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1**Uuv* ']u y < ÿ u ^
TRIBUNAL
D’APPEL
P
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PO
OU
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P h ilip p e SA IN T-BU T,
S É AN T A R I O M ,
propriétaire, habitant
au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et
M a r i e D U R A N D , son épouse, appelans d’un
j u g e m e n t rendu au tribunal d ’arr ondissem ent de
M oulin s le 7 germinal an 1 1 ;
CONTRE
J a c q u e s C H E M E L , propriétaire, habitant de
la commune de Tréban, intimé.
QUESTION.
Rente -purementfo n ciè r e , dont on veut éviter le -paye
ment sous prétexte de féodalité.
I l n’est que trop fréquent de voir des débiteurs de
mauvaise fo i, s’aider des lois révolutionnaires pour se
A
�.
.
( 2 )
..
.
dispenser d’acquitter une dette légitime ! ces tentatives
sont rarement couronnées du succès; cependant le nouvel
arrêté du conseil d’état, dont on fait une fausse applica
tion , enhardit la plupart de ceux qui doivent des rentes.
Il est facile de trouver un prétexte avec la loi du 17 juillet
1793. Mais ce qui doit étonner, c’est que les tri'b^unaju'x ^
admettent légèrement des prétentions aussi odieuses J%sub-j?*;:i;
versives du droit sacré de propriété.
' * , ••
'"'‘''s
F A I T S .
L e cit. Saint-But et son épouse sont propriétaires du
ci-devant fief connu sous le nom de P o u z e u x , situé dans
le département d’Allier.
Il leur est dû par Jacques Chemel une rente fo n cière
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle. Cette rente, par
les titres les plus anciens, est qualifiée de foncière ; elle
n’a aucun caractèi’e de féodalité; elle n’entraîne avec elle
ni mutation ni droits de lods, et par conséquent ne peut
être comprise dans la suppression que prononce les lois
des 20 août 1792 et 17 juillet 1793.
On voit dans un titre du 20 mai 1700, que Pierre
Jamin et Philiberte R o llie r, représentés par l’intim é,
reconnoissent, au profit de demoiselle Françoise A ubert,
propriétaire de la seigneurie de Pouzeux, (a u x droits
de laquelle sont les appelans ) la quantité de vingt-quatre
boisseaux de b lé -seig le , mesure de M oulins, bon blé
loyal et marchand, de rente foncière duc à la demoiselle
A u b ert, annuellement, par les sieur et dame Jam in, af
fectée et hypothéquée sur une terre appelée les M ontaix,
�C 3 )
dépendante de leur domaine des Chopins, située en la
paroisse de Tréban; et généralement sur tous leurs autres
Liens, conformément au titre primordial de cette rente.
Il est dit que les sieur et dame Jamin ont promis et
seront tenus de payer annuellement ces vingt-quatre bois
seaux seigle , à chacun jour et fête de saint M ichel de
_ chaque année, et de les porter à la seigneurie de Pou- ..
zeux ; comme aussi de payer et porter les. arrérages .qui pourroient en être dûs.
..............
.
Il n’est rien ajouté qui puisse faire présumer cette rente
féodale : nulle obligation de payer les droits de lo d s, ou
autres casualités. La vente est pure et simple, sans aucunes
stipulations qui accompagnoient ordinairement les presta
tions seigneuriales.
Cette propriété passa dans la suite au citoyen T ixier de
la Nogerette, q u i, n’étant pas payé de la rente toujours
qualifiée fo n c iè r e , obtint le 23 mars 1735 une sentence
en la sénéchaussée de M oulins, qui déclaroit le contrat de
rente exécutoire contre Louis Jam in, héritier de Pierre.
Cette instance fut reprise contre Antoine Baratlion, tu
teur d’autre Louis Jamin , fils de L ou is, et ensuite contre
le curateur à la succession vacante de Louis Jamin ; et la
sentence condamna ce curateur à passer titre n ou vel, et à
payer les arrérages de cette rente.
Il arriva dans la suite différens cliangemens. La dame
T ro lle t, mère des appelans, obtint encore une sentence
le 4 septembre 1771 , qui condamna le nouveau pro
priétaire des héritages assujétis à la rente, au payement
d’icelle. Une autre sentence contradictoire, du 20 août
A 2
�(4 )
17 7 6 , porte encore condamnation de cette même rente
foncière.
"
Enfin, en 1784, les appelans se virent obligés d’assigner
l’intimé pour être tenu de payer cette même rente foncière.
Il s’éleva sur cette demande une assez longue discussion :
Cheme l , intim é, prétendoit que cette rente ne pou voit
avoir son assiette sur sa terre des M ontai x , parce que cette
^ terre se trou voit couverte par les reconnoissances consen
ties au profit du r o i, et au profit d’un sieur Lamotte-Juliet.
Il y eut une expertise sur le fait allégué par Chem el; mais
la contestation fut terminée par une transaction passée
entre l’appelant et l’intimé , le 7 septembre 1790. Chemel
reconnut, par cet acte, qu’il étoit possesseur et détenteur de
la terre assujétie à cette rente; en conséquence, il.s’obligea
de pa^er, a chaque jour de saint M ichel, la rentef o n d ère
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle, mesure de M ou
lins. Il acquitta les arrérages qui étoient dûs jusqu’alors,
ainsi que les frais du traité.
Chem el, intim é, a acquitté la rente pour l’an 1791 ;
m ais, étant en retard de payer l’année 1792, il lui fut fait
un commandement de payer, à la requête de l’appelant,
le 29 janvier 1793. Depuis, le citoyen Saint-But fut obligé,
et pour cause, de discontinuer ses poursuites. Mais , le 4
thermidor an 10, il fit citer l’intimé au bureau de paix du
canton du M ontaix, pour se concilier sur la demande ten
dante au payement de la rente Jbn cière dont il s’agit,
ainsi que des arrérages échus.
•
L ’intimé fit comparaître son fils au bureau de paix ; mais
il refusa de s’expliquer sur la demande ; il déclara qu’il ne
�.
i* ? .
.
se présentait que pour obéir à justice, et ne voulut pas se
concilier.
•
Assigné au tribunal de M oulins, par exploit du 24 du
même mois de thermidor , Chemel donna plus de déve
loppement à sa défense. Il prétendit que cette rente f o n
cière étoit entachée de féodalité ; il excipa des lois des 25
août 1792 et 17 juillet 1793 qui suppriment toutes rede
vances seigneuriales. La reconnoissance de 1700 n’étoit,
suivant lu i, qu’un titre féodal; Saint-But lui-même s’étoit permis de donner l’investiture de l’héritage assujéti à
la rente; dans la demande qu’il avoit formée en 1784, et
sur laquelle étoit intervenu le traité de 1790 , Saint-But
s’étoit réservé tous devoirs seigneuriaux. Enfin Chemel
argumenta de l’article CCG X C 1I de la coutume de Bour
bonnais , qui dit <x que la première rente constituée sur
» aucun héritage allodial, s’appelle rente foncière, etem» porte droit de directe seigneurie et de lods et ventes, a
Chemel conclut de toutes ces circonstances, et surtout
de ce que la rente étoit due à un propriétaire de fief,
qu’elle étoit évidemment abolie par la loi du 17 juillet
1 793*
.
.
.
Il fut facile au cit. Saint-But de repousser ces objections :
la coutume de Bourbonnais est allodiale ; les héritages y
sont présumés francs et réputés tels, tant que le contraire
n’est pas établi.
