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Lettre à Mr GODEMEL
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E vous e n v o i e , M o n s i e u r , un précis hiftorique de la conduite
que j’ai tenue depuis que je fuis C u r é , & des persécutions que
j’ai éprouvées. C ’eft fur ce précis que je v e u x être jugé , & non
fur toutes les calomnies
qu’on
répand de toute part pour me
perdre dans l’efprit du Public.
Je fus ch a rg é , prefque malgré m o i , de la Cure d’Effiat en 1783.
Cette Paroiffe étoit alors dans la dernière misère , par les fuites d’une
grêle qui avoit enlevé toute fa récolte.
Bien convaincu qu’un des
premiers foins d’un Curé e ft de chercher à fo ulager les malheu
reux ,
je formai une a ffociation de perfonnes charitables qui fe
chargèrent d’élever les enfans orphelins , ou appartenans à des
parens chargés de famille ; de leur apprendre à tra v a ille r , & de les
nourrir des reffources que je pouvois me procurer.
Elles firent
plus : des fonds que je pouvois a v o i r , elles ont fouvent acheté
du bled & d’autres objets de première néceff i té pour les rem ettre,
dans les temps de misère , au plus bas prix poffible ; ce qui a
o p é r é , à plufieurs reprife s , un bien inappréciable dans la Paroiffe
& dans tous les environs , au vu & au fu de tout le monde.
Les perfonnes vertueufes qui font à la tête de cet établiffement,
ne bornoient pas leurs foins à cet objet : dans le dehors , la vifite
des malades , la confolation des m alheureux, la diftribution des
aumônes ; voilà une partie de leurs follicitudes , de manière que
toute la Paroiffe en tiroit une utilité réelle. Les vieillards incapa
bles de gagner leur v i e , & les eftropiés rccevoient de leurs mains
ce qui étoit néceffaire à leur fubfiftance.
Les femmes de la Pa-
roiff e qui ne trouvoient pas de l’ouvrage a ille u rs, n’avoient qu’à
s’adreffer à elles pour s’en procurer. A v e c toutes ces précautions
je ferois venu à bout de détruire la mendicité dans ma Paroiffe ,
j’oferois ajouter la fainéantife , & d’y établir une certaine a ifa n c e ,
fi j’avois été fécondé , comme je devois l’être , par les perfonnes
qui poûvoient & qui auroient dû le faire.
A
�Mais l'envie &' la h a in e , fous l’ènvëloppe d’un faux zèlp-, v i n
rent me contrarier dans mes opérations. D es perfonnes d»nt je ne
pouvois approuver la c o h ’luite'V commencèrent à répancïft qu’il ne
convenoit pas à un Prêtre de fe mêler de pareilles entreprifes. O n
chercha à débaucher ceux dont je pouvois me fervir pour l’exé
cution de mes p ro je ts , à m’enlever mes amis , à infpirer de la mé
fiance à*ceux qui me procuroient des reiTources pour m’aider dans
mes opérations : enfin on engagea les perfonnes qui me faifoient
des avances en coton pour la filature que j’avois é t a b li e , à prendre
toutes les meiures poflîbles pour me com prom ettre, ou pour me
forcer à vendre à perte.
Qe
pareils bruits m ’occafionnerent des
pertes confidérables *&n*eifirent beaucoup au crédit que mon ètabliffemint
p ouvoit a\*oir. Les créanciers ne furent pas les feuls
qu’on chercha
à prévenir &
à animer contre moi. O n engagea
ceux qui achetoient la filature, à profiter des circonftances. C e u x
même qui me devoient , en profitèrent pour refufer de me p ayer
w des fommes confidérables qui me font encore dues. J’en ai vu à
qui .j’avois prêté ou fait prêter , répandre de tous côtés que je
leur devois.
, •
O n ne s’en tint pas là. Il falloit aufli chercher à prévenir M.
l’Evêque & mes fupérieurs majeurs contre moi ; & pour y par
venir plus a iié m e n t, on interpréta jufqu’à
mes intentions. Selon
mes calomniateurs , toutes mes opérations partoient
d ’un efprit
mercantille qui ne convenoit pas à un prêtre ; rien n’étoit innocent
dans toutes mes avions : fous un extérieur de charité, je cachois
la plus vile ambition. Les demandes les plus juftes m’étoient refufées : toutes les ames
baffes, des domeftiquss mçme étoient
chargés d’épier toutes mes aftions , de me fuivre dans tous mes
pas ; on ne manqua pas non plus d animer & de prévenir çontrç
moi la partie la moins faine de ma Paroiffe, J’avois beairïéclamer,
demander à être entendu , crier a 1 injuftice , je r^ji jamtis pu*
parvenir à me faire e n te n d re depuis )>Jiis de quatre ans que mes
ennemis font acharnés à ma p^.te*v
V o y a n t enfin qu’on n’a v o i t ' p u
engager
m£s c r é a n c ie r s , *ni
�njes fnpérieurs à me pour(uivre. ave c vigueur , on chercha à
engager ¿es perfonnes qui avoient des
les g a r d e r , &
effets en nantiffement à
à me. contrarier au lieu de me favorifer dans la
vente , comme je les en avois prié.
Pendant un v o y a g e que je fis en Bourgogne pour me procurer
les reffources dont je p ouvois avoir befoin & fermer la bouche a
mes ennem is, ils répandirent* d,e tous cotés que je ne reviendrois
p lu s , qu’on alloit nommer un Curé à ma place , & que mes créanciers
courroient rifque de perdre tout ce qui leur étoitdû. D es bruits pareils
produifirent l'effet qu’on devoit en attendre : quelques-uns de mes
créanciers s’emparerent fans formalités , des bois , des b e ftia u x ,
des toiles de. c o t o n . . . . ; d’autres firent faifir mes métiers & les
meubles qui étoient dans l ’établiiTement, ce qui fournit le préteXie
de chailer tous les enfans qui y gagnoient leur v ie . O n auroit bien
defiré que ces mêmes métiers euffent été enlevés fur le champ ;
car c’eft à cette filature qu’on en v o u lo it: 1 orgueil de mes adverfaiies ou plutôt leur envie ne pouvoir la fouffrir. D ailleurs on regardoit cette opération comme un coup auquel je ne pourois pas
ré fifter, & un vrai m o yen de me forcer à quitter ma Paroiffe &
la maifon.
Inftruit de pareilles m e n é e s, je revins promptement! fans a vo ir
terminé les er.gagemens que je me propofois de prendre.
A mon
a r r i v é e , je tranquillifai une partie de mes créanciers ; j aurois du
attaquer ceux qui s’étoient payés de leurs mains , & qui s obftinoicnt de retenir en
leur puiffance des objets plus que fuffifans
pour affurer leur créance : mais la bonté de mon cœur fut tou
jours une des principales caufes de mes malheurs.
Je n ai jamais
fu attaquer perfonne , & me faire violence pour demander ju ilice .
fouffrir & faire du bien , v o ilà les deux difpofitions qui dominèrent
toujours fur mon ame. J’entrai e n fu ite , par intermédiaires, en ex
plication
avec quelques-uns de mes cor.freres qui auroient dus
rougir eux-mêmes de tout ce qui étoit arrivé à leur inftigatioR.
Je leur repréfentai que j’avois pour près de IJCOO liv. e n t o i le s ,
en beftiaux , en bâtimens , en fonds de terre & en cotcfi filé ; qu iL
m’é;oit
encore dû des fommes confidérablcs , & que n ayant pas
A X
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touché la plus grande partie des honoraires de ma C i r e , comme
le portoit l’a ile de ma prife -Je poíTe¡fion , j’avois au m o:ns }000
à réclamer , qu’on ne pouvoir me refufer , attendu que je ne
Jes demandais que pour le foutien de l’établiiiement de c h a r it é ,
que j’avois formé.
T outes ces repréfentations f irent »inutiles , & au lieu d’appaifer
mes créanciers, on ne cherchoit qu’à animer ceux qu’on cro yo it
les plui propres à me pourluivre & a féconder les m auvaik s in
tentions de mes a iverfaires. O n auro't defiré fur-tout qu’un d ’entr’eux pût obtenir contre moi une fentence de prife de corps ,
afin de forcer par-là M. l’Evêque & mes fupérieurs majeurs a me
de il tuer-
I s auroient
réiiffi certainem ent. s’il avo it été poifible
de me tra luire devant des juges qui euffent pu fe laifler prévenir ;
mais heureufement j’avois à faire à un juge ferm ï & incapable de
prévention. Convaincu de mon innocence & d-; la malice de mes
e m e n i s , il fit pour moi tout ce que le vice des lo ix permet de
faire pour la difenfe des innocens perfécutés.
T e l étoit l’état de
mes affaires & l’acharnement de mes adver-
fa ir e s , lorfqtie la ré volu tio n que nous v o y o n s s’o p é r e r , vint ra
nimer mes efpérances & déconcerter leurs trames. Je ne foupirois
qu’après le moment oii il me feroit permis de réclamer la juftice
que je de-ntndo.s inutilement depuis plufieurs annjes.
C ’eft dans
cette vue que je me tranfjortai à P aris, au mois de mai de rn ie r,
tant pour implorer le fecju rs
les droits de ma Cure.
de mes amis , que pour faire régler
La lenteur des opérations de l’ Affemblée
m’y retint plus long temps que je n’avois cru : mais je ne voulus
pas revenir que la conftitution du Clergé ne fut te r m in é e , & que
je n’enfle fait décider mes prétentions.
perdu de
vu e ,
La haine ne m’avoit pas
& un incident fort fimple procura à mes fupé
rieurs une occafion & un homme tels qu’ il les falloit pour w c faire
a r r ê t e r , & me forcer à donner ma démifllon.
Le 10 du mois de ju ille t , le S’r, M o llé , dodleur en m édecine,
a : procura un billet de caiiTe de 200 liv. pour e n v o y e r en p ro
vince ; je lui avois promi» de le lui remettre dans la huitaine : je
le p ouvois d’autant plus aifénunt ,
qu'on devoit m’apporter d e i
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fonds avant l'époque
*
jamais mémorable du 14. Le lundi 12 J e
Sr. Mollé , pouffé je ne fais par q u i , vint me trouver & n e dit
avec menaces qu ’il lui falloit la fomme fur le champ ,0:1 qu’il me
feroit un mauvais parti.
J’eus beau lui protefter que j’avois fait
une perte qui me mettoit dans l’impoffibilité de le faire dans le
moment , qu'il falloit attendre au lendemain , je ne pus rien ob
tenir. V oyan t enfin qu’il me feroit impoflible de l’a p p a ife r, qu’il
étoit capable de faire un éclat dangereux, peut-être de fe porter
a un mauvais coup dans la violence , je lui propofai d’aller avec
moi trouver le Procureur-général de la C on grég a tion , qui ne pouv o it pas me refuier une pareille fo m m e , fur - tout après les der
niers décrets de l’Afl'emblée nationale , qui me regardoient comme
tous les autres Curés.
Le Sr. Mollé accepta la propofition avec d ’autant plus de faci
lite que j ’ai lieu de croire que tout étoit c o n c e r t é , & que l’on fe
propofoit de faiiir avec empreflement cette
occafion pour me
compromettre. J’allai donc dans la maifon des PP. de l’O ratoire,
rue St. H on oré, fur les neuf heures & demie du foir. Conduit chez
le Procureur général, à peine daigna-t-il m’écouter : je m’étois at
tendu à ce retus , mais je voulois reiler dans la maifon jufqu’au
lendemain , tant pour ma fureté , que pour la tranquillité du Sr.
Mollé. Celui-ci après m’avoir quitté pendant quelque temps pour
aller parler à des perfonnes de la Communauté que je me difpenferai de nom m er, revint me trouver, m’accabla d’infultes & d ’avan i e s , & finit par me faire conduire au corps«de-garde qui eit dans
la maifon même des PP. de l ’Oratoire.
Le Sr. Mollé après m’avoir dit tout ce que la violence put lui
d;fter , prit le parti de fe retirer. Le chirurgien des PP. de l’O ra
toire eut alors la compla.fance de me propofer de monter dans fa
c h a m b r e , où je paiTai la nuit fur un fauteuil. Le Frcre Lamare me
vit le lendemain au m atin, & caufa avec m o i , fans favoir ce qui
m’étoit arrivé. Sur les huit à neuf heures arrive le Sr. Mollé q u i ,
après de nouvelles in fu lte s, demande un billet que je lui donnai
«levant le chirurgien, mais q u’il fe garda bien de produire au D iftr itt, étant plus avantageux pour lui de me faire pafier pour un
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efcroqueur que pour un débiteur. Après cette o p é r a tio n , if fortit
pour aller voir le P e r e Poiret ; le Secrétaire-greffier .devant lequel
je devois être traduit, le vit aufli : ils ne me le cacherent ni l’un ni
l'autre , ajoutant que le Pere Poiret les avoit fortement engagés à
me traiter ave c toute la rigueur poilible , qu’il leur avoit même
dit
que j’étois un mauvais fujet , & qu'on ne me regardoit plus
comme de l’Oratoire. Malheureufemtnt j’ignore le nom des perfonnes qui fe trouvoient au D i f t r i d , lorfqu’ils me firent cet aveu.
; Sur les onze heures, le Secrétaire-greffier me fit venir pour en
tendre la dépofition du Sr. Mollé ; quelqu’interprétation qu’il ait
voulu donner à mes intentions, il ne put m'accufer d’autre chofe
que de lui a vo ir emprunté un billet de 200 liv. , dont je devois
lui faire le montant dans la huitaine. Malheureufement pour moi
il n’avo it pas voulu recevoir un b ille t, lorfqinl me le prêta. Cette
dépofition finie, on me conduiftt dans une ch am bre: en y a lla n t,
je dis que j’avois befoin de prendre quelque chofe ,
on eut la
cruauté de me répondre que fi j ’avois de l’argent , on iroit chez
tin ttaiteur me chercher ce que je voudrois ; fur ce que je dis avec
fermeté qu'étant dans une maifon de l ’Oratoire , je n ’avois pas
befoin de payer ma nourriture, on m 'envoya de l’eau & du pain
de la cuifine. J’eus beau demander un peu de vin pour mes dou
leurs d’efto m ac, il fallut m’en pafler.
Sur les fix heures du foir , on m ’e n v o y a chercher par 4 fufilîers
qui ne me parlèrent pas en foldats citoyens , mais en vrais fateflites. Arrivé au Comité qui fe tient dans une chambre des PP. de
l’O r a t o ir e , le Secrétaire-greffier me demanda ma réponfe à la dé
pofition du Sr. M ollé , que je lin fis ecrire j il me demanda aufli
quels étoient mes fujets de plainte contre mes fupérieurs : je fus
fort furpris d’une pareille queftion ; préfumant néanmoins qu’elle
n’etoit pas faite fans m o t i f , je fis écrire tout ce dont j’avois à m e
plaindre ; & comme je n’eus pas de p®ine à croire que l’on fe
férviroit du Sr. Mollé
à
donner ma
&
désniifion
du Secrétaire-greffier pour me forcer
qu’on cherchoit
à m’extoxquer par une vo ie pareille ,
dépofition
,
une
proteftatîon
bien
depuis
long - temps
je fis inférer dans ma
claire
contre
tout
ce
�qu’on pourroît exîgôr de moi par furprife e u par v io le n c e , avant
qu’on m’eût donné uny confeil &
qu’on m’eût fait conduire au
Com ité des rapports , où j’avois une chofe efienticlle a commu
niquer à un D éputé de l’Aiîemblée Nationale.
J’eus foin aufll de
réclamer les droits de l ’h o m m e , notamment le décret qui défend
d’arrêter perfonne fans une fentence préalable.. . . Enfin je fis inférer
une plainte formelle du refus qui m’avoit été fait de me donner
à manger......... Ma dépolition auroit été bien plus en r è g l e , £ je
n’avois été prefle p a r le feribe qui ne tarda pas à fentir qu’il.s’étoil
chargé d ’une mauvaife commiiîion , & à me faire éprouver fa mauvaife humeur .• néanmoins il eut l’attention de me faire apporter
de fon h ô t e l, un morceau de jambon a vec du vin. Après un pareil
f o u p e r , je demandai à paiTer dans une chambre pour m ’y repofer ,
ce qui me fut refufé ; & comme fi on avo it cherché à me procurer
tous les défagrémens p oifibles, fur la plainte portée contre une
perfonne acculée
de v o l , on fit venir , une fille publique avec
d’autres gens de cette efpèce qui s'entretinrent devant m o i , pen
dant toute la nuit , de toutes les horreurs qui fe commettent au
Palais royal. Quand on les auroit p ayés pour cela , ils n’en auroient
pas dit davantage : jugez de mon inquiétude & de ma contenance
au milieu d’une pareille compagnie.
Le lendem ain, jour à jamais mémorable du 14 ju ille t, jour qui
fera époque dans ma vie comme dans les annales du m o n d e , le
• Greffier alla communiquer ma déposition au Pere P oirC t, fupérieur d e
la nu ifon , M. D u p o n t , Préfident du Com ité , qu’on avo it fait venir
pour en prendre co n n o ifla n ce, le v it auiïï: ils ne purent me cacher
ni 1 un ni l ’autre qu’elle l’avoit fortement c h o q u é ; je le crois : les
plaintes qu’elle co n tie n t, lont fortes; mais le Pere Poiret doit fe
rappeler qu’elle ne contenoit que le réfumé de ce que je lui avois
écrit plufieuri fois. Néanmoins je crus reconnoître à leur langage
q u e l l e avoir fait fon e ffe t , & qu’on étoitdifpofé à m ’accorder ce que
je demandois.
En conféquence je commençai A me tranquillifer ,
& je ne crus pas devoir profiter des Gardes nationales du dépar
tement du P uy -d e -D ôm e , qui vinrent s’aflembler fou9 la fenêtre
du diflrift où j’étois détenu. J’envifagccis moins., dans un é c la t,
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les avantages que je p ouvais en retirer, que la h o n tî qui pouvoit
en réjaillir i'ur toute la congrégation , fi mon affaire devenoit pubü q ie. C e qui acheva
de me tromper , c’eit que toute la journée
je fus affez bien traité ; qu’on me permit même d aller avec un
g a rd e , au partage des troupes nationales, dans la rue St. Honoré.
L e .S r. P ayen , commiffaire de quartier , en exercice ce jour- 3à ,
ne m ’enferma qtie pendant qu’il alla diner. Les PP. de l ’Oratoite
me firent apporter à manger , la premiere fois par un petit dom eftique, la fécondé par un jeune Frere dont j ’ignore le nom.
Sur les dix heures du fo ir } le Greffier me p ropora une chambre
que j ’acceptai avec plaiiir , v u
le befoin que j ’avois de repos ,
mais que j’aurois furement refufée fi j’avois connu la mal-propreté
du lit *, j ’aurois à coup sûr préféré de paffer encore une nuit fur
un fauteuil. Avant de m’y rendre, j’avois prié le Greffier de me
faire ouvrir le lendemain de bonne heure , parce que j’avais des
lettres preffées à é crire , & une perfonne à voir avant fon départ;
ajoutant que fi on me faifoit manquer l ’un & l’a u tre , on me fercit
un tort irréparable.
Le Greffier me promit de m’accorder ma dem ande, mais il ne me
tint pas p a r o le ; & il me la'.fla enfermé jufqu’à fix heures du f o ir ,
malgré tout ce que je pus lui faire dire pour lui rappeler fa prameffe. Arrive alors dans ma chambre le commiffaire Payen qui me
préfente de la part du Pere P o ir e t , une formule de démiflîon à figner.
Jugez de ma furprife & de mon indignation. - - A v a n t t o u t , lui disje » vous devez m ’accorder d’aller au Comité des rapports,comme
je l’ai demandé dans ma dépofition. — La chofe eft fort inutile , on
ne vous l’accordera p a s ; il faut ch o ifir, ou de figner , ou d’aller
à la Force. - - Comment a la Force , lui dis-je ; avez-vous une fentence contre moi ? ai-je été condamné? mon procès eft-il fait?
une fimple dépofition e(t-elle fuffifante pour faire emprifonner un
h o m m e , fur- tout un homme de
mon caraftère, —
N’im p o rte ,
ajouta-t-il , v o y e z & décidez-vous. Je ne parlerai pas ici de l’ar
gent qiie les Oratoriens
prétendent avoir été donné ; j ’aitendrai
q u ’ils aient produit leurs preuves.
Je représentai enfuite au commiffaire de quartier que j ’avois
�té i
9
contrafté des dettes étant C u r é , pour un établiiTement de charité
que j avois formé dans ma P a ro iffe , & qu’il me reftoit pour plus
de 1 2000 liv. tant en fonds de terre & en bâtimens , qu’en mobi
liers ou provilions , que par conséquent il m’éroit impoiT.ble de quitt er
Effiat dar.s ce trcment : toutes ces reprcfentations furert inutiles.
V o y a n t enfin que ma préfence alloit ctre absolument néceffa;re en
A u verg n e , je pron is de figner ma démiifi }n , comme le feul m oyen
que j ’avois pour obtenir
ma liberté.
Lorfque je fignai cet a & e ,
j ’étois bien c o n v a :r.cu que le décret qui concerne la nomination
aux C u re s, étoit fanftion né; mais je me gardai bien d’en parler au
Sr.
Payen. Je ne lui dis pas non plus que dans ma dépofition ,
j ’avois protefté contre toute furprife & toute violence qui pouvoit
m’être faite : je voùlois abfolument être libre pour me faire rendre
juftice.
Sur ma promeiTe, on me ccnduifit au C o m it é , où le Secrétairegreffier commença par exiger une lettre dans laquelle je déclarois
au Pere Poiret que je renonço s à la congrégation. Avant de la
f a i r e , je repréfentai que cette lettre étoit fort inutile , qn’on lui
a v o it dit
plufieurs fois que je n’étois plus de la co n g rég a tio n ,
qu’en conféquence
1 p ou v oit fe difpenler d’infifter fur cet article.
Sur de nouvelles i n f s n c e s , j'écrivis au Pere Poiret & non au régime,
que je renonçois à la congrégation , regardant cette lettre exigée
de m o i , non con me un acte , mais comme une preuve ; qu’on me
regardoit encore tomm e membre de la congrégation , & que l’in
dignité des traitemens que j'avois reçus retomboit fur le régime
même.
Le Sr. Lavau nie conduifit enfuite chez deux notaires : ne les ayant
pas tr o u v é s , il me ramena à la maifon de St. Honoré. Sur les huit
heures
& demie du foir ,
le même accompagné du Sr. P a y e n ,
me reconduilit chez M. Monot ,
notaire royal ; ils firent dreffer
l ’stte eux-m êm es fat. s que je difle un m o t , excepté au moment où
M,
Monot
crut de oir me queftionner.
A tout ce qu’ il put me
demander , je ne réj ondis autre chofe finon que je me portois bien ,
& que je n’étois pas fe u . Je ne fis rucune ri j rélcntatic n li r te ut
ce qu’il mit de plu», dans la crainte que l’on ne me conduifit de
�«
•
/
nouveau
IO
au diftri& , où
je
favois
trop bien comment on i;cnd
juftice.
Q u an d l ’a£le fut f i n i , je demandai à en prendre note avant de
le iigner ; mais on me promit de m’en donner copie auiîi-tôt que
je l’aurois figné : & quand l’opération fut faite , les Notaires s’étant
parlé tout bas, ils répondirent que je n’a v i i s qu’à revenir le len
demain & qu’on me la donneroit : ils vouloient apparemm ent m’em
pêcher de
faire un
regrer ; ils ne me cacherent pas même leur
crainte , ce qui donna beaucoup d’inquiétude aux deux tém oin s,
que je
me hâtai de
quitter de peur d'être arrêté de nouveau.
D a n s tout ce que je viens de d i r e , je ne puis citer d’autres perfonnes que les Notaires & les membres du diflrift qui m’avoient
accompagné ,
mais je protefte , devant D i e u , que je r.e fais que
rapporter les chofes comme elles le font paiTées. Avant de quitter
les triiles inftrumens de mon m alheur, j’eus la précaution de les
prévenir que le Sr. Nlollé avo it un billet à m o i , & qtie mon in
tention étoit de le retirer moi-même.
J’errai une bonne partie de la nuit fans favoir quel parti pren
dre. Le lendemain de grand m a tin , j ’allai au champ de mars faire
ma priere fur l’Autel de la liberté ; jugez des réflexions que je dus
y fa ir e , je me déterminai enfuite à aller paffer quelques jours à
F on ta in e b le a u , pour y réfléchir à mon aife : mon intention étoit
de revenir enfuite à Paris , mais ayant trouvé com pagnie, je partis
pour EfHat , jugeant bien que ma préfençe y feroit néceflaire au
moment où la nouvelle y arriveroit. Le mardi 20 , je donnai à M.
le M a i r e , pour remettre au Pere P eirier, fupérieur de l’EcoIe-milit a ir e , une lettre dans laquelle je le prévenois que ma démiifion
ayant été f o r c é e , je comptois r e g r e t te r , & qu’en conféquence il
convenoit de tenir la chofe fecrette , de peur d’éclat ; mais la nou
velle s’étoit déjà
répandue.
Je ne dirai rien fur tous les bruits
& les calomnies qu’on fe hâta
de répandre en même temps fur
mon compte.
J’allai enfuite à R i o m , où je me hâtai de faire fignifier mon re
gret au Général de l’Ordre , au Supérieur de la maifon , & au
Greffe eccléfiaftique, afin que perfonne n en prétendît caufe d’igno-
f
�II
rance. Le 2^ je me prérentai à la facriftie pour faire mes fondions.
Toiîtes les avenues étoient remplies de PP. de l ’Oratoire : on ne
laiffa entrer dans la facriftie avec moi , que M. le Maire & un
autre témoin
quoique pluiieurs habitans demandaient à être ad
mis. Sur la demande que je fis au Supérieur de me délivrer les
les regifttes & les ornemens p o u r 'd ir e la Mefle , il me répondit
que ne me reconnoiffant plus, ni comme membre de la congréga
tion , ni comme Curé , il ne fouffriroit pas que je fifle aucune fonc
tion. Je lui demandai enfuite qu’il exhibât une nomination , une
prife de poiTeffion & un titre qui l’autorisât à ce refus ; après cela
je fis dreffer a & e , & je me retirai pour éviter tout éclat.
Depuis cet a & e , j’ai obtenu un certificat honorab'e de la partie
la plus refpettable des habitans de ma P a ro ifle , auxquels fe font
joints M. le Maire & le plus grand nombre des Officiers municipaux.
Le 1 4 , je fis afligner le Supérieur à paroître à la première audience;
mais au lieu d’attendre la décifion , il alla chercher le Pere A lbiac,
pour qui il avo.t obtenu de nouvelles prov.fions datées du 9 a o û t ,
& un rifa daté du 16 , quoique mon regret eût été fignifié aux
fupérieurs majeurs & au Greffe eccléfiaftique, avant la fin de juillet.
L e Pere Albiac piit poiïeiïîon le 1 7 , en ca ch ette, n’ayant avec lui
que trois té m o in s, dont deux font gagés par la maifon des PP. de
l’Oratoire ; le roifième leur devant beaucoup eft auffi comme à leur
diipofition.
11
auroit été plus naturel d’y appeler M. le Maire if
les Officiers m unicipaux, mais on craignoit peut-être quelqu’oppofiiion & on v^uloit profiter du moment où j’étois âbfent. J’efpere
que le nouveau régime ne fouffrira plus de pareilles
fupercherics.
U n afte de prife de pofleifion eft comme un afte de m a ria g e , il
ne fauroit être trop public.
�Quc/ïiens à examiner.
1 L E
Secrétaire & le Commiffaire de quartier avoient-i!s le droit
d’ arrêter & de garder en chartre privée un Prêtre & fur-tout pour
une fimple dette ?
2
Le Diftrict tenant fes féances dans la maifon des PP. de l’Ora
toire , peut-on dire avec vérité que ceux-ci aient ignoré la détention
du fieur P y dans une de leurs chambres?
3°. Le fufdit Py ayant protefté , dans fa dépofition au District, contre
toute furprife & toute violence , avant qu’on lui eût donné un confeil ,
& qu’on l’ eût conduit au Comité des rapports , peut-on dire que la
rénonciation à la congrégation , & fa démiffion aient été des actes
libres ? Le Pere Poiret fait lui-même le contraire , & il ne peut nier
que tout a été fait par fes ordres.
4 °. Les deux Notaires ne peuvent pas nier que le fieur P y a été
conduit chez eux , par MM. Lavau & Payen qui l’avoient gardé
jufqu’à ce jour. E ft-il probable que le fieur Py eût été chercher de
pareils témoins pour affifter à la démiffion , fi elle avoit été libre ?
5 . Que les Notaires & les PP. de l’Oratoire difent qui a préfenté
la démiffion au Supérieur majeur & à M. l’Evêque : ceux-ci ne diront
certainement pas quelle leur a été préfentée par le Curé d’ Effiat.
6°. Les Notaires , s’ils n’avoient pas été du complot, auroient bien dû
remarquer que l’acte n’étoit pas libre ; lorfqu’ils reconnurent les deux
témoins qui n’auroient furement pas quitté leur di f t r ict, pour accompagner
le Curé d’E ffi a t , s’ils n’avoient pas eu peur qu’il ne s’échapât...............
Pourquoi lui refufa-t-on copie de fa démiffion ?
7 ° . P eu t-on croire qu’un Prêtre libre & en bon fens, ait pu renoncer
à fa Cure & à fon état , dans les circonftances actuelles ; fe mettre ainfi
à la merci de fes ennemis , & fe priver d’une des plus grandes reffources qu’il put avoir ?
^
Le fieur Py ayant fignifié fon regret , & n’ y ayant perfonne de
pourvue lorfqu’il fe préfenta pour faire fes f onctions, quel droit M.
Perrier , Supérieur de la maifon d’Effiat , avoit - il de s’oppofer à ce que
le fufdit Py exerçat fes fonctions ? La nomination qui a été faite depuis
du Pere Albiac , prouve bien qu’il n’avoit pas accepté la Cure luim é m e , & que par conféquent il ne pouvoit pas fe prévaloir des provifions qu’on lui avoit envoyées.
9'J. Si M. l’E v êquer fon grand Vicaire & le Pere Albiac avoient été
bien inftruits de cette tram e, ils ne fe fero ient furement pas expofés
à un pareil compromis, comment a-t-on pu leur repréfenter la démiffion comme purement libre ?
1o u. Si la démiffion e ft nulle, l’Evêque & les Supérieurs majeurs
peuvent-ils fe réunir pour dépofer le Curé d’Effi a t , fans lui faire fon
procès? L ’arrêt du Confeil qu ils citent en leur faveur, pourroit-il être
regardé comme loi à préfent que tout actte de defpotifme eft prohibé ?
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
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An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Godemel. 1790?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
démission forcée
prêtres
oratoriens
bienfaisance
filatures
mendicité
diffamation
créances
saisie
prison
Description
An account of the resource
Titre complet : « Lettre à Monsieur Godemel, juge de Justice de Riom sur les injustice que M. B. Py curé d'Effiat a éprouvées » .
Titre manuscrit.
L'auteur a édité en 1790 à paris, chez Devaux, l'ouvrage suivant : Esprit d'une constitution nationale, par un curé de campagne, [Par M. Py, curé d'Effiat en Auvergne] / Jean-Baptiste Py.
Table Godemel : démission : un curé qui a renoncé à la congrégation des pères de l’oratoire et a donné sa démission de sa cure, peut-il exciper de surprise et de violence ? S’il a signifié son regret, avant son remplacement, a-t-on pû s’opposer à ce qu’il exerçât ses fonctions ? a-t-on pu lui nommer un successeur avant de lui avoir fait un procès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1790
1783-Circa 1790
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1009
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Effiat (63143)
Rights
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Domaine public
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bienfaisance
Créances
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prêtres
prison
saisie
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CONSEIL
SUPERIEUR.
M
E
M
O
I
R
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1 ere C H A M B R E .
POUR
M e. G
B A R T H E L E M Y , N otaire Caufecontînuée
eorge
R o y a l , & Procureur d'’ Office au Bailliage de Cham alieres, Appellant, Demandeur & Défendeur.
C O N T R E Sr. A
n d r
É
D E S O C H E S , Entrepofe ur
des Tabacs en cette V ille de Clermont- Ferrand ,
Intimé & Défendeur.
ET
contre P
ie r r e
B A R B E T H uiffler en la.
Cour . Intervenant & Demandeur.
¡jj^d^rjôizrçri
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fc^QoZTTOT-Tt^
L fieur Defoches femble avoir eu pour
E
but, dans fon. Mémoire i mprimé v d’en
impofer au public : & de' furprendre la
religion de la C o u r; il ne s’ eft pas dé
menti dans ce qu’il a fait plaider ; Barbet ,
qu’il a appelle pour avoir occafion de parler fous deux'
nom s, l 'a parfaitement imité. L ’objet de la caufe a été
entierement changé par l'un & l'autre des propofitions
contraires aux principes conftants ont été élevées; pour
les appuyer, ils ont excipé de décifions indifférentes à l’ef-
SaoSitJ?.'
�pece, §c fuppofé des avis diamétralement oppofés. à cc,
qu’on lit dans les Auteurs qu’ils citent. Il cil temps de
rétablir les faits & de venger les régies : c’eft ce que
j:e:, me propofe dans ce Memoire. . ■
j J ’ai été publiquement outragé par le'ficur Defoches;
en vàin', pour pallier fa conduite -, rappelle-t-il la qua
lité de (créancier qu’il n’a plus aujourd’hui, elle ne l’autorifoit.pas à m’enlever ma liberté d*üne maniere irrésIguliere
deshonorante, dans le temps même qu’il me
voyoityibus I çl iàuve-sarde dje la Juftice ; il a fervi mes
o
T...' • • ° 1
v v. ■
. ’•
•'ennemis, '1 ignominie dont il m a couvert, non moins
Certaine-, quoique icellée par un a£te fau x , a” terni ma
réputation & tari, mes reiïources.: Laperte de mon honneur & de ma fortune eft le fujet de mes plaintes.
Toup ’çc que j’avance eft connu ou démontré; tout ce
que. je demande eft évidemment jufte ; mes adveriàires
en font convaincus , & ne croient pouvoir s’y fo u t
traire qu’en préièntant à canonifer l’irrégularité la plus
pf.éqfçment prononcée , l’indécence la plus injurieuie
& la plus révoltante, le faj.ix même le mieux manqué
& le plus dangereux ; ils luttent opiniâtrement contre
les,r|pi^:.6c la, raifon ; efperent-ils quelque vivoire ?
n2 V
i i fis
E T.
‘P R 0 C E D U R E S .
J e rae.fuis procuré par moi-même un état honnête,
dc^ns- l’jexerciqe, duquel j’ai eu;,des concurrents & des
iiipcçs^■j’pi dpnç fait des j a l o u x , j e me fuis donc att i r ^ . ^ ci^^è'mis ; confcqupnce.s affligeantes pour l’huniçnite, mais trop bien démontrées par l’expérience F
tantôt on veut me punir de m’être attiré trop de con-t
lîance dan$; l’excrcice du N o ta ria t, & pour fermer à
�2*1
3
m es clients les avenues clé mon E tu d e , on ‘m e illicite unes
affaire d’éclat, c’étoit le bruit du tonnerre, il n’en.eut q u ex
la durée, je tiens 'mes.adverfaires dans, le fileja,ce_'de?cf
puis quatre années entieres. Tantôt on me-trouve trop
exa& , trop vigilant & trop impartial dans mes fonâipns de Procureur d’Office , &c par des menées fpurdes on •
me dénigre auprès d’un Prince , & à fo r c e ' d’imputa
tions atroces, on obtient ma destitution fi defirée; mais
deftitution révoquée à la honte du méchant , dès le
moment même que j’ai pu in’expljquer. & déchirer le
voile de la calomnie. L a haine, ne.fe lailè pas, on cher
che à prévenir les premiers.de l’E ta ty ;des Lettres
:
nymes, des Mémoires fecrets paiîent' jufques danfr lç
cabinet des Miniftres , on veut en obtenir, par furprife, un coup d’autorité qui perde le malheureux ; m ai$,
en vain , la probité reçonpite dans Fexamen le pliisfcrimuleux, obtient un glorieux triomphe.
,
Ce n’étoit^pas là les lèuls traits que j’aVois à crain- ,
dre. Que la haine eit induilrieuiè ! On imagina par
la fuite de me rendre coupable malgré moi-meme. * ;
on me fuppofoit plus d’averfion pour l’ignominie que
d’attachement & de fou million à la Juiliçe. On forma
le projet de me réduire publiquement à la révoltante
alternative de me voir deshonorer ou de me rendre
rcbellionnaire.
C ’cft au nom du fieur Deioches qu ont etç faites ces
indignités puniilables.' 11 eft necefîaire de- s’airrêter ! au
prétexte dont on s’eiî; fe r v i, aux circonflances dans ,
^qu elles on l’a em ployé, & à la maniçre • dpnt qn
s
conduit.
. . . . : • • u
•i - . .
Le voyage que je fus ^obligé de f^rie à,
en,,
I 7 7 ° > pour découvrir à M . le Duc de Bouillon lés
A 2.
M
�calomnies par le moyen desquelles on étoit parvenu à
fl*rprendret la religion de ce Prince, me eau là des dépe'nfcs confidérables relativement à ma fortune.
' I l n'étoit' pas moins néceiïàire que je fiilè de nou
veau ce voyage en 1 7 7 1 , pour me difculper des imiitations injurieiifes qui m’avoienc été faites dans des
Mémoires' adreiïesaiix premiers Miniftres de la Juftice;
moihs fortuné pour lors , je n avois d’autres reiîources
que l’emprunt, je m’adreiTai au fieur Defoches donc
je connoiiîois l’écàt, & qui mê prêta n c o livres à in
térêt ; il' voulût ma liberté pour gage du principal non
aliéné, & du révenu cumulé, & me fit ligner une lettre
de change de 1 x 3 0 livres à fix mois d’échéance, avec
convention qu’elle feroit renouvellée tous les fix mois,
& qu’en cas d’abfence de ma p a r t, le fieur Deloches
afîureroit fes intérêts en obtenant Sentence.
M e trouvant abfent à l’échéance de cette lettre de
change, le fieur Defoches fit prononcer contre m o i,
fiiivant nos conventions, des condamnations confulaires ; à mon retour de Paris je lui ai payé fes frais avec
tous les intérêts, même jufqu’à plufieurs mois après ce
payement : lalomme de 3 0 livres, cumulée avec le prin
cipal dans la lettre de change, demeurant toujours payée
d’avance en fus de l’intérêt échu , c’eft démontré par le
calcul fait par le fieur Defoches dans l’a âc inftrumentaire du 1% Juin dernier, qui porte quittance du prin
cipal , des intérêts cumulés avec le principal & des inté
rêts du tout.
M es ennemis ont vent de cette Sentence, & exci
tent le fieur Defoches à me pourfuivre ; ce dernier n’étoit lié que par parole d ’honneur que nous voyons
aujourd’hui fi fouvent méprifée, on ne put pas, il eft
E
�233
■>
v r a i, lui arracher Tes titres , mais on lui fit promettre
de donner ion approbation à tout.
Je fus ainfi livré à la merci de mes ennemis, il ne
leur reftoit qu’à me couvrir de honte par un emprifonnement ignominieux, à l’inftant même ils pouvoient
iàiiir leur proie ; ne craignant rien du fieur Defoches,
dtrnt j’avois la parole, lur laquelle je me fondois mal
à propos ; je me préfentois en cette V ille tousles jours,
& à pluiieurs reprifès par jour ; je m’en rapporte fur ce
fait à la notoriété publique. On pou voit donc m’etnprifonner à tout inftant & fans peine. Mais mes enncnemis ne pouvoient fe fatisfaire d’une ignominie or
dinaire , il leur falloit des circonftances qui en aug
mentaient l’éclat : les Aififes des jufticiables du Bail
liage de Chamalieres fe tiennent ordinairement le onze
Ju in , qui s’eft rencontré cette année un Je u d i, jour
fixé pour l’Audience ordinaire, on efpéroit de m’y
voir au milieu de tous les Vaiïàux dont j’ai la confian
ce en ma qualité de N o ta ire, c’eft: à cec inftant que le
coup fataldevoit m’être porté.
M o n exactitude à mes devoirs fondoit les cfpéranccs de mes ennemis ; appellé à Chamalieres pour l’exer
cice des fondions de Procureur d’O ffice, je m’y rends
avant midi; mes premiers moments font employés à des
fondions de ma C harge, & en particulier à 1émancipa
tion de Jean Ginion de Ceyrat.
L a tenue des Aiïifes & de l’Audience des caufes, à
laquelle j efpérois d’en faire juger deux qui m’etoient per
sonnelles, devoit remplir fuivant l’ufage la féance de l’a-'
prcs-dînéc. Trois H uiificrs, Martin P e t it , Tilignac &
Calias (ont portés liir l’avenue & dans l’Auberge la plus
voiiine delalàlle d’Audience; tout étant prépare pour
�*
'
< ^
6 ,.
l'exécution du projet, Palliée, Huifîier du Bailliage, qui avoir tenu compagnie aux trois autres jufqu’alors ,
les quitte pour aller prendre ordre du Bailli de venir
m’avertir de me rendre; la fçénne étoit prête,’ envi-'
ronné de tous les Habitants de Ç e y r a t, Boiiïèjoux,
Sauzet, Thedes, Champeaux, Manilon , &C; je me
difpofois a monter le degré qui conduit à là ialle d’A u dience, lorfque je me vis aiïàilli par les Huiiliers por
tés , ils agirent avec cette violence qu’on peut leur
fuppofçr pour obtenir les trois louis promis pQur prix
de l’expédition ; c.ette libéralité n’étoit pas du fait du
fieuy Defo.ches , mais ils n’étoient pas moins aiTurés .
d’obtenir leur réçompenfe..
L e peuple étonné, irrité même de cette indécence,
dont leur Homme de confiance étoit la vi&im e, s’émouvoit feniiblement, & fembloit demander fi je deiirois ma délivrance ; je.lavois depuis long-temps que je
leur devoisTexemple.de la. foumiifion à la juftice, qu’il
n’y avoit pas à balancer entre l’ignominie & la rebel
lion , même contre des procédés vexatoires; je leur ré
pondis donc par des témoignages contraires à leurs vues,
& iàns le favo ir, je fruftrai mes ennemis dans leur at
tente., je les privai du moyen qu’ils avoient juftemenc
cru infaillible pour me perdre dans l’un &: l’autre de
mes qualités de Notaire & de Procureur d’Office.
L ’indignité & l’ignominie avec lefquelles. je fus bru
talement traîné de Chamalieres dans les prifons de cette
V ille font au deiTus de toutes expreflions ; d’ailleurs le
public en a été inilruit par les yeux, double raifon qui
me difpcnfc de les rappcller.
Traduit dans l’obicurité des priions, peu remis en
core des douleurs que m’avoient caulé dans ce trajet ,
�\
•
7
les'poignets aufïi. meurtriers que vigoureux des trois
Huiffiers que j’ai nommés; intimement convaincu de
mon innocence, ne pouvant préfumer que la Juftice
eût adopté des accuiations calomnieufcs, je cherchai,
je mçditai beaucoup, & le iieur Defoches me parut
feul capable de ce trait , je lui adreilài uné lettre
dans le moment même, pour le porter à un effort ex
traordinaire ; j’y inférai pour cela des expreflions ho
norables que le iieur Defoches a démenti, & qu’il
a prouvé avoir été mal adaptées ; il s’en fait cependant
un' moyen , & pour fe rendre moins odieux,r•il la1 iyn^
cope , il en retranche même des propofirions qui dé
montrent combien il y a peu de fincérité dans ce qu’ilJ
dit , qu’il avoir offert de ie contenter dè fimples1
Îeuretés , ne craigne^ nullement de perdre
-M'.J
f a i des reJJources à faire honneur à ce" ifàe je^vous1
i ° ‘ s »/ vous vouleç bien ne pas me les ‘ôter \ éti nie1
fiifa n t tenir prifon , voulez-vous, M . /i„v o u s aVie^
quelque crainte de perte , accepter la vente de ihon^Of*
fice &. dd ma maifon à Beaum ont,jc fu is prêt a vous ld'
pajfer. ........telles étoient mesipropofitions ; or n’étoitce pas là plus que des offres de feuretés.
t
, J ’ai dit & je répété que cette ‘lettre •fut écrite •&'
envoyée au moment même , ou le momèiit' après cfiie
j’eus été cmpriionné , favoir, à quatre-heures 'du felir,*
date qui y cil écrite; ce fut même par cette'1''lettre’
que le iîeur Defoches reçût la premiere nouvelle de^
mon emprifonnement, cette lettr.e lui avoit -étéfti'mife1
avant l’arrivée "du particulier qui lui fut idÎ^éché-de
Chamalieres , pour le prévenir de'ce qai'fc’ëtoit^affë;
& l’avertir d’envoyer à la prifori un HuîiFicr qiii fu?
dreifér le procès verbal de -capxnrt^ôc'd’ccrbuéiJ 1 Li
�8
Il falloir pour cette fonction un homme plus avide
qu’habile, Barbet , qui avoit ignoré jufqu’alors que
j’eus jamais.rien du au fieur Defoches, fut rencontré
le premier ^ conduit chez le iieur Defoches, il apprend
le fait , reçoit les titres, fe procure deux témoins ,
& vient drefFer dansées prifons, à. fix heures du io ir ,
ainfi qu’il eft juftifié par écrit , le procès verbal de
capture, d ’emprifonnement 6t d’écroue dé nia perfonnc. ,
.
Cette conduite me furprit, je le témoignai par un
a&e inilrumentaire que je fis faire à B a r b e t, & aux
autres Huiifiers dans le temps qu’ils redigoient le pro
cès verbal ; je proteftai expreiTément de m’inferire en
faux. Mais ces Huiifiers devoient être graiTement foldés , toutes remontrances furent vaines, ôc la décla
ration de B arb et, qu’il ctoit porteur de pouvoir , fut
tout ce qu’on put obtenir d’eux.
Je me pourvus à la hâte en la SénéchauiTée de cette
V ille contre mon emprifonnement que je foutins
n u l, tortionnaire injurieux & déraifonnablc, j’y fus
déclaré non recevable par Sentence du 1 7 Juin ,
par laquelle, quoique ma caufe eût été plaidée avec
la plus grande modération , il m’efl: fait défenfes de me
lervir à l’avenir d’aucun terme injurieux contre le
fieur Defoches. Surqupi je le défie hautement, publi
quement & judiciairement d’indiquer aucune des expreifions de la Plaidoierie.qu’il puiilè préfenter comme
injurieufes.
M ’étant procuré le., montant des condamnations
Confulaircs qui Icrvoicnt de prétexte au fieur Defoches pour me tenir dans les prifons, je le lui ai offert,
fous la réferve de fuiyrc l’appel que j’avois déj a interjette,
il
�9
2**
il l’a accepté, 6c m’en a donné quittance notariée ,
que j’ai voulu en cette forme pour aifurer mes réferves.
Enfuite,parfurabondancede droit, j’ai obtenu A rrêt
en la Cour le fix Ju ille t, qui me permet de m’inicnre en faux contre le procès verbal d’emprifonnement
daté du onze Juin précédent. L e fieur Defoches a
d’abord dénçncé cette demande à Barbet , depuis il
a formé oppofition à l’Arrêt qui me permet de m’in£
cnre en f a u x , par requête du neuf; il a été imité
par Barbet qui eft intervenu par requête du dix pour
former oppofition au même A r r ê t , 6c par une autre
requête d u > i du même mois , ce dernier a conclu à
2-ooo liv. de dommages 6c intérêts.
T el eft Tétat a&uel de cette caufe, extraordinairement défigurée parle Mémoire imprimé du fieur Defo
ches , & encore plus par les fuppofitions indifférentes
que Barbet ôc lui ont fait plaider à la derniere Audien
ce. Ramenons-les aux points àdifeuter, ils font en grand
nombre. L ’oppoiition formée par le iieur Defoches,par
fa requête du 9 Juillet, à f Arrêt du 6 du même mois
qui me permet de m’inferire en faux contre le préten
du procès verbal de capture. La demande en dénoncia
tion 6c garantie formée par le fieur Defoches contre
B a rb e t, par exploit du même jour. L ’oppofition formée
à l’exécution du même A r rê t, par Barbet, par fa requê
te d ’intervention du lendemain. L a demande en dom
mages intérêts portée en la requête de ce dernier du
vingt-un du même mois. M a demande en rejet de
la pièce ii juftement maintenue faufle. M on appel de
la Sentence de la Sénéchauflée. du 17 Juin , 6c les de
mandes que j’avois formé devant le Juge dont eft
appel.
B
�Cette énumération ne doit pas effrayer, il eft facile
d’établir en peu de mots que l’oppolition formée par
le fieur Deioches & Barbet à l’Arret du 6 Juillet eft
non recevable , qu’il en eft de même de la demande
en dommages intérêts formée par Barbet, que faute par
le iieur Deioches d’avoir fait la déclaration exigée par
cet Arrêt &c l’Ordonnance de 1 7 3 7 , le prétendu pro
cès verbal d’emprifonnement doit être rejetté de la
caufe.
Mais euiïè-je dédaigné de me pourvoir en infeription de faux contre le prétendu procès verbal de mon
emprifonnement, mon appel ne feroit pas moins bien
fondé ; la Cour frappée des nullités multipliées de ce
procès verbal , jugera que je n’ai eu recours à
l’infcription en faux que par furabondance de droit,
& pour tirer les parties d’affaire, prononçant fans doute,
par fans au il fo it befoin de s'arrêter à Vinjeription de
fa u x , infirmant la Sentence, elle accueillira la deman
de en nullité & en dommages intérêts que j’avois formé
devant le premier J u g e , telles font mes conditions prin«
cipales & fubfidiaires, je les prends avec confiance ,
parce que je fuis en état de les fonder fur des dé'
monftrations.-
M O Y E N S .
» L a pourfuite du faux incident aura lie u , lorf» qu’une des Parties ayant lignifié, communiqué 011
» produit quelque pièce que ce puiiîe être dans le
*» cours de la Procédure ; l’autre Partie prétendra que
» ladite pièce eft fauiïè ou falfifiéc » ainii s’expli
que l’Ordonnance de 1 7 3 7 , titre du faux incident ,
�II
article premier. C ’eft fur cette loi qu’eft fondée ,
mon entreprife en infeription de faux contre le procès
verbal de mon emprifonnement, ce prétendu procès
verbal a été produ it , communiqué, Jignific , il a fervi de lien pour me retenir dans les prifons, il a été
la baie de la Sentence dont cft appel, il y a donc
lieu à la pourfuite du faux incident contre cette pièce.
Approchons de cette démonftration ôc des autres
difpofitions de l’Ordonnance, les allégations qu’on
m’a oppoiées comme fins de non recevoir,la lumiere
de ces flambeaux en fera appercevoir la futilité.
i°. On me reproche de iîavoir pas expliqué ce en
quoi coniifte le faux dont je me plains. Je réponds
qu’il efl: vrai que ma procédure ne contient pas la
déiignation expreflè de ce en quoi j’arguë l’afté de
fau x, mais étois-je tenu de faire cette indication ? le
iieur Defoches foutient l’affirmative fur la difpofition
de rOrdonnance, &c le fentiment de Rouilèau de Lacombe, de mon côté je ioutiens le contraire iiir les
termes & les diftin&ions de la même Ordonnance ,
& lur le fentiment du même A u te u r, &c de tous les
autres qui ont traité la matiere. Quelle fingularité ! elle
a pour fondement une bévue de la part du fieur Defoches.
Il y a une grande différence entre Vaccufation de
fa u x principal & l'injcription de fa u x incident. Le faux
principal s’introduit par requête de plainte qui doit
inltruire le Juge de premier abord des faits dont on veut
faire informer : c’efl: la feule inftru&ion légale qu’on
puiile lui donner , il faut donc indiquer & déiigner les
caulès que l’on prétend fauifes, & lur lefquelles il faut
faire informer ; l’Ordonnance ne le porte nas textuel-
�I l
lement, mais tel eft Ton efprit, 6c ainfi l’a décidé R o u £
ibau de Lacom be, cité par le iieiu* Defoches.
Il en eit ■autre'ment de i infeription en faux incident,
elle s’introduit par requete tendante à per;iiiiïion de s’inicrire, & cette permi hon ne doit dépendre que du plus
ou moins d’influence que la pièce arguée de faux peut
avoir lur là décilion de l’inJiance, à laquelle l’infcription eft incidente , il ne doit pas c>rc qucilion dès-lors
de ce en quoi confifte le faux ; cetre énonciation feroic
fruftratoirc , puiiqu’ori ie trouveroit obligé de la ré
péter dans les moyens de faux, que l’article 14. du même
titr e , veut que l’infcrivant dépofe au Greffe après la
déclaration du défendeur. Elle feroit dangereufe, par la
raifon que ^article 9 du même titre, exigeant qu’il fôit
donné copie a*i défendeur delà requête, cette requête,
fi elle contenoit les énonciations que mes adveriaires
préfentent comme néceflaires, inftruiroit le défendeur
6c le mettroit à même de prévenir 6c furprendre les
témoins 6c de difliper les preuves, c’efl: pourquoi l’art.
38 porte, qu’en aucun cas il ne fera donné copie ni
communication des moyens de faux au défendeur.
Aucun Auteur ne s ’eft écarté de ces maximes , 6c
Rouflèau de Lacombe , qu’on nous cite comme ayant
une opinion favorable au fyflême du fieur DefoGhes ,
s’explique d’une maniéré bien contraire, le Demandeur
donnera Ja requête , dit cet Auteur dans fon Commen
taire fur l’Ordonnancc de 1 7 3 7 , au titre du faux in
cident, page 2 7 9 .............par laquelle il expofera que
dans la cauje , injîance ou procès d’entre lui & J a Partie
adverje , elle lui a fa it fignijier , communiquer ou pro
duit une ou plu/icurs pièces dont il expliquera la na
ture & la date , & dira q u i l les maintient faujfes ouJ'ai*
�331
J3
f { f ié e s E N G É N É R A L , S J N S
q u 'i l
SO IT
n éc e ssa ir e
-d’ e x p l i q u e r e n q u o i c o n s i s t e p r é c i s é m e n t
L e f a u x o u l a f a l s i f i c a t i o n , c a r , ajoute-t-il,
i l n en efc p a s de m cm e de la d em a n d e en f a u x in c id e n t
que de la p la in t e en f a u x p r in c ip a l, où i l f a u t e x p liq u e r
en q u o i c o n fijle le f a u x . . . . . . p a r ce yu en f a u x in
cid en t , q u a n d on f o u r n i t f e s m o y en s d e f a u x , l'o n e x
p liq u e en q u o i le f a u x ou là f i l f f i c a t i o n c o n fifle. L e
dchmt de déiignation des énonciations faufiès ne peut
donc pas former une fin de non recevoir.
)
2-°. On prérend que je n’ai pas d’intérêt dans l’in s
cription de faux , par la raifon fuppofée que la pièce e jl
in différen te ou p e u in térejja n te p o u r la d é cifio n .
L e fieur Defoches fe fut-il expliqué a in fi, s’il eut
cru que l’objet &c l’état de cette cauie fuilènt connus
Quoi! je me luis pourvu contre mon emprifonnement,
& on ofe dire que je n’ai pas intérêt à faire rejetter par
la voie de l’infcription de faux le prétendu procès ver-j
bal , par lequel on a voulu conftater cette injure dont
je me plains ? Sans ce procès verbal je n’aurois pas été
cenfé emprifonné ; s’il n’exiftoit p a s, il n’y auroit pas
de conteitation fur ma demande, & je n’aurois pas le '
droit de fuivre l’inicription de faux qui produira le
tticnie effet ? Il n’eil queftion que de dépens, dit le fieur
•^eibehes: eh bien, la caufe fut-elle réduite à ce point,
nc ferois-je pas recevable à m’inferire en faux contre
k pièce introdu&ive de l’inftance ? Mais il en eft au
trement , l’outrage qui m’ii été fa it, l’ignominie par la
melle on n’a que trop réufli à ternir ma réputation &
tarir mes reiTources , font les objets à examiner &• ceux
° nc je nie plains.
I
�lâr
M a is , ajoutentencorcmes adverfaires , le procès ver
bal , cette pièce arguée de faux efl indifférente ou peu
intérejjante pour la décijlon ; s’ il en eii ainfi, il n’y a
qu’à la rejerter de la caufe , l’inicription de faux ne
tend qu’à cela ; fi au contraire cette pièce fert de ba.fe
aux prétentions du iieur Defoches, elle me nuit, & je
fuis fondé à l’attaquer par les voies de droit ; or l’infcription de faux eft de ce nom bre, donc, &.c.
3 0. On foutient que je ne fuis pas à temps de m’infc
crirecn faux , que j’ai couvert le vice de la pièce arguée
de faux, foit par la lettre que j’ai écrite au heur Defoches,
foit par le payement que je lui ai fait.
Commençons par répondre à cette derniere partie
de l’obje&ion ; fi elle étoit fondée, je r.futerois inu
tilement la premierc.
J ’ai payé au heur Defoches tout ce qui lui étoit du ,
môme 30 livres d’intérêt de plus que ce qui lui étoit
du. (
Les conventions font les Loix , & ce n’eft pas
( a ) Pour qu’ on ne puifTe pas critiquer ce que j’avance , je l'établis
par le compte que fit le fieur Defoches dans l’a&e inftrumentaire du
i l Juin d ern ier, dont voici les cxpreifions.
Il
déclare qu’il lui étoit du lu Jbmrnc de z z j o livres , montant de ladite
lettrede c/iu/ig-«, ( je n’avois reçu que n o o l . ) , c y , . IZ30 1.
Pour les intérêts de ladite fomme principale, dcduïïton faite des vingtièmes £t deux fols pour livre ,
celle de 5 7 livres i j fols , c y ,
.
.
.
.
57
1 7 f.
Pour fra is faits jufquà Femprifonncment, excluftvcmcnt
livres 1 7 Joîs g deniers, c y ,
.
.
34
17
9 à.
Toutes lefquelles Çommes revenant t) celle de t J
2-2,
—
*
.......... '—
"■■
■
-
¡ivres 14. fols çf deniers, cy ’,
.
.
.
• 1 3 1 1 1. 14. f. ç d.
Sur laquelle fomme le fieur Defoches déchire avoir reçu en deux dijférentes fo is , ( en Jan vier 1772.. ) par les mains du Jieur Arny $ 3 livres ,
partant il lui refie encore dû celle de tZ-Zÿ livres 1 4 Jols ,9 deniers, &
à r infant ladite Dcmoifelle Duijfon, {femme de Me. Barthelmy, ) ayant
�a moi qu’on peut faire le reproche , que celle par la- .
quelle le fieur Defoches s’eft autorifé à retenir les 30
livres , eft contre les bonnes mœurs ; mais en payant au
fieur Deioches ce qu’il avoit droit d’exiger de moi ,
ai-je renoncé à. ce que j’avois droit d’exiger de lui ,
ces objets n’étant pas dans le'çâs de la compensation ?
J ’ai payé une fomme que je devois, & j’ai fait des
referves expreiles & réitérées de ce qui m’étoit dû ;
je les ai expliquées; c’eft la réparation de l’injure'&
du tort qui m’a été fait par le fieur Defoches, ;'j’étois
en inftance en la Cour pour raifon de ce fait, je me
fuis réfervé la fuite de cette inftance ; l’a&e notarié du
2-2, Juin en contient la preuve à chaque page.
Dans cette inftance j’attaquois faite du 1 1 JuiiVcornnie nul & vexatoire , je m’étois réfervé
dans mes
requêtes en la Sénéchauifée, & dans.celles en l a d o ü r , 7
de me pourvoir en infcription de faux; mes droitsfont:
mta&es à cet égard , je dois être reçu à cette pourfuite.'
Je vais plus loin, &: joignant ici la lettre que ¡ ’écri
vis au fieur Defoches à la quittance qu’il m’a fo u rn i,4
je foutiens que ces deux pièces, fuilent-elles approba->'
tives de l’a£te en queftion , je ne ferois pas moins enx‘
droit de l’attaquer par infcription de faux ; j’en tiré la •
preuve de l’article a du titre 2. de la mêmcvOi*doh^\
nance de 1 7 3 7 , qui veut que la pourfuite! d ù rrfaüx •
incident foit reçue, encore que les pièces prétendues fa u fH.
confcnti que ledit fieur Defoches reçoive ladite fomme de
livres
f ° t s 9 deniers , auxdites conditions & fous toutes ces protefla tidns Çf refer- ■
vr cs » & en exprès de fes dommages intérêts à raifon £ emprifonnement dudit 1
peur Uarthelmy, frais & dépens ; ledit fieur^Defoches , jous les mîmes reJerves & protejlations contraires, a reçu préfentement ladite fomme de'
1
livres z/j. fols 9 deniers, dont quitte d'autant.
.
�***
1^
1 6-
Jès ayent été vérifiées , menu avec le demandeur en
fa u x , à dautres fin s que celles d'une pouifuite de fa u x
principal ou incident , & que même en conféquence il
ioit intervenu un jugement fur le fondement defdites
pièces comme véritables.
Quant à la lettre du n Ju in , je fuis fnrpris que le
fieur Defoches en ait fait ufage ; elle dément les quali
tés d’indulgence , de bonté & de bienveillance dont il
fe pare; j’y inférai des expreflions propres à toucher le
prêteur le moins humain , .le plus infenfible, elles frap
pèrent fur l’airain , je ne pus rien obtenir, pas même
le confentement du fieur Defoches à la vente que je
lui propofai de ma Maifon & de mon Office, pour en
emplpyer le prix à l’acquittement de fa créance.
Cette lettre enfin peut-elle être prife pour approba
tion du prétendu procès verbal ? j’ai articulé dans un
temps où elle n’avoit pas repafle fous mes yeux, lavoir
dans ma requête du n Juillet dernier quelle avoit été
écrite ' au moment même de mon entrée dans les prifons ,
& quelle fu t même remife au fieu r Defoches , une heu
re au moins avant que le procès verbal maintenu fa u x
eut été drejfé , à menie une heure avant que Barbet à
les deux Records , fe s ajjifiants , eujjent paru dans les
piifons. A ujourd’hui
après la communication que
j ’çn -ai prife , je prouve le fait par écrit. L a lettre
eil datée de quatre heures du foir, & le procès verbal
ne fut dreile qu’à iix heures , c’efl prouvé par l’aile
inilrumentaire fait aux Huiifiers dans le temps même
qii ils étoient occupés à écrire , porte l’aile. O r une let
tre écrite à quatre heures après midi peut-elle être prefentée comme approbation d’un a£lc écrit à fix heures
de la même foirée ?
¿J'o*
�x7
4°. Enfin on avance comme certain qu’il y a de Villufion dans les énonciations prétendues fauflès & pour
raifon defquelles je me luis pourvu.
L e développement qu’ont fait le fieur Defoches &
Barbet de cette objection iinguliere , annonce afïèz
combien leur caufe eft déplorable; ils ont avoué l ’un.
& l’ autre en plaidant, que dans le vrai Barbet n a aff if t i ni à la capture , ni à la conduite , ni à VempriJonnement , mais feulement à la rédaction du procès ver
bal qui ejl de f i n ja it ; ils m’ont cependant foutenu
non recevable à m’inicrire en faux , fous prétexte qu’il
eft indifférent par qui que ce foit que j’aye été faifi,
l’ayant réellement é té, & qu’il feroit impoifible - de
trouver que Barbet n’étoit pas à cette expédition miitaire.
Peu d’attention fufEt pour faire appercevoir que*
mes adverfaires cherchent ici à éluder la diipofition de
l’article 38 de l’ Ordonnance de 1 7 3 7 > & à fe faire
communiquer, contre la prohibition de cette l o i , les
moyens de faux quej’ai h oppofer au procès verbal ,
& dont j’ai déjà été forcé de découvrir.une partie. Mais
fans entrer dans le détail du lurplus de ces faits, qui
étonneroient le Public & irriteroient la Juftice, j’exa
mine &. je détruis le prétexte de mes adverfaires.
J ’ai la preuve que les HuifTiers qui m’ont faifi n’avoient pas de titres &: ignoroient ce qu ils faifoient ;
cette preuve eft écrite dans l’a&e inftrumentaire fait à
Barbet le 1 1 Juin , dan? lequel il déclara que c’étoic
lui qui avoit les pouvoirs, ce fait étoit v r a i, il les
avoit reçu un quart d’heure avant des mains du fieur
Deioches.
'
O r il eft de principe que les HuifTiers ne peuvent
Î
C
�i8
exploiter , & encore moins faire des a£tes de la dernîere rigueur fans être porteurs de pouvoirs ; ii je prou
v e , par la pouriuite de l’inlcription de faux, que mon
empnlonnement, fous quelque face qu’on veuille l’envifager , n’eft pas du fait de Barbet non plus que de
fes Affiliants , il réitéra qu’il eft feulement du fait des
trqis Huiffiers que j’ai nommés, d’où rélultent deux
nullités : la premiere fondée lur notre Coutume qui
ne permet pas que des Huiiliers fe prêtent ainfi les
mains : la leconde fondée fur la circonftance avouée que
le fieur Defoches n’avoit donné aucun pouvoir à ces
Huiiïiers. D ’où j’irai plus loin , me trouvant à même
dès-lors d’indiquer celui qui leur avoit donné l’ordre
de me deshonorer. Il n’eit donc pas indifférent de favoir par qui j’ai été faiiî, & ma pourfuite en faux in
cident devient intéreilànte.
C ’eft bien inutilement que Barbet veut exciper des
énonciations du procès verbal nous avons ; il eft vrai
qu’il applique le nombre pluriel dans fon procès ver
b a l, mais feulement en parlant de lui & des deux
R e c o rd s, fes témoins , qui n’étoient pas à l’expédition,
on ne voit pas qu’à l’endroit où fe trouvent ces exprcifions il foit aucunement queftion des trois Huiiliers.
E t dans tous les autres endroits du procès verbal Bar
bet parle en fon nom feul. J e l ’ai d'abondantJbmmêy
& c , de payer audit , . . . ou à moi H u iJJier , & c . J e
leur ai à chacund ,eux , . . & c. D ’ailleurs peut-on com
battre l’infeription de faux par la pièce même mainte
nue fauilè ?
Dire qu’il feroit impoifible de prouver que Barbet
n ’étoit pas à l’expédition, c’eft un moyen miférablc :
qui. le fait eft négatif, mais il peut être conftaté par
�2>2>7
Ï 9
des faits pofitifs, & principalement yar celui-ci, bien effentiel a remarquer que le fieur Defoches n’a vu Barber,
& ne lui a donné de pouvoir qu’après mon emprifonnement; que mon cmprifonnement en un mot n e ij
pas du fait de cet HuifUer.
Ce fait, que mon emprifonnement n’eil aucunement
du fait de B a rb e t, eit déjà prouvé par Barbet même,
il fe tire d’une contradiâion groiïiere qu’il a fait
plaider à la derniere Audience, preuve indubitable
de l’impofture ; pour colorer fa conduite, Barbet iourint à la derniere Audience, qu’il avoit pofte lui-mêfïïechezTouvain les Huiifiersquimefaiiirent, & qu’ il s’étoit placé à la porte de M ontjoly comme au guer.
Il paroît qu’il ne connoît pas le local; de la porte
de M ontjoly on voit iàns obftacle celle de l’auditoire
de Chamalieres, & celle du çabaretier T ouvain , d’oii
fortirent les Huiifiers qui me faifirent près de la Salle
¿ ’Audience, à dix à douze pas de la porce de M ontjo ly ; ma capture caiifa une rumeur qui raiïembla tout
le V i ll a g e ; Ôi Barbet, fous les yeux duquel le tout fe
feroit paifé, n’auroit rien apperçu , ou témoin de la
fcene il n’y ieroit pas accouru pour y jouer un des
premiers rôles, lui qui prétend avoir eu les pouvoirs;
il auroit vu que l’on me conduiioit h l’inllant , & il
ne fe ieroit rendu aux priions que deux heures après
ma capture.
Ce que je dis cil il fufceptible de réponfe ? & que dev >enncnt d’après ces raiionnements les obje&ions de
nies adverfaires? je luis recevablc à m’inferire en 'faux
c cil d’évidence. La feule fin de non recevoir qui s^clevc frappe contre leur oppoiition , elle s établit fur les
nicmes moyens par lcfqucls j’ay réfuté celles qu’ils
m oppoibient.
C i
�Cette fin de non recevoir frappe plus fenfiblemen&
encore contre la demande de Barbet ; ion crime i’ in
quiété , il hazarde de m’arrêter dans les démarches
que je fais pour le démafquer ; le faux qu’un foraide
intérêt lui â fait commettre, lui paroît facile à cons
tater, il redoute la démonftration que produiroit l’infcription de faux incident, c’eft par cette raifon qu’il
s’y oppofe, & il a le front de demander des dom
mages intérêts, fans doute on le fait parler à fon infçu , il n’eft pas concevable qu’il pût fe duper ainfi
lüi-même.
' A l’égard du fieur Defoches, la pièce dont eft
queftion, doit être rejettée de la caufe , c’eft l’ Ordonnance de 1 7 3 7 qui le prononce : le défendeur, por
te l’article 1 1 du titre z , fera tenu dans ledit délai
( de trois jours ) de faire j'a déclaration précife s’il en
tend ou 5’il n entend pas f e fe iy ir de la pièce mainte
nuefi-ujje ; le fieurDefbches, dans l’embarras où le mettoitlaconnoifTance qu’il a du faux du procès v e rb a l, ne
s’eft expliqué ni pour le foutenir ni pour l’abandonner.
M ais___faute par le défendeur , ajoute l’article 1 1 y
d yavoir jatisfait à tout ce qui ejl porté par Farticle
précédent, le demandeur en fa u x pourra fe pourvoir
ci VAudience pour ja ire ordonner que la pièce main
tenue faujfe fera rejettée du procès par rapport au
défendeur. Je fuis donc en droit de demander le rejet
de cette pièce , j’y ai expreiTément conclu , & ma
demande ne peut éprouver aucune difficulté.
rL c procès verbal de capture ôc d’emprifonnement
ainii écarû , il ne s’enfuit pas que je n’aye pas été
enfermé dans les priions; c’cft en joignant la déri-
�iîon à rinjuftice; que le fieur Defoches a glofé fur.
ce point a la derniere Audience ; j’ai été traduit dans
les priions, mais feulement par un coup de force , &
non par autorité de la l o i , c’eft une avanie & un
affront fanglant que mes ennemis m’ont fait faire fous'
le nom de mon créancier , c’eft ma perte que l’o n ,
méditoit & non le payement de ce que je devois au
iieur Defoches.
{
L a loi, en rejettant'cc procès veVbal.comme faux ,
Jappe par les fondements la Sentence dont eft appel, .
qui n’avoit d’autre baie que cet a&e illufoire dans
toute la force du terme.
C ’eft fur cette pièce que les premiers Juges ont fon- !
dé leur décifion, malgré les nullités évidentes qu i‘en ‘
annonçoient la fauflèté , ôtqui auroient du bleffer leurs ,
regards; nullités qui dévoient faire proferire comme
indécent, irrégulier & vexatoire l’a&e que la pourfuite
d’infeription anéantit comme faux.
t
Je ne m’arrête pas au défaut de conftitution de. Procureur devant le Juge ordinaire, fi récommandée par '
les Règlements , 6c cffe&ivement fi eflèntielle dans des
a£les de cette cfpece ; plus les pourfuites lont rigoureufes, plus elles doivent être exactes, plus on doit donner
au défendeur les facilités de fe pourvoir par les voies
de droit. L e demandeur doit toujours être prêt à fè
défendre , & conféquemment indiquer fon Procureur ,
dans le tribunal oii les conteftations peuvent être
élevées. C ’cft l’eiprit des Ordonnances , & même la
difpofition textuelle de tous les Règlements' qui ; ont
trait à cette matière ; c’eft par ce moyen que le fieur
Gallien, d’Iffoire, obtint des dommages intérêts confiderables, au mois de Mai dernier, contre uUde-fcscican'. '
�ciers. légitimes, à la requête duquel il avoit été tra
duit dans les priions de la Sénéchauiïee , d’ A u vergn e,
par B o yard , l’aîné , Huiiîier en cette V ille , qui s’étoit
contenté de conilituer'Procureur à la Coniulaire.
" Mais qu’efl-cè qirunc irrégularité de procédure aux
yeux de ceux qui ne craignent pas d’enfreindre la fauvegarde prononcée par la Coutume &: les Loix ? J ’ai été
faiii au moment où, j’allois exercer mes fondions com
me Procureur d’Office,' & défendre mes intérêts com
me particulier, ces faits ne font pas conteftés , & pouvoient-ils l’être ? 'D’un côté je rapporte les dofïiers des
affaires qui me font perfonnelles, ÔC dans lefquelles on
trouve dès form ations du commencement de Juin , à
verïir,plaider à,la première Audience; l’une étoit con
tre le norhme Girard , ,Meunier à Chamalieres , elle
a été terminée depuis; l’autre contre Jacques Chaput,
Meunier à R o y a t , elle cil indécife ; d’autre part les
régiilres dn Bailliage de Chamalieres, qui conduifcnt
dès temps les plus reculés jufqu’a nos jours, conflatent
que. les Aiîifcs. des Jüiliciables de ce Bailliage fe tien
nent le 1 1 Juin , fur les trois heures 6c demie ou en
viron ; c’eil à cette heure qu’elles dévoient être & ont
été tenues cette année , elles fe font rencontrées au jour
de l’Âudiencc; les Vaifcaux & les Plaidants avoient
été appcllés par la cloche ordinaire, torique le Bailli
me fit avertir par Palliet ; le cer ificat du Greffier l’an
nonce. C ’eil à la porte même de la falle que je me
vis aifailli ; le procès verbal d it , fur La place publique ,
près du Château, c’eil l’auditoire même ; ce 11 a cette
entrée que'les Huifliers parurent encouragés par quel
que génie courroucé, & d’autant plus hardi, &c déter
minant qu’il étoit inviiible ; étoit-il libre au iieur
�Defoches , étoit-il décent à mes ennemis de me faire
faiiir à cet inftant ? les Lo ix générales, la Coutume de
cette Province, íes voiíines, la Juriiprudence 6c les
Auteurs répondent pour moi ; j’y renvoie le fieur
Defoches , il me refte à peine ailez de temps pour les
citer, mais je me réferve d’en faire voir les fondements,
& d’en faire développer les conféquences par la plaidoierie.
Quique litigandi caufa necejje habet in jure vel certo
loco fijli. . . . . . in jus Jin e permijjii meo ne quis vo, l. 4 , ff. de in jus vacando.
C ’eft fur le fondement de cette L o i , & de la né^ ceiïité de faire reipe&er la juftice, que l’Ordonnance
de 1 5 7 1 défend , fous les peines les plus griévcs, d'ou
trager ou excéder les Officiers de Juilice.
» Les allants devenants 'es foires & marchés pu» blics,ou en Cour, pour expédition de leurs c au les ,
3> dont ils feront crus par leur ferment, lie doivent
» être pris ni arrêtés, ni détenus en corps 011 en biens
» pour aucunes dettes ou matière civile. » Article 62 du,
titre des exécutions , & c. Sur quoi le procès verbal,
dans le détail des articles de la Coutume admis en'droit
écrit, s’exprime ainii : tout Ledit titre des exécutions y
y entes &JiibhaJlations 5 memement le Cze. article d!icelui
titre.
.
L ’atticlc 1 3 3 de la- Coutume du Bourbonnois, <Sç.
larticle 400 de celle de la Marche , ont des difpoii-,
tions femblables à la nôtre.
Il fut rendu Arrêt au Parlement de Paris lç dernier.
Décembre 15 6 3 v par lequel un. Huiflicr .qui avoit
emprifonné avec fcandalc un Prêtre qui ..vcnoit de
chanter-, fut condamné en l’anlcnde envers le lloi', 6p
�>
/ K
^
à des dommages intérêts envers la partie. 11 eft ra p
porté par DesbroiTe & Brilion , & c.
•L/ôn trouve cité dans les ouvrages de ces Auteurs
un autre Arrêt du même parlement du 26 N o vem
bre 1 6 8 0 , qui prononce les mêmes condamnations
contre un HuiiTier qui avoit emprifonné un Curé
le lendemain de N oël ; &Boniface en rapporte un du 9
A oût 16 4 1. qui cailà l’emprifonnement qui avoit été
fait d’un Soldat pour dettes civiles.
Il eft rare de voir enfreindre les réglés par des coups
de vexation de cette nature ; nous ne voyons pas que
ce fait foit arrivé depuis long-temps, mais lee Auteurs
nous aiTurent que la même décifion feroit prononcée.
Prohet, fur l’art. 6 1 du titre 24. de notre Coutu
me , dit qu’il eft exécuté, même nonobftant tous les
privilèges que pourroit avoir le créancier, & qu’il a été
ainfi jugé , lui plaidant, pour un débiteur de fermages.
Auroux des Pomiers, iur l’art. 1 3 3 de la Coutume
de Bourbonnois , s’explique d’une maniéré à ne pas
permettre de douter que ces maximes ne doivent être
& ne foient en vigueur aujourd’hui.
» A u refte , dit i l , le même privilège qui eft accor5> dé à ceux qui fréquentent les foires cfi o&royé par
» notre Coutume au préfent article , & par celles d’A u» vergne & de la M arch e, aux articles cottés confor» mément à la loi q u iq u e l i t i g a n d i , à ceux qui vont
» en jugement ou en Cour pour l’expédition de leurs
» caufes , &c toutes veulent que ces allants & venants
» aux foires ou en jugements foient pour raiion de
» cette venue crus à leur ferment. »
Le ficur Defoches me difpcnfc de faire le ferment,
les faits que j’articule font prouvés par écrit. M e ren
dant
�^>4
^
•
dant à l’audience pour folliciter le jugement de mes
affaires perfonnelles , je ne pouvois pas ctre ia ifî, &
on croit bien moins en droit de me faifir, confidéré
comme me rendant à la continuation de mes fondions
de Procureur d’Office.
Comment les premiers Juges ont-ils donc pu fe
déterminer à rendre la Sentence dont eft appel ? je
ne penfe pas que l’obje£Hon faite par le fieur Defoches, que je ne fus pasfaifi en robe, leur ait fait impreffion, ils font initruits que jamais les Juges de Chamalieres n’ont exercé leurs fondions en robe , ÔC
d’ailleurs j’allois à l’Audience, & les règlements n’o
bligent pas d’aller ou de venir en robe. Les pre
miers Juges fe font décidés fans doute par l’alléga
tion indifférente d’un A rrêt qui a confirmé l’emprifonnement d’un Juge pris en robe ; il en auroitété
autrement, s’ils en euifent confidéré l’efpece , là il s’agifloit d’exécution d’Arrêt rendu à la Tournelle , 6c
il n’ étoit queiHon à mon égard que d’une dette civile.
Que le procès verbal d’emprifonnement foit cafie
comme nul & injurieux, ou qu’il foit anéanti comme
faux, alternative nécciïàire , je dois obtenir des dom
mages intérêts contre le iicur Defoches , & j’en fais
l’obfervation pour diiïiper l’eipérance qu’il s’étoit for
mé en mettant Barbet en caufe, de me faire pren
dre des conclufions contre ce dernier; ce n’cft point
Barbet qui m’a faiii & emprifonnc, il n’a trempe
dans cette affaire que pour commettre un faux ; ce faux
m autoriferoit à l’a&ionner lui-mcme , mais je puis me
borner au lieur Dcioch es, faclum judicis 7facïum partis ;
�à plus forte râiion le pourfuivant doit-il répondre du
fait de ion agent ; cette raifon 6c l’iniolvabilité des
A u teu rs, ou pour mieux dire des exécuteurs de ma
capture, m’ont empêché d’aifigner les trois Huiiïiers
qui ont agi par les ordres de mes ennemis.
A quelle iomme la Cour fixera-t-elle ces domma
ges intérêts , je m’en rapporte à ia juftice , à laprudence ; elle connoît la perte que j’ai eÎTuyé, l’injure que
j’ai fouffert 6c le motif de la vexation. On a porté
coup à ma liberté comme citoyen , lorfque fous la
fauve-garde de la Coutume 6c des Loix , j’allois follicitcr le jugement de mes caufesperfonnelles : lorfque
je faifois tout ce qui étoit en moi pour me procurer
les moyens de fatisfaire mon Créancier. Comme P ro
cureur d’Office j’ai été arrêté dans le moment où je
me rendois à mes fondions, à la porte du Tribunal
de la Ju ftic e, dont j’allois demander l’exécution des
décrets. O n a particulièrement choiii cette circonilance , on en a certainement tramé le projet ; tous les au
tres jours 6c à chaque inftant du jour on auroit pu
me faire faiiir d’une manière moins éclatante 6c moins
ignominieufe ; mais on chcrchoit à m’outrager, à m’humilier , à m’avilir aux yeux de tous ceux fur la con
fiance dcfquels cil fondé mon état ; on attend le mo
ment où tous les Vaifaux 6c tous les Jufticiables du
Bailliage de Chamalicres font aiîemblés ; on me laiflè
placer au milieu d’eux à la porte de l’auditoire, c’eft
alors qu’on s’oppofe à mon entrée , pour me faire pré
fumer indigne d ’entrer dans le ianétuaire de la Ju fticc;
on me tait enlever du milieu de mes clients, pour leur
fuggércr qu’ il ièroit dangereux de me laiiler vivre avec
gux ; tout le peuple à dû me croire criminel, c’eft ce
�2\^
dont on vouloit le perfuader ; & qui ne l’auroit ima
giné, me voyant brutalement traîné par trois H u iffiers
inhumains, dans lefquels les ordres de mes ennemis
avoient éteint la fenfibilité même la plus groffiere ?
on affecte de me faire traverfer les lieux les plus peu
p lés, & dans chaque carrefour, à chaque pas on me.
tient immobile pour donner le temps à la populace
de voir mon humiliation, & la frapper affez pour
lui faire rappeller de l’ignominie dont elle me voyoit
couvert. Hélas ! l’obfcurité des prifons fut un foulagement pour moi, jufqu’au temps où le fieur Defoches,
rejettant les proportions honnêtes que je lui fis, &
dédaignant les furetés que je lui préfenta i , fit fceller
la vexation par un faux. Le peuple ne pénétre pas le
fond des chofes, le bruit le frappe, les apparences le dé
cident; il me croit criminel depuis qu’il m’a vu traité en
fcélérat; la confiance qu’il avoir en moi formoit cepen
dant mon état. J ’ai donc perdu à la fois ma fortune &
mon honneur ? & c’eft le fieur D efoches, qui, pour obli
ger mes ennemis, m’a caufé cette perte irréparable ; tout
s’intéreffe à ma vengeance , je la demande à la C o u r ,
&
je l’attends de fa juftice.
Si gné, B A R T H E L M Y .
M. D U F F R A I S S E
Avocat Général.
J
A
C L E
D E
o u r d a n
R M
V E R N IN E S ,
, Procureur
O N T . F
E R R A N D ,
l'imprimerie de P i e r r e
V I A L L A N E S , Imprimeur
du Roi , près l ’an cien Marché au B le d . 17 7 2 .
des
Domaines
*
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Barthélémy, George. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barthélémy
Duffraisse de Vernines
Jourdan
Subject
The topic of the resource
juridiction consulaire
notaires
destitution
lettres de change
prison
assises des justifiables du bailliage de Chamalières
fausse coutume
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
huissiers
dommages et intérêts
diffusion du factum
opinion publique
arrestation publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Maître George Barthelémy, notaire royal, et procureur d'office au bailliage de Chamalières, appellant, demandeur et défendeur. Contre sieur André Desoches, entreposeur des tabacs en cette ville de Clermont-Ferrand, intimé et défendeur. Et contre Pierre Barbet, huissier en la Cour, intervenant et demandeur.
Table Godemel : Emprisonnement. Si l’emprisonnement est nul, injurieux et vexatoire pour avoir été effectué en foire au moment où l’emprisonné, officier public, se rendait à l’audience, est-il dû des dommages intérêts ? une inscription de faux incident contre un procès-verbal d’emprisonnement, a-t-elle pû être faite sur simple requête ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
Circa 1770-1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0612
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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arrestation publique
assises des justifiables du Bailliage de Chamalières
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
destitution
diffusion du factum
dommages et intérêts
fausse coutume
huissiers
juridiction consulaire
lettres de change
notaires
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53389/BCU_Factums_G2019.pdf
5d2a2e52634a1a685c1173f629959c9f
PDF Text
Text
U
7
MÉMOIRE A CONSULTER,
V<wuC" *
POUR
A n t o i n e ,
J e a n
¿».■a»«.»«
et L o u i s - X a v i e r - S i l v a in
GOM ICHON, appelans, et demandeurs en garantie;
C O N T R E
F r a n ç o is e
G O M IC H O N , veuve, de Pierre
intimée
ET
Jea n
et
Joseph
et G u i l l a u
en garantie.
ENCORE
Depeyre,
CONTRE
D E P E Y R E , N ..... D E P E Y R E ,
m e
A R M E T , son mari, défendeurs
TABLEAU
G ÉN ÉA LO G IQ U E.
G r é g o ire G o m ich o n ,
m o rt en 172 0
à
Catherine A u g ier.
Jean,
n é en 16 9 7,
m ort en 172 7 ;
à
F ra n ço ise B o n te m ,
m o rte en 1733,
S ilv a in ,
A n to in e
n é en 1702.
n é en 1699,
m o rt e n 174 8 :
i
P é tro n ille C u ssat,
Jean,
)Françoi»o,
M a rie L a fo n t,
In tim ée,
n é e en 1737»
m a rié e en 175 3 ,
à
,i
>■Pierre Depeyre
I
.• Antoine.
J ean.
l.o u is-Xavier-Silvain.
Appelans
Catherine, Jean. J o
s
e
p
h
_
Guillaume Armet,
.:
�(¡n-
C2 )
F A I T S .
J e a n G o m i c t i o n , premier du n o m , est décédé en 1 7 9 7 ,
laissant en minorité un fils appelé Jean , com m e son pére.
Silvain G om iclion, son oncle paternel, fut nommé son tuteur.
Jean G o m ic lio n , deuxième du nom , étant parvenu à sa ma
jorité, forma demande contre ledit Silvain, son o n c le , en red
dition de compte de tutelle, par exploit du 23 janvier 1745.
1 Cette demande fut portée devant le châtelain de Montluçon.
I.e 24 mars suivant, Jean Gomiclion obtint une semence par
d é f a u t , qui condamna Silvain Gomichon à rendre le com pte
demandé ; et à défaut de c e la ire , le condamna a payer la soinmô
de 3ooo francs , intérêts et dépens*
Silyain Gomiclion décéda le xo juin 1748 , laissant une fille
m ineure, appelée Françoise Gomichon.
L e 21 du mëine mois, Jean Gomichon fut nommé son tuteur.;
Il n’avoit que vingt-deux ans.
Il obtint, îe 11 juillet 17491 des lettres r o y a u x , pour étro.
relevé de différens actes qu’il avoit faits en minorité, et entre
autres de l’acceptation de cette tutelle.
Il ne paroit pas que Jran Gomiclion ait donné suite h ces
lettres : il paroit m ê m e , au contraire, que Françoise Gomichon
ayant contracté mariage avec Pierre D e p e y r e , le 21 novembre
17 5 5 , Jean Gomichon a paru au contrat par fondé de pouvoir,
en qualité de t u t e u r de ladite Françoise Gomichon.
Q u o iq u ’il en soit, le 8 juin 17^8, D ep eyre a donné assignation
h Jean Gomiclion devant lt; châtelain de T re jg n a t, pour rendre
compte de. la gestion qu’ il avoit eue des biens de Françoise Gomiclion , sa femme.
^
Jean G o m i c h o n , de son c u t é , à qui il étoit du un semblable
compte par la succession de Silvain G o m ich o n , se pourvut de
nouveau par exploit des #4 et 3o juillet 1768, et conclut contre
Françoise Gomichon ? Cl Pierre D e p e y re , son m a ri, à ce que la
�Q*6
( 3 )
sentence du 2% mars 174^, qui ordonuoit la reddition de c e
compte de tutelle, et à défaut de c e , condamnoit Silvain Gom ichon au payement de la somme de ¿>000 fr a n c s , pour tenir
lieu de reliquat, avec intérêts et dépens, fut déclarée exécutoire
contre la femme D e p e y r e , comme elle 1 étoit contre Silvain
G o m ic h o n , son père ; qu’en conséquence elle fut condamnée à
payer la somme de 3ooo fr a n c s , avec intérêts et dépens.
En m êm e temps Jean Gomichon se mit en règle sur la de
mande en reddition de compte de tutelle de Françoise Gomichon
et de son mari.
C e compte fut rendu juridiquement le i 3 août 1769; et Jean
Gomichon établit qu’au lieu d’étre débiteur de sa pupile, il étoit
son créancier : et il étoit difficile que cela fût autrement, Silvain
G om ichon ayant fait de très-mauvaises affaires , au point qu’il
avoit été emprisonné pour dettes, qu’il étoit mort peu de temps
après s’étre évadé des prisons, et que Jean Gomichon ayoit été
obligé de liquider sa succession.
Françoise Gomichon et son mari fournirent des débats sur co
co m p te, le 25 du m ême mois d’août, et les choses sont restées
dans cet état jusqu’au mois de juin 1763.
A cette époque , Jean D e p e y r e , qui habitoit dans la haute
Auvergne , près de S t.-F lo ur, vint en Bourbonnais ; des amis
et parens communs cherchèrent à concilier les parties ; et par
le résultat de leur m édiation, il fut passe une transaction sur
p ro cè s, le 22 juin 1763.
D ep eyre y stipule ta n t en son nom qu’en qualité de mari et
maître des droits et biens dotaux de Marie-Françoise Gomichon,
fia f e m m e , absente.
O n y rend compte de la tutelle qu’avoit eue Silvain G om ichon ,1
de laipersonne de Jean G o m ich o n , son neveu, et du jugement
de 1745, qui condamnoit ledit Silvain à rendre compte de ladite
tutelle; i\ défaut de c e , le condamnoit à p«yer
3° 00
fr* > ayeo
intérêts et dépens.
A a
�r 4 )
On y rend aussi compte de la tutelle! rpravoît eue Jean Goxniclion , de Françoise G om ich on, fille à Si)vain ;
"»
D e fa reddition juridique de ce dernier c o m p te , par lequelr
Jean Gomichon s’étoit pi étendu créancier au lieu<d’ëtre débiteur,,
et
'
«
<c
des débats fournis sur ce compte.
« Toutes lesquelles demandes et poursuites, est-il ajouté ,■
metroient les parties dans le cas d'avoir p l u s i e u r s ' sentences et
arrêts de la Cour de parlement, qui auroient pu occasionner
a la perte totale de leurs b ie n s, pour à quoi obvier, et é viter
« les inconvéniens iaclieux qui auroient pu en résulter, et rnain« tenir la paix et l'u n io n , elles ont été conseillées de traiter et
* transiger sur le tout, ainsi et de la manière qui suit. »
Pierre D f p e y r e , stipulant com m e il a été dit en tète de P a c te ,
S u b roge Jean Gomiclion à to u s les d roits revenons h sa fem m e,
sans e x c e p tio n , moyennant la somme de 600 francs , stipulée
payable en quatre termes, sans intérêts pendant les termes.
A u moyen de quoi les parties se tiennent mutuellement quittes,
et tous procès demeurent éteints et assoupis ;
« E t les p a rtie s, à V exécution eh entretènem ent de to u t co
<c que d essu s, ont respectivem ent obligé , ajfectè eL hypothéqua
« tous leurs lie n s présens e t à v en ir. »
L es choses sont restées dans cet état jusqu’au iG avril 1787.
A cette époque , Jean Gom ichon étoit d é c é d é , laissant ses
enf'ans en minorité sous la tutelle de Marie La font, leur mère.
I ,i erre D cpc.yre, e t M arie-Françoisc G o m ic h o n , sa fe m m e ,
firent signifier la transaction dn 22 juin 17G5 à Marie L n fo n t,
en celte qualité de tutrice de ses enfans m ineurs, et ils l’assi
gnèrent en m ême temps pour voir déclarer cette transaction
exécutoire contre e l l e , audit, n o m , comme elle 1 étoit contre
ledit défunt Jean Gom ichon ; en conséquence, se voir condamner
ii leur payer la somme de Goo fr. portée par ledit a c t e , ave c lea
Intérêts et frais.
JLt l’année suivante, le jf) avril 1788, Antoine Gomichon,
�&Z q
( 5 J
l ’un des appelai« , se transporta à Murât ; il Et compte avec
Françoise Gomiclion de tous les intérêts du capital de Goo f r . ,
dûs e t échus jusqu'au jour, qui se trouvèrent monter à une
somme pareille de 600 fr; , et Françoise Gomichon lui en donna
quittance tant en son nom propre et privé , que comme fondéo
de procuration de son mari.
D e u x ans après cette quittance, et le 3o juillet 1790, Pierre
D ep eyre est décédé à Bayonne.
E n 1793, et le 9 m ars, Françoise Gomichon a , pour la pre
mière f o i s , conçu l’idée de rechercher sa famille du Bour
bonnais.
Elle a pris pour prétexte une prétendue succession d ’un Antoine
G o m ich o n , oncle et gran d -o n cle c o m m u n , q u e lle supposoit
décédé à Passy près Paris ;
Elle a fait citer en conciliation Marie L afon t, veuve de Jean
Gomichon t sur les différentes demandes rju’elle se proposoit
de form er, soit en partage de cette succession,
Soit en nullité de la transaction du 22 juin 1760,
Soit en reddition et règlement du compte de tutelle qu’elle
prétendoit lui être dû par Jean Gomichon , e t de c e lu i q u ’elle
poiH’o it devoir du c h e f de f e u Silvam G om ichon ,
Soit en désistement des biens provenus de ses père et m ère,
avec restitution des jouissances, avec intérêts et dépens.
Cette citation a été suivie de procès verbal de n o n - c o n c i
liation , et d’assignation au tribunal de Montluçon , en date
du 5 septembre suivant.
Cette action ne fut poursuivie par la veuve D e p e y re , que
jusqu’au mois messidor an 2.
Silence absolu depuis cette époque jusqu’au mois de frimaire
an 9.
Elle fit alors une première tentative en reprise, qui fut annullée par jugement du tribunal de Montluçon ; et elle fu i
condamnée aux dépens.
�( 6 )
Elle forma une nouvelle action en reprise , au mois messidor
an 11.
Les parties s’occupèrent alors principalement de la succession
d’Antoine Gomichon , oncle et grand-oncle c o m m u n , qu’elle
prétendoit être décédé à Tassy près P a r is , dont la veuve D epeyre demandoit le partage.
O n lui opposa que pour demander le partage d ’une succession,
il falloit établir, i°. le décès de l’individu de c u ju s ;
2°. Q u ’il n’avoit pas laissé des héritiers plus proches ;
3°. Q u ’il avoit laissé une fortune quelconque.
O n ajouta qu’il étoit de notoriété qu’Antoine Gomichon avoit
jadis entrepris un com m erce de bœufs , qu’il y avoit fait de
mauvaises affaires, et que se voyant accablé de dettes, il s’étoit
expatrié pour se soustraire aux poursuites de ses créanciers.
L a veuve D epeyre , convaincue par ces raisons , se rendit
justice : elle se départit de son action ; et un jugem ent contra
dictoire , du 5 ventôse an 12, donna acte de ce département,
et ordonna que les héritiers Gomichon défendroient au fo n d ,
dépens réservés.
Cette réserve des dépens est un peu étonnante, d’après le d é
partement prononcé juridiquement de l’action principale q u i,
jusqu’a lo r s , avoit occup é les parties ; mais ce qui est encore
plus étonnant, c ’ est que les héritiers Gomichon ont été con
damnés depuis à ces mêmes dépens , com m e op. le verra par
la suite.
Q uoi qu’ il en soit, les parties ont ensuite procédé sur l’objet
cle la contestation relatif h la transaction du a2 juin i j Gj , dont
la veu ve D e p e y re demandoit la nullité.
Les héritiers Gom ichon l’ont soutenue non recevable dan9
cette demande en nullité , attendu qu elle avoit ratifié cette
transaction , soit par la demande qu elle avoit formée conjoin
tement avec son mari, le iG avril 1787, tendante à faire déclarer
r;ctto transaction exécutoire contre les enfans Gom ichon, conunç
�(7 )
elle l ’étoit contre leur père, soit par la quittance notariée du 19
«avril 1788, de tous les intérêts du prix de la transaction, échus
jusqu’alors.
Nonobstant ces moyens qui sembloient décisifs, il est inter
venu un sécond jugement contradictoire, le i 3 iructidor an 12,
q u i, sur le m otif que la ratification de la veuve D epeyre 11 étoit
pas form elle, cc sans avoir égard à la fin de non-recevoir procc posée par les héritiers G o m ich o n , déclare nul l’acte du 22 juin
« i y 63 , qu’on date mal à propos du 22 juillet. »
C e m êm e jugement joint au fond une demande en provision,
qui avoit été formée par la veuve Depeyre.
Et pour être fait droit sur les fins et conclusions de la de
manderesse , ordonne que les parties en viendront à l’audience,
tous dépens réservés.
'
♦
C e jugement a été signifié à avoué le 20 floréal an i 3 ; et les
choses sont restées dans cet état jusqu’au 2 juillet 1807, que la
cause portée de nouveau à l’audience, 11 est intervenu un troi
sième jugement conçu en ces termes :
v « Le tribunal donne acte de la déclaration faite par M e. M eu
te nier, qu’il n’ a plus charge d ’occuper pour les défendeurs;
« donne défaut contre e u x ; pour le p ro fit, tient l’instance pour
« reprise ; les condamne à rendre compte de la gestion qu’il
« a eue de la personne et biens de Françoise Gomichon ; à le
« présenter et affirmer dans le mois, par-d evan t le président
« du tribunal ;
« Les condamne à se désister dés biens immeubles revenant
« à ladite Gomichon dans les successions de ses p è r e et m é r e ,
« avec restitution des jouissances, telles qu’elles se ro n t fixées
« par experts ;
« Condam ne lesd ù s défendeurs a u x dépens liquides à 4 J J f« 5a c. , au c o û t, levée et signification du présent jugement. »
jugement a été signifié à avoué le 8 juillet dernier, et ¿v
domicile le 21 du même mois.
�( 8Ï
L e s héritiers Gomichon ont interjeté un premier appel au domi
cile élu par la veuve D e p e y re , le 5 août dernier , tant de ca
dernier jugement que du précédent, du i 3 fructidor an 12, et
. ils ont réitéré cet rappel à son dom icile, avec assignation en la
Cour d’appel h R io m , par exploit du 26 septembre dernier.
Ils ont, ,par un autre e x p lo it du m ême jo u r, dénoncé à Jean
et Joseph D e p e y r e , et à la femme Armet et à son mari, lesdits
iDepeyre enfans et héritiers de Pierre D e p e y r e , les poursuites
exercées contre eux par Françoise Gom ichon, leur mère et belle-,
m ère , avec sommation de les faire cesser, sinon, et'à défaut de
c e f a i r e , ils ont protesté de les rendre garans et responsables
de tous les évènemens et de toutes pertes, frais, dépens, dom, mages - intérêts.
D ans cet état de choses, les appelans demandent au conseil,
x°. Si leur appel du premier ju g e m e n t, du i 3 fructidor an 2,
est recevable et fondé?
,
,
20. Si leur appel du s e c o n d .ju g e m e n t, du 2 juillet 1807, est
également recevable et fondé?
3°. ’Et su bsidiairem ent, dans le cas où le premier .jugement
jse ro lt confirmé, si le second pourroit l’étre, soitidans la dispo
sition relative au com pte de tutelle,
'
Soitidans celte relative au désistement prononcé contre les
nppelans, ’
•
Soit dans celle,relative à la.restitution des,jouissances,
}
Soit enfin dans celle relative aux dépens?
.
‘
4°. Eulin, si,les héritiers r.Gom
• ichon sont en droit vd’oxercer
.>
. liiie action en garantie.contre les héritiers D e p e y re , et jus^u’ou
iloit s’étendre 1cette garantie?
1 .
�1 9 Ï
L e S O U S S I G N É , quî a vu et examiné le mémoire à cori*
sulter ci-dessus et des autres parts, ensemble toutes les pièces
du procès, e s t d ’a v i s , sur les différentes questions proposées,
des résolutions qui suivent.
Sur la première question, qui consiste à savoir si l’appel des
héritiers G o m ich o n, du jugement du i 3 fructidor an 12, est
recevable et fondé , le soussigné estime qu’il y a lieu de se dé-,
cider pour l'affirmative.
D ’abord il ne peut pas y avoir de fin de n o n -recevo ir à
opposer aux héritiers Gom ichon contre c e t appel.
L e jugement est à la vérité du i 3 fructidor an 1 2 ; mais il
n’a été signifié qu’ à avoué le 20 floréal an i 3 , et il ne l’a été
dans aucun temps û domicile. O r , il n’y a que la signification
à domicile qui fasse courir le délai de trois m o is , accordé pour
interjeter appel d ’un jugement contradictoire.
C ’est ce qui est textuellement décidé par l’article 14 de la
loi du 16 août 1790 r dont la disposition a été expressément!
renouvelée par l’article 443 du Code de procédure actuelle
m ent en vigueur.
C et appel est également fondé.
Ce jugem ent, sans avoir égard aux différentes approbations
faites par la veuve D ep ey re, de la transaction du 22 juin 17 6 3 ,
a déclaré cet acte n u l , sur le fondement que ces approbations
n’étoient pas une ratification assez formelle.
Les premiers juges ont pensé, et avec raison, que le traité
du 2a juin 1763 étoit nul dans son p rin c ip e , respectivement
a Françoise G om ichon, parce qu’il étoit fait par le mari seul, et
*]u il comprenoit dos droits immobiliers a p p a r t e n a i t a la femme.
Si ces droits immobiliers eussent été situés en coutume d Auvergnoyil$ auroient encore eu raison do regarder comme sans co n
séquence les différentes approbations que Françoise Gomichon
B
�(' 10 ■)
auroit pu faire du traité de 1760, parce que ces droits i m m o
biliers étoinrit d o tau x, que la loi les auroit rendus inaliénables,
et que dans ce cas elle n’auroit pu approuver ce traité et le
ratifier valablement qu’après le décès de son mari.
1
IVlais les biens immeubles dont il est question dans ce traité,’
étoient situés sous l’empire de la coutume de Bourbonnais >
et cette coutume les rendoit aliénables , avec le consentement
de la fe m m e , d’après ces expressions de l’article 225 de cette
coutum e : et Mais il ne peut ( l e mari ) vendre ni aliéner les
« héritages de sadite fem m e, sans son 'vouloir et consentem ent.»
D ’où il résulte qu’il 11e faut dans cette co u tu m e, de la part
d e la fe m m e , pour rendre l’aliénation valable, que la preuve
de son vouloir et consentement.
Et
cette disposition est la m ê m e , soit que la f emme soit
mariée en coutume d’Auvergne , ou qu’elle le soit en coutume
de Bourbonnais, comme l’attestent un acte de notoriété de la
sénéchaussée de Bourbonnais, du C juillet 1706, rapporté par
A u r o u x ,s u r l’article 238 de cette co u tu m e, et le dernier co m
mentateur de la Coutum e d’A u v e rg n e , sur l’article 3 du titre
j/f , tome 2 , page 226.
Ces premiers principes une fois posés, il ne s’agit que de
savoir si le vouloir e t consentem ent de Françoise Gomichon sont
Suffisamment établis par les actes que les appelans rapportent.
Le premier est la signification juridique, faite par le mari et
la fe m m e , de c e traité du 22 juin 1763, à Marie La (ont, en
qualité de tutrice de ses etifaus, héritiers de Jean Gom ichon,
leur p è r e , avec assignation devant le juge des lieux, pour voir
déclarer ce traité exécutoire contre e u x , com m e il l’étoit contre
leur p è re ; en conséquence, se voir condamner h leur payer la
somme de 600 francs portée par ledit acte , avec intérêts et
dépens.
Cet acte n’a pas besoinde commentaire : Françoise Gomichon
no pouyoit pas mioux exprimer son vouloir et consentement
�u
C 11 )
à tout le contenu au traité du 22 juin 1763, qu’en en deman
dant elle-m êm e l’exécution en justice, conjointement avec son
mari, contre la veuve et les héritiers de celui qui l’avoit souscrit.
Mais cette première preuve du v ou lo ir e t consentem ent de
la fem m e D ep ey re a bientôt été suivie d une seconde p re u ve
encore plus énergique.
L e 19 avril 1788, Françoise G o m ich o n , tant en son nom
propre et privé , que com m e fondée de procuration de son m ari,
a réglé compte a v e c Antoine Gom ichon, 1 un des appelans, de
tous les intérêts qui étoient échus jusqu au j o u r , du capital
de 600 francs, porté par le traité du 22 juin 1763.
1
Ces intérêts se trouvèrent monter, les retenues légales dé
duites, à la somme de 600 francs, qui fut comptée à Françoise
Gom ichon , qui en consentit quittance devant G a n ilh , notaire
au bourg de. Chalinargue, « sans préjudice à elle des 600 fr.
« de capital, et des intérêts qui pourroient en échoir à l’avenir,
cc jusqu’à parfait p a y e m e n t, et de son hypothèque. »
< O n a vu qu’il ne failoit , en cout ume de Bourbonnais , pour
valider l’aliénation faite par le mari des biens de sa fem m e,
que son vouloir e t consentem ent.
r O r , ici ce vou lo ir et consentem ent sont exprimés de la m a
nière la plus absolue, et dès-lors l’acte de 1763 doit être consi
déré comme aussi parfaitement régulier que si Françoise
Gomichon y avoit paru, puisque tout ce qu’elle auroit pu faire
auroit été d’y donner son vouloir e t con sen tem en t, com m e
elle l’a fait par la demande en déclaration de titre exécutoire
du 16 avril 1787, et par la quittance notariée du 19 avril 17^8.
C e seroit vainement que la veu ve D ep ey re c r o i r o i t , pour
justifier les premiers juges, pouvoir tirer parti de la disposition
de l’article i 358 du C o d e , sur les ratifications, car cet article
prononce encore formellement sa c o n d a m n a tio n .
A piès avoir d it, en e ffet; dans quelle forme et dans quels
ternies doit être conçue la ratification d ’une obligation, pour
être valable, la loi «joute;
J .
13 3
.
�( 12 )
te A ctéfhut d’acte de confirmation ou ratification, i l ^suffit
que l ’obligation soit ex écu tée volo/Uatre?/icnt,apvàs l’époque
« à laquelle l’obligation pouvoit être valablement confirmée ou
k
te ratifiée. »
Ici les parties étant régies par la coutume de Bourbonnais,
l’acte du 22 juin 1760 pouvoit être valablement confirmé et;
ratifié dans tous les temps, à la différence de la coutume d\Auyergne , qui n’auroit permis de le confirmer et de le ratifier
qu’après le décès du mari.
D è s - lo r s , à défaut d ’acte de confirmation ou ratification, il
suffi soit que l’acte fût ex écu té volontairem ent.
O r , on ne peut pas nier que le traité de 1763 n’ait été e xé
cuté volontairement par Françoise G o m ic h o n , soit par la de
mande du 16 av ril 1787, soit par la quittance du 19 avril 1788»
E t com m e aux termes de c e m ême article « la confirmation,
« ratification ou exécu tion v o lo n ta ire , dans les formes et à,
« l’époque d< terminée par la lo i, emporte la renonciation a u x
<1 moyens et exceptions qu’on pouvoit opposer contre cet a c t e ,
« 6ans préjudice néanmoins aux droits des tiers, » il en résulte
que Françoise Gomichon est absolument non recevable à revenir
contre ce traité du 22 juin 17G5, et que le jugement qui l’a
déclaré nul ne peut subsister.
