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Text
M
E
M
O
I
R
E
*' - t* 1
POUR
(
les
Citoyens
B arthélém y,
M a rie
et
C a t h erine C h o i s s y , Enfans : et H é ritie rs
du C i t o y e n G a spard .Choussy , H a b i t a n s t de
la V i l l e de B illom ; F r a n ç o i s - A v i t G r e l i c h e ,
Homme
de
L o i,
M a r i ede ladite C a t h e r i n e
C h o u s s y ; et B a r t h é l é m y G r e l e t , H o m m e
de L o i , C u ra te u r à l’émancipation desdits
M in eurs C h o u s s y Intimés et a ppelans.
C O N T R E la Citoyenne. Catherine G a l i c e ,
Veuve de Nicolas Choussy ; et le Citoyen
Jacques-Philippe C h o ussy , Homme de L o i,
Héritier sous bénéfice d’inventaire dudit Nicolas
Choussy , son P è r e , Appelans et Intimés.
• V
L
A citoyenne G alice
l ’exem ple de
'
r •: T
et le citoyen Choussy , sonfilsà
N icolas C h o u ssy , ont em ployé
£
tous les m oyens
que la fraude peut suggérer p o u r ta c h e r d 'e n v a h ir le patrimoineA
�des mineurs
c
C h o u ss y , qui
2
)
avoient m alheureusem ent été mis
sous la tutelle de N icolas C h ou ssy, leu r grand-oncle.
Personne n’ignore la prévention
que les législateurs ont de
tout temps conçue contre les reconnoissances d’entre maris et
femmes , les
sentences
portant liquidation des droits
de ces
d ern ières, et les traités entre une veuve e t ses enfans, héritiers
de leur p ère
sous bénéfice
d’inventaire,
lié
bien , tous ces
moyens ont été mis en usage contre les mineurs Choussy.
Uriç sentence rendue en la ci-devant justice de B illo in , avoit
proscrit tous ccs-actes d ’iniquité , sans qu ’il fût m êm e besoin d ’en
venir à des preuves préalables. Sur l ’appel qui en a été interjeté
par la citoyenne G a lice et son f i l s , il est intervenu un jugem ent
qui a .imposé à la v e u v e C h o u ssy la nécessité de prouver par
tOniôins
lar consistance
et
V aleu r du m obilier
laissé par
son
pôxe ,^£axif la preuve contraire. E n exécution, de ce ju g em e n t,
les parjtiçs-ont;enquêté respectivem ent, et l’on verra qu ’il résulte
¿ e s .e n q u ê te s , qu e-tous les actes passés entre la veuve Choussy
et ‘ son fils , ne peuvent se souten ir, comme étant évidem m ent
l ’e fâ jt de l ’exagération et de la frau d e.
^ ¡Les irtjneurs:Cl}çussy, ont feux-mêmes pris le p arti de! se rendre
appelans de la sentence de la c l- devant justice de Billom : le
m otif*'dê leur a p p e l, e^t que cette se n te n ce , en renvoyant cà
statuer dans la suite sur des demandes essentielles qu ’ils avoient
form ées , syncope en quelque façon la contestation ; elle divise
les m oyens de fraude.qi^i doivént form er un ensem ble dont les
parties ne sau roien t-être d é ta c h é e s, sans tomber dans l ’inconsé
quence : il en résulteroit d ’ailleurs que l’on devroit plaider
deux »fois pour .'le m êm e objet.
A u .moy'eu de cet a p p e l, les entraves qui se présentoient. sur
la discussion de cette a ffa ire , et sur son ju gem ent, disparoitront,
et le tribunal pourra rendre un« décision qui vengera com plè
tem ent les mineurs Choussy de toutes les manœuvres odieuses
que leur t u te u r , sa veuve et son héritier bénéficiaire se sont
pfcrmisês, pour s’enrichir à leurs dépens.
^ L a carrière dans laquelle il faut e n tre r, est a rid e ; mais le
*Wic de rendre la justice soutiendra l'attention des juges* : on
�m
tâchera d’ailleurs de la soulager, ep: em ployant tout l'ordre dont
la discussion sera susceptible!.
,
F A
I T
S.
L e citoyen G aspard Choussy décéda en 1 7 6 7 , laissant trois
enfans dans le plus bas â g e , qui sont les intim és. Ils. furent
mis d ’abord sous la tutelle de leu r m è r e ; mais celle-ci mourut
le
23 septembre 1768 : cet accident nécessita une no u velle
tu telle.
L e citoyen N icolas C h o u ssy , , leur grand-oncle, mari de C a th e
rine G a lic e , a p p e la n te , et p ère du citoyen Jacques -
P h ilipp e
C h o u ssy , aussi appelant , é to it , suivant nos lois, dans l ’ordre
d ’être nommé leur tuteur.
Il ne put douter qu'il ne dût avoir cette ch arge; il fu t ayert.i
par les parens m êm e des mineurs , que leur suifrago se réunlroit
au vœu de la loi. Ces parens, dont,plusieurs .étoiejpÆ trt^-éloignés
de la ville de B illo m , où habitoit N icolas Choussy', s’y étpient
■rendus quelques jours avant qu’on procédât à la tutelle ; et
c ’est à Billom m êm e que les assignations leur furent d on n ées,
pour se trouver à l'hôtel, du, juge s; à l ’e ffe t d!y faire la nom i
nation.
!
:
• r>i j ; ,
.
D è s cet instant N icola$v ÇhouS£yy ,p e u t-ê tr e rnoins de son
propre m o u vem en t,
qu ’exçité : par C atherin e G a lic e ,
dont la
cupidité ne s’est pas .d é m e n tie , m édita les n^oyens de pouvoir
divertir les biens
des
m in e u rs, dont le
sort dcvoit
lui
être
confié , sans qu’ils pussent exercer sur sa fçrtune l ’indemnité
que les lots assurent aux pupilles sur les biens de lçur tuteur.
' ; G ’eÊt dansucotre vue que lfc 2 ^jctobre 17 6 8 ,.jo u r qui p récède
im m édiatem ent c.eLuiijde; la 'tu telle, N icolas Choussy alla furti
vem ent ch ez le cttoyçn Cham boissier , notaire à \ ic-le-C o in te,
(actu ellem en t \ ic -;s n r * A llie r ) ■
. p o îir.. ¡lui présenter le .projet
d ’une re(X)îinoissancci Lqu’il faisoit fi,; pfl. fuimnei;. d’une grande
quantité dé ;m archandises.'el
çjlfctsi ; ffy'il -disçit • avoir tre^uvé^
à la mort de. Jîucquea.'Galice } son pùrq
qui étoit décédé lè
19 juillet précédent.^ • s
K z
�ï.'ic^l ;rtèl0 f u t ^queátvón“ de la- pâyfc- dtf notaire que
p ro jet de reconnoissance
qui -lui
fu t présenté ,
de
copier
et de lui
donner une forme authentique. L e lendem ain, jour de la tu te lle ,
N ico la s Choussy se tïduva à Billom-, et. sa fem m e
n'a voit pas
quitté cette ville ; elle n'accepta pas la reconnoissance : ne
5 a'Ji ss’i n f ' ^ a s d’im ‘ àctC- Jsyna'lîn£matique , elle pouvoit cil
piôflfer' sans’ so n 1 Acceptation personnelle.
ndtair'è accbpt’ât p ou r" e lle. :,,‘n
II suffisoir que le
II e?t indispensable de presenter , au moins en su b stan ce,
les
dispositions de
cette reconnoissance.
: Choussy- 'ÿ~déclare q u ’au décès' de Jacques G a lic e ,
sén l'b é lu - p è ie , avec Ifeqüel il avoit résidé depuis son m âriage,
('qiiî rém ontoit à 1 7 4 2 ) il avoit trouvé parm i les effets de
sa succession
plusieurs
billets , obligations ,
se n te n ce s,
dont
le montant étoit dû p a r difiereng particuliers à son beau-père;
'qñ‘íí Hs’y élo it tro u vé11de I’dF et de l ;argent m onnoyé , et q u ’il
y ' ‘avoit de plus les étoffes e t'a u t r e s marchandises qui s’étoient
rro’W é e s.'d a n s' la tJoutiqiiè.' ■
•-> il
N icolas ChouSsy com m ence par faire le détail de toutes les
•nüarchandiiés ; il pouvoit en faire le plus bel étalage p ossible:
il ttvbit ' un champ
quantité ,
sans
libré i ‘ après de- dé fail fait seulem ent par
estimations
particulières ,
sans
mention
de
factu resc," il ;Héclare' 'd’âprèsvline- supputation fuste q u ’il prétend
néanm oins en avo ir‘ faite-, qüël la l'valeur de ces m archandises
s’é lè v ë :à la somme de dix m ille quatre cent q u a tr e -v in g t-tre iz e
livres dix sous. , en/; lui
f
«•
(
V ie n t enshité 1 lé détail d<3£' créanaes> qnç N icolas' Choussy. a
d é c la ré 'ê tre ducîs a
la silticessioft,|d ç,J'Jacquds G alice : ce détail
ne présente pas/à- b é à u c o u p p iè ÿ , l^e»attitude qui doit se trouVer
flañs lin e 1 réconnotèsance , o u 'n u i Jmnri e n -fa isa n t un acte .de
justice envers sa fem m e , veut- cependant
ne pas blesser les
infdiots ¿ ’autrui. L a ^rllipáttl’ de (cM1¿Aíaiicüs-sont énoncées ave<$
tnénticm d& prom esses, 'doiit ôiv no rapporte p o in tila d ate;: ce
qïu 'rté'dé^éhdoit qué de N itolas Ghousdy , p uisqu’ih disoit luitilêmù en ¿ti-c! najtiti i: er\sorte q u ’o u h u
ch an ces
peut
saV oir,
si ces
étoient prescrites ou non ; s’il y. avoit dus paiem ens
�c 5 )
écrits. Four se former lino idée de cet ou vrage, on-va -rapporte*
quelques-uns des articles : Ledit sieur Choussy nous a déclaré
être du à la succession du sieur Galice la semme de trois cents
livres par le sieur Am anton D u b o s t, et nous a déclaré avoir sa
■promesse ; ledit sieur Choussy nous a déclaré être du à ladite
succession une somme de deux cent cinquante livres par le sieur
1) claire, l'aîné, de Vertaison ; ledit sieur Choussy nous a aussi
déclaré être dû par le sieur Delaire , cadet , une somme de i ¿ o 1*,
suivant
leurs promesses , desquelles le sieur
Choussy nous a dit
être nanti ; avoir aussi une pro?nesse fa ite par madame E scot et
s o n jils , d’une,somme de 9 5 if. L es articles qui suivent et qui
sont nom breux sont sous la m êm e énonciation.
N icolas
Choussy déclare
qu’il étoit
encore dû sur le livre
journal de Jacques G alice , par divers particuliers , plusieurs
petites sommes qui formoient , e s t-il dit , un objet assez
considérable. M ais le relevé de ces sommes n’est point contenu
dans la reconnoissance , et le montant n ’en est pas m êm e fixé.
Il en vient ensuite à l’argent : il dit avoir trouvé
dans la
cassette du défunt plusieuis vieilles pièces d ’argent vieux , dont
ce dernier étoit n an ti, parce qu ’il avoit été changeur p u b lic ,
lequel argent vieux s’est trouvé
m ille livres.
N icolas Chpussy
rcconnoît
de
être de la
plus
valeu r d ’environ
avoir trouvé
dans la
cassette la somme de S97 "ft en espèces d’or ou d’argent ayant
cours.
Il présente tous les objets ci-dessus énoncés comme appart)?nans en' entier à la succession; il ajoute q u ’il, est entré gendre
chez Jacques G a li c e , et qu’il n’y a, porté aucuns meubles , ou
du moins certains cjui ne, souvoiefit exccder la somme de 6 0 ^ . Il
évalue le tout à la somme iô jo o o '*, au paiem ent de laquelle
il entend que ses biens soient affectés.
L e dol et la fraude éclatent de toutes parts dans cet. acte:
q u ’il eut été à. desirer pour les mineurs que leurs parens eh
eussent eu connoissance ! leur fortune n ’auroit pas- été divertie
par un tuteur a v id e , et ils ne seroient pas réduits à la triste
nécessité de soutenir un
procès dispendieux pour en
arracher
�c
6
}
les débris des mains de sa veuve
m arché
particuliers eussent regardée
jam ais
et de son héritier qui ont
sur ses tra ce s; mais la tu telle que beaucoup d ’autres
à
N icolas
Choussy.
comme un fardeau , ne répugna
Le
m ystère
étoit
doublem ent
nécessaire ; il le falloit , et pour ne pas éloigner la confiance
des
parens ,
m alheureux
et
pour
se
m énager
des
armes
contre
de
enfans qui devoient être ses pupilles.
Q u elq u es années après la tutelle q u i, comme on a déjà observé,
fut faite le lendem ain de cette reconnoissance, N icolas Choussy
recu eillit la succession d ’un frère , chanoine à Billom : à sa
portion il réunit celle de ses co h éritiers, qu il acheta avec les
deniers appartenans aux mineurs C h o u ssy; il quitta la maison
G a lic e , pour aller habiter u n e m aison beaucoup plus v a ste ,
dépendant de la succession du citoyen C h o u ssy, chanoine.
D ’après l’augmentation qu erecevoil la fortune de N icolas Choussy,
la reconnoissance du 2 octobre 176 8 , dont on vient de rendre
com p te, ne se trouvoit plus de mesure pour absorber ses b ie n s,
et il en seroit reslé pour les mineurs. Il fallu t avoir recours à
un nouvel expédient sem blable au prem ier.
En conséquence, le 10 mai 1 7 7 2 , N icolas Choussy se transporta
ch ez le m êm e notaire à Y ic -s u r -A llic r , et lui présenta le projet
d ’une seconde reconnoissance. Catherine G alice y accompagna son
mari, pour accepter cette seconde reconnoissance avec la p rem ière;
e lle pou voit alors faire ce voyage sans danger. L a tutelle étoit
f a it e ; les parens n e to ie n t plus à B illo in ; il n ’y avoit plus à
craindre de leu r donner 1 éveil. D ’ailleurs, l’absence de N icolas
'¿Iioiissy et de C atherine G a lice' ne dcvoit pas être lo n g u e, et
jils pouvoient toujours com pter sur le secret.
r D c "Ia m anière dont la reconnoissance du 2 octobre
1768 est
conçue , on auroit bien cru qu il ne restoit plus m atière à une
seconde. N on seulem ent N icolas Choussy n’y avoit pas *dit q u ’il y
eût d ’autres créancés et effets qui appartinssènt à la succession de
Jacques G alice ; mais encore elle contenoit une ch,use dont on
w’- /1 ;i .: ,j . •
t
•
.
r
.
devoit lircr la'ccmstiqucnce contraire, et que voici : Sans toutefois
y comprendre tes meubles meublans généralement quelconques qui
dans la maison dudit sieur G alice \ lesquels appartiennent à
�( 7 )
ladite succession. E n présentant les m eubles m eublans comme
les seuls objets non reconnus , c etoit bien dire que tous les
autres l ’étoiont. N éanm oins on va voir com bien, en pareil cas
il est aisé de faire paroître 1 abondance , lorsque cela peut d’ailleurs
être utile.
Dans l ’acte du 10 mai 1 7 7 2 , N icolas Choussy déclare q u ’il
a fait déplacer les m eubles et effets qui étoient dans la maison '
et autres bâtim ens provenans de la succession de Jacques G a lic e ,
pour m eubler la maison dont il ëtoit devenu p ropriétaire; il dit
que ces m eubles et effets n’ont point été compris en détail dans
la reconnoissance du 2 octobre 176 8 ; et pour éviter toutes contes
tations entre sa fem m e et ses héritiers , il se déterm ine à en •
consentir une reconnoissance.
J1 commence par les m eubles meublans. L ’exagération en est
ridicule pour ceu x qui ont connu la maison de Jacques G a lice
et sa m anière de vivre.
N icolas G a lice porte dans cette reconnoissance
une quantité
considérable de fu ta ille , une quantité d ’h u ile , de vin et
de
g rain s, qui excède de plus du double celle qui a é té cu eillie
ordinairement dans
le9
biens
possédés
par
Jacques
G alice
et par N icolas Clioussy , m êm e d’après le compte rendu par
Jacques-P hilip pe C lio u ssy, comme héritier bénéficiaire de son
père ; ensuite N icolas Choussy en vient à de nouvelles créances
qu’il donne encore comme appartenant en totalité à la succes
sion de
Jacques G alice. L e
détail
de
ces créances apprend
que plusieurs étoient prescrites , ou qu ’elles ctoient dues par
des débiteurs insolvables. L e p r e m ie r article étoit du , en
e ffe t , en
vertu
d’une sentence
du
4
janvier
17 3 7 , e t on
n ’avoit pu en être payé , quoique le d é b ite u r, qui étoit Taurin
V o la n t, fut de la ville de B illo m , domicile du créancier.,'
A u cu n article de m eubles et de denrées n ’est apprécié : le
montant des créances n ’est point arrêté.
Il est seulem ent dit
à la fin de l ’acte : Déclarant ledit sieur Choussy
que les objets
ci-dessus reconnus sont en valeur de la somme de
pour fo ire (es droits du roi seulement.
i3 3 ooo^
3
Q uoique cette appréciation vague de i 3 , 0 0 0 *, parut d’après
�°
}
c e lte clause ne pas devoir servir de boussole pour la reprise des
,<lroits de Catherine G alice ; que cette appréciation n ’eût été faite
que pour la
j l fallût
perception des droits de contrôle; que dès-lors
la considérer comme au-dessous de la valeur, réelle
des o b je ts , néanm oins, comme on va le v o ir, Catherine G alice
e t son fils , auxquels 011 .n'a pas à reprocher des erreurs
de
calcul à leur p ré ju d ic e , ont cru devoir s’en tenir à cette appré
ciation.
Ce
parti leur a paru
bien plus commode que celui
d ’une nouvelle estim ation qui auroit nécessité un exam en p ar
ticulier de chaque objet , trop gênant pour eux.
V o ilà donc deux reconnoissances , dont l’u ne est de i 5 ,ooo™
pt l ’autre de 13 , 000 ^ ;. ce qui fait 2 8 ,0 0 0 '”'.
L e s circonstances dans lesquelles ces deux reconnoissances
ont été fa ite s; le m ystère dont on a eu soin de les e n v e lo p p e r,
n e perm ettent pas- de douter q u e lle s
ne soient l ’ouvrage de
la fraude. Il s’élève encore une infinité d ’autres moyens qui
m ettent cette fraude dans le plus grand jour. M ais , pour éviter
des redites , on en. renvoie l'explication au développem ent des
moyens. O n ne peut, cependant s’em pêcher d’annoncer ici q u e ,
quoiqu’il soit parfaitem ent établi
quç N icolas .Choussy , étoit
associé avec Jacques G a lic e , que dès-lors la m oitié des créances
et
effets. c.11 marchandises appartînt à
N icolas C h o u ss y , on
a poussé la dissim ulation, o u , pour m ieux dire, la m al-adresse
jusqu'à laisser la
totalité de tous ces objets à la succesion de
Jacques G alice , ,mê,me sans faire
pour
N icolas C hyussy
des
prélùvem ens qui , dans le sy stèm e q u ’il n’y auroit pas eu de
fociété , ne pourroient faire la moindre difficulté.
r. L a tutelle a
Je 1 2 décem bre
jusqu’au décès de N icolas C h o u ss y , prrivé
17S5. Son fils ne
manqua pas d ’accepter sa
succession, sous .bénéfice d ’inventaire. O n sait combien ce,, parti
p ffr e .d e
commodités pour prendre
créanciers. R evêtu
les b ie n s,-u t
frustrçr- les
de cette q u a lité , il fut assigne, ou , pour
jnieux d ir e , il se fit assigner lu i-m ê m e , sous le 110111 de Ca-, th ejin e G a lic e , sa m i r e , pour parvenir à la liquidation de ses
droits. Jl fut re n d u , le 2 septem bre 17 8 6 , u n e sentence qui
îW ccelte
l i qui da ti on , et l e
18 no v emb re s u i v a n t , „ Ca t he nj i e
'
G a lice
�C 9 )
G alice obtint contre son fils une seconde sentence qui oràonnft
q u ’il lui sera fait délivrance du m obilier provenant de la suc
cession de son m a r i, suivant l ’estimation qui en sera faite par
les jurés-priseurs. C ette délivrance eut lieu le 22 du m êm e
mois de novembre , pour la somme de 2,977 * 18^
à
laquelle l ’estimation fut portée.
F n cet état il fut passé , le 4 août 1 7 8 7 , un traité entre
C atherine G alice e t son fils. C ’est à la faveur de ce 'titre qu e
Jacques-P hilip pe Choussy a cru pouvoir faire passer sans pudeur
sur la tète de sa m ère tous les biens dq la succesion de son
p è r e , au préjudice des mineurs C h o u ssy , auxquels il s’est ima
giné q u ’il pourroit par ce m oyen f a ir e ‘ perdre un reliquat de
compte de plus de 25,0 0 0 *. G e traité est la consommation de
la fraude dont les actes précédens étoient la tram e. Il faut
remarquer que les intérêts de la succession de N icolas Choussy ,
et par conséquent ceux des m in eu rs,! ne pouvoient q ü y .ê t r e
sacrifiés, parce que Jacques-P hilip pe C h o u ssy , en se dépouillant
en apparence d’une main des biens de la succession , comme
héritier b én éficia ire , les prenoit de l’autre , comme seul enfant
e t héritier de Catherine G a lic e , de
tenir.
->
qui il étoit sûr de les
O n a affecté d’insérer dans cet acte beaucoup de détails!;
nous allons en rendre substantiellem ent les dispositions.
O n présente d ’abord les créances de C atherin e G a lic e , et on
ne manque pas d ’y faire figurer les deux articles de 13,0 0 0 '*,
d ’une part , et de 1 5 ,000
, d ’autre , fondés sur les deux
reconnoissances de 1768 rét de 1773. C e s cré a n ce s, distraction
faite du montant du mobilier de la succession de N icolas Choussy,.’
q u i, comme on a déjà observé, avoit été délivré à C ath erin e
G alice , suivant l ’estimation des jurés-priseurs , sont d’abord
fixées à la somme de 2 7 ,9 5 5 * 1^.
O n y assure un fait qui
est inconcevable , c ’est que parm i
les m eubles laissés par Nicolas C h o u ssy , il ne s’en est
aucun de ceux provenus de Jacques G a lic e , et compris
les reconnoissances
à
elles
dans
dénaturé ou
repris' en nature-
faites ,.q u i n'eût été
échangé ; q u ’en conséquence elle n ’en a point
trouvé
�(
.
1 °
)
...................................................................................................................................
d’où, il résulte' qu’il n y a aucune déduction à faire , à ce s u je t ,
sur . le 'm o n ta n t des reconnoissances ; q u ’au surplus, en dédui
sant la valeur réelle de tous
les
m eubles
q u ’elle a pris en
paiem ent à l ’estim ation , il en résulte le m êm e
libération, d e - la succession.
,
On
dit dans le
traité , q u ’ij n ’en- est
e ffet pour la
pas de môm e
des
créances compri^es-dans les reconhoissances ; q u ’il en existe encore
en n a tu r e , et que Catherine G alice consent de reprendre en
déduction de ses répétitions
celles de
ces créances qui n ’ont
pas périçlitjé entre les mainsj.de son m a ri, aux termes de la sentûnqç de ILqftidatioai : calcul fait'd e ces créan ces, elles se sont trouvé^s* mgfltGr à; la somme 'de 1,100"* 3 S 7 ^ et déduction
faiiQ-dç.'.çefcte somme s u r . celle de. 27,966 ^ 1 à laquelle les rép é
tions de
titions
C atherin e G alice
avoient déjà
çté fix é e s, ces rép é
sç tro u ven t-réd u ites à la somme de 26,864.n Ï 7 S à * »
à ,,laquelle îelle, a fait ; joindre .celle , de 6 g n 2 /. pour partie
des-, [frais ,d'e l’inventaire fa it après.’le décès de, N icolas Choussy ,■
qwVille avoit avancés.:
. ,
• • O n j procède
ensuite
am iablem ent
à la
licitation des fonds
et d ’une rente foncière qui avoient été achetés en, commun psr
Jacques G alice
et par N icolas C h o u ss y , et qui étoient indivis
çn îf P .C a th e rin e G a lice , comme ¡h éritière dp'.son p è r e , et ¡la
successiçn- bénéficiaire de N icolas , Choussy.
Il-; est : dit
q u ’après quelques enchères faites respectivem ent
en ap p aren ce, les fonds et la rente sont dem eurés à Catherine
G alice pour la somme de 18,000
, D e cette dernière .somme , C atherin e .G a lice ' s’en est retenu
çelle, d e ^ C O û * ; pbur
la
m oitié
à .elle reven a n te, en qualité
d'héritière de ; sOn père ;j,ct à tl'é g a rd , de llautje .m oitié , faisant
àvtssL'9,ooo^T,, il est!d it q u ’elle se l ’est égalem ent reten u e, du
consentement de son fils , à im puter sur ses répétitions.
: A p rès ces .«opérations.y on procède à l'exapien des som m es.qui
avaient été : respectivem ent; payées
par Jacques
G alice
et, par;
N icolas Choussy en acquittem ent d e dettes communes. O n trouve
que Jacques G alice avoii;'pay,é, 3 /|3 'f1' de plus dont ou accordu lu
^Pfcùtion Ù Catherine G alioe sur la succession do N icolas Choussy.
�( Iï )
E n cet é t a t , les répétitions de C atherin e G a lice s’élèven t
à 27,198'* 7^ 5 ^ ; et déduction faite de la somme de 9,000'*'
montant de la »moitié de la licitation , le total des répétitions
reste pour 1 8,ri 98’”’ 7^ 5 ^ .
I
' .
E n paiem ent de cette
délaisse à sa m è r e ,
somme , Jacques - Philippe
. i> t
Choussy
1 0.' L es fonds appartenans en propre à N icolas C h ou ssy, indé
pendamment de ceux qui avoient été acquis en commun, moyennant
la somme de 5 ,885 *' distraction faite des charges foncières et
du logement qui étoit dû à C atherine G alice dans la maison
de son m a r i, qui est de la comprise des objets vendus.
20. L es récoltes, redevances en grains, ou fermes appartenantes
à 'la succession de N icolas G a lic e , pour l’année 1787 , pour la
somme de 356 "*
3 &, déduction fa ite des c e n s, rentes et
impositions.
D istraction faite de ces deux sommes et de q u elq u es. autres
avances prétendues faites par C ath erin e G alice , sur la somme
de 1 8 , 1 9 8 7~r 5 -^, à laquelle ses répétitions venoient d ’être
fix é e s, elles restent pour la somme de 12,0 25* io^- 9 ^ .
E n acquittem ent de cette somme, j ° . Jacques-Philippe Choussy
cède à sa m è r e , à titre p ig n o ra tif, pour n e u f années , " après
lesquelles le paiem ent e ffe c tif tlevra avoir l i e u , les capitaux des
rentes appartenans en propre à la succession de N icolas C h o u ssy,
indépendam m ent de celle qui avoit été acquise en commun entre
son beau-père e t lui. C es capitaux m ontent, avec les encourus
qui sont aussi c é d é s , à-la somme de 3,007* ^ 85,1.
20. Jacques-Philippe Choussy paie h Catherine G alice la somme
de 2,006* 2^ 6&, montant du reliquat du compte du bénéfice
d ’inventaire dont il se reconnoît d é b ite u r, «t qui a été apuré de
gré à gré entre la m ère et le fils.
D éduction faite de ces deux derniers paiem ens, les répétitions
de Catherine G a lice sont restées pour la somme de 7 ,0 1 2 * 5J r.3,
e n ,cap ita l, q u i, est-il dit dans l’a cte, lui dem eure réservée avec
les intérêts à éch eo ir, ainsi que son douaire et son action pour
le remboursement des sommes en nantissement desquelles elle
n ’j . reçu que des rentes.
B a
�( 12 )
L a passation de ce traité étoit plus aisée que son exécution.
L e s mineurs
Choussy
avoient
C houssy en reddition du
actionné
l’héritier
compte de tutelle
de
N icolas
et paiem ent du
reliquat. L ’héritier avoit rendu le com pte : qu elqu’inexactitude
que renferm ât ce co m p te , il reconnoissoit néanmoins devoir aux
mineurs 12,0 0 0 *; e t , d ’après les blâmes et d éb a ts, le reliquat
se portera au moins à 25 ,ooo‘ft. L e s mineurs avoient sur les
biens de N icolas Choussy une hypothèque pour le paiem ent de
ce reliquat. E lle éto it, à la vérité postérieure à celle de Catherine
G a lic e , parce q u ’e lle ne remontoit qu’au jour de l’acte de tu te lle ,
e t que celle de C atherin e G alice prenoit date à son contrat de
m ariage qui est plus ancien. M ais il n ’en est pas moins vrai
qu e les m in eu rs, comme créan ciers, aroient le droit d ’exam iner
les
opérations
qui avoient servi
de
base à ce
traité , et de
dem ander q u ’il fût annullé , e t que les répétitions de Catherine
G a lice
fussent ré d u ite s, si elle s’étoit fa it
adjuger
plus
de
créances qu’il ne lui en revenoit. Ensorte que Catherine G alice
n’avoit
q u ’une propriété flottante et in ce rta in e , tant que l ’e x é
cution de ce traité ne seroit pas ordonné par la justice , contra
dictoirem ent avec les mineurs.
A ussi , par
exploit du
14
août 1787 ,
fit- e lle assigner les mineurs e t leu r
C ath erin e
G alice
curateur en la c i-d e v a n t
justice de Billom , pour voir ordonner
que
le
traité
seroit
homologué avec eux , comme créanciers de la succession bén é
ficiaire de N icolas Choussy , pour être e x é c u té , suivant sa form e
et teneur , e t en conséquence , pour se voir faire défense
de la troubler ou em pêcher dans la possession et jouissance
des biens m eubles et im m eubles à elle délaissés par cet acte.
On
sent
C h ou ssy;
d ’avance
ils ont
qu elle
a
été
la
crié avec fondem ent à
défen se
des mineurs
la fraude contre
ce
traité et contre les reconnoissances faites par N icolas Choussy
à sa fem m e. Ils ont dit que ces reconnoissances étoient
singu
lièrem ent exa gérées; q u ’elles devoient être annullées , et qu ’il
devoit en être de m êm e du traité qui en étoit une
suite. Ils
form èrent en tant que de besoin , tierce oppositon aux sentences
<lu * avoient été obtenues par C ath erin e G a lice contre son fils,
�( i3 )
les a septembre et 18 novembre 1786. Ils dém ontrèrent jusqu'au
dernier degré d ’évidence , par le rapport d’une foule d ’actes
authentiques, que Jacques G alice et N icolas C h o u ssy, avoient
é té en société ; que cette société remontoit au moins à 1746 ;
que dès-lors toute la fortune acquise depuis cette époque
en m eubles ou im m e u b le s, devoit être partagée entr’eu x ,
et qu’il en revenoit la m oitié à N icolas Choussy , à laqu elle
lu i et son héritier n ’avoient pu renoncer , au p réjudice de
leurs créanciers. E n un m o t, en relevant une foule de cir
constances , ils
m irent au jour les
soit leur tuteur , soit
concerts frau duleu x
sa veuve et
avoient conçus dans la vue
de
son héritier
faire perdre
leur
que ,
bén éficiaire
cré a n ce s, e t
de garder im puném ent une grande partie de leur fortune que ce
tuteur avoit tournée à son profit.
1
Ils dem andèrent à faire assigner en assistance de cause JacquesPhilippe Choussy qui soutenoit le procès , sous le nom de sa m ère,
dont il est exactem ent la doublure , puisqu’il est son seul héritier.
Etant assigné , il
a
continué de
jouer un
toujours laissé soutenir le combat , au
par C atherine G alice.
rôle
passif ;
il a
moins en apparence ,
A p rès une instruction très - am ple sur appointement en d ro it,
il fu t rendu en la ci-devant justice de B illo m , le 20 février 1790 ,
une sentence par forclusion contre Catherine G alice
et son f i l s ,
par laquelle les mineurs Choussy ont été reçus tiers opposans
à l’exécution des sentences des 2 septem bre et 18 novembre 1 7 8 6 ,
obtenues par Catherine G alice contre son fils : les parties ont été
mises au m êm e et sem blable état q u e lle s étoient avant ces
sentences. L es déclarations et reconnoissances faites par N icolas
C h oussy à Catherine G a lic e ,le s 2 octobre 1768 et 10 mai 1 7 7 2 ,
sont déclarées nulles , comme non faites et avenues. L e s délaissemens d ’objets
mobiliers et immobiliers
de Jacques - Philippe
faits ,
Choussy , à Catherine
le procès verbal fait en
présence des
de
la
part
G alice , tant par
jurés-priseurs , que par
le traité du 4 août 1787 , sont égalem ent déclarés nuls. C ath erin e
G alice est
Choussy
condamnée à rapporter à
la succession
tout ce qui en d ép en d o it, e t qui lui
a
de N icolas
été délaissé
�CH )
par le procès verbal et par le traité
dont on vient de p a rle r,
s a u f à elle à répéter sur la succession de Nicolas Choussy les effets
mobiliers en
marchandises ou autre nature quelconque ;
quelle
établira tant par titres , autres néanmoins que les deux reconnais
sances ci-dessus, que
par témçins ; et ce , suivant la commune
renom m ée, que ledit f e u son père laissa à son décès , la preuve
contraire demeurant résen'ée aux mineurs Choussy , à répéter aussi
sur la même succession ce que d'après des répliques de sa part aux
défenses contre certains des objets à elle adjugés par notre susdite
sentence du 2 septembre 178 6 , il lui sera définitivement adjugé ( 1 ).
I l est ordonné qu’à cet égard , ainsi que sur les. chefs de demandes
en rapport, form ée par les mineurs Choussy contre Catherine Galice ,
les parties contesteront plus amplement.
L a m êm e senténee renvoie à prononcer sur la société q u ’il
p eu t
y avoir eu
entre
N icolas Choussy
Jacques
G a li c e ,
jusqu’à ce qu’il sera prononcé sur les reprises à fa ir e par Cathe
rine G a lic e , d’après la preuve ci-dessus énoncée.
L e s parties sont mises hors de cours sur la
demande inci
dente de C ath erin e G a lic e , portée par sa requête du 4 ju illet
1789 ( 2 ) ; un tiers des dépens est rése rv é , et C atherine G alice
est condamnée aux doux autres tiers.
Il est essentiel de rem arquer que les mineurs C h o u ss y , en
faisant signifier cette sen ten ce, par exploit du 27 février 1790 ,
ajoutèrent que c e t o i t , sans néanmoins l ’approuver aux chefs
auxquels ils sont grevés , se réservant d’en interjeter appel inces
samment. L es mineurs Choussy ont fait la m êm e réserve dans
tous les actes de procédure essentiels.
C atherin e G alice
le
6 mars
interjeta
appel de cette m êm e sentence ,
suivant.
C e n ’est que long-temps après que Jacques-Philippe
Choussy
( 1 ) O n p rd su m e q u e le ju g o de B illo m a e n te n d u p arler des cré a n ce s
q u i se tro u v e ro ie n t établie«.
(a )
C e tte
d e m an d o
te n d o it
à
la su p p ressio n
d 'in ju re s qu o
C a th erin «
Ç*?l»;o p rü te n d o it q u o les m in e u rs C h o u s s y j'é to ic u t po rm ises m a -li-p ro p o s
c o n tro la m Om oiro do * o a m ari.
�( r5 >
a aussi interjeté appel. Il a restreint son a p p e l, an c h e f par
lequel les parties ont été mises hors de cours sur la dem ande
incidente qu'il y a dit avoir form ée lui-m êm e , le 4 ju illet
précédent , se réservant néanmoins de se pourvoir contre les
autres chefs. O n présume que le ch e f qui a fait le sujet de
l'appel de Jacques C h o u ssy , est celui qui a mis hors de [cours
sur la suppression des prétendues injures : on est cependant
étonné qu’il ait dit qu’il avoit formé lui-m êm e cette demande r
attendu que dans la requête qui la contient , on n’a vu en
qu alité que Catherine G alice. A cela p rès, sur l ’a p p e l, JacquesPhilippe Choussy a joué , comme en instance principale un
rôle purem ent passif. M ais quoiqu’il ne parût p a s , il n ’a pas
pour cela été l’adversaire le moins redoutable des mineurs Choussy.
D ’après le nouvel ordre dans l ’administration de la ju s tic e ,
l ’appel qui avoit d'abord été porté en la ci-devant sénéchaussée
de C lerm o n t, l’a été en ce tribunal, en conséquence des exclu
sions respectives
dont la faculté étoit
accordée
aux parties ;
et le 20 mars 1793 , le tribunal a rendu un jugem ent dont il.
est à propos de transcrire le dispositif.
Attendu qu’il n'a point etc fa it d’inventaire après le dccès du
sieur G a lic e , père de Catherine G a lice , appelante ; que les actes
ne fo n t f o i qu’entre, les parties contractantes ; que des tiers sont
toujours admis à critiquer des actes qui leur fo n t préjudice ; que
les circonstances dans lesquelles ont été fo ite s les reconnoissances
des 2 octobre 17 6 8 , et 10 mai 1772 , ainsi que les d i f érens f a i t s
articulés contre ces reconnaissances , de la part des intimés, f o n t
naître des soupçons de fraude et d'exagération dans les objets
reconnus; que des actes suspects d ’exagération et présumés passés
¿n fraude des créanciers, ont besoin d'être fortifiés par des preuves
secondaires qui détruisent le soupçon. L e t r i b u n a l , par jugement
en dernier ressort ordonne avant fa ire droit tant sur l ’appel inter
je té de la part de Catherine Galice et Jacques-Philippe Choussy,
son f i s , de la sentence rendue en la ci-devant justice de Billom
le 20 février 1 7 9 0 , que sur les demandes form ées en cause d’appe[
jet sans préjudice des fin s qui demeurent réserx’ées aux parties, que
ladite Catherine Galice fe r a preuve dans les délais de l'ordonnance
�C 16 )
tant par titres que par témoins et la commune renommée, de la
consistance et valeur des marchandises, ainsi que des meubles ,
bestiaux, or et argent demeurés du décès de Jacques G a lice, son
père , et les intimés preuve contraire.
En exécution de ce ju g e m e n t, les parties ont respectivem ent
en qu êté par-devan t
un
des mem bres du tribunal du district
de B illo m , auquel il avoit été adressé une commission rogatoire
à cet effet.
L e s m ineurs Choussy
d ’appeler
de
se
la sentence de
sont enfin vus dans la
la
nécessité
ci-devant justice de Billom ,
en ce q u e lle a ordonné une contestation plus am ple et un
sursis sur plusieurs objets importans qui éto ien t, sans contredit,
en état de recevoir u n e décision. O n verra dans la suite toutà-la-fois l ’intérêt et le fondem ent de cet appel.
M
O
Y
E
N
S
.
D a n s une affaire de toute autre nature que celle dont il s’agit,'
on pourroit passer tout de suite à la discussion des en qu êtes;
il n ’y auroit q u ’à voir si leur résultat rem plit
ou non le vœ u
du jugem ent interlocutoire ; mais ici le développem ent des cir
constances et des moyens qui établissent que la fraude a présidé
à tous les actes que les mineurs Choussy a tta q u e n t, doit m archer
de front avec l’analyse des enquêtes.
C ’est aussi dans cet esprit que le jugem ent interlocutoire a
é té conçu. O n
y lit entr’autres m o tifs , que
les circonstances
dans lesquelles ont c té fa ite s les reconnaissances des 2 octobre 1768
et 10 mai 1772 , ainsi que les dijjérens f a it s articulés contre ces
reconnaissances , de la part des intimés , fo n t naître des soupçons
de fraude et d'exagération dans les objets reconnus ; que des actes
suspects d’exagération , et présumés passés en fraude des créanciers,
ont besoin d’etre fo r tifiés par des preuves secondaires qui détruisent
le soupçon.
On
voit donc que les circonstances indicatives de la frau de,
et les dépositions contenues aux en qu êtes, sont autant de preuves
û'un genre différent qu ’il fa u t exam iner pour savoir si les pre
mières
�Ç n )
mières sont détruites du modifiées , ou* si au contraire ellçs sont
fortifiées par les dernières.;:;-^
! :.'L* :•
• r- i.-.i.
L es circonstances qui prouvent la fraude , se présentent en,
foule. L orsqu’un m a ri,u n marchand sur-tout (c a r N icolasC h ou sSy,
m êm e après le décès de son b e a u -p è re -, avec leqtiel il étoit
asso cié , s’est toujours qualifié
reconnoissance à sa fem m e ,
de m a r c h a n d ), en ifaisant une
n’a d^autrfe but
que de rem plir
un devoir que la justice lui impose ; il ne prend pas des voies
détournées ; il s’en occupe
aussi - tôt après l ’ouverture de la
succession j il appelle un notaire du lie u ; il ne fuit pas la lum ière.
C ’est dans la maison m êm e que le notaire inventorie les effets
reconnus ; il exam ine la nature de ces effets ; il,r e n d com pte
de ce qu'il voit , et il ne copie pas alors m achinalem ent un
acte où l’on dit que des effets existen t, sans q u ’il sache si cela est
vrai ou non. S ’il n ’y avoit réellem ent que 5 o ‘f1' en a rg e n t, le
notaire ne diroit pas qu’il en a trouvé i,8 Q o'f,‘ . C e tte précau
tion seroit encore plus salutaire pour des objets d ’un transport
d ifficile, et qu’on ne pourroit pas aisém ent su p p o ser, tels qu e
des grains , autres denrées et des m eubles.
U n mari qui n’a que des vues droites reccnnoît et fait invento
rier à-la-fois tout ce que ,s on ; beau-père laisse. Il ne m u ltip lie
pas les reconnoissances, à mesure qii’il contracte une responsabilité
que ces reconnoissances tendent à éluder. E n fin , il m et sous
les y eu x les objets pour pouvoir m ieux les apprécier. L es titres
des créances sont visés et datés ; on distingue les effets dont
le paiem ent doit être regardé, comme certain , de ceux dont
la perte est à craindre. p ar de? prescriptions ou par l'insolva
bilité des débiteurs.
'
Q u e la conduite de N içolas Choussy a été différente ! Il ne
songe à faire une reconnoissance h Catherine G a lic e , qu’au moment
où il est question de la tutelle des enfans Choussy ; q u ’il a la
certitude
qu’il
quelqu’avantage ,
sera nommé
ou ce qui
tuteur ,
revient
et il
croit se
au m êm e ,
donner
h C ath erin e
G a lic e , en donnant, à cette ;jeconnoissance Uutie date antérieure
à la tutelle.
• * ij.)
.
.v
•
■
«j c ir -.
.
}i :,
«
E t qu’on ne dise pas que ce rapprochem ent de dates de la
C
�< 18 )
récônnoiÿsance et de la tu te lle , est l'e ffe t du liasard ; que sans la
circonstance de la t u t e lle , la reconnoissance aiiroit été égalem ent
faite. O u ï, il doit dem eurer pour certain que la reconnoissance
a été faite à l ’occasion de la tu telle; que l’une est une suite de l’éveil
donnéipar l’autre. O n ne p eu t en douter, d ’après ce qui a été dit
dans
une requête signifiée en prem ière instance , de la part
dé C ath erin e G a lic e , le 11 août 1788. « Il leur paroît étrange
s> ( aux mineurs C h o u ss y ) que le sieur C h ou ssy, m enacé d’une
» charge qui l’effrayo it, comme tant d’autres, ait songé à rendre
» à sa fem m e la justice q u ’il lui d e v o it, et q u ’il n ’ait pas cru
» pouvoir retarder davantage un e reconnoissance en forme
» 'd'inventaire que la loi lui prescrivoit de lui fournir dans les
» trois mois
prêts à expirer. Ils
ne
voient qu’un dessein de
» frauda dans ces reconnoissances ; mais l ’honnêteté
11’y verra
» q u ’un acte de justice rigoureuse. E n exposant sa fortune, dans
» L'administration d’une tutelle , pour laquelle il ne se connoissoit
» aucune aptitude, é t o it - il raisonnable qu’il exposât aussi celle
» de sa fem m e', par une négligence coupable à en assurer l ’état » !
Il étoit impossible de dire plus disertem ent que la reconnois
sance n'étoit faite qup pour m ettre en opposition les prétendus
intérêts de C atherin e G a lice avec lés intérêts très-réels des enfans
dont la tutelle
alloit passer sur
la tète de
N icolas
Choussy.
Il n ’y a rien de plus frivole que les moyens qu ’on fait valoir pour
justifier les circonstances dans lesquelles cette reconnoissance a
é té faite.
Il sem ble de la m anière dont on s’exprim e , que la recon
noissance ne polivoit pas être retardée ; cependant il n ’y avoit
aucune nécessité q u ’elle fût faite avant la' tu telle. Si elle eût
é té 1sincère, elle auroit eu égalem ent son e fie t, quoique faite après
la nomination du tu te u r; parce q u e , dans tous les cas , ainsi que
les mineurs Choussy en sont co n ven u s, C atherin e G a lice avoit
une hypothèque pour ses rép étitio n s, à com pter de son contrat
de m ariage.
O n s’abuseroit encore bien grossièrem ent, si' on croyoit que
c^ttc reconnoissance dût être faite dans les trois mois du décès
<lc Jacques G a lice. L es lois , qui donnent aux héritiers trois
�C ‘9 )
mois pour faire in ve n ta ire , .e t quarante jours t pour d élibérer ;
sont , sans co n tre d it, 'étrangères aux reconnoissances des maris
à leurs fem m es. Si ce délai devoit être observé , dans ce c a s ,
que Catherine G alice nous explique la cause d ’un si long intervalle
q u ’il y a eu entre les deux reconnoissances. Il ne ¡ p eu t donc y
en avoir d’autre raison, si cc n ’est , comme on a déjà d it, que
N icolas Choussy avoit touché des deniers et effets pupillaires ,
avec lesquels il avoit fait des acquisitions, et la seconde reconnoissance étoit une arme q u ’on se préparcit contre la restitution
qui
en ssroit dem andée.,
j
. -a
Q u e lle idée peut-on encore se former de ces deuxt reconnois
sances ,
lorsqu’on voit que Nicolas, Çhoüssy les fait , non par
fo rm e d’inventaire, comme le dit Catherine G alice ; niais bien
par forme de m ém oire , à son gré , sans la présence d ’un officier
public , et qu’il va furtivem ent les porter à un notaire dom icilié
à deux lieues de distance, auquel il.les d°nne, à copier ?E st*cë-là
la marche de la candeur et de la vérité ?
n . f, v u ., *r
C ’est en vain que Catherine G alice a d i t , pour fpallier ces
détours tortueux , que l ’on avoit eu recours au m inistère du
citoyen C h am boissier, notaire à V ic-su r-A llier , ,pnr une espèce
de nécessité , parce que d it-e lle , ce notaire étoit nanti (des titres
et papiers de la succession de N icolas C h oussy, ainsi q u e'C a th erin e
G alice prétend l ’établir par un certificat q u ’elle a
méndié
du
C ito yen M ailli , qui a succédé au citoyen Cham bcissier.
L es réponses à cette objection abondent.
j ° . Il n en est pas dit un mot dans les deux reconnoissances.
2°. O n y voit que , par rapport à la plupart des créances ,
les titres ne sont ni visés ni datés , ce qui est un ¡nouveau m oyen de
su sp icion ; et que N icolas Choussy a dit avoir lui - m êm e . ces
titres en son pouvoir.
3 °. L ’inspection de reconnoissances apprend, que la m ajeure
partie des débiteurs étoient domiciliés à Iîillom ou aux environs
Il r é s u lte , sans contredit , d e .to u te s ;ces circonstances , qUo
les titres et pièces n ’étoientpas au pouvoir du notaire Cham boissier
comme on a voulu le faire croire.
*
4 °.
L ’objection de Catherine G alice ne p eu t pas au moins
s’appliquer aux m archandises, a rg e n t, d e n ré e s,
meubles ei
C 2
effets
�q u i-s e
( 20 )
trouvoiént dans la maison de Jacques G a lic e , e t q u i,
suivant e lle , foim oient un objet très-con sid érable.
L a ' rtiârche n a tu relle, quoi q u e lle en dise, étoit donc de faire
faire inventaire dans la maison par un notaire qui auroit écrit
ce -q u ’il aufi>it vu-, s a u f à porter en déclaration les objets qui
auraient
être en dépôt- ch ez le
toutefois îli y en avo ir.:
citoyen C h am b o issier, s?
:
S i on joint à toutes ces circonstances, celles que les reconnoissances et le traité dont il s’a g it, sont faits d’abord entre le
mari et la fe m m e , ensuite entre cette1 fem m e devenue v e u v e ,
•
*
r
^
? T
*
et 5ôfi fil&,-''ioit seul héritier-, qui avoit pris là qualité d ’héritier
bénéfici&irdI;d e 'S o n père , qu elle confiance p e u t-o n avoir en
ces actes ? O u tre r^ue ces sortes d ’actes sont en g é n é r a l, par leur
nature, suspects de frau d e, c’esl que la fraude se présum e toujours'
entra-proche. Ffm ls inlcr proximos fa c ifè prœsumitur.
■ 1II
d'ailleurs^ bien difficile dé së; défendre d’une forte p ré
vention contre un a cte fait par Jacques-Philippe C h ou ssy, revêtu
de: la (jûîflifé' 'd[h-ûilier bénéficiaire de s o n 'p è r e , s u r -to u t dès
que cet a cte 'd é v o it tourner à son p rofit, comme devant succéder
à sa m ère. Ecoutons ce que nous dit contre cette espèce d'héritiers,
Morhac'y jurisconsulte d ’une très-grande ex p érien ce, sur la loi 5 3 ,
f f . de '.petit.
mamrunt verd ■
'et indc bénéficiant 'hàredes ,
quorum hodii'. dùptcic: malùm. Poptilanïùr quippà hareditatem personnati- iiti
hœrcdis ,• famâ
defuncli
insuper habita J'ucumquc
crediloribus hæreditarUs J h c iu n t, sotuto aliis erre m odico, aliis verà
cum. quitus n m didderint
frauda lis omninà ac Uidificatis. C e l
auteur finit pari faire dêk voeux pôtir l’abolition du droit d e ‘ se
rendre h éritier 'so u s-b én éfice d ’inventaire.
M ais s i, dans les circonstances que l ’on vient d ’exposer, on
voit le dessein de trom p er, consilium fr a u d is , on verra dans tout
ce. qui a suivi, l'accomplissement de ce p ro je t, eventum fraudis.
O n pourrait rappeler
une foule de circon stances, à l ’aide
desquelles non seulem ent oh prouveroit la fraude , mais encore
qn couvriroit d e rid ic u lo le3• reconnoissances des i octobre 17 6 8 ,
et 10 mai 1772.
* L a quantité de m eubles m cublans
énoncés dans les rccon-
�( 21 )
noissances, est' telle que la maison occupée par Jacques G a lice
n ’auroit jamais pu les contenir. E lle n’a , en e ffe t, que 19 pieds
de long sur 16 de large. Il y a douze rideaux de fen être avec
leurs trin gles, et cependant il n ’y a jamais eu q u ’une fen être
»vitrée. O n y voit elicore six rideaux d’alcoves, et il n’y a ‘jam ais
eu d’alcoves; trois^lits de dom estiques, quoique Jacques G a lice
n ’ait jamais eu q u ’une servante.
Le
détail des denrées , porté dans les reconnoissahces , est
évidem m ent exagéré ,
puisqu’il est infinim ent
supérieur à la
quantité énoncée dans le compte de bénéfice d’in ven ta ire, rendu
par Jacques-Philippe C houssy, pour des objets qui étoient indivis
entre son père et son aïeul. O n a déjà fait rem arquer cette
coniradiction dans le récit des faits.
L es reconnoissances contiennent l ’énonciation de marchandises
"d’une n a tu re , telle que Jacques G a lice n ’en -a jamais e u e , et
qu’il ne s’en est m êm e jamais vendu dans Billom . Son com m erce
rouloit sur les étoffes les plus grossières, sur des bonnets, des
b a s , des gants , vulgairem ent appelés m ites, principalem ent à
l ’usage des habitans des cam pagnes, comme on le suppose aisém ent
d ’un marchand qui habitoit une villes peu considérable, trèsrapprochée de la cap itale, et où il n’y avoit aucune espèce de
lu xe.
r"
1
1
Il est dû aux mineurs Choussy une somme de 653 * 6^ 6^ par
A ntoine et Pierre Boussat. C es particuliers ne peuvent point
payer en argent; ils sont obligés de céder des ibndsi'! Nicolas
;Choussy se garde bien de s y opposer : les fonds vhloiènt bien
-la créancb; il conçoit le projet de tourner sur sa tête la propriété
de ces fon d s, qui devoit.résider sur celle des mineurs; C royan t
pouvoir
les en frustrer avec sûreté , il fait cette acquisition-,
sous le nom de son f ils , âgé seulem ent de quinze ans ; e t ,
pour tâcher de faire prendre le ch an g e, il date la quittancé
'du 12 février 1773 , et la vente de trois jours après. Il est
aisé de sentir que les mineurs ne doivent pas
être dupes de
cette sup erch erie, et que la réclam ation q u ’ils feront des fonds
dans l'instance relative à l’apurem ent du compte de tutelle
très-bien fondée.
:
- _
sera
�(
-Les reconnoissances ni
22
)
le traité ne font m ention d'aucune
dette passive de Jacques G alice. Com m ent croira-t-on cependant
q u ’un m archand auquel on suppose m êm e un commerce étendu ,
n ’ait laissé aucune dette ?
Si l ’on additionne les objets énoncés dans les reconnoissances,
le résultat n’est point conforme à la somme à laqu elle on les
a fait monter. Suivant 1 inventaire fait après le décès de N icolas
,Choussy , on ne fait m onter qu ’à 1 8 3 ^
l ’argent qu*il a laissé;
e t , par surcroît de fraude , C atherin e G a lice n ’en fait aucune
déduction sur ses créances.
A la mort de Jacques G alice , le domaine de L â c h a i, qui
avoit été pris à rente par indivis entre le b e a u -p è r e et le gendre,
etoit sans bâtim ens. C e n'est q u e depuis , que N icolas Choussy
y a fait construire deux granges , deux é ta b le rie s, une maison
pour le m é ta y e r, une cham bre pour lu U m êm e, et un colom bier
a u -d e ssu s. T ou tes ces constructions n ’ont pas été faites pour
3 ,0 0 0 * , et elles ont augm enté considérablem ent la valeur du
dom aine. Il auroit bien fallu
que
C ath erin e
G alice eût fait
raison de ces objets à la succession de N icolas Choussy ; .cependant
son fils et elle ont jugé
.égard.
à propos de
garder le silence à cet
Lorsque C ath erin e G a lice et N icolas Choussy m arièrent leur
.fille avec le citoyen F ayo l, notaire à S t. A m ant, ils lui constituèrent
tous deux ,,e n d o t, la somme de 8,000* dont le contrat de mariage
_portequittance de 5 ,000*. C e paiem ent fut fait par N icolas Choussy
(seul , et de ses deniers. 11 a donc payé pour sa fem m e la jn oitié
de
cette somme que la succession devoit répéter. C ependant
..Catherine Chouçsy et £on fils ont jugé à propos d ’oublier cet
article.
L e s reconnoissances de 1768 et 1772 font mention d ’une foule
de créances , souscrites au p ro fit, tant de N icolas C h o u ssy, quo
de Jacques G a lice ; quelques - unes m êm e sont faites au profit
.de N icolas Choussy seul : cependant par une mal-adresse incon
ce v a b le , par le traité de i/ 8 7 , l ’on a attribué le tout à la
.succession G alice.
lîn fin , on attribue à la
succession de Jacques G alice
des
�(23)'
couverts d ’a rg e n t, que plusieurs personnes'de Billom savent avoir’
été faits par un ouvrier de cette v ille , après la mort de Jacques
G a lice , pour le compte de N icolas Choussy.
Com bien d’autres circonstances semblables les mineurs Choussy
ne p ou rro ien t-ils pas invoquer? L e détail en est contenu dans'
leurs écritures. Il n ’échappera sans doute pas à 1 attention et'
au
zè le
du
citoyen
rapporteur.
N ous
croyons
donc pouvoir
passer à un fait infinim ent important dans cette a ffa ir e , qui'
porte avec lui une preuve irrésistible du dol pratiqué à 1 égard
des m in eu rs, et qui re n ve rse , sans ressources , toutes les bases'
du traité du 4 août 1787.
O n veut parler de la société qui a eu lieu entre- Jacques'
G alice et N icolas C h o u s s y , son g e n d re , depuis 1746 au m oins,
jusqu'au décès de Jacques G alice. Il résulte de là que les mar
chandises , créances et effets , qui ont été laissés par Jacques
G alice , et
que
les acquisitions
qu'il a
faites ,
depuis
cette
époque , ont dû appartenir pour m oitié à N icolas Choussy ;
ensorte q u e , soit l u i , soit ensuite sa veuve et son fils ont eu
une affectation bien co u p ab le , en agissant comme si tous ces
biens appartenoient à.Jacq ues G alice seul.
C atherine G alice et son fils ont bien senti toute la consé
quence qui résulte de ce m o y e n ; aussi n ’o n t-ils rien n égligé
pour le combattre. M ais, m algré tous leurs e ffo rts, il n y a rien
de plus aisé à établir que cette société.
E ll e prend d ’abord son fondem ent dans une quittance du 20
août 174S , donnée par Jacques G alice à N icolas Choussy , de
la somme de 2,000'*'.
faut observer que cette som m e, qui
faisoit partie de celle de 4,00 0'*', à laquelle la légitim e paternelle
de N icolas Choussy avoit été fixée par son contrat de m a ria g e ,
qui remonte à l'année 1742 , avoit été touchée par Jacques
G alice.
Par
la
quittance
Choussy reconnut
dont on vient
lavo ir retirée
de
p a r le r ,
Nicolas
de Jacques G a lice ; mais en
mise
autres
m êm e temps , ce dernier reconnut que son gendre l ’avoit
dans sa b o u tiq u e ,
effets.
C e tte
quittance
et
l ’avoit em ployée en marchandises et
prouve
deux
faits
essentiels : le p rem ier,
�C *4 ).
que le beau-père et le gendre s etoient mis en société , depuis
qu elque te m p s, puique les marchandises de l ’un et de l ’autre
étoient confondues dans la m êm e bo u tiq u e; le second, que la
quittance n ’expliquant pas à qu elle somme montoient les mar
chandises mises dans la m êm e boutique , par N icolas C h o u s s y ,
e t ne fixant pas une
mise différente de
la part
de chaque
associé dans le commerce com m un, la présomption est que la
boutique ne contenoit, en tout, que pour 4,000* de m archandises,
et que c ’est à cette somme que doit être évalu é le fonds de
com m erce des deux associés : telle est la disposition de la loi 29,
f f . pro soch . S i non J'ucrint partes , y est-il d it, societati adjectœ,
aquas esse constat.
C e t t e société est ensuite é ta b lie , i ° . par 5 6 sentences obtenues
en différens
temps par Jacques G a lice et N icolas
C h o u ss y ,
au bailliage ou en la juridiction consulaire de Billorn , contre „
leurs débiteurs
communs , dans l ’intervalle
de
1761
à
176 7.
O n voit dans toutes ces sen ten ces, que le beau-père et le gendre
sont dem andeurs conjointem ent , sous le titre de marchands :
dans plusieurs , il est d i t , Jacques Galice et Nicolas C houssy ,
son gendre , communs en biens et demeurant ensemble : dans une
grande partie on est allé plus loin , il est d i t , Jacques Galice
et N icolas Choussy ,
m archands
a sso ciés
, habitons de la ville
de B illom , et il n ’est pas inutile de rem arquer que cette qu ali
fication de
m akchands
a sso ciés
est contenue dans plusieurs
sentences des plus a n cie n n e s, des années 1761 , 1764 e t 1755 .
C es sentences portent condamnation de diflérentes sommes dues
pour ventes de denrées ou marchandises. Il faut encore rem arquer
que lorsque Jacques G alice et N icolas Choussy étoient assignés,
on leur donnoit la m êm e qualité d’associtfs ou de communs en
biens q u ’ils se donnoient eux-m èines.
20. L a société se prouve par le relevé du livre de commerce
du citoyen Sablon , négociant à C le rm o n t, certifié par le citoyen
S a b lo n , son fils. 11 est r e la tif aux années 1 7 6 6 , jusques et compris
1 7 6 9 , et il est dit que les délivrances des marchandises ont été
faites pour tom es ces années
marchands <) B illom ,
u MM.
Galice cl
Choussy ,
3°.
�•
3 °. L a
C 25 )
m êm e preuve se tire' -de l ’extrait des rôles de
la
Ville de B illo m , des années 1 7 4 3 , jusques et compris l ’année
176S. Ces extraits annoncent q u ’ils payoient une seule cote
en commun. Dans certains extraits', il est d it, Jacques Galice,
et Nicolas Choussy, °son gendre , marchands, pour leur industrie
et biens. L ’extrait de
l’année
1766
prouve q u ’ils avoient fait
fixer une seule cote p o u r ‘ eux d e u x , par un procès verbal du
3o ju illet 1765. Certains autres extraits établissent aussi q u ’ils
faisoient leurs acquisitions en com m un; et cela résulte en effet
des actes qui en ont été rapportés.
•
• *
Enfin , la m êm e1 preuve résulte
nombre de
encore de ce' qu’un grand
titres de°cVéances ont été
souscrits
au
profit du
beau-père et du gendre conjointement.
C ette société a commencé quelques années avant la quittance
du 20 août 1748 ; c’est-à -d ire , en l’année 1 7 4 6 , et voici
com m ent ce fait s’établit.
O utre que les énonciations m êm e de la quittance le prouvent
puisqu’il est dit que la so m m e 1 de 2,000* avoit et'é remise
auparavant par Jacques G a lice à N icolas C lio n ssy, et qu ’elle
avoit été em ployée par ce dernier en marchandises qui étoient
■dans la bo u tiq u e, c'est qu’on* voit sous la cote soixante de la
co p ie , que Catherine G alice a fa it sign ifier'd e l ’inventaire fait
après le décès de N icolas Choussy , u n ‘b illet de; iS o * , consenti
au profit de Jacques G alice et de N icolas C h o u ssy , le 24 ju illet
174 6 . C e billet n’a pu être fait au profit du b e a u -p è re et
du gendre conjointem ent, que parce qu’ils étoient déjà associés.
Catherine G alice a combattu Texiitence de la s o c ié té , par
des objections aussi foibles que m ensongères; elle a dit d’abord
que
le beau-père et le gendre- n ’ont jamais été associés ; que
s'ils ont pris le
titre de communs en biens,
ce n ’a été
que
relativem ent à des fermds et acquisitions en com m un; mais que
ces expressions n ’ont jamais eu- aucun rapport au ; com m erce; de
draperie, de mercerie , de toilerie'', de 'Jacques
N icolas Choussy ne se m êloit jamais.
G alice ,
dont
C ette objection n’est point exacte. O n ne p eu t douter de l ’exis
tence de la so cié té , soit d’après la souscription des billets et obliD
�( 26)
gâtions, tantôt au profit du beau-père et du gendre conjointem ent,
tantôt au profit de l ’un des deux s e u l, soit par la qualification
que le b e a u -p è r e et le gendre se sont donnée d’associés, dans les
sentences q u ’ils obtenoient,
m êm e dans certaines où il n’étoit
question que d ’effets souscrits au profit d ’un
seul.
Il est bien vrai que dans quelques sen ten ces, ils sont dits communs
en biens. M a is, dans un très-grand nom bre, ils se sont précisém ent
qualifiés de marchands associés. A u su rp lu s, il seroit difficile d’établir
une différence entre la qualification d’associés et celle de communs
en biens.
Il est fau x qu ’en se qualifiant a in si, ce n’ait pas été
d ’une
m anière a b so lu e , mais sim plem ent relative à quelques fermes et
à des acquisitions communes. L e s jugemens où la qualification
d ’associés est in sé ré e , n ’ont aucun trait en général à ces objets
p articu liers; elles concernent des ventes et délivrances de marchan
dises faites par le beau-père et le gendre, pour l ’entretien du com
m erce des particuliers q u ’ils faisoient condamner. L e tribunal en sera
convaincu par l ’inspection des sentences qui sont sous les cotes n eu f
e t vingt-neuf de la production des mineurs Choussy en prem ière
instance. D 'ailleurs, comment peut-on supposer que si Jarques G alice
et N icolas Choussy n ’eussent voulu se réunir que pour dem ander
des objets relatifs à une société p a rtic u liè re , ils eussent procédé
sous le nom
indéfini d'associés , de communs en biens l ce n ’est
être ni associés ni communs en biens, que de l'être seulem ent
pour une ferm e ou pour une acquisition.
E n fin , ce qui achève de prouver l ’illusion de C ath erin e G a lice ,
c est qu à certaines epoqnes où son père e t son mari se sont
dits associés et communs en biens, il
n ’y
avoit ni ferm es , ni
acquisitions communes entr’eux.
Catherin e G a lic e , obligée en quelque sorte de passer condam
nation sur le fait de la société, a cm se donner quelqu’avanlagc en
invoquant
un m oyen de d ro it, consistant à dire que les sociétés
n e peuvent s’établir légalem ent par le f a it ; q u ’il faut , d ’aprés
M o rn a c, q u ’elles soient prouvées par écrit.
Il est aisé de dém ontrer que cette objection ne peut s’appliquer
à l’espèce.
�C 27 )
E h prem ier li e u , il n’est pas perm is d’ignorer qu ’il ne fau t
pas toujours un écrit pour q u ’une société soit établie entre
deux personnes. U n commerce fait en com m u n , le m élange
de biens e t : d’in d u strie, produisent seuls cet effet. C ’est alors
une société tacite établie par le fait m ê m e , qui a la m êm e vigueur
q u ’une société conventionnelle : c’est ce que
nous enseigne le
judicieux C o q u ille , dans ses questions et réponses sur les articles
des coutum es, question 88e. A p rès avoir traité de la commu
nauté de biens que certaines coutumes établissent entre fr è r e s ,
par le fait seul de la cohabitation pendant un certain te m p s,
il ajoute : « C e qui se dit entre frères par an et j o u r ', 'j ’en
» voudrois dire autant entr autres p erso n n es, si par
»
»
»
»
qu elque
plus long-temps elles avoient uniform ém ent et par m êm e
façon tenu tous leurs biens m eubles , m êlé et com m uniqué
les fruits de leurs im m eubles et tous gains e t profits. Quia
enim societas tacito consensu dissolvitur, sic tacito cbnsensu pote.st
» conlrahi » . C e t auteur se fonde sur plusieurs lois qu’il cite ,
et notamment sur la loi ; Itaque , f f . pro socio. S ur la question
89e , il traite des sociétés tacites, en cas de commistion de biens
zt profits; il confirme le m êm e principe encore avec plus
d’étendue.
D esp eisses, tome 1 , partie 1, section 1 , n° 12 , enseigne le prin
cipe q u e 'la société est présum ée, non seulem ent lorsqu’il en apert
par é crit, mais aussi lorsqu’il en apert par d'autres conjectures
pressantes. Il cite sur-tout l ’exem ple d’un p ère qui cohabite avec
son fils ; ce qui doit s’appliquer évidem m ent à la cohabitation
4d ’un beau-pèro avec son gendre.
Carondas , dans ses p an d ectes, livre 2 , chapitre 3 3 , dit que
« certains
marchands s étant communiqué ensemble
quelques
» marchandises, et ayant trafiqué en ic e lle s ,p a r arrêt l ’on fut
» reçu à prouver par témoins une telle société » .
,
Lacom be q u i, au mot société, partie 1 , n °. 2 , rapporte le
passage de Carondas , ajoute : « C e qui paroit devoir être observé
» nonobstant l’ordonnance de 1 6 7 3 , titre 4 , article 1 , parce qu’en
cc cas., c’est une société tacite , quœ rc cuntrahitur » . ,
D 2
�( 28 )
E n second lie u , les mineurs C h o u s s y , ne sont pas réduits à
invoquer les circonstances
d ’après
r é p u té e , au moins ta cite m e n t,
q u ’un é c r it, dans leq u el se trouve
Jacques G a lice
lesquelles
avoir
une
société
est
été établie. Il y a p lus,
consignée la société d ’entre
et N icolas Choussy. C es écrits sont toutes les
sentences où eux-m êm es se sont qualifiés de communs en .biens,
d'associes. L orsqu’on les actionnoit, on leur donnait ce titre ,
lorsqu’ils poursuivoient leurs débiteurs , ils se le donnaient euxm êm es ; et l ’on voudroit dire actuellem ent qu’ils ne le to ie n t pas t
leurs héritiers respectifs, qui sont tenus de leurs fa its, pourroient
tenir aujourd'hui un langage bien différent du leur , leur supposer
une volonté contraire à cello qu ’ils ont m an ifestée! cette assertion
est le com ble du ridicule. Aussi H e n r y s , tom. i ,p . 614 , édit. de 1708,
a - t-il donné en m a xim e, que l ’on doit regarder comme communs
ou associés, ceux qui avoient pris cette qualité par les actes.
L ’existence de la société d ’entre le beau- p ère et le gen d re,
est donc une vérité qui ne peut recevoir aucune atteinte
par
tous les efforts que la cupidité pourroit enfanter. A y a n t reconnu
solennellem ent q u ’ils étoient communs en biens et associés, leurs
créanciers les auroient fait condamner solidairem ent en cette qu alité.
M ais s’ils eussent été associés respectivem ent au public , il est
forcé q u ’ils soient considérés comme tels, respectivem ent à leurs
héritiers et ayans cause. O n ne conçoit pas que deux particuliers
pussent être regard és, to u r-à -to u r , comme associés, et comme
ne le ta n t pas.
M ais supposons, pour un m o m en t, q u ’on pût dire que Jacques
G a lice et N icolas Choussy n ’ont pas été associés, il n’en résulteroit
pas
pour cela que Catherine G a lice et son fils fussent à l’abri
du reproche de fraude. D ans ce systèm e m êm e , il
testable qu ’on devoit au
de N icolas
est incon
moins faire prélever par la succession
C h o u s s y , sur les biens G alice , la somme du deux
m ille livres que N icolas Choussy
avoit
mise en marchandises
.dans la boutique de son beau-père , suivant la reconnoissance
de ce dernier , contenue dans l’acte du ao août 1748.
Catherine
G a lice a cherché à prévenir cette objection
dans
�( *9 )
une écriture qu ’elle a fait signifier en la ci-devant justice de
B illom , le 4 ju ille t 1789. E lle y a prétendu qu’il est dit seulement
dans l ’acte du 20 août 1748 ,q u e la boutique du beau-père étoit
le dépôt où celui<i avoit permis à son gendre de placer M 0 a i e n t a n é m e n t les marchandises auxquelles il avoit employé la
partie de la somme de deux mille livres par lui reçue ; elle a
ajouté qu’une stipulation pareille n’avoit et ne pouvait avoir d ’autre
but que d’assurer au gendre la fa c u lté de disposer à son gré des
marchandises dont il s'a g it, et de les retirer à volonté, sans que
le beau-père pût l'en empêcher, et par réciprocité , sans qu’il j u t
aucunement chargé d'en rendre compte , sans qu’il f û t astreint à en
preudre de décharge, au moyen de la quittance a ctuelle, absolue et
sans réserve qui lui étoit consentie.
M ais C atherine G alice suppose dans l ’acte dont il sagit ÿ
des expressions qui n ’y sont p o in t, et des idées qu ’il ne sauroit
présenter. C e t acte apprend que Jacques G alice avoit reçu pour son
gendre
la somme de deux m ille
livres ; que ce dernier , du-
consentement de son beau-pére , l ’avoit em ployée en marchandises
dans la boutique ; que le gendre ne pouvant pas tout à-la-fois:
avoir l’action en répétition de la somme de 2,0 0 0*, contre son
b e a u -p è r e , et prendre des marchandises proportionnellem ent
à cette m êm e somme , le beau-père entendoit prendre décharge
ou quittance de la somme de 2,000'*, et reconnoître à son
i gendre l’emploi
qu ’il
en avoit fait en
..boutique. I l est impossible
m archandises dans la
d’interpréter autrem ent les termes
de l ’acto qui suivent la quittance de 2,000*, que Catherine G alice
devoit d’autant moins ign o rer, q u e l l e les a elle-m êm e rapportés
dans son écriture : « au m oyen de la présente q u itta n c e , led it
« sieur G alice reconnoît que ledit sieur C h o u ssy , son g e n d re ,
» l’a mise dans sa boutique , et em ployée en marchandises et
» autres effets , pour ladite somme de 2,000'”' ».
A in si donc doit disparoître ,1e commentaire com m ode, mais
inexact de Catherine G alice. Ainsi , il devient forcé de
l’idée que l’acte du 20 août 17 4 8 , constitue seulem ent
rejeter
Jacques
G alice dépositaire momentanée des m archandises, qui appartenoient
�( 3? )
N icolas Choussy ; q u e , d’après cet acte , le 'beau -p è re
à
a it
é té dispensé de prendre une décharge , lorsque le gendre retireroit
ces m êm es marchandises. O n v o it , au contraire , une mise en
commerce de marchandises de valeur de 2,000’”' ; il n ’y a pas
d ’époque fixe , à laquelle ces marchandises aient dû être retirées;
e t,
encore une fo is , à supposer pour
un in stan t, q u ’il n ’y
eût pas eu de société , il est évident que la succession G alice
ne pourroit
:le rapport
être libérée
de cette somme de 2,000'”' , que par
d une décharge de la part de N icolas Choussy. L a
reconnoissance ou l’obligation du beau-père ne pourroit être effacée
que par une quittance du gendre. M ais de ce que cette quittance
-n’est pas rapportée , il n ’en résulte pas seulem ent , que ce
dernier n ’a point retiré la somme de 2,000* , mais il en résulte
encore q u ’il étoit associé avec Jacques G alice , et que cette somme
-étoit sa mise en société , ainsi q u ’on l’a déjà établi.
M ais l ’état d ’insolvabilité, dans lequel les adversaires supposent
qu’est
décédé
N icolas
Choussy , porte à une réflexion bien
naturelle. Q u e sont donc devenues sa fortune et ses économies ?
O n n'a pas daigné expliq uer comment et par qu elle fatalité ,
après avoir consommé une partie considérable des biens de ses
p u p ille s , il s’est trouvé encore dans l’impossibilité de faire face
à
sept à huit
m ille
livres
de
créances
dues
à
Catherine
G alice.
Il
est cependant vrai que C ath erin e G alice a attribué cette
position à l ’ineptie de N icolas Choussy dans le com m erce; à
de faux placem ens de fonds; à nombre d’acquisitions de mauvais
v e n d e u rs, qu ’il a fallu abandonner ou payer plusieurs fois; à
des spéculations m al combinées qui ne lu i ont procuré que
des pertes , et à une incurie d ’administration qui faisoit q u ’il
ne tiroit aucun parti de 6es revenus , ainsi que de ceux de
ses mineurs.
En prem ier l i e u , on ne voit dans to\it cela que de vaines
allégations destituées de fondem ent. C atherin e -G alice ne prouve
rien de
ce
q u ’elle
avance : cependant
de
pareils
faits
sont
de nature Ji pouvoir être aisém ent p ro u ves, lorsqu ils sont vraie.
�C 31 )
E n second lie u , il n ’y a rien de plus contraire à la v é r ité ,
que le portrait que C atherine G alice a fait de son m ari] outre
q u e lle n’est pas d’accord en cela avec son fils qui donne bien
un autre p rix -a u temps de N icolas C h o u ssy , qui lui a supposé
bien des- talens et de l'intelligence , puisque dans le compte
de tutelle q u ’il a- rendu , il a demandé 3 ,ooo 'n* pour 1®
dédommager de la perte que son p ère avoit soufferte , pour
avoir été forcé de quitter le commerce par les embarras m ul
tipliés de la tutelle ; c’est que les mineurs C h o u ssy , forcés par
la nécessité de la d é fe n se , ont in vo q u é , dans une requête du
1 2 janvier 17 8 9 , l’opinion publique contre les assertions m en
songères de Cathérine G alice. Ils n ’ont pas craint d'être dém entis,
e n attestant que non seulem ent N icolas Choussy n e to it pas
en usage de faire de mauvaises a ffa ire s, mais que la cupidité
lui en faisoit faire de m eilleures que- la délicatesse ne leperm ettoit. Ils ont rappelé certains faits auxquels , par un
reste, d'égards, on se contentera de renvoyer. D ’ailleu rs, l'id ée
q u ’on a
déjà
donnée
de
la
conduite
de
N icolas
Choussy r
suffiroit seule pour prouver qu’il n ’étoit pas inepte en matière;
d intérêt.
Examinons actuellem ent si les preuves q u ’on vient de donner
de la fraude p ra tiq u é e , au préjudice des mineurs Choussy
par Catherine G alice , par son mari et sfan fils * sont détruités
ou modifiées par l ’enquête qu’elle a fait faire-, en- exécution»
du jugem ent du 20 mars 1792 : bien loin d e - l à , on va voir
que lesi dépositions de cette e n q u ê te , et celles de l’enquête
con traire,
que
faite- de la
prouver
la
part
modicité
des
minours C h o u ss y ,
de la fortune
laissée
ne font
par Jacques'
G a lice .
O n ne finiroit pas', si on vouloit rapporter les- dépositions
de trente-huit témoins entendus dans l ’enquête de C atherine
G a lice . Il est indispensable de les analyser; et l ’on peut dire dans
la plus exacte v é rité , qu ’elles se réduisent toutes à ceci. iVe
pas connaître particulièrement en quoi pouvait consister la fo rtu n e
<ic Jacques Galice ; mais qu'il avait une boutique bien fournie •
�C 30
que sa maison étoit bien m eublée, suivant io n cîat ; que lorsque
le sieur
Choussy e'pousa la demoiselle
G alice , tout le monde
disoit qu'il fa is o it un bon mariage; qu’il n’avoit besoin que de porter
son bonnet. Plusieurs témoins se sont expliqués plus brièvem ent.
Q u e portoit le
jugem ent
interlocutoire du tribunal ? Q u e
C ath erin e G a lice feroit p r e u v e , tant par titres que par témoins
e t la commune renom m ée , de la consistance et valeur des mar
chandises , ainsi que des m eubles, bestiaux, or et argent demeurés
du décès de Jacques G a lic e , son père.
O r , peut-on voir une sem blable preuve dans les dépositions
q u ’on vient d ’analyser!
< i ° . E lles gardent toutes le plus profond silence sur les
bestiaux , or et argent demeurés du décès de Jacques Galice.
C a th e rin e G a l ic e n ’a donc absolum ent rien prouvé sur tous CCS
articles im portans; elle n ’a donc pas satisfait au jugem ent.
2°. Q u an t au x marchandises et aux m eubles , les dépositions
des témoins sont trop vagues pour qu’on s y arrête. I l fa lla it
en prouver la
consistance et la valeur ; et l’on a vu que les
tém oins ont été réduits à l ’im possibilité d’entrer dans
d étail à cet égard.
aucun
V ain em en t C ath erin e G a lice voudroit-elle se prévaloir de ce
qu e
les tém oins qu ’elle , a fait entendre sem blent donner une
id é e avantageuse de la fortune de son p ère. O n sait combien
il faut se défier de l’opinion qui se forme sur la fortune d’un
m archand tel que Jacques G a lice qui avoit entrepris un commerce
très-m odeste, avec des ressources infiniment fo ib le s , et qui étoit
parvenu par ce m oyen à se procurer q u elq u ’aisan ce, à force de
travail et
de
parcim onie. L e s personnes qui Sont dans cette
p o sitio n , paroissent opulentes , parce
q u ’on est étonné de ne
plus les voir pauvres ; et cette idée de fortune prend sur-tout
d e l’accroissem ent dans l’esprit de ceux q u i , comme la plupart
des témoins entendus, à la requête de C atherin e G a lic e , vivant
dans un
une
état
d ’o b scu rité , ne sont guère à portée d ’apprécier
fortune ; ils exagèrent ■ordinaitem ent ce qui est pour eux
.un objet d ’envie.
D ’a ille u rs, il faut rem arquer que Catherine
G alice
�C{33 )
G alicü étoit fille un ique; que dans le principe, N icolas Clioussy
avoit une fortune peu considérable ; elle a .été augm entée p ar
des successions et par son industrie ; qu ’à l ’époque de son
mariage , qui remonte à 1 7 4 a , les dots étoient m odiques; ensorte
qu’il n’est pas étonnant que , quoique la fortune, de C ath erin e >
G alice fût m éd io cre , N icolas Choussy parût fàiré un mariage*
avan tageu x; il suffisoit qu'il ne fû t pas ’d ’abord obligé de monter,,
une m aison, et qu ’il n ’eût point de partage à fa ir e , pour q u ’on
le crût h eu reu x."C ette idée se tire naturellem ent de ces expres
sions , dont les témoins se sont se rv is, qu'il 11’avoit besoin quet
de porter son bonnet. ; 1
!!■î ,•
•'
O n ne peut donc faire, aucun fond sur des dépositions aussi
vagues. jCatherinéiQ alice a été chargée de prouver une consistance,
une valeur de m o bilier, ,et';elle ne prouve rien. O n doit d’autant
plus exiger d ’elle ^,q u ’il est établi qu'elle n ’a cessé de se porter
à des manœuvres od ieuses,. pour jeter un voile sur sa fortune,
et pour la grossir, ,au préjudice;,des mineurs. E lle a négligé le
seul m oyen légal de constater ce qu’a laissé son p è r e , qui étoit
un inventaire exact et ré g u lie r, à -lepoque de son d é cè s; sa
conduite n’a excité d ’autre sentiment que celui de la m éfiance;
et la peine, dé :cette négligence doit .être de faire rejeter toute
reprise,^dont « a n e voit point.^l’origin e, qui n’a pas un fonde
m ent réel.
„• 1.
a
M ais si cette enquête ne petit pas servir d etaie aux reconnoissances et au traité du 4 août 1787 , la chiite de tous ces
actes est encore plus c e r ta in e , d ’après l ’enqu ête contraire des
mineurs Choussy. IaJ .¡ a
,
.
,
E lle estiComposée de tren tç-n euf tçmoins qui ne laissent rien
à desirer sur la modicité des marchandises et des m eubles de
Jacques
Galice'.
^
T
A ntoine E s t iv a l, second tém o in , tailleur d ’h ab its, a dit q u e ,
.du .vivant de Jacques G alice , il est entré plusieurs fois dans
sa boutique pour y
acheter des étoffes pour des habits ; q u ’il
Lest de sa connoissance
que les étoffes , qui ; gam issoientj
cette
•boutique , nétaient point en grand nombre, et qu’elles étaient grossières
et de peu de valeur ; qu’elles consistoient en ratines , montaubans., camelots et a,utres étoffes de cette e sp è c e ; q u ’il^se rappelle
�( 34 )
n'y avoir jam ais trouvé de draps un peu Jîns ', pour faire
des
hàbits propres , ou pour faire des soutanes}; que lorsqu’il avoit
besoin de pareilles é to ffe s, il s’adressoit à la dame Bom part ; q u ’il
n ’a aucune connoissance de la quantité de bestiaux, or ou argen t,
que Jacques G alice pût laisser à son décès.
>
M atth ieu T ré b u c h e r, aussi tailleur d'habits , troisièm e tém oin ,
a dit qu’il avoit pris quelques habits ch ez Jacques G alice ; que
les étoffes q u ’il y a ac hetées le plus c h e r , et que Jacques G alice
avoit de
plus grand prix dans sa boutique ,
d’Angleterre de 8 ^
étaient des draps
à i o 1 f ; q u ’il y a pris aussi d ’autres étoffes
de V* à 5 n l’a u n e , telles que ratines et cadix de M ontauban;
qu’il y a pris plusieurs fois des Jarretières, dont Jacques G alice
vendoit grand nom bre, ainsi que des boutons , d o u b l u r e d’habits
et a u t r e s p Mi tes f o u r n i t u r e s ; q u ' i l a travaillé pour plusieurs
p rê tre s, mais q u ’il n ’a jamais pris aucune soutane ch ez Jacques
G a lice , et q u ’autant q u ’il p eu tJsen . rappeler , il croit pouvoir
assurer que
Jacques G ,i ‘,ice n avoit ppint dans sa boutique des
éc >jfes peur en ju ir e ; qu ’il n’a aucunti connoissance des m eubles ,
b e s tia u x , or et
argent que Jacques G a lice put laisser à son
d écès.
Jacques R è g e , antre tailleu r, qu atorzièm e tém o in , a dit avoir
ouï dire par son p è r e , qu’il y avoit dam Billom plusieurs boutiques
qui vaLient mieux que celle du iicur Galice , telles que celles du
sieur Foiirnet et de la dame B im p art.
L es autres témoins sout des bourgeois de Billom , qui sont en
état d ’apprécier la fortunu d u n du leurs concitoyens : leurs déposi
tions sont conformes aux trois q u o n vient de tapperter. O u se
contentera de rappeler certain» ntràlts quV sont laits pour être
relevés.
L e C itoyen A lexan dre F o u rn et, fils d ’un marchand do B illom ,
a déposé qu'il est de sa connaissance que la boutique de Jacques
C a lic e , quelques années avant sa mort, »ignifioit peu de chose", q u ’il
5e rappelle avoir vu Jacques G a lice ou sa fem m e yenir plusieurs
fo is ' prendre dans la
boutique
du •pere de
articles qui leur manquoient , comiUo le
lui de|U)S.mf des
père
dudit déposant
en avoit envoyé prendre lni-mênie ch ez Jacques G a lic e , attendu
que. lts boutiques uo l'un et do l autre étoient voisines e t medioett-
�'C '3 5 0
. ment garnies; que le commerce de Jacques G a lice , consistait eh
de grosses étoffes de d r a p s , telles que ratin es, montaubans ’
p e lu ch e , bergoopzom , fla n e lle , cadis et, autres étoffes grossières,
quelques toiles de| R o u en :et cotonnades!. . . . . ; qu'à L'égard, des
imeubles qui étoient dans la maison dudit sieitr, G a lic e , ils étoient
¿en petit nombre et de petite valeur.
• r' .
...
\
i, L a C itoyenne Jeanne N ugier, épouse du citoyen B arry, dixièm e
itém o in , a déposé qu ’étant entrée chez Jacques G a lice , pour y faire
tquelques e m p iè te s, elle n’y trouva
pas les objets dont
elle
:avoit eù besoin;.. que de retour ch ez elle , elle dit à son m ari:
-celte boutique, de M . G a lice , est une pauvre boutique on n’y trouve
rien ; je n’ai pas même trouvé de quoi t'acheter des culottes. E lle
T en d encore*sur les m eu b les, le m êm e tém oignage que le p récé
dent tém oin.
t
o;t L e s Citoyens G abriel C h au ssy, Joseph Barry et Jeanne R och e,
•veuve d ’A n n et > \ ? a u r y 4 e ,• 5 e et 6e tém o in s, disent qu'il n ’est
;pas étonnant que la boutique de- Jacques G alice ne fut pas
¡considérable, parce que dans ce iem ps-ià on ne connoissoit pas
le s draps j m s , et qu'il n’y
richement assorties.
avoit pas dans B illom
;
de boutiques
;.
,
r . L a m êm e observation a été faite par la citoyenne M arguerite
B arry * épousé du citoyen Ju illa rd , 12 e .tém oin, qui a ajouté
q u e r la boutique ¿toit peu. 'garnie , n’y ayant', des étoffes que d’un
côté ; qu’elle est mémorative qu'une chambre et une cuisine qui
etoient au-dessus de ladite boutique, étoient médiocrement meublées.
&•; François D ebord',‘ 18®^ tém oin , e s tta llé plus loin relativem ent
au x m eu b les; il a dit q u ’il seirap p elo it avoir vuidàns la <mai son
de. Jacques G a lic e , quatre lits'., dont l ’un pour la domestique et
les autres trois , des lits médiocres.v .
^ , o n u . :i rr 1, ; . Jeanne V a u r y , 19e témoin , dit que la boutique, du sieur. Galice
étoit une petite boutique, n’y ayant autre chose que des étojj'eà de
peu de prix , tel Us qu'espagnolLettes •et> autres d'à cette .nature j
des"couvertures , des bonnets , des liensr des mittes et des bourdes
et autres objets n l'usage des petites gens ; que les meubles de la
maison étoient vieux et de peu de valeur,; et quelle croit pouvoit
assurer que le tour de lit te plus propre ne valait pas. plus de x 5 -n- 4
îL'Ç atherm e Volant,' '2 0 ° '-témoin; f dit q u e V £ e iïd e ;te m p s aviui*
E 2
�( 3« )
la mort do Jacques G a lic e , sa b o u tiq u e , composée déjà de mar
chandises très - communes j en étoit m édiocrem ent g a rn ie, sans
doute parce que dans ce lemps-là il vouloit quitter le métier. E lle
aji'Ute qu elle se rappelle encore que les meubles de ta maison
ét-.Lnt médiocres, et tels que les pouvoient avoir dans ce temps-là
/.y gens de méc'ur. O n peut rapprocher de, cette déposition celle
du citoyen B a th o l, 7 e tém o in , qui a dit qu a-peu-près dans ce
te m p s , il y avoit peu de marchandises dans la b o u tiq u e, et
que m êm e Jacques G a lice cherchait à rendre son reste; ainsi que
celle de M arie
l'a u c h e r ie , 8e té m o in , qui a déposé que -le
sieur Gaiice , qui se proposoit de renoncer au commet ce , ne scixibûirassoit pas de bien garnir sa boutique.
C e n ’est pas tout encore. L e s mineurs C h o u ssy, dans leur
requête du 1 2 janvier 1 7 8 9 , ont articulé q u ’au mois de juin
trois ans avant le décès de Jacques G a lic e , il y eut une
j i - ndatiuii considérable à Billom ; que les eaux furent si abon
dantes , qu elles m ontèrent à la hauteur de n e u f pieds dans les
maisons \oisines du ruisseau, telle que celle de Jacques G a lic e î
q u ’il en souffrit un très-grand dommage ; que les eaux lui en le
vèrent la plus grande partie des marchandises q u ’il avoit dans
sa m aison, et que le restant fu t considérablem ent dégradé par
les {miles qui se trouvèrent dans une maison sup érieu re, et que
les eaux entraînèrent aveu elles ; que la perte de Jacques G a lice t
011 plutôt de lui et de son gendre ( car ils étoient alors associés
fu t si énorme q u ’ils furent
r é d u its , après
ce d é sa stre , à ne
vendre plus que des ■
coupons ; que Jacques G a liie ulloit prendre
de quoi s'habiller ch ez d autres marchands, et que la veille des
feires notam m ent, il em pruntoit les plus petites som m es, comme
2^n , eu m êm e 6 *, pour fournir à s js besoins.
L e fait de
l’inondation et le dommage qui
en a
é lé une
suite pour J a tq tu s G a lic e , sont p ro u ves, de la m aniéré la plus
p ré c ise ,
par l’enqucte des mineurs Choussy.
L e citoyen Jacques R e l i e r , prem ier tém oin , a déposé q u ’il a
oui dire qu'une iutndation a rrh é e «H une époque assez an cien n e,
mais dont il ne
se
rappelle
pas la
date p o sitive,
h i o rù t
emporté plusieurs cj ets qui étaient dans sa boutique. Um: foule
d autres témoins depescut de tu la it avec cotte différence q u ils
�C 37 )
..
.
n'en ont par parlé pas ouï d ir e , • mais pour en avoir une cor£
noissance personnelle. O n se contentera pour abréger , de citer
la déposition d’Yves Boyer , 1 7 e té m o in , à laquelle les autres
se réfèrent. Il a dit "-qu'il est de sa connoissance que le sieur Galic'e
avait beaucoup soujjert de l’inondathn arrivée il y à' environ 25
ans. T e lr est à-puu près le langage des 4 , 8 , i 5 , 1 8 , 1 9 , 2 1 ,
2 2 , 2 3 , et 24e3 témoins. L e m êm e fait est encore- attesté p a i
les i/+, 1 7 , 29 et 3 oes témoins de l’enquête de G atheriné
G alice.
Il est aisé actuellem ent dè se fbrriier une idée de la valeur de
la boutique de Jacques G alice. A vant l’inondation lés tétïioini
la présentent comme infinim ent médiocre ; c’est la veille m êm e
de 1 ette inondation ru e la citoyenne N u g ie r , épouse Barrÿ, dit
qu’elle n’y a*\.it pas trouvé de quoi acheter des culottes. D epuis
cette époque jus; u ’au' décès de Jacques G a lice les témoins en
pailent cûnime d’un vieux fonds j"1 unHreste de boutique dont
Jacques G alice vouloitu se défaire! L es témoins parlent aussi
peu avantageusem ent du mobilier. A u cu n des tBmotns de la
veuve Choussy n’a déposé sur les bestiaux. Q uelques-uns de ceux
entendus ¡à la requ'ête des m ineursJ Choussy , disent seule
m ent avoir- vu d-'ux paires^ dè:iJbcfeufsLdaris u n petit domaine'
acheté en Commun pàr le- bédti-pèré' et le 1 ‘gGndre. L a veuve'
Choussy et sou fils5oséront-ils encore soutenir qtie les marchandises,'
motib’es et effets doivent être porter à 28^000*?
Reste à examinér les motifs et le fondem ent de l’appel inci
demm ent interjeté par le* mineurs C lio iis s y ,.d u jugem ent de
la ci-devant jù^u.e dé ' Billom ,/d iiJ j o 'février i 79 0 .' Q tibique'
le juge- de Billom ait adopté lia h ù llifé des 'réconnoissances e t
d u ’ ttaité
rendu ,
dont il- sagit , Son jugem ent
est néanmoins m al
et il nuit au!x mineurs C h tu ssy
qui en conséquence'
*e sont vus forcés de' l ’attaquer. L eurs griéfs consistent en ce
qu e le prem ier juge a syncopé '-toutes • les' 'parties‘ d e 1l'affairé ;
il a divisé ce qui devoit toujours aller de front'; il commence'
par déclarer nuls les recorinoissàrices1 et Te traité t et p a r 'c o n
damner la veuve Choussy à rapporter à la succession de son
mari tout ce qui lui a été
délaissé. E t lorsqu’il est ensu ite
question des reprises de la veuve Choussy , pour créan ces 1ou
�( 3 8 )
jîûur .nipjcjiandises r a u .lip u de{ prendre des mesures convenables
pour parvenir à leu r
liquidation , il
donne sim plem ent
une
permission de plaider tant pour lesf unes que pour les autres.
I l veut, que sur touÇnceJa les parues contestent plus amplement k
çtn.sç que sur les chefs de demande en rapport ,, form ée par les
milieufs^ Choussy. (Ensorte qu ’il ne résulte
d e décision.
Il j i ’en, a point
donné
d e -là aucune s.ortç
non
plus
sur
l ’article
jjnportant de la société;; il a renvoyé a prononcer suri la société
qu’il peut y avoir eu entre N icolas Choussy et Jacques Galice
h iera ipvoVWCé• ■
-■
sur [les;:: reprises à fa ir e
Çatheÿpe-Cjalice, ;il
.
.
par
!
; . E,e; nïa{*}ugé[ Q^t évident. E n,prem ier lieju r toutes les demandes
étoien t en état , l’affaire étoit instruite , pourquoi le prem ier
juge "ne jugeoit-il pas sur le tout à-la-fois , sa u f cependant à
^ d p n A çr3 pr4?lablenieiitt une p re u v e ,, à la charge de la , veuve
f hous?y, .à Kj ’e£fyt. d ç .,savoirf si elle j^stifieroit ou non les faits
énoncés,^dans les reconnoissances et dans le t r a it é ,
ÿa fait le tribunal ? r .,
.
.,r. .
ainsi que
? .En^ second l i e u , les enquêtes respectives étant faites , il
se m b le r^ t, aux^ term es de la sentence du juge de B illom , que
tribunal ne pojurroit, ni réduite; le montant des reprises qu i
d o iv e n t, revenir à Ja. veu v e Choussy ,. tni statuer sur les autres
demandes , et qu ’il-, faudroit j«iV;Oyer le
tout
p a r-d e v a n t un
prem ier juge d;appel. O n sent com bien tout cela «seroit; injustes
e t inconséquent. Il est temps que les mineurs Choussy triom phent
4 qs iuanQeuvfeg.;/juç. L’qj^ » mises en usage pour envahir léuV
fyj-.tune-,;, san$„ qujijs. £$>jent obligés de soutenir encore, plusieurs
procès en. différens
■Q u ’on p e
Jrtbunaux. ¡pour les m ê m e s
, pas .q u e
ipipuissant ;, qu e
le
qye
juge
le
premier;
l ’app el
objets.
‘
I
des /nineurs C houssy }es\
tribunal ne pourroit statuer sur les chefs
s*est réservés ,
qu e
par.
la
voie 'dtj
l.’évpcation., niajf; quq jcçtte .évocation ne pourroit avoir liffü -,
q u ’autant jqîi’on .stan iezpit sur toutes les dcmasjdes à l’audience#
d^pj-ès l ’art, z du titro.,6 de l ’ordjonnance de 16^7.
*
-. -r
£ Ç e. ij’ust pas ici le cas d ’appliquer cet article : les dispositions
«J,q xett,e ,lqi auroient lieu , si le prem ier juge avoit préalablelB£nV i i H p j l Q c v i t o i r Q ' o u . -
rçndu jo u i a v t w
jugcmfcub
�<r 39 3
préparatoire dont il y auroit appel^: le juge d’appel devroit juger
simplement sur la question de savoir si le jugem ent préparatoire
est bien ou m al rendu , ët il ne pourroit décider sur le fond
réservé , qu ’autant que ce sefoit à l'audience^ '
1 ' '
M ais il n’est pas ici question d e ° c e la / l e prem ier juge â
détaché des demandes tellem ent cônnexèé ,u q u ’il est impossible
de statuer spr lu n e sans statuer en m êm e tënips sur lés autres.
Ensorte que rÎ e : juge d ’appel est ôbligé de réform er un pareil
ju g em e n t, et il ne peut le réform er q u ’en jugeant lui-m êm e
sur le tout.
U ne réflexion va convaincre de cette v é r it é : d*après la p p r l
m êm e de la veuve Chôùssy et d e 1son fils , le 'tribunal a à juger
si les rëconnoissance's ‘et
traite r o n t nuls rrcommè frauduleux.
L e tribunal peut regarder comme tin m oyen de fraude , la
suppression qu ’on s’est perm ise dans tous ces actes de la société
existante entre Jacques G alice e t N icolas Choussy. 11 seroit
m êm e p o ssib le'q u ’il se décidât principalem ent p a r -e ë m o yen ;
;mais comment poùrroit-il le f a i r e ,1 s’il ne lui ré<éU pas permis
•de statuer sur la demande? relative à l’existence de la so cié té ,
parce* q u ’il auroit plu au prem ier juge de renvoyer à prononcer
sur cet objet? O n ne dem ande pas que le tribunal évoque le
fond d’u n è-affairé'? on idemande la réform ation-d’im jugement",
sur ce q u ’il a mal à propos statué seulem ent-sur u n e demandé-,
q u ’il' en ' a ’ réservé' d’àirtrés
et Kqii’il est- im posable -de juger
sans jtiger sur le tout/
in
'J
..
..
»
L e la s dans-lequel'^se trouvent les p a rtie s, est du nombre
d ë )Cceux qui ’ orit:1été prévus?11’par R o d ie r , commentateur de
l'ordonnance de 16 6 7', Sût* l'article qiion a déjà c i t é , et il dit
’qu'alors le juge ¿ a p p e l ' ‘ statuer’ sur tèu tes"les dem andes,
autrem ent q u a l ’a u d ie n ce ; c ’e s t - à - d i r e , en procès par é c r it:
« L a cour , dit - il , p eu t sur cet appel appointer à b ailler
5» par écrit , réformer l ’appointement et vid er' le fond des
» contestations des parties , ou même ‘ interloquer sur certains
» .c h e f s , i ’t.l yi a lieu ; d e, sorte-qu’on 11e vide pas le tout par
» lin seul et m êm e a rrê t; mais c'est par vuic de g r ie f, et nun
» par vjfe d’évocation -que- cela se j a i t . Ainsi la dispoùüm dç
» i'orduiinançc r icti pas vU ée
;il
A
: ^ a
.
�•il i -r •
•
A u m oyen des
parties ,
le
'*
respectivem ent
appels
tribunal
I •
interjetés
doit vider -toutes les
é mandant et par voie de
griefs ,
par
les
contestations ,
en
sans renvoyer aucunes des
dem andes devant le prem ier ju ge.
En co n séq u en ce, il ne peut y avoir de difficulté à annuller
l es deux, reconnoissances de . 1768 et de 1 7 7 2 , ainsi que le traité
du 4 août 1 7 8 7 , comme étant faits en fraude des créances des
mineurs Choussy.
■ Jacques
,c
G alice
et
N icolas
C h ou ssy doivent
être déclarés
a voir é té communs depuis 1746 , jusqu’au décès de Jacques
G a lice . . En conséquence il doit revenir ;m oitié des cré a n ce s,
m archandises et acquêts im m eub les à la succession de N icolas
Choussy , d ’après le partage qui doit en être ordonné.
L a valeu r de ces m archandises, créances et les me u b le s, doit
ê tre arbitrée par le
.enquêtes.
trib u n a l, d ’après l’i d é e q u ’en donnent les
O n ne p eu t considérer, comme-, créances qu e celles
qui sont fondées sur titres rapportés et qui ne sont pas prescrites.
Il doit être ordonné que lors du partage de la com m u nauté,
l a succession de N icolas Choussy p ré le vera la somme de deux
m ille livres par lui mise dans la s o c ié té ,
du ao août 1 748.
suivant la quittance
yii
[
. C es décisions une fois re n d u e s, l e s réductions des reprises
de la veuve Choussy étant ordonnées , les mineurs Choussy
.d’après la valeur actuelle des biens de la succession de N icolas
.C h o u s s y ,
qui a
été
entièrem ent
dénaturée
dans,
les
actes
attaqués de fraude,, auront enfin, lieu d’espérer de recouvrer
leur patrim oine. Signe , B O U C H A R D O N , fondé d e pouvoir.
.citoyen B arth élém y Choussy.
Le
Citoyen D E V A L ,
Rapporteur.
L e C ito yen G R E N I E R ,
■
Le
*
D éfen seur officieux.
C itoyen D
ev è z e
, A v o u é.
A R I O M , D E L ' I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T , 1793-
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy, Barthélemy. 1793]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bouchardon
Deval
Grenier
Devèze
Subject
The topic of the resource
tutelle
fraudes
créances
appropriations de biens
marchands associés
témoins
commerce
inventaires
rumeurs
inondations
vin
textile
climat
draps
Description
An account of the resource
Mémoire pour les citoyens Barthélemy, Marie et Catherine Choussy, enfans et héritiers du citoyen Gaspard Choussy, habitans de la ville de Billom ; François-Avit Greliche, homme de loi, mari de ladite Catherine Choussy ; et Barthélemy Grelet, homme de loi, curateur à l'émancipation desdits mineurs Choussy, intimés et appelans. Contre la citoyenne Catherine Galice, veuve de Nicolas Choussy ; et le citoyen Jacques-Philippe Choussy, homme de loi, héritier sous bénéfice d'inventaire dudit Nicolas Choussy, son père, appelans et intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1793
1767-1793
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
BCU_Factums_B0135
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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O U V E R T U R E S
DE
CASSATION,
1*
POUR
F rançois
C H A LU S
et
. C l a u d in e
M A ZU EL
Prétendu homicide par fam ine.
A p r è s avoir langui long-tem s, la femme de Chalus
à perdu la vie : il fallait accuser la maladie et la n a
ture, et l’on a accusé le mari et la personne à qui il
avait confié le gouvernement de sa maison.
