnttjla Jàiiiçj
» réelle desrfonds dudit,.Vichnrd^ÔCj ià fe.ii/mc:) il ;
v déclare que jamais il ne luiaidomté auçuh ordre, ;
» qu’en conléquence il le déjav'oue- 'dans ladite
» pou yfuite de faijie■
■
réelle■
: que, quant .aux, a$es .
» de 'com m andem ent, laifie mob.iliaireck, au.tr.es \
» procès verbaux' , ioit dc-.-rebellion ou de.diicù(■
n fion, portant carence de meubles, s’il y enadefaits
». contre ledit Vichard ¿k fa fem m e, il entend êire
�(V
»vJpayé'-ckP montrant des frais d ’iceux ,/ fu iv a n tla '
«OûxÉilqvÜ! cti) fera. f i i lz \ xdrrmTe-irais /ordinaires
7J * f<£ ü L C %,* ^ -41
v tut
in.y
n L i. VJ ;
», w tix ' qui 1<mmfuïvi& ? " il en ■
déchhrgc ■
ledit *V i y>- àhitrd &foife.mmé T attendu qu’il n’a donné.au*-?
îv<4tiln *ofd-t>8 ;ni -poirvoir~à. P.rocureuri jii..■
H.uiilïer.
» pour faire cette pourfuite , & a reçu ladite,fom^r
niéide'a8'ÿaliirùs-j~ fo ls 9 idemersy<dosit quiti-r\tance^ quant à ladite: fomme de 12 liv. i 6 fols.
»>-'<3'deniers ^a déc|4ré'-ne jVpuloir la;recevoir fous >
}■
> les proteilations par lui ci-devaiit faites. » . v ’
; E t RifôVcr a f»gf>é 'fë i r ép o n fe ^ a n t fur l’originail!'q^e''i<iFila':ccipief.-de. cc;'proc<is' verbal qui cil <
produite au proçbs.
'
• En conféquence de cette acceptation , de la dé-chargé kl61R ibler ^,’& de ktiréferve par luiihiitepôur leS' frais-de pourfuites mobiliâires^ les Huif-:?
iiers^ont! frètire les 'i n . liv j..i6. fols ^ dent auxoffres Bc'pàyer lè'm ontant .de:ces. frais auifi-tôt"
après; la taxe', 'àüaüpren'iierc rpquifition.de R ibier •
& lors Jde 4 a-reitiiib-de l’obligation y.<!k ils o n t. fait-*
poiji*-1VichâVd & 'ia.fôhinie.Jtoiitcs réfer.ves &>■
prôt'cilatioiW^ & tnôtamnient de Je poutxoirpdur
ja ire ordonner la radiation de la JaiJie réelle
A V ï d û m e n t faite Jur- leurs- immeubles., & de •
répéter- toutes 'pertes ^ frais, déjiens^ dommages, :
intérêts Contre ’quiIcjl' airtfi ■qh\Lappartiendra. : •:
» Et aVons du tout fait & rédige, le preient
» proviès'verbal ledit jour ôc an en prêjhicc dud.
�» R ibier, auquel parlant à fa perfonnc nous avons
. délivré Qopic .du p réicn t..»
,
, ¡}
3 ' C;et .a&e:, le plus authentique qiii fut-, jamais,,
k , R1us à _l’abri* de . la iulpicion , puisqu’il cil fait
en préjènce de R i b i e r 6c ligné de lui tant fur
l’original que iur la copie, mettoic à. découvert
toute la,manœuvre dont Y ich ard croit y iftitae ;
R ib ie r, icrçanciçr.de'robligfitiori d e -2.87; }iy.de-*
iiroic jêtre payé., & cela etqiç .juiie , .mais, il çtoiç
bien éloigne de vouloir .ruiner fon débiteur, de
lui faire, fans intérêt perfoniiel, pour 1,500 liv. de
fraisait 0.3 joùçs7j c x to itià jl’pWjvragç de- l’argent
praticien,'ci ,qui ilî(avpit.eu,la foibleilè çl'e çonfieç
ion titre; •q,ui-çh^çhoicune proie.Trj& qui voyant
dans Vichard un malheureux’ payiàn iàns défenfe,
cr.oypir ppuvoir impunément ab.uier des fo rc e s
juridiques' pour'lq'.dépquiller de toute -ià .lortune.
t , Ce pr,qcès verbal tut pour .lui un, .coup, tle;four
d re , il appella R ibier, lui reprochaJbn. défaveu,
le menaça 6i faillit même en venir aux voies de
lait pour l’en punir, Ic Cabarecier fut d’abord in~
ilexi.ble, &• dan$ les premiers .monients il réitéra
cent fois cç .déiàvcu dans. les •places. publiques
ik ailleurs, en, préfcnce -d’une toule d’honnétes
gen s, qui feroient.tous en état d’attefter ce fair,
ii la preuve'ppijyoit en ctrç ‘ortjonpée. *
M ais bientpç il devint plus com plaifant, <Sc
* I / A p p e l l a n t a offert la
preuve dé c e fait e n caufe prin
77°*
e i p a l c par les écritures du ^ Mars i
�J
$6G
•
■
'
8
à* l’abri Tans doute d’une excellente contre-lettre,
dont le Praticien Compromis eut foin de le nlunîr ;,p dur le Satisfaire, on" le ‘ vit! prefqu’anÎfi-tôt
prêter foriinbrii -à:i un'langage tdui'contraire, &
lbuteriir avec chaleur cétte même procédure qu’il
venoit de défaÿouer. < ’
:
'" Les faits qui ont accompagné cette variation
fubite vont paroître bien fmguliers,' ils font mê
me inexplicables ; : V ichard du moins né fc per
mettra pas de les expliquer, il' en laifle le loin
à fes lecteurs.
Lbrfque Vichàrd fit des offres réelles à R ib ie r,
il avoir déjà formé dppbiitiçm1à la iaifiè réelU
à fin d’annulier ; il fe pourvut donct contre cette
faifie réelle fous un double point de v u e , ôc il en
demanda la radiation, foit comme nulle , foit en
conféquence de la décharge générale' qui lui en avoit
été donnée par R ibier par le procès verbal du
18 Décembre.
Cette demande fut formée à R ibier par ex
ploit du 2.8-du même m ois, & cet* exploit étoit
accompagné d’une nouvelle copie du procès ver
bal d’offres du 18. R ibier avoit eu deja bien du
temps pour méditer fur ce procès verbal & pour
en ientir les confcquences ; il ne lui étoit pas venu
en idée alors d’imaginer que tout ce qu’il con*
tenoit étoit l’effet de lafu rp rife, que les Huifïiers
l’avoient trompé , & qu’il avoit ligne fans favoir
ligner ; lorfqu’on lui remit de nouveau ce procès
verbal fous les yeux, il garda encore le plus pro-
�i r"
9
vforid‘ filence 'fur cette prétendue Îlirprife, fur :fqn
ignorance dâns l’àrt d’écrire 8c fur Pabus quelles
'H uifliers avôient tait déTæ main.rli~ ?S
'■
R ib ie r fit*plus, il défendit par ûrieires-longue
requête, fignifiée le 27 Janvier, à la demande en
' radiation’ de la iaifie réelle qui étoit'principale~ment farid'ée fù r ce-probes verbal 'd’offres’ & i qui
-e n é to it accc/mpagnée, & il fe contenta' de difc
*cuter tres-arriplement les- difierentës nullités oppofées par .Vichard contre la faifie réelle,'fans
faire la plus légère mention ’dé^cette pîece1èlïïh" ‘-tielle ,:;rti :désJmotifs quli} p ouvait avoir pbûr la
-‘■ïêtulèiO0 ' ;,‘fn
■
* 1{: 37 ^ i-’ lu- 'J 1 ^ " ?
: C e ne fut q u e le 13; Février Tuivarit que Ton
vit éclore fubitement une procuration donnée par
R ibier:, pôrtàntpoiivoir au Procureur fondé, dont
^le nom êil"eivblàncL de iaifir réellement & faire
■
;,vêndrerpar décret les'1domaines du Bout & des
Chanteiliers , & 'la maifon fi tu ce en la V ille de
M oulins, appartenants à Vichard & fa femme, le
tout pour Te procurer le paiement de la modique
Tomme de 2-87 liv.1portée en l’obligation du 2,
Juin précédent.
’
i
Cette procuration efl datée du 7 N o vem b re,
elle' eftpàr conféquenr antérieure à la iàifié réelle,
& par une prévoyancd finguliere que l’on ne peut
s’cmpccher d ’adm irerV’on a foin de ftipuler que
R ibier a déclaré ne fa voir Jigner, comme ii l’on
avoit voulu écarter d’avance les indti&ions que
■
' l’on pourroit "tirer d e:*la, fignatüre ' qu’il devoit
B
•
j
>
*
r
f
y
’
•
�j >6$
io
donner un mois après, en acceptant les offres de
fon débiteur & en défavouant la faifie réelle.
Cette premiere procuration a été accompagnée
d’une fécondé en date du 1 7 Janvier, par laquelle
R ib ier paroît donner pouvoir à M e. E ftopy
D efvignets de continuer d’occuper pour lui dans
la pourfuite de la faifie réelle, & fur la deman
de en radiation & en nullité de V ichard & fa
fem m e, & fur-tout d’oppofer tous les moyens
qu’il croira convenables contre le procès verbal
. d ’offres du 18 Décembre.
C et aStc ie termine par faire déclarer à R ibier
qu’il ne fait ni lire ni écrire, mais qu’il forme
lèulement quelques lettres, & que dans beaucoup
d’a&es qu’il a pailes, dans les uns il a préféré
de former ces lettres
dans d’autres il a pré
féré de déclarer ne favoir figner ; 6c que s’il a for
mé des lettres dans le procès verbal du 18 D é
cembre , c’efl: parce que les Huiifiers lui mirent
de großes lettres devant les yeux formant fo n nom.
E t à l’inftant, par,une maladreife fans exem ple,,
qui dévoile toute la manœuvre & qui contrédit
la prétendue im péritie, il dit qu’il va tacher d ’i
miter ces prétendues groifes lettres que lui ont
montre les Huiifiers pour en former fon nom , &C
en effet dans le meme ,inilant fa mémoire lui four
nit fidellcmcnt l’image de ces lettres que lui ont
préfentées les Huiifiers fix femaincs auparavant,
& il (igné fon nom au bas de cette procuration
avec des cara&crcs parfaitement reflemblants à
�11
ceux qu’il avoit tracés le 18 Décembre au bas de
l’original & de la copie du procès verbal d’offres.
Q u o i! R ibier ne lait pas figner, '& i l figne au1
bas de cettè procuration !
•
Il a fignédàns beaucoup d’autres ailes fans avoir
de maîtres , fans qu’on lui ait montré de groîles
lettres pour les im iter;. & il n’a pu ligner le 18
Décembre l’original & la copie de ce procès ver
bal qu ’à l’aide de ces groilès lettres mifes ious
fes yeux.
Il n’ a vu ces groilès lettres qu’un inftant le 18
Décembre , & ‘il les imite parfaitement à ‘l’aide d e :
fa mémoire le 1 7 Janvier.
Q u e d’inconféquences ! que d’abfurdités ! ce
pendant à l’aide de ces abfurdités & de quelques
autres , telles que la prétendue lézion qu’éprouvoit .Tardent A uteur de la iaiiie réelle, en ce qu’ il
perdoit'le fruit de 2,3 jours de vexation qu’il éva-lue à plus de i j o o liv. Il s’eft pourvu en la. Chan
cellerie du Palais à Paris le 27 Février 1770 , où
il a obtenu des lettres de reicilion contre le défaveu
& la décharge fouferite par Ribier dan$ le procès
verbal d’offres du 18 Décembre.
O n obtient tout en Chancellerie, & ces lettres
étoient fans coniéquence , cependant elles ont fait
impreiïion aux premiers Ju ges, ils ont cru y. voir
l’empreinte de la volonté fou veraine, 6c ils le ionc
docilement conformés à leur contexte, qu ils ont
pris pour bafe de leur déciiion)#qui eft conçue en
ces ternies :
B %
�» D ifo n s, fans nous/arrêter aux moyens de nul
lités propofées. par ledit Vicharcl & Gabrielle
T a lo n , :fa/femme, dans lefqiiel^ nous les décla
rons mal fondés, les déboutons d’içeux.,, & fai-,
iànt droit fur les c o n c lu o n s prifes par ledit R i
b ier, -ayant égard, aux lettres de refcijion par lui
■obtenues le y Février ly y o , nous ayons icellesentérinées ,, féquémment avons remis-les Par
ties au m ê ^ ç ;& fernblablcj état qu’elles étoient
avant le procès verbal d’offres du 18 Décembre
176 9 j relativement aux déclarations portées
;audit a&e fous, le nom dudit l,lib iç r, delquelles
nous l’avons déchargé ; ordonnons ;qne j<^.fufdit;
•procès;'verbal'’ d’offres au.rai,feulement ibji effet
quant aux fommes de 287 liv*. 2 f 9 d. d’une,
p art, 6c.de celle de i x liv. 16T. ^.d. d’autre,
i icelles reçues par le^it R ib ier :
fans: npus^/r-,,
: rèter auxd. offres portées an fuient procès vçrbalr
lefquelles; nous avons; déclarées. infuffcfantps ,
comme ;nc remplifïànt pas toutes les créances
dudit R ibier fans avoir,égard à .l’oppofuion,
. formée par ledit; Vichard & l^. femnyej, ;,de faquelle nous les avons d é b o u té ,.periimtpns^aud.
Ribier de commuer f i s pouijîiites : condamnons
ledit V id ia rd '& fa femme aux dépens ,* 6c au
-. coût &: levée de nptre ipréfente Sentence., .qui
j fera exécutée^par proviiîon aux charges,de J’O rt donnance.
i
:r / ;
: .j : - ,
• C e tte Sentence a été rendue le 4. A o û t 1 7 7 1 ,
expédiée précipitam m ent le mêm e j o u r , fig n ifiée'
�i 3,
à Procureur le <$, & à domicile Je 6 , avec com
mandement d’y fatisfaire.
a‘ Ce commandement n’eil: pas la pie£‘e la moins
curîeufe de cette affaire,' en voicî. l(b termes :
r
" » E t en vertu de ladite Sent'étice', j’afàuclit V i» chardÔc a ladite T a lo n , fa femriiè , audit domir
« cile, & parlant comme devant, fait comman» demént de par le'R o i & de Juftice' de fatidfai--» ' r é ' .payer'entre.le? niaiks 'de Me.'EJlopy] JQèf;’
» vipficts\^ ro cü rèu r es! J'ui‘iidi£tiôns Hé M ou linsv*^
I
• t
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I
p t
p 1
L
I
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» le réftant des créances q u ils d oiven t audit L a u - ’
« ,rent K il^ ier5 en rem bleie? dépens adjugés par là
»' S e n te n ce -¿ü d itjo îié*4 du préfentr h fo is , ç o ilt ,&t
n ' levée lde ïa m è m e ‘ b en te ri? c.''coûïÜie ’le ttiiit ayant 1
» a quoi de' iàtisfaire ledit Vichàrd! & fàv rcmme
Jairç pre
» prix èn "vràvenafn êtie 'Vfiféyéntre. Us mdins a
. T| f • I #; /| iJ'ïl
% HjJ hj. I . i 'i . VI. =/ 1J . !.i
: •' 1.
n M e. h lîo p u Udfvignets. ». . , ,
. *
. , ,
i1
Ï-Sfl-Sj M<?/Eft®yi3ervign¥ti ;cjifî^
eii1partie' au procès f îè W<fm2‘do rlitlièV 'elï' “¿rfjt&Vè *
de l^ÿplpÎV ¿‘màis-ï’ïl m \ ^ C
y m :& W e !:E P p y \
DePyigncis . s’i l ’ éfl >da quelque,/c h d fc , c Ît à M e . 1
E iîo V v "ü éfviàficis’^f côw VjSP
Vp
D cfvicn cts, y o u ï'lé prix '■m brminam ’étr'e-*vcrfP
j
P
. M ijî : 1 c- f: >. .-i, V ' . ; i .
.
dansJcs mains.
�Q uoi q in l en f o i t , Vichard & fa femme n’avoient garde dç fatis/aire M e .E ilo p y , on lçs fommoit de.,payer*Îa ¡créance due à k ib iè r , & cette
créance ne fubfiftpit plus ; la Sentence conftate
qu’elle étoitacquittée : fi o n :les fommoit de payer
des frais., il n’y en avoit point de liquidés , & le
paiement en étoit im poilible : a in fi, d’un côté on
exigeoit d’eux un paiement abfolument impoifible,
& de l’autre on proteftoit à défaut de ce paiement
dç cqntinuer fans retard la ïàifie réelle , &: de faire
v.endre tous les biens faifis; 6c en effet, des le 9
A o û t M e . Eftopy fe difpofo.it h. faire la féconde
criée, qui ^uroit encore fait dans un feul jour ü n ?
objet; de 14.1 rôles Tans les minutes originales ^
lorfque Vichard & fa femme arrêtèrent fes projets
par un appel qu’ils inteqetterent le 8 A o û t, veille
de ce ^Dimanche deftiné à la fecoride criée ,' duNà
renou^eller la premiere.
• V ich ard <Sc fa femme refpirent depuis ce mo
ment a l’ombre de cet appel &c de l’autorité de
la C ou r qui cil devenue l’arbitre ,de leur fort ; ils
li^bitçnt aujourd’hui fans crainte dans leurs foyefs; '
ils onÇjdeu.x fqis,depuis moiilbnnc tranquillement
les champs que. leur ont tranfmis leurs a ïe u x , & '
ils les cultivent journellement avec des mains îabprieufes &. pures^dans.cette ferme confiance que j
leur-jrifpire l(équité Çipxéme de la C ou r aüguftc.
qui entend leurs plaintes, qu’ils les cultivent pour •
eux mêmes .& non pour engraiiîèr de leurs dé
pouilles un Praticien avid e, qui a jetté un dévolu
�M
. iur leurs deux domaines ôc leur maifon , {mi exige
avec une hardieiîè ciniquei ¿jue le prix en J oirvcije
tout entier dansfe s mains ,
qiii ne craint pas de
protéfter dans un a&e authentiqbe qu’il ne veut
quitter prifè que lorfqu’il aura épuiie leur fubftanc e , &: dévoré toute leur fortune.1 x
N o n mijfura cutem n iji plena cruoris hirudo.
:
M O Y E N S .
■
>
L a Sentence dont efl appel a fait à Vichard ôc
ïà femme la double injuftice d’admettre les let
tres de refeifion obtenues par le Praticien E flopy,
fous le nom de R ibier ,, contre le déiàveu & la
'décharge de la faille réelle contenus au procès ver
bal du 1 8 Décembre,, ôçderejetter tous lés moyens
de iiuliité qu’ils oppofoient contre cette procédure.
Cette double injuftice p'réfente deüxrpoirûs de
• vue , fous lefquels il devient néceiîàire de difeuter
le mal jugé de cette Sentence, l’un principal ôc
* Tàutré fubiidiaire.
i
^ .
:I~ f Ilsdém ontreront en premier lieu'queladécharge
' contenuè au procès verbâl du 18 Décembre devoit feule déterminer la décifion des premiers Jug e s , parce qu’il efl de maxime qu’un créancier qui
reçoit,le montant de fa c r é a n c e , q u i décharge
Ton débiteur de telle ou telle pourfuite
le
libéré iàns retour , ce qui devenoit d’autant plus
rigoureux dans la thefe particulière, qu‘’il s a g ii1
foit d’une pourfuite odieufe 6c la plus vexatoire
�•: ■
a ~ ■r *>
'^r'^
•"i l) y ■ ■' ' il '
t ¿ o n d e s T ribu nau ^ e^ iT eat jam ais fpurrii iVxem jrfe.
j,. S u b fîd ia ire n ten t, 'én.m ettanta fe c a rt ce prem ier
m o y e n , ilsecaturoVent: que les nùllites-ians n om bre
qu i v ic p ie n t Jà faifie,. réelle nè pérm êttoien t pas
de la c o n f i r m e r : ,& d ’én ord on n er la con tinuation.
i.::»; ; / , L j ;• , 7 . .
' j . f r >7^. Ç i\VA p R i n r C I P A L . .
.5mT/j u,t
.
• .
A rrêtons-nouç'iurini^ nt à-l’époque du 18 Dé
cembre , jour des offres réelles faites par les A p - '-pellants'àR ibier.. v rif.
;r.. _ t
.... Ils lui roffrent.ïe pHtocmal ;cÎe"ià creançe¿qui-pft
de 2:87.liy - 3 | f _9-fl,'|^^ilfr:a1çcçp,te- 1
’•
Ils lui offrent i i . l i v . i,Ô £ 3 d.tpoùrles frais 3 e
.. .difcuifion
mobiliaire
„.il confent de., lès ;recevoir
. < . . " i l *.
.i. j ■
: I ./ , • w i.t . i ... .
•,
. ,après la taxe, JC * .. ,ji .y ,
;
(,• , . • :
, ¡ Ils fç plaignent de la faille réelle ôc-des prôcé. f dures monftrueuies^qui l’ont,fuiviç : il annoncé à
fes débiteurs qu’ il connoît ces pôurfiiitcs, qu’il a
été inftruit ppr la voie publique qu’elles ont été
faites par M e. D cfvig n ets, mai? que c’cft contre
ion intention , qu’il les défav.oW ,. 6c qu’il les en
décharge expreiiém ent, 6c il ligne cette décharge
fur l’original 6c fur la copie du prbcès-verbal.
En conféquence deqette décharge, de cette main
levée authentique de .la faifie réelle, les A p p el
lants en demandant la radiation, 6c il cil évident
qu’avec ceta & c à la main cette radiation ne pouvoit :pas leur, être refufee , fpuiiqu il contenoit la
quittance, de ,1a crcan<ie,' 6c. la n.ain-leyée ou la
décharge dé laiàiiie réelle de la part du créancier.
Si
�.
T7
Si dôhc.rdânsTefpece cette radiation a été.rejet
t e partles prèm iers J u g e s , ce n’a fp u ,être q u e 'p a r
l ’effet des Içttfes de refcifïon* obwiHieiiXbys-le rtom
de R ib ie r ,r g u i o n t ¡été entérinées p a t la §énten;çe
d'ont eft appel.
. 5 '
•' \ j ^ ~ ,-'f ... •
- A in fi toute I9. queflion fe réduit à favoir f i j ’a&e
4 u> i;8 'Deçem bre étoirTuicèptib!^ d-e/jxfciiipn
il les lettr.es onç été obtenuesTur'dep ^motifs- lé
gitimés. .i3 ; .r7:,;
*.” • j.o:i ^
• Remittendbus acliones fu a s aandus non ejl regrejjiis ; c ’eft un principe -tiré des-JLoj* romaines,
au -digeffce■
_de ■œàilitio edîcl'p. E t ;cç}principe i,, qui
n’efl.que l’expreifionidu bon fens.,(pàrq£ç iifnaltui
rel * qu’il fèrnbloit préiqu’miitile déj ririférer dLans
les L o ix poiîtives.
'
(
A ,!v ,
\
^
Jle/niuentibus açlionesïfiids. : çet,aâc d.u j 8 JDé^
cembrc cil une décharge authentique-de Ja iaifie
réelle; donnéej.par. û n c r é ariçier'à. fon.-.débitai r ,
le départ, le défi île ment d’une a£Hon, & d \irifi:ac?
tion défavorable , odieufepar elle-même , & plus
odieufe encore dans la .circonftance -particulière
que dans toute autre par la modicité-de Ton obj’er,,
par la précipitation avec laquelle elle a étéjourd.ie-,
par les procédures fruftratoires dont elle a été fiir-i
chargée , & parla ruine totale du débiteur qui en
étoit la fuite in é v ita b le ,■& q u e ;R ib ie rjn ’auroit puf
cauier fans, remords/
a
i ^
N o n dandus ejl rcgrejjiis. R ib ie r en donnant:
cette d éch arge, ce d éiift'em en t, s’eft donc exclu
to u t r e t o u r , toute efpece de reilitution<.contre la
C
�\S]
j'uiltce où la grâce qu’il faifoic-H "foh débiteur.
i; E t cètfc riiàKïnie'tfe trouve ¿oiïfacréê £>âi* Uh A r
rêt-du x<b M ars
13 ',:ic:icépar-'Baiîlt;r tôme pre-4
iriierV livré Ify 'tiW e '^ ë llà p ié r e ^ -, par'-lequei ürt
Appellant qui s’écoit déiiilé de ion appel, &? a'voie
enfuite obtenu des lettres royaux contre Ton défi fte nïè n t",'J fdt^dcôla ré- ~non:-pece Vâblc"Jd ans iW de-1
n àriâe M n - ^ ’êriterinc'nîéhc dbcês lettrées; i
M ais ce n’eft pas feulement parce que c’eft'ici
une déchargé, un départ, une remife d’adion que
llib ier^ o u le Praticien qui,agit1fous ion-nom , n’à
pas' dti ôtre ‘âjdmis à la rcfctlion ; cétte'-faveur dâ
lâ'Jlor,1 qiie^jDn^fte oorinoiilbit chez les RqmainS
qûè--» io n s;1<2 :titr6'd e bcn'fjficiünis pom hnnoncei?
que c’étoit une grâce, un bienfait contraire au droit
comrriüri ,*n-â-pà$»'éfc- introduite polir toutes fortes
dc:rriatkrÎ 5s.-î-,p;Ji:';i:i•,j< • , ; L:l■
, •••••’ ■1 ■'''
f rNôiï'iLifu)* tejlitiitiôi. .odiofa ,; dit l’ Auteuridti
traité dû l à rfcftiuuion-én‘ emicr ^ pagè 9 0 1., re
lativement iautfi prcfùriptions,
ailleurs , page
899 ^- o n y '4 'it'icncore cette;'prjécïcuic maxime ,’
r/ftiéiïi&l'etïaihvninonbus nqn.dam n.ad id 'quod
potuU 'î n ■
odiiïhi ¿¡venus ^uhm in'w ùliïam x-.tjus
tmdit. ' i!'J
1 '■ r
Ces maximes; femblent avoir été créées pour
le ois particulier qui ^nonç-diviic : 'la-faiiie réeüo
qui eil une dépofleflion f orcée y -qui- entraîne la
ruine' irifailUblc duliaiii', qui perd le débiteur fans
enrichir le Créancier, potiàs 111 odiuin airerius quàm
in utilitatcni ajus. raidit: c ’ cft dans to\ite. Ténergic
�S>>
¿ 9.
du term Q^r&flitutrç o d i o j a p rév u e ,p a r . cet 'A u
teur , ^ou plutôt«,c’çftji^né seilkùtiùiUn^lle.foi^jpJtfs
pdieufe>que[
e ffe & s fe p ^ ig
Çriptiary p o u r laquelle, iI ^ q v,oque;}CjCCte
ôc la !p oie enr principe.;., •>vjrr:nr: zo sjjo vnîrrom
. V e u t-o n au furplu^ Tuppofer pour 'un» inftant
que* la refciiioi^ foie ad m ijjiblç : c e n tre Gun. défilïc^
m ent quelconquq
c o n tre u n d^fiilçm ent, cl-une
faifie réelle Ja p iusrodieufe qui fu t mmais,, :il, .faut
d u moins avoir des m o tifs, ~oc d esm otifs.bien pujd-.
fants fans doute pour anéantir un.^a&e fait par un,
m a jeu r, deux fois; fignç p^n|ùi-njem e
parjdçyift
O flicie rs pub.liçs, qui en. a u g m ç ^ ^ i ^ aut^ epuçit^
O r , dc-.tous l
e
s
|
ccttKS
de refciiion’, obtenueis lous le n om d c tK ib ic rj il
iVv en a pas Un feu l;q u i:n e. fo it.u n p fauflete dé--,
* J
, f
m- r • • ot 'i * i' *^1 ~'1- - ri • ;W-^rîx
montrée, dans le. tau , .p^^aansjj^drpip.
du principe, k p lo t errçn £ ' g , P '
’ y i ’w o i
L e prem ier de -cesrnVqtys. conulte/ii .prutçn^fpv
que llib ie r ne fait ni lire, ni é crire , & q u e lle s
H u iiliers ont furpris fa^fignature cri l u ^ p n t p n t
de groiTes lettres qu’ils lu f o n t£ a itf.im ite iL lMnrr
/j ■
1
- .1 , 1 1. j
. ‘î ji - \ t-- *jri«
U n p o u rro it le c o n t e n t e r ^ r^ Q tfd re a cei^abfurdes im putations que la iignatùr.e dp;ftibi,çr étoix
fo rt peu néceflàire dans ce proebs verb al, que cellq
des, H u iiïic rs corçilatoit jufqu’à-l’inicriinion.de fau^x
. .i’ i : r - .1 '-i .* tjill.t/
- -i Iht UiM
l authenticite des faits qui .y £toient con ten u s.,,« :
; •( * ,
•'KW/r
V/î «sO.'Jj:».* ' i*1 v ' J *
que quand deux O fficiers s accorden t ppyr et/e
I î I
- ■ i,
i I !;() . r>., }J I v,r
fau ffa ircs, ce n eil pas rpour faire yn faux în im le,
6 c fans lequel leur a£Ve peut produire Ton .effet. .
C i"
�io
' 1 M ais quelqüe décifive que ioit cette réponiè
elle eft trop générale ,- ôc les Appellants ne ieroient
pas :íatisfálts.,‘; s’ils n’avoient dàns les circon£
tancés particulières de cette affaire la preuve dé
montrée que ce premier m otif des Lettres’ de refcifion e iM ’impoiKire la plus groiïiere qu’un plai
deur aux abdis'ait jamais pu le permettre.
•^Ribierj* dit-on , ne fait ni lire ni écrire, &c il
á figiré ; dans ftoiis; les aéleS qu’il (a paifé dans ia
vie'^' îr JJon n’en excepte cette fameufe procuration
du 7 Novem bre , qui a paru pour fa premiere
fois- le i 3 Février , dans laquelle , par une précaütiôn qt/i tient un peu trop de l’efprit prophé
tique, on lui fait déclarer qu’il ne fait figner.
T Ribier ne favo.it pas figner le 7 N o vem b re,
mais il figne le 2 7 Janvier fuivant, & il déclare
liü-même fclans1fa fécónde procuration datée de ce
jour 27 Janvier qu’il a figné dans. une foule d’autrçs aáes ; s’il a. ligné tant !de fois , il favoit donc
figner ? s’il fivoit ligner, il eft donc un impoileur ?
I l ajoute que J é s H utfficrs le furp iiren t en lui
m ontrant dô g folies lettres qui fôrm oiént io n nom /
qu’ils lui, firent imitó*. ,
•!
M ais fi le i'S Décem bre il n’a pu figner qu’a
l’aide de ces'grofles,lettres qu’on lui montroit ÔC
qu’on' lui fàifdit imiter , comment a-t-il pu ligner'
dans7tant ifautres^a&es b íi’pcrfónñe né fiïi traçoit1
de grottes lettres
ou il fignoitJfans maître'?
n’eft-ce pas la'le'co m b le de l’impofture Ôc de la
m»'il-adreile}
•
■
•
�ir
C e n’eft pas tout encore : s’il etoit vrai que cet
hom m e, qui avoit figné tant de fois fans maître ôc
fa,ns qu’on lui eût montré de groflès lettres à imiter,'
n’eut 'pu figner le 18 Décembre qu’à l aide de cette
imitation, comment feroit-il polfible que le 27 Jan
vier il eût p u , ie u l, & après une premiere leçon
d ’un inftant, donnée fix fèmaines auparavant, tra
cer les mêmes lettres de la même maniéré dans la
même foVme & dans le même ordre ? ;
'
Il n’y a point d’homme, quelqu’exerce qu’il /bit,
quelque fure que foit fà mémoire,qui après 4voir vu
un in ilan t, pour la premiere fois fix caracteres'inconnus , puiiîe fix fèmaines après iè les.peindre fi-*
delemènt 6c les tracer fur le papier dans le même
ordre , dans la même forme qu’ils lui ont été préientés ; &c ce dernier trait acheve de démafquer
l’impofture.
..
,, .
*
M a is que faut il de plus p o ù rd é m o n tre rla fa u fieté de cette prétendue fu rp rife, d on t on éxcipe
au jou rd ’ hui , que la conduite de R ib ie r lors d e '
ce procès verbal & poftérieurem ent à. cet aclé ?
I l reçoit alors l ’argent q u ’onJ fui o ffre, i l a c - '
cepte les o ffr e s , parce q u ’elles lui pàroiiîent iùffi.
fàn tes; il ne prétendra pas fans doute q u ’il, y ait
eu de la furprife dans cette a cce p ta tio n , il a bien
vu des efpeces , 1 il a bien fènti qu’il les.co m p to ir,
qu ’il les t o u c h o it , qu’ il le, les rendoit propres, &c
il efl évid en t qu’ il fe feroit bien gardé de lé 'fa ir e ,'
s’il avo it regardé ces offres com ir.e in fu ffilàn tès,
& fi fon intention n’avoit pa^ été telle q u e lle c il
/
�ax
rédigée , dans ce. 'procès v e rb a l, de toucher Ton
principal, de fqi.re i&xerl.cs frais de difcuifion mobiliairs.;&
décharger d,e la.fâifie réeller
, ..r t
Si d’ailleurs il y avoit eu quelque furprife de
pratiquée contre lui lors de la réda&iop de ce
procès v e rb a l, il n’auroit pas manqué l’inftant d’a
près, de fe tranfporter chez un N otaire , de proteiïer contre cette,Curprjiq , 6c de montrer par-là
combien ce procès verbal étoic contraire à ces vraies,
intentions; mais tout au contraire Ribier voit clorre
ce procès-verbal enJa prejènce , il en reçoit la co
pie v il la montre à tout venant, il cric luirmêmc
à la'vexation dans les places, publiques "; 6c lo r f
que le Praticien Efltopy lui reproche fon dë.iàveu ,
le menace de la. voix & du gefte, il le réitéré cent
6c cent fois, 6c lui reproche à lui-même l’abus qu’il
a fait de fon nom.
. T o u t le mois de Décem breTe paffë a in fi, f^ns
que R ib ie r' ait encore conçu la plus legere idée de
la furprïlç qu’on lui a faite ; Vichard fignific de
rcchcf le procès verbal du 18 D écem bre, il en fait
le principal titre de fa demandc:en radiation ; R ibicr voit de nouveau ce-procès v e rb a l, il examine,
cette demande*, il ÿ defend ; oppofe-t-il la fur
prife, le fa u x , Terreur, l’abus de fa iignature?
rien de tout cela , il ddeute des nullités , il garde .
ld plus: profond filcnce lu r cette piece importante,
6c fur. tous ¿es moyens dc fraude nés depuis d a n s
le s méditations d’une, chicane o b fa ir e , OC d’une
rûauyaife foi profondément réfléchie.
�■fy/
.
a
3,
.
Si jamais cependantia-veVitéiè'décëtë^c^il; dans
les premiers moments!, ^ c’eftïd&rts^’i'nftarlt niêrhè
‘que l’Homme tromp.é fe plaint* à' to ü tc e q ü i^ é ïk
vironn.e contrera iuprife^qu’on; lu i^ a -fa ir e 0qu’il
protefte contre la fraude 011 l’erreur ', ‘qu’il s’enïprefTe.de révoquer fa fignature ; & les cris publics
de R ibier contre les vexations de fon agent pré
tendu , fa défenfe à ladem anderen radiation? iàns
•ie.plaindre>,r fon »frlence de deux nioi$cfefôntJtôujours des preuves fans répliqué que cette préten
due furprife, imaginée tardivement pour tromper
la religion )du* Prince ,L e ft’la faûireté- la: plus fimpertinante & hla pluslmal-adtoite tque le -a é ii^ o ir
de caulè ait jamais enfanté y
- T .’ :
• ' £ ~:. Si le premier m otif inféré dans les lettres dé- re£ciiion elt' une. fauileté-démontrée, le fécond n^éil
pas plus'exaét r &i .n’étoitpaV.plus'proprtfà-faire réibinder la déihàvgCi au la;main-lcvéc iauthentique de
•la iàifie réelle'donnée par Ribier à fes débiteurs. f
- C e fécond m otif, c’éfh-la léfion que Ribier pré
tend éprouver p^cett& décharge yxn ce-qu elle lui
feroit perdre .toiisrles Jjrais de cette procédure, qui
forment,, eiVil dit , dans cesVlettres : un objet de
plus de i.5oo livres. ■. - ^
, oIcnti non,fît injuria yîious difent les régies de
<lroit xSclc bon ièns: .non iœditur.quifciens lœdituh;
I lib ie r ’¿ om ioiiÎbit la cfaiiie) réelle , il en 'd éch âvge
V ic h a rd &c fa fem m e , «ril-avoit été léie j c ’e ft'q ù ’vl
•aùroit voulu l’être , & fes plaintes contre cette prétfcndue léfton feraientm diicrettes.*
'
-Ji
-
**o v
�04
: O n pourroit en fécond lieu ioutenir avec le plus
gran4 avantage qu’il n’y a jamais de léfion dans la
.décharge que, donne un créancier à ion débiteur
d’une pm triùke'rigoureufe, 6c fur-tout lorfqu’il elt
démontré qije-cette pouriùite eft une vexation icrian
te , faite pour ¡attirer iur ion auteur i ’animadvèrfian
.des L c ix ,; r: «v
zm'' ,
•:
i M ais .ce qui ftranche toute difficulté fur ce point ^
jç?eit que dans:1e fait cette léfion ¡eil une vraie chij^ere, car il >eft confiant au procès que R ibier n’a
•fait dans, toute cette affaire, que prêter ion nom &
io n titre rr6c qu’il rn’a pas débourie une* obole. ;
•• L a preuve de ce fait réfiilte du commandement
du 6 A oût 1 7 7 2 , où -le Praticien Deivignets aniioncé que tout à été fa it &frayé par lu i, que c’eil a
lui , que tout eft dû., 6c ’ iomme en conféquence V i.chard 6c fà femme de le reconnoître pour leur feul
„créancier, 6c de payer à lui-même 7 à défaut duquel
paiçment il fait cette édifiante proteflation de con
tinuer fur le champ la iaifîe réelle y 6c de faire p ro
céder a la vente des biens iaifis , pour le prix en
provenant être verfé dans fes mains. -,
R ib ie r, on le répété:, n’a donc pas débourie une
obole, 6c jufqu’ici la prétendue léfion qu’il invoque
cft iàns objet : efl-elle mieux fondée dans le fu a ir , 6c
doit-il craindre que le Praticien O eivigncts ofe ja
mais répéter contre lui ces 1 ■Joo livres de frais qu’il
a faits a Vichard fous ion nom ?
; -Non fans doute , & c ’cil fiir quoi tout femblc de
voir le raffurcr : d’abord ion défàvcu qui préfente à la
vérité
�*5
.
' vérité les plus finguliers m yfteres, ^mais qui n’en
font pas pour Ribier , & qui n’en feroient peut-ctre
'pas pour- Vichard lui-même, fi la prudence ne lui
défendoit de lever le voile qui les couvre.
: A ce déiàveu ie réunit un fécond m oyen, qui
écarteroit encore toute eipece de répétition de la
part du Praticien Eftopy pour les frais de la faifie
réelle : ce moyen eft puife dans I a&e même du 7
N ovem bre, mis au jour le treize Février fuivant.
O n lit dans cette procuration qu’avant de pro
céder a la faifie réelle Ribier entend que l’on
épuiiè la voie de la difeuiïion mobiliaire, qui étoit
d’ailleurs de néceilité abiolue, comme on le verra
dans la fu ite , fur-tout dans la circonftance où il
ne s’agiiîoit que d’une dette très-légere, que la moin
dre diicuiïion mobiliaire pouvoit acquitter.
! O r , c’eft ce que le Praticien Eftopy s’eft bien
gardé de faire; iln ’yavoit pas un fol à gagner dans
une frniplè difeuiïion mobiliaire, il n’auroit pas eu
le plaiiîr de faire groiloyer par fes Scribes une volumineufe faifie réelle , de faire tranfcrire 34 fois
7 4 rôles de grofTe pour les 34. affiches qu’il a faites
au lieu des cinq que permettoit l’Edit des criées
il n’auroit pas fait groiloyer la premiere criée, qui
lui a produit un volume de 241 rôles d’expéditions, il
n’auroit pas eu la riante perfpe&ive de faire encore
groiloyer par la fuite 964 rôles pour les quatre autres
criées, de faire faire cette énorme copie du tout pour
iïgnifier à domicile, qui devoir monter a quatre à cinq
�i 6
cents rôles de minute , & fur-tout de mettre le dé
cret à fa fin , de faire vendre les deux domaines 6c
la maifon faifis, pour le prix en provenant être
verfé dans f i s mains.
Le Praticien E llopy calculoit trop bien pour ne pas
fe ménager cette heureufe aubaine; au lieu de faifir
des méubles, des foin s, des bleds, des beiliaux, il a
adroitement pratiqué un procès verbal de carence ,
par lequel il. a paru conilaté qu’il n’y avoit point de
mobilier fuiceptible de diiculïion, & fu r le champ
il a paile a la iaifie réelle.
Mais c’eil ce même procès verbal de carence qui
le condamne ; ce procès verbal eil un faux , & ce
faux cil: prouvé littéralement par les propres pieces
de l’intim é; en effet après avoir conilaté le 14. N o
vembre qu’il n’y avoit ni meubles’, ni autres objets
mobiliers dans la maifon de. V ichard &c dans, fes
domaines, l’Huiilier Guillet faifit les 16 & i j . du
même m ois, deux jours après, tous les beftiaux,
tant gros que menus, qui fo n t actuellement & qui
garnijj'ent lefdits lieux : ce font les propres expreflions du procès verbal de faifie réelle.
Com m ent pouvoit-il y avoir tant de beiliaux gros
& menus le 16 , s’il y avoit carence le 14 ? & puiique ce jour 1 6 Novem bre cet liu iifier iaiiiiloit
tout ces beiliaux , pourquoi ne pas en faire une fimple faifie mobiliaire , du moins de tous ceux qui 11’étoient pas deilinés au labourage, puifqu’il y en avoit
de gros & de mtnus , lorfque fur-tout cette fimple
iaiiie mobiliaire étoit conforme aux vues du Créan-
�r-.
^7
c ie r, & iuffifoit pour acquitter plufieurs fois une
modique dette de 2.87 livres? car il eft bon de iavoir
que les domaines du Bout 6c des Chantelliers ioiit
iîtués dans un pays de bois & de pacages , où les
beftiaux iont toujours très-nombreux, & forment le
principal revenu des domaines.
Si d’ailleurs ces deux domaines étoient garnis de
beftiaux gros 6c menus au mois de N ovem bre, il
eit d’une coniequencç néceiïaire qu’il y eût des foins
6c des pailles engrangés pour leur nourriture dans le
courant de l’hiver, 6c il n’eft pas poifible qu’il n’y
eut a cette époque ni bleds écoiiés dans les greniers,
ni bleds à ëcofîer dans les granges déftinées pour la
nourriture de Vichard 6c de ia famille.
C e procès verbal du 14 Novembre étoit donc un
faux palpable, 6c démontré tel par les pieces même
de rintim é; la prétendue carence du mobilier n’étoit
qu’un prétexte pour avoir occafion de faire la faifie
réelle ; ce mobilier exiftoit 6c n’a pas été diieuté ; le
Praticien Eftopy ne s’eft donc pas conformé à cette
procuration du 7 Novem bre', dans laquelle il met
toute fa confiance, d’où il réfulte qu’en adoptant
même cette procuration, 6c en mettant à l’écart le
déiaveu , il feroit toujours fans a&ion pour fes frais
contre Ribier , qui auroit à lui reprocher de n’avoir
p a s rempli fes vues, de n’avoir pas littéralement exé
cuté fes pouvoirs, 6c de ne s^être pas contenté d’une
faifie mobiliaire qui devoit fuffire pour lui procurer
le paiement de ia créance.
U n troifieme moyen qui écarte encore les vailles
D i
�r>
2.8
terreurs que pourroit avoir Ribier fur les répétitions
futures du Praticien E llo p y , c ’eit la nullité de toute
fa procédure.
Il eft de principe en matiere de faifie réelle, &
ce principe ne fera furement pas contefté , que
l’Huiffier qui exploite, & le Procureur qui rédige
& pouriuit la faifie réelle font également garants de
leur procédure , & que fi elle fe trouve vicieuiè ils
en perdent l’émolument, & font même dans le cas
de fupporter en vers le créancier toutes les pertes,
frais , dépens, dommages intérêts qui peuvent en
réfulter.
O r les Appellants établiront par la fuite que le
Réda&eur de cette procédure a entaifé dans les prin
cipaux a& es, & notamment dans la faifie réelle une
foule de vices de forme qui la rendent nulle & fans
effet, d’où il faut conclure qu’il ne peut y avoir lieu
a aucune efpece de répétition, ni contre R ibier, au
nom duquel a été ourdie toute cette procédure, ni
contre tout autre.
M ais ce qui femble encore devoir plus raifurer
Ribier contre toute répétition future de la part du
Praticien D eivign ets, c ’eft la nature même de cette
procédure, qui eit la vexation la plus criante qui ait
jamais été dénoncée à la jultice : comment dans
une Cour Souveraine, créée pour réformer les abus
de la procédure , & qui fèmble fur-tout avoir pris a
tache de punir avec la dernière févérité ces dé
prédations voilées des formes juridiques ; le Prati
cien Eitopy oferoit>il jamais répéter 1 500 livres de
�a?
frais qu’il aura faits en 23 jours contre un malheu
reux P a y ia n , fous prétexte de le contraindre au ‘
paiement d’une modique fomme de 287 livres quela
plus foible diicuiïion mobiliaire pouvoir folder ?
c
Difons-le avec confiance, cet avide Praticien ne
fera-t-il pas trop heureux, fi’la ièule peine qu’on lui
im pofe, pour s’être ainfi joué de la Juftice 6c de fes
formes, c’eft de iupporter en ion nom les dépens
de fa propre procédure, de ne la pouvoir répéter con
tre perionne, & de perdre le fruit de fes vexations ?
v Ribier peut donc déformais fe croire en fureté
contre les entreprifes du Praticien qui a abufé de
ion nom ÔC de fon titre pour faire ces 1500 livres
de frais ; fi ju f q u ’ic i il n’a pas débourfé une obole,
comme le conftate le commandement du 6 A oût
1 7 7 2 , il n’en débourfera jamais davantage , 6c il
n’exifte par coniequent à ion égard ni léfion actuel
le , ni léfion future dans la décharge qu’il a donnée
à ion débiteur par le procèsverbal du 18 Décembre.
Si quelqu’un.eft léie , c ’eft uniquement le Prati
cien E fto p y, qui fe trouve privé d’un travail,de 23
•jours, qui aura .en vain occupps une foule de Scri
bes a tranfcrire précipitamment la nijit;-£c le jour tou
tes les pieces de cette énorme procédure, à groiTo.yer la fa ifie réelle, à groiloyerles affichescompofées
■de 7 4 rôles chacune, h en faire,enfuite 34 copies
qui ont dû former un total dé..2 516 rôles mis en
m inute, h'groifoyer la premiere criée compofée de
•24.1 rôles, 6c qui perd fur-tout ce doux efpoir défaire
vendre les deux domaines 6c la maifou de Vichardj,
�3°,
pour le prix en provenant être verfé dans fes mains ;
& de voir ce malheureux & toute fa famille folliciter vainement à ia porte le fecours humiliant de
l’aumône;
R elie a difcuter le troifieme m otif de reicifion
inféré dans les lettres obtenues par Ribier ; ce m otif
confiile à prétendre que les Appellants n’ont pas ac
cepté la décharge contenue au procès verbal du 1 8
'Décembre, & que les Huiiïiers qui ont inftrumenté dans ce procès verbal n’ont pu l’accepter pour eux.
C e dernier m otif n’eft exact ni dans le fait ni
dans. le droit : dafts le fait/p arce qu’il eft établi
par les pièces du procès que Y ich ard & fa femme
nnt accepté cette décharge autant qu’elle pouvoit
Tetre , qu’ils ont manifeité fur ce point leur inten
tion par le fait & par les expreiîions les plus propres
h la conftater, & quele contrat judiciaire étoit formé
longtem ps avant que Ribier eut recours a larefcifion.
En effet, en conféquence de ce procès verbal,
Vichard & fa femme ont formé dès le 28 du même
m o i s de Décem bre une demande en radiation delà
faifie réelle, 6c pourfe còri formerà l’Ordonnance de
* 1 667 , ils ortt accompagné cette demande delà co
pie de ce procès verbal fur lequel elle étoit fondée,
&c dans les concluions de la requête contenant cet•tei dehìiindé^ ris oiit cxprcflémcnt demandé acte dit
'rapport de)]ce' procès verbal de réalifation d'offre
acceptation 'd'icdles & de décharge dudit jour 18
du prêjent mois , ce font les propres expreiîions de
¿cette requête.
•
•• 1
�* V ichard & fa femme pouvoient - ils accepter
plus expreffément &: former le contrat judi
ciaire d’une maniéré plus irrévocable que de deman
der a&e du rapport de ce procès <verbal &; de la
décharge y contenue ? &: n’eil-ce pas mentir con
tre le texte des pieces & en impofèr 'ouvertement
.que d’inférer le défaut d’acceptation de cette déchar
ge pour'motif déterminant des lettres de refcifioir?r
Q uant aux pouvoirs des H uiiiiersquel’on prétend
con teiler, il icroit très-indifférent aux Appellants
de les leur fuppofer plusj.qu moins étendus , puifqu’une décharge fous feing privé adonnée .par R ibier & acceptee par les Appellants , comme l’a été
la décharge contenue, au procès verbal- du i 8 D é
cembre dont ils ont demandé a£Be par requête, pro*
duiroit le même effet que la décharge la plus:au
thentique.
.y ■
il v ■o 1 > ■
>W."
.* Mais c’eil étrangement errer danslle.droit que
de fuppofer que des Huiiïiers qiiï font des protêts,
des offres réelles & une infinité d’autres.aÔes con
curremment avec les-Notaires, n’ont pas. les mêmes
pouvoirs qu’eux -danlce? -fortes d’aâ::s p o iirco n f
tater les dires des Parties, leurs réponfès , .-accepter
ce qui eft avantageux à rceux pour lefquels ils agifi
fè n t, proteltcr contre, ce .qui leur eiî contraire &
donner a tout ç q n e }’ad.efcQAtientj 1a même force
&; la même aitthqçticité^ que fi cet acte éteit revêtu
de la fignature dç deuxNotajres.
S’il y a concurrence dans cette partie entre ces deux
fortes d’Oificiers publics , il.elt d’une conféquence
�3%
.
.
.
,
.
...
•néceiîaire que leur fign ature produife les mêmes
effets aux y E u x -d e h tju ftic e , & donne la m êm e
►force'k tout] c e q iir e ft contenu dans leurs actes;
• ; -Air Îiirplus., comme ou I V déjâobfervé, cette
diicuiiion eft ier purement oiieufe ; la déchrge de
R ibier eft conftatée par un a&e authentique, elle
feroit fous fein gp rivéq u ’elkfièroit également irré
vocable , fur-tout d’après la requête a fin de radia
tio n , par Laquelle les Appellants ont demandé a&e
de cette décharge, d’où il faut conclure que dans
le droit comme dans lé fait ce troifieme m otif n’eft
encore qu’une erreur groiïiere ou une fauiïèté pal
pable,
!
A infi d o n c, ett réfumant cette diicuflion iùr le
mal-jugé principal de la Sentence dont eft appel, il
en réfulte bien clairem ent, en premier lieu, que la
décharge de la faifie réelle fouferite par Ribier dans
le procès verbal du 18 D écem bre n’étoit pas fufceptible de larefcifion, iuivant cette maxime tirée
de la loi quœntur: remirtentibus actiones fu a s y dan-dus non ejl regrejjiis.
En fécond lieu, que quand cette décharge n’auroit pas exclu par fa nature toute idée de rellitution,
les lettres de refcifion obtenues par Ribier étant obrcpticcs & fubrcj)ticcs, n’étant fondées que fur des
motifs démontres faux dans le fait comme dans le
droit, cette décharge du 18 Décem bre reftoit in
take , & devoit par conlequent déterminer les pre
miers Jurçes h prononcer la main-levée ou la décharge
de la faificréellcdcmandécpar Vichard & i a femme.
M ais
�M ais quand les’ Juges dont e il appel auroient pu
m ettre a l’écart ce prem ier m o tif de décifion , pouvoient-ils. du m oins s’em pêcher d’annuller cette iàifie réelle , & de fe déterm iner par les vices fans
n om bre dont elle eil in fe â é e ?
. - r ?■
e
M
a l
-
j u g é
'
s u b s i d i a i r e
.
'
N ullités de la Saijie réelle.
■ r
' •
'
A v a n t d’entrer dans la difcuifion de ces différen
tes n u llités, & de les analyfer en d é ta il, il eil bon
de rappeller par form e de prélim inaires quelques
idées générales , qu ’il ne faut jamais perdre de
vu e dans le cours de cette d ifc u ifio n , telles que
la m odicité de l’objet qui a fervi de prétexte à cette
m o n ilru e.'iè procédure.
L a fauilèté de la prétendue carence du m o b ilie r,
dont la plus légère d iicuilion auroit iiifE pour fo lder la créance.
L a m aniéré précipitée & vexatoire dont cette pro
cédure a été fuivie en preifant les in ila n ts, & en
m ultipliant in utilem en t, & prefque à I’infîni les
a&es les plus coûteux, tels que les affiches com p ofées de 7 4 rôles, répétées juiq u’à 3 4 fois.
E nfin, il ne faut jamais perdre de vue que c’eil
ici une matière de rigueur que les loix fe font plu à
furcharger de formes cmbarraiïïmtes, que toutes
les nullités y font fatales, & que le plus léger vice
entraîne la chute totale de la procédure.
E
�Si après s’&re bien pénétré de ces idées préli
minaires, on fait un examen exa& de cette procé
dure 6c des Loix locales qui ont dû la régir, on
remarque que la coutume de Bourbonnois, aux art.
1 06 6c 1 37 , exige que la faifie réelle foit précé
dée d’une difeuilion m obiliaire, Ôc que dans l’efpece le Praticien Eftopy a négligé cette formalité,
6c a procédé à la faille réelle fans avoir difeuté
le mobilier du débiteur, ce qui forme une premiè
re nullité qui vicie fa procédure.
O n s’attend, relativement a cette nullité, à deux
objc&ions de la part de l’Auteurde la faifie réelle,
l’une de f a it , l’autre de droit : il prétendra dans le
fait qu’il a rempli cette formalité par le procès ver
bal de carence, 6c dans le droit que cette formalité
a été abrogée pour les majeurs par l’Ordonnance
de 1 ^ 9 .
A l’égard du fa it, il a déjà été difeuté ; le pro
cès verbal de carence eft un faux manifefte, puifque deux jours après 011 faifit tous les bejliaux gros
& menus qui gamijjent actuellement les deux do
maines du Bout 6c des Chantclliers. Il exiftoit donc
du mobilier.; o r . i l eft prouvé par l’a&c même
de", prétendus carence qlic ce mobilier n’a pas été
difeuté, donc dans le fait cette formalité 11’a pas été
remplie.
Dans le droit c’eft une queftion fi cette fage
formalité exigée expreflement par le code romain,
6c de tout temps obfervée parmi n o u s, peut
être cenféc abrogée par l’Ordonnancc de 1539
�dans les coutumes que , comme celles du B our.bonnois , en ont une difpofition.particulière ?
• M ais quand dans la thefe générale cette for
malité ne feroit pas de rigueur, peut-o!n.,en dire
de môme dans le cas particulier où nous nous
tro u v o n s, où il s’,agiiîoit de la crpanc.ç la: .plus
m odique, que la moindre faifie, de fruits, ou la
d iic u iîio n d ’une trjcs-ioible^parçicj des beftiaux
pou voient folder.
., . ,
Ce cas a été prévu par Henrys dans fa ques
tion 1 7 du livre .3 ,de fes oeuvres, & par .Bretonnier , fon annotateur
ces; deux Auteurs
s’accordent à dire que quand les fruits de deux
.ou trois années fo n t fujpfants pour le paiement,
F 011 ne doit point fa ijir réellement lefo n d s, & faire
■
vendre les bien suies mineurs. ' ■ j> . ;
E t Bretonnier .ajoute,'; » {cc tempérament efl f i
» équitable q u i l doit avoir lieu pour les majeurs
» aufji-bien que pour Us mineurs, & pour les rir> ches comme pour les pauvres , car c ejl blejfer
» la jujlice aujfirbien que la charité' de fa ijir &
». faire vendre les héritages d- un débiteur, *quand
» les fru its de ces mêmes héritages fo n t Jiijjifants
» pour fitisja ire aux créanciers.
Q u ’a u r o i e n t d ife e s deux Aut eurs , fi au lieu
d’une dette qui ne pouvoir ctre payée que par
les fruits de deux ou trois ans, on leur eut préièntc la iaiiie réelle faite par le Praticien Èftopy
pour une fomme qu’une légère portiorî des fruits
d’une feule année, ou une très-mince partie des
�MJ
'
36
.
beftiau x inutiles au dom aine pou voic fo ld er?
C e cas particulier, nous dira-t-on, n’a pas été
excepté par POrdonnance de 1 5 3 9 , mais, il eit
des loix gravées dans tous, les cœurs honnêtes qui
portent l’empreinte de la nature, qui font plus
facrées encore que celles de nos recueils, & qui
doivent y.fuppléer lorfqu’elles font muettes.
Ces loix de la- nature nous enfeignent qu’il eil
dur , injufte, inhumain de mettre en décret, de
vendre à l ’enchere, de lacérer un malheureux dé
biteur <Sc de le dépouiller de toute fa fo rtu n e,
lorfqu’une portioncule de l'on mobilier auroit fuffi
pour le libérer.
Q ue faut-il de plus pour établir cette première
nullité réfultantc du défaut de difcuilion mobiliaire ? on eil aiîèz- fort quand’ orï a pour foi
H e n ry s, Bretonnier j' la nature, l’équitc ÔC la
raiion.
•
. . . .
Cette première nullité expédiée, la fécondé qui
fe prclente fc puife dans la circonitance que
l’Huiifier G uillet, qui a iouiçrit la failie réelle &c tou
tes les procédures qui l’ont précédée &: fuivie, a mis
a exécution ion propre titre', & av'oit un intérêt-per«
fonnel dans cette procédure.
11 cil dit dans l’obligation du 2 Juin, qui adon
né lieu a la iàifie réelle, qu’il eil dû une iomme de
5 1 livres a l’Huifficr Guillet pour frais qu’il a fait
h V ic h a rd , ce dernier s’oblige pour cette iomme
envers Ilibicr, & ail même inilant Ribier s’oblige
pour la même fomme envers l ’Huiilier Guillet.
�Et ce qu’il eil eifentiel d’obferver, c ’eil que V i
chard s’oblige à payer cette fomme ainfi que le furplus de l’obligation à Ribier le 24. du même mois
de Juin, & Ribier cette fomme à Guillet le même
jour.
D e forte que ces deux obligations, formées par le
même a&e , n’avoient qu’une même fource, un mê'
me terme , de maniere que l’Huiflier Guillet ne de«
voit naturellement être payé de íes .52 liv. par Ribier
que loriqu’il les recevroit lui-même de Vichard.
Lors donc qu’à cette époque du 24. Juin. V i
chard ne fatisfit pas à fon obligation, Ribier ne dut
pas mieux y iatisfaire de ion côté, <5c l’Huiiïier
Guillet étoit encore inconteilablcment fou créancier
loriqu’il a pourfuivi Vichard pour le compte
commun, ceil-à*dire, pour faire payer R ibier, <5c
pour retenir fur le tout les 52 livres qui lui étoient
dus.
O r s’il n’eil pas permis à un Huifïïer d’exploi
ter pour íes parents, s’il ne lui eil pas permis d’ex
ploiter en préfence des parties intéreifées , parce
que les Loix fuppofent que cette préfence pourrait
l’induire à vexation , * il ne peut à plus forte raifon
exploiter pour lui-même , quelque léger que foit
fon intérêt, des que cet intérêt cil perfonnel,
il doit s’interdire toute efpecc de fon & ion , &
tous les a&es qu’il peut faire font viciés de la
nullité la plus abibluc.
Cette nullité mérite d’ailleurs d’autant plus
* Or do n na nc e de Mo ul ins, articlç 31 .
*
..
�38
d’attention dans l’efpece, que l’intérêt de G uillet
dans cette pourfuite n’a peut-être pas peu contri
bué à la précipitation avec laquelle elle a été faite,
& a encore ajouté aux vexations du Praticien
Eftopy.
La troifieme nullité réfulte de Tele&ion de
domicile faite par llib ier dans la faifie réelle pour
Tefpace de 24 heures feulement dans les Paroiilès
de Luiigny & St. Pierre de M o u lin s, où font
fitués les immeubles i ai fis.
L ’article premier du titre 33 de l’O rdonnance de 1667 porte que tous exploits de iaifie
exécution contiendront l’éleQiion de domicile du
faifilfant dans la Vi l l e , B ourg ou V illages 011
la faifie exécution fera fa ite , ÔC cette formalité
e(t ordonnée à peine de nullité, fuivant l’article
19 de ce môme. titre.
L ’éleftion de domicile preferite par cette loi ,
n’efi: pas d’un inftant, d’un quart d’heure, ni de
tel autre efpace de temps déterm iné, elle eit in
définie &c doit durer auili l o n g - temps que
l’exécution ; c’eft la remarque de Jouile dans ion
Commentaire fur cct article , qui fur ces mots élec
tion de domicile , » obierve que plu/ieurs H u i f
» fiers fo n t dans Fufâge dans leurs exploits de ne
« faire pour leurs Parties élection de domicile que
» pour Z4 heures feulement ; mais, ajoute-t-il, il
» ejl évident que c'ejlpar abus & fans aucuns fou » dements , & qui l s firoient également fondés à la
» faire pour un temps encore plus court : ces fortes
�» d'élections de domiciles doivent être faites indé» jînim ent & fa n s aucune limitation de temps , &
» durent jujqu’à ce que Uinfance pour la Jaijie <£’
» emprifonnement J o it tei minée. »
Denizard fait la même obièrvation au mot faifie
réelle, n0. ^ . » E Ordonnance de i 6 6 j , titre y3 ,
» article 1 , e x ig e, dit-il, une élection de domicile
» permanente, & non de 2,4 heures pour une fim ple
» faifie mobihaire , & aplusforte raifonpour une
» ja ijie réelle dimmeubles.
Il 11a donc pas fufîi à R ib ie r , ou plutôt au zélé
Praticien qui a fait cette procédure fous ion n om ,
de ne faire que pouiTefpace de 24 heures cette élec
tion de domicile dans les Paroiilès de Lufigny &
de St. Pierre de M oulins, <Sccette omiiïion d’un
domicile indéfini 6c permanent eft encore une nul
lité décifive dans cette matière, défavorable par fa
nature , 6c mille fois plus défavorable encore dans
l’eipece particulière dans laquelle ie trouvent les
Parties.
Quatrième nullité. L ’HuiiTier G uillet, avant de
procéder a fon exécution , n’a pas appelle' deux
proches voifins pour y être préfents.
Cette nullité eft encore puifée dans le texte mê
me de l’Ordonnance de 1 6 6 7 , art. 4 du tit. 3 3 ,
qui eft ainii conçu :
» A vant d’entrer dans une maifon pour y iaifir
» des meubles ou effets mobiliers, 1 Huiiîier ou
» Sergent fera tenu d’appeller deux voifins au moins
» pour y être préiènts, auxquels il fera figner ion
�\
^°l
)
» exploit ou procès verb al, s’ils favent ou veulent
» fign er, finon en fera mention. »
Et. le. Commentateur ajoute , à peine âe nullité,
fuivant l’art. 19 ci-après.
C ïï texte eft clair, mais on en contefte l’applica
tion : Ribier prétend que cette Loi n’efl: faite que
pour les faifies mobiliaires, & qu’elle eit fans ap
plication à la faifie réelle.
Mais en premier lieu le procès verbal de faifie
réelle des 16 & 17 Novem bre contient également
une exécution mobiliaire , puifque l’HuiiTier
Guillet faiiit tous les bejhaux tant gros que menus,
qui font actuellement, & qui garnijjent lejdits
lieux.
A in fi, d’après Ribier Iui-m èm e, cette formalité
'étoit rigoureufement exigée par l’Ordonnance pour
cette faifie exécution , & fon omiiîion entraîne néceiTairement la nullité de ce procès verbal &c de
tout ce qui l’a fuivi.
En fécond lieu , pourquoi feroit-on difpcnfé de
’ fuivre dans les faifies réelles les formalités preferites pour les faifies exécutions ? Cette procédure plus
rigoureufe & infiniment plus importante, feroitclle donc moins folemnelle, & cxigeroit-clle un
moindre concours de yeux & de fignataires?
Cette formalité n’a , d it-o n , d’autre but que
d’empecber le divcrtiflèmcnt des effets torique les
HuiiTiers entrent dans les maiiôns pour iaifir.
M ais en procédant a la faifie réelle, les Huiiliers
ne font-ils pas entrés dans deux maifons des do
maines
�41
maines où il y avoir des meubles y dans des éta~
bleries oiV,il y^avoit des beiliaux, dans une maiibn JfiÇLiée_ en la V ille de'M oulins,' qui étoit égale
ment habitée par des locataires,- qu’on ne peut pas
liippoièr dépourvue de toute efpece de mobilier ; il
y avoit donc les mêmes riiques à courir , les mê
mes précautions à prendre, .ainii nulle différence
dans l’efpece entre la faifie réelle & la iàifie mobiliaire, & Ribier 11e iàuroit échapper à la rigueur
de la Loi.
Cinquième nullité. L ’HuiiIîer Guillet a faifi les
beiliaux fans les détailler,
' !L ’Ordonnance de 1667 porte, .art. 1 5 ,du, tit.
1 9 , les HuiJJiers ou Sergents Spécifieront par te
menu les ckofes par eux jaijics.
Et cette difpofition eil répétée dans l’article
6 du tit. 33 , en ces termes : les exploits eu pioces
verbaux de JaiJie & exécution contiendront par
le menu & en détail tous les meubles fa ifis &
exécutés.
L ’Huiifier Guillet a faifi en bloc & fans détail
tous les belliaux gros & menus qui garniffoient les
deux domaines du Bout Qc des Chantellicrs j ces
belliaux étoient bien conilamment mobiliers, ils
étoient par conféquent fournis a la difpofition de
ces deux articles, & la nullité efl encore ftns rcplique.
Il
cil d’ailleurs eiTentiel d’obfcrver que ce délai
étoit d’autant plus important dans l’efpece, que,
comme les Appcllants l’ont ,dcja obferve
les
F
�4-i
.
domaines du Bout & des Chantelliers font fitués
dans un Pays de bois & de pacage, où chaque do
maine nourrit iouvent ju itp ’à1concurrence de trois
pu quatre mille livres de beiliau x, & ou le profit
de ces'beiliaux forme le principal revenu des Pro
priétaires. ...
'' ' .Il n?y avoit \qu\m détail exa£l de ces beiliaux
qui put , lors de l'adjudication, influer fur les m ifes,
:6c faire connoître aux enchériffeùrs quelle étoit la
valeur des domaines qu’on leur propofoit d’acqué
rir , puiiqu’il y a dans cette partie de la Province
une différence totale entre* un domaine dégarni
de beiliaux,. & un domaine qui par le-détail fe
trouverait en avoir pour trois a quatre mille livrés.
Sixième nullité. La copie de la faiGe réelle n’eil
pas fignée des "mêmes témoins que l'original.
O n lit dans l’art. 7 du "même tît. 33 de I’O rdonnance de 16 6 7 , que la copie lainée aïi Saifi
J'era /ignée des mêmes ■
perfonnes -qui auront fig n é
L'original, toujours , à peine de nullité j fuivant
l’article 19.
L a loi cil encore pofitive , <Sc le fait eil confiant
que Jean Dupicli & Pierre Champagnail ont figne
la faifie réelle comme recors , &c que la copie de
cette faifie réelle a été fignée par Jean Duchemin <Sc
Jean Cnampagnnll.
M a is , dit Ribier., cette formalité.n’eil exigée
que pour les iaiiies mobiliaircs, & quant aux iailïcs
réelles elle cil ii peu eflentielle , qu’il n ’eilpas même
néceifaire d’en iignificr copie à la Partie iaifie.
�|
Cette obje£tion reçoit pluiieurs réponfes toutes
également fans réplique : la première , c’ert que le
! procès.:verbal des 1 6 & 17 Novem bre contient
1 une exécution mobiliaire comme une faifie réelle ,
puiique l’Huiflier faifit les beftiaux gros & menus
qui garnirent les deux domaines ; il devoit donc,
d’après Ribier lui-m êm e, & d’après le texte de la
loi y fatisfaire a cette formalité a peine de nullité.
• La fécondé , c’eft que c e tt e copie n’eft pas moins
ciTentielle pour la faifie réelle que pour la faifiemobiliaire elle eft d’abord ciTentielle dans-la thefe
générale & dans toute l’étendue du Royaume:,
comme on le voit dans d’H ericourt, traite de la
V en te des immeubles , iommaire 14 du chapitre 6 ;
ôc dans Néron , tome I er. notes fur 1 Editde 1 ^^1 ,
°u il rapporte la remarque de M . le Préfident leM aître, qui obferve que le propriétaire ■
doit être
inftruit par la lignification de la faille■
reelle, que.'
Je fu is d ’avis , d it-il, devoir etre ja it e , quoique
cette Ordonnance ne le renuiert pas.
Mais cette formalité eit encore plus rigoureufe
dans la coutume du Bourbonnois que dans toute au
tre, parce quelle contient fur ce point une difpofition particulière dans l’article 143., au titre des
exécutions
. C e t article porte , que le Sergent JigniJieraato
detteur, ou a i o n héritier apparent , ou au tiers dé
tenteur, a perionne ou domicile ladite main-mif 'e ,
cnfemble les ventes-ôc criées ès jours introduits
par la coutume.
„
�Signifier au dateur ladite mam-mife : cette Loi
eft impérieule , 6c il n’eft pas permis d’après un
texte auffi. précis de mettre en queftion fi dans
l’eipece l ’Huiflier Guillet a du lignifier la iàifie
réelle aux Appellants.
O r fi cette 'lignification étoit de rigueur., elle
étoit indiipenffablement prefcrite par la L o i locale
qui régit les Parties, peut-il y avoir quelque raiion pour la iùppofèr moins lolemnelle , moins 'rigoureufe que la lignification d’une fimple faifie
mobiliaire , qui n’eft par elle-même ni fi importante
ni fi défavorable aux yeüx de la L o i, ni ioumiiè
avec la même rigueur à la fatalité des formes
juridiques.
Cette fixieme nullité ne mérite donc pas moins
d’attention que toutes‘celles qui précédent; toutes
(ont fondées iiir le texte des Loix de la matiere,
& toutes s’appliquent dansTeipece à la plus odieufe,
la jîlus vexatoire procédure qui fut jam ais, formée
précipitamment, grofîie jufqu’au monftrueux, non
pas pour l’intcrct du créancier , que la plus légère
difcuiïion mobiliaire pouvoir fàtisfaire , mais uni
quement pour enrichir le Praticien E ilo p y , q u i ,
avec un titre de 287 livres a la main , croyoit pou*
voir impunément dépouiller Vichard & f à femme
de tous leurs biens 6c s’en approprier la valeurConcluons clolic que le mal-jugé fiibiidiaire de
la Sentence dont eit appel n’eft pas moins évident
que le mal-jugé principal, & q u e fous Pun-& Tau*
tre point de vue les premiers Juges n’ont pu Ce
- fi
�déterminer à confirmer cette procédure fans violer
toutes les réglés & commettre une injuftice énorme.
O n pourrait ajouter que cette Sentence réunit
à l’injuftice la plus criante la'contradiction la plus
bifarre dans fon contexte, en ce quelle ordonne la
continuation de la faifie réelle, & juge que la créan
ce eft acquittée, en ce qu’elle déclare des offres
fuffifantes & infuff i f antes tout à la fois ; mais ces
contradictions, quelques groffieres qu’elles foien t,
ne forment que de légeres nuances dans le tableau,
& les Appellants ne les relevent dans ce moment
pour montrer que c’eft en tout point que cette Sen
tence eft l’ouvrage le plus vicieux que la Juftice
fouveraine ait jamais'eu à profcrire.
Monf ieur l'A b b é D E P O N S , Confeillcr,
Rapporteur.
M e. B A L L E T ,
Avocat.
M i o c h e , Procureur.
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D e
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R o i ,
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1 7 7 4 .
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Vichard, Jean. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Pons
Ballet
Mioche
Subject
The topic of the resource
créances
procédure de ventes en criée
saisie
signatures
lésion
huissiers
faux
procédure abusive
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour Jean Vichard, Laboureur, et sous son autorité Gabrielle Talon, sa femme, habitants de la Paroisse de Lusigny, Appellants. Contre Laurent Ribier, Cabaretier, Habitant de la Paroisse de Saint-Bonnet, Intimé.
Table Godemel : Décharge : 1. le créancier qui a reçu le montant de sa créance, et ce, dans le procès-verbal d’offre, déchargé son débiteur d’une saisie réelle, poursuivie contre lui, en désavouant l’officier public qui l’a commencée, libère-t-il ce débiteur irrévocablement ? peut-il se pourvoir contre sa décharge, par lettres de rescision, si elle a été obtenue par dol et surprise ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0116
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52873/BCU_Factums_G0115.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lusigny (03156)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
Faux
huissiers
lésion
procédure abusive
procédure de ventes en criée
saisie
signatures
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52874/BCU_Factums_G0116.pdf
491a2ae74302b19b84d02b4a531bb28c
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§
MEMOIRE
P O U R Me. P i e r r e E S T O P Y D E S V I G N E T ,
Procureur en la Sénéchauffee de Bourbonnois ,
Siege Préfidial & autres Jurifdic t ons de Mou
lins, Intervenant & Demandeur.
,
CONTRE
Ga
EN
b r i
,
J e a n V 1 C H A R D le jeune &
e l l e T A L O N ,fa femme, Défendeurs.
préfence de L
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R IB 1E R
.
U ’un débiteur qui eft faifi réellement dans
fes biens & qui a vu un premier T ri b u
nal confirmer cette faifie réelle, paroiffant
d’une part accablé fous le poids de fa trifte
fituation dont il exagere encore la détreff e , & fe croyant d ’autre part en droit de
préfenter finon le créancier qui l’a pourfuivi, comme un
tyran , du moins les Officiers de Juftice qui ont occu
pé ou inftrumenté contre l u i , comme des fatellites inhu
mains qui auroient violé toutes les réglés pour faire de fes
biens la proie de leur infatiable cupidité; q u ’un tel hom
m e , parvenu aux pieds du Tribunal fupérieur, cherche &
trouve à faire pafler l'enthoufiafme de fa douleur vraie ou
fauff e dans lam e d'un D efenfeur généreux & fenfible ,
�6 ü£
i
qui par état d’ailleurs doit haïr ce qui lui paroît l ’injuftice,'1
& s ’enflammer à l’afpett du malheureux qui réclame les fecours de fon éloquence :1a conduite du client eil dans la
nature ; celle du patron eft de fon devoir.
Q u e ce même débiteur, toujours ulcéré & croyant
toujours avoir lieu de l’être, parlant enfuite par l’organe
q u ’il aura rempli de fon feu , dans un écrit rendu public,
à des Juges fléaux de la v e x a t io n , & qu’il regarde com
me les vengeurs de fon infortune ; faifant dans cet écrit
le tableau le plus touchant de fon état ; y peignant des
couleurs les plus noires tant les procédures de la faifie réel
le que la Sentence qui les a confirmées ; & tonnant fans
ménagement contre celui q u ’il fe perfuade être l ’auteur de
ces procédures pour lui fi odieufes ; que ce débiteur , difons-nous, trouve tous fes lefteurs difpofés à entrer dans
fes pei nes , & à partager même ion indignation & c on
tre les procédures & contre leur auteur : c’eft ce qui
fait honneur à l ’humanité. Plaindre les opprimés, déteiler
les opprefTeurs, ell le partage des coeurs honnêtes.
Si cependant les prétendus oppreffeurs, fe faifant enten
dre à leur tour aux Juges & au Public , leur prouvoient clairement que celui qui fe difoit l’opprimé ne
l’eft que par fa réfiftance opiniâtre à remplir des engage
ments légitimes ; que fon créancier,moins opulent que lui ;
n’a ceffé de fe montrer débonnaire q u ’à la derniere e\trêmité ; q u e celui qu’on cherche à faire pafTer pour Ieminiftre intéreffé des rigueurs de ce créancier, n ’a eu ni pu avoir
aucune part aux procédure» q u ’on dit être fon o u v r a g e ;
que ces procédures d’ailleurs ne font autre chofe que les
armes mifes par la loi elle même entre les mains de tout
créancier contre tout débiteur; que fi ces armes étoient
odieufes , comme elles font rigoureufes , ce feroit. donc à
la loi qu’il faudroit s’en prendre ; que du refte le véritable
auteur des procédures attaquées ne s’y ell point écarté
d’un pas de ce qu’exigeoit ou comportoit fon miniilcrc ; &
qu’on ne fauroit lui imputer aucun a£le , aucun trait de
plume que la loi c on d a m n e, & que l ’ufage des licuxnc rendît
�3 .
indifpenfables : alors ne feroit-il pas pofîîble que la pitié,
que l’indignation ceffafient, ou même qu’elles changeaf'ient d’objet ?
N e feroit-il paspoflible que (fans parler ici du créancier)
on ne vit au moins dans celui à qui on imputoit les pro
cédures, qu’une vi&ime des clameurs artificieufes du dé
biteur fa if i, du zélé louable mais trompé de fon défenf e u r , & de la compaffion jufte mais trop prompte du
public : au lieu 'd’y voir le moriftre qu’on en avoir f a i t ,
en le donnant pour un Praticien ardent & avide , cher
chant une p ro ie , ayant vû dans le débiteur dont i l s'agit
un malheureux payfan fans défenfe, contre lequel i l croyoit
pouvoir impunément abufer des formes juridiques pour le
dépouiller de toute fa fortune ; oardiffant & machinant en
'conféquence dans la poufjîere de fon Etude la plus criante s
la plus vexatoire procédure qui fu t jamais ; comptant par
fes doigts la valeur des biens du débiteur, & combien il
fa llo it de fra is pour s’en rendre acquéreur parfon exécutoirefaifant en vingt-trois jours , pour une modique fotnme de
x S y livres ', celle de ib o o Ihtes de frais , qu i l [fe difpofôlt
de doubler dans un pareil délai, & de tripler dans trois fnois ;
ayant jetté un dévolut fu r uriè M ai fon & deux Domaines ,
qui compofoient tout le bien du1 débiteur à qui i l en vou'loit ; exigeant avec une hardieffe cinique que le p rix de ce
"bien fu tv é rfé tout entier datü f i s tnains ; ne craigriahtpds
vde‘prôteflcr dans un^'qclc authentique qu'il ne veût- quittér
'prife que lo rfq u il aura épuifé toute la fiibfiance' &• dévoré
toute la fortune de ce malheureux, non-miiTürà cutèm nifi
p l e i n cruoris liiruclo; s'étant fu it uh doux efpoir de faire
vendre àfon profit les biens de ce même, malheureux, & de le voir
enfuite à fa porte lui & toute fa fam ille y jo llic ite r vaine
ment le fecours. humiliànt deJ Faumône; ayant excédé lis
pouvoirs qu'il s'était fa it donnerpour àutorifer les vexations
qu il rnéditoit ; n ayant produit ces pouvoirs qu après coup ;
ayant prémuni le créancier du nom duquel il aInfo i l , d ’une
excellente contrc'lettre, pour le mettre a la b ti de tout \ &
‘enfin , ayant eu r e c o u r s pourfoutenir.enfuite la fatfieréelle
�4
fo n ouvrage contre le défaveu même du créancier , à
des moyens de fraude , nés-dans les méditations d ’une chi
cane obfcure , d'une mauvaife f o i profondément réfléchie,
■'& qui cacheroient les plus finguliers myfier es , ( i la pruden~
ce ne défendoit pas de les dévoiler ?
N o n il n’eil pas poiïïble que celui dont on écrit d e1
pareilles horreurs , pour des procédures qu’on lui attribue
mal-à-propos, ne foit pas plaint àfon tour des le&eurséquitables, & ne foit pas vangé hautement par la C o u r ,
devant laquelle on le déchiroit ainfi pendant fon abfence ;
fi ces procédures encore font démontrées juftes, légitimes ,
conformes aux règlements généraux de la matiere & aux ufages particuliers du Siege auprès duquel elles ont vu le jour.
Te ll e eft l’efpérance confolante dont ofe ici fe flatter
M e . E ftop y Defvignet , Procureur en toutes les Jurifdictions de U Ville de Moulins. C a r c ’eft de lui qu’on a fait
le portait qu’on vient de v o i r , ( e n affe&ant même de ne le
ualifier que du PraticienEûopy , du Praticien Def vig net ,
e lavide , de Tardent Praticien , ) dans un Mémoire im
primé & diftribué pour Jean Vichard & Gabrielle T a l o n
fa femme Laboureurs à L u f i g n y , débiteurs d’une fomme
de 287 livres envers Laurent Ribier Cabaretier à SaintBonnet , faifis pour cela réellement dans deux Domaines
& u n e Maifon à la requête de ce créancier, & Appellants
• vi?-à-v,is de l u i , en la C o u r , d’une Sentence fur produc
t i o n s refpe&ives de la Sénéchauflee de Bourbonnois ; qui
a prononcé la confirmation & ordonné la continuation
'de cette faifie ré el le , qu’on veut à toute force attribuer
aujourd’hui à M e . E ft op y D e fv ig n et , quoiqu’il ne l’ait
ni faite ni pu faire.
Déjà les couleurs de ce faux portrait de M e . Efliopy
Defyignct ont commencé d’être, effacées par un Mémoire
ue le créancier faillffant, que Laurent Ribier vient de
onner à la C o u r ; & où il a jurtifié la faifie réelle,
ainfj que les procédures acceiToircs, & la Sentence
dont Vichard & fa femme font Appellants.
Mais R i b i e r , n'ayant, à défendre que fa Sentence & fes
Q
3
�procédures, n’a pas plus appuyéfur les points où l’on avoit
chargé perfonnellement M e . Defvignet que fur lesautres:
il ne s ’eft occupé & a dû ne s’occuper que de fa caufe
& non de celle de M e . Defvignet. D ’ailleurs quand R i bier l’auroit plaidée cette derniere caufe , il n’auroit pas pu
demander pour M e . Defvignet la réparation des torts que
Vichard & fa femme lui ont faits par leur écrit. C ’étoit
là l’emploi de M e . Defvignet feul : eh ! quel intérêt n ’avoitil pas de le remplir lui-même?
Il eft donc accouru de Moulins aux pieds de la C o u r ;
il a quitté femme t enfants, affaires , pour défendre fa
réputation attaquée, & tout fon être enfin compromis ,
c\ar fans l ’honneur q u ’eft-ce que l’exiftence ? il eft inter
venu dans la caufe d'entre Vichard & Rib ier ; il y a de
mandé juftice contre Vichard des calomnies répandues
dans fon Mémoire ; il y a conclu à la publicité de la ré
paration pour répondre à celle de l ’infulte : on voit affez
les faits qui ont rendu néceflaires cette intervention &
ces demandes : il ne s ’agir que d ’en développer les moyens.
s. I.
Il faut d’abord examiner , parmi les traits lancés contre
Me. Defvignet par V i c h a r d , c e u x qui n’étoient pas de la
caufe de cet Adverfaire. Et certainement il n’eft point de
lefteur impartial qui du moins à une fécondé lefture ne
trouve beaucoup de ces fortes de traits dans le Mémoire
que nous combattons.
C a r indépendamment de cettedénomination outragean
te , répétée à prefque toutes les lignes, de Praticien E ft o p y ,
de Praticien D e fv ig n e t , de l’ardent Praticien , de l’avide
Praticien;ctoh-ï\ d’abord de la caufe deVichard de dire*que
Me . Defvignet cherchoit une proie , & que voyant dans lui
Vichard un malheureux pay fan Jans défenfe, i l croyoit
pouvoir abufer impunément des formes juridiques , pour le
dépouiller de toute fa fortune >
Le moment où Vichard peint-là Me. Defvignet cherchant une proie , eft un moment où aucune des pourfuites
*
�6
contentieufes n’avoit été faite , & où il n’étoit même pas
encore queftion de les faire. C e n’eft donc pas le fait de la
caufe & fon action unique , c’eft une difpofition d’efprit »
une habitude de cara&ere que Vichardprêteà M e . D e f v i g n e t •
dans cette cruelle phrafe. O r qui a dit à Vichard , contre
lequel M e . D e fv ig n e t , avant cette malheureufe affaire »
n’avoit jamais cté chargé par perfonne de faire faire la
moindre pouriuite , de faire donner la moindre aflîgnation ; qui lui a dit que M e . D e f v i g n e t , que cet Officier
public étoit par nature & parhabitude un homme tel qu’ii
l’a fait dépeindre ?
Etoit-il également de la caufe de Vichard qu’on lût dans
fon M é m o i r e * que Me. Defvignet ou le Praticien avide ,
( pour le nommer comme il le n om me ) avoit jette un dé-
voLut fur les deux Domaines & la Maifon de lui. Vichardt
& q u il comptoit déjà par fes doigts combien i l ja llo it faire
de frais pour s ’en rendre acquéreur par fon exécutoire ?
Q uelle idée affreufe de pareilles expreffions ne laiflentelles pas concevoir d’un Procureur ? mais n’efl*ce pas là
vifiblement un fimple crime de projet & d’intention, im.puté à Me. Defvignet uniquement pou rle rendre odieux ?
car quand la faifie réelle dont il s’agit entre les Parties
principales de ce procès., auroit du produire à M e . D e f
vignet autant de frais que la valeur des deux Domaines
& d e la Maifon de V i c h a r d , peut-on croire que M e . D e f
vignet n’eut pas plutôt employé le montant prétendu de
fon exécutoire aux affaires de fon E t u d e , qu’à l’acquifitijon d ’une chetive Maifon de payfan dans un Fauxbourg
de Moulins
de deux Domaines dans un Village où M e .
Defvignet n’a pas un pouce de te rr e, & qu’il ne connoît
môme que de nom ?
Etoit-il encore de la caufe de Vichard de faire impri
mer * que Me. Defvignet a demandé le prix delà vente de
fes biens avec une hardie]]c cinique , & aproteflé dans un acte
authentique qu i i ne veut quitter prife que Jorfqu'il aura
epuifé fa fubflance & dévoré toutefa fortune ? & d’appliquer
en conféqucnce à Me. Defvignet ce vers d’Horace , qui le re.
�préfenteroit fous l’image odieufe d’un infefte non moins
vil que fanguinaire : non miffura cutem ni(l plena cruoris
hirudo ?
j
E h ! quel efl: donc cet a&e authentique où M e . Def*
vignet auroit montré une hardieffe cinique par fes deman.
d e s , & auroit fait l’horrible autant que finguliere protefïation qu’on lui impute ? c’eft un commandement fait à
V ic h a r d , à la requête de R i b i e r , le 6 Août 1 7 7 2 , de payer
entre les mains de M e . Eftopy Defvignet le reftant "des
créances dues à lui Ribier & les dépens adjugés par la
Sentence du 4 du même mois ( c ’eit celle dont eil appel
de la part de Vichard contre Ribier. )
Mais Vichard veut ici faire prendre le change où il le
prend lui-même. L e reftant des créances de Ribier dont
il s’agiiToit dans le commandement, c’étoientles frais des
procédures de faifie réelle : & les dépens dont il y eil
auifi parlé étoient ceux de la Sentence confirmative. O r
c ’étoit Me. Defvignet qui avoit avancé tous ces frais &
dépens pour Ribier ; il étoit donc jufte qu’ils lui rentraffent, & que Vichard condamné par la Sentence à les
p a y e r , ¿es verfât dans Us mains de M e. Defvignet. Et voilà
ce que porte le commandement. Mais eft-il rien déplus
n a tu re l, de plus légitime & de plus fréquent dansl’ufage?
T o u s les jours un homme qui obtient contre un autre des
condamnations de dépens ne lui fait-il pas faire fommatiôn ou commandement de les payer entre les mains de
fon Procureur à qui il les doit, & ne protejle-t-il pas
( comme dans le commandement du 6 Août ) qu’à faute
de ce faire il y fera contraint, même par faifie réelle &
rente de fes biens , pour ¿e prix en provenant être verjè entre
les mains de ce Procureur ?
A qui donc Vichard croit-il parler quand il veut don
ner une chofe auifi fimple, auilî commune & pour ainfi
dire auifi ufuelle que les termes du commandement dont il
s’agit; pour une proteftation authentique de M e . I^efvig n e t , qu’il ne veut quitter pùfe iJ ue 10Tf t} u ^ aurci epuife
la fubfîancc & dévoré toute la fortune de lui Vichard : N ON
�6m
' '
8
M ISSU R A CUTEM N I S I PL E XA CRUORIS HJR UDO ?
Ces grands mots, dans l ’occafion où Vichard s’en fert ,
font abfolument vuides de fens pour tous les Magiftrats,
inftruits qu’ils font des réglés & de Pufage. Ces mêmes
mots font également frivoles pour tous Avocats & P ro
cureurs qui , en lifantle Mémoire de V i c h a r d , voudront
bien faire ufage de leurs lumieres & de leur expérience.
Ces mots enfin ne lignifient r i e n , même pour les moin
dres éleves du P a l a i s , à qui fix mois de travail dans une
Etude ont pu faire voir vingt commandements femblables ?
C e n ’eft donc qu’aux y e u x des feuls le&eurs non verfés
dans la pratique & dans le d ro it , que Vichard peut jetter
de la pouifiere , par toutes fes déclamations contre
M e . Defvignet au fujet de la teneur du commandement ;
il n’en peut donc réfulter que de la diffamation pour
M e . Defvignet auprès du vulgaire , & non pas des
m oye ns pour la caufe de Vichard auprès de fes Juges.
Etoit-ce enfin pour l ’intérêt de cette caufe de Vichard
^age 29 & 30. qu’il falloit qu’on lut dans fon Mémoire * que cétoit un
doux efpoir pour le Praticien E flo p y , après qu’i l auroit
fa it vendre les deux domaines & la maifon de Vichard , pour
le prix en provenant être verfé dans fes mains , de voir ce
malheureux & toute fa fam ille folliciter vainement à fa
porte le fecours humiliant de iaumône S
E h quoi Vichard ! vous cr oyez donc qu’il exifte quel
qu’un fur la terre pour qui ce foit un doux efpoir que
celui de faire des malheureux, pour rebuter cnfuite leur
miferc après l’avoir caufée ! mais que vous*a fait Me. Defvignet pour vous faire penfer q u ’il pourroitêtre ce tigre?
qui vous a révélé les dilpofitions iecrettesde fon cœur pour dire q u ’après qu’il auroit fait vendre h fon profit votre b ie n ,
vous folliciteriez vainement fa porte le fecours humiliant
de l ’aumône ?quc fait ici l'aumône & la facilité ou la dureté
de Me. Defvignet à cet égard pour votre procès ? &
quand cela y ferviroit, quels pauvres fe font inutilement
préfentés à la porte do M e . Defvignet ? quels font ceux
que fes exécutoires y ont conduits, parmi les parties adver-
�9
fes de Tes nombreux clients ? o u i , de Tes nombreux clients:
car enfin vous le forcez ici à vouç dire , malgré fa^répu
gn an c e, q u ’il a eu le bonheur d’çtre jufq.u’ici un'dés Pra*
cureurs de fa"Yillé lês'plus occupés.
■ > ~v
' Conciliez donc , fi vous le p o u v e z , aVec cette vérité
inconteftable les reproches que vous lui faites , lçs traits
dont vous le défigurez. C e Praticien avide , cet ardent Pra
ticien qui combine par fe s doigts les fra is qu’il doit faire
avec la valeur des biens qu'il veutVnvahïr, a v o i t p o u r t a n t ,
quand vous l’aVez dénigré par Votre M é m o i r ç , une de$
plus be lle s, des plus nombreufes , des plus'honorables
clientelles de la Sénéchauflee de Moulins. O r c ro yez -vo us
que ce foit en multipliant les frais qu’il fe.la fut faite , l u i ,
qui ayant acheté un titrée nu , il'y, A quatorze a n s ^ c o m
mença fôn‘ étude avec un quarrë de.p3piei‘!?tPenfez,-vouë
que toutes les affairés qu’il a fait;juger depuis ce témps-li
il les ait gagnées? qu’il n ’y en ait pas au contraire plùueur&
qu’il a perdues , & dont par cooféqueot‘les frais lui, ont
été payés par fes propres clients? Si donc Ces clients avoien.t
trouvé ces frais exce.iïifs, quelqùés-ufn5 d’eufr àu moins né
senferoient-ils pas p l a i n t , &"fon étude, tle feroit-ellé p ai
peu 5 peu devenue déferte ? £epcndant elle a a.çigmcnré d&
jour en j o u r : aucun de fes" client^ , qu’il f â c h é , n e T à
quitté par mécontentement perfonnel : tous ¡l’éftimbient,
le coniidçroient,plufieurs même étoientTés*apis particu
liers avant votre Mé m oir e; nédirtîmûloiiis'riçn ,'ils lefonc
encore depuis. Voulez-rvous q p ’il vouS~rnpiitré lés lettresqu’il en a reçues pour lui adouci’r l’amertume qiV’il à refletiti de vos traits ?
L
Mais il vaut mieux vous renvoyer h l’attcftation <Ju
Tribunal même .devant lequel il exerce fep fondions de;pijis i 4 années. Liiez cette ¡iiejce à là 'fin ‘de céf imprimé.
V o y e z y tous les Officiers-Magiftrats de’ là Sciiéchatiff’ée & Siege Préfidial ¡du Bourbonnois', Tém oins' dculaires , Cenfeurs & premiers ‘ Jugés-nés de la con^
düite & des démarches des Minières fubalternes de
la Juftice . A T T E S T E R D A N S L A C // A
RÈ
4 ■% »■ -j w î it i J*
C; J » .
�G iL "
10
D U C o n s e i l » que Me. EJlopi D efvignet , reçu Proçu reur en leur Siege depuis i j 6 o , en a rempli les foncH dons avec \ele t q u il ri'a donné L I E U A A U C U N E
:>, P L A I NT J E , que fa conduite leur a. toujours paru être à
» l ' a b r i D U P L U S L E G E R R E P R O C H E , & qu'il s'ejl
conformé aux Règlements , dans les procédures dont i l a
été chargé. »
Quelle différence entre M e . Defvignet peint par V i c h a r d , & Me. Defvignets peint par Tes J u g e s ? les deux
portraits font contradictoires, & il faut de toute néceffité que l ’un foie faux fi l’autre eft vrai. Mais quel eft le
f a u x ? quel eft le vrai ? cela peut-il donc faire un problè
m e , ou ne fuffiroit-il pas pour le réfoudre d’un fimple
.coup d’œil 1 fur les intérêts des deux Peintres? V i c h a r d ,
feul de fon b o r d , n’a befoin que de mentir avec fuccès
dans un M é m o i r e , fur le chapitre d’un homme inconnu
.au Tribunal où il le déchire ; pour empêcher la faifie réel
l e de f e s . b i e n s , éviter les dépens conhderables de deux
in ft an ce s, l’une principale, l’autre d’appel, & fe venger
de. cet homme qu’il regarde comme fon perfécuteur, dé
v o r é de la foif de fa ruine. Qua torze Magiftrats d’autre
p a r t , s’expliquant favorablement fur le compte de ce mê
me iiomm^ q u ’ils ont vu fe former fous leurs y e u x , dont
Ils ont éclairé tous les pas , trahiffent fans intérêt la v é
r i t é , leur devoir , Içur confciénce, en impofent aux J u
ges fouverains lueurs fupérieurs & à tout un public ; il
Tetir certificat eft menteur. Q ue l cil donc lefprit affez pré
venu pour ajouter foi au mal dii Memoire plutôt qu au
bien du certificat ; pour croire que la vérité naïve réiidc
fur les levres d ’un plaideur a u x . a b o i s , & que le menfonge impur eft forti çîo l’aiTembléc dés Juges du peuple ?
. , M^is dira-t-on les]faits ! Les faits parlent contre votre
Pr oc ure ur ; il y en a dans le Mémoire de Vicha rd : tout
xi y eft pas déclamation, tout n’ y . e f t pas lieu c o m m u n ,
.tout n’y eft pas étranger à fa caufe ; on y trouve des faits
¿raves-, des faits pofuifs : & vous ne les détruifezpas.
N o u s allons les détruire.
�L a caufe de Vichard en la C o u r étoit I’àppel par luiinterjette de la Sentence de Moulins du 4 Août 1 7 7 2 ,
qui profcrit les moyens de nullité par lui proposes con
tre les procédures de la faifie réelle de fes biens : entérine
les lettres de refciiîon que Ribier faifîffant avoit prifcscontre un défaveu & de M e . Deivignet & des pourfuites de
faifie réelle, qu’on avoit furpris de lui R i b i e r , dans le pro
cès verbal d ’offres du 18 Décembre 1 7 6 9 ; déclaré infufÆfantes les offres portées parcfcprocès verbal', en ce qu’éllesne conténoient pas les frais de la faifie réelle: débouteVichard & fa femme de leur oppofîtion à cette faifie : or
donne que les pourfuites en feront continuées, & condam
ne Vichard & fa femme aux dépens.
En cet é t a t , les faits de la caufe de Vichard , lorfqu’ila:
donné en la C o u r le Mémoire dont fe plaint ici M e . Defvignet pour ce qui le regarde , ces faits ne pouvoient
être, i ° . que les procédures de la faifie réelle ; 20. le défaveu de llibier inféré au procès verbal d ’offres; 3 0. les
lettres de refcifion prifes par Ribier contre ce défaveu.
4 0 & l ’inftru£lion faite à Moulins fur les demandes refpe£ïives ; l a v o i r , de Vichard en radiation & nullité dé
ia faifie réelle & en validité du défaveu , & de Ribier en
entérinement des lettres de refcifion.
11 faut donc voir fi fur chacun de ces quatre faits géné
raux les inculpations portées par le. Mémoire de Vichard
contre Me. Deivignet font jufles ou non. C a r ceft feu
lement au premier cas qu'il fera vrai de dire qu’il 'y a des
fa its contre lui ; comme il faudra dire au fécond cas , que
le Mémoire qui l’inculpe eft calomnieux.
O r P R E M I E R E M E N T , au fujet de la faifie r é e l l e , il
paroit q u ’on fait un crime à Me. Defvjgnet du fait mûme & de l’intention de cette faifie; qu’on lui reproché
en fuite de l’avoir faite pour une fomme trop modique.;
d ’y avoir procédé trop précipitamment; d’y avoir excé-B 2
.
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t
'ii
dé Ton mandit, en ne fe bornant point à une faifie-exécution des meubles & beftiaux ou des fruits, qui fuffif o i e n t , dit-on , pour acquitter la (jette ; d’y avoir multi
plié , allongé & fait groiîbyer les actes , par envie d’émolûmenter ; d’avoir enfin commis dans ces a£tes plufieurs
nullités d’ordonnance.
V o il à en derniere analyfe tous les faits imputés à M e .
Defvignet par V i c h a r d , relativement aux procédures de
la faifii réelle -, nous dégageons en ce moment ces faits
de tous lés tdrmes injurieux qui les accompagnent dans'
le Mémoire , fauf à en rappeller quelques-uns dans la
difcuifion.
Mais avant que d’entrer dans cette difcuflïon , obfervons
que toute la procédure de faille réelle que Me. D e fv ig
net veut bien juflijîcr ici , n’eft pas de ion fait ni ne iauj
roit l'être en.point dô droit. C e ’iont les Huiifiers qui font
& qui doivent faire les faifies réelles & non pas les P r o
cureurs. Le miniftere de ces derniers y eft é t ra n g e r, au
moins jufqua la derniere c r i é e , ou jufqua ce qu’il y ait
quelque demande. Nous ne v o u l o n s , pour établir cette v é
rité , que le témoignage de Vichard lui-même, faifant écri
re dans fa requête introdüftive, au Sénéchal de M o u l i n s ,
du z8 Décembre 1 7 6 9 , c&s mots efléntiels : toutes les pro
cédures ( de faifie réelle ) que les fuppliants ( Vichard &
fa femme ) ont éprouvé , n'ont aucun rapport avec le mi
nifie rede Procureur ; l'acle en vertu duquel on les a pourfu iv is ejl notarié ; & toutes les procédures qu’on leur af a i
tes /ont ahf'olùment de la fonBion des Huiffiers , de forte
que tout Procureur paroît étranger à cette affaire , fi cen ejl
qu'on le confliiue ; mais le temps de fes fonctions dansfem blable matière n ’étant pas encore venu , cette conflitution ne
change rien.
Ainfi parlôit Vichard à M o u l i n s : Sc par une fuite de
fes principes qui font vrais à la lettre, il n’y faifoit aucun
reproche pcrfonnel à Me. Defvignet fur les procédures
de la faifie réelle. Par quelle fatale contradiction changet-il donc de langage au Tribunal fupéricur? Pourquoi des
�procédures qui , à M o u l i n s , ne préfentoient aucun crime
pour M e . D e f v i g n e t , font-elles en la C o u r autant de cri
mes pour lui ?
O n fait b i e n , dira Vichard , que quoique les Pr oc u
reurs ne paroiffent pas dans les faifies réelles, ce font eux
ou leurs Clercs qui font tout, ou du moins qui écrivent
to u t ; & que les Huiiîiers ne font que mettre leur nom ,
leur matricule, les dates & les parlant à , aux différents
aftes.
Mais Vichard fe trompe. T o u t ce q u ’il dit-là peut arriver
lorfque les Huiifiers ne font pas aiïez inftruits : mais on
connoît l’habileté de ceux du B o u rb o n n o i s, & Vichard
n’ignoroit pas que celui employé par Ribier n’avoit pas eu
befoin des fecours du Procureur.
D ’ailleurs, avec ce beau raifonnement,cette belle fcience
que les Procureurs font tout , & que les Huijjiers ne font que
des prête-nom, les Huiiliers font toujours les feuls garants,
aux y eu x des Magiftrats & de la loi, des vices des procédu
res d ’une faifie réelle. E u x feuls répondent en Jujlice de
ces procédures : fur eux feuls peut tomber la peine des
prévarications & des vexations quelles contiendroient ;
& un jugement qui en frapperoit d’autres têtes feroit illégal.
Mais malgré ces obfervations folides, viftorieufes fon
dées fur la loi , & d’après lefquelles il eft incontestable
que les procédures fur lefquelles nous nous trouvons ici
forcés par le Mémoire de V i c h a r d , de faire l’apologie
de Me. D ef vig ne t, étoient en point de droit comme en
point de fait abfolument étrangères à ce Procureur ( pour
nous fervir des propres termes de Vichard ) voci cette
apologie.
E t d ’abord n’eft-il pas bien fingulier qu’on impute à
M e . Defvignet le fait même de la faifie réelle confklérée
dans fon principe ? comme -fi Me. Defvignet avoit été
chercher le Créancier dans fon village de faint Bonnet
pour lui demander le titre qu’il avoit contre Vichard ,
fon débiteur, demeurant à Lufigny.^
Vichard devoit à ce créancier , ( à Ribier ) par obli-
�6n
14
*pa„e
gatîon en forme exécutoire du 1 Juin 1 7 6 9 , unefom»
me de 287 livres 3 fols 9 deniers , compofée de plufieurs dettes particulières , & entr’autres du montant de
cTeux obligations précédentes également en forme exécu
toire , & de 52 livres de frais de pourfuites que Ribier
avoit été forcé de faire , & qu’il avoit faires inutilement
pour raifon de ces deux obligations antérieures.
Cette obligation de 287 livres 3 fols 9 deniers du 2
Ju in 1 7 6 9 , Vichard devoit l’acquitter au 24 du même
mois ,
cIue ce ^a
^c r'r dans l’a^ e » & quand il
nous vient dire * qu’ il fut verbalement convenu entre les
parties que ce délai ne feroit pas rigoureux r on fait ce
qu’il faut penfer de ces allégations 'de prétendues conven
tions, verbalçs , lorfque les a£les les démentent.
" Q u o i qu’il en f o i t , Vichard ne paya point au terme :
en c o n f é q u e n c e le premier Juillet fuivant Ribier lui fit
faire un commandement préparatoire, mais qui ne produifit rien ; cependant Ribier attendit encore jufqu’au mois
de N ovem br e fans faire d’autres pourfuites. Mais alors
prefle lui-meme par la néceifité de fes affaires, il fe ren
dit à Moulins & remit fes titres à M e . Defvignet avec fa
procuration en blanc , fuivant l’ufage , en date du 7 du
même mois de No vem br e 1 7 6 9 , & par laquelle il donnoit pouvoir de faire faire à fa requête tous les acles de
commandement recordé, procès verbal de difcujfion , faifie
réelle & pourfuites jufqu à interpofition de decret & diflribution de deniers , de deux domaines & d’une maifon ap
partenants à Vichard & fa femme , à l'effet de procurer
au conflituant le paiement des créances à lui ducs , fuivant
fes titres , &c. &c.
M e . D e fv ig n e t , en conféquence de cette procuration,
remit les titres de Ribier à l’Huiifier Guillet , qui avoit
fait le commandement fimple du premier Juillet précé
dent , & qui fit le 9 du même mois de No vem br e un
commandement recor dé , que fuivit un procès verbal de
difcuifion de meubles ou plutôt de carence du 1 4 du
même mois , & enfin la faifie réelle des 16 & 1 7 .
�O r p eu t- on méconnoître dans tout cela l’intention &
la volonté marquée du créancier, de fe procurer le paie
ment de ion dû par la voie de la faifie réelle des biens
de Ton débiteur ? peut-on n’imputer qu’à Me. Defvignet
fi Ribier a pris cette voie rigoureufe ? peut-on dire que
c ’eft là une procédure ourdie & machinée dans la poujjiere
de l etude d un Praticien avide qui cherchoit une proie ?
peut-on dire même que Ribier n’eut pas eu pour ion dé
biteur , avant que d’en venir à cette extrémité, plus d’in
dulgence que l ’autre ne devoit en attendre?
L a faifie réelle eft rigoureufe fans doute , mais on ne
voit pas pourquoi on la taxeroit d ’être odieufe : les loix
l’autorifent formellement; & elles en rejettent tout l’odieux
fur le débiteur qui , par fon refus de payer , la rend néceffaire; c’eft ce que Ribier a démontre par fon mémoire.
11 y a plus , nous connoiiTons dans h droit & dans l’u.fage quatre fortes de contraintes ; la faifie arrêt des fommes
dues , la faifie exécution des meubles ou des fruits , la
faifie réelle des immeubles , & l’emprifonnement de la
perfonne dans certains cas. O r les loix permettent d’exert e r à la fois toutes ces contraintes : de forte qu’un créan
cier qui feroit porteur d’une condamnation par corps ,
pourrait dans le même temps arrêter les revenus de fon
débiteur , exécuter fes meubles , faire vendre fes immeu
bles par d é c re t , & emprifonner fa perfonne. On convient
que s’il le faifoit il paiferoit pour dur , mais il ne feroit
pas ce qu’on appelle réprehenfible aux yeux de la loi ,
puifqu’il ne feroit qu’uferdes droits qu’elle-même lui don
ne ; il manqueroit peut-être aux procédés , mais il feroit
à l’abri de toute animadverfion au côté des procédures.
Comme nt donc Vicliard a-t-il pu fe flatter de faire trouve r du crime & de la vexation de la part de Ribier &
de Me . Defvignet , dans le feul projet, dans le feul fait
d’une faifie réelle ?
;
. /
En fécond lieu , pour ce qui eft de la modicité c!e la
fo m m e d u e à R i b i e r , c’eft u n des points fur lef quelsyichard s’appuye le plus pour crier à Ja vexatjon , à l’m-
�\6
juftîce , faifant contrafter cette f o m m e , qui n?eft que de
287 livres , avec les frais de la faifie réelle qu’il fuppofe
Être de 1 5 0 0 livres , & cherchant à exciter davantage
l ’indignation par l’ idée de quinze cents livres de fra is 3
pour deux cents quatre-vingt-fept livres de capital.
Mais on verra dans la fuite q u ’il faut commencer par
retrancher plus de la moitié de ces prétendus quinze cents
livres de fra is. E n attendant , où Vichard a-t-il pris que
28 7 livres de capital fuiTent w/z<? fomme modique ? tout eil
refpeBif dans la nature des chofes. Mais d ’un côté 2 8 7
livres n’étoient pas fans doute une fomme modique pour
V i c h a r d , lui qui avant , qui depuis I3 date de fon obli
gation du 2 Juin jufqu’à l’inftant de la faifie réelle, n ’a
voir pas pu la payer même en partie, malgré les pourfuites antérieures à cette obligation & dont elle fait f o i ,
& malgré le commandement préparatoire , le comman
dement recordé & le procès verbal d e carence, poftérieurs*
II fallut même à Vichard pour chercher & pour trouver
cette fomme , félon lui fi modique, & pour l’offrir à Ilibier dans le deffein d ’arrêter les pourfuites de la faifie
réelle , il lui fallut vingt-cinq jours entiers. C a r malgré
la précipitation qu’il dit * avoir mife dans cette recher
che des 287 livres, après qu’il fut un peu revenu , d i t - i l ,
de la l’urprife où l’avoient d’abord jette ce q u ’il appelle les
effrayantes pourjuites de Ribier ; il y a vingt-fix jours d’in
tervalle entre la dénonciation d e l à faifie réelle à lui faite
le 23 N o v e m b r e , & fon procès verbal d ’offres du 18
Déce mb re.
D ’un autre côté 287 livres n’étoient rien moins qu’une
fomme modique pour Ribier. Cet homme n’a ni fonds ni
rentes. 11 vivoit dans fon Village du produit de fon C a ba
ret. O r les ch ofe s, encore un c o u p , font fortes ou modi
ques par relation.
. Mais ¿1 quoi nous amufons-nous i c i ? N o u s avons à dé
fendre du crime de vexation l’auteur d ’une faifie réelle ,
faite pour 287 livres: & nous avons à le défendre moins
devant ce public compatiffant & humain, qu’il eft aifé de
faire
�17
faire friffonner par ces feuls mots : quinze centsfrancs defrais
pour deux cents quatre-ving-jept livres de principal , mais
qui d’ailleurs ignore ce que c ’eft q u ’une faifie réelle &
pour quelle-fomme on peut l’a faire ; que devant des M a - •
giftrats auffi intègres qu’éclairés , qui favent quefuivant
la Jurifprudence & le fentiment des Auteurs, ilfuffitd'être
créancier d'une fomme qui pajfe cent livres pour pouvoirfaire
faifir réellement tous les immeubles d'un débiteur ; qu’il y a •
autant de formalités à ob fe rv er, & par conféquent autant
de frais à faire pour une faiiîe réelle , dont la caufe\ ne
feroit que de cinquante é c u s , que pour celle dont la ,
caufe feroit d’un million; & qu’enfin il faut également au*. :
tant de formalités & de frais pour un petit objet faifi que pour
un grand ; pour une chaumiere que pour un Palais.
Q uelle eft donc la réponfe la plus péremptoire que
nous puiifions faire à Vichar d- fur fon reproche a&uel?
c ’eft de lui oppofer les principes de la matiere qui dé
montrent la faufleté & la futilité de ce reproche. C ’eft
de lui dire , il ne s’agit pas ici de crier comme des enfanté,
au milieu d’autres enfants; nous combattons devant des
hommes identifiés, pour ainfi d i r e , avec la loi même ; c’eft
donc avec des armes tirées des arfenaux de la loi qu’il faut
nous attaquer & nous défendre. O r vous m’objeûez qu’une
faifie réelle eft vexatoire , fous prétexte qu’elle eft faite
pour une fomme trop modique de 287 livres ; mais en
cela vous ne pouvez vous appuyer d’aucune forte d’au
torité. Et moi je vous réponds que cette fomme de *87
liv. cil beaucoup plus forte qu’il ne faut pour autorifer une.
faifie réelle , fur-tout en Bourbonnois , où ilfuffiroit dé cent
livres. Et j'ai pour garant le C o m m e n t a t e u r de cette
c ou tu m e , qui fait notre commune loi. Et j’ai également
pour garant de la fufFifance , de la iurabondance même de
la fomme tous les Tribunaux de la France, fans peut-être
une feule exception ; car ceux q u i , comme le Châtelet de
Paris, ne fe bornent pas à cent livres pour autorifer une fdifie.
réelle , fe contentent tous de deux cents livres. J e fuis donc
ici dans les principes pour me défendre , & vous 11’y êtes
�pas en m’attaquant : votre moyen a&uel de vexation pré
tendue, n’eft donc pas un moyen juridique.
E n troijîemc lieu , 1e reproche de précipitation dans les
pourfuites n’a pas plus de fondement. D ’abord celui qui
11e fait que les procédures qu’il lui eft permis de faire par
la loi m ir n s , .& qui né les fait pas dans.un temps où la
loi lui défend de les faire, ne peut pas être accufé de les
avoir faites trop tôt. Mais il y a pl us : la loi forçoit ici
l ’auteur des procédures à ne pas perdre de temps.
E n effet la coutume de :B o u r b o n n o i s , l’Edit des criées,
c e lu i des Commiffaires aux faifies réelles, l’ufa ge.de la
Sénéchauffée de Moulins , tout en un mot exigeoit ,
i q u e la faiiîe réelle, une; fois fa it e, fût enrégiftrée au
Bureau des faiixes réelles & au Greffe de la Jurifdi£lion
dans les trois jours francs ; . i ° . que par la dénonciation
de la faiiîe réelle au faiii ( laquelle dénonciation 3 ainfi que .
les affiches , le créancier peut faire quand il lui plait, même
dès ïe lendemain des enrégiftrements;) ce même créancier,
indiquât le jour où fe feroient tant les affiches que les,
criées ; 3 0. que la premiere criée fût faite précifément
au bout de la quinzaine, à compter du jour de la dé
nonciation des affiches; 4°. & qu’enfin tout cela fût
exécuté à la lettre , à peine, de nullité pour un jour plus
tard.
O r examinons; mais faifons-le, pieccs S: règlements en
m a i n , car c’eft ainii qu’il faut agir pour ne pas argumen
ter , répondre & décider en aveugle dans ces matières ar
dues & peu communes.
: D ’abord la fai fie réelle eft des. 16 Si 1 7 No vem br e 1 7 6 9 ;
mais certes 011 ne peut pas dire quelle fut précipitée d’après
un commandement préparatoire du premier Juillet, un autre
recordé du 9 N o v e m b r e , & un procès verbal de difcuifion du 1 4 .
A l’égard de l’ enrégiffrement de cette faifie au Bureau
des faifies réelles il ell: du v i n g f, & renrégiftrement au
Greffe de la Sénéchauffée eft du 2 1 . Mais un jour plus
tard les trois jours francs depuis le 1 7 auroient été paffés,
�19
toyt fe feroit trouv^ nul\ il n’y avoit donc pas là en
core de précipitation..
‘
, Q u a n t ' à la dénonciation de la faifie réelle faite à V i - .chard, elle cil du 23 , & les affiches font du 24 : or nous
conviendrons que ces deux a£tes auroient pu être recu
lés , parce qu’à cet égard le créancier pouriuivanteft plus
maître de fa marche ; mais fi la loi ne l’oblige pas à la
;hàter cette m ar ch e, rien ne l’oblige non plus à la retarder;
;fur quoi donc fe fonderoit-on pour l’accufér de l’avoir
■précipitée? il p o u v oi t, pour la dénonciation & les affiches
feulement, faire plus tard les a ô e s ,qu’il a faits le 23 &
le 24 , tranfeat; mais il pouvoit auffi les faire ces jours-là
& même plut ôt , puifqu’à la rigueur le premier de ces
deux a£tes pouvoit fe faire, le’ 22 & lejfecond le 2 3 . Ces
deux a£les auroient même p r ê t r e faits plufieurs joiirs
auparavant: pour cela il n’y auroît eu qu’à faire enrégiftrer plutôt la faifie réelle , ce qu’il étoit libre au pourfui.vant de faire le jour même de fa date : ( car les trois jours
francs pour enrégiftrer font afin qu’on ne les laiffe pas
paffer ; mais il n’eil pas défendu de prévenir l’inftant de
l e u r expiration.)
Pour ce qui eft de la premiere c r i é e , elle devoit être
faite Jlriclemcnt dans la quinzaine cîu jour de la dénon
ciation des affiches, parce que l a (coutume & l’ufage de
la Jurifdi£lion le veulent ainfi ; or ces affiches faites le
24 N o v e m b r e f u r e n t dénoncces le vingt-cinq ; le jour de
J a criée tomboit donc forcément le dix D é c e m b r e , &
.c’eft précilément ce jour-là qu’elle fut faite.
Enfin cette premiere criée ( du dix D é ce m b re ) la feule
q u ’on ait faite, eft la dernicre des procédures contre les
quelles Vjchard eft fi fort animç.: cet Adverfaire fit fes
offres telles quelles le 18 du même m o i s , & tout ceffa dans
l’jnftant, quoiqu’on fut en droit de continuer les criées
nonobitam tout, fuivant l’article 1 4 3 de la coutume.
Maintenant quelle précipitation vexatoire peut-on re
procher à une- feule de ces procédures? ^
^
V o il à c e p e n d a n t ces p ro c é d u r e s dé no nce es à la févéC r
�20
rite de la Juilice & à l’indignation du public par le Mé"Pages iS & *9. moire de Vichard * ? quinze cents livres de frais faits en
2 j jours pour le paiement de %8y liv . belle phrai’e fans
doute & même vraie en tout ( il ce n’eft dans l ’exprefiïon de i 5 oo livres de fra is, laquelle , encore un c o u p ,
eft exagérée de plus de moitié. ) Mais combien, de
faifies réelles ont été conduites jufqu’à la premiere
criée , dans un temps encore plus c o u r t , & ont engendré
encore beaucoup plus de frais? Q u e Vichard s'informe
de cette vérité à fon Procureur à M oul in s , qu’il s’en in
forme à tous les autres Procureurs de cette derniere V i l l e ,
& à tous ceux du R o y a u m e qui ont eu des faifies réelles
dans leurs études. Sa phrafe eft donc de la déclamation toute
p u r e , propre , fi l’on ve ut , à é b l o u i r , à féduire même
q u el q u e s per fonnes, mais non pas à convaincre des
Magiftrats.
E n quatrième lieu , l'imputation faite à M e . Defvignet d’avoir excédé fes pouvoirs en"paflant jufqu’à la faific
réelle , au lieu de s’arrêter à l'exécution des meubles ,
fruits & beitiaux du débiteur, plus que fuflifants, dit-on,
pour acquitter la dette; cette imputation eit d’une fauffeté
démontrée par les termes feuls de la procuration que nous
avons tranferite plus haut.
E n effet, la procuration parle bien de difcuffion , mais
il n ’y eft pas dit que le Mandataire n ’iroit pas plus loin ;
le contraire même faute aux y eu x à la (impie leflure :
R ib ier charge fon Mandataire de lui procurer le paic~
ment de fes z 8 j livres , & cela par tous les acles de com
mandement recordé , procès verbal de difcuffion , faifte
réelle & pourfuites jufqu’à vente , interpofition de décret
ùdiflribuiion de deniers : tels f o n t , encore un coup , les
termes de' la procuration dont il s’agit, termes qui fonc
mèmode /7y/c dans toutes les procurations données c om
me celle-ci pour faire une laifie réelle. Peut-on dire d’aPage i j ;
près cela , comme fait Vichard , * qu'on lit dans cette
procuration quavant de procéder à la ¡aifie réelle R ibier
e n t e n d quon EPU ISE la voie delà diifcujfion.mobiliaire /
�21
Ribier n’entend pas qu’on épuïfe rien ; il entend qu’on lui
procure fon paiement , & voilà tout.
D ’ailleurs il plaît à Vichard de dire que le prix de fes
meubles , de fes beftiaux & de fes fru its, que celui même
des fruits fans le re fte , étoit capable de furpayer la dette.
Mais fi cela étoit , que ne les vendoit-il donc lui-même
ces fruits pour faire ce paiement ? averti qu’il étoit des
approches d’une faifie réelle par tous les a&es qui précé
dèrent , à partir du premier Juillet ; s’il avoit eu tous les
fr u it s , toutes les denr ées , tous les beiliaux & le mobilier
dont il parle , ne s’en feroit-il pas dépouillé volontaire
ment en tout ou en partie pourdéfintéreiTer fon créancier?
S ’il ne l’eut pas fait, il eft alors un débiteur de mauvaiie
f o i , qui felaifle faifir dans fes immeubles les mains gar
nies , & q u i dès-là eft indigne de la compafîion qu’il voudroit-exciter. O r comme bien certainement il ne l’a pas
fait ; s’il veut pafler ici pour avoir été dans le temps un
débiteur de bonne f o i , il faut qu’il convienne qu’il en impofe dans ce moment au fujet des beftiaux , des fruits &
du mobilier dont il fe vante.
Eh ! faut-il au refte d ’autre preuve aux yeux de la Jufti.
ce , comme quoi ce mobilier , & ces beftiaux & ces fruits
étoitnt des êtres de ra ifo n, qu e le procès verbal fait le 1 4
Novembre , deux jours’avant la faifie réelle ? Ce procès
verbal la contient cette fameufe difcuflion mobiliaire qu’o n
reproche tant & fi mal-à-propos à l’auteur des procédu
res de n’avoir pas faite ; mais l’Huiflïer qui fe préfentoit
pour faifir & exécuter les meubles, grains & beftiaux de
V i c h a r d , eut beau faire les perquisitions les plus amples
{/ans tout le domicile de ce débiteur & lieux circonvoijtns,
il n’y trouva que les meubles mis par l’Ordonnance à l’abri
de les pourfuites, & en conféquence il drelia fon procès
verbal de carence.
Cette prétendue carence , dit-on , n etoit qu un fimula-*
cre un jeu prémédité , une formalité vaine , pour avoir
occa’ fion de faire la faifie réelle dont évidemment on
avoit déjà préparé toutes les batteries, avant même défaire
�le procès verbal de carence ; car fans cela comment tant
d’ailes (î voifins qui ont paru coup fur c o u p , dont il y
a eu tant de copies & qui font fi l o n g s , auroient-ils pu
être prêts au jour & au moment ? On étoit donc d’avance
bien décidé à faire un procès verbal de carence , foit qu’il
y eût des meubles, foit qu’il n’y en eût pas : on vouloit
donc vexer le débiteur.
Vo il à ce que l’inattention ou la prévention peuvent
faire dire à tout hazard : voici ce que la connoifTance de
l’ufage , celle des faits, & le vu des pieces autorifent à
répondre avec certitude.
Dans l’u f a g e , quand un Huiflïer eft chargé de pourfuivre un débiteur jufqu’à la faifie réelle de fes biens, 6c q u ’il
veut cependant ou qu’il doit commencer par la difcuflion
mobiliaire, il s’informe préalablement s’il y a ou non chez
le débiteur des meubles faififfables ; & il s’en informe ou
par des émiflaires ou par lui-même , foit lorfqu’il va faire
les commandements préparatoires, foit en allant chez le
débiteur fous quelque autre prétexte, ou même e x p r è s &
fans prétexte. Si les connoiflances qu’il acquiert font pour
Vexiflence de meubles faififfables , alors il ne fonge po in ta
la faifie réelle , & i l fedifpofefeulementàexécuterces meu
bles. Q u e fi au contraire fes connoiflances font pour le
défaut de tous meubles , autres que ceux de l’Ord on na nc e ,
pour lors il fonge à la faifie réelle , & il en prépare les ma
tériaux , avant même , fi l’on v e u t , d e s ’être tranfporté au
domicile du débiteur pour y drefler le procès verbal de ca
rence des meubles ; mais en cela il ne fait rien de vexa toire & qui ne foit très-licite , puifque dans cette liypothefe 011 le fiippofe inrtruit que véritablement il n’y aura
pas de meubles faififlables.
O r ici , fans parler du commandement fimple du premior J u i l l e t , l’Huflicr avoit fait à Vichard ion comman
dement itératif le neuf Novembre , c’ei l- à-d ir e, cinq jours
avant le procès verbal de carence , lequel cil du 1 4 , &
fept jours avant la faifie réelle , qui fut commencée le feize
& linie le lendemain. Il avoit donc pu au plus tard ce
�23
jour-là n eu f Novembre fe convaincre du manque de meu
bles , & partant commencer dès ce moment à drefler les
a£tes de la faifie réelle. Mais depuis le neuf No vembre
jufqu a la veille de la premiere criée du 10 Décembre,
la feule qui ait été faire, il y a un mois tout entier, par
conféquent aflez & même plus de temps qu’il n’en falloit
pour que l’Huiflîer f e u l , avec tout au plus deux Copiftes,
nflent fucceflivement toutes les procédures qu’il y avoit
à faire jufques & compris la premiere criée.
Il y a plus, quand l’Huiflïer & les deux copiftes que
nous lui donnons feulement ( tandis qu’on fait que dans
ces fortes de cas ils en prennent des quatre , d z s fix , d es d i x ,
fuivant qu’ils font preiïés) quand l’Huiflîer avec deux c o
piées , difons-nous , n’auroient commencé à écrire que le
jour même du procès verbal de carence du 1 4 N ovem br e,
& après fa clôture, ils auroient encore pu drefler
copier aifément toutes les procédures dans l’efpace des
j o u r s , qui fe trouvent entre le 1 4 Novembre & le
9 Décembre , veille de la criée.
C a r il ne faut pas croire aux exagérations de Vichard
fur la longueur & le nombre des rôles de ces procédu
res. Il y a bien pour chacune, d’abord une minute ou
origin al , enfuitedesco/^'ei, &: enfin une expédition grojfoy é e : mais il ne faut pas mettre ici en ligne de compte ces e x
péditions grofloy'ées, parce que l’Huiifier les fait ou les fait
faire à fon aife après les opérations finies. Il ne faut donc
compterque lesoriginaux & lesco pies , comme le toutayant
c)ù être fait dans lecercle des vingt-cinq jours en queftion ,
parrro/iperfonnes ; f a v o i r , l’Huiflier & deuxeopiftes.
O r les a£tes dé procédures dont il s’agit coniîftent,
i #. Dans la faifie r é el l e, dont l ’original contient dix
rôles 3 & dont il a fallu une feule copie auflide d ix tôles ,
pour la dénoncer dans la fuite au débiteur; ce qui fait
pour la faifie réelle en tout vingt r ô l e s , c i ,
. . 20.
*2°. Dans l’exploit de dénonciation , dont t original con
tient quatre rôles & demi & la copie autant, ce qui fait
neuf rô le s, c i ,
.............................................................. 9 *
�6 a *6
* P^ge aj>.
r 24
3 ' . Dans les affiches de L u f i g n i , lieu de la fituation
des Domaines faifis, l’original defquelles affiches contient
dix-huit rôles , dont il a été fait quatorze copies , revenan
tes avec l’original à 270 rôles , c i ,
.
.
270.
4 ° . Dans les affiches de M o u l i n s , où eft fituée la Maifon auifi fa if ie , defquelles affiches l’original eft pareille
ment de 18 rôles, & les copies font au nombre de vingtdeux , ce qui fait pour l’original & les copies trois cents quatre-vingt-quatorze rôles , ci ,
.