Un seigneur de fief^ comme tout autre propriétaire f
peut posséder de simples rentes qui n’entraînent avec elles
aucune redevancê'Teôdaïe?
’
Des expressions hasardées, des réserves insignifiantes,
ne peuvent changer la nature de la rente. -
�(6 )
^
L a disposition de la coutume de Bourbonnais ne con
sidère la rente en directe, qu’autant qu’elle est la première
constituée sur un héritage allodial de sa nature ; et cette
disposition, dans tous les cas, seroit aujourd’hui supprimée
par la loi ; c’est-à-dire, que le propriétaire de la rente ne
pourrait plus exiger le droit de lods, mais la rente n’en
seroit pas moins due.
lie tribunal de cassation s’étoit déjà prononcé en faveur
du propriétaire, et avoit proscrit la prétention des débi
teurs de mauvaise fo i, q u i, sous des prétextes aussi frivoles,
avoient cherché à se dispenser de remplir leurs obligations.
Cependant les argumens de Chemel prévalurent : un
jugement contradictoire, du 7 germinal an 1 1 , déclara le
citoyen Saint-But non recevable dans sa demande ; et ce
jugement est m otivé, i°. sur ce q u e, à l’époque de la
transaction de 1790, le citoyen S a in t-B u t et son épouse
étoient, comme à présent, propriétaires du ci-devant fief
et seigneurie de Pouzeux.
2°. Sur ce que la reconnoissance de la rente du 20 mai
iyoo n’avoit été consentie à la demoiselle A ubert, qu’en
sa qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
30. On expose que cette rente a été stipulée payable et
portable à ladite seigneurie.
4°. Il résulte des titres, et notamment des contrats des 23
août 1720 et 11 octobre 17 5 1, qu’il dépendoit du ci-devant
fief de Pouzeux un fonds de cens et devoirs seigneuriaux
consignés dans un terrier.
O11 ajoute, en cinquième lieu , que lors de l’ncquisitiori
du domaine des Chopins , faite en 1776 par Chem el, le
cit. Saint-But étoit tellement persuadé que la rente et oit
;
�( 7 }
en directe, qu’il investit le même contrat, en perçut les
lods, qualifia cette rente de cens, dans la réserve de l’année
à échoir, et se réserva de plus ses autres droits et devoirs
seigneuriaux.
.
O n observe encore que , lors de la demande de 1784,
le citoyen Saint-But annonça qu’il répétoit cette rente
comme propriétaire du fief , et en vertu de la reconnoissance de 1700.
- 7°. O n dit que la transaction de 1790 n’a eu lieu que
parce que les censives du roi et de Lamotte-Juliet ne couvroient pas toutes les terres du M o n taix, et qu’il en restoit dix-huit boisselées pour l’assiette d elà rente.
8°. La reconnoissance' de 1700 ne peut pas être con
sidérée comme le titre constitutif, puisque la demoiselle
A ubert reconnoît en avoir un autre plus ancien.
90. Il n’est pas justifié que les dix-huit boisselées de terre
n’étoient pas allodiales, ou qu’elles étoient chargées d’une
redevance quelconque, lors de la constitution de cette
rente.
'
O n en conclut qu’elle doit être considérée comme la
première rente, q u i, aux termes de l’art. C C C X C II de la
coutume de Bourbonnais, étoit qualifiée cqyis emportant
droit de directe, seigneurie, et de lods et ventes.
10°. On prétend qu’elle a toujours été considérée, par
ceux à qui elle étoit d u e , et par ceux qui la devoient,
comme rente seigneuriale.
i i °. Que d’après les lois de 1792 et 1793, toute rede
vance seigneuriale et droits féodaux ont été supprimés sans
indemnité, ainsi que tous arrérages, même ceux dûs en
vertu de jugemens et de conventions.
�(8 )
. ,
. i2 °. Q u’il n’y a eu d’exceptées que les rentes qui n’avoient rien de féodal, ou possédées par des particuliers
non seigneurs on non possesseurs de fiefs.
Et celle en question étant due au seigneur ou posses
seur du iief de P o u zeu x, il s’ensuit que le cit. SaintrBut
n’est pas recevable à l’exiger.
- L e citoyen Saint-But, qui ne peut concevoir comment
on peut abuser ainsi des lois pour se dispenser de payer
une rente purement foncière, a interjeté appel d’un juge
ment qu’on peut qualifier de révolutionnaire; et c’est sur
cet appel que le tribunal a à prononcer.
A vant de proposer les moyens de l’appelant, et de dis
cuter les motifs^ du jugement dont est a p p el, il est à
propos d’examiner ce qu’on entend par première rente,,
et comment on doit expliquer l’art. C C C X C II de la cou
tume de Bourbonnais.
.
. Cet article est à peu près basé sur la disposition des
premiers articles du tit. X X X I de la coutume d’Auvergne.
Il seroit aujourd'hui bien difficile de définir ce qu’on entendoit par assiette de rente ; car le dernier commenta
teur observe lui-m em e que, quoique ce genre de con
venions fût très-essentiel pour le commerce des choses ,
dans les temps reculés, les rédacteurs, malgré tous leurs
eil’orts, n’ont pas réussi à l’éclaircir pour la postérité.
. Ce qu’il y a dé plus évident, c’est: que la première rente,
qualifiée de rente seigneuriale est celle qui avoit été créée
ou concédée par la constitution d’un héritage allodial , et
non une simple rente constituée à prix d’argent sur un héri
tage allodial. C’est ainsi que l’a observé Dumoulin sur cet
article C C C X C II de la coutume de Bourbonnais : Jtiiellige
�C9 )
lige , d it - il, n on p er emptionern sub p ecu n iâ , sed per
concessionem j'u n d i ■alitis consuetudo esset valdè stulta
et ineptci. Duret et Semin ont fait la même remarque.
A u roux des Pom m iers, sur cet article, nombre 16 ,
observe que quand le seigneur direct est maître du cens
et de la justice, et qu’il demeure sur le lie u , pour lors
le cens n’est point quérable; mais le tenancier est tenu
de payer et porter au seigneur censier, sans être de
mandé , à la seigneurie ou cliâteau où il est dû , si le
titre n’est contraire.
D e ces observations préliminaires il semble résulter
que l’article de la coutume ne s’applique pas à la rente
dont il s’agit. Rien ne prouve qu’elle soit le prix de la
concession d’un fonds allodial; tout annonce au contraire
que ce n’est qu’une simple rente assise sur un fonds ro
turier et non allo d ial, qui par conséquent n’emporte
point directe ni droit de mutation.
En effet, suivant l’acte du 20 mai 1700, on voit que
Pierre Jam in, et Philiberte R o llier, sa femm e, reconnoissent, au profit de Françoise A u b ert, la quantité de
vingt-quatre boisseaux de blé-seigle , mesure de M oulins,
bon blé loyal et marchand, de rentefo n ciè r e due à la
dite demoiselle A u b e r t, annuellement, par les sieur et
dame Jam in, affectée et hypothéquée sur une terre ap
pelée des M on taix, dépendante de leur domaine des
Chopins, et « généralement sur tous leurs autres biens,
» conformément au titre primordial de la rente que ladite
» demoiselle Aubert en a. »
’ Il est ajouté : « Laquelle quantité de vingt-quatre bois
» seaux seigle, comme dit est, ils seront tenus de payer
'
B
�.
( 10 )
.