JEt c ’eat un grand bonheur que cela soit ainsi. On verra par
la suite combien ce traité étoit précieux pour toutes les parties,
et avec quelle vérité les rédacteurs de cet acte ont dit d a p sle
préambule, « q u e toutes leurs demandes et poursuites mettroient
« les parties clans le ca6 d’avoir plusieurs sentences et arrêts d e
« la Cour de p a rle m e n t, qui auroient pu occasionner la perte
« totale de leurs b i e n s .......................pour ù quoi obvier, elle»
v ont traité et tra n sig é , etc. »
Sur la seconde question, q u i a pour objet de savoir si l’appel
Ou jugement du a jnillet 1807 est également recevable et fo n d é ,
il y a aussi lieu de décider affirmativement,
�( 13 0
D ’abord,-il 'Xie .peut pas y avoir de. fin d e non-recevoir à
opposer ajix.jappelans,
, j ..
.
;
Soit parce que c e jugem ent, à la rigueur , deyroit ¿ire rér
puté com m e non avenu , aux termes de 1article i 5 6 du Code
d e procédure, attendu qu’il est rendu par d é la u t, et qu’il n’a
pas été mis à exécution, dans les ¡six mois de son obtention,
n ’ayant été; signifié,.qu’au mois dç juillet 1809;
Soit parce que les appelans ont interjeté leur appel presque
immédiatement ,après la signification quiileur en a été faite.
A u fo n d , l’appel est'fondé.^t),; j |t,
-,
t C ’est une conséquence forcée de ce qui a été dit précédem
m ent sur l’appel du jugement du i 3 fructidor an 12.
t Si en effet il 'est démontré que ce premier jugement a mal
à propos annullé le traité du 5,2■ju in 1763, et que cet acte doit
conserver toute sa force et v e r t u , tout est terminé entre les
parties, et toutes les condamnations prononcées contre les
appelans par le second ju g e m e n t, tombent d ’elles-m êm es et
disparoissent.
Mais com m e en Cour souveraine il faut défendre à toute»
fins, il nous reste à examiner subsidiairement quel seroit le
sort des parties dans le cas o ù , contre toute attente, le juge
ment du i3 fructidor an 12, qui déclare le traité n u l, seroit
confirmé.
Les parties rentreroient alors dans le dédale des discussionsqu'elles ont voulu éteindre par ce traité.
Ces discussions éloient effrayantes alors; elles m e n a ço ie n t,
par leur n o m b re, par leurs détails, par leur obscurité, d’en-r
gloutir la fortune des parties; que s e r a - c e , lorsqu’un demisiècle qui s'est écoulé depuis ce traité a rendu cette obscurité
impénétrable, a fait perdre la trace des faits, a fait égarer lea
titres et [es procédures qui auroient pu du moins répandre
quelques traits de lumière dans ce chaos?
. û u° i su 'il en s o it, si Ica parties sont jamais forcées d e u xo»
�( 14 )
venir à ces ancîèrines contestations, il faudra du moins com
mencer par infirmer toutes les dispositions de ce dernier jugement
du 2 juillet 1807.
La première est conçue en ces termes :
« Les condamne à rendre compte de la gestion que leur père
« a eue de la personne et biens de Françoise Gomichon ; à le
« présenter et affirmer dans le mois , par-devant le président
cc du tribunal. »
■
1 ‘
1
.
• O n a vu dans les faits que si Jean Gomichon avoit été tuteur
de Françoise
G o m ich o n, sa cousine, Silvain G om ichon, père de
»
ladite Françoise, avoit lui-m ém e été tuteur de Jean Gomichon,
son neveu ;
Q ue Jean Gomichon avoit formé demande à Silvain Gomichon,
en reddition de ce compte de tu telle, le
janvier iy /t5 ;
Q ue par une sentence du châtelain de Montluçon, du 34 mars
de la même année, Silvain Gomichon avoit été condamné à rendre
c e compte , sinon à payer à son neveu 3ooo fr. pour re liq u a t,
a r e c intérêts et dépens ;
Q ue ce compte n’a jamais été rendu ; que dès-lors cette somme
de 5ooo francs étoit censée acquise à Jean G om ichon, avec les
intérêts depuis 1745 jusqu’en 1763, que les parties ont transigé
tant sur c e compte de tutelle que sur celui (¡ue devoit Jean
Gom ichon à Françoise G o m ic h o n , sa cousine.
D ’après ces faits, il est clair que les juges de première instance
n o m pu annuller ce traité de 1765, sans l’annuller pour toutes
les parties; que chacun a dû rentrer dans ses droits; que dèslors ils 11’ont pu ordonner que les héritiers rendroient le compte
de tutelle demandé par Françoise Gomichon , et qu’ils le préscnteroient et affirmeroient duns le mois, par-devant le président
du tribun al, sans ordonner en m ême temps que Françoise Gomichon re n d ro it, comme héritière de Silvain Gomichon , son
p è r e , le compte île tutelle du à Jean G o m ic h o n , dont il avoit
£t<S tuteur antérieurement, ou q u i . défaut de c ë , le jugement
�<¿¿0
'
X i5
,
)
du 24 mars 174^ , qui condamnoit ledit Silvain Gomichon ù
5o o o ‘francs pour reliquat* avec intérêts et frais, seroit exécuté
selon sa forme et teneur.
Indépendamment que c e mode dé prononcer1sur ce c h e f entre
les parties, étoit de d r o it , puisque les parties se devoient res~
pectivem ent un compte de tutelle, et que le traité nnnulle avoit
également c e compte respectif pour objet, ï îançoise G om ichon
y avoit elle-même donné les mains, en ce que par sa cedule en
"conciliation, du y mars 1793, elle avoit conclu « au règlement
« et reddition du compte de tutelle que leu Jean Gôm ichon, son
« cousin , a eue de sa personne et biens , et de celui 'que la dite
« requérante p e u t devoir du c h e f de f e u Silvain Gom ichon. »
C e premier c h e f du jugement du 2 juillet 1807, contient encore
un autre m al-jugé m an ifeste, en ce q u ’il est établi par le traité
du 22 juin 176 3 , que Jean Gomiçhon avoit'fourrli soîi .compte
à Françoise Gomichon le i 3 août ‘175 g , et que celle-ci'ét son
mari y avoient fourni des débats le 23 du m ê m e mois d’aoùt.
• D ès qu’il existoit un compte de tutelle rendu et débattu, les
premiers juges ne devoient pas condamner les appelans à rendre
c e même co m p te , et à le présenter et affirmer dans'le m o is,
devant le président du tribunal; ils dévoient seulement ordonner
que les parties procéderaient en la forme oïdinaire à l’apurement
du compte rendu et débattu en 1759.-'
r!*i
Ce premier c h e f du jugement du 2 juillet 1807, ne pourrait
donc manquer d’être infirmé sous un double point de v u e , quand,
par impossible, le premier jugement du i 3 fructidor an 12, qui
annulle le traité du 22 juin 1763, seroit confirmé.
Il en seroit nécessairement de même de la seconde disposition
de ce jugem ent, ainsi conçue :
« Les condamne il se désister des biens immeubles revenans
« à ladite G om ichon, dans les successions de s*‘s père et m è re,
« avec restitution des jouissances telles qu’elles seront fixées
a par experts. »
!
t
�( i6 )
Il faut distinguer dans cette disposition c e qui est relatif aq
désistement des immeubles, et ce qui est relatif à la restitution
des jouissances.
Et d’abord, en c e qui est du désistement des im m eubles, la
disposition de ce jugement ne peut se soutenir, par plusieurs
raisons également décisives.
La première se tire de ce que cette demande en désistement
a été formée vaguement, ïn globo , te des biens immeubles pro« venus des. successions de ses père et m ère » , tandis que
l ’ordonnance de 1667, sous l’empire de laquelle la demande a
été form ée, portoit expressément,,article 3 du titre 9 , que dan?
toute demande eu matière réelle ou désistement d ’immeubles,
1 exploit de demande devoit c o n te n ir, à peine de nullité , le
n o m , la situation, la contenue, les tenans et aboutissans, et la
n a t u r e , au moment de l ’exploit de chaque héritage dont le
désistement ^toit demandé ;
Disposition qui a été impérieusement renouvelée sous la même
peine de n u llité , par l’art. 64 du nouveau Code de procédure.
En second lieu, les biens de la maison Gomichon étoient restés
jndivis ; Silvain Gomichon , père de la veuve D ep ey re , les a
jouis long-teinps en totalité pendant sa tutelle de Jean Gomichon,
son neveu.
Il a m êm e continué d’en jouir après l'émancipation de son
n e v e u , jusqu’à s*i mort arrivée en 1748.
Jean , de son c ô t é , devenu tuteur de la fille de S ilv a in , en
a joui à son tour, toujours par indivis ; et les choses étoient en
c e t état au moment du traité, du
juin 17GJ.
D ans cet état de choses , en su p p o s a n t le traité de 17GJ annullé , F ran ço ise Gomichon ne pouvoit pas former contre les
représientans de Jean Gomichon une demande en désistement,
mais une action en partage des biens indivis, qui est; la seulo
jreçue entre cohéritiers.
J.a jurisprudence de la Cour est constante i cet égard ; elle
annullo
�( 17 ') «
annulle journellement de pareilles demandes en désistement, et
renvoie les parties à se p o u rvo ir par l’action en partage.
C o m m e n t, d ’a ille u rs, les appelans pourroient-ils aujourd’hui
exécuter c e jugement? D e quels objets pourroient-ils se désister,
lorsque tous les biens de la famille n ’ont jamais cessé d ’être
divisés ?
Sur quelle base pourroit se faire c e désistement? Q u e lle est
la portion que Françoise Gomichon prétend lui appartenir dans
ces biens? E st-c e le tiers , le quart, la moitié?
A u ra -t-elle le choix de la maison, du jardin, de telle ou
telle nature de biens ?
O n sent que tout cela seroit absurde, et qu’en pareille ma
tière il n ’y a de juste, de raisonnable, de possible dans l’exé
cution , que l’action en partage.
C e c h e f du jugem ent relatif au désistement des immeubles
no peut donc encore manquer d ’être infirmé.
. Il ne peut pas m ieux ae soutenir dans la partie d e cette dis
position qui est relative à la restitution des jouissances.
En e f f e t , cette disposition est encore v a g u e , indéfinie ; on
ne voit pas quand cette restitution doit co m m e n cer, et quand
elle doit finir.
Cependant cette explication n’est pas indifférente.
O n ne peut disconvenir que le traité du 22 juin 1763, quand
il seroit annuité pour Françoise G o m ic h o n , ne doive avoir sa
pleine et entière exécution pour Pierre D e p e y r e , qui avo it,
com m e m ari, l’usufruit des biens de sa fe m m e , et qui a pu
"valablement traiter de cet usufruit.
Il n ’y auroit donc, m êm e dans la supposition de l’annullation de c e traité, aucune restitution de jo u is s a n c e s à prétendre
d e la part de Françoise G o m ich o n , depuis 1763, époque du
traité , jusqu’en 1790 q u ’il est décédé ; ce qui diminue de vingtsept ans la restitution vague et générale prononcée par le juge
m ent dont il s’agit.
l
�'( 18 )
On pourroit ajouter que clans tous les cas il n’y nuroit encore
pas lieu à cette restitution de jouissances , depuis le décès de
Pierre» D e p e y re , jusqu'au mois de septembre 179^, que Fran
çoise
Gomichon a formé sa demande en annulation du traité
»
de 17G3, avec d ’autant plus de raison, que les biens dont il
étoit question dans ce traité étoient situés en Bourbonnais , où
l’aliénation en étoit perm ise, et que le traité de i ^63 étoit par
faitement connu de Françoise G om ichon, puisqu’elle 1 avo itap
prouvé en 1787 et 1788.
Il ne reste qu’à dire un mot sur l’article des dépens.
L es appelans y ont été condamnés indéfiniment ; et une
grande partie de ces dépens avoit eu pour objet la demande en
partage de la succession d’Antoine G o m ich o n, dont elle avoit
été obligée de se départir, et dont le département avoit été ho
mologué par un jugement contradictoire du 3 ventôse an 12.
C ’est donc dans tous les points que ce jugement ne peut
manquer d etre infirmé ; il faut m ême convenir que la rédac
tion en seroit inexcusable, si on ne considéroit qu’il a été rendu
par défaut contre les appelans ; ce qui doit aussi faire disparoltre toute espèce de préjugé que pourroit faire naître cette
première décision.
>
Sur la dernière question du m ém oire, relative 11 l’action en
garantie contre les héritiers D ep eyre , et sur l’étendue de cette
garantie -, le soussigné estime que cette action est fondée , et
que l’étendue de celte garantie n’a d’autres bornes que le quan
tum interest des héritiers Gonichon.
I l ne fa u t pas p erd re de v u e q u ’on r a is o n n e toujours dans
la su p p o sitio n invraisemblable q u e le jugement du i 3 fructidor
«tu
12 , qui
a n n u ll e
le
tiaité du 12 septembre 17G3, soit
confirmé.
Pierre Depeyre a stipulé clans cet a c t e , tant en son nom
qu’en qualité de mari et maître des droits et biens dotaux de
�( 19 )
M arie-Françoise Gom iclion, son épouse ; e t à Vexécution e t
entre tellem ent de to u t le contenu .en cet a c t e , i l a obligé
tous ses biens présens e t à 'venir.
~
En contractant cet engagem ent, il s est.soumis a toutes les
conséquences qui en pourroient résulter; il a promis de faire
valoir cet acte dans tout son contenu ; d ès-lo rs il est devenu
garant de tous les effets de son inexécution.
O r , quels seroient les effets de cette inexécution , dans le
plan de la veuve D ep eyre? D e nouveaux comptes de tutelle,
l’éviction des biens aliénés , des restitutions de jouissances q u i ,
suivant ses prétentions, monteroient a plus d un d em i-siècle,
et d ’énormes dépens.
T ous ces effets devroient être supportés par les héritiers
Depeyre.
C ’est ainsi que le décident les anciennes et les nouvelles
lois. Rvicta res e x em plo actlonem a d pretium d u n ta x a t recipiendum , sed a d id quod in terest, com petit. Loi 70, au dig.
d e evict.
Rousseau de la Com be, au mot év ictio n , n°. 6, explique co
quod interest en ces termes :
« Én cas d’éviction , l’acquéreur peut demander au vendeur,
« non-seulem ent la restitution du p rix, mais aussi ses domcc mages-intérêts .......................... tout le profit que l’acquéreur
cc eût reçu de la ch o se, si elle ne lui avoit pas été é vin cée .»
Et le nouveau Code en donne une définition encore plus
e x a c t e , article i 63o , qui est conçu en ces term es:
cc Lorsque la garantie a été pro m ise, ou qu’il n’a rien été
« stipulé à c e su je t, si l’acquéreur est é v in c é , il a droit de
« demander contre le v e n d e u r,
« x°. L a restitution du prix;
, « 2°. Celle des fruits, lorsqu'il est obligé de les rendre au
« propriétaire qui l’évince;
« 3°. Les frais faits sur la demande en garantie de lachc-j
ce te u r, et c e u x faits par le demandeur originaire;
C 15
�(
« 4°.
20 )
Ênfin les dommages-intérêts, ainsi que les Trais e*
« loyaux coûts du contrat. »
C e seroit vainement que les héritiers D ep ryre voudroient
exciper de c e que la cession faite par Pierre Dopeyre à Jean
Gomichon , de tous les droits mobiliers et immobiliers de sa
fe m m e , l’a été aux risques, périls et fortunes de ce d ern ier,
sans autre garantie de la part de Pierre D ep ey re que celle de
ses faits et promesses.
Il
est évident que ce qui est aux risq u e s, périls et fortunes
de Jean G o m ic h o n , c ’est le plus ou moins de valeur des objets
cédés ; c e sont les dettes des père et mère de Françoise G om ic h o n , qui demeurent aux risques et périls de Jean G o m ich o n ,
sans répétition contre D ep eyre e t sa femme.
Mais au moyen de la garantie de ses faits et prom esses, g a
rantie qui êtoit d’ailleurs de droit, et au moyen de l’engage
m ent de faire exécuter et entretenir cet acte dans tout son
co n te n u , il s’est incontestablement soumis à le m aintenir, à
]e faire valoir envers et contre to u s , et par conséquent à toutes
les suites que pourroit ^entraîner son inexécution.
C e seroit encore en vain que l e s héritiers D ep eyre prétendroient qu’ il n’y a lie u , dans l'e s p è c e , pour toute garantie, qu’à
la restitution des deniers , parce que Jean Gomichon connoissoitle v ice du traité, en c e qu’il traitoit des droits de la fem m e
D ep ey re avec son mari, en l'absence de cette d e rn iè re , et qu’ici
le prix du traité de 1760 n ’ayant pas encore été payé , cette
garantie devient illusoire.
C e moyen seroit peut-être proposable, s’il s’agissoit d’un bien
dotal, situé sous l’empire de la coutum e d’A uvergne, à raison
de l’inaliénabilité rigoureuse des biens dotaux, fondée sur un
statut négatif prohibitif.
Encore le3 opinions étoient-elles divisées sur cette question;
et la plupart des jurisconsultes regardoient, dans ce c a s , le
mari com m e passiWc des dommages-intérêts de l’a c h e te u r,
�'
( 21 )
pnrce q u ’il n’^toît pas «xcusable d’avoir contracté des engagemens qu’il n’étoit pas en état de tenir'j'et que ces engagemena
ne pouvoient pas être le jouet des vents. 1 L£ir*‘; t
Mais ici les biens qui ont donné lieu au traité *de 1763, sont
situés sous l’empire de la coutume d»î Bourbonnais. Les biens
dotaux, dans cette c o u tu m e , sont soumis au droit co m m u n ;
ils sont aliénables c o m m e ides biens de toute autre nature.
O r , dans le droit c o m m u n , une vente q u e lco n q u e, mémo
du bien d’autrui, donnoit lieu à des dommages-intérèts, lorsque
l ’acquéreur se trouvoit évincé par le véritable propriétaire.
R em aliénant distrahcre quem p o ss e , n u lla d u b ita lia e s t,
nam em ptio est, e t ven d itio ; sed res em ptori ai/Jeri potest.
Loi 28, au dig. D e contralm ida n n p lion e.
V e n d ita re aliéna , disent les interprètes, tenet conlractus
in prejudicium v e n d ito r ïs, non dom ini.
V e n d ito r de evictione tenctur.
« La chose d’autrui peut être v e n d u e , et la vente en est
u valable, dit D esp e isse s, toin. i er. , page 1 4 , n°. 7 , à ce que
te le vendeur so it tenu d'éviction. »
Rousseau de la Combe nous dit a u s s i, dans son Recueil de
jurisprudence, au mot Vente , section i re. , n°. 2 , que « quoicc que la vente du bien d’autrui soit valable, à l'effet de la g a « rantie de l ’acquéreur contre son 'vendeur, 1 acquéreur peut
« être évincé par le propriétaire. »
C ’étoit donc un point constant et de droit commun dans
notre ancienne jurisprudence, que le ven d eu r, même du bien
d 'a u tru i, ne pouvoit être à l’abri de l’action en éviction , et
des dommages-intéréts dus
l'acquéreur.
Au surplus, les héritiers D ep ey re peuvent ici d ’au tan t moins
échapper à cette actio n , que Pierre D ep eyre n’n rien iait que
du "vouloir e t consentem ent île sa J e m n ie , comme le prouvent
la demande du 16 avril 1787, et la quittance du 19 avril 1788;
que s il y ayoit, com m e oa le suppose ^ daus le jugement d u
'
�I
( 22 )
fructidor an 12 , insuffisance dans ces deux ratifications, cette
insuffisance seroit du fait de Pierre D e p e y re , attendu qu’il ne
tenoit qu’à l u i , dans tous les temps, de la rendre plus form elle,
plus parfaite , et telle que ce traité de 1763 fut à l’abri de
toute atteinte.
D
élibéré
à C lerm ont-F erran d, le 2 octobre 1809.
B O I R O T .
A Riom, de l’imp. de THIBAUD, imprimeur de la Cour d’appel, et libraire,,
rue des Taules maison L andriot, — Janvier 1810«,
�
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Factums Godemel
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[Factum. Gomichon, Antoine. 1810]
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coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
créances
prison
autorité maritale
procuration
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Titre complet : Mémoire à consulter, pour Antoine, jean et Louis-Xavier-Silvain Gomichon, appelans, et demandeurs en garantie ; contre Françoise Gomichon, veuve de Pierre Depeyre, intimée ; et encore contre Jean et Joseph Depeyre, N….. Depeyre, et Guillaume Armet, son mari, défendeurs en garantie.
arbre généalogique.
Table Godemel : Transaction : 6. le mari peut-il transiger seul sur des biens dotaux situés en coutume de Bourbonnais ? peut-on considérer comme ratification la demande en paiement du prix de la transaction formée par le mari et la femme, et la quittance que la femme, non autorisée à cet effet, aurait donnée, tant en son nom que comme fondée de pouvoir de son mari ?
Publisher
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de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1753-1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2019
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0548
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Treignat (03288)
Rights
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Domaine public
autorité maritale
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
Créances
prison
procuration
Successions
-
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b18fa603db68fa9c35142114fb9ac5d3
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Text
P O U R
J E A N - M A R I E BOSREDON.
�MÉMOIRE
P OUR J
e a n
- M arie
BOSREDON
,
détenu dans la maison de Justice près le
Tribunal Criminel du Département du Puyde-Dôme, comme soupçonné d’émigration.
T
ne me suis jamais émigre ; je n’en ai jamais
‘eu l’intention. Je suis chevalier de l’ordre de Malte ;
et depuis le commencement de la révolution, j ’ai
demeuré ou à M a lte , ou sur le territoire français :
cependant je suis détenu depuis le 15 avril dernier,
comme étant; prévenu d'émigration.
Depuis long-temps le tribunal criminel du département
du Puy-de-Dôme m’a renvoyé au directoire du même
,J E
A
�( o
départem ent, pour y faire valoir mes exceptions ,
conformément à l’article L X X X de la loi du 28 mars
1 795. J'a i prouvé aux citoyens administrateurs du
directoire, par l’organe de mes défenseurs, que dans
le fait je n’avois pas été ém igré; que dans le droit,
je ne pouvois l'être, parce qu’ayant été reçu chevalier
de l’ordre de Malte en 17 8 2 , et que n ’ayant pas
abdiqué ce titre, je ne pouvois être considéré comme
citoyen français ; que les lois me privoient tout à-lafois de cette qualité , et des droits qui y sont:
a tta c h é s.
A u moment, où le directoire du département alloit
prononcer sur mon so rt, j ’ai appris qu’il avoit reçu
avis de suspendre, de la part du citoyen ministre
de l ’intérieur, qu’il avoit consulté sur la question,, et
que le citoyen ministre étoit dans l ’intention d’en
référer à la convention nationale.
Pour hâter la cessation d’une détention que je ne
méritai jamais, je vais soumettre au citoyen ministre et
aux comités de législation et de sûreté générale près la
convention , les moyens de défense qui ont été exposés
pour moi au directoire du département. 11 en résultera que
je puis être ju g é , que je dois l’être dam l’état actuel;
qu’il existe des lois qui portent une décision claire sur
mon sort, dont il ne s’agit que de faire l’application;
qu’il n’en faut pas une nouvelle.; d ’ailleurs cette n o u v e l l e
l o i , à laquelle il ne seroit pas juste de donner un
effet rétroactif, ne doit pas plus faire la boussole de
la décision que j ’attends, qu’elle a dû faire la rcg*e
�( 3 )
de ma conduite', puisque je n'aufôis pu me gouverner
pariune loi que, j e - n ’aurciis: pas, connue.
>
-I
■; i
f
'<
E n 1782 j étant-- en fan t, et étudiant au collège
d ’Effiat, mes. parens me firent recevoir chevalier de
l ’ordre de Malte, Depuis ma réception , je suis allé
à Malte à trois reprises ; j ’y ai plus long-temps résidé
qu’en, France. A ce premier titre de chevalier, j ’ai
réuni celui d ’officier d’infanterie, attaché au service
de l’ordre de Malté.
Apres un long séjour à M a lte , après de longs
voyages sur m er, nécessités par cet état, je me rendis
dans la maison de mon père, qui est sur la municipalité
de Condat, district de Rionu
L e 16 mai 1 7 9 1 , je la quittai pour me rendre à
Malte. J e p ris, le lendemain 1 7 , un passe-port de
la municipalité de R io m , où je déclarai que j ’étois
chevalier de l’ordre de M alte, et que je me rendois
dans cette î l e , en passant par Lyon.
C e n ’est pas là le langage d’un homme qui veut
s’émigrer. J e déclare ma qualité, j ’annonce le pays
où je vais. C e pays n ’éto it point ennemi de la France ( 1 ) .
J e n ’entendois point commettre une action punissable;
et si cela eût été, la municipalité à laquelle je communiquois
mon dessein, auroit dû m’arrêter.
(1)
Je dois observer que le grand-maître de Malte avoit
recommandé à tous les chevaliers de l’ordre , de ne prendre
aucune part aux troubles qui agitoient la France.
A 2
�(
4)
Arrivé à M alte, j'y demeurai jusqu’au mois d’avril
1792 : à cette époque, je m’embarquai paur me rendre
en France ; et j ’arrivai au commencement de juin
suivant à Eoulogne - sur - Mer ; j ’y résidai jusqu’au
mois de février 1793 ; je logeai pendant tout ce temps
chez le citoyen Jean-Louis C lé r e t, vitrier.
L e 2 6 février 1793 , je pris un passe - port de la
municipalité de B o u lo g n e -s u r-M e r , et je me rendis
chez mon père vers le milieu du carême dern ier,
après avoir passé par R o u e n , Versailles et Paris.
Quelque temps après, j ’allai voir un de mes amisà Vernassa!, département de la Haute-Loire : il devoit,
ainsi que m oi, aller à L y o n ; nous fîmes le voyage
ensemble.
C'est dans cette ville que je fus arrêté, le 15 avril
dernier , sous le prétexte que je ne rappcrtois pas
de certificats de résidence. J e fus envoyé, peu de jours
après, en la maison de justice près le tribunal criminel
du département du Puy-de-Dôme , où est le domicile
de mon père.
Interrogé par ce tribunal, j ’ai d it, avec vé rité, que
depuis le commencement de la révolution , je n ’avois
jamais habité qu’en France, ou à Malte -, que d’ailleurs,
comme chevalier de M alte, je ne pouvois être cons ilé r é , dans aucun cas, comme émigré. L e tribunal
ne pouvant juger la validité des exceptions que je
f.iisois valoir, m’a renvoyé au directoire du département,
pour y statuer, conformément à la loi que j ’ai déjà
citée. En rappelant les moyens de défense qui y ont
été déduits pour moi 3 on sera convaincu que le
�. C 5,°
recouvrement de 'ma liberté ne peut- faire la matièr«'
d’un do u te, et que cette décision doit être portés
dès à présent.
Ma défense se divise en deux propositions.
L a première est que je ne suis ni ne puis être émigré-; >
parce qu’ayant continué d ’être chevalier de l’ordre de
M alte, je n’ai pu être considéré comme citoyen français.
L a seconde qui n’est que subsidiaire , et dans la
discussion de laquelle j ’entrerai uniquement pour ne
rien négliger dans une affaire de cette importance , est
q u à supposer que l ’on dût me traiter comme citoyen
français , je ne devrois certainement pas être puni
comme émigré , parce que je suis encore à temps
d’établir que je n e l ’ai point été. P
r e m i è r e
p r o p o s i t
i o
Ni
J e ne suis ni ne purs être' émigré ; je n’ai • jamais •
grossi' les ennemis du pays qui me vit naître : cetta
intention n ’entra jamais dans mon cœur. Mais il ne
s’agit pas ici de juger mes sentimens, il est seulement
question de savoir , si d’après ma-> position , je suis
coupable , ou n o n , d ’avoir négligé de retirer des
certificats de résidence ; s’il n’est pas vrai que la loi
qui prescrivoit cette forme ne pouvoit me lier.
Le-grand maître de Malte est un souverain étranger;
les chevaliers formant l’ordre dont il est le c h e f,
ont toujours été sous sa dépendance ; ils ont été
obligés de marcher sous ses drapeaux, à sa réquisition j
ils ont eu une existence politique qui ne pouvoit se
�e
n
-concilier avec les principes de la révolution : Il ¿toit
donc impossible qu’ils réclamassent la France comme
leur patrie , et que la république les regardât comme
ses enfans, tant qu’ils demeureroient attachés à leur
ordre.
Aussi, cette ségrégation s’est-elle faite sous les deux
rapports de leurs biens et de leurs personnes.
Quant à leurs biens, elle résulte du décret des 14 et
20 avril 1 7 9 0 , sanctionné le 22 , article VIII. L ’article
premier de ce décret confie aux départem ens et districts
l’administration des biens déclarés par le décret du 2
novembre dernier, être à la disposition de la nation;
et l’art. V III excepte, quant à présent, des dispositions
.de l’article premier de ce décret, l’ordre de M a lte , etc.
On retrouve la même idée dans le décret du 25
juin 17 9 0 , article VIII. L e décret du mois d ’avril
précédent que je viens de citer vouloit qu’il fut fait
inventaire du mobilier de toutes les maisons religieuses
et communautés séculières. L ’article VIII du décret du
23 juin 1790 en excepte l’ordre de Malte.
J e conviens que la distinction des biens a cessé dans
la suite , d ’après de nouvelles idées qui n’a voient pas
d ’abord fixé l ’attenlion des législateurs. Cela résulte du
décret du 19 septembre 1792 qui a ordonné la vente des
biens de Malte : mais ce décret même laisse encore des
traces de distinction entre les chevaliers de cet ordre et
les citoyens français qui ont été pensionnas. Les
chevaliers q u i, en cette qualité, avoient des possessions
en France , ont dû avoir les mêmes revenus qu’au
paravant , à l ’exception toute fois des droits 511e les
�7
)
représen'tans de la nation avoient supprimés sans indem
(
nité ; et l’art. X II porte q u e , « quant aux propriétés que
» les langues françaises ont dans les états voisins , ou
» que les langues étrangères ont réciproquement en» F ra n c e , le pouvoir exécutif est chargé de négocier
i» un arrangement
tant avec l'ordre de Malte' y.
» qu’avec les puissances respectives ». L ’article X du
même décret charge aussi le pouvoir exécutif de régleravec l ’ordre de M a lte, sous- l’autorité du corps légis
latif , la somme annuelle pour laquelle la France
contribuera à l ’entretien du port et de l’hôpital de
Malte^ et pour les secours que les vaisseaux de cet ordre
donneront au commerce maritime français: dans la*
JVléliterranée.11 est évident que ce décret considère l ’ordre de'
Malte comme une puissance étrangère. Mais cela n’a pu
ê tre , sans qu’on n ’aiti dû regarder comme membres
.étrangers à la république les individus composant cet
o rd r e , puisqu’il n’y a d’ordre que parce qu’il existe
des. individus qui le composent.
' Dans les décrets dont on vient de parler, quoique'
rendus« pour les b ie n s, on trouve déjà les fondemens
d ’une distinction quant aux personnes ; mais cette
dernière distinction qui est ici la plus essentielle , est;
disertem ent marquée dans le décret du 30 juillet 17 9 1 >
sanctionné le 6 août suivant.
C e ,d é c re t, après avoir supprimé tous les ordres de
chevalerie , ajoute, art. IV et dernier « : Tout Français
» qui demanderont ou obtiendroit l’admission, ou qui
» conserveroit l ’affiliation à un ordre de, c/içvaleriç ou
�'( 8 )
'* a u t r e , ou corporation établie en pays étranger,
* fondée sur des distinctions de naissance, perdra la
•j» qualité et les drdits de citoyen fra n ç a is'».
Dès que j ’ai conservé l ’affiliation -à un ordre de
chevalerie , à une corporation étrangère , fondée sur
•des distinctions de naissance , la conséquence est aisée
-à tirer. J e n ’ai plus existé politiquement comme
-citoyen français. Il n ’y a* pas d ’équivoque sur mon
intention à conserver mon affiliation à M alte, puisque
par-tout j ’ai pris la qualité de chevalier de M a lte , et
notamment dans le -passe-port que la municipalité de
‘Riom m’a délivré le 1 7 mai 1-791 ; que j ’y ai .encore
ajouté que j ’allois à Malte en passant par L y o n , et
que je n’ai cessé d ’y demeurer depuis que j ’ai quitté ma
famille , jusqu’à mon retour en France ( 1 ) .
Vainement voudroit-on distinguer un chevalier
de Malte non p r o ie s , de celui qui le seroit. Cette
distinction ui^est ni dans la raison , ni dans la loi.
E lle n ’est point dans la raison.. Celui qui tient à
un ordre de chevalerie, qui jouit des faveurs qui y
sont attachées, qui par sa persévérance aspire à de
plus grandes, qui a , si l’on veut, la faculté de le quitter,
mais qui ne peut en ctre exclu , est présumé avoir
adopté des principes politiques , trop éloignés de ceux
.qui /ont la ba§e de la xévolution française, pour que
( 1 ) J ’dbserve que je suis âgé de vingt-trois à vingt-quatre ans;
.que je n’ai jamais exercé en France le droit de citoyen; je n’en
conçois pas même la possibilité. Aurois-je pu être noble à M alte,
. et dire en France que je ne pouvois pas le t r e l
�9
(
) '
la république Î’admette au nombre des citoyens: tant
qu’il n’a pas abdiqué le titre de chevalier de M alte, il
est soumis aux lois de son ordre ; il seroit p u n i, s’il les
violoit. On ne pouvoit donc sans contradiction l’obliger
à exécuter tout à-la-fois les lois de M alte, et celles de la
France , soit lorsqu’elle étoit une monarchie consti
tutionnelle , soit lorsqu’elle est devenue une r é p u
blique.
Cette distinction n’est pas non plus dans la loi. E lle
veut simplement que tout Français qui conserveroit
Vaffiliation h un ordre de chevalerie
ou corporation
établie en pays étranger , fondée sur des distinctions de
naissance, perde la qualité et les droits de citoyen'
français. Or , pourroit - on soutenir raisonnablement
qu’un chevalier de M a lte , quoique non proies, ne soit
pas affilié à un ordre de chevalerie y à une corporation
fondée sur des distinctions de naissance ? Le législateur'
s’est déterminé par la seule manifestation de la volonté:il ne faut pas d ’autre engagement.
Mais quelle meilleure interprétation peut-on exiger
pour saisir le sens de cette l o i , que l ’art. II du chap. III'
de la constitution qui va paroître incessamment, et qui
est décrétée en cette partie. Il y est dit que « l’exercice
» des droits de citoyen se perd par la naturalisation en
» pays étranger ; par l'acceptation de fonctions oujaveurs» émanées d'un gouvernement non populaire; par la con» damnation à des peines infamantes ou afflictives ». S i d’après la dernière lo i, des fonctions sans titre, d e '
simples faveurs momentanées qui peuvent subsister, même
abstraction faite de la noblesse , qui peuvent cesser
B
�au gré de celui qui les accepte et de celui qui les donne/
emportent la privation'des droits de citoyen français,
des qu’elles émanent d’un gouvernement non populaire,
pourroir-on dire que le décret du 30 juillet 17 9 1 , n’a
pas voulu prononcer la même exclusion contre des
chevaliers de Malte qui , quoique non p ro fè s, ont
b'ien plus que des faveurs d'un gouvernement non
populaire, qui en tiennent un état qu’ils conservent,
autant qu’ils lé veulent, un état adhérant à la distinction
nobiliaire , absolument incompatible avec les principes
de la révolution ? L e décret du 30 juillet 1 7 9 1 , et
l'article de la constitution se prêtent un secours
mutuel ; ils ne sont que la continuité d ’une même
loi : l’un avoit provisoirement ordonné ce que l ’autre
a érigé en principe constitutionnel : l’un et l’autre
s’appliquent évidemment aux chevaliers de M alte, profès
ou non : l'un les prive de l’exercice des droits de
citoyen , et l’autre leur en avoit fait perdre la qualité.
Ainsi en 17 9 1 , comme à présent, les chevaliers de
M a lte , sans distinction, n ’ont pu être regardés comme
citoyens français.
‘ J e sais que quelques personnes ont pensé qu’un
chevalier de Malte pouvoit être réputé émigré, d'après
l'art. VII du décret du 28 mars 1 7 9 3 , q 11* s’explique
ainsi : » Ne pourra être opposée comme excuse ou
» prétexte d ’absence la résidence à Malte , ou sur le
» territoire de Bouillon, Monaco et autres lieux q u i,
v> quoique limitrophes ou alliés par des traités et
» relations de commerce , ne sont pas partie intégralité
y du U Franco > , etc.
�(II )
C ’est bien niai entendre cette loi que de l’appliqu-er
à un chevalier de Malte.
i ° . Cet article n ’a pas eu en vue ceux qui sont
étrangers à la république : les législateurs n ’y ont été
occupés que des citoyens français auxquels on pourroit
imputer de s’être émigrés ; et pour pouvoir déterminer
les cas d’émigration, ils ont indiqué les lieux où leur
résidence ne seroit pas une excuse , et qui ne font pas
parties intégrantes de la république , par opposition à
ceux qui en font partie : ensorte qu’un citoyen français
qui auroit résidé à Malte , à Bouillon , ou à Monaco , ne
.PfWrpit pas dire qu’il n ’est pas dans le cas de l’émigration.
Mais le chevalier de Malte , déjà mis au rang des
^étrangers , étoit tout autant à l’abri du reproche
d’émigration , que le seroit un habitant de M alte, de
Bouillon , ou de Monaco , et qui ne seroit jamais entré
fsur le_ territoire français.
1
2 ° . Ce qui prouve que les chevaliers de Malte
n’ont pas été l’objet des législateurs, dans cet article ,
c’est l’alliage qui y est fait des trois pays de M a lte ,
Bouillon et Monaco. On ne rappelle pas Malte pour en
faire l’application aux chevaliers ; on en parle comme
^de Bouillon et de. M o n a c o pour les mettre tous
également - dans la classe des pays étrangers à la
République..
3 °. C e qui ne permet pas de douter de la vérité
de< cette interprétation , c’est que cet article ne déroge
point au décret du 30 juillet 17 9 1 , que l’on ne peut pas
le supposer , puisque- ce décret vient d’être confirmé
par un des articles constitutionnels. S ’il est vrai qUC les
B 2
�........................................ (
t O
.chevaliers de Malte aient été mis hors de la classe des
citoyens français , il est également vrai qu’ils sont
étrangers à la république ; et s’ils sont étrangers’, il
devient indubitable que ce n’est pas d ’eux qu’on a
entendu exiger des certificats de résidence, parce que
la nécessité de la résidence dans la république n ’a
pu être imposée à celui qui lui est étranger. Celui
que la nation prive des droits de citoyen, fra n ç a is ,
ne pourroit pas être puni , quand il auroit manqué
aux devoirs qui en sont une 'suite,.
On ne peut 'donc m’opposer que les articles V et V I
d ’un décret du 28 mars 1 7 9 2 , reliatif aux passep o rts;
ils veulent que les Français ou étrangers qui voudront
sortir du royaum e, le déclarent à Ja municipalité de
ileur résidence , et que le passe-port contienne mention
de leur déclaration ; et 1 l ’égard des personnes qui
entreront dans le royaume , qu’elles prennent, à ‘-la
première municipalité frontiere , un passe - port. Or>
on a déjà vu que j ’ai rempli ces formalités.
S
e c o n d e
1
‘
p r o p o s i t i o n
1 '
.
•
*1
r-.;
J e pouvois borner ma défense à l’établissement de
a première proposition. Il n’est pas à présumer que
je sois traité comme citoyen français ; néanmoins il
est dans l’ordre des possibilités, que mes juges décident
le contraire ; et dès que je pourrois établir surabon
damment que je n’ai jamais été émigré, et que je serois
encore à temps de le prouver, il y auroit de l’imprudence
du ma part de supprimer cette discussion sccondaicç.»
1
�( n )
et je sens qu’il est doux à mon cœur de pouvoir m’y
livrer.
L e décret du 28 mars 1795 3 article V I , n ° , 2 ,
'veut qu?on déclare émigré tout Français qui ne justifiera
p a s d a n s la forme prescrite, d ’une résidence sans
¿interruption, en France, depuis le 9 mai 179 2.
J ’ai dit dans mon interrogatoire, que je n ’étois venu
à Boulogne qu’au mois de juin 1792, J e ne connoissois
pas la loi d’après laquelle je pouvois avoir intérêt à
ceique mon arrivée en cette ville remontât à une époque
plus reculée. J ’ai pu me tromper sur les dates ; et il
est très - possible que mon débarquement à Boulogne
soit antérieur. J ’ai eu le malheur de perdre en route
mon porte-feuille qui contenoit des notes qui pouvoient
me retracer exactement les faits. C e n’est aussi qu’après
mon arrestation , que j ’ai reçu de nouveaux extraits de
mon passe-port pris à Riom le 17 mai 1 7 9 1 , et de
celui que m’avoit délivré la municipalité de Boulognes u r - M e r , le 26 février 1793. C ’est à raison de la
-circonstance de la perte de mon porte-feuille, et par
un défaut de mémoire, que j ’ai dit dans mon interroga
t o i r e , que je n’étois parti de Riom qu’en juin 17 9 1 ;
cependant l’extrait que j ’ai fait retirer ensuite, du
passe-port que j ’avois dit devoir se trouver dans les
registres de la municipalité, m’a appris que mon départ
de cette ville étoit du 17 mai précédent.
M ais, supposons encore que mon arrivée à Boulognesur-Mer ne soit que du mois de juin 1 7 9 2 , on ne
pourroit faire valoir contre moi la préfixion de l’époque
du 9 mai précédent, portée par la loi du 28 mars
dernier.
�C 14 )
Pour s’en convaincre , il faut remarquer le motif pour
lequel on a fixé au neuf mai 1792 , la rentrée en
F ra n c e , de ceux qui s’étoient absentés de leur domicile.
C ’est parce que la loi du 8 avril précédent, concernant
•les émigrés, article X X V I , prononçoit seulement la
privation du droit de citoyen actif, pendant deux ans.,
contre les émigrés rentrés en France depuis le 9 février
1 7 9 2 , ou contre ceux qui y rentreroient dans le moi3.
On voit que le délai que la loi accordoit se prolongeoit
au 9 mai suivant ; et celui qui rentroit à cette époque,
sous la sauve-garde J e la lo i, ne pouvoit avoir encouru
d ’autre peine que celle qui y est'portée.
M ais, pourroit-on regarder ce délai comme fatal à
mon é g a rd , dès que j ’étois déjà sur mer , et qu’il
me falloir plus de temps- pour me rendre ? dès que
je suis arrivé de Malte à Boulogne-sur-Mer en juin
1 7 9 2 , il falloit que je fusse sur les côtes de France
avant le 9 mai précédent. Dès-lors je devrais être réputé
avoir exécuté la loi.
;
.
.
E n effet, outre qu’il est dans la justice de distinguer
à cet égard un homme de m er, de celui qui seroit
chez les puissances étrangères, sur les confins de la
république , c ’est que cette distinction est faite par
l’article V I de la mime loi du 8 avril 1792. Cette
loi. excepte de ses propres dispositions entr’autres per
sonnes les gens de mer.
D 'ailleurs, il ne faut pas perdre de vue , que le
mois dans lequel ou pouvoit rentrer, en n’cncoiirant
d’autre peine que la privation du droit de citoyen actif,
fendant deux ans, ne devoit courir, suivant l’art. X X V I
�C 15 }
V
de la loi du 8 avril 17 9 2 , qu’à compter de la pro
mulgation de cette même loi. O r, j ’aurois tout lieu
de soutenir que le mois, à partir de cette promulgation,
dans quelque district que ce puisse être, n ’est expiré
qu’en juin 1792 ( 1 ).
M ais, pourroit-on m’objecter, toujours en me suppo
sant la qualité de citoyen français, il auroit fallu, aux
termes des décrets , que vous eussiez rapporté des
certificats de résidence dans la république. Les articles
X X I I et suivans de la loi du 28 mars dernier, combinés
avec l’article V I , n ° . 2 , exigent que la résidence soit
établie par des certificats revêtus des formes qui y
sont mentionnées.
C e qui annonce mon ingénuité, je ne crains pas
de le dire, c’est l’aveu que j ’ai fait dans mes interro
gatoires , que je n’avois pas cru devoir retirer de
certificats de résidence. M a is, ne peut-il pas y être
suppléé par des renseignemens qui seroient demandés
et constatés authentiquement sur les lieux? Ne suis-je
pas recevable à demander, à cet effet, mon transport
sur les différens endroits où j ’ai séjourné? J e me flatte
d ’établir l’affirmative, à l’aide d ’une foule de moyens.
L a loi veut^bien qu’ on justifie la résidence par
des .certificats revêtus de certaines formes ; mais elle
ne dit pas qu’on doive avoir ces certificats, dans le
( 1 ) Cette observation est d'autant plus décisive, que, bien
U n que la loi du 28 mars 1793 ait dérogé à la loi du 8 avril
en cette partie, elle l’a au contraire confirmée, article M , n°. 1.
�( 1 « )
moment même de l ’arrestation , sous peine d ’être mis
à mort dans vingt - quatre heures. Les législateurs
français n ’ont jamais entendu faire une loi aussi dure.
Il peut arriver, de plusieurs manières, qu’un parti
culier n’ait pas de certificats qui constatent la vérité des
faits qu’il peut cependant établir authentiquement. E t ,
par exemple, un porte-feuille contenant tous les certificats
nécessaires, peut avoir été perdu un jour avant l’arres
tation de celui qui aura été absent quelque temps de
son dom icile, où en seroit-on, s i , malgré l’assertion,
de la perte des certificats, de la part de l ’arrêté, si*
malgré son offre d ’y suppléer par de nouveaux certificats,
il étoit mis à mort sur le champ? N o n , une pareille
loi ne se trouvera jamais dans notre code !
On doit donc dire que la loi veut simplement
l ’attestation de la résidence par des certificats ; mais
que ne s’étant pas autrement expliquée , cela doit
s’entendre par des certificats déjà existans, ou par
des certificats qu’on est à même de se procurer. E t
l ’on doit donner au prévenu le temps nécessaire et
les facilites convenables pour avoir les certificats ou
les attestations équipollentes.
Cela doit d’autant plus avoir li e u , que les lois
précédentes, relatives aux certificats de résidence, ne
les exigeoient p a s , sous peine de mort : elles n ’avoient
trait qu’aux biens.
L e décret du 9 février 1 7 9 2 , mettoit seulement les
biens des émigrés à la disposition de la nation.
Voici les termes de l’article I X du décret du 8 avril
v iv a n t : * Pour éviter, dans la confection des listes,
toute
�( 17 )
» toute/ erreur préjudiciable à des citoyens qui ne
s> seroient pas sortis du royaume , les personnes qui
» ont des biens hors le département où elles font leur
* résidence actuelle, enverront au directoire du dépar
ti tement de la situation de leurs biens un certificat de
» la municipalité du lieu qu’elles habitent, qui consta» tera qu’elles résident actuellement et habituellement
i> depuis six mois dans le royaume ».
L ’article II du décret du 15 septembre 1 7 9 2 , en
demandant l’envoi des certificats de résidence , avec
de nouvelles formes, prononce pour toute peine, faute
d’y satisfaire dans le délai qui y estiporté, l'exécution
des lois concernant le séquestre et L'aliénation des biens
des émigrés.
L a première loi qui parle de mort contre lés émigrés
qui rentreroient, n’est que du 23 octobre 1 7 9 2 , et
elle n ’a été promulguée dans les districts que long-temps après.
J
;
Les lois qui! ont d’abord exigé les certificats de
résidence, n ’étant donc relatives qu’à une privation de
biens, on ne pourroit être puni de mort pour ne les
avoir pas retirés dans le temps. Tel homme qui n ’avoit
aucuns biens;, croyoit n ’encourir aucune peine ; et,
s’il eût été menacé de celle de mort, il sé seroit sans
doute empressé de se^faire délivrer et d’envoyer des
cértificdts de ^résidence. Je me trouve dans ce cas.
Comme fils de famille , je n’avois et je n ’ai encore
aucuns biens ; comme chevalier de Malte , j ’avois
renoncé à toute prétention à la fortune. Je n ’avois donc
xien à conserver. J ’en ai fait l’observation dans mes
C
�( 18 ) .
interrogatoires. Comment pourroit-on donner, en pareil
cas, un effet rétroactif à une nouvelle lo i, et punir de
mort une négligence, toujours réparable, contre laquelle
cette peine n ’étoit pas prononcée, au moment où elle
auroit été commise ?
Mais ce qui .achève de lever toute difficulté sur la
faculté que doit avoir un prévenu d’émigration , de
prouver en tout temps .sa résidence , ce sont les
dispositions des lois des 1 2 . et 15 septembre 1792. L a
première, en imposant u n e ta x e a u x p ères d’enfans
émigrés, leur a accordé un délai de trois semaines,
pour justifier leur.-résidence en France. L a seconde,,
en prononçant la nullité de .certains certificats, accorde
un délai d’un mois pour en envoyer de nouveaux.
Lorsque les législateurs sont uniquement occupés de la
privation des biens, ils accordent un délai pour la réité
ration des formes,.ou pour réparer leur inobservation ;
e t , lorsqu’il s’agit de la v ie , on voudroit dire qu’ils
n’ont pas i entendu a v o ir ’la mOme indulgence ?
A ux dispositions de ces deux lois;, des, 12 et 15
septembre 1 7 9 2 , se réunit cncore l’article X X X I de
la loi du 18 mars dernier : il _donne le délai d ’un
moi-;, à l'effet d’obtenir, de ¡nouveaux .çertificats de
résidence , à ceux qui avouent d'abord rapporté des
Ci-rtiCicats annullés. 11 est parfaitement égal de n'avoir
j-omt de. .ceitihcats, ou d o n . avoir, eu qui ont cte
anmillés.; puisque ce qui est n u l, est aux yeux de
la -loi i, ponime s’il n’eût jamais existé. A la vçr.ne ,
suivant cet article , ce délai d ’un .mois-a dû coyn r,
^ compter d t la proûiulgaiip^i du la loi 3 mais .cette
�19
(
)
disposition ne peut me^nuire. Ma détention remonte
avant
il est bien évident que le délai
n ’a pas couru contre moi , tant que j ’ai été détenu.
Il ne faut donc pas être étonné que des départcmens
aient ordonné le renvoi de certains particuliers prévenus
d ’émigration, sur les lieux où ils disoient avoir résidé,
à ‘l’effet de le faire constater authentiquement, Les
citoyens administrateurs du département du Puy-deDôm e, qui doivent prononcer sur mon sort , ont pris
ce parti relativement au citoyen Chamflour d’AIagnat;
et ceux du département du Gantai ont eu la même
précaution à l’égard du citoyen Castella.
“ Enfin, j ’ai un avantage bien précieux sans doute dans
une affaire de cette nature. C!est que je n’ai jamais été
considéré comme .émigré ; que l’opinion publique ne
s’est jamais élevée contre moi , malgré mon absence
du domicile de mon père ; mon nom n ’a .été inscrit
sur aucune liste d’emigres.
A la vérité , il est fait mention de moi dans une liste
faite contre les pères des enfans émigrés, pour les
contraindre au paiement de la contribution ordonnée
par le décret du 12 septembre dernier. Mais il faut
bien remarquer la manière dont j ’y ai été placé. Cette
liste a été faite au district de R io m , le 51 janvier
1793 / époque à laquelle j ’étois en France. Mon nom
n’y étoit pas d’abord, et les administrateurs ont senti
qu’il étoit de leur justice d ’observer sur un extrait
de la .même liste qui est joint à la procédure instruite
contre moi , que j e n’y avois été inscrit qu’après sa
confection,
urr. simple avis donné dans les bureaux
C 2
�( 20 )
sans renseignemens qui pussent avoir légalement constaté
ma prétendue émigration. Mon père se pourvut d’abord
contre cette indication, même avant mon arrestation,
et il n’a pas encore été statué sur sa demande. E lle
recevra sa décision en même temps que la procédure
criminelle qui a été la suite de mon arrestation ( i ).
J e me flatte donc d ’avoir démontré que ma seule
qualité de chevalier de Malte doit më faire acquitter
( i ) Il est
im p o ssib le
de dire que j'ai été inscrit sur aucune
liste d’émigrés. L a loi n’admet d’autre inscription que celle qui
est faite en conséquence d’un avis ou envoi officiel d’une liste
de la part d’une municipalité.
J e dois remarquer que de ce que mon père s’est pourvu contre
la taxe, il en résulteroit encore, s’il en étoit besoin, un nouveau
moyen pour faire accorder le délai que je ne réclame toujours
que très-subsidiairem ent, et pour ne rien négliger dans m i
défense, puisque, comme chevalier de M alte, je soutiens que
je n’ai jamais eu besoin de prouver ma résidence en France.
L ’article L X III de la loi du 28 mars dernier, porte que « les
» personnes portées sur les listes des émigrés , qui ont réclam é,
» et sur les demandes desquelles il n’a point été statué, et celles
» dont les certificats de résidence sont annullés, seront tenues
» de s’en pourvoir, dans quinze jours, à compter de la promul» gation ds la loi ». Je serois nécessairement dans le cas, ou de
cet article , ou de l’article X X X I que j’ai invoqué dans le mémoire,
qui accorde un mois; et on se rappellera que je serois toujours
dans le délai, parce qu’il n’auroit pu courir pendant nia détention, *
qui remonte avant la
Um/O
«—
�(21)
de l ’accusation y et qu’elle doit déterminer dès à présent
mon élargissement. Mais subsidiairement, et si contre
mon attente, cette proposition pouvoit souffrir difficulté,
si l’on croyoit que j ’ai dû avoir la qualité et les droits
de citoyen français, j ’ai établi que je pouvois prouver
encore que je n’avois jamais manque aux devoirs que
cette qualité commande. Mes preuves partent de lois
claires et précises : il n’en faut point d autres. Hé ! s’il
en falloit une nouvelle, seroit-il possible de ne pas la
voir dans le nouvel article constitutionnel que j ’ai
rapporté dans le développement de mes moyens ?
Qu’il me soit permis d’observer à tous ceux qui
doivent coopérer à mon jugement , que je languis
depuis près de trois mois dans une détention toujours
fâcheuse par elle-même ; mais qui le devient encore
plus par les incommodités dont elle est environnée ( 1 )
que pour me rendre justice , il ne suffit pas de me
ju ger, il faut encore qu’on me juge promptement.
^Fait en la maison de justice, à Riom , le 28 juin
1 7 9 3 , l ’an deux de la république française.
S i gné, J e a n - M a r i e
( 1
BOSREDON.
) Mon mémoire étant à 1 impression, et ma santé s étant
dérangée, j’ai été transféré de la maison de justice dans la maison
d’arrêt, par ordre des citoyens juges du tribunal criminel; je saisis
l'occasion avec empressement pour leur témoigner ma gratitude.
______r
___________
A R I O M , D E L ’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T , 1793.
�
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Factums Baron Grenier
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bosredon, Jean-Marie. 1793]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bosredon
Grenier
Subject
The topic of the resource
émigrés
chevaliers de Malte
prison
citoyenneté française
neutralité politique
certificats de résidence
opinion publique
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Marie Bosredon, détenu dans la maison de justice près le tribunal criminel du département du Puy-De-Dôme, comme soupçonné d'émigration.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1793
1782-1793
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
BCU_Factums_B0136
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Condat (15054)
Riom (63300)
Lyon (69123)
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Domaine public
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certificats de résidence
chevaliers de Malte
citoyenneté française
émigrés
neutralité politique
opinion publique
prison
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Text
T R IB U N A L D E C A SSA T IO N .
P O U R V O I R A U CIVIL.
m
é
m
o
i
r
.
e
P o u r P i e r r e BOYER, juge au Tribunal civil
de l 'arrondissement de Clermont-Ferrand , chef-lieu du
département du - P u y-de-Dôme , demandeur ;
Jean-Baptiste-César CHAMPFLOURD’ALAGNAT , propriétaire , habitant de Clermont 3
Contre
défendeur.
A
l'âge de 67 ans il me
que je dois employer à faire
reste encore un moment
disparaître les calomnies
d’existence
que m on
adversaire ne cesse de répandre contre moi. Je veux que l ’honneur
me survive , et que l’opprobre couvre à jamais le cruel ennemi qui
m e déchire
les lois viennent à mon secours, et me fournissent
l'occasion de dévoiler toute la noirceur de son procédé.
I l est inutile de débuter par le tableau toujours révoltant de
la plus insigne ingratitude, de la perfide calom n ie, de la surprise
et de la mauvaise foi
les faits présentés , soutenus de preuves
écrites , en feront bien mieux ressortir les différentes nuances, que
tout ce que je pourrai dire dans un prélude.
C 'est sur la fin de 17 8 3 ,
ou au commencement de 17 8 4 que
mon adversaire me fut présenté par son frère Champflour-Desmoulin ,
dont la mémoire me sera toujours chère , et avec lequel il avait
été pendant plusieurs années en délicatesse. L e premier me peignit
la situation de ses affaires j son discrédit qui était tel qu!il n'aurait
A
�par trouvé un L ouis à emprunter y ni à vendre la moindre partie
de son b ie n , par la crainte des prêteurs de p erd re, et par celle des
acquéreurs d’écre de suite évincés. Sa détresse
était
au point qu’il
était obligé de rester chez lui pendant le jo u r , et de ne sortir que
la nuit pour ses affaires , à raison d’un jugement consulaire qui avait
été rendu contre lui en
faveur
d’un particulier de R iom , qui le
condamnait par corps à. lui payer une modique somme de n o a f r .
pour le m ontant d’une lettre de change. Des huissiers avaient été
mis depuis plusieurs jours en surveillance, et il était sans argent
pour la faire cesser.
J e l’invitai à me déclarer franchement ses dettes , son avoir et
ses ressources. L ’énumération des dettes , à ce m o m en t, était
effrayante ; mais il me parut que son avoir était plus que suffisant
pour y faire face , et qu’il était possible de lui conserver au moins
une partie de son bien : au récit de ses malheurs , il joignit ainsi
que son frère des suplications et les invitations les plus pressantes,
pour m’engager à venir à son secours , soit par
mon argen t, soit
par mon c ré d it, et par mes talens dans les différentes affaifçs dont
il était alors assiégé.
D es larmes arrachées par l’infortune et l’état de sa position furent
la suite de cette première entrevue. J e suis né bon et compatissant;
je fus touché ; je mêlai mes larmes à celles des deux frères , et dès
ce moment , bien fatal pour la tranquillité dont je n’avais cessé de
jouir jusque l à , je lui livrai généreusement
tout ce
que j ’avais
d’argent ; je lui promis ma signature j il usa de l’un et de l’autre
sur-le-cham p, et dans l’heure il jouit de 5a liberté et d’un repos
qu’il avait perdu depuis long-tems.
M on procédé fut regardé par les deux frères comme un effet de
la providence. Ces fières qui ne s’étaient vus depuis long-sems ,
redevinrent frères ; mon adyersaire
ne
savait
comment remercier
celui qui lui avait procuré ma connaissance, et dans
sa première
expension ¡’étais l’homme unique.
Peu dç tems après je fus encore bien plus grand à
ses yeux :
�?
un particulier fui demandait plus de soixante mille fran cs, cette
demande indépendante de la première énumération des dettes , fut
allarmante pour m oi qui m’étais déjà livré } il m’apporta une multi
tude de registres, des com ptes, un tas de petits papiers particuliers,
et une infinité de chiffons qu’il avait retiré de ce particulier , à toutes
les époques •, je m’en occupe pendant plus de huit mois j je fais un
travail pénible mais tranchant, et tel que sur le vil et l’examen de
mon opération, et au moment où mon ouvrage était sous presse ,
l'individu fut forcé par vo ie amiable de renoncer aux soixante mille
fran cs, et de lui
compter lui-même
rrente-un
m ille
n eu f cents
francs.
J'avo u e j et je ne l’ai jamais dissim ulé, qu’à cette époque v o u s'
m 'àvez fait un cadeau d ’environ mille écus en bijoux et argenterie j
vous crûtes le devoir à mon désintéressement j j re ne vous prenais
aucun intérêt pour l’argent que je vous avais piété ; je n'avais rien
exigé pour les honoraires de mon travail qui avait duré plus de
huit mois j c’est tour ce que j ’ai reçu de vous ; mais mon ardeur
pour vous sortir du bourbier de vos affaires ne se borna point li.
I l existait un commencement de
procès
de comptabilité
entre
route la famille Champflour et les citoyens V iry , pète et f i ls , au
sujet de la charge de Receveur des tailles à
Clerm ont : j ’ai em
ployé encore pour cette affaire plus de six, mois. J ’ai fait de plus
un travail dans le mâïne genre du prem ier, quoique pour une
recette différente , à raison de laquelle on vous demandait quatorze
m ille francs que vous ne payerez jamais. Je me suis occupé d’une
multitude d’amres ; en un m o t, le fardeau de vos affaires a été écrasant
pour moi pendant nombre d’années ; je ne pouvais
pas
me flatec
d’avoir une heure de libre chaque jour , à moins que vous ne fussiez
en voyage.
L ’opération principale concernant les citoyens V iry
ment heureuse, mais elle ne procura pas de suite
parut égale
le montant de
son résultat; il y avait des lettres de change que j’avais endossées.
I l fut arrêté entre vous et moi de faire la yente de votre maisoni
A i
�<vy.
4
de C lerm o n t, comme l’objet le moins one'reux pour va» intérêts ;
elle est affichée ; des acquéreurs se présen ten t, niais pleins de la
même frayeur des prêteurs d ’arg e n t, sans aucune confiance pour
votre garantie , tous veulent une caution pour la sûreté de leurs
deniers.
II était naturel que cette caution fut prise dans la
famille , ec
il n’y avait que le citoyen B u ra u d , votre beau-père , qui avait con
servé son bien et celui de sa fe m m e , in tact,
qui pût s’y prêter j
niais il existait depuis plusieurs années une séparation de fait entre
vous et votre fem m e; vous ne voyez ni elle ni sa fam ille ; je me
chargeai de vaincre cet obstacle. Votre beau-père m’avait des obli
gations notables qui sont encore connues ; il adhéra à ma demande ,
et pouvait-il s’y refuser sachant tout ce que j ’avais fait pour v o u s ,
qui rejaillissait nécessairement sur ses petits enfans qu’il eût toujours
chez lui ! la ven te, par ce moyen , eût lieu le 1 6 janvier 1 7 8 6 ;
vous en touchâtes 15 ,6 0 0 francs qui étaient sa vraie v aleu r,
sans
néanmoins que j ’eusse pu opérer votre réunion.
L a maison ven d u e, vous répandîtes généralement dans la V ille
que je vous avais tiré d’affaire , que vous ne deviez plus
rien , et
qu’il vous restait votre bien de Beaumont , objet conséquent , que
vous avez augmenté encore par des acquisitions de biens nationaux.
Vous a v a l’abord séduisant; au premier aperçu il semble que vous
êtes incapable de trahir la vérité ; vous fûtes cru sur ce bruit que
vous aviez pris soin ■ d’accréilitcr. Des partis se présentent pour
l'établissement de vos
filles ; l’aînée et
la
cadette furent mariées
très-avantageusement.
M ais il s ’en fallait bien que la nouvelle du jour que vous aviez
répandue, celle d’avoir payé vos dettes , eut de la réalité ; il en
existait encore de très-pressantes , fondées sur des lettres de change
que j ’avais endossées.
Une découverte heureuse se présente ; un Officier de santé de la
commune de Clerm ont avait 17 ,3 0 0 francs à placer, vous allez à
Jui pour les obtenir, il vous répondit qu’il voulait une caution j
V
�j
vous m’ofFrez, H m’accepte : m a is, comme nous étions à l’époque
du 9 août 17 9 ° » 1 Officier de santé qui donnait cette somme en
num éraire,
voulait en
être remboursé de
m êm e,
et il
exigea
pour cela un billet d’honneur ; vous lui offrîtes le vôtre , il n'en
veut pas.; j'offre le mien , il l’accepte sans hésiter ; vous m’en donntz
un pour ma garanrie, où'votfe honneur ne fut pas inséré (i) ; vou s,
prites l’argent toujours pour éteindre des lettres de change.
D es emprunts et des paiemens se répètent encore ; le courant de
vos affaires était à-peu-près de cent mille francs par a n n ée; j’étais
le banquier et l’endosseur toujours généreusem ent, et sans aucune
sorte de bénéfice.
A l’époque de 1 7 9 1 , voici
quelle était ma situation avec vous.-
outre la lettre de change de 1 7 ,5 0 0 fr. de l’Officier de santé, assurée
par mon billet d’honneur , il existait de ma p a rt, solidairement avec
v o u s , nombre d’effets souscrits par nous d eu x, indépendament des
lettres de change que j ’avais endossées ; le tout était pour votre
compte ; j ’avais , et j ’ai encore vos indemnités pour ceux qui sont
contractés par sim p le billets ; en voici le détail :
i .° J e m 'étais obligé pour 20^400 francs
en
R ochefort de R iom , capitaine d’infanterie ; ce
faveur du
billec
citoyen
portait que
c’était de l’argent qu’on vous avait prêté ;
2 .0 Pour 11 ,6 0 0 francs au citoyen
Brunei , juge
au ci-devant
présidial de Clerm ont ;
3.0 Pour 6000 francs en faveur du citoyen G uyot 3 homme de
loi à Vic-sur-Allier ;
4 .0 Pour 4240
mont ;
francs à défunt Charbonnier , bourgeois à C ler-
( 1 ) Je reconnais que monsieur B oyer n’a consenti un
billet d’ honneur de
1 7 ,3 0 0 francs en faveur de monsieur B o n n e t, pour lui payer en argent pareille
somme , montant d’une lettre de c l:an g e , titie au profit dudit sieur Bonet par
moi , et endossée par ledit monsieur Boyer j je
leconnais , cîis-ji , qu'il n’a
fait le tout que pour me faire plaisir ; je promets
en
conséquence l'indem
niser dudit billet fait ce 5 août 1 7 * 0 . Signé CIiampflour-d’Alagnar.
�6
5 .® Pour 4 , 4 0 j francs 1 1 sous 6 den. à la dame veuve LamotKe.
de Clermonc ;
6 ° Pour 16 0 0 0 francs
au
citoyen A s tie r , cadet,
somme quo
vous avez touchée en numéraire j7 .0
E n fin vous me deviez personnellement pour argent prêté',',
suivant deux billets des i . er octobre et m novembre 17 9 0 , 7 7 5 0 6 :.,
outre un autre billet de 800 francs que j ’avais
consenti
en faveur
d’une nommée Martine D elarb re, et dont le montant avait été.,
touché, par votre femme et sa mère..
Champflour ! obliger pour vous mon honneur ! exposer ma personne
ft tous les instans à.la contrainte par corps / plus que \x valeur de mes pro
priétés! (i)vou s prêter mon argent sans intérêt ! ne rien prendre pour les
honoraires de mon travail qui vous a été si utile dans les différentes
affaires que j ’ai traitées pour vos intérêts ! qu’aurai-je pu faire dé
plus pour un p ère, pour un enfant, pour un vrai ami de tous les
rems ! et pour qui l’ai-je fait *
Il vous plaît de faire un voyage de long cou rs, à la même époque
de 1 7 9 1 . O h ! j ’avoue que ce départ qui ne m’affecta pas dans les
premiers mois de votre absence, me- tourmenta
cruellement après
une année révolue. L a disposition rigoureuse des lois sur- l’émigration présumée , votre
inscription comme
émigré
sur
la liste de.
l’administrâtion du district de C lerm on t, la crainte fondée d’être en
bute à tous vos créanciers porteurs de mes engagemens qui auraient
absorbé tour ce que je possédais, la triste perspective d’être obligé
de vendre généralement tout mon bien , et de manquer aux enga
gemens que j-’avais contractés en établissant mes enfans ; ce tableau,
était déchirant pour moi.
C ’est dans ces circonstances pressantes que , ne recevant aucune
nouvelle de votre p a rt, et votre famille n’en recevant pas non plus ,
je me conformai à la loi : .je fis enregistrer au
(0
Pendant quarante
ans d’un travail
opiniâtre ,
je
district
n'ai
J }OOQ fn a c s d’ac<jai';iùon , itidépenJuaent. de jnon fMiimoMKi.
vos enga?
fait «juc pour
�genacns et les miens. M a démarche a été précédée de celle de huit
autres de vos créanciers , et suivie d’un nombre qui s’élève à quatrevingt-onze parmi lesquels on y trouve votre femme et vos gendres
qui ont agi d ’après le conseil du citoyen
Grenier } jurisconsulte
■célèbre j actuellement Tribun.
Vous revenez enfin en 1 7 9 3 , j ’étais alors membre de la munici
palité de Clermonr. Votre retour au lieu de dissuader le public du
■fait de votre émigration
qui au vrai n’existait pas , opéra un effet
-contraire. A u moment de votre arrivée vous vîntes m ’accabler d’ami
tié , vous me fîtes voir vos papiers a je les trouvai bons. Vous
êtes appelé à la municipalité , vous n’osiez pas y paraître , je vous
rassurai. N ous y arrivons ensemble. Je m’abstiens de mes fonctions
municipales pour devenir votre défenseur, vos certificats sont pré
sentés , on élève des soupçons, vous m’aviez si fort convaincu de la
sincérité de vospièces que je les écartais avec fermeté,et vous-même pour
Faire disparaître tout d oute, offrîtes et demandâtes à la commune de
nommer deux commissaires pris dans le conseil général qui iraient
avec vous à Boulogne , où vous aviez resté , pour vérifier le faux
ou le vrai de vos papiers} ceci fut arrêté sur la fin de l’hiver 17 9 j .
J ’allai avec votre femme prier les commissaires d’avoir pour vous
les égards que se doivent de vrais citoyens j ils le promirent et au
total le voyage n'eut pas lieu.
D es lois sont émises pour l’incarcération des personnes dites sus
pectes en maison de réclusion. Vous vous cachiez tantôt à Pérignat»
outre-ailier , chez votre gendre , tantôt à B eaum on t, chez un cul
tivateur. Vous voulez absolument me voir A Pérignat pour vous
con soler, je ne pouvais pas y aller pendant le jo u r , crainte que
ma démarche vous
fit découvrir j je
pars accompagné du citoyen
C h a lie r, oncle de votre gendre , au milieu de la nuit. J e passe deux
jours avec vous ; je reparts ensuite la nuit toujours avec
la même
compagnie.
V ous me faites encore sa v o ir, et au citoyen Boirot , juriscon
sulte connu, votre retraite cachée à Beaumont j vous demandez abso-
�s
lument à nous voir et à, eonferer ensemble ; nous partîmes le même
s o ir , toujours la nuit} et après avoir passé trois heures avec v o u s,
nous ne nous retirâmes pas sans éprouver les plus grands dangers
avant de retrouver nos paisibles habitations.
H élas! pourquoi mon
dévouement pour vous ,
a-t-il
été sani
borne ? fallait-il après avoir engagé pour vous mon honneur, et
hazardé ma fortune, exposer encore ma vie? quel était donc le ban
deau fatal qui me couvrait les yeux.
Ici se présente un autre ordre de fait.
J ’ai agi envers votre frère D esm oulin comme
avec vous , et s’il
v iv a it , ce que je désirerais , je serais sans repentir à son égard} il
serait incapable de m’en donner.
E n 17 8 9 , votre frère eût le malheur de faire une partie de jeu
chez la dame F .......... ; partie
funeste ; il y perdit beaucoup : lé
fait est notoire. Il n'avait pas , dans le jeu , l’argent nécessaire pour
faire face à sa perte; il trouva du crédit. Ces sortes de dettes sonc
d’honneur, et votre fière n’en manqua jamais j on comptait sur lé
sien.
Il vint chez moi déposer sôn repentir et sa douleur. Il m ’annonce
q u ’il est sans ressource de votre cô té, quoique son débiteur. Il me
dir en même temps avoir trouvé 110 0 0 francs , mais à cette con
dition que l’individu qui les offrait , exigeait de sa part la cession
de 16 0 00 francs en principal qui lui étaient dûs par les citoyens
V iry , produisant par année 15 0 0 francs de revenu , revenu autorisé
par les lois d’a lo rs, s’agissant
de la vente d’une partie d’un office
de receveur des tailles.
Je fus révolté contre l’usurier bien connu de v o u s , et sans autre
examen j ’assurai à votre frère q u ’ il trouverait de l'argent sur ma
signature , et qu’elle était à sa disposition. Toujours plein d’honneur,,
il ne voulut en user qu’en me donnant des sûretés. Il me propose
daccepter une obligation de 110 0 0 francs à prendre sur celle de i t f
qui lui ¿tait due par les V iry , et en même temps une procuration
pour toucher les i j o o francs d’intérêts par année jusqu’au rembour
sement
�A °)S
■
r
9
seraient du principal dont le terme était Rx( par un traité, duquel intérêt
je devais lui faire raison sous la déduction de celui que je serais dans
le cas de payer moi-même pour lui aux prêteurs : car pour tout ce
que j ’ai fourni de mon c h e f, il ne fut jamais question entre nous
d’intérêt.
J ’acceptai cette obligation j 1 * délégation et la procuration, sa date
est du 28 mai 17 8 9 .
L e même jo u r , la dame Blaud , votre sœ ur, ayant des relations
avec la citoyenne Bughon , veuve Sauzade , celle-ci lui assura qu’elle lui
fera prêter mille écus par son frère Bughon , marchand , à six pour
cent. Votre frère vous en prévint ; vous vîntes chez moi tous les
deux , et comme l’obligation était déjà faite , et que pour en remplir
le montant il était naturel que je dusse m’obliger ; je souscrivis en
mon nom une lettre de change de 3 18 0 francs, en faveur de vous
Champflour aîné , q u i, à l’instant même en passâtes l’ordre à Bughon
qui en avait compté le montant. Cette lettre de change et l ’ordre sont
du même jour de l’obligation de votre frère ; tous ces faits voiis
sont connus , ainsi qu’à la dame Blaud votre soeur.
Cham pflour-D esm oulin, au moyen de cette so m m e, éteignit ses
dettes du jeu les plits pressées.
J ’avais déjà découvert 5000 francs du citoyen L escu rier, de Salers
pour lequel j ’étais chargé d’une affaire à
la cour des Aides ; j’en
instruisis les deux frères , le prêt fut fait le 3 juillet 17 8 9 un mois
et cinq jours après l’obligation de iz o o o francs. Desmoulin prit
l’argent en votre présence et en celle du notaire , du prêteur et de
moi-même. Lescurier exige six pour cent d’intérêt et donne quatre
années de terme. L ’obligation fut en conséquence portée à 6 10 0 francs ;
l’intérêt qui étoit de 300 francs fut stipulé payable chacune des quatre
an nées; il l’a été par m o i, ainsi que le principal précisément au
terme d’ab ord , à L escu rier, et après son décès à son frère comme
héritier.
C'est le citoyen B ap tiste, notaire à C le rm o n t, qui jouissait d’une
réputation méritée , qui reçut l’obligation que je consentis à Lescuritr.
B
�0
C ’e'tait lui-même qui avait i£çu celle que m'avait consînri Desmoulirt
un mois auparavant. C ’était lui qui était votre notaire affidé, il avait
reçu la vente de votre maison le 1 6 janvier 1 7 8 6 , il savait tout ce
que j ’avais fait pour les deux frètes C ham pflour, et que tout n’était
de ma part qu’office d’ami. M oins généreux
que moi envers les
Champflour , il se fit payer du coût de l’obligation ÿ ce qu’il n’aurait
pas exigé de moi dans aucun cas , et sur-tout existant alors un concor
dat entre les notaires et les ci-devant procureurs 3 à C lerm o n t, d’a
près lequel au:un ne devoir prendre d’argent pour les' affa'res qu’ils
pouvaient avoir les uns en
contractant, les autres en plaidant \
il me fournit sa quittance , (i) elle est de 7 1 fr ., et datée [du 10 ju il
let 17 8 9 , sept jours après l’époque de l’obligation. E lle est écrite de
sa main , et Baptiste est mort depuis plus de huit ans.
Ces trois premiers objets se montent à 9 4 5 1 francs> j ’ai payé de
plus d’après une note écrite, de la main de votre frère,
sa v o ir, i
1 3 !atin , m archand, le 8 juillet 1 7 8 9 , cinq jours après l’obligation ,
Î.6-; francs z s. 6 den. Dans le même temps à Case , perruquier ,
3 15
francs pour le montant d’ une lettre de change j à Lahousse ,
billardier-pautnier , ¿400 francs, montant d’ une autre lettre de change
qui était échue au premier janvier 1 7 8 9 ; il me remit la lettre de
change après avoir mis son acquit de mes mains et deniers ; il oublia
de le sign er, et moi-mème je n’y fis pas attention , la remise de la
lettre de change me suffisait. J e payai encore à F a b re , m archand,
m 8 fran cs, montant d’ une lettre de change souscrite par D esm oulin,
le 14 janvier 17 9 0 . Tous ces objets se portent à la somme de
francs i s. 6 den.
C ’est ainsi que j ’ai rempli l’obligation de iz o o o francj que m’avait
( 1 ) Je sous'iijné , notaire en cette ville , reconnais avoir reçu de M . Boyer ,
procureur en h cour des aides de cette V ille , la
somme de soixante-douze
livre» pour contrôle et réception d’ une obligation de
la somme de
six mille
¿eux cents livrer , consentie par ledit Boyer au profit du sieur Charles Lescufie r , le )
du p résen t, dont quitte. A Clerm ont-Ferrand , le 10 juillet 1 7 8 ? .
Quittance de 7 1
francs.
Baptiste,
�*
consentie votre frère, et vous voyez que j ’étais en avance de i < îji
francs z s. 6 den. 3 er ce n’est pas étonnant, outre le pouvoir que
j ’avais de toucher les 1 1 0 0 0 francs en principal , j ’avais celui de
to u ch er,
sauf
à
en faire
com pte,
les
ijoo
francs d'intérêt que
produisait chaque année le principal des 16 0 0 francs.
i Vous avez été présent à to u s, notamment aux emprunts d eB u gh o n
et Lescurier ; il vous a même p lu , sans que je l’eusse
m’en fournir de votre main la preuve écrite, (i)
ex ig é ,
de
C e billet n’a ni date ni signature , mais sa composition annonce
suffisamment son époque. J ’y suis qualifié de m on sieur, Bughon et
Lescurier le sont aussi, et ce mode était d'usage à la date des em prunts,
il n 'a cessé qu a l’explosion de la révolution. Vous m’avez écrit une
lettre en l’an 4 qui sera insérée en son lieu dans ce mémoire pour
prouver votre p erfid ie, où vous m ’avez donné la qualité de citoyen t
et sur-tout celle d ’ami.
. D e ces faits résulte cette réflexion qui porte la vérité à l'évidence,
vous qui me deviez ; moi q u i, notoirement n’empruntai jamais que
pour vous et votre frère, peut-il tomber sous les sens qu'ayant le
droit d’exiger de vous q u i, depuis que j ’ai eu la fatalité de vous
connaître , n’avez cessé de me
des effets de Buglion
devoir bien au-de-là du montant
et L escu rier; j ’ai emprunté pour moi sans
besoin personnel, sans prétexte pour aucune affaire ni pour moi ni
pour mes a m is, à un intérêt de six pour cent ; non , la raison
rejette à jamais une' pareille idée.
J ’ai f a i t , pour m’assurer le remboursement de cette obligation
toutes les poursuites auxquelles les lois m ’ont forcé. Diligence inu
tile contre les Viry qui alors avaient perdu, la charge
de receveur
des tailles ; tentatives infructueuses d’exécution mobiliaire ;
tion au bureau des hypothèques. J e
(0
inscrip
11’ai rien touché des V iry , ni
Monsieur Boyer a emprunté pour mon fr è r e ,
x .* A monsieur B u g h o n ..................................................... jo o o fr.
» •° A monsieur l’Abbé A u b i e r ....................................... 1* 0 0
A monsieur Lescurier........................................... jooo
B 1
�♦
'
Yl
principal ni intérêts ; v o u s v o t r e
frère et le citoyen Blaud n ’avea
rien touché non plus. L es poursuites contre les V iry nous ont été
communes. M ais j ’étais nanti du traité passé entre les V iry et vous
tous , et c’est ici le premier aperçu de votre conduite astucieuse i
mon égard. V o u s seul essayâtes inutilement que je vous en fisse la
remise , et je ne le tenais que du citoyen Blaud qui avait avancé
les frais d’enregistrement ; je m ’y refusai : cet acte m’était devenu
commun. Je vous en offris le dépôt. Il a eu lieu le premier jour
complémentaire de l’an 4 dans l’étude du citoyen Chevalier t notaire
i Clerm ont. (1)
( 1 ) Par-devant les notaires à Clerm ont-ferrand , soussign és, sont comparus
les citoyens Je m -B ip tiste -C e z a r Cham pflour , et Pierre B o y e r , juge au tribunal
civil du département du Pai-de-D 6m e ,
Lesquels ont remis et déposé en nos mains ,
pour être placé
au
rang de
nos minutes ,
1 .® U n traité sans signatures p rivées, passé entre
Jean
et André Artaud-
D evivy , Jean -C ezar C h am pflour, Josephe Champflour , M trie-C lau d ine Champ
flour , et Jean Giraud-Blaud , par lequel lesdjts V ir y , pire et fils ,
obligés à payer quatre mille cinq cents francs tous les ans , pour
se
la propriété des deux tiers du prir d« la charge de receveur des tailles
ci-devant élection de Clerm ont , avec convention que la
sont
raison de
de la
rente de quatre mille
cinq cents francs ne pourra être rachetée que dans dix ans , moyennant le
capital de quarar. te-hui: mille francs. Ledit acte fait quintuple , le 14 décembre
1 7 8 1 , et a éti enregistré à Clerm ont le 1 7 janvier , 1 7 8 4 par G iron qui a reçu
cent cinquante-une livre dix sous. Ledit acte étant sur une feuille grand papier
com m un; commençant par cet mots ;
nous soussigné
A n d ré
A rtaud-D eviry ,
et finissant par la date déjà énoncée en les signatures suivantes j D eviry . p i r e ,
C h aaipflou t-J’A la g n a t, C h am p flo u r, capitaine, D eviry , fils , B lau d , avec cette
note ; cet acte a été passé dans le cabinet de monsieur C hazerat , intendant
d'Auvergne , ensuite de laquelle est sa sign atu re, scellé le 30 ja n v ie r;
1°
L ’expédition d’ un jugement contradictoire, rendu entre les mêmes parties
en la sénéchaussée de C le rm o n t, le 19 janvier 1 7 8 4 , portant
condamnation
du paiement de ladite rente ;
3.0 Autre expédition de jugem ent rendu
entre
Iesdites
parties
devant électian de Clerm ont , le 3 avril de ladite année 17 8 4 ,
ladite rente , scellé* le 7 avril même mois 3
ju
en la tisujet de
�4#
: ; ............. .
, . . . . ■
.
: .r
“ C et acte authentique ajouté à votre écrit annonce bien certainement
la parfaite connaissance que vous aviez du composé de l’obligation
de iz o o o francs que m 'avait consenti votre frère, puisque vous en
reconnaissiez vous-même la sincérité.
Il existe encore d'autres preuves écrites , dont l’une est authentique
par la production que vous en avez faite vous-même à l’audience du
tribunal d’appel.
■ Vous aviez tenu note de tous les objets qui avaient rempli l’obli
gation de iio o o francs , vous les aviez fait transcrire par votre aflidé
Louirette , ainsi que vos moyens de résistance suggérés par votre dis
position ordinaire de non payer, et vous n'avez contredit dans cet
écrit, en aucune manière , les articles de Bughon et Lescurier.
L a finale de cet état , dont il est fait mention dans le jugenienc
du tribunal d'appel j porte à la troisième page recto une invitation que
vous m’adressez pour nommer des arbitres. C et écrit sans date est nécessairement antérieur au traité qui a
eu lieu dans la suite entre n o u s, et dès qu’il contient les emprunts
faits à Bughon et Lescurier que vous n’avez pas contesté, il prouve
de nouveau que vous aviez la
connaissance parfaite de ces deux
articles, et forment l'aveu le plus formel que vous me les deviez
d’après notre traité.
Coste , également votre aflidé , a fait par votre impulsion quelque
chose de p l u s , et qui se rapporte toujours à votre procédé d'alors.
4 • n Enfin
,
un commandement de p a y e r , avec signification desdits
deux jv g e -
tnens , ainsi que d'une cession fa ite au citoyen B o y e r ,
ain si que
ledit exploit en date du 6 mars
dudit 'm ois. Desquelles
1 79 f , enregistré le 7
du
traité ,
pièces qui ont été paraphées par nous notaire , le dépôt en a cté requis par les
comparans , comme commun entre eux , à l'effet d'en retirer des expeditions pour
la poursuite de leurs; droits.
D e quoi nous avons
dressé le présent acte en
l’ étude , le 1 . “ jour complémentaire de l’an 4 de la République , une et indi
visible. Les parties ont signé* la minute demeurée
à C h e v a lie r , n o ta ir e , a
¿té enregistrée audit C le rm o n t, le 3 complémentaire de
B iy le qui a reçu une livre en numéraire.
la
même
arrufe par
�%
< V v
*4
J V i un. état écrit de sa mnirç (i) qui contient n o n
seulement le
détail des objets qui remplissaient ec au-delà l’obligation de iz o o o fr»
mais encore la réduction en numéraire d’après l’échelle du rembourlem ent que j ’avais faite en assignats des effets de Bughon et Lesçuriert
car se ?ont les seuls qui ont
été remboursés en papiers, n’ est-ce
pas encore un, nouveau surcroîc de preuve ?
E n résumant cet article. Ecrits formels avoués de votre part. Acte
notarié où vous avez concouru , écrit de vos deux serviteurs Louirette
Sommes payées p a r
le
citoyen B o yer
en
l ’acquit du
citoyen Desmoulin.
_
Lettre de ch an ge, 18 mai 17 8 9 au citoyen Bughon ,
Remboursement 3^180 fra n c s, acquittée le 1 7 décembre 1 7 9 1 ,
en assignats. c i .......................... ............................................. 3 ,18 0 f r .
Plus pour intérêts et frais . . . .
ijj
de
E n tout.................................3 ,3 15
Réduction à l'échelle
de dépréciation.......................... 1 3 5 3 1 . u s
3 juillet 1 7 8 9 , obligation du cit. Boyer en faveur
du citoyen Lescurier , de 6 , 1 0 0 fran cs, p ayab le,
savoir 300 fr. au 18 mai 17 9 0 , pareille somme de
300 fr. au 3 juillet 1 7 9 1 , encore 300 fr . le 3 juillet
1 7 5 1 , et les 5,30 0 fr. restans au 1 juillet 17 9 3 .
Quittances des sommes ci-dessus.
4 Juillet 179 0 . . .
13
13
J ui l l et 1 7 9 1
Jui l l et I 7 ÿ i
. . .
. . .
300 fr. réduits à
300
3 00
300 f .'
réduits à
réduits à
170
107
3 Juillet 17 9 3 . . . Î 3 ° °
réduits à
Coût de l'o b li g a t io n ................................
1908
71
\
m
fixoo f r . réduits à 4 757 fr !
; 110
31 M ai 17 S 8 , à Lahouîse 1,4 0 0 fr. échéans au
Remboursement i / 'j a n v i e r 1 7 8 9 , « ............................................................ 14 0 0
en numéraiie.
8 Juillet 1789 , au cit. Blatin 16 7 liv. 1 s. , ci. . 16 7
10 Juillet 178 8 , au cit. C ase 3 1 J liv. payables
au 10 juillet 17 8 9 , ci.................................... ............... ... • 3 1 J
1 4 J a n v i î r 1 7 9 0 , au cit. F a b r e j n 8 liv. payables
le 1 4 avril > 7 ?o , ci,
• .............................. ....
9} » 0
1
ii
»
1
m
*4
�»s
et C oîte. II est donc démontré matériellement que les emprunts que
j'ai fait de Bughon et Ltscurier étaient pour votre frère. Cependant
je les ai payés , j ’en rapporte les quittances et les effets j c’est donc
encore une fois la dette de votre frère que j ’ai payée et non la m ienne.
E t vous vous êtes obligé de m’en faire raison ; vous savez encore
qu’avec des assignats qui valaient cent ¿eus vous m 'avez remboursé
85 5 0 francs prêtés en num éraire,
et vous savez aussi la promesse
verbale que vous m’aviez faite lors de ce remboursement de m’in
demniser. Vo.us étiez instruit comme moi que j’avais payé Bughon
et Lescurier en même espèce, après des poursuites du premier au tri
bunal de com m erce, c’est d’après cela que vous avez formé vousmême le traité qui contient nos obligations. L es deux doubles sont
écrits de votre m ain, mon prénom est laissé en blanc dans celui qui
m ’est destiné ; cet acte se présente sous l’aspect du sentiment et de
délicatesse. M ais on verra bientôc la vôtre disparaître. (1)
( 1 ) Nous soussignés Jean Baptiste et C ezar Chatnpflour , propriétaire , habi
tant de la ville de C lerm otu -ferran d , d'unt p a r t ;
Et
B o y e r , juge au tribunal civil du département du Pui-de-
D ôm e , d'autre part -,
Désirons terminer amiablement entre nous le compte que nous croyon <nou*
devoir respectivem ent, mettre à l'abri notre délicatesse de
l’ égard l’un de l’autre , et maintenir de cette manière les
toute suspicion à
sentimens
d’estime
et d’amitié réciproque qui ont régné depuis lang-tem s entre nous , avons fait
cjioix des citoyens Louirette et Cosre , nos amis com m uns, à l'effet de pro
céder audit compte , lequel est relatif aux objets dont le détail suit :
i . ° Suivant une procuration passée devant Baptiste , notaire , le 1 juillet 17 8 5 ,
Je citoyen Champflour-Desm oulin s'esr reconnu débiteur envers moi Boyer ,
d’une somme en principal de douze mille francs , et m’a autorisé à me retenir
cette somme sur la créance à lui due par les citoyens V iry .
Quoiqu’il paraisse par cet acte que moi B oyer étais alors créancier de cette
Jomme , la vérité est cependant que je devais en faire l’ emploi à l'acquitterrçent
«les différentes dettes du citoyen
D esm oulin, et
que ce n’était que par
ce
m oyen que j’ en devenais véritablement créancier. Cette condition de ma parc
n’était point écrite, elle était simplement Une suite de la confiance qu'avait ca
Rio! le citoyen Desmoulin , itère du citoyen Champflour.
�\ r
'i<S
D e ce que j'ai dit jusqu'à ce m o m en t, il résulte, i . ° que je vous ai
rendu de ^om breux et d’importans services , 2.0 que je vous ai prêté
en numéraire 8550 francs, en 1 7 9 0 , que vous m’avez remboursé en
assignats , moyennant cent écus , à la fin de messidor an j ; 30.
que
j ’ai emprunté et remboursé pour votre frère 9452 francs à Bughon
et à. L escu rier, indépendamment des autres objets que le jugement
du tribunal d'appel vous a condamné à me rembourser j des écrits
assurent la véracité de tous ces faits.
Il est inutile de parler de la reconnaissance que vous me deviez , et
qui aurait dû suivre votre existence. Plein d’indignation je passe au
i . ° Les 1 . "
octobre et n
novembre 1 7 9 0 , il fut
prêté
par
B oyer à moi Champflour , une somme de 7 7 5 0 francs. V ers
m oi Boyer
le
citoyen
le même tems ,
«mpruntii une somme de 800 francs pour le compte des citoyenne*
Buraud et Chîm pflour. L ’une et l’autre
de
ces
sommes ne m'ont été rem
boursées qu'au moment oa les assignats éprouvaient une perte considérable.
Dans ces circonstances , pour nous indemniser réciproquement de
la perte
q u ’ont éprouvé les assignats aux époques des paiemens que ftioi Boyer ai dû
faire sur le prix de la
cession Je
nooo
francs ci-dessus
énoncée ,
et moi
Champflowr , des remboursemens aussi ci-dessus énoncés.
Nous consentons à être réglés par les citoyens Coste et Louirette , et nous
leur donnons pouvoir de procéder et arrêter les comptes dont il s’agit • et ce
d’après et sut le taux de l'échelle de dépréciation du papier monnaie , aux diffé
rentes époques des paiemens et remboursemens par nous faits ; en conséquence
nous fournirons tous renseignemens nécessaires,
et
remettrons aux
C o ste et Louirette ; s a v o ir , moi Boyer les quittances justificatives
citoyens
de l'emploi
des 11.0 0 0 fra n c s , ain<i que les notes , titres et docuinens relatifs audit compte .
et moi Chamj.flour les effets et les acquits des sommes dont j ’étais débiteur ;
et de tout quoi il sera dressé un é t a t ,
au bas duquel
sera le récépissé des
citoyens Coste et Louirette» lesquels compteront aussi les intérêts conformé
ment à la loi.
Promettons souscrire audit compte , et de l’exécuter suivant s* teneur , sans
appel de notre part. A cet effet , celui de nous qui se t r o u v e r a
réliquataire ,
ptdmet de satisfaire l’autre du montant dudit réliquat.
Fait double sous r.os signatures p rivé e s, à Clermont-ferrand , le 15
fructidor
an 7 de la République française, Signé Cliam pflour et Boyer.
développement
r
�développement de votre perfide calomnie et de votre mauvaise foi ;
à laquelle j ’ajouterai la marche astucieuse dont vous avez usé dans
votre défense pour tromper la religion des juges du tribunal d’appel ,
et me surprendre moi-même.
Cro;rait-on que ce traité qui semble n’avoir été dicté que par des
intentions pures , amicales , par le sentiment et la délicatesse entre
un bienfaiteur et celui qui jouit de ses bienfaits ? croirait-on , d is-je3
que l'ingrat à qui j’ai affaire , aidé de Louirette , à qui il ouvre et
ferme la bouche à volonté, ait osé répandre dans le public qu’il
m 'avait trompé dans ce traité., et de s’en faire un trophée ? le fait
est cependant vrai. J ’en fus instruit pat une personne dont la véracité
n’est point suspecte , en présence de Coste qui alors étoit à lui-m êm e,
et je d ois, à la v érité, qu’en ce moment il me sembla n’être pour rien
dans le concert entre vous et Louirette.
Cette annonce à laquelle je ne crus que par la confiance que j ’a
vais dans celui qui m’en fie p art, m ’étourdit à tel p o in t, que je la
lui fis répéter plut d’une fois.
J ’examine , je réfléchis sur le piège j j ’y apperçois bien de l’astuce,
mais en me référant à la chose } je crois pouvoir me rassurer.
E ffectivem en t, quel est le résultat de ce traité, on y voit autre
chose si ce n’est, i . ° que vous vous obligez à me rembourser principal
et intérêt des 8550 francs prêtés en num éraire, sous la déduction â
l’échelle des assignats que vous m’aviez donnés , à la fin de messidor
an j , qui ne valaient pas cent écus. Vous ne pouvez contrarier cette
date qu’en rapportant les effets et les acquits, ainsi que vous vous
y êtes expressément obligé par le traité dont vous êtes l’auteur. E t
moi Champflour m ’oblige de rapporter les effets ' et les acquits dont
j ’étuis débiteur.
i.°
Q u e , de ma part , je ne devais vous compter qu’à l’échelle les
remboursemens que j’avais faits en assignats à Bughon et Lescurier;
vous les connaissiez, il existe des preuves écrites du fait , tux seuls
ont été payés en papier, tous les
autres l’ont
été
en numéraire,
le substantiel du traité 11e contient rien de p lu s, vous et moi étions
C
�$oo
r
/»h -
'is
V
obligés très-form ellem ent, il n’érait besoin que de calculateur pout
compter
et régler le compte qui était aisé. Vous fites choix do
Louirette et Coste pour faire ce compte , j ’y consentis. Pouvais-je
être en «iéfiance contre de simples calculateurs ? Il ne pouvait même
pas me venir à l’idée de les prendre pour juges arbitres, nous avions
tout jugé nous-mêmes. N o s opérations étaient absolument indépen
dantes des calculateurs. _
1
D ’après ce traité, je croyais que le compte serait fait le même
jour , vous aviez d’autre vue. C e traité ne contenait point de terme
pour l’opération des calculateurs , c'est ici le commencement de votre
m anœ uvre, vous deviez et il n'est pas dans votre goût de
paytr.
Vous ne remettez aucunes pièces aux calculateurs. Votre affidé Louirette
que je pressai pour vous les demander, ne me montra que des dis
positions semblables aux vôtres ; c’est vous qui le faisiez mouvoir ;
vous crûtes l’un et l’autre que ce calcul était à votre v o lo n té, et par
conséquent à jamais interminable.
C e procédé augmenta mon indignation. J e vous en témoignai mon
m écontentem ent, je fus berné plusieurs jours par vous et L o u irette,
et ce ne fut qu’à ce moment que
je fus convaincu de votre but
insidieux. Je vous écris une lettre très-explicative sur tous les objets
que vous me deviez ( vous l’avez produite à R iom ) je vous fixai
le ternie de votre réponse. V ous ne m’en fites aucune , en consé
quence je vous fis citer en conciliation devant le juge de paix.
L à , plusieurs interpellations vous furent faites , vous résistâtes à
toute explication, vous vous référâtes à notre traité que vous qua
lifiâtes di compromis. L a conciliation n’ayant pas eu lieu 3 je vous
citai au tribunal civil du département du Pui-de-Dôm e , je conclus
contre vo u s, conformément à
nos obligations, je vous demandai
les 8550 francs , sauf la déduction du montant des assignats, et tous
les objets qui avaient servi à
remplir l’obligation de votre frère.'
S o u s nies offres de ne vous compter qu’à l’échelle
de dépréciation
les remboursemens que j ’avais faits à Bughon et Lescurier. Je révoquai
Louirette et C o ste , la loi
m’en donnait le d ro itj mais
loin
de
�■*?
révoquer vos obligations et les m ien n es, j ’en demandons au con~
traire l’exécution ; je vous citai en justice , et enfin l'affaire fut portée
par suite de la nouvelle organisation judiciaire au tribunal de C lerm o n t, lieu de votre dom icile, où je remplis la place de premier
juge.
.
; D ès la première citation vous aviez annoncé très-publiquement
que votre défense allait paraître dans un mémoire imprimé que vous
supposâtes être déjà fait. Ce projet me faisait plaisir , mais la réfle
xion vous fie craindre ma réponse
elle
aurait démonté la trame
calomnieuse sur laquelle vous aviez fondé toutes vos espérances. Pour
avoir toute liberté de me calom nier, vous avez préféré de ne point
écrire , système affreux qui vous a réussi pour le moment. Vous vous
laissez condamner par défaut à .C lerm ont,
lieu de votre d om icile,
où vous étiez connu. Vous interjetez appel à Riorn , même silence
de votre part, et ce n’est qu’à l’audience
sans que je ptisse ni dusse m’y
attendre , que vous étalez tout le fiel de la calomnie et toute la noir
ceur de l’ingratitude , après avoir eu soin de faire circuler sourdement
par quelques émissaires les fausses impressions que vous vouliez semer.
Quelle différence de ce langage à celui que vous m’avez tenu ,
en l’an 4 , dans une lettre que vous m’avez écrite à R io m (1 ).
Il est aisé de répandre toutes sortes de calomnies qui ne vien
nent que trop naturellement à
une
imagination malfaisante. Vous
u ’aviez rien écrit. J ’étais nanti de titres et de bonne foi ; ma sécu(1)
C h er citoyen et ami ,
V ous êtes attendu chez vous aujourd'hui à ce que m’a dit votre voisin lie
boulanger. Comme j'ertvoie à Ilium pour conduire les acquéreurs de mon vin ,
il vous sera peut-être commode de vous servir de la voiture qui doit re v en ir
ce soir ; c’ est ce qui m’ engage à vous écrire deux mots. M on domestique vous
remettra ma lettre , et vous conduira si vous ctes
dans
l’intention
à Clermont.
Salut et fraternité ,
et sur-tout votre a m i,
C H A M P F L O U R .
de venir
�‘i *
fîrs er celle de mou défenseur étaient parfaites; lui et moi ne.poa**
vions nous attendre qu’à un succès complet ; cependant vos voci
férations j les menées qui les avaient précédées et le peu de prix
que mon défenseur et moi y mîmes } ont fait que je n’ai été qu’im
parfaitement défendu et que vous avez recueillis en partie le fruit de
votre surprise qu’on va bientôt voir suivie d'une scarfdaleuse mauvaise
foi.
“
J ’ai exposé
yos
r>
obligations et les miennes ; vous-même sembliez
les avoir basées sur la bonne foi et la délicatesse j pouvais-je m ’at
tendre que vous y manquassiez ? je n’avais d’autre préjugé
contra
vous sur l’honneur que celui qui paraissait naître de votre affaire
a v e ; l’officier de santé } et vraiment je n’étais pas encore convaincu.
L es moyens sourds dont vous aviez frapé l ’oreille de nos juges
et des personnes marquantes i R iom , furent que ¡’étais terroriste,
et cette expression annonce la férocité.
A l’audience, et d’après le caractère sous
lequel vous
m’aviez
peint j votre venin y ajouta celui de dénonciateur effréné.
M o i terroriste ? raportez-en le moindre trait ; je souscrirai à tout
ce vous voudrez. Il existe dans l’affaire , et envers v o u s, des preuves
d’humanité et de bienfaisance de ma
p a rt, qui
sont
absolument
éloignes de ce caractère , et je n'ai été remarqué 3 djns tout le courant
de la révolution que par les mêmes traits.
M oi dénonciateur !. je vous donne le m im e d é fi^
J e ne1 dois cependant pas oublier qtte votre noirceur m’a présenté
comme tel à l’audience, et comme vous ayant dénoncé vous-même j
votre supercherie , ou pour mieux dire votre cruelle méchanceté vous
porta à dire que moi seul avais fait une déclaration au district d’adminis
tration de Clerm ont , do différons engagemens qui existaient entré
nous. J e vais au départem ent, dépositaire de ces registres ; je ne me
trouve que le huitième sur la liste , et je vois le nombre de vos
dénonciateurs ( si c'est l’être que de conserver ses droits d après une
loi impérative ) s’élever à 91 j votre femme et vos gendres sont de
lu partit ) au n.° jit f .
�S o 'S
i r
Ces premières imputations ne frapaieric que sur l’opmion \ I*
mienne a été et sera toujours pour l’humanité , l’honn eur, la déli
catesse et la bonne foi.
M ais vous m ’aviez préparé quelque chose de bien plus amer , tou
jours puisé dans le même fonds.
J ’ai dit que j'avais remboursé
pour
D esm o u lin ,
votre frère ,
¿,4 0 0 francs à L ah o u sse, paumier-BilIardier à Clerm ont } étranger
d'abord à cette com m une; vous imaginez er suggerez à Lahousse
que c’était
vous qui aviez
fait ce
remboursement. O n connaîc
aujourd’hui assez généralement les moyens donc vous êtes
capable
d ’user. Lahousse n’est pas ignoré non plus.
Lors de ce remboursement, Lahousse reverse entre vos mains la
somme q t ’il avait reçue de m o i; vous
vous arrangez sur l'article
de l’intérêr. L a finale est que Lahousse a éprouvé même
perte. J e
lui avais donné du numéraire , ec il n’a reçu de vous que des
assignats dans le tems de leur baisse. J e tiens ce faic de Lahousse
lu i-m êm e, à la seconde entrevue que j ’ai eue avec lui depuis plus
de cinquante ans que j'habite Clerm onr.
C epen dant, à la veille de l’audience , vous obtîntes de lui une
déclaration contraire , vous la fîtes valoir méchament , autant dans
le public qu’à l’audience, toujours
dans
la
vue de
rendre nia
probité équivoque.
Pour donner l'air de la vérité à cette déclaration ,' vous im asinez
O
une nouvelle im posture, vous faites plaider que votre frère était
malade , er qu'il avait de l’inquiétude sur l’échéance de cette lettre
de change, et pour marquer votre disposition à l’obliger , vous
faites paraître une quittance de Lahousse 3 datée du 8 juillet 1 7 88.
Cette quittance toute fraiche quoique écrite sur
un vieux chiffen ,
ne pouvait d'aucune manière quadrer à vos vues'; ec d’abord , il
n’y •était pas dit que c’était pour votre frère que vous aviez p a yé;
elle vous est donnée pour
votre
d’usage de prendre une quittance
propre
dette ;
particulière
d’ailleurs
est-il
lorsqu’on acquitte
une lettre de change , la remise qui en est faite par le créancier no
6uffit-elle pas ? ■
�11
A u fa it, la lettre de change est datée du 3 1 mai 1 7 8 8 , et n’était
payable qu’au i . er janvier 1 7 8 9 ; quelles pouvaient être les inquié
tudes de votre frère au 8 juillet
1 7 88.
Il
n'y avait qu’un mois
et huit jours qu’il avait emprunté , et il avait terme jusqu’au i . er
janvier 17 S 9 . Finissez
par rougir de
votre concert odieux avec
Lahousse.
A ussi le tribunal d’appel ne s’est point arrêté à cette trame ; il
serait en eâF;t bien dangereux et bien inconséquent de faire dépendre
le sort de celui qui a payé , et auquel le titre de la créance a été
rem is,
d’ une
déclaration
quelconque
provoquée et
surprise par
l'homme qui cherche sans regarder au prix , à en perdre un autre y
quel fléau ne serait-ce pas pour la société ?
Vous allez plus loin. Oubliant avec délice la délicatesse et les
sentimens qui paraissaient vous avoir conduit lorsque vous conçûtes
notre traité , vous avez l’impudeur de retracter vos engagemens sur
l ’indemnité des 85 50 francs, pour lesquels, en me remboursant en
assignats 3 vous ne m ’avez pas donné cent écus..
Conduit pat le même sentim ent,, vous vous rejettes
gation de iio o o francs que m’avait consentie
voulez que ce soit pour moi
votre
que j ’aie emprunté
sur l’obli
frère; vous
de Bughon et
Lescurier.
Vous produisez à la première audience un état écrit de la main
de votre frère , vous en aviez déchiré ou couvert d ’encre les dates ,
vous le fires disparaître aussi-tôt , et
pour
toujours
sans doute:,
parce que votre conduite y était dévoilée.
A la première audience j ’avais articulé que c’était1 la dame B la u d ,
votre sœur , qui avait procuré à votre frère Desmoulin les milite
écus empruntés de Bughon , et j ’avais dit la v é rité ; vous la fires
paraître à la seconde audience ; mais au moment
me fit des questions, et où
où
le président
j’allais le requérir d’en faire a votre
sccur, vous avez soin de la faire disparaîrre ;
vous craignîtes que
sa candeur ne lui permit pas de déguiser la véritc.
�Vous ne pouvez pas contredire les faits que je viens de p o se r, le
tribunal d’appel et tout le bareau en sont témoins.
Enfin , par la ruse , la surprise , la calomnie et la mauvaise foi
vous êtes parvenu à me tromper et tromper la justice. L e jugement
que j ’attaque, rendu entre vous et moi le 27 germinal dernier au
tribunal d’appel séant
i
R iom sur délibéré , au rapport du citoyen
C a th o l, a rejeté vos obligations, soit sur l’indemnité relative aux
■8550 francs prêtés en num éraire, soit les emprunts que j'avais fait*
pour votre frère de Bughon et Lescurier. I l vous a condamné à me
rembourser l ’efFet de Lahousse et ceux de Blatin , Case et F a b r e , à
compenser les d épen s, excepté le coûc du jugement auquel vous êtes
condamné.
Vous allez célébrer à votre maison de cam pagn e, à Beaum ont,
avec toute la pompe possible, le triomphe de vos ruses j vous fûtes
généreux 3 parce que vous étiez persuadé que c’était moi qui payais.