.
394.
5 0. Dans la dénonciation des deux procès verbaux de.
ces affiches, laquelle dénonciation a deux rôles de minute
ou o r i g i n a l , à quoi ajoutant deux rôles auifi pour la
copie , enfemble trente-fix rôles pour la copie des deux
Procès verbaux de chacun 18 rôles , cela fait quarante
rôles en t o u t , ci ,
.
.
.
.
40.
6°. Enfin dans la premiere criée faite en trois procès
verbaux différents, parce qu’il a fallu la faire en trois
Eglifes différentes, l’original de chacun defquels procès
verbaux contient vingt r ô l e s , ce qui fait pour les trois
foixante r ô l e s , & autant pour la feule copie qu’il a fallu
de chaque procès verbal à fin de l'afficher', ce qui fait en
tout pour original & copie cent vingt r ô l e s , c y , . 1 20.
E n additionnant préfentement tous ces rôles il en réfulte un total définitif, non pas de 2 b i6 rôles ( comme il
cft dit au Mémoire de Vichard * ) mais bien de 853
r ô l e s , dont 1 1 2 d'originaux écrits à peu-près en expédition
de Notaire & fur du périt papier de deux fo ls la feuille , &
les 7 4 1 rôles reftants font les copies des uns ou des au
tres de ces mêmes originaux , c y ,
.
.
.853
O r diftribuez ce nombre de 853 rôles à trois hommes
feulement , cela ne. fait pour chacun que 284 rôles,
cy,
•
•
•
•
•
•
284*
Do nnez en fuite à chaque homme vingt-cinq jours pour
remplir ia tâche ; & vous n’exigez de lui qu’onze rôles &
quelques lignes par jour.
Mais quel eft le Scribe qui ne copiera pas en un jour
onze rôles d ’expédition de Notaire étant fur du petit
papier
�papier de deux fols ? ou plhtôt quel eft le Scribe qui n ’en
copieroit p a s , fans fe g ê n e r , vingt par j o u r ? Et d’après
cela que devient l’impofante obje&ion tirée de la préten
due préparation antérieure des a£les de faifie réelle, con-.
tre la fincérîté du procès verbal de carence ? ; * ; • "■'[
Il e llfa u x en lui-même ce procès v e r b a l , dit Vidhard
& la faifie réelle ( d u ) 6 Novembre ) en fournit la preu
v e littérale , puifqu’on y faifit tous les befliaux gros & menus gami(fants acluellemcnt les lieu x , d’où il s’e n f u it , fé
lon V i c h a r d , q u iln y a v o it p a s carence le 14 . Pourquoi
d’ailleurs, ajoute-t-il, l’Huiflîer, qui trouvoit des beftiàux
au moins ce même jou r 1 6 , n’en iaifoit-il pas une faifie
mobiliaire ? Enfin , pourfuir-il, je demande à faire preuve
par témoins que même le 1 4 , jour du procès verbal de
carence , il y avoit dans mes domaines plus de chofes
mobiliaires de toute efpece qu’il n’eri falloit pour vous
payer.
'
J
Les réponfes à tour cet argument f o n t , que de dire
qu’un a£le eft faux fans pafler à Vinfcription , c’eft abso
lument ne rien d i r e , le principe eit fur ¡k général : qu’il
eft auiTi de principe que fans cette infcription' on iveft pas
recevable à demander la preuve teftimoniale contre le co n
tenu en aucun a£le : que la preuve littérale que Viehard
croit trouver d e l à faufleté du procès verbal de carence,
dans la mention de beftiàux portée par celui de faifie réelle,
eft pitoyable aufli-bien que fa queftion , pourquoi l’Huiffier qui trouvoit des beiriaux en allant faifir réellement
n’en faifoit-il pas une faifie mobiliaire. Ca r enfin , quand
011 faiiît un domaine avec Us befliaux tant gros que' menus
qui le garniffent aclueltemeni, cela ne prouve pas plus
I ’exiftence aduelle d’aucuns beftiaiix, que la faifie réelle
qui feroit faite d’une Seigneurie avec mention e.Ypreiïe desarrieres-pefs, cens , rentes qui en dépendent, ne prouveroir
l'éxrftence atfuelle d'aucuns àtrieres-fiefs parmi les dépen
dances de cette Seigneurie.
■ ;
En point de droit les beftiàux, dans le Bourbonnoisnrrgulierement, font cenfés taire partie des domaines & mai»-
�f o :u de la c i m p a g i i î . Conféquemment quand on y faifit
un. d o n line , on Ja.it toujours mention des befliaux qui le
g x r n iffe n t qu’il y en aie ou non. C ’efttquand en fuite ou
procède au br.iil judiciaire qu’on détaille les beftiaux par
le menu , û efFeÜiveinent il s’en trouve ; & s’il ne s’en
trouve p a s , la mention qu’en faifoit le procès verbal de
la faifie réelle paiTe pour être , comme elle eft en e ff e t ,
fans confequence. Tel s font les ufages de la Province des
Pa rt ie s, (a) d’aprés leCquels elles doivent être jugées.
En cinquième lieu , l’accufation d ’avoir multiplié ,
a l o n g é , & fait groffoyer les a£les de procédure de faifie
ré elle, afin d e m o lu m e n te r, de confommer tous les biens
de Vichard en frais , de porter enfin ces frais à iboo liv.
dans vingt-trois jours ; cette accufation ( comme toutes
les autres) géant dans le mémoire de Vichard , n’eft plus
qu’un nain , ou plutôt difparoît entièrement à la difeufiion.
Les procédures nexcédent p a s , quant à un nombre foit
des originaux foit des copies, les règlements, l’ufage du T r i
bunal , & la nature des objets, (b) Commandement prépa
ratoire , commandement recordé , procès verbal de caren
ce de meubles , procès verbal de faifie r é e l le , dénoncia
tion de cette faifie contenant en même temps indication
des affiches & des c r ié e s , affiches fur les lieux de la fituation des objets faifis mifes à tous endroits où il eft d’ufage d ’en mettre ; procès verbal de dénonciation de ces
affiches à la partie faifie, & enfin premières criées. D ’omet
tre quelqu’une de ces procédures il y auroit eu nullité :
comment de les avoir faites y auroit-il vexation ?
L a longueur & le volume des a&es viennent du nom
bre des articles d'héritages faifis , articles au nombre de
cinquante-neuf, qu’il a fallu défigner en détail paf nature,
fm tation , tenants & aboutiiTants, à peine encore de
nullité.
( j ) V o y e z fur la fin du Mémoire imprime pour Ribier
l ’aile de notoriété du Barreau de Moulins.
(¿) Voyez le meme afte de notoriété.
�*7
M a i s , dir a-t-on, faifir tant de chofes'pour 28 7 livres
41’eft-ce.pas .vexer ?, .
..
N o n ce, nelt pas y.exerdes que la l o i ,le . permet ; la.
plus-pétition n’a p a s lieu en F r a n c e , mêjrie.enrçnatiere de,
faifie , dit d'Héificourt.. Q u i ne (ait que dans l’ufage.de tou*
les Tribunaux on^faifit toujours plus’.qu il n’eiîidû ? cela,
eft même néceffaire , fqit pour éviter qu’une plus ample
faifie que pourrait faire un autre,créancier, ne^çpuvt;îf.&:*
ne rendîrvaine cette première , foit.à, caufe .dés oréinciers
oppofantsqui peuvent furvenir en foule ; car.fi quplqu,’u.n
d’eux prim oitcn hypothéqué ou par un,privilège., Iq créan
cier pourfuivant qui n ’auroit iaifi que jufqu a.concurren
ce de ia créance , que ferviroit à ce pourfuivïmt la f»i,fie
qu’il a u r a i t . f a j t e ? exclus:dn parpge.des deniers'par U
préférence des oppofants fur l u i , il fai^droit , $ o s c qu’il
paffàtà une nouvelle faifie des autres biens du., débiteur
laquelle., fi.elle reflembloit à la premiere,, pourrait encore
& par les mêmes raifons en nécefliter une troifieme ? &
quelle ruine alors pour ce malheureux débiteur ?
Au reile les articles faifis.fontrici en grand nombre
mais cela ¡peut ne rien prouver au.total pour leur impor
tance. ,Deux Domaines à Lufigrii..&T,une Maifoû , ojj.plutôt une mafure , dans un Fauxb.ourg>:de Mo ul in s; voila
les trois corps de bien faifis. Nous ignorons fi c’étoient
j à toutes les poffeflions deV ic ha rd . Mais nous croy qns
favoir que la valeur dçs deux Domaines entiers ..(jdans
lefquels Vicharçj vient de nous’ apprendre par une der¿îiere requête qu’il ne lui ,en appartient qu’un huitième )
jj e va pas pour tous les deux & pour la totalité des
.deux à plus de iix mille livres. Et à legard de.la M a i f o n ,
il cil prouvé par pieces que V ic h a rd , lequel l’a vendue
lui-même depuis la.faifie , ne la vendue que cent foixantehuit livres. Q u i fait donj: fi par L’événement du décret
' le prix delà vente auroit fi fort excédé l’a créance de Ilib i e r , fur-tout pour peu qu’il y eut eu d’oppofants , comme
il y en avoit déjà plufieurs?
Q u e les proc éd ures a y c n t été dans,Ia fuite grojfoyée*,
�Go<>
c ’eftauifirufaçïedé
laSénecliauiTéede
Moulins,ufa^eattefté
o
#
,
7
O
par le certificat çlu premier Magiftrat du 5 iegequi fera impri
mé à la fin de ce M é m oi r e, & proüvé par u n e ‘ produflion
nouvelle “ d e R i b i é r : Les Hiiiifiers du Boiirbonnois gar
dent pardevérs e u x , jüfqu'à la petfé&ïon du décret; les
minutes de procédures dés faifies réelles qu’ils f o n t , &
ils les gardent comme garants de la validité de ces procé
d u r e , -dont :il? ont toujours été ndrriis dans l’ufage à
délivrer des expéditions grciTdyées.' Mais d ’un côté qurôn
fe rappèlle comment on groffoÿoit à Tépoque dont iL
s’agit ( e n - 1 ^ 6 9 ) : qu’on faiTe" attention auiîî que les
groiTes ,en queftionfont fur du petit papier à deux fols la
feuille,' & pour lors 011 verra s’évanouir cette énormité
& cette'yexation que Vichard voudroit-fiire t r o u v e r fert
’ Pages3 & 4. général dans le nombre des rôles cùi’il prend la peine *-de
c ompter/niais mal, pour les proceduri^fà-ftes, & de d e v i
n e r , mais encoreplus m a l,p oà r' ce lle à qui' aùroient été à
faire jufqu’à la derniere criée.
1
Enfin qu’il y ait pour i b o o liv . de frais dans les pro
cédures que nous défendons ; c’cfl: ce qui'eft prouvé faux
par l ’exécutoire m ê m e ‘ qui en fut décerné J i l ’Huiifier fur
fa requ&té contenant mémoire , & fur le Vu des p ie ce s,
p a r Ordonnance du Ju g e du 1 1 Dé cembre 1 7 6 9 . C e t
exécutoire en effet, où le J u g e ne retrancha du mémoire
d c l ’HiiiiTier que qüatre;yingt liv. porte feulement les frais
de Ces protéxlurcs à la fomme .de f}p t cents ' vingt-cin q
liv . quatri fo ls lix deniers: cb qui’ îait une différence de
7 7 4 liv. 15 fois ¿ deniers* c’eft-à-dire ( comme nous
l’avions déjà annoncé') de plus de moitié entre lé vérita
ble montant des frais & les hyperboles éternelles de ' V i
chard fur cet article..'
.
.
•'
' K t c ’eil en vain qu’on alléguerait que Ribier Uii-rrtcmc
préfentoit ces frais, comme un’ ôbjc’t d e ' l f r i o liv. p a r f e s
lettres de refcilion contre le pfocès verbal doffres du 18
Décembre. C a r par la le&uro de ces lettres on voit que
R i b i e r , en y parlant vaguement de plus de quinze ccnts
livres de dépens, comprenoit dans cette fomme tant les
�29
frais de la faifie réelle que les dépens de I’inftance en
nullité &r radiation qu i étoit déjà c o m m e n c é e .
Mais d’ailleurs quand Ribier auroit entendu que les
frais feuls de la faifie réelle fe montafîentà plus de quinze
cents liv re s , c’étoit une erreur de ia part qui doit de
meurer aujourd’hui pour reconnue d’après l'exécutoire : &
il^doit également demeurer pour confiant d’après cette
piece que yxb liv. 4 fols 6 deniers , & non pas quinze
cents liv . font le véritable montant des frais des procédu
res de faifie réelle dont il s ’agit.
O r quiconque réfléchira fur cette feule circonftance
que c’eft ici une faifie réelle , qu’en la SénéchaufTée de
M o u l i n s , par. un ufage immémorial , o n grofjoye les a£ïes
de procédures de faifie réelle qui font du miniftere des
Huiiïïers ( & tous le font ) ; que par ce moyen il y à
pour chaque a£le une minute , une expédition grofjoyée
& toutes les copies néceffaires, outre le tranfport & les
journées de l’Huiffier & de fes afliilams, ce qui fait en
core un article à part; que toutes ces chofes font ici en
trées.dans la çompofition des 7 1 5 liv. de l ’exécutoire;
q u ’il y eil entré la groffe du commandement prépara
toire du. mois de Juillet ; qu’il y eft entré les vacations
d ’un Commiffaire.à terrier & de cinq indicateurs pour
prendre Jes confins des héritages, celles de trois N o ta i
res pour leur affiftance aux criées ( fuivant le même ar
ticle 1 4 3 de la coutume ) , les frais & droits d enrégiftrements au Bureau des faifies réelles & au G re ffe , tk tous
Jes contrôles de tous les aftes.; quiconque, difôns-nous ,
à l'exemple des J u g e s , réfléchira à toutes,ces chofes fans
p r é j u g é , fans colcrc ôi fans, env ie, & connoitra la ma■tier.il,. fera bien éloigné de trouver cette e x o r b i t a n t ( dans
jzJ> liv.\ & non pas, ¿ 3,00 liv. de frais ) dont on a fait
pour.la pwnic(C fois , qi ‘h Cour'feulement, un crime .à
Me.. D c f v j g n e t , iequql n ’a.pas fait ces. frais & t<c pou‘voit pas les faire, mais bien / H uiffier , au nom de qui
-l’exécutoirp en a été délivré..
•
E tt (ixum e li»M a l f a , ,que toutes les. procédures ton-.
�s..
G 03.
3°
tentieufes foient nulles en elles-mêmes du coté de laform e ,
c’eft fur quoi nous nous référerons au Mémoire de R i bicrqui les a juftifiées de ce reproche : fur-tout nous nous
léférerons à la Sentence même dont e'ft appel entre Vichard & R i b i e r , par laquelle ces procédures étoient déjà
juftifiées, comme elles le font encore par leur conformité
avec le contenu en l’afte de notoriété du Barreau de
la Jurifditlion. Et certainement ces deux appuis d e sp r o
cédures ( la Sentence & l’a&e de notoritété ) paroîtiont
toujours inébranlables à des efprits judicieux qui ne le
persuaderont jamais que des procédures foient nulles 3 &
encore moins qu’elles foient vexatoires , lorfqu’ils les ver
ront porter l’attache des Magiftrats locaux qui 'les ont
fcrutées, & lorfqu’ils les fauront conformes à ce que les
Jurifconfuhes de l a :Province difent avoir toujours penje,
décidé & vu pratiquer & juger.
maintenant aux trois autres faits géné
raux de lac aufe de Vichard en la C o u r ; ce font, avons
nous d it , le défaveu prêté à Ribier dans le procès v e r
bal d’offres de V i c l u r d du 18 Décembre ; les lettres de
refcifion pril’e s par le même Ribier contre ce défaveu fuppofé ; & enfin l’irïftru'&ion faite à Moulins fur les deman
des refpeftives , d c Vichard en radiationde la faifie réelle,
& de Ribier en entérinement de fes lettres de refcifion.
Nous avons déjà vu que la Sentence donteft appel, enté
rinant les lettres , releve Ribier de fon défaveu prétendu ;
& rejettant les demandes de Vichard , ordonne la conti
nuation des pourfuites de la faifie réelle. Ces difpolitions
* Pa^epremiere ont attiré à la Sentence de la part de Vichard * la qualidsrmcfc.
fication de fingulicr monument de l'injujlice h u m a i n e .
P
our en v en ir
ijui réunit à l'injujlice la plus criante les contradictions les
plus bigarres & les plus groffieres , & qui ejl en tout point
l'ouvrage le plus vicieux que la Juflice (buveraine ait ja
mais eu à ptoferire. Mais ce n’eft pas de cela qu’il s ’agit
ici.
Auro.it-on pu croire que Vichard trouvât en la C o u r
de quoi déclamer contre M e . Défvignet à l’occafion des
�3i
trois objets en queftion ; 1 sdéfaveu , les lettres derefcifion
& l'inflruBion. Cependant que ne dit-il pas !
D ’abord , pour commencer par l'injlruclion , il accufe M e . Defvignet , quoique fans le nommer , d ’a
voir employé des moyens nés après coup dans les médi
tations d'une chicane objcure & d'une mauvaife f o i profon
dément réfléchie.
Mais c’eft là vifiblement un lieu commun , étranger à la
caufe , & que nous aurions peut-être dû placer i’o us la
premiere partie de ce Mémoire. Du refie les moyens em
ployés à Moulins pour Ribier étoient tracés à M e . Defvignet dans les confultations de trois Avocats au Parlement
de Paris, & dans l ’avis de fix Avocats à Moulins. Ces moyens
on triomphé devant les premiers Juges , & on efpére
q u ’ils triompheront de même en la Co ur .
A l ’égard du prétendu défaveu : ceux qui n ’auroient pas
lu le Mémoire de Vichard , (auront ici que ce fut dans
le procès verbal des offres faites par ce débiteur faifi,
à la perfonne & au domicile de Ribier fon créancier, le
18 Décembre 1 7 6 9 , huit jours après la premiere criée ;
ce fur dans le corps de ce procès verbal , dilbns ii ou s,
qu’on fie faire à Ribier le defaveu contentieux, en ces termes :
» lequel Ribier a d i t , que quoiqu’il ioit vrai que Me .
„ D ef vig ne t, à qui il a remis fes titres , ait fait procéder h
„ la fai fie réelle des fonds de Vichard , néanmoins lui
„ Ribier déclare que jamais i l ne lui a donné aucun ordre ,
•n &
qu’en conféquence I L L E D E S A V O U E dans ladite
„ pourfuite de faifie réelle , E T DE C HA RGE V i e i l A R D
„ D E S F R A I S de cette faifie , ainfi que des acles faits pour
» y parvenir ou qui ont fu iv i.»
^
Une telle déclaration, pour le dire en paffant, n’eft pas
même vraifemblable à la fimple infpe£tion. Auifi Ribier
a-t-il obtenu fans peine des premiers Juges l’entérine
ment des lettres de refcilion qu il avoit pnfes contre ;
& cela non pas, comme dit V i c h a r d , * parce que ces Juges
auroient crû voir dans ces lettres l'empreinte de la volonté * Page ir.
Jouve raine
à laquelle ils dévoient docilementfe conformer.,
<5 o ~ ,
�* Pjge 7*
mais parce qu’ils ont vu dans la déclaration l’empreinte
de la furprife, du d o l , de l’erreur de f a i t , & de la
léfion.
Q u o i qu’il en foit, Vichard prétend aujourd’hui * que
ce défaveu mettoit , dit-il, à découvert toute la manœuvre
de M e. Defvignet', que ce fut pour lui un coup de foudre
que quand il l’eut ap p ri s, il appella R i b i e r , lui fit des re
proches , des menaces, penfa même en venir aux voies de
fa it ; que ce créancier cependant fut d ’abord infléxibie ,
réitéra fon défaveu , & cria à la vexation dans les places
publiques , en préfence d’une foule d ’honnêtes gens ,
qui pourroient en dépofer ; & quefi bientôt après il de
vint plus complaifant & foutint avec chaleur ces mêmes
procédures qu’il venoit de défavo ue r, ce fu t à l'abri fans
doute d'une excellente contre-lettre, dont le Praticien com
promis eut fo in de le munir pour le fatisfairc , & emprunter
enfuite fon nom pour foutenir fes monflrueufes procé
dures , &c. &c.
Mais de bonne fo i , maintenant que l’on connoît toute
la marche , toute la régularité des procédures- de la faiile
réelle , & après que la faufleté du défaveu , par l’impoifibilité & l’invraifemblance de fa propre teneu r, frappe
, les efprits comme un grand jour frappe les y eu x ; que
voit-on dans tout le narré ci-deflus de V ic h a rd , répété
encore par lui à la page iz d e ’fon Mé m oi re , & (m algré
ces répétitions) auilïinvraifemblable que le défaveu même,
qu’y v o it -o n , autre chofe que l ’envie de faire trouver M e .
Defvignet pa r-tout, de lui fare des crimes de tout ?
Eli quoi ! le défaveu découvre , félon vous Vichard , la
mmœuvre antérieure de Me. Defvignet ? mais quelle manœu
vre avoit-il donefaite ? chargé le 7 No vem br e des titres & de
la procuration de Ribier pour le faire payer de fa créance
par les voies portées en cette pro curation, & nommément
par celle de la faific réelle , il avoit remis ces titres ù un
Huiifier qui avoit fait cette faifie , & vous appeliez cela
une manoeuvre !
V o u s voulez enfuite que le défaveu, furpris frauduletrfemcnc
�6~~>f
, 35‘
iement à R i b i e r , le 18 Décembre , ait été pour M e . Defvignet un coup de fo u d r e ; q u ’il s’en (bit emporté contre
R ib ier , jufqu’aux menaces & prefque juiqu’aux c ou p s!
M a is ce défaveu eût-il été auffi réel & auifi indeftru&ible q u ’il étoit faux & peu folide , qu’avoit à craindre'
M e . Defvignet des effets de ce défaveu , avec la procu
ration qui faifoit fon titre contre Ribier ?
Enfin vous voulez que R ib ie r, que vous peignez, d’abord
perfévérant dans le déf aveu, & le publiant dans les places^
& tout de fuite revenant fur fes pas & foutenant avec-'
chaleur les procédures défa vou ée s, vous voulez qu’il n ’ait
ce que vous appeliez ainji varié , que par le moyen d'une
excellente contre-lettre d e ‘ M e . Defvignet !:
Mais fur quoi fondé parlez-vous là de contre-lettre!’
E n avez-vous vu quelqu’une entre les mains de Ribier ?ce r
homme vous a-t-il dit qu’il en eut une ? l ’a-t-il dit à quel
q u ’un qui vous l ’ait répété? en appercevez-vous vertige^
dans les pieces de toute cette affaire? Me . Defvignet danstoutes les fuppofitions poflibles àvoit-il même befoin de
donner une contre^lettre à un client, contré lequel la feule
remife du titre auroit fait fa fureté, & dont il avoit en
outre la procuration exprefle pour faire faire toutes les
procédures dont il s ’agiifoit ? Cette procuration encore
un coup étoit du 7 No vembre & paffée devant Notaires;;
le prétendu défaveu de Ribier n’étoit que du 18 Déce m
bre ; & toutes les procédures avoient été faites dans l’inter
médiaire, & poftérieurement à la date de la procuration,,
puifque la premiere de ces procédures , le commande
ment recordé eit du 9 No vem br e. D ’ailleurs le procès«
verbal d’offres qui contenoit le défaveu netoit pas une piece dont on put jamais faire ufage contre Me. Defvignet:
ce n’étoit pas là un défaveu de Procureur. Ces fortes d’a&es1
font fujets à des formes particulières dont n’étoit ni n e ;
nouvoit être revêtu le procès verbal d ’offres. Me. D e f
vignet nfc pouvoit donc pas être compivmis, ni dans le fait,,
ni dans le d ro it ,n i dans la f o r m e , ni dans le-fond par t e
'
�<D'■j S
dcfaveu couché dans ce procès verbal : il n’a voit pas à crain
dre non plus d ’autre défaveu 3 de défaveu légal de la part de
Ribier dont il avoit ( on ne fauroit trop le répéter ) une pro
curation authentique ; il n ’avoit donc pas de contre-let
tre à lui donner : c’eil donc une calomnie à vous Vichard
d’avoir parlé dans votre Mémoire d ’excellente contre-
lettre.
Q ua nt aux variations qu’on allègue, dans la conduite
de R i b i e r , pour en faire des crimes à Me. D e fv ig ne t , elles
n’exiftent que dans l’imagination de fon Adverfaire. R i - ,
bier ne fut jamais dans le cas d’approuver un feul inftant
le défaveu de l ’afte d’offres. Il l’ignoroit même au moment
où l’on veut qu’il l’eut f a i t , au moment de la féance te
nue en fa maifon pour les offr e s, dont on avoit apporté
l’aile tout drefle avec le défaveu écrit d’a v a n c e , ainii q u ’il
paroît par l ’identité d ’encre & de caraûere. Ribier ne
s’apperçut donc de ce défaveu que lorfqu’ayant porté à
M e . Defvignet la copie q u ’on lui avoit laiifée du procès
v e r b a l , il y reconnut la fupercherie de cette piece dont
il avoit jufques-là ignoré la véritable teneu r, ainii que
l’annonce fa démarche même auprès de M e . D e fv ig n e t :
car il ne feroit pas allé trouver ce P ro c u re u r, & ne lui
auroit pas apporté bonnement fa copie de l’afte d’offres,
s’il eut fu ou s’il eut cru quelle contenoit fon défaveu.
Ribier ne varia donc jamais fur le défaveu prétendu ni
fur les procédures de la faifie réelle : & jamais M e . D e f
vignet ne fut dans le cas de le craindre & de lui donner
une contre-lettre pour foutenir fous fon nom ces procé
dures. C e fut Ribier feul qui les foutint de fon propre
m ou v e m e n t , en fon nom & à fes rifques, comme feul il
avoit intérêt de le faire. Et c’eil encore ce que ne permet
pas de révoquer en doute une nouvelle procuration qu’il
donna à Me. Defvignet le 27 Jan vi er 1 7 7 0 , à l’e ff et , y
eft-il dit , „ de continuer d'occuper pour lui dans la pour» fuite de la faifie réelle & fur les demandes de Vicharcl
„ en nullité & en radiation, & d’oppofer tous moyens
�(5~o )
'» convenables contre le défaveu du procès verbal d’of» fres. „
Mais à quoi penfons-nous ici d’invoquer & la procura
tion & la conduite de Ribier fur l’article du défaveu &
des procédures de la iaifie réelle, pour juftifîer M e . D e f
vignet ? Eh ! c’eft tout cela qui le condamne , vous dira
Vichard par qui tout cela eft foupçonné ou plutôt empoifonné ! il vous dira * que les procurations parurent "Pages 98c 10;
toutes deux à la fois , & cela feulement le 1 3 Février :
comme fi ce fait n’étoit pas de la derniere indifférence”, &
comme il même on n’auroit pas pu fe difpenfer de pro
duire dans aucun tem ps, vis-à-vis de V i c h a r d , des procu
rations qui ne font que le titre du Procureur envers fon
client 1 II vous dira * que toute la conduite de Ribier de ! Page S.
puis le défaveu préfente des faits bien Jinguliers , qui font
même inexplicables ; Vichard du moins nefe permettra pas
de les expliquer , i l en laijfe ¿e fo in à fes lecteurs , c’eft ain.fi
qu’il parle. Et ailleurs * en revenant au défaveu ;,il vous * Page 17.
dira encore que cette piece prèfente à la vérité les plus finguliers myfleres , mais qui n en font pas pour R ibier ; & il
vous ajoutera qu’ils n ’en feroient peut-être pas pour lui-mê
me Vichard, ft la prudence ne lui dêfendoït de lever le voile
qui les couvre.
.. .
•
A i n fi , comme on v o i t , Vichard ne fe contente pas dé
dire contre M e . Defvignet tout le mal qu’on en lit dans
fon M é m o i r e , il y veut encore qu’on en penfe davanta
ge ; il laiffe à fes lefleurs le foin de deviner : & il fe tait luimê m e, quoique fachant bien d'autres ckofes au fujet du de
faveu, car c’eft ce que veulent dire ces m ots , que les myf
leres de cette piece n en feroient pas pour l u i , Vichard , f i la
prudence ne lui defendoit de lever le voile qui les couvre.
Mais c’en eft t r o p , Vichard , & vous pouffez les gens
à bout par vos réticences, plus injurieufes cent fois que
les expreifions les plus emportées dont vous pourriez vous
fervir & que les faits pofitifs les plus graves que vous
articuleriez.
_
E x
�6^
36
•'
! r‘
E n effet , il vous vou s ex pliqu iez , il eft certain que
l ’on vous répondrait & que l ’on vous confondrait c o m
me on l’a fait jufqu’ici fur-tout ce que vous avez bien
voulu écrire contre Me. Defvignet. Mais comment v o u
lez-vous qu’on vous réponde fur ce que vous ne faites
que penfer ou que laiiTer à penfer aux autres ?
En cor e fi vous aviez un peu mis fur la voie l’imagina
tion de vos l e & e u r s , fi vous les aviez aidés ! mais ri en :
point de fecours de votre part. C a r enfin , de ce que vous
dites que les procurations ne parurent fubitement que le
1 3 F é v r i e r , vous ne voulez pas fans doute qu’on infère
qu’elles n’exiftoient pas auparavant ? Ces procurations ,
l’une du 7 No vem br e & l’autre du z7 J a n v i e r , font paffées chacune devant deux Notaires différents : elles fu
rent contrôlées avant la quinzaine du jour de leur date
fuivant lesEdits. Il faudroit d o n c , pour les fufpecter , re
garder comme coupables de f a u x , non feulement M e .
De fvignet & R i b i e r , mais encore quatre Notaires & un
Contrôleur.
D ’un autre c ô t é , quand vous parlez des myfleres du dé
faveu , lefquels ne feroicnt pas des myjleres pour vous fans
votre prudence , vous ne voulez apparemment pas que l’on
croie que ces my itérés feraient quélque ceffion des droits de
R i b i e r , que M e . Defvignet auroit prife de ce client contre
la prohibition des Ordonnances ? C a r outre que pour Iaiffer feulement entrevoir une imputation de cette atrocité
contre un Procureur , il faudroit en avoir la preuve for
melle ; c’efl que l’acceptation faite.par R ib ie r' le 18 D é
cembre du montant de la créance principale que vous
lui payâtes vous-mêmé & qu’il reçut & toucha de vos
mains , démontreroit ici bien fufïiiamment qu’il en étoit
le vrai propriétaire. Expliquez-vous donc encore un coup
Vichard , levez ce voile myftérieux que votre prudence
r e fp e & e : ou confentez de pafler pour un calomniateur
convaincu par votre réticence même ; car c ’cft la réglé
en matière de calomnie vague , où l’on 11e particularifa
�r i e n , afin d ot e r toute prife & tout moyen d’y répondre;
réglé enfeignée par ce génie fublime à qui cette Ville de
Clermont s ’honore d’avoir donné la naiflance. (c)
Enfin pour ce qui eft des lettres de refcifîoti prifes par
R ibier , elles fourniiïent encore à Vichard * les traits les * page 14 &
plus fanglants contre M e . Defvignet au Sujet du m oy e n ^¡vantes.
de ¿éfion , réfultant de la perte des frais de la faifie réelle
dont l’a&e d’offres contiendroit de la part de Ribier une
décharge. C e n’eft pas Ribier , d it-o n, qui perdra ces f ra is ,
puifque d’un côté il ne les a pas déboursés, comme le c on s
tate le commandement du 6 Août 1 7 7 2 , & que d’un au
tre côté il eft à labri de toute répétition de la part du Pra
ticien Defvignet qui les a frayés & avancés 8: qui doit les
perdre. D ifons-le avec confiance ( ajoute Vichard ) cet
avide Praticien N E S E R A - T I L P A S T R O P H E U R F U X s i
L A S E U L E P E I N E Q ü ’ ON L U I I M P O S E pour s'être joué
de la Juflice & de fes formes , c’efl de fupporter en fon nom
les dépens de fa propre procédure , de ne les pouvoir répéter
contre perfonne , & de perdre le fru it de fes vexations.
V o u s l’entendez, Magiftrats Souverains, qui devez nous
juger. V ou s entendez Vichard donner quittance à Ribier de
tous les frais que M e . Defvignet fon Procureur fondé a
avancés pour lui dans la faifie réelle. V ous l’entendez folüciter en même temps votre glaive , & marquer ce Pro c u
reur comme la vi&ime dévouée à fon tranchant. Mais
M e . Defvignet ne craint rien de R i b i e r , dont il a la P r o
curation ; & il eft également raffuré contre la févérité de
votre J u f t i c e , par vos lumieres , par la droiture de vos
c œ u r s , & par la régularité des procédures qu’on vous
dénonce.
.
Seroit-ce même affez que vous ne repriiliez pas ici
M e . Defvignet pour des procédures qui effc&ivement
n’ont rien qui puiffent le rendre réprehenfible ? ^ o n fans
doute, ce ne feroit pas aiTez. Eh ! qui ne voit que ce ne feroit
(c) Pafcal, 1 5 e. Prov.
�38 .
même abfolument rien pour l u i , & , ofons le dire , rien
pour vous & pour la Juftice , qui n’eft qu’un même avec
v o u s ? Pour l u i , qui n’eft pas intervenu dans une caufe
étrangère précifément afin de défendre des procédures
qui ne font pas de fon fait & q u ’un autre a défendues,
mais afin de fe plaindre des outrages qu’il a reçus à l’occafion de ces procédures. Pour vous & la J u f t i c e , qui avez
ici deux caufes à juger ; l ’une les procédures dont il s’a g i t ,
attaquées par le Mémoire de Vichard & qui font la matiere de fon Procès vis-à-vis de Ribier ; & l’a ut re, ce même
Mémoire de V i c h a r d , dans la partie qui intérefle M e .
Defvignet & qui fait le fujet de fes plaintes.
V o u s les jugerez donc fans les confondre ces deux
caufes, & vous les jugerez toutes deux contre V i c h a r d ,
qui les a fait naître toutesdeux. Dans l'une ^vous lui appren
drez par la confirmation de la Sentence au profit de
R i b i e r , qu’il faut qu’on remplifle les engagements qu’on
a c o n t r a & é s , & qu’il eft permis à tout créan ci er, porteur
d'un titre éxécutoire, de faire procéder fur les biens de
fon débiteur, même par la voie rigoureufe de la faifie
relie, pourvu qu’on y procède fuivant les formes que les
Règlements prefcrivcnt. D ans l ’autre , vous apprendrez
au même Vichard par. la fupprefîion de fon M é m o i r e ,
que vous ne fouffrez p a s , que vous ne fouffrirez ja
mais que des Plaideurs , aveuglés par l’intérêt & par la
h a i n e , viennent autour de votre Tribunal en impofer har
diment à des Défenfeurs pleins de z e l e , pour chercher à
vous tromper enfuite vous-mêmes f u r i e compte, ou de
leurs Parties adverfes , ou de ceux qui ont prêté leur
miniftere à ces Parties devant les premiers Juges .
Enfin par l’éclat & la publicité de cette fuppreifion d’un
Mémoire à qui l’impreflion a donné auffi la publicité la
plus g r a n d e , vous égalerez la réparation à l’injure: &
vou s continuerez de faire vo ir aux Habitants de quatre
Provinces q u e , lorfqu’ils viendront à votre Si eg ede m an
der vangeance des torts qu’ils auroient reçus loin de vous
�dans leur perfonne , dans leur honneur ou dans leurs
biens , ils n’auront pas à craindre que leurs Parties adverfes ne leur faflent impunément, fous vos y e u x , par
des fatyres perfonnelles , un tort plus réel & infini
ment plus fenfible que ceux qu’ils vous porteroient à
venger. S ig n é , E S T O P Y
D E SV IG N E T .
;
Monfieur VAbbé D E P O N S , Rappoteur.
V ‘
M e . R E C O L E N E , Avocat.'
+.\
»
t*.
C
t) .
h e v a l i e r
d
’U
l g a ü d
, Proc .
C E R T I F I C A T D E W s. L E S O F F IC IE R S
de la Sénéchaiijjée de Bourbonnois & Siege
Prcjidial de Moulins.
N
O u s Officiers , Magiftrats de la Sénéchauflee de
Bourbonnois & du Siege Préfidial-de Mo ul in s, cer
tifions & atteftons que M e . P i e r r e E S T O P Y D E S V I G N E T , reçu Procureur èfdits Sieges en lannee mil
fept cent fo ix a n t e , en a rempli les fondions avec %ele,
qu’il n’a donné lieu à aucune plainte ; que fa conduite
nous a toujours paru être à l'abri du plus leger reproche,
& q u i l s'ejl conformé aux règlements dans les procédures
dont il a été chargé en fa qualité de Procureur ; en té
moin de quoi lui avons délivré ces prefentes. F a i t &
arrêté en la Chambre du Confeil le dix Mars mil fept cent
foixante-quatorze. Signes , G r i m a u l d , Lieutenant G é
néral ; D e s b o u i s d e S a l b r u n e , Lieutenant Particulier;
P ierre
moùze
de
S a i n t c y , Doyen ; P a r c h o t
de
V
ille
-
, Pere; P r e v e r a u d ; B a r r u e l ; Ba r d o n n e t
d e G o n d a illy ; H o u d r y ; H eu ilh ard ; C habot ;
P a r c h o t d e V i l l e m o u z e , Fils; R i p o u x ; B u t a u x
�40
DU P o u x , Av ocat du R o i ; & C
onny de
V
alveron
,,
Procureur du R o i .
A
T T E S TA
T I O N.
N
O u s A n t o i n e G R I M A U L D , E cu yer,C on feiller du R o i , Lieutenant Général , Enquêteur &
C o m m i ffaire Examinateur en la Sénéchauffée de B o u r bonnois & Siege P ré fidial de Moulins , certifions & attes
tons à tous qu’il appartiendra que de tous les temps l ’ufage
de cette Sénéchauffée a été que l’H ui ffier roya l chargé dé
faire les poufuites d ’une faifie réelle, fuivant les Edits,.
Ordonnances & R è g l e m e n t s, eft toujours demeuré dépofitaire des actes par lui faits, étant garant, iufqu’à laperfect i o n du d é c r e t , de la faifie r é el l e, des formalités
des actes de la faifie réelle , & l’Huiff ier étant dépofitaire*
d ’iceux a toujours été admis & dans l 'ufage de délivrer
expédition des mêmes actes; en témoin de quoi nous avons:
donné la préfente atteftation, & avons figné avec notreGreffier, qui a appofé léfcel de cette Sénéchauffée. D o n n é ;
à Mo ulins, en notre H ô t e l , le ving-un A v ri l 1 7 7 4 .S ig n é,.
G R I M . A. U L D . Et plus bas ,, Sa _u l n i e r , Greffier..
A
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
D à - l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du Roi, Rue.S;.Genès , pres.l’ancien Marche.au Bled, 1774»-
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Estopy Desvignet, Pierre. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Pons
Récolène
D'ulgaud
Subject
The topic of the resource
créances
procédures
ventes en criée
ventes
saisie
signatures
lésion
huissiers
faux
affichage
contre-lettre
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Monsieur Pierre Estopy Desvignet, Procureur en la Sénéchaussée de Bourbonnais, Siège Présidial et autres juridictions de Moulins, Intervenant et Demandeur. Contre Jean Vichard, le jeune, et Gabrielle Talon, sa femme, Défendeurs. En présence de Laurent Ribier.
Table Godemel : Décharge : 1. le créancier qui a reçu le montant de sa créance, et ce, dans le procès-verbal d’offre, déchargé son débiteur d’une saisie réelle, poursuivie contre lui, en désavouant l’officier public qui l’a commencée, libère-t-il ce débiteur irrévocablement ? peut-il se pourvoir contre sa décharge, par lettres de rescision, si elle a été obtenue par dol et surprise ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1769-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0116
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0115
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52874/BCU_Factums_G0116.jpg
Coverage
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PDF Text
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GÉNÉALOGIE.
- M artin G arcclon.
I
G u illa u m e , dit G u illa in ,
á
M arguerite D u fa ye t.
S im o n ,
à
A gn ès F erlu t.
2*s. NOCES.
Gaspard D e lp r a t,
à
M argu erite Chénier.
I
A n to in e tte ,
á
Gaspard Delprat,
M a rg u e rite ,
à
Jean Sabatier,
C ath erin e,
J ea n ,
cu ré
de S t.-P rojet.
M a r ie ,
P ie rre ,
P ie rre ,
décédés sans postérité.
I
M a rg u erite,
à
Jean V alette.
Jean,
prêtre*
A n to in e ,
M a r tin ,
à
A n n e C hevalier.
P ie rr e ,
A n d ré,
A n to in e tte ,
à
B enoit Jam y.
M a rg u e rite ,
à
E tienne Carreau.
A nne,
S im on ,
à
C a th e rin e ,
décédée sans postérité.
F ran cois D om at.
décédés sans postérité..
décédés sans postérité.
M a r ie ,
..à
.Jean M arm onteü.
M a rg u e rite ,
à
Pierre M eynial.
Appelant.
Joseph,
décédé'sans postérité.
4
C a th e rin e ,
à
P ierre H ébrard.
A g n è s,
I " S . NOCES.
F ran çois Berc.
I
A n to in e tte ,
à
Jean-Joseph T a b a ricr.
Appelante.
2 es. NOCES.
M a r ie ,
décédée sans postérité..
P ierre V id al„
I.
M a r ie ,
à
M artin H ébrardi
Appelante
.
M a r ie ,
à
A n to in e V id a i.
Jean-Pierrc-H yppolite.
P ierre.
C ath erin e,
à
N icolas Fum et.,
Appelons.
-K
�-- 'A
A n to in e tte ,
à
B enoit Jam y.
M a rg u e rite ,
à
Etienne Carreau.
2*s.
noces.
G aspard D e lp r a t,
S im on ,
à
M a rgu erite C hénier. postérité,.
M a r ie ,
.. à
.Jean M arm onteil.
P ierre M
Anne,
à
F ran cois D om at.
C a th erin e,
à
P ierre H ébrard.
M a rie ,
décédée sans postérité..
yippelans.
M a r ie ,
à
A n to in e V id al.
I
rrc-H ypp olitc.
Pierre.
I
C ath erin e,
N icolas Fum et..
/ippelans.
C ath erin e,
décédée sans postérité.
�6?
COUR ROYALE
D E R IO M .
MÉMOIRE
2e Chambre civile.
PO U R Sr. F r a n ç o i s - M a r i e et P i e r r e - F r a n c o i s
B E R T R A N D Y , L o u i s e et M a r i e - A n n e BERT R A N D Y , habitant à Salers; dame L o u i s e F r a n ç o i s e S A L V A G E et S r. D E L Z A N G L E ,
'
*'««' A-»««»“ 4**"
d o c t e u r e n m é d e c i n e , s o n m a r i , h a b i t a n t la
commune de Fontange, intimés;
CONTRE
dame
T A B A R IE R ,
A n to in ette B E R C ,
M a rie V ID A L ,
veuve
P i e r r e , H i p p o ly t e
et
1
veuve-
H E B R A R D , habitant à Salers , sieurs
P ierre V ID A L ,
Jean-,
pro
priétaires, habitant à Saint-Christophe et
autres, appelans;
Pour servir de réponse
à
la
imprimée distribuée en la
d avril 1817.
’
Consultation
Cour au mois
m cm
C e n’est pas sur l’exposé d’un fait u n iq u e , isolé de
beaucoup d’autres, sur des questions tirées plus ou moins
exactement de ce fait, et sur une longue série de maximes
de droit et de principes gén éraux, qu’on peut apprécier
une cause, et en déterm iner les résultats; tout cela n e suffit
�6»
1
(» )
ni à la justice pour établir une décision, ni aux hommes
versés dans les lois pour exprim er une opinion positive ;
aussi n’ est-il pas étonnant que les jurisconsultes recômmandables, du nom et de l’autorité desquels les appelans
ont voulu fortifier leu r défense, se soient bornés à énoncer
des principes sans presque tenter les applications, et à dire
en résultat pour toute opinion :
-jj£ * u p Jt»'t •>
« D e tous les moyens ci-dessus développés, il semble
i.» e-^j
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« qiLon doit en conclure que la demande des héritiers
*7
'*• V f*
,
(< Bertrandy n’est pas fondée, et qu’çlle doit être rejetée. »
Sans doute une opinion fortement prononcée par des
avocats célèbres qui l’auroient établie sur l’examen attentif
de tous les faits d’une cause, pourroit faire impression à la
justice^ il ne seroit cependant pas défendu de la critiquer,
d’en m ontrer le ioible, même l’erreur; le jurisconsulte le
plus consommé peut y tom ber, et quelquefois la manière
de lui exposer une cause, le persuade, et le décide sur des
applications q ui, sans cela, eussent pu lui paroître au
moins douteuses.
M ais lorsqu’on isole un fait de beaucoup d’autres aux
quels il est essentiellement lié*, que sur ce fait unique on
établit une présomption sur laquelle seule on demande
un avis, et que le jurisconsulte, armé de circonspection,
répond par des principes q u ’il applique à peine et avec
hésitation, l’impression doit ôlre moins forte, moins
durable, et la réfutation moins difficile. L e moindre fait,
alors, peut porter atteinte à. une persuasion chancelante,
et aussitôt le prestige s’enfuit, et le nom du jurisconsulte,
qui faisoit la force d’ une partie, s’efface de lui-même.
T e lle est la position des parties dans une cause où on
�( 3)
attaque le titre des intimés par une présomption de paye
m ent, et où cependant l ’ensemble des laits démontre
qu’ils n’ont jamais été ni pu être payés de leur créance',
que bien loin de se rendre défavorables par un long-silence,
ils ont toujours a g i , et toujours éprouvé des difficultés
sans nombre*, qu’ainsi la présomption est fausse, et qu’in
dépendamment des réponses dont seroient susceptibles
en point de droit les moyens sur lesquels on l’appuie, ilà
se réduisent par le fait ù des recherches plus curieuseâ
qu’ utiles.
Il faut donc consulteï ces faits, les m ontrer dans leur
ensemble, et laisser à la justice le soin d’en déterm iner les
résultats : quelque désir qu’on ait de les résüm er, ils
exigeront du détail par la tournure q u’ont donnée à cettè
cause les difficultés sans nom bre et les incidens multipliés
des appelans: successivement proposés dans l’intervalle de
près d’un siècle, leurs premiers moyens sont maintenant
rejetés ou abandonnés; ils ont fait place à celui qui fait
l ’objet de la Consultation. Toujours plaidant et s’ibgériiant
pour ne pas payer, ils ont, pour la prem ière fois, en 1817,
invoqué une présomption de payem ent $ ils s’efforcent de
croire et veulent persuader q u e c’est à cela seul que se
réduit la cause. O n va démontrer qu’ils sbht et qu’ils in
duisent en erreur.
Jean Bertrandy, auteur des intim és, avoit plusieurs
creahceg contre un sieur Deldevès, m archand•, l?Une d’elles
étoit établie par un billet à ordre du 5 juin 1707, portant
obligation de payer une somme de 3,774 f r .} c’est la seule
�1»
'
■
( 4
}
dont il s’agisse aujourd’h u i; mais ce n’est pas un fait indif
férent que celui de l’existence de plusieurs autres qui en
étoient indépendantes, qui cependant existent encore en
partie, et n’ont jamais été acquittées. L e 21 juillet 1707,
Bertrandy obtint une sentence consulaire qui condamna
D eldevès au payem ent de 3,774 fr.
A son tour, Deldevès étoit créancier de Guillain Garcelon et M arguerite D u fayct, son épouse-, cette dette
rem ontoit en tout ou en partie jusqu’il M artin G arcelon,
père de G u illa in , et ce dernier étoit alors représenté par
Jean , Sim on, A n to in e, Pierre et Martin G arcelon, ses
cinq fils. L e 20 août 1707, Bertrandy fit entre leurs mains
une saisie-arrêt de tout ce qui pouvoit être dû à D eldevès;
cette saisie fut faite sur eu x , tant de leur chef, que comme
tenant et jouissant les biens de Guillain Garcelon et M ar
guerite D ufayet, leurs père et m ère, et M artin Garcelon,
leur aïeul.
Il paroît que déjà les cinq frères Garcelon avoient pris
des moyens pour parera toute action des créanciers: quatre
avoient répudié la succession des père et m ère; mais ils
l ’avoientfait accepter sous bénéfice d’inventaire par Jean,
prêtre et curé de St.-Projet : c’est une des deux questions
de la cause, que de savoir si cette répudiation étoit sincère.
L e s appelans ont mis beaucoup de soins à p r ou ve r qu’ils
n’étoient qu’héritiers bénéficiaires, et c’est pour cela qu’on
sera obligé de recueillir les faits relatifs à cette partie de la
cause : des actes émanés d’eux-mêmes et plusieurs déci
sions solennelles établiront que la répudiation et l’accep
tation sous bénéfice d’inventaire étoient frauduleuses.
D ’abord un acte du 12 juillet 1707 passé entre les cinq
�(5)
frères G arcelon, le témoigne ouvertem ent et sans détour,
parce que ceux qtû avoient répudié fictivem ent, voulant
conserver leur droit et avoir dans les mains une ressource
contre la mauvaise foi supposée de J ea n , leur frère, avoient
exigé de lui une déclaration écrite, qui devoit dem eurer
secrète.
Dans cet acte passé entre Jean G arcelo n , d’une part, et
Sim on, auteur des intim és, tant en son nom que pour
Pierre et M artin, d’autre, on trouve ces expressions:
« Savoir que m oi, Jean G arcelon, prêtre, quoique
« j’aie pris la qualité d’héritier bénéficiaire de M artin et
« Guillain G arcelon , mes père et aïeul, et que moi, Simon
« Garcelon, conjointement avecm es frères et sœurs, ayons
« déclaré répudier leurs successions*, le tout nci été fa it
« que pour arrêter les poursuites des créanciers de nos
« père et aïeul ; la vérité est que les uns ni les autres n’a« vons entendu nous préjudicier sur lesdites qualités, les« quelles déclarons entre nous comme si nous n’en avions
« pris aucune, et qu’après que les uns et les autres auront
« liquidé lesdites successions, et celle de feu notre m ère,
« nous viendrons à partage entre nous d’icelles, et chacun
« de nous prélèvera les sommes avancées, tant en prin« cipal, intérêts , que frais. »
11 ne faut pas de commentaires pour prouver que des
héritiers qui s’entendent si b ien , qui doivent administrer,
liquider une succession, y faire des avances, les prélever,
et partager le surplus, quoiqu’ils aient répudié, n’ont fait
envers les créanciers qu’une répudiation frauduleuse, et
que l’acceptation sous bénéfice d’inventaire, adoptée pour
protéger ce système, n’est ni plus sincère ni moins odieuse.
�,( 6 )
Rem arquons qu’en m ême temps les Garcelon jouissoient (aussi avoient-ils été assignés en confirmation de la
saisie comme tenant et jouissant les biens ) ; qu’étant par
venus à en conserver la possession par les difficultés qu’opposoit aux créanciers le bénéfice d’inventaire, ils les ont
partagés, vendus, et en jouissent encore par leurs acqué
reurs: ainsi le fait a bien concouru avec l’intention. A u
surplus, l’acte du 12 juillet 1707 a été enregistré, produit,
et a servi de fondement à plusieurs arrêts de la Cour qui
prononcent contradictoirem ent, contre les descendans
G arcelo n , la qualité d’héritiers purs et simples -, aussi est-ce
la conviction qu’ils ne parviendront pas à effacer cette
qualité indélébile, qui les a jetés dans le m oyen auquel ils
se réduisent aujourd’hui.
I l est à peu près inutile, si ce n’est pour l’exactitude du
fait, d’observer ici que la demande en confirmation de
saisie avoit été formée devant les juges-consuls de Clermont. O n a crié beaucoup contre cette irrégularité, et
peut-être déclarnera-t-on encore-, mais tout cela est cou
vert par le laps du tem ps, et par le dernier arrêt de la Cour
qui a rejeté l’appel et tous les moyens d’incompétence et
de nullité proposés contre cette procédure, et la sentence
qui la termina.
Q uoi qu’il en soit, la demande en confirmation de saisie
resta im poursuivie jusqu’au 29 d écembre 1734, époque k
laquelle elle fut reprise par François Bertrandy, fils et
héritier de Jean. Il est utile de considérer les qualités de
ceux qui furent alors assignés, puisque les appelans s’en
servent aujourd’hui comme d’ une présomption que la
.créance a été payée. On saisira facilement ces qualités res-
�pectivcm ent aux G arcelon, en les appliquant sur la g é
néalogie. L a demande fut formée contreToinctte D eldevès
et le sieurC heym ol, son m ari, représentant les D eldevès,
parties saisies*, Jean D evalens, curateur à l’hoirie vacante
de M artin, Simon et Pierre Garcelon j autre Pierre Garcelon , comme tuteur des enfans mineurs de M artin et
Sim on, héritiers de feu Antoine et Jean Garcelon , leurs
oncles, et, par leur moyen, de G uillain et M artin, et de
Marguerite D u fa y et; et enfin le sieur D om at, comme
tuteur de ses enfans d'avec A n n e Jam y,fille d’Antoinette
G arcelon, autre fille de G u illain , et ses héritiers. Ces in
dividus représentoient la totalité de la descendance de
M artin et Guillain G a rcelo n -, et tout en répudiant aux
successions de M artin , Simon et P ierre, qui avoient euxmêmes fait la répudiation frauduleuse de 1707, ils étoient
et ont toujours été héritiers de Jean , qui étoit lui-même
héritier prétendu bénéficiaire, et d’A n toin e qui n ’avoit
pris aucune qualité , et par le m oyen duquel ils avoient
espéré conserveries biens: tout cela est essentiel. L ’as
signation eut pour objet, savoir, contre les D eldevès et
C heym ol, de voir déclarer exécutoire contre eux la sen
tence de 1707, et contre les G arcelon d’être subrogés aux
droits et actions des D eld evès, et de faire leur déclaration
affirm ative, sinon être déclarés débiteurs purs et simples
des causes de la saisie.
I c i, il faut observer la marche de la procédure et la
conduite soutenue des Garcelon qui répudioient toujours
aux successions les uns des autres, sauf un ou deux qui ne
prenoient pas qualité, ou qui se disoient héritiers bénéfi
ciaires, et qui conservoient toujours la jouissance des biens.
�(8)
L es C heym ol opposèrent qu’ils n’étoient qu’héritiers
bénéficiaires de D eld evès; mais les Garcelon n’osèrent pas
faire juger cette question: assignés comme biens tenant,
et les ayant de fait partagés depuis l’acte de 1707 , ce rôle
étoit par trop difficile.
A u ssi, pendant que sur la déclaration des Cheym ol,une
sentence du 16 mars 1737 renvoya devant qui de droit
pour régler les qualités, parce que les juges-consuls se
reconnurent incompétens pour statuer sur ce poin t, dès
qu’il y avoit contestation } une auti'e du 19 novem bi’e tint
l’instance pour reprise avec les Garcelon, ès qualités qu'ils
sont p ris, parce qu’ils ne les contestoient pas} et, malgré
leu r silence, ne jugea pas le fond de la dem ande, et or
donna , au contraire, q u ils sei'oient réas signés pour faire
leur affirmation.
Cette nouvelle assignation fut donnée le
décembre
aux mêmes parties, et notamment à Pierre G arcelon,
comme tuteur des enfans desdits M artin et Simon G arce
lon, « iceux héritiers de f e u A n to in e, leur oncle, par leur
« m oyen ou celui de la dame Chevalier, leur mère, dona-
23
« taire dudit A n to in e , et par le m oyen d’icelui ou de leur
« chef,héritiers de feu Jean G arcelon , curé de St.-Projet,
« aussi leur oncle, et par le m oyen desdits Antoine et J ean,
« héritiers de Guillain, et M arguerite Dufnyet, et de M artin
« Garcelon. »
Rem arquons ici qu’une autre saisie-arrêt avoit été faite,
par le m ême acte de 1707 , entre les mains des nommés
Chazette et des héritiers R olland, qu’on supposoit débi
teurs de D eldevès; et c’est ici qu’il faut observer davan
tage la m arche de la procédure.
1
Les
�(9)
■
L es Gheym ol avoient rapporté et signifié une sentence
des juges ordinaires qui les déclaroit héritiers bénéficiaires
seulement ; une sentence du 22 août 174° déclara le titre
exécutoire contre eu x , en cette q ua lité, et condamna les
tiers saisis à vider leurs mains des sommes q u ils affirme
raient devoir.
Les Chazette firent immédiatement leur affirmation
qu’ils ne savoient pas devoir la moindre cliose aux D eldevès; mais les Gai’celon persévérèrent dans leur système
silencieux, et ne se présentèrent pas davantage-, une sen
tence du 20 décembre 1740 ordonna de nouveau qu’ils
seroient tenus de faire leur affirmation ; cette sentence fut
signifiée au domicile de chacun d’e u x , comme les précé
dentes; elle ne changea rien à leur résolution. M algré
ce la , et par surcroît de précaution, les juges-consuls, par
une sentence du 7 avril 1742, ordonnèrent une remise des
pièces, et un rapport par l’ancien des consuls; et ce ne fut
que le 12 janvier 174 3 , que fut prononcée la sentence
définitive q u i, attendu l’affirmation des C hazette, et leur
prétention de ne rien d evoir, délaisse les parties à se pour
voir comme elles aviseront; et donnant défaut contre les
G arcelon , en leur qualité d'héritiers, les déclara débiteurs
purs et simples, faute d’avoir fait leur affirmation ; la même
condamnation fut prononcée contre les Rolland. C ’est
cette sentence que le dernier arrêt de la C our a déclarée
avoir force de chose jugée, comme ayant été dûment signi
fiée le 21 mars 1743, et n’ayant pas été attaquée. O n voit
au moins que le juge n’atteignit que ceux sur la dette et
sur la qualité desquels il ne fut pas élevé de contestation,
et qu il ne prononça contre eux qu’avec les plus mûres
précautions et après une foule de délais.
�' Q ui donc avoit em pêché les Garcelon de se défendre,
s i , comme ils le prétendent aujourd’h u i, leurs auteurs ne
devoient rien aux D eldevès ; s’ils n ’étoient eux-mêmes
qu’héritiers bénéficiaires de leurs auteurs? Ils n’osèrent
pas alors agiter ces questions, et préférèrent se laisser con
dam ner, en se réservant pour l’avenir d’élever des incidens. Toujours est-il vrai que les D eldevès, parle bénéfice
d’inventaire, se mirent dès-loi's à même de se préser
ver du payement de la créance, et que dès ce moment
deux circonstances s’opposèrent à ce que Bertrandy mît
la sentence à exécution contre les Garcelon :
L ’u n e , q u e tous leurs biens avoient été saisis en
1735;
5
L ’autre, que François Bertrandy décéda en i^ i ,
pendant celte saisie, laissant deux enfans mineurs.
Rem arquons, en passant, que la saisie réelle de 1735
avoit été faite par un sieur B lancher, créancier de
M artin et Guillain Garcelon ; qu’elle comprenoit no
tamment deux domaines appelés de Tougouse et de
Blavat, trouvés dans leur succession, et jouis par leurs
enfans et petits-enfans, nonobstant les répudiations suc
cessives; et que ces faits sont constans dans la cause,
par le rapport des actes, et par l’aveu de toutes les
parties.
Les ressources et les détours de la chicane ont servi
par la suite aux Gai-celon, pour se débarrasser de la
saisie, des saisissans, et de tous ces obstinés créanciers
qui s’avisoient de les poursuivre, et auxquels aujourd’hui
ils reprochent leur sileoce et des lenteurs. On va voir
qu’ils sont parvenus à faire rayer la saisie, à reprendre
ou conserver la possession des Liens; qu’ils les ont par-
�77
( 11 )
tagés, vendus, et que leurs créanciers, morfs successive
m ent, ont néanmoins conservé des droits que la m ino
rité de leurs héritiers et les difficultés sans nombre des
débiteurs ne leur ont pas permis d’exercer.
François Bertrandy avoit laissé deux enians, P ierre,
né en 1782, et A u n e , qui étoit beaucoup plus jeune.
D evenue majeure, celle-ci épousa un sieur Salvage, et
l’un et l’autre ayant acquis la connoissance de leurs
droits, formèrent en 1 7 7 1 opposition à la saisie réelle,
pour être colloqués à l’ordre, en vertu de leurs titres,
pour le principal de leurs créances, les intérêts et les
frais. Cette opposition eut pour effet nécessaire de con
server les droits des opposans, sans autre démarche ni
précaution de leur part.
L e silence dès-lors n’eût pas été n égligence; car,
par la seule force d’une saisie, toute autre poursuite
étoit paralysée, et le saisissant poursuit et conserve pour
tous les créanciers opposans, qui n’ont plus rien à faire
qu’à attendre la vente et la distribution du prix : mais
ce silence fut souvent interrom pu; nous en donnerons
bientôt la preuve. Nous ne rappellerons cependant pas,
quant à présent, les actes qui la fournissent, pour ne
nous occuper en ce moment que des faits qui étoient con
nus lors du prem ier arrêt de la Cour.
Il est inutile d’étaler ici ceux qui purent se passer
depuis 1771 jusqu’en
U ne foule de sentences et
plusieurs arrêts furent rendus avec différens créanciers,
notamment saisissans : au reste, on présumera sans peine
que la lenteur de la procédure fut occasionnée par les
doyens dilatoires des parties saisies. Il suffit de dire que
�1»
( 12 )
Ies Blancher étoient décédés, et que la saisie étoit pour
suivie par des sieurs Bertrandy, de Saint-M artin-Valm e r o u x , leurs h éritiers, étrangers à ceux de Salers,
dont il s’agit aujourd’hui. L e 21 mars 1792, un sieur
D elp ra t, mari d’Antoinette G arcelon, uùe des héritières
des débiteurs, demanda personnellement la radiation
de la saisie, l’envoi en possession pign orative, comme
créancier des G arcelon , et une provision contre le com
missaire aux saisies réelles. Cette demande fut formée
contre tous les intéressés, notamment contre Pierre
B ertrandy, de Salers, et A n n e , femme Salvage, sa sœur,
comme créanciers opposans, par l’acte du 2 mai 1771.
A p rès deux sentences du bailli de Salers , la demande
fut portée devant le tribunal de district de la même
v ille , où il intervint, le 17 août 1793, un jugem ent
qui ordonna la radiation, et qui autorisa D elprat à jouir
des biens pour sa créance.
C e jugement fut fondé sur ce que les saisissans avoient
touché diverses sommes, et n’avoient pas désavoué l’asser
tion qu’ils étoient entièrem ent payés.
Par ce m oyen, Delprat s’empara exclusivement de la
jouissance ‘des biens ; mais les héritiers Garcelon ne le
virent pas sans jalousie, et le 19 juin 179$, ils citèrent en
conciliation sa f emme et lui. L a citation fut donnée par
M arie G arcelon, fille à Sim on, A nt o i n et t e B erc, veuve
T ab arier, M arie V idal et M artin H ébrard, son m ari, re
présentant M arguerite G arcelon, aussi fille à Simon (ce
sont les adversaires actuels des sieurs B e rtra n d y )5 elle
fut donnée à D elprat, et aux Dom at et Vidal,descendons
de G arcelo n , par A ntoin ette, femme Jam y, et fille de
�( ï3)
Guillain Garcelon, en sorte que toute la descendance étoit
en cause.
Q ue demandèrent les h éritiers, alors, comme depuis, si
avides des biens, et qui aujourd’hui contestent eux-mêmes
la qualité d’héritiers purs et simples, et se retranchent dans
un prétendu bénéfice d’inventaire qui n’exista jamais?
I ls renouvelèrent une tierce-opposition form ée au juge
ment de. 1793 •, ils demandèrent à être déclarés seuls ha
biles à succéder a u x différentes branches éteintes de la
fam ille Garcelon, quant a u x biens provenus de Vestoc de
Martin et G uillain Garcelon, et à être autorisés à se mettre
en possession des domaines de Tougouse et Blavat, comme
héritiers bénéficiaires, sous l’offre de payer toutes les dettes
légitim em ent aifeclées sur lesdits biens.
Un jugement du 9 fructidor an fit droit sur cette de*
m ande, et au lieu de déclarer les demandeurs, représentans
de Sim on, seuls héritiers de Guillain et M artin Garcelon,
'ordonna que la succession de Jean G arcelon, curé de
St.-Projet, composée de ses biens et de ceux de M artin
et G uillain , consistans, entre autres choses , dans les do
maines de Tougouse et 'Blavat, serait partagée entre les
descendons de Sim on, et ceux d’Antoinette Garcelon,îqüi
étoient défendeurs.
3
Ce jugement et celui de 1793 furent attaqués par la voie
de l’appel; le tribunal civil du Puy-de-D ôm e en fut saisi,
et prononça sur l’un et l’autre appels, par jugem ent du
2 frimaire an 6.
Ï1 confirma la disposition du jugem ent de 179 3, qui
avoit ordonné la radiation de la saisie, infirma celle qui
av°it a(ljugé la demande exclusive de Delprat, et confirma
�3
(i4)
le jugem ent de l’an ., en ce iju’il «voit ordonné le partage;
A la charge , est-il dît, par les représentons d’Antoinette
G arcelon, de rapporter au partage ce qui étoit dû par elle
sur te prix de certaine cession de j 70^; les expressions sui
vantes sont remarquables :
« Sans qu’aucune des parties soit tenue du rapport
d’aucunes jouissances qu’elles ou leurs auteurs pour« roient avoir perçues, ni d’aucunes provisions qu’elles
« pourroient avoir touchées , non plus que d’aucuns
« intérêts qu’elles pourroient d evoir; le tout demeurant
,« entre elles respectivem ent compensé. »
Cette condition qui ne pouvoit avoir été prononcée que
par le consentement des parties ( car la justice ne prononce
pas aveuglém ent des com pensations), qui prouvoit au
moins que toutes avoient jo u i, ainsi que leurs auteurs ,
étoit en harmonie avec la conduite qu’avoient tenue les
héritiers Garcelon depuis l’acte frauduleux de 1707; mais,
il faut en convenir, c’étoit une fort étrange manière de
préparer le compte que des héritiers bénéficiaires doivent
toujours aux créanciers, surtout dans des successions où il
n ’y a eu ni scellés ni inventaire, ni même déclaration qu’on
se portoit héritier bénéficiaire. A u reste, et c’est ce qui est
fort rem arquable, tout démontre que les héritiers G arce
lo n , qui ne se remirent qu’à cette époque eu possession
des biens dont ils avoient été dépossédés par les suites
de la saisie réelle et le jugem ent obtenu par D elp rat,
n ’avoient pas jusque-là payé la créance des intimés; ils
ne l’ont pas fait depuis, car aucune des parties plaidantes
n’a jamais prétendu en avoir personnellement payé une
obole.
�(i5)
L e jugement de l’an 6 com prenoit dans ses qualités les
créanciers saisissans et les opposans 5 il prononça défaut
contre eux : ceux-ci y form èrent opposition \ ils y furent
déclarés non recevables par un jugem ent du 26 brum aire
an 7 , où les intimés sont encore parties. Il est donc incon-1
cevable que les héritiers Garcelon aient osé se faire un
moyen de leur silence, lorsqu’au contraire ils ont toujours'
plaidé sans autre bénéfice que de payer ou d’avancer,
il faut le croire, une énorme quantité de frais.
Nous négligerons ici le détail de ce qui s’est passé
depuis entre les G arcelon, les Bertrandy, de St.-Martin-'
V alm erou x, et d’autres individus : vingt jugemens et
arrêts, au moins, ont été rendus entre les Garcelon et leurs
créanciers, ou sur les nombreuses contestations qui se
sont élevées entre les Garcelon eux-m êm es; mais nous
ne pouvons omettre de rappeler trois arrêts de la C our,
qui ont successivement et contradictoirement jugé la
qualité d’héritiers des Garcelon.
1
Les Bertrandy, de St.-M artin-Valm eroux, après avoir
vu rayer la saisie réelle, sur la présomption qu’ils étoient
payés, ne se tinrent pas pour battus-, ils demandèrent
contre les héritiers G a rc e lo n , les mêmes qui sont appelans dans la cause actuelle, que leurs titres fussent déclarés
exécutoires en leur qualité d’héritiers purs et simples, et
qu’ils fussent condamnés à venir à compte.
. Cette demande avoit été adjugée au tribunal de M aun a c ) et deux arrêts successifs, des \!\ fructidor an 10 et
^ messidor an 11, avoient confirmé ces condamnations;
Ina,s ^ persévérance des appelans exigea des décisions
Plus solennelles.
�lis étoient en instance en la Cour avec certains créan
ciers, sur l’appel d’une ancienne sentence qui avoit p ro
noncé des condamnations contre A n loin e Garcelon ; Pierre,
comme tuteur des enfans mineurs de Martin et Simon;
Benoît J a m y, comme tuteur de ses enfans d’avec A n to i
nette G arcelon; Catherine Jam y et sieur D om at, son mari,
en qualité d'héritiers purs et simples de Jean Garcelon ,
prêtre, icelui héritier de Guillain et Martin Garcelon. L a
cause fut jugée le 17 pluviôsean i : l’arrêt rappelle diverses
autres sentences rendues depuis ^ 33 , qui avoient de
même déclaré les appelans ou leurs autres héritiers purs
et simples-, il juge que cette qualité étant irrévocablem ent
im pi’im ée, et étant d’ailleurs accompagnée de la posses
sion des biens, elle ne peut plus être contestée; « attendu,
« dit-il, q u i l résulte, soit des pièces produites au p rocès,
« soit des qualités données aux. Garcelon dans les sen
ti tences et aiTcts antérieurs, que M artin, Simon et Pierre
« Garcelon n avoient répudié que fictivem ent à la suc« cession de Guillain et Martin G arcelon, leurs père et
« a ïe u l, et q u ils étaient restés cohéritiers avec J ea n ,
« leur frère. » C e m otif avoit des conséquences positives,
car il est déterminé par les mêmes décisions ; il est
d’ailleurs reconnu que les appelans sont h leur tour héri
tiers de Jean et A n toine G arcelon, qui avoient réuni sur
leur tête et leur ont transmis la totalité des biens de
M artin et Guillain G arcelon, leurs auteurs.
U n autre arrêt contradictoire, du 11 frimaire an 14 ,
3
juge encore de même ; car les adversaires ne se sont
jamais lassés d’élever cette question: il ajoute à ses motifs
la circonstance que les héritiers Garcelon avoient fait
le
�*7
(
)
le partage des biens; circonstance suffisante, sans doute,
quand elle ne seroit accompagnée d’aucune autre.
E n fin , le 18 novem bre 18 1 5un autre arrêt l’a décidé
dans les mêmes termes contre la dame H ébrard ; il est
utile de le connoître.
B ertran dy, de St.-M artin - V a lm e ro u x , avoit fait un
commandement tendant à expropriation ; mais' les cohé
ritiers G arcelon, redoutant une semblable poursuite,
avoient demandé et obtenu de la justice la permission
de vendre par licitation, attendu la m inorité de quelquesuns d’eux : il paroît que le sieur Bertrandy avoit sus
4
pendu l’expropriation par complaisance pour eu x ; et
la licitation se poursuivoit lorsque la dame H ébrard céda
ses droits à Jacques Serre, ferm ier du domaine de T o u
gouse, par acte authentique du 29 janvier 1811.
N e pouvant se dissimuler sa qualité d’héritière pure
et simple, et s’étant bornée jusqu’alors pour la form e y
ainsi que ses cohéritiers, à dés protestations multipliées
de bénéfice d’inventaire; ellè continue ce système sans
cesser d’agir comme une héritière pure et simple ; elle
se présente comme héritière bénéficiaire de Jean G ar
celon , cüré de St.-Projet, J ils et héritier de Cruillain ;
elle ajoute qu’elle n’a jamais entendu se dire ni se porter
héritière des sieurs Sim on, M artin et Pierre G arcelon ,
frères dudit Jean , curé de St.-Projet, dont les succes
sions furent répudiées ; déclarant n’avoir jamais eu en
son pouvoir aucun m obilier dépendant de la succession
dudit Jean G arcelon, et n avoir perçu sur les fruits q u u n e
somme de Sao fra n es, employée et au delà dans les
instances terminées par les susdits jugemens. ( Elle avoit'
3
�(
>8 )
donc perçu quelque chose sans inventaire, sans lettres ni
déclaration de bénéfice d’inventaire, en un m ot, sans
compte ni mesure. ) Imm édiatem ent elle cède, à forfait,
à Jacques Serre ses droits successifs, part et portion h éré
ditaires dans la succession de Jean G arcelon, m oyennant
2,000 francs payés com ptant, et à la charge de payer
sa portion des dettes de la succession. V o ilà , il faut en
con ven ir, une manière assez ingénieuse de n’être q u’hé
ritière bénéficiaire de Jean G arcelon , surtout en la rap
prochant de l’art. 780 du Gode civil: au reste, on ne peut
pas douter que Jeun G arcelon ne fût héritier pur et
simple de son père et de son aïeul, et comme tel tenu de
la créance.
U n procès considérable s’éleva alors entre Serre et les
autres héritiers : Serre prétendoit faire.partager les biens,
les Garcelon s’y opposoient, et le sieur Bertrandy, de
St.-M artin, intervint pour soutenir q u’il y avoit lieu à
poursuivre la licitation; qu’autrement il recom m enceroit
l’expropriation, qu’il n ’auroit pas suspendue, s’il n’avoit eu
l ’espoir d’une vente prochaine et moins coûteuse par la
licitation.
Serre contestoit l’interventioD ; il soutenoit que sa
cédante n’étant pas héritière des débiteurs Bertrandy,
et ne pouvant tout au plus être considérée que comme
héritière bénéficiaire, ne pouvoit pas être tenue person
nellem ent de la dette; que les biens lui provenoient de
Jean , qui n’étoit pas le débiteur de Blancher; et enfin, il
se réservoit son recours contre sa cédante, dans le cas
où elle seroit déclarée héritière pure et simple. L e tri
bunal de M auriac avoit rejeté la demande en partage,
�9
( * )
et ordonné la continuation de la vente : sur l ’appel eu
la C our, le jugem ent fut confirm é; un des motifs de
l’arrêt porte textuellem ent que les déclarations d'héri
tiers bénéficiaires que sc sont attribuées les cédans de
Serre, n ont pu changer leurs premières q u a lités,fixées par
plusieurs jugem ens et arrêts ; et qu’il ne lui reste qu’une
action en garantie contre sa cédante pour l’avoir trompé
par une qualité qu’elle n’avoit pas;
C e que nous venons de dire est épisode parmi les
faits relatifs à la créance des intimés ; mais cela étoit
nécessaire pour fixer la C our sur ce qui a trait à la
qualité d’héritier bénéficiaire*, car il faut bien se persua
d e r, quelque difficile que cela soit, que les appelans, qui
sont parvenus à ne rien p a y e r, et cependant à garder les
b ie n s, à les partager sans se rendre compte des fm its et
sommes perçues par chacun d ’ e u x , qui les ont vendus,
et en ont reçu le p r ix , veulent encore aujourd’hui faire
juger qu’ils ne sont qu’héritiers bénéficiaires, nonobstant
le fait contraire, bien a v é ré , l’acte frauduleux de 1707 ,
et cette foule de décisions contra'dictoirés *, aussi est-il
facile de se persuader qu’après cet expoàé de faits, les
intimés ne se jetteront pas, sur ce point, dans une dis
cussion de moyens q u i , certes, serôit plus qu’inütile.
Nous avons vu que les B ertrandÿ, de Salers, porteurs
du billet de i j o 5 , des sentences de 1706 et 1743, de l’op- '
position de 1 7 7 1 , avoient figuré dans les diverses ins
tances relatives aux biens Garcëlon jusqu’en l’an 7. A près
avoir si long-temps plaidé sans rien obtenir que des con1
amnations infructueuses, ils reprirent leurs poursuites
eQ 1812 contre les appelans, comme héritiers et biens
5 *
�( 20 )
tenant des débiteurs originaires; ils demandèrent que la
sentence de 1743 fût déclarée exécutoire contre e u x ,
com m e elle l’étoit contre les enfans de M artin et Guillain
G a rce lo n , et conclurent à ce qu’ils fussent tenus de payer
la créance, chacun personnellem ent, pour la portion qu’ils
am endent dans la succession de leurs auteurs, et hypothé
cairem ent pour le tout.
Il est quelquefois dans le monde des positions diffi
ciles. Quand on occupe un certain rang dans la société;
q u ’on a tenu une conduite q u i, aux y e u x de ceux qui en
ont été les tém oins, impose silence sur certains m oyensj
q u ’on a d’ailleurs des juges imbus de la v érité, et qu’on
n ’espère pas de trom per sur les fa its, il est plus simple
de ne pas se défendre, et d’aller dans un tribunal étran
g e r , loin de celte portion du public dont on redoute le
jugem ent, et à l’abri de la conviction de ses juges, avancer
des faits qui peuvent plutôt obtenir quelque crédit, et
réclam er avec audace une faveur que refusent la justice
et la vérité.
T e lle a été la conduite des dames H ébrard et Tabarier : condamnées par défaut à M au riac, elles ont dii'ccternent interjeté appel en la C o u r, sans prendre la voie
plus simple de l’opposition. L es intimés ont présenté leurs
titres» et notamment la sentence de 19/| , dans le m êm e
état où elle est aujourd’h u i, c’est-à-dire, sans rature ni sur
charge, mais avec quelques lignes écrites et effacées sur
le verso de la dernière feuille. Q u ’ont opposé les appelans
3
en la C o u r? convaincus qu’ils n’étoient pas libérés, ils
n ’ont pas dit un seul m ot des lignes raturées, et sc
sont réfugiés dans des arguties q u ’ils eussent certaine
�(21
)
ment dédaignées, s’ils eussent eu quelque chose à espérer
de ces ratures.
Ils ont opposé la prescription , soutenant que les
Bertrandy avoient gardé plus de trente ans le silen ce,
et que l’opposition de 1 7 7 1 , et toutes les procédures où
ils avoient figuré d ep u is, n’étoient pas des diligences
utiles.
Ils ont remis subsidiairement en question leur qualité
d’héritiers bénéficiaires.
C ’est sur ces deux questions que la cause a été portée
à une prem ière audience de la Cour.
• A
une seconde audience,
les appelons déclarèrent
interjeter appel de la sentence de 1743, soutenant qu’elle
n’a voit jamais été signifiée, et en dem andèrent la n u llité,
comme étant irrégulière et incom pétem m ent ren d u e;
m oyen déplorable qui se ressentoit de la misère de la
cause, et qui fut prom ptem ent repoussé par la produc
tion d’un extrait d’enregistrem ent de la signification faite
en 174 3 , et de l’original de la signification m êm e, qui
étoit en lam beaux, et qu’on refusoit de reconnoitre.
Quant à la prescrip tion , elle fut repoussée par le
fait m êm e des diligences des Bertrandy.
Enfin , les faits parloient assez haut sur la qualité
d’h éritie r, pour que la décision fût inévitable.
A lo rs , et comme si c’eût été un trait de lu m iè re ,
le défenseur excipa des ratures mises au dos de la sen
tence. V o y e z , d is o it-il, ces lignes effacées avec soin,
elles ne pouvoient que contenir la m ention de quelque
paiem ent; les appelans n’articulent p a s , à la v é rité , en
avoir fait un seul; mais cette foule d’individus condamnés
�( 22 )
par la sentence de 1743, et qu’on ne poursuit plus aujour
d’h u i, ne peuvent-ils pas avoir payé? Dans l’ignorance
du fait, dont nous n’avons ni preuves ni indices, 11e faut-il
pas le présum er? D evalens, R ollan d , C h eym o l, les G arcelon, que d’individus condamnés! Pourquoi donc aujour
d’hui poursuivre une seule famille ? pourquoi garder un
silence absolu contre les autres? n’est-ce pas parce qu’ils
ont acquitté la créance?
11 n’étoit pas difficile de repousser ce dernier effort
d’un plaideur désespéré; toutes ces présomptions p ré
tendues ne détruisoient pas le titre représenté dans son
état intégral: le billet de 170 5, la sentence de 1706, celle
de 1743 , tout cela est entre les mains du créancier; les
lignes raturées sur le dernier feuillet de la sentence de
1743 en sont indépendantes; elles n’occupent pas une
place sur laquelle on eût pensé à m ettre des endossem ens; enfin., cette sentence n’étoit qu’une confirmation)
du titre , et non le titre m êm e; et certes si les Deldevès;
eussent payé la d ette, comme on feint de le c r o ire ,
ils se fussent moins arrêtés à faire des endossemens sur
leu r sentence de 1743 que sur le titre original de la
créan ce, sans laquelle cette sentence ne pourrait rien
être.
C 'est sur tout cela que la C our eut à statuer le
'
juillet 18 16 ; le ministère public s’étoit prononcé pour
la confirmation du jugem ent : la C our pensa devoir
rech ercher un éclaircissement qu'on pou voit encore
23
espérer sur le dernier fait ; elle rejeta le m oyen de
prescription et l’appel de la sentence de 1743, et or
donna , avant faire d r o it, que trois experts vérifie-
�3
(a )
roient les lignes raturées, et transcriroient, dans leur
rapport, figurativem ent, autant que possible, soit l’en
tier contenu de ces lign es, soit les mots détachés q u’ils
pourroient seuls déchiffrer; et com m e la C our ne statuoit pas sur la créan ce, elle crut à plus forte raison,
qu’il convenoit de surseoir à prononcer sur la qualité
d’héritier.
C et arrêt a été suivi d’un rapport d’e x p e rts, qui
déclarent n’avoir rien pu lire des dix - n eu f lignes
écrites transversalement sur la dernière feuille de la
sentence, si ce n’est les deux dernières séparées des
autres par un trait de plum e et écrits d’une encre beau
coup plus n o ir e , portant ces mots : L e p r ix sera dis~
tribue' a u x p lus anciens créanciers.
L a cause fut reportée à l’audience au mois d’avril
dernier ; et com m e les appelans faisoient principale
m ent porter la présom ption de payem ent sur les D eld e v è s , débiteurs originaires, les intimés déclarèrent
n ’avoir connoissance d’aucun paiem ent fait par les D eld e v è s, si ce n’est par l’acquisition d’un bâtim ent saisi
et vendu sur eux et dont le sieur B ertran dy, leur p è re ,
s’étoit rendu adjudicataire, m oyennant 12 ou i , oo fr. ;
qu’ils n ’en avoient pas trouvé le titre , mais qu’ils en
3
avoient m ém oire; qu’au reste, ils ne refusoient pas d’al
louer cette somme ou toute au tre, si on leu r fournissoit des preuves ou m êm e des présom ptions suffisantes,
que leur père eût reçu d’autres som m es, et q u e lle s
fussent imputables sur la créance dont il s'agit.
L e ministère public avoit encore conclu à la con
firmation du jugem ent ; la cause n’ayant pas pu être
�ju g é e , d o it ê tre r e p o r té e u n e Iroisièm e fois à l’a u d ien ce.
Dans l’in te rva lle, et à force de rech erch es, les inti
més ont découvert des sentences qui peuvent devenir
précieuses ; elles prouvent les faits que nous avons
avancés, que les Bertrandy «voient d’autres créances
contre les D eld e v è s, et qu’en 1788 ils n’étoient payés
d’aucune.
Il
paroît que quelques-unes de ces créances remontoient à des temps très - recu lés, soit qu’elles eussent
été cédées par des tiers aux Bertrandy, soit qu'elles
provinssent de leur propre ch ef : il paroît que les
créanciers originaires de quelques-unes, lassés de tou
jours poursuivre sans jamais rien o b te n ir, les avoient
cédées à Jean Bertrandy : l’une d’elles rem ontoit à l’année
16 7 7 , les autres n’éloient guère moins anciennes-, elles
ronsistoient dans une somme de 2,ooofi\, une de 1,000 fr.,
5
un e de 600 fr., une de 4 7 fr> o cent., plus quelques
habits de deuil, le tout avec les intérêts et frais, depuis
jcertaines sentences de 1677, I 7°7»
années postérieures,
obtenues par les créanciers prim itifs, cédées à B ertran dy,
et confirmées en sa faveur par d’autres sentences, notam
m ent en 1749*
Il
paroît aussi que les créanciers originaires avoient
form é en 1716 une demande hypothécaire contre Jean
P u e cli, et autres détenteurs de certains biens, qui avoient
appartenu aux D eldevès : Bertrandy reprit cette de
m ande, et le
juillet 1750, obtint une sentence qui dé
3
clara les héritages confinés dans un exploit de 1 7 16 , et
* affectés et hypothéqués ,à une somme de 2,000 francs
« d’un côté, 1,000 fr ,d ’autre, 47 fi\
5ocent. d’autre, 600fr.
d’autre,
�( a5 )
« d’autre, la valeur d’uu habit de deuil, et aux intérêts et
« frais, ainsi que le tout est adjugé par la sentence du 18
« juillet 1749* contre Pierre C lieym ol, praticien, comme
« tuteur de ses enfans d’avec T oiuette D eldevès, icelle
« héritière d’A n toin e D eld evès, son p è re , e t, par son
« m oyen , de Jean D eldevès, son aïeul; » la sentence per
met à Bertrandy de jouir par form e d’h y p o th è q u e .. . . et
m ôm e, à son ch o ix , de saisir et vendre sur placard.
Il est ensuite ajouté :
« Sans préjudice au demandeur d'autres dus, droits et
« actions, tant en vertu de b illet, sentence de la bourse,
« qu’autres titres qui lui demeurent réservés. »
Il
y eut opposition à cette sentence, et un débouté fut '
prononcé le i décem bre 1765.
3
Preuve évid en te, d’une p a rt, que les D eldevès ne
payoient pas, et de l’autre, que Bertrandy ayant exercé
d’autres poursuites pour le billet de 1705, et étant pour
cela opposant à la saisie réelle des biens G arcelo n , se
bornoit à agir hypothécairem ent pour les autres créances,
sans y com prendre jamais celle de 1705, qui dem euroit
intacte et intégralem ent réservée par cela seul.
Bientôt après, C lieym ol étant décédé, sa succession fut
répudiée, et Bertrandy fut obligé de faire nom m er un
curateur; il obtint contre lui, en 17 6 7 , une n o u v e lle sen
tence.
Depuis cette époque, des saisies et autres poursuites
lurent continuées pendant plusieurs années, sans aucun
résultat connu des intimés.
M ais, en 1788, les Bertrandy demandèrent la permis
sion de saisir et ven d re, sur simple placard, une maison
4
�( 26)
qui appartenoit aux D e ld e v è s, et une cave qui en dé
pendent et qui avoit été vendue à un des Bertrandy, de
St.-M artin-Valm eroux : ils jugèrent convenable alors de
poursuivre la vente pour ses créances de toute n atu re,
soit celles portées par la sentence de 17^0, et autres anté
rieures, soit celle de 1705 dont il s’agit aujourd’h u i; ils
furent obligés de faire nom m er un nouveau curateur h la
succession vacante de D eldevès, et obtinrent le 22 février
178 8 , tant contre lui pour la maison, que contre B er
trandy, de St.-M artin, pour la cave, une sentence qui leur
perm ît de faire vendre sur simple placard, « p o u r, est-il
« d it, les deniers qui en proviendront, être délivrés a u x
« demandeurs à compte de leurs dites créances, à imputer,
« i°. sur les intérêts, fra is et dépens fa its et à fa ire. » Cette
condition de la sentence est fort rem arquable dans la
Cause.
3
La saisie suivit im m édiatement; et le a janvier 1789,
l ’adjudication fut prononcée au profit des B ertrandy,
d eSalers, poursuivans, moyennant la somme de i , o o f r .,
qu’ils durent retenir et im puter sur leurs créances, en
vertu de la sentence de 1788.
3
C e fait est très-p récieux dans la cause, surtout si on le
rapproche im m édiatement d’un autre relatif aux lignes
raturées sur la sentence de 1743.
L es experts ont déchiffré ces deux dernières lignes; ils
les avoient d’abord bien lues telles qu’elles sont écrites
bien lisiblement.
L e p rix sera distribué a u x plus ensienes créances :
ces mots leur ont paru sans doute une erreur de diction,
et ils ont raturé, sur le papier transparent dont ils se sont
�( 27 )
servis, les deux dernières lettres du m ot ensienes, et
il est resté les plus ensicn ; quant au mot créances, les
experts ont cru voir et en ont fait le m ot créancier au
singulier; mais avec de l’attention, on lit très-distinctem ent, au dessous et sur la sentence m êm e, les deux mots
ensienes créances. Cette rem arque trouvera bientôt son
application.
V o ilà les faits dans toute leur exactitude; il ne reste
qu’à en tirer des conséquences; elles appartiennent à la
justice, et les intimés se borneront à quelques réflexions:
ils exam ineront ce qu’il faudroit décider dans le droit,
abstraction faite des circonstances, et quelles preuves ou
présomptions peuven t résulter des faits.
Il
étoit inutile de s’épuiser pour prouver le principe
que le titre, produit par une partie, fait pleine foi de
tout ce qu'il contient m êm e contre elle ; ce principe gén é
ral est indubitable: aussi est-il vrai que si la sentence contenoit quelque condition, le créancier seroit obligé de la
souffrir, et ne pourroit même opposer aucune prescription
à son adversaire pour tout ce qui résulteroit des dispositions
corrélatives de ce titre invoqué par lu i; mais quelle appli
cation peut avoir cette m axim e du droit sur un titre dont
la disposition unique est une condamnation prononcée
en faveur de celui qui le produit?
L e titre cancellé, dit-on, cesse d’être un titre; et làdessus, citations à perte de v u e , pour apprendre ce que
ce st que canceller un titre, et quelle valeur doit avoir
un titre cancellé.
Il ne falloit pas non plus rechercher aussi loin la signi-
4*
�(a 8 )
iication du m ot ca n cellé; nos auteurs modernes nous
l ’expliquent brièvem ent : voyons M erlin.
« C anceller, c e s t Vaction de rendre un écrit nul en le
« barrant ( le titre ) ci traits de plume. »
O n en trouve autant dans F errières, dans D en izart,
et dans tous les D ictionnaires de droit et de jurispru
dence , raÊme, il faut le dire, dans tous les passages que
cite la Consultation.
E t remarquons bien que si le titre est cancellé, il y a
non pas preuve absolue, mais (et c’est ce qui est fortrem arquable) sim ple présomption de payement. C ’ est la doctrine
enseignée par tous Les auteurs, no ta mm en t par RousseauL a co m b e, qui dit que la cancellation de /'original fa it
présomption de payem ent, à moins que le créancier ne
prouve manifestement que la créance lui est encore due;
cette doctrine n’est pas dissimulée dans la Consultation,
3
aux pages 1?. et i , et ce sont les véritables principes.
Si donc le titre de créance des intimés étoit cancellé,
c’est-à-dire, barré en travers ou en croisant, il faudroit pré
sum er qu’ils ont été payés; mais cette présomption ne
leu r interdiroit pas de prouver le contraire, et certes
la masse des faits établiroit l’impossibilité que ce payem ent
ait jamais été fait.
M ais par où le titre est-il cancellé ? La sentence de
1^43 est rapportée intégralement sans rature ni surcharge;
elle est dans les mains du créancier; elle fait toujours
pleine et entière foi de son contenu : seulement q u e lq u e s
lignes mises sur le verso du dernier fe u ille t ont été ratu
rées, cancellées, si l’on veut. M ais la question de savoir
quelle conséquence 011 doit tirer de ligues ainsi raturées,
�(
29
)
est toute autre que celle qui naît de la cancellation du
t itr e , et surtout du titre original ; nous exam inerons
en peu de mots cette question, qui est celle de la cause;
mais nous devons rem arquer, dès à présent, que ce n’est
pas le cas d’appliquer brusquement les principes en matière
de titre ca n ce llé, à la simple cancellation de quelques
lignes qui ne sont pas le titre même.
Cela est d’autant plus vrai, que la cancellation de la sen
tence de 1743 elle-même ne sauroit être d’auc une c o n
séquence dans la cause; cette sentence, en effet, n ’est
pas le titre original des intimés; et les lignes, qui y sont
écrites et effacées, ne peuvent pas, dans le doute, établir
une présomption de payement.
Elle n’est pas le titre des intim és, cela est évident:
car isolée, elle ne peut leur servir à i-ien; elle ne pro
nonce pas contre les G arcelon une condamnation défi
n ie , et qui les frappe à elle seule; elle les déclare débiteurs
des causes de la s a is ie , faute d’affirmation; elle ne fait
donc que leur appliquer le billet de 1705 dont ils devien
nent débiteurs personnels. M ais, si les causes de la saisie
s’évanouissent, si le billet est acquitté, et que le débiteur
le retire, si le créancier le perd ou le rem et, sa sen
ten ce, purem ent applicative d’une créance préexistante,
reste vaine dans ses mains, et le laisse sans titre ; car
toutes les condamnations possibles, qui se réfèrent à un
titre, dem eurent sans vertu , lorsque le titre disparoît.
Convenons, en effet, que le débiteur seroit bien peu
réfléchi, si en faisant un payem ent, et 11’en recevant pas
de quittance, il se bornoit à faire ou à exiger un simple
endossement sur une sentence, et laissoit ce titre dans son
�état prim itif; la loi n’a ni p u , ni voulu admettre une sem
blable présom ption; lorsque le titre original est en pleine
vigu eu r, le créancier qui l ’a fait confirm er par une sen
te n ce, et qui la p e rd , a ie droit d’en retirer une nou
velle expédition; il p eu t, à la v é rité , perdre son droit
d’exécution immédiate par la disparition de la grosse, et
la suspicion qui peut s'ensuivre ; mais il ne perd pas le
droit d’actiori, ni m ême celui d’obtenir de la justice le
droit immédiat d’exécution , si on ne prouve pas contre
l u i , par les voies lég a les, que
le
titu e
o r ig in al
qu’il
conserve a été anéanti.
T e lle eût été la position du sieur B erlrandy, si, étant
de mauvaise foi, il eût mis sa prem ière expédition de côté,
et en eût demandé une seconde, disant qu’il avoit perdu
la prem ière. M u n i de son titre original de créance bien
intact, qu’auroit-on eu à lui dire ? auroit-on pu s’opposer,
avec fondem ent, à ce que la justice lui fît délivrer une
seconde grosse de la sentence? n on, sans doute; c a r ia
remise de la prem ière faisant à peine une présom ption
de p a ye m en t, le créancier qui l’a p e rd u e , sans l’avoir
rem ise, n’a plus contre lui la présomption de droit, puis
q u ’il a son titre, et que le débiteur n’en est pas nanti; c’est
donc en ce cas le débiteur qui doit prouver sa libération,
sans quoi il ne peut em pêcher la délivrance d’une seconde
grosse, ni refuser le payement.
E t voilà pourquoi la lo i, faisant une différence essen
tielle entre les différens cas, veut en l’art. 1 282, que la re
m ise du titre original sous seing prive fa sse preuve de la
ilibération, tandis que l’article suivant ne regarde la remise
delà grosse du titre que comme une simple présomption de
�( 3 l )
payem ent, et alors il ne la ut pas s’étonner que le législateur,
en disant dans l’art. i33^, que l’écriture, mise par le créan
cier à la suite, ou en m arge, ou au dos d’ un titre qui est
toujours resté en sa possession, fait foi contre lu i, quoique
non signée, ait eu le soin de le placer sous la rubrique des
actes sous seing privé ; il y a lo in , en effet, du titre ori
ginal sous seing privé à une sentence qui en ordonne
l’exécution', toute la créance est dans le titre, la sentence
n’est qu’un m oyen ; et il im porte peu qu’elle soit rendue
contre un tiei's qui n’étoit pas partie dans le titre \ il
n’en est pas moins vra i, que sans ce titre original, la sen
tence n’est rien , m ême contre le tiers; elle n’est donc
le titre dans aucun cas.
A in si donc, et dès que le titre original n’est pas can
cellò , il seroit indifférent que les sentences le fussent*,
et puisque la loi n’attache de présomption qu’à la can
cellation du titre o rig in a l, on ne peut pas étendre sa
présomption à ce qui n ’est pas rigoureusem ent ce titre }
les principes invoqués ne sont donc pas ceux qui ré
gissent la cause.
Exam inons maintenant en droit, quelle conséquence
peut avoir la cancellation des lignes mises au dos de
la sentence-, il ne nous faudra que peu de mots. T o u t ce
que nous venons de dire dans le cas où la sentence
elle-m êm e seroit can cellée, s’applique, et à bien plus
forte raison, aux lignes raturées sur le dos ; la loi ne
peut pas attacher à un fait semblable la présom ption de
droit, qu’une créance a n térieu re, et dont le titre est
rapporté, a été anéantie. Q u el est le débiteur qui eût
�' ....................................................................... (
3a
)
ainsi laissé le titre original à son créancier, dans toute
son in tégrité, s’il eût payé la dette? Q ui osera juger
aujourd’hui que cette dette n’existe plus? Q ui croira
pou voir légalem ent déclarer que le billet de i j o S a été
payé, acquitté, anéanti? la loi y autorise-t-elle les juges?
non. E t si les magistrats trouvoient dans cette cause
des m oyens de faveur par lesquels ils se laissassent en
tr a în e r , se,roient-ils assez forts de leur conscience, et assez
sûrs de ne s’être pas trompés , pour affirmer qu’il n’en ré
sulte pas une injustice ? ce seroit une position où ils ne doi
ven t jamais se placer. Lorsque Ja rigueur des lois entraîne
des conséquences luncstcs à un débiteur trop lent, et dont
un e condamnation tardive renverse la fortune, c’pst un
m alheur pour lu i; lorsque l’inattention, l’inobservation
de quelques formalités , de quelques délais , exige de la
justice une condamnation qui dépouille un propriétaire
de ses bien s, c’est un mal plus grand en co re; m ais,
le ju g e , en p ro n o n çan t, garde une conscience calme
et sûre d’elle-même., parce qu’il n’a été que l’organe
de la loi. S i, au contraire, entraîné par une impression
désavantageuse à une p artie, par quelques m ouvemens
du cœ ur ou de l’âme qui peuvent le trom per, il désarme
une rigoureuse justice, pour s’abandonner à ce qui lui paroî t équitable ; s’il dédaigne les présomptions delà loi pour
se livrer à celles de son esprit, il tombe dans l’arbitraire,
et court les risques, en violant la lo i, d’avoir été injuste.
M ais pourquoi cette digression, et par où donc les
héritiers G arcelon pourroient-ils se rendre favorables?
çl’où pourroit naître une présomption de payem ent?
et
�33
(
)
et quelle circonstance pourroit exiger que la justice voulut
bien prêter l’oreille aux lamentations des appelans? tout,
au contraire, ne s’élève-t-il pas contre eux ?
Quelles conséquences désastreuses, s’écrient-ils, n’auroit pas l’action dirigée contre nous! Nos pères ont été
condamnés personnellem ent pour une dette qui n’étoit
pas la le u r; une sentence par défaut a prononcé cette
décision injuste. N ous n’élions pas débiteurs des parties
saisies, et nous avons été considérés com m e tels. U n
siècle et plus s’est écoulé, et après avoir laissé accum uler
les accessoires de la créance de m anière à renverser notre
fo rtu n e, on rapporte la sentence qui nous condam ne,
dans un état qui démontre l’infidélité du créa n cier,
et qui explique son long silence. Parm i les individus
condam nés, la plupart sont abandonnés, parce qu’évi
dem ment ils ont p a yé, et que la m ention de ces payemens peut seule avoir été raturée 5 et c’est nous seuls
qu’on poursuit avec acharnem ent, pou r nous faire im
prim er une qualité d’héritiers purs et simples, aussi fausse
qu’elle seroit désastreuse. L a justice doit donc s’empresser
de saisir le m oyen qui se présente, pour nous tirer du
précipice affreux qu’ont creusé sous nos pas l’astuce et
la mauvaise loi.
C ’est ici qu’indépendam ment du droit, les faits seuls
vont répondre.
Si les intimés n’avoient d’autre titre que la sentence
743
1
, pour prouver la dette des G arcelon envers
D eld evès, ce ne seroit pas moins une preuve légale
et indestructible. L es Bertrandy ne peuvent elre tenus
de 1 apporter les titres de D eldevès contre les Garcelon \
�(34)
maïs puisqu’il faut tout établir ab initio, ils produiront
à la C our onze titres de créance de Jean D eldevès
contre G uillain G arcelon , tous consentis dans les trois
années 1672, 16 7 3 , 1674, et montant en principal à
plus de 2,400 fr. Pas un de ces titres n’est c a n ce llé ;
pas un n’a d’endossemens lisibles ni illisibles; pas un
n ’a été acquitté ; et sans doute on fera grâce de la
prescrip tion , puisque la sentence de 1743 n’est pas
prescrite. Cette sentence étoit donc juste, et les G ar
celon avoient donc leurs motifs, lorsqu’ils ne se défendoient pas.
L e silence prétendu des intimés s’écarte sans plus de
peine. T oujours poursuivre, et ne jamais rien recevoir*,
toujours répondre à des incidens, à des chicanes, à des
répudiations frauduleuses, à des gestions de bénéfice
d’inventaire, et ne jamais trouver des gens qui se défen
dissent ouvertem ent et avec franchise; voilà quel rôle
ils ont joué depuis 1707 jusqu’à présent.
Quant aux présomptions de payem en t, d’où peuventelles naître? e st-ce de la diligence des débiteurs? T o u t
p ro u ve, au contraire, et leu r mauvaise volonté, et leurs
efforts pour se soustraire au p ayem en t, et le succès dont
ils ont été couronnés jusqu’à ce jour. T ou s leurs créan
ciers ont les mains pleines de titres q u’ils représentent
dans leu r état prim itif, et aucun d’e u x , depuis plus d’un
siècle, n’a pu en arracher une o b o le; cependant ils ont
conservé les biens, nonobstant leurs répudiations et les
poursuites de leurs nom breux créanciers.
D ’autres auroient-ils p a yé ? mais laquelle des parties
condamnées par la sentence de 1743 pourroit justifier
cette présom ption?
�( 35 )
Seroit-ce D evalens, curateur à des successions vacantes?
M ais ces successions de gens qui eux-mêm es avoient
répudié à celle de leurs auteurs, ne pouvoient donner
prise que par des ventes judiciaires.
Il
étoit certainem ent impossible de rien obtenir autre
m ent du curateur, qui n ’étoit q u’ un homme de p a ille ,
et ne pou voit être condam né personnellem ent. O r , les
biens n’ont pas été vendus sur lui*, ils étoiënt sous la
saisie réelle de ^ ; ils n ’en sont sortis que pour rentrer
dans la main des intimés.
1 35
Seroit-ce Pierre G a rce lo n , tuteur des enfans de Sim on
et P ierre? Il étoit dans le m êm e cas.
Seroit - ce les C h e y m o l, héritiers des D eldevès ? Ils
opposoient un bénéfice d’in ven taire; ils l’avoient fait
adm ettre, et leurs successions ont été répudiées.
Seroit-ce R o llan d , autre tiers saisi? R ie n ne peut en
fournir l’idée : nulle part on ne trouve de traces de ce
qui s’est passé avec e u x ; cependant il est de tradition
que D e ld e v è s, époux d’une R o lla n d , étoit débiteur
de sa d o t, et que la fem m e, devenue v e u v e , avoit
exercé son action contre les héritiers de D eld evès, son
m a r i, qui devoit rem ettre la d o t, m êm e sans l’avoir
re ç u e , parce qu’il en étoit garant. Cette créance étoit
une de celles cédées à B ertran d y, et pou r lesquelles
il avoit obtenu sentence en 1749 : sans doute si les
R olland avoient payé quelque chose, c’eût été sur leur
propre créance. A u reste, ils existent, et on n’a osé
articuler aucun payem ent qui les concerne : d’ailleu rs,
et les intimés n’ ont jamais changé là-dessus de langage,
quon leur fournisse des p reu ves, ou seulem ent dcs!
�( 36 )
indices raisonnables, et ils ne refusent pas de déduire
tout ce qui pourroit avoir été payé.
M ais en core, à quelle époque pourroit-on rapporter
ce fait de payem ent ? C e n’est assurément pas à un
temps antérieur à 176 0 , puisqu’alors en obtenant
condamnation pour d’autres créances, les intimés se
réservoient positivem ent c e lle -là ; ce n’étoit non plus
ni en 1765 et 176 7, puisqu’ils obtenoient de nouvelles
condam nations; ce n ’étoit pas davantage en 178 8, puisqu’à cette époque une sentence peim ettoit de saisir en
vertu de ces mêmes titres, et qu’elle autorisoit les Bertrandy à touclxcr le p r ix , a . c o m p t e de leurs créances;
et certes ce n’est pas depuis 1788; car en ce cas on
articuleroit le fait com m e positif, puisqu’il seroit p er
sonnel à quelqu’un des appelans, et non com m e une
présom ption ou une vraisemblance.
A-t-on vu d’ailleurs beaucoup d’empressement à retirer
le billet de 1705, à l’anéantir? Disons-le en core, les inti
més ont les inains pleines de titres de toute espèce ; ils ont
dépensé des sommes énormes pour obtenir des condam
nations, et ils ont encore intégralem ent leurs titres et
leurs sentences.
E t cependant si ce titre est toujours en vigu eu r, il doit
être exécuté contre tous ceu x à qui il a été appliqué : les
ratures de certaines lignes, au dos de la sentence de 1740,
sont absolum ent indifférentes; elles n’ont pas besoin d’ex
plication; et si on condam noit les intimés, faute par
eu x d’exp liq uer le contenu de ces lignes, on établiroit
une présom ption arbitraire contre la présomption de la
loi.
�(37 )
M ais, veut-on expliquer tout? rien ne semble plus fa
cile*, et la C o u r, qui n’a voulu que chercher un éclaircis
sem ent, sans rien préjuger sur le point de droit, peut
encore se satisfaire.
L e sieur Bcrtrandy nvoit p u , après l’adjudication de
1789, m entionner sur cette sentence qu’il étoit com p
table de i, oo fr. ; y ajo u ter, pour sa propre sûreté, que
ce p rix seroit distribué auoc p lus anciennes créances ;
puisque la sentence d’adjudication le lui réservoit A
c o m p t e d e s e s C R É A N C E S . Il a pu ensuite, et en remai’quant
3
que les autres créances étoient les plus anciennes, qu’elles
3
n’étoient pas absorbées, et que par conséquent ces i , oofr.
ne pourroient s’im puter sur le .billet de 170$, effacer
ces lignes comme inutiles et devenues sans objet; c’est
la seule explication raisonnable qu’on puisse en donner
et qu’exigent ces derniers m ots, distribués a u x p lu s an
ciennes créances ; elle est toute sim ple, toute naturelle, et
suffit pour tranquilliser les consciences les plus alarmées.
Enfin , et quant à la q u a lité , les intimés n’ont qu’à
attendre en silence la décision de la C our : cette q u a lité,
jugée cent fois, et jugée pour la cause, par la sentence
de 174 3 , ne peut être éq u ivoq u e; Jean , curé de SaintP ro je t, n’é to it-il pas h éritie r? son acceptation sous
bénéfice d’inventaire n’é to it-e lle pas frauduleuse ? les
adversaires n’avouent-ils pas tous qu’ils sont héritiers de
Jean , que les domaines qu’ils ont vendus provenoient de
lui? n’ont-ils pas pris partout la qualité d’héritiers d’A n
toine, qui l’étoit aussi de G uillain et M artin ? où peut
donc être la question ?
E h ! qu est-ce donc que des bénéfices d’inventaire de
�( 38 )
ce g e n re , lorsque les héritiers présomptifs jouissent les
b ien s, en font part à .leurs cohéritiers qui répudient, les
afferm ent, et en disposent à leur g ré ; lorsque surtout, et
encore aujourd’h u i, ces prétendus héritiers bénéficiaires
en font des ventes et des baux à ferm e volontaires, sans
formalité de justice, et les partagent sans se rendre compta
de ce qu’ils ont réciproquem ent perçus. D es actes de ce
gen re son t, de d roit, présumés em porter acceptation
pu re et sim ple, sans autre p re u v e , surtout lorsqu’on dé
m ontre que c’étoit une conduite prém éditée pour parer
à l’action des créanciers, et ne rien perdre.
- M a is, et ce. q u i . achève de prouver la bonne foi et
les bonnes dispositions des G arcclon de nos jours, dignes
héritiers du système de répudiation de leurs auteurs,
ce sont les contre-lettres contenant des stipulations de
pot-de-vin et d’augmentation secrète du p rix des baux
volontaires, qu’ils ont fait constamment des biens de leurs
auteurs. C ’est pour éviter des fraudes de ce g e n r e , que la
lo i exige des formalités indispensables et rigoureuses, de
la part des héritiers bénéficiaires, et qu’elle attache la
qualité d’héritier et l’acceptation im plicite à tout acte
qui n ’en est pas accom pagné, parce qu’elle le présume
frauduleux. Q u e dire donc lorsque la preuve réelle se
trouve à côté de la présom ption, et lorsque des arrêts con
tradictoires ont apprécié l’une et l’autre, et.appliqué la
qualité d’héritier pu r et simple ?
N ous arrêterons-nous au m oyen de faveur tiré par les
G arcelo n , de ce que le sieur Bertrandy, un des intim és,
a acheté un de leurs dom aines? C et argum ent étoit
pitoyable ; les biens ont été mis en vente par les Gar-
�celon eux-m êm es; le sieur B ertrandy, qui avoit, com m e
créancier, intérêt à préven ir de nouvelles fraudes, y
a mis son enchère; un domaine lui est resté par suite
d’une déclaration de m ieux ; il croit l’avoir acheté son p rix :
qu’a-t-on à lui dire? qu’est-ce que cela a de com m un avec
sa créance? sa conduite a-t-elle quelque chose de répréhen
sible, de frauduleux? porte-t-elle quelque préjudice aux
appelans? D e deux choses l’un e: ou le domaine est à son
p r ix , et ils n’ont pas à se plain dre; ou il est adjugé à vil
p rix , et alors le créancier qui a enchéri est justifié; car,
s’il lui est resté, ce n’est pas par des actes secrets, mais par
nne enchère pu b liqu e; et s’il n’eût pas en chéri, il en fût
résulté que le domaine auroit été adjugé à plus bas p rix ,
et seroit resté, p e u t-être, presque pour rie n , entre les
mains des débiteurs eux-m êm es, au préjudice des créan
ciers: et on pourroit se plaindre de ce qu’un créancier a
enchéri! de ce qu’on lui a laissé adjuger la propriété!
N e seroit-ce pas le regret de n’avoir pu encore une fois
le rendre dupe, qui fait tenir ce langage aux appelans?
Q u ’ils cessent donc de se plaindre, de dire qu’ils sont
plongés dans la misère si leur cause est perdue. L e u r
silence p ro lo n gé, leur conduite ténébreuse, leui's fraudes
m ultipliées, leurs chicanes sans nom bre, voilà les causes
immédiates qui ont produit l’accroissement de la créance;
et si l’arrêt que redoutent les appelans m enaçoit leur for
tu n e, ce seroit parce que la justice, qu’ils espéroient éviter
seroit rendue trop tard : et depuis quand un débiteur qui
la fuit avec tant d’opiniâtreté, a-t-il le droit d’im puter à son
adversaire lés conséquences fâcheuses qui,en résultent à son
égard? Si les appelans eussent franchem ent comparu en
�743
(
40 )
et offert de vider leurs mains de tout c e qu’ils dev o ie n t à D eld evès; s’ils n’eussent pas agglom éré des jouis
I
sances qu’ils vouloient soustraire, leurs dettes n’auroient
pas tant grossi, les créanciers n’auroient pas tant souffert,
les frais ne seroient pas si énormes : mais il faut que celui
qui a fui la justice pendant si long-tem ps, en éprouve la
rigu eu r, lorsque son jour arrive et si les appelans en
étoient durem ent frappés, ils n e pourraient s’en prendre
qu’à eu x-m êm es,
E n deux m ots, et c’est à cela que se réduit la cause,
si on s’arrête au point de droit sur la question relative
au t itr e , il faut en ordonner l'e x é c u tio n , puisqu’il est
rapporté en origin al, sans altération, et que rien n’a
détruit ni ce titre, ni m êm e la sentence qui l’ap p liqu e;
o r , la lo i, le point de d roit, doivent être ici la seule
règle du juge.
Si on v e u t, pour se satisfa ire, desoendre jusqu’aux
circonstances, elles s’élèvent toutes contre les appelans.
E t enfin , quant à la qualité d’h éritiers, l’évidence du
fait, les condamnations cent fois prononcées, et m ieux
que tou t, la sentence de 174 3, qui condamne les G ar
celon en q ua lité d'héritiers, tout cela repousse de con
cert une prétention aussi déplorable q u ’elle est devenue
odieuse,
M e D E V I S S A C . avocat.
M e D E V È Z E , avoué licencié.
A R IO M , de l’imprimerie de T H I B A U D , Imprimeur du Roi,
de la Cour royale, et Libraire, — Novembre 1817,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bertrandy, François-Marie. 1817]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
successions
bénéfice d'inventaires
généalogie
longues procédures
ratures
vices de forme
saisie
experts
graphologues
cancellation
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour sieur François-Marie et Pierre-François Bertrandy, Louise et Marie-Anne Bertrandy, habitant à Salers ; dame Louise-Françoise Salvage et sieur Delzangle, docteur en médecine, son mari, habitant la commune de Fontange, intimés ; contre dame Antoinette Berc, veuve Tabarier, Marie Vidal, veuve Hebrard, habitant à Salers, sieurs Jean-Pierre, Hippolyte et Pierre Vidal, propriétaires, habitant à Saint-Christophe, et autres, appelans ; pour servir de réponse à la Consultation imprimée, distribuée en la Cour au mois d'avril 1817.
arbre généalogique
note manuscrite : « Voir la consultation à laquelle on répond, ainsi que l'arrêt au 23éme volume, p. 475 et 492. »
Table Godemel : Ratures : s’il existe au dos d’un titre authentique, produit par une partie à l’appui de sa demande, un certain nombre de ratures ou biffures couvrant plusieurs lignes d’une écriture préexistantes, mais illisibles, doit-on nécessairement en conclure 1° que l’écriture effacée était contraire à celui qui possédait le titre, et que c’est lui qui l’a biffé ; 2° que les lignes raturées constituaient un paiement intégral ou des paiements partiels ? ou, au contraire, en l’absence de toute contestation, vérification ou reconnaissance d’endossement, par les experts nommés, ne vaut-il pas mieux accorder foi au titre, que de se livrer à des présomptions arbitraires et non autorisées par la loi ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1817
1707-1817
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2403
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Salers (15219)
Fontanges (15070)
Saint-Bonnet-de-Salers (15174)
Saint-Paul de Salers (15205)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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bénéfice d'inventaires
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Créances
experts
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graphologues
longues procédures
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saisie
Successions
vices de forme
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ea5940860eb4781043a191a03bfa40e8
PDF Text
Text
v
/
v
\
y
L
PRECIS
Le sieur
EN R É P O N S E ,
COUR ROYALE
POUR
2 . Chambre.
A m é d é e - E liz a b e t h - L o u is
D E R IO M .
B aron
D E M A I S T R E et la dame D E M O N T
J
B L I N , s o n épouse, intimés;
CONTRE
Sieur
P h i l i p p e
C h a r le m a g n e
V A N -
D U E R N E . et la dame M A R É C H A L
j
son
épouse s appelans.
I L ne fut jamais de cause plus simple que celle des
sieur et dame de Maistre; la connoissance des faits, si
on les expose avec exactitude, suffit pour en démontrer
la justice. Les sieur et dame V anduerne, qui ont cru
j
�I V'
I ----------------- ¡ T V l l
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„é ¥ ....■....
^
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'
^
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devoir publier un mémoire, fussent .donc tombés dans
un inconvénient fort grave, s’ils se fussent bornés à les
montrer tels qu’ils sont, tels que la justice doit les voir ;
aussi, se sont-ils efforcés de leur donner une couleur, de
les présenter sous une forme apprêtée. Pour se faire
une cause, il a fallu dénaturer le sens des actes, expo
ser des principes que les législateurs et les jurisconsultes
se garderoient d’avouer, et en faire des applications
inexactes.
\
Il y a, sans doute, un peu de témérité à jouer un
semblable rôle; il y a, il faut le dire, quelque chose
de despectueux pour la justice; mais que n’oublie-t-on
pas quand on a l’imagination exaltée par un rêve de
plusieurs millions ? C’est cet intérêt majeur qui seul peut
expliquer comment les sieur et dame Vanduerne ont
s’abandonner à l’idée d’un semblable procès. Il est
Nsi doux de penser qu’on pourroit devenir maître d’une
terre de six cent mille francs au moins, et obtenir la
restitution de cent vingt-six ans de jouissances qu’une
imagination exaltée peut aller , dans son délire, jusqu’à
espérer qu’il l’obtiendra. Que sait-on? . . . . Les frais sont
si peu de chose en comparaison des résultats, qu’on peut
avoir l’idée de tenter la fortune ! si par hasard on
pouvoit réussir, on auroit à se reprocher de ne l’avoir
pas fait! et, d’ailleurs, la crainte de lY:vènemcnt, quelque
peu fondée qu’elle soit, l’ennui d’un procès dont le
cours est si désagréable et dont les suites seroient si
terribles, en supposant tout, peuvent engager le pos
sesseur légitime à un sacrifice ; quelque peu considé
rable qu’il fû t, iir outre-passeroit de beaucoup les frais;
�*
9
d'ailleurs, si le possesseur est maintenu, comment s’y
prendra-t-il pour répéter ses dépens ? fera-t-il, pour ce
modique intérêt,la dépense d’un voyage à Bruges? sur
quoi les prendra-t-il, quand il y sera? n’auroit-il pas
plus de bénéfice à les abandonner ? On risque donc peu
de chose en faisant un procès et ce seroit sottise de
ne pas l’entreprendre. T el a été, sans doute, le calcul
des sieur et dame Vanduerne.
Les intimés n’ont pas pensé qu’aucune considération
pût leur commander un sacrifice pécuniaire. Porteurs
de titres authentiques soutenus d’une possession de plus
d’un siècle, ils se croyent légitimes propriétaires, et ne
croyent rien devoir à leur propre sûreté; ils ne sont
pas obligés à des sacrifices par la position do leurs ad
versaires et les circonstances qui entourent le procès j
les sieur et dame Vanduerne, sans doute, n’ont pas
besoin dJeux, et les intimés ne doivent aucun égard à
une prétention ambitieuse autant qu’irréiléchie ; il faut
donc aborder franchement la question, si toutefois, après
l’exposé des faits, on peut se faire une question.
Il est constant que la terre de Bompré, qui fait le
sujet du procès, provient de Claude Maréchal. Il vivoit
sur la fin du 17e. siècle; il étoit mort néanmoins avant
le 2.5 janvier 1692.
A son décès, il laissa quatre enfans ; Françoise, dont
nous ne parlerons que cette seule fois, parce qu’ayant
embrassé la vie monastique, elle fut, par la mort civile,
exclue de la succession de son père ; Jeanne, représen1 *
�C 4
)
tée par les intimés ; Claude-Bernard, auteur des appelans, et M arc, décédé sans postérité.
Le 25 janvier 1692, Jeanne épousa Nicolas Revanger;
elle se constitua tous ses biens par une clause générale,
et la dame Jacquinet de Pannessières, sa mère, lui fit
donation entre-vifs de tous ses biens et droits, même
des créances qu’elle avoit contre la succession de son
mari ; elle lui fit donation aussi de tous les biens qu’elle
laisseroit à son décès , à la charge des légitimes de
Claude et M arc, scs deux frères.
La dams Maréchal mourut peu de temps après, le
18 septembre 1693 ; sa succession, comme celle du père,
se trouvoit dévolue à ses trois enfans, Jeanne, GlaudeBernard et M arc; mais Jeanne, comme donataire de
tous les biens présens, avoit le droit de les retenir sans
prendre part à la succession; d’un autre côté, les biens
du père étoient obérés de dettes ( près de 300,000 fr. ) ; la
mère ayant des reprises plus considérables encore et que
Jeanne pouvoit exercer comme donataire universelle,
il faut reconnoître que ces deux successions furent la
chose qui dut l’occuper le moins; mais comme il ne lui
suffisoit pas de les négliger, et qu’en succession directe
surtout, la maxime la mort saisit le v i f a un effet
immédiat lorsqu’on n’en repousse pas l’application , la
daine Revanger se présenta leaô novembre suivant devant
la sénéchaussée de Bourbonnais, et y déclara renoncer
aux successions de ses père et mère, pour s’en tenir
à sa donation ; le juge lui en donna acte et prenant
en considération l’intérêt du fils (, Marc ) qui étoit en
core m ineur, ordonna qu’il seroit pourvu de tuteur et
�(
5
)
de curateur. Il est utile de remarquer ici que depuis
le 25 novembre 1693, la dame Revangcr n’est pas re
venue contre sa déclaration, et que sa répudiation n’a
été attaquée ni critiquée par personne ; c’est déjà quel
que chose pour repousser une prétention uniquement
fondée sur ce qu’elle seroit présumée posséder ccmtne
cohéritière ; toujours est-il vrai que dès le jour de cette
répudiation, les deux successions reposèrent en entier
sur la tête de Claude-Bernard et Marc Maréchal.
Les biens étoient saisis réellement par la dame F eydeau, veuve du sieur le Maistre, président des enquêtes
du Parlement de Paris, et un sieur Quesmas, procu
reur, l’un et l’autre créanciers du père. Le fils arrêtait
les poursuites par des incidens ; des procédures longues,
coûteuses, alloient dévorer une partie de la substance
des ci'éanciers, lorsqu’il parut plus convenable, soit h
eux, soit aux conseils des deux frères M aréchal, de
prendre des mesures qui fussent dans l’intérêt de tous.
Le 27 mars, il fut passé entre les saisissans, faisant
tant pour eux que pour les autres créanciers , et ClaudeBernard Maréchal, majeur de coutume ou émancipé ,
un traité sur lequel les appelans ont longuement disserté
pour établir que c’étoit un acte sans effet réel, quoi
qu’il eût eu un résultat immédiat, suivi d’une exécution
de plus d’un siècle, sans le moindre trouble ni la plus
petite réclamation. Bornons-nous h faire connoître l’acte
tel qu’il est* nous n’en citerons cependant que les parties
essentielles, à cause de son étendue.
On en expose d’abord l’objet 5 c’est « d’éviter la
« multiplicité des procédures, la dissipation des biens . . . .
« et le déiv'vi'Mpr»— '
h.Q f1ê(Tueni<,r' 7 "
�(
«
«
«
«
6
)
d’état q u i sont obtenues par ledit sieur de Bompré
fils, qu i n’y peut rien prétendre, attendu le grand
nombre des dettes qui absorbent et au delci la valeur
des biens. »
On passe ensuite à la disposition : « L e sieur Maré« chai a quitté, cédé, rem is, transporté, délaissé et
« abandonné tous ses droits successifs sur les biens
a meubles............. et immeubles..................délaissés par
« ses père et m ère, même les actions rescindantes et
« rescisoires, à la réserve de ce q u 'il peut prétendre
« sur Vacquisition Jaite de la dame de Longueval.
« Ces derniers mots sont une preuve qu’il ne cède pas tout.
« Pour lesdits créanciers en jciuir à dater de la Saintk Martin dernière ; pour quoi, les subroge en tous ses
c< droits, privilèges et hypothèques.' Les revenus qu’il
c< n’aura pas perçus appartiendront aux créanciers.
« Il est stipulé, pour l’intérêt des créanciers entr’eux,
« que les saisies réelles et mobilières demeureront en
a leur force et v 'îr tu , et tous les créanciers dans tous
« leurs droits, privilèges et hypothèques, L E S U N S A
k l ’ e n c o n t r e d e s a u t r e s . » On a longuement glosé
sur cette stipulation qui démontre, dit-on, que l’actc
ne transmettoit aux créanciers aucune p ro p r ié té , puis
qu’ils se réservoient la saisie, leurs privilèges et hypo
thèques ; on a voulu faire entendre qu’ils se réservoient
tout cela contre Maréchal, leur céJant, et on a omis
ces termes si précieux : Les uns à Vencontre des autres.
Il est évident, d’ailleurs, que la réserve étoit nécessaire,
i° . dans l’intérêt des saisissans, premiers opposans res
pectivement aux autres créanciers, parce que la vente
ne diminuoit rien de leurs droits de préférence j 2°. à
�(
7
)
cause de la minorité du vendeur, et jusqu’à sa ratifi
cation. Mais, poursuivons:
« S’il se trouve d’autres bi°ns meubles, effets et im« meubles , ils appartiendront aux créanciers.
« L e présent délaissement et abandonnement fait
« pour le prix et somme de quatre mille livres, que
a lesdits créanciers, tant pour eux que pour les autres,
« promettent lui bailler E T P A Y E R , par forme de
a gratification, sur les biens de ses père et mère ,
« quoique la totalité d’iceux ne soit pas suffisante pour
cc payer leurs dettes; ladite somme payable en la ville
« de P a r is , un mois après sa majoritéy et après qu’il
« aura ratifié ces présentes et fait ratifier à la dame
« son épouse, et sans qu’‘aucun des créanciers puisse
« faire saisir ladite somme de 4,000 livres -,........... et
« où ils le feroient, lesdits sieur et dame comparons
« seront tenus de fa ire lever lesdites saisies et en
« rapporteront mainlevée , ......... mais ne seront tenus
« de faire lever les saisies qui pourroient être fa ite s
cc à la requête de ses créanciers particuliers. »
Maréchal « s’interdit d’obtenir dorénavant aucunes
« lettres d’état, et d’user de celles qu’il a déjà obte« nues ; ................ et s’il venoit à s'en servir, il sera
« privé de ladite somme de 4,000 livres ; la rendra,
« s’il i’a reçue, et payera 3,000 livres de dommages« intérêts;
cc E t en considération de toutes ces conventions, les
cc saisissans s’obligent, en outre, à payer à Maréchal,
« dans quinze jo u rs, une somme de 1,000 livres qui
« sera prise sur le prix des récoltes de Cannée der-
�(
2
)
« n ière, à ïeffet de quoi la vente sera incessament
« faite , ........................bien entendu que le payement
« des 4,000 livres promises audit sieur Maréchal sera
« fait des deniers provenans desdits biens abandonnés,
« soit des revenus, soit des fonds. »
Il est facile de se fixer sur l’objet et les conséquences
de cet acte.
On y voit un délaissement de certains biens qui
appartiendront aux créanciers, avec droit de jouir
depuis un terme antécédant.
Ce délaissement est fait pour'un prix convenu; les
biens sont cédés, délaissés , abandonnés, etc............. ils
appartiendront aux créanciers.
lie cédant s’en î-éserve quelques-uns; il ne traite pas
avec scs créanciers personnels ; donc ce n’est pas un
simple abandonnement pour se décharger de ses dettes.
T out en stipulant, tant pour eux que pour les autres
créanciers du père, les deux seuls qui traitent s'obligent
personnellement à payer ce prix et à garantir de toutes
saisies que pourroient faire ces autres créanciers.