O n a inventé que des alimens avaient été refusés à
a malheureuse dont l’heure fatale venait de sonner
et la faim a été le couteau dont on a armé ses assassins.
Quelle a été la source de ces reproches si graves en
eux-mêmes , et si légèrement faits?
U n avide héritier n’avait pas ratifié la donation d'usu
fruit qui avait été faite à Chalus par s a f e m m e il a
voulu l’annuller.
-
Q uelques domestiques n 'av aien t pas pardonné à ClauA ,
�< o
dine M a z u e l, regardée par eux comme leur égale , l’au- torité qu’elle avait exercée sur eux; la jalousie a tenu
des propos, et les propos ont enfanté une accusation.
Des passions étaient en m ouvem ent; un texte avait
été fourni à leurs commentaires, lorsque , Clialus vou
lant assurer une récompense à Claudine M a z u e l, l ’inep
tie d’un notaire avait laissé ridiculement prendre à
l ’acte rénumératoire ,
mariage.
la
forme
d’un
contrat
de
On a expliqué la mort d’ une femme débile , à la
quelle on devait s’attendre , par un crime tellement
nouveau dans son atrocité , qu’ il avait échappé à la
prévoyance de la lo ij par un forfait répandu,pour ainsi
dire, sur on ne sait quel nombre ou de mois ou de jours ,
commis et renouvelle à tous les instans et se multipliant
parles heures et par les minutes.
Ce qu’avaient controuvé de petites passions, on a fini
par le répéter et par le croire : une prévention s’est
établie , qui a tenu lieu de conviction , qui a résisté à
toutes les preuves, d’autant plus inflexible qu’elle était
plus extraordinaire et plus contraire à toute vraisem
blance.
Enfin Chalus a été condamné à vingt ans de fers
et Claudine Mazuel â la m ort, résultat é t r a n g e d'une
accusation fantastique o ù , en supposant le crim e, ce
�(3 )
que la qualité d’époux y a jo u ta it, est oublié et la peine
est attenuée sur la tete la plus coupable.
Il faudra dérouler les feuilles de la procédure, pour
en manifester les vices j éplucher la déclaration des
jurés, pour en décéler l ’incertitude et l ’insuffisance}
•cçinparer le jugement à la lo i, pour en reconnaître
la déplorable inconsistance ; mais il importe de etter
d’abord sur l’accusation mêmejun’eoup-d’œil explorateur.
Telle est la nature de l ’aftaire, que la demande en
cassation ne peut être séparée des élémens qui en com
posent le fond , sans perdre beaucoup de son évidence
et de son energie.
Jeanne-Marie Authier femme Chai us , avait abusé
de la v i e , commis des excès et altéré son tempérainment.
Quand elle fit, le 3 ventôse an 6 , en faveur de son
m a r i, la disposition qui assurait à. ce dernier la jouis
sance de tous ses biens , déjà elle voyait le terme fatal
s’approcher pour elle.
Dès-lors elle sentait les atteintes de la maladie qui
devait la conduire au tombeau : bientôt à la perte des
forces du corps,s’ajouta celle des facultés intellectuelles,
et on la vit décheoir dans une effrayante progression.
On tint ce discours d’elle , à Martin-Gilbert Gomot
A 2
L e fo n d de
l'a ffa ir e .
�(4 )
l ’un des témoins dont les déclarations ont été écrites ,
que « c ’était une femme perdue, au physique comme
»-au m oral, et au moral comme au physique ».
Chalus appeîla en l ’an 8 , auprès de lu i, Claudine
Mazuel dont la famille n ’était pas étrangère à la sienne:
il la chargea, dans son m énage, des soins dont la maî
tresse de la maison n ’était plus capable. Les domestiques
s’etaient accoutumés à l’indépendance et au désordre
ils supportèrent impatiemment la supériorité de la nou
velle ven u e, et plus impatiemment la réforme.
Ils furent ses détracteurs quand elle régla la dépense
et mit fin au dégât ; e t , quand il fallut venir à les
congédier, ils devinrent ses ennemis déclarés.
Cependant l ’état de la malade allait empirant, avec ,
une affligeante rapidité.
»Son appétit dépravé repoussa les alimens auxquels
elle avait été a c c o u t u m é e . Elle ne prit que du pain ,
des racines, du la it , du fromage j elle mangea de la
terre et du plâtre j elle soutint opiniâtrément de
longues abstinences.
Son estomac cessa de faire ses fonctions. Les alimens
ne firent que passer dans un corps où tout ressort était
détendu , et p a r-to u t elle porta avec elle l ’ordure et
l ’infection.
Elle fut sujette à des défaillances dont les paroxisrnes
se rapprochèrent, et durant lesquelles sa bouche rendit
une sale écume.
�Plus rapidement encore elle perdit la mémoire et
1 in
telligence.
N e reconnaissant personne , elle allait disant piteuse
ment , j e n ’ a i rien , j e n ’ a i rien , à tous ceux qui se
présentaient à elle., et savait à peine proférer d’autres
mots.
Errant dans la cuisine, elle jettait des immondices
dans les vases où la nourriture de la maison était pré
parée.
U ne manie s’ empara d’elle, plus dangereuse pour ellemême et pour les autres 5 elle joua avec le feu^ empoi
gna ds-s tisons ardens, les porta sur ses habillemens et
dans ses poclies, et fit craindre l ’embràsement de la
maison.
'
Par respect pour son infortune, on supporta long-tems
le§ inconvéniens de sa situation et le spectacle rebutant
de sa maladie.
Il fallut bien se résoudre à la traiter d’ une autre ma
nière : on choisit une chambre vaste, bien placée , où
l ’air se renouvellait facilement , et on l’y déposa.
E lle cessa d’être libre et non d’être soignée. U ne jeune
servante fut chargée de ppurvoir à sa nourriture , et C lau
dine M azuel, de veiller à ce qu’elle fût tenue aussi pro
prement qu’il était possible.
Insen sible à
cette espèce de captivité , parce qu’elle
n’avait plus la faculté ni de sentir ni de comparer , elle
11e fit entendre aucune p l a i n t e .
/
�(6 )
On lui porta du p a in , du vin ? du lait et du fromage :
elle mangea comme auparavant, ne digéra pas mieux f
ne fut pas moins prompte à répandre l ’ordure sur elle et
autour d’elle»
Si l’on alluma du feu pour la réchauffer quand il fai
sait froid, on fut obligé de ne pas la quitter; car en se
brûlant elle-m êm e, elle aurait incendié la maison.
Elle était entrée dans cette chambre avec une lueur de
vie qui s’éteignit un mois après.
On peut dire q u e , long-tems imprudente et puis victiine,inalade de l’esprit e( du corps,privée d ’intelligence
' et de force, nulle pour elle*mêine et pénible pour les autres^et perdant , chaque jour , un lambeau de ce qui lui
restait d’existence j elle acheva enfin de mourir le 27
prairial an 9.
E l l e f ut sai si e p a r s a d e r n i è r e d é f a i l l a n c e ; e l l e v o m i t
sa dernière éc u m e.
Il
est reconnu, il a été déclaré par tous les témoins
qui ont é.é entendus, que Chalus n’avait cessé de s’oc
cuper affectueusement du sort de sa fem me, de lui
donner personnellement des soins et de la recomman
der à ceux de ses domestiques.
On voit .»ussi qu’ une jeune servante était chargée de
portera la captive ses alimens, et l ’on ne dit pas qu’elle
ail manqué à ce devoir.
\
�‘
7 ^
Aucun soin ne peut prévenir un assassinat ou
empoisonnement ; un instant y suffit : la fairn , au
contraire, est un moyen lent dont le moindre secours
interrompt l’action et prévient l’effet et, s*il est vrai ,
comme les témoins l ’ont dit f que Chalus ait souvent
porté à sa femme le pain , le fromage et le vin de son
déjeûner ^ oxi peut hardiment nier que la faim ait été
la cause de sa mort.
E t il est Lien plus certain que la mort a eu une
autre cfiuse que la faim } si la jeune servante a , même
avec n égligence, accompli son service.
Pourquoi donc Chalus et Claudine Mazuel avaientils donné à l ’acté passé entre eux , le 8 g erm in al, la
forme d’ un contrat de mariage? Ce fait extrêmement
singulier ne peut être expliqué que par la simplicité
d';s deux parties et l ’ignorance grossière du notaire.
Si un projet de mariage avait été lié à celui d ’ un
meurtre , il est évident que celui-là aurait été différé.
Outre qu’ il n’y aurait eu aucnn intérêt de commencer
par la , quelque stupide que l ’on fût , il ¿toit impossi
ble de ne pas voir que, dans cette inutile précipitation >
on fournirait une preuve du crime concerté.
Ce ridicule contrat de mariage est presque un moven
justificatif j il est incompatible
l ’homicide.
avec le complot de
Claudine Mazuel avait passé un an dans la maison
�(
8
)
de Clialus et parmi les peines et les dégoûts : elle n ’v
était pas salariée , et pourtant il était naturel qu’ une
récompense lui fût assurée.
U n e donation que Chalus avait faite à' son frère le
gênait 5 ce fut sa pensée que la forme du contrat de
mariage levait cet obstacle et l ’on prit cette forme.
C ’est ainsi que les parties ont uniformément rendu raison
de ce qu’elles avaient fait.
C ’était une bévue sans doute ; mais elle pouvdit fort
bien entrer dans la tête d ’un ci-devant gentilhomme de
campague et d’une paysanne de vingt-cinq ans.
Il n ’est pas clair qu’elle ne soit pas entrée dans celle
du Notaire qui fit l'acte j et, après tout, elle n ’était pas
plus grossière que celle de constater le dessein d’ un se
cond m ariage,lorsqu’on aurait complotté la dissolution
du premier par un meurtre.
Quand le Notaire a été interrogé
l ’ébruitement de
l ’affaire et ce qu’il en avait entendu dire l ’avaient aver
ti de sa lourde sottise , et il a dit q u’il avait cru les
parties également libres j mais avouant que Chalus était
connu de l u i , comment ne savait-il pas qu’il avait une
femme ? Mais avouant qu’ il ne connaissait pas Claudine
Mazuel , comment prêtait-il son ministère à un acte de
cette importance,, sans prendre aucune information
Il y a une bon-homrnic qui est presque la caution
dç la vérité , dans ce qu’en a déclaré Chalus à son pre
mier
�mier interrogatoire , » qu’il avait dit à cette dernière
» (Claudine M azu el) qu’il voulait lui reconnaître quel» que chose pour la, dédommager de ses peines ; m us
» qu’il ne savait comment s’y prendre , ayant donné a
» son frere tous les biens dont il mourrait vôtu et saisi j
» qu’ alors ladite Mazuel lui dit qu’il pourrait lui recon» naître quelque chose par contrat de mariage...... Qu’ il
» observa.au Notaire que son épouse n’ était pas morte j
» mais qu’elle était dans line si déplorable situation y
» qu’ elle pouvait être considérée comme telle ; qu’à
» cette observation le Notaire rêva un in s ta n t } et puis
» dit au répondant que cela n’ y faisait rien. «
'V o ilà l’incident tout entier de ce contrat de maringe.
I l fut écrit le 8 germinal, et ce fut le 28 floréal que
Clialus fit conduire sa femme dans la chambre où l’on
fut enfin forcé de la retenir et où elle vécut encore un
mois.
Il est cruel d’avoir à faire des calculs de cette nature j
il faut pourtant le remarquer ; dans le plan d’ un crim e,
une telle convention de mariage aurait été trop p r é c o c e ,
ou bien la catastrophe t r op differée.
On avait t e n u d e s d i s c o u r s d ’ a p r è s les domestiques
mécontentés et congédias ; quand,Chalus laissant sa fem
me
errante
dans sa mai on , elle vivait de pommes de
terre , de pain et de fromage 5 quand, retenue dans une
chambre , elle n’y avait p a s d ’auties alimens; quand on
B
�( 10 )
l ’avait entendu répéter , presque pour toute conversa
tion , ces mots qui entraient dans sa manie , j e n ’ a i r ie n ,
j e n ’ a i rien ; ces discours se renouvellerent quand la ma
lade eut fermé les yeux : ce fut un torrent que rien ne con
tint et qui entraîna la crédulité publique , toujours d’au
tant plus facile que les choses le sont moins.
. Tout le monde savait que cette femme infortunée avait
été accablée de symptômes graves et croissans journel
lement en fréquence et en intensité j il était naturel de
voir , dans ce déclin gradu el, la cause de son trépas j la
multitude aima mieux , l'expliquant par un crime f ima
giner ce qui était affreux, mais extraordinaire , que de
rechercher ce qui était v r a i , mais simple.
U n e lettre du maire de Pontaumur informa le juge de
paix de cette mort et de la rumeur dont elle était le sujet,
et le juge de paix assisté de son greffier qui joua depuis
dans cette affaire un autre rôle et de ses assesseurs qui
n'en devaient jouer aucun , alla reconnaître le cadavre
le 28 prairial lendemain de la mort.
Deux chirurgiens procèdent à Couverture et à la véri
fication et ne décident rien. Réunis le 29 avec trois au- 1
très , ils remarquent clans l'œSophage f l’estomac et le
duodœnum, quelques signes d'inflammation ; dans l'es
tomac en particulier l’absence de la tunique veloutée;
dans l e s intestins sept à huit corps de matière argilleusc
�C 1* )
et pierreuse j à cela près v a cu ité totale (c'est leur ex
pression) et , d’ailleurs , tout dans son état naturel.
C
rs
corps argilleuxet pierreux
trouvés
dans les intes
tins , prouvaient cette inanie qu’elle avait eue , de man
ger de la terre et du plâtre.
Cette va cu ité totale pouvait être lV ffet du relâche
ment extrême dont sa continuelle malpropreté avait été
l'indice. Les chirurgiens déposeront depuis avoir apperçu quelques restes de fromage et de beurre, et l'un
d'eux avoir vu dans le rectum, un morceau entier de fro
mage et la v a cu ité totale était un symptôme d'autant
plus équivoque.
*
Cette inflammation des viscères , effet commun de
plusieurs causes , ne dénotait rien par elle-même.
Enfin cette absence de la tunique veloutée, imputée
par eux à la matière argilleuse et pierreuse trouvée dans
les intestins, ainsi expliquée , prouvait seulement que
la défunte avait avalé cette même matière, dont la pré
sence le prouvait encore mieux.
Dans tout cela, la v a cu ité exceptée, qui n’était pas
totale , puisque l’on avait reconnu quelques restes de
fromage et de beurre, i! n’ y avait rien qui dût faire
soupçonner l’action de la faim.
A u moins les chirurgiens n'expliquèrent pas comment
les auties signes par eux énumérés,, concouraient à en
produire le soupçon.
B a
�( 12 )
Et pourtant ils ôtaient appelés , non pas pour d o n n e r
une décision dogmatique sur les causes de la mort ; mais
pour déduire les raisoiis de croire à certaine cause plu
tôt qu’à certaine autre.
En lisant la description imparfaite qui constitue tout
leur rapport, on n’apprend rien. Ils n’allèguent ni prin
cipes ni expérience , la rumeur est leur guide ; ils o n t
entendu crier dans le pays , que l ’on a fait mourir de
faim la femme de Chalus, et ils déclarent que la femme
de Chalus est morte de faim.
Pourquoi n ’ont-ils pris aucune information ? Ils au
raient appris qu’ une longue maladie avait tourmenté la
malheureuse femme dont ils visitaient les restes j qu’elle
avait perdu la santé dans l ’inconduite et dans l ’intempé- *
rance j qu’elle avait été, d ’esprit et de corps, la proie
d ’ une décrépitude prématurée j et tout cela les eût éclai"
rés sur les phénomènes observés par eux.
I ls
auraient
syncopes , elle
appris q u e , sujelte depuis long-tems à des
vomissait dans leurs accès, de l ’écume,
et que sa mort s’était confondue avec un accident du
même genre, signalé par les mêmes symptômes} et peutêtre eussent-ils été amenés à confesser un appauvrisse
ment su ccessf, annonçant ses progrès par cres pâmoi
sons subites et a yan t, dans la dernière, son période
extrême.
G’est ainsi qu’ un rapport de chirurgien
aurait été
�( i3 ")
utile à la manifestation de la vérité ; mais quand ceux
qui ont été appelés, font une opération purement ma
nuelle , ne discutent rien et prononcent d’après un
bruit populaire, il n’y a point de rapport, il n’y a que
le vain et insignifiant récit d’ une inutile décTiiqueture.
On fit comparaître des témoins, tant alors que
depuis, devant le juge de paix, devant le directeur du
jury et devant le tribunal criminel : leurs déclarations
peuvent être rangées dans trois classes.
Il y a d’abord celles des domestiques et habitués de
la maison que le gouvernement de Claudine Mazuel avait mécontentés et qui furent expulsés par elle ou
d’après ses conseils ; ils la chargent de tout leur pou
vo ir, et pourtant tout se réduit aux reproches d’avoir
manqué aux égards et au respect qu’ elle devait à la
défunte, d’avoir engagé Chalus à l ’exclure de sa table
et ensuite à la renfermer dans une chambre , d’avoir
repoussé les personnes qui voulaient la visiter; e t , sur
le refus des alimens , rien que ce discours habituel de la
malade, j e n?ai rien , j e n’ a i rien , et la vague alléga
tion de la mort causée par la faim.
Ensuite il y a les déclarations des personnes qui avaient
donné plus ou moins de confiance à la censure p o p u
laire dont Claudine M azuel avait été l’objet soit a v an t,
soit après la mort de la femme C halus. Celles-ci prouvent
l ’existence d’ une rum eur dont la source était probable-
�( i4 )
menl dans les détractions des domestiques expulsés j
c’est la rumeur elle-même ) mais seulement la rumeur
juridiquement constatée.
On distingue enfin la déclaration des témoins qui, ne
cédant à aucune passion et connoissant le bruit popu
laire sans être entraînés , ont articulé des faits précis, et
affirmé ce qu’ils avaient vu.
C ’est dans cette dernière espèce de déclarations q u e ,
remontant à quelques années et descendant jusqu’au
jour du trépas de la femme Chalus , on trouve le tableau
de sa vie et les causes qui en précipitèrent la fin.
On y apprend comment cette femme éprouva et détrui
sit son tempérament, devint insensée et malade et, de
chute en chûte^ arriva au point extrême de la démence et
do la caducité et aux symptômes déplorables de ce der
nier mois durant lequel, il fut nécessaire de la confiner
dans une chambre.
encore l ’histoire des soins dont elle fut l ’ob
jet. On la voit recommandée par son m ari, mangeant
L à est
à sa table tant que l ’infeçtion qu’elle porte après elle
est supportable,
patiemment épiée lorsqu’elle a la
double manie de couvrir d’immondices la nourriture
des autres, et elle-même de feu , conduite dans une
chambre quand sa liberté est devenue trop rebutante
et t r o p dangereuse, pourvue^ quant aux aliniens, par
une domestique, et, quant à l’habillement, par une autre,
�( iS )
et enfin mourant parce qu’elle n’ était pas immortelle,
non surprenante en ce qu’elle expire alors , mais en ce
qu’elle a traîné si long-tems une si misérable existence.
Ces détails sont l ’extrait fidèle de tous les témoi
gnages qui ont été écrits.
Quand on a tout lu avec attention et avec c a lm e , on
se demande si, destinée à mourir de faim , la femme
Clialus aurait été placée dans une cliambre à deux fe
n êtres, d’où ses plaintes pouvaient se faire entendre audeliors et qui auraient ouvert une issue à. son dé
sespoir.
On se demande si Claudine M a z u e l, ayant résolu cet
homicide barbare , aurait permis qu’ une autre qu’ elle
fût chargée de porter à la prisonnière le pain f le vin et le
fromage dont elle était nourrie.
On se demande si Clialus , complice d’ un affreux com
plot, n’aurait pas pris d’autres mesures pour se dérober à
tous les regards ou s i , attentif à prescrire les soins né
cessaires a sa femme, il n’aurait pas été informé de
1 inexécution de ses ordres.
On se demande si les alimens apportés à la malade
par son mari et par la jeune fille qui en avait l’e m p lo i,
pouvaient lui être enlevés assez promptement par d’au
tres mains et si la pins mince quantité
suffi pour l’empêcher'de mourir de faim.
n’aurait pas
�( 16 )
On se demande s’il se peut que la mort de la femme
Clialus ait été tramée, préparée et causée par ce pro
cédé lent de la faim , sans que non-seulement Chalus
et Claudine Mazuel aient été d ’accord j niais encore
que les deux autres filles qui étaient au service du pre
mier j mais encore que le domestique, ou les domestiques
mâles j mais encore que toutes les personnes qui fré
quentaient la maison aient été complices du crime sans
cesse présent, sans cesse commis , qui n ’aurait pas excité les cris de leur indignation.
O n se demande enfin si le terme naturel d’ une lan
gueur prolongée n’est pas la mort,' et s’il est permis
d ’attribuer à une cause extraordinaire , ce qui a dans
soi-même, son explication.
Toutes ces considérations ont été omises dans la
poursuite dirigée contre Chalus et contre Claudine M a
zuel , et dans le jugement qui les a condamnés : c’est
justement à ce qui était extraordinaire, difficile,impos
sible à co n c e v o ir, qu’ une inconcevable persuasion s’est
aheurtée.
L’accusation.
On form a, le 7 thermidor, la liste d’ un juré spé
cial d’accusation , et Bois , greffier de la justice de paix
de Pontaumur , compris dans cette liste , ne s’excusa
pas : on ne vit pas qu’après avoir pris part , comme
officier,, aux premiers actes de l’instruction , il ne pou
vait
_
�(
17
)
^
-
vait intervenir comme juré dan s l ’exament de 1 ac
cusation.
En lisant l ’acte d’ accusation , on voit la mort préten
due violente de la femme Cholus,en être le m otif uni
que et, depuis, quand la loi le défendait , on ajouta un
prétendu fait de bigamie et une prétendue atteinte a
l ’honnêteté publique.
Bientôt on prépare le jugement défin itif: un premier
tableau de jurés est annullé ; m ais, dans le tableau
nouveau, se trouvent les noms de deux hommes qui
n ’avaient été compris ni dans, la liste des jurés spé
ciaux, ni même dans la liste commune des jurés.
On remplace deux jurés actifs par deux hommes sans
caractère , et l’on remplace un juré adjoint par un
li'Mniue inscrit sur la liste des jurés spéciaux; comme
si la primauté n’avait pas été due au tableau des jurés
actifs.
Ensuite a une première liste de témoins , une se
conde est substituée: des témoins sont retranchés ; un
témoin est ajouté.
Arrive le moment critique où le jury doit s’expli
quer ; il est interrogé sur deux chefs , et il n 'y avait
qu’ un chef d’accusation.
v
U n e tentative de bigamie est niée, ce qui a rapport La .léchn«™
à cet acte réaiunurutoire que Chalus avait fujt Sm
(î" J,lr«
«le-jugement,
c
�( i8 )
la forme d’ un contrat demariage • mais les<jurés affir- .
ment qu’il y a eu action déslionnête et attentat publi
quement fait aux bonnes mœurs.
C ’est ensuite sur un plan et dans des termes singuliers
qu’est établie la déclaration du ju r y , relative à la mort
de la femme Clialus.
Il est constant
9 fait-on dire aux jurés , que cette
femme fut quelquefois maltraitée j
Qu’elle fut enfermée dans une chambre j
Que cette mesure ne fut pas commandée par la né
cessité j
Que Chalus et Marguerite Mazuel ont pris part à
cette mesure j
Que la femme ,Chalus est décédée peu de tems après
dans cette chambre j
«
Q u’ elle n’ est pas décédée de mort naturelle j
Que cette mort est due à une privation d ’ alim ens j
Que cette privation ne fut pas volontaire j
Q u ’elle fut l ’ effe t de manoeuvres étrangères à la
fe m m e Chalus ;
Que François Chalus est convaincu d'avoir concouru
à cette p rivation d 'a lim en s ;
Qu’il y a concouru sciem m ent ;
�0 9 )
Qu'il n 'y a pas concouru avec préméditation j
Que Claudine Mazuel est convaincue d 'avoir concouiu
à cette privation (Valimens ;
Qu’elle y a concouru sciem m ent ;
Qu'elle y a concouru avec prém éditation.
Enfin le tribunal prononce : Clialus est condamné à
la peine de vingt années de fers pour avoir concouru,
sciem m ent et sans prém éditation à la privation d’alimens à laquelle est due la inort de sa fem m e, en vertu
de l’art. 8. sect. 1. tit. 2. part. 2. du code p é n a l, suivant
lequel » l'homicide commis sans préméditation est puni
» ainsi. «
Et Claudine Mazuel est condamnée à la peine de mort
pour avoir concouru à cette privation d'alimens scient*
nient et avec prém éditation , en vertu de l'art. 1 1 por
tant que » l’ homicide commis avec préméditation sera
» qualifie d’assassinat et puni de mort «
Quelle obscurité et quelle indétermination là où la
loi desire tant de précision et tant de clarté !
U ne femme q u e l q u e f o i s maltraitée , enfermée dans
une chambre, par une mesure sans nécessité, à laquelle
on a pris p a r t , décédée dans cette chambre d’ une mort
non naturelle due h une privation d ’alimens non vo
lontaire , effet de manœuvres ; des accusés qui ont co n
couru à cette privation d’alimens , qui y ont concouru
sciemment l'un avec, l'autre sans préméditation !
C 2
I
�( 20 )
Il n 'y a pas un m o t dans cet entortillement qui ne soit
la matière d'un doute et d'un commentaire. Q u ’ e s t - c e
que prendre p a r t à une mesure ? Comment la m o r t
est-elle due à une privation d'aliinens ? Q u ’ e n t e n d - o n
par ces manœuvres dont la privation d’alimens a e t e
l ’effet? Que signifie le mot cojicourir , appliqué à une
privation d’alimens? D e quelle manière Chai us et C lau
dine Mazuel y ont-ils concouru , etc. etc. etc. ?
Et c’est ensuite de cette déclaration vague , quand il
reste tant de sujets de d o u te, et d’après des i n c u l p a
tions qui ne sont pas définies , qu’ un Tribunal r é s o u t
une condamnation à vingt ans de fers et une condam
nation à la mort !
Après avoir tracé ce tableau des faits , de l'instruc
tion , de la p r o c é d u r e , de l ’examen et du j n g e m e n t ,
on est p r e s q u e tenté de s’arrêter là e t, sans discussion ?
de livrer cet incohérent assemblage à la justice et à la
raison des Magistrats qui doivent juger la demande en
cassation.
Pour faire annuller et cette procédure et ce
ju gem en t,
fout-il autre chose que les exposer à nud dans
le u r
pro
pre défectuosité ?
L e s 011 vet lurps
(Je cassation.
C ’est en les renfermant dans le cercle d’ une démons-
�( 21 )
tration abrégée, que l ’ on va indiquer les ouvertures qui
doivent assurer le succès de la demande en cassation.
et
Il faut distinguer la procédure >la déclaration du Jury
le j u g e m e n t e t les vices qui leur s o n t r e s p e c t i v e m e n t
propres.
D e nombreux reproches pourraient être adressés à la La procédure,
procédure ; on ne dira pas tout.
Il y a sur les procès-verbaux du 28 et du 29 prairial
qui en sont la pièce fondamentale , cette premiere re
marque à faire , que des officiers sans compétence y ont
concouru. L e juge-de-paix à qui la loi donnait isolément
le titre d’officier de police ( loi de brumaire an 4 , art.
21 et s u iv .— loi du 7 pluviôse an 9 , art. 4 . ) , le juge-depaix s’ y fit assister de ses assesseurs, adjoints nécessaires
de ses fonctions civiles, étrangers à ses fonctions de po
lice ; et leur présence hétérogène priva ces actes de tout
caractère légal.
a dit q u e ces p r o c è s - v e r b a u x f u r e n t la p i è c e fon
damentale de la p r o c é d u r e . La l o i ne v e u t - e l l e p a s en
effet que » lorsqu’il a été commis un délit dont l’existence
» peut être constatée par un procès-verbal } le juge-deOn
» paix se transporte sur les lieux pour y décrire en détail
» le corps du délit ? «
Telle était la nature du fait , qu’il exigeait le trans\
. •
�'.( aa )
'
port et le procès-verbal ; et si l’acte est n u l, il ne reste
rien de la poursuite dont il fut le principe.
Si les procès-verbaux sont le fondement de la procé
dure, la déclaration affirmative du jury d ’accusation
est la base de toute poursuite déterminée devant le tri
bunal criminel.
Celle que l’on fit donner contre Clialus et contre C lau
dine M azu el, fut rendue défectueuse par la participa
tio n , en qualité de ju r é , du greffier de la justice de
paix de Pontaumur.
Il avait écrit et dû écrire les procès-verbaux du 28 et
du 29 prairial : le premier de ces actes faisait mention de
sa présence et de sa signature j il était terminé par ceg
mots , « et avons signé avec notre secrétaire-greffier. »
O n trouve établie, dans la loi, une incompatibilité pré
cise entre le titre de juge et les fonctions de juré ( loi de
brumaire, art. 484)5 et elle garde le silence à l ’égard du
titre de greffier.
Il s’ensuit qu’absolum ent, un greffier n ’est pas inca
pable j mais il est contre la nature des choses que dans la
même affaire il soit juré, étant ou ayant été greffier. Les
fonctions publiques ont été départies séparément et
une telle confusion n’y peut être reçue.
�(
*3 )
On voit que les accusés furent présentes deux fois au
débat» U ne liste de témoins leur avait été signifiée le
18 fructidor. On leur en signifia une nouvelle le 9 ven
démiaire , où les mêmes témoins ne furent pas tous com
pris , et ensuite on produit au débat un témoin dont le
nom n’ y avait pas été. Contravention à. laloidebrum airej
art. 346.
,
Quand il s’agit de former le tableau du jury de ju
gement, on y inscrit en remplacement de deux jurés qui
t
manquent, deux hommes qui n’ étaient n i sur la liste
spéciale , ni sur la liste com m une, et l’on remplace un
juré adjoint par un homme appartenant à la liste. Con
travention à l’art. 5 i 8 d e là loi de brumaire an 4 , e$ à
la loi du 6 germinal an 8, art. 4 et 5.
V oilà ce qui regarde la procédure.
Il faut passer maintenant à la déclaration du juré
de jugement.
On remarque d’ abord que l’acte d’accusation avait
eu pour objet un seul d élit, celui que l’on supposait
avoir eu pour eifet la mort de la femme Clialus , et il
fallait s’arrêter là; car, selon la lo i, les jurés ne peu
vent prononcer sur d’autres délits que ceux qui sont
portés dans l’acte d’accusation. ( L o i de brumaire
046.)
\
art
Déclaration
du J u ry .
�( H )
On se fait une autre règle : les jurés sont interro
gés, et s’expliquent en premier lieu sur le fuit de ce
ridicule contrat que le notaire Chevalier avait écrit
entre elles.
Dirait-on que la loi ne prononce pas la nullité de la
déclaration où les bornes de l’acte d’accusation sont
ainsi franchies? La nullité est de droit quand on a fait ce
qui était interdit expressément.
Dirait-on que cette partie de la déclaration n’a donné
lieu à l’application d’aucune peine, et qu’il n’y a point
d ’intérêt de s’en plaindre? Il y a toujours un intérêt de
demander que des actes non conformes à la loi ne soient
pas entretenus, et puis n ’y a-t-il pas lieu de soupçonner
que si l’attention des jurés n ’avait pas été partagée, ils
auraient mieux examiné le ch e f d’accusation qui devait
véritablement les occuper ?
,
Relativement à ce ch e f d’accusation, toutes les règles
ont été blessées dans la déclaration des jurés : tout ce
q u ’ il
y fallait essentiellement faire entrer y a été om is,
tout ce qu’il importait d ’éviter y a été employé.
Où est,dans l’ordre tracé pour cette déclaration par le
tribunal, la première question tendant essentielIement
« à savoir si le fait qui forme l’objet de l’accusation
» est constant? (L o i de brumaire , art. 374 ) ”
Pour qu’il y eût un d élit, il fallait, selon le thème de
l ’accusation *
�( 25 )
l’accusation, que la mort cle la femme Chalus fût arri
vée par l ’effet de la faim , des alimens lui étant refu.
ses , et des obstacles étant rnis à ce qu’ elle en reçût.
G’ est à cette définition du délit qee la premiere ques
tion devait répondre.
Que la femme Clialus eÆt été quelquefois maltraitéej
qu’elle eût été enfermée dans une chambre ; qu’ elle fût
morte dans cette chambre ; que sa mort eût été l’effet
d’ une privation d ’ a lin ien s; tout cela pouvait ê tr e ,
sans qu’il y eût un délit, et n ’était par conséquent pas
le fait formant l’oî jet de l ’accusation.
Il est fiit mention ensuite de manœuvres étrangè
res à la Ja n in e ( halus , dont cette privation d }alim ens
fut l’effet ; et c’est dans ces manœuvres que le délit a
dû consister , et que doit être le f a i t qui J'orine l ’ objet
de Vaccusation ; mais quelle idée les jurés ont-ils atta
chée à ces expressions?
Proprement le mot manœuvre signifie l ’attirail d’ un
vaisseau ou l’ action de son équipage et encore le m ou
vement d’ une armée : on l’emploie, au figuré, pour
exprimer des procédés et des moyens appliqués à de
certains desseins ou la conduite qui a été tenue pour
arriver à un certain but j et alors il est vague et par
conséquent équivoque P abstrait
et
par conséquent
obscur.
D
�( *6 )
Il ne convient à des jurés ni de parler au figuré ni de
faire des déclarations abstruses ou énigmatiques. Les
questions qui leur sont faites doivent, comme leurs ré
ponses , se réduire aux termes les plus simples , les plus
facilement intelligibles. Si leur pensée a besoin de tra
vail pour comprendre ce qu’ils ont à vérifier, s’il faut
ensuite que l’on étudie ce qu’ils ont déclaré, ce ne sont
plus des hommes d’entre le peuple appelés pour recevoir
une impression et la manifester $ ce sont des juges char
gés de discuter et les arguties prennent la place de la
conviction«
Quelle est la grande attention de la loi lorsqu’elle règle
la marche de l ’examen par jurés? N ’est-ce pas de faire
en sorte que les résultats soient exempts de toute combi
naison ? Pourquoi distingue-t-elle les questions sur le
f a i t , sur ses auteurs , sur sa m oralité , sur la gravité du
d é lit, sur ses circonstances, sur l’intention qui y fut
apportée, sur les excuses des accusés ( d it art. 3 7 4 ) , si
ce n'est afin que les jurés , à chaque fois qu’on les inter
roge , n ’aient à percevoir qu'un point sim p le, facile à
saisir, et sur lequel il y ait dans l ’affirmation ou la ne
gation , une explication suffisante et pleine ?
!N’est-ce pas encore dans le même objet , que la loi
défend
( art.
les questions
et les déclarations
complexes
3 77 ) ?
Faire consister un délit ou le fait qui fo r m e Vobjet
�( 27 )
d ’ une accusation dans des ‘manœuvres ^c’estne pas fane
aboutir l’examen à ce résultat simple et exempt de corn
lunaison que la loi désire, et contrevenir à ^institution
. des jurés dans son essence. Sur une telle interrogation ,
affirmer ou nier né suffit p a s pour qu’il y ait une expli
cation pleine.
Il reste à Savoir quelles ont été ces manœuvres , quel
rapport elles ont eu avec l ’effet qui a été produit , et
comment elles ontcontracté la nature du délit.
On voit b ie n , pour terminer la discussion de ce pre
mier p o in t, qu’ en énonçant ces manœuvres , dont la
privatiàn d'alim ens fut l’ effet pour là femme Chalus ,
le tribunal a eu la volonté de provoquer, et les jurés
celle de donner une déclaration sur un f a i t f o r m a n t
l’ objet de Vaccusation j mais on eàt forcé en même tems
de reconnaître que cette volonté n’ a pas été accomplie.
Et il- s’ ensuit qu’ il y a eu contravention à. la loi qui
prescrivait une première question, tendant essentiellement a savoir si le fait qui formait l’objet de l ’ accusatioilj était constant ou non.
Selon la méthode de la l o i , la seconde question et la
seconde déclaration devaient avoir lieu sur la conviction
des accusés : avaient-ils commis le délit ou y avaient-ils
coopéré ? voilà ce qu’il y avait à éclaircir. Et l’on a
�\
( *8 ) •
■
continué d’être hérissé d’ambiguité et enveloppé de
ténèbres.
'
Après dénonciation de cette espèce de fait principal
que la femme Chalus fut enfermée dans une c h a m b r e ,
l ’ un» et l’autre accusé est déclaré convaincu d’avoir
p r is p a r t à cette mesure.
Après l ’énonciation de l'autre fait principal des
manœuvres étrangères à la fem m e Chalus d o n t l ’ e f f e t
fut la privation cValimens , l ’ un et l ’autre accusé est
encore déclare convaincu d ’ avoir concouru à cette p r ivation d ’ a lim e n s.
P ren d re p a r t ou
co n co u rir ,
c ’est ,
à
quelques
nuances p r è s, la même chose j mais ces mots , em
ployés ab solum en t, expriment encore des abstractions
qui ont besoin d'être déterminées. Il n ’y a rien de pré
cis jusqu’à ce qu’il soit dit comment il a été p ris p a rt
et comment il a été concouru.
I l se peut que,, sans être coupable } l ’on ait p r is p a r t
ou concouru au fait qui constitue le plus grand crim e,
par des procédés éloignés qui viennent accidentelle
ment s’y rattacher.
Celui qui a retenu violemment un v o y a g e u r, afin
que l ’assassin l’atteignît et le frappât ; a p ris p a r t ,
a concouru au fait du d é l i t , et il est coupable : c e l u i
qui a arrêté le voyageur par quelque acte fortuit sc
�( a9 ) .
trouve fatalement avoir pi'is p a r t , avoir concouru au
fait j et il est innocent.
Il y a cela de remarquable que la privation d ’a limens dans laquelle on place la cause de la mort , est
attribuée à des m anœ uvres, et que ce n ’ est pas à ces
manœuvres que les accusés sont déclarés convaincus
d’avoir concouru ; et l’on sait que l’ action la plus in
nocente peut se trouver en concours avec la plus cri
minelle.
A i n s i , la seconde question prescrite par la loi,m an
que comme la première. On ne v o i t , aucun fait cons
tant dont les accusés aient pu être reconnus les auteurs j
mais sur-tout les accusés ne sont déclarés convaincus
d’avoir commis aucune action déterminée , ni d’avoir
coopéré à aucun fait précis , par aucun procédé défini.
I l y a donc encore contravention à la loi d’après la
quelle une seconde question devait être posée , ten
dante a savoir si les accusés étaient convaincus d’avoir
commis le délit ou d’ y avoir coopéré.
V oilà la déclaration du juré d e j u g e m e n t destituée de
ses deux élémens essentiels ; la, loi n’a pas été mieux
accomplie dans les détails.
Il a été reconnu que la femme C h alu s fut enfermée
dans une chambre , et les jurés ont dit ensuite que
�( 3° )
cette mesure ne fut pas commandée par une indispen
s a b l e nécessité. L a défense des accusés avait consi&té à
objecter l’état d’infection et d’imbécillité de la malade
et son habitude dangereuse de jouer avec le feu. Pour
quoi ces représentations n ’ont-elles été la matière d ’au
cunes questions ? L rs jurés n’auraient pu nier ni l’in
fection , ni l ’im bécillité, ni la risquable habitude; e t ,
d ’après ces circonstances reconnues , qui auraient dû
être considérées en premier lieu comme plus favórables
aux accusés ( dit art. 3 7 4 ) , les jurés auraient été
moins positifs sur la nécessité de la mesure.
Ceci appartenait à la moralité du fait et se trouvait
dans la cause et l ’omission fut une contravention à la
loi qui voulait qu’après les questions principales , on
f î t aux jurés celles « qui , sur la moralité du f a i t , ré» sultaient de l’acte d’accusation , de la défense des
» accusés et du débat , en commençant par les plus
» favorables aux accusés, ( d it art. 374. )
D e même sous le rapport du fait prétendu de la p r i
v a tio n d ’a lim e n s, il avait été allégué, pour la défense
des accusés , que la femme Chalus était parvenue à un
tel point d ’appauvrissement, que son estomac recevait
et renvoyait la nourriture sans la digérer ; que souvent,
par caprice ou par dégoût, elle s’était abstenue de man
ger; qu’elle avait cessé de vouloir d’autres alimens que
du p a i n , du l a i t , du fromage et du v i n ; que tout
�(
3i )
cela lui était porté journellement en plus ou moins
grande quantité; que les recommandations de son mari
étaient à cet égard aussi fréquentes qu’affectueuses ;
qu'une domestique avait été particulièrement chargée
de ce soin , et que le mari le remplissait souvent luimême.
Si l’on avait mis les jurés à portée de s’expliquer su®
ces particularités , après les avoir vérifiées dans les élémens du débat, il eût été difficile qu’ils attribuassent
la mort de cette femme à cette privation d’alimens , à
laquelle leur déclaration s’arrêta si absolument.
D e même encore,, les accusés avaient invité les juges
et les jurés à considérer les syncopes dont la femme:
Chalus avait été travaillée à différens intervalles , longtems avant l’époque où elle fut enfermée dans une
chambre i dans lesquelles , parmi d’autres symptômçs
semblables , elle avait vomi de l’écume comme dans la
pâmoison , qui s’était confondue avec sa mort ; et si
les jurés avaient été avertis par une question positive
de l’attention que méritait cette conformité d’attaques
xnultipliees , ils auraient été moins légers A caractériser
cette mort et ses causes.
C ’est parce qu’il n’y a point de délit là où il n’ y a
point d’intention de mal faire , que la loi a exigé
l’examen et la définition de ce qu’elje appelle la mo*
�( 32 )
r a lité du fait. Les jurés doivent être interrogés sur
l ’intention dans laquelle les accusés ont agi : la néces
sité de cette question fut dans l ’esprit de la loi de bru
maire ( dit art. 374 ) ; elle avait été littéralement
établie dans la loi du 14 vendémiaire an 3 .
On ne trouve dans la déclaration donnée contre Cha
lus et contre Claudine Mazuel f aucune explication sur
l ’intention qu’ils apportèrent dans leur conduite à l ’égard
de la femme Chalus.
A la vérité , les jurés ont dit que les accusés avaient
concouru sciem m ent à la privation d’alimens imposée
à cette femme , et même que Claudine Mazuel y avait
concouru avec prém éditation y mais pour avoir su ce
que l ’on faisait et pour l ’avoir prémédité , on n ’a pas
nécessairement eu la pensée qu’on commettait un
crime.
Si jamais une déclaration relative à l ’intention des
accusés dût être désirée, ce fut dans l ’affaire de Chalus
et de Claudine Mazuel. Aucun fait n ’y était articulé
dont la nature ne fût équivoque.
Même en reconnaissant.qu’il n’avait pas été indispensablement nécessaire de renfermer la femme Chalus
dans une chambre , on pouvait découvrir que les accu
sés , croyant à cette nécessité f s’étaient mépris et
n ’avaient été guidés par aucune pensée criminelle.
M êm e en reconnaissant que la privation d ’ alim cns
avait
�( 33 ) }' “
avait causé la m ort, on pouvait saisir, dans les circons
tances , des raisons de cro ire , si les accusés y avaient
concouru, qu’ ils ne s’étaient pas attendu au résultat
d’une privation qu’ on n’affirmait pas avoir été totale.
En un m o t , la loi voulait que l’on posât la question
relative à l’intention, et que les jurés fussent tenus
« d’y prononcer par une déclaration formelle et dis» tincte, et ce à peine de nullité ; » et la contravention
qui ne saurait être plus évidente , ne doit pas être
impunie.
On a vu que les déclarations principales données
par les jurés contre Chalus et contre Claudine Mazuel
ne remplissaient pas l’objet de la l o i , faute d’avoir leur
sens simple et déterminé ; il suit de là qu’ un autre
principe y a été blessé ; celui qui interdit les déclara
tions complexes , et le même reproche doit être fait
aux jurés à l’égard des articles accessoires.
Sont-ce des questions simples que celles-ci, si la me
sure d’ enfermer la femme Chalus fut commandée par
une indispensable nécessité , et si les accusés sont con
vaincus d’avoir pris part à cette mesure? Les jurés ne
sont-ils pas obligés de combiner, relativement à la pre
mière , la position dans laquelle était la malade et ce
qu’il y avait de raisonnable à faire ; et relativem ent à la
seconde , ce que firent les accusés pt ce que leurs proE
�(34)
cédés eurent de rapport avec la résolution d’enfermer
la femme C h alu s, et avec l’accomplissement de.cette
résolution ?
E t les questions si la femme Chalus est décédée de
iliort naturelle, si cette mort est due à une privation
d ’ a lim e n s , si cette privation fut l ’effet de manœuvres
étrangères à la femme Chalus , si les accusés concou
rurent à cette privation cPalimens , n ’offrent-elles pas
chacune en elle-même , plusieurs points à considérer ?
N e faut-il pas , pour répondre à la première , après
avoir conçu l’idée de ce qu’on appelle une mort natu
re lle , se représenter l ’idée contraire et
faire
com
paraison ?
N ’est-on pas obligé , à l ’égard de la seconde, de v é
rifier d’abord s’il y a eu privation d ’ a lim e n s, ensuite
de se rendre raison de la durée qui put rendre cette
privation mortelle , et enfin de voir si tel fut le cas
et si l ’événement ne peut être rapporté à aucune autre
cause ?
Quand on passe à la troisièm e, n ’a-t-on pas besoin
ds définir les m anœ uvres, d ’en rechercher l’existence
dans les faits , et d’établir le point par lequel ces m a
nœuvres se rattachent àf la privation d*alimens dont
il s’agit ?
Enfin , n ’entre-t-il pas dans la nature de la qua
trième, que, pour la résoudre, on ait à se rendre raison
�(3 5 )
en général de ce qui peut constituer le concours de
quelqu’ un à quelque évén e m en t, ensuite d’ un fait qui
ait constitué ce concours et en dernier terme du rap
port qui lie le fait à l’événement?
C ’est dans l’article 377 de la loi de brumaire qu’ est
cette disposition formelle , qu’ il ne peut être posé aucune
question com plexe, et il est bien clair qu’on ne s’y est
pas conformé dans la déclaration prise et xdonnée
contre Contre Chalus et contre Claudine Mozuel.
On avait annoncé que cette déclaration était contraire
aux règles dont L’observation y était ordonnée j mainte
nant ce reproche est démontré.
Reste le jugement.
Le jugement.
Qu’est-ce qu’ un jugement en matière criminelle? C ’est
l’acte par lequel le tribunal, après avoir comparé au fait
qui a été déclaré, les dispositions de la lo i, applique le
précepte qui y co n vien t, et en ordonne l ’exécution.
C est pour préparer la comparaison et sa conséquence,
que les jurés ont dû déclarer le fait qui a été rendu cons
tant, la conviction q u ia été,acquise contre les accusés
et les circonstances qui déterminent la nature du délit j
ensuite le juge n’ est que l’instrument de la lo i, dont il
prononce les paroles sur l'affaire et sur les accusés.
Et l’application du précepte de la loi qui convient au
E 2
�(3
6
)
cas ainsi défini, est si bien l ’objet unique du jugement
et la seule chose que les juges aient à faire, q u e , si le pré
cepte a été mal choisi dans la loi et ne se trouve pas ré
pondre au délit f il y a ouverture de cassation.
Il y a ouverture de cassation \ dit la loi'de brum aire,
i° . lorsqu’il y a eu fausse application des lois pénales
(art. 456 ).
,
Pour apprécier le jugement rendu contre Chalus et
contre Claudine Mazuel , il faut faire la comparaison
dont il dût être le résultat.
—
Ce n ’est ni de la chambre dans laquelle la femme
Chalus fut enferm ée, ni de cette mesure de l ’enfermer,
ni de la part que les accusés y avaient prise , que la
raison de punir a été tirée.
D u reste, quel est le fait constaté et quelle est la con
viction définie? La femme Chalus est décédée non de
m ort naturelle , mais d’une mort due à une privation
d ’ alim ent qui ne f u t p a s volontaire de la p a rt de la
fe m m e C h a lu s , qui f u t au contraire V effet de m a
nœ uvres étrangères à e lle , et les accusés ont été con
v a i n c u s d ’ a v o ir concouru à cette p riv a tio n d ’ a lim en sy
sciem m en t, et l ’un des deux a v e c prém éditation.
Quelles ont été les dispositions pénales que le tribunal
a regardées comme répondant à ce fait ? Voici celles
qu’il a .transcrites et appliquées.
�( 37 )
Il est dit dans la loi que « l’homicide commis vo» lontairement avec quelques armes , instrumens et
» par quelques moyens que ce soit , sera qualifié et
» puni selon le caractère e t les circonstances du crime. »
(Code pénal,, part. 2 , tit. 2, sect. 1 , art. 7 . )
Que « commis sans préméditation il sera qualifié
» meurtre, et puni de la peine de vingt années de fers,
» (art. 8 .) »
Que « commis avec préméditation il
sera qualifié
» assassinat, et puni de mort, (art. 1 1 .) »
Trouvait-on dans la déclaration des jurés le fait
d’ un hom icide commis volontairem ent avec quelque-S
armes , instrumens et p a r quelque moyen que ce f û t ,
sans prém éditation par l’ un des accusés, et avec p ré
m éditation par l’autre? Alors le tribunal criminel a bien
comparé et bien ju g é , puisqu’il a condamné l’ un des
accusés à vingt ans de fers, (art. 8 , ) et l’autre à la
mort, (art. 11 ) j mais dans le cas contraire il a mal
comparé et mal jugé.
Il y a hom icide lorsqu'une personne a été tuée par une
ou plusieurs autres en employant des a r m e s , des ins
trumens ou d’autres moyens , et cela suppose une ac
tion sans laquelle par conséquent le fait de l ’homicide
ne peut être affirmé.
U n e privation d*alim ens avait été la cause du tré
pas de la femme Chalus, Il n’ y a là point d’action , et par
�(
38 )
dans le sens de la lo i, point d’hom icide.
Les jurisconsultes disent, en matière civile, pour rendre
odieuse la personne qui refuse les alimens qu’elle doit
à une autre, que celle-là semble tuer celle-ci, necare
'videtur; niais en matière criminelle ce n’est pas d’après
ce qu’ un accusé est censé avoir f a i t , c’est sur ce qu’il
a fait réellement qu’on le condamne.
conséquent,
Il s’ensuit de l’adage des jurisconsultes que la per
sonne à qui des alimens sont d u s , a une action relative j
que cette action est urgente, provisoire et favorable;
mais la personne qui la doit est condamnée à la déli—
v ia n c e , et non pas aux fers ou à la mort.
Cette action civile en délivrance d’alimens ne peut
être intentée ni par le pu p ile, ni par l ’insensé incapable
de vouloir j elle appartient, pour eux , à leurs familles.
Pourquoi le frère de la femme C h a lu s, si ardent depuis à
poursuivre son beau-frère, ne s’occupa-t-il point du sort
de sa sœur vivante ?
N e voit-on pas qu’au moyen de ces actions données
pour les alimens , la loi n’ admet pas la possibilité de
l ’homicide par famine? C ’est ainsi que la définition d ’ un
tel homicide ne se trouve pas dans ses dispositions
Dirait-on que la disposition générale embrasse toutj
que la famine est l’un de ces quelques moyens que ce
�( 39 )
io iid o n t il y est fait mention? Cette disposition générale
n’est rien par elle-même ; elle réserve la qualification et
la déclaration de la peine qui en dépend pour les dis
positions suivantes , et c’ est là qu’est véritablement ex
primée la volonté de la loi.
Si la disposition générale avait par elle - même quel
que consistance, tout aurait été expliqué par la distinc
tion de la non préméditation et de la préméditation,
(art. 8 et 1 1 ) } et après avoir dit que l ’homicide com
mis avec préméditation serait qualifié d’assassinat et puni
de m ort, (art. 1 1 ) , on n’aurait pas eu besoin d’ajou
ter que « l’homicide commis volontairement par poison
,J serait qualifié de crime d’empoisonnement et puni de
» mort, (art. 1 2 ) . On n’ajouta pas une qualification
pour l’homicide commis par famine , parce qu’ un crime
ainsi qualifié n ’était pas dans l ’ordre des choses
possible^,.
Quand il y a accusation prouvée d'assassinat, les
juges appliquent l’art. 11 j quand il y accusation prou
vée d empoisonnement , i l s a p p l i q u e n t l ’art. 12 ; ce
n est jamais sur l’art. 7 , dans lequel il n ’ y a a u c u n
précepte pénal, que la c o n d a m n a t i o n est fondée. Quand
il y a accusation d’homicide par famine , alors mêmequ’elle pourrait être prouvée,
les juges ne trouvent
dans la loi aucun texte à appliquer.
Contre Chalus et contre Claudine M a zu e l, on a appli-
�( 4°)
que l’art. 8 et l’art. 11 ; mais il n’y avait déclaration d’au
cun faitauquel l ’ un ni l’autre se rapportât. On reprochait
aux accusés, non d’avoir commis , mais d’avoir omis;
non d’avoir tué 7 mais de n’avoir pas nourri ; et la nature
du fait n’admettait aucune comparaison avec des textes
de lo i, où l’action est toujours supposée.
I l ne peut être nié cependant que l ’homicide } de quel
que inaniere qu’il soit com m is, est un crim e , et que l’a
nalogie des cas prévus et des cas non prévus dans la l o i ,'
donne matiere à argumenter des uns aux autres. C ’est ce
que l’on aurait fait dans l’ancienne jurisprudence , lors
que l’on condamnait pour les cas résultans du procès;
mais la jurisprudence nouvelle ne permet aucune argu
mentation , aucune application de peine par analogie.
Sans doute , il importe que le crim e, de quelque li
vrée qu’il s’enveloppe , soit puni; mais il importe encore
plus que la loi seule punisse et que les juges soient
vmuets quand elle n’a pas parlé.
Dans le fait principal déclaré constant par la
d é c la
ration des ju r é s, de la mort de la femme C h a lu s,
par suite d 'u n e p r iv a tio n da U m ens , il est donc clair
qu’il n ’y avait rien qui pût autoriser la comparaison
avec les textes dans lesquels la loi définit et qualifie
l ’ h o m i c i d e ; c’est ce qui n’est pas moins manifeste lors
qu’on descend aux détails dans lesquels ce fait devient
p e r s o n n e l à Chalus et à Claudine Mazuel.
C ’est
�(4 0
C ’est l’ accusé qui a commis , sans préméditation , ce
que la loi définit un homicide que l’on doit condamner
à vingt ans de fers; c’est à l’accusé, qui a commis avec
préméditation le même homicide , que doit être appli
quée la peine de mort j quand on a lu la déclaration
de jurés donnée contre Chalus et contre Claudine Mazuel , il reste que ni l ’ un ni l’autre n’a rien commis
et que la prétendue mort par p r iv a tio n d ’ alim ens leur
est étrangère.
Des m anœ uvres ont été la cause de cette p riv a tio n
d ’ alim ens. Les jurés ont-ils reconnu que les accusés
aient été les auteurs de ces m anœ uvres ? Nullem ent.
Ont-ils reconnu que,de quelque manière, les accusés y
soient intervenus, y aient pris part? Nullement encore.
Comment entend-on, dans la déclaration, qu’il y a ,
des accusés , au fait dont il s’agit quelque rapport ?
C ’e s t, disent les ju rés, qu'ils ont co n cou ru , non pas
aux manœuvres qui sont le véritable délit ; mais à la
p riv a tio n d ’a lim en s, qui est l ’effet de ces manœuvres*
En sorte que toute cette déclaration, en mettant de
l ’ordre dans les idées qu’elle exp rim e, se réduit à ce ci,
que la femme Chalus est morte pour avoir été privée
d’alimens par l’effet de certaines m an œ uvres, et que
les accusés, sans que ces m anœuvres aient aucunement
été les le u r s, se trouvent cependant avoir concouru
d’ailleurs,on ne sait par quelle co-incidence , avec ces
m anœ uvres 7 un fait de la privation d’alimens.
F
�(40
Vous avez fermé une porte , par laquelle l ’homme
qui a été assassiné uu quart-d’heure après dans la rue,
a u r a i t pu se réfugier chez vous ; vous avez laissé sur
line table le couteau dont l’assassin s’est saisi ; vous
avez concouru à la mort; mais vous n^avez pas con
couru au crime. D e même , la femme Chalus a péri
par l ’effet de certaines m a n œ u v res, e t , sans avoir
été acteurs dans ces manœuvres , Chalus et Claudine
Mazuel ont co n co u ru t la mort qui en a été le produit«
V oilà tout ce qu’il y a à dire d’après la déclaration des
jurés , ce qui diffère grandement de la conviction d’être
auteurs ou complices du fait et d ’avoir commis le crime
d ’homicide avec ou sans préméditation.
Ain si la déclaration , considérée dans son point prin
cipal ou dans ses détails^articuliers , ne peut être mise
à côté des dispositions de la loi ( art. 7 , 8 et 11 ) que
l ’on ne reconnaisse la dissemblance des cas ; et il y a
ouverture de cassation ( loi de brumaire , art. ^56 ) ;
puisque des dispositions pénales ont été tirées hors de
leur cas précis et que c ’est ce déplacement qui consti
tue la fausse application.
Il
est tems de terminer ce développement des raisons
d’annuller et le procès et le jugement dont Chalus et
Claudine Mazuel ont si justement à se ptaindre. Les
ouvertures de cassation qu’ils proposent ne sont pas in-
�( 43 )
certaines j des préventions n ’auront pas atteint le T r i
bunal devant lequel ils sont enfin parvenus \ et c est
avec confiance qu’ils déposent devant lui leur demande
et leur légitime espérance.
' Des préventions ! il est trop vrai que jusqu’à ce jour
elles ont tout fait dans cette malheureuse affaire.
Claudine Mazuel a fait jalouser l’autorité que Clialus
lui avait donnée dans sa maison , et des domestiques
mécontens ont répandu une diffamation vague et té
nébreuse.
•
U n héritier a été intéressé à laisser subsister un pré
jugé qui pouvait un jour lui fournir des armes contre
la donation d’usufruit qu’ il se proposait d’irnpugner.
Dans le public on aime à s’entretenir des faits qui
sortent de l ’ordre commun et même à y croire.
A force de répéter que l ’on faisait mourir de faim la
femme Chalus , on a fini par faire de ces vains discours
une opiuion enracinée.
Ces bruits répandus tireront de la consistance de cette
imprudente bêtise d’ un contrat de mariage passé lors
qu’ un mariage n’était pas permis.
U n .murmure universel établi sur des rapports vagues
qu’on ne vérifia point, précéda et suivit l’événement du
trépas de la femme Chalus. On n’examina rien j on se
l
�(
44 )
plut à croire e t , comme une contagion , cette persua
sion sans cause se communiqua aux Jurés et aux Juges.
O ù était cependant la raison d’expliquer par une cause
si extraordinaire un événement si naturel ?
A près des années de maladie , lorsque , de progrès
en progrès , tous les principes de la vie avaient disparu ,
ne fallait-il pas que la femme Chalus arrivât au terme
fatal ?
Elle mourut parce qu’étant m ala d e,la crise fatale la
surprit : elle aurait pû. expirer plutôt sans que l ’on dût
en être étonné.
Dans sa situation il n’y avait point d’instant qui ne
fût l’ instant possible de la mort.
C H A B R O U D , Défenseur.
D e l ’ im p r im e r ie d e R e n a u d ie r e , r u e d e s P ro m v a ircs t n , 5 6 4
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chalus, François. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chabroud
Subject
The topic of the resource
homicide par famine
démence
autopsies
médecine légale
jury d'accusation
condamnation à mort d'une femme
homicides
rumeurs
Description
An account of the resource
Ouverture de cassation, pour François Chalus et Claudine Mazuel ; Prétendu homicide par famine.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Renaudière (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1798-Circa An 8
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0711
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Coverage
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Pontaumur (63283)
Rights
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Domaine public
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autopsies
condamnation à mort d'une femme
démence
homicide par famine
homicides
jury d'accusation
médecine légale
rumeurs
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8f7dff595c074bf570c7bbd84e3d3e9c
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Text
PIECES JUSTIFICATIVES.
*
P
rocès-verbal
de M . le Ju g e de P a i x .
C e j o u r d ’ h u i , h u i t septembre mil h u it cent d i x-sept, sur les sept heures
du m atin,
nous,
A n t o in e - B e n o ît - h
T éo p h ile D u fa u r e -D e c itr e s ,
ju g e
d e paix du canton de M ontfaucon , d épartem ent de la H a u t e - L o i r e ,
d ’après l ’avis q u i nous a été d on né par M . l ’adjo in t à la mairie de
la co m m u n e de D u n iè res, portant que le sieur Jean C o u rb o n , fils a în é ,
d u lieu des M azets, de cette c o m m u n e , âgé d ’environ trente-sept ans,
venait d ’être trouvé mort tout près des bâtim en s d u sieur Jacques
M assardier, aubergiste audit Du n ières, avec prière de nous transporter
su r les lieux p o u r o rdonner ce q u e de droit ;
Nous étant transporté de suite, avec notre greffier,
vers le lieu
in d iq u é , avons rencontré la personne dudit Courbon dans une position
extraordinaire, ay ant la tête courbée sur la poitrin e , le bas d u corps
portant sur ses pieds, de manière à ne pas toucher terre, tellement
que tout le poids du corps portait sur le cou , la tète étant reployée ,
ce que la nature du terrein pourrait peut-être expliquer, ledit Courbon
étant tombé dans une espèce de fossé adhérant aux bâtimens du dit
Massardier, formant un quarré équilatéral d’ un diamètre d’environ
quatre pieds sur deux et demi de hauteur, N ’ayant à notre disposition
aucune personne de l’a rt, avons ordonné au nommé Duclos-Clocheron
de chercher à donner au corps dudit Courbon une position plus natu
relle , ce qu’il a fait sans aucun succès. L a figure, qui était courbée
contre terre, nous ayant paruc hideuse et décomposée, les membres
généralement roides ; cependant un rente de chaleur nous ayant donné
encore quelques espérances, on a cherché à réveiller ses sens à l'aide
d' eaux spiritueuses introduites par le nez et par la b o u ch e , et dont
la tête lui a été lavée, ce qui a été encore inu tile, ainsi que les autres
Soi ns
qu ont commandé sa malheureuse position.
Désespérant de le r a m e ner à la v ie , nous avons ordonné que son
corps serait déposé dans le clocher dudit Dunières, en attendant l’arrivée de M. le docteur Thomas , de Saint-D id ie r , appelé en remplace
ment de M. Bergeron, absent, q ui avait été pvévenu depuis euviron
i
�deux heurés, lequel étant survenu peu de moraens après,
nous a
rapporté q ue, d ’après l ’inspection du cadavre, et les reclierclies inté
rieures qu ’il a pu y faire, on doit croire que ledit Jean Courhon est
décédé de mort n aturelle, à la suite d’excès de v i n , ce qui a provoqué
une attaque
d ’apoplexie , qui
a été reconnue par l ’ouverture d u
cadavre, qui a présenté les sinus gorgés de sang, ce que l ’on verra
plus en détail dans le rapport écrit de M. le docteur.
.
Désirant cependant savoir si la v o ix publique était en concordance
avec la manière de voir de M . le d o c te u r , et si elle ne désignait per
sonne comme a u te u r , fauteur et complice de la fin malheureuse dudit
C o u r b o n , avons appris qu’elle disait que le décédé était généralement
aimé de tous ceux qui l’approcliaient, et que le malheureux état où il
avait été trouvé était la suite d ’ un ex cès de vin j où il s’était livré dans
le jour avec quelques a m is, ce qui nous a pani prouvé par l ’état d u
cad avre, qui a jeté du vin sur ses liabits, et qui d’ ailleurs était souvent
en état d’ ivresse.
F o u la n t cependant établir ju squ 'à l ’évidence,le genre de mort d u d it
C o u rb o n , avons fait comparaître devant nous Pierre Sellie r, chau
dronnier a m b u la n t, âgé d ’environ quarante-cinq ans , domicilié à
M arsenat, arrondissement de M u r â t , département du C a n ta l, lequel
nous a déclaré que cejourd’liu i, vers les cinq heures du m atin, sortant
de la grange de Massardier., d e D u n iè r e s , où il avait co u c h é , ses y e u x
avaient rencontré un homme qui lui avait paru dans une position
extraordinaire, co qui lui avait fait dire à Claude R o c h e , beau-frère
dudit Massardier : Cet homme est peut-être malade ; a p p e l o n s - l e ; "“co
q u ’ il avait fuit, en disant plusieurs fois : C a m a ra d e! cam arade! en
répétant ces mots d ’une voix très-forte; mais que ne r e c e v a n t aucune
réponse , ils avaient p e n s e qu ’ il é ta it m o r t . E t a n t r e n t r é d e suite dans
la maison de Massardier, il l ’avait engagé à en prévenir l’adjoint de
la comm une; que M. Digonnct, adjoint, étant arrivé, avait reconnu
ledit cadavre pour être celui de Jean Courbon, fils aîné, du lieu des
Mazets. Les signes de mort lui ayant paru évidens, ledit adjoint avait
ordonné (pie l ’individu ne fût pas to u ch é, et que le juge de paix fût
prévenu , pour ordonner ce que de droit.
D( :mandé audit Sellier s’il n’est pas porteur do papiers qui établissent
sa moralité, nous a répondu en nous présentant un passc-port eu
bonne forme.
�C3 )
A l u i dem andé s’ il n’ a e n te n d u crier n i gém ir dans la n u it , a
rép o n d u que non.
Demandé s’il a à sa connaissance quelque indice sur la cause de la
mort de l ’individu dont est question, a répondu que n o n , lequel a
affirmé par serment. Lecture à lui faite de sa déclaration , a dit icelle
contenir vérité , y persister, et a déclaré ne savoir sign er, de ce requis.
Avons aussi fait appeler les nommés Jean Duclos, cloclieron, Claude
Roche et Jacques Massardier, son gendre, le premier commis à la garde
du cadavre par M. l ’adjoint, et les seconds habitant la maison près
laquelle ledit Courbon a été trouvé, lesquels entendus se sont accordés
à dire ce qui est rapporté par le nonuné S e llie r, assurant, les uns et
les autres, que la inort dudit Courbott ne peut ¿Ire attribuée qu’à un
excès de vin, désignant Pierre Courbon, frère du décéd é, comme étant
la dernière personne qui l’ait approché vers les n e u f heures du soir de
la journée du sept septem bre, lequel avait fait des efforts inutiles pour
le ramener avec lui dans son domicile ;
A joutant encore que Courbon avait bu avec Mathieu T a v e m ie r ,
domicilié à J o n zie u x , envers lequel il s’était libéré de certaine s o m m e ,
et avait reçu dudit Tavcrnier son l>iïïet relatif à sa crean ce} qu il I avait
déchiré en présence de Louis Ilispal , de D u n ièrc s, et de Jacques
Galtând , de INIaletavernc ; qu’ il avait remis les morceaux dudit billet
dans sa p oche, que nous avons fait inutilement chercher par le sieur
D uclos, qui n ’a trouvé dans les habits du décédé qu’ un sac de toile
contenant trente-trois francs quatre-vingts centimes, un couteau et uno
c le f , que nous avons remis aux parens dudit Courbon.
Ces renseignemens nous ayant paru suffisamment prouver le genre
de m o r t , et notre zele à le constater, avons ordonné que le corps dudit
Courbon serait remis à sa famille , pour recevoir les honneurs de la
sépulture dus à sa m émoire, ayant été dans sa trop com te vie le soutien
des malheureux indigens, sur-tout dans l ’année calamiteuse d ’où nous
sortons.
Do tout quoi nous avons fait et clos le présent
p r o c è s - ve rb a l,
pour
Être envoyé à ]\J. le procureur du Iloi près le tribunal civil de première
instance séant {, Yssingeanx, que nous avons signé n toutes les pages,
avec le greffier de Dm iièrcs, les jour et an susdits. Signé Dui’iuBE
p e CiTHES , juge de paix , et IionMET, greffier,
�(4 )
R a p p o r t de M .. T h o m a s ,
médecin.
Nous soussigné, m é d e c i n , ha bita n t la v ille de S a in t-D id icr -la -S é a u v e ,
c h e f - lie u d e canton de l ’arrondissement d ’Y s s in g e a u x , en vertu d ’ un
réquisitoire en date de ce j o u r , d e M . le ju g e de paix d u canton do
M o n t f a u c o n , nous sommes transporté au h o u r g de D u u iè r e s , canton d e
M o n t f a u c o n , p o u r constater le genre de m ort d u sieur Jean C o u rb o n ,
des M azets , co m m u n e de Dunières.
A p rès nous être assuré de sa m o r t , avons procédé à l ’autopsie cada-'
vé riq u e. L a
surface externe nous a d ém on tré les caractères suivnns r
C o n stitu tio n a th létiq u e , épaules la r g e s , co u c o u r t , tête grosse ( causes
prédisposantes à l ’a p o p l e x i e ) , figure l i v i d e ,
vaisseaux de la t u n i q u e
a lh u g in ée , les d e u x y e u x injectés , lan gu e g o n f l é e , regorgem ent par ht
L o u c h e d ’ un m élan ge de liq u e u rs fermentées. N ’y ayant trouvé d ’autres
indices de m ort v i o l e n t e , avons fait l ’ ou v ertu re de diverses c a v it é s ,
1° de la tû te, d o n t les vaisseaux q u i abreu v en t son intérieur gorgés de'
S a n g , sans altération de la substance de l ’organe en céph aliqu e , ni epanch c m e n t ; 2° de la cavité t b o r a c h i q u e , d on t nous avons reco nn u le?
viscères dans l’état sain ; 3 ° la cavité p elvien n e o u abdom inale o u v e r t e ,
avons tro u vé Festomac co nten an t u n e assez grande qu antité de liq u e u rs
f e r m e n t é e s , sain d ’a ille u r s , ainsi qu e scs autres viscères y contenus.
D ’après l ’é n o u cé ci- d e s s u s , on d oit rapporter la m ort d u sujet à unef
a tta q u e d ’ a p o p le x i e , d o n t il était m enacé par sa forte c o n s titu tio n , et
d o n t l ’ intem pérance sans cesse répétée a été la cause efficiente,
en;
d éte rm in a n t au cerveau u ne plus' grande affluence de sa n g , ce q u i a;
p r o d u it à cet organe un colaps d on t s’ en est suivi la m ort.
E n foi de quoi nous avons dressé le p ré se n t, à D unières, le lniiC
septembre mil h uit cent dix-sept. Signé Thomas»
E
xtra it
du rapport à M . le Procureur du R oi.
M o n s i e u r , dans la jou rnée du h u i t septembre m il h u it cent <lix-scpt}
j ’ui constaté par un procès-verbal la m ort du sieur Jean C o u r b o n s
tro u vé sans vio vers le p o in t du jour d u h u i t , près la maison de Jacques
M a s s a r d i e r , aubergiste du b o u rg de D unières. C e l l e pièce a di\ vous
tra n q u illis e r sur le genre de m ort de cet in d ivid u ; et le rapport d u
d octeu r Thom as a sans d o u te ach evé d ’élo ig n er d e votre pensée tout
�(55
soupçon àem ort v io len te; c’était aussi, Monsieur, mon intime croyance
et celle de tout ce q ui ni?entoura dans le cours de cette malheureuse
journée : le «lire du chirurgien acheva d’éloigner tous les doutes de ma
conscience. Cette manière de voir était d’ailleurs justifiée par Fétat du
cad avre, qui ne présentait pas même une légère égratignure, et par
F état des •vêtemens nullement en désordre.
L ’ intérieur du corps, étudié avec soin, n’ ayant offert qu ’ un engor
gement vers les vaisseaux qui aboutissent au cerveau , tout concourut à
persuader que l ’excès du vin avait déterminé une attaque d ’apoplexie.
Ce fut le jugement général. U n e seule chose cependant embarrassait
et présentait quelques observations à faire : c ’était la position d u
cadavre, trouvé dans une attitude très-extraordinaire, n ’étant appuyé
que sur la n u q u e , les pieds et un genou. O n se demandait comment
était-il arrivé q u e , dans les angoisses de la m o r t , ce corps ne se fût pas
rapproché de la terre. O n croyait que la nature , en succom b ant, devait
laisser l ’ individu dans un tel état de déb ilité, qu’ il eût dû se jeter vers
la droite ou vers la gauche. On pensait que C ou rb on , venant du midi
et faisant la culbute dans la fosse oii il a été trouvé, devait heurter vers
le m ur opposé , et non a v o i r le corps tourné au sud. On devait s’attendre
aussi à voir sa tête mutilée par le m u r , et le chapeau éloigné de sa
p lace, et non sur la figure, qu ’il couvrait entièrement. Enfin on devait
croire que C o u r b o n , étant tombé du lieu où on a trouvé scs pieds,
devait avoir une partie du corps hors du creux où il était; mais ces
- réflexions s'effacèrent prom p tem ent, et on crut qu ’ il n’y avait rien de
tragique clans la mort de Jcau C o u rb on , et son corps fut livre à sa
famille.
. .
�MÉMOIRE MÉDICO-LÉGAL,
P ar A dolphe R I C H O N D ,
du P u y ( Ifa u te -L o ir e ), sous-aitic-major
à l ’hôpital militaire d ’instruction de Strasbourg, maintenant nommé
chirurgien à l ’hôpital du V a l- d e -G r â c e , à P a r is , _ex~élève intenta
des h ô p ita u x civils et de l ’école-pratique de la même v ille , sur le
genre de mort de J e a n C oo r b o n , de la commune de Dunières ,
département de la Haute-Loire.
Ce Mémoire
•
est
approu vé
,
t
i ° P a r M . E . FODER.E, professeur de médecine légale et de maladies
épidémiques à la fa c u lté de médecine de Strasbourg, membre de
l ’académ ie de m édecine, etc. etc. e t c .;
a° P a r M . C A I Z E F IG U E S , professeur de médecine légale à la fa c u lté
d e M o n t p e lli e r , e t c .
etc. ;
3 ° P a r M . C . C. IN'. M A R C , membre titulaire de F académie royale
de m édecine, médecin de S . A . S . M onseigneur le Duc d ’Orléans ,
membre du conseil de sa lu brité, directeur du secours a u x noyés
e t a sp h ixiés, médecin ju ré-exp ert près la Cour royale du département
de la Seine ;
4 8 E t enfin par M . J. A u g . L U C A S , membre titulaire de Vacadémie
royale de m édecine, chevalier des Ordres de -Saint-Michel et de la
Légion d ’h o n n eu r, premier médecin
de Son A . R .
M
adam e
,
Duchesse d 'A u g o u lê m e , inspecteur des e a u x minérales d e V ic h y ,
L ' a m o ü A «lu m e r v e i l l e u x , o n l e <l<-»ir <lc t r o u v e r d e s c o u p a b le s
n® fa it q n o t r o p
s o u v e n t v o i r «les faits e x tra o rd in a ire ® d a n s l e »
¿ « ¿ n c i n e i i s l e i p lu s s im p le s . C e p e n d a n t , ô v o u s , m ag istra ts c o m m it
p o u r la p r e m iè r e i m i r u c t i o n <Ut p r o c é d u r e s c r im in e lle » j e t v o u s ,
p i é d e c i n s , v o u s n e d e v e z pas i g n o r e r q u e l V s p r i l d e p r c v c u l i o i i
l i e n t u n o p r e m iè r e p la c e p a rm i le s fa ib le s s e s h u m a in e s !
F odsré.
A
p r
¿
s
avoir lu atlcntivcment les diflerenles pitaes relativos
1’aíTaire de C o u rb o n , ¡o n’ ai pas hesité á premlre la plutne,
a
bien
persuade <juc je defendáis ¡’¡n u g ecu ce, et <jue c ’était rendre un scrvico
�(7 )
aux juges, à l'humanité entière, que de faire ressortir dans cette cir
constance l ’énormité de l ’erreur que l ’on a commise en jugeant légè
rement de malheureux pères de famille. E n effet, le jugement qui a
été porté contre eux repose sur des hypothèses gratuites, qu ’ il me sera
facile de renverser, et qui n’auraient jamais dû servir de hase à la con
damnation des accusés. En procédure criminelle, il fa u t, pour pouvoir
condamner un individ u, qu’ il y ait un corps de délit bien manifeste,
et ce n ’est pas sur des probabilités, des demi-preuves, qu ’on s’expose à
flétrir et à rayer de la société des personnes innocentes. Je dis inno
centes; car il ne peut y avoir de coupables, dès qu’il est démontré qu ’ il
n ’y a pas eu de délit ; et c’est là le p o i n t q u ’il me sera facile de rendre
aussi clair que le jour.
D ’après le procès-verbal de M . le juge de paix de M o n tfa u co n , il
conste que Jean Courbon , âgé de trente-sept ans, fut trouvé mort ,
le 8 septembre 1817 , dans un fossé attenant aux bâtimens du sieur
Massardier ; que la position était t e l l e , que la tête était courbée sur
la p o itrin e , le bas du corps portant sur les pieds et un g e n o u , do
manière h ne p a s t o u c h e r t e r r e , t e l l e m e n t que le poids du c o r p s re
posait sur le cou. L a nature du terrein , y est-il d i t , pourrait p eutêtre expliquer celle position bizarre ; les babils étaient en bon ordre ,
la coiffure nullement dérangée, le chapeau placé sur la figure. I l existait
un état de roideur rem arqu ab le, et un reste de chaleur t e l , que des
soins furent prodigués au malheureux : du vin fut trouvé répandu sur
ses habits. L ’ enquête faite par M . le juge de p a i x , sur les habitudes et
les mœurs de C o u r b o n , lui apprit q u ’il était enclin à l ’ivrognerie, et
q u ’ il commettait presque journellement des excès de boissons alkooliqucs ; que d ’ailleurs il était fort aimé dans le p a y s , et n ’avait pas
d ’ennemis connus.
M . le docteur T h o m a s , appelé pour examiner le cadavre de Courbon,
dit que celui-ci était d ’ une constitution athlétique ; qu ’il avait les
épaules larges, le cou c o u r t, la tête grosse, la figure liv id e , les y e u x
injectes, la langue gonflée; qu ’ il y avait^un regorgement, par la bouche,
de liqueurs fermentóos : le corps ne présentait d ’uilleurs aucune traefl
de violence extérieure. L a lô te, ouverte, lui offrit les vaisseaux qui
abreuvent l’ intérieur du crime gorgés de sang, sans altération de l ’or
gane encéph alique, ni épanchcinent. L es organes contenus dans 1«
poitrine lui parurent très-sains; enfin•Tuuvcrlurc de la cavité abdc-
�(•>
minale ne luì fit trouver aucune altération. D ’après tous ces faits','
M. Thomas e n >c o n c lu t , avec beaucoup d é r a is o n , que Courbon était
mort apoplectique; et tous les phénomènes mentionnés dans son rapport
appartiennent réellement à celte affection.
O r , d ’après les faits énoncés dans les procès-verbaux, pouvait-il
ótre intente une accusation contre G a l la n d , Rispai et Tavernier? Lo
rapport du médecin ne devait-il pas être pris en sonsidéràlion ? Les
faits sur lesquels est basée la condamnation étaient-ils prouvés? Avait-on
fait exhumer le cadavre? Avait-on suivi le conseil de M. Bergeron , qui
dit qu’après trois mois il aurait pu encore reconnaître la luxation?
Telles sont les questions que l’on serait en droit de faire, et auxquelles
•
on ne pourrait pas répondre d ’ une manière satisfaisante...........
Mnis, puisque l’erreur a été commise, il importe de la rectifier, et
pour cela de prouver, i° que Courbon est mort apoplectique; 2° qu il
Il y a pas eu cle luxation; 3° qu ’eût-elle existé, elle ne prouvait pas un
m eurtre; 4° i 110 l a position n’avait rien de si extraordinaire, qu ’on no ,
puisse bien l'expliquer ; 5° enfin que la strangulation , la suffocation ne
peuvent avoir eu lieu.
•
*
• Après avoir démontré ces différentes propositions, il me semble qu ’ il
sera prouvé que la mort de Courbon a été naturelle, qu ’ il n ’y a eu
aucune violence extérieure, et que par conséquent les accusés sont
innocens.
’
i° Il sera démontré que Courbon est mort apoplectique, si on a
reconnu en lui toutes les causes prédisposantes à cette affection , el si
sur le cadavre on a trouvé toutes les lésions propres à la caractériser, et
rien autre que ces lésions. O r , le fait est te l, et il sera facile de s’en
convaincre, si on consulto les auteurs qui ont
écrit
sur celle maladie.
C'est ainsi q n H offm an , sJlbinus , P in o t, M. Fodere , P o r ta i, T u ilier ,
frin ito vi, et tousles auteurs le plus justement recommatiilnbles, placent
nu rang des causes prédisposantes, la constitution robuste, le cou court ,
les épaules larg es, le régime succulent, e t c . , et que tous insistent
principalement sur les excès dt\ boissons alcooliques. L ’ivrcss'e en effet
entretient l’engorgement des vaisseaux cérébraux; elle a été cornparéo
à un« demi-apoplexie ; et quand les individus qui se livrent à l'ivrognerio
sont en outre doués do la constitution qu ’on peut appeler apoplectique*
il est ordinaire qu’ ils finissimi leur carrière en succombant h cetlo
Maladie. O n pourra juger de l'importance qu ’on doit donner u l'examen
�(9)
des causés prédisposantes, en faisant attention aux soins qu'ont pris
L o u is, A m broise-P aré, Lancisi, e t c . , de les mentionner dans les rapporta
q u ’ils ont faits en justice , pour faire connaître le genre de mort auquel
avaient succombé des personnes qu ’on supposait assassinées. Les causea
dans lesquelles ils ont été consultés ont trop de rapport avec celle qui
nous occupe , pour que je ne les mentionne pas , et même n’ eu
transcrive des passages entiers.
Mais avant tou t, continuons l ’examen de Courbon. Son cadavre ne
présenta rien qui pût faire supposer une violence extérieure ; l'autopsie,
faite avec soin, ne fît reconnaître qu ’ une injection d e la fa c e et des
y e u x , un engorgement de la langue , un regorgement de liqueurs
ferm en tées, un engorgement des va issea u x céréb ra u x, et tous les
autres organes sains.
O r , toutes ces lésions sont réellement celles qu’ on doit rencontrer
ebez un apoplectique. Voici ce que dit à ce sujet l’auteur de l'article
niort, au Dictionnaire des Sciences médicales :
« De toutes les causes de mort subite, la plus fréquente e6t l ’apo« plexic. II est bien e s s e n t i e l tï’eii connaître les caractères, q u a n d ,
« appelé près d ’ un ca d a v re , on doit constater le genre de m ort a u q u e l
« il a'succom bé ; niais l ’apoplexie laisse après elle des traces évidentes,.
« On trouve souvent un épanchement sanguin dans le crd n e, ou b ie n
« un engorgement des v a isseaux qui s’y trouvent ; le visage est rouge (
v tum éfié, livide ; la langue est gonflée, les j e u x in jectés, la boucha
et écumeuse ou contournée ; la chaleur se conserve long-tems ». O r , ces
phénomènes prennent plus de consistance, quand la personue morte
jouissait de la constitution apoplectique.
,
M orgagny, dans son excellent ouvrage D e Causis ctSedibws morborum,
donne absolument les mêmes caractères. M . F o d é r é , Belloc et tous
les praticiens sont du même avis.
11 est facile de rem arqu er toute la parité qui existe entre les p h én o
m ènes observés ch ez C o u rb o n , et ceu x qu e tous les m édecins rapp ortent
a 1 apoplexie. A u c u n e éq u ivo q u e ne p e u t e x iste r , a u c u n d ou te ne d o it
rester dans 1 esprit ; et il faudrait être bien p r é v e n u , p o u r v o i r dans sa
m ort autre chose q u ’ iu,0 a p o p le x ie , occasionnée par l'in tcn ip éra n ce at
l ’ ivresse, et à laqu elle sa constitution l ’avait prédisposé. L a position
q u e la ch u te lui fit p r e n d r e , en em p ê ch a n t la l ib r e circu la tio n d u sang
venant de la l é t o , d u t e n c o r e
2
favo riser
sa stase dans les vaisseaux
�( 10 )
c é r é b r a u x , et toutes ces causés réunies firent éclater cette m aladie q u i
termina en p eu d ’ instaris sa vie.
Dans le rapport du m édecin , il n ’y avait aucun fait, aucune cir—
constance qui pût donner lieu à l ’instruction d ’ une procédure crimi
nelle ; et il me semble qu ’on ne peut et qu ’on ne doit jamais accuser
des individus de meurtre , avant d ’avoir trouvé au moins q uelque
lésion cadavérique qui puisse donner des soupçons et faire élever dca
doutes.
Mais rien ne prouve qu’ ils fussent ici fondés. A ucune marque do
violence extérieure n ’a été reconnue ; et il n’existait pas même la plus
légère ègratignure ( d i t M. le juge de paix). E t devait-on , dans un cas
aussi important, recourir à des suppositions, à des hypothèses gratuites T
à l’appui desquelles on n’apportait aucun fait? N o n , sans do u te; car
cût-il existe des ecchymoses, des meurtrissures, des plaies même, cela ne
suffisait pas p o u r faire n a îtr e l’ idée d ’ un meurtre , puisqu’il y a v a it des
faits suflîsans pour faire reconnaître l ’apoplexie.
L a lecture des causes célèbres, dans lesquelles Louis et Lancisi ont
rédigé des mémoires justificatifs des accusés, servira, je crois encore , à
¿claircir le fait qui nous occupe.
P
r e m ie r
E
xem ple
.
« C hassagn eux, de M ontbrison, fut un jour trouvé
ic mort dans un chemin public, la face tournée contre terre. Les premières
* personnes qui le virent le mirent sur le dos. L é chirurgien , appi lé
« pour constater son genre de m ort, trouva une plaie contusc sur le nez,
«< avec fracture des os propres, des ecchymoses sur le cou , sur les lombes»
* il trouva un engorgement considérable de la langue, et crut recou«i naître que la plaie du nez avait fourni beaucoup de sang. Satisfait de
« ces signes, il se dispensa d ’ ouvrir le crâne, et en conclut qu il y avait
« eu compression sur le c o u , et q u e , réunie à l'hémorragie occasionnée
« par la plaie, elle avait pu occasionner une mort violente.
n L a voix p ublique, qui appelle toujours une victim e, accusa le fils
* et la b e lle -fille , qui furent condamnés au supplice des parricides.
« Appel au parlement, qui ne vit pas l’allaiie aussi claire que les
« premiers juges, et posa au célèbre Louis les questions suivantes,
« savoir : i° si le rapport (lu médecin avait clé fait convenablement?
« a 0 si des f.iits itHMiliomiés ou pouvait tirer des inductions défavorables
« aux accusés? Le professeur Louis répondit qu'il était de toute nullité.
e L ’exposé des faits, dit cet lioimno illustre, établit que le sujet
�o
>
if était d’ une fo r te constitution; qu ’il était d a n s lc moment échauffé par
« l ’ivresse, et par un violent accès de colcre. Les vaisseaux cérébraux )
te d it- il, sont toujours fort dilatés chez les personnes.sujettes à l'ivresse
h
et à la colère ; ces deux causes avaient produit depuis long-teins.uno
a disposition habituelle, par laquelle, au moment de la c h u te , il sa
« sera fait un refoulement du sang dans les vaisseaux, d u c erveau , et
« leur crevasse par la commotion de ce viscère.
.
, •
;
« L ’ouverture du crâne aurait infailliblement fait reconnaître l’épan-i
« chemeut ou l'engorgement des vaisseaux
cérébraux ,
résultat do
k l'apoplexie. L e crime ne. se présume p a s , a jou te-t-il; il. faut q u ’iL
« soit prouvé; et le médecin , chargé du r a p p o r t , a été bien imprudent f
k p o u r n e pas dire co u p a b le , dans ses assertions hasardées..11 attribua
« la plaie à la ch u te, et les ecchymose»à l’apoplexie ou à une exaltation,
cc sanguine, faite sur le cad a vre, comme cela arrive fré q u e m m e n t« .
Les accusés furent mis en liberté.
I l est facile de remarquer combien cette cause est analogue à celle
qui nous .occupe. Elles diffèrent pourtant l’ une de l’autre, en ce q u e ,
dans la première, il pouvait y avoir des soupçons bases sur les lésions
cadavériques, tandis q u e , dans la dernière, il n ’aurait jamais dû s’en
élever.
Dkuxikme E x c u r t n . rc L a veuve M ontJ)ailly, de Saint-Om er, âgée
« de soixante a n s , d’ un embonpoint extraordinaire, fort adonnée a u x
« liqueurs fortes, avec lesquelles elle s’enivrait journellem ent, fut un
« jour trouvée morte dans sa cham bre, sur un coflrc à angles aigus. L e
« chirurgien appelé observa des ecchymoses au bras droit, au bras gauche,
« à lu poitrine, a la.gorge ; une plaie au-dessous du sourcil : les parties,
a internes furent trouvées dans l’état sain. Il en conclut que la dnmc
« Montbailly avait reçu des cou p s, et était morte d'hémorragie. Son filsi
« et sa belie-fille, accusés d ’assassinat, furent condamnés au supplice
« <le la roue. L e premier subit sa peine; et on ne sursit à l’exécution
« de la deuxième sentence, quo vu la grossesse de la lielle-fille. Pendant
« ce letns-là, nppel fut fuiI au parlement, et le procès fut révisé. L o u is ,
a consulte sur co suj0i f répondit que le rapport <lu médecin était do
i< toute nullité. Il so récria avec raison de ce que le chirurgien n’avait
« pas fait moution , dans son rapport, de la constitution , des habitudes
« de la personne supposée assassinée (chose e ssentielle); c ar, «lit-il,
ff ccltc personne était adonnec ou vin j et a pu mourir dans un état
�( » )
*
d ’ivrésse a ctu e lle , ou dans un état d ’apoplexie, dont l ’habitude d é
« s’ enivrer est reconnue comme une des causes les plus fréquentes ». I l
attribua la plaie à la chute faite sur le coffre, les ecchymoses a l ’apo*
p le x ie ; e t , eu égard à sa décision, la mémoire de Montbailly fut
réhabilitée ; mais , hélas I le crime était consommé !.......,
O n voit ici qu’ il y avait
des lésions propres à faire naître des
soupçons , et que l ’on n’avait pas trouvé le principal caractère de
l ’apoplexie : l ’engorgement
des vaisseaux cérébraux.
jugement fut cassé.
T
r o is iè m e
E
xem ple
Cependant le
7
« Morgagny rapporte l ’exemple d’ un liommo
.
rc âgé de cinquante-cinq ans , q u i , reconduit dans un état d’ivresse, le
k soir du 16 janvier
, fut trouvé le surlendemain mort dans la
« ruelle de son lit. Ce savant professeur en fil la dissection , et trouva
« les vaisseaux de la pie-mère ( enveloppe du cerveau ) et le plexus
« choroiûe excessivement gorgés. C e t h o m m e , q u i s’ en iv ra it souvent r
fc d it- il, d e v a it a vo ir le s v a is s e a u x de l ’intérieur du crd n o tr è s -d ila té s }
« ce qui est, ajo u te -t-il, une disposition à l ’a p o p lexie, à laquelle il a
« succom bé,»
Q
u a t r iè m e
'
E
xem ple
,
,
a Lancisi parle d ’ un homme replet, adonné
« au vin , qui mourut subitement; et il n’omet pas de parler, dans son
<t rapport, ni de l’obésité, ni du penchant à l ’ivrognerie du s u je t,
« q u ’il dit être elle-môme un commencement d ’apoplexie. »
Je pourrais citer encore bien des exemples, qui pourraient fairô
ressortir davantage l’évidence du genre de mort auquel a succombé
Courbon ; mais il paraît que la chose doit ôtre maintenant bien claire
et je crois pouvoir in’abstenir de nouvelles citations.
Je crois donc pouvoir conclure ( e n sûreté de conscience), de tousles faits (pie j’ai rapportés et rapprochés entr’e u x , i° que Courbon
réunissait toutes les causes prédisposantes à l’apoplexie; 20 qu’ il y a
réellement succombé ; 3 ° enfin que l’accusation intentée contre T a v e r nier, et autres, n’est basée sur lieu de positif, sur rien qui puiisa
soutenir l’examen le plus léger.
Mais comme jo ne veux laisser aucun doute sur l ’affaire dont il
s’ a git, que je veux prévenir toutes les suppositions qu’on pourrait faire,
jo vais examiner successivement la position de C ourb on, et les genre*
Je mort violente auxqueU il pourrait avoir succombé.
1° La position de Courbon , ù laquelle on parait avoir attaché beau-*
�C ’
3 )
feoup d ’importance, et qui paraît seule avoir donné lieu à des soupçons
d ’assassinat, ne méritait pas la moindre attention. E n effet, q U’y a-t-il
de si extraordinaire, que cet homme iv r e , chancelant, revenant p eutêtre sur ses pas, se soit précipité tète première dans ce fossé? L a tête
se trouvant la partie la plus déclive , l ’engorgement des vaisseaux céré
b r a u x , déjà occasionné par l ’ivresse, a etc augm enté, et l ’apoplexie
s’en est suivie...........
A u moment de l ’accident, Courbon dut tenter de se relever; mais
comme la tête était pour ainsi dire enclavée , qu’ elle portait contre le
parois opposé du fossé, l ’effort dut se propager aux extrémités. O r ,
comme l ’a démontré le professeur Richerand , les muscles fléchisseurs
étant plus nombreux et plus forts que les extenseurs, la contraction dut
occasionner la flexion des g e n o u x , leur rapprochement du t r o n c , qui
ainsi sera resté en l ’air. T elle est l ’explication bien naturelle et bien
simple de ce qui dut se passer dans ce moment fatal. L a mort survenant
au moment où les muscles étaient en contraction , le corps conserva la
position qu’ il avait au moment où l ’apoplexie se manifesta, et l’équilibrç
l u t conservé.
L a mort par apoplexie, loin de s’accompagner de convulsions , d ’agi
tations, comme le suppose M. le juge de p a ix , est extrêmement tran
quille ; elle s’opère sans douleurs et sans mouvemens. O n ne doit pas
^rouver extraordinaire que le cadavre ne soit pas tombé d’un côté ou
d ’un autre. î ie connaît-on pas, en effet, toutes les positions bizarres
que prennent les ivrognes dans les chutes qu ’ils f o n t , et qui occasionnent
souvent leur mort? De ce qu’ un fait est inexplicable, doit-on l'attribuer
à une cause non naturelle? N o n , sans doute. L ’expérience démontre
tous les jours que les phénomènes vitaux, sont susceptibles d ’ un grand
nombre de variations extraordinaires*
Mais je vais plus loin ; je crois que c’ est précisément parce que la
position de Courbon était b iza r r e , parce que son corps ne s’est pas
ttiïiiisiic, qu’on devait en conclure q u ’il n'y avait pas eu luxation. Ërç
ellet » la luxation de la colonne vertébrale occasionne la compression oi\
l'altération do ln moelle épinière. O r , comme l e s membres, le tronc, etc.,
reçoivent leurs n erfs tic celle partie, il doit en résulter imlispensablem enl suspension des fo n d io n s , et paralysie complète des membres; mais
si cela eût élé , les muscles ne pouvant se contracter, le corps n’eût jms
p u être ainsi soutenu ; île lo u lç niccssilc il {c u r n il iucliuv d ’mi cOté
�ou d'u n autre ; et par conséquent ces phénomènes m an q u a n t, l ’idé«
de luxation devrait nécessairement s’évanouir. Mais je reviendrai encore
sur cet article. Il serait l)ien plus difficile , je crois , de concevoir qu ’ un
cadavre, obéissant à l’impulsion communiquée, pût prendre et conserver
une position semblable : il est encore plus déraisonnable de supposer
que des assassins la lui aient donnée après-la mort. En effet, des meur
triers, à supposer q u ’ils conservassent assez de sang-froid pour recourir
à une pareille r u s e , se seraient bien gardés de rester si long-tems près
de leur victime , dans le voisinage d’ une habitation. D ’ailleu rs, eu
supposant qu ’ ils eussent été assez raffinés dans le crim e, quelle aurait
pu être leur intention, sinon de faire croire à une mort naturelle?
Mais n’est-il pas évident que la position de C o u r b o n , à raison de sa
bizarrerie, devait éveiller l ’attention des magistrats? IN’étail-il pas plus
simplo do l ’étendre tout de son long sur la voie p ublique? ]Vaurait-on
pas cru plus faciloinment à une mort naturçllc? D ’ailleurs, le bon état
des vétemens , de la coiffure de Courbon , tout concourt à prouver qu ’il
s’est précipité de lui-m ém e dans le fossé, et qu ’il y est mort.
Q ue nous reste-t-il donc maintenant à faire , pour mettre au joue
toute la vérité ?
D é m o n trer q u ’ il no p e u t pas y avoir eu luxatio n , strangulation ni
suffocation.
i° L a luxation de la colonne vertébrale parait être le genre de mort
auquel on suppose que Courbon a succombé ; mais sur quoi repose cette
supposition? L ’a -t-o n trouvée sur le cadavre? a -t-o n fait exhumer lo
corps? avait-on enfin quelque fait qui pût y faire croire? K on : l’idée do
luxation était une pure hypothèse; et c ’est sur un fait semblable qu ’est
bâtie une condamnation !.......
Mais eut-elle clé démontrée, M. lo médecin l ’eût-il parfaitement
fcc o n n u c , eût-elle été accompagnée de toutes les lésions propres à cctto
affection , je dis et je démontrerai q u ’on ne pouvait en tirer aucune
induction défavorable aux accusés.
PiinMiKnr. Q
u estio n.
L a l u x a t i o n d e la c o l o n n e v e r t é b r a l e e x i s t a i t - e l l e ?
Non. L ’ union des pièces osseuses qui composent cette colonne est
tcllcmont fortifiée« par des ligamens solides, que leur déplacement exigo
des efforts, destructions considérables, sur-tout pour la produire par
la (lésion de la tôle. O r , comment supposer q u e , pendant que lo
malheureux Courbon luttait avec ses m eurtriers, ou du moins qu ’ U
�c Ï5 )
faisait des efforts pour résistera leur vio lence, il n’ ait éprouvé aucun
désordre dans ses vêtem ens, dans sa coiffure ? C om m ent son cliapeau
n'a-t-il pas été éloigné? Ses cris n’ auraient-ils pas été entendus des
personnes qui couchaient dansila grange voisine? Des assassins eussent-ils
choisi un pareil lieu pour la scène tragique?
Mais supposons que la luxation ait pu être opérée sans b ru it et sans
désordre, dans quel sens aurait-elle été produite ? E n a v a n t, puisque
la tète était fléchie sur la poitrine? mais cette luxation est des plus rares;
elle ne se remarque guère que sur les jeunes enfans; elle ne peut s’opérer
que par le déchirement ou le relâchement des ligamens odontoïdiens ;
e t , dans ce c a s , la t ê t e , loin de rester fléchie et de ne pouvoir pas être'
ramenée à sa rectitude naturelle, peut de plus être portée fortement
en arrière, comme le prouvent les observations d'A n to in e P etit eC
Bohn. L a luxation , dans ce sens, n’existait donc pas ;
2° C e lle par d ép lace m e n t des apophyses a rticu la ires, et q u i s’ o p è r e
p lu s aisément par un m o u v em en t d e t o r s io n , n ’«xistait pas encore. E n
e ffe t, ici la tête est in clin é e d u côté opposé à la lu x a t io n , et ne p e u t “
pas être ramen<5©à sa rootîtndo n a t u r e l l e , tandis q u e chez C o u r b o n lit
tête était directem en t fléchie sur la p o itrine ;
3 ° Enfin la luxation de la colonne vertébrale, quelle qu ’elle f u t , no
pouvait pas exister; car, dans ce c a s , il y aurait eu affaissement, renver
sement du corps , pour les raisons que j ’ai déjà données ; e t , d’ailleurs,
comme la circulation et les autres fonctions sont instantanément sus
pendues, il en résulte « que le cadavre présente line pâleur remarquable ;
« qu ’il n’y a pas de bouffissure; que la face ni les membres ne sont in« jectés, et que l’engorgement cérébral ne se remarque pas ». (Fod ûré).
( J e ne partage pas l ’opinion de M. Bergeron, qui dit que la luxation
peut avoir lieu avec les phénomènes de l ’apoplexie ).
O r , chez C ou rb on , il y avait engorgement des vaisseaux cérébraux,
bouflissure, injection de la face, état de contraction des muscles; doue
il u est pas mort par suite d'une luxation.
S i , contro les expériences de Legallois, su rira principes de la v i e ,
on veut supposer
i c cœur , recevant «les nerfs du cerveau , peut se
contracter, tandis (j«e les autres fonctions sont anéanties, il devrait en
résulter engorgement dos vaisseaux du p ou m on , et dus cavités droites
du cccur ; et on voit que Coin bon n’a pas présenté cet engorgement ;
• 4 ° Mais C ourb on’ fût-il réellement çiort par suite de la luxation d»
�la colonne Vertébrale ( c e que j ’ai prouvé n’élrc p a s ) , je dis qu’on nô
pourrait en tirer aucune induction contre les accusés.
E u effet, d’ une p a r t , nous avons vu les difficultés qu’ il y avait à
opérer ces luxations par des efforts, e t , de l ’autre , nous allons voir qua
les chutes, les culbutes en sont les causes plus fréquentes. « M . D e lp ech ,>
te dans ses Œ u v r e s Chirurgicales , dit que la luxation dont il s’agit peut
fc quelquefois être le résultat de tractions, de torsions considérables ,*
« mais que de toutes les causes, les plus fréquentes étaient les chutes
« sur la n u q u e , la culbute. »
M . Fodérc , ce célèbre médecin légiste, d i t , en parlant de la manière
dont on doit faire les autopsies, « qu ’ il faut bien faire attention aux
« plaies, aux contusions, aux luxations de la colonne vertébrale ; car
« ces accidens, d i t - i l , ne peuvent pas toujours être considérés comme
« une preuve d ’a tten ta t, vu qu ’ils succèdent souvent à la chute *
et résultat d ’ u n e apoplexie. »
A in s i, l ’on voit qu ’à supposer que la luxation eût été démontrée
elle ne prouvait r ie n , puisque Courbon pouvait^se l ’être occasionnéo
par sa chute ; mais elle n ’existait p a s , comme je l’ai démontré ; et
certainement M . Thomas parait être trop bon observateur, pour avoic
laissé échapper une semblable altération , si elle eut existé. A in s i , on
ne pouvait rien conclure , d ’après l ’idée de luxation ; e t , eût-<elle existé,
qn ne pouvait pas condamner les accusés.
Passons maintenant à la question relative à la strangulation.
D
e u x iè m e
Q
u e s t io n
.
L a strangulation peut-elle avoir lieu , sans qu ’ij
en reste des traces extérieures, et sans que les lésions cadavériques
puissent en faire connaître l ’existence? T e lle est la question que je mo
suis proposé de résoudre , et à laquelle je réponds par la négative.