,
» et porter a ladite demoiselle, à chaque jour et fête de
» saint M ich el, à la seigneurie de Pouzeux.
Rien n’annonce, dans ce titre, le prix de la concession
d ’un héritage allodial.
Si c’eût été une première rente emportant directe, il
eût été inutile de stipuler qu’elle seroit portable à la
seigneurie de Pouzeux, puisque, d’après A u ro u x , cette
rente étoit portable de droit au manoir du fie f, sans
aucune stipulation; dès-lors jusqu’ici elle n’a aucun des
caractères des premières rentes emportant directe.
D ’un autre cô té , C hem el, représentant le preneur à
rente, soutenoit, lors du traité du 7 septembre 17 90 7
que cette rente ne pouvoit.pas avoir son assiette sur la
terre des M ontaix, parce que cette terre se trouvoit cou
verte par des reconnoissances consenties au profit du roi
et du seigneur de Lam otte-Juliet ; de sorte que, dans le
système de l'in tim é, l ’héritage spécialement affecté au
payement de la rente ne pouvoit être allodial, si elle
étoit déjà couverte par d’autres terriers.
Il faudroit donc conclure, d ’après l’intimé lui-m êm e,
que l’article C CCX CII de la coutume ne reçoit pas son
application à la rente dont il s’agit; qu’elle n’emportoit,
de sa nature, aucune directe seigneurie; que par consé
quent le payement pouvoit en être exigé.
E n effet, toute renie qualifiée foncière, et sans aucun
accompagnement féodal, doit continuer à être servie. L ’ar
ticle II de la loi du 17 juillet 1793, cette loi si souvent in
voquée , et qu’on trouve encore à regret dans notre code
de législation , du moins pour tout ce qui est le prix de la
concession d’un fonds, excepte formellement toutes les
rentes foncières.
�c * o
Et certes, il est bien difficile de confondre des rentes
de cette nature avec des rentes féodales : les ci-devant
seigneurs n’étoient que trop soigneux de stipuler toutes
les clauses qui donnoient le caractère de féodalité ; on
les accusoit plutôt d’augmenter dans les nouvelles reconnoissances les charges d’une ren te, que de les modifier.
Combien de ratifications postérieures qui rendoient féo
dales des rentes qui n’étoient dans le principe que fon
cières ! Ne remontoit-on pas tous les jours au titre primitif',
pour vérifier si les reconnoissances postérieures étaient
conformes aux premières ? Tous les jours des plaintes
nouvelles sur les usurpations des seigneurs. E t dès que la
reconnoissance de 1700, qui, dans l’espèce, ne rappelle
qu’une rente foncière , n’a ajouté aucune clause, aucune
trace de féodalité , il faut en tirer la conséquence que c’est;
une simple rente foncière, dont la prestation ne fait pas
la matière d’un doute.
>
L e caractère d’une rente foncière ne peut se distinguer
que par les expressions du titre qui en porte la création.
L ’hypothèque spéciale donnée à la rente n’est pas une
preuve que la rente soit le prix de la concession. Il est
reconnu qu’on pouvoit constituer une rente purement
foncière en concédant un fonds roturier et non allodial.
L ’article CCCXGII de la coutume suppose deux faits constans ; l’un que la rente est la première constituée sur l’hé
ritage *, le second que l’héritage sur lequel la rente est cons
tituée , est allodial. O r, la preuve de ces deux faits ne se
trouve point dans la cause. Rien n’établit que la rente
dont il est question, soit la première constituée; rien ne
constate que l’héritage sur lequel elle a été constituée
B z
�(12 )
'
soit allodial. Chemel avoit même une prétention toute
contraire, puisqu’il soutenoit que son héritage étoit cou
vert par deux terriers diiFérens.
L e mot a llo d ia l, employé par la coutum e, prouve
qu’une rente foncière peut être assise sur un fonds non
allodial. Si aujourd’hui le citoyen Chem el, changeant de
langage, prétend que le fonds hypothéqué spécialement
à la rente, étoit allodial, ce seroit une exception, et c’est
à lui à le prouver.
M ais, en le supposant allodial, oseroit-on soutenir au
jourd’hui que la disposition exorbitante de la coutume
peut imprimer à la rente un caractère de féodalité te l,
qu’elle en entraîne la suppression ; ne peut-on pas d ire ,
au contraire , que la loi a fait disparoître l’article de la
coutume établissant la directe, mais laisse subsister une
rente qualifiée simplement dq fo n cière’, cette idée recevra
dans la suite un plus grand développement. On va s’oc
cuper d’analiser les motifs qui ont servi de base au juge
ment dont est appel.
L e premier consiste à dire que lors de la transaction
de 1790, le cit. Saint-But et son épouse étoient comme
à présent propriétaires du iief et seigneurie de Pouzeux.
Mais qu’importe la qualité des appelans ? n’arrive-t-il
pas tous les jours qu’un seigneur de fief possède des rentes
purement foncières, même dans l’élcndue de son fief ;
aucune loi n’a établi qu’une rente purement foncière de
sa nature, dût être réputée féodale, par cela seul qu’elle
étoit dans la main d’un ci-devant seigneur.
T e l fut le m otif d’un jugement du tribunal de cassa
tion, en date du 3 pluviôse an d ix , qui confirma un juge-
�( 13 )
ment rendu en dernier ressort au tribunal de Strasbourg,
portant condamnation contre les débiteurs de la ren te,
quoiqu’elle fût due à un ci-devant seigneur.
L e deuxième motif n’est qu’une suite du prem ier, et
s’écarte par le même moyen : on dit que la reconnoissance
de la rente n’a été faite à la demoiselle Aubert qu’en sa
qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
Mais on n’apei'çoit pas dans l’acte que ce soit à cause de
sa qualité. Si elle prend celle de maîtresse du fief de Pou
zeux, on ne dit pas que la rente soit due par la raison
qu’elle est dame du iief. E t comme un propriétaire de fief
peut posséder de simples rentes, ce motif est tout à la fois
erroné et inconséquent.
Comment les premiers juges ont-ils pu relever, dans le
troisième m otif, que la rente avoit été stipulée payable et
portable à la seigneurie de Pouzeux -, tandis que si elle étoit
seigneuriale , elle seroit portable de sa nature sans stipula
tion, ainsi que l’a remarqué A uroux des Pommiers? Cette
clause tendroit donc au contraire à effacer le caractère de
féodalité qu’on veut lui im prim er, puisqu’on a jugé néces
saire d’imposer cette condition, pour qu’elle fût portable.
On d it, en quatrième lie u , qu’il est prouvé par titres
qu’il dépendoit du ci-devant fief de Pouzeux un fonds
de cens et devoirs seigneuriaux consignés dans un terrier.
Mais de ce qu’il a pu dépendre de cette terre des rentes
féodales, doit-on en conduire que celle dont il s’agit, qua
lifiée de fo n c iè r e , est une rente féodale ? D ’abord on ne
justifie pas que la rente réclamée fasse partie de ce terrier,
n i que l’acte du 20 mai 1700 y soit inséré; et quand il y
seroit, pourroit-on la regarder comme féodale, contre la
�.
.
(. I 4 )
teneur du titre qui la qualifie de rente purement foncière.
On sait qu’en général les terriers renfermoient tout à
la fois des redevances seigneuriales , comme des rentes
simples; il suffisoit qu’elles appartinssent à des seigneurs,
pour les consigner dans le môme terrier ; et le tribunal
d’appel, n’a pas eu égard à ce m oyen, dans la cause du cit.
de X/assalle, contre plusieurs habitans de Blanzac.