Ils ajoutent un supplément de prix, et c’est pour
l’intérêt du sieur Maréchal , et non par aucune condi
tion restrictive, qu’ils s’obligent de le payer sur les
récoltes de l’année précédente, et pour c e , de les vendre
incessamment ; de m êm e, la clause qui l’oblige a payer
les 4,000 livres sur les deniers provenant des biens,
soit des revenus ou des fonds, est toute dans l’intérêt de
M aréchal; c’est un privilège qu’on lui accorde sur
le produit des biens, mais cela ne peut jnmais tourner
contre lu i, puisqu’on stipule en même temps quU sera
payé
�(
9
)
payé au préjudice de tous les créanciers, et nonobstant
que les dettes surpassent la valeur des biens, et qu’au
reste on s’y oblige personnellement.
N ’en disons pas davantage ; tout le monde peut qua
lifier un acte semblable, quand on le connoît tel qu’il
est. Voyons ceux qui l’ont suivi.
Ce premier acte ne lioit pas les créanciers; ainsi il
n’eût pas eu de grands avantages pour la dame le
Maistre, si on ne le leur eût pas rendu commun, puisque
chacun d’eux auroit pu poursuivre la vente et ramener
au point qu'on avoit voulu éviter. Quesmas, qu’on peint
comme un procureur avide de procédures, y eût trouvé
son compte, sans doute ; mais il se présenta tout bonnemen comme un créancier légitimequi ne demandoit
autre chose que de toucher sa créance, même en accor
dant des termes et des facilités, et qui fuyoit les frais
de saisies au lieu de se ménager adroitement le moyen,
d’entasser des procédures par lui - même ou par autrui,
et de consumer en frais, à son bénéfice personnel,
une partie notable du gage commun de tous les créan
ciers.
Le i 5 janvier 1695, huit créanciers souscrivirent vo
lontairement à l’acte du 27 mars 1694; soit refus de
la part des autres, soit difficulté de les réunir à de
grandes distances, on n’avoit pas eu leur consentement;
mais la dame le Maistre et le sieur Quesmas qui avoient
besoin de terminer avec tous les intéressés, obtinrent,
le 13 juin 1695, une sentence des requêtes du palais
qui. homologua le traité avec ceux qui l’avoient sous~
%
�( IO )
crit, et poim't d’assigner les rtfusans pour vo :r déclarer
la sentence commune avec eux.
L e sieur Maréchal acquéroit sa majorité le 17 juin;
il avoit intérêt de son côté à la ratification du traité,
pour toucher 5,000 liv. auxquels, sans cela, il n’avoit
aucun droit; il fit,dans le même temps, et hors la -pré
sence des créanciers, les actes nécessaires pour y par
venir. Il faut les connoître.
L e 20 juin, il passe devant notaires à Paris un acte
où il comparoît seul et où il déclare autoriser son épouse
à ratifier le contrat du 27 mars 1694, et à s’ obliger,
solidairement avec ledit sieur son époux, à son entière
exécution , et, par ladite ratification, se désister de toutes
prétentions qu’elle pourroit avoir et demander sur les
choses abandonnées.
L e 30 du même mois, la femme passe à Tournay
un acte où elle figure encore seule et sous l’autorisation
résultante de l’acte précédent; elle s'oblige solidaire
ment avec son m ari, et déclare ne prétendre aucun
droit ni choses quelconques sur les susdits biens et
choses délaissées par,sondit mari.
Enfin, pour achever sur ce point, le 27 août, Maré
chal se présente devant deux notaires à Paris; il dépose
en leurs mains son extrait baptistaire du 17 juin 1670,
pour prouver sa majorité ; les actes des 20 et 30 juin précé
dent; ratifie l’acte comme majeur, en ce qui le concerne;
donne quittance de 3,117 liv. payées par le fermier judi
ciaire, sur les4,000 liv.; se réserve le surplus* etx'econnoît
avoir reçu les 1,000 livres de supplément dès le 24 mai
�C 11 )
1694. A insi, sauf le payement du surplus des 4,000 liv.,
tout est consommé quant <\ lui par ce dernier acte. .
Pendant que Maréchal se mettoit en mesure pour
tenir les promesses qu’il avoit faites en minorité, la dame
le Maistre et Qucsmas avoient dû en faire autant pour
remplir leurs obligations.
Le 19 août, ils avoient obtenu une seconde sentence
aux requêtes du palais ; ils demandoient, i°. que le traité
de 1694 fut homologué contre les créanciers refusans;
20. que le fermier judiciaire fût tenu de payer à Maré
chal la totalité de la somme qui lui étoit due en vertu
de ce traité.
Claude Maréchal demandoit lui-même le payement
de ses 4,000 livres.
E t un sieur Priés, c r é a n c i e r , q u i se trouvoit des der
niers en ordre, demandoit que les sommes payées ou
promises à Maréchal fussent supportées par tous les
créanciers, au marc le franc de leurs créances, au lieu
d’être prélevées et de frapper en entier sur les derniers
créanciers hypothécaires.
Remarquons ici que vingt-sept créanciers étoient assi
gnés; qu’on voyoit figurer parmi eux Jeanne Maréchal
et le sieur R evanger, son mari; qu’ainsi, après avoir
répudié sans condition, et se trouvant en présence de
Claude-Bernard Maréchal qui avoit abandoné ses droits
moyennant un prix, de Quesmas et de la dame le Maistre
qui étoient à ses droits, ils n’élevoient aucune préten
tion sur les bii'ns du sieur Maréchal père; qu’ils figuroient uniquement comme créanciers, et qu’ainsi leur
qualité fixée contradictoirement avec tous les intéressés,
(
2
*
�.
.
.( ■ • >
devenoit publique et indélébile, quand bien môme ils
eussent pu la changer auparavant.
A u reste, la sentence homologua le traité, en décla
rant commune à tous les créanciers assignés la sentence
précédente ; elle ordonna le payement à Maréchal des
4,000 livres, et sur la demande de Priés, elle porte :
« Jo in t la contestation à Tordre, pour y être, en ju
te géant, pourvu ainsi qu’il appartiendra. »
Ces dernières expressions sont précieuses; elles ne
laissent pas de doute sur la pensée du juge, que la tra
dition des biens se trouvoit consommée au profit de
tous les créanciers, par le résultat de cette sentence.
A u reste, observons que par son effet immédiat, les
sieur et dame Hcvanger furent investis, comme créan
ciers et devenus acquéreurs , d’un droit quelconque
à la proj)riété des biens qu’ils avoient refusés comme
héritiers. Ce fut donc en leurs mains un nouveau titre
sans relation avec l’ancien qui ne résidoit plus sur leur
tête; titre nouveau qui auroit interverti la cause de leur
possession, quand bien mêm e, ce qui n’est pas, ils auroient continué de la garder après la répudiation.
A la vérité, la circonstance qu’ils étoient acquéreurs
ou cédataires, comme on voudra, seulement pour une
portion, aui-oit suffi pour que ce ne fût q u ’un com
mencement de titi’e à la propriété du tout ; mais aussi nous
allons voir que ce titre reçut bientôt sa perfection par des
actes ultérieurs, passés avec ceux-là seuls quipouvoient
désormais prétendre droit aux biens, quant à la portion
de Claude-Bernard Maréchal, savoir, ses créanciers de
venus propriétaires.
�C 13 )
Ce qui ne pouvoit avoir effet que pour la portion
de Claude, s’appliqua bientôt à celle de Marc Maréchal;
par acte passé devant notaires à M oulins, le 26 du
racine mois d’août, et dans lequel on voit figurer les
sieur et dame Revanger, seulement comme créanciers,
dépouillés de toute autre qualité, en face de leur pré
tendu cohéritier; celu i-ci, qui ne les considère plus
comme tels, se dépouille en leur faveur de la pro
priété de ses biens, et les leur abandonne dans les
mêmes termes et sous les mêmes conditions ( quoique
pour un moindre prix ) que venoit de le faire Claude
Bernard, son frère, majeur comme lu i, et débiteur
comme lui de créances plus considérables que la valeur
de ses biens.
A in si, indépendamment d’une répudiation non ré
tractée, la dame Revanger fut reconnue par ses deux
frères uniquement comme leur créancière, et agissant
en cette qualité.
Nous n’avons pas à nous occuper ici d’une contesta
tion qui s’éleva, à ce qu’il paroît, entre la dame le
Maistre et les autres créanciers, sur la prétention qu’elle
avoit de les forcer à prendre des biens fonds en paye
ment de leurs créances : on dit qu’elle succomba sur
cette prétention, et cela peut être*, car il étoit difficile,
hors le cas d’une volonté réciproque , d’imaginer un
mode de payem ent plus extraordinaire et moins suscep
tible d’exécution; et il ne faudroit pas s’étonner que les
autres créanciers s’y fussent refusés, et qu’ils eussent
obtenus de ne pas y être forcés. M ais, où les conduisoit cette résistance ? Ils trouvoient toujours dans les
�( i4 )
personnes de la dame le Maistre et de Qucsmas des
obstacles insurmontables à leurs vues. Ceux-ci, créanciers
hypothécaires, premiers en ordre de collocation, ne
couroient aucun risque. Qu’on vendit les biens volon
tairement, ce que peut-être on ne trouvoit pas à faire, ou
qu’on continuât les poursuites en saisie réelle, ce qui exposoit les derniers créanciers à tout perdre, Quesmas et
la dame le Maistre dévoient toujours être payés. En cet
état de choses, on songea à se débarasser de ces deux créan
ciers. Ils s’y prêtèrent, et le 10 décembre 1697 fut passé à
Moulins un acte par lequel les sieur et dame Revanger
et les Farjonnet, créanciers, s’obligent solidairement a
payer ces créances. I>e sieur R e va n g er y figure tant
comme mari que comme fondé de procuration de son
père qui étoit créancier de son chef; on voit par la
suite de l’acte que ses créances s’élevoient à 10,800 liv.;
celles des Farjonnet à 138,000 liv ., et ce, non compris les
intérêts et les trente-cinq autres créances. Quoiqu’il en
soit, Quesmas et la dame le Maistre consentent à re
cevoir, l’un 4,000 liv. et l’autre 5oo liv. par an jusqu’à
extinction de leurs créances; ils s’obligent à faire ap
prouver l’accord par tous les créanciers; mais comme
il faut vendre et que Quesmas et la dame le Maistre,
abandonnant la gestion, ne seront plus à même de se
défendre de rien, il est stipulé que dans le cas où
le prix de la vente ne suffirait pas, les créanciers coutractans payeront ce qui s"1en défaudra, sans garantie
ni institution de deniers.
Après cet acte, et par requête du 14 février 1698,
les Revanger , Farjonnet et autres créanciers qui y
�C 15
)
parties, démandèrent contre Quesmas et la dame
le Maistre, et le commissaire aux saisies réelles, qu’il fût
exécuté suivant sa forme et teneur; qu’ils fussent auto
risés à jouir des biens, et qu’il fût fait défense au commis
saire aux saisies réelles de les troubler dans cette jouissance.
Les 10 mars et 10 juillet suivant, ils obtinrent d’abord
aux requêtes du palais, puis aux requêtes de l’hôtel,
deux sentences qui l’ordonnèrent ainsi ; et ces deux
sentences furent exécutées sans contradiction.
Il importeroit très-p eu , sur cette partie des faits,
que les sieur et dame Revanger eussent arrangé tout
cela pour tirer meilleur parti des créanciers, après s’être
débarassé des deux plus difficiles; on pourroit mêm e,
sans danger, admettre pour un moment cette supposition,
qu’ils avoient préparé de longue main tous ces actes
dans leur intérêt personnel, pour conserver les biens
sous un titre plutôt que sous un autre, avec le moins
de frais possible. Tout cela seroit sans conséquence, car
il ne s’agit ici que d’une difficulté unique, la seule que
les appelans osent élever ( si toutefois c’est une difficulté ),
celle de savoir si les sieur et dame Revanger ont in
terverti leur titre; s’ils ont joui comme cohéritiers ou
comme acquéreurs; et certes, pour décider cette ques
tion, il est fort inutile de rechercher, après cent vingtsix ans, à quel prix ils se sont débarassés des créanciers.
La seule chose qui intéresse pour cet objet, est de recon
noitre si les deux frères Maréchal ont conservé des droits
après les actes dont nous venons de parler, et si la dame
Revanger, donataire universelle de sa mère et créancière
de sommes considérables, a pu réunir sur sa tête la to
talité de la fortune. L ’a-t-elle fait? si elle l’a fait, a-t-elle
étoient
�pQO
( I6 )
possédé les biens légitimement et animo dom ìni? si elle
les a possédés, a-t-elle transmis à ses enfans cette pos
session ? ceux-ci, la recevant de bonne foi et la conti
nuant de même, ont-ils à craindre, après cent vingt-six
an,s, que cótte possession leur soit aussi inutile que le
titre et le titre que la possession, et qu’on leur arrache
les biens en leur faisant restituer tout le bénéfice de la
jouissance ? C’est cette dernière partie des faits et sa consé
quence qui vont former le complément de cette proposi
tion que nous avons posée du premier m ot, qu’il ne fut
jamais de cause plus simple que celle des sieur et dame
de Maistre ; à quoi nous pourrons, ce semble, ajouter
dans quelques instans q u ’il n’en fut jamais de plus dif-*
ficile, de plus déplorable que celle des sieur et dame
Vanduerne ; et voilà pourquoi des moyens entortillés
avec une narration inexacte, présentent de leur part
des résultats aussi peu positifs, qu’ils ont donné, sans
doute, de travail à une imagination sophistique.
Qu’on ne doute pas que les sieur et dame Revanger
n’ayent pris, après les sentences de 1698, le seul parti
prudent qui leur restoit, celui de payer les créanciers;
aucun cl’eux n’a rien réclamé depuis. Qu’on ne dise pas
que ces créanciers étoient imaginaires, ils figurent au
nombre de trente-sept dans les actes et les sentences.
Qu’on ne se figure pas enfin que les sieur et danjo de
Maistre seraient en peine de justifier le payement do
ces créances. Il no seroit pas dilficile d’établir quelles
s’élevoient en principal à près de 3°0;000 livres; que
la majeure partie des terres qui cornposoient Ja fortune
fut délaissée en payement aux créanciers, ou vendue
pour
�C *7
)
pour les payer ; enfin, que les reprises de la dame Revnnger, plus considérables à elles seules que toutes les autres
dettes de la succession, outre-passoient la valeur de co
qui resta entre ses mains.
Mais les intimés se garderont d’établir aucune discus
sion sur ces points secondaires et qu’ils croyent inutiles
à examiner ; ils ne chargeront pas cette cause de détails
qui y sont étrangers dans l'état où elle se présente ;
encore une fois, cela n’est pas la question, et l’intérêt
de l’homme qui soutient une cause juste, claire dans ses
faits, forte dans ses preuves, est que l’esprit du juge
ne soit pas un seul instant éloigné de la^question.
O r , pour y rester constamment, il nous suffit de dire
qu’après avoir réuni sur leur tête la propriété des biens,
en désintéressant tou9 les a u t r e s c r é a n c i e r s , les sieur et
dame Revanger voulurent consolider cette propriété dans
leurs mains, par l’autorité de la justice.
Le 8 octobre 1717? ils firent assigner une partie des
créanciers aux requêtes du palais ; la femme se présenta
comme donataire universelle de la dame sa m ère,
yeuve de Claude Maréchal, et qui avoit renoncé ¿1 la
communauté stipulée en leur contrat de mariage ,* elle
persista donc toujours dans sa qualité de créancière de
son père, jusqne-là reconnue par tout le monde comme
l’unique dans laquelle elle avoit procédé.
Sur cette requête, fut l’enduc le 2.6 novembre T7I 7
une sentence contradictoire avec un créancier, et par dé
faut contre les autres ; elle est ainsi conçue :
« La cour, parties comparantes ouïes, par vertu du
« défaut donné contre les défaillans, en conséquence des
3
�( 18 )
« payemens faits par les parties de Guillauniet (les sieur
« et dame R evanger), aux créanciers de défunts Claude
« Maréchal et Marie Jacquinet, des subrogations et
« réunions en leur personne des droits des créanciers}
« ordonne que la propriété des terres de Bornpré,
« Loutaud................avec leurs circonstances et dépen« dances, demeureront et appartiendront incommuta« blement, avec les fruits et revenus, auxdites parties de
« Guillaumet, depuis le 10 décembre i6$J qu’ ils en
« sont en possession................ce faisant, fait pleine et
« entière mainlevée de la saisie réelle et des oppositions ;
« ordonne qu’elles seront rayées des registres.
Sans beaucoup de commentaires, demandons ici aux
sieur et dame Vanduerne, car c’est le moment, sans
doute, où ils ont pris que la déclaration de propriété
n’étoit prononcée que comme conséquence d’une dis
position principale, conséquence q u e, suivant eux, il
ne faut pas séparer de son principe, ni rendre plus
puissante que lui, ou si, au contraire, cette déclaration
de propriété n’est pas elle-méme la disposition prin
cipale, la disposition unique de la sentence. A u reste,
tout évident que cela est, nous aurons à y revenir.
Cette sentence fut signifiée à procureur le I e r dé
cembre; la signification à domicile n’est pas rapportée,
et il ne faut pas s’en étonner beaucoup ; elle est, d’ailleurs,
assez inutile; mais il faut tenir pour certain qu’elle fut
faite dans le même temps, car tous les créanciers n’ayant
pas été parties dans cette sentence, ils furent appelés
aux requêtes du palais par (de nouvelles assignations
des 8 et 9 avril 1718, et le 30 juin, une nouvelle sentence
�{. *9 ;
fut rendue contre le surplus des créanciers; elle déclara
commune avec eux celle du 25 novembre précédent; et
comme l’original de la signification i) domicile fut écrit
sur l’expédition même, il y est encore joint aujourd’hui.
Certes, Claude-Bernard et Marc Maréchal, dépouillés
de tous leurs droits depuis 1695, par un consentement
volontaire, n'avoient que faire d’assister à ces sentences^';
aussi, n’y furent-ils point appelés, mais bien tous leurs
créanciers, seules parties intéressées depuis ces actes de
délaissement, vente ou abandon, comme on voudra les
qualifier. Ces sentences furent bientôt exécutées; le 23
septembre 1718 la saisie réelle et les oppositions furent
rayées, en vertu des actes passés devant notaire et des
sentences de la Cour ; cette exécution qui consistait
dans un fait lé g a l, fut accompagnée d’un autre fait
public, authentique, la possession exclusive, conforme
au titre sans douts, par conséquent, ayant pour prin
cipe la propriété incommutable transférée ou confirmée
par la dernière sentence, comme conséquence des actes
qui l’avoient précédée.
Cette possession commencée en 1697, et dont le carac
tère jusqu’à 1717 n’étoit pas incertain, quoique moins
positif, s’est exercée encore pendant cent seize ans
contre les Maréchal qui n’avoient plus paru de
puis 1695 , et une quadruple prescription setoit ac
complie sur la tête de la demoiselle de M ontblin qui
représente les sieur et dame R evanger, lorsque le
16 mars 1814, les sieur et dame Vanduerne l’ont assignée
dans la personne du sénateur comte Garnier, son tuteur.
3
*
�( 20 )
Cette redoutable assignation étoit assez difficile à ré
diger, car on vouloit lui donner des motifs, et il falloit
sortir do l’embaras où on étoit jetté par des titres ré
guliers et une possession si long-temps prolongée. A u
reste, elle est assez curieuse et il ne faut pas omettre
d’en rendre compte.
La dame Vanduerne expose qu’elle représente ClaudeJBernard M aréchal; elle dit que la dame Jacquinet,
mère du sieur Maréchal avoit été sa tutrice ; qu’en
mariant sa fille au sieur Revanger et lui remettant ses
biens, elle les chargea solidairement de continuer la
tutelle; qu’en conséquence, les Revanger et leurs représentans n’ayant pu tenir les biens q u ’au môme titre de
tuteur, ce titre est précaire et fait obstacle à toute
prescription.
Ne se fiant pas trop à ce premier moyen qui n’est
pas exact en f a it , ils disent que si les sieur et dame
Revanger n’étoient pas tuteurs, ils étoient cohéritiers
de Claude-Bernard Maréchal ; qu’ils jouissoient en vertu
d’ un titre commun, par indivis, par conséquent, pour
tous les ayant droits ; second obstacle à la prescription.
Que le vice de la possession s’est perpétué jusqu’à
ce jour, et qu’en conséquence , il faut considérer comme
nulle toute espèce de jouissance.
Passant ensuite aux prétentions que doit favoriser ce
système, ils disent qu’outre les droits personnels de
Claude, ils ont encore à exercer la portion qu’ils amen
dent dans ceux de Marc et de Françoise, et ils de
mandent le partage pour leur attribuer tout cela.
�( 21 )
E t comme Claude, leur auteur, étoit laine* des mâles,
en coutume de Bourbonnais, ils demandent prélève
ment du droit d’aînesse.
Enfin, pour arriver au résultat, ils déclarent pour
leur prélèvement, qu’ils se contenteront de l’appliquer
sur le principal manoir, qui est la terre et château
de Bom pré, et h mobilier qui en dépend ; ils récla
ment le partage de toutes les terres sorties de la famille,
avec attribution au lot des défendeurs, de toutes celles
qui ont été aliénées ; la restitution des jouissances depuis
1694, y compris les dîm es, cens et rentes , jusqiCci
Vabolition ; enfin, comme le procès doit coûter des
fr a is considérables, ils demandent vingt-quatre mille
francs de provision pour y fou rn ir.
Si après avoir fait connoîtrc le fond des demandes,
nous les oublions pour n'en voir que les moyens, tenons
dès à présent pour constant que la cause est réduite à
l’examen d’une seule question. Les demandeurs reconnoissent que si la prescription a commencé, elle n’a point
été interrompue, puisqu’ils ne l’allèguent pas ; ils se
bornent à prétendre qu’elle a été empêchée par la nature
même du titre; parce que le possesseur et ses descendans ont joui comme tuteurs ou comme cohéritiers, et
ils mettent en principe qu’une jouissance semblable ne
peut jamais, et dans aucun cas, opérer de prescription ;
ce qui est, ou autant vaut, dire nettement. que l’action
en reddition de compte et celle en partage, sont de
leur nature imprescriptibles. C’est cette législation par
ticulière:, sans doute, aux sieur et dame Vanduerne,
qu’ils ont délayée; dans leurs imprimés.
ç
�C 22 )
Nous allons brièvement, et autant seulement quu
peut être utile, en parcourir les propositions; elles dis—
paroîtront à l’aspect des véritables principes, au premier
regard de la justice.
Nous nous éloignerions grandement du plan que nous
avons adopté et qui semble commandé par la nature
même des choses, si nous suivions les appelans dans leurs
divisions et sous divisions d’articles et de paragraphes 5
nous pourrions, sur chaque proposition, isolément, dé-?montrer qu’elle est erronée; mais nous entreprendrions
sans fruit une discussion longue et fastidieuse. V o y o n s la
cause dans son ensemble, et abordons franchement les
véritables questions.
t
, Nous allons supposer que la dame Revanger n’a eu
d’autre principe de possession que sa qualité de donataire
de sa mère, même d’héritière de son père, quoiqu’elle
ait • répudié , et que sa répudiation n'ait jamais été
attaquée. En carressant ainsi le système favori des sieur
et dame Vanduerne, nous les servirons sans doute à leur
goût 7 et nous simplifierons beaucoup la discussion ,
puisque les six paragraphes de leur premier article, c’est-r
à-dire , les quarante premières pages de leur mémoire
seront chose absolument inutile à réfuter , et que, suppo
sant vrai tout ce qui y est écrit, ces vérités seroient sans
conséquence.
Nous reconnoîtrons d’abord la vérité de ce principe,
que celui qui possède en vertu d’un titre précaire, et
dont la possession n’a pas d’autre cause, ne peut jamais
prescrire, et ainsi nous arriverons à la quarante-cin-*'
�(
*3
)
quièmepage de la consultation, sans avoir d’autre réponse
à faire ; mais nous nous étonnerons en pensant qu’on ait
pris tant de peine à prouver des principes positifs ,
comme s’ils étoient contestés, et mis tant de légèreté à'
en poser les conséquences, comme si celles qu’on en
tire étoient justes et avouées; en sorte que le juge, une
fois pénétré du principe, n’auroit plus qu à prononcer
les conséquences, sans avoir autrement besoin de les
examiner. Montrer la difficulté là où elle ne peut ê tre ,
et où on est sur de convaincre, et éloigner l’œil du magis
trat de la difficulté réelle en lui présentant celte partie sca
breuse comme non susceptible de contestation, ce peut
être de l’art, mais ce n’est pas tout à fait de la rectitude.
C’est après avoir prouvé et bien.appuyé d’autorités
ces principes généraux et incontestables, que la posses
sion précaire ne constitue jamais la prescription, qu’on
commence à la page 45 à s’occuper de la cause; deux
propositions fort simples et sur lesquelles on veut per
suader par une apparente bonhomie qu’on n’a besoin
ni d’autorités, ni d’efforts, ni de logique, contiennent tout
ce qu’on à écrit directement sur la cause.
L a possession des sieur et dame Revauger étoit vi
cieuse, dit-on, par deux raisons essentielles.
La première est l’indivision. La dame Revanger, mise
en possession par sa mère de tous les biens paternels
et maternels, a joui des biens indivis dans lesquels elle
n’amendoit qu’une portion ; un partage poitçoii seul
¿faire cesser là cop rop riété , et la coutume de Bour
bonnais, article 2 6 , étoit en ce cas un. obstacle à la près-
�( H )
cription ; Vindivision avertissait ’p erpétuellement les
sieur et dame Revangcr et leurs héritiers in infinitum
qu’ils n’étoient pas propriétaires des portions de ClaudeBei’nard Maréchal ; ils n’ont donc pu les prescrire.
La seconde raison se tire de ce que, chargée par le
contrat de mariage de tous les engagemens de la tutelle
qui pesoit sur la téte de sa m ère, la dame Revanger ne
jouissoit des portions des autres qu’avec un titre pré
caire et comme un véritable administrateur; cette ad
ministration ne pouvoit cesser que par un compte rendu
et délivrance à chacun de sa part des biens ; cette dé
livrance n'ayant pas eu lieu, la possession des sieur et
dame R e v a n g e r s’est perpétuée jusques dans leur posté
rité, à titre d’administrateurs.
Ces deux propositions ainsi isolées, sont faciles à dé
truire ; un souille va les anéantir en les examinant l’une
après l’autre. Elles sont si bizarres, si incohérentes,
qu’elles ne peuvent pas soutenir la plus petite réflexion.
Posons d’abord le principe ; c’est de là qu’il faut partir.
La prescription a été introduite comme un moyen,
nécessaire à la tranquillité des familles : lorsquo le terme
en est accçmpli, elle fait présumer que le possesseur est
légitime propriétaire ; elle le défend contre les attaques
tardives qui pourroient renverser sa fortune ; elle arrête
en cela les calculs de la méchanceté et de la mauvaise
foi, et voilà pourquoi elle est qppelée la patrone du
genre humain.
Mais ce principe, admis sans restriction, eût produit
des majux plus gçajjds ençorç qije ceux qu’on vouloit
éviter
�c 25 )
éviter ; il eût été l’éceuil de la bonne foi, de la confiance?
de lafoiblesse; pour l'empêcher, les législateurs ne l’cnt
admis que sous trois exceptions.
La première -a été prise de ce que la possession n’ayant
commencé qu’à un titre précaire, et le possesseur ne
faisant qu’user des droits d’autrui, ne possédant que pour
autrui, il ne peut pas acquérir une prescription qui
suppose qu’il a possédé pour lui-mêine, anirno dom ini;
la loi déclare donc qu’une semblable cause empêche la’
prescription.
’
La seconde a été prise de l’état d’incapacité de ceux
dont les biens sont possédés par des tiers, mais qui ont
commencé à prescrire ; elle ne veut pas quon puisse
tirer avantage de leur foiblesse, et cette cause suspend.
E nfin , la présomption légale que produit la prescrip
tion ne pouvant exister que par un silence prolongé
pendant le temps nécessaire à son accomplissement, l’in
terpellation judiciaire du créancier, ou la reconnoissance:
écrite du débiteur, constitue une troisième exception ;
c’est là la cause qui interrompt.
E t c’est ainsi que, fournissant aux possesseurs de bonne
foi ( ce qui s’entend de la bonne foi légale ) le moyen
de se préserver de toutes recherches après un certain
tem ps, la loi apporte à leur droit un sage tempérament
toutes les fois qu’il a été exercé contre des individus qui
ne pouvoient pas se défendre.
N ous n’avons à examiner que le premier cas ; mais
nous avons dû parler des deux autres pour les montrer'
tous sous le même point de vue, afin qu’on puisse bien
reconnoître le motif de la .règle, celui des exceptions,
4
�discerner si on s’y trouve, et aussi pour nous assurer
dès à présent que ces trois exceptions étant les seules
admises, la prescription doit être considérée comme
accomplie dans le cas où nous sommes, si elle a pu com
mencer , puisque les appelaus ne peuvent articuler ni
suspension ni interruption.
Nous n’avons pas besoin de remonter bien haut pour
reconnoitre la doctrine qui doit nous guider. Le Code
civil, art. 2236, contient en deux lignes toute la subs
tance des anciens principes.
Ceux qui possèdent p o u r a u t r u i , ne prescrivent
jamais.
C ’est à ce caractère qu’il faut reconnoitre ceux-là seuls
qui ne peuvent prescrire ; aussi la doctrine des législa
teurs du monde se trouve-t-elle toute renfermée dans
ces deux mots qui font anthitèse avec l’article : Pour
prescrire, il faut posséder animo domini. Ne nous épui
sons pas en recherches; si la dame Revanger et ses
représentans ont possédé pour autrui, point de consé
quence à en tirer pour eux; s’ils ont possédé pour eu x,
animo dom ini, avec l'esprit de propriété, ils ont prescrit.
Voilà notre boussole; c’est celle que la loi nous donne,
en nous avertissant que celui qui s’en écarte, ira se
briser sur des écueils.
Revoyons maintenant les deux propositions des oppclans ; d’abord l’indivision q u i, dit-on, n a u roit pu cesser
que par un partage; l’art. 26 de la coutume de Bour
bonnais , et la conséquence qu’on en a tirée que le par
tage n’ayant pas été fait, l’indivision a continué, et a
Rmpêché la prescription.
�( 27 )
Cette proposition nmo't en elle-même quelque chose
de b:en étrange, si elle étoit vraie dans le sens des
appelans. Après l’avoir admise, faute de pouvoir en dis
cerner le vice, l’homme qui, sans eonnoître la science
du droit, auroit néanmoins quelque teinture des prin
cipes jointe à un jugement sain, se demanderoit bientôt
à lui-même: « Que signifient donc, en ce cas, les lois
« de tous les temps qui veulent que le cohéritier qui
« laisse jouir son cohéritier, et qui oublie pendant trente
« ans de demander le partage, en soit exclus parce que
« l’action en piirtage se prescrit par trente ans, lorsqu’il
« n’y a ni suspension ni interruption? est-ce que les lois
« peuvent renfermer des contradictions aussi palpables ?
« comment s’y prendre, en ce cas, pour les exécuter, même
« pour leur obéir ? » N ous n’.iurions pas de peine à con
vaincre cette ûmehonnête, mais sans expériences en affaires;
nous en aurons moins encore pour nous faire entendre
des magistrats qui distribuent la justice.
Tout gît dans l’explication de ces trois mots : Jouir
pour autrui. Elle seroit facile sans aucun secours ; mais,
pour ne pas encourir le reproche de nous abandonner
au raisonnement , c’est dans le répertoire même des
appelans que nous allons puiser ; c’est l’article 26 de la
coutume de Bourbonnais qui va tout expliquer.
« Quand aucunes choses sont tenues et possédées en
« commun et par indivis , l ’on ne peut acquérir ni
« prescrire le droit l’un de V a u t r e .......... par quelque
îc temps que ce soit. »
Ici, la loi se concilie bien avec elle-même; elle ne dit
pas que le coheritiex* qui jouira seul de la succession
�(28)
commune, ne prescrira pas contre les autres, mais q u j
ceux qui jouiront en commun et par indivis, ne pour
ront prescrire l’un contre l’autre le droit l’ un de
Vautre. « La raison, dit M. Auroux sur cet article,
« c’est que celui qui reconnoît posséder une chose com« m im e, soit par succession ou autrement, reconnoît,
« par conséquent, le droit de ses communs, et qu’on
« ne prescrit point contre son titre ;
« Mais, pour faire une application sûre de notre ar-*
« ticle, il fa u t que la chose soit reconnue commune
« par celui qui la possède. »
Ainsi, cela s’applique à plusieurs, jouissans ensemble
et par indivis, et qui p eu v en t toujours demander le
partage Yun contre Vautre, « même à un héritier q u i,
« jouissant seul, fait part aux autres communs des bé« néfices de la jouissance qu’il exerce, ou qui reconnoît
« par écrit qu’il n’a joui que pour eux ; » mais celui
qui jouit seul et sans en faire part à autrui, ne jouit pas
par indivis; il jouit, au contraire, fort divisément, exclu
sivement y et prescrit par cela seul le droit d’autrui.
« U in d iv is, dit M . A uroux sur ce même article 2 6 ,
« n’est une reconnoissance de la nécessité qu’il y a dç
« faire partage qu'au respect de ceux qui jouissent
« par indivis et non à Yégard d'un cohéritier q u i n ’a
a aucune possession. C’est p ou rq u oi, si on suppose que
« dç quatre cohéritiers il y en ait un qui ait gardé le
« silence pendant trente ans, et que les trois autres ayent
« jo u i par indivis de toute la succession, celui qui a
« gardé le sileuce pendant trente ans ne sera plus re« ccvable à demander sa part. »
�( ^9 )
Puisqu’il faut aux sieur et dame Vanduerne des au
torités pour leur apprendre ce que c'est que jouir par
indivis, ils ne récuseront pas celle-là, sans doute, pas
plus que celle de Semin et du président D uret, toujours
sur le même article, non plus encore que ce principe
universel que le cohéritier qui vit dans la maison
commune , quoiqu’un autre jouisse , se trouve placé dans
l’exception, parce qu’alors il jouit par indivis ; et ils
avoueront peut-être que notre législation ne reconnoissant pas d’héritiers nécessaires, ne conserve pas le
droit des successibles contre leur volonté, et que leur
silence suffit pour que leur droit se perde et s’éteigne
à jamais.
Voilà des principes, sans c l o u t e ; n o u s ne craignons
pas de l’affirmer, et la Cour ne les repoussera pas ; que les
sieur et dame Vanduerne, arrivant de Bruges, en Bour
bonnais, les yeux un peu épaissis par le désir d’une
grande possession, eussent lu l’art. 26 de la coutume,
réduit à son texte et dégagé de tout commentaire, et
qu’ils n’eussent pas bien compris les mots jouis en co?nmun
et par indivis, cette idée seroit encore supportable;
mais que dans un écrit en forme de consultation, signé
par des jurisconsultes, on soutienne que parce qu’on n’a
jamais fait de partage on peut toujours le demander, et
que le cohéritier qui s’est abstenu de la succession, qui
n a jamais jou i, qui n’a jamais vécu dans la maison com
mune, qui, au contraire, s’en est éloigné, et s’est abstenu
de prendre part aux biens depuis cent vingt-six ans
peut, sans aucun moyen d’interruption, demander un
partage et cent vingt-six ans de jouissances ; qu’en un mot,
�( 30 )
son droit est conservé par le fuit même que la loi admet
comme exclusif de tout droit, c’est ce que l'esprit se
refuse à croire, pendant que les yeux le lisent distinc
tement.
Nous n’entasserons pas ici les autorités pour prouver
ce que la loi dit impérieusement depuis des siècles, et
ce que le- Code civil ne fait que répéter, art 816.
« Le partage peut toujours être demandé , même
« quand l’un des cohéritiers auroit joui séparément de
partie, des biens de la succession, s’il n’y a eu un acte
« de partage ou une possession suffisante pour a cqu érir
« la prescription. »
Cet article, joint ù l’art 2.2.62., n’a fait que poser le
principe général que l’action en partage se prescrit
par trente ans ,• il fixe, d’ailleurs, une question de droit
qui avoitété controversée par les jurisconsultes, celle de sa.voir si entre des cohéritiers qui ont joui divisément pen
dant un certain temps, dix ans, par exemple , on pouvoit
se soustraire au partage sans en rapporter un acte;
doctrine qui avoit été repoussée par la saine partie des
docteurs, notamment Lebrun; et il érige en loi parti
culière ce qui jusque là n’ayoit été reconnu que comme
une conséquence des principes généraux, savoir, que
trente ans de jou issa n ce séparée sont nécessaires pour
dispenser un cohéritier de rapporter un acte de partage,
Il est donc inutile que nous opposions aux appelans
l’autorité des plus célèbres auteurs, sur un point qui
étoit de doctrine universelle ; nous ne leur produirons
ni Domat, ni Pothier, ni môme Dunod qu’il ont fort
imprudemment invoqué ; nous croirioiis faire injure
�C sO
aux ministres de la justice, en accumulant les citations
pour prouver qu’une jouissance séparée de trente ans
opère la prescription de l’action en partage , et nous
aurons un peu plus de respect pour les lumières d’une
Cour souveraine; mais nous ne saurions nous dispenser
d’insister sur une autorité que les sieur et dame Vanduerne ne mépriseront pas; sur laquelle, sans doute,
ils n’élèveront ni doute ni soupçon; celle de leur propre
consultation. lie principal motif qu’on invoque pour
prouver que madame Revanger, ni ses descendons, n’ont
pas pu prescrire, est celui-ci ( page 46 ).
0
' a L ’indivision avertissait perpétuellement les sieur et
dame Revanger et leurs héritiers in injînitum , qu’ils
n’étoient pas propriétaires des portions revenant à ClaudeBernard Maréchal; par conséquent, ils n’ont j «mais pu
les posséder anuno dornim. »
' A rrêton s-n ou s un instant.
On a senti le besoin de dire que le cohéritier qui jouit
pour la succession, est averti par quelque chose qu’il
ne jouit pas pour lui-même; car la prescription étant
fondée sur ce principe qu’on jouit animo dom ini,
il faut qu’un fait quelconque lui apprenne , et à ses
héritiers in injmitum, qu’il jouit pour autrui ou avec
autrui. Demandons ici aux sieur et dame Vanduerne
ce que c’est que cette indivision qui avertit perpétuellenient, si ce n’est un fait positif qui démontre
q u ’on ne jouit pas p o u r s o i , ou si cela s’applique au
cohéritier qu i, r e s t é seul dans la maison commune, ne
fait part de sa jouissance à personne ; dispose en maître
�( 32 )
et à son profit personnel de toute la succession; s’ap
proprie exclusivement les revenus ; vend les immeubles
sans en rendre compte à personne? Si cet héritier,
disposant en maître , jouissant exclusivement , ne
possède pas animo dom ini, quel sera donc celui à qui
on appliquera ces expressions? dans quel cas un cohé
ritier pourra-t-il prescrire la portion des autres? Sou
venons-nous bien que la pi'escription tient lieu de titre;
que la. possession trenténaire fait présumer de droit la
transmission de l’immeuble à titre gratuit ou onéreux,
et consolide la propriété incommutable sur la tête de
celui qui a prescrit; en sorte que sa possession eût-elle
commencé par une usurpation qui eût pu être roconnue si une demanda eût été signifiée api'ès vingt-neuf
ans onze mois et vingt-neuf jours, elle est devenue lé
gitime après l’expiration d’un jour de plus; elle le dis
pense de rapporter un titre, et l’affranchit même de
l’exception de mauvaise foi ( article 2262 ). O r, et abs
traction faite de tous les actes, sentences et arrêts qui
ont été passés oy. obtenus depuis 1694 jusqu’en 1718 ,
qulon nous dise comment madame Revanger et ses
descendans eussent dû jouir autrement qu’ils n’ont fait,
pour acquérir une possession réelle et attendre la prescrip
tion? n’ont-ils pas joui pour eux exclusivement? ont-ils
jamais reconnu Vindivision^ un fait matériel quelconque
les a-t-il jamais avertis qu’ils n’avoient qu’une jouissance
précaire, qu’ils possédoient en commun et par indivis ?
se sont-ils jamais occupés de leurs cohérities prétendus?
enfin, ne prouve-t-on. pas le contraire de tout cela en
leur
�( 33 )
leur demandant aujourd'hui cent vingt-six ans de resti
tution de jouissances ?
C ’est trop en avoir dit, sans doute, sur cette première
partie, si claire, si évidente, et qui repousscroit si hau
tement la prétention des sieur et dame de Vanduerne,
même en supposant vrai tout ce qu’ils avancent.
Nous ne devons pas être longs sur le second m oyen,
ou plutôt sur la seconde face de ce m oyen , celle qui
représente la dame Revanger jouissant comme tutrice
et ne pouvant prescrire parce qu’elle n’avoit d’autre
titre que celui d’administrateur; les mêmes principes
s’y appliquent avec autant d’exactitude.
A vant to u t, fixons-nous sur un. fait essentiel.
La dame Vanduerne agit comme représentant Claude*
Bernard Maréchal ; c’est principalement de son chef
qu’elle tiendrait le droit qu’elle exerce, s’il pouvoit lui
appartenir; aussi, s’est-elle crue obligée à prétendre que
la dame Revanger , par son contrat de m ariage, et
comme condition expresse de sa donation, avoit été
chargée de tous les engagemens de la tutelle, et que
ces engagemens portoient tout à la fois sur les biens de
Claude-Bernard et Marc Maréchal, ses deux frères. Le
contrat de mariage à la main, nous attaquerous cette
proposition dans ses fondemens, et nous démontrerons
que ce moyen n’est qu’une illusion.
Mais la supposant aussi exacte q u ’elle l’est p eu , quelle
conséquence faudroit-il en tirer? Aucune, sans doute;
c a r, si la demande en partage se prescrit par trente ans
du jour où la jouissance commune a cessé, il en est de
5
�( 34 )
même de l’action en reddition de compte du mineur
contre son tuteur.
Tant que la minorité dure, la qualité de tuteur.ré
side sur la tête de celui qui en a été légalement investi;
le mineur non émancipé n’a pas de capacité, person
nelle; il ne peut paroître en son propre nom à aucun
acte; c’est son tuteur qui reçoit et quittance pour lui,
qui paye et agit pour lu i, qui le représente, en un
mot, dans toute espèce d'affaires; et c’est cette différence
de qualités de l’enfant mineur ou majeur, cette grande
distinction faite par la loi elle-même de ceux qui sont
sui <vel alieni ju r is , qui fait la ligne de démarcation
entre l’époque ou le tuteur ne prescrit pas et celle où
commence la possession utile qui opère la prescription.
L e mineur est-il encore sous la puissance de son tuteur,
celui-ci administre, jo u it pour autrui; est-il sorti de
cette puissance, le tuteur ne peut plus le représenter ^
les actes qu’il feroit en cette qualité sont nuls, respec
tivement au pupille, quand bien même le tiers qui traite
avec le tuteur ignoreroit le changement d’état. A ussi,
s’il continue de jouir, le principe de sa possession change
comme l’état et la qualité des personnes ; il jouit pour
lui-m êm e; l’enfant, devenu majeur, n’a d’autre droit
que de lui demander com pte, et trente ans de possession
écoulés sans interruption légale, effacent à jamais ce droit.
Nous ne grossirons pas ce précis de citations plus qu’inu
tiles pour prouver un principe positif; mais nous de
manderons si dans l’ancien droit, il s’est jamais élevé
d’autre question que celle de savoir si certaines actions
�( 3* )
du mineur contre son tuteur duroient trente ou seu
lement dix ans après la majorité. Toutes ces questions
qui ne prouvent que mieux la vérité de notre proposi
tion, sont tranchées par l’articie 475 du Code civil, qui
réduit à dix ans la prescription de toutes les actions du
mineur contre son tuteur, et y enveloppe l’action en
reddition de compte.
Remarquons, au reste, combien il est étrange d’en
tendre dire ici à la dame Vanduerne, comme elle l’a
fait sur le moyen d’indivision, que parce que le compte
n’a jamais été rendu, ou parce qu’on a resté plus de
trente ans utiles sans le réclamer, on peut le demander
encore, c’est-à-dire, que la demande n’a d’autre appui
que le moyen même qui la repousse.
A in si , en fussions nous réduits là , madame Revanger
et ses descendans auroient joui pour eux et non pour
autrui, auroient possédé utilement, auroient prescrit,
quatre fois prescrit, puisque la prescription n’a été ni
suspendue ni interrompue.
Mais madame Revanger n’a jamais été chargée de
gérer la tutelle de Claude-Bernard Maréchal qui avoit
* cessé avant son mariage, et le contrat de 1692, au con
traire , la charge taxativement et exclusivement de gérer
et administrer, au lieu de sa m ère, la tutelle et ad
ministration de Marie-Marc M aréchal, son fils mineur;
comment donc s’en servir à raison des biens de ClaudeBernarcl ?
Cela est vrai, disent les appelans, page 4 7 , « mais
« Claude Bernard n’avoit pas obtenu sa portion dans
sc la succession de son p ère ......... aucun compte de
5*
�« tutelle ne lui avoit été rendu, aucun partage de la
« succession n avoit étéj'a it ; elle étoit donc restée ink divise ; la daine Revanger s’est donc chargée d’admi<f nistrer la portion appartenante à Vaîné, puisque tout
« étoit dans Vindivision.
« Cette administration ne pouvoit cesser que par un
« compte rendu..»
Une conséquence obligée de cet argum ent, c’est que
l’action n’a eu d’autre durée que celle de la reddition du
compte ; c'est bien évidemment celle qui résulte de cet
av<iu échappé au conseil des appelans, que tout cela
pouvoit finir par un compte rendu.
Mais , et toujours de leur aveu, ce moyen ne scroit rien
sans l’indivision ; ce n’est donc encore que le moyen de
Yindivision , si pauvre, si pitoyable, présenté sous une
autre face. Et si nous voulons nous occuper un peu plus
de l’embaras des appelans, remarquons bien que le
moyen d’indivision qu’ils appellent au secours de la tu
telle, 1 air a paru à eux-m êm es si foible, que pour le
faire paroitre quelque chose , ils ont cru devoir l’établir,
d’abord sur ce que la dame Revanger, en vertu de
son contrat de mariage, avoit été mise en possession
par sa jn ère de toits les biens paternels et maternels,•
de ceu x-ci, en lu i faisant la donation entre-vifs ' et
de ceu x -là , parce qu'une des conditions de la donation étoit qu’elle administrerait conjointement avec
son m ari la tutelle dont avoit été chargée la donatrice.
.A insi, dans les mains de la dame Revanger, la.
�( 37 )
totalité des biens se trouvait indivise, parce que la lé
gitime des frères n’en avoit pas été séparée. ( page 48).
D ’où il est aisé de voir que l’indivision est un m oyen,
parce quelle est fondée sur une charge d’administrer.
E t la qualité d’administrateur est un m oyen , parce
qu’elle étoit accompagnée d’indivision.
En sorte que chacun de ces prétendus moyens ne
pouvant se soutenir par lui-même, se trouve néanmoins
assez fort pour supporter l’autre, et lui donner une va
leur qu’il n’a pas à lui seul. Une qualité d’administra
teur qui n'existoit pas devient quelque chose, parce
qu’il y avoit indivision; et cette indivision dont on n’a
perçoit aucune trace, reçoit son existence et sa force de
la qualité d’administrateur qui étoit impuissante sans elle !
Bravo ! M. Vanducrne.
._
.
;
N ’ajoutons rien de plus à ces moyens si précis, à
ces principes contre lesquels on n’auroit cru néces
saire de rien écrire, s’ils n’étoient appuyés que de la
signature de la partie ; mais pourquoi avouer par son
silence des principes, des applications qui émanent de
jurisconsultes plus ou moins connus ? Ici , le dédain
n’est plus permis ; il faut répondre. Après ce peu
de mots, tenons pour certain qu’en admettant en leur
entier quarante-quatre pages de mémoire des appelons,
ils n’en seroient pas moins dépouillés de tout droit par
une prescription inexpugnable.
M ais que nous sommes loin d’avouei' que la dame
Revanger n’ait eu d’autre principe de possession que
celle d’un tuteur ou d’un cohéritier qui possède en com
mun et par indivis. La prescription n’est pas ici le seul
�moyen; nous n’en avons pas besoin pour déroger au titre’;
elle est, au contraire, Je plus ferme appui des titres;
elle a été exercée conformément à la volonté des par
ties exprimée dans des actes, aux ordres des tribunaux
écrits dans des arrêts ; elle n’est plus dès lors que le
soutien de la vérité.
S’il est vrai que celui qui détient une chose à un
titre précaire ne peut pas la prescrire, tant qu’il la
possède pour autrui ( art. 2236 ) , il ne l’est pas moins
que la prescription commence, lorsqu’il intervertit la
cause de sa possession ( art. 2238 ) , parce que si on
ne peut pas se changer à soi-même la cause de sa pos-»
session, on -peut prescrire contre son titre, en ce sens
qu’ on prescrit la libération de Vobligation que Von a
contractée ( art. 2241 ).
Nous avons prouvé qu’à supposer vicieux le principe
de la possession , il se trouvoit interverti soit par la
séparation des cohéritiers et l’interruption de la jouis
sance commune, soit par la cessation de la tutelle; il
nous reste à prouver, dans le cas particulier, qu’une
intervention d’un autre genre auroit également fait cesser
le vice, ou plutôt que le vice n’avoit jamais existé.
i°. Quant à la cause tirée de la jouissance par indi
vis, elle suppose nécessairement que la dame Hevanger
avoit joui com m e h éritière , et qu’on peut lui opposer
cette qualité ; mais comment user d’un semblable moyen
lorsqu’on lit, dans une foule d’actes authentiques, que
sa mère étant morte le 18 septembre 1693, elle renonça
le 2,5 novembre suivant, tant à sa succession qu’à celle
du père ( que la mère avoit détenue jusqu’alors ) , et
�Ç 3? A
que cette renonciation, judiciairement faite et qui n’u
jamais été attaquée d ep u is,-fu t, au contraire, recon
nue et approuvée, soit par ses frères, dans des actes
publics où elle figura seulement comme créancière,
soit par les autres créanciers de la succession , dans
des traités authentiques, soit par l’autorité judiciaire,
dans les quatre sentences de 1695, 1717 et 1718 ?
cette renonciation n’est-elle pas aujourd’hui un acte dix
fois inattaquable; n’a-t-elle pas fixé sans retour la qua
lité de la dame Revanger; et les héritiers de ClaudeBernard Maréchal ne sont-ils pas, plus que toute autre
personne, non recevablcs à vouloir imprimer la qualité
cohéritiers à ses descendans?
2°. Quant à la tutelle, il y a encore peu de loyauté
dans cet argument. Lorsqu’on détruit le fait principal
qui le fonde ( la tutelle de Claude-Bernard Maréchal ) ,
et qu’on fait disparoître le moyen d’indivision, à quoi
se réduit-il? on le demande, n’est-il pas détruit dans
sa base?
Tout cela seroit donc encore plus que suffisant pour
repousser l’action des sieur et dame Vanduerne, et nous
n’aurions pas besoin d’examiner les caractères des actes
de 1694 et 1695; car on doit bien remarquer que nous
n’en avons pas usé jusqu’ic i, si ce n’est pour établir
que la répudiation de la dame Revanger avoit été
c o n n u e , approuvée et exécutée contradictoirement avec
toutes les parties intéressées. Mais nous pouvons aller
plus loin encore ; et après avoir supposé vraie la pro
position majeure et prouvé qu’on en tiroit de fausses con
séquences, ne craignons pas de l’attaquer ouvertement
�(4 0
elle-même, et de prouver que quand bien même il y
auroit eu besoin d’actes autres que la répudiation, qui
eussent positivement interverti la cause de la possession,
ces actes existent, et ces actes, émanés des auteurs des appelans, approuvés et exécutés partons les créanciers, sanc
tionnés enfin par la justice, mettant dans la même main le
titre de propriété et une possession de cent vingt-six ans,
forment un bouclier indestructible contre la folle et témé
raire demande qui nous occupe.
Que se passe-t-il après la mort de la dame Maréchal?
Les biens de son mari étoient couverts de dettes;
elle laissoit à la dame Revanger des créances contre sa
succession.
Le i 5 novembre 1693, la dame Revanger, sa fille,
renonce à la succession du père.
Immédiatement, les biens sont saisis par Quesmas et
la dame le Maistre.
Le 27 mars 1694, Qaude-Bernard Maréchal aban
donne ses droits aux saisissans, tant pour eux que pour
les autres créanciers. N ’examinons pas encore, si l’on
veut, les caractères de cet acte, mais souvenons - nous
bien que Claude-Bernard, n'espérant rien de la succes
sion, cède ou abandonne les biens aux saisissans, moyen
nant un prix pour lequel ces deux créanciers consentent
une obligation personnelle, même une garantie du fait
des autres créanciers.
Les 13 juin et 19 août i 6g 5 , deux sentences homo
loguent cet acte avec les créanciers.
lies 20 ,30 juin, 19 et 27 août, Claude-BernardMaréchal
Ratifie cet acte, le fait ratifier par son épouse et reconnoît
dans
�(4 0
dans un acte Judiciaire que la dame Revanger n’agissoit
plus que comme créancière.
Le 26 août, Marc Maréchal, à son tour, abandonne
ses droits aux créanciers moyennant un p r ix , et sa sœur
figure dans cet acte comme créancière.
Le 10 décembre 1697, les créanciers s’unissent pour
désintéresser Quesmas et la dame le Maistre ; ils les
payent et restent à leurs droits.
Le 14 février 1698, les sieurs et dame Revanger, Farjonel et autres, agissant dans tous ces actes comme créan
ciers, demandent l’autorisation de jouir des biens, nonobs
tant la saisie, et l’obtiennent par deux sentences des
10 mars et 10 juillet suivans.
Enfin, après avoir payé tous les créanciers, soit en
argent, soit en immeubles, la dame R e v a n g e r se présente
aux requêtes du palais comme créancière de Claude Maré
chal, son père, et procédant envers la masse des autres
créanciers; elle obtient, non comme héritière, sans doute,
mais par abnégation de cette qualité et seulement comme
exerçant les créances de sa m ère, deux sentences con
tradictoires , lesquelles qui ordonnent que la propriété
des biens demeurera, et appartiendra incommutablement auxdits Revanger; fait pleine et entière main
levée de là saisie réelle et des appositions.
E t en vertu de ces sentences, la saisie est rayée.
Voilà comment la dame Revanger, créancière de son
chef de plus de 300,000 francs en capital, non compiis
les droits d’autrui q u ’elle avoit acquis, parvient à conser
ver quelque chose d’une succession qui alloit être dévo
rée en frais de toute espèce, et y parvient en désin-
6
�( 42 )
téress.int tout le monde et en se chargeant à elle seule
d’une liquidation à laquelle, il est vrai, elle ¿toit inté
ressée , mais qui ne lui en coûte pas moins vingt-un ans
de soins, de peines et de travaux de toute espèce.
Qu’importeroit alors que les actes de 1694 et 1695
eussent ou n’eussent pas la valeur d’une vente? qu’ils
ne fussent qu’un simple abandon, même précaire, à des
créanciers ? seroient - ils moins une procuration pour
vendre et se faire payer sur les deniers? et oseroit-on
dire que la cession de biens qui décharge un débiteur
de tous ses engagemens, quelqu’énormes qu’ils soient,
n’est qu’une simple procuration ? D ’ailleurs, qu’importe ?
Les créanciers qui pouvoient vendre volontairement ou
judiciairement, à leur g ré , propriétaires ou procureurs
fondés, comme on voudra, n auroient pas moins vala
blement transmis la propriété des biens à la dame R evanger par un simple acte; à plus forte raison cela est-il
valable lorsque, du consentement de tous, cette fixation
de propriété, sur la tête d’un seul, est revêtue de l’au
torité imposante de la justice.
Mais comment douter que l’acte ne fût réellement
translatif de propriété, lorsqu’on y lit toutes les expres
sions qui maintiennent cette transmission ; lorsqu’on y
voit toutes les conditions essentielles au contrat de vente;
lorsqu’en ne-pédant q u ’une partie de ses biens à deux
créanciers de son père, Maréchal reçoit de ces deux créan
ciers l’obligation personnelle de lui payer un prix quel
conque,nonobstant toutes saisies, sauf celles des créanciers
personnels du vendeur, qui, sans doute, eussent eu des
droits sur les biens du père, si ces biens eussent été plus
�(
43
)
que suffisans pour acquitter les dettes de la succession.
A u reste, deux réflexions tranchent tout. E lle sont
extrêmement simples.
Quelques doutes qu’on pût permettre d’élever sur le
caractère des deux actes de 1694 et 1695, il n’en est
pas moins vrai que dans une cause dont tout le moyen
est tiré d’un prétendu vice de possession, il faut con
venir que la répudiation, jointe aux deux actes et aux
sentences qui les ont suivies et où sont parties les frères
Maréchal, constituent l’interversion de possession la plus
évidente, la plus formelle qü’on puisse invoquer, et
excluent la pensée d’une jouissance commune et par
indivis. Premier argument q u i, sans doute , restera
long-temps sans réponse.
L ’autre, que les sentences de 1 7 1 7 et 1 7 1 8 , rendues
avec les ayans droit et représentans, in ilia re, des frères
Maréchal, et signifiées dans leur temps, portant attri
bution ou confirmation de la propriété incommutable
au profit de la dame Revanger ; rien aujourd’hui ne
peut ébranler l’autorité de la chose jugée ; et certes, ce
ne sera pas après avoir souffert cent six ans d’une pos
session conforme à ces sentences, qu’on parviendra à
renverser l’ouvrage d’une partie intéressée, qui fit le bien
de tous avec l’autorité de la justice.
E n voilà, sans doute, plus qu’il n’en faut ; cependant,
disons encore deux mots pour achever de satisfaire le
cœur , car depuis long-temps l’esprit doit être convaincu.
Remarquons que Quesmas et la dame le Maistre ,
créanciers premiers en ordre, consentent à des termes
longs, sans intérêt pour le payement de leurs créances,
�( 44 )
pour se débarasser de tout, ce qui suppose qu’il n’y
avoit pas un si grand avantage à faire vendre ou à s’ap
proprier les biens.
Remarquons que dans l’acte de 1694 Claude-Bernard
Maréchal ne traite pas avec ses créanciers personnels,
dont les créances demeurent à sa charge, ce qui n’eût
pu être adopté, ni dans son intérêt propre, ni dans
celui de ses créanciers, si ceux dela succession n’en eussent
pas entièrement absorbé les biens.
Remarquons enfin qu’une très-petite partie des biens
seulement resta à la dame R evan ger, et que la terre
de Bom pré,dont la valeur actuelle est un objet d’envie
pour les appelans, a été plus que doublée depuis 1718,
par des acquisitions considérables des successeurs de la
dame Revanger; qu’ainsi elle ne lui resta pas alors en
payement de ses créances dans toute l’étendue qu’elle
a aujourd’hui. .
E t avec ces légères observations, croyant avoir tout à la
fois repoussé les paradoxes, réduit à rien les moyens de
droit, et démontré le vide des moyens de défaveur qu’on
veut rejeter sur les auteurs de la dame de Maistre, nous
aurons la pensée d’avoir plus que rempli notre tâche, et
nous te minerons, sans prétention comme sans apprêt,
une discussion qui n’exige pas qu’on sorte de cette simpli
cité qui est toujours le meilleur moyen d’une cause de
ce genre.
M e. d e V IS S A C , avocat.
M e. B R E S C H A R D , avoué-licencié.
T H I B A U D , Imprimeur du R o i , de la Cour royale et libraire, à Riom.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Maistre, Amédée-Elizabeth-Louis de. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Breschard
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
mort civile
créances
coutume du Bourbonnais
abandonnement
séquestre
saisie
prescription
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour le sieur Amédée-Elizabeth-Louis Baron de Maistre et la dame de Montblin, son épouse, intimé ; contre sieur Philippe-Charlemagne Van Duerne et la dame Maréchal, son épouse, appelans.
annotation manuscrite : « 13 juillet 1820, journal des audiences, p. 316. »
Table Godemel : Abandonnement : l’acte par lequel un débiteur a cédé et délaissé à ses créanciers les droits qui lui revenaient dans une succession, ne peut être considéré comme un simple abandonnement ne transmettant aucun droit de propriété aux créanciers si l’abandon ne comprend pas tous les biens affectés au payement des créances, et s’il n’a pas été fait aux créanciers avec la faculté de vendre les biens délaissés.
un pareil acte est une véritable vente ou cession de droits successifs, surtout lorsqu’il est stipulé un prix, quoique pour forme de gratification, et qu’il est convenu que tous meubles et immeubles, autres qu’un objet expressément réservé appartiendront aux créanciers cédataires.
les représentants du débiteur cédant ne peuvent attaquer cet acte, exécuté comme vente et cession pendant un très grand nombre d’années. Tierce-opposition : 4. une tierce-opposition doit-être formée par requête. Elle n’est recevable qu’autant qu’elle a été régulièrement formée dans les trente ans de la date des jugements attaqués.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
1692-1820
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2525
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2522
BCU_Factums_G2523
BCU_Factums_G2524
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53511/BCU_Factums_G2525.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tournai (Belgique)
Bayet (03018)
Barberier (03016)
Bompré (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abandonnement
coutume du Bourbonnais
Créances
longues procédures
mort civile
prescription
renonciation à succession
saisie
séquestre
Successions
-
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1abe74ecb1c2fb1ae8ad9dd890c035b6
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Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
M a r i e D A Y M A R D , v e u v e L a c r o ix , et M a r i a n n e
C O U D E R C , fem m e de D u r a n d - R i e u x ,
appelantes;
.
'
.
C O N T R E
E m e k ic , M a r i e , M a r ia n n e
GINESTE et autres,
intimés.
L a famille Gineste fait plaider les héritiers D aym ard et Couderc, depuis cinquante ans, pour obtenir le recouvrement d’une
créance qu’elle ne conteste pas , mais qu’elle ne veut pas payer.
Un arrêt souverain donne à ces créanciers deux gages plus que
suff isans; c’est-à-dire, la légitime d’un oncle, dont les adver
saires sont héritiers, et la succession bénéficiaire de leur aïeule.
Mais si on en croit les héritiers Gineste, ces deux gages se ré
duisent à un seul, lequel se réduit à rien; car ils veulent que la
légitime n’existe pas , et que la succession bénéficiaire soit ab
sorbée pour leurs reprises.
l
�( O
Ces prétentions ne devraient pas être bien longues à combattre
après un arrêt; mais comme les juges de Saint-FIour se sont
permis d’infirmer cet .arrêt , sous prétexte de le commenter, il
est nécessaire de rappeler l’origine do la contestation, et quel
était son état lors de l’arrêt qu’il s’agit aujourd’hui de faire
exécuter.
F A I T S .
L e 7 juillet 1 7 4 1 Marie Duvel d eM u railla c, veuve de Gas
pard Second , de la ville de P le a u x , acheta du sieur Montesquiou de Saint-Projet , diverses rentes et censives, moyennant
6 ,124 fr.
Elle les revendit à Joseph Daymard et Jean Couderc, auteurs
des appelantes, le 10 janvier 1766, moyennant 6,674 fr.
Quand les acquéreurs crurent se mettre en possession des
objets vendus , ils trouvèrent un fermier judiciaire qui leur
apprit que la terre de Saint-Projet était en saisie réelle au par
lement de Toulouse.
lisse pourvurent pour obtenir la distraction des objets vendus ,
ou une indemnité, et assignèrent leur venderesse .en recours.
L ’arrêt d’adjudication ou d’ordrô ne leur accorda rien, et les
laissa seulement à faire valoir leur garantie contre la veuve
Second.
Ils étaient en cause contr’elle , en 1761 , lorsqu’elle m o u ru t,
la is s a n t pour héritiers Jean1Second son lils, prêtre, et les enfans
de Marie-Jeaune Second sa iillc,. mariée on 1767, au sieurEineric
Gineste, juge à Pleaux.
. Emeric Gineste, qui avait plaidé jusqu’alors avec sa bellemère et avec son beau-frèro, s’empara de tout; et néanmoins
il déclara, pour ses enfans, q u ’il n’entendait se porter héritier
que sous bénéfice d’inventaire. Il présenta une requête , fit
donner une simple assignation à son beau-frère qui habitait
Paris, et une assignation à cri public à tous prétendons droitj
puis il fit dresser un inventaire comme il lui plut.
�( 3 )
L e mobilier en évidence lui parut trop conséquent; et pour
en distraire la majeure partie, il produisit au juge-l’inventaire
de son beau-père mort en 1781, pour prétendre que tous les objets
de même nature, inventoriés en 1781, devaient être retranchés de
la succession Muraillac; puis, ayant mis ordre à tout, il atten
dit la poursuite des Daymard et Gouderc.
Ceux-ci assignèrent en reprise, les i . er et 20 décembre 1764,
tant 1abbe Second, que le sieur Emeric Gineste père, et Pierre
Gineste, son fils aîné, majeur. (iVo/a. Marie-Jeanne Second et
Emeric Gineste.avaient eu trois enfans ; Pierre, marié à Fran
çoise Delzor; Marguerite, qui a épousé un sieur Feneloux , et
Marianne).
'*
Ils apprirent, i.° que la dame Muraillac , avant son décès,
avait déposé des effets chez la dam eD hauzers, abbesse de Bra-'
geac, et chez les ursulines d’Argentac, sous prétexte de les des
tiner à l’abbé Second , son fils, victime de la chicane de son
beau-frère; 2.0 qu’elle avait vendu une maison au sieur Ghantegrie-Lavigerie ; et pour en dénaturer le prix , dont l’acte por
tait quittance, elle s’était fait consentir une obligation, dont le
sieur Gineste fils s’était emparé.
En conséquence, ils firent des saisies-arrêts dans les mains
de tous ces débiteurs de la succession.
‘ Nous verrons bientôt comment Pierre Gineste enleva des
t it r e s précieux déposés chez l’abbesse de Brageac, et qu’ il redou
tait singulièrement de laisser connaître. Peut-être chercha-t-il
à en faire autant chez les religieuses d’Argentac; mais soit qu’il
n*y parvînt p a s , soit de concert avec elles, elles firent vendre ce
mobilier en place publique, en y appelant seulement Gineste
père et fils; et la vente, frais déduits, produisit £96 liv. 7 sous
2 deniers.
Quant à la dette de Chnntegrie, les Gineste se voyant décou
verts , avaient pris 1111e autre tournure; au moyen de quelques
créances trouvées dans la succession , et auxquelles ils s’étaient
fait subroger, ils avaient ouvert un ordre, lors duquel ils
�se firent colloquer pour 1,742 francs, par sentence de 1765»
A in s i, par une main-mise générale, et par des manœuvres en
apparence régulières , mais qu’on ne révélait aux Daymard et
Couderc qu’à mesure qu’ils faisaient des découvertes , les
Gineste préparaient un long procès à des créanciers simples
et de bonne foi.
Cependant ces créanciers, convaincus de jour en jour que
toutes les démarches des sieurs Gineste étaient une fraude diri
gée contr’e u x, conclurent, par requête du 11 mars 1 7 8 5 ,3
être reçus à prouver que postérieurement à 1770, Pierre Gineste, fils d’Emeric (décédé alors), avait fait acte d’héritier
en vendant des objets de la succession, et payant des dettes:
subsidiaireinent ils conclurent à ce qu’il rendît compte du
bénéfice d ’inventaire.
E n 1786, ayant appris que l’abbé Second était décédé, ils
conclurent à la reprise contre les Gineste en qualité de ses
héritiers; et on voit dans un mémoire du 25 juillet de la même
année, qu’ils y observent que l’abbé Second est mort créancier
de sa légitime paternelle et maternelle, et que les Gineste doi
vent la rapporter pour faire Face à la dette de la Muraillat.
O11 voit bien une réponse à ce mémoire de la part des G i
neste, sous la date du 29 août 1786; mais 011 n’y a pas remar
qué qu’ils aient trouvé une seule objection à faire contre cette
demande de la légitime paternelle de l’abbé Second.
On a élagué de cette procédure toutes les chicanes et conclu
sions de forme des Gineste, qui, à chaque suspension deproeéi
dure, commandée par plusieurs décès successifs des parties et
des procureurs, et plutôt par le besoin de surveiller leurs dé
marches, ne manquaient pas de demander des péremptions,
sur-tout lorsque le teins de la prescription fut venu ; et quand
ils n'y réussissaient pas, ils demandaient leur renvoi de T o u
louse à A u rillac, pour rendre commun aux Daymard un compte
bénéficiaire qu’ils y avaient présenté en 1772, à un créancier de
a ï o francs.
�( 5 ) ’
, • C ’est en cet état que fut rendu au parlement de Toulouse , sur
productions respectives , entre les parties , et par défaut, contre
les tiers saisis, le g mars 1789, un arrêt qu’il faut mettre en son
entier sous les je u x de la cour, puisque les difficultés princi
pales qui s’élèvent aujourd’hui, naissent de son exécution.
» JSotredite Cour..........démet ( les Gineste ) des demandes
« à ce que l’instance soit déclarée périmée......... ; condamne
« lesdits Delzor (veu v ed e Pierre G ineste), Parlange (tuteur),
« Feneloux et Marguerite Gineste mariés , en leurs qualités
« cohéritiers de Joseph Secon d , fils de ladite Duvel de Mu« ra illat, et oncle maternel dudit Pierre Gineste, à payer aux« dits Daymard et Couderc, à concurrence de la légitim e du~
<t dit Joseph Secon d, la valeur des rentes vendues à leurs pères
« par ladite Duvel de Muraillat, par l ’acte du 10 janvier 1756,
« suivant l’estimation qui sera laite desdites rentes, de l’auto« ri té de notre Cour, relativement à l’époque de l’éviction, par
« experts, avec les intérêts légitimes de ladite valeur , qui
« seront fixés par lesdits experts..........et demeurant la d é e la « ration fa ite par ledit fe u P ierr e -J e a n Gineste devant les
«
«
a
«
«
ordinaires de Pleaux ; qu'il n'a accepté, en qualité de tuteur,
la succession de ladite D u v e l son aïeule , que sous bénéjice
d'inventaire, et recevant la répudiation de ladite succession,
a ordonné et ordonne qu’à concurrence des sommes dues auxdits Daymard et Couderc, tant en capital, intérêts que dé-
«
«
«
«
«
p e n s , ladite Delzor et ledit Parlange seront tenus, chacun
comme les concerne , de rendre com pte auxdits Daymard et
Couderc , de tous et chacun les meubles et effets mobiliers
qu’ils ont reçus, provenans de la succession de ladite Duvel
de Muraillat , ensemble des f r u it s , intérêts et jouissances
« jusqu’à cejourd’hu i, tant desdits meubles et effets que de tous
« autres biens par eux possédés, et dépendans de ladite succes« sion , suivant l’état que lesdits Daymard et Couderc en don« neront, sauf les impugnations et exceptions de droit ; comino
« aussi ordonne que lesdits Parlange et Delzor seront tenus en
�( 6 )
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
leurs dites qualités de rendre compte de toutes et chacunes les
som m es, que lesdits Daymard et Couderc justifieront avoir
été pajées par ladite D uvel de Muraillac, à la décharge de
l ’hérédité de Gaspard Second, et deles rembourser, le cas y
échéant ; et déclarant les défauts pris contre lesdits ChantegrieLavigerie, le s religieuses de Ste.-Ursule d’A rgentac, Fabbesse
du couvent de Brageac, et Jean Tillet tous banitaires, bieft
poursuivis et entretenus ; ordonne qu’ils remettront, chacun
en droit soi, auxdits Daymard et Couderc, les sommes en leurs
mains bannies, à la requête de ces derniers, et ce, à concur-
-K rence des sommes capitales, et que pour le surplus desdrits
u banimens , lesdits banitaires en demeureront dépositaires
« ju sq u 'à L'apurement du com pte à rendre; comme aussi dans
« le cas que les sommes qui seront délivrées auxdits Daymard
u et Couderc ne seront pas S u f f i s a n t e s pour remplir le montant
<c des condamnations prononcées en leur faveur par le présent
,a
«
«
t«
arrêt; leur permet d eJaire sa isir, d’autorité de notre C ou r,
les immeubles et autres o b je ts , qu’elles découvriront être
dépendans de la succession de ladite Duvel. Sur toutes autres
demandes, fins et conclusions desdites parties, les a mises , et
« met hors.de cour et de procès; condamne lesdits.Delzor et
ft Parlange, comme procèdent, au x dépens de d 'in s ta n c e , en1
« vers lesdits Daymard et Couderc , taxés à z 3 i fr. 19 s.
L a première opération , faite en exécution de cet arrêt, fut
J’estimation des objets évincés. L e rapport dos experts , etl
date du 22 février »790, les évalue à
7,525 fr. 10 s. à quoi
ils ajoutent les intérêts de 1756 à 1782, fixés a 10,998 f. 17 s. 9 di
de sorte que la créance des sieurs Couderc et Daymard , ¿ladite
¿poquc de 1782, a été réglée à 18,524
7 s* 9
Ce rapport 11 été homologué par un 2 / arrêt du 3o avril 1790'.
L e 19 janvier 1.791 , après la suppression dit parlement de
Toulouse, les héritiers Gineste assignèrent les héritiers Couderc
et Duyniard devant le tribunal du district de Salers pour pré
senter le compte ordonné; c’est ce compte .qu’ il s’agit de dé-
�battre, et sur lequel il ne faut pas méditer lo n g -te in s, pour
s’nppercevoir que de prétendus héritiers bénéficiaires s’efforcent
d’expolier un créancier légitim e, eu ne révélant que ce qu’ils
ont cru le plus en évidence.
, Avant de parler de ce com pte, disons un mot de la position
de la dame Duvel de Muraillac , à son décès.
.Mariée en 1720, elle eut pour 5 oo fr. de bagues et joyaux,
ou augment,
.Elle fut héritière fiduciaire de son m ari, par testament de
1731 ; mais légataire personnelle des revenus.
. Elle fut héritière fidéicommissaire de Marie-Jeanne Second,
femme d’Emeric Gineste, sa fille, par testament de 1744, et
encore légataire personnelle des jouissances.
Elle f u t , pendant longues années, fermière de Pleaux ; et
elle passait pour la personne la plus aisée de l’endroit.
Elle laissait en immeubles plusieurs vignes et une terre de
deux septerées, plantée en châtaigniers.
Elle avait vendu un immeuble au sieur Lavigerie : le contrat
portait quittance ; mais il y avait une contre-lettre. ( jSota. U n
créancier en eut connaissance, força le sieur Gineste à rapporter
la somme : ce qui donna lieu à l’ordre dont on a déjà parlé ).
Elle avait vendu un moulin aux religieuses d’Argentac; et,
par une contre-lettre, ces religieuses s’étaient obligées de nourrir,
pendant trois ans , une demoiselle que devait envoyer la dame
de Muraillac. Cette contre-lettre était encore dans les papiers
de sa succession.
E n fin , comme on l ’a déjà d it, elle avait fait, peu de tems avant
sa mort , un dépôt de papiers et d’argenterie entre les r a a in s r
de l’abbesse de Brageac, pour remettre à l’abbé Second son fils.
.Les*-. Gineste n’avait pas eu plutôt connaissance de ce dépôt, q u ’i l
avait couru à l’abbaye de B rageac, pour le r é c la m e r . Juge de cette
abbaye ,il dut persuader ou épouvanter une religieuse simple et
scrupuleuse, qui craignit d’avoir paru favoriser uulégitiraaire, au
�( 8 )
préjudice de l ’institué. Comment d ’ailleurs s’exposer à un procès
contre le sr. Gineste, juge, a vocat, et qui passait sa vie à plaider?
L ’abbesse de Brageac devait faire valoir une saisie-arrêt faite
entre ses mains par les sieurs Daymard et Couderc ; mais le
sieur Gineste leva encore cette difficulté, en donnant une ga
rantie à l’abbesse de Brageac , et se soumettant à représenter le
dépôt aux créanciers.
Cette dernière particularité ne fut connue des sieurs Daymard et Couderc, qu’après l ’arrêt de 1789, par une opposition
que fit l ’abbesse de Brageac, le 11 septembre 1790, à l’exécution
dudit arrêt, commencée contr’elle à leur diligence.
Cependant ils gardèrent le silence sur cette révélation, pour
savoir si les Gineste comprendraient dans leur compte ces objets
non inventoriés, ou s’ils auraient l’infidélité de les taire.
Il ont eu cette infidélité.
L e compte rendu est divisé en trois chapitres de recette, et
un chapitre de dépense.
L e i . er chapitre de recette n’a que 3 articles.
1 .er A rticle: 100 fr. pour le mobilier de la daine de Muraillac,
parce que, dit-on, il a fallu distraire de son inventaire, fait en
17 6 1, le montant de celui du père, fait en 1781, par la raison
q u ’elle avait retenu ce mobilier, en vertu du testament de 1731.
2.® Article : 5oo fr. pour les bagues et joyaux de ladite M u
raillac. (N o ta . Les Gineste ont jugé à propos, après avoir fait
régler l’article à cette somme, par un jugement par défaut, de
réduire l ’article à 66 liv. 12 sous 4 deniers, en disant que leur
mère n’avait droit qu’à une portion virile de ses p r o p r e s reprises ).
3 .e Article 1400 fr. pour tous les arrérages de la ferme de
Pleaux, touchés par eux après sa mort.
a.e Chapitre de recette, un seul article,
Composé des immeubles de la succession. Il n’est présenté
que pour mémoire.
3 .®Chapitre de rece tte , un seul article.
Des jouissances desdits immeubles depuis 1761 jusqu’à 1790»
�( 9 )
. h 2.0 fr. par an , attendu que l ’évalution dans les rôles ne porto
le produit net qu’à n fr. ; c’est, pour 29 ans. . . 58o 1.
s'.
Chapitre de dépense, 20 articles ;
i .° Reprise sur le mobilier. ............................... 900
2.0 et 3 .° L e sieur Giueste est créancier person- .
nel d e .............................................................................. yo5
4.0,
5 .° et 6.® Il est créancier, pour legs fait à
Marie-Jeanne Second, par Jeanne Muraillac , de
7 .0 Frais de maladie et enterrement....................
546
114
8.° Frais de scellés , inventaire , requêtes,
exploits et affiches............................................... . .
90
i3
9.0 Pour valeur d’immeubles paternels, vendus
à M e d a l , par. la Muraillac.........................................1,000
io.° et i i .° Payé au sieur L anglad e, ou gardes
baillistes de Saint-Projet, et f r a i s ........................... 1,224
12.0 Payé à Etienne Boyer, créancier.................
110
i 3.° Pour frais faits contre ledit Boyer , pour
lui rendre compte du bénéfice d’inventaire . . . .
60
14.0 Pour impôts de 1759 à 1.771, ou pour in
térêts d’une créance Lacoste......................................
çyj
14
1 5.0 Plus, au sieur Bastide, créancier d’un billet.
174
16
16.0 Plus , au sieur Vaissière , créancier d’un
b ille t
144
17.0 P lu s , à l’abbesse de Brageac, pour pro
messe du 26 mai 1761...................................................
72
18.0 Plus, au sieur Biard , créancier par sen
tence de 1 7 4 2 ...............................................................
201
17
19.0 Pour les dépens auxquels sont condamnés,
par l’arrêt de 1789..........................................................
23 i
19
20.0 Pour les frais du présent compte.................
9^
a
�k.* M
( 10 ) '
D ’où il suit que la dépense excède la recette de 4,191 liv.
6 den.; et les Gineste en concilient qu’ils doivent être renvoyés
de la demande (1).
Ce compte fut débattu par requête du 5 novembre 1791; et
indépendamment de la critique faite aux articles ci-dessus, les
sieurs Couderc et Daymard iirent un chapitre d ’om issions com
posé de 5 articles ;
i .° Pour la somme touchée par le sieur Gineste,
du sieur Chantegrie , acquéreur de la Muraillac . . . 1,782 1.
2.0 Pour les trois ans de nourriture due par l ’ab
baye d’Argentac , et dont Gineste avait donné ac
quit en 1770.. . . •••• .
........................
1,200
3 .° Pour valeur du dépôt retiré de l ’abbesse de
Brageac. . ...................................... .................................. 10,000
4.0 Pour d ix-sep t années de jouissances que la
Muraillac avait eu droit de toucher des biens de
son m ari, en vertu du testament de 1744 , et dont
Gineste s'était emparé; la succession valant 80,000 fr. 34,000
5 .° Pour la quarte trébellianique qu’elle avait eu
droit de retenir sur ladite succession, d’après ledit
tostament. ...........................................................................20,000
Par la même écriture, les sieurs Daymard et Couderc obser
vèrent que la légitime de l ’abbé Second , dont les adversaires
sont héritiers, aurait dû être fixée; et que comme il a recueilli
un sixième dans les biens de Gaspard Second , son p ère, il s’agit
de représenter ce 6.e pour faire face aux condamnations de l’arrêt
de 1789. En conséquence, ils indiquèrent les immeubles devant
servir à composer ladite légitime.
(j ) En
1 7 7 2 , G in e ste avait présenté un sem b lab le com pte à E tien n e
B o y e r , d é n o m m é au x articles 12 et i3 .
A lo r s la dép en se ex c é d a it la recette de a,3o4 fr. seu lem en t.
É tie u u e
D o y e r n ’en
Ic sd ils a it. j » e i j
3.
a
p a s m o in s su se fa ir e p a y e r , c o m m e le p r o u v e n t
�( ïï )
Ils conclurent, en conséquence, à ce que, sans s’arrêter au
compte frauduleux, présenté en 1790, les adversaires fussent
condamnés en leur nom.
Subsidiairement à ce que les adversaires fussent tenus de con
tester , dans la huitaine , la composition de la légitime de l’abbé
Second, sinon la déclarer suffisante, et condamner les adver
saires à en payer le montant, en exécution de l’arrêt ; sauf, en
cas de contestation , à faire estimer la succession.
Et en ce qui touche la succession bénéficiaire, et audit ca s,
à ce que les chapitres fussent réglés aux sommes ci-dessus , et
les adversaires condamnés aux dépens, sous réserve de pour
suivre les tiers-saisis, et de faire saisir les immeubles , en con
formité de l’arrêt.
Les adversaires répondirent à ces débats par une requête du
16 mars 1792 ; et persistant dans leur compte, ils s’attachèrent
principalement à soutenir que l’arrêt de 1789 ne soumettait
au payement de la créance Daymard et C ou d erc, que la légi
time maternelle de l’abbé Second.
Subsidiairement ils prétendirent qu’il avait accepté la desti
nation de la légitime paternelle fixée à 1,000 fr. par le testa
ment de 1 7 3 1, et qu’il avait donné plusieurs quittances, soit
par des lettres missives, soit par un acte de 1752.
Quant au dépôt d e l’abbesse , ils dirent, sans beaucoup de dé
tail (quoique la requête ait cent douze rôles ) , qu’ils offrent com
munication de titres pris chez l’abbesse, lesquels ne signifient rien,
et que d’après l’arrêt, c’est aux Couderc et Daymard à indiquer
en quoi consistent les biens de la succession de Muraillac.
L e s Gineste sentaient bien que leur désir de soustraire ces deux
points principaux était singulièrement contrarié par l’arrêt du
parlement de Toulouse. A u ssi, dans leur requête, iirent-ils une
sortie vigoureuse contre ce parlement pour lui reprocher son
arrêt.
L ’injustice de cet arrêt, disaient-ils, est révoltante , en cc qu’il
a jugé l’abbé Second, héritier pur et simple de sa mère : car
�Gineste étant héritier bénéficiaire, on ne p o u v a it, suivante u x ,
soutenir l ’autre héritier pur e tsim ple, suivant Dumoulin. « C ’est
« a in si, s’écriaient-ils, que des gens qui ont acheté le droit de
« juger les hommes, remplissaient leur devoir. Et on s’est laissé
« entraîner par le torrent d’un siècle de despotisme, au point de
« regarder jusqu’à présent leurs jugemens comme des autorités
« respectables ».
Il faut croire que cet anathème, né à Salers, n’a pas au
trement nui à la réputation des magistrats de Toulouse, et que
leur arrêt n’en sera pas moins respecté.
L a cause était sur le point d’être jugée en 17 9 3 , lors de
la suppression des droits féodaux, fort étrangère sans doute
à la contestation. Mais le tribunal de Salers , qui ne voulut
pas imiter le parlement de Toulouse, et se laisser accuser de
despotisme , ordonna qu’il en serait référé au comité de légis
lation , pour savoir s’il devait prononcer sur une vente de
rentes féodales, faite en 1756.
L e comité de législation répondit le 7 thermidor an 3 , au
tribunal de S alers, qu’il n’avait rien à juger sur la vente
féodale de 1756 , puisqu’il y avait un arrêt , et qu’il n’avait à
s’occuper que de son exécution ; qu’ainsi il devait passer outre.
Pendant ce tems-là le tribunal de Salers cessait d’exister, et
les femmes Couderc et Daymard assignèrent les héritiers G i
neste, par exploit du i . er fructidor an 4 , devant le tribunal
civil du Canlal pour voir donner acte de l’aveu , fait par les
Gineste , d’avoir retiré le dépôt de l’abbessede Brageac; en conséqn ence être condamnés, en leur nom, à payer la créance ;
subsidiairement composer la légitime de l’abbé Second, d’un 6.*
des biens de Gaspard Second, et apurer le compte de la succes
sion Muraillac , de la manière exprimée en la requête du 5
novembre 1791.
L e 14 pluviôse an 5 , les Gineste obtinrent un jugement par
d é fa u t, lequel homologue l’entier compte présenté par les ad
versaires, à l ’exception de trois articles ; savoir , i.° l ’intérêt des
�( *3 )
gains nuptiaux ;• 2.0 des revenus de vingt-neuf ans, portés an
3 -e chapitre de recette ; 3.° de l’art. i 5 du chapitre de dépense..
Autorise les adversaires à prélever les autres articles de dé
p en se , en capital et 1accessoires.
Ordonne qu’ils seront tenus de se charger en recelte des in
térêts de 5oo fr. montant des gains de survie depuis le décès de
la Muraillac.
. Ordonne , avant faire droit sur l’article des jouissances , qu’ils
seront estimés par experts, depuis et compris 1761 jusqu’à ce
jour.
?
*
Ordonne aussi, avant faire droit, que la signature relative à
l ’article i 5 du chapitre de dépense, sera vérifiée par experts.
Délaisse les Gineste à se pourvoir contre la femme Couderc ,
en remboursement de 5oo fr. par elle reçus pour la moitié de la
légitime, est-il d i t , de l’abbé Second, comme ladite somme ayant
été induement perçue avec l ’intérêt à compter du paiement.
( Nota. Ce dernier chef paraît être ajouté d’oflice, sans con
clusions expresses ).
Condamne les Daymard et Couderc aux dépens.
j
X.es femmes Daymard et Couderc formèrent opposition à ce
jugement, el les parties en vinrent à l’audience du i3 thermi
dor an 5 , où les Gineste conclurent au débouté d’opposition,
et demandèrent à ne porter en recette qu’une virile dans les gains
nuptiaux de 5oo fr. ; de leur p a r t , les Daymard et Couderc
persistèrent dans les conclusions ci-devant rapportées.
_Par jugement du 14 thermidor an
1
5 , le tribunal du Cantal
prononça sur le tout, ainsi qu’il suit : i.° En ce qui touche la de*,
mande en paiement personnel delà créance, il juge que les qualités
des parties sont réglées par l’arrêt de 1789 , lors duquel il fut'
question du dépôt de l’abbesse de Brageac , et qu’on ne peut plus
remettre en question une chose jugée; que Pierre Gineste avait
fait état des objets déposés et par lui retirés; qu’on en ofire la
communication , et qu’il n’est allégué aucune soustraction des
�( 14 )
pièces J or ou argent provenant du dépôt touché par Gineste.
2.° En ce qui touche la question de savoir si l ’arrêt parle de
la légitime paternelle de Jean Second, le tribunal juge que Jean
Second, étant réduit à une légitime de droit du chef mater
nel, et mort avant que Gineste prit la qualité d’héritier béné
ficiaire en 1786, il n’a pu être tenu des dettes de sa mère que
sur son 6.e des biens maternels ; que si on donnait à l’arrêt de
1789 une extension sur la légitime paternelle, ce serait prêter
aux juges qui l ’ont rendu, une ignorance des principes, invrai
semblable , et une contradiction manifeste, parce que si Jean
Second avait été assujéti sur les biens paternels, ce n’aurait pu
être que comme héritier pur et simple de la D u v e l, et alors
les mineurs Gineste, héritière médiats de leur oncle, auraient dû
être condamnés personnellement, tandis qu’ils ne l’ont été qu’à
rendre compte du bénéfice d’inventaire de la D u v e l, et cette
disposition de l’arrêt ne paraît avoir été mise que pour que les
mineurs Gineste ne pussent demander la distraction du 6.e du
chef de Jean, sur la succession de la Duvel; d’où il suit que cette1
condamnation ne peut porter que sur la légitime maternelle.
, Jl est ajouté que les paiemens faits parles Gineste, sur la lé
gitime paternelle de Jean Second, l’ont été par erreur et con-'
trainte , ou eu vertu des jugemens de Salers ; que le tout doit
être réparé en définitif, et que Jean Second ayant approuvé le
le legs et destination, en fournissant des quittances, acceptant
le titre, et se faisant payer les revenus en majorité, n’ayant ja
mais formé demande en supplément, les Daymard et Couderc,
après plus de trente ans de majorité, n’auraient jamais été recevables à exercer des droits prescrits.
3 .® En ce qui touche les gains nuptiaux, il juge que d’après
les novelles 98 et 12 7 , la Mtmiilluo n’avait pu retenir qu’une
virile de ses gains nuptiaux en propriété , et qu’il y a eu lieu de
changer les conclusions.
4.0 En ce qui touche les jouissances de la succession de Gas
pard Second, léguées ù la Muraillac en 17 3 1, il juge qu’en ren-
�( i5 )
dant le fidéicommis T elle ne s’est rien réservé; que le compte
énoncé au contrat n’est pas rapporté ; qu’elle n’a joui de la
maison, grange et jardin, qu’en vertu d’une contre-lettre non rap_portée, mais rappelée au testament de 1744, et au traité de 1747.
5 .° En ce qui touche les jouissances de la succession de
Marie-Jeanne Second, léguées à la Muraillac en 1744, il juge
que la Muraillac, ayant lait la remise de l’hérédité, sans rien
réserver, et sans faire publier la substitution, n’a pas eu droit
aux jouissances ; qu’il ne paraît pas qu’elle ait demandé judi
ciairement l’exécution de ce testament.
6.° En ce qui touche la quarte, il juge que la M uraillac,
n’ayant fait aucun inventaire, l’avait tacitement abdiquée ; que
d’ailleurs si elle avait joui, les trois quarts des fruits auraient
du être imputés sur la quarte, et l’auraient absorbée.
7 .0 En ce qui touche l’abbaye d’Argentac, il juge que rien
ne prouve que les Gineste en aient fait leur profit.
8.° En ce qui touche l’indemnité demandée en l’art. 9 du
chap. de dépense, il a pensé que le testament de 1 7 4 4 ^ oppo
sait, et que cette réclamation n’était pas fondée.
c
9.0 Eu ce qui touche les art. 2, 3 , 4 , 5 , 10 et i r du chap. de
dépense, il juge que, les premiers étant compensés par le traité
de 1747 , et même le sieur Gineste étant resté débiteur de la
Muraillac, de 678 f. 14
cette somme doit être portée en recette,
ou compensée avec les 1,200 fr. de l’art. 10.
■
>
10.0 En ce qui touche le mobilier porté en l'inventaire de
17 6 1, et sur le fait de savoir s’il fallait déduire le mobilier dé
1781, il juge qu’il n’y a lieu de rapporter que les objets recon
nus n’être pas les mêmes qu’en 1731.
i i , ° En ce qui touche l’art. i . er de dépense, relatif au mobilier
manquant,‘ le tribunal du Cantal pose la question, et n’y donne
aucun motif de décision; mais il y a débouté au 11.0 6 ci-apiès. ’
En conséquence , ledit jugement définitif, du 14 thermidor
an 5 , « i.° déboute les femmes Dnymard et Couderc de leur de« mande en condamnation personnelle, sauf à elles à prendre
�( 16 )
« comnïiimcation de l’étal des pièces et actes déposés ès-mains
« de l’abbesse de Brageac, et prendre à cet égard telles conclu« sions qu’elles aviseront;
« 2.0 Ordonne que la condamnation portée par l’arrêt du par« lement de Toulouse, du 9 mars 1789, en payement de la légiec time de Jean Second, n’a dû ni pu porter que sur la légitime
« maternelle, et nullement sur la légitime paternelle ; en consé« quence, ordonne que toutes les sommes payées par les Delzor
« et Gineste, à la suite des procès-verbaux et jugemens de pro
ie vision, seront portées au chapitre de dépense, ou compte de
« bénéfice d’inventaire de la succession de Marie Duvel ;
« 3 .° Ordonne que la somme donnée par Gaspard Second à
« la dame D u v e l, en leur contrat.de mariage, sera réduite à
« 166 Uv. i3 so u s4 deniers pour le tiers faisant la portion virile,
« avec intérêts à compter du décès de la dame Duvel;
« 4.0 Déboute lesdits Daymard et Couderc de leur demande
« à fin de payement des jouissances de la succession de Marie« Jeanne Second, et distraction de la quarte trébellianique;
« 5 0 Les déboute de leur demande à fin de pay ement de la
« pension stipulée par Marie D u v e l , avec les religieuses d’A r« genlac;
« 6.° Les déboute de la demande en rapport de 1,700 francs,
« montant de la collocation faite à Erneric Gineste, par la sen« tence d’ordre de 1765 ;
« 7 .0 Déclare les Gineste non-recevables à porter en dépense
»
t ,o o o
fr. pour dédommagement des aliénations faites par Marie
«
«
«
«
«
D u v e l, de certains héritages de la succession, vente de cabaux,
marchandises énoncées en l’inventaire fait après le décès de
Gaspard Second, ainsi que de la créance Faure, et legs fait à
Jeuime-Maiic Second; en conséquence, ordonne que les articles 1 , 2 , 3 , 4 , 5 , 9 du chapitre de dépense seront rejetés;
u j .° Ordonne que le chapitre de recette sera augmenté de
« 678 liv. 4 sous 4 deniers pour les causes du traité du 8 octobre
«. 1747, pour être ladite somme compensée au désir dudit traité,
« av«ec celle de 1,200 fr. p a y é e au fe rm ie r de Saint-Projet ;
�«
a
«
«
( i7 )
« 8.° Ordonne que les Gineste seront tenus de représenter les
meubles reconnus par l’inventaire fait après le décès de Marie
Duvel, être en sus de ceux portés en l’inventaire fait après le
décès de Gaspard Second, pour iceux être vendus, s’ils sont
en nature , ou en payer la valeur suivant l’estimation; décharge
« les Gineste de la délivrance du surplus des meubles;
« 9.“ Avant faire droit sur le surplus des articles du compte,
« et sur les demandes en main-levée du sursis, ordonne qu’il
« sera procédé à l’estimation des fruits et jouissances des im« meubles de la succession de Marie D u v e l, depuis son décès« jusqu’à ce jo u r , et des meubles ci-dessus, etc. dépens réservés. »
Tel est le jugement dont les héritiers Daymard et Couderc ont
ijîterjeté'appel. Ils vont, pour.proposer leurs moyens avec plus
de clarté, parcourir séparément les chefs qui leur ont paru cori-’
tenir des erreurs à leur préjudice, en suivant l’ordre même des
motifs dudit jugement.
«
•
»
•
f'
1
1. Dépôt de L’abbesse de Brageac.
Des créanciers légitimes , qui disputent ce qui leur est du
contre un héritier soi-disant -bénéficiaire, méritent toute la fa
veur de la justice; car tout est caché pour eux dans une fam ille’
étrangère : il faut donc que la conduite de l’héritier bénéficiaire
soit franche et de bonne foi. Il ne doit rien retenir ou dissimuler;
et si aptes son inventaire de nouveaux objets parviennent, soit
en ses mains, soit à sa connaissance, il est de son devoir de les
faire inventorier à l’instant : car les créanciers doivent tout v o ir’
dans l’inventaire,' sans rien chercher hors de cet acte. Tout cela'
est d’équité et de prinüipe. Voyons maintenant si le sieur Gineste
s’y est conformé.
Li'l dame Muraillac, veuve Second , voyant qu’elle avait plaidé"’
Joute sa vie avec le sieur Emeric Gineste père, et que le sieiir1
Pierre Gineste Son fils croissait avec les mêmes dispositions,
conçut des inquiétudes au sujet de Jacques Second , prêtre ,
3
�( "8 )
son fils, qui déjà , pour avoir sa pension du séminaire, avait élé
forcé aussi de soutenir un ou deux procès.
Elle déposa dans les mains de la dame Dhauzers, abbesse de
33rageac, un sac de papiers, et une corbeille d’argenterie, pour
le remettre, après sa mort, à l ’abbé Second. L e sac contenait,
à ce qu’il paraît , plusieurs titres et obligations qui étaient des
créances de la v^uve Second, tant contre divers particuliers,
que contre la succession de son mari. Il est notoire que sa ferme
de Pleaux était très-lucrative, et qu’elle avait un porte-feuille
considérable. Nous avons dit qu’elle mourut en 1761.
L e sieur Gineste se porta seulement héritier bénéficiaire, et
fit, en cette qualité, procéder à un inventaire en la même année
1761.
r Supposons , si on v e u f, que, lors de cet inventaire , il ne con
naissait pas ce dépôt.
Mais quand il est allé le retirer, devait-il s’abstenir de faire
ajouter ces objets à l’inventaire ?
11 était avocat et juge de Pleaux; il était de plus juge de
l'abbaye même de Iirageac. E ta it-il de bonne foi en retirant
pour lui seul, et non pour les créanciers , un objet inventorié?
Etait-il de bonne foi en induisant en erreur des religieuses qui
avaient pleine confiance en lui?
L es sieurs Dayinard et Couderc avaient fait une saisie-arrêt
entre les mains de l’abbesse, le 22 août 1764.
Quand leurs veuves voulurent l’assigner sur leur saisie-arrêt,
en 1780, elle répondit, par une requête du 21 juin 17O3 , qu’à la
vérité la dame Second lui avait remis un sac cousu, contenant
des papiers, sans aucun état ou mémoire, et une corbeille do
jonc, contenant 3o Iiv. à'dlain travaillé, pour remettre, après
son décès, à l’abbé Second, son fils, alors à Paris; qu’elle remit
ce dépôt au sieur Gineste, en 1772 , et avait dû le lui remettre,
parce que la dame Second et l’abbé étaient morts , et que les
sieur Dayinard et Couderc s’étaient absentés; que d’ailleurs il
y avait prescription.
�•
' ..
^ 19 )
A va n t celte signification, l’abbesse avait marqué à la veuve
Lacroix , par une lettre du 26 mai 1776, que M. Gineste , hé
ritier sous bénéfice d’inventaire, et autorisé en justice, avait
retiré ce dép ôt, et l’avait porté à Aurillac, avec l’inventaire des
effets de la veuve Second.
Ainsi le sieur Gineste avait persuadé à cette dame qu’il était
autorisé de la justice pour retirer ce dépôt.
Il lui avait persuadé, pour vaincre ses scrupules sur la desti
nation du dépôt, que l’abbé Second était mort en 1772, à Paris ;
et il n’est mort que le 21 avril 1777.
Il lui avait persuadé que les sieurs Daymard et Couderc ,
créanciers saississans en 1764, s’étaient absentés, et il savait
qu’ils étaient morts.
Il parlait de péremption à une religieuse qui devait certai
nement le croire; et cependant il savait bien qu’une saisie-arrêt
•ne périme pas.
Voila donc comment agissait un héritier bénéficiaire envers
des créanciers, ou plutôt envers les veuves de deux créanciers,
parce qu’il lui était bien aisé de dénaturer alors tous les papiers
'dont il venait de s’emparer, au risque de dire , comme il l’a fait,
qu’on ne peut pas diviser sa déclaration.
• lletnarquons cependant les suites de cette infidélité. Il était en
procès en 1772; lorsqu’il retira ce dépôt, il garda le silence, il
ne fit rien constater; 011 du moins s’il y eut un récépissé dé
taillé , il n’a jamais voulu le produire.
Il présenta un compte de bénéfice d’inventaire en 1772, et
ne dit pas qu’il avait des objets non compris en l’inventaire
de 1761.
Ouand'il a vu qu’on poursuivait en 1780 l’abbesse de Brageae,
i l a retardé le plus qu’il a pu les édaircissemens à cet égard.
Ce n’est qu’en 1791 qu’il signifie un compte, quand il voit que
trente ans d’intervalle ont tout dénaturé, et que les créanciers
Daymard et Lacroix seront hors d’état de découvrir en quoi
consistaient les*papiers, qu’il u enlevés lui-même, malgré leur
�saisie. C ’est alors, ou plutôt en i 8 o5 , et après quarante a n s ,
qu’il leur dit sèchement : Ces papiers étaient inutiles, vous ne
prouvez .pas le contraire, donc ma déclaration doit prévaloir,
parce qu’elle est indivisible.
Non , il est impossible de ne pas voir dans cette conduite le
cas d’application des lois sur la déchéance du bénéfice d’in
ventaire.
L ’inventaire, dit M. d’Argentié, doit être la description fidèle
de tous les biens meubles et immeubles du défunt, et son objet
est de conserver aux créanciers tout ce qu’il leur importe de
connaître : inventarium descriptio est bononitn mobilium et
immobilium defuncti , vocalis creditoribus. . . . F in is ejus , ut
res salvæ sint ciediloribas ........ lnvenlarii. maleria bona sunt
tarn m obilia quàm immobi/ia , nam etsi imtnobilia auferri non
possunt et p a te n t , et fo ris cubant , ut lo q u u n tu r, tamen possessio eorum interverti p o te s t , et secreto in alios transferri....
JLrgo hæreditaria o m in a , bond Jide describenda puto , et in
eo creditorum interesse versatur ; est enim inventarium insirumentum commune hccredis et creditorum. (Art. 5 14, gl. 3).
A la vérité, d’autres auteurs ont pensé que l ’état des im
meubles n’était pas absolument nécessaire, mais ils exigent au
moins la mention des titres de propriété, par les mêmes raisons
que les créanciers doivent être mis à portée de connaître, par l’in
ventaire, tout l’actif de la succession.
Il finit même, d’après d’Argentré, un tel détail dans l’inven
taire, qu’il ne se contente pas de l’état approximatif des grains,
mais il veut qu’on les mesure, dici debet frugum mensura, ncc
suf/icit cumulurn dixisse ; il veut qu’on estime chaque objet, ou
qu’on le décrive de manière à ne pas en substituer un autre,
t i c ejusdem nom inis species pro a lia supponi p o s s it , viliorpro
m cliorc ; et il déclare que tout cela est d’autant plus indispensa
ble qu’il n’a que trop vu de fraudes de ce genre , au préjudice
des créanciers, adhibitis cujusque artificii opificibus. Il s’élève
même contre ceux qui penseraient qu’il ne faut pas autant de
�( 21 )
précautions. C a r, pourquoi ne pas préférer, dit-il, ce-qui est
plus utile et plus sûr? Quare çuod utilius et cautius d isplicet?
. O r , tontes les fois qu’il y a des omissions dans l’inventaire ,
l’héri lier bénéficiaire est déchu du bénéfice , et réputé malgré lui
héritier pur.et simple.
Une loi romaine à la vérité semblait ne le condamner qu’à
la peine du double, qui est inconnue parmi nous; mais elle
était contrariée par d’autres lois , et la jurisprudence française
n’a jamais admis que la déchéance du bénéfice d’inventaire pour
les recelés ou omissions, comme on le voit dans Brodeau , Leprêtre, Furgole et Pothier.
En effet le bénéfice d’inventaire n’était accordé par la loi que
sous la condition de faire un bon et fidèle inventaire. Si la con
dition n’élait pas remplie il n’y avait plus de bénéfice.
11 y a même , dit Fachinée , qui a fait une dissertation
sur cette question , plus à reprocher à celui qui fait des omis
sions, qu’à celui qui ne fait aucun inventaire; car 011 peut croire
à l’ignorance de celui-ci plutôt qu’à son dol. Mais celui qui n’in
ventorie pas tous les objets delà succession, ou qui en dissimule
aux créanciers, n’est pas digne du bénéfice de la loi. Ig ilu r s i
hœres non descripsit omnia bona , ea occullando , non est
dignus bénéficia iegis. ( L i v . 4 , chap. 37).
Aujourd'hui le Code civil a fait de ces principes une loi prér
lise en l’art. Ooi. « L ’héritier, qui s’est rendu coupable de recélé,
« ou qui a omis sciemment de comprendre dans l’inventaire des
« effets de la succession, est déchu du bénéfice d’inventaire».
O r , comment peut-on dire que Pierre Gineste n’a pas fait
cette omission sciem m en t, lui qui se cachait des créanciers pour
demander à l’abbesse de Brageac un dépôt, dont la valeur et la
consistance n’étaient pas connues.
Dira-t-on que Gineste ne connaissait pas lui-mêine le dépôt
en 1761 ? mais qu’il lise l’inventaire, il verra la clause de style,
par laquelle Gineste, en aiïirmant no connaître aucun autre objet
de la succession, ajoutait qu’il déclarerait ceux qui viendraient
par la suite à sa connaissance.
�( 22 )
Sans cela l'inventaire ne serait le plus souvent qu'une ébaucheinutile; car quand les papiers d’ une succession sont chez les no
taires on huissiers pour des recouvremens, lors de Finventaire,
il faut bien que l’héritier bénéficiaire en fasse un second, s’il
ne veut pas expolier les créanciers.
L ’usufruit des pères était bien plus favorable que le bénéfice
d’inventaire. Cependant quand il y avait lieu de leur part à faire
un inventaire, ils étaient privés de l’usufruit, si après en avoir
fait un premier, ils n’ajoutaient pas dans un secoud ce qui sur
venait ensuite.
L a sénéchaussée d’Auvergne a prononcé deux privations d’u
sufruit en ce cas; en 1775, contre James Tournilhas de V o lo re ,
•et en 1788, contre Jasseaume Dolmet.
Les premiers juges ont écarté tous ces principes, en disant
qu’il y avait chose jugée à cet égard par l’arrêt de 1789, parce
qu’alors il avait été parlé du dépôt de l’abbesse de Brageac.
Mais où ont-ils vu qu’il eût été question le moins du monde
de la difficulté. L ’abbesse était en cause elle-même comme tierssnisi ; il s’agissnit d’obienir c on lr ’elle une condamnation à vider
ses mains, et c’est là ce qui a été ordonné.
L ’objet de la demande était donc une saisie-arrêt contre l ’ab
besse elle-m êm e, ainsi il n’y a pas chose ju g é e, puisqu’il faut,
suivant les principes , cadetn res, eadem persona , cadem causa
p e te n d i, ce qui est rappelé en termes plus précis encore par Fai t.
ï 35 i du Code civil.
Les sieurs Ayinard et Couderc n’avaient pas même intérêt
alors d'abandonner leur action directe contre Fabbesse de Bra
geac, pour la suivre contre un héritier bénéficiaire: et .si un instant
il y a eu des conclusions contre le sieur Ginesle, en condamna
tion personne lle , elles venaient de tout -autre cause, mais non
de la réception du dépôt, puisque les conclusions prises contre
l ’abbesse oui toujours subsisté , ont clé même adoptées par l’arrêt.
Ce n’est qu’après l'arrêt, après commandement à l’abl/csso d’y
■satisfaire, et même après saisie-exécution et assignation pour la
�6
( *3 )'
vente, que l’abbesse fut forcée de révéler, par notification du 11
septembre 1790 , qu’elle avait un billet de garantie d u sr . Gineste!
' Ces poursuites prouvent donc que la chose jugée, quant au dépôt,
était encore personnelle à Pabbesse; et lorsqu’on a appris, pour
ta première fois, que le sieur Gineste avait tout pris sur son compte-,
par une garantie, alors seulement il y a eu lieu d’agir coûte lui,
pour faire valoir tout le résultat de l ’infidélité par lui commise.
M ais, ont dit encore les premiers juges, lésqualite's des parties
Sont réglées par l’arrêt , et sont dès-lors invariables.
Erreur encore ; car il n’y a d’indélébile que la qualité d’héri
tier pur et simple : car celle d’héritier bénéficiaire peut être
changée d’un instant à l’autre, suivant les circonstances.
Un hériter bénéficiaire peut n’être pas réputé coupable d’omis
sions, lorsqu’on juge seulement sa qualité. Mais s’il en est con
vaincu ensuite, la faveur changera; et le moindre recélé bien
justifié, comme dit Rousseau-Lacombe , le fera déchoir à l’ins
tant du bénéfice d’inventaire.
Ici on a pu croire Gineste de bonne foi dans le retirement du
dépôt de B ra g eac, tant qu’il était incertain s’il voulait se l’appro
prier; et le parlement de Toulouse, en ordonnant un compte de
la succession , a dû croire que le sieur Gineste y porterait les
objets par lui retirés.
f Point du tout ; le compte est présenté en 1791 , et on n’y trouve
ni la corbeille contenant ce qu’on a dit être de l’étain, ni le sac
de papiers, qui devait bien être de quelque valeur, puisque
c’était un don manuel destiné à un légitimaire.
A lors, siins contredit, a commencé le droit des sieurs Daymard et Couderc , de dire au sieur Gineste : Vous ne pouvez plus
être héritier bénéficiaire , puisque vous retenez sciemment un
objet de la succession.
<Dira-t-il q u ’on a conservé l’action en rapport contre l’abbesse?
Ce serait aujourd’hui une chose idéale; mais d’ailleurs il 'a de*
�\» \
( 24 . )
nieuré seul en prise par sa garantie; et en exerçant môme les
droits de l’abbesse, l’action revient à lui.
O r quelle est cette action? Un saisi, qui 11e représente pas,
est condamné à payer la dette lui-même, après un délai de grâce-.
L e sieur Gineste, garant de l’abbesse, doit y être condamné; et
ce sera la même chose que le déclarer héritier pur et simple.
Dira-t-il encore qu’il ne peut pas être tenu à plus qu’il n’a pris?
Ce n’est pas là la question ; car , en sa qualité d’héritier par bé
néfice d’inventaire, il suffit qu’à l’instant actuel on ne voie pas
dans l ’inventaire , ni dans son compte, ce qu’il a retenu, il est
dans le cas de l’art. 801 du Code civil.
Un créancier ne peut pas être astreint à prouver les circons
tances d’un retirement de d ép ôt, qui a eu lieu en 1772. Il suffit
qu’il établisse le Fait matériel de ce retirement; cela lui suffit.
Comment saurait-il même ce que l’abbesse dépositaire ignorait,
et ce que le sieur Gineste eut tant d’empressement de cacher?
Cependant les précautions du sieur Gineste n’ont pas empêché
qu’ une partie de la vérité 11e soit venue aux o r e i l l e s des héritiers
Dnymard et Couderc. Ils ont indiqué quelques-uns des litres qui
formaient le dépôt, et notamment une obligation de 3,400 fr. ,
consentie au sieur M elo n , puis dénaturée par le sieur Gineste:
ils persistent encore à offrir la preuve de ce fait particulier, si la
cour la juge nécessaire.
S’il restait encore quçlque doute à la cour sur cette question,
la plus impartante de toutes, puisqu’elle dispense de juger celles
qui suivent, y a-t-il à hésiter dans l’alternative de faire supporter
une dette sacrée aux dcsceudans du débiteur, ou de faire perdre,
des créanciers légitimes? Une famille, opulente jouit de la suc
cession qui est le gage de la dette ; qt il est bien clair que tout
ce qu'elle relient n’est pas connu. Les D aym .iid, au contraire,
trompés par la Muraillac, plaidant depuis 5o ans pour ravoir,
r.-irgcut qu'ils ont donné, ne cherchent qu’à n’clre p is trompés
encore. N’y eût-il que les articles rejetés par les premiers juges,}
il
*
�il. serait bien;certain aui moins qu’on a cherché à les duper en-*
tout. Alors comment, dans l’incertitude mêm e, la Cour pren-.
drajt-elle sur son compte.de sacrifier J e créancier légitime qui
perdrait évidemment, plutôt que ;l’héritier du débiteur qui ne
peut jamais tout perdre, puisqu’il lui reste la succession?
i.
L a Cour peut d’autant moins se faire scrupule de condamner les
héritiers Gineste à payer la dette des Daymard, que déjà en 1772,
après un semblable com pte, et malgré un déficit considérable,
les Gineste .furent assez sages pour payer le créancier clairvoyant,
qui était plus à portée de révéler beaucoup. Ainsi ce ne sera au-,
jourd’hui que leur rendre la justice que déjà ils se sont rendue
eux-mêmes.
*
f
2. Légitim e de L'abbé Second.
}
L es Gineste ne veulent pas rapporter sa légitime paternelle
et cette résistance ne peut pas étonner : car un héritier bénéfi
ciaire a toujours pour règle exprimée ou sous entendue, qu’il ne
ne doit payer que le moins qu’il peut. Mais il est inconcevable
que les premiers juges aient adopté les sophismes ridicules qu’on'
leur a présentés sur cette question.
Ils sont cependant condamnés par l’arrêt à rapporter deux
choses,
1.0 L a succession bénéficiaire de la Muraillac ;
2.0 L a légitime de l’abbé Second.
Si la légitime était comprise dans la succession bénéficiaire; il
était inutile d’en faire un article à part, et de distinguer aussi
positivement la légitim e.
Les Gineste , tant en leur nom que comme héritiers de l’abbé,
auraient été condamnés à rendre le compte de la succession ma
ternelle. V oilà tout.
A u contraire l’arrêt explique fort bien que la légitime est indé
pendante de la succession bénéficiaire, et les adversaires qui n’ont
4
�r*«x
pas voulu l’entendre en l’an 5 , l'avaient «eperidant fort bien en~'
tendu en 1790.
Car ils avaient donné alors aux femmes Daymard un à-compta
sur cette légitime ; et cet à-compte ne pouvait pas se régler sur
la succession de la m ère, puisqu’ils prétendent qu’elle est obérée.
. Il faut être conséquent avec soi-m ême, et répondre à un di
lemme bien simple : ou les quittances de 1791 sont données sur la
légitime de la mère, ou sur celle du père.
Dans le premier cas, l ’inventaire est faux, et les adversaires
doivent être réputés héritiers purs et simples.
1 Dans le deuxième cas, la question est jugée par eux-mêmes.
Mais un bail de copie du 7 juillet 17 9 1 , va la juger mieux
encore, et voici comment.
Par la quittance de 1790, il avait été payé 5 oo fr. à Marianne
Couderc à compte de la légitime de l’abbé Second, en exécution
de Varrêt du 9 mars 1789, sous réserve de répéter s’il y avait
d’autres quittances excédantes.
r L e 7 juillet 17 9 1 , on signifia à ladite Couderc cette quittance
avec une autre de 700 fr. du 2 octobre 1 j 5z , et on conclut à être
remboursé de 200 fr. payés de trop.
L a cour se rappelle que le testament de 1731 avait fixé pour
légitime paternelle à l’abbé Second 1,000 Fr. ; et voilà pourquoi
les Gineste, ayant payé 1,200 f., disaient avoir payé de trop 200 f.
Ainsi le meilleur interprète de l’arrêt du 9 mai 1789 est le
fait personnel des adversaires, ou l’exécution même de cet arrêt.
Combien d’après cela devient mesquin et pitoyable le motif du
jugement dont est appel, qui excuse cette exécution, en disant
qu’elle a eu lieu par erreur et contrainte, ou en vertu d’un ju
gement provisoire!
Qui a pu révéler aux premiers juges qu’il y avait erreur et
contrainte, lorsque les parties n’ont pas demandé à être restituées
à cet égard? les moyens rescisoires ne peuvent pas être suppléés;
�6 t€ P t
}
Où aurait été la contrainte quand on a payé volontairement, etn
exécution d’un arrêt souverain?
>
L e bail de copie seu l, du 7 juillet 17 9 1, détruit tout cet échaf(
2
7
faudage d’excuses puériles.
S il y avait eu erreur, ce ne serait qu’une erreur de droit con
tre laquelle on n’est pas admis à revenir. Mais ce n’est pas là la
question, car il n’y a pas d’erreur, puisque un an après le paie
ment , 011 n’en conteste que la quotité.
Les premiers juges accusent aussi d’ignorance le parlement
de Toulouse, 's’il avait jugé que l’abbé Second devait rapporter
la légitime de son père, parce que, disent-ils, il aurait fallu l’y
condamner comme héritier pur et simple de sa mère. .
; , Mais sans contredit c’est bien ainsi que le parlement l’a entendu,
et dû l’entendre,
. •
1'
Où ont trouvé les Gineste, qui paraphrasent à leur guise cette
partie obscure du jugement de St.-Flour, que l’abbé Second ne
fût pas héritier pur et simple, par la seule raison que Gineste ne
l ’était pas?
Les qualités d’héritier sont personnelles. L a règle générale est
qu’on soit héritier pur et simple; la qualité bénéficiaire n’est que
l ’exception; mais elle n’atteint que celui qui la réclame.
O r , jamais l’abbé Second n’a voulu être héritier bénéficiaire,
quand dès 1761 Gineste en prenait la qualité. L ’arrêt et la pro
cédure prouvent cette différence avec clarté. Ainsi l’abbé Se
cond , qui a vécu jusqu’en 17 7 7 , est mort héritier pur et simple
de la Muraillac sa mère.
Quelles en sont les conséquences?
- ,
• >
C ’est qu’il a été tenu des dettes de sa mère ultrà vires. C ’est
que toute sa fortune a élé responsable de ces dettes, et par con
séquent sa légitime paternelle a dû y contribuer.
L e parlement de Toulouse n’a donc fait qu’appliquer les prin
cipes les plus élémentaires, en ordonnant que la légitime de l’abbé
Second (qu i était entre les mains des Gineste), serait rapportée
par eux, pour payer les dettes de la Muraillac, et qu’e/z outre,
�( * 8')
¡ les Gineste rendraient compte de la succession bénéficiaire qui
était aussi dans leurs mains.
' ■1
M a is , disent encore les premiers ju g es, l’abbé Second avait
-approuvé la destination de légitime, en donnant des quittances ,
acceptant le titre, et recevant ses revenus en majorité. Il est mort
•sans demander un supplément.
Est-ce qu’une légitime serait approuvée par des quittances
données à com pte?
.
Il est de principe au contraire que le légilimaire n’approuve
-qu’après avoir connu le testament du.père, nisi cogn itis inspeètisque verbis testa m en ti, comme la loi le dit elle-même*
L a coutume d’Auvergne dit qup le legs doit être approuvé
sciem m ent $ et ces lois sont appliquées journellement parla Cour.
Un arrêt du 19 ventôse an 11 a même admis à revenir contre
.-Une renonciation, faite moyennant une légitime conventionnellè,
portée par un testament dont le notaire était indiqué, mais dont
la date n’était pas rappelée. A tte n d u , a dit la C ou r, qu'on n'a
donné connaissance , n i de la fo r m e , n i "des clauses , ni de la
date de P a cte; cet arrêt n’a fait autre chose que l’application
textuelle de la loi, n isi inspectis verbis testamenti.
L ’abbé Second, né en 1729 , émancipé en 1749, plaida aussi*
. tôt avec le sieur Gineste pour avoir la pension qu’il devait payer
au seminaire, et dont le père avait chargé le sieur Gineste.
L a famille délibéra le 7 novembre 1749, qu’il lui serait payé
3 oo fr. par a n , à condition que s’il 11e se contentait pas de la
légitime prom ise, et réclamait (lors de sa majorité) la légitime
, de d roit, il imputerait l’excédant de l ’intérêt, s’il y avait lieu, sur
.le principal de cette légitime.
En 1750, le sieur Gineste fit à Pleaux un titre clérical de 80 1.
par an à l’abbé Second , qui habitait Paris.
Mineur et absent, lors de cet acte, il n’a pas fait sans doute
d’acceptation légitime. Aussi ne veut-on la trouver que dans lis
quittances postérieures.
�. „
e .
( 29 ) , .
..
...................
On produit deux lettres et deux reçus de 17S0 et 1 7 5 r. Mais
nulle part on ne voit d’approbation de légitime; tout est donné à
compte.
.
Les reçus de 17Ü0 sont à compte de la sentence qui a con
damné Gineste à payer 3oo fr. par an pour la pension du sémi
naire; ne voilà donc que des revenus.
Aussi on n’a excipé, lors du bail de copie de 1791, que d’une
seule quittance du 2 octobre 1752, de 700 fr. que l’abbé promet
passer à com p te, sans dire même que ce soif sur sa légitime.
-De 17ÎÎ2 jusqu’à son décès en 17 7 7 , il n’y a plus de quit
tances; ainsi non agnovil judicium defuncti. .
_
L ’action en partage dure trente ans utiles. L ’abbé Second a
été majeur le 24 septembre 1754 ; par conséquent il ne s’est
écoulé jusqu’à son décès, au a i avril 1777, que vingt-deux ans
six mois et vingt-huit jours de prescription.
Par la règle, le mort saisit le v if, les Gineste ses héritiers
ont à l’instant été substitués à ses obligations dans toute leur
étendue; eux seuls ont dû faire face, vis-à-vis les Daymard et
Couderc, à tout l’objet de leurs demandes.
Ces demandes étaient pendantes en 1777 contre l’abbé Se
cond et contre les Gineste; il y a eu reprise, et ¡’arrêt de 1789 ,
en ordonnant contre les Gineste, qu’ils rapporteraient la légitime
de l’abbé Second aux créanciers exerçant ses droits, a voulu
qu’elle fût rapportée télle qu'elle était due, sans ordonner qu’elle
serait j-éduite à 1,000 fr. ou à 3oo fr., puisque les Gineste n’eu
avaient jamais élevé la prétention.
L ’arrêt de 1789 , par cette disposition, et par celle du compte
de la succession M uraillac, n’a donc fait que prononcer une con
damnation générale , mais indéterminée, parce qu’il ne s’agissait
alors que de régler les points de droit; le montant de la légitime,
comme le montant du compte, devaient être également inconnus
au parlement de Toulouse , lors de son arrêt. C ’était aux Gineste
à faire face à U double condamnation prononcée contre eux, en
l ’exécutant.
�-c 3 ° )
Jusqu’ici, donc l’arrêt de Toulouse a demeuré sans exécution
en cette p a rtie lle s adversaires se sont contentés de signifier un
compte infidèle. Mais ils ne peuvent pas se dispenser d’obéir,à
la chose jugée. Ils doivent, on le répète, rapporter la légitime
paternelle de l’abbé Second, et cette légitime ne petit être qu’un
6.e de la succession en meubles et immeubles, sauf la déduction
de 70g fr. sur les revenus, puisque l’abbé Second est mort sans
avoir rien approuvé.
3 . G ains n u p tia u x de la veuve Second.
L e s adversaires, après avoir offert 5 oo f r . , veulent réduire cetl»
somme à un tiers.
Il est vrai que les principes du droit écrit ont sur cette ques
tion une disposition particulière.
Par les lois du code, les gains nuptiaux étaient propres au sur
vivant. L a novelle 2 , chap. 2, ne lui en laissa que l’usufruit. L a
novelle 22 , chap. 20, lui en rendit la propriété, sauf le cas des
secondes noces. L à novelle 98, chap. i . er,a rétabli la novelle 22,
et enfin la novelle 12 7 , chap. 3 , a laissé au su rvivant non r e
marié une portion virile en propriété, et l’usufruit du surplus.
Quoi qu’il en soit de celte variation , et sans examiner si cette
dernière loi a d’aulre but que d’empêcher le survivant de faire
entre ses enfans une disposition inégale d’une portion des biens
' de l’autre époux, il y avait, dans l ’espèce/dérogation expresse ù
' la nature du gain de survie.
Car dans le contrat de mariage de 1720, il y a donation des
5oo fr. pour être propres dès à présent à la future; elle a donc
été saisie dès l’instant mêm e, et propriétaire de cette somme.
Mais admettons pour un instant que les adversaires eussent
droit de réduire nu tiers les 5oo fr. de survie, promis par Gas
pard Second à la dame Muraillac sa veuve.
S’ils ont eu ce droit, ils l’ont perdu par leurs conclusions
admises en jugement.
4
k
�( 3. r
Car non-seulement'lés adversaires ont offert celte «oirime de
5 oo fr. dans leur compte ; mais elle est aussi dans le jugement
par défaut du 14 pluviôse an 5 , avec des motifs très-détaillés.
O r , comment les premiers juges ont-ils pu corriger un juge
ment par défaut, dans une partie dont l’opposant ne se plaignait
pas? C’était se réformer soi-même, et reconnaître qu’une ques
tion de droit avait été mal jugée la première fois.
Cette prononciation de mal jugé était au-dessus du pouvoir des
premiers juges.
4 , 5 , 6 . Jou issan ces des fidéicom m ls et quarte trébel¿¿a n i que.
L a dame Muraillac avait droit de jouir comme héritière fidéi-,
commissaire des biens de son époux jusqu’à son décèsj on ne le
lui dispute pas.
Mais on prétend qu’elle a remis l’hérédité sans rien réserver y
et que cette remise ne lui a laissé aucun droit de jouissance.
Cela serait v r a i, si la remise eût été volontaire; mais la veuve
Second ne fut forcée de ne pas jouir que par l’usurpation du sieur
Gineste, avec lequel elle plaida toute sa vie. Après le testament
de son m ari, qui la fit héritière fidéicommissaire en 17 3 1, elle
remit l’hérédité à sa fille en 1737, et cela pour elle.
;
Redevenue héritière en 1744, par le testament de sa fille, elle
voulut reprendre les biens, mais le sieur Gineste s’y opposa.
Les appelans ont excipé devant les premiers juges d’une signi
fication qu’elle fit en 1746, du testament de 1744, pour deman
der qu’il fût exécuté à son égard. O r , peut-on se faire un titre
contr’elle de l’impossibilité où elle fut de jouir.
On objecte que, d’après l’article 36 de l’ordonnance des subs
titutions, elle est réputée n’avoir jamais accepté le fidéicommis.
Mais cet article même ne dit pas qu’il faut jouir pour accepter;
mais qu’on est censc accepter, soit par la possession, soil par,
des demandes.
�• ni
■
\ ' *!
( 32 )
‘
On dit que la veuve Second ne fut qu’he'ritière fiduciaire de
sa fille. Mais la principale distinction du iiduce, d’après Peregrinus et Henrys , est quand le fidéicommis doit être remis in
diem cerlum , et quand on prohibe la distraction de quarte.
Tout cela n’a pas eu lieu dans le testament de 1744.
D ’ailleurs, autre chose est le iiduce , autre chose est le legs t
personnel des fru its..
Comment admettre, sans injustice, que le sieur Gineste, détempteur de revenus quelconques, appartenant à sa belle-mère, _
ait pu les retenir en refusant de payer ses dettes ?
Tout est rigoureux contre l’héritier qui veut séparer les pa- •
trimoines ; et il n’est pas juste qu’il .distraye la moindre chose
de l ’actif qui doit faire face à la d ette, pour le laisser dans le
patrimoine qui ne doit pas y contribuer.
Quant à la quarte trébellianique, elle appartient de plein
droit à tout héritier testamentaire chargé de rendre , d’après
les titres du Digeste : A d sénat. Treb.
Il
ne doit se prendre qu’ une seule quarte sur les cinq sixièmes'
de l a s u c c e s s i o n île Gaspard Second, a d v e n u s à M a r i e - J e a n n e
Second, femme Gineste; et ce, en vertu du testament de 1744,
parce qu’elle fut prohibée par celui de 1781.