Il est impossible , dit M. le professeur F o d éré, q u e la vie soit enlevée,
Sans qu’ une violence extérieure, exercée par les innins ou des lacs , no
laisse des traces d ’ecchymoses et de lésions profondes. L a partie sur laquelle
la violence a été exercée se présente vio le tte , rouge ; il y a une dépres
sion considérable, correspondant au corps comprimant; la peau e st,
comme l’observe A m b v oisc-P a rè, rid ée, excoriée. O r ,
là-o ù on 110
trouve aucune lésion extérieure, on ne peut pas supposer existence do
s t r a n g u la t i o n . Mais outre ces phénomènes lo ca u x, il est îles caractères
de lésions internes,
fo u t reconnaître ce g e n r e do in o r t, ou plutôt
«jui füitiGent les soupçons que peuvent faire naître les ecchymoses pu
�(
J7
)
dépression du cou. Ces phénomènes sont la couleur bleuâtre de la faCc/
les lèvres, les yeu x livides, la teinte violàcce de la peau , mais princi
palement l’engorgement considérable
des
vaisseaux pulmonaires et
cérébraux.
v Les poumons so n t, clans ce cas, dit M. F o d é r é , gorgés de sang
« livide ; le poumon droit sur-tout en regorge; les cellules pulmonaires
« sont distendues. »
« Ambroise-Paré d i t , à ce sujet, q u e, si l'etranglement a lieu pen
te dant la v ie , la tête et la poitrine sont remplies de sang. »
Littre rapporte, dans les Mémoires de l ’Académie des Sciences, en
qu’ une fem m e,
qui fut étranglée par deux liommes qui lu i
serrèrent la gorge avec les mains, présenta à l ’autopsie les poumons
extrêmement distendus par l’a ir, et la membrane qui les enveloppe
gorgée de sang.
Il est bien évident que si Courbon avait succombé à ce genre dé
m o r t , on aurait trouvé un engorgement considérable des vaisseaux
pulmonaires , des impressions sur le cou , des ecchymoses , etc. O r , tout
ceci n’a pas etc* rencontré ; donc on ne peut pas raisonnablement supposer
q u ’ il ait clé étranglé ou pendu (car les phénomènes sont les mêmes dans
les deux cas).
E n rédigeant cet article , je ne puis m’empêclicr de blâmer les sugges
tions que fait un médecin au substitut du procureur du Roi. Courbon
ne p u t - il pas, d i t - il , être suffoqué p a r u n mouchoir ou autre corpâ
tenu long-tcms sur la bouche et sur le nez? Ce médecin n’ ignorait p a s,
sans d o u te , qu’ un homme de loi est trop étranger aux phénomènes do
la vie , pour pouvoir apprecier les diflerenccs que l’ on doit trouver dans
tel ou tel genre de mort. Il devait bien savoir lui-même ,
que les
caractères de l'apoplexie ne sont pas du tout semblables à ceux de la
luxation , de la strangulation ou de la suffocation ; et , s’ il eut fait
attention au rapport de M. T h o m as, il aurait vu qu ’ il n’y avait rien
qui piU s’ollier à l’idée de suffocation ou de strangulation.
M a i s passons h la d e r n i è r e s u p p o s i ti o n q u e l ’ on p o u r r a i t faire ,
c ’ es t - a - d irc , a c e llo r c l a t i v o à u n e s u f fo c a tio n p r o d u i t e p a r u u c o r p s
m a i n t e n u su r la b o u c h e et su r le n e z.
L ’état du cadavre de C o u r b o n , les phénomènes q u ’ il a p r é s e n t é s ,
p e uvent-ils, en quelque m anière, être alliés à l’ idée de suffocation?
l'io n , sans doute. Ce genre de moit e u tra iu e , duus l’état des organes
3
�(
>8
)
intérieurs, <ïes changemcns si remarquables, qu ’il est impossible de s 'f
méprendre. E n effet, ici l ’engorgement des vaisseaux du poumon est
extrêmement remarquable; les cavités droites du cœur sont gorgées de
sang ; les vaisseaux arrosant les viscères abdominaux sont eux-mêmes;
distendus; les vaisseaux cérébraux sont le plus ordinairement, engorges ;
cependant ils ne le sont pas toujours, comme l’a démontré D chue.
« Dans l ’asphysie, dit B ello c, médecin légiste , on trouve les vaisseaux
« cérébraux et pulmonaires engorgés de sang; la teinte générale est
« liv id e , etc. ; enfin on observe presque tous les phénomènes propres
« à la strangulation (les locaux exceptés). »
O r , à l ’autopsie de C o u r b o n , 011 n’a remarqué aucun engorgement
du p ou m on , du cœur ou des vaisseaux abdominaux; doue il n’est pas
mort suffoque.
Il me semble incontestablement p rouvé, i° que Courbon a succomba
a 1 a p o p l e x i e , à l a q u e l l e sa c o n s t i t u t i o n et ses h a b i t u d e s l ’a va ient p r é
disposé; 2° que la p >sition d u c a t la v ie 11’ é t a it pas i n e x p l i c a b l e . et n(l
devait pas faire présumer un crim e; 3 ° qu ’ il n’a éprouvé ni l u x a t i o n , ,
ni strangulation , ni suffocation ; 4° que par conséquent il n ’y a pas eu
de d é l i t , et qu’ il n’y a pas de coupables.
Puissent les ju g e s , sous les yeu x desquels ce mémoire doit être placéj
partager la conviction intime que j ’a i , qu ’il n ’y a pas eu de d é l i t , et
rendre à leurs familles des m alheureux, victimes d ’ une erreur judi
ciaire !
’
Fait par nous soussigné, Adolphe Richond , du P u y ( lla u l c - L o i r e ) ,
sous-aidc-major à l’hôpital militaire d ’ instruction de Strasbourg.
A Strasbourg, le i 5 uovembre 1820.
Signii A .
R
ic h o n d
.
V u pour la légalisation de la signature «le M. Richond, chirurgien
sous-aide à l ’hôpital militaire de Strasbourg. L e sous-intendant militaire,,
«igné Siot'jiLi'W.
I.r. professeur, soussigné, de médecine légale et des maladies épidé
m iques, à la faculté de médecine de Strasbourg, après avoir pris
c o n n a is sa n c e ,iu Mémoire ci-dessus, en approuve en entier le contenu ;
e t , après avoir examiné les procès-verbaux de MM. 1« j"g e de paix et le
médecin , relalils à l étal où ils onl trouvé le corps de Courbon , il estime
�pa re illem en t q u e c e lu i-c i est m ort a p o p le c t i q u e , et q u ’ il n 'y a a u c u n e
raison pour recourir à une autre cause.
Strasbourg,, le 19 novembre 1820.
Signe F , E . F o d l r é .
V u à la mairie de la ville de S tras b o u rg , p o u r légalisation de la
signature de M . E . F o d é r é , apposée d ’ autre part.
A S tr a s b o u r g , le 20 novem bre 1820, Signe T lacii , adjoint.
V u p o u r légalisation de la signature de M . F l a c l i , adjoint du maire
de la ville de Strasbourg. A S tr a s b o u r g , le 20 n o vem b re 1820. P o u r le
p r é f e t , le secrétaire général d élégu é , signé V i l d e r u e l t .
C
onsultation
de M .
C aizeu gu es.
L e so u ssign é, professeur de m édecine légale à la fa culté de médecinô
d e M o n tp e llie r , a pris une connaissance approfondie des
diverses
pièces
précil élis ; il a m û rem en t réfléchi sur toutes 1rs circonstances qui Oilt
précéd é la mort de C o u rb o n ; il a sur-tout pris en considération l’état
et la position dans lesquels le cadavre a été trouvé ; il a lu avec la plus
grande attention le M ém oire de M . A d o lp h e R ich o n d ; il a analisé ,
avec l’exactitude la plus sc ru p u le u se , tous les faits qui y sont exposés
avec autant de m éthode qu e de précision , ainsi q u e les motifs q u i
a p p u ye n t le jugem ent qu e M . R ic lio n d a émis sur le genre de m ort
du nommé C o u rb o n .
D ’après toutes ces co nsidératio ns, le soussigné
estime
:
Q u e îles preuves m u ltipliées autorisent à reconnaître q u e le nom m é
C >nrbon a succom bé à une m ort natu relle d éte rm in ée par une nttaqun
d ’.ip o p lex ie, occasionnée ellc-in èm e par un excès eu liqueurs spiritueiisf>$, et q u ’ il n’ existe a ucun in d ice qui puisse porter à attrib ue r
ce lle mort à des violences extérieures.
L e sous,i{rm'. sc permettra d 'a jo u ter aux preuves q u ’ 011 a d éjà établies
de l’apoplovii) vineuse chez C o u rb o n , celles q u ’on peut tirer de l’état
de contraction ou d«> rigidité q u 'o n t oil'cil les membres du c a d a v r e , qu f
co iuervait encore un reste de c h a le u r , d ’après le p ro c ès-veib a l de M. lo
ju g e de paix.
Ou lil dans ce procès-verbal, cju’ on a tcaté saus succès de douncr au
�1
{ ‘c
(..)
corps de CourLon une position plus naturelle ( q u e celle qu’il avait dans
sa cliutc ) ; que les membres étaient généralement roides..............
Il est reconnu, en effet, que dans l ’apoplexie qui est la suite de
l ’ivresse, les membres sont affectés d’un état de roideur convulsive. Ce
sym p tôm e, l ’état convulsif, qui est propre à cette espèce d’apoplexie ,
est parfaitement décrit dans cet aphorisme du père de la médecine, q u i
dit :
S i q ui s e x ebrielate voce prive tu r , coiwulsus moritur................
Ai'ii. v , sect. 5 .
O n sait que la perte de la v o i x , ou l ’a p h o n ie , est une expression'
synonime d’apoplexie, dans les Œ u v r e s d’ IIippoerate.
O n sait aussi, et une observation constante nous l ’a appris, que les
muscles conservent de la rigidité à la suite des morts subites et con
vulsives.
V o y e z les T lp ist. a n a t. m e d . d e M o r g a g n y .
O n peut donc assurer que'la rigidité des membres, qu’on a observée'
dans le cadavre de C o u r b o n , rigidité qui peut rendre raison de la
situation singulière de ce c o rp s, doit servir à corroborer les preuves de
la mort par apoplexie vineuse, et à éloigner toute idée de luxation des
vertèbres cervicales. Cette luxation , que l ’on a supposée sans aucun
indice qui pût en justifier le moindre soupçon, loin d ’amener la rigidité
et l’état de contraction des m uscles, détermine nécessairement un état
tout opposé dans ces organes, c’ est-à-dire le relâchement et la paralysie.
Ce (ju’on pourrait objecter de l’état d ’crection de la verge, qu’on a.
remarqué chez les pendus et chez les individus qui ont r e ç u une lésion
insolite et subite de la moelle épinière , ne saurait infirmer notre
assertion, fondée sur l’expérience, puisqu'on même tems qu’ il se ma
nifeste un état spasinodiquc des organes génitaux cliez les sujets qui
éprouvent de fortes compressions ou autres lésions de la moelle de
l ’é p in e , il existe un relâchement paralytique des muscles et des autres
parties situés au-dessous de l’endroit de la moelle épinière, qui reçut
la lésion.
Consultez, sur ce phénomène, M arcellus D onalu s, Pechlin, Iluiscli j
Rain.iz7.iui, l’acch ioni, Sam. Musgravc , etc.
Délibéré à M ontpellier, le i 5 février 1821.
CAIZEnCVES.
�C o n s u l t a t io n s
et
C.
de
C.
M M .
II.
J.
A u g.
Lucas
M arc.
J. Atig. L tjc a s , membre titulaire de l’académie royale de médecine y
clievalier des Ordres de Saint-Micliel et de la L é gio n d ’iio n n e u r ,
premier médecin de S. A . R .
M
adam e
, duclicsse d A n g o u le m e , ins
pecteur des eaux de V icliy ;
E t C. C. H. M a k c , membre titulaire de l ’académie royale de méde
c i n e , médecin ordinaire de S. A . S. Monseigneur le duc d ’OiiLLANs,'
membre du conseil de salubrité, directeur des secours aux noyés et
asphyxiés, médecin juré-expert près la Cour royale du département de
la S e i n e ,
A
vons
e x a m in é
Av e c
i .a
n/us
g ran de
a t t e n t io n
,
i° U n e copie d u
procès-verbal dressé, le 8 septembre 1 8 1 7 , par M . le juge de paix du
canton de Montfaucon, département de la Ilau te-L oire, constatant l ’état
dans lequel on a trouvé le cadavre du nommé Courbon, que l’on a
p r é t e n d u a v o i r é t é assassiné ;
2 0 (Jne copie du rapport du médecin qui a été chargé d’examiner
le cadavre ;
3° U11 dessin représentant l ’attitude dans laquelle on a trouvé 1q
cadavre de C ourb on, dessin exécuté par ordre de l ’autorité judiciaire ;
4 ° U n e notice sur ce qui a suivi la condamnation des nommés
G alla n d , Rispal et Tavernicr ;
5° Enfin une copie d ’ iiu mémoire m édico-légal, concernant celle
affaire, rédigé par M. l l i c h o n d , sous-aidc-major à l ’hôpital militaire
d ’ instruction de Strasbourg, et approuvé par M. F o d é r é , professeur
d e médecine légale a Strasbourg.
C ’est sur ces matériaux, que M. M o n te llic r , avoué-licencié prés lo
tribunal de première instance séant au l*u y ,
ancien défenseur à la
C o u r ciimiiielly du département «le la Ila u le-L o ire , désire que les
médecins soussignés fondent leur o p inion, et déterm inent,
i° Si la mort du nommé Courbon a été naturelle , ou s'il y a eu
homicide ;
20 Quel a été le genre do mort du nommé C ourbon?
L es médecins soussignés se seraient livrés à une discussion détaillée
et approfondie des faits de leur com pétence, dont sc compose c e tu
�'(
22
)
malheureuse affaire, si ce travail n’avait déjà été exécuté avec un véri
table talent, et sur-tout avec beaucoup de clarté, par M. Richond,
E n effet, ils ne peuvent rien ajouter à ce qu ’a dit ce jeune m édecin,
qui a épuisé les argutnens les plus incontestables pour faire valoir son
opinion; ils sc borneront en conséquence à établir la leur d ’une manière
plus sommaire sur ces mômes argum ens, dont ils essaieront de faire
ressortir les plus saillans.
L a cause dont il s’ agit leur présente, avant to u t, une particularité
dont les annales de notre jurisprudence criminelle n’ offrent peut-être
p a s, jusqu’à ce j o u r , un second exemple : c’est l ’absence de tout corps
de délit.
Les causes criminelles où une accusation érronée d ’homicide a été
accueillie, et quelquefois même confirmée p a r le s tribunaux, ne sont
malheureusement pas rares ; mais dans toutes les causes, l ’opinion
matérielle des j u g e s ¿ t a i t du moins c o n s t a m m e n t en h a r m o n i e a v e c les
résultats de l’expertise m é d i c a l e ; e t si d es persécutions, si même des
meurtres juridiques ont été commis , c ’est à l’ignorance, à la légèreté,
en un m o t, aux erreurs des premiers experts qu ’ il faut les attribuer.
Ainsi , pour nous en tenir à un seul des exemples rapportés par
M . Richond, les enfans de Chassagncux , de Montbrison , n’eussent
pas subi une première condamnation, si le chirurgien chargé de cons
tater le genre de mort de leur père n’eùt pas déclaré qu ’il y avait eu
mort violente.
Dans l’affaire qui nous o c c u p e , tout le contraire a ou lieu. M. le
docteur Thom as, seul homme de l’art qui ail examiné le cadavre d'uue
manière formelle, déclare non seulement qu ’il n’a découvert aucune
trace de violence extérieure, mais il indique en outre la véritable cause
de la mort, q u ’ il regarde comme n a t u r e l l e . C e p e n d a n t , bien q ue, pur
cette déclaration, tout corps de délit soit e x c lu , deux pères de famille
sont condamnés à la plus forte des peines allliclives et infamantes, après
la peine capitale , et un
troisième à une peine aillictivc. Quelle
monstruosité ! ...........
Jusque-là notre cœur seul a p urlé, et la source de nos raisonnemens
a été ce bon sens, apanage do tous les hommes doués d’un jugement
sain. INous nous sommes dit : U n premier expert, le seul qui ait
examiné le cadavre, „ ‘y u p„s découvert de traces de mort viólenle;
donc il »’y a Pas <1° corps de délit; donc personne ne peut être acçuscr
�et encore moins convaincu d ’avoir commis un crime dont il n’exislc
aucune trace physique.
Mais il "«»s reste maintenant à examiner, sous le rapport de l ’a rt,
si celte absence d’ un corps de délit a ¿lé réellement établie par les faits
observés et par les inductions que l ’on a tirées de ces faits. Cet examen
sera trèt.-sommaire , et n’offrira principalement que les corollaires des
.travaux des hommes de l ’art, qui, dans l ’espece, ont observé et prononcé
avant nous.
Les phénomènes qui excluent toute supposition d’ une violence exté
rieure et mortelle sur C o u r b o n , sont essentiellement ceux-ci :
i° LVhsence de toute trace de compression, de contusions ou do
lésion quelconque à la surface du-cadavre.
2° L ’absence d’ un désordre quelconque dans les vélemens du défunt J
il es t en effet impossible qu’ un homme doué sur-tout, tel que lui ,
d une constitution athlétique, n’ oppose pas à ses assassins une résistance
quelconque , résistance dont tou jours il se manifeste des vestiges par le
désordre des vêtemens. Cette résistance, quelque faible que soit l ’iudiv i d u , a constamment lie u , à moins rji»e l’iioniiuiclo ne s’opère par un
m oyen i n s t a n t a n é m e n t m o r t e l , com m e, par exemple, un coup de feu ,
un coup de poignard, un coup de massue, etc .; mais, dans l ’espèce,
il n'a jamais été question de pareils m oyens; on a parlé, au contraire,
de l ’exécution du plus difficile de tous, de celui qui exige le plus do
force et d’adresse étrangères, en même teins qu’ il suppose le plus do
résistance de la part de la victime : nous voulons parler de la luxation
des vertèbres cervicales.
3 ° U n concours de phénomènes cadavériques, indiquant d’ une ma
nière non équivoque que Courbon est mort par l’effet d ’ une apoplexie ;
ces phénomènes sont la lividité de la face , l ’ injeclion des vaisseaux do
lu tunique albuginee des deux y e u x , le gonûemcnt de la langue, l'e n
gorgement des vaisseaux cérébraux.
4 " I/alisenee <le tout aulrc désordre intérieur auquel la morl aurait
pu être at tri|>uée.
5° Un ensemble de causes prédisposantes et occasionnelles propres h
déterm iner l'apoplexie».
Aux premières appartiennent la constitution athlétique du défunt, lu
largeur de scs épaules, le peu de longueur de son cou et la grosseur d«
sa téle.
�(
4
)
Parmi les secondes il faut compter l ’intcmpérancc habituelle dô
C ou rb on , intempérance q u i , il ne faut pas en dou ter, a été une des
occasions principales de sa m o rt, puisque son estomac contenait unu
assez grande quantité de liqueurs fennentées, et qu ’il y avait eu régur
gitation de cette liqueur par la cavité buccale, et jusque sur les vêtemens
du défunt.
U n e autre des occasions principales de la mort de Courbon a été la
position dans laquelle on a trouvé son corps. Cette circonstance est
digne d ’ une attention d’autant plus grande, qu ’elle paraît avoir donné
lieu à des inductions funestes aux malheureux condamnés, bien qu ’elle
concorde parfaitement avec la totalité des faits qui établissent quo
Courbon a succombé à une attaque d’apoplexie.
Cette position effectivement était telle, qu’elle devait augmenter les
obstacles au retour du sang de la tête , puisque celle-ci était plus basse
que le reste du corps ; que le poids de ce dernier portait sur le cou , et
que la téte était courbée sur la poitrine.
Si maintenant nous nous enquérons des causes qui ont pu déterminer
l'attitude dans laquelle a été trouve C ourbon, il faut d ’abord en excluro
toute supposition qui tendrait à établir que cette attitude lui aurait été
donnée après la mort. 31. Richond en a trop bien exposé la raison ,
pour qu’ il soit nécessaire de nous arrêter plus long-tcms sur co point.
Mais s i , au contraire, on compare cette position avec celle que l’on
est à même d ’observer tous les jours sur des individus q u i, dans un état
d ’ivresse c o in p le tlc , ont le malheur de faire une c h u te , on s’explique
parfaitement,
et de la manière la plus naturelle, la situation dans
laquelle a été trouvé le cadavre de Courbon.
Lorsqu en effet un individu
ivre tombe la face contre terre , il
cherche a se relev er, cl 011 le voit alors ( q u ’ o n n o u s passe celte ex
pression triviale, mais pittoresque), marcher à quatre pattes, à reculons,
et faire des efforts pour soulever son tronc et sa tête. Si l’ ivresse est
com plettc, il arrive alors q u e , scs efforts devenant vains, l ’ ivrogne fait
de sa tête un point d ’a p p u i , tandis que les muscles des lombes et des
extrémités inférieures agissent seuls, de sorte que le corps entier formo
un angle plus ou moins a i g u , dont le bassin est le so m m et, et dont
la tête et les genoux, ou bien les pieds, sont les extrémités inférieures
des cotes. Si dans ente* posture, qui n é c e ssa ire m e n t d o it augmenter
Vulllux du sang vers le cerveau , il survient une apoplexie foudroyante,
�(»5 )
l a corps peut rester dans la posture où la mort l ’a surpris (t). C ’est bien
certainement ce qui est arrivé à C o u r b o n , soit q u e , tombé accidentel
lem ent, et la tête en avant dans le fossé , il ait tente sans succès de se
relever, soit q u e , descendu dans une intention quelconque dans le
fossé, il y ait fait une chute. D ’ailleurs, en consultant le dessin joiut
aux pièces, ainsi que le procès-verbal du juge de p a ix , on trouve que
îa nature du sol a dû favoriser cette posture; il était m o urant, et la
partie supérieure et postérieure de la tête s enfonçant un p e u , et por
ta n t, ainsi que le c o u , sur une des parois du fossé, cette circonstance
a dû rendre le point d’appui plus fix e , et en augmenter la solidité.
Dans les pièces qui nous ont été soumises, nous trouvons qu ’ il a été
supposé qu ’ une luxation des vertèbres cervicales avait eu lieu. 11 paraît
m ê m e , d ’après un passage du Mémoire de M . R i c h o n d , que c’ est
principalement sur celte supposition que la condamnation a etc basée.
•
Mais., outre que le rapport du médecin qui a examiné le cadavre ne
fait aucune mention d’une luxation p a re ille , eût-elle même existé, il
faudrait encore ne l a c o n s i d é r e r <jne c o m m e u n eflet de l a c h u te ; car
elle n’ e û t pu ê tre effectuée par des mains homicides , chez un sujet
aussi robuste que C ourb on , sans laisser des traces de résistance de la
part de la victim e, et d’efforts violens de la part de ses meurtriers.
Toutefois, l ’état dans lequel a été trouvé le cadavre de Courbon
établit incontestablement qu ’il n’y a eu de luxation sur aucun point
de la colonne vertébrale. S i, en cfl’e t , ce genre de lésion avait eu lieu ,
la paralysie générale qui s’en serait suivie eût déterminé instantanément
un affaissement de tout le corps,
qui n’ eut pu alors conserver la
position dans laquelle il a été découvert ; et le
ballotcmcnt des
membres, de la tête sur-tout, eût élé d’ autant plus sensible, lor;q u ’on a relevé le cad avre, qu’ il conservait encore de la chaleur. Cette
vérité est tellement démontrée par les faits, et entr’autres par les
recherches du c é l è b r e L o u i s ( M é m o i r e sur une q u e s t i o n de jurispru
d e n c e , e t c .,
( 1) L e »
ra rc».
17 6 3 ), qu ’elle seule suffit pour nous dispenser d’insisler
e x e m p le » d e c o p e n r e , «prJ-s île » a p o p le x ie » f o u d r o y a n t e s ,
N ous
c ite ro n »
e n t r ’ n u tie s
f a m i l l e , a v a it a p p ity c s o n
c e lu i
il’ un
> ic illa n l
fr o n t .u r ses m a in » c r o i s é e ) ,
q u i,
n e s o n t pa s t r è » -
é t a n t an s p e c t a c le
l o g e . O 11 c r u t q u 'il »’ éta it e n d o r m i ; m ais a p rè s la fin d e la r e p r é s e n t a t i o n ,
« 'a g it d e s’ e n a l l e r , o n s ’ a p e r r u t «ju’ il » y a jt ç ç s s g
4
«T e c »a
e t s c s c o u d e s su r le b o n i <!<■ >«
il’ ç ji s i e j- ,
e t lo r s q u 'il
�plus longuement sur l'examen d ’un point que M . Richond a ¿ ’ailleurs
discuté de la manière la plus satisfaisante.
,:..0
Nous ne nous arrêterons pas à examiner si Courbon a pu périr p a r
suffocation ou par strangulation ; r i e n , dans les pièces qui nous ont
été soumises , n’en établit même le plus léger indice. A u reste ,
M . R ic h o n d , qui a surabondamment posé ces questions, les a résolues
négativement par des argumens irrésistibles, et auxquels nous ne pour
rions rien ajouter.
*
* A in s i, tout bien considéré, les médecins soussignés concluent de la
manière la plus positive, et avec une certitude mathématique ,
i ° Q u e la mort de Courbon a été naturelle, c’est-à-dire qu’elle n ’a
pas été le résultat de violences quelconques exercées, par des mains
étrangères, sur sa personne ;
20 Q u e la mort de Courbon est uniquement due à une attaque
d ’apoplexie, laquelle attaque a été probablement foudroyante, et pro»
y o q u é e , d ’une p a r t , par une disposition naturelle de son organisation r
e t , d ’ une autre p a rt, par un état d'ivresse, ainsi que par la position
de son c o rp s, position q u i a été une suite de la chute déterminée pas
ledit ctat d ’ivresse.
P aris, le i 3 mars 1821.
Signé M a rc .
A u g . L ucas.
�(
L e ttr e
27
)
d e 3 1 . R ic h o n d à 3 1 . 3I o n te lh e r .
M o n s ie u r ,
E n même tems que les diverses pièces que volts m’avez fait l ’honneur
<le m’adresser, j’ai reçu une note contenant quelques réflexions relatives
4 la position de Courbon. Vous ine demandez la solution d ’ une question^q u e vous craignez qu'on vous adresse, qu’on vous a déjà faite, et qui est
celle-ci : Savoir si Courbon, homicide, aurait pu recevoir de la main de ses
assassins, et conserver la position dans laquelle on l ’a trouvé. Je croyais
avoir suffisamment dém ontré, par mon M ém o ire , que nulle autre causa
.que l ’apoplexie n’avait pu mettre fin à l’existence de Courbon ; e t , en
supposant successivement les derniers genres de niort violente auxquels
i l pouvait avoir succom bé, j ’ai fait voir que des phénomènes, autres que
Ceux qu’on a trouvés, eussent été observés dans ces cas. A l ’article assez
long relatif à la position de C o u rb o n , je croyais avoir prouvé-que la
lu x a tio n des vertèbres cervicales , en paralysant les muscles de presque
toutes les parties, aurait dû s’opposer à cet état de roideur qu ’on
o b se r v a , et lequel était incompatible avec l ’existence d’ une luxation :
je croyais donc avoir prévu toutes les objections. D ’ailleurs, après la
\ lecture attentive des mémoires, par lesquels la mort naturelle de Courbon
est démontrée m athém atiquement, je ne conçois pas qu ’on puisse pré
senter de pareilles objections, qui tendraient à remettre en question le
point généralement adopte. Q ue nous importe , en e ffe t, qu ’ un cadavre
p û t ou non prendre, la position qu’avait C ourbon? Q uelle induction
pourrait-on tirer de cette concession? Pourrait-on en conclure q u ’il y a
eu homicide? U n e supposition gratuite, vide de sens, pourrait-elle
c o n t r e b a la n c e r, dans l'esprit des ju g e s , les preuves si nombreuses qui
.constatent In vérité? P u isq u e le ju g e m e n t i n i q u e , qui a ravi à trois
pères de famille les biens les plus précieux, l ’honneur cl la lib e rté , a
été porte sans p r e u v e s , sans corps de d élit ; puisqu’au mépris de l’avis
du médecin-expert et des autres consultans, l ’idée d’ un crime u’a pu
it r e détruite ; qu’elle a résisté, dans l’esprit des hommes p r é v e n u s, i
toutes les preuves les plus convaiucanles, il ne serait pus impossible qu®
�l ’erreur trouvât aujourd'hui des prosélites ; que le hon sens et I’équîté
fussent foulés aux pieds , et qu ’au mépris de tout ce qui est sacré,
l'injustice prévalût. L a prévention tien t, en e ffe t, la premier rang
parm i les faiblesses humaines ; e t , comme le dit M . C h o m el, la vérité
n'a p lus'de charmes pour celui h q ui l'erreur a su plaire.
Mais quel
puissant m o tif pourrait porter à employer toutes les
ressources de la chicane , et à ne vouloir apercevoir la vérité , que quand
on sera ébloui par son flambeau?
> Serait-ce pour assurer la perte des malheureuses victimes de l ’oppres
sion? P our s'étre tro m p é, croirait-on devoir défendre l'erreur? P ou r
avoir été trom p é, faudrait-il devenir coupable? INon ; j’écarte loin de
moi ces idées affligeantes ; je me plais h croire q u e les juges, commis à
l ’examen de l’affaire à laquelle je m ’intéresse si v iv e m e n t, seront équi
tables , e n n e m i s de l ’oppression , et qu'ils se rappelleront q u ’ in t e r p r è t e s
de la loi , ils n e d o i v e n t user d u g la iv e v e n g e u r , q u e q u a n d ils ont pebO
avec soin toutes les p r e u v e s ; q u a n d , a près a v o ir e x a m i n é scrupuleuse
ment les f a i t s i l s ont acquis une certitude mathématique ; et sur-tout
q u ’ ils sauront se prémunir de cet esprit de prévention, qui fait qu ’ore
considère presque toujours coupable celui qui n’est encore qu’accusé.
s
S o n » l e c o u p a b le e ffo r t d 'u n e n o ir e i n s o le n c e ,
T h cm L s a v u c e n t fo is c h a n c e le r sa b a l a n c c -
T)it Despréaux. Osons espérer que nous n ’aurons pas d’ application &
^ faire de ces vers, et que bientôt une réhabilitation entière permettra»
aux malheureux accusés de goûter le repos et le bonheur.
Mais dans une aiTairc si i m p o r t a n t e , qui doit si vivement intéresser
les amiâ de l’h u m a n ité, on serait coupable , je crois, de négliger un seul
des nombreux moyens propres à faire ressortir la vérité, à détruire le
prestige de l’erreur, et à briser le prisme de la prévention*
C ’est pour cela q u e , quoique les preuves que j ’ai déjà données ailleurs
me paraissent assez fortes pour établir la non culpabilité des accusés, jo
crois devoir uborder la question relative à la position , et tâcher do
démontrer q u e , dans aucuu cas, cllo ne peut être alliée à l'idée d ’ un
homicide.
�( 2i) )
L a question se r é d u it , je cro is, à celle-ci :
C o u r b o n , assassiné, aurait-il pu recevoir des mains*de ses assassins,
et conserver la position dans laquelle il a été trouvé ?
Je réponds par la négative. Je crois entièrement impossible q u ’ un
cadavre puisse conserver une position semblable, liors les cas analogues
à ceux de Courbon ; c'est-à-dire que celte position ne peut pas être
conservée, après avoir élé donnée après la m ort, si tant il est vrai qu’on
eut pu la donner. L ’ observation de ce qui se passe sur les cadavres suflira
pour convaincre de la vérité de ma proposition.
Après la m ort, c’est-à-dire après l ’extinction de celte propriété, en
vertu de laquelle le corps qui en jouissait était soustrait à l ’empire
absolu des lois physiques ordinaires, le corps humain partage les attributs
des autres co rps, et rentre sous l ’empire des lois physiques.
E n o u tr e , après la m o r t , il se développe de la r o id e u r , laquelle
présente cela de particulier et de différentiel, qu ’ une fois détruite, elle
ne reparaît plus. Ce phénomène paraît à des époques variables, suivant
le genre de m ort, l ’â ge, la c o n s t i t u t i o n d u sujet, l ’état atmosphérique ,
la disparition plus ou moins rapide de la chaleur. Quelques professeurs,
et entr’autres M M . Louis et F o d é r é , admettent que la rigidité cadavé
rique commence à se développer immédiatement après la m ort, malgré
l ’existence de la chaleur; mais en lisant attentivement divers autres
passages de l ’excellent Traité de ce dernier professeur, on voit qu’ il
admet que ce phénomène est susceptible de beaucoup de variations, et
q u ’ il est subordonné aux circonstances dont j ’ ai déjà parlé. O n peut
opposer à l’opinion exclusive de Louis , celle du nouveau professeur de
médecine légale de Paris,
M. Oriîla 7 q u i , dans les cours p ub lics,
enseigne que la rigidité cadavérique ne commence jamais à paraître
qu ’après la cessation de la ch aleur, à moins qu ’elle ne soit le résultat
immédiat de la m o r t , et qu ’elle n’ait paru avec elle , comme dans
quelques apoplexies, catalepsies, etc. Je pourrais rappeler l’avis d u
célèbre fheh a t, qui prétend, dans quelques circonstances , n’avoir pas
vu se développer ce phénomène, et celui de l’ illustre phisiologiste H uiler,
q u i , dans son xxx*
liv re ,
I)e M o rte , s'exprime de la manière suivante :
Sæ pè antô rigorem mors perfeetn est; et in proprio v iili puero nullunl
esse rigorem citm tertio jwst morlcm die sepcliretur. Mais on d o i t , je
�crois, rejeter toute opinion exclusive ; et l'examen d ’ un grand nombre
de cadavres m’a permis d'observer que l ’invasion de la roideur >arie
beaucoup ; qu ’elle se manifeste à des époques différentes chez des sujets
de môme con stitution , et placés dans les mêmes circonstances ; mpis
q u e , dans presque tous les c a s , la chaleur et la roideur étaient en raison
inverse l ’une de l ’autre ; qu ’ainsi la roideur augmentait à mesure que la
chaleur diminuait. Mais ce que je dis ici n ’est relatif qu ’aux sujets
morts de maladies plus ou moins’ longues; car la cause de mort subite
fait varier ce phénomène ; et c ’est sur ce point que tous les auteurs sont
d ’accord. M. Fodéré dit que souvent on voit des sujets morts,d’hémor
ragies, de vo m iqu es, présenter instantanément une roideur extrê m e,
et conserver la position qu’ ils occupaient dans des chaises, etc. Morgagny,
dans son ouvrage D e sed. et caus, M o r b ., présente beaucoup de faits
semblables ; et M M . Marc et L ucas en ont cité un exemple dans leur
Mémoire. lïippocrate dit qu ’après les apoplexies , pt sur-tout celles qui
succèdent à l ’ivresse, il existe souvent un ctat de contraction spasmodique
des membres, et l’observation journalière vient appuyer ces faits. A i n s i ,
on observe cette roideur spontanée chez les cataleptiques, chez les
asphixiés; m ais, comme je viens de le dire , elle est instantanée, parait
aussitôt après la m o r t , et ne doit pas être considérée comme un phéno
mène cadavérique : elle est en effet le résultat d ’ une dernière et forte
contraction des muscles, laquelle se prolonge et se confond plus tard
avec la véritable roideur cadayérique ; c ’est dans ce cas , ainsi que dans
le tétanos, que pourrait être admise l ’opinion de feu M . Nystcn , qui
prétendait que la roideur cadavérique était le résultat d ’ une action
vitale.
Mais quand la mort a ¿té le résultat d ’ une cause qui a agi en portant
ptteinte au principe de la contractililé m usculaire, telle que la luxation
des vertèbres, la comm otion, etc. , les muscles restent beaucoup plus
lon"-tems à devenir roides, et ne le restent que pejj de tems. L es
membres deviennent mous et flasques au moment de la m o r t, cornmo
l ’a observé J^ouis, sur les suppliciés par la co rd e , qui succombaient
presque toujours à une luxation des vertèbres, quand ils étaient exécuté»
par le bourreau de Paris,
Dans les asphixics qui ne sont pas suivies de roideur spontanée, Jn
p â l e u r restant assez forte pendant lo n g -tein s, il c*1 résulte quo la
�roideur cadavérique ne doit se manifester aussi que très-tard ; et crest ce
que l ’observation démontre.............
O r , faisons l ’application de ces faits à l ’examen de la position du
corps de Courbon.
E n supposant qu'il a été assassiné (chose que j ’ai démontrée impossible),
il faudrait admettre qu’il a succombé à la luxation des vertèbres, ou à
l ’aspliixie par suffocation.
O r , dans ces deux c a s , la roideur cadavérique n’aurait dû se montrer
que très-tard ; et, à l ’époque à laquelle on trouva le cadavre de Courbon ,
elle n’aurait pas p u être com plète, puisqu’il était encore chaud. I l
aurait donc été absolument impossible aux assassins de faire conserver à
Courbon la position que sa flexibilité pouvait permettre de donner. O n
a v u , en effet, quelle était cette position : elle est des plus forcées ; le
poids du corps repose sur la n u q u e , tandis que le bassin, les extrémités
inférieures sont soutenues par l ’extrémité d’ un pied fortement tendû et
u n genou. O r , cette position exigeait de fortes contractions, et le
consensus d ’action de p r e s q u e tou s les m u s c les p o u v a i t s e u le la faire
conserver. U n cadavre flexible, obéissant à la pesanteur, ne pouvait
donc pas être placé de la sorte et y rester; l ’affaissement du corps vers
le sol se serait infailliblement opéré, et la chute se fût opérée en avant
ou sur les côtés. T o u t le monde a sans doute éprouvé ce fourm illem ent
et cette pesanteur dans la )ambc , après la compression des nerfs qui s’y
distribuent. S i , dans cette circonstance, on veut prendre un point
d ’appui sur ce m em b re, il fléch it, ne peut soutenir le poids du corps ;
et la chute s’opérerait, si le centre de gravité n’était aussitôt transporté
sur l ’autre membre.
O r , ici il n’ existe qu’ une paralysie momentanée et partielle des
muscles de la jambe ; et combien plus marqué doit être cet affaissement,
q u a n d , par la m o rt, toutes les puissances musculaires sont privées de la
contractilito I
D ’nilleurs, pour pouvoir supposer la conservation de cette p o sitio n ,
il faudrait admettre dans le cadavre des manières d ’être qui se détruisent
et sont opposées>Huno à l’autre; il faudrait q n’il existât en même teins
flexibilité et roideur; flexibilité, pour pouvoir trousser ainsi le cadavre;
roideur, pour que la position donnée pùt être conservée. O r , non«
savons déjà qu’ une fois la roideur détruite par les efforts qu’on a faits, et
�( 3* )
les tractions exercées sur les membres., elle ne reparait plus. Il est donc
impossible, en supposant flexibilité .ou roideur du cadavre, que la
position eût pu être donnée et conservée. D ’ailleu rs, si le cadavre
n ’avait été p la c é , dans cette position d éclive, qu’ après un assassinat,
011 n'aurait pas dû trouver cette lividité de la fac e, cette injection deç
y e u x , ce gonflement de la lan g u e ,
qui attestent que la mort s’est
effectuée dans cette position.
Veut-on admettre j malgré toute l ’absurdité d ’une semblable suppo
sition , que les assassins, après avoir placé le cadavre dans le fossé1,
l ’aient maintenu en équilibre et dans la position observée, jusqu’à co
que la roideur survenant l ’ait ainsi fixé. Mais, comme nous l’avons d i t ,
en admettant l’h o m icide, la roideur aurait dû se manifester plus tard ;
et peut-on raisonnablement admettre que des assassins aient reste pen
dant aussi long-tems p r è s de leur victime , froids o b s e r v a te u r s des
phénomènes c a d a v é r i q u e s ? P c u t - o n p e n s e r q u e d es paysans, étrangers il
toutes les connaissances médicales, aient pu présumer que la position
donnée à Courbon ferait naître l’ idée d ’apoplexie, et écarterait cello
de meurtre? A u mépris des dangers qu !ils couraient, auraient-ils été
transporter ayec effort le cadavre, précisément contre une h abitation,
dans uu fosse attenant à une g ra n g e , dans laquelle étaiaut couchées
plusieurs personnes? Pendant Je transport, les vêtem ens, la coiffurc
n’auraient-ils pas été dérangés? L ’idée de chercher à déguiser un crime
par un moyen si difficile, aurait supposé une préméditation. O r , la
préméditation a été éloignée dans le jugem ent, et on a pensé q u ’ il »’y
avait eu que meurtre : c’eût donc été par inspiration, qu’ils se seraient
avisés d ’ un procédé semblable! L e bon sen^ ne devait-il pas au contraire
leur faire s a i l l i r , que plus la position serait b iz a r r e et u x lr a o r d i n a i r e ,
plutôt elle devrait éveiller l'attention des magistrats. S'ils avaient été
aussi rusés qu ’ il faudrait l’admettre , ils auraient tout simplement étendu
le cadavre sur la voie publique , ou bien ils l’auraient pendu , pour faire
naître l’idée d ’un suicide. Mais, pour adopter toutes ces suppositions, il
faudrait admettre un sang-froid qui est incompatible avec l’ idée d ’ un
meurtre ! un raffin em en t dans le crime, qu’on ne pouvait pas trouver chez
des paysans q u i , jusqu’ alors, avaient joui de la considération publique!
E l puisque,
par su ito «lu genre de mort qu'ils a u r a i e n t d o n ne, il no
restait pas de traces de leur crime , d ’iiulices extérieurs , ils auraient dty
�(33
)
être tranquilles, ignorant qu’ un médecin habile doit Interroger les restes
inanimés de la victime , faire parler ses organes , et lire , dans leur alté
ration , l ’accusation , l ’arrêt des coupables !
Toutes ces preuves morales sont bien suffisantes, je crois, pour dis
siper toute incertitude et détruire l’objection; mais en supposant encore
(car je ne
raisonne
toujours que sur des suppositions) que les assassins
soient restés près de leur victime , aient eu le courage et la patience
d ’ûttctidrc, croit-on que la position eut etc conservee? ^ on , sans
doute j car à mcsui’o que la roideur se m anifesteiait, 1 état des parties
devrait changer, l’équilibre serait détruit, et le corps obéirait sans
cesse à la pesanteur. Il aurait f a l lu , pour pouvoir conserver la position ,
soutenir pendant plusieurs heures .'le cadavre, ne pas l’abandonner d ’ un
m oment, pour remédier aux eifets de la roideur;.et il eût fallu attendre
jusqu’à ce que celle-ci eût été com plclte; cela n’ a pas eu lieu ; car la
roideur augmente jusqu’à la disparition de la chaleur, et il est certain
q u ’ici elle était conservée. Il n’ est donc rien , rien du t o u t , qui puisse
faire croire à un hom icide; tous les faits sont opposés à celle i d é e ,
tandis que tous se r a t t a c h e n t n a t u r e l l e m e n t à l 'a p o p l e x i e , et la dé
mon tren t c l a i r e m e n t , ^ ous avons v u , en eifet, que dans les apoplexies,
les catalepsies, il arrive quelquefois une roideur spasmodique plus pro
noncée que celle qui ne se développe que plus la r d ; qu’elle est instan
tanée ; qu’elle peut rendre raison de toutes les positions bizarres
affectées par les cadavres; qu’elle peut coïncider avec la chaleur; d'autre
p a r t , j ’ai démontré que tout ce qui était propre à la faire admettre
avait été trouvé, et rien autre que cela» Il doit donc rester bien dé
montré que Courbon a succombé a une mort naturelle , et qu’en con
séquence il n’y avait pas lieu à une accusation, encore moins à une
condamnation.
Je crois inutile do m’ appesantir davantage sur ces faits de roideur ;
«t il ine semble qu ’ il n’est aucun m o jc n raisonnable de n luler les
nombreuses preuves de la mort naturelle de Courbon : par conséquent
je bornerai ü ,ncs réflexions. Vous voyez , Monsieur, qu ’elles sont
absolument les mêmes que celles dont vous me faisiez paît. Kous ne
différons que sur quelques points théoriques , et j’aurais pu me dis
penser de vous adresser ces lignes, dans lesquelles vous ne pouvez
puiser aucun argument bien puissant.
J ’ espèro recevoir avant peu la n o u velle de l ’ entière réhabilitation de
�O 4 5
ces malheureux accusas, et j ’attends ce jour comme devant ¿tre un dc3 •
plus beaux de ma vie.
V e u ille z , M onsieur, agréer l ’assurance de la haute considération
avec laquelle j ’ai bien l ’honneur d’être ,
V o tre très-humble et obéissant serviteur,
A. MCIIOND,
Sous-aide à l'hôpital militaire de Strasbourg.
Strasbourg, 3 mai 1821.
L e professeur, soussigné, ayant pris connaissance de ce nouveau
M ém o ire, relatif à la position qu ’ayait conservée le corps de Courbon,.
déclare être entièrement du môme avis, et en approuver le contenu
dans sa totalité.
Strasbourg, le l\ mai 1821,
Signé F
C 'eit
' Le
par E rreu r, q u e
le
r a p p o r t t u iv a n t
a étc
im p r im é
le c t e u r r e m a r q u e r a f a c ile m e n t la p l a c e q u e
c n su iv a n t l ’ o r d r e c h r o n o l o g i q u e .
cet
k la Cn
o d Ér L
d e » p iè c e s ju s t ific a tiv e s .
a cte d e v a it O c c u p e r d a n s l e r e c u e i l^
( N o t e Je l ’ imp rimeur)-
�R apport
de
Messieurs D a r le s et D e b r y e ,
à
médecins
Yssingeaux.
N ous, soussignés, François-Paul Césaire Darles, médecin de l'hospice
e t (les prisons de la ville d’ Yssingeaux , et Laurent-Marie D e b r y e , aussi
médecin de cette v ille , d’ après l’invitation qui nous a été faite par
RI. P u r a y , substitut du procureur du Roi près le tribunal de cette v ille ,
h l ’effet d ’émettre notre opinion sur la question de savoir si la situation
dans laquelle a été trouvé le cadavre de Jean C o u r b o n , du lieu du
M azet, commune de D unièrcs, arrondissement d’ Y ssingeaux, résulte
nécessairement de violence extérieure, ou si elle est plutôt l ’effet naturel
d ’ un accident, laquelle invitation est contenue dans un Mémoire à
consulter, signé de M . le substitut, et accompagné de pièces à l ’a p p u i ,
Déclarons qu ’après avoir pris connaissance de ce Mémoire et des
p ièces, qui consistent principalement dans le procùs-verbal du juge do
p a ix , le rapport du médecin , l ’extrait d ’une lettre du même juge do
paix , les dépositions de divers témoins , etc. , il nous parait co n sta n t,
en fait, que Jean C ourbon, ûgé de trente-cinq à trente-six ans, homme
d ’une haute et large stature, ayant la figure livide, le cou court, la tète
grosse, et l ’habitude de s’enivrer, a été trouvé sans v i e , dans la ma
tinée du 8 septembre 18 1^ , dans une fosse placée derrière la maison de
Jacques Massàrttier, aubergiste à Dunières (celte fosse, de quatre à cinq
pieds quarrés en tout sens, sur deux pieds et demi de profondeur, était
attenante à la maison , ot placée tout près de la porte de la g ra n g e , à
droite) ; que dans cette fosse, où étaient quatre ou cinq excrémens h u
mains non écrasés, so trouvait aussi de. la paille peu froissée ; que cet
endroit communiquait à la rue principale d e D u u iè r c s c l à une auberge,
par un sentier très-usité, et était aussi accessible à tout venant; que
Jean C o u rb o n , q u i , la v e i l le , était ivre, ou à peu prés, était placé
dans cette fosse, lorsqu’ on l’y a trouvé le dos en l ’a ir, et suspendu ou
porté uniquement sur ln nuque ( la tûte étant totalement repliée), sur
la pointe du pied gauclie, qui était te n d u , et sur la pointe du pied
droit, et du genou dro it, sur lequel était aussi appuyé« sa main droite;
/juc le chapeau dudit Courbon était placé sur «es épaules; que ses liabits
�(36}
n ’étaient nullement déranges; que l ’aulopsic cadavérique, faite par
M. Th om as, officier de santé, n ’a présenté aucune violence'extérieure,
ni aucune contusion à l a . t ê t e ; que les vaisseaux qui fournissent du
sang au cerveau étaient entièrement engorgés, la langue très-volumi
neuse, les yeu x très-rouges, et les vaisseaux de la sclérotique injectés ;
q u ’ il sortait de la bouche des liqueurs fermentées, qui regorgeaient de
l ’estomac; que le visçère ayant été mis à découvert, ainsi que ceux de
l ’nbdomcn , étaient tous parfaitement sains; que l ’estomac contenait,
dans son intérieur, des liqueurs fermentées; q u e , d ’après des témoins^
contre l’opinion de M. T h o m a s , médecin , la tête était très-mobile t
mouvante, comme une boule sur un b âton ; et q u ’enfin, suivant ces
Jémoins , le cou présentait des taches ou ecchymoses.
D ’après tous ces faits, et un pareil état de choses,
Nous déclarons que la mort de Jean Courhon a pu être l ’effet de la
conjestion du sang au cerveau , remarquée «le l'officier de santé , dans
l ’autopsie cadavérique > soit que cette conjestion• résulte , comme le
prétend M. Thom as, d ’ une attaque d ’apoplexie, soit q u e, effet pure
ment physique, elle résulte des-lois de la pesanteur, et dérive de la
position de l’individu , q u i , ayant la tête plus basse que le corps , et
placée sur la poitrine, a dù succomber à l ’accumulation du sang au
çerveau ,. dont la circulation était moins gênée dans les artères carotides,
que dans la veine ju gulaire, qui participent, davantage à la courbure’
de la tête et aux plis de la peau h à cause de leur position superficielle ÿ
et cette dernière hypothèse nous paraît plus probable, q u ’ une attaque
d ’apoplexie, q u i, étant une fonction maladive ^ n’arrive que par casfo rtu it, et nécessite un concours de circonstances propres à sa mani
festation. ■
,1 : y. ... •
N o u s déclarons ég alem ent q u e la position fiti-a n rd m a ire do cet indi
v id u s’e x p liq u e très-facilement jiar la luxationf<Io» vertèbres cervicales,
luxation d o n t les dépositions de q u e lq u c s 'lé m 6 iiis nous d o n n e n t une1
idée , lorsqu’ ils rapportent q u e la tête était très-mobile sur les épaules.
L es vertèbres n’ o n t p a l p u sc lu x e r sans occasionner des tirnilleinens
iiibiîs dans la m oelle épinière', tira illem en t q u i , a leur t o u r , ont p r o d u it
injtnnt<<n<:mont 1;V'contraction téUiu'iqiie d(|>l'iudivi(lu (dont lVflî*t a étw
la position ex tra o rd in a ire'd u sujet ) j et d l- te n n ilié in mort , 'en p e r m e t la-At ch luôfiic tenv» l’aUlux d u-tdtjg ati corve-iu.
1
�(
)
37
Boyer admet la possibilité de la luxation complète des vertèbres cer
vicales, lorsqu'on citant l’exemple de luxation incomplète des vertèbres
cervicales, dont l’une eut lieu sur un enfant qui faisait des culbutes suï
1111 l i t , il ajoute que ces sortes de luxations, dont on n’ a pas d ’exemple ,
sont très-possibles, et qu ’il doit exister des tiraillemens dans la m oelle
épinière ( V o y e z le Traite des maladies chirurgicales, 2 e éd ition , 18 1 8 ,
page 1 1 7 .)-
(
.
Jean Courbon se sera luxé la vertèbre cervicale en tombant dans la
fosse , ou plutôt en cherchant à se relever. Sa position , comme celle de
tous les ivrognes, devant être celle d’ un homme qui se place pour faite
une cu lb u te , il sera tom b é, par la lassitude des efforts qu’ il aura faits
pour se relever, de tout son poids sur la tète ; et celle-ci se trouvant
engagée sous la poitrine , alors lien n’cmpêche , ou plutôt tout fait pré
sumer que Courbon se sera luxé les vertèbres. On sait que l ’apophyse
oblique des vertèbres cervicales a une position horizontale, et qué 1?
courbure de la tète permet aisément leur luxation. D'ailleurs il est,
comme le dit Fodéré (édition de 1 3 13 , vol. 3 , n os 0 4 1 cl 642) certaines
positions organiques ( Çt ccllos- là peuvent être supposées clif* Jiiau
Courbon, que nous avons connu , et qui avait les fibres lâches et le corps
usé par le y i n ) , où les ligamens sont telloinent relâchés, que le moindre
cfl’ort peut Ici rompre.
On peut prétendre que des assassins ont pu placer un cadavre , devenu
róide , dails la position où 011 a trouvé' Courbon ; mais , outre qu ’il faut
supposer cétte lu x a tio n , cornine nous vénons de le faire, on ne peut»
sans cette supposition, expliquer la mort de Courbon par la congestion
du sang au cerveau, si 011 avait seulement tordu le cou à Courbon., à
moins qu’ il n'y eut en même teins étranglem ent; mais alors les signes
extérieurs do l’étranglement auraient été évidens ; car on 11e doit pa?
prendre pour signe de violence extérieure
quelques taches ou ecchy
moses reconnues par quelques témoins, mais par d ’a u tr e s q u i , appréciés
a leur juste valeur, indiq uen t, par cela seul, qu ’ellcs n ’ont pas été
aperçues par certaines personnes ; q u ’elles 11e devaient pas être très-pro
noncées , et qu ’elles peuvent, en les a d op tan t, être regardées collimo
l’eflet de la luxation «les vertèbres.
O u t r e que ceux q u i m uaient fait subir u n e mort violente à JoaO
C o u rb o n pouvaient trouver un lieu m ieux choisi (¡ne c e l t e fosse, pou r
éviter d'élrc aperçus , et des positions plus convenables
, pour,
faire m p -
�(
33
)
poser une mort n a tu re lle , comment auraient-ils pu déposer le cadavre
dans cette fosse, et l’y arranger dans la position extraordinaire et téta
nique où on l’a trouvé , sans écraser les excrémens qui étaient au fond ,
et sans froisser la paille ?
D ’après toutes les considérations que nous venons d’exposer, et la
discussion dans laquelle nous sommes entrés, nous déclarons, en répon
dant à la question u n iq u e , quoique d o u b le , qu’a posée M. le substitut,
à la fin de son Mémoire à consulter , et qui est conçue en ces termes :
« L a mort de Jean Courbon et sa position extraordinaire dans la fosse
« de Massardier ne peuvent-elles être expliquées que par le fait d’ un
« crime?
« O u b i e n , ne pourrait-on pas plutôt trouver la cause de cette mort
a et de cette position dans un accident n a tu re l, provenant de la ch ute
« de Courbon dans la fosse, et de ses efforts à se r e lev e r, sa tête appuyant
« a te r r e , comme font les ivrognes ? »
Nous déclarons , diso n s-n o u s , q u e la m o r t d e J e a n C o u r b o n et sa posi
tion extraordinaire dans la fosse de Jacques Massardier , p e u ve n t et
d o iv e n t s’e x p liq u e r par t o u t autre fait q u e celu i d ’ un c r i m e ,
E t qu’ il est plus probable que Jean Courbon a péri par congestion du
sang au cerveau , résultant de l ’ivresse et de sa position, et peut-être
aussi en même tems par luxation des vertèbres cervicales, produite par
sa ch ute ou ses efforts à se relever (luxation qui explique très-bien
la contraction tétanique de l ’individu , dont l ’effet instantané aura é té ,
entr’autres, la roideur de la jambe gauebe et la main sur la cu isse),
que par le fait de violence exercée sur sa personne ;
E t enfin nous pensons qu’au lieu de se livrer à des suppositions,
e t a des hypothèses, on doit plutôt s’arrêter aux signes qui in d iq u en t,
d une manière si evidente , la mort naturelle de Jean Courbon.
f a i t à Yssingea u x , le 11 juillet 1820.
S ig n é
D a r le s.
D ebrye,
A R IO M ,
chez J . C
SALLES, IMPRIMEUR. DE LA COUR ROYALE ET DU BARREAU,
,
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Rispal, Régis. 1821?]
Creator
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Subject
The topic of the resource
faux témoignages
travaux forcés
condamnation à mort
homicides
médecine légale
flétrissure
obésité
cabaret
ivresse
alcoolisme
autopsies
rumeurs
juge de paix
témoins
affaire Fualdès
erreur judiciaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Pièces justificatives.
Table Godemel : Révision : de procédure et arrêt, au grand criminel. - innocents condamnés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1821
1817-1821
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2518
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
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fre
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Dunières (43087)
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Domaine public
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alcoolisme
autopsies
cabaret
condamnation à mort
erreur judiciaire
faux témoignages
flétrissure
homicides
ivresse
juge de Paix
médecine légale
obésité
rumeurs
témoins
travaux forcés
-
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c032847bbaba3958fb99e827be558d63
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MÉMOIRE
POUR
R é g is R I S P A L , propriétaire3 habitant du
de Dunières, canton de M ontfaucon ;
Et
lieu
G A L L A N D , propriétaire, habitant du
Maltaverne , mêmes commune et canton.
J a c q u e s
lie u d e
Tous les d eu x condamnés, le 9 mars 18 19 , p a r arrêt
de la Cour d ’assises séant au P u y , département
de la H aute-Loire , a u x travaux forcés à perpé
tu ité à la flétrissure , et exécutés , le 16 ju in
suivant, comme coupables d ’homicide volontaire,
et sans prém éditation, sur la personne de Jean
C ou rbon
■
E t adm is , p a r arrêt de la Cour de cassation , après
condamnation définitive d ’un f a u x témoin , et
annullation de l ’arrêt de la Cour d ’assises de la
H aute-Loire 3 à être jugés de nouveau, sur même
acte d 'a ccusation , pa r la Cour d ’assises du dépar
tement de la Loire , séant à Montbrison.
S a p e oculi et aures v u lg i sunt testes mali.
PubLIE Sxnr seiUculia.-.
17
E n c o r e une méprise de la justice! encore un exemple
effrayant de l 'effet de la prévention! encore une occa
sion de déplorer l ’erreur des jugemens h u m a in s, et de
gémir sur la triste condition des magistrats et des jurés!
Deux citoyens, deux pères de famille ont été arra
chés pour toujours à la société et à leurs affections ;
�( 2 )
un arrêt les a condamnés aux travaux forcés à perpé
tuité et à la flétrissure; cet arrêt a été exécuté; et cesdeux malheureux, livrés aux bourreaux, ne sont des
cendus de l ’échafaud que pour être précipités dans un
bagne, et livrés aux horreurs et aux tourmens de cet
enfer anticipé.
Il est vrai que le crime dont ils étaient et sont
encore accusés est horrible. Ils n ’étaient mus par
aucune espèce de passion ; ils n’avaient aucune haine
à assouvir, aucune vengeance k exercer, aucun intérêt
à conserver; cependant ils auraient entraîné dans leur
propre maison un homme estimé de toute la contrée ,
le soutien et le bienfaiteur des malheureux et des
indigens, 1 ami de tous ses concitoyens ; lh , ils auraient
froidement calculé les moyens de lu i donner la mort;
e t, après avoir essayé différens genres de supplice, ils
auraient étouffé le malheureux C o u rb o n , lui auraient
rompu la colonne vertébrale , et auraient ensuite
transporté leur victime dans une fosse, et placé son
cadavre dans la position qui pouvait le mieux cacher
leur forfait. A h ! si un crime aussi cruel et aussi inu
tile a été commis; si les accusés en sont les auteurs,
pourquoi d’aussi vils assassins existent-ils encore ?
Combien est blâmable l ’indulgence du jury dont la
déclaration leur a conservé la vie !
Mais, dès l’origine des poursuites, les accusés ont
protesté de leur innocence.
« Il n’y a point de crime! se sont-ils écrié; pourquoi
« chercher (les criminels?
«
«
«
«
«
« Courbon n ’a point été assassiné; il est mort d’apoplexie : le procès-verbal du juge de paix l'atteste,'
le rapport du médecin le prouve; sa constitution
physique, les excès auxquels il se livrait habituelleinenl, l’inspection de son cadavre, le lieu où il a
été trouvé, la position dans laquelle il éta it, toutes
�( 3 )
les circonstances de la cause se réunissent pour
confirmer cette vérité.
« S’il n ’y a point de crime; s’il n ’y a point d ’excès
à venger, quels criminels espérez-vous donc décou
vrir? N ’est-ce point assez cjue nous ayons eu à sup
porter une instruction téméraire et inutile ; que
nous ayons été poursuivis lorsque la vérité fonda
mentale, le point essentiel, le fait le plus préalable
de tous les faits, le seul qui puisse servir de base k
une accusation, était prouvé en notre faveur-, lorsq u ’enfîn la non existence dù délit était établie ?
Faudra-t-il encore que vous couriez après l ’om b re ,
dans le tems que vous pouvez saisir et arrêter le
corps ; que vous négligiez la vérité pour chercher la
figure ; q u ’enfin vous préfériez un fantôme qui.
échappe, à une réalité qui s’offre et qui se présented ’elle-même aux yeux de la justice?
« Vous nous opposez des dépositions de témoins ,
des indices, des présomptions ; nous les détruisons
d ’un seul mot : il n ’y a pas eu de crime commis,
donc il ne peut y avoir de coupables.
« Mais faut-il confondre la malice de ces témoins ?
faut-il vous prouver que nous sommes victimes
d’une horrible calomnie? A notre tour nous les
accusons, ces tém oins........... L e tems, les lieux et
les hommes se réuniront pour les convaincre de
m ensonge........ Suspendez votre jugem ent............
Sachez douter encore, et vous n ’aurez bientôt que
des calomniateurs à punir. »
Vaines prières, efforts inutiles......... Les malheureux
descendent vivans dans la to m b e !.........
Mais des cris se font encore entendre ; la société en
est troublée : « Nous sommes innocens ! nous sommes
« innocens ! s’écrient les condamnés ; des témoins
« pervers ont égaré le glaive de la justice : q u ’à leur
« tour ils eu soient frappes j nous renouvelons la
�( 4
)
« plainte que nous avons déjà portée contr’eux : q u ’ils
« soient soumis à une instruction; q u ’ils soient jugés,
« et l ’erreur dont nous sommes victimes sera reconnue ! »
Quelle est cette femme qui vient joindre ses géné
reux efforts aux prières des deux condamnés ? Elle
appartient à une des classes les plus obscures de la
société; l ’éducation n ’a point développé en elle les
dons de la nature; ses mœurs sont simples; ses paroles,
rustiques comme les habits qui la couvrent. Quel faible
appui! Comment parviendra-t-elle à détruire les pré
ventions qui assiègent le temple de la Justice?
Mais elle est sœur., elle est épouse, elle est mère ;
elle reposait auprès de son époux au moment et dans
la même maison où l ’on prétend que Courbon a été
assassiné; elle était encore auprès des condamnés à
l ’instant où un vil imposteur soutient avoir entendu
l ’aveu de leur crime; elle est donc sure de leur inno
cence, et son ame généreuse ne peut que s’indigner de
la malice des hommes.
Par ses soins, la procédure en faux témoignage
commence ; elle ose pénétrer dans cet abîmé et en
sonder la profondeur : elle y porte enfin la lum ière,
et bientôt l ’on apprend,
'
.
. ■
i° Q u ’il n ’y a point eu dô crime commis;
2° Que tous les indices qui s’élevaient contre les
condamnés s’expliquent en leur faveur;
3 ° Enfin que les dépositions qui ont égaré la conscience
du jury sont mensongères et fausses.
CJn faux témoin est traduit aux assises : la femme
Rispal s’y présente; elle est accompagnée de l ’épouse,
non moins courageuse, de Galland : l ’une et l ’autre
viennent couvrir de leur protection des victimes si
chères, et demander la condamnation de l’auteur de
tant de maux. Leurs vœux sont exaucés; elles p e u v e n t
enfin concevoir l’espérance de retrouver des époux.
�(S )
dignes d’elles, (le rendre un père à leurs enfans , ci
des citoyens à la société.
Quelle p itié , quel intérêt, quel attendrissement ne
sont pas en droit d ’attendre def toute ame sensible ces
deux épouses, ces deux mères infortunées! Cependant
elles ne demandent q u ’un examen impartial et réfléchi;
elles se sont imposé la glorieuse tache de faire passer
dans l ’ame de leurs juges la conviction qui les anime.
L ’accomplissement de ce devoir sera facile et aura ses
douceurs, si ceux qui sont appelés à décider d ’aussi
grands intérêts se rappellent que l ’homme qui déclare
l ’homme coupable, et le punit à ce titre , résout un
problème, et exerce un droit où D ieu seul est assuré *
de ne point faillir-, que tous les jugemens seront ju gés5
q u ’ainsi toutes les passions, quelles q u ’elles soient ,
doivent s’en retirer, l ’homme a yan t, dans sa faiblesse
native, bien assez de chances d ’erreur.
.:
F A IT S.
1
L e sieur Jean C ourbon, habitant a:u lieu du M a z e t,
commune de Dunières, appartenait à une famille recommandable; il était riche, et père de trois en fans}
honoré de l ’estime publique, juste récompense de ses
vertus. Il était le protecteur du faible-, et l’indigent,
objet constant de ses sollicitudes , ne réclamait jamais
en vain ses secours} d ’ailleurs, doux et affable avec
tout le monde, fidèle à l ’am itié, observateur exact de
ses engagemens, C ourbon, chéri et respecté de tous scs
concitoyens, n ’avait et 11c pouvait avoir que des amis.
'La constitution physique de Courbon est aussi à
remarquer : il avait les'épaules larges, le cou court et
la tête grosse; son embonpoint élait e xt raordi nair e.
Courbon pesait au moins deux cents livres, et a j oui a it
aux dangcis de cette cou formation , tous ceux qui
naissent de 1 exces habituel des liqueurs iermentees
�(M
;
de toute espèce : aussi, a chaque instant pouvait-on
craindre q u ’ un accident trop facile à prévoir ne vint
enlever ce bon citoyen à sa fam ille, à l’affection de
ses amis, et k la reconnaissance publique.
Tel est l ’homme que l ’on soutient avoir été la
victime d ’un assassinat : la possibilité d ’un autre genre,
de mort a été repoussée avec in d ign ation !,...
Mais quels sont les accusés? Il faut les faire con-*
naître, et ne leur donner d ’autres traits, que ceux
que présentent, et la procédure et les documens les
plus certains.
,
.G alland, Rispal, et Tavernier sont beaux-frères ;
leur sort a été bien différent. Ils étaient accusés du
même crime; cependant Galland et Rispal ont été
condamnés aux travaux forcés k perpétuité, tandis que
Tavernier n’a eu à subir q u ’une année d ’emprisonne-T
ment. Les deu* malheureux, qui figurent aujourd’ hui
seuls dans le procès,, ont dû. se féliciter, au moment
de leur condamnation, de ce que leur beau-frère
n ’était pas obligé à partager leur misère. L ’erreur
ycnait de frapper des têtes; également innocentes; e t ,
si les peines étaient inégales 3 le public pouvait y
Attacher le même degré d ’infamie, llispal et Galland
ont été cependant seuls autorisés, k se pourvoir en
révision de leur arrêt; ils tiennent cette faculté de la
nature de la peine qui a été prononcée c o n tre u x ;
mais si la loi l ’interdit à Tavernier, condamné correctionnellem ent, il trouvera sa réhabilitation dans
justification de ses beaux-frères. Rispal et G a lla n d ,
,en prouvant leur innocence, démontreront également
la. sienne; et si quelque chose pouvait ajouter au
bonheur de leur triomphe, ce serait la douce idée de
le partager avec, cet autre infortuné, dont le front est
resté si long-teins courbé dans la poussière.
Reprenons les,faits.
G alland, habitant du lieu de M altavcnie, commune
�(7 )
rie Dunières, appartient à une famille honnête, et qui
n ’est connue que sous les rapports les plus avantageux.
Cet homme vivait dans une heureuse médiocrité.
Après avoir payé sa dette à la patrie, il s?était retiré
du service, et habitait avec sa femme le lieu qui l ’avait
vu naître5 il y cultivait un domaine qui lui avait été
transmis par sa famille, et qui peut être évalué k
3o,ooo francs.
G a lla n d , satisfait de son humble fortune , était
connu par sa franchise, son désintéressement, son
honnêteté; il aimait à rendre service, et la calomnie
n ’a jamais essayé de flétrir son caractère, en l ’accusant,
ou même en le Soupçonnant capable d’aucun acte de
bassesse.
:c>
G alland joignait à la franchise d’un so ld a t, la brus
querie et l ’orgueil qui en sont les compagnes ordïâaires;
il pouvait lui être difficile de supporter froidement
vin caprice ou une insulte ; peut-être encore q u ’il aima
Si partager avec ses amis les plaisirs de la table ‘r mais
en était-ce assez pour le dépeindre comme un homme
violent, adonné au v in , un querelleur et un mauvais
époux I
.
1
?
Galland a répondu a plusieurs dè ces reproches, en
rapportant les certificats les plus honorables. Ils attestent
q u e , comme soldat, sa conduite était tellement régu
lière , q u ’il n a jamais été condamné à la peine de
police la plus légère; et q u e , comme citoyen^ il<n’â
jamais inspiré aucune crainte h personne, ni provoqué
la surveillance ou les sollicittides de l ’autorité. Son
épouse, h Son to u r, est venue le venger de l ’injure
qui pesait le plus sur son cœur. On l’a VUe aux assises
(le Riom répondre li la calomnie, ■
>en pressant son
époux dans ses bras, et en le baignant de ses larmes.
Régis llispal, autre accusé, habitait Dunières; sa
famille est honnête, et si sa fortune était médiocre, il
y suppléait par sou économie, son industrie et son
�(8 )
activité. L a confiance q u ’il s’était acquise dans . son
état de boulanger lui donnait l ’espoir d ’élever sa fa
mille et d ’augmenter son faible patrimoine. La mora
lité dejcet homme n’est point douteuse; elle est attestée
par le juge de paix. Ce juge, qui veut ensuite que la
maison Rispal soit devenue un repaire d ’assassins, nous
apprend» « que l ’on peut dire de Rispal plutôt du bien
« que du m a l ......... y que l ’on se tait sur son compte j
« que généralement l ’on pense q u ’zï a été trompé ;
« q u ’on dit même q u ’il avait fait entendre des paroles
« de vie. »
Ainsi Rispal est un citoyen honnête; mais faudraitil parler de ses qualités domestiques? Le dévouement
de son épouse n ’est-il pas connu ? ces voyages nom
breux , ces sollicitations pressantes, ces larmes si sou
ven t répandues, ces accens si déchirans du désespoir,
cette abnégation de l ’avenir, qui lui fait abandonner
le soin de sa fortune , sacrifier sa d o t , l ’existence
même de ses e n f a n s c e t héroïsme enfin de l ’amour
conjugal n ’attestent-ils pas que Rispal est le meilleur
des époux comme le plus tendre des pères? • .
U n troisième accusé était présenté aux assises de la
llautc-Loire : c’est Tavernier. L ’instruction n ’apprend
rien de désavantageux sur son compte; 011 y
(IU ^
habite l ’arrondissement de Saint-Etienne, où il est à
la tête d une fabrique de soie, dont il est propriétaire.
Son caractère et ses mœurs sont d ’ailleurs extrêmement
douces; et, depuis sa condamnation, il a toujours pro
testé de son innocence et de celle de ses deux beauxfrères, qui ne l ’avaient point quitté un seul instant.
Il faut ajouter que Tavernier était le seul des trois
beaux-frères, qui eut des relations d ’intérêt avec .lean
Courbon. Ce dernier était son débiteur, par billet,
d ’une somme assez modique, et la lui remboursa la
veille de sa mort.
Ce tableau fidèle de la position sociale, des mœurs,
�(9
)
du caractère et des habitudes du malheureux Coilrboii
et des accusés était indispensable, pour mettre les lec
teurs en état d ’apprécier les faits de cet étrange procès;
et déjà l ’on se demande :
Comment Courbon aurait-il été victime d ’ un assas
sinat? quelle main impie se serait chargée, sans y être
poussée par un vil intérêt, de trancher le iil d ’ une si
belle vie? D ’un autre côté, les accusés n ’ayant aucun
intérêt à la mort de Courbon; n ’étant mus par au
cune passion; n’ayant aucune injure à venger; aimant
Courbon comme tous les habitans de la contrée l ’ai
maient; présentant d ’ailleurs les plus fortes garanties
sociales, auraient-ils tout d ’un coup cessé d ’être sem
blables à eux-mêmes, jusqu’au point d’entrer dans la
carrière du crime par le plus abominable des forfaits?
E t si Ion veut que Galland soit, dans ses emportemens , capable d’excès, llispal et T a v e r n i e r ne sont-ils
pas étrangers à ces (lisposil ions? 11’au rai ent -i l s pas modéré
et c o n t e n u . G al l aï u l? llispal sur-tout aurait-il prêté
sa maison pour en faire .le théâtre d ’un assassinat ?......
Voilà bien des présomptions d’innocence; mais elles
peuvent être détruites par des preuves positives. E x a
minons le fait,
L e 7 septembre 1817 (jour de dimanche), Jean
Courbon était à Dunières : son frère Pierre y était
aussi. On a déjà fait remarquer que Jean Courbon
avait la triste habitude de se livrer aux excès du vin :
c était son seul défaut; mais il lui était impossible do
le vaincre.
Il exisic au lieu de Dunières trois cabarets, l ’ un
tenu par M a u g i e r , l ’autre par Massardier, et le troi
sième par le nommé Samuel. Le 7 septembre Jean
Courbon, après avoir bu chez Massardier, s’est/rendu
chez Maugier; de l’auberge Maugier il est allé dans
celle tenue par Samuel, et u ’u quitté le cabaret de ce
2
�( 10 )
dernier, que pour retourner chez M augier, d ’où
il n’est sorti q u ’à neuf heures du soir, environ. Ainsi
Jean Courbon a employé cette journée entière à fré
quenter les cabarets, et il a été vu par-tout buvant avec
excès du vin et des liqueurs fermentées de toute es
pèce. Sa compagnie habituelle pendant cette journée
a été tantôt les deux accusés et Tavernier, tantôt un.
ou d’eux d ’entr’eux , auxquels il faut ajouter les
sieurs Marnas frères, l ’un notaire et l ’autre percep
teur au lieu de Dunières; enfin Pierre C ou rbo n , frère
de-Jean.
Il est inutile de suivre Jean Courbon dans tous les*
instans de cette journée; mais il est essentiel de fixer
Son attention sur deux points importans, celui de son
entree à 1 auberge Massardier, et celui de sa dernière
sortie de l ’auberge Maugier.
Jean Courbon était descendu chez Massardier avec
le sieur Fourboule de la Brugère, son oncle; là il
trouva les deux accusés, et Tavernier leur beau-frère.
C e dernier, comme on l ’a v u , était créancier de Jean
Courbon du montant d ’un billet à échéance dans
quinzaine; il pria Courbon d ’en anticiper le paiement :
Cou rbon, naturellement obligeaut, y consentit avec
plaisir; il parait même q u ’il emprunta quelqu’argent
pour se libérer. Enfin il paya, retira son b ille t, le
lacéra , et en mit les morceaux dans sa p o ch e, où ils
ont été retrouvés lors de la découverte de son cadavre.
M. le juge de paix avait négligé de constater ce der
nier fait; mais cette omission a été réparée aux assises
par la déclaration de deux témoins, auxquelles il faut
joindre celle du juge de paix lui-même.
Ce procédé de Jean Courbon n ’était sans doute pas
fait pour exciter en Tavernier de mauvaises disposi
tions. Cette obligeance, jointe à la circonstance esserw
Iicilo que Courbon a été vu sou ven t, pendant la
journée du 7 septembre, avec les trois beaux-ii’èrcs,
�* ( 11 )
prouverait même plutôt q u ’il existait entr’eux une
intimité assez étroite, ou q u ’au moins Jean Courbon
fréquentait avec plaisir les deux accusés et Tavernier.
Il est vrai qu ’on a voulu dire que Courbon voyait
Galland avec peine; que sa présence le gênait ; q u e ,
dans la journée du 7 septembre, il cherchait à le fu ir 5
q u ’il y avait eu entr’eux querelle, échange d ’injures,
même des menaces de la part de G allan d ; mais ces
bruits ne sont confirmés ni par les dépositions écrites,
ni par les dépositions orales; au contraire, les témoins
les plus importans, Pierre Courbon lui-mêm e, font
des déclarations tout opposées k cette assertion, et
la détruisent entièrement.
On a vu que Jean C ou rbon , étant entré pour la
seconde fois dans le cabaret Maugier, s’y trouvait
encore a neuf heures du soir : il était avec Pierre
Courbon son frère; les deux accusés et Tavernier b u
vaient aussi dans le mèine lieu. A l ’heure que l ’on
vient d ’indiquer, Pierre Courbon engage son frère k
se retirer; ils sortent ensemble, traversent la place
publique qui conduit du cabaret k la rue principale
de Dunières, et suivent cette rue, k l ’extrémité de
laquelle se trouve, sur la droite, le chemin du Mazet
(lieu où habitent les Courbon) , traçant une ligne un
peu oblique.
Mais k peine les deux frères Courbon ont-ils fait
quelques pas dans la rue, que Jean Courbon veut
s’arrêter. Ils arrivent auprès d ’une forge appartenant
îi Maugier : un char est devant; Jean s’y assied : il
ne veut plus suivre son frère; il résisie k ses instances,
enfin il ue veut point partir, et une discussion assez
vive s engage entre les deux frères.
Pierre C o u rb o n , ne pouvant vaincre la résistance
de son frère, résistance qui pouvait lui paraître l’efFet
de l ’ivresse, et voulant éviter' q u ’il ue se livrât de
nouveau k son intempérance dont il devait craindre
�(
12
)
les suites, retourne précipitamment sur ses pas, pour
défendre à Maugier de servir encore du vin à Jean
Courbon. Ces ordres donnés, Pierre Courbon se hâte
de revenir auprès de son frère; mais, ne le trouvant
plus au lieu où il l ’avait laissé, il pense q u ’il a pris
la-route du Mazet. Alors Pierre continue son chemin
en chantant, dans l ’espoir sans. cloute d ’attirer son
frère, q u ’il supposait être en avant de lui. Tous ces
faits sont fidèlement extraits de l ’instruction et des
débats qui ont eu lieu devant la Cour d ’assises du Puy*
Il e s t . également certain que les trois beaux-frères,
R isp al, Galland et Tavernier , étaient au cabaret
M augier, au moment où les deux frères Courbon en
sont sortis $ q u ’ils y étaient encore au retour de Pierre,
et qu ils ne l ’ont quitté que cinq minutes après le
départ de ce dernier : aussi n’a-t-il jamais été contesté
que Jean Courbon avait disparu du point où Pierre
l ’avait q u itté , et que Pierre avait eu lui-même le
lems de traverser le lieu de D unières, avant que les
trois beaux-frères fussent sortis de la maison Maugier.
C ’est ici le lieu de fixer l ’attention sur les circons
tances qui ressortent du précis des dépositions des
témoins. La vie agitée de Jean Courbon pendant toute
cette journée ; cette fréquentation répétée des trois
seuls cabarets qui existent au lieu de Dunières; ^es
excès auxquels il se livre; les efforts de son frère pour
le ramener a son d o m i c i l e ; le jugement que porte ce
frère sur l’état de Jean, en allant défendre à Maugier
de lui donner encore du vin ; enfin cette manière
extraordinaire d ’cchappcr aux soins et a la vigilance
de l’am itié, tout ne prouve-t-il pas que ce malheureux
était dans un état d ’ivresse tel, q u ’il n ’avait plus le
libre exercice de ses facultés; et déjà ne peut-on pas
prévoir ou craindre quelque accident, si on l'aban
donne un instant à lui-même ?
D ’un autre coté, si l ’on ajoute q u e , p e n d a n t toute
�O
)
celte même journée, Jean Courbon a vu les accusés
sans q u ’il y ait eu entr eux la plus legere dispute; q u e
T av e r n i e r en a au contraire reçu, u n service, comment
supposera-t-on que les trois beaux-frères aient conçu
de mauvais deseins .contre Jean Courbon ?; Comment
sur-tout voudrait-on les. rendre responsables de son
sort, quel q u ’il soit, si l ’on considère que Jean Courbon
était livré aux soins de son irère; que les accusés étaient
au cabaret Maugier, lorsque les deux Courbon en
sont sortis; q u ’ils y étaient encore lorsque Pierre y est
revenu, et q u ’enfin ils n ’ont quitté ce cabaret, que
quelques instans après que Jean Courbon a d isp aru,
et s’est soustrait à la surveillance toute bienveillante
de son frère? E n effet, à quel instant les accusés
au raien t-ils conçu le dessein de leur crime? Quels
étaient leurs moyens d ’exécution? Où attendaient-ils
leur victime? Jean Courbon n ’était-il pas pour eux
livré à la garde de son f rère? l i t existe-t-il un seul
témoignage , une seule prévention de laquelle on
puisse induire que les accusés aient rencontré Jean
Courbon après sa dernière sortie du cabaret Maugier?
Mais continuons. On se souvient de la ]*sition de
Jean Courbon, q u i, le 7 septembre, a neuf heures
du soir environ, était assis sur un char placé an-devant
de la forge Maugier. Depuis cet instant il a disparu,
et son cadavre a ete découvert le lendemain , 8 sep
tem bre, à cinq heures du m atin, gisant dans une fosse
placée derrière la maison de l ’aubergiste Massardier.
Pour se faire une idée juste des conséquences à tirer
de cette découverte, il faut examiner, avec la plus
sein puleuse a tten tion , la situation île la maison
Massardier, celle do la fosse, dont la description inté
rieure et extérieure d o i L être laite avec soin enfin l:i
position et l’éiat du cadavre du malheureux Courbon.
Si l ’on veut connaître la situation de la m a i s o n
Massardier, qui est l ’auberge où Jean C o u r b o n s’est
�(
)
*4
d ’abord présenté lors de son arrivée à Dunières, il faut
pren d re, pour point de d ép art, le cabaret M augier,
situé à une des extrémités du b o u rg , et sur une place
p u b liq u e, qui le sépare de l ’église et du cimetière*
E n sortant de ce cabaret , on traverse la place pu^blique; à la droite se présente ensuite la rue principale,
ou plutôt l ’ unique rue de Dunières, qui se prolonge
jusqu’à l ’autre extrémité du bourg. Si l ’on suit cette
ru e , on trouve à sa gauche la forge Maugier, au-devant
de laquelle était placé le char. E n avan çan t, on arrive
au-devant de la maison L e m o in e , qui est la dernière
du bo u rg, à gauche, et l ’on a en face la maison
Massardier, placée dans un enfoncement, et sur une
place ou terrain vacant , qui la sépare de la r u e , à.
droite.
La maison Rispal est placée à la droite et k l ’extré
mité de cette rue; elle borde la place ou le terrain
vacant sur lequel est située la maison Marrardier; elle
a des jours, soit sur la rue, soit sur cette place, et
d écrit, avec la maison Massardier, un angle droit; de
manière que celui qui se trouverait à l ’extrémité de
la maison Rispal, se rendrait directement de ce point
h. la porte de la maison Massardier, en traçant une
diagonale, qui serait la base d ’un angle décrit, sur la
place pu blique, par les maisons Rispal et Massardier,
et dont le point de jonction de ces deux maisons, sur
cette même place, est le sommet.
Cette description fait déjà pressentir que la princi
pale façade de la maison Massardier est sur la place
publique , qui borde la r u e , à droite ; là est la porte
d ’entrée de l ’auberge, et à cette porte peut commencer
un sentier q u i, longeant la maison Massardier et tour
nant à droite, conduit sur les derrières du bourg de
D u n iè re s, et sert de communication de l'auberge
Massardier 11 l ’auberge Samuel. Ce même sentier, qui
a SOU débouché sur la route de Montfaucon , peut
�( i5 ) _
aussi conduire à l ’auberge Maugier'; de manière q u ’en
revenant au point de départ que l ’on s’est fix é , c’està-dire à la place publique, où est située la maison
M augier, et en suivant la rue de Dunières jusqu’à son
extrémité, on trouve à droite l ’auberge Massardier,
aussi située sur une place publique; tournant ensuite
cette maison à droite, et longeant ses derrières, on
revient sur la place p u b liq u e, qui est au-devant de là
maison Maugier, en laissant à droite l ’auberge Sam uel,
et à .gauche l ’auberge Maugier.
On voit que ce sentier est un moyen cle circulation
bien important pour le bourg de Dunières, et q u ’il
doit être très-fréquenté, sur-tout les dimanches et
autres jours où les habitans des environs se réunissent
dans ce lieu.
Il faut actuellement isoler la maison Massardier et
ses dépendances, et y porter exclusivement son a t
tention.
On connaît sa façade sur la place publique; sur le
derrière est une autre façade parallèle à la première,
donnant sur un hangard, au-devant duquel est encore
un petit vacant limité par le sentier dont on vient
de parler.
L e hangard, au-dessous duquel se trouvent deux fe
nêtres, commence à l’une des extrémités de la maison, et
à la droite de l ’observateur; il se prolonge jusqu’à la ren
contre do la fosse où le cadavre de l ’infortuné Courbon
a été trouvé. Cette fosse est elle-même immédiatement
placée au niveau d ’une fenêtre à quatre carreaux, ser
vant à éclairer l ’évier de la maison Massardier. U n de
ces carreaux était cassé à l ’époque de l ’événement.
Cette fosse, q.ui est limitée à droite par le hangard
de lace par la maison Massardier, l ’est, à gauche^
par la grange de la même maison grange q u i, faisant
suite à la maison Ihspal, et se prolongeant, décrit ,
avec la maison a laquelle elle appartient, un angle
�( 1(5 )
droit renfermant, dans ses deux côtés, le hangard^ la
fosse , et le terrain vacant qui est au-devant. Ce terrain
sert à faciliter l ’entrée de la grange, dont les portes,
tenant presqu’immédiatement à la fosse, sont placées
à une des extrémtés de la grange , et près du sentier
public.
Ainsi la fosse où le cadavre a été découvert tient
à une auberge5 elle est placée dans un village, près
d ’un sentier ou rue publique extrêmement fréquentée,
sur-tout un jour de dimanche; enfin elle est entourée
de fenêtres et de portes qui la mettent entièrement à
découvert.
Cette fosse forme un quarre équilatéral de quatre
pieds de diamètre sur deux de hauteur; et dans son
intérieur 011 remarquait quatre ou cinq excrémens
humains non écrasés, et de la paille peu froissée.
Le cadavre de Jean Courbon gisait dans cette fosse.
Pour connaître sa position , il faut consulter les procèsverbaux, et ce que les dépositions des témoins ont
ensuite appris.
Les vêtemens du malheureux Courbon n ’étaient
dérangés en aucune façon.
Son dos était en l’air, et la tête en bas, de ma
nière que le corps, étant dans une ligne presque per
pendiculaire, n’a v a it , pour ainsi d ir e , de point
d ’appui que sur la nuque, les pieds, et le genou
droit : la main droite du cadavre était sous ce genou.
L a cuisse et la jambe gauches étaient tendues, et se
soutenaient sur la pointe du pied; la main gauche
appuyait à terre; et la tête, recourbée sur la poitrine,
paraissait être entre les cuisses. Au reste, les pieds et
Jes jambes de Courbon étaient tournés du coté du mur
de la maison Massardier., et le corps du coté du chemin';
enfm le chapeau était placé sur le cou ou sur les
épaules.
XjC procès-verbal du juge de paix est de ce jou r,
�V'i))
$ septembre 1817. C et officier'de police judiciaiVe
apprend que la position du cadavre, quelque extraordi
naire q u ’elle puisse paraître, peut être expliquée pai
la nature du terrain et par la chute de Courbon; ih
ordonne de donner au corps une position plus n atu
relle, ce qui est vainement essayé; mais il peut re-r
marquer que la figure est hideuse et décomposée; q u er
les membres sont généralement roides, et que le earps>
a un reste cle.*chcileur Getté>dernière observation le.
frappe même si fortement, q u ’il fait administrer au>
malheureux Courbon des .eaux spiritueuses, que l ’on
introduit dans le n ë z , d a n s la bouche, et dont on lui
lave la tête, pour tâcher, mais vainement, de le rap
peler à la vie.
•iLej cadavre}),transporté au clocher du b o u r g , est
soumis.'a l ’examen du médecin, qui fait de suite le
rapport de son opération à M. le juge de paix. Ce
de rnier consigne, dans son procès-verbal, que le. mé
decin lui a déclaré que, d ’après l ’inspection du ca
davre, et les recherches fintérieures auxquelles il s’est
livré , il est certain que Jean'Courbon est décédé de
mort naturelle, suito d ’un excès de vin; que cet excès
a provoqué une apoplexie p dont l ’existence lui »¡est
prouvée par. l ’examen des sinus, >qui se sont trouvés
gorgés do!sa*ng.
’>
•
;
INI. le juge de paix veut ensuite savoir si la voix
publique s’accorde avec l ’opinion:de l ’homme de l ’art,
sur le genre de mort auquel Jean Courbon a succombé:
il 1 interroge et apprend,
-1 ,
■
Que C ou rbo n était généralement aimé de tout
le monde;
i
• 2 Que Jean Courbon était souvent dans un état
d ’ivresse absolu ; , . \
,
.. ,, .
3 ° Q ue «a mort devait être la suite de» fcxcès de
vin auxquels ce m alheureux s’était livré le jour même
de son décès.
�L e juge de paix adopté cette opinion, et la fortifie
par une observation qui lui est particulière ; il ditq u ’il a effectivement remarqué que le cadavre je ta it
du vin s u t ses habits. >
Enfin cet officier de police judiciaire, ne voulant
rien négliger, entend plus particulièrement cinq té
moins, insère leurs déclarations dans son procès-verbal;
et, tons assurant que la mort de Courbon ne peut être
attribuée q u ’à un excès de v in , il d it , dans la clôture
de cet acte important, que les renseignemens lux ayant
paru suffisamment prouver le genre de nîort de Courboni, et son zèle à le constater y il ordonne que les
restes de cet estimable citoyen seront remis à sa
famille.
L e rapport du docteur, qui a p r o c é d é à l ’autopsie
cadavérique,. ne contient autre chose que. le dévelop
pement de l ’opinion déjà manifestée à M. le juge do
p a ix , et que ce dernier a consignée dans son procèsverbal. r
L e médecin examine d ’abord la surface externe du
cadavre. La constitution physique de Courbon pré
sentait la réunion de toutes les.causes prédisposantes k
l ’apoplexie; et l ’examen extérieur de son corps n’offre
aucun autre indice de mort vio len te, que ceux qui
servent à indiquer’cette espèce d ’accident. L'homme de
l ’art confirme même une des obsèrvatîons du j ngc de
paix , et dit que le cadavre regorgeait, par la'bouch e,
'
un mélange de liqueurs fernientées.
Le médecin procède ensuite à l'ouverture des trois
Cavités qui existent dans l ’organisation de l ’homme.
La l ê i e , les cavités thorachiques, pelviennes ou abdo
minales, sont successivement l ’objet de son attention;
cl après l’examen le plus scrupuleux, et avoir remarqué
que l ’estoniac contenait une assez grande quantité de
liqueurs fermentées., il n ’hésite pas à déclarer qne
Cuuibou est mort d ’attaque d ’apoplexie, accident que
�C*9 )
sa forte constitution pouvait à chaque instant faire
craindre, et qui a été déterminé par les excès répétés
devin et de liqueurs, auxquels ce malheureux se livrait
journellement (i).
C e rapport ne forme q u ’un seul et même acte avec
le procès-verbal du juge de paix. Ces deux pièces sont
si intimement unies, que l ’on peut dire du rap p o rt,
q u ’il n’est que l ’explication du procès-verbal. Il ne
contient en effet autre chose que des développemens
étrangers aux connaissances d ’un juge de paix, et q u ’uu
homme de l’art pouvait seul donner. Il faut ajouter
que l ’examen du ju ge, ses recherches sur la cause de
la mort de C ou rbon, son interrogatoire de diflerens
témoins, ont eu lieu en même tems que l ’autopsie
cadavérique; que tout cela se faisait dans la matinée
nieme du jour où le cadavre avait été découvert; q u e ,
dans cet in stan t, il ne s’élevait a u c u n soupçon, sur la
nature de la mort de C o u r b o n ; q u ’a u c u n coupable
n ’était signalé; q u ’ainsi jiersonne ne pouvait avoir
intérêt à cacher les causes de cette m ort; et q u ’en
supposant que quelqu’un put en être l ’a u t e u r , le soin
de sa conservation l ’obligeait à s’abstenir de toutes
démarches ou sollicitations qui auraient pu le faire
soupçonner. Tout cela ne prouve-t-il pas que le juge
de paix et le médecin agissaient également de bonne
lo i; q u ’ils ne cédaient ni à la crainte ni à l’intérêt que
pouvaient leur inspirer des coupables présumés; mais
q u ’en interrogeant les faits et en en tirant les consé
quences inévitables qui se présentaient naturellement
et sans effort , ils ne faisaient q u ’obéir au sentiment
de leur d evo ir et à l’impulsion de leur conscience?
Il faut donc le dire ici : non-seulement il u ’y a point
( 0 V oyez, à la page \ des piiVcs justificatives, ce rapport, qui est <îft
môme p u r que le procès-verbal d u juge de p a ix , et qui c o u t i e u l tous
les détails de l’autopsie cadavérique dç Courbon.
�•
•
,
» .
jusqu’à présent de crime pro u vé, mais encore Iesi
procès-verbaux excluent la possibilité de l ’existence d’un
corps de délit; et s i, par la pensée, l ’on énumère les
autres faits déjà connus, faits qui jaillissent de l ’ins
truction , et dont M. le juge de paix pouvait être
in stru it, ou dont au moins il lui était si facile de
s’in stru ire , ne sera-t-on pas convaincu q u ’à cette
époque le juge de .paix avait la certitude que Jean
Courbon était décédé de mort naturelle; que si la
société pouvait avoir un accident à déplorer, au moins
il n ’y avait aucun crime à venger; et si dans la suite
quelques combinaisons fortuites, quelques circons
tances difficiles à expliquer semblaient accuser queliqu’un. de ce crime imaginaire et impossible , ces
malheureuses victimes du soupçon et de l ’erreur ne
devaient-elles pas s’attendre à trouver protection et
appui dans l ’autorité toute tutélaire de M. le juge
de paix ?
Cependant des ignorans et des oisifs; des femmes
d ’une imagination faible; le peuple crédule et ami
des nouveautésj pourvu qu'elles aient un caractèreextraordinaire et présentent à l ’esprit des images
effrayantes; toute cette tourbe enfin dont l ’honune
sage dédaigne les opinions, comme étant le produit
de l ’erreur, s’empare de cet événement, le travestit
bientôt en assassinat, et n ’est pas long-tems à en in
diquer les auteurs. Quelques jours sont à peine écoulés,
que le peuple de Duniôres croit aussi fermement à la
mort violente de Courbon , et à la culpabilité de
G a lla n d , llispal et Tavernier, q u ’il peut encore croire
aux revenans, «i ln. sorcellerie et à la magie.
La mort tragique du malheureux Fualdès occupait
alors la France; les détails de cet horrible procès cir
culaient dans les villes et dans les hameaux, sous les
lambris dorés comme sous le chaume : elle était l'objet
de toutes les conversations j et s’il eût été possible d ’y
�( 31 )
ajouter quelque nouvelle horreur, produit d ’une ima
gination vicieuse ou déréglée, le peuple l ’aurait saisie
avec avidité, tout invraisemble d ’ailleurs q u ’elle pût
être.,
L ’accident arrivé au malheureux Courbon appelait
des victimes. Ses parens, ses am is, ceux sur-tout qui
avaient éprouvé les effets de son obligeance et de sa
charité, brûlaient d ’offrir à ses mânes une hécatombe
humaine.
B i e n t ô t l ’assassinat de Courbon parait certain. Il a
cté enlevé, le 7 septembre au soir, à sa sortie du
cabaret Maugier; on l’a entraîné dans la maison Rispal;
là , il a été couché sur un b a n c, et une voix s’est fait
entendre pour demander une hachasse ^ b. l ’effet de
recevoir le sang de la victime. Plus tard, 011 dira que
ce moyen n ’ayant pas réussi, Courbon a été étouffé,
et que les assassins lui o n t rompu la colonne verté
brale; mais toujours ce sera dans la maison Rispal, que
l ’assassinat aura eu lieu. Les inventeurs du crime de
JJunières ne feront autre chose que de s’approprier les
détails du crime de Rhodez, commis dans la maison
Bancal, qu ’ils copieront, corrigeront et augmenteront
suivant les circonstances.
Q u ’est devenu ensuite le cadavre? Les assassins l ’ont
transporté dans la fosse où il a été découvert. Ils
avaient d ’abord le projet de le déposer dans la grange
Massardier, située près de celte fosse; mais, contre
' l ’habitude, la porte de cette grange étant fermée, ils
ont été contraints de le placer dans la fosse, et de lui
d o n n e r la position qui pouvait le mieux faire croire à
une mort nat ur el l e.
Les preuves du l’a it sont le b ru it public; l ’état du.
cadavre; les choses extraordinaires qui se sont passées
pendant la nuit ; les hurlemens lugubres d ’un chien qui
paraissait prévoir quelquesm al lieu rs ; les révéla lions d ’un.
être m ystérieux, d ’un pèlerin q u i aurait pour ainsi dire
�.
. .
(
3 2 )
assisté aux derniers instans de C ou rbon, et entendu ce
malheureux demander la vie à ses féroces assassins. Q u ’à
cela l ’on ajoute tout ce q u ’une imagination fantastique
peut produire; quelques taches de sang observées sur
la terre*, la découverte de cheveux épars ou en toufte;
les inquiétudes occasionnées par l ’insomnie à quelques
habitans de D unières, et l ’on se fera une idée juste de
la fermentation que la crédulité, les passions, l ’amour
du merveilleux, et sur-tout le désir de trouver des
coupables avaient dû exciter dans ce lieu.
Mais tout cela n’était encore q u ’absurde; les procèSverbaux répondaient à toutes les objections : il ne
s’agissait pas, en effet, de suppléer à leur incerti
tu d e; mais il fa llait, contre leur contenu, prouver
le fait d ’un assassinat.
Cette fermentation de propos indiscrets et de bruits
populaires frappe l ’esprit de M. le juge de paix. On
dit que son caractère est naturellement porté aux
affections douces; on lui accorde beaucoup d ’instruc
tio n , jointe à un esprit b rillan t; mais ces qualités
ne suffisent pas toujours pour garantir l’homme qui
en est pourvu, de la prévention, maladie contagieuse
de l’esprit humain; il faut encore une ame forte et
un jugement exquis pour interroger les faits et tic pas
se laisser induire en erreur, en mettant des hypothèses
pompeuses à la place de la vérité.
Ce juge, d ’ailleurs estimable, mais peu accoutumé,
sans doute, à rinstruction des causes criminelles, re
jette sa propre conviction. Plus aveuglé que celui q u i,
à force de fixer une place vid e, où il lui semblerait
voir un objet qui n’y existe pas, finirait par le re
garder comme réel, ce magistrat voit un crime et un
corps de délit constant dans le fait q u ’il avait d ’abord
jugé et démontré en être exclusif; il recueille les ap
parences les plus légères, les indices les plus équi
voques} il accumule renseignement sur r ens ei gne me nt ,
�Ç ?3 )
écoute des personnes bornées ou mal instruites, prêt«
même l’oreille à des témoins pervers,, q u i, en déposant
de ce q u ’ils n ’ont ni vu ni entendu, et en inspirant à
M. le juge de paix des craintes personnelles, amassent
à-la-fois des nuages funestes sur le fait à exam iner,
et excitent la prévention et la haine du juge contre
ceux qui en sont présumés les auteurs.
.. M. le juge de paix ne pouyait se garantir de tant
de pièges; il se décida à devenir , auprès de l ’autorité,
l ’organe d ’une .opinion q u ’il .avait déjà adoptée. Ses
lettres ou rapports sont nombreux ; ils appartiennent
aux accusés, puisqu’il leur en a été délivré copie ; et
.ces derniers, en en donnant l ’extrait, pourraient y
faire remarquer des expressions, des pensées, des désirs,
des suppositions, des phrases entières qui ne peuvent
Ê accorder avec la dignité d ’un magistrat et l ’impassi
bilité qui doit le caractériser. Mais ils restreindront
leurs observations, sur ce jio in t, à faire remarquer,
i°,Q u e chaque information de M. le juge d ’instruc
tion était.précédée d ’une lettre de M. le juge de paix,
contenant des notices sur le personnel des témoins et
sur les dépositions q u ’ils devaient faire; que constam
ment les faits contenus dans ces lettres ont été in
firmés ou adoucis par les dépositions des témoins ;
20 Que ces rapports révèlent des faits d ’ une haute
gravité, et dont les témoins ne parlent pas;
3 ° E n f in , que M. le juge de pai* croyait devoir at
tribuer les réticences ou le silence des témoins à la
terreur que. leur inspirait l ’état de liberté, des trois
beaux-frères; que cependant, depuis l'arrestation de
.ces malheureux, et aux assises même, aucune dépo
sition xi a été changée ni modifiée, si l ’on en excepte
.celle d un seul témoin, qui sera l ’o b je t.d ’un examen
particulier..
Les premiers rapports, en forme de lettres, de M. le
juge de paix, commencent au 24 novembre 1817. Ce
�(»4 5
juge convient que le procès-verbal q u ’il a rédigé , et
celui du médecin , devaient tranquilliser et éloigner
tout soupçon sur le genre de mort de Courbon ; que
sa croyance, alors partagée par tous ceux qui l ’entouraient, était d ’ailleurs justifiée par l ’inspection du
cadavre, qui ne présentait pas même une légère
égratignure , et par l ’état des vêtemeus, qui n'étaient
nullem ent en désordre. Il énonce ensuite dans ce rap
p o r t , et dans deux autres, qui sont sous les dates des
2 et 3 octobre, différens faits qui peuvent se réduire
à ceux-ci :
:
i° Une querelle s’est élevée au cabaret, entre Galland et Courbon ; elle a été suivie de menaces de la
part de Galland;
2° Rispal, Galland et Tavernier n ’ont point établi
l ’emploi de leur tems dans la soirée du 7 septembre,
depuis neuf heures ctdemie du soir jusqu’à onzeheuresj
3 ° Dans cette même soirée, et près de la fosse oii le
cadavre de Courbon a été découvert, on a entendu
une voix s’écriant : « Ne serai-je pas bientôt à cette
« f ...... porte ! » U n instant après, quelque chose de
pesant a été jeté dans la fosse ;
4 ° Galland ayant quitté le bourg de Dunières à
m inuit passé, pour se rendre au lieu <Je M altavcrne,
lieu de son domicile, aurait d it, le 8 septembre 1 8 1 7 ,
à la pointe du jo u r, en allant de Maltaverne au lieu
de Cublaise, oii était son épouse, et eu passant au
lieu de G uignebaude, domicile d e là nommée Colomb e tte, que Courbon avait été trouvé étouffé par le
vin , derrière la maison Massardicr.
M. le juge de paix insistait spécialement sur les
difficultés q u e, suivant lu i, les trois beaux-frères
éprouvaient à justifier de l'emploi de leur teins, depuis
neuf heures du soir jusqu’à onze, et sur la conversa
tion que Galland aurait eue avec la Colombette, dans
Ja mtlliuée du 8 ; conversation contenant un aveu q u i,
�( * s )
vu-les distances, ne pourrait avoir été fait que par
celui qui aurait participé à l ’assassinat de Courbon.
Cependant la justice gardait le silence. Cette
autorité, à la fois vengeresse et tutélaire, recevait
les renseiguemens qui lui étaient donnés; mais elle
n ’en usait q u ’avec la circonspection qui est la pre
mière garantie de la liberté des citoyens. Aucun acte
n ’était encore émané d ’elle, lorsque, le 4 septembre
18 18 , le maréchal des logis de la gendarmerie, en ré
sidence à M ontfaucon, agissant d ’après les ordres de
son lieutenant, ordres délivrés d ’après la clameur
publique, arrête Rispal et Tavernier. G allan d , ins
truit de l ’arrestation de ses deux beaux-frères, vient
de lui-même se remettre entre les mains des gendarmes,
qui les transfèrent à Yssingeaux. Il n ’est pas inutile
de faire observer q u e , soit dans les choses, soit dans
les expressions, l ’ordre de l ’officier de gendarmerie
n ’est que le résumé exact des lettres ou rapports du
juge de paix à M. le juge d ’instruction.