' Ces particuliers se refusoient à payer des percières, sur
le fondement qu’elles étoient dues à un seigneur, et que
la reconnoissance étoit extraite de son terrier.
- Mais ils n’en furent pas moins condamnés au payement,
parce qu’il fut vérifié que ces percières n’étoient nullement
féodales, et qu’un seigneur, surtout dans un pays où on
admet la maxime nul seigneur sans titre}pou voit, comme
tout autre particulier, posséder des rentes non féodales.
La teneur du titre, qui n’entraînoit aucun droit de mu
tation, ni aucun caractère de féodalité, détermina le ju
gement.
Cette décision est conforme à la doctrine qu’on trouve
consignée dans un jugement du tribunal de cassation du 29
thermidor an 10. On va môme jusqu’à dire, dans les motifs
de ce jugement, « que le faux emploi', dans un acte , de
» quelques mots appartenais A La féodalité, ne peuvent
» pas rendre féodale une concession qui ne pouvoit être
» telle, et qui d’ailleurs est caractérisée par l’acte de bail
à renie foncière. »
Ici on n’a employé aucune expression qui appariîenno
à la féodalité, on a caractérisé la rente àe purenient fon
cière., le juge ne devoit y voir que ces mois : la teneur du
liti-y est au-dessus de toutes les ¿illégations ou interpréta-
�( Z5 )
tions. D n’est pas justifié qu’elle fasse partie du terrier de
Pouzeux : si elle n’en fait pas partie, il faut en conclure
que la rente n’est pas féodale ; si elle y est consignée, on
ne pourroit en tirer aucune conséquence sur sa nature. Ce
motif n’est donc d’aucune considération.
On reproche dans le cinquième motif, au cit. Saint-But,
d’avoir investi le contrat d’acquisition fait en 1776 , par
Chem el, d’en avoir perçu les lods, d’avoir qualifié cette
rente de cens dans la réserve de l’année à échoir ; et enfin
de s’être réservé, dans sa demande de 1784, ses autres
droits et devoirs seigneuriaux.
■
Mais si le cit. Saint-But a donné une investiture qu’on
lui a demandée sans nécessité, s’il a perçu des lods qui ne
lui étoient pas dûs, s’il a qualifié sa rente de cen s, quoi
qu’elle fût fon cière, peut-elle être devenue féodale ? le
cit. Saint-But peut-il en avoir changé la nature ?
Chemel sans contredit pouvoit se passer de l’investiture;
il l’a demandée sans doute pour éviter des droits de franc
fief qui étoient considérables; il a payé des lods qu’il pou
voit refuser. Saint-But a fait un faux emploi du mot cens
qui appartient à la féodali té : qu’en peut-il résulter ? rien
autre chose sinon que le cit. Saint-But a fait une percep
tion illégitime qu’on auroit pu lui contester en prouvant
que la rente n’étoit pas féodale; mais il seroit injuste et con
traire à tous les principes de la matière, d’inférer d’une
circonstance indifférente en elle-meme, que la rente dont
il s’agit est comprise dans la suppression de la loi du 17
juillet 1793.
Certes, par cette perception, ou ces réserves inconve
nantes, Saint-But a fait eucore moins que si, dans des ra-
�.
.
.
' ,( , 5 } .
.
tifications postérieures, il eût fait reconnoître la rente
comme seigneuriale, emportant droit de lods, etc.
Cependant on sait que des ratifications de ce genre , ^
même souvent répétées, n’auroient rien ajouté à ses droits,
ni changé la nature delà redevance; il auroit toujoui*s fallu
remonter au titre prim itif, pour déterminer l’origine et
la nature de la rente.
.
“
E t pourroit-on croire que parce qu’un débiteur ignorant
a payé sans demande, sans jugem ent, des droits de lods
qui n’étoient pas dûs, ce même débiteur peut profiter de
sa faute, pour se dispenser de payer aujourd’hui la même
rente ?
O n lui répondroit avec succès : Ce que vous avez fait
dans un temps où on pouvoit errer sur la nature cl’une
redevance, où le créancier pouvoit avoir des prétentions
exagérées, n’a pu augmenter ni diminuer les droits de
chacun , n’a pu donner l’empreinte de la féodalité à une
rentcjo n cière; et comme les rentes foncières sont excep
tées de la suppression portée par la lo i, vous ne pouvez
vous dispenser d’en 'continuer la prestation.
Qu’importe encore que la transaction de 1790 n’ait eu
lieu que par la raison que les censives du roi. et de Lam o tle -J u lie t ne couvroient pas toutes les terres du
M ontaix, et qu’il eu restoit dix-huit boisselées pour l’as
siette de la rente.
Quand bien même tout ce terrain eût été couvert par
d’autres censives, ne p o u v o it- 011 pas reconnoîtrc une
rente foncière sur des héritages asservis à un cens? Que
voit - on dans l’acte de 1700? on n’y voit autre chose
qu’une hypothèque générale sur tous les biens du débi
teur ,
�#
( *7 )
teur, et une affectation spéciale de l’héritage y désigné
pour la sûreté de la rente. Chemel, dans la transaction
'de 1790, se déiendoit ,par la plus mauvaise objection. La
rente étoit assise sur tous ses biens': de ce que ces mêmes
biens étoient couverts par d’autres censives ,! c’étôit le
moyen le plus infaillible poùr établir que la rente due
au citoyen Saint-But n’étoit pas seigneuriale.
M ais, d it - o n , il restoit d ix-liu it boisselées de terre
qui n’étoient pas couvertes. Il n’est pas justifié que cette
quantité clc terrain fût chargée cl’une redevance quel■
conque, lôrs de la constitution de la rente. Ces dix-huit
boisselées de'terre étoient donc allodiales : c’est donc une
première rente q u i, aux termes de l’article C C C X C II de ■
la coutume de Bourbonnais, emportôit directe seigneurie.
i° . Il est difficile de penser, il est même impossible
que dix-huUJboisselées de terre aient pu servir cl’assiette
h une rente de vingt-quatre b oisseaux de blé. L e titre
annonce, au contraire, 'une affectation spéciale de toute
la terre du M ontaix; et si tout est couver^, excepté dixhuit boisselées, la rente ne peut être uné prémière rente:
la coutume ne peuT recevoir aucune applicationir'
Sur cette disposition p a r t ic ïïïï^ “dcTlïPc ou turn c de
►
Bourbonnais, qui en ce point est conforme à celle d’A u
vergne, voici comment a raisonné le conseil de l’appelant,
' sur les lieux :
« Ce n’est point la rente, a-t-il dit, qui seroit féodale,
53 c’est l’article C CCX CII de la coutume qui est une loi
» féodale; conséquemment ce n’est pas la rente, qui par
» sa nature ne tient en rien à la féodalité, qui seroit
C
>'
�.
.
.( i 8 )
» abolie; mais c’est l’article même de la coutume, parce
» que c’est en lui que réside la féodalité.
'
» On peut même dire qu’il y a long - temps qu’il est
» aboli : il l’est depuis que le territoire du Bourbonnais
» a été solennellement àéclavèjranc-alleu-, car l’article est
» visiblement une émanation de cette maxime féodale,
» nulle terre sans seigneur.