On oppose qu’elle rie peut se prendre par l’héritier fiduciaire,
mais les auteurs enseignent que ce n’est qu’au cas que la charge
de rendre soit à jour certain, et non de rendre au décès.
( D espeisses. t. 2, p.
338 , n.° 14).
Les Gineste opposent cju’elle ne se cumule pas avec les jouis
sances. Ils ont raison.
Mais ils disent eux-mêmes que Marie Muraillac n’a joui que,
d’une maison, jardin et grange. Ainsi il est question de savoir
si ces objets excèdent le quart de la succession ; eu ce cas , il est
juste q u ’en lui donnant la quarte trébellianique comme proriété distincte, à compter du décès, 011 déduise la portion des
jouissances qui excéderaient cette quarte ajoutée à sa succession.
7'
�( 33 )
*
7. La-pension due par le couvent d'Argentac.
1 En achetant un pré de Marie Muraillac, les religieuses d ’A rgentac donnèrent un écrit, par lequel elles s’obligèrent de nour
rir une demoiselle , présentée par elle , pendant trois ans. Cet
écrit, resté dans la succession, était une créance.
Mais le sieur Gineste, qui a gouverné la succession bénéfi
ciaire à sa guise, et anirrio dom ini, a donné aux religieuses ,
en 1770, un é crit, par lequel il reconnaît, sans autre explica
tion , et sans époque, que cette promesse est acquittée.
Cette manière d’agir avait même été une des raisons pour les
quelles on avait offert preuve d’adition en 1770. Mais dès que
le parlement n’y vit pas un acte d’héritier, il reste au moins le
'droit de demander aux Gineste le paiement de cette valeur.
Si la promesse eût été acquittée avant 1 7 6 1 , les religieuses
n’auraient pas manqué de la retirer, ou de prendre quittance.
L e sieur Gineste , qui a voulu la donner, a donc pris cela sur
son compte, comme v i s - à - v is l’abbesse de Brageac. On voit
bien qu’il a voulu par-tout éviter les révélations; mais y auraitil de la justice, dans l ’incertitude même, de le dispenser dû
paiement ?
8 et 9. Articles de dépense.
L e tribunal de Saint-Flour a rayé les articles 1 , 2, 8, 4 , 5 ,
0, 9, 10 et 11 de la dépense du compte , rendu par les adver
saires en 20 articles.
Est-ce la preuve de la fidélité de l’héritier bénéficiaire ? Et ne
faut-il pas ajouter cette remarque aux moyens de déchéance?
• Il faut répéter aussi que le parlement de Toulouse n’a pu
juger la qualité de bénéficiaire que pour le passé, et qu’il 11e
savait pas en 1789 , si le#compte serait rendu avec sincérité eu
1 7 9 1,
. . . .
i
$
�to .
M obilier de M arie
M aràillac.\
\
\
Il
a été inventorié en 1761 ; mais les premiers juges n ’ont
voulu le faire composer que de ce qui restait dans cet inven
taire , après la distraction du mobilier délaissé par Gaspard Se
cond , en 1 7 3 1 , parce qu’ils ont ajouté foi à l’allégation des ad
versaires, que Marie Muraillac en avait demeuré nantie.
Cependant on voit dans le contrat de mariage de la dame
Gineste, du
5 novembre 17 3 7 , que Marie Muraillac sa mère,
lui remit tous les meubles et effets de Gaspard Second, inven
toriés en 1731. Donc voilà la preuve écrite q u ’elle n’en retint
pas la possession.
On oppose que lors de ce contrat, ët par une contre-lettre,
le sieur Gineste son gendre, lui donna pouvoir de les garder,
ainsi que des immeubles ; mais que cette contre-lettre ne se
trouve plus.
Comment le sieur Gineste , qui conserva tant de papiers ,
laissa-t-il perdre celui-là ? ou plutôt comment avait-on eu idée
de faire une contre-lettre nulle et parfai tement in ut ile , puisque
rien n’obligeait de fa ir e , par contrat de m ariage, une remise
de mobilier, si on voulait aussitôt la révoquer?
A u reste, c’est là un point de fait à vériiier; et les appelans
ne veulent rien qui ne soit juste.
Mais aussi ils rte veulent pas s’en rapporter aveuglément à ce
que le sièur Gineste a fait faire en 1761, sans les appeler.
Quela Courveuille bien prendre la peine decomparer les deux
inventaires ; et si les articles , ' qu’on peut dire ressemblans, lui
semblent identiquement les m êm es, les appelans s’en rapportent,
•avec confiance, à sa conviction sur ce chef néanmoins impor
t a n t , de la contestation.
!
DÉP ENS.
Les héritiers Gineste ont porté en compte de dépense ceux
qu’ils ont faits au parlement de Toulouse.
�f ( 3S ) )
Ils réussirent à ne pas y êlre condamnés en leur nom person
n e l, quoique déboutés de leurs diverses demandes en péremp«
tion, et de celles en rçnvoi. Mais alors on ne connaissait n i la
garantie donnée à l’abbesse de Brageac, ni l'acquit de pension
donné au couvent d’Argentac , ni la contre-lettre du.sieur: Chantegrie , ni les nombreux articles rayés, que le sieur Gineste avait
■projet de s’adjuger; il put paraître alors.,'sinon .en bonne fo i,
au moins pas assez convaincu de mauvaise foi en sa qualité d'horitier bénéficiaire.
• • ‘ r/< -«V. ; if
S ’il est déchu du bénéfice, comme tout le prouve, son compte
de dépense s’évanouit tout entier. Mais s’il ¿tait possible que la
Cour ne le jugeât pas ainsi, au moins les dépens, faits depuis
1780 jusqu’à présent, doivent-ils être supportés par les adver
saires personnellement.
i
Ce n’est pas tout de les réserver sous prétexte d’une estima
tion relative à un seul article. Car le compte n’en sera pas moins
fixé pour tous les autres , et n’y eût-il que la radiation de neuf
articles sur vin g t, ou plutôt sur d ix-hu it , c’en est assez pour
convaincre la C o u r , que les adversaires ont élevé de mauvaises
contestations ; et dès-lors faire condamner les adversaires aux
dépens , en leur nom p erso n n el, dès à présent.
L ’article de la légitime de l’abbé Second l ’exige seul. Car il
est l’objet sur lequel les adversaires ont le plus raisonné, le
plus contesté, et chicané avec le plus" d’opiiiiâtreté. C ’était en
effet l’article le plus im portant, car il sulïira pour remplir
les condamnations en garantie dues aux appelans. L ’arrêt de
1789 l’avait placé le premier en ne considérant le compte à
rendre que comme un subsidiaire. A in s i, la Cour, en jugeant
que les adversaires ont mal à propos contesté en cette partie
l ’exécution de l’arrêt, leur fera supporter sans difficulté tous les
dépens déjà faits, et même réglera ceux de l’exécution du nouvel
arrêt, comme il se pratique en matière de partage; tout au plus,
est - il vraisemblable, qu’elle réservera les dépens de cette exé
cution seulement.
11.;
�( 36 )
L es héritiers Daymard et Lacroix se flattent de n'avoir rien
proposé qui ne soit fondé, et sur-tout qui ne soit équitable.
L eu r position , dans ce procès , est faite pour appeler la rigueur
de la Cour contre une famille qui leur conteste depuis si longtems le paiement d’une créance , que par honneur elle eu t dû
payer depuis quarante ans. Q u ’elle jouisse, si bon lui semble ,
du privilég e des lois., il faut bien le souffrir; mais que la succession débitrice soit dissimulée, affaiblie, dénaturée même par
trois générations successives, c’est ce que la Cour ne souffrira
■
certainement pas. Car la bonne foi est de première nécessité
pour tout le m on d e, même pour ceux qui n’attachent pas de
;prix à respecter les engagemens de leurs auteurs.
M
'
.
j
e
DELAPCHIER,
A v o c a t.
M . e D E V È Z E , L ic e n c ié -A v o u é .
. 1
A
RIOM ,
D E L ’IM P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daymard, Marie. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
successions
saisie
rentes
censive
Ursulines
Parlement de Toulouse
experts
quarte trébellienne
comité de législation
inventaires
dissimulation de titres et obligations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Marie Daymard, veuve Lacroix, et Marianne Couderc, femme de Durand-Rieux, appelantes; Contre Emeric, Marie, Marianne Gineste et autres, intimés.
Table Godemel : Inventaire : 2. Quels caractères doivent avoir les omissions faites dans un inventaire, par l’héritier bénéficiaire, pour entraîner contre lui la déchéance de cette qualité et le faire considérer comme héritier pur et simple ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
1720-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1824
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1823
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53351/BCU_Factums_G1824.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pleaux (15153)
Aurillac (15014)
Brageac (15024)
Bourg-Argental (42023)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
censive
comité de législation
Créances
dissimulation de titres et obligations
experts
inventaires
Parlement de Toulouse
quarte trébellienne
rentes
saisie
Successions
Ursulines
-
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9d59509a7fbfdd842fe250799975c1fd
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
M a r i e D A Y M A R D , v e u v e L a c r o i x , et M a r i a n n e
C O U D E R C , fem m e de D U R A N D - R i e u x ,
appelantes;
C O N T R E
E m e ric, M a r i e , M a r ia n n e
G IN E S T E et a u tr e s ,
intimés.
L A
famille Gineste fait plaider les héritiers Daymard et Cou-
derc, depuis cinquante ans, pour obtenir le recouvrement d’une
créance qu’elle ne conteste pas , mais qu’elle ne veut pas payer.
Un arrêt souverain donne à ces créanciers deux gages plus que
suffisans; c’est-à-dire, la légitime d’un oncle, dont les adver
saires sont héritiers, et la succession bénéficiaire de leur aïeule.
Mais si on en croit les héritiers Gineste, ces deux gages se ré
duisent à un se u l, lequel se réduit à rien; car ils veulent que la
légitime n’existe pas , et que la succession bénéficiaire soit ab
sorbée pour leurs reprises.
x
�Ces prétentions ne devraient pas être bien longues à combattre
api'ès un arrêt; mais comme les juges de Saint-Flour se sont
permis d’ infinner cet a rrê t, sous prétexte de le commenter, il
est nécessaire de rappeler l’origine de la contestation, et quel
était son état lors de l’arrêt qu’il s’agit aujourd’hui de faire
exécuter.
F A I T S .
L e 7 juillet 1741, Marie Duvel de M u ra illa c, veuve de Gas
pard Second s de la ville de P le a u x , acheta du sieur Montesquiou de Saint-Projet , diverses rentes et censives, moyennant
6,124 fr.
Elle les revendit à Joseph Daymard et Jean Couderc, auteurs
des appelantes, le. 10 janvier 1706, moyennant 6,674 fr*
Quand les acquéreurs crurent se mettre en possession des
objets vendus , ils trouvèrent un fermier judiciaire qui leur
apprit que la terre de Saint-Projet était en saisie réelle au par
lement de Toulouse.
Ils se pourvurent pour obtenir la distraction des objets vendus,
ou une indemnité, et assignèrent leur venderesse en recours.
L ’arrêt d’adjudication ou J°rdre ne leur accorda rien, et les
laissa seulement à faire valoir leur garantie contre la veuve
Second.
*r Ils étaient en cause contr’elle , en 1761 , lorsqu’elle m o u ru t,
laissant pour héritiers Jean Second son-fils, prêtre, et les enfans
4
de Marie-Jeanne Second sa fille, mariée on 1787, au sieurEmcric
Gineste, juge à Pleaux.
Eineric Gineste, qui avait plaidé jusqu’alors avec sa bellemère et avoc son beau-frère, s’empara de tout; et néanmoins
il déclara, pour ses enfans, qu’il n’entendait se porter héritier
que sous bénéfice d ’inventaire. Il présenta une requête , fit
donner une simple assignation à son beau-frère qui habitait
Paris, et une assignation a cri public ù tous prétendans droit•
puis il lit dresser un inventaire comme il lui plut.
�C3)
. ' L e mobilier en évidence lui parut trop conséquent; et pour
en distraire la majeure partie, il produisit au juge l’inventaire
de son beau-père mort en 1781, pour prétendre que tous les objets
de même nature, inventoriés en 1781, devaient être retranchés de
la succession M uraillac; puis, ayant mis ordre à tout, il atten
dit la poursuite des Daymard et Couderc.
Ceu x-ci assignèrent en reprise, les i . er et 20 décembre 1764,
tant l’abbé Second, que le sieur Emeric Gineste père, et Pierre
Gineste, son fils aîné, majeur. ( NoLa. Marie-Jeanne Second et
Emeric Gineste avaient eu trois enfans ; Pierre, marié à Fran
çoise Delzor; Marguerite, qui a épousé un sieur Feneloux , et
Marianne).
Ils apprirent, i.° que la dame Muraillac , avant son décès,
avait déposé des effets chez la d am eD hauzers, abbesse de Brageac, et chez les ursulines d’Argentac, sous prétexte de les des
tiner à l’abbé Second , son fils, victime de la chicane de son
beau-frère; 2.° qu’elle avait vendu une maison au sieur Chantegrie-Lavigerie ; et pour en dénaturer le p rix , dont l’acte por
tait quittance, elle s’était fait consentir une obligation, dont le
sieur Gineste fils s’était emparé.
E n conséquence, ils firent des saisies-arrêts dans les mains
de tous ces débiteurs de la succession.
Nous verrons bientôt comment Pierre Gineste enleva des
titres précieux déposés chez l ’abbesse de Brageac, et qu’ il redou
tait singulièrement de laisser connaître. Pout-être chercha-t-il
à en faire autant chez les religieuses d’Argenlac; mais soit qu’il
n’y parvînt p a s , soit de concert avec elles , elles firent vendre ce
mobilier en place publique, on y appelant seulement Gineste
père et lils ; et la vente, frais déduits, produisit 96 liv. 7 sous
5
2 deniers.
Quant à la dette de Chantegrie, les Gineste se voyant décou
verts , avaient pris une autre tournure; au moyen de quelques
créances trouvées clans la succession , et auxquelles ils s’étaient
fait subroger, ils avaient ouvert un ordre, lors duquel ils
�( 4 3
se firent colloquer pour 1,742 francs, par sentence de 1765.
A in s i, par une main-mise générale, et par des manœuvres en
apparence régulières , mais qu’on ne révélait aux Daymard et
Couderc qu’à mesure qu’ils faisaient des découvertes , les
Gineste préparaient un long procès à des créanciers simples
et de bonne foi.
>
Cependant ces créanciers, convaincus de jour en jour que
toutes les démarches des sieurs Ginesle étaient une fraude diri
gée contr’e u x , conclurent, par requête du 11 mars 1 7 8 5 ,^
être reçus à prouver que postérieurement à 1770, Pierre Gineste, fils d’Emeric (décédé alors), avait fait acte d’héritier
en vendant des objets de la succession , et payant des dettes :
subsidiairement ils conclurent à ce qu’il rendît compte du
bénéfice d ’inventaire.
E n 1786, ayant appris que l’abbé Second était décédé, ils
conclurent à la reprise contre les Gineste en qualité de ses
héritiers; et on voit dans un mémoire du
juillet de la même
année, qu’ils y observent que l ’abbé Second est mort créancier
de sa légitime paternelle et maternelle, et que les Gineste doi
vent la rapporter pour faire face à la dette de la Muraillat.
On voit bien une réponse à ce mémoire de la part des G i
neste, sous la date du 29 août 1786; mais on n’y a pas remar
qué qu’ils aient trouvé une seule objection à faire contre cette
demande de la légitime paternelle de l ’abbé Second.
On a élagué de cette procédure toutes les chicanes et conclu
sions de forme des Ginesle , qui, à chaque suspension deproce
dure, commandée par plusieurs décès successifs des parties et
des procureurs, et plutôt par le besoin de surveiller leurs dé
marches , ne manquaient pas de demander des péremptions,
sur-tout lorsque le tems de la prescription fut venu; et quand
ils n’y réussissaient pas, ils demandaient leur renvoi de T o u
louse à A u i'illac, pour rendre commun aux Daymard un compte
bénéficiaire qu’ils y avaient présenté en 1 7 7 2 , à un créancier de
210 francs.
�(5 )
C ’est en cet état que fut rendu au parlement tle Toulouse , sur
productions respectives , entre les parties , et par défaut, contre
les tiers saisis, le 9 mars 1789 , lin arrêt qu’il faut mettre en son
entier sous les yeux de la co u r, puisque les difficultés princi
pales qui s’élèvent aujourd’hui, naissent de son exécution.
» Notredite Cour..........démet ( les Gineste ) des demandes
« à ce que l’instance soit déclarée périmée. . . . . ; condamne
« lesdits Delzor (ve u v ed e Pierre Gineste) , Parlange (tuteur),
« Feneloux et Marguerite Gineste mariés , en leurs qualités
« d'héritiers de Joseph S e co n d , fils de ladite Duvel de M u
te ra illat, et oncle maternel dudit Pierre Gineste , à p a ye ra u x « dits Daymard et Couderc, à concurrence de la légitim e duv dit Joseph S e co n d , la valeur des renteà vendues à leurs pères
« par ladite Duvel de Muraillat, par l’acte du xo janvier 1766,
«
k
«
«
«
«
suivant l ’estimation qui sera laite desdites rentes, de l’autorite de noire Cour, relativement à l’époque de l ’éviction, par
experts , avec les intérêts le'gitimes de ladite valeur , qui
seront fixés par lesdits experts..........et demeurant la déclaration fa ite par ledit fe u P ie r r e -J e a n G ineste devant les
ordinaires de Pleaux ; qu'il n'a accepté, en qualité de tuteur,
« la succession de ladite D u v e l son aïeule , que sous bénéfice
« (£inven taire, et recevant la répudiation de ladite succession,’
« a ordonné et ordonne q u ’à concurrence des sommes dues aux-’
« dits Daymard et Couderc, tant en capital, intérêts que dé« pens , ladite Delzor et ledit Parlange seront tenus, chacun
« comme les concerne , de rendre com pte auxdits Daymard et
« Couderc , de tous et chacun les meubles et effets mobiliers
« qu’ils ont reçus, provenans de la succession de ladite Duvel
« de Muraillat , ensemble des fr u its , intérêts et jou issa n ces
« jusqü’à cejourd’h u i, tant desdits meubles et effets que de tous
« autres biens par eux possédés, et dépendans de ladite succes« sion , suivant l’état que lesdits Daymard et Couderc en don« lieront, sauf les impugnations et exceptions de droit ; comme
« aussi ordonne que lesdits Parlange et Delzor seront tenus en
�(6 )
« leurs dites qualités de rendre compte de toutes ef chacunes les
k sommes , que lesdits Daymard et Couderc justifieront avoir
« été payées par ladite Duvel de M uraillac, à la décharge de
« l ’hérédité de Gaspard Second , et deles rembourser, le cas y
« échéant ; et déclarant les défauts pris contre lesdits Chantegrie« Lavigerie, les religieuses de Ste.-Ursule d’Argeutac, l’abbesse
« du couvent de.Brageac, et Jean Tillet tous bancaires, bien
« poursuivis et entretenus; ordonne qu’ils remettront, chacun
« en droit soi, auxdits Daymard et Couderc, les sommes en leurs
« mains bannies, à la requête de ces derniers, et ce, à concur« rence des sommes capitales, et que pour le surplus desdits
« banimens , lesdits banitaires en demeureront dépositaires
« jiiSQU d L apurement du compte d rendre,* comme aussi dans
« le cas que les sommes qui seront délivrées auxdits Daymard
« et Couderc ne seront pas suffisantes pour remplir le montant
« des condamnations prononcées en leur faveur par le présent
« arrêt ; leur permet d eJaire sa isir , d’autorité de notre C ou r,
«
«
«
«
u
a
les'im m eubles et autres o b je ts , qu’elles découvriront être1
dépendant de la succession de ladite Duvel. Sur toutes autres
demandes, fins et conclusions desdites parties, les a mises , et
met hors de cour et de procès ; condamne lesdits Delzor et
Parlange, comme procèdent, au x dépens de V in stan ce, envers lesdits Daymard et Couderc , taxés à
1 fr. i g s.
23
L a première opération, faite en exécution de cet arrêt
fut'
l ’eslimation des objets évincés. L e rapport des experts , en’
date du 22 février 1790, les évalue à 7,526 IV. 10 s. à quoi
ils ajoutent les intérêts de 1756 à 1782, fixés a 10,998 f. 17s. 9 d.
de sorte que la créance des sieurs Couderc et Daymard , à ladite
époque de 1782 , a été reglée à 18,624
7 s ..9 d.
Ce rapport a été homologué par un 2.e arrêt du o avril 1790.'
3
L e 19 janvier 1791 i après la suppression du parlement de
Toulouse, les héritiers Gineste assignèrent les héritiers Couderc
et Davmard devant le tribunal du district de Salers pour pré
senter le compte ordonné ; c’est ce compte qu’ il s’agit de dé
�(7 )
battre, et sur lequel il ne faut pas méditer lo n g -te in s , pour
s’appercevoir que de pre'tendus héritiers bénéficiaires s’efforcent
d’expolier un créancier légitim e, en ne révélant que ce qu’ils
ont cru le plus en évidence.
Avant de parler de ce co m p te, disons un mot de la position
de la dame Duvel de Muraillac , à son décès.
Mariée en 1720, elle eut pour oo fr. de bagues et jo yaux,
5
ou augment.
Elle fut héritière fiduciaire de son m ari, par testament de
1731 ; mais légataire personnelle des revenus.
Elle fut héritière fidéicommissaire de Marie-Jeanne Second,
femme d’Emeric Gineste, sa fille, par testament de 1744 , et
encore légataire personnelle des jouissances.
Elle f u t , pendant longues année?, fermière de Pleaux ; et
çlle passait pour la personne la plus aisée de l’endroit.
Elle laissait en immeubles plusieurs vignes et une terre de
deux septerées, plantée en châtaigniers.
Elle avait vendu un immeuble au sieur Lavigerie : le contrat
portait quittance ; mais il y avait une contre-lettre. ( No t a. U n
créancier en eut connaissance, força le sieur Gineste à rapporter
la somme : ce'qui donna lieu à l ’ordre dont on a déjà parlé ).
Elle avait vendu un moulin aux religieuses d’Argentac; et,
par une contre-lettre, ces religieuses s’étaient obligées de nourrir,
pendant trois ans , une demoiselle que devait envoyer la dame
de Muraillac. Cette contre-lettré était encore dans les papiers
de sa succession.
Enfin, comme on l’a déjà dit, elle avait fait, peu de tems avant
sa mort , 1111 dépôt de papiers et d ’argenlerie entre les inains
de l’abbesse de Brageac, pour remettre à l ’abbé Second son fils,
L e s r. Gineste n’avait pas eu plutôt connaissance de ce dépôl, qu’il
avait couru a l’abbaye de B ra geac, pour le réclamer. Juge de cette
abbaye , il dut persuader ou épouvanter une religieuse simple et
scrupuleuse, qui craignit d’avoirparu favoriser uulégitimaire, au
�(8 )
préjudice de l'institué. Comment d ’ailleurs s’exposer à uil procès
contre le sr. Gineste, juge, a vo cat, et qui passait sa vie à plaider?
L ’abbesse de Brageac devait faire valoir une saisie-arrêt faite
entre ses mains par les sieurs Daymard et Couderc ; mais le
sieur Gineste leva encore cette dilïiculté, en donnant une ga
rantie à l’abbesse de Brageac , et se soumettant à représenter le
dépôt aux créanciers.
Cette dernière particularité ne fut connue des sieurs Dnymard et Couderc, qu’après l ’arrêt de 1789, par une opposition
que fit l ’abbesse de Brageac, le 11 septembre 1790, à l’exécution
dudit arrêt, commencée contr’elle à leur diligence.
Cependant ils gardèrent le silence sur cette révélation, pour
savoir si les Gineste comprendraient dans leur compte ces objets
non inventoriés, ou s’ ils auraient l’infidélité de les taire.
Il ont eu cette infidélité.
L e compte rendu est divise' en trois chapitres de recette 7 èt
un chapitre de dépense.
3
L e i . er chapitre de recette n’a que articles.
I . er A rticle: 100 fr. pour le mobilier de la dame de Muraillac,
parce q ue, dit-on, il a f a l l u distraire de son inventaire, fait en
1 7 6 1 , le montant de celui du père, fait en 1781 , par la raison
q u ’elle avait retenu ce mobilier, en vertu du testament de 1731.
Article : oo fr. pour les bagues et joyaux de ladite M u
5
raillac. ( N ota. Les Gineste ont jugé à propos, après avoir fait
régler l’article à cette somme, par un jugement par défaut, de
réduire l’article à 66 liv. 12 sous 4 deniers , en disant que leur
mère n’avait droit qu’à une portion virile de ses propres reprises ).J
3 .e Article .*400 fr.
pour tous les arrérages de la ferme de
Pleaux, touchés par eux api'ès sa mort.
1
a . e Chapitre de recette, un seul article,
Composé des immeubles de la succession. Il n’est présenté
que pour mémoire.
.e Chapitre de rece tte, un seul article.
3
Des jouissances desdits immeubles depuis 1761 jusqu’à '1790«
à
�(9 )
• à 20 fr. par a n , attendu que l ’évalution dans les rôles ne porte
le produit net qu’à 11 fr. ; c’est, pour 29 ans. . .
o 1.
s*>
>Chapitre de dépense, 20 articles;
58
i . ° Reprise sur le mobilier...................................900
3
2.0 et .° L e sieur Gineste est créancier person
nel d e ................. ... ..................................................... .
<708
4.0, .®et 6.° Il est créancier, pour legs fait à
Marie-Jeanne Second, par Jeanne Muraillac , de
7 .0 Frais de maladie et enterrement.....................
546
114
8.° Frais de scellés , inventaire , requêtes,
exploits et affiches .......................................................
90
5
i
3
9.0 Pour valeur d'immeubles paternels, vendus
à M e d a l , par la Muraillac.................... ............. ... . 1,000
io.° et i i .° Payé au sieur L anglad e, ou gardes
baillistes de Saint-Projet, et frais . . . V ..............1,224
12.0 Payé à Etienne Boyer, créancier.................
3
1IO
1 .0 Pour frais faits contre ledit Boyer , pour
lui rendre compte du bénéfice d’inventaire . . . .
60
14.0 Pour impôts de iy 5g à i 7 7 i , o u pour in
térêts d’une créance Lacoste......................................
97
14
i .®Plus, au sieur Bastide, créancier d’un billet.
174
16
5
16.0 Plus , au sieur Vaissière , créancier d’un
billet . ............................................................................
144
17 .0 P lu s , à l’abbesse de Brageac, pour pro
messe du 26 mai 1761...................................................
72
18.0 Plus, au sieur Biard , créancier par sen
tence de 1742 , ............................................................
201
17
ic).° Pour les dépens auxquels Sont condamnés,
par l’arrêt de 1789...................................................... ...
23i
19
20.0 Pour les frais du présent compte.......................96
�( IO )
D ’où il suit que la dépense excède la recette de 4,191 //V:
6 den.; et les Gineste en concilient qu’ils doivent être renvoyés
de la demande (1).
5
Ce compte fut débattu par requête du novembre 1791; et
indépendamment de la critique faite aux articles ci-dessus, les
sieurs Couderc et Daymard firent un chapitre d ’omissions com
posé de
articles ;
i .° Pour la somme touchée par le sieur Gineste,
du sieur Chantegrie , acquéreur de la Muraillac . . . 1,782 .
5
1
2.0 Pour les trois ans de nourriture due par l ’ab
baye cVArgeutac , et dont Gineste avait donné ac
1,200
quit en 1 7 7 0 .................... .................................................
.° Pour valeur du dépôt retiré de l ’abbesse de
Brageac..................................................." . .......................... 10,000
4.0 Pour dix-sep t années de jouissances que lu
3
Muraillac avait eu droit de toucher des biens de
son mari, en vertu du testament de 1744, et dont
Gineste s’était emparé; la succession valant 80,000 fr. 34,000
.° Pour la quarte trébellianique qu’elle avait eu
droit de retenir sur ladite succession , d’après ledit
testament.............................................................................. 20,000
5
Par la même écriture, les sieurs Daymard et Couderc obser
vèrent que la légitime de l’abbé Second , dont les adversaires
sont héritiers , aurait dû être fixée ; et que comme il a recueilli
un sixième dans les biens de Gaspard Second , son p ère , il s’agit
de représenter ce 6.e pour faire face aux condamnations de l’arrêt
de 1789. En conséquence, ils indiquèrent les immeubles devant
servir à composer ladite légitime,
(1) E n 1772 » Gineste avait présenté un semblable compte à Etienne
B o y e r , d éno mmé aux articles 12 et i 3.
*
Al ors la dépense excédait la recette de a,304 fr. seulement.
Etienne Bo y e r n’ en a pas moins su se faire p a y e r , comme le prouvent
Icsdils
12
art.
et j3.
�•.
( 11 )
Ils conclurent, en conséquence, à ce que, sans s’arrêter au
compte frauduleux, présenté en 1790, les adversaires fussent
condamnés en leur nom.
Subsidiairement à ce que les adversaires fussent tenus de con
tester , dans la huitaine , la composition de la légitime de l’abbé
Second, sinon la déclarer suffisante, et condamner les adver
saires à en payer le montant, en exécution de l’arrêt ; sauf, en
cas de contestation , à faire estimer la succession.
Et en ce qui touche la succession bénéficiaire, et audit cas ,
à ce que les chapitres fussent réglés aux sommes ci-dessus , et
les adversaires condamnés aux dépens, sous réserve de pour
suivre les tiers-saisis , et dô faire saisir les immeubles , en con
formité de l’arrêt.
Les adversaires répondirent à ces débats par une requête du
16 mars 1792 ; et persistant dans leur compte, ils s’attachèrent
principalement à soutenir que l’arrêt de 1789 ne soumettait
au payement de la créance Daytnard et Couderc , que la le'gitimc maternelle de l’abbé Second.
Subsidiairement ils prétendirent qu’ il avait accepté la desti
nation de la légitime paternelle fixée à 1,000 fr. par le testa
ment de 17 3 1, et qu’il avait donné plusieurs quittances, soit
par des lettres missives , soit par un acte de 1752.
Quant au dépôt de Pabbesse , ils dirent, sans beaucoup de dé
tail (quoique la requête ait cent douze rôles) , qu’ils offrent com
munication de titres pris chez l’abbesse , lesquels ne signifient rien,
et que d’après l’arrêt, c’est aux Couderc et Daymard à indiquer
en quoi consistent les biens de la succession de Muraillac.
Les Ginestesenlaient bien (pie leur désir de soustraire ces deux
points principaux’ était singulièrement contrarié par l’arrêt du
parlement de Toulouse. A ussi, dans leur requête, firent-ils une
sortie vigoureuse contre ce parlement pour lui reprocher son
arrêt.
L'injustice de cet arrêt, disaient-ils, est révoltante , en ce qu’il
a jugé l’abbé Second, héritier pur et sim ple de sa mère : car
�( 12 )
Gine'fe étant héritier bénéficiaire, on ne p o u v a it, su iva n teu x ,
soutenir l’autre héritier pur et simple, suivant Dumoulin. « C ’est
« a in si, s’écriaient-ils, que des gens qyi ont acheté le droit de
« juger les hommes, remplissaient leur devoir. E t on s’est laissé
« entraîner par le torrent d’un siècle de despotisme, au point de
« regarder jusqu’à présent leurs jugemens comme des autorités
« respectables ».
Il faut croire que cet anathème, né à Salers, n’a pas au
trement nui à la réputation des magistrats de Toulouse, et que
leur arrêt n’en sera pas moins respecté.
L a cause était sur le point d’être jugée en 1793 , lors de
la suppression des droits féodaux, fort étrangère sans doute
à la contestation. Mais le tribunal de Salers , qui ne voulut
pas imiter le parlement de Toulouse, et se laisser accuser de
despotisme , ordonna qu’il en serait référé au comité de légis
lation , pour savoir s’il devait prononcer sur une vente de
rentes féodales, faite en 1756.
3
L e comité de législation répondit le 7 thermidor an
, au
tribunal de Salers , qu’il n’avait rien à juger sur la vente
féodale de 1756 , puisqu’il y avait un arrêt , et qu’il n’avait a
S’o c c u p e r que de son exécution ; qu’ainsi il devait passer outre.
Pendant c e tems-là le tribunal de Salers cessait d’exister, et
les femmes Couderc et Daymard assignèrent les héritiers Ginestc, par exploit du i . er fructidor an 4 , devant le tribunal
civil du Cantal pour voir donner acte de l'aveu , fait par les
Gineste , d’avoir retiré le dépôt de l’abbessede Brageac; en con
séquence être condamnés, en leur nom, à payer la créance ;
subsidiairement composer la légitime de
1abbe Second, d'un 6.e
des biens de Gaspard Second, et apurer le compte de la succes
sion Muraillac , de la manière exprimée en la requête du
5
novembre I7 9 1*
L e 14 pluviôse ail , les Gineste obtinrent tin jugement par
d é fa u t, lequel homologue l’entier compte présenté par les ad
5
versaires, à l ’exception de trois articles \ savoir , i.° l’intérêt des
�(
i
3
)
gains nuptiaux ; z.° des revenus de vingt-neuf ans, portés au
.e chapitre de recette ; .° de l’art. i du chapitre de dépense.
Autorise les adversaires à prélever les autres articles de dé
pense , en capital et accessoires.
Ordonne qu’ils seront tenus de se charger en recette des in
térêts de oo fr. montant des gains de survie depuis le décès de
3
3
5
5
la Muraillac.
Ordonne , avant faire droit sur l ’article des jouissances , qu’ils
seront estimés par experts, depuis et compris 1761 jusqu’à ce
jour.
Ordonne aussi, avant faire d roit, que la signature relative à
l’article i
5 du chapitre de dépense, sera vérifiée par experts.
Délaisse les Gineste à se pourvoir contre la femme Couderc ,
en remboursement de oo fr. par elle reçus pour la moitié de la
légitime, est-il d i t , de l’abbé Second , comme ladite somme ayant
été induement perçue avec l ’intérêt à compter du paiement.
( Nota. Ce dernier chef paraît être ajouté d ’oflice, sans con
clusions expresses ).
Condamne les Daymard et Couderc aux dépens.
5
Les femmes Daymard et Couderc formèrent opposition à ce
3
jugement, et les parties en vinrent à l’audience du i thermi
dor an , où les Gineste conclurent au débouté d’opposition,
et demandèrent à ne porter en recette qu’une virile dans les gains
5
5
nuptiaux de oo f r .; de leur p a r t, les Daymard et Couderc
persistèrent dans les conclusions ci-devant rapportées.
5
Par jugement du 14 thermidor an
, le tribunal du Cantal
prononça sur le tout, ainsi qu’il suit : i.° En ce qui touche la de*
inande en paiement personnel delà créance, il juge que les qualité»
des parties sont réglées par l ’arrêt de 1789 , lors duquel il fut
question du dépôt de l’abbesse de Brageac , et qu’on ne peut plus
remettre en question une chose jugée; que Picn-è Gineste avait
fait état des objets déposés et par lui retirés; qu’on en offre la
communication , et qu’il n ’est allégué aucune soustraction des
�c
1
4
5
pièces , or ou argent provenant du dépôt touché par Gineste.
z:° En ce qui louche la question de savoir si l ’arrêt parle de
la légitime paternelle de Jean Second, le tribunal juge que Jean
Second, étant réduit à une légitime de droit du chef mater
nel, et mort avant que Gineste prît la qualité d’ héritier béné
ficiaire en 1786, il n’a pu être tenu des dettes de sa mère que
sur son 6.e des biens maternels; que si 011 donnait à l’arrêt de
1789 une extension sur la légitime paternelle, ce serait prêter
aux juges qui l’ont rendu, une, ignorance des principes, invrai
semblable, et une contradiction manifeste, parce que si Jean
Second avait été assujéti sur les biens paternels, ce n’aurait pu
être que comme héritier pur et simple de la D u v e l , et alors
les mineurs Gineste, héritiers médiats de leur oncle, auraient dû
être condâmnés personnellement, tandis qu’ils ne l’ont été qu’à
rendre compte du bénéfice d’inventaire de la D u vel, et cette
dispôsition de l’arrêt ne paraît avoir été mise que pour que les
mineurs Gineste ne pussent demander la distraction du 6.e du
chef de Jean, sur la succession de la Duvel; d’où il suit que cette
condamnation ne peut porter que sur la légitime maternelle.
- Il est, ajouté que les paiemens faits parles Gineste, sur la lé
gitime paternelle de Jean Second, l’ont été par erreur et con
trainte , àxi en vertu des jugemens de Salers ; que le tout doit
êjre réparé en définitif, et que Jean Second ayant approuvé le
le legs et destination, en fournissant des quittances, acceptant
le titre, et se faisant payer les revenus en majorité, n’ayant ja
mais formé demande en supplément, les Dayniard et Couderc ,
après plùi de trente ans «le majorité, xi auraient jamais été recevables à exercer îles droits prescrits.
3.°
En ce qui touche les gains nuptiaux, il juge que d’après
les novëlles 98 et 127, la Muraillac. n’avait pu retenir qu’une
virile de s e s gains’nuptiaiix en propriété, et qu’il y a eu lieu de
changer les conclusions,
4.0 E h'ce qui touche les jouissances de la succession de Gas
pard Second, léguées à la Muraillac en 17 3 1, il juge qu’en ren-
�( i
5
)
dant le fidéicommis, elle ne s’est rien réservé; que le compte
énoncé au contrat n’est pas rapporté ; qu’elle n’a joui de la
maison, grange et jardin, qu’en vertu d’une contre-lettre non rap
portée , mais rappelée au testament de 1744, et au traité de 1747.
.° En ce qui touche les jouissances de la succession de
5
Marie-Jéanne Second, léguées à la Muraillac en 1744, il juge
que la Muraillac, ayant fait la remise de l’hérédité, sans rien
réserver, et sans faire publier la substitution , n’a pas eu droit
aux jouissances ; qu’il ne paraît pas qu’elle ait demandé judi
ciairement l’exécution de ce testament.
6.° En ce qui louche la quarte , il juge que la Muraillac ,
n’ayant fait aucun inventaire, l’avait tacitement abdiquée; que
d’ailleurs si elle avait joui, les trois quarts des fruits auraient
dû être imputés sur la quarte, et l’auraient absorbée.
7 .0 En ce qui touche l’abbaye d’A rgentac, il juge que rien
ne prouve que les Gineste en aient fait leur profit.
8.° En ce qui touche l’ indemnité demandée en l’art. 9 du
chap. de dépense, il a pensé que le testament de 1744 s’y oppo
sait, et que cette réclamation n’était pas fondée.
9.0 En ce qui touche les art. 2 , 3 ,
4 , 5,
10 et 11 du chap. de
dépense, il juge que, les premiers étant compensés par le traité
de 1747 , et même le ¡sieur Gineste étant resté débiteur de la
•Muraillac, de 678 f. 14 s., cette somme doit être portée en recette,
ou compensée avec, les 1,200 fr. de l’art. 10.
.
■
>
10.0 En ce qui touche le mobilier porté en l’inventaire de
1761 , et sur le fait de savoir s’il fallait déduire le mobilier de
17 3 1, il juge qu’il n’y a lieu de rapporter que les objets recon
nus n ’être pas les mêmes qu’en 17,31.
i i .° En ce qui touche l’art, i.er t]e dépense, relatif au mobilier
manquant, le tribunal du Cantal pose la question, et n’y donne
aucun motif de décision; mais il y a déboulé au n.° 6 ci-après.
En conséquence , ledit jugement définitif, du 14 thermidor
an , « i.° déboute les femmes Daymard et Couderc de leur de-
5
<tt mande eu condamnation personnelle, sauf à elles à prendre
�( 16 )
« communication de l ’état des pièces et actes déposés ès-mains
« de l ’abbesse de Brageac, et prendre à cet égard telles conclu«' sions qu’elles aviseront ;
« 2.0 Ordonne que la condamnation portée par l’arrêt dû par
te lement de Toulouse, du 9 mars 1789, en payement de la légi« tirne de Jean Second, n’a dû ni pu porter que sur la légitime
« maternelle, et nullement sur la légitime paternelle ; en consé« quence, ordonne que toutes les sommes payées par les Delzor
« et Gineste, à la suite des procès-verbaux et jugemens de pro*
« vision, seront portées au chapitre de dépense, ou compte de
« bénéfice d’inventaire de la succession de Marie Duvel ;
« .° Ordonne qué la somme donnée par Gaspard Second à
« la dame D u v e l, en leur contrat de mariage, sera réduite à
« i66.1iv. 1 sous 4 deniers pour le tiers faisant la portion virile,
« avec intérêts à compter du décès de la dame Duvel;
3
3
« 4.0 Déboute lesdits Daymard et Couderc de leur demande
« à fin de payement des jouissances de la succession de Marie« Jeanne Second, et distraction de la quarte trébellianique;
« 0 Les déboute de leur demande à fin de payement de la
« pension stipulée par Marie D u v e l , avec les religieuses d’Ar« gentac;
« 6.° Les déboute de la demande en rapport de 1,700 francs,
« montant de la collocation faite à Emeric Gineste, par la sen
5
te tence d’ordre de 1765 ;
« 7 .0 Déclare les Gineste non-i’ecevables a porter en dépense
5) 1,000 fr. pour dédommagement des aliénations faites par Marie
« D u v e l, de certains héritages de la succession, vente de cabanx,
« marchandises énoncées en 1 inventaire fait après le décès de
« Gaspard Second, ainsi que de la créance Faure, et legs fait à
« Jeanne-Marie Second; en conséquence, ordonne que les ar-
3
5
« ticles 1 , 2, , 4 , , 9 du chapitre de dépense seront rejetés;
« 7.0 Ordonne (pie le chapitre de recette sera augmenté de
ci 678 liv. 4 sous 4 deniers pour les causes du truité du 8 octobre
« 1747, pour être ladite somme compensée au désir dudit traité,
« avec celle de 1,200 fr. payée au fermier de Saint-Projet ;
�7
( i
)
• « 8.° Ordonne que les Gineste seront tenus de représenter les
« meubles reconnus par l’inventaire fait après le décès de Mario
« Duvel, être en sus de ceux portés en l’inventaire fait après le
« décès de Gaspard Second, pour iceux être vendus, s’ils sont
« en nature, ou en payer la valeur suivant l’estimation; décharge
« les Gineste de la délivrance du surplus des meubles;
« 9.0 Avant faire droit sur le surplus des articles du compte,
« et sur les demandes en main-levée du sursis, ordonne qu’il
« sera procédé à l’estiinalipn des fruits et jouissances des im« meubles de la succession de Marie D u v e l, depuis son décès
« jusqu’à ce jo u r , et des meubles ci-dessus, etc. dépens réservés. »
Tel est le jugement dont les héritiers üaymard et Couderc ont
interjeté appel. Ils vont, pour proposer leurs moyens avec plus
de clarté, parcourir séparément les chefs qui leur ont paru coït*
tenir des erreurs à leur préjudice, en suivant l’ordre même des
motifs dudit jugement.
r' '
1. Dépôt de L'abbesse de Brageac.
\ Des créanciers légitimes , qui disputent ce qui leur est dû
contre.¡un héritier soi-disant bénéficiaire, méritent toute la la
veur de la justice; car tout est caché pour eux dans une famille
étrangère : il faut donc que la conduite de l’ héritier bénéficiaire
soit franche et de bonne foi. Il ne doit rien retenir ou dissimuler;
et si apiôs son inventaire de nouveaux objets parviennent, soit
en ses mains, soit à sa connaissance, il est de sou devoir de les
faire (inventorier à lÜnslant :,car les créanciers doivent tout voir
•dans l’inventaire,' sans rieii chercher hors de cet acte. Tout cela
est d’équité et de principe. Voyons maintenant si le sieur Gineste
s’y est conformé.
;
t viLa, dame Mtirïitllac, veuve Second , voyant qu’elle avait plaidé
;t0ute sa vie av£Q le sieUr Emeric Gineste père, et que le sieur
¡Pierye Gineste son fils croissait avec les mêmes dispositions ,
conçut des inquiétudes au sujet de Jacques Second , prêtre ,
3
�-c
1 8 }
.
'son fils, qui déjà , pour avoir sa pension du séminaire, avait été
forcé aussi de soutenir un ou deux procès.
Elle déposa dans les mains de la dame Dhauzers, abbesse de
"Brageac, un sac de papiers, et une corbeille d’argenterie, pour
le remettre, après sa mort, à l ’abbé Second. L e sac contenait,
à ce qu’il paraît, plusieurs titres et obligations qui étaient des
créances de la veuve Second, tant contre divers particuliers,
que contre la succession de son mari. Il est notoire que sa ferme
de Pleaux était très-lucrative, et qu’elle avait un porte-feuille
considérable. Nous avons dit qu’elle mourut en 1761.
L e sieur Gineste se porta seulement héritier bénéficiaire, et
fit, en cette qualité, procéder à uu inventaire en la même année
1761.
Supposons , si on ve u t, que, lors de cet inventaire, il ne con
naissait pas ce dépôt.
Mais quand il est allé le retirer, devait-il s’abstenir de faire
ajouter ces objets à l’inventaire ?
*'
Il était avocat et juge de Pleaux; 'il ¿tait de plus juge de
l'abbaye même de Brageac. E ta it-il de bonne foi en retirant
pour lui seul, et non pour les créanciers , un objet inventorié?
Etait- il de bonne foi en induisant en erreur desTeligieuses qui
avaient pleine confiance en lui?
L es sieurs Daymard et Couderc avaient fait une saisie-arrêt
entre les mains de l’abbesse, le 22 août 1764.
Quand leurs veuves voulurent l’assigner sur leur saisie-arrêt,
en 1780, elle re'pondit, par une requête du 21 juin 1783, qu’à la
vérité la dame Second lui avait remis un sac cousu, contenant
des papiers, sans aucun état ou mémoire, et une corbeille de
jo n c , contenant o liv. à’étain travaillé, pour remettre, après
son décès , à l’abbé Second, son fils, alors a Paris; qu’elle remit
ce dépôt au sîeùr Gineste, en 1772 , et avait dû le lui remettre,
parce que la dame Second et l’abbé étaient m orts, et que Ids
sieur Daymard et Couderc s’étaient absentés; que d’ailleurs il
y avait prescription.
3
�9
( i
)
A v a n t cette signification, l’abbesse avait marqué à la veuve
Lacroix , par une lettre du 26 mai 1776, que M. Gineste, hé
ritier sous bénéfice d’inventaire, et autorisé en justice, avait
retiré ce dépôt, et l’avait porté à Aurillac, avec l’inventaire des
effets de la veuve Second.
Ainsi le sieur Gineste avait persuadé à cette dame qu’il était
autorisé de la justice pour retirer ce dépôt.
Il lui avait persuadé, pour vaincre ses scrupules sur la desti
nation du dépôt, que l’abbé Second était mort en 1772 , à Paris ;
et il n’est mort que le 21 avril 1777.
Il lui avait persuadé que les sieurs Daymard et C ou derc,
créanciers saississans en 1764, s’étaient absentés, et il savait
qu’ils étaient morts.
Il parlait de péremption à une religieuse qui devait certai
nement le croire; et cependant il savait bien qu’une saisie-arrêt
ne périme pas.
Voila donc comment agissait un héritier bénéficiaire envers
des créanciers, ou plutôt envers les veuves de deux créanciers,
pctrce qu’il lui était bien aisé de dénaturer alors tous les papiers
dont il venait de s’emparer, au risque de dire , comme il l’a fait,
qu’on 11e peut pas diviser sa déclaration.
Ilemarquons cependant les suites de cette infidélité. Il était en
procès en 1772; lorsqu’il retira ce dépôt, il garda le silence, il
ne fit rien constater ; ou du moins s’il y eut un récépissé dé
taillé , il n’a jamais voulu le produire.
, Il présenta un compte de bénéfice d’inventaire en 1772, et
ne dit pas qu’il avait des objets non compris en l ’inventaire
de 1761.
, Quand il a vu qu’on poursuivait en 1780 l ’abbesse de Brageac,
il a retardé le plus qu’il a pu les édaircissemens à cet égard.
79
Ce n’est qu’en » 1 c]u’il signifie un compte, quand il voit que
trente ans d’intervalle ont tout dénaturé, et que les créanciers
Daymard et Lacroix seront hors d’état de découvrir en quoi
consistaient les papiers, qu’il a enlevés lui-même, malgré leur
�( 20 )
85
saisie. C ’est alors, ou plutôt en i o , et après quarante ans ,
qu’il leur dit séchemçnt : Ces papiers étaient inutiles, vous ne
prouvez pas le contraire, donc ma déclaration doit prévaloir,
parce qu’elle est indivisible.
N o n , il est impossible de ne pas voir dans cette conduite le
cas d’application des lois sur la déchéance du bénéfice d’in
ventaire.
- L ’inventaire, dit M. d’Argent ré, doit être la description fidèle
de tous les biens meubles et immeubles du défunt, et son objet
est de conserver aux créanciers tout ce qu’il leur importe de
connaître : inventarium descrïptio est bonorum mobilium et
irnmobilium de/uncti , vocalis creditoribus. . . . F in is ejus , ut
res salvœ sint creditoribus. . . . . Inveniarii. materia bona sunt
tam mobilia quàm im m obilia, nam etsi im m obilia auferri non
possunt et p a te n t, et fo r is cubant, ut loquun tur, tamen possessio eorum interverti p o te s t, et seçretb in alios transferri.....
E rgo hœreditaria om n ia, bond Jide describenda puto , et in
eo creditorum interesse versatur ; est enim inventarium instmmentum commune hœredis et creditorum. (A rt. 514, gl. ).
A la vérité, d’autres auteurs, ont pensé que l’état des im
meubles n’était pas absolument nécessaire, mais ils exigent au
moins la mention des titres de propriété, par les mêmes raisons
que les créanciers doivent être mis à portée de connaître, par l'in
ventaire , tout l’actif de la succession.
3
Il faut m ême, d’après d’Argentré, un tel détail dans l ’inven
taire, qu’il 11e se contente pas de l ’état approximatif des grains,
mais il veut qu’on les mesure, dici debetfrugum mens lira, nec
sufficit cumulum d ixisse; il veut quon estime chaque.objet, ou
qu’o n l e décrive de manière a ne pas en substituer un autre,
ne ejusaem nom inis spccies pro aliâ supponi p o s sit, viliorpro
m eliorc ,* ef il déclare que tout cela est d’autant plus indispensa
ble qu’il n’a que trop vu de fraudes de ce genre , au préjudice
des créanciers, adhibitis cujusque arti/icii opificibus. Il s’élève
'.même contre ceux qui penseraient qu’il ne faut pas autant de
�( ai )
précautions. C a r , pourquoi ne pas proférer, dit-il, ce qui est
plus utile et plus sûr? Quarc quod u liliu s el cautius displicet ?
- O r , toutes les fois qu’il y a des omissions dans l’inventaire
l’héritier bénéficiaire est déchu du bénéfice , et réputé malgré lui
héritier pur et simple.
Une loi romaine à la vérité semblait ne le condamner qu’à
la peine du double, qui est inconnue parmi nous; mais elle
était contrariée par d’autres lois , et la jurisprudence française
n’a jamais admis que la déchéance du bénéfice d’inventaire pour
les recelés ou omissions, comme on le voit dans Brodeau , Leprêlre, Furgole et Pothier.
, En effet & bénéfice d’inventaire n’était accordé par la loi que
1
sous la condition de faire un bon et fidèle inventaire. Si la con
dition n’était pas remplie il n’y avait plus de bénéfice.
y a même , dit Fachinée , qui a fait une dissertation
sur cette question , plus à reprocher à celui qui.fait des omis
sions, qu’à celui qui 11e fait aucun inventaire; car on peut croire
à l’ignorance de celui-ci plutôt qu’à son dol. Mais celui qui n’in
ventorie pas tous les objets de la succession , ou qui en dissimule,
aux créanciers, n’est pas digne du bénéfice de la loi. Ig itu r s i
11
hæres non descripsit omnia bona , ea occullando , non est
dignus beneficio legis. ( L i v . 4 , ehap. 37).
Aujourd’hui le Code civil a fait de ces principes une loi pré
cise en l’art. 801. « L ’héritier, qui s’est rendu coupable de recélé,
« ou qui a omis sciemment de comprendre dans l’inventaire des
« e/fets de la succession, est déchu du bénéfice d’inventaire».
O r , comment peut-on dire que Pierre Gineste n’a pas fait
cette oir.ission sciem m ent, lui qui se cachait des créanciers pour
demander à l’abbesse de Brageac un dépôt, dont la valeur et la
consistance n’étaient pas connues.
Dira-t-on que Gineste ne connaissait pas lui-même le dépôt
en 1761 ? mais qu’il lise l’inventaire, il verra la clause de style,
par laquelle Gineste, en affirmant 11e connaître aucun autre objet
de la succession, ajoutait qu’il déclarerait ceux qui viendraient
par la suite à sa connaissance.
�( 22 y
Sans cela l’inventaire ne serait le plus souvent qu’ une ébauche
inutile ; car quand les papiers d’une succession sont chez les no
taires ou huissiers pour des recouvremens, lors de l’inventaire,
il faut bien que l’héritier bénéficiaire en fasse un second, s’il
ne veut pas expolier les créanciers.
L ’usufruit des pères était bien plus favoi-able que le bénéfice
d’inventaire. Cependant quand il y avait lieu de leur part à faire'
un inventaire, ils étaient privés de l’usufruit, si après en avoir
fait un premier, ils n’ajoutaient pas dans un second ce qui sur
venait ensuite.
La sénéchaussée d’Auvergne a prononcé deux privations d’usuiruit en ce cas; en 1775, contre James Tournilhas de V o lo r e ,
et en 1788, contre Jasseaume Dolmet.
Les premiers juges ont écarté tous ces principes, en disant
qu’il y avait chose jugée à cet égard par l’arrêt de 1789, parce
qu’alors il avait été parlé du dépôt de l’abbesse de Brageac. ■
Mais où ont-ils vu qu’il eût été question le moins du monde
de la difficulté. L ’abbesse était en cause elle-même comme tierssaisi ; il s’agissait d’obtenir contr’elle une condamnation à vider
ses mains, et c’est là ce qui a été ordonné.
L ’objet de la demande était donc une saisie-arrêt contre l’ab
besse elle-même , ainsi il n’y a pas chose jugée , puisqu’il faut,
suivant les principes , eadem res, eadem persona, eadem causa
p e te n d i, ce qui est rappelé en termes plus précis encore par l’art;
i3 5 i
du Code civil.
Les sieurs Aymnrd et Couderc n’avaient pas même intérêt
alors d’abandonner leur action directe contre l ’abbesse de Bra
geac, pour la suivre contre un héritier bénéficiaire: et si un instant
il y a eu d e s conclusions contre le sieur Gineste, en condamna
tion personnelle , elles venaient de tout autre cause, mais non
de la réception du dépôt, puisque les conclusions prises contre
l’abbesse ont toujours subsisté, ont été même adoptées par l’arrêté
Ce n’est qu’après l’arrêt, après commandement à l’abbrsse d’y
satisfaire, et même après saisie-exécution et assignation pour la
�( î3 )
■ . •. ■
vente, que l’abbesse fut forcée de révéler, par notification du r i
septembre 1790 , qu’elle avait un billet de garantie d u sr . Gineste.
Ces poursuites prouvent donc que la chose jugée, quant au dépôt,
était encore personnelle à l’abbesse; et lorsqu’on a appris, pour
la première fois, que le sieur Gineste avait tout pris sur son compte,
j)ar une garantie, alors seulement il y a eu lieu d’agir conte lui,
pour faire valoir tout le résultat de l ’infidélité par lui commise.
M ais, ont dit encore les premiers juges, les qualités des parties
sont réglées par l’a rrêt, et sont dès-lors invariables.
Erreur encore ; car il n’y a d’indélébile que la qualité d’héri
tier pur et simple : car celle d’héritier bénéficiaire peut être
changée d’un instant à l’autre, suivant les circonstances.
Un hériter bénéficiaire peut n’être pas réputé coupable d’omis
sions, lorsqu’on juge seulement sa qualité. Mais s’il en est con
vaincu ensuite, la faveur changera ; et le moindre recélé bien
justifié, comme dit Rousseau-Lacombe , le fera déchoir à l’ins
tant du bénéfice d’inventaire.
Ici on a pu croire Gineste de bonne foi dans le retirement du
'dépôt de Brageac, tant qu’il était incertain s’il voulait se l’appro
prier; et le parlement de Toulouse, en|ordonnânt un compte de
la succession, a dû croire que le sieur Ginèste ÿ ‘ porterait les
objets par lui retirés.
Point du tout ; le compte est présenté en 1791 , et on n’y trouve
ni la corbeille contenant ce qu’on à dit être de l’étain, ni le sac
de papiers , qui devait bien être de quelque valeur, puisque
c’était un don manuel destiné à un légilimaire.
A lors, sans contredit, a commencé le drbit des sieurs Day
mard et Couderc , de dire au sieur Gineste : Vous ne pouvez plus
être héritier bénéficiaire , puisque vous retenez sciemment un
objet de la succession.
■
'
Dira-t-il qu’on a conservé l’action en rapport contre l’abbesse?
Ce serait aujourd’hui une chose idéale; mais d’ailleurs il a de-
�( H )
meure seul en prise par sa garantie ; et en exerçant même les
droits de l’abbesse , l’action revient à lui.
Or quelle est cette action? Un saisi, qui ne représente p a s ,
est condamné à payer la dette lui-même, après un délai de grâce.
L e sieur Gineste, garant de l’abbesse, doit y être condamné; et
ce sera la même chose que le déclarer héritier pur et simple.
Dira-t-il encore qu’il ne peut pas être tenu à plus qu’il n’a pris?1
Ce n’est pas là la question ; car , en sa qualité d’héritier par bénéjice d’inventaire, il suffit qu’à l’instant actuel on ne voie pas
dans l ’inventaire , ni dans son compte, ce qu’il~a retenu, il est
dans le cas de l’art. 801 du Code civil.
Un créancier ne peut pas être astreint à prouver les circons
tances d’un retirement de dépôt , qui a eu lieu en 1772. Il suffit
qu’il établisse le fait matériel de ce retirement; cela lui suffit.
Comment saurait-il même ce que l’abbesse dépositaire ignorait,
et ce que le sieur Gineste eut tant d’empressement de cacher?
Cependant les précautions du sieur Gineste n’ont pas empêché
qu’une partie de la vérité ne soit venue aux oreilles des héritiers
Daymard et Couderc.. Ils ont indiqué quelques-uns des titres qui
formaient le dépôt, et notamment une obligation de 3 , 4 0 0 fi\ ,
consentie au sieur Melon , puis_dénaturée par le sieur Gineste:
ils persistent.enqore-à .offrir Ja preuve de ce fait particulier, si la
c o u r la juge nécessaire.
,
S’il restait encore quelque.doute à la cour sur cette question,
15
la plus importante de toutes, puisqu’elle,dispense de juger celles
‘ t‘
* t
1
1
*
qui suivent, y a-t il à hésiter diuis 1 alternative de faire.supporler
une dehe sacrée a u x. deisc e nclans jCt 11 débiteur, ou de (aire perd rp
•
des ¡créanciers» (é^itimeSj?. Upe, familjp opulente jouit de la: suc
cession qui est le gage de la d^lje ; et il est bien clair que tout
ce qu’elle retient n’esl pas^cojinu. Les Daymard * au contraire,
trompés par la Muraillac, plaidant depuj^(i o oiip^pour.ravoip
5
.•l’argpti I- qu*j!?(,o” 1
Qucorc. N’y eu,t-il .qpe
'
•^}e,?*%l?i (lu’;'.
P'?s: twmipés
P»)jîcle^ r^j^té^.par le^ premiers jugesj,
'
il
�(
^5
)
il serait bien certain au moins qu’on a cherché à les duper en
tout. Alors comment, dans l’incertitude m ê m e , la Cour pren
drait-elle sur son compte de sacrifier le créancier légitime qui
perdrait évidemment, plutôt que l’héritier du débiteur qui ne
peut jamais tout perdre, puisqu’il lui reste la succession?
L a Cour peut d’autant moins se faire scrupule de condamner les
héritiers Gineste à-payer la dette des D aym ard, que déjà en 1772 ,
après un semblable compte , et malgré un déficit considérable,
les Gineste furent assez sages pour payer le créancier clairvoyant,
qui était plus à portée de révéler beaucoup. Ainsi ce ne sera au
jourd’hui que leur rendre la justice que déjà ils se sont rendue
eux-mêmes.
2. Légitim e de L’abbé Second.
Les Gineste ne veulent pas rapporter sa légitime paternelle
et cette résistance ne peut pas étonner : car un héritier bénéfi
ciaire a toujours pour règle exprimée ou sous entendue, qu’il ne
ne doit payer que le moins qu’il peut. Mais il est inconcevable
que les premiers juges aient adopté les sophismes ridicules qu’on
leur a présentés sur cette question.
Ils sont cependant condamnés par l’arrêt à rapporter deux
choses,
i . ° L a succession bénéficiaire de la Muraillac ;
2 .0 L a légitime de l’abbé Second.
Si la légitime était comprise dans la succession bénéficiaire; il
était inutile d’en faire un article à part, et de distinguer aussi
positivement la légitim e.
' Les Gineste , tant en leur nom
que com m e
héritiers de l ’abbé,
auraient été condamnés à rendre le compte de la succession ma
ternelle. Voilà tout.
A u contraire l’arrêt explique fort bien que la légitime est indé
pendante de la succession bénéficiaire, et les adversaires qui n’ont
4
�(•26 )
5
pas voulu l’entendre en l ’an , l ’avaient cependant fort'bien en
tendu en 1790.
Car ils avaient donné alors aux femmes Daymard un à-compte
sur cette légitime; et cet à-compte ne pouvait pas se régler sur
la succession de la mère, puisqu’ils prétendent qu’elle est obérée.
Il faut être conséquent avec soi-même, et répondre à un di
lemme bien simple : ou les quittances de 1791 sont données sur la
légitime de la mère, ou sur celle du père.
Dans le premier cas, l’inventaire est faux, et les adversaires
doivent être réputés héritiers purs et simples.
Dans le deuxième cas, la question est jugée par eux-mêmes.
Mais un bail de copie du 7 juillet 1791 , va la juger mieux
encore, et voici comment.
Par la quittance de 1790, il avait été payé
5oo fr. à Marianne
Couderc à compte de la légitime de Pabbé Second, en exécution
de l'arrêt du 9 mars 1789, sous réserve de répéter s’il y avait
d’autres quittances excédantes.
L e 7 juillet 17 9 1, on signifia à ladite Couderc cette quittance
avec une autre de 700 fr. du 2 octobre 1762, et on conclut à être
remboursé de 200 fr. payés de trop.
L a cour se rappelle que le testament de 17S1 avait fixé pour
légitime paternelle à l’abbé Second 1,000 fr.; et voilà pourquoi
Gineste, ayant payé 1,200 f., disaient avoir payé de trop 200 f.
l e s
" Ainsi le meilleur interprète de l’arret du 9 mai 1789 est le
fait personnel des adversaires, ou l’exécution même de cet arrêt.
Combien d’après cela devient mesquin et pitoyable le motif du
jugement dont est appel, qui excuse celte exécution, en disant
qu’elle a eu lieu par erreur et contrainte, ou en vertu d’un ju
gement provisoire.
Qui a pu révéler aux premiers juges qu’il y avait erreur et
contrainte, lorsque les parties n’ont pas demandé à être restituées
à cet égard? les moyens rescasoires ne peuvent pas être suppléés.
�( *1 )
Où aurait été la contrainte quand on a payé volontairement, en
exécution d’un arrêt souverain?
'L e bail de copie seu l, du 7 juillet 179 1, détruit tout cet échaffaudage d’excuses puériles.
S ’il y avait eu erreur, ce ne serait qu’une erreur de droit con
tre laquelle on n’est pas admis à revenir. Mais ce n’est pas là la
question, car il n’y a pas d’erreur, puisque un an après le paie
ment, on 11’en conteste que la quotité.
Les premiers juges accusent aussi d’ignorance le parlement
de Toulouse, s’il avait jugé que l’abbé Second devait rapporter
la légitime de son père, parce que, disent-ils, il aurait fallu l’y
condamner comme héritier pur et simple de sa mère.
Mais sans contredit c’est bien ainsi que le parlement l’a entendu;
et dû l’entendre.
Où ont trouvé les Gineste , qui paraphrasent à leur guise cette
partie obscure du jugement de St.-Flour, que l’abbé Second ne
fût pas héritier pur et simple, par la seule raison que Gineste ne
l ’était pas?
Les qualités d’héritier sont personnelles. L a règle générale est
qu’on soit héritier pur et simple; la qualité bénéficiaire n’est que
l ’exception; mais elle n’atteint que celui qui la réclame.
O r , jamais l’abbé Second n’a voulu être héritier bénéficiaire,
quand dès 1761 Gineste en prenait la qualité. L ’arrêt et la pro
cédure prouvent cette différence avec clarté. Ainsi l’abbé Se• cond , qui a vécu jusqu’en 1777» est mort héritier pur et simple
de la Muraillac sa mère.
Quelles en sont les conséquences?
C ’est qu’il a été tenu des dettes de sa mère ullrà vires. C ’est
que toute sa fortune a été responsable de ces dettes, et par con
séquent sa légitime paternelle a dû y contribuer.
L e parlement de Toulouse n’a donc fait qu’appliquer les prin
cipes les plus élémentaires, en ordonnant que la légitime de l’abbé
Second (qui était entre les mains des Gineste), serait rapportée
par eux, pour payer les dettes de la M üraillac, et qu’ev/ outre,
�( *8 )
_
,
les Gineste rendraient compte de la succession bénéficiaire qui
était aussi dans leurs mains.
M a is , disent encore les premiers ju g es, l’abbé Second avait
approuvé la destination de légitime, en donnant des quittances ,
acceptant le titre, et recevant ses revenus en majorité. IL est mort
sans demander un supplément.
Est-ce qu’une légitime serait approuvée par des quittances
données à com pte?
Il est de principe au contraire que le légitimaire n’approuve
qu’après avoir connu le testament du père, n isi cogn itis inspectisque verbis iestam enli , comme la loi le dit elle-même.
L a coutume d’Auvergne dit que le legs doit être approuvé
sciem m ent $ et ces lois sont appliquées journellement parla Cour.
Un arrêt du 19 ventôse an 11 a même admis à revenir coutre
une renonciation, faite moyennant une légitime conventionnelle,
portée par un testament dont le notaire était indiqué, mais dont
la date n’était pas rappelée. A tte n d u , a dit la C ou r, qu’on n'a
donné connaissance , n i de la fo r m e , n i des clauses , ni de la
date de l ’a c te; cet arrêt n’a fait autre chose que l’applicatiou
textuelle de la loi, nisi inspectis verbis testamenti.
L ’abbé Second, né en 1729 , émancipé en 1749, plaida aussi
tôt avec le sieur Gineste pour avoir la pension qu’il devait payer
au seminaire, et dont le père avait chargé le sieur Gineste.
L a famille délibéra le 7 novembre 1749, qu’il lui serait payé
3oo fr. par a n , à condition que s’il ne se contentait pas dè la
légitime prom ise, et réclamait (lors de sa majorité) la légitime
de d roit, il imputerait l’excedant de l ’intérêt, s’il y avait lieu, sur
le principal de cette légitime.
En 1750 , le sieur Gineste fit a Pleaux un titre clérical de 80 .
par an à l’abbé Second , qui habitait Paris.
Mineur et absent, lors de cet acte, il n’a pas fait sans doute
1
d’acceptation légitime. Aussi ne veut-on la trouver que dans les
quittances postérieures.
�( 29 )
On produit deux lettres et deux reçus de 1750 et 1751. Mais
nulle part 011 ne voit d’approbation de légitime ; tout est donné à
compte.
Les reçus de 17*10 sont à compte de la sentence qui a con
damné Gineste à payer oo fr. par an pour la pension du sémi
naire; ne voilà donc que des revenus.
Aussi on n’a excipé, lors du bail de copie de 1791, que d’une
seule quittance du 2 octobre 1752, de 700 fr. que l’abbé promet
passer à c o m p t e , sans dire même que ce soit sur sa légitime.
D e 17&2 jusqu’à son décès en 1 7 7 7 , il n’y a plus de quit
3
tances; ainsi non agnovit ju d iciu m defuncti.
L ’action en partage dure trente ans utiles. L ’abbé Second a
été majeur le 24 septembre 1754 ; par conséquent «il ne s’est
écoulé jusqu’à son décès, au a i avril 1777, que vingt-deux ans
six mois et vingUhuit jours de prescription.
Par la règle, le mort saisit le v i f , les Gineste ses héritiers
ont à l’instant été substitués à ses obligations dans toute leur
étendue; eux seuls ont dû faire face, vis-à-vis les Daymard et
Couderc, à tout l’objet de leurs demandes.
Ces demandes étaient pendantes en 1777 contre l’abbé Se
cond et contre les Gineste; il y a eu reprise, et l’arrêt de 1789 ,
en ordonnant contre les Gineste, qu’ils rapporteraient la légitime
de l’abbé Second aux créanciers exerçant ses droits, a voulu
qu’elle fût rapportée télle qu'elle était due, sans oi’donner qu’elle
serait réduite à 1,000 fr. ou à oo fr., puisque les Gineste n’en
3
avaient jamais élevé la prétention.
L ’arrêt de 17O9 , par cette disposition , et par celle du compte
de la succession Muraillac , n’a donc fait que prononcer une con
damnation générale , mais indéterminée, parce qu’il ne s’agissait
alors que de régler les points de droit; le montant de la légitime,
comme le montant du compte, devaient être également inconnus
au parlement de Toulouse , lors de son arrêt. C ’était aux Gineste
à faire face à la double condamnation prononcée contre eux, eu
l’exécutant.
�C 30 )
Jusqu’ici donc l’arrêt de Toulouse a demeuré sans exécution
en cette partie; les adversaires se sont contentés de signifier un
compte infidèle. Mais ils ne peuvent pas se dispenser d’obéir à
la chose jugée. Ils doivent, on le répète, rapporter la légitime
paternelle de l’abbé Second , et cette légitime ne peut être qu’un
6.e de la succession en meubles et immeubles, sauf la déduction
de 709 fr. sur les revenus, puisque l’abbé Second est mort sans
avoir rien approuvé.
3 . Gains n uptia ux de la veuve Second.
5
L es adversaires,après avoir offert oo f r ., veulent réduire celle
somme à« un tiers.
11 est vrai que les principes du droit écrit ont sur cette ques
tion une disposition particulière.'
Par les lois du code, les gains nuptiaux étaient propres au sur
vivant. L a novelle 2 , chap. 2, 11e lui en laissa que l’usufruit. L a
novelle 22 , chap. 20, lui en rendit la propriété, sauf le cas des
secondes noces. La novelle 98, chap. i . er , a rétabli la novelle 22,
et enfin la novelle 12 7, chap. , a laissé au survivant non re
marié une portion virile eu propriété, et l’ usufruit du surplus.
Quoi q u ’ il en soit de cette variation , et sans examiner si cette
dernière loi a d’autre but que d’empêcher le survivant de faire
entre ses enfans une disposition inégale d’ une portion des biens
3
de l’autre époux, il y avait, dans l’espèce, dérogation expresse à
la nature du gain de survie.
Car dans le contrat de mariage de 1720, il y a donation des
5oo fr. pour être propres dès à prcscnL à |,i fuiurç; elle a donc
élé saisie dès l’instant même, et propriétaire de cette somme,
t
»
Mais admettons pour un instant que les adversaires eussent
droit de réduire au tiers les oo fr. de survie, promis par Gas
pard Second a la dame Muraillac sa veuve.
S’ils ont eu ce droit, ils l’ont perdu par leurs conclusions
5
admises en jugement.
�( 3 0
•Car non-seulement les adversaires ont offert cette somme de
oo fr. dans leur compte ; mais elle est aussi dans le jugement
par défaut du 14 pluviôse an , avec des motifs très-détaillés.
.O r , comment les premiers juges ont-ils pu corriger un juge
ment par défaut, dans une partie dont l’opposant ne se plaignait
pas? C ’était se réformer soi-même, et reconnaître qu’une ques
tion de droit avait été mal jugée la première fois.
Cette prononciation de mal jugé était au-dessus du pouvoir des
premiers juges.
5
5
1
4 , 5 , 6 . Jouissances des fidéicornm is et quarte trébelU anique.
'
>«,
L a dame Muraillac avait droit de jouir comme héritière fidéicommissaire des biens de son époux jusqu’à son décès; 011 11e le
lui dispute pas.
Mais on prétend qu’elle a remis l’hérédité sans rien réserver
et que cette remise ne lui a laissé aucun droit de jouissance.
Cela serait vrai, si la remise eût été volontaire; mais la veuve
Second ne fut forcée de ne pas jouir que par l’usurpation du sieur
Gineste, avec lequel elle plaida toute sa vie. Après le testament
de son.m ari, qui la fit héritière iidéicommissaire en i j d t , elle
rémit l’hérédité à sa fille en i j S j , et cela pour elle.
Redevenue héritière en 1744, p a rle testament de sa fille, elle
voulut reprendre les biens, mais le sieur Gineste s’y opposa.
Les appelans ont excipé devant les premiers juges d’une signi
fication qu’elle fit en 1746, du testament de 1744, pour deman
der qu’il fût exécuté à son égard. O r , peut-011 se faire un titre
contr’elle de l’impossibilité où elle fut de jouir.
O11 objecte que, d’après l’article
36 de l’ordonnance des subs
titutions, elle est reputee n’avoir jamais accepté le fidéicoinmis.
Mais cet article même ne dit pas qu’il faut jouir pour accepter ;
mais qu’on est censé accepter, soit par la possession, soit par
des demandes.
�(
3a
)
On dit que la veuve Second ne fut qu’héritière fiduciaire de
sa fille. Mais la principale distinction du fiduce, d’après Peregrinus et Henrys , est quand le fidéicommis doit être remis iti
dietn certum , et quand 011 prohibe la distraction de quarte.
Tout cela n’a pas eu lieu dans le testament de 1744.
D ’ailleurs, autre chose est le fiduce , autre chose est le legs
personnel des fruits.
>
Gomment admettre, sans injustice, que le sieur Gineste, détempteur de revenus quelconques, appartenant à sa belle-mère, .
ait pu les retenir en refusant de payer ses dettes ?
Tout est rigoureux contre l’héritier qui veut séparer les pa
trimoines; et il n’est pas juste qu’il distraye la moindre chose
de l’actif qui doit faire face à la dette , pour le laisser dans le
patrimoine qui ne doit pas y conjribuer.
Quant à la quarte tre'bellianique, elle appartient de plein
droit à tout héritier testamentaire chargé de rendre , d’après
les titres du Digeste : A d sénat. Treb.
Il ne doit se prendre qu’une seule quarte sur les cinq sixièmes
de la succession de Gaspard Second, advenus à Marie-Jeanne
Second, femme Gineste; et ce, en vertu du testament de 1744,
parce qu’elle fut prohibée par celui de 1781.
On oppose qu’elle ne peut se prendre par l’héritier fiduciaire,
mais les auteurs enseignent que ce n’est qu’au cas que la charge
de rendre soit à jour certain, et non de rendre au décès.
( D espeisses. t. 2, p.
, n.° 14)-
338
Les Gineste opposent qu’elle ne se cumule pas avec les jouis
sances. Ils ont raison.
" Mais ils disent eux-mêmes que Marie Muraillac n’a joui que
d ’une maison, jardin et grange. Ainsi il est question de savoir
si ces objets excèdent le quart de la succession ; en ce cas , il est
juste qu’en lui donnant. la quarte trébellianique comme proriélé distincte, à compter du décès, on déduise la portion des
jouissances qui excéderaient celte quarte ajoutée ù sa succession.
�7- L a .pension due par Le couvent d'A rgcntac.
En achetant un pré de Marie M uraillac, les religieuses d’A rgentac donnèrent un écrit, par lequel elles s’obligèrent de nour
rir une demoiselle , présentée par elle , pendant trois ans. Cei
écrit, resté dans la succession, était une créance.
Mais le sieur Gineste , qui a gouverné la succession bénéfi
ciaire à sa guise, et anirno dom ini, a donné aux religieuses ,
en 1770, un é c rit, par lequel il reconnaît, sans autre explica
tion , et sans époque, que cette promesse est acquittée.
Cette manière d’agir avait même été une des raisons pour les
quelles on avait offert preuve d’adition en 1770. Mais dès que
le parlement n’y vit pas un acte d’héritier, il reste au moins le
droit de demander aux Gineste le paiement de cette valeur.
Si la promesse eût été acquittée avant 1 7 6 1 , les religieuses
n’auraient pas manqué de la retirer, ou de prendre quittance.
L e sieur Gineste , qui a voulu la donner, a donc pris cela sur
son compte, comme v i s - à - v is l’abbesse de Brage'ac. On voit
bien qu’il a voulu par-tout éviter les révélations; mais y auraitil de la justice, dans l ’incertitude mên^e, de le dispenser du
paiement ?
8 et 9. ArticLes de dépense.
L e tribunal de Saint-Flour a rayé les articles 1 , 2,
5, 4 , 5,
6, 9 , 10 et 11 de la dépense du compte , rendu par les adver
saires en 20 articles.
Est-ce la preuve de la fidélité de l’héritier bénéficiaire ? Et ne
faut-il pas ajouter cette remarque aux moyens de déchéance?
Il faut répéter aussi que le jîarlement de Toulouse n’a pu
juger la qualité de bénéficiaire que pour le passé, et qu’il ne
savait pas en 17S9 , si le. compte serait rendu avec sincérité eq,
Ï
791 -
�( 34)
.ï
io . M obilier de M arie M uraillac.
II a été inventorié en 1761 ; mais les premiers juges n ’ont
voulu le faire composer que de ce qui restait dans cet inven
taire, après la distraction du mobilier délaissé par Gaspard Se
cond, en 17 3 1, parce qu’ils ont ajouté foi à l’allégation des ad
versaires, que Marie Muraillac en avait demeuré nantie.
Cependant on voit dans le contrat de mariage de la dame
Gineste, du
5 novembre 17 8 7 , que Marie
Muraillac sa mère,
lui remit tous les meubles et effets de Gaspard Second, inven
toriés en 1731. Donc voilà la preuve écrite qu’elle n’en retint
pas la possession.
On oppose que lors de ce contrat, et par uqe contre-lettre,
le sieur Gineste son gendre, lui donna pouvoir de les garder,
ainsi que des immeubles; mais que celte contre-lettre ne se
trouve plus.
Comment le sieur Gineste , qui conserva tant de papiers,
laissa-t-il perdre celui-là ? ou plutôt comment avait-on eu idée
tle faire une contre-lettre nulle et parfaitement inutile, puisque
rien n’obligeait de faire , par contrat de m ariag e, une remise
de mobilier, si on voulait aussitôt la révoquer?
A u reste, c’est là un point de fait à vérifier; et les appelans
ne veulent rien qui ne soit juste.
Mais aussi ils
ne
veulent pas s’en rapporter aveuglément à ce
que le sieur Gineste a fait faire en 1761, sans les appeler.
Que la Cour veuille bien prendre la peine de comparer les deux
inventaires-; et si les articles, qu’on peut dire.ressemblant, lui
identiquement les mêmes les appelans s’en rapportent,
s e m
b
l e n
t
,
* avec confiance, à sa conviction sur ce chef néanmoins impor
tant, de la contestation.
d é p e n s
.
Les héritiers Gineste ont porté en compte de dépense ceux
qu’ils ont faits au parlement de Toulouse.
�( 35 )
Ils',réussirent à ne pas y êlre condamnés en leur nom person
nel, quoique déboutés de leurs diverses demandes en péremp
tion , et de celles en renvoi. Mais alors on ne connaissait ni la
garantie donnée à l’abbesse de Brageac, ni l ’acquit de pension
donné au couvent d’A rg e n ta c, ni la contre-lettre du sieur Chantegrie , ni les nombreux articles rayés, que le sieur Gineste avait
projet de s’adjuger; il put paraître alors, ¡sinon en bonne foi,
au moins pas assez convaincu de mauvaise foi en sa qualité d’hé
ritier bénéficiah’e.
S ’il est déchu du bénéfice, comme tout le prouve, son compte
de dépense s’évanouit tout entier. Mais s’il était possible que ta
Cour ne le jugeât pas ainsi, au moins les dépens, faits depuis
1780 jusqu’à présent, doivent-ils être supportés par les adver
saires personnellement.
Ce n’est pas tout de les réserver sous prétexte d’une estima
tion relative à un seul article. Car le compte n’en sera pas moins
fixé pour tous les autres , et n’y eût-il que la radiation de neuf
articles sur vin g t, ou plutôt sur d ix-h u it , c’en est assez pour
convaincre la C our, que les adversaires ont élevé de mauvaises
contestations ; et dès-lors faire condamner les adversaires aux
dépens , en leur nom p erso n n el, dès à présent.
L ’article de la légitime de l’abbé Second l ’exige seul. Car il
est l’objet sur lequel les adversaires ont le plus raisonné, le
plus contesté , et chicané avec le plus d’opiniâtreté. C ’était en
effet l’article le plus im portant, car il suffira pour remplir
les condamnations en garantie dues aux appelans. L ’arrêt de
1789 l’avait placé le premier en ne considérant le compte à
rendre que comme un subsidiaire. A i n s i , la Cour, en jugeant
que les adversaires ont mal à propos contesté en cette partie
l’exécution de l’arrêt, leur fera supporter sans difficulté tous les
dépens déjà faits, et même réglera ceux de l’exécution du nouvel
a rrê t, comme il se pratique en matière de partage ; tout au plus,
e st-il vraisemblable, qu’elle réservera les dépens de cette exé
cution seulement.
�( 36 3
*' L es héritiers Daymard et Lacroix se flattent de n’avoir rien
proposé qui ne soit fondé, et sur-tout qui ne soit équitable.
- L eu r position , dans ce procès , est faite pour appeler la rigueur
de la Cour contre une famille qui leur conteste depuis si longtems le paiement d’une créance , que par honneur elle eut dû
payer depuis quarante ans. Q u ’elle jouisse, si bon lui semble ,
du privilège des lois, il faut bien le souffrir; mais que la suc
cession débitrice soit dissimulée, affaiblie, dénaturée même par
trois générations successives, c’est ce que la Cour ne souffrira
«
certainement pas. Car la bonne foi est de première nécessité
.pour tout le m onde, même pour ceux qui n ’attachent pas de
prix à respecter les engagemens de leurs auteurs.
M .e D E L A P C H I E R ,
A v o c a t.
M .e D E V È Z E , L ic e n c ié -A v o u é .
A
RIOM,
D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Daymard, Marie. An 6?]
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An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
successions
saisie
rentes
censive
vie monastique
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Mémoire pour Marie Daymard, veuve Lacroix, et Marianne Couderc, femme de Durand-Rieux, appelantes; Contre Emeric, Marie, Marianne Gineste et autres, intimés.
Publisher
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De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 6
1741-Circa An 6
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0311
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brageac (15024)
Pleaux (15153)
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rentes
saisie
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vie monastique
-
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64554d5741fd2bf8bbf1f7480bb9a950
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Text
«
COUR
M
É
M
O
I
R
E
IMPÉRIALE
DE R IO M .
EN
R E P O N S E
i . re C h a m b r e .
POUR
L e Sieur
J e a n - J oseph
J O U B E R T , intimé;
C O N TR E
L e Sieur J
ean
-
Jo sep h
C O U R B Y -C O G N O R D ,
appelant.
l
e
sieur Courby-Co gnord a fait gémir deux fois la
presse pour défendre, suivant lui, son honneur et sa
libellé.
En appelant ainsi l’attention publique, il a du se
proposer d’établir que sa conduite était à l’abri de
toute censure, et qu’il était injustement l 'o bjet d’une
demande en stellionat.
Mais ce bu t, louable en lui-mêm e, s’il était inspiré
par un sentiment noble, a-t-il été rempli?
L e sieur Courby a-t-il dissipé les soupçons que font
naître ses propres dires? s’est-il lavé des inculpations
�( 2 )
qui'lui ont élé faites? a-t-il mérité, a-t-il obtenu les
suffrages flatteurs de l’opinion et l’approbalion hono
rable de la Cour ?
«
C ’est ce que l’avenir apprendra.
On reproche amèrement au sieur Joubert d’avoiu
méconnu les droils du sang et les devoirs d’une
affinité religieuse; de s’être montré en n e m i, tandis
qu’il devait être protecteur.
Mais ces titres qu’invoque le sieur Courby-Cognord,
ne les a-t-il pas violés cent fois lu i- m ê m e , en abusant
de l’affection de son oncle pour se procurer des res
sources et fournir à ses dissipations; en se débarras
sant, par des moyens frauduleux, de dettes énormes,
pour en charger celui qui le traitait en père ; en ob
tenant chaque jour de nouveaux sacrifices sous la foi
de ventes trompeuses ou de gages illusoires; en en
levant à ce créancier légitime , par des manœuvres
obliques, la possibilité de récupérer la moindre partie
des deniers quJil a su lui arracher; en empoisonnant
enfin, par la plus noire ingratitude, ses nombreux
bienfaits, du fiel de la calomnie.
Et il ose après c e l a , réclamer sa tendresse et sa
bienveillance !
Les motifs du sieur Joubert, qui n’avait pas cru
devoir répondre
au premier cartel de son n e v e u ,
n ’ont pas été appréciés par celui-ci : enhardi par cet
acte de modération, il n ’a pas craint d’avancer, contre
son oncle , des imputations odieuses et les plus h a
sardées.
Dans la nécessité de faire connaître à la Cour l’origine
�(3)
et les détails de la cause soumise à sa décision, l e —
sieur Joubert prouvera qu’il respecte encore les liens
qui rattachent à son adversaire, en se dispensant de
dérouler un tableau dont lui-même aurait à rougir,
et en se bornant à présenter les faits dans toute leur
pureté.
Père d’ une famille nombreuse, propriétaire d’une
fortune • assez considérable et liquide, éloigné des
affaires: auxquelles il est parfaitement étranger, et
n’ayant d’autre occupation que celle de faire valoir
ses propriétés rurales, le sieur Joubert vivait heureux
à la campagne qu’il habite, lorsque son repos a été
troublé,' ’sa1"fortune ébranlée par ses relations avec
le sieur Courby-Cognoi’d.-1
‘ :i
rf Celui-ci , qui était entré dans le monde sous des
auspices assez brillans relativement à la fortune, et
que quelques succès dans les affaires avaient aveuglé,
ne crut pas la ville d e Thiers un théâtre assez vaste
pour ses spéculations. Il transféra son domicile à Clermont, où beaucoup de causes, qu’il est mutile de rappe
ler , le jetèrent dans la gène et dans un discrédit absolu.
Pour couvrir ce que peuvent avoir de répréhen
sible ses dissipations, le sieur Courby en indique la
source dans la piété filiale; si on veut l’en croire,
les secours qu’il a prodigués à son père ont préparé
sa ru i rie.
. Serait-ce par oubli que le sieur Cou rby a
tu le
prix qu ’il mettait h ses bienfaits envers son père?
ils furent considérables sans doute, ces bienfaits, puis-
�que ce dernier, accablé de leurs poids, n’a pu les
reconnaître qu ’en se désaisissant bientôt de toutes ses
propriétés.
Faut-il également attribuer à la modestie du sieur
Couib y-Cognord le silence qu ’il a gardé sur le mode
de sa mise en possession du bien de Bicon, en usant des
mesures les plus coercilives, parce qu’il savait que
son père n’avait pas les fonds nécessaires pour faire
enregistrer une contre-lettre à la vente authentique.
Ce n’est donc point à son père que le sieur Courby
doit imputer le dérangement de sa fortune; la cause
en est moins belle, et il serait difficile de l’excuser.
L a première négociation qui eut lieu entre Joubert
et Cou rb y, eut pour objet la cession de cinq contrats
de rente appartenant h la dame Courby ; le sieur
Joubert ne se décida à faire cette acquisition que pour
procurer à son neveu le prix de ces contrats dont
il disait avoir le plus grand besoin. On peut même
noter sur ce point une particularité assez remar
quable. Postérieurement à cette cession le sieur Courby
n ’en a pas moins touché le revenu de la plus forte des
rentes, parce qu’au moment de l’échéance du terme,
le transport n’avait pas été notifié aux débiteurs. Sa
quittance le contasfe.
Peu de tems après, le
3 octobre 1806, Cou rby-
Cognord vendit à J o u b e r t , par acte sous seing-privé,
un jardin et un pré appelés de l’A b b a y e , qu ’il avait
acquis de son père. L e prix convenu fut de 8,000 fr.
qui furent payés en huit effets de 1,000 fr. souscrits
par l’acquéreur et livrés au vendeur.
�(5)
C ’est postérieurement, ainsi, ’ qu ’on le dira bien
tôt, que cet acte de vente a reçu une forme authen
tique.
L e sieur Courby, qui, depuis l’an n , s’était rendu
acquéreur du bien de Sarliève , avait eu recours à des
emprunts pour payer une partie du prix; pressé par le
banquier qui lui avait fourni des fonds, poursuivi d’ail
leurs pour d’autres dettes personnelles et exigibles, il
s’adresse au sieur Joubert pour le tirer de l’embarras
où il se trouve : il lui annonce qu’il est perdu, malgré
sa fortune brillante, s'il ne lui prête son appui; il ininvoque tous les titres qu’il peut avoir à ses bienfaits,
l ’intéresse à sa position, et obtient enfin de sa faiblesse
et de sa complaisance la promesse de venir à son secours.
L e crédit de Courby était é pu is é, sa signature re
butée; il avait besoin de ressources considérables. L e
sieur Joubert souscrivit, en conséquence, le 16 no
vembre 1806, pour
38 ,ooo fr. d’eifets à l’ordre du
sieur Courby qui les retira, et qui, de son côté, remit
des effets, pour pareille somme, à une échéance plus
rapprochée , pour tenir lieu de garantie. Dans le nom
bre se trouve
il est parlé à
Les places
circuler, des
la lettre de change de 10,000 fr. dont
l’art. 5 du mémoire de Courby.
,
de Thiers et de Clermont virent alors
mains de Courby seul, des lettres de
change du sieur J o u b e rt, pour une somme considé
rable. Quelle pouvait en être la cause?
Joubert n'avait rien acquis de C ou rby , que l’objet
modique dont on a parlé ; il lui avait encore moins
emprunté. Acquéreur depuis peu de lems du domaine
�(6)
des Baraques, où il avait fait des constructions impor
tantes Joubert n ’élait pas lui-même en situation de
placer des fonds. C'est donc sans fondement, que le
sieur C ou rby , familiarisé avec le mensonge, a avancé
dans son m é m o ire , et pour la première fois, que son
oncle avait été un des prêteurs auxquels il avait eu
recours, et que son taux n’avait pas été plus modéré
que celui des autres.
Cette assertion, aussi faussé1qu’indécent.e, serait dé
mentie hautement par tous les liabitans de Thiers ,
qui savent parfaitement que les effets distribués par
Courby, et revêtus de la signature de Joubert, lui ont
été donnés sans intérêt et à titre gratuit.
Cou rby ne fut pas dans cette circonstance, comme
dans beaucoup d’au tres, exact à. remplir ses engage^
mens; car le sieur Joubert fat obligé de solder à l’é
chéance plusieurs de ces effets.
L e s bienfaits du sieur Joubert ne se bornèrent pas
à' cette unique opération. D e
nouvelles demandes
furent faites : elles furent accueillies par de nouveaux
effets ou des cautionnemens.
Rien n’était négligé pour obtenir des ressources;
la dame C o u r b y e l l e - m ê m e secondait parfaitement
son mari dans ses projets, dans ses spéculations et dans
ses moyens. Des voyages fréquens et des séjours pro
longés au Brasset, habitation du s.r Joubert, avaient
toujours pour objet quelques sollicitations nouvelles. Ce
dcmicir s’abandonnait d'autant plus facilement à 1 im
pulsion de son cœur franc et généreux, que cl une part
ses bons offices profitaient îi l’amilié, et que de 1 autre
�(7)
la fortune apparente de C o u r b y , propriétaire de Bicon
et de Sarliève, ne lui laissait aucune crainte sur les suites
de sa complaisance.
Il était loin alors de suspecter sa loyauté, Seul il
était dans l’aveuglement.
'
<, '
. !• i.
Pour d o n n e r , en e ffe t, une idée de l’opinion que
l’on avait du sieur C o u rby-C o gn ord , dans sa ville na
t a l e , il suffira de rappeler le trait suivant : ,
,
!
A u commencement de 1807 , Courby arrive au
Brasset, où il avait été précédé par son: épouse, qui.,
munie de divers effets, avait tenté vainement depuis
plusieurs jours, de les faire endosser par le s.r Joubert,
atteint de la goutte à la main droite. On redouble
d ’efforts. La dame Joubert, séduite par des prières et
des larmes, sollicite èlle-même, et arrache à son mari
un consentement. C o u rb y , satisfait, s’élance sur son
cheval, et vole à Thiers présenter ses effets- L e ban
quier les refuse ; il méconnaîtra signature tremblante
de Joubert. Courby insiste vainement; son attestation
est méprisée; et il est forcé de revenir le même jour
au Brasset, auprès de son oncle qui lui reinet un billet
ainsi conçu.: i 5 février 1807. — J ’a i la goutte, j e n a i
pas pu nueux signer, J o u b e r t .
';
Ce billet fut joint à la lettre de change. ¡Le sieur
Joubert ayant été contraint de payer, comme endos
seur, et en vertu de jugement du tribunal de c o m
merce, qui condamne C o u r b y , tireur-, à l e ’garantir,
l’ un et l’autre lui furent remis: i l ’ en est porteur.
Ou profitera de celle circonstance, pour répondre,
une fois pour toutes, à une inculpation é!t ràngëf que
�(8)
le sieur Courby fait; à son oncle, dans une note h la
page 18 de son mémoire. *
En supposant que le sieur Joubert eut été excité
Jcontre son neveu, comme on veut le dire, p a r'u n e
colère a v e u g le , et qu ’il eût-voulu le contraindre par
corps, il n'aurait eu besoin de pratiquer aucune ma
nœuvre, pour se procurer contre lui une lettre de
cliange, afin de le poursuivre devant les tribunaux de
¡commerce. Pour son propre malheur, il n ’en a que
trop reçu. Forcé^de1payer pour son.neveu, il a obtenu
plus de dix jugemens emportant contrainte par corps,
sans en mettre un seul à exécution. Il peut les repré
senter encore.
•
i l :
Que le sieur Courby abandonne donc le vaste champ
du subterfuge et dé la calomnie!
r
.j
Cependant Joubert exige'que l’on donne une forme
authentique à la,vente du
3 octobre 1806. Cet acle
fut,reçu par Tourrau d, notaire, île! 11 avril 1807; il
eshun de ceux qui établissent les stellionats du sieur
Courby.
Il vend le jardin et le pré de l’A b b a y e , avec pleine
et çntièrç garantie, sans déclarer les hypollièques nom
breuses qui en absorbaient plusieurs fois la valeur, et
rendaient sa propriété incertaine et précaire.
Il reconnaît que le prix en a été payé avant l’acle.
..
Il oblige spécialement, à l’exéculion de la v e n l e ,
un ténement de terre, appelé le champ de la Honche,
faisaijtiparlie du domaine de Bicon ; et il 110 déclare
point les hypothèques qui grevaient cet liérilagc.
.Cependant} comnie dépendant du bien de 13icon , il
était
�(9)
était frappé de treize inscriptions de la part des créan
ciers du sieur Courby père , se portant, en totalité, à
72,348 f r., et de sept inscriptions prises par les cré a n
ciers personnels du sieur Courby-Cognord, toutes exi
gibles , pour une somme de 100,000 francs.
Ce même domaine était également frappé de l?h y pothèque légale de la dame Courby. L e vendeur la
dissimule également nonobstant l’obligation expresse
que lui imposait la loi d’en faire la déclaration.
Pour pallier sa conduite , le sieur Courby prétend
que la venle de ces jardin et pré n’a pas élé réelle ;
qu’il n’en a jamais reçu le prix ; et que l’abandon
qu ’il en a fait n’a eu d’autre objet qu’ une indemnité
exigée par Joubert , à raison de cautionnemens par
lui fournis.
• j
. . - r
, Il faut encore prouver le mensonge sur ce point.
A la vérité l ’acte énonce que le prix a élé reçu avant
ces présentes j mais la, raison, s’en trouve facilement.
L a vente de 1807 n’a fait que remplacer celle du
3 octobre 18 06, qui avait été payée au moyen d ’efï'els
souscrits par Jo u b e rt, et par lui soldés depuis. Lors de
la. vente authentique, le sous seing-privé, devenu inu
tile fut déchiré. L e notaire et les témoins pourraient
1 attester. Mais ce qui vaut mieux encore que toutes
lesi attestations possibles, c ’est l’existence des efiets
souscrits le 3 octobre , et qui , par un hasard heureux ,
se trouvent encore entre les mains du sieur Joubert.
Indépendamment de cette circonstance matérielle et
concluante, les clauses de l’acte ne repousseraienl-çlles
pas l’asserlion vaine du s.r Courby ? Si réellement il eut
3
�(
*)1â
10
)
4
fait un don gratuit du jardin h son oncle , se seraitil soumis aux chances d’ une garantie formelle , el à
loules les conséquences d’ une hypothèque spéciale?
Joubert lui-même recevant l’immeuble h titre de li
béralité, eût-il été si exigeant pour ses sûretés?
Mais s’il fallait encore des témoignages plus imposans sur la sincérité de la vente du 11 avril 18 0 7 ,
le sieur Joubert en invoquera qui ne seront point
récusés par son neveu.
L e sieur Courby-Cognord , pour qui la reconnais
sance est un fardeau dont il se débarrasse facilement,
s'était permis quelques propos sur le compte de son
oncle qui en est instruit. Une lettre portée par un
domestique à Courby lui reproche vivement l’indi
gnité de sa conduite : celui-ci s’empresse de démentir
les propos et les faits e u x - m ê m e s . Sa lettr e, datée
du 9 mai 1808, fait disparaître plus d’une des mille
imputations fausses auxquelles il s’est livré dans son
mémoire (1).
( 1 ) Y o i c i le contenu de la le ttre , telle qu’elle est éc rite :
Clermont, te 9 mai 1809.
M on cher o n c l e ,
.
J e suis bien surpris, qu’à T h ie r s , l’on me fasse parler quand
je d o r s , que je vous ai donné d ix m ille Hures pour me contre
signer des effets, ensuite le jardin et puis douze cents livres.
Je n’ai jamais parlé de cela à personne, et que cela n'est pas.
D ans le cas de dire cela. J e passerai au Brasset en allant à Thiers,
pour prendre jour pour te faire compter le montant du billet
que tu as endossé pour m oi et f a i t pour moi.
Je te salue am icalem ent,
C o u bby -C ognord.
�(
II
)
L e sieur J o u b e rt , qui avait payé un grand nombre
d’effets pour le compte de son n e v e u , et qui luimême , à raison de c e , avait eu recours aux emprunts ,
désire être remboursé; il le sollicite viv e m e n t, mais
sans succès; n'obtenant rien, il fait protester et m e
nace de poursuivre.
Dépourvu de fonds , Courby propose à son oncle
de lui abandonner en paiement l’effet d’un bail à ferme
de Bicon ; Jo ubert, pressé de Irouver des ressources,
acceplela proposition; et Courby lui fait cession de cinq
années du prix de la ferme du bien de B ic o n, qui
étant annuellement de 6 , 25 o francs, formait un total
de 3 1,260.francs.
L e transport ne porte, à la vé rité, le prix qu’à la
somme de 27,000 francs; mais il fallut nécessaire
ment calculer les intérêts des différens termes annuels
du bail, qui n’arrivaient qu’à des échéances successives
et éloignées. Celle différence du prix à la somme cédée,
démontre que le taux d’intérêts du sieur Joubert n’a
pas été excessif.
L e sieur Courby n’a pas manqué de renouveler,
sur cette cession, son assertion bannale, q u ’ une partie
du prix servit d’indemnité pour des cautionnemens
postérieurs.
Il avoue que , dans la réalité, il reçut i 5,ooo fr. en
effets de commerce; mais il ne prend point pour a r
gent comptant les effets dont le sieur Joubert lui fît
remise, et qu’il n ’avait pas payés. U ne de ses letIres,
du 6 mai 1808, établit cependant qu’avant le trans
p o r t , il se reconnaissait débiteur de son oncle, puii-
4
�qu'il lui demande comment il fa u t qiùil fa sse pour
le payer • il Lui apprend qu’il a des terres à vendre à
Sarlieve■q u i l ne se tient plus que pour 2,000 f r . , et
que d ’un moment à l'autre il peut terminer. Il se plaint
enfin des poursuiles exercées contre lui.
11 est très-vrai que le même jour, Joubert sous
crivit des cautionnemens sur cinq effets, s’élevant à
10,000 f r.; mais ils ne firent point partie du prix d e l à
cession, et si, dans la suite, il a exigé qu’on lui fît
compte de ces effets ( page 9 du m ém oire ), c ’est par la
raison bien simple qu'il les a soldés comme endosseur,
et qu’il devait en recouvrer le prix contre le tireur.
Il est porteur des billets portant acquit de ses deniers.
Un nouveau bienfait du sieur Joubert envers son
neveu résulte encore du cautionnement qu ’il lui prêta
le 8 juillet 1808; ce cautionnement est devenu la
source et l’occasion de tous les désastres qui pèsent
sur lui.
Par cet a c t e , passé h Clermont, Courby reçoit du
s.r D u m a y , banquier, une somme de 26,000 liv ., qu’il
emploie à payer une parlie du prix resté dû sur l’acquisition par lui faite des biens de Sarliève. L e sieur
Deslradut,
qui
touche les fonds, subroge le sieur
D um aij à,son privilège de vendeur.
D ’un autre côté, Courby et Joubert cèdent conjoin
tement et solidairement à D umay 26,000 liv. sur ce
qui peut être dû au dit sieur Courbij des prix en prin
cipaux et intérêts des ventes par lui consenties à plu
sieurs particuliers de diirérentes parties des biens qui
composent le domaine de Maison-JS^euve.
�( >3 )
p
Courby donne pour hypothèque le bien de Bicon
qu'il présente comme Libre, puisqu’il ne déclare au
cune des hypothèques inscrites qui, à cette épo qu e,
le grevaient de plus de 290,000 fr.
11 garde également le silence sur l’hypothèque lé
gale qui, dans la suite, a été évaluée par la femme
à 110,000 fr.
On a reconnu dans tous le cours de l’instance, que
le sieur Joubert n’avait paru dans cet acte que comme
simple caution; on le répète encore dans le mémoire,
et l’on entreprendrait en vain de le nier, puisque toutes
les expressions de l’acte tendent à manifester cette
vérité.
11 est bon d’observer que dans toutes les négocia
tions relatives au bien de M ais on -N e u ve , ainsi que
dans beaucoup d’autres, C o u rb y - C o g n o rd , que l’on
représente comme un jeune homme sans expérience
( page 48 du mémoire ), a trompé tous ceux qui ont
eu le malheur d’y prendre part.
Il a trompé les acquéreurs de ce b i e n , en le leur
vendant comme sa propre chose; et par ce m oye n, il
est parvenu ¿1 toucher la plus grande partie du prix.
Dans l ’acte du 8 juillet, il cède même à D u m a y
les 26,000 liv. comme une créance personnelle.
Enfin il a trompé tout à la fois et le sieur D u m a y ,
cédalaire, et Joubert, sa caution, en ne leur offrant
pour sûreté de ses engagemens qu ’une hypothèque
illusoire.
Comment ose-t-il, après c e l a , répéter que le cau
tionnement de son oncle ne lui a été accordé qu'à
ï
�( i4 )
des conditions onéreuses (pag. 8 du mémoire)! Peutil espérer d’en imposer par ses déclamations ? Quels
sont ses litres pour inspirer la confiance?
Sa mémoire ne lui rappellerail-elle pas, au contraire,
qu’après la clôture de la cession du 8 juillet, le sieur
D u m a y lui dit en termes énergiques, et en présence
de témoins , que jamais il ne pourrait ressentir et té
moigner assez de reconnaissance au sieur Joubert, pour
les services qu ’il en avait reçus.
Cette observation n ’a pas fructifié : le terrain était
ingrat.
Postérieurement J o u b e r t , contraint de payer de
nouvelles lettres de change, pour le compte de son
neveu , se /ait consentir par ce dernier une obliga
tion de 10,000 francs. Bientôt il solde au sieur Grangeon une autre somme do 10,000 francs, montant
des effets qu’il avait caulionnés lors de la cession du
bail de Bicon.
D ’un autre côté, D u m a y qui avait agi contre les
acquéreurs de M aison -N euve, en vertu de la cession,
éprouva de la résistance de leur part; ils avaient dé
couvert que ce bien était dotal. Ils refusèrent de payer.
Un jugement du tribunal de Thiers les autorisa à re
tenir en leurs mains le prix de leur acquisition. Alors
le sieur D u m a y , qni veut être p a y é , s’adresse à son
cédant.
Des obligations, des lettres de change n’étaient pas
de l'argent. Joubert, pressé, poursuit à son tour Courby;
il fait protester différons effets. Courby sollicite des dé
lais pour vendre le bien de Sarliève , cui’il avait a f -
�( .
5)
fiché dequis long-fems; il le lui offre à lu i- m ê m e ; une
correspondance active s’établit en treux. Trois lettres,
sous les dates des 10, 12 et 27 avril, justifient tout à
la fois et la nature des propositions du sieur Courby à
Joubert, et la réalité des créances de ce dernier. (Voir
ces lettres à la fin du mémoire.)
Beaucoup de personnes peuvent se rappeler qu'à
celte époque les acquéreurs qui se présentèrent furent
éloignés par les prétentions outrées du sieur Courby,
qui, en exagérant les revenus du bien, le portait à une
valeur excessive. Lassé d’attendre, le sieur Jo ubert,
conseillé de se rendre lui-même acquéreur, pour as
surer au moins ses créances personnelles, fit enfin l'ac
quisition de Sarliève, par acte du 9 juillet 1809.
L e sieur Courby lui vendit le corps de bien situé
à Sarliève, tel qu’il l’avait acquis du sieur Destradat,
par les ventes des 29 messidor an 10 et 9 nivôse an
11 , à l’exception des objets vendus au sieur Dumay.
H vendit également différons objets qu’il avait réunis
h sa propriété , et notamment une vigne et terre pro
venues du nommé C h o sso n , suivant les actes reçus
D o h j, notaire au lieu de Cournon.
Les prix de ferme de l’année courante et la récolte
qui pouvait alors être pendante, firent partie de la
vente. Cou rb y ne se réserva que la récolte de trois
septerées de luzerne.
L e prix de vente fut porté ¿1 74,074 fr., dont 4,074 fr.
pour les récoltes et le prix de ferme.
I,’acquéreur est chargé de supporter les inscriptions
conservatoires prises sur le bieïi vendu parles nommés
�(
16
)
Cornez, d’Auzolles, Lachenal et autres, ayant pour
objet la garantie des ventes consenties par le sieur
C o u rb y, des biens de son épouse. Il doit supporter de
mêm e quelques autres inscriptions conservatoires prises
par des acquéreurs nominativement désignés.
On lit encore que le vendeur a hypothéqué spéciale
ment , pour la garantie de la vente, son bien de Bico n,
lequel bien est déjà grévé de différentes hypothèques
dont l’acquéreur déclare avoir connaissance.
Enfin, F a d e est terminé par l’engagement que con
tracte le vendeur de faire la remise, dans le délai d’ un
mois, de son titre d’acquisition, de la quittance finale
de sa libération vis-à-vis le sieur d’Estradat, et des baux
à ferme de la propriété vendue.
Il n’est pas une seule clause, dans cet a cte , qui ne
constitue un stellionat, ou qui n’ait donné lieu à un
acte de mauvaise foi de la part du sieur Courby.
i.° L e sieur Jo ubert, qui a acheté le bien de Sarliève,
tel qu il avait été acquis du sieur cV E slradat, a néan
moins été actionné par ce dernier, en désistement de
six septerées de terre, faisant partie de l’un des objets
compris dans la vente du g nivôse nn 1 1 ; vainement
il a appelé en garantie le sieur C o u r b y , son vendeur;
celui-ci ne s’est pas mis en peine de faite valoir sa
v e n t e , et depuis p e u , un jugement du tribunal de
Clermont a ordonné le désistement.
2.0
D e tous les objets particuliers qui avaient été
réunis par le sieur Courby au bien principal de Sarliève, et qui faisaient partie delà vente, le sieur Joubert
n ’a joui quo de six quartelées de terre provenant d'un
nommé
�'nommé Beldon; il n’en a point connu 'd’autres, et
quelques recherches qu’il ait faites, il n’a jamais pu
parvenir à découvrir La vigne et la terre provenues du
nommé Chosson, et qui avaient été notamment com
prises dans la vente. Il y a plus, c’est que nonobstant
la déclaration formelle que les actes d ’acquisition ont été
reçus par D o ly , notaire à Cournon, le sieur Joubert
ne craint pas d’affirmer qu’il n’en existe point.
Ainsi le sieur Courby a évidemment commis un
stellionat, en vendant des immeubles dont il savait
n ’être pas propriétaire , puisque jamais il ne les a
acquis.
3.° Les prix des fermes faisaient partie de la vente;
le sieur Courby ne manqua pas d’en retenir les baux
bien au-delà du délai dans lequel il devait en faire
la remise, nonobstant une sommation de les délivrer:
il lit plus, il eut l’indélicatesse d’en toucher une grande
partie. Les fermiers ont ses quittances.
A u lieu de trois septerées de luzerne qu’il s’était
réservées, il en lit couper huit.
4.0
La iixation du prix de vente, porté pour les im
meubles à 70,000 fr. n’est pas la moindre des fraudes
de Courby. Elle est le produit de saJidêUtê dans 1 in
dication des revenus. Sa lettre du 10 avril 1809 apprend
qu’il les portait à 5,686 fr. Un tableau justiiicatif et
détaillé qu’il remit, avant l'acquisition, au sieur Jou
b e r t , qui en est porteur, fait mention de baux alors
expirés, d’autres dont les prix'étaient enilés, ou qui
même n’avaient jamais existé.
L e sieur Joubert croit au surplus inutile d’obseivcr
5
�que ce p r i x , tout énorme qu’il est, a été payé
intégralement, soit par l’abandon de ses créances per
sonnelles, soit par des délégations sur des créanciers
qu’il a soldés, dont il a les quittances. Cela est établi
par la contre-lettre dont on a donné copie : elle prouve
même par le calcul des sommes que le prix réellement
payé par Joubert monte à 76,625 fr., en ne comptant
même le prix de la cession du bail de B i c o n , que
pour
25 , 5 oo fr. ; aussi fut-il expliqué par Cou rby,
qu’il ne serait fait aucune répétition de part ni d’autre.
5.® L ’acquéreur a bien été chargé de supporter
quelques inscriptions conservatoires qui frappaient le
bien ven d u, mais il a dû naturellement trouver dans
cette obligation spéciale qui lui était imposée, l’as
surance qu’il n’en existait point d’autre, et la dispense
formelle d’en souffrir un plus grand nombre.
Ce p e n d a n t, indépendamment de ces inscriptions
conservatoires, il en existait, au moment de la ve n te ,
vingt-cinq autres, qui toutes avaient pour objet des
créances exigibles et personnelles à Courby, et dont
l ’évaluation se porte ¿1 la somme énorme de 2 1 5,000 fr.
On ne peut douter que le but de C o u r b y , en trom
pant son acquéreur sur les hypothèques qui grevaient
Sarliève, ne fût d’obtenir quittance des dettes dont
celui-ci était personnellement créancier, et de se dé
barrasser, par l’eilet des délégations de celles de ses
autres dettes qui lui parurent les plus pressantes. Joubert
se serait-il dépouillé, s’il eût été instruit ?
6.° L e sieur Courby a également dissimulé les hypo
thèques légales qui frappaient soit le bien vendu, soit
�( I9 )
l’objet qu’il présentent pour sûreté de ses engagemens ;
c’est une vaine subtilité de conclure de la déclaration
faite par J o u b e rt, qu’il avait connaissance des hypo
thèques qui grevaient Le domaine de B ico n , la consé
quence qu ’il connaissait aussi les hypothèques légales
non inscrites.
Comment donc, après tant de supercheries, de dol
et de fraude , le sieur Courby pourrait-il espérer d’é
chapper à la peine du stellionat ?
L e sieur Joubert connut bientôt la profondeur de
l’abîme dans lequel il s’était précipité, par ses rela
tions avec son neveu.
L e prix des jardin et pi*é de l’A bb aye , qu ’il avait
vendus au nommé Gaudissier, devint l’objet d’un
ordre ouvert entre les créanciers de Courby père et
ceux de Courby-Cognord. Ce qu’il y a de plus re
marquable , c’est que ce dernier y figure en qualité
de créancier poursuivant, du chef de sa m è r e , et il
se fait colloquer par privilège pour les frais d’ordre,
sur le prix de la revente d’un immeuble qu’il avait vendu
lui-même , tandis que son acquéreur perd tout à-Iafo i s , la chose, le prix et le gage qui lui avait été
promis.
L e sieur Joubert , déçu de l ’espoir de touc her le
prix du jardin , fut réduit à la fâcheuse nécessité de
so dépouiller lui-même, par l’aliénation de son do
maine des Baraques. La valeur de cette propriété,
qui s’éleva à 46,080 francs, fut employée ¿1 solder
lesxréanciers délégués par la vente de Sarliève , et
6
�(
20
) „
partie de la créance du sieur D u m a y , portée dans la
cession de 1808.
Ces sacrifices considérables n’en provoquèrent point
de semblables de la part du sieur Cou rby, qui depuis
long-teins s’inquiétait peu de ses engagemens. Les res
sources pécuniaires de Joubert, bientôt épuisées, furent
insuffisantes. Pressé vivement par D u m a y qui le pour
suivait comme caution solidaire, et l’avait fait e x é
c u te r, il sollicita son neveu de prendre des mesures
convenables pour terminer ses affaires.
Courby propose alors de céder à son épouse le bien
de B i c o n , pour remplacer le domaine de MaisonN e u ve par lui vendu, et pour acquitter ses autres re
prises. Celte aliénation, disait-il, en assurant tous les
droits de sa fe m m e , consoliderait la vente qu’il avait
faite de son bien dotal; les acquéreurs deviendraient
sans intérêt à maintenir les inscriptions conservatoires
prises sur Sarliève qui serait dégrèvé d’autant; ils s’em
presseraient de verser le prix de leur acquisition, qu’on
emploierait à éteindre la cession du 4 juillet 1808,
soit entre les mains du sieur D u m a y , pour ce qui lui
restait d û , soit dans celles du sieur Joubert, pour la
porlion qu’il avait payée lui-même.
Ce projet fut alors goûlé par Joubert qui concourut
à son
exécution , d’après l’assurance formelle que
Cou rby mettrait tout en œuvre pour arriver ¿1 ces
résultats. Mais celte convention qu ’on v e u t , pour
eu déduire un moyen de c a u s e , faire remonter ¿1
l ’époque de la venle de Sarliève, qui avait eu lieu
cinq mois auparavant, n'a été réellement arrêtée que
�(
21
)
^^3
long-lems après, et lorsque le sieur J o u b e rt , éclairé
sur les manœuvres dont il avait été v ic t i m e , et sur
sa véritable situation, se vit contraint d’adopter aveu
glément toutes les mesures qui paraissaient devoir le
préserver du naufrage.
Les pièces qu’on a publiées (pag. 16 du mémoire) dé
mentent même formellement l’assertion du s.r Courby,
puisque la première a pour date le 5 novembre 1809,
antérieure, de trois jours seulement , à la vente qui
est du 8, et que la seconde pièce lui est postérieure.
Celte vente du bien de Bicon à son épouse ne fu t,
de la part de Courby, qu’ une nouvelle fraude qui
mit le comble aux désastres de Joubert, en paralysant
tous les moyens d’exécution qu’il pouvait avoir contre
son neveu.
D ’une p a r t , l’acquisition de Sarliève ne lui offrait
aucune ressource, puisque les inscriptions considéra
bles qui grevaient ce bien, enlevaient au propriétaire
la possibilité de l’aliéner utilement.
D ’un autre c ô t é , C o u r b y , infidèle à sa promesse,
n ’agissait point pour faire cesser les motifs que les
acquéreurs de Maison-Neuve avaient eus pour retenir
en leurs mains le prix des ventes, cédé au sieur D u
may. 11 avait même laissé confirmer par arrêt le ju
gement qu ’avaient obtenu les acquéreurs au tribunal
de Tliiers.
Enfin, le bien de Bicon était devenu un gage pu
rement illusoire , soit par l’effet des inscriptions dont
il était frap pé, soit par l’aliénation qui en avait été
faite à la dame Courby.
�(
22
)
Telle élail la position critique de Joabert. Courby
cependant sembla prendre plaisir à l’aggraver, en lui
enlevant jusqu’aux plus iaibles ressources auxquelles
il aurait pu s’attacher.
Il fait d’abord requérir, par son épouse, deux ins
criptions sur le domaine de Sarliève, à raison de ses
droits, reprises et gains éventuels, le tout évalué à
1 10,000 francs. Ces inscriptions sont bientôt suivies de
sommations hypothécaires, notifiées les 24 juin et 19
août 1811 par la dame C o u r b y , alors séparée de biens ,
sous Cautorisation de son mari.
11 cherche à soustraire ses récolles de Bicon , par
une cession simulée, qu ’il en fait le i er. avril de la
même année à un nommé M a rtin et, tapissier à Clermont ; il y comprend même le mobilier qui garnissait
sa maison.
S’affranchissant de toute pudeur, Courby pousse
plus loin ses précautions. Il prévoit que le décès de sa
m ère, en lui attribuant une porlion de son hérédité,
pourrait offrir un gage à ses créa liciers ; rien ne l’e m
barrasse pour les en frustrer. 11 se rend auprès du lit
de sa mère agonisante, lui lait souscrire un acte sous
seing-privé, par lequel elle déroge à tous les réglemens
de famille qui avaient eu lieu entre ses enfans, et fait
une démission, au profit de tous, de l’universalité de
ses biens et droits. C e u x - c i consislaient en reprises
considérables contre son m ari, liquidées par jugement.
Muni de cet acte, Courby s’empresse d’en recueillir
reflet'; il en passe cession authentique, le 6 novembre
1810, en faveur de Joseph Martinet, son prête-nom
�(2
3)
ordinaire. Il est bon d’observer que sa mère existait
encore à cette époque. Quoique le vice d’un acte sem
blable soit é v i d e n t , il n’en démontre pas moins les
intentions coupables de "celui qui l’a souscrit.
Ce n’est pas tout : il craint d’avoir laissé quelque
chose en prise. Créancier de Philippe C o u r b y , son
f r è r e , d’une somme de 1 8,700 fr., que celui-ci lui avait
déléguée à prendre sur Pierre C o u rb y , leur père com
m u n , il veut encore c h erch era dénaturer sa créance,
et feint de s’en dépouiller par acte notarié du r 1 février
18 11. Pour cette fois, soit qu’il n’osât plus user de la
complaisance de son cédataire en litre, Martinet, soit
que celui-ci lui refusât son entremise, il alla découvrir
un sieur Gervy, charron à Clermont, qu’il constitua
son cédataire, moyennant une somme de 5 ,000 f r . ,
prétendue payée lors de l’acte.
Après de pareils faits, le sieur Courby voudrait-il
se présenter encore comme un jeune homme sans
expérience? Persuadera-t-il qu’il a été la victime d’un
oncle qui n’aurait pris la connaissance des a flair es que
dans le tumulte des camps, où il a figuré avec hon
neur, et à la campagne, qu’il a constamment habitée
depuis? Certes, ce
bien des coups de
Cependant lout
Jouberl. D u in n y ,
ne sont pas là de simples essais, mais
maître.
se réunissait pour accabler le sieur
qui n ’était point p a y é , exerce les
droits et privilèges du sieur d’Estradat, auxquels il avait
été subrogé par la cession du 8 juillet 1808, et pour
suit Joubert comme détenteur de Sarliève; après un
cômmandement du 27 mars 1 8 1 1 , il frappe ce domaine
�d’une saisie immobiliaire. L e procès-verbal est du 2 5
mai suivant.
Toutes ces poursuites sont dénoncées à C o u r b y , qui,
selon son usage, garda le silence. Jouberl était dans
l ’impuissance absolue de satisfaire D u m a y; l’expropria
tion fut consommée, et le 1 3 décembre 18 12 , le bien
de Sarliève passa sur la tête du sieur Rochefort, qui
s’en rendit adjudicataire.
Un ordre est ouvert au tribunal civil de Clermont
pour la distribution du prix, et l’on voit figurer, dam
le procès-verbal, la dame Cou rby, comme créancière
inscrite.
Quel était le résultat des relations d’affaires qui
avaient eu lieu entre Joubert et son n eveu ?
Dépouillé du domaine des Baraques,-chargé de dettes
à raison des emprunts qu’il avait été obligé de faire,
exproprié du bien de Sarliève, Joubert avait néanmoins
des créances considérables à répéter contre Courby. Ces
créances comprenaient, i.° la somme de 8,000 fr., prix
de la vente du jardin; 2 ° celle de 26,000 fr., portée
par la cession de 1808, qu’il avait payée comme cau
tion; 3.° la somme de 74,074 f r . , prix de Sarliève*
4.0 enfin , les intérêts de ces différentes sommes, et les
dommages - intérêts résultant des pertes qu ’il avait
éprouvées par le fait de son débiteur.
Quelles ressources lui offrait le s.r Courby ? aucune,
puisqu’au moyen des actes frauduleux qu’il a passés,
il s’est mis dans un état réel ou apparent d’insolva
bilité.
Rassuré par les mesures dont il s’est entouré , le
sieur
�C'a 5 ;)
siéur Courby se refuse à toute espèce d’arrangemens -,
ou ne les écoute que pour gagner du tems. Des sa
crifices sont offerts : il les rejetle avec obstination, ou
ne donne aucune garantie de ses engagemens.
Que pouvait faire alors le sieur Joubert ? placé dans
l’alternative cruelle!, de livrer à la censure de la justice
les actions d’ un neveu ingrat et coupable, ou de perdre
la fortune de ses enfans, il a dû céder aux devoirs
les'plus sacrésj Aucun esprit de vengeance n ’a pré
sidé au choix de son action; un sentiment si vil est
loin de son cœur ; il aurait volontiers épargné à Courby
la honte d’une condamnation rigoureuse, s’il n’eût
été certain que là contrainte par corps est le seul
moyen qui puisse assurerison paiement.
C ’èst par exploit du 20. décembre 1 8 11 , et après
un procès-verbal de non conciliation , que le sieur
Joubert saisit le tribunal civil dé sa demande, et con
clut à ce que Courby fût déclaré stellionataire, et
condamné par corpsau paiement detoutes sescréances.
Cinq mois de délais furent accordés au s.TCourby, qui
se plaint néanmoins de l’impatience de son adversaire.
Un jugement du 20 mai 1812 a condamné p a r corps
le sieur C o u rb y , déclaré stellionataire, à payer au
sieur Joubert la somme de 51,649 ifr., montant des
créances définitivement liquidées, el celle de 8,000 fr.
pour dommages-inlérôts.
Il est sursis à statuer sur le surplus des sommes
qui reviennent au sieur Joubert, pour raison de la
vente de Sarliève, jusqu’après la confection de l’ordre
ouvert au tribunal de Clerm ont, et la distribution
7
�( *6 )
du prix de ce domaine; en suile duquel les parties
viendront à c o m p te , relativement aux sommes que
le sieur Joubert pourra reprendre comme représentant
ceux des créanciers utilement colloqués , et qu’il a
payés.
)
L ’exécution du jugement est ordonnée nonobstant
appel et sans caution.
L e sieur Joubert est si étranger aux mouvemens
de la vengeance, quoiqu’on l’accuse de s’être laissé
guider par une colère aveugle, qu’il n’a pas mémo
usé de cette faculté.
L'appel du sieur C o m b y a investi la Cour du droit
de prononcer sur le mérite de ce ju ge m e n t, qui sera
mis en entier sous ses y e u x , à la suite du mémoire.
Cette décision porte avec elle sa recommandation
et les preuves de sa sagesse; tous les efforts du sieur
Cou rby n’ont pu l’atteindre. Les principes qui y sont
consacrés demeurent dans toute leur force, et l’ap
plication qui en est faite dans la cause, ne souffre pas
la moindre critique ni la plus légère objection.
Les motifs adoptés par les premiers juges ne lais
sant rien à désirer sous le rapport du droit, l’objet de
ce mémoire a dû naturellement se borner au déve
loppement des faits, étrangement dénaturés par le
sieur Courby-Cognord ; aussi le sieur Joubert se ferat-il un devoir de renfermer sa discussion dans un cadre
resserré.
En adoptant les divisions établies par le sieur C o u r b y ,
on examinera d’abord s’il y a , de.sa part, stellionat.
�C *7 )
^;"£n second lieu, si le jugement renferme des erreurs
sur la quotité des condamnations qu’il prononce.
J. v. . . IIP R ' E
j. s;
M I È R E
‘i
1 Q U E S T I O N .
Y a - t - il stellionat?
\
■
-
*
• •
• •
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r
Y
a - t - i l stelUonat, à défaut de déclaration des
créances inscrites? n • ' r .
L ’article 2069 du Code Napoléon détermine tout àla-fois la peine du stellionat et1 les principaux carac
tères auxquels on peut le reconnaître. Il est aS’nsi concu:
« L a c o n t ra in t e par corps a lieu, en matière civile,
pour.le stellionat.
- a II y a stellionat,
‘1
>'
« Lorsqu’on vend ou qu’on hypothèque Ün immeuble
dont on sait n’être pas propriétaire;'
1 -
« Lorsqu’on présente comme libres des» biens h y p o
théqués , ou que l’on déclare des hypothèques moindres
que celles dont ces biens sont chargés ».
L e sieur Courby voudrait se soustraire’1 l’application
de cet article, qui cependant offre, avec une exacti
tude frappante, le tableau de sa conduite envers son
oncle.
Il prétend que le premier cas prévu est étranger à
la cause; que les autres ne peuvent s’appliquer à lui,
parce qu’il n’a pas présenté ses biens comme libres, ni
déclaré des hypothèques moindres que les hypothèques
8
�(
28
)
réelles, et que la loi n’admet l’existence du stellionat,
que dans le cas d’une déclaration expresse contraire à
la vérité.
Les erreurs fourmillent dans ce système, en droit
et en fait.
B ie n n’autorise.; en d ro it ,'la distinction subtile et
immorale que l’on veut établir entre la déclaration
expresse du franc et quitte et le silence prémédité sur
les hypothèques existantes. L ’une et l'autre conduisent
au même but ;■ils produisent les mêmes effets , la
tromperie du créancier ; ils doivent donc être soumis
aux mêmes peines.
Cette conséquence incontestable résulte de la na
ture des choses. L ’acquéreur ou le créan cie r, qui
refusant de s’en remettre à la foi de l’individu avec
lequel il traite, exige une h y p oth è qu e , entend bien,
sans doute, recevoir une sûreté réelle et solide , puis
que sans cela, il n’eût pas contracté. L e vendeur ou
débiteur, qui, de son cô té, s’est soumis à la condition
imposée , doit la remplir dans toute son étendue. Si
donc il viole ses engagemeus, dans leur essence même
et dans leurs effets les plus immédiats, en ne livrant
qu’ un gage illusoire, il mérite également l ’animadversion de la justice, soit qu’il ait trompé par une
fausse déclaration, soit qu’il ait trompé par un silence
perfide dont on n ’a pas dû se défier.