A peine traduits à Yssingeaux, Rispal, Galland et
Tavernier sont séparés et mis au secret-, ils sont in
terrogés isolément, et répondent, d ’une manière aussi
simple q u ’ uniforme, aux différentes questions qui
leur sont proposées, questions qui étaient sans doute
rédigées sur les notes et renseignemens transmis par
M. le juge de paix.
Leurs réponses sur l ’emploi du tems qui s’est écoulé
de neuf heures et demie à onze heures du soir, dans la
soirée du 7 septembre, sont sur-tout remarquables.
Suivant eu x, ils sont sortis du cabaret Maugier à
neuf heures; ils ont parcouru ensemble la rue de
Dumèrcs; mais arrivés au-devant de la maison Rispal,
ce dernier a q u iu é ses deux beaux-frères, est rentré
dans son domicile, s’y est couché, et n ’en est plus
sorti.
Galland et Tavernier ont continué leur route. A
4
�( 26 ) t
neuf heures et demie, ils sontarrivésaucabaretLyonnel,
situé à quelque distance de Dunières; ils ont soupe
dans ce lieu : Tavernier y a même couché; mais Gal
land en est parti pour se rendre à M altaverne, en
passant par Cublaise, où il avait l ’espoir de rencontrer
son épouse.
Ces explications devaient paraître suffisantes; aussi
la chambre d ’instruction signa, le 8 octobre, l ’ordon
nance de mise en liberté de ces trois prévenus. Dans
la même soirée, ces trois malheureux se retirèrent à
l ’auberge Perrot , située à Yssingeaux. La femme
Rispal , portant au bras un enfant q u ’elle allaitait
encore, était venue donner à son mari des secours et
des consolations : elle était aussi descendue à l’auberge
Perrot. Quelle joie d ’y retrouver libre l’époux q u ’elle
croyait dans les fers! que d ’expressions de tendresse!
que de félicitations réciproques ! Les momens de la
douleur sont bientôt oubliés ! — Imprudens! ! ! modérez
ces transports......... Vous êtes libres; mais vos ennemis
sont-ils désarmés? la calomnie n ’a-t-elle plus de traits à
lancer contre vous? ne viendra-t-elle pas vous frapper
au sein même de la joie la plus innocente?.........
Mais il ne faut point anticiper sur les faits; et il
suffit ici de dire que Tavernier et G alland, Rispal r
son épouse^ et leur jeune enfant, passèrent a Yssin
geaux la nuit du 8 au 9 octobre, et couchèrent
ensemble à l’auberge Perrot, dans une chambre à
deux lits.
Le 9 octobre, cette famille rentra dans son domi
cile; elle venait de payer à la société le tribut le plus
cruel q u ’elle puisse imposer : ne devait-elle pas espérer
quelques consolations, sur-tout du magistrat q u i, sui
de simples soupçons, avait momentanément exposé la
réputation, et sacrifié la libçrlé de trois citoyens, de
trois pères de lain il le ?
Mais M. le juge de paix, que sa trop grande promp
�( 37 )
titude avait entraîné dans l ’erreur, la chérissait trop
pour la reconnaître. Par une lettre du in octobre, il
témoigne son déplaisir de l ’ordonnance qui a rendu la
liberté aux prévenus. Les 1 1 , il\, *8, 21 novembre
et 7 décembre, autres lettres, où il expose de nouveau
les circonstances q u ’il regarde comme accusatrices; il
y ajoute des révélations q u ’il prétend avoir été laites
par la mère de llispal; il a grand soin sur-tout de
prémunir le juge d ’instruction contre les témoins ,
q u ’il assure avoir été carressés et corrompus ; et si
son heureuse mémoire lui rappelle « qu a u x gens
« a i s é s les vertus sont fa ciles » la réflexion lui
fait de suite ajouter « que h s témoins sont indigens 3
« et que les accusés ne le sont pas. »
E n fin , les premières informations commencent; les
procès-verbaux sont sous les dates des 2 1 , a5 no
vembre et 9 décembre, et précédés c h a c u n d ’une ou
de plusieurs lettres de M. le juge de paix.
Ces informations apprennent comme faits essentiels:
i° Que Gallaïul et Tavernier, au lieu d ’arriver au
cabaret Lyonnet à neuf heures et demie de la soirée
du 7 septembre, comme ils l ’avaient déclaré dans
leurs interrogatoires, n ’y seraient venus q u ’à onze
heures ;
20 Q u ’il serait vrai que, le B septembre au m atin,
G a lla n d , passant au lieu de Guignebaude, aurait
annoncé à une femme, nommée Colom bette, la mort
de Gourbon. Ce fait n ’était point déposé par la Colom betie, mais semblait ressortir de la déposition de
trois autres témoins;
3 ° Que la nièce de R ispal, enfant alors âgée de qua
torze ans, aurait tenu une conversation qui accusait
son oncle;
4°
pendant la nuit du 7 au 8 septembre, 011
avait entendu des chiens aboyer, des disputes et des
géinissemens ;
�-( =8 )
5° E n fin , une fille de quatorze ans déposait des
on dit qui circulaient dans le bourg de Dunières, et
des projets que l ’on supposait avoir été conçus, de
faire subir à Courbon une mort semblable à celle
du malheureux Fualdès.
Tels sont tous les faits à charge qui ressortent ,
contre les accusés, de ces trois premières informations;
elles apprennent d ’ailleurs que Galland et Courbon
n ’ont point eu de dispute dans la journée du 7 sep
tembre; que ce dernier était dans un état complet
d ’ivresse; enfin, ces informations relatent ou confirment
la majeure partie des faits qui ont déjà été exposés.
O11 doit remarquer aussi un fait essentiel dans cette
première instruction. On voulait que Courbon eût
succombé à une mort violente; mais, dans rincertitude où l ’on était sur le genre de cette m ort, on s’était
enfin arrêté à la rupture de la colonne vertébrale et à
l ’étouiFcment. M. Bergeron, médecin à Mont faucon.,
interpellé sur ce fait, avait répondu que la luxation
des vertèbres pouvait se reconnaître sur le cadavre ,
même après trois mois de sa mort; q u ’il était encore
possible de l ’exhumer; et l ’on avait négligé ce ren
seignement, jusqu’au point de 11e faire aucune re
cherche pour constater un fait que l’on jugeait si
important dans le système de l’accusation.
M. le procureur du lloi et le juge d ’instruction
avaient enfin épuisé tous les renseignemens qui leur
avaient été transmis par M. le juge tie paix. M. le
procureur du Roi avait requis un mandat d ’arrêt
contre les trois beaux-frères; mais le juge d’instruction
ayant fait son rapport à la chambre du conseil, il y
intervint, le 17 décembre 1 8 1 7 , une ordonnance, qui
déclare q u ’ il n’y a lieu à faire droit sur le réquisitoire
de INI. le procureur du Roi, parce q u ’il 11e résulte, des
in formations , ni des preuves ni des présomptions
suffisantes pour priver des citoyens de leur liberté;
�( 2<> )
que d ’ailleurs les bruits publics sont à dédaigner,
lorsque sur-tout il n ’existe aucune preuve m atérielle
du délit.
Cette ordonnance était un hommage rendu aux
principes les plus vrais, et dont le magistrat ne doit
jamais s’écarter dans l ’instruction des affaires criminelles.
Comment, en effet, rechercher des coupables, s’il n ’y a
point de crime constaté? Ne serait-ce pas se jouer des
choses les plus sacrées, et compromettre arbiti’airement
la sûreté, la liberté et la vie des hommes?......
Cet acte, aussi sage que respectable, irrite encore
M. le juge de paix. L a résistance du tribunal à faire
arrêter les prévenus, peut, suivant lu i, faire manquer
l ’effet des poursuites : « L ’affaire de llh o d e z , s’écrie« t-il, n’est cependant pas plus horrible? Le canton
« de Montfaucon n’aurait-il pas les mêmes droits à Ja
« sollicitude de l'autorité? » Il imliquc ensuite de
nouveaux témoins, et recommande spécialement A n n e
Colom bette, dont la m oralité est p lu s que fa ib l e / il
pense même que la crainte d ’être poursuivie p eu t seide
fa ir e p a rler c e t t e i n f e r n a l e f e m m e . . . (Lettres des 5
et 6 janvier 1817 ).
L e 18 février 1818, M. le juge de paix écrit que 1a
famille Courbon-croit le rapport du médecin inexact;
q u ’elle lui reproche de ne l ’avoir livré que six jours
après la visite du cadavre. Ainsi ce juge infirme luimême son propre témoignage; il veut s’être trompé au
, moment où il pouvait tout vo ir, tout examiner et tout
apprécier : peu lui importe q u ’on l ’accuse d ’irréflexion
lorsqu’il dressait son procès-verbal, pourvu que les
bruits populaires et les renseignemens q u ’il recueille
lassent connaître les coupables du crime q u ’il suppose.
Il are et louable modeslie, qui fait abnégation de tout
amour-propre, jusqu’au point de renoncer à une vérité
démontrée, pour s attacher a des apparences étran
gères, et s’efforcer de l^s établir! L a société, qui est
�C 30 )
obligée de rechercher des coupables, mais qui se réjouit
lorsqu'elle découvre des inuocens, lui tiendra-t-elle
compte d’un aussi noble dévouement?
On ne s’arrête point aux autres lettres qui sont
nombreuses, et contiennent des détails exagérés ou
inexacts; il faut seulement dire q u e , dans celle du
i 3 aoi\t 18 1 8 , Peyrache est indiqué comme tém oin,
et devant déposer des excès que Q alland avait exercés
sur sa personne.
L ’instruction se continue. U ne information du 7
janvier 1818 apprend :
i° Q u ’Anne Colom bette, qui était au-devant de la
porte de sa maison au moment de sa conversation avec
G allan d , ne dépose pas q u e ce dernier lui ait parlé de
la mort de Courbon ; ainsi elle i nfirme ou au moins
rend problématiques les dépositions des témoins qui
ont déchiré avoir entendu cette conversation et cet
veu de Galland à la Colombette ;
20 Que le soir du 7 septembre, et sur les neuf
heures, quelqu’un est venu heurter à la porte d ’en li ée
de l’auberge Massardier ; que ne recevant pas de ré
ponse , cet individu est alors monté du coté où
Courbon a été trouvé morl ;
3 ° Que quelqu’ u n , qui couchait auprès de la fosse
où le cadavre de Courbon a été déoouvert, a entendu
dans la soirée , ou pendant la nuit du 7 au 8 septembre,
une voix s’écrier : « Ksl-ce que je n y suis pas encore ! »
4° Que lors de la visite et de l ’autopsie cadavérique
du malheureux Courbon, on a fait inutilement observer
au m édecin, que le mal qui avait causé sa mort n’était
point dans la tête^ mais bien au cou.
L'instruction a ensuite été suspendue pendant sept
mois; elle a été reprise dans le courant du mois
d ’août suivant; et sous les-dates des i/j, o.!\ et 2 (> de
ce mois, se trouvent trois procès-verbaux d ’information 3
( p i appieiiiieul :
�( 31
)
i° Que Galland s’était, à différentes reprises, liv ré ,,
contre plusieurs individus, à des excès et à des actes
de violence; que Courbon avait é té , comme plusieurs
autres, exposé à ces excès; et q u e , dans la journée
du 7 septembre , T avern ier, étant au cabaret avec
C ou rbon, l ’aurait appelé cochonj en proférant cette
épitliète avec un ton colère;
. 2° Que lors de la visite du cadavre, on s’est aperçu
que la tète de Courbon était mobile et tournait en
tout sens; que des taches noires et violettes se faisaient
remarquer vers le cou ; que l ’os du gosier était plus
saillant q u ’à l ’ordinaire; q u ’enfin Je médecin a avoué
que Courbon n ’était pas mort d ’apoplexie;
3 ° Q u e , le 8 septembre, Rispal, s’expliquant sur
la mort de Courbon , a tenu des propos de mauvaise
plaisanterie; que cet homme, se voyant fixé par le
juge de paix, a pâli ; que sa pâleur a s u r - t o u t a u g m e n t é ,
lorsque, sur l' i n t e rp el l a t i o n du juge de paix., l ’auber
giste Massardier a nié avoir vu déchirer par Courbon
le billet q u ’il devait à T avernier, et dont il venait de
se libérer.
Enfin , pour compléter les idées sur ce qui ressort
de ces diverses informations, il faut ajouter q u ’elles
font aussi conntaitre les bruits qui circulaient dans
le bourgo de Dunières. On vc disait :
Que Galland et Tavernier , après avoir étouffé
Courbon, s’étaient réfugiés dans l ’auberge de Lyonnet;
Q u ’ un nommé Saignard avait aidé llispal à porter
le cadavre dans la fosse;
Q u ’enfin un inconnu avait dit que INI. Dufaurc
(le juge de paix) eut à prendre-garde à lu i, Galland
ayant a n n o n c é <ftt’il lu i fe ra it comme à Courbon.
Le tribunal d ’Yssingcaux, pensant que la procédure
était complète, renvoya, par ordonnance du 27 août
1 8 1 8 , cette affaire a la chambre des mises en accusa
tion de lu C o u r royale de Riom.
�(3 0
L e jour même de ce renvoi, M. le juge de paix
écrivait encore. 11 faut extraire de cette dernière lettre
un fait essentiel. 11 annonce que Peyrache , témoin
déjà entendu, lui a rapporté q u ’étant à Yssingeaux ,
et logé à l'auberge Perrot_, il a pu entendre les trois
beaux-frères s’entretenant de leur crime-, q u ’un d ’eux
disait : « N ous avons trop enfoncé le m ouchoir} ce
/< qui a fa it enfler le cou et a éveillé les soupçons »
que si Peyrache n ’a pas révélé plutôt ces propos, c’est
q u ’il a peur de ces coquins, et parce que d ’ailleurs il
n ’a pas été interrogé sur l ’assassinat.
Toutes les lettres de M. le juge de paix étaient
jointes à la procédure : elles semblaient même en faire
par ti e ; elles p o u v a i e n t donc fixer l ’a t t e n t i o n de la
Cour. Cette correspondance a q u e l q u e chose de si
positif; les faits q u ’elle contient sont si graves; les
personnes y sont traitées avec si peu de ménagement ;
la conviction de M. le juge de paix paraissait enfin si
profonde, que la chambre d ’accusation crut devoir,
dans sa haute sagesse, soumettre cette affaire aux
débats des assises. U n des motifs de son arrêt d ’accu
sation, qui est du 2 octobre 18 18 , énonce clairement
la pensée de la C o u r; ce m otif dit textuellement q ue ,
s i les fa its articulés p a r le ju g e de p a ix avaient été
déposés j les indices seraient plus graves ; mais que
les témoins ont été intimidés p a r la fé ro c ité des j)révenus; qu enfin elle espéra <pie les débats des assises
étant dirigés dans le sens des indications du ju g e de
p a ix , fournies avec soin, fero n t ja illir la lumière.
Les informations 11e sont donc pas ce qui décide
positivement la C o u r; elle a constamment son atten
tion fixée sur les faits articulés par le juge de p aix ,
faits qui ne sont pas encore prouvés, mais qui peuvent
l ’être; elle s’indigne, avec raison, de ce que la férocité
des prévenus a pu tenir si long-tems la vérité captive;
plie espère que, lorsque ces hommes dangereux seront sous
�( 33 )
la main de la justice, les témoins s’expliqueront, justi
fieront, par leurs dépositions, les indications données
par M. le juge de paix , et que la société n ’aura plus à
gémir sur l'impUnité du plus horrible attentat.
L ’arrêt d ’accusation renvoie là connaissance de cette
affaire à la Cour d ’assises du P u y , département de la
H aute-Loire; e t , le 27 octobre, l ’acte d ’accusation.
€st dressé ; il ne contient autre chose que le développe
ment des présomptions et des indices qui avaient
motivé la mise en accusation.
C ’est à peu près à cette époque, que G a lla n d , un
des accusés, fut arrêté, et traduit dans la maison de
justice du Puy. Rispal et Tavernier, pensant que leur
procès serait jugé aux assises de décembre, vinrent
joindre leur beau-frère • ils passèrent avec lui une
journée en prison; mais ayant appris q u ’ils étaient
renvoyés aux assises de mars, ils se retirèrent dans leur
dom icile, après eu avoir prévenu, par écrit, M. le
procureur du Roi.
.
■
Cependant la justice faisait de nouvelles recherches.
Le président des assises donne des commissions rogatoires; et des procès-verbaux d’information, sous les
dates des 22 novembre 1818 et 27 janvier 1 8 1 9 , font
connaître,
i° Que de nouvelles conversations de la jeune nièce
de Régis Rispal semblaient prouver que ce dernier était
auteur de la mort de Courbon ;
9.0
Q u e, dans la nuit du 8 au 9 octobre, les accusés,
couchant àYssingeaux, dans l ’auberge Perrot, auraient
lait l ’aveu de leur crime, aveu qui aurait.été entendu
et recueilli par Peyrache, qui se trouvait dans la mêmp
auberge;
3 ° Q u e , pendant la
près de la losse où le
couvert, 011 a entendu
* nous n ’y sommes
nuit dti 7 an 8"Septembre, et
cadavre de Courbon a été dé
une voix, disant : « Est-ce que
pas encore ? >> et une autre
�( 34 )
répondre : « O u i, nous y sommes » 5 que presqu’aussitôt
on a entendu le bruit d’un corps pesant q u ’on jetait.
On arrive au mois de mars 1819.
Les accusés Rispal et Tavernier s’étaient constitués
prisonniers. La simplicité de leurs réponses, la douce
sérénité de leur physionomie, leur attitude à-la-fois
modeste et assurée, tout faisait présumer leur innocence.
Ces accusés furent présentés aux assises; ils étaient
assistés, dans leur défense, de Me M andet, a v o c a t,
et de Me Montellier, avoué, tous les deux si avanta
geusement connus par leurs talens et par la beauté de
leur caractère. Ces deux généreux défenseurs, d ’ailleurs
convaincus de l ’innocence de leurs cliens, venaient ré
clamer justice, et l ’attendaient avec la plus grande
sécurité.
;
On leur avait bien parlé d’intrigues, de témoins
pervers ou corrompus; ils 11e voulaient pas y croire.
« Quel homme oserait, disaient-ils, en imposer à Dieu
« et à la Justice? Quel imposteur assez atroce entre« prendrait d ’égarer la conscience du jury, et ne
« craindrait pas d ’attirer, par une fausse déclaration,
« le glaive de la loi sur des têtes innocentes? L ’igno« rance et là légèreté ont bien pu entraîner quelques
« témoins hors des bornes de la vérité; mais la sain« teté du serment, la solennité de l ’andicnce, la vue
« du mal q u ’ils vont faire, suffiront sans doute pour
h les rendre à eux-rnOmes, et ils avoueront leurs
mensonges. »
On leur-faisait aussi craindre les effets de la Pré
vention, celle ennemie mortelle de la Justice , qui
quelquefois s’assied auprès du magistrat à son insu,
excite son zèle, assiège constamment son esprit, donne
aux erreurs q u e lle lui inspire le caractère de la vérité,
et lui dicte'souvent des arrêts q u ’il voudrait ensuite
eflacer. avec son sang, llien ne peut intimider le cou
rage des deux défenseurs; d ’ailleurs, que peuvent-ils
�(35 )
Craindre devant un tribunal juste, éclairé et impar
tia l, devant un jury attentif et équitable?
Cependant, le 4 mars, les débats sont ouverts.
Trente-trois témoins sont ajoutés à ceux déjà entendus
dans les diverses informations. Voici ce que le procèsverbal, tenu par le greffier, apprend d’essentiel :
Le docteur Thomas persiste dans les faits énoncés
dans son rapport-, il déclare que les lèvres du cadavre
étaient teintes de v in ; il dit q u ’il est faux q u ’on lui
ait fait observer que le mal était au cou; qu ’il est
également faux qu ’il ait déclaré que Courbon n ’était
pas mort d’une attaque d ’apoplexie. Il convient cepen
dant ensuite n’avoir pas visité le cou du défunt.
M. D ufaurc, juge de paix, déclare q u ’il ne croyait
pas à un assassinat, et quelesdires dudocteurThom as
lui firent rédiger son procès-verbal avec trop de légè
reté; il ajoute q u ’tt/i morceau de b illo t, oh était la
signature de Courbon , a été trouvé dans une des
poches de l'habit du défunt. Cette découverte , qui
explique ce q u ’est devenu le billet que Courbon avait
acquitté à Tavernier, le 7 septembre, est encore at
testé par un autre témoin produit aux débats.
Anne Colombette avait déjà été entendue; sa dé
position, contenue dans un cahier des informations ,
était insignifiante : elle anéantissait même la décla
ration de trois autres témoins; mais cette fe m m e,
produite aux débats, dit que, dans la conversation
q u ’elle avait eue avec G alla n d , au lieu de Guignebau d e, et au commencement de la matinée du jour
du 8 septembre, cet accusé lui avait annoncé la mort
de Courbon. Cette déposition s’accordait avec celle de
trois autres témoins, qui déclaraient avoir entendu
cette conversation; et leur force était telle, que l ’on
pouvait en induire que Galland avait eu connaissance
de la mort de C o u r b o n , dans uu instant où il devait
�( 36 )
absolument l ’ignorer, s’il n’en avait été ni l ’auteur ni
le complice.
A l ’audience du 6 mars , Me Montellier requit
que Lardon et la Colom bette, qui déposaient plus
particulièrement de ce fait, fussent conduits hors de
l ’enceinte de la C ou r; que là , en présence des voisins
et d’un de MM. les jurés, qui assisteraient à l ’expé
rience, on fit la démonstration du lieu où était placé
Lardon, respectivement à la Colombette et à G alland,
lorsque Lardon aurait entendu l ’annonce que Galland
faisait à la C o lo m b e tte ,. de la mort de Courbon.
La Cour rejeta ce moyen d ’instruction, comme
Inutile et n’ayant d’autre but que d ’allonger les débats.
L a déposition de Peyraclie donna lieu à un nouvel
incident. Cet homme avait été entendu deux fois;
d ’abord il n ’avait été produit que comme pouvant
déposer d ’excès que Galland aurait exercés sur sa per
sonne : ainsi la nature même de la déclaration q u ’il
devait faire annonçait déjà q u ’il était l ’ennemi de
Galland.
Quoi q u ’il en soit, sa première déclaration est dit
26 août 1818. On a vu que les prévenus ayant été mis
en liberté, le 8 octobre 1 8 1 7 , avaient passé-la nuit
du 8 au 9 à Yssingeaux, dans l ’auberge Perrot; cepen
dant ce n’est q u ’au mois de novembre 18 18 , que
Peyraclie vient apprendre q u ’il était lui-même a ^tssingeaux , dans l’auberge de Perrot, pendant la nuit du
8 au 9 octobre 1818, et q u ’il a entendu les prévenus
faire l’aveu de leur crime. Peyraclie répéta cette dépo
sition aux assises du P u y ; et comme 011 lui opposait
q u ’il n’était point à Yssingeaux les 8 et 9 octobre;
que conséqueimrient il n ’avait point paru à l'hôtel
Perrot; que Perrot et les gens de sa maison déclaraient
même ne l’y avoir jamais v u ; pour appuyer sa déposi
tion, Peyraclie présenta, comme étant sous la date
du 8 septembre 1 8 17 , une quittance do M. L abatie,
�( 37 )
avoué, et soutint que cette pièce prouvait sa présence
à Yssingeaux, au jour q u ’il indiquait. L a rapidité et
la chaleur des débats empêchèrent de donner à l ’examen
de cette quittance toute l ’attention q u ’elle exigeait;
son inspection suffisait cependant pour convaincre
Peyrache d ’imposture. E n effet, cette pièce était bien
du 8 septembre, mais de l ’année mil huit cent d ix h u it , au lieu d ’être de l ’année m il huit cent dix-sept.
Mais ce fait si important n’a été découvert q u ’aux
assises de R iom , où Peyrache osa encore produire cette
quittance, pour soutenir son imposture.
Les choses en cet état^ Me Manclet dit que la dépo
sition de Peyrache était fausse, et requit l ’arrestation
de ce témoin. Il demanda en même tems que la Cour
nommât des commissaires, à l ’effet de vérifier si P e y
rache avait pu entendre, dans l ’auberge Perrot, la
conversation q u ’il -supposait y avoir été tenue par les
accusés, et si Lardon avait aussi pu entendre celle de
Gallantl et de la Colombette, au lieu de Guignebaude.
Cet incident s’était élevé h l ’audience du 9 mars; mais
la Cour., par son arrêt du même jo u r, refusa d ’obtem
pérer à cette réquisition, en déclarant que rien ne
justifiait la fausseté de la déposition de Peyrache, et
'que la vérification demandée 11e pouvait produire
aucun résultat.
Il est très-important de faire observer que les réqui
sitions des accusés étaient autorisées par l ’article 33o
du Code d ’instruction criminelle , qui dispose q u e ,
« si, d’après les débats, la déposition d ’un témoin parait
« fausse le président pourra, sur la réquisition soit
« du procureur général, soit de la partie civile', soit
<1 de l accusé, et même d ’office, faire mettre le témoin
« en élat d ’arrestation...... Dans ce cas, dit l’art. 33 1
« les mêmes parties pourront requérir, et la Cour
« ordonner, même d ’office, le renvoi de i affaire à la
* prochaine session. »
�( 38 )
Les accusés avaient fait leur réquisition; les déposi
tions de Peyrache, de la Colombette et de Lardou
leur paraissaient fausses; mais la C our n’obtempérant
point à ces réquisitions, ju g ea que ces dépositions lui
paraissaient v r a i e s , et leur donna, par son arrêt,
j)lus d ’influence sur l ’esprit des jurés, q u ’elles n’en
auraient peut-être eu, si leur véracité ou leur fausseté
n ’avait pas fait l ’objet d ’une discussion très-vive, et
sur laquelle la Cour était appelée à décider. Ainsi on
ne peut se dissimuler que ces dépositions n’aient puis
samment servi à former la conviction des jurés.
Si l’on parcourt le procès-verbal des assises et toutes
les informations, pour y découvrir les autres charges
qui se présentaient contre les accusés, on y voit :
D ’abord que le jury devait être incertain sur le fait
de savoir ce q u ’était devenu Jean C o u rb o n , après sa
sortie du cabaret Maugier. Il était déposé q u ’à neuf
heures du soir, quelqu'un avait heurté ou loqueté à
la porte d ’entrée de l ’auberge Massardier; que la même
personne s’était ensuite dirigée derrière la maison, et
vers le lieu où le cadavre a été trouvé ; que ce même
soir une personne, couchant dans une chambre don
nant sur le derrière de la maison Massardier, avait
entendu, une voix s’écrier : « Est-ce que je n’y suis pas
encore ? » et bientôt après un bruit semblable à celui
d ’un corps pesant que l ’on jette ou q u ’on laisse tomber.
Il faut même ajouter que, dans la suite, ces expres
sions, « est-ce que je n’y suis pas encore? » avaient été
traduites en celles-ci : « Est-ce que nous n ’y sommes
pas encore? » en y ajoutant la réponse : « O u i, nous
y sommes », qui ferait supposer la présence de plusieurs
personnes près de la fosse.
Deux inductions forcées naissaient de ces faits : ou
C o u rb o n , , cherchant la porte de la grange Massardier,
avait appuyé trop à droite, et s’était laissé tomber
dans la fos;e, placée à une distance de deux pieds do
�( 39 )
cette porte; ou les assassins, qui voulaient déposer le
cadavre dans la grange, ne la trouvant plus ouverté,
l ’avaient jeté dans la fosse, et arrangé comme on l ’a
vu plus h a u t , pour induire en erreur sur les causes de
la mort.
A laquelle de ces deux inductions les jurés s’arrête
ront-ils? L eur choix n’était-il pas forcé, s’ils ajoutaient
quelque confiance aux dépositions de la Colombette et
de L a rd o n , et sur-tout de Peyrache ? E n effet, les
assassins ne s’étaient-ils pas fait connaître par leurs
propres aveux?.........
MM. les jurés avaient ensuite un autre point de
fait à exam iner, l ’emploi du tems des trois accusés
pendant la soirée du 7 septembre.
Il était ce rta in , au procès, que les accusés étaient
sortis du cabaret Maugier quatre h cinq minutes après
les frères C ourb on. Rispal disait q u ’il était de suite
rentré dans son dom icile; G alland et Tavernier sou
tenaient q u ’ils s’étaient rendus au cabaret L y o n n e t,
où ils étaient arrivés à n e u f heures et d em ie, plus ou
moins.
Mais les dépositions de trois témoins semblaient
combattre et détiuire ces assertions; l ’un disait être
arrivé chez Lyonnet à dix heures du soir; y avoir fait
ferrer son cheval; être allé ensuite à Dunières pour
affaires; être revenu, à onze heures et demie, chez
L y o n n et, où il avait trouvé Galland et Tavernier, qui
n ’y étaient entrés que depuis un petit quart d ’heure.
Cette déclaration paraissait en harmonie avec la dé
position de celui qui avait tenu le pied du cheval, et
ineme avec celle du cabaretier Lyonnet.
A in si, sur l ’emploi du tems, on pouvait remarquer
une contradiction entre les interrogatoires des accusés
et les dépositions des témoins, et se demander ce
qu avaient fait Galland et Tavernier pendant l e s sept
quarts d ’heure q u i s’étaieut écoulés depuis n e u f heure»
�......................................( 4o )
jusqu’à dix heures trois quarts; et si on se rappelle
l'influence que devaient avoir les dépositions de la Colorabette et de Peyrache, on croira facilement que
cette circonstance a été interprétée contre les accusés,
et que MM. les jurés ont été convaincus que c’était
pendant ce teins, que Rispal, Galland et Tavernier
avaient exécuté et consommé le crime dont ils sont
accusés.
; Il est vrai que tous graves que ces faits pussent pa
raître, ils ne pouvaient suppléer au défaut de preuves
de l ’existence d ’un corps de d élit, ou plutôt à la preuve
positive q u ’il n’existait pas de crime ; mais lorsque
l ’imagination est frappée d ’une idée q u ’elle adopte
comme pi’incipale, il est difficile q u ’elle ne regarde
pas également comme vrai tout ce qui lui parait n être
que l ’accessoire ou la conséquence de cette première
idée. Ainsi, MM. les jurés étant convaincus, par les
dépositions de Peyrache et de la Colombette, de la
culpabilité des accusés, n ’ont pu supposer q u ’il n exis^tàt pas de crime-, ils ont regardé les indices et les
présomptions, qui ressortaient des dépositions de quel
ques témoins, comme suffisantes pour le démontrer,
et détruire les preuves matérielles et positives contenues
soit au procès-verbal du juge de paix, soit au rapport
du médecin.
E n réduisant tout ce que l ’on vient de dire , on
voit que la preuve de l ’existence du corps do délit est
résultée de la déposition de quelques témoins , qui
miraient déposé de la luxation de la colonne verté
brale, de quelques taches noires ou violettes qui au
raient été remarquées auprès du cou, et sur-tout de
la.position extraordinaire du cadavre de Courbon dans
la .fosse où il a été trouvé;
Que la culpabilité des accusés serait ressortie ,
>
i° De ce que les accusés étaient hors (l’état de rendre
Compte de l ’emploi du teins q u i s’est écoulé depuis
�(40
n eu f heures et demie jusqu’à onze heùres passées de
la soirée du 7 septembre ;
20 De ce que Galland a annoncé, le 8 septembre,
> et avant le lever du jour, k Anne Colom bette , la
mort de Jean Courbon, annonce qui aurait été faite
dans un tems et dans un lieu qui font supposer que
Galland était l ’auteur de cette m ort;
>
3 ° De ce que, dans la nuit du 8 au 9 octobre, les
accusés étant à Yssingeaux, et logés dans l ’aubel^e
P e r ro t, ont fait, dans une conversation particulière,
et q u ’ils croyaient secrète, l ’aveu de leur crime, aveu.'
qui a été entendu par le nommé Peyrache.
Toutes les autres circonstances n’étaient que des
adminicules insignifians^ telles étaient les expressions :
« Est-ce què je n ’y suis pas encore? » traduites en
celles-ci : « Est-ce que nous n ’y sommes pas encore?»
augmentées de la réponse : « O u i, nous y sommes. >»
Les débats de ce tt e affaire o nt duré depuis le 4
jusqu’au 9 mars inclusivement.
^ A cette dernière audience, le jury ayant déclaré
que les accusés Galland et Rispal étaient coupables
d ’avoir commis, sur la personne de Jean C o u rb o n ,
un homicide volontaire, et sans préméditation; d ’avoir
transporté son cadavre dans une fosse attenant k l ’au
berge Massardier; et Tavernier ayant été déclaré com
plice des mêmes faits, mais avec les circonstances
atténuantes , q u ’il avait agi non volontairement
l ’arrêt de la Cour d ’assises du P u y condamna
Galland et Rispal aux travaux forcés k perpétuité ,
et k la flétrissure;
E t ravernier k une année d ’emprisonnement.
Galland et Rispal se pourvurent en cassation. Les
eiForts généreux de M° Odillcm-Barrot, si avantageu
sement connu par des talens qui le plaçent au premier
rang du barreau français, n ’ayant pu réussir, les
condamnés implorèrent la clémence du Roi. Mais uu
�(
4
2
.
monarque aussi éclairé ne p o u v a io u b lie r que le droit
de faire grâce serait nuisible à la société, si le Sou-?
verain n ’en usait avec sagesse; aussi, comme le crime
dont les condamhés étaient convaincus ne pouvait être
excusé; q u ’il portait, au contraire, avec lui tous les
caractères de la plus froide .perversité, leur requête eii
grâce fut rejetée, et l ’arrêt exécuté dans toute sa rigueur*
t..
On arrive à un nouvel ordre de faits.
Les accusés soulevèrent la pierre de la tombe qui
semblait devoir les ensevelir à jamais; leurs gémissemens, répétés par une sœur, une cpouse aussi sensibleque courageuse, fuient entendus de la Justice, et une
nouvelle procédure commença.
Rispal et Gallantl renouvelèrent la plainte q u ’ils
avaient portéedevantia Cour d’assises du P u y . Ils dirent :
: i° Q u ’Anne Colombètte-avait déposé faussement r
çn déclarant que G alland'lui avait d it, le 8 septembre
1 8 1 7 , et à la pointe du jour, q u ’il s’était levé plus
matin q u ’elle, et q u ’on avait trouvé Tainé Courbon,
du Mazet, mort derrière la maison Massardier ;
2° Q u ’Etienne Lardon en avait aussi imposé , en
disant q u ’il avait entendu, le même jour, à la même
heure, et lorsqu’il labouraitT la conversation tenue’
entre Galland et la Coloinbelte •;
3 " Que Joseph Auianier et Pierre Celette avaient
également 'm enti, lorsqu'ils avaient déposé q u e , le
même jou r, à six heures .du matin , Lardon leur avait
annoncé, chez lu i, ce que.Galland vpnait de*dire à la
Colombette;
:
4ÜE n fin , que Peyrarhe avait faussement déposé aux
assises du P u y , en soutenant avoir couché, pendant
la nuit du 8 au 9 octobre, d a n s! l’auberge 'de Perrot,
à Ys.singeau* , e t 'y avoir entendu les'trois condamnés
parler de leur crime-, et en faire l ’aveu. • '
. Le 20 décembre i 8 i y , » l a chambre du conseil du
�'(
43 5
tribunal d ’Yssingeaux ordonna q u ’il serait poursuivi
et informé sur cette plainte,, et que le tribunal pro
céderait, ep corps, aux opérations nécessaires pour
vérifier les dépositions de la Colom bette, Lardon et
Pey radie.
^
L e 20 janvier 1820, la dame Rispal, née G allan d ,
■épouse et sœur des.condamnés, demanda, par une re
quête , à être autorisée à faire toutes les observations
nécessaires dans l ’intérêt de son frère et de son époux.
Cette autorisation lui ayant été accordée, la procédure
én faux témoignage commença ; e t , par suite de l'ins
truction qui a eu lieu , P.eyràche a été condamné
comme faux témoin.
Tout est précieux dans cette procédure, qui a été
faite avec un soin particulier. L e juge d ’instruction,
réuni au magistrat du parquet , a pris les moyens
propres à.expliquer tout ce qui pouvait paraître dou
teux o u i é q u i v o q u e . L es plans des localités o nt étc levés
av eci soin; les experts et les hommes de l ’art ont opéré
en présence des magistrats et des prévenus; les prévenus
et les témoins ont été entendus sur les lieux; on a tenu
note de tous les détails et des moindres explications,
de manière que Ton peut dire que rien n ’a été négligé
pour parvenir à la découverte de la vérité.
L e besoin de la cause pourrait peut-être exiger un
examen approfondi de toutes les pièces de cette volumi?
neuse instruction. Il ne serait pas sans intérêt de
connaître comment la justice est parvenue à soulever
successivement les voiles plus ou moins t?pais qui
couvraient la vérité ; mais comme le teins pourrait
manquer pour un travail aussi long, on se réduira à
exposer, dans quelques paragraphes, ce qui lient le
plus directement à la cause, et à faire connaître les
nouvelles découvertes, qui ont anéanti les faits qui
semblaient avoir entraîné la conviction de MM. les
jurés de la Ilaute-Loire.
�( 44 >
Chacun de ces paragraphes servira à-la-fois à détruire
une erreur de fa it, et à prouver une vérité contraire.
Ainsi l ’analise de cette procédure établira :
i° Que non-seulement Jean Courbon n ’est pas mort
assassiné, mais encore q u ’il a succombé à une attaque
d ’apoplexie ;
2° Q u e , loin q u ’il y ait du doute sur la conduite
des trois beaux-frères, dans la soirée du 7 septembre r
et pendant le tems qui s’est écoulé de neuf heures à
onze heures, les localités, les faits et les témoins se
réunissent pour montrer que ce tems a été employé,
par les trois beaux-frères, d ’une manière si innocente,
que l ’on ne pourrait leur imputer la mort de Courbon
lors m ê m e q u ’il serait établi que ce malheureux a éLc
■victime d ’ u n assassinat;
3 ° Que la déclaration de la femme Colombette n ’esü
pas vraie ; q u ’elle est repoussée par l ’examen des loca
lité s, et par les dépositions des témoins; que la dépo
sition de Lardon est tout aussi fausse; que cette
fausseté est démontrée par les distances, la position
des lieux , et celle des interlocuteurs;
4 ° E n fin , que le condamné Peyrache est un vit
im posteur, qui n ’a rien entendu et ne pouvait rien
entendre, puisqu’il n ’était ni à l ’auberge P e r r o t , ni
même à Yssingeaux, dans la journée et dans la nuit
du 7 au 8 octobre.
Il f a u t se liàter de d évelopper ces p r o p o s i t i o n s , dont
la réunion démontre complettement l ’erreur de MM. les
jurés de la Ilaute-Loire.
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NON
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EXISTENCE
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CORPS DE
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DÉLI T.
I c i , il faut se remettre sous les yeux le procès-verbal
de M. le. juge de paix et le rapport du m édecin, qui
sont, l ’un et l ’autre, sous la date du 8 septembre 1817.
( V o ir les pièces justificatives). Ces deux pièces se
réunissent, comme on le sait, pour établir que Jean
Courbon était décédé des suites d ’une attaque d ’apo
plexie. Lorsque, plus tard, on a voulu équivoquer
sur la preuve qui résultait de ces deux procès-verbaux,
M. le procureur du Roi a consulté le docteur Bergeron,
qui a répondu que si Courbon était mort par suite de
la rupture de la colonne vertébrale, ce point de faiç.
pouvait encore être vérifié , quoique le cadavre fut
inhumé depuis trois mois. L a justice a négligé ce
moyen d ’i n s t r u c t i o n , et s’en est t en u e à. la dépositi on
de q u e l q u e s t é mo in s , qui soutenaient avoir observé des
choses propres k anéantir les résultats établis par les
procès-verbaux.
Lors de la procédure en faux témoignage, M. le
substitut du procureur du R o i, à Yssingeaux, spécia
lement chargé de cette instruction, réunit tous ces
documens. Le procès-verbal } le ra,pport, les dépositions
<le tous les témoins entendus dans la première instruction
ou aux assises, un dessin figuratif de la position de Cour
bon sont transmis, par ce magistrat, aux docteurs Darle
et D ebrie, médecins à Yssingeaux, avec un Mémoire à
consulter, explicatif de tous les faits., où M. le pro
cureur du I\oi demande, « si la mort de Courbon et
« la position extraordinaire de son cadavre, dans la
« fosse où il a été trouvé, ne peuvent s'expliquer que
« p a r le f a i t d'un crim e} ou bien si on 11e pourrait
« pas trouver la cause de cette mort et de cette posi« tio n , dans un accident naturel, p r o v e n a n t ^ 1*
1
�« chute de Courbon dans la fosse, et de ses efforts à se
« relever, sa tête appuyant à terre, comme font les
« ivrognes. »
L e i i juillet 1820, les deux docteurs font leur
rapport, et répondent,
Que la mort et la position de Courbon peuvent et
doivent s’expliquer par tout autre fa i t que par celui
■d’un crim e;
Que Courbon est probablement mort ou par l ’effet
de la congestion du sang au cerveau 3 résultat de
Vivresse et de sa position, ou par suite de la luxation
des vertèbres, qui aurait été produite par la chute de
Courbon, ou par ses efforts pour se relever ;
Q u ’ il est certain q u ’il n ’y a point eu de violences
exercées sur la personne de Courbon*, q u ’il f a ut s’abste-nir de se livrer aux suppositions et aux hypothèses,
pour ne s’arrêter q u ’aux signes qui indiquent si é v i
d e m m e n t u n e MORT NATURELLE (V o ir les pièces
■justificatives.)
’
' C e rapport, fait par ordre de la justice, prouvait
tout ce q u ’il était nécessaire de connaître sur ce point
de •fait; il faisait cesser tous les équivoques que M. le
'juge de paix et quelques témoins s’étaient permis
d ’élever sur les opérations du docteur Thomas. Désor
mais il n’était plus permis de soutenir, • au moins
légalement, que Courbon eût été victime d’un as
sassinat.
Mais la prévention jette des racines si profondes ,
ses fruits sont si amers, que les épouses et les conseils
des condamnés crurent 11e devoir négliger aucun effort
pour la détruire, ou au moins pour la combattre avec
avantage.
1
’
Des Mémoires îi consulter sont rédigés avec soin; on
y joint les pièces et documeus que’ lés docteurs Darle
et Debrie avaient eus sous1 les yeux; on les transmet
autf médecins de notre teins-les plus verstH dans 1 art
�( 47 )
cle la médecine légale, et on les interroge sur les causes
de la mort de Courbon.
M. Fodéré, professeur de médecine légale à Stras
bourg, et auteur d ’un Traité qui est à-la-fois le i'ésumé de la science sur cette matière, et un recueil
d ’observations nouvelles aussi justes que profondes ,
adopte et approuve une consultation rédigée par le
docteur R ichond, sous-aide-major à l ’hôpital militaire
d ’instruction de Strasbourg.
. Ce jeune docteur, dans deux Mémoires étincelans
de beautés, examine les causes réelles de la mort de
Courbon : il déclare d ’abord q u ’il est mort d ’apo
plexie. Portant ensuite ses regards investigateurs sur
les faits avancés par les tém oins, et sur les autrescauses présumées de cet événement, la science, les
exemples et le raisonnement lui servent à démontrer
q u ’il est impossible que la mort de cet homme soit
la suite de la •s t r a n g u l a t i o n , de la suf fo cat io n, ou de
la l ux a t i o n des vertèbres; il prouve enfin que la p o
sition du cadavre de Courbon ne peut être l’effet d ’une
impulsion communiquée; elle e s t , au contraire, une
de celles que C ou rbon, succombant à une attaque
d ’apoplexie, pouvait prendre; et cette position est ellemême une preuve q u ’il n ’y a point eu de luxation des
vertèbres (V oir les pièces justificatives.).
, Ce travail si précieux, «l qui.doit être placé à côte
des consultations médico-légales données par les plus
grands maîtres., est ensuite soumis à l ’examen du doc
teur Caizergues, professeur à l ’école de médecine de
Montpellier. Ce savant observateur, en déclarant ,
dans sa consultation du 15 février iB -ai, que Courbon
est mort d ’apoplexie, ajoute qu'elle a été causée par
un exces do liqueurs; que le genre de mort et s^cause
sont également prouvés par la contraction ou la rigi
dité des membres, et par le reste de chaleur qui se
laisuit remarquer dans le cadavre au moment
1)11
�ï ’a découvert ; q u ’enfin l ’état de rigidité des membres
rend raison de la situation du corps, et éloigne toute
idée de luxation, q u i, loin d ’opérer une contraction,
au ra it, au contraire, laissé le cadavre dans un état
de relâchement et de paralysie (V o ir les pièces justi
ficatives).
Les docteurs Lucas et Marc, tous les deux membres
de l ’académie royale de Montpellier*, le premier, ins
pecteur des eaux minérales de V ic h y , et le second,
ihédecin-juré-expert à P aris, examinent à leur tour
toutes les pièces, rapports, documens, et opinions dont
on vient de donner l ’extrait.
L e u r consultation, qui est du 11 mars 1821 , est
au-dessus des éloges. Que d ire, en effet, qui puisse
rendre di gn em en t les impressions q u e ce b e au tra va il
fait, éprouver, lorsqu’on t ro uve l ’a m o u r de l ’humanité
réuni à la science qui éclaire l ’esprit : il faut admirer
et se taire ! Dans cette consultation, qui doit être lue
avec la plus grande attention, les docteurs concluent,
DE LA MANIÈRE LA TLUS POSITIVE, et AVEC UNE CERTITUDE
m a t h é m at i qu e , que Courbon est décédé de mort natu
relle, et q u ’il n ’y a point eu de violence exercée sur
sa personne; que cet infortuné est mort d ’apoplexie;
ce qui est prouvé par son organisation, par l’état
d ’ivresse dans lequel il était, et par la position de son
corps dans la fosse où il a été trouvé (V oir les pièces
justificatives).
S i , plus ta rd , les condamnés ou leurs conseils désirent
encore qnelques explications sur la position du cadavre
de C o u rb o n , le docteur Lucas répond, le 4 mai 18 2 1,
« que cette position n ’a pu être acquise et conservée
« que par une mort apoplectique ; q u ’il s’était pénétré
« de l ’importance de la mission qui lui était confiée,
« et des devoirs que lui imposait sa conscience; q u ’il
« avait senti le danger de la légèreté, dans l'examen
« d ’une question qui doit rendre à la société des
�C 49 >
« assassins s ou délivrer d ’un jugement... d es innôcens.
Cette lettre se termine ainsi : «Nous protestons , devant
« D ieu et la J u s t i c e , de notre conviction de la mort
« naturelle et apoplectique de J ean C ourbon . »
Voici cependant la chimère que l ’on a poursuivie :
le crime qui a été créé par l ’ignorance et la précipi
tation. Il n’existe pas, ce.crime; mais les malheureuses
victimes de cette cruelle supposition sont flétries et
languissent encore dans les fers! Que de maux évités,
si une sage prévoyance eût inspiré aux magistrats l ’heu
reuse idée de dissiper les doutes qui paraissaient
s’élever sur l ’existence du corps de délit; si du moins
une louable circonspection eût arrêté le glaive de la
justice, au moment où les accusés protestaient de leur
innocence, et accusaient à leur tour des témoins de
fausseté! IS'ulla uncjiiàm de morte hominis cunctatio
longa est.. J uv é n a l , sat. 6 , ,v. 139..
S II*
EMPLOI DU TEMS DES TROIS BEAUX-FRÈRES.
Pour comprendre la démonstration qui doit faire
l ’objet de ce paragraphe , il est indispensable de se
rcmettrc'sous les yeux ce qui a déjà été dit sur certains
points de localités du bourg de Dunières, et cl’y ajouter
les explications suivantes :
S i , partant du cabaret Maugier et en suivant la rue
de Dunières, on s’arrête à la porte d ’entrée de fa maison
llisp a l, située à l'an ire extrémité et à droite de cette
nie , 011 p e u t, en se fixant sur un point auprès de ccitte
p o r t e s e faire l ’idée de d^ux s e n t i e r s l ’un ¿1 droite
et aboutissant au chemin du Mazet, suivi par Pierre
Courbon, qui cheminait en chantant , lorsque son
frère eut quitté le char qui était au-devant de la forge
�C 5o )
Maugier; l ’autre à gauche, aboutissant au chemin deDunières h Saint-Etienne, et que les accusés déclarent
avoir suivi pour se rendre au cabaret Lyonnet^ situé
sur cette route, et à quelque distance de Dunières..
U ne cro ix, placés à soixante pas de ce bou rg, est le
sommet de l ’angle que décrivent ces deux routes, à
partir de ce point.
La forge Maugier est à gauche de la rue de Dunières;
sur la droite de cette forge, et en descendant de ce
point pour se rendre sur la place publique, où est
située la maison M augier, se trouve la maison de
Françoise Colombette; sur la gauche de la même iorge,
et en suivant la rue pour arriver à la maison Rispal,
se t r o u v e n t la mais on du sieur M a r n a s , p e r c e p t e u r ,
et une grange a t t e n a n t à cette m a i s o n , et placée dans
un enfoncement. Cette grange était, en 1817 , habitée
par Catherine Barlet. L a place publique, sur laquelle
est situé le cabaret M augier, la maison Colombette,
la forge Maugier, la maison Marnas et la maison Rispal,
sont disposés de telle manière, que de la maison C o
lombette 011 peut voir, d ’un côté, ce qui se passe au
point occupé par la forge Maugier, e t, de l ’autre, à
celui de la place p u b liq u e , qui correspond le plus di
rectement à l ’auberge Maugier; q u e , de l ’extrémité
de la maison Marnas, on peut également voir ce qui
se passe à la forge Maugier, et, d ’un autre côté, suivre
de l’œil le passant q u i parcourrait la rue, jusqu’à l'ex
trémité de la maison Rispal; point où commencerait
la diagonale tracée sur la place publique, et qui con
duirait, de l ’angle de cette dernière maison, à la porte
d ’entrée de la maison Massardicr.
C ’est le moment d ’extraire les dépositions des té
moins qui étaient placés à ces divers points, et à
l’anberge Lyonnet.
O n y apprend les faits suivans :
\° Les deux frères Courbou ont été vus sortant
�( 5- )
ensemble du cabaret Maugier , et allant jusqu’à la
forge Maugier, où ils se sont arrêtés;
20 Après que Pierre Courbon eut quitté son frère
pour retourner au cabaret Maugier, Jean Courbon a
été vu passant devant un témoin, et se dirigeant vers
la maison Massardier;
3 ° Pierre Courbon a été va revenant de l’auberge
Maugier, marchant assez vite, et faisant, comme il
l ’a dit lui-même, son chemin en chaulant ;
4 ° Le chant de Pierre Courbon a été entendu vers
la maison Lemoine, située à l’extrémité du village,
et près de la route de Saint-Etienne; il a été entendu
quelques petits momens après que l ’on fut venu heur
ter à la porte d ’entrée de la maison Massardier, et
q u ’on se fut dirigé sur le derrière de cette maison; il
a enfin été entendu sur la route du Maz.et, et à un
point qui n ’est distant que de ticnte-Imit pas de la
maison Lyonnct. Da ns ce moment, Lyonnet faisait
boire son cheval à la rivière.
Si l ’on interroge les enquêtes relativement aux ac
cusés, elles apprennent,
i° Que les trois beaux-frères, qui étaient restés chez
Maugier après la sortie des frères Courbon, ne q u it
tèrent ce cabaret q u ’après la seconde sortie de Pierre
Courbon, qui y était venu recommander de ne plus
donner de vin à Jean son frère;
a0 Que les trois beaux-irères, qui étaient accom
pagnés de l’enfant de Rispal, marchaient doucement;
q u ’arrivés à la maison Rispal, on a entendu ce dernier
dire aclieu à ses deux beaux-frères ; q u ’on l’a vu inimédiaiement rentrer chez lui avec son enfant, et
'fermer sa porte-,
3 U Que Calland et Tavcrnier ont continué leur
chemin; q u ’ils ont été vus ayant dépassé les maisons
Lemoine et Massardier (qui sont, à droite et à gauche
de la n ie, les deux dernières de Dunières, et attenant
�C5 0
aux routes (lu Mazet et de Saint-Etienne) , et se diri
geant vers le cabaret L y o n n e t, en prenant la route
de Saint-Etienne;
4 ° Que Galland et Tavernier sont arrives chez
Lyonnet moins d ’/i/z quart heure après que ce dernier
aurait entendu le chant de Pierre Courbon, fait q u ’il
aurait raconté à deux témoins avant l ’entrée des deux
beaux-frères ;
5 ° Q u ’arrivés chez L yo n n et, les deux beaux-frères
ont bu ensemble près de deux heures, au moins; q u ’en
suite Tavernier est resté chez L yo n n et, oii il a couché,
et que Galland est parti pour Maltaverne.
On peut déduire de ces faits des conséquences aussi
simples q u ’évidentes.
L e s trois beaux-frères accusés é ta i ent à l' a ub er ge
Maugier, lorsque les deux frères C o u r b o n en sont sortis
pour la première lois. Ces malheureux étaient encore
dans ce cabaret au moment que Pierre Courbon est
venu défendre à Maugier de donner encore du vin à
Jean : ils n ’ont point suivi Pierre Courbon lors de
cette seconde sortie; donc ils n ’avaient point le des
sein de rechercher , de rencontrer, et encore moins
(Vattaquer Jean Courbon , qu’ils devaient supposer
être sous la garde de son frère.
Jean Courbon avait profité de l ’absence de son frère
pour se relever du char qui était placé devant la
forge Maugier; il s’était immédiatement dirigé sur la
maison Massardier; il avait loqueté a la porte (l’entrée
de celle maison; il s’était même rendu sur le derrière
de ce cabarel, et s’élait probablement laissé tomber
dans la fosse au moment que Pierre Cou rbon, reve
nant de chez Maugier, traversait le village, et coniinnaii sa roule sur le Mazet, en chantant pour attirer
Irère; donc Pierre Courbon n ’avait été assailli
p a r personne ; // s'était raidit de son plein gré à la.
maison SSIassardwry sa chute et sa mort n étaient et
�( 53 )
lie pouvaient être que l ’effet et la suite ¿l’un accident.
Rispal, Galland et Tavernier n ’avaient quitté le
cabaret Maugier que cinq 011 six minutes après la se
conde sortie de Pierre Courbon. Dans ce moment, Jean
Courbon avait disparu ; il était derrière la maison
Massardier, où son cadavre a été retrouvé le lende
m ain; donc les accusés ne l ’ont point rencontré, ne
Vont point attiré ou conduit dans la maison Rispal
pour lui donner la m ort, et ne Vont point transporté
dans la fosse où il a été retrouvé.
Les trois.accusés sont sortis du cabaret Maugier avec
l ’enfant Rispal. Rispal, après avoir salué ses dëux
beaux-frères, est rentré dans son domicile. Galland et
lavernier ont pris la route de S a in t-L lien n e, et sont
arrives a la maison Lyonnet peu de tems après que les
chants de Pierre Courbon s’étaient fait entendre ;
donc Rispal était d a n s sa m aison lo rsqu e J e a n C o u r bon éta it derrière V auberge M a s s a r d ie r ; donc G alland
et T a v e rn ie r étaient su r la route qui conduit chez
J.yonnet, au moment où Pierre Courbon , venant de
quitter son frère , se rendait, en chantant , de D unières au M azet; et comme il est établi (pie Tavernier
a couché chez ly o n n e t, cl cpie G alland n’a quitté
ce lieu que pour se rendre à M a l taverne , il est aussi
évident que les accuses 11 ont pu se réunir h Dunières}
fie n e u f heures et demie à onze heures du soir, pour
concevoir cl exéculer un crime.
I./emploi du tems des trois beaux-frères est bien
justifié. Le chant de Piei Me Courbon, rapproché des
«'îrconsianccs moins -connues, dissipe toutes le>) obscu
rités <|ui pourraient les enveloppe! ; et s'il s’est. élevé
quelques doutes sur ce point important.,- cela tient ,
d une/part, a la difficulté que les habilans de la cam
pagne éprouvent. à énoncer, d ’ une manière positive .
i heure fixe de la nuit; et, de l’autre., au peu d ’atieul
lion que 1 011 a mise a rapprocher les dépositions do>-
�( 54 )
témoins du fait constant et avoué, le chant de Pierre
Courhon.
Ces vérités sont si simples, que ce n’est pas sans
déplaisir que l ’on se voit obligé de les démontrer:
Comment ont-elles pu échapper aussi long-tems à l ’œil
vigilant de la justice? comment, sur-tout, M. le juge
de paix, q u i, dans cette trop célèbre affaire, a donné
tant de renseignemens; q u i, à chaque instant, pou
vait interroger les lieux, les circonstances et les hommes,
n ’est-il parvenu à découvrir que des éléinens d ’erreur,
lorsque la vérité était si facile à saisir? M. le juge de
paix insistait fortement sur le non emploi du terns*
Cette circonstance, si souvent rappelée et commentée
dans toutes ses lettres, était, par la confiance q u ’il
devait i n s p i r e r , regardée c o m m e chose c onst ant e. Si
Cependant ce Fait faux a pu influer sur la conviction
d u ju r y , quel regret 11e doit point avoir celui qui
pouvait si facilement le rectifier, et q u i, pour se con
vaincre de l ’innocence des accusés, n’avait, en se rap
pelant le si ju d ica s, c o g n o s c e q u ’à donner à l ’examen
de la défense et de leurs moyens de justification, uri
des nombreux instans q u ’il accordait avec tant de
bienveillance à leurs ennemis et à leurs accusateurs!'
S III.
PKPOSIXIONS DE J E ANNE
COLOM 1JF.TTE , LARDON ,
EX
ATJLANIEÏl
CI.LKTTE.
L a femme Colombette avait déposé q u ’à la pointe
du jour du 8 septembre 1 8 1 7 , l ’accusé Gallaml ,
passant par G uignebaude, lieu où elle demeure, lui
avait annoncé la mort de C ourbon, en ces termes :
« L ’ainé C ourbon, du M a/et, a été trouvé mort
« derrière la maison Massardier. »
C e lle déposilion; qui n’uvail élé faite q u ’à l ’an
�c. 5 5 }
dience de la Cour d ’assises, quoique la Colombette
eût été entendue dans l ’instruction, pouvait paraître
suspecte , soit par les circonstances qui l ’accompa
gnaient, soit par la mauvaise réputation du témoin;
mais elle était soutenue,
Par Etienne L ard on , qui déclarait avoir entendu,
en labourant, la conversation de Galland et de la
Colombette ,
E t par Joseph Aulanier et Pierre C elette, qui dépo
saient que Lardon leur avait an noncé, sur les six
heures du matin du 8 septembre, et dans sa propre
maison, ce que Galland venait de dire à la Colombette.
C ’est ce corps de preuves, que la plainte en faux
témoignage des condamnés soumettait à l'examen de
la justice. Mais avant de^suivre l ’instruction, il faut
essayer de donner une idée des localités, en c o n s u l t a n t
un plan qui a été levé en v er t u d ’o r d o n n a n c e d u juge.
L e lieu de G u i g n e b a u d e est situé dans la commune
de D u n i è r e s ; la maison de la Colombette est placée
dans le petit vallon qui porte ce nom*, h une certaine
distance, et sur les derrières de cette maison, est une
cote ou monticule qui sépare deux vallons; et au-delà
du second vallon, existe encore un autre monticule,
ou est situé le village de Cublaisc.
Près de la maison de la Colom bette, et au-devant
de sa porte d ’entrée, passe un chemin conduisant
de Guignebaude à M altaverne, domicile de l’accusé
Galland.
La femme Colombette, suivant sa déposition devant
la Cour d ’assises, était au-devant de la porte d ’entrée
de sa maison , lorsqu’elle a eu avec Galland la conver
sation dont elle a déposé 5 et Lardon aurait entendu
celle moine conversation, en labciurant dans une terre
de la Colombette est placée.
Le 28 janvier, une première ordonnance esl rendue;
�elle porle q u ’il sera ‘procédé à la vérification des posi
tions' respectives de la femme Colom bette, Galland et
L ard on , au moment de la conversation présumée, et
que MM. le juge d ’instruction et le procureur du Roi
se transporteront sur les lieux, pour y recevoir les
déclarations de la Colombette et de Lardon.
Ce transport a lieu le 29 janvier, et le procès-verbal
atteste :
Que la Colombelle s’est placée à neuf pas de sa
maison, sur le derrière, et a indiqué la position de
G allan d , à vingt-huit pas d ’elle.
On voit déjà que cette femme se mettait en contra
diction avec elle-même; que non-seulement elle quittait
la porle de sa m ai s on , et se pl aça it sur le derrière, pour
SC mettre en v u e de L a r d o n , mais encore q u ’elle,
s'éloignait de neuf pas du derrière de sa maison , pour
se rapprocher de cet homme. Elle avait aussi grand
soin, en éloignant Galland du chemin de Guignebaude
à Maltaverne, de lui donner une position qui le rap
prochât le plus possible do Lardon.
Cet homme , à son tour , indiqua le point q u ’il
occupait sur la terre de la cime de la còte, lors
q u ’il avait entendu la conversation de Galland et de
la Colombette. Il déclara q u ’il attelait ses vaches,
lorsque Galland passa et parla. ïl avoua cependant
11’avoir pas1 vu Galland. La distance de Lardon à
G allan d , si l’on s’en rapporte aux indications données
par la Colombelle et Lardon , serait de deux cents
mètres, et còlle de la Colombelle à Galland, de vingtqualre mètres.
Les indications données par la Colombelle el Lardon
pouvaient être vérifiées. Difl’érenles personnes étaient'
011 état de donner des renseignemens précieux sur ce qui
s’était passé dans la malinée du 8 septembre. Les unes,
en cil et., travaillaient des terres au-dessous de celles
de Lardon, cl sur un point plus rapproché du vallon
�c 57 )
ou est située la maison de la C olo m bette, tandis que
d ’autres labouraient sur un terrain bien plus éloigné,
et sur la côte, où est situé le village de Cublaise; mais
q u i , étant plus élevées, avaient nécessairement vue
sur la côte où labourait Lardon.
Des informations devenant indispensables, des té
moins sont entendus, les 10, 1 1 , 14? L8 , 22, 23 J
février, et i 3 mars 1820. Il faut en faire connaître
les résultats, en les rapportant à chacun des individus
q u ’elles regardent.
Relativement à J.nne Colombette , ces enquêtes
apprennent :
i° Que cette femme, causant avec sa famille, au
moment où elle a quitté G alland, ne lui a pas rapporté
le propos q u ’elle a ensuite imputé à cet homme ;
20 Que la fille de la Colombette lui a reproché la
déposition q u ’elle avait faite à la C o u r d ’assises du
P u y ; que d ’ailleurs G a l l a n d n ’avait jamais démandé
autre chose à la Colom bette, que de dire la vérité;
3 ° Q ue, jusqu’à la veille de sa déposition devant la
C o u r d ’assises, la Colombette a assuré à plusieurs té
moins, que jamais Galland ne lui avait parlé de la
mort de Courbon, dans la matinée du 8 septembre.
Quant à Lardon , on lit dans les mêmes informations :
i° Que dans la matinée du 8 septembre, cet homme
ne labourait point à l’endroit q u ’il a indiqué, mais
bien dans une terre plus éloignée ;
20 Que Lardon n’a appris la mort de Courbon que
chez un nomme Escofiier, où il travaillait; que cette
nouvelle ne lui a été donnée q u ’à dix heures du matin.
Quant à A ulanicr et Colette, les dépositions an
noncent :
i° Q u ’un témoin leur a appris, le 8 septembre, à
neuf heures du soir, la mort de C o u rb o n , tandis q u ’ils
disent que Lardon la leur avait annoncée à six heures
de la matinée du même jour;
tf/j
'<
�.
( 58 )
_
.
2° Que L ard on , avant d ’aller déposer à Yssingeaux,
était allé voir Aulanier; que leur entrevue leva tou»
les doutes que Lardon se faisait sur ce q u ’il avait
à dire.
On doit placer i c i , comme remarque essentielle,
que ce dernier fait s’accorde parfaitemeut avec le
contenu en une des lettres de M. le juge de paix, e t
q u ’il paraît certain que L ard on , avant sa conversation
avec Aulanier, avait constamment déclaré q u ’il n ’avait
rien en ten d u , ou q u ’au moins il refusait de s’expli
quer. Il faut aussi dire que L a rd o n , ayant été arrêté
et interrogé, avoua que, le jour même où il devait se
rendre à Yssingeaux, et avant sa déposition, il était
allé chez A u lan ier, pour s’assurer de ce q u ’il avait d it
à ce dernier.
Des réflexions propres à faire sentir combien devaient
paraître suspectes les dépositions de ces quatre indi
vid us, seraient ici inutiles et oiseuses.
L e 27 avril 1820, la chambre du conseil ordonna
q u e , le 4 m ai su ivan t, la justice se transporterait au
lieu de G uignebaùde, à l ’eifet de vérifier si Lardon
avait pu entendre la conversation tenue par G alland
et la Colombette; elle voulut en même tems que trois
experts, les sieurs M onnet, de Retournac; M athieu,
de Bas, et B renas, d ’Yssingeaux, procédassent à cette
expérience ; enfin l ’ordonnanee porte que M. le juge
de paix de Montfaucon sera appelé h cette visite.
U ne question se présente ici d ’elle-même : Q u ’avait
à faire le juge de paix dans cette opération? Elle était
ordonnée par une autorité bien supérieure à la sienne.
MM. le juge d ’instruction et le procureur du Roi
devaient y assister ; elle devait être faite par trois
hommes de l’a r t , ayant la confiance du tribunal et
du public : la présence de M. le juge de paix était
doue au moins superflue.
�( 59 ) _ _
.Mais cet officier de police judiciaire avait cru devoir
donner de nouvelles preuves de son zèle.
L e 26 août 1 8 1 9 , il s’était transporté à Guignebaude; et là., sans mission, sans réfléchir q u ’il n ’avait
aucune compétence pour agir, il s’était permis une
opération dont il annonçait les résultats, comme étant
■entièrement avantageux à Lardon et à la femme Colombette. Cela ne paraîtra point extraordinaire, lorsque
l ’on saura que M. le juge de paix, sans doute pour
assurer le succès de son opération, avait arrangé les
choses de telle manière, q u e , d ’une p a r t , l ’interlocuteur qui représentait Galland adressait la parole à
L ard o n , au lieu de parler à la C olom bette, et q u e ,
de l ’autre, le représentant de Galland s’était placé à
soixante pas de la Colom bette, tandis q u ’il ne devait
en être q u ’à dix-huit. C e moyen ingénieux donnait à
Lardon toutes les facilités possibles p o u r e n t e n d r e ,
p u i sq u e c’était à lui que l ’on parlait; puisqu’il en
était p révenu ; puisqu’enfin l ’interlocuteur avait été
placé à une distance, d ’où Lardon pouvait facilement
saisir ses pensées et ses expressions. Il faut eii convenir :
M. le juge de paix réunit à l ’art d ’assembler les pré
somptions et les indices qui accusen t, c e l u i , plus
difficile peut-être, de préparer les moyens qui peuvent
paralyser et détruire l'accusation la mieux fondée.
Quoi q u ’il en s o it, le transport à G uignebau d e, qui
de vait avoir lieu le l\ m ai, fut précédé d ’une nouvelle
information; et l ’on peut extraire du procès-verbal
d ’audition des témoins, qui est sous la date du 29 avril
1 8 2 0 , le fait essentiel :
Que 'Galland, q u i , le 8 septembre, et à l ’aube du
j o u r , aurait parlé à la Colombette de la mort de
C ourbon, n ’en aurait rien dit un quart-d’heure après,
causant avec un de ses amis, et que ce dernier n ’au rai t
lu i-même appris cette nouvelle à Gublaise, q u ’à neuf
heures du matin du même jour.
-
�( 60 )
Le 4 mai 1820, les expériences qui'(levaient être
faites au lieu cle Guignebaude commencèrent. M. le
juge d ’instruction avait eu le soin d ’y faire trouver les
témoins qui pouvaient faire connaître la vraie position
de L a r d o n , et l ’instant précis où cet homme aurait
appris la mort de Courbon.
Ces témoins furent entendus sur les lieux , et
confrontés avec Lardon. Les uns soutinrent que ce
dernier ne travaillait pas à la terre de la cime de la
côte, et au point q u ’il avait indiqué aux magistrats,
le 29 janvier, mais bien à la terre du P r a t , et à un
point plus élevé et plus éloigné que le prem ier, de
quarante-cinq mètres de celui supposé occupé par
Galland.
L ’opération des experts ap pr en d ensuite q u ’entre le
point indiqué par L a rd o n , comme occupé par lui au
moment de la conversation de Galland et de la Colomb e tte , et celui où les témoins le placent, il existe un
rocher et une pente qui interceptent la v u e , de ma
nière à empêcher de voir G uignebaude, à l ’endroit
sur-tout où Lardon et la Colombette faisaient placer
G alland.
U n autre témoin assure q u ’il avait employé Lardon
à travailler, pendant la journée du 8 s e p t e m b r e , et
que. c’est dans la maison de ce témoin, que Lardon a
appris, ii dix heures du m atin, la n ouv el le de la mort
de Courbon.
Il est ensuite procédé aux opérations qui étaient
l ’objet du transport de la justice et des experts. On a
grand soin de conserver les positions que la Colombette
avait indiquées, comme occupées par elle et Galland
dans l ’instant de leur conversation. On place aussi
successivement Lardon sur le point q u ’il disait avoir
occupé pendant cette conversation, et sur celui désigné
p a rle s témoins, et on se convainc bientôt q u ’à quelq u ’eiidroit que Lardon se place, il est impossible q u ’il
�( 6r )
&it entendu
Colombette.
la conversation
de
Galland et de la
Com m ent, en effet, supposer que celui qui adresse
la parole à un interlocuteur placé à trente pas de l u i ,
prendra, sans nécessité, un ton de voix assez élevé
pour être entendu à deux cents pas , c’est-à-dire sept
fois plus loin? Ne sait-on pas que la vo ix, cet organe
si flexible, se modifie suivant les distances, et q u ’il est
rare q u ’elle s’élève beaucoup au-dessus' de ce qui est
nécessaire pour être entendu? D ’un autre côté, il ne
suffit pas toujours d ’avoir des oreilles pour entendre,
il faut encore prêter son attention à ce q u ’on dit-, et
l ’homine qui est sérieusement occupé d ’un o b je t ,
n ’entend pas le plus souvent ce qui se dit à côté de lui.
L a r d o n , pressé par ces dépositions de témoins et
par les vérifications a u x q ue l l es il assistait c o m m e p a r t i e ,
c h e r ch a i t à en repousser les conséquences i n é v i t a b l e s ,
en d is ant q u ’au moment où il avait entendu la con
versation de Galland et de la C olom bette, le soleil
n ’était point encore levé; que le teins était calme et
serein ; tandis que l ’expérience n ’avait lieu q u ’à dix
ou onze heures du m a tin , et que dans cet instant il
faisait vent. Mais ces différences, si elles existaient
ne trouvaient-elles point leur compensation dans la
circonstance, q u ’au moment de l ’expérience*, Lardon
savait ce q u ’on voulait faire, et était prévenu de tout
à mesure que l ’on opérait*, tandis q u ’au moment où
il aurait entendu la conversation de G alland, il était
occupé de son travail, et que rien rte p o u v a i t fixer son
attention sur l ’arrivée et la présence de cet homme
auprès de la C o l o m b e t t e .
On ne peut que rendre hommage à la sagesse et à
la prévoyance des magistrats qui ont dirigé cette ins
truction ; mais ce qui vient d ’être dit conduit, à l ’idée
que la justice pouvait adopter un mode d ’opérations
�( 6» )
bien plus conforme aux intérêts de la plainte qui avait
été portée par les condamnés.
E n effet, étant acquis au procès, que Lardon liait
ou attelait ses vaches au moment où il a entendu la
conversation de Galland (qu’il ne voyait pas) avec la
C olo m b ette, la véritable expérience à faire pour s’as^
surer de la v é rité , ou même de la possibilité du fait
déposé, n ’était-elle pas de placer, sans les prévenir,
trois individus, l ’un liant des vaches au point sup
posé occupé par Lardon , et les deux autres aux points
supposés occupés par Galland et par la Colombette ;
d ’engager ensuite ces deux derniers à ouvrir entr’eux
u n e conversation à haute voix; et, dans cette liypo-»
thèse, croira-t-on q u e le représentant de L a r d o n pût
entendre cette c o n v e rs a t i o n j lo r s q u e , dans u n e ex p é
rience toute favorable à L ard on , on le voit lui-même,
quoique bien prévenu de ce qui allait se passer, être
obligé d ’avouer q u ’il n ’avait pu saisir le moindre mot
de ce qui se disait aux lieux occupés, suivant l u i, par
G alland et la Colombette,
De nouvelles informations succèdent à cette opéra
tion. Il faut encore extraire des procès-verbaux, qui
se trouvent sous les dates des 1 9 , 20 et 24 du même
mois, les faits suivans :
i° Que lu Colombette a une très-mauvaise répu tation ;
2° Que cette femme n ’était pas, le. 8 septembre, au
point q u ’elle a indiqué, sur le derrière de sa maison;
q u ’elle se trouvait, au contraire, placée, toute désha^
b illé e , à un autre point in d iq u é, sur le devant de la
même maison ;
3 ° Que la conversation de Galland et de la Colom
bette a été écoutée par la sœur de cette dernière, qui
n’a pas entendu Galland parler de la mort de Courbon.
Le second fait était propre à rappeler une circons-.
tance bien précieuse, et q u i, jusqu’à ce moment, pa-r
raissait avoir échappé à l'attention des magistrats }
�( » }
on veut parler de la déposition é c r it e / d e la Colombette, sous la date du 7 janvier 1 8 1 8 , qui se réunit à
une lettre de M. le juge de paix, du 24 novembre
18 17 ? pour prouver que cette femme était devant sa
porte au moment de la conversation q u ’elle avait eue
avec Galland.
• Les conséquences immédiates à déduire de ce fait
positif étaient,
Que la Colombette ne pouvant être placée derrière
sa maison, et au point qu ’on avait indiqué à M. le
juge d ’instruction, Galland d evait, à son t o u r , être
mis dans une position qui le rapprochât de la Colom
bette ;
Que le nouveau point où il devenait indispensable
de placer G allan d , l ’éloignant de L ard on , rendait l ’au
dition de sa conversation encore pins impossible ;
Q u ’ainsi tout cela p r o u v a i t q u e lés positions indi
quées à M. le juge d ’instruction , lors de son transport,
du 29 janvier 1820, étaient fausses, et avaient été
combinées avec la Colombette et L ard on , pour essayer
de rendre leurs dépositions probables*
Cette nouvelle découverte exigeait un examen plus
approfondi-, aussi M. le substitut du procureur du
Ilo i, accompagné de l ’expert Brenas, se tran&porlèrentils de nouveau au lieu de Guignebaude.
Il y fut vérifié,
Q u ’en adoptant les indications données par la C o
lombette à M . le juge d’instruction, le 39 janvier, il
n existait ni chemin ni sentier qui pùt conduire au
point prétendu occupé par Galland;
Qu en s’arrêtant, au contraire, au fait que les der
nières informations avaiont révél«7 fait d ’ailleurs con
forme aux renseignemens donnés par M. le juge de
paix, et confirmé par la déclaration de la Colombette,
011 tiouvait que Galland avait pu s’arrêter à un point
où existe uu sentier q u i débouche au-devant de la
�( 64 5
maison Colom belte, et a bo u tit au chemin de Guignebaude à. Maltaverne.
Mais., dans cette dernière position, qui était la seule
possible, G allan d, se trouvant à une distance de huit
pas de la C olo m b ette, était beaucoup plus éloigné de
L a r d o n , ce qui ren d a it, pour ce dernier, l ’impossi
bilité d ’entendre, déjà démontrée, plus grande encore.
Tout ce qui vient d ’être dit prouve jusqu’à l ’évi
dence la fausseté des quatre dépositions examinées dans
çe paragraphe, Les l o c a l i t é s v u e s avec l ’attention la
plus scrupuleuse, se réunisssent en effet aux déposi
tions des témoins, aux hésitations de la Colombette et
de Lardon, aux aveux enfin de ces quatre individus ,
p o u r les accuser et les convain cre d ’ imposture.
Cependant q u ’ é t a i e n t ces q u a t r e m a l h e u r e u x ? Un<£
femme perdue de réputation, ayant tous les défauts ,
et entachée de tous les vices q u ’accoinpagne' 1 habi
tude de la débauche la plus crapuleuse
Des hommes inconnus , sans considération , sans f o r
tu n e , des prolétaires vivant chaque jour des travaux
de leur journée,
'
j
Tous jgnorans, et d ’une faiblesse d ’esprit extrême,
pouvaient-ils se garantir des pièges1 de la séduction ?
ne devaient-ils pas également céder aux impulsions de
l ’espérance et de la crainte? prévoyaient-ils sur-tout
les suites funestes que leurs dépositions pouvaient avoir
pour autrui et pour eu x?...... Les imprudens! . . . ., L a
C our les a mis hors d ’accusation; mais l ’instruction
j-este dans toute sa force pour faire rejeter leur té
moignage......... Q u ’ils se repentent ! q u ’ils appaisfent
celui qui scrute si profondément les consciences des
hommes
Les accusés leur pardonnent.
�(■65
)
S IV.
DÉPOSITION DE PEYRACIIE.
Quant à Peyraclie, si cet homme jouissait encore
d ’une existence sociale; s’il pouvait être présenté à. la
Justice comme témoin; si sa déposition sur-tout devait
avoir la moindre influence sur le sort des accusés, il
faudrait examiner les nombreuses preuves de faux té
moignage qui s’élevaient contre lu i, et prouver q u ’il
avait été excité au crime par la haine q u ’il portait à
G alland, et par les récompenses q u ’il avait reçues et
espérait recevoir encore de la famille Coui-bon, dont
il était l ’agent le plus actif. L ’étude du caractère de
Peyraclie pourrait même être de quelque u tilité; ses
fourberies, ses vices habituels, son esprit toujours in
quiet, le besoin q u ’il é prouvait à chaque instant de
s’éloigner de sa famille, pour porter le desordre et le
trouble chez les personnes qui avaient le malheur de
]e recevoir; son empressement à se mêler des affaires
des autres, pour vivre à leurs dépens; enfin, chacun des
traits de cet homme singulier fournirait une leçon à
suivre et un exemple à éviter.
Ma is la j ustice l’a frappé : Peyraclie n ’a plus ni fa
mille ni concitoyens; son nom, attaché au crim e, 11e
peut plus être prononcé que pour épouvanter ceux qui
seraient tentés de l ’imiter. Peut-être son supplice a-t-il
commencé au fond de son a m e !.............. Respect au.
m alheur, même m érité!
L ’arrèi qui condamne Peyraclie est du 26 mai 1821.
Ija condamnation de cet homme donnait ouverture à
la révision du procès criminel dans lequel Galland et
Rispal avaient succombé.
TJ11 arrêt de la Cour de cassation, du 9 août 18?. 1,
9
�• 6 ^ ''r
(66)
annulant celui rendu par la Cour d’assises du P u y , le
9 mars 18 19 , ordonne que les accusés seront jugés sur
même arrêt d ’accusation, et les renvoie, à cet effet,
devant la Cour d ’assises du département de la L o ire ,
séant à Montbrison.
■
T e l est Fétat de ce procès.
;i '<i
(
�( 61
)
DISCUSSION.
L ’examen détaille et raisonne des faits de ce procès
a prouvé deux propositions, dont la vérité est aujour
d ’hui évidente. La première, q u e, n’existant point de
c rim e , on ne pouvait rechercher des criminels ; la
seconde, q u ’en supposant un corps de délit établi, les
accusés ne pouvaient en être présumés et encore moins
jugés les auteurs.
Les faits seuls et les conséquences q u ’on en doit
déduire suffisant pour démontrer l ’erreur du jury de
la H aute-Loire, et pour dissiper les obscurités dont
la prévention avait entouré cette malheureuse affaire,
il semblerait que toute discussion ultérieure est inutile,
si l’on ne savait que celte erreur est autant de droit
que de fait,,et que MM. les jurés ne se sont t r om pé s ,
q u e parce q u ’ils n ’ont pas assez réfléchi sur les condi
tions nécessaires à la preuve de l ’existence d ’un crim e,
s u r - t o u t lorsqu’il s’agit de meurtre et d ’homicide.
Ce point de droit est cependant d ’une haute impor
tance; il intéresse éminemment la société entière; et
la moindre erreur ou la plus légqre méprise, sur une
vérité aussi fondamentale, est d ’autant plus funeste,
q u ’elle peut à chaque instant compromettre la liberté,
l ’honneur et même la vie des citoyens.
Il faudra donc fixer, sur cette question, l’attention
de MM. les jurés, e t , en en'recherchait les principes,
dans l ’ancienne législation criminelle , leur prouver
que le texte de nos Codes actuels, l’esprit du législa
teur, l’éq ni té et la raison, sans, lesquelles il n’y.aurait
qu arbitraire et despotisme, leur imposent l ’obligation
de s’occuper, avant tout, de l ’existence du corps de
d élit, et que, dans certains cas, ce|,le existence doit
être pioiiAcc par des actes Auxquels il ne peut êtr&
permis de suppléer.
�(C8)_
Mais avant d ’aborder cette discussion, et pour sim
plifier toutes les idées qui se présentent dans ce procès,
il n ’est pas inutile de donner quelques explications sur
la révision des procès criminels, action que nos Codes
ont cru devoir admettre.
L a révision des procès crim inels, autorisée par
l ’ordonnance de 1670 , fut supprimée par les lois de
l ’assemblée constituante. Ayant été rétablie par la loi
du i 5 mars 17 9 3 , pour le cas seulement où deux
condamnations seraient inconciliables , elle fut de
nouveau anéantie par la mise en activité du Code
criminel du i 3 brumaire an 4> q u i , en gardant la
silence sur la révision, déclare abolie toute forme de
procéder et de juger, qui n ’y serait pas t e x t u e l l e m e n t
r appelée. L e s mo tif s de cette omission é t a i e n t , d ’une
p a rt, la crainte que la confiance que devait inspirer
l ’institulion du ju ry ne se trouvât affaiblie, par la
seule supposition q u ’il pourrait tomber dans l ’erreur y
e t, de l ’autre, la crainte que le respect dû aux organes
de la loi et aux arrêts de la justice ne reçût quelque
atteinte d ’une disposition qui , après l ’accomplisse
ment de toutes les formalités, et l ’épuisement de tous
les degrés de ju rid iction , offrirait encore un moyen
d ’attaquer et de faire anéantir un arrêt définitif de
condamnation.
Ces considérations étaient importantes. Soumises h
l ’examen du législateur, elles devaient le porter h fixer
avec circonspection les règles auxquelles serait assujétie
l'a révision ; mais il n ’en était pas moins indispensable
(le rétablir une barrière contre les erreurs possibles,
des jurés et (les juges. E n effet, « tant que les hommes,
« dit un jurisconsulte étranger, n ’auront aucun carac« 1ère certain pour distinguer le vrai du faux , une
« des premières sûretés qu ’ils se doivent réciproque«- m en t, c ’est de 11e point'admettre, sans une nécessite
« démontrée 3 (les peines absolument irréparables.
�C «9 )
« N ’a-t-on pas vu toutes les apparences du crime
« s’amonceler sur la tête d ’ un accusé , dont l ’innocence
« était démontrée, quand il ne restait plus q u ’à gémir
« sur les erreurs d ’une précipitation présomptueuse?
« Faibles et inconséquens que nous sommes ! nous
« jugeons comme des êti’es bornés, et nous punissons
« comme des êtres infaillibles (i). »
L'exercice du droit de faire grâce, rétabli par le
sénatus-consulte du i/j. thermidor an 10 , ne devaitil pas même paraître insuffisant, en faveur de celui
qui aurait été victime d’apparences trompeuses ou de
fausses dénonciations ?
L a révision fut donc de nouveau consacrée par nos
Codes; mais elle fut réduite aux cas où elle paraissait
réclamée par l ’intérêt même de la justice, et sans que
celui de la société p u t e n recevoir atteinte.
Ai n s i , la révision n ’est autorisée q u ’en mat ièr e
c ri m i ne l l e, et jamais en mat ièr e de police c o r r e c t i o n
nelle et de si mple police.
- Cette faculté ne peut être exercée en matière cri
m inelle, que dans trois cas.
11 y a lieu à révision :
• i° Si l ’accusé a été condamné pour un crime à raison,
duquel un autre condamné a été déjà condamné,
lorsque les deux condamnations ne peuvent se conci
lier (art. l\4 3 );
■2° S ’il résulte, des pièces communiquées, des indices
suffisans de l’existencc de la personne prétendue homicidée, et dont la mort supposée a déterminé la con
damnation ;
3 ° Dans le cas de condamnation portée dans un
débat, dans lequel des témoins à charge ont été pré
venus de faux témoignage,-et depuis condamnés pour
raison de ce crime (art. 44 5 ).
(1) Jérémie Bcntham.— Traité de la législation civile ot crimineli*.
\
�( 7d )
C ’est dans ce troisième cas de révision , que les
Condamnés Galland et Rispal ont été placés par la
condamnation du faux témoin P ey radie,
M. Berlier, après avoir fait observer que l ’espèce
prévue par l ’article 44^ était exactement celle qui
forma , il y a plusieurs années, le sujet de la récla-r
mation élevée dans les intérêts des nommés PetitR e y n a u d , condamnés à Besançon , disait q u e , si dans
ce cas l ’erreur de la condamnation ne se montrait pas
avec la même évidence que dans les autres espèces
citées; s’il était strictement possible que le faux témoi
gnage n’eût pas seul dicté la déclaration du ju r y ,
qu ’enfin si Verreur de la condamnation n en résultait
pas évidem m ent, du moins il fallait convenir q u e ce
fait est'assez grave, p o u r é ta b lir une su ffisa n te pré
_
somption (jue l ’accusé a été victim e d ’une horrible
calomnie.
« Dans une telle position, ce serait, disait l ’orateur,
« être sourd à la voix de l ’iuimanité, que de ne pas
« recourir à une nouvelle instruction , dégagée des
« funestes éléniens qui ont corrompu la première (i) ».
C ’est donc d’après une nouvelle instruction , que
MM. les jurés du département de la Loire sont appelés
à prononcer sur le sort de Galland et de R ispal, qui
actuellement ne sont plus ([\i accusés ; et dans les dé
liais qui vont s’ouvrir, chacune des charges doit être
considérée avec la même a t te n t i o n que si elle n ’avait
pas déjà été soumise à l’examen de la justice. MM. les
jurés doivent sur-tout se garantir de l’impression que
pourrait faire sur eux l ’idée q u ’il y a choso jugée. Ce
sentiment, s’il existait, serait un préjugé et une erreur
d ’autant plus condamnables, q u ’il est établi, d ’une
p a r t , que les accusés ont été victimes d ’une horrible
calomnie, et que, de l ’a u tre, il est aussi certain quo
(i) Expose (les jnotifs doM. le Couspillcr d’Elat Bcrlicr, liy. a , tit, 3,
�( 71 5
la décision des jurés de la Haute-Loire a été influencée
par des élémens corrupteurs, q u i, en dénaturant toutes
les circonstances du l'ait, ont puissamment agi sur la
conviction.
Ces idées préliminaires étant expliquées, il faut
examiner ce que c’est q u ’un corps de délit, et comment
il doit être établi pour donner lieu à des poursuites,
et sur-tout pour légitimer une condamnation.
« Si l ’accusé, dit l ’illustre chancelier d ’Aguesseau,
« soutient q u ’il n’y a eu ni assassinat ni meurtre ;
« que le corps mort de celui q u ’on l ’accuse d ’avoir
« assassiné ne porte aucunes marques de blessures ,
« aucuns vestiges de violen ce, aucun caractère de
« l ’assassinat; si saint Athanase, accusé d ’a-voir coupé
« la main d ’Arsène, demande à représenter Arsène à
« ses accusateurs étonnés; s’il oifre de confondre leur
« malice , en l ’obligeant à l e u r m o n t r e r ses deux
«< mains, qui pourra soutenir que de pareils faits ne
« doivent pas être examinés isolément par rapport à
« l ’accusé, par rapport à l ’accusateur, par rapport à
« la justice elle-même, qui ne doit jam ais entrer dans
« ïinstruction d ’un crim e , dont l ’existence peut être
« justem ent révoquée en doute? (i) »
Ce passage si éloquent, inspiré par lTiumanite et
dicté par la raison, n ’est autre chose que le plus heu
reux développement de la Loi S i délietum probatum
fu e r it , et des principes consacrés par l ’ordonnance de
16 7 0 , sur la preuve en matière criminelle.
E n effet,
Sous celte ordonnance , tous les auteurs étaient
d accord que la preuve en matière criminelle devait
avoir nécessairement deux objets q u ’il ne fallait point
diviser, Y u n , de s'assurer de l'existence du crim e,
c est-a-diie, établir le lait particulier, que le crime s
(1)
D ’A g u e s s e à t j , 5 i b
plaidoyer, affaire du LopiyarJiiw.
�( 72 )
«Hé commis, ce que les criminalistes appelaient cons
tater le corps de d élit; l ’autre, de convaincre la per
sonne qui en est accusée , d ’en être l ’auteur ou le
complice.
L e premier soin qui devait occuper le juge était
de s’assurer si le crime avait été effectivement commis;
et cette preuve, dans la plupart des cas, ne pouvait
s’acquérir que par des procès^verhaux du juge et par
des rapports des médecins et chirurgiens.
Relativement à la preuve , on distinguait deux
sortes de crimes, les un s, q u i, comme l ’h o m icid e ,
laissent des traces après e u x , et que les docteurs ap
pellent delicta fa c ti perm anentis; les autres, qui ,
comme le b l as p hè me et les injures verbales, ne laissent
fiucune trace, et pour cela sont appelés delicta fa c ti
transeuntis.
Pour les premiers, la preuve de l ’existence du corps
de délit ne pouvait ressortir que des procès-verbaux
(les ju g es et des rapports d ’experts , parce que ces
crimes laissent des impressions durables, qui les rendent
susceptibles de l ’inspection des yeux. Pour les autres,
il était permis de recourir aux informations et aux
interrogatoires, parce que le corps du délit ne tombait
point sous les sens.
D ans les crimes qui laissent des traces après e u x ,
on distinguait.cn outre ceux dont le corps devait être
constaté par le concours des r a p p o r t s d e x p e r t s
avec les procès-verbaux des juges, tels que Yhomicide
et le poison, crimes dont l ’existence devait être établie
suivant les règles de l ’a rt, de ceux dont le corps pou
vait être constaté par le seul procès-verbal du ju ge,
comme le vol avec effraction, l’incendie, e tc ., dont
tout le monde peut juger à. la simple inspection des
yeux.
'
Ces règles étaient absolues, et n’admettaient d ’ex
ception que dans un seul cas; celui où les traces du
�C ’ 3 ')
crime auraient cessé d ’exister, par le fait de l ’auteur
même, qui en aurait dérobé la connaissance, en jetant
dans la rivière ou en brûlant le cadavre de la personne
q u ’il avait assassinée. Il fallait bien alors recourir aux
informations et aux interrogatoires; mais constamment
l ’aveu de l ’accusé était repoussé, comme insuffisant
pour constater le corps du délit, à moins q u ’il ne se
trouvât d ’ailleurs appuyé par les dépositions des té
moins, ou par quelques-uns de ces indices prochains,
que l ’on connaît en droit sous la dénomination de’
témoins muets.
Ces principes étaient le résultat de l ’expériencè.’
Les erreurs trop fréquentes de la justice avaient enfin
ramené les criminalistes, même les plus farouches,
au respect et à l ’observation de cette maxime : Q u'il
v a u t m ieux risquer cle laisser un crime im puni, que
de s’exposer à cojidamncr un innocent; enfin il n’était*
plus douteux que le délit devait être constant pour
que l ’accusé pût être condamné à la torture; et que
les « rapports des médecins et chirurgiens sont si'
« nécessaires dans les procès où il s’agit d’ homicide
« qu e, faute de pareils rapports de visite, soit q u ’il.
« n’eu ait point été f a it , ou q u ’ils ne soient point
« rapportés, ou q u ’ils soient nuls, on pourrait inférer
« que le blessé n’a point été blessé, et que la personne
« blessée serait morte p a r un autre accident qu ’à
« cause de blessures; en un m ot, en ces sortes d ’oc« casions, c’est le procès-verbal qui établit le corps de
« délit. Différons arrêts ont enjoint à des juges de
<« dresser des procès-verbaux en pareils cas (r). »
Ainsi , sous l ’ordonnance de 1670, il faut tenir
pour certain :
(1) Voir Muynrd tic Vonglnns, de la Division de la P re u v e , lit. 3 ;
François Serpillon, sur le titre 19, article i er do l’ordonnance cle 1670;
r.ny du Rousseau dcL acom bc, T raité des m atières crim inelles, 3e part.,
cliap, 3 , n° 11.
10
�( 74 )
i° Que si un caclavre était découvert, le genre de
mort devait être constaté par la réunion du procèsverbal du juge et le rapport du médecin;
2° Que la preuve de l ’homicide ou l ’existence du
corps du délit ne pouvait résulter que du rapport du
médecin ou chirurgien;
3 ° Q u ’un homme ne pouvait être poursuivi ou mis
en jugem ent, comme prévenu d ’homicide, que lorsque
le fait matériel était établi suivant les formes pres
crites.
,
Qu/aurait-on pensé, sous cette législation, des pour
suites exercées et de la condamnation prononcée contre
deux malheureux, jugés coupables d ’un crime dont
1 existence était prouvée impossible dès l’origine même
d e la procédure ?
Si l’on s’arrête un m o m e n t pour recueillir les leçons*
de l’expérience et consulter la sagesse des siècles, on
lie peut s’empêcher d ’admirer la prévoyance du légis
lateur, qui a cru devoir confier à la médecine seule le.
soin de résoudre les problèmes, plus ou moins diffi
ciles , que l'existence ou la mort de l ’hoinme peuvent
présenter.
L ’étude de la médecine embrasse tant de connais
sances diverses; elle exige un esprit si essentiellement
observateur, des aperçus à-la-fois si profonds et si in
génieux, un cœur si ami de l ’ humanité, que l’on doit
convenir, que s’ il existe quelques moyens de rendre
les hommes plus sages et meilleurs q u ’ils ne l’ont
encore été, ce doit être dans celle science q u ’on doit
les chercher. N ’esl-ce pas, en eftet, à la médecine que
nous devons nos premières lois? Les sages de l’ancienne
Grèce ne réunissaient-ils point à la science de la légis
lation et de la morale, celle des lois de la physique
animale et la connaissance du cœur humain? K t si
l’on parcourt l'immense recueil du Droit romain ; si
l'un étudie sur-tout les règnes des Sévère, des A drien,
�( 75 )
des Antonin j des M arc-Aurèle, ne se convaincra-t-on
pas que ces empereurs, amis des médecins et des phi
losophes, avaient également consulté les écrits d ’Aristote
.et d ’Hippocrate, pour établir leurs décisions sur l ’état
des citoyens et la classification des délits?
L a jurisprudence apprend que par-tout où le Droit
romain était r e »ç u /, les savans et les médecins étaient"
consultés dans les cas extraordinaires; et ort ne peut
s’empêcher de penser que Charlemagne n ’eût cet usage'
en vu e, lorsqu’il dictait ce beau capitulaire, « q u ’un
« juge ne condamne jamais sans être sûr de l’équité
« de son jugement; q u ’il ne décide pas de la vie des
« hommes par des présomptions, mais par des preuves
« aussi claires que le jour; q u ’il sache que ce n’est
« pas celui qui est accusé qui est coupable, mais bien
« celui qui est convaincu; q u ’il n ’y a rien de si dan« gereux et de si inj ust e que de hasarder un jugement
« sur des c o n j e c t u r e s q u e toutes les affaires où la
« preuve ne consiste q u ’en indices, et ne peuvent tout
« au plus former q u ’un d o u te , doivent être réservées1
« au souverain jugement de Dieu ( i) . »
O r , dans les choses qui appartiennent à l ’état ana
tom ique, physiologique et pathologique de l ’homme,
comment le magistrat serait-il sûr de son jugem ent,
sans recourir aux lumières des personnes de l ’a rt? ....
L ’exercice de la médecine dans les Cours de justice,
d a te , en France, du siècle de François I". Bientôt
les ordonnances (le nos Rois érigèrent en lois ce qui
n avait commencé par n ’être q u ’une coutume. La mé
decine, associée aux fonctions de la justice, rendit
des services importans, et contribua puissamment h
détruire des préjugés ou des erreurs nés de l ’état de
( i ) Capitul. , liv. 7— 107.
�( 76 )
crédulité où l ’on vivait alors (x). Il est vrai que les
décisions des médecins n ’ont pas toujours été des
oracles irrévocables ; que plusieurs d ’entr’e u x , dé
pourvus des connaissances indispensables à cette pro
fession, ou du jugement q u i, les mettant en œuvre,,
les dirige vers un but utile, avaient donné lieu à des
scènes ridicules ou sanglantes, dans les tems où les
tribunaux étaient moins éclairés (2). Mais fallait-il
rejeter la science, parce q u ’elle était appliquée par
des hommes inhabiles? Ne valait-il pas mieux s’atta
cher à en régler l ’usage?
C ’est ce qui fut fait; et on trouve, dans les recueils,
sous la date de 1606, des'letlres-patentes , données
par Henri iv à son premier médecin, lui conférant le
droit de nommer deux chirurgiens dans chaque ville,
pour faire les rapports. V in t ensuite l'ordonnance
de 1667, q u i, dans l ’article 3 du t i t r e S , veut que
les rapports soient faits par detrx chirurgiens, nommés
par le premier médecin du Roi. Enfin intervinrent deux
arrêts du Conseil d ’E l a t , en 1G92 et i 6 t)3 , qui
réunirent ces offices aux communautés de médecins et
chirurgiens.
O11 arrive au dix-huitième siècle, à cette é poque où
1 étude des choses sérieuses e t des s c i e n c e s exactes succéda
à l ’enthousiasme des lettres, de la poésie et des beauxarts. On connut alors le doute p h i l o s o ph i qu e. Une
heureuse rivalité, inspirée par le désir d ’être utile aux
hommes, s’établit entre l ’académie de chirurgie cl la
«société de médecine. Bientôt la nature n’eut plus de
secrets; les faits, sagement interrogés, dévoilèrent ses
mystères; e t , à l ’aide d ’obscrvalions souvent répétées
et faites avec la plus grande exactitude, on parvint
(1) Voir Pigray , cTiirurgica (l'Henri n i, et contemporain (l’Antoine
Parié.
(a) Voir Malion , mçJcciuo légale, tome i er, page 2.^
�( 11 )
enfin à expliquer, avec une précision et u'tie,'certitude
presque mathématiques, les phénomènes de la vie et
de la mort.
Il
faut placer à cette époque les travaux du célèbre
Louis. Cet ami si éclairé de l’humanité fut le premier
qui enseigna publiquement l ’art de résoudre certaines
questions médico-légales ; et bientôt des mémoires
consultatifs imprimés , discutant la forme et le fond
des rapports, furent accueillis par les magistrats. L a
publicité a y a n t ensuite fait sentir combien il était
nécessaire d ’apporter du soin a la rédaction de ces
mémoires, l ’on vit l ’éloquence, réunie au savoir, arra
cher à la mort et à l’infamie des accusés qui parais
saient devoir succomber. C ’est alors que l ’on a pu dire,
avec B alde, q u e , dans ces matières/ les- assertions des
médecins ne sont pas un témoignage , mais bien p lu tô t
un ju g em en t .
'''
. . r ..
E a effet, personne n ’ignore les exemples fournis par
les affaires trop célèbres de Montbailly et de Sirven, et
sur-tout par celle de Chassagneux, de Montbrison \ qui
a tant de points de ressemblance'avec celle de Rispal
et G a lla n d , aujourd’ hui soumise à l ’examen du ju ry
de la Loire. Mais, si l ’on étend ses recherches sur des,
espèces moins connues; si l ’on consulte les arrêts de
l ’ancienne jurisprudence; plus on les étudiera, et plus
on sera frappé de cette vérité importante, que ja m a is ‘
aucun accusé n a été convaincu d'un crim e , lorsque
le corps de délit n était point constaté ; que les erreurs
judiciaires naissaient toujours de ce que les premiets^
rapports ayant constaté le corps de d é lit, les déposi
tions, entendues dans l ’instruction, en désignaient, le
coupable. Ma is constamment,, s ’il s'élevait des d iffi
cultés sur ¡‘existence du crim e, ou si un médecin
plus éclairé que le premier montrait que le délit
n ’existait pas ou même était d o u te u x , la justire, dédaignaut et rejetant les preuves qui semblaient con-
�( 78 )
vaincre un coupable, repoussait l'accusation d ’un seul
mot — . L e crime n ’ existe p a s ! ...... L e corps de dél i t
EST INCERTAIN !
Des principes aussi conservateurs dè la vie des
hommes, de l ’honneur et du repos des familles,
auraientrils éprouvé quelque changement , ou subi
quelque altération par l ’émission de nos nouveaux
Codes ? Us étaient la règle du m agistrat, sous une
législation toute défavorable aux accusés; ils les pro
tégeaient, lorsque, privés de communications, livrés^
à eux-mêmes, et plongés dans l ’obscurité d ’un cachot,
ils ignoraient souvent jusqu’à la nature de leur crime;
ils leur servaient encore de bou clier, lorsque, sans
d é f e n s e u r s , ils restaient exposés seuls à la mal ice de
leurs ennemis. C e s principes seraient-ils anéant is ou
méconnus, aujourd’hui que notre législation criminelle
a fait un si grand pas vers le b ie n , en accordant un
défenseur aux accusés, en confiant l ’application des
lois à des juges civils, et en couronnant ce bel oeuvre
par la sublime institution du ju r y ? Est-ce dans le
tems que l ’accusé doit être jugé par ses pairs, par des
hommes non versés dans les subtilités de la procédure,
et dont la règle unique doit être le bon sens et
l ’équité, que quelques novateurs imprudens v o u d r a i e n t
soutenir que le jugement des affaires criminell es ne
devant avoir d ’a u t r e règle que la conviction morale
du ju r y , il lui a p p a r t i e n t de rester c o n v a i n c u du corps
de d é lit, contre le contenu aux procès-verbaux et aux
rapports des médecins ; do prendre pour règle de son
jugement l'ignorance, aussi vaine que présomptueuse,
du quelques témoins; de dédaigner les témoignages des
faits recueillis, interrogés et jugés par les hommes de
l ’art; q u ’enfin les jurés, cédant à une croyance légère,
que l'irréflexion peut confondre avec la" conviction t
in tim e , ont reçu de la loi le pouvoir de créer à-là-foi?
Je crime et le crimiuel?
�, s
( 79 )
66o.
Ali ! s’il en ¿tait ainsi, que le législateur retire hcs
funestes présens : il nous a trompés ! Il s'est égaré
lui-même en croyant établir une innovation favorable
aux accusés : q u ’il nous rende les secrets, le s tortures,
toutes les horreurs enfin de l ’ancienne procédure cri
minelle. Elles faisaient gémir l’humanité; mais le
calcul mathématique des preuves, auquel l ’ordonnance
soumettait le jugement des affaires criminelles, serait
plus favorable à l ’ i nnocent accusé , que la nouvelle
forme qui lui a été substituée.
L a raison repousse un système anti-social, et d ’au
tant plus dangereux , que son effet le plus immédiat
serait de substituer l ’arbitraire à la justice.; et quel
despote que celui qui ne connailrait d ’autre règle que
ses caprices ou son ignorance !
Aussi n’est-ce point ce que la loi a voulu; et l ’en
semble de notre législation prouve clairement que ,
plus que jamais, la jurisprudence doit être spéciale
ment éclairée par la médecine.
E n effet, lesrapports.de la médecine avec le Droit
commencent à se manifester dans le Code civil; et la
plupart des articles renfermés dans les livres I er et 3 e
ne sont que la réunion des décisions médico-légales
consacrées par le lems. Mais, pour 11e pas trop s’éloigner
de son sujet, on se borne à faire remarquer que si la
médecine a été consultée pour établir les règles con
servatrices des biens, des qualités et des litres des
citoyens, dans la jurisprudence criminelle, l ’union de
la médecine aux lois est d ’autant plus nécessaire pour
1 exercice plein et entier de la jnstice, que cetle union
est le seul garant de l ’honneur et de la vie compromis
injustement.
La première idée qui s’est présentée h la pensée du
législateur, lorsqu’il s’est occupé de la réforme des loi*
pénales, a clé d ’aviser aux moyens de donner plus dt*
développement aux connaissances en médecine légale,
�( 8o )
et de rendre cette science populaire. Pour cela, il créa,
par la loi du 1 4 frimaire an 3 , des chaires de méde
cine légale dans toutes les facultés dè médecine; créa
tion qui fit de cette science, dont l ’enseignement était
originairement restreint à l’école de P a r is , un objet
général d ’étude pour tous les français qui se destinaient
h. la profession de médecin.
L e Code des délits et des peines parut bientôt après :
on sait q u ’il est du 3 brumaire an 4 '•>et ses dispositions
s’accordent parfaitement avec les idées que le législa
teur s’était faites de la nécessité de l ’étude de la mé
decine légale j élude d ’ailleurs dont il voulait uiiliser
les fruits.
L ’ article 102 impose au juge de p a i x , aussitôt q u ’il
est informe d ’ u n d élit d o n t l ’existence p e u t être cons
tatée par procès-verbal, de se transporter sur les lieux
pour y décrire en détail le corps du d é lit, avec toutes
ses circonstances et tout ce qui peut servir à convic
tion ou à décharge.
L ’article io 3 veut q u ’au besoin le juge de paix se
fasse accom pagner d ’une ou de deux personnes p ré
sum ées , par leur art ou profession, capables à ’appré
cier la nature et les circonstances d u délit.
E n fin , l ’article 104 est ainsi conçu : « S’il s’agit
» d ’un meurtre ou d ’ une mort dont la cause esi in« connue ou suspecte, le juge de paix d o i t se iairo
« ASSISTER d ’un ou de deux officiers de santé. »
Ainsi, dans ce code, point de délit sans procèsverbal qui le constate; et, dans les cas ordinaires, le
juge de paix doit décrire le corps du délit avec toutes
les circonstances à conviction ou à décharge; les hommes
de l’art peuvent apprécier la nature et les circonstances
du lait; mais s’ il s’agit de meurtre ou de m ort, l’obli
gation imposée au juge de paix devient formelle : il
non’ se luire assister de doux officiers de s a u le , qni
�( 8 .)
Sont appelés seuls à prononcer sur la cause de la mort,
si elle est inconnue ou suspecte.
Ces procès-verbaux et rapports étaient indispen
sables, non seulement pour la poursuite et l ’instruction
de l'affaire, mais encore pour le jugement. « Les jurés,
« dit la l o i , doivent d ’abord examiner l ’acte d ’accu« sation, les procès-verbaux, et toutes les autres pièces
« du procès, à l ’exception des déclarations écrites des
« témoins ». Après cette instruction , qui est en pleine
harmonie avec la procédure exigée, l ’arLiclc 3 7 4 or
donne que la première question tende essentiellement
à savoir si le f a i t qui J'arme le f o n d de l ’accusation
est constant ou non ; et la seconde, à savoir si l ’accusé
est convaincu de l’avoir commis, ou d ’y avoir coopéré.
L ’instruction et le jugement avaient donc en vue
un premier objet préalable à tout autre, celui de s’as
surer de l ’existence du corps de délit. La première
opération du j u r y était de former sa conviction sili
ce point; il ne pouvait rechercher le coupable que
lorsqu’il s’était rendu certain de l ’existence du fait
formant le fond de l'accusation; et sa Conviction de
vait avoir pour unique fondement les procès-verbaux
rédigés par les hommes de l’art. L e Code des délits et
des peines, du 3 brumaire an 4 > était donc en tout
conforme aux principes consacrés par Fordonnance de
1670. Comme celte ordonnance, il ne reconnaissait
d ’homicide et de meurtre que lorsque ces crimes
étaient établis par les rapports des médecins.
Lorsque l ’intérêt p u b lic, le développement de l'in
dustrie, <mi ne peut avoir lieu que lorsque les citoyens
jouissent d ’ un état de liberté, toujours incompatible
avec les pi'<»hibitions, quelles q u ’elles soient, eurent
rendu la suppression des corporations nécessaire ou
vit des hommes sans mission, comme sans études préa
lables, exercer, moyennant patente, Fart de g u é r i r ,
et apporter, dans l ’exercice de la médecine légale, les
11
�( 8a )
malheureux fruits de leur inexpérience, de leur igncw
rance et de leur légèreté ; mais les maux q ui résul
taient de cet abus ayant fixé l ’attention du législateur,
furent aussitôt réparés par la loi du 19 ventôse an 1 1 ,
qui exigea, à peine de n u l l i t é , que les gens de l ’a r t ,
commis aux rapports, eussent été reçus docteurs dans
l ’une des facultés de médecine.
L a médecine légale avait été rendue à sa dignité j
on avait déjà pu apprécier ses heureux effets , lors
q u ’on 1808, le Code d ’instruction criminelle fut pro
mulgué.
Il faut en examiner les dispositions.
L ’ensemble de cette loi fait sentir la nécessité de
dresser des procès-verbaux, à l ’cflet de constater le
corps de délit.
L ’article 3 a exige des procès-verbaux dans tous les
cas.
L ’arlicle 43 veut que le procureur du Roi se fasse
accompagner, au besoin } d ’ une ou de deux personnes
présum ées 3 p a r leur art ou profession , capables d ’ap
précier la nature ou les circonstances du délit.
C e t article est conçu en termes facultatifs; mais
les expressions de la loi deviennent obligatoires, lors
q u' il s’agit de constater une mort violente, ou une
mort dont la cause serait inconnue ou suspecte.
Dans ce cas , dit l ’article 44 1 (<1° procureur du Roi'
« se FF, ha AssisTF.n d ’ un ou de doux officiais de santé,
« q u i f e r o n t leur rapport sur les causes de la mort
a et sur l'état du cadavre. »
On retrouve ici les principes consacrés par l ’ordon
nance de
et adoptés par le Code du 3 brumaire
an 4. Pour constater le d é l i t , d ’ une p a r t , obligation
imposée à l’officier de police judicia ire , de se faire
assister de médecins; de l ’a u t r e , charge à ces méde
cins de constater l ’état du cadavre et les causas de
la mort. L e rapport de Ces derniers est la seule pièce
�q u i puisse inspirer de la confiance à la justice , et
former sa conviction sur l’existence du crime.
Pour faciliter l’intelligence de la lo i, et s’assurer
de la rectitude des idées q u ’elle présente, veut-on
avoir recours aux auteurs les plus graves? que l ’on
consúlteles tra it és, é ga l em ent estimés, de M M . Carriol,
Legraverend et Desquiron.
L e premier, conseiller en la C ou r de cassation , s’ex
pliquant sur l ’article i 4 a du Code d ’instruction cri
minelle, dit :
« Cet article n’est pas simplement fa c u lta tif , comme
« le précédent; il fait un devoir au procureur du lloi
« de se faire assister d’ un ou de deux officiers de santé,
« dans tous les cas de mort violente, ou de mort dont
* la cause est inconnue et suspecte.
« Cela devait être ainsi ordonné; il faut nécessaire« ment un homme de l ’art pour bien apprécier les
« circonstances d ’un pareil événement ; elles ne peu« vent l ’être souvent que p a r Vouverture du cadavre ,
« ou par les procédés q u ’un oilicier de san té , bien
« versé dans Vanatomie , peut seul employer.
<' C ’est pour celle raison, que l ’article 44 charge les
« officiers de sanié d ’être eux-mêmes les rédacteurs
« de leur procès-verbal , qui doit devenir , dans ht
« discussion , la pièce la plus im portante y d ’oii il
« suit que ces officiers doivent apporter la p lu s grande
«< attention à ce qu'il soit rédigé avec cette préci« sion et celle clarté que ne pourrait lui donner le
« procureur du Roi. »
On peut aussi extraire les passages suivans, de
1 excellent. Traité de M. Legraverend, directeur des
affaires criminelles et des grâces, au ministère de la
justice (i).
(i) L e g r a v e r e n d ,
r- 1B2.
T r a ité de la législation
criminelle en France,
t.
i rr,,
�( ?4 )
«
«
«
«
«
o
«
«
«
«
«
« Il arrive fréquemment que des crimes ou de£
délits sont de telle nature que pour être vérifiés }
constatés et appréciés dans leur caractère distinctif
et dans leurs circonstances, on doit employer le
ministère de gens de l ’art. Tous les officiers de
police'judiciaire, tous ceux que la loi a chargé de
dresser des procès-verbaux de ces crimes ou délits,
doivent avoir le plu s grand soin de s ’entourer alors
des lumières nécessaires pour découvrir la vérité, et
d ’appeler de suite auprès d ’eux les hommes q u i ,
par leur profession, sont présumés avoir les connaissances q u ’exigent respectivement chaque espèce
« d ’affaires.
« Ainsi , par exemple , s’a g it - i l d ’un homicide
« consommé ou non, il faut faire vérifier, par des
« officiers de santé, l ’état du cadavre...... Les officiers
<i de santé doivent fa ire leur rapport , suivant q u ’il
« y a lie u , sur les causes de la mort et sur l ’état du
« cadavre ........ L a déclaration des gens de l ’art a et
« doit avoir une influence décisive sur l’instruction
« et sur le résultat de la procédure . » N
Enfin M. Desquiron , jurisconsulte estimé , et
membre de plusieurs sociétés savantes de l’Europe (i) ,
combat l ’opinion des personnes qui ne regardent que
comme incertaine ou nulle, la preuve qui résulte des
rapports - d e s ' m é d e c i n s ou chirurgiens. Il pense an
contraire q u ’un chirurgien habile p e u t éclairer la
religion des magistrats, et préparer ainsi l ’arrêt qui
doit prononcer sur le sort des accusés.
>
Passant ensuite aux preuves de son opinion , il
s’appuie de différons rapports du docteur L ou is; e t,
empruntant les expressions de ce savant chirurgien,
il dit « que les connaissances acquises par l ’étude et
( i ) Desfjuiron , T r a ité de la preuve par témoins en matière crim inelle,
p. i a 7 .
�C 85 )
« l ’exercicè de l ’art ont une utile application dans
« l ’ordre moral. L ’é ta t, la fortune et l ’honneur des
« citoyens ne sont que trop souvent compromis; per« sonne n ’est à l ’abri d ’une imputation calomnieuse,
« que des circonstances singulières pourraient accré« diter; on est exposé à l ’infamie et même au supplice,
« sans l ’avoir m érité, par l ’inattention on par l ’erreur
« de ceux qui ont le droit de prononcer sur le sort de
« leurs semblables. »
L ’a u t e u r reconnaît bien q u e , sur-toïit dans les
petites villes et dans les campagnes, les rapports des
chirurgiens sont écrits quelquefois d ’une manière si
obscure, q u e , dans les débats, ils ne peuvent servir
à fixer l’opinion ; mais il conseille aux officiers de
police judiciaire d ’ user de la faculté qui leur est
accordéej pour 11e faire t o m b e r l eu r choix q u e su r des
h o m m e s d o n t la sagesse et l'expérience puissent donner
Tine gar anti e îi la société, sur-tout quand il s’agit de
constater une mort violente, ou une mort dont la
cause est inconnue ou suspecte ; « car , s’écrie-t-il ,
« l ’histoire des tribunaux contient un grand nombre
« de pages tracées avec du sang, versé par suite des
« erreurs des experts et médecins, »
Les autorités les plus imposantes se réunissent, donc
aux lumières de la raison, à l’esprit et à la lettre de la
lo i, pour apprendre que le corps du délit doit être
constaté par des rapports de médecins et chirurgiens;
que ces rapports sont si indispensables, s u r - t o u t en
inatiere de« meurtre ou d ’ homicide, qu'il ne peut y
etre suppléé par aucun autre genre de preuve; que si
les medecins peuvent èt re su jets à l’erreur, en établis
sant. la culpabilité ou l'innocence, les premiers rapports
peuvent être rectifiés par un second ex am en , confié h
des hommes de l’art pltis instruits ou pins dignes de
la confiance de la justice; mais qu e, sons quelque
point de vue que Tou examine la question, les travaux
�et les opérations des médecins ne peuvent être soumis
à la critique de témoins ignorans ou pervers, aveuglés
par la passion, ou excités, par la haine, à désirer et
préparer, par leurs dépositions, la condamnation d ’un
accusé.
Mais quelle doit être l ’influence de ces procèsverbaux , lorsque le jour du jugement est arrivé ;
lorsque l ’accusé est présenté aux assises, et que le jury
a à examiner le fait qui lui est soumis, et sur lequel
doit porter sa déclaration ? Poser cette question ,
11'est-ce pas, en d ’autres termes, demandersi un homme
peut être convaincu d ’un crime qui n’existe pas? E t
d e v r a i t - o n se l ivrer à l'examen d ’un aussi singulier
paradoxe, si les n o u v e a u x r a i s o n n e m e n s , q u i servent
à le com battre, ne devaient en même tems présenter,
gous un nouveau jour , une vérité tant de fois dé
montrée ?
L ’article 337
Code d ’instruction criminelle dis
pose : « L a question résultant de l ’acte d ’accusation
« sera posée en ces termes : L ’accusé est-il coupable
d ’avoir commis tel m eurtre, tel vol ou tel autre
« crim e, avec toutes les circonstances comprises dans
« le résumé de l ’acte d ’accusation. »
La simplicité de cette question a pour objet de faire
cesser la complication de celles que le Code de brumaire
an l\ exigeait que l’on posât au ju r y ; mais si le Code
d ’instruction criminelle a simplifié les formules, il n’a
point dérogé aux principe.? q u ’il importait de main
tenir. L e jury continue d ’être interrogé sur tous les
points de fait; mais il n’est, interrogé que sur le fait,
et on ne pose plus de questions abstraites, (fui ne ten
daient q u ’à l ’induire eu erreur, et à le luire tomber
en contradiction avec lui-même.
Mais dans chaque lait, le jury doit établir une
division naturelle : c’est1 de connaître si le fait est
constant; et s’il ne trouve pas la constatation du crime
�( ô7 3
suffisamment établie, il doit répondre que l’accusé
n ’est pas coupable : ce u ’est que lorsque le crime est
suffisamment constaté, q u ’il a à examiner la culpabi
lité de l ’accusé.
C ette distinction ressort clairement des dispositions
de l ’article 4 4 ^ du Gode d ’instruction criminelle. C et
article porte :
« L e chef du jury les interrogera, d ’après les ques« tions posées, et chacun d ’eux répondra ainsi q u ’il
« suit :
« i° Si le juré pense que le f a i t n ’est pas constant}
« ou que V accusé n’en est pas convaincu , il dira i
^ « N o n , Vaccusé n’est pas coupable ;
« 2° S ’il pense que le f a i t est con sta n t , et que
« l ’a ccusé en est con vain cu , il dira * O u i , l ’accusé
« est coupable, etc......... »
I Ainsi l ’exam en de la co nsta ta ti on du fait doit être
to uj o ur s séparé de l'e xam en fie la c u l p a b i l i t é de
l ’accusé. L ’accusé doit être a c q u i t t é , si le f ai t jn’ est
pas c on s ta n t , O U s'il n’est pas convaincu d ’en être
Vauteur. L ’accusé ne peut être condamné, que lorsque
le f ai t est co ns t an t , et qu ’il en est d écla ré convaincu.
Mais quelles sont les preuves propres à convaincre le
juré de la réalité et de l ’existence d ’un corps de délit?
On a déjà répondu à cette question : dans les crimes
ordinaires, lés rapports cl les procès-verbaux y lors
q u ’il- s’agit d'homicide ou de m eurtre, les rapports
SEULS DES MÉDECINS*
M. Carnot ( i) établit une distinction entre la preuve
qui est nécessaire pour constater le corps de délit, et
celle qui peut servir à établir la culpabilité de l ’accusé.
II s’explique ainsi :
« C est d ’abord sur la réalité du crim e, que doit
« porter l ’examen du ju r y ; car il ne peut y avoir de
( i ) De l'instru ction c r im in e lle , to m e 2 , page 200.
�lî
(88)
i« coupables, si le crime n ’a pas été commis; et lors« q u ’il n’existe pas un corps de d é lit , comment avoir
« l ’assurance que le crime a été réellement commis?
« Presque toutes les erreurs de la justice ont été
« fondées sur la supposition de Y existence d ’un crime,
« d ’après ‘des apparences trompeuses; ce qui prouve
« mieux que tous les raisonnemens, la nécessité de
« ne s’occuper des preuves à la charge de l ’accusé,
« que lorsque le crime a été commis, de manière à ne
« laisser aucun doute sur sa réalité.
• « Nous pourrions rapporter des exemples"nombreux
« de pareilles erreurs; mais ils se trouvent dans tous
« les livres, et nous ne ferions q u ’user de redites
« inutiles. Nous nous bornerons à observer q u ’il ne
« p e u t y avoir entière c o nv i c t i o n de la c u l p a b i l i t é Je
« l ’accusé, m algré tous les indices, toutes lespreuves qui
« peuvent résulter, à sa charge, de l ’information et des
« débats, tant que le corps du délit n ’est pas constaté,
« de manière à ne laisser aucune incertitude dans
« l ’esprit sur son existence.
« I)e simples traces de délit peuvent bien suffire
« pour faire mettre le prévenu en accusation; mais
« pour le fa ire condam ner, il ne suffit pas d ’une
« simple probabilité que le crime a été commis , il
« FAUT EN AVOIR LA CERTITUDE.,))
L ’auteur examine ensuite quelles 6ont les preuyes
qui doivent démontrer la culpabilité d ’uU accusé.
Elles peuvent être positives> ou ne reposer que sur
des présomptions.
La preuve'positive doit avoir une grande influence;
cependant il faut que les actes et les témoignages,
desquels elle résulte, méritent une pleine confiance.
Quant aux indices, 'quelques graves q u ’ils soien t,
on doit s’en défier; et pour q u ’ ils soient de nature à
établir nue certitude, il fa u t qu'ils excluent la pos
sibilité de l'in n o c e n c e s’ ils n’établissent q u ’une preuve
�( « 9 )'
im parfaite; s’ils n ’excluent pas cette possibilité , ils
.sont insuffîsans; car il faut une preuve parfaite pour
que la condamnation de l ’accusé doive être prononcée.
C e serait, en effet, une grande erreur, de croire que
c ’est une simple possibilité de culpabilité que le jury
doit chercher; ce n’est pas sur la possibilité que l ’rtccusé soit c o u p a b l e q u ’il peut être condamné, mais
sur l ’ IMPOSSIBILITÉ qu ’ il NU LE SOIT PAS.
Ces principes étant certains, la raison de décider
se présente d ’elle-même : Jean Courbon est mort le
7 septembre 18 17; le 8, il a été dressé procès-verbal
de l ’état de son cadavre, et lin rapport de médecin a
fait connaître les détails de son autopsie cadavérique.
Si ce procès-verbal et ce rapport eussent laissé des
doutes ou des incertitudes sur le genre de mort de
Courbon , la justice, en r ec ue il l ant les renseignemens
propres à les lever ou à les Taire cesser, devait com
m e n c er une instruction à l ’effet de connaître quels
pouvaient être les auteurs de cette mort incertaine
mais si, dans la suite, un autre rapport de médecin
11e venait démontrer la réalité du corps de d é lit, ces
poursuites devaient cesser; ou au moins, si des accusés
étaient présentés aux assises, ils devaient être acquit
tés, par cela seul que le corps de délit n'était pas
constant.
Mais dans ce malheureux procès, non seulement il
n ’y a point de corps de délit constant, mais il est
constant q u ’il n ’existe pas de crime. C ’est par le procèsverbal du juge de paix et le rapport du médecin, que ce
point de fait se trouve établi d ’une manière absolue.
Cette vérité si importante était connue dès le 8 sep
tembre au matin : quel est donc le lait qui a pxi
donner lieu à une instruction?........... quels criminels
espérait-on de découvrir, lorsqu’on était certain q u ' i l
¿^’existait point de crime? Pourquoi Kispal, Üulland
12
�Xoo)
et Tavernier ont-ils été poursuivis? comment sur-tout
ont-ils etc condamnés ?
S i , pendant les débats qui ont eu lieu devant les
assises de la H aute-Loire, les dépositions de quelques
témoins ont pu élever quelques doutes sur les causes
de la mort de Courbon, ces doutes pouvaient-ils se
changer en réalité contre le contenu au procès-verbal
et au rapport? Mais aujourd’hui ils n ’existent plus,
ces doutes*, un rapport de médecins, fait par ordre de
la justice, des mémoires consultatifs, demandés par les
accusés, contiennent un nouvel examen des faits con
tenus dans le rapport du médecin Thomas, et dans les
dépositions des témoins, destinés à combattre ce rap
port. C e s f a i t s , consultés et appréciés de n o u v e a u , ,
n ’ont fait que confirmer cette vérité : C o u r b o n n ’ e s t
POINT
MORT
d ’ apoplexie
ASSASSINÉ
IL A SUCCOMBÉ
A UNE
ATTAQUE
: LA SOCIÉTÉ n ’ av a i t NI CRIME A VENGER
NI COUPABLE A PUNIR.
U n cri trop long-tems contenu s’échappe enfin de
tous les coeurs honnêtes : ils sont innocens ! Ils sont
innocens ! et les malheureux , condamnés, flétris ,,
confondus dans un bagne avec les pins vils criminels,
ne sont sortis de ce sépulcre vivant, que pour reprendre
leurs fers, et être présentés de nouveau à la justice.
Hâtez-vous! réparez, réparez p r o m p t e m e n t des maux
aussi grands et si peu mérités! Des jurés peuvent se
tromper; mais ils doivent à la société, à la sainteté
d ’une institution avouée par les idées les plus pures,
digne d ’ailleurs du respect et de l ’amour de tous les
Français, de reconnaître franchement leur erreur.
E t vous tous, qui êtes appelés à décider de la vie
des hommes, appreuez à maîtriser vos émotions et vos
passions; sachez que vous serez toujours placés entre
le plaisir d’avoir été justes et le remords de n ’avoir pas
assez consulté les lumières de votre conscience ; ins
truisez-vous sur-tout : les hommes éclairés sont les
�( 91 )
meilleurs ; eux seuls rendront toujours des décisions
équitables.
Cette cause doit être un grand exemple pour tous les
jurés français; et si la condamnation a la peine capitale,
qui fut prononcée contre le malheureux boulanger de
Venise, de cet innocent qui se trouvait entouré des
présomptions les plus accablantes, fit une impression,
si profonde sur l ’esprit du sénat, q u ’il enjoignit au
greffier de dire aux magistrats, toutes les fois q u ’ils
seraient assemblés pour juger un accusé à. mort , ces
paroles foudroyantes :
« Recordate v i del polvero fornaro, »
u n avocat fidèle a ses devoirs qui pensera que, dansle court espace de l ’existence, il ne peut se présenter
une plus grande chance de bonheur, que de sauver
l ’ honneur ou la vie à u n h o m m e innocent, n ’aurat-il pas le droit, en s’élevant à la dignité de sa pro
fession , de s’écrier désormais :
« Jurés, avant de vous décider, souvenez-vous de
« la condamnation des malheureux Rispal et Gal« land ! ! 1 »
Jn.-Ch. B A Y L E aîné, ancien A vo ca t, à R io m j
»
-
Conseil et Défenseurt des accusés*
ils o n t é té a c q u ité s
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rispal, Régis. 1821?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle, Jean-Ch.
Subject
The topic of the resource
faux témoignages
travaux forcés
condamnation à mort
homicides
médecine légale
flétrissure
obésité
cabaret
ivresse
alcoolisme
autopsies
rumeurs
juge de paix
témoins
affaire Fualdès
erreur judiciaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Régis Rispal, propriétaire, habitant du lieu de Dunières, canton de Montfaucon ; et Jacques Galland, propriétaire, habitant du lieu de Maltaverne, mêmes commune et canton, tous les deux condamnés, le 9 mars 1819, par arrêt de la Cour d'assises séant au Puy, département de la Haute-Loire, aux travaux forcés à perpétuité, à la flétrissure, et exécutés, le 16 juin suivant, comme coupables d'homicide volontaire, et sans préméditation, sur la personne de Jean Courbon ; et admis, par arrêt de la Cour de cassation, après condamnation définitive d'un faux témoin, et annulation de l'arrêt de la Cour d'assises de la haute-Loire, à être jugés de nouveau, sur même acte d'accusation, par la Cour d'assises du département de la Loire, séant à Montbrison.
note manuscrite : « Ils ont été acquittés »
Table Godemel : Révision : de procédure et arrêt, au grand criminel. - innocents condamnés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1821
1817-1821
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
91 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2518
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53503/BCU_Factums_G2517.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Dunières (43087)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
affaire Fualdès
alcoolisme
autopsies
cabaret
condamnation à mort
erreur judiciaire
faux témoignages
flétrissure
homicides
ivresse
juge de Paix
médecine légale
obésité
rumeurs
témoins
travaux forcés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53325/BCU_Factums_G1722.pdf
2597f92653c7065c7c6a2f12190c3215
PDF Text
Text
hï
A SON EXCELLENCE
MONSEIGNEUR
LE G R A N D - J U G E ,
MINISTRE DE LA JUSTICE ;
GRAND OFFICIER DE L A LÉGION D ’HONNEUR.
M o n s e ig n e u r ,
B iuce G
179 1
e rtoux,
m em bre des
assemblées nationales, depuis •
jusqu’en 1 7 9 6 , . directeur des con tribu tion s
directes
du département des Hautes-Pyrénées , actuellement à Paris ,
a l’honneur d’exposer à votre Excellence que depuis l’établis
sement du Gouvernement consulaire, il s’est organisé, dans le
chef-lieu de ce département, un' système affreux de persécu
tion contre les fonctionnaires publics.
Trois médecins, dont l'un est très - achalandé , sont les
chefs de cette coalition impie.
Leur but est de se débarrasser des agens d’un Gouvernement
qui leur est odieux, d’employer leur crédit pour les faire rem
*
^ •
�(2)
placer par leurs créatures, et de disposer ainsi des places ,
afin de consolider leur tyrannie par la terreur et par l’asservis
sement des dépositaires de l’autorité.
Ils n’hésitent pas sur le ^hoix des moyens qui peuvent leur
assurer le succès de leurs crimes.
Ils emploient d’abord ceux que présentent les sciences oc
cultes , l’électricité , le galvanisme, le magnétisme, les fumi
gations d’assa-fœtida, et même d’arsenic, etc., etc.
Ils travaillent ainsi les tètes pour les désorganiser, et pu
blient d’avance la folie de ceux qu’ils attaquent.
Ils accréditent ce bruit, vrai ou faux, et le répandent, par
leur correspondance, dans les départemens.
Si ces moyens ne leur réussissent pas, ils stipendient des
coupe-jarrets qui deviennent les vils inslrumens de leur
scélératesse, et ils en emploient de plus direets et de plus
efficaces.
La première victime qui a succombé sous leurs coups téné
breux, est le sieur I^apeyrere fils, jeune homme d’un mérite
distingué, le premier qui ait rempli, à Tarbes, chef-lieu du
département, les fonctions de maire , après l’établissement du
Gouvernement consulaire.
A la vérité il était étranger à toute espèce de fonctions pu
bliques l’époque de sa mort. Son énergie avait déplu à mon
sieur le Préfet ; il avait été destitué au grand regret de ses ad
ministrés j et le magistrat même qui avait provoqué sa destitu
tion , en a témoigné depuis son repentir dans plusieurs oc
casions.
Il était en effet à présumer qu’il aurait été appelé de nou
veau , par la confiance du Gouvernement et par le vœu des
citoyens de T a r b e s à exercer les fonctions de cette place.
�(3)
' Ce fonctionnaire estimable est décédé dans des frayeurs,
dans des troubles, dans des syndereses telles, qu’il n’a pu
mettre aucun ordre dans ses affaires domestiques.
C’est aussi par l’effet de pareilles manœuvres , que le sieur
Chappuis, receveur général du département, frère de mon
sieur Chappuis, législateur, a été moissonné à la fleur de son
âge : il est aussi décédé dans d.is transes, dans des frayeurs,
dans le trouble, dans l’agitation, dans la terreur. .. .
Son agonie fut longue. Déjà, cinq ou six mois avant sa mort,
il était en proie à des sensations effrayantes qui le mettaient
hors d’état de,s’occuper de ses fonctions, de soutenir un
quart d’heure de conversation, et même les regards de ses
amis. . . ,
L’exposant a été lui-même le témoin de ces faits dans plu
sieurs occasions; il parvenait avec peine à le rassurer, et à lui
inspirer de la confiance. Si un moment de calme paraissait
succéder quelquefois à ces orages, bientôt après la tête de
ce malheureux jeune homme devenait nébuleuse.
Toutes les ressources de cet art funeste et meurtrier avaient
été mises en usage contre ce fonctionnaire pu blic, qui avait
mérité, à plusieurs reprises , la confiance du Gouvernement
pour les mêmes fonctions.
Chargé, par son excellence le ministre des finances, de cons
tater , après son décès, la situation de sa caisse , l’exposant
trouva les papiers et les finances de la recette générale dans
le plus grand désordre.
Il parvint cependant, avec le concours du juge de paix, à réu
nir environ vingt mille francs qu’il trouva dans des sacs épars
çà et là, dans des rouleaux cachés dans les coins et recoins
�(ift
(4)
de son appartement, et sous un tas de papiers qui étaient
sous les pieds.
L’infortuné avait néanmoins assuré, la veille et le jour
même de sa mort, que sa caisse était entièrement vuide.
C’est encore à peu prés dans les mêmes tourmens et dans
la même aliénation, qu’est décédé, quelque temsaprès, mon
sieur Dintrans, juge du tribunal civil de Tarbes*
Enfin, l’exposant est, dans ce moment, dans les plus vives
allarmes sur le sort d’un de ses amis qui remplit, dans l’ordre
judiciaire, une place du premier rang. Il est atteint, depuis
quelque tems, d’une maladie de langueur qui le tient éloigné
de ses fonctions ; il est à craindre que , produite par la même
cause, elle n’ait la même fin........
On assure encore que la tête d’un adjoint de la justice de
paix de Miélan ( département du Gers ) a été travaillée par
les mêmes procédés, et qu’elle est devenue extrêmement
faible. Cette ville est à peu près à la distance de quatre lieues
de Tarbes.
Depuis longtems, M o n s e i g n e u r , ces scélérats regardaient
le directeur des contributions avec les yeux de la haine et
de la jalousie. L’ordre qui régnait dans son administration et
dans ses affaires particulières, faisait leur tourment. Ils ont
aiguisé leurs poignards et préparé leurs poisons contre lui.
C’est depuis un an, à peu prés, qu’ils travaillent à désorga
niser la tête de l’exposant, par les mêmes procédés qu’ils
ont mis en usage contre leurs autres victimes ; et parce qu’elle
a résisté plus longtems, ils en sont enfin venus à des excès
dont l’atrocité fait frémir l’humanité.
La procédure dévoilera un tissu d’horreurs et de combinai
sons ténébreuses inouïes jusqu’à ce jour.
�•Jú!l
C5 )
Ga aura peine à croire que, dans le dix-huitième siècle,
il existe des monstres aussi atroces et aussi persévérans dans
le crime.
Voici y M o n s e i g n e u r , l’analyse des voies de fait et des
vexations qui ont eu lieu à l’égard de l’exposant....
A Tarbes, outre les procédés physiques avec lesquels ils
l ’ont empoisonné intérieurement ou extérieurement, et dont
les vapeurs affectaient sa tète plus ou m oins, un des chefs
et plusieurs de leurs complices sont venus, pendant quinze
jours consécutifs, et sans interruption d’une minute, depuis
sept heures du matin jusqu’à dix heures du soir, racler à ,
ses oreilles avec un violon accompagné d’une clarinette et
d’un haut-bois, des sons aigus, dans la chambre voisine de
celle qu’il occupait chez les dames Dutilh.
A dix heures du soir ils étaient relevés par d’autres com
plices, qui hurlaient toute la nuit, jusqu’à sept heures du
matin, dans des cornets, des imprécations et des horreurs
contre lui, contre sa famille, contre celle de son neveu, mem
bre du conseil général du département, et contre celle de sa
sœur, dans une chambre delà maison de Lagrele , cabaretier
voisine de la sienne.
La diffamation de ces trois familles a été d’ailleurs pro
clamée publiquement dans les rues, dans les places publiques
et dans les carrefours de la ville de Tarbes, la nuit et le N
jour , par les stipendiés de la coalition : ils ajoutaient la me
nace à la diffamation, et juraient par leurs chefs que toute
la race des Gertoux serait exterminée.
Le secrétaire général de la préfecture,M. Labouliniére, qui
occupe, chez les dames Dutilh, la chambre dans laquelle
s’exécutait la musique enragée dont il a été parlé, répétait
�(6)
cent fois par jour les propos orduriers et diffamatoires qu’on
avait tenus à haute yoîx sur les rues : il se faisait quelque
fois renforcer par ses affidés et par son domestique.
A travers toutes ces bacchanales , il a été impossible à l’ex
posant de fermer l'œil une seule minute pendant quinze jours
et quinze nuits consécutifs.
Les cloches de la ville étaient empoisonnées de leur souffle
pestiféré, et paraissaient produire dans leurs vibrations des
sons articulés si immoraux, si impies et si licentieux, que,
par ordre des ministres du culte des deux paroisses , on entrècoupa les coups de batant, afin de rendre cessons articulés
incohérens et sans suite.
Les voix des conspirateurs se faisaient entendre sourdement
dans les airs : il est prétendu qu’elles n’étaient entendues qué’
de l’exposant.
Ses mains et ses oreilles, lorsqu’il les frottait, articulaient
aussi des sons ressemblant à des mots; ses souliers, lorsqu’il
marchait, produisait le mèmfc effet.
Cet état, qu’on croirait magique ( s ’il était possible de
croire à la magie ) , subsiste encore chez l’exposant, et au
moment où il rédige ce mémoire , il entend dans les airs
les voix sourdes de deux de leurs complices, qui cherchent
à l’effrayer, à le troubler, et à lui interdire toutes les fa
cultés intellectuelles et physiques. Ces scélérats l’ont suivi par
tout depuis son départ de Tarbes.
Les bureaux de la direction sont au rez-de-chaussée de
la même maison , et lorsque l’exposant y descendait dans le
jour , soit pour se dérober au tintamare affreux qui l’as
sourdissait dans sa chambre , soit pour remettre son travail
au chef, soit enfin pour lui donner scs ordres, alors M. Labou-
�S23>
(
i
)
liniére trépignait, marchait à. grands pas, et frappait quel
quefois du pied dans la chambre qui est au-dessus de la salle
occupée par les bureaux; il invitait son domestique et les per
sonnes qui étaient avec lui à l’imiter pour augmenter le bruit.
L’exposant quitta cette maison vers le premier mai dernier;
il se réfugia chez un de ses amis : les manœuvres de ses en
nemis le poursuivirent dans l’asile de l’umitie. Il n y passa
qu’une nuit.
Il se retire chez une de ses filles, mariée à Laloubére : ses
assassins physiques et moraux le poursuivent encore dans cet
asile de la piété filiale.
Croyant se dérober à leurs poursuite et les fatiguer, il part
le lendemain pour chercher le repos dans le sein de sa fa
mille à Campan ; deux scélérats, stipendiés par les chefs,
se placent sur le derrière de la voiture publique qui le con
duisait : il les reconnaît à Bagnéres. Ils le poursuivent jusqu’à
Campan : là ils passent les nuits et les jours entiers dans une
maison voisine de celle de l’exposant, à hurler et à diffamer
les trois familles.
Les agens de la persécution avaient déjà proclamé à Campan
la prétendue folie de l’exposant, et cette réputation factice
l’avait précédé dans ses propres foyers.
A son arrivée, ses voisins , jaloux de ce qu’il a acquis la
maison presbytériale , poussés d’ailleurs par l’influence du
principal chef de la coalition, en deviennent les agens; et
pour lui montrer leur dévoûment et une entière soumission
sur ses nouveaux ordres, ils finissent par être ses Seïdes.
L’u n , qui est un soidisant avocat, déshonore cette noble
profession en hurlant jour et nuit dans un cornet plein de
sels combinés ; il se déshonore bien plus encore en trahissant
*
�< .ù
(8)
ïa confiance de l’exposant, et en se prêtant à des noirceurs
telles, que les chefs de la horde ont été forcés de convenir
qu’il était aussi scélérat qu’eux.
L ’autre est un cabaretier, q u i, autant par bêtise que par
scélératesse, s’est fait le valet des conspirateurs.
Le lendemain de son arrivée, il parut une lettre fausse
ment attribuée à un vicaire général, qui jouit d’une confiance
bien méritée auprès de monsieur l’évêque; l’exposant y était
désigné sous le nom de l’ impie Achab : elle portait en subs
tance que l’impie Achab G ertoux, directeur des contribu
tions , devait expirer par le son des cloches dans son Ut de
douleur. Ces mêmes propos avaient été tenus àTarbes, avant
son départ, par un suppôt du tribunal crim inel, agent et
complice de la coalition.
Oui, M o n s e i g n e u r j l’exposant était en effet expirant dans
un lit de douleur, entouré d’une famille éplorée et réduite
au désespoir.
Cependant le zélé de ses assassins ne se ralentit pas , et
le projet de consommer le crime fut encore suivi avec plus
de chaleur.
En effet, le son des cloches fut continué longtems, et répété
à l’infini ; son agonie fut sonnée à diverses reprises.
Au son dçs cloches vint se joindre le tintement des poêles ,
nuit et jojiir , et le bruit sourd d’une sonnette à vache cou
verte de laine en dessus.,
Pendant la n u it, des Mégères contrefaisaient la voix de
ses enfans pour troubler son repos ; elles pleuraient, pous
saient des gémisserçiens : plusieurs fois l’exposant a été la dupe
d,e ces voix et décès gémissemenis trompeurs. Il appelait alors
son'épouse : Allez \ lui ¿lisait-il, consoler tel enfant qui pleure.
�2
SS
(90
et qui gémit; dites-lui que je. suis, mieux, et que ses pleurs
m’affligent. Elle exécutait mes ordres. Nos enfans , me disaitelle à son retour, dorment tranquillement ; reposez - vous,
Gertoux, vous en avez besoin.
.j:‘
.
Le meurtre de l’exposant a été prêclié publiquement par
un prêtre pendant deux jours , par intervalle. « Il faut, disait
ce scélérat en pleine rue , et à haute v o ix , aller égorger 1 impie
Achab-Gertoux dans son lit, et puisque le son des .cloches
est impuissant, peuple de Campan , levez-vous , suivez-moi ;
je suis à votre tête : qu’il meure ! Offrons à Dieu cette victime
en holocauste ; ce sacrifice lui sera infiniment agréable. "Vous
savez tous que cet-impie a acquis le presbytère consacré à
l’habitation des ministres du Seigneur. » , ()1.,, . , ;
«
- Les deux voisins latéraux répondaient ep.tchorus} :yIl faut
l’aller fusiller clans le presbytère.
En effet, quelque tems après la seconde, exhortation, le
frère de ce prêtre sortit armé d’un fusil pour consommer le
crime ; il en fut empêché par.un de ses voisins, qui l’entraîna
de force chez lui.:
}
Les menaces, les provocations à l’assassinat de l’exposant
ont été réitérées mille fois la nuit et le jour pendant qu’il a
séjourné à Campan. On tenta même .une nuit d’escalader les
murs pour l’exécuter. Ce projet échoua, et l’assassin qui grim
pait tomba à la renverse. A toutes ces horreurs vinrent encore
se joindre, pendant deux nuits, le roulement continuel de deux
voitures à quatre roues , dont l’une appartenait au fils du cidevant seigneur de Laloubère, et l’autre à un gén^ral de,bri
gade en séjour à Bagnères.
.
(
Les maîtres étaient quelquefois dans ces voitures ; toujours
elles étaient accompagnées d’un cortège de domestiques>oude
a
�/
C IO )
personnes soudoyées*, qui avaient reçu l’ordre de joindre de9
cris d’alarmes et de terreur au bruit du roulement. Ces cris
et ces hurlemens affreux étaient répétés à chaque instant et
venaient frapper ses oreilles. .
Une de ces nuits affreuses, ils annoncèrent qu’ils allaient
faire guillotiner l’exposant dans son lit , ainsi que ses voisins,
par Rousseau, piémontais, domestique du sieur Labouliniére.
Cette menace n’eut pas de suite: à son égard. On alla seule
ment chez les autres, qui jouèrent le rôle de gens effrayés par
l’appareil du supplice et par la présence du bourreau, et qui
en conséquence poussèrent des cris plaintifs et lamentables
pendant une grande partie de la nuit. ,
L’audace effrénée des conjurés s’est portée au point de faire
figurer à diverses reprises dans ces scènes d’horreur, le prési
dent du tribunal criminel, le procureur général impérial, le
préfet, le secrétaire général, le capitaine de la gendarmerie,
son lieutenant, et partie d’une brigade.
L’escouade <1« la gendarmerie se disait chargée d’cxécuter
des mandats d’arrêt et d’amener, supposés contre l’exposant
et ses voisins; lecture de ces mandats était faite publiquement
et à haute voix.
Ce moyen de terreur a été mis en usage plusieurs fois. Dans
certaines circonstances on affectait le mystère ; mais on avait
toujours grand soin d’instruire l’exposant de ces démarches
mystérieuses, par des propos tenus sur la rue et à portée d’être
entendus par lui.
Un des voisins ( l ’avocat) avait invité un jour, en s o u f f l a n t
dans son cornet magnétiquo, l’exposant à prendre le c h o c o l a t ;
il l’invita un autre jour, de la même manière, à aller diner
chez lfii.
�jn
( II)
' 'On sent d'avance que cèi invitations ridicules ne furent pas
acceptées. Le lendemain du dernier refus, cetavocat criait à tue
tète, toujours en soufflant dans son cornet magnétique :tuas été
bien heureux de ne pas avoir accepté ni le chocolat ni le diner,
parce que mon projet était de t’empoisonner.;.; tout était pré
paré pour cela, mais ce qui est différé n’est pas perdu. 11 ajouta
encore que l ’exposant avait été réellement empoisonné en bu
vant du vin qu’il avait fait prendre chez un cabaretier nom\né
Labaille Bourgeac, dont la probité est généralement reconnue.
* Tel fut à Campan le résultat des opérations combinées de»
conspirateurs et de leurs agens.
.» , j
L’exposant ne trouvant point dei'epos, même dans le sein
de sa famille, partit pour Tarbes le f 5 mai. M»
’
•*
11 ne fut pas plus ménagé en route. A l’issue de Campanj
il s’aperçut que le cliqueiement des fers de sa jument articu
lait des sons imitant la parole.
>fn
Arrivé à Arcizac-Adour, l’articulation changea tout à coup
lorsque l’exposant passa devant la dernière maison de ce vil*
lage, qui est située à la droite de la grande route.
•< i;
On assure que les nommés Fricôsse, cordonnier, et Touton
Figarol, avôué, tous les deux habitans de Tarbes, étaient
postés à guet-apens dans cette maison, pour attendre l’expo
sant <xson pàssage.
,
...»,«••
■j■'A Momeres, autre village qui se trouve encore sut la grande
route, l’articulation du cliquetement des-fers de la juttientj
produisit encore des sons différens. ■ i,
•(.
Sans doute un autre guet - apens était aposté dans ce village.
Pendant toute la route, l’exposant fut escorté en outre depuis
Bagnères jusqu’à Laloubère, par deux voix qüii se faisaient
.entendre^à une certaine distance, et qui imitaient ceiloi des
�viC
C 12 )
sieurs Labouliniére, secrétaire général de la préfecture, et de
Dumont, maire de Ganipan.
Ils se disaient armés l’un et l’autre de pistolets, et le mena
çaient à chaque instant de le tuer, s’il allait à Tarbes.
Il était nuit lorsque l’exposant arriva à Laloubére; son
gendre et sa fille voulurent le retenir absolument; il résisla à
leurs instances pour leur épargner les horreurs et les désagré«
mens de la persécution.
Rendu à Tarbes, il heurta à la porte d’une auberge où sa
famille va loger. La crainte de déplaire aux chefs de la cons
piration, et celle de devenir l’objet de leur haine et de leur
vengeance, lui en ht refuser l’entrée.
11 fut reçu dans une af{tre où il se croyait en sûreté, quoi
qu’elle lui eût été indiquée par les voies du cornet magnétique.
Mais à peine sut-on qu’il y était logé, que tout changea deface dans cette auberge, la plus paisible de Tarbes.
Les domestiques, ainsi qui: les maçons et les couvreurs qui
travaillaient aux r é p a r a t i o n s il« la m a i s o n , furent achetés et
corrompus; ils.se dévouèrent entièrement aux assassins.
Par l’effet de cette corruption, les procédés les plus atroces
ont etc substitués aux attentions 11 aux égards dus à un voya
geur, surtout lorsqu’il est connu sous ue bons rapports, et
honoiéde la confiance du gouvernement. .
' Les criailleries orduriéres d’usage, recommencèrent le soir
jnème.de; son arrivée.
Des fumigations d’assa-fœtida brûlé avec de l’arsenic, lui
fureût prodiguée* av^c profusion.
Le lendemain do son arrivée, les ouvriers et les manœuvres
transportèrent les ¿oliaffaiiduges. Ilsbaricadiîrent la seule croisée
qui éclairait sacliambrc, et l'empêchèrent ainsi de respirer l’air.
^
�Sz
( *5 )
Us lui jetèrent à plusieurs reprises le mortereau des décombres
sur la figure, et par le tuyau de la cheminée, des paquets de sels
ou d’arsenic. Un jour ils lui adressèrent par la même voie, une
terrine qui se brisa en éclats; elle était remplie d’une compo
sition dont l’exposant ne connut ni les ingrédiens, ni par con
séquent les effets; cependant, et par une précaution dictée par
la prudence, il couvrit cette matière des cendres qui se trou
vèrent très à propos dans 1atre, afin de faire absorber ce quelle
pouvait contenir de pestilentiel.
Enfin, ces ouvriers étaient tellement voués aux manœuvres
de ses ennemis, qu’ils firent brûler sur un réchaud de l’assafœtida et de l’arsenic, dans la partie du grenier qui corres
pondait directement à sa chambre.^
Les domestiques se permirent, une seule fois cependant,
d’imbiber de sel une caraffe d’eau bonne à boire qui lui était
destinée, mais il la fit changer.
Les voyageurs logés à cette auberge en déguerpirent dans
la nuit. Un négociant de Pau qui était du nombre et qui
n’ignorait pas que l’exposant était depuis longtems l’objet
d’une persécution horrible , lui souhaita le bonsoir, et lui
a d r e s s a ces mots latins : « A l assueùs non fit passio. Quant à
moi ajouta-t-il, je ne veux pas mourir dans cette auberge,
et je vais chercher le repos dans une autre. »
Les hurlemens , les cris d’alarmes, d’effroi, de terreur; les
imprécations, les apostrophes outrageantes, les menaces d’as
sassinat, les propos les plus impies , furent vomis nuit et jour
sans une minute d’interruption, dans les airs, par les cornet9
magnétiques qui s’étaient multipliés. Le ciel et la terre en
furent infectés.
(
,
Eniin, le délire des conspirateurs a été à son com ble, lorg-
*
�>0
4
04)
qu’ils on t, avec une audace effrénée, violé le secret d« la
correspondance qui a eu lieu entre son Exc. le ministre-des
finances et l’exposant.
Il est connu à Tarbes qu’une lettre de satisfaction que ce
ministre lui avait écrite a été lue dans les sociétés. . . .
Qu’une autre lettre écrite par l’exposant à son Ex., rela
tivement à la suppression de deux places de contrôleur dans
cette direction, pour les réunir à celle du département des
Landes, a été lue dans les cercles, où elle a subi la censure et
les traits piquàns de la dérision , quoique la minute de cette
lettre n’ait jamais été remise dans les bureaux, et que l’ex
posant l’ait toujours gardée sous la clé.........
Qu’un tableau, dressé d’après les ordres du ministre sur les
services, la moralité et les talens des employés de la direction ,
a été pareillement livré à la curiosité de plusieurs personnes ,
au point que les notes particulières à chacun de ces employés
ont été répétées littéralement et mot pour mo! , même à l’ex
posant.
Qu’une lettre d’amitié écrite par l’exposant à son collègue,
M. Menessier, directeur des contributions directes du dépar
tement de la Moselle, a couru les rues, et qu’il en a été extrait
plusieurs copies, quoiqu’il n’y eût pas de minute, et quelle
eût été cachetée et remise par l'exposant lui-mème au chef
de ses bureaux.
Toutes les lettres et paquets qui partaient des bureaux de
la direction, étaient cependant portés à la poste par M. Clayerie, dernier commis , beau-frère du directeur de ce dépôt
sacré.
L’objet de toutes ses manœuvres était de confirmer l’opinion
déjà préparée sur l’aliénation de l’esprit de l’exposant, et d’y
�( *5 )
chercher des preuves par des commentaires, afin d’envahir
par provision sa place, en supposant qu’il ne succombât pas
sous les coups qu’on lui portait : ce qu i, cependant, paraissait
infaillible aux conjurés, d’après le succès qu’ils avaient déjà
obtenu par les procédés de leur physique expérimentale.
Les autorités locales ont toujours, été froides et muettes sur
tant d’horreurs commises .publiquement contre un agent du
Gouvernement; et malgré qu’il ait hautement invoqué leur
intervention, il n’a trouvé aucun appui ni dans l’autorité ni
dans les talens. Aucun avocat n’a voulu se charger de sa défence, tant est puissant dans cette ville, chef lieu du départe
ment, le crédit des conspirateurs!
L’exposant désespérant de résister plus longtems à des at
taques si violentes, si multipliées et si soutenues; assuré de ne
pouvoir survivre à une persécution si atroce, chercha son
salut dans la fuite. Il est venu réclamer à la source de l’au
torité la justice qu’il n’a pas trouvée dans une ville ingrate qui
lui devait cependant quelque sentiment de reconnaissance.
Ces assassins , qui avaient prévu qu’il ne lui restait d’autre
ressource pour se dérober à leurs coups, qui voulaient
d’ailleurs ensevelir leurs crimes dans l’oinbre et en assurer
par là l’impunité, firent tous leurs efforts et employèrent tout
leur crédit pour empêcher son départ.
Par leurs menées, toute voiture suspendue lui fut interdite.
Leur victime échappa cependant en partant le 22 mai dernier
pour Pau,sur une brouette qu’il trouva pour dernière ressource.
11 espérait voyager tranquillement, autant néanmoins qu’on
le peut dans les ténèbres et sur une brouette............
Mais à peine fut-il arrivé sur la côte de Gers, qu’il entendit
le trépignement des pieds de chevaux et le hurlement de#
�i<sl
C ’6 )
cornets magnétiques qui l’avaient assourdi à Tavbes, à I.aloubére et à Campan.
Il crut entendre les vibrations des cloclies d’Y bos, dépar
tement des Hautes-Pyrénées, ou des sons qui les imitaient,
et qui paraissaient répéter les mêmes indécences que celles
de Tarbes.
La persécution ne se renferma pas dans les limites du dé
partement des Hautes-Pyrénées.
L’exposant arriva à Pau le a 5 mai, à cinq heures du matin ;
il descendit à l’auberge des Trois-Cnntons, où le même ac
cueil qu’il avait reçu à Tarbes lui était préparé , par les soins
d’une dame native du département des Hautes - Pyrénées,
sœur d’un des coalisés.
A son déjeuner, une bouteille de vinaigre fut adroitement
substituée , par l’instigation de cette dame , h celle que l’au
bergiste lui avait fait porter dans sa chambre.
Deux charognes furent placées dans la rue, vis-à-vis scs
croisées, pour mùphytiser l’air , et les fumigations iX’assafœtida ne cessèrent d’empoisonner ce quartier de la ville :
les vapeurs en étaient si fortes et si insupportables, qu’une
dame ( la ci-devant comtesse d’Abidos) s’en trouva tellement
indisposée, qu’elle fut obligée de se mettre au lit; enfin, s’y
trouvant comme étouffée par leur effet, elle quitta son ap
partement et en prit un à l’extrémité opposée.
Un rouet de bois de nouvelle invention, et dont le mou
vement fait à peu prés le bruit d’un tourne-broche, fut placé
dans la chambre voisine de celle de l’exposant : ce rouet était
en jeu nuit et jour; les criailleries nocturnes furent à peu
près de la même force, dans le même genre, et aussi dis-,
continues qu’à Tarbes.
�t
(
*7 )
Cependant les domestiques du fils du 'ci-devant seigneur
de Laloubére s’étaient rendus à P a u , e t, réunis à ceux de
la dame dont il a été parlé, ils faisaient un bruit affreux
dans le quartier, excitaient les ouvriers en bois à faire tra
vailler leurs scies, à frapper de grands coups dans leurs ate
liers ; et sous le prétexte que l’un de ces domestiques était
logé à la même auberge que l’exposant, ils montaient dans
une partie du grenier abandonnée aux chauves-souris , audessus de la chambre occupée par l’exposant, et y faisaient
un sabat affreux.
Lui étant impossible de résister plus longtems à ce tumulte,
et de supporter l’air fétide et empoisonné dont il était im
prégné et étouffé , il se réfugia dans une antichambre.
A Pau parut aussi nuitamment sur la scène la prétendue
gendarmerie du département des Hautes-Pyrénées, ayant à
sa téie le capitaine et le fils du ci-devant seigneur de Laloubére, et dans cette scène figura pour la première fois le pré
tendu chef d’escadron de la gendarmerie, qui parut semoncer
vivement le capitaine , le fit mettre en prison, par forme de
police militaire , et lui donna pcmr camarade le fils du cidevant seigneur de Laloubére.
Les vibrations des cloches allaient aussi leur train ; elles
avaient été empoisonnées comme celles de Tarbes.
La réputation de la prétendue folie de l’exposant fut so
lennellement proclamée dans cette ville ; les voyageurs et les
conducteurs des voitures publiques furent chargés de la ré
pandre, et de la faire précéder sur tous les lieux de son
passage : les agens doucette coalition infernale ne négligèrent
rien dans cet objet.
On pense bien qu’après avoir essuyé de pareils traitemens,
3
�t
( *8)
l’exposant fut très-pressé de partir : dans cet objet, il quitta,
le q5 mai au matin, l’auberge des Trois-Cantons, et alla
attendre le conducteur de la diligence de Bayonne il l’auberge
de Marescaut. Il arrêta une place pour le jour même , et remit
douze francs à un agent du conducteur : ainsi sa place lui
était assurée, lorsque l'instant d’après cet agent, intimidé ou
gagné par ceux de ladite dame ot des chefs de la conspira
tion, lui rendit 1rs douze francs, en lui disant qu’il n'y avait
pas de place pour lui.
L’exposant ne s’en tint pas à ce refus -, il pria le S. Marescaut
d’aller lui-même arrêter une place au bureau de la diligence.
- Il piofita de cet intervalle pour aller solliciter auprès de
monsieur le préfet un passe-port, que les circonstances dif
ficiles dans lesquelles il s’était trouvé à Tarbes, au moment
de sou départ, l’avaient empêché de prendre. 11 attendit tréslongtems inutilement l'audience, et à ce propos il n'est pas
indifférent d'observer qu’en l’absence de monsieur le préfet
il essuya quelques lnsnt< noes <le 1«
cl’un commis , qui
prit sur lui de jouer le rôle de secrétaire-général.
Tous ces mauvais procédés étaient l’effet de l’intrigue de
ladite lime et des coalisés.
Cependant la diligence était partie, et l’exposant restait à
l ’auberge, si le sieur Marescaut ne lui eut fourni un cabrio
let et deux chevaux pour la joindre.
Les cornets hmléient de plus fuit
son départ ; des sons
lugubres et sinistres se lépandirent de toutes parts d:ins les
airs, et le clocher de l’ancien couvent de Lescar paraissait en
être l’autre ou l’écho.
A demi-lieue à peu prés de I.cscar, il se forma un orage
qui s’annoncait de la manière la plus tenible ; l’exposant en
�5 s>$
( ‘9 )
fut effrayé, mais la colonne de l’air formée en trombe passa
rapidement à. côté de la voiture, sans que l’exposant, le pos
tillon ni les chevaux en fussent incommodés. Ainsi l’exposant
continua sa route avec confiance, sous la protection du c ie l,
qui l’a visiblement sauvé ensuite des dangers dont il a été
environné.
L’exposant joignit la diligence vers les trois heures du soir.
Aucun événement remarquable ne s’est passé sur sa route
jusqu’à Bordeaux.
Il observe seulement que dans les auberges où il s’arrêtait
il était regardé comme fo u , traité de même, et surtout ran
çonné ; car les émissaires de la coalition avaient prévenu
les aubergistes et leurs domestiques, qu’une de ses manies était
de prodiguer l’argent, et que telle exhorbitante que fût la de
mande qu’on lui ferait, il paierait sans ricaner.
Il arriva à Bordeaux le 3 1 mai ; il descendit à l’auberge qui
a pour enseigne Yhôtel de Richelieu, tenue par le sieur Daget :
après avoir retiré des bureaux de la direction sa valise, il
monta dans sa cliambre. Il se disposait à se jeter sur le lit pour
reposer quelques instans -, mais il avait à peine ôté ses souliers,
qu’il entendit dans la chambre voisine le bruit du rouet dont
on s’était servi à Pau, pour fatiguer le tympan de ses oreilles;
il aperçut, d’ailleurs, les préparatifs de la musique enragée
qui l’avait tourmenté à. Tarbes pendant quinze jours, sans une
minute d’interruption.
L’exposant ne fut pas surpris de ces dispositions, lorsqu’il
reconnut dans la cour de l’auberge deux personnes qui avaient
précédé son arrivée, l’un est le fils d’un médecin de Tarbes ,
chef de la persécution, et l’autre un agent des plus zélés et
des plus actifs.
�/
( 20 )
Ils avaient déjà signalé l’exposant coftime Fou : bien plus,
ils s'étaient annoncés comme des parens qui étaient venus à
Bordeaux, pour l’empêcher, dans l’intérêt de Sa famille, de
continuer sa route vers Paris.
L’exposant ne trouvant ni sûreté ni repos dans cette au'berge, alla loger aux Chartrons, chez une dame qui tient
hôtel garni et qui donne à manger.
Elle lui donna un domestique pour aller rùtirèr sa valise de
l’auberge de Richelieu ; il la reprit en effet dans la chambre
qui lui avait été destinée, en chargea ce domestique, et remit
à un homme d’un certain âge la clef de la chambre.
Il sortit de cette auberge avec ce domestique qui portait la
valise sur le cou.
Mais à peine eut-il fait quinze ou vingt pas sur la ruer
qu’il s’aperçut que le domestique ne le suivait pas. Revenu
à l’auberge, il voit sa valise jetée à terre dans la cour, envi
ronnée d’ un cercle de jeunes gens parmi lesquels il reconnut
les deux ngens et comptines île la coalition; ils étaient sans
doute à délibérer s’ils l eventreraient; car ils savaient qu’elle
contenait une somme de cinq mille quelques cents livres ; ce
qui a été constaté par le Magistrat de sûreté.
Le domestique, effrayé, se tenait à quelque distance, il
eut toutes les peines du monde à articuler que la valise lui
avait été enlevée avec violence et de vive force sur la rue, à
dix ou douze pas de l’auberge, par deux jeunes g e n s à lui
inconnus.
L’exposant se présente pour réclamer sa yalise ; elle lui est
refusée net, et il est taxé de fou.
lia recours à l’autorité du maire;un domestique lui répond
Irusqucmcnt qu’il n’est pas viaible, parce qu’il est malade.
�$7
S
( 21 )
Enfin, il porte plainte devant le Magistrat de sûreté,
Lafourcade, de ce vol public, de cette ^violation de la foi
publique , et de cet attentat porté à la sûreté des voyageurs ;
le magibtiat ordonne vcrbalenicnt que la valise sera portée
dans ses bureaux; l’énumération des espèces qu’elle contient
est faite en sa présence ; le montant se trouve conforme au
bordereau que l’exposant lui en avait remis ; et celui-ci, après
avoir essuj é quelques insolences de la part de l’aubergiste , et
notamment la qualification de fou qui lui avait été com
mandée, est réintégré dans la possession de son argent et de
ses effets.
Le Magistrat fait mine de dresser, sur papier libre, un
procès-verbal : il propose à l’exposant de le signer , celui-ci s’y,
refuse, le prie de donner suite à la plainte , et de poursuivre,
par les voies légales, les auteurs, fauteurs, corrées et com
plices du vol public de sa valise. 11 se réserve expressément
toutes les actions civiles et criminelles résultantes de ce crime;
le mémoire en plainte reste déposé dans les bureaux de ce
Magistrat.
Ce fâcheux contre-tems a retenu l’exposant à Bordeaux pen
dant quatre jours.
Le 3 juin, il arrête une place dans la diligence qui con
duit de Bordeaux à Paris, pour le départ du quatre.
Sa valise , contenant à peu près les mêmes espèces, est re
mise dans les bureaux de la direction. Dans l’intervalle du 3
au 4 , le conducteur est acheté et corrompu; la diligence s’ar
rête un instant à Chouvenceau; l’exposant et les autres voya
geurs descendent pour se raffraichir dans des auberges diffé
rentes; il est le seul oublié, malgié que la diligence ait passé
à côté de lui, et que le conducteur et les autres voyageurs
'
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I
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l’aient aperçu; elle allait avec la rapidité de l’éclair; l’expo
sant la suivit quelque tems à pied; mais fatigué, et désespé
rant de l’atteindre, il revint à Chouvenceau ; il loua un cheval
que l'autorité du maire lui fit trouver, et partit dans la nuit à
travers les forêts pour rejoindre la diligence à Barbesieux :
vain espoir ! elle était déjà partie.
L’exposant arriva à Barbesieux vers minuit; il descendit à
l’aiiberge qui a pour enseigne la Boule-d'Or, chez LegandAubert. C’est à celle-là que s’arrête la diligence.
Le perfide conducteur de celle qui était partie le 4 juin,
fidèle aux engagemens qu’il avait contractés à Bordeaux avec
les agens de la conspiration , avait disposé les esprits à le
recevoir comme un fou prodigue de son argent.
D ’après cet avis, on avait préparé une fête , et un repas à
dix ou douze couverts, dont il devait être l’Amphytriotv, mais
désespérant de le voir arriver ce soir là , vu l’heure avancée de
la nuit, les convives s’étaient mis à table.
1 L ’exposant entra su.r la c l e b a c l e d u festin 5 il les trouva
d’une gaîté bruyante qui redoubla à son arrivée. Cette humeur
joviale changea tout à coup lorsqu’il demanda à manger
seul.
Pendant son souper ils s’amusèrent à le faire agacer et pro
voquer à diverses reprises.
Las de tant d’impertinence, l’exposant y répondit assez,
vertement, et répliqua par quelques épigrammes aux injures
grossières qui lui étaient prodiguées, et aux épithètes de fou
et d’insensé dont on le régalait
On lui demande le paiement de son souper et de celui de
l’homme qui l’avait accompagné. 11 paie sans difficulté, et
s’apercevant que l’aubergiste lui rendait trop sur l’échange
�( *5 )
d’un écu de six livres, il l’engagea à recompterellfe reprit en
effet quelque argent, clans le double et clans l’agitation.
Lesinjuieset les provocations recommencèrent de plus belle;
l ’exposant ne les souffrit pascpaliomment.
>
Ici, M o n s e i g n n u h , commence une scène d’horreur faite pour
exciter l’indignation de toutes les ames sensibles.
A une heure après minuit l’exposant est chassé avec violence
d’une auberge accréditée, qui doit être l’asile sacré des voya
geurs. La femme de l’aubergiste renforcée du valet d’écurie,
et de trois ou quatre personnes, le poussent rudement vers la
rue et lui ferment la porte de l’auberge.
11 s’assied sur un banc placé sous des arbres en face de l’au
berge. 11 implore à haute voix le secours du peuple de Barbezicux; il se nomme. Tout est muet. Les échos seuls lui répon
dent dans le silence de la nuit. Il craint d’être assassiné.... Mille
idées, les unes plus lugubres que les autres, viennent l’agiter....
C’est dans des transes mortelles qu’il passe une grosse heure
à déplorer son malheureux sort.
Enfin, le froid et l’humidité lui rendent le sentiment de son
existence; il va chercher un asile. Il parcourt toute la ville,
mais inutilement.
A deux heures du matin un gendarme se présente à lui, lui
reproche ses promenades nocturnes et lui ordonne d’aller
rendre compte de sa conduite au commandant de la gendar
merie.
Il résiste à cet ordre. Je n’ai aucun compte, dit-il, h rendre à
votre commandant; conduisez-moi elle? les magistrats; j’obéirai
à la loi.— Où sont vos papiers? — Je n’en ai pas. — Votre passe
port 7 — Je voyage sous le passe-port de l’opinion publique.
La résistance de l’exposant irrite le gendarme ; il appelle
�( 24 )
six paysans apostés, vêtus de surtouts de toile écrue ; alors il
lui réitère cet ordre : l’exposant y résiste avec plus d’intré
pidité. Le gendarme lui enlève de force sa canne, aux grands
applaudissemens de son escorte, qui le nomme M. Fayeux.
Le commandant se présente, et l’exposant croit ne pas se
tromper en avançant qu’il était du nombre de ceux qui
l’avaient maltraité à l’auberge de la Boule-d’ Or.
Le commandant, qui était en habit bourgeois, ordonne
de conduire l’exposant en prison. Celui-ci calcula le nombre
des assaillans ; ils étaient huit : il vit bien que la supériorité
du nombre était un obstacle invincible à la défense de sa
liberté individuelle, et que toute résistance à l ’oppression était
inutile et même dangereuse.
Ainsi l’exposant fut traîné dans une tour du château des
anciens comtes de Barbezieux. La porte du cachot s’ouvre
pour l’engloutir. Quel spectacle hideux frappe sa vue ! cinq
spectres pâles et défigurés, gissant sur des châlits, le font
reculer d ’h o r r e u r .............. une o d e u r f é t i d e e t i n f e c t e empoi
sonne cet asile de l’infortune.......... N’importe, la porte du
cachot se referme sur lu i..........
Un de ces infortunés veut lui faire place aux pieds du châlit:
il le remercie ; il craint la contagion....; enfin ,'il se couche,
transi de froid, dans un coin , sur un tas de vieilles tuiles.
L’aurore vient enfin éclairer ce tiiste. séjour : l’exposant
passe la matinée entière jusqu’à onze heures à implorer le
secours du c ie l, et la protection de la loi contre les actes
oppressifs et arbitraires auxquels il est en butte.......... Sa voix
est entendue..........
A onze heures deux gendarmes le conduisent chez mon
sieur Bourdet, magistrat de sûreté. 11 y trouve le commandant
�( *5 )
de la gendarmerie et le gendarme Fayeux : ils paraissaient
consternés. Ce magistrat l’accueille avec bonté et avec l’in
térêt que lesames justes et sensibles accordent aux opprimés.
Il dresse un procès-verbal, que l’exposant a signé. 11 invite
celui-ci à revenir à l’auberge de la Boule-cTOr, et l’assure
qu’il y sera traité avec les égards qui lui sont dus........
L’exposant n’a qu’à se louer de la bonne conduite de mon
sieur Bourdet dans cette circonstance, et de la sensibilité que ses
dames ont témoigné à son infortune.
Cependant, il obéit à la voix de la sagesse et se rend à l’au
berge de la Boule cl’or. Sa canne lui est apportée quelque teins
après par le commandant de la gendarmerie. Il le remercie. -1
Le séjour qu’il a été obligé de faire à Barbezieux, fera époque
dans l’histoire de la persécution horrible qu’il a éprouvée.
L’exposant partit de Barbezieux le 6 juin. Le conducteur de
la diligence, partie de Bordeaux le 5 , avait reçu l’ordre du
directeur des messageries de le mener en toute sûreté à Paris.
Celui-ci était déjà informé de la conduite perfide qu’avait tenue
le conducteur de celle partie le 4L’exposant est arrivé à Paris le io juin, sans malencontre.
Le tableau analytique que l’exposant a l’honneur de mettre
s o u s les yeux de votre‘Excellence, offre, M o n s e i g n e u r , le
caractère d’une atrocité soutenue avec un acharnement qui
n’a pas d’exemple.
•
Des tigres altérés de sang veulent , à quel prix que ce
soit, s’abreuver de^elui d’un ggent du Gouvernement et de
celui de trois familles entières.
Leur soif est inextinguible.
Dans leur rage , ils poursuivent leur proie de département
en département pour la dévorer.
4
'
�i'tX
06)
Ils rugissent lorsqu’elle échappe à leurs griffes meurtriéi'es.
Le nombre de leurs agens et de leurs complices se mul
tiplie en proportion des obstacles qui s’opposent à leurs projets
sanguinaires ; rien ne les arrête.
Ils se jouent de la vie et de l’honneur des citoyens.
Us foulent aux pieds les droits sacrés de l’homme et les
lois protectrices qui les ont consacrés.
La violation du dépôt des lettres n’est pour enx qu’un jeu ,
et ils en font l’objet de leur amusement et de celui de leur
société.
£—
Le secret de leur art funeste les enhardit à tous les crimes.
Us espéraient de les ensevelir avec l’exposant dans le même
tombeau; ils annonçaient hautement sa mort comme trésprochaine, par l’infaillibilité de leur atroce magie.
Leur projet ayant échoué en province et sur la route, ils
ont transporté à quarante ou cinquante lieues de Paris leur
attelier et leurs cornets infernaux.
D e là ils ne cessent du vomir dans les airs nuit et jour, et
eans l’interruption d’une minute, des imprécations contre l’ex
posant et contre les trois familles proscrites.
Leurs sons lugubres ne lui accordent, pas un moment de
relâche.
*
*
‘
Us annoncent le pillage, l’incendie, le massacre de toutesa famille ; ils répètent à chaque instafit le serinent exécrable
d’exterminer toute la race des Gertoux , jusqu’aux derniers
neveux : ils boivent d’avance leur sang (fans leur coupe en
chantée , et ils en savourent déjà les délices.
Ils font tous leurs efforts pour confondre toutes ses idées,
et lui interdire même la faculté de penser.
Ces monstres épient toutes les démarches de l’exposant, et
devinent jusqu’à sa pensée la plus secrète.
S
�( a7 )
Chaque ligne, chaque mot de ce mémoire est pour eux
un objet à censure ou k dérision.
Jamais on ne montra tant d’audace dans la conception du
crime, jamais tant de constance et d’intrépidité dans l’exé
cution.
Tant de scélératesse ne peut, M o n s e i g n e u r , rester i m
punie.
C’est par la protection visible de la Providence que l’ex
posant a échappé â tant de dangers.
Elle a veillé et veille encore sur ses jours.
Peut - être, dans la profondeur de sa sagesse , l’a - 1- elle,
choisi pour être l’instrument de sa vengeance, et pour ar
racher le masque à des scélérats qui ont trop longtems souillé
impunément la terre de leurs forfaits.
Vous avez vu, M o n s e i g n e u r , que ces antropophàges ont
étendu les ramifications de leurs noirs complots dans quatre
départemens. Il est impossible à l’exposant d’en suivre les
traces, si l’autorité supérieure ne lui tend une main secourable : il est venu invoquer sa justice et son appui.
La société entière réclame la punition de ces monstres , et
un exemple terrible et effrayant pour ceux qui oseraient les
imiter. Interest reipublicœ cognosci malos.
A ces causes il vous plaise, M o n s e i g n e u r , ordonner h
M . le Procureur général impérial des Hautes-Pyrénées, de
porter plainte et faire informer contre les auteurs, instiga
teurs, fauteurs et complices des crimes commis dans ce
département, depuis environ six mois , contre l’exposant et sa
famille , leurs circonstances et dépendances.
A M. le Procureur général impérial des Basses-Pyrénées,
de porter plainte et faire informer pareillement contre les
�(
28)
auteurs, fauteurs, instigateurs et complices des crimes commis
contre lui, à Pau, chef-lieu de ce département, les 23 , 24
et 2 5 mai dernier, leurs circonstances et dépendances.
A M. le Procureur général impérial du département de la
Gironde, de porter également plainte et faire informer contre
les auteurs, fauteurs, instigateurs ei complices des crimes
commis à Bordeaux contre l’exposant, depuis et compris le
3 1 mai dernier, jusqu’au 3 juin inclusivement, notamment
à raison du vol public de sa valise, et à raison des moyens
de corruption et de séduction pratiqués envers le conducteur
de la diligence partie de Bordeaux pour Paris, le 4 juin aussi
dernier, et dont le nom doit être inscrit sur le registre de
départ de la direction des messageries.
Enfin, à M. le Procureur général impérial du département
d e la Charente, de porter plainte et faire informer contre les
auteurs, fauteurs, instigateurs et complices des crimes commis
contre l’exposant, à Barbesieux, chef-lieu d’arrondissement,
les 5 et 6 juin dernier.
Ordonner en outre que les procédures faites à Pau,
Bordeaux et Barbesieux, seront envoyées à M. le Procureur
général impérial des Hautes Pyrénées , à Tarbes, foyer de la
c o n s p i r a t i o n -, pour être jointes à la procédure principale, et
être jugées par un seul jugement.
L'exposant vous prie, M onseigneur , d’agréer l'hommage
de son profond respect.
B. GERTOUX.
�sas
P. S. Ce matin 10 juillet, à mon réveil, ils m’apprennent que
le rouet dont j’entends le bruit est une machine fantastique ,
et qu’au moyen de leurs cornets enchantes , ils transmettent
intérieurement à leurs victimes toutes especes de sons, les
changent et les cadencent à volonté. Ils vomissent dans les
airs des imprécations horribles , impies et exécrables. Leur
puissance s’étend partout ; elle est au dessus de celle de Dieu
et des hommes. Ils disent qu’ils sont à Tours ou à Orléans,
et puis à Orléans ou à T ours, pour troubler mes idées.
Les physiciens seuls peuvent expliquer des phénomènes
aussi étranges , aussi immoraux, aussi meurtriers , et aussi
destructeurs de l’ordre social.
_<
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gertoux, Brice. An 6?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gertoux
Subject
The topic of the resource
persécution contre fonctionnaires publics
fonctionnaires
rumeurs
harcèlement
menaces de mort
démence
auberges
Description
An account of the resource
Titre complet : A son Excellence Monseigneur le Grand-Jude, ministre de la Justice, grand Officier de la légion d'Honneur.
Table Godemel : Folie : - pétition au grand juge, annonçant tous les caractères de la folie de la part du rédacteur. il se plaint d’un système de persécution organisé dans le département des hautes Pyrénées, contre les fonctionnaires publics, dans un but contraire au gouvernement ; en cherchant, principalement, par des moyens occultes, à désorganiser les têtes et à faire tomber dans un état de folie les personnes dont on veut se débarrasser.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 6
An 6
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1722
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tarbes (65440)
Miélan (32252)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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auberges
démence
fonctionnaires
harcèlement
menaces de mort
Persécution contre fonctionnaires publics
rumeurs
-
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16a14344df381c3acecfbabdf75c90ed
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Text
PRÉCIS EN RÉPONSE,
POUR J
acques
C H O U S S Y , Géomètre, demeurant
à Cusset, Intimé ;
C O N T R E Jean-Claude P L A N T A D E R A B A N O N , propriétaire , demeurant au lieu
de C h itain , commune de Saint-Christophe , dépar
tement de l 'A llie r , Appelant.
C e t t e cause offre le h ideux spectacle d'un débiteur
de mauvaise fo i, q u i, pour se soustraire au payement d’une
dette constante et avérée, épuise d’abord les subterfuges
ordinaires de la chicane; et se ro idissant contre l’autorité
de la chose ju gée, cherche enfin par d’odieux détours et
d’affreuses calomnies, à rendre illusoires des condamna
tions bien motivées, prononcées en dernier ressort, aux
quelles il a formellement acquiescé et à remettre en question, dans un nouveau tribunal, sur un autre territoire où
il est moins connu,ce qui a été irrévocablement décidé par
ses juges naturels et compétens.
A
�Telle est l’idée sommaire de ce procès vraiment scan
daleux : les détails en sont révoltans. Hatons-nous de les
retracer , pour détruire les effets de la perfidie avec la
quelle ils ont été tronqués dans le précis im prim é de Plan»,
tade-Rabanon.
F A I T S .
Claude Busseuil, fermier de la terre de C liitain, subroge,,
le 4 avril 1 7 8 1 , Pierre Choussy, père de l’intim é, à l'effet
de son bail ; il le charge de rendre, à sa sortie, au proprié
taire ( Laqueuilhe ) un cheptel montant à 3^894 f r .,
et lu i v e n d e n o u tre tous les b estia u x q u i e x c é d o ie n t ce
cheptel, avec quelques autres objets, moyennant 3 ^ 9 6 fr.
L e 27 mai 1783., Pierre Choussy renouvelle sa ferme
avec le propriétaire (Laqueuilhe ) pour neuf ans, finissant
au 24 juin 17 9 2 , et se charge de laisser , à la fin de son
b a il, pour 3,894 fr. de bestiaux, comme en étoit tenu Bùsseu il, précédent ferm ier : le p rix de la ferme étoit de
8,000 fr.
L e 12 janvier 179 2 , Pierre Choussy afferme encore
cette même tei*re p o u r trois ans , finissant au 24 juin 179 5
(an 3 ) , aux mômes clauses et conditions ; mais le fermage
est réduit à 4,300 fr. à cause de la suppression des droits
féodaux, avec convention que le p rix sera augm enté, si
ces droits féodaux sont rétablis avant la fin du bail.
Au. mois de juin de la même année ( 1 7 9 2 ) , Jacques
Chousjy- fils prend desarrangemens avec Pierre son père,
qui le subroge à la ferme dé Chitain. Choussy fils, intim e,
y va résid er,et en prend ^administration.
Laqueuilhe est porté sur la liste defi émigrés.} ses biens.
�C3 )
\
sont confisqués et mis en vente; la terre de Çhitain est
vendue par lots séparés : Plantade-Rabanon achète la ré
serve et les domaines de Chitain et de Jon in ain , le 2. bru
maire an 2.
Un arrêté de l’administration centrale du département
de l’A llie r, du 2 1 ventôse an '2, > pris sur l’avis de celle
du district de Cusset, annulle le dernier bail de ferme de
la terre de Chitain , et le condamne aux flammes , à raison
de la clause d’augmentation du prix stipulée en cas du réta
blissement des droits féodaux supprimés. Jacques Choussy est dépossédé de. sa ferme au 24 juin
l794(m essidoran 2) ; Plantade-Rabanon et lesautres acqué
reurs en tren t en jouissance des lots par e u x achetés , et font
procéder par deux experts, le 14 du même m ois, à l'es
timation des bestiaux ; et comme le nombre étoit supé
rieur à celui qui avoit été l’objet du cheptel, l'estimation
dut par là même excéder de beaucoup le montant de ce
cheptel.
Choussy, qui avoit quitté la ferm e, et qui laissoit ses
bestiaux, désiroit en recevoir le prix ; il presse Plantade
de te rm in e r avec lu i, comme avoient fait les outres acquér
,1‘curs. Plantade di/Fèrc, lui d e m a n d e divers délais, et
l’oblige à faire des voyages inutiles et fatigans.
Choussy va trouver le représentant Forestier, alors en
séjour ù Cusset, avec qui Plantade étoit intiméinent lié ;
il le prie de le concilier avec son ami. Forestier lui dit
qu’il peut écrire i\ Planlade, et l’inviter desa part h terminer
•cette affaire. Choussy écrit la lettre du 29 messidor an 2 ,
im prim ée à la suite du précis de P lantade ; celui-ci garde
A z
�>4 }
le silence pendant quinze jou rs; enfin, le 14 therm idor,
il écrit à Choussy la lettre suivante :
« J e vous p rie , mon cher citoyen, de venir ici après
« demain 16 du couran t, et d’apporter, comme nous en
« sommes convenus , les baux des métayers de Chitain et
<r Jo n in a in , et votre b a il, ainsi que les papiers que vous
« croirez nécessaires. Tous mes hommages à votre ci
te toyenne. Salut et fraternité, et signé P lan tad e . »
Choussy ne manque pas au rendez-vous, et le 17 mes
sidor an 2 ,les parties règlent définitivement leur compte.
Choussy modère même l’estimation des bestiaux; Plantade lui paye une somme de 2 r5 oo fr. assignats, et lui sous
crit u n billet de 2,892 fx*. 80 cent, /payable le prem ier ger
minal an 3. Choussy lui remet les baux à cheptel des mé
tayers, et les autres papiers relatifs à la ferme de Chitain.
L e lendemain de l’échéance ( 2 germinal an 3 ) , Plantade fait à Choussy fils, absent, un acte d’offre du montant
du billet de 2,892 fr. 80 cent., ù condition , r .° qu*il éta
blira sa qualité de ferm ier; 2.0 que dans la quittance qu’il
fou rn ira, il sera tenu de réserver au citoyen Plantade le
bénéfice de toutes lois qui pourroient in te r v e n ir su r les
ch e p te ls. C et ncto étoit n u l p ar vice de forme , et ridicule
dans son contenu. Choussy le regarde comme non avenu ,
et cite Plantade, le 6 germinal an 3 , devant le bureau de
p a ix , pour se concilier sur la demande eu payement du
billet et de quelques autres objets.
Plantade persiste dans son acte d’offre, et la conciliation
n’a pas lieu.
1 3 germinal an 3 , demande en condamnation du mon
tant du billet..
�( 5)
25 du même m ois, jugement par défaut du tribunal de
C u sse t, qui condamne Plantade à le payer.
L e 28 du même mois Plantade y forme opposition.
L e 22 floréal an 3 , il intervient un second jugement par
défaut, qui déboute Plantade de son opposition, et donne
acte à Pierre Choussy père de la déclaration par lui faite,
que la ferme de Chitain appartenoit, depuis 1 7 9 2 , à
Choussy fils, intim é, et qu’à son égard il n’avoit rien à
prétendre.
Plantade appelle de ces deux jugemens. L a cause est por
tée au tribunal de district de Gannat, où il intervient, le 1 1
"vendémiaire an 4 , un troisième jugement par défaut, qui
confirme les deux premiers.
Plantade y forme encore opposition devant le tribunal
civil du département de l’A llie r, qui venoit alors d’être
installé.
L a cause se plaide contradictoirement. Plantade répète
que Choussy père étoit seul fermier ; qu'il n’a pu traiter va
lablement avec le fils; qu’il s’étoit glissé des erreurs consi
dérables dans l’arrangement par lui fait avec Choussy fils j
que cet arrangement,et le billet de 2,892 francs 80 centimes
qui l’a s u i v i , so n t le fruit de l’e rreu r, dé la surprise, etc.
Et le 3 pluviôse an 4 , Je tribu nal civil de TAllier rend un
quatrième jugement, en dern ier ressort, par lequel, sta
tuant sur l’appel interjeté par Plantade, il confirme défini
tivement les deux jugemens du tribunal de Cusset, des 25
germinal et 22 floréal an 3 , prononçant la condamnation
du montant du billet.
f
Ce jugement est signifié ù Plantade. Deux ans s’écoulent^
il ne paye pas. L e 8 floréal an 6 , une saisie-exécution est
H
�lïi\
t.\K
(6)
assise sur quelques bestiaux : Plan ta de, sous la réserve de
tous ses d ro its, fournit un gardien volontaire ; bientôt il
forme opposition aux poursuites. Les parties retournent au
tribunal civil sur ce nouvel incident : la cause se plaide le 14
prairial an 6. Plantade conclut en ces ternies: « O uï Ga y ,
» pour l’opposant (Plantade) qui a conclu ù ce qu’il plaisç
» au tribunal accorder à sa p artie, en vertu de la loi du i 5
» fructidor dernier ( an 5t) terme et délai pqur tout le temps
» que cette loi permet aux tribunaux d’accorder aux débi» teurs de créances antérieures au 5 thermidor an 4 ; lui
» donner en conséquence main-levée de la saisie faite à son
x préjudice, ù la requête du citoyen Çhoussy, aux offres
jj que fait le citoyen Plantade-Rabanon de payer en même
» temps la créance principale, ainsi que les intérêts et frais
» légitimes ».
Choussy conteste le délai demandé* et il intervient un
cinquième jugement contradictoire, qui accorde à Plantade
terme et délai jusqu’au premier vendémiaire an 7 , la saisie
.tenant jusqu’ù l’entier payement.
Lorsque Plantade voit approcher le terme fixé , il élève
de nouvelles chicanes; il form e , le 5 fru c tid o r nn 6 , une de
m a n d e en d o u z e chefs , o ù il a n n o n c e qu’ily a eu des erreurs
et une lésion considérable dans les arrangenions faits entre
lui et Choussy , le 17 thermidor an 2 ; mais il ne se plaint
pas d’avoir souscrit le billet par l’effet d’une prétendue ter
reur. Cette demande est déclarée nulle paru ii sixième jugojn e n t, du 14 du même mois.
Plantade forme lui-même une saisie-arrêt, entrôses pro
pres m ains, sur Choussy , quoiqu'il n’ait ni créance, ni
titre,
‘
r
r ' ’.
. .
�C7 )
' Choüssy reprend ses poursuites. Plantade imagine alors
un nouveau système de défense ; il forme , par citation et
exploit des 17 vendémiaire et 9pluviôse an 7 , une demande
tendant à obtenir la rescision des arrangemens faits entre
lui et Choussy , ïe 17 thermidor an 2 ; i° . comme étant le
fruit de l’erreur , du d o l, des menaces , violences et dénon
ciations résultant d’une lettre du 29 messidor ( celle impri
mée à la suite du précis); 20. comme étant contraires aux
arrêtés du comité de salut public, des 2 thermidor et 1 7
fructidor an 2 , et aux lois des 15 germinal an 3 et 2 thermi
dor an 6. Il conclut à ce que les parties fassent un nouveau
compte, basé sur lés lois et arrêtés précités. P ar cette de
mande , Plantade se départ de toutes autres demandes
antérieures.
L e 24 ventôse suivant, il v a , seul et sans'citation , chez
iin notaire, pour y déposer, dit-il, une somme de i , 5oo f .,
pour payement de ce qu’il peut devoir à Choussy ; il en fait
dresser acte , et retire de suite le prétendu dépôt.
L e 19 germinal an 7 , Plantade assigne Choussy devant
le tribunal civil de FA llier, pour faire accueillir sa saisiearrêt faite sur lui-m êm c, son opposition aux(poursuites, et
faire prononcer la validité du dépôt (_iionja.it ou retiré de
suite') de i , 5oo francs, et conclut encore à l’adjudication,
des conclusions portées en ses exploits, du 5 fructidor an6 ( déclarénul')i 17 vendémiaire an 7 ,et autres postérieurs..
L a cause appelée à l’audience du 17 floréal an 7 , sur l’as
signation du 9 pluviôse seulement, Plantade ne se présentepas. Choussy demande acte du départ des autres demandes „
donné par cet exp lo it, et congé-défaut*
�( 8 )
Un septième jugement homologue ce départ, et rejette
la demande en restitution de Plantade.
Celui-ci y forme opposition. Un huitième jugem ent,
sous la date du 1 1 messidor an y , fondé sur le règlement du
tribunal c iv il, et.sur ce que la cause avoit été appelée à.tour
de rô le, déclare Plantade non recevable dans son oppo
sition.
Plantade a interjeté appel de ces deux derniers jugemens.
C’est sur cet appel qu’il s’agit de prononcer.
Plantade, qui jusqu’alors avoit presque toujours affecté
dese laisser condamner par défaut sur toutes ses demandes,
a enfin rompu le silence et publié u n mémoire im prim é,
o ù , tro n q u a n t et dissimulant tous les faits essentiels du
procès, il ne parle que de son assignation du 9 pluviôse an
7 , et des deux jugemens des 17 floréal et 1 1 messidor suivans ; il suppose qu’il n’a souscrit le billet du 17 thermidor
an 2 , que pour éviter la mort dont le menaçoient Choussy
et le représentant du peuple Forestier; et pour colorer sa
lâche im posture, il s’est livré aux diatribes les plus viru
lentes et les plus calomnieuses.
Ce simple récit des faits a déjà mis à nu la m auvaise foi de
ce d éb ite u r d é h o n te . L a ré p o n se de Choussy va faire éclater
toute sa turpitude.
L e citoyen Plantade parle ironiquement de l'épithète de
notre brave représentant , que Choussy donne dans sa
lettre au citoyen Forestier----I£h ! mais n’eSt-il pas notoire
que c’est lui-même , Plantade , qui l’a ainsi qualifié dans
ses discours et dans ses lettres aux sociétés populaires de
Ciisset et de V ichy ? Il l’appeloit avec complaisance son
doux atni\ se glorifioit d’avoir été constamment son ami
depuis
�(9)
depuis sa jeunesse , et long-temps avant la révolution; il
annonçoit par-tout qu’il étoit son conseil dans toutes ses
affaires contentieuses ; et le citoyen Plantade sait bien que
ce fut là le motif qui détermina le citoyen Choussy àparler
au citoyen Forestier des lenteurs qu'il .éprou voit dé la part
du citoyen Plantade.
L e citoyen Choussy livre la lettre qu’il a écrite à ce sujet
le 29 messidor an 2 , à la critique la plus sévère , et défie
qu’on y trouve aucune expression qui puisse servir de
prétexte aux viles calomnies du citoyen Plantade : ce der
nier fait lin rapprochement perfide de cette lettre et d’un
arrêté du représentant Forestier du 22 therm idor.. . . E t
qu’y a-t-il donc de commun entre la lettre et l’arrêté pos
térieur de près d’un mois ? Cet arrêté n’a pu effrayer PJantade , puisqu’il n’existoit pas à l’époque des arrangeinens.
L e 9 thermidor 'avoit lui sur la France et fait cesser
alors le régim e des triumvirs dont Plantade parle dans
son mémoire. Il cherche à insinuer qu’il ig n o ro it, le 17
thermidor , les événemens du 9 , tandis que l’alégresse
universelle agitoit alors tous les F ran çais, dans les départemens mêmè les plus éloignés. Si le citoyen Plantade au reste
a des reproches à faire aucitoyen Forestier,il peut s’adresser
directement à lui j il saura bien répondre, et peut-être at-il encore dans son porte-feuille des pièces capables de con
fondre le citoyen Plantade.
• '
1
Quelle, crainte'Forestier pouVoit-il inspirer au citoyen
Plantade qui lui étoit attaché par les nœuds de la plus
étroite amitié,) avec qui il mangeoit fréquem m ent, qu’il
accompagnoit au comité de salut public), à la commission
dys/subiiisUinces > et rà qui il prodiguoit les noms les plus
chers?
.! d 'j ; J •
B
’
�( 10 )
Planlade dit que le cordonnier B ou rgeois, de V ich y
étoit l’émissaire de Forestier; on ignore s’il a des preuves
de cette assertion , mais on doit s’étonner que Bourgeois
ait été dans le cas d’inspirer de la frayeur au citoyen Plantade qui étoit avec lui membre du comité de surveillance
de V ic h y ; à Plantade qui a été constamment fonctionnaire
public pendant le gouvernement révolutionnaire ; à lui
qui étoit un des plus grands orateurs des clubs ; à lui dont
les collègues Bourgeois et Bonnefont ont attesté le civisme
et l’ardeur à exécuter les lois d’alors et les arrêtés des re
p ré se n ta i en m issio n ....
Ne seroit-ce pas p o u r e f f a c e r ces impressions après le 9;
therm idor , que Plantade auroit imaginé de mettre en
scène le dénonciateur Arm illon ,u n journalier qui ne sait
n i lire ni écrire, pour faire croire que Plantade étoit sus
pecté d’incivisme et menacé comme G ravier, R aynaud,
Sau ret, de . . . Mais la fable a été mal ourdie ; on place les.
propos de Bourgeois aux premiei’s jours de germinal an s#
et c’est le 23 du même mois de germ inal, que lç représen
tant du peuple Vernerey proclamoit le citoyen Plantade
administrateur du district de Cussel ; que la société popu
laire de cette c o m m u n e upprouvoit avec transport sa no
mination , tandis qu’elle déclaroit que G ra v ie r, Raynaud
n’avoient pas assez d 'én ergie.. . . Planlade avoit donc assez
d’én ergie; il étoit donc ce qu'on appeloit à la h au teur,
puisqu’il sortoit triomphantde toutes les épreuvos.
Plantade qualifie le citoyen Choussy de neveu deFores-tier ; mais il sait bien que ce fait est fa u x , et que Choussy a
seulement épousé une femme qui est la cousine de Forestier
à un degré fort éloigné; il sait bien aussi que Choussy at
eu très-peu de rapport avec lui..
�(
)
Si Choussy avoit eu autant de crédit que Plantade lui
en suppose auprès de Forestier, n’auroit-il pas alors obtenu
quelque em ploi? se seroit-il laissé dépouiller de sa ferme ?
n’auroit-il pas fait maintenir son bail qu'un arrêté émané
<lu corps adm inistratif, dont Plantade a ¿té m em bre, a
condamné à être lacéré et b rûlé? Cette décision n’a-.t*elle
pas dû donner à’Ghoussy de justes inquiétudes, tandis que
Plantade triomphoit d evo ir le bail anéanti, et sa mise en
possession rapprochée ?
‘
Pourquoi le citoyen Plantade a-t-il laissé ignorer dans
son p récis, que les deux domaines et la réserve par lui
acquis provenoient de Laqueuilhe inscrit sur laliste des ém ig r é s ? a u r o it-il craint q u ’ o n fît la r é fle x io n bien juste que
l’acquéreur d’un tel bien devoit avoir moins d’e ffro i, que
le ferm ier de l’émigré dont le bail ¿toit condamné aux
flammes.
' Vous aviez dpnc cru , citoyen Plantade, qu’on avoit
perdu la m ém oire, et qu'il vous sufïisoit d’avoir agi et
réagi en sens contraire, selon le temps et les lie u x , pour
-vous soustraire au payement de vos dettes légitimes.. . . Si
-v o u s aviez voulu inspirer plus de confiance aux juges
d a p p e l, vous auriez clu développer tous vos m oyens,
tous vos prétendus faits devant vos juges naturels, devant
-le tribunal de Cusset, devant celui de Gannat, devant celui
de Moulins........ Quoi ! vous laissez prendre contre vous
■huit jugeniens successifs, les uns par défaut, les autres
contradictoires, sans révéler £i vos.juges que la crainte de
la mort vous a arraché le billet contre lequel vous plaidez
depuis sept ans.
Vous avez vu Forestier incarcéré, et vous n’avez pas
�/
7A0
î,- .x
( 12 )
songe à parler des événemens relatifs au billet î convenez
que votre mémoire a été bien ingrate. Qui vous a donc
empêché de protester , de réclam er devant tous les juges
qui se sont succédés depuis thermidor an 2 , et qui sont
certainement à l’abri du soupçon d’avoir favorisé les agens
de la terreur ?
Comment se fait-il qu’un homme dont la finesse a passé
en proverbe dans le district de Cusset, qu’un homme qui
rédige lui-meme ses citations, ses exploits, ses m ém oires,
qui étoit le patron et le solliciteur au parlement, des procès
de ses compatriotes, et quia été constamment fonctionnaire
public , ait re c o n n u la dette , ait acquiescé au ju g e m e n t de
condamnation, ait demandé termes et délai, ait offert de
p ayer, et même ait fait semblant de consigner, lorsqu’il
avoit un m o yen , qu’il croit si sur* de faire ajinuller le
billet ?
L e citoyen Plantade a-t-il pu espérer de rendre sa cause
plus intéressante, en remuant la fange des passions, en
nous ramenant aux temps malheureux des excès, lorsque
le gouvernement s'efforce de les faire oublier, et que l’oli
vier delà paix rallie tous les Français sous son ombre tulélaire? En v ain le citoyen Plantade a voulu parler n la haine,
au ressentiment des hommes passionnés..........L e citoyen
Choussy ne veut parler qu’à l’in tégrité, à la raison, à l’im
partialité de ses juges.
L ’engagement arraché par violence à un homme que
Von tient enfermé , à qui on tient le pistolet sous la gorge,
et qui est menacé de perdre la vie s’ il n’obéit, est justement
proscrit par les lois; mais on n’annulle pas légèrement les.
conventions: il faut établir clairement ses faits, et no pas.
�//p
C 13 }
se contenter de verbiager et de vom ir des calomnies. O r
Plantade n’a rien prouvé , ni même allégué de précis q u i
puisse justifier sa nouvelle manière de payer ses dettes.
C’est Plantade lui-même qui a écrit à Choussy,le 1 4 ther
midor an 2 , de venir à Chitain terminer leurs comptes :
tout a été consommé dans le domicile de Plantade luim êm e; il a été l’arbitre et le régulateur de l’arrêté de
compte. Toutes les circonstances sont donc contre lui ;
toutes sont en faveur de Choussy, comme on vient de l’éta
blir. Aucune menace ne lui a été faite; il étoit en grande
faveur sous le régime du trium virat, et Choussy, comme
ferm ier d’ém igré , avoit de justes inquiétudes ; il n’étoit
pas m ê m e membre des sociétés p o p u la ir e s , o ù Plantade
triomphait comme orateur.
Si son engagement n’étoit que le fruit de la crainte de la
m o rt, le citoyen Plantade pou vo it, il de voit même exciper
de ce moyen péremptoire chaque fois qu’il a été appelé
devant les tribunaux 5 et cependant, loin d’articuler ce vice
radical, il a approuvé le billet, il a fait des offres réitérées
de le payer ; et d’après les lois civiles, cette approbation le
rendroit non recevable à attaquer la convention si formel- .
leinent sanctionnée, dans un montent où sa prétendue
terreur étoit évanouie.
' ;
Mais qu’e st-il besoin d’entrer dans tous ces détails,
quand il existe desjugernens définitifs non attaqués ni attn*quables, qui ont prononcé la condamnation du billet ,
m a lg r é les reproches d’erreur et de surprise allégués par
Plantade? Tout est jugé par les jugemens des tribunaux de
Cusset, Gannat et M oulins, des 2 5 genninal et 22 floréal
an d eu x, 1 1 vendémiaire et $ pluviôse an 4 , et 14. prairial
�(
1 4
)
an 6. Plantade a acquiescé formellement a tous ces jugem en s;i!s sont passés en force de cliose ju gée; il n’est pas
même au pouvoir du tribunal d’appel d’y porter atteinte:
tout jugement en sens contraire donneroit infailliblement
ouverture à la cassation.
Plantade parle dans son précis des lois des i 5 germinal
an 3 , et 2 thermidor an 6 , sur les cheptels. Quelle influence
ces lois pourroient-elles avoir dans l’espèce ? D e quel droit
auroit-on voulu forcer Choussy à laisser ses bestiaux à Plan
tade sans en recevoir le p rix ? N e doit-on pas traiter confor
mément aux lois qui existent au moment où l’on entre en
p o u r -p a r le r ? L'art. V I de la loi d u 2. th e r m id o r an 6 , dit
expressément : et que les comptes et partages des cheptels
« entièrement consommés , soit qu’ils l’aient été par suite
« de jugeniens,soit qu’ils l’aient été en vertu d’arrangemens
« définitifs faits de gré à g ré , sont maintenus et sortiront
« leur plein et entier effet, à quelqu’époque, et dans quel« que proportion qu’aient été faits lesdits comptes et par
te tages. »
O r , Plantade et Choussy ont fait des arrangemens de
.gré à g r é ; ils ont réglé leur c o m p te de cheptel ; les bes
tiaux ont été estimés et rendus au propriétaire, 6ans
réserve ; le reliquat a été payé, partie en inonnoic cou
rante , partie en un billet ; tout est consommé. Peu importe
que Plantade ait voulu revenir après coup sur scs engagem ens; qu’il ait plaidé et chicané sur leur exécution; cette
•circonstance ne détruit pas le fait matériel du compte ar
rê té , de l’arrangement terminé. Un acte n’est pas moins
¡consommé, quoique la somme promise ne soit pas encore
piiyée, I/m gagcm cnt de payer existe ; il suilrt à la perfeo*
�C * 5. )
tîon de la convention. Un plaideur n’est pas moins obligé
d’exécuter une transaction , quoiqu’il lui plaise de chica
ner sur les payemens. L a remise d’un billet pour achever
de solder le prix des bestiaux a d’ailleurs opéré une nova
tion , et changé la nature et l’espèce de la dette. C’est un
effet pur et simple qui a remplacé l’obligation de cheptel
et qui en a détruit les effets. L a créance de Choussy est une
créance nouvelle, une sorte de prêt, dont le sort ne peut
plus être lié aux contestations qu’il a plu à Plantade d’a
monceler sur la tête de Choussy. L ’arrangement est en
core consommé par le jugement en dernier ressort, du 14.
pluviôse an 6 , qui a approuvé le compte de cheptel et le
billet, qui l’a s u i v i , et rejeté le p o u v o i r de Plantade.
Ainsi les parties sont doublement dans le cas de l’art. V I
de la loi d u s thermidor an 6 , soit à raison des arnrngemens>
consommés à l’amiable, soit à raison de la sanction judi
ciaire et définitive qui leur a été donnée.
Choussy n’auroit pas lieu de craindre le résultat d’un
nouveau compte avec un homme honnête et délicat; mais
Plantade est tellement connu par sa mauvaise fo i, sa du
plicité, son esprit intrigant et chicanier; il en a donné dans
cette affaire des preuves si frappantes , qu’il faudroit con
sentir à plaider toute sa v ie , et à manger dix fois Je billet*,
pour arriver à un résultat d éfin itif.... Voile» le véritable
m otif qui détermine Choussy à ne plus entrer en lice, sur
tout aujourd’hui que les bestiaux n’existent plus, et que les
baux et les pièces ont été remis A Plantade. Comment ose-til tracasser ù ce point l’ex-fermier de Laqueulhe, lorsque
tous les coacquéreurs de Chitain, le citoyen RuetLam otte
particulièrement ^ancien fermier, du même bien, a traité*
�*
( ï 6 )
avec Choussy sur les mêmes bases, et d’après la même esti
mation que celles arrêtées avec Plantade? Aucun de ces
acquéreurs ne s’est plaint; tous ont payé l’excédant du
cheptel. Il étoit réservé à Plantade de plaider sept ans
contre son b illet, et d’employer les moyens les plus faux
et les plus viles.
>
Ün dernier trait achève de le peindre.. . . Désespérant
d’arrêter les poursuites avec sa propre saisie-arrêt, il est
allé en mendier une d’un métayer illitéré, nommé Marie
B a rg e , à qui Choussy n’a jamais rien dû. Depuis plus d’un
an , Choussy plaide contre le prête-nom de Plantade,pour
le forcer à faire connoître les motifs de cette saisie-arrêt,
faite sans titres et sans autorisation de justice.. . . Ce pré
tendu saisissant , fertile en moyens de nullité contre la
procédure, fait constamment défaut quand il s’agit de
m otiver sa saisie.. . . A peine un jugement du tribunal de
la Palisse en a-t-il prononcé la main-levée , que le prêtenom en a appelé. Intimé devant le tribunal supérieur,
cette rnarionette de Plantade refuse de déduire ses moyens.