Hélas ! parce que je vous avais démandé ce qui m ’était si légiîimem enr dû , fallait-il après ce jugement qui me l’avait refusé vous
mépriser assez vous-même pour donner une fête ?
-
L a fête ne vous satisfit pas, vous fûtes le seul qui y savourâtes
le fruit de vos intrigues. Vous imaginâtes d’autres moyens pour donner
de l’aliment à votre calomnie. M ais très-inconsidérément , vous pu
bliez et faites publier par Louirette que les chefs dans lesquels j ’avais
succom bé m’étaient bien dûs , mais que vous vouliez que je ne pro
fita pas du cadeau que vous m ’aviez fait. Ingrat / un présent n’est
jamais fo rc é , et si j ’eusse pu prévoir ton ingratirude, ma porte
aurait été fermée pour jamais à toi et à ton présent. T u ne m ’as
pas payé un centime par heure pour le temps que tu m’as fait perdre»
et dont j’ai privé la foule d’honnêtes gens qui affluaient chez moi.
Toujours furieux dans votre haine qui n’avait d’autre but que de
vous dispenser de me payer, goûtant le plaisir de m’avoir fait perdre
quinze ou seize mille francs que vous avez reconnu me devoir après
le jugement. Vous heurtez à toutes les portes pour me faire destituer
de ma place de prem itr juge au tribunal civil de l’arrondissement de
�*+
C le rm o a t, •chef-lieu-du département du Pui-de-D om e. Ÿ ou s répandes
impudemment que ce jugement me déshonore : comme s’il éta^t
possible d’être déshonoré en demandant son bien à celui qui , par sa
mauvaise foi , cherche à vous le faire perdre. Vous avez la bassesse
de chercher à en persuader les défenseurs au tribunal civil qui n’a
joutent aucune f j i à votre délation. Vous me forcez par-là de faire
imprimer et les motifs et lts dispositions de ce jugement. Vous
espérez par suite de votre calomnie de trouver les moyens de frapper
l’oreille du gouvernem ent, et vous n’avez rien négligé pour y par
venir ; mais quoique je sois demeuré calme et tranquille , il m’esc
revenu qu’il ne vous était resté de toutes ces démarches que le cruel
désir de me faire plus de mal encore.
Vous affectez d’oublier ce qui est connu de tout le département.
D ans aucun temps je n’ai demandé de places. J ’étais content de
m on premier état dont j ’ai toujours joui avec agrément. Celles dont
j ’ai
été honoré ne m ’ont pas été données par l’effet de l’intrigue,
mais de la confiance et de ma soumission aux lois. J ’appelle sur la
véracité de ce fait tous mes concitoyens , la députation passée et
présente du département du Puy-de-Dôm e et le gouvernement luimême. Je n’ai jamais dit ni écrit à aucune personne en place un
mot qui tint à la sollicitation.
J e ne m’abaisserai pas jusqu’à demander à mes collègues dans les
différentes fonctions que j ’ai remplies des attestations de ma conduite ;
mais ne me donnez pas un défi à cet égard , vous seriez couvert
de confusion par le démenti quelles vous donneraient de toutes vos
calomnies.
Il
est malheureux pour moi que je ne puisse pas m’occuper dans
ce moment des moyens accablans que j’ai à présenter, et qui n’on;
pas été plaidés au tribunal d’appel. L a loi me force à me restreindre aux
infractions qu’elle a soufferte par le jugement dont je poursuis 1*
cassation , et je passe aux moyens.
Premier moyen de cassation.
L a cause a été plaidée pendant deux audience* \ à la seconde et
le
�fc i j
germinal il fut ordonné tm délibéré au rapport jldu ciroyen
C ach o t, à qui les pièces furent remises sur-le-champ ; ce délibéré ne
fut prononcé que le 27 , et l’a été sans rapport préalable ni plai_
doirie de la part des défenseurs. J ’étais à l'audience , et je n’ eus
q u ’à entendre le jugement q"ue j ’ attaque , ce qui est une contraven
tion aux articles I I I et X de la loi du 3 brumaire an z , qui dans
ce cas exige un rapporc à l’audience , publiquement.
Second moyen.
C e ju gem ent, en vous condamnant à me payer 4200 francs dont
vous ne m’aviez pas fait des offres , compense les dépens, excepté
le coût du jugem ent auquel vous êtis condamné. Autre violation
des dispositions de l’article premier du titre X X X I de l’ordonnance
de 16 6 7 ainsi conçu:
« T oute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens
» indéfiniment j sans que , pour quelque cause que ce s o it, elle en
» puisse être déchargée. «
Troisième moyen.
L a première et la plus sacrée de toutes les lois pour la société
et pour les individus qui la com pose, est celle qui maintient les
conventions et les obligations contractées volontairement \ les liens
qui les soumettent à leur exécution 11e peuvent être brisés que dans le seul cas où leurs engagemens auraient pour base une cause illicite
et prohibée.
C ’est pour le maintien de cette loi précieuse que nos législa
teurs ont assujetti les juges de ne porter leurs décisions q u ’en les
motivant et en annonçant publiquement la loi qu’ils ont appliquée,
afin que les particuliers qui ont le malheur djavoir des procès , ne
puissent pas ignorer que c’est la loi qui les a jngés plutôt que les
juges qui doivent en être les esclaves. On va
voir à quel point la
première section du tribunal d’appel séant à R iom s’est écartée de
ce principe.
Une loi du î x frim aire an 4 s’exprime ainsi : « considérant que
D'
�pour arrêter les vols que font à leurs créanciers les débiteurs dô
» mauvaise foi en les remboursant en assignats au moment où ils
» n’ont aucune v a le u r, etc. etc. »
U ne autre loi du 5 thermidor an 4 a été rendue d'après les mêmes
principes à l’article premier : il est dit qu’à dater de la publication
de la présente loi , chaque citoyen sera, libre de contracter
comme
bon lui semblera ; les obligations qu’il aura souscrites , seront exe'cuy
te'es dans les termes et valeurs stipulés.
E n f in , l’article V de la loi du 15 fructidor an 5 s’exprime ainsi:
"
« Tout
traité ,
accords ou transaction faits depuis
le premier
» janvier 1 7 9 1 , contenant fixation en numéraire m étallique, réduc» tion ou arermoiment d’une créance résultante d’un autre titre, quel» qu’en fut la date ou la valeur exprimée dans ces nouveaux actes,
» auront leur pleine et entière exécution. »
J ’ai rapporté dans tout son contexte votre obligation., et vous
convenez dans cet acte me devoir 8550' francs que je vous avais
prêtés en numéraire. Vous rapportez même la date des effets. Vous
êtes
l’auteur, le rédacteur et l’écrivain des
deux doubles , vous
laissez en blanc mon prénom dans celui qui m ’est destiné. Vous
convenez aussi ne m’avoir remboursé cette somme lorsque les assignat»
éprouvaient une perte considérable^ousvous obligez de rapporter/« effets
q-is vous m’ ave-[ consentis et les acquits que j e vous ai fournis qui
fixaient l’époque certaine du remboursement que j ’assure être dans le
courant de messidor an 3 , presque sur la fin , moment auquel ce que
vous me donnâtes en assignats ne valait pas cent écus. Vous promettez
de m ’ indemniser d’après le taux de l’échelle du département du Pu ide-D.ôme , de la perte que vous m 'aviez faite éprouver. T elles so n t
vos obligations qui avaient pour cause , d’après la loi , la restitution
d ’ un vol bitn connu de nous deux. Vous faites intervenir à cet enga
gement la délicatesse 3 vous vouleç que je n’aie aucun reproche à vous
faire. Cette obligation était irréfragable ; ses causes étaient puisée*
dans la plus seine moralité et dans les lois précitées.
Cependant le jugtm eiic dont je demande la cassation, l’a annulé
�*7
dans cette partie, et a ordonné son exécution dans un autre. L ’at-il pu ? et ses dispositions ne sont-elles pas évidemment une infrac
tion i toutes les lois ?
L es motifs de ce jugement ne peuvent l'excuser dans cette p a rtie ,
ses motifs sont évidemment éronés ou au moins
inapplicables à
l’espèce.
,
L e premier est calqué sur la loi du 1 1 frimaire an 6 qui déclare
définitif les paiemens accepcéi en assignats , et qu’ayant reconnu moiinéme avoir écé remboursé en assignats, je n’avais pas le droit de
réclamer l’ effet de l’obligation que vous m’avez consentie.
M ais la loi de l’an 6 prohibe-t-elle les restitutions de la part de
celui qui veut les faire volontairem ent, et par délicatesse à celui qui
a été
victime de la crainte ou de la complaisance ? n’y aviez-vous
pas renoncé par notre traité ? d ’ailleurs , cette loi annulle-t-elle les
obligations ayant une cause aussi conforme aux dispositions de celles
que je viens de citer ? et n’est-ce pas une infraction absolue à ces
lois et à la raison que présente le premier et le principal m otif de
ce jugement ?
L e second , le troisième et dernier m o tif n’ont rien de commun
à la contravention à la loi j ils sont purement idéals et facultatifs.
Dans le second , on cherche à excuser la contravention à la loi ,
sous prétexté que ce jugement avait fait disparaître l’indemnité que
j ’avais promise à Champflour sur les remboursemens que j ’avais faits
en assignats A Lesci rier et à Bughon pour le compte de D esm oulin ,
deux articles que le jugement rejette , et dont je parlerai dans mon
quatrième moyen de cassation.
M ais faut-il de réciprocité pour rembourser à quelqu’ un ce qu’on
a reconnu véritablement lui devoir , et ce que la loi caractérise de
vol. Où en trouvera-t-on une qui dispense de payer une dette avouée
et reconnue? d’ailleurs il aurait fallu
une
condition irès-expresse
dans notre traité qui eût prévu et bien expliqué
et il n’en existe pas.
cette con dition ,
Quant au dernier il est détruit pat le fait même et par les piècea
D i
�■19
de' la procédure 5 il
compromis 3 les
parte 'q u ’ en tout cas
B o yer ayant révoqué h
engagement de Champflour ont cessé p a r son propre;
fait.
M ais il 11’exisre point de compromis
entre
les
parties, ce sont
des obligations très-formelles et irrévocables : en voici la preuve.
U n jugem ent contradictoire , du 19 brumaire an 8 , rendu entré
Champflour présent j et moi au ci-devànt tribunal civil séant à 'R io m .
est ainsi conçu :
» Attendu que le citoyen Champflour a déclaré , par l’organe de
« son défenseur, avoir signé l’acte dont il s'agir.
■ » L e tribunal ordonne qu’au principal les parties procéderont en
» la manière ordinaire, et cependant donne acte au demandeur de
j> ce que le citoyen Champflour reconnaît avoir signé l’acte du 15
» fructidor an 7 ; eh conséquence ordonne que ledit acte portera
» hypothèque sur les biens dudit C ham pflour, à compter de ce jo u r».
L a même expression a été répétée datis vos moyens rapportés pat
le jugement du tribunal d’ap p el, où il y est dit par vous-m êm e,.
p a r l ’acte du 15 fructidor an 7 : la même expression y est répétée
plusieurs fois ; ainsi d& votre aveu , notre traité est un acte et non
un compromis.
.
Q a’est-ce effectivement qu’un compromis ? . c'est une convention
faite entre deux particuliers qui ont des contestations, et sur les
quelles ils ne sont point d’accord, i Ils nomment
deux arbitres,
et
leur donnent pouvoir de juger leurs diffôréns ou en dernitr ressort
ou sauf l’appel.
Or le traité en question n’a aucun
de ces caractères 5 vous et
moi décidons tour. Chacun contracte les obligations qui lui sont rela
tives. Louirette et Coste ne sont choisis que pour être de simples,
calculateurs } la qualification de compromis donnée à cet acte n'est
donc que pure fantaisie. L oin par moi d'avoir révoqué les engagemens que nous avions contractés , j'en ai demandé expressément
l’exécution par mes citations, et ce n’est pas révoquer un acte que
4 ’eu réclamer l'cfLc. L a révocation qui existe esc restraiute au seul
�su
ï?
choix qu’ avait fait Champflour de LouVettS et Coste qui n’ont 'p„iî
quitté ses poches pendant qu’a duré notre discussion soit à Clerm ont
jo it à R iom . L e tribunal d’appel en a été témoin ; et pour mou
compte je me suis félicité de les avoir révoqués.
Quatrième moyen.
>
r J ’avois une obligation de 1 1 0 0 0 francs qui m’avait été consentie
pat Desmoulin ; le même acte portait délégation sur les Vi ry qui
lui en devaient 16000 3 et procuration pour coucher l’intérêt de
cette so m m e, portée à 1 5 00 fr. par année , s agissant de la vente
d’une partie de l ’office de receveur des tailles , où Desm oulin avait
part ; je devais faire
compte à
Desm oulin de
cet intérêt. Il
ne
dépendait que de moi de me faire payer du montant de cette obli
gation par les V iry
à l’échéance du terme qu’il avait pris par le
traité passé avec les Cham pflour et JBlaud 3 ce dernier en qualité de
m a ri, traité déposé en l ’étude de Chevalier , notaire à Clerm ont ,
par Champflour et m o i , plusieurs années après la date de l’obligation.
Si j ’ai fait l’aveu que lors de cette obligation, j ’en avais pas de suite
compté le m ontant, c’est parce que je l’ai v o u l u , c’est que la vérité
■fut toujours ma boussole , et que mon h onn eur, depuis mon exis
tence , n’a jamais reçu d ’atteinte. Champflour a été témoin r e tous
les actes d’après lesquels j ’ai rempli et au-de-là le montant de cette
.obligation. I l a lui-même passé l’ordre de la
lettre
de change
de
j , i 80 francs 3 empruntés à Bughon ; il 3, été également présent de
l ’emprunt de 6 1 0 0 francs de Lescurier qui sont les deux objets rejettés par le jugement. Sa connaissance sur ces deux objets est
assurée par un écrit de sa main , d ’autant plus avoué par lui 3 que
(omme je l ’ai observé dans les fa its , i l a osé m’en, dîmander la remise
p a r une demande judiciaire qu’ il a formée au tribunal d ’appel séant
à Riom j et qui y
est encore pendante.
L e s lois et les principes que j ’ai mis en avant mettent les écrits
^ous leur sauve-garde comme chose sacrée} cependant le jugement
que j ’attaque ne s’y est point arrêté 3 et son m otif à çtt
égard est
de dire que la dette de Bughon et de Lcscuriet m 'é lit pçrsçnnelle.
�Sans doute que c'est moi qui m’écais o b lig é , je devais le fairi
pour remplir l’obligation de 12 0 0 0
fr. qui
m’avait été consentie.
M.iis il est écabli par preuves écrites , émanant de vous-même , que
c’est D :sm oulin qui a tou-hé ces deux emprunts. N otre traité porte
obligation de ma part de rapporter les quittances justificatives de
l’emploi de 12 0 0 0 fr. , montant de l'obligation , ainsi que les notes ,
titres et riocumens relatifs audit compte. O r , ayant prouvé par vos
écrits que Desmoulin , votre frè re , avait touché les deux emprunts
rejetés par le ju gem ent, et ayant établi par quittance, et rapporté
les cff.-ts que j ’ai acquittés à Bughon et à Lescurier , n’était-ce pas
la dette de Desmoulin que j’avais payée? et ayant ainsi rempli les
obligations que j ’avais contractées dans notre traité , n’est-il pas contre
toutes les lois que l’obligation que Desmoulin m’avait consentie,
n’aie pas été maintenue ? la confession de celui qui est muni d’ un
pareil titre peut-elle être divisée en matière civile ?
Cinquième moyen.
Une loi du 3 octobre 1 7 8 9 3 sanctionnée te 1 2 } s ’ exprime ainsi ',
tout particulier, corps et communauté pourront à l ’avenir prêter l'argent
à terme fix e , avec stipulation d ’intérêt suivant le taux déterminé pa r
la l o i , sans entendre rien innover aux usages du commerce.
Par notre convention il est expressément dit que Louirette et
Costc compteront aussi les intérêts conformément à la lo i , et alors il
n ’y avait point de demande.
'
L e jugement vous condamne à me rembourser 4200 fr. que j ’ai
payés pour votre frère pour des dettes onéreuses > et où toujours
l'intérêt est au grand mo i n s , au taux du commerce. M es paiemens
remontent au tems du numéraire 3 et où il
n’était pas question
d’assignats.
L e ju gem ent, d’après la
lo i , pouvait-il me refuser cet
intérêt
conventionnel , autorisé et permis , lorsque , dans cette partie , il
consacre votre obligation , quoiqu’il la rejette dans l’autre. Cependant
les intérêts ne me sont adjugés que du jour de
la demande. Ce
jugem ent présente donc encore une nouvelle infraction à la loi.
�Avec cette m ultitude de m oyen s, tous tirés d e s lo is
moyens
qui sont encore plus dévélopés dans m a requête en cassation. Je
dois en attendre avec sécurité l’admission.
B O Y E R ,
A
c l e r m o n t
D E L ’IM P R IM E R I E
DE
-f
e r r a n d
GRANIER
ET
,
F R O IN ,
�
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Factums Godemel
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A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1801?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Puy-De-Dôme, demandeur ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat, propriétaire, habitant de Clermont, défendeur.
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
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de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1801
Circa 1786-Circa 1801
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0927
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A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G0928
BCU_Factums_G0929
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Clermont-Ferrand (63113)
Beaumont (63032)
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assignats
biens nationaux
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
prison
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6bab344525622622d6ab028929bd090d
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Text
M E M O I R E
e n r é p o n s e
POUR
<
B O Y E R , Juge au Tribunal civil de
l'arrondissement de Clermont - Ferrand , chef - lieu du
département du Puy-de-Dôme , demandeur en cassation ;
P i e r r e
C o n tre
Jean - B a p tiste - C e z a r
CHAMPFLOUR-
D’ALAGNAT.
Q u o i q u e l ’ingratitude soit un vice monstrueux et détestable
et qu'il passe pour un crime qui porte en soi l ’opprobre de tous les
crimes } elle était néanmoins impunie parmi les anciens 3 qui estimaient
que la haine et la malédiction publique que les ingrats attiraient sur
eux
était une peine suffisante pour leurs punitions
et que ce crime
é tait de la condition de ceux dont la vengeance particulière devait être
réservée à Dieu.
Ainsi s’explique Dolive , le savant Dolive , chap. 5 , liv. 4
pag335
'
T “
de
’
�J ’ai dit et prouvé par
m on
premier mémoire que Cîiampflom
était dans la classe des plus insignes ingrats. M es preuves sont sou
tenues d’une multitude d’écrits qui ém anuit de lu i-m êm e, et qu’il
n’a pu démentir. Sa réponse n’efface aucun des traits marquans de
son ingratitude , de sa méchanceté , de sa mauvaise foi et de
sa.
perfide marche dans cette affaira y- elle n’est basée cette réponse que
sur ce qui peut sortir de labouche du vice , et du crime monstrueux
de l’ingratituue j m ensonges, im postures,
méchanceté ^ impudente
calomnie ; c’est tout ce que contient votre libelle.
Ç i n'a pas été assez a ’assouvîr votre rage contre ma réputation j
d’aborJ par votre plaidoirie , puis par
vos bravades , non seule
ment dans l’auditoire du tribunal de C le rm o n t, mais
encore dans
les tavernes et dans les cafés , bravades qui ont dû me faire un
devoir de publier m o n m é m o i r e , vous avez osé ajouter , par votre
réponse , les sarcasmes les plus
empoisonnés sur la confiance que
le Gouvernem ent actuel a bien voulu me continuer 3 par suite de
celle que je me flatte d’avoir méritée dans tous les
états que j ’ai
parcourus.
C ’e s t , personne n’en d o u te, afin de me
m o r t, que vous avez
porter le
employé cet amâ» d’outrages
des regrets à tous ceux qui ont attesté
l ’autorité suprême.
le
coup de la
pour
donner
vœu public auprès de
Tém éraire / vous n’avez pas pressenti les conséquences où va
tous
entraîner la lutte humiliante dans laquelle vous me forcez
de descendre
par votre
abnégation
de toute p u d u ir,
abandon inconsidéré à une plume prostituée
n’avez pas calculé
dans
votre
sotte fatuité
par votre
à la calomnie ; vous
sur
mon
origine ,
que la d iffir nce que vous me forcez d’écablir , ne pourrait qu’a
jouter au mépris et au discrédit donc vous êtes déjà trop couvert!
que votre vol reste à votre cupidité , peu m'importe ; c’esr moins
pour moi et pour ma famille que je reprends la plume , que pour
apprendre à ceux qni ne
yo us
Vmgrat qui me déchire.
r
connaissent pas t quel est l’ennemi,
�s n
i
Q u’ai-je été et
qui
suis-je ?
honoré de compter parmi mes
31'eux un Lieutenant général de la principauté dauphine d’A u v e rg n e ,
illustré par une Chartre donnée en 16 0 6 par l’oncle de H enry I V ,
à raison des actions d’éclat au-siège de Vodable , je n’ai cessé de
nie rendre digne d’une origine aussi flatteuse. Com m e procureur
dans les cour et tribunaux à C lcrm onr, une diantelie nombreuse
er d’élite , a plus marqué pour ma délicatesse que pour ma fortune.
D ans quarante années de travail, j’ai à peine
mille francs
à mon patrimoine. J'étais
ajouté
trente-quatre
sévère sur le choix des
plaideurs j je n’ai jamais occupé pour vbus ; j ’ai sur-tout
à
me
féliciter de n'avoir pas coopéré aux cent et une tracasseries que vous
avez suscitées aux pauvres gens de Eeaum ont , et à la faveur
quelles vous avez ajouté
beaucoup
de petits
des
héritages à votre
domaine ; trente familles au moins en gémissent depuis long-tem ps;
vous étiez un habitué du citoyen
dn tribunal d ’Issoire.
T riozon ,
aujourd’hui
greffier
A u x témoignages particuliers de confiance et de désintéressement
ont toujours été joints , et sans interruption , les
marques de la
considération de mes confrères et du public. J ’ai été successivement
syn d ic, procureur de communauté , membre de l’assemblée d’élec
tion d’Isso ire , administrateur de l’hôtel-dieu ,
B e rg ie r,
le
collègue du cit.
depuis plusieurs années législateur, comme
membre du
bureau de conciliation , officier municipal , procureur de la com
m une.
A la première révision du tribunal de district de C lerm o n t, le
vœ u de la municipalité et du conseil général me plaça pu m ier
juge.
X la secon de, le répsésentanr M usset se détermina par l'accla
m ation générale, à m e maintenir dans cette place.
E n l’an 4 , j ’étais à ma cam pagne,
lorsque l’assemblée
électo
rale me nomma juge au tribunal civil t
et je ne dois la place
<jue j ’occupe au tribunal
du Département qu’à la
du
chef-lieu
A i
�connaissance qui a étiS donnée au G ouvernem ent t et 1 mon însçn ;
par tous ses ri présent m s , du zèle et de la candeur avec
lesquels
j ’ai exercé mej fonctions.
Bien loin d î devoir aucun emploi à Couthon , il me destitua B’
à son retour du siè je de Lyon , de la place
C o m m u n e: il était mon em em i s s n s
de
procureur de
la
d o u te, parce que je ne me
servais ni pour moi ni pour mes cliens , de ses talens. L es registres
des audiences et la notoriété s'accordent sur cette vérité.
Généralem ent
pour un
reconnu . même par ceux
qui
ont été
réclu s,
bon, loyal et compacissant Citoyen \ ma femme
et mes
en fans n’ont qu’à se louer de ma conduite domestique , sur-tout j
je n'ai porté au c.n trouble dans aucune famille ;
m ;s enfans
et
mes gendres n’ont jamais eu à se plaindre de ma loyauté.
M a is} quel est donc ce personnage,
naissance ou par
sdiî
sinon aussi illustré par
mérite personael , au
moins
avili
par
sa
son
insolence, par son immoralité , par son audace à faire des dupes.
C ’est Jean-Biptistc-C ezar Caam pflour j le dernier des Cham pflour , ce voltigeur , tau ment sans péris.
Son b isaïeu l, marchand à C 'erm ont , acheki, en 1 7 1 0 ,
le do
maine d’Alagnat , à Beaumont , si vanté par son petit-fils pour »es
©rgies.
Son aïoul était juge ,
Lam oignon. C e
et de plus , homme d’affaire de
m agistrat, par son crédic ,
fie , de
cet
M . de
homme
¿ ’affaires un en n o b li, en 1 7 4 } .
I l n’y a pas long-temps qu’il
existait, à R io m ,
deux procu
re u rs , cousins de ce C e^ar, genrilhomme , qui se divertit à ravaler
l ’ctat de procureur ; comme si le petit-fils d'un marchand pouvait
ignorer qu’il est bien peu de procureurs qui ne ¡»\vonorent de cette
origine.
Com m ent cet homme û hautain s’était-il abaissé à devenir l ’ami
de Couthon ? à all«c se jewer à ses p ie d s, à P a r is , et à en ob-
�J
tenir une lettre pour la Municipalité de C lerm on r, le 7 juillet 17 5 5 ,
lettre qui préserva cet ingrat , et fournit à moi les moyens de lui
rendre les services détaillés dans mon précédent mémoire , et connus
4 e toute la V ille.
C ’est cependant ce
Totre
sau veu r,
même
Coutlion
qui fut
votre protecteur ,
dont l’oubli du bienfait vous a fait fabriquer cette
épigrame ingénieuse , moins pour moi que pour le G ouvernem ent,
et ceux qui l’ont éclairé sur le choix des juges............. Quod genu^
hoc hominum !
I l serait sans, doute merveilleux qu’ un tel Citoyen ne fut le fléau
de sa fam ille, de la société entière.
Sur le premier article 3 ne soulevons par ce voile qui cause encore
tant de désolations , et qui fait l’illusttation de votre femme.
Quant à l’autre, il m’est indispensable d’établir que si la fatalité
me rend victim e, j ’augmenterai la série de tant d ’autres. Semper
malus in eod:rn ginerc mali 3 par-tout astuce , im pudence, mépris
des règles des ob ijacions , comme de celles de l'honneur.
Mcrtons en premier ordre la violation des dépôts qu’avait faits entre
vos mains votre ancien
domestique. L e
fidèle Foureau entrant à
vou e service vous remit 25 louis. I l a l’imprudence de vous confier
q u i! a pour 15 0 0 francs de patrimoine dans le lieu de sa naissance j
vous le sollicitez de le vendre j il a la faiblesse de vous en remettre
le p rix , et ce fut lorsqu’il vous parut aisé de
vous libérer de ces
dépôts et des gages de nombreuses années , que vous prîtes un léger
prétexte pour le congédier, et par ce moyeu l e p a y e r en assignats
presque sans valeur : il est ruiné , et ses lamentations n’ont produit
sur votre cœur d’autres effets, que de le calomnier , sans réfléchir que
yous aviez abusé de l’empire de m aî:re pour violer la loi sacrée du
dépôt.
Appelez en témoignage M . Rechignat-D ém arant sur votre loyauré ,
relativement à votre billet d’honneur, et M . Rochefort , ne R ic m ,
ancien capitaine tl’ir.fauteiie, « m i s qui j ’eus la facilité c ’etre votre
�caution ? combien valaient
les 10 4 0 0 liv.
que vous
aviez promis
sur votre honneur, de rendre en espèces comme vous les aviez reçues ?
vous êtes-vous conduit autrement envers le citoyen B r u n e i, ancien
juge au présidial de C lerm on r, pour 12 6 0 0 francs ; envers le citoyen
G u y o t, de Vie sur-Allier , pour 6000 liv. j envers défunt Charbon
n ie r , bourgeois,
de Clerm ont ,
pour 424 0 liv. 5 envers la dame
veuve L a m o c h e jd e C lerm o n t, pour 4405 francs 12 s. 6 d .; envers
le citoyen Astier cadet, pour 24000 francs ; envers le citoyen Bonnec
officier de santé à C lerm o n t, pour
7
011 8000 francs. Il en sera
encore question.
Sont-ce là des traits d’honneur , de cet honneur qui distinguait les
preux chevaliers , comme ces respectables négocians que votre bisaïeul
eût sans doute imité ? ai-je calculé juste en vous plaçant ledernier
de votre race ?
Sans doute avec de pareilles ressources vous eussiez été ou plutôt
vous eussiez dû être au-dessus des besoins ; mais pourquoi , vous
sur-tout si grand en m unificence, avez-vous récemment ajouté à Pénormité de vos dettes un emprunt de
20000 francs à 18 pourcent
avec double doublure ? espereriez-vous au retour de moyens aussi
prom pts, aussi faciles pour votre libération ?
N e semblerait-il pas entendre le Cardinal de R ohan , à votre fa
tuité de rehausser la maniéré dont vous avez soutenu avec dignité
le rang où votre nom et votre condition vous ont placé ?
D ’après ce tableau fidèle connu de tous
nos concitoyens, qui ^
Cezar Champflour convaincra-t-il par son impudence sur le genre
de nos relations, par le ridicule de ses calomnies , par l’exagération
de sa prétendue générosité ? E t d’ab o rd , comment faire coïncider le
paiement dei vacations dues à un Procureur qui ne l’a jamais été pour
Champflour , ou les appointemens d’un homme d’affaire affidé tej
que Costes et L o u ïre tte , avec les marques d'une
reconnaissance
pour des services d’ami , de con seil, de guide j de cautionnement.
C est sous ces rapports que
yo uî
prépariez perfidemment vos leures »,
�i
en disant à
vos
SU
,
enfans arec transport apparent > avec jo i e , que
j'étais leur second père.
Quel «finem en t d'invention , de supposer d'avoir donné 25 louis i
ma domestique pour se donner le plaini: d’ajoucer que j’ai partagé ce
prétendu don ! Quelle corruption dans L s habitudes pour im aginer
un pareil moyen de calomnier ! ausii semble-t-il
qu’on ait
fouillé
tout son répertoire de sottises et de grossiéreté, pour me les appliquer !
Quod genus hoc hominum !
Une telle imposture qui n’est étayée
nécessairement enhardir à
saisir les
que
par l’audace, devait
lieux communs d’invectives.
L es larmes du pauvre arrosent les champs
que B o yer a acquis ou
usurpé pendant quarante années de vertus. Quel boursouflage ! qu’elle
attroce supposition ! Je n’ai rien acquis , encore moins usurpé de ce
qui a appartenu à des particuliers peu fortunés.
L ’acquisition que j ’ai faite à So lign at, au prix de î j o o o fr.
l ’a été de M . de Brion-de-Laizer.
I l ne s ’ agit, continue Cfaampflour , que de consulter les habitant
de la commune de Solignat 3 et le délibératoire du conseil, du 9 frim aire
an <) , qui autorise le M aire à poursuivre B o y e r en désistement des
Rutoirs et Communaux dont il s'étalt emparé j
pour
aggrandir son
p r é de Pragrand.
A qui Champflour a-t-il recouru pour un mensonge si mal conçu ?
L a commune de Solignat est composée d’environ mille habitan^
ou forains propriétaires j il leur a pris fantaisie , après l’an 4 , de
se diviser les communaux j je ne m’y o p p o s a i point. L es citoyens
Courbeyre , l’un ancitt» adm inistrateur, a u j o u r a ’ J iu i du conseil de
Préfecture , l’autre juge de p a i x , et le citoyen Duclauzel avaient
pris leur part : le citoyen Courbeyre avait fait extraire de son pré
environ mille chards de pierres qui furent déposées sur
la portion
¿ c com m unal, portion que j ’ai prise comme les autres , en suite de
la destination qui en avait été faite
pour moi.
C e n ’a jamais été
l ’emplacement des rutoirs. Il a plu à neuf particuliers sm m ille, de
■-*<
�s
me faire un procès ; il y a des Champilour et des brouillons par-tout:
Aussi ne voit-on figurer dans les n euf qu’un
M erle courroucé de
ce que j’ai réclam é, par la voie de la justice , l’abandon d’un chemin
qu’il a usurpé; le juge de p a ix , par ressentiment d'avoir succombé
à raison d’une prise d’eau donc il s’écaic emparé.
Les
sept -autres
ne
sont
que
des instrumens passifs
de la
méchanceté.
Quant aux dons : l’étalage mensonger que vous en faites, forme
un contraste bien frappant dans vos assertions ; les services que je
vous ai rendus , étrangers à ceux d’un procureur et
d’un homme
d*afïaire j les prêts immenses sans intérêts , les cautionnemens dan
gereux pour moi sous
divers rapports ; tels sont les motifs qui ont
eu , à vos yeux d’alo rs, un tel prix 3 . que
vous
avez cru en té
moigner une reconnaissance assez coûteuse. Répondez à ce dilemme ;
ou le présent a été alors proportionné aux
bienfaits j ou il a été
aussi peu réfléchi, que l'est aujourd’hui votre reproche ?
Dans le premier c a s , vous êtes un hardi et lâche menteur j dans
le secon d , ce serait de votre part l’aveu d’une dissipation aussi
irréfléchie que la vente de tous les biens de votre fem m e, et toutes
les espiègleries , à la
faveur desquelles
vous
ave^
soutenu
avec
dignité le rang ou votre nom et votre condition vous ont placé.
Dans le vrai , j ’ai reçu de vous deux boîtes d’o r , une plus petite
pour ma fem m e, une écuelle d’argent avec son couvercle et son
assiette, un porte-huilier à bâteau, douze couverts d’argent, dont
six à file ts, quatre cuillers à ragoûts , dont deux de moindre gran
deur , deux flam beaux, quatre douzaines de
planches , bois dur ,
et deux chards de bois à brûler. J ’ai évalué le tout à 3000 francs j
et j ’ai certainement porté chaque objet au-delà de sa vraie valeur.
Ju sq u 'ici , j ’ai établi que vous
étiez un inventeur eflronté :
je
pourrais vous appliquer cet ad ag e, semel m endax, semper mendax.
M ais , en s’écartant des
principes qui prescrivent l’indivisibilité
des a v e u x , il fauc au m o in s, à défaut de preuves, édifier par les
présomptions qui résultent de la moralité reconnue des parties,
�5»
Sur-tout par les preuves que
vous fournissez
vous-même de
votre
mauvaise for.
Vous n’avez jamais été dans le cas de prêter, mais toujours dans
celui des emprunts.
A l ’époque même où par l’effet d’un travail de plus de huit m o is ,
je vous fis toucher 3 10 0 0 francs par celui qui vous en demandait
60000 , vous articulez m’avoir remboursé les 7 7 5 0 francs que je vous
prêtai en 17 8 9 et 1 7 9 0 , vous n égligeâtes, d ites-vou s, de retirer
votre billet de 250 0 fr.
Que le citoyen Bourdier se plaint de n’avoir pas de quitance de
douze louis en or qu’il me remit pour votre beau-père Beraud.
Que vous étiez créancier au lieu detre débiteur de yotte frère
D esm oulin.
Que quoique je n’eusse pas compté les 12 0 0 0 fr. à Desm oulin ;
j ’avais spéculé de faire rapporter à ce principal n eu f et demi pour
cenc d’intérêt par an sur celui de 15 0 0 fr. qui étoit perçu sur le
capital de 16 0 0 0 fr. dû par les Viry.
Que j ’étais tenu de me faire donner une reconnaissance par celui
pour qui je faisais les emprunts.
Q u’il n’y avait aucune note probante de ces emprunts.
Que celle que je rapporte écrite devotre main , n’était pas en tière;
!
qu’elle avait été coupée avec des ciseaux.
t.
Que votre frère m 'avait remis des papiers de fa m ille , et parmi
ceux-ci la lettre de change de Lahousse.
v
Q u’il est tellement faux que j ’ai payé des créanciers en vertu de
l ’obligation de 12 0 0 0 f r . ; que sur mon refus de les p a y e r, vous ,
Champflour , les avez acquittés, notamment D ufraisse pour
18 0 ®
fr. afin d ’ honorer la m émoire de votre frère dont vous répétez sans
cesse que vous êtes le créancier.
Que ce n’est pas vo u s, mais bien moi qui ai sousttait, à l’audience
l ’écrit de votre frère dont je vous accuse d’avoir falsifié ou raturé
les dates.
B
i
�Que vous m’avez remboursé en mars 17 9 $ , au lieu de messîdot
an 5.
Que la detre envers Bugîion m ’était personelle.
Q ae je dénature les faics sur mon cautionnement envers Bonner.’
Reprenons chacun de ces treize articles.
i . ° D ’un côté , payer par Champflour
une somme de 15 0 0 fr.
sans retirer le titre de son engageaitnr ou une quittance j c'est
incroyable à quiconque l’appréciera par tous k s procédés , par les
contradictions , par les jongleries qu’il n’a cessé d ’entâsser dans cette
affaire , par le traité de l’an 7 , rédigé et écrit en deux doubles ,
par Champflour qui a laissé mon prénom en blanc. Champflour ne
s’est-il pas non seulement constitué mon débiteur de ces Z500 f r . , mais
encore ne m’a-t-il pas promis de m’indemniser à raison de l’époque
du remboursement ? or se fut-il rendu à cet acte de justice pour une
somme qu’il au ra it, selon l u i , payée deux fois j d’un autre c ô té ,
com parant, pages 7 , 25 , 24 , 5 1 de sa réponse avec cet acte du
ij
fructidor an 7 , on rétorque sans possibilité de reto u r, Cham -
flour ! mentiris iuipudentissime.
Page 7 , il prétend avoir payé 15 0 0 .
Pages 13 et 1 4 , il a p a y é deux fo is partie de ces sommes dans le
courant ds mars 17 9 5 . I l retira les effets qu’ il déchira comme inutilest
et il ne restait plus de trace de remboursement.
Page 3 1 , il s’ est entièrement acquitté en fonds et en numéraire j
soit envers le citoyen Bonnet j soit envers la demoiselle B om part} de
notre billet d’ honneur. I l en a les acquits des 2 1 messidor t 1 1 et 1 J
thermidor an 6 3 ainsi que le billet d’honneur.
P ar notre traité de l’an 7 , il se reconnoît mon débiteur de la
somme de 7 7 5 0 fr. et des 800 francs empruntés de M artine D e larbre , lequel emprunt il avait d ésavou é, page 8.
I l s’obligea par ce même traité de. rapporter Us effets et k s acquits,
des sommes dont il étoit débiteur.
�/ s /
11
Quelles sont donc , Champflour , les pièces que vous avez déchi
rées comme inutiles ? pourquoi vous êtes-vous obligé en l’an
7 de
rapporter des pièces que vous avez déchirées en 17 9 3 , tandis que
vous convenez d’être nanti des effets et quittances concernant Bonnet ?
pourquoi êtes-vous convenu , en l’an 7
que vous n’aviez remboursé
les 77 jo h . qu’au moment ou les assignats éprouvaient une perte con
sidérable ? assurément ce n’était pas en mars 17 9 3 .
Se joue-t-on aussi impunément des premières règles de la justice?
obligé par acte de rapporter des pièces dont vous convenez d’être
nanti , vous croyez être quitte de cette obligation en alléguant de
les avoir déchirées. Vous devez rapporter les pièces ou je dois être
cru. Vous êtes d’autanc plus indigne de confiance sur votre alléguation de paiement en mars 17 9 3
j
qu’encore une fois vous êtes ex*
pressément convenu dans notre traité de l’an 7 que vous n ave\ rem
boursé qu’au moment oà les assignats éprouvaient une perte consi
dérable.
E n ce qui touche 1s citoyen B o n n e t, vous abusez en vérité de
l ’art de mentir. Vous le forçâtes , malgré le billet d’honneur d’un
homme de votre nom et de votre rang } d’accepter les immeubles aux
prix que
voulûtes y m ettre, en le menaçant de le rembourser en
papier. Si vous avez donné du num éraire, c'est d’après l’échelle de
proportion. I l vous est si aisé d’obtenir des déclarations ! mais le
citoyen Bonnet et la demoiselle Bampart ne sont pas des Lahousse.
J e vous mets au défi de me contredire par le rapport de ces dé
clarations.
I
2-° C ’est à sa seule négligence que le citoyen Bourdier a dû
attribuer son défaut de quittance. L es douze louis n ’étaient qu’ un
à-compte. I l est
faux que les sieur et
dame
Beraud m ’eussenc
chargé de ce recouvrement ; je ne fus qu’ un commissionnaire offi
cieux. Bourdier encore débiteur, esperait, sans d o u te, de prendre
une quittance finale j le fait remonte à i i ou 15 ans. Il est notoire,
a C leim o n t, que ces époux ne laissaient pas séjourner leurs fonds
B x
s
�eu main-tierce : Champflour souille tout ce
reservé à lui
qu’ il touche j il est
seul de multiplier les in ju re s, mais
heureusement,'
il esc connu.
j . ° C ’est outrager la mémoire de D esm oulin
de soutenir qu’il
était débiteur de son frère, si celui-ci avait la bonnefoi de com m u
niquer tout ce qui peut
établir
la vérité , notament
l’écrit
m o n tr a i l’audiance, et q u 'il fit disparaîcre, la honte de ce
songe serait le seul résultat de cette vérification.
qu’il
men
4 .0 L a notre écrite de votre main , «elle de votre frère me. con
cernant j dont je suis porteur ; celle relative à v o u s , que vous avez
soustraite à l’audiance; le traité du
15 fructidor an 7 ,
l’acte de
dépôt entre les mains du notaire C h e v a lie r, de tout ce qui
a rap
port à la créance V iry donc je n’ai pas touché un sou j toutes ces
pièces combinées ensem ble, démasquent! votre imposture sur l’odieuse
invention que vous avez osé hasarder contre la preuve écrite, que
j ’eusse voulu recevoir des intérêts à 9 et demi pour cent , puisqu’il
est démontré par l’obligation même contenant procuration ,
que je
m’étais chargé d’en compter. C es intérêts sont encore Ju s. T o u t *
été gratuit.
5.0 Il éraic inutile,
il aurait
été
dangereux et mal-honête de
prendre des reconnaissances de celui pour qui les emprunts étaient
faits ; in u tile, parce que tout était de confiance ; cette confiance
m'établissait maître de ma cause , par la nature même de l'acte ;
dangereux et mal-honêce dans le cas de l'anéantissement de l’obli
gation de 110 0 0 fr. j obligation qui n’était en effet qu’en brevet
que je vous ai remise
dans
la même
fo rm e , depuis le jugement
que j ’attaque. Ces reconnaissances n’auraient-elles pas form é autant
de doubles emplois , autant de créances particulières, exigibles encore
si on eut déjruit l’obligation de iz o o ® fr. qui le* comprenait.
6 ° L a note des emprunts n ’était-elle pas suffisamenr établie pat
votre écrit et par le traité de l’an 7 ?
S 'il eut resté quelque douce, y aurait-il à hésiter dans la préfé-
�>3
fenee à d onn er, pour le serment, à l’obligeant officieux, sur l'ingrat,
sur le perfide jongleur,
7 .0
L a prétendue coupure de la note écrite par Champflour , n*a
i l é imaginé par lui que pour le seul besoin de son iniquité.
8.° Desmoulin ne m’a jamais remis aucun papier. C e fait
rrouvé a paru nécessaire pour donner
quelques
roman sur la lettre dechange de Lahousse. Si
con-
consistances au
cet
effet eut été
acquitté par Desmoulin ou par C ham pflour, le premier ne l’aurait-il pas
anéanti; en aurait-il fait mention dans ses écrits à moi et à son frère j
l'autre avair-il quelques raisons ou prétextes de me le[ remettre ? tout
ce que débite , à cet égard , Champflour , à l’aide de cet autre flibustier,
est absolument fa u x , et semble avoir un but plus criminel encore.
Cette lettre d ech an ge est du j i
mai
17 8 8 j
fixée au i . cr janvier 17 8 9 . Que penser de vos
son échéance étaic
extravagances,
en
supposant une prétendue maladie à Desm oulin , ses alarmes sur
un effet qui n’érait pas encore é c h u , ec qu’il a v a it, indiqué
dans ses n otes, devoir être p a y é , et l'avo ir été par moi ? de
quel
œ il,
sur-tout , envisager cette
rapportée sous la date du 8 juillet
quittance
que
vous
avez
17 8 8 , cinq mois avant l’c-
chéance y et que vous n’avez pas osé faire im prim er , comme étant
détruite par les notes et écrits des deux frères 3 par ceux de Louïrette
et C oste. C elui de ces écrits que vous eûtes l’adresse de soustraire
à la connaissancs de la ju stice, en prouvant que
vous
étiez son
débiteur de 6000 francs , faisait mention du paiement par n^oi, du
montant de cet effets j il rappelait en outre que l’objet principal
de la lettre de change n’était que de 18 0 0 francs ; l’intérêt était donc
de i j pour io o pour six mois. Quod genus hoc hominum !
9.
L 'écrit que vous avez soustrait à l’audience , vous constituait
'débiteur de votre frè re , de 6000 francs. J ’ai acquitté , selon
yo us-
m êm e par votre é c rit, et comme Coste l'atteste, d’après le traité de
l ’an 7 y les sommes dont il s’agit j si v o u s , C ham pflour, en avez
payé d'autres , sans doute vous ne pouviez vous en dispenser, s'il étaiç
�dans vos principes
d’honnorer
*4
la mémoire de votre frè re , von*-
cuss’rez rendu plus de justice d celui q u i, à sa considération , ec
sur sa fatale présentation, vous
avait tiré du
bourbier
où
vous
étiez plongé.
10 .° C ’est ajouter une rare impudence à une profonde déprava
tion , de m’imputer l’enlèvement de l’écrit de Desmoulin , "qui eut
opéré le gain de ma cause , en dévoilant vos infidélités sur l’état et
sur le contenu de cette pièce.
n . " Com m ent présumer que Cham pflour occupé, en mars 1 7 9 J ,
de préserver sa personne, eut imaginé de payer des créanciers dont
il eut encore emprunté pour se prémunir contre les malheureuses
conjonctures d’alors ?
L e traité de l’an 7 ne détruic-il pas ses mensonges et ses contra
dictions à cet égard ? ne vous êtes-vous pas obligé j C liam pflour,
par cet ac te, de rapporter les effets et les acquits des sommes dont
vous êtie% débiteur ?
1 1 . ° L a dette de Bughon est portée par votre é c r it, et dans
celui de C o ste , votre homme d’affaire, pour être personnelle à
Desm oulin. L e rapport d’une attestation de ce Citoyen honète , serait
trop humiliant pour lui et pour m o iy pour lui , de
se
mettre en
parallèle avec l’amendé Lahousse \ pour moi , d’imiter en rien un
ennemi aussi inimitable. M ais cette attestation a été rapportée à
l ’audience du tribunal d ’ a p p e l , par C h a m p f l o u r j son défenseur la
tenant "en
m a in ,
l’a n n o n ç a ,
sans la lire,
com m e
applicable â D es
m oulin. Plusieurs Citoyens de C le rm o n t, présens à l’audiance, er
ceux qui composaient le barreau, s’en rappellent. Quel voile a donc
pu dérober la vérité de ce fait à la justice ? pourquoi Cham pflour
a-t-il excepté de faire imprimer ce
m ém oire, avec les autres pièces ?
ctrtificat
à
la suite de son
.° Je crois en avoir dit assez sur le remboursement fait au
citoyen Bonnet j dans le premier article de cette discussion.
i j
O u i, sans doute , ma défense fut interceptée par vos
yocifé-
�"
.
.
rationsi par un débordement de calomnies grossières. M es m oyens;
dans le d ro it, furent étouffés 3 et le tribunal
fut surpris.
Quelle
méprise de qualifier une obligation dictée par une volonté déter
minée , ,ec par une confiance libre sur des objets secrets d’obliga
tion ) pour cause fausse ou sans cause pré-existante.
Quel autre sens peut-on , sous l’accepration naturelle ,
donner à
ces expressions, si ce n’est que le débiteur n’a pas reçu à la minute
m ôm e, m atériellem em ent, l’objet du prêt. M ais de qui est provenue
cette certitude ? de la seule loyauté de ce créancier qui pouvait pré
venir par un seul mot toute dénégation, toute supercherie.La cause
de cette obligation est-elle pour cela fausse ? exclut-elle la certitude
d’une cause préexistante ? non , sans doute.
Cham pflour-Desmoulin , dans une position fâcheuse , a besoin,
dans cet instant , d’autant de crédit que d’espèces. L a nature
nombre de ses dettes lui présentent des embarras dont
et le
il ne peut
sortir que par un acte de confiance , tel qu’il ne puisse recevoir
aucunes entraves. I l épanche sa douleur dans le sein de son ami j
il se fait un titre envers cet a m i, de cette habitude de bienfaisance
dont cet ami commun de la fam ille a donné
des preuves si écla
tantes à son frère.
N e sont-ce
pas là antant de causes m orales, pré-existantes, de
l'acte du 28 mai 17 8 9 ?
C et acte , dans son essence , et par ses expressions, n’est-il
autant un mandat qu’ une obligation? que d is-je, ne
pas
renferme-t-il
pas indivisiblement ce double carectère ?
M ais ces causes pré-existantes ne sont
elles sont encore matérielles.
pas seulement
morales i
Desmoulin avait , dans ce moment même , à acquitter des dettes
¿ ’honneur pour le jeu j il en avait d'autres par lettres de change
dont le terme était éch u , ou était sur le point d’échoir.
C ’est dans la journée m ê m e , après la confection de cet acte, du
>8 mai 1 7 8 ? , que je tire en votre faveur une
lettre de change;
�vous en passez l’ordre à Bughon et le m ontant, distraction faite
de l’in térêt, est touché par Desmoulins.
À-c-il pu échapper
à quiconque
counaissait votre
position
de
fortune et nos relations, que vous m’eussiez prêté vous-même ou
fait prêter par Bughon , et par l’entremise de votre sœur madame
B lo c , une somme pour mon compte ?
C ’est dans les premiers jours de juillet suivant que , presqu’à la
fois , je m’oblige envers Lescurier, de qui Desm oulin reçoit 5000 fr.
et que j ’acquitte pour lui les «ffers de Caze et de Blatin.
Sont-ce donc là des causes fausses, et s’il y a fausseté , n’y at-il pas contradiction dans le jugem ent?
M ais Champflour
aventure )> et on soutient pour lui que par
notre traité je me suis soumis de rapporter des resonnaissances de
D esm oulin sur ces deux objets , et que je n ’en rapporte aucune.
Ç ’a été le] prétexte de diviser mon aveu loyal , et d’an éan tir, à mon
é gard , l ’acte syllanagmatique du 18 mai 17 8 9 .
Diverses inconséquences. D ’abord erreurr de n’avoir pas reconnu
son indivisibilité , sa cohérence nécessaire avec les écrits de vous et
de votre frère , avec ceux de vos serviteurs Coste et Louïretre , que
j ’avais eu la bonne foi et le malheur de
vous laisser nommer nos
calculateurs.
Ces derniers écrits dont vous rapporrate* un bouble à Taudiance,
et dont je suis Hanti de l’autre, transcrit page 15 de mon m é
moire , ne sont-ils pas conformes aux notes de Desm oulin et à la
v o tre , n’ajoutent-ils pas à ce qui manque dans l’acte du
ij
fruc
tidor an 7.
M ais entraîné malgré moi
par une erreur que je dois respecter;
que dis-je , cet acte du 1 j fructidor an 7 , est le complément des autres.
I l fallait distinguer les sommes payées en numéraire d'avec celles
acquittées en papier. E h bien , dan»
cet a c te , il
ne
peut
être
question pour les paiemens en papiers suc lesquels je ne voulais pas
bénéficier
�> 7
-bénéficier que des objets Eughon
Coste et Louïrette
contient
t
et
y
Lescurier. L e Bordereau ¿ s
évaluation
de ces
sommes
d’après
-l'échelle de dépréciation j n’est-il pas l’exécution du traité
et
des
notes de vous et de votre frère ?
C e que vous avez imprimé sur celle de votre frère, pag. 1 2 , à
la n o te , 1 9 ,
que
j ’ai
10 et 2 1 de votre mémoire } comparé
rapportée ,
et
telle
qu’elle est
qui contient le bordereau de C oste , page
va mettre au plus grand jour
sur
avec
celle
la même feuille
14 de mon m ém o ire,
votre turpitude. M alheureux ! vous
vous êtes rendu coupable d’ un faux
matériel.
L ’écrit
que
vous
prêtez à votre frère, page 1 2 de votre mémoire , n ’est pas de lu i ,
et il ne peut être de la fabrication que de vous s e u l, oui de vous
s e u l, même sans l’aide de Coste et de Louïrette.
E n même temps , dites-vous } que mon frère souscrivit cette obli
gation ^ il avait donné à B o yer l'état de ses dettes.
C ’est donc d’après vous que cet état m e fut remis le
17 8 9 , jour de cette obligation.
x S mai
M ais l’état que vous décrivez est tout différent du m ie n , cepen
dant celui-ci a été la base du calcul et du bordereau de Coste et
de Louïrette.
Ces deux états , tous deux sans date , ne s’accordent point sur
la nomenclature des sommes j celui que j ’ai ,l* s exprime par louis ,
le vôtre les décrit par francs , quoi que , à cette époque ,
on
se
servit plus communément du mot livres.
Ils sont encore discordans sur le «om bre des articles } le mien
■en renferme onze , et celui que vous produisez n’en contient que dix.
Ils différent sur l’ordre dans lequel les créanciers sont inscrits.
M ais ces états sont absolument opposés sur les noms des créan
ciers et sur les sommes.
C elu i dont je suis po rteu r, qui
est encote Hne f o i s ,
saurais trop le rép éter, conforme aux écricsde
yos agens,
car je ne
est ainsi conçu :
C
M
, , i
�13
à Lahousst , io o louis j i * m’ envoyer au régiment pour le jeu 3 50
louis ; $.° par obligation cautionnée p a r M . B oyer , 1 1 1 louis ; 4.0 ¿
Lapierre , mon ancien domestique , 30
35
; 6 .“ , d
; 5.° <z Monestier , tailleur ,
j perruquier 1 3 / . ; 7 .0 ,
Flageac 2 5 /. j S .°, <è l ’abbé
Aubier 6 l. j 9 * , à mon tailleur 15 /. ; 1 o.° , ^ B latin 6 1 l. ; j 1 .° , pa r
contrat dora B lot est caution 3 6 1 l.
’
Celui que vous avez imaginé et fabriqué , destine i .° à M . L a ville j
M . B lot caution y 15 0 0 fr. \ 2.° à la Nanon 3 cuisinière de
men frère , 600 j j . ° à
Flageac ,
i i o 3 j 4.0 M .
Dufraisse-Lapierre , domestique de AI. de
B o yer ma caution 3 2 8 0 8 ;
S aubade 2900 j 6 ° à C a\: perruquier 3 15 ;
7 .0 'à
5.0 à A P .
Fabre
confiseur
1 2 1 8 j 8.p à l'abbé A ubier 12 0 0 ; 9 ,° à B latin 16 0 j io .u à Brochet ,
tailleur 360.
D e cette comparaison il résulte ,
i . ° Que dans les deux états
sont
compris
seulement
B l o t , ici
pour 15 0 0 fr. ,là pour 6 1 1. j Lapierre, ici pour 12 0 0 f r . , là pour 30 1. j
moi Boyer comme caution , ici pour 2800 f r ., là pour 1 2 1 lo u is ;
Caze , ici pour 3 15 fr. , là pour 13 louis ÿ un tailleu r, ici pour 3 i o f . ,
là pour i j louis ; l’abbé A u b ie r, ici pour 12 9 0 f r . , là pour 6 louis ;
et B la tin , ici pour
2 60 fr. , là pour 1 1 louis, O n apperçoit môme
qu’il y a assez d’uniformité ppur cinq de ces créanciers, mais qu’il
y a contrariété de 44 louis pour A u b ie r, et de 2 0 p o u r Lapierre ;
2 .0
Que Lahousse , Monestier , Flageac , et la destination de
1 2 0 ® fr. pour le je u , rappelés dans mon état 3 11e sont point cou
chés sur le vôtre. E n revanche, ce dernier comprend votre cuisi
nière , madams Saiizade et Fabre. Cette contradiction prouve que
la destination des 12 0 0 0 fr. était indé terminée j elle démontre sur
tout que devant varier selon les changemens éventuels du
d’autres causes, Cham pflour-D esm oulin
jeu , ou
se reposait sur l’acte
de
confiance q u 'il n’avait consenti que pour lui faciliter ces variations.
E n e ffe t, au lieu
de 50
louis pour le
jeu a v e n ir, au lieu de
payer la plupart des créanciers indiqués , il toucha les 800c fr. pro
venus de Bughon et de Lescurier pour faire face à la partie de jeu ,
qui l’avait fait recourir 4 cet expédient j conséquemment il me restait
�'*5>
à employer pour remplir les 12 0 0 0 fr. ; que 4000 francs qui l’ont
été en effet par m o i, et bien au-delà par les paiemens que j ’ai faits
de Z400 fr. à Lahousse j de 1 6 7 / r . à Blatin ; de 3 15 fr. à Caze , et
de 1 1 1 8 fr. à Fabre.
3 .° ( V o ic i, Champflour , le coup de massue qui va faire ressortir
ton
infâme
impossible
le
complot
que
avec Lahousse ) } qu’il est
Fabre
besoin de ta cause ,
compris
put
dans
êcre
ton
état
indiqué
le
phisiquement
fabriqué
18 mai
pour
17 8 9 ,
pour être acquitté, puisque F a b r e , alors , n’était point créancier de
Cham pflour-D esm oulin, et qu’il ne le devint qu’environ huit mois
ap rès, le 14 janvier 17 9 0 avec échéance au 1 4 avril suivant préfixe.
M ain tenan t, auquel des deux états faut-il ajouter foi ? à celui que
je rapporte l ’écrit de la main de ton frè re , confirmé par celui de
tes ag en s} rappelé dans l’écrit que vous
avez
eu la
subtilité de
soustraire à la ju stice, ou à celui dont je viens de prouver la faus
seté ? L e trait de lumière devient électrique pour porter la même
évidence , et mettre au plus grand jour le concert abominable avec
Lahousse.
L a lettre de change de cet estafier est du
ji
mai 17 8 8 ; l’échéance
était au premier janvier 17 8 9 ; Champflour a articulé l’avoir payée
le 8 juillet 17 8 8 , et la
déclaration
de ce
complice est du
19
nivôse an 9.
M a i s , le 8 juillet 17 8 8 3 l’écrit de Desnnoulin que je rapporte,
et dont vous placez la date au 28 mai
17 8 9 ,
n’était
même pas
fait le 8 juillet 17 8 8 , puisqu’il y rappelle la date de C a z e ,
qui n’a été cou tractée que le 2 juillet 1 7 8 8 , et n’était payable que
le 1 juillet 17 8 9 .
E h bîen ! C ham pflour, répliquez ; imaginez quelqu'autre moyen
pour consommer votre trame infâme avec votre digne ami Lahousse.
N o s concitoyens, la postérité et la ju stic e , je l’espère, jugeront la
question qui du gentilhomme
C
ham pflour
ou de l’ancien procureur
peut se promettre que l’honneur lui survive.
�» :■
10
Donc la cause de cet acte du
18
mai
17 8 9 }
fausse qu’est certaine au moral et au phisique ,
est aussi
peii
la cause pré-exis
tante.
C ela posé et démontré jusqu’à l’éviden ce, n’y a-t-il pas eu une
nouvelle erreur d’avoir prétendu que l’on devait diviser ma décla
ration émise de bonne f o i , et loyalement dans l’acte du 1 j fructidor
an 7 , transcrit page i j
et 16 de mon m ém oire?
Ces inconséquences en ont produit d’autres.
x ,° D ’avoir considéré mon aveu
2 ° D ’en avoir induit
comme contre-lettre.
la présomption d’une
autre
contre-lettre
pré-existante.
3.® D ’avoir confirmé mon aveu qui a été divisé quoiqu’indivi
sible , et de vous avoir déchargé du votre , sous prétexte d’une
prétendue révocation qui n’exista ja m a is, de l’acte du 15 fructidor
an 7.
En fin quelle a pu être l’opinion publique sur vos
fanfaronades
de vous être vanté de m’avoir fait perdre 12 0 0 0 fr. ;
n’est-il pas
notoire que vous m 'avez offert 14 0 0 0 fr. avant le litige que je ne
me déterminai à introduire
que
iTaprès les calomnies
que vous
vous étiez déjà permises ?
Term inons ce combat polémique , pat vous d e m a n d e r quel est
jusqu’ici le résultat d e tout.ee qui en est l’objet : l’entière créance
V i r y , qui était ma garantie, ne
vous reste-t-elle pas en
ne me volez-vous p a s , d'un côté , plus de 8000 fr. ,
entier ?
distraction
faite des assignats que vous m ’avez remis en l’an 5 , et que m échament
yous
me prêtez soutenir en l’an
4 ;
e t , d ’ un autre cô té,'
la valeur réelle des objets Bughon et Lescurier ? eh ! vous êtes assez
dissolu pour ajouter à ces vols la plus attroce diffamation / ô tempora ! ô mores !
Je
ne répéterai aucun moyen de mon pourvoi; je renvoie
X.
pion mémoire. Je ne prendrai pas la peine de refuter la réponse:
V
�quelque soit l’évènem e n t , ma conscience est pure j ma sécurité esc
parfaite.
I l me
reste encore le dégoût , mais la nécessité Impérieuse de
balayer les autres ordures
parsemées à chaque instant dans votre
libelle.
J e ne reviendrai pas sur vos caquets touchant
les
besoins dont
vous avez perdu le so u ven ir, lorsque j ’ai exposé ma fortune , mon
honneur et ma v i e , dans le temps où vous n’auriez pas
emprunter un lo u is, lorsque je
trouvé i
vous cautionnai pour plus de 1 1 0
niille francs 3 je courus tous les dangers , le plus pénible de tous ceux
que j’é p ro u ve, a été celui de l’ingratitude; j’ai agi en ami ch au d ,
sans un sou d’in té rê t, sans attacher aucun prix à mes veilles j à.
mes sollicitudes. Ingrat ! la présence
de
mes
enfans
semblait re
procher à ma m unificence, et vous les abreuvez du fiel le plus
amer que puisse éprouver un vieillard ! vous n ’avez répondu aux
faits que contient mon mémoire que par des sottises , des ironies !
injurier n’est pas répondre. L a notoriété vo u s, accable............. E h !
cependant ma fam ille et moi devons glaces à D ieu de votre noire
ingratitude. Si je vous eusse continué mes b o n tés, à quels ma
lheurs j’exposais ma fem m e, mes
enfans , m oi-m êm e. L e temps
n’est peut-être pas élo ign é, pensez-y bien , de vos regrets plus que
de vos remords.
V ous êtes insatiable sur le souvenir de Couthon ; vous ne vous
rappelez plus que vous n’obtîntes la lettre dont j’ai parlé j et que
je ferai imprimer à la suite de cette réponse, que parce que vous
Ütes abnégation de votre naissance et de votre rang j que vous rap
pelâtes à propos l’origine du marchand Champflour , sur-tout vos
acquisitions de biens nationaux à Beaum ont j aussi ce despote écrivit,
dit-il ,
AVEC rLAISIR
,
P A R C E QUE j ’ A I M E A
M E F R A P P E N T , E T QUE ,
m arq u é
que
d ’u n
CHAMPFLOUR
Champflour n>5t pas
AUTRE
fu t
seulement
D IR E
COTE , J E
l'e n n e m i
ami
du
LES V É R I t Î
n ’a i
s
QUI
JAMAIS
RE*
p e u p le .
du peuple,
mais
de la
�9
11
populace la plus effrénée , puisqu’il sait si bien la singer. Cepen
dant ,
toujours versatile , sa
naissance et son
rang lui font dé
daigner aujourd’hui d’être l’ami d’un ancien procureur, et il saisit
avidem nient ce mot pour s’égayer dans sa diffamation/
B o yer 'dit qu’il est mon ami 3 il m’a dénoncé comme émigré.
M isérable ! je n'ai
dénoncé personne ;
vous
eusse-je dénoncé ,
vous qui croyez me flatter en me nommant votre second père ; mais
vous seriez-vous conduit alors comme aujourd’hui ? d’abord je n’é
prouve pas le sentiment aussi fâcheux que pénible de la vengeance.
M ais me serais-je précipité dans tous les ab îm es,
suite funeste de
votre ém igration , moi qui étais à découvert pour vous , pour plus
que la valeur de ma fortune que vous exagerez des deux tiers.
D e votre aveu s page 7 de votre réponse , parti au commence
ment de juillec 1 7 9 } j vous fûtes inscrit sur la liste , le 14 pluviôse
suivant. V ous et vos agens affectés de confondre un simple acte
conservatoire qu’exigeait la l o i , avec
une dénonciation. J e différai
cet acte jusqu’au 5 décembre 1 7 9 1 ; je me suis bien gardé de vous
y présenter comme émigré. C et acte avait été précédé de huit autres;
31 a été suivi de
plus
de
quatre-vin gt-dix; ce sont d o n c, selon
v o u s, autant de dénonciateurs, et dam une colère digne de votre
rang et de votre naissance t
L ou ïrette 3 votre femme ,
vous
n’exceptez
vos gendres ,
pas
même le fidele
tous ceux qui vous ont
marqué intérêt. Quod genus hoc hominum !
B o yer se dit mon ami } et il m’a fa it rembourser en assignats tous
les anciens capitaux qui m’ étaient dus.
G rand D ie u ! quel affronteur/ quelle est donc une seule créance
dont j ’ai- coopéré au remboursement ? M ais avant to u t, vous toujours
o b éré, quelles créances autres que celles
provenant des ventes des
biens de votre femm e , dont la valeur équivaut au
vous été dans le cas de toucher ? je 11e suis entré
vôtre , avezpour rien dans
le s tripotages que vous avez faits à ce s u je t , et lorsque vous avez
eu la facilité de recevo ir, yous yqus êtes passé de tous bons offices
même de c m
de Louïrette.
I
�B o yer se dit mon ami 3 il fu t cause de ma. réclusion ; i l eut l'attrocitc d’insulter à mes malheurs.
Ir>tensé ! quel
l’autre
;
eh !
a c te ,
vols
quel m otif aventurez - vous ? ni l’un ni
affectez d’oublier tout
ce
que
je
fis pour
vous à cette triste époque ! n'est-il pas fâcheux que vous me for
ciez à vous savoir gré de cet impudent mensonge , la défiance
et l’indignation publiques à ce s u je t, s’étendront bienrôt sur votre
libelle comme sur votre personne.
Je ne fus pas chargé par Couthon de
la mission
douloureuse:
que me donna la Municipalité d’enrrer dans cet endroit de malheur
où vous étiez.
Lorsqu’il
s’agit de
faire exécuter la séparation
du s e x e , des
hom m es, j ’en appelle à tous les reclus et aux demoiselles de l’E ta n g j
leur position m’arracha des larmes , j’obtins à leurs désirs t qu'elles
restassent. Je vous n om m ai, il est v r a i, sœur Ce^ar, vous rites de
cette allusion sut l’opposé à cette vocation. Je n’eus aucune intention
de vous fâcher. C ’était dans cet instant fatalj une expression frater
nelle , par le plaisir que j ’avais que vous eussiez échappé à de plus
grands maux.
Quelle est donc la trempe de votre poignard pour ouvrir déjà ma
tombe ! il vous reste encore i empoisonner l'action dont je viens
de goûter les délices. Compatissant aux malheurs de la dame
Der
fargues comme je le fus aux v ô tres, je v ie n s , par acte p u b lic , de
lui remettre des biens que j’avais achetés plus de 80000 francs en
assignats. M on intention était connue depuis long-temps de M rs.
de Vcrniere > de Fougères , L e v é , Asticr , juge du tribunal <1’ar
rondissement à R iom . Chacun de nous a cherché à l’em porar suc
l’autre, en délicatesse dans les procédés.
J ’ai reconnu dans cette dame cette véritable illustration de nais~
sance et de rang. Vous êtes bien loin d’en approcher , Champflour !
;votre m alig nité était p eu t-être nécessaire p o u t
mous
faire connaître
�elle ne setvira qu’à faire plus honeur à ma mémoire. J e désire un
retour sur vous-même , mais vous, me rappelez ce que j’ai lu quel
que part
peut-être dans l’allmanach ou dans le praticien Lange , qu’il
est des h o m m es,
m enso nge.
tout glacés pour
la
v é r it é
to u t feu
,
p o u r le
L e Public va juger que nous différons encore
point.
sur ce
'
,
B O Y E R.
L E T T R E
DE
COUTHON.
Paris, le 7 Juillet 1 7 9 3 l’an 2
République française.
G E O R G E
de la
C O U T H O N ,
A u x Offic ie rs Municipaux de Clermont.
M
ES
CHERS .CO N CIT O Y E N S;
J ’ai vu chez moi avec.............. CHampflour-Beaumont ; il m’a communiqué
tous ses certificats et passe-ports ; il m'a apparu ainsi qu’à............. légalement
en règle. Il a désiré que je vous en écrivisse ; je le fais avec plaisir, parce '
que j’aime à dire les vérités qui me frappent , et que d’un autre côté, je
n’ai jamais remarqué que Champflour fut un ennemi 'du Peuple.
A CLERMONT-FERRAND
,
D E L’IM PRIMERIE DE GRANI ER E T F R OIN?
rue Balainvilliers.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Pierre. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boyer
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
émigrés
Couthon
notables
faux
communaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, chef-lieu du département du Pui-De-Dôme, demandeur en cassation ; Contre Jean-Baptiste-César Champflour-D'Alagnat.
suivi de « Lettre de Couthon ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Granier et Froin (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0929
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0928
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53090/BCU_Factums_G0929.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Solignat (63422)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
communaux
Couthon
Créances
émigrés
Faux
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53089/BCU_Factums_G0928.pdf
55bd2cb0170fb20e9893ed4723d022e4
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Text
MEMOIRE
EN
RÉ P O N S E ,
POUR
J
CHAMPFLOURD ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
e a n
- B
a p t i s t e
Puy-de-D ôm e,
- Cesa r
défendeur j
CONTRE
\
P i e r r e B O Y E R , juge au tribunal civil de
l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Q u o d genus h oc hom inum !
V irg.
B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de C lerm ont, a été long-lemps mon procureur et mon
A
P IE R R E
t r ib u n a l
de
CASSATION.
�( s )
Iioinmc d’affaires ; il me scrvoit avec exactitude, je le
récompensois avec généi-osité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières ,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
Il devoit à l’une, de scs filles une dot de 20,000 francs ;
il ex p o se, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
dot.
U n jugement solennel du tribunal d’a p p e l, séant à
R io in , a réduit les prétentions de B o yer, i° . à une
somme de 1,800 francs 13 centim es,.qtii étoit due par
feu mon frè re , et que je ne contestois pas; 20. à une
somme de 2,400 fi’ancs que je paye deux fo is , parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
.Boyer m’a fait signifier le jugem ent, avec som m ation
de Vexécuter. J ’ai* payé ; il a reçu. A u jo u rd ’hui il se
pourvoit en cassation.
O n sent que-cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugcniènt du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homm e aussi peu délicat, Siégeai parmi
les magistrats du département.
Il a cru détruire cette prem ière impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore; je m ’éfois
contenté de faire valoir mes moyens ù l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intéi’êts. Je croyois devoir cette con
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que th o n n eu r lu i survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance ; il a soixantesept ans : il pourroit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. Il affecte de rappeler souvent qu’il est juge :
nn plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nom m é parce q u i l le co n n o isso it, et que le gouverne
m ent ïa v o it conservé parce q u i l ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon am i; il m ’a dénoncé comme
émigré ! Boyer se dit mon a m i, et il m ’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m ’étoient dûs!
(i) U n citoyen de Clermont réclame contre l’assertion de Boyer,
et lui fait au contraire de grands reproches : c’est le cil. Bourdier.
Il devoil à défunt Beraud , mon beau-père, une rente annuelle de
5o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années' d’airérages : le
citoyen Boyer éloit chargé d’en poursuivre le recouvrement. Bour
dier lui donna douze louis en or à compte ; mais il n’eut pas la
précaution de retirer de quittance, parce que Boyer prom eüoil de
la lui faire donner par la dame Beraud. Boyer a oublié celte cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la montre, a toujours dit le
délicalBoyer : etles douze louis seroient perdus pour le cil. Bourdier,
si je n’avois eu connoissance du fait. Je les alloue au ciloyen Bour
dier : c’esl encore une somme ii ajouter à toutes celles que j ’ai
données ù B o y e r, qui voudra bien la regarder comme une nou
velle marque (le reconnaissance.
A 2
�Boyer se dit mon ami ; il fut causes de ma réclusion f
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jo u r , en sa qualité de
com m issaire de Couthon , il se rendit ù la maison des
U rsulines, où on avoit entassé une foule c^e victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les fàm m es, et de
les conduire dans un autre cachot. N on seulement il se
perm it de les traiter avec une rigueur digne de «es temps
affreux, qui lui convenoient si L ien , mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœ ur César.
M o i Cham pflour, ami de Boyer! mais l’âge,'la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations , les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. Il convient lui-m êm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des m arques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B o y e r, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
E n fin , cette amitié ne remonte pas bien loin , puisque
au rapport de B o y e r, ce n’est qu’en 1783 ou en 17 8 4 ,
que je lu i a i été -présenté. Q uel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérém onie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et au mois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoîfre. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à Ilio m , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
?
�(
5
)
J}c> \
M a famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite; mes ancetres se sont illustrés dans la magis
trature, et l ’un d’eux fut annobli pour services rendus à
l ’état. C ’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
un citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. L a propriété principale
que je possède est située près de G lerm ont, dans un
des plus beaux cantons de la Lim agne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p la c é , dans un temps où il
existoit des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit fo rcé, dans la v i e , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m ’étoit ouverte de toute
p art, et q u o iq u ’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
B o y e r, qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un rom an, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m ’appliquer •, mais personne ne m ’a reconnu à ce portrait
louchant.
L a charge de receveur des décimes du clergé, appartenoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exercée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par B oyer, que j’avois chargé
de mes affaires ; le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer lit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai scs soins et son zèle; je lui iis
�•
f
(G )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleux, et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu , il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de là charge de receveur
des ta illes, qui venoit également de ma famille. Il est
connu de tout le départem ent, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l ’en ai jamais occupé.
•
E n 17 8 9 , j’eus besoin de quelques fonds; Boyer me
p r ê ta , le prem ier novem bre de cette même an n ée, une
(1)
Il n’est pas inutile de détailler ici les différons cadeaux que
j ’ai faits à B o yer; vingt couverts d’argent, dont huit à filets; huit
cueillers à ragoût, douze cueillers à c a fé , six salières d’argent,
une écuelle d’argent, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d’argen t, à h ateau , trèsbien ornés ; six flambeaux d’argent , deux cueillers à sucre , à
jour ; deux tabatières d’or pour le mari et la fem m e; une montre
d ’or à répétition, deux moutardiers et deux cafetières d’argent ; un
cab rio let, un fusil à deux coups, deux pistolets et une selle, cin
quante cordes de bois ù b rû ler, une feuillette de B ordeaux, tout
le bois nécessaire pour parqueter sa m aison, faire ses alcôves et
séparations, le tout en planches de noyer et poirier, et tant d’au
tres choses qui ne reviennent pas ù ma mémoire.
En argent , soixante-dix louis , qu’on lui fit accepter comme
bénéfice du je u , quoiqu’il n ’eût rien avancé.
l ’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis; jo
ne parle de cette largesse , que parce que je sais qu’ il monsieur
çlle en rendoit quelque chose.
�QU
(7 )
somme Je 5,ooo francs, avec intérêts à cinq pour cent,
sans retenue. L ’année suivante 1790, je renouvelai mon
Juillet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novem bre 179 0 , il me prêta encore une somme
de 2 , 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. J e voulus retirer m on billet ; il n’eut pas
le temps de le chercher au même m om ent; je négligeai
de le redem ander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792 ', je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois ém igré; il me dénonça comme
tel, le 27 octobi-e 179 2; sa déclaration (x)contient rén u
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son proiit les 1 * et 11
novem bre 179 0 , quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
....... ■
I
........ .
— ■!■■■■■— I
■■
. ■
(1) V oyez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o y e r, que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1793, il me faisoit
rembourser deux fois la somme de 2,5oo francs. Que vous ai-je
répondu, me d it-il? — Q u'il1falloit vous payer encore une fois!
A lors m ’adressant au juge de paix et ù scs assesseurs, je m'écriai :
Quelle opinion devez-vous avoir d'un homme qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà reçu ? L e juge de paix et ses asses
seurs soiït très-mémoratifs de ce f a i t , et peuvent l'attester.
�* -r
( 8 ) .....................
mars 179 3; Boycr ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. O11 sent que ce 11’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit;
je crus ne pouvoir m ieux faire que de le mettre hors
d’in térêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Couthon.
Mais Boyer s’étoit encore fait un autre titre de créance;
il me dit avoir emprunté d’une nommée M artine D elarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pou voit-il qu’il
eût fait cet em prunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dam es, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retiré d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune m ém oire : point de recon-»
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut paÿer ( 1 ).
(1) A propos de Martine D elarb re, Boyer lui avoit emprunté
cette somme de 800 fr. le i 5 avril 1790. C ’est le
25
du m êm e
m o is, huit jours après ce billet , qu’il fit le compte des dames
Beraud et Chajmpflour , et il ne fait nulle mention de cet em
prunt pour leur compte. Je me suis procuré ce billet des mains
des héritiers de Martine Delarbre. J’ai remarqué qu’il étoit de la
6ormne de 840 fr. payable dans un an ; la somme de /¡o fr. éloit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossernens en
m arge, de la somme de /(.o l’r. chaque; l'un , du ia septembre
1792 ; l’autre, du 27 mai
On y voit encore , que sur la date
çlu
avili 1790» Boyer a cflacé le ipot d ix de la fin de }a date,
Mes
r
�( 9 )
M es rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme juge , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendém iaire; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les regards ; il ne lut pas même
fort en crédit jusqu’au 18 fructidor' an 5 ; mais à celte
ép oqu e, il reparut avec audace: il étoit cependant hu
m ilié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
fit parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro
chement. L e prétexte fut un aiTangem ent par lui fait
avec feu Cliampflour-Desmoulins, mon fr è r e , en 1789.
Suivant B oyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement com ptée, et ce qui avoit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le mot onze ; ce qui donne au billet la date de
4791 au lieu de 1790. L ’encre qui a tracé le trait sur le mot d ix t
et écrit le mot on ze, l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infiniment plus noire que celle du corps du billet et
de la signature qui le termine. Ces cliangemons ne paroissent
avoir été faits que lors de l'endossement de la somme de 40 fr.
du 27 mai 1795 : cet endossement est postérieur au rembourse
ment que je lui ai fait. Il voulut alors rembourser Martine Del arbre
en assignats, sur le prétexte que je I’avois remboursé de même.
Cette fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et qu’elle ne lui avoit pas prêté pour mou compte;
alors il effaça le mot d ix pour y substituer le mot onse. 11 avoit
deux objels ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l’autre, de rendre plus probable l’emprunt qu’il
disoit avoir lait pour ces dam es, en lui donnant une date posté
rieure au compte qu’il avoit fait avec elles , et qui se Irouvoit
trop rapproché de la date du billet pour qu’on ne soupçonnât {»as
sa délicatesse.
B
�( ÎO )
.aucun bénéfice sur ces payemens; mais comme je lui avois
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790, il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte que je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un com prom is, pour nous en
rapporter définitivement à deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i , et que Boyer ne clierchoit
qu7un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m ’avoit prêtées en 179 0 ? Il crut s’être
fait un titre pour me forcer A lui donner une indemnité ;
et bientôt, révoquant le com prom is, il me traduisit au
tribunal civil du P u y-d e-D ô m e, où il étoit juge.
M ais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’éti'ange marché que B oyer
avoit fait avec mon frè re , le 2,8 mai 1789.
Cham pilour-Desm oulins, mon frère , étoit un jeune
m ilitaire, gén éreu x, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et m e devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les mains une quittance de mon frè re , de la tota
lité de sa légitim e, en date du 1 " avril 1784; un billet de lui ,
du 1" mars 17 8 9 , par lequel il se reconnolt mon débiteur de
4,600 francs; et un second, du 25 août 1791 , par lequel il reconnoit me devoir la somme de 16,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n'ai cessé de venir au secours de mon frère dans.
tous les temps ; j’ai une foule de lettres de lu i, par lesquelles il
m ’exprime sa reconnoissancc.
?
�Il lui restoit pour toute ressource une créance de
16.000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cen t,
sur le p rix de la charge de receveur des tailles de
l ’élection de Clerm ont, dont le tiers appartenoit à notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V i r y , notre
o n cle , titulaire de cette charge.
M on frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude ; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les m ojens de le tranquilliser. Il proposa à mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V i r y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se chargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Desmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
M ais un acte .de ce genre seroit bien coûteux-, entraîneroit des droits d’enregistrement considérables ; il faut
éviter cette dépense, et il y a un moyen tout simple.
D on n ez-m oi, d i t - i l à D esm ou lins, une procuration
notariée, pour m ’autoriser î\ recevoir les 16,000 francs
et les intéi'êts que vous doit votre oncle ; vous reconn o îtrez, par cette procuration, que f a i déjà payé les
12.000 fra n cs à vos créa n ciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne celte somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans, avoir donné un sou; et ce n’est point
B 2
�ici une assertion aventurée ; B oj’er l ’a reconnu clans lo
compromis du i 5 fVusador an 7 ; il a renouvelé cet aveu
devant le juge de p a ix , devant les premiers ju ges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
p o u r cause f a u s s e , ou sans cause préexistante ( 1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi im portante, sans bourse délier! et Boyer
veu t-il que l'honneur lu i survive, lorsqu’il est condamné
à remettre une obligation consentie pour cause fa u s s e !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) En même temps que mon frère souscrivoit cette obligation,
jl avoit donné à Boyer l’état de ses dettes. C et état étoit ainsi
conçu:
i°. A M . L aville, M . B lau d cau tio n ............................... i , 5oo fr.
A la Nanon , cuisinière de mon f r è r e ......................
Goo
A Dufraisse-Lapierre, domestique de M . de Flagheac,
1,200
c i ...................................................................... ... . :'V . . .
M . Boyer , ma c a u tio n ...................................................
2,800
A madame S a u z a d e .......................................................
2,900
A Caze , p e rru q u ie r........................................... ...
3i 5
A F a b r e , c o n fis e u r .......................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r ..............................................................
1,200
A B l a t i n ............................................................................
A B ra cb e t, t a i l l e u r ............................. ........................
260
5Go
T o t a l . . . ............................. ...
12,353 fi .
Voilà les dettes que devoil payer Boyer ; il n ’en a acquitté
d'autres que celles de C aze, Fabre et Blalin , que je lui ai allouées.
( E xtra it du livre journal de mon frl're, dans letjuel il avoit ins
crit les dettes dont B o y e r éto it chargé).
!
�an 8, Boyer obtient une cédule du juge de paix du
la section de l’Ouest de Clerm ont - F erra n d , où je
suis dom icilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m ’a rendu des services nota
bles ; q u i! a reçu d’abord de m oi des m arques de re
connaissance ,- il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 179 0 ; que l’époque des-remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’éclielle de
dépréciation, suivant les conventions des parties ; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et L o u yrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les a veu x; e t , comme les ni-bitres n’avoient autre
chose à faire qu’ un calcul qui seroit p én ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
„11 ine demande au prin cipal, i° . la somme de 8, 55o fr.
pour les causes énoncées au com prom is; 20. les intérêts .
de celte som m e, à com pter depuis l’échéance des effets;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen L e scu rie r, pour le compte do mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; p lu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l'obligation de 12,000 fr. 4 0 . la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen B u gh eon ,
le 28 niai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 179 2 , avec 136 fr. pour intérêts ou frais.
. Boyer demande encore une somme de 2^7 fr. 20. cent.
�( H )
payée à B la tin , négociant, le 8 juillet 178 9; celle de
3 1 5 fr. payée au nommé Caze, coiffeur, le 10 du m ême
m o is; celle de 1,218 fr. donnée à F a b r e , m archand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desm oulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclam oit aussi une somme de 2,400 fr,
qu’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un effet souscrit par mon frè re , et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B o y e r, par une suite de confiance ; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , B oyer. demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr- qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en fa v e u r de qui.
Telles étoient les demandes prin cipales, et comme
Boyer se trouvoit dans le b e so in , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
b ref d é la i, pour être condamné à lui p a y e r, par pro»
vision et à bon com pte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il donc dans le délire ? à qui persuadera-t-il
qu’il a em prunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
d’une p a rt, .et 3,180 fr. d’au tre, sans se faire donner
aucune reconnoissance par celui pour lequel il faisoit
les emprunts? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas môme
déclaré aux créanciers ? Pourquoi , quand Bughcon a
obtenu contre lui une sentence de condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi 11’a-t-il pas fait dénoncer les poursuites de
Uuglieoa ù mon frère ou à ses héritiers ?
I
�C 15 )
•Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l'obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’être créancier?
M ais cette obligation est contenue dans une procura
tion qui l’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo francs par annee ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il étoit
donc tenu de rendi’e compte de sa pi’ocuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescurier
et de Bughcon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient tourné à son profit. Reçues par mon
frère ! mais cela étoit im possible, Boyer ne devoit lui
rien com pter; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu , il n’a rien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets m inutieux de
B latin , Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs:
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de L escurier, Desmouliiis étoit
à son régim ent ; j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-m oi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m ’a fait assigner.
N o n , ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l ’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789 > ei1^ l’a(lresse de tirer sur
moi la lettre de change de B u gh eo n , et c’est avec ce
�(i6 )
même argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus délié , il reliroit deux fois son argen t,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai rem boursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frèi’e : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adroit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argum ens, qui
étaient sim ples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m o i, et que cet écrit étoit accablant.
M ais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoître
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et d em ’attérer par cette preuve que j’avois m oi-m ême donnée.
C e fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A v a n t d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît con
noître le montant des sommes qu’il disoit avoir em prun
tées pour mon frère.
Boyer me présente une feuille de papier, et rne prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Bo}rer a emprunté
« pour mon frère ,
« i°. A M . Buglicon 3,000 francs.
« 2°. A M . l'abbé A u b ie r 1,800 francs.
« 30. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres ; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je denuiXHÎois,
�c 17 )
^
^
J*
mnndois comment ces prétendues créances étoient étaLLies. Boyer prend de l’hum eur, et retire le p ap ier:
ce st cette inéme note qu’il a eu l’indignité de p ro d u ire,
et qu’il aimonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il ? 11 ne produisit qu’un papier
c o u p é , de la longueur de quatre lign es, dont il vouioit
se servir; il avoit supprimé le reste, et l’avoit coupé
avec des ciseaux ( i ).
P our le co u p , ce fut B oyer qui fut altéré, et publi
quement couvert de lionte. Malheureusement pour l u i ,
la créance de Yabbé A u b ie r se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de Yabbé A u b ier. S’il avoit supprimé les
'autres qu’il ne demandoit plus ; il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A u b ie r; cependant il convenoit qu’elle
DC lui étoit pas due. O r , il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Buglieon et L escu rier, quecelle
d’A u bier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou celte préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables ?
Q u'on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Buglieon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
m ’a voit prêtées en 1790! et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'audience, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des ciseaux , ils
firent éclater un mouvement d’indignation contre l'infidélité du
citoyen Boyer. Plusieurs citoyens de C lerm o n t, qui étoient éga
lement à l’audience, s’en aperçurent, et ont publié que les rieurs
n ’etoient pas du côté.du citoyen Boyer.
�Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m ’avoit fait
écrire sous sa dictée , et sur le même p a p ier, il avoit
porté entre autres , une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen Lenorm andFlaglieac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dire si mon frère avoit été son d éb iteu r,. et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
L e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
cîcvoit rien , et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
J e présentai cette lettre à l’audience, et iis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé diiïérens créanciers! Quand
on connoît B o y e r , il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B o y e r , procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l'audience sur l’interpellation du président!!!
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon frère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu'il me demande, et celles qu’il ne m’a pas
(1) TCoyrr a ajouté tf'» sa main son prénom , <jui avoit été laissé
rn blanc dans le double du compromis <jue j’ai en mon pouvoir.
�Jss
( *9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent à
178 9, et qu’il est établi que mon frère a resté à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 17 9 1, sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C ’est ici le cas de parler de la lettre de change de
.Lahousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 francs , au profit du
citoyen Lahousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788; il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de pai'ler principalement de la créance de Lahousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrais
à diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Lahousse; je n’avois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la detle; je priai le
citoyen Lahousse de vouloir bien inc remettre la lettre
de change de mon frère, et j’offris de souscrire à son
prolit un effet de pareille somme.
L e citoyen 1 -ahousse s’empressa d’accéder à ces arrangeinens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’effet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
fam ille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ign o roit les arrangeinens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dern ier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le m ontant, et l’engage
à mettre son acquit au Las de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’éloit des deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien con n u e, m algré la m alignité
de B o y e r , refusa de signer l’acquit , en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature; il a osé depuis form er
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payem ent, sur le fondement
que Boyer étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a entraîné les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme ju g e, sans le juger comme hom m e; mais
cet homme est im juge!!!
Mais je demanderai à B o y e r, comment et à quelle
époque il a payé ccltc somme à Lahousse ?
Boyer a d it , en plaidant, qu’il l’a voit acquittée à
l’échéance : on se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 178 9; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de celle obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
nanti avant d’etre créancier; il eu convient lui-incm e.
�Il ne l’a pas payée depuis, puisque la lettre de-change
étoit sortie d’entre les mains de Lahousse, lo n g-tem p s
avant son échéance. Tous les faits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Lahousse’; déclaration que j’ai produite à
l’audience (r) : aussi,loi’sque j’ai satisfait auxeondamnations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre celte lettre de change, afin d'en
poursuivre le recouvrement contx-e Lahousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à celte rem ise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel, de Riom .
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l'im
pudeur de xvclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C ’est ainsi que j’ai payé i,8oo francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 178 6, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C ’est ainsi que j’en ai payé bien d'autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en noie, à Per
ception de celles de F a b rc, Caze et Blatin.
Je pou vois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Lalioussc est imprimée à la suite du mé
moire.
�( 22 ^
J ’avois présenté un autre état qui m’avoit été donné
par mon frè re , et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cette
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M o n frère avoit fait la note des sommes que j’avois pré
cédemment payées pour lu i, et m’avoit remis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une dem i-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa main , et que
mon frère n’existoit p lu s , cet état étoit une pièce pro
bante qu’on ne pouvoit contester : je m ’en fis un grand
m oyen , lors de la p laid oirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. B oyer, qui ne connois^
soit pas cette p iè ce , en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de ‘
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoienL avec
intérêt la discussion de cette cause. L a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est m em bre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
I/O défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit à la m ain;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates,
lia cause est continuée à une autre audience ; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit il mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
ijous demandons tous deux avec confiance, soit à B oyer,
V
�i
c 23 )
soit à son défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouvé.
A lo rs Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou raturé
les dates. O n voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, u ’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la p a rtie , lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la'p ièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté cette créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en c o n v in t, et Boyer fut
jugé par le public. A u jourd ’h u i , Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son m ém oire,/ lui Boyer,7 le seul en
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blAmera-t-on maintenant de m’être refusé à payer
une indemnité à Boyer, à. raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
20. .T’ai rem boursé,danslecourant de mars i793,dan su n
temps où les papiers avoient encore une grande valeur ( j ).
(1) Boyer ne peut pas équivoquer sur lVporjuc de ce rembour-
�C m )
Il est vrai qu’en m ’acquittant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il ne restoit plus de traces
du remboursement.
Q u’a fait l ’ingénieux B o yer, pour me donner plus de
défaveur sur ce rem boursem ent? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
O n lui observe que cela est impossible ; qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation ; alors il
répond que c’est au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut m ériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et L ou yrelte,
par nous réciproquem ent choisis : Boyer a révoqué lo
compromis.
4°. E n fin , je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit réciproque, et que Boyer in’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payomens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé ; il n’y a donc pas de réciprocité.
sèment. J’en al fait un , dans le même tem ps, au cit. L o u y re lte ,
l’un des arbitres, que Boyer lui-même pressoit d’exiger son paye
ment et d ’imiter son exemple , sur-tout à raison de ma prétendue
émigration.
Depuis le com prom is, il eut la mauvaise foi de prétendre que
le remboursement avoit été fait beaucoup plus lard ( en messidor
cm 4. ) L ’arbitre Louyrettc le releva sur cette assertion. L e dé
licat Boyer se hâta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire comme m o i, puisque nous avons été remboursés dans le même
temps. On conçoit actuellement le m otif de la grande colère de
Boyer contre Louyrelte.
Tels
�(25)
T els furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
m on défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les propos de taverne
et de café , qui fui*ent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pas été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut co u vert, d it-il, par mes vociféra
tions , et le trib u n al, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un d élib éré, et n’a prononcé qu’après
le plus m ûr examen.
Enfin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9 , qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clerm ont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m o i, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 178 9 , et de celle de 3,180 francs d’au tre,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même a im ée, intérêts et frais qui leur sont acces
soires;
-2°. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement do la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obliga
t i o n de 2,804 francs, prétendue contractée par Cham pllour-Desmoulins , au profit d'une personne inconnue ;
30. En ce que les intérêts ont é.é adjugés à B o y e r,
à compter des époques des payemens ; 40. E n fin , en ce
que j’ai été condamné aux dépens; ém endant, Boyer est
D
�'♦
.
(* o
débouté de toutes ses demandes relatives à ces différens
chefs, sauf à lui à agir en garantie, le cas échéant; (c’estù-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de 1,800 fr. 13 cen.
montant des sommes payées à B latin, Fabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné àpayerles 2,400f.
montant de la lettre de change de Laliousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour h me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
f r è r e , comme faite pour cause fa u s s e ou sans cause
■préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugem ent auquel
je suis condamné.
Ce jugem ent, dont Boyer a pris la peine de faire im
prim er les motifs et les dispositifs , est principalement
m o tivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à B oyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champilour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de B oyer, dans le compromis
devant le juge de p a ix , devant le tribunal d’appel, qu’au
pioment de celle obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère;
L e tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
»
�C*7)
iicatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et documens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement dç
la somme de 8, 55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i que cette somme a été par moi payée à Boyer*
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquem ent Boyer se soumettoit à ne ré
péter les sommes q u ’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon fr è r e , que suivant la môme propor
tion , et d’après l’éclielle ;
4 0. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. L e tribunal d écid e, quant h l’indemnité du caution
n em ent, qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet prescrit, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne pas.
L a condamnation des sommes ducs à B latin , Caze et
la b r e , est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change deLahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
V 2
J
�(a 8 )
.
A l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depuis
l ’époque de ses prétendus payemens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
con ven tion , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
la demande.
B o y e r, présent à la prononciation de ce jugem ent,
croit avoir fait un assez grand p ro fit; il p art, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content , qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement a mon avou é,
le 5 iloréal an 9 , sans approbation préjudiciable , pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon dom icile,
sous les mêmes réserves; mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugem ent, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire urt acte d’oifre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal cl intérêts; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage an procès, notamment la lettre de
(1) Ces réserves et protestations de Boyer me rappellent I’anecdote d’un vieux praticien, qui voyageant dans les ténèbres, fut
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à se reconnoîlre dans l’obscurité. II s’écrioit üt chacun : J e t’ ac
cepte en tant que tu me sers, ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
Comme lu i, Boyer ne marche jamais sans protestations.
�/
(
29
A
)
change souscrite par feu mon frère au profit de Lahousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient insci’its les noms de L escurier, 1abhe yliibier
et B ugheon, comme créanciers de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendrait, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Lahousse.
Boyer ne laisse pas échapper l ’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. (c e lle fa ite pour' cause
fa u s s e ) \ mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, d it-il, la lettre de change et la n o te, sous le
vain prétexte qu’ il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’a p p e l, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
11 me parut d’autant plus extraordinaire , que B o y e r,
qui m’avoit fait, sommation d’exécuter le jugem ent, qui
rccevoit le montant des condamnations qu’il prononce en
sa laveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
J e pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d’une rébellion à justice; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugem ent, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je préseulai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
nie permet de l’assigner à jour fixe sur celle demande.
L e i 5 du même m ois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à cc jugement dans le
d é la i, et a fait paraître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité , également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m ’apprend, par
ce lib e lle , qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
T elle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-etre été
m inutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire ; je laisserai ensuite ;V
mon' conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la p lu m e, le fait bon et
com patissant ! R isu m teneatis. B o y er com patissant! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les habitans de la commune
de Solignac , que Boyer habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des rutoirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand. ’ ~
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu'il in’a rendu s, Boyer a mal ch o isi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Q u’on examine celte ven te, du 16 janvier 1786 (x); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avoia pas encore été présenté au citoyen Boyer £1 celte
¿poejue.
�(3 0
l'acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 fr. au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi form el.,.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de .mes filles. J ’en ai trois , toutes établies; elles ont porté
a leurs mai'is une fortune au moins égale, et j’estime assez
mes gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m ’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (i),,
(1) Boyer dénature les fa its, relativement au citoyen Bonnet.
C e n ’est pas lu i , comme il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointement et cumulativement
le 9 août 1790. J’ai heureusement conservé le b illet; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m ontant, partie en im
meubles , partie en numéraire. J’ai donné en im m eubles, au mois
de juillet 1792, douze journaux de terre, situés dans les appar
tenances de C lerm o n t, dans le meilleur canton, près les jardins
des Salles ; p lu s, une grange située à Clerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai compté en o u tre , en numéraire , la somme
de 8,400 fra n c s, intérêts com pris, à la demoiselle B om part, à
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. Ces payemens
«nt été faits les 21 messidor, 21 et a5 thermidor an G: j’en rap
porte les acquits de la demoiselle Bompart.
�w><.
( 32 )
et quelques autres créanciers dont il Fciit rém unération.
M ais B oyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Q u’il
le dise , s’il l’ose. M ais de ce que Boyer a été ma caution,
tous ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’aventuroit rien lorsqu’il se prêtoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
sur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre m o i, comme ém igré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il pcrsécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit à R io m , chez le citoyen
G ren ier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de R io m ; et m algré sa m oralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterm iner ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E s t-il bien étonnant, d’après ces services sign alés,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon ém igration? Il n’en falloit pas tant en 179 3 ; et
j’aurois eu moins d'inquiétude, si j’avois été daiis cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
O n sait qu’il falloit être propriétaire pour être inscrit
sur la liste fatale.
B oyer,
I
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sur
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût interpellée.
A ccoutum ée à vivre dans la retraite, loin du tumulte de
la société, elle fit avec effort le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti'; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la fis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus*
qu’à m o i, cette imposture m ’affeeteroit plus vivem ent.
Lorsque vous dites que j’ai connu f’obligatiôn consentie
par mon frère , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai en-
( i) Boyer prétendit en plaidant, que les sommes empruntées
de Buglieon avoient été versées dans le tablier de ma sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm oulins, mon frère : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressémeut mon défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-même pour lui
donner un dém enti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de ma sœ ur, étoit
celle de 3,900 fr. prêtée par la dame Sauzade, que j ’ai acquittée,
Boyer ne l’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-même de cette manière
au citoyen B o ye r, lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dame Sauzade répondit à Boyer , que la somme
prêtée par le citoyen Buglieon son frè re , n ’avoit pas été compte«
à Desmoulins : elle est toujours prête à attester ce que j ’avance.
E
�e 34 )
core par le m entiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur m oi la lettre de ch ange, que j’en passai l’ordre à
Bugheon; mais je ne le iis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
n eu r, qu’il ne fut point question de mon frère :.vou s
saviez trop bien que ¡dans.ee moment je ne me serois pas
engagé pour lui. ¡. .
Un des grands argumens de B o y e r, pour prouver que
l’emprunt fait à Lçscuriçr n’étoit pas pour son com pte,
est de dire qu’il a pris de B aptiste, n otaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être; mais celle
quittance est pour le droit de contrôle : o r, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs ; e t ,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en retirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution no devoit pas échapper
i\ Boyer.
M a is, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère , puisqu’elle est
comprise clans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez C h evalier, notaire, le prem ier com plé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur celle pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avec m oi, et. nous avons été divisés, lorsque je
I
�( 35 )
^
en ai ' demandé le compte. V ou s prétendiez en
avoir fourni le m ontant, à la vérité en assignats; vous
m ’oifriez de me faire raison du bénéfice, à condition que
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez; e t, lorsqu’après plusieurs années de discussion j
j’ai voulu éclaircir ce fait, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m ’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usnge à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent que j’avois toujours refuse d’allouer de
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation :
en changeant le lieu de la scène, il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion; c’est le billet sans date, où j’ai prostitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus aj-îprendre au pu blic, lorsqu’il en fit parade,
les motifs qui l’avoient dicté. C ’est après la journée du
18 fructidor. J ’appartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme émigré ; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoil fait des menaces; il
disoit à tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu'il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma fam ille, mes amis, étoicnl alarmés; on m’engagei
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
tous
�C 36 J
code. Boyer étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
Iréquens de cette ville à celle de Clerm ont ; il cherchoit
surtout à épargner les voitures; j’envoyois la mienne à
R io m , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta Lien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste •
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calom nies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? 11 me semble
entendre ce voleur qui crioit bien haut de peur qu’on
l ’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore rid icu le, lorsqu’il prétend que j’écarlois
l ’afllucnce des honnêtes gens qui accouroicnt chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la foule , et qui n’a jamais personne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
destituer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernem ent
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il o b tin t, par importu n ité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si sou vent manqué
de m émoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut plus
s’étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres, quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrclte. Mais tous
deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
l’estime p u b liqu e, et tous les deux connoissent trop bien
B o y er, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( 37
) _
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
tx-iomplie.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; fa i le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugem ent, je.donnai à d în er, à Beaum ont, à plusieurs
citoyens , pai’mi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœ ux pour le gouvernem ent, pour le premier
magistrat de la rép u b liq u e, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion p u b liqu e, à lui-m êm e , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C ’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent sou volum ineux et insignifiant mémoire.
S ig n é, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examine la
procédure et le jugement rendu contradictoirem ent,
entre les citoyens Champflour et B o y e r , le 27 germinal
an 9 ; le m émoire en cassation du citoyen B o y e r , et
celui en réponse du citoyen Cham pflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen B o yer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du p ro cès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les difïérens chefs de créances réclamées par le citoyen
B oyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaires, si foibles, qu’on scroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen C liam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un m émoire contre lui.
En effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen B o y er, une fin de non recevoir invincible. Il a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l'exé
cuter, en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
sans se fa ir e aucun préjudice.
1.1 est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête prs
�(
39
)
.
l'exécution d’ un jugement en dernier ressort. M a is, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles être
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
q u i a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement; alors, s’il croit avoir ép rouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p o u rv o ir, il ne doit payer
que comme contraint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention, sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescemen t préjudiciable.
M ais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; d;ins ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l ’acceptation.
O r , le citoyen B oyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Cham pflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Cham pflour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc term iné, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrem ent, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Cham pflour scroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condam né, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugem ent, et don
nerait à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudrait syncoper le jugem ent, le casser dans
�une p a rtie , et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugem ent, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chefs
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i , dans l’état où
en sont les parties : les choses ne sont plus entières, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
• Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
B o y e r, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus m ûr examen ?
Il oppose, i° , que la cause a été plaidée pendant deux
audiences; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ. Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7, sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui , suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , q u i, dans ce ca s, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
A v an t de proposer un pareil m oyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il allaq u c,
et qu’ il a lui-m êm e fait signifier. Il y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été prononcé. Boyer devroil surtout §e rappeler, puisqu’il
éLoit
�C41 )
¿toit présent à l’audience-; qu’il assistait son avoué pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut prononcé.
Ce fa it, au surplus, est constaté par le jugement q u i ,
sans d o u te, mérite plus de confiance que l’assertion de
Boyer. 11 porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant deux précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i , après en avoir d é lib é ré , etc ». V oilà
qui répond , sans d o u te , à l’objection d’une manière
pérem ptoii’e.
D ’ailleurs , un délibéré n’oblige point à un rapport.
Jôusse, sur l’article H t du titre V I de l’ordonnance de
1667 , explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu ,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des p ro« cureurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience ; auquel ca s, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur le registre,
« sans mémoires ni-écritures. L e greffier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : on en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« l ’audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
c< plus prochain , et le jugement sc prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sortes de délibérés sont autorisés par l’article 111
du titre V I , et par l’article X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rap port, écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugem ent, qu’il
a été ordonné un délibéré ès mains de l’un des juges,
F
�»fe
.
.
^42 )
ce seroit la stricte exécution de l ’ordonnance, loin d’être
nne infraction à la loi.
Il est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brumaire , d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l ’exécution de l ’oi’donnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure , et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute pi'océdure ; l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
abroge donc nécessairement la loi du 3 b ru m aire, si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’exp liq u er, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boy.er pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
pspèce de rapport à la cause ; il p o r te , « que si les parties
« com paroissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
a de demande et le jugement définitif ; si l’une d’elles ne
« comparoît poin t, il lui sera notifié de plus le jugement
« préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« ccdure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
O11 11e voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’arlicle X n’est pas plus déterminant:
« Les juges des tribun aux, porte cet article, p ou rron t,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet examen , ils rentreront à l’audience pour y déli
ée bérer en p u b lic, y opiner à haute v o i x , et prononcer
« Je jugement. Ils pourront en core, si l’objet paroît
« l’e x ig e r , nommer un rapporteur, qui fera son rapport
I
�( 43)
« le jour indiqué dans le jugement de nom ination, lequel
k rapport devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétendra pas que le
'jugem ent est n u l, parce que les juges n’ont pas opiné
à haute voix. Ce m ode, qui a entraîné tant de dénon
ciations, n’est plus usité. L ’objet de la caiise n’exigeoit
'pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de soin
les différons chefs de demandes, et le citoyen Boyer doit
'se féliciter de cette précaution; elle lui a valu lu con
damnation du billet de Lahousse, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
Ainsi , ce premier moyen de cassation est absurde et
inadm issible, d’après la teneur du jugem ent, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second l i eu, que le ju
gement viole la disposition de l’article 1 du titre III do
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le ciloyen Champflour
est condamné ; il se fonde sur ce que le citoyen Cham p
flour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il 11’avoit point fait d é lire s; d'où il lire la consé
quence que tous les dépens éloient à la charge du citoyen
■•Champflour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses applicaeations : il est vrai que lïarticle qu'il invoque veut que
toute partie q u i s u c c o m b e soit condamnée aux dépens
F a
�■
•
-
(44)
indéfinim ent, sans que pour quelque cause que ce soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Ghampflour a -t-il succombe? L e citoyen
B oyer a form é contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient à une som m ede23,3i7f.
i o cent. Il n’a réussi que sur deux ch efs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r , il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
g a g n e , surtout lorsque ces chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des dépens. C ’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyei'. V o ici com
ment il s’exp liq u e, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l ’assignation, et que le deman« deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les com penser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagn e, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
u sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Cham pflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le prem ier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoieut
contenus dans le même exp loit, et ont bien évidemment
occasionne autant de frais les uns que les autres. L e
�(45)
citoyen Cham pflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens; cependant ils ont été com pensés,
et le coût du jugem ent a été entièrement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en p lain d re, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-même dans
son troisième moyen. Sans doute on doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairem ent contractées.