A u surplus, l'esprit et les termes de la loi repous
sent formellement la distinction proposée.
L ’objet de la loi est de pourvoir à ce que des tiers ne
soient pas trompés, do prévenir toutes stipulations
�( 29 )
frauduleuses, d’assurer l ’exécution des contrats, et d’ef
frayer , en donnant une nouvelle force à l’obligation,
tous ceux qui pourraient concevoir la pensée de se sous
traire à leurs engagemens. L a sollicitude du législateur
a dû s’étendre sur toutes les espèces de fraude, les com'prendre dans ses dispositions, et les punir avec une
égale sévérité, sous quelque forme qu’elles se présen
tassent ; aussi, dans l’impossibilité de prévoir tous les cas
de dol, et de déterminer les manières infinies qui peu
vent être employées pour t r o m p e r , il nous apprend
lui-même dans la discussion élevée au conseil d’état,
qu’il s’est exprimé d’une manière générale, en aban
donnant à la prudence des tribunaux le soin de re
chercher, de reconnaître et de réprimer ce genre de délit.
Les termes de la loi sont également remarquables.
Elle ne dit pas qu ’il y a stellionat lorsqu’on déclare
libres des biens hypothéqués, mais lorsqu’on présente
comme libres des biens hypothéqués; ce qui est trèsdiflérent. Cette expression, qui fixe le sens d e là dispo
sition, est d’autant plus importante que l’art, 2,069
fournit lui-même la preuve que sa rédaction a été le
résultat des plus profondes méditations, puisque dans le
second membre de la phrase, il est ajouté : « ou lors
qu’on déclare des hypothèques moindres que celles
dont les biens sont chargés ».
Il ne faut donc pas, pour constituer un stellionat,
la déclaration expresse que les biens sont libres; il suffit
de les présenter comme tels. O r , n’est-ce pas présenter
des biens comme libres, que les vendre ou les hypo
théquer purement et simplement, sans déclarer qu’ils
�(
3o )
sont grevés de charges préexistantes? L e silencè, en
ce cas, n’est-il pas équipollent au mensonge? Ne pro
vo que-t-il pas l ’erreur du créancier? Ne trompe-t-il
pas également sa bonne foi? L e fait, dans ce cas, n’estil pas plus fort que la parole? El le législateur, en
employant ces mots , présenter comme libres , n’an
nonce-t-il pas clairement que ses dispositions con
courent avec le but qu’il s’était proposé?
N ’y aurait-il pas d ’ailleurs une absurdité révoltante
à c o n d a m n e r / c o m m e stellionataire, l ’individu q u i ,
en déclarant certaines hypothèques, en aurait passé
d’autres sous silence; et à excepter de l’application
de l’article précité celui q u i , affichant une désobéis
sance plus formelle à la lo i, aurait affecté ses biens
sans en déclarer aucune. Telles'seraient cependant les
conséquences immédiates du système proposé.
S’il était nécessaire d’invoquer des autorités pour
déterminer le véritable sens de la loi nouvelle , on
trouverait ais ément, dans tous les monumens de la
jurisprudence, les principes qu ’elle a consacrés.
L e savant Domat définit ainsi le stellionat, 1. i . er,
lit. 18 j secl. 3 , art. 5 :
« L e stellionat est cette espèce de dol don! use celui
qui c è d e , vend ou engage la même chose qu’il avait
déjà c é d é e , vendue ou engagée, et qui dissim ule cet
engagement ».
Il justifie sa définition par le texte de plusieurs lois
romaines dont les ternies sont précis. La même doc
trine est enseignée par les auteurs les plus recommandables ; et plusieurs arrêts ont déclaré stelliona-
�(
3i
)
iaires des débiteurs qui avaient assigné leurs biens,
en dissim ulant les hypothèques dont ils étaient grevés.
A in s i, le stellionat n’est donc pas essentiellement
attaché à la circonstance d’une fa u sse déclaration.
Il a lieu lorsqu’on assigne des biens en dissim ulant
les charges dont ils sont grevés ;
Lorsqu’on présente ces biens sans déclarer les h y
pothèques.
L a dissim ulation et le silence constituent le délit.
Cependant on insiste : on soutient qu’au moyen
de la publicité des hypothèques, le silence du v e n
deur ou du débiteur n’offre pas les mêmes dangers
qu’autrefois , où souvent il était impossible aux tiers
de reconnaître les hypothèques dont étaient grevés
les biens; et on en déduit la conséquence qu’il faut
puiser dans cette considération des motifs pour res
treindre les cas du stellionat.
Il est facile de pénétrer les vices de ce raisonne
ment. D ’abord le recours aux registres publics n’est
point une obligation pour le créancier ou l’acquéreur,
mais une simple fa c u lté dont il peut user ou se dis
penser a son g r é ; tandis que la bonne foi et la loi
exigent du débiteur ou du vendeur une déclaration
franche et expresse.
11 n’est pas vrai, en second lieu, q u e , dans notre
s37slème hypothécaire, le silence du vendeur ou du
débiteur soit moins dangereux qu’autrefois.
D ’une part, en ordonnant la spécialité des hypo
thèques, le législateur a voulu qu’elle produisît un
effet réel ^ et donnât la certitude d’ un gage assuré j
�(
32 )
ce qui n’arriverait pas, si le débiteur ou le vendeur qui
doit connaître les charges dont ses biens sont frappés,
pouvait les affecter , sans déclarer les hypolhèques
préexistantes.
D e l ’au tre, en dispensant d e l à formalité de l'ins
cription certaines espèces de créances, telles que les
privilèges énoncés en l’article 2 i o r , les hypothèques
légales et autres de cette nature, la loi aurait 1endu
un piège à l’acquéreur ou au'créancier, qui les ignore
nécessairement, si elle n’eût pas imposé l’obligation
de faire connaître ces créances et toutes autres qui
peuvent affecter les biens.
Enfin , la faculté qui est accordée aux créanciers
de requérir, pendant un certain délai, apiès la trans
cription des ventes, l’inscription de leurs hypolhèques
qui viennent néanmoins frapper le bien vendu', four
nirait encore des moyens de fraude, si, par une
mesure sage et expresse, le législateur n’eût constitué
en mauvaise foi le vendeur qui dissimule ses dettes et
les hypothèques dont ses biens sont grevés.
A i n s i , loin que le nouveau sysleme hypothécaire
com por te, sans danger, le silence du débiteur ou du
ve ndeur, et qu’il autorise quelques limitations aux cas
de stellionat, toutes ses dispositions
concourent à
réclamer la plus grande sévérité, soit dans l’appré
ciation des faits qui caractérisent ce délit, soit dans
l’application des peines encourues par celui qui s’en
rend coupable.
En fait, on ne peut se dissimuler que les trois actes
produits
�( 33 )
produits par le sieur Joubert ne renferment tous les
cas prévus par l ’article invoqué.
L e sieur Courby s’est rendu stellionataire envers le
sieur Joubert ;
i.° En vendant, par l’acte du 9 juillet 1809, les
terre el vigne qui sont dites provenir du nommé Chosson,
suivant les acles reçus D o l y , notaire, tandis qu’il n’a
point acquis ces héritages, et qu’il n’en a jamais été
propriétaire ;
2..0 En vendant, par l’acte du 11 avril 1807, les
jardin et pré de l’A b b a ye , absorbés plusieurs fois par
des créances qui ne lui laissaient qu’une propriété
incertaine et précaire, dissimulant , à dessein , les
hypothèques inscrites dont il était g r e v é , pour en
toucher le prix ;
3 .° En présentant comme libres, pour hypothèque
spéciale , savoir ;
Dans l’acte du 11 avril 1807, la terre de la Ronclie,
q u i , comme dépendant du domaine de Bicon , se
trouvait grevée de près de 200,000 fr.
Et dans celui du 8 juillet 1808, le même bien de
Bicon, sur lequel reposaient alors pour plus de 290,000 fr.
de créances inscrites.
4.0 Enfm, en déclarant, dans l’acte du 9 juillet 1809,
des hypothèques moindres que celles dont les biens
étaient grevés, puisqu’il n’avait chargé l’acquéreur que
de supporter nommément des inscriptions conseivatoires désignées, qui frappaient le bien de Sarliève,
objet
v e n d u , tandis qu’à cette
époque il existait
sur le môme bien, vingt-cinq autres inscriptions, ayant
9
�( 34 )
\
pour fondement des jugemens ou des obligations
personnelles au sieur C o u rb y , et qui donnaient un
total de 2 1 5,ooo fr. exigibles.
Ainsi le jugement attaqué se trouve complettement
justifié sous ce premier rapport.
§.
Y
I I.
a-t-il stellionai, faute de déclaration des hypo
théqués légales?
L'affirmative est évidente; elle résulte des art. 2 i 36
et 2194 du Code Napoléon.
L e premier de ces articles impose d’abord aux maris
et tuteurs Yobligaùon de faire sur eux-mêmes une
inscription ; pour assurer l’exéculion de cette mesur e,
dont l'objet est de pourvoir à ce que des tiers ne soient
pas trompés, il ajoute : « Que les maris et tuteurs qui,
ayant manqué de requérir et de faire faire les inscrip
tions ordonnées par le présent article, auraient consenti
ou laissé prendre des privilèges ou des hypothèques
sur leurs im meubles, sans déclarer expressément que
lesdits immeubles étaient affectés à Yhypothéqué légale
des femmes et des mineurs, seront réputés stellionataires, et comme tels, contraignables par corps ».
Il résulte de ces termes, aussi clairs que formels,
plusieurs conséquences :
i.° L a loi prescrit impérieusementVinscription) pour
faire connaître a u x tiers l’existence de l’hypothèque
légale ;
2.0 Elle considère déjà comme une faute Xomission
�(
35 )
du mari 011 du tuteur à faire cette inscriplion, parce
que celte omission est une désobéissance à ses injonc
tions;
3 .° Si l’inscription n ’ayant pas été requise, le mari
ou le luteur consent ou Laisse prendre des privilèges ou
hypothèques sur ses immeubles, sans déclarer les h y
pothèques légales de la femme ou du mineur, il est,
par son silence seul, réputé stellionataire, et puni
comme tel, parce qu ’alors la loi présume que la fraude
se joint à la désobéissance;
4,° E n f i n , la déclaration qu’est tenu de faire le
mari ou le tuteur, doit être expresse, et résulter de
l’acte l u i - m ê m e ,
suppléée.
sans pouvoir être présumée
ni
I/art. 2194 confirme encore ces principes; après
avoir établi le mode de purger les hypothèques légales
des femmes et des mineurs, il porte que les maris,
tuteurs, etc., pourront prendre l’inscription dont il
s’agit dans les deux mois de l’affiche cju’aura fait faire
le tiers-acquéreur, « sans préjudice, y est-il d it , des
poursuites qui pourraient avoir lieu contre les maris
et les tuteurs, ainsi qu 'il a été d it ci-dessus, pour
hypothèques par eu x consenties au profit des tierces
personnes, sans Leur avoir déclaré que les immeubles
étaient déjà grevés d’hypothèques, en raison du ma
riage ou de la tutelle ».
Les dispositions de ces deux articles peuvent être
rigoureuses, mais elles sont irritantes et positives : elles
doivent être respectées.
Dans la première partie de la discussion, le sieur
�Courby bornait ses préienlions à restreindre les termes
de la loi, et à en éluder l’application par une équi
voque spécieuse et subtile; mais devenu plus liardi,
il ne propose à la Cour rien moins que d’usurper la
puissance législative, et d’effacer du Code les deux
articles qui viennent d’être cités.
A Fentendre , l’exécution littérale de ces articles
constituerait stellionataires tous les maris, tous les tu
teurs de l’empire; et cette généralité révoltante doit
provoquer dans la loi une restriction que l’équité ré
clame. Il invoque m ê m e , pour colorer l’absurdité de
sa proposition , un passage d’un auteur à jamais cé
lèbre.
Mais ce raisonnement, spécieux au premier aperçu,
ne supporte pas le plus léger examen.
D ’une part, la loi existe; fût-elle vicieuse, il fau
drait l’exécuter.
Secondement, le grand nombre des coupables, loin
d'être un motif pour modifier la loi, et la restreindre
dans ses effets * prouverait, au contraire, la sagesse
de ses dispositions et la nécessité de maintenir avec
vigueur l ’exécution d’une mesure qui a pour objet
de prévenir la fra u d e , et de pourvoir à ce que des
tiers ne soient pas trompés.
Enfin le législateur n’a pas ignoré les inconvéniens
qui peuvent être attachés à l’exécution de ses décrets;
il a pensé sans doute qu ’ils n ’en balançaient
avantages , puisqu’il ne s’y est pas arrêté. Il
lui - même les motifs qui l’ont déterminé ;'i
de sévérité contre les maris ou tuteurs qui,
pas les
indique
s’armer
au m é -
�pris de ses injonctions, auraient consenti , ou laissé
prendre des privilèges ou hypothèques sur leurs im
meubles, sans faire la déclaration des hypothèques lé
gales. ( V o i r les motifs de la loi.)
E n se pénétrant de ces motifs, on reconnaît à la
fois la sagesse du législateur, l’utilité de la loi, el la
nécessité d’en maintenir l ’exécution.
L e passage c i t é , de D o m a t , est sans application.
L e sens des art. 2 1 36 et 2194 du Code ne conduit
ni à de fa u sses conséquences ni à des décisions injustesj
la loi est claire et positive : elle n’a pas besoin d etre
interprétée, puisqu’elle dit elle-même ce quelle veut.
Contraint de céder à la rigueur des principes, le
sieur Courby voudrait échapper à la condamnation
qui pèse sur sa tête, à la faveur de quelques ihifs par
ticuliers.
Il prétend que l’existence des hypothèques légales
a été connue; et pour l’établir, il invoque la qualité
du sieur Joubert, qui est son oncle et son parrain,
sa présence au contrat de mariage , l’acquisition des
rentes dotales et quelques autres circonstances aussi
peu importantes.
Sans examiner en ce moment la valeur relative do
chacune de ces circonstances, qui, d'ailleurs, ont été
réfutées par les motifs du jugement ,on repoussera, par
un moyen général, les conséquences qu’on veut en
induire, que le s.r Joubert a été instruit des hypothèques
léga les, el qu’une déclaration lui était alors inutile.
L a loi, dans les articles 2 1 36 et 2194 est générale,
expresse, absolue ; elle n admet aucunes circonstances
�U‘>0
( 38 )
particulières qui puissent modifier ses dispositions ; elle
s’est exprimée en termes formels, soit par rapport
aux obligations qu'elle a imposées aux maris et tuteurs,
soil relativement aux effets qu’emporterait contr’eux
l ’infraction à ses règlemens ; elle ne souffre, dans
son exécution, aucune exception, et n’a point atta
ché sa volonté à un fait connu , ou présumé connu
de la partie qui contracte.
A i n s i , fût-il établi, ce qui ne peut ê t r e , que le
sieur Joubert a connu l ’existence des hypothèques
légales; cette connaissance de sa part deviendrait in
différente pour la décision de la cause, puisque la loi
a attribué au défaut de déclaration des hypothèques
légales, le caractère et la peine du stellionat, indé
pendamment et abstraction faite de toutes considéra
tions particulières.
Si l’on examine actuellement les trois actes qui ont
été consentis p a r l e sieur C o u r b y , on y reconnaîtra,
sans beaucoup de recherches, tous les caractères qui
constituent le stellionat-aux termes des art, invoqués.
1°. I.e
ii
avril 18 0 7, il vend au sieur Joubert un
jardin et un pré.
II ne déclare pas les hypothèques légales qui frap
pent les objets vendus.
Il affecte spécialement à l'exécution de la vente,
le champ de la Ronche , sans déclarer l’existence de
ces mêmes hypothèques.
On oppose*que le sieur Joubert a purgé les biens
vendus de ces hypothèques légales, et qu’ainsi il les
connaissait, quoique non déclarées.
�( 39 )
Ce fait n’exclut pas le stellionat : d’une p a r t , il
ne prouve pas que la connaissance de l'hypothèque
légale ait précédé ou accompagné l’acte. D e l’autre,
cette connaissance n’ayant pas été donnée par le v e n
d e u r , ne peut le soustraire à l’application de la loi.
A u surplus, l’hypothèque légale de la dame Courby
frappe encore sur l'immeuble affecté à la garantie de
la vente.
2.0
Dans l’acte du 8 juillet 1808, Courby d o n n e ,
pour sûreté de ses engagemens, le bien de Bicon , et
il garde le silence sur l'hypothèque légale.
On voit enfin, dans le troisième acte, que le sieur
C o u r b y , vendant à Joubert le bien de Sarliève, le
charge de supporter quelques inscriptions conserva
toires , mais il garde le silence le plus absolu sur les
hypothèques légales.
Il en agit de même à l’égard du domaine de Bicon ,
qui a été spécialement affecté à la garantie de la vente.
Il est à remarquer que depuis la vente de Bicon à la
dame C o u r b y , qui remonte au 8 novembre 1809, et
qui parait avoir été homologuée par jugement du sa
mai
1 8 1 2 , Cou rby n’en a pas moins laissé subsister
1 hypothèque légale sur Sarliève 5 qu ’il n’a /ait aucune
diligence pour faire le ve r l’opposition des acquéreurs
de Maison - N e u ve ; et qu’il n ’a pas même lait con
naître la vente ni le jugement d'homologation.
Après des infractions si répétées, des fraudes si ma
nifestes , pourrait-il s'élever le moindre doute sur
l’exislence du stellionat ?
Cependant le sieur C ou rb y, accablé p a rla masse des
�'
(
40
)
preuves qui l’accusent, fait un dernier effort. Il ose
invoquer sa bonne foi ! Il rejette sur une erreur ou
sur l’oubli le défaut de déclaration des hypothèques
légales. Il affirme, pour justifier cette bonne foi, que,
lors des divers actes, il n’a touché aucune somme, et
que le sieur Joubert n’a pas été trompé.
Sa bonne foi ! ! !
Elle est établie
Par sa conduite ;
Par tous les actes qu ’il a passés ;
Par sa réputation ;
Par sa fidélité à remplir ses engagetnens ;
Par la vérité des faits qu’il atteste pour la justifier.
Il n’a louché aucune somme.
Le
3 octobre 1806 n’a-t il pas reçu 8,000 fr. pour
le prix du pré et du jardin ?
Les 26,000 liv., qui ont fait le prix de la cession
du 8 juillet 1808, n’ont-elle pas été versées, à sa dé
charge , dans les mains du sieur d’ Estradat.
N ’a-t-il pas reçu réellement, lors de l’acte du 9
juillet 1809 ;
1,800 fr. pour pot de vin ;
3,3oo fr. en un effet de com m e r ce ;
1 0,000
fr. portés par l’obligation reçue T o u r r a u d ,
dont il s’est libéré vis-à-vis de Joubert ;
25 , 5 q o f r . , pour la valeur du bail de Bicon, dont
Joubert se départit à son profit, et qu’il a touchés
depuis ?
N ’a-i-il pas aussi profilé de l’effet des délégations
qu ’il a faites par le même acte au profil de plusieurs
de
�(
4i )
de ses créanciers, et qui ont été payés par Jouberl?
L e montant de ces délégations donne un total de
35,442 fr.
Et il n’a rien touché!
l i e sieur Joubert n’a pas été trompé.
Serait-ce Courby qui aurait été trompé par Joubert?
Il ne réclame rien contre son oncle; et lui même
se reconnaît débiteur de sommes considérables.
Quelle garanlie offre-l-il à son créancier?
11 est donc prouvé que le sieur Courby n’a pas rempli
les obligations qui lui étaient imposées par la loi;
Q u ’il n’a pas déclaré les hypothèques légales;
Q u ’il a trompé Joubert avec lequel il contractait;
Q u ’il n’a point commis un stellionat imaginaire.
lie jugement doit donc être maintenu dans la dispo
sition qui déclare le sieur Cou rby slellionataire.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert ?
Cette partie de la cause n ’a qu ’un mot.
On critique' la liquidation des premiers juges, re
lativement aux objets acquis le 11 avril 1807, et on
vent la réduire à la somme de 6,913 fr. 60 c. , prix
de la vente consentie par le s.r Joubert à Gaudissier.
Cette observation pourrait paraître fo n d é e , si la
Cour ne pensait pas que Joubert , qui a acquis le
jardin moyennant 8,000 francs, et qui en est pri vé,
par le fait du vendeur, doit répéter tout ce q u ’il a
payé.
�(40
L a fixalion de la somme de 18,074 francs, que
les premiers juges ont allouée à Jo ubert, pour la dif
férence fixée entre le prix de la vente de 1809 et
celui de l’adjudication, est également contestée.
Il
paraît juste de rectifier Terreur qui s’esl glissée
dans le jugement, en confondant la valeur d e l à ré
colle pendante et du prix des baux de l’année courante,
évalués 4,074 f r . , avec le prix des immeubles.
Mais le sieur Joubert fera de son côté quelques
réclamai ions.
L e sieur Courby lui doit compte,
i.° Des sommes qu’il a touchées sur les baux à
ferme qui faisaient partie de la vente, et dont il a
fourni quit lance aux fermiers.
z.° D e la valeur des vigne et terre provenues du
'nomm é Chosson, et comprises dans la ve n te , dont
il n’a jamais été mis en possession, ainsi que des jouis
sances depuis la vente.
3.° L e jugement n’a pas adjugé au sieur Joubert
les frais et loyaux coûts de l ’acte du 9 juillet 1809.
Néanmoins ayant été exproprié par le fait de Courby,
vendeur, il a droit à cette répétition qui excède la
somme de 4>000 f rancs*
On soutient qu’il y a erreur de droit dans la dé
cision dont est appel,’ en ce qu’elle a accordé au s.r
Joubert la différence du prix des deux ventes. Pour
jusiifier celte e rr eur, on allègue que Joubert n’a pas
été évincé comme acquéreur, mais seulement comme
débiteur solidaire, ou comme caution solidaire, faute
de paiement ; et que conséquemment il ne peut exiger
�b o /
( 43 )
que le remboursement de ce qu’il a payé pour le
sieur Courby , débiteur direct , et les intérêts
de
celle somme.
L ’erreur est dans l’objection.
Joubert a été évincé, comme acquéreur ou tiersdétenteur, et non comme débiteur solidaire.
L e sieur D u m a y n’a fait exproprier Sailiève, que
comme subrogé de fait et de droit, au privilège du
sieur d’Estradat, premier vendeur qu ’il avait payé.
Comme créancier de J o u b e r t , en vertu de la cession
de 1808, D umay n’avait aucune hypothèque sur Sarliève, puisqu’alors Joubert n’en était pas propriétaire,
et qu ’il n’avait assuré d ’hypothèque que sur son do
maine des Brassets.
L ’éviction a donc eu lieu du ch ef de C o u rb y, v e n
deur, et sur Joubert, en qualité d'acquéreur. Courby
ne peut donc refuser une garantie complet le.
L e jugement a bien décidé en se conformant sur
ce point aux articles 2,178 et i , 63 o du Code N a
poléon.
On a
1 air de critiquer l’évaluation des dommages-
intérets; Joubert a seul le droit de s’en plaindre, si
1 on considère les pertes considérables qu ’il a essuyées
par le fait de C o u r b y , et l’état de délabrement de
ses affaires.
Les premiers juges ont pu condamner par corps au
paiement de ces dommages-intérêls ; et jamais, peutêtre, il n’a été fait un meilleur usage du pouvoir dis
crétionnaire accordé aux tribunaux, par l’article 126
du Code de procédure.
12
,
�( 44 )
En dernière analyse, des fraudes multipliées, des ma
nœuvres obliques, des actes odieux accusent le sieur
Courby.
Par des
stellionats
géminés , il
est
parvenu
à dépouiller le sieur Joubert d’ une grande partie de
sa fortune.
Il
se trouve dans tous les cas prévus par la loi, et
ne peut échapper à une condamnation qu’il a jus
tement méritée.
C ’est avec un sentiment pénible que le sieur Joubert
s’est vu fo r c é , par les imputations qui lui ont été faites,
îi prendre la plume pour éclairer la Cour et le public
sur la nature et les suites de ses relations avec le sieur
Courby.
S i, par la force des choses, il a été conduit à ma
nifester des vérités fâcheuses, que le sieur Courby
n ’impute qu’à lui-même la honte qu’il en éprouve!
C ’est dans les actes qu’il a passés, que l’on découvre
ses sentimens et sa conduite. Pourquoi a-t-il pro
voqué son oncle par une récidive insultante? Pour
quoi l’a-t-il placé dans la dure nécessité d’une dé
fense légitime?
L e sieur Joubert le répète : il ne réclame que jus
tice. Aucun sentiment de haine ni de vengeance ne
le domine. S’il insiste sur une condamnation par corps,
c’est parce que, dans l’état réel ou apparent d’insol
vabilité où le sieur Courby« s’est placé, par des ma
nœuvres obliques, il n’a pas d’ autre voie pour assurer
le paiement, de ses créances. '
■" '
Pour ne laisser aucun doute sur ses véritables in-
�.
. . .
(.45.) .
..
. .
t e n t i o n s le sieur. Jouberl r é i t è r e , e n présence de la
^ Cour les offres qu’il,a faites cent fois, avant et depuis'
.
l'instance. Que le sieur- C ourby se montre avec fran_
c h i s e et b onne loi;q u ' i l assure , par des moyens convenables, le paiement des sommes dont il est débiteur;
e t l e s i eur J oubert, renonçant aux droits qu’il tient
“
1
de la loi s’empressera de lui accorder tous les délais,
facilités et tempéramens raisonnables qu’il pourra
„désire r Que le.sieur C u
o r b y soit sincère dans ses offres;
.qu'il soit fidèle à ses nouveaux engagement. L e tems
.
qui calme tout, effacera quelques torts. L ’indulgence
p e r d o n n e r a l e reste et peut-être un jour retrouvera-t-il
a v e c satisfaction dans le coeur de son oncle, l’amitié
et la bienveillance qu’il e n avait aliénéés.
•Signé J O U B E R T .
‘
- M E G O D E M E L , avocat.
M e V E R N IE R E
A v o u é lic e n c ié ,
A- ^ov
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J.-C . S A L L E S lm p. de la Cour impériale et du Barreau.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Joubert, Jean-Joseph. 1813?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Vernière
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
enfant prodigue
lettres de change
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé ; contre le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant.
note manuscrite : texte de l'arrêt du 5 mars 1813.
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2218
BCU_Factums_G2220
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53448/BCU_Factums_G2219.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
enfant prodigue
fraudes
hypothèques
lettres de change
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53524/BCU_Factums_G2609.pdf
f8c3894008aa1d414d189565b9bd3ef2
PDF Text
Text
MÉMOIRE
CO U R R O Y A L E
EN
RÉPONSE,
DE RIOM.
i r0
POUR
Sr
A n to in e
da m e
A
G U E F F IE R -D U B U IS S O N , Propriétaire-,
n t o i n e t t e G U E F F IE R , A m a b le B A Y O L ;
son m a r i,
Officier de S a n té ,
et J e a n - B a p t i s t e
G U E F F I E R , Propriétaire, Intim és ;
CONTRE
Me
A
n to in e
G U E F F I E R D E L ’E S P I N A S S E ,
ancien A v o c a t, Appelant.
D a mihi fallere : da just.o sanctoque. videri :
Noctem peccatis, et fraudibus objica nubem!
H o r a c e , l i v r e I e r , chap i t r e 1 6 .
filia tio n des intimés et leur droit aux successions
dont ils ont d e m a n d é le partage , ne sont point
L
a
contestés : ils ne pouvaient l ’ètre. Le sieur G u e ffierL'Espinasse, leur adversaire, oppose,
pour unique
c iia m b u t:.
�m oyen, la prescription
j
dont il exalte l ’utilité dans
le Droit c i v i l , et les bienfaits dans l ’intérêt privé.
Son système, fortifié de toutes les ressources du talent
et de la m éthode, repose entièrement sur cet axiome
léon in , q u ’on n ’oserait invoquer ouvertement : Q u i
tenet, teneat : possessio va let. Il suffit de l ’indiquer
pour le faire proscrire.
Sans doute, des considérations d ’une haute impor
tance ont dû faire admettre la prescription , comme
moyen conservateur ; mais cette patrone du genre
. humain ne protège pas indistinctement tous les posses
seurs 5 soumise à des conditions essentielles qui en
règlent l ’application, elle ne consacre que la possession
faite de bonne foi , animo dom ini} et à juste titre.
L ’appelant pourra-t-il en réclamer les effets, quand
il est démontré que , par une suite de manœuvres
frauduleuses , c e l u i q u 'il représente a éloigné ses
cohéritiers de la connaissance des affaires de la succes
sion ; q u ’il
a volontairement
renoncé à son titre
d 'héritier universel, pour ne retenir que sa portion
virile comme héritier bénéficiaire ; q u e, préférant à
toute autre qualité celle de créa n cier, il a été saisi
des biens de la succession , non comme propriétaire,
mais précairem ent, aux titres successifs ou cumulés
de gardien, d ’antichrésiste , de possesseur pignoratif
et de fermier judiciaire?
Vain em en t, pour consommer une usurpation révol
tante, ce cohéritier se sera-t-il efforcé, par des p r o c é
dures clandestines, par une fraude l o n g u e m e n t méditee, et par des jugemeus c o n c e r t é s , de couvrir le vice
�de sa possession et d ’en intervertir le titre. Vainem ent,
après avoir paralyse 1 action des cicanciers et des suc-*
cessibles, aura-t-il v o u lu , Protée judiciaire, s’attribuer
le
titre u n iv e r s e l
auquel il avait formellement renoncé. ~
Toutes ces ten tatives, réprouvées par la morale et par
la Justice, n ’ont porté aucune atteinte aux droits des
cohéritiers présomptifs , parce que sa possession , se
référant au titre p rim o rd ia l, n ’a aucun des caractères
propres à, lui attribuer le bénéfice de la prescription.
FAITS.
- Six enfans sont nés de l ’union de Pierre G uefiler
et de Jeanne M artin on , bisayeux des parties : M arie,
q ui avait épousé Charles de Gouzel de L auriat 5
Antoine ,
Jean ,
Marguerite ,
épouse
de
Maurice
Nozerinej Louis et Pierre.
Jean, qui devint dans la suite bailli de Brioude,
épousa Marie-Anne Soléliage. L e u r contrat de mariage
eut lieu le 26 juin 1 7 17 .
On y lit que Jeanne Martinon, alors veuve de Pierre
Guefiier, institua le futur son héritier universel do
tous les biens q u ’elle laisserait à son décès, avec décla
ration q u ’elle les substituait à celui des enfans mâles
dont son fils ferait choix, o u , à défaut de choix, à.
19 * ' 1
1 aine des mâles, pourvu q u ’il 11e fût point d ’église.
Ces dispositions , faites sous différentes réserves et
charges, sont terminées par la clause suivante :
« Desquels biens ci-dessus substitués,
le futur
« époux ne pourra faire aucune distraction de quarte,
�« mais sera tenu de les remettre, et en leur entier, à
«
«
«
«
ceux à
et sans
puisse
époux,
qui la demoiselle Martinon les a substitués;
aussi que l'usufruit desdits biens substitués
être saisi par aucun créancier dudit futur
pour quelque cause et raison que ce puisse
« être. »
L e sieur Gueffier-rEspinasse, trouve dans ces der
nières expressions, une preuve que les affaires de Jean
Gueffîer étaient déjà en désordre.
C ’est aller chercher un peu loin un moyen de cause.
Il était plus simple de n ’y voir q u ’une stipulation de
prévoyance, pour assurer, 'a tout événement, au fu tu r,
l ’usufruit des biens. Si ses affaires eussent été dé
rangées, il n ’est pas vraisemblable q u ’il l ’eût constaté
dans son contrat de mariage, ni q u ’il eût obtenu la
main de la demoiselle Soléliage, q u i , indépendam
ment des autres biens maternels dont son père retint
l ’u su fru it, lui apporta effectivement une dot considé
rable en m obilier, argent et immeubles, notamment
cinquante œuvres de vigne et le domaine du Buisson,
au labour de deux paires de bœufs.
»
L a dame Martinon décéda le 3 septembre 1780.
Jean Gueffîer avait acquis de Marguerite , épouse
du sieur de N ozerine, ses droits légitirnaires paternels
et maternels.
Il est établi, par un traité en forme authentique,
du 10 avril 17.39, q u ’il la suite d ’un procès considé
rable avec un sieur de Bussac, ledit sieur Gucliier fut
�constitué
de celui-ci (l’une somme de 20,768 fr.
en principal, et de 53,82 1 fr. pour intérêts. Le débi
te u r, pour payer partie de ces sommes, adjugées par
arrêt de la C ham bre des enquêtes, du 8 août 1738,
lui délaissa par le même acte, i° un domaine situé
dans les faubourgs de Brioude , appelé de SaintL a u r e n t , évalué à 12,000 fr. ; 20 un autre domaine
de Vouliandre. L ’imputation du prix fut faite sur les
intérêts, le surplus et le capital de la créance demeu
rant réservés aux créanciers.
c r é a n c i e r
A la même époque, Jean Gueffîer fut appelé à recueillir
deux successions assez considérables, celle d ’Isabeau
E stiva l, qui lui avait légué une maison et ses dépen
dances, ainsi que trente oeuvres de vigne, le tout situé
à Saint-Upise} et celle d’Antoine G ueffîer, son frère,
lieutenant-colonel, q u i, l ’ayant institué son héritier
général et universel,
par testament du 21 octobre
1738, lui transmit ses droits indivis dans les biens
de Pierre Gueifîer et de Jeanne Martinon.
Sa fortune, loin de se détériorer, comme on l ’a
dit, prenait donc un accroissement progressif.
Pierre-Joseph Gueffîer de Longpré, père de l'appc^ut ,
contractant
mariage avec demoiselle
Jeanne
Léniond, le 2 août 174^3 fut institué héritier un i
versel de son père, qui le choisit également pour re
cueillir l'effet de lu substitution faite par la daine
Martinon eu 17x7. Jean Gueffîer se réserva l ’usufruit
des biens substitués, et une somme de 1 5 ,000 francs
�, sur sa fortune personnelle, pour faire la légitime de'
ses autres enfans.
L a dame Soléliage , mère du f u t u r , lui assura
3 ooo fr. , payables après son décès.
L e sieur Gueffier, b a illi, mourut le 2 avril 1760.
Indépendamment des biens de la dame Martinon
sa m ère, dont la propriété passait au sieur de Longpré, il laissait une fortune considérable, ayant fait
plusieurs acquisitions avantageuses. E n voici le tableau :
Deux maisons à Brioude ;
L e pré B ourg, contenant trente-un journaux, donné
en dot à la dame M ontfleuri, sœur de l ’appelant, pour
25,ooo f r . , par son contrat de mariage, du 2 février
1 7 8 5 , et estimé, en partage} 5o,ooo fr. ;
Des vignes à Coste-Cirgue et à Chavelange -,
L e domaine de Sain t-L a u ren t, en valeur de 12,000 fr,
au 10 avril 1739 }
Ceux de Youliandre et de Vichel;
Les biens de Saint-Germain-Lambron, réunis à ce
dernier domaine, et que Jean Gueffier avait acquis
du sieur Ranvier 5
L e domaine de Saint-ïlpise ;
TJn grand nombre d'héritages détachés ;
E t des contrats de rente pour plus de 2000 fr.
Il est vrai q u ’il laissait des d ettes5 mais à l ’excep
tion de celles par lui contractées pour prix d ’acquisi
tion , elles provenaient presqu’en totalité de Pierre
Gueffier son père,
�( 7 )
On n’a pas remarque q u ’il eût été p r i s , à cette
époque, aucune précaution pour distinguer les dettes
qui a p p a r t e n a i e n t à Jeanne Martinon. Cette confusion,
qui n ’a peut-être pour cause que l ’inadvertance, a du
nécessairement jeter de l ’obscurité sur l ’état réel de
la
succession
de Jean Gueffier.
L e 27 juin 1760, le sieur de Longpré fit procéder
à un inventaire où la dame Soléliage et Pierre-Joseph
Gueffier-Dubuisson, son frère le plus jeune et son
filleul, assistèrent seuls. Les autres cohéritiers, M au
rice, François et G uillaum e, père des intim és, étaient
éloignés.
Nulle mesure conservatoire n ’avait éic prise : les
scellés ne furent pas même apposésj on n appela au
cun créancier pour assister à cette opération , le sieur
Longpré ayant déclaré au procès-verbal que sa mère
et ses frères étaient les seuls créanciers q u ’ i l connût
avoir intérêt à la succession.
L e sieur de Longpré, qui ne jugea point à propos
de faire mettre à prisée les denrées et eifets mobiliers,
f u t chargé de tous les objets inventoriés 3 p our en
rendre compte à qui de droit. C ’était pour lui un
mode de prise de possession qui lui parut sans incon
vénient, et propre à le conduire à son but.
Par acte fait au greffe, le 27 juillet s u iv a n t,
il
réitéra la déclaration, déjà faite dans l ’in ven taire,
}•1 5
qu il n entendait accepter la succession que comme
héritier bénéficiaire, et renonça formellement à 17«.$titution d ’héritier faite en sa faveur par Jeau Gueffier
son père, le 2 août 17/15.
�E n abdiquant son titre universel3 le père de l ’ap
pelant changea la situation des parties intéressées : de
simples légitimaires q u ’ils étaient , aux termes de
l ’institution contractuelle, ses frères devinrent ses co
héritiers à portion égale. L ’acceptation q u ’il fit comme
héritier bénéficiaire ne pouvant restreindre les droits
ouverts à ses co-successibles , ne porta dès-lors que sur
sa portion virile, qui était un cinquième de l ’hérédité.
'Ainsi, comme héritier bénéficiaire, il devint pas
sible des dettes personnellement pour un cinquième,
et hypothécairement pour le tout; mais ayant d roit,
comme créancier, d ’exiger et de poursuivre, sur les
biens, le paiement de la totalité de ses créances.
Calculant que le bénéfice d ’inventaire empêchait la
confusion, le sieur de Longpré se servit habilement de
sa qua lité de créancier pour envahir l’universalité
des biens.
Dès le 3 o ju illet, et sans aucune provocation à ses
cohéritiers, à l ’eiFet de s’expliquer sur la qualité q u ’ils
entendaient prendre, un curateur est nommé.
L e 14 ao û t, agissant comme héritier substitué de.
Jeanne M artinon, et en qualité d’ héritier d ’un sieur
Armand de l ’Espinasse, il assigna ce curateur en paie
ment de ses créances contre la succession.
Il o b tin t, le i 5 novembre suivant, au bailliage de
Brioude, une sentence p ar d é f a u t f a u t e de com pa
roir , q u i, en adjugeant les conclusions par lui prises,
condamna le curateur à lui payer un capital de
33 , 45o f r . , avec des intérêts remontant h des époques
plus ou moins reculées.
�Co)
Ces condamnations ayant été obtenues sans contra
diction , il n ’est pas étonnant q u ’il se soit glissé une
foule d ’erreurs très-considérables, et toutes k l ’avan
tage du poursuivant. Voici les plus notables : L a suc
cession de Jean Gueffier, qui n’avait succédé à son
père que pour un sixième, de son chef, et pour un
autre sixième, du chef d’Antoine, son frère, fut con
damnée à restituer la totalité de la d o t , reprises et
avantages matrimoniaux de Jeanne Martinon. L a
sentence attribua au sieur de Longpré 2800 fr. pour
. les arrérages du douaire de celle-ci, tandis q u ’elle avait
joui, jusqu’au moment de sa-m ort, des biens de Pierre
Gueffier, son mari. On évalua k la somme évidemment
exagérée de i 3 , i 2 i fr. les contrats de rente et créances
actives de la dame Martinon. Plusieurs chefs furent
alloués sans être établis. Non seulement on ne déduisit
aucune des dettes nombreuses payées par Jean, b a illi, à
la décharge de la succession M artinon, mais on con
damna même le curateur à rembourser des capitaux
et arrérages de rentes dues par le poursuivant, comme
héritier substitué. Avec de telles inadvertances, il
était facile de grossir un capital. La sentence est terminée par la disposition suivante,
qu’il est important de faire connaître :
<c E t pour parvenir au paiement du montant de
<( toutes les condamnations prononcées, tant en prin« cipaux , intérêts que frais, permettons au suppliant
«
jo u ir pignorativement et se mettre en possession
« des immeubles des successions desdits Pierre et Jean
« G ueffier, si mieux il n ’aime les faire saisir et
�a
«
«
«
vendre, pour, des deniers provenant de la vente
d ’iceux être payé de ses créances ; et, attendu que le
demandeur est fondé en titres, ordonnons que notre
présente sentence sera exécutée f nonobstant oppo-
« sition ou appellation quelconque. »
L e sieur. Gueffier de Longpré, qui ne considérait
pas cette disposition comme étant purement de s tile ,
s’empressa d ’en profiter.
Après avoir fait signifier la sentence au curateur,
le a décembre 1760, il se mit en possession des biens.
Les baux à ferme que produit l ’appelant sont loin
de prouver que son père eut joui à tout autre titre ,
puisqu’ils sont postérieurs à cette signification.
C ’était p e u , dans ses intérêts, d ’être en mesure
contre ses cohéritiers, q u i , au moyen de sa jouissance
pignorative, ne pouvaient l ’expulser sans le rem
bourser préalablem ent j il fallait encore arrêter les
créanciers de la succession, dont les actions n ’étaient
point paralysées. L e génie du sieur Gueffier lui en
indiqua les moyens.
L e 7 février 1 7 6 3 , il fit faire au curateur une
nouvelle signification de la sentence, avec commande
ment recordé.
C e t acte fut suivi d ’un procès-verbal en date du 27
avril, qui saisit réellement la plus grande partie des
biens dépendans de la succession. Ceux qui étaient
les plus éloigués, et qui pouvaient n ’être pas connus
des créanciers, furent exceptés.
Sur les diligences du commissaire aux saisies réelles
de la sénéchaussée de Riom , où celle-ci avait été
�9\fô
( n )
portée,
il fut procédé, le
16 j u i n ,
au bail des
immeubles saisis.
L e sieur de Longpré s’en rendit \eferm ier ju d icia ire.
Il ne l’eût pas p u , s i , comme on le prétend, il ne
possédait ces biens q u ’en qualité d’héritier bénéficiaire,
puisqu’il aurait été à-la-fois saisissant et partie saisie.
La position qu'il avait su prendre était éminemment
avantageuse. Comme possesseur pignoratif et même à
titre d ’héritier bénéficiaire pour un cinquième, il était
devenu comptable des jouissances j en qualité de fer
mier judiciaire, il ne devait plus que la somme exiguë
à laquelle il avait bien voulu fixer le prix du bail.
D ’un autre côté , il s’était créé un arsenal dans lequel '
il puisait des moyens de défense, contre les attaques
de toutes les parties intéressées.
L e 12 mai 1 7 6 4 , le sieur G ueffier fit procéder à
l ’adjudication au rabais des réparations à faire aux
biens saisis, dont il reconnut être en jouissance comme
bailliste ju d icia ire.
Il songea bientôt à mettre les biens meubles de la
succession à couvert des poursuites des créanciers. Ce
bu t fut rempli par une sentence que Julien Nozerine,
son cousin germain, obtint seul contre lu i, le 23 août
176 4. E lle condamnait le défendeur, en qualité d ’héri
tier bénéficiaire de Jean Gueffier son père, à rendre
compte du bénéfice d ’inventaire, e t, à défaut de ce
faire, h payer audit Nozerine une somme de 1000 fr.
portée par un billet dudit Jean G ueffier, du 16 sep
tembre 1 7 4 9 , qui avait été éteint par d iffé r e n s traités
passés avec le débiteur lui-même.
\
�( 12 )
C e lle sentence, évidemment obtenue de concert,
puisque toutes les copies de signification failcs à
Nozerine sont dans le dossier de l’appelant , fut
exécutée comme elle devait l ’ètre, par un simulacre
de compte qui n’a jamais été débattu, et q u ’on a gardé
en réserve pour l ’opposer à tout venant. Pour donner
une idée de la régularité de ce compte, on se contentera
de (“a ire observer que tous les objets mobiliers, énumérés
dans l ’inventaire, n ’y sont portés que pour m ém oire,
et sans aucune évaluation.
L e premier bail judiciaire, q u i, conformément aux
ordonnances, n’avait été passé que pour trois années,
étant expiré, il fut procédé à un second, le io avril
1 7G6, pour le même nombre d ’années, si tant la saisie
réelle dure. L e sieur Gueffîer se rendit encore fermier
judiciaire : ainsi se perpétua sa jouissance précaire.
On semble vouloir tirer avantage de ces expressions:
S i ta n t l a s a isie d u r e . Mais 011 peut se convaincre, en
ouvrant le Traité des Immeubles de M. d ’JIéricourt,
à la page 1 1 7 , n° 17 , que celte clause était de rigueur,
d ’après l ’ordonnance de 1626. E lle eut pour but de
faire cesser les-fraudes qui rendaient interminables les
procédures eu saisie réelle. On n ’y peut donc rien voir
de particulier à la cause.
Parfaitement éclairé sur les forces de la succession,
le sieur de Longpré résolut de lirer parli de ses avan
tages, en composant, soit avec ses cohéritiers, soit
avec les créanciers. Les frais furent bien moins consi
dérables q u ’ou 11e voudrait le faire croire. Il est aise
de s’en convaincre.
�( >3 )
La dame Soléliage, sa mère, réclamait la restitution
de la d o t , portée, par sou contrat de mariage, à
1720 fr. ; i3oo fr. pour gain de survie, bagues et
joyaux 5 le service d ’un douaire annuel de 100 f r . , et
son l o g e m e n t ; enfin , la restitution d’une somme
de 7000 f r . , montant d’effets et créances que défunt
Jean Gueffier avait touchés pour elle, en vertu d ’une
transaclion du 4 février 1728.
- Guillaume Gueffier, père des intimés, avait droit
à une légitime sur les biens substitués de Jeanne
M artinon, et à un cinquième dans ceux de Jean
Gueffier, par suite de la renonciation de l ’héritier.
On traita sur toutes ces préten tion s, par acte sous
signatures p r iv é e s, du aG ju ille t 17 6 7 . Pour les
restreindre, le sieur de L ongpré p r é t e n d i t ce sont les
termes de l ’acte, « que la succession du sieur Gueffier
« père était entièrement absorbée par des dettes anté« Heures » 5 mais cette allégation n ’est même justifiée
par aucune énonciation.
Toutes les créances et reprises de la dame Soléliage
furent réduites à la somme de 3 ooo f r ., q u i, est-il d it,
demeurera com pensée, au jour du décès de celle-ci,
avec celle de 3 000 francs q u ’elle lui a donnée par son
contrat de mariage. E n bornant ainsi l ’avoir de sa
niere à quelques intérêts viagers q u ’il n ’osa refuser,
le sieur de Longpré méditait alors la répudiation que
nous verrons réaliser, en 1820, par son fils, qui suit
scrupuleusement ses plans.
Son frère ne fut pas mieux traitéj il promit de lui
payer la somme de 5oo francs, sans intérêts jusqu’au
�( i4 )
jo u r , « pour tenir lieu au sieur Guillaume Gueffîer
« de tout ce q u ’il pouvait prétendre, à titre de légi« time de grâce ou autrem ent, sur les biens de
« Jeanne M artin on , son ayeule , substitués
audit
« sieur Guef’fier de Longpré, ou sur les biens dudit
« sieur Gueffîer, bailli, sou père. »
Toute ridicule que fût cette espèce de destination k
l ’égard d ’un cohéritier, le sieur de Longpré eut l'ascen
dant de la faire approuver plus tard , par une ratifi
cation du 10 niai 1 7 7 5 , q u ’on a opposée comme fin
de non-recevoir aux justes réclamations des intimés.
Ce traité, du 26 juillet 1 7 6 7 , renferme mention
d ’une prétendue séparation de biens q u i aurait existé
entre la dame Soléliage et Jean Gueffîer, son mari.
On n’en trouve de traces nulle part. L'appelant ne
produit ni titres ni documens qui puissent certifier
ce fait.
C epen dan t la saisie réelle était toujours tenante elle avait été frappée de plusieurs oppositions. U n
certificat du greffier aux criées de la sénéchaussée, dé
livré au saisissant, le 24 juillet 17 6 7 , constate q u ’elles
n ’étaient q u ’au nombre de huit.
De ces créances, deux frappaient les biens de Jeanne
Martinon : celle du sieur du Gouzel de Lauriat et des
héritiers Nozerine, qui avait pour objet le rembour
sement des dots par elle promises; et les arrérages de
cens auxquels ses biens étaient assujétis, au profit du
chapitre de Brioude. Elles étaient exclusivement à la
charge du sieur de Longpré, son héritier.
L a troisième, qui était un contrat de rente de 107 liv.
�(. i 5 )
W
10 sous annuellement, consenti par Jeanne Martinon
et Jean Gueffier (alors due à dame Marie N ugicr,
veuve Yiallard) , devait être répartie par ég alité entre
les deux successions.
La q u a trièm e, consistant en un contrat de renie
de i 5 fr. au profit de l ’Hôtel-Dieu de B rio u d e , et la
cinquièm e, qui était une fondation de 20 fr. en faveur
du curé de la même v ille , concernaient la succession
de Pierre Gueffier, époux de la dame Martinon.
' L a sixième et la septième ayant aussi pour objet
deux rentes, l ’une'de i4 1 iv . 2 s ., et l ’autre de 7 5 liv .,
paraissent être dues par Jean Gueffier.
E t la dernière opposition, faite à la requête d ’un
sieur Gueffier-Taleyras, n ’était que conservatoire.
On peut ju ger, dès-lors, de l ’étendue des sacrifices
que dut faire le sieur de Longpré pour obtenir main
levée de ces oppositions, sur-tout lorsqu’on sait ce qui
résulte d’ailleurs des actes rapportés par lui , q u ’ilJ
n ’acquitta aucunes' créances 3 et que les arrangemens
avec les créanciers se bornèrent h ratifier les contrats
de rente.
Si la vente des biens saisis eût été mise à fin , les
débats de l ’ordre auraient nécessairement mis à dé
couvert le véritable état de la succession. Ce n ’était
pas le but auquel tendait le sieur Gueffier; il avait
conçu le projet de conserver les bien s, et d ’intervertir
lè titre de sa possession. Voici comment il entreprit
de l ’exécuter
Rien n’avait été négligé par l u i , pour cacher à ses
co-succcssibles la connaissance des affaires de la succès-
�( '0
)
sicm, cl (les procédures q u ’il dirigeait dans ses intérêts
personnels.
Une lettre q u Jil écrivait, le i 3 avril 1 7 6 9 , à
Me F a v a rd , son procureur, ne laisse aucun doute sur
ses plans ni sur la nature des moyens q u ’il employait
pour arriver à ses fins. On y lit : « J’ai v u , Monsieur,
« par la dernière lettre que vous m ’avez écrite, en
« réponse à ma dernière 3 que vous aurez l ’attention
«
«
«
a
«
«
d ’observer que personne ne fa sse aucune démarche
vis-à-vis le commissaire a u x saisies réelles. Vous
avez dû savoir que j ’ai un frère qui a été rester à
Iiiom y c est précisément de ce côté-là que j ’avais
lieu de craindre $ mais me voilà r a s s u r é , par l ’attention que vous me promettez de prendre à mes
« intérêts. »
Sur un réquisitoire signifié par l ’appelant, il lui a
été donné copie de cette lettre qui n ’a pas besoin de"
commentaire, et sur laquelle il a cru devoir garder le
silence dans son Mémoire imprimé.
C ’est dans ces entrefaites, et au milieu de toutes
ces précautions , que le sieur Guefiier de Longpré
demanda la radiation de la saisie réelle.
E n avait-il le droit?
L e 17 août 1770 , il o b tin t, en la sénéchaussée,
contradictoirement avec le procureur du curateur
q u ’il avait choisi, et avec celui des dames religieuses
de Brioude, créancières opposantes dont il avait ratifié
la vente, mais p ar d éfa ut contre tous les autres c r é a n
ciers et le commissaire a u x saisies réelles} une sen
tence qui ordonna « la radiation de la saisie réelle et
�( 17 )
«
«
«
«
«
<
des oppositions, et en fit main-levée, à la charge
toutefois que les droits et actions du sieur GueffierTaleyras, pour lesquels son opposition h. fin de conserver avait été formée, demeureront sains et entiers,
du consentement du sieur Gueffier de Longpré, et
« aussi à la charge de lu i rembourser les fr a is de son
« opposition, et c e u x p ar lu i fa its en conséquence
« ju s q u à ce jo u r . »
On voit avec quelle attention le sieur de Longpré
soignait, même en son absence, les intérêts du sieur
Taleyras, dont il redoutait la surveillance.
Cette sentence, signifiée aux procureurs des parties
en cause, ne l’a jamais été à leurs domiciles, pas même
à celui du curateur T h ib a u d , partie saisie.
Il est alors difficile de concevoir comment elle aurait
p u , de p ia n o , faire disparaître les effets de la saisie
q u i avait placé les biens sous la sauve-garde de la
Justice.
L e redacteur du Mémoire de l'appelant a commis
une erreur, en disant quVZ était fâ c h e u x que la sen
tence du 17 août 1770 n ’eût pas été connue des
premiers juges, parce qu e, sans doute, ils n’auraient
pas considéré comme précaire la possession du sieur
Gueffier.
Les qualités du jugement dont est appel font mention de cette sentence et de son -dispositif} elle est
meme implicitement rappelée dans les motifs. C ’est
donc en connaissance de cause, que le tribunal de
Brioude ne s’y est point arrêté.
Que se passa-t-il alors dans la famille ?
3
�Pierre-Joseph G u effier-D u bu isson , le plus jeune
des frères, allant chercher fortune en Am érique,
confia, en 1 7 6 4 , au sieur de L o n gp ré, la régie de ses
biens et droits, et notamment d ’un pré appelé des
Prés N o irs j provenant de MM. M illanges , dont il
était devenu le propriétaire en 1755. Le mandataire
tenait état des revenus pour en rendre compte au
retou r5 mais, in struit, à la fin de 1781 , de la mort
de son frère, il disposa de ses biens en les vendant à
son profit. Il se détermina à repousser, par des fins de
non-recevoir, la demande en partage de ses cohéritiers.
François G u e ffie r , célibataire, avait réclamé ses
droits, tant paternels que maternels. Des difficultés
sans nombre furent élevées par le sieur de Longpré.
Obligé de quitter la maison de celui-ci, il obtint
judiciairement une provision. A son décès, il laissa
pour son héritière testamentaire la dame de Montfleury,
sœur de l ’appelant. Il a fallu alors s’exécuter : un traité
sous signature privée a terminé leurs différends.
Guillaume Gueffier est décédé en 1 7 7 8 , après avoir
fait un testament, par lequel il a institué la dame
Lam othe, son épouse, pour son héritière universelle.
Croyan t avoir droit à la succession de Pierre-Joseph
Gueffier-Dubuisson , cette dame en avait forme la dejnande en partage contre le sieur Longpré, par exploit
du 28 janvier 1793.
Le quatrième frè r e , Maurice
Gueffier , prêtre ,
éloigné, par ses fonctions, de son pays natal, avait
aussi remis le soin de ses affaires et l’administration
de ses biens au sieur de Longpré. C e lu i-c i, comptant
�( '9 )
sans rcloute sur son. affection-, qu il avait déjà mise a
l ’épreuve j crut pouvoir usex largement du m andat ,
en ven d a n t, par acte du 7 deçembre î j ' j G, à un sieur
F o u r n i e r - S a tou raille , un bien et .des contrats de rente
que possédait Maurice au lieu, de Saint-Ilpise^ et dont
il s ’a p p r o p r i a le p r ix , porté à 6100 francs. Il est à
croire que le père de l ’appelant a procuré à son frère
des assurances tant sur cet objet que sur ses autres
droits successifs : la morale et
l ’équité
repoussent
l ’opinion contraire.
Les excès de la révolution ayant frappé plus parti
culièrement les ministres du culte, Maurice Guefiier
obtint un asile au château de l ’Espinasse, qu'habitait
le sieur de Longpré. Il y est décédé le 2/f prairial an 4
(12 juin 1796), âgé de soixante-dix-sept ans. }
On remarque avec étonnement q u ’ il n ’a été pris
aucune mesure pour constater les effets mobiliers , et
■
sur-tout les papiers, qui étaient au pouvoir du défunt.
•f '•
• < * . ) : '
>1
Après q u ’ils eurent été subrogés, par* traité du 4
brumaire an 12 , à tous les droits de la dame Lamothe
leur mère, dérivant du testament de Guillaum e Guef
iier, les intimés citèrent, le 18 thermidor de la même
année , le sieur Antoine Gueffier-l’Espinassé, appelant,
1 effet de se concilier sur la demande .qu’ ils se pro
posaient de former eu partage des successions de Jean
Gueffier et de Marie-Anne Soléliage, ayeux Communs
pour.leur en être attribué les portions àteux revenantes
du c h e f «le G m l l u u m c l e u r p è r e , d e P ie r rc -J o s 'c i.l.
�lO R
( 20 )
Gueffier-Dubuisson et de Maurice
oncles.
Gueffier, leurs
Cette première poursuite fut suspendue par des pro
positions d ’arrangement qui restèrent sans effet.
Une nouvelle citation en conciliation ayant aussi
été infructueuse, fut suivie d ’une assignation donnée
devant le tribunal de Brioude, le 3 floréal an i 3 .
Les débats qui s’élevèrent ont mis à jour les inten
tions de l ’adversaire.
Il soutint d ’abord, par ses défenses signifiées le 12
thermidor, en se l'etranchant dans un moyen généi’al,
que la demande en partage des biens et successions de
Jean Gueffier et de Marie Soléliage était éteinte par
la prescription; que dès-lors les demandeurs devaient
y être déclarés non recevables, ou, en tous cas, en
_ être déboutés.
Cette objection fut victorieusement com battue par
une requête du 5 février 1820. Les demandeurs dé
montrèrent que leur action était entière à l ’égard de
toutes les successions dont ils provoquaient le partage.
Après avoir reçu différentes sommations de venir
plaider la cause, le sieur Gueffier de l ’Espinasse se
ravisant prend le parti de se présenter au greffe et d ’y
faire la déclaration q u ’il renonce, du chef du sieur de
Longpré son père, à la succession de Marie Soléliage,
pour s’en tenir aux avantages stipulés au contrat de
mariage du 2 août
C ette démarche, faite quarante-sept ans après le
deces de Mûrie Soléliage, arrivé le i 3 septembre
�aurait pu paraître extraordinaire , si quelque chose
pouvait étonner dans cette affaire.
Alors, et par des conclusions signifiées le 4 avril
1821
fense.
le sieur l ’Espinasse établit son système de dé
'
= 1 'u ’ ’
}
' |
Il opposa sa répudiation à la-demande en partage
de la succession de la dame Soléliage 5
Contre celle de Jean Gueffier ,
i° D u chef de G u illa u m e, il fit valoir le traité du
26 juillet 1767 , ratifié par celui du 10 mai 1775 ;
20 Relativement à Pierre-Joseph^Gueffier-Dubuisson,
il se retrancha sur le défaut de preuve légale de son
décès ; •
3 ° A l ’égard de Maurice G u effier, il prétendit q u ’il
s'était écoulé un laps de tems [suffisant pour opérer la
prescription.
Le tribunal de Brioude a statué sur toutes ces ex
ceptions, parson jugement contradictoire du 23 mai
1821.
- Les intimés ont été déboutés de leur demande en
partage de la succession de Marie Soléliage et de celle
de Jean Gueffier, du chef de G u illau m e, leur père.
ïls ont été déclarés non recevables, quant ¿1 présent,
dans celle relative à la succession de Pierre-Joseph
Gueffier-D ubuisson.
Leur demande, du chef de Maurice Gueffier, a été
accueillie.
On croit inutile de faire connaître littéralement les
motifs de décision, puisque ceux relatifs au dernier
•
�^
^
( 22 )
chef, qui constitue la principale difficulté,
ont été
transcrits dans le Mémoire de l ’appelant.
L a relation exacte des faits de la cause rendra trèsfacile l ’exposé des raisons qui doivent déterminer la
confirmation du jugement quant au grief relevé par
l ’appel du sieur l ’Espinasse.
DISCUSSION,
L es in tim é s c r o ie n t d e v o ir fa ire p ré c é d e r cet examen,
p a r q u e lq u e s co n sid é ra tio n s s u r les a u tre s d isp o sitio n s
d u ju g e m e n t .
Ils ont la conviction intime q u ’ils parviendraient ,
soit k faire rejeter, comme tardive et suspecte, la re
nonciation faite à. la succession de la dame Soléliage ,
soit à obtenir l ’annullation des traités que Guillaume
G u e ffier, leur père, souscrivit aveuglément, par suite
des manœuvres frauduleuses constamment pratiquées
par le sieur de Longpré. Mais, jaloux de mettre fin
aux débats qui depuis si long-tems troublent leur fa
m ille, ils se réservent d ’examiner s’ils feront à l ’amour
de la paix le sacrifice de leurs droits sur ces deux
points.
Il ne peut y avoir de difficulté relativement au dispo
sitif du jugement qui a déclaré non recevable, quant
à présent, la demande en partage de la succession de
ï*ierre-Joseph Gueffier, deuxième du n o m , parce quç
son décès ne serait pas légalement établi.
Ce point de fait ne peut être raisonnablement mis
�(' 2 .3 )
*6$
Cil cloute. U ne lettre écrite officiellement de l ’ ile de
Saint-Domingue, le 5 décembre 1 7 8 1 , par un sieur
Vausselin, commis au bureau du trésor de la marine,
au Port-au-Prince, et adressée aux maire et échevins
de la ville de Brioude, annonce positivement la mort
de Gueffier-Dubuisson, avec invitation à en trans
mettre la nouvelle à sa famille. E lle indique en détail
les pièces qui doivent être envoyées par ses héritiers
pour recueillir la succession q u ’il a laissée dans l ’ile.
Cette lettre, qui fut alors transmise, par l ’autorité
locale, aux membres de la famille Guefiier, ne parut
point équivoque. Le sieur de Longpré nè croyait cer
tainement point h l ’existence de son frère , lorsqu’il a
disposé d ’une partie de ses b ien s, dont il a touche le
prix.
Si l ’appelant, son fils et son héritier a allégué de
puis l ’insuffisance des preuves du décès, il est aisé
d ’en apercevoir le m otif, qui tend à prolonger sa pos
session et à éloigner le compte des jouissances.
La Justice ne consacre point de semblables pré
tentions.
Mais fùt-il vrai que l ’absence de quelques formalités
« empêchât de considérer comme pièce légale et probante
la lettre produite par les intim és,
au moins reste-
t-elle au procès comme une*forte présomption du décès
q u e lle annonce. Dans cet état de choses, le tribun al
de Brioude ne devait point rejeter la dem ande, mais
Seulement ordonner un sursis, et fixer un délai pen
dant lequel les actes et procédures seraient régularisés.
C ette mesure conciliait les in léiêts de toutes les parties,
�ÏW
( 24 )
et évitait aux demandeurs l ’inconvénient grave de re
commencer un nouveau procès lorsqu’ils auront obtenu'
les renseignemens q u ’ils ont demandés aux autorités
compétentes.
Ces réflexions, qui n’exigent pas de plus grands développemens, motivent suffisamment la réserve expresse
que font les intim és, d ’interjeter un appel incident.
Si l ’on scrute avec attention le système proposé par
l ’appelant, on s’aperçoit bientôt q u ’il repose entière
ment sur cette erreur de f a i t , reproduite avec com
plaisance sous toute espèce de form e, que le sieur de
Longpré avait j dès son o u v e r t u r e , i n t é g r a l e m e n t
a ccep té la succession de Jean Guejfier son père.
E n fondant sur cette base fausse, on a aplani les
difficultés. Les principes se sont présentés en foule \
et de leur application, des conséquences pressantes ont
été déduites.
Rappelons quelques principes, et rétablissons les
faits.
Quoique la qualité d ’héritier soit universelle et
indivisible, en ce sens que le successeur ne peut en
restreindre les droits et les obligations j néanmoins,
si le défunt laisse après lui plusieurs héritiers, elle se
divise entr’eux, de manière que chacun succède à titre
universel, mais non comme héritier universel. Les
biens et les charges se distribuent proportionnellement
entr’eux, sans q u ’il puisse exister aucune
prépondé
rance pour les uns au préjudice des autres.
S il y a abstention ou renonciation de la part do
�( »5 )
l’ un des successibles, le cohéritier n’est pas contraint
d ’accepter l ’accroissement qui peut en résulter. Son
intérêt est, à cet égard , la seule réglé qu il ait a
suivre : il peut à son gré recevoir ou refuser cette por
tion. On conçoit en effet q u e , par un sentiment de
délicatesse, un cohéritier ait voulu faire honneur aux
affaires de la succession, pour sa part seulement, sans
entendre se livrer aux chances d ’un événement imprévu,
par lequel il se trouverait chargé de la totalité. S’il
n ’opte point pour l ’accroissement, son obligation per
sonnelle ne subsiste que pour sa portion seulement ;
sauf, de la part des créanciers, leur action hypothé
caire sur tous les biens de la succession , aux termes
de la loi 6 1 , J f . d e a c q u ir c n c ld v e l c in iitte n d d Jicered ita te
(i).
Voyons maintenant ce qui s’est passé après le décès
de Jean Gueffier, arrivé en 1760.
E n v e r t u d e son i n s t i t u t i o n c o n t r a c t u e l l e , le s ie u r
d e L o n g p r é a v a it la saisine lé g a le de la succession de
so n p è r e , a v e c la ch a rg e des d ette s p a s s iv e s , et l ’o b li
g a tio n d e d é liv r e r à c h a c u n de ses frères sa d e s tin a tio n
co n v en tio n n elle, o u ,
si c e lu i-c i le p r é f é r a i t , sa l é g i
tim e de d r o i t , q u i é t a it u n d i x i è m e , les e n fa n s é t a n t
a u n o m b r e de c i n q .
I l n ’ a. pas vouiïu accepte'r la r e s p o n s a b ilité a b so lu e
c£ui r é s u lt a it d u j u s et noincn hæ redis , de la q u a l i t é
d h é r it ie r u n iv e r s e l.
E n conservant cette qua lit é , il pouvait en restreindre
(1) Chabrol, tome 2 , page i 4 o.
‘
4
ft6?
* iy
�(
)
les e f f e t s , é v i t e r a u m o i n s
d e c o m p r o m e t t r e ses b i e n s
p erso n n e ls , p a r u n e a c c e p ta tio n sous bénéfice d ’i n v e n
taire :
C
il
ne
réancier
l’a
et
pas
voulu
héritier
.
tout à-la-fois, le sieur Guef-
fîer donna la préférence au premier titre.
Soit par
défiance des forces de la succession, soit par un calcul
m édité, pour ne pas confondre ces deux qualités , il
déclara l'enoncer à l ’institution d ’héritier, faite en sa
faveur, le 2 août 174^ ? et n’accepter la succession
que comme héritier bénéficiaire.
Par cette abdication profondément réfléchie, l ’ac
ceptation sous bénéfice d ’inventaire ne porta et ne put
porter que sur un cinquième de la succession , qui
était sa portion virile. L ’iustitution contractuelle ainsi
anéantie, les cohéritiers rentrèrent dans leurs droits
naturels et légitimes, et devinrent habiles à recueillir
les quatre autres cinquièmes.
Fùt-il vrai que l ’abstention de quelques-uns des
successibles eut rouvert de nouveaux droits en faveur
du sieur de Longpré, on conviendra du moins, i° q u ’il
n ’aurait pu les recueillir que dans les délais et avec les
conditions prescrits par la loi j 20 que n étant point
forcé de les accepter, il a dû exprimer la volonté d ’en
profiler. A défaut d ’option, la renonciation q u ’il avait
faite était un obstacle insurmontable à toute occupation
contraire.
Ainsi, quand les intimés n ’auraient à opposer à leur
adversaire que sa propre détermination, indépendam
ment de toute autre circonstance, ils ne devraient
point redouter l ’issue du procès.
�( 27 )
%§<)
Mais si l’attention se porte sur le$ faits qui ont
suivi, il ne peut rester le moindre doute sur la nature
de la possession du père de 1 appelant.
Lors de l ’inventaire, le sieur Gueffier entendit si
peu recevoir les denrées et effets mobiliers, en qualité
d ’héritier, q u ’il sq f i t çharger, par le procès-verbal,
de tous les objets inventoriés 3 pour en rendre compte
à qui de droit. Il en fut donc constitué gardien judi
ciaire. (.1).
A u lieu de s’adresser, comme il le devait (2), aux
héritiers présomptifs, q u ’il connaissait parfaitement,
il fit nommer un curateur à la succession, et obtint
contre lu i, sans contradiction, une liquidation abusive
de ses créances personnelles , q u ’il osa porter a la
•somme de 34>ooo fra n cs , en principal seulement.
Cette condamnation le frappait personnellement
pour un cinquièmej elle était obligatoire, quant au
surplus, pour ses cohéritiers.
Pour envahir l ’universalité des biens, il se servit
utilement de sa qualité de créancier, en obtenant de
la Justice l ’envoi en possession pignorative, à défaut
de paiement de ces quatre cinquièmes, si mieux il
n’aimait les faire saisir et vendre.
Il opta d’abord pour la jouissance pignorative, et se
«lit en possession , en vertu de la sentence qui ordon
nait rexécution provisoire.
( 0 1 igeau, Procédure civile > t. 2 , page 343 .— Code de procédure ,
art. 9^3 , n° 9.
(2)
Idem , art.
996.— Quest. de D roit y° Héritiers § 2
colonne 2, alinéa 8 .
,
,
,
p .
648,
�fi-i;,
( 28 )
Trois ans après, afin d ’écarter les créanciers qui lui
donnaient de l’inquiétude, il usa de la seconde faculté
que lui accordait la sentence, en faisant saisir réelle
ment la plus grande partie des biens.
Il se rendit lui-même fermier judiciaire.
Sa possession continua de fa it. A quels titres?
D u mobilier, comme gardien;
Des immeubles non saisis, comme créancier pignoratif;
Des objets saisis, comme fermier judiciaire.
U ne semblable jouissance, loin de pouvoir être con
sidérée comme faite animo d o m i n i ne porte-t-elle pas
tous les caractères d ’une possession précaire?
Tout au p lu s, et en abondant dans le sens de l ’ap
pelan t, pourrait-on dire q u ’il n ’a jo u i, comme pro
priétaire, que du cinquième dont il était héritier
bénéficiaire ; mais q u ’à l ’égard du surplus de la succes
sion , il ne l ’a possédé q u ’à des titres insuffisans pour
lui en transmettre la propriété.
Tel est le véritable état de la cause.
On peut actuellement suivre l ’adversaire dans la
, division q u ’il a adoptée; la réfutation de ses moyens
semble découler naturellement des faits.
P R E M IÈ R E PR O P O SIT IO N .
L a f a c u lt é d ’ accepter la succession de Jean Guefjfier
a -t-e lle
é té perdue par p lu s de trente ans de
prescription ?
A fin d ’établir que Maurice Gueffier ou les intimes
qui le représentent n’ont plus été recevables à accepter
�( 29 )
la succession cle Jean G ueffier, pour s’être abstenu
de prendre la qualité d h éritier, pendant
plus de trente ans, on invoque les lois
l ’opinion des auteurs, et l ’article 789 du
q u i, dit-on, se réfère, en cette m atière,
un laps de
romaines,
Code civil,
aux législa
tions préexistantes.
On a donné à la règle sur laquelle on s’appuie un
sens beaucoup trop absolu. P o u r l ’apprécier saine
ment , il faut le coordonner avec deux autres principes
q u ’on doit aussi respecter :
i° D ’après la maxim e, le mort saisit le v i f , con
sacrée par l ’article 724 du Code c iv il, le successible
étant saisi de plein droit de la succession, est réputé
définitivement h éritier, s i, dans les trente a n s, il n a
pas renoncé. Ce résultat ne contrarie pas la règle,
n ’est héritier qui ne 'v e u t,
puisque l ’ héritier pré
somptif peut se dépouiller de cette q u a lité , en décla
rant q u ’il ne veut pas l ’accepter.
Telle était la disposition du Droit romain.
L a loi D7 , ff. D e acquir. v e l omit, h c e r e d .il.après
avoir laissé aux héritiers nécessaires le pouvoir de
s’abstenir de la succession, explique comment on doit
entendre cette abstention > en ajoutant : Que quoique,
dans la rigueur du D ro it, ils soient obligés envers les
créanciers du d éfu n t, cependant il n ’est point donné
d action contre eux, s’ils veulent délaisser la succession :
&t v elin l derelinquere hœreditatem.
« Ce mot derelinquere, dit M. M erlin , en traitant
« cette question ( 1 ) , n’est ni obscur ni équivoque; il
( 0 Question de Droit. V° Héritiers ^.paragrnpheX
�( 3o )
^
ci signifie clairement q u e , pour n ’êlre pas soumis aux
« poursuites des créanciers, il ne suffit pas que les
«< héritiers siens ne se soient pas immisces de fait dans
« la succession , mais q u ’il faut encore q u ’ ils la répu« d ie n t; car clerclinquerc exprime un délaissement,
« un abandon ,
c’est-à-dire un
acte
positif ,
une
« déclaration fo rm elle de ne pas vouloir demeurer
« héritier. »
« L e $ 2 , aux Institûtes D e hœredum qualitate et
« dijferentiâ , dit également q u ’à la vérité les héritiers
« siens sont héritiers nécessaires, mais que le préteur
« leur pe rm et, lorsqu’ ils le v e u le n t, de s’abstenir de
« l ’ hérédité : sed his prœtor perm ittit vo lek tib u s
« abstinerc hœreditate. L o rsq u ’ils le v e u le n t , volen« tibus, leur abstention n ’a donc pas lieu de plein
« d ro it; elle ne peut donc être que le résultat de leur
« volonté*, il faut tlonc cjue leur volonté de s’abstenir
« soit déclarée expressément, pour q u ’ils soient censés
« s’être abstenus. »
C e t auteur recom m an dable, après avoir parcouru
différons textes de lois ro m a in e s, cite l ’opinion du
président F a v r e , dans son T raité D e erroribuspragma-
ticorum , où il é t a b lit , avec sa profondeur ordinaire,
que les héritiers siens sont censés accepter la succession,
p a r cela seul q u ’ils n'jr renoncent p a s , et que la
m axim c filin s , ergo hœres, s’applique à eux dans toute
son étendue.
Si nous consultons la C o u tu m e d ’ A u vergn e, sous
l ’empire de laquelle s’est ouverte la s u c c e s s i o n de Jean
G u e fiie r, q u e lle doit ré g ir, l ’article 54 du chap. 12
�( 3i )
décidera la question dans le même sens. Il est ainsi
conçu :
« Aucun n ’est recevable de soi dire n ’être héritier
« d ’aucun, s’il ne répudie et renonce expressément
« à sa succession. »
Ce texte, puisé dans les lois romaines, n ’exige pas
de commentaire. Il apprend clairement que celui
auquel une succession est déférée est le maître de
l ’abdiquerj mais il veut que l ’abdication soit expresse.
Tant q u ’il n ’y a point renonciation de sa p a r t , l’hé
ritier conserve la qualité dont la loi l ’a saisi. Il peut
en réclamer les prérogatives, comme on peut lui en
opposer les obligations.
r
« C ette règ le , dit M. C h ab rol ( i ) , est au tan t eu
« faveur de l ’héritier présomptif que contre lui ,
« puisque, s’il n ’a pas renoncé formellement, on ne
« peut pas lui opposer son abstention et son simple
« silence. Il est donc juste q u e , de sa p a rt, il ne
« puisse se soustraire à la qualité d ’héritier, q u ’en y
« renonçant dans une fo rm e suffisante et légale. »
L a disposition de la Coutum e est d ’autant plus
juste, q u ’elle est en harmonie avec la maxime que la
renonciation ne se présume p a s 3 et q u ’elle doit être
formelle (V oyez L e b r u n , Successions 3 liv. 3 , ch. 8 ,
sect. 2 , n ° 3 6 ; Code c iv il, art. 784.).
E n fin , le sens dans lequel l ’appelant a entendu
1 article 78g du nouveau C od e, le rendrait absurde et
contradictoire, en lui faisant décider q u ’après trente
�ans, la prescription anéantit simultanément la faculté
d’accepter et celle de renoncer. On ne conçoit pas
qu'un héritier puisse perdre à-la-fois l’exercice de
deux
facultés opposées; il faut nécessairement que
l ’une cède à l ’autre.
Aussi la loi ne dit pas que la faculté d ’accepter
et la faculté de répudier se prescrivent ; elle dit que la
faculté d ’accepter ou de répudier se prescrit; ce qui
signifie, suivant l ’opinion de M. Chabot ( r ) , « qu ’après
le délai de trente ans, la faculté que l ’héritier pré
somptif tenait de la l o i , ou d ’accepter la succession
qui lui était déférée , ou de la répudier, se trouve
éteinte par la prescription, et q u ’ainsi, lorsque l ’hé
ritier a laissé passer trente ans, sans avoir fait son
option, il se trouve, à défaut de renonciation expresse ,
héritier définitif, héritier obligé, quoiqu’il n’ait fait
aucun acte d ’ héritier.
C e savant commentateur justifie cette interprétation
par une dissertation à laquelle il suffit de renvoyer.
E lle est basée sur ce m otif puissant, que l’ héritier qui
est appelé par la loi ; q u i , par e lle, est saisi de la
succession, sans q u ’il soit besoin à cet égard d ’aucun
acte de sa volonté, peut bien, en manifestant une
volonté contraire, n’être pas héritier et faire cesser la
saisine; mais q u e, s’il ne manifeste pas cette volonté
contraire, en renonçant expressément dans le laps de
trente ans, il est considéré comme ayant définitivement
( 1) S u c c e s s i o n s , a r t i c l e 7 8 9 , t o m e a , p a g e 5 .'|8 .
�accepté le titre et les droits d ’héritier, que la loi lui
avait conférés.
Dès qu’il est reconnu, dans la cause, que Maurice
Gueffier n’a jamais renoncé à la succession de son père,
on a mal à propos conclu de son abstention pendant
trente ans, q u ’il a été déchu de la faculté d’accepter.
L a conséquence la plus juste à déduire e s t , au con
traire, q u ’il a v o u lu être héritier 3 puisqu’il n’a pas
répudié, et q u ’au moyen de son silence pendant la
période indiquée, son acceptation tacite est devenue
irrévocable, par la perte de la faculté de renoncer.
Ainsi tom be, sous ce premier rapport, le moyen
proposé.
2° L a thèse posée par l ’adversaire, fùt-elle absolue,
il n ’en serait pas plus avancé.
La privation de l’exercice d ’une faculté ne peut être
admise sans q u ’il se présente un adversaire qui ait droit
et qualité pour la réclamer. Lorsque la loi déclare un
héritier présomptif déchu par l'effet de la prescription,
c’est pour investir celui qui a possédé à son préjudice.
E lle ne veut point que les biens puissent rester sans
propriétaire, ce qui serait contraire à l ’ordre public.
Cette doctrine est professée par tous les auteurs.
Voici comment s’explique,
au n° 160, Furgole,
dont l’appelant a invoqué l ’opinion (pages 20 et 21
du Mémoire) , pour prouver que la faculté d ’accepter
U n e hérédité se perd par trente ans :
« Mais il faut prendre garde q u ’afin que le droit de
« l ’héritier fut éteint par la prescription, il fa u d ra it
« (ju un autie l eut acquis par la possession j car la
�(« '
! 34 )
« prescription est bien mise au rang des moyens
« d ’acquérir ou de perdre ; mais il fau t, afin q u ’elle
« ait lieu , que ce qui est perdu par l’un à cause de
« sa négligence, soit acquis par un autre à cause de
« sa possession. Si une hérédité était va ca n te, et sur
« la tète d ’un curateur qui serait un simple déposi« taire, lequel ne pourrait jamais l ’acquérir par la
« prescription, elle pourrait être acceptée,
même
« après les trente ans depuis la mort du défunt ,
« parce que le droit n ’en serait pas perdu, à cause
« qu’i l n ’aurait pas été acquis par un autre. »
M. M erlin, q u ’on a également cité , suppose aussi,
ce qui est de toute nécessité, q u ’il y a possession de la
part d ’un autre héritier, et en cette q u a lité d ’héritier.
On aurait pu remarquer, en rapportant son opinion,
q u ’elle n’est point appuyée sur les principes généraux
du D ro it, mais fondée, dans l ’espèce q u ’ il exa m in a it,
sur une disposition précise et spéciale de l’article 21
du titre 21 de la Coutum e d ’Audenarde. Elle 11e peut
donc faire impression dans la cause.
Quels sont donc les droits de l ’appelant, ou du
.sieur Gueffier de Longpré q u ’il représente , pour
opposer aux intimés une déchéance de la qualité
d ’héritier , résultant de la prescription ?
On répond : Dès le décès du père commun , il a seul
possédé le titre d ’héritier, le j u s et nomen hœredis.
C ’est une erreur.
Il
n ’a pas voulu accepter le titre d ’héritier universel
qu ’il tenait de la libéralité paternellej il l ’a expressé
ment répudié.
�Il
s’est volontairement restreint à sa portion virile.
Les autres successibles, au nombre desquels se
trouve Maurice Gueffier , ont reçu de la loi la qualité
d ’héritiers à titre universel; ils l ’ont conservée, puis
q u ’ils ne l ’ont point répudiée.
L e sieur de Longpré a lui-même fait nommer un
curateur q u i , en représentant la succession, a laissé
intacts les droits de tous les héritiers, malgré leur
abstention.
i
Il
n ’a donc aucun droit acquis dont il puisse se
prévaloir au préjudice de Maurice G uefiier, qui est
réputé héritier pur et simple , tandis qu ’il n’est
q u ’héritier bénéficiaire.
E u eiit-il? il ne les recueillerait pas exclusivement.
Les intimés seraient, sans doute, bien fondés à ré- '
clamer une portion de cet accroissement, du chef de
G u illau m e,
leur père. E n effet, la cession q u ’il a
consentie de ses droits n’aurait pu porter sur un-béné
fice qiuiè’se serait ouvert po/térieurement.
A in s i, à moins q u ’on ne prouve .que le père de
l ’appelant a légitimement possédé ^ à titre d ’héritier,
la totalité des biens, il ne peut espérer de trouver,
dans son titre se u l} le droit de s’opposer à la pétition
d hérédité, formée du chef de Maurice Gueffier. Ceci
nous conduit à l’examen de la deuxième questiou, agitée
par l ’appelant.
�( 30 )
D E U X I È M E PR O PO SITIO N .
L a propriété des biens de la succession a-t-elle été
acquise à Vappelant par une possession utile et
p lu s que trentenaire?
négative est déjà établie par ce qui précède-,
quelque réflexions compléteront la démonstration.
L a possession trentenaire suffit seule pour accom
plir la prescription, parce que celui qui a joui aussi
long-tems sans trouble, est censé avoir acquis de bonne
fo i, à moins que le contraire ne soit prouvé. Mais s’il
est représenté un titre sur l e q u e l l a p o s s e s s i o n s’appuie,
quoiqu’ancienne q u ’elle s o it, cette possession sera
L
a
vicieuse et inefficace, si le titre n ’est pas de sa nature
translatif de propriété, parce q u ’alors il démontre que
la possession n’a pas commencé de bonne foi ; ce qui
s’entend, l o r s q u e l e p o s s e s s e u r n ’ a p a s e u ju s la opinio
acquisiti dominii. Aussi les possesseurs à titre précaire,
d ’impignoration ou de nantissement; le fermier, le
dépositaire, e t c . , ne peuvent jamais prescrire, quelque
longue que soit leur possession.
Delà s’est formée la règle : A d prunordium tituli
posterior se/nper fo rm a lu r eventus, dont on lait un
usage si fréquent au Palais (i).
(i) L e b r u n , Traite des Successions, tilrc du partage, n° 78.—
Répertoire de Merlin. V° Prescription, seel. i r*t paragr. G, art. 2.
—
D o m a t,
Lois civiles, liv. 3
,
til. 7 , sect, 5 , n0> 11 et
12.—
l’olbicr,
de la Possession , n04 i 3 et 3 a.— Le m êm e, Introduction à la Coutume
d Orléans.— Code civil, art. aajG.
�)
W)
L e vice de la possession se perpétue de succession
en succession5 tn
? parce que, 1 héritier étant
la continuation de la personne du défunt, celui qui a
commeneé à posséder un bien en vertu d’un titre qui
ne lui en attribuait pas la propriété j est censé vivre
dans sa postérité, q u i, aux yeux de la loi, est la même
personne (i). Le Code civil, par son article 2287, a
consacré cette.vérité, qui est écrite également dans les
lois romaines : Usucapere hceres non p oterit, quod
defunctus non p o tu it; idem ju r is est chm de donga
possessione quœritur. L . 1 1 , if. de diversis temporibus
prœscript.
• c *
- ’r
i’ ~y
L ’application de ces principes est ici sensible, lors
q u ’on se rappelle que ce n ’est q u ’en sa qualité de
cre'ancier seulement, que le sieur de Longpré s’est mis
en possession des biens, à titre d ’impignoration, et
jusqu’à parfait paiement du montant des condamna
tions q u Jil avait obtenues.
'I '
V ' "i n
Com m ent, avec une possession aussi précaire, dont
il a transmis le vice à'son successeur, le sieur de Longpré aurait-il pu prescrire la propriété des biens?
Cette prétention est d ’autant plus insoutenable,
que ce n ’est que dans son intérêt personnel, après de
longues réflexions, et dans des vues manifestes d’usurpatlQn , que l ’auteur de l ’appelant, e n rabdiquant ou né
gligeant sa qualité d’héritier, a voulu jouir h. tout antre
titr e des biens de la succession.
(1) Polluer, Possession , „«• 33 et 5 ^ — Doinal, loco
sect. 4 > ll°
— Merlin , cod. loc. , ait.
tuprà citato
�p ffr'
( 38 ) •
Il
trouvait en effet, clans ses combinaisons artifi
cieuses, des moyens contre tous les intéressés. Il disait
aux créanciers : Je vous dois, à la vérité, sur les biens
de la succession, un ciuquième des dettes, comme
héritier bénéficiaire; mais, hypothécairement, je suis
antérieur à vous comme créancier; vous n’aves rien à
prétendre tant que je ne serai pas soldé. Quel peut
être votre b u t , disait-il aux cohéritiers? les droits des
créanciers absorbent tout, et je suis le premier, le
principal et le plus privilégié.
N ’est-il pas juste q u ’après avoir joui pendant si longtems des avantages du système q u ’il avait adopté ;
l ’adversaire en subisse aujourd’hui les conséquences
opposées.
Pour éluder les suites de sa jouissance précaire ,
l ’appelant soutient que son père n ’avait pas dem andé
à être envoyé en possession pignorative; que la dispo
sition insérée clans la sentence n ’était que de stile ;
q u ’au surplus, cette sentence lui accordant une option,
il s’était déterminé pour la f a c u lt é de fa ir e saisir et
vendrey q u ’aiqsi il n ’avait pas voulu jouir pignorativement.
Que d’erreurs et de mauvaise foi dans ces objections!
V o u s n’avez pas dem andé l ’envoi en possession
pignorative ! E t la sejitencc qui vous l ’accorde e$t votre
propre ouvrage, puisqu’elle a été rendue par défaut
faute de comparoir, contre le curateur. Vous en avez
d’ailleurs accepté toutes les dispositions, en la signi
fiant et en l’exécutant.
/><i disposition n ’est (pie de stile ! Rica n’est inutile
�( 3y )
aSil •
dans les j u g è m e n s n i dans les lois. On ne peut consi
dérer-comme telle une disposition (|iii sssure'tiu■
cvcîiii*
cicr un moyen certain d execution. L
adopte en
Auvergne prouverait seul contre vous l ’importance
q u ’on mettait à obtenir cette faculté.
V o u s n’avez pas usé de la permission ! E t votre:
mise en possession a suivi immédiatement la signifi
cation de la sentente. Vous ne justifiez d’aucun acte
de possession antéfiêure ; les baux consentis' par 'le
sieur de Longpré sont tous d’une date plus récente.
E n fa isa n t' saisir et v e n d r e v o u s avez opté pour
cette f a c u lt é , et ii avez pas vou lu jo u ir ‘p ignorative;n ient! Mais cette jouissance pignorative de l ’universa
lité des biens a duré trois ans, depuis 1760 jusqu’au
ï6 juin 17 6 3 , date du premier bail judiciaire. E lle
ii’â cessé sous cette forme que';pour se reproduire sous
un autre titr'e également précaire, celui de fermier
judiciaire. Il y a plus, les"deux modes de possession
ont résidé conjointement sur la tète du sieur de Longpré, puisqu’en même tems q u ’il possédait ,f comme
fermier judiciaire, les biens saisis réellement, il con
tinuait de jouir , à titre d’im pignoration, en vertu de
la sentence, des objets non compris dans le procèsverbal de saisie.
Les intimés sont loin de redouter l'application des
Tègles posées par d’ Argentré, et q u ’on a rapportées
dans le M émoire, d ’après M. Merlin; ils la réclament^
au contraire, puisque c’est par l’appréciation du titre,
que cet auteur juge des effets de la possession.
~
'
�( 4» )
Sentant bien l ’impossibilité de faire méconnaître la
véritable cause de la possession de son auteur ^ l ’advei>
sa ire se restreint soutenir què le titre de sa possession
a été interverti par la sentence dé 1770, qui a prononcé la radiation de la saisie réelle. Il en conclut
que dès cet instant il a joui comme héritier, comme
propriétaire, et q u ’il doit profiter,des.avantages de la
prescription, puisqu'il s>,st écoulé; trente-cinq ans
depuis 1770 jusqu’en i 8o 5 x époque de la demande
en partage.
,
Des réponses se présentent en droit et en fait.
. C est une erreur en D roit de prétendre q u ’un pos
sesseur précaire puisse se changer a lui-même la cause
de sa possession. Cette m utation , q u ’on nomme inter
version, ne peut être opérée que de deux manières :
ou par une cause venant d ’un tiers, telle q u ’une
vente, échange, donation, ou autre titre transmissiblc
«le la propriété 5 ou par la contradiction que le pos
sesseur oppose aux droits du propriétaire. C ’est ainsi
que s’en expliquent D om at, tit. 7 , sect, 5 , art. 1 2 ,
et Dunod lui-même, dont on n ’a cité q u ’un fragment.
L ’article 3238 du Code civil n ’ji pas disposé diffé
remment.
•
E n f a i t } la sentence de 1770 n’a aucun de ces
caractères.
1’ E lle n ’a attribué ni pu attribuer au sieur Gueffier aucune qua lité nouvelle, puisqu’elle avait pour
objet unique la radiation d ’une saisie réelle q u ’il avait
lui-même provoquée comme créanciery
20 ïùlle n’opère eu sa faveur aucun« transmission
�( 4i )
de droits en propriété ou possession, de la part de
tiers qui aient stipulé à cet effet ;
- > On n ’y voit point de contradiction vis-à-vis du
propriétaire, puisque la main-levée de la saisie ne
portait aucune atteinte aux droits des créanciers ou
des héritiers ;
• 4° Les circonstances qui environnèrent cette sentence
la feraient d ’ailleurs considérer comme une fraude qui
»e peut profiter à son auteur ;
E lle fu t rendue par défaut contre la p lu part des
créanciers \ soigneusement cachée aux cohéritiers*, ob
tenue dans l ’ombre du m ystère, avec toutes les précau
tions propres à induire en erreur les parties intéressées,
dont les domiciles étaient éloignés : témoin la lettre
du i 3 avril 17695
5 ° Cette sentence n’a jamais été signifiée a u x do
m iciles des parties en cause, notamment au curateur,
par lequel 011 faisait représenter la succession ; elle n’a
donc eu ni pu avoir d ’ejiécution : elle est censée même
n ’avoir jamais1 existé.
Dès-lors la saisie réelle a continué de subsister, et
dvec elle tous les effets que la loi lui attribue. Pen
dant trente ans elle a conservé les droits des parties
intéressées, et suspendu le cours de toute prescription j
6° E n f i n , e t c e tt e o b je c t io n d é t r u i t t o u t le s y s tè m e
d e défense de l ra p p e l a n t , quand la sen ten c e de 1 7 7 0
A u ra it v a l a b l e m e n t e t u t i l e m e n t o r d o n n é la r a d i a t i o n
d e la saisie r é e lle , q u e l l e en
s e ra it la c o n s é q u e n c e ?
�■
'i Cl»!.
( 42 )
Que le sieur de Longpré, qui ne trouvait plus d'avantage
à laisser vendre les biens mis sous la main de la Justice,
a continué de les posséder comme il avait commencé,
et comme il jouissait encore des objets non saisis ,
c’est-à-dire à titre d ’impignoration, en vertu de la
sentence du i 5 novembre 1760.
Que l ’appelant cesse donc d ’invoquer la prescription!
C ’est comme gardien à titre de jouissance pignora
tive , comme fermier judiciaire, que son auteur a
commencé à posséder : ces causes de possession n ’ont
jamais changé. Il a constamment pris dans les actes
la qualité de créancier et de fermier judiciaire ; la
sentence de 1760 n ’a jamais cessé d ’être exécutée $ sa
possession a toujours été précaire, et par suite inca
pable de lui attribuer la propriété.
Parvien d rait-il à faire décider que sa qualité
d ’ héritier bénéficiaire lui donnait un titre pour
jo u ir? Cette qualité, restreinte par sa déclaration, à sa
portion virile, ne pourrait s’appliquer q u ’au cinquième
de la succession, q u ’on ne lui conteste pas -, mais elle
ne préjudicie point aux droits des autres cohéritiers,
de recueillir leur amendement dans une succession
encore indivise, que la Justice a conservée pour tou s,
et à laquelle ils peuvent venir prendre part, malgré
leur abstention, puisqu’aucun autre héritier n ’a été
substitué à eux par unejiossession utile.
L a jurisprudence procure sur ce point des préjugés
aussi décisifs que nombreux. On connaît le fameux
�( 43 )
^
arrêt du 21 avril i 55 i', qui d'condamne l ’evêque de
Clerm ont à rendre à la reine Catherine de Médicis la
seigneurie de la ville de Clermont*, quoique depuis
plusieurs siècles elle fut possédée par les évêques de
cette ville. Il était prouvé, par le titre originaire ,
que cette seigneurie avait été donnée en garde a un
évêque de C lerm on t, par Jean de Bourbon, que re
présentait la reine.
.> j
t■ :
1
* 2 , r
L e Répertoire de Jurisprudence rapporte plusieurs
arrêts qui ont jugé que la possession la plus lon gu e
n ’était d ’aucune considération quand le titre qui lui
avait servi de fondement était vicieux, c’cst-à-dire
incapable de transmettre la* propriété.
L a Cour de Riom, par arrêt du 19 germinal an 10,
a admis les descendans d?un successible à prendre la
qualité d héritiers, quatre-vingts ans après ^ r é p u
diation , en rejetant la'prescription opposée par un
cohéritier qui avait joui à titre pignoratif.
' ^
L a Cour de cassation a consacré les mêmes prin
cipes, en cassant une décision dè la' Cour de D o u ai,
qui les avait violés, et adjugé q u e , 'nonobstant la
contradiction"opposée par un cohéritier qui jouissait
^es biens de la succession à titre préc’aire, la prescrip
tion 11’avait pu courir en sa faveur. L ’arrêt, du 6
novembre 1 8 2 1 , est rapporté par Sirey, tome 22 ,
I r6 partie, page 69. ‘ '
1
L ’appelant est-il favorable, lorsqu’il s’est évidem
ment créé une fortune considérable au détriment de
�( 44 )
ses cohéritiers? Lorsque, probablement, le silence de
Maurice n’est dù q u ’à cles promesses fallacieuses ou à
des garanties qui auraient disparu après son décès ?
Est-il favorable en se défendant par une fin de non
recevoir, odieuse même aux yeux de la loi, après que
son père a jou i, comme mandataire, des biens de
M aurice, que ses fonctions tenaient éloigné du lieu de
leur situ ation , et de ceux de Gueffier-Dubuisson ?
parti pour l ’ile de Saint-Domingue ?
Est-il favorable, lorsque prétendant avoir, par le
paiement des dettes, affranchi la succession des charges,
il ose alléguer que les titres de libération sont adhirés?
Ces petits moyens de considération n ’imposent
point.
i° On ne justifie point de ces paiemens, que l ’on
fait mou ter à des sommes considérables ;
20 L es actes de m a in -levée d ’opposition prouvent
q u ’on n ’a pas payé, mais assuré le service des rentes ^
3° P u isq u e , dans le système même de l ’appelant, il
ne s’était écoulé que trente-cinq ans de prescription utile
à l ’époque de la demande, il n ’est pas vraisemblable
que son père et lui-mème aient négligé de conserver
des titres aussi précieux j
4° E n fin , lors du partage, il sera de toute justice
q u ’ ils prélèvent
les sommes q u ’ils établiront avoir
versées pour le compte des héritiers.
Sans doute, les prétentions d u eieur l ’Espiuasso ne
�,( 4 5 )
W
vont pas jusqu’k faire rejeter d ’une manière absolue
la demande en partage de la succession de Maurice
Gueffier. E n s’efforçant de paraliser l ’action des in
tim és, quant a u x droits qui dérivent de Jçan Gueffier,
il n'a pas voulu se refuser au partage des biens meubles
et immeubles qui appartenaient au défunt. Le silence
q u ’il a gardé relativement à cette partie de la cause
laisse penser q u ’il sent la nécessité de faire le rapport
des biens de Saint-llpise, que le sieur de Longpré a
vendus en 17 j 6 , ainsi que du mobilier et autres objets
qui sont restés dans sa maison, où est décédé Maurice
Gueffier. ,
.,
Les droits des intimés paraissent donc établis, lis
se .présentent comme successeurs, en partie, de Mau
rice G ueffier, leur oncle ; celui-ci était héritier de
Jean son père 5 il n ’a jamais perdu cette qualité ,
puisqu’il n’y a point renoncé. L a loi a rendu définitive
son acceptation tacite5 aucun autre héritier n’ayant
utilement possédé à son préjudice, ses droits et son
action sont entiers. Ses héritiers doivent donc obtenir
de son chef, comme il l ’evit obtenu lui-m êm e, la dé
livrance de leur portion dans son amendement.
Si la résistance opiniâtre du sieur l'Espinasse ne
1
1
leur permet plus d ’espérer de sa part un acte de jus
tice, ils l’attendent avec confiance de la C o u r , qui
saura apprécier les faits et appliquer les principes.
L ’appelant n'a-t-il pas lieu de craindre q u ’on ne lui
applique ce passage énergique de LaJbruyèr.e.?
. « N ’envions point à une sorte de gens leurs grandes
�( 46 )
« richesses; ils les ont à titre onéreux, et qui ne nous
« accommoderait point. Ils ont mis leur repos, leur
« santé, leur honneur et leur conscience pour les
« avoir. Cela est trop cher, et il n’y a rien à gagner
« à un tel marché. »
BAYOL.
B A Y O L , née G U E F F I E R .
G U E F F IE R -D U B U IS S O N .
G U E F F IE R -S A U V A T .
Me G O D E M E L , ancien A vocat.
M e D O N I O L , A voué.
R IO M , I M P R IM E R IE DE S A L L E S , PRÈS LE P A L A I S DE JU STIC E .
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Gueffier-Dubuisson, Antoine. 1824?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Doniol
Subject
The topic of the resource
successions
prescription
absence
renonciation à succession
séparation de biens
arbre généalogique
possession pignorative
saisie
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour sieur Antoine Gueffier-Dubuisson, Propriétaire ; dame Antoinette Gueffier, Amable Bayol, son mari, Officier de Santé, et Jean-Baptiste Gueffier, Propriétaire, intimés ; contre Maître Antoine Gueffier de l'Espinasse, ancien avocat, appelant.
Table Godemel : Absent : 2. le décès d’un individu à Saint Domingue est-il suffisamment établi par un acte en forme authentique indiquant le jour du décès, son nom de famille et l’un de ses prénoms, bien que, contre les termes de la déclaration du 9 avril 1736, il ne mentionne pas non plus la qualité ; à moins que l’on établisse qu’un autre individu du même nom ait résidé dans l’isle et y soit décédé à la date de l’acte rapporté ; surtout, si l’identité résulté d’autres documents et des faits de la cause. Renonciation : 14. l’enfant, héritier institué, qui, après avoir fait procéder à l’inventaire du mobilier existant au décès de son père, a renoncé à son institution d’héritier contractuel, pour n’accepter la succession qu’ab intestat et sous bénéfice d’inventaire ; qui a fait nommer un curateur au bénéfice d’inventaire et obtenu, contre lui, sentence de condamnation pour un capital de créances assez considérable, avec permission de se mettre en possession des immeubles de la succession, ou de les faire vendre par placard ; qui s’est réellement investi de fait de l’universalité des biens ; n’a joui, à titre de propriétaire, que du cinquième formant sa portion virile, et à titre pignoratif des autres quatre cinquième, en qualité de créancier.
Quelque longue qu’ait été sa possession, il a joui aux mêmes titres, s’il n’a pas manifesté expressément une volonté contraire ; il ne peut, dès lors, opposer aux autres enfans, ses cohéritiers, aucune prescription. malgré le nombre des actes de possession qu’il a pu faire, il ne peut résister au partage, ni se refuser au rapport des biens et jouissances, sauf à prendre le cinquième qui lui revient en qualité d’héritier bénéficiaire.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1824
1760-1824
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2609
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2608
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53524/BCU_Factums_G2609.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Saint-Ilpize (43195)
Saint-Germain-Lembron (63352)
Saint-Domingue
République dominicaine
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence
arbre généalogique
Créances
possession pignorative
prescription
renonciation à succession
saisie
séparation de biens
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53532/BCU_Factums_G2617.pdf
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PDF Text
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royale de R i o m
So u s s i g n é s ,
Sur le renvoi qui leur à été fait par Monsieur le Pro cureur
gé r é ral d ans l' i n t é r ê t de l ’E t a t , d ’une procédure e n
saisie réelle exercée par le chapitre de c h a u d e s a i g u e s
contre les enfans d' Antoine G oldemar, et après avoir
attentivement examiné, soit cette procédure, soit les
fait s qui l ’avaient précédée et ceux qui l ’ont accom pagn é e soi t les m o y e n s d e n u llité proposés c o ntre la
sentence d ’adjudicati on , du 22 j u i l l e t 1 786 •
E S T I M E N T que l e s q u e s t i o n s s o u m ises a la C o ur
tiennent à des faits q ui n ’ont pas été suffisamment
développés dans les écritures du procès, notamment
dans les Mémoires i m p r i éms; et i l l e u r p a r a i t néces
saire de s’ y appuyer un peu plus q u ’on ne l ’a fait
ju s q u ’à présent , parce
q u ’il peut
en résulter des
conséquences formelles, qua nt aux fins de non recevoir
q u ’on oppose aux appelans.
Des moyens de considération et de faveur ont figuré
ju s q u ’ici en première ligne dans les écrits des appelans;
ils dominent sur-tout dans le Mémoire imprimé. Il
est très-bien, sans dout e, d ’invoquer la faveur de la
Justice pour des citoyens injustement et irrégulière
ment dépouillés de leur patrimoine mais l ’ usage d ’un
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semblable moyen doit être accompagné oc sagesse et
appuyé sur la vérité'. Il faut se tenir en ga rde *co ut re
certaines îinpreSSiotifr^ui*, en reposant sitr un prineipe#
louable, séduisent quelquefois Iq. cœ .i^, et font prendre
• **¿1 un sentiment de cornniisération la place de^a Justice.
C ’est ce q u ’on aperçoit dans les écrits ^ s âppelans.
L e défenseur a cru-ses cliens indignement trompés,
• • e t «e sentiment a présidé *lans ses moyens de djlfcnse.
.
A u j o u r d ’ hui il se fortifie de la Uualité de celifi sur qui
‘ "** i ^
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retomberait la nullité de la p r o c é d u r e , c ’esi-à-^Tfe
Y Îfta tq w i représente Îe'fhîipiti’é de C'lfSf*iesîfl'gûes.
malheureux d ’un côté et le Gouver nement de l ’autre!
On sent tout ce que cette pensée ajoute de faveur à la
iVrcrtiou«des appelans.
•• • •
•**
%».
•
L e jur iscon su lte, non plus que le m ag istra t, 'n’a
pas à s’arrêter bea'ucoVp sur des’ moyen« semblables.
Il ne ferme pas leu çoeuf h la pitié, m^is il doit examiner
les questions q u on lui propose sous les rapports légaux.
L ’É t a t est soumis à la loi comme les autr es , et <pàr,
cela seul il**a droit d ’en invoquer le bénéfice comme
les simples particuliers. D ’ailleurs, il s’agit aussi de v
l ’intérêt d ’ un tiers q ui est l ’adjudicataire \ et enfin pour
être malheu reux , on n ’est pas dispensé de payer ses
dettes quand on en a le moyen. O r , dans l ’espèce, il
est constant que la famille Goldemar était débitrice de
sommes considérables, respectivement à la masse de scs
biens. Il est reconnu, par toutes les parties, que le prix
de la vente n ’a pas suffi pour les désintéresser. L e
chapitre de Ghaudesaigues était créancier d ’ un« rente,
et d ’ une obligation faite pour arrérages. Il est certain
�s •%
( 3 \ ,
q u ’on n e 'p a y a it ni ce créancier, ni les autres; il eut
donc le droit de faire vendre les biens des débiteurs.
m
Voilà la vérité du f a it , q u ’il suffit de voir à nu pour
être
con vaincu, q u o iq u ’on en ait d i t , que la poursuite,
eut un principe légitime.
;
T ou t consiste donc à voir si la procédure a été
régulière, et si ceux q u i l ’att aqu ent en ont le droit
ou la faculté : c’est l ’examen auque l doivent se borner? •
des jurisconsultes.
Si ce dernier cas posé n ’était pas un p r o b l è m e -, s il
était constant entre les parties q u ’aucune fin de non
recevoir n ’écarle la prétention des appelans;
si la
nullité de la saisie était réclamée par les héritiers du
déb iteu r, l ’examen des actes de la procédure pourrait
embarrasser dès le premier pas. T o u t en regardant
comme chimériques la plupart des moyens proposés,
ce q u ’ il est facile^de reconnaître,
le Conseil croirait
trouver dans le premier acte une difficulté sérieuse, en
ce que le commandement recordé qui devait précéder
la saisie, ne contient pas copie des titres de créance.
C ett e
nullité résulterait textuellement de la dispo
sition de l ’é d i t , et le Conseil ne croit pas q u ’on y eut
répondu suffisamment en disant que par un acte de
la veille on avait notifié la sentence. D ’ une p a r t , la
notification n ’était pas suffisante dans un simple acte;
elle devait se trouver dans le commandement, et être
attestée par les deux témoins. E n second lieu , l ’ acte
de la veille ne contenait que la notification de la sen
tence, et non celle des titres de créance, savoir : un
cojitrat de rente et une obligation de 299 f r , , et pour
�4
( 4 )
tout cela, il ne suffisait pas de rapporter la sentence.
O n sait que dans les maximes ordinaires du palais,
celui qui a obtenu par jugement une condamnation
. iondée sur un titre, ne peut pas obtenir le paiement
avec la sentence seule, parce que le défaut de représen
tation du titre suffit pour en faire présumer la remise;
et dès lors, toutes les fois que la loi exige la notifica* tion des titres de créance,
on n ’y satisfait pas en
notifia nt, seule, une sentence qui n ’est que la confir
mation du ti tr e , et qui ne peut guère avoir effet Sans
lui. Toutefois nous ne donnons ici q u ’ une idée un peu
générale de ce moyen dans un cas supposé;
nous
verrons plus tard q u ’il est à peu près sans application
à l ’espèce.
Nous devons examiner les questions q ui se pré
sentent, dans l ’intérêt de la justice; la l a v e u r , s’il
en était q u e s tio n , ne serait pas toute entière du côté
des appelans, car la position d ’ un adjudicataire q u i
a acheté de bonne foi et payé de même, et qui jouit
depuis quarante ans, a bien aussi son côté favorable.
Il ne lui est pas indifférent de conserver sa propriété
ou de la perdre même avec une garantie, et ce n ’est
pas sans raison que les docteurs ont adopté cette
maxime de notre droit : m eliu s est habere res quàm
cautiones. C e t adjudicataire ne sera donc pas défavo
rable en opposant des fins de non recevoir à un dé
bit eu r q ui a laissé vendre son bien pour n ’avoir pas
payé ses dettes. Pour les bien apprécier,
com m ençons
par établir les qualités des parties qui ont interjeté
appel de la sentence d ’adjudication.
v
�( 5 )
Sans parler des faits , si ce n est en tant qu. il sera
nécessaire sur chaque question, disons avant tout que
le chapitre de Chaudesaigues avait poursuivi celte
vente contre Jean, Philippe et Antoine G o ld em a r ,
Jeanne Goldemar et E tie n ne Fabre ,
son m ar i,
et
Jeanne Gold emar et V i t a l C r o s , son mari. Elle fut
mise à fin le 22 juillet
1786.
L ’adjudicataire prit
possession par acte du 3 i juille t, et cet acte de prise de '
possession fut notifié le 9 septembre suivant à P h ilip p e
G o ld em a r q ui possédait les biens en vertu d ’un traité
dont nous parlerons plus tard. En fin , après celte prise
de possession, l ’adjudicataire consigna le prix de son
acquisition entre les mains du greffier comme cela se
pratiquait alors, et fit ensuite procéder à l ’ordre entre
tous les créanciers opposans. Tous com pa rur en t; des
discussions s’élevèrent, et la procédure fut mise à fin
par une sentence du 20 juillet 1 7 8 7 ,
le plus grand détail
sur
q u i statue avec
toutes les difficultés q ui
sJétaient élevées. C e tt e sentence- a été signifiée et exé
cutée par l ’adjudicataire et n ’a jamais été attaquée.
Les créanciers ont été payés par le greffier, dépositaire
de la consignation, ainsi que le constatent plusieurs
quittances jointes à la procédure. V o ila une série des
laits q u ’ il ne faut pas perdre de vue.
Il faut y ajouter une autre circonstance qui n ’est
pas non plus sans intérêt. On présume quelquefois de
la fraude, de la inal-façon, lorsqu’on voit une a d ju d i
cation faite b ru s q u e m e n t, et le poursuivant devenir
adjudicataire. Ici les choses se présentent sous un
tout autre aspect. Après le congé d ’ adjuger et le placard
�de quaran tai ne, l ’adjudication fut renvoyée de plus
de deux ans. L e juge le fit sans doute dans l ’intérêt
des parties saisies. On vo it, dans la sentence, plusieurs
publications et affiches, faites dans le courant de i ^85
et au commencement de 1 7 8 6 ; enfin, après plusieurs
remises, on remarque les trois publications portant
remise de quinzaine , à la première desquelles sont
faites plusieurs enchères. A la seconde, les enchères ne
se renouvellent p a s , m ai s , à la troisième, six autres
enchères sont faites par diverses personnes. L e juge
remet encore; il prononce ainsi deux remises succes
sives, de quinzaine en quin za in e, e t , à la seconde fois,
il fixe l ’adjudication au 22 juillet. E n f i n , le 22 juillet,
et après toutes ces précautions., il la prononce au profit
de Jean Be rbigie r, c ’est-à-dire, d ’un homme étranger
au p o u rsu iv a n t, qui achète, fait faire l ’ordre, et paie
de bonne foi un prix q u ’on offre au jo u rd ’hui de lui
rendre, parce q u ’on reconnaît en avoir profilé. Voilà
l ’ensemble des faits .q u ’il faut apprécier pour bien
connaître la situation de l ’adjudicataire et des parties
saisies qui ont attaqu é la sentence d ’adjudi cat ion ,
après la consom m ation de la p rocéd u re d ’ordre où
ils étaient appelés.
*
L e premier acte d ’appel est du 3 août 178 7. Il fut
fait à la requête de Jeanne G o ldem ar, veuve de V i t a l
Cros,
tant en son nom que comme tutrice de ses
enfans. C e sont eux au jo u rd ’ hui qui la' représentent.
U n second acte d ’appel fut n o ti fi é , le 8
octobre
1 7^7 ? P‘*r Philippe G old em a r et Jeanne G oldem ar,
fem me Dejean. Philippe était frère de la femme Cros.
�.
(
7
)
Les qualités de la femme Dejean ont été contestées,
et ne paraissent pas avoir été établies.
Ces trois parties ont procédé ensemble sur les dexfx
appels, ju sq u’au 22 thermidor an 3 . A u jo u r d ’ hui les
noms de Philippe G oldem ar et des mariés Dejean ont
disparu des qualités. Ils 11’ont pas repris l ’instance
d ’appel depuis 1 79$, et il n ’y a eu de reprise que parles
enfans de Jeanne Goldemar et de V i t a l C r o s , par acte
du i 3 juin 1807. C ’est avec eux seuls que la procédure
a pté suivie ju sq u’à ce j o u r , ainsi que le constatent
tous les actes notifiés en la Co ur. L e Conseil se bornera
donc à un léger examen de la position des intimés
envers Philippe Goldemar et la femme Dejean. Il sera
suffisant pour juger si on doit, à leur égard, prendre
quelque précaution.
Si nous étions moins avancés dans le t e i n s , des
motifs de prudence auraient pu commander de les
appeler en cause, pour 11e pas avoir deux procès pour
un. Dès q u ’on était en instance avec eux., il n ’aurait
pas suffi de faire juger cette instance avec les enfans
C ro s, même en les supposant héritiers-, car si on rejette
l ’appel à leur égard, il faudrait y revenir avec les autres 5
si on l ’admet et q u ’on déclare la procédure nulles on
ne pourrait pas se désister de la propriété entière, ni
rendre les jouissances, n i , en un m o t , terminer le
procès sûrement avec les enfans C r o s , qui n ’au ra ien t
pas le pouvoir de prendre la portion de leurs cohéri
tiers. A i n s i, il suffirait que ces derniers eussent figure
dans l’ instance, pour q u e , régulièrement, les intimés
dussent les y appeler.
�(8)
Toutefois on peut s’en dispenser, si les qualités
n ’ont pas changé depuis le dernier acte de procédure,
dh 22 thermidor an 3 , parce q u e , depuis ce jo u r q u i
correspond au xo août 179 ^, il s’est écoulé plus de
trente ans.
Les parties intéressées auront à examiner si elles
sont suffisamment à l ’abri de toute poursuite u lté
rieure,
par cette seule circonstance. Cela est assez
vraisemblable, sur-tout si 011 examine la position de
ces individus, qua nt à leurs moyens d ’appel.
Philippe Goldemar avait évidemment q u a lité ; il
était fils et héritier d ’Antoine G o l d e m a r , débiteur de
la rente due au chapitre de Chau des aig ue s, et dont les
biens avaient été vendus s u r l u i- m è m e .
Mais des actes qui lui sont personnels s’opposent à
tout retour de sa part contre l ’adjudication.
Jeanne G o l d e m a r ' et V i t a l C r o s , son m ar i, étaient
en possession des biens; nous verrons bien lot ce fait
prouvé d ’ une manière in d u b ita b le ; quant à présent,
tenons-le pour constant. Il n ’y avait point eu de bail
judiciaire; le chapitre n ’agissait pas rigoureusement :
cela est démontré par les circonstances. Il avait pour
suivi depuis 1 7 5 9 ; fait en 1760 une première saisie
réelle q u ’il avait abandonnée en recevant des à-comptes.
Il avait repris les poursuites en 1782 , et fait en 1788
une seconde saisie réelle q u ’il ne mit à fin que le 22
juillet 1786. Pendant q u ’il accordait des délais, il ne
voulut pas cependant laisser les mariés Cros profiter
pour eux-mèmes des fruits de la chose saisie; et , le II
juillet 1 7 8 5 , après la notification de la sentence qui
�( 9 )
déclarait
la . procédure
valable ,
et
portait
congé
d ’adjuger, il fut passé, entre le doyen du ch apitr e,
Jeanne Goldemar veuve C r o s , Philippe Goldemar et
Jean V e y l e t , opposan s, un acte notarié, par lequel
il fut convenu en tr ’eux tous, pour l ’intérêt des créan
ciers, que Philippe Goldemar prendrait la récolte, par
fo rm e de b a il à f e r m e ; tju i l ]>aie rail 170 f r . p o u r
le s.fr u its (jui resten t, et que les blés seraient payés
suivant estimation ; que sur ce prix seraient payés
d ’abord la taille et les cens; et le su rp lu s, est-il d i t ,
fe r a fo n d s p o u r être distribué a u x créanciers, suivant
et conform ém ent à leu r ordre de créa n ces, et ¿1 la
vente q u i sera f a it e des fo n d s saisis. C et acte, passé
après la notification de la sentence portant déclaration
de la validité des poursuites et continuation d ’ icelles,
est évidem ment , de la part de toutes les parties, une
approbation de la saisie et
de toute la procédure
antérieure.
Allons plus loin : Philippe G o ld em a r , au lieu de
se pourvoir contre la sentence d ’adjudication, comparut
à la sentence d ’ordre, comme créancier opposant, pour
les créances d ’ Elisabeth B i r o n , sa mère.
Il y a été
colloque, en cette qualité, avec une quinzaine d'autres
descendons des G o l d e m a r , q ui réclamaient, du chef
de leurs au t eu rs ,
les biens vendus ,
d ’Antoine.
des droits
comme
ou
des légitimes sur
appartenant aux
eufans
E n f i n , Philippe G o ld e m a r , qui jouissait, en vertu
du bail de 178 ^ , ne voulut pas obéir à la sentence
d ’adjudication; et malgré la notification qui lui fut
3
�( 10 )
faite de cette sentence et de l ’acte de prise de possession,
il sema les blés v i f s , soit sur les terres travaillées, soit
même sur les retroubles, pour se maintenir en posses
sion. Il fit plus : il coupa
et enleva
des arbres.
Berbigier rendit p la in te, le fit décréter d ’ajournement
personnel; e t , pour empêcher la poursuite, Goldemar
passaj devant notaire, le 27 janvier 1 7 8 7 , un acte
par l e q u e l , en reconnaissant le litre et les droits de
l ’adjudicataire,
il lui abandonna la possession des
biens , et s’obligea à lui payer 327 f r . , dont 180 fV.
pour le prix de la ferme , et 147 IV. pour dommagesintérêts.
Il est dès-lors inconcevable que le même Philippe
Goldemar ait pensé à interjeter appel, le 8 octobre
suivant. O n voit très-bien pourquoi il l ’a abandonné,
et on doit pleinement se rassurer sur ce qui le concerne.
Q u a n t à la femme D e j e a n , elle n ’était pas sœur de
Philipp e et de la femme C r o s , par conséquent pas
propriétaire des biens. L a saisie n avait pas etc faite
sur elle; elle n ’était pas partie dans la sentence d ’ad
judication. Aussi on contesta sa qualité ,
elle ne l ’a
pas établie; trente ans et plus se sont écoulés depuis
q u ’elle a abandonné les poursuites; il n ’y aurait donc
aucun intérêt au jo u rd ’ hui à rechercher ce q u ’elle était,
et îi se rendre aggresscur contre elle ou ceux qui la
représentent,
pour faire juger un appel q u ’elle ne
reprendra pas et q u ’elle essaierait vainement de re
prendre.
Reste la femme Cros ; c’est aujourd ’ hui la seule
partie de la cause dans la personne de ses enfans.
Le
�( 11 )
Conseil pense que deux moyens les repoussent : i° un
défaut de qualité;
a 0 une fin de non recevoir résul
tante de faits q ui lui sont personnels. Po u r l ’établir_,
il faut reprendre quelques faits.
Jeanne Goldemar épousa V i t a l C r o s ,
le 9 janvier
1 7 5 7. Antoine G o ld e m a r , son père, lui fit donation
de tous scs biens présens et à 'venir.
Il paraît q u ’après le mariage, des circonstances qui
nous sont inconnues lu i apprirent que les a fia ires de
son père étaient en désordre. E l l e craignit sans doute
des poursuites personnelles’, pour se mettre à l ’a b r i ,
et avec le concours et l ’autorisation de son m a r i , elle
se présenta devant un notaire, et y fit, le 28 juin 17ÎÎ7,
un acte aulhentliique de renonciation à cette donation.
E l l e et son mari déclarèrent que leur renonciation
était fondée sur les articles 18 et 3 G de l ’ordonnance
de 1 7 3 1 , et sur ce q u i l s ignoraient 3 lors du contrat,
les dettes contractées p a r le d it A n to in e G o ld em a r,
donateur, et ( ju ic e lu i G old em a r avait tenues cachées.
Il est
inutile de rechercher si cette renonciation
était ou non valable, et si le droit ou la faculté de
renoncer 011 d ’opter n ’ était pas renvoyé à l ’époque du
décès du donateur, dès q u ’ il s’agissait de biens présens
et à v en ir - nous 11e parlons de cet acte que pour en
tirer deux conséquences : l ’une que Jeanne Goldemar
savait dès lors que les biens de son père étaient plus
q u ’absorbés par ses dettes; l ’autre que celte renon
ciation avait au moins pour objet de se préserver des
poursuites q u ’on aurait pu faire contr’elle comme do
nataire enire-vifs.
�( 12 )
L a répudiation était certainement ignorée du cha
pitre de Chaudesaigues, lorsqu’en 1 7 ^ 9 , il poursuivit
Antoine Goldernar et la femme C r o s , sa fille, comme
sa donataire, et q u ’en 17G0, il fit une saisie réelle.
Il ne la connaissait pas davantage , lorsqu’en 1708,,
et le 12 février, après la mort d ’Antoine Goldernar, il
reprit les poursuites contre la femme Cros ,
comme
donataire et héritière de son père ; mais les poursuites
ayant clé rallenties^, les choses changèrent de face; et
après avoir pris le lems de la réflexion ,
les mariés
C ro s, persévérant dans la volonté q u ’ils avaient ma
nifestée en 1 7 5 7 ^ parce q u e , sans d oute, les mêmes
raisons subsistaient toujours, firent une répudiation
authentique à la succession d ’Antoine Goldernar. Elle
est du 8 septembre 1 7 7 3 , faite devant notaire, connue
cela se pratiquait alors.
E l l e rappelle dans cet acte sa renonciation de 17ÎÏ7 }
elle dit que son père a laissé six autres enfans, lesquels
sont habiles à lui succéder; que com m e les créanciers
de la succession de son père f o n t des poursuites
c o n tr e lle , q u o iq u e lle n’ait ja m a is v o u lu être héri
tière} p o u r lever tout éq uivoq ue, elle a , en adhérant
h la répudiation d u d it j o u r ,
28 ju in
17£>7,' dit et
d é c la r é q u e lle répudie et renonce à la succession de
son père , com m e la reconnaissant p lu s onéreuse que
p rofita ble.
C e l te répudiation ne fut pas signifiée immédiate
m ent, et le chapitre reprit contre les époux Cros en
la même q u a l it é , les poursuites précédentes, et n o
tamment la saisie réelle de 17G0. Déjà il avait obtenu
�( >3 )
par défaut un jugement de reprise, lorsque tout d ’ un
coup il abandonna scs poursuites pour recommencer
sur de nouveaux frais. Il est facile d ’apercevoir la
cause de ce changement.
Il parait que les mariés Cros firent usage de la ré
pudiation, pu is q ue , le 9 octobre 1 7 8 2 ,
le chapitre
présenta une requête-par laq u e l l e , après avoir rendu
compte des faits précédons, il dit que P^ital Cros et
Jeanne G o ld e m a r , sa f e m m e ,
tout en jo u issa n t des
biens laissés p a r A n to in e G o ld em a r 3 prétendent néan
m oins as’ oir rép u d ié à la donation ¿1 euac f a it e j>ar
A n to in e G o ld e m a r , ainsi q u à la succession à e u x
déférée p a r la loi.
Il ajoute q u ’il pourrait les soutenir héritiers; mais
comme il lui est indifférent q u ’ils le soient ou ne le
soient pas, il se contentera de f a ir e assigner les enfaiis
q u i n ont p a s ré p u d ié,
et V i t a l Cros et sa femme,
p o u r rendre com pte des jou issa n ces p a r euæ perçues
depuis leu r mariage,, et encore V i ta l Cros en parti
cu lie r, pour voir déclarer hypothéqué à sa créance 1111
pré retiré p a r lu i du chef d ’Antoine Goldemar.
E n f i n , le chapitre demanda la permission d ’assigner
à l ’ une et à l ’autre fin. Il o bti nt une ordonnance q ui
l y autorisa, e t , le 11 du même mois, il donna une
assignation i° à J e a n , P h ilip p e et A n toin e G o ld em ar ,
A n toinette G old em a r et E tien ne F a b r e , son m a r i ,
iceux
pris comme héritiers d 'A n to in e ,
le u r père ;
20 aux mariés C ro s, seulement pour rendre compte
des jouissances. Personne ne c o m p a r u t, e t , le 14 dé
cembre 1782 , il obtint une sentence conforme.
�( >4 )
Il faut bien se fixer sur cette sentence q u i a été le
point de départ de toute la procédure. E lle se trouve
sous la cote 3 de la production j et la requête sous
la cote 2. Les condamnations q u ’elle prononce sont
positives et tout à fait distinctes l ’ une de l ’autre. Les
anciennes procédures sont mises de côté. L e chapitre
se résigne à les ab and onner, parce qu'elles é t a ie n t'd i
rigées contre les mariés Cros com m e donataires depuis
leur renonciation à la donation , et com m e héritiers
depuis leur répudiation à la succession ; que par co n
séquent elles n ’avaient pas été dirigées contre la véri
table p ar ti e,
puisque les mariés Cros ne pouvaient
avoir qualité que comme donataires ou comme héri
tiers. L e moyen opposé et tiré de ces répudiations
décida le chapitre* sans dout e, à faire le sacrifice des
procédures considérables q u ’il avait faites jusque-là.
Aussi la sentence ne prononce-t-elle pas de reprise,
mais seulement des condamnations toutes nouvelles, et
indépendantes de tout acte antérieur.
Jean,
Philippe,
Ant oine G o l d e m a r ,
Antoinette
G oldemar et F a b re, son m ar i, sont condamnés comme
héritiers d ’ Anto ine,
leur père,
à payer i° la rente
de 3o fr. depuis 17D9; 20 les arrérages adjugés par la
sentence de 1 7 ^ 9 ; 3 ° 299 fr . d ’anciens arrérages; ils
y sont condamnés chacun pour leur part et portion ,
comme héritiers et hypothécairement pour le tout.
E n f i n , eu la même qualité d ’ héritiers, ils sont con
damnés à payer 26 liv. 5 s. de dépens, adjugés par
une semence de 1766. Tous les : autres irais sont
négligé^.
: .
‘
�( 15 )
Q u a n t aux maries Cros., ils ne sont
condamnés
q u ’« représenter les jo u issa n ces depuis leu r mariage 3
vu q u e , par suite de leur répudiation, ils les avaient
indûment perçues-, et V i t a l C ro s, seul, est condamné
à sou/Fri r l ’hypothèque du chapitre sur le pré q u ’il
avait retrait.