» Les lois de la révolution ont frappé la féodalité là où
» elle se trouve: si elle est dans la convention, si elle ré
» suite du titre constitutif, c’est le titre qui est aboli:
» mais si les parties n’ont voulu constituer qu’une simple
» rente ; c’est un contrat ordinaire qui n’a rien d’odieux,
» qui se pratiquera toujours dans le nouveau comme
» dans l’ancien régime. Cette convention ne prenant le
» caractère de servitude féodale que dans la disposition
» d’une l o i , c’est la loi qui est abolie ; mais la rente est
» maintenue. »
O n va plus lo in , et on soutient que la disposition de
cette loi est abolie pour le passé comme pour l’avenir;
parce que les lois suppressives du régime féodal sont
allées le rechercher jusque dans sa source, et interdisent
toutes répétitions d’arrérages échus pour le passé, aussi
loin qu’ils puissent remonter , eussent-ils été suivis d’o
bligations ou de condamnations en justice.
On doit adopter cet argument avec d’autant plus de
confiance, que cet article de la coutume ne peut s’expli
quer avec Pallodialité des héritages et la prescription des
cens et devoirs seigneuriaux établis par l’arlicle X X II de
la coutume.
�C 19 )
Aussi M . A uroux des Pommiers , tit. X X V I I I , n°, 4
et suivans, d on n e-t-il en m axim e, que de tout tem ps,
avant comme après la rédaction de la coutume, on a tou
jours reconnu la liberté et franchise des héritages ; de sorte
que c’est au seigneur à tout p ro u ver, et à établir par des
aveux et dénombremens, et autres titres de la tenuredu
fief, que tel héritage est dans sa censive ou m ouvance, par
le titre primitif et originaire de la constitution du cens, qui
est la concession de l’héritage et la charge de telle rede
vance , ou par d’autres titres équipollens.
Si sa qualité de seigneur est contestée, ajoute A uroux,
c’est à lui à l’établir. S i negatur se dominum prœstare
dcbet, dit le président D u ret, etpro régula est utalligans
qualitatem super quant ju s su u m fu n d a t, sip ro eo non
est prœsumptio , qualitatem probare teneatur, sive sit
a cto r, sive sit reus.
Il résulte de cette doctrine, que dans le doute, une rente
est présumée foncière ; que celui qui la prétend seigneu
riale est obligé d’établir cette qualité.
A combien plus forte raison, doit-on regarder la rente
comme purement foncière, dès qu’elle est qualifiée telle
par le titre constitutif-, qu’elle n’est accompagnée d’aucuns
caractères de féodalité ; lorsque d’ailleurs tout annonce
que l’héritage sur lequel elle est assise, se trouvoit déjà
dans toute autre censive.
C’est donc contre tons les principes de franchise recon
nus en coutume de Bourbonnais, que les premiers juges
ont refusé la prestation de la rente dont il s’agit.
C’est étendre la disposition d’une loi rigoureuse et
qualifiée môme inique dans les jugemens du tribunal
�.
,
20 )
...
.
de cassation , tandis que tous les efforts dés magistrats doi
vent tendre à la restreindre dans ses bornes ; puisqu’ils
n ’ont pas le pouvoir de la réformer.
Les difficultés dont on se hérisse, les entraves qu’on
fait naître nuisent singulièrement au commerce et aux
mutations : quel sera le père de fam ille, le propriétaire
' assez insensé pour oser aujourd’hui donner son bien en
rente? En privant une foule de citoyens de cette ressource,
on éloigne le plus grand nombre de la propriété ; on
dégoûte les cultivateurs d’un travail qui devient stérile;
l’industrie est éteinte; l’agriculture ne peut plus pros
pérer.
L e jugement dont est appel est donc tout à la fois
inconvenant, im politique, injuste; et c’est aux juges
supérieurs, dont les idées sont plus élevées, plus libé
rales, qu’il appartient de réformer des décisions dan
’ gereuses dans leurs conséquences ; de faire respecter le
droit sacré de propriété , que le gouvernement veut
essentiellement protéger.
L e citoyen P A G E S ( deRiom ) anc. jurisc.
L e citoyen M A N D E T , avoué.
A. R I O M , de l'im p r im e r ie fie L
a n d rio t
, seul im p rim eu r du
Tribunal d ’appel. — A n 1 1
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Saint-But, Philippe. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Philippe Saint-But, propriétaire, habitant au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et Marie Durand, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Moulins le 7 germinal an 11 ; contre Jacques Chemel, propriétaire, habitant de la commune de Tréban, intimé. Question : Rente purement foncière, dont on veut éviter le payement sous prétexte de féodalité.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0245
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0246
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Comps (03092)
Treban (03287)
Montaix (terre des)
Chopins (domaine des)
Rights
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Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
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25bc946bc217202ffb203795c226a0cf
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Text
m{u<¿us
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~
É
J a c q u e s
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O
’
I
R
E
-
P O U R
C H E M E L ,
in tim é
• CONTRE
•
P h i l i p p e S A I N T - B U T , appelant.
L
’ a p p e l est d’un jugem ent du tribunal d'arrondisse
ment de M o u lin s , du 7 germinal an 11 , par lequel
l’appelant a été déclaré purement et simplement non
t
r
recevable dans la demande qu il avoit
form ée contre
l’intimé en payement d’une rente de 24 boisseaux de blé
seigle, et l’intimé quitte et absous, avec condamnation
des dépens contre l ’appelant.
L 'u niqu e question est de savoir si la rente réclamée
par l’appelant est du nom bre de celles qui sont com
prises dans l’abolition générale des droits fé o d a u x , p ro
A
�noncée par les lois de
1792 et
17 9 3 ; et c’est cette
question qui a été décidée pour l’affirmative par le juge
ment dont est appel.
L ’article X V I I du décret du z 5 août 1792 porte que
dans l’abolition des droits féodaux ne sont pas com
pris les ren tes , champarts et autres redevances qui
ne tiennent point à la féo d a lité , et qu i sont dûs p ar
des particuliers à des particuliers non seigneurs ou
possesseurs de Jiefs.
• 'v
D e là la conséquence nécessaire que les rentes, cliàmparts et
autres r ede vanc es
qui
t iennent
à la féodalité >
et qui sont dûs à des seigneurs ou possesseurs de fiefs,,
sont compris dans l’abolition.
Si la redevance de vingt-quatre boisseaux de seigle,
réclamée par l’âppelant, tenait à la féodalité, et si elle
étoit due à un seigneur de fief, il a donc été bien jugé
par le tribunal de M oulins, et l’appel est inai fondé.
O r , il suffit de rappeler les titres qui ont été pro
duits en cause principale, pour porter jusqu’à la démons
tration la preuve que la redevance dont il s’agit tenoit
à la féodalité, et qu’elle étoit due à un seigneur de fief.
On pourvoit même l’établir par la seule disposition
de la coutume de Bourbonnais, dans l’étendue de laquelle
se trouvoit situé l’héritage sur lequel étoit assise la rente
dont il s’agit.
L ’article C C G X C II de cette coutume dit que la pre
mière rente constituée sur aucun héritage allodial >
�(3 )
■s'appelle rente fo n cière, et emporte droit de directe
seigneurie et de lods et ventes. L a directe seigneurie
attachée à une rente, et les droits de lods qui en sont
une suite, n'impriment-ils donc pas à une pareille rente
le caractère de féodalité?