M ais lorsque les conventions ou les obligations sont
purem ent conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accom plies, avant que la
convention soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention ; l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur uue vérité aussi certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être conlroverséi
O r , quelles sont donc les conventions des parties? E n
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Cham pflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qu’il lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fait
Un compte entre les parties, et que Boyer l’indeinniseroit
h son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’éloit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Cham pflour
n’éloit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-même. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties; Boyer n’a fuit aucun payement pour le compte
�( 4 <5 )
du citoyen C h am pflour-D esm oulins, o u , ce qui est la
même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il li’y à donc plus de consentement, dès
que Boycr révoque le Compromis •, il n’y a donc plus do
récip rocité, dès que Boycr n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir e n compensation aucune indem nité,
et cependant la compensation avoit été la cause prem ière
et essentielle du contrat ; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
co n d itio n , la convention est demeurée imparfaite. C ’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce q u ia été parfaitement
développé dans les m otifs; et si Boyer prétend que daus
un contrat synallagmatique et récip ro q u e, le citoyen
Cham pflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-m êm e;
qu’il pouvoit se jouer de scs engagem ens, tandis que le
citoyen Cham pflour étoit obligé d’exécuter les siens ,
cette prétention paraîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation , parce qu’il n’y a ni v io
lation de fo rm e , ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frim aire, 5 therm idor an 4, i 5 fruc
tidor an 5 , sont également mal appliquées.
1
P rem ièrem ent, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le discrédit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frim aire : Boyer avoit reçu volontaire
m ent, et ralenti n o n jit injuria.
Les lois des 9 therm idor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nç se sont occupées que des obligations pures et simples,
I
�et non des contrats conditionnels; il étoit donc inutile
de grossir un m ém oire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut exam iner le fond du
pi’ocès.
L e quatrièm e m oyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
g rief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Buglieon et Lescurier ; il va jusqu’il
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de i2 ,co o f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend quç cette n o te , qui émane
du citoyen Cham pflour., prouve que D ësm oulins, son
frère, a touclié les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l ’emploi
de 12,000 francs; mais il prétend avoir p r o u v é , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
C ham pflour, que D esm oulins, son fr è r e , avoit touché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rem pli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugem ent; la confession de celui qui est muni d’un
pai'«il titre , ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
T o u t est erreur et confusion dans ce g rie f, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
11 se plaint de ce que cette obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Q u’on lise son exploit introductif. de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; on verra que
�(48)
loin de conclure au maintien de celte obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
Cham pflour a.demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l?a ordonné en m otivan t, sur les aveux de B o yer,
qu& robligatipn étoit consentie p o u r cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
«
»
__
A l ’égard des lettres de change souscrites par B oyer,
au profit des citoyens Bugheon et L escu rier, rien n’établissoit que l’em prunt eût tourné au profit du citoyen
Cliam pflour-Desm oulins; il n’en a pas reçu le m ontant;
il ne devoit pas même le to u ch er, d’après les conven
tions , puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Cham pflour-Desm oulins;
et B oyer n’a payé aucune de ces dettes.
P o u r l’écrit prétendu émané du citoyen Cham pflour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. L a forme de cet é c r it, la
créance de îa b b é A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de B u gh eo n , et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payem ent, dénotent assez le cas qu’on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroit dû
précédemm ent supprim er; mais le jugement ne pouvoit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas form é la demande : le tri
bunal ne pouvoit condamner le citoyen Cham pflour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen B o y er; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celte p a rtie , ce scroit un grief d’ap p el, et non
un moyen de cassation.
Dans
?
�(
49)
Dans son cinquièm e et dernier m oyen , le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 1789, qui permet à Favenir
de prêter de l’argent à termes fixes, avec stipulation
d’in térêts, suivant le taux déterminé par la loi , sans
entendre rien innover aux usages du commerce.
L e citoyen Boyer argumente de cette lo i, pour prouver
que le jugement dont il se plaint auroit dû lui adjuger
les intérêts de la somme de 4,200 francs qui lui a été
al l ouée, à com pter du payement qu’il dit en avoir fait.
L e jugement ne lui adjuge cet intérêt qu’à com pter de
la dem ande; d on c, suivant le citoyen B o y e r, il y a in
fraction à la loi du 3 octobre 1789, par conséquent ou
verture à cassation.
Etrange conséquence ! Suivant les anciens principes,
l ’argent étoit stérile de sa nature, et ne pouvoit produire
d’in térêt, lorsqu’il s’agissoit de p rêt, qu’autant que le prin
cipal étoit aliéné entre les mains du d ébiteu r, ou qu’il
existoit une demande judiciaire en payement.
L a loi citée n’a pas dérogé à ce p rin cip e; elle a seu
lement laissé la faculté, pour l ’avenir, de stipuler l'intérêt
au taux o rd in aire , par l’obligation ou le b ille t; c’est-àdire , que lorsque cet intérêt est stipulé par l’écrit émané
du débiteur, les tribunaux doivent l'adjuger , conform é
ment à la convention ; mais s’il n’existe aucune stipula
tion , l’intérêt n’est d û , comme autrefois, que du jour
de la demande.
O r , il 11’y a aucune convention de cette nature entre
les parties, puisqu’aucontraire les sommes réclamées par
le citoyen Boyer étoient contestées ; que d’ailleurs le
prétendu prêt étoit antérieur à la lo i; il y a plus, c’est que
G
�<<•
( 5o )
dans les emprunts prétendus faits par B oyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l ’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payem ent, et que cet intérêt
■avoit été confondu avec le principal. C ’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier ei B u gh eo n , et pour les
soijimes adjugées à B oyer; tel est d ’ailleux’S l’usage abusif
et usuraire qui s’est introduit dans le commerce.
A in si les prétentions du citoyen Boyer ne tendroient
à rien moins qu’à se faire adjuger l ’intérêt des in térêts,
et à faire admettre l ’anatocisme dans les tribunaux.
XI invoque une clause du com prom is, où il est dit que
les citoyens L ouyrette et Costes, arbiti-es, feront aussi le
compte des in térêts, conform ém ent à la loi. M ais cette
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1 789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à com pter
les intérêtslégitim em ent d û s , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créance L ah ousse, auroient
au contraire x-ejeté le principal.
M ais le citoyen B oyer a révoqué le com promis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-m êm e détruit.
L e citoyen B oyer, en terminant son m ém oire, annonce
que ses moyens sont encore m ieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est com m uni
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cbam pflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R io m , par les anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendém iaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrarid, le 30 vendém iaire
an dix.
D A R T I S - M A R C 1L L A C .
qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. D élibéré à R io m , le 3 brum aire
an 10.
Xi
e
c o n s e i l
s o u s s i g n é
,
ANDRAUD.
�VJI,
PIECES
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C IA T IO N
DE
PIERRE
B O Y E R ,
Antérieure à l’inscription du cit. Champflour, sur la liste des émigrés.
E x tr a it des registres, contenant lés déclarations des créanciers
sur ém igrés, tenus au ci-devant district de Clerm ont, n°. 74.
A u j o u r d ’ iiu i
IS
!»
vingt-sept octobre mil sept cent quatre-vmgt«douze, a été déclaré par le procureur syndic du district, qu’il lui
avoit été signifié un a cte, en sadite qualité , par le ministère de
W e lla y , huissier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette com m une,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit Boyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisleCésar Champflour-d’Alagnat ; pour lequel il avoit fait des affaires
im portantes, et s’étoit prêté, à son égard, à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’avoit fait de la ma
nière la plus généreuse, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , ne
s’attendant â d’autre reconnoissance qu’à celle que se doivent des
ümis ; qu’il l’avoit principalement obligé , en souscrivant diffé
rons emprunts faits par ledit Cham pflour, notamment un billet de
la sommé de 17,000 francs au profit du sieur R och efo rt, et autres
quatre de 85o francs chacun, le 3 mars 1791 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d’indemnité : 20. d’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur Champilour par le citoyen B ru n e i, pour lequel il y
avoit également indemnité ; qu’il avoit en outre passé l’ordre de dif
férentes lettres de change tirées sur lui par ledit sieur Chamjtflour, dont il étoit dans l’impossibilité de donner le d é tail,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notamment celles
�jé r
(. 5 5 )
•
• ^
tics sieurs B o n n e t chirurgien, G uyot de Vic-le-Com le, et autres ; qu’il
lui étoit du à lui-même par billet 7,95o iîancs : p lu s , q u ’il lui
étoit dû par ledit Champjlour-Desmoulins la somme de 12,000
francs par acte devant notaire , lesquels l'ifo o o fr . (1) lui B oyer
avoit empruntés pour les compter audit Champjlour ou ci ses créan
ciers, et fou rn i de ses deniers ce qu i n’avoit pas été emprunte ;
mais que cette somme lu i avoit é té déléguée à prendre sur les
sieurs de V i r j père et f i l s , p a r le même acte du 28 mai 1789 ,
lesquels devoient audit Champjlour la somme de 16,000 francs
portant quinze cents francs d’ intérêts ; qu’il étoit même porteur
du titre obligatoire qui étoit commun avep le sieur Champjlour
a îné et la dame B l o t , auxquels il éloit dû pareille somme.
Q u’il avoil été instruit par bruit public que ledit sieur César
Champilour étoit ém igré; qu’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts, et de faire en conséquence la pré
sente déclaration , avec protesta Lion de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte étoit signé dudit sieur Boyer et de l'huissier.
Que M . le procureur-syndic croyoit 11e devoir être tenu ¿1 autre
chose sur cette signification, que de la déposer au secrétariat du
d istrict, pour valoir et servir audit Boyer ce que de raison ;
que les lois, soit du 8 avril, soit du 2 septembre dernier, ne le
rendoient en aucune manière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d’émigrés ; que l ’article V I de la loi du a
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce qu’ils avoient
à l’a ire, pour être conservés dans leurs d roits, privilèges et hypo
thèques , et être colloques utilement sur les deniers provenais de la
vente des biens des ém igrés; que par conséquent l ’acte du sieur
B oyer, qui, sans être un acte inutile, ne remplissoit pas néanmoins
(1) On voit que Boyer ne comptoit pas sur mon retour , lorsqu’il vouloit
s’approprier les 12,000 Francs énoncés en l’obligation de mon Irèie; quoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , pour ca u se fa u sse. , il ne la portoit pas moins comme une créance légitime qu ’il vouloit s’approprier, sans
doute pour V intérêt d e la nation. Yoilà_cet homme qui veut que l'honn eu r
lu i survive !
�( 54 ) _
le Lut de la loi sur ses intérêts ; et qu’il ne ponvoit sans autrement
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
(aire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
au secrétariat ; ce qui a été fa it, sauf audit B o y e r, s’il le juge à
propos, à parer aux inconveniens qui résulteraient de cette décla
ration imparfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé B e r n a r d ,
procureur-syndic. N°. 406.
Ledit jour 5 décembre 179 2 , est comparu au même directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r, avoué au tribunal du district
de C lerm ont, y h abitan t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment^ rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen B ern ard, procureur-syndic de ce district, le 27 octobre
d ern ier, a déclaré qu’ il croyait devoir la réitérer, et Vétendre
notamment sur des objets q u i d o i v e n t p r o f i t e r a l a r é p u b l i q u e ,
dans la supposition que Jean-Baptiste- César Champflour-Beaum ont, dom icilié en cette 'ville jusqu’ au 14 ou i 5 ju ille t dernier ,
so it ém igré, ce que le requérant ignore absolum ent, le sieur
Champjlour ne lu i ayant annoncé son voyage que pour la villa
de L y o n , n e s e t r o u v a n t p a s s u r l a l i s t e d e s é m i g r é s , dans la -*
quelle Joseph Champjlour son frère est inscrit. E n conséquence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d*affirmer s’ il en est
requis, ou s i cela peut être nécessaire ( 1 ) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Champflour , pour
lequel il a fait des affaires importantes et heureuses également
notoirement connues; que par suite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu’on peut faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’a
fait de la manière la*plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fam ille, ne s’attendant à d’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalement obligé en souscrivant
( i j Ma femme et l’ un de mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la démarche Je B o ye r; ils offrirent de le rassurer, par des engagemens soli
daires sur leur fortune personnelle, de lout ce q u ’il pourroit perdre : mais
Boyer oyoit d ’qutres vues; il comptoit se faire adjuger mon bien de Beaiw
»PQIltf
�( 55 )
différons emprunts faits par ledit sieur Cham pilour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient communs , notamment cinq billets à ordre.
L e Ier. de 17,000 francs en principal, au profil du sieur R o chefort de R io m , et les autres quatre de 85o lrancs chacun, le
3 mai 17 9 1, pour lesquels ledit sieur Champilour a fourni le
même jour une indemnité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
2°. Q u’il a souscrit avec ledit Champilour un autre billet de
la somme de 12,600 francs prêtée à ce dernier par le citoyen
B ru n ei, habitant de cette v ille , du 5 mars 1 7 9 1 , payable au
5 mars de la présente année, ignorant le requérant, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indemnité du même jour, et qu’il
a également déposé.
3°. Q u’il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur Cham pilour, el dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des prêteurs , desquels il est dans l'impos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n’en
ayant pas gardé des notes, comptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur Champilour ; mais qu’il en connolt plusieurs, notamment
celle du sieur B onnet, chirurgien de celte v ille, de 8,\ 00 francs ,
et qui étoit auparavant de 27,300 francs.
4*. Q u’il a souscrit et accepté deux lettres de change de
3,000
F.
chacune, en faveur du citoyen G u yo t, [de V ic -le -C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le x"* février 1795, pour
lesquels il y a indemnité du i or. février 1789, de la part du sieur
Cham pilour, en faveur dudit instant, laquelle le requérant a éga
lement déposée.
5*. Qu’il a passé l’ordre en faveur du citoyen Charbonnier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24° fra n cs, tirée par le
sieur Cham pilour, en faveur du requérant, le i 5 mars 1791 ;
6°. Q u’il est dû au requérant, i°. la somme de 5,260 fr. suivant
le billet consenti par le sieur Cham pilour, le 1". octobre 1790 ;
20. autre somme de 3,5oo f. portée par billet du 11 novembre 1790;
�(56)
S', enfin d’une somme de 4oo f. payée en son acquit au citoyen
Dessaignes, pour le montant d’un billet de pareille somme , du 23
août. 1790 , suivant sa q u ittan ce, au dos du 17 janvier 1791«
T o u s lesquels billets le requérant a déposé à l’in sta n t, en exé
cution de l’art. Y I de la loi du 2 septembre dernier, sauf à les
retirer, s’il est nécessaire, lesquels ainsi que les indemnités sont
timbrés et non contrôlés.
l i a déclaré d é p lu s , e t ce rouR l ’ i n t é k k t nE l a n a t i o n , sa u f
à réaliser sa déclaration a la m unicipalité de celte 'ville , con
form ém ent à la l o i , qu’ il a en ses mains les objets suivans , con
cernant le sieur Champjlour et son frère : i°. un double de
Im ité p a ssé sous seing privé entre les sieurs A rta u d -d e -V irj ,
père et fils, et les sieurs Jean-César Cbam pilour, Josepli Cham pilour, officier, et Claudine Champflour et Jean Gérard B lo t, son
m a ri, du 14 octobre 1782, par lequel les sieurs de V iry se sont
obligés à leur payer la somme de 48,000 fr. pour leur p o rtion ,
dans la charge que possedoit le sieur de V i r y , el l’intérêt de celte
som m e, sans pouvoir la rembourser de dix années , à compter de
l’époque du tra ité, sur le pied de 4>5oo francs par année, c’està-dire, i , 5oo francs chacun , en intérêts, et 16,000 en principal,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette ville,
du 29 janvier 17 8 4 , portant condamnation de ladite somme et
des intérêts, sur laquelle somme de iG,ooo fr. revenant au sieur
C h a m p f l o u r , officier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 mai 178 9 , en sorle qu’il n ’est plus dû au sieur
Champflour cadet que 4,000 fran cs, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ il a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Champflour et B lo t, au sujet de la comptabilité des béné
fices de la même charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V ir y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mémoires
et relevés pris sur les registres-journaux el sommiers pris par le cit.
Louyrette
I
�5 7 }
Louyrette qui y a , de sa p a r t, employé au moins trois m ois, sans
désemparer^, et qu'il sem ble, d’après le compte de clerc à m aître,
que le sieur de V ir y est débiteur d’environ 120,000 fr. envers les
sieurs Champflour et B lo t, le sieur Champflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, comme héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dame Espinasse, sa Jcmme, et les
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliampilour père, époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie rs, entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
(
sont com m unes, tant avec ledit. Blot et le déclarant qu’avec les
frères Cham pflour, et qu’il en est de même de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offrant cependant de communiquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , même avec déplacement.
5°. E n fin , qu’ il a en ses mains trois contrats de 'vente sons
seing privé , de deux parties de maison située en cette v ille ,
v i s - à - v i s les c i-d e v a n t A ugustins, et d’ un m oulin sur le
chemin de Clermonl , allant à Chaînaii<)vas ; les deux pre
miers , du a 5 septembre 1790 , l’un consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat aîné , et l’autre en faveur de Magdelaine
Charles , veuve de Claude D onces, sellier ; et le troisièm e, du 1 " .
avril 1791 , en faveur d ’Herm ent Jacob, traiteur, habitant de
cette ville, moyennant les prix y énoncés, desquels il a pareille
ment fuit le dépôt présentement, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B craud , épouse du sieur Cliampilour aîn é,
comme faisant partie de la succession du sieur Bcraud, son père.
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposés, sans préjudice à lui de tous scs droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
Copie certifiée conforme :
L À B R Y ,
secrétaire.
II
oyeu.
�DÉ C LARA T IO N DU CITOYEN LAROUSSE.
J e soussigné reconnois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Champflour - Desm oulins, la somme de
2,400 fra n c s, de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
payable au commencement du mois de janvier 1789; que long
temps avant l’échéance, le citoyen Champflour aîné me dit que
son frère Desmoulins étoit inquiet à raison du payement de cette
lettre de change, et me proposa, pour le tranquilliser, de me
faire lui-même un effet de pareille som m e, payable à ma volonté ;
ayant accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frère,
je lui remis ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
som m e, qu’il me paya ensuite.
D éclare et confesse, en outre, que long-tem ps après avoir été
payé du montant du billet représentant ladite lettre de change,
le citoyen Boyer me présenta la même lettre de change, en me
disant : V oilà un effet dont vous avez été payé; il faut y mettre
votre acquit; lequel il me dicta : et comme il m ’avoit fait écrire
que c ’étoit des deniers de lui B oyer, je refusai de le signer; dé
clarant en outre que le citoyen Boyer ne m ’a jamais rien p a y é ,
ni pour les citoyens Cham pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolument pourquoi cette lettre de change s’est trouvée entre les
mains de B o y e r, de laquelle je n’avois plus entendu p arler, que
depuis l’année dernière que le citoyen Champilour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et me dirent que le citoyen Boyer prétendoit s’en faire payer par le citoyen Champilour aîné.
Ce 29 n ivôse, an 9 de la république.
Déclaration de ce que dessus.
L AIIO U SSE.
Enregistré à R io m , le d ix - s e p t germinal an n e u f, fo lio
recto e t verso. R eçu un fr a n c , p lus d ix centim es.
r O U G I I O N.
48
�(59 )
Saint - Amand, le 7 frimaire an 8.
J 'a i reçu ta lettre, mon cher Cham pflour, par laquelle tu me
demandes un éclaircissement sur une créance de 600 francs que
le citoyen Boyer réclame de la succession de ton frè re , qu’ il d it
m’ avoir payée au nom de ton frère je ne puis te dire que ce que
j’ai répondu au citoyen B oyer, qui est venu me voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à me rap
p eler, et depuis j’ai encore tâché de me ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur cette affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’ il m ’a toujours parfaitement payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclamer : mais je ne me rappelle pas que
jamais il ne m’ ait rien été payé , au nom de D esm oulins, par
le citoyen B oyer; je le lui ai déclaré comme je te le mande ici,
parce que j e n ’en ai pas la moindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire tort, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B oyer, à qui j’ai fait la même déclaration que
je te fais là. M ille respects à madame de Cham pflour; et reçois,
mon cher a m i, l'assurance de mon bien sincère attachement.
LENORMAND.
À R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribun al d ’appel. — An 10,
J ï'ô
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour-D'Alagnat, Jean-Baptiste-César. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Champflour
Touttée
Pagès
Dartis-Marcillac
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
Couthon
notables
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-De-Dôme, défendeur ; Contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Annotations manuscrites : « 11 frimaire an 11 de la section civile de la cour de cassation qui rejette la fin de non recevoir. Sirey tome 3, page 101 »
pièces justificatives « déclaration des créanciers sur émigrés ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0928
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53089/BCU_Factums_G0928.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Couthon
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53022/BCU_Factums_G0613.pdf
4af403e78c418ab1da58a82bbe36ad19
PDF Text
Text
M É M O I R E
SIGNIFIÉ
PO UR
B E A U N E , Laboureur &
Tailleur d’habits, Appellant.
P
i e r r e
C O N T R E
LES
P R I E U R
E T
R E L I G I E U X B E R N A R D I N S de
l ' Abbaye Royale de Belaigue , pourfuite &
diligence de D om C h a r m e t , leur Procureur
Cellérier , Intimé.
E T
contre F
P E R R I E R , Laboureur
Tifferand , auffi Intimé.
ranço is
J’Implore le fecours des Loix & le bras
de la Juftice pour me venger des vexations dont les Religieux de Belaigue
ont ufé envers moi. Sans droit & fans
titres, du moins valables, ils m’ont fait arrêter
dans ma M aifon , entraîner par des Cavaliers de
A
�W
i;:v „
a
MaréchaufTée dans la Prifon de M ontaigu, ou
ils m’ont détenu injuilement pendant deux mois
& demi, & où je ferois encore, fi la Cour ne
m’eut accordé ma liberté provifoire.
O mes Juges ! vous ferez juftement indignés
de la perfécution qu’on m’a fait eiîuyer lorique
je vous en aurai tracé le tableau dans l’ordre des
faits.
F A I T S .
J ’ai pris à Bail emphytéotique du fieur Delauzer un petit Dom aine, pour l’exploitation du
quel j’eus befoin de Befiiaux. Je m’adreifài au
fieur de C ram an t, Religieux Bernardin , C elle—
ricr de la Maifon de Belaigue ; il me vendit une
paire de V aches, moyennant i
livres , que je
promis lui payer dans un an. François Perrier
tenoit ces Vaches à titre de chetcl, il eut ordre
de me les liv r e r , ce qu ’il fit.
Le terme du paiement n’ etoit pas encore arrivé
lorfquc le fieur de Cramant paya le tribut que
nous devons tous à la nature ; le fieur Charm et,
ion C on frère, lui fuccéda dans la Cellérerie , mais
non pas dans les fentiments d’humanité. Je fus le
prier de proroger le terme de l’échéance de
mon engagement, je lui expofai que l’année avoit
' été dure pour m o i, & ma Récolte mauvaile; il
inc inexorable, &: rejetta ma demande avec du
reté. J ’en ai depuis appris la caufc.
Ce Dom Charmet ¿toit fort lié avec un Prati-
�cicn de M ontaigu, nomme Defmaroux , qui eil
le Procureur ad hus de la M aiion de Belaigue.
Ce Praticien , mon ennemi, parce que j’avois refufé de lui céder mon petit Domaine , qui avoiiinoir le iien , crut me forcer à le déguerpir en
me faifant pouriuivre a toute outrance par Doni
C harm er, qui s’y prêta avec trop de complaifance. V oici la marche qu’a tenu le Praticien
Defmaroux.
O n me fait afligner ail Bailliage de Montaigu
ious le nom de François Perrier, à qui je lia i
jamais rien dû, pour me voir condamner confulairement <Sc par corps au paiement de 15 0 liv.
pour le prix des deux vaches en queition. Je n’ai
eu aucune connoiilance de cette aflignation, j’oie
l’atteiler à mes Juges.
On obtient Sentence faute de comparoir, qui
me condamne, &C que je n’ai connu que par la
copie du procès verbal de mon cmpriionncmcnt.
L a iigniiication de cette Sentence m’elt fouftlée ;
on fait fous la cheminée un procès verbal de ca
rence de meubles, tandis que je fuis en état de
prouver qu’il y avoit dans ma maiion des meubles
plus que iuffiiants pour payer les 1 $0 liv. mais
on n’en vouloir pas à mes meubles.
On fait encore 4 ou ■$ procès verbaux de perquifition, qui confiaient que je ne fors point de
ma m aiion, tandis que tous les jours j’allois aux
champs. Enfin muni de ces procès verbaux 011
obtient une Ordonnance du Ju ge de M ontaigu,
�qui permet de m’arrêter chez moi à toute heure,
même les jours de Fête & de Dimanche.
L e 1 4 Octobre dernier on frappe à ma porte
au point du jour , on l’enfonce , &C ma maiion ie
trouve remplie d’Huiiïiers &: de Cavaliers de Maréchauilée ; on m’arrête de la part du R o i , ma
femme s’évanouit, ma mere & mes enfants font
les hauts cris. Jetois au lit, on me donne à peine
le temps de pafler un habit, & l’on m’entraîne
comme un Criminel dans la priion de Montaigu.
C ’eil la où j’apprends que c’eit pour n’avoir pas
payé au nommé Perrier 1 <50 liv. que je ne lui ai
jamais dû.
M a is, m’écriai-je alors, pourquoi me traiter en
Crim inel? pourquoi des Cavaliers de Maréchauffée pour me conduire en prifon? pourquoi donc
une fi grande eicorte pour arrêter un payian comme
moi qu’un fimple Spadaflin eut conduit au bout
du monde ? pourquoi tout cela ? je devinai le mot
de l’énigme, & le voici : le Praticien Defmaroux
vouloir aflocier mon domaine au iien , il lavoit
que je pourrais payer une fomme de 1 <$0 liv. &
quelques légers dépens fans aliéner mes fonds ; il
falloir donc d’une part m’accabler en frais, & de
l’autre jetter de l’effroi dans mon ame ; voilà la
raifem pour laquelle on a fait faire 5 ou procès
verbaux de perquilition , & qu’on a employé tant
de monde pour l’exécution de ma pcriônnc ; mon ,
fcul empriionnemcnt avec les procès verbaux ont
coûté mieux de quarante écus.
6
�Z Ji
5
Voici a préfent un nouvel ordre de faits. Perrier a feul paru jufqu’ici fur la icene ; la toile va
tomber, & nous allons voir mes véritables àdverfaires prendre ia place & jouer un rôle allez fingulier.
C e pauvre P errier , qui n’avoit aucune connoiffance des reilôrts qu’on avoit fait jouer fous ion
n om , fut inftruit de ma détention, & qu’il en
etoit l’auteur, il protefta publiquement que je ne
lui devois rien , qu’il déiavoueroit tout ce qu’on
ûuroit fait ; Dom Charmet tacha de l’appaiier par
un billet de garantie que Perrier a montré à tous
ceux qui ont voulu le voir.
D om Charmet c le Procureur ad lites recon
nurent alors qu’ils avoientmal procédé fous le nom
de Perrier ; mais comment faire pour rétablir les
chofes ? on imagine une tournure qui a au moins
le mérite de la nouveauté.
Le 20 O âobre 1 7 7 3 on me fignifie entre les
deux guichets, où je fus appellé, un acte fait h la
requête des Religieux de B elaigue, pourfuite <Sc
diligence de Dom C harm et, par lequel on mç
déclare qu on ejl inftruit que fa vo is été conflitué
prifonnier à la requête de François Perrier , leur
Chetelier, pour le paiement de la fomme de i$o liy.
6
pour vente & délivrance de deux vaches ; mais que
comme le prix en appartenoit en entier auxdits
Religieux , ils mejaifoicnt défenfes de payer c l d'au
tres qiià eux , & me déclaroient qu’ils me retiendroient en prifon jufqiià ce que j ’eus entièrement
�»«
;
6
payé le montant des condamnations & frais
en conféquence.
Ils ont de plus déclare dans cet aile qu'ils in
tervenaient & Je joignoient aux pourfuites, & pre
naient même le fait & caufe dudit Perrier , tant
pour raifon defdites pourjuites que de mon empriJonnement.
Voila donc mes adverfaires les Religieux de
Belaigue démaiqués ; voila donc les manœuvres de
leur Cellérier bien cara&ériiees ; je n’ai donc pas
eu tort de dire que Perrier n’a été que Tin Ani
ment. Mais de quel droit, M rs. les Bernardins ,
prétendez-vous me retenir en prilon , vous qui
n’avez encore aucun titre contre moi? Où avezvous donc pris que vous pouviez par une inter
vention extrajudiciaire vous joindre après coup a
Perrier pour faire valider fa demande <Sc Tes poufuites qui étoient nulles, puifque je ne lui de vois rien,
comme vous en convenez vous-même dans l’a&e
ci-dcilùs ? vos procédés font violents, la vexation
cil criante , vous pourriez en convenir auili ; mais
continuons.
On me fait former oppofition devant le Juge de
Montaigu a la Sentence faute de comparoir qui m’avoit condamné par corps , ainfi qu’à mon emprifjnnemcnt. On dit pour moyen de forme que la
dette n’ell pasconlùlairc , que je ne fuis point M ar
chand, qu’on n’a pu me condamner par corps , que
'confequcmmcnt mon emprifonnement cft nul.
A u fond on s’avife de dire, fans ma participa
�tion & fans aucun pouvoir de ma part, que je ne
dois rien , tandis que je n’ai jamais nié mes dettes,
que j’ai même iollicité D om Charmet pour m’ac
corder du temps ; ians doute qu’on me faiiôit tenir
ce langage pour donner lieu à de nouveaux frais,
&: groiîir ceux du Praticien Defmaroux.
Quoi qu’il en fo it, fans faire attention que la
preuve teitimoniale n’étoit pas admiilible dans l’efpece, le Juge de Montaigu ordonne cependant que
les Religieux feront preuve que je ne leur avois
point paye les 50 écus , & me réferve la preuve
contraire.
Cette procédure fe faiioit a mon iniii, les Reli
gieux font entendre huit témoins qui dépofent tous
de la vérité de la dette ;ils en auraient trouvé cinquan
te qui l’auroient dépofé ainfi, puifque je l’avois dit
hautement. On porte l’affaire a l’Audience , Sen-:
tence intervient le premier Décembre dernier qui
me déboute de mon oppoiition à la Sentence faute
de comparoir & a mon emprifonnement; ordonne
que le tout fera exécuté , les pouvfuites encom-î
mencées continuées , & me condamne aux dépens.
O n m’a fignifié cette Sentence avec la copie de la
déclaration des dépens faits par le Praticien D e f
maroux , qui contient une légende d’articles for
mant un total de 3 ôo liv. au moins.
'
’
Vous voila parvenu a vos fins , M e. Defm a
roux -, mais heureufement qu’ici cefTe votre minifterc, & que je n’ai plus a redouter votre plume
.meurtrière.
�8
Enfin je fuis forti des portes du Palais de Montaigu, & j’eipére qu’on ne m’y reverra pas de fi-tôt ;
mais je luis toujours dans les priions de cette Ville ,
& comment eniortir; un Palteur zélé & charitablé me tend une main iecourable, il va confulter
au loin ; on lui aiTure que mon affaire eft indubita
ble , que mon empriionnement eft n u l, qu’il n’y a
point de titre contre m oi, qu’il faut interjctter appel
de tout ce qui s’eft fa it, déiintéreiîer les Bernardins
par des offres réelles de la fomme principale de
1 5 0 liv. & demander enfuite en la C our mon élargiilement proviioire ; j ’ai interjette ap pel, j’ai fait
les offres réelles, qu’on a refufées, & ce bon Pafteur
m’a procuré par les ioins un Arrêt fur requête, qui
a ordonné mon élargiffement, en confignant par
moi 15 0 livres entre les mains du Concierge , ce
que j’ai fait, & je refpire en liberté fous la protec
tion de la Cour.
Vous m’avez cruellement vexé, M M . de Bêlai*
gue , l’expreffion n’eft pas trop forte, & je vais
le prouver en établiilant i°. que votre Chetelicr
Pcrriçr, qui eit votre adjoint,
qui ne court aucun
r if ju e , parce que vous lui avez donné un billet
d’indemnité ( fait dont j’oftre la preuve) étoit non
recevable dans la demande qu’il a formé contre
ipoi ,.par cevte feule raifon que je ne luidevois rien.
a". Quç la Sentence faute de comparoir du
J ailliaec de Montaiiiu eft fouverainement iniiiile,
d un cote pour m avoir condamne a payer 1 <jo
livres que je ne devois p as, & de 1 autre jjour
m’y
3
�MX
m’y avoir condamné par corps, moi qui ne fuis
point marchand.
3°. Que mon emprifonncment eit nul &: vexatoire-, parce qu’il cil fait en vertu d’un titre vi
cieux en exécution d’une Sentence injufte ôc pour
cauie non due.
4*. Que toute la procédure monflrueufe, faite
au Bailliage dé Montaigu, doit être déclarée nulle
comme étant une fuite de la mauvaife demande
de Perrier à q u i, je ne ceilerai de le d ire , je ne
devois rien.
50. ,Enfin que tout ce que deiTùs étant bien
prouvé, la vexation le fera au ffi, & il s’enfuivra
que vous me devrez de gros dommages & intérêts.
•- Revenons fur nos pas & reprenons en détail
ces cinq proportions.
Je dis en premier lieu que je ne devois rien à
P e r r i e r j e le dis avec d’autant jplus de confian
ce , que je ne crains pas d’être démenti par mes
Adversaires, à moins qu’ils n’aient oublié la teneur
dejTa&c qu’ils m’ont faitfignifier le ao O&obre
dernier j par lequel ils m’ont déclaré que cétoit à
eux & non à Perncr a qui je devois les I 50 liv.
L e fait cil donc confiant, c j’en demande a&e
pour conflater cette vérité.
C ela pofé,de quel droit, vous P errier, me fai
tes-vous aiTigner à vous payer 15 0 liv, que je ne
vous dois point ? L ’intérêt eil cependant la mefure
des aâions ;vous étiez fans intérêt, fans droit ni
qualité pour diriger contre moi une demande en
6
13
�IO
paiement de >50 écus ; cela eft fi v ra i, que fi je vous
euiîe payé cette iom m e, je n’en .aurois point été
libéré envers les Religieux de Belaigue., ils euilènt
toujours pu me faire contraindre au paiement.; Par"
tez de l a , & convenez que votre demande :étoit
folle
ridicule.
.
;
T'
* .
• • V»
*
S
e c o n d e
P
r o p o s i t i o n
*'".
Mais fi je ne vous devois r i e n f i votre deman
de portoit à fau x , vous conviendrez au moins que.
yotre Sentence faute de comparoir ne peut ^pàs: fe
foutenir, parce qu’elle porte fur un fondement
ruineux, fur un être de raiion. Cette Sentence vous
a adjugé une fomme qui ne vous étoit pas due, L’injultice eft criante, j’en appelle au bon iènsi ôc à)
la faine raifon.
,’
) ;:i )
Je vais plus loin; euiTiez-vous etc mon Créancier'y
votre Sentence feroit encore injufte dans.Ia diipo-i
fition par laquelle on m’a condamné par corps. J ’ai
toujours ouï dire que les gens de notre iorte'/jqub
ne font aucun commerce ., quî labourent rleurfij
champs , n’etoient pas jufticiables des Jurifdi£fcians
ConfulaireS. Je n’ai point acheté les vaches,¿les:
Religieux de Belaigue pour les revendre, jcries?
ai acquifes pour labourer mes terres , pour ciiltivcr
mes héritages,,
vous voulez d’aprbs cela,avoir-pin
me traduire aux Confuls ? Oh ! pour le coup il n’elt
peribnne, en fait de débiteurs,.qui puiiTcfe mettre à
l’abri de la contrainte par corps^ôc il faudroit , il)
L
�ri
votre prétention étoit adoptée, fermer tous les T ri
bunaux ordinaires pour ne laiiîer fubfifter que les
Jùriicii£tions Confulaires.
T
r o i s i è m e
P
r o p o s i t i o n
.
Vous m’avez fait emprifonner, vous ne le pouviez
pas , je ne vous devois rien ; la Sentence qui fait
votre titre m’a condamné injuftement, je l’ai dé
montré, & mes Juges en font convaincus. Je fuis
vdonc bien fondé à me plaindre de cet empriionnement &C d’en demander la nullité.
C e n’eft point par cet endroit feul que péclie
femprifonnement, je lui connois un autre vice qui
me feroit gagner mon procès quand je ferois dé
pourvu d’autre moyen. Vous m’avez fait arrêter
chez m oi, dans ma maiion,que vous deviez refpecter ; je repoiois lous mon toit à l’abri des L o ix , &:
vous avez forcé ma porte pour m’arracher du ièin
de ma famille ; pour vous prouver que vous ne le
pouviez pas , je n’ai beioin que d’invoquer les O r
donnances , les Arrêts & Règlem ents, ôc la Ju riiprudence de la Cour.
Mon cmpriionnemcnt eft donc nul , on m’a
donc perfécuté injustement ; ce n’elt point à vous
Perricr a qui j’en fois le reproche, vous n’étiez que
l’inllrumcnt de cette manœuvre odieufe , les Agcns
fe font démaiqués par l’a&e du 1 0 O âo b rc, c’étoit
les Rcligeux de Belaigue qui me vexoient fous
votre nom , c’étoit ce Praticien de Montaigu qui
�vouloit envahir mon domaine pour l’incorporer
au fien.
Vous m’avez donné, mes adverfaires, des ar
mes bien puiifantes pour vous combattre. L ’a&e du
20 O âobre vous confond & vous pulvériiè. Vous
reconnoiiTez par cet a&e que je ne dois rien à Per
rier , & que fa procédure eft vicieuiè par le défaut
d’intérêt de fa part, &c vous cherchez a y porter un
correctif; examinons s’il pourra faire valider une
procédure nulle &: vicieuie dans ion principe. Vous
intervenez, vous vous joignez aux pourfuites de
Perrier, vous prenez ion fait & cauiè pour raifon
dcfdites pourfuites ôc de l’emprifonnement.
Nous ne connoiilons point dans l’ordre judi
ciaire de pareilles interventions fignifiées par un
fimple a£e entre les deux guichets. A l’égard de
votre prife de fait & cauiè vous me permettrez de
vous dire que vous êtes bien les maîtres de vous
joindre a Perrier & de prendre ion fait &: cauiè,
mais toutefois dans l’état où en étoient les choies
au xo O&obre. O r a cette époque elles étoient en
mauvais état, & le mal e'toit ians remede ; votre
jon&ion ne peut avoir d’effet retroa&if, &c vous
ne pouvez communiquer après coup a Perrier un
d ro it, un intérêt, une action qu’il n’avoit point
contre moi loriqu’il m’a fait ailigncr.
Q
u a t r i è m e
P
r o p o s i t i o n
.
Tout ce qui a été fait a Montaigu a la iuitc de
mon emprifonnement elt n u l, parce que ce qui l’a
�précédé l’eft aufïî. Il eft de maxime que ce qui eft
nul dans fon principe ne peut produire aucun effet.
< L a Sentence du 1 4 Novembre qui a admis les
Religieux a prouver par témoins que je leur devois I 50 liv/ eft irréguliere &: contraire aux loix
du Royaume. L ’ Ordonnance de 16 6 7 défend à
tous Juges d’admettre a la preüve pour une iom«
me au defïus de 100 liv.
j
. ,j .
L a Sentence définitive du premier Décem bre,
qui m’a débouté de mon oppofition à la premiere
Sentence & à mon empriionnement, eft auiïi injuile que les précédentes, par les mêmes raiions 6c
pour les mêmes caufes.
rl *
Concluons donc que toute la Procédure., les
Sentences, les Ordonnances du Juge de Montai
g u , mon empriionnement, tout ce qui l’a précé
dé , tout- ce qui l’a fu iv i, font nuls , irréguliers.,
injuftes &: vexatoires j. c que la [Çour. ne peut iè
diipenier de tout anéantir par la force >de la nullité
& par le défaut d’intérêt de la part de Perrier dans
fa demande originaire.
'
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6
CINQUIEME
P R\Ô P O S I T I O Ny j
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'jt j - .-a -Qui a pour objet mes dommages & intérêts à rai
fort' de la perftcnuon que f a i cjjiiyé , & des
pertes que j]ai f a i t e . i
• .•
;
/ ■’’>
> r. ' {nii • : 1 ,
i ;' |
Je demande a mes Advêrfaires 3 0 0 0 liv id e '
dommages &, intérêts; cette fomme n’eft point ex-
�{ B4
.'ceifive pour , avoir'été vexé fi cruellement, pour
. avoir été privé de ma liberté c détenu injuite. ment en priion pendant deux mois c demi’. Je
-fuis bien allure qu’aucun des Religieux de Bélai.gue ne voudroit être privé de la iienne, & cmpiiionné durant la moitié de ce temps pour le
double; cependant je fuis homme comme eux, je
fuis citoyen &c leur égal aux yeux de Ix Loi. Je
fuis plus , je Îuis perè de famille , j’ai une mere
de 86 an s, une femme prefque infirme &c fix
enfants fort jeunes qui ne fubiiftent que du fruit
jde mes travaux. Cette malheureufe famille a éprou
vé les horreurs de l’indigence pendant ma captirvité. ^tandis que ' ines periecntcurs vivoient dans
•l’abondiince ' c noient de nos malheurs.
*• Les chagrins qui m’ont dévoré dans la P riio n ,
les infirmités.que j’y»ai contra&ées, qui abrége
ront mes joursy dotvenpentrer-en ligne de compte
pour mes 8aminàgés '<Sqintérêts;
Il me reité encore un m otif bien puiiTant pour
déterminer la Cour a m’accorder la iommc que
je demande. Je la fupplie de fe rappeller que j’ai
etc,arrêté 6c emprifonné-Je .14 : O üobrc , teihps
auquel mes Terres étoient cultivées & prêtes à être
enfémcncéesy elles, ne l’ont poin tété, n’étant forti
de Prifqn qu’i» la fip cle Décembre,; je ferai privé
cette année de ma récolte , c je ferai cependant
obligé de payer les impôts , les cens c rentes, c
lo:,prrx? devinon- Bail emphytéotique. Comment
pourrai-je acquitter ces différentes ibmmcs & faire
6
6
6
6
6
6
�6
u \
15
fubfifter ma famille jufqu’à l’année 1 7 7 5 que je
pourrai recueillir, fi la Cour ne m’adjuge pas
des dommages proportionnés à mes pertes & à
mes malheurs? V ous les avez caufés , M effieurs de
Belaigue , vous devez les réparer, vos revenus
immenfes feront foiblement altérés par une con
damnation de 30 0 0 livres, qui ne fera pas la plus
frivole de vos dépenfes.
Monf i eur D E V E R N I N E S , Avocat Général’
D
A
a
r
t
i s
,
Procureur.
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
De l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur dej Domaines
du R oi, Rue S. Genès, près l’ancien Marché au Bled, 1774,
ws;
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beaume, Pierre. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vernines
Dartis
Subject
The topic of the resource
prison
compétence de juridiction
contrainte par corps
dommages et intérêts
abbayes
critique de l’Église
créances
prison
emprisonnement nul et vexatoire
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour Pierre Beaune, laboureur et tailleur d'habits, appellant. Contre les prieur et religieux Bernardins de l'Abbaye royale de Belaigue, poursuite et diligence de Dom Charmet, leur procureur, Celérier, intimé. Et contre François Perrier, laboureur et tisserand, aussi intimé.
Table Godemel : Emprisonnement. Nullité d’emprisonnement pro non debito, contre un individu non marchand, opéré dans le domicile même de l’emprisonné, par esprit de vexation. Réclamation de dommages intérêts.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1773-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0613
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Virlet (63462)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53022/BCU_Factums_G0613.jpg
abbayes
compétence de juridiction
contrainte par corps
Créances
critique de l’Église
dommages et intérêts
emprisonnement nul et vexatoire
prison
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53095/BCU_Factums_G0934.pdf
94e73fba3524b36d8b267b105adc9830
PDF Text
Text
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MÉMOIRE
J U
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I F I C
A
T
I F ,
' P O U R Me J o s e p h D e s m a r o u x , Notaire Royal &
Procureur au Bailliage Royal de Montaigut en
Combrailles, prifonnier dans les prifons de la Ville
de Riom, accufé.
>
C O N T R E Monfieur le Procureur du R o i de la
Sénéchauffee d'Auvergne & Siège Préf idial de la.
V ille de Riom accufateur.
infortunée de la vengeance & de la calom
nie, je gémis depuis deux mois dans l’horreur des
prifons ; j’éprouve tout ce qui eft deftiné aux fcélérats du premier ordre ; cependant, tout autre que
moi eft coupable du crime qu’on m’impute. Fut-il
A
Vci t i m e
CRIMINEL.
SÉNÉCHAUSSÉE
D ’A U V E R G N E
�jamais d’accufé plus cligne d’être plaint du public &
protégé par la juilice ? Diipenfateurs de ce tréfor
facré, magiilrats intègres, vous devez l’ouvrir à tous
ceux qui le demandent ; s’il pouvoit être fermé pour
un, il pourroit l’être pour tous : le dernier des citoyens
y a le même droit que les puiiTances du royaume;
mais, s’il pouvoit y avoir quelque préférence fur la
diilribution d’un bien fi précieux, la raifon, la nature
& l’humanité ne demanderoient-elles pas qu’elle fût
en faveur du malheureux qui eftinjuftement opprimé?
Père de famille, domicilié, jouiifant de tous les
droits de l’honnête bourgeoifie , j’ai été outragé
dans mon honneur, dans ma perfonne, dans ma
liberté. Chargé par état de la confiance & du fecret
des familles, j’ai depuis long-temps rempli tous mes
, devoirs avec toute l’attention qu’ils exigent : expofé,
malgré ces avantagés, aux coups d’une trame odieufe,
ourdie par le reffentiment, fomentée par la paiîion,
&foutenue par la cabale de quelques ennemis pervers,
je fuis confondu avec les m alfaiteurs, & réduit à
paraître aux yeux de la juftice en criminel.
Mais, qui peut fe-défendre de la calomnie, furtout quand elle eft armée du bouclier impénétrable
-de la tyrahnie, iefecret? Combien de gens honnêtes
Uônt<été à la veille de fuccomber fous le poids de
-i’aCcufation la plus injufte ? La vertu la plus pure
'n ’èit-elle pas tous les jours en 'butte à l’envie A à la
ijaloufie.?
�( 3 )
*
Raiïuré par mon innocence, je pourrois laiiTer le
foin de ma défenfe à la réputation que je me fuis
acquife en vingt-deux ans d'exercice de mes charges
& des différens emplois de confiance donc j’ai été
honoré par plufieurs perfonnes de confidération ; je
pourrois me diipenfer de me donner en fpeétacle au
public, par un mémoire, fi la juftice humaine, meiurant fes coups fur ceux de la juftice divine, pouvoit
çonnoître fur le front des hommes la perverfité dç
leur cœur, & diftinguer le coupable de l’innocent;
fi elle-pouvoit dire en toute aifurance : Defcendams
& videbo utràm clamorem qui venu ad me opere corn-*
pleverint y an non efl ita ut fciam ( æ).
Ma cauie intéreile eifenrieliement la iociété ; c’eü
celle de tous les notaires; c’eft celle de tous les
citoyens, parce qu’il n’y a perfonne qui puiiTe ie
flatter de n’avoir aucun ennemi, & d’être à l’abri de
la calomnie. Des circonftances fi fingulières & fi intéreiTantes pour un homme public, demandent qu’il
faiTe paroître de la fenfibilité; elles veulent qu’il
repouife l’outrage; elles lui mettent les armes à la
main pour ia défenfe. Ce feroit donc mériter de ma
part toutes les injures qui m’ont été faites, que de
n’en pas Taire çonnoître i’injuftiçe aux refpeélables
magiftrats qui doivent me juger, & au public qui
-m’a alfez honoré de fon eftime, pour ne pas me faire
un crime du filence quejje voudrois m’impofer.
(a) Genef. chap. 1 8 , verf. 2 U
A i
�L e fieur de Segonzat, 'feigneur de Champigoux,
fît en ma faveur, par un feul & même a¿le du 24
feptembre 17 7 6 , deux donations : l’une, à titre oné
reux, & l'autre, abfolument gratuite : l’aCle fut reçu
par Giraud, notaire royal à Montaigut; il fut pafie
dans l ’étude du notaire, & écrit de la main de Lougnon
'qui lui' fervoit de clerc pendant les vacances qu’il
paiîoit à Montaigut, chez le fieur Tabardin, notre
beau - frère.
Il eft dit dans la première partie de cette donation,
que le fieur de Segonzat me donne, par donation
:entre-vifs, le bien & fief de Champigoux, fous la
•referve de l’ujfufruit 8c jouilîance de tous les bâtimens,
jardins y attenans, de deux chenevières. . . . . le fieur
de Segonzat fe réferve auiTi la directe fur les objets
'donnés, & y impofe la redevance d’un denier de
cens portant profit. La donation eil de plus faite, à
la charge par moi de payer annuellement au fieur de
Segonzat une penfion viagère de 800 liv. d’acquitter
fes dettes, jufqu’à concurrence de la fomme de
'I0200 liv. ou environ, & de le tenir quitte de la
jfon?me de 593’ liv. qu'il me devoit perfonnellement.
La fécondé clauie de la donation porte que a le
;t> fieur de Segonzat défirant me témoigner la conti» nuation de Ion amitié & de fon affeétion . . . . ma
V donné & me donne gratuitement, & aux miens,
�*» par donation entre-vifs perpétuelle & irrévocable,
. » le domaine appelé des Rondiers, iitué audit lieu
» de Champigoux, coutume de Bourbonnois^ & tous
v les autres héritages en roture, qui lui appartenoient,
» iitués dans les paroiifes de Mourmière & St. E loy,
» avec quatre bœufs . * . . . en quoi que le domaine
■» des Rondiers Si héritages en roture conilftent &
3> puiflent confifler, iàns en rien retenir ni réferver (\z).
Je dois obferverici ( & c’eiHe feul crime qu'on peut
«l'imputer, en iuppofant que.je doive être garant des
faits d’autrui ) qu’à la iliite de cette fécondé partie
de la donation, Giraud qui la diétoit, fit, par igno
rance, ou plutôt dans le deiTein de trahir mes intérêts,
inférer la claufe, que le fieur de Segonzat me donnoic
de plus t o u s s e s b i e n s é c h u s e t a é c h o i r , p r é s e n s
e t a v e n i r ( ¿ ) ; ce qui rendoit la donation radicale
ment nulle, d’après les diipofitions textuelles de l’or
donnance de 17 3 i»
u
l J ’étois dans l’étude de Giraud, pendant qu’il étoit
occupé à compofer cet aéîre; mais je faifois alors la
converfation à l’écart avec le fieur de Segonzat, & ne
. doniiois aucune attention à ce que Giraud di&oit,
, n’ayant garde de fuipeéler fes dellêins, moins encore
( û ) N ota. C ’eft pour ce dernier objet de la donation feulem ent,
que le fermier de M. le duc d’Orléans m’a demandé des droits de lods.:
v
(¿ 5 La mlnut© de la donation étoit compofée de deux feuilles,
cette Claufe fe trouvoit écrite dans la feuille du milieu. ’
■
i :>
�:( * )
de me défîerMe ifon expérience & de ia capacité qui
m’étoient connues : d'ailleurs , on devoit me faire
leélure de Ta&e ; on me l'a fit en effet, & alors je
remarquai la claufe vicieufe : j’en^fis aufli-tôt l’obfervation, & demandai que la minute fût changée, ou
la claufe fupprimée, attendu que je n’étois pas dans
l’intention de fournir aux frais d’une donation qui ne
pouvoit m'être utile. Sur ma repréfentation, Giraud
ayant remontré qu’il iuffifoit de changer la feuille du
milieuy fur laquelle étoit écrite la claufe vicieufe, &
de iiibftituer une autre feuille, dans laquelle on ne
comprendroit point les biens échus & ci échoirs , préfens & à venir, le iïeur de Segonzat 8c moi nous ren
dîmes à fon avis. Dans le même moment, la feuille
étant tranfcrite par Lougnon, la claufe fupprimée &
Taéle figné, je me retirai avec le iieur de Segonzat,
laiifant iur la table de Giraud, & la minute de la
donation, & malheureufement la feuille fupprimée
qu’on auroit dû déchirer dans l'inftant. Mais quél eft
l’homme aiTez prévoyant qui puiiTefe flatter de n’avoir
jamais eu d’imprudence à ie reprocher?
Enfans de Colère & du nienfonge, vous qui êtes
plus confommés en malice que ces fcélérats même,
.dont les crimes ont enrichi l’hifloire au déshonneur
de la nation, mon imprudence va fournir à votre
imagination une vafte carrière, pour exercer vos
talens. Mais.cous vos projets odieux, vos iropoftures,
vos calomnies, viendront fe brifer à l’écueU de-Î’is^
vraifemblance & des contradictions.
�(7)
»
l e s dates font dans cette affaire, de Ja plu? grande
importance.
La donation faite en ma faveur par le fleur dp
Segonza.t, le 24 feptembre 17 7 6 , fut contrôlée &
iniinuée le 16 du même mois. Cette vérité ne peut
paroître équivoque, puifqu’elle eft confignée dan$
des a£tes .publics, dans un certificat du contrôleur,
'& dans fa propre dépofition.
Devois-je m’attendre qu’une libéralité de cettp
nature alloit devenir pour moi le principe de la deftru&ion de ma fortune? Pouvois-je prévoir que des
.héritiers qui avoient refufé d’accepter ce don, au£
mêmes conditions que moi, feligueroient un jour avec
des ennemis jaloux & un fermier avide, pour me perdre
dans l’efprit d’un confeil éclairé, du confeil d’un prince,
à tous égards refpe&able, M. le duc d’Orléans?
- La ligue formée, je fus atteint de fes coups meur
triers, peu de temps après la donation. Je vis éclore
deux procès contre moi, & s’en former un troifième
.qui attend fon exiftence du fort de la plainte qu’on
a fait rendre contre moi.
: Giraud, quel nom viens-je de prononcer! ouï,
«Giraud, ce même notaire qui a di<5té la donation fait/?
;en n>a faveur, par le fieur de Segonzat, ce notaire
qui avoit euja confiance des deux parties, fe montre
¿à-la tête de la cabale; il eft le premier qui cherche
-à me faire dépouiller des biens qui venoient de m’être
¿«donnés en fa préfence. Que ne^oit-on pas craindre
.du rellentiment & dune baiTe jalouüej
�(S )
Depuis la donation, ayant été chargé, en ma qua
lité de procureur, de la défenfe de Jean Rouzille,
auquel Giraud avoit iufcité le procès le plus injufte,
pour la vente de là coupe d’un bois taillis 3 je deviens
un objet odieux pour Giraud. Il faut me venger 9
dit-il, il faut me venger, quand je devrois moi-même
être enveloppé dans ma propre vengeance.
1
Des raiions d’intérêt l’animèrent encôre &■ lui
fuggérèrent le plan qu’il a fuivi, & que fans doute,
il méditoit, en faifant ma donation, puifqu’il a con^•iervé foigneufement cette feuille fatale que je fis
iupprimer. C ’eft cette pièce dangereufe qui lui four
nit le moyen de me nuire. On voit tout d’un coup
l’ufage qu’il en pouvoit faire, & il le fit d’autant ptas
avidement, que le fuccès & l’impunité paroiiToient
infaillibles.
Il voit le fieur de Segonzat, l’engage à fe pourvoir
contre fa donation, & lui fait part des reffources qu’il
lui a ménagées pour'réuiïîr à la faire déclarer nulle.
Ceux qui ont connu le fieur de Segonzat, ne feront
point étonnés que Giraud ait pu le faire varier.
’>
On m’afligne donc le 17 février 17 7 7 en la juftice
de Montaigut, en nullité de cette donation faite cinq
mois avant. Le moyen de nullité eft tiré de ce que
la donation comprend les biens à venir.
Quel abus, Giraud j faites-vous de votre miniftère?
Eft -ce la haine feule qui vous confeille .de vous com
porter -ainii l Non : une efpérance chimérique vous
faic
�(p )
ïïy
fait encore agir. Vous vous étiez periùadé que la
donation faite en ma faveur étant une fois annuilée,
le iieur de Segonzat difpoferoit des mêmes biens en
faveur de Bouttin, beau-frère de votre gendre. C ’eft
le langage que vous avez tenu, & la convention que
vous aviez faite avec le fieur de Segonzat : la preuve
en eft écrite au procès.
Je négligeai de comparaître fur la demande du
fieur de Segonzat, ou plutôt je ne favois quel parti
prendre; car, comment éviter la nullité, s’il failoic
que j’adoptaile le faux aéle, & comment entrepren
dre de pourfuivre mon confrère en action de faux?
comment même prouver la fauiTeté?
Cependant le fieur de Segonzat prit contre moi
une fentence par défaut, le 4 du mois de mars, qui
déclara la donation nulle.
L ’impofture, fière de mon filence & de fes pre
miers fuccès, alla croiifant de jour en jour. Giraud
s’étant retiré pour un moment derrière le rideau, je
vis paraître fur la fcène Salleneuve, fermier de M,
le duc d’Orléans, pour me iufciter un nouveau pro
cès, fous le nom de ce prince. Ce fermier s’étant
figuré que la donation qui m’avoit été faite par le
fieur de Segonzat, étoit une vente déguifée, me fit
aifigner, fous le nom du prince, en la juilice de
Montaigut, le i j du même mois de mars, pour être
condamné à payer les droits de lods.
Ma défenfe fut fimpie, Je ne de vois pas de droits
B
�W
l. :
( I0 )
"de lods pour une.donation gratuite; 8c quand j’en
aurois dû, je ceiTois d’y être aiTujetti, ii, par la four
berie de mon notaire, ma donation devoit demeurer
nulle : ce furent les moyens que j’employai ; je dis
d’abord qu’une donation ne donnoit point ouverture
aux droits feigneuriaux dans la coutume de Bourbonnois ; j’ajoutai fubfidiairement que la donation
fa ite en ma faveur par le Jieur de Segonqat, avoït
été déclarée nulle par une fentence du bailliage de
Montaigut} d’oùje concluois que A i. le duc d3Orléans
ne pouvoit pas exiger de droits feigneuriaux, ju fqu à
ce que la jujïicc eut prononcé définitivement Ju r cette
demande en nullité de la donation > ou que le fieur de
Segon^at s3en fût défifié.
. J ’étois bien loin par ce genre de défenfes, d’ap
prouver la demande en nullité, 8c j’en difois afiez’
pour montrer le cas que j’en faifois, ou du môins
pour convaincre que je ne m’en tiendrois certaine-?
ment pas à la fentence de Montaigut.
. Comment donc la malignité peut-elle me faire un
crime de m’ctre ainfi défendu? Etoit-ce m’approprier
le faux de Giraud, 8c vouloir abufer de la nullité
apparente, que d’en appeler, au contraire, à la jus
tice, 8c d’annoncer que je ne regardois pas commedéfinitif le jugement de Montaigut? d’un autre côté,
fi ce faux devoit produire fon effet, fi je ne pouvois
parvenir à écarter cette prétendue & faufïe nullité,
étoit-il jufte que .je.payaiTe les lods dam bien qui
t
�( ( rï l ) )
-n’étoit pas à moi? c’étoient les termes où j’en étais
lorique je me défendis, & il y a à ce fujet deux circonfîances bien remarquables : lu n e, qu’à l’époque
des défenfes que je fis lignifier le 15 juillet 1 7 7 7 ,
contre la demande de M. le duc d’Orléans, il eft
inconteftable que la fentence qui déelaroit nulle la
donation que m’avoit fait le fieur de Segonzat, fubfiitoit dans toute fa force, puifque je n’attaquai cette
fentence par la voie de l’oppofition qu’au mois d’août
fuivant.
L ’autre, que Giraud, de concert avec Salleneuve,
pour me perdre, ayant eu l’infidélité de lui délivrer
une expédition de la donation dans laquelle il avoit
inféré la claufe des biens échus-& à échoir, préfëns &
à v.enir ; & Salleneuve m’ayant fait lignifier cette
donation dans cette forme, j’avois tout lieu de crain
dre que la perfidie de Giraud ne l’eût encore porté à
faire contrôler & infinuer cette donation dans la même
forme. Il n’y a rien à eipérer d’un ennemi, & tout eft
à craindre de fa part.
Pour terminer mes doutes & fixer mes incerti
tudes, j’allai coniîilter les regiftres des infinuations,
ÔC me fis donner par le greffier une expédition de la
donation. Etant alors bien aiîuré de fa validité, je
formai oppofition à la fentence qui avoit été furprife
contre moi, de la part du fieur de Segonzat, & depuis
il n’a plus été queftion, ni en la juftice de Montaiguc,
ni en la cour de parlement, où 1 affaire fut portée par
�appel,delà fentence obtenuepàrlefîeur de Segônzat,
qui décJaroit la donation nulle. Giraud avoit en fon
pouvoir, & la feuille fupprimée, & celle qui fut fubftituée, au moment de l’aéte ; & cet ennemi juré fe
faifoit un jeu de délivrer des expéditions, tantôt dans
une forme & tantôt dans l’autre : tel eft l’art dange
reux qu’une intrigue adroite fait employer pour fatisfaire l’animofité, Sc compromettre l’innocence.
Inflruit du contenu en l’expédition que javois
retirée du greffe, le fieur de Segonzat ne put fe diffitmuler que la donation étoit valable, Sc que Giraud
l ’avoit induit en erreur, en abufant de fa crédulité;
il s’empreffa à m’en faire part Sc à fe réconcilier avec
moi : la lettre qu’il m’écrivit à ce fujet le 10 août
1 7 7 7 , eil trop elfentielle à ma juftifîcation, pour
que je puiffe me difpenfer de la tranfcrire ici dans fon
entier.
« Monfieur, M. Bidon, mon procureur, m’a dit
1 « que vous avez formé oppofition à la fentence ( du
4 mars 17 7 7 , qui déclaroit la donation nulle, comme
contenant la claufe des biens échus & à échoir, & c. ) ;
» je vous prie de ne point la pourfuivre : M. Giraud,
» quoique votre ami, m’avoit confeillé cette demande,
ï> pour m*engager à faire une nouvelle donation à M .
» Bout tin; il m’aVoit & \tquil s3¿toit réferve , lors de
» la donation, d e q u o i à me fa ire reujfir : je fuis
» trop content de vous, pour me laiifer gouverner
» à l’avenir par de mauvais confeils; faites faire la
�( i3 )
ï > fo u p e ; je vais la m an ger ch e z v o u s , & iu is v o tre
» fe r v ite u r , J i g t i è 3 de S e g o n z a t » .
Il n'y a rien dans cette lettre qui ne foit remar
quable. Chaque phrafe, chaque ligne, chaque mot
découvre la perfidie de Giraud & la noirceur de Tes
intentions : il a confeillé la demande en nullité; il a
confervé d e q u o i à la faire réuiîir ; il a déterminé le
fieur de Segonzat à difpofer en faveur de Bouttin,
des biens qui m’avoient été donnés. Quelles preuves
plus fenfibles pourroit-on exiger pour diftinguer le
coupable de l’innocent! Giraud a confervé, lors de
la donation, de quoi faire réuifir la demande en nullité
du fieur de Segonzat. Ce d e q u o i enveloppé fous
l ’ombre du myftère, peut-il fe référer à autre choiè
qu’à la feuille fupprimée, lors de la donation, dans
laquelle on avoit inféré la claufe des biens échus &
à échoir ? Non, Giraud, vous en êtes convenu vousmême, & les témoins ouïs dans l’information l’ont
attefté à la juftice, d’après les aveux que vous leur en
avez faits.
La perfidie de Giraud étant ainfi découverte,,
la conteftation qu’il m’avoit fait fufciter par le fieur
de Segonzat, fut auifi-tôt. terminée.
Le 12 du meme mois d’août, fut jugée l’inilance
d’entre M. le duc d’Orléans & moi. Par la fentence
«qui intervint, M. le duc d’Orléans fut débouté de ia
demande en paiement de droits de lods, à la charge
par moi d’affirmer & de faire affirmer par le fieur de
�C i4 )
Segonzat, que la donation du, 24 feptemhre
étoit fincère , & quelle ri avoit pas été' imaginée pour
■frujlrer M . le duc d* Orléans , des droits feigneuriaux*
L e iîeur de Segonzac & moi fîmes notre affirma^
lion le même jour fur la fincérité de cette donation;
& j3avois lieu de croire qu'un a<5te auiïi folennel
deiîilleroit les yeux à mes perfécuteurs, & me déli-»vreroit de leur tyrannie. Mais, de quel poids peut
être la religion du ferment pour des hommes dont
les principes ne renferment aucune conféquence,
pour des hommes qui ne confultent que leurs paifions
Sc l’intérêt ?
Giraud & Salleneuve, quoique réunis en fecretj
ne fe font montrés jufqu’à préfent contré moi, que
lu n après l’autre ; mais ils vont marcher de front :
plus animés que jamais, l’un, de ce qu’il n’a plus d’efpérance de me faire enlever les biens du iîeurt de
Segonzat, pour les taire paifer entre les mains de
Bouttin, & l’autre, de ce qu’il craint d’être privé
des droits de lods qu’il m’avoit demandés, fous le
nom de M. le duc d’Orléans, forment un nouveau
fyftême pire que le premier : n’ayant pu parvenir à
déchirer leur viétime, ils tentent la voie de la faire
égorger. Calomniateurs infignes, que ne m’eft - il
poifible de peindre ici toute la noirceur de vos dé
marches dans cette circonftance ? Que n'ai-je dans
ce moment une plume de fer, & le talent d’écrire
eu caractères de feu 2 Mais quel homme peut être
�à l'abri des traits d une cabale odieufe & intéreiTee !
Ces hommes, nés pour le malheur des autres, ces
Kommes qui ne connoiffent que l’intrigue & ne refpirent que la haine; ces hommes que je me félicite
d’avoir pour ennemis, parce que les honnêtes gens
èn auront toujours de tels, tant qu’il y aura des mé
dians, parviennent par leurs iubtilités & leurs manœu
vres, à periiiader au confeil du prince, que je iiiis
un fourbe sunimpojleur3un fauffaire enfin. On invente,
on controuve des faits; on leur donne les couleurs1
les plus vives & les plus éclatantes; on transforme
les allions les plus indifférentes, pour les rendre
douteufes, & toutes ces indignités iè trouvent renfer
mées dans un mémoire qu’on préfente au confeil du
prince, avec une lettre de Giraud qui en attefte la
iincérité.
Ce mémoire, tout infidclle qu’il étoit, a produit
l’effet que mes ennemis s’en étoient promis. Aprèsun arrêt du i l août 1775?, qui infirme la fentence
du juge de Montaigut, & me condamne à payer au
prince ( o u , pour mieux dire, à fon fermier, partie;
principale intéreffée ) les droits ieigneuriaux pour
une partie des objets que m’avoit donné le iieur de1
Segonzat, je me vois, près de cinq ans après, enchaîné
dans les détours d’une procédure criminelle. Les droits
de lods fu r payés au fermier du prince, les frais
'acquittés, la conteilation terminée, je fuis tout à coup
faifi, lié, garrotté Si conduit comme le plus infam»
�c.i 6 )
des criminels, par lin huiifier & la maréchauffée dâni
les priions de la ville de Riom.
Qu’on fe peigne, s’il eft poiîible, l’était affreux ou
je dus me trouver, au milieu d’un cortège auiîi
effrayant : Quelles révolutions étranges la nature n’é
prouve-t-elle pas dans des momens auifi critiques !
Un homme d’honneur n’eil fenfible alors qu’au regret
de vivre encore ; il croit voir d’un feul coup d’œ il,
fa jeuneiTe, fa vie facrifiée, fa fortune envahie, fes.
enlans & tous fes parens couverts de honte, plongés
dans l’opprobre, dans l’indigence, & difperfés : des
objets aufli effrayans ne font-ils‘pas fentir les tortures
les plus rigoureufes, ôc ne confondent-ils pas toutes
les facultés de l’ame.
Il
feroit inutile de m’étendre davantage fur des
images auffi hideufes : il n’eil perfonne qui ne foit
frappé d’un fpeèlacle ii révoltant, & qui, d’après fes
propres réflexions, ne gémiife de voir encore dans la.
fociété des monilres auez barbares pour immoler au
plus vil intérêt tout ce que leurs concitoyens ont de
plus précieux.
Que la nature du décret n’étonne pas : Giraud &
Salleneuve font témoins dans l’information faite contre
moi, à la requête de M. le procureur du roi.
Quelle manœuvre incompréhenfible pour étayer
une plainte ! Giraud & Salleneuve font mes ennemis
jurés, les auteurs de la ligue, mes perfécuteurs, mes:
délateurs : ce font eux qui ont préfenté des mémoires
contre
�C
1
7
>
n
Contre mor au confeil du prince; ce font eux qui one
envoyé au greffe civil de la cour de parlement la
feuille fupprimée de la donation dufîeurde Segonzat;
ce font eux qui ont follicité Si obtenu l’arrêt du 11août 17 7 ^ , Si ce font ces mêmes liommes qui ofent
fe préfenter à la juflice pour être témoins contre moii
Qu’eft-ce donc qu’une accufation pour laquelle on
commence à faire violer les règles les plus inviolables
del’ordre judiciaire? Votre religion a été furprife, ma^
giftrats refpeèhibles : des coupables artificieux, dans la
vue d’éviter ou de diminuer les châtimens dont ils font
menacés, ont eu l ’audace de fe plaindre des perfécutions qu’ils ont fufeitées aux autres h Si d’imputer
leur propre crime à celui qui auroit dû être leur accufateur; mais quel ne doit pas être moneipoir? Eclairés
du flambeau de la juftice, vous avez déjà percé les
ténèbres -où l’on cherchoit à vous égarer; vous avez
déjà pefé .au poids du fan<5luaire la valeur des pref*
tiges qu’on avoit employés pour vous faire illufion,
puifque Giraud, l’un de mes délateurs, a été décrété
d’ajournement perfonnel. Après le récolement Si la
confrontation, n’ai-je donc pas lieu d’attendre que-,
pénétrés de la délicateffe de vos fonctions qui fonc
toujours proportionnées à celles de la confcience ,
l’impofture étant entièrement découverte, & l’inno
cence reconnue, les prévaricateurs fubiront le fore
auquel ils m’avoient deftiné ?
Ces premières réflexions devroient être fuffifante^;
G
t
�'
,
1
i
8
)
pour me juftifier d’un crime, dont je n’ai pu m i
former l’idée ; d’un crime qui auroit tourné con
tre moi, puifqu’il m’enlevoit le fruit d’une donation ,
ou qu’évidemment je n’aurois pu commetre que de
concert avec Giraud, afin qu’après m’être fervi de
la faufle feuiiie pour éviter les lods, je pus rétablir
enfuite la véritable, pour conferver ma donation ; &
cependant il eft démontré que, loin de me fervir de
cette fauffe feuille, j’ai appris que je proteftois contre
la demande en nullité; & ce même Giraud qui feroit
auili coupable que moi, fi j’avois participé au faux,
& qui l’eft feul, puifque le faux n’a été pratiqué que
pour me nuire, eft tout-à-la-fois délateur & témoin
contre moi; il ne manqueroit plus à la fmgularité du
fait, que de l’avoir pour juge avec Salleneuve.
Mais , l’iniquité de mes ennemis les trahit trop,
pour que je néglige de les en accabler, autant que
je le peux. Comme il s’agit ici d’une inculpation des
plus graves, qui attaque tout-à-la-fois mon honneur,
mes états & ma fortune, & qui dépend de l’événe
ment de rinftruétion, je fuis obligé de recourir aux
moyens qui concourent à ma juftification. La juftice
ne fauroit me déiàprouver, puifqu’elie eft elle-même
intéreifée à ne pas fe méprendre fur le choix des cou
pables. C ’eft par l’examen des dépofitions que l’injus
tice fanglante de la calomnie éclatera. Il eft donc
indifpenfàble que j’expofe les différens chefs d’accufation dont (on m'inculpe, Si pour en démontrer
�C ip >
*■
l’injuilice Si la faufleté, que je rende compte de la
qualité des preuves répandues dans les information,
récolemens 8c confrontations, parle moyen defquelles
j’en ai eu connoiifance3 ayant d’ailleurs la mémoire'
aiTez heureufe pour retenir, fur-tout ce qui m’intéreife auili particulièrement. Mais une obfervation doit
précéder cet examen.
On a dû remarquer par le détail des faits, dans
lequel je fuis entré, qu’une donation faite en ma
faveur par le iïeur de Segonzat, cil le principe de mes
malheurs 8c la fource de la ligue qui s’eft formée
contre moi. J ’ai dit, 8c je le répète, qu’à la ieéhire
de cette donation m’étant apperçu que dans la feuille
du milieu on avoit iniéré la claufe des biens échus &
à échoir, préfens & à venir, qui rendoit la donation
nulle, cette feuille fut fupprimée; qu’il en fut fubilituée une autre à la place, 8c que tant la minute de
la donation, que la feuille fupprimée, relièrent fur
la table de Giraud, notaire recevant.
Voilà le fait eilentiel, prouvé, confiant qu’il ne
faut jamais perdre de vue, parce que c’ell la clef du
fyftême d’iniquité enfanté contre moi, 8c la preuvé
convaincante de ma juftifïcation.
Or, cette feuille fatale fut entre les mains de mes
ennemis, comme une épée à deux tranchans ; elle
devoit fervir à m’enlever les biens, & à les faire
paifer à Bouttin, fi le iîeur de Segonzat vouloit y
^ donner fon confentement. Dans le cas contraire, oa
C 2,
�poiivoit l’employer à me faire une affaire criminelle,
& à y intéreffer le prince, en periuadant que j’avois
fubflitué cette fauiîe feuille à la véritable, pour priver
Je prince de fes droits de lods.
C ’étoit, fans doute, un plan bien abfurde 8c bien
contradictoire ; car, s’il arrivoit, comme on devoit
le prévoir, 8c comme il eft arrivé en effet, que je fis
tous mes efforts pour maintenir ma donation & me
garantir de la fauiïeté dont on vouloit me rendre
victime, alors il devenoit évident que ce n’étoit pas
moi qui étois l’auteur de cette fauffeté; mais heureu
sement les méchans ne prévoient pas toujours tout,
8c ils tombent fou vent eux-mômes dans leurs pro
pres filets.
Je me défendis, en effet, comme je l’ai déjà dit,
contre le fieur de Segonzat, 8c il fut lui-même très-'
' prompt à abandonner Terreur dans laquel on l’avoit
^précipité.
Alors Giraud ayant manquéfon but, 8c Salleneuve
craignant toujours que je ¡ne réuifiife à écarter le droit
de lods, par le principe qu’une donation n’y efl pas
-iujette, ils en vinrent, de concert, à l’autre partie
de leur fyflême, qui fut de m’accufer auprès du
; prince, d?avoir falfifié.la minute de la donation. Ils
' adrefsèrent à fon confeilmn mémoire où ils expo
sèrent.
« :i°.'Que le 24 feptembre i77É>, l’aéte de donation fait en ma faveur :par le Jieur de. Segonzat %
»
�ÿ> fut préfenté fur ies dix heures du foir, tout rédigé,
» à Giraud, notaire, qui ne voulut le ligner avec les
» parties, que ;lê lendemain 2,^¡leptembre.
» 2°. Que Faite étant ligné me fut remis pour le
» faire contrôler & infinuer.
» 3°. Que dans l’efpace de trois ou quatre mois,
» qu’on a fuppofé que la minute de la donation avoin
»■relié en mon pouvoir, je l’avois fait changer, trois
» ou quatre fois; que les premières minutes avoient
_» été brûlées ou déchirées, & qu’à chaque change^
y> ment, la relation du contrôle & de i’infinuation
» avoit été remife fur la nouvelle minute que je pré'» fentois moi-môme au contrôleur.
» 4 0. Que dans le temps que j’étois faiii d elà
» minute, j’eus recours à deux ilratagêmes pour me
difpenfer de payer les droits delodsque me deman•» doit Sallenéuve, fous.lé nom du prince. Le pre:3) mier fut de fupprimer dans la minute de la dona,» tion, la feuille du milieu, & d en ,'fubflituer une
» autre qui renfermoit la claufe des biens a venir,
» ce qui-rendoit.la donation nulle,.& faifoit priver
» le prince des droits feigneuriaux. Le fécond fut de
-» confeiller au /leur de Segonzat., de former la de» mande en nullité de la donation- qu’il ma voit faite,
Sc d’oppofer enfuite au prince-, contre fademande
•» en. paiement-des lods , laTentence qui déclaroit la
;» donation nulle., cominè. renfermant la claufe d'es
•jiiàiens. à venir.» -*»» L,{1~
f!~ ^ - ...
�Ce font les mêmes chefs d’accuiàtlon qui ont été
mis fous les yeux de moniieur le procureur général,
& qui ont donné lieu à la plainte qui me retient dans
les fers, avec cette différence néanmoins que dans
le mémoire préfenté à M. le procureur général, on
y a ajouté « qu’après la remife de la minute qu’on
» fuppofe m’avoir été confiée, Giraud s’étant apperçu
» qua la place de la feuille du milieu, j’en avois
» fubilitué une autre qui renfermoit la claufe des
» biens à venir, ce notaire vint comme un furieux
» chez moi, avant quatre heures du matin; qu’il me
» furprit au lit, dans le temps que je dormois; qu’il
» m’intimida, en me préfentantJu r la gorge un piflolet
» garni de trois chevrotines ; qu’auiïï-tôt je me levai,
» j’allai dans mon étude pour remettre la feuille fupv> primée ; que dans ce moment arrivèrent les fieurs
yy de Segonzat & Rance qui relièrent un inftant, allèrent
y> enfuite à la mejf'e, & qu’après leur départ, je remis
» à Giraud la feuille fupprimée qu’il rétablit dans
» la minute, après l’ avoir montrée à Salleneuve, & ôta
» la feuille fauiTe qui contenoit la claufe des biens
» à venir ».
Qui ne. voit dans tout cet expofé un tiiTu de four
beries, d’impoftures 8c d’invraisemblances ? Qui n'y
reconnoît une machination concertée avec art, avec
réflexion, un myftère d’iniquité, un ouvrage digne
de l’exécration publique? En iiiivant pas à pas ces
calomniateurs infâmes, je me flatte de parvenir à le*
�( 23 )
Confondre. Une feule circonilance n’opère pas la
■conviction; mais la réunion des faits ne permet pas
de fe méprendre fur les vrais coupables. Il eil donc
néceifaire de fuivre, de réunir, de combiner leurs
difcours, de les comparer avec l’énoncé en l’a<5te
de donation, avec les déportions des témoins, & de
relever les contradictions dans lefquelies iis font
tombés : c’eft le feul moyen de faire fortir la vérité
du chaos, où l’on a cherché à i’enfeveiir.
P r e m i è r e
i n c u l p a t i o n
.
L ’ a c t e de donation f a it en ma fa v e u r p a r le fic u r
de Segon^at, fu t p r é fente le 24 feptembre 17 7 6 fur
les d ix heures du f o i r , tout rédigé3 à G irau d 3 notaire ,
qui ne voulut le jig n er avec les p a rties , que le len
demain 25 feptembre.
R
é p o n s e
.
A ce premier trait de la calomnie, ne doit-on pas
reconnoître la noirceur du génie de mes perfécuteurs?
peut-on fe difpenfer de croire qu’une paillon aveugle
fait arme de tout; que les vérités les plus feniibles,
les démonftrations même n’ont aucun prix aux yeux
des fourbes animés à calomnier l’innocence ?
Quoi ! ma donation a été préièntée à Giraud,
toute rédigée, le 24 feptembre, & elle n’a été fignée
que le lendemain ! Qui s’eft jamais permis des impoftures auifi évidentes? Lorfque vous avez parié ainii*
�W
'( 24 )
Giraud, vous êtes-vous fouvenu que vous àviez été
le miniftre de l’aéte, que par votre fignatüre vous
en aviez attefté la ilncérité & la date? De deux chofes
l’une : ou vous conviendrez, comme vous l3ave% fa it
à la confrontation, que ma donation a été paiîée le
2.4 feptembre, ou vous perfévérerez à dire qu’elle
ne Ta été que le 2 y. Au premier cas , vos mé
moires, votre lettre au confeil, votre dépoiition,
votre interrogatoire, font un tiifu de fuppoiitions &
de fauifetés ; au fécond cas, il faut que vous conve
niez que vous êtes un fauifaire, puifque l’aéle dedonation qui fait par lui-même probationemprobatamy
ne permet point de douter qu’il ait été paifé le 24
feptembre.
Jepourrois ajouter que Lougnon qui a écrit l’aéie,
a attefté dans fa dépoiition, foutenu dans fon interro
gatoire (tf) & à la confrontation, que c’eft le 24
feptembre 177<5 , qu’il l’écrivit, ainfi que la feuille
fupprimée, dans votre étude & fous votre di&ée ;
mais cette dépoiition, toute ilncère qu’elle eft, ne
peut rien ajouter à la foi d’un a£le qui fait preuve
par lui-même; ainfi Giraud eft néceiTairement un impofteur ou un fauifaire; ce qui ne permet point d’a
jouter loi à fa dépofition.
( a ) N ota. Le fieur Lougnon a été auilî décrété d’ajournement perfonnel. Mes juges ont fans doute voulu apprendre de lui-même les cir—
confiances dans kfquelles l'acls avoit etc paifé, & l’époque à laquellû
il l’avoit écrit.
S
?
e c o n d
^
�,
C
S e c o n d e
•
x
7a*
)
i n c u l p a t i o n
.
L * a c t e de donation étant { i g n é m e fu t remis
pour le fa ir e contrôler & infirmer*
R
é p o n s e
,
s’efl deflaiii de fa minute ! Comment un
officier public oie-t-il faire un aveu de cette efpèce,
s’accufer de prévarication : nemo creditur allegans
turpitudinem fuam. Cet aveu fufliroit feul pour em
pêcher la juftice d’y ajouter foi : mais c’eft encore
une iuppoiïtion démontrée telle par les dépofitions
des témoins ouïs dans l’information en effet. Le fieur
Lougnon a encore attefté que l’aéte de donation étant
écrit & fîgné, les parties fe retirèrent 3 & que la minute
de la donation & lafeuille fupprimée furent laijfées fur la.
table de Giraud. Le fieur Tailhardat de la Fayette,
contrôleur, a dépofé que la minute de la donation lui
fu t remife pour être contrôlée & infinuée par Giraud,
& q u il la remit au même notaire, après le contrôle &
l3infirmation. Le même fait eit attefté par un écrit qui
me fut envoyé par le fieur Tailhardat de la Fayette,
le 9 oétobre 17 7 6 . Cet écrit eft imprimé à la fuite
du mémoire. Peut-on après cela fe diiîimuler que
les inculpations qui me font faites, foient l’unique
fruit de la brigue & de l’impofture l
G ir a u d
D.
■
'V -r
�(aS)
T r o i s i è m e
i n c u l p a t i o n
.
On a ajouté que dans Vefpace de trois ou quatre mois
qu’on a fuppofé que la minute de la donation avoit refté
en mon pouvoir , 'je l3avois fa it changer quatre oucinq fo is; que les premières -minutes avoient été brûlées
ou déchirées, & quà chaque fo is , la relation du con
trôle & de l3inJinuation avoit été remife fu r la nou
velle minute queje préfentois moi-même au contrôleur.>
R
é p o n s e
.
C e t t e troifième imputation dévoile de plus en
plus l’acharnement de mes ennemis à consolider l’ou
vrage d’iniquité, dont ils font les architeéles; mais
la vérité fe dérobe rarement aux yeux perçans de
la juftice , & le crime fe trahit ordinairement par les
fubtilités même qu’on emploie pour le cacher.
»
i° . Il eft fuppofé, il eil faux que la minute de la
donation m’ait été confiée. Que la ligue s’étudie tant
qu’elle voudra à inventer, je la mets au défi de
prouver que j’aie été faifi un feul inflant de cette
pièce.
2°. N eil-ce pas une fable ridicule de prétendre
que dans l’efpace de trois ou quatre mois, la minute
îi été changée jufqu’à cinq fois ? Cette impoflure eil
entièrement détruite, i° . par l’expédition de la dona
tion qui a été tirée des regiilres du contrôle & desinfinuations. On voit en effet, par cette expédition,
»
�'( 2 7 )
qu’elle efl conforme mot pour mot à la minute qui
eft entre les mains de Giraud ; & il n’eft pas à pré
fumer que la minute eût été refaite fi fouvent, fr
l’intention des parties n’avoit pas été d’y faire quelque
changement.
2°. Pour adopter une abfurdité de cette nature ,,
ne faudrot-il pas fuppofer iix fauifaires; deux notaires,
le clerc, le contrôleur & les parties contractantes l
ce qui ne fauroit fe- préfumer.
3 0. Les regiftres du contrôle & des infirmations
ayant paiîe fous les yeux du miniftère public & de
monfieur le lieutenant général criminel, il n’y a été
remarqué ni changement, ni rature, ni furcharge ;
cependant la donation du 24 feptembre fut contrôlée
& infmuée le 26 du même mois.
4 0. Les témoins de l’information difent, favoir;
le fieur Charbonnier, l’un des notaires, q u i l n a (ign é
Vacle de donation , dont il s’agit, qiLune feu le fo is ;
le contrôleur, q u i l ne Va enregiflré quim e f o i s ; le
clerc, q u i l ne Va auffi écrit qu une f o i s , ôc tous les
trois ont déclaré dans leurs dépofitions, récolemens
Sc confrontations , qu’ils reconnoiffoient la minute
qui leur a été repréfentée pour être l a m ê m e q u ils
avoient écrite, fignée , contrôlée & infmuée.
L ’incrédulité elle-même pourroit-elle ne pas céder
à des preuves fi évidentes & fi précifes? Se trouveroit-il dans le public quelques - uns de ces efprits
malheureux qui croient fi facilement le mal fans preuve,
D z
�w
& qui doutent toujours du bien, lors même qu’il efl
prouvé / Ce n’eit pas pour eux que je publie ma déienfe ; & toutefois , fi je ne peux parvenir à les con
vaincre, je vais du moins les confondre par un dernier
moyen fans réplique.
Giraud, principal auteur de cette calomnie , l’a
ainiî préienté, pour fervir Salleneuve, dans le mé
moire envoyé au confeil du prince ; il Ta attefee dans
fa dépofition , & foutenu dans fon interrogatoire ;
mais à la confrontation, la force de la vérité Ta obligé
à venger l’innocence : ce miférable , après y avoir
hardiment répondu aux reproches déshonorans que
je lui oppofois , n’a pu réfifier aux remords de fa con
science ; il s’e/l retraite pofitivement de ce chef de
calomnie; il a avoué q u il iiavoit été fait quune feule
minute de la-donation. Que d’opprobres? quel abus ?
quel jeu de la religion ? & que peut-on en inférer, il
non qu’un tel témoin, qui cil l’un de mes délateurs ,
s’eft proilitué à dépofer au gré de ion complice.
En faut-il davantage pour rendre la preuve com
plète , pour défabuièr l'incrédulité , & pour démon
trer qu’il eft une juilice fupérieure qui frappe les
criminels d’aveuglement, afin de faire foudroyer le
vice Si triompher l’innocence ?
Q
uatrième
i n c ul p a t i on
.
D A N s le temps que.'fétois fa ijid e la minute } f e u s
recours à deux Jlratagênies f pour me difpenfer de p a y er
les droits de lods que me demandait Salleneuve, jo u s
�C'*P )
le nom du prince : le premier fut de fupprimer 3 dans
la minute de la donation , la feuille du milieu, & d’en
fubjütuer une autre qui renfermoitlaclaufe des biens à
venir; ce quirendoit la donation nulle, &fa ifo it priver
le prince des droits feigneuriaux. L e fécond 3 fut de
confeillerau ficur de Segoujat de former la demande en
nullité' de la donation q u il ni avait faite y & d’oppofer
enfuite au prince contre fa demande en paiement des
lods, la fentence qui déclarait la donation nulle comme
renfermant la claufe des biens à venir,
RÉPONSE.
• T o u t ce que la malice peut inventer de plus arti
ficieux , fe trouve renfermédans ce chef d’incuJpation.
Diffamateurs exécrables, comment avez-vous pu vous
garantir du remords déchirant d’avoir outragé la vérité
d une manière fi indigne ? Avez-vous jamais conçu ,
combien il en coûteroit à un accufé, pour rendre ion
innocence auiïï notoire quepourroit l'etre votre diffa
mation l Avez-vous jamais penie qu’un jour de ca
lomnie demandoit des années entières pour l'effacer,
Si que fes blellures , fi elles ne font pas abfolument
incurables, laifient toujours des cicatrices qui quel
quefois partent d’une génération à l’autre ? Mais ,
quelles réflexions peuvent faire des monflres, dont
le cœur ne refpire que la haine Si la vengeance \
Ce neft pas.aifez pour faire punir un crime, de
fuppofer quiÎ a été coinmis ; il faut .le .prouver, 8c
�*74°
'
C30)
.
donner des preuves plus claires que le jour. Que tous
ceux, dit l’empereur, qui veulent intenter une accu
sation capitale, fâchent qu’ils n’y feront point reçus,
s’ils ne la prouvent, ou par des titres inconteflables ,
ou par des témoins fans reproche, ou par des indices
indubitables & plus clairs que le jour. Sciant cunclV
accufatores eam Je rem deferre in publicam notionem
debcre , quœ injlrucla fit aperti^imis documentis , vel
rnwiita idoneis tejlibus 3 vel indicis ad probadonem indubitatis & lace clariorïbus expedita ( ¿z).
Dans la recherche des crimes , en effet, comme
dans le commerce des affaires humaines , l’ufage a
introduit trois différentes fortes de preuves : la litté
rale , lateilimoniale & la conjeéturale.
La preuve littérale eil la moins douteufe & la moins
foupçonnée, parce qu’elle fe tire de la leéture immé
diate des pièces authentiques ; elle prend fon principe
dans la propre autorité de la foi des a<5tes ; mais elle
ne fait foi que de ce qui y eft contenu. Injlrumentwn
nihilaliudprobat, quàmilludquodcontineturin eo (/;>).
Pour cette preuve, deux conditions fontrequifes (c):
lu n e , que la pièce qui fert de titre contienne
prouve immédiatement le fait dont il s’agit . . . car
fi ce titre ne contient rien du crime dont il ejl quejlion ?
.
(
a
(
b ) Bald, ad leg. ad probat, z j , cod de probat.
)
L .fin . cod. de probat.
( c ) M. le V ayer, trait. dela preuv. par com p, dccrit.
�(
i I )
>4!
.Sc qu’on s’en ferve feulement pour en tirer des con
séquences 8c des induélions par conje&ures, alors cette
.preuve ne s’appelle plus preuve littérale du crime ; ce
n’eft plus qu’une preuve littérale d une conjeéture ,
8c par conséquent, elle ne forme plus elle-même
qu’une conjecture Sc un indice.
La fécondé condition néceifaire eft, que la pièce
qu’on produit fa fle fo i par fon autorité propre ; car il
elle ne fait pas foi par fa propre autorité, ce n’eft
point encore une preuve littérale, d’autant que ce n’eit
plus la pièce qui prouve : la preuve vient alors, ou
des témoins, ou des indices qui lui font donner créance ;
Sc ainfi , elle tombe encore dans l’efpèce de la preuve
teflimoniale ou conjeéturale.
La feuille iupprimée au moment de la donation du
24 feptembre 17 7 6 , peut-elle être confédérée comme
une pièce authentique? peut^elle faire foi par ellemême que j’ai voulu priver le prince des droits feigneuriaux ? Il faudroit iuppofer les têtes & les idées
de tout le genre humain renverfées, pour qu’il pûtfe
trouver un feul homme qui osât affirmer des abfurdités auiîi révoltantes. i° . Unepiècequin’aétéiignée,
ni par les parties, ni par un notaire, ne fera certaine
m e n t ’ jamais coniidérée comme un a6te authentique.
2°. La fuppreffion de cette feuille, qui renfermoit la
claufe des biens échus & à échoir 3 préfens & à venir >
peut d’autant moins manifefler mon intention de faire
priverleprin.ee ou fon fermier des droits feigneuriaux j
�( 3 0
que dans le moment de cette donation, j’étois intime
ment convaincu que je n en devois point, d’après les.
difpofitionsdelacoutumedeBourbonnois, fous l’em
pire de laquelle fe trouvent fitués les biens donnés.T
Suivant le langage de mes ennemis , je n’ai gardé
la minute de la donation, que pendant trois ou quatre
mois. Dans cet intervalle, le fermier de M. le duc
d’Orléans, n’a formé, contre moi, aucune demande
pour le paiement des droits de lods, puifque je n’ai
été affigné par ce fermier , fouslenom du prince, que
le i <y mars 17 7 7 , dansun temps où l’on convient que je
n’avois plus la minute de la donation en mon pouvoir.
Or, dès le moment qu’il eft prouvé, par l’aveu même
de mes délateurs , qu’au temps de la demande du
prince , je n’étois pas faiii de la minute , on doit nécellairement convenir que je n’ai pu en fùpprimer là
feuille du milieu pour en fubilituer une autre.
Eft-il croyable d’ailleurs , que, pour me fouftraire
au paiement des lods, j’euife voulu m’expofer, dune
part, à me faire dépouiller des biens donnés; & d’une
autre, à voir ma fourberie découverte, par le moyen
du rapport de l’expédition qu’on étoit dans le cas de
retirer duregiftre des infinuations ? L ’intérêt eft la règle
& la meiùre des avions : on ne fe porte point ordi
nairement aunefcélérateffe,lorfqu’onn’en doit retirer
aucun fruit, nemo gratuité malus ; ôc il ne pourra ja
mais paraître vraifemblable, qu’un quelqu’un s’expofe
3, encourir une accufation qu’il eft le maître.d’éviter«
.Quel
'
�C 3 3 )
7* 's
. 'Q uel ufage, au furplus, ai-je fait de cette feuille,
qui n’a jamais été en mon pouvoir, & que je n’auroiS'
certainement pas remifeà Giraud, ii j’en avois été
Tain ? L ’ai-je oppofée au prince ou à fon fermier? leur
ai-je communiqué quelque expédition, où fe trouve la
fauffe claufe des biens à venirl Salleneuve, quoique
l ’un de mes délateurs, a dit tout le contraire dansfes
dépofition, récolement & confrontation.
. M ais, à propos d’expédition, je me rappelle d’un
ipoyen bien important, pour confondre mes ennemis;
j’ofe même dire qu’il eft décifif. Le voici :
' Dans fa dépofition, Giraud a dit, cp3après que l3aâe
4? donation eut été refait pendant trois fo is , dans l3ef*
pace de deux mois , ou un peu plus & que les pre-"
mières minutes eurent été brûlées ou déchirées en préfence du fieur Charbonnier3 il me délivra une expédi
tion de ta donation , une fécondé expédition au fieur.
Rancey & une troifième à Salleneuve.
De fon côté, Salleneuve a foutenu que je lui avois
communiqué l3expédition que j 3avois retirée ; q u il en
avoit pris une copier q u il Vavoit confiât ée, & q u il
écoit afîuré que la claufe des biens à venir îi3étoit
jfiin t dans cette expédition : cette clauie fe trou voit
néanmoins dans les expéditions délivrées dans le même
temps au fieur Rance ôc à Salleneuve. L ’exiftencede
la claufe, dans ces deux dernières expéditions, eft
atteflée par les dépofitions de Giraud, de Salleneuve
& du fieur Rance *
.
;
E
�74*
C 34 )
" De là réfulte la conféquence nécefTaire, évidente,
que Giraud eft fauteur du faux; car^ il jeTavois com
mis, ¡c’eût été, comme on le iuppofe, pour tromper
Salieneuve, & ce fermier convient que je ne l’ai pas
fa it, puifque je lui ai» communiqué l’expédition del!a£te vrai. Cependant il eft certain qu’il y a eu des
expéditions de l’aéte faux ; que ces expéditions ont
été délivrées par Giraud ; qu’il les a enfuite retiréesou corrigées : donc c’eft Giraud qui a fait le faux >
pour me mettre aux prifes avec le fieur de Segonzat,
ou avec Salieneuve.
r Faut-il indiquer ces preuves, pour démontrer que
Giraud eft feul l’auteur du faux \ cela eft très-facile
on les trouve dans la conduite que Giraud a tenue, &
dans la dépofition de Salieneuve.
Giraud, inftruit que dans le procès que j’avois
avec M. le duc d’Orléans , Salieneuve m,’avoit faic
fignifier une copie de la donation , dans laquelle fe
trou voit inférée la claufe des biens à venir, vint chez:
m oi, me prie de lui communiquer cette copie ; ce
que je fis , fans connoître fes intentions ; & , dans le
moment, Giraud va chez le fieur Coulongeon, pro-.
çureurdu prince, l’engage à raturer la claufe vicieufe,'
& me remet, en cet état, ma copie. Pourquoi faitesvous ces démarches, Giraud \ quel intérêt prenez-vous
h la conteftation qui s’eft élevée entre le prince <3cmoi£
Vous avez,craint que j’appe.rçuife votre fauifeté, que
jedéconcertaiïe vos projets, &que je priifele parti dé
i
�( 3 1 )
vous attaquer le premier; mais ce n’eft pas tout.
Le fieur Rance , créancier du fleur de Segonzat,
Vêtant rendu en la ville de Montaigut, pour prendre
■à ce iujet des arrangemens avec m oi, Giraud , qui
eft inftruit du jour de fon arrivée , l’attend à ma
porte , entre avec lui dans mon étude ; & à peinele
fieur Rance à-t-il dépofé, fur mon bureau, fes titres de
créance, parmi lefquels fe trouvoit l’expédition de ma
donation, qui lui avoit été délivrée par Giraud, que
ce dernier fe faiiit de cette expédition , l’emporta
•fur le champ , ratura la fauiTe claufe, & ne la remit
que plufieurs jours après au fieur Rance qui fit les
• plus vives follicitations pour l’y engager. Lors de la
remife, le fieur Rance s’étant apperçu de la rature, ÔC
en ayant démandé les motifs à Giraud : que répondit-il?
que fon clerc s3¿toit trompé. Quelle invraifemblance i
un copifte fe trompe ordinairement , en omettant
•quelques claufesde l’aéte; maisilne lui arrive jamais,
.lorfqu’il eft de bonne foi, comme fetoit certainement
le clerc de Giraud, d’ajouter dans une copie , des
claufes qui ne fe trouvent point dans l’original. A la
confrontation avec le fieur Rance, Giraud eft coravenu que cette rature étoit de fon fait : cette expédi
tion eft produite au procès.
Giraud ne s’eft pas contenté de raturer la clauiq
vicieufe dans les expéditions qu’il a délivrées ; il s’eft
en outre fait remettre les expéditions, lorfqu’il a pu y.
•parvenir. Ce fait eft attefté par Salleneuve qui dit >•
E 2
�jdans fà dépofition , que' Giraud Vayant p rié de lm
remettre la fauffe expédition q u il lui avoit délivrée, il
yconfentit,en'liddifant: j e n e v e u x p a s l a m o r t
d u p é c h e u r , & je ferois fâché de vous expofer à des
conféquences défagréables.
Giraud eft le pécheur ; Giraudefl/efauffaire ; Giraud
eft le coupable ; il eft néanmoins en liberté , & je fuis
dans les fers. Que de réflexions ne pourrois-je pas me
permettre ici?.mais je fuis hors d’état de les expofer.;
jnaraifon égarée, mon efprit affoibli, toutes les facultés
.démon ame anéanties, ne me permettent point d'ap
profondir un myftère auifi inconcevable.
Qu’on perfifte à préfent à dire, avec quelques ames
corrompues , que mon intention ^toit de me Servir
de la feuille fupprimée, lorfque le prince me demandejo it les droits de lods, & d’oppoferla véritable donation,
lorfque les héritiers Segonzat voudroient m’attaquer,
&que cette fupercherie doit me faire envifager&punir
xommeun criminel? Je répondrai toujours avec fuccès a
cesfuppoiltions, i° . qu'elles font purement gratuites ÔC
contraires à la préfomption de droit; que c’eft Giraud,
-dépofitaire de la minute , qui en a abufé & qui l’a
-faliîfiée : car,.encore une fois, la fauife feuille qui fut
lupprimée lors de la rédaction de l’aéte, & laiflée au
.pouvoir de Giraud , ne fait preuve, par elle-même ,
d’aucun crime. Le crime eft dans l’abus qu’on en a
fait : or, cet abus , à qui l’imputer, qu’à Giraud qui
t8> déliyré de fauife s,exp éditions ;
comment rim*
�(
57 )
_
* *
pùter à- mol, qui en ai reçu une vraie, & qui la i com^
muniquée, comme je lai reçue, félon le dire même
4e la partie intéreiTée, par qui cette affaire m’eftiuAi
cirée?
f 2°. Outre la préfomption de droit, il y a preuve
évidente contre Giraud, par les expéditions qu’il a
délivrées, & par le témoignage de Salleneuve qui
attefte que je lui ai communiqué la vraie.
Ce n’eft pas cependant que j’adopte rien de ce qu’a
pu dépofer Salleneuve. Je fuis obligé d’avouer que
je n’ai nulle mémoire de lui avoir communiqué aucune
¡expédition. Mais enfin, ou fa dépofition eft vraie, ou
elle eft fauife : ii elle eft fauiTe, quel cas doit-on faire
de mes délateurs .? ii elle eft vraie , comment douter
du véritable criminel.
Si jen’étoispasaifez heureux pour avoir des preuves
teftimoniales auili déciiives , ma iituation en feroitelle plus critique ? Je vais démontrer que non,
; J ’ai dit qu’un fécond genre de preuves fur lequelil eil
permis d’aifeoirune condamnation, eft la preuve teftimoniale ; mais quil eft dangereux de fe référer à des
témoignages de cette nature ! Par une eipèce de fatalité
attachée à la condition humaine, la plupart des témoins
ignorent l’importance duminiftère auquel la juftice les
appelle ; & d’autres à qui la diffamation ne paroît plus
qu’un jeu de la fociété, étant vendus au menfongë, ,ne
marchandent que l’honneur & la vie de l’innocent. Une
fonction auift férieufe exige de la réflexion, foutenuQ
a i'
�/
,
w
d’une probité éclairée & fcrupuleufë ; auflî, pour la
preuve teftimoniale , comme pour la preuve littérale,
exige-t-on rigoureufement, en matière criminelle y
deux conditions eifentielles pour la rendre certaine. >
Lapremière, que les témoins qui dépofent d’un fait,
l ’atteftent comme d’une chofe qu’ils favent de pleine
certitude, pour y avoir été préfens 8c l’avoir vu euxmêmes. Inquifitio fiat per examinationem tejlium dicentiumfe àdfuijfe iis quæ gefla fu n t, & vidijfe quoi tune
agebantur ( a ) ; car s’il paroît que la dépofition des
témoins eft vacillante & incertaine, audiendi non
ju n t(b ')\ qu’ils n’ont parlé que d’après des ouï-dire,
ou fur des préemptions , leur témoignage ne peut
plus former de preuve : fie ergo fuâ feientiâ debet
reddere tejlimonium, & de fuâ. præjenda ; de auditu
autem alieno non valet ( c ).
La fécondé condition pour former la preuve com
plète, eft que les témoins qui font entendus en dépo
sition, foient exempts de paiîion contre l’accufé; qu’ils
ne foient point engagés par quelque raifon particu
lière à le faire confidérer comme coupable, & , qu’en
un mot, leur conduite foit irréprochable : intejlimoniis autem d i g n i t a s f i d e s m o r e s g r a f i t a s
examinanda ejl ( d ) .
y
,
,
,
(a) Auih. de fanclif. ejnfcop. cap,
fivero abfunt,
( b ) L. a sff. de teflib.
( O G lof. ad l. tejlium t q f cod, de teflib, vert, praflo»
- (tf) L , z , cod. de teflib,
'
�V 39
V Four démontrer dune manière très-feniible, que la:
preuve teftimoniale confignée au procès ne fauroit
non plus me faire conÎidérer comme coupable du
crime dont on m’accufe, j’expoferai d’abord les motifs
qui doivent faire rejeter les dépofitions de quelques
témoins, & j ’examinerai enfuite s’il peut réfulter quel
que preuve de conviétion du témoignage des autres.
P R E M IÈ R E
PR O P O SIT IO N .
Onconnoît déjà, & les témoins que j’ai dûrécufer^Gîraud&saU
& les motifs qui m’y ont forcé. Les auteurs difent ,!eneuire'
que l’accufé peut, avant la confrontation, demander
le nom de fon dénonciateur à M. le procureur du
roi, pour fa voir fi les témoins font parens ou alliés de
fa partie fecrète, & plufieurs arrêts l’ont ainfi jugé (<z).
La conféquence qu’on doit tirer de cette jurifprudenc* eft facile à pénétrer : on doit en conclure que
les parens du dénonciateur ne pouvant être témoins
contre l’accufé, il en doit être, à plus forte raifon, de;
même des dénonciateurs qui dans cette circonftance
dépofent dans leur propre caufe: or, Giraud & Salleneuve font mes véritables dénonciateurs ; ce font mes
ennemis jurés ; ce font les chefs de la ligue ; ce font
enfin eux qui, avec les héritiers Segonzat, m’ont fait,
fufciter le procès criminel qui eft à juger.
Giraud & Salleneuve, de concert avec les héritiers
( a ) Lacom be,.mat. crimin. part. 3 , chap. 1 3 , n, 3 / j B ou vot, queft,
not. au mot dénonciateur fto m t
2,
queft. i crc*
- s
/
�'< *
Ç 4 0 )'
Segonzat , ont compofé differens mémoires corttre
m oi, qu’ils ont envoyés auconfeil du prince, 8t Giraud
a attefté, par une lettre, la iincérité du contenu dans
çes libelles (a).
Giraud a follicité le iieur Charbonnier à iigner l’un
de ces mémoires ; mais ce notaire, dont la probité
çft reconnue, a conftamment refufé de proilituer ia
plume (h).
Giraud a fait tous fas efforts pour faire annuller la
donation que m’avoit faite le fieur de Segonzat, afin cte
pouvoir enfiiite faire difpofer des mêmes biens en
faveur de Bouttin, beau-frère de fon gendre (c).
Giraud a dit publiquement, avant & depuis fa dépoiition, que mon affaire criminelle feroit bientôt ter
minée, J i je voulais me départir de la donation qui i
7na été fa ite (d). Les héritiers Segonzat tnont fait<
( a ) A la confrontation Giraud eft convenu d’avoir envoyé ces
mémoires au confeil, & il s'ejî ex cu /é , en difant qu ï l y avoit été fo r c é 3
& que ces mémoires lui avoïent étéfu g gércs.
(
b)
Le fieur Bidon a attefté ce fait dans fa dépofition.
( c ) Giraud en a fait l’avçu au fieur B id o n , qui l’ a ainfi dépofé ; &
rA u din , autre tém oin , a attefté que dans le temps que la demande en
nullité de la donation fut form ée, le fieur de Segonzat lui avoit dit que
Giraud lui avoit c'onfervê q u e l q u e
c h o s e p o u r fa ir e
réuflir cette demande.
Ce q u e l q u e c h o s e eft le d e q u o i dont parle 1« iieur de Segonzat
flans fa lettre ; c’eft-à-dire, la feuille fupprim ée., dont Giraud a abufé.
( d)
Il en eft convenu, à la confrpntation.
fa irt
I
�'( 4 r )
'ifdire la même propofttiùn depuis que je fu is privé ie
ma liberté ( a).
Giraud a avoué au procès cpien vertu d ’arrêt du par
lement il a fait dépofer au greffe, tant lafeuille fup■primée, que la minute de la donation : donc ii eil tout-à-la-fois , & l’un de mes dénonciateurs, & témoin
.dans fa propre caufe.
Enfin, Giraud eil le vrai criminel, lefeul coupable
du faux ; il ne m’accufe que pour qu’on ne l’açcuic
pas ; il veut me perdre pour fe fauver, & ce qu’il y a
d’incroyable, c’eil qu’il eil venu à bout contre toute
vraifeinblance, toute raifon, de me mettre à fa place,
& de faire tomber fur ma tête un poids dont il doit
répondre par la iienne.
Salleneuve eil convenu à la confrontation , qu’il
avoit travaillé contre moi pour les héritiers Segonzat
qui ont obtenu un arrêt d’attribution pour tenter
enfuite la voie de faire annuller la donation qui m’a
été faite (b).
A la follicitation de Salleneuve, & d’un curé, dont
( a ) J’en aurois offert la preuve teftimonlaJe ; mais depuis que mon
mémoire eft fous prefle, les héritiers Segonzat m’en ont fourni une
preuve écrite; n’ayant voulu ni pu obtempérer à leurs propofitions dans
la circonftance a&uelle, ils m’ont fait aflîgner le 2¡> mai dernier, pour
être condamné à me défifter des biens donnés.
(¿>) C’eft la cour qui eft commife par cet arrêt, qui eil du î i
novembre .1 7 8 3 , & qui me fut fignifié fans-aflignation, & fans expliquer
E
�( 42 )
le nom eil aiTez connu, un nommé Ja b e y , de la
paroille d’Y b u x, s’efl: rendu dans cette ville le I er oii
le 2e mai dernier, pour porter des plaintes contre moi,
quoique je ne lui aie fait aucun tort ( a ) .
'
Saileneuve a dit hautement qu'il parviendroit à me
fa ir e perdre mes états, & même A M E FAIRE p e n d r e
ou q uilp erd ro it fon nom (/?). Si la loi s’indigne contre
les témoins qui fe préfentent d’eux-mêmes, que doit
doncpenfer le juge, de ceux que je viens de nommer?
Si je me conduifois par les mêmes principes que
mes ennemis, je ne manquerois pas l’occafion de
dévoiler ici des faits qui ne laiiferoient aucun doute
jiir le cas qu’on doit faire de la fidélité des uns ÔC de?
autres, dans les devoirs de leurs états; mais je crois
pouvoir m’en taire, & j’aime à le faire, perfuadé que
^
____ -Wj -jj Sw«a^
■les motifs pour Icfquels il avoit été obtenu, le 1 7 du mois de décembre
luivant.
Sur le retus que j’ai fait, depuis que je fuis dans les liens, de confentir
à ce que les héritiers Segonzat exigent injudement de m oi, j’ai été afligné
en la cou r,àleur requête. Ces procédés permettent-ils de douter que les
héritiers Segon?at fe font réunis avec mes délateurs ? C’efl: à mes juges;
c ’eft au public impartial, à le décider ; c’efl le troifième procès dont j etois
m enacé, & que j’ai annoncé au commencement de mon mémoire.
( a ) Ce tém oin, qui m’efl; venu trouver en prifon , m’a inftruit du
fa it, & il l’avoit auparavant dit à plufieurs perfonnes qui le firent appercevoir de fa démarche inconfidérée.
%
................
<
'
( h ) J’offre la preuve des propos de ce fermier.
r
�4 3 )'
je- peux faire ce facrifice à Teipric de charité , iàn£
compromettre la néceiTité de ma juftification. Ëh !
peut-être la notoriété publique ne fuppléera que trop
à ma difcrétion.
Un fécond motif qui doit faire rejeter le témoi
gnage de Salleneuve, eft l’évidence de la fauifeté de
là dépofition : Salleneuve a Soutenu dans ia dépoli-'
tion, dans le récolement & à la confrontation, que
Giraudne lui délivra une expédition, dans laquelle fe
trouve, la claufe, des biens à venir, qu après que fe u s
fa it lignifier (le r j juillet 1 7 7 7 ) la fentencequi avoic
été rendue contre moi, en faveur du fleur de Segon^at.
Cette allégation eft une impofture démontrée. Jefupplie mes juges de vouloir bien faire attention , en
examinant les pièces produites au procès, que ce fut
le 1 j’ juillet 1777? que je fis lignifier au prince la fen
tence rendue en faveur du iieur de Segonzat, &
qu’avant cette époque du iÿ juillet, Salleneuve, fous
le nom de M. le duc d’Orléans, m’avoit fait fignifier
une copie de la donation, avec la claufe des biens
cchus & à échoir, préfens & à venir. Ce fut la lignifi
cation de la donation dans cette forme, qui me déter
mina à oppoSer iubfidiairement contre la demande du
prince, que la donation étant nulle, je ne pourrois
être dans le cas de payer des droits feigneuriaux ; il
eft donc faux ; il eft donc fuppofé que Salleneuve
n'ait retiré une expédition delà donation, que poftérieurement à la Signification que je fis faire de la Sen^
F 2
�C 4 4 )
tenèe qu£ le iîeur de Segonzat avoit iurpriie contre
moi.
Giraud a d’ailieurs démenti formellement cette
aifertion de Salleneuve : on peut voir, en effet, dans
la'dépofition de Giraud, qu’il y attelle qu’environ trois
ou quatre mois après la donation, qui efl du 24 feptembre 17 7 6 , il en délivra une expédition à Salleneuve dans laquelle étoit la claufe vicieufe ; mais ce
n’efl point là l’unique fauifeté que j’ai remarquée dans
la dépofition de Salleneuve ; il y en a une autre aufli
frappante.
A la repréfentation qui a été faite à Salleneuve de
la minute de la donation & de la prétendue feuille
iiibflituée, ce fermier d e jin t é r e fjé a eu le front de foutenir q i i i l re c o n /io iffo lt l 3a cte é c r it f u r d e u x f e u i l l e s
p o u r être c e lu i q u i c o m p o fo it O R I C I N a i r e m e n t Ici
m in u te d e la d o n a tio n . , e t l a
c e lle
f e u i l l e , p o u r être
q u i a v o it é t é s u b s t i t u é e
ci
la p l a c e d e la
Peut-on s’expofer
à mentir aufli groiîièrement \ Quoi! Salleneuve ofe
attefler qu’il reconnoît l’aéte écrit fur deux feuilles ,
pour être celui qui compofoit o r ig in a ir e m e n t la minute
de la donation? Mais quelle certitude pou voit-il avoir
de ce fait,puifqu’iln’avoitpasétépréfentàla pafTation
de cet aéle l II dit encore qu’il reconnoît la f e u i l l e ,
pour être celle qui avoit été fu b jlit u é e ; mais quelle
connoiffance a-t-il de la prétendue fubflitution? a-t-il
yn iorfqu’elle a été faite a-t-il vu écrire la feuillet
f e u i l l e d u m ilie u d e la d o n a tio n .
�iiibftituée ? m’a-t-il entendu dire que j’étois l'auteur
de cette fubftitution l Te fils debet reddere rationem
d iâ i fu i per fenfum corporalem s putà vifunt vel auditum (a). Salleneuve en a donc impofé dans ces deux
parties de fa dépofmon ; il a défavoué ce qui étoit
de fa connoi/Iance , & il a atteilé ce qu’il n’a jamais
pu connoître; ainfi fa dépoiition eft fauife., au moins
quant à ces faits.
< M ais, quelle eft la règle reçue par les docteurs criminaliftes dans cette matière , & puifëe dans la difpoiition des loix ? il n y en a pas un qui ne dife que
le témoin, convaincu d’être faux en une partie , eft
réputé faux en tout, par rapport au ferment qui ne
le peut diviièr : ex quo juravit dicerc veritatem fuper
.omnibus , tune fi deponit falfum in uno 3 non creditur
■ci in aliquo, tanquamperjuro, dit Alexandre (/>). Menochius ( c ) s’exprime en termes encore plus forts :
S i in modico confflat falfitas tcflis deponentis, prafumiturfalfitas in aliispartibus , etiamfi ignoranter&per
erroremfalfum effet atteflatus, noncnïm ob idexeufatur,
Alciat ( d ) donne trois raiions pour prouver que
( a ) GloJ'. a d L u fiiu m . cod. de tejl, Dimoul. n. 6q.
denomb.
(b ) Tit.2 , conjil.
pag.
17 .
(c)
4 4 .,
7,
,
8 , tic. i , glof>
pag.3 2. Cravetta, tom. 1 , conf. 6 , n .
Bald. lïb. 2 , conf. 2.86’ , n. 4 , pag. 80
Lib. 5 , prœf. 2 2 , n. 1
§
2,
3
,
verf. col. 1,
,pag. 486*.
• ( d ) A d . L' 1 . d t verb. obligat, § J ed f i m ihi, n. 5 2 , 5 ? } 5/j., pag,
& 7.86*
•
'-
28$
�;
_
(4 0
l-ignorance & l’erreur ne' doivent point ex'cufer urt
témoin qui fait une faufTe dépoiition , i °. quia tejlis'
prœfumiturpropter juramentum deponere confideratè &
de eo quodefcertus; 2.0. quia te(lis diccns aliqilid falfum,
commuât contra jus divinum & naturale , undè ignorantia non excufat à dolo ; 3 0. quia in his in quibus
débetprœcedere diiigentia, prœfumiturfeientia &dolus
iilius qui debebat diligenter inqulrere., nec admitdtury
exeufatio ignorantiœ ; d’où il 'conclut, que in dubio
non prœj'umitur ignoranter depofuijfe falfum3 & confequenter in dubio totum diclum annullatur.
'
Je conclurai aufiï, avec ce do<5teur, que la fauiîe
dépoiition de Salleneuve tombe entièrement; que le
ferment qu’il a violé dans une partie, perd fon carac
tère, qui doit être comme la vérité une & invariable;
que , où la vérité n’eft pas entière, la faulTeté eft par
faite , & que ce qui n’eft vrai qu’à demi, eft entière
ment faux : veritas quœ non ejlplena veritas, ejlplena
falfitas : quoi non efi plena probatio y nulla eft probatio , dit Cujas ( a ) .
Giraud eft tombé dans des contradictions révol
tantes. Dans fes mémoires envoyés au confeil, il-y
avoir dit que la donation avoit été refaite, dans l’e f
pace de quatre mois , pendant cinq fo is ; qu’il l’avoic
toujours fignée par complaifance : dans fa dépoiition ,
. \\ , •
( « ) Sur la loi 3 , au cod. ad leg, Ju l, M ag. c’eftaufli l’avis dePapon, en
fes arr. liv.
, tit, 8.
�c 47 y
11 a dit que cette donation n’avoit été refaiteque trois
fo is , Si à la confrontation , il eft convenu que cette
donation navoitjamais été refaite. Dans fon interro
gatoire, ileit convenu en un endroit, que c’étoit par
ion miniftère que la donation avo'u étépa[fée le 24
feptembre 17 7 6 3 Si en un autre endroit , ii dit que
Vacíe lui fu t préfenté tout rédigé le 24 feptembre 3 &
quilne lefigna que le 25. Dans la dépofition , ii a dit
c^x ayant délivré à Sallenéuve une expédition de Vacte3
avec la claufe des biens à venir 3 cefu t Sallencuve qui
fu t le trouver 3 & lui fit remarquer cette claufe ; Si dans
fon interrogatoire , ii a fouteriu qu3il s3étoit apperçu
le premier de ce vice, & qui l fut auffï-tot trouver Salleneuve 3 & le prier de lui remettre Vexpédition. Je ne
finirois pas , ii je voulois rappeler toutes fes incon
séquences S i fes 'contradictions v j
Quelle foi eit-ii permis d’ajouter à des contradic
tions auili frappantes? quoi, Giraud, à chaque inftant
vous dites o u i Si n o n , Si la jufticenelance pointlur
votre tête íes foudres & fes carreaux ! Suis-je donc
deftiné à être le fuppôt de vos in iqu itésil faut nécef
fairement que celaioit, puiiqu’à l’avis même de votre
ami Salleneuve, vous êtes le p é c h e u r ; & perfonne
ne difconviendra que je fubis la peine due à vos for
faits. O uï, il faut que cela foit, puifcju’avant votre
dépofition, Si en vous promenant dans l’antichambre
du parquet , fur les repréfentations qui vous furent
faites, par un eccléilaftique, de ne pas vous expofer
' x
�( 4§)
à dépofer contre la vérité, vous répondîtes que vous
avie{ dans votre poche de quoi vous garantir. Mais
vous garantirez-vous de la peine dont eft menacé un
faux témoin, un impofteur, un prévaricateur, un fauffaire : fouillez dans vos poches, Giraud, vous n’y trou
verez pas de billet de garantie de la part de la juftice.
La contradiction eft l’écueil où fe brifent ordinaire
ment les fourbes & les impofteurs ; non feulement elle
détruit toute la foi du témoignage, mais elle expofe’
encore le témoin àlapeine du crime de faux. Aut tejiis
deponit in uno judicio contrarium ejus quoddixerat in .
aliojudicioy& in hoccafudebetpuniritanquamfalfarius;
aut deponit in uno judicio contrarium ejus cpiodpriiis'
dixerat in eodem judicio, & pariter puniendus e(l de
fa lfo ( a ).
N ’eft-ce pas infulter à la juftice elle-même; n’eftce pas chercher à la furprendre ; n’eft-ce pas l’expofer
à pleurer fur fes propres jugemens, que de lui pré»fenter des témoins de cette nature ? Ah ! s’il étoic
permis d’aiTeoir des condamnations fur de pareils
témoignages, combien d’innocens feroient expofés
à devenir la vi&ime de la fcélérateife \ Ne feroit-ce
point ouvrir un champ libre à la calomnie? ne feroitce point favorifer la noirceur de ces hommes mons
trueux qui n’épargnent ni les moyens ni les fuites
(a )Julius Clarus, lib. 5 , §fdlfurn, n, 5 ,1 . 16 ,jf% de tejîib. 1.2-7 f f 3 ad
l. Cornel. de fa If.
funeftes
�( 4? )
t â
funeiles'cle leur vengeance, pourvu qu’ils fe vengent?
Mais oublions pour un moment ces faux témoins,
pendant que je vais examiner les autres.
SECONDE
PR O PO SIT IO N .
L es autres témoins ouïs dans l’information doi
vent être diftribués dans deux clalfes : lu n e, pour
ceux dont le témoignage n’efl: fondé que fur des
ouï-dire; & l’autre, pour ceux dont la fcience ne
peut jamais être étayée que fur des préemptions ,.
des indices, des conjectures, & le plus fouvent fur
des invraiièmblances. Tout le monde conçoit que
¡^entends parler de la fcience des experts en matière
de vérification d’écriture.
Première clajfe des témoins.
D e tous les tém oins o u ïs dans l ’in fo rm a tio n , il y tes fleurs
i
• r*
i
n
r p «it
i
i
1 t -1
Tailhardat de la
en a deux, qui lont les heurs 1 aiihardat de la rayette Fayette &R am
& Rance, qui ont dépofé avoir ouï-dire quil avoitce>
été fubjütué à une des feuilles de la minute, une autre
feuille s dans laquelle fe trouvoit inférée une claufe
nouvelle qui étendoit la donation aux biens à venir ^
mais quils ne favent par qui cette fubjlitution a été
fa ite.
S’arrêter à contredire ces dépolirions, ne fèroit-ce
point s’occuper à combattre l'évidence ? Il y a une
feuille fùbftituée dans la minute de la donation! qui'
en doute? On a entendu parler de cette fubftitution I
^u’y a -t-il d’étonnant, puifque le fait eil vrai? Mais,
G
�C i? ) ■
quel eft l’auteur de ce faux qui dans ce principe n’en
étoit pas un? On vient d’obferver que la fauffe feuille,,
ou le faux, s’eft trouvé entre les mains de G.iraud ;
ainfi il eft très-aifé de connoître le fauifaire.
Seconde clajfe des témoins.
L a preuve conjeéhiralej ou la preuve par indices,'
qui eft la troifième que j’ai annoncée, eft celle qui
réfulte de la dépofition des experts qui ont été ouïs
dans l’informaticn. Peut-être ai-je à me reprocher
de n’avoir pas obfervé à la confrontation, que ces
experts, connus pour muficiens gagés, qui en font
leur état, n’ont jamais fu écrire que machinalement,
Si fans principes; mais, outre que ce fait eft notoire,:
l’opinion de ces muficiens m’eft d’ailleurs très-indiffé
rente, puifqu’elle ne peut former ni preuve littérale,
ni preuve teftimoniale, Si que ce n’eft que fur l’une
ou l ’autre de ces preuves, que la juftice doit fe déci
der ou à condamner, ou à abfoudre.
Ces experts ont dépofé, fur la repréfentation qui
leur a été faite de la minute de ma donation Si de
la feuille fubftituée, q u ’ i l s e s t i m e n t que les deux
feuilles qui compofent la minute de la donation, ont
été écrites d’un même contexte > avec la même plume }
de la même main & de la même encre, & que la feuille
féparée a aujfi été écrite de là même main, mais d’une
encre différente de celle du corps de la minute; que cer
taines lignes font rejferrées & d’autres efpacées, &dJun
plus gros caraâère ; que le caractère des deux feuilles,qui
�Cs )
_ '
tompofent la minute efl plus uni que celui de la feuilîè
féparée 3 d’où Barbon ( feul ) a eu le courage de
conclure que la feuille féparée a été écrite dans ufi
temps différent de ma donation.
Au récolement, ces experts ont ajouté que la
marge de la feuille féparée nétoit pas égale à celle
des feuilles de la minute3 & q iiils n ont pu juger fi
Vempreinte de ces deux feuilles étoit la même que
celle qui fe trouve dans la feuille féparée qui efl d’un
papier plus fin ; ce qui 3 fuivant eux3 peut provenir
de la pâte, ou de la main de Vouvrier.
De quel poids peuvent être aux yeux de la juilicë
les déportions de ces deux experts? y a-t-il quelqu’un
qui ignore que leur jugement eíl conjetural, incer
tain, & qu'il peut fervir de paife-port au menfonge,
aufil bien qu’à la vérité?
La preuve conjecturale & préfomptive eft inadmiffible en matière criminelle ; elle n’apprend que
des circonilances defquelles on peut fe fervir par
raifonnement, pour découvrir la vérité; mais cela ne
conduit pas à la découverte de la vérité, puifqu’ii
ne s’agit que de conjecturer & d’argumenter pair
conféquences qui ne peuvent déterminer une jufte
concluiion. Quand il s’agit d’accufation capitale, où
il échoit peine afflictive ou infamante, les loix exi
gen t nécelfairement une fcience parfaite, une certi
tude phyfique, de la part des témoins qui dépofeni.
.C’eit pour ve motif qu’on diftingue- deux fortes d§
'i
�fciences & deux fortes de convictions, favoîr ; la
fcience qui produit une certitude morale, & celle qui
produit une certitude phyfique.
La fcience qui produit une certitude morale, eft
celle qui dépend du raifonnement, 8c telle eft la
icience qui n’eft fondée que fur des indices, des pré
emptions & des enchaînemens de conféquences.
La fcience qui produit une certitude phyfique,
eft celle qui dépend immédiatement des fens, telle
qu’eft celle des témoins qui ont vu commettre le
crime. Ces deux différentes efoèces de fciencesforment' les deux différentes efpèces de convictions ;
conviction morale & conviction phyfique : or, la
Icience 8c la conviction morales, quoique capables
de fonder un jugement en matière civile, ne fuffifent
jamais en matière criminelle, contre un accufé, parce
que dans de femblables affaires, les juges doivent
chercher & délirer des preuves toujours claires ,
pour n’être pas furpris ; elles fufHfent en matière
civile, parce qu’il n’y eft jamais queftion que du
droit des parties, Si que les queilions du droit font
de la dépendance de la morale ; mais elfes ne font
pas fufiifantes dans une queftion capitale, par la
raifon qu’il ne s’agit dans cette queftion, que d\i
.fait, & que les queilions de fait ne font point de la
juriidiction de la morale, mais feulement de la pur.e
connoiifance de la phyfique, qui confifte dans l’évi-'
deuce, dans l’expérience 8c les preuves.
JL
�053 )
,Qui oferok direrque Morgeat & Barbon ont une
certitude phyfique du faux dont- on m’accufe? mais
ont-ils été préfens à la paifation de ma donation ?
ont-ils vu écrire la feuille fubftituée ? ont-ils une
connoilTance parfaite , per fenfum corporalem , que
cette feuille a été écrite après ma donation ? Il faudroit être auili impofteur que Giraud 8l Sallcneuve,
pour foutenir 'des aifertions fi évidemment fauifes.
D ’ailleurs, lorlqu’on eft dans l’intention de com
mettre un faux, ne prend-on pas toutes les précau
tions pour empêcher qu’il ne foit découvert? Le fauffaire eft ordinairement très-adroit; il fe cache; il.fe
déguife, & il imite fi parfaitement les écritures, qu’il
n’eft peut-être perfonne à qui il ne foit arrivé d’avoir
été trompé par la reilèmblance des, écritures , &
quelquefois même par la iienne propre.
Qu’on fuppofe donc, comme l’on dit ces experts,
que la feuille féparée. eft écrite d’une encre différente
de celle de la minute; que les lignes font'tantôt plus
reiferrées, tantôt plus éloignées ; que le cara<5tère eft
plus uni dans la minute, que dans la feuille féparée ;
que les marges des trois feuilles .ne font pas les
mêmes , toutes ces préfomptions, ces conjeéhires
c o n d u i r o n t - elles à une certitude phyiique, que la
feuille féparée, a été écrite pofté.rieurement à ma dona
tion ; que c’eft. moi qui ai [ait écrire cette fauiTe
feuille; que je fuis l’auteur du faux, & que je. l’ai
commis pour tromper le prince & fon fermier ! Je
>'
�rie me periiiaderai jamais qu’ily a it un feul Homme,
inftruit' ou non, qui puiife foutenir l'affirmative de"
cette aifertion; il fera plutôt porté à croire que ces’
irrégularités dans la feuille ieparée, font une preuve^
inconteftable, qu’elle a été écrite dans un temps où’
l’on ne pou voit préfumer qu’il pût s’élever des con-'
feftations à cet égard.
Au furplus, l’expérience n’apprend-elle pas que.
la main eft fu jette à des variations’ infinies ? Ceux qui
ont i’ufage d’écrire, n’ont-ils jamais apperçu dans
leurs écritures des. variétés frappantes qui provenoient, foit du changement de l’encre, foit de la
pofition du corps, ou de la main, foit de la'diipofition des idées ? N ’arrive-t-il pas tous les jours à un
clerc qui écrit fous la diétée*, tantôt de reiferrer les’
mots & les lignes, tantôt de les écarter? Cette diffé-1
fence peut provenir de l’attention & de l’application
du copifte, ou de fa négligence, & fouvent de la
nonchalance ou de la précipitation avec laquelle on'
lui di<5te.
Cetté reffemblance & cette difparité que ces experts
prétendent avoir remarquées entré l’écriture dé la!
minute & celle de la feuille féparée, peuvent donc
être l’éffet de différentes caufes; mars fi cela eft ainfi,
y eût-il jamais un figne plus équivoque, un indice
plus incertain, une conjecture plus1 trompeüfe ?
Pour fonder une preuve fur des drgiïmens tirés des
jpi'éfomptions,“ il"fait qu’il n’y aitr rien~d’éqüivo^ùé
�( s i)
$ans‘Jes‘cîrconftances du fait,
qu'il.n'ait pn arriver
dune autre manière qu’on fe l’eft periuadé. Pourquoi
*lonç fuppofer ici un faux, tandis qu’il eft évident
qu’il n’y en a aucun, au moins de ma part? pourquoi
fuppofpr que j ’e n fuis l’auteur, tandis que je n’avois
aucun intérêt à le commettre?
Des experts qui dépofent iur un fait qui ne s’efl
point pafle fous leurs yeux, né peuvent en avoir une
connoiiTance parfaite ; auifi les plus hardis ( tel que
Barbon ) n’ofent-ils avancer autre chôfe, finon qu’ ils
croient 3 quils préfument3 qu ïls ejliment que le fa it
s*ejl pajfé ainfi. Mais, fi ces experts ne favent pas
positivement le fait fur lequel ils dépofent, comment
un juge pourroit-il fonder fur leurs dépofitions une
fcience 8c iine connoiiTance qu’ils conviennent n’a
voir pas eux-mêmes? Y a-t-il un homme de bon fens',
qui fît le moindre cas d’un témoin qui, au lieu de
témoigner qu’il fait le fàit,;dont il dépofe, avec cer
titude, diroit fimplement q uï l a opinion que cela eflï
Qui peut s’aiîurer, a dit un favant, que la penfée Sc
l’opinion d’autrui ne foient pas un menfonge
La dépoiition des experts ne peut produire une
preuve phyfique; elle ne forme pas même un indice
indubitable; il n’y a rien de plus incertain que leur
opinion ; rien de plus trompeur que leurs conjec-*
tures, 8c de là réfuite la conféquence évidente, inconteilable, qu’il, n’exiûe au pro.cès aucune des . trois
�preuves déiîrées par i a l o i , pour forcer la juflice a
punir un accufé (¿z).
,
• Mais ce n’eft pas fur le'feu l défaut de preuves
qu’eft fondée ma juftificatioîï; c’eft principalement
fur l’invraifembiance du faux ^qué 1’pri m’impute ; &
quoique j’aie déjà démontré que ce faux ne pouvoit
être que l’ouvrage de Giraud, je ne dois pas omettre,
pour achever de le .confondre & de le convaincre
d’impoftures & de fauiletés tout-à-la-fois , de dire
deux mots fur la manière dont il a raconté qu’il étoit
parvenu à retirer d’entre mes mains la feuille de la
minute qu’il a fuppofé que j’avois fupprimée.
Au dire de cet impoiteur, il vint chez moi avant
quatre heures du matin; il me iurprit dans iefommeil,
me porta le piftolet fur la gorge ; qu’intimidé j’allai
dans mon étude, où vinrent aujfi-tôt les fieurs de
Segon^at & R ance; qu’ils y relièrent un iniiant, fortirent enfuite pour aller à la mejj'e ; qu alors je lui
remis la feuille fupprimée ; qu’il fortit de chez moi,
§C qu’ayant apperçu Salleneuve dans la ru e, il lui
cria de loin : j e l a p o r t e , j e l a p o r t e .
Quel front ne faut-il pas avoir pour ofer entre( a ) Comme dans le récit des faits j’ai prouvé que la fentence
"obtenue contre moi par le fieur de S egon zat, avoit été follicitce par
Giraud qui avoit intérêt à faire déclarer ma donation nulle pour
obliger Bouttin, je crois devoir m’interdire d’autres réflexions quant
aux reproches qu’on m’a faits, relativement à cette fentence..
. .. j
prendre
�s’attendre dans une pièce qui n’eft qu’un amas monf.
trueux de fauiTetés, de fuppoiitions, & un tiiTu d’intri
gues déteilables ?
Eft-il d’abord à préfumer que il j'euife été faiiî de
la prétendue feuille fupprimée, je l’euiTe remifc à
Giraud, fans exiger qu’il me remît dans le même temps
la feuille iubftituée ? perfonne ne fe le periuadera.
2 °. A quelle époque & à quelle heure s’eft paiTée
la fcène dont parle Giraud? cela eil elfentiel àfavoir,
& il a eu la complaifance de m’en inftruire.
D ’après les aveux de ce notaire & ceux de Salleneuve , je n’ai gardé la minute que trois ou quatre
mois : auiîi-tôt que je l’eus remife à Giraud, il s’apperçut de la ilippreiîion & fubftitution des feuilles ,
ce qui l ’obligea à venir chez moi, pour me forcer à
lui remettre la feuille fupprimée : la remife de cette
feuille fe réfère donc au mois de janvier, ou de février
I 777> puifqu’il y avoit alors quatre mois que ma
donation ( qui eft du ^feptèm bre 1 7 7 6 ) , avoit été
faite. Or, qui pourra fe perfuader que dans la rigueur
de cette faifon, où le jour ne commence à paroître
qu’à fept heures, Giraud s’eil introduit chez m oi,
avant quatre heures du matin? queleiieur de Segonzat,
& le fieur Rance qui demeure à plus de trois lieues
deMontaigut, y vinrent auifidans le même moment?
que Giraud étant fôrti de mon étude, apperçufSalle^
H
�w
neuve dans la rue ( c’étoit apparemment à la faveur
de la clarté de la lune ) , Sc qu’il lui cria de lo in ,
je la porte , je la portel Que d’invraifemblances à-lafois ; mais il eit un principe qui d it, quod non ejl
veriffimile, ejl falfîtatis imago.
Les Jieurs de Segon^at & Rance fortirent de mon
étude pour aller à la mejfe ! en vous expliquant ainii;
Giraud, vous n’avez certainement pas lait attention
que tous vos concitoyens vous donneront un démenti
iur ce fait, en vous rappelant que les premières mefles
ne fe célèbrent point auiïi à bonne heure dans les
églifes de Montaigut. Achevons de confondre l’impoiture de Giraud, par une dernière réflexion.
A la confrontation, j’ai rappelé ces faits à Giraud,
Sc lui ai de plus demandé qui lui avoit prêté le pis
tolet chargé de trois chevrotines, qui lui avoit ouvert
la porte de ma maifon ( je n’avois point alors de
domeftique, ¿k Giraud m’avoit trouvé endormi, ainfi
que ma iamille ) , Sc s’il y avoit de la lumière dans
mon étude. Que m’a répondu ce miférable? quil ne
javoit plus oà il en étoit ; il avoit oublié fa leçon.
Ah ! Giraud, calomniateur infâme, vous ne favez
plus où vous en êtes? la force de la vérité vous acca
ble ; la confcience vous reproche, les remords vous
déchirent :.hé bien ! je vais vous apprendre où vous
en êtes, ou du moins, où vous devriez être : c’eit
à ma place.
Tant d’iniquités > tant d’impoilures, tant de for-
�c 59 y
faits pourroient-ils refter impunis ? quelles couleurs
ne faudroit-il pas emprunter , pour en peindre toute
la noirceur , pour exciter la jufte indignation des
magiftrats & la rigeur des loix /
N ’eft-cepas un crime, en effet, Sc même un crime
énorme , que de charger un officier public d’une
fauife accufation ? N’eft-cepas un crime, &un crime
exécrable , que de m’attaquer dans mon honneur,
dans ma liberté, pour me faire perdre la confiance du
public .? N ’ePc-ce pas un crime , que de m’accufer
^ d’un abus de confiance , de iuppofer que j’ai été
capable de fouftraire une feuille d’un a<5te authen
tique , & d’en fubflituer une autre à la place .?
Perfides calomniateurs, votre complot eit heureufement découvert; vos propos , vos démarches , vos
contradictions , vos aveux même ont décelé votre
honte ôc votre turpitude. Il eft prouvé au procès ,
que ç’eft Giraud qui a foliicité la fentence que le
iieur de Segonzat avoit obtenue contre moi ; que
pour parvenir à faire annuller ma donation, & faire
enfuitepaiferlesbiens du iieur de Segonzat à Bouttin,
Giraud avoit confervé la feuille fafale qui me retient
dans les liens. Il eft prouvé que Giraud eft feul l’au
teur du faux que l’on m’impute , puifque l’inftrument de ce faux s’eft trouvé entre fes mains, &
qu'il en a fait ufage , tantôt pour faire annuller ma
donation, tantôt pour me perdre dans l’efprit de
mes juges ôc du public ; il eft prouvé enfin par l’in-
I
�•sv.
(60)
'
vraifemblance des faits de l’accufation, par la faufleté
des déportions de mes délateurs, par l’évidence des
contradiélions , dans lefquelles ils font tombés , par
les pièces juftificatives que j’ai produites , & par les
dépositions des autres témoins de l’information, que
dans cette affaire, il n’y a d’autres criminels que mes
perfécuteurs. Y a-t-il de fatisfaétion publique, de
dommages-intérêts qui puiffent réparer le tort qué
des injures & des calomnies il odieuies m’ont caufé £
8z arrêter l’effet du poifon de ces mortelles impos
tures l
J ’obferverai en finiffant, que ce n’efl point par
un efprit de haine & de vengeance, que je me fuis
permis quelques déclamations contre mes délateurs ;
c’ëft la néceflité d’une légitime défenfe qui m’y a
obligé : j’y étois d’ailleurs autorifé par les loix_, puiiqu’en même temps qu’elles défendent l’injure, elles
permettent de la repouifer par les termes, les expreffions & les couleurs les plus vives : Licet enim fanguinern fuurti QU a l i t e r , q u al i t e r redimere ( a
Signé, D E S M A R O U X .
( a ) D it M ornac, fur la loi
confciv. Bart, fur la même loi.
1,
de bon, eor. qui ante fentent. mort, ftbi
�C o p i e du billet qui me fu t envoyé par le f ieur
Tailhardat de la Fayette contrôleur, le 9 octobre
1 776.
J
»
»
»
»
e
prie M. Defmaroux de vouloir fe donner la
peine de paffer au bureau, pour me payer le contrôle & infinuation de la donation qui lui a été
faite par M. de Segonzat, que j ' ai remife au notaire..........il obligera fon ferviteur.
Signé T A I L H A R D A T
DE L A F A Y E T T E .
Cet écrit eft produit au procès.
Monfieur C H A B R O L
préfident} lieutenant
général criminel rapporteur.
M e G A S C H O N , avocat.
D e f f a y e s , p ro cu reu r.
Signé, D E S M A R O U X .
A R I O M , chez M a r t i n D É G O U T T E , Imprimeur
Libraire ; près la Fontaine des Lignes, 1784,
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Desmaroux, Joseph. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Desmaroux
Subject
The topic of the resource
faux
notaires
opinion publique
Duc d'Orléans
donations
droits de lods
droits féodaux
abus de confiance
prison
coutume du Bourbonnais
témoins
faux témoignages
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire justificatif, pour maître Joseph Desmaroux, notaire royal et procureur au bailliage royal de Montaigut en Combrailles, prisonnier dans les prisons de la ville de Riom, accusé. Contre monsieur le procureur du Roi de la sénéchaussé d'Auvergne et siège présidial de la ville de Riom, accusateur.
Copie de la pièce d'enregistrement par le contrôleur Tailhardat de la Fayette.
Table Godemel : Faux : dans un acte, reçu le 24 septembre 1776, la feuille du milieu avait été soustraite et remplacée par une autre contenant des altérations essentielles. quel est l’auteur de la substitution ? est-ce celui au profit duquel l’acte avait été consenti, ou le notaire recevant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1776-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
61 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0934
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0933
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53095/BCU_Factums_G0934.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut-en-Combrailles (63233)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
coutume du Bourbonnais
donations
droits de lods
droits féodaux
Duc d'Orléans
Faux
faux témoignages
notaires
opinion publique
prison
témoins
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53952/BCU_Factums_B0113.pdf
66ad76188d33020a77dd44593a220e16
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
JUSTIFICATIF
E
,
P O U R
J
«r
Mc D E S M A R O U X ,
ACCUSÉ.
C O N T R E
M. LE PROCUREUR DU RO I
A C C U S A T EUR.
�CRIMINEL.
M
É
M
O
I
R
E
JUSTIFICATIF,
P O U R Me J o s e p h D e s m a r o u x , Notaire Royal &
Procureur au Bailliage Royal de Montaigut en
Combrailles, prifonnier dans les prifons de la V ille
de Riom, accufé.
C O N T R E Monfieur le Procureur du R oi de la
Sénéchauffée d’Auvergne & Siège Préfidial de la
Ville de Riom } accufateur.
infortunée de la vengeance & de la calomieje
n gémis depuis deux mois dans l’horreur des
prifons ; j'éprouve tout ce qui eft deftiné aux fcélérats du premier ordre; cependant, tout autre que
m o i eft coupable du crime qu’on m’impute. Fut-il
A
Vci t i m e
r
~
�*jamais d’accufé plus cligne d’être .plaint du public 8c
' protégé par -la juftice '1 Diipeniàteurs de ce tréfor
«îacré, magiilrats intègres, vous devez l’ouvrir à tous
ceux qui le demandent ; s'il pouvoit être fermé pour
un, il pourroit l’être pour tous : le dernier des citoyens
' y a le même droit que les puiiTances du royaume ;
mais, .s’il pouvoit y avoir quelque préférence iiir la
diftribution d’un bien il précieux, la raifon, la nature
Sc l’humanité ne demanderoient-elles pas qu’elle fût
. en faveur du malheureux qui eilinjuftement opprimé?
Père de famille, domicilié, jouiiTant de tous les
droits de l’honnête bourgeoise , j’ai été outragé
dans mon honneur, dans ma perfonne, dans ma
-liberté. Chargé par état de la confiance & du f e c r e t
des familles, j’ai depuis long-temps rempli tous mes
devoirs avec toute l’attention qu’ils exigent : e x p o i e ,
"malgré ces avantages, aux coups d’une trame odieufe,
ourdie par le reifentiment, fomentée par la paillon,
- & foutenue par la cabaletdç-^quelques ennemis pervers,
, je fuis confondu avec les malfaiéïeurs, & réduit a
paroître aux yeux de la juilice en criminel.
Mais, qui peut fe ‘ défendre de la calomnie, iur"
t o u t quand elle eil armée du bouclier impénétrable
-¿le ia tyrannie, le fecret! Combien de gens h o n n ê te s
‘ont été à la veille de fuccomber fous le poids de
-raceufation la plus injufte ? La vertu la plus p ^
'n’eft-ellepas tous les jours en butte à l’envie & a ^
�TlaiTuré par mon innocence, je pourrois laifFer le
foin de ma défenfe à la réputation que je me fuis
acquife en vingt-deux ans d’exercice dû
charges
& des différents emplois de confiance dont j ai ete
honoré par plufieurs perfonnes de considération ; je
pourrois me difpenfer de me donner en fpeétacle au.
public, par un mémoire, û la juilice humaine, mesu
rant fes coups fur ceux de la juftice divine, pouvoic
çonnoître fur le front des hommes la perverfité de
leur cœur, & diitinguer le coupable de l’innocent;
fi elle pou voit dire en toute atfurance : Defcendam,
.. 6’ videbo utràm clamorem qui venu ad me opere compleverim an non efl Itd ut fciam ( a ') .
Ma caufe intérelle effentiellement la fociété ; c’eit
celle de tous les notaires; c’eft celle de tous les
citoyens, parce qu’il n’y a perfonne qui puiife fe
flatter de n’avoir aucun ennemi, & d’être à l’abri de
la calomnie. Des circonitances il fingulières & fi inté^
reiTantes pour un homme public, demandent qu'il
faife paroître de la fenfibilité; elles veulent q u i1
repouife l’outrage; elles lui mettent les armes à la
main pour ia défenfe. Ce feroit donc mériter de ma
part toutes les injures qui m’ont été faites, que de
n en pas faire çonnoître l’injuftice aux refpe&ables
luagiftrats qui doivent me juger, & au public qui
!u a allez honoré de fon eitime, pour ne pas me fair^
Vn crime du filence que je voudrois mimpofer.
( tt) Genef, ch'ap. 1 8 , verf. 2 1 .
A
2
�L e fieur de Segonzat, feigneur de Champigoux,
'fit en ma faveur, par un feul & même aéte du 24
feptembre 1 7 j 6 } deux donations : Tune, à titre oné
reux, & l’autre abfoiument gratuite : l’a<5le fut reçu
par Giraud, notaire royal à Montaigut; il fut paifé
dans l’étude du notaire, & écrit de la main de Lougnon
qui lui ièrvoit de clerc pendant les vacances qu’il
paiîoit à Montaigut, chez le iieur Tabardin, notre
beau - frère.
Il eft dit dans la première partie de cette donation,
que le ijfeur de Segonzat me donne, par donation
entre-vifs, le bien & fief de Champigoux, fous la
réferve de l’ufufruit & jouillancede tous les bâtimens,
jardins y attenans, de deux chenevières..........le iieur
de Segonzat fe réferve auifi la dire&e fur les objets
donnés, & y impofe la redevance d’un denier de
cens portant profit. La donation eft de plus faite, à
la charge par moi de payer annuellement au iieur de
Segonzat une penfion viagère de 800 liv. d’acquitter
fes dettes, juiqu’à concurrence de la fomme de
lo a o o liv. ou environ, & de le tenir quitte de la
iorome, de ^ 3 liv. qu’il me devoit perionnellement.
La féconde claufe de la donation porte que « Ie
» fieur de Segonzat déiirant me témoigner la conti» nuation de ion amitié & de fon affe&ion „ . - •
a
* donné & me donne gratuitement, & aux miens*
�» par donation entre-vifs perpétuelle & irrévocable9
» le domaine appelé des Rondiers, fitué audit lieu
« de Champigoux, coutume deBourbonnois, & tous
r> les autres héritages en roture, qui lui appartenoient,
y> fitués dans les paroiiTes de Mourmière & St. Eloy ,
» avec quatre boeufs.......... en quoi que le domaine
y> des Rondiers & héritages en roture confiftent &
» puiiTentconfifter, fans en rien retenir ni réfer ver (a ).
Je dois obferver ici ( & c ’eft le feul crime qu’on peut
m'imputer, en fuppofant que je doive être garant des
laits d’autrui ) qu’à la fuite de cette fécondé partie
de la donation, Giraud qui la dtéloit, fit, par igno
rance, ou plutôt dans le deifein de trahir mes intérêts,
inférer la clauie, que le fieur de Segonzat me donnoit
de plus t o u s s e s b i e n s é c h u s e t a é c h o i r , p u é s e n s
e t a v e n i r (/>); ce qui rendoit la donation radicale
ment nulle, d’après les difpofitions textuelles de l’or
donnance de 1 7 3 1 .
J ’étois dans l’étude de Giraud, pendant q u il étoit
occupé à compofer cet a&e ; mais je faifois alors la
converfation à l’écart avec le fieur de Segonzat, & ne
donnois aucune attention à ce que Giraud di&oit,
n ayant*garde de fufpeéter fes deileins, moins encore
■(û) Nota. C e ft pour ce dernier objet de la donation feulement)
le fermier de M. le duc d’Orléans m’a demandé des droits de lods*
L a minute de la donation étoit compofee de deux feuilles« fit
claufe fe trouvoit écrite dans là feuille du milieu.
�( 6)
de me défier de Ton expérience & de fit capacité qui
m’étoient connues : d’ailleurs, on dévoie mç faire
leéhire de l ’a ile ; on me l’a fie en efiet, & alors
remarquai la claufe vicieufe : j’en iis auiïi-tôt l’obfer-.
vation, & demandai que la minute fût changée, ou
la claufe fupprimée, attendu que je n’étois pas dans
l ’intention de fournir aux frais d’une donation qui ne
pouvoit m’être utile. Sur ma repréfentation, Giraud *
ayant remontré qu’il fuffifoit de changer la feuille du
milieu, fur laquelle étoit écrite la claufe vicieufe, &
de fubflituer une autre feuille, dans laquelle on ne
comprendroit point les biens échus & à échoirs } pré' fens & à venir, le iieur de Segonzat & moi nous ren
dîmes à fon avis. Dans le même moment, la feuille
étant tranferite par Lougnon, la claufe fupprimée Si
l’aéte figné, je me retirai avec le iieur de Segonzat,
laiifant iiir la table de Giraud, & la minute de la
donation, & malheureufement la feuille fupprinuç
qu’on auroit dû déchirer dans l’inftant, Mais quel eft
l’homme allez prévoyant qui puiife fe flatter de n’avoir
jamais eu d’imprudence à fe reprocher?
Enfans de colère & du menfonge, vous qui êtes
plus confommés en malice que ces fcélérats même,
dont les crimes ont enrichi Unitaire au déshonneur
de la nation, mon imprudence va fournir à votre
imagination une vaite carrière, pour exercer vos
talens. Mais tous vos projets odieux, vos impoftur^,
vos calomnies, viendront, fe brifer à l’écueil de lip*
vraifemblance & des contradi&ions.
�(7 )
,
.
..
— -Les dates font dans cette affairé, de la plus 'grande
‘
importance.
'.......
c La donation faite* en ma faveur par le fieur de
^Segonzat, le 2.4 feptembre 17 7 6 y lut contrôlée &
¿nfinuée le 2,6 du même mois. Cette vérité ne peut
iparoitre équivoque , puifquelle eft confignée dans
des aéles .publics, dans un certificat du contrôleur,
& dans fa propre dépofition.
^
Devois-je m’attendre qu’une libéralité de cette
-nature alloit devenir pour moi le principe de la dei‘tru6lion de ma fortune! Pouvois-^je prévoir que des
-héritiers qui avaient refüfé d’accepter ce don, âux
Tnemes conditions que moi, fe ligueroieilt un jour avec
des ennemis jaloux & un fermier avide, pour me perdre
-dans l’efprit d’un confeil éclairé, du confeil d’un prince,
à tous égards refpedjjable, M. le duc d’Orléans?
La ligue formée , je fus atteint de fes coups-meur
triers, peu de temps après la donation. Je vis éclôrfe
deux procès contre moi, & s’en former un troiiîème
-qui attend fon exiftence du fort de la plainte q u oa
a fait-rendre contre moi.
I
‘ Giraud, quel nom viens-je de prononcer î ouï,
Giraud* ce même notaire qui a di&é la donation faitfe
^n ina faveur, par le fieür de Segonzat, cé notaire
jjui avoit eu la confiance des deux parties^ ie montre
^'la^tête de la cabale; il eft le •premieri'qui c'hei'çhe
faire dépouiller ’detf biéiis iqüi venbièiït de m êtrfe
’^ rniés en fa préfencè. Que ne^d'oît - on pas -crâindïb
^ ieifentiment & d’une baiTe jaloufieS
�(8)
Depuis la donation, ayant été chargé, en ma Qua
lité de procureur, de la défenfe de Jean Rouzîiie',
auquel Giraud avoit iufcité le procès le plus>injufte,
pour la vente de la coupe dun bois taillis je deviens
un objet odieux pour Giraud. Il faut me venger,
dit-il, il faut me venger, quand je devrois moi-même
être enveloppé dans ma propre vengeance.
Des raifons d’intérêt l’animèrent encore & lui
fuggérèrent le plan qu’il a fuivi, & que, fans doute,
il méditoit, en faifant ma donation, puifqu’il a confervé foigneufement cette feuille fatale que je fis
iiipprimer. C ’eft cette pièce dangereufe qui lui four
nit le moyen de me nuire. On voit tout d’un coup
l ’ufage qu’il en pou voit faire, & il le fit d’autant plus
avidement, que le fuccès & l ’impunité paroifToient
infaillibles.
Il voit le fieur de Segonzat, l’engage à fe pourvoir
contre fa donation, & lui fait part des reiTources qu’il
lui a ménagées pour réuifir à la faire déclarer nulle.
Ceux qui ont connu le fieur de Segonzat, ne feront
point étonnés que Giraud ait pu le faire varier.
On m’aiTigne donc le 1 7 février 17 7 7 en jufàce
de Montaigut, en nullité de cette donation faite cinq
mois avant. Le moyen de nullité eft tiré de ce que
la donation comprend les biens à venir.
Quel abus, Giraud, faites-vous de votre miniftère?
Eft-ce la haine feule qui vous confeille de vous com
porter ainfi ! Non : une efpérance chimérique vous
�t 9)
fait ,encore agir., Vous vous étiez periuade què ladonation faite en ma faveur étant une fois annullee*
le fieur de Segonzat difpoferoit des mêmes biens en,
faveur de Bouttin, beau-frère de votre gendre. C ’eft
le langage que vous avez tenu, & la convention que
vous aviez faite avec le fieur de Segonzat : la preuve
en eft écrite au procès.
Je" négligeai de comparoître fur la demande du
fieur de Segonzat, ou plutôt je ne favois quel parti
prendre; car, comment éviter la nullité, s’il falloit
que j’adoptaife le faux a<5te, & comment entrepren-v
dre de pourfuivre mon confrère en aèlion de faux!
comment même prouver la fauifeté?
Cependant le iieur de Segonzat prit contre moi.
une fentence par défaut, le 4 du mois de mars, qui
déclara la donation nulle.
L ’impofture, fière de mon filence & de fes pre
miers fuccès, alla croiifant de jour en jour. Giràud
s’étant retiré pour un moment derrière le rideau, je.
vis paroître fur la fcène Salleneuve, fermier de M.
le duc d’Orléans, pour me fufciter un nouveau pro
cès, fous le nom de ce prince. Ce fermier s’étant
figuré que la donation qui m’avoit été faite par le
fieur de Segonzat, étoit une vente déguifée, me fit
aflîgner, fous le nom du prince, en la juftice de
■Montaigut, le 1 ^ du même mois de mars, pour être
c°ndamné à payer les droits de lods.
1
défenfe fut fimple. Je ne devois pas de droits
�Cio)
rde lods pour une donation gratuite;'& quand j’en
aurois dû, je ceiTois d’y être aiîujetti, fi, par la four
berie de mon notaire, ma donation devoit demeurer
nulle : ce furent les moyens que j’employai ; je dis
d’abord qu’une donation ne donnoit point ouverture,
aux droits feigneuriaux dans la coutume de Bourbonnois ; j’ajoutai fubfidiairement que la donation
fa ite en ma faveur par le fieur de Segon^at} avoit
été déclarée nulle par une fentence du bailliage de
Montaigin 3 d3ouje concluois que M . le duc d 3Orléans
ne pouvoit pas exiger de droits feigneuriaux, jufqu à
ce que la jujiice eût prononcé définitivement jiir cette
demande en nullité de la donation, ou que le fieur de
Segon^at s3en fu t déjijlé.
J ’étois bien loin par ce genre de défenfes, d’ap
prouver la demande en nullité, & j’en difois allez
pour montrer le cas que j’en faifois, ou du m o i n s
pour convaincre que je ne m’en tiendrois certaine
ment pas à la fentence de Montaigut.
. Comment donc la malignité peut-elle me faire ufl
crime de m’être ainii défendu l Etoit-ce m ’a p p r o p r i e r
le faux de Giraud, & vouloir abufer de la nullitf
apparente, que d’en appeler, au contraire, à lajuft*te, & d’annoncer que je ne regardois pas comme
définitif le jugement de Montaigut? d’un autre côté,
ii ce faux devoir produire fon effet, fi je ne p o u v o i r
parvenir à écarter cette prétendue & fauiTe nullite>
oit-il jufte que je payaife les lods d’un bien ep*
�< « ')
n’étoit pas à mol! c’étoient les termes ou ) en etok
lorfque je me défendis, & il y a à ce fujet deux circonftances bien remarquables : lu n e, qu’à l’époque
des défenfes que je fis fignifier le i< juillet 17 7 7 t
contre la demande de M. le duc d Orléans , il eft
inconteftable que la fentence qui déclaroic nulle la
donation que m’avoit fait le fieur de Segonzat, fubfiftoit dans toute fa force, puifque je n’attaquai cette
fentence par la voie de l’oppofition qu’au mois d’aouc
fuivant.
L ’autre, que Giraud, de concert avec Salleneuve,
pour me perdre, ayant eu l’infidélité de lui délivrer
une expédition de la donation dans laquelle il avoit
inféré la claufe des biens échus & à échoir préfens &
à venir ; & Salleneuve m’ayant fait fignifier cette
donation dans cette forme, j’avois tout lieu de crain
dre que la perfidie de Giraud ne l’eût encore porté à
faire contrôler & infinuer cette donation dans la même
forme. Il n’y a rien à efpérer d’un ennemi, & tout eft
à craindre de fa part.
« Pour terminer mes doutes & fixer mes incerti
tudes, j allai confulter les regiftres des infinuations,
Sc me fis donner par le greffier une expédition de la
donation. Etant alors bien aifuré de fa validité, je
formai oppofition à la fentence qui avoit été iurpriie
contre moi, de la part du-fieur de Segonzat, & depuis
'1 n a plus été queftion, ni en la juftice de Montaigut,
1X1en ta cour de parlement, où l’affaire fut portée par
,
�'(,1 2
)
"appel, de la fentence obtenue parle iîeur de Segonzat,
qui déclaroic la donation riulle.» Giraud avoit en ion
pouvoir, & la feuille fuppriinée, & celle qui fut iiibftituée, au moment de l’aéte ; & cet ennemi juré fe
faifoit un jeu de délivrer des expéditions, tantôt dans
une forme & tantôt dans l’autre : tel eft l’art dange
reux qu’une intrigue adroite fait employer pour fatisfaire Tanimofité, Sc compromettre l’innocence.
Inftruit du contenu en l’expédition que javois
retirée du greffe, le fieur de Segonzat ne put fe diffimuler que la donation étoit valable, & que Giraud
l’avoit induit en erreur, en abufant de fa crédulité-;
il s’empreifa à m’en faire part & à fe réconcilier avec
m o i l a lettre qu’il m’écrivit à ce fujet le 10 août
1 7 7 7 , eil trop eifentielle à ma juilification, pour
que je puille me difpenfer de la tranfcrire ici dans fon
entier.
!
« Moniîeur, M. Bidon, mon procureur, m’a die
» que vous avez formé oppolltion à la fentence ( du
4 mars 17 7 7 , qui déclaroit la donation nulle, comme
contenant la claufe des biens échus & à échoir, ôcc. ) j
» je vous prie de ne point la pourfuivre : M. G i r a u d ,
» quoique votre ami, m’avoit confeillé cette demande,
pour m'engager à faire une nouvelle donation a
» B outtin j* il m avoit dit q u il s*e'toit refervé, lors de
y> la donation , DE quoi à me faire réujftr : je fuis
,» trop:content de vous, pour me laiifer,gouverner
y) à l’avenir par'de.mauvais confeils; laites,laire w
»
�( 13 )
v» Coupe * je vais la manger chez vous, & fuis votre
r> ferviteur, figné 3 d e S e g o n z a t r>.
. Il n’y a rien dans cette lettre qui ne foit remar
quable. Chaque phrafe, chaque ligne, chaque mot
découvre la perfidie de Giraud & la noirceur de fe’s
intentions : il a confeillé la demande en nullité ; il a
confervé d e q u o i à la taire réuilir ; il a déterminé le
fieur de Segonzat à difpofer en faveur de Bouttin,
des biens qui m’avoient été donnés. Quelles preuves
plus fenfibles pourroit-on exiger pour diitinguer le
coupable de l’innocent? Giraud a confervé, lors de
la donation, de quoi faire réuifir la demande en nullité
çlu fieur de Segonzat. C e d e q u o i enveloppé fous
l’ombre du my itère, peut-il fe réiérer à autre chofe
qu’à la feuille fupprimée, lors de la donation, dans
laquelle on avoit inféré la claufe des biens échus &
à échoir ï Non, Giraud, vous en êtes convenu vousmême, & les témoins ouïs dans l’information l’onc
attefté à la juftice, d’après les aveux que vous leur en
avez faits.
> La perfidie de Giraud étant ainfi découverte ,
la conteftation qu’il m’avoit lait iufciter par le fieur
de Segonzat, fut auifi-tôt terminée.
Le 12 du meme mois d'août, fut jugée r.inilance
d’entre M. le duc d’Orléans & moi. Par la fentence
qui intervint, M. le duc d’Orléans fut débouté de fa
demande en paiement de droits de lods, à la charge
par moi d’affirmer & de faire affirmer par le fieur de
�C 14 >
Segonzat, que la donation du 24 feptetnbre 17 7 6
étoit Jîncère , & quelle 11 œvoit pas été imaginée pouf
frujlrer M . le duc d* Orléans , des droits feigneuriaux.
L e fieur de Segonzat & moi fîmes notre affirma-’
tion le même jour fur la fincérité de cette donation;
& ) avois lieu de croire qu'un aéte auiîi folennel
deiIÎHeroit les yeux à mes perfécuteurs, & me délivreroit de leur tyrannie. Mais, de quel poids peut
être la religion du ferment pour des hommes dont
les principes ne renferment aucune conféquence,
pour des hommes qui ne coniiiltent que'leurs paillons
Sc l’intérêt ?
Giraud & Salleneuve, quoique réunis en fecret,
ne fe font montrés jufqu’à préfent contre moi, que
lu n après l’autre ; mais ils vont marcher de front :
plus animés que jamais, l’un, de ce qu’il n’a plus d’eipérance de me faire enlever les biens du fieur do
Segonzat, pour les faire paiTer entre les mains de
Bouttin, & l’autre, de ce qu’il craint d’être prive
des droits de lods qu’il m’avoit demandés, fous le
nom de M. le duc d’Orléans, forment un nouveau
fyftême pire que le premier : n’ayant pu parvenir *
déchirer leur vi&ime, ils tentent la voie de la faire
égorger. Calomniateurs iniignes, que ne m’eft - ^
pofliBle de peindre ici toute la noirceur de vos dé
marches dans cette circonftance ? Que n’ai-je dans
ce moment une plume de fer, & le talent d’écrirô
en caractères de feu l Mais quel homme peut etrô
�à 'l’abri des traits d’une cabale odieufe & întereffee î
Ces hommes, nés pour le malheur des autres, ces
hommes qui ne connoiflent que l’intrigue & ne res
pirent que la haine; ces hommes que je me félicite
d’avoir pour ennemis, parce que les honnêtes gens
en auront toujours de tels, tant qu’il y aura des mé
dians, parviennent par leurs fubtilités & leurs manœu
vres, à perfuader au confeil du prince, que je fuis
Unfourbe un ïmpojleur, un fau (faire enfin. On invente,
on controuve des faits ; on leur donne les couleurs
les plus vives & les plus éclatantes; on transforme
les avions les plus indifférentes, pour les rendre
douteufes, & toutes ces indignités fe trouvent renfer
mées dans un mémoire qu’on préfente au confeil du
prince, avec une lettre de Giraud qui en attefte la
fincérité.
Ce mémoire, tout infidelle qu’il étoit, a produit
l’effet que mes ennemis s’en étoient promis. Après
un arrêt du n août 17 7 9 , qui infirme la fentence
du juge de Montaigut, & me condamne à payer au
prince ( o u , pour mieux dire, à fon fermier, partie
principale intéreffée ) les droits feigneuriaux pour
line partie des objets que m’avoit donné le fieur de
Segonzat, je me vois, près de cinq ans après, enchaîné
dans les détours d’une procédure criminelle. Les droits
de lods furpayés au fermier du prince , les frais
acquittés, la conteilation terminée, jeiuis tout à coup
lié, garrotté & conduit comme le plus infamô
,
�(t6)
des criminels, par un huiiîier & la maréchaüÎTée 'dànS
les priions de la ville de Riom.
Qu’on fe peigne, s’il eil poifible, l’état affreux où
je dus me trouver, au milieu d’un cortège auflî
effrayant : Quelles révolutions étranges la nature n’é
prouve-t-elle pas dans des momens auiïï critiques \
Un homme d’honneur n’eit feniible alors qu’au regrec
de vivre encore ; il croit voir d’un feul coup d’œ il,
fa jeuneife, fa vie facrifiée, fa fortune envahie, fës
enfans & tous fes parens couverts de honte, plongés
dans l’opprobre, dans l’indigence, & difperfés : des
objets auifi effrayans ne font-ils pas fentir les tortures
les plus rigoureufes, & ne confondent-ils pas toutes
les facultés de l’ame.
Il
feroit inutile de m’étendre davantage fur des
images auifi hideufes : il n’eil perfonne qui ne foin
frappé d’un fpeétacle fi révoltant, & qui, d’après fes
propres réflexions, ne gémiife de voir encore dans la
fociété des monftres aiîez barbares pour immoler au
plus vil intérêt tout ce que leurs concitoyens ont de
plus précieux.
Que la nature du décret n’étonne pas : Giraud &
Salleneuve font témoins dans l’information faite contre
moi, à la requête de M. le procureur du roi.
*
Quelle manœuvre incompréhenfible pour étayer
une plainte ! Giraud & Salleneuve font mes ennemis
jurés, les auteurs de la ligue, mes perfécuteurs, m.es délateurs : ce font eux qui ont préfenté des mémoires
contre
�C 17 )
contre mol au confeil du prince; ce font eux qui ont
envoyé au greffe civil de la cour de parlement 1^
feuille fupprimée de la donation duiieur de Segonzat J
cé font eux qui ont follicité & obtenu l’arrêt du 1 1
août 17 7 9 , & ce font ces mêmes hommes qui ofent
fe préfenter à la juitice pour être témoins contre moi lQu’eft-ce donc qu’une accufation pour laquelle on1
commence à faire violer les règles les plus inviolables
del’ordre judiciaire! Votre religion âété furprife, magiftrats refpedtables : des coupables artificieux, dans la
vue d’éviter ou de diminuer les châtimens dont ils font
menacés, ont eu l’audace de fe plaindre des perfécutions qu’ils ont fufcitées aux autres * & d’imputer
leur propre crime à celui qui auroit dû être leur accufateur; mais quel ne doit pas être monefpoir? Eclairés
du flambeau de la juftice, vous avez déjà percé les
ténèbres où l’on cherchoit à vous égarer ; vous avez
déjà pefé au poids du fanétuaire la valeur des pref- .
tiges quon avoit employés pour vous faire illufion,
puiique Giraud, l’un de mes délateurs, a été décrété
d’ajournement perfonnel. Après le récolement & la
confrontation, n ai-je donc pas lieu d’attendre que,
pénétrés de la délicateife de vos fondions qui fonc
toujours proportionnées à celles de la confcience ,
limpoilure étant entièrement découverte, & l’inno
cence reconnue, les prévaricateurs fubiront le fort:
auquel ils m’avoient deftiné !
Ces premières réflexions çtevroient être fufïifante£
C
�,
c i 8 )
pour me juftifîer d’un crime, donc je n’ai p.u me
former l'idée ; d’un crime rqüi àuroit tourné con-r
tre moi, puiiqu’il m’enlévoic le fruit dune donation,
ou qu’évidemment je n’aürôis pu commetre que de
concert avec Giraud, afin-qu’après m’être fervi de
là fauiîe feuille pour éviter les. lods, je pus'rétablir,
enfuitela véritable, pour conferver ma donation; Si'
cependant il eft démontré que, loin de me iervir de
cette fauiTe feuille, j’ài appris que je proteftbis contre
la demande en nullité; & ce même Giraud qui ièroic
auili coupable que moi ,.ii j’avôis* participé au faux/
Si qui l’eft feul, puifque le faux n’a été pratiqué que;
pour me nuire, eft tout-à-la-fois ¡délateur & témoin
contre moi; ii ne manqueroit plus à la fingulaiité du
lait, que de l’avoir pour juge avec Salleneiiye.
-'»■/Mais, l’iniquité de-mes ennemis les trahit itrop >•
pour que je néglige dç les.<en accabler’, a u t a n t quejé le peux. Connue il s’agit ici d’une inculpation des!
plus graves, qui attaque tout-à-la-fois mon honneur,
mes états Sc ma fortune, & qui dépend de l’événe
ment de i’inilru<*tipn, je (ujs obligé de recourir au*
moyens qui concourent-à ma juftilication.'La juftice
lie làuroit me défaprouver, puifqu’elle eft eiie-meine
intéreilee à ne pas fe méprendre lin [ç choix des coü'
pables. C ’eft par l’examen,des déportions que ttnjufticçi fanglante. 'de; la . calomnie; éclatera. Jl eft donc
indifpenlable que j expdib.lës/différens chefs d^acçufation dont ojr m’inçulpe,,
ppur ejU; démontré
�l’injuilice & la fauiTeté, que je rende compte de a
qualité des preuves répandues dans les information,
récolemens & confrontations, par le moyen deiqueli.es
j’en ai eu cormoiiïanceayant d’ailleurs la mémoire
aiTez heureufe pour retenir, fur-tout ce qui mintereife auili particulièrement. Mais une obfervation doit
précéder cet examen.
On a dû remarquer par le détail des faits, dans
lequel je iliis entré, qu’une donation faite en m'a
faveur par le fieur de Segonzat, eft le principe de mes
malheurs Si la fource de la ligue qui s eit formée
contre moi. J ’ai dit, & je le répète, qu’à la leèlure
de cette donation m’étant apperçu que dans la feuille
du milieu on avoit inféré la claufe des biens échus &
à échoir, préfeus & à venir, qui rendoit la donation
nulle, cette feuille fut fupprimée; qu’il en fut fubftituée une autre à la place, & que tant la minute de
la d o n a t i o n , que la feuille fupprimée, relièrent fur
la table de Giraud, notaire recevant.
Voilà le fait eifentiel, prouvé, confiant qu’il ne
faut jamais perdre de vue, parce que c’eft la clef du
fyftême d’iniquité enfanté contre moi, & la preuve
convaincante de ma juilification.
Or, cette feuille fatale fut entre les mains de mes
ennemis, comme une épée à deux tranchans ; elle
devoit fervir à m’enlever les biens, & à les faire
pafTer à Bouttin, fi le fieur de S e g o n z a t vouloit y
ourier ion conientement. Dans le cas contraire, on,
C2
�/ (2 0 )'
pou voit l’employer a me faire une affaire criminelle,
& à y intérefler le prince, en perfuadant que j’avois
fubftitué cette fauife feuille à la véritable, pour priver
le prince de fes droits de lods.
C ’étoit, fans doute, un plan bien abfurde & bien
contradictoire; car, s’il arrivoit, comme on devoit
le prévoir, & comme il eit arrivé en efiet, que je fis
tous mes efforts pour maintenir ma donation & me
garantir de la fauifeté dont on vouloit me rendre
victime, alors il devenoit évident que ce n’étoit pas
moi qui étois l’auteur de cette fauifeté ; mais heureufement les médians ne prévoient pas toujours tout,
& ils tombent iouvent eux-mêmes dans leurs pro
pres filets.
Je me défendis, en effet, comme je l’ai déjà dit,
contre le fieur de Segonzat, & il fut lui-même trèsprompt à abandonner l’erreur dans laquel on l’avoit
précipité.
*
Alors Giraud ayant manquéfon but, & Salleneuve
craignant toujours que je ne réuiliife à écarter le droit
de lods, par le principe qu’une donation n’y efl pas
fuje.tte, ils en vinrent, de concert, à l’autre partie
de leur fyftême, qui fut de m’accufer auprès du
.prince, d’avoir falfifié la minute de la donation. Ils
adrefsèrent à fon confeil un mémoire où ils expo
sèrent.
« i° . Que le 24 feptembre 17 7 6 , l’aéle de donaj) tion fait en ma faveur par le fieur de Segonzat,,
�( 21 )
>> fut préfenté fur les dix heures du foir, tout rédigé,
y> à Giraud, notaire, qui ne voulut le figner avec les
v parties, que le lendemain 2.5 feptembre.
, » 2 0. Que Faite étant figné me fut remis pour le
» faire contrôler & iniinuer.
» 30. Que dans l’efpace de trois ou quatre m ois,
ï> qu'on a fuppofé que la minute de la donation avoit
y> refté en mon pouvoir, je l’avois fait changer, trois
« ou quatre fois; que les premières minutes avoierit
y> été brûlées ou déchirées, & qu’à chaque change^
» ment, la relation du contrôle & de Tinfinuatiori
» avoit été remife fur la nouvelle minute que je pré» fentois moi-même au contrôleur.
« 40. Que dans le temps que j’étois faiii de la
« minute, j’eus recours à deux ftratagêmes pour me
y> difpenfer de payer les droits de lodsque me deman» doit Salleneuve, fous le nom du prince. Le pre» mier fut de fupprimer dans la minute de la dona» don, la feuille du milieu, & d’en fubilituer une
» autre qui renfermoit la claufe des biens ¿1 venir ,
» ce qui rendoit la donation nulle, & faifoit priver
» le prince des droits feigneuriaux. Le fécond fut de
» confeiller au fieur de Segonzat, de former la de» mande en nullité de la donation qu'il ma voit faite,
» & d’oppofer enfuite au prince, contre fa demandé
** en paiement des lods, la fentence qui déclaroit la
« donation nulle, comme renfermant la claufe des,
biens à venir »
J
�( 22 )
Ce font les mêmes chefs d’accufation qiii ont été
mis fous les yeux de monfieur le procureur général,
& qui ont donné lieu à la plainte qui me retient dans
les fers, avec cette différence néanmoins que dans
le mémoire préfenté à M. le procureur général, on
y a ajouté « qu'après la remife de la minute qu’on
» fuppoie m’avoir été confiée, Giraud s’étant apperçu
» qu’à la place de la feuille du milieu, j’en avoîs
» iiibilitué une autre qui renfermoit la claufe des
» biens à venir, ce notaire vint comme un furieux
» chez moi, avant quatre heures du matin; qu’il me
» furprit au lit, dans le temps que je dormois; qu’il
» m’intimida, en me préfentant fur la gorge un pijlolet
y> garni de trois chevrotines ; qu’aulli-tôt je me levai,
» j’allai dans mon étude pour remettre la feuille fup» primée ; que dans ce moment arrivèrent les fleurs
y> de Segonzat & Rance qui relièrent un inftant, allèrent
y) enfuite à la mejfe, & qu’après leur départ, je remis
» à Giraud la feuille fupprimée qu’il rétablit dans
y> la minute, après Vavoir montrée à Salleneuve, & jôta
r> la feuille fauife qui contenoit la claufe des biens
» à venir ».
Qui ne voit dans tout cet expofé un tiiïii de four
beries, d’impoflures & d’invraiiemblances l Qui n’y
reconnoît une machination concertée avec art, avec
réflexion, un inyflère d’iniquité, un ouvrage digne
de l’exécration publique? En fuivant pas à pas ces
calomniateurs infâmes, je me flatte de parvenir à les
�C 23 )
. ,
confondre. Une feule circonftaiice n’opère pas 1^
conviction; mais la réunion des faits ne permet pas
de fe méprendre fur ies vrais coupables. Il eft dond
néceifaire de fuivre, de réunir, de combiner leurs
difcours , de les comparer avec l’énoncé en l’aéte
de donation, avec les dépofitions des témoins, & de
relever les contradictions dans lefquelles ils fohc
tombés : c’eil le feul moyen de faire fortir la vérité
du chaos, où l’on a cherché à l’enfevelir.
-
PREMIÈRE' INCULPATION,
L * a c te de donation fa it en ma faveur par le fieu/
de Segon^at, fut pre'fenté le 2.4 feptembre 1 7 7 6 , fur
les dix heures du fo ir, tout rédigé 3 à Giraud, notaire
qui ne voulut le figner avec les parties, que le len
demain 2,5 feptembre.
.
j;
R É P O N S E.
- I
A ce premier trait de la Calomnie, ne doit-on pas
reconnoître la noirceur du génie de mes perfécuteurs?
peut-on fe difpenfer de croire quune paifiori aveugle
fait arme de tout; que les vérités les plus feniibles,
les démonilrations même n’ont aucun prix aux yeux
des fourbes animés à calomnier l'innocence ?
Quoi ! ma donation a été préfentée à Giraud,
toute rédigée, le 2.4 feptembre, dz elle n’a été lignée
que le lendemain ! Qui s’eft jamais permis-des impoi’-^
tUres auifi évidentes! Lorfque vous avez parlé Jainii£
�( 24)
fjiraud, vous êtes-vous fouvenu que vôus aviez été
le miniflre de l’a6te, que par votre fignature vous
en aviez attefté la iincérité & la date? De deux chofes
l ’une : ou vous conviendrez, comme, vous l’ ave^ fa it
à la confrontation} que ma donation a été paifée le
2.4 feptembre, ou vous perfévérerez à dire qu’elle
ne Ta été que le 25. Au premier cas , vos mé-^
moires, votre lettre au confeil, votre dépoiition,
votre interrogatoire, font un tiiîu de fuppoiitions &
de fauifetés ; au fécond cas, il faut que vous conve
niez que vous êtes un fauifaire, puifque Ta&e dedonation qui fait par lui-même probationemprobatam9
ne permet point de douter qu’il ait été paifé le 24
feptembre.
Jepourrois ajouter que Lougnon qui a écrit l’a&e,
a attefté dans fa dépoiition, foutenu dans fon interro
gatoire ( a ) & à la confrontation, que c’eft le 24
ieptembre 17 7 6 , qu’il l’écrivit, ainfi que la feuille
fupprimée, dans votre étude & fous votre diélée ;
mais cette dépoiition, toute fincère qu’elle eft, ne
peut rien ajouter à la foi d’un a&e qui fait preuve
par lui-même ; ainii Giraud eil néceifairement un impofteur ou un fauifaire; ce qui ne permet point da*
jouter foi à fa dépoiition.
( a ) Nota. L e fieur Lougnon a été auili décrété d’ajournement per
sonnel. Mes juges ont fans doute voulu apprendre de lui-meme les cir-*
confiances dans lefquelles l^éte ayoit cté pafle, & lçpoque à laquelle
¡1 l’avoit écrit.
S E C O N D S
�O j)
S
e c o n d e
I
i n c u l p a t i o n
.
& a c t e de donation étant (igné a me fut remis
pour le faire contrôler & infirmer.
R é p o n s e
.
G iraud s’eft defiaift de fa minute ! Comment un
officier public oÎe-t-il faire un aveu de cette efpèce,
s’accufer de prévarication : nemo creditur allegans
tiirpïtudinem fuam. Cet aveu fuffiroit ieul pour em
pêcher la juftice d’y ajouter foi : mais c’eft encore
une iuppoiition démontrée telle par les dépofitions
des témoins ouïs dans l’information en effet. Le fieur
Lougnon a encore attefté que l’aéle de donation étant
écrit & figné, les parties fe retirèrent 3 & que la minute
de la donation & lafeuillefupprimée furent laijfées fur la
table de Giraud. Le fieur Tailhardat de la Fayette,
contrôleur, a dépofé que la minute de la donation lui
fu t remife pour être contrôlée & infirmée par Giraud,
& q u il la remit au même notaire, après le contrôle &
Vinftnuation. Le même fait eft attefté par un écrit qui
me fut envoyé par le fieur Tailhardat de la Fayette,
le 9 oétobre 1 7 7 6. Cet écrit eft imprimé à la fuite
du mémoire. Peut-on après cela fe diflimuler que
les inculpations qui me font faites, foient l'unique
ruit de la brigue & de Timpofture l
D.
�( i6 )
T
r o i s i è m e
i n c u l p
a t i o n
;
O nu ajouté que dans Vefpace de trois ou quatre mois
qu’on a fuppofé que la minute de la donation avoit refté.
en mon pouvoir , je Vavois fa it changer quatre ou
cinq fo is ; que les premières minutes avoient été brûlées
ou déchirées, & quà chaque fo is , la relation du con
trôle & de l3infirmation avoit été remife fu r la nou
velle minute queje préfentois moi-même au contrôleur.
R
é p o n s e
.
C e t t e troiiième imputation dévoile de plus en
plus l'acharnement de mes ennemis à confoiider l'ou
vrage d’iniquité, dont ils font les architectes ; mais
la vérité fe dérobe rarement aux yeux perçans de
la juilice , & le crime fe trahit ordinairement par les
fubtilités mcme qu’on emploie pour le cacher.
i° . Il eft fuppofé, il eft faux que la minute de la
donation m'ait été confiée. Que la ligue s'étudie tant
qu’elle voudra à inventer, je la mets au défi de
prouver que j’aie été faifi un feul inftant de cette
pièce.
2°. N ’eft-ce pas une fable ridicule de prétendre
que dans l’efpace de trois ou quatre mois, la minute
a été changée jufqu’à cinq fois ? Cette impoflure eft
entièrement détruite, i° . par l’expédition de la dona
tion qui a été tirée des regiftres du contrôle Sc des
infinuations. On voit en effet, par cette expédition,
�( *7 5
qu’elle eft conforme mot pour mot à la minute qui
eft entre les mains de Giraud ; & il n eft pas à preiumer que la minute eût été refaite il fouvent, fi
l’intention des parties n’avoit pas été d’y faire quelque
changement.
2°. Pour adopter une abfurdité de cette nature,
ne faudrot-il pas fuppofer fix fauilaires; deux notaires,
le clerc, le contrôleur & les parties contrariantes l
ce qui ne fauroit fe préfumer.
3°. Les regiftres du contrôle & des infinuations
ayant pafle fous les yeux du miniilère public & de
“ monfieur le lieutenant général criminel, il n’y a été
remarqué ni changement, ni rature, ni furcharge ;
cependant la donation du 2.4 feptembre fut contrôlée
& infinuée le 2.6 du même mois.
40. Les témoins de l’information difent, favoir;
le fieur Charbonnier, l’un des notaires, q u il n3a figné
Vaâe de donation, dont il s’agit ^ quune feule fo is ;
le contrôleur y q u il ne Va enregiflré quune fo is ; le
clerc, quil ne l3a anffi écrit quune fois , & tous les
trois ont déclaré dans leurs dépofitions, récolemens
& confrontations, qu ils reconnoiffoient la minute
qui leur a été repréfentée pour être l a m ê m e quils
avoient écrite, fig{iée, contrôlée & infinuée.
L ’incrédulité elle-même pourroit-elle ne pas céder
a des preuves fi évidentes & fi précifes? Se trouver°it—
il dans le public quelques - uns de ces efprits
malheureux qui croient fi facilement le mal fans preuve,
D a
�w
êc qui doutent toujours du bien, lors même qu’il eft
p r o u v é C e n'eft pas pour eux que je publie ma défenfe ; & toutefois , fi je ne peux parvenir à les con
vaincre, je vais du moins les confondre par un dernier
moyen fans réplique.
G irau d , principal auteur de cette calomnie , l’a
ainii préfenté, pour iervir Salleneuve, dans le mé
moire envoyé au confeil du prince ; il l’a attefté dans
fa dépoiition , & fou tenu dans fon interrogatoire ;
mais à la confrontation, la force de la vérité l a obligé
à venger l’innocence : ce miférable , après y avoir
hardiment répondu aux reproches déshonorans que
je lui oppofois, n’a pu réfifter aux remords de faconlcience ; il s’eft rétra&é pofitivement de ce chef de
calomnie; il a avoué qu'il iiavoit été fait quune feule
minute de la donation. Que d’opprobres? quel abus ?
quel jeu de la religion \ & que peut-on en inférer , fi
non qu’un tel témoin, qui eft l’un de mes délateurs,
s’eft proftitué à dépofer au gré de ion complice.
En faut-il davantage pour rendre la preuve com
plète , pour défabufer 1 incrédulité , & pour démon
trer qu’il eft une juftice fupérieure qui frappe les
criminels d’aveuglem ent, afin de faire foudroyer le
.vice Sc triompher l’innocence \
Q
uat ri è me
i n c u l p a t i o n
.
D a n s le temps que fé to ïs fiifid e la minute>j ieus
recours à deuxflratagémes , pour me difpenfer depayer
les droits de lods que me demandoit Salleneuve, fous
�('!(> )
le nom du prince le premier fut de fupprimer , dans
la minute de la donation, la feuille du milieu, & d’ en
fubflituer une autre qui renfermoitla claufe des biens à
venir ; cequirendoit la donation nulle, &fu fo itp riv er
le prince des droits feigneuriaux. Le fécond 3 fut de
conjciller aufieur de Segon^at déformer la demande en
nullité de la donation q u il m3avoit faite & d3oppofer
enfuite au prince , contre fa demande en paiement des
lods, la fentence qui déclaroit la donation nulle 3 comme^
renfermant la claufe des biens à venir.
R É P ONS E .
T o u t ce que la malice peut inventer de plus arti
ficieux , fe trouve renfermé dans ce chef d’inculpation»
Diffamateurs exécrables, comment avez-vous pu vous
garantir du remords déchirant d’avoir outragé la vérité
d’une manière fi indigne ? Avez-vous jamais conçu ,
combien il en coûteroit à un accufé, pour rendre fon
innocence auifi notoire quepourroit l’être votre diffa
mation l Avez-vous jamais penfé qu’un jour de ca
lomnie demandoit des années entières pour l’effacer,
Si que fes bleifures, fi elles ne font pas abfolument
incurables, laiifent toujours des cicatrices qui quel
quefois pafl'ent d’une génération à l’autre \ M ais,
quelles réflexions peuvent faire des monftres , dont
le cœur ne refpire que la haine & la vengeance ?
Ce n’eit pas aifez pour faire punir un crim e, de
*uppofer qu’il a été commis ; il faut le prouver, St
�C 3°)
donner des preuves plus claires que'le jour. Que tous
ceux, dit l'empereur, qui veulent intenter une accufation capitale, fâchent qu’ils n’y feront point reçus*
s’ils ne la prouvent, ou par des titres inconteftables ,
ou par des témoins fans reproche, ou par des indices
indubitables & plus clairs que le jour. Sciant ciincli
accufatores eam Je rem dcferre in publicam notionem
debere , quœ injlructa Jît apertifjimis documends , vel
munita idoneis tejlibus , vel indicis adprobationem in-dubitatis & luce clariorïbus expédita ( a ) .
Dans la recherche des crimes, en effet, comme
dans le commerce des affaires humaines , l’ufage a
introduit trois différentes fortes de preuves : la litté
rale , la teftimoniale & la conjecturale.
La preuve littérale eit la moins douteufe& la moins
foupçonnée, parce qu’elle fe tire de la leéture immé
diate des pièces authentiques ; elle prend fon principe
dans la propre autorité de la foi des a<5tes ; mais elle
ne fait foi que de ce qui y eft contenu. Irijlmmentunt
nihilaliudprobat, quàmïllndquodcontineturin eo (b).
Pour cette preuve, deux conditions fontrequifes (V ):
l’une , que la pièce qui fert de titre contienne Sc
prouve immédiatement le fait dont il s’a g it . . . car
fi ce titre ne contient rien du crime dont il ejl quejlion,
( a ) L . fin . cod. de probat.
( b ) B a ld , a d leg. a d probat. Z j , cod de probat.
( c ) M. le V a y e r , trair. dela preuv, par copp.d ecrit*
�( 31 )
$c qu’ori s’en ferve feulement pour en tirer des conféquences & des induCtions par conjeCtures, alors cette
preuve ne s’appelle plus preuve littérale du crime ; ce
neft plus qu’une preuve littérale d’une conjecture ,
& par conféquent, elle ne forme plus elle-même
qu’une conje6ture & un indice.
La fécondé condition néceiTaire eft, que la pièce
qu’on produit fa(]'efoi par fon autorité propre ; car il
elle ne fait pas foi par fa propre autorité, ce n’efë
point encore une preuve littérale, d’autant que ce n’eil
plus la pièce qui prouve : la preuve vient alors, ou
des témoins, ou des indices qui lui font donner créance ;
Si ainii, elle tombe encore dans l’efpèce de la preuve
teftimoniale ou conjeCturale.
La feuille fupprimée au moment de la donation du
24 feptembre 17 7 6 , peut-elle être-confidérée comme
une pièce authentique? peut-elle faire foi par ellemême que j’ai voulu priver le prince des droits feigneuriaux l 11 faudroit fuppofer les tètes & les idées
de tout le genre humain renverfées, pour qu’il pût fe
trouver un feul homme qui osât affirmer des abfurdites auifi révoltantes. i° . Une pièce qui n’a étéfignée,
ni par les parties, ni par un notaire, ne fera certaine
ment jamais confidérée comme un a6te authentique.
■20. La fuppreffion de cette feuille, qui renfermoit la
■claufe ’des biens échus & à échoir , préfens & a venir 3
peut d’autant moins manifefter mon intention de faire
•priver le prince ou fon fermier des droits feigneuriaux.
�( 32 )
que dans le moment de cette donation, j’étois intime
ment convaincu que je n en devois point, d’après les
difpoiitions de la coutume de Bourbonnois, fous l’em
pire de laquelle fe trouvent iitués les biens donnés.
Suivant le langage de mes ennemis , je n’ai gardé
la minute de la donation, que pendant trois ou quatre
mois. Dans cet intervalle, le fermier de M. le duc
d’Orléans, n’a formé, contre moi, aucune demande
pour le paiement des droits de lo d s, puifque je n’ai
été affigné par ce fermier 3 fouslenom du prince, que
l e i j mars 17 7 7 , dans un temps où l’on convient que je
n’avois plus la minute de la donation en mon pouvoir.
Or, dès le moment qu’il eft prouvé, par l’aveu même,
de mes délateurs , qu’au temps de la demande du
prince, je n’étois pas faifi de la minute , on doit néceflairement convenir que je n’ai pu en fupprimer la
feuille du milieu pour en fubftituer une autre.
Eft-il croyable d’ailleurs, que, pour me fouftraire
au paiement des lods, j’euiTe voulu m’expofer, d’une
part, à me faire dépouiller des biens donnés; & d’une
autre, à voir ma fourberie découverte, par le moyen
du rapport de l’expédition qu’on étoit dans le cas de
retirer duregiftre des infinuations 1L ’intérêt eft la règle
Si la meiiire des actions : on ne fe porte point ordi
nairement à une fcélérateife,lorfqu’on n’en doit retirer
aucun fruit, nemo gratuité malus ; & il ne pourra ja
mais paroître vraifemblable, qu’un quelqu’un s’expofe
il encourir une accufation qu’il eft le maître d’éviter.
�(33 )
'Quel ufage, au furplus, ai-je fait* de cette Feuille,
qui n’a jamais été en mon pouvoir, & que je n aurois^
certainement pas remife à Giraud , fi j’en avois été
faifi? V ai-je oppofée au prince ou à Ton fermier \ leur
ai-je communiqué quelque expédition, où fe trouve la
fauife claufe des biens à venirl Salleneuve, quoique
l’un de mes délateurs , a dit tout le contraire dansi’es
dépofition, récolement & confrontation.
Mais , à propos d’expédition, je me rappelle d’un
moyen bien important, pour coniondremes ennemis;
j’ofe même dire quil eft décifif. Le voici :
. Dans fa dépofition, Giraud a dit , qu3après que VaÜe
de donation eut été refait pendant trois fo is , dans l3e f
pace de deux mois , ou un peu plus 3 & que les pre
mières minutes eurent été brûlées ou déchirées en préfence du fieur Charbonnier, il me délivra une expédi
tion de la donation , une fécondé expédition au fieur
Rance , & une troifème à Salleneuve.
De fon côté, Salleneuve a foutenu que je lui avois
communiqué l3expédition que fa vo is retirée ; q u il en
avoit pris une copie ; qu il Vavoit confultée, & q u il
écoit aifuré que la claufe des biens à venir, n3étoic
pnnt dans cette expédition : cette claufe fe trouvoit
néanmoins dans les expéditions délivrées dans le même
temps au fieur Rance & à Salleneuve. L ’exiftencede
'la claufe , dans ces deux dernières expéditions, eft
atteftée par les dépofitions de Giraud, de Salleneuve
•A du fieur Rance.
E
�C 34 )
De là réfulte la conféquence néceflfaire, évidente*
que Giraud eftFauteur du faux; car fi je l’avois com
mis, c’eût été, comme on le iuppofe,pour tromper
Salieneuve, & ce fermier convient que je ne l’ai pas
fait, puifque je lui ai communiqué l ’expédition de
l’aéte vrai. Cependant il eft certain qu’il y a eu des
expéditions de i’a£te faux ; que ces expéditions ont
été délivrées par Giraud ; qu’il les a enfuite retirées
ou corrigées : donc c’eft Giraud qui a fait le faux ,
pour me mettre aux prifes avec le fieur de Segonzat,
9
\
ou avec Salieneuve.
Faut-il indiquer ces preuves, pour démontrer que
Giraud eft feul l’auteur du faux \ cela eft très-facile ;
on les trouve dans la conduite que Giraud a tenue, ÔC
dans la dépofition de Salieneuve.
Giraud, inftruit que dans le procès que j’avois
avec M. le duc d’Orléans , Salieneuve m’avoit faic
iignifier une copie de la donation , dans laquelle fe
trou voit inférée la claufe des biens à venir, vint chez:
m o i, me prie de lui communiquer cette copie ; ce
que je fis, fans connoître fes intentions ; & , dans le
moment , Giraud va chez le fieur Coulongeon, pro
cureur du prince, l’engage à raturer la clauiê vicieufe,
& me remet, en cet état, ma copie. Pourquoi faitesvousces démarches, Giraud? quel intérêt prenez-vous
à la conteftation qui s’eft élevée entre le prince & moi?
Vous avez craint que j.’apperçufle votre faulfeté, que
je déconcertaiTe vos projets, &que je priifele parti de
�*îî:> .
vous attaquer leTpremier ; mais ce n’eft pas tout; x
Le iieur Rance , créancier du fieur de Segonzat,
s’étant rendu en la ville de Montaigut, pour prendre
• à ce iujet des arrangemens avec m oi, Giraud , qui
eft inftruit du jour de fon arrivée , l’attend à ma
.porte , entre avec lui dans mon étude ; & à peine le
iieur Rance à-t-il dépofé, fur mon bureau, fes titres de
%créance, parmi lefquels fe trouvoitl’expédition de ma
donation, qui lui avoit été délivrée par Giraud, que
ce dernier fe faifit de cette expédition , l’emporta
- lur le champ , ratura la fetuife claufe, & ne la remit
que plufieurs jours après au fieur Rance qui fit les
plus vives follicitations pour l’y engager. Lors de la
remife, le fieur Rance s’étant apperçu de la rature, 8c
en ayant demandé les motifs à Giraud : que répondit-il?
que fon clerc s*étoit trompé. Quelle invraifemblance !
un copifte fe trompe ordinairement , en omettant
quelques claufesde i’aéte; mais il ne lui arrive jamais,
lorfqu’il eft de bonne foi, comme l’étoit certainement
le clerc de Giraud, d’ajouter dans une copie , des
claufes qui ne fe trouvent point dans l’original. A la
confrontation avec le fieur Rance , Giraud eft con
venu que cette rature étoit de fon fait : cette expédia
tion eft produite au procès.
Giraud ne s’eft pas contenté de raturer la claufe
vicieufe dans les expéditions qu’il a délivrées ; il s eft
en outre lait remettre les expéditions, lorfqu il a pu y
- parvenir. Ce fait eft attefté par Salleneuve qui dit ,
Ea
�. h * ?
'Hans fa dépoiition , que Giraud Vayant prié de lifiremettre la fau(fe expédition q u il lui avoit délivrée, il
y confentit, en lui difant j e n e v e u x p a s LA MORT
d u p é c h e u r , & je ferois fâché de vous expoferà des.
conféquences défagréables.
1
Giraud eft^/w/zi^r; Giraud eft/f faujfaire; Giraucl
eil le coupable ; il eit néanmoins en liberté , Sc je fuis
dans les fers. Que de réflexions ne pourrois-je pas me
permettre ici? mais je fuis hors d’état de les expofer;
ma raifon égarée, mon efprit affoibli, toutes les facultés
de mon ame anéanties , ne me permettent point d’ap
profondir un myftère auiïï inconcevable.
Qu’on perfifte à préfent à dire, avec quelques amés
corrompues, que mon intention étoit de me fervir
de la feuille fupprimée,lorfque le prince me demande*
roit les droits de lods, & d ’oppoferla véritable donation,
lorfque les héritiers Segonzat voudroient m’attaquer,
&que cette fupercherie doit me faire envifager& punie
comme un criminel? Je répondrai toujours avec fiiccès à.
cesfuppofitions, i°. qu’elles font purement gratuites Sc
contraires à la préfomption de droit; que c’eil Giraud,
dépofitaire de la minute , qui en a abufé & qui l’a
falfifiée : car, encore une fois, la fàuife feuille qui fut
fupprimée lors de la rédaétion de l’a&e , & laiflee au
pouvoir de Giraud , ne fait preuve, par elle-même ,
d’aucun crime. Le crime eil dans l’abus qu’on en a
fait : or, cet abus , à qui l’imputer, qu’à Giraud qui
il délivré de fauiîes expéditions-;
comment Tim^
;
�(37)'
«puter à moi, qui en ai reçu une vrâîe, 8t qui l’ai com
muniquée , comme je l’ai reçue, félon le dire meme
delà partie ùntéreifée, par qui cette affaire m’eftfufcitée \
* 2°. Outre la préfomption de droit, il y a preuve
évidente contre Giraud, par les expéditions qu’il a
délivrées, 8c par le témoignage de Salleneuve qui
attefte que je lui ai communiqué la vraie.
Ce n’eftpas cependant que j’adopte rien de ce qu'a
pu dépofer Salleneuve. Je fuis obligé d’avouer que
je n’ai nulle mémoire de lui avoir communiqué aucune
expédition. Mais enfin > ou fa dépofition eft vraie, ou
elle eit faulfe : fi elle eft fauife, quel cas doit-on faire
de mes délateurs ? fi elle eft vraie , comment douter
du véritable criminel.
Si jen étois pas aifez heureux pour avoir des preuves
teftimoniales auifi décifives , ma fituation en feroicelle plus critique \ Je vais démontrer que non.
J ’ai dit qu’un fécond genre de preuves fur lequelil eft;
-permis d’aifeoir une condamnation, eft la preuve teftimoniale ; mais quil eft dangereux de fe référer à des
témoignages de cette nature 1 Par une efpèce de fatalité
•attachée à la condition humaine, la plupart des témoins
ignorent l’importance duminiftère auquel la juftice les
appelle ; & d’autres à qui la diffamation ne paroît plus
qu un jeu de la fociété, étant vendus au menfonge, nq
^marchandent que l’honneur & la vie de l’innocent. Une
°n£Uon auifi férieufe exige de la réflexion, foutenue
�d’une probité éclairée & fcrupuleufé ; auffi, pour la
preuve teftimoniale , comme pour la preuve littérale,
exige-t-on rigoureufement, en matière criminelle ,
deux conditions eiTentielles pour la rendre certaine.
La première, que les témoins qui dépofent dun fait,
l ’atteftent cûnftne d’une chofe qu’ils favent de pleine
certitude, pour R avoir été préfens & l’avoir vu euxmêmes.' InqulfitiofuH per examinationem tejlium dicentiumfe ddfuïjje iis quæ gefla fu nt, & vidiJJ'e quœ tune
agebantur ( a ) ; car s’il paroît que la dépofition des
témoins eft vacillante & incertaine, audiendi non
Ju n t(b '); qu’ils n’ont parlé que d’après des ouï-dire,
ou fur des préem ptions, leur témoignage ne peut
plus former de preuve.: fie ergofuâ feientiâ débet
reddere tejlimonium, & de fut! prœjenda ; de auditii
autem alieno non valet ( c ).
La fécondé condition pour former la preuve com
plète, eft que les témoins qui font entendus en dépo
sition, foient exempts de paiîion contre l’accufé ; qu’ils
ne foient point engagés par quelque raifon particu
lière à le faire coniidérer comme coupable s 8c, qu en
un mot, leur conduite foit irréprochable : intejlimoniis autem d i g n î t a s 3 f i d e s , m o r e s > g r a v i t a s
examinanda ejl ( d ).
(a ) A uth. de fa n â if. epifeop. cap. z ,$ f iv e r o abfant.
( b ) L. z , J f . de tejlélb.
t e ) G lof, a d l. tejlium i q } cod. de tefiib. verb. prccJÎot
( d ) L . z , cod. de tefib.
�C 39 )
Pour démontrer d’une manière très-fenfible, que la
preuve teittmoniale confignée au procès ne fauroit
non plus me taire confidérer comme coupable du
crime dont onm’accufe, j’expoferai d’abord les motifs
qui doivent faire rejeter les dépoiitions de quelques
témoins, & j’examinerai enfuite s’il peut réfulter quel
que preuve de conviction du témoignage des autres.
PREM IÈRE
PRO PO SITIO N.
Onconnoît déjà, & les témoins que j’ai dûrécuijer, Giraud&s»i& les motifs qui nvy ont forcé. Les auteurs difentleneuve*
que l’accufé peut, avant la confrontation, demander
le nom de ion dénonciateur à M. le procureur du
roi, pour favoir fi les témoins font parens ou alliés de
fa partie fecrète, &plufieurs arrêts l’ont ainfi jugé (a).
La conféquence qu’on doit tirer de cette jurifprudence eft facile à pénétrer : on doit en conclure que
les parens du dénonciateur ne pouvant être témoins
contre l’accufé, il en doit être, à plus forte ration, de
même des dénonciateurs qui dans cette circonftance
dépofent dans leur propre caufe : or, Giraud & Salleneuve font mes véritables dénonciateurs ; ce font mes
ennemis jurés ; ce font les chefs de la ligue ; ce font
enfin eux qui, avec les héritiers Segonzat, m’ont fait
. fufciter le procès criminel qui eft à juger.
Giraud Si Salieneuve, de concert avec les héritiers
( a ) Lacombe, mat. crimin. part. 3 , chap. 1 3 , n. 3 Î > B ou vot, queft^
n0t* au mot dénonciateur-, tom. 2 , queft.
�U ° )
Segonz^t-, onc compofé différens m.çmoires^ .contre;
m oi, qu'ils ont envoyés auconfeil düprincej& ,Giraud
a attefté, par une lettre, la iincérité du contenu dans
ces libelles (rz).
Giraud a follicité le ileur Charbonnier à ligner l’un
de ces mémoires ; mais ce notaire, dont la probité
eft reconnue, a conftamment refufé de proftituer fa
plume (7 >).
Giraud a fait tous Ces efforts pour faire annuller la
donation quem’avoit faite le iieurdeSegonzat, afin de
pouvoir eniuite faire difpofer des mêmes biens en
faveur de Bouttin, beau-frère de fon gendre (c).
Giraud a dit publiquement, avant & depuis fa dépoiition, que mon affaire criminelle feroit bientôt ter
m in ée,^’ je voidois me départir de la donation q u i,
m a été faite (c/). Les héritiers Segoujat ni ont fa it
( a ) A la confrontation Giraud eft convenu d’avoir envoyé ces
mémoires au confeil, & il s’ejl excu/é, en dïfant q u i l y avoit été fo rcé,
& que ces mémoires lui avoient étéJuggérés.
( b ) Le fieur Bidon a attefté ce fait dans fa dépofition.
( c ) Giraud en a fait l’ aveu au fieur Bidon , qui l’a ainfi dépofé ; 8C
'Audin, autre témoin , a atteftc que dans le temps que la demande en
nullité de la donation fut form ée, le fieur de Segonzat lui avoit dit que
Giraud lui a vo it confervé q
Ce
Q U EL Q U E CHOSE
u e lq u e c h o se
eft le
de
QUOI
pour fa ire réuffir cette demande.
dont parle le iieur de Segonzat
dans fa lettre ; c’eft-à-dire, la feuillefupprim ée, dont Giraud a abufé.
( d ) Il en eft convenu à la confrontation.
faire
�(41 )
,
,
i f aire la même propofition depuis que je fuis prive de
.ma liberté (a).
Giraud a avoué au procès cpien vertu d*arrêt du par
lement 9 il afait dépofer au greffe , tant lafeuille fup primée, que la minute de la donation : donc il eft tout,à-la-fois, & l’un de mes dénonciateurs, & témoin
dans fa propre caufe.
Enfin, Giraud eft le vrai criminel, tefeul coupable
du faux ; il ne m’accufe que pour quon ne l’accufe
pas ; il veut me perdre pour fe fauver, & ce qu’il y a
d’incroyable, c’eft qu’il eft venu à bout contre toute
vraifemblance,toute raifon, de me mettre à fa place,
& de faire tomber fur ma tête un poids dont il doit
répondre par la fienne.
Salleneuve eft convenu à la confrontation , qu’il
avoit travaillé contre moi pour les héritiers Segonzàc
qui ont obtenu un arrêt d’attribution pour tenter
enfuite la voie de faire annuller la donation qui m’a
été faite ( b).
A la follicitation de Salleneuve, & d’un curé, donc
( a ) J en aurois offert la preuve teftimoniale ; mais depuis que mon
mémoire eft fous preiTe, les héritiers Segonzat m’en ont fourni une
preuve écrite ; n’ ayant voulu ni pu obtempérer à leurs propofitions dans
la circonftance attuelle, ils m’ont fait aflîgner le 2<j mai dernier, pour
être condamné à me défifter des biens donnés.
( ^ ) C ’eft la cour qui eft commife par cet arrêt, qui eft du lit
novembre 178 3 # & qui me fut figniiié fans afiignation, & fans explique*
?
�C )
le nom eft afiez connu, un nommé Jab ey, de la
paroiife d’Y oux, s’eft rendu dans cette ville le I er ou
.■le 2e mài dernier, pour porter des plaintes contre moi,
-quoique je ne lui aie fait aucun tort ( a).
Salleneuve a dit hautement qu’il parviendrait à me
faireperdre mes états mime A m e f a i r e p e n d r e ,
ou quilperdroit fon nom (b')^ Si la loi s’indigne contre
les témoins qui fe préfentent d’eux-mêmes, que doit
donc penfer le juge, de ceux que je viens de nommer ?
Si je me conduifois par les mêmes principes que
mes ennemis, je ne manquerois pas l’occafion de
dévoiler ici des faits qui ne laiiferoient aucun doute
fur le cas qu’on doit faire de la fidélité des uns & des
autres, dans les devoirs de leurs états; mais je crois
pouvoir m’en taire, & j’aime à le faire, perfua’dé que
les motifs pour lefquels il avoit été obtenu* le 1 7 du mois de décembre
iuivant.
Sur le refus que j’ai fait, depuis que je fuis dans les liens, de confentir
à ce que les héritiers Segonzat exigent injuftement de m oi, j’ai été aifigné
en la cour, à leur requête. Ces procédés permettent-ils de douter que les
héritiers Segonzat fe font réunis avec mes délateurs ? C ’eft: à mes juges;
c ’eft: au public impartial, à le décider ; c’eft le troifième procès dont j’étois
m enacé, & que j’ai annoncé au commencement de mon mémoire,
(a )
C e témoin, qui m’eft venu trouver en prifon , m’a inftruit du
fa it, & il l’avoit auparavant dit à plusieurs perfonnes qui le firent apper-1
c/evoir de fa démarche inconfidérée.
( b ) J ’offre la preuve des propos de cc fermier,
l
�■ C 43 >
je peux faire ce facrifice à l’efprit de charité, fan$
compromettre la néceifité de ma juftification. Eh 1
peutrêtre la notoriété publique ne iuppléera que trop
à ma difcrétion.
Un fécond motif qui doit faire rejeter le témoi
gnage de Salleneuve, eft l’évidence de la fauifeté de
fa dépofition : Salleneuve a foutenu dans fa dépofition, dans le récolement & à la confrontation, que
Giraudne lui délivra une expédition, dans laquelle je
trouve la claufe, des biens à venir, qu après que j 3eus
fa it ftgnifier ( le 15 juillet 17 7 7 ) la fentencequi avoic
été rendue contre moi, en faveur du fieur de Segon^at.
Cette allégation eft une impofture démontrée. Je fupplie mes juges de vouloir bien faire attention, en
examinant les pièces produites au procès, que ce fuc
le 15 juillet 17 7 7 , que je fis fignifier au prince la fentence rendue en faveur du iieur de Segonzat, &
qu’avant cette époque du 15 juillet, Salleneuve, fous
le nom de M. le duc d’Orléans, m’avoit fait fignifier
une copie de la donation, avec la claufe des biens
échus & à échoir, préfens & à venir. Ce fut la lignifi
cation de la donation dans cette forme, qui me déter
mina àoppofer fubfidiairement contre la demande du
prince, que la donation étant nulle, je ne pourrois
être dans le cas de payer des droits feigneuriaux ; il
eft donc faux ; il eft donc iuppofé que Salleneuve
n ait retiré une expédition delà donation, que pofténeurement à la fignification que je fis faire de la fen,->
�............ (4 4)
tence que le iîeur de Segonzat avoit furprife contre
moi.
Giraud a d’ailleurs démenti formellement cette
aifertion de Salieneuve : on peut voir, en effet, dans
la dépofition de Giraud, qu’il y attefte qu’environ trois
ou quatre mois après la donation, qui eft du 24 feptembre 17 7 6 , il en délivra une expédition à Salleneuve dans laquelle étoit la claufe vicieufe; mais ce
n’eft point là l’unique faulfeté que j’ai remarquée dans
la dépofition de Salieneuve ; il y en a une autre aufli
frappante.
• A la repréfentation qui a été faite à Salieneuve de
la minute de la donation & de la prétendue feuille
iiibftituée, ce f ermier defintérefjé a eu le front de foutenir quil reconnoijjoit Vacte écrit ju r deux feuilles ,
pour être celui qui compofoit o r i g i n a i r e m e n t Ici
minute de la donation e t l a f e u i l l e pour être
celle qui avoit é t é s u b s t i t u é e à la place de la
'feuille du milieu de la donation. Peut-on s’expofer
à mentir auifi grolfièrement ? Quoi! Salieneuve ofe
attefter qu’il reconnoît i’aéte écrit fur deux feuilles ,
pour être celui qui compofoit originairement \a minute
île la donation? Mais quelle certitude pouvoit-il avoir
'de ce fait,puifqu’iln’avoitpasétépréfentàla paiTation
•de cet aéle ? Il dit encore qu’il reconnoît la feuille
¡pour être celle qui avoit été fubjlituée\ mais quelle
'connoiflànce a-t-il de la prétendue fubftitution? a-t-il
y u iorfqu’elle a été faite ï a-t-il vu 'écrire la feuille
,
,
,
�(4i >
iubftîtuée ? m’a-t-il entendu dire que j’étois [auteur
de cette fubftitution \ Teftisdebei reddere radonem
'dicli fu i per fenfum corporalent, putà vifum vel ciudi-tum (a ). Salleneuve eh a donc impofé dans ces deux
parties de fa dépoiition ; il a défavoué’ce qui étoit
de fa connoiiTance , & il a attefté ce qu’il n’a jamais
pu connoître; àinfi fa dépoiition eft fauife, au moins
equant à ces faits;
<
M ais, quelle eft la règle reçue par les do&eurs criminaliftes dans cette matière , & puifée dans la difpofition des loix ? il n’y en a pas un qui ne dife que
'le témoin, convaincu d’être faux en une partie , eft
réputé faux en to u t, par rapport au ferment qui ne
fe peut divifer ex quo juravit dicere veritatem fuper
omnibus tune f i deponit falfum in uno } non creditur
-eiinaliquo y tanquamperjnro y dit Alexandre (7>). Menochius ( c ) s’exprime en termes encore plus forts :
»Si in modico conftftat falfitas teflis deponentis, prœfimiturfalfitas in aliis partibus 3 etiamfi ignoranter &per
erroremfalfum effet attejlatus s non enim ob id exeufatur.
Alciat ( d ) donne trois raifons pour prouver que
,
:
( a ) GloJ. ad l. ujiiutn. cod. de teji. DumpuL. n,
§ 8 , tit. i , gloft
denomb.
(b )
T it.% , confil.
44., n. 7 , p a g . 32. Cravetta, tom. 1 , cotif\ G ,
Pa£ ' *7* B ald, î'tb. z , co h f.z2G 3 n. q , pag. 80 , verf. col. 1 •
( O Lib. 5 , p ra f, z z , n. 1 , a , 3 ,p a g . q 26.
'(d) Ad, /, 1 , dt verb,-obligau §jtd fi mihi} n. 5 2
C‘ a86‘.
$4>PaS'
n.iqt
�( 4 i )
l ’ignorance '& l’erreur ne doivent point excufer un’
témoin qui fait une fauife dépofition, i° . quia tejlis
prœfumiturpropter juramentum deponere conftderatè &
deeoquodejicertus; i ° . quia tejlis dicens aliquidfalfums
committit contra jus divinum & naturale , undè igno
rant ¿a non excufat à dolo ; 3 0. quia in his in quibus
debetprœcedere diligenda, prœfumiturfcientia &dolus
illius qui debebat diligenter inquirere, nec admittitur9
-excufatio ignorantiœ ; d’où il conclut, que in dubio
non prœfumitur ignoranter depofuijfe f a l f u m & confequenter in dubio totum diclum annullatur.
Je conclurai aullî, avec ce do&eur, que la fauife
dépofition de Salleneuve tombe entièrement; que le
ferment qu’il a violé dans une partie, perd fon carac
tère, qui doit être comme la vérité une & invariable;
que , où la vérité n’eft pas entière, la fauifeté eft par
faite , & que ce qui n’eft vrai qu’à demi, eft entière
ment faux : veritas quœ non eflplena veritas, eflplena
falfitas : quœ non eft plena probatio s nulla eft probatio y dit Cujas ( a ) ,
Giraud eft tombé dans des contradiélions révol
tantes. Dans fes mémoires envoyés au confeil , il y
avoit dit que la donation avoit été refaite, dans V ef
pace de quatre mois pendant cinq fo is ; qu’il l’avoit
toujours iîgnée par complaifance : dans fa dépofition %
( a ) Sur la loi 3 , au cod, a d leg. Ju l, M a g %c’eft auifi lav is de Papon, en
fes air. liv, % \, tit. S.
�( 47 )
il a dit que cette donation n’avolt été refaite que trois
fo is , & à la confrontation , il eft convenu que cette
donation rfavoitjamais été refaite. Dans fon interro
gatoire, il eft convenu en un endroit, que c’étoit par
ion miniftère que la donation avoit étépa(fée le 24
feptembre 17 7 6 ^ & en un autre endroit , il dit que
Vacle lui fu t préfenté tout rédigé le 24 feptembre 3 &
quilne lefigna que le 2. ÿ. Dans fa déposition , il a dit
qu ayant délivré à Salleneuve une expédition del 3acle>
avec la claufe des biens à venir, ce fu t Salleneuve qui
fu t le trouver, & lui fit remarquer cette claufe\ & dans
fon interrogatoire , il a foutenu quJi/ s3étoit apperçu
le premier de ce vice, & q u il fu t aufji-tôt trouver Salleneuve j & le prier de lui remettre Vexpédition. Je ne
finirois pas ii je voulois rappeler toutes fes inconféquences & fes contradictions.
Quelle foi eft-il permis d’ajouter à des contradic
tions auifi frappantes? quoi, Giraud, à chaque inftant
vous dites o u i & n o n , & la juftice ne lance point fur
votre tête fes foudres & fes carreaux ! Suis-je donc
deftine a etre le iuppot de vos iniquités? il faut nécef
fairement que celafoit, puifqu a 1 avis même de votre
ami Salleneuve, vous etes le pécheur ; & perfonne
ne difconviendra que je fubis la peine due à vos for
faits. O uï, il faut que cela foit, puifqu’avant votre
^epofition, & en vous promenant dans l’antichambre
u parquet , fur les repréfentations qui vous furent
dltes> par un eccléfiaftique, de ne pas vous expofer
�C 4» >
•
5
t
*'
*
à dépofer-contre la vérité, vous répondîtes que voiiï
àvie% dans votre poche de quoi vous garantir. Mais y
Vous garantirez-vous de la peine dont ¿il menacé un
faux témoin, unimpofteur, un prévaricateur, unfauA
faire : fouillez dans vos poches, Giraud, vous n’y trou
verez pas de billet dé garantie de la part de la juftice*.
La contradiélioneftfécueil où fe brifent ordinaire
ment les fourbes & les impofteurs; non feulement elle
détruit toute la foi du témoignage, mais elle expofé
encore le témoin à la peine du crime de faux,
tejlis
deponit in uno judicio contrarium ejus quoddixerat in.
aliojudicio, & in hoccafudebetpuniri tanquamfalfarius\
aut deponit in uno judicio contrarium ejus quodpriàs
Uixerat in eodem judicio a & pariter puniendus e(l de
fa lfo ( a ) .
N ’eft-ce pas infulter à la juilice elle-même; n’eflce pas chercher à la furprendre ; n’eft-ce pas l’expoier
à pleurer fur fes propres jugemens, que de lui préfenter des témoins de cette nature? Ah! s’il étoic
permis d’aiTeoir des condamnations fur de pareils
témoignages, combien d’innocens feroient expofés
à devenir la vi<5time de la fcélératefTe? Ne feroit-ce
point ouvrir un champ libre à la calomnie? ne ieroitce point favorifer la noirceur de ces hommes mon£
'trueüx qui nepargnent ni les moyens ni les fuites
____
‘ - _______
,)
- (a ) Julius Clarus, lib. 5, Sfalfum, n. 5, /. 1 6 ,ff. détêjîib. /. 27 f , ad
/. Cornel, de fa lf.
.
-
^
funeftes
�( 4 9 .
funéites de leur vengeance, pourvu qu'ils fe vengent.
Mais oublions pour un moment ces faux témoins %
pendant que je vais examiner les autres.
SECONDE
PROPOSITION.
L es autres témoins ouïs dans l’information doi
vent être diftribués dans deux claifes : l’une, pour
ceux dont le témoignage r i eft fondé que fur des
o u ï-d ire ; & l ’autre, pour ceux dont la fcience ne
peut jamais être étayée que fur des préfom ptions,
des indices, des conje&ures, & le plus fouvent fur
des invraifemblances. T ou t le monde conçoit que
j entends parler de la fcience des experts en matière
de vérification d’écriture.
Première claffe des témoins.
D e tous les témoins ouïs dans l’information, il y
Le* fieur»
en a deux, qui font les fieurs Tailhardat de la Fayette Fay«ted&
& Rance, qui ont dépofé avoir ouï-dire q u ila v o itce*
été fuhjlitaé à une des feuilles de la minute, une autre
feuille , dans laquelle fe trouvoit inférée une clan.fe
nouvelle qui etehdoit la donation aux biens à ven ir,
mais qu’ ils ne fa v a u par qui cette fubiliiuûon a été
jatte.
'
J
S arreter a contredire ces dépofitions, ne feroit-ce
S
? ccuPer ^ cc>mbattre l’évidence ? Il y a une
eui le fubilituée dans la minute de la donation! qui
qu’ ° Ute‘
a entendu parler de cette iubilitution î
a y a-t-U d’étonnant, puifque le fait eft vrai\ M ais,
Q
�o
°
j
qûel eft l'auteur de ce faux qui dans ce principe n’en
étoit pas un? On vient d’obferver que la faufTe feuille,
ou le faux, s’eft trouvé entre les mains de Giraud ;
ainii il eft très-aifé de connoître le fauifaire.
Seconde clajfe des témoins.
L a preuve conjecturale ? ou la preuve par indices,
Morgeai &
qui eft la troifième que j’ai annoncée, eft celle qui
Barbon.
réfulte de la dépofition des experts qui ont été ouïs
dans l’information. Peut-être ai-je à me reprocher
de n’avoir pas obfervé à la confrontation, que ces
experts, connus pour muficiens gagés, qui en font
leur état, n’ont jamais fu écrire que machinalement,
& fans principes; mais, outre que ce fait eft notoire,
l'opinion de ces muficiens m’eft d’ailleurs très-indiffé
rente, puifqu’elle ne peut former ni preuve littérale,
ni preuve teftimoniale, 8c que ce n’efl que fur l’une
ou l’autre de ces preuves, que la juftice doit fe déci
der ou à condamner, ou à abfoudre.
Ces experts ont dépofé, fur la repréfentation qui
leur a été faite de la minute de ma donation & de
la feuille fubftituée, q u ’ i l s e s t im e n t que les deux
feuilles qui compofent la minute de la donation, ont
été écrites d’un même contexte, avec la même plume ,
de la même main & de la même encre, & que la feuille
fépctrée a auffi été écrite de la même main, mais d’une
chcre différente de celle du corps de la minute; que cer
taines lignes font refferrées & d’autres efpacées, &d’un
¡dus gros caractère; que le caractère des deux feuilles qui
EXPERTS.
�v
C 51 )
•èompofent la minute ejl plus uni que celui de la feuille
féparée 3 d’où Barbon ( feui ) a eu le courage de
conclure que la feuille féparée a été écrite dans uti
.temps différent de ma donation.
Au récolement, ces experts ont ajouté que la
marge de la feuille féparée riétoit pas égale à celle
des feuilles de la minute } & quils n’ ont pu juger J i
Vempreinte de ces deux feuilles étoit la même que
celle qui fe trouve dans la feuille féparée qui ejl d3un
papier plus fui ; ce qui, fuivant eux} peut provenir
de la pâte s ou de la main de Vouvrier.
De quel poids peuvent être aux yeux de la juftice
les dépoiitions de ces deux experts? y a-t-il quelqu’un
qui ignore que leur jugement eft conjeétural, incer
tain, & qu’il peut i'ervir de pailé-port au menfonge,
auiîi bien qu’à la vérité?
La preuve conjecturale & préfomptive eft inadmiiîible en matière criminelle ; elle n’apprend que
des circonftances defquelles on peut fe fervir par
raifonnement, pour découvrir la vérité; mais cela ne
conduit pas à la découverte de la vérité, puifqu il
ne s’agit que de conjeéturer '& d’argumenter par
conféquences qui ne peuvent déterminer une jufte
çoncluiion. Quand il s’agit d’accufation capitale, où
il échoit peine affliétive ou infamante, les loix exi
gent néceftairement une fcience parfaite, une certi
tude ^phyfique, de la part des témoins qui dépofent,
C eit pour*ce motif qu’on diftingue deux fortes'de
�o o
fciences Sc deux fortes de convictions 9 favoir ; la
fcience qui produit une certitude morale, & celle qui
produit une certitude phyfique. >
La fcience qui produit une certitude morale, eft
celle qui dépend du raifonnement, & telle eft la
icience qui n’eft fondée que iur des indices, des pré
emptions & des ënchaînemens de coriféquences.
La fcience qui produit une certitude phyfique,
eft celle qui dépend immédiatement des fens, telle
' qu’eft celle des témoins qui ont vu commettre le
crime. Ces deux différentes eipèces de fciences' for
ment les deux différentes eipèces de convictions;
conviction morale &■. conviétion phylique : or, la
-fcience & la conviction morales, quoique capables
<de fonder un jugement en matière civile, ne fufïifent
jamais en matière criminelle, contre un accufé, parce
que dans de femblables affaires, les juges doivent
chercher & déiirer des preuves, toujours claires.,
•pour n’être pas furpris ; elles 'iufEfent en matière
: civile, parce qu’il n’y eft jamais queftion que du
droit des parties, 8c que les queftions du droit font
de la dépendance de la morale; mais elles ne font
pas fuffifantes dans _une queftion capitale, par la
raifon qu’il ne s’agit dans cette queftion, que du
-fait, & que les queftions de fait ne font point de la
-jurifdiction de la morale, mais feulement delà pure
. connoiffance de la phyfique, qiii'Confifte dans*révi¿.dence, dans l’expérience & les preuv.es,-; .j
�'Cï3>
, Qui ôferoit dire que Morgeat & Barbon ont une
certitude phyiique du faux dont on m’accufe? mais
ont-ils été préfens à la paifation de ma donation l
ont-ils vu écrire la feuille fubftituée ? ont-ils une
connoiifance parfaite , per fenfum corporalem , que
cette feuille a été écrite après ma donation ? II fau
drait être auifi impofteur que Giraud & Salleneuve,
pour foutènir des aifertions ii évidemment fauifes.
: D ’ailleurs, lorfqu’on eft dans l'intention de com
mettre un faux, ne prend-on pas toutes les précau
tions pour empêcher qu’il ne foit découvert? Le fauffaire eft ordinairement très-adroit; il fe cache; il fe
déguife, & il imite fi parfaitement les écritures, qu’il
n’eft peut-être perfonne à qui il ne foit arrivé d’avoir
été trompé par la reilemblance des écritures , 8c
quelquefois même par la iienne propre.
Qu’on fuppofe donc, comme l’on dit ces experts,
que la .feuille féparée eft écrite d’une encre différente
de celle de la minute ; que les lignes font tantôt plus
reiferrées, tantôt plus éloignées; que le caractère eft
plus uni dans la minute, que dans la feuille féparée;
.que les marges des trois feuilles ne font pas les
mêmes, toutes ces,précomptions, ces conjectures
conduiront-elles aun e certitude phyiique, que la
feuille féparée a été écrite poftérieurement à ma dona
tion; que c’eft moi qui ai fait écrire cette fauife
■feuille; que je fuis l’auteur du faux, & que.je l’ai
c°ttU>Tiis pour tromper le prince & Ion fermier.? Jp
�0 4 )
ne me perfuaderai jamais qu’il y ait un Îeul homme,
inftruit ou non, qui puiiTe foutenir l’affirmative de
cette aifertion; il fera plutôt porté à croire que ces
irrégularités dans la feuille féparée, font une preuve
inconteftable, qu’elle a été écrite dans un temps où
l’on ne pouvoit préfumer qu’il pût s’élever des conteftations à cet égard.
Au furplus, l’expérience n’apprend - elle pas que
la main eft iùjette à des variations infinies ? Ceux qui
ont l’ufage d’écrire, n’ont-ils jamais apperçu dans
leurs écritures des variétés frappantes qui provenoient, foit du changement de l’encre, foit de la
pofition du corps, ou de la main, foit de la difpofition des idées? N arrive-t-il pas tous les jours a un
clerc qui écrit fous la diélée, tantôt de reiîerrer les
mots & les lignes, tantôt de les écarter? Cette diffé
rence peut provenir de l’attention 8c de l’application
du copifte, ou de fa négligence, & fouvent de la
nonchalance ou de la précipitation avec laquelle on
lui di<5te.
Cette refiemblance & cette difparité que ces experts
prétendent avoir remarquées entre l’écriture de la
minute & celle de la feuille féparée, peuvent donc
;etre l’effet de différentes caufes; mais fi cela eft ainfi,
y eût-il ‘jamais un figne plus équivoque, un indice
jplus incertain, une conje<5hire plus trompeufe'?
' Pour'fonder une preuve fur des argumens tirés des
préfom ptions, *ii faut qu. il n y ait rien *d'équivoqufe
�'(ff)
'¿[ans tes circonilances du fait, Sc qu’il n’ ait pti arriver
d’une autre manière qu’on fe l’eft perfuadé. Pourquoi
donc iuppofer ici un faux, tandis qu’il eft évident
qu’il n y en a aucun, au moins de ma part? pourquoi
fuppofer que j’en fuis l’auteurtandis que je n’avois,
aucun intérêt à le commettre?
' Des experts qui dépofent fur un fait qui ne s’eft
point paifé fous leurs yeux, ne peuvent en avoir une
connoiffance parfaite; aufli les plus hardis ( tel que
Barbon ) n’ofent-ils avancer autre chofe, finon quiU
c r o i e n t q u i’ ls préfument y quils efliment que le fa it
s’ ejl pajfé ainfi. Mais, fi ces experts ne favent pas
poiitivement le fait fur leqùel ils dépofent, comment
un juge pourroit-il fonder fur leurs dépoiltions une
fcience & une connoiilance qu'ils conviennent n’a
voir pas eux-mêmes?~Y a-t-il un homme de bon fens^
qui fît le moindre cas d’un témoin qui, au lieu de’
témoigner qu’il fait le fait, dont il dépofe, avec cer
titude, diroit fimplement q u il a opinion que cela e(lÎ
Qui peut s’ailurer, a dit un favant, que la penfée &
l’opinion d’autrui ne foient pas un menfonge !
La dépofition des experts ne peut produire une
preuve phyiique; elle ne forme pas même un indice
indubitable; il n’y a rien de plus incertain que leur
opinion ; rien de plus trompeur que leurs conjec
tures , Si de là réiulte la conféquence évidente, incon-’
^ftable^ quil n’exifte au procès aucune des trois
�'C y * ;
preuves déiîrées par la lo i, pour forcer là juilîce a
punir un accufé (¿z).
)
Mais ce n’eil pas fur le feul défaut de preuves
qu’eft fondée ma juftification ; c’eft principaiemenc
iùr l’invraifemblance du faux que l’on m’impute ; &
quoique j’aie déjà démontré que ce faux ne pouvoit
être que l’ouvrage de Giraud, je ne dois pas omettre,
pour achever de le confondre & de le convaincre
d’impoftures & de fauiTetés tout-à-la-fois, de dire
deux mots fur la manière dont il a raconté qu’il étoit
parvenu à retirer d’entre mes mains la feuille de la
minute qu’il a fuppofé que j’avois fupprimée.
v
Au dire de cet impofteur, il vint chez moi avant
quatre heures du matin; il me furprit dans lefommeil,
me porta le piftolet fur la gorge ; qu’intimidé j’allai
dans mon étude, oà vinrent aufji-tôt les fleurs de
Segon^at & Rance; qu’ils y relièrent un infîant, fortirent enfuite pour aller à la meff'e ; qu’alors je lui
remis la feuille fupprimée ; qu’il fortit de chez moi
¿te. qu’ayant apperçu Salleneuvé dans la ru e, il lui
cria de loin : j e l a p o r t e , j e l a p o r t e .
Quel front ne faut-il pas avoir pour oier entre_
( a ) Comme dans le récit des faits j’ai prouve que la fentence
obtenue contre moi par le fieur de Segonzat, avoit été follicitée pac
Giraud qui avoit intérêt à faire déclarer ma donation nulle pour
obliger B ju ttin , je crois devoir m’interdire d’autres réflexions quant
aux reproches qu’on m’a faits, relativement à cette fentence.
*
�.( >7 )
prendre.de perfuader à la juftice des faits auÎTi fau^ç
qu’invraifemblables l mais à quoi ne doit-on pas
s’attendre dans une pièce qui n'eft qu’un amas mons
trueux de fauifetés, de fuppofitions, & un tiifu d’intri
gues déteftables \
Eft-il d’abord à préfumer que fi j'eufle été faifi de
la prétendue feuille Supprim éeje l’euile remife
Giraud, fans exiger qu’il me remît dans le même temps;
la feuille fubftituée? perfonne ne fe le perfuadera.
,
2°. A quelle époque & à quelle heure s’eft paifée
la fcène dont parle Giraud? cela eft elfentiel àfavoir,
& i l a eu la complaifance de m’en inftruire.
,
D ’après les aveux de ce notaire & ceux de Salleneuve , je n’ai gardé la minute que trois ou quatre
mois : auffi-tôt que je l’eus remife à Giraud, il s’apperçut de la iuppreiTion & fubftitution des feuilles ,
ce qui l’obligea à venir chez moi, pour me forcer à
lui remettre la feuille Supprimée : la remife de cette
feuille fe réfère donc au mois de janvier, ou de février
* 7 11 > puifqu il y avoit alors quatre mois que ma
donation (qui eft du ^Septembre 17 7 (5 ), avoit été
faite. O r, qui pourra fe perfuader que dans la rigueur
dé cette faifon, ou le jour ne commence à paroître
qu à fept heures, Giraud s’eft introduit chez m oi,
*^ant quatre heures du matin? que le fieur de Segonzat,
le fieur Rance qui demeure à plus de; trois lieues »
eMontaigut , y vinrent auffi dans le même moment!
^Ue Ç*^,aud étant forti de mon étude, apperçut Salle-*
�C ;8 )
. .
neuve dans la me ( c’étoit apparemment à la faveur
de la clarté de la lune ) , & qu’il lui cria de loin ,
j e la porte, je la porte \ Que d mvraifemblances à-lafois ; mais il eft un principe qui d it, quod non ejl
verifjimile, ejl falfitatis imago.
L,es fieurs de Segon^at & Rance fordrent de mon
étude pour aller à. la mejfe ! en vous expliquant ainfi,
Giraud, vous n’avez certainement pas fait attention
que tous vos concitoyens vous donneront un démenti
iùr ce fait, en vous rappelant que les premières meifes
ne fe célèbrent point aulli à bonne heure dans les
églifes de Montaigut. Achevons de confondre l’impofture de Giraud, par une dernière réflexion.
A la confrontation, j’ai rappelé ces faits à Giraud,
8c lui ai de plus demandé qui lui avoit prêté le piftolet chargé de trois chevrotines, qui lui avoit ouvert
la porte de ma maifon ( je n’avois point alors de
domeftique, & Giraud m’avoit trouvé endormi, ainfi
que ma famille ) , 8c s’il y avoit de la lumière dans
mon étude. Que m’a répondu ce miférable? q u il ne
javoit plus où il en étoit ; il avoit oublié fa leçon. •
Ah ! Giraud, calomniateur infâme, vous ne favez
plus où vous en êtes? la force de la vérité vous acca
ble ; la confcience vous reproche, les remords vous
déchirent : hé bien ! je vais vous apprendre où vous
en êtes, ou du moins, où vous devriez être : c’eft
à ma place.
•.Tant d’iniquités , tant d’impoftures, tant de for-
�C 19 )
faits pourroient-ils relier impunis ? quelles couleurs
ne faudroit-il pas emprunter , pour en peindre toute
la noirceur, pour exciter la juile indignation des
magiilrats & la rigeur des loix
N’eil-cepas un crime, en effet, & même un crime
énorme , que de charger un officier public d’une
faulfe accufation ? N’eil-cepas un crime, & un crime
exécrable , que de m’attaquer dans mon honneur ,
dans ma liberté, pour me faire perdre la confiance du
public ? N’eil-ce pas un crime , que de m’accufer
d’un abus de confiance , de fuppofer que j’ai été
capable de fouflraire une feuille d’un aéle authen
tique , & d’en fubilituer une autre à la place
Perfides calomniateurs, votre complot eil heureufement décoüvert; vos propos , vos démarches , vos
contradi<5lions , vos aveux même ont décelé votre
honte & votre turpitude. Il eil prouvé au procès ,
que c’eft Giraud qui a follicité la fentence que le
fieur de Segonzat avoit obtenue contre moi ; que
pour parvenir à faire annuller ma donation , & faire
enfuite paifer les biens du fieur de Segonzat à Bouttin,
Giraud avoit confervé la feuille fatale qui me retient
dans les liens. Il eil prouvé que Giraud eil feul l’auteur du faux que l’on m’impute , puifque l’inilruïftent de ce faux s’eil trouvé entre fes mains, &
il en a fait ufage , tantôt pour faire annuller ma
nation, tantôt pour me perdre dans l’efprit de
nies juges Si du public; il eil prouvé enfin par im*
�« o .y
vraifemblance des faits $e l’adcufation, par la fauiTeté
des dépofitions de mes délateurs , par l’évidence; des
contradictions , dans lefquelles ils font tombés , par
les pièces juitifîcatives que j’ai produites , & par les
dépofitions des autres témoins de l’information , ques.
dans cette affaire, il n’y a d’autres criminels que mes_
perfécuteurs. Y a-t-il de fatisfaétion publique , dé>
dommages-intérêts qui puiifent réparer le tort que.
des injures & des calomnies ii odieufes m’ont caufé,
& arrêter l’effet du poifon de ces mortelles impos
tures. ?
J ’obferverai en finiiTant, que ce n’eil point par
un efprit de haine & de vengeance, que je me fuis.)
permis quelques déclamations contre mes délateurs ; *
c’eft la néceiîité d’une légitime défenfe qui m’y a
obligé : j’y étois d’ailleurs autorifé par les loix_, puifqu’en même temps qu’elles défendent l’injure , elles
permettent de la repouiïer par les termes, les expre£
fions & les couleurs les plus vives : Licet enirn fanguinem fiium q u a
liter
,
S ig n é ,
qua l it e r
redimere ( a ) .
DESMAROUX.
( a ) Dit M ornac, fur la loi I , de bon, cor. qui ante fentenu mon, fib i »
cortfciv, Bart, fur la même loi.
,
...
j
�-
J
:
C o p i e du billet qui me fu t envoyé par le fieur
Tailhardat de la Fayette contrôleur, le 9 octobre
1 776.
» J E prie M. Defmaroux de vouloir fe donner la
** peine de paffer au bureau, pour me payer le conw trôle & infinuation de la donation qui lui a été
- » faite par M. de Segonzat, que f a i remife au n0w taire. . . . . il obligera fon ferviteur.
s ig n é
'
|
'
(j
T
a i l h a r d a t
de
F
la
>
a y e t t e
.
Cet écrit eft produit au procès.
Monfieur C H A B R O L , préfident
général criminel rapporteur,
j
lieutenant
Me G A S C H O N , avocat.
D
effayes,
procureur*
S ig n é D E S M A R O U X .
D É G O U T T E , ImprimeurLibraire, près la Fontaine des Lignes. I784
A R IO M
c hez M a r t i n
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Baron Grenier
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Desmaroux, Joseph. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Desmaroux
Tailhardat de la Fayette
Chabrol
Gaschon
Deffayes
Subject
The topic of the resource
faux
notaires
opinion publique
Orléans (Duc d')
donations
droits de lods
droits féodaux
abus de confiance
prison
coutume du Bourbonnais
témoins
faux témoignages
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Mémoire justificatif, pour maître Joseph Desmaroux, notaire royal et procureur au bailliage royal de Montaigut en Combrailles, prisonnier dans les prisons de la ville de Riom, accusé. Contre monsieur le procureur du Roi de la sénéchaussée d'Auvergne et siège présidial de la ville de Riom, accusateur
En annexe : « Copie de la pièce d'enregistrement par le contrôleur Tailhardat de la Fayette. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1776-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
61 p.
BCU_Factums_B0113
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0114
BCU_Factums_G0934
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Coverage
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Montaigut-en-Combrailles (63233)
Riom (63300)
Rights
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Abus de confiance
coutume du Bourbonnais
donations
droits de lods
droits féodaux
Faux
faux témoignages
notaires
opinion publique
Orléans (Duc d')
prison
témoins
violences sur autrui
-
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bd10b19b18f18aa74adbbffb5a612b8d
PDF Text
Text
6 ïf-
EMOIRE
DÉPARTEMENT
du
P u y - d e -D ô m e .
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J U
POUR J . J
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u st in
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I C
A
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I F
,
D U B O IS -L A M M A R T IN IE ,
L i e u t e n a n t surnum éraire des troupes d ’A rtille rie
de la Marine, Accusé.
Do nobis tristis sen tentia fertur.
J UVENAL.
J
E suis accusé d’avoir fait usage d’une fausse com
mission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement des
chevaux de luxe. Sur des bruits vagues et sans fon
dement , on m’arrête à Aurillac , on me traîne ignomi
nieusement dans les prisons de C lermo n t , et bientôt
dans la maison de justice du tribunal criminel de ce
département.
A
r ib u n a l
mè
�< V .j
Sans inquiétude, sur une accusation frivole qu’il
m’est aisé de détruire , j ’attendois impatiemment le jour
qui doit éclairer mon innocence , lorsque j ’apprends
que mes ennemis cherchent à prévenir contre moi l’opi
nion publique ; on répand que j ’ai contribué à la mort
de l’infortuné Colinet de Niaucel , l’intime ami de ma
famille, le mari de la sœur de mon beau-frère. On ajoute
que j ’ai participé aux journées désastreuses des 2 et 5
septembre à Paris ; on me représente comme un factieux,
1111 agitateur, un faussaire.
J e dois à ma famille , au public , à moi-même , une
justification complète de ma conduite , et le récit exact
de mon malheur : citoyens impartiaux , qui devez pro
noncer sur mon sort , lisez et jugez !
J ’habite le lieu de Fontenilles, paroisse de Jussac ,
district et canton d ’Aurillac , département du Cantal.
Mon père , originaire de Saint-Céré , département du
Loth , a servi avec distinction ; il a fait toutes les cam
pagnes de l’Hanovre, et s’est retiré capitaine de cavalerie ;
il a épousé Ailarie-Anne Farganel , dont la famille est
illustre par les grands hommes qu’elle a produits.
Mon frère a în é , sert en qualité d’officier dans le
corps d’artillerie de terre, en garnison à Nancy. Mon
frère c a d e t, commande en second le dépôt du 220 régi
ment de cavalerie , ci-devant N avarre, en garnison à
Aurillac.
Voulant suivre la carrière des armes, j ’entrai dans
la marine de la division de Rochefort. Une maladie
considérable occasionnée par l’air des marais qui envi
ronnent cette ville , m'obligea de quitter ce service j
�( 3)
mais depuis, les ministres do n t'je suis connu, m’ont
engagé à me faire inscrire sur la liste des lieutenans sur
numéraires d ’artillerie de la marine: on savoit que j ’étois
expert dans cette partie , et j ’eus la promesse de m’em
barquer sur la première flotte qui armeroit pour la répu
blique.
J e jouissois paisiblement dans mon domicile des
bienfaits de la révolution , lorsque mes concitoyens, qui
connoissoient mon ardent amour pour la chose publique ,
mon respect et ma soumission aux lois , mon empres
sement à les exécuter, me firent l’honneur de me nommer
commandant de la garde nationale de Jussac.
J e me rendis digne de leur confiance en leur inspirant
les scniimens du véritable patriotisme ; c'est-à-dire,
amour de l’ordre , soumission aux l o i s , respect pour les
personnes et les propriétés.
Au mois de mars 1 7 9 2 , une foule d’individus égares
partirent pour Mont-Salvi, et vinrent me solliciter de me
mettre àleur tête ; je refusai constamment de m’y rendre,
quelque danger qu’il y eût dans ce refus. Je prévoyois
des troubles ; je leur écrivis avec fermeté pour les dé
tourner de leur dessein, pour prévenir toute infraction à
la loi ; ma lettre qui fut imprimée dans le temps, fit
le plus grand effet ; elle est jointe aux pièces de mon
procès.
Quelques ennemis de la chose publique , suscitèrent
peu de temps après des troubles dans la ville d’Aurillac ;
je m’y rendis à la première réquisition, à la tête de mes
camarades ; mais j ’arrivai trop tard pour prévenir les
premiers excès } j ’appris avec douleur que l’infortuné
A 2
�<W o
(4 )
Colinet avoit été victime de la fureur du peuple : sa
mort m’arrache encore des larmes ; il ¿toit l’ami de ma
famille , ma sœur a épousé Alexis Vigier de Fumel s
frère de la veuve Colinet.
N e pouvant lui donner des secours, j ’arrêtai les
progrès du m al; je rendis la liberté, au péril de ma v ie, à
plusieurs prêtres réfractaires qui alloient être immolés.
C ’est cette conduite généreuse qu’on voudroit lâchement
calomnier : ces faits néanmoins furent consignés dans
une adresse lue à l ’assemblée nationale par le citoyen
Pages Vixouse , député pour solliciter une amnistie en
faveur de quelques habitans d’Aurillac. Dans cette
adresse , devenue publique par l’impression, on rend
justice à mon zèle dans l ’exercice de mes fonctions, à
mon amour pour la liberté.
E h quoi ! un citoyen généreux, ami de l’ordre et des
lo is , qui a reçu plusieurs fois des éloges publics, seroit-il
donc un faussaire, un factieux? Cette idée me fait fris
sonner d’horreur. Livré à moi-même, confondu avec des
criminels, je croyois du fond de mon cachot inspirer à
ceux qui me connoissent au moins un sentiment de
compassion et de pitié : sentiment bien stérile , mais un
peu consolant; j ’apprends au contraire que l ’acharnement
de mes ennemis ne fait qu’augmenter ; leurs efforts
seront impuissans.
Au mois de mai 1792 , je fus député à Paris ; j ’assistai
à la fédération du 14 juillet ; je fus n o m m é président du
comité de subsistance des fédérés des quatre-vingt-trois
départemens : j ’en ai le certificat dans mes pièces. Ma
conduite m’attira quelque confiance ; le 10 août 3 je
�( 5 )
commandai le peloton qui enleva le drapeau des Suisses
au château des Tuileries ; je m’y iis remarquer par
quelques actions d ’éclat ( i ) ; je n’entends pas m’en
¡prévaloir1; si' dans cette journée mémorable, je fus utile
à laf cliose publique, ma récompense est dans mon cœur,
et mes foibles services ne diminueroient pas la gravité du
délit dont on m’accuse, si j ’en étois coupable.
J e ne dois cependant pas passer sous silence que le
même jour, je haranguai avec courage l’assemblée que je
présidois, et j ’eus le bonheur de ramerier-à des sentimens
de modération une foule de citoyens égarés, qui vouloient
massacrer sans pitié les signataires de la protestation des
vingt-hilit mille v ils durent la vie à mes efforts.
' - J é me' retirai avec calm e, et vécus en citoyen privé :
j ’étois bien 'élôigné de. prévoir les scènes abominables
des 2 e t ' 3 septem bre, moins d’y participer ; je n ’en
appris les détails que par le bruit pu b lic, et le seul
souvenir me fait dresser les cheveux ; affreuses , exé
crables joüPnéés 1 que la> postérité n’apprendra qu-’avec
horreur ; qui seroient l ’opprobre de la nation’ , si on
pouvoit les reprocher aux Français: Mais dans ces grands
mouvemens, il se trouve bien peu de personnes qu’on puisse
étt accuser ; il né faut qu’tin.soélérat, hardi et entreprenant , :la multitude jk’émeut en aveugle , le crime des
mouvemens populaires ne tombe que sur celui qui les
cause.
‘ Oh mb -pardonnera sans doute cette courte réflexion;
( i ) ' J ’ëtt Vâppôrfê' une<atte&fofioïï
H
^oV ( j )
A 3
�IV
/
o
je n ’ai pu résister au plaisir de justifier mes concitoyens
des reproches injustes de nos voisins à la nation française^,
toujours magnanime et généreuse.
j,
J e passai toute la journée et une partie de-la nuit du
2 septembre chez la dame B e lleville, avec le citoyen
Contrastin , prêtre constitutionnel d ’Aurillac ; le lenr
demain, je me rendis dès lè matin chez le citoyen Pages,,
bourgeois, mon compatriote, qui habite Paris, rue Mauconseil, n ° . 50 : j ’y dînai avec une compagnie nombreuse;,
je partis deux jours après pour M elun, avec une commis^
sion de la commune de Paris, et du pouvoir exécutif,,
pour la levée des chevaux de lu x e , que l’assemblée
nationale avoit mis au pouvoir des ministres : ma commis
sion concernoit principalem ent les chevaux des émigrés;.,
je m’en acquittai- avec succès : les papiers publics du temps
vantèrent mon patriotisme, etmonzèle éclairé(1). Enfin,
je revins à Paris avec le projet de me retirer dans ma
famille, où j ’étoisappelé pour quelques affaires; d éjaj’avois
arrêté ma place à la diligence, pour le 12 novembre, ainsi
que je le prouve par la feuille des messageries , lorsque
je me présentai, dans les hureaux des ministres pour,
annoncer mon départ à ceux que je connoissois. Dans ce
temps, l ’armée manquoit. généralement de chevaux : il
étoit naturel, que les chevaux de luxe appartenans aux
émigrés,.fussent employés aussi utilement ; la levée n ’en
avoit pas été faite dans les départemens du C a n t a l, du
L o t h , de l ’Aveyxon.^du Puy-de-Dôme et de la Corrèze...
'*
"
1
■—
1
1
'
11
'
CO Voyez les annales patriotiques du 20septembre, n°,.a6^.
..............
�.
£> v\
(7 )
Orr me crut propre à donner des renseignemens, et m in e
à faire cette levée ; on me dit de passer aii; bureau' de la
guerre, où je recevrais des ordres i^mais , n ’ayant point
trouvé le chef du bureau à qui je devois m’adresser, je
me rendis chez le citoyen B ru n e, commissaire - général
du pouvoir exécutif ; je priai un de ses commis de me
dresser un projet de commission que je devois envoyer
au ministre du premier endroit , où je m’arrêterois ,
parce que la diligence devant partir le même soir, je ne
pouvois retarder mon départ sous aucun prétexte.
L e commis fit le projet; il prit dans le tiroir de son bureau
un cachet du citoyen Brune et l’adapta à ce projet; il me
remit ensuite le tout. J e ne peux pas être soupçonné sans
douted’avoircherchéàcontrefaire les ordres duministre.,ou
le cachetde la république : j ’avois déjà étépourvu de sembla
bles commissions ; je savois qu’elles étoient imprimées, et
celle dont il s’agit est une écriture privée ; je savois que les
véritables commissions sont munies d’un sceau sur lequel
est inscrit : République française > et sur le projet dont il
s’agit,, le sceau qui y a été adapté'porte : Commissairegénéral du pouvoir exécutif. On dit que la signature du
ministre Pache qui se trouve sur ce projet, n ’èst pas le
seing du citoyen Pache ; mais cette signature n’avoit été
mise a p p a rem m en t que pour que le projet fût figuratif;
d’ailleurs il est reconnu que l’écriture de ce projet, et du
seing du ministre , n’est pas la mienne ainsi on ne
peut me faire aucun reproche de l’avoir contrefaite.
J e partis avec ce projet dans ma poche : le plaisir de
me réunir à ce qiie j ’ai de plus c h er, me fît Bientôt
oublier pour quelques instans 3 et le projet de commission^
'
�et les ordres que j ’avois reçus : j ’arrive; màis voulant être
utile à la république, je m’informe à Clerm ont, s’il y a
beaucoup de chevaux de luxe qui appartiennent aux
émigrés dé cette v illè <;1j ’écrià-'ràu ; ministre pour' lui
apprendre1 mon arrrvéé ;''ët lui" dfemaridër'- de nouvéaux
ordres ; je crois pouvoir -m’ouvrir à quelques citoyens; sur
l ’objet de ma mission et de mes'Recherches. J e leur dis
que je-suis commissaire du ■pouvoir exécutif; mais là
preuve que: j e ne voiilois faire aiicun usage d e ;cë projét
de commission, c?ëst que jè^né'-I’ai pas présènté auxxorps
administratifs ; c’èst que je n’ai fait aucune levée , aucune
demande.
•„
*
,
* *j
' 1 [• OI. * ' Í*' '
''
U n jour oïl me conduisit avec affectation Háns l’éciirie
d ’une aubergé, pourm‘y faire vóir qiíátrb chJéVaüx superbes1^
qui appartenóíéñt, disoit-on, ’au’^itqy'én C haret, Amé
ricain , demeurant actuellement°én cette ville de Riom ,
chez la citoyenne . Deçhapte*
sá párente,' Sur une
fdflexio'ïi qui °ínwéchappa‘V que c$s|fch£vaú¿ seroient
plus utilement employés à traîner les charriots dè'i’armée
oii conçut quelques inquiétudes. Ón me'párlá du proprié-2
taire, comme d’un homme honnête et estimable ; on me
vanta l’amabilité et1 les ciiarmes de tsa,parente.; et peu de
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Tours après on me du qu elle etoit instruite de mes
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i :;n*irf «-i oA . .»tôt íji ir
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observations, et 'qu’elle .en çtoit alarmée.*
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J ’et oís alóte "sur le point db partir pour Aurïllac ;
d é jà 'j’avois fait mon marché pour m’y Faire conduire' ; je
vins à Riom ; je me présentai chèz la clame Dechaptes
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pour la, rassurer sur. ses craintes ; . je ne voulois donner
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uonibraire a personne.; ae retour à Clermont , je.,tus
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II.-- ’ iííiiint ZOUt l /Uî>
'»OJICJC
mande u la municipalité ; on m interrogea; je ne craignis
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9
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pas de m’ouvrer,ayec confiance au conseil' de;Ia comirume ;
je dis que j ’étois commissaire du pouvoir exécutif ; que
cependant je ne faisois aucun usage des ordres quô
j ’avois reçus ; que je n ’ignorois: pas qu’un, décret de la
convention révoquoit toutes les commissions du pouvoir
exécutif ; que je ne in’étois permis aucune infraction à
cette lo i, et qu’on pouvoit être tranquille.
On me demanda si je comptois faire quelque séjour à
Clermont ; je répondis que j ’y étois encore pour deux pu
trois jo u rs, et tel étoit mon dessein : un -incident que
personne n ’ignore, me fit partir le lendemain ; ce ne fut
point un motif de crainte qui hâta mon départ ; j ’avois
l’intention de revenir peu de jours a p r è s p a r c e que
j ’attendois des ordres. J ’étois d’ailleurs maître de mes
actions , dès que je ne troublois pas, l ’ordre public. Quel
fut mon étonnement, lorsqu’arrivé à Aurillac, je me
vis arrêter en vertu d’un mandat d’amener du juge
de paix de Clermont, qui avoit pris la précaution d’en
envoyer plusieurs expéditions sur les routes circonvoisines ; on me conduisit comme un criminel dans les
prisons ; je fus placé dans un lieu, où la pluie et la neige
pénétroient jusqu’à mon lit. J e contractai une maladie
sérieuse dans un séjour aussi mal sain ; je crus que sans
blesser la ju stic e,.o n pouvoit soulager l’humanité souf
frante ; je fis parvenir ma réclamation aux magistrats
du peuple : des commissaires de la municipalité se trans
portèrent dans ma prison; e t , pour toute réponse , je
leur entendis dire ironiquement , qu’il falloit me faire
faire une cheminée la polonoise, et faire dresser un lit
de damas.
�( 10 )
Enfin , j ’ai été mis en état d ’accusation ; je suis pré
venu d ’avoir méchamment et a dessein Je nuire , présenté
à plusieurs personnes une pièce que je savois sciemment
être fausse , et d ’en avoir fait usage.
J ’ai été transféré dans la maison de justice de ce tri
bunal ; pendant le voyage , on m’a chargé de chaînes
pesantes , et serrées si fortement que j ’en ai été assez
grièvement blessé en plusieurs endroits ; je me ressens
encore de mes blessures.
Sont-ce là les précautions que recommande la loi pour
s’assurer des prévenus ? jé m’abstiens de toutes réflexions
sur un traitement aussi cruel ; je ne cherche point à atten
drir. Fort de mon innocence , je n’ai pas besoin d’em
p lo y e r cette ressource pour co n vain cre mes juges.
J e sais qu’on a fait entendre contre moi un nombre
prodigieux de témoins ; je me réserve de discuter leurs
dépositions, lors de l’instruction publique de mon procès;
j ’ose assurer d’avance que le résultat de toutes ces dépo
sitions ne donnoit pas lieu à un mandat d’amener contre
moi ; il n’est aucun témoin qui ait dit ou puisse dire que
j ’aie jamais fait usage de ce projet de commission ; que je
me sois permis de mettre ;\ contribution aucun citoyen ; '
j ’ajoute même que j ’en aie eu l’intention ; et quand je l’aurois eue , comment juger l’infention ? où est la loi qui la
punisse ? on n ’en trouvera point dans le code pénal ; il ne
peut pas en exister dans le code de l'humanité.
Ci toyens, l’em] loi dont je suis honoré , m’appelle au
service de la république : l’artillerie de la marine sur-tout
a besoin de gens experts dans cette partie. J ’ose dire que
�je serai utile à ma patrie par mes services; je n ’attends
que votre jugement pour voler à mon devoir , et je
l ’attends avec autant de sécurité que de confiance.
D
ubois
-L
A R I O M , D E L’ I M P R I M E R I E
am m artin ie
DE
.
LANDRIOT.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois-Lamartinie, J. Justin. 1792?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dubois-Lamartine
Subject
The topic of the resource
faux
prison
marins
contre-révolution
troubles publics
homicides
prêtres réfractaires
réquisition de chevaux
émigrés
témoins
opinion publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour J. Justin Dubois-Lamartinie, lieutenant-surnuméraire des troupes d'Artillerie de la Marine, accusé.
Table Godemel : Faux : 3. imputation d’avoir fait usage d’une fausse commission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement de chevaux de luxe.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1228
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Jussac (15083)
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53186/BCU_Factums_G1228.jpg
contre-révolution
émigrés
Faux
homicides
marins
opinion publique
prêtres réfractaires
prison
réquisition de chevaux
témoins
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52914/BCU_Factums_G0306.pdf
75f4cde9a31209f1863a90a3b666d485
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Caufe conti
nuée au Lundi
18 Juillet, Aud ie n c e d e ne u f
P O U R J e a n .M
anenc,
Laboureur, Appellant
,
C O N T R E le fieur J U E R Y ci-devant Mar
chand en la v ille de Saint-Flour Intimé.
QU E d’objets à traiter nous préfente
cette conteftation ; d’un côté M anenc
ignore une Sentence furprife par défaut par le fieur Juery en la Sénéçhauffee de Riom ( infirmative de.deux Sentences
qu’il avoit obtenues contre lui au Bailliage d’A n delat) parce qu’on lui fouffle la copie de l ’affignation & de la fignification de la Sentence, elle
paffe en force : de chofe jugée, f ans( q u ’il en ait
' connoiffance. D ’un autre côté , je fieur Juery
veut faire payer à M ânenc une iomme qui ne
peut lui être due que par des gens étrangers
à M an en c, il a obtenu en conféquence une Sen
tence dans un Tribunal incompétent ; il a gardé
A
�cette Sentence en poche pendant plus de treize
ans fans en faire ufage , ni même La faire
, fignifier ; il fait enfuite arrêter en pleine foire
¡ce V ieillard rëipe&able ; il fait conduire cet
' homme honnête comme un fcélérat par des Cava
liers de M aréchauflee, des Huiiïiers , des Serents, à trois lieues , dans les Priions de Saintlour , quoique dans le lieu de fa capture il y
eût des prifons, lui refufe copie du procès ver
bal d’empriionnement pour lui fermer la voie à
toutes réclamations.
. Q uel homme que : ce fieur J u ery, qui exerce
tant de cruautés ! M anenc fe plaint, & en la for_me^ ôc air fond de la Sentence qui a fervi de
prétexte à fon emprifonnement, elle eft rendue
par des Juges qui n’en avoient pas le p o u v o ir,
Manenc ne doit pas la fomme qu’on lui demande;
'ces moy'ens entraînent la nullité de fon emprifçmnement, qui eft encore nul,parce qu’on a viólele
privilege iacré des fo ire s, ôc qu’il n’étoit même
pas contraignable par corps ; voila les principaux
moyens qu’on fe propofe de développer. Il
attend des Sumieres &i de l’équité de iès Juges
la juftice qui lui eft d u e , & une réparation proporportionnée à l’outrage qui lui a été fait.
A infi qu’il'eft d’ufage dans la haute Auvergne
parmi les habitants de la campagne , pour parvenir
"au paiement des im pôts, & fournir à la nourriture
& entretien drune riombreufe fam ille, Manenc
. joignoit la qualité de Marchand à celle de Labou
f
�reur; il ne fut pas heureux dans fon commerce;
il fe vit forcé d’avoir recours aux lettres du Prin
ce qu’il fit notifier a fes créanciers ( æ ) , & qui
furent entérinées par Sentence du Bailliage d’A n d e la t, féant en la V ille de M u rât, du premier
Décembre 1 7 ^ : le fieur Juery fut le leul qui
oiat contefter fa ceiTion de biens. D eu x Sentences'
du même Siege des 12. & 2.9 du même mois
de Décembre rendent d’abord fes efforts impuiifants ; celle du 29 déclare commune avec lui la
Sentence du premier du même mois. Appel en la
Sénéchauifée de R iom de deux Sentences. Il a la
précaution de faire foufïler ,1’aiïîgnation ; n’ayant
pas de contradi&eur, il obtient Sentence par dé
faut le 10 Décembre 1 7 6 0 , qui déclare M anenc
déchu du bénéfice des deux Sentences, & le con
damne aux dépens ; M anenc a toujours ignoré
cette Sentence, la copie ne lui eneft pas parvenue ,
il n’a connu la Sentence qu’au moment de l’ A u dience du proviloire, où le défenieurdu fieur Juery
en excipa qu’au moment où il ne pou voit plus,
s’en plaindre; les dix ans accordés par la loi pour
en interjetter appel étoient expirés. Heureufe-'
ment cette Sentence ne détruit pas celle du pre
mier Décembre qui conierve toute fa force.
L e fieur Juery voulut fe procurer un titre de
créance contre M anenc, en conféquence il expofa
dans une aifignation qu’il lui fit donner en la Jurifdi&ion Confulaire de la V ille de Brioude, par
( a ) La Sentence fait mention de la notification.
A %
�exploit du 9 Février 1760 , qu’il avoit vendu a
des nommés Cheminade, freres , beaucoup de marçhandifes, pour raifon de quoi il avoit obtenu
contr’etix une Sentence confulaire ( & ) , que ces
nommés Cheminade avoient vendu de ces marchar.difes aux fleurs Cochelin & Soucheiroux
pour une Tomme de 1336 livres, & que Manenc
étant aifocié defdits fleurs Cochelin & Souchei
roux, ainfi que des Chem inade, il avoit droit de
répéter contre lui cette fomme de 1336 livres; quetde plus Manenc étant convenu, en préfence
de gens dignes de fo i, qu’il devoir une fomme de
^36 livres à Chem inade, il pouvoit, en exerçant
les droits de fon débiteur, qui étoit hors de la
P ro vin ce, lui demander cette fom m e; il conclut
à ce que M anenc fïit condamné par corps au paie
ment defdites deux fommes revenantes 'a celle de
1 8 7 1 livres, la Sentence fuivit de près l’affignat i o n ( c ) ; le fieur Juery a gardé cette Sentence
en poche pendant plus de 13 ans, fans oieren faire
ufage : ce n’eft que le 2.2 Juin 1773 qu’il paroît
l’avoir faite fignifier pour la première fois ( d ).
( £ ) On vo it en effet dans fon doifier une Sentence des
Juges -C o n fu ls de Brioude, qui condamne les nommés C h eminade au paiement de la lomme de 2887 liv. 18 f. d’une
part, pour des marclundifes qu’ils avoient pris, y eft il d it,
dans Ton magafin , & celle de 874. liv. d’autre part, pour des
im rchandifesqu’il avoit données à Pierre L om bard, dont ils
avoient répondu.
( c ) Elle eft dudit mois de Février 17^°*.
( d) La fignification eü au dos de l’expédition de la Sentence,
la copie n’en eft même pas parvenue à Manenc.' y
�5
_ L e décès des pere &c mere du fieur Juery l’avoit
laifTe daps un état d’opulence, dbrit lis ttacé’s o n t *
femblc bientôt clifparoître ; car après quelque tem psT
de commerce il a eu recours au bénéfice decefÎioii^
fes créanciers l’ont laifle long-temps Çe ) languir
dans la plus grande détreiTe , & flotter entre l’e£
pérance.& la crainte de ne poiivoir' eh obtenir uivtraitement-fa.yorable , pendant .ce ténips 'ies-débî^1
teurs ont joui d’une eipétîe de treve qui a' été
rompue par les plus fanglântes des guerres ; car
devenu libre, il a pourfuivi vivement tous c e u x :
qu’il a prétendu être Tesd T ire u rs .L à |ïrifon’fétojt
lé prélude-dê$ lpoÜriüitès 2 M anénc en à fait le
trifte eilai. !
™ ••
■Le. 12 N ovem bre , .jour de grande foire en
ljC.ville, de-M urât,':1e iièur 'J.udry s y eft tranfport’e"
l’année d ern icréJ773 ^'M ahèrit ;y. étoit aùifi, le"
fieur Juerÿ paroît au fo ira i fur lés 1 1 . Heures dü:i
matin j il promené fe^s’ règ'ards de tout c ô t é , il
appercoit Manenc dans, la foule, qui vaquoit à iès
affaires^ il v^ appeller auiu-tot une troupe d argouiîhs., Jls arnvÆnt , ,ils''fiififfcnt leur proie , lesj!
uns au collet'/lés ¿ u t f è ^ r ’ tfëFrierè'., lé plrfüflcpt
avec violence hors du fôiral dans la V i l l e , &
l?amenent ,d^ns: l’auberge ' dü‘ nommé O la g n o l
A u bmiit’ de ! cettefCÔViôrté'V lé2, jb'eupl# Voiijours'
curieux. 10urne Jes1regard?j^ e rS ce' fpeftaclé ^/^at
tendrit du mauvais traitement qu on exerçoit en-*
vers ce Viéillafd iexapériaire1,- qui ne failoit ¡aucune( e ) Il paroît qu’il f i l refié dans cetitai^a.u
.n o n tvuh iiu «a aiüîfjij 35 bj- oy
0j
�6
.
. .
refiftance ;
cours de la foire eil un moment in
terrompu ^ on rfe demandé Ton n o m , on le croit
crim inelv prefçjuè perfonne n’ignore le privilege
des foires de cette Province. ( j )
,
_ A rrivé chez O la g n o l, le iieur Juery déclare à
M anenc qu*il.va^etre êmprifonné. ‘faute de paye
ment àe-la. iompie de .1^872 liv. de principal, in
térêts & frais portés par la Sentence des Juge<:Confuls de B rioude, du 26 Février 17 6 0 ; M a -'
nenç iu rp ris, s’ écrie qu’il ne lui doit pas cette
iomme , demande copie de la ‘Sentence & la p e r-’
miflion ^ ’fin conférer a u n : Jurifconfulte ; o V n e !
l’écoute point , on lë tient“en cHarté'privée Jdans
l ’auberge, tandis que la cohorte fe fortifie par un
ample; dîne,;ou. le vin n etoit pas épargné. A u iïirto t.
~ \ "1
"1 ‘ ' r c
si 1 ‘i* * •
. • : j -.: ■
■ >,h r H
après on le,, rel^iut ; oc q u o iq u u y ait des puions
ei) la,ville <je M urât > on le fo rt'd e la v illé , cm
V - i •*. 1 ■ ¥J. {<*• ALjf... -p,..
; )'rf,; j
J '
!
prend le chemin de Saint-Flour, on 'l’àmene
on lui fait faire trois lieues dans le grand chemin,
p.^yé[ de..gcns qui àlloient & venoîeht de. la foire-,
efcorté Jie ilciix,r|pavaliers d e / M a ^ c Î ’uh
Èfuiflier-, § f de. trois; Eecors^Çç'),. ,‘éxpoié’aüx inluhes &; violences de. , ¿eux cjui le èonduiioient,
& regardé ççjniipe up.jcçlératpar tous les pàfïànts;
ijx perfonnés,,poui,.conduire un. vieillard ‘infirme
Jgxage^ait^ç?: on n ^ ^ t^ re n d ra point de decrire
“ r( / ) ’ Cc qm V p » côhtribii'er ericore<à le faire croire crimi
n e l, :c!eft qu’il .¿toit efcorté de deujc Huillîers, de cinq R ecors & d ’un- Cavalier de. Maréchaufl'éçi_lç,proCès v e r b a l‘ de
cajrtVrd'eri'feîï ntentibti^u suub
iis ¡j
jîq-r, Ji ( )
( g ) Le procès verbal de capture en fait ihentionl
�>7
tout ce que ce vieillard vertu eux, cette ame hon
nête eut à foufFrir tout le long du chem in, tout
cela eft plus- facile' à 'concevoir qu-à décrire ;¡enfin
^arrivé à Sairit:Flour,' il'eft m isenprïionJ znnnoo
Quelle nouvelle* pôur-üné épotife téndrêyipQik
des enfants chéris ! ils ne tardent pas a l’appren
dre , ils fondent en larmes , leùrs am is, leurs pa
rents, leurs 'voifiris ont beauf lés c<irtfô]err;r:ils jne
peuvent porter rerriedë a leurs iniux ; ils-Îpwti tour
à tour le voyage dé S .F lô ù r pôù&iècouriïu&coïiioler cet époux , ce pere infortuné , & après les
premiers mouvements confacrés à la douleur, on
¡.délibéré f u r ie parti qu’il y a^à,,prendre ,,O0.(CiOnfulre l’HomnÉie de, Loix j-ile ft d’^yiç^qpeç iem prïfonnement eft n u l, qu’on eft contrevenu au. pri
vilège iacré des foires, que Manenc n’étoit pas d’ail*
leurs eontraignable par corps.,Manenc ne^o^vapt
, avoir copie diï procès verbàjl de fâ capturé 71F )ùi
deverioit clifficiléJdé fe jpoùryo^r ; ril de.jA^iïd^L‘au
.Concierge un j certificat de l’ééroÜ .qui avoit 'dû
être fait de fa pèrfonnej, ( le Conciergè, éft plus
, traitable que le fieür Juery ’& l’Huiiîiér* ‘j il^ ’oBt tient ? il préiente requête a (|a 'C o u r^ q ü i:lé'i*éçpit
Âppellant d e 'la ' Seintence' clés"^Çonilils0, fait dëfeniedepaiïer outre , & indique un jour fur là dèijnan Je en élârgiilèment proVjiîbire • *au jour indiqué
*on plaidé connradi&oirénient, lé fie'ür Juéry èxcîpê,
p^urlapremiere fois , de là Sentence d e m o m , ‘le
D é fenfeur .de Manenc n’a ^ le lE m p s 'lÎe / 'l^xCmi•ner, il invoque l ’art.'62 du.litre ,2.4. d eja Çcjut^-
�r
Q ?• •
. n, ."T •••' *)■
•*
:* * ' O
me de cette P r o v in c e le Défenfèur du fieur Juery
i déplpie tout çej que ^fon. éloquence & fon génie
connus lui/oupiiTefif; pour éluder l’application ,de
via Loi;'.cependant; çpn,vaincu^de l’inutilité de fes
-efforts, il confient a la fin a l’élargifiem ent, en
*donnant caution ; la.Cour rejette le correftif, &
-ordonne (Jt) l’élargiifement provifoire purement
fimplement ; e’eft en vertu de cet A rrêt, que
-M anenc a"été; élargi des prifons de S. Flour.
c-i
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■
_____
#
d'incompétence contre la Sentence ’de la
JuYij'diclion Confulaire de SHoude. i {'
.•
•
..
.
Manenc refte au lieu de la Moulede > Paroilïè de
la VeyiTenet, de la jufticerde C heylanne, reiîort
J<iu .Bailliage. d-Andêlat ; conformément, a la D é
claration du ^AjVril 1 7 5 9 , l l 'devoit Têtre alfigné
e n la Jufiice dé Cheylanne•&: non en là Jurif¿idion Confulaire de B rioud e, éloignée de plus
^de ifipc liewes ;de ion domicile. o
J
Onjnie peut, pas ^prétendre que cette Sentence
pa^ïee'en force, de çhoiè jugée,, parceMqu’élle
de 17.60 ; ' elle n a été fignifiée ,Jpour la pre' iniere fois . quelle %% Juin 1 7 7 2 ; le .délai de dix
~t. •T:1. . ,
f 1 ‘-i« •
'•
l il
ans.,acçorxüâ .par , la lo i,, pour interjetter appel,
a
S.
T !• ?.
1 | p
• /y
,.né çommgnce^ a.j;Jcot}riij que du jour, de la ïigmh*( h) Arrêt d u 'io Décembre 1773- Les(Mrs. qui ¿toient de la
“ chambré fe;rappellëront fans doùte des motifs de leur Arrêt.
cation *
�cation ( z ) , & non du jour que la Sentence eft
rendue.
Envain prêtendroit-on encore que l’appel d’inçompétencc n’eft pas recevable, parce que l’Arrêt
qui reçoit Appellant ne fait pas mention que l’ap■ pel a été interjette comme de Juge incompétent j
M anenc vient d’expliquer ion appel par une re
quête ; il déclare qu’il eft Appellant, tant comme
de Juge incompétent qu’autrement.
A u furplus , le fieur Juery n’y gagneroit rien ,
Meifieurs les Gens du R oi qui veillent fans ceiïè au
maintien de l’ordre établi des Jurifdiâions, après que
la procédure leur iera paifée fous les yeux , ne
manqueront pas, en portant la parole, d’interjetter
appel de cette Sentence, comme de Juges incom
pétents.
§ 1 1 .
Moyen fu r le fo n d de F appel de la Sentence des
Jug es- Confuls de Brioude.
- L e fieur Juery demande a Manenc une fom
me de 133 6 livres, pour la valeur des marchandifes qu’il prétend avoir vendu aux Chem inades,
& que ceux-ci ont vendu aux fleurs Cochelin &
Sûucbciroux , ôc c e , dit-il , a caufe que M anenc
étoit aiîocié d’un côté avec les Chem inade, & d’un
( i ) Arr. 17 du titre 27 de l’Ordonnance de 1667.
�autre côté avec les fleurs Cochelin & Soucheiroux.
La prétendue aiïociation de Manenc avec les
Cheminade n’a jamais exifté ; le fieur Juery ne
fauroit adminiftrer la preuve du contraire. Il ièroit
indifférent que Manenc eut été ailocié avec les
fleurs Cochelin &L Soucheiroux. Le fieur Juery
ne peut pas leur demander le prix des marchandifes qu’ils peuvent avoir acheté des Chem inad e , il convient ne leur avoir point véndii ces marchahdifes, il déclare les avoir vendues aux C h e
minade, il n’a donc d’a&ion pour en demander
le prix que contre les Chem inade, qui font feuls
les acheteurs.
Indépendamment de cette queilion, il reileroit
encore la queilion de fa it,d e favoir s’il efb vrai
que les fleurs Cochelin & Soucheiroux ont réelle
ment acheté des Cheminade les mêmes marchandifes que ces Cheminade avoient acheté du
fieur Juery , & qu’ils n ’en ont pas payé le prix.
L e fieur Juery demande encore une fomme de
■536 liv. qu’il ioutient que Manenc a déclaré en
préfence de gens dignes de foi aux Cheminade.
- - Quand le fait ieroit vrai ( 'c e dont on fe gar
de cependant bien de convenir ) Manenc pour-'
roit bien avoir payé cette fomme dans l’intervalle
de cette prétendue déclaration à l’afiignation ; d’ail
leurs ce n’étoit pas ainfi que le fieur Juery devoit
iè comporter ,* il auroit dû faire une faifie-arrêt
entre les mains de Manenc de tout ce qu’il auroit
pu devoir aux Chem inade, demander ion afïir.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
9
*
�II
U3
mation : ces Cheminade n’étoient pas décédés, ils
pailpient une partie de l ’année/.dans leur patrie r
ils dévoient être mis en caufe. .
-,
L e fieur Juery ne poüvoit pas demander la con
trainte par corps ; la ceflion de biens de M anenc
étoit admife ; les Sentences du Bailliage d’Amdelat
des I er. 1 2 & 19 Décembre 1759 étoient ren
dues; le fieur Juery n’avoit pas encore obtenu ia;
Sentence de la Sénéchauflee de R io m , qui eit du
10 Décembre 176 0 .
£ Il refte encore à faire voir que la Sentence.de
la Sénéchauflee de R iom n’empêche pas qué la
ceflion de biens de M anenc ne doive avoir lieuÿ
même vis-a-vis du fieur Juery. La Sentence du
Bailliage d’Andelat du premier Décembre enté
rine les lettres de reitifion de biens obtenues par
M anenc avec fes créanciers ; la Sentence du 29
déclare la Sentence du premier commune avec
le fieur Juery. Perfonne, ni même le fieur Juery,
ne s’eit plaint delà Sentence du premier Décem
bre , elle eft donc paflee en force de chofe jugée j,
la Sentence de la Sénéchauflee de Riom du ro Dé-,
cembre 1760 ne fait que déclarer Manenc déchu de
l’effet des Sentences des a i & 29 Décem bre 1739;,
elle ne le déboute pas de la demande en entérine
ment de fes lettres de ceflion de bien s, ellc^laiiîe tou
te fa force à la Sentence du 1 D écem bre, dont il n’y
avoit pas d’appel. Les Parties font donc dans le mê
me état qu’elles étoient avant que le fieur Juery conteftat la ceflion de biens de Manenc ; or avant
t
�IX
cette conteftation la ceiïion de biens de Manenc
$voit été admifè, elle avoit lieu ^contre tous fès
créanciers, & par conféquent contre le fieur Jue
r y , dans le cas où il auroit été créancier.
Quoique cette Sentence de la Sénéchaufîee de
R iom n’empêche pas que la ceiîion de biens de
M anenc n’ait lieu ; cependant il en auroit'inter
jette appel, s’il l ’avoit connue, fur-tout en ce qu’elle
le condamne aux dépens que le fieur Juery a fait
ta x e r, &C qui fe montent à une fomme de 4.6
liv. 5 fols i l deniers (A) ; mais le fieur Juery a
toujours eu le fecret de lui faire foufïler les copies;
il n’eft que trop ordinaire de voir les Sergents,
ces Miniftres fubalternes de la Juftice, fe prêter à
de pareilles manœuvres, qui ont fouvent des fuites
très-dangereufes, en ce qu’elles mettent celui qui
eft condamné par un jugement dont il n’a pas
connoiiîance hors d ’état de fe pourvoir dans les
dix ans au Tribunal Supérieur, par la des juge
ments inj uftes paiîènt en force de chofe jugée ir
révocablement. Trifte reilource que la voie en
infcription de fau x, qui eft la feule ouverte en pa
reil cas !
§. I I I .
Moyens de nullité contre ïemprifonnement fa it de
la perfonne de Manenc.
-
L a liberté eft un bien précieux &
(Jt) On ne vient à
naturel à
bout de connoître tous ces faits que
f u r la communication qu'on a p rife des pieces du fieur Juery.
�13
l’homme ; le temps qui lui fait connoître íes er
reurs ^ p erfection n e fes connoiiTahces, lui en fait
peu à peu fentir tout le prix. Les Romains avoient
des Eiclaves, notre Nation plus fage a eu hor-f*
reur de regarder &c traiter iès femblables comme
des bêtes*brutes. Nous avons, il eft vrai, des cerfs,
maïs arpetit nombre^
des fiecles plus éclairés
les rendent plus rarès encore* L a contrainte par
corps avoit lieu ! pour les dettes- purement civiles ;
après les 4 mois. Il étoit réfervé au fiecle de Louis
X I V de voir anéantir cette loi humiliante pour l’hu
manité, fi'elle fl’á pás été anéantie pour les dettes con
tractées dans le com m erce, c’eft à caufe de la fa
veur que le Monarque doit au" commerce qui fait
fleurir iès états, mais aufli a-t-oñ reiîerré fon ufage, on l’a^aÎïùjetti a beaucoup de - formalités' dont
l’oraiffion ’opère, la nullité ; il n’eft pas permis de
l’exefeer en certains temps, en certains ça.s ôc^-en
certains lieux. Un domicilié ne peut pas être pris
dans ia maifon ; le-creancier ne peut pas être préfent a- la-capture qii’il fait faire de ion débiteur;
il faut obfèrver pour les procès verbâüx d ’emprifonnements les mêmes formalités que- pour i les
ajournements , les faifies-exécutions ; les jours de
Fêtes & Dimanches , les jours de foires & mar
chés font libres ; on'peut' en sûreté reriiplir iès de
voirs & vaquer a les affaires* D n eft; encore à
l ’abri de toutes contraintes par corps, loriquel’on
eft à la fuite d’un Procès. Paris a des quartiers
�**
v.,
,
Ï4
privilégies (/) où un débiteur met ià. perfonne en
§uïeté. A q u o i bon, tant jde'privilèges ■&-de forma
lités,,, fi ce^n’eil ppur gêner l’ufage des contraintes
par corps, qu icit une loi rïgoureuiè en -matière civi'
le ; il eit bien dur en effet qu’une perionne ioit deflinée â périr dans les prifpns,,parce qu’un accident qu’il
île pouvoir bie^fTAweitit ni prévoir ni empêcher,
l’aura mis hors d’état, de payer fes dettes. Quels
éloges^ne méritent, pas les' anciens Habitants de
cette Province, nos A n cêtres, pour avoir mis par
l ’art. 62. du titre 24. de la coutume des er - -aves
à l ’ufage des ¡contraintes par corps en: ma^ere ci
vile !. auifi cet article n’a-t-il jamais ceiîe d’être en
vigueur , on en a toujours réclamé l’exécution
.avec fuccès dans, tous les Tribunaux*
3 rL e fieurt Juery n’ignoroit pas le privilege des
foires ni >la Juriiprudence de la C ou r à cet égard.
¡Dans le..temps qu’il a fait emprifonner M an en c,
il venoit a peine d’être condamné par la C o u r pour
être contrevenu au même art. de la coutume, il
rjqus.-l’apprend: lui-même dans une requête qu’il
a donné lors du proviioire. (jri) Com m ent, il ne
refpeàe n i la-loi ni les oracles del à C o u r , il fe
joue de tout !, quel parti reile-t-il donc à prendre
j
-
, *(l ) Le Tem ple & l’enclos de l ’A bbaye de Saint Germain«les-Pïés. ‘
(m) V o ic i quelles font Tes expreifions; n comme l'art. 6 1 ,
». du titre 24. de la coutume d’A uvergne défend d’arrêter les
» marchands qui vont aux foires, le Suppliant avoit eu tort
» d’en arrêter un dans l?Empire de la coutume, il fur con» damné. »
�-vrV
, !V
'
'
'
pour les lui faire exécuter de force, ne voulant
pas les exécuter de gré ? mais pour toute réponfè
il déclare qu’il n’eil pas dans le cas de la lô l,‘ ÔC.
à cet égard il eft néceifaire d’ecarter une oBje&ion
qui a été faite lors du provifoire,* & qui pourroit'
bien reparoître fur le fond.
y
O
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j
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c
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N.
o
°
. .' .
. , •• . r.
C e t arr. de la coutume n’a lieu que dans le
pays coutumier d’A u vergn e, & non dans celui qui
fè régit par le droit écrit ; c’eft le fentiment de
M e. Charles D um oulin, qui dit: hoc intcllige intra
metas hujtis confuetudinis tantum ; Murât étant fi-;
tué en pays de droit écrit, on ne peut pas tirer
avantage de cet art. dans l’eipece.
.
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*")
f ' -1.
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il :iox
Murât , quoique fitué en pays de droit, fe régit
parla coutume quant aux a&es judiciaires (n) *, l’ob-.
jeéHon ' s^évanoüit donc par cètte feule obfetratiôn ;
mais il y q u elq u ech o ie 'dé1 plus
.Charles'
Dumoulin n’a’ appliqué ces mots 1iô'à?ïntclligë ê ’cl
qu’à ces éxpreiiiôns de l’art, de la coutum e,ou en’
Cour pour*' expédition' deAitiïr caufe (6)‘^SÔC‘ nôri'
.1 .
v/i
y.': 'y ’.Av 'V: .} t.\ Y
f V'W\i
■
' "'if
»
(n) Coütumë locale de Murât.
> *■
'
peut le vérifier.--Les Commentateurs "de lïrtouTuime’
en rapportant fon fentiment.auroient dû en faire- mention;
ils induifent enerreui tous ceux qui ne confultent pas l’Auteur»*
\o) On
�16
a celui-ci les allants & venants es foires & mar
chés. Com m ent àuroit-il penfé que ce privilege
d^s foires n’a pas lieu dans le pays de droit écrit,
il avoit lieu chez les Romains ; la loi un. au cod.
de nundinis, qui excrcendarum mercatuum, porte
à la fin, velfub pvetextu privati debiti ahquam ibi
dem concurrentibus molejliam poffiit in frre, G odefroy , Annotateur, o d ferve fur cette lo i, nundinœ publicam habent Jecuritatem Çq) , M e. C har
les Dumoulin dit aü iïi, illi quibus Jhnt nundinœ
non pojjunt venientes ad nundinas caufa debiti arrefiare, nec merces eomm fqueflrare . . . . nundinantes enim liberifu n t tempore nundinarum in accejjii, mora & recejju, Bal. Il fe fait auiîl cette
question , an privatd paclione renunciari pojjit
huic conjiiaadim , &; il répond venus puto quod
n o n , favore nundinarum ; hoc enim principaliier
favore publico introduclum eft. M . D o m a t, dans
ion traité du droit public, titre 7 , fe&ion 3 ,
iòmmaire 6 , foutient què l’utilité des foires &
ijiarchés fait que l’on accorde beaucoup de privilegesj ;,aiix pedònnes que leur commerce ou leurs
affaires .peuvent y attirer ; » ainfi * ajoute-t-il, on
»-. ne peut exçrcer Jur leurs perfonnes&L leurs ¿quij». pages, marchandifes ou autres chofes, aucune
contrainte, pourjeurs'det tes, ci vîles pendant quils.
» \ ont aux foires 1 qiiilsjy féjournent ou qurd s en
» reviennent, iT~rappelle la loi un. cod. de.nund, n
m m .
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■■■ ■ 1 ! 1 rn
(q) V id t, dit-il, Mol. de ufuris, quefl. 5 , n°. ,97 , ut qui earurrt
Stufa canveniunt non interpclkntur privati debiti caufâ.
Le
�n
17
L e Fieùr Juery s’ eft encore permis une objec
tion bien miférable ; la L oi que vous in vo q u ez,
dit-il, n’a lieu quepour les M archands, vous ^n’êtes
pas Marchand , d on c, & c . mais lifez d o n c , fieur
Juery , la L o i; elle porte les A lla n ts & prenants;
ces mots dénotent-ils les Marchands feulement :
lifez encore M . D o m a t lo r f q u ’il d it, les perionnes que leur commerce , ou leurs affaires, &
cëfTez de nous faire des objedions abiblument ri
dicules.
•
' '
L ’emprifonnement de M anenc eft donc nul
par la raifon feule qu’il a été capturé en pleine
foire. i° . Il eft encore n u l, fi la( Sentence- en
vertu de laquelle il a été emprifonné eft nulle ,
comme incompétemment rendue. 30. Il eft encore
n u l , s’il ne doit pas la fom m e, pour le défaut de
>aiement de .laquelle des Recors 6c des C avaiers de MaréchauiTée lui ont mis la main fur le
collet. 4 0. Il eft encore n u l , fi on ne pouvoit pas
le contraindre par corps. Si ces nullités ne iuffiioient pas , on foutiendroit encore la nullité de
Pemprifonnement, foit parce que PHuiiTier qui l’a
capturé s’eft fervi du miniftere d’un antre H uiffier, (r) contre le texte précis de l’article pre
mier du titre premier de la Coutume de cette
Province , foit parce que le fieur Juerv étoit pré«
Îent h la capture ; foit encore parce qu’on a pro
mené Manenc.,de Murât a S. Jrlour, ians,aucune
{
(r)
Le procès verbal de capture en fait foi.
c
�ü'
1 3,
efpece de m otif (s):,; foie enfin p a r,le }défaut-de
beaucoup d’autres fo rm a lité s à 'k -d iic u iïio n de£
quelles iL eit inutile de. ibi livrer.
. ; \ -y, - , v
9
§.
lv .
r ,V.
t
i
- J U e jl d û (à Manenc.. des. dommages-intérêts* '
. Vï\in\fi î\.«\ ,JO f
-U 1 O’Jp
Cette propofitiorL îveilz qu’une-'fuite de¿jprece
dentes ; la Loi naturelle apprend qu’on doit répa-‘
rei: le tort qu’on- fait à autrui:;: drue fauròit y- avoir
de douce Jur la queftion dé. favoir ful’empriionne-'
ment fait dii lai pèrfonne doc: Marièiicï lû t a été:
préjudiciable iik fut, c a p tu ré fu r Jesï- onze heures'
du matin , il manqua ia foirer, il'avoit des-beftiau#
à vendre .& à acheter r il ne put pas> non plus>ièpendro à- di’autrcsr foires. & -marchési, qui-* fe-tien
nent anxi environs, du lieu *de ioni’ domiciles dé
plus , il y a eu une perte réelle; db temps ^ non>
feulement, de l u i m a i s encore de toute fa famille
dk fa: femme & de iès enfants r qui ibnt> fouvent
Qj Voir! &î le con folcr'dans ià-priibn(pëttdafiti
wùt l7e tempsr qu’il y: eíb roíló-i toutes Ws* t-olirfQÿ
ontr- ocbafîio.iinô'à cette-; familia ,-ontPô' la-) pòrto- ‘du*
tem ps, dosídépeníes.'dont 'ihferóít iú ju íte 'd&-n£
fciÿjr't.
> .¿'l.i.11, '1.
— 4_l*j~L h — :— — —... ■. .
) Il
ijruiç.jle-prp^sj varbâï^quevMonenç ardefiiandi^
cette prïfon , , cette déclaration ne pçut f-iire aucune foi', elle
rí?éftJ pas>í?gim: cd^-Maner/c ^ iP t i’ÿ '* éft -pás dir ríídiVfe "qu’bfii
l ’ait fonimé de Ta fig n e rj elle e f t V ouvrage de rHuiiTiet. qui
lie’ l’à im a g in a que p ô û rlS g m m e r remprifonnement, de Ma
nenc aux ca th o ti dc*'S. F lo ’urï' ■1 ' 1
1 •
J
�Oti¡
19
,e%
,
pas les dédommager. L e temps eft precieux à
des Laboureurs ; l a . femme de M anenc a un
corps de domaine qu’elle fait valoir avec ion
mari & íes enfants, elle a employé des ouvriers
qu’il a fallu payer. Manenc demande une fomme de 3000 livres , elle' ne doit pas paroître
exceflive ; Eh ! qui voudroit pour pareille iom m e , même ,dans la clalïè des Laiboùreüre, ’en
durer ce qu’on a fait iôufFrir a M anenc : à ion
âge fe voir emprifonner , pour la premiere fois
de la vie,, pour h’àvoir j>as payé^ùneiipmme qu’il
rie doît pas^, iiè V ô îr èicorté par deux^ Cavàliers
''dë Maréchaufïëe^^itirôis., R ëcptëfij;& ü n'H u iflier,
être regarde comme un Crim inel ,' foufFrir toutes ,
les horreurs de la prifon ^quelles douleurs pour
un Vieillard Viértqeux Mes petnés(6c les' foucis'ont
ruiné ia fanté * efk en eft ‘altérée fe1 ííeúr -îJtîery
en eft la caufe t, il doit encore l'en- dédommager ;
il n’y a d’ailleurs que des peines pécuniaires qui
puiilènt déterminer le fieur Juery à ‘ne plus,jenfreindre la L o i, & a refpeder les :Atrêtsr d e Lla
Cour ^ qu’on ie rappeller même ;laifpofition de
M anenc à l’égard de la Sentence dè là Sénéchau£
fée de Riom , qui le condamne en des dépens ,
qiii font taxés par unfe exécution ; il ne peut pas
s’en plaindre , elle1eft pafîee en force de choie ju
gée fans qu’il l’ait connue.
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NéceJJîté coordonner 7’imprefjtori & Hraffiche de
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FArrêt.
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aüwi: v " r . x .»%«■>/ i^:p ! :i. :. > _flüC ette proportion elt encore une luite de la
précédente. Il y a d e 'd e u x io rte s de réparations.
Quand •une t perionne a fouffert dans fa fortune
p u ià fanté'par le fait d’autrui, c’eft le cas des dom.jmages-intérêts. Quand ion honneur & fa^réputatio n o n t été injustement attaqués dans'le^ p u b lic,
on lui doit rétablir l’un
l’autre dans Feiprit "de
•jcç même public. L ’honneur ôc la réputation de
•Manenc ont foufferts'par fon emprifonnement^;
il. a été, arrêté en pleine foire ,(r) par_ des- C avâjiers de ^Maréchauüée, Huiiïiers & Recors. Prefrquè perfonne n ’ignore le privilege des foires
.pour cette Province ; toutes les fois au’un quel
q u ’un eft, capturé en f pleine foire , il effc cenfé
quer c’eft pour .crime , puifqu’on ne peut être
'capturé pour dettes. O n'a donc été fondé à croire
M anenc criminel , loriqu’il a été arrêté en plei
ne foire de M u rât; ces efprits qui l’ont regardé
- a v e c un efpece de fondement comme un icélérat,
doivent être détrompés & ils nepeuvent l’être que par
( / ) L e 'p r o c è s verbal de capture en fait mention.
�l’affiche de l’A rrêt ; c’eft un délit commis dans
l’ordre public , qui demande d’etre vengé , &
ce fera peut-être le vrai moyen d’arrêter le cours
de femblables délits.
I'
r
’\
M onfieur D U F F R A I S S E D E V E R N I N E S ,
A vocat Général.
-
M e.
D U B O I S , Avocat.
D u g a s , Procureur.
A
C L E R M O N T - F E R R AND,
de Pierre Viallandeurosirue
D e l’ imprimerie
S genès p rès l'a ncien m arché
;
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Manenc, Jean. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duffraisse de Vernines
Dubois
Dugas
Subject
The topic of the resource
privilèges de foire
dettes commerciales
créances
prison
conflit de juridictions
coutume d'Auvergne
coutume locale
conflit de coutumes
dédommagement
opinion publique
Cheylanne (Justice de)
droit coutumier
foires
conflit droit écrit droit coutumier
prise de corps
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean Manenc, Laboureur, Appellant. Contre le sieur Juery, ci-devant Marchand en la Ville de Saint-Flour, Intimé.
Table Godemel : Emprisonnement. 1. nullité d’un emprisonnement, le débiteur ayant été capturé en pleine foire.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1759-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0306
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52914/BCU_Factums_G0306.jpg
Cheylanne (Justice de)
conflit de coutumes
conflit de juridictions
conflit droit écrit droit coutumier
coutume d'Auvergne
coutume locale
Créances
dédommagement
dettes commerciales
Droit coutumier
foires
opinion publique
prise de corps
prison
privilèges de foire
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53113/BCU_Factums_G1015.pdf
c5cd4171898e0ebb5751ccaa1b3d6c7b
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
A
ntoine
BOYER , Je a n C H A B R O L,
J e a n S O U L IE R , E
tienne
VAR EN N E, Je a n
M A I G N E , J e a n de L E N D Y & A n t o i n e
R E Y N A U D , tous Marchands , Habitants des
Paroiffes de V e z e , Dienne & Alanche , deman
deurs.
C O N T R E
,
de C ha rm en fa t H abitant de la
défendeur
.
, Seigneur
V i l le d 'A la n c h e ,
Sieur J e a n B O N N E T
E fieur Bonnet effaie envain de juftifïer une action
Vraiment révoltante, & contre laquelle les loix pronon
cent les peines les plus g rav es. Il a déjà jugé lui mê me
Q u 'e lle étoit honteufej il a cru en conféquence la voiler
A
�ïifi
t
*
t
<ies ombres du m yftère, 6c ii ne s’en feroît peut-être pâg
rendu coupable, s’il en eût pu prévoir les fuites. Il t
imaginé un trafic inoui jufqu’à préfent. Après avoir mis,
par des voies infidieufes, François & Jean Soulier dans
la néceifité de faire banqueroute, il s’eft emparé de toute
leur fortune , il la g a rd e , & il refufe encore de paye*
les demandeurs qui font créanciers de ces particuliers: on
ne fait ce qui doit donner une idée plus défavantageufe
des fentiments du fieur Bonnet , ou de l’a&ion qu’il a
com m ife, ou du mépris qu’il fait de l’opinion publique ,
en laiiTant donner à cette affaire l ’éclat de l ’inftru&ion.
F A I T S ,
A u mois de décembre 178 <; , François Soulier , m?rchand
de beftiaux, demeurant au lieu de Recoules , paroiffe de
Jourifac, fut enfermé dans les prifons de la ville d’Alanc h e , à la requête du nommé Jean Jean, marchand de la
paroifle de Ségur.
L e fieur Bonnet vint offrir fes fervices à François Sou
lier dans les prifons où il étoit détenu. Il lui promit de
payer la créance pour laquelle il étoit em prifonné, qui
ünontoit feulement à la fomme de cent livres; il la paya
en effet pour l u i , o u , c e qui eft de mêm e, il en fit fa promeife au créancier. Mais en même-temps le fieur Bonnet
défira connoître le livre journal de François Soulier. C ’eil
fur ce livre qu’étoient infcrites les ventes que lui ou Jean
S o u lie r, fon fils, avoient faites depuis p eu , d’une quantité
confidérable de beftiaux dans les Provinces de, BrefTe 6c,
de B u g e y , & fur lefquelles il leur étoit dû près de vingt-*,
quatre mille livres.
�- François Soulier 5 prenant ccttê confiance que le
malheur & la folitude infpirent ordinairement, féduit par le /
ton affe&ueux du fieur B o n n e t, & croyant trouver en lui
un libérateur, envoya un exprès chez lui pour fe procurer
ion livre journal. C e fut Jean Soulier , fon fils, qui l’ap
porta.
Il y eut quelqu’intervalle entre la demande que François
Soulier fît faire du livre journal & la remife. L e fieur
Bonnet ne demeura pas pendant tout ce temps dans les
priions d’A la n c h e, & à la compagnie de François Soulier ,
il s’étoit retiré dans fa maifon : lorfqu’il fut que François
Soulier étoit muni de fon livre jo u rnal, il ie rendit une
fécondé fois dans les prifons , & il prit ce jo u r n a l, tou
jours à titre de communication.
Pour connoître l’importance de cette communication, il
faut prendre une idée du livre journal. C ’eft le fieur Bonnet
lui-même qui nous Ta donnée dans fes écritures. Sur cha
que feuillet on avoit inferit les ventes de beftiaux , & ceux
à qui ces ventes avoient été faites, avoient figné au bas
de la mention de chacune, de manière à fe reconnoître
débiteurs du montant. Il n’y avoit qu'un feul article de
vente fur chaque feuillet; cela fe praciquoit ainfi, fo ie ,
parce qu'à mefure des paiements on fupprimoit le feuillet
fo u fe rit, qui y étoit rélatif, foit parce qu’on écrivoit au
bas de la mention mife fur chaque feuillet, les paiements
qui étoient faits à compte par les débiteurs ; enforte que
ce livre journal étoit comme un porte-feuille , conrenanc
toute la fortune mobiliaire des Soulier. Il paroît cependant,
toujours d'après le récit du fieur B onn et, qu’il y avoit
quelques articles de ventes qui n’étoient pa»* revôtui delà*
A 2
�4
fignature des débiteurs. Mais toujours eft-il vrai f comme
on a déjà dit j que leurs fouferiptions étoient au bas de
majeure partie.
‘
Quelque temps après que le fieur Bonnet fe fut fajfi de
ce livre journal, les Soulier lui,en demandèrent la remifé^
iis en avoient befoin pour aller dans les Provinces dè Breffe
& de Bugey , où ils devoient faire les recouvrements d e i
leurs créances, à l’effet de payer ce qu’ils d e v o ie n t,
fur-toutpour fe libérer envers les particuliers qui leur avoienp,
vendu des beftiaux en 1 7 8 ;. L e fieur Bonnet manifeila
l ’impoflibilité où il étoit de remettre le dépôt qui lui avoit:
été confié; on fut même qu’il s’étoit tranfporté dans les,
Provinces de Brefie & de Bugey , o ù , en vertu du livre
journal des S o u lie r, il'a v o it fait faifir & arrêter tout c e.
qui leur étoit d û , ou s’en étoit fait payer.
François & Jean Sou lier, indignés de cet abus de co‘n-.
fiance de la part du, fieur B o n n e t , fe tranfporterent en cette f
V i l l e , ils préfenterent une requête de plainte contre lè
fieur B onnet, à raifon des faits dont on vient de rendre,
compte. E lle fut répondue d'une O rdonn ance, portant
permiffion de faire informer pardevant le plus prochain
Juge des lieux du reffort.
Il eft eiTentiel de remarquer q u e , dans cette requête de
plainte, les Soulier convenoient qu’ils .devoient au fieur
Bonnet la fomme de mille livres , en vertu d’une obligation
faite à fon profitpar François Soulier , l’un d'eux, en 178 j ,
mais en même-temps ils obfervoient que le fieur Bonnet
avoit reçu différents acomptes qui montoient à la fomme.
de fept cents quarante-quatre livres ;enforte qu’il n’étoit refté.
dû que deuxeents cinquantc-fix livresi les Soulier ajoutoient
�encore dans cette même requête qu'ils feraient en état de
fa ire la preuve de tous ces paiements , f i le fieur Bonnet
o fo it en difconvenïr*
,
t e fieur B on net, inftruit db parti’ que les Soulier avoient
p ris, mit tout en œuvre pour en arrêter les fuites. Il fit
poft'er plufieurs perfônnes affi’dées fur les avenues, ou les
Soulier devoient pafler , en fé rendant de cette V i l l e , d’eii
ils portoient l’ Ordonnance qu’ils entendoie?t mettre à exé
cution furies lieux. La rencontre fe f i t , ôclies Soulier, en
gagés par les. infinuations des prépofés du fieur B o n n e t, fe
rendirent chez l u i ; il s'emprefla de les faire boire, & à la
fuite d’un long repas, il fit venir dans, fa maifoh le fieur
M aigne, notaire à Alanche , après lavo ir envoyé chercher
à plufieurs reprifes, pour pafler avec les Soulier deux
a£tes qui achevoient d ’aiTurer toute leur fortune au fieur
Bonnet.
Ces deux a£les furent faits le même jour 34. avril 178 6 1
& ne doivent être confidérés que comme un feul. Dans
un, François Soulier, père, figura feul ; dans l’autre, il ftipula conjointement avec Jean S ou lier,fon fils. Par l’a&e
où Françpis Soulier eft feuP, on lui fit vendre au fieur
Bonnet tous les biens qui lui étoient échus par les fucceffions d'Antoine Soulier , & de Marie C yr, fes pèrè & m è r e ,
dans lefquelles il amandoit un tie rs, 6c de plus trois prés
appartenants en particulier à François So u lier; le prix de
la vente fut de la fomme de trois mille livres ; favoir, pour
les trois prés quatre cents livres, & pour les biens hérédi
taires, deux mille fix cents livres. I I.fu t dit dans cet a£te
que le fieur Bonnet fe retenoit cette fomme de trois mille
liv res , en diminution de ce que François Soulier lui de-
1
�'6
v o i t , en vertu des titres de créances q u il avait pardevers luiJ:
si imputer d'abord fur les intérêts ôc Frais»
Par l’autre a û e , il fit dire par François & Jean Soulier
qu’ils étoient débiteurs du fieur Bonnet de différentes fom
mes , que , pour parvenir au paiement de Tes créances , il
avoit fait faifir ôc arrêter ce qui étoit dû aux Soulier par
plufieurs marchands des Provinces de BreiTe ôc Bugey , où
le fieur Bonnet étoit lui-niéme allé ; qu’il étoit fur le point
de faire dénoncer ces faifies & arrêts aux Soulier pour en
obtenir la confirmation ; que toutes ces procédures entraîneroient de grands frais j & q u e , comme ils vouloient les.
éviter, ils approuvoient toutes les faifies qui avoient été
faites par le fieur Bonnet entre les mains de leurs débiteurs,
ôcafin d’en retirer le paiement, les Soulier firent & conftituerent , pour leur Procureur général ôc fp é cia l, le fieur
Bonnet , auquel ils donnèrent pouvoir d e , pour eux ôc-en
leurs n o m s ,fe tranfporter dans la Brefle 6c le B u g e y, pour
faire le recouvrement des fommes qui leur étoient dues ;
ils lautoriferent à en donner quittance aux redevables, 6c
en cas de refus de paiement, à les a£tionner , 6c à conftituer Procureur à cet effet , & même tranfiger. Il fut dit
qu’en conféquence les Soulier promettaient de remettre au
fieur Bonnet leur livre journal, 6c que le fieur Bonnet retiendroit entre fes mains toutes les fommes qu’il toucheroit jufques & à concurrence de ce que les Soulier lui dev o ie n t , toujours à imputer en premier lieu fur les intérêts
& frais, ôc enfuite fur le principal.
Il fut fiipulé q u e, lors de la délivrance du livre journal,
il Jeroit CQtté de Soulier, f i l s , & de 'lui figue à la fin , pour-,
cohfiaier îc nombre des' pages qu'il contiendrait. Enfin il fut ”
�7
5/
ajouté à la ün de l 'a f i e , fans cependant par le fieur Bonnet fe prèjudicler à ce qui lui ejl du par la fuccejjion
de Gabriel 6* Pierre Bagués du Crou\et. O ïl aura occafion
d ’argumenter dans la fuite de cette dernière énonciation.
I l y a une circonftance qu’il ne faut point perdre de v u e ,
& qui confirme ce qu'on a dit rélativêmentauxinfimmions
pratiquées pour parvenir à ces deux a&es ; c ’eft qu’ il eft
dit dans l’un ôc l’autre, qu ils ont été fa its & paffés à Alanchet
maifon du fieur Bonnet.
D ès le jour môme où ces deux a£tesfurent paiTés, Fran
çois 6c Jean Soulier s’abfenterent, leurs paiements & leur
commerce ceflerent, le fieur Bonnet eft demeuré nanti de
leur fortune , & les demandeurs, créanciers des Sou lier,
n'ont point été payés : on comprend aifément que les Sou
lier ont dès cet inftant été regardés publiquement comme
en faillite ouverte. Leur conduite en avoit tous les carac-'
tères.
■
;
■■■■•!
• Les demàndenrs eurent lieu de penfer que la juftice obligeroit le fieur Bonnet à payer les créances dues par les
Soulier, dès qu'il s’étoit emparé auflî finguliérement des
objets qui en étoieht le gage. En conféquerice , ils le firent
aïïignbr en Ia‘ jurifdi&ion Confulaire de Brioude, par ex
ploit du 22 juin 1 7 8 5 , pour y être condamné à le u r p a y è r
les créances qui leur étoient dues par François & Jean Sou
lier , defqiielles ils firent le détail, & qui fe montoient à
la iomme de trois mille fept cents quarante-neuf livres. Cette
fûmme prôvenôi’r d e ventés det beftiaux par eux faites aux
Soulier en foiré,- ch l ’année 178^. .Ils les avoierit reven
dus dani les pays de Brefle & de B ü gëy, .& le fieur Bonnet
enr avoit tdtfché le prix d'après les arrangements j auifi étranges
que commodes , qu’il avoit pris ayec eux. ‘
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i*>
8
f ;
-
-
Les Juges-Confuls de Brioude furent frappés des deux
a£tes du 24. avril 1786 > donc Je fieur Bonnet fit fans doute
la bafe de fa défenfe en plaidant, fi on ne le dit pas avec
c e r titu d e , c’eft qu’avant la plaidoierie il n’avoit,,pas fourni
de défenfes par écrit. Ces Juges ne purent pas être édifiés
de voir que le fieur Bonnet s’étoit mis en pofleflion du
livre journal des Soulier , qui contenoit toute leur fortune
mobiliaire, fans en avoir fait conflater le montant; qu’il s'étoit;
auffi emparé, de tout ce que-ces particuliers poiTédoient-en
immeijibies. Ils durent être étonnés de ce que le fieur Bonnet V écoit retenu le tout en paiement de prétendues créances,
dont or) ne voyoit dans les ades ni les titres, ni le détail,
ni le montant.
Affettés de toutes ces id ées, par une première Sentence
du 8 juillet 178^-, ils: remirent la caufe(à une audience d’a
près quinzaine, â laquelle les parties comparoîtroient en.
perfonnes, même l e s , Soulier : ils ordonnèrent que le fieur
Bonnet rappbrteroit fes prétendus titres de créances, fur-tout,
y eft-il d it, ayant affeclé dans les deux aâes différents
dont il s a g i t , ( du 24. avril 1786, ) deynen. potter aucun s
ni de faire aucun , arrêté . de com pteavec - les :Soulier. Cette
fentence porte que le fieur Bonnçt rapporterait, auffi le li-,
vre journal des Soulier, q u il ne pouvoit, dire n être.pas en
fo n pouvoir, enfemble les fai fies . qu’il avoit faites, ôc ce
qu’il pouvoic avoir.fait depuis, avec un ^tat .par lui certi
fié. vériçabled w . fo rm es. qt# Î .p^uVoit'1avpjr/'r/sçues de*
différents] débiteur^ des Soulier> ftu f
c on tred is <fe$!de
m a n d e u r « p o u r .çtre, fait droit ainfi.que ?.de pufon.
C e qui eft dit d^ns^cetie, fentence ,j relativement au livre
journal, que le
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djreA{\J,tr^ pas,
en
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9
en fon pouvoir, ânnonce que lors de la plaidoîerie de la
caufe , à la Jurifdiftion confulaire , il défavouoic qu’il en fut
dépofitaire. Mais les Juges penfoient avec raifon qu’il en
étoit faifi , & que c ’étoit un artifice groilier de fa p a rt,
d ’avoir fait inférer dans un des a£tes du 24. avril 1 7 8 5 , que
les Soulier promettoient de le lui remettre, dans la vue
d ’infinuer qu’il ne l ’avoit pas alors. En e f f e t , les Soulier
atteftoient dans leur requête de plainte, préfentée le 20 avril
1 7 8 5 , que le fieur Bonnet avoit pris en communication
le livre journal dès le mois de décembre 178J , qu’en abufant du d é p ô t, il étoit allé en BreiTe 6c dans le Bugey pour
faire faifir & arrêter tout ce qui étoit dû aux Soulier. Le
fieur Bonnet eft convenu de ce voyage , & des faiiies &
arrêts, dans ce même acte du 24 avril 1786 ; on feroit cu
rieux de favoir comment il auroit connu les débiteurs , &
comment il auroit fait ces pourfuites , s’il n’avoit pas été
muni du livre journal ; & fi de ce v o y a g e , & de ces pro
cédures, on eft fondé à conclure que le fieur B on n et, lors
de la requête de plainte, étoit faifi de ce livre journal,
comment pourra-t-on croire qu’il en ait fait la remife dans
l ’intervalle de la plainte à l’a£te, qui ne renferme que quatre
jours ? D ’ailleurs, pourquoi l’auroit-il remis, dès qu’aux
termes de Ta£te , la délivrance devoit lui en être faite auffitôt ? Il eft donc évident que, par un des a&es du 24. avril
1785 , le fieur Bonnet a eu l ’affeclation de faire ftipuler
qu’on lui remettroit le journal, quoiqu’il l’eût alors en fon
pouvoir , & qu'il en fut nanti depuis le mois de décembre
précédent.
Cette fentence des Juges-Confuls eft infiniment fage.
E lle annonçoit au fieur Bonnet que fa conduite étoit lou-
B
ï
�* '
MO
che. Elle lui apprenoit celle qu’il devoit tenir pour faire
cefler les équivoques dans lefquelles on le voyoit s’envelop
per : & elle lui faifoit appercevoir les peines qu’il eneour.roit, s’il fe trouvoit coupable des manœuvres dont on.étoit
d’abord forcé de le foupçonner. 'Le difpofitif de cette^fentence eft un premier .trait de lumière qu’on peut fuivre,avec
■confiance dans la déciiion du procès.
L e fieur Bonnet n’a ceiTé de l’éluder, bien loin d’y fatisfaire. Dans deux requêtes qu’il fit iignifieren la Jurifdi£tion
confulaire j Je i er. feptembre 1 7 8 5 , & le 6 janvier 1787 *
il chercha à juilifier la conduite qu'il avoit tenue jufqu’à
alors. Il prétendit qu’il étoit créancier des Soulier, & d’uu
nommé Gabriel Bagués , leur aiîocié, delà fomme de treize
mille cinq cents foixante-quatre livres dix fous , en vertu
de cinq fentences obtenues depuis 1780 , jufqu’en 1783 »
non feulement contre ces particuliers, mais encore contre
Jean Soulier, fils aîné de François, qui étoit alors décédé.
Q ue les deux â£tes du 24. avril 1785, ri’avoient été ¡faits
que pour lui procurer le paiement de ces créances. Q ue les
créances énoncées au livre journal> dont il s’avouoit dépo
rtai re ne montoient qu’à la fomme de cinq mille deux
cents quatre-vingt-quatre livres ; que fur cette fomme il avoit
touché , par lui ou par les perfonnes qui avoient été ¿hargéeç
d'en faire le recouvrement, la fomme de quatre mille deux
cents quatre-vingt-huit livres, jfur laquelle ilconvenoit encore
de déduire les frais des voyage! qu’il avoit faits, en Brefle
& dans le Bugey , ôc ce qu’il avoit payé.au Procureur chargé
de frire les pourfuites contre les débiteurs. Ilfoutint que les
Soulier n'étoient pas en 'faillite. Il ne pouvoit défavouer ce
pendant qu’ils ne fuifent abfents de.la P ro vin ce, môme lors
�11
d e 1la requête du \6 janvier 17S7 3 mais il âjoutoit que cela
n’étoit pas extraordinaire dans un pays où il eft commua
de voir les habitants s’expatrier & ne revenir que tous les
trois ou quatre ans* En un m o t , il fe préfenta comme un
créancier qui n’avoit fait que prendre des mefures prudentes
pour conferver fa créance.
- Les demandeurs ne furent pas effrayés de tous ces moyens.
Ils virent bien que les créances1accumulées dont le fieur
Bonnet faifoit le d étail, fans cependant juftifier des titres,
n’étoient qu’un vain épouvantail. Ces titres ne pouvoiènt re
paraître que par l'effet du concert de fraude qui étoit pra
tiqué entre lui & les Soulier. Comment fuppofer en effet
que fi, après les premières fentences obtenues contre eux
par le fieur B o n n e t, ils n’euffent point payé , le fieur
Bonnet eût néanmoins continué fes délivrances ? d’ailleurs
les créances du fieur Bonnet n’étoient pas dues en entier
par les Soulier feuls, elles l’étoient encore par les Bagués,
aflbciés des Souliers ; c ’étoit auili par cette raifon que
par un des a£tes du 24. avril 1 7 8 6 , le fieur Bonnet avoit
déclaré qu’il entendoit ne pas fe préjudicier à ce qui lui
étoit dû par la fuccejjîon de Gabriel & Pierre Bagués du
Crouv^et.
Enfin , Jean Soulier , fils , ne pouvoit être tenu perfonnellement des dettes c o n traires par la fociété avant qu’il
devînt un des aifociés ; par conféquent les dettes concra&ées
par Jean S o u lie r, fon frère a în é , contre lequel frappoient
certains titres du fieur B o n n e t , lui étoient étrangères.
Par rapport à la faillite, elle étoit certaine, & elle
avoit commencé au moins au 24 avril 1786, puifque dès
ce jour là les Soulier s’étoient abfentés y qu’ils avoienc
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renoncé à leur fortune & à leur comrrierce, '& quJils n’avoient fait aucuns paiements. Les demandeurs ofFirirent la
preuve de tous ces faits.
Ils ajoutèrent que quand on ne devroit pas confidérer le
fieur Bonnet comme étant l'auteur ou le fauteur de la
banqueroute des S o u lie r, & que quand il auroit pu éluder
le paiement de leurs créances par la voie de l’a&ion perfon n elle,a u moins étoit-il certain qu’il ne pouvoit pas pro
fiter feul des deux actes du 24, avril 1785 , fuivant les difpofitions des loix faites fur la matière : ces a£tes ne pouvoient ni produire une hypothèque, ni tranfmettre aucune
propriété en faveur du fieur B o n n e t, dès qu’ils étoienc
paiTés non-feulement dans un temps rapproché de la b an -.
queroute, mais encore dans l’inftant môme où elle s’ouvroit.
Telles furent les réponfes folides des demandeurs aux
moyens du fieur Bonnet. Mais ce qui acheva de rendre ces
réponfes victorieufes, ce fut la production qu’ ils firent de
deux lettres écrites par le fieur Bonnet aux Soulier, l’une
en date du 16 juin 1786, avant l’aflignation des demandeurs;
l’autre en date du 14 juillet fuivant, pendant le cours de
l’initance. François Soulier ayant réfléchi fur la nature de
l’inftancequi fe pourfuivoit entre le fieur Bonnet & les deman
deurs , fur l'abîme dans lequel la cupidité du fieur Bonnet l’avoit
p lo n g é , vintdépofer ces lettres entre les mainsdu Procureur
qui occupoit pour les demandeurs en la Jurifdi&ion confulaire.
C e dépôt eft conflaté par un a£te pafTé pardevant Notaire , le
18 juin 1787. P a r c e môme acte, François Soulier a dé
voilé toutes les iniquités, à la faveur defquelles le fieur
Bonnet n’avoit pas crainc d'envahir fa fortune ôc celle de
�'¿ > ft
13
fon fils. Il y a ddclarê encore qu’il ne lui feroit pas rede
vable de plus de trois cents liv res, quoiqu 'il eût des titres
qui étabUffent une créance plus confidérable. Ces lettres
jouent un trop grand rôle dans cette affaire, pour qu’on
ne les tranfcrive pas. V oici celle du 16 juin 1 7 8 5 , qui eft
écrite aux Soulier, père & fils.
A la n ch e, 1 6 Juin iy 8 6 *.
» Je vous donne avis , Meffieurs Soulier , père & fils ,
» qu’il y a beaucoup de ceux à qui vous devez qui ont
» obtenu fentence par corps contre tous deux y en confér> quence de ce , prenez-vous garde 3 & retirez-vous dans
» les pays où l'on ne pourra pas vous faire prendre ; il y
» en a un de Peyrufle qui vous fuit, ££ il vous fera em» prifonner s’il vous trouve. Vous dites que vous ferez
» le 24. juin à N eu v ille ; prenez-vous g a r d e , & ne vous
» moncrez p a s, parce que le fieur Peuvergne eft ca» pable de vous trahir; ainii la prdfente re ç u e , ne fa ites
» faute de vous mettre & entrer dans un pays franc , fans
» quoi vous ferez faifis & empiifonnés : votre mère fe porte
» très-bien , & eft bien tranquille, ainfi que votre tante;
» on travaille le bien à l'ordinaire , & les Vaches fe remet•
» tront ; prenez-vous bien garde de ne pas vous laifler
» .faifir, on travaille pour cela, attendu que l'on a fu votre
» route ; mêliez-vous bien de Peuvergne, ne vous prdfentez
» pas à lui. Je fuis toujours votre très-humble ferviteur,
» (igné B o n n e t , fils. »
P. S. » Avec le temps on parviendrai avoir les lettres,
» ainfi patientez-vous ; mais ne vous montrez pas , car fi
j> vous vous mourrez dans les pays francs „ vous ôtes pris. »
. Il n'eft pas inutile encore de tranfcrire l’adreiTe. » A M .
�T4
» L a r d e t, marchand Ghaudromet', pour remettre à Jean
» Soulier, auflimarchand Chaudronierà B o u r g e n B r e s s e ,*
» ôc aufli pour le faire t e n i r , fi l’on p e u t , au fieur Soulier,
»- à N e v ille , le 24 juin 1786. »
L a lettre du 14 juillet 1786", adrefTée par le fieur Bon
n e t , à Jean So u lier, fils, feulem ent, eft écrite par. le fieur
B o n n e t, ainfi que la précédente; mais il ne Ta pas fignée,
& il a grand foin d’en donner les raifons, elle eft ainfi
conçue.
Alanche y le 14 Juillet iy%6.
» S o u lier, fils, je vous envoie ci-in clus, par le fieur
» Fontanier, deux feuillets de papier marqué de la marque
»• d’A uvergne, que vous lignerez au bas de chaque feuille,
» pour préfencer votre requête , & vous mettrez au bas
» de chaque feuille & d’un côté feulement, y approuve ce
»- que defjus , Soulier, ainfi que cela fera mis au bas de
» celle-ci ; vous ne parlerez de rien à perfonne ; vous me
» renverrez cela par Fontanier, ou par la pofte; vous me
» renverrez auffi la préfente lettre, parce que j e ne veu x
» pas que cette lettre f e v o ie , attendu que j e veux faire
cela de cachette; fi vous ne me renvoyez pas la préfente,
»• je vous aflure que je JaifTerai vos affaires fans; faire ;
» je ne figne pas la préfente, crainte q u elle tombe en mau•» vaifes mains : vous deve\ connaître mon écriture ¡par con» féquent vous fave^ à qui il fa u t adrefj'tr vos affaires. »
La première page de la lettre fe termine en cet endroit ;
& on voit au bas, au milieu de la page,, ces termes écrits
de la main du fieur B o n n e t, f approuve ce que deffus ,
S o u l i e r . C ’étoit le modèle de la foufcription que le fieur
Bonnet demandoit à Soulier} fils 3 qui devoit être mife au
�bas des deux feuilles de papier-timbré qu’il lui envoyoit;
& à la fécondé page de la lettre eft écrit ce qui fuit. » Si
» vous ne comprenez pas ce que je -vous marque, vous
» vous le ferez-expliquer à quelqu’un de connoiflance de
» ce pays là-bas; vous fignerez à chaque feuille, & d’un
» côté feulem ent, & vous commencerez à l ’endroit où il y
» a un petit trait de plum e, c ’ell-à-dire, qu’il ne faut que
» quatre fignatures. Prenez-y bien garde, & renvoyez-moi
» la préjente lettre que je vous écris, fans quoi je ne ferai
•» rien. »
L ’Adreffe de cette lettre eft la même que la première ,
'& le fieur Bonnet défiroit fi ardemment de recevoir ce qu’il
demandoit, qu’il inféra fon adrefle dans ces lettres.
A ces deux lettres François Soulier joignit les deux feuil
les de papier au timbre d’Auvergne, qui avoient été envoyées
par le fieur Bonnet ; on voit à la première page de chaque
feuille , le trait de plume fait par .le fieur B o n n e t, où
devoient commencer les approbations quJil défiroit de la
part de Soulier, fils.
L ’affaire en cet état préfenta la queftion de favoir s’il
y avoit ou non faillite -ouverte de la part des S o u lie r, il
le fieur Bonnet en étoit l’auteur ou le fauteur; fi les attes
dont il étoit muni, étoient-frauduleux ou non : dès lors les
Juges-Confuls, fuivant les règlements, n’étoient plus com
pétents ; aufli par une fentence du 27 feptembre 178 7 , ils
délaiiTerent la caufe & les parties pardevant les Juges qui
en devoient connoître , tous dépens refervés, fur les
quels le Juge du renvoi ilatueroit.
En exécution de cette fentence, le fieur Bonnet a été
traduit en ce S ièg e , & l ’affaire y a été retenue.
1
�Il feroit inutile de faire des efforts pour établir que les
Soulier ont été en faillite ouverte, au moins dès le 24
avril 1 7 8 5 , époque des a&es pafiés entr’eux & le fieur
Bonnet ; l’évidence de cette propoiition eft frappante ; dès
cet inftant les Soulier fe font abfentés, ils ont abandonné
tout-à-la-fois leur fortune ôc leur com m erce, ils ont cefTé
leurs paiements ; chacune de ces circonftances, fuivant les
loix , caraâérife la faillite ou banqueroute. L ’article i er.
du titre X I de l’Ordonnance de 1673 , porte que » la
» faillite ou banqueroute fera réputée ouverte du jour
» que le débiteur fe fera retiré, ou que le fcellé aura été
» appofé fur fes biens. » M . JoufTe , fur cet article n°. 4 ,
dit que » la faillite ou banqueroute eft auiïi réputée ouverte
» du jour que le débiteur eft devenu infolvable , & a ceffé
» entièrement de payer fes créanciers, ou qu’il a détourné
» & changé fes effets de n a tu re ,& c . » La même jurifprudence eft atteftée par D én ifa rt, au mot banqueroute ; nos.
14 , 1 j , \6 & 17.
Il y a plus j les Soulier ne font pas Amplement tombés
en faillite , mais encore ils ont fait une banqueroute frauduleufe. » Déclarons ( eft-il dit , dans l’article X du titre
» X I de l’Ordonnance de 1673 ) , banqueroutiers fraudu» leux , ceux qui auront divertis leurs effets, fuppofé des
» créanciers , ou déclaré plus qu’il n’étoit dû aux véritables
» créanciers. » Dans la jurifprudence il y a encore d’au
tres cara&ères auxquels on juge une banqueroute frauduleufe ;
auifi M. JoufTe , fur l’article X I , n°. 4 , dit que » les ban» queroutiers frauduleux font ceux qui détournent ou
enlèvent
�17
» enlèvent leurs effets, ou les mettent à couvert fous des noms
» interpofés par de fauffes ven tes, ou par des cédions ou
» tranfports fim ulés, ceux qui emportent ou cachent leurs
» regiflres & papiers, pour ôter à leurs créanciers la con» noiflTance de leurs effets, & de l’état de leurs affaires. »
C e même auteur , fur l’article i cr. du même titre , n°. 4 ,
explique en détail les renfeignements qu'un débiteur en
faillite doit s’empreffer de donner à fes créanciers „ les pré
cautions qu’il doit prendre pour la fureté de fes effets ; tout
cela réfulte de la difpofition môme de l’article X I , qui veut
q u e , » les Négociants & les Marchands, tant en gros
» qu’en détail, & les Banquiers qui, lors de leur faillite , ne
» repréfenteront pas leurs régiftres & journaux, lignés &
» paraphés, pou rront être réputés banqueroutiersfrauduleux, n
O r , en appliquant toutes ces autorités aux faits dont on a
déjà rendu compte, on fera aifément convaincu qu’il s’en
faut bien que les Soulier doivent être placés dans la claffe
des débiteurs qui ne font que malheureux.
L a principale tache qu’aient donc à remplir les D em an
deurs , eft de prouver que le fieur Bonnet a été non feu
lem en t fauteur de cette banqueroute frauduleufe, qui a fait
évanouir en un inftant le gage de leurs créances
mais
qu’encore il en a été l’auteur. S ’ils établiffent une fois ce
point de f a i t , il ne faudra pas une forte logique , pour prou
ver que l’obligation, de la part du fieur Bonnet , de payer
les créances des Dem andeurs, doit être la moindre puni
tion d'une conduite auiïï extraordinaire.
•• >L ’article X I I I du même tit. X I de l’Ordonnance de 1673 ,
‘détermine les cas dans lefquels on fera réputé avoir aidé ou
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18
favorifé une banqueroute frauduleufe,- il les fixe à quatre, favoir ;
■
» iî Ton a diverti les effets du débiteur, fi l’on a accepté
» des tran/poris, ventes ou donations fimulées, ôc qu’on favoit
» être en fraude des créanciers ; fi l’on s’eft déclaré créancier»
» ne Tétant p a s , ou fi l’on s’eft porté créancier pour plus
» grande fomme que celle qui eft due »
Cette loi ne parle pas d’un autre cas dans lequel on mé
rite encore plus certainement le titre de fauteur de ban
queroute : le Légiflateur ne peut l ’avoir omis , que parce
que l’évidence fuppléeoit à fa décifion. C e cas eft celui où
un particulier a favorifé l ’évafion du débiteur ^ & l’a fouftrait à la prife des créanciers. AuiTi le Com mentateur, dont
on a déjà eu occafion d’invoquer plufieurs fois le fuffrage,
n’a pas manqué d’en faire l’obfervation , fur cet article X I I I ,
n°. j ; » outre les quatre cas , d it - il, de complicité préfumée en cet article , en matière de banqueroute, on peut
» encore regarder comme complices de banqueroutes frau»iduleufes, ceux.qui favorifent l’évafion des Banqueroutiers,
•» ou qui empêchent qu’ils ne foient arrêtés. Par l’Arrêt du
» 26 Janvier 1702 (cité fur l ’article p récéd ent, N °. 3»)
v le nommé Chérubin qui avoic facilité Tévafion d e F a b r e ,
p qu’il favoit être criminel, fut condamné au banniflfêment. »
Faiions actuellement l ’application de ces A u to rité s, &
voyons s’il eft pofiible au lieur Bonnet d’échapper au re
proche que lui font les Demandeurs * d’avoir favorifé la ban
queroute frauduleufe des Soulier.
E11 premier lieu , il a fait plus que de divertir les efFet$
de ces particuliers . L O rdonnan ce, fous ces m o t s , en divertijfant les effets ; a p u entendre un fimple récélé , pour
�*??57
les conferver au débiteur , au préjudice de Tes créanciers ;
mais le fieur Bonnet ne s’en eft pas tenu là. Il a fait paflfer
en fon p ou vo ir, fans compte ni mefure , toute la fortune
des Soulier ; & les aftes qu’il a paiTés, annoncent qu’ il entendoit s’en rendre propriétaire. Il parvient d’abord à fe ren
dre dépofitaire du livre journal des Soulier , objet fi pré
cieux dans leur fortune , en leur promettant un fecours que
dans la fuite il leur a fait payer bien cher. Les Soulier ont
foutenu ce fait dans leur requête de plainte, & ce qui en
démontre la vérité , ce font les différentes faifies & arrêts
que le fieur Bonnet avoit fait faire , avant les deux nttes ,
du 24 avril 1 7 8 6 , entre les mains des débiteurs des S o u
l ie r , qui demeuroient dans les Provinces de Brefie & de
Bugey. Il auroit été impoflible quJil eût fait faire ces fai
fies , au nombre de plus de v i n g t , s’il n’avoit pas eu en
fon pouvoir le livre journal. Les Soulier s’élèvent contre
fon entrepriie , il trouve le moyen d’étouffer leur récla
mation ; le titre de fimple dépofitaire de la fortune mobiliaire des Soulier , qu’il sJétoit procuré malgré eux , il le
convertit en celui de propriétaire, & il obtient encore un
abandon de leurs immeubles.
E n fécond lieu , quand il auroit été réellement créancier
des S o u lie r, il eft bien évident que cette circonftance n’excuferoit pas fa conduite , & il ne feroit pas pour cela à
l ’abri de Ta&ion des Demandeurs. Mais il eft cependant vrai
que fi jamais il a été créancier des Soulier , il a exagéré ce
qui pouvoit lui être d û , & qu’au moins aujourd’hu il ne
peut pas prendre cette qualité.
10. Parce qu’il eft invraifemblable qu’il ait laiifé accumu
ler tant de créances fur fes prétendus débiteurs.
�20
. 2*. Parce que ia collufion manifeile qui a régné entre
lui & les Soulier j ne permet plus de coniidérer comme fincères Tes prétendues créances. II lui efl: bien plus aifé d’en
faire paroître les titres, qu’il ne l’eil aux Demandeurs de
juflifier des quittances quJil en avoit vraifemblablement don
nées aux débiteurs. Ceux-ci fe font livrés à lui avec la plus
imprudente confiance. Ils Tont rendu le maître de leur for
tune & de leur fort. Peut-on fe refufer à cette idée , en
lifant ces deux lettres , qui, d’après le fieur Bonnet lui-m êm e,
n’auroient jamais vu le j o u r , s’il eut prévu qu’on les lui eût
oppofées, & fur-tout en juftice ? Elles apprennent que le fieur
Bonnet étoit dans tous les fecrets des Soulier ; il favoit où
ils avoient dû fe rendre, après leur évafion , où ils devoient
aller enfuite ; ce qui fe paifoit dans leur famille , l'état de
leurs biens, la deftination d’une partie de leur m obilier, de£>
tination que lui feul pourroit encore nous expliquer. Votre
mère , dit-il , dans la lettre du 16 juin 1 7 8 6 , fe porte trèsbien , & eji bien tranquille , ainfi que votre tante. On tra
vaille le bien à l'ordinaire, & les vaches fe remettront.
3o- C e qui fait élever le plus violent foupçon contre les
prétendues créances du fieur Bonnet , c’eft la triple affec
tation, & de n’en faire le détail par aucun a£te, pas même
par ceux du 24 avril 1785 , & de confondre ce qui étoic
dû par François Soulier, avec ce qui pouvoit l ’être par Jean
S o u lier, fon fils , & de ne pas apprendre ce qui étoit à la
charge des B agués, aifociés des Souiier j & ce qu’ils avoient
payé.
(
En troifième lie u , le fieur Bonnet s’eft fait faire par les
S o u lie r, une vente flmulée de leurs biens immeubles. C e
1
�qui le prouve , ce font les termes de la lettre du 16 juin
1786. On travaille le bien à l'ordinaire , & les vaches f e re
mettront. Ces termes annoncent que le bien ne(fe travailloit
pas pour le compte du fieur Bonnet , & cependant il s’en
étoit fait tranfmettre la propriété , par un des a£tes du 24.
avril précédent. Dans la fécondé lettre , du 14. juillet fuivant , il femble ne vouloir que veiller à l’adminiflration de
leurs biens. Si vous ne me renvoyer pas , leur d ifoit-il, la
préfente , j e vous affure que j e laifjerai vos affaires fan s faire.
Il fefoit donc croire aux Soulier quJil leur laiiferoit la
jouiflance de leur bien , en fe muniffant cependant d’un a£te
qui lui donnoit le droit de s’en emparer à fon gré.
E n quatrième lieu , le fieur Bonnet a inconteftablemenc
favorifé l’évafion des Soulier. Il étoit impoilible d’être plus
officieux qu’il ne l’a é t é , pour fouftraire leurs perfonnes à la
prife de leurs créanciers. C ’eft lui-même qui nous fou rnit, à
cet égard, les preuves les moins équivoques. Je vous donne
avis , dit-il dans fa lettre du 16 juin 1785 , qu’il y a beau
coup de ceux à qui vous deve£ , qui ont obtenu fentences par
corps , contre tous deux. En conféquence de ce , prenez-vous
garde , & retirez-vous dans les pays où l ’on ne pourra pas
vous faire prendre. I l y en a un de Peyruffe , qui vous f u i t ,
& il vous fera emprifonner, s’il vous trouve. Il ne ceife de
répécer cette idée dans le corps de la lettre, & elle devient
encore le ftijet de fa concluiion. A in ft, la préfente reçue ,
ne fa ites fau te , dit-il, de vous mettre , 6* entrer dans un
pays franc ,fans quoi vous fere^faifts & empnfonnés. Le fieur.
Bonnet ne peut quitter la plume , fans dire encore aux Sou
lier , prenez-vous bien garde de ne pas vous la ijjerJa ifiro n
�22
travaille pour cela , attendu que l'on a f a votre route. Oit
ne craint pas de le dire , le fieur Bonnet avoit plus en
horreur le retour des Soulier , que ceux-ci ne le défiroient.
Quelle pouvoit être la raifon d’une conduite aufli étrange ,
fi ce n’eft l’intention où il étoit de faire perdre aux Soulier
l ’efpoir de revoir jamais leur pays , & de confolider par-là
l ’abandon qu’il s’étoit fait faire de toute leur fortune ?
E t comment ne pas fe fortifier dàns cette idée , à la vue
de la lettre écrire par le fieur Bonnet , le 14 juillet 1 7 8 5 ,
contenant demande des fouferiptions & fignatures de Sou lier,
f i l s , fur les deux feuilles de papier, au timbre d’A u vergn e,
qu’il avoit eu l ’attention de lui envoyer ? L/ufage que le
fieur Bonnet vouloit en faire , avoit deux objets. O n lui
avoit contefté la qualité de créancier , au moins de Jean Sou
lier , fils, 6c il avoit fans doute en vue de faire reconnoître
par ce dernier , qu’il étoit perfonnellement débiteur. Les D e
mandeurs avoient enfuite foutenu , & avec raifon , que, dans
tous les c a s , les aftes auxquels le fieur Bonnet avoit fait
confentir les Soulier , le 24 avril 1 7 86 , étoient nuls., parce que,
dès cet inftant, ces particuliers s’étoient abfentés , & avoient
été en faillite ouverte, & le fieur Bonnet croyoit détruire
ce moyen , en fe procurant les fignatures de Soulier , fils.
Il faut préfumer qu’il vouloit écrire au-deifus * ou un bilan ,
ou une requête en ceifion ou refpi ; il auroit foutenu que
la' faillite n’avoit commencé qu’à la date qu’il auroit donné
à ce bilan , ou à cette req uête, & encore au moyen des
fignatures, mifes fur du papier du p a y s , il auroit pu dire
que les Soulier étoient fur Ids lieux , quoique, dans le fait^
ils s’en fuifent abfentés depuis long-temps.
y
�, 25
Eft-ce là la conduite d’un créancier qui ne veut que
prendre de fages précautions , pour conferver une créance
légitime ? Ec , au contraire, ne voit-on pas un homme qui,
ouvrant fon coeur à la plus fordide ambition 3 afFeSe de ten
dre une main fecourable à un débiteur, pour hâter fa clune>
& enlever à, fes créanciers les débris de fa fortune , pour
en profiter lui-même?
M a is , à quoi bon recourir à tant de preuves, pour dé
montrer que la conduite du fieur Bonnet eit répréhenfible ?
Il l’a lui-même jugée telle , en recommandant, avec tant de
ioin , le fecret fur toutes fes manoeuvres. Vous me renver:rei, difoit-il dans la lettre du 14 juillet 1786 , aujji la préfente lettre, parce que je ne veux pas que cette lettre f e voie,
A T T E N D U QUE JE F E U X F A I R E
CELA DE CACHETTE ...
j e ne figne pas la préfente , erainte quelle tombe en mau■vaifes'xmains. 'Vous deve^eannoïtre mon écriture . . . . & renvoye^-moi la pré fente lettre que je vous écris, fans quoi j e ne
fe ra i rien. Si la conduite du fieur Bonnet eût été honnête,
^ùroit-il- manifefié un defiraufii ardent du fecret ? II 11’y a que
le crime'qui fuit la lumière.
ce que le fieur Bonnet eÛ non. feulement.le fauteur,
•mais encore J’a.uteur de la banqueroute fdes S o u lie r, il en
•rëfliltè 'deux conféquences, lîune qu’il a encouru les pemea
-les'plus graves. L ’article X I I I du tit. X I de l’Ordonnance
de 1 6 7 3 , veut que ceux qui feront convaincus d’avoir aidé,
•ou favorifé une banqueroutè frauduleufe , foient condamnés
€ n x 5 oo :liv. d'amende, &’.au double de ce qu'ils auront diveri l ) . oih trop;, dejnandé], ¡au profit ¡¿es çrédnciers-, La Déclara
tion du 11 Janvier 1 7 1 6 t eft allée plus loin. Elle prononce
�contr’eux la peine des Galères à perpétuité , ou à temps ,
fuivantl’exigence.descas, outre les peines pécuniaires contenues
en l’Ordonnance. Maisles Demandeurs laifferont cette difcuffion à la fageffe de Meilleurs les Gens du R o i , dont le zèle
leur fera fans doute réclamer la communication d’une affaire
de cette nature. L ’autre conféquence, qui eft la feule dont
les Demandeurs doivent s’occuper , c ’eft l’obligation , de la
part du fieur Bonnet , d’acquitter leurs créances. O r , cette
conféquence eft inconteftable.
En e f f e t , il ne s'agit pas ici d’une fimple amende", & du
paiement du double des objets divertis ; on ne peut pas les
déterminer. L e fieur Bonnet s’eft emparé de toute la fortune
des Soulier ; il a pris leur livre journal fans en faire dreffer procès-verbal. O n ne peutfavoir quelles font les fommes
dont il s’eft fait payer. Il rapporte ce livre journal dans le
plus mauvais état ; entre les feuillets qui font encore exis
tants, on diftingue les reftes de quarante-trois, qui ont été
déchirés & enlevés , on ignore s'ils ont été cottés. L es autres
l ’ont été , ôc de ceux-là encore il en manque environ huit,
& certains autres font détachés & volants.Et il eft efïentiel
de remarquer que c’eft entre les.feuillets aduellemenL exis
tants & écrits , que l ’on apperçôit qu’il y en a eu de déchi«r é s , & qui manquent. L e fieur Bonnet a donc tout-à-la-fois*
commis des fo'uftra&ions fur la fortune mobiliaire des Sou
lier, & il a pris des mefures pour empêcher de les connoître,
& de les apprécier. Comment d o n c , dans une pareille pofition , pourroit-il fe difpenfet de payer les créances des D e
mandeurs'? Peut-ïl' autrement réparer-*le tort .qu’il leur,
a fait ?
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�2?
Au furplus , quand on fuppoferoie , pour un m o m e n t,
que le Heur Bonnet ne dût pas être regardé comme le fau
te u r, ou, pour mieux dire , i’auteu'r de la banqueroute des
S o u lie r, & que par conféquent i l 1 ne dût pas payer les'
créances des Demandeurs ; au moins , eft-il certain qu’il, ne
pourroit pas réclamer l’exécution de la vente d'immeubles
qu’il s’eft faite confentir, le 24 avril 17 8c> , & qu’il devroic
rapporter les fommes qu’il a touchées des débiteurs des Sou
lie r, en vertu de l’autre a£te du même jour , pour être par
tagées avec les Demandeurs t au marc la livre de leurscréances.
En effet, la Déclaration du 18 novembre 1 7 0 2 , veut que
toutes ceflions ôc tranfports fur les biens des marchands qui
font faillite , foient nuls & de nulle valeu r, s’ils ne font
faits dix jours au moins avant la faillite publiquement con
nue ; comme auiïi que les-a£tes & obligations qu’ils pafleront devant Notaire , au profit de (quelques -uns de leurs
créanciers, ou pour contracter de nouvelles detres, enfemble les fentences qui feront rendues contre eux , n’acquiérent aucune hypothèque ni préférence fur les créanciers
chirographaires j fi lefdits aftes & obligations ne font paifés,
& fi lefdites fentences ne font rendues pareillement dix
jours au moins avant la faillite publiquement connue.
E t que le lieur Bonnet ne dife pas que le droit qu’il a
eu de toucher les créances dues à fes prétendus débiteurs,
ne dérivoit pas de la ceflion du 24. avril 1786; qu’il lui
¿toit acquis par les faifies & arrêts qu’il avoit faits faire an
térieurem ent, & dont quelques-unes remontent à dôuze ou
quinze jours avant l’a£te y tandis que les autres ne font pas
antérieures de dix jours, ou font poftérieures.
�2.6
L e Légiilateur n’a pas dit abfolument que l ’on dût regar
der comme exempts de fraude les a£tes paffés avec un débiteu? , par cela feul qu’ils l’auroient été dix jours ou plus,
avant l’ouverture de la faillite; il a feulement pré fumé, d’a
près l’intervalle de dix jours., que celui qui contraftoit étoit
en bonne f o i , & qu’il ignoroit le dérangement des affaires
du débiteur ; mais il n’a entendu ni pu entendre, que quand
même l’a&e, ou les pourfuites judiciaires remonteroient à
plus de dix jours avant l ’ouverture de la faillite, il fût
valable , s’il étoit d’ailleurs prouvé que cet a£te ou fes pourfuites étoient le fruit de la mauvaife foi; les cas de fraude
font toujours exceptés de la l o i , & ici la fraude , de la
part du fieur B o n n e t, ou , ce qui eft de m ê m e , la connoiiTance qu’il avoit des affaires des S o u lier, bien plus de
dix jours avant la publicité de leur banqueroute, ôc la
collufion qui a régné enfuite entr'eux & l u i , ne peuvent
plus être révoquées en doute ; a u fll, faut-il remarquer ces
termes de la l o i , dix jours au moins ; ils prouvent qu’elle
n’a pas entendu fauver de la profcription tous a£les ou
toutes pourfuites j bien qu’ils remontaflent à plus de dix
jours avant l’ouverture de la faillite; il a été dans l’efpric
de la l o i , comme dans la raifon, que toutes ces précautions
deviendroiént vaines, s’il s’élevoit des circonftances fuffi-'
fan tes, pour être convaincu que la fraude y a préfidé, &
qu’un créancier a abufé de la connoiifance qu’il avoit de
là fituation des affaires du débiteur , au préjudice des au
tres créanciers qui 1 ignoroient.
Mais cette dernièrfc réflexion n’eft faite que fubfidiairem ent, 6c pour ne rieh négliger dans la défenfedes deman-
�27
'deurs ; on fe flatte d’avoir établi que la conduite que le
fieur Bonnet a te n u e , lui impofe la néceffité de payer leurs
créances c’eft la moindre peine qu’elle doive lui attirer ;
il a lieu de craindre un jugement encore plus fé v è r e , qui
ferve à contenir ceux qui pourroient oublier que fi une
fortune acquife par un travail pénible & honnête , doit être
plutôt honorée qu’enviée, celle qui n’eft que le fruit de
la cupidité devient tôt ou tard un fujet de honte, quelques
précautions même qu’on prenne pour agir en cachette.
Monfieur F A I D I T , Rapporteur.
M e. G R E N I E R ,
G r a n e t ,
A v ocat.-
Procureur.
A R I O M , de l'im p rim erie de M a r t i n D É G O U T T E ,
Im prim eur-Libraire, près la Fontaine des Lignes. 1789 .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Antoine. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Faidit
Grenier
Granet
Subject
The topic of the resource
banqueroute
prison
créances
commerce de bestiaux
livres-journaux
juridiction consulaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Antoine Boyer, Jean Chabrol, Jean Soulier, Etienne Varenne, Jean Maigne, Jean de Lendy et Antoine Reynaud, tous marchands, habitants des paroisses de Veze, Dienne, et Alanche, demandeurs. Contre sieur Jean Bonnet, seigneur de Charmensat, habitant de la ville d'Alanche, défendeur.
Table Godemel : Banqueroute : les Soulier père et fils, débiteurs communs, sont-ils d’après les circonstances en état de faillite ouverte et même de banqueroute frauduleuse ? Bonnet s’est-il constitué fauteur de cette banqueroute, et ne doit-il pas, au moins, par suite des faits qui lui sont personnels, payer les créanciers ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1785-1789
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1015
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Véze (15256)
Dienne (15061)
Allanche (15001)
Charmensac (15043)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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banqueroute
commerce de bestiaux
Créances
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livres-journaux
prison
-
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ebcb1e4c65107a792e814e915ab20950
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Text
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J ean
A n toine
BOYER ,
SO U LIE R ,
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“ M A IG N E ,
-r*
Jean
J ean
CHABROL,
VARENNE,
de L E N D Y
&
Jean
A ntoine
R E Y N A U D , tous Marchands , Habitants
des
Paroiffes de V e z e , Dienne & Alanche , deman. deurs.
. ,
*;K
C O N T R E Sieur J e a n B O N N E T , Seigneur.
. de Charmenfat y Habitant de la V ille d 'A lanche,
'■ défendeur,'
E
L fieur B onnet eff aie envain de juftifier une' action
vraiment r é v o lta n te , & contre laquelle les loix pronon
cent les peines; les plus graves1. Il a déjà jugé lni-même
qu'elle étoit hon teufe
il a cru en conféquence
A
la voiler
�des ombres du m y ilè r e , & H ne s’en feroit peut-être p â r
rendu co u p a b le, s’il en eût pû prévoir les fuites. Il a
imaginé un trafic inoui jufqu’à préfent. A p rès avoir mis,
par des voies infidieufes, François & Jean Soulier dans
la néceiïité de faire b an qu eroute, il s’eft emparé d e to u tç*
leur fortune , il la g a r d e , ôc il refufe encore de payer,
les demandeurs qui font créanciers de ces particuliers : on
ne fait ce qui doit donner une idée plus défavantageufe
des fentiments du fieur B onnet , ou de l’a&ron qu’il a*
co m m ife , ou du mépris qu’il fait de l ’opinion publique ,
en laiiTant donner à cette affaire l ’éclat de 1 inftru&ion.
F A I T S .
A u mois de décembre 1 7 8 f , François S o u lie r , marchand
de beftiaux, demeurant au lieu de R e c o u le s , paroiiTe de
J o u r fla c , fut enfermé dans les priions de Ja ville d’Alânc h e , à la requête du nommé Jean J e a n , marchand de la
paroiiTe de Ségur.
.
L e fieur B onnet vint offrir fes fervices à François Sou
lier dans les prifons où il étoit détenu. 11 lui promit de
payer la créance pour laquelle il étoit e m p rifo n n é , qui
m ontoit feulement à la fomme de cent livres ; il la paya
en effet pour l u i , o u , c e qui eft de m êm e , il en fit fa promeiTe au créancier. Mais en même-temps le fieur Bonnet
délira connoître le livre journal de François Soulier. C ’eft
fur ce livre qu’étoient infcrites les ventes que lui ou JeanSou lier, fon fils, avoient faites depuis p e u , d’une quantité
confidérable de beftiaux dans les Provinces de Breffe &
de B u g e y , & fur lefquelles il leur étoit dû près de vingtquatre mille livres.
/
�3
François Soulier j prenant cetté confiance que le
malheur & la folitude infpirent ordinairement, féduit par le
ton affe&ueux du fieur B o n n e t , & croyant trouver en lui
un lib é ra te u r, envoya un exprès chez lui pour fe procurer
fon livre journal. C e fut Jean Soulier , fon fils , qui l’ap
porta.
I l y eut quelqu’intervalle entre la demande que François
Soulier fit faire du livre journal & la remife. L e fieur
B onnet ne demeura pas pendant tout ce temps dans les
priions d’A la n c h e , & à la compagnie de François S o u lie r,
il s’étoit retiré dans fa maifon : lorfqu’il fut que François
Soulier étoit muni de fon livre jo u r n a l, il ie rendit une
féconde fois dans les priions , & il prit ce journal , tou
jours à titre de communication.
Pou r connoître l’importance de cette com m unication, il
faut prendre une idée du livre journal. C 'eft le fieur Bonnet
lui-même qui nous l a donnée dans fes écritures. Sur cha
que feuillet on avoit inferit les ventes de beftiaux , & ceux
à qui ces ventes avoient été faites, avoient figné au bas
de la mention de chacune j de manière à fe reconnoître
débiteurs du montant. Il n’y avoit qu’un feul article de
vente fur chaque fe u ille t; cela fe pratiquoit ainfi, f o i t ,
parce quJà mefure des paiements on fupprimoit le feuillet
f o u f e r it, qui y étoit ré la tif, foit parce qu’on écrivoit au
bas de la mention mife fur chaque fe u ille t, les paiements
qui étoient faits à compte par les débiteurs ; enforte que
c e livre journal étoit com m e un porte-feuille, contenant
toute la fortune mobiliaire des Soulier. Il paroît cependant,
toujours d'après le récit du fieur B o n n e t , qu’il y avoit
quelques articles de ventes qui n’étoient pa< revêtu« d e là
A 2
�4
fignature des débiteurs. Mais toujours eft-.il vrai,, corttpie
on a déjà dit j que le.urs foufcriptions étoient au bas de la
majeure partie.
Q u elq u e temps après que le Heur B onnet ie fut faifi de
ce livre jo u rn a l, les Soulier lui en demandèrent la re m ife ,
ils en avoient befoin pour aller dans les Provinces de Brefle
& de B u g e y , où ils devoient faire les recouvrements de
leurs cré a n ce s , à l ’effet de payer ce qu’ils devoient , &
fur-toutpour fe libérer envers les particuliers qui leur avoienç
vendu des beftiaux en 178J. L e fieur Bonnet manifefta
l ’impoflibilité où il étoit de remettre le dépôt qui lui avoif
été co n fié ; on fut même qu’il s’étoit tranfporté dans les
Provinces de Brefle & de
Bugey , o ù , en vertu du livre
journal des S o u lie r , il avoit fait faifir & arrêter tout
ce
qui leur étoit d û , ou s’en étoit fait payer.
François & Jean S o u lie r , indignés de cet abus de con
fiance d e là part du fieur B o n n e t , fe tranfporterent'en cette
V ille , ils préfenterent une requête, de plainte contre le
fieur B o n n e t, à raifon des faits dont on vient de rendre
compte. E lle fut répondue d ’une O rd o n n a n c e , portant
permiflion de faire informer .pardevant le plus prochain
Juge des lieu x du reffort.
’
Il eft effentiel de remarquer q u e , dans cette requête de
plainte, les Soulier convenoîent qu’ils devoient au /leur
Bonnet la fomme de mille liv re s , en vertu d’une obligation
faite à fon profit par François S o u l i e r , l’un d 'eu x , en 1783^
mais en môme-temps ils
obfervoient que le fieur Bonnet
avoit reçu différents acomptes qui montoient à la fom me
de fept" cents quarante-quatre livres jenforte qu’il n’étoit refté
dû que deux cents cinquante-fix livres j les Soulier ajoutaient
�j
encore dans cette .même requ ête qu'ils, fe ro ie n t en
fa ir e la preuve de tous ces paiem ents t f i le J ie u r
ofoit en^di'[convenir.' 4 ; '
état de
B o n n et
• -
L e fieur B o n n e t, inftruit du,parti que les^iSoulier avoient
p ris, mit tout en oeuvre pour eh arrêter les fuites. Il fit
pofter plufie’urs perfonnes .affidées fur les 'avenues où les
Soulier devoient pafier , en fe rendant de cette V i l l e , d’ou
ils portoient l ’Ordonnance qu’ils enfendoient mettre à exé
cution fu ries lieux. L a rencontre fe f i t , &*les S o u lie r, en
gagés par les infinuations des prépofe's du fieur B o n n e t , fe
rendirent chez l u i ; il s’ empreffa de les faire b oire, & à la
fuite d’un lon g rep as, il fit venir dans fa maifon le fieur
M aigne, notaire à Alanche , après l’avoir envoyé chercher
à plufieurs re p rife s, pour pafler avec les Soulier deux
a£tes qui achevoient d’aflurer toute leur fortune au fieur
Bonnet.
1 Ces deux a£tes furent faits le même jour 24 avril 1 7 86 3
& ne doivent être confidérés que comme un feul. D ans
i’un, François Soulier, père, figura feul ; dans l’autre, il ftipula conjointement avec Jean S o u lie r ,fo n fils. Par l ’a£te
où François Soulier eft fe u l, on lui fit. vendre au fieur
B onnet tous les biens qui lui étoient échus par les fucceffions d’ Antoine S o u lie r , & dé M arie C y r , fes pèrë & m è r e ,
dans lesquelles il amandojt un tiers ] & ' de plus trois prés
appartenants en particulier à François Soulier ; le prix de
la. yent.e fut de la fo m m e de trois mille .livres ^ favo ir, pour
les trois prés quatre^cénts l i v r e s p o u r . l e s biens hérédi
taires, deux mille fix cents livres. Il fut dit }dans c e t ‘a£te
Çue le fieur Bonnet fe r e t e ^ l t ^ e t t è fomrine dè1 trois mille
liv r e s , en diminution' de .ce
que’ François 'Soulier lui de-
�'6
v o i t , en vertu des titres de créances q u 'il avait f a r devers lu i>
à imputer d’abord fur les intérêts & frais.
P ar l ’autre a£te, il fit dire par François & Jean S o u lie r ,
q u ’ils étoient débiteurs du fieur Bonnet de différentes fommes , que , pour parvenir au paiement de fes créances , il
avoit fait faifir & arrêter ce qui é toit dû aux Soulier par
plufieurs marchands des Provinces de BreiTe & B u gey , où
le fieur Bonnet étoit lui-même allé ; qu’il étoit fur le point
de faire dénoncer ces faifies & arrêts aux Soulier pour en
obtenir la confirmation ; que toutes ces procédures entraîxieroient de grands frais j & q u e , comme ils vouloient les
é v it e r , ils approuvoient toutes les faifies qui avoient été
faites par le fieur Bonnet entre les mains de leurs débiteurs,
& afin d’en retirer le p a ie m en t, les Soulier firent ôc confti-;
tuerent , pour leur Procureur général & f p é c i a l, le . fieur
B onnet , auquel ils donnèrent pouvoir d e , pour eux & en
leurs n o m s, fe tranfporter dans la Brefie & le B u g e y , pour
faire le recouvrement des fommes qui leur étoient dues ;
ils l’autoriferent à en donner quittance aux redevables, &
en cas de refus de paiement » à les actionner , & à confti-.
tuer Procureur à cet e f f e t , & même tranfiger. Il fut dit
qu’en conféquence les Soulier promettaient de remettre au
fleur Bonnet leur livre jou rna l, & que le fieur B onnet retiendroit entre fes mains toutes les fommes qu’il toucheroit jufques 6c à concurrence de ce que les Soulier lui dev o i e n t , toujours à imputer en premier lieu fur les intérêts
& frais, & enfuite fur le principal.
I l fut ftipulé q u e , lors de la délivrance du livre journal,
i l fer o it cotté de Soulier, f i l s d e lui Jigné à la f i n , pour
(onjlater le nombre des pages qu’il contiendrait. Enfin il fut
�7
ajouté à la fin de Taite , fa n s cependant par le fieur B o n net f e prtjudicier à ce qui lui eft dû par la fu ccejjlon
de Gabrïèl &• Pierre Bagués du Crou^et. O n aura occafion
d ’argumenter dans la fuite de cette dernière énonciation.
I l y a une circonftance qu’il ne faut point perdre de v u e , J
& qui confirme ce qu’on a dit rélativementauxinfinuations'
pratiquées pour parvenir à ces deux a£tes ; c ’eft qu’il eft
dit dans l’un & l’autre , qu'ils ont été fa its & paffés à A tanchc,
maifon du fieur Bonnet.
1 D è s le jour même où ces deux aâesfu ren t paiTés, Fran
çois & Jean Soulier s’abfen teren t, leurs paiements 6c leur
commerce ceiTerent, le fieur Bonnet eft demeuré nanti de
leur fortune , fie les demandeurs, créanciers des S o u lie r,
n ’ont point été payés : on comprend aifément que les Sou
lier ont dès cet inftant été regardés publiquement comme
en faillite ouverte. L eu r conduite en avoit tous le s1carac
tères.
' - ".:■
■
■
■
L e s demandeurs eurent lieu de penfer que la juftice obligeroit le fieur Bonnet à payer les créances dues par les
Sou lier, dès quJil s’étoit emparé auffi finguliérement des
objets qui en étoient le gage. E n co nféq u ence, ils le firent'
aiïignér en la jurifdi&ion Confulaire de B riô u d e , pâr'-fex-'
ploit du 22 juin 1 7 8 6 , pour y être condamné à leur payer^
les créances qui leur étoient dues par François & Jean Sou
li e r , defquelles ils firent le' d éta il, & qui fe montoient à '
la iomme de trois mille fept cents quarante-neuflivres. C ette
Tomme proverioit de ventes de beftiaux par eux faites aux
Soulier, en fo ire , en Tannée 178?. Ils les avoient reven
dus dans les pays de Breffe & de B u gey * & le fieur Bonnet
en avoit touché le prix d’après les arrangements} aufli étranges
que co m m o d e s, qu’il avoit pris avec eux.
�2
f
L e s Juges-Confuls de Brioude furent frappés
des deux,
a&es du 24 avril 1 7 8 6 , donc le fieur Bonnet fît fans doute
la bafe de fa défenfe en p laid an t, fi on ne le dit pas avec
certitude', c e i l qu’avant la plaidoierie il n’avoit pas fourni
de défenfes par écrit. Ces Juges ne purent pas être édifiés
de voir que le fieur Bonnet s’étoit mis en pofleiïion du
livre journal des Soulier , qui contenoit toute leur fortune
mobiliaire, fans en avoir fait conftater le m ontant;qu’il s’étoit
auifi emparé .de tout ce que ces particuliers poiTédoienc en
imfnieubles. Ils durent être étonnés de ce que le fieur B on
net s’étoit retenu le tout en paiement de prétendues créances,
dont on ne v o y o it dans les a£tes ni les titre s , ni le détail,
ni le montant.
, A ffe& és de toutes ces idées., par une première Sentence
du 8 juillet 1 7 8 ^ . ils remirent la caufe à une audience d’a
près q u in zain e, à laquelle les parties comparoîtroient en
p erfonnes, même les Soulier : ils ordonnèrent que le fieur
B onnet rapporteroit fes prétendus titres de créances, fur-tout,
y e ft-il.d it, ayant affeâé dans les deux aàes différents
dont i l s’a g it, ( du 24 avril 17 8 6 , ) de tie n cotter aucun ,
n i.d e .fa ir e aucun arrêté de compte avec les Soulier. C ette
fentence porte que le fieur Bonnet rapporteroit auifi' le li
vre journal des S o u lie r, qu'il ne pouvoit dire nêtre pas en
fo n p o u v o ir,. enfemble les faifies qu’il avoit faites, & . ce
qu’il pouvoit avoir fait depuis, avec un état par lui certi
fié véritable des fommes qu’il pouvoit avoir reçues des
différents débiteurs des S o u lie r, fau f Xes contredits des démandeurs,, pour être fait droit ainfi que de raifon.
, Ce qui eil dit dans cette fentence, relativement au livre
journal, que le fkur Bonnet ne pouvoit pas dire nêtre pas
en
�*
tn foti pou voir, annonce que lo rs de la plaidoierie de là
caufe , à la Jurifdi&ion confulaire , il défavouoit qu’il en fu t
dépofitaire. Mais les Juges penfoient avec raifon qu’il en
étoit faifi , & que c'éto it un artifice groiïier de fa p a r t ,
d ’avoir fait inférer dans un des aftes du 24 avril 1 7 8 5 , que
les Soulier promettoient de le lui remettre , dans la vue
d ’infinuer qu’il ne l’avoit pas alors. E n e f f e t , les Soulier
atteftoient dans leur requête de p la in te , préfentée le 20 avril
17 8 6 , que le fieur Bonnet avoit pris en communication
le livre journal dès le mois de décembre 17 8 ^ , qu’en abufant du d é p ô t , il étoit allé en Breife & dans le B u gey pour
faire faifir & arrêter tout ce qui étoit dû aux Soulier. L e
fieur Bonnet eft convenu de ce v o y a g e , & des faifies: &
arrêts, dans ce même a£te du 24 avril 1 7 8 6 ; on feroit cu
rieux de favoir comment il auroit connu les débiteurs , &
com m ent il auroit fait ces pourfuites , s’il n ’avoit pas été
muni du livre journal ; & fi de ce vo y a g e 3 & de ces pro
cédu res, on eft fondé à conclure que le fieur B o n n e t , lors
de la requête de plainte, étoit faifi de ce livre jo u rn a l,
com ment pourra-t-on croire qu’il en ait fait la remife dans
l ’intervalle de la plainte à l ’a & e , qui ne renferme que quatre
jours ? D 'a ille u rs, pourquoi l ’auroit-il rem is, dès qu’aux
termes de l’a&e la délivrance devoit lui en être faite auflïtô t ? I l eft donc évident q u e , par un des a&es du 24 avril
17 8 5 , le fieur Bonnet a eu l'affectation de faire ftipuler
qu’on lui remettroit le jo u r n a l, quoiqu’il l’eût alors en fon
pouvoir , 6c qu'il en fut nanti depuis le mois de décembre
précédent.
‘
C ette fentence des Juges-Confuls eft infiniment fage.
E lle annonçoit au fieur Bonnet que fa conduite étoit louB
�<10
c h e .’E lle lui apprerfoic ceile q u ’il devoit te n ir p our faire
cefler les équivoques.dans le fq u e lle so n le v o y o it s’envelop
per : & elle lui faifoit apperçevoir les peines q u ’il en co ü rr o i t , s’il fe tro u v o it coupable des manoeuvres d o n t on é t o i t
d ’abord forcé de le fou pçon n er. L e difpoiitif de c e tte fe n te n ce efl un prem ier trait de lufaière qu’on peut fuivre avec,
confiance dans la décifion du procès.
• L e iîeur Bonnet n’a ceffé de l ’éluder, bien loin d’y fatisfaire. Dans deux requêtes qu’il fit fignifieren la Jurifdi&ion;
confulaire, le i cr. feptembre 1 7 8 6 , ôc le 6 janvier 178 7 3
il chercha à juftifier la conduite q u ’il avoit tenue jufqu’à
alors. Il prétendit qu’il étoit créancier des Soulier , & d’un
nom m é Gabriel B a g u é s , leur aiTocié, d elà fomme de treize
mille cinq cents foixante-quatre livres dix fous , en vertu
de cinq fentences obtenues depuis 1 7 8 0 , jufqu’en 17S3 ^
non feulement contre ces particuliers, mais encore contre:
J e a n ,S o u lie r , fils aîné de F rançois, qui étoit alors ¡décédé.
Q u e les deux a&es du 24 avril «785, n’âvoient été faits
que pour lui procurer le paiement de ces créances. Q u e les
créances énoncées au livre jo urn al, dont il s?avouoit dépofitaire j ne m ontoient qu’à la fomme de: cinq mille deux
cents quatre-vingt-quatre livres ; q u e fu r cette fo m m e ;iI avoir x
touché , par lui ou par led.pe.rfonnes qui avolent été chargées. *
d en faire le recouvrement-, la fomme de quatre m ille'd eu x
cents quatre-vingt-huit livres, fur laquelle il convenoit encore
de déduire, les frais des voyages qu’il àvoit faits en Brefîe
& dans le B u g e y , & c e q u ’iliavoit payé au;Procureur chargé
de faire les pourfuites contre les débiteurs. Il foutinr que lés j
Soulier n’ étoient pas en faillite. ; Il né pouvoir défavouer c e
pendant qu’ils ne fuifent abfents de la Province;, m êm e lors.
�11'
'de la requête du 16 janvier 1 7 8 7 , mais il âjoutoit que cela
n’étoit pas extraordinaire dans un pays où il eft com m un
de voir les habitants s’expatrier & ne revenir que tous les
trois ou quatre ajns. E n un m o t , il fe préfenta comme un
créancier qui n’avoit fait que prendre des mefures prudentes
pour confervér fa créance.
L es demandeurs ne furent pas effrayés de tous ces moyens.
Ils virent bien que les créances accumulées dont- le fieur
B o n n et-fa ifb it le d é ta il, iaris cependant'juftifier des-titres,
it'étpient qu’un vain épouvantail. Ces titres:rie pouvoient rë. 4
paroître que par Tëffet du concert de fraudé fcjui étoit pra*
tiqué entre lui & ’les Soulier. C om m ent füppôfer e n 'e ffe t
que fi y après les premières fentences obtenues contre eux
par le fieur Bonnet , ils n’euffent point payé , ' le fieur
B onnet eût néanmoins continué fes délivrances ? d’ailleurs
les ¡créances du fieur Bonnet nJétoient; pas Hües- en entier
par les'Soulier f e u l s , 1 elles Tétoient encore pàr! lë^ Bagués?
affociés des Souliers ; c ’é to it"’auÎïr par cette ràifon que
par un des a&es du 24. avril 1 7 8 6 , le fieur Bonnet avoic
déclaré qu’il entendôit ne pas'fe préjudicicr à ce qui lui
¿toit ^du -par la fu cce jjiô ti de Gabriel & Pierre Bagues du
Crouïjgt.
" f 1
r .
i i v
rl V
.
;jri
v
Enfin \ Jean’ S o u l i é r , fils , rie pouvoit 'être tenu person
nellement des 'dettes contrariées par la fociété avant qu’il
devînt' un des affociés; par conféquent les dettes contractées
par Jean S o u li e r , fon frère a în é , contre lequel frappoient
certains titres du fieur- B o n n e t , lui étôient étrangères.
*' Par ‘rapport à la fa illite, elle étoit ^certaine,* &; elle
avoir com mencé au moins au 24* avril 178$, p'uifque dès
ce jour là les Soulier s’étoient a b fen tés, qu’ils * avoient
'
B 2
�>12
renoncé à leur fortune & à leur co m tïie rce , & qu'ils n’avoient fait aucuns paiements. L es demandeurs offirirent la
preuve de tous ces faits.
Iis ajoutèrent que quand on ne devroit pas confidérer le
fieur Bonnet com m e étant l'auteur ou le fauteur de la»
banqueroute des Soulier , & que. quand i l auroit pû éluder
le paiement de leurs créances par la voie de l’adlion perfo n n e lle ,a u moins étoit-il certain qu’ il ne pouvoit pas pro
fiter feul des deux ades du 24 avril 1785 , fuivant les difpofitions des jloix faites fur . la matière : ces,a£tes ne pouyo ien t ni produire une h y p o th è q u e , ni tranfmettre aucune
propriété en.jfaveur du fieur B o n n e t , dès qu’ils étoient
paiTés non-feulement dans un temps rapproché de la ban
q u e ro u te , mais encore dans Im itant même
où
elle s’ou-
yroit;-;j J r
. ■ ‘
m.bn
. T e lle s furent les réponfes folides des demandeurs aux
moyens du?fieur Bonnet, .Mais ce q u ir acheva de rendre ces
réponfés v i& o rieu fe s, ce fut la produ£tion qu'ils firent de
deux lettres écrites par le fieur Bonnet aux S o u lie r, l’une
en date du itf juin 1 7 8 6 , avant l ’ailignation des demandeurs;
l ’autre en date du 14 juillet fu iv a n t, pendant le côurs de
1 inftance. François Soulier ayant réfléchi fur la nature ».de
1 inftancequi fe pourfuivoit entre le fieur Bonnet & les deman
deurs , fur 1 abîme dans lequel la cupidité du fieur Bonnet l’avoir
p l o n g é , vint dépofer ces lettres entre les mainsdu Procureur
qui occupoit pour les demandeurs en la Jurifdidîon confulaire«
C e dépôt eft conftaté par un a£te paffé pardevant N o t a ir e , le>
.18 juin 1787. P a r c e même a£te, François Soulier a dé
voilé .toutes les iniquités, à la faveur defquelles le fieur:
Bonnet: n'avoit pas craint d'envahir fa fortune & celle de
�15
fon fils. Il y a déclaré encorô qu’il ne lui fero it pas rede
vable de plus de trois cents liv r e s, quoiqu'il eût des titres
qui établiffent une créance plus confiderable. Ces lettres
jouent un trop grand rôle dans cette affaire, pour qu’on
ne les tranfcrive pas. V o ic i celle du 1 6 juin 1 7 8 5 , qui eft
écrite aux S o u lie r, père ôc fils.
A la n c h e , 1 6 Juin iy 8 t?.
. » Je vous donne a v i s , Meilleurs Soulier , père & fils
» qu’il y a beaucoup de ceux à qui vous devez qui ont
» obtenu fentence par corps contre tous d e u x ; en confe» quence de c e , prenez-vous garde > & retirez-vous dans
» les pays où l ’on ne pourra pas vous fa ire prendre ; il y
» en a un de Peyruffe qui vous fuit, & il vous fera em» prifonner s'il vous trouve. V o u s dites que vous ferez
» le 24. juin à N euville ; prenez-vous garde , & ns vous
» montrez p a s , parce que le fieur Peuvergne eft ca» pable de-vous trahir; ainfi la préfente r e ç u e , ne fa ite s
» faute de vous mettre & entrer dans un pays fra n c , fa n s
» quoi vous fere\ faifls & emprifonnés : votre mère fe porte
» . t r è s - b i e n , & eft bien tranquille, ainfi que votre ta n te ;
» on travaille le bien à l'ordinaire , & les Vaches f e remet*
»
»
»
»
tront ; prenez-vous bien garde de ne pas vous laiffer
faifir, on travaille pour ce la , attendu que l'on a fu votre
route ; méfiez-vous bien de P e uv erg n e , ne vous préfentez
pas à lui. J e fuis toujours votre très-humble fe rv ite u r,
>1 figné B o n n e t , fils. »
■P . S . » A v e c le temps on parviendra à avoir les le ttres,
» ainfi patientez-vous ; mais ne vous montrez pas , car fi
t> vous vous montrez dans les pays francs ^ vous êtes pris. »
U n’eft pas inutile encore de tranfcrire l’adreffe, » A M .
�* 4
»
»
p
v
L a r d e t , marchand C hau dron ier, pour remettre à Jean
S o u lie r , auiïimarchand Chaudronier à B o u r g e n Bresse,*
& auiïi pour le faire tenir , fi l ’on p e u t , au fiçur Soulier^,
à N e v il l e , le 24 juin 1785. »
L a lettre du 14 juillet 1 7 8 5 , adreifée par le fieur B o n
n e t , à Jean S o u lie r , fils, fe u le m e n t, eft écrite par le fieur
B o n n e t , ainfi que la p récéd en te; mais il ne l’a pas fig n é e ,
$c il a grand foin d’en donner les raifons, elle eft ainfi
qpnçiie.
■
'
A lan che , le 14 J u illet tyZG.
» S o u l i e r , f i l s , je vous envoie c i - i n c l u s , par l e fieur
» F o n t a n i e r , deux feuillets de papier marqué de la marque
» d ’A u v e r g n e , que vous lignerez au bas de chaque f e u i l l e ,
» pour préfenrer votre r e q u ê t e , &
vous mettrez au bas
» de chaque feuille & d’un cô té feulem ent, j approuve ce
» que dejjus , S o u lier, ainfi que cela fera .mis au bas de
celle-ci y vous ne parlerez de rien à perfonne ; vous m i
» renverrez cela par F o n tan ie r, ou par la porte; vous me
i) renverrez aujji la pr.éfente lettre, parce que j e ne v e u x
pas que cette lettre f e voie t attendu que j e v eu x fa ir e
» cela de cachette ; fi vous ne me renvoyez pas la préfente,
» je vous allure que je taillerai vos affaires fans faire ;
» j e ne figne pas la préfente, crainte q u e lle tombe en mau» vaifes mains : vous deve^ connaître mon écriture ,par con» fcq u cn t vous fa v e { à qui il fa u t adrcfftr vos affaires. »
L a première page de la lettre fe termine en cet e n d roit;
6c on voit au b a s , au milieu de la page j ces termes écrits
de la .m a in du fieur B o n n e t , fapprouve çe que deffits , "
C ’étoit le modèle de la foufcription que le fieur.
B onnet demandoit à S o u lie r } f i ls , qui devoit être mife .au
So u l ie r .
�1\
bas des deux feuilles de papier timbré qu’il lui en v o y o it;
& à la fécondé page de la lettre eft écrit ce qui fuit. » S i
» vous ne comprenez pas ce que je vous m arqu e, vous
» vous le ferez expliquer à quelqu’un de connoiffance de
» ce pâys là-bas ; vous lignerez à chaque feuille, & d’ur*
» côté feu lem en t, & vous commencerez à l ’endroit où il y
» a un petit traie de p lu m e, c ’eft-à-dire, qu’il ne faut que
» quatre fignatures. Prenez-y bien garde, & renvoye^-moi
x> la préjente lettre que je vous é c r is , fan s quoi j e ne fera i
» rien. »
L ’Adreffe de cette lettre eft la même que la première ,
& le fieur Bonnet défiroit fi ardemment de recevoir ce qu’il
dem andoit, qu’il inféra fon adrefle dans ces lettres.
A ces deux lettres François Soulier joignit les deux feuil
les de papier au timbre d'Auvergne, qui avoient été envoyées
par le fieur* Bonnet ; on voit à la première page de chaque
fêuille;:, le trait de plume fait par le fieur Bonnet., où
devoient'com m encer les approbations quxl défiroit de la
part de S o u lie r, fil«.
L ’affaire en cet état préfenta la queftion de favoir s’il
y avoit ou non faillite ouverte de la part des S o u lie r , fi
l e fieur Bonnet en étoit l’auteut- 'ou le fauteur; fi'lesa&ek
dont -il' étoit m uni, étoient frauduleux ou non : dès l'orsles
J u g e s-C o n fu ls, fuivant les règlements*-, irétoient p‘lus com
pétents ; àuifi par une fentence du 27 feptembi'e 17 8 7 ,11 s
délaifferent ;la caufe '& les parties pardevant les Juges qui
en dévoient connoître , tous dépens refervési, fur les
quels le -J u g e du renvoi i h fje r o i t .
'
En* exécu tion de c e tte fe n te n c e , le fieur B o n n e t a é té '
traduit" en c e S i è g e , -ô c 'l’affaire y a été retenue.
f
�ïï
M
O
Y
E
N
S
.
II
feroit inutile de faire des efforts pour étib lir que les
Soulier ont été en faillite o u v e rte , au moins dès le 24
avril 1 7 8 6 , époque des a&es paffés entr’eux & le Heur
B o n n e t ; l ’évidence de cette propofition eft frappante ; dès
cet inftant les Soulier fe font abfentés , ils ont abandonné
tout-à-la-fois leur fortune & leur c o m m e r c e , ils ont ceffé
leurs paiements ; chacune de ces circo n fta n c es, fuivant les
lo ix , caractérife la faillite ou banqueroute. L ’article i er.
du titre X I de l ’Ordonnance de 1673 , porte que » la
» faillite ou banqueroute fera réputée ouverte du jour
» que le débiteur f e fera retire , ou que le fcellé aura été
» appofé fur fes biens. » M . Jouffe , fur cet article n°. 4 ,
dit que » la faillite ou banqueroute eft aufli réputée ouverte
» du jour que le débiteur eft devenu infolvable , ôc a ceffé
» entièrement de payer fes créanciers, ou qu’il a détourné
» & changé fes effets de n a t u r e ,& c . » L a même jurifprudence eft atteftée par D é n if a r t , au m ot banqueroute ^ nos.
14 , 1 f , 1 5 ôc 17.
Il
y a p lu s , les Soulier ne font pas Amplement tombés
en fa illit e , mais encore ils ont fait une banqueroute frauduleufe. » Déclarons ( eft-il d i t , dans l ’article X du titre
» X I de 1 Ordonnance de 1673 ) , banqueroutiers fraudu» leux f ceux qui auront divertis leurs effets, fuppofé de3
» créanciers , ou déclaré plus qu il n dtoit dû aux véritables
» créanciers.» Dans la jurifprudence il y a encore d’au
tres cara&ères auxquels on juge une banqueroute frauduleufe ;
auflî M . J o u ffe , fur l ’article X I , n°. 4 , dit que » les ban» queroutiers frauduleux
fon t ceu x qui détournent ; ou ;
e n lè v e n t
�17
» enléventleurs effets , o u les m ettentàcou vertfous des noms
» interpofés par de faufles v e n te s , ou par des cédions ou
» tranfports fim ulés, ceu x qui emportent ou cachent leurs
» re'gijlres & papiers, pour ôter à leurs créanciers la con» noiffance de leurs effets, & de l'état de leurs affaires. »
C e même auteur , fur l’article i cr. du même t it r e , r.°. 4 ,
explique en détail les renfeignemencs q u ’un débiteur en
faillite doit s’empreffer de donner à fes créanciers , les pré-’
cautions qu’il doit prendre pour la fureté de fis e ftV s ; tout
cela réfulte de la difpofition même de i article X I , q u i veut'
q u e , » les Négociants & les M archands, tant en gros
» qu’en détail, & les Banquiers qui, lors de leur faillite , ne
» repréfenteront pas leurs régiftres & journau x, lignes &
» paraphés, pourrontêtre réputés banqueroutiersfrauduleux. »
O r , en appliquant toutes ces autorités aux faits dont on a
déjà rendu com pte, on fera aifément convaincu q u ’il s’en
faut bien que les Soulier doivent être placés dans la claffe
des débiteurs qui ne font que malheureux.
L a principale tache qu’aient donc à remplir les D e m a n
deurs , eft de prouver que le fieur Bonnet a été non feu
lement fauteur de cette banqueroute frauduleufe, qui a fait '
évanouir en un inftant le gage de leurs créances j mais
qu’encore il en a été l ’auteur. S ’ils établiffent une fois ce
point de f a i t , il ne faudra pas une forte lo g iq u e , pour prou
ver que l’o b lig a tio n , de la part du fieur Bonnet , de payer
les créances des D em a n d eu rs, doit être la moindre puni- '
tion d'une conduite auiïi extraordinaire.
L ’article X I I I du même tit. X I de l'Ordonnance de 1673 1
détermine les cas dans lefquels on fera réputé avoir aidé ou
C
�18
^avorifé une banqueroute frauduleufe; il les fixe à quatre, favoir;
» fi l’on a diverti les effets du d é b iteu r, fi l’on a accepté
» d is tranjports, ventes ou donations fimulées, & qu’on favoit
» être en fraude des créanciers ; fi l ’on s’eft déclaré créancier»
» ne Tétant pas , ou fi Ton s’eft porté créancier pour plus
» grande fomme que celle qui eft due »
C ette loi ne parle pas d’un autre cas dans lequel on mé
rite encore plus certainement le titre de fauteur de ban
queroute : le Légifiateur ne peut l ’avoir o m i s , que parce
que l ’évidence fuppléeoit à fa décifion. C e cas eft celui où
un particulier a favorifé Tévafion du débiteur , ôc Ta fouftrait à la prife des créanciers. A u ili le C om m en ta teu r, donc
on a déjà eu occafion d ’invoquer plufieurs fois le fu ffra ge ,
n ’a pas manqué d’en faire Tobfervation , fur cet article X I I I ,
n°. y ; » outre les quatre c a s , d i t - i l, de com plicité préfu» m ée en cet article , en matière de banqueroute, on peut
» encore regarder com m e complices de banqueroutes frau» id u le u fe s , ceu x qui favorifent l ’eva/îon des Banqueroutiers,
y».ou qui empêchent q u ils ne foien t arrêtés. Par l ’A rrêt du
3> 26 Janvier »702 (cité fur l ’article p r é c é d e n t, N ° . 3 )
» le nommé C hérubin qui avoit facilité Tévafion d e F a b r e ,
» qu’il favoit être crim in el, fu t condamné a u banniifement. »
Faiions a&uellement l ’application de ces A u t o r i t é s , ÔC
voyons s il eft pofïible au fieur Bonnet d’échapper au re
proche que lui f o n t les Demandeurs , d’avoir favorifé la ban
queroute frau d uleu fe des Soulier.
E n p re m ie r lieu , il a fait plus que de divertir les effets
de ces p a rticu liers. L ’Ordonnance , fous ces mots , en di~
vertijjant les e ffe ts ,
a pu entendre un fimple récélé , pour
�ïp
les confefver au débiteur , au préjudice de Tes créanciers ;
mais le Heur Bonnet ne s’en eft pas tenu là. Il a fait paifer
en fon p o u v o ir, fans compte ni mefure , toute la fortune
des Soulier ; & les a£tes qu’il a p afles, annoncent qu’il entendoit s’en rendre propriétaire. Il parvient d’abord à fe ren
dre dépofitaire du livre journal des Soulier , objet fi pré
cieux dans leur fortune , en leur promettant un fecours que
dans la fuite il leur a fait payer bien cher. Les Soulier ont
foutenu ce fait dans leur requête de p la in te, & ce qui ert
démontre la vérité , ce font les différentes faifies & arrêts
‘ que le fieur Bonnet avoit fait faire * avant les deux a£tes
du 24 avril i78i>, entre les mains des débiteurs des S o u
lier , qui demeuroient dans les Provinces de Bréfïe & de
B u geyi II auroit été impoffible quJil eût fait faire ces fai
fies , au nombre de plus de v i n g t , s’il n’avoit pas eu en
fon pouvoir le livre journal. L es Soulier s’élèvent contre
fon entreprife , il trouve le moyen d’étouffer leur récla
mation ; le titre de fimple dépofitaire d e s'la fortune m obiliaire des Soulier , qu’il s'étoit procuré malgré eux , il le
'convertit en celui de propriétaire, & il obtient encore un
abandon de leurs immeubles.
En fécond lieu
quand il auroit été réellement créancier
des Soulier , il eft bien évident que cette circonftance n’excuferoit pas fa conduite , & il ne feroit pas pour cela à
1 abri de 1 a£tion des D em an deu rs. Mais il eft cependant vrai
que fi jamais il a été créancier des Soulier , il a exagéré ce
qui pouvoit lui être d û , & qu’au moins aujourd’hu il ne
peut pas prendre cette qualité.
i°. Parce qu’il eft invraifemblable qu’il ait laiffé Accumu
ler tant de créances fur fes prétendus débiteurs.
�20
2°. Parce que la collufion manifefte qui a ‘régné entre
lui ôc les S o u lie r , ne permet plus de confidérer com m e fincères Tes prétendues créances. Il lui eft bien plus aifé d’en
faire paroître les titre s , qu’il ne l ’eft aux Demandeurs de
juftifier des quittances qu'il en avoit vraifemblablement don
nées aux débiteurs. Ceux-ci fe font livrés à lui avec la plus
imprudente confiance. Ils l'ont rendu le maître de leur for
tune 6c de leur fort. Peut-on fe refufer à cette idée , en
lifant ces deux lettres , qui, d’après le fieur Bonnet lu i-m êm e ,
n ’auroient jamais vu le j o u r , s’il eût prévu qu’on les lui eût
oppofées , & fur-tout en juftice ? Elles apprennent q u e le fieur
B onnet étoit dans tous les fecrets des Soulier ; il favoit où
ils avoient dû fe rendre, après leur évafion , où ils devoiene
aller enfuite ; ce qui fe paifoit dans leur famille , l'état de
leurs biens, la deftination d’une partie de leur m o b ilier, des
tination que lui feul pourroit'encore nous expliquer. Votre
mère , dit-il , dans la lettre du 16 juin 1786 , f e porte trèsbien. , & ejî bien tranquille , ain(i que votre tante. Ori tra
vaille le bien à l'ordinaire , & les vaches fe remettront.
30. C e qui fait élever le plus violent foupçon contre les
prétendues créances du fieur Bonnet , c ’eft la triple affec
tation
de n’en faire le détail par aucun a£le, pas même
par ceux du 24 avril 1785 , & de confondre ce qui étoic
cîû^par Français S o u lie r, avec ce qui pouvoit l’être par Jean
Soulier , fon fils , & de ne pas apprendre ce qui étoit à> la
charge des Bagués , aflociésdes Soulier ^ & ce qu’ils avoient
payé.
En troifième lie u , le fieu r.B on n et s’eft fait faire par les
S o r î i e r , une vente fnnulde de leurs biens immeubles. C e
�*1
qui le prouve , ce font les termes de la lettre du 16 juin
1 7 8 6. On travaille le bien à l'ordinaire , & les vaches f e re
mettront. Ces termes annoncent que le bien ne fe travailloit
pas pour le compte du fieur Bonnet , & cependant il s’ea
étoit fait tranfmettre la propriété , par un des a£tes du 24.
avril précédent. Dans la fécondé lettre , du 14. juillet fuivant , il femble ne vouloir que veiller à l’adminiitration de
leurs biens. Si vous ne me renvoye£ pas , leur d i f o i t - i l la
préfcnte , j e vous ajfurt que j e laijjerai vos affaires fa n s faire.
I l fsfoit donc croire aux Soulier qu il leur laifleroit la
jouiflance de leur bien , en fe muniflant cependant d un a£te
qui lui donnoit le droit de s’en emparer à fon gré.
En quatrième lieu , le fieur Bonnet a inconteftablement
favorifé l ’évafion des Soulier. Il étoic impoilible d’être plus
officieux qu’il ne l ’a é t é , pour Îbuftraire leurs perfonnes à la
prife de leurs créanciers. C ’eft lui-même qui nous fo u r n it, à
cet égard , les preuves les moins équivoques. Je vous donne
avis , dit-il dans fa lettre du 16 juin 1785 , qu’il y a beau
coup de ceux à qui vous deve^ , qui ont obtenu fentences par
corps , contre tous deux. En confequence de c e , prenez-vous
garde , & retirez-vous dans les pays où Von ne pourra pas
vous faire prendre. I l y , en a un . de P eyrujfe , qui vous f u i t ,
& il vous fe r a t emprifonner, s’il vous trouve. Il ne ceife de
répéter cette idée danstIe corps de la le ttre , & elle devient
encore le fujet de fa conclüfion. A in f i, la préfente reçue ,
ne. fa ite s fa u te , d it-il, de vous mettre , 6» entrer dans un.
pays franc ,fa n s quoi vous fere^ faifts-ù emprifonne's^ L e fieur
Bonnet ne peut quitter la plume f fans^ dire encore(aux Sou
l i e r , prene7C vous bien garde de ne pas^ vous\laijJerJaifir, on
�22
travaille pour cela , attendu que
l ’on a f u votre' roiite. Ô il
ne craint pas de Je dire , le fieur Bonnet avoit plus en
horreur le retour des Soulier j q u e csux-ci ne le défiroient.
Q u e lle pouvoit être la raifon d ’une conduite auffi étrange ,
fi ce n ’eft l’intention où il étô'it de faire perdre aux Soulier
l ’efpoir de revoir jamais leur pays , & db confolider par-là
l ’abandon qu’il s’étoit fait faire de toute leur fortune ?
E t comment ne pas fe fortifier dans cette idée , à la vue
de la lettre écrite par le (leur Bonnet , le «4 juillet 1 7 8 6 ,
contenant demande des foufcriptions & fignatures de S o u lie r,
fils , fur les deux feuilles de papier , au timbre d’A u v e r g n e ,
qu’il a voit eu Inattention de lui envoyer ? L ’ ufage que le
fieur Bonnet v o u lo it en faire , avoit deux objets. O n lui
avoit contefté la qualité de créancier , au moins de Jean Sou
lier s fils, & il avoit fans doute en vue de faire reconnoître
par ce d ern ier, qu’il étoit perfonnëllement débiteur. Les D e
mandeurs avoient énfuite foutenu , & avec raifon , que, dans
tous les c a s , les ades auxquels le fieur Bonnet avoit fait
confentir les Soulier , 1 e 24 avril 1785, étoientnuls, parce que,
dès cet inftant, ces particuliers s’étoient abfentés , & avoient
été en faillite o u v e r t e , & le fieur Bonnet cro yo it détruire
ce moyen , en fe procurant les fignàtures de Soulier , fils.
I l faut préfumer qu’il vouloit écrire au-defïus , ou un bilan ,
ou une requête en ceilïon ou refpi ; il auroit foutenu que
la faillite n avoit com m encé qu à la date qu’il auroit donnd
à ce bilan , ou à cette requête., & encore au moyen des
fignatures , mifes fur du papier du pays , il auroit pu dir.e
que les Soulier étoïènt !fùr les lieux , q u o iq u e , dans le fa itj
ils s’en fuiTent abfentés depuis long-tem ps.
�23
Eft-ce là la conduite d’un créancier qui ne veut que
prendre de fages précautions , pour conferver une créance
légitim e? E t , au contraire, ne voit-on pas un hom m e qui,
ouvrant fon cœur à la plus fordide ambition j affe£te de ten
dre une main fecourable à un d éb iteu r, pour hâter fa chute »
& enlever à fes créanciers les débris de fa fortune , pour
en profiter lui-même ?
M a is , à quoi bon recourir à tant de preuves, pour dé
montrer que la conduite du iïeur Bonnet eft répréhenfible ?
I l T a lui-même jugée telle , en recom m andant, avec tanp de
foin , le fecret fur toutes, fes manoeuvres. Vous m e,renver-,
re^ , difoit-il dans la lettre du 14. juillet 1786 , aujfila prefente lettre, parce que j e ne veu x pas que cette lettre f i v o ie,
A T T E N D U QUE J E V E U X F A I R E C E L A D E C A C H E T T E .. .
j e ’le figue pas la pré fente , erainte q u e lle tombe en -mauvaifes ‘ mains. V ous deve\ connoître mon é c r i t u r e .... ^ ren Voye^-moi la pré fente lettre que je vous écris, fa n s quoi j e /zç,
fer a i rien. Si la condijite du fieur Bonnet eût été hon nête,
auroit-il manifefté un defir aufli ardent du fecret ? Il n’ y a que (
le crime qui fuit la -lumière.
_ D e ce que le fieur Bonnet eft non feulement le fauteur,
mais encore l ’auteur de la banqueroute des Soulier , il en
réfulte deux conféquences , l’une qu’il a encouru les peines
les plus graves. L ’article X I I I du tit. X I de l’Ordonnance
de 167? , veut que ceux qui feront convaincus d avoir aidé,
ou favôrifé une banqueroute frauduleufe , foient condamnés
en t$ o o liv. d'amende, & au double de ce qu ils auront diyer-,
ù , pu trop demandé y au profit des çréanciers. La D éclara
tion du 11 Janvier 1 7 1 5 , eft allée plus loin. E lle prononce
�2 4
contr’eux la peine des G alères à perpétuité , ou à temps j
fuivant l’exigence,des cas, outre les peines pécuniaires contenues
en l’Ordonnance. Mais les Demandeurs bifferont cette difcuf-«
{ion à la fagefle de M eilleurs les Gens du R o i , dont le zèle
leur fera fans doute réclamer la communication d’une affaire
de cette nature. L ’autre conféquence , qui eft la feule dont
les Demandeurs doivent s’o c c u p e r , c’eft l ’obligation , de la
part du fieur B o n n e t , d’acquitter leurs créances. O r , cette
co n féq u en ce eft inconteftable. •
* E n e f f e t , il ne s'agit pas ici d’une fimple amende', &ïdu
paiement du double des objets divertis ; on ne peut pas les
déterminer. Le' fieur Bonnet s’eft emparé de toute la fortune
des S oulier ; il a pris leur livre journal , fans en faire dreffèr procès-verbal.- O n ne peutfavoir quelles font les fommes
dont i l V e f t fait 'payer. I l vrapporte ce livre journal dans le .
plus' mauvais état ; éritre les feuillets qui font encore exi£
ta n t s , on diftingu« les reftes< de quarante-trois, qui ont é té
déchirés 6c enlevés , on ignore s'ils ont été cottés. L es autres
l ’o n t été , 6c de ceux-là encore il en manque environ h u it,
6c certains autres font détachés 6c volants.Et il eft efïentiel
d e ‘ remarquer que c’eft entre les feuillets actuellement exiftants ôc écrits , que l’on apperçoit qu’il y en a eu de déchi
rés , 6c qui manquent. L é fieur Bonnet a donc tout-à-la-foiscommis des fouftra&ions fur la fortune mobiliaire des Sou
lie r , 6c il a pris des mefures pour empêcher de les connoître*
6 c de les apprécier. C om m ent d o n c , dans une pareille poiition , pourroit-il fe difpenfer de payer les créances des D e
mandeurs ? Peut-il
a fait ?
autrement réparer le
to rt qù’il leur
*
Au
�A u furplus , quând on fuppoferoit , pour un m o p ie n t,
que le fieur Bonnet ne dût pas être regardé comme le fau
t e u r , ou, pour mieux dire , l’auteur de ia banqueroute des
Soulier , & que par conféquent il ne dût pas payer les
créances des Demandeurs | au moins, eft-il certain qu'il ne
pourroit pas réclamer l’exécution de la vente d’immeubles
qu’il s’eft faite co n fen tir, le 24 avril 17.8e?, & qu’il devroic
rapporter les fommes qu’il a touchées des débiteurs des Sou
li e r , en vertu de l’autre a S e du même jour , pour être par
tagées avec les Demandeurs , au marc la livre de leurs
créances.
' E n effe t, la Déclaration, du 1,8 novembre 1 7 0 2 , veut que
toutes cédions & tranfporti fur les biens des marchands qui
font faillite', foient nuls & de nulle v a le u r , s’ils ne font
faits dix jours au moins avant la faillite publiquement co n
nue ; comme auffi que les a£tes & obligations qu’ils paiferont .devant N otaire , au profit de [quelques -uns de leurs
créanciers , ou pour .contra&er de nouvelles dettes,, enfemb le les fentences qui feront rendues contre eux , n’acquiérent aucune hypothèque ni préférence fur les créanciers
c hi ro gr a ph a ire s , fi lefdits aftes & obligations ne font pafles,
& fi lefdites fentences ne font rendues pareillement d ix
jç u r s au moins avant la faillite publiquement connue.
E t que le fieur Bonnet ne dife pas que le droit qu’il a
eu de toucher les créances dues à fes prétendus débiteurs,
ne dérivoit pas de la çeiTion du 24. avril 17 8 6 ; qu’il lui
étoit acquis par les failles & arrêts qu’il avoit faits faire an
térieurement , & dont quelques-unes remontent a douze ou
quinze jours avant l’a d e , tandis que les autres ne font pas
antérieures de dix jo urs, ou font poftérieures.
D
�z6
L e L egiilateur n’a pas dit abfolument que l ’on dût regar
der comme exempts de fraude les a£tes paifés avec un dé
biteur , par cela feul qu’ils l ’auroient été dix jours ou plus,
avant l’ouverture de la faillite; il a feulement préfumé, d’a
près l’intervalle de dix jo u rs , que celui qui contractaitécoit
en bonne f o i , ôc qu’il ignoroit le dérangement des affaires
du débiteur ; mais il n’a entendu ni pu entendre, que quand
même l'acte, ou les pourfuites judiciaires remonteroient à
plus de dix jours avant l ’ouverture de la faillite , il fut
valable , s’il écoit d’ailleurs prouvé que cet a£te ou fes pourfuites croient le fruit de la mauvaife foi ; les cas de fraude
font toujours exceptés de la l o i , & ici la fr a u d e , d e là
part du fieur B o n n e t ,
o u , ce qui
eft de m ê m e , la con-
noiiTance q u ’il avoit des affaires des S o u lie r , bien plus de
dix jours avant la publicité de leur ban qu eroute, & là
collufiqn qui a régné enfuite en tr’eux & l u i , ne peuvent
plus- être révoquées en d o u te ; a u f li , faut-il remarquer ces
termes de la l o i , d ix jo u rs au moins ; ils prouvent qu’elle
n’a pas entendu fauver de la profcription tous actes ou
toutes pourfuites, bien qu’ils remontaffent à plus de dix
jours avant l ’ouverture de la faillite; il a été dans l ’efpric
de la l o i , comm e dans la raifon, que toutes ces précautions
de viendroient v a in es, s’il s’élevoit des circonftances fuffi-,
fa n t e s , pour être convaincu que la fraude y a p ré fid é , ÔC
qu’un créancier a abufé de la connoiiTance qu’il avoit de
la fituation des affaires du débiteur , au préjudice des au
tres créanciers qui Tignoroient.
Mais cette dernière réflexion n’eft faite que fubfidiairem e n t, & pour ne rien négliger dans la défenfedes deman-
�27
d eurs ; on fe flatte d’avoir établi que la conduite que le
fieur Bonnet a t e n u e , lui impofe la néceffité de payer leurs
créances ; c ’eft la moindre peine qu’elle doive lui attirer ;
il a lieu de craindre un jugement encore plus f é v è r e , qui
ferve à contenir ceux qui pourroient oublier que fi une
fortune acquife par un travail pénible & honnête , doit être
plutôt honorée qu’e n vié e, celle qui n’eft que le fruit de
la cupidité devient tôt ou tard un fujet de h o n te , quelques
précautions même qu’on prenne pour agir en cachette.
Monfieur F A I D
I T , Rapporteur.
M e. G R E N I E R ,
A v ocat.
G r a n e t , Procureur.
de l’imprimerie
M artin D É G O U T T E
Im p rim e u r-L ib ra ire , près la Fontaine des L ig n es, 1789
A R IO M ,
�
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Factums Baron Grenier
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Dublin Core
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A name given to the resource
[Factum. Boyer, Antoine. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Faidit
Grenier
Granet
Subject
The topic of the resource
banqueroute
opinion publique
créances
prison
marchands de bestiaux
livres-journaux
juridiction consulaire
Description
An account of the resource
Mémoire pour Antoine Boyer, Jean Chabrol, Jean Soulier, Etienne Varenne, Jean Maigne, Jean de Lendy et Antoine Reynaud, tous marchands, habitants des paroisses de Veze, Dienne et Alanche, demandeurs. Contre sieur Jean Bonnet, seigneur de Charmensat, habitant de la ville d'Alanche, défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1785-1789
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
BCU_Factums_B0132
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Véze (15256)
Dienne (15061)
Allanche (15001)
Charmensac (15043)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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banqueroute
Créances
juridiction consulaire
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marchands de bestiaux
opinion publique
prison
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ÉMOIRE
POUR Jea
n
-M
¿tx)
1M *1
BOSREDON
arie
,
détenu dans la maison de Justice près le
Tribunal Criminel du Département du Puyde-Dôme , comme soupçonné d’émigration.
J
e
n e me suis jamais émigre ; je n ’en ai jamais
eu l ’intention. Je suis chevalier de l ’ordre de Malte ;
et depuis
le com m encement
de
demeuré ou à M a l t e , ou sur le
la
ré v o lu tio n , j ’ai
territoire
français :
cependant je suis détenu depuis le 15 avril dern ie r ,
comme étant prévenu d ’émigration.
Depuis long-temps le tribunal criminel du département
du Puy-de-D ôm e m ’a renvoyé au directoire du même
A
ÙV
�irfc
\
départem en t,
pour
( O
faire valoir
y
conformément à l ’article L X X X
1793.
J ’ai
prouvé
aux
citoyens
mes
e x c e p t io n s ,
de la loi du*28 mars
administrateurs
du
d irecto ire , par l ’organe de mes défenseurs, que dans
le fait je n ’avois pas été é m ig ré ; que dans le d r o i t ,
je n e pouvois l’ê tr e , parce qu ’a ya n t été reçu chevalier
de
l ’ordre de M alte
en
1782 , et que n ’a yant pas
abdiqué ce titre , je ne pouvois être considéré com m e
cito yen français ; que les lois m e privoient tout à-lafois
*
de
cette
qualité ,
et des
droits
qui
y
sont:
attachés.
»
A u m o m e n t, où le directoire du département alloit
pronon cer sur
avis
de
mon s o r t , j ’a i appris qu’il avoit reçu
s u sp e n d re , de la
part du cito yen
ministre
de l ’intérieur, q u ’il avoit consulté sur la q u e stio n , et
que
le citoyen
ministre
ét'oit' dans l ’intention
d ’ên
référer à la convention nationale.
Pour hâter la cessation d ’une détention que j e ne
méritai jam ais, je vais soumettre au citoyen m in is tr e et
aux comités de législation et de sûreté générale près la
convention , les m oyens de défense qui ont été exposés
pour moi au directoire du département. Il en résultera que
je puis être j u g é , que j e dois l ’êfre dans l’état actuel ;
q u ’il existe des lois qui portent une décision claire sur
mon s o r t , dont il ne s’agit que de faire l ’application ;
qu'il n’en faut pas une nouvelle ; d ’ailleurs cette nouvelle
loi , à laquelle il n e "seroit pas juste de donner un
effet rétroactif, ne doit pas plus faire la boussole d e
la décision que j ’attends 3 q u ’elle a dû faire la règ le
I
�y//
,
:■......................
,
< 5 >
...
d e ma co n d u ite, puisque je n ’aurois pu me gouverner
par une loi que je n ’aurois pas' connue.
E n 1782,
étant
en fan t,
et étudiant au
collège
d ’E ffia t, mes parens me firent recevoir chevalier de
l ’ordre de Malte.
Depuis ma r é c e p tio n , je suis allé
à M alte à trois reprises ; j ’y ai plus long-temps résidé
qu ’en France. À
ce premier
titre de c h e v a lie r , j ’ai
réuni celui d ’officier d ’in fa n te rie , attaché au service
d e l ’ordre de M alte.
Après
un
long
séjour à M a l t e ,
après de
longs
vo ya g es sur m e r , nécessités p“ar cet éta t, je me rendis
dans la maison de mon p ère, qui est sur la municipalité
d e C o n d a t , district de Riom.
Le
16 mai 1 7 9 1 , je la quittai pour me rendre à
M alte. J e p r is , le lendem ain
1 7 , un p a sse-p o rt d e
la municipalité d e R i o m , où je déclarai que j ’étois
chevalier de l ’ordre de M alte , et que je me rendois
dans cette î l e , en passant par .L y o n .
C e n ’est pas là le langage d ’un homme qui veut
s’émigrer. Je déclare ma q u a lité , j ’annonce le pays
<
■
où j e vais. C e pays n ’étoit point ennemi de la France ( 1 ) .
Je n ’entendois point commettre une action punissable ;
etsi cela eûtété, la municipalité àlaquelle je communiquois
mon d e ssein , auroit dû m ’arrêter.
( 1 ) Je dois observer que le grand-maître de Malte avolt
recommandé à tous les chevaliers de l ’ordre , de ne prendre
aucune part aux troubles qui agitoient la France.
A 2
^
�( 4 )
■
A rriv é à M a l t e , j ’y demeurai jusqu’au mois d ’avril
T792 : à cette é p o q u e , je m ’embarquai pour me rendre
en France ; et j ’arrivai
suivant
au
com m encem ent de juin
à B oulogne - sur - M er ;
j ’y
résidai
jusqu’au
mois de février 1793 ; je logeai p endan t tout ce temps
chez le cito yen Jean-Louis C l é r e t , vitrier.
L e 26 février 1 7 9 3 , je pris un passe - port de la
municipalité de B o u l o g n e - s u r - M e r , et je me rendis
chez mon
père
vers
le
milieu
du
carême
dernier 3
après avoir passé par R ou en , V ersailles et Paris.
Q u e lq u e temps ap rès, j ’allai voir un de mes amis
à V e rn a ss a l, département de la H au te-L o ire : il d e v o it ,
ainsi que m o i, aller à L y o n ; nous fîmes le v o y a g e
ensemble.
C ’est dans cette ville que je fus arrêté, le 15 avril
dernier , sous le prétexte que je n e rapportois pas
de certificats de résidence. Je fus e n v o y é , peu de jours
a p rès, en la maison de justice près le tribunal criminel
du départem ent du P u y - d e - D ô m e , où est le dom icile
de m on père.
Interrogé par ce trib u n a l, j ’ai d i t , avec v é r it é , que
depuis le com m encem ent de la r é v o lu t io n , j e n ’avois
jamais habité qu ’en F r a n c e , ou à M a lt e ; que d ’ailleurs,
com m e chevalier de M a l t e , je ne pouvois être con
sidéré , dans aucun c a s , comme émigré.
ne pouvant juger la validité
Le
tribunal
des exceptions
que j e
faisois valoir, m ’a renvoyé au directoire du départem ent,
pour y statuer , conformément à la
loi que j ’ai déjà
citée. E n rappelant les m oyens de défense qui y ont
été
déduits pour
moi } on
sera
convaincu
que
le
�( 5 }
recouvrem en t de ma liberté ne peut faire la matière
d ’un d o u t e , et que cette
décision
doit
être portée
dès à présent.
M a défense se divise en deux propositions.
L a première est que je ne suis ni ne puis être émigré;
parce qu’ayant continué d ’être chevalier de Tordre de
M a lt e , je n ’ai pu être considéré comme citoyen français.
L a seconde qui n ’est que subsidiaire ,
et dans- la
discussion de laquelle j ’entrerai uniquement pour ne
rien négliger dans une affaire de cette im portance, est
q u ’à supposer que l ’on dût me traiter comme cito yen
français , je ne devrois certainement pas être puni
comme émigré , parce que je suis encore à temps
d ’établir que j e n e l ’ai point été.
4
P R E M I È. R~E
P R O P O S I T I O N .
J e n e suis ni n e puis être émigré ; je n ’ai jamais '
grossi les ennemis du pays qui me vit naître : cette
intention n ’entra jamais dans mon cœur.
Mais il n e
s’agit pas ici de juger mes sentim ens, il est seulement
question de s a v o ir , si d ’après ma- position , je suis
coupable , ou n o n , d ’avoir négligé de retirer des
certificats de résidence ; s’il n ’est, pas vrai que la loi
qui prescrivoit cette forme n e pouvoit me lier.
Le-grand maître de Malte est un souverain étranger >
les
chevaliers
ont
toujours
formant
été
l’ordre
dont il
sous sa dépendance ;
est le
ch ef,
ils ont été
’ obligés de marcher sous ses d ra p ea u x , à sa réquisition »
ils ont eu une existence politique qui ne pouvoit se
�c o
concilier avec les principes d e la révolution : il ¿toit
„donc impossible qu ’ils réclamassent la France comme
?leu r patrie , et que la république les régardât comme
ses e n fa n s, tant qu ’ils dem eureroient attachés à leur
•ordre.
A u ss i, cette ségrégation s’ést-elle faite sous les deux
rapports de leurs biens et d e leurs personnes.
Q u a n t à leurs b ie n s , elle résulte du décret des 14 et
•20 avril 1 7 9 0 , sanctionné le 22 , article V III. L ’article
prem ier de ce décret confie aux départemens et districts
l ’administration des biens déclarés par le décret du 2
novem bre d e rn ie r, être à la disposition-de là n a tio n ;
,et l ’art. V III e x c e p t e , quant à p résen t, des dispositions
,de l ’article premier de ce d é c r e t , l ’ordre de M a l t e , etc.
O n retrouve la même idée dans le décret du 23
juin- 1 7 9 0 ,
article V III.
Le
décret du mois d ’avril
p récédent que je viens de citer vouloit q u ’il fût fait
-inventaire du mobiliër de toutes les maisons religieuses
;ét communautés séculières. L ’article V III du décret du
23 juin 1790 en excepte l ’ordre de M alte.
Je conviens que la distinction des biens a cessé dans
la s u it e , d ’après de nouvelles idées qui n ’avoient pas
d ’abord fixé l ’attention des législateurs. C e la résulte du
décret du -19 septem bre 1792 qui a ordonné la ven te des
biens d e Malte : mais ce décret même laisse encore des
traces de' distinction entre les chevaliers de cet ordre et
les
citoyens
français
qui
ont
été pensionnés.
Les
chevaliers q u i, en cette q u a lité , avoient des possessions
en France , ont dû avoir les mêmes revenus
q u ’au
p a r a v a n t , à l ’exception toute fois des droits que les
�représentâns de la nation avoient supprimés sans indem~nité ; et l ’art. XII porte q u e , « quant aux propriétés que
y> les langues françaises ont dans les états voisins , ou
v que les langues
étrangères ont réciproquem ent en
» France , le pouvoir exécutif est chargé de négocier
» un
arrangement ,
tant
avec
l'ordre
de
M a lte
t q u ’avec les puissances respectives ». L ’article X du
même décret charge aussi le pouvoir ex é cu tif de régler
avec l ’ordre de M a lte , sous l ’autorité du corps légis
l a t i f , la somme
annuelle
contribuera à l ’entretien du
pour
laquelle
la
France
port et de l ’hôpital de
M a l t e , et pour les secours que les vaisseaux de cet ordre
donneront- au commerce maritime français dans laM éditerranée.
11 est évident que ce décret considère l ’ordre de
M alte comme une puissance étrangère. Mais cela n ’a pu*
ê t r e , sans qu’on n ’ait dû regarder comme membres
étrangers à la république les individus composant cet
ordre , puisqu’il n ’y a d ’ordre que parce qu ’il existe
des individus qui le composent.
Dans les décrets dont on vient de p a rle r, quoique
rendus pour les b ie n s , o n tr o u v e déjà les fondemens
d ’une distinction quant aux personnes j mais cette
dernière distinction qui est ici la plus e sse n tie lle , est'
disertement marquée dans le décret du 30 juillet 1 7 9 1 ,
sanctionné le 6 août suivant.
C e d é c re t, après avoir supprimé tous les ordres d e
c h e v a le r ie , ajoute, art. I V et dernier « : T o u t Français
* qui demanderoit ou obtiendroit l ’a dm ission, ou qui
» conserveroit l ’affiliation à an ordre de chevalerie o u 1
�.
'
( 8 )
.
. .
■
» autre, , ou corporation établie en p ays étranger >
V 'fondée sur des distinctions de naissance , perdra la
> qualité et les droits de citoyen fr a n ç a is * .
Dès
que j ’ai conservé l ’affiliation à un
chevalerie ,
ordre
de
à -une corporation étrangère , fondée sur
des distinctions de naissance , la conséquence est aisée
à
tirer.
Je
n ’ai
c ito y e n français.
plus
Il n ’y
existé
politiquem ent comme
a pas d ’équivoque sur mon
intention à conserver mon affiliation à M a l t e , puisque
p a r-to u t j ’ai pris la qualité de chevalier de M alte , et
notamment dans le passe-port que la municipalité d e
Riom m ’a délivré le 17 mai 1791 ; que j ’ y ai encore
ajouté que j ’allois à M alte en passant par L y o n , et
qu e je n ’ai cessé d ’y demeurer depuis que j ’ai quitté ma
famille , jusqu’à mon retour en France ( 1 ) .
V a in em en t
v o u d r o it-o n
distinguer
un
chevalier
d e M alte non prof es , de celui qui le seroit. C e t t e
distinction
n ’est ni
dans la
raison , ni dans la loi.
E lle n ’est point dans la raison. C e lu i qui tient à
un o r d r e d e c h e v a le r ie , qui jouit d e s -faveurs qui y
sont a tta c h ées, qui par sa persévérance aspire à d e
plus g ra n d e s, q u i a , si l ’on v e u t , la faculté de le quitter,
mais qui ne peut en être exclu , est présumé avoir
adopté des principes politiques , trop éloignés de ceux:
qui font -la base de la révolution fra n ça ise, p our qu e
o>
»
( 1 ) J'observe.que je suis âgé de .vingt-trois à vingt-quatre ans;
que je n’ai jamais exercé en France le droit do citoyen; je n’en
conçois pas même la possibilité. Aurois-je pu être noble à M a lte,
et dire en France que je 11e pouYois pas 1être !
la
�?î> 3>
C s >
Ja république l ’admette au nombre des citoyens : tant
q u ’il n ’a pas abdiqué le titre de chevalier de M a lt e , il
est soumis aux lois de son ordre ; il seroit p u n i , s’il les
violoit. O n ne pouvoit donc sans contradiction l ’obliger
à exécuter tout à-la-fois les lois de M a lte , et celles de la
F r a n c e , soit lorsqu’elle étoit une monarchie consti-’
tu tio n n e lle , soit lorsqu’elle
est
devenu e
une
répu
blique.
C e tte distinction n ’est pas non plus dans la loi. E lle
veut simplement que tout
Français
qui
conserveroit
Vaffiliation a un ordre de chevalerie , ou corporation
établie en pays étranger, fondée sur des distinctions de
naissance, perde la qualité et les droits de citoyen
français. O r , p o u rro it-o n soutenir raisonnablem ent,,
q u ’un chevalier de M a l t e , quoique non profès, ne soit
pas affilié à un ordre de c h e v a le rie , à une corporationfondée sur des distinctions de naissance ? L e législateur
s’est déterminé par la seule manifestation de la volonté :
il ne faut pas d ’autre engagement.
Mais quelle meilleure interprétation peut-on exiger'
j o u r saisir le sens de cette l o i , que l ’art. II du chap. III
de la constitution qui v a p a r o îtr e in c e s s a m m e n t , et qui
est décrétée en cette partie. Il y est dit que « l’exercice
» des droits de citoyen se perd par la naturalisation en
> pays étran ger; par l ’acceptation de fonctions ou faveurs
» émanées d’un gouvernement non populairey par la con» damnation à des peines infamantes ou afflictives ». Si
d ’apr'es la dernière l o i ,
des fonctions sans titre ,
de
simples faveurs momentanées qui peuvent subsister, même
abstraction faite de la noblesse , qui peu vent cesser
B
�au gré de celui qui les accepte et de celui qui les donne,
emportent la privation des droits de cito yen fran çais,
dès q u ’elles émanent d ’un gouvernem ent non populaire,
pourroit-on dire que le décret du 50 juillet 1791 , n ’a
pas
voulu
chevaliers
prononcer la même
exclusion contre des
de M alte qui , quoique
non p r o f è s , ont
bien plus que des faveurs d ’un gouvernem ent non
p o p u la ire, qui en tiennent un état qu ’ils con s erve n t,
autant q u ’ils le veu len t, un état adhérant à la distinction
nobiliaire , absolument incompatible avec les principes
d e la révolution? L e décret du 30 juillet 1 7 9 1 , et
l ’article de la constitution se prêtent un secours
m utuel ; ils ne sont que la continuité d ’une
même
loi : l ’ un avoit provisoirement ordonné ce que l ’autre
a érigé en principe constitutionnel : l ’un et l ’autre
s’appliquent évidemment aux chevaliers de M a lt e , profès
ou non : l ’un les prive de
l ’exercice des
droits de
c ito ye n , et l ’autre leur en avoit fait perdre la qualité.
A in si en 1791 , comme à p r é s e n t , les chevaliers de
M alte , sans distinction , n ’ont pu être regardés com m e
citoyens français.
- Je sais que
quelques
personnes
ont pensé q u ’un
chevalier de Malte pouvoit être réputé ém igré, d ’après
l'art. V II
du décret du 28 mars 1793 , qui s’explique
ainsi : i> N e pourra être opposée comme excuse ou
* prétexte d ’absence la résidence à M alte , ou sur le
» territoire de B o u illo n , M onaco et autres lieux q u i ,
» quoique
limitrophes
ou
alliés
par
des traités et
» relations de commerce , n e sont pas partie intégrante
» d e la France v> ,
et£.
�Y
f r
}
( 11 )
C ’est bien niai entendre cette loi que de l ’appliquer
à un chevalier de Malte.
i ° . C e t article n ’a pas eu en vue ceux qui sont
étrangers à la république : les législateurs n ’y ont été
occupés que des citoyens français auxquels on pourroit
imputer de s’être émigrés ; et pour pouvoir déterminer
les cas d ’ém igratio n , ils ont indiqué les lieux où leur
résidence ne seroit pas une e x c u s e , et qui ne font pas
parties intégrantes de la république , par opposition à
ceux qui en font partie : ensorte qu ’un citoyen français
qui auroit résidé à Malte ,, à Bouillon , ou à M o n a c o , ne
pourroit pas dire qu’il n ’est pas dans le cas de l’émigration.
Mais le chevalier de M alte , déjà mis au rang des
étrangers , étoit tout autant à l ’abri du reproche
d ’ém igration, que le seroit un habitant de M a lte , de
Bouillon , ou de M o n a c o , et qui ne seroit jamais entré
sur le territoire français.
2°. C e qui prouve que les chevaliers
de M alte
n ’ont pas été l ’objet des législateu rs, dans cet article,
c ’est l ’alliage qui y est fait des trois pays de M a lte y
Bouillon et M onaco. O n ne rappelle pas M alte pour en
faire l ’application aux chevaliers s on en parle com m e
de Bouillon et de M o n a c o , pour Tes mettre tous
également
dans
la classe
des
pays
étrangers à la
république.
3°. C e qui n e permet pas d e douter de la vérité
de cette interprétation , c ’est que cet article n e déroge
p oin t au décret du 30 juillet 1791 , que l’on n e peut pas
le su p p o ser, puisque ce décret vient d ’être confirmé
par un des articles constitutionnels. S ’il est vrai que les
B a
'¡ r \
�m
( * o
chevaliers de M alte aient été mis hors de la classe des
citoyens
français ,
il est
égalem ent
vrai q u ’ils sont
étrangers à la république ; et s ils sont étrangers , il
devien t indubitable que ce n ’est pas d ’eux q u ’on a
entendu exiger des certificats de ré s id e n c e , parce que
la nécessité de la résidence
dans
pu être imposée à celui qui lui
que
la nation
la
république n ’a
est étranger.
C e lu i
prive
des droits de citoyen, fr a n ç a is ,
ne pourroit pas être
puni , quand il auroit manqué
aux devoirs qui en sont une suite.
O n ne peut donc in’opposer que les articles V et V I
d ’un décret du 28 mars 1 7 9 2 , relatif aux passe-ports;
ils veulent que les Français ou étrangers qui voudront
sortir du r o y a u m e , le déclarent à la municipalité de
leur r é s id e n c e , et que le passe-port contienne mention
d e leur déclaration ; et à l ’égard des
personnes qui
entreront dans le r o y a u m e , q u ’elles p re n n e n t, à la
jDremière municipalité frontiere , un passe - port. O r ,
on a déjà vu que j ’ai rempli ces formalités.
S
J
e
e c o n d e
p r o p o s i t i o n
.
pouvois born er ma défense à l ’établissement de
la première proposition. Il n ’est pas à présumer que
je sois traité comme citoyen français ; néanmoins il t
est dans l ’ordre des possibilités, que mes juges décident
le contraire ; et des que je pourrois établir surabon
damment que je n ’ai jamais été ém igré, et que je serois
Encore à temps de le p rou ver, il y auroit de Pimpru len c e
de ïriü part de supprimer cette discussion secondaire »
r
�n y
( 13 )
e t je sens qu’il est doux à mon cœ ur de pouvoir m ’y
livrer.
L e décret du 28 mars 1 7 9 3 , article V I , n®, 2 ,
veut q u ’on déclare émigré tout Français qui ne justifier;*
pas , dans la forme p r e s c r ite , d ’une résidence sans
interruption, en F r a n c e , depuis le 9 mai 1792.
J ’ai dit dans mon interrogatoire, que je n ’étois venu
à Boulogne q u ’au mois de juin 1792. Je ne connoissois
pas la loi d ’après laquelle je pouvois avoir intérêt à
ce que mon arrivée en cette ville remontât à une époque
plus reculée. J ’ai pu me tromper sur les dates ; et il
est très - possible que mon débarquement à B oulogne
soit antérieur. J ’ai eu le malheur de perdre en route
m o n »porte-feuille qui contenoit des notes qui pouvoient
m e retracer exactem ent les faits. C e n ’est aussi qu ’après
mon arrestation, que j ’ai reçu de nouveaux extraits de
mon passe-port pris à Riom le 17 mai 1 7 9 1 , et de
celui que m ’avoit délivré la municipalité de Boulognes u r - M e r , le 26
février
1793.
C ’est à raison de la
circonstance de la perte de mon p o rte -feu ille, et par
un.défaut de m ém oire, que j ’ai dit dans mon interroga
toire , que je n ’étois parti de Riom qu'en juin 179 1 ;
c e p e n d a n t l ’extrait que j ’ai fait retirer e n su ite , du
passe-port que j ’avois dit devoir se trouver dans les
registres de la m u n ic ip a lité ,(m ’a appris que mon départ
de cette ville étoit du 17 mai précédent.
M a is , supposons encore que mon arrivée à Boulognesur-Mer n e soit que du mois d e (.juin 1 7 9 2 , on ne
pourroit faire valoir contre moi la préiixion de l’époque
du 9 mai prç,çç.4,çnt 3 portée par la loi du 28 mars
dernier.
/
�ÏV )
,1 ;
C h )
Pour s’en c o n v a in c r e , il faut remarquer le m otif pour
lequel on a fixé au n e u f mai 1 7 9 2 , la rentrée en
F r a n c e , de ceux qui s’étoient absentés de leur domicile.
- C ’est parce que la loi du 8 avril p ré c é d e n t, concernant
les ém igrés, article X X V I , prononçoit seulem ent la
privation du droit de cito yen actif, p en dant deu x a n s,
contre les émigrés rentrés en France depuis le 9 février
1 7 9 2 , ou contre ceux qui y rentreroient dans le mois.
O n voit que le délai que la loi accordoit se prolongeoit
au 9 mai s u iv a n t; et celui qui rentroit à cette é p o q u e ,
sous la sauve-garde de la l o i , n e pouvoit avoir encouru
d ’autre p ein e que celle qui y est portée.
M a is , pourroit-on regarder ce délai com m e fatal à
mon é g a r d , dès que j ’étois d é jà sur mer , et qu’il
me falloit plus de temps pour me rendre ? dès que
je suis arrivé de M alte à Boulogne-sur-M er en juin
1 7 9 2 , il falloit que je fusse sur les côtes de France
avant le 9 mai précédent. Dès-lors je devrois être réputé
avoir exécuté la loi.
E n e f f e t , o u tre q u ’il est dans la justice de distinguer
à cet égard un homme
de m e r , d e celui qui seroit
chez les puissances étran g ères, sur les confins d e la
république ,
c ’est que cette distinction
est faite par
l ’article V I de la même loi du 8 avril 1792. C e t t e
loi excep te de ses propres dispositions entr’autres per
sonnes les gens de mer.
D 'a ille u rs , il n e faut pas perdre de v u e , que le
mois dans lequel on pouvoit ren trer, en n ’encourant
d ’autre p eine que la privation du droit de citoyen a c tif,
pendant deu x ans, ne devoit courir, suivant l ’art. X X V I
r
�( 15 )
d e la loi du 8 avril 1 7 9 2 , qu ’à compter de la pro
m ulgation de cette même loi. O r , j ’aurois tout lieu
d e soutenir que le m ois, à partir de cette promulgation,
dans quelque district que c e puisse ê tre , n ’est expiré
q u ’en juin 1792 ( 1 ).
M a is , pourroit-on m ’o b je c te r, toujours en me suppo
sant la qualité de citoyen français, il auroit fa llu , aux
termes des décrets , q u e
vous
eussiez rapporté des
certificats de résidence dans la république. L es articles
X X I I et suivans de la loi du 28 mars dernier, combinés
avec l ’article V I , n ° . 2 , exigent que la résidence soit
établie par des certificats revêtus des formes qui y
sont mentionnées.
C e qui annonce mon in gén u ité, je ne crains pas
de le d ir e , c'est l ’aveu que j ’ai fait dans mes interro
gatoires , q u e je n ’avois pas cru devoir retirer de
certificats de résidence. M a i s , n e peut-il pas y être
suppléé par des renseignemens qui seroient demandés
jet constatés authentiquement sur les lieux ? N e suis-je
pas recevable à d e m a n d er, à cet e ffe t, mon transport
sur les différens endroits où j ’ai séjourné? Je me flatte
d ’établir l ’a ffirm a tiv e , à l ’aide d ’une fo u le de moyens.
L a loi veut bien qu ’ on justifie la résidence par
des certificats revêtus de certaines formes ; mais elle
ne dit pas qu ’on doive avoir ces certificats, dans le
C i ) Cette observation est dautant plus décisive, que, bien
lcin que la loi du 28 mars 1793 ait dérogé à la loi du 8 avril,
en cette partie, elle l a au contraire confirmée, article Y I , n°, 1..
�( ïO
m om ent même de l ’arrestation, sous p ein e d ’être mis.
à mort dans
vin gt - quatre
heures.
Les
législateurs
français n ’ont jamais entendu faire une loi aussi dure.
Il peut arriver, de plusieurs m an ières, qu’un parti
culier n ’ait pas de certificats qui constatent la vérité des
faits qu’il peut cep en d an t établir authentiquement. E t,,
par e x e m p le , un porte-feuille contenant tous les certificats
n écessaires, peut avoir été perdu un jour avant l ’arres
tation de celui qui aura été absent quelque temps de
son d o m ic ile , où en sero it-o n , s i , malgré l ’assertion
d e la perte des certificats, de la part de l ’arrêté, si,,
malgré son offre d ’y suppléer par de nouveaux certificats,,
il étoit mis à mort sur le cham p? N o n , une pareille
loi ne se trouvera jamais dans notre code !
On
doit donc
dire
que
la
loi veut
simplement
l ’attestation de la résidence par des certificats ; mais
que ne s’étant pas
s’entendre
autrement
expliquée , cela
par des certificats déjà
doit
e x is ta n s , ou par
dès certificats q u ’on est à même de se procurer. E t
l ’on doit donner au prévenu le temps n é c e s s a ir e et
les facilités convenables pour avoir les certificats ou
les attestations équipollentes.
C e la
doit
d ’autant plus
avoir l i e u ,
que les lois
p ré c é d e n te s, relatives aux certificats de résid en ce, ne
les exigeoient p a s , sous peine de mort : elles n ’avoient
trait qu ’aux biens.
L e décret du 9 février 1 7 9 2 , mettoit seulement les
biens des émigrés à la disposition de la nation.
V o ic i les. termes de l ’article I X du décret du 8 avril
suivant : « Pour é v ite r , dans la confection des liste s ,
toute
�( r7 )
» toute erreuT préjudiciable à des citoyens qui n e
» seroient pas sortis du royaume , les personnes qui
» ont des biens hors le département où elles font leur
» résidence a c tu e lle , enverront au directoire du dépar» tement de la situation de leurs biens un certificat de
» la municipalité du lieu qu’elles h a b iten t, qui consta-* tera q u ’elles résident actuellement et habituellement
» depuis six mois dans le royaume ».
L ’article II du décret du 13 septembre 1 7 9 2 , en
demandant l ’envoi des certificats de r é s id e n c e , avec“
de nouvelles form es, prononce pour toute p e in e , faute
d ’y satisfaire dans le délai qui y est porté, Vexécution
des lois concernant le séquestre et Valiénation des biens
des émigrés.
L a première loi qui parle de mort contre les émigrésqui ren treroien t, n ’est que du 23 octobre
1 7 9 2 ,'e t
elle n ’a été promulguée dans les districts que long
temps après.
L es
lois
qui
ont
d ’abord exigé les certificats de*
résid en ce, n ’étant donc relatives qu’à une privation de
b ie n s , on n e pourront être puni de mort p o u r ne lesavoir pas retirés dans le temps. T e l homme qui n ’avoit
aucuns b ie n s, croyoit n ’encourir
aucune peine ; e t ,
s’il eût été menacé de celle de m o rt, il se seroit sans
doute empressé de se faire délivrer et d ’envoyer des
certificats
de résidence. Je
me
trouve dans ce cas.
C om m e fils de fa m ille , je n ’avois et je n ’ai encore
aucuns
biens ; comme
chevalier
de
M a lte ,
j ’avois
renoncé à toute prétention à la fortune. Je n ’avois donc
rien à conserver.
J’en ai fait l ’observation dans mes
C
�0 8 )
interrogatoires. C o m m en t pourroit-on d o n n e r, en pareil
c a s , un effet rétroactif à une n ouvelle l o i , et punir de
rnort une n é g lig e n c e , toujours réparable, contre laquelle
cette peine n'étoit pas p ro n o n c é e , au moment où elle
auroit été commise ?
Mais ce qui achève d e lever toute difficulté sur la
faculté que doit
prouver
en
avoir un
tout
temps
prévenu d ’émigration , de
sa
résidence ,
ce
sont les
dispositions des lois des 12 et 13 septembre 1792. L a
p r e m ie r e , en imposant une taxe aux pères d ’enfans
ém ig ré s , leur a accordé un délai d e trois sem a in e s,
pour justifier leur résidence en France. L a seconde.,
en prononçant la nullité de certains certificats, accorde
un
délai
d ’un
mois
pour
en en voyer de nouveaux.
L orsque les législateurs sont uniquement occupés de la
privation des biens, ils accord en t.u n délai pour la réité
ration des formes, ou p o u r réparer leur inobservation ;
et,
lorsqu'il s’agit de *la v i e , on voudroi.t dire ,qu’ils
n ’ont pas entendu avoir la même indulgence ?
Aux
d is p o sitio n s
de
ces d eu x
lo is,
des
12
et
13
septembre ,179-2, se réunit encore l ’article X X X I de
la loi du 28 mars dernier : il donne
le
m o is , à l'effet
certificats
d ’obtenir de -nouveaux
r é s id e n c e , à ceux
délai d ’un
de
qui avoient d abord rapporté des
certificats annuUés. Il est parfaitement égal de n ’avoir
point de
certificats,
annuliés ; puisque ce
ou
d ’en
avoir
eu
qui ont été
qui est n u l , est aux y e u x de
la loi , -comme s’il n ’.eût jamais .existé. A la vérité ,
s u u a n t cet article , ce délai d ’un mois a dû cou rir,
û com pter de la ptpm ulgation de la loi » mais cette
�( i;9 )
disposition j i e peuj, me nuire. M a détention remonte
avant
et il est bien évident que le délai
n ’a pas couru contre moi , tant que j ’ai été détenu.
Il ne faut donc pas être étonné que des départemens
aient ordonné le renvoi de certains particuliers prévenus
d ’ém igration, sur les lieux ou ils disoient avoir résidé,
à l’effet
de le faire
constater authentiquement, Les
citoyens administrateurs du
département du Puy-de-
D o m e , qui doivent prononcer sur mon so rt, ont pris
ce parti relativement au cito yen Chamflour d ’A la g n a tj
et ceux du département du Cantal ont eu la même
précaution à l ’égard du citoyen Castella.
E nfin, j ’ai un avantage bien précieux sàns doute dans
une affaire de cette nature. C ’est que je n ’ai jamais été
considéré comme émigré ; que l ’opinion publique n e
s’est jamais élevée contre m o i , malgré
mon absence
du domicile de mon père ; mon nom n ’a été inscrit
sur aucune liste d ’émigrés.
A la v é r it é , il est fait mention de moi dans une liste
faite contre les pères des enfans é m ig ré s, pour les
c o n t r a in d r e au p a i e m e n t de la c o n fr ib u tio n ordonnée
par le décret du 12 septembre dernier. Mais il faut
bien r e m a r q u e r la manière dont j ’y ai été placé. C e tte
liste a été faite au district de R i o m , le
31 janvier
17 9 3 ■
> ¿P0(l ue à laquelle j ’étois en France. Mon nom
n ’y étoit pas d ’abord, et les administrateurs
qu ’il étoit de leur justice
ont se n ti
d ’observer sur un extrait
de la même liste qui est joint à la procédure instruite
contre
moi ,
que j e n ’y a v ° i s ^
confection, sur w
« R file
inscrit qu'anrcs sa
dans les ^uieaux3
C 2
�sans renseignemens qui pussent avoifc légalement. constaté
ma prétendue émigration. M o n père
VPU ü ’abord
contre cette in d ica tio n , même avant mon arrestation,
et il n ’a pas encore été statué sur sa dem an d e. E lle
recevra sa décision en même temps que la procédure
criminelle qui a été la suite de m on arrestation ( i ).
Je me flatte donc d ’avoir dém ontré q u e ma seule
qualité de chevalier de M alte doit m e faire acquitter
( i ) Il est impossible de dire que j’ai»été inscrit sur aucune
liste d’émigrés. L a loi n’admet d’autre inscription que celle qui
est faite en conséquence d’un avis ou envoi officiel d’une liste
de la part d’une municipalité.
Je dois remarquer que de ce que mon père s’est pourvu contre
la taxe, il en résulteroit encore, s’il en étoit besoin, un nouveau
moyen pour faire accorder le délai que je ne réclame toujours
que très - subsidiairement, et pour ne rien négliger dans ma
défense , puisque, comme chevalier de M a l t e j e soutiens que
je n’ai jamais eu besoin do prouver ma résidence en France.
L ’article L X 1II de la loi du 28 mars dernier, porte que « les
» personnes portées sur les listes des émigrés , qui ont réclam é,
» et sur les demandes desquelles-il n ’a point été statué, et celles
» dont les certificats de résidence sont annuités, seront tenues
» de s’en pourvoir, dans quinze jours, à compter de la promul» gation de la loi ». Je serois nécessairement dans le cas, ou de
cet article, ou de l’article XXXI que j’ai invoqué dans le mémoire,
qui accorde un mois; et 011 se rappellera que je serois toujours
dans le délai, parce qu’il n’auroit pu courir pendant ma détention,
qui remonte avant la
�D e l'accusation, et qu’elle doit déterminer dès à présènt
mon élargissement. Mais subsidiairemen t y et si contre
m on -atten te, cette proposition p o u v o it souffrir difficulté,
si l ’on croyoit que j ’ai dû avoir la qualité et les droits
d e c ito ye n français\ j ’ai établi que je pouvois prouver
encore que je n'avois jamais man que a u x devoirs que
cette qualité c o m m a n d e m e s preuves partent de lois
claires et précises : il
faut; point d ’autres. H é ! s'il
en fuifoit une n o u v e lle , seroit-il possible de ne pas la
voir
dans le nouvel
article
constitutionnel que
j ’ai
rapporté dans le développem ent de mes m oyens ?
Q u ’il me soit permis d ’observer à tous ceux qui
d oivent coopérer à mon jugem ent , que je languis
depuis près de trois mois dans une détention toujours
fâcheuse par elle-même ; mais qui le devient encore
plus par les incommodités dont elle est environnée ( 1 ) ;
que pour me rendre justice , il ne suffit pas de me
j u g e r , il faut encore q u ’on me ju g e promptement.
Fait en la maison de ju s tic e , à Riom , le 28 juin
1 7 9 3 l ’an deux de la république française.
Signe
Jean-M arie
B O SR E D O N .
( 1 ) Mon mémoire étant à l'impression, et ma santé s'étant
dérangée, j’ai été transféré de la maison de justice dans la maison
d'arret, par ordre des citoyens juges du tribunal criminel; je saisis
l'occasion avec empressement pour leur témoigner ma gratitude.
A R I O M , D E L ' I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T , 1793.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bosredon, Jean-Marie. 1793]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jean-Marie Bosredon
Subject
The topic of the resource
émigrés
chevaliers de Malte
prison
citoyenneté française
neutralité politique
Révolution française
certificats de résidence
opinion publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean-Marie Bosredon, détenu dans la maison de justice près le tribunal criminel du département du Puy-De-Dôme, comme soupçonné d'émigration.
Annotations manuscrites: « rédigé par maître Grenier ».
Table Godemel : Emigré : a-t-on pu considérer comme émigré, et appliquer les lois sur l’émigration au français, devenu chevalier de malte, en 1782, et qui, depuis cette époque a résidé à malte, en vertu des ordres de son supérieur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1793
1793
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0935
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Effiat (63143)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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certificats de résidence
chevaliers de Malte
citoyenneté française
émigrés
neutralité politique
opinion publique
prison
Révolution française
-
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156f2fa6c9359abea9e1dcd27c9c0157
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MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
P our J e a n n e et M a r i e - G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et J o s e p h G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M o z u n , intimés ;
Contre J o s e p h N O Y E R - D U B O U Y , habitant à
Chamaliere, appelant ; en présence d ’'A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
�M
É
M
O
I
R
E
EN R É P O N S E ,
Pour J e a n n e e t M a r i e -G a b r i e l l e N O Y E R , P ie r r e
et J oseph G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M ozun , intimés ;
,
Contre J oseph N O Y E R - D U B O U Y habitant-à
Chamalière, appelant; en présence d ’A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
,
E citoyen N oyer-Dubouy crie au vo le u r, pour qu’on
ne le soupçonne pas; il se plaint de tout le monde: il
ne veut pas tout-à-fait, comme Harpagon , faire pendre
la ville et les fauxbourgs, mais après avoir mis une foule
l
de personnes à l ’index de sa colère, il va grondant
encore contre ceux qu’il ne désigne pas. Son mémoire
est un acte d’accusation contre son p è r e , ses frères,
ses sœurs , ses beau-frères, le juge de paix et assesseurs
de M o zu n , les juges, le commissaire et le greffier du
A
�( a )
tribunal civil de Clerm ont, le magistrat de sûreté, etc.
Il ne s’agil rien moins que de v o l , bris de scellés , pré
varication ; et véritablement son procès semble être la
matière d’une conspiration vaste,m éditée depuis l’an 5,
et dont les ramifications sont sans nombre.
Ces personnalités si multipliées, mêlées à des moyens
présentés cependant avec talent et adresse , doiventelles ajouter plus de persuasion en faveur de la narra
tion du citoyen N oyer-D ubouy, et convaincre davantage
de la sincérité des'faits qu’il avance? non ; la vérité
plus simple et plus naïve n’a pas pour escorte des in
jures et des accusations. Les dames Greliclie diront au
citoyen D u b o u y , avec moins d’aigreur et plus de fran
chise , qu’il a voulu les faire ses dupes ; qu'elles résistent
de tout leur pouvoir à le devenir ; et que c’est là tout
le secret de ses plaintes et de la contestation : qu’après
avoir fait régler ses droits dans les successions confon
dues des père et mère , il a voulu faire distinguer la
succession de la mère pour s’en créer de nouveaux ;
et sur une réponse équivoque au bureau de paix , il a
bâti l’édifice gigantesque de ses prétentions toujrturs
croissantes, et du procès interminable qui menace de
dévorer toute la succession.
Dans ce calios de faits, de débats minutieux et de
procédures, s’il y avait un point de départ positif, il
faudrait s’en emparer pour se rendre plus promptement
intelligible ; mais malheureusement la cause le serait
moins, si les détails en étaient omis, si rensemble en
était rompu ; car le système du citoyen N oyer-D u bou y
�C 3 )
.
est fondé principalement sur la procédure; il faudra
donc la parcourir toute entière. Il s’attache aussi à
prouver que sa mère a laissé une succession opulente;
il sera donc nécessaire d’en examiner la consistance.
' ' ii* .
F A I T S .
Jean-Baptiste-Josepli Noyer épousa, en 1760, Fran
çoise T i x i e r , fille de Marien T ixier , commis-greffier
de la cour des aides.
Marien T ixier , marié à Jeanne L e y m e r ie , qui lui
porta 5 oo livres de d o t , avait de son ch e f une petite
maison , un jardin de deux œuvres, une vigne de huit
à dix, une terre de trois quartonnées ; lout cela était
imposé , à son décès, pour un revenu présumé de 168
livres. Il avait trois enfans.
lie contrat de mariage de 1760, a des clauses pro
portionnées à cette richesse ; i.° la future porte un
trousseau estimé 35 o liv. ; 2.0 elle est instituée héritière
par égalité avec Gabrielle sa sœur, sauf un préciput
de 1000 liv. ; 3.° ses robes, ses bagues et joyaux font
un total de 120 liv.; 4 ° riche douairière, la future a
l ’expectative d’un gain de survie de 120 liv. en capital.
Marien T ixier, qui dans sa qualité était commis au
paiement des gages de la cour des aides, mit de la
négligence dans ses comptes. A sa m ort, en 1760, il
avait été condamné à plus de 80,000 liv. de contraintes
ou d’amendes. Sa succession se trouva en outre débi
trice de sommes assez considérables envers une seconde
femme.
A a
�( 4 )
L e fisc s'empara de la succession; le mobilier fut
vendu publiquement, et produisit 1269 livres; il fallut
.
en distraire 264 liv. de frais, et le surplus fut déposé
au greffe.
L a dame N oyer et sa sœur répudièrent au greffe ,
le 14 avril 1760. Jean Giraudias fut nommé curateur.
L e sieur N oyer avait acquis les créances de la veu ve;
il en donna l’é t a t , de m êm e que des siennes, par une
requête du 16 avril. L e total de ses demandes se por
tait alors à 5029 liv. 5 sous, h prélever sur la succession.
L e curateur fit faire le bail judiciaire des immeubles.
Beaucoup d’enchérisseurs se présentèrent ; des remises
furent ordonnées; l’adjudication fut faite à
livres.
Cependant le citoyen N oyer fit des démarches pour
l’honneur de son beau-père et pour sauver quelque
chose de sa succession ; il fit des voyages à Paris ,
sollicita des modérations, et enfin obtint, le 29 mai
1764 , un arrêt du conseil qui réduisit les droits du
fisc à 2000 livres, chargea le citoyen Noyer de payer
cette somme au trésor public , outre ce qui serait dû
au sieur de P ille, procureur à la chambre des comptes
(il paraît que c’était 1200 liv. ), au moyen de quoi le
citoyen N oyer fut subrogé aux droits du fisc contre la
succession.
Cette liquidation néanmoins n’engagea pas la dame
N oyer à se rendre héritière. On voit qu’ un autre cura
teur fut nommé après Giraudias , et que ce curateur
vendit h M .r Reboul la petite maison T ix ie r , moyen
nant 3 i2 o liv r e s, dont 2000 livres furent déléguées au
�( 5)
trésor, et io o o liv. à. M .r de Pille. M .r Reboul voulut
la garantie du sieur N o y e r, créancier principal, qui in
tervint pour la donner.
L e même jour le sieur N o y e r, tou jours comme person
nellement créancier, obtint la main-levée de deux saisiesarrêts, faites sur les deniers consignés au greffe, sur
le sieur Berard de Chazelle, débiteur de 1400 liv., et
sur le sieur de Vichy-VarVas , débiteur d’une rente de
2.5 livres. On ne voit pas s’il toucha ces deux sommes.
E n 1 7 6 7 , il vendit le jardin au sieur R e y m o n d ,
chirurgien , à la charge de payer une rente de 2 5 liv.
et moyennant 748 liv. (M arien Tixier l’avait a ch e té ,le
6 avril 17 4 2 , moyennant 35 liv. de rente ). Quant à la
vigne et à la terre , le citoyen D ubouy dit que son père
les a aussi vendues.
Françoise T ix ie r, femme N o y e r , n’était pas seule
hérilière de Marien , elle avait une sœur religieuse ;
l’autre était Marie-Gabrielle, vivant avec elle.
Quand la succession du père fut liquidée, celle-ci
voulut y avoir part, et demanda un com pte, non à sa
sœur, mais au cit. N o y e r, qui, comme créancier, oc
cupait la succession. Il fut, à ce sujet, fait entre eux un
traité, le 27 décembre 1767. L e citoyen Noyer y rend
compte d elà succession fixée à 11,088 liv.; sur quoi il
dit qu’y ayant pour 5,689 liv. ^ sous de dettes, ilresle
net 5 ,399 liv. 5 sous ; que Françoise Tixier ayant un
prélèvement de 1,000 liv ., il reste à Gabrielle T ixier
à prendre la moitié du surplus, c’est-à-dire 2,200 liv .,
à quoi le cit. N oyer ajoute 7 00
qu il a touchées pour
�m
sa belle-sœur sur d’autres affaires; de sorte qu’il se re
connaît son débiteur de 2,900 liv ., pour laquelle il crée
une renie raclieiable de 145 liv.; et comme Gabrielle
Tixier avait projet de rester près de sa sœur, il est dit
qu’en cas d'incompatibilité, elle pourra demander rem
boursement des 700 liv.
Y eut-il séparation? La rente fut-elle rachetée? on
l’ignore ; mais ce qu’on rem arque, c ’est qu’en 1766 et
1 7 6 7 , Gabrielle T ixier acheta une maison et des im
meubles dans le village de Provarel prèsSermentizon,
par trois ventes, moyennant 658 liv. On remarque aussique par acte du i 5 janvier 177^ , elle revendit tous ces
héritages au cit. N oyer son b e a u - fr è r e , moyennant
600 liv. dont elle lui donna quittance.
Ainsi ces immeubles s’effacent de sa succession, qui
consisterait tout au plus dans ses vêtemens et dans la
rente de 145 liv., s’il n’est pas jugé que les ventes qui Font
suivie de si près, en prouvent le remboursement.
Les sieur et dame N oyer avaient cinq enfans, trois
maies et deux filles; le tems était venu de les établir;
niais la forlune de la mère élait toujours incertaine,
ou plutôt elle était réputée entièrement nulle, puis
qu’elle 11’avait pas r é v o q u é sa répudiation.
Pour ne pas jouer un rôle tout-à-fait neutre lors de
rétablissement de ses enfans, on voit qu’elle sollicita
de son mari une reconnaissance de
lut faite le 8 novembre 17 7 6 , pour
touchés de la succession de son père,
11011 compris ce qui serait porté par
5,000 liv., qui lui
deniers, est-il dit,
et prix des ventes ;
quittance donnée
�( 7)
par Annet T ard if audit défunt T ixier<L a dame Ncryer
accepte cette reconnaissance.
Elle avait cinq enfatis; la générosité de son mari la
m e t t a i t à même de leur donner à chacun i,o c o liv. On
voit en effet par les contrats de mariage de ses enfans ,
et notamment de ses deux filles mariées aux deux ci
toyens Greliche, en 1776 et 1777 , qu'elle leur promet
de son c h e f une somme de 1,000 livres, payable après
son décès.
Gabrielle T ixier étant décédée, il paraît que la dame
N o y e r, sa sœ ur, fit assigner son mari en 17 8 3 , pour
obtenir une moitié de la succession de ses père et mère,
comme héritière de sa sœur, attendu que cette succes
sion lui était paraphernale. Elle reprit celte demande en
178 8 , et on ne remarque dans l ’un ni l’autre des ex
ploits qu’elle se plaignit de la reconnaissance de 1 7 7 5 ,
ni aucun des faits que son fils D ubouy lui fait dire six
mois après, dans un testament.
Ce testament, daté du 20 juillet 1 7 8 9 , qui n’est
revêtu d’aucunes formes, ne mériterait pas les regards
de lu justice, si le cit. D ubouy ne s’en faisait positive
ment un titre. Mais il en argumente expressément, il
en fait une pièce de sa production ; il huit donc en
rappeler le contenu.
La dame N oyer institue le cit. D u b o u y , son héritier
universel; elle prie son époux de lui reconnaître ce qui
lui est dù en conscience et probité.
Autant que je puis m ’en souvenir, dit-elle, mon mari
a reçu , i.° 7 à 8,000 liv. déposées chez M .r Reboul.
�C-8 )
2.°.Environ 2 5 o louis d’or de 24 lîv. que ]e^Tis moi-même
dans l’armoire démon père, à ¿’instant de sa mort. 3 .° Les
Jbiens qu’il a vendus...... Je n’ai de reconnu que 5,oooliv.
Je prie mon époux de reconnaître Le surplus, en con
science et probité, à Jean-Joseph Noyer-Dubouy, mon
héritier,
q u e j e p r i e d ’é v i t e r l a
r e c h e r c h e d e mes
DROITS P A R COMMUNE RENOMMÉE.
Qui ne v o i t , dans ce testam ent, une c o p ie , une
caricature du légataire universel ?
On devient certain de la captation, quand on re
marque que le citoyen N o yer-D u b ou y s’est marié un
an après, en 1790 , sans que la mère ait répété celte
institution.
Par son contrat de m ariage, on voit que son père
lui lègue les biens du B o u y , pour lui être remis après
son décès et celui de sa fem m e, la jouissance desquels
leur demeure réservée: ledit legs fait pour lui tenir lieu
de sa porlion héréditaire quand elle sera échue.
A la charge de p a yer, après le décès desdits sieur
et dame N oyer, 2,000 liv. h chacune des dames Grelic h e , pour pareille somme qui leur sera due par la
succession desdits sieur et dame Noyer, pour reste de
leurs dots, à elle faites par ledit sieur N oyer et sa femme;
plus 2,000 livres aux héritiers de droit, faisant au total
6,000 livres.
La mère ne paraît à ce contrat de mariage, que par
un fondé de pouvoir, ayant charge d ’autoriser le ma
riage; mais elle n’institue pas. L e legs est évidemment
fait pour tenir lieu des deux successions.
Le
�( 9)
L e cil. N oyer père, fut mis en réclusion h Billom ;
le n e u f iliermidor ne l’en délivra pas. U n chagrin
profond, dont il est inutile de dire les causes, fer
mentait dans son ame. 11 mourut le huit fructidor
an deux.
Quinze jours avant sa mort, il avait fait un testament
en présence des citoyens Girodias , L asteyras, M artinGibergue , B o m p a rd , Fournier et Q u esn e, détenus
comme lui ; en présence des citoyens Reynaud et
Bouchardon, commissaires du comité de surveillance,
et de Voltaire-Lausset, concierge de la maison de ré
clusion.
La loi du 19 ventôse devait lui inspirer des craintes
de confiscation. Il était encore fortement occupé du
projet de diminuer le legs, qu’il avait fait au citoyen
D u b o u y, de son principal im m euble, et la loi du 17
nivôse ne le rassurait pas assez. Dans celte double
occurence J e parti le plus prudent était de tenter une
reconnaissance au profit de sa femme; il déclara donc
luidevoir 12,000liv.pour le prix des ventes des meubles
et immeubles de son beau-père et de sa b e lle -sœ u r,
sans préjudice à d’autres reconnaissances.
A lout événem ent, il lui légua l'usufruit de ses biens,
et institua ses cinq enfans héritiers par égalité.
Cependant le district de Billom décida sagemenl et
légalement, le 11 fructidor, que les biens d’un détenu
mort et non ju g é , n’étaicnL plus susceptibles de con
fiscation ni de séquestre ; il permit aux hériliers N oyer
de faire lever par le juge de paix , les scellés niiî
B
�( 10 )
par le comité de surveillance, lors dé l’arrestation (i).
Les droits de la dame N o y e r , sur la succession de
son mari, étaient plus confondus que jamais dans la
succession du père, par le legs d’usufruit à elle fait par
le testament. A la vérité, ce legs ne devait être que de
m oitié, et il restait des difficultés pour liquider ses droits
sur l’autre moitié.
^
Ces difficultés, elle voulut les applanir toutes de son
vivant, pour ne laissera ses enfans aucune semence de
discorde. Elle les réunit tous pour leur céder ses droits
etreprises, moyennant unepension viagère de i , 5 ooliv.,
son logem ent, la jouissance d'un jardin, et moyennant
le délaissement de deux vaches, et tous les comestibles.
Cette pièce est rappelée au jugement du zb ventôse
an 5. Folio 5 , II0.
Ce traité liquidait entièrement la succession pater
nelle; les cinq héritiers en firent vendre tout le mobibilier. M ary Noyer aîn é, vendit sa portion à ses frères
et sœurs, moyennant 16,000 liv ., sous la réserve du
mobilier qui se trouverait chez sa mère, à son décès,
c ’est-à-dire, de ce que les uns et les autres entendaient
par la succession effective. A u moyen de quoi le partage
fut fait par quart ou par égalité , comme le voulait le
père par son testament.
( i ) Cette expression de scellés prouve que le comité n’avait
pas fait un inventaire général, comme le prétend le cit. P u b o u y ,
pour ajouter qu’on l’a soustrait; si quelqu’un est
su spect
de cette
soustraction , ce ne peut être ceux d ’entre les parties qui n’ont
haute les comités révolutionnaires que comme supplians.
�( lï )
Les deux dames Greliclie eurent les biens de Moznn.
Les citoyens Noyer-Lagarde et Noyer-D ubouy eurent
indivisément le domaine du B o u y , que l’intimé a au
jourd’hui seul.
L a dame N oyer ne survécut pas lo n g -te m s à ces
arrangemens de famille: elle décéda le 8 messidor an 3 ;
et comme ses héritiers supposaient toujours que sa suc
cession n ’élait que dans son mobilier, il en fut fait un
partage sans réclamation.
Mais bientôt advint le rapport de l’effet rétroactif
de la loi du 17 nivôse ; et malgré le testament de son
père, leciloyen N o y e r-D u b o ù y se crut autorisé à pour
suivre ses frères et sœurs, au moyen de son contrat de
mariage. Il 11e perdit pas un instant.
L a loi qui permettait de revenir à partage élait du
4 vendémiaire an 4. 11 commença les hostilités le 28,
par faire poser les scellés sur une armoire du père com
mun , dans laquelle restaient des papiers de sa succes
s io n , de même que d’autres objets restés indivis.
Il est à remarquer que dans le procès-verbal du juge
de paix, il signe N oijer-D uboujj, requérant seulement
Capposition des scellés , en qualité d ’acquéreur et de
légitim aire, conformément a son contrat de mariage.
C ’est qu’en effet, il ne prétendait pas alors que cette
armoire contînt des papiers si précieux pour la suc
cession maternelle; ¡1 était nanti de ces titres lui-même,
et savait que celte succession n’était rien.
On y voit que la clef de cette armoire était au pou
voir *du citoyen Noyer-Lagarde.
B 2
�( 12 )
C elle hostilité fut le signal des procédures. L e cit.
I<agarde,qui avait vendu à D ubouy sa moitié du do
maine du B o u y, et qui sans doute en était m écontent,
assigna ses cohéritiers en partage.
A u bureau de paix, le citoyen D ubouy dit qu’il s’en
tenait à la donation faite par son contrat de mariage,
et qu’il entendait seulement venir à partage des biens
de sa mère , sauf ses droits, dans le cas où il se trou
verait un titre qui le rendrait héritier.
A l’audience, il ne s’occupa plus de cette succession
maternelle, parce qu’il savait bien que tout était con
fondu dans le domaine du B ouy: et par jugement du
2 5 ventôse an 5 , les ventes faites par M ary Noyer
et par N oyer - L a g a rd e , de même que le partage du
22 fructidor an 2 , relatif aux biens paternels , lurent
nnnullés, comme prenant leur source dans l’effet ré
troactif de la loi du 17 nivôse. 2° L e domaine du Bouy
fut délaissé au citoyen N oycr-D u b ou y comme dona
taire contractuel; 3 .° le partage de la succession pa
ternelle fut ordonné entre les quatre autres enfans
N o y e r; 4.0 il fut réglé ce que chacun devait payer à
l ’autre, soit D ubou y h ses frères, pour les réserves de
la donation, notamment les 6,0001. dont il était tenu, et
pour ce qu’il avait touché en mobilier, soit les doux frères
à D u b o u y ,p o u r ce qu’ils avaient touché de leurs ventes.
Ce jugement tout avantageux qu’il était au citoyen
D u b o u y , était un règlement de famille; les quatre
cohéritiers appelés au partage nouveau, ordonné par
ledit jugem ent, s’empressèrent de l’exécuter.
�( 13 )
Ils avaient besoin pour cela des papiers de famille
et effets paternels, contenus dans l’armoire où étaient
les scellés du 28 vendémiaire an 4 ; le juge de paix
était sans doute tenu de les lever , sur la représenta
tion du jugement du ¿5 ventôse : mais avec le cit.
D u b o u y , il fallait des précautions.
, Les copartageans l ’assignèrent donc le 5 germinal
an 5, pour être présent à la rém otion, sans que cela
fût bien nécessaire ; le 6 germinal au so ir, en son
absence, il fut fait un inventaire.
L e juge de paix était à la vérité beau-frere des beaufrères des copartageans; mais quand un juge de paix a
mis des scellés sur les titres d’une succession, il n’y a
pas de p r é v a r i c a t i o n , quand un juge de paix les lève
sur la réquisition de ceux indiqués par un ju gem en t,
pour partager seuls cette succession.
L e juge de paix et ses assesseurs firent un inven
taire , contenant quatre-vingt-dix-sept cotes de titres.
Cet inventaire n'est pas une pièce occulte, le citoyen
D ubouy en a une expédition.
A la suite de l’inventaire les copartageans, voulant
éviter d’autres frais, firent un partage en deux lots d©
la succession N oyer ;N o yer-L ag ard e, pour lui et M ary
N o y e r , eut à son lot les 6000 liv- à prendre sur NoyerD u b o u y , en vertu de la donation de 179 0»
du juge
ment de l’an 5.
L e cit. D u b o u y, favorablement traité par la justice,
trouva dans cette opération les matériaux d’un procès
bien plus lucratif que le premier. Il fit citer ses colié-
�C 14 )
ritiers pour être condamnés à réintégrer le mobilier
enlevé. Il demanda en outre pour dommages-intérêts
60.000 livres écus, quoique les écus ne fussent pas alors
Irès-communs. Il prétendit qu’on avait soustrait l ’o r,
l’argent, les titres, les bordereaux des ventes , et le
testament du 20 ju ille t 1789. (M en teu r! il est dans ses
pièces, cote 14 de sa production).
On pense bien que sur une telle d em an de, la séance
du bureau de paix dut être orageuse (18 floréal an 5 ).
Com m e D ubouy voulait faire représenter les effets
d ’ u n e succession qu’il n’avait pas voulue^onlui demanda
en quelle qualité il entendait agir ; il répondit : que
c ’était comme héritier universel de sa mère, aquéreur
de ses frères, et légitimaire de son père.
Alors les citoy ensGreliclie, faisant pour leurs femmes,
lui disent qu’ils en étaient bien aises, parce qu’ayant
1.000 liv. du clief maternel par leur contrat de mariage,
et ne sachant où les prendre , puisque la mere avait
répudié à la succession de ses père et m ère, ils lui de
mandaient chacun ladite somme de 1,000 liv.
N o y e r - D u b o u y , qui en savait plus qu eux ; quoiqu’il
les accusât d’avoir pris tous les titres, répondit qu’il
acceptait la renonciation qu’ils faisaient de la succession
maternelle, et qu’il se chargeait de les p a y e r , si la somme
leur était due.
Les citoyens Greliche alors, quoiqu’ils ne
soupçon
nassent pas un piège, dirent qu ils n’avaient jam ais
renoncé h la succession maternelle, com m ele prétendait
le cit. D u b o u y, mais qu’ils acceptaient les 1,000 liv.
�( i5 )
A u surplus ils répondirent que s’ils avaient fait lever
les scellés, ils en avaient le droit, en vertu du jugement
du 16 ventôse.
Voilà le précis exact de ce procès-verbal du 1 8 floréal
an 5 , sur lequel le cit. D ubouy a basé toutes ses pré
tentions, pour ruiner la succession ab intestat de son
père, par la recherche de celle de Marien Tixier son
aïeul.
Cependant le cito}re n N o y e r-D u b o u y avait interjeté
appel du jugement du 2 5 ventôse. Il prétendait ne de
voir pas rendre compte de la majeure partie du mobilier
qu’il avait retiré de la succession paternelle, parce qu’il
l ’avait, disait-il, acheté en vente publique , et payé à
ses cohéritiers, c’e st-à -d ire, mis en dépôt dans Carmoire scellée.,
L e 11 ventôse an 6 , cet appel fut jugé au P u y , et
le jugement de Riom fut infirmé dans l’objet de la con
damnation ci-dessus rappelée.
L e cit. N o y er-L a g a rd e, qui dans tout le procès a pris
mal à propos bien des choses sur son com pte, déféra
le serinent décisoire au cit. D ubouy , qui en consé
quence fut autorisé à retenir le m obilier, à la charge
d ’affirmer.
Comme la levée des scellés lui avait fait naître l’idée
d’obtenir le partage des droits maternels , il plaida for
tement pour l'obtenir; mais il ne put obtenir que la
réserve de son action, qu’on ne pouvait lui refuser, et il
est même essentiel de remarquer qu’il no plaidait pas
pour être héritier universel ; car i.° il ne dit rien de la
�( i 6 )
prétendue répudiation du 18 floréal ; 2.0 il fait dire au
premier m otif que la succession de la mère est divi
sible en cinq.
L ’affirmation ordonnée fut un autre sujet de discorde
entre les frères Noyer. I^e citoyen D u b o u y fut accusé
d ’avoir soufflé les copies de signification du jugem ent,
pour faire son affirmation incognito. L ’huissier fut mis
en prison ; mais les choses se pacifièrent : M ary-Noyer
déclara par-devant notaires avoir reçu sa copie; l’huis
sier fut mis en liberté. Enfin lé cit. D ubouy a affirmé,
et on-ne lui dira pas par récrimination qu’il a volé ce
m obilier; car res ju d ica ta pro veritate habetur.
L e cit. D ubouy reprit sa demande relative à la suc
cession m aternelle, le 7 prairial an 6. Il cita au bureau
de paix ses frères et sœurs pour lui remettre la succes
sion , les papiers, le testam ent,-etc ., comme étant seul
héritier, à cause de l’abdication faite le 18 floréal, si
non à lui payer 60,000 liv. (1). A u bureau de paix 011
( 1 ) Il faut être bien osé pour motiver des conclusions aussi
exagérées , sur le fait présumé que les titres, relatifs à la succes
sion de la m ère, ont été enlevés , lorsqu’on les a soi-même.
L e cit. D u b o u y est porteur, 1.° de l'o rig in a l du contrat de
mariage de sa m è r e , expédié à elle-même, cote i . re de
duction ; 2.0 du traité o rig in a l de 1765, cote 4 ;
3 .° de
sa
pro
l ’expédi
tion originale de la reconnaissance de 1 7 7 6 , cote n ; 4 -° c^es
orig ina ux d ’exploits donnés à la requête de la mère contre son
m û r i, en 1787 et 1788 , et du petit d é fa u t, délivré au greffe , sur
ces exploits , cote i3 ; 5.° du testament de sa mfcre; du 20 juillet
178 9, toujours en o rig in a l, cote 14.
ne
�C 17 )
ne dit rien. L e cit. D u b o u y expliqua sa citation par son
assignation du 18 thermidor, et demanda i.° le mobilier
suivant l’inventaire; 2.0 5,ooo liv. pour la reconnaissance
de 1 7 7 3 .° 12,000 liv. pour celle de l’an 2; 4.0 43,000
cli v. pour les autres.reconnaissances énoncées dans celle
de l’an 2.
« ■ ,
Sauf à déduire 4,000 liv. dues; savoir: 1,000 livres à
-Mary N o y e r, lesquelles lui resteront,comme son aquér e u r , et 3,000 livres aux citoyens Greliche et N oyer-Lagarde.
.1
Il saisit en ses mains 4,000 liv. (il avait écrit 6 ) , par
lui dues en vertu de sa donation ; ladite somme prove
nant de La succession du père} l ’huissier lui fait défenses
de s’en désaisir.
;
j .
Cette demande' ne put être jugée ¿1 Riom • il la reprit
en l’an 8 , devant le tribunal de Clermonl ; là il pré
senta une pétition pour demander 6,000 liv. de provi
sion ; puis il augmenta même ses conclusions principales
et demanda 3,900 livres de plus, par un exploit du 9
fructidor an 8 , pour la succession de Gabrielïe T ix ier,
comme échue à sa mère en parapliernal.
L e cit. D ubouy se croyait si bien prêt, à obtenir ces
sommes imaginaires, qu’il fit des saisies arrêts, des
inscriptions au bureau dos hypothèques, etc.
t.
Q ui donc est le voleur ?
Mais il a avoué avoir eu une clef lors des scelle's', et L a garde
une autre. Peut-être voit-on là 'p o u rq u o i il veut absolument
"persuader que Lagarde collude avec tous les autres , et pour
quoi il le signale'com m e son ennemi déclare'.
C
�( 18 )
La translation du proccs de Riom à Clermont semble
peut-être une chose très-ordinaire et indifférente au
procès; elle n ’est cependant rien moins que cela; car
on pressent bien que le cit. L a g a rd e, étant avoué à
C lerm on t et partie lui-même en son nom dans la cause,
dut naturellement en suivre l’instruclion. Elle l’inté
ressait d ’ailleurs seul en quelque sorte ; car il plaidait
pour conserver les 6,000 1. échues à sou lot, par le par
tage du 6 germinal an 5.
L a copie d’exploit était posée à son domicile ; il pou
vait donc se présenter sa n s en attendre d’au 1res. Il
n ’avait nul besoin de procuration, et il n ’en demanda
'pas; ce} qu’il y a de certain, c’est qu’il a toujours agi
seul et à sa guise.
Il paraît vrai qu’il y eut sur la demande provisoire
de D ubouy une plaidoirie, non pas le i 5 fructidor, mais
le 2 vendémiaire an 9, et qu’il fut rendu un jugement qui
joignit le provisoire au fonds. Ainsi ilétait inutile de nom
mer et placer les juges et les auditeurs, de crier tollé
contre le greffier qui a dû faire son devoir. L e tribunal
sera indigné de ces injures qui n’avaient pas d’o b je t ,
et qu'il fallait au moins appuyer par un certificat. Mais
c ’était perdre l’occasion de dire que le jugement fut
inotivé sur, la répudiation • ce qui est faux.
L e cit. Lagarde étant dans la cause avoué pour luim êm e, et procurator in rem suam pour ses beau-frères,
ne s’en tint pas à l’instruction ordinaire de sa cause; il
fit donner, le 2,5 ventôse.an 9, une a s s ig n a t i o n à sa re
quête et à celle des citoyen et dame Greliclie ^pour con-
�( T9 )
d u re le citoyen D u b o u y , i.° au paiement de 1,000 liv.
pour chacun en sa qualité d’héritier dela mère ; 2.0 à la
radiation des inscriptions par lui faites; 3.° en 12,000 1.
de dommages-inlérêts.
Certes ce ne sont pas les cit. et dame Gì eliche qui
firent pour cet exploit ; i.° ils habitent M ozun , et l’huis
sier est de Clermont; 2 ° c’est le cit. Lagarde qui.s’y
constitue avoué ; 3 .° il est écrit en entier de la main du
cit. Lagarde; mais jusques-là il n’y avait pas de répu
diation, et cet exploit n’en ferait pas une. A u reste-,,
quand les citoyens D u bouy et Lagarde ont pu se par- /.
lager des titres, ils ont bien pu aussi arranger un ex
ploit entre eux.
L e 6 floréal an 9 , le cit. D ubouy se. laissa condam-,
ner par défaut, et par conséquent il se laissait, débouter.,
de ses demandes ; mais aussi il se faisait, condam nera
payer les 1,000 liv. en qualité d ’héritier. C ’était là son
but et son piège. L a collusion est-elle donc tout-à-fait
imaginaire?
■
<
D u b o u y , dans son appel, déclara expressément
acquiescer au ju g e m e n t, en ce qui concernait la répu
diation et son acceptation de la qualité d’héritier.
Beaucoup plus urgent sur l ’appel, parce qu’il croyait
avoir atteint son b u t, il donna ses causes d’appel quinze,
jours après son exploit ; c’est là que jouissant de son
adresse, il appelle le citoyen Lagarde, praticien trèss u b lil,e i le raille, en feignant le louer ou le crainduei
11 argumente du testament de sa mère pouç prouver
l’opulence de la succession T ixier; il dit que Jç; traité,
�( 2<> )
fait avec elle, est une démission de biens, révocable
et inutile , qui ne l’a pas empêché de transmettre sa
succession h ses héritiers, et par conséquent à lui seul,
puisqu’il est reconnu seul héritier maternel.
L e citoyen T a r d if, constitué avoué pour tous les
intimés, tenant sa correspondance et les pièces du ci
toyen Lagarde, y vo}7antles citoyens et dame Greliche,
en qualité, étant dès-lors suffisamment autorisé de faire
sa procédure , et n ’ayant ni ne pouvant avoir aucun
sujet de méfiance dans celte affaire, donna sa réponse
à causes d’appel , et ne put qu’écrire en faveur du
jugem ent, attaqué pour en obtenir la confirmation.
L a cause avait été au rôle de l’an 9; le cit. D ubouy
surprit un jugement par d éfa u t, sur ce même rô le ,
le 11 ventôse an 10. Il se fit adjuger les deux recon
naissances de 1775 et de l’an 2. Mais il n’osa pas sans
doute conclure aux 43,000 livres pour les reconnais
sances présumées ; le jugement ne lui adjuge ,
cet
égard, que des dom m ages-intérêts à donner par dé
claration , de même que pour le mobilier.
Il signifia sa déclaration en exécution de ce juge
m en t, et ne parla que du mobilier.
Les citoyens et dame Greliche ne se doutaient guère
qu’il se fit en leur nom une telle procédure; mais ils
avaient peine à croire que le citoyen D ubouy les eût
laissés si l o n g -teins sans procès. Dans leur m éfiance,
ils s’informèrent, et quand ils eurent appris la vérité,
ils se hâtèrent de réparer ce qui avait été fait en leur
nom ; leur seule voie légale et juste était un désaveu.
�( 21 )
Ils ne pouvaient ni ne devaient le proposer contre le
citoyen Tardif ; sa procédure était régulière et de bonne
foi. Tout partait du citoyen N o y e r-L a g a rd e ; c ’éiait
donc lui qu’il fallait désavouer.
En vertu de leur déclaration le désaveu fut mis
au
greffe de Clerm ont, l’assignation pour le voir statuer,
fut donnée non seulement au citoyen L agard e, mais
au citoyen D u b o u y , pour qu’il y veillât à ses intérêts;
et n’eût pas le prétexte de crier à la collusion. L e 20
prairial an 1 0 , le désaveu fut prononcé par défaut;
le citoyen D u bo u y a interjeté appel de ce jugement.
Dans cet intervalle encore, survint un nouveau pro
cès; le citoyen Lagarde se plaignit de ce que les 6,oool.
qui lui avaient été cédées par le parfage du 6 germinal
an 5 , ne lui étaient pas payées, et il cita les citoyens
et dame G reliclie, au bureau de p a ix , le 2b prairial
an 1 o.
C e u x - c i lui répondirent qu'ils n ’entendaient plus
rien aux chicanes qui s’élevaient journellement sur la
succession ISoyer. Qu’ un jugement de R io m , et un ju
gement du P u y y condamnaient le citoyen D u b o u y ,
et qu’il n’y avait qu’à les exécuter. Il fat donné as
signation néanmoins par le citoyen Lagarde aux cit.
Greliclie qui la dénoncèrent au citoyen Dubouy.
Ainsi se termine cette éternelle procédui-e ; l’appel
du désaveu a été instruit de part et d’au tre, et joint
à l’opposition pendante,sur la demande du cit. D ubouy
L a cause a été plaidée sur le tout, le 14 fructidor an 10
et le tribunal a prononcé un appoinlement.
�( 22 }
M O Y E N S .
L e cit. D u b o u y , dans son m ém oire, prétend que le
désaveu n’est pas recevable, parce qu’il est couvert par
désapprobations suffisantes, et que l ’opposition au ju
gement du 11 ventose an 10, n’est aussi pas recevable.
Il ne s’occupe que par subsidiaire du fonds de la con
testation. Pour suivre son plan d’a tla q u e , il faut éta
blir comme lui plusieurs questions. L a première sera
de savoir si le désaveu du cit. Noyer-Lagarde doit être
reçu; la deuxièm e, si l ’opposition au jugement du n
ventôse an 10, doit être admise, quoique la cause ait
été au rôle ; la troisième, en quoi consiste la succes
sion de Françoise T ixier ; la cinquième , quel est le
droit des parties sur ladite succession.
P R E M I È R E
QUESTION".'
L e désaveu doLtril être reçu ?
Ce désaveu a été prononcé par défaut, le 20 prairial
an 10; le citoyen D u b o u y en est appelant; ainsi il ne
devait avoir rien à combattre que la demande. Mais le
citoyen D u bouy s’attache à tout, et il trouve un vice
de forme dans lé jugement du 20 prairial, comme non
motivé. Mais il n’a pas bien lu sa propre copie, car
elle porte un m otif et la loi n’en exige pas un plus
grand nombre. D ’ailleurs attaquer le jugement dans sa
forme ne serait pas faire tomber la demande; le tri
bunal d’appel n’en jugerait pas moins le fonds, ainsi
✓
�( 2 3 }
le premier moyen est tout à la fois inexact el mutile:
passons donc au désaveu en lui-même.
Pour qu’il ait l i e u , dit le citoyen D u b o u y , il faut
que ce que l’avoué a fait, l’ait été hors de ses pouvoirs,
sans consentement et sans approbation postérieure. Or
y ayant eu instance avec les dames Greliche , le cit.
Lagarde en étant l ’avoué , y ayant eu plaidoirie et
jugement en fructidor an 8 et le 6 floréal an g , les
dames Greliche les ont approuvés, et par conséquent
l ’avoué et la procédure. Or encore le citoyen Lagarde
avait plusieurs pièces pour constater son p o u v o ir, i.° le
procès-verbal du 18 fructidor an 5 ; 2.° l’exploit du 21
ventôse ; 3 .° la signification du 21 floréal an 9. Enfin
le citoyen D ubou y oppose que le cit. T a rd if, avoué
des dames G relich e, au tribunal d’ap p el, n ’est pas
désavoué pas plus que les huissiers Chassaing et Massis
qui ont signifié des actes de la procédure.
Sans doute, s’il y avait une approbation postérieure
du citoyen Lagarde , elle équivaudrait à une procu
ration précédente,carralikabltLo mandalo comparatur:
mais peut-on raisonnablement vo ir, dans des actes faits
sous le nom des citoyens et dame Greliche, des appro
bations de la procédure du citoyen Lagarde.
Il était, dit-on, nanti de la copie d’exploit et du
procès-verbal du 18 floréal an 5. Et certainement on
ne peut pas nier qu’une copie d’exploit et procès-verbal,
contenant des dires, ne soient un pouvoir suffisant à
un avoué pour se présenter, et répéter les mêmes dires
en jugement. Mais le cit. Lagarde n ’avait pas besoin
�( 24 )
de la copie posée aux citoyens Greliche ; il avait la
sienne, car il était partie au même exp loit, et il s’est
présenlé pour tous.
Les dires du procès - verbal ne l ’autorisaient pas à
répudier , car ce procès - verbal du 1 8 flo réa l, porte
au contraire que les citoyens Greliclie n entendent pas
répudier.
D ’ailleurs, c’était une succession parapliernale ou
verte aux dames Greliclie. Les maris, exclus parla loi
de jouir même les parapliernaux , ne pouvaient pas
disposer de la propriété de ces parapliernaux. Ils ne
l ’eussent pas pu davantage, quand la succession aurait
été dotale, parce que le mari n’a que Y adm inistra
tion de la d o t , et n’a aucune qualité pour répudier
une succession ouverte au profit de sa femm e ; car ce
serait aliéner.
• L e cit. N oyer-Lagarde ne pouvait ignorer ces prin
cipes; ainsi quand même il aurait eu une procuration
pour occuper, il ne devait pas répudier en jugement ,
si la procuration n’en portait le mandat exprès, et
n’était donnée pour cela par les dames Greliche ellesmêmes.
L e jugement d j fructidor an 8 , est un être imagi
naire. Lors du jugement du 2 vendémiaire an neuf,
il paraît qu’on attaquait les reconnaissances, ce qui
est l’opposé d’une répudiation ; enfin le j u g e m e n t do
lloréal an 9, est précisément l’objet principal du désaveu.
L ’exploit du 21 ventôse fait partie de la procédure
suivie par le cit. I/ngarde. Il l’a fait donner pour fixer
les
�( *
5 .)
les conclusions prises dans l’instance, et s’y est consti
tué avou é; il paraît mêm e qu’il est écrit de sa main.
L a signification du 21 floréal ne fait qu’un avec le
jugement du 6 , qui est la principale pièce désavouée.
E t tout le monde sait bien , que quand un avoué ins
truit une procédure, dans laquelle ily a lieu de faire des
significations, c ’est lui qui charge l’huissier de les faire.
Si don c, il fallait désavouer aussi l ’huissier, ce serait
un cercle vicieux , car l’huissier dirait : je tiens mon
pouvoir du cit. Lagarde , et ce serait h celui-ci qu’il
faudrait revenir.
E n fin , et par les mêmes raisons, le citoyen D ubouy
ne peut pas argumenter de ce que les dames Greliche
n ’ont pas fait aussi un désaveu contre l’avoué qui a
occupé pour elles, au tribunal d’appel. Elles se sont
bien donné garde de faire cette injure h l’exactitude
et la délicatesse du cit. T ard if qui a été induit en erreur
par le c. Lagarde. A v e c l’expédition du 6 floréal et la copie
d’a p p e l, il était en règle et à l ’abri de tout reproche;
il aurait même eu une action en dommages-intérêts.
T oute la question du désaveu consiste donc dans les
déclarations qui ont pu être faites en ju stice, à Clermont; car dans les pièces précédentes, rien n’autori
sait le cit. Lagarde à répudier pour les dames Greliche.
L e procès-verbal du 18 floréal devait au contraire l’en
empêcher.Il s’est donc exposé à un désaveu, et comment,
sous prétexte d’une collusion qu’il plaît au cit. D u b o u y
de supposer, ce désaveu serait-il rejeté s’il est fondé.
N ’y aurait-il pas plutôt lieu de croire que cette
D
�( *6 )
collusion a eu lieu entre le citoyen Lagarde son ven
deur, et lui. Quand on mit les scellés, l ’un d’eux prit
la clef de l’armoire , et l ’autre la porte du cabinet,
cela est avoué au mémoire Dubouy. L e cit. Lagarde
a dans son dossier tous les titres de la succession du
père ; et le citoyen D ubouy a dans le sien tous les
titres originaux de la succession de la m è r e , quoiqu’il
se fasse un m oyen de n ’avoir pas assisté à l’inventaire
du 6 germinal. E n fin , le citoyen Lagarde fait des dé
clarations en jugem ent, et le citoyen D u bou y se laisse
condamner par défaut pour les accepter- incontinent.
A la v é r it é , il serait difficile de croire à ce que ces
deux frères fussent en bonne intelligence, lorsqu’on
lit tout ce que le citoyen D u bou y exprime aux pages
21 et 22 de son m é m o ire, pour insinuer fraternelle
ment que le cit. Lagarde s’est mis dans le cas d ’une
destitution. Mais qu’il ne fasse pas tomber l ’odieux de
ce danger surles cit. Greliche ; car dussent-ils encourir en
core le reproche de collusion, ils déclarent qu’ils auraient
fait les sacrifices les plus grands, si l’insidieux analhême
du cit. D ubouy eût dû être le résultat de leur demande.
Ils déclarent aussi que lorsqu’ils ont fait , amère
ment peut-être, au citoyen Lagarde le reproche d’avoir
usurpé leur confiance et d’avoir sacrifié leurs intérêls,
le citoyen Lagarde lenr dit avoir agi d’après une, con
sultation des citoyens B e rg ie r, Boirot et D a r l i s , par
laquelle ces jurisconsultes étaient d’avis que toute la
succession maternelle élait confondue dans celle du
père ; par le traité de l’an 2 j qu’elle ne consistait que
�C 27 )
dans ce que la mère a laissé en m o b ilie r, après son.
décès, et qu’ainsi il avait vil plus d ’avantage à la laisser
toute entière au citoyen D u b o u y , pour qu’il payât
les sommes promises par les contrats de mariage.
Que le cit. D u b o u y trouve inconséquent ou non de
rapporter un fait qui disculpe le citoyen Lagarde , les
dames Greliche n’en ont pas moins cru de leur devoir
de ne pas le taire. Mais tout en reconnaissant que le
citoyen Lagarde a pu agir de bonne foi et même avec
précaution , elles n'en sont pas moins fondées à dire
qu’une consultation n’est pas un m andat, et que le
cit. D u b o u y , en faisant une procédure et des décla
rations sans pouvoir, s’est mis dans le cas d’ un désaveu.
C e n’est pas que ce désaveu eût été absolument né
cessaire, puisque la succession de Françoise T ixier est
à peu près nulle, comme on l’établira sur la troisième
question. Il aurait p e u t-ê tre même été plus avanta-r
geux aux dames Greliche d’adopter ce qui a été fait
en leur nom; car une répudiation conditionelle doit être
acceplée, comme a voulu la faire le renonçant, ou toutà-fait rejetée. Mais la ténacité du cit. D u b o u y , à vou
loir ruiner la succession de son père par celle de sa mère*
a fait que les dames Greliche, venant pour la première
fois en cause, ont voulu s’y présenter sans l ’entrave
des faits d’autrui. N e pouvant préjuger l’opinion du
tribunal, elles auraient véritablement débuté avec té
mérité et en dupes, si pour ménager le cit. Lagarde ,
elles avaient ratifié sa procédure. L e désaveu a été
pour elle un acte pru d en t, nécessaire, et quoiqu'en
D a
�.
c
28
)
dise le cit. D u b o u y , il ne peut être rejeté , parce qu’il
ne s’agit pas ici d’une simple instruction de procédure,
qu’il y a répudiation en jugem ent, et que pour cela
seul il fallait un mandat spécial.
D E U X I È M E
QUESTION.
L ’opposition, au jugem ent du 11 ventôse an 10, est-elle
recevable ?
T o u t e s les prétentions du citoyen Noyer-D ubouy
sont nouvelles et singulières. Aucun autre que lui n’a
vait im agin é, depuis 1790, de rappeler un article de loi
qui ne peut plus s’adapter aux formes actuelles, et on
peut dire,presqu’avec certitude, qu’il n’est pas de journal
parmi ceux qui rapportent depuis long-tems la jurispru
dence du tribunal de cassation etdesautrestribunauxde
la république, qui contienne aucun jugem ent, ni même
aucune'tentative pareille. Mais le cit. Noyer-Dubouy
veut être m odèle, il veut faire juger la question : on n’a
pas le droit de l’en empêcher. Cependant cette oppo
sition est antérieure au désaveu; ainsi la question n’in
téresserait les dames Greliclie , que dans le cas où le
désaveu serait rejeté. Elles ne vont donc s’en occuper
que par subsidiaire, et pour répondre à tous les moyens
opposés par le citoyen Dubouy.
Il est très-vrai que l’ordonnance porte en l’art. I I I
du titre X X X V , que les parties ne peuvent se pour
voir, par opposition, contre les jugemens en dernier
ressort, quand ils ont été rendus à tour de rôle.
�( f9 )
Il est très-vrai aussi qu’une loi ne tombe en désué
tude que tacito omnium consensus et il était assez inu
tile de transcrire un plaidoyer de Merlin pour corrobo
rer ce principe, et appliquer à la cause toutes.lés au
torités qui y sont rapportées. Il ne s’agissait, dans ce
plaidoyer, que d elà fin de non recevoir de l’opposition,
après La huitaine, mais non à tour de rôle ; et le cit.
Merlin n’y a recueilli des extraits des arrétistes de plu
sieurs parlemens, que pour établir que la jurisprudence
du parlement de Paris, d’admettre les oppositions après
la huitaine, n’était pas uniforme dans le royaume.
Ces citations ne peuvent rien sur la question de
l ’opposition aux jugemens pris à tour de rôle , car il
n’y a pas parité de raison ; c’était uné jurisprudence
particulière au parlement de Paris, et dans quelques
autres, d’admettre l’opposition après la huitaine; mais
le parlement de Paris ne l’admettait pas, quand la cause
était venue à tour de rôle. Il y avait donc une dis
tinction à faire, et cette distinction même juge la ques
tion qui nous occupe.
A vant la révolution, on faisait une différence entre
les causes venant sur p lacet, et les causes appelées à
tour de rôle. Celles-ci étaient placées au rôle bien longtemsavant d’être appelées. L e rôle était public, à Riom,
deux fois dans l’a n n é e , à la St. Martin et à la St.-Jean,
et tous les mois au parlement. L a lecture publique des
causes prévenait les parties long-teins ¿1 l ’avance ; et
comme la loi était précise, et l’ usage des tribunaux
constant sur ce point, il fallait bien se tenir prêt au
�c 3 0 }
tour de rôle; ce qui, au reste, n ’était pas très-urgent ;
car la m ulliplicité des placets occupait la majeure partie
des audiences.
Aujourd’h u i, toutes les causes doivent être placéesau rôle, sans distinction, d’après la loi du 24 août 1790,
et la loi du 21 ventôse , relative aux droits de greffe.
Ainsi il est contraire aux principes reçus, qu ’une loi
rigoureuse qui ne s’étendait qu’à une partie des causes,
s’étende aujourd’hui tacilement à toutes les causes ; car
les peines ne peuvent être que restreintes, mais non
étendues au-delà de leurs strictes dispositions; et certes
la fin de non recevoir d’une opposition, est bien une
peine prononcée contre le plaideur en retard.
Si le tribunal de cassation a jugé que l ’article de l’or
donnance n’était pas tombé en désuétude pour l’op
position après la huitaine, c ’est que dans la révolution
la fin de non recevoir avait été presque généralement
prononcée par les tribunaux : mais il n’en est pas de
même de la fin de non recevoir des causes venues à
tour de rôle. Aucun jugement conforme au système du
cit. D ubouy ne peut être cité par lui depuis 1790 ;
et comme le mode d’appel des causes a changé à cette
époque, il est clair que ce changement a fait tomber
en désuétude l’article de l’ordonnance tacito omnium
consensu. L ’usage universel a expliqué la loi du 24 août
1790. En cette partie, tous les tribunaux ont admis l’op
position aux jugemens en gén éral, pourvu qu’elle fût
formée dans la huitaine. Ainsi il ne s’agit plus de re
chercher la loi ancienne qui permettait aux parties de
�( 3i )
mettre au rôle les causes qu’il leur plaisait, puisque
la loi nouvelle ôte cette liberté -, et y assujettit toutes
les causes. L e mode d’interprétation de ces lois est donc
suffisamment justifié par quatorze ans de jurisprudence;
car consuetudo optima est legum interpres (i).
Mais au reste.le cit. D ubouy est non recevable luimême à demander la fin de non re c e v o ir, par deux
motifs ;
i.° L ’opposition au jugement a été formée le 18
ventôse an 10; elle a été suivie de la procédure du
désaveu dont D u b o u y a interjeté appel.
, , ,.j ■
O r , par requête du 28 thermidor an 10, il a conclu à
ce que son appel du désaveu fût joint à La cause pen
dante sur Copposition.
Il a donc reconnu que cette opposition était rece
vable , puisqu’elle faisait une cause. Ainsi il a couvert
la fin de non recevoir qu’il oppose.
2.0
L a cause a été contradictoirement plaidée sur
le f o n d s , le 14 fructidor an 10 , quand le tribunal a
appointé. L a fin de non recevoir devait encore y être
proposée à limine litis ,* elle est donc couverte, et le
cit. D u bou y doit, malgré lu i, plaider le fonds.
( 1 ) D ep uis la rédaction de ce mémoire,, le tribunal de cassa
tion a ju g é la question en thèse. Il a casse', le
3 pluviôse
an 12,
un jugement du tribunal de Neufchâteau , qui avait déclaré une
opposition à un jugem ent en dernier ressort non recevable ,
parce qu’il était rendu à tour de rôle.
V o y . le J o u rn a l des audiences de c a s sa tio n , par D en evert,
an 1 2 , p a g e 212.
�( 3a )
T R O I S I È M E
QUESTION,
JE'n quoi consiste la succession de F r a n ç o is e T i X i e r ?
Françoise T ixier n ’a traité avec ses enfans que pour
éviter que cette question se présentât après elle.'
Toussesenfans étaient ses héritiers par égalité, même
avant le 17 nivôse, puisqu’elle n ’en avait avantagé au
cun. L a forclusion de ses filles était abolie depuis le 8
avril 1791.
A la vérité, le cit. D ubouy dit : Je suis donataire de
mon père ; et après le prélèvement de ma donation ,
mes cohéritiers ont partagé le surplus sans moi : mais
je dois prélever aussi sur le surplus ma portion, ail
moins des biens de ma m ère; ainsi il faut connaître sa
succession.
Mais le cit. D u bou y ne veut pas se rappeler que par
son contrat de mariage , son père , en lui léguant le
domaine du Bouy après son décès et après le décès de
Françoise T ix ie r , en le chargeant de payer à chacune
de ses deux sœurs 2,000 liv. qui leur resteraient dues
alors, par la succession des sieur et dame Noyer, a dou
blement marqué par ces expressions que les deux suc
cessions étaient confondues , et que les dettes de la
mère devaient se payer indifféremment par la succes
sion du père, qui les englobait toutes deux. Aussi la
m ère, qui se fait représenter à ce c o n trat, ne donne
rien.
L a mère n’a donc fait que ratifier en quelque sorte
cette
�( ( 4*33 ) )
Ycette confusión' Sos deux'snccessi'ons", en'traitant avec
^ses enfaná, tóúnís-en'Kan d èu x(i). A laivérité otupeut
¿objecter': qu’alors les circonstances n ’étaient plus les
¿mêmes, parce que <la'loi du 17 nivôse voulait un parJ tage par égalité. Maisice^ne sont Ipas les ènfans seuls
-qui ontttraitéien, vertu de çetteloi ; la mère elle-même,
que-la. loi n’obligeait pas, est <venu'e:traiter ayec'eu x
pour ses droits et reprises; et qu’a—t-elle fait autre chose
, :que de des confondre dans la succession du père j conime
odéjà ils l'étaient respectivement àiNoyer-Dubouy:i:>
o . A i n s i ¿ q u e'là loi du 17 nivôse soit ou ne soit pas;, il
( 1 ) L e cit. D u b o u y conteste , à la page 41 de son m é m o ire ,
l ’éxis^èrice de cet acte comme 11011 vérifie ni, enregistré. Il le
produisait d’abord lui-même j’-'il en arg u m en tait, ‘ét ‘il l'il saris
doute retiré de ses pièces. Mais il produit, sous la cote 18, un
acte du même jo u r, quoique aussij n<fn enregistré, et il y a
souligné lui-même ce qui suit : Convenu en outre que dans la
présenle cession sojit com pris.les droits cédés p ar notre.m ère
'c o m m u n e , par acte de céjourd*liui ^ 2.° dans ses causés d'appel,
cole 40 , 'il excipé plusieurs fo iiclu tVa'itd' lait ehtre l^ in ère et
les enfans , et il le idate* à clitiqîne lois j dil*2a fructidor a n >2;
3.°
il en assure encore l ’existence a la page 7 de son mémoire ;
,4.0 on lit dansée jugement du-aÜ ventosean
5)
folio
5
II.0, ce
qui suit : « ¿4près que tous Les 'héritiers eurent pris des arran-
o. .
Mi •/ ;
.■
¡r
gc'.mens avec I r a n ç o is e T ix ie r le u r jn e r e , relativem ent à sa
con stitu tion de d o t, gains , avantages m atrim on ia ux'et autres
créances q u e lle avait à répéter contre la succession de son
m ari , etc. » Ce traito est donc: un acte constant au procès. L e
çit. D u b o u y , qui en a toujours excipé, ne peub donc.rçfyser de
le remettre dans sa production-
* t
v.
‘*
•^ ÍV
J «': .
E
�: ( c 34 ) )
'
,
cn’en esfpasrmoins vrai que J e .ôi l. I)ubhriy nfcrjHuoa’
prendre que le'domaine du Bo'uyij) après lefdücès.£/e.jBi
père et. mère, h la charge de payer '6roooJiy.' dus. pà/iles
deux successions ;e t les a u Ires liérit ier&ont eu à prendre
, ces 6,000 livres,, et le surplusdeabienstdomme f o i r a n t
,la succession ab.itileita t, plus Jes/bestiaubc; .et comes
tibles qui furent laissés à=la mère itor# d e L'arrangement,
et pris sur la succession paternelle.:-: îo ..!*■ .!: ' i ' ;
. C ’est ainsi que toutes les partiesiToht entendu non
seulement en l’an 2 , mais lors du jugement ,de Ventôse
an 5 , puisqu’ elles laissèrent toutes ordonner lé partage
de la succession du père, sans demander celui de la
mère ; puisque le cit. D,ubouy se laissa notamment con
damner à rapporter le s^ o o q ji^ . dues par la supcpssion
du père et de la mère „ sains proposer de compensation
ide celte somme avec les prétendues reprises1qu’il de
mande aujourd’h u i, et qu’il fait frapper sur la succes
sion paternelle.
Celte intention,des parties est claire; elle était fon
dée suî ,1e?. actes . de .famille, à Inexécution desquels
chacun se rendait; aucun ne doutait alors que la suc
cession dô la mère ne fût composée seulement de son
mobilier tel qu’il était ¿péciiié par le traité de l ’an 2 ;
et si l’appelant a varié au P u y , c*èst que la levée des
* 1v
\
C
V
'
scçllés lui avait donné le prétexte de se créer une nou
velle source de réclamations et de procès. ■
,.»
Ce n ’est pas tout que les parties l’aient entendu ainsi,
car c’est aussi1de cette manière qu’elles devdieni T’en
tendre; les actes les y obligeaient.
�C
35
)
CiiFrançoise •Tifcier:ayait-elle: le droit de traiter avec
ses enfans en l ’an 2? ebpeutVon appeler J’dcte qu’elle
a fait, un partage anticipé d’une succession qui.s5ést>
ouverte de nouveau à son décès ; car voilà le s.ÿstêi’n e
actuel du citoyefm Dubouy; on oo L. :: >ç
rr n \
* L es principes; sur les; démissions rie s?appliquent;pas!
à la cause ; ce n ’estpas ici un-abandon fait parilne. m.èréde-ses.biens m eublesjetim m eubles jiévidens ^connus; 3
desquels elle se.désaisisse pour leu x/ et;quc?ils>parlagent!
ensa^présence. <&[ i-iialb Im’:1
îu ' :iil'i
Il ii’y a rdans ^espèce ni biens connus, ;ni désaisissemerii effectif, ni partage actuel.. Ge. n ’est d on c pas ce;
partage anticipé dont excipe le cit. D ubou y com m et
moyen principal j iL n’y à donc pas: de. démission.
>
C ’est un .traité sur des droits inconnus!;, litig ie u x ;,
c ’est une vente ii fonds*pèrdu de ces mêmes droits,.autorisée par ltariiclë!26 derknloi du 17 nivôse , ;qui •
était encore en Vigueur au décès-deila mère. ^ uj >•. . c
: Dans le cas même où làm ereaurail prévu ^rétablisse
ment des actes de sa famille et lé rapport-de la loi du
17 nivôse dans son effet .rétroactif , là.cession qu’elle
faisait était valable; car le citüDuboüy.devait.s’ëirtenir'
à son d om ain e , et alors s e s reprises frappaient sur la
succession ab intestat} c’est-à-dire y contre les ¡autres
héritiers.
, .
•<>' Eh b ie n , elle vend ses reprises à fonds perdmà ceux-
ci ; et comme il fallait, suivant la loi, que les autrcsq
successibles y consentissent et y intervinssent),Me cit.
D ubouy y est intervenu et ¡y a consenti. L e vœuide laloi a donc été rempli.
�( 35 )
.■vIl’.iTe^ira; pas Cfue'c’e&t-iün •à’cte,»forcérpar^la 'craîlîte
révéreniièlle; car }a loiai’admet puis ce :m o y e n <
',iloils-~.
qu’èllèi,exigé, le consentement des successibles y isans'»
distinction.' fUipv urj ¿ 'oV) :ioa i; m.vuum -S üVwtvjo
A u reste , quand ce ne seraif pas! lfV une .'vente l’à'i
fonds: perdli ,uôn demanderait) en' vertu, de)¿quçlle*loi
ib peut être défendu à 1unei mère-’4&-trailer<avec>seS*
enianspsur des droits.susceptibles) dtuplus. grande litigô-;->
les loi&’prptègept les;transactions com ibe l’a'cte le;plus'
utile à la société , puisqu’il éteint les .procès et se^
pourrait-il que les procès, entre une m^re etkles enfutis,
fussent une cliose nécessaire et, non, susceptible-d’ar-i
rangement ? ':u/7 .
m
ir '.b V.;-. ij\.i
'~çy - ’
Ce système cho'que; car si Erancôtsç ' T ixi er pouvait •
agir et plaider ; sansi contredit bll©'pouvait transige!* ;
car ila ’transaction• a lie u 'd e LLl& m o tâ .a iit movendâ.
O r qui contestera ài<ï’ranç6is(i-Tixier le droit de de
mander ses droits etoi’eprisds en l’an 2;?'Mais>parce que
rienih’était pliisicortiusietiinextricable que ses droits;
parce quTelle savait elle - même que son m a ri, en lui i
donnant l’ usufruit de; moitiés, n’avait, puîrèconnàître
12,00a liv. a u - ’delà. de la) quotité disponible
qui elle savait qu’il faudrait prouver
parce \
kabuit de .
la .première -reconnaissance., Françoise .Tixier a fait. ,
avec ses enfans, une transaction, que la nécessité et son
intérêt l’auraient obligée de,faire ayec les étranges; .les
plus divisés d ’intérut a.vec elle; cti^fesl là (Cette transac
tion qu’on veut,confondre avec-une démission, avecune simple libéralité dictée par la tendresse maternelle,
�( 37 )
spontanément-, sans nulles circonstances; et pour la? seule
utilité do'ses'en fans. ):
r
, Si la mère a traité avec tous, il.n Jy a là que de la
ressemblance avec une démission, parce que la mère
était bien:obligée de traiter avec tous ceux qui avaient,
un procès à soutenir contr’elle<> i;
Ainsi,, vouloir que cette réunion nécessaire de tous
les enfans change la nature de l ’a cte , ferait retomber
dans lecsysiême qu’on ne peut'transiger avjec.ses'enfiins.
'Lorsque le filsdiisiéür de L a n g h a c(i) a demandé par
deux fois, au tribunal de cassation, la nullité d’ un traité
fait avec son père pour ses droits m aternels, il n ’osait
pas même plaider qu’on ne peut pas traiter .avec son
père; il faisait valoir des moyens rescisoires,’et cepen
dant le traité à été maintenu..Ulne transaction peut donc
êlre à l’abri, même d e là puissance paternelle. Préten
dre que le rapport de l’effet rétroactif de la loi du 17
nivôse a annullé le ,1railé fait avec, Françoise T i x i e r ,
c’est vouloir oublier ^qu’elle n ’avait que faire de la loi*
du 17 nivôseü G a n d ’une part, elle traitait pour ses rc.r;
prises, et !de l ’autre, pour un usufruit qui n ’en a pas
été moins mainleilU'par les lois postérieures.
F ran çoiseT ixierij’aldonclaissé de succession que dans
son mobilier et non-dans ses reprises; etlen partant de ,
cette vérité la plus évidente, la plus naturelle , le liibunal clague toutes les autres questions du procès. Car
le cit.D ubôu ya pris sa portion du mobilier, il n’a pas eu
idée de prétendre,qu’on en eut volé : il a donc toul son lot.
( 1) Journal de SiREy. Jugement decassation du 25 frim.rc nn 10.
�(
38
)
¡¿Tout conduit h penser, que telle a.toujours étéT;in-.
tenlion et le but des parties, et que c’est là la plus exacte
jusliceà leur rendre. Mais pour suivre le cih D ubouy
dans ses prétentions , et s’il pouvait faire composer la:
succession de Françoise-Tixier de ses droitslet;reprises/
voyons quel en serait le résultat.) "■
>' Vr:.-?, i;
' :-'.j
Q u’aurait obtenu Françoise Tixier^ si elle eût voulu
plaider en l’an 2?
' u-:..»
• i'
- Ses droits étaient-ils fixés:pardesudeux; reconnais-)
Sances, ou par.la consistance réelle dé; la succession de
son père et de-sa» sœ ur?i‘
’
n
1: •
" ' »
Pour cette explication* il faut se;basér: s u r quelquès*
principes.
•
r
oî •
v %'i^ba*!;' <• 1
r
¡Toutes les reconnaissances.que fait le'riiari , après le^
mariage , sont réputées; des.libéralités j si la femme ne
prouve undè habuit; et alors ces libéralités n’ont d’efiet
que pour la portion dont le mariipouvait disposer. ConJessio de dot&\ recep ici-fada. 'per mdritum 3 constante
matrimonio y valet iti vim doriationis. Et il faut, comme
dit Coquille , enquérir et prouver la vérité du fait, si
on veut faire valoir la reconnaissance a u - d e l à de la
portion disponible. Ainsi l’enseignent encore Ricard et
Furgole. Ainsi l’a iju g è le tribunal, le 21 prairial an 10,
en ordonnant l ’apport d e l’inventaire d ’une succession
indiquée com m e1 Y undè h a b u it, dans une
reconnais
sance semblable.
Il est encore de principe,' qu’en pays de droit écrit,
où le sieur N oyer était domicilié, le mari et la femme
ne peuvent se faire de donations pendant le m ariage,
�v( 39 >)
et cela p^r une prévoyance de la 'lo i, /ze matuoamore
1
^•
, inler se., invicem spoUentur.
1
, A la vérité ces donations prennent leur effet par
la m o rt, si elles n’ont pas é té ( révoquées auparavant.
Mais parce iqu’ellesrne fo n t ;qu’une donation à cause
-de m ort, éllçs se règlent par la quotité disponible qui
a lieu 'àil’ouverture de la succession.
O r , au»décès du sieur N o y e r , la loi du 17 nivôse
régissait toute la république; et si elle effaçait les prohi
b itio n s du droit-écrit, en donnant toute latitude aux
.dispositions;entre ép o u x, au'moins elle les restreignait,
-quand il y avait des enfans, àT u su fruit des choses don
nées, si elles n ’excédaient pas; la moitié des biens. (Art.
. î i 3 et 14).
>
: Ainsi Françoise T ixier devait prouver en Fan 2 la
-consistance 'de la succession.liquidée de son père.
Il fallait fair,e estimer les biens vendus non par le
curateur, mais par le sieur N oyerfen son nom ; non
¡pas suivant 1^ évaluations ridicules, que le cit. D u b o u y
leur donne au taux actuel, mais à la valeur de 1760.
,11 fallait établir la .consistance du mobilier, et ensuite
i.déduire des, charges et les dettes. Ces dettes sont con
sidérables, puisque le seul article des reprises du sieur
N o y e r , justifiées par k requête du 16 avril 1 7 6 0 , se
porte à une somme de 5,029 liv. 1.6 s., outre les 2,0001.
payées au tréspr public, 1,200 liv. au sieur D epille, et
89 liv. 7 s. au sieur Dufraisse. D é jà , par la compurai-son de celte s.eule dette avec les biens, il est évident
en simple aperçu., que si le sieur N oyer fit une recon-
�/ C 4° 0
naissance de 5,o o o à sa fem m e, c ’éfait pour qu’elle no
fût pas humiliée de n’avoir rien à donnera ses ënfans,
lors de le u r ’établissement, et pour la mettre à môme
de donner à chacun 1,000 liv:.
i;
«
-- • J ■
Mais quand il ÿ aurait quelque excé d a n t, tout ce
que Françoise T ixier n'auraît pas justifié lui apparteten ir, dans les reconnaissances , devenait simple libé
ralité, et alors combien de diminution cette libéralité
" n ’éprouvait-elle pas?
«
:
' J
D ’abord le cit. D u b o u y faisait passer, avant t o u t ,
le don o u legs du d o m a i n e , puisqu’il lui était assuré
par son contrat de mariage, et puisque les reconnais
sances ne prenaient effet ¡qu’à la mort.
‘‘f
Les deux reconnaissances de 5,ooo liv. et de 12,000 I.
ne valaient eu l’an 2 que pour l’usufruit de ces deux
sommes, mais cet usufruit était confondu dans l’usu
fruit de moitié qui était aussi légué par le sieur N oyer
à sa femme ; il absorbait toute la «quotité disponible.
T^es deux reconnaissances devenaient donc nulles' et
sans effet.
'
M
Non seulement l’usufruit de moitié absorbait tout ,
mais il ne pouvait avoir lieu concurremment avec le
don du dom aine, sur lequel l’ usufruit ne frappait pas ,
q u ’a u t a n t que la légitime des puînés devait rester in
tacte, et sans charges suivant les principes, ce qui ne
se pouvait pas. Françoise T ixier n’était donc p;is fon
d é e à p l a i d e r pour obtenir les1deux reconnai ssances .
Il est inutile d’occuper le tribunal de la demande ridi
cule que le sieur N oyer avait formée de 48,000 l i v . , pour
représentation
�(
4*
)
représentation des reconnaissances supposées enlevées,
et du testament de sa mère (q u o iq u ’il en soit nanti) ;
il a abandonné cette demande qui d’ailleurs ne méri
tait pas qu’on s’occupât sérieusement de la combattre.
. Françoise T ixier était encore héritière de sa sœur,
mais les droits de celle-ci étaient liquidés par un traité
dont le cit. D u bouy n'a demandé le prix qu’en l’an 8.
O r ce traité ne donne pas une somme exig ib le , mais
une rente qu'on ne peut forcer à rembourser : et tout
prouve qu’elle avait été remboursée par le cit. N oyer
p è r e , puisque sa belle-sœur acheta des immeubles pour
à peu près ce qui lui était dû.
Ces immeubles ne font pas partie de sa succession,
puisqu’elle les a revendus au sieur N oyer père ; ainsi
quand cette succession ne serait pas confondue dans le
traité, elle n’en serait pas moins absolument nulle.
Voilà donc à quoi se réduit la prétention du citoyen
D u b o u y , si le tribunal veut faire discuter, à grands frais,
le mérite des reconnaissances; et si, en les approfondis
sant de plus en plus , il ne se trouve pas encore plus
fortement convaincu , que Françoise T ixier a fait une
transaction respectable et nécessaire, et qu’en traitant
avec ses enfans, ut a frater no certamine eos prœservarebj elle a prudemment calculé leurs intérêts et le sien.
Q u e l est le droit des parties sur la succession T i x i e r ?
L
e
citoyen D ubouy a un testament de sa mère qui
le fait héritier universel. Ce testament est olographe, et
F
�(
4
2
3
daté de 1789 : mais il n ’est pas enregistré, ainsi ce n’est
pas une pièce à produire.
Ce testament, dicté évidemment p a r le cit. D u bo u y,
semble tacitement révoqué par son contrat de mariage
qui est postérieur, et dont les clauses semblent con
traires à ce testament, au lieu d’y renouveler l’institu
tion , il serait aussi annullé de droit par le traité de
l ’an 2. Car un testament est ultimœ voluntatis testatio.
Or un acte de 1789 n’était pas la dernière volonté de
Françoise Tixier.
Mais à quoi servirait ce testament, dès que la succes
sion de la mère ne consiste que dans son mobilier ;
il est partagé ; et voilà ce qui faisait prendre au mot
le cit. D u b o u y , lorsqu’il se disait seul héritier d’une
succession nulle , parce que cette nullité m êm e rendait
illusoire la promesse de 1,000 livres, que la mère avait
faite h ses filles lors de leur mariage.
Il ne servirait à rien encore si le tribunal voulait
annuller le traité de l’an 2, et fixer la succession de la
m è re , car le pis aller serait d’adjuger la reconnaissance
de 5 ,ooo liv. la seule que son époque puisse faire res
pecter; et alors les dames Greliche y auraient 1,000 liv.
chacune, dès que cetle somme leur est promise avant
le testament. Ce serait donc à leur égard un partage
par égalité, malgré l ’institution.
Mais soit que la succession malernelle se compose de
mobilier, ou de ces 5,000 l iv ., ou de loute autre chose,
le cit. D ubouy doit toujours rendre compte des 6,000 1.
qui sont une charge de sa donation, ce qui est Iota-
�( 43 )
lement distinct du procès a c tu e l, et ce qui est jugé.
- Il a cherché jusqu’à présent à retarder le paiement
de cette somme , et il y est parvenu , en plaidant qu’il
fallait attendre la décision relative au partage de la
m ère; le moment est donc ven u, non pas d’y rapporter
ces 6,000 liv. mais de les payer, car il n’est donataire
qu’à cette condition.
j Ainsi ce procès si compliqué par les conclusions si
souvent changées du cit. D ù b o u y , se simplifie extrê
m em ent, et se réduit à des points certains.
1
L ’opposition au jugement par défaut est recevable;
ainsi le jugement surpris par le cit. D u b o u y est com me
non avenu.
L e désaveu estfondé au cas qu’il ait été nécessaire;
mais quand les sieurs Greliche auraient répudié au
bureau de p a ix , et même en jugem ent, une succession
parapliernale à leurs fem m es, celles-ci ne sont pas liées
par cette répudiation ; c’est une nullité viscérale; les
maris n’ont promis aucune garantie. S’il y avait enga
gement de leur p a r t , ce serait le sujet d’une action
particulière à diriger contre eux; mais cela ne produi
rait pas une répudiation.
r
•'
D ’après cela, le partage de la succession de Françoise
Tixier doit être ordonné entre toutes les parties ; mais
cette succession se réduit au mobilier, puisque les droits
litigieux et incorporels, dont elle pouvait se composer,
sont: vendus par transaction.
Si le tribunal annullait cette transaction, alors la suc
cession de Françoise Tixier n’en serait pas moins réduite
F a
�( 44 )
à rien, soit parce qu ’elle egt décédée sans avoir révoqué
sa,répudiation de 1760 , soit parce que les recouvreinens des biens de son père sont absorbés par les dettes ;
soit parce que sa soeur ayant acquis des biens1, pour le
p_yix de sa cession de droits, les a revendus,
r Si le tribunal donnait effet aux reconnaissances sans
les compenser avec les reprises du cit. N o y e r p è re , il
annullerait sans, doute'celle de l ’an 2 , com m e1n ’étant
qu’un avantagé in d ir e c tt e n d a n t à surpasser la quotité
disponible par la loi d u ^7 nivôse, et ne donnerait effet
qu’à, celle de 1775.
L a succession de Françoise T ixier une fois connue,
se régie aisement ; il est à. peu près égal que le citoyen
•Dubouy en soit*-héritier: ou ne' le soit pas; mais le tri
bunal ne peut avoir égajrd au testament de 1 7 8 9 ,puisque
i.° il n’est pas enregistré; 2 ° il est annullé par le con
trat de mariage de 17,90 > et le traité de l’an 2.
Il £dul donc en revenir aii point d’où on est parti,
c ’esl-ti-dire , a u jugem ent du a 5 ventôse an 5 ; tout est
réglé par l u i , et le tribunal n’a pas de guide plus sûr;
car le cit. D ubouy avait tout demandé alors, comme
011 peut le voir par le procès-verbal du i . er pluviôse
p ré cé d e n t, et ce fait n’est pas détruit par de simples
réserves qu’il a faites au P u y postérieurement et dans
d ’autres circonstances. Ces deux pièces du procès mar
quent assez que les parties entendaient faire terminer
toutes leurs contestations à cette époque, et celte in
tention fait crouler toutes les procédures, toutes les
conclusions, toutes.les injures du cit. N o y e r-D u b o u y ;
�(4 5 )
car il devait alors bien expliquer ses prétentions, et il
les avait expliquées; toutes les considérations ont été
pesées alors, et il ne p e u t , sans mauvaise foi a faire
renaître un procès d'un autre procès, et exiger que la
Justice partage avec lui ses embûches et ses cavillations.
M.r MARCHEIX , Rapporteur.
L . F. DELAPCHIER, Homme de loi.
F A Y E , Avoué.
A RIOM, DE L IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer, Jeanne. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
créances
successions
captation d'héritage
prison
contre-révolution
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Jeanne et Marie-Gabrielle Noyer, Pierre et Joseph Greliche, leurs maris, habitant à Mozun, intimés ; contre Joseph Noyer-Dubouy, habitant à Chamalière, appelant ; en présence d'Anne Noyer-Lagarde, avoué au Tribunal civil de Clermont, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1750-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0330
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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captation d'héritage
contre-révolution
Créances
prison
Successions
-
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edc9f8873583d41ce618d20f9283306d
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Text
DITR1CT
PRECI S
de
Pour LÉGER. R I C A R D , c ito ye n , habitant de
la commune de L e z o u x , appelant d’un jugem ent rendu au district de Billom le 3 germinal
dernier,
Contre m a r g u e r i t e M A Z 1N , femme séparée,
quant aux b ie n s , A n t o i n e B A N N I E R ,
autorisée en ju s t ic e , intimée.
‘
'
q u e s t i o n
.
Une fe m me, q u i, en coutume d’Auvergne , a vendu
ses biens dotaux, pour racheter s o n m ari de prison,
avec toutes les form alités prescrites , p eut-elle de
mander la nullité de cette aliénation , sur le pré
texte qu’ a l'époque de cette vente, son m ari possédoit encore quelques héritages, mais hypothéqués à
une fo u le de creanciers, antérieurs à celui qu i avoit
obtenu la contrainte par corps ?
Les questions les plus simples deviennent aujourd’hui
des problèmes, et p ar-tou t on ne voit qu’ incertitude
ou erreur! Les points de jurisprudence les plus certains
A
t i i i e r s
.
�•
.....
.
( * )
.
.
sont méconnus. Les personnalités remplacent les princi
pes; de vains'motifs de considération sont substitués aux
moyens de droit ; -l’arbitraire à succédé aux lois les plus
précises ; les propriétés sont chancelantes et incertaines !
*. T d le s sont les tristes vérités dont le jugem ent du district
de Billom fournit une nouvelle preuve. , '
; Le. 14 novembre 1778, A n toin e B an n ier, habitant du
lieu de D allet, vendit à Léger R ica rd , appelant, la quan
tité de quatre cent vingt-six pots de vin rouge, moyennant la
somme de mille vingt livrçs. qu’il reconnut avoir reçues.
Il s’obligea, par; a'cte notarié, à délivrer la quantité
de vin vendu , dans le courant du mois de ju in , lors
prochain , et il n’est pas. mutile d’observer que B a n n ier
■ se soumit à la contrainte par corps, attendu qu’il s agis
sent d’ un objet de son commerce.
B a n n ie r , hors d’état de faire cette, délivrance , vint
trouver le citoyen R ic a r d , le 8 mars 177c); il le pria
d’accepter une obligation, pour tenir lieu du prix de la
vente, qu’il avoit touché; et quoique le marché lut de
venu avantageux au citoyen R ica rd , celui-ci voulut bien
le résilier; Bannier lui consentit une obligation de mille
quatre cent deux livres, causée pour la vente'et. déli
vrance de quatre cent vingt-six pots de v in , ou pour les
frais de la première vente ; il renouvela sa soumission à
la contrainte par corps, attendu qu’il s’agissoit de vente
pour le fait de son commerce.
Cette obligation fut stipulée payable en deux termes;
moitié au 24 juin suivant, le reste au 11 novem bre, lors
prochain.
•
B an n ier ne fut pas exact à l’échéance : le 18 ju in ,
/
�( 3 )
il y eut un commandement de p ayer; et le 12 juillet
suivant, un procès verbal de rébellion.
On ne peut pas reprocher i R ica rd une grande pré
cipitation dans ses poursuites , puisque du com m an de
ment, à l’exécution., il y eut plus d’un mois d'intervalle.
Mais une obligation étoit un 'vain titre, qui n’imprimoit.
qu’une hypothèque sur les biens de Bannier-, et R ica rd
etoit primé par une foule de créanciers plus anciens.
Pour parvenir au payement de sa créance, et attendu
qu’il s’agissoit d un fait de commerce; que B annier s’étoit
soumis consécutivement par deux actes, à la contrainte
par corps; 'Ricard le traduisit en la juridiction consulaire
de Billom , et obtint le 20 juillet 1779 , une sentence qui
condamne R am ner consulairemènt au payement du pre
mier terme écliu de l'obligation.
Cette sentence fut mise à exécution le lendemain • la
femme B am iier présente requête au juge des lieux 'de
mande à être autorisée à consentir une obligation au profit
de R ic a r d , poür racheter son mari- de p r i s o n ; elle obtient
une ordonnance conforme , sur l’exhibition de l’acte d’-'
crou ; et le 23 juillet, -elle consent une obligation de
la somme de sept cent; v in g t-se p t livres sept sous trois
deniêrs dont son m’ari se-rendit caution « «' '■
■
)
Dans l'in tervalle, il fallut lle nouvelles poursuites • la
femiriè Banmer n est'pas plus exacte qi,e son mari. Ce
l u i . « s inquiété peu de'‘son cautionnement. T raduit de
fio u veta à 'k juridiction'corisul&iré'de Billom“,' une sb- '
coude sentence, du i 5 février i 78 o , le oondâmne au
payement de 1 obligation Consentie par sa fem m e, et dont
il s’ëtoit rendu caution.
ii
>
A 2
�C4 )
^
Il y a eu des commandemens de payés , des procès
verbaux sans nom bre, et tout est inutile : le second terme
de l'obligation arrive, il faut recommencer ; il est assigné
en la juridiction consulaire de Rio'ui, et le 30 novembre
1780, jRicard obtient une sentence qui condamne jBanirier au payement du terme échu.
B a n n ie r , de nouveau dans les pi'isons, Marguerite
M a z in , sa fem m e, s’occupe sérieusement de l’en faire
sortir : elle présente requête au ci - devant lieutenantgénéral de la sénéchaussée, pour demander permission
de ven d re, afin, de racheter son mari de prison , et se
libérer du montant de l’obligation qu’elle avoit consentie
au profit de Ricard.
Sur la représentation de l’acte d’écro u , elle obtient
le décret du juge, et vend à R ica rd quatorze œuvres
de vigne, moyennant la s o m m e de o n z^ cent trente livres,
jusqu’à concui\rence de laquelle elle étoit autorisée à.
vendre.
Depuis cette ven te, il n ’est pas de vexations que la
femme B a n n ier n’ait fait éprouver à Ricard. C e lu i-ci,
qui a v o i t eu la facilité de venir au secours de B a n n ier,
et avoit a u g m e n t é ses créances, a toujours trouvé à son
chemin Marguerite M azin , qui s’étoit fait séparer de
biens avec son mari : il n ’y a p a s eu un procès verbal
d’exécution, que la femme B an n ier n’ait formé oppo
sition ; pas un meuble saisi qui n’ait été réclamé par
elle comme lui appartenant. Tous les tribunaux ont. re
tenti de scs querelles, soit- avec R ic a r d , soit avec les
autres créanciers : par-tout elle a succombé. Le détail des
jugemens qui ont été rendus est étranger à ce mémoire,
�.
( 6 >
et en grossiroit inutilement le volum e; mais elle a mis
le comble à la mesure , en revenant contre l'obligation
et la vente par elle consentie au profit de R icard.
Après plus de 13 années de silence, et lorsqu’elle a
Vu que les immeubles avoient augmenté de valeur
par une progression énorme , elle a imaginé, après avoir
épuisé les voies conciliatoires, de traduire au district
de Billom , le citoyen R ic a r d , par exploit du 16 prai
rial de l’an a , pour voir déclarer nulle l’obligation par
elle consentie, le 23 juillet 17 79 , et être condamné
au désistement des 14 œuvres de vigne par elle vendues,
pour rachetei son man de prison, le 30 novembre
1780; elle a demande la restitution des jouissances,
depuis la vente , et les intérêts du tout.
La femme B annier a exposé qu'il étoit établi . par
son contrat de mariage, que tous se sbiens étoient
dotaux.
Elle a argumenté de la disposition de la coutume d ’Auveig n e, qui interdit 1 aliénation des biens de cette nature ,
pendant la durée du mariage.
*
Elle a soutenu que la coutume ne permettoit l’alié
nation des biens dotaux, pour racheter le mari de pri
son , que lorsque le mari n’avoit pas d’autres biens'- et
a mis en fait qu'A ntoine B a n n ier , son époux, possédoit plusieurs immeubles, lorsque R ica rd l’avoit con
traint de vendre.
Elle a pretendu encore que les formalités exigées
par la loi municipale , n’avoient pas été remplies ; que
la vente avoit été faite sans connoissance de cause.
Elle s est ensuite livrée a des personnalités injurieuses
�( 6)
envers R ica rd , moyens ordinaires de ceux qui n ont
pas d’autre ressource.
R ica rd , méprisant les injures, a rendu compte des
faits avec exactitude \ il a rappelé la disposition de
l’article 7 du litre 14 de notre coutume , qui autorise
]a feinint* à aliéner ses biens dotaux , en cas de néces
sité, pour alimcrLs décile, de son mari et de ses enfans,
ou pour racheter son m ari de priso/2.
La venté consentie par Marguerite M a z in , avoit
ce dernier objet, puisque son mari étoit privé de sa
liberté.
Si la coutume exige connoissance de cause et décret
du ju g e , cette connoissance de cause existe lorsqu’il y
a un . acte d'écrou -, le décret du juge est rapporté :
tout étoit donc en règle.
‘
L a coutume, en disant que la femme peut aliéner ses
biens dotaux, à défaut d’autres biens, n’a entendu par
ler que des biens de la femme qui péuvent être de
différente nature , parapliernaux ou dûtaux et comme
la femme est maîtresse, dans tous lés cas, d'e ses tiens
parapliernaux , ils doivent être épuisés les premiers, s’ils
s o n t sufïisans , a v a n t d en venir aux biens dotaux ; mais
il n’est et né peut être question des biens du- mari
qui petit se trouver dans l’nnpossibilité de les aliéner,
l\ raison des privileges, ou hypothèques antérieures, et
par là seroit menacé de languir dans une dure captivité.
Cette explication si naturelle n’a pas satisfait les pre
miers j u g e s ; là cause portée à l’audience, le 3 germinal
dernier, il y est intel'venu un jugement dorit il est
essentiel de connoitre les motifs,
�.
. .
^7 \
' « A ttendu, est-il dit, que l'obligation de la M a zut
e femme B an n ier, est le résultat d’une collusion rrnmi« feste entre R ica rd et B a n n ier, celui d’une machina
it tion tramée pour acquérir les biens de la femme ;
‘ ’« Collusion, machination prouvées par la conduite
« de R ica r d , qui, ayant un titre paré, fait une somk mation , un procès verbal de rébellion, et abandonne
« des poursuites commencées, pour obtenir un jugement
« consulaire absolument inutile : illégitimité qu’il met dans
« ses poursuites, en obtenant le 20 juillet un jugement
<r qu’il ne peut obtenir que dans la soirée; et cependant
« B an n ier etoit incarcéré le lendemain à sept heures
« du matin, et le même jour une ordonnance qu’on fait
« obtenir à la femme pour sortir son mari de prison,
* qui y étoit à peine en tré, ou qui n’y étoit entré que
« volontairement, car nul huissier ne se fût exposé à
« mettre un jugement de la veille à exécution, et R ica rd
« n’eut osé s’y exposer ;
«’ Attendu qu’il est constant que B a n n ier avoit des
« meubles et des immeubles, que la raison et la justice
a disent devoir être épuisés, avant de conduire une
« femme à l’aliénation de ses immeubles ;
« Attendu que la vente est la suite d’une obligation
« nulle et illégitime ;
.
« Attendu q uelle n a pas été faite par aucun des cas
« prévus par la l o i ,
•
« Le tribunal déclaré nulle l’obligation consentie
« par la M a z u i, au profît de Ricard. , le 23 juillet
« 1779 j déclare aussi nulle la vente des 14 œuvres de
« vigne, du 30 novembre 1780 ; ordonne que l’une et
�,
•
(
8
.
,
« l’autre demeureront sans effet :' condamne
t R icard à
« sedésisler, au profit de la M a z m , des 14 œuvres de
« vigne; à lui en laisser la libre possession et jouissance;
« lui fait défenses de l’y troubler, aux peines de droit; le
« condamne à rendre compte des jouissances perçues
« depuis la vente; au payement des dégradations, suivant
« festirnation par experts ; le condamne au payement des
-« intérêts du tout et aux dépens. »
Ce jugement est aussi singulier dans ses motifs, qu’in
juste dans ses dispositions; R icard s'est empressé d’en
interjeter appel • le tribunal de Thiers a été saisi de la connoissance de cet ap p el, après les exclusions respectives.
On gém it, comme on l’a observé en commençant, de
voir motiver un jugement sur des personnalités, ou sur
des motifs de considération, tandis q u ’ o n met de côté
les principes et les moyens de droit. R icard détruira,
avec facilité, les assertions erronnées de collusion, de
machination ' il établii'a ensuite la validité de la vente,
en rappelant la disposition de la coutume, qu’on s’est
permis d’interpréter d’une manière si contraire au texte
et à l’esprit de l’article qu’il invoque.
’
Il ne peut y avoir, ni collusion, ni machination; c’est
pour la première fois, sans doute, qu’on a imaginé qu’un
débiteur eolludoit avec un créancier, lorsque ce dernier le
poursuit rigoureusement, le fait traduire dans les prisons,
après avoir épuise toutes autres ressources, fait exécu
ter et vendre ses meubles par une foule de procès
v e r b a u x , dont il n en est pas un seul qui n’ait lait un
incident toujours contradictoirement discuté et jugé.
Mais, dit-ofl> cette collusion et machination est prouvée
par
�'
. ( 9 \
~
par la conduitode R icard qui avoit un Litre p arc, en
vertu duquel il avoit commencé des poursuites qu’il
abandonne, pour obtenir un jugement consulaire abso
lument inutile.
Les premiers juges, au lieu de voir des machinations,
auroient dû voir les titres parés dont ils parlent ; ils
auroient lu , dans les deux obligations de 1778 et de
1779 ? clu(i B an n ier s’étoit soumis consécutivement à
la contrainte par corps, attendu qu’il s’agissoit d’objets
de son commerce; que, par conséquent, R icard avoit
eu le droit de le traduire devant les juges-consuls ; ils
auroient senti que les jugemens consulaires n’étoient pas
inutiles ; que c etoit, au contraire, la seule ressource qui
restât à R ic a r d , pour se procurer le payement de ses
créances , par la raison qu’une sentence consulaire lui
donnoit une action sur la personne du d ébiteur, tan
dis qu’une obligation ne lui donnoit qu’une hypothèque
sur ses biens, hypothèque postérieure à toutes les autres
créances; à M arguerite M a z i, 1 3 sa fem m e, dont l’hy
pothèque ^remontoit à son contrat de m ariage, et qui
d e p u i s sa séparation, s’est fait adjuger tous les biens de
son mari pour le montant de ses reprises.
.•
I , .Qu’importe que R ic a r d n’ait pu obtenir la sentence
que dans la soirée ? que B a n n itr ait été incarcéré Je
lendemain, etc.? où donc est l’impossibilité que la sen
tence ait été exécutée avec célérité; narrivc-t-i.1 pas tous
les jours qu un créancier, qui trouve le moment opportun,
fait saisir son débiteur, lorsqu’il sait où le prendre , et
11e se presse-t-il pas au contraire de faire exécuter le
jugement avant que le débiteur soit averti et puisse se
B
�.
( 10 ) ■ .
.
..
soustraire par la fuite; et d’ailleurs 'iln’est pokrt question
ici du hic 11 ou mal procéd é, oti jugé par les sentences
consulaires J elles ont été exécutées, approuvées, ne sont
point attaquées, ne pourroient pas l’étre, parce qu’elles
ont passé en force de -choses 'jugées. Mais c’est "trop
s’arrêter sur des motifs-aussi pitoyables : on s’empresse
d’aborder la question de droit.
r
J
L ’art. 7 du titre 14 de notre coutume autorise ’la
femme à aliéner ses biens d otau x, à défaut d’autres
biens, en cas de nécessité , poux dlimens d?elle , de son
mari, de ses enfans, ou pour Tacheter son m ari de 'prison,
Cette aliénation peut être'faite,sans aucune récompense,
:pourvu qu’il y ait connaissante de' cause et im'xlécr&t
d u ju g e .
•
On a agité ‘long-temps parmi 'les jurisconsultes , 'si,
pour qu’il y eut c o n n a i s s a n c e de cause ; il falloit un
avis de parens, indépendamment d’un décret du ju ge,
•■
et à cet égard on'a fait une distinction pbur 'les aliénations
causées pour alimens , d avec “celles qui avoient pour
objet de racheter le mari de prison.
.
Dans le premier cas, on a pensé qu’il étoit nécessaire
d’avoir un avis de pai-ens, parce que la nécessité de cette
aliénation 11e pouvoit être constatée que de cette -ma
nière ; mais 011 a décidé que l’avis 'de parens étoit inu
tile, l o r s q u ’ il sagissoit de racheter le 'm ari de prison;
ou a pensé avec rajson qu’il existoit une assez grande
- c o n n o i s s a n c e de cause du procès verbal ^ ’emprisonne
ment et de lacté d’écrou. Il Suffit de rapporter à ‘l'hôtel
du juge ces deux pièces, sur lesquelles le juge rend son
d écret,'et ce décret a toujours été suffisant pour valider
les ventes qui s Ciisuivoient.
�,
, .
( 11 )
Telle étoit la jurisprudence constante et l'usage de la
ci-devant sénéchaussée d’Auvergne. On trouve au Journal
des Audiences un arrêt du 21 juin 17 0 7 , qui a jU(r£
la question en thèse. Le dernier commentateur est égale
ment de cet avis : il rend compte d’une sentence qu’il a
omis de dater, et qui a ju g é , en très-grande connoissance de cause, qu’il n’étoitpas nécessaire dans ce cas de
prendre un avis de parens : enfin ce point de juris
prudence est devenu trivial parmi nous , on ne se per
met plus de le révoquer en doute.
Dims l’espèce, le procès verbal d’empris.ônncinent,
l’acte d’écrou., le décret du juge sont rapportés. L ’obli
gation de la femme B an n ier a donc eu une cause légi
time ; l’aliénation de ses immeubles , qui en a été la
suite, a donc été valablement faite.
.
M ais, ajoute-t-on, il est constant qu’à l’époque de lp.
vente consentie par sa femme, B a n n i e r avoit des meublcs , des immeubles , notamment vingt-trois œuvres
de vignes : laïaison et la justice veulent qu ils soient épuisés
avant de conduire une femme a l’aliénation de ses biens
dotaux. .
‘
î
Il se présente une foule de réponses ¿1 cette objection •
il est ¿vident, cl’apres le texte de l’article, que la-cou
tume , en permettant i\ la femme ^’alié;ier ses biens^jptaux,
à fa u te d autres bien s, n a en tendu--pai/Jçr
dcyf^/ien?
de la'i.io;mne , et non de ceux çlu i ^ y i d o n t iJLr ne$t
pas question dans l’article.
¡} .... ,, '
,
Cela ne veut dirç autre chose, sinon. qi)ip;.cjlaps le cas.j
où la femme auroit des biens paraphcri^aux, pu^aycijtiis;!)
sullisans pour subvenir à la détresse de son .¿nari, cjle
B 2
�.
( i2 )
^
devroit les aliéner par préférence à ses biens dotaux.
La raison en est sensible : la femme dans notre cou
tume, est maîtresse de disposer, comme bon lui semble,
de ses biens aventifs et paraphernaux : elle en est mere
de fam ille, pour se servir des termes de la lo i; au lieu
que les biens dotaux sont inaliénables de leur nature.
Les prem iers, par conséquent, doivent être épuisés,
avant d’en venir aux derniers : c’est ,ce qu’a voulu la cou
tume, et on devroit s’en tenir au texte. Si donc la femme n’a
q u e des biens dotaux, elle peut les aliéner, pour rache
ter son mari de prison, quand même le mari auroit
encore quelque bien : l’intérêt public , la faveur du
commerce, le repos des familles, exigent que les ventes
de ce genre s o i e n t valables.
L e dernier commentateur rcconnoît lui-m êm e que
son opinion est contraire au texte de la coutume , qui
n’a entendu parler que des biens de la femme, et non
de ceux du mari. S’il pense que les biens du mari doivent
être premièrement épuisés, son avis n’est fondé sur
aucun jugement ou a rr ê t, et aujourd’hui , plus que
jamais, on devroit suivre littéralement le texte- de la
lo i, sans se permettre de l’interpréter.
A la vérité B a sm a iso n , dans sa Paraphrase, a énoncé
la même opinion : on conviendra même qu’il est rai
sonnable?.^ .que lorsque le mari a des biens sulïisans
pour payèr'^èes dettes , il commence par les aliéner,
plutôt que ceux.de sa femme; mais il peut a r r i v e r que,
quoique le mari ail des biens, il soit dans l’impossibilité
d-acquitter, avec ces mêmes biens, la dette qui le retient
en captivitésM ' '
6
z n.
�,
.
' 13 )
Le créancier qui a la contrainte par corps contre son
débiteur, peut avoir des créanciers fort antérieurs à
lui en hypothèques, ce qui rend la vente impossible
aux créanciers postérieurs. Il en résulteroit qu’alors le
mari languiroit dans une captivité rigoureuse; ce qui
rendroit absolument illusoire la faculté que la coutume
accorde ¿1 la femme d’aliéner ses biens dotaux, pour
racheter son mari de prison.
.
Cette distinction s’accorde parfaitement avec l’opinion
du dernier commentateur : il ne lui paroît pas naturel
que la femme vende , quand le mari peut pourvoir à
ses besoins. Mais lorsque le mari a ses biens affectés à
des créances antérieures à celles qui le retiennent en
prison, il est dans l’impossibilité de subvenir à sa dé
tresse, et alors il faut que la femme vienne à son secours;
c’est là le cas que la coutume a voulu et dû prévoir , les
seules lumières de la raison doivent convaincre de cette
vérité.
Telle est l’espèce où se trouve le citoyen R ica rd •
la femme B annier en a imposé à la justice, lors
qu’elle a soutenu que son mari avoit encore des meu
bles. Comment a-t-elle pu mettre en avant cette asser
tion , elle q u i, à chaque procès verbal de saisie-exécu
tion , est venu demander, et a fait demander par sa
mère, la main-levée de la saisie, sur le fondement que
son mari navoit aucune espèce de meubles, et que
ceux qui avoient été saisis appartiennent à elle ou à sa
m ère? Ce n’est pas au citoyen R ica rd seul, contre
lequel elle est pourvue, sous ce prétexte, mais contre tous
les autres créanciers, et notamment contre le citoyen
Vernièrcs.
�( *4 )
Elle a ajouté, mais sans en donner aucune preuve,
que son mari possédoit v in g t-tro is œuvres de vig n e,
lorsqu’elle a aliéné ses biens dotaux : quand le fait
seroit vrai , R am iier étoit dans l’impossibilité de ven
dre ; il y avoit une foule de créanciers antérieurs au
citoyen R icard ; la femme M a zin elle-même avoit uiie
f hypothèque du jour de son contrat de mariage ; cette
iTypotlicqluTabsorboit seule, et au-delà, tous les biens du
m ari, puisque la femme, dans la suite, se les est fait ad
ju g e r, en totalité, pour le montant de ses reprises,
et a poursuivi le désistement contre les tiers acquéreurs.
E l l e ne pou voit pas se départir de son hypothèque j
dès quelle étoit en puissance de mari : c’eût été de
sa p a rt, une aliénation absolument nulle. Quand elle
auroit pu le faire, R icard n’eût p a s été.plus a v a n c é , parce
que les créanciers antérieurs se seroient mis en posses
sion des vin g t-tro is œuvres de vig n e, ou auroient été
colloqués avant lu i, sur le prix de la vente.
R a m iier n’avoit donc d’autre ressource pour se
r a c h e t e r de prison, que dans les biens de sa fem m e,
qui paroît se repentir, aujourdhui, de lui avoir tendu
une main secou rable : ainsi le moyen de nullité est odiçux
et de mauvaise foi.
'
Si on considère ensuite, que c’est apjj^s plus de treize
années de silence , que la femme R annier vient témoi
gner des regrets davoir fait son devoir ; qu’elle n’a
form é cette demande, qu’à raison de la progressionsurvenue dans la valeur des immeubles, que les préten
tions de ce genre se. multiplient tous les .jours , et
deviennent le iléau de la société ; on demeurera côn-
�(15 )
vaincu qu’il faut enfin qu’il y ait quelque chose de
certain parmi les hommes ; que la prétention de la
femme B an n ier est déplorable , et on s’empressera de
réformer un jugement q u i, à tous égards, et sous
tous les rapports, est contraire aux principes et à
l’équité.
Ainsi semble : à R io m , le 20 th erm idor, an 3 de
la république française. P A G E S .
TO U T T É E , ANDRAUD, GRANGHIER,
V E R N Y , T O U T T É E , jeune, F A V A R D , GAS
C H O N , B O R Y E , GRENIER.
$
A RIOM, DE L’ I M P R I M E R I E DE LANDRIOT.
\
1
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ricard, Léger. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Touttée père
Andraud
Granchier
Verny
Touttée jeune
Favard
Gaschon
Borye
Grenier
Subject
The topic of the resource
coutume d'Auvergne
vin
créances
biens dotaux
prison
Description
An account of the resource
Précis pour Léger Ricard, citoyen, habitant de la commune de Lezoux, appelant d'un jugement rendu au district de Billom, le 3 germinal dernier, contre Marguerite Mazin, femme séparée, quant aux biens, d'Antoine Bannier, autorisée en justice, intimée. Question. Une femme, qui, en coutume d'Auvergne, a vendu ses biens dotaux, pour racheter son mari en prison, avec toutes les formalités prescrites, peut-elle demander la nullité de cette aliénation, sur le prétexte qu'à l'époque de cette vente, son mari possédait encore quelques héritages, mais hypothéqués à une foule de créanciers, antérieurs à celui qui avait obtenu la contrainte par corps ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 3
1778-Circa An 3
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0147
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lezoux (63195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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biens dotaux
coutume d'Auvergne
Créances
prison
vin