Cette sentence fut signifiée à toutes les parties,
le 17 janvier 1 7 8 3 , notam ment aux mariés C ro s, en
parlant à leurs personnes. Il est fort remarquable
q u ’ils ne l ’ont jamais att aq uée , et qu'elle a passé en
force de chose jugée , tant à leur égard que contre les
quatre
enfans, condamnés comme héritiers. A i n s i,
elle a suffi pour fixer irrévocablement les qualités des
parties dans la succession d ’Antoine Goldemar.
E n f i n , il faut s’arrêter sur un autre fait. C ett e
«
sentence est devenue le fondement unique de la saisie.
C ’est en vertu de ses dispositions, q u ’a été fait le
commandement
recordé,
et
q u ’a
été pratiquée la
saisie réelle du 25 janvier 1783. E l l e a été dirigée
contre P h i l i p p e ,
Antoine et G u il l a u m e G ol de mar
(ce dernier, sans cloute, était le fils de Jean)} contre
les époux l a b r e , et enfin lés mariés C r o s ; ces derniers
n ’étaient pas compris dans les actes comme héritiers.
Le commandement portait sommation de satisfaire à
la sentence d u i/| décem bre dern iery la saisie étai t
faite faute d ’y avoir satisfait; ainsi on ne leur dem an
dait que de rendre com pte des jo u is s a n c e s , et 011 ne
saisissait sur e u x , que par cette raison un iqu e q u ’ils
n ’avaient pas abandonné la possession ; car il y aurait
eu une contradiction
trop m a r q u é e , de prétendre
�( 16 )
poursuivre la femme Cros comme héritière, pendant
q u e , abandonnant toutes les poursuites antérieures,
on n ’agissait q u ’en vertu de la sentence q ui lui en
refusait la qualité.
A u reste, q u ’on ne doute pas de la possession des
mariés C ro s, à l ’époque de la saisie5 ils en conviennent
dans tous les actes de la procédure; et dans leur
Mémoire imprimé, page 2 1 , ils vont ju s q u ’à prétendre
tju ils îi’ont ja m a is é té dépossédés y lundis q u ’on va se
convaincre q u ’ils l ’ont été de droit par la saisie, et de
fait par le traité de 1785 , et mieux encore par la prise
de possession , et les baux
à ferme q u i ont suivi
l ’adjudication. Toujours est-il vrai que jusque-là on
avait dû saisir sur eux com m e détenteurs.
D e tous les faits que nous venons de parcourir, il
»
résulte que Jeanne G o ld em ar , femme C ro s, par sa
répudiation de 1 7 7 3 , est demeurée étrangère aux
biens d ’An to in e Gol de mar; que le retranchement de
ses droits d ’hérédité, dans la succession de sou père,
a été consacré, d ’après son option fort volontaire, par
la sentence aujourd’ hui irrévocable, du i/|. décembre
1782 , .puisque cette sentence a accordé la qualité
d ’ héritiers à ses quatre frères ou sœur, et l ’a condamnée
à rendre les jouissances des biens d ’Antoine G oldem ar,
comme les possédant in d û m en t , faute de litre et de
q u a l ité ; enfin que c ’est sur sa provocation, et par
suiLe du moyen tiré de sa répudiation, que le chapitre
se décida tout d ’ un coup à faire le sacrifice de douze
ans de ■
poursuites , et de tous les frais qui en étaient
le résultat, pour reprendre de nouvelles poursuites,
�f r i - '
( 17 )
en
reconnaissant q n ’il
y
avait
eu
erreur sur les
qualités.
Il est dès-lors évident que l ’ appel de la sentence
d ’adjudication est non recevable à défaut de qualité.
Les enfans
Cros auraient
mauvaise grâce
aujourd’ hui plus
que
prétendre que cette répudiation ne
peut profiter à personne, parce q u ’elle est restée dans
l ’ombre et q u ’ils n ’en ont pas usé. Ils en ont us é,
qu o iq u ’on n ’en rapporte pas de signification, puisque
le créancier, par cela seul, changea toute sa procédure;
et l ’ usage q u ’ il en ont fait a été consacré par une
sentence q u ’il faut exécuter a u j o u r d h u i j puisqu elle
est irrévocable.
D ’ailleurs, remarquons ici q u ’il s’agit de l ’intérêt
et du droit de l ’adjudicataire, qui est fort étranger
au poursuivant, et q ui a acquis de bonne foi. O r , il
a le droit de prétendre que les qualités et les droits
des héritiers sur lesquels on v e n d a i t ,
lui on t
été
transmis, au moins en ce q u ’ils ont de relat if aux
biens adjugés. Il lui appartient donc de dire : « Les
quatre héritiers saisis ont accepté cette q u a l i t é ,
et
vous l ’avez abdiquée; jS les représente, et je soutiens
aux enfans de la femme C r o s , que leur mère avait
répudié, et que la vente étant faite en sa présence
sur les quatre héritiers, les qualités respectives ont
éle fixees pour moi et avec moi; que par cela seul il
s’est opéré une dévolution entière de l'hérédité sur
ceux q ui l ’avaient acceptée. »
I) ailleurs
il est difficile
de- concevoir
comment
les enfans Cros pourraient accommoder avec la justice
3
«
�r 18 )
la prétention q u ’ils réveillent après un long silence,
lo rs q u’il est constant q u ’ils étaient obérés de dettes;
q u ’ils avaient répudié; q u ’ un adjudicataire étranger
à la poursuite a acheté de bonne foi ce que la Justice
vendait pu bli qu em ent, et que le prix a été versé dans
la main des créanciers, avant toute réclamation contre
la sentence. L e Conseil ne peut apercevoir ce q u ’il y a
de favorable dans cette position.
Dès-lors, et dès que les enfans Goldernar, déclarés
héritiers, poursuivis comme t e l s e t sur qui on a fait
vendre en cette q u a l ité , ne se sont pas pourvus contre
la saisie; q u ’au contraire ils ont exécuté l ’adjudi ca
tion , il ne reste aux enfans Cros aucun moyen de
retour.
Cela ne fût-il pas aussi cl air, une autre fin de non
recevoir se présenterait encore : elle résulte du traité
de 1 7 8 5 , fait entre les mariés C r o s , le chapitre, un
créancier opposant et Philippe Goldernar.
Nous l ’avons déjà remarqué : la sentence du 12 juin
178 4 avait déclaré les poursuites valables et régulières,
et ordonné l ’adjudication. C ett e sentence avait été
notifiée aux mariés C r o s , le 2 6 ; et c’est le 1 1 ju i l le t ,
que les mariés C r o s , quoique possesseurs, et com m e
possesseurs , passent ce traité oit ils sont parties prin
cipales ,
et
où
ils
consentent
à ce
que Philippe
Goldernar jouisse des biens comme f e r m ie r ,
pour
éviter un bail judiciaire; q u ’ il en jouisse moyennant
un prix q u i f e r a f o n d s , p o u r être d istrib u é auxcréa n ciers, conform ém ent à leu r ordre de cré a n ces,
et à la ven te q u i sera f a it e des fo n d s saisis.
�( T9 )
Si on pouvait considérer la femme C ros comme
intéressée à la saisie, elle n ’aurait pas pu faire d ’appro
bation plus formelle de la sentence du 12 juin et do
la procédure qui l’avait validée; elle serait donc non
rccevable aujou rd ’ hui à proposer la nullité des actes
antérieurs. D ailleurs, elle n ’a jamais appelé de cette
sentence; on 11e peut pas la comprendre dans cette
expression générale de l’ appel : T o u t ce q u i a p r é c é d é
et s u iv i, parce que ce n ’est pas là un simple acte de
procédure, mais un acte du ministère du j u g e , qui
emporte profi t, et qui subsiste tant q u ’on ne saibit pas
le juge supérieur du droit de l ’examiner par un appel
régulier et formel. O r , dans les procédures qui ont
suivi la sentence du 12 j ui n, le Conseil n a pu aper
cevoir aucune nullité. Celles qui sont proposées dans
les écrits des appclans sont repoussées par le fait 011 par
la loi. Quelque légèreté q u ’on ait mise en apparence à
les combattre dans le Mémoire imprimé, 011 a dit tout
ce q u ’ il fallait rigoureusement pour en démontrer la
futilité. L e Conseil n ’entrera,
sur ce p o i n t ,
dans
aucun détail; il les croit superflus.
D ’ailleurs, une observation ne sera point inutile.
On a d i t , en co mmençant,
que
le moyen
opposé
contre le commandement recordé, à défaut de copie
des titres, pourrait paraître considérable, si on plaidait
contre les héritiers G o ld e m a r , parce q u ’ il aurait fallu
leur donner copie des titres de créance; mais il froit
être évident maintenant q u ’à le supposer ainsi , ce
moyen n ’appartiendrait pas aux mariés C r o s , parce
q u e , dès q u ’il ne s’agissait , à leur égard -, que de la
�( 20 )
restitution des jouissances, elle ne se référait à aucun
titre an térieur , et q u ’ il suffisait, en ce q u i les con
cernait, de leur fournir copie de la sentence, q u i était
le seul titre contre eux.
Il faut faire une dernière remarque.
Dans la
première
répudiation ,
les mariés Cros
s’ét ii e nt réservé les droits revenant à Jeanne Goldemar,
du chef d ’Elisabeth Bi ro n, sa mère; et voilà pourquoi
ils crurent pouvoir continuer de jouir; mais les jouis
sances, dont
ils furent déclarés
comptables par la
sentence de 1784? outrepassaient leurs reprises mater
nelles : voilà pourquoi ils n ’eurent aucun intérêt à
comparaître à l ’ordre. Trois de leurs créanciers per
sonnels y com par urent, et demandèrent à être colloqués en sous-ordre. Mais on voit encore, dans diverses
dispositions de la sentence d ’ordre, q u ’après avoir fait
le compte de ce que les mariés Cros devaient rapporter,
la compensation de leurs créances était plus q u ’eiTectuée;
et , en définitive, toute collocation leur fut refusée.
C ’est après toutes ces tentatives épuisées;
que la femme
Cros eut essayé un retrait
après
sous le
nom d ’un de ses fils; après que Philippe Goldemar
eut fait le même essai sous le nom d ’autre P h i li p p e ,
que les appelans ont reconnu être son neveu; après
que l ’adjudicataire eut pris possession formelle, et no
tifié sa prise de possession; après q u ’on eut exécuté la
seutence en lui en abandonnant les biens; q u ’il les eut
a florin es à des tiers; q u ’il y eut fait des réparations
coûteuses; après .qu’il a eu versé le prix-de la vente,
Ct que ce prix a éuV retiré par les créanciers colloques;
\
�c ’est après cela, disons - n o u s , que
des parties ont jugé convenable
deux seulement
d ’interjeter app el ,
comme une dernière ressource sur laquelle ils n ’avaient
pas compté d ’abord.
Ils ont cru q u ’ il leur suffisait
d ’offrir la restitution du prix; q u ’ ils pourraient, à leur
gré, changer encore une fois leurs qualités; dissimuler
cette répudiation , au moyen de laquelle ils avaient
forcé leur créancier d ’abandonner des frais considé
rables ,
et
de
recommencer
les
procédures
après
douze ans de tems perdu. On ne se joue pas ainsi de la
Justice, après s’étre aussi long-tems jo u é de ses créan
ciers. Les soussignés persistent à penser que l ' appel est
non re cevable, et qu' aucun moyen de faveur ne se
présente,
qui puisse seulement faire hésiter sur ce
moyen décisif.
Délibéré à R i o m , le 3 mai 1826.
GODEMEL.
R IO M
D E VISSAC.
I M P R IM E R IE DE S A L L E S ; PRÈS L E P A L A I S DE J U S T I C E .
�Of l'ulUiur- /Mfc,
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Goldemar, Antoine. 1826]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
De Vissac
Subject
The topic of the resource
rentes
créances
adjudications
affichage
Chapitres
renonciation à succession
saisie
successions
ventes
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation. [Chapitre de Chaudes-Aigues contre Goldemar]
Annotations manuscrites. Arrêt complet du 9 juillet 1828, 2éme chambre. Appel non recevable.
Table Godemel : Répudiation : 2. les représentans de jeanne Goldemard, laquelle après avoir renoncé, en 1757, à la donation universelle que lui avait faite son père, lors de son mariage avec vital cros, répudia sa succession le 8 xbre1773, n’ont ni droit ni qualité pour attaquer soit la saisie réelle établie par le chapitre de Chaudesaigues, créancier de la succession, soit l’adjudication des biens saisis contre les autres enfans Goldemard, ses seuls et véritables héritiers ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
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Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1826
1786-1826
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
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BCU_Factums_G2617
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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Chaudes-Aigues (15045)
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Successions
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-
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MÉMOIRE
A
t
C O N S U L T E R ,
ET CONSULTATION,
P O U R
f i eur B e n o i t
P E R O L .
C O N T R E fieur A n toine-M arie L E G A Y
Notaire Royal s & Baillif de Pontgibaud.
-f
L
,
9
' V
E s fieurs L e g a y & Perol ont été fermiers de la T e r r e
de C onfolent, L eu r bail de ferme eft expiré en l’année
1785
Il eft dû à cette Seigneurie un cens en Pagéfie , par les
habitants du V illa g e de.Langardette. Le.fieur Perol fut ch arg é
du recouvrem ent de cette redevance.
E n conféquence , par exploit du 13 mai 1786 , le fieur
P e r o l , tant fous fon nom , que fous celui du fieur L e g a y
�fon aiTocié, lit allïgner en la Juftice d’O lb y trois des débi
teurs folidaires ; fa v o ir , C laude M ig n a rd , Jean Gafne , &
Jean C l e r m o n t , pour être condamnés à payer leur cens ,
pour les années 1 7 8 2 , jufques & compris 1 7 8 J . L e fieur
.Perol demanda exa& em ent ce qui étoit porté par les reconn o i f la n c e s ,& notamment par une du 3 août 17^3, reçue par
le fieur L e g a y . C e fens confiile en cinq liv. fept d. fix feptiers
de f e i g l e , deux feptiers cinq quartes d’a v o in e , trois g é lin e s ,
d e u x charroirs à bois, & deux vinades.
L e ' 10 juin 1 7 8 5 , le fieur P e ro l obtint , toujours fous fon
n o m , & fous celui du fieur L e g a y , une fentence par dé
faut , faute de comparoir , adjudicative de fes conclufions.
L e filence que gardèrent ces particuliers , foit a v a n t , foit
après la fentence , fuffiroit feul pour prouver qu’ils n’avoient
point payé leur dette.
L e fieur Perol renouvella fes p ou rfu ites, en janvier 1 7 8 7 ;
alors les particuliers condamnés vinrent lui donner des à
com ptes fur leur cens de 17 8 6 , qui étoit dû au fieur Perol
fe u l, parce que depuis cette a n n é e , il a été feul fermier de
la T e r r e de C o n fo len t} & en même temps ils prétendirent
qu'ils ne devoient rien pour les arrérages antérieurs , qu’ils
les avoient payés au fieur L e g a y , & que c’étoit m al-à-pro
pos que le fieur Perol les avoit fait condamner. Pour établir
leu r alTertion , ils préfentèrent une quittance qui leur avoit
é té donnée par le fieur L e g a y , fils , qui eft m a r ié , qui ha
bite a ve c fon p è r e , & qui leve les fermes de fon père con
jointem ent avec lui : le fieur P e r o l , f i ls , pratique de même
pour fon père. C e tte quittance eft conçue en ces termes :
je'reconnois avoir reçu des habitants de Lagardette les arréra
ges des cinq Pagéfies q u ils doivent annuellement à la Seigneu
�5
rie de C o n fo len t, jujqiies £* compris Vannée derniers i y 85 »
f a i t ce i 5 avril i y 8 5 \ figné , Legay»
Il y a dans la date de cette quittance une erreur manife f t e , mais qui eft fans conféquence. O n a entendu donner
cette quittance fous la date du i $ avril 1 7 8 6 , quoiqu’il y foie
d i t , i j avril 178 ^ ; la preuve s’en tire de ce que l’on y recor.noît avoir reçu les cens t ju fq u e s & compris F année der
nière \y 85 . E n parlant ainfi de l’année 178? , la date de la
quittance fe référé néceflairement à l'année 1 7 86.
L e fieur Perol fut étonné de cette quittance , parce quJil
fa v o it très-bien que les Cenfitaires ne s’étoient pas lib é r é s ,
même à l'époque où elle étoit repréfentée. I l comprit aifément qu’elle étoit l'effet d’une fraude pratiquée , de la parc
des fieurs L e g a y , dans la vue de le faire fuccomber à l ’égard
des C enfitaires, & de lui faire perdre let frais qui n'étoient
dûs qu’à lui feul. C e p ro c é d é , quelque mal-honnête qu’ il fû t ,
pouvoit d’autant plus fe fuppofer , de la part des fieurs L e
gay , que depuis quelque temps il étoit furvenu une divifion
entre les Parties , & que le fieur Perol avoit à fe plaindre de
quelques autres procédés peu décents.
C e qui achevoit de prouver que cette quittance étoit fimul é e , c ’eft que le fieur Perol avoit r e ç u , le 11 juin 1 7 8 5 , un
billet du fieur L e g a y lui-m êm e, que le fieur P e ro l retrouva
& qui étoit conçu en ces termes : je fouhaite le bon iour à
M . Perol , & le prie de me marquer combien montent les
fra is q u il a fa its contre les habitants de Lagardette ; je vais
régler leur fituation des fe p t années dernières , & demande à
quelle fomme M . P erol a vendu les grains * pendant ce temps•
S ig n é , L eg a y.
C e billet eft fans date , mais le fieur L e g a y a été obligé
A 2
�^
„
dè convenir , dans uné requête du 29 février 1788 , qu’ il'
avoit été adreflTé au fieur P e r o l , le 11 juin 1386 , celui-xi
feroit d’ailleurs en état de le prouver. L e fieur Perol fatisfic
à ce fujet le fieur L e g a y , & il eut plufieurs occafions d’ap
prendre dans la fuite que les Cenfitaires étoient encore en
retard de fe libérer. C ’eft en conféquence de la certitude
qu’il en avoit j qu’il fit fignifier cette fentence aux Cenfitai
res , le 17 du même mois de juin ; ce quJil n’eût certainement
pas f a i t , s'il n’avoit pas fu que les débiteurs ne s’étoient pas
libérés.
O n comprend aifément que fi , au 11 juin 178 6 , le fieut
L e g a y n’avoit pas encore réglé la fiîuatioti des habitants , il
n’étoit pas vrai que lui , ou ce qui eft de m ê m e , fon f i l s ,
eut reçu les arrérages qu’ils devoient
précédent.
dès le 1 ; avril
L e fieur P erol ne diifimula pas aux Em phytéotes l’idée
dont il étoit afFe&é fur ce procédé ; cependant , craignant
d ’engager une conteftation entre le fieur L e g a y & l u i , fachant bien d’ailleurs que le fieur L e g a y lui rendroit toujours
com pte des arrérages qu’il difoit faufiement avoir reçus , il
confentit de ne pas les d e m a n d e r, mais il obferva aux E m
phytéotes , qu’au moins ils devoient au fieur Perol les frais
auxquels ils avoient étoiant condamnés , puifqu’ils étoient
dûs à lui feul qui les avoit avancés, & qu’ils ne les avoient
pas payés au fieur L e g a y , d’après la quittance même du 1$
avril 1 7 8 5 , que le fieur Perol fe retint du confentement de
ces E m p h y té o te s , puifque cette quittance portoit feulem ent,
fu r les arrérages dûs , jufqaes & compris i y 8 5 , & qu’en confequence , il continueroit fes pourfuites pour fes frais.
L es Em phytéotes furent étourdis à cette obfervation f
�s
parce que le fieur L e g a y , fils, n’avoit pas prévu la d ifficulté,
ôc il ne leur avoit pas appris la réponie qu’il fa lloit-y f a i r e ,
enforte qu’ils demeurèrent bien convaincus qu’ils ne pouvoien t éviter le paiement de ces frais.
^ i; ri
M ais quelques jours a p r è s , r& le '31 janvier 1 7 8 7 , fur
leur refus de faire ce p a ie m e n t, le fieur P erol fit p ro c é d e r,
par faifie-exécution , fur le mobilier de Claude M ignard ,
& ce qui prouve déjà les faits qu’o n ,v ie n t d’a v a n c e r , c ’eft
que dans ce procès-verbal, le' fieur Perol reftreignit l ’effet de
fes pourfuites à la fomme de quatorze liv. quatre fols, montant
des dépens adjugés par la fentence.
*
■
L es Cenilcaires eurent alors recours au fieur L e g a y , p ère;
qui ne fe fit pas inftamment prier pour accorder fes bons
offices a 1 effet de faire fuccom ber encore le fieur Perol dans
fes nouvelles pourfuites, relatives aux frais. L a cïrconftance
.étoit délicate. Si le fieur L e g a y eût donné une quittance des
frais, fimulée & an tid a tée , femblable à celle du i ; a v r i l,
il fe feroit impofé par là l’obligation de les rendre au fieur
P e r o l , ôc d’a illeu rs, il fentôitque ce faitau roit été démenti
par cette même quittance. S ’il avoit reconnu feulement les
avoir reçus après la faifie-exécution j les frais de cette faifie
auroient été d û s,
& le fieur L e g a y auroit par là prépard
au fieur Perol un triomphe que fo n 1unique but étoit de lui
enlever. L e fieur L e g a y chercha donc des m oyens pour faire
croire que les C enfitaires, long-temps avant la faifie-exé
cution y lui avoient payé bien au-delà de ce qu’ils devoienc ;
que cet excédent furpaifoit le montant des frais, que dès-lors,
les pourfuites du fieur P erol étoient mal dirigées, parce que,
le fait d’ un affocié étant celui de l’a u tre , le fieiir P e ro l
n’avoit pu demander des frais qui n'étoient pas d û s ,
au
m oyen des paiements faits au fieur L e g a y .
�•
6
C e dernier préfenta une requête au Juge d’O l b y , fous le
nom des E m p h y té o te s , le 7 février 1 7 8 7 , contenant oppofition à la faifie-exécu tion , de la part de l ’E m p hytéote
qui la y o ir fubie ,■& intervention de la part des autres ; il
la fie figner par le nomm é Gaumet, fon C le rc , jeune hom m e
fans ca ra & è re, & âgé de feize a n s , par lequel il fit faire
les fondions de Procureur ; il y dit que ces E m p h y té o te s ,
ces machines qu’il faifoit m ouvoir au g ré de fa p a illo n , ne
devoient pas plus les frais que les arrérages. Pou r tâcher de
faire croire un fait aufli invraiiem blable, & démenti par
la quittance-du îy avril 1786 , il articula qu’après les pourfuites faites par le fieur P e r o l , il fut procédé à un com pte
entre les Cenfitaires & le fieur L e g a y , que par l ’événem ent
de ce c o m p t e , les, Ceniitaires fe trouvèrent avoir furpayé
ce qu’ils devoient pour cens depuis 1 7 8 0 , jufqu’en 178^
in clu fiv em e n t, de la fomme de vin g t liv. quinze fols fix
d eniers; il ajouta que « co m m e les frais de pourfuite»
» avoient été fournis par le fieur Perol , & que le fieur
» Legay,
qui n’étoit pas muni des p iè ce s, en ignoroit le
» m o n ta n t, il fut convenu que cette reftitution demeure» roit fu fp end ue, jufqu’à ce que l ’état de ces frais feroic
» c o n n u , pour en opérer la compcnfation à due concurrence ».
L e fieur L e g a y dit e n c o r e , pour rendre vraifemblable cet
’ excéd e n t de p a ie m e n t, que ce qui y avoit principalement
donné lieu , c ’eft qu’en 1 7 7 a , il fût procédé à une répar
tition ou également du cens. Q u e lors de cette op ération,
dont il fe m b le , d ’après les é critu re s , que le fieur L e g a y
efl l’au te u r, le cens fut porté à une quotité plus forte que
celle qui étoit établie par les rcconnoilïances ; que cet
excéd ent étoit de vingt-deu x fols un denier > iix coupes
�7
un quart de f e î g l e , & cinq coupes deux quarts & un feizièm e d’avoine
que les paiements avoient été faits dans lit
fuite d’après ce faux également.
L e fieur L e g a y ne pouvoit fe diiïïmuler que ^
fait8
étoient tels qu’on vient de le dire d 'a p r è s ^ m , les em phytéotes n’auroient pas dû. de f r a i s , er^orte qu’ils n’auroient
pas dû confentir à ce que la fondue qu’ils avoient payée audelà du montant du c e n s , fu«: com penfée avec ces fra is, ôc
cro ya n t prévenir cette ob ^ eQ ion, il pouffa-la complaifançe
jufqu’à dire lui-m êm e 'qu’il avoit trompé les emphytéotes en
leur faifant entendro que cette com pensation, devoir avoir
lieu : mais que n éa n m o in s, ils vouloient ¡bien ne pas revenir
contre cette erreur * 6c qu’ils confentoient encore à c e tte
compenfation \ vo ici les termes de la requête : * dans cette
» Situation-, loin d’êtrç débiteurs-des fermiers de C o n fo le n t,
» ils font^au contraire leurs jÇréancier^j mais pour trancher
» fur ce point , &. s’ accorder .avec les p a r o le s Jous le/quelles
» Legay tes a. trompés
ils ^ouS'JlQminû^ront.lu'conipen^
» fqtion à due concurrence y>. .v
* . Ai
.11 n e-fu t pas d iffic ile ,au fieur P e ro l de com battre toutes
ces fables. .Mais qe ne devoit pas. être les feules que {’im agi
nation du fieur L e g a y eût à produire.' Pou r .foütemr u ^ p re
m ier menfonge , il faut-foùvent en inventer pldfiêiirs V iitre s ,
& ici le fieur L e g a y nJa pas été heureux^ car fur c h a c u n ‘de
ce u x qu’il a mis au j o u r , il eft tombé dans des contradictions
groflîèrçs. D ans la requête dont on vient de p a rle r, les E m phytéptes dont le fieur L e g a y étoit l’organe ^ n ’articujoient
aucune quittance particulière , ils difoÎéru fimptemerit qu’ils
avoient payé, au fieur L e g a y , & c e ’quM Jfaut repwfcjuer >
c ’eft qu’ils fixaient l’époque cÎu p } d e m è n t .& ¿ e '/ a q u i t t a n c é *
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*•
-1
’7 i °
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i ;an
�au mois de juillet 1 7 8 6 , en ces termes : » de manière q u i
» cette partie "de dire£le de C on fo len t fut intégralement rem» plie , depuis le mois de ju ille t dernier, fuivant les quittan» ces qui léur furent fournies par le fie u r X e g a y . »
M ais le fieùr Perol annonça la quittance du i y avril 1 7 8 ^ ,
qui détruifoit. toutes les fables qui faifoient la bafe de la
défenfe des E m p h y té o te s ; le fieur L e g a y lut dans la c o p i e ,
i 5 a o û t, pour le i 5 a v r il, alors* il crut devoir donner une
quittance à ces E m p hytéotes , fous cette' date du \$ aoû t
1 7 8 6 ; laquelle quittance devoit paraître une ampliation d e
ce lle qui avoit été, donnée par le fieur L e g a y , fils, & con
tenir l’explication de c e q u ’on dîfôit s’êtfe paiTé entre le fiéur
L e g a y & ces E m p h y té o te s , & cette quittance fut produite
par une requête'du ¿ 'm a r s 1 7 8 7 , donnée toujours par le
fieur L e g a y ,' fous le nom dèè1E m p h y té o te s ; .dans’cette dérnière quittance
il éft dit qu’en conféqiiéhce' de l ’éga le m en f
vicieux, fait eh 1772^ & rétabli aux'rtiois de mai & juin 17869
le qu el"p réferito it'ü ri!excédènt fur le céris porté p a r l e s re^
connoifiances , les ,Iv n p h ytéo te s avoient furpayé le fieur
L e g a y . ^ & yuif. avoit‘ etc convenu que ledit excédent demeur è r o i c o m p à id c conçuttence avéc les fra is q u ils avoient
éprouves y àn1,'qui on t été' fournis par le fieur Peroil :
1
* A p rè s t ù n e ‘ première fentènce qui fit m ain-levée provifoire
au nom m é M i g n a r d d è s objets faifis, le J u g e d’O lb y Ren
d i t , ié 'jjo ju illet 17817 , une fentéhce par d é fa u t , faute de
p la id e r, qui déboütta les'Em phytéotes de leur intervention ,
& f^e I’op p ofitib n’ a lau.prbm1ère fçn’t ence du io -juin- 178
L e fieur L e g a y fit alors ‘fiWrtier oppofitiôn ’par c c s particii-1
Tiers à la fentenice *du 30' juillet 17 8 7';, ce q u i étoit irrégùKer / p a r c e qu’oppofition fut oppofitïon n’a p is lieii1, & eii‘
même
�9
même temps il intervint pour former tierce oppofitioti à
cette même fentence ; il foutint la vérité de tout ce qu’il
avoit avancé , fous le nom des Emphytéotes.
L e Juge d’CHby., frappé de toutes les contradi&io'ns dont
le fieur L e g a y n avoit pu fe garantir , ôc induifant delà
que tous les faits qu’il avoit articulés étaient faux-, convain
cu que ni les frais , ni même les cens n’avoient pas été payés
au fieur L e g a y , avant la faifie-exécution , débouta les C e n fitaires ôc le fieur L e g a y de leurs oppofitions 6c demandes ,
& les condamna aux dépens.
L e lleur L e g a y a interjetté appel de cette fentence , il çn
a fait auffi interjeter appel par les E m p h y té o te s ; il n’a pas
craint de foutenir avec force l’impofture qu’il avoit lui-mêm©
fuggérée aux E m p h y té o te s , & pour la faire triompher , il
•a demandé a&e par une requête du
février 1 7 8 8 , de ce
qu'il prenoit leur fait ôc caufe.
L e fieur Perol , lors de la plaidoierie , foutint que fi la C o û t
■fe déterminoit à donner aux quittances leurs effets , r é la t i vement aux Em phytéotes y ôc que fi à la faveur dé ces quit
tances ôc de la prife de f a i t & c a u fe , elle leur adjugeoit leurs
conclurions , au moins le fieur L e g a y devoit garantir le fieur
P e rô l des fuites de l ’infidélité dont il s’étoit; rendu coupable ;
que la prife de fait & caufe , de la part du fieur L e g a y , ne
.devoit avoir d’autre effet , que de faire fupporter à lui feul
,to u t le fardeau des condam nations, auxquelles il fembleroit
q u ’auparavant lçs Emphytéotes^ euffent dû p a rticip er, co m .m e étant fes_ complices. E n -cqnféquence , J e défenfeur tlu
-fieur Perol çonclqt judiciairement à cette, garantie contre le
i.fiçur L e g a y , dans lç cas où il Înteryiendroit contre l u i des
condamnations vis-à-vis les Em phytéotes.
B
�E n cet état il eft.intervenu un Jugem ent Préfidial , le 8
mars 1 7 8 8 , par lequel la fentence du Juge d’ O lb y a été in
firmée par rapport aux Em phytéotes ; le fieur P e ro l a été
condamné aux dommages-intérêts de celui fur qui il avoit
fait procéder par faifie-exécution , & aux dépens envers
tous. L e fieur L e g a y a été condamné à reftituer à ces E m
p hytéotes l’excédent de ce qui étoit dû par ces derniers , &
qu’il avoit toujours dit avoir reçu d’e u x , quoique cela ne fût
pas vrai ; & le fieur L e g a y a été condamné , en ce qui le
co n cern e , aux dépens à l ’égard des Em phytéotes ; & avant
d e faire droit fur les demandes refpe&ives des fieurs Perol &
L e g a y , formées tant judiciairement qu’au tre m en t, il eft or
donné qu’ils viendront à compte en la C o u r , dans le m o is,
à com pter de la fignifïcation du J u g e m e n t, des arrérages de
ia ceniive & ferme de la T e r r e de C o n f o le n t , commune entr’e u x , dépens réfervés.
Il s’agit actuellement de procéder à ce compte. L e fieur
P e ro l fe propofe d’y dem ander, contre le fieur L e g a y , la ré
pétition des dommages-intérêts & des dépens auxquels il a
tité condamné envers les E m p h y té o te s , attendu qu'il paroît
dém ontré que , lors du procès-verbal de fa ifie-exécu tion ,
ces Em phytéotes n’avoient ni payé leur cens , ni les frais ,.
dont ils ne fe fo n t point encore libérés; 6c que ce qui a été dit
dans les écritures & dans les quittances , n’efl qu’un jeu menf o n g e r , l ’effet d’une fraude infigne, pratiquée d e là part du
iieur L e g a y , pour nuire à fon aifocié ; que les facrifices q u ’il
femble faire n e doivent pas eu impofer , & ne font qu’appa
rents , parce qu’il a pris des précautions à l ’égard des E m p h yjtéotes 3 fur ld q ù els il a un empire a b fo lu ,
pour régler fon
�fort de manière à ne pas être dupe. C e tte a&ion en g a ra n tie ,
de la part du fieur P e r o l , eft-elle entière , même après le
Jugem ent Préfidial du 8 mars dernier , 6c eft-elle bien
fondée ?
L
e
c o n s e il
s o u s s i g n é , qui a vu les Pièces 6c
le M ém oire ,
E s t d ’ a v i s , fur la première queftion qui confifte à favoir.
fi l’a&ion en garantie du iieur P e ro l contre le fi é u r L e g a y , eft>
encore e n tiè r e , que l’affirmative de cette propofition ne fan-,
roit faire la matière d’un doute. L ’énoncé ‘des qualités du Ju
gem ent Préfidial du 8 mars dernier, prouve que le iieur P erol
avoit judiciairement demandé que, dans le cas où il interviendroic
quelques condamnations contre lui à l’égard d e s E m p h y té o te s ,
le fieur L e g a y fût tenu de l ’en ga ra n tir, & encàre, y eft-il d i t ,
ledit P e r o l, demandeur judiciairem ent, à ce que dans le cas où
il interviendrait quelque condamnation contre lui en fa v eu r
de/dits Mignard G* autres , ledit fieur Legay fa it condamné
à l'en garantir £> indem nifer, & en fe s dommages-intértts.
L o rfq u ’enfuite il eit a jo u t é , qu avant dé fa ire droit fu r les
demandes refpeâives des fieurs P erol &; L e g a y , fo r m é e s ,
tant judiciairement quautrem ent, il e/l ordonné que les P artics viendront a compte dans le mois des arrérages de ld fe r m e ,
dépens réfervés : il en réfulte évidemment que la demande en
garantie n’a point reçu fa décifion ; que cette décifion a é té
renvoyée à l ’appurement du compte , enforte qu’il eft manififte que l’a£Uon du fieur Perol à» cet égard eft entière.
L a fécondé queftion n’eft pas fufceptible d’un plus grand
doute en faveur du fieur Perol. Si quelque ch ofe doit étonner
B 2
�dans cette affaire, c ’eft que ie fi:ur L eg a y ait laiiTc échappsr
autant de preuves de la faufleté de fes atterrions ; le fieur
P erol peu: avancer , fans c ra in te , que le m e n fo n g e , ia
fraude & la collufion éclatent de toutes parts dans les pro
cédés & dans les écrits du fieur L e g a y peVfonnellement ,
ou dans ceux fignifiés fous le nom des Em phytéotes , ôc
dont il paroit être l ’auteur.
Il feroit indifférent que le fieur L e g a y eût été payé des
arrérages de cens avant le procès-verbal de faifie-exécucion
du 31 janvier 1 7 8 7 ; il fu ifir o it qu’alors les frais avancés
par le fieur P erol n’eufient pas é t é a c q u i t t é s ; parce que ce
procès-verbal de faille porte la reftriciion des pourfuites a u t
feul paiement des frais. C ep e n d a n t, il n’eft p as, à beaucoup,
p r è s , inutile d'établir que.; Jors de cette faifie, les arrérages
de cen 3 n avoient pas pliis été payés que les frais ; parce
que les contradictions qui ont échappé au fieur L e g a y fur. le
prétendu paiement des cen s, ne- pourront que r e n f o r c e r les
m oyens de fraude qui s’élèvent contre l u i , r e la t i v e m e n t au
prétendu paiement des frais, fuivant la m a x im e , fe m e l malus ,
fem pcr malus in codent gcnere ni ali.
O r , on ne croit pas que le fieur L e g a y , puifle jamais perfuader qu’avant le procès-verbal de ia ifie , lçs arrérages de
cens avoient été payés. Pour fe convaincre du contraire , il
fuifit de remarquer les contradictions groflières & fans nombre
dans lefquel les il eft to m b é; c ’eft là une preuve du m en fonge,
fur-tout lorfque toutes les circonfiances d’ailleurs fortifient
<lans ejette idée.
. L e s E m p h y t é o t e s , . pour prouver le paiement des c e n s ,
ont d’abord rapporté au fieur Perol la quittance du fieur
L e g a y , fils, du 15 avril 1786 ; il y cil d it, à la v é r it é , qu’elle
�\3
eft du i f avril 1785’. Mais d’apr.ès les réflexions contenues
au M ém oire , il paroît démontré que cette dernière date eft
erron n ée, 6c que la véritable date eft du J5 avril 178.5 j au
fu rp lu s, ce fait eft indifférent pour la conteftation : mais
cette quittance eft fauffe, elle eft l ’effet d’une infidélité de
la part du fieur L e g a y ou de fon fils. D è s que le fieur L e g a y
a reconnu par un billet q u i , de fon a v e u , configné dans une
re q u ête, eft du 11 juin 1 7 8 6 , que les E m p hytéotes n’a, voient pas payé à cette époque ; qu’il devoir alors , pour
fe fervir d,e fes termes , régler leur fituat'ion , il eft donc é v i
d e m m e n t faux que ce paiement eut été. fait dès le 15 avril
^1786., ou m ê m e , fi l’on v e u t ,
178^.
• .^e .fieur L e g a y , & les habitants de Lagardette ont enfuite juftifié d u n e autre quittance du. 15 août 17S 6 ; mais
cette quittance ne mérite pas plus que la première , là
confiance de la juftice.
i°. L a fincérité de cette quittance eft démentie par celle
du 1 <y avril précédent. Les E m phytéotes n’ont pu payer au
15 août ce qu’ils auroient payé au îy avril. Lorfque deux
faits font aufli évidemment contradictoires, il eft impoffible
d ’ajouter foi à aucun. R ien n’eft alors c e r ta in , fi ce n’eft le
menfonge de la part de celui qui les allègue.
2°. L a quittance du i f avril eft fim ple, & n'annonce pas
toutes ces opérations c o m p liq u é es, que l’on dit avoir été
faites par la quittance du 1 y août , opérations invraifemb la b le s , comme on le dira dans la fuite.
3°. Si cette quittance du i j août eût été fincère , les
Em phytéotes ne fe feroient-ils pas empreffés d’en juftifier
par leur première requête du 7 février 1 7 8 7 ? C ep e n d a n t,
non-feulementils n’en parlent pas, mais encore, par l'effet d’une
nouvelle contradiction, ( car ici tout l’embarras confifte à faifir
�r4
toutes les contradictions du fieur L e g a y , ) il y eft dit que
le paiement avoit été fait au mois de ju ille t ij% 6 .
Il s’agit actuellement d’examiner fi les frais dûs au fieur
P erol , com m e les ayant avancés, avoient été payés au fieur
L e g a y avant le procès-verbal de faifie-exécution. Ici fe man ife fte , d’une manière bien fe n fib le , tout l’embarras où s’eft
trouvé le fieur L e g a y , pour faire paroître que les E m p h y téotes s'étoient libérés de ces frais.
L e fieur L e g a y veut faire croire q u e , d’après une furcharge
qui s’étoit faite fur la quotité du c e n s , lors d ’un égalem ent
de 1 7 7 2 , les E m p hytéotes avoient furpayé a u - d e l à de ce
q u ’ils devoient ; que ce t e x cé d e n t étoit de vin g t Iiv. quinze
f o l s , & qu'il fut convenu que cette fomme feroit com penfée
avec les frais qui étoient dûs au fieur Perol. C ’eft ce qui a
été inféré dans la quittance du 15 août.
M ais en premier lie u , cette quittance fe réfuté encore
par celle du fieur L e g a y , fils , du i f avril 1786. C e tte der
nière quittance porte fimplement furies arrérages, il n’y eft fait
aucune mention ni des frais, ni des op érations, par l ’effet deiquelles on prétend que ces frais ont ceifé d’être dûs. L e
fieur L e g a y ne peut pas raifonnablement dire qu’il a f a i t ,
lors d’une des quittances , des opérations dont l’autre quit
tance exclud l ’idée.
E n fécond lieu , tout ce qu’a dit le fieur L e g a y , pour tâ
cher de perfuader le paiement d’un excédent fur la q u o t i t é
du cens & la compenfation des frais avec cet excédent , eft
abfolument invraifemblable ; cette invraifemblance devient
une fauffeté d é m o n tré e , au moyen des contradictions avec
lefquelles le fieur Perol a encore l'avantage de rcfuter le
fieur L e g a y par lui-mome.
i ° . R i * a ne prouve cet également vicieux de 1772 , ôc
�cet excédent dans les paiements ; au contraire , tout en an
nonce la fauffeté. O n voit que le fieur P e ro l n'a demandé
que la véritable quotité de ce n s, portée par les titres; ôc
par fa pramière requête, il a indiqué les paiements qui avoient
été faits par les Em phytéotes ,
commun.
d’après les reçus tenus en
2°. L e fieur L e g a y , fous le nom des E m p h y t é o t e s , a
bien d i t , dans leur première requête du 7 février 1 7 8 7 , que
lors du prétendu compte il y avoit eu un excédent, dans les paie
m e n ts , de v in g t liv. quinze fo ls; mais un peu auparavant,
on trouve une idée différente. O n y lit en e f f e t , chacun des
Suppliants vint avec le fieur Legay à compte de la portion con
tributive , à partir depuis i j 8 o , jufques en i y 8 5 , inclufivem en t, ce qui f a i t G ans ; après quoi ceu x qui avoient trop
p a yé , & qui par conféqucnt f e trouvoient en ava nce, reçu
rent du fieur Legay la reflitution de cet excédent de preflation j
tandis que ceu x qui avoient laiJJ'é cumuler des arrérages en
arrêtèrent le m ontant, ù s'en fo n t enfuite libérés dans les
délais qui leur fu ren t accordés ; de forte que de tous les con
tribuables , les fteurs M a llet & Hugon , enfemble les héritiers
de Durand Hébrard 3 & dont la ferlée part ne monte en total
que quatre fols trois deniers, cinq quarts & demi de coupe de
fe ig le 3 & trois quarts & un huitième & feiÿèm e d 'a v o in e,
furent les fe u ls qui refièrent en demeure de payer.; de ma
nière que cette partie de directe de Confoient f u t intégrâtes
ment remplie depuis le mois de ju ille t dernier.
O n fent aifément les m oyens qui s’élèvent de ce paflage
contre le fieur L e g a y . D ’un cô té il ne pouvoit être queftion
!de reftituer ce qui avoit été p a y é par certains E m p h y té o te s ,
au-delà de ce qu’ils devoient pour leur quotité particulière ;
c e t excéd ent devoit être imputé fur ce que les autres E m j
�< V '
16
p hytéotes d e v o ie n t, aînfi que cela f e pratique, & doit fe
pratiquer en pagéfie. D ’un autre c ô t é , s’il eft vrai que la
pagéfie en q u eftion , cette partie de directe de Confolent n’a
é té intégralement payée qu’au mois de ju ille t , il n’avoit
d on c été rien furpayé auparavant.
*
3°. Si on fuppofoit ce p a ie m e n t, en fu s 'd e ce qui é ta it
d u , il faudroit en m êm e temps renoncer à l'idée de la co m
penfation des fommes furpa y ées a v e c les frais avancés par le
fieur P erol. L a raifon en eft fim p le , c’eft que dans ce c a s ,
les E m p h y téotes n'auroient pas été obligés de confentir à
cette c o m p e n f a t i o n , ils n’auroient pas dû de frais. L e fieur
Legay ne fauvera certainement pas l ’invraifemblance de ce
f a i t , en avouant q u 'i l avoit trompé les E m p h y t é o t e s , en les
portant à confentir à cette compenfation. C e t aveu peut être
p la if a n t , mais il n’eft certainement pas édifiant de la part du
fieur L e g a y , & l ’on peut dire que la tournure n’eft pas heureufe.
O n vo it donc que le fieur L e g a y a pris des mefures frauduleufes & infidèles , pour paroître avoir reçu ce qui ne lui
a point é té payé. L ’on ne doit pas s’en laiffer impofer par le
facrifice qu’il femble faire , d’après la collufion qui régne
entre lui & les Em phytéotes. Il doit être feul refponfablc de
la condamnation de dépens qu’il a fait fupporter à fon aifocié , il ne peut pas s’en d é fe n d re , en invoquant les loix
d’une fo c ié té , après les avoir m al-honnêtement violées.
D é lib é r é à R io m , le 13 avril 1788.
T
1
G R E N I E R .
.
i . i hi . F»!
1
>n —
• -
.
A
R I O M , de l’im prim erie de M a r t i n
1
1 1
».
■
DÉGOUTTE 9
Im p rim eu r-L ib raire, près la F ontaine des Lignes. 1788.
�
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Factums Baron Grenier
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pérol, Benoit. 1788]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Subject
The topic of the resource
cens
pagésie
quittances
fraudes
saisie
justice seigneuriale
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter, et consultation, pour sieur Benoit Pérol. Contre sieur Antoine-Marie Legay, notaire royal, et baillis de Pontgibaud.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1788
1785-1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
BCU_Factums_B0127
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0724
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Coverage
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Pontgibaud (63285)
Olby (63257)
La Gardette (village de)
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Information about rights held in and over the resource
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cens
fraudes
justice seigneuriale
Pagésie
quittances
saisie
-
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MÉMOIRE
P
o u r
le fieur M
o n t g o lfie r
,
R ec e v e u r-G é n é ra l
de
j
l 'a r c h e v e c h é de Paris , a c c u ffé ;
C
o n t r e
le
fi e u r
M
onroy
, E nt e p r e n ur
d e B âti-
m e n s , a c c u fa te ur ;
;
>
E N préfence du f ieur CARDON , Marchand de v in , de
M e. D u f r e n o y , Procureur au Châtelet , & de la
dame G l R A R D , co-accufés.
f
----- ,---------------------------------------------------^
,
,
H ic r.iurus ahtreus t jl o
N il con fcirt f i b i nulLi pallcfccre culpâ.
H o r . , Epift. i o . Liv. n . Ad Mæcen.
L e fieur Montgolfier eft acc ufé de complicité dans
une faillite prétendue frauduleufe........................ E h !
q
u
de
i nous eft : à l’ab ri d’une accufation ? q ui de nous
eft à l’abri des incurfions de ces corfaires domeftiques,
A
j.
j
{
�\i ‘ Av
■
v
ç<a.> '. »»•' ,
W**^Aî '
- A K&kV^ib V«
* * V A
• < >xaSÎÏ'
; iy h
4 ,
q u i , ne vivant que de méfaits & d'intrigues 3 épient la.
fimplicité pour en abufer ; qui 3. armés de tout ce que"
la calomnie a d'effrayant, mettent à prix leur inaction y&Z qui , s’ils ne réufliiTenr pas par la terreur qu’ils infpiren t, efent dérober jufqu’au glaive de la loi f pour-
égorger ou dépouiller leurs viét-imes.
,
Mais fe pourroit - il que le fieur Montgolfier fût
coupable ? Se pourroit-il même qu’il fût fufpe£t ? Non..
E t vous tous hommes honnêtes qui , parvenus comme
lui au terme d'une carriere irréprochable , joui il c z en
paix de votre vie pailec ; croyez, avec une douce fécurké , qu’il n’eft pas polîîble de démentir une réputation
acquife par plus de cinquante ans de délicateiTej croyez
donc d’avancc à fa pleine juftification.
Croyez même que sJil cft réduit à paroître aux pieds
de la juftice comme fc défendant d ’être, coupable ;
G’efl: qu’une affociation clandefline , ipéculant fur fe s
dépouilles, a ourdi contre lui la trame la plus odieufe ;
c’eft qu’incapable de tranfiger fur fon honneur, il n’a
pas voulu acheter fon repos aux dépens d’ une juitification folemnelle ; c’eft q u e, fort de fon innocence,,
il n*a pas craint de livrer à fes ennemis un combat à
outrance, & de leur difputer , devant des juges équi
tables , la proie qu’ils ofent encore fe promettre do
Iburs machinations.
F A I
T S.
Au mois de juin 1 7 8 3 , le fieur M ontgolfier, créan
cier du. iieur Diot de Blanchard, s’eft trouvé, par une*
¿¿légation judiciaire, celui du fieur Cardon..
�î
Alors le fieur Cardon , marchind de vin traiteur,
fai Toit un commerce floriflant : il avoit du bien, & ce
bien il l'avoir amaiTé par l'on travail ; une fortune aor
quife préfentoit ainfi à un prêteur une iïïreté matérielle :
des iuccès d’ induftrie lui prometcoienc même l ’accroiffement de ion Oça^e.
¿5
Le fieur Montgolficr fc détermina donc aifément à
Jaiffer entre les mains du fieur Cardon une fomme de
10,000 livres. Ce p rêt, quoique le fieur Montgolficr
eût déjà fait quelques négociations avec le fieur Cardon.,
e i t , à parler exactement, le premier qu’il lui ait fait.:
il eft , fi nous pouvons parler ainfi , la racine de la
créance qu’il répète aujourd’hui.
Tous les jours le .fieur Cardon cherchoit à agrandir
fon commerce, & il formoit des entreprifes d’ un avan
tage très-apparent; mais pour rcalifer fes efforts il lui
falloit des avances , il en obtint du fieur Montgolficr.
Eh ! de quel capiralifte n’en eut-il pas obtenu , tant
la confiance qu’il infpiroit étoit grande , tant les appa
rences lui étoient favorables ?
En 1 7 8 4 , il vend une|maifon , & les lettres de ratifi
cation de fon acquéreur font fcellées fans oppofition.
En 17^ 5 > ü ie préfente pour acquérir des économats
trois mille toifes de cerrein ; on les lui cède, moyennant
une redevance annuelle de 3000 livres, & à la charge
de conftruire un bâtiment au moins de 100,000 livr. ;
& fa fortune j fa réputation fo n t , pour l’exécution d’un
engagement auili important, des fûretés dont fc contente
ür* confeil adminiftratif.
Enfin t & c’eit à l’aeeufateur même du fieur Mont*A z
�41
golfier qu’il faut s-’adreflfer pour favoir la confiancequ’infpiroit le iieur Cardon ; c’eft dans Tes écrits ( i )
cju'on apprendra que ion commerce en vins étoic coniidérable ; qu’il avait des magafins en Bourgogne , aux
environs de Paris Ù dans cette capitale,• que ion auberge
jouijfoit de la plus grande vogue ; que fept domejîiquss
étoient continuellement occupés a. en fàire le fervice ;
qu’il confommoit annuellement pour 40 h 50,000 livres
de poiffon, fans parler des autres comefltbles ; qu’il
faifo it pour 500,000 d'affaires par an ; ôc qu’il avoic
pour plus de deux millions de crédit.
Scra-t-on maintenant étonné que le ficur Montgolfier
ait fait des prêts confidérables au fieur Cardon ? Le
fera-t'On fur-tout,./! 011 réfléchit avec quelle facilité un
premier prêt en amene d’autres , lorfque le débiteur
a une fois gagné la confiance de fon créancier ? Ec
ne craignons pas de le dire, le fe r a - t - o n , fi on fais
avec quel abandon le ficur Montgolfier fc livre à Tattraic
de rendre fervice ?.
,
Au mois de juillet 178 6 , le fieur Montgolfier s’eft
donc trouvé créancier du ficur Cardon , d’une fomme
de 80,189 livres, portée par. portions x en plufieurs bil
lets, à diverfes échéances.
Sans doute cette fomme étoic confidérablc , & l’in
térêt de la conferver pouvoir caufer quelques follicirudes ; d’ailleurs le ficur Cardon avoit déjà promis des
rembourfemens, &c il ne les avoit pas faits; déjà.il avoit
eu befoin de répit.
) Premier mémoire du fieur Monroy, page 10* 11 & 12.
�f
D ’ailleurs encore le fieur Montgolfier le voyoic oc
cupé à ia conitru&'ion d’un bâtiment ; &C ce bâtiment',
dcftiné cependant à fervir d’auberge, éraloic dans for»
architeclure un luxe moniïrucux ; même des coldnnes
en décoroient la façade.
Il conçut donc quelque défiance , non pas pourtant
encore fur la folvabilité de fon débiteur, mais fur la
prudence de fa conduite ëc la diferétion de fes entreprifes.
H témoigna des inquiétudes : malheureufement elles
furent calmées. Cardon lui préfenta un étal général de
fes affaires, duquel il réfultoit qu’il avoit pour plus de
Joo,ooo livres de bien libre & c ffe& if; il lui annonça
de plus des rembourfemens très-prochains ; en un moc
il réuflit à le tranquiUifer.
Mais de nouvelles échéances arrivèrent , &. il paroîc
que le fieur Cardon n’éroit guère alors plus qu’aupara
vant en état d’y faire honneur : il avoit pourtant a
craindre de réveiller les foupçons du fieur M ontgolfier,
& il fentoit bien que le feul moyen de prolonger fa'
fécurité étoit de lui propofer quelque rembouricmcnrEn conféquence, le 28 a o û t, il lui offrit l’ordre dequatre effets, l’un de 4000 livres, fur le comte d’Harcourt, & les autres de 3000 livres chacun, fur un fieur
Hapillon.
Quoique le fieur Montgolfier eût de fortes raifonS
^ ne pas croire à la folidité de ces effets , il les accepta
pourtant, mais h valoir fur fa créance.
Depuis cette époque, près de deux mois s’écoulèrent
fans que le fieur Montgolfier conçût de nouvelles inquié-*-
�6
•tudcs ; le fieur Cardon continuoit Ton commerce 5c fes
conilru£lions ; rien dans fes affaires apparentes n’annoncoic
une mauvaiie iituation»
On conçoit donc fans peine quel fut Ton étonne
ment lorique M e. Dufrcnoy , procureur au Châtelct s
vint lui faire parc du dérangement des affaires de Car
don ; & on prévoie déjà fa conduite en femblablc con
joncture.
I l devoit prendre des précautions p ou r, s’il écoit poffible , affurer fa créance : fes titres étoient de fimples
billets , fans privilège, fans hypothéqué ; il avoir donc
à leur donner une date certaine, de pour cela il falloic
en faire prononcer la condamnation.
Mais alors tous fes billets n’étoient pas échus, & la
faillite n’étant pas ouverte, les échéances étoient en
core de rigueur ; il ne fît donc ailigner le fieur Cardon
que pour 54,089 livres, montant des billets échus : i!
ne fe préfenta pas , & le 13 octobre fentence de con
damnation intervint contre lui.
Pendant les délais de cette procédure le mauvais état
des affaires de Cardon avoit éclaté : faute de payement,
les ouvriers employés à fes conftrudtions avoient quitté
Je travail , & quelques créanciers, affemblés chcz
dame Pourrin , avoient inutilement tenté de le leur
faire reprendre.
D ’un autre côté , la fituation pcrfonnelie de Cardon
empiroit h chaque intlanc ; pluficurs ièntenccs étoient
déjà rendues contre lui ; des contraintes par corps
menaçoient fa Iibcrté\; enfin fa faillite éroit inévitable:
.cependant 9 difoit-il, fes affaires n’étoient qù’engorgées.
�7'
& le moindre répit, pouvoit les remettre dans leur circu
lation naturelle.
Il étoic donc intéreflant pour Tes créanciers de venir
à fon fccours : auffi fe réunirent-ils le 13 o&obrc , 2c
convinrent-ils de follicucr un arrêt de l'urféance : on
dreiïa. fur-le-cham p le placet ,\ il fut ligné même par
le 'ficur Monroy.
Mais des vues pacifiques n’animoient pas rous lescréanciers; quelques-uns, mus par toute autre envie que
celle de conferver au ficur- Cardon les moyens de ré
parer fa fituation, s’oppoferent à l'obtention de la furléancc.
L a liberté du ficur Cardon reità donc expofée auxmêmes exécutions : il s’abfenta.
C ’cit encore M e. Dufrcnoy qu i,-le 29 oeiobre , ap
porta au ficur Momgolficr la nouvelle de cette diiparu-'
tion , qui ouvroit irrémiiîiblcmcnt la faillite.
•
Le ficur Montgoifier étoit créancier de 80,289 Jiv.
8c il avoir titre exécutoire pour la plus grande partie'
de cette fomme j il pouvoir donc commencer les pourÎliitcs : il croit même le plus intérefl'é à le faire.
M c. Du frenoy lui ofFrit ion mini-flic re j il l’accepta.
En conféquence , le 29 ottobre plainte fut rendue y,
information -faite , 8c décret d’ajournement perfonnel
prononcé contre Cardon. Le même jour les fccllés furent
aPpofés fur fes effets.
Le
} faifie reelle de les deux maifons, l’une au
Gros-Caillou &c l'autre à la Râpée : tout cela à la requête
du fieur Montsolfier.
O
�8
Pendant ces pourfuitcs , les créanciers s’étoient fouv-cnr
aflemblés pour aviier à un parti convenable; mais rien
n’écoic encore arrêté, lorfque le 13 novem bre, 5c à
une aflembléc extraordinaire , le fieur Cardon , après
avoir donné l'état de fes affaires, fie propofer l’abaiidoji
eén éral de fes biens.
Sans contredit on ne pouvoir exiger de lui rien de
plus ; il abandonnoit tout : auiîi fa propofition fut ac
ceptée ; &C on croira difficilement qu’un a&e de cette
nature ait ¿té fiiivi d’une plainte en banqueroute fraud-uleufe.
Quoi qu'il en foit , l’acbe d’abandon fut dreiTé : les
créanciers qui compofoient l’ affenïblée le fignere-nt ; ils
s’ unirent Sc nommerentles iieurs Montgolfier Sc Soi fions
fyndics de l'union.
Ces fyndics fe tranfportcreni à. Sain t-Cloud , où b
fieur Cardon s’étoit réfugié ; mais ce ne fut pas fans
difficulté qu’ils le déterminèrent à iigncr. De noûvellcs
réflexions avoient changé fes réfolutions : il ie croyoi.c
cncord riche ; il étoit fur-tout perfuadé qu’il abandon^
noit à fes créanciers plus qu’il ne leur devoir ; il rjépugnoit à fe mettre «à leur merci par un abandon général :
il refufa donc d’abord de figner, & il ne s’y détermina
que quand le fieur Montgolfier lui cut fair entendre que
l’abandon entier de ia fortune, quelle qu en fut la fituatio n , étoit un hommage qu’il devoit aux bpnnes inten
tions de fes créanciers.
Quoique cet a£te fût figné par beaucoup de créanciers,
il ne l’etoit pas par la pluralité, 6c on ne pouvoit par
conféquent en pourfuivre l’homologation. Cardon reftoit
donc
�9
donc toujours expofé à des contraintes } il ne pouvoir
agir pour acquérir ccttc pluralité : il étoit ainfi impor
tant de lui obtenir un arrêt de furféance : les créan
ciers le folliciterent, & l'obtinrent le 13 décembre.
Alors le fieur Cardon, tranquille fur fa liberté , tra
vailla«! acquérir la pluralité : il y réulîir. le 3 mars 1 7 8 7 ,
2c le 13 du même mois ce traité fut homologué provi*
foiremcnt avec les créanciers accédans.
Mais^ déjà fe formoit un orage contre le fieur Cardon.
Le'fieur Monroy , fon créancier de 1 5 , 3 5 7 livres, animé
par la cupidité & par d’autres motifs odieux que nous
lai fions au fieur Cardon à développer , avoit formé le
projet de ie ruiner fans reiTource, & pour cela de fe
rendre maître de la difeuifion judiciaire de fes biens.
D e - là , comme moyen de parvenir à fon b u t, une aceufation de banqueroute frauduleufe.
Effe&ivement , le 7 avril 1 7 8 7 , il a rendu plainte 6c
fait entendre dix-huit témoins.
Le premier juin, le décret d’ajournement perfonnel
déjà prononcé contre Cardon a été converti en décret
de prife de corps ; fa femme & M e. Dufrenoy ont été
décrétés d’aifignés pour être o u ïl; ils ont tous iubi in
terrogatoire.
O
Tout ce qui avoit été fait jufqu’alors ne laifibit matière
à aucun foupçon contre le fieur Montgoîfier ; cependant,
on (aura bientôt pourquoi, le fieur M o n ro y, dans fes
Manœuvres, vifoit direâemcnt à lui ; il falloir donc
dreffer de nouvelles batteries.
E n conféquence, le 14 juin , nouvelle plainte & infor
mation , compofée de
témoins,
B
�ro
Ces efforts ont encore été impuiflans cont re le fieur
M o n t g o l f i c r , mais le fieur M o n r o y ne s’eft pas pour cela
d é c o u r a g é ; il a encore ajouté h (a plainte, il a fait en
tendre c n c o r c j n e u f t é m o i n s , Sc il cil enfin parvenu h
obtenir ce qu’il pourfuivoit fi c h a u d e m e n t : le fieur Moncrçolfier a été décrété {faffigné pour être oui.
Q u e le fieur M o n r o y ait fait du fieur Montgolficr un'
objet particulier de
(es pourfuites, tout le m on de en'
pénètre les m o t i f s ; .Y peine les a-t il lui m ê m e déguifés;
h peine a-t-il dilRmulé qu’il fc flattoit que le fieur M o n t
golficr, impliqué dans une affaire criminelle , s’emprefferoit d’en acheter c hèr em ent l’cxtin& ion . Il vouloir
d’ailleur» fc rendre maître de la difcuilion des biens de
Cardon, &
pour cela il falloir en dépouiller
le fieur
Montgolficr ; pour cela il falloit le rendre fufpecl.
Mais combien pourront fc méprendre fur les caufes de
Uacharncmcnt de cet a c c u l a t c u r , fur les caufcs de la per(écotion lourde &- raffinée qu’il lui a fait éprou ve r!
faut donc
Il
leur apprendre que fes e n n e m i s , ou Tes en
vieux , fc font ligués, fitût qu’ils ont vu qu’on pouvoir tirer
parti cont re lui d’une affaire malheureufe; qu’il fc font
emparés du fieur M o n r * y , o n t dirigé tous fes c o u p s , l ’ont
aidé de leurs manœuvres ic m i m e de Uur plume: il faut
leur apprendre que le fieur Montgolficr a eu a redouter
la p^rfiJn: »le cette cabale m o n l l f u t u f c , plus ericorc que
r ir d f t ic c
du fieur M ^ n r o v
,
Q . j o quM en f o i * , le û-—:r Montgolficr ctoit
te il I* icroit pîefr:«te pp jr prerer ic* t c p o n f e i , fi , a ru**
de I» c o n f c i c n c ^ , il n\ ût c l o u t é que Ion imp n ;
J j î c U fcntC : mat» s'il dcroi t compte J ,
t
fa codyM,;c •
�Tt
ctoic-ce avec l'appareil humiliant des formes rigoureufes de
la juftice ? N ’étoic-cc pas plutôt pour éclairer l'opinion
publique & raffurer la propre d é lic a tc fle , que pour r e m
plir le premier devoir d’un h o m m e fufpc&?
Aufli interjetta-t-il appel de fon d é c r e t ; mais il fuccom ba:
Sc cette défaite viendroic en co re effrayer fou
i n n o c e n c e , s'il ne pouvoir pas dire hautement q u e , lié à
des c o- a ccu fé s cont re Icfqucls s’élevoient fans doute des
p r é e m p t i o n s fAcheufes , il a été la vi&ime f o r c é e du
principe de l’ordre judiciaire, qui veut qu’c* matière cri
minelle , tinjlruclion fo it indiv 'tfible ; s’il n’avoit pas furtout la douce & ineftimablc confolation de fc rappelIcr l’h o m m a g e publiquement rendu à
la pureté de f i
c o n d u i t e , par un magiftrat aufli glorieufement
co nnu
par fon intégrité que par fes rares talcns ( i ) .
Le ficur Monrgolficr cft d o n c revenu devant les pre
miers juges: il a ioutenu y interrogatoires ic répondu à
2 j)
interrogats ,
prcfque
tous adminiftr¿s p a r l e fteur
S io n r o y , c ’eft-i-d.re prcfque tous c a p t i e u x , dérifoircs,
étranger» \ la conrcftjtion , fie pourtant infidiculemenc
»■^produits fous toutes les formes. Scs rcüiftrcs ont été
compulfé* , fie p r o c è s -v e rb a l , t i n t J e leur defeription que
de l’expédition J e» articles relatif) i Î* c r é a n c e ,
a été
joint au procès : il x été c o n f r o n t é , ifcc. en un m o t , il a
fubi toutes
les é p r e u r e t
de la
procédure la
plus ri-
goureuf?.
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�12
Sans doute ces épreuves ont coûté à fa fenfibiüté ; fans«doute il a été bien cruel pour lui de fe voir étroitement
e n v i r o n n é de la défiance & des menaces de la juftice;
mais maintenant, arrivé à une juftifîcacion éclatante , il
retiendra Tes plaintes, il oubliera toutes Tes peines, il at
tendra avec confiance les réparations qui lui font dues.
Et nous, voués à fa défenfe par affection 6c par un
fentiment intime de fon innocence, plus encore que par
les devoirs de notre mi'niftcre ; nous à qui les fourdes
manœuvres de fes ennemis font connues, & qui avons
pour ainfi dire vu de près , les rciForts tendus pour le
perdre ; puiffions-nous, maîtrifantl’ indignation dont nous
fommes pénétrés, ne pas franchir les bornes d’une iage
modération! Puiffions-nous ne pas perdre de vue que il
la calomnie artaque avec fureur , l'innocence ne fe dé
fend qu’avec courage, que la vérité eft fa juftificationi,.
qu’elle eft même fa vengeance !
M
O
Y
E
N
S
.
Etonné de voir le fieur Montgolfier impliqué dans
une affaire criminelle , on fe demande d'abord ce qu'il
a fa it;
bientôt il faut renoncer à trouver dans fa con
duite quelqu’a&ion fufpe£te.
Avant la faillite du fieur Cardon , il lui a fait des
avances, il lui a donné des fecours, >1 l’a aidé à amélio
rer le fort d*unc famille nombreufe ; & féduit, aveu
glé même fi l’ on veu t, par les apparences, il s’eft de
prêts en prêts, de ménagemens en ménagemens, trouvé
ion créancier de 80,2.89 livres, à l’époque du dérange-
�*5
ment cíe fes affaires. Cela eil malheureux; mais cck*
cft-il blâmable?
Ma is , entendons nous dire, la créance du fleur Mont j
/ golficr efl f i confidérable ! E h bien Í qu’importe fî elle cft
Jincere? Au furpîus & indépendamment de toute preuve
de fa iinceriré, que conclure de. la quotité de cette
créance? qu’elle eft invraifemblablc, qu’elle cil fufpe&c.Loin de nous pareille conféqucnce! Il n’y a qu’une ma
ligne prévention, il n’ y a peut-être qu’une probicé équi
voque qui puiiTe la concevoir ; car ceux-ià feulement qui
en font capables, préfument hardiment le dol. Quel eft
en effet l’homme honnête qui ne fait pas que l’excès
de confiance^ ordinairement produit par l’excès de droi
ture , produit à fon tour un abandon qui ne calcule pas,
& qui ne s’arrête que quand il eft pleinement détrompe.
Ignore-t-on d'ailleurs que le ficur Monrgolficr n’a pa3
prêté 80,189 livres en un fcul prêt, mais par des prêt!?
divers, fucceffifs, amenés les uns par les autres, pendant
pluiîeiirs années? A-t-on oublié qu’il a été induit à ceá
différens prêts par la fituation floriflante du ficur Cardon,par la profpérité apparente de fon com merce, par l'exiftence matérielle d’une fortune adez c on f i d é r a b l e , par
fon exactitude dans plufieurs opérations, par le défaut
de pourfuites publiques contre l u i , par des promefles
^êm e des indications de rembourfement total.
Et combien d’autres ont été abufés auffi cruellement
que lui : le fieur Soldons a fait des avances pour 81,000 liv.,
le fieur Gourct eft créancier de 38,000 liv ., la femme le
S*eur répète 56,000 l i v . , & c . Enfin, car tout eft relatif,beaucoup d’autres perfonnes, en prêtant au fieur Cardon’
�•14
des fommes moindres , ne lui ont-elles pas confié la plus
grande partie de leur fortune? Son pailif ne s’éleve-c-il
pas à près de 500,000 livres? Que de créances feroient
donc fufpe&es, ii pour cela il fuffifoit qu’elles fuflent
confid érable s !
Après la fa illite , le iieur Montgolfier s’ efl: comporté
en créancier qui, pour l’intérêt général, veut éclairer la
conduite de fon débiteur & conférvcr le gage commun;
il a provoqué contre Cardon une procédure févere, 6c
mis Tes biens fous la garde de la juftice.
C e débiteur a-t-il expofé l’écat de Tes affaires & de
mandé à traiter avec fes créanciers? Le fieur Montgol
fier a été le premier à exiger qu’il fît un abandon géné
ral de fes biens; il s’eft même employé perfonnellemenc
pour l’engager à cette abnégation de toute propriété.
Le traité du 13 novembre a-t-il été conclu , &. le fieur
Montgolfier nommé fyndic? Il a conilamment fervi la
confiance de l’union ; il s’eft efforcé de prévenir le dépériflement des effets de C ard on , Sc il en a fuivi la difeuffîon avec le moins de frais poilible.
En un m ot, toutes les démarches du fieur Montgol*
jier ont eu d’abord pour but l’avantage de fon débiteur, ÔÇ
^depuis fa faillite, l’intérêt commun des créanciers.
Ec de fon côté qu’A fait le fieur M onroy ?
Avant la faillite , il a faic quelques négociations avec
C a rd o n , il lui a fait quelques avances, mais il l’a ufuré»
Sc il a ainfi ^contribué au dérangement de fes affaires (0*
( 1 ) « P a r l’ événement de toutes nos négociations, il s’eit trouvé mon créait-
p
cier ; je lui ai fait des billets ; a l’époque de leur échéance je les ai re*ouvel-t;S
�Après la fa illit e , il a, fans intérêt légitime, puifque le
fieur Cardon avoir abandonné tous Tes biens , rendu
plainte contre lui; il l’a fait emprifonner ; &. abuiant ainil'
<î;s formes criminelles, il lui a ôté les moyens de conti
nuer fon commerce &: d'augmenter le gage de fes créan*
ciers. Sacrifiant à fa cupidité l ’intérêt de tous, il a traverfé
les arrangemens pris par la pluralité unie ; il s’eft oppofé
à une difeuffion amiable, pour y fubftituer une difcüilîon
judiciaire & ruineufe; il a retardé la vente des vins 8c ils:
ont dépéri; il a empêché la continuation du bâtiment du!
Gros-Caillou ,• &. ce bâtiment s'eft détérioré : la plupart
des matériaux réfervés pour l’achcvcr font même deve
nus hors de fcrvice.
En un m o t, le fieur Monroy , par toutes fes démai'-'
ches, n’a pas feulement travaillé à la ruine du fieur Car
don, niais même à la dilapidation complccte du gage des
créanciers (i).
» faute d’argent, 6c M onroy a toujours exigé que j’y compriffe les intérêts. Ces
» billets ont été renouvellés fi fo u v e n t,& il y a eu à là fin tant d’intérêts cum ulés,
» que la totalité de ma dette s’eft trouvée formerune forr.me de 1 5,000 livres. (Mém.
» de C ardon , p. 1 7 ) ».
( 1 ) L i fieur L argiliere, un des témoins du fieur M o n ro y , a obfervé, lors de
ion récolem ent, que « M o n ro y étoit un malheureux qui étoit caufe que lui t é - ’
» moin ctoit dans la m ifere, & que fans toutes fes chicanes infâmes, les créan” ciers de Cardon ne feroient p is dans la détrefie ; que fi Cardon n’eût pas été
” chaffé de fa m aifon, il l’auroit payé ;
6c
que M onroy lui a dit que fon plus ‘
}> grand plaifir étoit de confommer tout en frais ».
L e fieur M onroy a dévoilé à cet égard fes intentions défaftreufei; il en a fait
Part à plufieuri perfonnes , & c’eft d’après cela que les créanciers , unis dans une
délibération du 23 ju in , ont d éclaré« qu’ils font unanimement convaincus que le
^*eilr M on roy ne peut avoir d'autre but que de multiplier les frais , que l’union
"
ne peut qu’applaudir aux efforts du fieur M ontgolfier, pour empêcher qu’il ne
ct féuflifle dans fon projet ; qu’elle l’invite a ies continuer, & c , » .
�lé
Qu4on prononce maintenant lequel du fieur Montgoifier ou du fieur Monroy devroit aujourd'hui jouer le rôle
d ‘accufateur. Qu’on dife pour lequel des deux c’ cft un de
voir de fe jufiijîer.
M a is, quelque droit de s’en plaindre qu’ait le fieur
M ontgoliîcr, telle eft la fatalité de fa fituation, qu'il faut
qu’il repoufife une accufation , que c ’eft à lui à fe juftifier.
Il s’agit donc de remplir cette tâche, facile il eft vrai, mais
douloureufe à celui qui, defcendu.dans faconfcience pour
vifiter auftèrement fes a v io n s , n’en trouve aucune qui ,
bien loin d’émouvoir fon repentir, ne lui faiTc goûter la
douce fatisfa&ion d’avoir tout fait pour le bien.
L ’accufation intentée contre lui pofe fur deux bafes ca
pitales: l’exagération de fa créance, 6c la collufion de fes
pourfuites. Sa juftification fe divife donc naturellement en
deux branches: il a à. établir la fincérité de fa créance
Ja légitimité de fes pourfuites.
§.
I.
L a créance du fieur Montgolfier ejlfncere.
Le fieur Montgolfier cft porteur de treize billets du
fieur C ard on , qui forment en total la fomme de 80,289 !•»
il établit donc fa créance par des titre ; & très-certainefnent des titres méritent croyance, fur-tout quand ils font
jnattaqués 6c inattaquables par l’infcription en faux.
Rem arquons même que la nature de ceux du fieur M ont'
golficr cd une preuve 'de leur fincérité. S’il eût été capable
de
�*7
de fimuler des créances ; éft-ce qù’il fe préfenteroit avec
de fimplcs billets, fans dare certaine, fans hypothèque?
■Eft-ce que fa créance auroit été expofée à fe confondre
dans la maffe des chirographaires? cft-cc qu’ une partie
confidérable fe rrouveroit en ce moment réduite à une
condition fi défavantageufe?* Non , certainement; la
fraude a (Turc fes pièces & épuife les précautions, pour ne
pas manquer la proie qu ’elle convoite.
Ce n'eft pas au refte à l’exiftcnce de fes titres que le
fieur Montgolfier borne les preuves de la réalité de fa
créance. Il a mis fes regiftres fous les yeux du magiftrac
inftru&eur, & ce magiftrat j-ufte'& éclairé (i) , y a re
connu tous les caradleres de la fincérité ; il a trouvé le rap
port le plus exa£t entre les énonciations des différentes
portions de la créance & les titres divers de cette créance.
» Vérification faite, eft-il dit à la fin du procès-verbal
» de compulfoire, du regiftre couveic en pa-chemin
” v e rt, avons remarqué que les dates, numéros & fommes
M y portées cadrent parfaitement avec les dates, numéros
6c fommes portées au regiftre, couvert en peau verte;
>3 8c pour d ’autant plus nous affurer, de la part du fieur
» Montgolfier, la fincérité & la légitimité de fes créances,
,s il nous a repréfenté , pour notre inftrucbion feulement,
’5 les effets dont il fe trouve porteur, au bas dcfquels
*» nous avons remarqué des numéros conformes à ceux
,J énoncés esdits regiftres, ainfi que les fommes ».
Le f i e u r Montgolfier invoque d’ailleurs, fur la fincérité
de fa créance, la rcconnoiffance formelle qu’en fait la
( l ) M . Judde,
�i8
pluralité unie des créanciers 3 6c les aveux ou témoignages
multipliés qu’en contient la procédure de Monroy.
Peut-on d’après cela former une preuve plus complette de la iïncérité d’une créance , &. le fieur Monroy *
qui ofe y réfifte* , ne feroit-il pas bien embarraffé fi on
en exigeoit une pareille <îe la fincérité de la fienne £
Ne le feroit-il pas même fi on lui demandoic quelle
preuve de plus
dans l’ordre naturel des choies , le
lîcur Montgolfier pourroit apporter ?
C e n’eft pourtant pas encore allez poi r le fieur Mont
golfier -, il veut à des preuves pofuivea réunir des preuvesen quelque maniere négatives ; il veut examiner les infor
mations du fieur Monroy , & rcpouilèr d’ailleurs les impu
tations particulières de cet accufateurSix témoins ont été confrontés au fieur MontgolfierCe font ainfi , fur plus de 60 , les feuls qui aient été'
préfumés faire charge contre lui. Ces témoins font l'esficurs Hollicr Ifaac C a lm e r , Charpentier, Pierre &C
Nicolas M ercier, &. la dcmoifelle Dcgouy..
Nous allons rapporter dans toute leur force les dépofuions de ces témoins ; mais auparavant il nous paroîc
cflentiel de donner une idée de l'information en général t
èc de dévoiler les manœuvres qui l'ont produite : il
n’en faudra fans doute pas davantage pour la juftement
apprécierOn ienc combien il doit être difficile de prouver,,
foit la partialité d’un commiiTaire-informateur , foit la
corruption des témoins, & c’cfl: pour cela qu’on voit il •
peu d’infurre&ions contre les procédures dont les abus
�*9
font couverts par une régularité extérieure ; mais il fort
quelquefois du fein même de cette procédure des traits
de lumière , q u i , en tant qu’ils éclairent les juges fur
la c o n f i a n c e qu’ils doivent accorder à certaines déposi
tions , font propres à tenir lieu d’une procédure vrai
ment épuratoire ; or le fieur JVlontgolfier peut fc flatter
de réunir des moyens généraux de fufpicion contre la
plupart des acteurs qui ont figure dans les informations
du iieur Monroy.
On lit dans la dépoiition du troifieme témoin de la
fécondé information , que M e. Petit Dufrcnoy 0 le
Jieur Montgolfier fe font permis de lui tenir des propos,
dont il s’eit tenu offenfé , relativement à un billet àt
ordre pour lequel il cil créancier de Cardon.
Et ce témoin a déclaré , à la confrontation, ne pas
connoîcre le Jieur Montgolfier , qui le voyoic au/fi pour
la prçmiere fois.
-Ain il de deux chofes l’ une ; ou le témoin , à la follicitation de Monroy , a fauflement & fous des rapports
nuifibles compris le fieur Montgolfier dans fa dépoiition;
ou le commifTaire-réda&eur s’eit lui même rendu cou
pable de cette prévarication.
Le fieur Nicolas Mercier a dit auiîi à la confronta
tio n , « que le commiflaire lui a demandé comme un
■» confeiTeur ce qu’il favoit fur chaque fait, qu’il lui
a répondu ce qu’il favo it, que le commiflaire lui
demandoit chaque fait féparément, ave^-vous vu telle
& telle chofe , que lui témoin répondoit «.
Eil -ce là , nous le demandons, la conduite que doit
tenir un commiflaire ? D o it - il provoquer la dépoiition
C ij
�20
d’ un témoin î D o i t - i l , par des queftions, dirigef cette
dépofition /ur certains faits &c certaines pcrfonncs ( i ) ?
Ec lorfqu’il a tenu une pareille conduite, n’efl- il pas.
au moins fufpcct de partialité?. N e doit-on pas ie méfier
de ia réda&ion, fur-tout Iorfqu’on voit le même témoin %
à qui on a fait dire que le fieur Montgolfier Sc le fieur
Dufrcnoy mangeoient fouvent enfemble chez le fieur
Cardon , Iorfqu’on le v o i t , diions- nous, déclarer, à laconfrontation ,. qu’il ne les a jamais vus enfemble?
Enfin le fieur Charpentier interpellé........... a dit : « qu’:t
»s ne fe rappelle pas avoir été chez le commiflaire ,
» qu’on lui a apporté ia dépofition chez lui pour la'
»1 figner, qu’il l’a fignéc & s’en eft convaincu depuis
m qu’il a été confronté aux autres accufés,.ne fe rap>3 pelle pas qui. la lui a apportée, croit fe rappcller que
» c’étoit vers les une heure, que M onroy ne l\a point
» prié de depofer en fa faveur, puis a dit que oui y
« puis non ».
Que s’ils le peuvent, le commiffaire & le fieur
Monroy effacent les terribles indu£tions qu’il fauc
tirer de pareilles déclarations. Que s’ils le peuvent,
ils détournent la fufpicion qui doit rejaillir des aveux
de ces témoins fimples & timorés, fur les dépofitions
de ceux qui, plus fidellcs à leurs criminels engagemens,
ou naoins fcrupuleux., ont perfiilé d a ns leurs impofturcs.
( i ) Les recueils font remplis d’arrêts qui ont défendu aux juges d'interroger
fcs témoins. Il y en a même qui les ont punis pour l’avoir fait, O n diftingue
celui du 43 j u>lie* 1618 dans 1 affaire de la Pivardiere , & ceux des 16 janvier
1 6 1 7 , 15 mars 1723 & X mars 1728 , qui font rapportés dans Brillon Denifaro,.
J» Répertoire, &.c.
�it
Mais le fieur Montgolfier peut encore fe pniTer de
ces moyens généraux de réprobation ; il ne doit fûrement pas craindre d’aborder 5c de combattre les dépo
lirions qu’on lui oppofe.
\
L e iîeur Hollier a dépofé que la femme Cardon lùi
avait montré une lettre de fon m ari, par laquelle il
l ’engageoit à fe rendre caution pour les ¿6,000 livres
q u il devoit au fieur Montgolfier.
A la confrontation , il a obfervé « qu’il ne fait que
» de ouï-dire, que le fieur Montgolfier a reçu des fom« mes à compte de fes créances , & qu’il n’en a pas de
« connoiflancc perfonnelle ; & de plus, que d’après la
» lettre que la dame Cardon lui a montrée , il pouvait
» croire qu’il ne lui étoit du que 25,000 livres, mais» qu’il n’a jamais prétendu dire ni ne prétend pas cn« corc que fa créance ne foit pas réelle de ne s’éleve'
» point à 81,000 livres
La dépoiition du fieur Hollier fe réduit donc d’abord à
de fimples oui-dire , d’ailleurs vagues, & auxquels il attache
lui-même fi peu de confiftance , q u il n'a jamais prétendu ni
ne pretend pas encore en ce moment, que la créance du Jielir
Montgolfier ne foit pas réelle & ne s’éleve pas a 8i,oüo
livres. Tout le monde f a i t , au refis , que les dépofitions
fondées fur des ouï dire ne méritent aucuttc confidérarion : Teftes ex auditu alieno fidem non faciunt ( 1 ).
Et tout le monde faura bientôt ce qui a pu donner lieu
a des bruits d’tf compte reçu par le fieur Montgolfier.C* ) E n un m u ij de ouï-dire , il n 'y a point de phin. L oilîl. reg. de dr. coiit«
�il ne refte donc de la dépofition du ficur Hollicr
..que ce qui efl: relatif à la prétendue lettre du ficur
C a rd o n ; mais à cet égard il eft témoin unique, ôc par
conféquent il ne fait pas preuve, fuivant cetce maxime ?
Teftis unus , teflis nuUus ( I ). Mais le fieur Montgolficr
veut bien fuppofer Pexiilence de la lettre, &: en expli
quant ce qui a pu y donner lieu , mettre au grand jour
tous les détails de fa conduite.
II avoir, on fe le rappelle, obtenu le 13 o£tobre fen.jtencc pour 54,089 livres, montant de huit billets échus ,
& il écoit encore porteur de cinq billets non échus ,
formant z6,zoo livres. Le fieur C ard on , comme on fc
le rappelle encore, n’ayant pu obtenir un arret de fur{eance, s’étoit réfugié à Saint-Cloud , & fon abfence
avoit ouvert fa faillite. Le ficur Montgolfier fe trouvoic
donc, à l’époque de cette abfence, avec un titre exé
cutoire pour 54,089 livres, mais avec de fimples billets
pour 26,200 livres. Cette dernière fomme étoit donc
deilinéc à être appellée très-défavantagçufcment dans
l ’ordre des payemens : il voulut acquérir pour elle une
fureté particulière, & il crut que l’époufc du fieur Car
don confentiroit volontiers à fc rendre caution ; mais
elle s’y refufa , & de-là la lettre de ion mari pour
l’engager à fc rendre caution pour les î.6,000 livres
qu'il devoit, au fieur Montgolfier.
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( 1 ) G .tte regle fi f r g e , établie par l.’ s loix de M oyfe & confirmée par lcs
■ P-omains , a été adoptée par tous les tribunaux de l’univers. Non flabit teflis
unus contra aliquemquidquid iliudpeccati & ficinoris fucrit. Douter,
cap. 19. v. ¡ 1Manifeflc fancitnus ut unhis omnímodo teflis rcfponfîo non audiatur ^ ctiàinfi
p rx d a rx curia honore filg e a t. L . 9. §. 1. Cod, de teftib.
I
�Certainement il n’y a dans tout cela rien de répré“
ienliblc. Le ficur Montgolfier pouvoir chercher à affii-rer fli créance par tous les moyens ne portant point
atteinte aux droits acquis à la maiTe des créanciers : or
les créanciers n’avoient aucun droit fur la fortune par
ticulière &C libre de la dame Cardon ; le ficur Mont
golfier pouvoir donc prétendre à fon cautionnement*
Sa dem ande, au refte , n’a pas eu d'eiFct , & il n’y a
pas perfevéré dès qu’il a été queftion de comprendre
la dame Cardon dans l’abandon général fait par fon
mari : il s'eft alors cmpreifé de confondre fon intérêt
particulier dans l’intérêt commun.Mais paiTons aux indu£lions qu’il faut tirer de cet
incident.
Le fait énoncé dans la prétendue lettre du fieur Car-don cil clairement expliqué; il effc évident que lorfque
le iîeur Cardon a parlé des 16,000 livres qii"d deveit ait
fieur Montgolfier y il a entendu les 16,200 qu’il lui devoir,
outre les 54,089 portées par la fentcnce du 13 octobre,
il ne pouvoit en ciFet , & indépendamment de la connoiiTance intime qu’il avoit de la créance totale, igno-rcr la portion qui faifoic l’objet de cette fcntcncc ; car
elle lui avoit été fignifiée. Pourquoi d’ailleurs n’a-t-il
Parlé que de i 6 yooo livres? parce que le (leur M ont
golfier ayant titre-exécutoire pour 54,089 l i v r e s n ’avoic
pas befoin & fur-tout ne demandoit pas de fûreté particulicre pour cette fom m e: eh un m o t , parce que cette
fomnic étoit entièrement étrangère
relaO à la négociation
O
tive au cautionnement de la dame Cardon.
Sien loin donc qu’on puifle conclure de la préten
�'14
due lettre du fieur Cardon qu’il ne devoit que ¿6,ooo
livres au iîeur Montgolfier , il faut la regarder com qc
une reconnoiflancc formelle
involontaire qu’il lui
dcvoic 80,289 livres. Car au moment ou a été écrite
cette lettre le lîcur Cardon devoit déjà 54,089 livres.
Cela écoic conftaté par la fentence du 13 octobre ; de
forte qu’en convenant pofierieurement à cette fentence
( 1 ) qu’il devoit 2.6,000 livres, il a articulé bien pofitivement qu’outre 54,0.89 livres il en devoit z6,ooo;
ce qui forme la créanc.ç totale du fieur Montgolfier.
«
»
»
*
»5
«
«
»
m
»
«
>î
»
«
Le fieur Ifaac Calmer a dépofé.......... : « qu’il étoit
allé trouver au Châtelet le iieur Cardon pour l’engager à arranger l’affaire pour laquelle il étoic arrêté,
en lui expofant le danger qu’il courroit fi l’affaire
du fieur Monroy continuoit à fe pourfuivre, d'autant
plus que le fieur Cardon n’ ignoroit pas que lui dépofant fa voit la connivence qui regne entre ledit fieur
Cardon
le fieur Montgolfier, pour une créance de
80,000 livres dont ledit fieur Montgolfier paroîc
créancier ; tandis que la femme dudit Cardon avoic
dit à tous ceux qui ayoient voulu l’entendre que
le fieur Montgolfier n’étoic créancier que de 25,000
livres , & que même le fils du fieur Cardon avoit
avoué ce fait à lui dépofanc , que ledit fieur
Cardon a répondu au dépofanc qu’il ç’en moquoic
( 1 ) La lettre a ¿té écriie ils Sjint-Ç lou d , «Sc le fieur Cardon ne s’y çft
¡rpfngié q u i le 29 oftobre,
» puifqu’U
�a5
M puifqu’il étoic arrêté, que l’éclat étoit fait, qu’on ne
l’avoit arrêté que comme un voleur en plein jo u r ,
« que fcs créanciers n’avoient qu’à le faire pendre &
» rôtir s'ils vouloienc, qu’ils en étoient entièrement
» les maîtres, qu’il étoit las de vivre; qu’alors le dépo-» fant obfcrva audit Cardon que quand on étoit pere
>3 de famille on devoit fe conduire autrement..............
» qu’il étoit inconcevable que ne pouvant prouver une
»3 perte de plus de 6o}ooo livres fur les effets qu’il a
« négociés , il préfente aujourd'hui une ma fie de 5 à
” 600,000 livres ; ce qui prouve que plufieurs des créan« ciers qu’il a portés dans fon état font des créanciers
*s fimulés ôc frauduleux ; que ledit Cardon fur ces ré» flexions répondit au déposant que les créanciers q u il
» avoit annoncés dans fon état p a ÿ if étoient fnceres &
» véritables , ôc finiilanc toujours par dire que le fieur
« Monrgolfier étoic fon ami intim e, ainiî que la veuve
» Girard, &. qu'il s’arrangeroie avec eux dans le cas où
« fcs créanciers ne voudroient pas les rcconnoîtrc ».
Le ficur Calmer interpellé à la confrontation de dé
clarer comment il favoit qu’ il régnoit une connivence
entre le fieur Montgolficr Sc le fieur Cardon pour une
créance de 80,000 livres a d it , par Cardon ô fa femme
ù qu'il nO. pas de connoifjance perfonnelle de cette conni
vence.
La dépofition du fieur Calmer repofe, comme on le
v o it, à l’égard du fieur M ontgolfier, fur des propos
qu’il attribue à Cardon j & le premier point à txamincr cil fans contredit celui de favoir s’ il cil prouvé que
ces propos aient réellement été tenus. Or très-certaincD
�inent il n’en exîfte aucune preuve : le fieur Calmer eÆ
à cet égard témoin unique , & de plus fa dépofition eit
formellement contredite par Cardon,
Mais fuppofons l’exiftence ôc la preuve de ces propos,
& voyons , dans le fait ôc dans le d ro it, de quel poids,
ils pourroient être contre le fieur Montgolfier.
Que Cardon air dit quyon lravoit arrêté comme un vo~
leur, que fes créanciers pvuvoient le faire pendre & rôtir p
q u il ¿toit las de■ vivre , ôc. ce font des extravagances ,,
©u du moins des propos fans conféquence, & produits
par le défefpoir de fa c a p t i v i t é . Qu’il ait die enfuite que le
fieur M onigolfitr étoit fo n ami intime , & qu il s'arrange
rait avec lui f i les créanciers ne vouloient pas le reconnoitre ;;
tout cela efir vague & in fi g ni fiant; & fi l’on prétendoic
en induire quelque foupçon , il ne faudroit que s’adrefieEau fieur Cardon , ou plutôt au fieur Calmer lui-m êm e*
pour le difïïper.. Que lui a effectivement répondu le fieur
Cardon fur le reproche qu’il lui faifoit de fimulation de
créances ? Que les créanciers qu il avoit annoncés dans fort’
état p a jfif étoient finceres ô véritables. Cela eft fansdoutc afl'ez poiitif &. aflez clair pour lever route équi
voque,. pour fervir d’interprétation sûre à tout ce qui
pourroit en avoir befoin.
Enfin , dans le droit & en fuppofant que Cardon eûc
avoué au fieur Calmer une c o n n i v e n c e , il n’en pourroit
encore rien réfultcr c o n t r e le fieur Montgolfier.
En général, une dépofition fondée fur un oui-dire ne
mérite aucune confederation ; mais lorfque le oui-dire
tombe fur une partie contre laquelle le témoin dépofe,.
il. en réfulte une confeffion extrajudiciaire.. Une feule
�£7
chofe feroit donc confiante dans notre hypothèfe: le
fieur Cardon auroit cxtrajudiciairement confeiTé une
connivence entre le fieur Montgolfier 8c lui.
O r , il efl: de principe, en matiere criminelle, qu’ uher
confeiîîon extrajudiciaire , même lorfqu'élle efl. réitérée
dans les interrogatoires, ne fuffic pas pouraiTeoir une con
damnation contre celui qui l’a faite ; 8c qu’à plus forte raifon elle ne fait pas preuve contre les complices par lui
déclarés (1).
Mais à quoi bon une difcufîion fi férieufe pour une dépoficion du fieur Calmer? Efl>ce que des reproches cîef
tous les genres ne s'élèvent pas contre lui ?
Jouant le rôle de médiateur pour en abufer, il s’adreiTe au fieur Cardon & lui d i t , qu'il fa it la connivence
qui regne entre lui & le fieur M ontgolfier; 8c à la con
frontation il déclare n’avoir point de connoiflance /><?/'formelle de cette connivence.
11 dépofe que le fils Cardon lui a avoué que le fieur
Montgolfier n'étoit créancier que de 25000 livres; Sc à
la confrontation il n’efl: plus queftion que de Cardon
& de fa femme.
N e font-ce pas là des variations choquantes ? n'eft-ce
pas le cas d’appliquer la loi : Tefies qui adversiis fidem
fuam tejlationis vacillant audiendi non furtt , 1. 2 , ff. de
teftib.
E t dans la bouche de qui encore fe trouvent ces vanations? Dans celle du fieur I s a a c C a l m e r . ............ du fieur
0 ) On peut vo ir entr’ailtre* crim lualiiles, L a c o tn b :, p a rt., I l l ch. 1 1 , ° - * * 4 *
D 'i
�i8
Calmer reproché, nous le difons à regret, pour avoir
eiTtiyé une condamnation au blâme.
Eft-ce là un témoin fur lequel l’œil de la jufticc puifle
fe repofer avec quelque abandon ? Eft-ce la le témoin
de Jaloi : teflis intégra, frontis & inculpâtes v 'uce ?
Remarquons même que ‘pour qu’ un témoin foit reprochable par défaut de bonne renommée, il n’eft pas néceflaire qu’il ait été flétri par un jugement exprès. Il eft
dans l’ordre focial certaines taches qui heureufement
nJont pas befoin du fceau de la juftice, pour rendre
plus ou moins indignes de foi ceux à qui une conduite
répréhcnfiblc les a imprimées ( i ) Enfin, Sc cette derniere réflexion d ç ;t écarter fans re
tour la dépofition entiere du fieiu Calmer > il paroît
que le dérangement des affaires de Cardon a eu pour
eaufe principale , fes négociations avec les fleurs D oligny* Mardochée Dupin , du Pougetj Henris & Ifaac
Calmer l u i - m ê m e , qui l’ont fait dupe de plus de
iooooo livres ( i) . Or il efl: confiant que la plupart de ces
agioteurs, Sc en particulier le fleur C alm er, font Intime
ment liés avec le fleur Monroy ; 6c il y a tout lieu de croire,
qu’intérefles à mettre le défordre dans les affaires de Car
don, 8c même à le perdre pour échapper à fes juftes pourfuites, ils ont chargé le fleur Monroÿ de cette entreprife , en fe réfervant de l’aider de leur témoignage. On
peut donc confldérer le fleur Calm er dépofant contre
(1)
Tejlium fides diligenter cxaminanda ejl. ldeàque in ptrfonâ eorum txplo-
ztnda trunt in primis..... & an honejlœ & inculpatce
reprehcnjrbilis, 1. 3 , ff. de T eftib.
an verà notatus quis
(2) Voy. le pitmicr mcm. de Cardon, pag. 7 & fuiv,
�*9
C ardon, comme témoin intéreiTé & mcnle comme té*,
moin dans fa propre caiife; cc qui fuffic très-certaincmenc
pour anéantir fa dépofitiôn: Omnibus in re propria dicendi
tcjiimonii facultatcm jura fub moveruni , I. 1 0 , ff. de Teftib.
A l’égard des quatre autres témoins confrontés au fieur
Montgolfier, il feroit fuperflu de nous occuper de leurs
dépofitions. T outes, hors celle du fieur Pierre M ercier
ont été, par le choc de la confrontation, réduites à ne
faire aucune charge contre le fieur Montgolfier, & cellelà n’ayant aucun rapport avec fa créance, mais feule
ment aux procédures faites à fa requête 3 il ne peut en
être queftion que fous le paragraphe relatif à ces pro
cédures.
Nous pouvons donc pafTer de fuite aux imputations
particulières du fieur M o n ro y , & en entreprendre la dif-
cuifion avec d’autant plus d’aiTurance , que manquant
de toute efpece de fondement dans les informations,
eHes ne peuvent être qu’hafardées & calomnieufes.
On fc rappelle qu’au mois d’août 178 6 , le fieur C ar
don remit au fieur Montgolfier , a valoir fu r fa créance 3
Quatre lettres-de-change, trois de 3000 livres chacune ÿ
fur un fieur Hapillon , & une de 4000 livres fur le
comte d'Harcourt. Hé bien, le fieur Monroy argumente
cette opération ; il prétend que la créance du fieur
■Montgolficr a été réduite de 1300 0 livres par la remife
ces effets, & que* foit le fieur Montgolfier en n’en
ant pas compte ; foil le fieur Cardon en ne les dé-
�30
iduifant pas dans fon bilan , fe font rendus coupables
r'- Vk'l! V
¿ ’exagération de créance.
; »
Il fuffit, pour effacer cette inculpation, de rendre
» « »’•t
*
¿compte des circonftances particulières de l'opération
qui y donne lieu.
Les lettres fur le fieur Hapillon avoient été remifes
¡au iieur Montgoliîer, fous l’endoffement en blanc du
fieur C ard on , & l’échéance étant arrivée , il les remir
lui-même au fieur Chatain , un de fes commis, pour
qu’ il pn allât recevoir le payement ; mais le ficur Ha
pillon les laiiTa protefter & il fut aifigné; alors il fouiint d’une parc, qu’il n’avoit pas reçu la valeur, 8c de
l’autre, que le fieur Chatain n’étoit que prête-nom, Sur
ces entrefaites arriva le dérangement des affaires de
Cardon : plufîeurs créanciers, comme nous l’avons dit,
s’aiïemblerenr le 23 o&obrc ; & ce qu’il eft ciienriel de
remarquer , le fieur Montgolfier les inftruifît, que créan
cier de 80,189 livres, il étoit porteur de 13000 livres
d'effets à valoir fur fa créance; il les prévint qu'il en
feroit dédu&ion s'ils étoient acquittés, mais que le
payement en étoit très-douteux, foit par le peu de folvabilieé des débiteurs, foit à caufe des conteftations qui
s’étoient déjà élevées fur ce payement. Le fieur Pain
porteur d’une lettre-de-change auflî de 3000 livres, fur
le fieur H apillon, en fit également fa déclaration. Le
ficur M onroy &. le fieur Hollier étoient à l’affemblée.
Quoi qu’il en fo it , 1.x prétention du fieur Hapillon
donna lieu à plufîeurs procédures, dont le réfultat fut
une fentcnce rendue le 30 offcobre, par laquelle le
/leur Chatain fut déclaré prête-nom du fieur M ontgol*
�fier,, en conféqucnce les pourfuites faites à fit requête’
nulles , & il fut ordonné que les lettres-de-change refïeroient dépofées au greffe.
L e fieur Montgolfier ou le fieur Châtain auroient pu
fans doute fe plaindre de TmjufHce de cette fentenee ^
& fi les chofes fuiTent reilées dans leur état naturel y
ils en auroient certainement demandé la reformation
mais peu de temps après le fieur Hapillon a fait failli ce
les lettres-de-change font devenues fans valeur , & parconféquent toutes pourfuites ultérieures,, inutiles.
Alors les- recours ont eu lieu , & le fieur Montgolficr,
dénonçant au fieur Cardon la fentenee du 30 o£lobre,, Im a fait ( de droit feulement, à caufe de leur dépôt
au greffe) la remife des trois lettres-de-change fur H a
pillon.
Q uanta celle fur le comte d’ FÎarcourc, elle a été pro
f i l é e le 25 o& obre; le fieur Montgolfier a-obtenu fentcncc le 6 novembre, ô£ le 10 on lui a fait fignifier un
arrêt de furfé'ancc.
Il cil donc inconteflable que le fieur Montgolfier
n’a pas dû tenir compte des effets dont il s’agit ; il ne
les avoit reçus qu’à valoir , & ils n’ont pas valu ; partant
il c il, malgré la remife de ces effets, reilé créancier
80,189 livres; & il fuffît pour cela qu’il les ait rap
portés non-acquittés , & qu’il ait juftifié de fes diligencesPour en obtenir le payement ; ce qu’il a1 fait.
A l’égard du fieur Cardon & de la1 mention qu’il a1
foite du fieur Montgolfier fur fon bilan , comme créanClct de 80000 liv,, malgré la remife de ces effets, elle:
cft'indifférente au fieur Montgolficr car le fieur Mon1*
�to y n’a fans doute pas l’intention de le rendre refponiàble de l’exa&itude de ce bilan.
A quelle époque, au furplus, le fieur Cardon a-t-il
donné ion bilan ? Le 13 novembre. Quelle valeur avoient
alors les lettres de-change pour le fieur Montgolfier ?
A u cu n e; car le 30 octobre écoit intervenu, en faveur
d’Hapillon , la fentcnce des confuls , & le 10 novem
bre le comtc d’Harcourt avoir fait fignifier fa furféance.
Le fieur Montgolfier étoit donc alors créancier, comme
auparavant, de 80,289 livres; le fieur Cardon a donc
dû le comprendre dans fon bilan pour cette créance to
tale ; 6c s’il ne l’avoit pas fait , il y a grande apparence
qu’aujourd’hui le fieur Monroy l’accufcroit, à cet égard,
de fouftra&ion de créance.
Ici devroic fans doute fc terminer toute difc.uilion
relativement à la négociation des lettres-de-change donc
il s’agit. T out foupçon d'exagération de créance à cc
iujct cil difiipé, &. le fieur Monroy n'a droit de porter
fes recherches que fur cc point ; mais ce n’en cil pas
affez pour le fatisfaire; ayant befoin de coupables, il
voit des délits dans les choies les plus innocentes; ayant
prémédité des outrages , il en a impudemment créé les
occafions. C ’eil la marche du calomniateur : ea efi
calumniatoris natura , omnia in crimen vocare , omnia ad
injuriarn vertere. Démofth.
11 a donc prétendu que les lettres-de-change fur Hapillon avoient été excroquées par Cardon , au fieur M ardochée Dupin ; que le fieur Montgolfier les avoit rece
lées ; que pour fc les approprier, il en avoit paffé l’ordre
fiour Chatain &; qu’il n’en avait pas tenu rpgiftrc »
�33
d a enfin avancé que pour s’en aiïiirer le payement, il
»voit offert de fe parjurer , c’eft-à-dire d'affirmer que
le fieur Chatain nJétoit pas fon prête-nom.
C e fonc-Ià autant d’atroces impoilurcs. ni._
i ® . Les Iettres-de-changc n’ont pas été escroquées à
D u p in , ôc il s en faut b ien , car elles ont tenu lieu de
reftitution d’effets excroques par ce juif. Cela eft prouvé
par la procédure.
Rien au refte de plus indifférent au fieur Monto-olfier; car il eft encore confiant qu’ il n’à eu aucune parc
à la tranfmilîion de ces effets dans les mains de Car
don, qu’il a même parfaitement ignoré la maniéré dont
elle s’étoit faite. E h , comment préfumer le contraire ?
Dans quelles circonftances ces lettres ont elles été né
gociées au fieur Montgolfier? On ne Ta pas oublié; lorfqu’ unc partie confuiérable de fa créance étant échue, il
attendoit journellement les rembourfem?ns promis par
Cardon ; lorfquc nouvellement affoupi fur la folvabilicé
de ce débiteur, il étoit important de prolonger fa féCurité au moins par quelques à compte. Ec l’on croiroic
que dans de pareilles conjonctures, Cardon ne s’eil pas
appliqué à cacher au fieur Montgolfier roue ce qui pourroit lui faire fufpe&er la légitimité des effets qu’il lui
ftégocioit! Quelle abfurdicé!
x°. Le fieur Montgolfier porteur des lettrcs-de-changc ,
fous l’endoflement en blanc de Cardon, 6c voulant s’en
procurer le payement, les remit, à l’échéance, au fieur
Chatain , l’un de fes commis, pour les préfenter au dé
biteur ; ma;s ¡1 lui falloir le pouvoir d’acquittcr, & il
^es paiTa à fon ordre. Cela fe pratique journellement dans
E
�34
Je commerce* Le fieur Montgolfier a d’ailleurs il pet»
cherché à.fe fervir par-là d’ une voie oblique & déguifée,,
qu’il a accepté fous fort nom la lettre-de-change fur le
comte d’H arcourt, provenante aulîi de la reftitution
faire par Dupin ; & enfin qu’il a paffe celles fur Hapillon fous celui d\in de Tes commis. Etoit-ce l a , en vé
rité,. la pcrfonne qu’il aurait choifie s’il eût cherché à,
détourner les recherches ?
3°. Si le ficur Montgolfier n'h pas tenu rcgiftre de
l ’opération relative aux lctrres-de-change d’Hapil!on„
c’eit qu’elle n’étoit pas de nature à demander cette for
malité. D e quoi s’agiilbic-i! ?. D ’une remife h valoir; or.
une remife de ce genre étant éventuelle , ie fait toujours'
de confiance:: elle ne devient véritable négociation que
lorfqu’clle cft réalifée par le payement. Alors elle n'eifc
plus a. valoir elle a valu, e lle e il confommée
il faut
en tenir compte ; alors donc feulement elle devient fujette à regiftre : or la remife faite au. fieur Montgolfier
n’a pas va lu ; les effets n’ont pas été p ayés, il les a.
rendu non-acquitfés, il n’a donc jamais été dans le cas
d’en faire regiftre.
4°. Et à l’égard de PofFre de fe parjurer , eft-il poffible que le lieur Montgolfier, ait befoin de defeendre àune juftification ? Sans doute,, s’il n’avoit à parler qu’à,
ceux qui le connoiffent, elle ieroit inutile : ils ont d é jà ,
de toute leur indignation, rcpouiTe une telle calomnie.
Mais il s’adircfTe à la juftice & il veut la convaincre. II>
s’adrciTe peut-être à cette partie du public qui croit tout
fans examen , auprès de laquelle la hardieffe dent lieu de'
preu ve, qui confond toujours le menfonge. impudent avec-
la vérité,
il veut la détromper*.
�Hapillon ayant foutenu que Chatain n’ étoît que prêtenom du fieur M ontgolficr, le fomma de déclarer quand
& comment il avoit acquis les effets dont il étoit
porteur.
' '
L e fieur Chatain dit que « la valeur en ^voit été
« fournie à Cardon par le iicur M ontgolfier, Sç'qüe et•» lui-ci les avoit négociées à lui demandeur fous la
•» iîgnaturc de Cardon ».
Sur c e , Hapillon demanda la mife en caufe du fieur
Montgolficr, & elle fut ordonnée.
Il s'eft donc préfenté aux Confuls , & il a déclaré
«5 que les trois lettres de-change acceptées par Hapillon,
♦» lui avoient été remifes 6c négociées par le fieur Carn don fur fa ûgnature en blanc, à valoir fur plus forte
« fomme qui lui étoit due par ledit Cardon ; que fous
« le même cndaiîcmcnr er> blan c, iJ a négocié lefdites
« lettres-de-change au fieur Chatain , qui lui en a compté
>3 la valeur, de auquel il en a donné fon aval de ga« rantie; laquelle déclaration il eft: prêt & offre d’affirmer fous la religion du ferment fincere & véritable
« fi nous l'exigeons: nous obfervant qu'il n’ a tenu au« cune cfpece de regiflre de cettc opération « .
C ’eft de cette prétendue déclaration qu’abufe fi étran
gement le fieur Monroy.
Nous difons prétendue, car elle ne peut être regardée,
fur-tout littéralement, comme étant du fait du fieur
Montgolficr. Elle ne lui a pas été lue & elle n'eit point
(ignée de lui ; il pourxoit donc la défavouer en entier ;
il pourroit du moins la rcétifier ; mais il veut bien la
fuppofer rigoureufement cxa&e.
E ij
�3^
Q u’a-t-il offert d’affirmer ? que le (leur Chatain lui
avoit compté la valeur des lettres-de change, ccft-à-dire
qu’il ¿toit dé-fintéreffé par ce porteur d 'o rd re, qu’il ne
lui demandoit & ne lui demanderoic rien: Sc non p a s ,
comme- l'avance M o n ro y , que Chatain lui en avoit
fourni la valeur comptant, c’eft-«\-dire en efpeces; cc
q u icil bien différent; or, très-certainement le fieur Mont;golficr pouvoir offrir cette affirmation , il pourroit même
ia faire encore aujourd’hui.
E t qu’ on ne penfe pas que ceci cil une interprétation
bénignement imaginée pour !c befoin d’ une juftification
difficile. Continuons.
Les Confuls ne trouvant pas fans doute leur but rem
pli par la déclaration du fieur Montgolfier, ont jugé à
propos de l'interroger de nouveau , & (après avoir auiîï
fait fubir un interrogatoire fecret au fieur Chatain ) ,
ils l ’ont fait appcller dans la- chambre du confeil , cfii'
ils l’ont interpellé de déclarer « comment 6c en quels
» objets il avoit reçu la valeur des 9000 livres, mon» tant des lettres-de-change ».
Le fieur Montgolfier avoit à faire une réponfe bien
lïmple. Il pouvoir dire qu’il avoit reçu les 9000 livres
en efpeces ayant cours , & tout auroit été terminé ; car
on ne pouvoir exiger de lui des détails plus particuliers.
C ’eft effectivement la réponfe qu’il auroit faite , fi pré
cédemment il avoit offert d’ affirmer qu’il avoit reçu la
valeur en deniers comptans ; mais ce n’étoit pas là ce que
le fieur Montgolficr avoit fait ; ce n’étoit pas- là ce qu’il
avoit offert ¿ ’affirmer ; aufïï ce n’eft pas ce qu’il a ré-
�SI
» À quoi le fieur Monrgolfîcr a répondu qu’ il a reçu
» valeur à fa fatisfa&ion ».
Voilà bien fans équivoque l’interprétation de ce qu’ il
a offert d’affirmer, qu'il avoit reçu une valeur qui le dé~
fintérejfoit ; mais pourfuivons, 6c cela devient encore plus
évident.
et: Par nous interpellé d’office de nous- déclarer cathé« goriquement en quels objets ; » il a répondu que ci cette
» valeur n’a été qu'entendue entre lui 6c le ficur Cha-*
» tain ; pourquoi il ne peut nous en donner le détail ».
(Cette déclaration eft la feule qui ait été lue au fieur
M ontgolfier, Sc qu’il ait (ignée).
Le fieur Montgolfier a t-il d o n c , ainfi que M o n ro y ,
oie le répéter jufqu’à fatiété , offert de Te parjurer? îï
peut mentir impunément, Ton intérêt le demande , Sc
pourtant il ne le fait p as: il peut dire qu’ il a reçu en
4 tJpeceTi ’&"Ton payement ne doit plus lui être dénié j mais
il n’a reçu que valeur entendue, 6c il le déclare ingénu
m e n t, quoiqu’on puifle (comme on l’a fait) fc fervir de *
€et aveu pour lui contcfter fa créance.
A h ! fans doute > on a Confpiré contre la réputation
6c le repos du ficur Montgolfier! mais devoit-on abufer
auiîi impudemment d’une procédure irrégulière ôc étran
gère à la co n ten tio n ? Devoit-on jamais ofer en faite
fortir l’offre de fe parjurer contre quelqu’un qui n’a pas
même voulu meïïtir.
Et comment au furplus concilier quelqu’idée de fraude
avec la conduite franche & ouverte du fieur Montgol
fier? N ’a-t-il pas, fitôt le dérangement des affaires de
C a rd o n , inftruit les créanciers, qu’il é.toit porteur des
�38
llettres fur Hapïllon ? Sc dès-lors n’a-t-il pas prévenu tout
foupçon fur Tes pourfuites à cet égard? N ’a-tril pas pré
venu ces lâches imputations du fieur M onroy ? q u ii avoit
deux objets en f e fervattt du nom de Chatain, pour s'ap
proprier les lettres en quefiion : le premier , de ne point pa~
roître porteur d’effets qu'il favoit ne pas appartenir légiti
mement a celui qui les lui paffoit > & le fécond , d'en rece
voir s'il pouvait le montant , fans en faire déduclion fu r
f a créance. Premier m é m ., p. 44.
Que le fieur M onroy ne fe lediffimule donc pas, l'a
charnement qui a conduit fa plume fort lui-même de
contre-poifon à la calomnie qui en cil découlée.
A quoi bon par conséquent nous occuper des reproches
de dérail auxquels s’eil livré le fieur M onroy? Ce feroic
nous aiTujettir à relever des injures prodiguées fans pu
deur; ce feroit fouiller gratuitement notre plum e; car
il n’eil aucune des impoilures de ce témémsasss^miksa*—rairc accufateur , qui ne foit démentie par la procédure
gée avec Part le plus perfide.
Croiroit-on , au demeurant, quJil cil néceflaire de ju£
tifier le fieur Montgolfier fur cette remarque du fieur
JVJonroy, que le 10 mai ï 786 , un billet de 8600 livres
¿toit échu , que Cardon ne Pavoic pas payé , 6c que ce
pendant le fieur Montgolfier lui avoit prêté 4601 livres;
que le 10 juin un autre billet de 10000 livres etoit auifi
éch u , que Cardon ne l’avoir pas non plus payé , & que
pourtant le fieur Montgolfier lui avoic encore prêté
8000 livres? Rien de plus facile que cette juilification.
Avant la faillite, quelle étoit la fituation du fieur
Montgolfier à 1égard du fieur Cardon? J 1 étoic dans k
�35>
plus parfaite fécuriré ; il avoit dans f;i folvabilité une.
pleine confiance. L ’échéance d’un billet n’étoic done'
pas un motif d’en exiger le payement, n’étoit pas même
un obftacle à prêter encore.Et la conduite du fieur M onroy lui même cft uiï
exemple bien frappant de ce que la confiance dans la1
fortune de Cardon a été capable d’ opérer, même à la1
veille de fa faillite & poiléricurement à tous les prêts
du fieur Montsrolfier.
Ses billets écheoient au mois- de
Í7
feptembre 1-786,. il n’en demande pas le payement, il*
confent à les renouveller , & ils le font effectivement
le 10 ôc 1 1 de ce mois.
M a is , dit encore le fieur M o n ro y , les billets du fieur
Montgolfier étoient fuccefïivement échus , 5c pourtant'
ii n’en demandoit pas même le renouvellement.
Y a-t-il encore là quelque chofe d’étonnanr, fi on1
fait attention au rapport de fituation dans lequel fe trouvoit le fieur Monto-olficr avec fon débiteur?
Cardon annonçait journellement des rembourfenlens,»
& le fieur Montgolfier, confiant en íes promefles, çompr-oit même iur celui de fa créance entière. Il fc gardoic’
donc de demander le renouvellement de fes billets ; il
ne vouloit pas, par une femblable novarion , faire de'
nouvelles échéances ôc éloigner ainfi fon rembourfement.
Enfin il fc gardoit biende preiTer fon payement à chaque
échéance : il n’auroit pu le faire que par une adtion ju
diciaire ; or certainement 011 conviendra qu’ un parti d e ’
cette nature doit êtte abfolument la dernicre reifource
d’un créancier de fommes confidérables, de fur-tout d’un 1
créancier dont la créance totale cft divifée- en échéances*
�40
fucceflives. Écrafer fon débiteur à la premiere échéance,
ce n’effc sûrement pas fe préparer l’acquit des autres.
L e Heur Monrgoliîer endormi par les promettes de
C ard on , s’eft: donc trouvé, au mois d'octobre 1 7 8 6 ,
créancier de 54,089 livres, montant de différons billets
. fucceifivement échus; 8c il l’avouera hardiment, fa con
fiance dans la fortune de Cardon étoit telle, qu’ il auroit
encore attendu, fi M c. Dufrenoy ne fût venu le dé
tromper.
Enfin faut-il répondre au fieur M o n r o y , quand il pré
tend qu’au mois de juillet 1 7 8 6 , le fieur Montgolfier a
travaillé à l’inventaire du fieur Cardon, de concert avec
lui ; d’ou il conclut qu’il en connoiÎloit parfaitement les
affaires.
A cette époque le fieur Montgolfier a feulement exigé
que Cardon lui fît parc de l’ctat de fes affaires, 8c Car*
don lui a communiqué feulement un tableau général,
duquel il réfultok qu’il avoit pour plus de 300000 livres
d,e bien libre 8c effeélif.
Eh , de bonne fo i, croira-t-on que fi le fieur Monto-olfier
avoir, au mois de juillet, eu connoiiTance de
£5
rér'ac au vrai des affaires de C a rd o n , il auroit attendu
plus de quatre mois pour prendre les précautions nér
oeflaires à la sûreté d’une créance de plus de 80000 liv. ?
Répétons-le donc , nous aurions pu nous difpenfer
de répondre à ces reproches du (leur M onroy, 8c notre
filcncc ne les auroic sûrement pas accrédités. Il n’en au
roit pas moins été confiant que le fieur Montgolfier eft
créancier finccrc de 80,289 livres. Etoit-il cffe&ivemcnc
£ préfumer que le fieur Monroy pue jetter quelques
foupçons
�4i
foupçons raîfonnables fur la. fincérité d’une créance
portée en des titres, juftiiîée par des livres en regie, re
connue par la pluralité des créanciers
, ce qu’ il n’auroic jamais du perdre de vue, répétée par un hpmmc
notoirement incapable de fraude.
§.
I
I.
'
Les pourfuites du Jicur Montgolfier font légitimes.
L a fincérité de la créance du fieur Montgolfier une
fois certaine: nous pourrions dire que la caufe eft finie.
Quel intérêt peut4 l avoir eu à tremper dans un complot
frauduleux? Nous défions même le fieur M onroy & les
génies malfaifans qui l’infpirent, de lui en trouver un
vraifcmblable.
Nous pourrions donc éca rte r, fans le moindre dé
tail , tous les reproches relatifs aux pourfuites du fieur
M ontgolfier : étant fans objet déterminé ils tombent
d ’ eux mêmes.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier a dans fes
pourfuites civiles uié de ménagemens pour Cardon ;
bien loin de pouvoir lui en faire un crime , le fieur
M onroy même lui en devroie de la reconnoiffance. Ces
ménagemens auroient produit l’abandon général des
biens du failli ô£ l’économie des frais de difeuffion. Eh i
que peut défirer de plus une mailc de créanciers! Heureufe la faillite dont la difeuffion ne tombe pas entre les
mains d’ un pourfuivant , qui par une activité inconsi
dérée } confume le gage commun. Ils le favent déjà, les
F
�4*
créanciers du fieur Cardon , combien il leur eut été avan
tageux que les pourfuites contre ce débiteur ne fuiFent
pas paiTées des mains du fieur Montgolfier en celles du
fieur Monroy : la dilapidation de leur gage eft déjà bien
avancée.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier n’a pas donné
des fuites aiTez meurtrieres à fa procédure criminelle^
de quel droit pourroit-on le lui reprocher? Avoit-il con
tracté,* par exemple envers le fieur M o n roy, l’engage
ment de pourfuivre Cardon comme banqueroutier frau
duleux , &c n’a-t-il pas été le maître d’abandonner fes
pourfuites à cet ég ard , fitôt qu’il les a cru mal fondées,
ou haiardeufes ?
Enfin , découvriroit-on quelques irrégularités dans les
procédures faites au nom du fieur Montgolfier, nous le
demandons, feroient-elles de fon fait? Pourroic-on les
ïui imputer 5c fur-tout en former contre lui la matière
d ’une accufaiion ? Depuis quand donc une partie peu
©u point verfée dans la fcience des formes ? une partie
qui eft purement paifive dans tout cc qui fe fait de ju
diciaire , feroit-clle criminellement refponfable de la con
duite des officiers publics auxquels elle a remis fes inté
rêts,. & dont le choix a été le plus fouvent forcé pour
clic ?
M ais voyons en particulier fur quoi le fieur M on ro y
fonde fes reproches.
U n fcul témoin, Pierre Mercier,, a dit « que le 24
» oftobre 1 7 8 6 , le fieur Cardon fils, accompagné d’un
» particulier qui s’efi: dit huiificr, font venus chez le ré» pondant, à la. Nouvelle France,, 6c lui ont fait figner
�45
* un papier, que ce particulier &: ledit iîeur C a rd a *
*> dirent au dépofant que tout cela n’étoit que des for-
y
t c
» malités de juftice, & q u e , fous huit à quinze jburs, /M>uZ*c$c^ x C f i
*> les affaires du fieur Cardon feroient terminées, 8t que
m toutes ces opérations fe faifoient de concert entre le
iieur Montgolfier 8c le Heur Cardon pere , 8c que lo:s
« de I’appofition des fcellés du 30 o & o b r e , le commif» faire a d i t , à lui dépofant, que tout ce qu’ on faifoit
»3 étoit d’accord, & convenu entre le fieur Cardon 8c
» le iïeur Montgolfier ».
Nous ne dirons pas que le fieur Mercier érant témoin
unique , fa dépofition doit être rejectée: elle efl: de trop
peu de conféquence pour qu’il foit befoin de Pattaqutfr
«n forme. Sur quoi repofc-t-elle ? fur des oui-dire. Elle
ne mérite donc aucune coniidération ; & cela efl: d’au
tant plus certain qu'on a évité de faire entendre en témoignage ceux de qui font venus ces oui-dire. On a donc
négligé le feul moyen de conftater légalement le fait ;
& pourquoi cette négligence? Sans doute pour ne pas
révéler le menfonge du témoin.
Quand au refte, il feroit vrai que le commifTaire ,
l’huiffier 6c cent autres auroient dit qu’il exiftoit un con
cert entre le fieur Montgolfier Sc le fieur C ard o n , pourroit-on foutenir qu’il y a preuve de ce concert. Eft-ce
que pour former une preuve, la juftice fe contenta ja
mais de propos vagues? elle ne reçoit dans fa balance
que des faits & des faits cowftans. Or ici y en a t-il un
feul de cette nature ? Il n’y >n a pas même d’articulé.
Quand d’ailleurs le fils Cardon auroit cherché à donner à une faille faite fur fon pere êlcs couleurs favoriF ij
j
,j
�V* ’ 1
44
Wessÿ. quand le Commiffaire auroit, des. mêmes traits:
peint l’appofition des fcellés, afin de déterminer le fieur
Mercier à être gardien eft-ce qu?il faudroit e a conclure
une colluficn entre le fieur Montgolfier & le fieur Cardon.?
Le pourroit - on ,. furtout en confidérant l’iiTue des
procédures qui ont eu lieu ?
D ’un côté elles ont produit contre le fieur Gardon
un décret d’ajournement perfonnel r or cft-on. de con
cert avec quelqu'un lorfqu’ on le fou met à une procé
dure féve re, lorfqu’on provoque & obtientj contre lui
un décret rigoureux. A la vérité ce décret n’a pas été
lignifié 'y mais pourquoi? Parce que les circonftances s’y
l'ont oppofées. Sirôt l’abfence de Cardon & par conféquent fitôt le décret ce failli a parlementé avec fes;
créanciers, il leur a propofé des arrangemens, & ces
arrangemens ont été acceptés. Quand eil-ce donc que
le fieur Moutgolfier auroit pu raifonnabîement pourfuivte
ia procédure criminelle ?. C e n^étoit pas avant l’a â e du:
,1.3 novembre,, car il auroit rompu toute voie de con
ciliation ,. &: par-là compromis l’intérêt des créanciers®.
C e n’efl: pas enfin après l’aile du 13 n o v e m b r e c a r
au moyen des conditions de ce traité,. tous les créaaciers accédans ont ccnfenti à ceÎlcr toutes pourfuites.
D ’ un autre c ô té , les pourfuites du fieur M ontgolfier
ont amené un abandon des biens du fieur Cardon en
quoi qu'ils puijjent conjifler ô en quelque lieu qu'ils foientr
fituées ; or cft-on frauduleufement de concert avec quel
qu’un, lorfqu’ on l’amene à fe dépouiller fans réferve?;
jEc quand il feroit vrai qu o n auroit eu quelques m énagemens pour l u i , feroit-on répréhenfible ? N ’auroit-on
�4'f
pas mérité la- rcconnoifTance des créanciers, plutôt que
leur animadverfion ? N ’auroit-on pas donné une preuve
de Ton zele pour leur avantage , plutôt que de ion atta
chement pour le failli.
t II faut donc encore écarter les inductions que pré
tend tirer le fieur Monroy de ce que les-.pourfuites du
fieur Montgolfier ont été faites par le miniftere de
M c. D u fren o y , procureur au Châcelcc
& celui du
fieur Cardon avant ia faillite. Encore une fois,, quand
on fuppoferoit une efpccc de concert entre ce procureur
& le fieur M o n t g o l f i e r pour ufer de ménagemens en
vers C ard o n , quel en auroit été l’effet? L ’abandon gé
néral de fes biens 6c Féconomie des frais de difeuffion.
Il n’auroit donc eu lieu que pour l’avantage de la maffe
des créanciers.
Au furplus, il n’y a eu ni pu avoir de premeditation
frauduleufe entre M c, Dufrenoy & le fieur Montgolfier.
Lorfque ce procureur cft venu l’avertir du dérangement
des affaires de Cardon , i l lui êtoit parfaitement inconnu :
cela eft établi par la procédure ; enforte que lorfque
M °. Dufrenoy lui a offert Ton miniftere pour, autant
qu'il feroit poffible, mettre à couvert Ces intérêts dans*
la faillite , il n’a vu ni pu voir en lui qu’un officier pu
b l ic , revêtu du caraftere néceflaire, 6c il a , fans autre
exam en , accepté fes offres. S’il y a là quelque chofe
d’irrégulier , ce n’eft, certainement pas au fieur M o n t
golfier qu’il faut Fimputer. Si M c. Dufrenoy n’a pas dû’
fe charger de fes intérêts, c’eit à lui à fe difculper.
Finalement, &■ à l’égard de Fappofition des ficelles, de
ïavente des effets 8c de toutes les opérations judiciaires ,•
�4<S
on n’a ríen à imputer perfonnellement au fleur Montgol
fier ; ce font des opérations auxquelles il n’a pas même
aflifté, dont les irrégularités ne pourroient tendre qu’ à
des fins civiles , & qui ne regardent, fous tout autre
point de vue, que les officiers publics qui y ont procédé
Que le fieur Monroy s’adrefle donc à M . le lieutenantcriminel, à M. le procureur du R o i , aux commiilaires „
procureurs, & c. C e feroit à eux à Ce juftifier, fi, cc que
le fieur Montgolfier eft bien éloigné de croire, il s’étoic
pafte quelque chofe d’jrrégulier dans l’exercice de leurs
fonctions. Il remarquera donc feulement que tous les re
proches hafardés par le fieur M o n ro y , relativement aux
détails de cet exercice , d’abord dénués de vraifemblance,
le font aujourd’hui de toute preuve.
Ainfi difparoifTent les inculpations du fieur Monroy,,
6c fans doute l’opinion publique vengera le fieur M ont
golfier de leur témérité; nous ofons même croire qu'elle
le venge déjà. Mais ce n’efi: pas afîcz pour la juitice : il
faut qu'elle puniiTe. E t certes qui le mérita davantage
que le fieur M onroy & fes complices ? Qui plus honteuiement qu’eux Te rendit jamais coupable de diffamation
atroce? Qu’on ouvre leurs écrits, fie, fi on le peut, qu’on
en foutienne la le&ure fans les repoufler vingt fois d ’unp
bouillante indignation.
Si encore ils s’écoienc bornés à des injures ! mais ils fe
font rendus coupables des infidélités les plus groifierer
nient iniques. Taire ou traveftir les faits, tranfpofer les
d ates, tronquer les a i l e s , fuppofer des charges & des
preuves, fupprimer des cirçonft^jiccs ciTentielles &
�47
rapprocher de totalement étrangères ; tels font les élémens de ces écrits ( 1).
C ’eft ainfi que déchiré par des libelles fcandaleux, atta-^
qué par des manœuvres perfides, & pour ainfi dire traîné'
d' humiliations en humiliations,'* le fieur M ontgolfier a été
pendant quatre années entieres la victime de fes enne-mis. C ’eft ainfi que pendant quatre années entières, Ia!
calomnie a lentement promené dans fon fein fes poi
gnards empoifonnés. Mais le jour de la juftice approche..,..
& ce jour fera celui de la vengeance de l’innocence
outragée.-
M onsieur
J U D D E , Confeiller, Rapporteur.
M c. D E F R E S S E N E L , A vocat.
T
a il la n d ie r
,
Procureur.-
( 1 ) Ils font fignés pat M . Guillaume, alors avocat au parlement & maintenant5
aux Confeils,
De l’imprimerie de la Veuve Hérissant , rue Neuve Notre-Dame,
�
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Factums Vernet
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montgolfier. 1786?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Judde
Defressenel
Taillandier
Subject
The topic of the resource
créances
banqueroute
fraudes
lettres de ratification
commerce de vin
cessation de travail
saisie
prise de corps
témoins
lettres de change
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Montgolfier, receveur-général de l'Archevêché de Paris, accusé ; Contre le sieur Monroy, entrepreneur de bâtiments, accusateur ; En présence du sieur Cardon, marchand de vin, de maître Dufrenoy, procureur au Châtelet, et de la dame Girad, co-accusés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Herissant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1786
1783-1786?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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banqueroute
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lettres de ratification
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saisie
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TT
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MEMOI RE
A CONSULTER,
ET
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CONSULTATION.
.
/
Madame M a r é c h a l de Bompré, épouse
de Monsieur le Chevalier V A N D U E R N E :
P our
Madame de M o n t b l i n , épouse de
Monsieur le Baron de M A IS T R E .
C ontre
�k W l W W W M W M t V W i m W U W M V A Ï l V V l W B V M W l l T O i m i 'W V K H M M l w . l M i w H V W W l M V V H V « « * »
MÉMOIRE A CONSULTER,
P o u r Monsieur et Madame V A N D U E R N E ,
appelans ;
C ontre
Monsieur et Madame de M A IS T R E y
intimés,
Q u e l q u e lo in que soit l’époque où se sont ouvertes les succes
sions que réclame madame Van D uerne, ses droits n’en sont pas
moins fondés et légitimes , s’ils n ’ont été détruits par aucune
espèce de prescription. C’est ce qui résultera des faits dont on
va rendre compte.
F A IT S .
Claude M aréch al, éc u y e r , seigneur de Bompré , en Bour
bonnais , épousa Marie Jacquinet de Pannessière ; leur contrat
de mariage, du 19 décembre 1667 établit entre eux communauté
de biens.
Il s eurent quatre enfans., Jean n e, Claude- B ernard, Françoise
et Marie-Marc.
Le père m o urut au mois de septembre 1 6 8 8 , laissant ses
x
�( 2 )
cufans en minorité. On dit que Françoise étüit déjà entrée en
religion, en soi te que la mère fut tutiice de sa fille aînée et de
ses deux fils.
A l’âge de vingt ans, Claude-Bernard alla demeurer a Tournay,
en Flandre, o ù , l ’année suivante, il se maria , sans l’assistance
de sa mère ; ce mariage opéra son émancipation.
On destinait Marie-Marc h la vie monastique, de manière que
la mère portait toute son affection à Jeanne , sa fiile aînée ,
comme on le voit par l ’union qu’elle lui fit contracter avec
Nicolas Revanger , fils d’un conseiller au présidial de Moulins.
E n effet, le contrat de mariage, qui est du a 5 janvier 1692,
porte donation universelle et entre-vifs de tous les biens de
sa m ère, et de tous les droits que la donatrice avait à exercer
sur la succession du seigneur de Bom pré , son mari.
Les conditions de cette donation sont d’abord une pension
alimentaire, au profit de la donatrice, et l’acquittement de
toutes ses dettes , à la commodité de la donataire ; ce qui fait
présumer qu’il n’existait point de dettes, surtout aucune n ’étant
énoncée.
.
De plus , la donataire s’oblige de garantir sa mcrc de toutes
recherches relatives aux contrats qu’elle peut avoir passés, en
qualité de tutrice de ses enfans : elle avait vendu des biens qui
leur appartenaient, comme héritiers de leur père.
La donataire , en o u tre , est tenue de 'la légitime de ses
frères ", cl enfin les deux futurs époux sont chargés conjointement
de eércr
et administrer la tutelle de Maric-Marc Maréchal.
O
A l’égard de Claude-licrnard Maréchal, il s’était émancipé par
mariage; mais la succession du père n’ayant pas été liquidée,
la part qu’il y avait se trouvait indivise avec les parts de sa sœur
cl de son frère. Ainsi la charge d'administrer los biens du mi-
�t 5 )
ncur en tutelle, comprenait nécessairement-l’obligation de gérer
ceux du mineur émancipé, jusqu’au moment du partage.
‘
E n exécution de celle donation universelle et entre-vifs , les
nouveaux époux sont mis en possession de tous les biens pa
ternels et maternels, ainsi que de tous les titres et papiers, pour
s’en servir , est il d it, en temps et lieux.
Cette possession de tous les biens indivis , parmi lesquels était
la seigneurie de Bompré , n’éprouve aucun changement jusqu’au
décès de la mère donatrice, c’est-à-dire, jusqu’au 18 septembre
16 9 3 .
Le 25 novembre suivant, la dame Revanger , sur le refus
que fait son mari de l’autoriser , se présenie seule devant le
lieutenant-général de la sénéchaussée de M oulins, accompagnée
d’un procureur qu’elle s’est constitué pour curateur, et déclare
renoncer aux successions de ses père et m ère, pour s'en tenir
à la donation portée en son contrat de mariage.
Les deux successions en conséquence deviennent la propriété
exclusive de Claude-Bernard Maréchal, et de son frère MariéMarc Maréchal.
L ’aîné de ces deux héritiers n'ayant plus à craindre sa mère ,
dont il s'était éloigné à cause des dégoûts qu’elle lui avait fait
éprouver , arrive de Flandre au château de Bompré , pour re*
cueillir sa part dans la succession de sou père. Il lui revenait
aussi dans Ja succession maternelle , sa légitime et sa préiogative d’aînesse sur les fiefs : ces deux objets n’avaient pu êiic com
pris dans la donation universelle faite à sa sœur.
On l’crtVaye par la crainte d’une multitude de prétendus
créanciers, qui , dit-on, poursuivaient, à Paris , devant les re
quêtes du palais et les requéles de l’hôtel , l ’expropriation de
tous les biens putcrncls et maternels. On le conduit dans celte
1.
�( 4 ) •
capitale, où il est livre à un procureur au parlement, qui
dirigeait les procédures. II cède aux instances réitérées , et le
27 mars i 6 ç)4 ¡1 signe un acte d’abandonnement de tous ses
Liens et droits successifs provenant de scs père et mère défunts , au
profit de la dame le Maistre et du procureur Quemais , qui se
disent créanciers poursuivans , et qui déclarent stipuler tant
pour eux que pour les autres créanciers non-comparans.
Rien ne justifie les qualités des deux poursuivans , ni leur
pouvoir de traiter au nom des autres créanciers ; ceux-ci ne
sont pas même n om m és, et nulle des prétendues créances n’est
énoncée.
Dans l'acte du 27 mars iGg 4 , particulier à Claude-Bernard
Maréchal , il se réserve expressément et ne cède pas les objets
que son père avait acquis de la dame de L on g eval,n i les sommes
que cette dernière pouvait devoir à ia succession paternelle.
On lui promet pour prix de son consentement au traité, une
somme de quatre mille livres , niais seulement à titre de grcitification /-attendu , dit-on, que la valeur des biens fcst plus
qu'absorbée par les dettes. Il est stipule, au surplus, que celte
gratification ne sera payable qu’à sa majorité, après qu’il aura
donné sa ratification à l’abandonncment ; en attendant , les
intérêts de cette somme lui seront payés.
1
Chose remarquable encore : il est ajoute que la gratification
et les interdis ne seront payés que sur le produit des revenus
Ou sur le fond des biens. Celle condition est répétée plusieurs
fois , tant les créanciers étaient résolus à ne pas s’obliger per
sonnellement au payement de la gratification promise.
Us ont bien soin aussi de stipuler que l’abandonnement n’em
pêchera pas de subsister les saisies réelles , mobilières , et les op
positions ; c’est une conséquence de riulcniion où ils sont de
�ê
(5)
ne pas s’obliger personnellement pour raison des biens mis à
leur disposition. Ne voulant pas les acquérir, il était juste qu’ils
conservassent la qualité de créanciers et le droit de poursuivre.
Par la même raison, ils ajoutent que les frais à faire en dili
gences et poursuites pour l’exécution du traité, ne seront pris
que sur les biens ; jamais ils ne s’obligent eux-mêmes, ils n'ac
quièrent donc pas; ils entendent au contraire que des poursuites
seront nécessaires de leur part pour obtenir leur payement.
Leur inteution est si formelle de rester créanciers après le
traité , qu’ils font renoncer Claude-Bernard Maréchal à toutes
lettres détat. On sait que , dans l'ancienne législation , c’était
un moyen d’empêcher les créanciers d’exproprier leurs débiteurs.
Daus le cas où Claude-Bernard Maréchal apporterait un obstacle
à l’expropriation , il se soumet à restituer la gratification de
quatre mille livres avec les intérêls, et à payer en outre une
indemnité de trois mille livres , plus, à être déchu de toutes
prétentions sur les biens de ses père et mère.
Apres ce traité , Claude-Bernard Maréchal aurait donc encore
pu arrêter les poursuites de ses créanciers. Il conservait donc
encore des droits sur les successions qu’il mettait à leur dispo
sition ; ce n’était donc pas une vente qu’il faisait , mais une
simple cession volontaire , un abandonnement.
Quoi qu'il en soit, sa majorité était arrivée depuis deux mois;
et il allait incessamment donner sa ratification et celle de son
épouse } comme il s y était obligé, lorsque Ton jugea convenable
de faire homologuer l’abandonncment du 27 mars 169 4 , avec
plusieurs créanciers qui n’y avaient pas comparu. La sentence
d'homologation rendue par les requêtes du pa'lais à Paris , est
du 19 août iGq 5 , et Claude-Bernard Maréchal 11’y a point été
appelé.
�(G )
Néanmoins ce dernier ratifia son abandonncment, par acte du
27 août i 6g 5 , et présenta un pouvoir que lui avait donné son
épouse, pour adhérer au même abandonncment ; ce qu’il fit
comme il l’avait promis. E n même temps il reçut la giatification stipulée.
L a veille du jour où cette formalité se passait à P a r is , par
les insinuations du procureur au Parlejnent, c’cst-à-dire, le
2.6 août i 6q 5 , on faisait signer à Moulins un pareil abandonnement par Marie-Marc Maréchal. On n ’avait pas eu besoin de
faire circonvenir par un procureur au parlement , ce mineur
qui faisait son noviciat dans un couvent de bénédictins ; devant
bientôt renoncer au m onde, il consentit à signer autant par
complaisance , que par indifférence, pour des biens qu ’il allait
prochainement répudier.
Son acte d’abandon est absolument semblable à celui qu’on
avait surpris à l ’inexpérience de son Ircre, sauf que celui-ci avait
fait réserve de ce qui provenait de la dame de Longeval, et que
l ’autre ne s’était rien réservé : on en conçoit aisément la raison
de la part d ’un néophyte religieux. On lui promit pourtant
une somme de douze cents francs, mais toujours à titre de
gratification , et avec stipulation expresse qu’elle ne pourra être
prise que sur les revenus des biens abandonnés. On ne voit
pas que celte somme lui ait été payée ; en avait-il besoin daus
sa retraite monastique ?
Il faut d ire aussi qu'il ne lui est pas imposé la condition do
n ’apporter aucun obstacle à la vente des biens par des lettres
d’état. O11 n’avait rien de semblable à craindre d'un jeune homme
qui voulait mourir au monde : 011 le soumet seulement à la
peine de rendre la gratification, s’il occasionnait quelqu’cmpcchcjneni à la vente des biens.
Pareillement 0.1 crut inutile d? lui faire promettre de ratifier
�( 7 )
en majorité; cette époque trop éloignée ne devait jamais arriver,
puisqu’il était à la veille de prononcer ses vœux. E n effet, son
entrée en religion cul lieu peu après; en sorte que toute ratifi
cation devint impossible.
« Par la mort civile de Marie-Marc Maréchal, ses droits dans
les successions de ses père et mère passèrent à son frère aîné
Claude - Bernard Maréchal; c’est avec lui seul que les traités
d’abandonnement devaient s’exécuter, comme étant devenu l ’u
nique héritier des sieur et dame Maréchal de Bompré.
Pressée de retirer le fruit des manœuvres par lesquelles elle,
était parvenue à obtenir de ses frères un abandon, la dame
Bevanger voulait que chaque créancier fut tenu de prendre des
biens en payement de ce qui lui était dû. Elle avait formé sa
demande à cet effet , conjointement avec quelques prétendus
créanciers ^ ses affidés; mais la dame le Maistre , en qualité de
poursuivante, et plusieurs autres, s y étant opposés, une sen
tence rendue aux requêtes du palais, le 26 mars 1697 , rejeta
sa prétention et- condamna les demandeurs aux dépens que
la dame le Maistre fut autorisée à employer en fra is de criées.
Cette sentence a donc jugé que les actes des 27 mars i 6g 4 et
26 août i Gg5 ne contenaient pas vente parles héritiers Maréchal;
car si les créanciers eussent été les propriétaires des biens cédés,
il n’y aurait eu réelhment que le partage pour sortir d’indivision,
lin proscrivant cette voie , les requêtes du palais ont décide' que
les actes d’abandonnement 11’avaienl pas enlevé la propriété des
biens aux héritiers M a ic c h a l , cl qu’ainsi la vente devait en etiv
faite aux crie'cs.
Cependant les sieur et dame Bevanger , qui ne craignaient
rien lant que de voir vendre les biens, .et surtout la seigneurie
de Bom prc, chcrchercut d’abord à *,’y maintenir , en se faisant
�(8)
n-ommer par justice administrateurs - séquestres , au rao;s d«
juillet de la même année 1697.
Ce n’était pas assez : il fallait écarter totalement les deux
poursuivans. C’est ce qui fit l’objet d’une transaction passée le
10 décembre suivant On y voit les sieur et dame Revanger ,
et un sieur Farjo n el, qui spnt cautionnés par les sieurs Revanger,
p ère, et Farjonel, fils, ils s'obligent solidairement à payer à la
dame le Maistre et au procureur Quemáis, tout ce qui peut
être dû à ces derniers en capitaux, intei'èts et frais , à raison
de 4jOûo liv. p a r a n , pour la dame le Maistre, e t d e 5 ooliv. par
an pour M e de Quémais.
Ces deux créanciers poursuivans n’agissent plus comme dans
l ’acte d abandonnemeut f.ùt par Claude-Bernard M a r é c h a l , tant
pour eux que pour les créanciers non-comparans ; ils ne stipulent
que pour ce qui les concerne personnellement. 11 n’est point
dit non plus dans celtc transaction combien il leur est dû,
ni à quel titre. Il est à remarquer qu’aucun acte , aucun juge
ment concernant celte affaire , n ’énonce en quoi consiste la
créance d’un seul des prétendus créanciers.
Au moyen des garanties que fournissent les sieur et dame
Revanger et le sieur F a rjo n el, père , ils sont subroges aux droits
des deux créanciers poursuivans, la dame le Maistre et le p ro
cureur Quémais.
t
Muuiü de jeette transaction , les sieur et dame Revanger, non
comme acquéreurs, niais c o m m e se disant créanciers de celle
de la succession du seigneur de Rompre ci son épouse, ob
tiennent aux requêtes du palais et aux requêtes de rhô.lcl , les
10 niai et 10 juillet i Gq8 , deux sentences qui les autorisent à
exécuter la transaction de 1G97, e t, en conséquence, à jouir
(des biens pour en employer les fruits au paiement des créan-
�1
( 9 )
ciers : en nièmc temps , il en ordonne que le commissaire aux
saisies-réelles les laissera jouir.
Quel devait être l’eflet de ces deux senlences qui déclaraient
commune , avec les autres créanciers, la transaction du 10 dé
cembre 1697 ? C’était seulement d’autoriser les sieur et dame
Revanger et le sieur Farjonel , père, à continuer les poursuites ,
en leur qualité de subrogés aux droits de la dame le Maistre et
du procureur Quémais. 11 n’en pouvait rien résultèr contre
Clauùe-Bernard Maréchal, qui n ’était point partie dans la tran
saction, ni dans les sentences qui en ont ordonné l’exécution.
Il n’en fallait pas moins suivre avec lui , comme devenu seul
héritier de ses père et m è re , l’effet des actes d’abandonnement,
c’est-à-dire, comme l’avait jugé la sentence du 26 mars 16 9 7 ,
procéder à la vente des biens aux criées , à la requête des créan
ciers poursuivans ou de leurs subrogés.
E n ont-ils agi ainsi? Won : les sieur et dame Revanger sont
rcste's en possession, sans faire usage de leur subrogation; et,
chose singulière, aucun des autres prétendus créanciers n'a élevé
la moindre réclamation pour faire procéder à la vente des objets,
q u i , disait-on, étaient leur gage. N’e st-o n pas bien fondé à
soupçonner de fraude tout ce qu’ont fait les sieur et dame Revanger, pour obtenir l’abaudonnement des biens, et pour ensuite
se perpétuer dans leur possession ?
«
Claude-Bernard Maréchal n’était pas aussi patient que ses pré
tendus créanciers, il faisait de fréquens voyages en bourbonnais.
Toujours de nouveaux prétextes empêchaient de lui rendre compte
de la liquidation des dettes de scs père et mère, liquidation qu’il
avait confiée aux créanciers représentes par la dame le Maistre
et le procureur Quémais , à qui les sieur et dame Rcvangcr
.avaient été subrogés. Il ne pouvait donc s’adresser qu’à ces dej--
^
2
�( 10 )
niers , surtout puisqu’il les trouvait en paisible possession de tous
les biens, dont aucun n’ayaitété vendu.
Résolu enfin de terminer, Claude-Bernard se rendit, en 1 7 1 6 ,
au château de Bom pré, ce fut pour la dernièie l'ois. Sa disparition
subite mit fin à ses importunités, qui devenaient à cette époque
'u n peu trop sérieuses pour les sieur cl dame Revanger. Nous 11c
parlerons pas des bruits qui coururent sur la cause de cet événe
ment; il en restait encore , il y a peu de temps, une fûchcuse
tradition.
On a vu que depuis vingt ans la possession des biens était
restée paisible entre les mains des sieur et dame Revanger ; il
11’avait plus été question de poursuivre la prétendue saisie-réelle ,
du moment ou ils avaient été subrogés aux droits des poursui
vons ; aucun créancier n’avait paru lésé par ce long silence. Com
ment se fait-il que la catastrophe de Claude-Bernard Maréchal
éveille des inquiétudes , que sa sœur et son beau-frère ne pa
raissent pas avoir conçues jusqu’alors, sur les formalités à rem
plir pour terminer le mandat contenu dans les actes d’abandonnement? C’est que du vivant de Claude-Bernard il était impossible
de finir avec l u i , sans lui rendre compte de ce que scs biens
étaient devenus dans les mains de scs créanciers. Ou n’avait
d'autre m o y e n , quand i] écrivait, ou qu'il se présentait, que
de tromper sa bonne foi sous toutes sortes de prétextes, plus ou
moins spécieux, qui le déterminaient à attendre.
M ais, après sa m ort, il laissait une veuve chargée de plu
sieurs cnCans en bas-Agc; ollo était fort éloignéo , et un voyage
dans le Bourbonnais ne lui était pas praticable. D ’ailleurs ,
elle l'cùt entrepris sans succès ; elle manquait des renscignemens nécessaires, qui ne se trouvaient que dans des papiers
disparus avec son mari. Le moment était donc favorable pour
/
�( 11 )
former une sorte d'obstacle , en cas d’une réclamation dans
l ’avenir par la famille de Claude-Bernard Maréchal.
En conséquence , dès l’année qui suivit la disparition fa
tale de cet infortuné, les sieur et dame Revanger rompent le
long silence qu’ils avaient gardé ; ils demandent aux requêtes
du palais la main-levée d’une saisie réelle, oubliée depuis vingt
a n s ; ils se fondent sur l'exccution de la transaction du 10
décembre 1 6 9 7 , et allèguent avoir désintéressé tous les créan
ciers , tant les poursuivans que les prétendans opposaus. Sur
celte demande , quelques créanciers comparaissent pour y
adhe'rer, d’autres font défaut.
11 ne fut donc pas difficile aux sieur et dame Revanger,
sam rien justifier, d’obtenir, le 25 novembre 17 1 7 , ' une
sentence q u i , attendu la subrogation et réunion des droits
des créanciers dans les mains des demandeurs , fair main-levée
de la saisie réelle, et les déclaré propriétaires incommutables
des biens saisis.
Ils avaient toujours parlé d’un grand nombre de créanciers,
sans jamais énoncer aucune des sommes qui pouvaient être
ducs ; ceux qui avaient élé appelés à cette première sentence,
ne paraissant pas assez nombreux , les sieur et dame Revanger
en firent assigner d’autres, l ’année suivante. Comme ce 11’était
pas des créanciers sérieux, aucun ne comparut ; et le 5o juin
1 7 1 8 , une sentence par défaut, déclara la précédente com
mune avec eux.
Aucune de ces sentences n’a été rendue avec Claude-Bernard
Maréchal ; 011 s’csl bien gardé de l ’appeler , ni lui , ni sa
v e u v e , ni scs enfans ; jamais elles 11c leur ont été signifiées;
en sorte qu’iuijourd’liui , pour la représentante de ClaudeBernard Maréchal , elles sont res inter alios acta , cl 11e peu
vent par conséquent lui être opposées.
�( »2 *)
Ce qu’avaient prévu les sieur et dame Revanger est arrivé.
La veuve de Claude - Bernard Maréchal, dans l’impuissance
d ’avoir des renseignemens suflisans pour réclamer ses biens du
Bourbonnais , passa quelques années dans des recherches qui
étaient encore infructueuses, lorsque, succombant sous le poids
de ses chagrins, elle alla rejoindre, dans la tom be, son mari
qu’elle n’avait cessé de pleurer.
Des enfans, dont l’éducation n’était pas encore achevée, étaient
trop jeunes pour s’occuper de leurs droits sur les biens qui
leur appartenaient en France. Il resta dans la famille de ces
orphelins , des souvenirs de toutes les injustices dont leur père
et mère s’étaient plaints souvent; mais ce ne fut qu'après bien
des années et par suite de divers événemens amenés par la
révolution , . que les descendans de Claude-Bernard Maréchal
parvinrent à sé procurer des titres capables d’être présentés
en justice.
Madame Van Ducrne , autorisée de son m ari, ayant découvert
que les biens de sou tuteur étaient restés dans les mains des
sieur et dame Revanger, qui les avaient transmis par successions
directes jusqu’à mademoiselle de Montblain , a réclamé contre
, cette dernière, devenue depuis épouse du baron de Maistre.
La demande en revendication a été portée au tribunal de pre
mière instance de Ganat , où un jugement par défaut, faille de
plaider, fut surpris contre monsieur et madame Van Ducrne , le
22 mai 18 18 . Il est motivé sur ce que les demandeurs , en ne so
présentant pas pour plaider , sont censés abandonner leur action.
Par exploit du 6 août suivant, monsieur et madame Van Ducrne
ont interjeté appel de ce .jugement devant la cour royale de
Rioin , où la cause se présente dans le même état qu'elle étuit
eu première instance.
�( ’3 )
Monsieur et madame de Maistre avaient fait imprimer un mé
moire où ils conviennent que la terre de Bompré leur vient en
ligne directe des sieur et dame Revanger. Ils ne peuvent pas se
dissimuler que, si ces derniers l’avaient recueillie à titre de co
héritiers, aucune prescription n ’aurait pu courir contre le s r e présentans de Claude-Bernard Maréchal. E n effet, l ’article aG
de la coutume de Bourbonnais porte, que nul ne peut prescrire
les poriions de ses copropriétaires, par quelque laps de temps
que ce puisse être.
C'est pourquoi monsieur et madame de Maistre imaginent de
soutenir que la dame Revanger, ayant renoncé aux successions de
ses père et m è r e , pour s'en tenir à la donation universelle
portée en son contrat de m ariage, elle a cessé d ’avoir aucun
droit sur ces deux successions , qui ont passé en totalité aux deux
frères Maréchal. O r , ceux-ci , par les actes de 1694 et 1 6 9 3 ,
ont vendu» tous leurs droits successifs à leurs créanciers; et ces
derniers en ont fait la vente aux sieur et dame Revanger par la
transaction de 1697. E n exécution de cette transaction, les sen
tences de 1 7 1 7 et 1718 ont déclaré les sieur et dan?e Revanger
propriétaires incommutables des biens : d o n c, c’est à titre d’acque'reurs qu’ils les ont possédés; donc , la prescription de trente ans
et plus a rendu inattaquable leur possession continuée dans leur
postérité.
'
On voit que ce système est fondé uniquement sur la suppo
sition que les actes de iGg4 et
i (hj5
sont des ventes. Si donc ce
ne sont que de simples abandounernens faits aux créanciers,
pour leur faciliter les moyens de se payer, il en résultera que
les héritiers Maréchal n’ont pas cessé dYtrc propriétaires desbiens
qui leur revenaient dans les successions de leurs père et m ère,
'• et que ct’s biens sont restés indivis entre les héritiers et leur sœur ,
�( i .4 )
qui y avait droit par la donation contenue en son contrat de
mariage.
‘
S i , d’un autre côté, la transaction de 1G97 ne contient qu’une
subrogation aux droits de deux créanciers seulement, il est évi
dent que les sieur et dame Revangcr ne sont pas devenus acqué
reurs , mais tout au plus subrogés aux droits des créanciers ,
qui n’étaient que mandataires , pour se payer sur les biens dont
ils avaient accepté la cession volontaire.
Dans ces circonstances , les jurisconsultes sont invités à s’expli
quer sur la légitimité de la réclamation de madame Y an Duerne ,
dont la qualité de descendante en ligne directe de Claude-liernard
Maréchal n’est pas contestée, et ne peut p a s l e t r e , d’après les
actes authentiques de sa généalogie,
L e chevalier V AN D U E R N E .
p c L ’ i M P n i M r . n i n s t î h é o t y v e d e l a u r e n s a 1k é > h u e d u i*O T -D E - *E n , m», i / <t
�CONSULTATION.
Conseil, soussigné, qui a pris lecture d’un mémoire à
c o n s u l t e r pour monsieur et madame Van Duerno, des pièces qui y
sont énoncées, et d’un Mémoire imprimé pour monsieur et m a
dame de Maistre,
L
e
Est d'avis que madame Y a n Duernc , comme représentant
Claude Bernard Maréchal, son bisaïeul, est fondée à revendi
quer les biens que ce dernier a recueillis des successions de scs
père et m ère, et qui se trouvent dans la possession de madame
de Maistre, à qui ils sont échus par une suite de successions di
recte venues des sieur et dame Revanger, ses auteurs.
Il est de principe que l ’héritier est considéré comme la con
tinuation de la personne du défunt ; qu'ainsi telle qu’est la pos
session de ce dernier, telle est celle de ses héritiers in infinitum , comme disent tous les docteurs , et notamment Pothier
en son Traité de la possession, n° 57 ; D o m a t, Titre de la pos
session et des prescriptions, section 4, n° 18. C ’est en confir
mation de cette ancienne législation, que le Code c iv il, article
2 2 3 7 , a consacré cette vérité, qui est écrite également dans les
lois romaiscs : usu capere hcrcs 11011 p o lcrit , quod dcfunctus non
potmt : idem juris est cimi de longd /¡ossessione qiuvritur. L .
1 1. f f . de dà’crs/s temporibus prvscript.
11 u ’est donc pas douteux que madame de Maistre possède la
�( Ifl )
terre de B o m p r’ , qui lui vient par héritage des SiC’j r ei dame
Revanger, au môme titre que ceux ci Tout possédée et trans
mise à leur postérité.
Maintenant examinons de quelle nature était la possession
des sieur et dame Revanger; ensuite nous verrons si cette pos
session bien caractérisée a pu donner, cours à la prescription.
A h tîc le
I er.
Quelle a été la possession des sieur et dame Revanger.
L ’oniGiNE de celle possession est la donation faite à la dame
Revanger par son contrat de mariage.
Après le décès de sa mère donatrice, la dame Revanger re
nonce aux successions de scs père cl mère , pour s’eu tenir ¿1 sa
donation.
*
Les deux frères, devenus seuls héritiers de tous les biens pa
ternels , ainsi que de la legitime coulumière cl feodale dans les
biens maternels, font, en 1694 et ^ 9 5 , abandonnement de
tous leurs biens cl droits successifs à leurs créanciers.
Au mois de juillet 1 6 9 7 , les sieur et dame Revanger se font
nommer administrateurs-séquestres des biens saisis.
L e 10 décembre suivant , esl passée une transaction , par la
quelle les deux créanciers poursuivans consentent la subrogation
de tous leurs droits , au profit des sieur et dame Hevanger et d’un
sieur Farjonel , lesquels s’obligent solidairement à les payer in
tégralement.
En 1 7 1 6 ,
Claudc-Dcrnard
M aréchal, resté seul héritier de
scs père e t,m ère, depuis que son frère est entré en religion ,
vient en Bourbonnais réclamer le compte que lui devaient ses
créanciers ou leurs subrogés; mais il disparaît sans avoir obteuif
justice.
�( »7
)
Profitant de cette catastrophe, les sieur et dame Revanger
rompent leur long silence de vingt ans , et , sans appeler ni
Claude-Bernard Maréchal, ni sa veuve et ses enfans, font pro
noncer la main-levée de la saisie-réelle , et déclarer qu’ils sont
propriétaires incommutables, par deux sentences des requêtes
du palais, rendues en 17 1 7 et 1 7 1 8 , avec des créanciers désin
téressés , dont la plupart ne comparaissent pas.
C ’est dans cet état que la terre de Bompré et scs annexes est
restée en la possession des sieur et dame Revanger, et est parve
nue, à titre de succession , jusqu’à madame de Maistre.
E x a m in o n s de quelle n ature était la possession des sieu r et
d am e R e v a n g e r à chacune de ces époques.
§• I-
De la donation.
E
n
exécution de la. donation u n iv e rse lle et e n tre -v ifs, portée
en son contrat de m ariage , la d am e R e v a n g e r est entrée en p o s
session de tous les biens m aternels : ils étaient indivis entre elle
et scs frères.
E u effet, la donation universelle des biens maternels ne pou
vait pas comprendre la légitime des deux fils M aréch al, ni la
prérogative de l ’aîné sur les fiefs. Ces objets, il est vrai , ne
pouvaient leur être livrés qu’au décès de la donatrice, mais la
nue propriété ne leur en appartenait pas moins.
Quant aux biens paternels , la dame Revanger s'en est mise
également en possession, en vertu de la clause qui, dans la do
nation , la chargeait , conjointement avec sou m a r i, de gérer
et adm inistrer, au lieu et place de la donatrice, la tutelle de
Marie-Marc Maréchal. Cette administration comprenait néces
sairement aussi la portion de Claude-Bernard M aréchal, puisque
3
F»
�(
)
Ja succession paternelle n’avait été ni liquidée, ni partagée entre
les trois enfans.
Ainsi les biens paternels et maternels étaient en état d’indivision
eutre les mains de 1a dame Revanger; car scs frères y avaient
des droits comme elle. Un partage potTvait seul faire cesser l’in
division.
S-
II-
D e la renonciation a u x successions.
Après que la dame Revanger, en jGg^, eût renonce aux suc
cessions de ses père et mère défunts , pour s’en tenir à sa dona
tion , la possession qu’elle1 avait des biens maternels , comme
donataire, n’a point changé de nature. Ces mêmes biens n’en
étaient pas moins indivis avec ses frères , pour leurs légitimes
coutumière et fcodale. La seule différence est que , par le décès
de la mère donatrice, ces. deux sortes de légitimes étaient deve
nues exigibles. Ainsi les portions des deux frères Maréchal dans
les biens de leur m è r e , sont encore restées indivises en la
possession de leur sœur.
Il en a été de même des biens paternels. E n vertu de sa do
nation , la danic Revanger avait droit à la communauté d ’entre
son père, et sa mère, et à exercer les reprises de sa mère sur ces
mêmes biens , qui, du reste, appartenaient aux deux fils Maré
chal , seuls héritiers de leur père depuis la renonciation de leur
sœur. Les biens paternels , après celte renonciation , oui donc
coulinué d’étre possédés par la dame Revanger dans un état
d ’indivision.
I)e p lu s , elle avait etc chargée de les gérer cl administrer au
lieu et place de lu mère tutrice, qui l’avait ainsi ordouné comme
condition de sa donation. L a dame llevangcr tenait donc les
�( «9 )
biens paternels, non-seulement à titre d’indivision , mais encore
à titre précaire d’administration.
Ce litre précaire s’étendait également aux portions légitimaires
que les deux frères Maréchal avaient dans les biens 'maternels ;
car ces portions indivises faisaient partie de la tutelle que la dame
Revanger s’était obligée à gérer et administrer.
ii
A in s i, après sa renonciation aux successions de ses père et
mère , elle a continué de posséder , à titre d’indivision et à titrç
précaire, les biens paternels et les biens maternels. Donc , tant
que sa possession a conservé ce double caractère , la prescription
n’a pu commencer, comme on le verra par la suiie.
§•
III.
Des actes cVabandonnement.
Il n’existait ni liquidation , ni partage des biens paternels et
vmaternels possédés par Ja dame R evan ger, lorsque scs deux
frères , prenant qualité d’héritiers de leur père et mère , ont
abandonné leurs droits successifs à leurs créanciers, par actes
passés, pour Claude-Bernard Maréchal, le 27 mars 169 4 , et
pour Marie-Marc Mare'chal, le 26 août i 6g 5 .
On connaît en droit la cession judiciaire , qu’on nomme aussi
cession forcée , parce que le débiteur obtient un jugement qui
force ses créanciers à la recevoir.
L a cession volontaire est celle que les créanciers acceptent
volontairement, par acte passé d’accord avec le débiteur, 011 la
uonunc alors abandonnement.
Jamais la cession judiciaire ou forcée ne peut être conside'rée
comme une vente ; elle n’est qu’un mandat donne aux créan
ciers , pour so payer sur les biens , soit par les revenus , soit
par le prix de la vente qu’ils sont autorisés à poursuivre.
3.
�( 20 )
Q u a n d les créanciers acceptent v o lon tairem en t les biens du
débiteur , il peut y a v o ir aliénation ; et alors c ’est un e vente ,
q u i,
p o u r être v a la b le , doit a v o ir tous les caractères essen
tiels à ce genre de contrat.
S i la
con ventio n .n’exp rim e pas
u n e vente fo rm ellem en t , si le débiteur s’est contenté de mettre
ses biens à la d isposition de ses créanciers ,
c’est un
sim p le
ab an d on n em en t , c’est-à-d ire , u n consentement à ce que les
créanciers se p ayen t s u r les biens q u ’on les autorise à ven d re.
Cette espèce de m andat étant purem ent v o lo n ta ir e , est suscep
tible des diverses con d itio n s q u ’il plaît aux parties de stip u le r;
m a i s , dès q u e l ’aliénation des biens ab an d on n és n ’y
est pas
c la ire m e n t e x p r i m é e , 011 11e peut pas l’y su p p léer, parce q u e ,
p o u r o p é re r une exp ro p riatio n volon taire , il faut q u ’il a p p a
raisse in d u b ita b le m e n t, d ’un c ô t e , la volon té de v e n d r e , de
l ’autre , la volo n té d ’ac q u érir.
A i n s i , q uan d cette do ub le v o lo n té 11’est pas e xp rim ée, quelles
,
que soient
d ’ailleurs les conditions convenues
biens
créanciers n’est toujours q u ’un aban d on n em en t. 11
aux
la rem ise des
11e p r iv e le débiteur que de la jo u issan ce des objets q u ’il ab an
d o n n e , et n u llem en t de le u r p ro p riété. E l l e cesse d e lu i a p
p a rte n ir à l ’épo q u e seulem en t o ù les créanciers , usant du p o u
v o ir qui le u r est conlié , fo nt p ro c é d e r à la vente.
Cette vérité est trop c o n n u e , p o u r q u ’il soit besoin de l ’a p
p u y e r de nom b reuses autorités. C iton s celle de P o tliie r ,
q u i,
dans son T ra ité du d o m ain e de pro priété , n° 3 7 3 , s’e x p ri me
en 1ces termes :
« U n d ébiteur qui fait à scs créanciers une cession et nban*
» don de scs b i e n s , soit en ju s t ic e , s o i t lun t r a n s a c t i o n , ne
„ perd pas par cet ab an d on le d o m a in e de propriété des c h o ie s
» qui lu i ap p a rtie n n e n t, c om prises dans cet a b a n d o n , ju sq u ’à
» ce
q u ’en exécution de cet ab an d on , elles ay cn l etc vendues et
�»
»
*
»
( 21 )
livrées aux acheteurs. Cet abandon n’est censé être autre
chose qu'un pouvoir qu’il donne à ses créanciers de jouir
de ses biens et de les vendre pour se payer de leurs créances , tant sur les revenus que sur le prix. »
Pour appuyer son opinion, qui n'est que l’expression de la
jurisprudence la plus constante , notre célèbre jurisconsulte
invoque la loi 3 au digeste de cessionc bonorum , qui porte :
Is qui bonis cessit anlè reruni venditionem , utique bonis suis
non caret.
C’est sur le même fondement que la cession et l ’abandonnem en t, lors du régime féodal , ne donnaient pas ouverture au
droit de lods et vente au profit du seigneur. « Il n’y a pas
» de mutation, dit llcnriqu ct, dans son Code des Seigneurs,
j> et]Hauls Justiciers, chapitre 6 , question 55 ; les créanciers,
» ajoute - 1» i l , ne sont que des régisseurs, ils ont seulement
a procuration de vendre, et le débiteur n’est que dépossédé
» sans être exproprié. »
Voyez aussi Guyot , Traité des fiefs, chapitre a , n° io. Poquet de Livoniarc , sur la même matière , rapporte un arrêt
du parlement de Paris, en date du 16 septembre 1G60 , qui
a jugé qu’un débiteur n’est point privé de la propriété des biens
qu’il a cédés à ses créanciers.
A in si, nul doute qu’une cession de biens faite judiciairement,
ne puisse jamais être qu’un mandat. La cession volontaire, ou
autrement d i t , l’abandonnement n’est également qu’ un pouvoir
donné aux créanciers , à moins qu’il ne contienne expressé
ment les caractères d ’un contrat de vente.
Les actes des 37
sions volontaires ,
des caractères du
ciers y manifestent
mars 1G9Î cl aG août îGçp , sont des ces
des abandoiinemcns. L ’on u y trouve aucun
contrat de vente; au contraire, les créan
l'intention formelle de n’être pas acquéreuis ,
�( 22 )
et de conserver leur quaüte de créanciers sur les biens aban
donnés. Ces actes ne sont donc que de simples mandats. Pour
en être convaincu , il suffit de jeter les yeux sur leurs prin
cipales dispositions; comme ils sont rédigés l’un et l’antre de
la même manière, tout ce qu’on dira de l ’abandonncmcnt fait
en
par Claude-Bernard Maréchal, s’appliquera nécessai
rement à rabandonnement fait en i 6g 5 p ar sou frère MarieMarc Maréchal.
i ° Après l’éuumération des objets abandonnés , il est dit :
« P o u r, par lesdits sieurs et dames créanciers , jouir desdils
» biens , meubles et im m eubles, et exercer les droits et actions
» qu’ils aviseront bon être. »
Il n'est pas ajouté que les créanciers en disposeront comme
de chose à eu x appartenante. C'est la clause ordinaire qui
caractérise l’expropriation du vendeur au profit de l’acquéreur.
Les créanciers ne sont donc investis que de la faculté de jouir
des meubles et im m eubles, et d’exercer les droits et actions ,
comme ils aviseront bon être , parce qu’il ne s’agit que de
leur faciliter les moyens de sc p ayer, suivant les règles pres
crites en matière de simple abandonneraient.
2° Les créanciers stipulent ensuite que les saisies mobilières,
immobilières et les oppositions demeureront dans leur force et
vertu. Ils n'entendaient donc pas faire une acquisition ; car
elle aurait nécessairement éteint toutes saisies et oppositions sur
les vendeurs. On n’aurait pas pu continuer de saisir contre
eux ce qui aurait cesse «le leur appartenir. D ’un autre côté, les
créanciers ne pouvaient pas poursuivre la saisie de choses qui
seraient devenues leur propriété. On voit par cette clause, qu'ils
n’avaient d ’autre but que de parvenir à sc payer sur les biens
sans obstacle de la part de leurs débiteurs ; c’est-à-dirô que. ceux-ci
lie faisaient pas une vente, mais un simple abandonuemeut.
/
*
�( 23 )
- 5° C’est pour celte raison que le débiteur promet de remettre
aux créanciers tous les titres et papiers concernant les biens et
droits délaissés , cédés et abandonnés , et cu ’on ne se sert pas
de l’expression vendus ; car il ne s’agissait*pas d’une vente , mais
d’un délaissement, d'une cession , d’un abandonnement.
Aussi est-il ajouté qu’il sera fait inventaire des titres, et qu’au
bas madame de Maistre s ’en chargera. Jamais dans un contrat
de vente , l’acquéreur ne se charge envers le vendeur des titres
remis par ce dernier , parce qu'ils deviennent la propriété de
l ’acquéreur. Madame de Maistrc, en s’engageant à représenter
les titres des biens cédés , n’entendait donc pas faire une acqui
sition.
4° Une clause postérieure porte que le présent délaissement et
abandonnem ent , et non pas la présente vente, est faite moyen
nant quatre mille livres pour Claude-Bernard Maréchal , et seu
lement douze cents livres pour son frère ; mais ces deux sommes
ne sont promises que par forme de gratification , à prendre sur
les biens cédés. Cette condition caractéristique du traité y est rap
pelée plusieurs fois. D ’abord, à l’occasion des intérêts des quatre
mille livres promises à Claude-Bernard M aréch al, on lit que ces
intérêts seront pris sur les fruits recueillis l’année précédente; et
dont, en conséquence, la vente sera faite incessamment. Plus bas ,
il est ajouté : « bien entendu que le payement des quatre mille
» livres, promises audit sieur Maréchal , sera fait des deniers pro» venant desdits biens abandonnés, soit des revenus, soit des
* fonds ».
La même stipulation se trouve pour les douze cents livres de
gratification promises à Marie*Marc Maréchal ; elles ne doivent être
prises que sur les revenus des biens ccdcs.
Pouvflit-on exprimer plus clairem en t que les so m m e s p r o m ise s
n ’étaient pas le p r ix d ’une v e n te , mais celui du consentem ent que
�( 24 ) ‘
Jcs débiteurs voulaient bien donner à ce que les créanciers pus
sent, sans empêchement, disposer des biens pour se payer ? 11 est
de l’essence de la vente que l’acquéreur soit obligé personnel
lement au payement du prix convenu ; i c i , les créanciers répè
tent plusieurs fois qu’ils n’entendent pas s’engager personnelle
ment , que les sommes qu’ils allouent à leurs débiteurs ne sont
pas un prix de vente , mais seulement des gratifications ; qu’à
cet effet elles ne seront pas acquittées de leurs deniers , mais
uniquement sur le produit des biens cédés. Ce n’était donc pas
une vente qu’entendaient faire les parties, ce n’était qu'une ces
sion volontaire, un simple abandonnement.
5° Le but des créanciers n'était évidemment que d’obtenir un
libre cours aux poursuites qu’ils faisaient pour être payés , sans
craindre les obstacles que leurs débiteurs pouvaient y apporter.
Ce motif est exprimé bien clairement dans le préambule des
deux a ctes, et plus spécialement dans celui fait avec Claude-Ber-
nard Maréchal. On y déclare que les parties se sont déterminées
à traiter, pour éviter la multiplicité des procédures, la dissipa
tion des biens, leur dépérissement, p a r les fréquentes lettres
d ’état qui sont obtenues p a r ledit sieur de Bompré , fils .
En conséquence, l'une des conditions auxquelles les créanciers
paraissent mettre le plus d’importance, est celle où Claude-Bernard Maréchal renonce à toutes lettres d'état obtenues cl ¿1 obtenir ,
sous peine d'etre privé et déchu de ladite somme de quatre
mille livres et des intérêts ii lui ci-dessus promis , et de toutes
prétentions qu'il pourrait avoir contre
su r les biens desdits
sieur et dame de Bompré , et même de payer auxdits sieurs et
dames créanciers la somme de trois mille livres de peine , sans
qu elle puisse être réputée comminatoire.
Des lettres d’état, dans l ’ancienne législation, étaient des dé
fenses faites aux créanciers de poursuivre leurs débiteurs. Le
�C 25 )
Roi accordait cc secours à ceux qu’il jugeait mériter de l'indulgence.
Si les créanciers de Claude - Bernard Maréchal s’étaient re
gardés comme acquéreurs , auraient-ils pris tant de soin de le
faire renoncer à toutes lettres d’état ? Elles n’avaient aucun efl’et
sur les contrats de vente. Us savaient donc que la cession , qui
était faite par Claude-Bernard Maréchal, ne le privait pas de sa
propriété, et qu’ils devaient rester ses créanciers. Voilà pourquoi
ils craignaient que leur débiteur les entravât dans la poursuite de
leurs droits.
f
Si la convention faite avec lui eût été une vente, auraientils stipule qu’il n’aurait plus de gratification à espérer? Devenus
propriétaires incommutables des. biens aliénés à leur profit, les
créanciers seraient restés nécessairement débiteurs du prixicon
venu , et dans aucun cas , J e vendeur n’aurait pu être p a y é de
la faculté de s’en faire payer.
Ce 'qui achève de convaincre rpue les créanciers ne se regar
daient pas comme acquéreurs , c’est qu’ils font renoncer ClaudeBernard Maréchal à toutes prétentions sur les biens cédés } s’il
viole sa promesse de ne pas recourir à des lettres d’état. 11 con
servait donc des droits sur les biens ; il n’en faisait donc pas la
vente; ce notait donc qu’un abandonnemcM , un simple mandat.
La peine à laquelle il se soumet de payer trois nsille livres
d’indemnité, n’est pas pour le cas où il ne livrerait pas les choses
par lui cédées ; c’était seulement pour le cas où , contre sa pro
messe , il obtiendrait des lettres d’etat. Ceux à qui il rcmenait
ses biens restaient donc scs créanciers ; ils craignaient donc la
suspension do leurs poursuites par des leitrcs d ’étal, qui ne
s’accordaient qu’aux débiteurs menacés d expropriation. Par le
traité , Claude-licriiiud Maréchal n’était donc pas exproprié; scs
créanciers conservaient donc le droit d’exercer leurs créances sur
Jcs biens cédés ; ils n’en faisaient donc pas l’acquisition.
4
�( ’G )
6° Les parties ajoutent que 'toutes diligences et poursuites
pour l’exécution du traité, et pour son homologation , seront
faites au x f i a is desdita biens , et chacune constitue , à cet cfiet,
un procureur à Paris, et un procureur à Moul ins.
S ’il eût été question d’une vente , la seule exécution entre les
vendeurs et les acquéreurs, eût été, d’une part, de payer le
prix convenu, et, de l’autre, de donner quittance; car les
objets cédés étant saisis, se trouvaient sous la main des créan
ciers, la tradition en était effectuée. 11 n’y aurait donc eu lieu
à aucune diligence, à aucune poursuite ultérieure. La consti
tution des procureurs au parlement de Paris, cl à la sénéchaussée
de Moulins , n'c&t eu aucun o b je t, surtout quand on voit que
ces procureurs ne sont chargés ni de p a y e r, ni de recevoir.
On conçoit au contraire que le traité n’étant quu’n simple
abandonnement, les créanciers ne pouvaient disposer des biens
qu’en qualité de mandataires responsables; et qu’ainsî des for
malités de poursuites leur étaient nécessaires pour parvenir à
à sc payer sur les biens abandonnés.
L a clause dont 011 parle est donc une preuve que les créan
ciers ne sc regardaient p a i comme acquéreurs de ces mêmes biens ,
et que les héritiers Maréchal n’en avaient pas perdu la propriété.
Ÿ Veut-on «ne nouvelle preuve que l'abandon était fait uni
quement pour faciliter la vente? Q u ’on lise la dernière clause
du traité : il y est dit que si Claudc-Bcrnard Maréchal fo rm e
aucun empêchement, directement ou indirectement à la vente
et disposition des b ien s , il demeurera déchu des sommes à lui
prom ises , et restituera celles qu’il pourrait avoir reçues, et p a r
corps , comme provenant d'effets saisis en justice.
L ’abandonncmcnl de Marie-Marc Maréchal porte aussi q u e ,
s’il fait aucunement obstacle à la venlc, il sera tenu de rendre la
gratification qui lui est promise.
�( 27 )
Pour l'exécution du traité, on devait donc procéder à la vente
des.biens; les débiteurs cedans y conservaient donc des droits >
en vertu desquels ils auraient pu former des empècbemens à
cette vente. L a gratification promise n’était donc pas le prix d’une
acquisition à payer par les créanciers , puisqu’elle était à prendre
uniquement sur les biens. C’est pour cela qu’on la déclare p ro
venant de deniers mis sous la main de la justice. L a saisie res
tait subsistante après le traité ; donc il n’était pas. un contrat
d’acquisition ; c’étail évidemment un abandonnement , qui ne
donnait aux créanciers que le pouvoir de vendre les biens , et
qui interdisait au débiteur la faculté de s’opposer à la vente que
voulaient en faire les créanciers pour se payer de leurs créances.
8 ° Après avoir examiné séparément les clauses caractéristiques
des deux actes
il n’offrira pas
mot n’y est pas
qualifient ni de
convention faite
de 1694 et i 0 q 5 , considérons leur ensemble :
davantage les apparences de vente. Ce dernier
écrit une seule fois; jamais les parties ne s’y
vendeurs, ni d’acquéreurs. Continuellement, la
entre les créanciers et leurs débiteurs est appelée
ou délaissement, ou abandon , ei les biens qui en font l’objet
ne sont pas désignés autrement que comme biens cédés, délais
sés, abandonnés, parce qu’en clFet les héritiers Maréchal ne
faisaient pas une vente, mais une cession, un délaissement, un
abandonnement.
Cette attention de ne point énoncer les mots vente et acqui
sition , cadre parfaitement avec toutes les clauses qu’on vient
d analyser, et d ou il resulte que les créanciers ont l'intention
lrès-formcllc de n ’être point considérés comme des acquéreurs,
mais comme voulant continuer la poursuite de leurs créances sur
les biens mis à leur disposition.
La preuve la plus convainquante-, s’il était possible d’ajouter
4-
�( =8 )
à celles qu’on a dcjà de celte vérin; , c’est que les deux actes
dont il s’agit n'expriment aucune espèce de libération en faveur
des héritiers Maréchal. Cependant , s’ils eussent réellement vendu
leurs biens à leurs créanciers , il serait arrivé que ceux-ci auraient
acquitté leurs’ débiteurs , soit du total des dettes , soit au moins
jusqu’àdue concurrence de la valeur des biens. 11 était impossible
qunl se fût opéré une vente , sans y exprimer de combien les
vendeurs se libéraient tinvers les acquéreurs.
P a s un seul m ot n ’est dit à ce su je t; les créanciers acceptent
l ’ab an d on des biens , et ils ne s’expliquent d ’aucune m anière
s u r l'effet que doit a v o ir cette cession v o lo n t a ir e , par rapp ort à
la
libération des cedans. A ssurém ent on ne prétendra pas que
c e u x -c i eussent entendu v e n d r e , sans fixer la so m m e dont ils
Se seraient trouvés déchargés. O r , il n ’u été spécifié ni la quotité
" des d ettes, ni la v a le u r des biens ab an d o n n és.
11 faut en c o n
c lu re nécessairem ent q u ’il n y a pas eu de vente, l o u l débiteur
q u i vend des biens à son c ré a n c ie r , p o u r se lib érer, fait exp rim er
la v aleu r des choses q u ’ il c è d e , et la quotité de i a d ette, dont
l'acquittem ent est r e c o n n u .
. ^
C'est donc un simple abandonnement qui a été fait aux créan
ciers , non pour les rendre acquéreur^, mais pour qu'ils eussent
à se payer sur les biens, soit par les revenus, soit, en cas
d’insutlisance, par la vente des fonds. C’est pourquoi on ne s’est
pus occupé d’évaluer les objets abandonnes , ni d’exprimer ce
ilunt les débiteurs se trouveraient libérés. La quotité dos dettes
acquittées pai^suile de cet abandonnement, devait dépendre de
ce que les créanciers toucheraient, soit par la perception des
fruits, soit par le produit des ventes qui pourraient avoir lieu.
En attendant qu'il y ait eu des aliénations opérées pttr les créan
ciers, en vertu du pouvoir qu’ils en avaient, les débiteurs cétlans restaient propriétaires : ils notaient que dépossédés cl »ou
�C 29 )
pas expropriés : ls qui bonis cessit, anlù rerutn venditioncm ,
utique bonis suis non caret. L . 3 , D. de cessionc bonorurn.
g 0 Une autre circonstance , qui achève rie démontrer que les
deux actes de iGg 4 et i 6g 5 ne sont pas des contrats de vente ,
c’est la perception du droit de contrôle. On sait q u e , dès l ’ori
gine , ce droit a été divisé en droit fixe cl droit proportionnel.
Tous acics contenant mutation de propriété mobilière ou im m o
bilière, étaient assuje'tis à un droit proportionné à la valeur des
objets aliénés ; tous ceux qui ne contenaient pas expropriation
de la part d’une partie au profit de l ’autre, ne devaient qu’un
droit fixe.
O r, pour l’acte du 27 mars i 6g 4 , passé à P aris, et celui du
aG août iGg 5 , passé à M oulins, il n’a été perçu qu’un droit fixe
de quarante sols. Les parties ne les ont donc présentés que
comme étant simple abandonnement, et les agens du fisc 11e les
ont pas non plus considérés comme opérant translation d e p r o - „
priété des mains des débiteurs dans celles des créanciers.
io° A tant de preuves que les actes de iGg{ et i 6 g 5 ne con
tiennent qu'une simple cession , et nullement un coutrat de vente,
se joint l’autorité de la chose jugée.
L ’abandonnemcnt des biens saisis devait en faciliter la vente ,
sans obstacle de la part des débiteurs. Celle vente 11e pouvait
être laite que judiciairement aux criées , parce que les héritiers
Maréchal, qui étaient restés propriétaires des biens par eux cédés,
n'avaient pas donné pouvoir d’en disposera l’amiable. Les créan
ciers eux-mêmes avaient formellement exprimé que l’abandonnement n'empêcherait pas les saisies de conserver leur force et
vertu; c’était positivement convenir que la vente n’aurait lieu
que par la contiuuation des poursuites commencées.
Celte marche contrariait sans doute les projcls des sieur et
�r
C So )
dame Revanger, qui voulaient se perpétuer dans la possession
des biens. La voie de l’adjudication leur faisait courir la chance
de n’être pas les derniers enchérisseurs. Un partage, où chaque
créancier aurait pris des biens pour une valeur proportionnée à
ce qui lui était dù , leur était plus convenable : c a r , selon toutes
les apparences, il y avait peu de créanciers sérieux , et il eût
cté plus facile de s'arranger avec e u x , pour les désintéresser.
L a dame le Maistre ayant mis pour condition dans l’acte
d ’abandonnement, par elle accepté, que les poursuites de saisie
seraient continuées, s’opposait au partage. 11 paraît que le sieur
Revanger ne put s’empêcher de reconnaître l’irrégularité qu’il y
aurait de ne pas faire vendre en justice des biens dont il n’avait
etc fait qu'une simple cession aux créanciers. Son épouse , au
contraire, s’obstina dans sa prétention; mais il refusa de l ’auto
riser à contester sur ce point, comme il avait refusé de l’autoriser
’ à renoncer aux successions de ses père et mère.
E n conséquence, la dame Revanger, seule et avec l'autorisa
tion du j u g e , forma une demande à fin de partage. Quelques
soi-disant créanciers se joignirent à e l l e , et d’autres s’unirent à
la dame de Maistre pour soutenir que les héritiers Maréchal
n'avaient pas été dépouillés de la propriété des biens dont ils
ïi’avaient fait qu’un simple abandonnèrent ; qu'ainsi, les créan
ciers n’avaient pa/s droit de se partager les biens; ils s’exposaient
à voir leurs opérations attaquées , s’ils ne suivaient pas exacte
ment la marche convenue par les actes de cession. Le but uni
que du traité fait avec les débiteurs saisis , avait etc d’enlever à
Cîaude-Iîernard M aréchal, tout prétexte de s’opposer à l ’aliéna
tion de scs biens pour l’ucquillcmcnt des dettes. Agir comme s’il
avait vendu les objets qu’il avait simplement abandonnes, c’é
tait lui fournir de justes motifs de contestations.
Ce$ moyens triomphèrent, et par sentence des requêtes du
�palais, en date du 26 mars 1697 , la dame Revanger et scs
partisans furent déboutés de leur demande à fin de partage, et
condamnés aux dépens; que madame le Maistre fut autorisée à
passer en fr a is de criées.
On ne peut pas objecter que , par celte sentence , le partage a
été jugé impraticable en nature. Les demandeurs avaient conclu
à ce que des experts fussent nommés pour procéder à l’estima
tion des biens et à la formation des lois. Les juges n ’onl pas
nicme accue lli ce préalable.
S'ils eussent pensé que les Créanciers étaient devenus proprié
taires des biens cèdes, ils n'auraient pas pu se dispenser de faire
droit aux conclusions tendant à une nomination d’experts, pour
reconnaître si le partage en nature était possible. C’est seulement
après un rapport qui aurait prononcé négativement, que la
demande afin de partager en nature aurait pu être rejetée. Bien
plus , dans ce dernier cas. m êm e, c'est par voie de licitafa’on que
les parlies auraient été obligées de procéder; tandis que c’est aux
criées quelles ont été renvoyées.
11 est donc évident que le seul point jugé par la sentence du
26 mars 1 6 9 7 , est que les créanciers n’étaient pas devenus acqué
reurs des biens à eux abandonnés ; qu’ainsi, l’action en partage
ne leur appartenait pas. C ’est pourquoi, le tribunal des requêtes
du palais n’a pas même voulu savoir si les biens étaient parta
geables en nature ; il a ordonné, non pas une licitation , ce qui
eût été admettre le droit de faire un partage, mais la continua
tion des poursuites aux criées.
11 a donc et« jugé contradictoirement avec la dame Revangcr,
que l’abandounomcju conl <>7ni par ses deux frères , n'élail point
une vente faite aux créauciers, lesquels, par conséquent ,
�n'avaient pas pu sc partager les biens cédés, nj même les liciter
entre eux; ils n’étaient autorisés qu'à les faire vendre judiciaire
ment.
Ainsi les clauses mêmes des deux actes d’abandonnement, et
l’autorité de la chose jugée, démontrent qu'ils ne sont pas des
contrats de vente , et que les héritiers ¡Maréchal, après les avoir
signés, n'ont pas cessé de conserver la propriété des objets cédés.
11 suit de là que la possession qu’en avaient conservée les sieuret
dame Revanger, continuait delre la même, c’est-n-dirc par iudivis et précaire , tant que les créanciers ne faisaient pas usage de
leur mandat pour vendreles biens compris dansl’abandonnemenl.
§ IV .
Nomination d'administrateurs-sêqiieslrcs .
N ’ayant pas pu obtenir le partage des biens abandonnés aux
créanciers, les sieur et dame Revanger se sont occupés d’em
pêcher que la vente en lût faite aux criées, comme l’avait o r
donné la sentence du 26 mars 1697. Ils commencèrent, suivant
que, l ’annonce le mémoire imprimé contre la dame Van Duerne,
par se faire nommer en justice administrateurs - séquestres des
biens saisis. C’est du 26 juillet suivant que date leur possession
en vertu de ce nouveau titre.
On sent bien que cette autorisation de retenir les biens, en
qualité d’administrateurs-séquestres, ne dépouillait pas les héri
tiers Maréchal de leur propriété. Les parts qu’ils avaient dans
ces mêmes biens n’en restaient pas moins indivises entre eux
et les sieur et dame Revanger ; ces derniers qui en nvaient
déjà l’administration, comme tenus des obligations de la tutrice,
�C 33 )
ajoutaient seulement à ce titre précaire, un autre titre de la
même nature, en se faisant nommer administrateurs-séquestres
des biens saisis.
Ainsi par celte nomination, contraire à toute idée de vente,
les rapports qui s'étaient établis entre les héritiers Maréchal et
ies sieur et dame llevanger n’ont point subi de changement :
ceux-ci sont restés possesseurs de biens qui étaient indivis , et
qu’ils administraient à titre doublement précaire.
§ v.
De la transaction du 10 décembre 1697,
\
Sans doute que le but des sieur et dame R evan ger, en se
faisant nom m er, au mois de juillet 1697 , administrateurs des
biens saisis, était d’en retarder la vente judiciaire, afin d’avoir
le temps de désintéresser les créanciers qui dirigeaient les pour
suites de saisie réelle. Ils se joignent donc au sieur F a rjo n el,
p e r e , et prenant la qualité de créanciers des sieur et dame Ma
réchal , père et m ère, lont une transaction le 10 décembre 1G97,
avec la dame le Maistrc et le sieur Q uesm ais, procureur au
parlement. Ces derniers n’agissent plus tant pour eux que pour
les autres créanciers non comparans, comme ils avaient fait eu
acceptant l ’nbandonnement consenti par Claude-Bcrnard Maré
chal ; ils ne stipulent qu’en leur propre et privé n o m , en qualité
de créanciers poursuivans la vente des biens saisis.
Les sieur cl dame Revanger et le sieur Farjonel, père, décla
rent que les poursuites faites sur la saisie réelle, et la sentence du
mois do mars précédent , qui avait rejeté la demande en partage,
les ont déterminés àoffrir de rembourser intégralement les deux
créanciers poursuivans. Us 11c mettent à celte proposition qu’uno
5
7
�( 5.4 )
seule condition , c’est que les poursuites pour les décrets , ins
tances et procès demeureront en surséance.
Au moyen des obligations solidaires et des garanties qui leur
sont consenties , la dame le Maistre et le procureur Quesniais
consentent à recevoir leur payement par à-compte de quatre
mille francs pour l’une , et de cinq cents francs pour l’autre y
chaque année , pendant lequel temps il sera sursis a u x pour
suites des décrets , instances et procès.
Les obligés solidaires doivent faire agréer le sursis ; et s’ils
n ’y parviennent pas , la dame le Maistre et le procureur Quesmais pourront continuer les poursuites, instances et procès y
comme ils auraient pu fa ir e auparavant ces présentes.
Néanmoins , les obligés solidaires s’engagent , soit à payer
les deux créanciers poursuivant , soit à leur parfaire ce que
la continuation des poursuites, au cas qu’elle ait lieu, n’aurait
pu leur procurer pour solder intégralement leurs créances : à
cet effet, les deux poursuivans subrogent à leurs droits les obligés
solidaires, mais sans aucune garantie, ni restitution de deniers.
De plus , les deux poursuivans consentent que les obligés
solidaires touchent les revenus des biens saisis , et retirent les
sommes provenant des baux judiciaires, lesquelles sont entre les
mains du commissaire aux saisies réelles.
E n fin , il est convenu qu’il ne pourra être procédé à la vente
des biens saisis , sans la présence de la daine le Maistre et
du procureur Quesinais; et que le prix en sera remis, savoir:
les deux tiers à l'u n e , et le tiers à l’autre.
Telle est, en substance, la transaction du 10 décembre 1697,
par laquelle ou prétend que les sieur et dame Rcyangcr ont ac-
�( 55 )
quîs des créanciers, les biens abandonnés à ces derniers parles
deux frères Maréchal. D’abord , on a vu , dans le paragraphe I I I ,
que les héritiers Maréchal n’ont pas fait de vente à leurs créan
ciers, qui, par conséquent, n'ont pu revendre ce qu’ils n’avaient
pas acheté. La transaction elle-même prouve que les créanciers
n’étaient pas propriétaires des biens que les héritiers Maréchal
n’avaient mis à leur disposition qu’à titre d’abandonnement.
E n effet , elle rappelle la sentence qui avait repoussé la de
mande en partage , et déclaré que le décret, ou autrement dit ,
la saisie réelle des biens abandonnés continuerait d’être pour
suivie. Les sieur et dame Revanger reconnaissent eux-mêmes
que telle a été la de'cision de cette sentence , puisque , pour
condition a 1 offre qu’ils font de payer les deux créanciers saisis6ans , ils exigent que la poursuite du décret soit suspendue.
Les deux poursuivrais ne se regardent pas davantage comme
propriétaires des biens , puisqu’ils se réservent d’en poursuivre
la saisie par eux commencée , si le sursis ne pouvait avoir lieu.
11 résulte de là que les parties qui transigeaient ne regardaient
pas l’abandonncmcnl fait par les héritiers Maréchal comme une
veute , puisque les biens abandonnés n’en devaient pas moins
être poursuivis en justice , par,les créanciers qui avaient accepte
l’abandonnement.
La déclaration des sieur et dame R evan ger, concernant la
sentence qui avait rejeté la demande en partage des biens aban
donnes , est une adhésion formelle à cette décision. La condi
tion qu’ils imposent de surseoir à la continuation des poursuites
ordonuées parcelle sentence, estim e reconnaissance formelle
que les créanciers avaient droit de poursuivre les biens à eux
abandonnes, et que par conséquent ils n’en étaient point acque5.
�,
( 36 )
reurs. En effet , s’ils en fussent devenus propriétaires , les
poursuites du décret forcé auraient été anéanties; ils n’auraient
eu à procéder entre enx que par voie de partage , seul moyen
de faire cesser l'indivision entre des co-propriétaires. Par suite
de l’action en partage , si les Liens n’étaient pas susceptibles
d’être divisés en nature, il n’y avait lieu qu'à une licitation,
et nullement à la continuation des poursuites de la saisie faite
antérieurement sur les débiteurs à qui Jes biens saisis auraient
cessé d’appartenir.
Ainsi , non-seulement il a etc jugé avec les sieur et dame
Revanger , par la sentence du 26 mars 1 6 9 7 , que l’abandonnement consenti p a rle s frères Maréchal n’était pas une vente,
mais encore les sieur et damo Ilevanger ont reconnu eux-mêmes
cette vérité, par la transaction du 10 décembre de la même
année. O r , sile s créanciers qui ont accepté rabandonnement
des biens , 11’cn sont pas devenus acquéreurs , ils n'ont pas pu
les revendre ; cl , en effet, la transaction dont il s'agit n’est pas
un contrat de vente.
D ’abord , la dame le Maistre et le sitfur Quesmais , qui transi
gent avec les sieur et dwine Revanger et le sieur iu r jo n c l , porc,
n ’agissent qu'en leur privé nom ; cependant s’ils eussent entendu
faire la vente des biens abandonnés , ils auraient stipulé tant
pour eux que pour les autres créanciers non comparons, puisqnc
les biens auraient également appartenu à ceux-ci, dans le cas ou
l'abandonnemcnt, fait au piolit de tous , cùi été une vente.
En second lieu, la dame le Maistre et le sieur Quesmais ne
transigent que sur leurs créances personnelles; ils s'assurent des
moyens d ’en être payés , et ne s’occupent nullement des autres
créanciers qui auraient pourtant été co-propriélaircs des biens ,
si l'ubandomicmeni ciii clé une vente.
�( 57 )
Troisièmement, la dame le Maistrc et le sieur Quesmais ne
livrent pas les biens saisis, comme ils auraient fait, s’ils eussent
entendu les revendre ; ils se contentent de subroger à leurs
'''■ droits de créanciers poursuivans , ceux qui s’engagent solidaire
ment à les rembourser intégralement.
D o n c , la transaction du 10 de'cembre 1697 n ’est pas une
vente faite par la dame le Maisire et le sieur Quesmais aux
sieur et dame Revanger; elle subroge seulement ces derniers aux
droits de poursuivre le décret force , pour parvenir à la vente des
biens abandonnes. Les subrogés qui étaient en possession des'
biens saisis n’ont point fait usage de leur subrogation pour les
faire vendre; ils ne sont donc restés en possession , que comme ils
l ’étaient avant la transaction , c’est-à-dire, à titre de co-propriétaires par indivis avec les héritiers ¡Maréchal , et au double titre
précaire d’administrateurs de tutelle et de séquestres.
Les sentences qui ont homologué cette transaction , et autorisé
les sieur et dame Revanger, en qualité de créanciers de la succes
sion du sieur de Rompre, à jouir des biens de ladite succession
pour l ’usage qu’ils demandaient, savoir : pour acquitter les dettes
avec les fruits , comme ils s’y obligeaient par la transaction
de iC)97,n’oi t rien changé à la nature et aux effets de cetacte; elles
prouvent au contraire qu’ils n’entendaient nullement avoir ac
quis les biens : qu’ainsi les abandonnemens n’étaient pas des
ventes; et que la transaction, faite ensuite avec les créanciers
saisissans , n’était pas une revente. Au surplus ces sentences,
comme la transaction elle m êm e, sont choses étrangères aux
héritiers M aréchal qui n’y ont point ¿lé panics.
�C 38 )
§• V I.
Main levée de la saisie réelle.
Il est à présumer que la dame le Maistre et le procureur
Quesmais étaient les seuls créanciers sérieux ; car la transaction
faite avec eux a tellement assuré aux sieur et dame llevanger la
possession des biens saisis, qu’ils en sont restés les détenteurs ,
sans qu’aucun autre créancier les ait forcés à suivre la procédure
de vente. On voit aussi dans la transaction q u e , si la vente de
quelques objets saisis était effectuée , la totalité du prix serait
re m ise , en déduction de leurs créances , savoir : les deux tiers
à la dame le Maistre, et l’autre tiers au sieur Quesmais ; ce
qui prouve que d'autres créanciers n ’avaient rien ù y prétendre.
De p lu s , il parait, par des conclusions signifiées à monsieur
et madame Van D u c rn c , le 20 février i 8 i 5 , que la saisie faite
à la requête des poursuivans, le 17 novembre 16 9 2 , était pour
avoir payement d’un capital de vingt-deux mille livres seulement;
il en résulte que les dettes dont étaient grevés les biens saisis,
étaient loin d’absorber leur valeur.
Voilà ce qui explique pourquoi les sieur et dame Revangar
tenaient à ne pas les laisser vendre, et pourquoi, après avoir
assuré le remboursement des deux créanciers saisissans , ils
n ’ont point cté troublés dans leur possession par d ’autres créan
ciers.
D e v e n u seul héritier de ses père et mère , depuis que son frère
avait prononcé scs vœux monastiques, Claude-Bernard Maréchal
était donc le seul qui inquiétât sa sœur et son beau*frere , par
de fréquens voyages au chûteau de Rompre , pour avoir compte
des biens abandonnés. Mais scs importunites , qu’on éludait
�( 59 )
chaque fois sous différons prétextes , p riren t fin lors de sa d ern ière
apparition en B o u r b o n n a i s , dans l’année 1 7 1 6 .
Sa mort clandestine , la disparition des titres et renseignemens
qu’il avait apportes avec l u i , le domicile éloigné de sa veuve
et de scs enfans, paraissent des circonstances favorables aux sieur
et dame Revanger , pour obtenir, sans contradicteur légitime ,
un litre apparent de propriété sur les biens qu’ils détenaient à litre
précaire.
Depuis vingt ans que la transaction du 10 décembre 1697 leur
avait assuré le silence des deux créanciers poursuivans, il n’avait
plus été question de la saisie réelle, qui n était plus à craindre;
c'est seulement dans le courant de l’année qui a suivi la dispax’ition de Claude-Bernard M aréchal, qu’ils imagiuent de former
une demande en main-levée de celte saisie, contre des créanciers
désintéressés, dont la plupart ne comparaît pas.
Par celte demande , les sieur el dame Revanger reconnaissent
que la saisie réelle, qui datait du 17 novembre 1 6 9 2 , n’avait
pas cessé de subsister, soit après 1 abandonnement des frères
Maréchal, soit après la sentence qui a rejeté la demande en par
tage des biens abandonnés , soit après la transaction qui a suivi
cette sentence. C’était donc reconnaître que les créanciers n’étaient
pas devenus acquéreurs des biens mià à leur disposition. Ces'’
biens 11'ayant été aliénés ni parles créanciers, eu vertu du pouvoir
qu’ils en avaient re ç u , ni par leurs subrogés, étaient donc restés
la propriété de Claude-Bernard Maréchal, comme devenu seul
héritier de scs père et mère.
D an s celte position , les sieur et dam e R ev an g er étaient-ils r e
devables à d e m a n d e r la m ain -le v é e de la saisie réelle ? L a r a is o n
de douter est q u ’ ils .'laissaient
c o m m e su b rog és au x c ré an cie rs,
li n e ffe t, la scntcncc rend ue s u r le u r d e m a n d e , le 2 5 n o v e m b r e
�( 4« )
17 i r , aux requêtes du palais, porte expressément : que la main
levée leur est accordée } vu les subrogation et réunion dans leurs
mains des droits des créanciers poursuivons et opposons.
Mais ce qui fait décider que les sieur et dame Revanger avaient
intérêt à obtenir la radiation de la saisie réelle , c’est qu’ils étaient
co-propriéiaires des biens saisis , lesquels étaient indivis entre eux
et Claudc-Bernard Maréchal.
A in s i, cette sentence, et celle rendue le 5o juin 1 7 1 8 , portant
que la précédente est commune avec les créanciers qui n’y avaient
pas figuré, n’ont pas eu d’autre eflet que de dégrever les biens ,
tant de la saisie réelle, que des oppositions. 11 n’en est pas r é
sulté que l’indivision ait cessé entre les co-propriélaires.
E n vain voudrait-on tirer argument de ce qu’après avoir or
donné la radiation de la saisie, ces sentences déclarent les sieur
et dame Revanger propriétaires incommutables ? Cette déclaration
n’est pas une disposition , mais la. simple énonciation de la con
séquence, qui résultait du dégrèvement des biens. Naturellement,
ceux qui obtenaient ce degrèvement , devenaient propriétaires
incommutables. C’est donc avec raison que les sieur et dame
Revanger ont été déclarés n’avoir plus à craindre les créanciers
saisissans et opposans ; ¡1^ devenaient effectivement propriétaires
incommutables des portions qui leur appartenaient, comme leurs
co-propriétaircs le devenaient également des autres portions ; la
main-levée profitait également aux uns et aux autres.
En déclarant l’incommutabilité de la propriété, les scntcnccs
n ’ont pas l’ait ccsscr l’indivision ; elles n’ont pas pu dépouiller
les co-propriétaircs absous, pour transmettre leurs portions aux
co propriétaires présçns ; ceux-ci n’ont pas cto déclarés seuls pro
priétaires , car il n’était question que d’une main-levée de saisie
�C 4* )
r c e lle , et nullement de savoir à qui appartenaient les Liens saîsi'7
D ’ailleurs les paities intéressées à défendre leur co-propriété, n'a
vaient pas été mises en cause. Si donc il était possible de considérer
les deux sentences comme ayant porté une disposition spoliatrice,
on ne pourrait pas les opposer aux repiésentans de Claude-Bernard
Maréchal ; ce serait pour eux res inter alios acta.
Ainsi, il n’est pas douteux que les deux sentences de 1 7 1 7 et
1 7 1 8 n'ont eu d’autre effet que de débarrasser les biens de toutes
saisies et oppositions , et que les sieur et dame Revanger ont
continué de les posséder par indivis et à titre précaire.
A r t i c l e
II.
L a possession des sieur et dame Hevanqer et de leurs descendant
n ’a pas p u produira la prescription.
I . es biens revendiqués aujourd’hui sont situés dans le ressort
de la coutume de Bourbonnais ; c’est donc à scs dispositions qu’il
faut se référer, pour savoir s’ils ont pu être acquis p a r la pres
cription ; car le Code civil, dans son dernier article, veut que les
prescriptions commencées avant sa publication, soient réglées par
les anciennes lois.
Suivant l’art. a 3 de la coutume de Bourbonnais , l’on ne peut
prescrire les biens et droits immobiliers que par trente ans. A
cette disposition s’appliquent les principes du droit c o m m u n ,
puisés dans les lois romaines, ainsi que l ’explique A u r ou x des
l'ommicrs , savant commentateur de cette coutume.
L e premier de ces principes est que la possession seule pen
dant trente a n s, suffit pour accomplir la prescription, sans
G
�( 42 )
qu’il soit besoin de titre. Celui qui a joui aussi long-temps,
sans trouble , est censé avoir acqnis de bonne fo i, à moins que
Je contraire ne soit prouvé ; voilà pourquoi , lorsqu’il n’y a
pas de tilre, la partie qui oppose la prescription, n’a autre
chose à dire si ce n’est : possideo quia possideo.
Mais s’il est représente un litre, quelqu’ancicn qu’il so it, il
fait disparaître loule présompiion , cl le possesseur est jugé ou
légitime propriétaire, ou sans droit pour conserver l ’héritage,
selon que le tilre produit, soit par l u i , soit par le réclamant,
est ou non de nature à transmettre la propriété.
Tel est le second principe du droit commun sur la prescription
de trente ans ; il a toujours reçu son application dans les cou
tumes qui n’ont aucunes dispositions contraires , comme celle
du Bombonnais; c’est ce qu’attesie Auroux des Pommiers , dans
son Commentaire, sur Tart.
23 de cette coutum e, n° 52 et
suivans.
C'est de ce principe que s’csl formée la règle si commune : a d
primordium tituli poslerior semper fo n n alu r cvcnlus. Elle est
tirée de la loi première au Code de irnpon. lucrati. dcscript. et
n’est que la confirmation de la loi cliirn , au digeste de adquir.
vel arnitl. possess. où on lit : origo nanciscendœ possessionis
exquirendu est; il faut rechercher l ’origine de la possession. S ’il
n’y a pas de titre, elle est présumée de bonne fo i; si un titre
esi représenté, il faut s’y référer.
On peut voir sur ce principe incontestable le Répertoire uni
versel de Merlin , nu mot Prescription , section r, §. V I , art. 2.
« On ne peut pas présum er, dit*il, que celui qui jouissait, il y
» a cinquante ou cent ans , en vertu d’un b a il, ou à tilre d’en» gagement, a il, par la suile, interverti le tilre de sa posscs-
�C 43 )
» sion et soit devenu acheteur , donataire , échangiste , e tc ., du
» bien qui lui était primordialement affermé ou engagé. »
A celte occasion, le même auteur tfte le fameux arrêt de Paris',
du 21 avril i 5 5 i , rapporté dans le recueil de D u lu c , livre 9 ,
titre 5 . Cet arrêt a condamné levêque de Clermont à rendre à la
reine Catherine de Médicis , la seigneurie de la ville de Clermont,
quoique depuis plusieurs siècles elle fut possédée par les évêques
de cette ville, 11 était prouvé par le titre originaire que cette sei
gneurie avait élé donnée en garde à un évêque de Clermont par
Jea n de Bourbon que représentait la reine.
C’est sur le même fondement que repose l’incapacité de l’usager
et de l’usufruitier , de prescrire la propriété même par la posses
sion la plus longue. « Tant qu’il porte sa qualité d’usager (dit
» Coquille), il ne peut acquérir droit de propriétaire. »
D u m o u l i n , s u r la cou tum e de P a r i s , titre I , §. X I I , g lo se 7 ,
an m ot Prescription , dit expressém ent que la possession plus que
c e n te n a ire , ne peut p ro d u ire la p r e s c r ip t io n , si le titre n est pas
c elu i d’un propriétaire.
D ’Argcntréc, qui n’est pas toujours de l’avis de D u m o u lin ,
embrasse le même sentiment en ces termes : ciim apparet titulus ,
ab eopossessioncslegem accipiunt; dès qu'il parait un titre , il fait
loi pour juger de la nature de la possession.
I.a possession n’est rien , dit encore M o rn a c , sur la loi i 5 ,
au digeste de publiciancl in rem actionc, si elle esl contraire au
litre : si contra tilulurn jiossessum est.
Après ces diverses citation s, le savant auteur du R é p e rto ire u n i
v ersel de ju ris p ru d e n c e ajoute q u ’ il serait aussi facile que superflu
d ’a c c u m u lc r s u r ce point un p lu s gran d n o m b r e d ’a u to r ilé s ; « de
6.
�»
»
»
u
»
»
C 44 )
leur concours, dit i l , de leur nombre, de leur unanimité, s’esr
forme cet axiome, le plus connu comme le plus sage de noire
droit français : a d primordium tiluliom nis j'orniatur evenlus.
II y a des siècles que celle maxime forme la règle des tribunaux
on v o it, en parcourant les arrêtistes , quelle a servi.de base à
une multitude d’arrèts ».
*
L ’auleur du Répertoire rappelle ensuite sept ou huit arrêts ,
qui ont jugé que la possession la plus longue n ’était d’aucune
considération, quand le titre qui lui avait servi de fondement
elait vicieux , c’est-à-dire incapable de transmettre la propriété.
« A in si, ajoute-t-il , si j’ai possédé pendant un siècle, el qu’on» recouvre un litre précaire, 011 présume que j’ai- toujours posn sédé au même titre j et dès-lors je 11e puis demeurer en pos—
» session , du moment où le propriétaire s y oppose. »
On ne peut donc pas douter, comme nous l’avons annoncé,,
que le titre qui est représenté ne rende ineilicace la possession
la plus ancienne , s’il n'est pas de sa nature translatif de pro
priété, parce qu’il démontre que la possession n’a pas commencé
de bonne foi ; ce qui s'entend , lorsque le possesseur n’a pas eu
jtts/a opinio acquisili dominii. On dit alors que le] tilre est
vicieux ; cl le vice , comme 011 l’a démontré dans l’article précé
dent, se perpétue de succession en succession, in infinilum ,
parce que l'héritier élanl la continuation de la personne du
défunt, celui qui a commencé à posséder un bien , en vertu d’uu
titre qui ne lui en attribuait pas la propriété , est censé vivre dans
sa postérité, qui aux yeux de la loi est la même personne.
Examinons donc si les titres, sur lesquels 1 héritière des .sieur
et dame Revanger appuie sa longue possession , sont ou non
translatifs de propriété , nous y trouvons deux vices essentiels,,
�( 45
)
dont un seul suffirait pour établir que les auteurs de cette hé
ritière n’ont pas pu posséder de bonne f o i , c’est-à-dire , en qua
lité de propriétaire, animo domini , les héritages réclamés.
L e premier de ces vices est l ’indivision. E n effet, la dame
R e v a n g e r, eu vertu de son contrat de mariage , a été mise en^
possession par sa mère de tous les biens paternels et maternels ;
de eeux-ci, parce qu’il lui bü était fait donation universelle et
entre-vifs; de ceux-là parce qu’une des conditions de la dona
tion était qu’elle administrerait conjointement avec son m ari
la tutelle dont avait été chargée la donatrice.
Dans les biens maternels se trouvaient la légitime coutumière
des deux frères Maréchal , et la légitime féodale de l’ainé :
ces deux sortes de légitimes n’avaient pas pu être comprises
dans la donation. A in s i, dans les mains de la dame Revanger,
la totalité des biens de sa mère sc nouvaii indivise, puisque
les portions légitimaires de ses deux frères n’en avaient pas été
séparées.
La renonciation de la dame Revanger à la succession de
sa m ère, n’a pas pu changer par la suite cet'état d’indivision,
.puisque la renonciation n ’a été faite que pour s’en tenir à la
donation.
»
A l ’égard des biens du père , décédé dès avant le mariage
de la dame Revanger, ils appartenaient évidemment pour un
tiers à elle , et pour chacun un tiers à scs deux frères’. Il est
vrai que postérieurement elle a renoncé à la succession de son
père ; mais comme c’était pour s'en tenir à la donation que sa
mcrc lui avait faite de l’unîvcrsalilé de scs biens, droits et ac
tions , elle avait à reprendre sur cette succession la part de
sa mère dans la communauté qui avait existé entre cotte dernière
�( 46 )
et sou mari. Elle a v a it, en o u tre , à exercer les reprises ma
trimoniales de sa mère qu’elle représentait. Les biens paternels
dont elle avait pris possession , étaient donc, comme les biens
maternels, dans un état d’indivision entre elle et ses deux frères.
Un partage pouvait seul faire cesser la copropriété ; et ja
mais il n’p existé de partage. O r , suivant le droit commun ,
celui qui possède par indivis, ne peut jamais prescrire les portions
de ses co-propriétaires. Il y avait des coutumes qui disposaient
autrement, mais elles établissaient un droit exorbitant.
Au reste, sans nous appesantir sur la question de savoir quel
était effectivement le droit commun sur ce point, il sufiira de
dire que la coutume du Bourbonnais décide formellement, que
l’indivision est un obstacle perpétuel à cc que la prescription
s’opère au profit du possesseur par indivis. L ’article 26 de cette
coutume s’exprime en ces termes :
« Quand aucunes choses sont tenues et possédées en com» mun et par indivis , l’on ne peut acquérir ni prescrire le
» droit l’un de l ’autre, au pétitoirc ou possessoire, par quel» que laps ou espace de temps que ce soit. »
A in s i, par la soûle raison que les biens dont les. sieur et
dame Revanger ont été mis en possession, étaient indivis entre
eux et les héritiers M aréchal, jimais cette possession n’a pu
leur servir ù prescrire les portions qui appartenaient dans ces
mômes biens aux deux frères Maréchal, et qui, depuis la mort
civile du plus jeune, sont devenues la propriété de l'aine, ClaudeBernard Maréchal. L ’indivision avertissait perpétuellement les
sieur et dame Revanger cl leurs héritiers in in/m it uni , qu’ils
n’étaient pas propriétaires des portions revenant à Claude-Bernard Maréchal. I'ar conséquent, ils n’ont jamais pu les pos*scd.cr animo ¿lomini.
�( 4 0
,
Un second vice qui se rencontre dans Ja possession com
mencée p arles sieur et dame Revanger, et continuée par leurs
descendans , résulte de ce que leur contrat de m ariage, qui est
le titre fondamental de cette possession , les chargeait conjointe
ment de tous les engagemens contractés par la mère donatrice , à
l ’occasion de la tutelle qui lui avait été déférée, et dont elle leur
remôltait l'administration.
Maric-Marc Maréchal, il est v ra i, était le seul enfant de la
donatrice qui fût resté en tutelle; mais Claude-Bernard M aré
chal , quoiqu émancipé par mariage, n’avait point obtenu les
portions qui lui revenaient de la succession de son père ; au
cun compte de tutelle ne lui avait été rendu ; aucun partage
de cette succession n ’avait été fait ; elle était donc restée indi
vise entre lui , son frère et sa sœur. En se chargenut de tous les
cnGaeemens
de la mère tutrice,' et d’administrer Ja tutelle du
o O
plus jeune de scs frcrcs, la dame Revangerse chargeait néces
sairement aussi d’administrer Ja portion appartenant à l’aîné de
ses frères, puisque le tout était dans un état d’indivision.
Depuis la renonciation que la dame Bevanger a faite aux deux
successions paternelle et maternelle, après le décès de sa mère,
elle n'est pas moins resiéc en possession de tous les biens indivis;
par conséquent elle a continué d’administrer, tant ce qui lui
appartenait dans ces mêmes biens, en qualité de donataire du
chef de sa m ère , que ce qui appartenait à scs deux frères, en
leur qualité de k'gitimaiies sur les biens maternels , et d’héritiers
des biens paternels.
Cette administration ne pouvait cesser que par un compte rendu,
et délivrance de la part revenant dans les biens, soit aux deux
frères Maréchal , soit à l’aîné après la mort civile du plus jeune.
Jamais cette opération n’ayant eu lieu , la possession des sieur et
�( 48 )
dame Revanger s’est perpétuée jusque dans leur postérité, à litre
dadministrateurs des portions appartenant à C laude-Bernard
Maréchal.
O r , la qualité d'administrateur ne confère qu’un titre pré
caire , c’est-à dire, un titre par lequel on ne possède pas pour soi,
mais pour celui à qui la chose appartient. Voila pourquoi il est
de principe qu’ un tuteur, un dépositaire, un mandataire, enfin
un administrateur quelconque ne peut jamais prescrire les biens
qui lui sont confiés, quoiqu’ancienne que soit sa possession ;
il est continuellement averti par son titre , que sa possession
n ’est pas celle d’un propriétaire.
Cette vérité est trop connue pour avoir besoin d’autorité ;
on peut voir au surplus l ’ othier, en son T r a i t é de la possession
et de la prescription; D om at, au titre où il traite de la même,
matière; D u n o d , dans son excellent Traite d e l à prescription.
] c Code civil a consacré ce même principe dans sou article
2256 , non pour introduire un droit nouveau, mais pour con
firmer l'ancienne législation, q u i, d’après les lois romaines,
avait interdit la faculté de prescrire par aucun laps de temps ,
à quiconque n'était possesseur qu’à litre précaire, non animo
domini.
De cette discussion il faut conclure que les titres , en vertu
desquels a commencé la possession des biens revendiqués, étant
représentés, il n’est plus possible de fonder la prescription sur
le seul laps de temps; c’est la nature de ces titres qu’il faut
consulter, pour savoir s’ils ont été capables de transmettre la
propriété des objets réclamés.
On vient de prouver qu’il s’y rencontre deux vices, dont un
seul suffirait pour empêcher à jamais de prescrire : l’u n , fondp
�(49 )
spécialement sur l'article 26 de la Coutume du Bourbonnais, est
l ’état d’indivision où étaient les biens à l’origine de la possession, et
où ils sont constamment restés dans les mains des sieur et dame
Revanger et de leur postérité. L ’autre est la qualité d’adminis
trateurs que ces .derniers ont eue pour les portions indivises ap
partenant aux héritiers Maréchal; qualité qui constitue un titre
précaire, qui, d’après les principes les plus certains , n’a jamais
permis à la prescription de courir au profit des sieur et dame
Revanger et de leurs desceudans.
Réponse a u x Objections.
L e s adversaires de M. et madame V an Duerne ne peuvent
se dissimuler toute la force des principes qui lour refusent la
prescription. C'est pourquoi, en désespoir de cause, ils imaginent
un système qui , suivant eux, couvrirait les deux vices inhérens
au titre de leur possession.
i ° On dit que ies deux frères Maréchal ont vendu leurs droits
successifs à leurs créanciers, par actes des 27 mars 1694 et
26 août 1 6 9 5 ; q u e, dès-lors, ils ont perdu toute prétention sur
les biens de leurs père cl mère. D où 1 011 conclut que madame
Van Duerne, qui les Représente aujourd’hui, est nou-recevable
dans sa demande en revendication.
Réponse. Ou a vu dans l’article prccedent, §. l l l , que , par
les deux ailes de 1694 et 1 6 9 5 , les héritiers Maréchal n’ont
rien vendu à leurs créanciers, que ces deux actes 11c contiennent
qu ’un simple abandonnemeut , dont tout l ’cilct élait de donuer
aux créanciers le pouvoir de se payer sur les biens abandonnés,
soit par la perception des fruits , soit sur le prix de la vente.
On ne répétera pas ici toutes les preuves qui ont été tirées de*
7
�( 5o )
deux actes m êm es, et de ce qui en a été la suite, pour démon
trer q u e , loin de trouver les caractères d’un contrat de vente
dans ces deux actes, on remarque l'intention formelle, de la part
des créanciers, de 11’être.pas acquéreurs / et, au contraire, de
conserver leur qualité de créanciers poursuivans la saisie réelle
des biens laissés à leur disposition.
Si donc les héritiers Maréchal n'ont pas e'té expropriés par
rabandoiinement qu’ils ont consenti , s’ils sont restés co-proprie'taires des biens par eux cédés, pour les portions indivises
qui leur appartenaient , la possession qu’en avaient les sieur et
dame Revanger continuait d’être, après rabandonnement, comme
elle était auparavant, c’est-à-dire, par indivis, et à titre pré
caire.
Il est à remarquer, au su rp lu s, que Claudc-Bernard M aré
chal n’a pas même abandonné la totalité de ses droits successifs.
11 s’est expressément réservé les objets que son pere avait acquis
de la dame Longeval. Ces objets au moins seraient restés possé
dés par les sieur et dame Revanger, en état d’indivision, et à
titre précaire.
n® On insiste, et on soutient que, même en supposant aux actes
de 1694 cl 1695 la nature d’un simple abandonncmcnt , les
créanciers avaicnl du moins le pouvoir de les vendre, cl rfu’en
cilct ils les ont vendus aux sieur et dame Revanger et au sieur
F a rjo n c l, père, par transaction du 10 décembre 1697. O r , dit011, depuis ce contrat d'aliénation, les sieur et dame llcvnnger
‘ont commencé une possession anima dom ini , qui a été capable
de iairc courir la prescription.
fti'fjonsc. 11 est faux que les créanciers à qui rabandonnement
des biens avait été consenti, les ayent vendus par la transaction
�( 5i )
de 1697. 11 a été démontré dans l'article précédent, §. V , que
cette transaction n’était pas le fait de l’union des créanciers; quo
les deux seuls poursuivans y figurent , et seulement en leur
propre et privé 110m; que loin de stipuler comme vendeurs, ils
se réservent expressément la {acuité de suivre le décret forcé ,
si le sursis à leurs poursuites n’était pas consenti par les autres
créanciers ; qu’enfin , ils se bornent à subroger à leurs droits les
sieur et dame Revanger, et le sieur F arjo u el, qui s'obligent soli-,
dairement à les rembourser.
L a transaction dont il s’agit n’était donc pas un contrat de
vente par les créanciers ; autrement la saisie réelle faite par eux
eut cessé d’exister par cc seul fait. O r , on a vu au même article,
§. V I , qu’il n’avait été que sursis aux poursuites par celte tran
saction, et que la saisie subsistait encore en 1 7 1 7 , puisqu’à cette
époque les sieur et dame Revauger en ont fait eux-mêmes pro
noncer la main levée.
A in si, par la transaction de 1 697, ils étaient encore, comme
a u p a r a v a n t , possesseurs par indivis et à titre précaire, des por
tions de Claudc-Bernard Maréchal, qui avait réuni sur sa tête les
droits de son frère entré en religion. Il est résulté seulement de
cette transaction que les sieur et dame Rcvanger ont augmenté
leurs droits sur les biens indivis , par leur subrogation aux droits
des deux créanciers poursuivans.
5“ Ab an d on nant encore la transaction de 16 9 7 , et pressés prr
l ’é v id e n c e , les adversaires se retranchent dans la sentence du a 5
n o v e m b r e 1 7 1 7 , suivie de celle du 3o juin 1 7 1 8 , qui a o rd o n n e
l ’exécution d e la précédente. E u donnant niain-levee de la saisie
r é e ll e , la p re m iè re de ces sem ences a déclaré les sieur cl dam e
R c v a n g e r propriétaires iu c o m m u tab lc s des biens qui avaient ét«
saisis.
7*
/
�(52 )
‘ On prétend qu’au moins à partir du jour de ce prononcé ,
les sieur et dame Revauger ont commencé une possession à titre
de propriétaires -, ce qui a dù faire courir Ja prescription.
Réponse. Il ne faut pas confondre dans un jugement les dis
positions qui statuent sur l’objet de la demande, avec l’énoncé
des conséquences qui en doivent résulter. Ce qui est essentielle
ment disposition fait sans doute loi entre les parties qui ont été
appelées au jugement ; mais ce qui est déclaré seulement , comme
conséquence , ne doit avoir que l'elfet qui résulte naturellement
de Ja décision.
De quoi s’agissait-il lors de la sentence de 1 7 1 7 ? D’obtenir
m ainlevée de la saisie réelle, attendu les subrogation et réunion
des droits des créanciers dans les mains des sieur et darne Revanecr.
O On ne soumettait au tribunal aucune contestation relative à la propriété •, c’est pourquoi les créanciers, saisissans
et opposans , avaient été les seuls assignes sur la demande.
Assurément ils n'avaient qualité que pour défendre relativement
à la radiation de la saisie , pour la consentir ou la contester.
Ils étaient parfaitement étrangers à tout ce qui pouvait con*
cerner la propriété des biens saisis.
La sentence de 1 71 7 n’ayait donc de disposition à rendre que
concernant la main-levée requise ; elle l ’a prononcée, parce
que nul créancier n’a élevé de contestation sur ce point. Si la
semence a ensuite, ajouté, qu'en conséquence d e l à radiation de
la saisie , les demandeurs demeuraient propriétaires ¡ucommutablcs , celte déclaration n'était pas une décision , mais une expli
cation de l 'cilcl que devait avoir Ja radiation. D onc, cet cllctne
doit s’entendre que jusqu'à concurrence des droits des deman
deurs , sans leur eu attribuer aucun nouveau.
O r , les d em and eurs n ’étaient pas p ropriétaires de la totalité
�%
(55 )
des biens saisis; par conséquent , en les déclarant , par suite de
..la radiation prononcée, propriétaires inconimutables , cela vou
lait d ire , pour la portion qui leur appartenait. Aussi ne voit on
pas que la sentence ait déclaré les sieur et dame Revanger pro
priétaires libres de la totalité des biens , mais simplement que
leur propriété, telle qu'elle consistait , se trouvait libérée. C’est
ce qu’on a établi plus au long , dans le §. V I de l’article précédent.
Ainsi la sentence de 17 17 n’est pas un litre en vertu duquel
les sieur et dame Revanger ayent pu posséder, animo domini,
les portions indivises qui 11e leur appartenaient pas.
«s
Mais supposons que celle sentence ait déclaré par voie de dé
cision, çt non par simple conséquence, l’incommulabililé de la
propriété des sieur et dame Revanger; supposons encore que
la même sentence ait spécilié qu’elle entendait leur attribuer la
totalité des biens, et non la seule portion qui leur appartenait;
car il faudrait ces deux circonstances réunies pour que l ’argument
des adversaires fût même spécieux ; dans celte double suppo
sition , bien gratuite assurément, ils ne pourraient pas tirer plus
d’avautage de la scnlcncc donl il s’agit : deux moyens s’y oppo
seraient.
Premier moyen. Un principe incontestable est que celui qui
possède d’une manière incapable de faire courir la prescription,
ne peut pas se changer à lui-même son titre; il faut pour ce
changement le concours d’une volonté étrangère à la sienne :
nullà extrinsecùs accidente causa , uemo sibi causant posscssionis mutare potest. L. 5. au digeste , de adquirendd et rctin.
possess. Le Code civil a consacré cette décision dans son ar
ticle aa/jo , c o m m e confirmation de l’ancienne législation. La
raison en est que le titre représenté empêche perpétuellement le
cours de la prescription, quand il 11’est pas accompagné de cette
�(54 )
bonne foi capable de donner au possesseur de la.chose, la con
viction qu’il a acquise : justa opinio acquisiti dominii. Celui qui
ne tient une chose qu’au nom d’un autre , et qui se ferait un
nouveau tilre à lui-même, n’aurait pas le moindre prétexte <Je
croire être devenu le propriétaire de cette même chose.
T el serait pourtant le cas où se seraient trouvés les sieur et
dame Revanger, si la sentence de 1 7 1 7 était comme on vient de
la supposer. Elle serait évidemment leur ouvrage à eux seuls,
du moins dans la partie qui, comme conséquence de la main
levée , déclare la propriété incomniutable.
E n effet , si cette déclaration n’a pas spécifié que les sieur
et dame Revanger n’étaient propriétaires que jusqu’à concur
rence de ce qui leur appartenait , c’est qu'ils n ’avaient pas
mis en cause leurs co-propriétaires ; c’est qu’ils s’étaient présentés
comme les seuls débiteurs saisis , qui , comme tels, avaient
désiutéressé leurs créanciers. Ils ont donc trompé la religion
du tribunal p a rle u r propre fait; ils étaient seuls en cause sur
ce p o in t, leurs créanciers n’y étaient qu’en raison de la main
levée de la saisie , et encore pour cet objet , ils étaient sans
iutérèt , puisqu’ils avaient été payés.
O11
devrait donc , dans la supposition faite, en ce qui con
cerne la conséquence de la radiation de la saisie, regarder la
sentence de 1 7 1 7 , comme un jugement rendu sur requête,
sans contradicteur, et qui eït toujours considéré c o m m e 1 ou
vrage de celui qui l'obtient. Si d o n c , celui qui possède, dans
une certaine qualité, fait prononcer, par un pareil jugem ent,
que sa possession est à un titre différent, il sc change évidem
ment son titre à lui-même, sans le concours d’aucune autre
volonté; ce qui est absolument inefficace pour la prescriptiou.
E n vain dirait-011 que la volonté des juges est intervenue
�#
( 55 )
lors de la sentence de 1 7 1 7 , et qu’ainsi le changement
a eu lieu extrinsecùs accidente causa. Ils n’onl eu de
que pour statuer sur la m ain-levée de la saisie
parce que c’était le seul objet soumis à leur décision,
sur lequel il y avait légitimes contradicteurs.
de titre
volonté
réelle ,
le seul
A l ’égard de la conséquence résultant de celte décision , les
juges n’ont eu aucune volonté. Ce qu’ils ont déclaré leur a été
dicté, sans contradicteur, par les demandeurs; ils n’ont pas
porté une décision , ils ont seulement expliqué ce que devenaient
les biens après la radiation de la saisie. Cette explication était
donc l ’ouvrage des seuls demandeurs ; c’est véritablement un
titre qu’ils se sont fait à eux-mêmes , et qui , par conséquent,
est incapable de changer celui en vertu duquej ils possédaient.
Second moyen. Ce n est pas assez pour opérer lTnterversion
de titre , qu’une volonté étrangère ait consenti un litre nouveau
en faveur du possesseur -, il faut eucore que les véritables pro
priétaires , contre qui il s’agit de faire courir la prescription ,
a ie n t e u connaissance du changement^ arrivé dans la possession t
autrement, le nouveau titre est clandestin ; ce qui le rend in
capable de faire courir la prescription.
« La clandestinité , dit Dunod , est un obstacle à la prescrip» tio n , parce que celui qui se cache pour jouir en son nom ,
» est présumé de mauvaise foi : Clandestinum factum sem per
» preesumitur dolosum , loi pénultième , au Digeste pro socio.
L e même auteur dit que l’on est possessèur clandestin , quand
on fait une chose à l’insu de celui qui n’aurait pas manqué de
s'y opposer , 011 quand ou ne la lui a pas dénoncée , lorsqu’il
est intéressé à la connaître. Cette décision est tirée de la loi 3
§. 7 , au Digeste ; quod vi mit clùm. Elle est conçue en ces
�termes: Cliim f acere vicleri, Cassius scrib it , eum qui celavit
adversarium , neqiie ci denunciavit; si modo ejas timuit controversiam , a lit timere debuil.
La loi 6 au Digeste de adquircndd et amitt. possess. , porte
également que le possesseur clandestin est celui qui jo u it , à
l ’insu de la partie dont il craint l’opposition ; ignorante eo
quem sibi conlroversiarn facturum suspicabatur.
' D ’après ces autorités, Dunod cite pour exemple d’une in
terversion de titre, le cas où un fermier achète d’un autre que
de celui dont il tient son bai l , les héritages tenus à ferme- S ’il
fait connaître au véritable propriétaire le changement survenu
dans la possession, comme s’il refuse de payer le prix du bail ,
cl que le bailleur resic dans le silence , la prescription aura
son cours. De là il faut conclure q u e , si le fermier laissait son
bailleur dans l’ignorance du changement, la possession en vertu
du nouveau titre serait clandestine, et par conséquent clic serait
incapable d’efiectucr la prescription.
L ’application de ces principes incontestables se fait facilement
à l’espèce dont il s’agit. Supposons que la sçnlcncc de 1 71 7 ait
disposé par voie de décision, des portions qui appartenaient à
Claude Bernard Maréchal, au profil des sieur et dame Revanger,
même avec le concours d’une volonté étrangère à celle de ces
derniers. supposition évidemment gratuite, il n’eu sérail pas
moins vrai que ce nouveau titre serait intervenu à l’iusu de la
seule partie intéressée u s’y o pposer, puisque ni Claude-licrnard
M aréch al, ni sa veuve , ni ses enfans n’y ont été appelés. Cette
sentence serait un titre clandestin que les sieur et dame Uevanger
auraient obtenu, ignorante co quem sibi controversiam facturum
suspicabantur.
�« 1 7
C 57 >
Jam ais celte sentence n'a été mise à la connaissance des
parties intéressées, par les sieur et dame R evan ger, ni par leurs
descendans. Us sont toujours restés dans le cas du détenteur
clandestin , qui celavil adversarium , nçque ci denunciavit.
Ainsi la sentence de 1 71 7 , fut-elle ce qu'on la suppose ,
n’aurait jamais pu opérer une interversion de titre, parce quelle
est. toujours restée clandestine par rapport à CJaude-Bernard
Maréchal et à ses représentais. E l l e aurait donc élé constam
ment impuissante, pour changer la nature de la possession des
sieur et dame Revanger.
Cette possession, qui était originairement par in d ivis, et à tiire
précaire, n ’a éprouvé aucun changement, ni par la renonciation
de la dame Revanger aux successions de ses père et mère, ni par
l’ahandonnement consenti par scs frères, ni par la transaction
quelle a faite avec deux des créanciers, ni enfin par la main-levée
de la saisie réelle.
Les biens, et notamment la terre de R om p re, dont les sieur
et dame Revanger sont entres en possession à titre d indivision
et à titre précaire, sont passes a leur postérité dans le même état
des choses , par voie de succession, jusqu’à madame de Maistre.
Cette dernière , comme héritière des sieur et dame Revanger , n’a
pas d’autres droits queux sur les biens réclamés. Elle ne peut
pas opposer, plus qu’ils ne le pourraient eux-mêmes , la longue
possession, puisque la donation qui l’a commencée , est repré
sentée, et (pie, loin d’attribuer à la donnt.iirc la propriété des
biens reclamés, elle atteste que les auteurs de madame de Maistre
11c les ont possédés que par indivis, cl a titre précaire d’admi
nistrateurs.
Les actes qui ont suivi celte donation, it commencer de la re-
8
�it*
( 58 )
noncialion de la dame Revanger aux successions de ses père et
mere, jusqu’à la main-levée de la saisie réelle des biens indivis,
n’ont pas opéré l’interversion du titre originaire de la possession,
qui est restée constamment la même.
Délibéré à Paris ce 24 septembre 1 S 1 9 ,par les anciens avocats
soussignés.
P. L E P A G E .
B O U R R É E D E C O R B E R O tf.
MUMWWVVWVWV'JWKVm’.U\VWMM
V\WWHVU\VWVVWW\%
T / a n c i e k a v o c a t s o u s s i g n é , qui a vu i ° un acte de délaisse
ment fait par Claude Bernard Maréchal, le 27 mars 1694 ; 2°une
transaction du 10 décembre 1 697 ; 5' deux sentences des requêtes
du palais, des 25 novembre 1 7 1 7 et 5 o juin 1 7 1 8 ; un mémoire
à consulter pour M. et madame Van D u e rn e , contre INI. et
madame de iNlaisire, et la consultation délibérée, par M e* L e
page et Bourrée de Corberon , le 24 septembre 1 8 1 9 ; ainsi
qu’un mémoire imprimé pour M . et madame d e M a istre , signe
par Me. Mauguinj
E s t i m e , que les droits de madame Van Duerne sont parfai
tement établis dans la consultation délibérée par M*'. Lepage
r i Bourrée de Corberon , et que les moyens de droit développés
par ces jurisconsultes doivent assurer le succès de sa demande.
Toute la cause peut se réduire à deux questions de droit.
La première, l ’acte du 37 mars 1G94 est- i I un acte de vente, ou
seulement 1111 contrat d’ahamlnuncinnnt qui n’a pas irausftré aux
créanciers de Claude-Bernard Maréchal la propriété des im
meubles cédés, mais qui les a constitués simplement mandataires
dans leur propre chose , à l’ellct de vendre ces immeubles pour
«'il employer le prix au payement de leurs créances ? La seconde ,
si l’acte du 27 mars 1G94 ne peut pas être considéré comme
translatif de propriété à l ’égard des créanciers qui ont iiguré
dans l’acte : cette propriété peut-elle être établie, soit par les
actes postérieurs intervenus par suite et comme conséquences de
l ’acte du 27 mars 1G 9 , soit par -la longue possession des auteurs
�(59 )
de M. cl madame de Maistre depuis la dale de cet acte jusqu’à
c:e jou r?
•
S u r ¡a première question , le soussigné n’hésite pas à décider
que l’acte du 27 mars 1694 11/est point un contrat de vente d’im
meubles , ni même de droits successifs, mais un simple acte
d’abandonnement , qui 1111
dépossède le cédant } lequel a
conservé sur sa tête la propriété des biens, en constituant les
cessionnaires ses mandataires dans leur propre chose , a la
charge de r e n d r e compte. C’est ce que la consultation de M es. Lepafre et Bourrée de Corbcron a démontre jusqu a 1evidencc ; ou
ne^pourrait rien ajouter aux raisons solides et judicieuses don
nées par ces jurisconsultes , et que le soussigné adopte dans leur
entier. 11 se bornera à Jaire remarquer que le caractère prin- 1
cipal du contrat de vente , et sans lequel ce contrat ne peut pas
exister, est la stipulation d ’un prix qui soit l’équivalent de la
chose vendue. Sine pretio nul la venditio est .- L e g. 2 , §. 1 ,
f f . de conlrahcnd. em pt.; o r , . 011 ne trouve dans l ’aclc du 27
mars 1G94 aucune stipulation de prix , car on ne peut pas
considérer comme stipulation du prix la clause qui porte : « que
« le présent délaissement et abandonnempnt faits par ledit sieur
« de Bom pré, pour le prix et somme de quatre mille francs,
« q u e l e s d i t s premiers et derniers créanciers , tant pour eux que
« pour les autres , promettent lui payer , pur form e de gratiji« cation sur les biens de sesdits père et marc. »
D ’ab ord, cette clause se réfère non pas à une vente, mais
à un acte de délaissement et d’abandonnement fait par ClaudeBernard Maréchal ; eusnite les créanciers ne s'engagent pas pul'erncnt et simplement à payer au cédant celle somme de qua'rc
mille francs, et de leurs propres deniers, mais seulement sur
Ifls biens cédés et abandonnés ; c’est à-dire , qu’ils s'obligent, sur
le produit de la vente des biens , à payer à Claude-Bernard M a
réchal la somme de quatre mille francs avant de Jui rendre
leurs cou»pics de l ’emploi des sommes provenant de cette vente ,
et (pii étaient destinées à payer les créanciers.
11
est si vrai «pie, pur l’acte du 27 mars tC>g.{, l’ intention des
parties n’était [»as de transférer aux créanciers la propriété des
l»iens , que par une clause expresse de cet acte les saisies qui
«vaient été faites sur le cédant à la requête de quelques créanf ,'’i s , ont été formellement maintenues sur lui-m êm e, ce qui
�( 60)
est incompatible avec l’idée de la dépossession de Claude-ber
nard Maréchal , ou de la translation de la propriété à des
tiers.
,
E nfin, on ne pourrait pas même prétendre que le prix de la
vente faite par Claude-bernard ¡Maréchal était dans sa libération
envers les créanciers , car cette libération n’est aucunement sti
pulée; et que si le produit de la vente des biens abandonnés
avait été insuffisant pour payer les créanciers , ceux ci auraient
eu le droit de poursuivre leur débiteur, qui, par l’acte lui-même,
avait renoncé à faire usage de toutes lettres d’état ou de répit
qu ’il aurait obtenues , ou qu’il pourrait obtenir dans la suite.
S u r la seconde question , le conseil soussigné estime , que les
actes postérieurs à l'acte du 27 mars 1694 , et particulièrement
la transaction du 10 décembre 1697 , et les sentences des requêtes
du palais, des 25 novembre 1 7 1 7 et 3o juin 1 7 1 8 , ne peuvent
être considérés comme des titres nouveaux et sans connexité
avec l’acte primitif du 27 mars 4
19
6
ces actes se réfèrent tous
à un contrat d’abondonnement, et n’en sont que les conséquences;
o r , si le contrat d’abandonnement ne transfère pas la propriété,
si le cédant continue à rester propriétaire , il ne cesse pas de
l’être par des actes qui ne sont que des modifications , des suites
du contrat d’abandonneme n t , et qui n’ont pu lui enlever le droit
de demander compte du mandat qu’il a donné par ce contrat.
Qua nt a la possession des auteurs de M. et madame de Maistre,
cette longue possession , qui serait plus que suffisante pour leur
avoir acquis la prescription, si elle n’avait commencé par un
titre; vicieux et qui ne pouvait servir de fondement à la pres
cription , ou, si la cause de cette possession vicieuse avait pu être
légalement changée ou intervertie, elle ne peut pas protéger et
couvrir les possesseurs actuels p a r les raisons qui ont été déduites
dans la consultation délibérée par M '1. Lepage et B ourrée de
C orberon. , et auxquelles le soussigné se réfère.
Délibéré à Paris p a r le jurisconsulte soussigné, ancien a v o c a t
à la cour de Cassation , le 17 avril 1820.
G . DARD.
d e l 'i m p r i m e r i e s t é r é o t y p e d e L a u r e n s a i n é r u e d u p o t d e f e r n 1 4
�
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Factums Godemel
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Description
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Text
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A name given to the resource
[Factum. Van Duerne. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lepage
Bourrée de Corberon
Dard
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
mort civile
créances
coutume du Bourbonnais
abandonnement
séquestre
saisie
prescription
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, pour monsieur et madame Van Duerne, appelans ; contre monsieur et madame de Maistre, intimés. [suivi de] Consultation.
Table Godemel : Abandonnement : l’acte par lequel un débiteur a cédé et délaissé à ses créanciers les droits qui lui revenaient dans une succession, ne peut être considéré comme un simple abandonnement ne transmettant aucun droit de propriété aux créanciers si l’abandon ne comprend pas tous les biens affectés au payement des créances, et s’il n’a pas été fait aux créanciers avec la faculté de vendre les biens délaissés.
un pareil acte est une véritable vente ou cession de droits successifs, surtout lorsqu’il est stipulé un prix, quoique pour forme de gratification, et qu’il est convenu que tous meubles et immeubles, autres qu’un objet expressément réservé appartiendront aux créanciers cédataires.
les représentants du débiteur cédant ne peuvent attaquer cet acte, exécuté comme vente et cession pendant un très grand nombre d’années. Tierce-opposition : 4. une tierce-opposition doit-être formée par requête. Elle n’est recevable qu’autant qu’elle a été régulièrement formée dans les trente ans de la date des jugements attaqués.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Laurent Aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
1692-1820
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
60 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2522
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2523
BCU_Factums_G2524
BCU_Factums_G2525
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53508/BCU_Factums_G2522.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tournai (Belgique)
Bayet (03018)
Barberier (03016)
Bompré (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abandonnement
coutume du Bourbonnais
Créances
longues procédures
mort civile
prescription
renonciation à succession
saisie
séquestre
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53509/BCU_Factums_G2523.pdf
2321d47d679cd3812fe14bbc56032581
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PIÈCE JUSTIFICATIVE
L e Mémoire et la Consultation, qu'on vient de lire , sontfondés
sur la défense opposée par M. et Madame de Maistre , à la
demande formée contre eux, par M. et Madame V an Duerne
pour prouver q u 'en effe t on a répondu exactement au système
des adversaires ; on a cru nécessaire de donner copie entière
du Mémoire q u 'ils ont f a it imprimer et distribuer en première
instance.
COPIE DU MÉMOIRE
P our M .
C ont re
et Madame de M A I S T R E , à Paris ;
M. et Madame V A N D U E R N E , de Bruges.
Un grand d o m a in e , la terre de B o m p r é , situé dans l'ancien
Bourbonnais , est de v e n u , depuis 12 0 années, la propriété exclu
sive de celle des branches de la famille M a r é c h a l, qui s’est unie
à celle de Revanger de Chassignoles ; il s’y est perpétue par une
transmission continue jusqu'à mademoiselle de M o n tb lin , der
nier rejoton des Re vang er , épouse aujourd’hui de M. le baron
de. Maistre. L ’autorité antique de la chose jugée , le laps d’ un
long tem ps, tout ce qui rend un droit parfait et irr é v o c a b le ,
s'était réu ni pour compléter celui de M. de Maistre durant près
�C2 )
d’un siccle el d em i.
ÎSuI
t r o u b l e , n u lle réclam ation : tout à
c o u p , ellfe reçoit de F l a n d i a , par le ministère d 'u n h u is s ie r ,
l ’extrait d ’actes n o m b r e u x de b aptêm e et de m ariage , qui lui
apprennent q u e , dans B r u g e s , se trouve une dam e V a n D u e rn e ,
descendant aussi bien qu’elle de la fam ille de M aréch al L ’exploit
g é n é a lo g iq u e présent;; l’identité d ’o rig in e c o m m e source d ’un
droit incontestable su r les biens de m adam e de M a is t r e , et finit
p a r une d em ande en partage de la terre de B o m p r é , soit-disant
in d iv ise. A la suite arrive bientôt la n o u v e lle prétendante : elle
s ’établit en F r a n c e , su r les li e u x , à côté de la terre ,
y exerce sa
s u r v e illa n c e , se plaint d ’a b u s , m enace de destitution , jo u it par
a v a n c e , et juge seule le p rocès.
1 1 y a ign o ran ce et légèreté dans cette conduite de m ad am e
V a n D u e r n e ; elle n ’a v u que ses ti t i c s , c ’est un t o r t ; elle
devait s’in fo rm e r de ceux de m ad am e de M aistre : il n ous suf
fira de .les e x p o s e r , p o u r
établir q u ’ils
n e sont susceptibles
d ’au cu n e critique.
V e r s la fin du d ix-septicm c s i è c l e , la terre de B o m p r é a p p a r
tenait à C la u d e M a r é c h a l , qui en était seign eu r j il avait épousé
M a r ie Ja c q u in c t de Pann cssièrc , et quatre enfans étaient nés de
ce m aria ge ; J
eanne
, F
r a n ç o is e ,
M ar c et C l a u d e - B e r n a r d .
C lau d e M aréch al de B o m p r é m o u ru t dans un âge peu avan ce ,
la terre de B o m p r é se trouvait dans sa succession ; il
laissait
b eaucoup do dettes cl trois héritiers , Jeanne , Marc et ClaiulcUcrnard. T o u s les trois étaient c n c o rc m in eurs ; la dam e Ja c q u in c t
de P a n n c s s iè r c , le u r m c r e , devint leur tutrice. Q u a n t à Frn nç o i s e , c lic avait fait des v œ u x ,
et sa profession de foi l ’avait
retranchée du m o n d e cl de sa fa m ille .
J e a n n e M aréchal épousa le sieur N icolas R c v a n g c r de C h assi¿'tiolcs; le.contrat de m ariage f u t ’ passé le a 5 ja n v ie r iGga., par-
�( s )
devant M® Cantat , notaire à M oulins. L a dame Jacquinct de
Pannessière y intervint et disposa , au profit de la future , dû
l'universalité des biens qu’olle laisserait à son décès : elle lui
donna notam m ent, est-il dit dans l ’acte , tous les droits , n o m s ,
raisons , actions et créances q u e lle pouvait avoir à prétendre sur
les biens qui avaient appartenu audit défunt messire Claude Ma
réchal son époux , seigneur de B o m b ré , soit pour la restitution
de ses biens dotaux... , soit pour les créances qu’elle pouvait
avoir acquittées sur lesdits biens , etc.
L a dame de Pannessière survécut peu à cette donation ; elle
6 3
mourut Je 18 septembre i g . Ainsi les successions paternelle
et maternelle se trouvaient ouvertes ; elles étaient dévolues aux
trois héritiers , Jeanne , Marc et Claude-Bernard.
Mais Jean ne Maréchal avait d’autres droits que ses deux frères ;
du chef de sa mère , et en vertu de son contrat de mariage , el!e
était créancière de la succession paternelle.
Le
novembre iGq , elle se présenta devant le lieutenantgénéral de la sénéchaussée du Bourbonnais , et renonça , tant h
25
5
la succession de son père qu’à celle de sa m è re , déclaran t, est-il
dit dans l’acte de renonciation , qu’elle s’en tient à la donation
universelle et générale qui lui a été faite par la daine de Jacquinct
sa m ère, en son contrat de mariage du
25 janvier
»692.
Jean n e Maréchal de Bom pré perdit donc tout droit de p ro
priété sur les biens héréditaires; elle fut réduite à scs créances.
L a terre de Bom pré passa exclusivement n M arc et à Claude*
B e r n a r d ; ils ne la conservèrent pas long-temps.
Les dettes qui grevaient la succession de Claude Maréchal de
B o m p r é , auteur c o m m u n , excédaient de beaucoup l'actif héré
ditaire qu'il avait laissé. La terre de Bompré avait élé mise en
saisie immobilière ; les créanciers s’étaient unis ; ils s’étaient fait
envoyer en possession des biens, eu qualité de séquestres; ils
réso lu ren t , pour 11c pas consommer leur gage en frais multipliés,
1.
�(4)
pour en devenir eux-mêmes propriétaires , et le vendre à leur
gré, d ’acheter les droits successifs des deux héritiers, M arc et
GJande-Bernard de Bom pré.
6 4
L e 37 mars i g * ac,e passé devant l’Evêque et V a le t , n o
taires au châtelet de P a i i s , entre Claude-Bernard Maréchal dç
Bo m pré , d’une part
et madame la présidente le Maistre et le
sieur Q uesm ais, d’autre part; ces derniers, tant en leurs noms ,
et com m e créanciers des sieur et dame de Bom pré décédés ,
qu'au nom et dans l’intéièt des créanciers 11011 comparans.
I l est dit dans cet acte, que les parties, p ou r éviter la multi
plicité des procédures , la dissipation des biens desdits » eur et
dame de Bom pré et le dépérissement d’iceu x, par le» fréquentes
lettres detat qui sont obtenues par ledit sieur de B o m p ré fils ,
qui n’y peut rien prétendre, attendu le grand nom bre des dettes
desdits défunts sieur et dame de B o m p ré , qui absorbent au-dela
de la valeur desdits b ie n s , lesquels, pour la plus grande p a rtie ,
sont saisis réellement aux requêtes du palais et aux requêtes de
l ’h ô te l,
Son t volontairement convenus de ce qui s u i t , savoir : que ledit
sieur de Bom pré , en ladite qualité d ’héritier desdits défunts
sieur et dame de Bom pré , ses père et mère , a présentenient céd é,
quitté , tran sporté, délaissé et abandonne auxdits sieur et dame
créanciers comparans et acceptant, tant pour eux , que pour les
autres créanciers non comparans , tous et chacun de scs droits
successifs,
p a rtie s, portions et prétentions, exprimés et non
exp rim és, que ledit sieur de Bom pré a , ou peut avoir à pré
tendre sur les biens , meubles et immeubles , bsstiaux et effets ;
tant vifs que m o r t s , délaissés par lesdits sieur et dame de Bom pré
scs père et mère , scs parts et portions dans les terres et seigneurie
de Bom prc , L o u ta u t, et dans les autres biens délaissés par scs
�•
0
9
(5 )
dits défunts père et mère , situés dans la province de B o u rb o n
nais ; plus la terre et seigneurie deN eau , situés dans la province
de INivernois, droits d’aînesse et de légitim e, etc.
Cette cession de droits successifs fut faite par Claudc-Bernard
Maréchal , moyennant la som m e de quatre mille livres. L ’acte
d’abandon fut homologué aux requêtes du palais à P aris, par
deux arrêts des
3 juin
6 5
i 6g 5 ,
et ig août i g .
Le 27 du même mois d’août
Claude-Bernard Maréchal
se présenta de nouveau devant les mêmes notaires , produisit son
acte de naissance, constatant qu’ il était majeur, ratifia, en tant q u e ,
de besoin , l’acte dont nous venons de transcrire une partie, et rap
porta même un acte , par lequel Catherine Ilaccart son épouse ,
ratifiait , confirmait et approuvait le contrat d’abandon ; enfin ,
il donna quittance pour solde du p rix de quatre m ille livres qui
lui avaient été promises.
L e 26 août 169*5, par devant Clore cl Croisier, notaires royaux
à M o u lin s, Marc Maréchal fil de même abandon et transport de
ions ses droits su ccessifs, aux c ré an cie rs, moyennant douze cents
livres , dont il donna quitiance.
A in s i, la famille Maréchal était tout-à-fait dépossédée de la
terre d e.B om pré : Jean ne avait abdiqué les droits q u e lle y avait
eus dans le principe , en ren o n ç an t, le a
5
novem bre 1 6 9 3 , à la
succession de son pfere. Marc et Claude-Bernard Maréchal avaient
cédé les leurs aux créanciers , et en avaient reçu le prix.
J e a n n e ne tarda cependant pas à rentrer dans la te rre , mais n o u
plus u titre de succcssiblc.
Com m e créancière de la succession paternelle, du ch e f de sa
m è r e , elle avait figuré parmi les créanciers u n is , qui s'étaient
�_.
*
rail envoyer en possession des liions, en qualité de séquestres, et
qui avaient ensuite acquis les droits successifs de Marc et de ClaudeBe rnard. L ’union des créanciers était propriétaire. Jean ne Maré
chal et son m a r i , le sieur Revanger de Chassignoles , n’avaient
d o n c , pour devenir propriétaires eux-mêmes, qu’à se faire céder
les droits de l'u n io n ; c’est ce qu’ils firent.
Ils commencèrent par payer un grand nombre de créanciers,
et ensuite ils se firent reconnaître en justice com m e administra
teurs-séquestres des biens ; ils entrèrent en possession de la terre
de B o m p ré , le 26 juillet j Gc)7 ; puis ils s’occupèrent de régulariser
leurs droits.
L e 1 0 d écem b re 1 6 9 7 , devant C le rc et Bazin , notaires à M o u
lin s , intervint un e transaction entre eux et les autres créanciers
un is
-, les p a y e m e n s d e jà faits p a r M . et m ad am e R e v a n g e r de Chas-
sinoles furent recon nu s : ils en firent de n o u v e au x , dont il le u r fut
d o n n é q u itta n c e , et e n fi n , ils contractèrent l ’obligation de p a ye r
dans des termes s tip u lé s , l’intégralité du su rp lu s. D e leu r c ô t é ,
les créanciers unis les su b ro g ère n t dans tous leu rs d ro its.su r les
biens héréd itaire s, ci n o tam m en t su r la terre de B o m p r é . O n cru t
n écessaire de faire h o m o lo g u e r la transaction en justice , avec
quelques créanciers qui n ’y avaient pas c o m p a r u , et elle fut h o m o
loguée en e f f e t , p a r doux arrêts du 1 o‘ m ars et du 1 0 juillet t 6 g S ,
l ’nu des requêtes du p a lais, l ’autre des requêtes de l’hôtel.
lijtiOn, M . et madame Revanger ayant satisfait à toutes leurs
obligations, ayant désintéresse tous les créanciers, les assignèrent,
tant aux requêtes du palais qu’aux requêtes de l ’h ô t e l, pour voir
dire, qu’en vertu de la transaction, ils demeureraient définitive
ment propriétaires des biens ; ils assignèrent en même temps
Claude-Bernard cl Marc Maréchal. L e 2
5 novembre
1 7 1 7 cl le
5o
juin 1 7 1 8 , intervinrent deux arrêts, qui les déclarèrent pr.opric-
�(1 )
taires incommutables J e la terre de B o m p ré ; e t , en exécution
de ces deux arrêts , les saisies réelles et les oppositions existantes
sur les biens furent radiées de tous registres , comme on le voit
par un certificat du garde des criées, eu date du 2 septembre 1 7 1 8 .
5
C ’est depuis cette époque, que la propriété de la terre de B o m pré a été consolidée dans la famille'de Ucvangcr de Chassignoles;
elle s’y est perpétuée sans interruption, elle y a fait constammei, t
la matière des constitutions dotales accordées aux aînés ; enfin
elle est arrivée jusqu'à la dame de Maistre.
On v o it , par ce peu de m o ts, que les droits de madame de
Maistre reposent sur la transaction du 1 0 décembre 1697 , sur
les arrêts du 10 mars et du 10 juillet 1G 98, qui l ’ont h om olo
25
5
guée, et sur ceux du
décembre 1 7 1 7 et du o juin 1 7 1 8 ,
qui ont déclaré M . et madame de Ucvangcr de Chassignoles, p ro
priétaires incom mutables; on voit e n fin , qu'à ces titres inatta
quables, se joint une possession plus que centenaire , non inter
rom pue, p aisib le, pu bliq u e, non é q u iv o q u e , à titre de p r o p rié
taire , possession qui suffirait à elle seule pour crcer un droit
définitif.
Com ment se fait - il donc que madame de Maistre est trou
blée dans sa propriété ? Ecoutons
maintenant madame V an
Duerne.
E lle fonde tous ses droits sur ce qu'elle descend en ligne directe
au quatrième ou cinquième degré de Claude-Bernard M a ré ch a l,
seigneur de B o m p ré , et de Catherine Haccart son épouse , et elle
ajoute : Ma ri e J a c q u in c t de Pannessicrc était chargée de la tutelle
de Marc et de C l aude -Bernard ; o r , en mariant sa fille Jeanncî
avec Nicolas Revang er de Chassignoles, elle chargea les époux, par
leur contrat de m a r ia g e , du
25 janvier
1 G 9 2 , de continuer la tu.-
�f lï
(8 )
Ielle de M arc et de Claude - B e r n a r d , cl d ’administrer tous leurs
biens. C ’est à ce titre unique de subrogés à la tutelle, que les sieur
et dame Revanger ont possédé et administré la terre de Bom pré.
Us ont joui depuis cette époque ; mais , d'une p a r t , ils n'ont j a
mais rendu compte des fruits; d ’autre p a r t, ni e u x , ni leurs
héritiers, n’ont jamais pu prescrire la propriété, parce qu’ils n’ont
jamais pu changer leur titre : et voilà p o u rq u o i, continue madame
V an D uerne, madame de Maistre, qui représente M. et madame
Revanger, doit restituer la terre de B o m p r é , et les fruits depuis
16 9 2 : voilà aussi pourquoi madame V an Duerne, qui est ClaudeBernard Maréchal tout vivant, est prête à recevoir les fruits depuis
1 2 6 ann ées, et la terre m ê m e , qui ne vaut guère que quai’ante
mille livres de rente.
C ’est là tout le procès ; c’est à ce petit con te, qui paraît flatter
infiniment l’imagination orientale de M . et madame V an Duerne,
que M. et madame de Maistre ont à répondre.
O n pourrait dire à madame V a n D u erne, que si elle établit suffi
samment qu’elle descend de Claude - Bernard Maréchal , rien
ne p r o u v e , du moius , qu’elle soit maintenant sa seule et uni
que descendante; mais nous ne voulons pas pointiller avec elle.
11 y
aurait, à côté de madame V an D u e rn e , di x , vingt héritiers
<le Claude-Bernard , elle n ’aurait à réclamer que le quarantième
de la terre de B o m p ré , que sans doute il lui serait encore fort
agréable de recevoir le quarantième de quarante m ille livres de
l’ente , et tous les fruits 11011 acquis à madame de Maistre par
la prescription.
N ous pouvons sans crainte attaquer directement son système.
E lle suppose, en prem ier lieu, que monsieur et madame de R e v a n g e r , représentés par madame de Maistre , ne sont entrés en
�(9 )
possession (le la terre de B o m p ré , que comme subrogés à la tu
13
telle de M arc et de Claudc- erriard, donl Marie Jacquiuct de
Pannessicre élail chargée.
Nous avons établi le con traire, et c e la , par des actes, par des
arrêts qui ne sont susceptibles d’aucune critique. E lle cite Je
5
contrat de mariage du a janvier 1692. Nous l’engageons à le
relire ; elle 11 y trouvera rien de ce q u elle avance : elle ne trou- '
vera ni dans cet acte , ni dans aucun a u tre , que M. et madame
Revanger aient jamais été chargés par la dame de Pannessière,
de continuer la tutelle de M arc
et de Claude-Bernard.
E lle suppose , en second lieu , que Claude-Bernard , aux droits
de qui elle se p la c e , aurait pu revendiquer la terre de Rom pre
sur M , et madame Revanger : elle veut maintenant exercer scs
actions, elle réclame de son c h e f; nous Ja renvoyons à l’acte
d'abandon du 27 mars 1694. E lle y verra que Claude-Bernard
Maréchal a ccdé tous ses droits successifs, soit sur la terre de
R o m p r e , soit sur les autres biens paternels el maternels ; qu’il
a reçu ce p r i x , qu’il en a donné quittance pour solde j. que même
la dame Catherine H acc art, son épouse , a ratifié le c o n tra t, <m
ce qui pouvait la con cern er, et qu’ainsi Claude-Bernard M aré
chal n ’aurait aucun droit à exercer, s’il pouvait se présenter luilïlême. O r , madame V an Duerne qui veut se mettre en son lieu
et p la c e , conviendra sans doute avec nous q u e lle ne peut pas
avoir plus de droits que lui.
C ’est là le m ol delà c a u s e , c ’est dans cet acte du 27 mars 1694 ,
qu’est principalement la décision du procès; il nous dispenserait seul
de tout autre m oyen : il faut que madame Van Duerne l ’ajtaque
et. le lasse annuller avant tout , ainsi que les décisions judiciaires
qui l ’ont h o m o lo g u é , si elle veut élever des prétentions sur Ja
terre de Bom prc ; et e n c o r e , en supposant q u e lle vînt à réussir,
3
�( 10 )
n ’aurait-elle pas renversé tous les obstacles qui la séparent de la
terre? Il faudrait ensuite qu'elle fit a n n u lle r la transaction de 1697
et les quatre arrêts qui s ’y rattachent. Il faudrait enfin q u ’elle
détruisît les effets d’une possession plus que centenaire, fondée
sur des titres et sur l’autorité de la chose jugee.
Nous laissons à madame V an D uerne le soin d’ entreprendre ce
petit ouvrage ; j u s q u e - l à , la demande qu’elle a formée pourra
justement être taxée de ridicule.
E lle a la même origine que madame de Maistre , voilà tout;
madame de Maistre s’en réjouirait sans doute, si l ’exploit qui lui
a signifie une parente nouvelle ne lui avait appris en même
temps , que la nouvelle parente ose demander ce qui ne lui appar
,
tient pas.
Ce mémoire est signé, M A U G U I N , avocat.
A Paris , de l ’imprimerie de D on dey - D u p r é , rue de SaintLou is , n° 4 6 , au Marais.
DE L’IM PRIM ERlE STÉREOTYPE DE LAURENS AI N E R UE DU POT-DE-FER ? N0«1 4
\
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Maistre. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mauguin
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
mort civile
créances
coutume du Bourbonnais
abandonnement
séquestre
saisie
prescription
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Pièce justificative. Copie du mémoire pour monsieur et madame de Maistre, à Paris ; contre monsieur et madame Van Duerne, de Bruges.
Table Godemel : Abandonnement : l’acte par lequel un débiteur a cédé et délaissé à ses créanciers les droits qui lui revenaient dans une succession, ne peut être considéré comme un simple abandonnement ne transmettant aucun droit de propriété aux créanciers si l’abandon ne comprend pas tous les biens affectés au payement des créances, et s’il n’a pas été fait aux créanciers avec la faculté de vendre les biens délaissés.
un pareil acte est une véritable vente ou cession de droits successifs, surtout lorsqu’il est stipulé un prix, quoique pour forme de gratification, et qu’il est convenu que tous meubles et immeubles, autres qu’un objet expressément réservé appartiendront aux créanciers cédataires.
les représentants du débiteur cédant ne peuvent attaquer cet acte, exécuté comme vente et cession pendant un très grand nombre d’années. Tierce-opposition : 4. une tierce-opposition doit-être formée par requête. Elle n’est recevable qu’autant qu’elle a été régulièrement formée dans les trente ans de la date des jugements attaqués.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Laurent Aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
1692-1820
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2523
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2522
BCU_Factums_G2524
BCU_Factums_G2525
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53509/BCU_Factums_G2523.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tournai (Belgique)
Bayet (03018)
Barberier (03016)
Bompré (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abandonnement
coutume du Bourbonnais
Créances
longues procédures
mort civile
prescription
renonciation à succession
saisie
séquestre
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53193/BCU_Factums_G1304.pdf
ab2a1a80d5498a12c002533695df0e67
PDF Text
Text
ta
tty
10
MEMOIRE
TRIBUNAL
D’APPEL
POUR
SÉANT A RIOM .
L e citoyen J e a n - J o s e p h C H O U S S Y , juge
du tribunal d arrondissement du P u y , appelant
d 'un jugement rendu au tribunal d'arrondisse
ment de Brioude, le 27 prairial an 10 ;
CONTRE
L e citoyen A
n t o i n e
M A I G NE,
aîné,
propriétaire, habitant de la ville de Brioude,
intimé.
L e jugement contre lequel réclame le cit. Choussy,
a déchargé le citoyen Maigne du payement d'une somme
de 16,000 francs, dont il s’est reconnu débiteur par une
transaction sur procès.
A
�( 2)
Il ne peut s’élever aucun doute sur la légitimité de la
créance. L e citoyen Maigne ne s’est défendu que sur
des prétextes futiles, qui ne peuvent en imposer à per
sonne ; comment donc les premiers juges ont - ils pu
s’égarer au point de rejeter la demande du citoyen
Choussy ? c’est ce qui paroîtra inconcevable, lorsqu’on
connoîtra les faits et les circonstances particulières de
cette cause.
F A IT S .
L e citoyen Choussy étoit créancier de sommes consi
dérables de feu Antoine Ducros de Brassac, plus parti
culièrement connu sous le nom de chevalier de Brassac.
Les citoyens M aigne, négocians à Brioude, étoient, à
leur tour, débiteurs du chevalier de Brassac, etlui avoient
cédé trois billets à ordre, souscrits par la damé Dugard
de Cheminade, formant ensemble la somme de 7 ?^9 °
plus, quatre billets de 2,5oo fr. chacun, faisant 10,000 fr.,,
souscrits par le citoyen Croze-Montbrizet, dit Moniflouri..
Le citoyen Ducros-Brassac passa, au prolit du citoyen
G ^oussy , son ordre de ces différons billets, tant de ceux
de la femme Dugard, que de ceux de Montbrizet-Mont*
°
fleuri.
Ces derniers, souscrits par Montileuri, avoient d’abord
été donnés en nantissement au citoyen Lamotte ; et ces
émissions ou négociations firent naître plusieurs procès*
Le citoyen Choussy lorma demande contre Lamotte
pour la remise des effets de Montileuri, et poursuivit
en même temps ce dernier, pour le payement. Monlllchiri
contesta la validité de l’ordre, sur le fondement que le
�te l
( 3 )
citoyen Maigne n’avoit donné qu’une simple signature
qui ne pouvoit équivaloir à un ordre. Le cit. Clioussy
exerça son recours contre le chevalier de Brassac : et
quoique Montbrizet n’eut aucune qualité pour contester
la validité de l’ordre, puisqu’il étoit le tireur; qu’il n’eût
aucun intérêt, puisqu’il étoit toujours débiteur du mon
tant de l’effet; néanmoins, après une ample discussion,
il fut rendu, sur productions respectives, en la ci-devant
sénéchaussée de Riom, une sentence du 23 août 1787,
qui décida que les billets n’avoient pas été valablement
négociés; débouta le citoyen Clioussy de sa demande,
condamna le chevalier de Brassac à le garantir, sauf le
recours du chevalier de Brassac contre Maigne.
Le citoyen Choussy interjeta appel de cette sentence
au ci-devant parlement de Paris ; le chevalier de Brassac,
sur l’appel, exerça un contre - recours contre M aigne;
mais, l’affaire n’ayant pas été vidée au parlement avant
sa suppression, l’appel fut porté au ci-devant district de
Clermont, où il a encore resté impoursuivi.
Un second procès s’éleva encore pour les billets de la
dame Dugard-Cheininade. Le cit. Choussy fit protester
les effets, faute de payement à l’échéance, et assigna
Maigne au tribunal de commerce de Clermont, en
remboursement du montant. M ais, au tribunal de com
merce, le citoyen Choussy ne fut pas plus heureux. Maigne
( prétendit, contre toute vérité, qu’il y avoit la môme
irrégularité dans la forme de l’ordre; et un jugement
du 21 juillet 1790 débouta le citoyen Clioussy de sa
demande. Nouvel appel au parlement, qui ne reçut point
de décision, et qui a depuis clé porté au ci-devant district
A 2
�(4
de Tliîers , °ù ^ a resté également impoursuivi.
Bientôt naquit un troisième procès entre le citoyen
Choussy et les citoyens Maigne, au sujet de plusieurs saisiesarrêts que le citoyen Choussy fit faire entre leurs mains,
comme débiteurs du chevalier de Brassac. Cette instance
fut d’abord portée à la ci-devant sénéchaussée de Riom;
ensuite, par l’emplacement, au tribunal de district d elà
même ville ; et, le 19 août 1791, il fut rendu un jugement,
sur productions respectives, qui sursit de six mois à
faire droit sur la demande en saisie-arrêt, pendant lequel
temps les parties feroient respectivement leurs diligences
pour faire statuer sur les appels dont on vient de parler,
ainsi que sur une demande formée au tribunal de district
de Brioude, par la demoiselle de Brassac et son frère,
contre les citoyens Maigne, en restitution d’une somme
de 25,ooo francs, que ces derniers avoient reçue pour
elle-, demande qui avoit été formée par exploit du 12
mars 1791.
Il est à propos d’expliquer l’objet de la demande en
saisie-arrêt du citoyen Clioussy. Les citoyens Maigne,
père et fils, éprouvèrent de grands dérangemens dans
leurs affaires; ils furent même obligés d’en venir à un
contrat d’attermoiement avec leurs créancier?; et comme
ces derniers n’ignoroient pas que les citoyens Maigne
avoient des affaires à régler avec le chevalier de Brassac,
il fut convenu que les citoyens Maigne 11e pourroient
traiter avec lui qu’en présence et du consentement des
syndics des créanciers.
Les citoyens Maigne étoient débiteurs de sommes
considérables envers le chevalier de Brassac ; mais il
�( 5)
est encore ‘nécessaire de remarquer que le cit. Brassac
étoit tout à la fois créancier personnel, et encore comme
tuteur de ses neveu et nièce.
M. Bouchaud , conseiller au grand conseil, étoit oncle
de dame Aimé Boucliaud , veuve Brassac , mère des
pupilles du chevalier. Ce M. Bouchaud fit un testament
le 8 octobre 1777 > pa1' lequel il légua à dame Aimé
Bouchaud , sa nièce, sa charge de conseiller au grand
conseil, et substitua la somme de 20,000 fr. à MarieGabrielle-Jeanne-Adélaïde Ducros de Brassac, sa petite
nièce. M . Boucliaud décéda au mois de février suivant;
et sa nièce ne lui survéquit que jusqu’au mois d’avril de la
meme année. Ses enfans mineurs furent mis sous la tutelle
du chevalier de Brassac, leur oncle, qui vendit la charge
de conseiller au grand conseil, dont étoit pourvu JVÆ. Bou
chaud, à M . Fournier de Touny. Cette vente, en date
du 18 décembre 1784, fut faite moyennant la somme de
25,000 fr. payable après l ’obtention des provisions.
Le chevalier de Brassac donna une procuration au
citoyen M aigne, intimé , petur toucher cette somme de
2Ô,ooo fr. ; et celui-ci en fournit quittance le 23 février
1784 : les termes de cette quittance sont remarquables.
Maigne oblige le chevalier de Brassac, et s'oblige en son
nom -personnel, d’employer la somme de 25, 000 fr. de
la manière la plus utile pour les mineurs, et d’en ju s
tifier à M . de T o u n y , à toute réquisition , à peine de
tous dépens, dominages-intéréts.
Maigne ne s’étant pas libéré de cette somme, ¿\ l’é
poque du dérangement de scs affaires, il fallôit néces
sairement l’employer dans le compte qui devoit être fait
�'
( 6 )
avec le chevalier (le Brassac ; et on voit qu’en effet, le
29 décembre 1786, il fut passé un traité entr’eux, en
présence des syndics des créanciers, pour régler tout ce
qui étoit dû au chevalier de Brassac.
£,e premier objet porté à ce traité est la somme de
25,ooo fr. reçue par Maigne, intimé; mais cet article
est réduit à une somme de 6,343 francs, avec condition
néanmoins , qu’à défaut de payement aux termes qui
seroient convenus, le chevalier de Brassac pourroit faire
valoir la quittance dans son entier.
Le surplus des sommes dont les Maigne se reconnoissent débiteurs, est personnel au chevalier de Brassac :
bref, le débet est arrêté et fixé à la somme de 5o,ooo f.,
à laquelle le chevalier de Brassac veut bien modérer
ses créances ; et il accorde dix-huit anuées pour le paye
ment , à raison de 2,778 francs par année.
Sans doute qu’on vouloit soustraire ce traité à la
connoissance de l’appelant; car il ne fut passé que sous
seing privé : mais le citoyen Choussy, instruit que les
citoyens Maigne étoient débiteurs de sommes considé
rables envers le chevalier de Brassac, obtint permission
de faire saisir et arrêter entre leurs mains tout ce qu’ils
devoient; et, comme les incidcns grossissent entre les
mains des citoyens Maigne, cette saisie-arrêt forma
bientôt une instance considérable. Inexactitude dans les
déclarations, refus de justifier du traité; enfin, exhi
bition de cet acte jusqu’alors inconnu ; mais incident
sur les procès qui existoient déjà entre les parties, et
de là le jugement du district de Riom , dont on a
rappelé plus haut les dispositions.
�. ( 7 )
En cet état, les parties se rapprochèrent ; et, le 27
thermidor an 3, il fut passé un traité entre l’appelant
et l’intimé. Comme cet acte est la base et le fondement
du procès sur lequel le tribunal a à statuer, on va en
faire connoître les dispositions; mais on observera avant
tout, qu’avant l’époque de ce traité le chevalier de
Brassac étoit décédé; que ses neveu et nièce avoient
répudié à sa succession , et qu’il avoit été nommé un
curateur à la succession vacante.
Le citoyen Maigne étoit bien convaincu qu’il ne pouvoit échapper aux condamnations réclamées par le cit.
Choussy. Les deux premiers jugemens qui avoient été
rendus, étoient contraires à l’usage reçu dans le com
merce, pour les billets à ordre : des actes de notoriété des
tribunaux de commerce, et des négocions attestoient que
dans le commerce on 11e reccvoitque de simples signatures
pour passer l’ordre d’un billet : il y avoit encore cette
circonstance particulière, que les citoyens Maigne attes
toient eux-mêmes cet usage. Le citoyen Choussy est
porteur d’un acte de notoriété, signé des cit. Maigne,
en date du 8 avril 1783. D ’un autre côté, il n’y avoit
que les billets de Montbrizet, dont l’ordre avoit été
passé avec la simple signature ; ceux de la dame DugardClieminade étoient remplis : d’ailleurs le citoyen Maigne
ne les avoit-il pas donnés lui-m êm e en payement, et
n’en étoit-il pas responsable? il l’avoit bien senti : aussi,
parle Irai té du 27 thermidor an 3, il est convenu que,,
pour terminer définitivement tous procès entre les parties,
dont l’un au tribunal de Thiers, pour les trois billets A
ordre de la dame Dugard-Cheminade; l’autre au district
�m
de Clermont, pour raison des quatre billets à ordre de
Croze-M ontbrizet; le troisième au district de R iom , pour
les saisies-arrêts faites à la requête du citoyen Choussy,
comme créancier du chevalier de Brassac, tant du montant
des sommes portées en ces billets, que de celle de 26,944 f.
portée par sentence du tribunal de commerce de Brioude,
ensemble des intérêts ', frais et dépens ; le cit. Choussy
veut bien réduire et modérer toutes ses créances, tant
en principaux qu’accessoires, à la somme de 36,000 fr.
Sur cette somme, Maigne compte au citoyen Choussy
celle de 20,000 fr. assignats, et s’en fait consentir quit
tance, de ses mains et deniers, sauf son recours contre
qui bon lui semblera.
A l’égard des 16,000 francs restans, le citoyen Maigne
s’oblige de les payer au cit. Choussy, aussitôt les jugemens
rendus en faveu r de lui Maigrie, contre les héritiers
Ducros de Brassac , ou quoique ce so it, contre le cura
teur à Thoirie répudiée dudit D u c r o s de Brassac.
Il est stipulé qu’au moyen de cet arrangement, les
effets de la dame Dugard de Cheminade , ceux contre
ledit Ducros de Brassac, toutes les pièces et procédures,
même les effets de Croze-Montbrizet étant entre les mains
du sieur Lamotte, seront remis et délivrés au citoyen
Maigne. Le citoyen Choussy donne une procuration ad
hoc, pour retirer les eifets d’entre les mains de Lamotte ;
et enfin il est ajouté que le citoyen Choussy ayant été
condamné par sentence de la sénéchaussée de Riom, aux
dépens envers Croze-M ontbrizet, le citoyen Maigne
promet d’acquitter ces dépens , d’en garantir le citoyen
Choussy, et tous les frais qui, peuvent être faits dans
la
�te7
1
( 9 )
la suite dans les tribunaux , pour les jügettietls qué
Maigrie se propose d*obtenir contre qui bon luisscmblera, doivent être entièrement à sa charge ; au moyen
de q u o i, tous procès mus et à mouvoir dans les tribu
naux de Thiers, Clermont et Riom , demeurent éteints
et assoupis.
Il est difficile de concevoir comment il pouvoit y avoir
lieu à contestation entre les parties, d’après ce traité. Une
transaction sur procès est l’un des actes les plus solennels,
que les lois ne permettent pas d’enfreindre. Le citoyen
Maigne reste débiteur d’une somme de 16,000 francs : il
obtient des grâces i des remises de son créancier. C’est
toujours dans le même esprit, et par une suite de la modé-*
ration du citoyen Choussy, qu’il veut bien suspendre le
payement de la somme de 16,000 francs, jusqu’à ce que
Maigne eût fait régler ses intérêts avec le curateur à la
succession vacante du chevalier de Brassac ; et la seule
action qu’eût à intenter Maigne contre cette successions
c’étoit' d’obtenir la- compensation des sommes qu’il payoit
au citoyen Choussy, avec celles dont il s’étoit reconnu
débiteur envers le chevalier de Brassac , par le traité de
1786, et dont il n’avoit pu se libérer aüi préjudice des)
saisies-arrêts du citoyen Choussy. Mais il'faut surtout faire
attention que Maigne ne se réserve d?autre action que'
contre les héritiers du chevalier de B rassac tiOu quoique
ce soiPcontre là curateur à sa sucôessioîi répudiée : ce
sont les expressions.littérales' du traité; et 011 doit biense garder de les étendre à tout- autre discussion ; car le
système du citoyen Maigne est de •faire croire qu’on a
compris dans cotte réserve toutes les discussions qu’ir
B
�( 10 )
pourroit avoir avec la famille du chevalier de Brassac,
contre sa nièce ou son neveu personnellement ; et c’est
sans cloute ce qui a produit l’erreur des premiers juges,
si on peut qualifier ainsi leur décision.
Maigne, depuis ce traité, a gardé le silence. Le citoyen
Choussy s’est vu obligé de le traduire en justice, par
eédule du 13 messidor an 5 , pour parvenir au paye
ment de cette somme de 16,000 francs, portée au traité
qu’on vient d’analiser.
Qu’a imaginé le citoyen Maigne, pour faire diversion
à cette demande ? La demoiselle Ducros de Brassac, avec
laquelle il a pris depuis des arrangemens particuliers y
l’avoit fait assigner au tribunal de la H aute-Loire, par
exploit du 11 nivôse an 7 , en payement d’une somme de
22,5oo francs; savoir, 20,000fr. montant delà substitution
qui lui avoit été faite par M. Bouchaud son oncle, et celle
de 2,5oo francs, faisant moitié des 5,ooo francs qui formoient le surplus du prix de la charge de conseiller au*
grand conseil. Cette action étoit la suite de celle intentéeà Brioudecn 1791.
I,a demande de la demoiselle Ducros étoit fondée sur
la quittance qu’avoit fournie le citoyen Maigrie à M. de
T o u n y, de la somme de 2Ô,ooo francs, et sur l’obligation
■personnelle qu’il avoit contractée de faire un emploi utile
de ces deniers.
Il étoit sans contredit facile au citoyen Maigne d’écarter
cette demande. L e chevalier de Brassac, tuteur, avoit
qualité pour vendre la charge, et en toucher le prix. Le
citoyen M aigne avoit compté de cette somme au chevalierde Brassac, ainsi qu’il résulte du traité de 1786. S’il avoit
�\3
( ** )
contracté l’obligation personnelle dans la quittance de
M . de T ou n y, cette obligation ne regardoit que l’acqué
reur , et pour sa sûreté, ad cautelam einptoris , comme le
dit la loi : les mineurs n’étoient pas partie dans cette
quittance; ils n’avoient donc d’action que contre leur
tuteur ou contre sa succession répudiée ; et la demoiselle
Ducros étoit non recevable à attaquer le citoyen Maigne.
Mais ce lu i-ci, qui avoit ses vues, se garda.bien de
contester la demande en elle-même ; il prétendit seule
ment qu’il étoit attaqué pour le même objet par le citoy.
Choussy, et demanda la jonction de ces deux demandes.
L a défense de la demoiselle Ducros, contre cet inci
d en t, répond à toutes les objections que Maigne propose
Contie te citoyen Choussy.
Voici comment elle s’e x p r im a :
« La demoiselle Ducros ne réclame point, dans ce
a moment, les sommes que le citoyen Maigne peut devoir
« à la succession de François-Antoine Ducros, son oncle
« et son tuteur, dont elle a répudié l’hoirie, et dont elle
cc est créancière de sommes considérables; elle ne demande
« que ses deniers personnels dont le citoyen Maigne est
« dépositaire, pour ne pas en avoir fait l’emploi comme
« il s’y étoit obligé par sa quittance du 12 février 1785.
« La saisie faite à la requête du citoyen Choussy ne
« frappe pas sur les deniers de la réclamante, et n’est
« point faite à son préjudice. Les arrangemens subsistanis
« entre le citoyen Maigne et le citoyen Choussy nd la1
« regardent nullement ; et il ne scroit pas juste de Pcx« poser au désagrément d’une jonction de deux instances
« très-distinctes, et qui doivent être jugées séparément. »
J3 2
�Ho
(12 )
Eu conséquence , le .tribunal , considérant que la dejnande de la demoiselle Ducros n’avoit aucune connexité
avec le différent subsistant entre le citoyen Maigne et le-'
citoyen Choussy; que ce différent ayant pour objet les
deniers dûs par le citoyen Maigne au citoyen Ducros >
ne pouvoit préjudiciel' aux droits et réclamations de la
demoiselle Ducros, qui ne répétoit que scs propres de
niers dont le citoyen Maigne étoit dépositaire, dont il
n’avoit pas fait l’emploi comme il s’y étoit obligé par une
clause expresse de sa quittance, le débouta de sa demande
en jonction, par jugement du 6 messidor an 7.
Bientôt le tribunal de la Haute-Loire fut remplacé par
les tribunaux d’arrondissement : dès-lors le cit. Choussy
traduisit le citoyen Maigne au tribunal d’arrondissement
de Brioude; et quoique Maigne eût ( depuis ) traité avec
la demoiselle de Brassac, par acte sous seing privé et
devant des témoins qu’on connoît, il se fit également
poursuivre par la demoiselle de Brassac au même tribunal;,
et le 5 prairial an 10 il a été rendu un jugement, de
concert entre la, demoiselle Brassac et Maigne, qui con
damne ce dernier à, lui payer la somme de 22,5oo francs,,
avec les intérêts depuis 1785, époque de la quittance par
lui fournie.
L e 27 du même m ois, la cause du citoyen Choussy a
été portée à l’audience, sur la demande en payement de
la somme de 16,000 francs; et il y est intervenu un juge
ment contradictoire dont il est essentiel de connoître les.
motifs et les dispositions.
11 seroit diflicile de l’apprécier par une simple analise*
Les premiers juges mettent en question d’abord si l’obli~
�( 13 )
gation contractée par Maigne, par le traité du 27 ther
midor an 3, est -purement personnelle , ou si elle dépendoit d’une condition.
Pour entendre cette première question, il faut supposer
que les jüges ont voulu dire, Si l’obligation étoit absolue
ou conditionnelle ; car certainement elle est personnelle
dans tous les cas.
2°. Si le jugement dont les parties ont entendu parler
dans ce traité, au lieu d’être en faveur de Maigne, ayant
été rendu contre lu i, il peut être tenu de payer égale
ment la somme qui faisoit l’objet de son obligation.
Pour le cou p , les premiers juges se sont égarée dans
cette question : certes ce n’est pas là ce qu’ils avoient à
juger ; mais ils avoient à examiner si le citoyen Maigne
ne s étant réservé que la faculté d’obtenir un jugement
contre les héritiers du chevalier de Brassac, ou quoique
ce soit contre sa succession répudiée, ils pouvoient exeiper
du jugement qu’il avoit fait rendre en faveur de la de
moiselle Ducros. Si ce jugement de la demoiselle Ducros
ne formoit pas un objet distinct et indépendant de l’obliga
tion; voilà la véritable et la seule question qui pouvoit
naître, et sans contredit elle n’étoit pas difficile à résoudre.
Troisième question également ridicule. Si ce traité de
I?an 3 contient réellement une subrogation, une cession
de droits de la part de Clioussy en faveur de Maigne.
Lu partant de ces questions si singulières, le tribunal
a considéré, « i° . qu’il est établi par le traité passé avec
« le chevalier de Brassac, le 29 décembre 1786, que
« Maigne lui devoit seulement la somme de 5o,ooo fr.
« et qu’au moyen du payement de cette somme, Ducroa
�( 14 )
« de Brassac avoit promis de le tenir quitte; qu’ainsi
« Maigne ne pouvoit être tenu de payer cette somme
« au chevalier de Brassac ou à ses ayant-droit.
« 2°. Que quoique ce traité paroisse annoncer qu’il y
« a e u , à cette époque, quelque remise faite par le
« chevalier de Brassac en faveur de M aigne, il paroîtx,
« d’un autre côté, que cette remise n’a point existé,
« puisque les syndics des créanciers de ce dernier l’ont
« attesté par une déclaration ; que ce fait, attesté par les
« syndics des créanciers, se trouve concorder avec les
« écrits de Ducros de Brassac rapportés par Maigne; que
« le payement qui a été imputé par le tuteur sur la
« créance de ses mineurs, n’ayant point été alloué par
« le jugement du tribunal rendu entre eux et M aigne,
« doit nécessairement être imputé sur la créance person« nelle du tuteur.
. « 3°. Que par des requête et écriture du 18 juillet
« et 13 août 1791 , signifiées de la pai't de Maigne au
« citoyen Choussy, il avoit été justifié à ce dernier,
« i°. du certificat des créanciers, des pièces y relatées,
« et en exprès de l’exploit de demande du 12 mars 1791
« de la demoiselle Ducros et de son frère ; que ces actes
a et procédures ont en partie servi de motif et de base
« ?u jugement du district de Riom , du 19 août 1791 ,
« qui prononce un sursis de six mois, pendant lequel
« temps les parties feraient statuer sur leurs prétentions
« respectives, et ledit Maigne sur la demande formée
« contre lu i, de la part desdits Ducros de Brassac, en
« payement de la somme de 26,000 francs.
« 4°* Quc ce jugement iixoit le dernier état des choses
�-----------I4&
( i5 î
« entre Choussy et M aigne, lors du traité du 27 ther« midor an 3 ; qu’ainsi il est visible que lorsqu’ils sont
« convenus que Maigne payeroit la somme de 16,000 f . ,
« lorsqu’il auroit obtenu des jugemens en sa faveur ,
« contre les héritiers Ducros de Brassac , les parties
« n’ont entendu parler d’autres jugemens que de celui
« qui devoit intervenir sur la demande formée par
« exploit dudit jour 10 mars 1791 , de la part desdits
« Ducros de Brassac contre ledit Maigne.
« 5°. Que ce jugement, qui est celui du 5 prairial der« nier, au lieu d’être en faveur de Maigne, est entière« ment contre lui ; que son obligation étoit subordon« née à ce jugement , qu’en même temps qu’elle étoit
« personnelle, elle étoit conditionnelle, et dépendoit
« d un jugement qu’on espéroit devoir être rendu en
« faveur ; qu’ainsi, dès que le résultat a été tout autre
« que celui quyon espéroit, il ne doit plus être con« traint au payement de l’obligation qu’il avoit con
te tractée conditionnellement.
« 6°. Que le traité qui a été respectivement souscrit
•te ne peut souffrir de division ni d’exception de la part
« du citoyen Choussy; qu’il doit être exécuté en son
« entier, comme ayant été souscrit et dicté par les par« ties, par suite du jugement du 19 août 1791*
« 70. Que Pacte du 27 thermidor an 3 ne contient
« aucune cession de droits de la part de Choussy, en
« faveur de Maigne; que Clioussy n’a point renoncé au
« surplus de ses droits contre le chevalier de Brassac ;
« 'qu’il n’y en est pas dit un mot ; qu’il a encore moins
,
�( 16
c< subrogé M aigne à ses droits ; et qu’ainsi celui-ci
« n’auroit ni droit ni qualité pour les exercer.
« 8°. Que Ie traité ne pouvoit pas être plus rigou« reux que le jugement en dernier ressort, qui auroit
« adjugé à Choussy ses conclusions, et que Maigne n’au« rcit jamais pu être condamné qu’à vider ses mains de
« ce qu’il devoit à Ducros de Brassac, -au moment des
« saisies; et que, d’après ce qu’il a payé à Choussy, ou
« qu’il est obligé de payer à la demoiselle Ducros, d’a« près le jugement dudit jour 5 prairial an 10 , il ne
« doit plus rien ; que dès-lors le cas prévu par le traité
« anéantit et résout son engagement, puisque Choussy ne
« peut pas avoir plus de droits que Ducros de Brassac,
« son débiteur.
« 90. Que si le citoyen Choussy prétend que le juge« ment, rendu en faveur de la demoiselle Ducros de
« Brassac, lui est trop favorable , et qu’il peut être
« rétracté, il a les voies de droit, pour se pourvoir contre ;
« mais que ce jugement et les pièces dont Maigne est
« porteur-, et dont partie émane de Choussy luirmôme,
« prouvent que Maigne a payé ou. est obligé de payer
« plus de 60,000 fr. au lieu de 5o,ooo fr. qu’il devoit
« réellement. Il seroit injuste de l’obliger à payer encore
« les 16,000 fr. dont il. s’agit.
«, Bar tous ces m olifs, il est donné acte à Maigne de
« ce qu’il reconnaît les écritures, et, signatures-mises au
« bas de l’acte du 27 thermidor, an 3.,.et., faisant; droit .
« au principal, le citoyen Choussy est débouté,- de: sa
« demande, et condamné en tous les dépens.»
Le
�k if
C *1 )
Le citoyen Choussy a interjeté appel de ce jugement
Il se flatte d’établir que le citizen Maigne ne peut éviter
le payement de la somme de 16,000 francs, portée par
la transaction sur procès, du 27-thermidor an 3.
Il prouvera que l’obligation de Maigne est absolue et
sans condition ;
*
Que la réserve est une simple suspension, q u i, dans
aucun cas, ne peut le dispenser de se libérer;
Que cette réserve ne peut frapper sur la demande for
mée en 1791 par la demoiselle Ducros et son frère ;
Que la prétention de la demoiselle Ducros est distincte
et absolument indépendante de faction qu’avoit à former
Maigne contre la succession du chevalier de Brassac; qu’ainsi
les premiers juges ont grossièrement erré dans leur déci
sion; que les motifs du jugement sont iticonséquens, con
tradictoires et inintelligibles, et qu’il faut Vouloir se refuser
à l’évidence, pour élever des doutes sur la demande du
citoyen Choussy.
O11 ne doit pas perdre de vue que, par l’acte du 27 ther
midor an 3 , les parties ont transigé sur les trois procès
qui existoient alors; que Maigne a considéré ces procès
comme lui étant personnels. Et, en effet, ils ne pouvoient
concerner que lui seul, puisque Maigne avoit passé l’ordre
des billets de la dame Dugard de Cheminade, comme de
ceux de Montfleuri ; qu’ainsi il étoit évidemment garant
envers le chevalier de Brassac, qui lui-môme avoit été
condamné à garantir le citoyen Choussy.
Le citoyen Choussy veut bien, en considération du
tttàft'é^'^ôdüirë 'èt modérer ses1'créances ;\ la somme*de
36,000 francs, tant en principal qu’ifitércts et Trais : mais
�Ui/o
•
(*8 3
cette remise n’est; faite que .sous la conditipn que,Margne
se reconnoît personnellement débiteur delà sommeréduite.
Dos ce monient, les procès qui subsistoient ne regardent
plus le citoyen Clioussy : -toutes les .pièces doivent être
délivrées à Maigne; c’est lui qui se* charge de les retirerdans les trois tribunaux où les procès étoient pendanis. Les
eifets de la dame Dugard-Chcminade lui sont délivrés -, il
reçoit une procuration pour retirer les effets de CrozeMontbrizet, entre les mains du sieui^Lamotte : enfin ,
Maigne s’oblige d’acquitter; tous les fraise-les dépens aux
quels lecitoy. Choxassy avoit été eontLamné envers CrozeMontbrizet; il fait son affaire personnelle de tout; prend
tous les événemens sur son compte; se charge d’obtenir
des jugemens contre qui bon lui semblera, et à ses dépens*
Voilà des obligations absolues et sans condition, sur.les
quelles ne frappe pas la réserve particulière qui donnelieu ù la contestation.
R e l a t i v e m e n t î\ la s o m m e de 36,000 fr a n c s , dont il se
reconnoît débiteur, il paye la somme de 20,000 francs,
et en retire quittance de ses deniers (*); mais pour la sommede 16,000 francs, il s’oblige de la payer au citoy. Clioussy r
aussitôt les jugemens rendus eu sa faveur contre les héri
tiers Ducros de Brassac, ou quoique ce soit contre le:
curateur à l’hoirie répudiée \dudit Ducros de B ra ssa c..
Il n’y a point d’équivoque dans ces exprçssipps. Ce n’est
pas contre la demoiselle Ducros. de,,Brassac .personnelle
ment,.qu’il fait cette réserve ; maiq seulement-contre la,
, ( * ) A.rC*po(jue- du p a y e m e n t, l^ s o m m q de ¿ojpoo jfrance cru
assignats ne representoit <jue celle de Goo francs .numéraire*
�<4<f
(
)
succession répudiée du chevalier, puisqu'il ne parle que
des héritiers de ce dernier, o u , ce qui est la in,ême chose^
contre sa succession répudiée'; car on ne contestera pas
sans doute que ces mots*, quoique ce soit, veulent dire,
ce qui est la même chose. Il peut d’autant moins y avoir
de doute sur ce point , qu’il est aujourd’hui irrévocable
ment jugé que la demande de la demoiselle Ducros étoit
indépendante de l’action, que pouvoit avoir Maigne sur
la succession du chevalier de. Brassac.
- Les premiers juges, n’ont pas voulu remarquer cette
circonstance; cependant lorsque Maigne a voulu demander
la jonction de la demande formée par le citoyen Choussy
avec celle de la demoiselle ^Ducros, cette dernière n’at-elle pas dit qu’il n’existoit aucune cqnnexité- ni le
moindre rapport entre, sa -ca,usç . et celle du citoyen
Choussy ?
••
,
!
N ’a-t-elle pas articulé qu’elle lie rcclamqit point les,
sommes que Maigne pouvoit devoir à la succession do
son oncle, son tuteur, dont elle avoit répudié l’hoirie,
dont elle étoit créancière de sommes très-considérables ?
,£s’a -t-e lle pas ajouté qu’elle ne demandoit que ses
deniers personnels, dont Maigne étoit dépositaire; que
la saisie laite à la requête du citoyen Choussy ne Jfrajj-*
poit pas sur ses deniers., et n’étoit point à son préjudice;
qu’enfin les arrangemens subsjstans. enti;e le cit. Maigne
et le citoyen Choussy ne la regardoient nullement ?
Le tribunal d u P iiy, pav SODL jugempnt du. 6 messidor
an 7 , a consacré formellement la vérité de ces propo
sitions, soit en l’expliquant dans scs motifs, soit en dé
boutant le cit. Maigne contradictoirement de sa demande
en jonction.
C a
�Ütir
( fo )
Ce jugement a passé en 'force de chose jugée. L e
citoyen Mâîgne ne l’a point attaqué; il est donc irré
vocablement décidé que la réserve portée au traité du
27 messidor au 3^ ne s’applique qu’à la succession répu
diée du chevalier de Brassac.
O r , le citoyen Maignë pourroit-il penser que parcequ’il s’est obligé de payer cette somme, après avoir obtenu
un jugement en sa faveur contre cette succession répu
diée, il pouvoit se jouer de ses engagemens, éviter ou
reculer à son gré le payement, jusqu’à ce qu’il lui plairoit d’obtenir un jugement contre le curateur à la succes
sion vacante ? ' ’ '
: J 1
P eu t-il croire qu’après sept années de silence, il élu
dera ainsi une obligation formelle et absolue ? Il n’a
pas dit qu’il ne payerait qu’à condition qu’il obtiéndroit
un jugement en sa faveur ; il s’est obligé de payer, aprè&Tavoir obtenu.
O r , nulle: difficulté pour l’obtenir. D ’une part, il'
n’avoit à discuter que contre un curateur à une succes
sion vacante ; et ce n’est plus alors qu’une vaine for
malité qui n’éprouve aucune-contradiction., D ’un autrecôté, il ne pouvoit en éprouver aucune; ilétoit débiteur
du chevalier de Btassac en vertu du traité de 1786.
Le cit Choussy, créancier du» chevalier de Brassac r
avoit fait saisir entre ses mains : Maigne paye en vertude cette saisie; dès-lors, nécessairement et évidemment
il devoit obtenir une compensation sur la succession du
chevalier de Brassac.-C’est là ce qu’il a entendu; c’est
ce qui lui a fait obtenir une suspension de payement
pour la somme de 16,000 fr. : son obligation est dona
�(21 )
absolue et sans condition. Mais pourquoi le citoyen
Choussy ne diroit-il pas le vrai motif de cette réserve?
c’est lui seul qui l’a proposée, pour éviter le rembour
sement intégral de sa créance, Maigne vouloit tout payer
alors, et en eût été quitte pour une valeur moindre de
1,200 francs : le citoyen Choussy ne vit d’autre moyen
de l’éluder qu’en proposant d’attendre que Maigne eût
fait régler ses droits avec le curateur»
Maintenant, il ne sagit que de suivre les motifs du
jugement, pour en montrer l’inconséquence et la futi
lité des prétextes qu’ont saisis les premiers juges.
Le premier motif n’appi-end autre chose, sinon que
par le traité du 29 décembre 1786, entre le chevalier
de Brassac et Maigne , celui-ci lui devoit une somme
de 5o,ooo francs, au moyen de laquelle Ducros de
Brassac avoit promis de le tenir quitte.
Mais pourquoi n’est-on pas allé plus loin dans ce
motif? pourquoi n’a-t-on pas dit que cette somme
de 5o,ooo francs étoit due personnellement au chevalier
de Brassac , presque dans son intégralité, puisque les
2Ô,ooo francs qui sont l’objet de la demande de la
demoiselle Ducros, n’y sont entrés que pour la somme
6,343 francs ? Le citoyen Maigne étoit donc débiteur
personnellement, envers le chevalier de Brassac, d’une
somme de 43,657 francs ; voilà de quoi justifier l’obli
gation qu’a contractée le citoyen Maigne envers le cit.
Choussy, puisque celui-ci a réduit ses créances en prin
cipal , intérêts et frais , à la somme de 36,000 francs,
et que Maigne devoit une somme plus considérable en.
principal, au chevalier de Brassac , sans compter les
intérêts et les frais-
�\
(: 22 )
A la v é r i t é les premiers juges y dans' leur second .
m otif, disent q u e, quoique ce traité de 1786 paroisse '
annoncer qu’il y a eu , à cette époque, quelques remises
faites par le chevalier de Brassac en faveur de Maigne,
il paroît, d’un autre côté, que cette remise n’a point
existé, puisque les syndics des créanciers de Maigne l’ont i
attesté par une déclai'ation , et que ce fait attesté. se ,
trouve concorder avec les écrits de Ducros-Brassac, rap
portés par Maigne.
“ Mais d’abord l’attestation des créanciers n’est qu’une
enquête à futur, abrogéeipar l’ordonnance de 1667 , et
qui ne peut ■
être:d’aucune considération.: ■ , ; D ’ailleurs, de quelle importance pourroit être le fait
de savoir si Maigne a obtenu cette remise ou non ?
Maigne ne!l’ignoroit pas lorsqu’il a passé le traité;avec. ,
le citoyen Choussy; il ilvoit bien les écrits du chevalier
de Brassac, qui étoit décédé; et il ne s’est pas moins
obligé au payement de la créance du citoyen Choussy.
’ D ’un autre côté , que résulteroit-iL de la circonstance
qu’il n’a pas obtenu de remise? rien autre chose, sinonqu’il étoit débiteur de sommes plus considérables envers
le chevalier de Brassac ; et un motif de plus pour arrêter
les poursuites du citoyen Choussy.
En vain les premiers juges auroient-ils dit que le paye
ment qui a été imputé par le tuteur sur la créance des
mineurs, n’a point été alloué par le jugement du tribu
nal'Jli rendu entre la demoiselle Ducros et le citoyen
Maigne. Si le citoyen Maigne s’est mal défendu ou .n’a
pas voulu sc défendre, il ne peut pas en faire le reproche
nu citoyen Choussy, étranger à toutes ces discussions; et
�lil
( ^3 3
il est ridicule d’en tirer la conséquence que cef payement
doit être imputé sur la créance personnelle du tuteur. On
développera plus amplement cette proposition qui revient
encore dans les autres motifs du jugement dont est appel.
Les premiers juges ont dit, en troisième lieu, que par
des écritures et requêtes signifiées en 1791 , Maigne avoit
justifié au citoyen Choussy des certificats des syndics des
créanciers, des pièces y relatées, de l’exploit de demande
de la demoiselle de Brassac et de son frère, et que ces
actes, procédui*es et pièces ont en.partie servi de base
au jugement du district de Riom, du 19 août 1791, qui
prononce un sursis de six mois , pendant lequel temps les
parties feroient statuer sur leurs productions respectives,
et Maigne feroit ses diligences sur la demande contre
lui formée par la demoiselle de Brassac et son frère. On
ajoute que ce jugement fixoit le dernier état des choses ;
que dès-lors il est visible que Maigne, parle traité du 27
thermidor an 3, n’a entendu parler d’autre jugement que
de celui qui devoit intervenir sur la demande de la de
moiselle Ducros et de son frère.
Il n’est pas possible de déraisonner plus complètement.
Dès que Maigne et Choussy connoissoient tous deux la
demande de la demoiselle de Brassac et de son frère, si la
reserve ayoit dû porter uniquement sur cette demande,
011 l’eut disertement exprimée et relatée. Et comment la
réserve pouvoit-elle frapper sur celle demande? Quel
qu’en fut l’évenement, Maigne ne pouvoil être condamné
qu’t\ payer une somme de 25,000 francs; il n’en restoit
pas. moins encore débiteur de sommes considérables en
vers la succession du chevalier de Brassac. Le citoyen
�Ch )
Choussy n’avoit rien à démêler avec la demoiselle Ducros;
il n’ctoit créancier que de la succession du chevalier ; et
il ne tombe pas sous les sens, il répugne à la raison ,
que le citoyen Choussy eut voulu subordonner le payement
de sa créance à l’événement d’une demande qui lui étoit
étrangère, formée par une personne avec laquelle il n’avoit rien à discuter, puisqu’elle avoit répudié à la succes
sion du chevalier, et que cette répudiation étoit connue
du citoyen Choussy.
Maigne ne pouvoit pas espérer d’imposer à son créan
cier une condition aussi onéreuse qu’extraordinaire. La
prétention de la demoiselle Ducros ne nuisoit en aucune
manière aux droits du citoyen Choussy, premier saisis
sant , et qui, comme te l, devoit être préféré ù tous autres
créanciers.
Maigne n’a donc fait porter la suspension du paye
ment que sur la succession du chevalier de Brassac ; et
cela est d’autant plus évident, que , sans aucune condi
tion, il se charge exclusivement de toutes les procédures,
se fait délivrer les effets tous personnels au chevalier de
Brassac, et doit obtenir à ses frais les jugemens qu’il
croit nécessaires, et contre qui bon lui semblera.
S’il y avoit la plus légère ambiguité, elle s’interpréteroit contre le débiteur qui reconnoît la légitimité de
la créance et entre en payement. S’il ne doit pas la somme
de 16,000 fr. , il doit aussi se faire restituer la somme
de 20,000 fr. qu’il a payée; c’est au moins ce qui résulteroit des motifs du jugement; on ne croit pas cepen
dant que le citoyen Maigne ose élever cette prétention.
O r, comme il n’y a pas plus de raison pour payer les
20,000
�( *5 )
20,000 francs que les 16,000 francs , il faut en tirer la
conséquence qu’il ne peut éviter lu condamnation récla
mée par le citoyen Choussy.
Les clauses d’un traité sont indivisibles et corrélatives ;
tel est le principe le plus certain en cette matière-, et,
d’après la substance du traité, on ne peut y voir autre
chose, sinon que Maigne s’est reconnu débiteur de 36,000 f.
que son créancier a bien voulu lui accorder un délai pour
se libérer d’une partie de cette somme. Mais ce délai ne
peut être illimité , et doit être sainement entendu ; il ne
pouvoit durer que jusqu’au terme raisonnable et néces
saire pour se mettre en règle avec le curateur à la suc
cession vacante ; deux mois étoient plus que suflisans.
Maigne n’a fait aucune diligence pendant sept ans ; il
n’a donc plus aucun prétexte pour retarder sa libération.
Par une suite des premiers motifs qu’on vient de dis
cuter, les premiers juges observent que le jugement du 5
prairial an 10, au lieu d’être en faveur de Maigne, est
au contraire contre lui ; que son obligation étoit subor
donnée à ce jugement; qu’en même temps qu’elle étoit
personnelle, elle se trouvoit conditionnelle, et dépendoit
<l’un jugement qu’ on espéroit devoir être rendu en sa
faveur; qu’ainsi, dès que le résultat a été tout autre que
celui qu’011 espéroit, il ne doit plus être contraint au
payement de l’obligation qu’il a voit contractée condition
nellement.
C’est contre leur propre connoissance que les premiers
juges ont ainsi raisonné. Ils 11e pouvoient ignorer que
le jugement du 5 prairial 11’étoit pas celui que Maigne
avoit en vue. Les premiers juges connoissoient le jugeP
�( 2 6 )
ment du-Puy, dit 6 messidor an 7 ; le cit. Gioussy en
a argumenté dans ses défenses ; e t, lors de la plaidoirie
de la cause, il a rappelé les dires de-la-demoiselle Ducros
qui n?avoient pas été contredits par* le- citoyen- Maigne;
il a invoqué les motifs de ce jugement et l’autorité'de la
chose jugée ; il a prouvé que la demande de- là demoi
selle Ducros avoit un tout autre objet: mais les premiers
juges n’ont pas voulu s’en apercevoir. Ont-ils cherché U
écarter cette induction puissante pour favoriser le citoyen
M aigne? Il est permis de le croire , plutôt que de leur
faire l’injure de penser quTils ont donné dans un piège
aussi gi*ossier.
Qu’importe que lracte du 27 thermidor an 3 contienne
ou ne renferme aucune cession de droits ! il est absurde
de dire que le citoyen Choussy n’a pas voulu renoncer \
une partie de ses droits contre le citoyen Dncros de
Brassac; il est également ridicule de prétendre que le
citoyen Choussy n’a pas subrogé M aigne.
L e citoyen Choussy pouvoit-il conserver ses droits,
lorsqu’il remettoit tous les titres? Comment auroit-il pu
les exercer, dès qu’il n’avoit dans les mains aucuns titres
qui constituassent ses créances ?
Lorsque le citoyen Maigne se reconnoît débiteur, sauf
son recours contre qui bon lui semblera , ne résulte-t-il
pas de ces expressions un transport ou une cession en
laveur de M aigne? le tiers saisi qui paye un créancier
saisissant n’est-il pas subrogé de plein droit au créan
cier qu’il a payé? Et d’ailleurs, comment une subroga
tion pouvoit-elle etre utile? On conçoit qu’un créancier, qui paye un créancier antérieur, peut exiger une
�Ç 27 )
subrogation de celui qu’il a payé. Mais le débiteur qui
vide ses mains en celles du saisissant, ne peut espérer
qu’une compensation, et n’a aucun autre droit à exer
cer. Il faudroit devenir créancier pour prendre la place
de celui qu’on a payé ; ici Maigne étoit débiteur , et
ne faisoit que s’acquitter.
Mais, d it-on , le traité ne pouvoit pas être plus rigou
reux que le jugement en dernier ressort, qui auroit adjugé
à Choussy ses conclusions ; et Maigne n’auroit jamais pu
être condamné qu’à vider ses mains de ce qu’il devoit à
Ducros de Brassac, au moment des saisies. O r, d’après ce
qu’il a payé à Choussy, ou ce qu’il est obligé de payer à la
demoiselle D ucros, d’après le jugement du 5 prairial
an 10, il ne doit plus rien : dès-lors le cas prévu par le
traite anéantit et résout son engagem ent, puisque Choussy
ne peut pas avoir plus de droits que Ducros de Brassac,
son débiteur.
C’est ainsi que les premiers juges tournent sans cesse
autour d’un cercle vicieux. D ’abord, il n’est pas vrai en
principe que Maigne n’auroit jamais pu être condamné
qu’au payement de ce qu’il devoit à Ducros de Brassac,
en vertu du traité de 1786.
Le*cit. Choussy étoit créancier du chevalier de Brassac,
antérieurement à ce traité. Il n’étoit pas permis au cheva
lier de Brassac de faire des remises, au préjudice de ses
créanciers. D ’après la disposition des lois, au flf. Qucc ùi
fraudent crédit oru/n , le citoyen Choussy pouvoit exercer
les droits de son débiteur, et, en cette qualité, exiger de
M aigne, sans aucune réduction, l’intégralité des sommes
qu’il devoit au chevalier de Brassac.
Da
�Ui
; . • ( *8 )
D ’un autre côté, on a vu que, par le traité Je 1786,.
indépendamment de l’objet particulier qui revenoit aux
enfans Ducros, Maigne étoit encore débiteur envers le
chevalier de Brassac d’une somme de 43,667 francs. Ainsi,
quelles que soient les condamnations qu’ait obtenues la
demoiselle de Brassac , Maigne- étoit toujours débiteur ,
envers la succession du chevalier, de sommes plus consi
dérables que celles qu’il s’est obligé de payer au citoyen
Choussy : dès-lors, le raisonnnement des premiers juges
tombe de lui - même ; ils ne marchent que d’erreur en
erreur.
Ils croient répondre à tout, en ajoutant que si le citoyen
Choussy prétend que le jugement rendu en faveur de la
demoiselle Ducros, lui est trop favorable, il peut aujour
d’hui être rétracté, et que le citoyen Choussy a les voies
de droit pour se pourvoir contre ce même jugement.
Oh ! certes il n’est pas douteux que ce jugement ne soit
trop favorable. M ais c’cst ignorer les premiers principes,,
que d’avancer que le citoyen Choussy a des moyens de
droit pour le faire rétracter.
On dit que ce jugement est trop favorable à la demoi
selle Ducros. En efTet, il est aisé de prouver que la demoi
selle Ducros étoit sans droit, comme sans qualité /pourrépéter la somme de 25,000 francs contre Maigne. Celuici soutient qu’il s’est libéré de cette somme, entre les mains
du chevalier de Brassac , tuteur. Or , tout le monde sait
que le payement fait au tuteur, durant sa charge, est
valable, quoique le tuteur soit insolvable. Telle est la
disposition précise de la loi 46, au code, § . 5 , et § ultim,.
de adm. etpcric. tut.; de lu loi 13, au code, de adm. tuU
�( 29 )
Tandis qu’au contraire ce payement, fait au pupille, ne
libérerait pas le débiteur. Le tuteur a seul qualité pour
recevoir : il en est du payement fait au tuteur, comme de
celui que feroit le débiteur de la dette dotale de la femme
au mari même insolvable; le débiteur est toujours valable
ment libéré. Ce n’est pas à lui d’examiner la solvabilité
du tuteur ou du mari' ; il suffit qu’il connoisse la qualité :
et d’ailleurs on auroit le droit de l’y contraindre.
Il est vrai que, dans l’espèce particulièx-e, Maigne s’etoit
rendu personnellement responsable envers M. de Touny :
mais ce n’est ic i, comme on l’a dit plus liaut, qu’une
sûreté que le débiteur a exigée ; les mineurs ne sont point
partie dans la quittance ; le tuteur n’a pas stipulé pour eux;
ce n est point envers eux que Maigne s’est obligé de jus
tifier de 1 emploi des deniers ; ce n’est qu’envers M!. de
Touny personnellement : et dès-lors il est évident que
Maigne pouvoir écarter sans retour les prétentions exa
gérées de la demoiselle Ducros.
S’il ne l’a pas fait, ce n’est que pour se ménager un
moyen contre le cit. Choussy, par ce malheureux penchivnt qui l’entraîne à se jouer de tous ses engagemens;
il avoit déjà pris des engagemens secrets avec la demoiselle
de Brassac pour une somme très-modique; s’il se permettoit de le désavouer, ou lui citeroit les témoins qui ont
présidé à l’arrangement, et qui en ont été les. rédacteurs.
Le jugement du 5 prairial a été rendu de concert, et ne
peut influer en aucune manière sur le sort de la contes
tation.
-A.il surplus, par quelle voie le citoyen Choussy pourroit-il attaquer ce jugement du 5 prairial? Seroit-ce par
�( 3° )
la tierce opposition? Mais pour former une tierce oppo
sition à un jugement, il ne suffit pas d’avoir intérêt de
le détruire; il faut avoir eu, lors de ce jugement, une
qualité qui ait obligé de vous y appeler.
O r, non-seulement le citoyen Choussy n’avoit pas de
qualité pour être appelé au jugement rendu en faveur
de la demoiselle Ducros; mais il étoit même irrévocable
ment jugé que cette discussion lui étoit étrangère, et indé
pendante de l’action qu’il avoit formée contre Maigne :
dès-lors il n’a donc pas qualité pour former tierce oppo
sition, puisqu’il n’a pas dû. être appelé à ce jugement.
. Seroit-ce par la voie de l’appel ? car l’ordre judiciaire
n’admet que ces deux moyens. Mais pour se rendre appe
lant , il faut encore mieux être partie dans le jugement ;
et celui du 5 prairial n’est pas rendu avec le citoyen
Choussy. Dès-lors il n’est pas-vrai que le cit. Choussy
puisse se pourvoir par les voies de droit , pour faire
réformer le jugement du 5 prairial ; et ce motif, qui paroît
être un de ceux qui ont déterminé les premiers juges,
lie fait pas honneur à leurs lumières.
Lorsqu’on a réfléchi sur la cause, sur les moyens pro
posés par le cit. Maigne, sur les motifs qui ont déterminé
le jugement dont est appel, il esi impossible de concevoir
comment le citoyen Choussy a pu succomber. Son droit
étoit évident et certain ; l’action cju’il a intentée est à
l’abri de toute critique; elle est appuyée sur une transac
tion sur procès. L ’ordonnance da 1 56o ne permet pas de
se pourvoir contre un traité de cette nature. L ’obligation
du cit. Maigne est absolue; on a démontré que sa réserve
n’a trait qu’à lu succession répudiée du chevalier de
�(31)
Brassac ; il a dû, comme il a pu, faire liquider ses droits
sur cette succession. En supposant que son obligation ne
fût que conditionnelle, la condition seroit censée accom
plie, faute par lui d’avoir fait les diligences nécessaires;
il est incontestablement débiteur de la succession répudiée.
Le cit. Choussy, premier saisissant, devoit être nécessai
rement payé par préférence à tous autres. M aigne, en
s’obligeant envers lui, a eu une cause légitime et néces
saire; il ne peut donc se soustraire au payement de la
somme de 16,000 francs, réclamée par le cit. Choussy,
et le jugement du tribunal de Brioude doit être nécessai
rement réformé.
Signé, J. J. C H O U S S Y .
Le cit. P A G E S de Riom , ancien, jurisconsulte.
V E R N I È R E S , avoué.
A
R I O M , de l’imprim erie de L a n d r i o t , seul im prim eur du
T rib u n a l d ’appel. — A n 1 1
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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A related resource
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy, Jean-Joseph. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vernières
Subject
The topic of the resource
créances
saisie
actes de notoriété
offices
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le citoyen Jean-Joseph Choussy, juge du tribunal d'arrondissement du Puy, appelant d'un jugement de Brioude, le 27 prairial an 10 ; Contre le citoyen Antoine Maigne, aîné, propriétaire, habitant de la ville de Brioude, intimé.
Annotations manuscrites: Résultat du jugement du 26 floréal an 11, 1ére section.
Table Godemel : Transaction : 2. la transaction sur procès convenue entre les parties, le 27 thermidor an 3, par laquelle Maigne resta débiteur de 16000 livres, constitue-t-elle, de sa part, une obligation absolue, ou conditionnelle ? s’il y a erreur, doute ou obscurité dans la rédaction, contre qui doivent-ils être interprétés ?
affaire jugée par juridictions successives
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1784-An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1304
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1305
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de notoriété
Créances
offices
saisie
-
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5370f3c5aad552151a99b10e567947fe
PDF Text
Text
OBSERVATIONS.
- !: y
’
‘ ' '
.
• •r
L e Mémoire de monsieur et madame de Maistre suppose que,
par les actes d 'a bandonnement datés de 1694 et 1 6 9 5 , l e s frères
Maréchal ont vendu à leurs créanciers les biens composant les
successions des sieur et dame M a r é c h a l, père et mère. Les con
sultations qui précèdent, réfutent suff isamment cette fausse inter-*
prétation qu ’on voudrait donner aux deux actes,
i
I l en est de même de la transaction de 1697 , et des sentences
de 1 7 1 7 et .17 18 q ui ont prononcé la main-levée de la saisie réelle
des biens abandonnés; les jurisconsultes l ’ont complètement dé
montré , chacun de ces titres est une nouvelle preuve que l ’abandonn ement duquel ils se rapportent n'est pas une vente, et que
par eux-mêmes ils n ’ont pas pu opérer translation de propriété.
Mais il ne sera pas inutile d ’ajouter quelques observations sur
certains faits allégués par les adversaires.
Ils disent ( voyez page 9 de la p ièce justificative) que les sieur
et dame Revanger n ’ont jamais été chargés, par leur contrat de
mariage , de gérer et administrer la tutelle de Marie-Marc M aré
chal. Voici textuellement la clause de ce contrat où l ’obligation
dont il s’agit est imposée com m e condition de la donation faite
au profit de la dame R evanger.
�( a )
* Ladite future sera tenue, au lieu de la darne sa m cre, de
» toutes lés garanties auxquelles elle s’est engagée, de gérer et
» administrer en son l i e u t conjointement avec le sieur futu r, la
» tutelle et administration de Marie-Marc M aré ch a l, son fils
» m in e u r, et de l'exécution de tous les autres contrats par elle
» passés, même de l ’événement de tous procès et instances aux» cjucls elle peut avoir intérêt ; sau f à ladite dame future à en
» retirer p ro fit, sJil ch ééhdt »r:
■
!'
,fr:
II.
.. Les adveisaircs disent encore ( voyez page 3 de la picce justi—
ficaùvc ) que les dettes qui grevaient la succession de Claude
M a r é c h a l, excédaient de beaucoup l ’actif héréditaire qu’il avait
laisse.
¡11
o i
A quoi donc se montaient ces dettes? On n’a , sur ce point ,
que la déclaration des adversaires q u i, dans des conclusions
signifiées le 20 février 1 8 1 5 , font monter le total des dettes ù près
de deux cent m ille li v r e s , sa n s, pointant, en justifier une Seule,•
ils s’expriment^en ces te r m e s: 0
-
i ;;
« Attendu que, par la transaction du 1 0 décembre 1697 , les
» sieur et dame Revanger se sont obliges à payer à la dame le
» Maistre et au sieur Qucsmais toutes
les
sommes qui leur
» seraient d u c s , tant en principaux qu’intérêts et frais ; et que ,
)> moyennant celle obligation et popr la valeur d ’icclle, ils ont
» été mis en possession des biens saisis. ' '' ' •
) >l
1
» Attendu qu'ils ont acquitté toutes les dettes dont les suc» cessions des sieur, et dame Maréchal étaient g r e v é e s , et q u i j e
» sont élevées à pi'ès de deux cent /tulie livres; t
,
;; ¡,
’
r( f
[j
» Attendu que l ’acte du 10 décembre 1G97 ayant reçu soi! « n -
'
�(5 )
» tière exécu tion , les sieur cl darne Rcvangcr sont entrés en
» possession des terres de Botnprè, Perccnnat, Ncaux et autres ».
D ’un autre côté, il est constant et avoué (v o y e z page 8 de la
pièce justificative ) que la seule terre seigneuriale de Rom pre
est d’ un revenu annuel de quarante mille livres , quoique la sup
pression du régime féodal ait diminué son produit des cens ,
rentes et droits seigneuriaux qu’on trouve énoncés dans les actes
d’abandonnement. Cette terre seule valait donc beaucoup plus que
les deux cent m ille livres de dettes prétendues? Par conséquent
l’actif héréditaire de Claude Maréchal excédait considérablement
ic passif en ne considérant que la terre de B o m pré j com bien
cette vérité devient frappante si on joint à ccltc terre tous les
autres objets compris dans rabandonnement !
Ainsi , p ou r moins de deux cent m ille livres qu'ils auraient
payées aux créanciers, les sieur et daine Rcvangcr se seraient e m
paré des deux successions paternelle cl maternelle , dont la pre
mière se composait de plusieurs terres parmi lesquelles, i tait celle
de lio m p r é , q u i , seule , avait une valeur infiniment au-dessus de
toutes les dettes qu’on suppose avoir existé; car il est à remarquer
qu’aucun des actes du procès n’indique la quotité des préten
dues dettes ; tout annonce au contraire qu’on a pris bien soin de
Ja cacher aux frères M a ré c h a l, pour les efirayer davantage,
déterminer l’aîné à consentir rab an d o n n e m e n t, et confirmer le
plus jeune dans la résolution de prononcer des vœux monas
tiques.
III.
M onsieur et madame de Maistre prétendent ( voyez page G de
la pièce justificative ) que lors des sentences de 1.717 et 1 7 1 8 , les
�( 4 )
sieur et dame R evanger firentt assigi
assigner Claude B ernard et M arieM arc Maréchal. Ce fait est absolument controuvé.
D ’abord Marie-Marc M a r é c h a l, entré en religion depuis près
de vingt-deux a n s , était mort civilement et ne pouvait pas être
appelé en justice. A l ’égard de son fr è r e , la lecture des deux
sentences suff it pour p rou ver qu'il n’y a point été partie. O n y
voit seulement que l es sieur et dame R evanger ont assigné des
créanciers qualifiés d’opposans à la saisie rée lle, un autre créan
cier qualifié de subrogé à la poursuite de cette saisie, et un cura
teur aux biens abandonnés et saisis. Il résulte de là que la saisie
réelle avait subsisté nonobstant les actes d ’abandonnem ent, et
qu ainsi ces a c tes n ’avaient jamais été considérés com me des con
trats de vente. On voit aussi que les deux sentences dont il s’agit
ont été rendues sans y avoir appelé C laude-B ernard M aréchal ;
et com me elles n ’ont jamais été signifiées ni a lui ni à aucun de
ses descendans , elles s o n t , pour ces derniers , des titres clan
destins , q u i , par conséquent, sont incapables d’opérer la pres
cription , com m e le démontrent les jurisconsultes.
L e Chevalier V A N D U E R N E .
D E L '’ IM PR IM E R IE STÉRÉOTYPE DE LAURENS A ÎN É .
\
�
Dublin Core
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Van Duerne. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Van Duerne
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
mort civile
créances
coutume du Bourbonnais
abandonnement
séquestre
saisie
prescription
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations.
Table Godemel : Abandonnement : l’acte par lequel un débiteur a cédé et délaissé à ses créanciers les droits qui lui revenaient dans une succession, ne peut être considéré comme un simple abandonnement ne transmettant aucun droit de propriété aux créanciers si l’abandon ne comprend pas tous les biens affectés au payement des créances, et s’il n’a pas été fait aux créanciers avec la faculté de vendre les biens délaissés.
un pareil acte est une véritable vente ou cession de droits successifs, surtout lorsqu’il est stipulé un prix, quoique pour forme de gratification, et qu’il est convenu que tous meubles et immeubles, autres qu’un objet expressément réservé appartiendront aux créanciers cédataires.
les représentants du débiteur cédant ne peuvent attaquer cet acte, exécuté comme vente et cession pendant un très grand nombre d’années. Tierce-opposition : 4. une tierce-opposition doit-être formée par requête. Elle n’est recevable qu’autant qu’elle a été régulièrement formée dans les trente ans de la date des jugements attaqués.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Laurens Aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
1692-1820
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2524
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2522
BCU_Factums_G2523
BCU_Factums_G2525
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53510/BCU_Factums_G2524.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tournai (Belgique)
Bayet (03018)
Barberier (03016)
Bompré (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abandonnement
coutume du Bourbonnais
Créances
longues procédures
mort civile
prescription
renonciation à succession
saisie
séquestre
Successions
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dd06f0a5de6050f08ffb222b263667b7
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Text
MEMOIRE
S I G N I F I É
E N
R É P O N S E ,
P O U R
L e c i t oye n M A I G N E , n é g o c i a n t , h a bi t a n t de la v i l le
de B r i o u d e , i n t i m é ;
C O N T R E
L e cit.
J
e a n
- J
o s e p h
C H O U S S Y - D UP I N ,
ex négociant, habitant actuellement la ville du P u y ,
appelant.
L E citoyen Maigne défend sa fortune. Si des faits indispensables
à rapporter m ontrent son adversaire subtil, indélicat et avide, ce
sera la fatalité de tonies ses causes. L e citoyen Maigne déclare
qu' il n’en veut ni à la réputation, ni à l’honneur du cit. C houssy.
A
�#-¿1
( 2 )
L a principale question de la cause est de savoir quelle a é té ,
quelle a pu être l’intention des parties, l’un faisant et l’autre
acceptant une obligation conditionnelle.
F A I T S .
sieur Ducros d eB rassac, tuteur de ses neveu et nièce, avoit
vendu au sieur Fournier de T o u n y la charge de conseiller au grand
conseil, dont étoit décédé pourvu le sieur de Bouchaud ; il donna,
le i g décembre 1 7 8 4 , sa procuration au citoyen Maigne pour tou
cher à Paris la somme de 25,000 fran cs, prix de cet office.
L e 23 février 1785, le citoyen Maigne reçut ce prix ; il en fournit
Le
quittance au sieur de T o u n y , en vertu de la procuration dont il étoit
porteur, et avec l’obligation personnelle de faire emploi des deniers,
pour la sûreté d’iceux, envers les mineurs.
L e çiloyen Maigne ne reversa pas l’entière somme dans les mains
du chevalier de Brassac; il en paya seulement 18,657 francs.
L e chevalier de B rassac, et le citoyen Maigne associé avec son
frè re , étoient en affaires de commerce. L e 21 avril 1785, Maigne
c a d e t, débiteur du sieur de B rassac, lui donna en nantissement
sept effets se montant à 11,260 fra n cs, et payables à des échéances
reculées. Plusieurs n ’étoient pas des effets de commerce. Ce nan
tissement fut couché par écrit dans le livre de négociations des cit.
Maigne.
L e citoyen Choussy faisoit aussi des affaires de commerce avec
le sieur de Brassac. L e 8 mars 1786, il fit entre les mains des cit.
Maigne une saisie-arrêt, comme des biens du sieur de Brassac, en
vertu de simple ordonnance, et à faute de payement de charbons
'vendus. D es événemens avoient altéré la fortune du sieur de
Brassac et celle des cit. Maigne. Les créanciers des cit. Maigne
prirent connoissance de leurs affaires, et se constituèrent en union
pour la simple surveillance; ils laissèrent toujours le cit. Maigne
aîné à son magasin , son commerce et ses bien s, ct^îTcrm oyèrent
avec lui. L e sieur de Brassac avoit été l’un des syndics des créanciers :
�¡¿i
( 5 )
scs variations , ou l’exagération de scs créances , obligèrent les
autres syndics d’imposer à Maigne la condition de ne pas régler sa
dette envers le sieur de Brassac , liors de leur présence.
L e 29 décembre 1786, le cit. Maigne et le sieur Ducros traitèrent
en présence des créanciers : la dette des cit. Maigne fut fixée à
5 o,ooo fr ., intérêts et frais com pris; et cette somme fut stipulée
payable en annuités pendant d ix-h u it ans. — L e premier article
du bordereau de compte comprend 6,345 fr. restés dûs de la somme
de 25,ooo fr. provenans du prix de l’office Bouchaud, et touchés
par le citoyen M aigne, du sieur de T o u n y ; et il étoit ainsi réduit,
parce que le sieur de Brassac avoit réellement reçu du cit. Maigne
18,657 fr- en déduction des 25,000 fr. ; fait qui est bien prouvé,
et a été tenu pour constant, lors d’un jugement du 19 août 179 1,
rendu avec le cit. Choussy ; nous aurons occasion d’en parler.
Cependant comme cette créance, provenue de l’olfice Bouchaud,
étoit hypothécaire ; que le sieur de Brassac vouloit conserver une
hypothéqué sur les Liens du cit. M aigne, jusqu’à concurrence de
cette somme, et bien assurer le p a ye m e n t de sa créance totale; il
exigea qu'il fû t souffert dans le traité la réserve de son hypothè
que; et les contractans ne conçurent d’autres moyens pour cela,
que de faire dire par le sieur de Brassac, qu’il faisoit remise de
l ’excédant des 6,343 francs , complétant a 5 ,ooo francs avec ré
serve de faire valoir la quittance du citoyen Maigne pour le
to u t, à faute de payement des 5 o,ooo francs , aux termes énon
cés. Ce fait est prouvé par certificats, enquête et jugemens. Et
une observation ne permet pas de doute sur le m otif de cette stipu
lation énonçant une remise. L e sieur de Brassac étoit comptable
envers ses mineurs de la somme entière de 25,000 francs ; il
n’éloit pas le maître de faire une remise ¿1 leur préjudice ; et s’il
eut eu envie de faire une remise aux cit. M aigne, autant qu’il
s’en d éfen d it, il l’eût faite sur ce qui lui étoit dû de son chef.
L e cit. Choussy orbtint contre le sieur de Brassac une sentence
au trihural de Brioude, le 5 i juillet 1787, portant condamnation
au payement de la somme de aG,y44 fr* pour indemnité dè la
A 2
�C4 )
vente de charbons que lui avoit faite le sieur de Brassac, et qu'il
prétendoit ne lui avoir pas été délivrés. — En vertu de cette sen
ten ce, il fit faire une nouvelle saisie-arrêt entre les mains du cit.
M a i g n e , sur le prix de l'obligation portée par le traite du 29 décemb.
178 6, passé entre M aigne et le sieur Ducros de Brassac.
Mais le citoyen Choussy et le sieur D ucros n’en vivoient pas
moins en bonne intelligence. L e citoyen Choussy avoit su s’em
parer de la confiance du sieur de Brassac, et Favoit engagé à
faire cause com m une, sous l’appùt de quelques bénéfices dans les
procès qu’ils entamèrent, et contre les citoyens Maigne-, et contre
des tiers qui lui avoient fourni des effets.
Ici se place une observation : le traité entre les cit. M aigne
et Ducros de Brassac ne portoit pas, en déduction de la dette
M aigne, les sept effets de 11,260 fr. donnés en nantissement au
sieur Ducros le 21 avril 178 6, nantissement constaté par les
livres sous les yeux des contractans. L e cit. Maigne les réclama
en présence des syndics de ses créanciers : le sieur Ducros ne les
avoit pas sur lu i; il promit verbalement de les rendre; on l’en
crut sur parole. Dirigé par le cit. C h o u ssy, il a voulu l’enfreindre;
niais des jugemens lui ont ordonné de satisfaire à l’honneur, et
ces jugemens frappent aussi le citoyen Choussy. L a condamna
tion ne vaut pas p a y e m e n t , et elle n ’est pas exécutée encore.
Pendant les procès , Choussy sollicitoit le sieur Ducros ù lui
donner en payement d autres effets ; il en savoit dans les mains
du citoyen Lam otte , négociant à Clerm ont , se portant à plus
de 5G,ooo francs ; il demandoil que le sieur Ducros lui donna 1111
consentement pour les retirer, et les prendre eu payement. Pour
obtenir ce qu’il demandoit, il ilattoit et mçnacoit tour à tour le
sieur Ducros : il lui promeltoit notamment de mener rondement
INIonlbrizet; et M ontbrizet l’a lait succomber.
11 paroit que le sieur de Brassac fit ce que vouloit le citoyen
Choussy; et les procès contre le citoyen Maigne commencèrent.
Choussy le lit d^abord condam ner, par jugement par défaut du 7
mars 1788, ii acquitter un ellet Campigni de 5j 5 fr. ; et il en a reçu
�/6 i
( 5 )
le montant le 12 dudit mois. Il demanda aussi le payement d’un
autre effet de la dame Dugard de Clieminade de 1,690 ir. , sur
lequel il s’étoit. permis une petite addition pour le rendre négociable.
L e citoyen Maigne connut ce jugem ent, par la saisie-exécution
que le cit. Choussy fit faire sur les marchandises de son magasin :
il y form a opposition ; se fit décharger de la condamnation
prononcée contre lui ; fit condamner Choussy et Ducros de Brassac
à lui remettre ces effets , et Choussy en 5 oo fr. de dommagesîntérèts. L e jugem ent, en date du 12 novembre 1788, porte, qu’au
dit billet a été ajouté le mot ordre après le dernier inot de la
seconde ligne ; que l’ordre mis au dos dudit billet est écrit
de la main de Choussy, n’y ayant en principe que la signature
de M aigne sans ordre.
L e citoyen Maigne , averti, par les poursuites du cit. Choussy ,
de l’abus qu’avoit fait le chevalier de Brassac du simple nantis
sement des sept effets dont nous avons p arlé, form a contre lui
la demande en remise desdits sept e ffe ts, se portant à 11,260 fr .;
e t , après interlocutoire et enquête, le chevalier de Brassac fut
condamné à les rem ettre, par sentence du 6 juin 178 8, rendue
contradictoirement.
L e chevalier de Brassac n ’étoit pas l’adversaire de M aigne dans
ce procès ; c ’étoit Choussy nanti des billets, et qui abusoit de
son nom.
L a sentence du G juin 178 8 , celle qui avoit précédé et dont
nous avons parlé , n’étoient pas suffisantes pour déconcerter le
citoyen Choussy. Homme à mauvaises ressources, il interjeta appel
de la sentence du G ju in , au nom du chevalier de Brassac , et
négocia encore au cit. L em crle , son neveu, deux autres billets
Dugard de Clieminade de la somme de 3,000 fr. chacun, dont la
remise avoit été ordonnée contre le chevalier Ducros. Lem erle
en demanda le payement à M aigne, çt ilfutdébout'é de sa demande,
par sentence du 21 juillet 1790; C houssy, partie dansce jugement,
fut condamné à garantir Lem erle, et à rendre à Maigne les billets,
pour, par lu i, s’en iaire payer par le débiteur.
�( 6 )
Choussy seul interjeta appel de ce jugement.
En cet état , le sieur Ducros de Brassac ém igra, et il n’a plus
reparu.
Les i 5 janvier et 12 mars 1791 , les sieur et demoiselle Ducros
de Brassac formèrent contre le cit. Maigne la demande en rem
boursement de la somme de 25,000 fr. qu’il avoit reçue du sieur
de T o u n y. Dans le même tem ps, le citoyen Clioussy reprit la pour
suite de l’instance sur sa saisie-arrêt; les citoyens Maigne lui
opposèrent la demande des sieur et demoiselle D u cro s, et sou
tinrent que le cit. Choussy devoit la faire cesser.
Sentence intervint le ig août 17 9 1, rendue bien contradictoire
m e n t, sur le rapport du citoyen Cathol du D é fia n t, qui p o rte,
attendu qu’avant de statuer sur la demande du cit. C h oussy, il
importe de savoir quel sera l’événement de la demande qui a été
formée contre Maigne , de la part des sieur et demoiselle Ducros ,
en restitution de la somme de 25 ,000 f r . , surseoit de six mois sur
la demande en saisie - a rrêt, pendant lequel temps les parties
fero n t respectivement diligence, pour faire statuer sur la de
mande des sieur et demoiselle Ducros.
L es choses en restèrent là quelque temps. L e 27 thermidor
an 3 , Maigne et Choussy se rapprochèrent. L e cit. Choussy, seul
créancier saisissant, avoit besoin de fonds pour rembourser la
constitution de sa ci-devant épouse; les parties traitèrent.
Choussy se disoit créancier du sieur Ducros de Brassac, de
44,554 francs en principaux, et, pour se montrer généreux envers
u n e succession abandonnée, il se restreignoit à T>6,ooo francs.
On se rappelle que, suivant le traité entre les cit. Maigne et le
sieur Ducros de Brassac, Maigne etoit constitué débiteur d’une
Êomme de 5 o,ooo francs, dans laquelle il y a v o it 6 , 5/|5 francs en
reste de 25 ,000 francs provenus de l’ofiiee Bouchaud. Maigne ,
saisi d elà part de Choussy, n’avoit pas pu se libérer; il ne rapportoit d’acquils que jusqu’à concurrence de la somme de 5,024 francs,
' en sorte qu’il avoit dans ses mains 20,000 francs du ch ef du
chevalier de Brassac, et a 5,ooo francs que réclainoienl les sieur et
demoiselle Ducros.
�(i)
Il paya au citoyen Clioussy les 20,000 francs revenans à la suc
cession de Bi’assac, et stipula qu’il payeroit les 16,000 irancs par
faisant la créance du citoyen Choussy, aussitôt qu’il auroit obtenu
un jugement contre les héritiers Bouchaud sur la demande qu’ils
avoient formée. Cette stipulation sage, bien raisonnable, et con
forme à l’esprit et à la disposition de la sentence rendue entre les
parties le 19 août 179 1, fut^dénaturée par le citoyen Choussy, qui,
dans son mémoire, s'avoue le rédacteur du traité.
L e citoyen Choussy commit une erreur à laquelle le citoyen
Maigne ne fit pas attention. A u lieu d’énoncer que le payement
de la somme de 16,000 francs seroit fait après un jugement rendu
contre les héritiers Bouchaud, il dit contre les héritiers de Brassac ;
et le citoyen Maigne fut d’autant plus aisément trom pé, qu'il
considéroit les enfans Ducros de Brassac comme héritiers du
chevalier de Brassac leur oncle, sans enfans.
C'est celte erreur affectée du citoyen Choussy, qui lui fournit
aujourd hui matière à exiger que le citoyen Maigne lui paye la
somme de 16,000 fra n cs, quoique la demoiselle Ducros de Brassac
ait fait condamner le citoyen Maigne à la lui p a y e r, à elle.
L a mauvaise foi que manifeste le citoyen C h o u s s y , ne laisse
pas douter qu’il prépara sa prétention actuelle, en désignant dans
son traité les héritiers de Brassac pour les héritiers Bouchaud ;
mais reprenons les faits.
L e 29 vendémiaire an 7 , la demoiselle D ucros, aujourd’hui
épouse d’A pchier, reprenant la demande qu’elle avoit formée en
179 1, conjointement avec son frè re , assigne de nouveau le citoyen
M a ig n e , et réclame , en vertu d’un legs à elle fait par le sieur
Bouchaud, la somme de 22,5oo fr. sur celle de 25,000 francs qui
faisoit l’objet de la première demande. L e citoyen Maigne notifie
au citoyen Choussy cette nouvelle assignation, et l’appelle en assis
tance de cause, pour défendre ù la demande de la demoiselle Ducros,
et s’accorder avec elle.
L e citoyen Choussy ne fuit aucun cas de l’assignation en assis
tance de cause; Maigne l’oppose à mademoiselle D ucros, et en
�W vl
}
demande la jonction à l’instance pendante avec elle; une première
sentence du G messidor an 7 rejette la jonction.
(
8
A utre sentence du 22 frimaire an 8 , qui fait provision à la
Ducros de 10,000 fra n cs, attendu la contestation du
citoyen Maigne.
demoiselle
Clioussy est légalement averti des poursuites de la demoiselle
D ucros : il demeure dans l’inaction à son égard; fait donner une
nouvelle assignation au citoyen Maigne pour procéder dans l’ins
tance sur sa saisie-arrêt, et conclut à ce q u e , sans s’arrêter a la
demande en assistance de cause du citoyen M aigne, les conclu
sions qu’il a prises, par exploit du 5 thermidor an 5 , lui soient
adjugées.
Les* deux procès étoient pendans devant le tribunal d’arrondis
sement de B rioude, et s’instruisoient séparément.
L a dame Ducros d ’Apchier a fait prononcer sur sa dem ande,
e t, par sentence du 5 prairial an 1 0 , Maigne a été condamné à
lui payer la somme de 22, 5 oo francs, avec intérêt depuis 1785.
Clioussy a aussi fait statuer sur ses assignations; et une sentence du
27 dudit mois de prairial l’a déboulé de la demande en payement
de la somme de iG,ooo francs, qui devoit lui être payée après un
jugement en faveur de Maigne contre les héritiers Bouchaud ,
aussi héritiers présomptifs de Ducros de prassac.
L e tribunal de Brioude a reconnu (pie la stipulation faite au
traité de thermidor an ù , entre Clioussy et M aigne, et qui renvoie
le payement des ifi,000 francs à l’époque d ’un jugement en faveur
de M aigne, ne pouvoit frapper que sur un jugement entre lui et
les sieur et demoiselle Ducros.
L e citoyen Clioussy est appelant de cette sentence. Bravant
l’opinion publique et celle de ses juges, il soutient que sa turpitude,
quoiqu’évidente, a lié le citoyen M aigne; que c ’est par les expres
sions du traité, et non parce que les parties ont entendu, que la
cause doit être jugée. Mais comme les lois ont pour objet principal
la distribution tic la justice d’après l’équité; comme les juges 11c
" sont
�( 9 )
sont pas astreints à s’en tenir aux termes plutôt qu’au sens de la
convention ; qu’en principes il faut rejeter les expressions qui
n ’ont pas de sens, suivre l’intention plutôt que les term es; que
c’est un caractère essentiel à la validité de toute convention, qu’elle
soit faite avec sincérité et fid é lité ; comme les magistrats ont l’in
terprétation des lois et des clauses exprimant les conventions , qui
sont aussi des lo is, par voie de doctrine et par voie d ’autorité, le
citoyen Choussy n’a dû se promettre aucun succès de son témé
raire appel.
L a discussion portera sur plusieurs questions, qui naissent de
trois propositions principales. Ce seroit allonger que d’en donner
une idée substantielle et le développement. Nous tâcherons d etre
m éth o d iqu e^ sans division de notre plan.
L e citoyen Choussy prétend que la réserve de ne payer
iG,ooo francs, qu’après un jugement en faveur diicitoyen M aigne,
contre la succession de B rassac, ne peut pas frapper sur la de
mande formée en 1791 par les sieur et demoiselle Ducros. Et
sur quelle demande frappera-t-clle donc; puisqu’il faut lui donner
une application, la diriger vers un effet réel ?
Quelle peut être la valeur d ’un jugement en faveur du citoyen
M aigne, contre la succession du chevalier de Brassac? Q u’eut-il
porté, et quel pouvoitêtre l'intérêt du citoyen Maigne à en avoir un?
Le citoyen Choussy , traitant en qualité de créancier d’une suc
cession vacante, et que faussement il dit répudiée , puisqu’il n’y a
jamais eu de répudiation , ni de curateur nommé à llio irie , prenoit la place de 1 homme de la succession , stipuloit les intérêts
de la succession envers le citoyen M aigne, régloil et fixoit, en
cette qualité, la dette de Maigne. Les condamnations que le citoyen
Maigne avoit fait prononcer en remise des effets D ugard, frappoient directement contre le sieur de Brassac; elles n ’atteignoient
le citoyen Choussy que secondairement. — C ’est dortc au nom do
la succession de Brassac, que le citoyen Choussy stipuloit que
Ma igne relireroit les effets Dugard et M ontbrizet-M ontfleury,
B
�( 10)
ensemble toutes les procédures, et autres pièces se trouvant entre
les mains des défenseurs dans divers tribunaux ?
L,e citoyen Choussy, qui invoque l’ordonnance de i 56 o , contre
]a défense du citoyen M aigne, qui , page 7 de son m ém oire,
s'exprime en ces termes : « A u ssi, par le traité du 27 thermidor
« an 3 , il est convenu que pour terminer définitivement tout
u procès entre les parties, dont l’un au tribunal de T h ie rs , pour
« les trois billets à ordre de la dame Dugard de Cherninade;
« l ’autre au district de C lerm ont, pour raison de quatre billets à
« ordre, de Croze-M ontbrizet ; le troisième au district de R io m ,
i< pour les saisies-arrêts faites à la requête du citoyen C h oussy, etc. »
nous dit donc que le traité étoit fait sur les trois procès existans
alors, et pour les éteindre; dès-lors point de jugement h obtenir
contre les héritiers de Brassac, ou le curateur à son hoirie.
E t sur quoi eùt-il frappé ce jugement ? qu’eût-il prononcé ?
L ’homologation du traité pour le rendre commun avec le curateur.
M ais quelle en étoit l’utilité? Ce jugement eût-il mieux assuré
le payement qu’auroit fait le citoyen Maigne au citoyen Choussy,
au préjudice de l’action des héritiers Bouchaud? E ût-il rempli
l’objet de la sentence du 19 août 1791 ?
Il ne peut pas être permis de le prétendre. Il faut donc reconnoltre qu’un jugement d ’homologation du traité n’étoit pas dans la
convention des parties.
E ût-ce été pour faire dire que la somme de 25 ,000 fran cs,
prix de l’office Bouchaud , appartenoit aux sieur et demoiselle
D ucros , et que cette somme devoit être retranchée de celle de
5o,000 francs, pour laquelle le citoyen Maigne s’étoit obligé par
le traité du 29 décembre 1786, envers le chevalier de Brassac?
Un jugement en faveur de M aigne, contre les héritiers de Brassac,
ne pouvoit être que cela , s’il n ’étoit pas pour l’homologation du
traité du 27 thermidor an 3 ; et il ne remplissolt pas les vues du
citoyen Choussy , il s'en éloignoit au contraire.
, Etoit-il beso in , y avoit-il lieu à faire d ire , par un jugement
�IV
( 11 )
rendu contre la succession de Brassac, que Maîgne avoit valable
ment payé' audit de Brassac la jçpéance propre aux sieur et de
moiselle D ucros? C e rte s, ni la. votive de Brassac, ni ses héritiers,
ni un curateur à l’ hoirie, n ’eussent contesté cela.
Mais la justice, si elle n ’eût été surprise, eût reconnu que le
jugement étranger aux sieur et demoiselle D u cro s, ne pouvoit pas
leur nuire, qu’il seroit frustratoire, insignifiant, et eût refusé
d’admettre la demande.
Tenons donc pour bien certain , bien dém ontré, que ce n ’étoit
pas d’un jugement en faveur de M aigne, contre les héritiers de
B rassac, que les parties entendoient parler, en renvoyant à un
jugement le payement de la somme de 16,000 francs.
A vant encore d'obtenir un jugem ent, il eût fallu diriger une
action ; et ce n’est pas une action que le citoyen Maigne doit
form er, c’est un procès pendant qu’il doit faire juger en sa faveur.
Remarquons que la clause par laquelle Maigne se charge , à la
fin du tra ité, de garantir le citoyen Choussy des frais auxquels
il a été condamné envers le citoyen M ontbrizet, et stipule de plus
que tous les frais qui seront faits par la suite, pour l’obtention des
jugemens qu’il se propose d’obtenir contre qui bon lui semblera ,
seront à sa charge, ne vient pas à l’appui de la prétention du
citoyen C h o u ssy, mais au contraire rectifie la subtilité dont il veut
abuser. Ici il est question de remise de billets et e ffe ts, d’action
contre les débiteurs de ces effets ; c’est une réserve particulière ,
une convention indépendante, et sans rapport à celle qui con
ditionne l’obligation du payement des 16,000 fr.
Examinons la même question sous une autre face.
L e payement de la somme de iG,ooo fr. renvoyé à l’époque d ’un
jugem ent, frappoi t-il sur la demande des sieur et demoiselle D ucros ,
héritiers Bouchaud?
O h ! très - certainement o u i, parce qu’il y avoit action d’une
part, et action qui subsistoit; que de l’autre , il étoit indispensable
de faire cesser la réclamation des héritiers Bouchaud.
11 s’agissoit de faire dire, envers les héritiers Bouchaud, et sur
B 2
�( 12 )
leur demande, que leur tuteur avoit pu recevoir 18,667 fr. sur la
créance mobiliaire de 25 ,ooo fra n c s , prix d’un office ; que consé q u e m m e n t Maigne, ayant payé à Ducros de Brassac, avoit bien
payé; que la reconnoissance du tuteur valoit envers les niineurs.
C ’étoit alors, et avec ce jugement, que le citoyen M aigne, ne devant
aux héritiers Bouchayd que la somme de 6,543 fran cs, formant
le premier article de son arrêté de compte avec le sieur D uçros
de Brassac, ayant encore dans les mains 16,000 fr. com plétant,
avec ce qu’il avoit p a y é , ou au chevalier de Brassac, ou à Choussy,
les 4 -3,657 francs dûs au sieur de Brassac, de son c h e f, pouvoit
délivrer la somme de 16,000 francs à C h oussy, et être pleinement
et entièrement libéré.
C ’étoit pour avoir cette assurance, pour savoir à qui il payeroit,
et ne payer qu’une fois, que le cit. Maigne avoit plaid«* contre le cit.
Choussy. L a sentence du 19. août 1791 avoit réglé les parties à cet
égard; et, par le traité du 27 thermidor an 3 , Maigne n’y renonce
pas ; le traité n’est qu’une exécution de cette sentence, et s’y réfère.
Ainsi que l’avoue le citoyen Choussy en en détournant la vraie
ca u se, le citoyen Maigne eût eu Ja volonté comme la possibi
lité de p a yer, au 27 thermidor an 3 , 56 ,000 francs au citoyen
Choussy ; et il est de fait que Choussy vouloit les toucher alors,
parce qu’il avoit à faire le remboursement de la constitution de
dot de son épouse, remboursement auquel il employa les 20,000 fr.
qu’il re ç u t, ce qui fait qu’il n’a rien perdu sur ce payem ent.
C e peu de m ots, sur la seconde question , prouve démonstra
tivement , et sensiblem ent, que le payement de la somme dç
16,000 francs ne devoit être fait à Choussy, dans l’intention des
parties , et dans leur convention , qu’autant que Maigne seroit
déclaré, par jugement ( avec les vraies parties ) , bien libéré de
18,667 francs sur le prix de l’office Bouchaud : car il répugne au
sens, à la raison , que M aigne ait voulu payer deux lois la même
6onime ; qu’il ait entendu contracter envers Choussy une obligation
nouvelle, sans cause, sans prix. — 11 ne devoit rien personnellement
au citoyen Choussy, le citoyen M aigne; il 11e lui avoit rien dû ;
�H *
(■s)
il ne pouvoit être tenu de lui payer, par l’effet de la saisie-arrêt,
(]ue ce qu’il devoit au sieur de B rassac, et ce qu’aucun autre
n ’avoit droit de toucher.
O r , il étoit dans l’intention des parties, et ce fut leur conven
tion, que la somme de 16,000 francs ne seroit payée que dans le
cas où le cit. Maigne feroit ju g er, contre les héritiers Bouchaud,
qu’il avoit bien payé 18 ,6 57 francs sur le prix de l’office, en payant
au tuteur desdits héritiers.
L e citoyen C h o u ssy, rédacteur du traité, rendit parfaitement
la convention, mais en détourna l’application ; il ayoit ses raisons :
Maigne ne s’en défia p a s, et n’y prit pas garde. — Inexercé dans
les tournures qu’on peut donner à une clause, un négociant probe,
et de bonne f o i , ne voit que le fait ; et ce qui a été convenu,
ce qui a été expliqué et arrêté , lui paroit é c rit, en quelques
termes que la convention soit exprimée. M aigne vit et lut la con
dition imposée à son obligation de payer 16,000 francs; il ne fit
pas attention que Choussy désignoit les héritiers de la succession
de Brassac , pour les sieur et demoiselle de Brassac : un nom
donne pour un autre échappe aisément à la confiance. Il n ’eût pas
conçu même ce que Choussy pouvoit avoir en v u e , en désignant
les héritiers de Brassac pour les héritiers Bouchaud , ou les enfans
de Brassac; et d'ailleurs il ne pouvoit pas être fait d'erreur, dès
qu’il n 'y avoit qu'un procès à faire ju g e r, qu'une réclamation
fo rm ée, et qui fit obstacle au citoyen Choussy pour le payement
de 16, 000 francs.
L e citoyen Choussy dit qu’il y a ambiguïté dans la clause, et
qu’elle doit s’interpréter contre le citoyen M aigne. Cette opinion
n est pas la doctrine des auteurs : nous nous en tiendrons à ce que
dit le célèbre et judicieux Domas.
Dans sa dissertation préliminaire sur les règles d ’interprétation
des lois, il s exprime ainsi : « Il est nécessaire d’interpréter les lois,
« lorsqu’il arrive que le sens d’une loi, tout évident qu’il parolt dans
« les term es, conduiroit à de fausses conséquences et à des décisions
« qui seroient injustes, s'il étoit indistinctement appliqué à tout
�(i4)
« ce qui semble compris dans l’expression ; car alors l’évidence de
« l'injustice qui suivroit de ce sens apparent , oblige à découvrir,
« par une espèce d’interprétation , non ce que dit la loi , mais ce
« qu’elle veut, et à jugerparson intention quelle est son étendue. »
Sur le chapitre des conventions, analisant les dispositions des lois
d e là m atière, il enseigne, article VIII, que « c’est par l’intention
« des parties qu’on explique ce que la convention peut avoir
« d’obscur ou de douteux. » L . 3g , ff. de pactis.
A rticle X I. « Si les termes d’une convention paroissent contraires
« à l’intention des contractans, d'ailleurs évidente, il faut suivre
« cette intention plutôt que les termes. » L oi 219, ff. de verb. sign.
A rticle XIII. (( Les obscurités et les incertitudes des clauses qui
« obligent, s’interprètent en faveur de l’obligé; et il faut restreindre
« l’obligation au sens qui la diminue ; car celui qui s’oblige ne veut
« que le moins , et l’autre a dù faire expliquer plus clairement ce
» qu’il prétendoit. » L , 10 9, ff. de verb. obli.
A rticle X IV . « Si l’obscurité, l’am biguïté, ou tout autre vice
« d ’une expression , est un effet de la mauvaise f o i , ou de la faute
« de celui qui doit expliquer son intention, l’interprétation s’en fait
u contre lui. A in s i, lorsqu’un vendeur se sert d’une expression
« équivoque sur les qualités de la chose vendue , l’explication s’en.
« fait contre lui. »
T o u t s’applique à la cause présente , et frappe le cit. Choussy.
C ’est de sa part qu’a été la mauvaise foi ; l’infidélité est de son fa it ,
puisqu’il est le rédacteur du traité : il manque de sincérité ; il est le
créancier, et doit souffrir l’interprétation en faveur de la libération.
Son système blesse la raison , offense la probité.
Il faut donc, d’après les préceptes et les lois précités, chercher
à connoître qui l’on a v o u lu , qui l’on a pu désigner comme devant
souffrir un jugement en faveur du citoyen M aigne, déclarant le
payement de 18,657 francs , fait au sieur Dupros de Brassac , bien
fait et imputable sur la créance propre aux héritiers Bouchaud ; et
autorisant encore le citoyen Maigne îx payer 16,000 fr. au citoyen
Choussy , au préjudice de la réclamation de la dame Ducros
�ly j
( «5 )
d’Apchier : et cette recherche n’est pas pénible; le résultat n ’ën est
pasdouteux. Il est dém ontré, il est fortement sen ti, qu’il n’y avoit
de jugement à obtenir, pour légitimer le payement des 16,000 fr.
laissés en réserve, que contre les sieur et demoiselle Ducros de
Brassac.
L e citoyen Choussy prétend que l ’obligation du citoyen M aigne
est purement absolue et sans condition ; en sorte que, dans ce sys
tème], il étoit surperflu de s’occuper de savoir quelle a été l’intention
des parties, le vrai sens de leur convention.
Il d it, page 20 de son mémoire : « L e citoyen Choussy, créancier
« du chevalier de Brassac, avoit fait saisir entre ses mains : Maigne
« paye en vertu de cette saisie; d è s-lo rs, nécessairement et évi« dem m ent, il devoit obtenir une compensation sur la succession
« du chevalier de Brassac. C ’est là ce qu’il a entendu ; c’est ce qui
« lui a fait obtenir une suspension de payement pour la somme
« de 16,000 francs : son obligation est donc absolue, et sans con« dition. »
L e plus grand talent ne peut pas même colorer une mauvaise
assertion. L e citoyen Choussy n ’a pu poser sa thèse, qu’en avouant
toujours une condition qu’il veut ne pas exister; e t, dans la consé
quence de sa proposition , il dit une erreur.
Q uoi! 1<^tiers-saisi, qui paye au saisissant, a besoin d’obteni^de
faire prononcer une compensation envers le débiteur saisi! et avec
quoi compense-t-il? la compensation se fait d ’une dette à une autre.
L e chevalier de Brassac ne devoit pas au citoyen Maigne ; il n’y
avoit pas de compensation à obtenir.
Mais si la nécessité de la compensation, ainsi que l’entend le
citoyen C h o u ssy, faisoit accorder une suspension de payement
pour les 16,000 fr. il y avoit même raison pour les 20,000 francs ;
et cependant Maigne en iaisoitle payement. Les parties ne sentoient
donc pas l’évidente nécessité que le citoyen Maigne obtint une com
pensation; et, puisqu’il y avoit une cause de suspension, il falloit
nécessairement une condition. Si Maigne exposant 20,000 francs
n ’en vouloit pas exposer 56,o o o , et sc réservoit un jugement
�( 16 )
en sa faveur, avant d’être tenu de payer les 16,000 francs, il imposoit
à son engagem ent la condition de ne pas payer, si le jugement
étoit contre lui. Le citoyen Choussy n ’a donc pas prouvé que l’obli
gation du citoyen Maigne soit absolue et sans condition. Il y a
m ieu x, il ne le pense pas.
M ême page du m ém oire, le citoyen Choussy dit que le citoyen
Maigne devoit personnellement au chevalier de Brassac plus que la
somme de 56,000 francs , pour laquelle il s’obligeoit, et que cette
circonstance justifie l'obligation absolue et sans condition de
Maigne envers Choussy.
Mais si nous établissons qu’il ne pouvoit pas , en vertu de sa
saisie-arrêt, toucher sur la dette du citoyen Maigne envers le sieur
Ducros au delà des 20,000 francs qui lui furent payés com ptant,
nous aurons écarte l'induction du citoyen Choussy, tirée du fait qu’il
avance, et nous aurons prouvé encore que l’obligation n ’a pas été
absolue.
>■
O r , un calcul simple détruit et le fait et l’induction du citoyen
Choussy.
Par le traité du 2<)décembre 1786, le citoyen Maigné sereoonnoît
débiteur du sieur Ducros de 5 o,ooo francs: dans cette som m e, n'y
entre la créance des héritiers Bouchaud que pour 6,545 francs, parce
que le citoyen Maigne avoit payé sur cette créance 18,667 francs,
antérieurement au traité : reste bien pour la créance personnelle du
sieur de Brassac 45,667 fran cs; nous sommes d ’accord ju sq u e-là .
Mais le chevalier de Brassac , ou M aigne, doivent rembourser
2 6 , 0 0 0 fr. aux héritiers Bouchaud ; et si Maigne est Condamné, par
l’effet de l’engagement contracté par la quittance qu’il a fournie de
celte somme au sieur Fôurnier de T o u n y , de la payera la demoi
selle D u cro s, il est de toute évidence que le chevalier de B rassic,
qui a reçu de Maigne 18,667 francs , doit lui en faire raison , et
les imputer sur sa créance personnelle, qui , d è s-lo rs, diminue
d ’autant, et se réduit à 25,000 francs. — Le citoyen Maigne justifie
avoir payé 6,024 fr* au sieur Brassac après le compte réglé en 1786;
rt, avant la saisie'du 6 août 1787, il ne devoit en l’an 5 , età l’époque
du
�fïï
( 17 )
du traité avec Choussy , que 20,000 francs au sieur de Brassac
personnellement. Son obligation absolue , et sans condition ,
pour 36 ,ooo francs envers le citoyen Choussy , n’est donc pa&
justifiée.
Elle est donc sans cause cette obligation que le citoyen Choussy
veut n ’être pas conditionnelle, et elle est nulle. L a nullité ne
sauroit être méconnue : on ne peut ouvrir un livre de droit sans
y trouver le principe consigné.
Comm ent justifie—t-il maintenant le défaut de cause dans l’obli
gation absolue ? Il ne s’est pas donné la peine de l’entreprendre.
Il a dit ( hors celte thèse ) qu’il avoit fait des remises considé
rables à la succession de Brassac : mais ces prétendues rem ises, ne
profitant pas au citoyen Maigne , ne donnent pas une cause à son
obligation ; et nous établirons, dans un m om en t, qu’au lieu de
faire des remises sur sa créance, Choussy l ’a augmentée bien
indélicatement.
Il a dit encore que Maigne avoit obtenu des remises du che
valier de Brassac, qui n avoit pas pu en faire à son préjudice.
L e traité passé avec le sieur de Brassac porte bien , h la vérilé,
l’énonciation d’une remise de 18,657 francs ; mais nous avons déjà
remarqué que cette somme avoit été payée avec imputation sur
la créance propre aux héritiers Boucliaud , et que l’énoricialion
insignifiante d’une remise étoit une couleur à l’hypothèque que le
chevalier Ducros vouloit se conserver pour sa créance personnelle.
11 a été établi bien conIradictoirement a\ec le- citoyen C houssy,
dans l’instance au tribunal du district iVtsGoM><f sur la saisie-arrêt,
que les 18,657
avoient été reçus par le sieur de Brassac. C e
fa it, certifié par des hommes honnêtes et consideres dans Brioude,
témoins oculaires du compte fait avec le chevalier de Brassac , est
d’ailleurs justifié par le rapport de plusieurs pièces. Ces preuves
ont paru suffisantes aux citoyens V e r n y , T o u ttée , Favard et
Pagès , qui ont consigné dans une consultation donnée au citoyen
M aigne, le 28 thermidor an 7 , qU’à moins de se refuser à l’éviC
�( i8 )
dence, la certitude des payemens de 18,657 ^r* ne sauroit être
mieux démontrée.
N e parlez donc plu s, citoyen Choussy, de remises faites: vous
ayez tant besoin de vous taire à cet égard.
Revenant sur l’étendue et la validité de l’obligation du citoyen
M aigne, il n’y a pas de parti moyen pour Choussy.
L ’obligation est conditionnelle, au cas où le citoyen Maigne
feroit juger qu’il a bien payé au sieur Ducros la somme de 18,657 &•
sur celle de 25,000 fr. prix de l’office Bouchaud ; et dès qu’il a ,
au contraire , été jugé que Maigne avoit mal payé au tuteur ; qu’il
étoit personnellement tenu de faire valoir la quittance qu’il a
donnée ; et qu’il a été condamné à payer 22,5oo fr. à la dame
Ducros-d’A p ch ie r, le surplus demeurant au sieur Ducros son
fr è r e , il est de toute évidence que Maigne ne peut pas p a y e r, et
que Choussy ne peut pas réclamer la somme de 16,000 fr.
Si l’obligation ne contient pas la condition , elle est nulle à
défaut de cause, et le payement n ’en peut pas être demandé.
Il fa u t, à la validité d ’un engagement , une cause. Pour con
sentir une obligation , il faut en avoir reçu le montant ; sans cela,
point d’engagement valable.
C ’est ce qu’ont entendu les premiers juges, quand ils ont d it ,
dans un des motifs de la sentence dont est appel, que « l’acte du
« 27 thermidor an 3 ne contient aucune cession de droit de la
« part de Choussy en faveur de Maigne ; que Choussy n ’a pas
« renoncé, au surplus de ses droits contre le chevalier de Brassac;
« qu’il n ’y en est pas djt.un mot ; qu’il a encore moins subrogé
« Maigne à ses dpoi&T et qu’ainsi celui-ci n ’auroit ni d roits, ni
« qualités pour les exercer. »
Que répond le citoyen Choussy , page 26 de son mémoire ?
«
«
«
«
«
Lorsque le citoyen Maigne se reconnolt débiteur, sauf son
recours contre qui bon lui semblera , ne résulte-t-il pas de ces
expressions un transport ou une cession en faveur de Maigne ?
le tiers saisi qui paye au créancier saisissant n’est-il pas subrogé de plein droit au créancier qu ’il a payé ? »
�( *9 )
Peut on reconnoltre de l’identité de la subrogation légale, qui
s'acquiert par le fait du payement de la dette d’autrui, au trans
port de droits qui exige les conditions de la vente ?
L e payement fait à un saisissant, en déduction ou en extinction
de sa propre d ette, peut-il faire un transport de créance ? Le
tiers saisi n ’achète pas ; il se libère : il n’y a donc pas de subro
gation légale.
A u reste, la subrogation de droit n ’étant pas du fait du créan
cier qui reçoit tout ou partie de sa créan ce, et dans les limites
dans lesquelles elle a lie u , ne dépendant pas de la volonté du créan
cier , ne donne pas une cause valable à une obligation qui n ’en a
pas d’autre : ainsi point de prix , point de cause à l’obligation
absolue du citoyen Maigne.
N ’auroit-il pas pressenti un jugement conforme aux principes
invoqués , le citoyen C h oussy, quand il a voulu se placer dans
une situation de perte évidente, en se refusant à lui-même la res->
source de la tierce opposition à la sentence rendue au profit de la
dame Ducros , dont il critique la décision , en reprochant au
citoyen Maigne de ne s’être pas défendu?
Les divers jugemens rendus en faveur de la dame D u cro s, les
consultations dont le citoyen Maigne a fait les faux frais, prouvent
sa résistance à souffrir la condamnation prononcée contre lui en
faveur de la dame Ducros-d’Apchier. L es longs plaidoyers dont il
est porteur, l’appel en cause du citoyen C h o u ssy, prouvent qu’il
s’est défendu, et laissent au citoyen Choussy tout le tort de son
traltro et coupable silence.
Q u’il ne fasse donc de reproche qu’à lui-même ; et qu'il se con-»
duise franchement une fois.
Nous ne sommes pas chargés de sa défense ; mais nous soute'«
nons qu’il a d ro it, et qu’il est encore recevable à se pourvoir par
tierce opposition contre la sentence rendue au profit de la damo
Ducros-d’Apchier.
Pour être fondé dans une tierce opposition, il faut avoir intérêt
de faire réformer des condamnations qui rejaillissent contre nous.
C 2
�D e cet’ intérêt sorterit le droit et la qualité. E t puisque le citoyen
Choussy pense qué, pour être recevable dans une tierce opposition
à un jugem ent, il faut avoir eu, lors de ce jugem ent, une qualité
qui aie obligé de nous y ' appeler, il peut soutenir qu’il avoit
cette qualité , puisque, d’une p a r t, il a été appelé par le citoyen
M aigne, et par exploit; q u e , d’autre part, il avoit intérêt de faire
■dire que le citoyen de Brassac , son débiteur, avoit eu le droit
de recevoir du citoyen M aigné la créance mobiliaire des sieur""
et demoiselle Ducros , ses pupilles, et que le citoyen Maigne avoit
bien payé.
A u re ste , que le citoyen Choussy se conduise comme il lui
plaira à l’égard de la dame D ucros-d’A pchier: nous n ’avons d’objet
que celui de réfuter ses assertions, et de le montrer en guerre
perpétuelle avec la raison et les principes de loyauté et de justice.
Ici se borneroit la défense du citoyen Maigne , déjà assez éten
due ; mais il faut forcer le citoyen Choussy sur tous les points.
II pense qu’il n ’y a plus de délais pour le citoyen M aigne,
pour remplir la condition de son obligation ; et il le prouve par
un mauvais sophisme : voici son langage*, page 20 deson mémoire.
« Le citoyen Maigne pourroit-il penser que, parce qu’il s’est
« obligé de payer cette som m e, après avoir obtenu un jugement
« en sa faveur contre cette succession répudiée, il pouvoit se
<c jouer de ses engagemens, éviter ou reculera son gré le paye« m ent, jusqu’à ce qu’il lui plairoit d’obtenir un jugement contre
« le curateur à la succession vacante?
« Peut-il croire qu’après sept années de silence , il éludera une
« obligation formelle et absolue? Il n ’a pas dit qu’il ne payerait:
« qu’à condition qu’il obtiendroit un jugement en sa faveur ; il
w s'est obligé de payer, après l’avoir obtenu. »
• Nous adoptons la conséquence de l’argument du citoyen
Choussy. Maigne n’ayant pas dit qu’il ne payeroit qu’à condi
tion qu’il obtiendroit un jugem ent, s’est obligé de payer, après
avoir obtenu un jugement.
Eh bien! il n ’est pas obtenu ce jugem ent, ni contre le cura-
�( 31 )
leur , ni contre les héritiers Boucliaud. L e terme de la condition ,•
ou du payement si l’on v e u t, n’est donc pas arrivé; la condition
est à remplir.
Est-il certain que le citoyen Maigne n'eut pas encore le droit
d ’invoquer la clause de réserve, dans le cas où il seroit décidé
que c^st contre le curateur à la succession Ducros de Brassac,
qu’il a obtenu*le jugement convenu par le traité?
Il n’y avoit pas de terme lim ité; s'il ne doit pas être perpé
t u e l, il souffre néanmoins un long cours de temps, et sept
années ne sont pas le long temps défini par la lo i, il en faut dix
au moins.
O r , le citoyen Maigne fait ce dilemme. D e l'aveu du citoyen
C lioussy, je ne me suis obligé de payer qu'après avoir obtenu un
jugement contre le curateur du chevalier de Brassac; la consé
quence est que vous ne pouvez agir que quand le cas de la condition
exprimée sera arrivé. Votre demande est donc prématurée.
Si je me suis trompé , en pensant que c’étoit avec la dame
Ducros que je devois faire rendre un jugem ent, c’est bien parce
que vous, Choussy, m ’avez trompé aussi, et vous devez m e donner
le temps de réparer l’erreur. V otre action est encore prématurée.
Dans la situation des parties , l’homme et le juge sentent la
nécessité de surseoir encore à la demande du cit. Clioussy.
L a somme de 16,000 fr. qu’il demande à loucher, ne lui est
pas d ue, c’est ce qui sera établi. L e cit. M aign e, qui ne doit qu’une
lois sansdoute, l’a déjà payéeà ladame D ucros-d’Apchier, en vertu
de la sentence contre lui rendue depuis un an : il a quittance de
31,000 francs. L 'é q u ité , la rigoureuse justice, ne commandentelles pas la surséance? Choussy retient tous les effets se portant
à*i 1,260 fran cs, que le chevalier de Brassac et lui ont été con
damnés à rendre au citoyen Maigne. Choussy a même touché le
montant de plusieurs ; il est responsable des autres , s'ils ont péré■clité dans ses mains : est-il en souffrance?
M a is, peut-on nous d ire, la surséance n’est qu’un délai nouveau,
dont le terme laissera toujours le citoyen Maigne dans la même
�T
( 22
situation, puisque d’après lui tout jugement qu'il obtiendra contre
le curateur à l’hoirie du chevalier de Brassac, sera insignifiant à
l ’égard de la dame Ducros-d'Apchier.
C ette objection ne peut pas être faite par le citoyen C h o u ssy,
qui a écrit, et dans le traité et dans son m ém oire, que ce seroit
contre le curateur à l’hoirie répudiée que Maigne obtiendroit un
jugement en sa faveur. Il faut que la conventionr-soit exécutée
dans un sens ou dans un autre.
E t d’ailleurs ne s e r o it-il pas permis au citoyen Maigne de
prendre, à l’égard du citoyen Choussy, la place du chevalier de
B rassa c, son garant , et de compter avec le citoyen Choussy ?
Cela parolt incontestable : le garanti peut exercer les droits de
son garan t, et faire ce qu'il feroit lui-même. O r , avant que
Choussy puisse, en vertu de l’obligation conditionnelle du citoyen
M aigne, exiger le payement de la somme de 16,000 francs qui
appartient aux sieur et dame D u cro s, il doit justifier de la légi
tim ité de sa créance , établir par un compte contradictoire que
cette somme lui est encore due.
Choussy doit bien faire confirmer sa saisie , vis-à-vis le débiteur
principal; et M aigne, exerçant les droits de son garan t, peut bien
Requérir la liquidation de la créance de Choussy saisissant, et
demander un compte. ..
E n vain Choussy opposera le traité du 27 thermidor an 3 , pour
fin de non recevoir. Ce m o ye n , presque toujours en opposition à
bonne f o i , n ’est pas admis quand il parolt de l’erreur et de
l ’ignorance de fait.
O r , Maigne ignoroit, au 27 thermidor an 3 , que les effet»
M onlbrizct , de 10,000 francs , n'étoient pas la propriété de
C h o u ssy, mais seulement le gage saisi de sa créance. 11 pensoit*,
comme Choussy l'articu lo it, que les fonds en avoient été faits au
chevalier de Brassac.
Il ignoroit que le citoyen Choussy eût touché 5,75a liv. 18 sous
en vertu de ses saisies, et Choussy n’en parla pas : il ne les porta
pas eu déduction,
�( 25}
11 ignoroit que le cit. Choussy avoit vendu les Lois , les grains,
les charbons du chevalier de Brassac, et touché ses fermages du
domaine de D u rb iat, en vertu d ’autorisation sollicitée et obtenue
sous une reconnoissance que Choussy a toujours dissimulée.
C e n’est pas l’ignorance de d roit, dont personne n ’est excusé ,
que nous invoquons. C ’est l’ignorance de fa it, qui ne se couvre
pas mieux que Perreur de calcul : c’est le dol personnel du citoyen
Choussy.
A in si, point de fin de non recevoir contre le compte demandé au
citoyen Choussy.
En vain ilopposeroit que ce n’est pas par la preuve testimo
niale que l’on peut établir les recouvremens et les perceptions
articulés.
Dans l'état des choses et la situation des p arties, la preuve
testimoniale est admissible.
Premièrement, parce que le citoyen M aigne, étranger aux affaires
de Choussy et du chevalier de B ra ssac, n'a pas pu faire assurer,
par des écrits , l’usage et l'abus que le citoyen Choussy a fait des
mandats et des pouvoirs qu'il a reçus du chevalier de Brassac.
Secondement, la perception n’est pas une convention, mais un
fait personnel q u i, par sa publicité, constitue une comptabilité.
A u surplus, le cit. Maigne s’est procuré des pièces form ant des
preuves sur certains recouvrem ens, et des commencemens de
preuves sur une perception. E t peut-être en a-t-il assez pour la
preuve que Choussy a reconnu qu’il ne lui étoit rien dù par le che
valier de Brassac.
Il est sans contredit que le cit. Maigne est fondé à demander
la déduction des sommes qu’il établit ou établira avoir été reçues
par le cit. Choussy, en déduction de sa créance, contre la succes
sion du chevalier de Brassac, quoiqu’antérieurement au traité de
l’an 3 , dès que les pnycmens ne sont pas du fait du cit. M aigne,
et que le cit. Choussy les lui a laissé ignorer.
Mais y auroit-il quelques difficultés à ordonner le compte entre
Maigne et C h o u ssy, sans l’assistance du curateur à l’hoirie du
�VJ*
i l l
(=4)
chevalier Je Brassac ? C'est alors 1« cas d ’accorder au cit. Maigne
1111 délai, pour agir contre ce curateur. Ce sera laisser au citoyen
M aigne, et la faculté convenue, et le temps de satisfaire à la clause
du traité de l'an 3 , sous tous les rapports et dans tous les sens. C e
sera le relever de l’erreur dans laquelle il a été, si vraiment il a
erré.
Ce délai demandé et l'action à diriger contre le curateur serontils sans fruit pour le cit. M aigne? Ici s’expliquent les motifs et
l ’intérêt qui justifient et démontrent l'absolue nécessité de surseoir
à statuer sur l'appel, jusqu'à ce que le cit. Maigne aura, confor
mément à l'expression de la clause du traité de l'an 3 , fait pro
noncer Contre le curateur à l’hoirie du chevalier de Brassac.
Cette explication toutefois n'est «ordonnée, il faut que le cit.
Choussy le sache b ien , que parce que le cit. Maigne n ’entend pas
taire ce qu'il se propose. Il ne connoît pas la dissimulation : il
s’irrite de la fourberie, et ne ruse jamais; car il suffiroit au cit.
M aigne de dire : Je n ’ai pas, dites-vous, satisfait aux expressions
de la clause de notre traité, énonciative de la condition sous laquelle
j’ai promis payer iG,ooo francs; ce n’éloit pas contre les héritiers
Bouchaud que je devois obtenir un jugement, c'étoit contre les hé
ritiers du chevalier do B rassac, ou le curateur à son hoirie. Eh
bien , n’y ayant pas eu de délai lim ité, il ne peut pas y en avoir de
fatal ; je suis toujours à temps, et je me soumets à satisfaire à la
clause, autant qu’il sera en mon pouvoir. E t certes, la faveur
méritée au cit. Choussy ne fera pas fléchir la rigueur des prin
cipes en ce point.
L e cit. Maigne se propose donc, si la justice le met dans cette
nécessité, de faire nommer un curateur à l’hoirie abandonnée et
non répudiée du chevalier de Brassac; de form er contre lui une
action en recours des condamnations prononcées en faveur de la
dame D ucros-d'Apchier, ou de la demande du cit. Choussy.— Pouf
p'irer à l’action du cit. M aigne, le curateur n’aura de ressources,
que de faire cesser la prétention du cit. Choussy contre le cil*
M aigne, en faisant dire avec lui q u ’il n ’est pas créancier.
�W
'
(25)
A lo rs, par le secours des âmes b ien nées, se débrouillera la con
duite tortueuse du cit. Choussy. L à se découvrira l’abus d’une con
fiance demandée par écrit, et qui devoit rassurer le chevalier de
Brassac. L à reparoîtra peut-être l’écrit fait double entre Choussy
et le chevalier de Brassac, contenant reconnoissance d e s nantissem e n s, des mandats dont Choussy a voulu se faire des titres de
créance. L à enfin s’établira, nous en avons la certitude, puisque
déjà nous en avons de si fortes preuves, que Choussy n ’est pas
créancier.
E t alors le curateur se fera renvoyer de la demande récursoire
du cit. M aigne; et le cit. Choussy déclaré non créancier aura ce
qu’il exige, le jugement en faveur du curateur contre M a ign e, et
le cas de la condition exprimée dans le traité du 27 thermidor an 3 ,
arrivera en sens contraire, au cas dans lequel M aigne pouvoit seu
lement payer , ( un jugement en sa faveur ) ; et tout rentrera dans
l'ordre et dans les principes d’équité. L a dame Ducros aura sa
chose propre. Maigne ne payera pas deux fois. Choussy ne
touchera pas injustement.
Nous terminons par un voeu bien sincère. L e citoyen M aigne
donne au citoyen Choussy un bel exemple d ’une grande franchise,
même en procès, en lui révélant le secret m o tif du subsidiaire.
Puisse cet exemple fructifier dans l’àme des plaideurs, et rappeler
le citoyen Choussy au sentiment de la considération nécessaire
à un magistrat !
A.
M A I G N E .
V A Z E I L L E , défenseur avoué
A R IO M
, de
l' imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du Tribunal
d’appel. _ An XI.
^
�
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Factums Godemel
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[Factum. Maigne. An 11]
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Vazeille
Subject
The topic of the resource
créances
saisie
actes de notoriété
offices
commerce
mines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié en réponse, pour le citoyen Maigne, négociant, habitant de la ville de Brioude, intimé ; Contre le citoyen Jean-Joseph Choussy-Dupin, ex-négociant, habitant actuellement la ville du ¨Puy, appelant.
Table Godemel : Transaction : 2. la transaction sur procès convenue entre les parties, le 27 thermidor an 3, par laquelle Maigne resta débiteur de 16000 livres, constitue-t-elle, de sa part, une obligation absolue, ou conditionnelle ? s’il y a erreur, doute ou obscurité dans la rédaction, contre qui doivent-ils être interprétés ?
affaire jugée par juridictions successives
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1784-An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1305
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1304
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53194/BCU_Factums_G1305.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de notoriété
commerce
Créances
Mines
offices
saisie