Mais c’est surtout dans les titres produits au p r o c è s ,
qu’on trou vera, A ne pouvoir s y m épren d re, que la
rente tenoit A la féodalité, et qu’elle étoit due A un sei
gneur de fief, A cause de son fief ; et ce n’est qu’en,
omettant la plupart de ces titres, ou en mettant de côté
leurs principales expressions, qu’on a tenté vainement
de dénaturer la rente dont il s’agit.
L.e fief
et
domaine
de
Pouzeux,
d’où dépend
cette
rente, fut adjugé sur une saisie réelle en la sénéchaussée
de M oulins, par une sentence du
25
juin 1697 : l’ad
judication qui fut faite A la demoiselle Françoise A ubert
comprend le domaine de P o u z e u x , cens et droits en
dépendants.
Il y eut trois ans après une reconnoissance de la
rente , du 20 mai 1700, par Pierre Jam in , alors proprié
taire de fhéritage sujet A cette ren te, en faveur de la
demoiselle
Aubert ,
maîtresse de la seigneurie
de
P o u zeu x. Cette reconnoissance n’est pas un titre nou.
.
*
.
veau : il y est dit qu’elle est faite conformément au
titre primordial que la demoiselle A u bert en a ’ et il
•y est dit encore que la rente sera portée et payée èa
■
ladite seigneurie de Pouzeux.
A 2
�4
(
)
II y a lieu de croire que le titre prim ordial, s’il étoiü
rapporté, donneroit encore plus ¿ ’éclaircissement sur lar
nature de la rente ; et l’on verra bientôt que ce titre
primordial doit être au pouvoir de l’appelant.
L e 23 août 1720, la demoiselle A u bert vendit le fief
de Pouzeux à la demoiselle T ix ie r de la Nogerette. Il
est dit que la vente est faite du domaine de P o u z e u x ,
bâtimens, terres, etc. avec ‘le fo n d s des cens et devoirs
q u i sont dûs et dépendans de ladite maison de P o u zeux. Il y est encore dit que parmi les titres délivrés à
1 acquereur est une expédition en papier portantperéque-
ment des devoirs vendus entre les codétenteurs, passée
pardevant Duclier en 1660; ce qu’on appelle en A u
vergne également de cens est connu en Bourbonnais et
ailleurs sous le nom de peréquement. Enfin il est ajouté
que la venderesse se réserve les arrérages des devoirs
qui sont échus dudit terrier.
L e même jour d e là vente il y eu t, de la part de la
demoiselle T i x i e r , un acte de prise de possession du
domaine de P o u zeu x , otVil fut dit qu’elle prenoit posses
sion dudit domaine avec lejbn ds des cens et devoirs qu i
en dépendaient.
L e 11 octobre 1 7 6 1 , nouvelle vente du fief de P ou zeux , par un procureur constitué de Jean - Baptiste
T ix ie r de la N ogerette, à Pierre D u ran d, où il est dit
que dans la présente vente sont aussi compris quelques
articles
de
devoirs qu i étoient dus au vendeur a
cause
�C 5
)
du terrier acquis avec ledit domaine. II est aussi dit, dans
cette vente, que le vendeur a remis à l’acquéreur quel
ques titres qui sont désignés, et qu’il s’est obligé à lui
remettre tous les autres titres, papiers et enseignemens
et terrier concernant la chose vendue.
' -
L e fief de Pouzeux étoit mouvant du duché de B ou r
bonnais ; aussi voit-on , à la suite de là vente du 11 octobre
5
i y i , l’acte d’investiture qui en fut donné àTacquéreur
par les officiers de la chambre du domaine de ce duché,
le 24 février 1762.
r
L e 26 juin 1 7 7 6 , Jean Dubost et Jacques Chemel
firent l’acquisition du domaine des C h o p in s, dans la
paroisse de Treb an , d’où dépendoit la terre des M o n taix,
assujétie à la rente dont il s’a g it, à la charge de servir
i\ l’avenir les cens et devoirs qui se trouvoient sur les
objets vendus.
Soit pour faire courir le délai du retrait lignager,
soit pour empêcher le retrait censuel sur les fonds qui
dépendoient d’ une censive , et q u i étoient tenus en
directe seigneurie, il étoit nécessaire, suivant la coutume
de Bourbonnais, de prendre l'investiture des seigneurs
directs : c’est à
quoi les acquéreurs du domaine se
conformèrent ; et on trouve aux marges du contrat du
26 juin 1776 les actes d’investiture des différentes sei
gneuries qui avoient des censives sur des héritages dépendans de ce domaine.
•
Dans le nom bre de ces investitures est celle donnée
A3
�.
(6)
par le sieur de Saint-But, appelant, et qui contient en
m êm e temps quittance des droits de lods. Il n’est pas
inutile de transcrire cet acte : « Investi le présent contrat
» pour ce q u i relève de notre terrier de P o u z e u x ,
» après que l’acquéreur nous a payé les simples et doubles
» lod s, pour raison de ladite acquisition, sans préju» dice aux droits d’a u tru i, et à l’année de cens qui
» écherra à la saint Michel prochaine, l’année échue à
» la saint M ichel dernière ayant été payée, et à tous
5> autres droits et devoirs seigneuriaux , à
» les acquéreurs de
».
zaine. Fait
» Sa
in t
-B u
à
t
reconnoitre
de
la
charge par
n o u v e a u dans q u i n
V e r n e u il , le 28 novembre 1778. Signé
. »
de
'
V o ilà un acte d’investiture qui n ’eût pas été néces
saire pour la vente d’héritages qui n’auroient été sujets
qu’à de simples rentes ; au lieu qu’il étoit indispensable,
pour des héritages sujets à des rentes en directe sei
gneurie : mais ce même acte renferme de plus la quit
tance des droits de lods, qui ne pouvoient être dûs qu’à
raison d’un héritage asservi à une rente seigneuriale.
Il qualifie de cens la redevance dont il s’agit.
Sans doute on 11e prétendra pas que l'investiture et
les quittances des droits de lods se rapportoient à tout
autre héritage du domaine qu’à celui des M on taix, qui
étoit sujet à la rente dont il sagit. Il faudroit pour cela
qu’on fît voir qu’ il y avoit dans ce domaine d’autres
héritages qui relevoient du terrier de P o u z e u x , ce qui
�(7 )
seroit impossible à l’appelant: et m ê m e , dans son mé
m oire, n’applique-t-iJ pas l’acte d’investiture, et le paye
ment de lods et ventes, à d’autres héritages qu’a celui
des M ontaix; mais d’ailleurs on va démontrer qu’il ne
r el ev oi t
du terrier de Pouzeux que l’héritage des M on-
• taix sujet à la rente dont il s’agit, et cela par un' acte
de fait même de l’appelant.
'
L e 9 mars 178 4 , il fut présenté une requête au senéclial de Bourbonnais, par Philippe de Saint-But, écuyer, ’ •
sieur de P o u z e u x , et la dame D urand sa femme de
lui- autorisée, où ils disent que comme propriétaires du
f e f de P o u ze u x , il leur est dû une rente annuelle et
foncière de vingt-quatre boisseaux de seigle, su r une
terre appelée des M o n ta ix , dépendante du domaine des
Cliopins, dans la paroisse de Treban j ils répètent, dans
plusieurs endroits de cette requête, que le devoir de
vingt-quatre boisseaux de seigle f a i t une dépendance
du f i e f de P o u z e u x , et que devenant propriétaires du
f e f de P o u z e u x , ils le sont devenus du même, devoir f
puisqu’ ils ont acheté et le f e f et ses dépendances. C ’est
après cet exposé que Saint-But et sa femme demandent
permission d’assigner Chem el, qui étoit propriétaire du
,
domaine des Chopins, situé dans la paroisse de T r e b a n ,
comm e
propriétaire détenteur et jouissant de la terre
des M o n ta ix , pour être condamné à payer la rente
de vingt-quatre boisseaux de seigle , et leur en passer
nouvelle reconnaissance , et leur justifier du titre en
a
4
�C8 )
vertu duquel il jouit de ladite terre, pour être pris par
eux telles conclusions qu’ils aviseront, même en paye
ment des lods et ventes , s’il y échoit.