Mais Choussy ne cessera de le rép éter, tout est jugé défi
nitivement entre lui et IMantado par les cin q premiers
jugetnens q u i o n t ,p r o n o n c é la condamnation du billet,
qui sont passés en force de chose jugée, et auxquels il
a formellement acquiescé. L e tribunal ne peut -, ni ne doit,
entrer dans aucune autre discussion ; 011 ne peut faire juger
cent fois la même chose. C'est faire injure aux tribunaux,
c'est renverser toutes les idées reçues en jurispruderice, que
de présenter des chicanes si ridicules, si injustes et si mé
prisables. L a fin de non recevoir doit seule faire justice
d >1 la fourberie de ce débiteur infidèle et-perfide.» Choussy
�( *7 )
a une trop haute idée cles/taie ns étde la probitedpstrofg.
ju r is c o n s u lte s , d o n t les noms figurent aü bas du précis
de Plantâde, pourm ’être pas convaincu qu’ils auroient
rougi de dOnrier une sorte d’approbation à ce libelle dif
famatoire 3 -s’ils eussent connu lès véritables circonstances
çt lés faits de la' cause , dont Plantade a affecté de ne pas
dire un seul ràot.
• ,• si - ! .
' ' ;.
C H O U SSY .
D E V E Z E , avoué.
N o u s soussigné, GeofïroiBonnefont l’aîné, perruquier^
et Claude Bourgeois, cordonnier, demeurant tous deux en
là commune de V ichy , certifions à tous qu’il appartiendra,
que le citoyen P la n ta d e -R a b a n o n , demeurant ci-devant en
la commune de V ich y , et actuellement en celle de SaintChristophe, a été nom m é, conjointement avec nous, miembre du comité de surveillance de V ic h y , par le citoyen
M ativet, alors membre duicomité de survéilldnce de Cusset, et ensuite délégué tant de ce comité que des représen
t a i du peuple en mission dans le département de l’A llier,
siu cornmencèmÊnt de l’an deux de la république, et qu’il
en a exercé les fonctions conjointement avec nous, et qu’il
a montré le plus grand zèle pour l’exécution des lois et
arrêtés des représentans du peuple. En foi de quoi nous
avons délivré le présent certificat. A V ich y, le 29 ventôse
an 9 de la république française. — Bon pour ce que dessus,
quoique non écrit de ma main. Sign é , B o n n e f o n t . —
J ’approuve ce que dessus, quoique non écrit de ma main..
S ign é, B o u r g e o i s .
V u bon pour la signature ci-dessus des citoyens Bonncfont et Bourgeois-
�'
Ci8)
Fait en bureau m unicipal, à V ic h y , le 29 ventôse an 9 de
la république. S ig n é, S a u r e t , maire.
J e soussigné , Germain M ativet, atteste et certifie la vé
rité des faits énoncés au présent certificat. A Cusset, ce 30
ventôse a n .9.de là république. S ig n é, M a t i v e t .
’
1
V u.bon pour la.signature ci-dessus du citoyen Mativet.
E n m airie, à Cusset, le 2 germinal an 9.de la république _
française. S ign é, B o u q u e t .
Enregistré le 9 germinal à R io m , par Poughon.
’
E x tr a it des registres de la société populaire de la com mime de Cusset, départem ent de V A llier, séance du 23
g erm in a l, deuxièm e année républicaine.
L e représentant du peuple Vernerey est entré dans la
salle des séances , au son d’une musique , etc.
L e représentant du peuple a pris la parole et a annoncé
à l’assemblée que l’objet de sa mission étoit d’organiser le
gouvernement révolutionnaire, et d’épurer les autorités
constituées, etc.
L e secrétaire du représentant est monté à la tribune; il
a exposé les principes d’après lesquels l’assem blée de v o it se
c o n d u ire p o u r a d m e ttre o u rejeter ceux qui alloient lui etre
proposés pour rem plir les places publiques, etc. Il a com
mencé par les membres du directoire du district.
D istrict.
Christophe Frcm invillc, président.
François G ivo is, agent n a tio n a l, etc.
L e secrétaire a passé aux membres du conseil du district.
�Conseil de D istrict.
Gouthier de Busset.
Plantade-Rabanon, etc.
L ’assemblée a également approuvé le choix de ces mem
bres du conseil de district, à l’exception de G ravier-R aynaud, à q u i elle n 'a pas trouvé assez d'énergie pour rem
p lir une place d' adm inistrateur, etc.
P ou r extrait conforme. L . F o r i s s i e r , secrétaire.
J e soussigné, maire de la ville de Cusset, département
d e l’A llie r, certifie que la signature ci-dessus est celle véri
table du citoyen L u c F o rissier, secrétaire de l a m airie, et
que foi doit être ajoutée aux actes qu’il signe en cette
qualité.
E n m airie, à Cusset, le 26 ventôse an 9 de la répu
blique française. S ig n é, D u s a r a y - V i g n o l l e s .
Enregistré à Riom , le 1 2 germinal an 9 , par Poughon.
A R
io m ,
de l'im prim erie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy, Jacques. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Choussy
Devéze
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé ; Contre Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire, demeurant au lieu de Chitain, commune de Saint-Christophe, département de l'Allier, appelant.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1129
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53157/BCU_Factums_G1129.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53156/BCU_Factums_G1128.pdf
e3cc567cd0cc31ddecdcce675e61d05a
PDF Text
Text
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1
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MÉMOIRE EN RÉPONSE T“
-"N
P O U R
J ean - C
laude
de
I'"‘* «ectîon.
PLANTADE - RABAN ON ,
p ro priétaire d e m e u r a n t
à
C h ita in , com m une
S a i n t - C h r i s t o p h e , a p p e la n t '
C O N T R E
J
acques
c
C H O U S S Y , géomètre, demeurant a
Cusset, intimé.
L e citoyen Rabanon, dans son précis du 14 ventôse
dernier , avoit cru devoir ne pas donner le récit tou
jours dégoûtant de la procédure immense faite contre
lui. Jacques Choussy l'accuse d’avoir dissimulé les faits
essentiels de la cause. Il faut donc en fatiguer et le tribunal
et le public. L e citoyen R abanon n’y avancera rien sans
preuve, et par la comparaison, il sera facile de découvrir
l’imposture, la perfidie, la calomnie.
L e citoyen Rabanon est bieu éloigné de plaider contre
A
�I I*.
C 2)
son b ille t, comme Jacques Choussy lui en fait le reproche
grossier. Il reconnoît et il a toujours reconnu ce b ille t,
puisqu’il a fait non seulement des offres réelles du mon
tant de ce même b ille t, mais le dépôt de somme bien
plus considérable pour se garantir des poursuites vexatoires de Jacques Choussy. Mais il réclajue contre les
causes de ce billet : mais il réclame contre une espèce
darrangement qu’on lui a arraché dans ces temps de
calamité ou le citoyen honnête étoit forcé de tout sacri
fier au sentiment de sa pi'opre conservation.
F A I T S .
L e 30 septembre 1 7 9 3 , le citoyen Rabanon devint
adjudicataire au directoire de district à Cusset, de deux
domaines appelés Joninain et Chitain , et situés dans les
environs de Cusset.
Ces deux domaines avoient été affermés au citoyen
Choussy p è r e , commissaire à te rrier,.p ar bail de 1783.
Ils étoient garnis de bestiaux à cornes et de brebis. L a
preuve en est consignée dans la lettre du citoyen Busseuil
ancien fermier (1).
( 1 ) C om m une de G en e la rd , le «a v en dém iaire , ^me. année rép u b licain e.
L e cito y e n
B
u s s e u il
,
c i-devan t ferm ier de C h it a in ,
A u citoyen P l a h t a d e -R a b a n o n , propriétaire de la maison
et domaines de Chitain et Joninain.
1
J ’ AI laissé, c i t o y e n , deux années de jouissance de m on bail,
nu c ito y e n C h o u ss y le p è r e , qui a été m o n su c ce sse u r, npre»
“avo ir renouvelé la ferme de Chitain. J ’ ai pareillement laissé les
domaines garnis de bons et beaux bestiaux ; je me rappelle trèsbien que les domaines de C lütaio et Joninain étoient com posés
�¿75*-/
C3 )
I/adversaire, fils du Fermier, éleva au citoyen Rabanon
des difficultés sans fin. Sous le règne des lois elles auroient
été bientôt écartées ; mais en l'an 2 , mais avant le g ther
m idor, elles étoient très-graves, insurmontables.
L ’une de ces difficultés avoit pour objet l’exigue des
de six paires de b œ u fs , ch a cu n d’une quantité de v a ch e s, garnis
dans la p roportion que six paires de bœufs c o m p o r te n t, les autres
bestiaux dans les mêmes proportions. Les brebis léle pour tête ;
ie3 truies ou c o ch o n s comme j e les ai reçus pour chaque domaine.
E n un m o t , j ’ai rendu à Pierre C h o u ss y la m êm e quautité, qualité
e t espèce que j’avois reçues des citoyen s L a m o tte s et D e s p e u x , et
que je devois la isse r , au term e de m on bail verbal entre le c ito y e n
Lacjueuille et m o i, plus l’excédant dont C h o u ssy le père in’a fait
raison. J e m e rappelle très-bien, c i t o y e n , qu’à l’époque de m a
so rtie , j’ai laissé tous les bestiaux en bon é t a t , et que Choussy a
eu pour moi de fort mauvais procédés. 11 a dû vo us rendre la m êm e
b r a n c h e , qualité et quantité de gros et menus b e stia u x , qu’il
avoit reçus de moi, c l tels que je les avois reçus m o i-m êm e de m on
prédécesseur, et que ce dernier fes avoit reçus des siens, et ainsi
des autres. Quant aux brebis , je les ai rendues tete pour tète, tel
que je Ie3 ai reçues. Quant aux réparations lo ca tù es , je les ai
toutes payées au citoyen Pierre Choussy, en présence des citoyens
Charles d e là Coste, et Souciions de Lalouette, et l'arrangeaient
«’ en fit à G o u g e . D ’après toutes les règles de justice et de ra iso n ,
il me paroît bien naturel qu’ il doit être obligé de vous laisser la
m ê m e quantité, espèce et qualité de tons bestiaux quM a reçus de
jnoi,et que je luiai abandonnés tels que je les avois reçus m oi-m êm e.
J ’ai laissé les étangs en bon état et bien empoissonnés ; et tout ce
qui était à ma charge, Choussy a bien su me le faire payer. Il en
a été de mêm e des prés et de lotit ce qui (.'toit à ma charge. 11
ne m’a fa it, en v é rité , a u cu n e espèce de grâce. J e l ’ ai comblé
A 2
�i v.
U )
bestiaux. L e citoyen Rabanon ne faisoit que des demandes
justes. Par cela seul, elles ne convenoient pas à Jacques
Choussy. L e citoyen Rabanon étoit déjà menacé en ger
minal an 2. Claude Bourgeois disoit à Paris : ce ,}’en ai
« encore quatre en vue. J ’ai Dumonsseau, j’ai G r a v ie r ,
de bons procédés , et lu i rûen a eu que de mauvais pour m o i,
après avoir couru ma ferm e et fo r c é à lu i céder les deux années
de mon bail. Il a gardé tous mes to n n ea u x de p ê c li e , m algré
i n o i , sous prétexte qu’ ils lui étoient nécessaires p o u r celle qu’il
avo it à f a i r e , ainsi qu’ une très-grande c u v e à recevo ir de la v e n
d a n g e , que j’avois établie dans la chapelle de Chitain , par ordre
d u c it o y e n L a q u e u ille , et que j’ai p a y é e a ux cit oyens de Creusier.
T o u s ces objets ont dû v o u s ê tre délaissés, c o m m e je les avois
r e ç u s. J e vo u s observe seulem ent que j’avois renou velé les vieux,
selon l’ usage. J ’ai laissé des volets a u x croisées donnant sur les
fossés, ferm ant et en bon é t a t , a u x croisées qui en avoient ou
a v a n t m o i ; pareillement la co rd e de la c l o c h e , le b o u c h e -fo u r .
J ’ai pareillem ent laissé un va let en fer à la p orte du m a g a sin ,
donnant vis-à-vis le ch â tea u . J ’ai pareillement laissé Je magasin
garni de crèch es et râ te lie rs, en bon état. J ’ a i pareillement laissé
dans la p ê c h e r ie , qui est-sous le g r a n d j a r d i n du ch âteau , et que
v o u s avez a c h e té e , un très-grand et beau c o f f r e , cil c h ê n e , fort,,
a v e c ses garnitures et cadenas de fer. En un m o t , c i t o y e n , j’ai
e xécuté toutes les clauses de m o n bail v e r b a l, envers le c it o y e n
L a q u c u iltc , et j’ai bien p ayé au c ito y e n Pierre C h o u ss y le p è r e ,
t o u t ce qui étoit à m a c h a rg e , c o m m e fermier. C ’est le c ito ye n
D u ro se t qui avoit fait faire le coffre de la pêcherie du ch â te a u .
Q u a n t a la cu v e que j ’ai faite et laissée, e l l e fait partie du cliâ le a u
qui vo us a été vendu. T o u t ce que je vous écris, e s t de la plus
grande e x a c titu d e , et C h o u ss y le sait aussi-bien que m oi. S a lu l
et fraternité. S ig n é, B u s s e u i l .
�( 5 )
Reynaud - Sauret et R aban on . » Déjà l’une des maisons
du citoyen Rabanon sise à Paris, avoit été comprise dans
la liste des biens d’é m ig rés, une seconde maison alloit
y être inscrite , etc. etc.
L e 29 messidor an 2 , l’adversaire écrivoit au citoyen
Rabanon : « toutes ces tracasseries ni ont rnis dans le
« cas (feu parler à notre brave représentant F o restier,
<c qui n’a pas été content de votre façon d agir, et r?i a,
« dit de vous écrire de sa p a r t, et vous invite de vous
« montrer plus accommodant; que nous n étions plus
« dans ces temps où les tracasseries étoient à to rd re
« du jo u r , etc ». ( V o y e z page 18 et 19 du précis du
citoyen Rabanon. )
L ’on c o n ç o i t combien une invitation de la p a rt à'un
représentant redouté avec raison, étoit puissante: c’étoit
un ordre absolu ; il falloit obéir, ou la réclusion et la mort.
Aussi le citoyen Rabanon ne balança-t-il plus ; il se
sentit forcé à écrire à Jacques Choussy, le 14 thermidor
an 2 , la lettre transcrite dans le précis de Jacques
Choussy, page 4. Il invita Choussy à venir ù Chitain ;
Choussy parut, et le citoyen Rabanon se soumit à ses
volontés.
Jacques Choussy faisant tant pour lui que pour son
p è re , présenta au citoyen Rabanon , un état de compte
des bestiaux, (é ta t heureusement co n servé); l’adver
saire lui remit un écrit daté du 17 ,thermidor an 2 ,
duquel il résulte, i ° . que tous les bestiau^c avoient été
estimés à 9,960 fr. assignats, prix de foire; 20. que
pour la moitié du bénéfice revenant à l’adversaire, le ci
toyen Rabanon lui compta 2; 5oo IV. en argent, (dans un
�(S)
tettips où il n y avoît que certains êtres privilégiés , et déjà
accoutumés à satisfaire leur passion, qui pussent im puné
ment parler écus et en exiger). Jacques Clioussy , dans son
précis, page 4 , dit que cette somme lui fut payée en
assignats. Mais son écrit le dém ent; son écrit dit argent.
L e citoyen llabanon fît en outre à l’adversaire un billet de
2.892 fr. 16 sous, payable en germinal an 3 , total 5,392 fr.
16 sous. Dans la discussion des moyens nous tirerons un
grand parti de ces deux pièces , (ellessont transcrites mot
pour mot à la suite du précis du citoyen Rabanon , pages
1 9 , 20 et 21 ) , nous prouverons que ce billet est le fruit
de la terreur. Noüs disons de la terreur, parce que même
après les 1 7 , 22 et 28 thermidor an 2, le représentant
F o r e s tie r è toit encore l’effroi du département de f A l l ie r ,
dont il devoit être par état, et le patron, et l’a m i, parce
qu’encore la consolante influence du 9 thermidor ne s'éloit
pas étendue jusqu’au district de Gusset, parce que le 22
thermidor an 27 Forestier rendit un arrêté , et fit partir,
le 28 du même mois , douze victimes de tout â g e , de tout
sexe, pour le tribunal de Fouquet-Thinville. Nous rap
portons l’arrêté de Forestier ; nous l’avons fait imprimer,
( pag. 22 et 23 du précis).
L e district de Gusset est celui de la république où la
tourmente révolutionnaire a régné le plus long-temps.
En l’an 3 , en l’an 4 , en l’an 5 , etc. tous les gens de bien y
étoient comprimés presque autant qu’avant le 9 thermi
dor. lie citoyen Rabanon étoit en apparence débiteur en
vers l'adversaire. Il l’éloit ostensibleirent de la somme de
2.892 fr. 16 sous, montant de son billet. Il étoil exposé
des poursuites rigoureuses. Pour les p réven ir, il lit à l ad-
�(7)
v e r s a i rn
, le 2 germinal an 3 , époque de l'échéance du
billet, un acte d’offres réelles, qui se ressent encore de
la contrainte, mais qui en dit assez , mais qui .exprime et
rappelle assez les griefs du citoyen Rabanon.
P ar cet acte, le citoyen llabanon offrit réellement
l’adversaire la somme de 2,892 fr. 16 sous, montant du
billet; il offrit de la lui p a ye r, mais ù condition, i°. que
Vadversaire lu i ju sh fiero it de sa qualité d eferm ier des
dom aines de C/iitain et de J o n m a in ; 20. que le citoyen
R a ba n on profilera il des lois annoncées su r les cheptels,
atten du, est-il dit dans cet a c te , que des circonstances
particulières Vont contraint a u x engagemens q ù il a
contractés. L e citoyen Rabanon ajouta, que le véritable
f e r m i e r , le citoyen Choussy p è r e , lu i étoit redevable de
sommes considérables sur les clauses du ba il ¿1ferm e.
Ces offres et ces conditions ne furent pas acceptées. L ’ad
versaire poursuivit le payement du montant du billet et
de quelques autres objets inutiles à détailler ici. L e 12
germinal an 3 , les parties étant au bureau de paix, le
citoyen R abanon s'en référa ¿1 son acte d’offres, du 2.
lie 22 floréal suivant, l’adversaire prit au tribunal de
Cusset, jugement par défaut contre le citoyen Rabanon.
Pierre Choussy p è re , parut ¿\ l’audience pour déclarer
qu il jia v o it aucun droit ¿1 exercer sur le cheptel des
bestiaux des dom aines C hitain et J o n in a in , dont
J a cq u es C houssy étoit le seul fe r m ie r .
t
L e citoyen Rabanon appela de ce jugement. Cet appel
fut porté au tribunal de Gannat, où l’adversaire obtint
encore défaut. L e 11 vendémiaire au 4 , lo citoyen R a-
�(8 )
fcanon y forma opposition. II y fut statué par le tribunal
civil d’A H ier, le 3 pluviôse suivant.
V o ic i ce jugement. Il importe que le tribunal prenne
la peine de le lire en son entier; parce que c'est de cette
pièce que Choussy tire une fin de non recevoir, et cria
pour prouver q u ’il est de bonne fo i, qu’il veut éclairer
la religion de ses juges (1).
(1) E n tre Jea n -C Ia u d c P la n ta d e -R a b a n o n ;
Contre Jacques Choussy , fils.
O u i , G o n t ie r , R a b a u o n conrine sou fondé de p o u v o i r , p ou r
leq uel il a c o n c lu en ce qu e son opposition sus la tte , fût reçue
a u ju gem ent aussi susdaté ; qu ’en co nséqu en ce il seroit déchargé
d e reflet d’ic e lu i, statuant au principal que la promesse du 1 7
thermidor dernier, qui est causée valeur reçue comptant, tandis
(¡ue les causes d’ icelle sont pour bénéjice de cheptel, sera déclarée
nulle et de nid effet, comme étant le fruit de l ’ erreur et de la.
surprise et consentie par ledit Rabanon à Choussy , Jils , qui
n’ auoit ni droit , ni qualité ; et à c e qu’ il s o it, en co n s é q u e n c e ,
r e n v o y é de la dem ande dudit C h o u ss y a v e c depen s, le to u t par
ju g em e n t qui sera e x é cu té en dernier r e s s o r t , suivant le consen
tem e n t prêté par ledit R abanon , p ar le jugem ent du tribunal
du 26 pluviôse dernier, et qu’ il a n'itéré à la barre. Oui Jaudart t
aussi défense r officieux et fo n d é de pouvoir dudit Choussy ,
par lequel il a co n clu à c e que ledit Habanoti lût déclaté p ure
m ent et simplement non recevable dans son opposition du 14
frim aire dernier , au jugem ent du tribunal de G a u n a t , d u 11 ven
démiaire prteedent , ce faisant que ledit jugement seroit exécuté
selon sa form e et te n e u r , et (¡ne les poursuites en eom m eucées
^croient continuées ; que ledit Hab,mon seroit co n d a m n é en tous
les d é p e n s, le to u t par ju gem ent en dernier ressort, suivant son
La
�<
( 9 )»
Ln cause du citoyen Rabanon fut mal présentée ; on lui
fit demander la nullité du billet de 2,892 fï\ 16 sous, su r
-consentement piété par le ju gem ent dudit jo u r 26 pluviôse der
n ier, et qu’ il r. itère à la barre.
L a cause plaidée par les défenseurs des p a r t ie s , Rabanon a
soutenu par l ’ organe de son défenseur, qu1étant certain qt.e la
ferm e des domaines Chitain et Joninain, desquels il était devez u
adjudicutiire de la nation , comme confisqués sur l ’ émigré
LaqucttHhe, était au nom de Choussy , père, il n’ avait pu traiter
qu’ avec l u i , et que l'euigue des bestiaux desdits biens qu’ il avait
J a it y. a erreur avic Jacques Choussy , ji/s, ainsi c^te le Li.ltl eu
promesse qui en était résu lté, devaient être annuités et regardés
comme non avenus; que (¡liant aux mitres chefs de la demande
prim livr de h partie de .la n d a r d , il 11e les contestoit pas.
J a u d a r d , pour sa p artie, a demandé ac te de l’aveu cjne f.isoit
R abanon de d e v o i r les autres chefs d e l à d e m a n d e , et a souten u
que Rabanon l ’avoit. reconnu p our fermier dudit lieu , puisque
c ’est C lio u s s v , iüs, (jui l’en a mis eu possession , que c'est a v e c
lui qu’il est venu à l’exigue des bestia ux ; (ju’il a fait ;in c o m p te
g é r e r a i ; qu’ il a a c h e t é , dudit C h o u s s y , fils, une partie de la
récolte de !a réserve de C h ita in , et diiïérens autres actes d’ un
propriétaire et d’ un fe rm ie r ; que d’ ailleurs il ne pouvoit plus
m éco u n o ître la qualité dudit C h o u s s y , fils, de fermier dndil lieu ,
puisque Pierre C h o u s s y , père , a d é cla r é , pan le jugement diid-t 8
floréal dernier , (pi’il 11’ avoit plus a u cu n s droits sur la ferme ni
les bestiaux desdits lieux, et que J a cq u e s C h o u s s y , son fils, en
¿tuil le seul fe rm ie r , lequel ju gem ent lui avoit été signifié.
Oui
le commissaire du directoire e x é cu tif en ses conclusions;
si Rabanon
pouvait ou non méconnaître la qualité de fermier de la partie de
Jaudard , des lieux dont il s’ agit; et s i , par une suite le billet
ou promesse du 18 thermidor était ou non nul j et
si Je juJa cause a présenté à juger les questions de savoir, 1
JB
�( 6 ^
Y ;'* .
( t° )
le fondem ent seulement qu il y avoit erreur et surprisse
s u r le f o n d e m e n t s e u l e m e n t , que cette erreur et cette sur\
g e m e n t rendu sur a p p e l, par le tribunal de G a n n a t, le n ven
démiaire dernier, seroit e x é c u t é , ou si au contraire / R a b a n o n
seroit déchargé de l’ effet d’ic e lu i, ainsi que de l’effet du ju ge
m e n t du 18 floréal d e r n ie r, rendu par le tribunal de C u s s e t ,
en première instance.
L e trib u n a l, considérant qu’il est co nstan t entre les parties,
que c ’est la partie de Ja udard qui a mis celle de G o n tie r en
possession des lieux d o n t il s’ a g it; co n sid éran t, que c ’est ave c la
partie de J a u d a r d , que celle de G o n t ie r est venu e à l’exigue des
bestiaux desdits lieux; considéran t, que le 1 7 therm idor der
nier ,
la partie de G o n tie r a fait un co m p te ave c celle de
Jaudard,
du
profit desdits bestiaux et d’autres objets ; que
R a b a n o n a reçu la qu itta n ce des profits des bestiaux dudit
C h o u s s y fils, c o m m e fermier dudit lie u , et qu’il a donné le
billet dont il s’a g it, audit C h o u s s y , aussi c o m m e ferm ier; c o n
sidérant, que la partie de G o n tie r a m êm e ach eté d e celle de
J a u d a r d , la m oitié de la récolte qui lui revenoit c o m m e fer
m ier de la réserve dudit lieu de Chitain ; et qu’il a
d ’ailleurs
r e ç u différentes choses dudit C h o u ss y fils, venant de la ferme
desdits biens; considéran t, que la partie de G o n tie r a reçu de
celle de J a u d a r d , les baux et obligations de cheptel desdits
biens, en s’ obligeant d’en aider la partie de Ja u d a rd , lorsqu’elle
en auroit besoin; considérant, que la partie de Confier n’ a pas
f a i t tous ccs actes par erreur et surprise, puisque c'est elle qui
a provoqué le compte général et les arrangemens dont il s’ a g it ,
par une missive adressée à Choussy Jils.
Considérant, que Pierre Choussy père , a déclaré par ju ge
ment du iB floréal dernier , n’ avoir aucun droit à exercer sur
la ferme ni les bestiaux desdits lie u x , el que son fils Ja cq u e s
C h o u s s y , eu étoit seul fe rm ie r , et que d'après cette déclaration
i
�( ”
)
prise dérivaient de ce que Tadversaire ii étoit pas le f e r .
jif’er de C hitain et Jo n in a in . Aussi le citoyen Rabanon
succomba dans son opposition.
que la partie de Confier ne peut pas méconnaître, puisque le
jugement lu i a été signifié le 4 prairial aussi dernier, et se pouvo it co n va in cre qu’il avo it valablement traité a v e c la partie de
J a u d a r d , et qu’ elle ne p o u v o it plus être inquiétée par le père
C h o u s s y ; considérant, que d’après tous ces actes la partie de
G o n lic r ne peu t et 11e p o u v o it m é co n n o ître la qualité de fer
mier de la partie de J a u d a r d , desdits li e u x , et que par c o n
séquent le billet ou promesse dont il s’agit , ne peut être argué
de nullité, ni c o m m e étant fait par erreur et surprise; consi
dérant enlin , que la p arue de G o n t i e r ' a déclaré 11e pas c o n
tester les autres chefs de demande , conten an t les prétentions
de la partie de J a u d a r d , et que les parties ont consenti à t i r e
jugées en dernier ressort par le tribunal.
L e tribnual jugeant en dernier res ort, sans s'arrêter ni avoir
égard aux moyens de nullité, opposés par ta partie de Gantier,
contre le billet ou promesse du \~j thermidor dernier, et contre
les opérations qui ont précédé, déclare la partie de G o n t i e r ,
p urem ent et simplement non recevable dans son opposition du
14
iiiuiriire d e r n ie r , au jugem ent rendu par le tribunal de
G a n n a t , Je 11 vendémiaire p récéden t, sur l’appel d ’un juge
m ent du tribunal de C u s s e t , du 18 floréal dernier; o r d o n n e ,
quCT lesdils jugem ens seront exécutés selon leur for/ne et teneur,
et que les poursuites en co n sé q u en ce , seront co n tin u é es , c o n
dam ne la partie de G o n tie r aux dépens, l'a it et jugé à M o u lin s ,
l’audience du tribunal civil du département de l’ Allicr tenante,
pardevant nous Joseph P ir o n , D u llo q u e t, D e l a r e , C oinclion et
V ille m o in c ,
juges audit
tribnual, le 3 p lu v iô se , f a n 4 de la
république une et indivisible.
B a
�( 12 )
Depuis, vexation sur vexation de la part de l’adversaire
contre le citoyen Rahanon ; depuis, résistance égale, résis
tance constante de Ja part du citoyen Rabanon. Tel est le
déplorable effet de l’injustice ; celui qui en profite, est
très-ardent dans l’attaque; celui qui en est victime, est
aussi très-ferme dans sa défense. Beaucoup de temps a été
employé par les deux parties à se regarder, à incidenter.
Enfin a paru la lumière ; le citoyen Rabanon a été éclairé.
En l’an 6 , le citoyen Rabanon avoit dem andé, contre
l’adversaire , raison des bcvtiaux : sa demande étoit du
5 fructidor an 6 ; elle embrassoit encore d'autres objets.
P o u r qu'on ne la défigure plus, nous la mettons sous les
yeu x du tribunal (i).
(i) L 'a n six de la république fran çaise, et le cinq f r u c t i d o r , a
là requête de Je a n -C Ia u d e R a b a n o n , soussigné, m e suis trans
porté au dom icile du c it o y e n J a c q u e s C h o u s s y , etc.
7°. l a somme de six cent soixante-dix-huit fran cs , pour cent
treize brebis ou moutons , que ledit Choussy a fa it payer injus
tement audit Plantade-Rabanon , et qu'il dei'oit lu i remettre par
la fo rce de l'usage et de la ju stic e , tête pour tête, sans les argen
ter , comme il les a reçus de son prëaécesseur, sans les payer ,
comme son devancier les avoit aussi reçus de Laqueuille , tête pour
tête, et sans p a y e m e n t , c o m m e C h o u ssy les a donnés aux m ét a y e r s d e C h ita in , ainsi qu’il résulte de leurs b a u x , passés d evant
C a q u e t , n o ta iie , c o m m e lesdits m é ta ye rs les lui auroient ren
dus et me les re m e ttro n t; et tels enfin qu’il a dû et doit nie les
laisser tete p our t ê t e , sauf la valeur supplémentaire du n o m b r e ,
s’j! en existoil à sa sortie prétendue de fe rm e , et qui lui est offerte.
8°. Pour avoir dudit Jacques Choussy non seulement les actes
d’appréciation d* s gros bestiaux, mais encore les états des brebis
ou moutons qui lu i ont été remis par son prédécesseur , afin
�C 13 )
Choussy fut déconcerté ; cette demande l ’éiourdit : l'ac
tion de la justice le pressoit. Pour s y soustraire momen
tanément, il se réfugia dans un moyen de nullité de forme.
Cette nullité lui réussit; elle emporta l’exploit du 5 fruc
tidor an 6 , mais elle n’emporta pas le fond. Nous prions le
tribunal de lire le jugement rendu sur ce point au tri
bunal de Moulins, le 14 fructidor an 6 (1).
d’ éclairer la religion des juges sur les doubles emplois et les injus
tices consacrées par ledit Choussy, lors de notre arrêté de compte
du 1 7 thermidor an 2 , qui sera mis sous les yeux du magistrat,
et desquelles pièces il doit me justijier et m’ aider pour me con
vaincre qu’ il m’ a remis, au terme de son bail, le même nombre
et la même espèce de chose dont il étoit chargé , pour les laisser
à sa sortie, comme il les a reçus du précédent fermier. P age 4 ,
fo l. verso.
90. Pour que ledit Jacques Choussy fa sse raison audit Plan fadeRabanon, des fa u x calculs et erreurs matérielles commis dans
le bordereau qu’ il lu i a présenté, et sur lequel il a été fa it le
compte du 1 7 thermidor an 2 , et le billet de 2,892 fr. 16 sousÿ
attenduqu’ il est démontré par une opération simple et méthodique,
qu’ il y a une erreur grossière de 2,027 f r'
io°. Sous toutes les réserves de droit, dom m ages-intérêts, répé
tition de réparations lo c a tiv e s , d é g r a d a t io n , d é té r io r a tio n ,
prévues et signalées par son bail p r é c it é , remise de bestiaux , con
formément aux clauses de ce même acte, et aux airêtés du comité
de salut public, lois relatives aux délaissemens de cheptel, de
ferm ier à propriétaire, et sous les conditions apposées à l'exploit
d’ (ffres ci-devant rappelé.
(1) E n tre Jean-Claude l ’ Iantade-Rahanon :
Contre Jacques Choussy.
O u i G a y , p our le demandeur , et Jaudard p o u r le défen-
�V
r
( *4 )
Enfin après avoir passé au bureau de p aix, le 9 p lu
viôse an 7 , le citoyen Rabanon fit assigner l’adversaire
d e u r , présent à l’audience; ensemble le cito y e n M ic h e l, ju g e ,
faisant fon ction p our le substitut du commissaire du directoire
e xécu tif en ses conclusions-.
11 s’agit avant tout de statuer sur la nullité opposée par le
d é f e n ie u r , e on tre l’assignation à lui donnée , sur le fondem ent
que la copie qui lui a été donnée à son d o m ic ile , ne co ntient
a u c u n e mention de la personne à laquelle elle a élé laissée.
L a question est de savoir si ce défaut de mention opère la
nullité de la demande.
Con sid érant qu’aux term es de l’article trois du titre deux de
l’ ordonnance de mil sept cen t s o ix a n t e - s e p l, d o n t leslites dis
positions n’ ont point été a b r o g é e s, il doit être fait m e n tio n , en
l’ original et en la copie , de l’exploit d’ajournem ent des personnes
auxquelles ils a u ro n t été laissés, à peine de nullité et d’am ende
de vingt fr. co n tre l’huistier, attendu (pie dans la copie donnée
à C h o u ss y de l’assgnation du 5 de ce m o is , 011 ne tro uve a u cu n e
m ention de la personne à qui elle a été laissée.
L e tribunal jugeant en premier r e s s o r t , déclare l’assignation
donnée à la requête du d e m a n d e u r , au d é fe n d e u r, par Biesse ,
ln iissie r , le 5 de ce m o is , n u lle , co n dam n e Plantade-Ilahanon
a u x dépens liquidés à vingt-deux f r . , ensemble au c o û t et lev».c
du présent jugem ent.
Et. statuant sur le réquisitoire* du substitut du commissaire du
directoire exécu tif, condîimtie l ’huissier B ie s s e , qui a posé lad.te
assign ation, à l’am ende de vingt Ir.
J'ait et jugé à ÎMoulin-î, l’an lietice du tribunal <¡vil t e r r n t c ,
j n relevai H n o m . 1; cqties Baudinot , Pelaire . llossigneil, N u fo u r,
.Armet et T i b a i r l , juges c l pivsi lent dudit tribunal, le 14 fr u c
tidor an six de la république lraneaû>c, une c l indivisible.
�( 16 )
J
au tribunal d’allier. i° . L e citoyen Rabanon conclut à
être restitué contre son l)illet du 17 thermidor an 2 , et
contre le simulacre d'arrangement du même jo u r, remis
y.ar l’adversaire au citoyen Rabanon. 20. L e citoyen R a
banon demanda aussi la restitution de' la somme de
2.500 fr. payée à l’adversaire par le citoyen Rabanon le
17 thermidor an 2 , avec intérêts. 30. L e cit. Rabanon
demanda encore compte des bestiaux, suivant les bases
déterminées par la loi du 2 thermidor an 6 , et autres,
sur cette matière. L e citoyen Rabanon déclara qu’il se
désistoit de toutes demandes q u 'il a u ra itform ées contre
ledit Ja cq u es C h o u ssy , en ce q u elles seroient contraires
a u x différât/s chefs de celles q u i l vient de motiver et
f o r m e r : ce sont les termes de sou exploit.
Comme l’adversaire pouvoit reprocher au cit. Rabanon
de plaider pour éloigner le payement, s’il pouvoit devoir,
le citoyen Rabanon déposa, le 24 ventôse suivant, ès
mains du citoyen Gontier , notaire à M olle, la somme de
1. 5 00 fr. é c u s, et aux conditions apposées en l’acte du
2 germinal an 3. Il en fut dressé acte, qui fut signifié le
lendemain à l’adversaire.
L e 17 iloréal an 7 , l’adversaire a obtenu contre le
citoyen Rabanon sentence par défaut, par laquelle le dé
part du citoyen Rabanon, quant à ses demandes précé
dentes, a été homologué , et le citoyen Rabanon a été
déclaré non recevable en celles du 9 pluviôse an 7.
Sur son opposition à cette sentence, le cit. Rabanon y
a été déclaré non recevable p a r a u t r e sentence du u mes
sidor su ivan t, par le motif bien étrange que celle du
17 iloréal précédent ayant été rendue à tour de r ô le , il
n’y avoit pas lieu
opposition.
�(
1
6
)
Les 24 vendémiaire et 9 brumaire an 9 , le citoyen
Rabanon a appelé des deux sentences.
L e 2Ô germ inal, Choussy a pris défaut contre le citoyen
Rabanon : celui-ci y a formé opposition le 6 iloréal ; il a
demandé en même temps la suppression du précis signifié
par Choussy. Ce précis est un libelle.
M O Y E N S .
L a sentence du n messidor an 7 ne doit pas nous oc
cuper beaucoup. Il seroit ici bien ridicule do prétendre
encore qu’en l’an 7 un jugement par d éfa u t, rendu à tour
de rôle par un tribunal jugeant à la charge de l’appel ,
ne fût pas susceptible d’opposition. Venons-en donc à la
sentence par défaut du 17 floréal précédent-: cette partie
de la cause donne lieu aux questions suivantes :
, ’
i°. L e citoyen Rabanon est-il recevable en ses de
mandes ?
20. L e citoyen Rabanon est-il dans le cas de la resti
tution , contre l’espèce d’arrangement fait entre lui et
l’adversaire le 17 thermidor an z ?
30. L e citoyen R a b a n o n est-il aujourd’hui en droit de
poursuivre la restitution de la sonunc de 2,5oo francs,
payée A l’adversaire le 17 thermidor an 2 , avec intérêts,
à compter du même jo u r?
4°. L e citoyen Rabanon est-il recevable et fondé à de
mander raison des bestiaux des domaines de Chitain et
Joninain ?
Nous allons tru"terc«iLquestionsséparément; mais aupa
ravant, il faut proposer quelques explications contre la
première
�C r7 )
p re m iè re disposition de la sentence d u 17 floréal an 7 /
P a r cette p r e m iè r e d is p o s itio n , les p rem iers juges o n t
adm is les conclusions judiciaires de l’adversaire ; ils o n t
h o m o lo g u é le dép art d u citoyen R a b a n o n , quant à ses
dem andes précédentes.
.
•
M ais ceci est tr o p v a g u e ; l’on p o u rro it en in d u ire q u e
le d ép art du cito y e n R a b a n o n est absolu , tandis q u ’ il est
p u re m e n t re latif: voici p o u rq u o i. L ’on dit que le désis
tem ent du citoyen R a b a n o n est p u re m e n t r e la t if , p arce
q u ’il n’a entendu le ra p p o rte r q u ’au x conclusions q u ’il
a v o it prises p o u r le m ê m e objet dans des actes antérieurs
à celui du 9 p lu viôse an 7 : aussi a -t-il d i t , en ce quelles
seraient contraires a u x différens chefs de celles q u i l
vient de form er. P a r là , le citoyen R a b a n o n a v o u lu dire
q u 'il n’insistoit plus sur ce q u i , dans scs dem andes p r é
c é d e n te s , seroit contraire à ses nouvelles conclusions.
M ais il n’a jamais eu la pensée de re n o n ce r a u x autres
chefs de d e m a n d e , tels q u e ce u x de la p ortion de fe r
m a g e à lui r e v e n a n t , etc. A
cet é g a r d , il y a instance
p articu lière q u ’il v a p o u rs u iv re incessamment.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il recevable en ses demandes
du 9 pluviôse an 7 ?
Ici l’adversaire op pose au citoyen R a b a n o n , la chose
j u g é e , les ju gem en s rendu s à C u sset, à Gannnt et à
M o u lin s , les 22 floréal an 3 , 11 ve n d é m ia ire et 3 p lu
viôse au 4 ; il s’appuie p rin cip a le m en t sur le ju g e m e n t
G
�( 18 )
du 3 pluviôse an 4 ; il invoque la maxime non 1rs in
idem.
P o u r juger du mérite de l’objection, il faut se r a p - .
peler l’objet de la contestation d’alors; il faut se rappeler
encore le système de défense adopté pour le compte
du citoyen Rabanon.
L ’adversaire demandoit le payement de la somme de
2,892 fr. 16 sous, montant du billet du cit. Rabanon.
Quant à la défense du citoyen R a b a n o n , il faut ne
pas s’arrêter à ce qui a été fait à Cusset et à G a n n a t,
puisque les jugem ens q u i y ont été rendus , Vont été
p a r d éfa u t, il faut se porter au jugement rendu i\
M oulins, le 3 pluviôse an 4. O r , au tribunal de M oulins,
au nom du citoyen R abanon, on demanda la nullité
du b ille t, par le motif seul que l’adversaire n’étoit pas
le vrai fermier de C h itain, et qu’ainsi il y avoit eu er
reur et surprise : cette demande en nullité fut rejetée.
Voilà ce qui a été jugé le 3 pluviôse an 4 ; il a été jugé
qu’il n’y avoit ni erreur ni surprise, quoique dans le
principe Pierre Choussy père seul fût fermier.
3VIais alors, il n’étoit pas question c o m m e aujourd’hui,
de la validité de toutes les parties de l'arrangement}
mais alors, il n’étoit pas question comme aujourd’ h u i,
d’une demande; en restitution contre l’intégralité de cet
arrangement pour cause de fo rce et crainte grave,
pour cause de dot personnel de la part de ¿’ adversaire,
p o u r cause d'erreur de com pte, double et f a u x emploi.
P a r le jugem ent du 3 pluviôse an 4 , le tribunal
d 'A llie r n a. pas statué n i pu statuer sur ces difficultés
infinim ent lég itim es, p u is q ii elles ne lu i ont pas été
�/o(
C T9 )
-présentées : ce n e s t donc pas le lieu de la jn a xim e
non nobis in idem.
L ’adversaire, dans son précis (p a g e i 5 ) , excipe
d’un jugement du 14 pluviôse an 6 , q u i, dit-il, a ap~
prouvé le compte de cheptels , et le billet. Mais l’on ne
connoît aucun jugement à cette date : Choussy ne l a
point signifié. Il y a probablement méprise sur ce
point; il est vraisemblable que l’on a voulu parler de
celui du 3 pluviôse an 4.
L ’adversaire ne peut pas se prévaloir des actes subséquens.
L e citoyen Rabanon s’est toujours récrié contre là
contrainte violente, exercée contre lu i; il n’a pas signifié
un acte, où il n’ait protesté de toutes ses forces, et au
tant que les circonstances fâcheuses dans lesquelles nous
nous sommes trouvés, le lui ont permis. Ses réclama
tions ont été graduées sur le plus ou le moins de liberté
civile adont il a 'joui.
Jacques Choussy appelle en vain à son secours, le
jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4 , et la
sentence du 14 prairial an 6 , par laquelle il est
prouvé que le citoyen Rabanon avoit demandé et obtenu
un délai pour payer le montant du billet du 17 ther
midor an 2 , en vertu des lois nouvelles sur les h’ansactions.
i°. L e jugement en dernier ressort du 3 pluviôse an 4,
n'a pas jugé la question ; nous venons de le prouver.
20.
La sentence du 14 prairial an 6 , ne signifie rien
dans les circonstances. Personne n’a encore oublié qu’en
l’an 6 , l’oppression directoriale pesoit principalement
C 2
*t'\
�76%
y \
C 20 )
dans l’arrondisscmcnt de Cusset. L à , comme aupara
v a n t, les personnes honnêtes étoient froissées, terrorifiées : d’ailleurs, en donnant aujourd’hui à l’arrangement
fait par Choussy lui-m êm e, le 17 thermidor an 2 , la
f o r c e (Tune transaction , il y auroit également lieu à
réclam ation , parce que Tordonnance de i 56 o, ne m ain
tient que les transactions f a it e s sans dol et sans con
trainte , et q u ic i il y a eu contrainte et dol.
S e c o n d e
q
u
e
s
t
i
o
n
.
L e citoyen R a b a n o n est-il dans le cas de la restitu
tion contre Tespèce d'arrangement f a i t entre lu i et
Tadversaire, le 17 therm idor an 2 ?
C ’est ici le lieu d’analiser les principes les plus certains
en restitution, et d’en faire de suite l’application dans le
môme ordre.
L ’on est restitué contre tout engagement o \ il y a eu
crainte : ait p r œ to r , quod metûs causa gvztum e n t
ration non habebo. L . 1. il’, quod met. caus.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
force : S i quis v i compulsus aliquid f e c i t , per hoc ediction restituitur. L. 3. cod.
L ’on est restitué contre tout engagement où il y a eu
dol.
Nos ordonnances ( 1 ) , en particulier celle de François
(1) C e l l e parlic est tirée m ot p ou r m ot du précis du cito ye n
R a b a n o n , pag. y et 10. N ous l’avons fait ainsi, p our cjue l’attentiou du lecteur ne soit pus détournée.
�( ' 21.)
1er. de l'année i5,39 , ont adopté les principes du droit
romain et admis la restitution pour cause d'erreur de fait,
de d o l , de violence et de.crainte; et non seulement notre
jurisprudence s y est conformée, et nos livres sont pleins
d’arrêts qui ont détruit les engagemens que la crainte et
la violence ont fait contracter; mais cette même juris
prudence avoit été plus loin ; elle a voit consacré les prin
cipes d’un titre du code théodosien intitulé: D e infirm andis lus quœ sub tirannide acta sant. Nous trouvons
dans les réponses de Charondas , un arrêt du mois de
janvier 1 6 9 7 , par lequel il fut jugé que des ventes d’hé
ritages faites durant les troubles des guerres civiles et temps
de calamité, étoient sujettes à rescision, sans même s’en
quérir de la vilité du prix. L . 9 , rép. 25 . Nous trouvons
dans Mornac un arrêt par lequel un débiteur qui s’ étoit
fait faire remise de sa dette , pendant le temps de la ligue,
par son créancier , lorsque les troubles furent appaisés,
fut néanmoins condamné à payer la dette, ad. le g .z .ff.
de calum niatoribus ; et c’est à l’occasion de cet arrêt que
Mornac cite le titre du code théodosien intitulé : D e la,
nécessité de détruire les actes passés dans les temps de
tyrannie ; mais quels temps furent plus calamiteux ! quels
temps furent plus tyranniques, plus meurtriers que ceux
de l’an 2 dans le district de Cusset ?
Un autre principe écrit dans l'ordonnance de 1667 9
s e m b l e fait pour la cause : l'art. 21 du tit. 29 d it, en
parlant des redditions de compte: s'il y a des ei'reuis ,
des om issions de recette ou f a u x em p loi, les parties
pourront en J o r m er demande.
Tous ces vices 11e se couvrent point par le silence de
�( zz )
*a partie ldsde , à moins que les parties n’aient ensuite
traité expressément sur ces mêmes vices.
Quant à la crainte , il faut q u ’elle soit grave. Il faut
metus instantis vel J 'u tu ri p ericu li causa m entis trepidatione. L . i . ff. quod inet. caus. D om at, liv. i , titre 18 ,
section 2, n.° 3 , dit : « Si 011 la met (la personne effrayée)
« en péril de quelque mal dont la juste crainte l’oblige
« à un consentement forcé ; ce consentement sera sans
« effet. »
A u 17 thermidor an 2 , il y avoit contre le citoyen
Rabanon, metus instantes, ou tout au m oins, f u t u r i
p ericu li causa. Il y avoit m entis trepidatio. L e citoyen
Rabanon étoit dénoncé dès le mois de germinal an 2 ;
B o u rg eo is, l’un des principaux ennemis du citoyen Raba
n o n , disoit à Paris qu’ il seroit encore l’un de ceux des
tinés à appaiser la soif ardente des persécuteurs. La
preuve en est écrite dans une information faite à la
société épuratoire de V ich y , le seize brumaire an 3.
( Voyez page 17 du précis du citoyen Rabanon. ) L e
29 messidor an 2, l’adversaire écrivoit au citoyen Rabiiuon
qu’il avoit parlé de sa résista n ce, des difficultés q u 'il opposoit ; que le représentant F orestier 11’étoit pas content
de sa façon d’agir ; que ce brave représentant l’invitoit
à se montrer plus accommodant, et que ce n éloit plus la
temps où les tracasseries étaient à f ordre du jour. ( V o y.
page 18 du précis du citoyen Rabanon ). Déjà une des
maisons que le citoyen Rabanon avoit î\ P aris, avoit été
comprise dan-» la liste des biens des émigrés.
L e sens naturel du langage de Clioussy saute aux yeux.
Il signifie, que si le citoyen Rabanon 11e se rondoit pas
�/ o J '
( 23 )
tiux vues de Fadversaire, tout iniques qu’elles étoîent,
le sort commun d’alors attendoit le citoyen Rabanon ;
d’abord visites, menaces, nouvelle dénonciation , réclu
sion , d puis la mort. Il y avoit dès lors , le metus
p ericu liin sta n tis v e lfu tu r i, mentis trepidatio.T^c citoyen.
Rabanon n’avoit pas à s’y méprendre, puisqu'il y avoit
une dénonciation form elle, à raison de la résistance qu’il
opposoit i\ Choussy, et de sa confiance dans l’attente de
la loi du 17 fructidor, en faveur des propriétaires contre
les fermiers.
Aussi le citoyen Rabanon souscrivit-il le 17 thermidor
an 2 , à tout ce que l’adversaire exigea de lui. L e citoyen
Rabanon n’examina rien. La m entis trepidatio étoit si
grande en lui, qu’il en fait l’aveu : l’entendement l’aban
donna. Il fit et paya tout ce que l’on voulut; trop heu
reux en lo u vo ya n t, de gagner quelques instans de plus.
L ’adversaire répond en vain qu’au 2 thermidor an 2 ,
( page 9 de son p ré cis), l’alégresse universelle agitoit tous
les Français; que la tète du premier tyran de la France
étoit tom bée, et qu’ainsi le citoyen Rabanon n’avoit plus
de sujets de crainte.
A u 17 thermidor an 2 , et long-temps après, la terreur
régnoit àC usset, comme avant le 9 thermidor; eh bien,
la stupeur, le deuil, y planoient sur toutes les têtes. Rien
ne le prouvoit plus que l’arrêté de Forestier du 22. Par
cet arrêté , ce représenta?it envoyoit encore au tribunal
révolutionnaire, douze citoyens honnêtes de tout âge , de
tout sexe , qui partirent des prisons de Cusset et Moulins,
le 28 thermidor, et ne sont revenus de celles de Paris,
que le i . cr brumaire an 3 , après avoir justifié de leur
�(H )
innocence. L e s Dussaray-Vignoles, les B o u q u e t - D e s c li a u x ,
les Charles, les Combes et autres, ne sont sortis cles
prisons de C u sset, q u ’à la fin de brumaire et frimaire
an 3. Les vertus étoient alors des crimes. Ce même
arrêté réservoit pour un autre e n vo i, deux magistrats du
bailliage de Cusset, dont l’un honore le tribunal d’appel
par des qualités bien estimables , et trois autres victimes
signalées par le même arrêté. L e 9 thermidor et autres
jours mémorables , n’avoient fait qu'augmenter, l’au
dace et la fureur des illuminés. La pièce imprimée
ci - dessous ( 1 ) , et plusieurs autres , le prouvent.
(1) Extrait d'une adresse présentée à rassemblée nationale , en
Van 3 , par les citoyens de Cusset et de Vichy.
L e sage et vertueux Vernerey , e n v o y é en mission dans le dé
p arte m e n t de l’A Hier, clans le mois de germ inal dernier, versoit le heaum e de la consolation dans les cœ urs des m alheureux
liabitans de ce district ; les principes de justice et d’hum anité ,
m é co n n u s depuis lo n g -te m p s, étoient rappelés; des cito ye n s inn o c e n s , entassés en foule dans les prisons, r e c o u v r o i e n t la l i b e r t é :
ch a cu n c r u t ê t r e à l’époque du bonlicur. V ain e illusion! Vernerey
quitte le département, laissant après lu i Forestier, pour le mal
heur de ses concitoyens, et de ceux à qui il en voulait. Bientôt
la terreur ressuscita; ceux qui avaient recouvré leur liberté , f u
rent traînés de nouveau dans les maisons d'arrêt. Dans l ’espace
d ’un mois toutes les traces du bien que le vertueux Vernerey
avoit laissées , furent entièrement effacées, e t notre district se
vit plus q u e jamais l e théâtre de mille ve x a tio n s; tout se passoit. sous les y e u x de F o r e stie r , à ijni il an ro it été si facile de
maintenir le bien (ju’avoit lait son collègue. Mois <juel co n C 'v ’ t
�ÏO V
(
)
Ces pièces ne sont malheureusement que trop ex
pressives. D ’ailleurs Choussy , qui a tant de m ém oire,
traste dans la co n d u ite de ces deux
représentais ! l ’un avait
passé comme une divinité bienfaisante , pour réparer les maux
que la tyrannie nous avoit causés: Vautre comme le démon des
tructeur, ne paroît que pour jeter la désolation dans nos âmes t
et préparer de nouvelles victimes à la mort. Vernerey avant le
9 thermidor, ne voit dans le district, que des innocens persé
cutés ,* il les rend à la liberté. Forestier, après le 9 thermidor, ne
voit dans la plupart de ces mêmes citoyens , que des conspira
teurs, des contre-révolutionnaires: il les envoie chargés de fers ,
au tribunal révolutionnaire, et ils obtiennent tous , quelque
temps après, leur liberté du comité de sûreté générale. Vernerey,
sous le règne de Robespierre, préchoit la justice et l ’ humanité ;
il exhortait à ne pas fa ir e par des vexations injustes, des en
nemis à la chose publique. Forestier ranimait la terreur: il di
soit qu’ il fa lla it encore se défaire de six têtes à Cusset; que rien
n’ étoit plus beau, plus m ajestueux , que le tribunal révolution
naire : qu'on y passoit en revue la fou le immense des accusés,
avec une rapidité incroyable, et que les jurés faisoient / e u de
file ; enjin, que le tribunal révolutionnaire lui paroissoit au-des~
sus de la convention. I l se plaignoit vivement, de ce que deux
citoyens qui depuis ont obtenu leur liberté du comité de sûreté
générale , avoient échappé à la guillotine de Lyon; m ais , disoiti l } Us n'échapperont pas à celle de Paris . A v e c des principes si
o p p o s é s , des mesures si co n tra ires, eût-on dit que ces deux rcprésentans siégeoient dans le m êm e s é n a t, aspiroieut au m ê m e
b u t.
C ito y e n s représentans, pourrons-nous nous e m p ê ch e r de nous
livrer à de justes plaint es co n tre F o re stie r, el le regarder c o m m e
le prem ier m o t e u r de tou s les m aux qui nous ont affligés pen-
D
f-
�c
2
6
}
n’a pas oublié, ( mais il ne voudra pas le dire ) qu’en
l’an 5 , il y .eut à Gusset un mouvement violent, tel que
dant un a n , « lorsque nous savons qu’ il s’ est vanté d’ avoir
« f a i t guillotiner Dujfort ; lorsque nous savons qu’ après le 9
« thermidor, il a cherché à ranimer le courage de nos terro« ristes, et les entretenir de l ’ espoir de voir bientôt reparoître
« le règne de la tyrannie, soit en écrivant à la société populaire.
« de Cusset, le 18 fructidor dernier : « Croyez que l ’ esprit public
« va reprendre son énergie première » , soit en écrivant que la
convention nationale alloit fa ir e poursuivre les individus qu’ il
avoit renvoyés, au tribunal révolutionnaire, et q u e le co m ité de
s u « t é générale venoit de m e ttre en liberté; a j o u t a n t , que la
convention nationale alloit reprendre une attitude capable d’ en
imposer à Varistocratie.
L e s mânes d’ une foule de victim es in n o ce n tes, d o n t le sang
crie encore ven g ea n ce, s’ élèveront dans tou s les tem ps p ou r co n
dam ner c e tte assertion aussi fausse que révo lta n te : suivent centsoixante-quinze signatures, etc.
J e soussigné, ancien adm inistrateur au directoire du district
de Cusset, certifieàqui il appartiendra, avoir été envoyé au tribunal
révolutionnaire de Paris , le 28 thermidor an 2 , en v e r tu d’un
arrêté de F o r e s t ie r , représentant du peuple alors , en date du 22
du même mois, et n’ être sorti des prisons de Paris que le i er. bru
maire an^, après avoir été interrogé et avoir justifié de mon inno
cence , ainsi que les onze autres victimes dénommées par Varrêté
précité, qui étaient parties le même jour que moi, soit des prisons
de Cusset, soit de celles de Moulins. E n foi de quoi j’ai signé le
présent p ou r servir et valoir c e que de raison. F a it à M a g n ct ,
le 29 germ inal an 9 de la république française. Signé P . A .
M e i l i i e u v a t , adjoint.
V u bon p our la signature ci-dessus du c it o y e n M e iliie u v a t,
�( 27 )
les deux partis étoient armés et en présence ; et une
-personne prudente ayant fa it rem arquer à c e r ta in jiîs ,
que J a cq u es C houssy connoit b ie n , qii il était en opposition avec son p è r e , lu i dit : vous voulez donc tirer
su r votre père ,* l e j î l s répondit, mon père est à son
p o s te , je suis au m ien.
Choussy dit lui-m em e, page 3 de son précis, et dans
sa lettre, que le citoyen R a ba n on differoit, q u i l lu i avoit
demandé divers d é la is , q u i l Vavoit obligé à f a i r e des
voyages inutiles et fa tig a n s , et qu’après la lettre du 29
messidor, le citoyen R a ba n on garda le silence pendant
encore qu in ze jo u rs.
T o u t ce ci sig n ijie, caractérise une obsession cons
tante de la part de C houssy contre le citoyen R a b a
non , et une résistance opiniâtre de ce de} nier à une
oppression raisonnée et soutenue. L a vérité déchire
donc le voile astucieux dont Jacques Choussy voudroit
se couvrir. Toutes ces démonstrations , qui lui échappent
forcément, démontrent la nécessité d e là réponse du cit.
Rabanon , du 14 thermidor.
Jacques Choussy en impose encore, en disant ( pag. 10
de son précis ) q u e F o r e s t ie r n e st que s o j i a llié à un
adjoint à la mairie de c e t te c o m m u n e . A M a g n e t , le 29 germinal
an 9. Signé, C
haules
L acoste.
V isé p o u r légalisation de la signature du citoyen C h arlesL a co ste ,
m aire d e là co m m u n e de M a g n e t , par le sous-préfet du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’AIlicr, à la Palisse, le 3 floréal
a n p d e la république française. S ig n é , C
à la Palisse, le 9 floréal an 9. Signé V
ossonn ier
alleto n
. . . Enregistré
.
D
î
�C z* )
degré f o r t éloigné. Jacques Ckoussy sent ici le besoin d’un
mensonge grossier , et la nécessité d'en imposer aux juges
et aux lecteurs : m ais Ja cq u es C houssy en est le neveu
à la mode de Bretagne ; ce fait est prouvé par la pièce
matérielle ci-jointe ( i ). Quelle croyance donner à un
hom m e q u i m ent a u ssi effrontém ent , et à toutes les
-pages ! __
Que malgré cette parenté, le bail de Choussy père ait
été condamné aux flammes ; que cette condamnation ait
été prononcée par le département d’A l l ie r , il n’en résulte
qu’une conséquence de justice forcée en f a v e u r du citoyen
Rabanon , et que les juges saisiront bien en repoussant la
fausseté de cette autre assertion de Jacques Choussy.
(i)
J e soussigné, m aire de la c o m m u n e de C u s s e t, certifie à
qui i! ap p a rtien d ra, que la citoyenne A n n e Touset, née le 28
lévrier 1 7 6 0 , sur c e tte c o m m u n e , et mariée a u c ito y e n Ja cq u e s
C h o u s s y , d e l à m êm e c o m m u n e , est nièce, à la mode de Bretagne,
du citcycruForestier, ci-devant représentant du peuple, en l'an 2,
par L o u ise D esbrest, sa m è r e , mariée en 1^66, a F r a n ç o i s T o u s e t ;
laquelle L ouise Desbrest étoit cousine-germ aine dudit Forestier,
c o m m e enfant l’un et l’autre de frère et sœur.
E n foi de q u o i , j’ai délivré le présent p o u r servir et yaluir
c e que de raison. A C u s s e t, ce 2 floréal an 9.
Signé,
D u ssa r a y- V ig n o les,
maire.
V u bon p o u r îïi signature du c it o y e n D u s s a r a y - V i g n o l e s ,
maire de la ville de C u s s e t , par le sous*préfct du quatrièm e
arrondissement du départem ent de l’ A l l i e r , a la Palisse. L e 9
floréal an y de la république française. S ig n é , C
ossonn ieii.
Enregistré à la Palisse, le 9 floréal an 9 >Signét V a l l e t o u .
�...............................................................
(
2
9
)
'
1°. L ’avis du district de Gusset, sut lequel il est inter
venu , est du z 5 brumaire an 2 , et ce n’est q ne le 1 ^ p lu
viôse suivant que le citoyen Rabanon a été nommé membre
du conseil du district de Cusset, ainsi qu’il est démontré
par la lettre suivante (1). 20. Ce bail a été anéanti, d’une
part , parce qu’il étoit postérieur au mois de février
179 2 , et de l’autre parce qu’il rappeloit des qualifications,
des énonciations qui faisoient ombrage. N o u s nous sommes
-procuré cet arrêté; a in s i, Fannullation du bail en ques
tio n , est absolum ent étrangère au citoyen R a b a n o n ,
q u i n a été nom m é membre du conseil du district, que
longtem ps a p rès, et lorsq u 'il étoit en m ission dans
le département du C h e r , où i l a séjourné ju sq u 'à la
J in de p ra irial an 2 (2).
(1) C u s s e t , le 16 p lu viô se , l ’an a de la république une e t in d iv isib le.
L'agent national provisoire près le district de Cusset , au.
républicain Plantade-Rabanon, à Vichy.
J e te donne avis q u e , par l’arrêté du représentant du peuple
Vernerey, du 13 de ce mois, tu as été nommé administrateur au
conseil du district de Cusset, J e t’invite à te rendre à tou poste.
S alut et fraternité,
P o n c e t.
(2 )
E
xtrait
de l’un des registres des délibérations et arrêtés du
directoire du district de Cusset.
Séance publ i que et permanent e du 9 p l u v i ô s e , an 2 de la républ i que une 1
et indivisible.
Nous administrateurs composant le directoire du district de
Cusset ;
�C 3° )
L e citoyen Rabanon n’a jamais dissimulé l’origine
des domaines de Chitainet de Joninain; ils proviennent
du sieur de Laqueuille, ém igré; et son mémoire au
conseil le dit formellement; mais il en a joui en bon
père de famille; mais il les a administrés plus soigneu
sement que les siens, que ne le faisoit Jacques Choussy;
mais il n'a jamais permis que l’on détachât la plus petite
branche des bois des deux domaines en question ; mais
il y a au contraire, procès verbal régulier des dégrada
tions commises dans tous les genres par Choussy , et dont
l’effet sera poursuivi à propos. Mais cette a c q u i s i t i o n n e
garantissoit pas; elle ne pouvoit pas garantir le citoyen
Rabanon , des traits meurtriers dont ses ennemis vouloient l’accabler.
L e surplus des épisodes du précis de Jacques Choussy ,
n’est qu’une lâche récrimination : le citoyen Rabanon y
a répondu par des réflexions, à la suite de son mémoire
au conseil. Revenons à la cause, et dévoilons le dol per
sonnel commis par Jacques Choussy.
P o u r le d o l p e r s o n n e l , il faut le d e s s e in de l’un des
contractans de surprendre l’autre, et l’événement effectif
de la trom perie, dit Dornat, liv. i , titre 18 , section 3 ,
A p r è s avoir consulté et entendu l’agent national p ro viso ire ,
A r r ê to n s les dispositions suivantes :
A n T . I er. L es c ito y e n s P lanta.de-Rabanon , habitant de la c o m
m u n e de V i c h y , et a u tre s, sont nom m és co m m issa ires,à l’effet
de se transporter sur le ch a m p au départem ent du C h er.
P a r les administrateurs ; signé, F o u i i n j e r , P. L. R. P . ,
et O l i v i e r , secrétaire adjoint,
�( 3i )
n°. 4. F ra udis interpretatio semper in ju r e c iv ili non
e x eventu d u n ta xà t, sed e x con cilio quoque desideratur.
L . 79 ff. de reg. jur.
Dans l’espèce, le concilium est dans la lettre de l’ad
versaire au citoyen R ab an on , du 29 messidor an 2 , où
le citoyen Rabanon étoit menacé de la disgrâce du brave
représentant F orestier ; l’adversaire menaçoit de cette
autorité terrible, pour réduire le citoyen Rabanon à l’im
puissance de se défendre, et pour le tromper.
U cçeiitu s est dans le simulacre d’arrangement même.
Dans la reconnoissance du 17 thermidor an 2 , on lit que
le citoyen Rabanon a donné au citoyen Choussy, 2,5oo
francs argent ; c’est-û-dire, z 5oo francs écus. Cette circons
tance est marquante ; 2,5oo francs écus, dans un temps
où il ne se faisoit aucune affaire en argent, annonce
combien alors le citoyen Rabanon étoit comprimé. D ’ail
leurs il y a erreur de com pte, double em ploi, faux em
p lo i, dans ce prétendu arrangement.
En effet, à en juger par les propres écrits de l’adver
saire , par l’état et par l’écrit qu’il remit au citoyen R a
b an on, le 17 thermidor an 2 , il y a sûrement erreur de
com pte, double e m p lo i, faux em ploi; nous allons le
démontrer.
Mais auparavant, il est b o n d e prévenir le tribunal,
que l’adversaire a fait l’opération, comme si le citoyen
Rabanon eut été tout ¿1 la fois, et le propriétaire, et le
métayer des deux domaines. L e citoyen Rabanon est
chargé de tou t, sauf à lui i\ s’entendre avec les métayers.
Suivant l’écrit de l’aiiversaire ? sous la date du 17 ther-
�( 3* )
m idor an 2 , et l’état y jo i n t , les bestiaux auroient été
estimés à la somme de neuf mille neuf cent
cinquante francs, ci . . , .............................. 9 j 9§0 fr* 0 s>
Suivant lu i,l’ancien prix
des bestiaux pour le do
maine de Chitain , étoit de
neuf cent cinquante-deux
francs seize sous, ci . . . . 952 fr. 16 s. I
Suivant l’adversaire,l'an.
cien prix des bestiaux pour
?
le domaine de J o n in a in ,
étoit de neuf cent soixante
francs , c i ............................
g6o
Ces deux sommes don
nent un total d e ................. 1,912 fr. 16 s.
Cette dernière somme déduite de celle
de 99Ôo fr. ci-dessus, montant de l'estima
tion des bestiaux, au 17 thermidor an 2 , il
r e s te ................. .................................................. 8;037
Cette somme seroit partageable par moitié
entre l'adversaire, comme Fermier, et les
m étayers; la moitié de l’adversaire seroit
d e ......................................................................... 4,018
Suivant l'écrit du 17 thermidor an 2, l’ad
versaire auroit r e ç u , i ° . en argent comp
tant 2 , 5 o o fr. ; 2°* en-un billot de 2,892 fr.
16 s. T o t a l, ci . . . . . ................. ... . . . . 5,392
La diflerenceau préjudiceducit.Rabanon
seroit d e ................................................................. I >374
4
12
16
4
Preuve d’erreur bien marquée.
M a is ,
�( 33 )
Mais , dira l’adversaire, le prix du cheptel entre L aqueuillie et moi n’étoit pas le même qu’entre les mé
tayers et moi ; mon prix avec lei métayers étoit plus con
sidérable.
E h bien ! comptons encore dans ce sens. Mais pour fa:re
bien sentir la démonstration, commençons par une expli
cation essentielle.
L ’adversaire nous dit lu i-m êm e, qu’au 17 thermidor
an 2 , l’estimation totale des bestiaux étoit de 9,960 francs.
Dans cette som m e, est comprise la valeur originaire des
bestiaux , la valeur de 1783 ( date du bail à ferme par le
susdit Laqueuilhe à Choussy. )
Dans cette somme est aussi comprise la valeur progres
sive , à partir du bail de 1783 , jusqu’au bail à métairie
consenti par Choussy ; dans cette somme est aussi comprise
la valeur progressive depuis ce bail à m étairie, ju?qu à l’es
timation de l’an 2. Toutes ces valeurs sont réunies dans la
somme de 9,960 f r . , puisqu’en l’an 2 les bestiaux, suivant
l’adversaire, n’auroient pas été appréciés à plus de 9,960 fr.,
ensorte qu’à en juger par Choussy lui-même en 1 an 2 , les
bestiaux ne valoient que 9,960 fr.
Ceci p o sé , si l’adversaire veut faire deux opérations de
com pte, s’il veut établir une distinction entre le bail à
ferme et le bail à métairie , il ne peut pas prendre d’abord
la moitié de toute la différence qu’il y auroit entre le prix
exprim é au bail de 1783 et l’estimation de l’an 2.
Il ne peut pas prendre ensuite, sur la moitié revenant
aux métayers, dans cette même différence, toute la somme
en plus entre lè prix énoncé au bail à ferme et le prix
énoncé
bail à métairie.
�( 34 )
En effet, entre Choussy, ferm ier, et les rti&aÿers, le bail
à cheptel opéroit une société. O r , il est de principe que
lorsqu’il s’agit d’ un partage de société, l’on commence
par en former l’actif.
'
Sur toute la niasse de cet a c t if , chacun des sociétaires
prélève les fonds qu’il a mis dans la société, et ce qui reste
est partagé entre les sociétaires.
Entre Choussy et les m étayers, la valeur des bestiaux en
l ’an 2 , la somme de 9,960 fr. auroit été la masse de l’actif
de la société ; les fonds mis par Choussy dans la société
auroient été la plus-value des b e s t i a u x d e p u i s 1783 , ju s
qu’aux baux à métairie faits entre Choussy et les m é
tayers.
Sur la valeur de l’an 2, Choussy de voit prélever le mon
tant de cette plus-value; mais il devoit faire ce prélève
ment avant tout partage, afin que ce prélèvement portât
également sur tous les sociétaires.
A u lieu de cela, Choussy a commencé par
porter en lign e, c i ...........................................9,960 fr. o s.
D e cette som m e, il a soustrait celle de
1,912 fr. 16 s.
Pou r le prix des bestiaux en 1783 , il a
p r i s ..................................................................... 1*912
Il en est r e s t é .............................................. 8*037
16
4 s*
. D e cette somme, il a pris pour lui moitié,
q u ia é t u d e ..............................................
4,018 fr. 12 s.
Il a attribué au citoyen Rabanon , comme, | (
1
représentant les métayers, une somme de . 4,018
12
�7t r
r s 5 )
Sur cette moitié, il a été retenu la somme
d e ........................................................................ 1,218
4
pour la plus-value des bestiaux entre 1783 _______ _
et 1792.
D e cette manière il s’est donné . . . . 5,23$
Dans cette opération il y a erreur de
compte , double emploi et faux emploi.
Il y a double em ploi, en ce qu’il reçoit
deux fois la mcme somme ; il reçoit deux
fois la même som m e, en ce que les 1,218 fr.
16
4 s. devant être seulement un prélèvement
sur la somme totale, par la forme du prélè
vem ent, il en auroit lui-mêmc supporté la
moitié.
Il y a faux em ploi, en ce qu’en opérant
de cette manière il a mis sur le compte des
métayers,et dès-lors sur le citoyen Rabanon,
la totalité d e .....................................................1,218 fr. 4 s.
montant de la plus-value, tandis que lui •
Clioussy devoit en supporter la moitié.
En cet état, voici le vrai calcul qui auroit dû être fait par
Jacques C h o u s s y , même .daus son système. L e citoyen
Rabanon n’entend pas approuver les bases que Choussy
a posées. E n temps et lie u , le citoyen Rabanon en pro
posera d’autres qui sont très-justes; mais en ce moment,
et sans tirer à conséquence, nous comptons d’après Choussy
lui-m êm e, et nous montrons l’erreur, le double em ploi,
le fux emploi.
Ainsi, suivant Choussy en l’an 2 , p rix de
�fo ire , les bestiaux v a lo i e n t ............................ 9>95o fr. o s.
A in si, suivant Choussy, les bestiaux en .............
1783 valo ien t, prix de f o i r e ....................... 1,912 fr. 16 s.
q u ’il falloit déduire.
________
R e s t o i t .................................
Suivant C h o u ssy, la plus-value depuis
1783 jusqu’en 1 7 9 2 , avec les
métayers, étoit pour Joninain
888 fr. 4 s.
P o u r C h ita in .......................
330
1,218
4
A d é d u i r e ................. ...
R e s t o i t ............................................................6,819
L a moitié revenant à Choussy, étoit de . 3,409 • 10
Il lui reviendroit encore pour la plusvalue entre 1783 et 1792 ci-dessus, ci . . . 1,218
4
L e total du contingent de Choussy seroit
d e .........................................................................4*627
Il a reçu en a rg e n t. . . 2,5oo fr. os. 1
Il lui seroit encore dû
> 5,392
par billet . • . ................. 2,892 •» 16
)
‘
14
16
Il y auroit donc une première erreur contre le citoyen
Rabanon de 765 fr. 2 s ., non compris les valeurs des chep
tels des brebis , qui appartiennent aussi essentiellement au
citoyen Rabanon que les cheptels des gros bestiaux , et que
Jac ques Choussy, par le compte que Ton vient de discuter,
fait payer au nombre de cent vin gt, à raison de 6 J'r.p ar
brebis • tandis qu'il doit les rendre tête pour tê te, comme
�( 37 )
son père les a reçues du citoyen Busseuil, précédent fer
mier, ainsi que l’explique la lettre imprimée de ce dernier,
page 2.
D e tout ceci, il résulte matériellement qu’il y auroit
preuve bien positive d’erreur de com pte, double em
p lo i, faux emploi ; et comme erreur n’est pas compte ,
tout est à refaire.
Ce n’est pas que le citoyen Rabanon en soit réduif à
ce moyen ; il en a plusieurs autres qu’il développera ; mais
il a cru devoir se borner en ce moment à celui-ci,
comme l’un des plussaillans. Lorsque le simulacre d’arran
gement du 17 thermidor an 2 sera effacé, lorsque le
compte se f e r a de n o u v e a u , i l s t i p u l e r a scs intérêts avec'
plus de t r a n q u i l l i t é d’esprit; il jouira de toute sa lib erté• ^
alors, il aura sûrement justice.
Nous avons démontré qu’il y a eu erreur même dans
le com pte, dans l’opération de Choussy. Mais nous n’en
avions pas besoin ; la vérification ne doit s’en faire, que
lorsqu’il s’agira de l’exécution du jugement que le tri
bunal va rendre ; en ce m o m en t, il suffit d’avoir bien
p r o u v é que le citoyen Rabanon a été terrorifié par
Choussy et par t o u t e s les horreurs des circonstances des
temps, et par celles des 17 , 22, 28 thermidor, pour que
le citoyen Rabanon doive être restitué, contre des actes
produits par la tyrannie.
�7^°
(38)
T
r o i s i è m e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on -p eu t-il dem ander la restitution
de la som m e de 235 oq J r a n c s en a rg en t, p a r lu i payée
le 17 therm idor an 2 , avec intérêts ?
Cette proposition n’est pas une question 5 elle est seu
lement une conséquence de la précédente.
E n effet, nous venons de démontrer que l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 , doit être annullé :
cette a n n u l a t i o n r a m è n e r a t o u t e s les p a r t ie s e n l’état
d’avant le 17 thermidor an 2 ; les écrits du 17 thermidor
an 2 et tout ce q u ia suivi, seront considérés comme non
avenus ; il faudra que chacune des parties reprenne le sien.
Ce qu’a fait l’adversaire, ne présentera plus q u’une expoliation , et spoliatus antè om nia restituendus. L ’adver
saire rendra la somme de 2,5oo francs ; il la rendra avec
les intérêts, à compter du payement. Ces intérêts seront
la réparation du dommage causé au citoyen Rabanon. Z/. 2.
cond. ind.
Q
u a t r i è m
e
q u e s t i o n
.
L e citoyen R a ba n on est-il a u jo u rd 'h u i, recevable et
J b n d é à demander raison du cheptel ?
Celle proposition ne présente pas de difficulté ; elle
est encore une conséquence forcée de la seconde. L ’es
pèce d’arran^cinent du 17 thermidor an 2 , écartée, les
V
�ïz \
( 39 )
droits du citoyen Rabànon sont rétablis en leur intégralité.
" Ce sont le s;nouvelles-lois sur le9 cheptels, qu'il faut
'consulter; en voici la série et les dispositions propres à
la contestation d'entre les parties.
Un arrêté du comité de salut public, du 2 thermidor
an 2, article 3 , porte : « Lorsque le bail du métayer sera
et J î n i , il sera obligé de rendre en nature au proprié
té taire, Je mérrtè nombre de bestiaux et la même branche,
« tels enfin qu’il les avoit reçus, sans pouvoir se servir
« de la clause de son b a il, pour en fournir la valeur. »
U n arrêté du même com ité, en date du 17 fructidor
an 2 , dit en l’article premier : « Les fermiers qui ont reçu
« du propriétaire des bestiaux en entrant dans leurs fer« m es, sont tenus comme les métayers, d’exécuter l’ar« rêté du 2 thermidor dernier. »
Ces deux arrêtés furent rapportés par un troisième
de ce com ité, en date du 16 pluviôse an 3 ; par l’ar
ticle 2 , les comités de législation et de com m erce, furent
invités à présenter sans délais un projet de lo i, su r les
difficultés qu occasionneraient alors les ba u x à cheptel.
Parut ensuite la loi du i 5 germinal an 3. L ’art. Ier.
obligea les1fermiers ou métayers à rendre les bestiaux
à la jin du ba il ou lors de Vexig u e, compte ou partage,
en même nombre , espèce et q u a lité qu'ils les aboient
reçus.
~ T/article 4 , dans le cas d’une simple énonciation de
prix dans les b a u x, et sans désignation du nombre des
espèces et des qualités ; dans ces deux cas, cet article
veut qu’il y soit suppléé par enquête ou par experts.
L ’article 5 recommande aux experts de prendre toutes
�(40).
les informations, tous les éclaircissemens nécessaires pour
découvrir la vérité ; il les charge de s’arrêter au mon
tant de l’estimation exprimé au bail, et d'apprécier com
bien au temps de cette estimation, moyennant la somme
de cette estimation, l’on pouvoit avoir de bestiaux. 11
les charge de consulter le nombre de bestiaux conve
nable pour l’exploitation du bien.
Enfin l’article n parle ainsi : « toutes les difficultés
« qui ont pu s’élever dâns le courant de ta n n ée d ern ière,
« sur les baux à cheptel expirés ou r é silié s, et qui sont
« indécises ; toutes celles a ussi q u i se sont élevées rela»
c tivement à l’exécution des arrêtés du comité de salut pu
is blic des 2 thermidor et 17 fructidor, jusqu’à ce j o u r , et
« q u i ne sontp a s non plus entièrem ent term inées, seront
cc définitivement réglées d après les dispositions dex
articles précédens. » G est ici une restitution que la loi
accorde aux propriétaires, contre la sorte de brigandage
des métayers et des fermiers , contre les propriétaires.
L e papier-monnoie a b o l i, le législateur rendit la loi
du 2 thermidor an 6.
P a r l'article 6 de cette loi , les m étayers o u ferm iers
fu re n t ob ligés à re n d re les bestiaux ou tête p o u r tête ,
ou le p r ix su ivant l’estimation.
L ’article 6 dit : « Les comptes et partages de cheptel
« entièrement consommés, soit qu’ ils l’aient été par suite
« de jugement, soit qu’ ils l’aient été par suite d'nrran» gemens définitifs faits de gré à g r é , sont maintenus,
« et sortiront leur plein et entier effet, à quelque épo« que et dans quelque proportion qu’aient été faits le^d.
«.comptes et partages, »
Mais
�t e s
c 4* )
Mai? ¡’article 7 po¡rte :« A l’égard' des comptes et par« tnges .écjius, ¡niais non définitivement consommés, ils
seront ,r<é.glés suivant les conventions et les lo is , ou
-« usfiges antérieurs ,î\ la loi du i 5 germinal an 3. .»
... «, Ü estim a tio n à faire, s'il y a lieu , dit l’article 8 ,
* pqur la rendre des bestiaux, dans le cas de l’article
« précédent , sera faite en valeur métallique, au prix
<« rnçyen de 1790, ,ç\ ucmobstaut toute estim ation déjà
m J a iie j p en da n t la dépréciation du papier-m onnoie :
hu cette estimatiqn sera faite à raison de l’état du b é ta il
.« reiidu,, s’il est ençorfi sur les lie u x j dans le cas con« traire, les e x p e r ts q u i a u r o ie n t opéré la remise ., et
k<;j à Jqur dt^ant y \tçvis autres \ççcpfirts tém o in s, seront
je appelés,
procéderont de n ouveau, d'après laurm é
ta m oire , ■
leurs connaissances particulières , ou tous
■
ft autres dpeumens, conformément aux règles prescrites
,« par la présente. »
. ,j >
I/artiçle 11 de 1? loi du i,5 gprminal an 3 , parle en
général .de ¡toutes difficultés élevées dans le courant de
J’^njiée précédente, de .toutes les difficultés .encore indé
cises ; elle ne distingue pas,:, il suivit qu’il y ait difficulté,
pour qu’il y ait lieu à 1’applicatio.n de cette loi.
ï $ e parle no# seulement dpsj^aux expirés, mais encore
¡des Jjapx r,ésilié$;; pias .de .distinction ;ent¡r’eux.
^llçis’iipp.roprie à tpus les cns.ou Je propriétaire auroit
réclamé le bénéfice des arrêtés des z thermidor .et 17 fruc
tidor an 2;.elje dit qü’alorp si JesidifficuHés qui s’ensuivent
7ie s.oiit pas etttièrcmçjit term in ées, -elles seront défini
tivement réglées ¿suivant les .dépositions de cette loi ( d u
i 5 germinal. )
F
�C 42 )
Celle du 2 thermidor an 6 va plus loin. S i , en l’ar
ticle 6 , elle maintient les comptes et partages faits, elle
veut qu’ils soient entièrem ent consom m és; elle exige qu’il
11 y ait plus rien.à faire; elle exige que les parties se
trouvent en position telle qu’elles n’aient plus rien à se
dem ander, -parce que sans cela la chose ne seroit pas
entièrem ent consom m ée.
Dans ce sens, pour une consom m ation en tière, il n&
su ffit pas d'une estim ation des bestiaux pendant le
papier - jnonnoic , puisque ta rticle 8 dit nonobstant
toute estim ation d éjà j'a ite p e n d a n t la d é p r é cia tio n dtù
papïer-m onnoie.
P o u r une consommation e n tiè re , il ne suffit pas de
la reddition des bestiaux par le fermier au proprié
taire, puisque le même article 8 d it: Cette estim ation
sera f a it e ¿1 raison de Vétat du bétail ren d u , s’il est
encore su r les lieu x ( ce qui suppose la reddition déjà
faite au p ro p riéta ire), puisque le môme Article, dans
l'hypothèse où ces bestiaux ne seroient plus sur les lieu x ,
charge les e x p e r t s q u i en a u r o ie n t o p éré la rem ise} d’en
faire l’appréciation, d’après leur m ém oire et leurs con
naissances particulières.
O r , ici il 11 y a rien eu de définitif; il ne peut pas y
avoir encore rien de définitif aujourd’hui entre le citoyen
Rabanon et l'adversaire, puisque le citoyen Rabanon n’a
rien p a y é , et que c’est le payement définitif ou le dépôt
qui opère la consommation : tout le prouve.
i°. Dans le sens de la loi du i 5 germinal an 3 , des
difficultés1se sont élevtfçs entre le citoyen Rabanon et
l'adversaire.
�ÏX J
(A 3 ) .
L e citoyen R abanon, en l’an 3, par ses offres cTu 2 ger
minal et par nombre d'autres actes subséquens, a réclamé’
toujours le bénéfice des arrêtés des 2•thermidor et 17 fruc
tidor an 2; de là des difficultés non entièrement terminées
lors de la publication de la loi du i 5 germinal an 3.
2°. Dans le sens de la loi du 2 thermidor an 6 , d’une
part il n’a été rien fait de gré à g r é , puisque le citoyen'
Rabanon a élo ig n é, résisté autant qu’il a été en son’
pouvoir, au prétendu arrangement du 17 thermidor an 2;
puisque, s’il n’a voit pas obéi aux réquisitions, aux injustes"
prétentions de l’adversaire, les visites, les menaces, les
dénonciations auroient recommencé , jusqu’à ce que’
J a c q u e s Ghoussy e u t o b t e n u cc q u ’ il désiroit ou dans li n
sens ou dans l’autre; d’un autre c ô t é , il n’ÿ a encorer
rien de définitivement consom m é>puisqu’il fau t'y revenir,
puisque dans l’opération il y a eu crainte grave, force
dol personnel., erreur de com pte, double em ploi, faux'
emploi.
N ’importe qu’ i l 'y ait e u , en l’an 2 , estimation des
bestiaux; mais cela ne suffit pas. ( Y . art. 8 de cette lo i,,
première partie. )
N ’importe qu’il y ait eu remise des bestiaux, par lracl-versaire, au citoyen Rabanon; mais cela ne suffit pas
encore. ( V ‘. art. 8 de cette l o i , deuxième partie. )
- En ce cas, la loi en appelle, i°. aux experts qui au
r o ie n t déjà opéré cette remise; 2 0. à tous autres experts
témoins; 3°. à le u r m é m o ir e , à leurs connoissances
■particulières, et à tous autres dücumens. Et certes, il'
existe encore beaucoup de témoins de l’injustice criantefaite par Choussy au citoyen Rabanon.
F 2-
�t A4 )
Un. autre moyen, puissant se présente contre l’adver
saire; il ne sauroit y répondre convenablement.
E n p o m t.d e d r o it, un acte synallagmatique est celui
qui est obligatoire de part et d’autre; toutes les fois q u’il
y a obligation réciproque, il en est résulté un.engagement
synallagmatique; et l'acte contenant cet engagem ent, s’il
est sous seing p r iv é , doit, être fait d oub le, à peine de
nullité.
Dans l’espèce, il s’agissoit de la résiliation d’un cheptel
de fer. L e propriétaire pouvoit réclamer le montant de
l’estimation de 1783 ;;le fermier étoit en droit de retenir
l ’excédant.
Il y avoit nécessairement obligation réciproque entre
le citoyen Rabanon et l’adver.saire.. Suivant le calcul de
l’adversaire, le citoyen Rabanon lui devoit-raison de la
plus-value des bestiaux; de .son côté, l’adversaire devoit
lui rendre les bestiaux. Il y. a de part et d'autre 'des engagemens i\ remplir : ceci posé, il devoit y a vo ir, de la
part du citoyen Rabanon , décharge des bestiaux du
cheptel; il devoit y a v o ir, au profit du citoyen R aban on ,
quittance de la p l u s - v a l u e . P a r c e s d e u x motifs, il devoit
y avoir un acte fait double; il n’y.en a point. L e citoyen
Rabanon pourroit demander h Choussy raison des bes-r
tia u x , parce que Choussy n’en a point de décharge.
Choussy ne pourroit pas dire qu’il 11’en avoit pas besoin,
et qu’il lui suflisoit de la simple remise des bestiaux,
parce que quand on est engagé par écrit, il faut établir
sa libération par écrit.
Choussy ne pourroit pas plus offrir utilement une preuve
testimoniale, parce que l’objet cxcéderoit 100 fr.
�(■4 5 )
D e tout ceci^ il suit que tout n’est donc pas définiti
vement consom m é, et dûs lors c’cst le cas de la loi du 2
therm idor, an 6.
L a lo i du prem ier.fructid or an 3 , a prévu fesp èce;
elle rappelle , relle consacre tous les principes de ju r is
prudence-sur des doutes ¡q u i s 1étoient élevés. L e légis
*
lateur passe à Vordre du j o u r ,fo n d é sur ce q u u n remboursem ent n e s t consom m é que lorsque le débiteur
s’est dessaisi p a r la consignation.
En cet état de choses, il faut mettre à l’écart l’espèce
d’arrangement du 17 thermidor an 2 ; alors demeure dans
toute sa fo rc e , l’obligation de l’adversaire de compter des
bestiaux du cheptel, en conformité des lois d e s 'i 5 ger
minal an 3, et 2 thermidor an 6.
l ia loi de thermidor an 6 présente au tribunal le moyen
de rendre justice à qui elle appartient. Des experts témoins
montreront au doigt le véritable débiteur : ce sera alor*
que l’on- pourra , en très-grande connoissance de cause,
juger laquelle des deux parties est à condamner, ou le cit.
R ab an on , pour avoir lutté contre une injustice criante, ou
Jacques Choussy, pour vouloir en abuser.
Après avoir analisé le précis, les moyens de Jacques
Choussy, ses apostrophes, ses personnalités,que restc-t-il
dans son m émoire? des injures, des calomnies, des perfidies,
pas une vérité.
Mais ce n’est point assez que les moyens de droit du cit.
Rabanon obtiennent un succès complet. Il doit cire vengé
de toutes les expressions diffamatoires du précis de Jacques
Choussy. L e cit. R abanon, dans le sien, a été grandement
modéré sur le coinpte de Jacques Choussy. Les pièces qu’il
�71 t
(4 6 )
a produites sont dans les mains de tous les administrés du
district de Cusset qui les lui ont confiées.
II a dû les présenter à la justice : sa cause l’exigeoit.
Elles sont l’expression des sentimens de tous ceux qui les
ont signées : rien ne lui est personnel. Jacques Choussy,
au contraire, a dit tout ce qu’il falloit pour fatiguer ungalant homme , pour attaquer sa délicatesse. Mais le sanc
tuaire de la justice ne doit jamais être souillé par des com
bats d’injures, d’impostures, de calomnies; les tribunaux
doivent empêcher- et réprimer ces scènes scandaleuses. L e
meilleur moyen , en pareil cas, est celui employé lors d’un
arrêt du c i - d e v a n t p a r l e m e n t de P a r i s , du 7 f é v r i e r 1 7 6 7 ,
rendu sur les conclusions du cit. Seguier. Ce moyen est
d’ordonner la suppression du précis épisodique de Choussy..
L e cit. Rabanon y a conclu : le tribunal consacrera sans
doute cet acte de justice.
GOURBEYRE,
A R
io m
,
avoués
de l'imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
troubles publics
émigrés
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire demeurant à Chitain, commune de Saint-Christophe, appelant ; Contre Jacques Choussy, géomètre, demeurant à Cusset, intimé.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1128
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1127
BCU_Factums_G1129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53156/BCU_Factums_G1128.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
domaines agricoles
émigrés
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
troubles publics
-
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3d0b5ad92ced2ae9d206c6dcea2a5f8b
PDF Text
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M É M O I R E A U C O N S E I L , ° (V ^
P O U R J e a n - C l a u d e P L A N T A D E - R A B A N O N , pro
priétaire des maison , domaines de Chitain , Joninain ;
C ON T R E
J a c q u e s
!
C H O U SSY.
L
E 27 mai 1 7 8 3 , le citoyen Charles L a c o t e , fondé de pouvoirs du citoyen
L a q u e u ille , a passé bail pour n e u f a n n é e s , qui ont fini le 24 juin 1 7 9 2 ,
au citoyen Pierre Choussy et à sa f e m m e , par acte reçu L o u h er , notaire à SaintG éra n d -le-P u y . L es devoirs du ferm ier envers le propriétaire y sont signalés
et circonscrits d ’une manière particulière. Je vais rappeler les articles qui ont
trait à la contestation du m om ent.
« Laissera ledit Pierre C h o u s s y , en fin de ferm e dans ladite terre, pour la
somme de 5 8 9 4 l i v de gros bestiaux, com m e il le s a reçus du fe r m ie r a ctuel. »
L e 9 brumaire an 2 , j’ai acquis de la nation, et com m e créancier, la maison
et les deux domaines de Chitain et Joninain , garnis de leurs b e stiau x, des
cinq domaines dont étoit composée la terre de Chitain.
L ’article 6 du procès verbal d ’adjudication veut que j ’aie contre le fermier
l ’action en résiliation que la loi donne aux acquéreurs.... Pierre C houssy a joui
jusqu’au 6 messidor an 2...... L ’estimation des cheptels de mes deux domaines
n ’eut lieu que le 14 du m êm e mois.
L es experts furent singulièrement divisés sur la prisée des bestiaux. C e tte
disparité fit que les arbitres se séparèrent sans pouvoir se concilier et se réunir.
T o u s les propriétaires lésés étoient instruits alors que le gouvernement s ’occ u poit des moyens de réparer les injustices criantes des colons et fe r m ie r s ,
relativement à la remise des cheptels ; et com m e il importoit au consultant
d'attendre la d écisio n d’ état du co m ité d e sa lu t pu b lic sur des intére ts a u ssi
p r e s s a n s , il ne donna aucune suite à l’opération d es experts.
U ne foule d ’actes authentiques, un arrêté du département de l'A l l i e r , du
21 ventóse an 2 , qui sanctionne les comptes de Pierre C h o u s s y , une pétition
de la m ê me d a te , justifient mathém atiquem ent q u ’il a été seul ferm ier jusqu’au
24 juin 179 4 que je suis entré en jouissance de mes deux domaines ; que Jacques
C houssy ne l ’a jamais été q u ’en vertu d ’un acte in fo r m e , imaginé dans les
temps pour la c a u se , et qui ne peut supporter les regards de la ju stice, par
son illégalité radicale. A u mépris de ces actes so len n els, tous l’ouvrage de
Pierre C h o u s s y , Jacques Choussy fils m ’é crivit, le 29 messidor an 2 , cette
lettre alté ra n te , qui est la deuxième p ièce justificative.
Je ne ferai point l’analyse de cette le t t r e , qui fatigue encore et la justice et
l'hum anité. Il entroit dans le principe raisonné de Jacques Choussy , de transf ormer son intérêt personnel en un intérêt d ’état. J’observe seulement que c ’est
Jacques Choussy qui me recherche et me provoque, pour terminer, sans le concours
et le rappel des premiers arbitres, l'exigue des bestiau x; q u ’il ne parle que
d e la prisée de son expert ; que c ’est lui qui tient la plum e pour faire les
calculs et me dicter des lois ; que la somme qu ’il lui a plu de déterminer si
arbitrairement est la mêm e que celle qu ’ il réclame si injustement.
O n voit encore que Jacques C h o u s s y , toujours attentif sur cet intérêt qui le
;
h
�tourmente si Fort, invoque le témoignage dos frères Croisior , pour Justifier q u ’il
a voulu me remettre les clefs de la maison de Cliitain et bâtimens en dépend a n s, sans y avoir fait la plus petite réparation locative, sans me permettre
de lé faire constater partiellement et authentiquem ent, pour en récla m er,
au nom de la l o i , l’ in d em n ité q u 'elle com m a n d e, com m e je réclame par elle,
et en son n o m , l’exécution littérale de ses dispositions justes et bienfaisantes
sur la remise des cheptels.
E t ce sont ces traits de lu m iè re , cette attente , cette confiance dans la justice
du gouvernem ent, cette résistance à des volontés si repoussantes, si extraordi
naires , que Jacques C houssy appelle des tra casseries.... qu’ i l dénonce com m e
d es tracasseries q u i ne so n t p lu s à l’ ordre du jou r ( e t ¿¡uel j o u r , que le 29
m essidor an 2 / ) e t pour le sq u e lle s tracasseries i l inte'resse , i l ap p elle toute
la p u issa n ce d’ un d é p u té , son parent.
P ou r réussir avec plus d ’im p un ité, Jacques C houssy s'adressa au cit. Forestier,
représentant dans le département de l’A l l i e r , et oncle, à la inode de B re ta g n e ,
de sa fem m e. N os malheurs étoient à leur com ble; la mesure étoit telle qu ’il n’y
avoit point de propriétaires menacé qui n ’eut offert la dernière colonne de son lit,,
pour se dérober à la pensée et à la honte d ’un genre de m ort qui ne devoit frap
per que les grands crimes et les scélérats prono îcés. J’arrîvois du département du *
C h e r , où une mission importante de grains m ’avoit tenu éloigné pendant près de
c in q mois ; je l ’avois remplie avec tout le zèle et le succès dont les âmes dévouées;
au bonheur de leurs semblables sont seules susceptibles ; je connoisssois la
confidence perfide faite par Bourgeois à C laude A r m illio n , à P a ris, où mes
confrères, commissaires dés subsistances, m ’avoient député pour activer la
prompte exécution de la réquisition que le département du C h er avoit à effec
tuer pour le très-nécessiteux district de Cusset. L e prix de tant de froissem ent,
d ’attachement à mes devoirs ,.de pertes pécuniaires, devoit être payé par la mort
j ’en étois p r é v e n u . . ; et le sacrifice que j ’avois Fait de mon existence, ne me
rendoit que plus chers les soins affectueux que je devois aux habitans de mon
d istrict, qu e je considérai toujours com m e mes premiers amis. Cependant nous
n ’avions, mes trois collègues et m o i, ni abordé les caisses publ iques, ni assassiné,
ni incendié, ni dépassé la Ii^ne de nos c o m m u n e s, ni entretenu de corres
pondance sur les affaires d ’é ta t, et avec qui que ce soit au monde. J’obéissois
aux lois ; j ’etois ce que je serai tou jou rs, o ffic ie u x , bienveillant, ami de
l ’ordre et adorateur de mon p a y s . . . . Ces affections sont aussi celles de mes
trois compagnons d ’infortune : 011 tro u v e r a i la suite de ce mémoire l ’historique
repoussant de Bourgeois, tel q u ’il m ’a été remis et aux autres victimes désignées
pour former avec moi le complément de la fatale charrette.
Je ne me permettrai aucune réflexion sur la confidence de Bourgeois ; je lui ai
donné? du blé com m e à tous les habitans nécessiteux de V i c h y , qui m ’aimoient e t
m e protégeoiont, et h un prix bien inférieur à celui des marchés environnans; c ’est
en nous vengeant de nos ennemis par des b ie n fa its , que nous acquérons le droit
d ’arracher quelques remords à nos persécuteurs, et la jouissancederécompenser par
la pratique des vertus sociales, ceux (pii ont fait cesser tous les genres de tyrannie.
C ’est donc en germinal au 2 , que ces aveux se faisoient à P a ris; c ’est en mes
sidor an 2, que Jacques Choussy me dénonçoit pour me force ra lui payer c e
que je n '‘ lu i devais pas , c e que la lo i m r défendait de lu i d on n er, ce que le
légitim e ferm ier de Cliitain me devoit. « C ’est quelque temps auparavant que mes
••nnemis a voient écrit à Paris pour faire porter sur la liste des biens de« émigrés les
deux maisons que j ’y ai; que l ’une y a été inscrite, et que j ’ai empêché l ’autre
�( 3 )
d ’être mise au nombre ries propriétés nationales, en justifiant matériellemeni que
je n ’avois pas abandonné d ’une minute le territoire de mon district ; c ’esL à ces
mêmes époques que la porte d ’une maison de Cusset m ’a été fermée, parce que j e
devois èlre arrêté prochainement ; que mes fidèles domestiques ont été sollicités ,
pressés pour sortir leur mobilier de chez moi, dans la crainte qu’il ne f û t confondu
avec le m ien, comme national ; que la clameur publique vouloit que j ’eusse é t é
c o n d u i t au tribun.nl révolutionnaire du chef-lieu de ma mission pour les grain s;
q u ’une aubergiste de Cusset a dit à mes métayers, à ceux de la dame B o u q u e t-L a g r y e , m a nièce, que j ’allois être conduit en prison; q u ’une citoyenne de V ic h y
g é n é r a l e m e n t respectée (la dame Gravier R e y n a u d ) , étonnée de me trouver chez
le citoyen Fouet où je devois dîner, m ’assura que toute la ville me croyoit en ar
restation depuis quelques heures, et que pour ne point fatiguer par ma présence
un vieillard vénérable, je me retirai chez moi pour y attendre avec résignation
la vengeance de mes ennemis; qu’enfin , etc. etc. etc. »
T o u te s ces choses, je les eusse gardées profondément dans m a m é m o ire , si
la violence des procédés de Jacques C h o u s s y , la p u b lic ité , l’abus q u ’il a fait
de ma lettre, et qui a été provoquée, commandée par la s ie n n e , ne m ’eussent
arraché des vérités, des souvenirs amers que j’ai dévorés se u l, et que j ’aurois
oubliés avec plaisir, sous notre gouvernement sauveur et protecteur.
M e n a c é , tou rm en té , accablé de toutes parts , je fus forcé d ’écrire celte le t tr e ,
que Jacques Choussy a eu l’astucieuse effronterie de présenter au tribunal ,
pour justifier que je l’avois provoqué à un compte et reconnu pour fermier.
M ais Jacques Choussy peut-il oublier, et sa d én on cia tion , e t sa lettre du 29 mes
sid or, q u i caractérise , d e la manière la p lu s fo r m e lle , et mon éloignem ent e t ma
tén a cité à ne p a s terminer nos affaires concernant V acquisition de C h ita in ; et
sa méchanceté-à vouloir transformer en intérêt d ’état, par 1 autorité accablante d ’un
représentant, l’intérêt le plus solitaire ; et cette cupidité raisonnée qui lui la it
apporter un bordereau de compte tout préparé, tout in e x a c t, tout faux , d ’après
lequel il me c o n tra in t, le 17 thermidor an 2 , de lu i p a yer sur le cham p une
som m e d e 2,5oo livres a rg en t, e t de souscrire un b ille t à son nom de 2,892
livres 16 sous , p o u r p r ê t de p a reille som m e ( y e s t-il d it ) , tandis qu’au même
m om ent il m e donne , au nom de son père et du s i e n , un reçu motivé de.
5,092 livres 16 sous , pour sa part e t portion de l ’excédant de bestiaux qu ’il
a à m e livrer ; quittance qui comprend des cheptels de brebis que C h o u ssy
n’ a ja m a is a ch etés , n i p a y é s , n i p u vendre par-là m ê m e , puisque les anciens
propriétaires ne les ont pas plus vendus que les cheptels des gros bestiaux, puisqu’ils
sont ma propre chose, com m e propriétaire, et que son père les avoient reçus du
citoyen liusseu il, précédent f e r m ie r , pour les rendre tête pour tête au citoyen
L aq u e u ille, ainsi que l ’explique la lettre de B u sseuil, du 12 vendémaire an /(.
11 est de notoriété p u b liq u e , m alheureusem ent, que le 9 th erm id or, q u i ,
dans la plupart des départemens , avoit réconcilié le ciel avec la te r r e , n ’avoit
encore p ro cu ré, dans notre trop infortuné d istr ict, ni espérance , ni consolation ,
ni amendement dans les caractères. Il est d é m o n tré , par un arrêté du représen
tant du peuple Forestier, du 22 thermidor an 2 , et qui est dans les mains de
tous les administrés , que douze individus de tout â g e , d e tout s e x e , partoient
de tous les p oints q u i m’ environnoient, pour le tribunal révolutionnaire, le 28
therm idor. E t que d ’autres victimes éloient destinées pour leur succéder ! C es
vérités, écrites en caractères de f e u , soulèvent encore toutes les conceptions,
<*t sont placées à la suite de ce m é m o ire , cote 4.
Depuis cet acte arbitraire de C h o u ss y , du 17 thermidor an 2 , l'arrêté salutaire
A 2
CV r
�du 17 fructidor suivant, fut décrété. L/article premier ordonne* que le s ferm iersq u i ont reçu du propriétaire dns b e stia u x en entrant dans leurs fe r m es , seront
tenus com m e le s m étayers d ’ e x é c u te r Varrêté du 2 thermidor.
L ’arrêté du 2 thermidor s ’explique a in si, art. 3 ... L o rsq u e le ba il du m étayer
sera f i n i , i l sera o b lig é de rendre e n nature au propriétaire le m êm e nombre
a’>‘ b e stia u x e t la m êm e branche , tels enfin qu’ i l le s avait reçu s , sans pouvoir
s e s e n ’ir de la cla u se de son b a il p our en p a r e r la 'valeur. L e bail de Pierre
C h o u s s y , du 17 mai 1785 consacre la m êm e mesure de justice, p u isq u ’ i l doit
rendre le s bestia ux., com m e il le s a reçu s du p récéden tferm ier. Je n ’ai r é cla m é ,
et je n ’ai jamais dû réclamer que la stricte exécution de ces deux lois et de celles
qui leur sont relatives. L e s propriétaires qui ont eu des fermiers justes et sen
s ib le s , n ’ont pas même eu cíe vœux à former. Ils ont été prévenus et comblés
par ces mêmes hommes précieux q u i , en remplissant la sainteté de leurs d e v o ir s,
ont encore eu le mérite apparent de la générosité, tandis qu’ils n ’étoient que les
fidèles agens de la loi...... L a conduite de Pierre et de Jacques Choussy à m on
égard est donc le scandale de la raison et de l’équité.
L e s lois des i 5 germinal an 5 , et 2 thermidor an 6 , rendues, com m e lés d e u x
prem ières, sur les différentes réclamations des propriétaires de tous les points,
du •'ouverneinent, sont encore bien plus impératives ; elles ajoutent à la justice
et à la fixité de leurs principes le mérite d ’éclairer les intérêts du propriétaire
et du f e rm ie r ; de prévenir et de confondre tous les raisonnemens de l’a s tu c e ,
en traçant un mode de choses que toutes les passions humaines ne peuvent
mécoinioitre. C es lois me rappellent, m ’a d m e tte n t, me confirment dans toute
l ’intégrité des droits qui m ’étoient acquis par l ’arrêté du 2 thermidor an 2 ,
puisque celui du 17 fructidor en reporte les effets à cette première époque;
que j ’avois traité fo r c é m e n t, dans l ’intervalle de c e s d e u x lois ; que le bordereau
de compte et d e calculs, présenté si arbitrairement par Jacques C h o u s s y , four
m illent «Terreurs, de doubles, de faux emplois, et de faux matériels...... que les loisréprimantes sur les cheptels n ’ont voulu d ’autre ca u se , d ’'autre m o t i f , qu’ une
s i m p l e prétention élev ée ou d e la part du f e r m i e r , ou d e c e lle du propriétaire f ,
et qu ’eíles écartent par là mémo toutes les fins de non recevoir.
L a loi du 1 5 germ inal, art. X I , ordonne que toutes le s d ifficu ltés élev és d a n s
le c o u r a n t de l ’ an 2 , sur le s b a u x à ch ep tels e x p ir é s ou r é s ilié s , e t q u i so n t
in d é c is e s , toutes c e lle s aussi q u i se son t élev ées relativem ent à l ’ e x é c u tio n
d es arrêtés du co m ité de sa lu t p u b lic , des 2 therm idor et 17 fructidor ju s q u 'à
c e j o u r , e t q u i ne so n t pas entièrem ent term in ées, seront définitivem ent réglées'
d'après la disp osition des articles p r écé d e n s.... Ainsi cette loi est encore conçuepour mon espèce, puisque dès le 2 germinal an 3 , époque de l’échéance de mon
b ille t, j’avois mis en demeure Jacques C h o u ss y , jiar un exploit «l'offres réelles
d»; la somme de 2,892 liv. ifi s. assignats...... que j avois réclamé le bénéfice des
lois existantes et à créer sur la remise des bestiaux.... pareillement les nayemens
considérables des sommes qui m ’étoient et me sont encore dues par Jacques et
Pierre C h ou ssy ...... et protesté enfin contre la violence des procédés et des cir
constances du 17 thermidor an 3 .... Ainsi mes réclamations, mes protestations,
(fuites voulu es, toutes commandées par les lois sur les ch ep tels, remontent à
lu première origine de ces mêmes lois.
Celle «lu 3 thermidor an G , émise sur les nouvelles plaintes «les propriétaires,
victimes de la fausse application ou «le la violation de ces mêmes lois, consacre
de nouveau la sollicitude éclairée «lu gouverneme t. Elle ord o n n e , art. 7 , Q un
les comptas c l partages éch u s , et non définitivem ent consom m és , seron t réglés
�\
/
\y • ^ ¿ suivant le s conventions et le s lo is ou usages antérieurs a la lo i'd u 1 5 germ inal
^ A x ï . 8. « L ’estimation à faire , s’il y a l i e u , pour la rendue dos b estiau x , sera
faite en valeur m étalliqu e, au prix m oyen de 1790, nonobstant toute estimation
déjà faite pendant la dépréciât 011 du papier-monnoie. C e t t e estimation sera fa ite
à raison de l'état du bétail rendu , s il est encore dans les lieux. D a n s le cas
contraire, les experts nui auront opéré la remise, eL à leur d é fa u t, tous autivsr
experts témoins procéderont de n o uvea u , d ’après leur m ém oire, leurs connoiss a n c e s particulières, ou tous autres docutuens, conform ém ent aux règles prescrites
par la présente. »
. .
.
,,
,
Je suis donc Lien encore dans l’exception et la justice decretees par cette lo i,
puisque je me trouve toujours à l’égard de Jacques C h o u s s y , au rrietne état q u ’au
1 7 thermidor an 2 ; que depuis cette éj>oque je n ’ai rien p a y é , rien e x é c u té ,
rien co n so m m é , que j’ai ré cla m é , au co n traire, daus tous les temps utiles,
et par actes judiciaires, le bénéfice de ces mêmes lo is; que. Choussy s'est refusé
constam ment à celte mesure de ju stice, de rendre c e que son père a reçu ,
m êm e nombre , q u a lité e t nature de p r ix , après le nouveau com pte v o u lu par
la lo i , e n va leu r m é ta lliq u e , au p r ix m oyen de 179° > Ilon°bsta n t toute esti~
W allon déjà fa it e pendant la dépréciation du papier-m onnoie;
A in si Jacques Choussy plaide depuis sept ans pour un complément de bénéfice
Tepoussant; moi pour obtenir ou donner, après le nouveau compte voulu par la
lo i, tout ce qu’elle m ’ordonne de recevoir ou de payer. Jacques Choussy plaide
de lucro captando , et moi de damno vila n d o .
Jacques C h o u s s y , en me rem ettant malgré moi" pour i , 5q 4 francs assignats
de bestiaux qu ’il avoit reçus en 1785,. valeur numérique , ne m ’a rien d o n n é ,
puisqu’il est démontré par le procès verbal des experts, du 14 messidor an 2 ,
que le prix de quatre bœ ufs me r e m p lit, selon lui , de toute la valeur de mes
a e u x ch eptels; que Choussy a pour bénéfice net plus de q u a r a n te -six grosses
bêtes arables, e t c e p e n d a n t mes deux domaines comportent un labours habituel
de dix paires de b œ u f s , des vaches et élèves dans la mêm e proportion , ainsi
q u ’il résulte du bail authentique des métayers de Chitain , du 12 août 1 79 0 ,
à qui Pierre Choussy impose la condition de labourer et fa ir e v a lo ir à cinq
paires de bœ u fs , e t d ’ avoir au m oins , pendant toute Vannee r cin q hommes,
p our l ’ exp lo ita tio n dudit dom a in e, non com pris l/‘S bergers et domestiques.On voit d ’un côté, que je 11e suis p o i n t r e m p li, à beaucoup près, de la quotité
<îcs bestiaux nécessaires pour la cu ltu r e , tels que je le s ai donnés en 178"), v a le u r
m étallique ; q u ’ils me sont r e m is , m algré m o i, en l ’an 2 , va leu r a ssig n a ts,
franc pour fr a n c ; c ’est-à-dire, valeur n o m in a le ; c e qui est contre l ’esprit des
lois des 2 thermidor et 17 fructidor an 2 ; et (pie de l’autre , j ’a i p a y é à Ja cq u es
C h o u ssy pour sa sim ple m o itié , non com pris ce lle des métayers , une. som m e
d e a,5oo liv. argent, et q u ’ il répète encore ce lle de 1,070 hv. aussi argent, com m e
valeur représentative des 2,892 liv. assignats, montant de mon billet.
J’observerai encore qu ’il falloit être accablé par le tourment des circons
tances , pour laisser dire à Jacques C h o u s s y , q u ’il trailoit avec moi le 17
therm idor an a , pour lui et son p è r e , tandis q u ’il avoit traité la veille avec,
les trois frères R u et-L a m o lle , acquéreurs comme moi des mêmes b ie n s , au nomSeul de son père ; que l ’appréciation des bestiaux s’est montée à QiQSo livres,,
brebis comprises, et q u ’elle a été faite à l ’amiable par nos deux experts, ainsi
qu’il a eu l ’audace de le déclarer par sa quittance (lu 17 thermidor : ce qui est
t a u x , et démontré matériellement f a u x , par la lettre aussi imprimée dudit
�C h o u s s y , du 39 messidor an 2 , qui parle seulement de l’estimation de S a u la ie?,
son e x p e r t } e t non de ce lle au m ien. C ’est donc Jacques Choussy qui par
l'empire des circonstances, a f i x é se u l le p r ix d es ch ep tels ; car si les deux
experts eussent été d ’a cco rd , ou appelés une seconde fois pour rapprocher les
intérêts respectifs, Jacques C houssy ne m ’aurait pas dénoncé au représentant
F orestier, oncle de sa f e m m e ; il ne se plaindrait pas de ma résistance opi
niâtre , de m es tracasseries , q u ’ i l d it n’ étre p lu s il l’ ordre du jo u r ; il n ’écriroit pas qu ’il est venu chez inoi pour terminer ; il ne parlerait pas de la seule
estimation de Saulnier ; il existerait un procès verbal commun des experts ,
qui serait signé par eux et les parties intéressées présentes ; chacune aurait
son double : au lieu q u ’il n ’existe que la narration de cette prétendue estima
tion , toute p en sée, toute écrite de la main de Jacques C h o u s s y , et signée
de lui s e u l , quoique ce soit une transaction qui , pour être régulière, veut
£tre signée du fermier légitime et du propriétaire , parce que cet acte de rigueur
est la reconnoissance de la remise des bestiaux et la quittance de leur prix.
Je ne m ’occuperai point ici d ’aucune observation sur la procédure. L es pièces
s o n t s o u s les y eu x de m on défenseur officieux; il en fera l ’analise , pour éclairer
la religion des magistrats du tribunal d ’appel. Je rappellerai seulement que ,
le premier germinal an 3 , Jacques Choussy n ’osa ni me p résen ter, ni former la
demande en payem ent du billet de 2,892 liv. 16 sous assignats ; il étoit instruit
que les trois frères L am o tte avoient éclairé ma religion, pai la communication
de leur traité avec lui.
D ébiteur app aren t, j’ai dû faire, par délicatesse, et j’ai fait à Jacques C h o u s s y ,
le lendemain de l’échéance du b ille t, des offres réelles de la somme intégrale,
par D u c h o n , huissier à C u sse t, avec les conditions motivées pour la conserva
tion de mes droits. J’ai fait plus , et pour me mettre à l’abri des vexations
journalières de Jacques C h o u s s y , mon débiteur , et de ses trois saisies-arrêtsexécutions, j’ai déposé volontairem ent, le 24 ventôse an 7 , d ’après le vœu de
la loi d u .......................... et sous les réserves apposées audit acte , une somme de
i , 5 oo livres n u m éraire, bien supérieure à celle de 1,070 liv. réclamée injuste
m ent par Jacques Choussy.
Je n ’ai pu invoquer le bénéfice de l’arrêté du 2 thermidor an 2 , et des autres
lois sur les ch ep tels, qu ’à l’échéance de mon b i ll e t , et par l’exploit d ’offres
réelles, parce que j’ignorois dans quelle main étoit mon effet que Jacques C houssy
pouvoit avoir commercé par la voie du transport.
Je suis instruit que des hommes sans m oralité, d ’autres fo ib le s , plusieurs de
bonne f o i , mais trop près de cet excès de confiance qui trompe t o u jo u r s, ont
pensé sur les versions journalières de Pierre et Jacques C h o u s s y , que la valeur
de mon billet de 2,893 liv. 16 sous assignats, avoit pour principe un procédé
généreux; c ’est-ii-dire, un prêt de semblable somme. Je dois déclarer à la répu
blique entière, que Jacques et Pierre C h o u s s y , qui ont imaginé et colporté cet
absurde mensonge , sont les derniers individus du g o u v e r n e m e n t, dont je
voudrais intéresser la sensibilité et l'obligeance.
J’ai senti dès le commencement de ce p rocès, que mon intérêt ne pouvoit
«'•Ire mis en opposition avec celui de Jacques C h o u s s y , sans blesser sa cupidité,
et exciter son irascibilité nnturelle.
M ais Pierre Choussy , n>'a-t-on d i t , ne peut pas oublier q u ’il m ’a d e m a n d é ,
par sa lettre du 5 o juin 1783 , la forme de mes propriétés paternelles, et que
je lui ai p ré fé ré , par raiso n, mes m é ta ye rs, cultivateurs. Il se souvient encore
q u ’il m ’u persécuté lo n g - te m p s pour me faire payer des cens et devoirs aussi
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injustes nu’imaginaires ; que j ’ai éclairé la rehg.on et les intérêts des anciens*-*
redevables de la prétendue directe de C liita in , dont d elo.t f e r m ie r , et que sur
u n e
ordonnance du tribunal de M o u lin s, j ai lait consacrer, après l’avoir mis
en demeure par un procès verbal du 20 avril I 79 2 > rédige par un notaire de
Cnsset nui avoit de son état toutes les vertus et les lurmeres ( le cit. D e v a u x ) ;
nue d'après la déclaration dud. Clioussy , d paroissoit constant q u ’il n ’existoit
noint de terriers de Fretay , Bressolles, R o s ie r , A l le m a n d , en vertu desquels
il exi"eoit des redevances accablantes par leurs quotités, leurs genres de féodalité
et de'servitude personnelle, que la prétendue reconnoissance de C laude R e g n a u d ,
l ’un de mes auteurs, étoit n u lle , de toute n u llité, puisqu’elle n ’étoit signée
d ’aucun notaire.... Ces vérités étoient tellement démonstratives, que dès le 10
octobre 178 2 , ce mêm e Pierre Clioussy m ’écrivoit com m e fermier de Cliitain ,
qu ’il y avoit une instance à M oulins contre différons particuliers , au sujet
u'une transaction entre le seigneur de Cliitain et ses justiciables.... et il ajoutoit :
C e n’ e s t pas que j ’ entends fa ir e usage pour le m om ent de cette transaction contre
v o u s e t v o s fe r m ie r s.... J ’ a i des raisons p articulières pour n e p o in t m e se n 'ir d e
c e titre à l’ égard de v o s o b jets.... j e vou s en dirai le s raisons en temps e t lieu ; et
com m e en matière d ’ intérêt Pierre Clioussy est très-m ém oratif, il me demande
six charrois par d o m a in e , pareil nom bre de journées à bras par locataire, et le
prom pt payem ent de ce qui lui est d û .... sans se souvenir qu ’il vient de me faire
l ’a v e u , qu ’ il a des raisons particulières pour ne pas se servir de la transaction,
dont est question, ni contre moi, ni contre mes fermiers; ce qui est bien contraire
avec sa prétention. M ais le procès verbal du 20 avril 1792 , explique toutes ces rai
sons ; il ajoute enfin, qu ’il espère qu’ ayant affaire à la p lu s équita ble e t la p lu s
ju d ic ie u s e p erso n n e, i l n ’ éprouvera aucune d ifficu lté sur sa prétention. A u jo u r
d'hui il a une idée bien différente de mon équité et de ma justice ; c'est q u ’il fait
marcher so înteret avant tout autre considération*
Il
en falloit moins en l ’an 2 , pour réveiller toutes les passions de la cupidité
et de la vengeance ; Pierre Clioussy ne m 'a prié , pressé de le continuer
ferm ier depuis le 9 brumaire an 2 , époque de mon adjudication jusqu'au 6 mes
sidor su iv a n t , que pour dégrader avec p lus d’ im p u n ité, aij\si qu'il est constaté
par le procès verbal authentique de l’état des lie u x , l'intérieur de mes maisons
et bàtim ens de C liita in , m e refuser avec acharnem ent et depuis sept a n s , non
seu lem en t m es loyers e t ferm ages , m ais le p r ix des différentes livraisons de
p o isso n s te lle s que je le s lu i a i v e n d u e s , e t la ju s te in dem nité des réparations
loca tives e t abus d e tous genres signalés audit acte.
Je n ’opposerai à ces deux h om m es, qui sont bien constamment mes ennemis
p ronon cés, que des actes de ju stice, des bienfaits. D è s l ’origine de notre di
vision et dans tous les t e m p s , j'ai offert et fait offrir sans s u c c è s , à Jacques
Clioussy, par le citoyen G u a y , mon avoué à M oulins, tous les moyens amiables
qui pouvoient rapprocher nos intérêts respectifs; je tenois singulièrement à ce
genre de procédé. . . . U11 magistrat de ce tribunal connu par ses m alheurs, ses
lu m iè re s, sa noble franchise , et qui connolt aussi mes principes concilians
a proposé, il y a deux m o is , sa médiation à Jacques C lio u s s y , et il l ’a rejetée
avec une aigreur repoussante.
L a justice (pie Jacques Clioussy m'a refusée si négativem en t, je l ’obtiendrai
sans doute , de ces magistrats supérieurs, que toutes les affections, tous les
hommages publics environnent.
J’ai dit en commençant ces réflexions que Jacques Clioussy m'avoit apporté le
17 thermidor an 2 , un compte tout apprêté, tout inexact... Parm i une foule d ’er-
�Tours , je. Tais en préciser quelques-unes : Pierre C houssy a reçu en 178." les
cheptels d is bestiaux en estimation ordinaire; c ’est-à-dire, le cinquième déduit.
I ,e fa it est constant et avoue par l’ élat iibprim é cotte 3 . Jacques Choussy a senti
q u ’il éloit de son intérêt de porter par sa si'ule volonté les cheptels à prix do
lo ir e , parce q u ’en grossissant la so m m e, le résultat en devenoil plus avantageux
pour lui. 11 falloit au contraire, et suivant l ’usage constant des lieux, estimer
com m e en 1783; c ’est-à-d ire, com m e sou p ire avoit reçu, ou diminuer le cin
quième de la prisée de foire ; et le cin qu ièm e de la som m e de 9,960 liv re s, fixée
arbitrairement par Jacques Choussy , pour la masse des deux ch e p te ls, ceux
des brebis compris, est de. 1,990 livres : ainsi, première erreur importante. Il cil
existe deux autres aussi grossières ; le cheptel des métayers du domaine Joninain,
par a ctereçu D eb rest, notaire, le 21 août 1782, est de 1,075 liv r e s , brebis com
p r is e s , et Choussy le porte dans son bordereau im prim é, pour la som m e de
1,290 livres : il y a donc une erreur de 220 liv. et non de 55 o Iiv. que C houssy me
fait payer de trop, quand bien m êm e j ’aurois voulu avoir le mêm e cheptel que les
métayers dévoient lui laisser, parce q u ’il ne peut rien changer au mode de son bail>
et qu ’il doit céder les cheptels pour le même prix qu ’il les a donnés auxdils métayère
et que ceux-ci doivent les rendre. L e cheptel des métayers du domaine de Chitain
par acte reçu C a q u e t , notaire, le 12 novembre 1 7 9 2 , est en estimation ordi
naire de i)545 liv r e s , non com pris le s brebis q u i doivent être rendues tdtc.
p o u r te t e , ou p a y é es 2 livres, et C houssy le porte à 1 ,8 4 1 , non com pris le s bre
b is q u ’ i l f a i t p a yer G livres la p iè c e : il y a donc encore une erreur matérielle
de 276 livres, parce que Choussy 11’a pu porter atteinte aux conditions des mé
tayers avec l u i , ni les changer envers moi pour grossir son intérêt ; je n’ai connu
et"dû étu dier, analiser, comparer toutes ces erreurs m athématiques, qu'après la
remise de ces b a u x , et cette remise 11e s’est effectuée que le 17 thermidor an »,
et après que Jacques Choussy m ’eut fait compter les 2,5oo liv. argent, et souscrire
le billet de 2,892 liv. iG s.
IMais tous les comptes faux et tortueux de Jacques Choussy disparoissent
devant les lois réprimantes que j ’ai invoquées'tour à tour. C es lois ont dos rapports
si purs, si directs, si successifs, q u ’elles se réunissent toutes par les mêmes prin
cipes pour opérer les mêmes résultats , ( justice , égalité d'intérêts ). rJ’outes ont
été rendues et renouvelées à mesure que les réclamations sur l’abus de leur exé
cution se sont multipliées; toutes ces lois ont v o u lu , com m andé le retour et
rafferm issem ent (le l’intérêt s o c ia l, sans blesser l’intérêt individuel; toutes ont
é t é p en sées pour secourir le s propriétaires fr o is s é s , v ictim e s ou par la cu p id ité
île leurs ferm iers , ou la tourmente des circonstances ; toutes ont ordonné
la rem ise des b estia u x et effets aratoires d e la part des colon s et. ferm iers en
m êm e nombre et qu a lité'qu’ ils le s ont reçu s ; toutes ces lois enfin, me rappellent,
m 'adm etten t, me confirment dans toute l’intégralité de mes d r o i t s , et elles
écartent et proscrivent toutes les fins de non recevoir astucieuses , que Jacques
Choussy voudroit opposer , parce que je me trouve au mêm e et semblable état
qu'au 17 thermidor an 3 , et que je suis dans le sens, l'exception, la f a v e u r , la
justice voulus par le législateur ; soit encore à raison des erreurs monstrueuses
dont fourmille le compte de Jacques C h o u s s y , soit à raison de sa dénonciation
e| de cette tourmente uni a existé si long-temps dans le district fie Cusset.
Le conseil voudra m éclairer après l’examen de la procédure et des pièces justificnliv.s.
Jarijims Chou.s.sy dit , page 17 île son mémoire , que le conseil qui a rédigé;
mon premier p récis, n a u r o it p as'd o n n é son app rob ation, s'il eut <•0111111 les
circonstances
�circonstances et les faits d e là cause. Je suis obligé de faire imprimer le mémoire
à consulter, qui lui a été remis par le citoyen G ourbeyre, mon défenseur offi
c ie u x , pour justifier que toutes les pièces des procédures de Cusset, G annat et
M o u lin s , ont resté devant m on conseil pendant plus de quinze jo u rs, et q u ’il
en a fait 1extrait, l’usage, que sa prudence lui a dicté.
Je vais répondre à quelques objections du mémoire de C h o u s s y , absolument
étrangères à la cause et à la discussion des moyens. M ais comme elles forment
une masse de choses controuvées, je dois rétablir la vérité.
Choussy d it, page 3 de son m ém oire, q u ’il a été dépossédé de sa ferm e, le 24
juin 1794» m a*s a-t-il jamais éLé fermier de Chitain en nom seul ou co llectif, et
voudroit-il inspirer de l ’intérêt par cela mêm e q u ’il se dit ferm ier d ’émigré ?
Choussy parle de sa lettre du 29 messidor an 2 ; il dit que je garde le silence
tendant quinze jours; c’est-à-dire, jusqu’ au 14 thermidor que je lui écris celte
eltre, commandée par les circonstances.
Choussy convient donc d ’ un silen ce de quinze jo u r s , (Fun éloig n em en t, d ’ une
résistance par la m êm e à sa v o lo n té trop m écham m ent exp rim ée. M ais la
phrase précédente explique des choses bien plus fortes . . . . elle dit qu e j e dif
f è r e . . . que j e dem ande des d é la is * . , que j e l’oblig e à fa ir e des voyages inu
tile s e t fa tig a n s.
Ch oussy confesse donc bien mon éloignement p a r le s déla is que j e d em a n de....
il avoue donc son im porlunitépar se s différens v o y a g e s .. . O u i , ma résistance
é to it co n sta n te .. . . O u i , ce s voy ag es n ’étaient p a s in u tiles pour l u i , m ais
tvès-fatigans ]X)ur m o i .. . I l vou toit pa r leu r fr é q u e n ce , son obsession , ses
m enaces réitérées , m e conduire à se s f i n s . . . Il fallut donc é c r i r e . ... T o u t le
district de Cusset étoit dans le deuil et dans une stupeur m o rte lle .. . . Quand
Choussy parle plus loin de ces atrocités, il a l’air de raconter une fable ; et ce
r.eveu si com p rim é, si intéressant, si affectueux (le citoyen Dussaray-Vignoles
fils), que l ’on force à voter la mort de son oncle Rougane-Prinsat, (page 8 d ’un
mémoire signé par 170 citoye n s), et ces nombreuses victimes qui n existent plu#
autour <le nous, et dont le sang bouillonnoit encore le 17 thermidor an 2 . . . et los
douze individus envoyés le 28 du mêm e mois au tribunal ré v o lu t io n n a ir e ....
et tous ceux qui étoient encore désignés pour les remplacer ) ; toutes ces calamités
publiques, citoyen C h o u ss y , étoient-elles donc des suppositions... des j e u x . . .
des effets d ’une imagination tranquille?
P a g c 4 » Choussy dit que je paye une somme d e 3,5oo fr a n c s a ssigna ts, et ce
pendant c ’est une somme d e 2 , 5oo f r . a rg e n t, dont i l m e donne une quittance
m otivée. . . V o u d m it-il être cru sur parole , lu i q u i é to it s i p a isib le , lorsqu’ i l
tenôit la p lu m e .. . lu i q u i sa it s i bien m en a cer, tourm enter, d én o n cer, cal~
ctder. . . .
Choussy n ’est pas plus exact dans la narration de l ’acte d ’offres de payement
de mon billet du a germinal an 3 . . . . N o n seulem ent i l en défigure le s condi
tions a p p osées, m ais i l e s t s ile n c ie u x sur l ’ objet e s s e n tie l, sur ma réclam a
tion form elle e t contre le s circonstances p articulières q u i m ’ ont contraint à
souscrire l ’engagement dont est question, et sur nies répétitions de som m es consi
dérables , dues par le fe rm ie r de C h ita in , en vertu de mon titre d ’ adjudication.
Page G , Choussy veut encore que je n ’aie contre lui n i créance n i titre.
M a is il a jo u i de m a fe rm e pendant n e u f m o is , et sans m ’ avoir p a y é ; m ais
i l d it avoir un acte q u i le subroge dès 1 7 9 2 , à la fe r m e d e C h ita in . D o n c il
doil. Quand me p ay e ra -t-il? quand en aura-l-il ou le temps ou le moyen ? M e
JVra-t-il uu crime dy 111» patience?
H
Î
�( 10 )
Page 8. L a qualité de b ra ve représentant est encore [ouvrage de Ch oussV ,
puisqu'il l’a employée dans sa lettre. J’ai dû la présenter com m e i! a voulu qu'elle
lu t lue. Il est des affections, que le temps ou les circonstances détruisent pour
toujours. A v a n t la révolution j’ai eu pour régulateurs dans mes affaires contentituises les citoyens Grangeon , T o u r e t , M allet et T o u t té e p ère ; et depuis la
révolutio n , les citoyens Jieraud, D u r y , A n drau d , G ren ier, V e r n y , T o u t t é e
fils et Pages. Je présente leurs consultations pour démontrer la fausseté dé
l ’allégation de C h o u ss y , en indiquant avec respect les noms de ces jurisconsultes;
éclairés et vertueux.
Page 9. O u i , j’ai accompagné Forestier à la commission des subsistances et
an comité de salut p u b lic , parce q u ’il falloit y être présenté par le député de sondistrict , pour poursuivre la réquisition des grains que j’avois à prerdre dans le
département du C h e r , qui se refusoit à l’exécution de l’arrêté de la commission
des subsistances. :\I us ces promenades dont parle C h o u s s y , sont aussi étrangères
à la cause, que les injures q u ’il m é d i t si gratuitement.
Page 10. Je n ’ai été que très-momentanément du comité de surveillance de’
V ic h y , et après la démission du citoyen C o r n i l ,. notaire. Je reçus ;’i cette époque
les félicitations des citoyens de la com m une : je 11’ai été en activité que pour
dix-huit séances; j ’en ai donné quittance; je fus éloigné après.
Je n ’ai point été fonctionnaire public depuis le commencement de la révolution,
co nu e Choussy se permet de l’avancer à dessein : j’étois en mission pour les
subsistances dans le département du C h e r , quand V ern erey me n om m a membre
du conseil île district, le i 5 pluviôse an 2 ; je le justifie par la lettre imprimée de
l'agent national. O11 sait que ces administrateurs étoient sans fo n ctio n , et q u ’ils
n ’avoient d ’activité, q u ’autant q u ’ils étoient appelés de leurs différentes co m m u
nes. C houssy dit encore une fausseté, en p la ça n t, page 10, ma nomination au
y 5 prairial. Son m o t if est pénétrant. M ais quand cette nomination eut été du
prairial , je ne pouvois coopérer à aucun acte a d m in istra tif, puisque j’étois
dans le département du C h e r ; qu ’après mon retour en prairial, le district me
nom m a aussitôt pour une levée de quinze cents quintaux de grains sur celui de
G a n n a t , et que je ne suis rentré chez moi qu’entour le 10 messidor, après cinq
mois d ’absence. iNIa commission imprimée fixe mon départ, ici encore Jacques
Ch oussy sue et aspire tous les genres de passions , en déclamant contre C laude
A r m illio n ; en prenant le fait et cause de Bo urgeo is, avec une chaleur qui décèle
l ’intérêt q u ’il donne à ce dernier, et en suspectant les citoyens Gravier-Dum onc e a u , G r a v ie r -R e y n a u d , Sauret et moi , d ’intelligence avec A r m illio n , q u i ,
quoique voilurier par eau , force à l’estime ses amis et ses ennemis.- Mais la
déclaration d ’A rm d lio n lui appartient tout entière; elle est le cri de Son intérieur
seul.
.
O u i , Jacques C h o u s s y , mon conseil vous a qualifié avec raison de neveu du
citoyen Forestier; et je suis aussi étonné de vous voir nier avec effronterie celte
alliance rapprochée , que vos rapports habituels avec cet oncle. Fia pièce
imprimée à la page 20 justifie mathématiquement que vous êtes son neveu
i\ la mode de Bretagne. Ouand j’avouerai que Forestier est venu souvent chez
nfoi , sur-tout avant la révolution , com m e il alloit chez tous les citoyens des
communes environnantes , je dirai une vérité d ém o n strative; mais je n ’aurai
pas votre foi blesse pour démentir des faits (»ositifs.
Pages 11 et 12, vous dites e n c o r e , Jacques C h o u s s y , que j ’aurois dfi parler
des événeniens rclatils à mou b ille t, quand Forestier éloit incarcéré. Y o l r ç
�(ii)
Cj
^b’cction pi-cuvr assez ce quo vous aurirz i a i t , si toîis eussiez ¿lé à ma place :
je me tais, p:irce que je respecte le malheur clans lsf personne de mes ennemis.
Pa^e i3» Jacques Choussy veut me rappeler sans doute, qu’à l’exemple des
citoyens les plus énergiques et les plus bienveillans, j’ai p u , j’ai dii ¿ire utile
à mes c o n c ito y e n s .... et quand la com m une de V ic h y m ’a prié dans les temps
de lui donner un intérêt e lfe c t if contre le syndic du diocèse de C l e r m o n t , qui
réclamoit l’universalité des biens des célestins de V ic h y ; que ce z è le , cette sur
veillance se sont continués pendant plus de cinq ans ; q u ’ils ont été couronnés
du succès le plus complet ; (pie la ville de V ic h y a obtenu de riches dotations
S ou i ses églises , ses pauvres , son h ô p ita l , son officier de sa n té , un collège, des
istributions abondantes d ’argent ; que tous ces so in s, ces m o u v e m e n s, cette
correspondance journalière, les honoraires , les frais d ’avocats, de procureurs t
huissiers, secrétaire de rapporteur , mémoires im prim és, frais d ’impression , de
distribution ; en un m o t , tout ce qui constitue une masse énorme de déboursés...
Éh bien ! que Jacques Choussy compulse les registres, q u ’il soulève toutes les
consciences, q u ’il demande à ces bons habitans de V ic h y , aux trésoriers, aux
dépositaires de leurs comptes , c e qu’ il en a co û té h la co m m u n e, ils répon
dront par ju s tic e e t a ccla m a tivem en t, r ie n , absolum ent r ie n . . . p a s une obole.
E t quand la commune de Cusset me fit p r i e r , l’année dernière , de la sup
pléer à Paris [>endaiit l’absence du citoyen A m e lo t , ex-législateur, de lui donner
des soins empressés , de rédiger ses mémoires manuscrits, les distribuer , les faire
imprimer , payer les frais d ’impression , les présenter aux consuls, aux conseillers
cj’état et autres autorités , ai-je dû être le p a tro n , le so lliciteu r des habitans de.
C u s s e t ? O u i , sans doute , e t d ’ une manière tellem en t a ffe c tu e u s e , désinté
ressée , que Ja cq ues C h o u ssy ne trouvera n u lle part le s traces qu ’il en a coûté
à la commune de Cusset le plus léger d é b o u r s é ; .......... et si ces missions d ’hon
neur ces actes de devoirs et de dévouem ent, et qui ont été pour moi autant de
jouissances et d ’occasions de m ’acquitter et de mériter de nouveaux bienfaits de
mes concitoyens , doivent m ’attirer de Jacques Choussy une critique a m ère, des
sottises, des in ju res, des calo m n ies, les magistrats mettront un grand prix sans
doute h la pureté de mes procédés, et ine vengeront de la lâcheté de mon en
nemi ; et si toutes les âmes des communes du district de Cusset étoient encore
de la trempe de celle de Jacques Choussy , faudroit-il briser sa plume , toutes
ses affections, et fermer son cœur et sa bourse aux accens du malheur , dé
l ’a m itié , <le la reconnoissance ? non sans doute..........
Pour édifier Jacques C h o u s s y , et lui donner le goût de l ’im itatio n, je vais
transcrire quelques parties des lettres que j’ai reçues, dans les temps , des citoyens
de V ic h y . Je me tairai sur celles des citoyens G ravier et C h o clie p ra t, écrites au
nom de la ville et de l’hôpital de V ic h y , et sur celle du citoyen L u c Forissier ,
commissaire du gouvernement près la municipalité de C u sse t; elles sont trop
flatteuses pour m o i , et faligueroient par là mêm e l’humeur de Jacques Choussy,
J e me borne ù ces deux actes publics.
«
«
«(
«
«
a V o s compatriotes n ’avoient pas besoin de ce dernier trait de bienfaisance,
pour connoître toute la générosité de votre c œ u r , mille autres de ce genre
les avoient pleinement convaincus de tout ce que vous pouviez, faire et entre-.
prendre pour e u x ; le soin que vous avez pris au sort des malheureux pour
qui vous vous occupe/, le p lus, est un acte pour vous de triom phe, qui se
transmettra à la postérité la plus reculée; et par surcroît de bunté et dç zèle,
�«
«
«
«
«
«
¡1 faut que je me ressente de vos bienfaits; ce travail qui vous est ordinaire,
vient assurer à une petite famille encore au berceau un père et un bienfaiteur;
mais ils le sentent, et ie dois être leur garant auprès de vous. C e titre m ’est
d ’autant plus c lic r , q u ’il me rapproche de votre souvenir, et q u ’ils y ont autant
de droit que moi. S i g n é , J N o v i . i t s , officier de sauté, v i c h y , ce 6 août
1787..
E x tr a it d e la lettre de la sœ ur supérieure de l ’ h ôp ital de V ic h y , 9 a oût 1787.
« J’ai reçu l'honneur de la vô tre, avec la plus grande satisfaction et la plus
vive et sincère retonnoissance : nos devoirs sont trop multipliés à votre égard,
pour vous offrir des remercîmens ; je puis vous assurer que nous graverons
votre n o m , et que votre mémoire sera en bénédiction dans notre maison ;
un million d ’actions de grâces de tant de jxùnes et de soins pour nous procurer tant de bienfaits. V en e z d o n c , m onsieur, afin que chacun puisse.vous
téoioigiier ses sentimens; comme vous entendrez le jargon de nos petits enfans»
chacun à sa m anière, que vous êtes son bienfaiteur \ S ig n é , 6. Fiiançoisk
V a lle t.
Page 12 , Choussy dit que pour rendre m a cause intéressante, j ’ai remué la
fange des p assions.. . . C e soulèvement n ’est ni de ma cause, ni dans mon carac
tère ; j ’ai produit les pièces qu ’il m ’a rem ises, celles qui se lient aux circons
tances , que l’on a placées, par la voie de l’impression, dans la m ain des admi
nistrés , et que tout le district m ’a apportées.
Je n ’ai jamais été membre de société populaire que de celle de V i c h y , que
j ’ai très-peu fréquentée, parce que j ’ai été en mission pour des grains depuis le
mois de pluviôse an 2 , jusqu’au 10 messidor suivant. J ’ai donné quelques dis
cours de morale dans le sens dt*s citoyens paisibles et vertueux. Je n ’ai paru que
très-rarement à la tribune de la société de V i c h y , et toujours pour proposer à
mes corn iloyens des actes d ’humanité. Je me rappelle e n lr ’autres qu ’ils m 'ont
nom m é commissaire pour solliciter les libertés des citoyens Cailliaud, et Fouger o lle s, mort depuis aux armées de la république, et que j ’ai été assez heureux
jx>ur obtenir sur le champ leur mise en liberté.
Page i/f, Choussy demande de quel droit auroit-on voulu le forcer à me
laisser des l>estiaux sans en recevoir le prix / , , . et il ajoute . . , ne doit-on p a s
traiter conform ém ent a u x lo is q u i e x iste n t au moment oit l ’on entre en pourp a rler? . . . . Eh bien! Jacques C h ou ssy, vous venez de décider la question qui
nous divise; et en objectant comme v o u s, je dirai de quel droit voulez-vous me
payer un cheptel de 1,594 fr. écus de 1 7 8 3 , avec une monnoie idéale? Pour
quoi prétendez-vous que le p rix, le se u l p r ix assignats d e quatre bœ u fs , com
p lém en ts la va leu r de p lu s de cinquante grosses bétes a ra b les, qui formoient
en 1780 les cheptels de m es d e u x d o m a in es, que votre père , par une cla u se
p articulière de son b a il, doit m e rendre com m e i l le s a reçus du ferm ier p révéilent. , . . E t p uisque vou s vou lez traiter conform ém ent a u x lo is q u i e x is te n t
e u moment oti l ’ on entre en poun-parler , pourquoi depuis sept ans vou s jo u e z vou s du v œ u im péra tif de l ’arrêté du 17 fru ctid o r an a , qui reporte le s ch o se s
et l e s parties au mente état ou c/fes étaient avant l e 2 th erm id or? O r , vous
m ’avez forcé de traiter dans l’intervalle de ces deux lois : donc je suis , de votre
propre a v e u, d.ms l ’exception voulue par elles.
Page iü* Chi»ussy n ’est ¡»as plus exact pour les noms de personnes que pour
«
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«
�(1 3 )
les citations de choses; il parle d ’un m éta yer illitéré, no m m é M a rie B a r g e ,
qui a formé une saisie-arrêt entre mes mains. Je déclare q u ’il n ’en existe point
au nom de M arie Barge.
S i j ' avois é t é c e que Jacques C h o u ssy s ’efforce s i p é n ib le m e n t, s i m é
c h a m m e n t d 'écrire , nous n ’ aurions ja m a is é t é d ivisés n i d ’ in tér êt, n i de
p e n s é e , n i d 'a c tio n ; ses so ciétés , ses g oûts , se s am is seraient le s m ien s •
i l n’ auroit p a s f a i t des voy ages in u tiles e t fa tig a n s , ni éprouvé des délais
et une résistance forte et constante de ma part ; il ne m ’auroit pas dénoncé p ou r
des tracasseries qui n ’étoient plus à l’ordre du j o u r , e t c . , e t c .; enfin, et il fa u t
encore l’ajouter i c i , je n ’aurois pas été m a n d é , six jours après mon retour d e
la mission des g r a in s , pour rendre compte de l’intérêt naturel que je devois à
l ’abbé A u f a u v r e , petit neveu de m a m è r e ...........justifier matériellement q u ’il
étoit dans le sens voulu par la loi ; je n ’aurois pas été nécessité d ’envoyer , en
trente-six heures, à V o selle , à G a n n a t , à M o u lin s , pour avoir la sanction des
différentes autorités de ces trois c o m m u n e s, sous peine d ’arrestation , co m m e
si je pouvois répondre des procédés d ’un tiers demeurant à P a r is , et que j ’avois
perdu de vue.... L es signatures de ces différentes administrations, des 16 , 7
1
18 m essidor, sont devant le tribunal d ’appel. O n n ’auroit pas essayé de faire
r e v i v r e , contre m o i , la fable du loup et cîe l’a g n e a u , et Jacques Choussy n e
m ’auroit pas repris, m enacé, tourm enté, dénoncé onze jours après, c ’est-à-dire,
le 29 messidor, époque de sa lettre.
P L A N T A D E - R A B A N O N .
A R iom , de l'imprîm. de L ANDRIOT, imprimeur du T ribunal d’appel. — A n 9 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Plantade-Rabanon
Subject
The topic of the resource
ferme
cheptel
experts
pétitions
subsistances
biens nationaux
distribution de blé
rumeurs
terriers
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire au conseil, pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire de la maison, domaine de Chitain, Joninain ; contre Jacques Choussy.
Table Godemel : Restitution : contre un règlement, pour cause de crainte et de dol.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
13 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1127
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1128
BCU_Factums_G1129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53155/BCU_Factums_G1127.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chitain (domaine de)
Joninain (domaine de)
Cusset (03095)
Vichy (03310)
Saint-Gérand-le-Puy (03235)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
cheptel
distribution de blé
experts
ferme
pétitions
rumeurs
subsistances
terriers
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53116/BCU_Factums_G1018.pdf
aee08ceb37265cfd079a365bd7f9b5e5
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Text
M
É
M
O
I
R
E
'
la C itoyenne C a t h e r i n e G A L L I C E ;
veu ve de N i c o l a s C H O U S S Y , Appelante
de jugement de la ci-devant juftice de Billo m ,
du 20 février 17 9 0 .
P o u r
Contre
les
Citoyens
BARTHELEMI , M a r i e
& Catherine CH O U SSY
de G a s p a r d
A v it
C H O U S S Y
G RELICH E
C houffy
,
, enf ans &
&
héritiers
Fran çois
-
, marit de ladite Catherine
In timés.
B
A r t h e l e mi Chouff y & fes fœurs me font plaider depuis
fept a n s , fans autre intérêt qu e celui d e tourm en ter m a
vieilleffe : mes créan ces f ur la fucceff ion d e mon mari leur
font o m b r a g e : créanciers e u x mêmes d ’un reliq u a t d e
c o m p t e d e tutelle , en core incertain & i n d é t e r m i n é , a van t
de favoir c o m b i e n il leur eft d û , ils s’inquiètent c o m m e n t
- i l s feront payés : au lieu de rece voi r leur pai em en t plufieurs fois offert par l’héritier bénéficiaire d e N i c o l a s
C h o u ff y , leur t u t e u r , s’ils v o uloient ne pas e x a g é r e r leurs
prétentions & c o m p t e r a l’a m i a b l e , ils fe p la ifent à feindre
des cr a in tes q u ’ils n’ont pas fur l’infuffifance d e l’h é r é d it é ;
& pour f a t i s f a i r e leur ambition ( a ) , ils voudroient faire
( ) Cette ambition cft d’autant plus déraifonnable , qu’ils repréfentent l 'a iné de !a famille qui av oit eu cent mille liv r e s de l’héré
dité pa tern ele , p endant que Nicolas C h o u f f y , puiné
& mon
m a r i, n’a- reçu de c e frère aîné que quatre mille livres cinq cents
A
�A -«
2
rédu ir e mes créances qui les priment en hy po thè qu e. Ils
s’attachent a v e c un a c ha r ne m en t inc on ce va bl e à fe préparer
à J’a v a n c e , par cette ré d u d ti o n , s’il leur étoit poflïble , des
reilburces tres-furabondantes depuis la haufle des biens.
C e t t e ¿racaflerie .évidemment dé nué e d’intérét ré>. , ne
fe conciliera certainement pas la f a v e u r , mais c ’t f i à la
Joi feule à nous juger & non aux conlidc ra unn s ; aulii n’inv o q u e r a i - j e que l’srppui de la loi , pour me défend re de
l ’at taque paifionnée de mes adverfaires ?
M e s créances ont ieur fo nd em en t dans mon contrat de
m a r i a g . ' , par lequel j ’avois été iniluuée héritiere de Jacque s
G a ll i c e mon père, & dans d e u x dé clarations ou reconnoiflances
que me fit Nicotos ChoufTy , mon m a r i , l’ une ic ¿ octobre
1 7 6 8 & l’autre le 10 mai 1 7 7 * 5 des m a r c h a n d é e s du
c o m m e r c e de mon père ( m a rc h a n d drapier & mercier ) ,
d e fes effets fie d e (on mobilier dont il s’étoit emp ar é après
fa m o r t , fans inventaire.
L e fort de ces rcconnoiflances eft décidé ; le ci-de van t
bailli de B il lo m , par ju g e m e n t de f o r c lu fi o n , du 20 février
1 7 9 0 , les avoit déclarées nulles, L e tribunal de R i o m au
contraire a d éci d é q u ’elles J o n t v a la b U s , mais fufpeétes
d ' e x a g é r a t i o n , & qu’elles avoient befom d ’étre jo r tijie c s
p a r des preuves Jecondaires qui d itr u ijin t le J ou p ço n : en
c o n f é q u e n c e , il a été ordonné que je ferois p r e u v e , tant
• par titres que par témoins & la com m une renom m ée, de la
co nlillan ce &
valeur des marchandifes , ainfi que des
me ubl es , beftiaux , or & argent de meurés du décès de
G a l l i c e , mon p e r e , 6c les intimés preuve contraire fi bon
leur fembloit.
L e bu t de ce j u g e m e n t quel a - t - i l été ? de pouvoir
1
livres pour toute légitime , mon mari ayant négligé , fous de
vaines promettes, de former une demande judiciaire en léfitianî
de rigueur, le citoyen Jacques-Philippe Choufly , fon héritier
bénéficiaire, a formé cette demande jufte & affez coiiféquente ;
ils ont eu la délicateifc de lui oppoicr la prefeription, '
�42/
comparer le rlfu lta t des enquêtes a v e c le rtfu îta t des reconnoiflances; de juger par les preuves des e n q u ê t e s , d e
la fidélité ou de l’ex ag é r a tio n des reconn oiiïan ce s, & d e
prononcer ou leur confirmation o u leur ré dud ti on , s’il y
avoit lieu.
L e s enquêtes ont été faites , elles font ra p p o rt é es , de
q u o i s’agit-il maintenant ? de les a p p r é c i e r , de voir fi elles
fournifîent à la véracité des reconnoiflances attaquées ,
l ’appui qui leur m a n q u o i t , fi elles écartent le fo up ço n
d ’exagé ra tio n dont les avoient environnées les frère & lœurs
Chou iTy , ou fi elles juftifient au contraire leurs clameurs
d ’enflure.
Il n ’eft plus queftion de réunir & de difeuter le faifeeau
de préfomptions qui jetoit de la défiance lur ces reconnoiffances a v a n t les enquêtes \ tout ceci eft jugé : il a été dit
que les reconnoiiïances étoient f u i p e é t e s , ne fe luffiloient
pas à e l le s- m ê m e s, & avoient beloin d ’étre fo rtifiées par la
preuve teftimoniale ; cette fimple obferv at ion rend le
mé m o ire imprimé des frère ôc lœurs C h o u i l ÿ un h o r s d ’œ u v r e com ple t ; car quel en eft-le réfultat ? Peu fatisfaits
de leur enquête , ils le font tourmentés pour préfenter
encore un tableau de toutes les circonftances qu ’ils a vo ie nt
pré tendu avoir p r é c é d é , a c c o m p a g n é ou fuivi les re con n o i i ï a n c e s , 6c deiqueiles pouvoit fortir q ue lqu e foupçon
d ’e n f lu r e ; il» ont r é p é t é , encore une f o i s , ce qu ’ils avoient
dit fix fois ava nt le j u g e m e n t interlocutoire. H é bien ! à
quoi font-ils arrivés ? à conclure a v e c ce ju g e m e n t que les
reconnoiilîtnces font fulpeétes & ont beloin d’être fortifiées j
msis voilà tout \ par coniéq uent la d é cl am ati on d e c e
mém oir e eft une peine entièrement perdue.
Soit : les reconnoillaiices faites à la ve u v e C h o u f l y n’avoient
befoin que d ’étre fortifiées par une preuve teftimoniale de c o m
m u ne r e no mm ée q uj rendit t é m o ig na g e de leur véracité j
mais Pont-elles obtenu ce tém o ig na g e ? ce fera toujours à
ce point urtique q u ’il fa u d r a revenir.
JJ éd a ign o iis d o n c les v a in e s & futiles d é c l a m a t i o n s des
A
a
�frère & foeurs C h o u f f ÿ & venons à l’an a ly fc des e n q u ê t e s ;
le tribunal n’a plus à s’oc cu p er que d ’elles. L e m o y e n le
plus sûr de p r o n o n c e r fi ces enquêtes co nfirment ou détruifent les reconnoitTances, eft d e les mettre en paralleîe.
L a reconnoifiance du 2 o i t o b r e 1 7 6 8 contient le détail
des ma rchandifes trouvées au décès de J ac q u e s G a ll i c e
da ns fa boutique & ton m a g a f i n , l’efpèce , la quantité ,
l’a u n a g e & l’évaluation ; le montant entier des m a r c h a n —
difes ell d e 10,4^3
10 I . , co mparons a v e c le réfultat
de s enquêtes,
E fp è c e s & quantité des mar E fp èces & quantité des m treha n •
d ijes du commerce de Jacques
chandifes com prijcs dans
G a llic e , m entionnées dans U s
la déclaration du 2. oSobrs
enquêtes.
tj68.
Cad is.
Ratines.
Serges de différentes efpèces.
Bouracans.
Ffpngnolettes,
Finettes.
Saumières.
D roguets.
Flanelles.
T o ile s de Rouen.
Bas pour h o m m e s, femmes &
enfans
Cotonnades.
Mouchoirs.
Camelots.
Différentes efpùces de batifle.
D e mi-loudre.
Carifel.
D e s peaux. *
D e Cenquête d'recît.
Les témoins 1 , 2 , 9 , 1 0 , 1 4 ,
i ç & 1 7 , dépofent qu’il eft de
leur connoiff.ince que la boutique
t le magafin dudit G allice étoient
bien garnis en draperie & autres
marchandifes de beaucoup d efpèces.
Le 19 .' en d ra p s, en taffetas*
en m oufle!ines, en couvertures e
autres objets.
Le 23.' en draps de toute« façons,
en taffetas, en c melots , en c tonnades , en coutelines , en toiles
d ’Orange , en mouffelines , en
toiles de coton & autres objets.
Le 24.« en toutes fortes d’étoffes.
Le 26.e en toutes fortes d étoffes,
comme diaps , couvertures, coton*
Différentes efpèces de taffetas. n a d e s, c a m e lo ts, c épons.
Le 28.« en draperie & mercerie.
Crépons.
Le 3 y t en étoffes pour hommes
T o lo la n e .
&
p ur femmes.
Tannes.
Ces témoignages font-i's défrnitj
Veloutés,
Différentes efpèces de bonnets. par l ’enquête contraire ? Ü s’çn faut
8
5
�4
^
bien ; quelque mal difpofés que
fuffent la plupart des témoins, ils
défignent de même les marchandifes
du commerce de Jacques Gallice.
Rubans^
Liens.
Padous.'
Galons.
Jarretières.
Bourdaloues.
Quelques galons & bouton»
d’argent.
Etamines.
Velours dits de gueux.
Différentes efpèces. de toiles.
Différentes efpèces de bafins.
Bougrans.
Chapeaux.
Papelines.
Coutelines.
Filofelles.
Cambayes.
Touloufe.
Callemandre.
Dauphines.
Montaubans.
D u premier procis-verbal de l'er.qucei
con train .
'
Là dépoiition du 2ld témoin porte
des ratines , ‘’des montaubans , de*
camelots’ & autres étoffes de cette
efpèce.n
Celle du 3.% des draps d'Angle
terre , des ratines, des cadis , des
montaubans, dés jarrétières, °des
boutons , des dbubîures' â ’irâbits
nur.
& autres fournitures.
C e lle dii j . e , dès r a tin e s,
de*
montaubans ,_,des peluches, des
Ber-op-zoom , des flanelles, des
cadis & autres étoffes de draps,
quelques1'toiles de R o u e n '& défi
cotonnade?.*
Celle' du n . e , des cadis, des
Rats de caftor & autres rats.
Différentes efpèces de couverd“
,
v
•1 » 1 % bonnets & des gans de payfan.
ture*, boutons, poils de che0
1 J
v r e , fils démarqué, & plu- D u jtco n d proàs-verbal de la même
iieurs autres marchandifes de
enquete.
^
cette efpèce.
<
■
La dépofition du i.*^. témoin
porte dès efpagnolettes, des cotonnades & autres de cette efpèce.
Celle du 3 « , des étoffes communes, & en outre des couver
tures & des bonnets de laine.
Celle du 4.«, des cadis, des droguets , des couvertures , de*
cotonnades, & autres marchandifes de cette efptce.
Celle du ç.e y beaucoup de couvertures, (les bonnets de laine»
des ba s, des mites , des cadis & autres étoffes commîmes.
Celle du 6.e , des étoffes groiïtèfes & des couvertures, de*
bonnets de laine, des gans de payfan & des bas bleui.
Celle du 7.et des efpngnoleitcs & autres de cette nature, dci
couvertures, des bonnets, des l i e n , des mites & des boutfes,
& autres objets à l'nfage des petits gens.
Celle du 8.e , des draps communs , des carüs de plufieurs efpèces
des couvertures t bonnets de laine , des bas blei s , des cotor.n,»*
des , & autres étoffe* communes à lufagc des petits gens.
8
�6
Celle du ç .e , des cadis , des drognets, des faum ières, des bas;
C e lle du I 0 . e , des cotonnades communes, des cadis , des ferges,
beaucoup de msrchandiies en bas , bonnets , m it e s , bouries à
l ’ufage des petits g ns.
C e lle du 12.e , des étam ines, des c a d is, des buratines , des
f i l o f d l e s , des couvertes de Jane, des bonnets, des miteS.
, .Cel e du l . . e » des. couver.ures en laine , en crin , des b a s, des
m ite s , des ca'Jis, dçs‘ drôguets, des filofeiles , des callemandres.
Celle du 1 4 . ' , de^ couvertures de laine, de c ra in , des bas de
laine , des'm ites, des familières, des cotonnades & autres de cette
efpèce.
Celle du l f . e , d.3s bas dé la in e , des m ites, des étoffes appelées
fergés à l\|fager des petits g . n s , des d io g u e ts, des dauphines, des
f j l o f e l ï e 's d e la cal em and re, de, ia ferge , de la iaumière , des
couvertures en la i n e , an crin f dès camelots & d s buratines, des
cadis & de Ja" ferge de ^ o m e s ^ o ü le u r s , de la cotonnade.
' Une' conformité fi frappante des qualités des m ar ch an difesr Hu c o m m e r c e 1 d é J a c q u e s G a l l i c e à Ion d é c è s , entre
la déclaration q u ’en fit p i c o l a s ChouiTy & le rapport des
témoins , permettra-t-elle déformais la moindre critique
& l e ' p l u s l é g e f lôupçon fut la l o y a u t é ,de la décLararion ?
‘'Mais s’il n’ÿ a rien à 1dire fur l’efpèce & les q u a li t és ,
o n r fe recriera peut-être fur les q u a n ti té s ; de telles c la
meurs ne feroient que le délire d e l’obrtination & de
l ’a ve u g le me n t.
1
Parcourons d ’a bo rd la reconnoiiTance , ,yr ^veçronsf-nous,
la quantité de c h a q u e efpèce e x a g é r é e au -delà du beioin*
d ’un c o m m e r c e , dont le détail continu exig eo it des appro.-!
v i f i o n n e m e n s , au moins pour le débit de fix mo is, afin
d e n’être pas toujours à l’emplette ? non : les pliis forts1
articles ne l’o nt que de 120 a u n e s , & i l -n’ y en a que tro is,
favoir: î
aunes de cadis pour d o u b l u r e s , autant de ferge
grile , autant de c o t o n n a d e s , toutes les autres ma rchand ifes (ont en bien moindre q u a n t i t é , depuis (5 , 2 0 , 2-),
3 0 , 4 0 , 60 6c So a u n e s , proportionnément à la rapidité
du debir de chacune.
L e s m a r ch a n d ife s d é c la r é e s par n o m b r e , telles q u e Its
p e a u x , les d o u b l u r e s , les b a s les bo nn ets & c , & c , n e
3
3
�font pas dans une proportion plus é le vée ; 40 paires d e
bas à c a d e t , 20 paires de p a d o u e , 20 bo nncis de Scgt-vie
r o u g e , 24 bonnets g r i s , 30 borr.ets m u i c , 36 pawes de
bas d ’enfans & ainii des autres ait ic lts p a re ils , ce. loi.t là
les plus chargés.
Q u a n d on rapproche ces détails du r a p p o n de la c c m mu ne r e n o m m é e , qui nous dit dar.s j ' e n q u t t e , p j ! l’organe
d es
3
J-e r > 2 ,
9,
10,
14,
15,
17,,19,
23 , 5 4 , 2 7 ,
28,
S > 36 témoin? que la boutique t>’ le
u ùc C u ih c e
tto u n t bien garnie , que Ja boutique ¡.tvn iu m c itu u fi de
Bi/lüm , que c ’ ttoit le bruit p u a lu , q u i ù o li u e o\o U ûujfî
depuis lo n g tem p s une boutique
un inagujiu bien fcui nis
a l^ iç-le-C o m te ( v it ü x ll y lc ) -, qu'il reuhu L tuut à b itio m
lo r jq u ’ il J e vit ujje{ riche ( ce lotit les exprtfliuns de qut Iques
témoins ) ; tjut lie idée le fairoit-on donc Je la m eilleure
boutique de B illo m , fi l’on trouvoit d t l’ex agération dans
la déclaration de Nic ola s C h o u l i y , dans laquelle il n’éleve
le fonds de m a r c h a n d é e s de G a l ü c e q u ’à 10,493 ^v * • ^es
témoins de l’e r q u é t e contraire p a rl ti o nt en vain du c o m
m e r c e de Gail ice c o m m e m é d i o c r e , ils diront en vain que
la bo u ti qu e , c o m m e celles des autres ma rc ha nd s de Billo m , ¿toit médiocrem ent garnie , paflablc.merit g a rn ie}
c ’eft le la ng a g e des 1 1 , 12 témoins & autrts : ce l a n g a g e
v a g u e & d ép réc ia tif ne détruit pas la déclaration d t Nic ola s
C h o u i l y ; il ne la c o m b a t pas , car cette déclaration ne
préfente dans les détails & dans ion réiultat qu’ un fonds
d e c o m m e r c e trè s-m ed ioc re , qu’un e nf e m bl c de marchandifes conve nab les au débit d ’une ville où le luxe ne d o minoit pas : qu’eft-ce en effet qu’ un fonds de i c , c c o liv.
en draperie , toilerie , petite foierie & mercerie , tandis
q u ’un iimple m a rc h a n d , roulant av e c un c he va l , t n a
c o m m u n é m a n t autant & fouvent deux fois plus , qu oiq u’il
ne réunifie pas autant de branches qu’ en réunifloit G a l ü c e ,
& que les frais de tranfport & de circulation le forcent de
fe refl’e rrer dans le nécellàire abfolu ? ou il faut être a v e u
g l é par la p r é v e n t i o n , encore un c o u p , ou il faut avoue*
•
�v
8
q u ’il ¿toit impoflible que la vé ra cit é de la re conn oiflance
d e 17 6 8 fut mi eux certifiée q u ’elle l’a été par les e n
quêtes. ( L e s frère & fœurs ChoufTy ne fe rendent ce p e n d a n t pas
e n c o r e , ils veulent que le c o m m e r c e de G a ll i c e eût d é p é r i ,
q u ’il eût foufFert un fort d o m m a g e par une inondation
a rr iv ée à Oillom en 1 7 6 5 ; que depuis ce m o m e n t G a l
l i c e d é ci d é à quitter le c o m m e r c e , ne s’occupa plus que:
d e fe défaire de ion fonds fans r e m p la c e r; mais ces allé
g a t io n s font démenties par les 2 , 4 , 19 , 2 7 , 3 6 , 3 7 ,
38 & plufieurs autres témoins qui dépofent pré c ifé m e nt .d u
temps m ê m e du décès d e G a ll i c e arrivé quelques années
après l’inondation ; d ’a i l l e u r s , la plupart des témoins qui
par lent d ’inondation dans l’enquêre c o n t r a i r e , parlent d ’une
inondation arrivée depuis lon gues années ; en effet il y en
e û t une en 1 7 5 0 qui cau fa du d o m m a g e à la boutique de
G a l l i c e ; mais celle de 1 76 5 , lors de laquelle Ga lli c e avoit
tout rétabli depuis lo n g - t e m p s , lui fut beauco up moins funefte.
I l c i l p r o u v é que la bo uti que de G a ll i c e ne s’ouvrit poi nt,
c o m m e l’ont prétendu les frère & fœurs ChouiTy ; de toutes
celles du q u a r t i e r , elle eft la plus éloignée du ru i f l e a u ,
elle eft iituée du c ô t é oppofé au cours que tenoient les
e a u x ; elles ne firent q u ’y pénétrer , & mouillèrent quel
q ue s marchandifes des rayons bas *, mais ce fut peu de
c ho fe & bientôt réparée ; G a ll i c e révit enluite fa boutique
bien garnie ( ce font les expreflions du 29.' témo in ) ; à
l ’appui de cette dépo fit io n vie nn en t beauco up d ’a u t r e s , fit
il eft fi p e u vrai que cet é v é n e m en t dé cid a G a ll i c e à
qu itter le c o m m e r c e , 6c à ne pas rem pla ce r à melure des
v e n t e s , qu e les témoins 2 7 , 36 & d ’autres attellent q u ’à
fa m o r t , fa boutique étoit la plus forte de Bil lom 6c la
m i e u x g a r n i e , & cette vérité eft confirmée par les laélures
q u e produifent les frère & fœurs C h o u f l ÿ e u x - m ê m e s ,
lefquelles continuent j u l q u ’à fa mort.
Enfin , ce qui d é m : n t d ’une manière bien frappante
e n c o ï c l’allég at ion que G a lli c e v e n d o i t jnfcniiblement fon
fonds
�fonds fans r e m p l a c e r , c ’efl: le peu de numé ra ire qui a été
trouvé à fa mort. S ’il a voi t fondu fon c o m m e r c e , il auroic
eu ou une forte cafîette o u un ample porte-feuille j o r ,
rien de tout c e l a ; par cu nf é qu en t la fonte de ion c o m m e r c e
n ’eft q u ’une impofture ha ia rdé e c o m m e tant d ’autres.
L a leconde partie de la m ê m e reconnoifîance , é g al em e n t
fans e x a g é r a t i o n , porte pour 2 1 2 5 liv. 15 f. ¿ ’effets a< hfs
& 1 8 9 7 liv. en n u m é r a i r e , f a v o i r , 8 9 7 liv. en efpèces
couran tes &
1000 liv. en
vieilles efpèces ,
G a ll i c e
etoit c ha ng e u r de la monnoie , voilà pourquoi il avoit des
efpèces vieilles ; quant aux elpèces c o u r a n te s , 8 9 7 liv. ét oie nt
bien la moindre fo m m e qui pût fe trouver c h e z un m a r
c h a n d qui faifoit fans cefle des ventes au com pta nt. E n f i n ,
la m ê m e reconnoifiance parle d ’ une manière un peu v a g u e
des fommes à recou vre r fur le livre j o u r n a l , mais le réiultat précile bi entôt ce v a g u e & fans ex ag é r a tio n e n c o r e ,
car le mo nta nt de la reconnoifiance eft fixé à la cl ô tu re
à 1 5 ,0 0 0 liv. ; or y a y a n t 10 ,4 93 ^v * 10 f- pour marchandiles , 4.022 liv. 15 1. pour les effets & le n u m é r a i r e , il
ne refte que 483 liv. 15 f. pour le r e co u v re m e n t du livre
j o u r n a l , f om me trop m o d iq u e pour n’être pas e x em pt e de
iou pç on d ’enflure.
5
Parlon s main ten an t de la fécondé reconnoifiance datée
du i o mai 1 7 7 2 . E lle eft la continuation de la p re mi ère
du 2 octobre 1 7 6 8 D a n s c e l l e - c i , il n’avoit été qu e il i o n
qu e des m a r c h a n d é e s de c o m m e r c e , d ’une partie des effets
adhfs & d ’une foible fo m m e en numéraire ; la fécon dé
déte rmi né e par la tranflation de la de m eu re de Ni co la s
C-houfly dans une nouvelle habitation , & le d é p la c e m e n t
qu ’elle rendoit néceflaire du mobilier de la mailon de
G a l l i c e , Ion b e a u - p è r e , c o m pr e nd en détail les meubles
m e u b l a n s , les uftenfiles de m é n a g e , 1 ' s denrées & pro vi fïons , le lurplus des o b l i g a t i o n s , fentences & autres eftets
a é h f s , & fe termine ainfi :» tous leiquels m e u b l e s , effets t
» b e f t i a u x , d e n r é e s , & c . ont été latfics en nature lors du
» décès d u d it iieur G a l l i c e
faifoient partie Sc étoient
3
�io
de - là co mprife de l’inftitution d ’héritière faite en fa
faveur par fon père ; en c o n f é q u e n c e , ledit fieur ChouiTy
veut & confent que ladite demoifelle G a lli c e , fon é p o u l e ,
puiiïs retirer en nature ou autr em ent lefdits meubles ,
gr a in s , beft iaux & effets , & s’en puiiTe faifir de tout
en cas de d é c è s , Si f o rm er telle d em an de q u ’elle a v i l e r a ,
pour avoir la déliv ran ce de ce qui le trouvera en na ture & la valeur de ce qui ne fe tr ou ve ra point e x i f t e r ,
foit par la vente q u a u r o it p u en fa ire le. ficur C h o u fly >
loit par la non repr éiî nta tio n des e ff e t s .......... d é c l a r a n t
ledit C ho uiT y que les objets ci- dtllus reconnus lont en
valeur de i $,o oo liv. pour fixer les droits feulement. »
Ici la fixation d e - l a valeur n’eft point tuxative : N i c o l a s
C h o u f ï y a conl la té , par un détail circonftancié , la nature ,
la q u a l i t é , la q u a n t i t é des meubles meublans , l i n g e s ,
denrées & autre mobilier pareil de la fuccefTion de G a l l i c e ,
dans la feule vue d ’en préparer la reftitution en nature ;
s’ob liger à rendre ce qui exilloit encore , alors ce n’étoit
pas endetter fon patrimoine & s’a p p a u v r i r , c o m m e fe plaifent à le dire les frere & fœurs C h o u l f y , c ’étoit feu lemen t
tracer une ligne d e féparation entre la propriété de la
f e m m e & la propriété du mari , & ap pren dre à les d i s
ti ng u er; o r , qu o i de plus jufte ?
M a i s diroit-on e n c o r e q u ’il y eût de l’exagération dans
les détails ? pour e n j u g e r , claffons les différens objets
compris dans la reconnoiffance , comparons-les a v e c les
enquêtes.
»
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»
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E x tra ie de la rcconnoijjancc
du
10
niai IJ'?'*-'
U m U cs n .c M a m , lin p s de 1U
c
,
,. °
iy de table,
E x tr a it des enquêtes.
L ’cnquâte d ir.tte
tft compofce
'<mo n s , ni pareni , ni alliés,
prefquc tous gens riche', ou a i l e s ,
* ■\
,
qui fréquentoient la maiit’n de
4 lits de maître.
G a lli c e , fc* vo ifins, des ma chands,
3 lits de domcfliqiic.
des gens honnêtes & en état d a p L cs tupiflerics de l chambres, préciqr une maiion ; hé bien ! ils
3 commodes.
s’accordent à dire que la ma ifon de
i z fauteuils»
G allice étoit e x c e lle n te , qu’il itoit
�4 3 3
I i
plus qu'à l'aife ; que tout le monde
2 tabourets.
étoit'étonné, en 1742 , qu’il donnât
12 rideaux de fenêtre.
fa fille en mariage à Nicolas C h ouf6 rideaux d’alcove.
f y ; que ce dernier faiioit un grand
4 garnitures de cheminée.
1 par avant.
c o u p , qu’ il n’avoit beioin que de
4 armoires.
porter fon bonnet de nuit.
2 vaiffelières.
Le 5.« témoin dépofe que lorfquc
I table de cuifine.
C h ou ffy époula la demoifelle G a l
lice , le monde difoit qu’il époufoit
tables de cabaret.
3 tables ce chambre.
un parti au moins de
, C liv .,
en 1742 , c ’eft-à-dire , plus de
3 tapis pour table.
8®,cco liv. actuellement ; & fi la
douzaines de chaife^
I douzaine de bergère.
fortune de G allice étoit déjà fibien
6 rondeaux de table. _
établie dès 1 7 4 2 , 34 ans avant fon
8 douzaines de d r ’ps de lit.
décès , dans un temps où fon com
4 douz ines d ’oreiller.
merce & fes bénéfices n ’alloient
qu’en cioifla n t, quelle opinion doit6 douzaines de nappe.
20 douziines de ferviette.
on avoir de ce qu’eile fut à fa mort ?
il ne fit d’acquifitions nouvelles de
3 douzaines d’effuie-main.
12 couvertures de chevet.
fonds que du domaine fmié au lieu
Les vOtemens & linges de de R eignat; il l’acquit conjointe
corps dudit Gallice.
ment ave c Jacques Da!mas , & en
Les ulïenfiles ordinaires de fit part à C h o u f f y , fon gendre ;
table & de cuifine , defquels mais à quel titre fut faite cette acquiuftenfiles ¡1 n ’y a de prix que i it io n ? à titre de r e n t e , par conféfix c u ille r s, iix fourchettes & quent fans rien retirer des fonds
de fon commerce.
un gobel t d’ irgent.
Mar; une maifon que les témoins
Les uftenfiles pour ametibler
préfentent comme fi aif. e & ii bien,
le vin & aut.es d .ni ees.
pourvue dès 1 7 4 2 , une maifon oii
^e gonrïrc n’avoit à porter que fon bornet de nu t , que devo itelle être en 1 7 6 8 , G allice n o y a n t fait q u ’accumuler depuis / il
ne donn' it pas dans le luxe ; malgré cela , fes relations fes habi
tudes avec tout ce qu ’il y avoit de gens honnêtes dans le canton ,
l’a voient m s dans le cas d’avoir une maifon au moins paisible
ment meublée; il
des témoins de l’enquête contraire qui lui
donnent des meubles fuiv-.nt fon é t A , & nombre de témoins de
l ’enquête d ireâ e a t t e i n t cui'il étoit bien mpublé fuivant :on é ta t;
tel eft le témoign.iue des 1 , 7 , 10 , 1 4 , 1 5 , 17 & 1 9 ; o r , q u e
les frère & fœurs Chouf fy foient de bonne f o i , ils ne pourront
pas me connoître que dans la déclaration dont les principaux objets
font relatés ci-contre ; il n'y a pas un feul meuble qui appartienne
4
20 0 0
4
B a
�12
au l u x e , le plus brillant de l’ameublement , le feul article qui
forte du dernier com m un, co-nfiite en douze médiocres fauteuils
répandus dans différentes pièces -, tout le rcüe cit au deiTojs de
la médiocrité.
C o n c l u o n s do nc que le rapport des témoins appuie 8c
confirme la reconnoili’.nce à cet égar d ; il Ui confirme de
m ê m e à i’ég ar d des uftenii^s de m é n a g e , dont îe détail ne
prele nte encore rien qui l o r t e , en ce g e n r e , des bornes de
l' a m e u b le m e n t o r d in a n e d ’ une perionne aifée ; l'argenterie
cit m êm e li peu de c h o i e , que l’on a droir d e s’ étonner
q.i’ii ne s’en fuit pas trouvé d a v a n t a g e .
Qu elles i’o nt p u é r i l e s , après cela , les réflexions g é n é
rales que font les intimés lur l’exagération prétendue des
me ub le s & uitenfiles d e m é n a g e ! la mailon de G a l l i c e
n ’auroit pa"s pu c o n t e n i r , difent-ils, tout ce q u e la reconnoiflance contient en ce. g e n r e ; voilà du ridicule ; cette
rnaifon que l’on fe plaît à r a p e t if i e r , ou l’on ne luppofe
q u ’une f e n ê t r e , pour faire paroître la déclaration de do uze
r i d e a u x de fenêtre , de fix ri dea ux d ’a lc o ve , lorfqu’il n’y
av o i t pas une feule al co ve , e n f i n , de trois lits de do m e ltiq ue , quand il n ’y avoit q u ’un feul d o m e f t i q u e , une
m a l - a d r e f i e ; ce (ont des pafquinades & pas autre choie ;
la vérité elt que la m ê m e maifon loge d e u x m é n a g e s , &
que c h a c u n o c cup e une b o u ti qu e & des a p p a r t e n o n s ; elle
n ’eft d o n c pas ii petite.
L a vérité elt q u ’elle avoit d u temps de G a ll i c e une
bou tique & une a r r ic r c - b o u t iq u e ou magafin ; que cette
f é c o n d e pièce avoit d u côté d e la rue plufieurs f e n ê t r e s ,
& q u ’elles étoient garnies de rideaux , c o m m e elles le
font or d in a ir em en t dans les magafins d e ma rchands.
Q u ’il y avoit trois pièces au premier é ta ge & autant au
f é c o n d , fans c o mp te r le tr o ii i è m e ; il y avoit d o n c plus
d ’une f e n ê t r e , & plus q u ’il en falloit pour placer les rideaux
q u e le ma ga fin n’e m p l o y o i t p a s ; il y avoit aufli des a lc ô
ves au premier fie au f é c o n d , ou des lits mafqués par des
ri dea ux d ' a l c o v e ; il y en a voi t e n c or e à R e i g n a t où G a ll i c e
avo it un pied à t e r r e , me u b lé & uftenfilé; l à , il y av o it
�4
3
/
1 5
aufîi un lit de maî tr e 5c un lit de d o m e f t iq u e o u d ’enfa ns;
ca r la reconnoiffance a ente%du les c o n io n d te ; ainfi la 1 ^
vérité ne pafie point la- vr a is e m bl a nc e dans c u t e recon noi f**
V '\
f a n c e , & ce ne fera p a s , encore un c o u p , par des ri di- vNVI. •î\\\«Aavwvk
cules pa lq u in a d es q u ’on réuffira à la détruire.
. ;
o'îk «
D en r é e s & P r o v i j i o n s .
V
V
L e s témoins des enquêtes n’a y a n t point vifiré les caves
& les greniers de G a l h c e j n’onr pu préciier la quantité des
denrées trouvées à ion d é c è s ; mais la nature de Tes biens
& 1’ etac de g r a n d e ailance où tous les témoins d é cl ar e nt
q u ’il v i v o i t , nous en appre nnen t allez. Les frère & lœurs
C h o u f l y iè font fort recriés fur l ’e x a g é r a t io n d e Nic ol as
..
C h o u i l y a cet é g a r d ; c e p e n d a n t ils nous font g râ c e de l t u r
A
refrein banal , lu mai/un n'auroit pa± contaW les d e nré es ’
s
%
que N i c o l a s Ch o u f iy a prétendu y avoir t r o u v é e s ; car ils
A\ ‘
f ave nt q u ’il eil notoire q u ’o ut re 1a maifon d o m i c i l i a i r e , * -s < v.v\*\ v> J a c q u e s G a lli c e occupoïc un autre b â tim en t au qu artier
^
des boucheries d e Billo m , où il avoit c a v e , c e l l i e r , c h a m ,
bres & greniers , q u ’il pofiedoit e n c or e d e u x g r a n g es a u ' W v \ v * v& »vs
quartier des Hautes ; oh ! pour le c ou p on c o n v i e n d ra b i e n
'
q u ’il y avoit de quoi lo g e r des denrées en q u a n t i t é ; mais
ell-il poffible .que G a il ic e en eut autant que la déclar at ion
de l'on g e n d re lui en donne ? à ent en dr e les dé cl am at io ns
des i n t i m é s , on croiroit que cette dé claration parle de fept
à huit cents fetiers d e g r a i n s , de trois ou qua tre mille
pots d e v i n , & c . &c. ; point du t o u t , il n’y cil parlé que
d e , c i . q q ^ ^ ^ s p p ^ d e y « ç l e cinqu ante fetiers froment
bl an c ou r o u g e , vi n g t fetiers f e i g l e , quarante fetiers pam o u le , trente fetiers f e v e s , d o u z e q u in ta ux d ’h u i l e , il n’y
a. pas là afiurément de quoi s’ extafier.
Y a-t-il à s’étonner q u a n d on trouve cinq cents pots de
vin c h e z un poiTeiTeur de vignes à produire cette quantité
dans une feule année , c qui ne prématuroit pas les ventes
q u a n d on trouve cent quarante fetiers de tous g r a i n s , y
comprife la récolte de l’anné e du décès arriv é fur la fin
^^
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8
SltL
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S'»
V
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('
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de j u i n , c h e z un pofleifeur de terres à produire dans une
^
¿¡O
feule anné e cette quantité / eft-il plus lurprenant de trou?
. v e r c h e z ce pofleifeur d ’autant de terrein arboré de n o y e r s ,
d o u z e quin ta ux d lhuile ? s’il ne les cueilloir pas c h a q u e
y
O
* a n n é e , il Ies|avoit a c c u m u l é ; d ’a i l l e u r s , d ’après les fpécu~
***
lations de c o m m e r c e , il eft con fiant q u e G a l l i c e achetoit
d e toutes d e n r é e s , & ne laifloit pas les fonds oififs'lorfq u ’il voyoit un bénéfice à faire.
E n f i n , ce n’eft rien dire pour déprécier les denrées
prélutnées exiftantes au décès de G a l l i c e , de vouloir les
rabaiiTcr au taux du produit des biens d e Ni c o la s C h o u iT y
d ’ üne feule a n n é e , do nt le citoy en C h o u i f y , f i l s , a rendu
.
co mp te c o m m e héritier bénéficiaire : le com pte elt d ’une
ï
a u ^~~
a n n é e m a u v a i le & à - p e u - p r è s de la feule mpitié d u b ien
A
Rei^nat ^ G a l l i c e , outre l’autre moitié 'd e ce bien 2
bonnes terres
%
poifédoit en core douze à qu in ze fepterées de bot
j .j auA*dt>uM us> d *— -à- Bilîom & à L a p s ; fans parler d ’ailleurs qu’il n’eft pas
3
flî
^'/ m é u J $ / î)oijiu £ -- ‘t ^ ue G a lli c e n ’eût à fa mort aucuns grains de la récolte
y
'
pré céd en te ni de c o m m e r c e ; en c o n l é q u e n c e , le parallèle
¿ W - , - p ê c h e par les b a f e s ; au i u r p l u s , les témoins de l’enquête
^
^p réfentent la fucceiïion de G a lli c e c o m m e o p u l e n t e , quelques-uns vont jufques-là ; or que figmfieroit cette op ule nc e
A-il *»
------fi le mobilier , les m a r c h a n d é e s , le r e c o u v r e m e n t , l’a r g en t
'
c o m p t a n t , fi tout cela étoit c h é t i f & m e l q u i n , fi la m a ll e
du tout ne d e vo it pas s’é le ve r aux vingt-huit mille li vre s,
à quoi les d e u x reconnoifiances la p o r t e n t , & ce qui étoil
la majeure partie de la fortune, effeftive de G a ll i c c , d ’après
..
mes ad verlan es e u x - m ê m e £
■ÿjf
Pulfons aux effets aitifs ; la déclaration de 17 6 8 en contient
une p a r t i e , celle de 1 7 7 2 renferme l’a u t r e ; les b i l l e t s ,
les o b l i g a t i o n s , les fentences s’y trouvent vilés
c datés
article par article ; s’ il y a quelques billets qui ne foient
wi;
v
'po in t d a t é s , les débiteurs de tous les effets y (ont partiVI -s
i
— c u li èr un u nt d é n o m m é s , c font encore la plupart vivans ;
\
* V \ e t repertoire de créan ces n’eft pas un travail d ’ima gin at ion ;
.v v,
j cs dépôts publics rendent t é m o i g n a g e de fa ilncérité , les
.1 i
6
6
î
�< i C -'>
^
3
/
,
•*
frère Si fœurs ChouiTy les ont f o u i l l é , & ont fait au total
les re cherches les plus lcrupuleufes. C e s dépôts publics
pr ouvent encore que G a l h c e avoit eu une multitude d ’au très etïets pareils , mats qui étant foldés &. retirés à Ion
d é c è s , n’ont pas trouvé place dans des déclarations que la
.V '
•.
^
c'
*>v
feule bo nn e foi diitoit.
.v
\ v
E n f i n , la maile des effets en ce g e n r e , compris dans les-** v ®
>vy.*>
d e u x r e co nn oi iia nc e s, s’élève feulement à 7 6 5 U l i v . , ionVmc
peu considérable aflurément pour repr éf tnt er !e c réd it &
l ’arriéré île trente ans de c o m m e r c e ji d e ' prêts & de négod a t i o n s ; a i n f i , rien de f u l p e â e nc ore claçis cette t r o i f i è m e ^ j / W
partie des re co nn oi fî àn ce s, 6c il e n r c l u î t e une pre uve fcnfible
d e la modération
r u s aux reconnoilli
1 5,000 liv. ; les efFets
fant moins de 7 5 0 0 liv. à appliquer aux d e n ré ts ( qui
hauiserent de prix a l’époque du décès de G a il ic e , le vin
fur-tout ) 6c aux meubles meublans , l i n g e s , ultenfiles de
m é n a g e , c u v e s , tonneaux & autres futailles, bois & pro>
viiions. A u lieu d ’être e xa g é ré , N i c o l a s C h o u f l y a u r ç i t
été injufte envers fa f e m m e , fi l’évaluation qu’il fit ài-çft
^
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N•
V*
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v-Kv»*^
;
«•,
v
av
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à 15 ,0 0 0 liv. de tout le contenu de la reconnoiiTance eut- '
été taxacivc
s’il n’eût pas déclar é qu’ elle étoit uniq uem ent ^A»\vv\lNr. ,.*sa \
faite pour le rè gle m ent des droits du c o n tr ô le , & fans ti ret rV xvy
^ x;
a ut re m en t à con lé que nc e , ni nuire à mon aélion pour la
\
remile en nature de ce qui le tt o u v e t o u tx if tan t lorique
■
‘m v v Î " ' " v m ^
m a dot deviendroit reftituable.
x^^vS
^ . va
Q u e n’avc7.-vous d o n c fait la reprife en n a t u r e , s’e m,
prellent de me dire les i n t im é s ? je ré po nd iai far^s hefiter
^ \
j ’ai repris ce qui exiftoit e n c o r e } la preuve en eft dans
w w ->\
\
»
le traité de liquidation p a i l é - a v e c l’héritier b é n é f i c i a i r e ,
\■
«
C
»V
le 4 août 1 7 8 7 , où l’on voit qu e j ’ai repris en déduétion
'> v. *\^\V VJ "v
pour i l 00 liv. 3 f. d ’effets, obligations ou f t n t e n c e s , fai- '
fant partie de la fé c on de reconnoiflance , c ’cil -à- dir e , le s
v" v s v V
feptieme à - p e u - p r è s du montant entier des effets d e cc
*'
g e n r e f fi je n’en ai pas retiré da va nt a g e , c ’eft q u ’il n’en
''
*»tx>i
v V*
�jc e * r / j y&//,<-
10
^ a iu L
P^us ’ ^ue ^ans v ^nê £ a n n ^cs Ni c o la s C h o u i ï ÿ avoit
sy P j
du r e c o u v r e r le lurplus.
j/ c / c ç e * ¿b'*'au^ -Q u a m a u x d e n r é e s , on ne préte ndr a pas* fans do ute
- e u t- Q u ’ elles duflent exifter encore au b o u t de vi ng t ans.
/
/ •
A l’é g a r d des me ubles m e u b l a n s , Ni c o la s C h o u iï y avoit
&U^ Ô
c h a n g é , d én at u ré ; rien ou prefque rien n’etoit re co nn oi f, hors q u e lq u e fu ta il le ; il n ’étoit pas pofiible de dif- '
ti n g u er dans cette confufion le m itn du Jicn ,* je m e fuis
Féîîgnée à l a c r i f î e r , en bo rn a nt m a ré clamation à i’é va lu a ^a *te PüUr
CQn1role l e u l e m e n t ; que les frère & feeurs
Ch o u iï y n f q ue nt une eliimation s’ils l’o i e n t , ils verront ii
. r\ n
"
a ‘ rai^on
^L__iuations.
de dire
<l ue ie perds à m ’en tenir à ces é v a -
Réflexions générales
i..
”
,
jl ee vv ijens
<je
par
ens o
e jjuftifier
u u i n e r ,, p
a r le
ic ra ppr oc hem en t des en—
les d e u x reconnoiiTances que m ’a fait lucc elfivement
„
^ / « ^ ¿ ¿ t ^ N i c o î a s C h o u i T y , mo n m a r i , d u mobilier par lui .retiré
^ao
]
au décès de J a c q u e s G a l l i c e , mon père.
ett impoflible
i Z -r a u * - ¿ » - » t e t i L e 't A i
7
, 1 ,
t *
j
/
j
r
x . q u i l rcile d ts doutes iur leur iincetite r.n vain les riere
*
Cho uiTy ont pris dans l’indig en ce une g r a n d e
< q u i/eu d - s j ^ r t i e des témoins q u ’ils ont produit pour déprécier c e
■
; en v a i n , pour donner un air impoiant à leurs
jL ___ t é m o i . t s , ils en a u g m e n te n t le nom bre de d ou ze dans leur
11
‘^ eJf ua^ù>tc\tm o\x^., & le portent à tre nte-neuf au lieu de vi ngt-lept
aote-__ f e u l e m e n t , dont leur enquête ôt addition d ’erïquete lont
y
*/
c o m po sé e s; en vain ils ont pris p a ï e n s , a m i s , f e r m i e r s ,
ttuuud—y / a j^ , ^ d é b i t e u r s , gens dépendant d ’e u x , gens difpofés a me outre
i'jits
¿¿afterf}our caufe de pourluites judic iai res ; en vain ils o n t i n i p i r é ,
\ i* * s <?u* />* e
-,
)£
)^ /
'¿>e& JLy*Mo...
font-ils a rr iv és ? à aucun réfultat utile à leur
caufe. A obrenir des dépolirions qui ne font point relatives
^ l’époque des faits i n te r l o q u é s , des in c on fé qu c nc e s , .des
1
*
— > co ntradictions (a ) , qui déshonorent le la n g a g e partial d e
j c l o . ..........
j
( û ) Le témoin 8 du C cond procès - v e r b a l , ¡ingère dudit
> ^ 5 ail‘cc y apr^s avoir dépoié dani l’enqiiûte d;rcfte , n.<i 3 4 ,
,
:>[ ' j'y i t û a
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y
C£
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. xb. Vu/c _fte>tjC,A. ) i ?
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O ^ L-. A . “ -‘
0 -----1
�ces témoins & les d é c r é d i t e n t , mais au b o u t d e tout à
des riens.
Plufieurs de leurs t é m o i n s . parle nt d u c o m m e rc e d e
Ga lli c e c o m m e m é d i o c r e , d ’autres difent fon am eu b le m en t
o r d i n a i r e , hé mais l e f t - c e do nc le mobilier d ’un miHionaire dont les reconnoifiances préfentent le table au ? dix
mille livres de mar chandifes en petite d raperie» en toile
rie , en mercerie , ne font pas un fonds de c o m m e r c e a udefl’us du médio cr e , encore un coup ; iix à fept mille
livres de denrées dans un temps où le pr ix étoit é l e v é ,
de futailles-,. de meubles m e u b l a n s , d e linges & uftenfiles
de m é n a g e , f o r m e n t- ils do nc encore un e immenfité ?
les reconnoifiances n’e x c é d a n t la médiocrité en aucu n
g e n r e , elles ne font don c pas démenties m ê m e par les
témoins les plus favorables à- mes adverfaires.
2.0 E n f i n , au milieu d e tout c e c h o c d ’aflertions & de
d é m e n t is , venons-en à la r è g l e , qu e veu t-elle ? il eft un
fait certain , l'avoir , que Nic ol as C h o u f i ÿ recueillit fans
inventaire, la fucceifion d'un ma rc ha nd notoirement a i f é ,
& qui faifoit u n c o m m e r c e de toutes elpè ces de m a r c h a n
difes d ’un d é b it ufuel dans d e u x petites v i l l e s ; d ’ un p r o
priétaire q u i , mort à l’époque de la m o i f lo n , a dû laiiTer
des denrées & de l’anné e pré céd en te & de l’année aél uel le;
d ’un père d e famille qui avoit un m é n a g e monté & pou rvu
en proportion d e fon aifance.
Q u e l eft le droit que d o nn e à l’héritier l’omiflîon d e tout
i n v e n t a i r e , de la part d ’un m ar i (impie ufufruitier qui s’eft
ainfî e mp a ré fans c o m pt e ni mefure ? le droit d ’en être cru
à fon ferment jjuxiieiaire fur la confiftance & la valeur de
l ’univerfalité d u mo bi lie r ainli pris fans précaution ; » le
> ferment appelé juram entum in lit cm y nous dit P o t h i c r ,
a e n fon traité des o b l i g a t i o n s , n.° S 3 7 , tom. 2 , eft celui
quelle a toujours vu la boutique dudit Gallice af[ei bien garnie , &
q u il pur, iÿoit à C. i f e s conduite à d é p o f e r dans l’enquête contraire,
a tLt que la boutique ^adit Gallice étoit médiocrement garnie.
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s
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que le jug e d é fè re à une partie pour fixer & déterminer
la quantité de la condamnation qu’il doit prononcer à
ion profit...........Il y a lieu à ce ferment toutes les fois
que le d e m an de ur a juftitié qu’il étoit bien fondé dans
1a d e m a n d e en reftitution de certaines c h o i e s , & qu’il
n’ y a d ’incertitude que fur la lom me à laquelle le défe ndeur doit être c o n d a m n é , faute de faire la re ftitut i o n ..............fur la q u a n t i t é , lur la valeur. »
Ici la mile en polTdlion d'une univerfalité de mobilier
■eft prouvée : d ts enquêtes nombreufes donnent un aperçu
de fa c o n f i i t a n c e , que manque-t-il ? l’appréciation j or à
qui la loi s’en rappc rt e- t-e lle lur ce point ? au r é c l a m a n t ,
dès qu’elle lui déf ère le fer me nt
in litem. J ’offre le
mien , j ’offre d ’affirmer qu e les reconnoiflances que mon
mari m ’a faites font iincères Sc fidelles , qu’ il ne m ’a fait
que juftice : pou rroit-on donc ba lancer un m om en t à les
confacrer , & à dire q u ’il a été mal ju g é par la fentence
dont efl: a p p e l , qui les rejette c o m m e frauduleufes fur de
vai nes d écl am ati on s & fans preuves ?
3." H é bien ! continueront encore mes a d v e r f a i r e s , fort
q u ’il n’y aie pas d ’e xagér a tion dans les reconnoiflances que
vous i n v o q u e z , au moins y à-t-il dans ces reconnoiflances
une abnégation de la part de N i c o l a s C h o u f i ÿ de l’a v a n
t a g e de la lociété de c o m m e r c e qui exiftoit entre fon be au pe re 5c l u i , & le rendoit propriétaire de moitié du fonds
de marchandifcs , des denrées , des recouvremens dont il
s’efl: c h a r g é en t o t a l i t é , en fraude de fes créanciers & pour
dim in u e r leur g a ge .
Ici je ne puis q u ’exprimer mes regrets fur l’impuiffancc
où cil le tribunal de prononcer j mais la loi du 5 brum aire
dernier eft impérieufe , elle circonfcrit la million des tri
bunaux d ’appel dans le cerc le des points de conteftations,
fur lefquels les premiers juges ont p r o n o n c é , & leur défend
de s’en é c a r t e r , à peine de null ité ; l’appel incident inter
jeté par mes a d v e r f a i r e s , en ce que le premier ju g e a
or donné une contefUtion plus ample & un furfis fur pluiieurs
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4
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o b j e t s , no t a m m e n t fur la prétention de foeiété entre le b e au père & le g en d re , im a g i n é e par mes adverlaires , n’eft
pas un m o t i f fuffifant pour -que le tribunal s’attribue une
ampliation de pouvoir que la loi lui refuie.
Q u ’il me feroit facile de repouiièr toutes les futilités ,
toutes les illufions que les frère & fœurs C h o u i î ÿ ont réu
nies a v e c effort pour créer une foeiété qui n’exiftât jamais i
ils produifent quelques fentences dans lesquelles le b e a u père & le g e n d re font dits communs , parce q u ’il s’agiiToic
d ’a£tion$ particulières qui leur étoient c o m m u n e s , & que
leur procureur avoit ce l a n g a g e d ’habi tu de ( ce q u e j ’é
tablirai ) & je p r o d u ir a i , m o i , un bien plus grand n o m b re
d ’effets & de leniences oil Ga llice eil leul en q u a l i t é , fans
parler d e fon g e n d r e , quoique ces effets & fentences foient
du m ê m e temps que les fentences produites par les frère
& fœurs C h o u lf y . J ’ai d é m o n t ré d ’ailleurs irréiiftiblement
dans plufieurs écritures , en première inftance , que tout
réfifte à l’admiflion d ’une foeiété entre Ga lli c e & ion g e n d re ,
& que rien ne la prouve ; mais s’appéfantir fur ces points, feroit
actuellement un temps perdu , pourquoi entretenir le tribunal
d e ce qu’il ne. doit pas ju g er ? réferver les droits & aétions
des parties à ce lujet pour être réglées par les juge s de
pre mièr e inftance , c ’eft tout ce q u ’il p e u t , & il ne faut
pas de difcuflion pour une fe m bl a bl e réferve.
4 ° Il me refle cepen dan t à parler d ’un dernier c h e f du
ju g e m e n t d ont ert a p p e l , fur lequel porte ma r é c l a m a ti o n ,
c o m m e iur celui qui proferit les reconnoiflances que je
d éf en ds ; ce c h e f annulle un traité portant c o m pt e ou liqui
dation de mes c r é a n c e s , licitation & délaifl'ement de biens
de la fucceiTion de Nicolas Ch o u fly , en paiement. O n a
je té encore les hauts cris fur ce traité daté , du 4 ’a o ût
1 7 8 7 ; mais en juftifiant les reconnoiflances d e . ma d e t t e ,
j ’ai juftifié la première partie du traité qui contient la li
quidation de ma créan ce d ’après elles; l’infirmation du j u g e
m e nt dont eft a p p e l , en ce qu’ il annulle cette • première
partie d u tr ai té , eft do nc inévitable.
�L a féc ond é partie contient licitation des biens indivis
entre la fucceff i on & moi , & m ’a dju ge la part de m o n
mari pour un prix déterminé en pa ie m e nt de partie de mes.
créances. M e s adveriaires ne peu ve nt le r e c rier que fur la
mod ici té du . p r i x , car ils n’ont d ’intérêt à contefter l’ex é
cution de la vente que fous ce ra pp or t; or l’expofition du
traité au tableau des h y p o t h è q u e s , l’enchère q u ’ils ont déjà
f a i t e , celle q u ’ils pe uv en t a j o u t e r , les mettent à l’aife à
c e t égard. Co n c lu o n s que leur réclamation eft fans bu t
d ’utilité pour eux & d è s - lo r s non r e c e v a b l e , car l’intérêt
eft la feule mefure d e s acti o n s ; d e là encore la néceff i t é .de
réformer le j u g e m e n t d ont eft appel , relat ivem en t à la
p r o fcription de la ve nte des biens de la fucceff ion qu’il
prononce , fa u f à réferver aux frère & l'œurs C h o u ffy le
droit d ’enchérir , s’ils le j u g e n t à propos.
R
é
s
u
l
t
a
t
.
L e j u g e m e n t d o n t eft appel annulle des rcconnoiff ancesdo nt les enquêtes & la notoriété j u ft i f i e n t la loyauté &
l a légitimité ; l’infirmation de ce premier c h e f déjà pré-,
j u g é e e ft inévitable.
Il
anéantit é g a l e m e n t un traité portant liquidation d e
c r é a n c e s , qui n'eft dans cette partie que l’exécution des
rcconnoiff a n c e s ; leur confirmation entraîne donc né c e ffairement celle du traité.
L e m ê m e traité contient une vente par licitation en
pa i e m e n t ; la foumiff îon aux. encheres écarte tout l’intérêt
que mes adverfaires pourroient avoir à l’attaquer ; do nc
il doit être é g a l e m e n t m a i n t e n u , fauf à mes adverfaires à
enchérir ; donc le ju g e m e n t dont eft appel do it fubir en.
dernier point la m ê m e réforme que fur les autres.
ce
S ig n é e ,
G A L L IC E , ve uv e C H O U S S Y .
L e citoyen D E
VAL , Rapporteur,
A CLERMONT-FRRRAND, de l'Imprimerie de la Veuve DELCROS & Fils
imprimeurs du D ép artem en t d u p u i d e d o m e l’an 2 de la R ép u bliqu e.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gallice, Catherine. An 2?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gallice, veuve Choussy
Deval
Subject
The topic of the resource
tutelle
fraudes
créances
appropriations de biens
marchands associés
témoins
commerce
inventaires
rumeurs
inondations
vin
textile
climat
draps
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour la Citoyenne Catherine Gallice, veuve de Nicolas Choussy, appelante de jugement de la ci-devant justice de Billom, du 20 février 1790. Contre les citoyens Barthélemi, Marie et Catherine Choussy, enfans et héritiers de Gaspard Choussy et François-Avit Greliche, mari de ladite Catherine Choussy, intimés.
liste des étoffes et tissus vendus par un marchand drapier mercier. Et annotations manuscrites.
Table Godemel : Reconnaissance : de sa femme, l’une la veille du jour de la tutelle des biens et personnes de ses neveux, et la seconde, pendant le cours de la tutelle, les 2 8bre 1768 et 10 mai 1772, et un traité portant liquidation des créances énoncées dans ces reconnaissances qu’on soutient avoir eu pour but d’augmenter les reprises de celle ci sur ses propres biens, doivent-ils être annulés comme faits en fraude des créances des mineurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Delcros et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 2
1768-Circa An 2
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1018
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1017
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53116/BCU_Factums_G1018.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
appropriations de biens
climat
commerce
Créances
draps
fraudes
inondations
inventaires
marchands associés
rumeurs
témoins
textile
tutelle
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53115/BCU_Factums_G1017.pdf
f9d7378e13d8be9f4984b36946b61bbe
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MÉMOIRE
POUR
les
Catherine
C ito y e n s
B arth élém y,
Marie
et
Enfans et Héritiers
C h o u s s y ,
du C i t o y e n Gaspard C h o u s s y ,
Habitans
de
la V ille de Billom ; F ran ço is-A vit G r e l i c h e ,
H o m m e de L o i , Mari de ladite C atherin e
C h o u s s y ; et B arth élém y G r e l e t . , H o m m e
de
Loi ,
Mineurs
à l’émancipation
Choussy,
C O N T R E
Veuve
Curateur
desdits
Intimés et Appelans. .
la Citoyenne Catherine
de Nicolas Choussy ; et
G
a l i c e
,
le Citoyen
Jacques-Philippe C h o u s s y , Homme , de L o i,
H éritier sous bénéfice d'inventaire dudit Nicolas
C houssy son P è r e , Appelans et Intimés.
■■
1
-: r
,
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:
i
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" !
.
or
' !!J'.
'•
'•
L
A citoyenne G alice
l ’e x emple de
et le citoyen
Choussy , ' Son
Nicolas-: C h o u ss y , ont employé
fils , a
tons les moyens
q
ela
u fraude p eu t suggérer, pour tâcher d 'envahir le patrim oine
A
�/
. 'c .
des
mineurs
C h o u ssy, qui
( o
avoient m alheureusem ent été mis
sous la tutelle «le N icolas C h oussy, leur grand-oncle.
Personne n’ignore la prévention que les législateurs ont de
tout tem ps conçue contre les reconnoissances d’entre maris et
fem m es , les
sentences
portant liquidation des droits
de ces
d e rn ières, et les traités entre une veuve et ses enfans, héritiers
de leur père
sous bénéfice
d’inventaire.
Hé
bien ,• tous ces
moyens ont été mis en usage contre les mineurs Choussy.
U iie sentence rendue en la ci-devant justice de B illo m , avoit
proscrit tous ces actes d ’iniquité , sans qu’il fût m êm e besoin d ’en
venir à des preuves préalables. Sur l ’appel qui en a été interjeté
par la citoyenne G alice et son f i l s , il est intervenu un jugem ent
qui a imposé à la veuve ' Choussy la nécessité de prouver par
tém oins la consistance et valeu r du m obilier laissé par son
p è r e , sau f la preuve contraire. E n exécution de ce ju g em e n t,
les .parties ont enqu êté respectivem ent, et l ’on verra qu ’il résulte
des en q u êtes, que tous les actes passés entre la veuve Choussy
et son fils , ne peuvent se souten ir, comme étant évidem m ent
l ’e ffet de l ’exagération et de la fraude.
L e s mineurs Choussy ont eux-m êm es pris le parti de se rendre
appelans de la sentence de la c i-d e v a n t justice de Billom : le
m o tif-d e leur a p p e l, est que cette se n te n ce , en renvoyant à
statuer dans la suite sur des demandes essentielles q u ’ils avoient
form ées , syncope en quelque façon la contestation; elle divise
les m oyens de fraude qui doivent former un ensemble dont les
parties ne sauroient être d é ta c h é e s , sans tomber dans l'inconsé
quence : il
en résulteroir
d ’ailleurs
que
l ’on devroit
plaider
deux fois pour le m êm e objet.
A u m o ye n .d e cet a p p e l, les entraves qui se présentoient sur
la discussion de cette a ffa ire , et sur son ju gem en t, disparoîtront,
et le tribunal pourra rendre une décision qui vengera com plè
tem ent les mineurs Choussy de toutes les m anœuvres odieuses
que leur t u te u r , sa veuve et son héritier b én éficiaire se sont
perm ises, p o u r.s’enrichir à leurs dépens.
L a carrière dans laqu elle il faut e n tre r, est aride ; mais le
désir de rendre la justice : soutiendra .l’attention des juges : on
�C C'. 3 )
tâchera d'ailleurs de la soulager, en 'em p lo ya n t tout ]Tordre dont
la discussion sera susceptible',
I
F A
.v
ri- ^
I T S.
T
L e citoyen G aspard Choussy décéda en x 7 6 7 , laissant trois
enfans dans le plus bas â g e , qui sont les intim és. Ils furent
mis d ’abord sous la tutelle de leu r m ère ; mais celle-ci m ourut
le
¿3
septem bre
1768 : cet
accident
nécessita une
nouvelle
tu telle.
L e citoyen N icolas C h o u ssy , leur gran d-oncle, mari de C a th e
rine G a li c e , a p p e la n te ,
et p ère du citoyen , Jacques -P h ilip p e
C h o u s s y , aussi appelant , é t o it , suivant nos lo is , dans l ’ordre
d ’être nommé leur tuteur.
Il ne put douter q u ’il ne dût avoir cette ch arge; il fu t averti
par les parens m êm e des m in eu rs, qu e leur suffrage se réuniroit
au vœ u de la loi. C es p aren s, dont plusieurs étoient très-éloignés
de la ville de B illo m , où habitoit N icolas C h o u ss y , s’y étoient
rendus quelques jours avant qu ’on procédât à la tutelle ; et
c’est à Billom m êm e que les assignations leur furent d o n n é e s,
pour se trouver à l ’h ôtel du ju g e , à l ’e f f e t ,d ’y faire;Jla nomi
nation.
»
D è s cet instant N icolas
C h o u ssy, p e u t- ê t r e
<
■
moins de son
propre m ouvem ent , q u ’excité par C ath erin e G a li c e , dont la
cupidité ne s’est pas d é m e n tie , m édita les m oyens de pouvoir
divertir les biens
des
m in e u rs, dont le
sort devoit
lui
être
confié , sans qu’ils pussent exercer sur sa fortune l ’indem nité
que les lois assurent aux pupilles sur les biens de leur tuteur.
C ’est dans cette vue que le 2 octobre 176 8 , jour qui précède
im m édiatem ent celui de la tu te lle , N icolas Choussy alla furti
vem ent ch ez le citoyen Çham boissier , notaire à Y ic -le -C o m te ,
(a ctu e lle m e n t V ie - sur - A llie r )
d ’une
reconnoissancc q u ’il
pour
faisoit à
quantité de marchandises et
lui
sa
présenter le projet
fem m e
effets , qu’il disoit
d’une
grande
avoir trouvés
à la mort de Jacques G alice , sou p ère , qui étoit décédé le
19 ju illet précédent.
A x
�•:<P4 )
fu t question* de la - p a r t
XI n è
^e p ro jet de reconnoissance
du notaire que
qui lui
de
fu t présenté ,
copier
et .de lui
donner une forme authentique. L e lendem ain, jour de la tu te lle ,
N ico la s C houssy se trouva à B illo m , et sa fem m e n ’avoit pas
qu itté
cette ville ;
¿’agissant
elle n ’accepta pas
pas« " d ’un • àcte
profi-ter
sans son
notaire
acceptât pour elle.
la reconnoissance : ne
synallagm atique ,
acceptation
personnelle.
elle
pouvoit
en
Il suiïisoit que le
I l est indispensable de présenter , au moins en su b sta n ce,
les
dispositions de
cette reconnoissance.
N icolas !C iièussy ÿ déclare q u ’au décès de Jacques G a lic e ,
son b e a u -p è re , avec lequel il avoit résidé depuis son m ariage,
(q u i rem o n to it-à
1 7 4 2 ) il avoit trouvé parm i
les
effets de
sa succession plusieurs billets , obligations , sentences , dont
le montant étoit dû par différons particuliers à son beau-père;
q u ’il s’y étoit trouvé de l ’or et de l ’argent m onnoyé , et q u ’il
y avoit de plus les étoffes et autres marchandises qui s’étoient
trouvées . dans la boutique.
N icolas' Choussy com m ence par faire le détail de toutes les
marchandises ; il pouvoit en faire le plus bel étalage possible :
il avoit ‘ un champ lib r e ; après ce détail fait seulem ent par
quantité ,
sans
estimations
particulières ,
sans
m ention
de
factures ; il déclare d’après une supputation juste q u ’il prétend
néanmoins en avoir la ite , que la valeur de ces marchandises
s’é lève à la somme de dix m ille quatre cent q u a tr e -v in g t-tre iz e
livres diix sous.
V ien t ensuite le détail des créances que N icolas C houssy a
déclaré être "dues à
la succession de Jacques G alice : ce d étail
ne présente p as, à beaucoup p rè s , 1 exactitude qui doit se trouver
dans une reconnoissance , où un
justice
mari en faisant
envers sa fem m e , veut cependant
un acte de
ne pas blesser les
intérêts d'autrui. L a plupart de ces créances sont énoncées avec
m ention de prom esses, dont on 11e rapporte point la d a te ; ce
qui ne dépendoit que de N icolas C h o u ss y , puisqu il disoit lu irhéine en être
nanti : ensorte
q u ’on ne peut
créances étoient prescrites ou n o n ; s’il y
savoir , si ces
avoit des paiem ens
�5 %t
( 5 )
écrits. Pour s'e former nne id ée de cet ou vrage, on va rapporter
quelques-uns
des articles : Ledit sieur Choussy nous a déclaré
être du à la succession du sieur Galice la somme de trois cents
livres par le sieur Amarilon JDubost, et nous a déclaré avoir sa
promesse ; ledit sieur Choussy
nous a déclaré être dit à ladite
succession une somme de deux cent cinquante livres par le sieur
D c la ir e , l’aîné, de Vertaison ; ledit sieur Choussy nous a aussi
déclaré cire dû par le sieur D c la ir e , cadet , une somme de i 2 o ’ft,
suivant
leurs promesses , desquelles le sieur
Choussy nous a dit
être nanti ; avoir aussi une promesse fa ite par madame E scot et
son f i l s , d’une somme de 9 5 n . L e s articlos qui suivent et qui
sont nom breux sont sous la m êm e énonciation.
N icolas
Choussy déclare
journal de Jacques
petites
sommes
qui
qu ’il étoit
encore dû sur le livre
G alice , par divers
form oient ,
e s t - il
particuliers , plusieurs
dit , un
objet assez
considérable. M ais le relevé de ces sommes n ’est point contenu
dans la reconnoissance , et le montant n ’en est pas m êm e fixé.
Il en vient ensuite. à l’argent : il dit avoir trouvé dans la
cassette du défunt plusieurs vieilles pièces d ’argent vieux , dont
ce dernier étoit n a n ti, parce q u ’il avoir é té
lequel argent vieux s’est trouvé
changeur p ublic ,
être de la
valeu r d ’environ
m ille livres.
N icolas
Choussy
reconnoît
de
plus
avoir
trouvé
dans la
cassette la somme de 897 1+ en espèces d’or ou d ’argent ayant
cours.
Il présente tous les objets ci-dessus énoncés comme appartenans en entier à la succession; il ajoute q u ’il est entré gendre
ch ez Jacques G a lice , et qu'il n'y a porté aucuns meubles , ou
du moins certains qui ne sauraient excéder la somme de 60 tt. Il
évalue le tout à la somme io ^ o o "* , au paiem ent de laqu elle
il entend que
ses biens soient affectés.
L e dol et la fraude éclatent de toutes parts dans cet acte:
q u ’il eût été à désirer pour les mineurs que leurs parens en
eussent eu connoissance ! leur fortune n’auroit pas été divertie
par un tuteur a v id e , et ils ne seroient pas réduits à la triste
nécessité de soutenir un procès dispendieux pour en arracher
�C 6 )
les
débris des mains do sa veuve
et de son héritier qui ont
m arché sur ses traces ; mais la tutelle que beaucoup d ’autres
particuliers eussent regardée comme un fardeau , ne répugna
jam ais
à
N icolas
Choussy.
Le
m ystère
étoit
doublem ent
nécessaire ; il le falloit , et pour ne pas éloigner la confiance
des
parens ,
m alh eureux
et
pour
se
m énager
des
armes
contre
de
enfans qui devoient être ses pupilles.
Q u elq u es années après la tutelle q u i, comme on a déjà observé,
fu t faite le lendem ain de celte reconnoissance, N icolas Choussy
recueillit la succession d ’un frère , chanoine à Billom : à sa
portion il réunit celle de ses co h éritiers, qu'il acheta avec les
deniers appartenans aux mineurs C h o u ssy; il quitta la maison
G a lic e , pour aller habiter une maison beaucoup plus v a s te ,
dépendant de la succession du citoyen C h o u ssy , chanoine.
D ’après l’augmentation qu erecevoit la fortune de N icolas Choussy,
la
reconnoissance du 2 octobre 176 8 , dont on vient de rendre
com p te, 11e se trouvoit plus de mesure pour absorber ses b ie n s,
e t il en seroit resté pour les mineurs. Il fallu t avoir recours à
un nouvel expédient sem blable au prem ier.
En conséquence, le 10 mai 1 7 7 2 , N icolas Choussy se transporta
ch ez le m êm e notaire à V ic -s u r-A llie r, et lui présenta le projet
d ’une seconde reconnoissance. Catherine G alice y accompagna son
m ari, pour accepter cette seconde reconnoissance avec la prem ière;
elle pouvoit alors faire ce voyage sans danger. L a tutelle étoit
f a it e ; les parens 11’étoient plus à B illom ; il n ’y avoit plus à
craindre de leur donner l ’éveil. D ’ailleurs, l’absence de N icolas
Choussy e t de C atherine G a lic e ne devoit pas être lo n g u e, et
ils pouvoient toujours com pter sur le secret.
D e la m anière dont la reconnoissance du 2 octobre
1768 est
c o n ç u e , on auroit bien cru q u i 1 ne restoit plus m atière à une
seconde. N on seulem ent N icolas Choussy n ’y avoit pas dit q u ’il y
eût d’autres créances et effets qui appartinssent à la succession de
Jacques G alice ; mais encore elle contenoit une clause dont ou
devoit tirer la conséquence contraire, et que voici : Sans toutefois
y comprendre les meubles meublons généralement quelconques qui
sont dans la maison dudit sieur C a lic e , lesquels appartiennent à
�( 7 )
ladite succession. E n présentant les m eubles m eublans comme
les seuls objets non reco n n u s, c ’étoit bien dire que tous les
autres l ’étoient. N éanm oins on va voir com bien, en pareil cas,
il est aisé de faire paroître l ’abo n d an ce, lorsque cela peut d’ailleurs
être utile.
Dans l ’acte du
10 mai
1 7 7 2 , N icolas Choussy déclare q u ’il
a fait déplacer les m eubles et effets qui étoient dans la maison
et autres bâtim ens provenans de la succession de Jacques G a lic e ,
pour m eubler la maison dont il étoit devenu propriétaire; il dit
que ces m eubles et effets n’ont point été compris en détail dans
la reconnoissance du 2 octobre 176 8 ; et pour éviter toutes contes
tations entre sa fem m e et ses héritiers , il se déterm ine à en
consentir une reconnoissance.
Il com m ence par les m eubles m eublans. L ’exagération en est
ridicule pour ceu x qui ont connu la maison de Jacques G a lice
et sa m anière de vivre.
N icolas G a lice porte dans cette reconnoissance une quantité
considérable de f u t a ille , une quantité d ’h u ile , de vin et do
grain s, qui excède de plus du double celle qui a été cu eillie
ordinairem ent dans
les
biens
possédés
par
et par N icolas Choussy , m êm e d'après le
Jacques
G a lice
compte rendu par
Jacq u es-P h ilip p e C h o u ssy, comme héritier bénéficiaire de son
p ere ; ensuite N icolas Choussy en vient à de nouvelles créances
q u ’il donne encore comme appartenant en totalité à la succes
sion de
Jacques G alice. L e
détail
de
ces créances apprend
que plusieurs étoient prescrites , ou q u ’elles étoient dues par
des
débiteurs
e ffe t , en
insolvables.
vertu
Le
d ’une sentence
prem ier
du
4
article
étoit dû , en
janvier
178 7 , et on
n avo it pu en être p a y é , quoique le d é b ite u r, qui étoit Taurin
V o la n t, fut de la ville de B illo m , dom icile du créancier.
A u cu n article de m eubles et de denrées n ’est apprécié : le
montant des créances n ’est
à la fin de
point arrêté.
11 est seulem ent dit
1acte : Déclarant ledit sieur Choussy que les objets
ci-dessus reconnus sont en valeur de la somme de
pour fo ir e les droits du roi seulement.
i 3 , c o o ‘f t ,
Q u oiq u e cette appréciation vague de i 3 , 0 0 0 * , parût d’apfès
�("8 )
.celte clause n e pas devoir servir de boussole pour la reprise dos
droits de Catherine G alice ; que cette appréciation n’eût été faite
que pour la
il fallût
perception des droits de contrôle; que dès-lors
la considérer comme au-dessous de la valeur réelle
des objets , n éanm oins, comme on va le v o ir , C atherine G alice
e t son f il s , auxquels on n ’a pas à
reprocher
des erreurs
de
ca lcu l à leur p ré ju d ic e , ont cru devoir s’en tenir à cette appré
ciation.
Ce
parti leur a paru
bien plus commode que celui
d ’une nouvelle estim ation qui auroit nécessité un exam en p ar
ticulier de chaque objet , trop gênant pour eux.
V oilà donc deux reconnoissauces , dont l’une est de
15 , 000™
et l’autre de i 3 , ooo1*; ce qui fait 2 8 , o o o-*.
L es
circonstances dans lesquelles
ces deux reconnoissances
ont été faites ; le m ystère dont on a eu soin de les envelopper ,
11e perm ettent pas de douter qu ’elles ne soient l ’ouvrage de
la fraude. Il s’élève encore une infinité d ’autres moyens qui
m ettent cette fraude dans le plus grand jour. M ais , pour éviter
des redites , 011 en renvoie l’explication au développem ent des
moyens. O n ne p eu t cependant s’em pêcher d’annoncer ici q u e ,
quoiqu’il
soit parfaitem ent établi
que N icolas
C h o u s s y , étoit
associé avec Jacques G a lic e , que dès-lors la m oitié des créances
et effets en marchandises appartînt à N icolas Choussy , on
a poussé la dissim ulation, ou , pour m ieux dire, la m al-adresse
jusqu’à laisser la
totalité de tous ces objets à la succesion de
Jacques G a lice , m êm e sans faire pour
prélèvem ens q u i , dans le
N icolas Choussy
des
systèm e q u ’il n’y auroit pas eu de
société , ne pourroient faire la moindre difficulté.
L a tutelle a duré ju squ au décès de N icolas C h o u ssy, arrivé
le
12 décem bre
1786. Son fils ne
manqua pas d ’accepter sa
succession, sous bén éfice d inventaire. O n sait combien ce parti
çffre de
commodités pour prendre
créanciers. R evêtu
m ieux d ir e ,
les b ie n s, et
frustrer les
de cette q u a lité , il fut assigné, ou , pour
il se fit assigner lu i-m ê m e , sous le nom de C a -
llierine G a lic e , sa m t r e , pour parvenir à la liquidation de scs
droits.
11 fut re n d u , le 2 septem bre 1 7 F 6 , une sentence qui
porte cette
liqu idation , et le
18 novembre suivan t, C atherin e
G alice
�( 9 )
G a lice obtint contre son fils une seconde se n tèn ce''q u i'o rd o n n e
qu ’il lui sera fait délivrance du m obilier provenant de la suc
cession de son m a r i, suivant l ’estimation qui en sera faite par
les ju rés-priseurs. C e tte délivrance eut lie u >le
mois
de novem bre , pour
la
somme de 2 ,9 7 7 "*
laqu elle l ’estimation fu t portée.
Fn
cet
22 du m êm e
6*
à
'
état il fu t passé , le 4 août 1 7 8 7 , un traité entre
C atherin e G alice e t son fils. C ’est à la faveur de ce titre que
Jacq u es-P h ilip p e Choussy a cru pouvoir faire passer sans pudeur
sur la tête d e * sa m ere tous les biens de la succesion de son
p è r e , au préjudice des mineurs C h o u ssy , auxquels il s’e st im a
giné q u ’il pourroit par ce m oyen faire perdre un reliquat de
compte de plus de 25,0 0 0 *. C e tra ité 'e st la consommation de
la fraude dont les actes précédens
étoient la tram e.
Il fau t
rem arquer que les intérêts de la succession de N icolas Choussy f
et
par conséquent c e u x Jdes: m in e u rs, ne pouvoient q u ’y être
sacrifiés, parce que Ja cq u es-P h ilip p e C h o u ss y , en se dépo u illan t
en apparence d’une m ain des biens de la succession , com m e
h éritier b é n é ficia ire , les prenoit de l ’autre , comme seul enfant
e t héritier de Catherine G a lic e ,
tenir.
*■
On
de
qui il étoit
-.q '
sûr de les
a affecté d'insérer dans c e t 'a c t e beaucoup de
d é ta ils;'
nous allons en rendre substantiellem ent les dispositions.
O n présente d ’abord les créances de C ath erin e G a lic e , et on
ne m anque pas d ’y faire figurer les-deux* articles de i G ^ o o * ,
d ’une part , et de
reconnoissances de
i S ^ o o - * - , d‘autre , fondés sur les
deux
1768 e t de *1773. C e s’’ créances , distraction
faite du montant du m obilier de la succesSionide N icolas C iioussyy
qui , comme on à déjà
G alice , suivant
observé, avoit été délivré à C ath erin e
l ’estimatibh des jurés-priseurs ,
sont d ’abord-
fixées à la somme d e ;'2 7 ,9 .6 5 ? i^ .
O n y assure un fait qui est inconcevable ,..c ’çst qu e parm i
les m éubles laissés
par N icolas C h o u ssy , il "no- s'en : est trouvé
aucun de ceux provenus de Jacques G a lic e , »et compris
les reconnoissances à elles
dans
faites ,■qui n ’eût Jtité* dénaturé ou^
échangé ; q u ’en conséquence elle n ’e n ’ à point rep ris1 ciïi n atu re;
B
�C '1o )
d’où -il i résulte qu ?il n’y a iau cu n e dédùction. à fa ir e ,* à ce su jè t,;
sur l e Tmontant des reconnoissances ; qu ’au surplus , en dédui
sant la valeur réelle d e ‘ tous les , m eubles q u e lle a pris en
paiem ent à J ’estiln^tion , il :enr,résulte le um êm e e ffe t pour la
libération .-def'la-si;içcession>;r"oj
On
dit dans le
lI
,■-
traité , q u ’il*- n’en: est
irp-,7 ><f
J,
pas de* même'
des
créances comprises-dans lés reconnoissancesj qu ’il en .existe encore
en n a tu re , .et que C atherin e G a lice consent de reprendre en
dédtic.tion de ses répétitions
celles de
ces créances qui n ’ont
pas- périclité entre >2esL .mairiSi(de^soa mari.,, aux termes -de la. sen
tence de liqttidâtion :fçalcu l fa it.d e ces créances ^ eîles se sont trouvéesj.nîptit^r ;à
la.^somnie
d
e
-
3./ 7 ^
et
déductiqn
faite de ce.tte. somme sur, celle de '27,955-'* 1 J à 'ia q u e lle les ré p é
tions jde .C ath erin e G a lice
avôi'ent déjà, été fix é e s, ces répé-
tit)ons;£.Sô trôuv.ént .réduites à-.-la,; somme de 2
6
, 1.7^. 5 ^ ,
à ;iaqueUe elle> • a fait jpindrqtiiQolle'. dei.69 ^ 2 J '- pour partie
des. [fr a is é e l;inyerçtaire ifa k après, le . d é c è s r d e N icolas C h o u ssy,
q u ’elle: avoit avancés*,!
?y |, j:
• O n i procède ensuite am iablem ent à ,1a
-v
■/
licitation des fonds
et d ’une rente foncière qui. avoient 'été achetés en commun-,par
Jacques G alice et par N icolas C h o u ss y , et qui étoient indivisî
entre._Catherinec G a liÇ e y içp m m e h éritière de»son p è r e , et la
succession bénéficiaire rde ; N icolas Choussy.
1
x, Il est dit
q u ’après quelques enchères faites respectivem ent
<?n ap p aren ce, les fonds et la rente sont dem eurés à CatherineG a lice pijur la solnme ,de ¡>i8iPoto^ . w
1 • . ■,
j■
,n;i .
r. Deu cette dernière >s o m m e C a t h e r in e Æïalice_,;.s!en e,st retenu,;
çeUe,ndû) 9,600?; pt>ur la moiti'é- à e lle reven an te, en qualité
d’haritièro île sdoLpère j ' i e t j i ,1 égard,, de l'autre m o itié , faisant
dussî 9,oooj1T ,cil..e stid ]t. q u ’e lle ,s e ,1’est égalem ent re ten u e, du
consentement de son fils , à im puter sur ses répétitions.
i/iApfèsi «os .opération s, on procède à- l'exam en ,des; sommes qu;
avoient été nrfespoctlVeHient. pi^yéesl. p a r Jacques : Galice* et par
N icolas G hpussyjen acquit tement :de dette?, communes. O n tjrouve
que Jacques, G alice avvit payé
34311, de plus d o n to n accorde la
répétition à, Gàt|iermû .^alioe.sur la-succession de N icolas Choussy.
il
�à 2 7 ,19 8 * yJ
5 ^ ; et déduction faite de la somme de 9,000
montant d e 'l a »moitié 'de la licitation , le total des répétitions
reste pour 1 8,ri 98'”' 7^ 5 ^ .
E n paiem ent de cette
délaisse à sa' m ère',
ji
*x :!
somme
? '
' ' .T rpil-tT
; Jacques - Philippe
Choussy
^'1
1 0.' L es fonds appartenant en propre à N icolas C h ou ssy, indé
pendam m ent de ce u x qui avoient^été acquis encom m un, moyennant
la ¡somme de
6 ,885'”’ : distraction faite des- charges foncières et
du logem ent qui éto it, dû à C a th e r in e 'G a lic e 'i dans la , maison
de son mari^ qui est de la com prise-des objets vendus. !:;p la
2 0. L e s récoltes, redevances en grains, ou ferm es appartenantes
à la succession de N icolas G a lic e , pour l ’année 178 7 , pour la
somme de
impositions.
356* i & f 3^, ‘ déduction, fa ite des c e n s, rentes et
î i i ' ^
0*10
f
i •• .i’ :rp -
•■'Distraction faite ¡de ces deux som m es*et de quelques autres
avances prétendues faites par C a th e rin e 'G a lic e , Isur la somme
de 1 8 ,19 8'*' 7^ 5* , à laqu elle ses’ répétitions venoient d e tre
-fix é e s , elles restent jpou r*la somme d e -12 ,0 2 5 * io ^ 9 ^ .
j
E n acquittem ent de cette som m e, i 0üJacques-Philippe Choussy
cède à sa m è re } à- titrer p ig n o ra tif, 1 poiir n e u f a n n é e s , après
lesquelles le p aiem en t-effectif ’d evra'’avoir lieui, les capitatix des
rentes appartenans en propre à la succession de N icolas Choussy ,
indépendam m ent de celle qui avoit été acquise en commun entre
son »beau-pèrci 1e t lu i. C es capitaux ,m ontentj avec les 'encourus
q u i sont aussi cédés j à la'Somme de
3 ,007*'2^" S3'.
20. Jacques-Philippe Choussy p aie à'C ath erin e G alice laisom me
de 2 >006™ 2 A 6 & , montant du reliquat du compte du bénéfice
d ’inventaire dont il se reconnoît d é b ite u r, et qui a été apuré de
gre a gré entre ! lai m ère 1et 1er fils.
..
D éduction faite de ces.d eu x derniers paiem ens, les répétitions
de Catherine G a lice sont-restées pour ila somme de 7 ,0 1 2 *
5J" 7^
'en cap ital, q u i, est-il dit.dans l’a c td jjlu i demeure, réservée avec
les intérêts à écheoir., ainsi que son douaire et son action pour
le remboursement (.des sommes en nantissement desquelles elle
n ’a reçu q u e . des renteSi
• j ; ....
'
;> :
B a
�( 12 )
L a passation de ce traité étoit plus aisée que son exécution.
Les
mineurs
Choussy
avoient
C houssy en reddition du
actionné
l'héritier
co m p te. de tu telle
reliquat. L ’héritier avoit rendu le
de
N icolas
et paiem ent du
compte : qu elqu’inexactitude
que renferm ât ce co m p te , il reconnoissoit néanmoins devoir aux
mineurs i2,oo o'tt; e t , d ’après les blâmes et idébats, le reliquat
sé portera au moins' à 25,000'*. L e s mineurs avoient sur les
biens de N icolas Choussy une h ypothèque pour le paiem ent de
ce reliquat. E lle éto it, à la vérité postérieure à celle de C atherine
G a lic e , parce qu ’elle ne remontoit qu’au jour de l’acte de tu te lle ,
e t q u e .c e lle de C atherin e G a lice prenoit date à son contrat de
m ariage qui est plus ancien. M ais il n ’en est pas moins vrai
qu e les m in eu rs, comme créan ciers, aroient le droit d’exam iner
les
opérations
qui avoient servi de base à ce traité , et de
les répétitions de Catherine
demander qu ’il fût annullé , et que
G a lice
fussent ré d u ite s, si elle s’étoit fait
adjuger
plus
de
créances q u ’il ne lui en revenoit. Ensorte que Catherine G alice
n ’avoit q u ’une propriété flottante et in ce rta in e , tant que l ’e x é
cution de ce traité ne seroit pas ordonné ,par la justice , contra
dictoirem ent avec les mineurs.
A ussi , par exploit du 1 4 août 1787 , C ath erin e G a lice
fit- e lle assigner les mineurs e t leur curateur en la c i-d e v a n t
justice de Billom , pour voir ordonner
que
le
traité
seroit
homologué avec eux , comme créanciers de la succession bén é
ficiaire de N icolas Choussy , pour être e x é c u té , suivant sa form e
et
teneur , e t
de la troubler
en
conséquence , pour se
ou em pêcher
voir faire
dans la possession
des biens m eubles et im m eubles à elle délaissés par
On
sent
C h ou ssy;
d ’avance
ils ont
qu elle
a
été
la
crié avec fondem ent à
d éfen se
défense
et jouissance
cet
acte.
des mineurs
la fraude contre
ce
traité et contre les reconnoissances faites par N icolas Choussy
à sa fem m e. Ils ont dit que ces reconnoissances étoient
singu
lièrem ent exagérées ; qu ’elles» dévoient être annullées , et q u ’il
devoit en être de m êm e du traité qui en étoit une
suite. Ils
form èrent en tant que de besoin , tierce oppositon aux sentences
qui avoient été obtenues par C ath erin e G a lice contre son fils,
�c 13}
les s. septem bre et 18 novem bre 1786. Ils dém ontrèrent ju squ’au
dernier degré d ’évidence , par le rapport d'une foule d ’actes
authentiques, que Jacques
G a lice et N icolas
été en société ; que cette société
que
en
dès r lors
m eubles
e t qu ’il
lui
toüte
ou
la fortune
acquise
im m e u b le s, devoit
en revenoit la m oitié
créanciers.
constances , ils
soit leur
depuis
être
cette
partagée
renoncer ,
au
entr’eux ,
p réjudice
E n un m o t, en relevant une
m irent au jour les
tuteur , soit
époque
à N icolas Choussy , à laqu elle
et son héritier n ’avoient pu
leurs
C h o u ssy , avoient
remontoit au moins à 1 7 4 6 ;
foule de cir
concerts frau duleu x
sa veuve et
de
son h éritier
que ,
bén éficiaire
avoient conçus dans la vue de faire perdre leu r cré a n ce s, et
de garder im puném ent une grande partie de leu r fortune que ce
tuteur avoit tournée à son profit.
Ils dem andèrent à faire assigner 'en assistance de cause JacquesPhilippe Choussy qui soutenoit le procès , sous le nom de sa m ère,
'dont il est exactem en t la d o u b lu re , puisqu’il est son seul h éritier.
E tant assigné , il a continué de jouer un rôle p assif; il a
toujours
laissé soutenir le com bat , au
moins en apparence ,
par C atherin e G a lice .
r
A p rè s une instruction très - am ple sur appointem ent en d ro it,
il fu t rendu en la ci-devant justice de Billom , le 20 février 179 0 ,
une sentence par forclusion contre C atherine G alice
et son f ils ,
par la q u elle les mineurs Choussy ont été reçus tiers opposans
à l’exécution des sentences des 2 septem bre e t 18 novem bre 1 7 8 6 ,
obtenues par C atherin e G a lice contre son fils : les parties ont été
mises au
m êm e
et sem blable état q u e lle s
étoicn t avant ces
sentences. L es déclarations et reconnoissances faites par N icolas
C h oussy à C ath erin e G a lic e ,le s 2 octobre 1768 et 10 mai 1772»
sont déclarées nulles , com m e non faites et avenues. L e s délaissemens d objets
m obiliers et immobiliers
de Jacques - P hilippe
f a it s ,
Choussy , à C atherin e
le procès verbal fait en
présence des
de
la
part
G a lice , tant par
jurés-priseurs , qu e par
le traité du 4 août 1787 , sont égalem ent déclarés nuls. C ath erin e
G a lice est
C houssy
condamnée à rapporter à
la succession
tout ce qui en d é p e n d o it, e t qui lu i
de N icolas
a. été délaissé
�(■
i4 )
par le procès verbal et par le traité
dont on vient de p a rle r,
s a u f à elle à répéter sur la succession de N icolas Choussy les effets
mobiliers en
marchandises ou autre nature quelconque ;
quelle,
établira tant par titres , autres néanmoins que les deux reconnais
sances ci-dessus, qu,e par témoins ; et ce , suivant la commune
renommée, que ledit J e u son père laissa à son décès , la preuve
contraire demeurant réservée aux mineurs Choussy , à répéter aussi
sur la même succession ce que d'après des répliques de sa part aux
défenses contre certains des objets à elle adjugés par notre susdüe
sentence du a septembre 178 6 , il lui sera définitivement adjugé ( 1 ).
I l est ordonné'qu'à cet égard, ainsi que sur les chefs dé demandes
en rapport, form ée par les mineurs Choussy contre Catherine Galice ,
Us parties contesteront plus amplement.
L a m êm e sentence renvoie à prononcer s u t la société q u ’il
p eu t <y avoir eu entre N icolas Choussy et Jacques G a lice ,
jusqu’à ce qu’il sera prononcé su r 1 les reprises à fa ir e par Cathe
rine G a lic e , d’après la preuve ci-dessus énoncée.
L e s parties sont .mises hors de cours sur la
>
demande inci
dente de C ath erin e G a lic e , portée par sa requête du 4 ju illet
1789 ( 2 ) ; un tiers des dépens est ré se rv é , e t Catherine G alice
çst condamnée aux deux autres tiers.
I l est essentiel de rem arquer que les mineurs Choussy ,>en
faisant signifier cette se n ten ce, par exploit du 27 février 1790 ,
ajoutèrent
que c’é to it , sans
néanmoins
l approuver
aux chefs
auxquels ils sont grevés , u e réservant d’en interjeter appel inces
samment. L e s mineurs Choussy ont fait la m êm e réserve dans
tous les -actes de procédure essentiels.
Catherin e G a lice
le
6 mars
interjeta a p p e l de cette m êm e sentence ,
suivant.
■Ce n ’est que long-tem ps après que Jacques-Philippe
Choussy
( 1 ) O n pre'sumo que le jugo de B illom a en ten d u parler des çreanccs
q ui sc trouveroient établies.
.(a )
C ette
dem ande tendoit ,à la suppression
«l’injures que
C atherine
G alico pretendoit que les m ineurs C houssy s’çtoien t pcriniscs m a-lâ-propos
c o n tre la inümoiro do son m ari.
�*5 )»
restreint son a p p e l, au
c h e f par
lequel les parties ont été mises hors de cours sur la
dem ande
(
a aussi interjeté appel. Il a
incidente
qu ’il y
a dit
avoir form ée lui-m ême , le 4
p ré c é d e n t, se réservant néanmoins de se
ju illet
pourvoir contre les
autres chefs. O n présum e que le ch e f qui a fait le sujet, de
l ’appel de Jacques C h o u ssy, est celu i qui a mis hors d e'co u rs
sur la suppression, des .prétendues
injures : ron
est cependant
étonné qu ’il ait dit qu ’il avoit form é lui-m êm e cette d em an d e,
attendu que' dans la
requête qui la contient , on n’a vu en
qu alité que C atherine G alice. A cela p rè s, sur l ’a p p e l, JacquesPhilip pe Choussy a joué , com m e
en instance
principale
un
rôle purem ent passif. M ais quoiqu’il ne parût pas , il n ’a pas
pour cela été l ’adversaire le moins redoutable des mineurs Choussy.
D ’après le
nouvel ordre dans l ’administration de
la ju s tic e ,
l ’appel qui avoit d’abord été porté en la ci-devant sénéchaussée
de C lerm o n t, l’a été en ce tribunal, en conséquence des exclu
sions respectives dont la facu lté étoit accordée aux parties ;
et le 20 mars 1792 , le tribunal a rendu un jugem ent dont il
est à propos de transcrire le dispositif.
Attendu qu’il n’a point été fa it d'inventaire après le décès du,
sieur G a lic e , père de
Catherine G alice
appelante ; que les actes
ne fo n t f o i qu’entrz les parties contractantes ; que des tiers sont
toujours[ admis a critiquer des actes qui leur fo n t préjudice ; que
les circonstances dans lesquelles ont été fa ite s les reconnaissances
des 2 octobre 1 7 6 8 , et 10 mai 1772 , ainsi que les d i f érens fa i t s
articulés contre ces reconnaissances , de la part des. intim és, f o n t
naître des soupçons de fra ud e et
d’exagération dans les
objets
reconnus; que des actes, suspects d’exagération et présumes passés
en fraude des créanciers, ont besoin d'être fo rtifiés par des preuves
secondaires qui détruisent le soupçon. L e t r ib u n a l , par jugement
en dernier ressort ordonne avant fa ir e droit tant sur l ’appel inter
je té de la part de Catherine Galice et Jacques-Philippe C houssy,
son f i l s , de la sentence rendue en la ci-devant justice de B illo m ,
le 20 février’ 1 7 9 ° ’ 9UC sur les demandes form ées en cause d’appel,
et sans préjudice des fin s qui demeurent réservées aux parties, que
ladite Catherine Galice fe r a preuve dans les délais de l ’ordonnance ,
4 i; -
�c IS )
tant par titres que par témoins et la commune renommée, de la
consistance et valeur des marchandises, ainsi que des meubles ,
bestia ux, or et argent demeurés du décès de Jacques G a lice, son
père , et les intimés preuve contraire.
E n exécution de ce ju g e m e n t, les parties ont respectivem ent
en qu êté p ar-d evan t
un
des m em bres du tribunal du district
de B illo m , auquel il avoit été adressé une commission rogatoire
à
cet effet.
L e s m ineurs
Choussy se sont enfin vus dans la
d ’appeler de la sentence de
en ce
q u ’elle
a ordonné
la
nécessité
ci-devant justice de Billom ,
une contestation plus am ple et un
sursis sur plusieurs objets importans qui éto ien t, sans co n tred it,
en état de recevoir une décision. O n verra dans la suite toutà-la-fois l ’intérêt et le fondem ent de cet appel.
M
O
Y
E
N
S
.
DANS une affaire de toute autre nature que celle dont il s’a g it,
on pourroit passer tout de suite à la discussion des en qu êtes;
il n ’y auroit q u ’à voir si leur résultat rem plit
ou non le vœ u
du jugem ent interlocu toire; mais ici le développem ent des cir
constances e t des moyens qui établissent que la fraude a présidé
à tous les actes qu e les mineurs Choussy a tta q u e n t, doit m archer
de front avec l ’analyse des enquêtes.
C ’est aussi dans cet esprit que le jugem ent interlocutoire a
é té conçu. O n y lit entr’autres m o tifs, que les circonstances
dans lesquelles ont é té fa ite s les reconnaissances des 2 octobre 1768
et 10 mai 1772 , ainsi que les dfjérens fa it s articulés contre ces
reconnaissances, de la part des intimés , fo n t naître des soupçons
de fra u d e et d'exagération dans les objets reconnus; que des actes
suspects d’exagération , et présumés passés en fraude des créanciersy
ont besoin d'etre fo r tifiés par des preuves secondaires qui détruisent
le soupçon.
O n voit donc que les circonstances indicatives de la fraude,
et les dépositions contenues aux enqu êtes, sont autant de preuves
d ’un genre différent qu ’il fau t exam iner pour savoir si les prem ièrej
�( 17 )
mîères sont détruites ou m o d ifié e s, ou si au contraire elles sont
fortifiées par les dernières.
L es
circonstances qui prouvent la fraude , se présentent en
foule. L orsqu’un m a ri,u n m archand sur-tout (c a r N icolas Choussy,
m êm e après le décès de son beau - p ère , avec leq u el il étoit
associé , s’est toujours qualifié
reconnoissance à sa fem m e ,
de m archand ) , en faisant une
n ’a
d’autre but
que de rem plir
un devoir que la justice lui im p ose; il ne prend pas des voies
détournées ; il s’en
occupe
aussi - tôt après l ’ouverture de la
succession; il appelle un notaire du lie u ; il ne fuit pas la lum ière.
C ’est dans la maison m êm e que le notaire inventorie les effets
reconnus ; il exam ine la nature de ces effets ; il rend com pte
de ce q u ’il voit , et il ne copie pas alors m achinalem ent un
acte où l ’on dit que des effets e x iste n t, sans q u ’il sache si cela est
vrai ou non. S ’il n ’y avoit réellem en t que
5o 'n" en a rg e n t, le
notaire ne diroit pas qu’il en a trouvé i , 2o o 'n' . C e tte p récau
tion seroit encore plus salutaire pour des objets d ’un transport
d ifficile , et q u ’on ne pourroit pas aisém ent supposer , tels qu e
des grains , autres denrées et des m eubles.
U n mari qui n ’a que des vues droites reconnoît et fait invento
rier à-la-fois tout ce que son beau-père laisse. I l ne m u ltip lie
pas les reconnoissances, à m esure qu ’il contracte une responsabilité
qu e ces reconnoissances tendent à éluder. E n fin , il m et sous »
les y e u x les objets pour pouvoir m ieux les apprécier. L e s titres
des créances sont visés et datés ; on distingue les effets dont
le paiem ent doit
être regardé comme çertain , de ceux dont
la perte est à craindre par des prescriptions ou par l ’insolva
b ilité des débiteurs.
Q u e la conduite de N icolas Choussy a été différen te ! II ne
songe à faire une reconnoissance à Catherine G a lic e ,q u 'a u moment
où il est question de la tutelle des enfans Choussy ; q u ’il a la
certitude
qu ’il
qu elqu’avantage ,
sera nommé
ou ce qui
tuteur ,
revient
et il
croit se
au mém o ,
donner
à C ath erin e
G a lice , en donnant à cette reconnoissance une date antérieure
a la tutelle.
E t q u ’on ne dise pas que ce rapprochem ent de dates de la
G
�»
( 18 )
reconnoissance et de la t u te lle , est l'effet du hasard ; que sans la
circonstance de la t u te lle , la reconnoissance auroit été égalem ent
faite. O u ï, il doit dem eurer pour certain que la reconnoissance
a été faite à l ’occasion de la tu telle; que l’une est une suite de l’éveil
donné par l ’autre. O n ne p eu t en douter, d’après ce qui a été dit
dans une requête signifiée en prem ière instance , de la part
de C ath erin e G a lic e , le 11 août 1788. « Il leur paroît étrange
» ( aux mineurs Choussy ) que le sieur C h oussy, m enacé d ’une
» charge qui l ’e ffra y o it, comme tant d’autres, ait songé à rendre
» à sa fem m e la justice q u ’il lui d e v o it, et q u ’il n ’ait pas cru
» pouvoir
retarder
davantage
un e
reconnoissance
en
forme
» d'inventaire que la loi lui prescrivoit de lui fournir dans les
» trois mois
prêts à expirer. Ils
ne
voient q u ’un dessein de
» fraude dans ces reconnoissances ; mais l ’honnêteté n ’y verra
» q u ’un acte de justice rigoureuse. E n exposant sa fortune dans
» l'administration d'une tutelle , pour laquelle il ne se connoissoit
» aucune aptitude , ctoit - il raisonnable qu’il exposât aussi celle
» de sa f e m m e , par une négligence coupable à en assurer l'état » /
11 étoit impossible de dire plus disertem ent que la reconnois
sance n’étoit faite qup pour m ettre en opposition les prétendus
intérêts de Catherine G a lice avec les intérêts très-réels des enfans
dont la tutelle
alloit passer sur la tête de N icolas
Choussy.
Il n ’y a rien de plus frivole que les m oyens qu ’on fait valoir pour
justifier les circonstances dans lesquelles cette reconnoissance a
é té faite.
Il sem ble de la m anière dont on s’exprim e , que la recon
noissance ne pouvoit pas être retardée ; cependant il n ’y avoit
aucune nécessite q u e lle fut faite avant la tu te lle . Si elle eût
¿ té sincère, elle auroit eu égalem ent son e ffe t, quoique faite après
la nom ination du tuteur ; parce q u e , dans tous les cas , ainsi que
les mineurs Choussy en sont con ven u s, C ath erin e G a lice avoit
une h ypothèque pour ses ré p é titio n s, à com pter de son contrat
de m ariage.
O n s’abuseroit encore
bien grossièrem ent, si on croyoit que
cette reconnoissance dût être faite dans les trois mois du décès
de Jacques Galice% L e s l o i s ,
qui donnent
aux héritiers trois
�C *9 )
mois pour faire in v e n ta ire , et quarante jours pour d élib érer ;
s o n t , sans co n tre d it, 'étrangères aux reconnoissances des maris
à leurs fem m es. Si ce délai devoit être observé , dans ce c a s ,
que C atherin e G a lice nous explique la cause d’un si long intervalle
q u ’il y a eu entre les deux reconnoissances. Il ne p eu t donc y
en avoir d ’autre raison, si ce n ’est , comme on a déjà d it, que
N icolas Choussy avoit touché des deniers et effets pupillaires ,
avec lesquels il avoit fait des acqu isitio n s, et la seconde reconnoissance étoit une arm e q u ’on sc préparoit centre la restitution
qui
en ssroit dem andée.
Q u e lle idée peut-on encore se form er de ces deux reconnois
sances ,
lorsqu’on voit que N icolas Choussy les f a i t , non par
fo r m e d’inventaire, comme le dit Catherine
G a li c e ; mais bien
par form e de m ém oire , à son g r é , sans la présence d ’un officier
p u blic , et qu ’il va furtivem ent les porter à un notaire dom icilié
à deux lieues de d ista n ce , auqu el il les donne à copier ? E st-ce-là
la m arche de la candeur et de la vérité ?
C ’est en vain que C atherin e G a lice a dit , pour p allie r ces
détours tortueux , que l ’on avoit eu recours au m inistère du
citoyen C h am b o issier, notaire à Y ic-su r-A llie r , par une espèce
de nécessité , parce que d it-e lle , ce notaire étoit nanti des titres
et papiers de la succession de N icolas C h o u ssy, ainsi que C ath erin e
G a lice prétend
l ’établir par un certificat q u e lle a m endié du
C ito yen M ailli , qui a succédé au citoyen Cham boissier.
L e s réponses à cette objection abondent.
i ° . Il n'en est pas dit un mot dans les deux reconnoissances.
20. O n y voit que , par rapport à la plupart des créances ,
les titres ne sont ni visés ni datés , ce qui est un nouveau m oyen de
suspicion ; et que N icolas Choussy a dit avoir lui - m êm e ces
titres en son pouvoir.
3 °. L inspection de reconnoissances apprend que la m ajeure
partie des débiteurs étoient domiciliés à Billom ou aux environs.
Il résulte , sans contredit , de toutes ces circonstances , q u e
les titres et pièces n étoient pas au pouvoir du notaire Cham boissier,
comme on a voulu le faire croire.
4 °.
L ’objection de C ath erin e G a lice ne p eu t pas au moins
s’appliquer aux m archandises, a rg e n t, d e n ré e s , m eubles et effets
C
a
�.
( 20 )
f[ui se trouvoient dans la maison de Jacques G a lice , et q u i ,
¿uivànt e lle , form oient un objet très-con sid érable.
L a m arche n a tu re lle , quoi q u e lle en dise, étoit donc de faire
faire inventaire dans la maison par un notaire qui auroit écrit
ce qu'il auroit v u , sa u f à porter en déclaration les objets qui
âuroient pu
être en dépôt ch ez le
citoyen C h am b o issier, si
toutefois il y en avoir.
Si on joint à totites ces circonstances, celles que les reconnoissances et le traité dont il s’a g it, sont faits d’abord entre le
mari et la fe m m e , ensuite entre cette fem m e devenue v e u v e ,
et son fils , son seul h é ritie r, qui avoit pris la qualité d ’héritier
bénéficiaire de son père , qu elle
confiance peut - on avoir en
ces actes ? O u tre que ces sortes d ’actes sont en g é n é r a l, par leur
nature, suspects de frau d e, c ’est que la fraude se présum e toujours
entre proche. Fraus inter proximos J'acilè pra’sumitur.
- Il est d’ailleurs bien difficile de se défendre d’une forte p ré
vention contre un acte fa it par Jacques-Philippe C liou ssy, revêtu
de
la qualité d’héritier bénéficiaire de son p ère , sur - tout dès
que cet acte devoit tourner à son p rofit, comme devant succéder
à sa m ère. Ecoutons ce que nous dit contre cette espèce d ’héritiers,
M orn ac, jurisconsulte d ’une très-grande exp é rie n ce , sur la loi 53 ,
f f . de petit, hared. mancirunt verà et indè beneficiarii hetredes ,
quorum hodie duplex malum. Populanlur quippè hareditatem personnali
istî
hetredes,
fa ma
defuncti
insuper habita Jucum quc
creditoribus harreditariis J a c iu n t, solulo aids arc m odico, a [iis verà
cum quitus non deciderint, Jraudatis omnino ac ludificatis. C e t
auteur finit par faire des vœ ux pour l’abolition du droit de se
rendre héritier sous bénéfice d ’inventaire.
M ais s i, dans les circonstances que l ’on vient d ’exposer, on
voit le dessein de trom p er, consilium Jra udis, on verra dans tout
ce qui a suivi, l’accomplissement de ce p ro je t, cvenlum fra ud is.
O n pourroit rappolor une foule de circon stances, à l ’aide
desquelles non seulem ent on prouveroit la fr a u d e , mais encore
«h couvriroit de ridicule les reconnoissances des a octobre 1 7 6 8 ,
et 10 mai 177 2 .
L a quantité
de m eubles m eublans
énoncés dans les rccon-
�•.
.
•
,f *
/
*
:n oissances, est telle que la m a ison 'o ccu p ee par Jacques G a lice
n ’auroit jamais pu les contenir. E lle n’a , en e ffe t’, que 19 p ied i
de long sur 16 de large. Il y a douze rideaux de fenêtre avec
leurs trin g le s, et cependant il n ’y a jamais eu qu’u n e 'fe n ê tr e
vitrée. O n y voit encore six rideaux! d’alco ves, èt il ri’y ¿ jamais
eu d ’alcô ves; trois lits de dom estiques, quoique J a cq u e s'G a lic e
n ’ait jamais eu qu ’une servante.
Le
"
détail des denrées , porté dans les reconnoissances , est
évidem m ent exagéré ,
puisqu’il est infinim ent
supérieur à la
quantité énoncée dans le compte de bén éfice d ’in ve n ta ire , rendu
par Jacques-Philippe C h ou ssy, pour des objets qui étoient indivis
entre son p ère et son aïeul. O n a d éjà fait rem arquer cette
contradiction dans le récit des faits.
L es reconnoissances contiennent len o n ciatio n de m archandises
d ’une nature , telle que Jacques G a lice n ’en a jamais e u e , et
qu’il ne s’en est m êm e jamais vendu dans Billom . Son com m erce
rouloit sur les étoffes les plus grossières, sur des b o n n ets, des
b a s , des gants , vulgairem ent appelés m ites, principalem ent à
l ’usage des habitans des cam pagnes, comme on le suppose aisém ent
d ’un m archand qui habitoit une
v ille peu con sidérab le, très-
rapprochée de la ca p ita le , et où il n’y avoit aucune espèce de
lu xe.
Il est dû au x m ineurs Choussy une somme de
653* 6s ô5’ par
A n toin e et Pierre Boussat. C es particuliers ne peu vent point
payer en a rge n t; ils sont obligés de céder des fonds. N icolas
Choussy se garde bien de s’y opposer : les fonds valoient bien
la cré a n ce ; il conçoit le projet de tourner sur sa tête la propriété
de ces fo n d s, qui devoit résider sur celle des mineurs. Croyant
pouvoir les en frustrer avec sûreté , il fait cette acqu isition,
sous le nom de son fils , âgé seulem ent de q u in ze a n s; e t ,
pour tâcher de faire prendre le ch a n g e, il date la quittance
du
février
1 7 7 3 , et la vente de trois jours après. Il est
aisé de sentir que les m ineurs n e doivent pas
être '^dupes de
cette su p erch erie, e t que la réclam ation q u ’ils feront des fo n d s,
dans l’instance relative à l ’apurem ent du compte de t u te lle , sera
très-bien fondée.
c
�( 22 )
^ ;L e s reconnoîssanccs .ni
le traité n e font m ention d'aucune
d ette passive de Jacq u es G alice. Comment^ croira-t-on cependant
q u ’un m archand a u q u el on suppose m êm e un com m erce étendu ,
n ’ait laissé aucune dette?
$i l’on additionne les objçts énoncés dans les reconnoissances,
Je ¡-résultat n’est point conforme à la somme à laqu elle on les
a fait monter. Suivant ¡in ven taire fait après le décès de N icolas
„Ç lio u ssy, on ne fait m onter q u ’à i 83 ‘M' l ’argent q u il a laissé;
e t , par surcroît de fr a u d e , C ath erin e G a lice n ’en fait aucune
Réduction sur ses créances.
A
la mort de Jacques G aliçe , le domaine de L a c h a l, qui
avçit été pris à.rente par indivis entre le b e a u - p è r e ,e t le gendre,
éto it sans bâtim ens. C e n ’est que depuis , que N icolas Choussy
,y a fait construire deux granges , deux é ta b le rie s, une maison
,pour le m é ta y e r, une cham bre pour lu i-m ê m e , et un colom bier
.a u -d e ssu s. T ou tes ces-constructions n ’ont pas été faites peur
_3 , o o o . . e t
çlles ont augm enté considérablem ent la valeur du
R om aine. Il auroit bien fa llu
qu e
C a th erin e
p a lic e eût fait
raison de ces objets à la succession de N icolas C h o u ssy; cependant
son fils et elle ont ju gé
à propos de garder le silence à cet
.égard.
Lorsque C atherin e G a lice et N icolas Choussy m arièrent leur
,fille avec,le citoyen F ayo l, notaire .à S t. A m ant, ils lui constituèrent
tous deux , en d o t , la s.ojnme de 8,000* dont le contrat de mariage
porte quittance de
5,000*. C e paiem ent fut fait par N icolas.Choussy
.seul , et de ses deniers. 11 a donc p ayé pour sa fem m e la m oitié
de
cette somme que la succession devoit répéter. C epen d an t
C ath erin e Choussy et son ûjs ont juge a propos d ’oublier cet
article.
L e s reconnoissançes de 1768 et 1.772 font,m ention d u n e foule
„de créances , souscrites au p ro fit, tant de N icolas C h o u ssy , quo
,de Jacques G a lic e ; q u e lq u e s-u n e s m êm e sor\t faites au profit
de N icolas Choussy seul : cependant par une mal-adresse incon
cevable , par le
traité de 1787 , l'on ,a attribué le
tout à la
Succession G alice.
E n fin , en attribue à la
succession de Jacques C a lice
V
des
�4
ô
S
-
.(¿35
¿ouverts d a r g e n t, que plûsieurs personnes'de Bilîôm sa v e n tTavoîr
été faits par un ouvrier de cette v ille , après la mort de Jacques
G a lic e , pour le compte de N icolas Choussy.
“ --y
C om bien d ’autres circonstances sem blables les mineurs Choussy
ne pourraient - ils pas invoquer ? L e détail en est contenu dans
leurs écritures. Il n ’échappera sans doute pas' à l’attention et
au
z è le
du
citoyen
rapporteur.
N ous
croyons
donc pouvoir
passer à un fait infinim ent im portant dans cette a ffa ir e , qui
porte avec lui une preuve irrésistible du dol pratiqué à l ’égard
des m in eu rs, et qui re n ve rse , sans ressources , toutes les bases
du traité du 4 août 17871
O n veut parler de la société qui a eu lieu entre- Jacque3
G a lice et N icolas C h o u ssy , son g e n d re , depuis 174 6 au m oins,
jusqu'au décès de Jacques G a lice . Il résulte de-là que les mar^
ch a n d ise s, créances et e f f e t s , qui ont été laissés par Jacques
G a l i c e , et que les acquisitions q u ’il a faites , depuis cette
époque , ont dû appartenir pour m oitié à N icolas Choussy ;
ensorte q u e , soit l u i , soit ensuite sa veuve e t son fils ont eu
une affectation bien co u p a b le , en agissant comme si tous ces
biens appartenoient à Jacques G a lice seul.
C ath erin e G a lice et son fils ont bien senti toute la consé
quen ce qui résulte de ce m o y e n ; aussi n ’o n t-ils rien n égligé
pour le com battre. Mais*; m algré tous leurs e ffo rts, il n’y a rien
de plus aisé à établir que cette société.
E lle prend d ’abord son fondem ent dans une quittance du 20
août 1748 , donnée par Jacques G a lice à N icolas Choussy , dé
la somme de 2 ,0 0 0 ^ . Il fau t observer que c e tte ’ som m e, qui
iaisoit partie de celle de 4,00 0 ^ , à laquelle la légitim e paternelle
de N icolas C h o u siy avoit été fixée par son contrat de m ariage ,
qui rem onte à l'année 1742 , avoit été touchée par Jacques
G a lice.
Par
la
quittance
Choussy reconnut
dont
on vient
de
p a r le r , N ico la s
l'avoir retirée de Jacques G a lice ; mais en
m êm e temps , ce dernier reconnut que son gendre l ’avoit m ise
dans sa b o u tiq u e , et l ’avoit em ployée en marchandises et autres
effets.
C e tte
quittance
prouve
deux
faits
essentiels ; le prem ier;'
�\
i
C M )
q u e Je beau-père et le gendre s’étoient mis en société , depuis
qu elque te m p s , puique les marchandises de l ’un et de l ’autre
étoien t confondues dans la m êm e b o u tiq u e ; le second, que la
qu ittance n ’expliquant pas à qu elle somme montoient les mar
chandises mises dans la m êm e boutique , par N icolas C h o u s s y ,
çt n e fixant pas
une
m ise différente de
la part
de chaque
associé dans le com m erce com m u n, la présom ption est que la
boutique ne contenoit, en tout, que pour 4,000* de m archandises,
e t que c ’est à cette somme que doit être évalu é le fonds de
com m erce des deux associés : telle est la disposition de la loi 29,
f f . pro soch . S i non Juerint partes , y est-il d it, societati adjectce,
irquas esse constat.
C e tte société est ensuite é ta b lie , i ° . par
56 sentences obtenues
en différens tem ps par Jacques G a lice e t N icolas C h o u s s y ,
a u bailliage ou en la juridiction consulaire de Cillom , contre
leurs débiteurs communs , dans l ’intervalle
de
1761
à
176 7.
O n voit dans toutes ces se n ten ces, que le beau-père et le gendre
sont dem andeurs conjointem ent , sous le titre de marchands :
d an s plusieurs , il est d i t , Jacques G alice et Nicolas C houssy,
son gendre , communs en biens et demeurant ensemble : dans une
grande partie on est allé plus loin , il est d i t , Jacques Galice
¡et N icolas Choussy , m a r c h a n d s a s s o c i é s , habitons de la ville
de B illom , et il n ’est pas inutile de rem arquer que cette quali
fication de
m archands
a sso ciés
est contenue dans plusieurs
sentences des plus a n cie n n e s, des années 1761 , 1764 et 17 5 5 .
C e s sentences portent condamnation de différentes sommes dues
pour ventes de denrées ou marchandises. Il faut encore rem arquer
qu e lorsque Jacques G a lice et N icolas Choussy étoient assign és,
on leu r donnoit la m em e qualité d'associés ou de communs en
biens q u ’ils se donnoient eux-m êm es.
20. L a société sc prouve par le relevé du livre de com m erce
*lu citoyen S a b lo n ., négociant à C le rm o n t, certifié par le citoyen
S a b lo n , sop fils. 11 est re la tif aux années 1756 , jusques et compris
1 7 6 9 , et il est dit qu e les déliyranccs, des marchandises ont été
faites pour toutes ces années
marchands à B illom ,
/
à MM.
Galice
et Choussy ,
'
9
.3
. ^
�t
3 °. L a
ville
de
1768.
c 2 5 }
m êm e preuve se tire
de l ’extrait des rôles de
la.
B illo m , des années 1 7 4 3 , jusques et compris l'année
C es extraits
en commun.
annoncent
qu’ils
payoient une seule cote
Dans certains extraits , il est d i t , Jacques G alice
et Nicolas Choussy, son gendre , marchands , pour leur industrie
et biens. L ’extrait de
l’année
176 6
prouve q u ’ils avoient fait
fixer une seule cote pour eu x d e u x , par un procès verbal du
3o ju illet 1766. Certains autres extraits établissent aussi qix’ils
faisoient leurs acquisitions en com m un] et cela résulte en effet
des
actes qui en ont été rapportés.
Enfin , la m êm e preuve résulte
encore de ce qu’un grand
- nombre de titres de créances ont été souscrits
beau-père et du gendre conjointem ent.
au
profit du
C e tte société a com m encé quelques années avant la quittance
du
20 août
1748 ;
c’e s t - à - d ir e , en
l ’année 1 7 4 6 ,
et
voici
com m ent ce fait s’établit.
O u tre que les énonciations m êm e de la quittance le p ro u ven t,
p uisqu’il est dit que la somme de 2,000’* avoit été remise
auparavant par Jacques G alice à N icolas C h o u ss y , et qu ’elle
avoit été em ployée par ce dernier en marchandises qui étoient
dans la b o u tiq u e , c'est qu’on voit sous la
cote soixante de la
c o p ie , que Catherine G a lice a fait signifier de l ’inventaire fait
après
le décès de N icolas C h o u ss y , un b ille t de 180^, consenti
au profit de Jacques G alice et de N icolas C h o u ssy, le 24 ju illet
1746 .
C e billet
n ’a pu être fait au profit du b e a u -p è re et
du gendre conjointem ent, qu e parce qu ’ils étoient déjà associés.
C atherin e
G a lice a com battu l ’existence de la s o c ié té , par
des objections aussi foiblos que m ensongères; elle a dit d ’abord
que le beau-père et le gendre n’ont jamais é té associés ; que
s’ils ont pris le titre de communs en biens, ce n ’a été que
relativem ent à des ferm es et acquisitions en commun ; mais que
ces expressions n'ont jam ais eu aucun rapport au com m erce de
draperie,
de
mercerie, de
toilerie , de Jacques
G alice ,
dont
N icolas Choussy ne se m êloit jamais.
;
C e tte objection n ’est point exacte. O n ne peut douter de l’exis
tence de la société >soit d ’après la souscription des billets et obliD
�( 25 )
gâtions, tantôt au profit du beau-père et du gendre conjointem ent,
tantôt au profit de l ’un des deux s e u l, soit par la qualification
que le b e a u -p è r e et le gendre se sont donnée d'assocics, dans les
sentences q u ’ils obtenoient,
m êm e dans certaines où il n e to it
q uestion que d ’effets souscrits au profit d'un seul.
11 est bien vrai que dans quelques sentences, ils sont dits communs
en biens. M a is, dans un très-grand nom bre, ils se sont précisém ent
qualifié;» de marchands associés. A u surp lus, il seroit difficile d’établir
une différence entre la qualification d’associés et celle de communs
en biens.
11 est fau x qu ’en se qualifiant a in si, ce n’ait pas été
d ’une
m anière absolue , mais sim plem ent relative à quelques ferm es et
à des acquisitions communes. L e s jugem ens où la qualification
d ’associés est in sé ré e , n ’ont aucun trait en général à ces objets
particuliers ; elles concernent des ventes et délivrances de marchan
dises faites par le beau-père et le gendre, pour l ’entretien du com
m erce des particuliers q u ’ils faisoient condamner. L e tribunal en sera
convaincu par l ’inspection des sentences qui sont sous les cotes n e u f
et vingt-neiif de la production des mineurs Choussy en prem ière
instance. D ’ailleurs, comment peut-on supposer que si Jacques G alice
et N icolas Choussy n ’eussent voulu se réunir que pour demander
des objets relatifs à une société p a rtic u liè re , ils eussent procédé
sous le nom indéfini d'assocics , de communs en biensl ce n ’est
être
ni associés ni communs en biens, que de le t r e seulem ent
pour une ferm e ou pour une acquisition.
E n fin , ce qui ach ève de prouver l ’illusion de C atherin e G a lic e ,
c’est qu ’à certaines époques où son p ère et son mari se sont
dits associés et communs en biens, il n y
avoit ni ferm es , ni
acquisitions communes entr’eux.
C atherine G a lic e , obligée en quelque sorte de passer condam
nation sur le fait de la société, a cru se donner quelquavan tage en
invoquant
un m oyen de d ro it, consistant à dire que les sociétés
ne peuvent s’établir légalem ent par le f a it ; q u ’il faut , d ’aprés
M o m a c , qu elles soient prouvées par écrit.
11 est aisé de dém ontrer que cotte objection ne p eu t s’appliquer
à l ’espèce.
I
�( *7 )
E n prem ier l i e u , il n'est pas perm is d’ignorer q u ’il ne faut
pas toujours un écrit pour q u ’une
société
deux personnes. U n
en com m un, le m élange
com m erce fait
soit
établie entre
de biens et d’in d u strie, produisent seuls cet effet. C ’est alors
une société tacite établie par le fait m ê m e, qui a la m êm e vigueur
q u ’une société conventionnelle : c’est ce que
nous enseigne le
judicieux C o q u ille , dans ses questions et réponses sur les articles
des coutum es, question 88e. A p rès avoir traité de la commu
nauté de biens que certaines coutumes établissent entre fr è re s ,
par le fait seul de la cohabitation pendant un certain tem ps ,*
il ajoute : « C e qui se dit entre frères
par an et jo u r , j ’en
» voudrois dire autant entr autres personnes , si par qu elque
» plus long-temps elles avoient uniform ém ent et par m êm e
» façon tenu tous leurs biens m eubles , m êlé et com m uniqué
» les fruits de leurs im m eubles e t tous gains et profits.
Q uia
» enim societas tacito consensu dissolvitur, sic tacito consensu potest
» contrahi ». C e t auteur se fonde sur plusieurs lois q u ’il cite ,
et notamm ent sur la loi ; Itaque , j f . pro socio. Sur la question
89e , il traite des sociétés tacites, en cas de commistion de biens
et
profits', il confirme de
m êm e
principe
encore
avec
plus
d eten d u e.
D esp eisses, tome 1 , partie 1, section 1 , n ° 12 , enseigne le prin
cipe que la société est p résu m ée, non seulem ent lorsqu’il en apert
par é c rit,
mais aussi lorsqu'il en apert par d ’autres conjectures
pressantes. Il cite sur-tout l ’exem ple d ’un père qui cohabite avec
son fils ; ce qui doit ‘s’appliquer évidem m ent à la cohabitation
d u n beau-pèro avec -son gendre.
Carondas , dans ses p a n d ecte s, livre 2 , chapitre 3 3 , dit que
-« certains marchands s’étant communiqué ensem ble quelques
» marchandises , et ayant trafiqué en ic e lle s , par arrêt l ’on fut
» reçu à prouver par témoins une telle société ».
Lacom be q u i , au mot société, partie 1 , n °. 2 , rapporte le
passage de C aron d as, ajoute : « C e qui paroît devoir être o b se rvé ,
» nonobstant l’ordonnance de 1 6 7 3 , titre 4> article 1 , parce qu’en
*> ce ca s, c’est une société ta c ite , quev re contrahilur ».
D a
�\ '
( 2S )
E n second lie u , les mineurs C h o u ss y , nd sont pas réduits à
invoquer les circonstances d ’après lesquell&s une société est
r é p u té e , au moins ta c ite m e n t, avoir é té établie. Il y a plus
q u ’un é c r it , dans
Jacques G a lice
lequel se trouve
consignée la société d'entre
et N icolas Choussy. C es écrits sont toutes les
sentences où eux-m êm es se sont qualifiés de communs en biens,
d’associes. L orsqu’on les actionnoit, on leur donnoit ce titre ,
lorsqu’ils poursuivoient leurs débiteurs , ils se le donnoient euxm êm es j et l’on voudroit dire actuellem ent qu ’ils ne le to ie n t pas 1
leurs héritiers respectifs, qui sont tenus de leurs fa its, pourroient
tenir aujourd’hui un langage bien différent du leur , leur supposer,
une volonté contraire à celle qu ’ils ont m anifestée ! cette assertion
est le com ble du ridicule. Aussi H en rys, tom. i ,p . 6 i4> édit. de 1708,
a - t- il donné en m a x im e, que l ’on doit regarder comme communs
ou associés, ceux qui avoient pris cette qualité par les actes*
L ’ex isten ce de la société d ’entre le beau- p ère et le gendre *
est donc une vérité qui ne p eu t recevoir aucune atteinte
par
tous les efforts que la cupidité pourroit enfanter. A yant reconnu
solennellem ent q u ’ils étoient communs en biens et associés, leurs
créanciers les auroient fait condamner solidairem ent en cette qu alité.
M ais s'ils eussent été associés respectivem ent au public , il est
forcé q u ’ils soient considérés coim na tels, respectivem ent à leurs
héritiers et ayans cause. O11 ne conçoit pas que deux particuliers
pussent être regardés, to u r-à -to u r , comme associés, et comme
ne l ’étant pas.
M ais supposons, pour un m o m en t, q u ’on put dire que Jacques
G a lice et N icolas Choussy n’ont pas été associés, il n’en résulteroit
pas
pour cela que Catherine G alice et son fils fussent à l’abri
du reproche de fraude. Dans ce systèm e m êm e , il
testable qu ’on devoit au
est incon
moins faire prélever par la succession
de N icolas Choussy , sur Ies biens G alice , la somme de deux
m ille livres que N icolas Choussy avoit mise en marchandises
dans la boutique de son beau-père , suivant la reconnoissance
de ce dernier , contenue dans l’acte du 20 août 1748'
Catherine
G alice a cherché à prévenir cette objection dans
�4 1 1
C a9 )
une écriture q u ’elle a fait signifier en la ci-devant justice de
B illom , le 4 ju illet 1789. E lle y a, prétendu qu'il est dit seulement
dans:- t'acli d u (2o,..août^ 1748
qtierla bautique dit Iwaiirpire. étoib
le dépôt où: celui<i avoit permis à son gendre' déplacer M 0
tanémeht
les
N->
marchandises auxt]uellÀ'S)dl 'avoitj.employé
partie de la somme de
deux m ille livrés r par lui rteçue. ; elle
ajouté q u ’une stipulation pareille n’avoit et ne pouvoit’ avoir d ’aulre,
but que d’assurer au gendre, la J'aculté de disposer à son gré des
marchandises dont il s'a g it, et .de las retirer à volonté „ salns. qui
le beau-père pût l'en empêcher, etapar réciprocité, sans qu’il J u t
aucunement chargé d'en rendre compte , sans qu’il f û t astreint à en
prendre de décharge, au moyen d e l à quittance a ctu elle, absolue et
sans réserve qui lui étoit consentie.
}
M ais
C atherin e .Galice» suppose dans
des expressions qui n ’y
l ’acte
dont il
sagit T
sont point ¡(¡et. des idées q u ’il ne sauroit
présenter. C e t acte apprend què Jacques G alice avoit reçu.pour son
gendre
la somme de deux m ille
liv re s ;
que !ce d e r n ie r , du
consentem ent de son beau-pére , l ’avoit em p loyée en marchandises
dans la b o u tiq u e; que le gendre ne pouvant pas tout à-la-fois
avoir l’action en répétition do la somme d e . 2,0 0 0 *, coiitre son
b e a u - p é r e y et 1prendre dos. marchandises proportionnellem ent
à cette même: somme.ÿ le beau-père entendait prendrai décharge
ou quittance de
gendre l’em ploi
la somme
qu’il
en
boutique. 11 est impossible
de 2,000* , et reconnoître. à son
avoit fait en
m archandises dans la
d/interpréter autrem ent les d e rm e s
de l’acto cjui suivent la. quittance de 2,000*, q u e C atherin e G alice
devoit d’autant moins ign orer, q u 'elle .les a elle-m êm e rapportés
dans son écriture : « au' m oyen de la présente quittance » ledit
« sieur G alice rcconnoît que ledit sieur C h o u ssy, son gen d re,
» l’a mise dans sa btm iique , et em ployée en marchandises et
y autres effets , pour ladite somme de 2,000* ». .c
A insi donc d o it’ disparaître le /commentaire com m ode, mais
inexact de C atherin e G a lice. A i n s i , i l devient forcé de rejeter
l’idée que l ’acte <lu 20 août 1 7 4 8 , constitue seulem ent Jacques
G a lice dépositaire momentanée des marchandises , qui appartenaient
�( 3o )
à 'N ic o la s C h o u ssy ; q u e , d'après cet a c t e , le b e a u - p è r e
a it
été dispensé de prendre une décharge , lorsque le gendre retireroit
ces m ê m e s m archandises.1 O n v p it, au co n traire, une mise en
co m m e rc e
de marchandises de valeur de 2,ooo',+ ; il n ’y a pas
d ’époqùe fixe , à la q u e lle ces marchandises aient dû être retirées ;
e t,
encore une fo is, à supposer pour
un in stan t, q u ’il n ’y
eût pas eu de société , il est évident que la succession G alice
ne pourroit
être libérée d e
le rapport -d u n e décharge
de
cette somme de 2,000* , que par
4 a part de N icolas Choussy. L a
refcorinoissance ou l ’obligation du ^beau-père ne pourroit être effacée
que par ùne quittance du’ gendre. M ais de ce q u e.cette quittance
n ’est pas -rapportée , il n ’en
résulte pas seulem ent , que cç
dernier n ’a point retiré la somme de 2,000* , mais il en résulte
encore q u ’il éto it associé avec Jacques G a lic e , et que cette somme
eto it sa misé en société , ainsi q u ’on l ’a déjà établi.
M ais l ’état d ;in solvabilité, dans lequel les adversaires supposent
q u ’est
décédé
N icolas -Choussy , porte à -une réflexion bien
naturelle. Q u e sont donc devenues sa fortune et ses économies ?
O n n ’a pas daigné expliq uer comment et par quelle fa ta lité ,
après a to ir( consommé une partie considérable des biens de ses
p u p ille s , il s’est trouvé encore dans l’impossibilité de faire face
à sept à h u it m ille .livres de créances dues à C atherin e
G a lic e .
'tif
Il
est cependant vrai q u e C a th e rin e -G a lice a attribué cette
.position à l ’ineptie de N icolas Choussy dans le com m erce; à
de faux placem ens de.fon ds; à nombre d’acqtiisitions de mauvais
•vendeurs , q u ’il a fallu, abandonner ou payer plusieurs fois ; à
des spéculations m al
combinées
qui ne lui ont procuré
que
.des pertes , (et à une incurie d’administration qui faisoit q u ’il
.ne tiroit aucun parti de ses revenus , ainsi que de ceu x de
ses mineurs. •
1 • >
'En prem ier lieü , ion 1ne voit dans tout cela que de vaincs
allégations destituées do fondéinent. C ath erin e G a lice ne prouve
rien de
ce
q u ’cilc' avance : cependant
de
pareils
faits sont
•Ue-nature^à pouvoir être.iaiséincnt p rouves, lorsqu’ils sont vrais.
�( 3 0
•
E n second liè u , il n ’y a rien de plus ' contraire à la vérité^
que le p ortraittque C a th e rin e ' G alice a fait>de son m ari; outré
q u ’elle n’est pas d’accord en cela avec son fils qui donne bien
un autre prix au temps de N icolas C h o u ssy , qui lui a suppose
bien des" talens et de l ’intelligence , puisque dans le compte
de
tutelle
qu ’il
dédom mager de
a£ rendu , il
la
perte
a
dem andé
3 ,ooo ^ pour lû
que son p ère avoit so u ffe rte , pour
avoir été forcé de quitter le commerce par- les embarfas m ul
tipliés de la tu te lle ; c ’est que les mineurs C h o u ssy, forcés par
la nécessité de la d é fe n se , ont in v o q u é , dans-u ne requête du
12 janvier 1 7 8 9 , l ’opinion publique contre les assertions m en
songères de C atherine G alice. Ils n ’ont pas craint d’être dém entis,
en attestant que" non seulem ent
N icolas
Choussy n etoit pas
en usage de faire de mauvaises a ffa ires, mais que la cupidité
lu i en
faisoit faire de m eilleures
perm ettoit.
Ils ont rappelé
que
la
certains - faits
délicatesse
a u x q u e ls ,
ne
par
le
un
reste d’égard s, on se contentera de renvoyer. D ’a ille u rs, l ’idée
q u ’on a déjà donnée de la conduite de N icolas C h o u s s y ,
suffiroit seule pour prouver q u ’il n ’étoit pas inepte en m atière
d intérêt.
Examinons a ctu ellem en t'si les preuves q u ’on vient dé doitner"
de la fraude pratiquée , au p réjudice
des mineurs C h o u ssy ’,
par C ath erin e G a lice , par son mari e t son f i l s , sont détruites
ou m o d ifiées-p a r l ’enquête qu 'elle a fait f a ir e , en exécution
du jugem ent du 20 mars 1793 : bien loin d e - l à , on va voit
que les
dépositions de cette e n q u ê te , et celles de l'enquête
co n traire,
faite
que p ro u ver1 la
G a lice .
de la
part
m odicité
des
mineurs C h o u ss y ,
de la fortune laissée
ne font
par Jacques
O n ne finiroit pas , si on vouloit rapporter les' dépositions
de trente-huit tém oins entendus dans l ’enquête de C atherin e
G a lice . Il est indispensable de les analyser; et l’on p eu t dire dans
la plus exacte v é r ité , q u e lle s se réduisent toutes à ceci. A'c
pas connoitre particulièrement en quoi pouvoit consister la fortune
de Jacques Galice ; mais qu’il aw it une boutiqv.e bien fournie*;
�que sa niaisoU 'étoit-.lien'm eu blée, suivant ton étal ; que lorsque
le sieur
Choussy épousa l a . demoiselle
Galice , tout le monde
disoit qu'il fa is o it un bon mariage ; qu’il navoit besoin que de porter
son bonnet. Plusieurs témoins se sont expliqués plus brièvem ent.
Q u e portoit le jugem ent interlocutoire du tribunal ? Q u e
C a th erin e G a lice feroit p re u v e , tant par titres que par témoins
•et la tcommune renom m ée , de la ,consistance et valeur des marrhandises, ainsi que des m eubles, bestiaux, or et ■argent demeurés
d u décès de Jacques G a lice , son père.
O r , peut-on voir une sem blable preuve dans les dépositions
.qu’on :vient d ’analyser?
plus profond
silence
sur les
Jbestiaux , or et argent demeurés du décès de
;i ° .
E lles
gardent
toutes
le
Jacques
Galice.
■Catherine G alice n ’a donc absolum ent rien prouvé sur tous ces
a rticles iinportans ; elle n*a donc pas satisfait au jugem ent.
2°. Q u an t aux marchandises et aux m e u b le s, les dépositions
-des. témoins sont trop vagues pour q u ’on s’y arrête. I l fa lla it
en prouver la
consistance et la mleur,;
et l’on a vu que les
.témoins ont é t é . réduits à l ’impossibilité d’entrer dans
aucun
détail à cet égard.
V ain em en t C ath erin e G a lice voudroit-elle se prévaloir de ce
q u e les tém oins qu ’elle a fait entendre sem blent donner une
id é e avantageuse de la fortune de son père. O n sait combien
¿1 faut se d éfier de l’opinion q u i, se forme sur la fortune d u n
m archand tel que Jacques G alice qui avoit entrepris un commerce
très-m od este, avec des ressources infiniment fo ib le s , et qui étoit
parvenu par ce m oyen à se procurer q u elq u ’aisance, à force de
travail et
de. jw ed m on ie.
personnes qui .sont dans cette
p osition , paroissent o p u le n te s, parce
q u ’on est étonné, de ne
p lu s les voir “p au vres; e t cette idée de fortune prend sur-tout
¿ e l’accrpissement dans l’esprit de ceux q u i , cpmtne la plupart
xles témoins entendus, à la requête de C atherin e G aü.ce, vivant
.dans un
une
état ..d ’pbscurité , ne sont guère à portée d ’apprécier
fo rtu n e ; ils, exagèrent ordinairement çe qui est pour eux
.un objet. 4 ’fn v iq j X>’a illçu rs, il f a u t ,rem arquer
C atherine
G alice
�( .33 )
G alice étoit fille u n iq u e; que dans le p rincip e,-N icolas C lio u ssy ■
avoit une fortune ,p eu considérable ; elle a été augm entée par
des „successions et par
son
industrie ;
qu’à l ’époque
de son
m ariage , qui rem onte à 1 7 4 2 , les dots,étoient m odiques; ensorte
qu'il n’est pas étonnant que , quoique la fortune de Catherine
G a lice fût m éd io cre, N icolas Choussy parût faire un mariage
avantageux ; il suffisoit q u ’il ne fût pas d ’abord obligé de monter^
une m aison, et qu ’il n ’eût point de partage à fa ir e , pour qu’on
le crût heureux. C e tte idée se tire naturellem ent de ces expres
sions , dont ..les témoins ,se sont se rv is , qu'il .r i avoit besoin que
de porter son bonnet,
j.j
.
. O n ne peut donc faire aucun fond sur .des dépositions aussi
vagues. C atherin e G a lice ,a été chargée de prouver une consistance,,
une valeur de m o b ilier, et e lle ne prouve rien. O n doit d ’autant
plus exiger d ’e lle , q u ’il est établi qu’elle n’a cessé de se porter
à des manœuvres odieuses ,i(pour jeter un voile sur sa fortu n e,
et pour la grossir, au préjudice.,des mineurs. E lle a négligé le
seul m oyen légal de constater ce qu ’a laissé son p è r e , qui étoit
un inventaire exact et ré g u lie r, à l ’époque de son d é c è s; sa
conduite n’a excité d ’autre sentim ent que celui de la m éfian ce;
et la peine de cette négligence doit,-être de „faire rejeter toute
reprise, dont 011 ne voit point l ’orig in e, qui n’a pas un fonde
m ent réel.
»
■
» . . .ai
t
li
ï
M ais si cette enquête ne p eu t pas servir d c ta ie aux reconnoissances . et au .traité , du 4 août 1787 , la chiite de tous ces
.actes est encore plus4 certaine , i d ’après l ’enquête contraire des
~
Choussy.
-, f [•
•
;
t
_ i-lfe est composée de tren te-n eu f témoins qui .ne laissent rien
à desirer sur la m odicité des marchandises et des m eubles de
Jacques G alice.
A n toin e E stival , second témoin , tailleur d ’h ab its, a dit que.,
,du vivant de Jacques G alice , il est .entré plusieurs fois
sa boutique,pour y
acheter des
dans
étoffes pour des, h ab its; q u ’jül
^qst de sa connoissance quç îles éto/fes, , qui. garnissoierit^ cette
¡boutique , riétçient point en grand nombre, et quelles épient grossières
et de peu de valeur ; q u ’elles c o n s is te n t
en ratines , montau-
.b a n s , pamelois et autres étoffes de cette esjpèce; q u ’il se rappelle
�' \ t»
C 34 )
nÿ
avoir jam ais " trouvé de draps un peu f r i s
pour faire
âeS
habits propres , ou f>our faire des soutanes [; que lorsqu’il avoit
besoin de pareilles é to ffe s , il s’adressoit à la dame Bom part ; q u ’il
n 'a aucune connoissance de lâ quantité de bestiau x, or ou argen t,
que Jacques G alice pût laisser à sort décès.
M atth ieu T ré b u c h e t, ailssi tailleur d ’h a b its, troisièm e tém oin ,
a dit qu'il avait pris quelques habits ch e z Jacques G a lice ; que
les étoffes qu ’il y a achetées le plus c h e r , et que Jacques G a licé
avoit de
plus grand prix dans sa b o u tiq u e ,
étaient des draps
d'Angleterre de 8*" à î o '* '; qu ’il y a pris aussi d ’autres étoffes
de 4 * à
5* l’a u n e , telles que ratines et cadix de M ontauban;
qu'il y a pris plusieurs fois des jarretières, dont Jacques G a lice
vendoit grand nom bre, ainsi que des boutons , doublure d n ab its
et autres parités fournitures ; q u ’il a
travaillé pour
plusieurs
p rê tre s, mais qu ’il n ’a jamais pris aucune soutane ch ez Jacques
G alle« , et qu’autant qu ’il peut s'en rappeler , il croit pouvoir
assurer que
Jacques G à 'ice n'avoit point dans sa boutique des
él ' l ’cs peur en fa ir e ; q u ’il n’a aucune connoissance des meublus ,
b e s tia u x , or et
argent que Jacques G alice put
laisser à soit
décès.
Jacques R c g e , attire ta ille u r, quatorzièm e tém o in , a dit avoir
ouï dire par son p e r e , qu'il y nvùit dans B illom plusieurs boutiques
qui valaient mieux que celle du sieur Galice , telles que celles du.
sieur Foum et et de la. dame Blfnpàrt.
' L e s autres témoins sont des bourgeois de B illo m , qui Sont en
état d’apprécier la fortune d'un do leurs concitoyens : leurs déposi
tions sont conformes aux trois q u ’on vient de rapporter. O n se
contenterà de rappulür certains traits qui sont faits pour être
. i, .
I '
>
■ ! ;
releves.
L e C itoyen A lexan dre F o u m e t, fils d ’un m archand de B illo m ,
a déposé qu’il est de *a Connaissance que la boutique de Jacques
(5a ire, quelques àni.écs avant sa mort, signifiait peu de chose; q u ’il
âe rappelle avoir vii Jacqiies G alice ou 5a fem m e venir plusieurs
fois prendre dans la
botitiqlie
du jlèrè
articles q u i leur ilianquoient , comtné le
de
lui déposant des
père
dudit déposant
"en avoit envoyé prendre lui-m êm e ch ez Jacqurs G a lic e , attendu
1 ^ue les boutiques de l'un et de 1 autre étoieut voisines e t mc’diocre-
�( , 3V )
¿ f'I'
prient garnies ; 'qu e le^com m erce de Jacques G a lice coi^sistoit e n
de
grosses étoffes de draps , telles que ra tin e s, montaubans ;
p e lu c h e , bergoopzom , fla n e lle , cadis et autres étoffes grossières ,
^quelques toiles de| R ouen et cotonnades
qu’à ¿ ‘égard, des
im eubles qjii étojent dans la maison dudit sieur G a lic ç , ils étoient
t en. petit nombrp et de petite valeur. ■
t
L'
'
L a Cite )yenne Jeanne ^Nugier, épouse du citoyen B arry, dixièm e
2tém oin , a déposé q u ê ta n t entrée ch ez Jacques G a lice , pour,y faire
• quelques e m p iè te s,, elle n ’y
trouva
pas
les objets dont
elje
aiivs>it ,eù besoin; que de retour ch ez elle , elle dit à son mari :
-celte bputùjue tde,J\I. .G alice, est une \pauvre boutique ; on n‘y trouve
rien; je n’ai pas même trouvé de quoi t'acheter dçs ^culottes. .JEl^e
rend encore sur les m e u b le s, le m êm e tém oignage ¡que le précé. dent témoin,
,i
,
ü ;:;Les. C itoyens .G abriel ÇliQussy, Joseph Barry ,et Jeanne R o ch e,
yeu ve d ’A n n e t V a y r y , 4 e ,
5 e et 6e tém o in sj disent qu ’il n'est
pas „étpnnant /pie la b o u tiq u e , de Jacques G alice n e fût pas
; consid érable, parçe que dans ce tem ps-là on ne connoissoit pas
, les draps Jins^.fit qu'il n'y avait pas dans B illom de boutiques
^richement assorties•
^
1 ; L a J;m êm e: observation >a é té fa ite par la citoyenne M arguerite
.B arry,, f épopçe , du .citoyen J u illa rd , 12® tém oin , qui ,a ,ajouté
fqu e la bputique . ¿toit peu garnie, rt'y ayajit des étoffes que d’iqi
'Coté ; qu’elle est mémQrative qu'une chambre et une cuisine qiji
tutoient au-dessus de ladite boutique., étoient médiocrement meublée^.
m F ra n ço isiP e b q rd , 18? tém oin , ¿est. allé plus loin relativem ent
¿aux m e u b jçsj il a dit q u ’il s e ^ p p e lo it avoir-.vu dans la^iaiso^i
.J.acquqs .G a lice , quqtre lits , dont l ’un pour la domestique et
les autres trois, des lits médiocres.
Jeartjie V a y r y , 19e tém oin,, dit que la boutique du sieur Galice
-¿toit une petite bqutique , n'y ayant autre chose que des ctojjes 4&,
peu de prix , telles <ju espagnollettes et autres de cette( naturer,
¿ t s couvertures , de^faonnets, des liens, des mittes et des bourses,
cet autres; objets à l ’usage des petites gens ; que les meubles de Iç.
maison étoient vieux et de peu de valeur, et qu’elle croit pouvoir
assurer que le tour. de lit le plus propre ne tvaloit ¡rfs jilus de i 5 ‘n' .
iti'..Çatf}eàw î. \o la n J , 29?tti<?moin,. d jt,ç]u c
E a
�■
< 36 >
la mort de Jacques G a lic e , sa b o u tiq u e , composée déjà de mar
chandises très - communes , en étoit m édiocrem ent g a rn ie , sans
doute parce que dans ce temps-là il vouloit quitter le métier. E lle
ajoute qu’elle se rappelle encore que les meubles de là 'maison
etuicnl médiocres, et tels que les pouvoient avoir dans ce temps-là
L s ge>is de méiier. O n peut rapprocher de cette déposition celle
du citoyen B a tlio l, 7 e tém o in , qui a dit q u ’à-peu-près dans ce
tem ps , il y avoit peu de marchandises dans la b o u tiq u e , et
que même Jacques G alice cherchait à vendre son reste; ainsi que
celle de M arie
F a u c h e rie , 8e té m o in , qui a déposé que te
sieur Galice , qui Se proposoit de renoncer au commerce , ne s'em
barrassait pas de bien garnir sa boutique.
C e n ’est x pas to,ut encore. L es m ineurs C h o u ssy, dans leur
requête du i 2 janvier 17 8 9 , ent articulé q u ’au mois de juin
- 1 7 6 5 j trois ans'avant le d é iè s de Jacques G alice , il y eu tîu n e
inondation considérable à Billom;- que lus eaux furent si abon
dantes , q u e lle s m ontèrent à la hauteur de n e u f pieds dans les
maisons voisines du ruisseau , telle que te lle de Jacques G alice’;
q u ’il en souffrit un irès-grand dom m age; que les eaux lui enle
vèrent la plus- grande partie des marchandises qu ’il avoit dans
sa m aison, ét que le’ : restant1 fu t’ Cojisidérablemt'nt "dégradé^ par
: les huiles qui se trouvèrent dans- une-inaisuh sup érieu re, et* qlie
leS eaux entraînèrent avec e lle s ; que la perte*de Jacquek G a h ce ',
ou plutôt de lui et de son gendre ( car ils étoient alors associés ) ,
fu t si énorm e qu ’ils lurent
réduits , après
ce désastre ,■à n©
vendre plus que des coupons; que Jacques G alice alK)it prendre
de quoi s’habiller ch ez d'autres marchands, et que la veille des
foires notam m ent, il empruntoit les plus petites som m es, comme
2 4 *, ou m êm e 6 *, pour fournir à ses besoins.
L e fait de
l'inondation et le dommage qui en a
été u n e
iu ite ip o u r Jacques G a lic e , sont p rouvés, de la m anière la plus
p ré c is e ,' par l’enquête des mineurs Choussy.
L e citoyen Jacqucs ^ c h e r , prem ier tém oin, a déposé q u ’il a
oui dire qu iin e inondation arrivée à une époque assez anciennS?,
n a is
dont il ne
se
rappelle
pas la
date p o sitiv e , lui «'• it
-im p u té plusieurs ejjets qui ¿toient dans sa boutique. U n e foule
d'autres témoins déposent de
fait avec cette différence q u ’ils
�.
O r )
............. ,
............./ t i U )
n ’en "ont 'par parle pas o u ï1dire ,* mais pour eri avoir une côrfnoissance personnelle. O n ' se fconteritèra pour abréger J 'd e cite*
la déposition d’Yves B oyet ,; 1 7 e tém oin , à laquélle le s cautres
se réterent. 11 a dit' qu’il est'de sa connaissance q ue 1le sieur'G alice
dv it beaucoup sciijferï^de l'iiïondati >n arrivée) ii^y W'eKvti'on
25
ians.' TeT-'est•■à-peu prèsfle- lârtgai£é:'.üéi, ' * 4 8 , ,Ï 5\'* i8 \ { 9 / 2 1 ',
2 ï \ 2 3 , et 24e5 téinorhs.' L e inenie la it ê s trencore attesté pair
les
14'
17,
29
et
3 o55 témoins de l ’enquête de Cathèriiife
G a lice .
■
*
1
■il estvaiSé a th iellem en t de se form er iune idée de' là va leu r'd é
la boutique de
Jacques G alice. A van t l’inondation Ifes1témoin^
la j)frésèntentt com m ewinfim m entim ediôcre ;v c ’ésï lit ve ille m êm e
de c ette inondation' que la citoyenne1 N u g ie r , éjibuke'B arry, 'di\
qi'dile "n'y a ve i t p a s troiivé d é quoi acheter des ctiluttcs'. D epuis
cette époql)er)jils’|iiaü décès "de Jacé^ ts G a lice , les (témoins en
patient côthniéf* d ’u n 'v ie u x
fehds
‘ rèste1 d e ’ boiitrr1t?è,!don't
Jàcqiies "G&lfée^vouloit se •d éfaite'?'Ê étf1 ttimoîH^ p ad efit aussi
peu avantageusem ent du m obilier. A u cu n • des témoins de là
veuve Ciiuiissy n ’a” déposé slir les beétîauxJ Q u elques-uns de ceux
¿hter.dus’ k la requête des rrtiiïeursP; Choussy , disent ' seule: avoÜ* Çu ’ dvùx paires de bcéuft datfs un pétir-'dom aine
r
î'\
. • •** r
9
acheté :eft t o i nm ifh-'fiar le b b iir-p ere ; e t7 le"" gendre'. L r veûvé
■Choussy ¿T'sonifils'bètrélu-ris cncoi'e sôiitëhii- que les'm ardiandisesj
lU jub.es et etf.:t$ d6irent être portés
1 ll-jsie a tx a m in e r'le s mofifs et-lé.•fo n d em en t'd e l ’appel inci
dem m ent wïterjetë
la
par 'les - mineurs Chôùssy * du' jugem ent ' dé
ci-ddvânt ju stn e 'de B lilom -^ thi J2o fé v riè f1 1790. Q ü o iq u e
le juga de Billom 'â it û'üo^téi lai';h u llité:îd ë iI;teconAoissancès et
du
traité
dorit- il sagit^', ^soiri“ jugénntent
est -‘néaii'moins m al
t e n d u , et il nuit aüx' mineurs Ghiiussÿ qui en conséquence
se s o n t ' v u s forcés de 1a ttaq u er:1 L eurs griefs consistent en ce
q u e l l e premier* j u g e r a s y n c o p é to u té s’ Itié 'p a rtie l de l'a ffa ir e ;
il à 1 divisé ce- qui jfd ë v o it‘‘toujours 'iillet' de* fro n t*/'il' commence
p ar déclarer nuls les recohttoisiaftctes é t rlé traite ,• et p ar con
dam ner la veuve Choussy à rdpporter à la 'su ccessio n dé son
tnari tout ce qui lu i1 a é té
délaissé. E t lorsqu’il est ensuité
question des reprisés de la veu ve C houssy , p o u r créances ou
�.
.po^r
.
( $ ' )
lieu :fle pM^çkg de^ m ^ w ef.co n v e^ a b la s
^pour^jiarvÆuir^îà -leur liquidation , ^ il
donne , souplem ent
une
j)erm issjan d p . plaider t;antn pour les^ unes q u e ’ pour les . autre?.
J1 v e u t que .js u r !^out.,cela les parties} contestent p im amplement ,'
çinsh $ u e àsiff ,les\ chefs &
rqùiei^
,dem(ij^e -tfn.jrapport; , formée^ par le$
Gfipussy. (ïinsort£, q u ’il jnej résulte, de r là ^aucune sortp
^de. décision^,, I l j i ’-ea 3 ¿¡point..a b o n n é p a o g ^ p lu s su f ¿ ’article
.ijupoxtant de la sociiité ; il, a mivojfc a prononcer surL la .sociétp
qu’il peut y
avoir eu entre N icolas Choussy et Jacques Galice),
W % b W ê n u W é ? ? ^ J tz sur> î . f e JRPWK ' à'--faire par
^Fty^tbiiorn'I în c v A .o^iîi. 0 a u /p ^ il ub
î>
iii^?î wafcjygg
4ét)°ie^ t; g n ^ ta ij,
n d ..I
ft^i&'ljçu^çutçsîl®^®,?1?*1^
1 a ffa irq était .instruite
pourquoi le prpjniçr
ju g e <ne. Jugeftit^il pas _si,ir le tput à-la-foi s , .sauf ce p e n d a n t à
'ÇhV i f e ü 4 e ‘j la , Vjçuyp
,C h ou ssy, ■
l^o;|l’efj§fî.t>4 Q is^y:?irt ?f re||e .jyst^fierqit, aÿ.uffpi\ les tfaüjS
j^ nw cçs.,flans fJe£; je j^ i^ o js s ^ ç e s .^ t x U n s ^ , j ç , o a i p s i ,qi\e
l V ÎS il?k : î ï ï V u?ftÛ i;u. :;A . - M m rfb m u a w v ■
- ,-j
E n ^second l i e u ,i j les .enquêtes, respectivjes é ta n tl(Jaites , il
sem b lerait, a u x term esyd e,la sentence^ du* ju ge, de B illom , qup
le trib un al ,.ne pçuçroit rÿ.,iédu irç le ^fuontaptj d#? çep,rises qiy.
doivent, je y e n fr .j^ la .iv ç ÿ v g J ^ w u s s y , j u i ,statuer sur d^s .autrge
demandes , :et qu[il. ^ u d rp U .f^nv^ysr. ,1e topt .p a r-tlc y a n t u u
prem ier juge d’a p p e lf Ç ^ i sent .combien tout ¡cela jSqroiç, jinjustç
ot incQnséque^t.jjIl est tempg qu,e les m ineurs Choussy triom phent
îles .m an œ u vre^ q u e Lr o n 'ja f Jiaii^ps , e jiju sa g e .p o iy ie;iv/ilulr iJ e u r
fortune y sans, tq u ’U fvsoient flbligçs dqj soutenir c-ncofo^plu^eurÊ
jprocèS; ç»
'objets. ,,| , |
l. Q.il!?P'hPP v^is®: .P ^ i' W^.,[r|aFPÇ^
iT,,P®MîS)[»Clwus,sy e y ,
^ p u i s s a n t ; q ije j(Jç tribunal, ne pourroit statuer sur, les-,çhe£
g u e ,Ie
prem ipr
ju ge ¿¡est réservés ,
que, p^r 1^ voie
dÿ.
1 yvpqation j, m ais.,^ u p.|cp ^ ç, évocation, ne jw n r r o it.a v o 'L ,lie u * ,
g u ’a u ^ n t , q u ’orç sî-ftuciroit; !$qr gto\UC?,,le^, ,dcrçia;ujps à l’audipuçe0
d ’après rl’a r t . t z . ;dyj îtfrçj 6r -4$ Jflrflçp^ n cy rfq ; ^ 6 7 ,
! , J i ti< | •
; .C o .:n W ;j,pa5 -igi l f cas d ’appliquer cet ..article : les dispositions
'4c .ice !>te '>lpi rauro^pt lieu , si le prem ier juge avoit préalable*.
WtyjMàPDPb uW
yW.,
OflHt^üïUj
�>' -,
,
préparatoire dont il y a iiro iy a p p e b : 1® jTTge d’appel devroit juger
simplement snr la question de savoir si le jugem ent préparatoire
est bien ou mal rendu , et il* 11e pourroit décider sur le fond
ré?ervé , q u ’autant que ce seroit à l ’aüdience.
r ,
€ Mais il n ’est pas"‘ ici' question de . cela ° :^ le 'p re m ie r, juge a
d é ta illé des demandes tellem ent 'connexes
’q u ’il est' impoSsiblû
de statuer sur^l’iuie sans'‘ statuer en iin èin e temps sur les1 autres.
Ënsorte que le jilge d ’appel est obligé de réform er un pareil
jugem ent', et il ne p eu t le réform er q u ’en jugeant lui-m êm e
s u t le tout.
• . |;
’ ''- - 'w
4
t*■“%
-
f
*
•
U ne réflexio n va ¡convaincre de cette vérité : d a p rè s l'appel
m im e - d e la veuve Chotissÿ e t- d e 1soin'fils , le 'trib u n a l a à ju ger
si les reconnoissances e t traité Sont huis comme frauduleux.
L e tribunal peut regarder comme u n m oyen de fraude , la
suppression qu'on s’est permise dans tous ces a c te s , de lu société
existante
e n tr e 1 Jacques G alice e t
N icolas Chotissÿ.
Il seroit
m êm e possible qu'il se décidât principalem ent p a rwce m o yen ;
'm ais com nient polirroit-il le’ f a i r e ,* s'il n éf l u i 1 étüii pàs’ permis
d e staluer sur la demande relative à l ’existence de la société ,■
parce q u ’il auroit plu au prem ier juge de renvoyer à prononcer
sur cer bbjüt ? O d ,ne d em an Jé!!paV que le tribnnal évoque le
fond d’ilne1 affaire , o n 1derilànde : la i-eforniiation d ’un ju gem en t,
sur ce qu'il a mal à propos statué seu lem en t sur -une d em an d e,
qu ’il én 'a* r é s e rv é 'd a u tr e s , ' et q u ’il est impossible de ju ger
sans ju g e f sur lé t o u t .'
L é cas dans lequel soi trouvent les parties , est du nombre
de ‘ ccuk qui
ont été
prévus
rordoriühmid de 1 6 6 7 , ' ^
par
R odier , com m entateur de
l'article1 qii’on a 'd é jà c i t é , ’et il-d it
Jlq\ialors le 'ju g e "dapptir ^èutT-stattier sirr toi?tes les dem andes,
autrem ent q u a l'a u d ie n c e ; c ’e s t - à - d i r e , eu procès par é c r it:
« L a c o u r , di t - i l , peut su^ cef * a p p e l, appointer à bailler
> par écrit , réform er Î’à ^ o in te m e n t et vid er le fond des
j» ccJfitèstatiBns des pàtties'v^ oiï mC’ iu e Jinterloquer sur certains
y .c h e ts , .s’il y a b t u ;ij d ç t;sorte' qu ’on ne vide pas le tout par
un seul et m enm afrêt ; mais c’est par voie Je g ù e f , et non
# par Voie d’cvocation que cela se f a i t . A im i la 'disposition de
lo i donnante ri
pas violée » .
�RESUM E
Au
m oyen
des appels
'
respectivem ent interjetés
par
les
parties , le tribunal doit vider toutes les contestations , en
é mandant et p a r , voie de griefs , sans renvoyer aucunes des
dem andes devant le prem ier juge.
E n conséquence , il ne peut y avoir de difficulté à annuller
l es deux reconnoissances de 1768 et de 1 7 7 2 , ainsi que le traité
d u 4 août 1 7 8 7 , comme étant faits en fraude des créances des
m ineurs Choussy.
: Jacques
G alice et
N icolas C h oussy doivent être
avoir é t é communs depuis
17 46 , jusqu’a u décès
G a lice. E n .conséquence il
doit revenir .moitié
déclarés
de
Jacques
des créa n ces,
marchandises et acquêts im m eubles à la succession de N icolas
Choussy , d ’après le partage qui doit en être ordonné.
L a valeur de ces marchandises créances et les m e u b le s, doit
être arbitrée par le tribunal r d'après l ' id é e ,q u ’en donnent les
,
;en qu êtes.
O n n e peut considérer, co m m e , créances,|que celles
q u i sont fondées sur titres rapportés et qui ne sont pas prescrites.
tpi*.
Il doit être ordonné que lors du partage de la com m unauté,
la succession de N icolas Choussy p rélèvera la somme de deux
m ille livres par lui mise dans l a société , suivant la quittance
A w r ltÊ ù
—
.du 20 A out .1748.
Ces
de la veuve
décisions une fois rendues , les réductions des reprises
Choussy étant ordonnées , les mineurs. Choussy ,
d’après la valeur actuelle des biens de la succession de Nicolas
/V
C h ou ssy,
qui
attaqués
a »M<*
ou- tk'-oJy
entièrem ent
dénaturée
dans
les
a ctes
de fraude , auront enfin lieu d'espérer de recouvrer
lE
Citoyen D E V A L ,
!_=_
•
r
Rapporteur.
'
L e C ito yen G R E N I E R D éfenseur officieux.
i
T
'
'
,
>l
L e C ito yen D e v e z e A v o u é
à.
«
/•
été
leu r patrim oine. Signé , B O U C H A R D O N , fondé de pouvoir du
citoyen B arth élém y C h o u s s y ..
îk i
à
a
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X * p U -fo S *
ARIOMDE L'IM
PRIM
ERIEDE LANDRIOT 1793
Y ° ^ (" *
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Barthélemy. 1793]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Deval
Grenier
Devèze
Subject
The topic of the resource
tutelle
fraudes
créances
appropriations de biens
marchands associés
témoins
commerce
inventaires
rumeurs
inondations
vin
textile
climat
draps
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les Citoyens Barthélemy, Marie et Catherine Choussy, enfans et héritiers du citoyen Gaspard Choussy, habitans de la ville de Billom ; François-Avit Greliche, homme de loi, curateur à l'émancipation desdits mineurs Choussy, intimés et appelans. Contre la citayenne Catherine Galice, veuve de Nicolas Choussy ; et le citoyen Jacques-Philippe Choussy, homme de loi, héritier sous bénéfice d'inventaire dudit Nicolas Choussy, son père, appelans et intimés.
Annotations manuscrites : jugement du 20 mars 1793 et un autre du 23 fructidor An 2.
Table Godemel : Reconnaissance : de sa femme, l’une la veille du jour de la tutelle des biens et personnes de ses neveux, et la seconde, pendant le cours de la tutelle, les 2 8bre 1768 et 10 mai 1772, et un traité portant liquidation des créances énoncées dans ces reconnaissances qu’on soutient avoir eu pour but d’augmenter les reprises de celle ci sur ses propres biens, doivent-ils être annulés comme faits en fraude des créances des mineurs ? Société : 5. une société de commerce, surtout entre membres de la même famille, a-t-elle pû être contractée sans écrit ? peut-elle, d’ailleurs, résulter de la qualité de commerce et associés prise dans plusieurs instances, du relevé des registres de divers commerçans en relation avec les associés, des extraits de côtes d’impôts en commun pour leur industrie et biens ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1793
1767-1793
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1017
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1018
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53115/BCU_Factums_G1017.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
appropriations de biens
climat
commerce
Créances
draps
fraudes
inondations
inventaires
marchands associés
rumeurs
témoins
textile
tutelle
vin