Cette requête fut répondue d’une ordonnance de per
mis d’assigner, et suivie d’une assignation donnée à Ghemel le
5 avril
1784.
Il étoit bien étonnant que Saint-But et sa femme de
mandassent, en 178 4 , à G hem el, la représentation du
titre en vertu duquel il possédoit la terre des M o n ta ix ,
tandis que Saint-But l u i- m ê m e , six ans auparavant, le
28 novembre 1 7 7 8 , avoit donné
l ’i n ve st it u re en
marge
de la vente de 1 7 7 6 , faite à Ghemel du domaine d’où
dépendoit la terre des Montaix. L a réserve de conclure
au payement des droits de lods, dans la requête de 1784 ,
étoit encore bien étonnante, puisque l’investiture donnée
par Saint-But en 1778 contenoit expressément la quittance
des simples et doubles droits de lods.
D u concours de tous les actes et titres qu’on vient de
rappeler avec la plus grande exactitude, de leur parfait
accord, des aveux même les plus positifs qu’on y trouve
de la part de 1 appelant, sort évidemment la démonstra
tion entière que la rente de v in g t-q u a tre boisseaux de
seigle, qui étoit due sur la terre des M o n ta ix ,
là féodalité, et q u’elle étoit due
à
des
t en o it
p art icul iers,
à
sei
gneurs et possesseurs de fiefs.
Q u ’est-il compris dans l’adjudication du fief de Pouzeux
en 1697? le fonds des cens et devoirs en dépendent s. Ces
�C9 )
mots cens et devoirs ne peuvent pas sans doute s’appliquer
à de simples rentes qui n’auroient pas emporté la directe
seigneurie ; et si on avoit voulu y comprendre la rente
dont il s’agit comme une simple rente non censuelle et en
directe, il auroit fallu l’y exprimer nommément.
Quand on consent en 1700 une nouvelle reconnoissance,
au profit de la demoiselle A u b ert, de la rente dont il s’agit,
dont il est dit qu'elle en a le titre p rim itif, la demoiselle
Aubert prend dans cette nouvelle reconnoissance le titre
de maîtresse de la seigneurie de P o u zeu x . C ’est à ce
titre qu’elle se fait faire la nouvelle reconnoissance ; et il
est ajouté que la rente sera payée et portée en la seigneurie
de P o u ze u x .
Quand en 1720 la demoiselle A ubert vend le fief de
P o u ze u x , elle comprend dans la vente le fonds des cens
et devoirs qui sont dûs et dépendans de la maison de
Pouzeux. Nulle mention de simples rentes ; et on ne peut
entendre sous les mots de cens et devoirs que des rentes
en directe seigneurie. Elle délivre une expédition d’un
peréquement des devoirs vendus entre les codétenteurs;
et par cette expression de peréquement on en ten d, en
Bourbonnais, ce qu’on appelle en A u vergn e également
de cen s' c’est-à-dire, l’acte par lequel les codétenleurs
font entr’eux la division des cens, pour la portion que
chacun d’eux doit en payer. L a demoiselle A u bert se
réserve dans le même acte les arrérages des devoirs qui
sont éclius dudit terrier: et qu’est-ce qu’on entend géné-
�( ÏO )'
raleraent par un terrier , sinon le recueil des reconnoissances des cens et de la directe seigneurie.
Quand la demoiselle T i x i e r , qui venoit d’acquérir de
la demoiselle Aubert le fief de P o u ze u x , en prend pos
session , il'est dit dans Tàcte qu’elle prend aussi possession
du fo n d s des cens et devoirs qu i en dépendent.
5
Quand en i y i le fief de Pouzeux est vendu à Pierre
' D u ra n d , c’est aussi avec les articles de devoirs q u iéio ien t
dus au vendeur à cause du terrier acquis avec ledit do•
»
inaine.
L e domaine de Pouzeux ¿toit
un
fief du duché de
Bourbonnais; et c’est aussi pour cela que la vente en est
présentée aux officiers du domaine de ce du ch é, qui en
donnent l’investiture.
Quand ensuite, en 1 7 7 6 , Chemel acquiert le domaine
d’où dépendoit la terre des M o n ta ix , qui étoit sujette à
la rente dont il s’agit, pourquoi s’en fait-il donner l’inves
titure par l’appelant lui-m êm e, alors propriétaire du fief
de P o u z e u x , investiture qui ne pouvoit avoir lieu que
pour des fonds sujets à des rentes censuelles et en directe
seigneurie, et non pour de simples rentes? Mais surtout
pourquoi l’appelant se fait-il payer des simples et doubles
droits de lods, à raison de la terre des M o n ta ix , si la renie
due sur cette terre n'étoit pas une rente en directe seigneu
rie? et pourquoi même Saint-But porte-t-il la rigueur
jusqu’à se faire payer un double droit de lods, parce que
la payement du simple droit n’avoit pas été payé dans les
�quarante jours de délai prescrits par l'article 394 de la
coutume de Bourbonnais ? Pouvoit-il y avoir une rcconnoissance plus formelle que la rente assise sur la terre
des Montaix étoit une rente en directe seigneurie, qui
par conséquent tenoit à la fé o d a lité , et qu’elle étoit due
à un seigneur ou possesseur de fief? R ien n’est plus plaisant
que la réponse sur ce dernier article, dans le mémoire de
l’appelant. Ghemel a , dit-on, demandé l’investiture sans
nécessité ; il l’a demandée sans doute pour éviter des droits
de francs fiefs, qui auroient été considérables. Mais où
a-t-on pris qu’il fût dû des droits de francs fiefs sur la vente
d’un héritage sujet à une rente foncière ? et p u is , les
droits de francs fiefs eussent même été fort au-dessous
d’un simple droit delod s, et bien plus encore d’un double
droit de lods.
Il est encore plus pitoyable de dire que S a in t-B u t a
fait un fau x em ploi du m ot cen s , q u ’il a fait une per
ception illégitime qu’ on auroit pu lui contester en p ro u
vant que la rente n’étoit pas féodale. T o u s les actes p rou
vent au contraire la féodalité de la rente,* et l’investiture
et la réception des droits de lods n’en sont que la con
firmation de la part de celui qui avoit alors intérêt q.u’elle
fût féod ale, et qui ne change aujourd’hui de système
que parce qu’il auroit un intérêt contraire.
,
Il n’ est pas inutile de parler d’ une transaction du 1
septembre 1790, passée entre les parties, dont l’appelant
dans son m ém oire paroît vouloir tirei^avantage : mais
�( 12 )
on croît pouvoir établir quelle prouve au contraire
de plus en plus la qualité féodale de la rente dont il
s’agit.
Voyon s ce qui avoit donné lieu à cette transaction,
et quel en fut le résultat.
L a transaction nous apprend que G herael, proprié
taire de la terre des M on taix, qui faisoit l’assiette de la
rente dont il s’agit, prétendoit que toute cette terre des
M ontaix étoit entièrement couverte par des cens qui
étoient dûs, soit au domaine du roi, soit au seigneur de
Iiamotte-Juliet ; d ou il
prétendoit
qu’il
ne
pouvoit pas
devoir la rente dont il s’a g it , qui ne pouvoit pas avoir
son assiette sur la terre des Montaix.
Cette prétention ei\t été bien ridicule, si de part et
d ’autre les parties n’avoient pas reconnu que la rente dont
il s’agit étoit due en directe seigneurie; car il n’est pas
douteux qu’on peut donner à titre de rente foncière sans
directe des fonds déjà assujettis à des censives,
Néanmoins sur cette prétention les parties nommèrent
des experts qui vérifièrent que de l’objet qui avoit fait
l’assiette de la rente, il y en avoit une partie dans la
censive du ro i, et une autre dans celle de la seigneurie
de Iiamotte-Juliet; mais en même temps il fut reconnu
qu’il en resloit une autre partie sur laquelle no porloient
pas les censives du roi et de Lajnotle-Jullct; et le résultat
de la transaction fut que Chemcl ne pouvoit point se
dispenser de payer la rente; en conséquence il paya les
�*3
(
)
arrérages, et s’obligea de continuer la rente ;\ l ’avenir.
Voilà donc par cette transaction la rente dont il s’agit
bien assise sur un terrain qui n’étoit sujet ni'à la censive du roi ni à celle de Lamotte-Juliet, qui par con
séquent avoit été allodiale dans le principe, dans la main
du seigneur de fief de Pouzeux, qui ayant donné à rente
ce terrain allodial , cette rente par la disposition de
l’article G C C X C II de la coutume de Bourbonnais empor*
toit droit de directe seigneurie et lods et ventes ; ,et
une rente dépendante du f i e f de P o u z e u x y comme l’é
noncent tous les titres qu’on a rappelés, et qui étoit due
au seigneur de lief de Pouzeux. L a transaction de 1790
feroit donc , s’il en étoit besoin, une nouvelle preuve que
la rente dont il s’agit tenoit nécessairement ¿1 laféodalité.
Après tout cela , après des preuves si multipliées et
¿les aveux si positifs, le tribunal dont est appel auroit-il
pu laisser subsister la redevance dont il s’a g it , sans con
trevenir
formellement à la disposition de la l o i ?
Q ue
l’on s’écrie tant que l’ on v o u d r a , Q u ’elle est d u r e , cette
loi! ceux qu’elle affranchit des droits féodaux ne la trou
vent pas telle; et c’est sans doute le plus grand et le trèsgrand nom bre des F ra n ça is, p e u t - ê t r e plus des n eu f
dixièmes : mais d’ailleurs elle est écrite, ,cctte lo i , et les
•
•
m
f
juges ne pouvoient pas s en écarter.
Il
est maintenant facile de pressentir les motifs qui ont
dû dicter la disposition du jugement dont est a p p e l, et
�14
(
)
on va les répéter pour en rendre le b ie n -ju g é d’autant
plus sensible.
P rem ier motif. — Q u ’à l’époque de la transaction de
1 7 9 0 , Saint-But étoit, comme il est aujourd’ fîui, à cause
de son épouse, propriétaire du ci-devant fief et seigneurie
de Pouzeux.
Deuxièm e m otif.'■
— Que la reconnoissance de la rente
dont il s’agit ne fut consentie en 1700, à la demoiselle
A u b e r t , qu’en sa qualité de maîtresse de la terre et
seigneurie dudit P o u z e u x ; que cette rente y fut stipulée
payable et portable en ladite seigneurie, et que Jamin
èt sa femme ne reconnurent la rente que comme d’un
terrain appelé des Montaix.
Troisièm e motif. — Que des contrats de vente de 1720
et de 1751 il résulte qu’il dépendoit du fief de Pouzeux
un fonds de cens et devoirs consignés dans un terrier.
Quatrième motif. — Que lors de l’acquisition faite en
1 7 7 6 , par Chem el, du domaine des C h o p in s, dont dé
pend la terre des M on taix, Saint - But étoit tellement
persuadé que la rente à lui due étoit la première rente
constituée, conséquemment cens, qu’il investit le même
contrat, perçut les lods et doubles lods du prix de la
vente de la terre des M o n ta ix , qualifia cette rente de
cens dans sa réserve de l’année à éch o ir, et se fit de
plus réserve de tous autres droits et devoirs seigneuriaux.
Cinquième motif. — Que dans la demande formée en
�C
15
)
1784 ( à la requête de Saint-But et de sa f e m m e ) , on y
annonce que ce n’étoit qu’en qualité de fief, et en vertu
de la reconnoissance précitée (d e 1700 ) , qu’onréclam oit
ladite rente.
Sixième motif. — Que la transaction de 1790 n’ayant
eu lieu que parce que les censives du roi et de Lamotte
ne couvroient pas tout le terrain des M o n t a ix , et qu’il
en restoit d ix - h u it boisselées pour l’assiette de la rente
en question, ( cette transaction ) peut d’autant moins être
considérée comme le titre constitutif, que la reconnois
sance de 1700 y est rappelée comme le véritable titre ,
d’après un autre titre primordial que la demoiselle A u b e rt
y
convient
avoir pardevers elle.
Septième motif. — Que la constitution de la rente doit
être considérée comme la première q u i , aux termes de
l’article C C G X C II de la coutume, étoit qualifiée cens em
portant. droit de directe seigneurie et lods et ventes.
Huitième motif. — Q u’il est prouvé que la rente a
toujours été regardée, par ceux à qui elle étoit d u e , et
par ceux qui la devoient, comme seigneuriale.
Neuvième motif. — Que suivant les lois de 1792 et
1793 , toutes redevances seigneuriales et droits féodaux
ont été supprimés sans indemnité; et les arrérages, m êm e
ceux dûs en vertu du jugement ou de convention , ne
sont pas exigibles.
Dixièm e motif. — Q u’enfin nrayant été excepté que
les rentes qui ne tenoient pas à la féodalité, et qui étoient
�•
( 16 )
•
'
d ues par des particuliers à des particuliers non seigneurs
ni possesseurs des fiefs de P o u z e u x , il s’ensuit que SaintBut est non recevable à l’exiger.
■
Tels sont tous les motifs d’après lesquels le jugement
déclare en effet l’appelant non recevable dans sa demande,
en renvoie l’intimé quitte et absous, et condamne SaintB u t aux dépens. L e dispositif est justifié par les motifs;
et les motifs ne sont que l’application des conséquences
qui dérivent des titres et actes qui sont produits. L a féo
dalité de la
rente
dont il s’a g it, et dans la main d’un
seigneur ou possesseur de fief, est si
é vi d e nt e
par elle-
m êm e, que ce seroit perdre du temps que de répondre
aux objections du mémoire de l’appelant, qui ne sont
que des efforts d’imagination ; et ce seroit par trop se
défier des lumières du tribunal d’appel.
L e citoyen A N D R A U D , avocat.
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
R
I O M , d e l' impr im erie de L
a n d r i o t
, seul imprimeur du
T r i b u n a l D’appel. — A n 1 1 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chemel, Jacques. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chemel, intimé ; contre Philippe Saint-But, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0246
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0245
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53745/BCU_Factums_M0246.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chopins (domaine des)
Montaix (terre des)
Treban (03287)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières