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MEMOIRE
COUR
•D’APPEL
EN
R É P O N SE,
I
SÉANTE
ARIOM.
•POUR
P i e r r e - P a u l - F r a n ç o i s V A N E L , propriétaire,
' et dame M a r g u e r i t e C A L O N N E , son épouse,
habitans du lieu de Rageaud, commune de SaintC erni n intimés;.
CONTRE
B E A U C L A I R , cordonnier, habitant
du lieu du Theil même commune de St.-Cernin,
appelant d'un jugement rendu au tribunal d’arrondissement d’A urillac, le 1 7 frimaire an 1 ..
N ic o la s
3
- N I C O L A S B E A U C L A I R , acqu éreu r particulier d’ une
portion de pré dépendante de la succession C alonne , veut
imposer une servitude sur la propriété des intimés.
A
�Cette servitude qui n’a jamais existé , qui n’a pas été
prévue par le partage de fam ille, est aussi inutile pour
l’appelant qu’elle seroit onéreuse pour les intimés.
L e jugement dont est appel a fait justice de cette pré
tention exagérée ; mais Beauclair persiste dans sa demande,
et ce n’est qu’en dénaturant les faits qu’il a créé des griefs
contre le jugement.
Il s’agit de démontrer que sa prétention est contraire
aux principes, qu’elle porte atteinte aux droits sacrés de
p r o p r ié té , qu’ainsi il ne peut espérer aucuns succès.
F A I T S .
Philippe-Joseph-François Colonne, et M arie-Julienne
Ilod d es, son épouse, ont donné le jour h onze enfans ;
deux sont morts sans postérité, deux autres ont été ins
crits sur la liste des émigrés.
Celle dernière circonstance nécessita une demande en
partage des cohéritiers Calonne , pour empêcher le
séquestre et la vente de leurs portions. Ils obtinrent le
12 germinal an 3 , de l’administration du déparlement du
C antal, un arrêté qui autorisoit le partage. Il y fut en
effet procédé ; mais l’opération des experts n’ayant pas
satisfait l’un des cohéritiei’s qui se prétendoit lésé, un
second arrêté du même déparlem ent, du 13 floréal an 4 ,
renvoya les parties devant le tribunal civil sur cette de
mande ; et un jugement définitif, du 25 frim aire'an 5 ,
ordonna qu’ il seroit procédé à un nouveau partage.
L ’administration dedépartement nomma lesieurllam es,
exp ert, pour faire ce partage; cl tous les cohéritiers, salis-
�(
3
)
faits de cette nomination, déclarèrent simultanément qu’ils
se contentoient de cet e x p e r t , qu’ils s’en rapportoient à
lui seul ; et en conséquence cet expert fut autorisé à y
procéder.
Son opération fut terminée en pluviôse an 6 ; le tirage
des lots eut lieu au département le 27 du même mois ;
chacun des héritiers fut envoyé en possession de son lot.
Il dépendoit de cette succession deux prairies, toutes
deux appelées de la R iv iè r e , mais dont l’une est située
au lieu de L am ou rie, et l’autre est située à Rageaud. C ’est
la prairie de Rageaud qui donne lieu à la contestation.
Il est bon d’observer que tous les biens de la succession
furent estimés en masse : il n’y a pas eu d'estimation par
ticulière pour le pré dont il s’agit.
L a prairie de Rageaud a fait quatre lots , un de cinq
journaux deux tie rs, un second de neuf journaux , un
troisième de cinq journaux , un quatrième d’un journal
trois quarts.
Cette différence dans la division prouve que Beauclair
n’a pas dit la vérité , lorsqu’il a exposé dans son mémoire
que l’estimation de ce pré fut la même pour chaque lot.
S ’il n’avoit pas existé une différence dans la qualité et la
valeur de telle ou telle partie du pré , chaque lot parti
culier de la même prairie n’auroit fait qu’ un tout ; l’e x
pert n’auroit pas divisé et placé en deux endroits diffé
rons le premier l o t , composé de cinq journaux deux
tiers, Cependant deux journaux de ce lot ont été placés
au bout de la p r a ir ie , le surplus a été séparé des deux
premiers journaux par le lot de la dame V a n e l , qui est
de neuf journaux ; ce qui prouve évidemment que toutes
A a
�. . . . . . . . .
( 4 )
les portions de ce pré ne sont pas de la même qualité, et
n’ont pas été estimées le même prix.
L e premier l o t , composé cle neuf journaux, est échu
A l’intimé j le troisièm e, de cinq journaux , est échu à
demoiselle Jeanne-Françoise de Galonné, représentée par
l’appelant, son acquéreur.
’
Dans le rapport de R a m e s, e x p e rt, il est parlé des
servitudes qui doivent exister. O n ne voit autre chose
à ce chapitre, sinon que « chacun des parts prenant sera
, «
a
«
«
«
«
«
tenu des réparations et de l’entretien des bâtimens échus
à son lo t; il est ajouté que chacun se servira par son
propre fonds autant que possible ; dans le cas con traire,
il passera sur la nature de terrain le moins dommageable
en temps et saisons convenables ; et quant aux eaux
il n’y est dit autre chose, sinon que celui auquel échoira
le quatrième lot aura la faculté, pour son usage ordi-
« n aire, de venir puiser de l'eau à la fontaine qui jaillit
dans la cou r, au-devant de la grande maison, à la charge
« par lui de contribuer aux réparations et entretien, tant
« de la fontaine que de la porte d’entrée de la cour.
« Et celui auquel échoira le deuxième lo t, aura aussi
« la liberté de mener boire ses bestiaux à la fontaine qui
« jaillit dans la cour située au midi de la grange des
« vaches, à la charge par lui de contribuer pareillement
« aux réparations et entretien de cette dite fontaine. »
Il n’est fuit en aucune manière mention cle l’ irrigation
de la p r a irie , ni du mode d’ irrigation. S’ il y avoit eu quel
ques difficultés entre les coparlageans pour un objet de
cette im portance, l’expert qui est'entré dans des détails
uussi minutieux , même sur la faculté de puiser ou de
�( 5 )
mener boire les bestiaux à telle ou telle fon tain e, n’auroit
certes pas manqué de régler le m ode d’irrigation de la
prairie.
Mais comment l ’expert se seroit-il occupé de cet objet?
O n voit sourdre des sources de toutes parts dans cette
p r a irie , de manière que chaque partie peut être arrosée
sans qu’il soit utile d’imposer aucunes servitudes sur les
portions divisées ; et aussi n’en a-t-il ete impose aucune:
chaque partie s’est contentée de son l o t , et en a joui sans
réclamation.
Il y a même eu plusieurs sujets de discussion entre les
cohéritiers. L e sieur Rames avoit fait différentes omis
sions dans son rapport; il n’avoit pas procédé à la liq ui
dation des reprises respectives des cohéritiers. Il fut nommé
des arbitres par l’administration du département ; et de tous
les cohéritiers qui réglèrent ces nombreuses répétitions ,
ainsi qu’il résulte des procès verbaux contenant avis arbi
tral , des 9 prairial et 8 messidor an 6, et quoique chaque
héritier n’ait rien n égligé, qu il soit entre dans les détails
les plus m inutieux, aucun n’a réclamé sur le partage de
la prairie de la R ivière ; aucun ne s’est plaint de la diffi
culté de l’irrigation, ou d’un obstacle à sa jouissance.
Ce n’est que le 13 vendémiaire an 9 , trois ans après
cet arrangement de famille , que Beauclair est devenu
acquéreur du lot de Jeannc-Françoise de Calonne.
Ce nouveau propriétaire eut bientôt des prétentions;
il se plaignit de la difficulté qu’il éprouvoit dans l’irri
gation du pré qu’ il venoit d’acquérir; il avoit a c h e t é ,
disoil-il , cet héritage avec ses aisances , servitudes ,
prises et perceptions d’eau dues et accoutum ées. Il sou-
�( 6 ) . ,
tenoit n’avoir pas la même quantité d’eau destinée à arroser
cette partie, que pendant que l’entière prairie étoit possédée
par le sieur de Galonné, père et beau-père des intim és’,
il vouloit faire procéder à un règlement d’eau, tant avec
les intimés qu’avec Antoinette Boignes, veuve de Nicolas
Mollet , qui avoit aussi acquis le second lot de cette
prairie.
,
: Les sieur et dame V a n e l , qui vouloient éviter toute
contestation , convinrent de s’en rapporter a des arbitres.
Les sieurs Rames et V id a l furent nommés par un com
promis du 21 thermidor an 9 ^¡mais, par acte du 17
messidor an 11 , Beauclair révoqua le compromis , et
deux jours après il fit citer au bureau de paix les sieur
et dame V a n e l , ainsi qu’Antoinette B o ign es, pour se con
cilier sur la demande en partage des eaux vives et casuelles
servant à l’irrigation de la p ra irie , et en doinmages-intérêts par lui soufferts, résullans de la privation des eau*
dont il n ’a voit pas joui, dit-il, depuis son contrat de vent$.
Les parties comparurent au bureau de paix le a 5 du
même mois.
Les sieur et dame V a n el répondirent que le partage
de famille ne donnoit aucun droit à Beauclair dans la por
tion qui leur étoit attribuée ; qu’ ils avoient toujours joui
exclusivement des eaux qui y naissent, et que Beauclair
éloit forcé d ’en convenir. L e sieur V an el ajouta que le
compromis par lui passé ne pouvoit lier son épouse, qui
s’étoit réservée la moitié de ses biens comme paraphernaux. S’il étoit question du partage des eaux dans ce com
prom is , c’étoit une erreur de fait ? et il ne pouvoit y
être assujéti.
�(
7
)
Antoinette Boignes , veuve M a lle t, qui avoit acquis la
portion de M arie G a lo n n é, répondit qu’elle avoit pris
plus ample connoissance du partage du domaine de R a geaud; elle s’est convaincue que le pré appartenant au
sieur Y a n e l et à son épouse n’étoit pas assujéti à fournir
aux autres parties du pré aucune portion de l’eau dont il
s’agit, ni par conséquent les rases nécessaires pour la con
duire : aussi reconnoît-elle qu’elle n’a pas joui de ces eaux
depuis son acquisition ; elle déclare qu’elle n’entend pas
entrer dans la contestation, voulant s’en tenir à cet égard
à l’exécution littérale du partage.
Cependant cette Antoinette Boignes n’est pas encore
aussi-bien traitée pour l’irrigation de son héritage que
l'exigeant Beauclair ; et la demande de ce dernier ne
tendroit a rien moins qu’a etre autorisé à s’introduire
sans cesse dans la propriété des in tim és, à y pratiquer
des rases ou nquéducs pour conduire dans son pré les
eaux qui naissent dans celui de la dame Y an el. O n sent
qu’une servitude aussi onéreuse diminuerait infiniment la
valeur de cette propriété , et on ne peut en imposer de
semblables sans un titre exprès.
Beauclair auroit donc dû se rendre justice comme a fait
la femme Boignes; mais un nouveau propriétaire, peu
accoutume a l’étrc, ne se rend pas aussi facilement. Il fit
assigner les sieur et dame Vanel au tribunal d’A u rilla c ,
par exploit du 20 fructidor an n , pour v o ir ordonner
le partage des eaux de la prairie, eu égard ù la portion
de chacun.
Les sieur et dame V a n e l, dans leurs défenses, soutin
rent qu'en priucipc 011 ne pouvoit admettre d’autres ser-
�■ \.
(S )
vitudes entre cohéritiers que celles établies par le partage
de famille. L e partage de l’an 6 n’ayant imposé aucunes
servitudes à cet é g a r d , ce partage d’ailleurs devant être
interprété d’après l’exécution qu’il avoit e u e , la demande
de Beauclair étoit sans fondement.
a Beauclair exposa de sa part que le sieur de C alon n e,
ancien propriétaire, avoit établi pour tout le pré de la
R ivière un réservoir' et des rases servant à son arrose
ment : c’é f o it , suivant l u i , la destination du père de
j a m i l l e , et il en résultait une servitude continue et appa:
rente. D è s -lo rs, dans son système, il n’étoit pas besoin
que le partage fit une mention particulière et expresse
de cette servitude, pour la conserver aux parties infé-r
rieures du pré. Il invoqua l’article-693 du Code civil J
qui porte que la destination du père de famille vaut
titre ; e t , dans tous les c a s , il ne pouvoit y avoir de dif
ficulté pour les eaux du réservoir , « q u i , d i t - i l , est
ce placé’ diins un chemin p u b lic, et qui n’étant donné à
a personne par le partage , doit être encore indivis. » .
Les sieur et dame V an el répondirent qu’il 11e falloit
pas considérer la manière dont l’ancien propriétaire jouissoit des eaux dont il s’agit; il ne pouvoit avoir de ser
vitudes sur lui-inêm e, d’après la maxime n en iin l res sua
servit. L e partage dont il s’agit avoit été fait en l’an 6 ,
sous l’empire des anciennes lois ; et la destination du père
de iamille ne valoit Litre que par écrit. Ils invoquèrent
les dispositions des articles 2 1 5 et 216 de la Coutume de
P aris, la disposition de la loi 7 au il’. Com m unia prœ dioruin rustic. > etc. Ils observèreut que le portage avoit
un chapitre particulier de servitudes, et u ’ayoit fait nulle
mention
�4^7
(
9
)'
mention de celle réclamée par Beauclair ; ils en tirèrent
la conséquence qu’ils étoient propriétaires des eaux qui
naissent dans leur pré , comme Beauclair l’étoit de celles
qui naissent dans le sien, et qu’il retient exclusivem ent,
quoiqu’autrefois elles servissent à l’arrosement du surplus.
• Les lois citées n ’établissoient aucune différence entre
les servitudes continues et apparentes , ou les servitudes
discontinues et non apparentes; et si le Code civil établit
un droit nouveau, il ne peut avoir d’effet rétroactif, ni
régler la contestation dont il s’agit.
• L a cause portée à l’audience du tribunal d’A u rillac ,
le 17 frimaire an 13 , est intervenu jugement contradic
toire qui déboute Beauclair de sa d em an d e, et le con
damne à tous les dépens.
• Ce jugement est m o tiv é , i ° . « sur ce que le partage
« de l ’an 6 a été fait sous l ’empire des anciennes lo is , et
cc^que dès-lors il n’y a eu de servitudes établies sur les
« différons lots que celles énoncées dans le partage. »
O n rem arq ue, z°. « que le chapitre des servitudes ,
« inséré dans ce partage, n’assujétit pas les portions du
«
«
«
«
«
pré de la R iv iè r e , jouies par les sieur et dame Y a n e l,
à faire part à la portion possédée par Beauclair des
eaux qui naissent chez e u x , ni de celles du réservoir,
ni à livrer passage dans leur propriété pour aller cliercher ces mêmes e a u x , ni ù laisser pratiquer des rases
« pour les conduire ; que dès-lors cette servitude n’a pas
« été établie, et 11e pourroit l’être sans blesser l ’ é g a l i t é
« du p a rta ge, lors duquel on a eu égard aux s e r v i t u d e s
« et charges imposées à chaque héritage. »
E n f in , il résulte du procès verbal de non conciliaB
�C 10 )
tion , « que-le;partage a été ainsi entendu et exécuté par
« toutes les parties. »
Beauclair a.interjeté appel de ce jugement. Pendant que
les parties étoient en instance à A urillac , Beauclair avoit
vainement sollicité une déclaration du sieur R am es,
e x p e r t , qui pût s’accorder avec ses intérêts. Beauclair ne
devoit pas même l ’espérer, puisqu’il a exprimé dans son
m é m o ire , page 4 , qu’il n’avoit révoqué le compromis
que parce qu’il crut s’apercevoir qiC il exista it de grandes
relations entre les intim és et les experts.
' Il a été plus heureux en la cour ; il a obtenu du sieur
Rames une reconnoissance ainsi conçue :
« Nicolas Beauclair , de la commune de Saint-Cernin,
« m’ invite à lui dire ce qui s’est passé lors du partage
cc des biens immeubles de la maison de Calonne , de
« Rageaud. Je déclare que dans le temps j’ai arpenté et
« estimé ces biens ; que je les ai estimés d’après leur état
« et valeur, au moment de ma visite sur les lieu x; qu’après
« avoir pris toutes les notes locales, je m e suis retire pour
« m ’occuper de la formation des l o t s , et que le grand
« pré du domaine de Rageaud f u t , autant que je m ’en
« souviens, divisé en quatre.
a Que les eaux servant à l’irrigation des prés du do
te
«
«
«
maine de Rageaud , et de celui de L.amourie , ne furent
pas divisées , p a r la raison que la fa m ille Calonne
étant très-pressée , il falloit abréger le procès verbal de
partage des immeubles , et qu’en s’occupant de la divi-
« sion deseaux, l’ouvrage devenoit d’autant.pluslong qu’il
« y avoit un plus.grand nombre de lots, et que cette (li
ft vision fut renvoyée après le, tirage au sort.des.lots.
�4 &)
k
«
«
«
«
«
(■il )
« Je déclare aussi que M . Franiatte et moi àvions été
chargés de procéder à la division des eaux de la prairie
deR ageaud; mais une demoiselle Galonné ayant vendu
sa portion de la prairie à B eauclair, il y eut entre
celui-ci et M . V a n él des conventions notariées pour
procéder au partage des eaux. M . V id a l et moi fumes
nommés , et M . V a n el révoqua les pouvoii’s portes au
« compromis.
« Mais si Beauclair est privé des eaux dont la por« tion de pré par lui acquise étoit arrosée lors de l’esti« ma tion que j’ai faite de ce pré en totalité de ces quatre
cc parties, cette portion de pré n’aura plus la même valeur
« que je lui donnai lors de ma visite sur les lieux ; e t ,
« n’ayant plus la même v a l e u r , l’égalité , qui est l’âme
« des partages, sera rompue ; il n’y aura plus l’équilibre
« que je chercliois alors. Beauclair, qui représente une
« des demoiselles Calonne , doit-il être traité comme le
« seroit la d e m o i s e l l e Calonne? voilà là question. E n foi
« de quoi je lui ai délivré la présente déclaration , le 17
cc messidor an 13. »
V o ilà sans contredit un acte bien extraordinaire. C om
ment un expert jaloux de sa réputation ose-t-il se per
mettre une indiscrétion de ce g e n r e , et en imposer si
grossièrement au public et à la justice?
L a famille Calonne étoit pressée, dit-il! mais comment
cette famille éloit-elle pressée , lorsqu’elle avoit deux
cohéritiers inscrits sur la liste fatale des ém igrés, et q u ’ il
lui importoit surtout de gagner du temps? N ’a v o i e n t - ils
pas plus à espérer en partageant entr’e u i plutôt quaveô
la nation? S’ils avoient demandé le partage à l’adminisB 2
�tration, ce n’étoit que pour éviter le séquestre et la vente
île leurs biens. O n sait q u e , d’après la loi du 28 mars 179 3 ,
les administrations étoient autorisées à procéder à la vente
de l’universalité des b ien s, quoique l’émigré n’amendât
qu’une p o r tio n , à moins que ses cohéritiers ne deman
dassent le partage.
,
L ’intérêt des héritiers étoit donc d’éviter la v e n te , mais
de prolonger le partage.
L a famille Galonné étoit pressée ! mais il y a eu un pre
mier partage de fait ; les héritiers ont réclam é, et un nou
veau partage a été ordonné. Dans ce premier partage il
n’existoit pas de servitudes sur le pré dont il s’agit.
L a famille Galonné étoit pressée! cependant l ’opération
de Rames a commencé dans les premiers jours de bru
maire an 6 , et n’a été terminée que sur la fin de pluviôse 5
c’est-à-dire, a duré quatre mois. 11 ne s’agissoit pas d’flne
succession considérable; la consistance des immeubles ne
s’élève pas h une somme de 90000 fr. Rames a donc eu
plus de temps q u’il n’en falloit pour terminer une opé
ration aussi simple que facile dans ses détails.
L a famille Calonne étoit pressée ! cependant Rames
a consncré un chapitre entier aux servitudes *, il s’est occupé
des eaux ; il a autorisé le quatrième lot à puiser de
l’eau à la fontaine qui jaillit dans la cour de la grande
maison ; il a autorisé le deuxième lot A mener boire
les bestiaux à la fontaine de la cour , située au midi
de la grange des vaches. E t croira-t-on que R a m e s ,
qui a eu le temps de se livrer h ces minuties, n ’ait pas
eu
celui
de s’occuper d’ un objet
plus
important ,
d’ un objet que les experts n’ont jamais o u b lié, le par-
�( 13 )
tage des eaux. C ’est l’appelant qui nous l ’apprend liiîmeme , page 10 de son mémoire *, il défie m êm e les
intimés de rapporter un seul partage où les eaux d’une
prairie de laquelle on a fait plusieurs lots soient res
tées indivises.
L e prétexte de l’omission de l’expert est donc bien
futile et bien ridicule ; et le sieur Rames ne s’est pas
aperçu qu’en déclarant que la famille Calonne était trop
pressée pour lui donner le loisir de s’occuper du par
tage des eaux , il manquoit à son premier d e v o i r , en
laissant son opération imparfaite ; il blesse enfin la déli
catesse de sa profession , en se permettant d’interpréter"
de commenter un rapport qui ne lui appartient p l u s , et
en donnant un avis que la justice ne lui demandoit pas.
. L e sieur R a m es, étranger à cette discussion, s’avise
encore de demander si Beauclair ne doit pas être
traité comme la demoiselle Galonné. Mais celle - ci a
joui de son pré pendant trois ans après le partage, et
n’a pas réclamé les eaux que Beauclair veut s’approprier
aujourd’hui. La fam ille, après le p artage, a encore été
divisée sur une foule d’objets , et leurs intérêts ont été
discutés avec beaucoup d’étendue et de chaleur : pas un
seul mot sur l’omission ou la prétendue négligence
dont Rames vient bénévolement s’accuser. Beauclair luimême n’a pas joui de ces eaux depuis sa vente ; il le
déclare dans sa citation ; il le répète lors du procès verbal
fuit au bureau de paix ; il demande des dommages-intorêts résultans de cette non jouissance : voilà bien des
années ecoulées depuis l’opération de Rames. 11 faut
être bien sûr de sa mémoire , ou avoir bien peu d’af-
�\
■ A
•
( 14 >
foires à ti’aiter dans sa j n ’ofessiqn, pour se rappeler ces
circonstances, e t 1 en rendre un compte* aussi détaille.
C ’est cependant'sept ans ¡et demi après le-rapport du
sieur Rames , lorsque l’état des“ lieux'a changé , lorsque
deux étrangers sont devenus acquéreurs de deux por
tions d’un pré qui ne fait lui-même qu’une partie trèsexiguë de la succession , qu’il veut bien nous apprendre
ce q u’il devoit dire ou faire lors de ce partage.
* U n e semblable déclaration est une enquête à fu tu r,
abrogée par l’ordonnance de 1667 , qui ne peut être
regardée que comme le fruit de la séduction ou de la foiblesse , et bien plus nuisible qu’utile aux iùtérêts de celui
qui l’a sollicitée.
>•
• Il est encore u tile, avant de passer à la discussion
des m o y e n s, de donner une idée du local et de la dis
tribution des eaux qui se trouvent dans la prairie de la
Rivière.
jo. Les intimés mettent en fait que l’eau prove
nant du réservoir n’a-servi dans aucun temps à l’arrosement de la partie de pré possédée par Beauclair. Ces
eaux arrosoient seulement la partie du même pré la plus
voisine du réservo ir, par le moyen de deux rases con
nues sous le nom (Vanciennes rases.
y
2°. Les eaux de la première fontaine étoient distri
buées par deux rases du côté de jour du même pré. Ces
deux rases ne portoient point les eaux dans la partie
occidentale où est située la portion acquise par Beauclair;
elles étoient dirigées oui midi , et destinées à arroser
environ douzé à treize1 journaux. Cependant il existoit
•une troisième rase dirigée du coté du nord', parlaquellb
�G i 5 )'
s'écouloit une légère portion des eaux de cette même,
fontaine ,,dans le haut d u 1 pré d e , l’ap p elan t, et qui ne
pouvoit servir qu’à une très-petite portion de cette môme
partie supérieure du pré.
3°. Les eaux, de la seconde source-, étaient distribuées
par deux ,rases 5) dont l?une seulement étoit dirigée du
coté du pré Beauclair ces deux sources sont peu utiles;,
elles tarissent à la première chaleui\
A u contraire , dans le. haut du pré Beauclair il y naît
deux sources qui ne tarissent jamais , et dont les eaux,,
pendant la vie du sieur Galonné p è r e , étoient dirigées
du côté de la partie de pré qui appartient aujourd’hui
à la dame; V anel, B eauclair, depuis son acquisition, jouit
exclusivement de ces deux sources ; Beauclair en jouit
même au préjudice de la femme Boignes , fdont le p r ç
profitait autrefois de ces mêmes e a u x , et qui en est au
jourd'hui privé, j •
j
Il existe encore dans le b a s . du pré Beauclair deux
au Ires sources que Beauclair retient également sans en
faire part ; enfin , tous les égoûts,dc la prairie entière se
déchargent inatureUcm(e nt ¡dans Lv partie possédée par
Beauclair;
.
.
)
Les intimés, articulent encore que la partie de pré
possédée par Beauclair et la femine Boignes , ne dépendoit pas autrefois du pré de la R ivière. Ces deux por
tions avoient été réunies p a r le sieur Calonne p è r e , peu
d’«innées avant son décès. T o u t le haut du pré Beauclair
étoit en nature de bois , qui n’a été coupé que q u e l q u e
temps après l’acquisition. Depuis , cette partie a servi de
pacher et n’a jamais été fauchée ; le terrain est de mau-
�( i 6 \
yaise qualité; on n’y voyoit croître que des ronces et des
genêts. Beauclair ne l’a défrichée que depuis son acqui
sition. Comment seroit-il possible, d’après ces faits dont
on offre la p reu ve, que cette portion ait été estimée
sur le même pied que le surplus de la prairie, qui est
de première qualité. C ’est cependant ce qu’a voulu faire
entendre le sieur B.ames, et ce qu’a attesté Beauclair dans
son mémoire.
Enfin , d’après le partage, on voit qu’il revenoit à
chaque cohéritier pour 9694 francs 40 centimes d’imm eubles; total, 87246 francs.
Chaque Iota été distribué de manière que ceux qui ont
eu une plus grande portion de la prairie ont eu beaucoup
moins dans les avitres immeubles ; tout comme ceux qui
ont eu moins dans la prairie ont eu davantage dans le
surplus des biens. Il s’est fait une compensation du plus
ou moins dans une juste proportion. O n a pris en
considération la facilité ou les avantages de chaque pro
priété ; et de deux choses l’ une , ou l’expert est un igno
rant , s’il n’a pas mis dans une balance égale les avan
tages ou les inconvéniens de chaque l o t , ou on ne peut
déranger les opérations sans porter atteinte à l’égalité
du p artage, et sans blesser les intérêts de chaque cohé
ritier.
Etoit-il donc si indifférent de savoir ou de connoitrc
les servitudes qui dévoient être établies ? Chaque cohé
ritie r, avant de connoître son so rt, 11’auroit-il pas ex igé
q u’on eût expliqué les servitudes? A u r a i t - o n o u b lié ,
par exem p le, de faire remarquer que si le propriétaire
des cinq journaux obteuoit le droit de s’introduire sans
cesse
�*■»
.
&
qesse*dans la partie que le sort a depuis attribuée.à la
dame V a n e l , qu’il pourroit venir y pratiquer des rases
ou aquéducs , les nettoyer ou les creuser de nouveau ;
qu’enfin le propriétaire ne seroit jamais maître chez lu i,
tandis que celui qui auroit les cinq journaux seroit affran
chi de toute servitude ? N ’auroit-on pas représenté que
le lot de neuf journaux ne valoit pas le lot des cinq ; et
que cependant ce lot des cinq journaux avoit une plus
grande partie des autres immeubles.
Ces réflexions si simples se présentoient naturellement
à l’esprit le moins exercé ; personne n’auroit vo u lu d’un
lot si onéreusement grevé , et l’opération de l’expert
eût été complètement ridicule.
O n peut maintenant apprécier le mérite de la décla
ration du sieur Rames ; elle ne peut avoir été arrachée
que par l’importunité et dans un moment d’oubli : on
ne veut pas fairejsoupçonner d’autres motifs.
Uiie dernière explication également nécessaire, est
d’apprendre que toute la succession du sieur de Calonne
père est située en pays de coutume. Cette vérité a été
reconnue par toutes les parties et par l ’expert lui-m êm e;
il y avoit d’autant plus d’intérêt à le constater , que la
dame Roddes , mère commune , auroit amendé une por
tion virile dans la succession de ses deux enfans.prédécédés,
pour les biens situés en paysdedroit écrit. l i a été reconnu,
lors du partage et du procès verbal des arbitres , que la
mère ne devoit rien obtenir à ce titre , parce que tous
les biens., et notamment le domaine du Rageaud, étoiçnt
situés en pays de coutume,
-..O u fuit cette réflexion , parce que personne u ignoie
�. ( 1 8 )
qu’en matière de servitude les principes ne sont pas
les mêmes dans le pays coutumier que dans le pays de
droit écrit.
O n passe maintenant à la discussion des moyen s de droit
qui s’élèvent en faveur des intimés : on répondra ensuitetrès-brièvement aux objections proposées par l ’appelant.
M O Y E N S .
En pays cou tum ier, nulles servitudes sans titré ; elles
sont en général imprescriptibles , notamment dans les
Coutumes de P a r is , de Bourbonnois et d’une foule d’au
tres. L a Coutume d’A u ve rgiie faisoit exception à cette
règle ; elle se rapprochoit davantage de la disposition
des lois romaines, qui déclarent les servitudes prescrip
tibles. L ’article 2 du titre 17 porte expressément que
les servitudes peuvent s’acquérir et se perdre par le laps
de trente années continuelles et accomplies : mais il ne
s’agit pas ici de prescription ; et Beauclair n’a pas p ré
tendu avoir joui pendant trente ans, puisqu’au contraire
il se plaint d’avoir été toujours troublé dans sa jouis
sance : il soutient seulement q u’il y a ici destination du
père de fa m ille ; que les eaux éloient distribuées de
manière que la portion de pré par lui acquise devoit etre
arrosée par celle qui a été attribuée aux intimés. Suivant
lu i, la servitude est continue et apparente ; e t , s’appuyant
de la disposition nouvelle du Code c i v i l , il prétend que
dans ce cas la destination du père de famille vaut titre
en sa faveur. Cette proposition n’avoit jamais été admise
parmi nous : si nous ne suivions pas la disposition de l’or-
�ticle .186 de la Coutume de Paris , et de l’article 5ig de
la Coutume du Bourbonnois , qui portent que le droit dè
servitude nes’acquiert par longue jouissance, quelle qu’elle
soit, sans titre, au moins nous admettions la disposilion
de l’article 2 1 6 , qui décide que la destination du père
de famille ne vaut titre qu’autant qu’elle est par écrit et
non autrement. En matière de servitude , ces destinations
générales sont nulles ; il faut spécialement les exprim er
pour qu’elles subsistent: Species servitutis exprim endaest:
ne si generaliter servire d ictu m erit. A u t n ih il v a le a t,
qu ia incertum sit quœ servitus excepta s i t , a u t om nis
servitus im poni d e b e a t, L . 7. I n tradendis , au ff. D e
servitut. prœdior. rustic. A in s i, lorsqu’un père de famille
met hors de ses mains une portion de sa p r o p r ié té , il
doit spécialement déclarer quelle servitude il retient sur
l’héritage par lui v e n d u , ou bien quelle servitude il cons
titue sur la propriété qui lui reste ; et s’il ne fait aucune
déclaration il ne peut exister de servitudes. En e f f e t,
toutes propriétés doivent être libres ; il importe a l’ordre
public, à la sûreté de tous, que les héritages soient affranchis
de toutes les entraves qui pourroient gêner la jouissance
ou diminuer la valeur de la propriété.
E t qu’on ne dise-pas que les articles 2 1 5 et 216 de la
Coutume de Paris ne s’appliquent qu’aux servitudes ur
baines; ce seroit une erreur relevée avec force p arT ron çon ,
sur l’article 2 i5. Il enseigne que cet article, coptime la plu
part de ceux du même t i t . , sont tirés du droit romain
en la loi I n tradendis , au ff. Com m una p r œ d io r u tn
rustic. , et en la loi Q u id q u id , au même tit. O11 a
pelé la disposition de la prem ière, et la deuxième s e x C 2
�prime ainsi : Quidqirid vendilor servitutis nom ine sïb i
recipere vult nom inaùm recipi oportct.
Il seroit difficile de savoir dans quelle source Beauclair
a puisé l’assertion , qu’il faut faire une différence entre
les servitudes continues et appai-entes, et les servitudes
discontinues et non apparentes ; non-seulement les auteurs
n’ont pas fait cette distinction , mais le dernier commen1
tateur de la Coutume d’A u v e r g n e , sur l’art. 2 du tit. 1 7 ,
nous enseigne que la Coutume ne fait aucune différence
entre les servitudes continues et les servitudes disconti
nues, entre les urbaines ou les rustiques. Les lois, dit-il,
en portent le même jugement; et les auteurs les plus ins
truits des principes du d ro it, conviennent qu’elles ont les
mêmes règles ; que les unes et les autres se pi’escrivent
par trente ans : il cite à l’appui de son opinion Facliin ,
I l c n r y s , etc.
L e partage de l ’an 6 étant muet sur un objet de cette
im portance, lorsqu’on pourrait lui reprocher de la pro
lixité sur tant d’autres, on ne doit plus considérer l’état
où se trouvoit la prairie lorsqu’elle appartenoit au même
propriétaire. T elle est la doctrine de Ferrières sur l’ar
ticle 2 1 5 de la Coutume de P a r is , t. 2, p. 176 0 , qui dit que
la destination du père de famille ne vaut que lorsque la servi
tude est imposée par écrit, et spécialement exprimée même
entre les enfans. Lorsque l’héritage a appartenu nu même
propriétaire, d it-il, ou lorsqu’il a réuni deux ou plusieurs
portions dans sa m ain, bien que l’ un des héritages, avant
qu’ il fût venu en la possession du vendeur, fut chargé
envers l’autre d’ un droit de servitude, néanmoins se trou
v a n t appartenir au même propriétaire, les servitudes ont
�( 2? )
4 ^ 0)
été éteintes p erco jifu sio n em , et ne peuvent revivre sans
une nouvelle explication. Il cite la loi 36,, au IF. I ) ç servit*
preedior. rustic.
L ’état ancien des lieux ne seroit donc d’aucune consé
quence du moment qu’il y a division entre les cohéritiers,
sans qu’aucune servitude ait été retenue par le partage.
Il faut en revenir a u x grands principes du droit naturel^
que chacun est maître chez soi.<
Maintenant personne n’ignore que celui qui est proprié
taire d’ un héritage est également propriétaire de la source
qui s’y trouve ; qu’il peut en user à son g r é , même contre
l ’usage accoutumé : Contrà statutam consuetudinis'J'or-?
7/iam, comme le dit la loi P rœ sesj au code D e servitutibuset a q u â ; principe consacré parla jurisprudence constante,
et qui n’a éprouvé qu’une seule modification, lorsque ler
voisin avoit la possession exclusive et trenténaire, d’aller
prendre les eaux dans l’héritage où naissoit la source, er\
pratiquant des rases ou aquéducs, ou autres ouvrages de
main d’homme. Ce principe et la modification qu’on vient
d’énoncer se trouvent exprimés dans les art. 641 et 642
tûu Code civil;
O r , comme Beauclair ne va pas jusqu’à prétendre qu’il
ait cette possession , qu’au contraire il se plaint de n’avoir
jamais joui des eaux qui naissent dans le pré de la dame
V an el , il en résulte la conséquence toute simple qu’il
est mal fondé dans sa demande.
O n ne sait trop commeDt Beauclair est allé chercher
la loi P o m p o n iu s, et quel argument il en veut en tirer.
Celle l o i , qui est la loi 8 au il'. Fît m il. e r c is ç ., §• 1 ? *s’ex"
prime ainsi : P o m p o n iu s a it colum bas qnca enntu soient
de colum bario venire in J a tn iln v crciscundcc ju d ic iu tu ,
•'"><
�( 22 )
cu m nostrœ sin t tam diù quam diù consuetudincm
habeant ad nos revertendi ; ce qui ne veut dire autre
' chose, sinon que les pigeons qui partent et reviennent
doivent entrer dans le partage de la succession tant qu’ils
ont l’habitude de revenir au colombier commun. On ne
vo it pas quelle similitude il peut y avoir entre les pigeons
qui vont et reviennent, et les sources qui naissent dans un
pré. Si Beauclair a voulu-dire par là que l’égalité devoit
être la base du partage, et que tous les objets commun doi
vent être divisés, on lui répondra que , dans son système,
il blesseroit lui-même l’égalité , parce que s’il prenoit l’eau,
des sources qui naissent dans le p r é 'd e la dame V a n e l ,
il lui ôteroit un avantage qu’elle est censée avoir acquis,
ou qu’elle n’a obtenu qu’en prenant moins dans le sur
plus , tandis que lui ou l’héritier qu’il représente, qui a
été dédommagé par d’autres objets, n’aurüit offert aucune
compensation,
Les actes, d it-il, s’interprètent par leur exécution : où
veut-il en venir avec cette maxime que les intimés ont
toujours invoquée ? On n’a cessé de dire que depuis le
partage de l’an 6 , la demoiselle Galonné, qu’il représente,
s’étoit bien gardée de s’introduire dans la propriété des
intimés ; qu’elle n’étoit jamais venue prendre les eaux dont
il s’agit, et cependant ce n’est que trois ans après le paiv
tnge qu’elle a vendu. Beauclair lui-meme est obligé de
co n v e n ir, dans sa cé d u le, qu’il n’a jamais joui de ces
eaux : d o n c, s’ il faut interpréter le partage par son exé
cution , tout est à l’avantage des intimés.
L e compromis dont il voudroit se faire un titre a été
révoqu é par lui-m êm e; il l’a été également par V a n e l,
qui ne pouvoit lier la dame son épouse. Ce compromis
�do\
( *3 )
est censé n’avoir jamais existé; d’ailleurs, il u’étoit fondé
que sur une erreur de fait. L e sieur V an el n’avoit jamais
consenti à nommer des experts pour le règlement des
eaux ; il ne vouloit qu’ une simple interprétation ; et ces
mots conform ém ent au p a rtag e, insérés expressément
pour rassurer le sieur V a n el, étoient un piège qu’on avoit
voulu tendre à sa bonne foi. Beauclair heureusement s’est
méfié des arbitres, et a révoqué le compromis. Gomment
pourroit-il aujourd’hui excip erd’un acte qu’il a lui-mêm e
anéanti ?
<
Il est encore plus difficile d’expliquer à quelle fin Beau
clair invoque un arrêt de la cour rendu le 29 messidor
an 1 3 , dans la cause du sieur R o c h e , contre les sieurs
Fontalard. Cet arrêt a décidé que les Fontalard ne pouvoient être admis à la subrogation d’action contre R o ch e,
cédataire d’un de leurs coh éritiers, parce que les F on
talard , par des actes g ém in és, avoient admis Roche au
partage déjà com m encé, lui avoient donné communica
tion de tous les titres de leur famille ; que dès-lors ils ne
pouvoient plus Pécartcr par une subrogation légale. Il
est impossible de deviner quel rapport cet arrêt peut avoir
avec la demande de Beauclair.
Sa digression sur les articles de la Coutume de P a r is ,
qu’on a invoquée dans le cours de cette instance, n’est
pas plus lumineuse. Il prétend que la Coutume de Paris
ne reçoit point d’application en pays de droit écrit ; mais
c’est une erreur, parce que la Coutume de Paris régloit
l’ usage des servitudes dans toute la France lorsqu’elle
n’avoit rien de contraire aux lois; et on a p r o u v e , dans
le cours do ccttc discussion , que ces deux articles étoient
puises dans les lois romaines. Enfin , il est reconnu que
�(2 4 )
le pré contentieux est situé en pays de coutume : dès-lors
l’objection tombe d’elle-m ê
m
e
O n a prouvé aussi qu’il n’y avoit aucune distinction
entre les servitudes urbaines et les servitudes rustiques
Quoique l’article 2 15 parle de hauteur et de m esure et
paroisse plus spécialement s’appliquer aux maisons et
bâtimens , l’article n’en est pas moins tiré du ff. au titre
des servitudes rustiques.
L a disposition nouvelle du Code civil ne peut régler
un partage fait en l’an 6 , et ce n’est pas aujourd’hui qu’on
voud roit essayer de donner un effet rétroactif aux lois. Il
seroit d’ailleurs aisé de prouver que la disposition de l’ar
ticle 693 du C o d e est étrangère à l’espèce particulière,
attendu qu’il ne résulte aucune servitude de l’état dans
lequel les choses avoient été mises par le sieur Calonne
père ; au con traire, lorsque le sieur Calonne possédoit la
prairie dont il s’a g it , le pré d’Antoinette Boignes étoit
arrosé p a r les sources qui naissent dans la portion attribuée
a Beauclair , qui aujourd’hui trouve fort commode de se
les approprier exclusivement.
O n se hâte d’en venir à la péroraison de l’appelant, qui
prétend que plus on est r ic h e , plus le désir s'irrite et croît
avec les m oyens de s'en richir davantage ; il dit que l'a mb ition est un ex acteur c r u e l, etc. etc. Ce l a n g a g e empha
tique est aussi ridicule que déplacé dans la bouche du cor
donnier Beauclair : N e su tor ultra crepidam .
M c. P A G E S ( de R io m ) , ancien a v o ca t
M °. D E V È Z E ,
•
;
avoué licencié.
>
.
À RlOM, de l'imprimerie de L andriot, seul imprimeur de la
Cour d'appel. — Frimaire an 14.
�
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Factums Godemel
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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[Factum. Vanel, Pierre-Paul-François. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
partage des eaux
experts-géomètres
servitude
pays de droit coutumier
experts
pays de droit écrit
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Pierre-Paul-François Vanel, propriétaire, et dame Marguerite Calonne, son épouse, habitans du lieu de Rageaud, commune de Saint-Cernin, intimés ; contre Nicolas Beauclair, cordonnier, habitant du lieu du theil, même commune de Saint-Cernin, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement d'Aurillac, le 17 frimaire an 13.
Table Godemel : Destination du père de famille : 2. - vaut-elle titre à l’égard des servitudes continues et apparentes, en pays de droit écrit, si le fonds divisé appartenait au même propriétaire et si c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ? peut-on, au contraire, décider que la destination du père de famille doit être établie par écrit et non autrement ? surtout, lorsque le partage des immeubles a été muet sur la servitude elle-même ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1798-Circa An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
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fre
Relation
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BCU_Factums_M0701
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Aurillac (15014)
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Domaine public
experts
experts-géomètres
Jouissance des eaux
partage des eaux
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pays de droit écrit
servitude
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c6682f46f860835d720ede7eb082e738
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COUR R O YA LE
MÉMOIRE
POUR
2me CHAMBRE.
Dame M a r i e A U T E R O C HE et le Sieur F r a n ç o i s
M A L A F O S S E D U C O U F F O U R , son m ar i,
A d j u d a n t des G a r d e s d u C o r p s , C o m p e d ’H a v r a y ,
C h e v a l i e r des O r d r e s d e Saint-Louis e t d u Ph én ix,
^ovtiX
J
Appelant d’ un jugement rendu le 28 août 1822 ,
par le Tribunal civil de Clermont ;
CONTRE
D em oiselle M a r g u e r i t e A U T E R O C H E et le
Sieur V O Y R E T son m ari, D octeu r en m édecine,
Intimés
EN PRÉSENCE
D e Dam e M a r i e A U T E R O C I I E et de S T B l a i s e
C I S T E R N E S - D E L O R M E S , son mari , aussi
intimés.
T
rop
souvent les volontés des pères sont méconnues
par les enfans. L inté r ê t source de désordres, divise
les parens les plus proches; et des procès sont suscités
par ceux-la m ême de qui l ’on ne devait attendre
qu' union et bienveillance.
t*6 l
�115.
L a dame Du Couflotir réclame l'exécution d’un don
en préciput qui lui fut assuré par son contrat de
,
mariage : les lois du tems l ’autorisaient 5 les actes de
sa famille ne paraissaient pas s’y opposer. Cependant
on le lui conteste aujourd’hui; et pour l ’en dépouiller,
on a recours à de subtiles interprétations qui tendent
à détruire plutôt q u ’à expliquer les dispositions non
équivoques d ’un contrat de mariage.
On invoque aussi un nouveau système de prétendus
principes , dont les conséquences seraient de rendre
illusoires la faculté cle d i s p o s e r accordée par la loi. ~
' Si sévères pour la dame D u Coufîour leur sœur, la
dame et le sieur V o y r e t , ses uniques adversaires , se
montrent d ’ailleurs fort indulgens pour eux-mêmes.
Ils doivent un rapport en argent : ils ne l'offrent
q u ’en valeur de papier-monnaie ; et quoique des lois
positives les condamnent,
quoiqu’un arrêt ait déjà
préjugé l ’erreur de leur prétention, ils insistent ce
pendant, et veulent que les effets de leur propre négli
gence retombent sur cette cohéritière même à laquelle
ils disputent des libéralités légitimes.
FAITS.
L es
dames D u Couffour, Voyret et Cisternes sont
les seuls enfans nés du mariage de M. Thomas Auteroche et de la dame Louise-ITélène L ’huillier.
L e contrat de mariage de ceux-ci est en date du ic)
novembre 1764. Il fut constitué à la dame L ’huillier
20,000 francs de dot et 1000 fr. de bagues et joyaux.
Depuis, il lui est ccln: d ’autres valeurs.
�H*
4
( 3 )
Le partage de la succession du sieur Auteroclie a
donné lieu au procès.
L a demoiselle Marie Auteroclie, 2medu nom, quoique
la fille puînée, se maria la première : elle épousa le
sieur Cisternes-Delormes. Leu r contrat de mariage ,
en date du 23 juin 17 8 9 , renferme des dispositions
qui sont le germe de l’une des difficultés de la cause.
Les père et mère de la future lui constituent :
i° Une somme de 5ooo f r . , dont la célébration du
mariage vaudrait quittance;
« 2 0 Tous les b i e n s q u e l e s i e u r A u t c r o c h e a d a n s l e
« lieu et collecte de
Sauvagnat,
consistant en batim en s,
« terres, vignes, prés, et de toute autre nature que ce
« puisse être, sans aucune exception ni réserve », à la
charge d ’acquitter les cens et les fondations dont ils
sont grevés }
3° Les rentes foncières ou constituées que le sieur
Àuteroche a dans la même collecte de Sauvagnat, rentes
dont il est fait le détail;
4° Enfin la somme de 10,000 f r . , qui est stipulée
exigible seulement après le décès du dernier mourant
des père et mère.
L e cas de restitution de la dot est prévu, et le
contrat renferme sur cet objet une clause remarquable :
« Dans tous les cas où ladite restitution de dot
« aurait lieu, il sera libre au futur époux, ou à ses
« ayant-cause, de garder les biens ci-dessus délaissés
« îi la future épouse par les sieur et dame Auteroclie,
ses père et mère, en payant, par ledit sieur futur
v
�( 4 )
« ép ou x, ou ses héritiers à qui il appartiendra, la
« somme de 2^,000 fr. »
Dix aus sont accordés au fu tu r épouæ ou à ses
héritiers pour le paiement de ladite somme de vingtcinq m ille fr a n cs et des autres sommes constituées.
Enfin il est dit que, sur la somme de quarante
m ille fr a n cs form ant la dot de la dem oiselle fu tu re
épouse , il y a 8000 francs pour biens maternels , et
le surplus pour biens paternels.
L a dot était en effet de la somme de l[ü,ooo francs,
d ’après le délaissement, fait à l ’ é p o u x p o u r 20,000 f r . ,
du bien et des rentes situés à Sauvagnat.
C e délaissement surprendra peu, lorsqu’on saura
que le sieur Cisternes avait des propriétés considérables
à Sauvagnat ; que ces propriétés et celles du sieur
Auteroche ne formaient autrefois que le même patri
moine, qui avait été divisé par un partage; et que ce
fut dans le but de tout réunir, que la famille C is
ternes demanda q u ’il fût stipulé , comme condition
du mariage, l ’abandon au futur é p o u x , moyennant
25.000 fr., des biens possédés par le sieur Auteroche
h Sauvagnat.
L a plus jeune des demoiselles Auteroche épousa,
en l ’an 2 ( 1794) ? le sieur V oyret.
L e u r contrat de mariage est du 3 ventôse. Les père
et mère de la future lui constituèrent un trousseau
évalué à 1000 francs, et deux rentes f o n c i è r e s estimées
10.000 fr. : l’une de dix-huit s e p l i e r s d e blé conseigle
annuellement, assise sur un moulin ; l ’autre de quatre
sep tiers un carton deux coupes de blé conseigle, une
�( 5 )
coupe de froment , une coupe de n o i x , seize livres
un q u a r t d’huile, seize livres un quart de chanvre,
assise sur divers héritages.
Par le même acte , les sieur et dame Auteroche
donnèrent à Marie , leur fille a în é e , la jouissance
d ’une vigne située dans la commune de Perrières, et
celle de tous les immeubles qu ’ils possédaient dans les
dépendances d ’Issoire.
Devenu possesseur de deux rentes considérables, le
sieur V o y r e t ne tarda pas à se faire rembourser la
principale, celle de dix-huit septiers de blé. Il accepta,
le 2 nivôse an 3 , un r e m b o u r s e m e n t , illégal soit p a r
i n s u f f i s a n c e , soi t à défaut d’emploi , soit comme
n’ayant été accompagné d’aucune des conditions prescriles par la loi du 29 décembre 1790.
Cependant, loin de profiter, comme il l ’aurait p u ,
de la nullité d’un remboursement condamné par la
loi comme par la morale, le sieur V o y r e t , soit im
prudence , soit fausses spéculations, provoqua luimème la x’ectification de l ’erreur du débiteur. IL
demanda a ce débiteur, nommé A rn au d , un supplé
ment de remboursement} il procéda avec lui à un
nouveau compte, et reçut, le 24 nivôse an 3 , 1 7G 0 fr.
de plus , pour la perfection du remboursement }
extinction et amortissement de la rente. Tels sont les
termes de la quittance qui se termine ainsi : E t au
moyen du paiement de ladite som m e, le citoyen
V oyret tient quitte ledit A rn a u d ; e t , à ce Jaire
ci obligé ses biens prdsens et à venir.
Ainsi le
il
sieur V o yret promit au débiteur une
�\
( 6 )
garantie personnelle; et la nullité du remboursement,
que le seul défaut d’emploi suffirait pour faire pro
noncer , cette nullité ne pourrait être invoquée au
jourd’hui; sans que ses effets rejaillissent sur le sieur
Y oyre t lui-même.
La
dame Marie Auteroche , l ’aînée des enfans ,
contracta mariage, le 4 pluviôse an 11 (2/f janvier
i 8o3 ) , avec le sieur Mala fosse D u Couffour. Ses père
et mère confirmèrent en sa faveur l ’avancement d ’hoirie
q u ’ils lui avaient fait par le contrat de mariage de la
dame Yoyret. Ils lui donnèrent de plus la jouissance
de certains bâtimens q u ’ils s’étaient alors réservés.
Les articles 7 et 8 du contrat renferment des dispo
sitions qui doivent être littéralement connues.^
Article 7. « Lés père et mère de la demoiselle future
« lui donnent, en préciput et avantage sur ses sœurs,
« le quart et quatrième portion de tous les biens dont
« ils mourront vêtus et saisis, pour en jouir à titre
« de bien paraphernal et extradotal; et l ’instituent
« par égale portion avec la dame Y o y r e t , sa sœur,
« dans les trois autres quarts, à la charge de rapport
« de ce que chacune aura reçu en avancement
« d ’hoirie. »
,
Article 8.
« Mais attendu que la dame Y o y r e t a
« reçu, par son contrat de mariage, un avancement
« d ’hoirie moins considérable que celui de sa sœur,
« lequel s’est même trouvé réduit à presque rien , par
« le remboursement forcé qui lui a été iait des rentes,
« et q u ’elle souffre par conséquent une perte annuelle
« dans sa jouissance, le citoyen Auteroche voulant
—
�(
((
7 )
ctre juste e n v e r s tous ses enf^ns 5 et- 1 en dedom^
« mager, il veut et enten(l
l ’ouverture de sa
« succession, ladite Yoyret prélève sur le quart ci-dessus
« donné à la future, la somme de 4ooo fr. tournois,
« a v a n t tout partage, et à titre d ’indemnité de ladite
« non jouissance ; la présente clause étant une charge
« dudit préciput. »
S i , dans le c o n t r a t , les sieur et dame Auteroche
n’appelèrent pas la dame Cisternes au partage de leurs
successions, c’est q u ’ils considérèrent q u ’elle avait déjà
reçu tout ce q u ’elle pouvait prétendre\ ils ne pensèrent
donc q u ’à régler les droits de leurs deux autres filles.
O u verra, au reste, que la dame Cisternes a respecté
ce règlement, et que la dame Yoyret seule s’en plaint,
en contestant le don du quart en préciput.
Lors du contrat de mariage de la dame D u Couffour,
le sieur Auteroche ne connaissait pas les circonstances
du. remboursement fait au sieur Y o y r e t , en papier
monnaie; car, loin d’ètre forcé, ce remboursement
avait été absolument volontaire de la part de celui-ci.
Il a été depuis reconnu et déclaré tel par un arrêt
du 28 décembre 1811 , rendu entre les sieur et dame
Y o y re t, et l ’ancien débiteur de la rente. Yoici dans
quelles circonstances :
Les sieur et dame Voyret avaient demandé la nullité
du remboursement, comme 11’ayant pas été accom
pagné d’emploi. Ils l ’auraient fait ainsi juger, si ce
remboursement illégal avait été réellement forcé; mais
le contraire fut démontré, et la Cour déclara les sieur
et dame Y oyre t non recevable's, quaiit à p résen t,
�dans leur d e m a n d e to u s moyens de f a it et de droit
é ta n t. respectivement réservés a u x p arties, lors de
l ’action de Marguerite Auteroche (la dame V o y r e t ) ,
ou de ses héritiers.'
'
Yoici les motifs de l ’arret :
« Attendu q u e , par le dernier acte passé entre les
«
«
«
«
«
parties, en la ville d ’Issoire, le 26 nivôse an 3 , le
sieur Voyret a fa it son affaire personnelle de la
consommation du remboursement, en recherchant
et recevant la somme de 1700 f r . , et un billet pour
quelques septiers de b l é , pour supplément au rem
et boursement déjà fait, le 2 du même mois de nivôse;
« Attendu q u ’en obligeant ses biens présens et à
« venir à l ’exécution de cet acte, il y a par conséquent
« affecté son u s u f r u i t , qui dure encore, en qualité de
« mari de Marguerite Auteroche. »
Ces motifs indiquent clairement q u ’une fin de non
recevoir seule, tirée du fait et de l ’obligation person
nelle du sieur V o y r e t , empêcha la Cour de confirmer
le jugement qui avait annulé le remboursement. Aussi
la Cou r n’admit-elle cette fin de non recevoir que
quant à présent, en réservant l’action en nullité,
pour l ’exercer lorsque l ’usufruit du sieur Voyret aurait
cessé.
Nous aurons à examiner si le sieur Voyret ne doit
pas seul souffrir la perte q u e , par son fait, il a seul
causée.
L e sieur Auteroche père est décédé le 26 février
1821.
Il avait fait, dès le 2 floréal an 9 , un testament
�11}
C9 )
olographe par lequel il avait legue a la dame L ’huillier,
son épouse, l’usufruit de la moitié de scs Liens.
Par ce t e s t a m e n t , il lègue aussi à la demoiselle Marie
Auteroche, sa fille, le qu a rt, en préciput, de tous ses
biens meubles et im m eubles, sans exception.
L e 7 juillet 1821, les sieur et dameVoyret assignent
la dame Cisternes et la dame D u Couffour en partage
de la succession du père commun.
Ils assignent aussi la dame L ’huillier, veuve A u te
roche, en assistance de cause et en règlement de ses
droits.
E n réponse à cette assignation, la dame Cisternes
fait au greffe un acte p a r lequel elle déclare q u ’elle
n ’entendait « prendre aucune part au partage des
« biens de Thomas Auteroche, son père; q u ’elle s’en
« tenait uniquement aux dispositions de son contrat
« de mariage avec le sieur Cisternes-Delormes, du 3
« juin 1789. ».
Par le même acte, le sieur Cisternes-Delormes dé
clare aussi « q u ’il renonçait, ainsi que venait de le
« faire sadite épouse, au partage des biens dudit dé« funt Thomas Auteroche, son beau-père; q u ’il gar«
«
«
«
«
dait et retenait les biens délaissés par les sieur et
dame Auteroche et L ’huillier, père et mère de la
dame Cisternes-Delorme, par le contrat du 23 juin
1789, pour la somme portée au susdit contrat j
ainsi q u ’il en a la faculté par icelui. »
Cette double déclaration, qui est du 9 août 1821 ,
fut notifiée, le 29 du meiiie mois} aux avoués des
parties.
V)
�Alors la dame et le sieur Voyret élèvent plusieurs
difficultés.
Ils prétendent que les biens donnés en avancement
d ’hoirie à la dame Cisternes doivent être rapportés ,
et estimés, non d ’après le prix pour lequel ils avaient
été délaissés au sieur Cisternes, mais d ’après leur valeur
au moment du décès du sieur Auteroche père ;
•
Ils soutiennent que cette valeur estimative doit être
imputée sur las quotité disponible, c’est-à-dire sur le
quart donné en préciput a la dame D u Couiîour, parce
q u e , disent-ils, la daine Cisternes, renonçant à la suc
cession, doit être assimilée à un donataire étranger,
et ne peut retenir ce q u ’elle a reçu, pour une part
héréditaire à laquelle elle n’a pas droit;
Ils ne veulent aussi rapporter la rente en grains ,
remboursée au sieur V oyre t, que suivant la valeur des
assignats dépréciés q u ’il a reçus ;
Ils demandent enfin la réduction du legs d’usufruit
fait à la dame L ’huillier, mère commune.
L a dame D u Couffour répond :
Que par le contrat de mariage de la dame Cisternes,
le sieur Auteroche a transmis à son gendre la propriété
des biens de Sauvagnat, et que c e l u i - c i n’élant tenu
de restituer que 25,ooo fr. , c’étaient seulement ces
25,ooo fr. qui devaient être rapportés à la succession;
q u Jil fallait régir les dispositions, soit de ce contrat
de mariage, soit de celui de la dame D u CouiFour,
par les principes en vigueur au moment de leurs dates,
principes d ’après lesquels la dot de la dame Cisternes
devait s’imputer sur sa part héréditaire; principes qui
�voulaient aussi que le quart en preciput donne a la
dame D u C o u f f o u r fût pris sur la masse entière du
patrimoine paternel ;
Q u ’cniin le sieur Yoyret devait seul subir une perte
que lui seul avait occasionnée, et que la valeur réelle
des deux principaux de rente donnés à son épouse de
vait être rapportés au partage.
L ’on agita aussi une question sur la valeur du
trousseau de la dame Yoyret.
L a dame L ’huillier, veuve Auteroche, réclama ellemême, i° le prélèvement de a 5 ,ooo f r . , montant de
ses reprises sur la succession de son mari ; 20 la déli
vrance du legs d’usufruit de moitié des biens.
Quant au sieur et à la dame Cisternes, ils persis
tèrent dans leurs déclarations, et demandèrent à être
mis hors de cause.
Telles furent les circonstances dans lesquelles fut
rendu un jugement contradictoire, du 26 août 1822,
qui ordonne, avant de faire droit, l’estimation, sui
vant la valeur de 1821 , des biens meubles et im
meubles délaissés soit à la dame Cisternes, soit aux
autres enfans, et qui surseoit jusque la à statuer sur
la mise hors de cause de la dame Cisternes.
Ce jugement ordonne aussi q u e la dame Y o y r e t
rapportera seulement ao34 fr. en numéraire , valeur
réduite des 9^00 reçus en assignats , par le sieur
Y o y r e t , pour le remboursement de la rente de dixhuit septiers de grains.
Lnfin il ne prononce pas sur les demandes de la
�( I2.)
dame L ’huillier, à laquelle il accorde seulement une
provision de iaoo fr. (r).
( i ) Voici le texte des motifs du jugement :
« E n ce qui touche le partage de la succession Auteroclie ,
« Attendu que toutes les parties y donnent les mains ;
« E n ce q ui touclie le quart donné en préciput à la dame Du
C o u f fo u r ,
« Attendu qu’ il est de principe certain que la quotité disponible est
réglée par les. lois existantes à l ’époque où la donation a été faite ;
.qu’au teins du mariage de la dame Du Coufl’o ur, les dispositions per
mises ne pouvaient excéder le quart de tous les biens; que, par consé
q u e n t, pour que le sieur Auteroclie pût alors disposer du quart, il
fallait que jusque-là il n’eût fait aucune disposition ;
(t Attendu que ce n’est pas à la qualification donnée à la disposition,
ni à son m ode, que s’arrête le législaleur, mais bien à son résultat ;
qu ’ainsi, lors môme que les père et mère dé la dame Cislernes n’auraient
entendu faire à leur fille, par son contrat de mariage, qu ’ une légitime
pour lui tenir lieu de tous droits dans leur succession (ainsi que le per
mettaient les lois alors en v ig u e u r ), il n’ en serait pas moins vrai que
s i, par cette disposition, la quotité disponible, ou partie d’ icelle, se
tro u v e , d’ une manière quelconque, employee en faveur de la dame
Cisternes, les sieur et dame Auteroclie n’ ont pu valablement disposer,
au profit de la dame Du Couffuur, que jusqu’à concurrence de la
quotité disponible, encore intacte ;
« Attendu qu’ il résulte de tous ces principes établis, que la question
de savoir s’ il y a lieu ou non à la réduction de la donation, faite à la
dame Du Couifour dépend entièrement de cette autre question desavoir
si les objets donnés par le contrat de mariage de la dame Cisternes, du
23 juin 178c) , équivalent ou non a la portion d ’enfant, et à la totalité
ou à une partie de la quotité disponible ; qu ’on ne peut arriver à cotte
solution sans avoir une parfaite connaissance de la totalité de la fortune
des père et mère ;
« Al tend 11 que celte connaissance ne peut s'obtenir que par une esti
mation , tant dos biens délaissés à la dame Cisternes etaux autres enfaiii,
que de ceux dont le sieur Auteroclie est mort saisi cl vôtu ;
�!% *
( ,3 )
'
Cette décision , qui tendait à annuler le don en
préciput fait à la dame D u Co uffo ur, nuisait trop îi
ses intérêts, et blessait trop les règles du Droit et les
« Attendu quJil ne peut y avoir de doute sur les bases à adopter pour
cette estimation ; et qu’aux ternies de l ’article 860 du Code c i v i l , c’est
valeur de 18 2 1 , époque du décès du sieur Auteroclie, qu ’elle doit être
faite ;
« Attendu qu’ encore que la succession du sieur Auteroclie se soit
ouverte sous l’ empire du Code, la dame Cistcrnes n ’en doit pas moins
conserver les droits que lui assurait l ’ancienne législation, sous l’empire
de laquelle a été passé son contrat de mariage ; que ces lois lui accor
daient la faculté de retenir, on renonçant, sa pari d ’enfant et la quotité
disponible sur les biens dont clic sc trouve saisie ; qu ainsi on ne peut
dire que ce soit donner au Code un effet rétroactif ;
« Attendu qu’elle a usé de cette faculté en renonçant ; que nulle
contestation 11e s est elevee 3 son égard 5 qu ainsi le bien de Sauvagnat,
qui compose en partie sa donation, ne peut être rapporté que ficti
vement.
« E n ce qui touche la question de savoir si le rapport fictif de cc
bien doit être fait en n a tu re , pour être estimé valeur de 1821 , ou bien
s’il ne doit être rapporté que le prix pour lequel le sieur Cistcrnes
aurait eu le droit de le re te n ir, si la dame Cisternes était venue à
décéder sans enfans ;
« Attendu qu’ on lit dans le contrat de mariage des époux Cislernes
la clause suivante : « Dans tons les cas où la restitution de dot aurait
« lie u , il sera libre au futur époux, ou à ses héritiers et ayant-cause,
« de garder et retenir les biens ci-dessus délaissés à la future épouse
K par ses père et mère, en p aya n t, par ledit futur ou ses héritiers, la
« somme de vingt-cinq mille francs » ;
« Allendu qu’ il résulte de l’ensemble de cette clause, et sur-tout
de ces mots : Dans tous les cas où la restitution de dot aurait lieu
q u ’en abandonnant au sieur Cisternes le domaine de Sauvagnat pour le
prix porté audit contrat, les père et mère de la dame Cisternes n’avaient
nullement eu l ’ intention de fixer la valeur pour tout autre cas que celui
prévu par ladite clause, mais qu ’ils ont seulement eu eu yuq de pré-
*4»
�■Mix
intentions da
Du
( >4 )
père de famille,
pour quo la dame
( 'ouffour we la dénonçât pas à des magistrats
supérieurs.
sauter au sieur Cisternes l’avantage de devenir propriétaire incommutable d’ un bien q u i, réuni à celui que lui donnait son père dans la
même com m une, devait former une propriété considérable, comme
aussi de l’encourager à l’améliorer, dans la certitude qu’à tout événement
il l’améliorerait pour lui ;
« Attendu que cette première clause se trouve encore interprétée par
celte autre du même contrat : « Les sieur et dame Auteroclie, et le sieur
« Cisternes-Delorme père, se réservant pour eux et les leurs, chacun en
« droit s o i , les biens par eux ci-dessus donnés et constitués aux futurs
tr é p o u x , en cas qu ’ils décèdent sans enfans, ou leurs enfans sans des« ceudans, ou sans en avoir disposé » ; et que cette dernière clause ne
laisse plus de doute sur le véritable sens à donner à la première ;
« A tte n d u , au surplus, que ces motifs sont totalement étrangers aux
autres enfans, et que bien certainement les père et mère n'ont pas
entendu leur préjudicier par cette clause du contrat de leur aînée.
« E n ce qui touche Les rapports à faire par la dame V o y re t,
« i° A l ’égard du trousseau :
« Attendu q u e , par contrat de mariage du 3 ventôse an i , passé
pendant le cours du papier-monnaie, il a été estime à la somme de
mille livres, et que celte somme est réductible en numéraire, d’après
l ’article i 5e du titre 3e de la loi du 16 nivôse an G, n° i 64 ;
« s" A l’égard de la rente en b l é , estimée, par le même c o n tra t, à
dix mille francs ,
« Attendu que le sieur Voyret a été forcé d ’en recevoir le rembour
sement en l’an 3 , ainsi que le sieur Auteroche l’a reconnu dans le
contrat de mariage de la dame Du CouiTour, et que le remboursement
fait moyennant la somme de (jjoo livres, assignats, le 12 nivôse an 3 ,
ne représente, à l'éch elle, que ao 34 livres en numéraire, et que la
dame Voyret ne doit que le rapport de cette somme, d'après 1 article i 5
précité de la loi du 1G nivôse an G , comme étant la valeur réelle qu’elle
a reçue ,
« L e t r ib u n a l, etc. »
�•H
( »5 )
Elle en a interjeté appel, par exploit des i!\ octobre
et 7 novembre 1822.
La dame veuve Auteroche s’est aussi plainte, par
un appel , de ce que ses reprises ne lui avaient pas été
accordées.
Ces deux appels font renaître devant la Cour toutes
les questions qui avaient été agitées en présence des
premiers juges.
Sur celui de la dame D u Couffour, l ’on aura à
examiner, i° quelles doivent être les valeurs des rap
ports fictifs a faire par les dames Cisternes et V o y r e t 5
20 Quel doit être l ’effet du don du quart en préc i p u t , promis à la dame D u Couflour.
§ i" .
V aleurs à rapporter p ar les clames Cisternes
et V o y ret.
Cette question se subdivise.
La dame Cisternes doit le rapport de /jo,ooo francs
seulement.
La dame Voyret doit la valeur réelle des rentes qui
lui ont été constituées.
Le rapport de la dame Cisternes ne doit être que
fictif, puisqu’elle ne vient pas au partage; niais il faut
que la valeur à rapporter soit connue, pour déter
miner la masse héréditaire, et pour prononcer sur le
don en préciput fait à la dame Auteroche.
�Selon la dame V o y r e t , on doit estimer, d ’après leur
valeur actuelle, les biens délaissés, en 1789, à la dame
Cisternes ou à
n mari; et cette valeur doit être
imputée sur la quotité disponible, parce cj[ue la dame
Cisternes renonce à la succession.
Selon la dame D u Couffour^ la valeur de ces biens
a été invariablement fixée par le contrat de 178g.
Vendus au m a r i , leur prix seul doit entrer dans le
patrimoine du père ; et la dot reçue par la dame
doit s’imputer sur la portion héréditaire
de celle-ci.
Cisternes
Cette question d ’im putat ion, que nous traiterons
dans la suite, forme, comme on le verra, tout l ’intérêt
1
de la question d ’estimation.
Les principes e n v i g u e u r lors du contrat de mariage
de la dame Cisternes, les clauses même de ce contrat,
11e permettent pas d ’hésiter à dire que les biens qui y
sont énoncés furent vendus au m ari, et sortirent, dès
cet instant, du patrimoine paternel.
Remarquons que c’est par les lois romaines que ce
contrat doit être régi, soit que l ’on considère le domi
cile des parties, soit que l ’on se fixe sur le lieu où il a
été passé.
Les sieur et dame Auteroche et la future épouse
étaient domiciliés à Issoire, pays de Droit écrit.
L e futur époux et ses père et mère habitaient
C l e r m o n t , dont le Droit écrit était a u s s i la loi.
E n f in , l’acte a été passé à Sauvagnat, près Issoire,
lieu aussi régi par les lois romaines.
�m
( 17 )
O r , une des règles élémentaires du Droit romain,
était la maxime clos estimcita , clos ? cnclita.
Cette maxime était écrite dans uae ioule de lois;
elle était enseignée par tous les auteurs des provinces
qui avaient adopté la législation romaine.
La loi 5 et la loi 10 au Code D e ju r e dotium ,
posent le principe comme règle générale.
Quolies res œstimatœ in clotem d a n tu r , dit la
première de ces lo is , maritus clominium consecutus 3
summee velut p re tii, debitor ejjicitur.
L a rè gle ne s o u f f r a i t q u ’ u n e s e u le e x c e p t i o n , s a v o i r ,
l o r s q u ’ il a v a i t é t é ré se rv é à l a
f e m m e la
liberté
de
re pre ndr e' l e ' f o n d s e s t i m é .
Fundus œstimatus non est dotalis sed marito proprius, em ptiom sjure} msi reliiicjiicitur cirbitrio m illions
fu n d um repetere (Observation de Cujas , dans son
Traité A d A fricanum , sur la loi 9 , S i m a r i t o iF.
D e fu n d o dotali.').
Au. contraire, s’il avait été convenu que la chose ou
l'estimation serait rendue, le mari avait le choix. C ’est
la décision des lois 10, § ult. , et 69, § 7 , D e ju r e
dotium.
Dans le doute même sur le bu t de l ’estimation, on
présumait q u ’elle avait été faite dans le dessein de
vendre au mari. Telle est la remarque de Serres, dans
ses institutes, où il cite la glose sur la loi 21 , Cod.
D e ju re dotium.
11 importait peu que le mari eut ou non vendu
l’objet estimé par le contrat. Dans
tous les cas ,
l ’estimation le rendant propriétaire, il ne devait res3
�( >8 )
tituer que la somme. Item si non v œ n ie r ite stim a lio
prœstari débet, h . item 3 , ff. D e pactis dotalibus.
Cette doctrine est enseignée par tous les auteurs qui
ont examiné la question pour les pays de Droit écrit.
On peut consulter notamment , parmi les auteurs
du parlement d e T o u lo u ze , Catelan, livre 4 ? ch. 3 2 ;
Serres, dans ses Institutions, livre 2 , titre 8 , ad
p r in c ip e et parmi ceux du parlement de Paris,
Rousseau-Lacombe, au mot D o t , partie 3 , sect. 2;
Roussilles, Traité de la D o t , ch. 9 , § 1 , et sur-tout
D ô m a t , dans ses excellentes Lois civiles, livre i er,
titre 9 , sect. i re, nos 5 et suivans.
Ce savant auteur cite et explique les lois romaines
sur la question.
Il s’exprime ainsi au n° 5 :
« La dot en deniers, ou autre choses, soit m eubles,
« soit im m eubles, qui ont été estimées par le contrat
« à un certain prix, est propre au mari, et il devient
« débiteur des deniers donnés en dot ou du prix des
« choses estimées; car cette estimation lui en lait une
« vente, et la dot consiste au prix convenu. »
Il ajoute au n° 7 :
« Dans le cas où les choses dotales sont estimées ,
« les règles sont les mêmes que celles qui ont été
« expliquées dans le contrat de vente; car cette esti« mation est une vraie vente ». Quia estimatio venditio est. L . 1 0 , in fin . 3 ÎF de ju r e dolium , et L . 1
et 10, C . eod.
L ’application de cette doctrine à la cause est aussi
facile que naturelle.
�( *9 )
On lit dans le contrat de mariage de la dame Cis
ternes q u ’il lui est constitué en argent 5ooo fr. , dont
l ’acte porte quittance, et 10,000 fr. payables après le
décès du dernier mourant des père et mère*, et en
immeubles, rentes ou meubles qui se trouvaient a
Sauvagnat, des objets évalués 25,000 fr.
Cette estimation , qui est répétée dans plusieurs
parties du contrat, suffirait pour attribuer au mari
la propriété des objets délaissés.
Mais on a fait plus; on a stipulé comme condition
du mariage, comme loi de famille, que, d a n s t o u s les
c a s o h l a r e s t i t u t io n d e l a d o t a u r a i t l i e u , non.
seulement le futur époux, mais même ses héritiers
ou ayant-cause seraient libres de garder et retenir les
biens en payant, à qui il appartiendrait, la somme
de vingt-cinq m ille fran cs.
Quoi de plus formel que cette stipulation? Quoi
de plus caractéristique d’une vente faite au mari et
à ses héritiers ou ayant-cause ?
Quoi de plus exclusif de l ’idée que la propriété des
objets délaissés résidât sur la tète de la dame Cisternes,
et que ces objets dussent être rapportés en nature au.
patrimoine du père?
N ’est-il pas évident q u e , dès ce moment même, le
Perc a entendu se dépouiller de cette propriété; q u ’il
l a transmise à. la famille Cisternes; que, par consé
quent, elle a cessé, comme tous les autres biens q u ’il
aurait aliénés, de faire partie de son patrimoine , e t'
qu aujourd nui elle ne doit pas y rentrer pour en
former la masse ?
�^ V JÛ
f 20 )
D ’autres clauses du contrat démontrent de plus en
plus cette vérité.
On accorde dix ans de terme au fu tu r ép ou x ou à
ses héritiers pour la restitution des 2Î),ooo fr. et des
autres sommes constituées.
O11 déclare ensuite que la somme de quarante
m ille fra n cs fo rm e la dot de la future.
Ainsi , suivant la pensée, suivant la volonté des
contractans, cette dot était seulement pécuniaire; elle
était seulement de 4.0,000 francs en a rge n t, puisque
telle est la valeur seule qu ’on lui fixe, puisque telle
est la valeur seule que le mari ou ses héritiers sont
soumis à restituer.
Opposera-t-on que le m a r i , étant libre de restituer
:i5,ooo f r . , était aussi libre de rendre les objets même;
q u ’ainsi la c o n s o m m a t i o n de la vente dépendait de la
volonté de celui-ci ou de ses héritiers?
' Cette circonstance est indifférente. La faculté ac
cordée au mari n ’établit pour lui q u ’un mode de
libération : elle n’empêche pas que la propriété des
objets délaissés ne lui ait été transmise dès le jour
même du contrat. Il devait un jour restituer la dot,
et cette o b l i g a t i o n le constituait débiteur envers son
épouse de la valeur fixée; mais cette dette, il pouvait
s’en libérer ou en argent ou en fonds, h son choix.
O r , par cela même que le mode de libération dépen
dait de lui, la propriété des choses q u ’il avait reçues
résidait nécessairement sur sa tête; il était libre d ’en
disposer à son gré, de les vendre, de les échanger, de
les donner même; il pouvait les aliéner dès le leu-
�/of
( 21 )
/
demain du c o n t r a t i l a p u , il pourra en disposer
pendant tout le cours de son mariage*, et même après
sa dissolution, ses héritiers, ses ayant-cause auront
aussi la même faculté, sauf à rendre les 2^,000 fr. ,
prix convenu.
Au contraire, le sieur Auteroclie père, la dame Cisternes n’ont plus eu, dès le jour du contrat de mariage,
le droit d’exercer aucun acte de propriété sur ces objets.
O r , n ’e st-i l pa s é v i d e n t q u e c e l u i - l à s e u l est p r o
p r i é t a i r e q u i p e u t d i s p o s e r d e la c h o se à son g r é ; et
n e r é s u l t e - t - i l pa s d e ces idé es q u e le s i e u r C i s t e r n e s
a é t é , dès 1 7 8 9 , le s e u l , le v r a i p r o p r i é t a i r e des o b j e t s
qui
furent
alo rs délaissés
par le
( V o y e z C o d e c i v i l , article
544*)'
sieur
Auteroclie ?
On peut reconnaître sous un autre rapport, que la
propriété de ces objets résidait sur la tête, du sieur
Cisternes.
Il s’était obligé ou à les rendre en natuie , ou à
rendre leur valeur, fixée à a 5 ,ooo fr. ; c’est-à-dire que
son obligation était alternative, et même q u e , d ’après
une convention expresse, le choix lui appartenait. Or,
si les choses q u ’il avait reçues avaient péri ; si les
rentes avaient été remboursées en valeur nulle; que
les meubles eussent été détruits par l ’usage ou autre
ment-, qUe i es immeu]3lcs eussent été dégradés par
quelque accident, par une force majeure même , le
sieur Cisternes eùi-il pu se dispenser de payer les
a 5,ooo fr.? N on , sans doute : la chose aurait péri
pour lui. Par la perte de cette chose, même sans sa
faute, son obligation alternative serait devenue pure
/ »
�et simple, et il aurait dû les 2 5,ooo francs (Voir Code
civil, article 1193; et Pothier, Traité des obligations,
n° 2 5o.).
t
Mais pourquoi, malgré la perte de la chose, le prix
en est-il dû? Pourquoi? par application de la maxime,t \
lies périt dom ino; et parce que tout débiteur sous
une obligation alternative à son choix, est considéré
comme seul propriétaire do la chose, tant q u ’il n’a pas
fait d ’option.
Remarquons, au reste, que l ’option du sieur Cisternes a même été consommée par la déclaration q u ’a
faite celui-ci, en présence de son épouse, au greffe du
tribunal civil de Clerm ont, le 29 août 1821.
L e sieur Cisternes avait à s’expliquer, puisque son
épouse pouvait ê t r e d a n s le cas de r a p p o r t e r sa dot à
la succession du sieur Auteroche, et lui-même, par
suite, obligé de restituer ce q u ’il avait reçu en objets
mobiliers ou immobiliers.
O r , qu'a-t-il déclaré? « Q u ’il gardait et retenait les
«
«
«
«
biens délaissés par les sieur et dame Auteroche et
L ’ huillier, père et mère de la dame Cisternes, par
le c o n t r a t dudit jour 27 juin 17 8 9 , pour la somme
portée audit contrat j ainsi q u i l en a la fa c u lté
« p ar icelu i. »
L e choix du sieur Cisternes est donc consommé. Il
retient les objets délaissés pour les 25,000 francs, prix
du délaissement; en sorte q u ’en supposant q u ’on put
considérer la vente comme c o n d i t i o n n e l l e dans l'ori
gine, la condition accomplie, ayant eu un'effet ré
troactif au jour du contrat de mariage, a rendu la vente
�( ^
)
pure et. siinpl^ des 1 înstunt même du conttat ^Voit
le Code civil, art. 1179.)A in s i , dès 1789 , il y a eu aliénation de la part du
sieur Auteroclie de ses biens de Sauvagnat. Il y a eu
aliénation, non à titre gratuit et en faveur de sa fille,
mais à titre onéreux, et dans l ’intérêt seulement du
sieur Cisternes et des héritiers de celui-ci, quels qu ’ils
fussent , directs ou collatéraux , conventionnels ou
naturels. Désuet instant les *¿5 ,000 fr., prix de l ’aliéna
tion , ont seuls fait partie de la dot de la dame
Cisternes, ont seuls été sujets à restitution d a n s t o u s
l e s c a s où elle aurait lieu, ont se uls aussi ete sujets
u rapport-, c a r le r a p p o r t est un cas de restitution.
Ainsi, la valeur actuelle de ces biens ne doit pas
entrer, même fictivement dans la masse du patrimoine
du sieur Auteroche; car si la loi veut que l ’on réunisse
U la masse les objets donnés (voir Code civil, art. 922),
elle n’autorise pas a y réunir les objets vendus, et
, sur-tout vendus h des non successibles. Sortis du patri
moine de l ’auteur , ces objets ne peuvent y être
compris ; leur prix seul, s’il est encore d ù , doit en
faire partie.
Les observations que nous venons de faire répondent
suffisamment aux motifs du jugement sur la question.
Les premiers juges reconnaissent , par exemple,
que le but de la clause du contrat a été de présenter
au sieur Cisternes l’avantage de devenir propriétaire
de ces biens de Sauvagnat.
Mais de cet aveu même ne découlerait-il pas la
conséquence évidente que le sieur Auterochc avait
�aliéné la propriété, et que cette propriété ne devait
plus à jamais faire partie de son patrimoine*, q u ’ainsi
elle ne devait y rentrer ni par la voie du rapport, ni
par aucune autre voie?
Les premiers juges disent que la clause doit être
restreinte au cas de restitution q u ’elle a prévu.
Mais un rapport n’est-il pas une sorte de restitution?
et, d ’ailleurs, si les objets délaissés ne sont restituables
ni en nature, ni en valeur actuelle; s’ils ont été aliénés,
depuis 17 8 9 , a titre onéreux à la valeur vénale de
cette époque; si, enfin, ils sont sortis dès-lors du pa
trimoine de la famille Autcroche, pour entrer dans
celui de la famille Cisternes, comment devraient-ils
être rapportés aujourd’hui à la succession Auteroche?
Les premiers juges argumentent aussi du droit de
réversion stipulé dans le contrat de mariage.
Mais outre que le cas de réversion n’est pas arrivé, .
c’est q u ’évidemment ce droit ne s’appliquait q u ’aux
25,000 f r . , prix de l ’estimation et du délaissement; car
le sieur Cisternes et les héritiers étant autorisés, dans
tous les cas où la restitution aurait lie u , à retenir
les biens, et à ne restituer que 25,000 f r . , il est clair
que cette faculté s’appliquait aussi à la réversion qui
n ’était elle-même q u ’un cas de restitution.
Enfin l’on a dit que le sieur Auteroche n’avait pas
entendu préjudiciel’ h ses autres enfans.
Etrange raisonnement! Comme si un père n’a pas
le droit, pendant sa vie, d ’aliéner son bien; comme si
le sieur Auteroche n’aurait pas eu la laculté de vendre
avant le mariage son bien de Sauvagnal, moyennant
�IT
•
( ,5 )
a 5 ,ooo f r . , soit au sieur Cisternes, soit à toute .autre
personne, et cleconstituer à sa fille cette somme; comme
s i , ce q u ’il aurait pu faire par deux actes différons , il
n’a pas eu le droit de le faire par le même acte qui.
renfermait tout à-la-fois, et la vente au sieur Cisternes,
et les conventions matrimoniales entre celui-ci et la
demoiselle Auteroche; comme s’il rx’avait pas enfin
exprimé la volonté formelle que la dot de la dame
Cisterne fût seulement, pécuniaire, et s’élevât à la
somme de 4o,ooo francs; comme s’il n’avait pas aussi
manifesté, non seulement par le contrat de mariage
de la dame D u Cou flou r , mais e n c o r e par son testa
ment , une v o l o n t é f e r m e et constante d ’attribuer à sa
fille ainée l ’avantage du quart de son patrimoine
entier, en laissant à la dame Cisternes, pour sa part
héréditaire, la dot q u ’elle avait re ç ue , et en ne vou
lant pas qu elle participai au partage du surplus de
ses biens.
Q u ’on cesse d’en appeler aux intentions du père de
famille, ou , si l’on veut invoquer ces intentions respec
tables, q u ’on s’y soumette, q u ’on les exécute; et la
discorde alors cessera de troubler la famille Auteroche.
On doit donc reconnaître que les premiers juges
ont méconnu la volonté du sieur Auteroche, violé la
loi du contrat de 1 7 8 9 , et blessé les principes des
rapports, en ordonnant l’estimation, valeur actuelle
des biens délaissés au sieur Cisternes.
Ces biens
aliénés alors au prix vénal du tems; ces biens dont k
propriété, transmise au sieur Cisternes, n’appartenait
plus à la famille Auteroche; ces biens q u ’à la dissolution
4
�( 26 )
du mariage, la dame Cisternes ni aucun de ses héritiers
n ’auraient eu le droit de réclamer; ces biens, étrangers k
la succession du sieur Auteroche, ne doivent pas y être
rapportés, même fictivement; les 25,ooo francs qui en
sont le prix doivent seuls entrer dans la masse, afin
de servir à déterminer la qu o tité d is p o n ib le , suivant
le vœu de l’article 922 du Code civil.
L ’erreur que nous venons de signaler n ’est pas la
seule qui ait été provoquée par les sieur et dame
V o y r e t , et qu ’ait commise dans leur intérêt le tribunal
dont est'appel.
Les sieur et dame Voyret devaient le rapport en
nature, 011 en valeur réelle, des deux rentes en grains
qui avaient été constituées à celle-ci par son contrat
de mariage.
L e sieur V o y r e t , à qui avait été fait le rembourse
ment de la principale de ces rentes, a obtenu de rap
porter seulement la valeur réduite des assignats q u ’il
avait reçus.
»
Cette décision eût été juste si le remboursement
eut été forcé, et s’il eût été accompagné des conditions
prescrites par la loi.
Mais le remboursement a été illégal; mais il a été
volontaire de la part du sieur Voyret.
L e remboursement a été illégal.
L a loi du 29 décembre
1790, en autorisant les
rachats des renies foncières, soumettait les débiteurs
à diverses conditions. L ’article l\ du titre 2 porte
notamment que « les tuteurs, les grevés de substilu-
�•/$7
( a7 )
«
«
«
«
tion, et les maris, clans les pays où les dots sont
inaliénables, mèmeavecle consentement des femmes,
ne pourront liquider les rachats des rentes ou redevances foncières appartenant aux papilles , aux
« mineurs, aux interdits, à des substitutions, et a u x
« fem m es mariées, q u ’en la forme et au taux ci-après
« prescrits, et à la charge du remploi. »
L ’article ajoute que « le redevable qui ne vomira
« point demeurer garant du remploi pourra consigner
« le prix du rachat. »
L e mode et le taux du rachat sont prescrits par le
titre 3 de l a l o i .
On n ’ e x a m i n e r a pas si la f o r m e et le taux du rachat
ont clé observés; cela dépend des calculs qui ont été
faits entre le débiteur et le sieur V o y r e t , calculs qui
ne nous sont pas connus, et dont on vérifiera la jus
tesse lorsque celui-ci les aura indiqués. On se bornera,
sur ce point, a dire que, d’après l ’article ?. du tit. 3
de la loi, le rachat des rentes en grains devait être fait
sur le pied du denier vingt-cinq de leur produit
annuel; et qu e , d’après l ’article 7 , le produit annuel
se déterminait en for man t, du prix des grains, une
année commune, a l ’aide des quatorze années anté
r i e u r e s à celle du rachat, années desquelles on re
tranchait les deux plus fortes et les deux plus faibles.
L e sieur Voyret aura à démontrer q u ’il a rempli
ces dispositions de la loi.
Mais une condition q u ’il a complettement négligée,
et que les débiteurs de la rente ont oubliée comme
l u i , c’est la charge du remploi.
¿ fi,
�Cependant, aux termes de l ’article 4 du titre 2 du
décret, il ne pouvait liquider le rachat q u ’à la charge
du remploi.
Le défaut de remploi rend donc la liquidation
nulle et le remboursement illégal. On connaît , en
effet, la force, en D r o i t , de cette expression prohi
bitive, n e p e u t ; S jlla b a > o n , prœposita verbo p o t e s t ,
tollit potentiam ja r is et f a c t i 3 el reddit actum nullum
et impossibile. Fait contre la prohibition de la loi ,
accepté sans le consentement même de la dame Voyret
seule propriétaire de la rente, le r e m b o u r s e m e n t ne
peut être opposé par le sieur V oyre t; il ne pourrait
même l ’être par les redevables, puisque la loi les ren
dait garans du défaut de rem ploi, et que par consé
quent ce remploi était nécessaire pour les libérer. C ’est
ce qui a été jugé par plusieurs arrêts de la Cou r, dans
des cas semblables.
U n arrêt du 19 prairial an 12 a déclaré nul le
remboursement d ’une rente dotale, faite au mari en
nivôse an 3 , accepté par celui-ci sans remploi. Il a
jugé que la nullité, fondée sur le défaut de remploi,
avait pu être demandée, même p e n d a n t le mariage ,
et il a condamné les redevables à servir la rente.
U ne semblable nullité de remboursement a été pro
noncée, le 18 juillet 1810, par le même motif, rela
tivement à une rente créée sur une maison de ville
(V oir les deux arrêts dans le Journal des A udiences
de la Cour de Riom 3 à leurs dates.).
Ces préjugés, et les termes de la loi du 29 décembre
1790, sont trop positifs, pour douter que le rembour-
�/'S')
( 29 )
sement fait au sieur Voyret n ’eut été aussi déclaré
nul, si ce remboursement avait été forcé, et si le sieur
Voyret n ’en avait personnellement garanti la valeur.
Aussi la demande en nullité, formée par les sieur et
dame Voyret, n’a-t-elle été rejetée que quant à pré
sen t, par l ’arrêt du 22 décembre 181 r , dont nous
avons rapporté ci-dessus la teneur. C ’est par une
lin de non recevoir que cette demande a été mo
mentanément écartée , et par une fin de non rece
voir résultant des faits personnels du sieur V oyre t,
de ce q u ’il a recherché, comme le dit l ’a r r ê t , et reçu
volontairement le remboursement, et de ce q u e , à
l ’exécution de la quittance q u ’il a donnée aux rede
vables , il a obligé ses biens présens et ¿1 venir.
C ’est donc par la faute du sieur V o y r e t , par les
suites de son imprudence ou de ses spéculations ,
par l ’effet de l ’obligation personnelle q u ’il avait con
tractée envers les débiteurs, que le remboursement a
été maintenu, et que la rente a péri, ou a été réduite
a une très-faible valeur.
Mais n ’est-il pas juste que le sieur V oyret soit seul
puni de ses propres fautes ? N ’est-il pas juste q u ’ il
subisse seul les conséquences de ses faits personnels?
N e-t-il pas juste que la succession du sieur Auteroche,
que la dame Voyret et les cohéritiers de celle-ci ne
souffrent pas des suites d ’un tort qui leur est étranger?
Ne sait-on pas aussi que tout fait quelconque de
l’ homme, qui cause a autrui un dommage , oblige
celui par la faute duquel il est arriv é , à le réparer
(Code civil, art. i382.)?
�( 3o )
L e sieur Voyret pouvait refuser le remboursement,
■et il l’a accepté volontairement; il l ’a même recherché,
suivant l ’expression de l ’arrêt de 18 i i . Il devait faire
un emploi, et il l ’a négligé. Il pouvait ne pas garantir
ce remboursement; s’il se fut abstenu de le garantir,
la succession forcerait aujourd’hui
les débiteurs à
servir la rente; et il a promis sa garantie personnelle,
et il a fait du remboursement sa propre affaire.
Si donc le remboursement est nul; si le sieur Voyret
a voulu s’exposer aux suites de cette n u l li t é , c’est sa
propre affaire et non celle de la succession. Les héri
tiers D u Couffour ont le droit d ’exiger, ou q u ’il re
présente la rente telle que le père de famille la lui
avait remise, ou q u ’il en rapporte la valeur réelle,
et non une valeur dépréciée, que lui seul a rendue
illusoire.
L e tribunal a donc mal jugé, en ordonnant seule
ment le rapport, en valeur réduite, des assignats que
le sieur Voyret a spontanément reçus. Celui-ci doit
rapporter, ou les rentes même en nature et dûment
conservées, ou leur valeur actuelle. Ce rapport et
celui de la dot pécuniaire de la dame Cisternes doivent
être réunis au surplus des avancemens d ’hoirie et aux
biens dont le pèrç était en possession à son décès,
pour former la masse héréditaire sur laquelle les droits
de chaque cohéritier seront déterminés,
�/¿'
( 3 0
§ II.
Q uel doit être Veffet du don du quart en p ré cip u t,
promis à la dame D u C oujjour?
L a dame Du CoufTour réclame le quart en préciput
des biens de son père. Sa demande est fondée sur deux
titres : son contrat de mariage et le testament du père.
Par le premier de ces titres , qui est antérieur au
Code civil (il est du 4 pluviôse an 11, ou 24 janvier
i 8o3 ) , les père et mère de la dame D u Couffour lui-,
ont assuré le quart de leurs biens en préciput, et
l ’ont instituée leur héritière dans les autres trois
quarts, par égale portion avec la dame Voyret. Ils ne
parlent pas dans cet acte de la dame Cislernes, à qui
ils avaient déjà donné la valeur de ses droits hérédi
taires, par son contrat de mariage du 23 juin 1789.
L e second titre, le testament du père, contient
aussi, en faveur de la dame Auteroche , un legs du
quart en préciput de tous scs biens meubles et immeu
bles sans excep tion .
L a d a m e V o y r e t rési ste à l ’ e x é c u t i o n d e c e t t e d o u b l e
d is p o s i t i o n .
V
Elle fonde sa résistance sur ce (rue la dame Cisternes
1f 1 t j
a u e c ia r e s en t e n i r à ce q u ’e ll e a v a i t r e ç u , et ne pas
vouloir venir au partage de la succession du sieur
Auteroche.
La dame Cisternes, dit-elle, a renoncé. Par sa re
nonciation , elle doit être assimilée à une étrangère.
Sa part héréditaire a accru à ses cohéritiers} et ce qui
-C<;
�**Y
( 3 0
lui a été donné doit s’imputer sur la quotité dispo
nible, suivant la règle écrite dans l ’article 845 du
Code civil. Si donc, par la dot de la dame Cisternes,
la quotité disponible est épuisée, la dame D u CouiFour
n ’a pas droit au quart en préciput qui lui avait été
promis.
Ce que la dame Cisternes a reçu, et sou refus de
venir à partage peuvent-ils priver la-dame Du CouiTour
du quart en préciput qui lui a été promis?
Telle est la question.
Cette question ne peut être résolue q u ’en faveur de
la dame Du CouiFour.
L a dame Voyret se retranche dans les nouveaux
principes q u ’elle interprète à sa manière. Elle s’appuie
aussi sur un arrêt de cassation, du 18 février 18 18 ,
q u i , dit-elle , a donné l ’explication du Code civil
p a r innovation à la législation ancienne (1).
Nous examinerons la difficulté d ’après les nouveaux
comme d ’après les anciens principes.
Mais la dame Voyret n’a pas remarqué que le Code
civil n ’aurait pu modifier, encore moins détruire une
disposition irrévocable, faite avant son émission; et
que , quelle que fût la législation nouvelle , c’est
d ’après la législation ancienne seule q u ’on devrait
apprécier l ’eftet du don en préciput fait à la dame
Auleroche.
C ’est un principe élémentaire , que les donations
entre-vifs ou à cause de mort, l o r s q u ’ e l l e s sont irrévo(1) Voir les conclusions «les sieur et dame V o y r e t, signifiées eu
première instance, le 17 novembre 18a 1.
�!A *
'
( 33)
cables de leur n ature , sont régies par la loi en vigueur
au moment de l ’acte.
Ce p r i n c i p e conservateur avait été méconnu pen
dant quelques années de désordres et d’aberration :
les lois des 5 brumaire et
17 nivôse an 2 avaient
établi une rétroactivité monstrueuse.
Mais bientôt les idées de justice triomphèrent, et la
rétroactivité fut abolie.
Depuis, les législateurs et les tribunaux ont été at
tentifs à maintenir l ’exécution des contrats, confcîrmément aux lois sous lesquelles ils avaient été passés.
Les législateurs du Code c i v i l ont pose dans le titre
p r é l i m i n a i r e , c o m m e fondement de toute législation,
«ette règle précieuse : « La loi ne dispose que pour
« l’avenir; elle n ’a point d ’effet rétroactif » (Art. 2
du Code civil.).
Une foule d’arrêts ont appliqué ce principe à. des
donations, à des institutions, e t , en général, à des
dispositions, soit entre-vifs, soit à cause de mort, qui
avaient eu lieu sous la législation antérieure au Code.
Ou peut consulter notamment des arrêts de cassation
des 3 messidor an 5 , 5 vendémiaire an 7 , 27 germinal
an 12, 17 et 25 nivôse , 7 ventôse et 8 prairial
an i 3 (1).
U n autre arrêt de la même Cour a décidé, confor
mément à ce principe, une question de réserve ou de
(«) Voir ces arrêts dans le Journal des A udien ces, par Dcnevers ,
volume de 1791 à l ’an 1 2 , pages m
page 3 i
7;
et 164 ; volume de l ’aa 12 !
volume de l ’aa i 3 , page i g S , 2 7 6 , 3oG
407^
�( 34 )
retranchement, née sous le Code civil, entre le père et
l ’épouse du général Virion. Les deux époux, par leur
contrat de mariage, du G ventôse an G, s’étaient lait un
don mutuel de tous les biens que le prémourant laisserait
à son décès. Ce don universel était autorisé par la loi
du 17 nivôse an 2; mais, le général Yirion n ’étant
mort q u ’en 1810, le père du général demanda la ré
duction du don universel jusqu’à la concurrence de la
réserve que lui attribuait le Code. Cette demande ,
accueillie e n première instance, refusée par la Cour
de Paris, a été aussi repoussée par la Cour suprême.
L ’arrêt de cassation déclare que « le don est irrévo« cable, et que, par une conséquence nécessaire, il
« doit se régir par la loi du tems où il a été fait ;
« que si, p a r la n a t u r e des c h o s e s , son exécution est
« p u r e m e n t éventuelle, cette éventualité se rattache
•« à l ’époque de la disposition, puisque c’est elle qui
« constitue le droit du donataire; que ce droit, étant
« acquis d'une manière irrévocable ; ne peut être altéré,
« eu tout ou en partie, par une législation qui lui
« est postérieure ;
« Que la prohibition de l ’efiet rétroactif des lois
« est, en effet, l’ une des bases fondamentales de notre
« législation, et que ce serait violer ce principe établi
-« par l’article 2 du Code c i v i l , que de faire prévaloir
« les dispositions de ce Code aux lois existantes à
« l’instant de la convention » (1).
(1) L ’ arrêt est du 9.8 inai 1812. Il est rapporté par D e n c y c is , volume
«le 1 8 1 2 , première partie, pages 5 o 8 et suivantes.
�f' Ainsi, il est certain que les dispositions contenues,
soit dans le c o n t r a t de mariage de la dame Cisternes,
soit dans celui de la dame D u Couffour, doivent être
régies seulement par les principes en vigueur à la date
des contrats, et q u ’ils doivent produire aujourd liui
les mêmes effets q u ’ils auraient produits si la succession
du sieur Auteroche père s’était ouverte avant le Code
civil.
O r , la dame Cisternes s’est mariée en 1789. Par
son contrat, ses père et mère lui ont constitué une
dot, en valeurs mobilière et immobilière, dé 4°500° fr* »
dont 8000 fr. ¡>our b ie n s m a t e r n e l s , et l e s u r p l u s p o u r
b i e n s p a t e r n e l s : expressions du contrat.
Il est d i t , en o u t r e , dans une autre partie
l ’acte, qu ’«M moyen de ladite constitution
de
la fu tu r e
épouse renonce a u x successions de ses père et mère.
Ainsi, la volonté manifeste du père, celle de la fille,
les intentions de toutes les parties contractantes ont
été que les valeurs données à la dame Cisternes for
massent la portion héréditaire de celle-ci. dans les
successions futures de ses père et mère.
Le sieur Auteroche père, en payant d ’avance à sa
fille la dette de la nature et de la loi, en lui attri
buant, par son contrat de mariage même, tout ce
qu elle devait avoir un jour dans sa succession , n ’a
pas dii craindre d ’ètre privé, par cet acte de justice,
du droit de disposer, à l ’avenir, d’aiicune partie de
ses biens ; il a dû croire que ce q u ’il donnait alors à
sa fille s imputerait, suivant sou vœ u, sur la portion
héréditaire de celle-ci.
�A.\
(36)
Ce serait clone blesser la volonté du père de famille;
ce serait aussi se jouer de l ’expression formelle du
contrat, que de prétendre que l ’imputation doit se
faire non sur la portion héréditaire de la dame Cisternes, mais sur la quotité disponible; q u e , par sa
renonciation, elle doit être assimilée à un donataire
étranger; que sa portion héréditaire doit accroître aux
autres héritiers ab intestaty et que c e u x-c i, sans rap
porter même les valeurs q u ’elle a reçues, sans en tenir
compte, doivent, au préjudice de la dame Auteroche,
donataire du q u a r t, profiter seuls de cette portion
héréditaire, comme si la dame Cisternes n ’avait rien
re çu, comme si sa renonciation était gratuite.
Ce système serait aussi en opposition directe avec
les principes reçus en 1789.
E n effet, tous les auteurs s’accordent à dire que
l ’enfant qui renonce aliquo (lato, celui, par exemple,
qui renonce pour s’en tenir à une donation qui lui a
été faite par son père , fait p a r t , dans l ’intérêt des
héritiers institués, pour la supputation des légitimes*
Le Brun le décide ainsi dans plusieurs passages de
son Traité des Successions.
Voici comment il s’exprime au livre 2 (1) :
« Lorsque l ’enfant, qui fait part naturellement,
« c’est-à-dire à qui il est dû par nature une part dans'
« la succession ou dans la légitime qui est une por-'
« tion héréditaire , renonce pour s ’en tenir ¿1 une
« donation, il est vrai de d i r e , en ce c a s , q u ’il a sa
(1) Clinpitrc 3 , section 6 , n°* 8 et 9.
�tfo
( 37 )
« portion légitim aire, puisqu’ i l en a la 'va leu r, et
« qu ’il est donataire en avancement d ’hoirie-, ce qui
« ne peut pas se trouver, ni dans la personne de
« de l ’enfant qui renonce sans avoir jamais rien r e ç u ,
« ni dans la personne de l ’étranger. Ainsi il est très« juste que l ’enfant qui renonce aliquo clato fasse
« part dans la supputation ; et bien loin que les
« autres enfàns aient le droit de se plaindre de ce que
«
«
«
«
cela diminue leur légitime, il fa ut, au contraire,
qu ’ils considèrent que leurs droits diminuent natuTellement, à proportion de ce qui a été donné à l e u r
frère, puisqu’il aurait p a r t a g é a v e c e u x ab intestat. »
M . L e B r u n t r a i t e l a question avec plus de déve
loppement au livre 3 (1); et après avoir rapporté les
raisons contraires, il se décide en faveur de celui qui
doit fournir la légitime aux dépens des libéralités qui
lui ont été faites. La solution q u ’il donne est conçue
en ces termes :
« Il est juste que tous les renonçans aliquo dato
« fassent part; car comme l ’on doit faire entrer leurs
« .donations dans la masse des biens, ce qui grossit
“ beaucoup la légitime^ aussi ils doivent fa ire part
" en fa v eu r de celu i qui fo u rn it la légitim e 3 ce qui
w la diminue à proportion; et l ’héritier testamentaire
« perd encore à cela, en ce que les donataires ne s’en
« tiendraient pas à leurs dons, s’ ils n ’étaient plus
« considérables que leurs parts afférentes dans la suc« cession. »
( 0 L ivre 3 , chapitre 8 , section 2 „ n°* 79 et suivau»,
�y
,
( 38 )
Ricard avait prévu la difficulté avant L e B ru n , et
il l ’avait résolue dans le même sens, eu parlant des
renonciations aliquo clato faites soit par des fils do
nataires du père, soit par des filles qui ont reçu une
dot.
« Dans ces espèces, remarque l ’a u t e u r , il n ’est pas
« absolument vrai de dire que les en fans qui s’abs« tiennent de la succession n’y
prennent point
de
« pa rt, attendu q u ’ils ont reçu leur partage en avan*« cernent d’ hoirie, et q u ’ils ne renoncent que par la
« considération de ce q u ’ils ont été. satisfaits par la
« prévoyance de leur père ». (i).
C ’est sur ces principes q u ’est fondé l ’article 34 de
l ’ordonnance de 17 3 1, qui autorise l ’enfant donataire,
contre lequel leâ autres légilimaires agissent par l ’action
en retranchement, à retenir sa propre légitime sur la
chose qui lui a été donnée, ce qui démontre claire
ment que le don doit s’imputer d ’abord sur la portion
héréditaire de l ’enfant.
E t remarquons que cette faculté de retenir sa propre
légitime sur le don qui lui a été fait, et au préjudice
des autres enfans, s’applique, à celui qui a renoncé
comme à celui qui a accepté, suivant la doctrine de
Ricard (2), doctrine adoptée aussi par M. Merlin dans
son Répertoire de Jurisprudence.
« Il est bien juste, dit le premier auteur, en par
lant de l’enfant qui renonce aliquo
dalo , il est
(1) Ricard , Traité dos Donations, 3 " p a rtie , n° ioG 3 ,
(2) Traité des Donations, 3* partie, n° i o 65 .
�/¿9
( 30 )
i«( bien juste qu ’il retienne, par forme ¿ ’exception, ce
« qui lui appartient par droit de légitime. »
Toutes les règles que nous venons de rappeler sont
enseignées par M. Merlin dans son llépertoire, au
mot Légitim e (i).
« L e donataire renonçant, dit M. Merlin, ne prend
« point part à l ’hérédité par actio n, mais il la prend
« par rétention : il faut donc nécessairement q u ’il fasse
« nombre. »
C ’est aussi d ’après ces principes que les filles dotées,
q u i , dans certains pays, étaient exclues du partage,
ou par une renonciation ou par le statut c outum ie r,
n’en faisaient pas moins nombre au profit de l’héritier
institué ou du donataire de quote; et q u e , loin q u ’on
imputât sur la quotité disponible les dots q u ’elles
avaient reçues, les enfans mâles n’étaient admis, par
droit d’accroissement , à réclamer les légitimes de ces
filles, q u ’à la charge de rapporter la valeur des d o ts ,
et de l ’imputer sur ces légitimes.
• Ainsi, dans l ’ancien D roit, les dots constituées, les
dons en avancement d ’hoirie, toute espèce de libéralité
faite par un père à son enfant étaient considérés comme
le paiement, par anticipation , de la portion hérédi
taire de celui-ci; et si l ’enfant doté ou donataire ne
venait pas partage, s’il renonçait pour s’en tenir à
ce qu il avait reçu, il n’en faisait pas moins nombre
pour la supputation des droits des autres enfans : ce
( 0 Voyez section 8 , paragraphe i , n« 7 , c l paragraphe a , article 3 ,
question 5 .
�( 4° )
qui lui avait été donné s’imputait sur sa légitime ou.
sur sa portion héréditaire, sans affaiblir la quotité
disponible.
Tels étaient les principes en vigueur en 1789, lors
du mariage de la dame Cisternes } et ces principes
élaient encore les mêmes en janvier i 8o3 , lors du
mariage de la dame D u C ou do u rj car le Code civil,
sur lequel s’appuie la dame Vo yret, n’avait pas encore
paru.
Les s i e u r et dame Auteroche savaient donc alors
que, quoique la dame V o y r e t e û t renoncé, par contrat
de mariage, à leurs futures successions, quelque fidèle
q u ’elle fut à sa promesse, ce qui lui avait été promis
ne devait pas s’imputer sur la portion disponible; ils
savaient que cette p o r t i o n d i s p o n i b l e était restée in
tacte, et q u ’ils n’en avaient pas moins le droit de
donner à la dame D u CoufFour le quart de leurs
biens, quotité autorisée par l ’article
I er
de la loi du
4 germinal an 8 , qui était la loi régnante.
C ’est sous la foi de ces anciens principes, c’est aussi
sous la foi de la faculté que leur attribuait la loi de
germinal an 8, q u ’ils ont fait, en faveur de leur fille
ainée, une disposition irrévocable de sa nature j c’est
enfin sous la foi de l’exécution de cette disposition ,
q u ’ un mariage a été célébré, que deux familles se sont
uniesj et une loi postérieure aurait pu détruire ce qui
était valable alors !
Mais, s’il en était ainsi, que deviendrait cette règle
fondamentale q u i veut q u e les contrats, et les pactes
q u ’ils renferment, soient régis par la loi du jour ou
/
/
�/f/
( 4i )
ils ont été faits? Que deviendrait ce grand principe de
la-non rétroactivité, principe si solennellement déclaré
par les législateurs du Code civil, principe qui est le
fondement de toutes les législations des peuples civi
lisés, principe sans lequel tout ne serait que désordre,
tout ne serait qu ’anarchie dans les lois et dans les
transactions sociales ?
Reconnaissons donc qu e, puisque, suivant les règles
admises soit en 1789 soit en janvier i 8o3 , la dot
de la dame Cisternes d e v a it , dans tous les cas,
que cette dame vint ou non à partage, s’ i m p u t e r sur
sa portion héréditaire, et non sur la quotité alors dis
ponible; et p u i s q u e le sieur Auteroche a disposé alors
par un contrat de mariage, par le plus respectable
des contrats, de cette quotité disponible qui était
libre dans sa main , reconnaissons q u ’ une loi posté
rieure n’a pu porter atteinte à ce don irrévocable
de sa nature; q u ’elle n ’a pu, en changeant l ’im pu
tation de la dot de la dame ¡Cisternes, anéantir ainsi
dans la main de la dame Du CouiTour la donation du
quart, dont celle-ci était saisie avant la publication de
la loi nouvelle.
La question peut encore, être considérée sous un
autie rapport qui conduirait au même résultat.
Avant le Code civil, en janvier i 8o3 , l ’ordonnance
de 1731 , sur les donations, était toujours en vigueur.
Cette ordonnance permettait au père de famille de dis
poser de tous ses biens, moins les légitimes de rigueur
des enfans. De là cette règle écrite dans l’article 34 de
oïdonnance, suivant laquelle, si le donateur no
�( 4» )
laissait pas en mourant assez de biens libres pour
fournir la légitime des enfans, eu égard à la totalité
de son patrimoine
les légitimaires avaient le droit
de demander la réduction, d ’abord des legs, ensuite
des donations, en remontant des dernières aux pre
mières.
Alors, comme le fait remarquer Furgole sur cet
article, on faisait entrer dans le patrimoine, pour le
règlement de la légitime, i° les biens existans; 2° ceux
dont le père avait disposé par testament; 3° ceux dont
il avait disposé entre-vifs, même par contrat de ma
riage, et à titre de dot.
Sur cette masse, chaque légitimaire ne pouvait de
mander que sa légitime personnelle. S ’il la trouvait
dans les biens libres, il devait l’y prendre; si ceux-ci
étaient insufiisans, il n’obtenait, sur les dispositions
testamentaires ou entre-vifs,
que ce qui lui man
quait pour compléter sa légitime;
encore devait-il
imputer sur celte légitime tout ce q u ’il avait reçu du
patrimoine paternel, avant le décès du père.
Ces légitimaires, d’ailleurs, n’avaient pas à examiner
si les autres légitimaires acceptaient ou répudiaient
la succession.
Seulement,, si la renonciation d ’ un des légitimaires
était à-la-fois gratu ite, et pure et simple, celui-ci ne
comptait pas pour la supputation, ce qui ne donnait
cependant pas aux légitimaires acceplans le droit de
reclamer les légitimes des renonçaiis, mais ce q u i ,
selon le nombre qui restait , pouvait augmenter ou
diminuer leurs propres légitimes.
�/
( 43 )
Au contraire * lorsque la renonciation d ’un légitimaire était dirigée en faveur d ’une autre personne,
ou lorsqu’elle était faite aliquo d a to , comme nous
l ’avons déjà d i t , les légitimes des autres enfans étaient
telles q u ’elles auraient été, si tous avaient accepté (i).
Ils ne profitaient pas de la renonciation ; ils ne p o u
vaient chacun réclamer, contre l ’héritier ou le dona
taire, que sa propre légitime de rigueur.
Ces principes sont enseignés par tous les auteurs,
notamment par le savant Ricard, selon lequel, « pourvu
« que les enfans tirent des biens de leur père la por« lion que la nature leur destine, eu égard au nombre
« de frères et de sœurs q u ’ils sont, du moins ceux
« qui ne sont pas absolument exclus de sa succession,
« et auxquels le père a communiqué ses b ie n s , leur
« querelle d ’inofficiosilé doit cesser, n ’ayant pas droit
«
»
«
«
“
de se prévaloir, si les autres ne demandent point
leur part ou la légitime, attendu que chacun a son
droit pour ce regard ^ et il suffit que le père ait
satisfait les autres, et q u ’il leur ait pourvu de sorte,
qu ’ils aient eu sujet de s’en contenter (2). »
C'est comme une conséquence de ces principes ,
<1*1 était admise, dans toute la France, la règle écrite
(1) V o ir M e rlin , Répertoire de jurisprudence, au m o t L é g i t i m e
section 8 , paragraphe 1 " .
*
0 ) Voir Ricard , Traité des Donations, troisième p a rt., n° 10GÎ,
i u > e rlil1’ ^
m0t U '5' l[mQ ’ SeCli° n 8> r araPr®phe 2 , question 5” ’,
N
�( 44 )
dans l ’article
concu :
307 de la Cou tu m e de Paris , ainsi
9
« Néanmoins , au cas où celui auquel on aurait
« donné se voudrait tenir à son d on , faire le p e u t ,
« en s’abstenant de l ’hérédité, la légitime réservée
« a u x autres. »
De cette théorie, la seule admise autrefois dans le
Droit français, et des termes formels de l ’article 34
de l’ordonnance de 1 7 3 1 , il résultait que l ’enfant ne
pouvait faire r é d u i r e les dispositions entre-vifs ou
testamentaires, que pour sa propre légitime, et q u ’il
n ’avait pas le droit de réclamer, en outre, par l ’action
en retranchement, les légitimes des autres enfa ns,
quoique ceux-ci renonçassent,
n ’était pas g r a t u i t e .
si leur renonciation
C e s'prin cip e s, et notamment l ’article 34 de l ’or
donnance de 1 7 3 1 , ont été la loi du contrat de mariage
de la dame Du CouiFour : ils autorisaient ses père et
mère à lui donner toute la quotité alors disponible,
et à réduire la dame Voyret à sa légitime de rigueur.
L a quotité disponible était plus faible, il est vrai,
q u ’en 17 8 9 , et la légitime plus forte; car la loi du
4 germinal an 8 permettait seulement aux père et
mère de disposer du quart de leurs biens. Les trois
quarts étaient réservés pour les légitimes.
Mais si la quotité disponible n ’a pas été excédée,
si la réserve destinée aux légilimaires a été respectée,
la dame Voyret n ’a aucune réclamation à élever.
C ’est vainement q u ’elle se livrerait à de subtiles
�( 45 )
dissertations sur le sens de divers articles du Code
civil.
L e Code civil ne doit pas régir la succession du
sieur Auteroche; car cette succession ne s’est pas ou
verte ah intestat. Avant la publication de cette loi
nouvelle, le père de famille avait disposé de tous ses
biens sous les lois anciennes : il en avait disposé , ou en
faveur de la dame Cisternes, en 17 8 9 , mais à imputer
sur sa portion héréditaire; ou en faveur de la dame
D u Cou ffour, à qui, en janvier i 8o3 , il avait donné
un quart de son patrimoine et une portion égale dans
les trois autres quarts.
L e Gode civil ne peut porter atteinte a ces dispo
sitions, valables sous la loi de germinal an 8.
La dame Yoyret doit les respecter, les exécuter telles
q u ’elles s o n t, ou se restreindre à la légitime que lui
assurait la loi de germinal, c’est-a-dire au quart du
patrimoine entier du sieur Auteroche.
Tout ce que peut donc exiger la clame Y o y r e t , c’est
qu’on compose ce patrimoine, i° des 3 2,000 fr. cons
titués à la dame Cisternes pour biens paternels; 20 des
autres dots ou avancemens d ’hoirie; 3° des biens q u ’a
laissés le père à son décès, et que sur cette masse ,
distraction faite des dettes, on lui attribue un quart.
O i , on ne lui conteste pas ce droit.
Mais en réclamer de plus étendus, c’est non seule
ment méconnaître les volontés d ’un père respectable
c’est aussi vouloir détruire les dispositions d ’actes de
famille que la loi protège.
S il était nécessaire d invoquer la jurisprudence à.
�l ’appui (le vérités aussi claires, aussi élémentaires
nous citerions un arrêt de la C o u r , du 28 janvier
1820, qui a jugé une question dont l ’analogie est
frappante avec celle élevée par la dame Voyret.
Par le contrat de mariage de la demoiselle Julienne
Arcis-Berthon, en date du 1 1 nivôse an 11 (sous la
loi de germinal an 8 ) , il lui avait été promis une
somme de 20,000 f r . , payable après le décès de son
père, a la charge du rapport à la succession , si la
donataire venait à partage. Le don n ’était pas fait en
préciput.
L e père meurt en i 8 i 3 } et la fdle déclare ne pas
vouloir venir à partage, en optant pour les 20,000 fr.
Les autres en fans prétendirent que le don devait être
restreint a u q u a r t , q u o t it é d is p o n ib le ,
e t q u e , n e se
portant pas héritière, la dame Arcis ne devait pas re
tenir, en outre, sa portion héréditaire.
L a C ou r, sans se jeter dans l'examen des articles du
Code civil, considérant que le don avait été fait sous
la loi de germinal an 8 , et que le père pouvait alors
donner h sa fille la portion disponible 3 et une por
tion 'virile dans le surplus , ordonna l’exécution de
la donation , si mieux n’aimaient les autres enfans
abandonner à la donataire un quart en préciput, et
partager avec elle, par égalité, les trois antres quarts
(Voir cet arrêt, à sa date, dans le Journal des Audiences
de la Cour de Riom.).
Des principes semblables d o i v e n t conduire à une
décision analogue, pour la cause actuelle. Comme les
frères Arcis-Berthon, la dame Voyret d o i t, ou exécuter
�G 47 )
la disposition, faite en faveur de la dame D u Couffour,
ou être r é d u i t e à sa portion dans la réserve fixée par
la loi du 4 germinal an 8 , c’est-à-dire au quart du
patrimoine du père.
Ou se rappelle que par le contrat de mariage de la
dame Du Couffour, son père lui a donné, en préciput,
le quart de tous ses biens, et qu ’ il l ’a instituée héri
tière, par égale portion, avec la dame V o y r e t , clans
les trois autres quarts, à la charge du rapport des
avancemens d’ hoirie.
On sait aussi q u e , sur le quart qui est attribué à
la dame Du Couiï’o u r , la dame Voyret est autorisée
par le même contrat a prélever 4 ° ° ° francs.
E n fin , on n’a pas oublié qu e, par son testament,
le sieur Auteroche père, en léguant à la dame D u
Couffour un quart en préciput, donne l ’usufruit de
la moitié de ses biens à la dame L ’huillier, son
épouse.
Le legs d’usufruit de moitié à madame Auteroche,
pouvait être (ait cumulativement avec le don du quart
en propriété à l’un des enfans. Cette double dis
position était autorisée, et par les articles I er et G de
la loi du 4 germinal an 8 , et par les articles r)i3 et
I094 du Code civil.
TV
'
après ces actes, les droits des pai’ties sont faciles
à régler.
L a masse du patrimoine paternel sera composée des
dots ou des avancemens d’hoirie des trois filles, et des
autres biens du père.
U n quart de cette masse sera prélevé par la daine
�( 48 )
D u Couffour, qui paiera sur ce quart 4ooo francs à la
dame Yoyret.
Sur les trois quarts, on distraira les 32 ,ooo francs
f o r m a n t la dot paternelle de la dame Cisternes.
L e surplus se divisera , par moitié , entre la dame
D u Couffour et la dame Yoyret.
Si celle-ci refuse ce mode de portage, et q u ’elle
préfère s’en tenir aux droits que lui assurait la loi de
germinal an 8 , elle recevra le quart du patrimoine
du père, en imputant sur ce quart son avancement
d ’hoirie.
Dans les deux cas, son lot sera grevé, proportion
nellement à sa quotité, de l ’usufruit légué à la mère.
Telles sont les bases du partage à faire. Ces bases
sont déterminées par les actes de famille, et par les
principes en vigueur à l ’époque du contrat de mariage
de la daine D u Couffour.
Ces bases, invariablement fixées alors, n ’auraient
pu être ébranlées par la loi postérieure. Le Code civil
ne peut régir l’exécution des contrats qui 1 ont précédé;
il n’a pu détruire un droit acquis.
Mais s’il était besoin de consulter les règles établies
par le Code civil, on démontrerait aisément l ’erreur
et le danger du système de la dame Yoyret.
La renonciation d ’un héritier naturel, dit la daine
Voyret , le rend étranger u la succession , et lait
accroître sa portion à ses cohéritiers. I)« l;i decoulent,
ajoute-t-elle, plusieurs conséquences. Les dons que le
renonçant retient sont de pures libéralités; ils s’inv
�S i*™ “
( 49 )
putent sur la q u o t i t é disponible : un second donataire
ne peut pas réclamer cette quotité.
L a base de ce système est prise principalement dans
les articles 785 et 786 du Code.
« L ’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été
« héritier (art. 785). »
« La part du renonçant accroît à ses cohéritiers
« (art. 786). »
Ces articles sont peu décisifs pour la question dont
il s’agit; l’un et l ’autre ne s’occupent que des cas
généraux.
L ’a r t i c l e 780 est s e u l e m e n t r e l a t i f a u cas o ù c e l u i
q u i re n o n c e n ’ a r i e n r e ç u , et
ne retient rien sur le
patrim oine du défunt.
L article *7865 611 établissant un droit d’accroisse• m e n t , suppose aussi que la successiou s’est ouverte
ab intestat.
On argumente encore de l ’article 8 4 5 , qui autorise
l ’héritier renonçant à retenir le don entre-vifs, ou à
réclamer le legs à lui fait, jusqu’à concurrence de la
quotité disponible.
Mais cet article ne s’explique pas sur le cas où la
quotité disponible a été donnée à une autre p e r s o n n e .
C ’est moins dans les articles que l’on vient de rap
peler que dans les articles 9 1 3 , 99.0 et 921 , que doit
se trouver la solution de la question.
L ’article 913 fixe la quotité disponible d’après le
nombre des enfans qui existent au décès du père.'
L article 9^®
déclaré réductibles que les dispo
sitions qui excéderont la quotité disponible.
7
�( 5o )
L ’article 921 autorise à demander la réduction ,
ceux-là seuls au profit desquels la loi Tait la réserve.
Appliquées à la cause des héritiers Auteroche, ces
règles démontrent que la dame Voyret ne devrait être
admise à critiquer les libéralités de son père, q u ’au
tant que ces libéralités excéderaient la réserve que la
loi lui attribuait.
Qu'était-elle, cette réserve? Elle était d ’ un quart
du patrimoine paternel; car le père ayant laissé trois
en fans à son décès, la quotité par lui disponible était
d ’un qu a r t, et les autres trois quarts étaient divisibles
entre les trois enfans, ce qui réduisait au quart la
portion réservée par la loi à la dame Voyret.
La prive-t-on de ce q u a rt, même en partie? elle a
le droit de se plaindre.
Mais conserve-t-elle ce quart en laissant exécuter le
don en préciput fait à la dame Du Cou flou r ? ses
plaintes sont injustes. La loi lui refuse la réduction
d ’ une disposition qui ne porte pas atteinte à sa réserve;
car elle ne peut demander cette réduction que jusqu’à
concurrence de la réserve faite à son p r o f i t ; elle ne
p e ut, à l’aide d'un prétendu droit d ’accroissement ,
réclamer la réserve légale qui était faite au profil de la
dame Cistcrncs. Le droit d ’accroissement, établi par
l'article 786, autorise à recueillir ce qui existe dans
la succession ab intestat> mais non à’ prendre dans la
main d ’ u n donataire ce que celui-ci a reçu; non à
faire annuler ou réduire une donation valablement
faite. L ’action en réduction est une action exorbitante
qui ne peut exister sans être autorisée par un texte
�c l a i r e t f o r m e l . D e s i n t e r p r é t a t i o n s s u b t i l e s e t forcées
110 p e u v e n t 1 é t a b l i r , l o r s q u e la lo i est m u e t t e .
Que l’on réfléchisse sur le système proposé, et l ’on
verra q u ’ il conduit à une injustice révoltante, et
même à l ’absurdité.
Il n’est aucun père q u i , en mariant l’un de ses enfans, ne lui donne un avancement d ’hoirie. En faisant
ce don par anticipation sur son hérédité, non seulement
il cède à ses affections, mais encore il se soumet à la
nécessité; car l ’enfant ne pourrait, sans un tel secours,
faire un établissement convenable.
O r, dans le système q u e l ’on c h e r c h e à c r é e r , le
père s’exposérait à perdre le droit de disposer dans la
suite, de la moindre partie de ses biens, par cela seul
q u ’en établissant l’un de ses enfans, il aurait, par un
don en avancement d ’hoirie, rempli le devoir de la
nature et du sentiment. Que l ’avancement d ’ hoirie soit
égal a la portion héréditaire de l ’enfant, q u ’il soit même
plus faible, cet e n fan t, par caprice ou par fraude, renon
cera à la succession du pèrej pour s’en tenir au don
qu ’il aura reçu; et le père, qui n’a pas dû craindre un tel
piège; le père qui aura voulu marquer par un bienfait
sa reconnaissance, ou une affection plus spéciale, à
celui de ses enfans qui en aura été le plus digue; le
pure sera trompé dans ses intentions. Ses libéralités
seront détruites, comme nous l’avons déjà dit, par le
caprice ou la fraude de l’enfant donataire d ’ un simple
avancement d’ hoirie.
Par le caprice, s i , sans aucun but coupable d ’ailleurs,
il veut se débarrasser de l’ennui d ’ uu partage qui ne
�( 5» )
lui offrirait qu ’ une valeur à peu près égale à celle q u ’il
a déjà reçue.
Par la fraude même. Car il pourrait arriver que cet
enfant, pour nuire à celui qui aurait été avantagé,
renonçât à la succession, fit ainsi disparaître le précip u t, et partageât ensuite secrètement avec les autres
héritiers le bénéfice que sa renonciation leur aurait
v a l u , au moyen de l’accroissement en leur faveur de
la portion du renonçant.
Un tel système serait subversif de la loi, qui n’a pas
entendu faire dépendre des héritiers eux-mèmes le sort
des volontés légales du père; un tel système tendrait
aussi à étouffer les sentimens de la nature, en empê
chant les pères de procurer à leurs enfans des unions
assorties, puisqu'ils ne pourraient d o n n e r le moindre
avancement d’ hoirie, sans s’exposer à être privés du
droit de disposer, dans la suite, d ’aucune partie de
leurs biens j un tel système aurait de trop funestes
conséquences, pour être adopté par la réilexion ; et
c’est faire injure aux législateurs, que de supposer q u ’il
est la conséquence de l’esprit de la loi nouvelle.
Dans la cause même, les mots ne peuvent pas servir
de prétexte à la théorie que l’on veut établir.
La daine Cisternes s’est bornée à déclarer q u ’elle
n’entendait pas venir à partage, afin de conserver le
don qui lui a été fait.
Elle n’a pas renoncé} elle s’est seulement abstenue
ali(juo (lato. Elle n’a pas répudié la q u a l i t é d ’héritière.
Elle est toujours héritière par rétention , si elle 11e l ’est
plus p ar action.
�0
^•53 )
Ce q u ’elle a retenu, elle a entendu le retenir,
conformément à son contrat de mariage , pour ses
droits paternels.
Donc elle ne peut être assimilée à un donataire
étranger.
Donc le don qui lui a été fait doit être imputé, non
sur la quotité disponible, mais sur sa portion héré
ditaire.
Donc les prétentions de la dame Voyret sont re
poussées, non seulement par la loi sainement entendue,
mais encore par les termes de la déclaration q u ’a faite
au greffe la dame Cisternes, et par les dispositions du
contrat de mariage de celle-ci.
La dame Voyret invoque des arrêts de cassation /
des 18 février 18 18 , et 17 mai 1 8 19 ; mais ces arrêts
ne sont pas applicables à la cause.
L arrêt de 1818 peut d autant moins s’v appliquer,
que non seulement il juge une question différente,
mais encore q u ’il est relatif à une donation faite,
le 28 messidor an 3 , c’est-à-dire sous l ’empire des lois
prohibitives, et par conséquent à une disposition qui
ne pouvait valoir comme libéralité, puisque les lois
du tems interdisaient tout avantage fait à un successible (Voir l ’arrêt dans le journal de S ir e y , tome 18,
page.98,
partie.).
L arrêt de 1819 décide aussi une question essen
tiellement différente, et qui eût été jugée de la même
manière, dans l’ancien comme dans le nouveau Droit.
Les enfans, donataires, étaient morts'sans postérité,
avant le décès de leur père, donateur. Leur prédécès
�( 54 )
ne leur ayant pas permis d ’être successibles, les dons
q u ’ils avaient reçus ne pouvaient évidemment s’im
puter sur une portion héréditaire à laquelle ils n’avaient
jamais eu droit.
Ces préjugés sont donc peu sérieux pour la cause.
Quant aux motifs de ces décisions, les invoquer, ce
serait s’exposer à faire juger à leurs auteurs des ques
tions auxquelles ils n'ont peut-être pas même pensé.
Des motifs fugitifs qui se sont glissés dans un arrêt,
ne présentent q u ’ une doctrine fort incertaine, lorsque
leur application directe à une autre question n’est pas
faite par l’arrêt même.
Au reste, si quelque doute s’élevait sur le sens et
l ’esprit du Code civil, ce serait aux principes anciens
q u ’il faudrait r e c o u r i r p o u r l ' i n t e r p r é t a t i o n des prin
cipes n o u v e a u x . On sait que les lois successives, lors
q u ’il s’agit de les interpréter, se prêtent un mutuel
secours. Loges priores ad poslenorcs traliuntur, et è
contra.
O r , l ’on a vu que sous la législation qui a précédé,
qui a préparé même le Code civil, l'enfant qui re
nonçait ciliquo dato faisait nombre dans 1 interet de
l ’héritier institué, pour la supputation des légitimes,
et q u ’il était considéré comme prenant part à l’ héré
dité, sinon par action, au moins par rétention.
Telle est aussi l ’opinion émise sous la législation
nouvelle, par des jurisconsultes dont le n o m est une
aulorite devant les t r i b u n a u x .
Telle est celle -notamment du dernier auteur du
Traité des Donations et des Testamens. Il examine avec
�V. ^ )
profondeur ordinm’C 1g cas ou. un enfant renonce,
pour s’en tenir à l’avantage qui lui a été fait; et il
prouve que si “ 1 enfant donataire ou lcgataiic ne
« vient point à la succession, le don ou le legs s’im« pute d ’abord sur sa réserve personnelle. I l en est
« saisi par la lo i » , ajoute l ’auteur (i).
M. Toullier, dans son Droit civil, reconnaît luimême que lorsqu’un enfant donataire renonce , et
qu’il existe d ’autres donations antérieures à la sienne,
il peut cependant, sur les biens q u ’il a reçus en don,
retenir sa légitime par voie d ’e x c e p t i o n , e t renvoyer
ses frères et sœurs vers les d o n a t a i r e s p r é c é d e n s , p o u r
o b t e n i r l e u r s p o r t i o n s d e la réserve légale (2).
Dc-lk découle nécessairement la conséquence que
l ’enfant donataire ne doit pas être assimilé a un
donataire étranger, et que le don qui lui a été fait
doit s’imputer, non sur la quotité disponible,
mais
sur la réserve. S’il •en était autrement,y les donataires
antérieurs lui seraient évidemment préférés, et sa
renonciation lui enlevant le litre d ’héritier , il nu
pourrait conserver aucune partie du don q u ’il aurait
reçu.
9
Ainsi, les principes du Code civil doivent être
considérés comme conformes aux principes antérieurs.
On ne doit pas, d ’ailleurs, légèrement présumer que
les législateurs du Code aient voulu apporter , aux
( i ) Traité <lcs Donations, édition in - 4° , tome 2 , page 2^3.
00 Voyez T o u llie r, Droit civil français, tome 5 , page 1 5 i , pre
mière édition.
�m
( 56 )
règles admises généralement jusqu’alors, une inno
vation aussi importante, aussi remarquable, sans q u ’il
se fut élevé même sur ce point la plus légère discus
sion lors de l ’examen du projet du Code civil. O r ,
q u ’on parcoure les procès-verbaux contenant les ob
servations faites au conseil d’Etat, l’on n’ y remarquera
rien qui annonce même que la difficulté ait été agitée.
Il ne parait donc pas que les législateurs du Code
aient eu l'intention de créer des règles directement
opposées à la législation antérieure, des règles abso
lument destructives de la faculté de disposer, faculté
que le Code civil a voulu cependant rétablir sur des
bases même plus larges que celles q u ’avait posées la
loi de germinal an 8.
Reconnaissons donc q u ’aujourd’hui même ceux-là
seuls peuvent se plaindre d’ une disposition, ceux-là
seuls peuvent la faire réduire, dont la réserve légale
est atteinte. Reconnaissons que la réduction ne peut
être demandée par un héritier à réserve, que jusqu’à
concurrence de sa portion particulière dans cette ré
serve; reconnaissons que si un enfant renonce ciliquo
clato, la chose q u ’il a reçue doit d ’abord s imputer
sur sa part héréditaire, et que c’est seulement au cas
où la part héréditaire serait plus faible, que l ’excé
dant s’imputerait sur la réserve ; reconnaissons, par
suite, que les autres enfans n ’auraient droit à l'ac
croissement de la portion du renonçant, q u ’autant
que le don retenu serait moindre que 1« part hérédi
taire; reconnaissons aussi que le père de famille a
¡reçu de la loi le pouvoir de disposer de toute Ja quotité
\
�que cette loi ne déclare pas indisponible dans l'intérêt
île chaque héritier naturel; reconnaissons enfin que
celui qui reçoit ou auquel on offre toute la quotité
qui est réellement indisponible à son égard, n’a le
droit de rien exiger de plus, et doit respecter, au
jourd’hui comme autrefois, toutes les dispositions qui
laissent intacte sa légitime personnelle.
Ou si l’on croyait superflu d ’examiner et de décider
la question d’après les principes nouveaux, convenons
que les principes anciens la jugent sans équivoque ;
convenons que les principes en vigueur eu 178g et
en janvier i8o3 , ces p r i n c i p e s , q u i sont la loi du
contrat de m a r i a g e d e la d a m e Cisternes et de celui
de la dame Du Coufl'our, commandaient d ’imputer
le don fait à la dame Cisternes sur la part héré
ditaire qui devait lui appartenir dans le patrimoine
de son père; convenons aussi q u ’à la disposition de
la loi s’unissaient les termes de la volonté expresse du
père de famille, qui avait déclaré formellement don
ner à la dame Cisternes, pour ses droits paternels et
maternels s et qui avait exigé q u ’au moyen de la cons
titution qui lui était faite, elle renonçât auæ succes
sions de ses père et mère $ convenons que le père de
famille, ayant stipulé sous la foi d ’ une législation
existante en 1789, et en v i g u e u r encore en i8 o 3 , a
dù croire que la quotité disponible était toujours
libre dans sa main; convenons que la famille D u
Coufl'our, dans laquelle entrait la demoiselle Auteroche, en janvier i 8o3 , a du se reposer avec confiance
6ur la législation la seule connue, la seule admise
8
�( 58 )
alors, et q u ’elle n ’a pas du craindre q u ’une législation
postérieure portât atteinte à un don valable au m o
ment où il a été fait, à un don irrévocable de sa
nature; convenons enfin que ce don et ses effets doi
vent être appréciés comme ils l ’auraient été si la suc
cession du père se fût ouverte au moment même , et
que, puisqu’il eût été maintenu alors, puisque la dame
Voyrct n’eût pu l’attaquer q u ’en se restreignant au
quart du patrimoine de son père, il doit être aussi
maintenu aujourd’h u i, et la dame Voyret doit ou le
respecter ou se contenter d ’ un q u a r t, qui était, en
l ’an 8 , qui est actuellement encore la seule légitime
dont la loi ne permettait pas de la priver.
Pour la calculer, cette légitime , la dame Voyret
peut, sans doute, demander que les dots et les dons
en avancement d’hoirie entrent, fictivement au moins,
dans la masse du patrimoine.
Mais elle n ’a le droit d ’y faire entrer que les valeurs
dont se composent les dots et les avancemens d’hoirie,
non les objets estimés dans les contrats de mariage , et
aliénés moyennant un prix déterminé.
Ainsi, dans le patrimoine du père ne doivent pas
être compris des objets vendus par lui au sieur Cisternes, moyennant 2^,000 fr. ; des objets sortis depuis
1789 de sou patrimoine; des objets q u i , dans tous les
cas où la restitution aurait h e u , suivant l’expression
du contrat de mariage de la dame Cisternes, ne de
vaient ni appartenir à celle-ci, n i r e d e v e n i r un bien
paternel. Le prix de l’aliénation, seule valeur à resti
tuer à l ’épouse, est aussi la seule valeur à rapporter
�( 5 9 )
fictivement à la masse de l ’hérédité, tandis q u ’au
contraire on doit y rapporter la valeur réelle d ’une
rente, dont le sieur Voyret n’était pas autorisé à
accepter un remboursement sans emploi •, d’une rente
dont la perte n’a eu d ’autre cause que les faux calculs
du sieur V o y r e t , ou plutôt des spéculations qui l ’ont
décidé à rechercher et à recevoir, pour son intérêt per
sonnel, une valeur en assignats, q u ’il a , dit-on, em
ployée fort utilement pour lui.
Ainsi, le tribunal de première instance, a commis
des erreurs graves. Il ne devait ni dispenser la dame
Voyret du rapport de la v a l e u r r é e lle de la rente
q u ’e lle avait r e ç u e en dot, ni ordonner l ’estimation,
valeur actuelle, d ’un bien vendu au sieur Cisternes,
en 1789, et dont le prix avait été alors invariablement
fixé. Au lieu de s’arrêter h un interlocutoire inutile,
et repoussé par les circonstances comme par les prin
cipes, il devait déterminer sur-le-champ les bases du
partage, et consacrer le don en préciput assuré à la
dame Auteroche, par la loi et par le plus solennel des
contrats.
La Cour réparera ces erreurs, en montrant dans
cette cause, comme dans toutes celles qui lui sont
soumises, son respect religieux pour les principes et
pour les volontés légitimes des pères de famille.
M* A L L E M A N D , ancien A vocat.
M* B R E S C HARD , Licencié-Avoué.
R I O M , I M P R I M E R I E DE S A L L E S , PRÈS LE P AL A I S DE J US TI CE.
<
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Auteroche, Marie. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Breschard
Subject
The topic of the resource
contrats de mariage
dot
assignats
renonciation à succession
successions
pays de droit écrit
conflit de lois
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Marie Auteroche et le sieur François Malafosse du Couffour, son mari, Adjudant des Gardes du Corps, Compagnie d'Havray, Chevalier des Ordres de Saint-Louis et du Phénix, Appelant d'un jugement rendu le 28 aôut 1822, par le tribunal civil de Clermont ; contre Demoiselle Marguerite Auteroche et le Sieur Voyret, son mari, Docteur en médecine, Intimés ; en présence de Dame Marie Auteroche et de Sr Blaise Cisterne-Delorme, son mari, aussi intimés.
Annotations manuscrites : « 8 avril 1824, journal des audiences, p. 255. »
Table Godemel : Donation : 17. quels doivent être les effets d’une donation, faite avant les lois nouvelles, par un père mort depuis le code civil, à une enfant qui renonce pour s’en tenir au don ? La donation fait-elle, nonobstant sa rémunération, nombre parmi les héritiers ; et peut-il retenir l’objet donné, jusqu’à concurrence de la légitime et de la quotité disponible, telles qu’elles étaient fixées par la loi en vigueur au moment du contrat ?
18. quel doit être le sort d’une donation du quart en préciput, faite à un autre enfant, postérieurement à la loi de germinal an huit, lorsque l’objet de la première donation est inférieur à la quotité disponible ancienne, et peut-être même à la disponibilité nouvelle ? - le second donataire, peut-il dans son intérêt, avec les héritiers à réserve, faire considérer le premier donataire comme légitimaire, prendre la quotité disponible au moment de la seconde donation, en imputant sur la légitime du premier donataire, les objets que celui-ci retient ? Dot : 4. dans l’ancien droit un immeuble donné en dot, avec estimation et pouvoir au mari de le retenir pour la somme indiquée, est-il présumé vendu ?
en supposant qu’il y ait eu vente, le don, devenant sujet à un rapport fictif, doit-il être estimé valeur du décès du père ? Rapport : 8. une rente foncière donnée en avancement d’hoirie doit-elle être rapportée, valeur réduite seulement, si elle a été remboursée en assignats au mari de la donataire, bien que le remboursement ait été accepté sous contrainte, qu’il n’ait pas été accompagné de remploi, et que la nullité du remboursement n’ait été mise à couvert que par le fait du mari ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1764-1822
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2606
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2607
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53521/BCU_Factums_G2606.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauvagnat (63410)
Perrier (63275)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
conflit de lois
contrats de mariage
dot
pays de droit écrit
renonciation à succession
Successions
-
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701e61d3493d19e090e01419860132f9
PDF Text
Text
P R E CIS
wxAïwLj&rd-,
a^xctr co\£j
EN
RÉPONSE
POUR
Dame
M
a r g u e r i t e
;!
-X? » -rtS
t- ' •'
AU T E R O C H E et le Sr V O Y R E T ,
son mari, Docteur en médecine, Intim és;
CONTRE
D am e M a r i e A U T E R O C I I E et le sieur F r a n ç o is
M A L A F O S S E D U C O U F F O U R , son m a ri,
A d ju d a n t
des
d ’H a v r é ,
Chevalier des
et du P h é n i x ,
G ardes
du
C orp s,
ordres de
com pagnie
S a in t-L o u is
Appelans
EN PRÉSENCE
*
1
'•
D e dame M a r i e A U T E R O C H E et de sieur B l a i s e
C I S T E R N E - D E L O R M E , son mari, aussi Intimés.
IL
s’agit de fixer l ’amendement des parties dans la.
succession du sieur Thomas Auteroche , leur père, et
de déterminer les rapports q u ’elles ont à y faire.
Les difficultés de la cause doivent trouver leur solu
tion dans l’appréciation de quelques faits constans, et
dans la saine application de principes plus ou moins
controversés.
L ’ uue ou l ’ autre des parties est nécessairement dans
�l ’erreur, relativement à l ’étendue de ses droits; mais,
dans des questions de la nature de celles que la Cour
aura à décider dans cette cause, on peut invoquer le
D roit, sans blesser l ’équité, et sans méconnaître la
volonté du père; s’adresser à la Justice pour faire régler
ses intérêts, sans ouvrir une soui'ce de désordres s
sans rompre les liens de fa m ille , et sur-tout sans
encourir le reproche d’avoir cherché à détruire l ’union
et la
bienveillance
mutuelle
qui
doivent
exister
entre parens également recommandables et faits pour
s’estimer.
Les faits sont simples; ils consistent dans l ’analise
de quelques actes de famille.
Du mariage du sieur Thomas Àuteroche avec demoi
selle Louise-Hélène L h u ilie r, sont issus trois enfans :
M a ri e , i re du n o m , q u i a épousé le sieur François
Malafosse D u c o u f l o u r , et q u i est a p p e l a n t e ;
Autre Marie, 2e du nom, épouse du sieur Biaise
Cislerne-Delorme. Cette dame a renoncé à la succession
de son père, et assiste en la cause sans y prendre aucun
intérêt a c t if;
Enfin Marguerite, épouse du sieur V o y r e t , intimée.
L e contrat de mariage des père et mère est du ic)
novembre 1764- Les apports de la dame Auteroche
et les avantages qui lui ont été faits, sont, pour le
moment,
inutiles à connaître,
ne s’agissant point
encore de régler ses droits dans la succession de son
époux.
Le premier contrat de mariage des enfans remonte
�au a 3 juin 1789 : c’est celui (le Marie,
avec le sieur Biaise Cisterne-Delorme.
Les biens du mari étaient situés dans
de Sa uvag nat ; il pouvait désirer que
épouse y fussent réunis : aussi Marie,
2e du nom,
la commune
ceux de sou
2e du nom,
reçoit-elle de son p è r e , entr’autres objets d otau x,
« tous les biens que le sieur Auteroche a dans le lieu
« et collecte de Sauvagn at , consistant en bàtimens,
« terres, vignes et prés, etc., ainsi que les rentes fonî< cières et constituées en grains et en argent, que le
« sieur Auteroclie a dans la même commune de Sàu« vagnat ». Cette constitution comprend même la
futaille et vaisseaux vinaires qui garnissaient les caves
et cuvages du domaine.
Il est inutile de parler du surplus de la dot cons
tituée par les père et mère, et des charges qui y furent
imposées.
Toutefois, la dame Cisterne renonça aux successions
de ses père et mère; et, comme cette clause empêchait
que l ’on pùt prévoir le cas de rapport à la succession
du constituant, et que l ’on ne devait se fixer que sur
la restitution de la dot, événement uniquement relatif
du mari et de ses héritiers, à la femme et à ses héri
tiers , on inséra
ragement pour
icstveindre à ce
Cette clause
une clause qui pouvait être un encou
le mari, mais qui devait toujours se
qui y était formellement prévu.
est ainsi conçue : « Dans tous les cas
«
OÙ la restitution d e d o t au ra l i e u 3 i l sera LIBR E
«
au f u t u r é p o u x ,
ou a ses héritiers ayant cause,
« de garder et reteñir les biens ci-dessus délaissés h la
�« future, en payant, à qui il appartiendra, la somme
« de 25 ,ooo francs. »
Après ce choix qui est donné à l’époux, la restitution
ayant lieu, on prévoit le décès de Marié Auteroche,
fu ture, sans enfans, et on stipule le droit de retour
en ces ternies : « Lesdits sieur et dame Auteroclie se
« réservent, pour eux et les leurs, chacun en droit
« s o i, les biens par e u x ci-dessus donnés, en cas
« q u ’elle meure .sans enfans, ou leurs enfans sans
« descendans, ou sans en avoir valablement disposé ».
Ainsi,.dans celte position, c’est le retour des biens et
non celui de la somme qui est stipulé.
•Enfin, les père et mère poussent plus loin leur
prévoyance. Ils supposent q u ’ils peuvent survivre a
leur fille laissant des enfans; et, pour cette position,
il est « convenu q u e , si la future épouse vient à
« s>tlécéder a v a n t lesdits sieur et dam e Auteroche,
« laissant plusieurs enfans, il leur sera l i b r e , chacun
« en droit soi, d ’appliquer le profit des institutions
« et constitutions, en tout ou en partie, à celui ou
« ceux des enfans mâles q u ’ils jugeront à propos, et
« de distribuer inégalement entre les autres enfans. »
L e 21 février 1794? la demoiselle ¡Marguerite Autcroclie contracta mariage en minorité. Elle épousa le
sieur Louis Voyrel-, et outre un trousseau évalué au
contrat à 1000 francs, elle reçut en dot deux parties
de rente, estimées ensemble a 10,000 f r . , dont l ’ une,
de dix-huit setiers blé ronseigle, ainsi que le droit do
mouture, était assise sur un moulin situé à Tssoiie.
Par ce contrat, les père et mère délaissèrent à. Marie
�(5)
nf
Àuteroclie, leur fille aînée, non encore mariée , tous
les biens fonds q u ’ils possédaient dans la commune
d ’Issoire, sans autre réserve que les batimens, et une
vigne à percière, située dans la commune du Perrier.
Ce délaissement, qui n’avait d ’autre charge q u ’une
rente de 200 fr., payable aux père et mère, é t a i t , par
sa valeur et par sa fixité, en tous points préférable à
la dot qui avait été constituée à la dame Voyrct.
E u effet, 011 était à une époque où il était dangereu:
de refuser les remboursemens en assignats, et d’êti
soupçonné de discréditer le papier-monnaie. Les lois
de ce teins imputaient ce refus à crime5 des lois ré
pressives, i n fi n im en t sévères, le p u n i s sa ie n t, et un
t r i b u n a l r évo lu tio n n a ir e po uva it appliquer ces lois
dans toute l e u r rigueur. M. Auteroche savait lui-même
que cette rente devait lui être remboursée $ l ’offre lui
en avait été faite peu avant le mariage de sa fille ^ de
manière q u e , loin d ’être étonné de la nécessité où se
trouva son gendre à cet égard, il dut regarder ce rem
boursement comme un malheur inévitable, dans les
circonstances où on se trouvait alors.
La première quittance du sieur Voyret est du 22 dé
cembre 1794. Elle est donnée par lui, en qualité de
mari, comme contraint et pour obéir à la loi 5 mais
comme cette rente 11’avait été remboursée q u ’au denier
vingt, et q u ’elle devait l’être au denier vingt-cinq,
plus tard le sieur voyret vint à compte avec le débiteur
reçut le montant de la différence, et fournit, le 2/j
nivùse an 3 ( i 3 janvier 1 7 9 5 ) , une quittance finale,
'/•*
*k
�pour la perfection du remboursement, extinction et
amortissement de la rente.
Ce remboursement a ensuite
donné
lieu à un
procès, dans lequel les sieur et dame Voyret ont
succombé.
L e contrat de mariage de demoiselle Marie, i re du
n om , avec le sieur François Malafosse, est du 4 plu
viôse an i i .
La future se constitue d ’elle-mème un trousseau
et 3 ooo fr. de mobilier.
Les père et mère confirment l ’avancement d ’hoirie
porté, en sa faveur, au contrat de mariage de la dame
Voyret ; ils y ajoutent les bâtimens d ’Issoire, à la
charge toutefois du rapport, si elle vient à partage.
Les père et mère lui donnent, en préciput et avan
tage sur ses sœurs, le quart de tous les biens dont ils
mourront vêtus et saisis, et l ’in s t i t u e n t par égale por
tion avec la dame Voyret dans les autres trois quarts,
à la charge du rapport de ce que chacune aura reçu
en avancement d ’hoirie.
Enfin , s’expliquant sur la rente remboursée à
madame V o y r e t , le contrat dit : « Mais attendu que
« la dame Voyret a reçu un a v a n c e m e n t d ’hoirie
« moins considérable que celui de ses sœurs, lequel s’est
« même trouvé réduit k presque rien, p a r le re m b o u r«
sentent
forcé
qui lui a été fait des rentes qui en
« étaient l ’objet, et q u ’elle souffre par conséquent
« une perte annuelle dans la jouissance, M. Auteroc lie,
« voulant être juste envers tous ses
enfans,
et l ’en
h dédommager, veut et entend q u ’à l ’ouverture de la
�r r. \
w
1 7 ) .
« succession, la clame Voyret prélève, sur le quart
« ci-dessus donné à la future, la somme de 4ooo fr. »
L e sieur A u te ro che père est déccdé le 26 février
1821.
L e 7 juillet, les sieur et dame Voyret ont formé la
demande en partage de sa succession 5 e t , le 10 du
même mois, ils ont assigné la dame veuve Auteroche,
leur mère et belle-mère, pour voir déterminer ses
droits dans la succession de son mari.
Dans cette position, et le 9 août 18 2 1, les sier
et dame Cisterne ont fait un acte au greife du tribuna
civil de C l e r m o n t , par lequel ils déclarent q u ’ils
renoncent au partage des biens de d é f u n t Thomas
Auteroche, pour s ’en tenir a u x dispositions et avan
tages portés en leur contrat de mariage.
Dans* le courant de février 1822 , les sieur et dame
Yoyret firent sommation aux sieur et dame Cisterne,
de mettre au greffe, dans les trois jours, une déclara
tion explicative du sens q u ’ils ont entendu attacher
aux expressions de l ’acte du 9 août 1821 , c’est-à-dire
une déclaration portant q u ’ils ont réellement entendu
renoncer à la succession du sieur Thomas Auteroche,
pour s’en tenir aux dispositions portées en leur contrat
de mariage.
Les sieur et dame Cisterne ne répondirent pas à
cette sommation 5 mais il est demeuré pour certain,
et reconnu entre toutes les parties, que la déclaration
du 9 août 1821 , contenait une explication suffisante,
d ’autant
mieux qu ’elle
confirmait
la renonciatiou
portée au contrat de mariage de la dame Cisterne.
yy
:>
�Les parties ont soumis plusieurs questions princi
pales à l ’examen et à la décision du tribunal civil de
Clermont. Trois d ’entr’elles doivent être de nouveau
discutées devant la Cour.
La première est de savoir comment doit se faire
l ’imputation de la dot de la dame Cisterne. Cette
imputation doit-elle avoir lieu sur la quotité dispo
nible de la loi de germinal an 8 ? Le sera-t-elle, ait
contraire, sur la part héréditaire de la dame Cisterne,
ou au moins sur sa part dans la réserve du Code civil?
Enfin ne doit-elle pas avoir lieu d ’abord sur la légi
time ancienne, et ensuite sur la quotité disponible
de la loi de germinal?
La seconde était relative aux immeubles donnés à la
dame Cisterne. Doivent-ils être compris fictivement
dans la masse de la succession, pour leur valeur à
l ’époque du décès, ou seulement po u r la somme de
25,ooo f r . , à laquelle ils ont été estimés par le contrat?
L a troisième avait pour objet le rapport de la rente
remboursée à la dame V o y re t. Devait-elle être rappor
tée, valeur nominale, ou seulement valeur à l’échelle?
Le-jugement dont est appel est du 2G août 1822.
Sur la question d ’imputation de la dot de la dame
Cisterne :
L e tribunal reconnaît en principe que la quotité
disponible est réglée par les lois existantes à l ’époque
de la donation 5 qu'au mariage de la dame DucoufTouv
cette quotité était d ’1111 q u a r t ; mais il pense que,
pour que le père put en disposer, il fallait q u ’il n’eut
fait aucun avantage antérieur.
�(9)
E n
e x a m in a n t
ensuite le clon fait a la dame Cisterne
,
le tribunal croit inutile de s’arrêter a sa qualification
qui lui paraît insignifiante. Il se fixe sur les résultats,
et décide que, lors même que ce don ne serait q u ’une
légitime , si la quotité disponible était épuisée ou em
ployée en pa rtie, le père n ’avait pu disposer en faveur
de madame Ducouftour, ou au moins n’avait pu dis
poser que de ce qui restait.
Pour reconnaître si le père pouvait disposer à l ’épo
que du mariage de madame DucouiFour, le tribunal
veut que l ’on recherche si le domaine donné à la dame
Cisterne , équivaut à une portion d ’enfant , et à la
totalité ou par tie de la portion disponible. P o u r cela ,
il veut^que l ’on connaisse la fortune des père et mère}
en conséquence que l ’on estime (valeur de 18 2 1) les
biens délaissés a la dame Cisterne, ceux délaissés aux
autres enfans, enfin ceux dont le père était eu possesà l ’époque de sou décès.
Relativement à la dame Cisterne : le tribunal pense
que son contrat de mariage doit être régi par la légis
lation sous l ’empire de laquelle il a été passé; q u ’elle
peut retenir, en renonçant, la part d ’enfant et la
quotité disponible fixée par cette législation ; q u ’ainsi
Ie domaine de Sauvagnat, compris en sa donation, ne
*t etre par elle rapporté que fictivement.
Sur la question du rapport du domaine de Sauvagnat :
L e tribunal pense que la première clause du contrat
doit être rigoureusement restreinte au cas q u ’elle pré
voit j que le choix laissé à l ’époux était un encoura-
�(
10
)
gement à améliorer (les propriétés qui pouvaient devenir
les siennes;
Que la seconde clause interprête et explique la pre
mière, de manière à ne laisser aucun doute sur le
véritable sens à lui donner ;
Q u ’enfin les motifs qui ont pu dicter cette clause
du contrat de mariage de la dame Cisterne, sont abso
lument étrangers aux autres enfans, aux droits desquels
les père et mère n ’ont certainement pas entendu porter
préjudice.
Quant au rapport de la rente demandé à la dame
Voyret,
Le tribunal, d ’après les circonstances et la déclara
tion du père, consignée dans le contrat du mariage de
la dame Ducouftour, reconnaît que le sieur Voyret a
été obligé d ’en recevoir le remboursement, et pense
que le ra pp ort ne d o i t en être fait q u ’à l'échelle , con
formément à l ’art. i 5 du titre 3 de la loi du 16 nivôse
an G.
En conséquence, sur ces trois questions, le tribunal
décide :
i° Q u ’il sera procédé à l ’estimation (valeur de 1821 ),
tant des biens meubles et immeubles délaissés à la
dame Cisterne et aux autres enfans, ainsi q u ’ils se
composaient lors des actes, ainsi que de ceux dont le
sieur Auteroclie estdécédé saisi et vêtu, sauf aux parties
à prendre sur le rapport
telles conclusions q u ’elles
aviseront ;
20 que la dame Voyret rapportera 2o34 irancs en
numéraire, valeur réduite de celle d o y 4 ° ° h '* assiguats,
�montant du re m bour sem en t fait au sieur Voyret de la
rente en bled énoncée dans leur contrat de mariage.
La dame Ducouffour a interjeté appel de ce juge
ment, p a r exploit du 24 octobre 1822.
Enfin , le 17 décembre 1823 , la damé Marie Auteroche, autorisée du sieur Biaise Cisterne son mari, a
lait au greffe de Clermont une répudiation pure et
simple à la succession de défunt sieur Thomas Auteroche son père, et a déclaré s’en tenir uniquement
aux dispositions et avantages portés en son contrat de
mariage.
Tel est l’état de la cause.
Ce précis n ’ayant d ’a u tre but que de fixer l ’attention
de la Cour sur les vraies difficultés du procès, et
d ’appeler sa méditation sur les principes qui doivent
servir à les résoudre, la discussion peut être brève et
simple. O11 la divisera en trois parties, et on suivra
l ’ordre adopté par le jugement.
Imputation de la dot de la dame Cisterne.
Sur ce p o i n t , il faut partir d ’une idée certaine j
c est que la donation faite à la dame Cisterne doit
avoir tout l ’effet que lui attribuaient les lois exis
tantes au tems de son contrat de mariage.
Mais à quel titre la dame Cisterne retient-elle le
don qui lui a été fait?
Ce 11e peut être comme part héréditaire, puisqu’elle
�a renonce à la qualité d ’héritière; ce ne peut donc être
que comme libéralité.
L a dame Cisterne a fait une renonciation à la suc
cession de son père : Par quelle loi l'effet de cet acte
doit-il être réglé?
Il est évident :
Que respectivement à la dame Cisterne, qui était
saisie avant le Co de, les effets de sa renonciation doi
vent être réglés par les lois existantes à l ’époque de
son contrat de mariage5
Que respectivement à ses cohéritiers , les effets de
cette même renonciationn doivent être réglés, pour
la légitime, par le Code civil, sous l’empire d u q u e l
la succession du sieur Auteroche s’est ouverte.
Cela posé, quels sont les principes?
U n arrêt célèbre les a i rré vo ca b le m en t fixés. II con
tient , à cet égard, une théorie complette; et si l ’on y
joint la lecture d ’un excellent rapport , chef-d’œuvre
d ’analise et de logique, fait par M. Poriquet, conseiller
en la Cour de cassation, on a pour résultats certains;
Que les principes de l'ancienne législation sont in
conciliables avec ceux du Code civil;
Que l ’ancienne législation donnait à chacun des
enfans , pour sa légitime , une créance personnelle
affectée sur les biens;
Que le Code c i v i l , au contraire, donne à tous les
enfans collectivem ent la succession tout entière;
Que les conséquences à tirer de cette différence sont,
sous le Code civil :
�( i3 )
-
**
Que l ’enfant n’ait part à la succession q u ’en qualité
d ’héritier.
Que s’il renonce à la succession pour s ’en tenir au
d o n , ce don reste fix é , pour lu i comme pour les
étrangers, à la quotité déclarée disponible (i).
E t comme l ’article 845 du Code civil borne à la
quotité disponible ce que l’enfant renonçant a le droit
de retenir , il devient évident que cet enfant ne peut
en même tems retenir aucune partie de la réserve
légale.
Ce dernier principe avait d’abord été contredit; mais
il a été adopté par un arrêt de la cour de R i o m ,
seconde chambre, du 8 mai 1821 (2), et par arrêt de
la cour royale de Toulouse, du 27 juin de la même
année (3 ).
Ce dernier arrêt a été rendu dans une espèce iden
tique.
Il s agissait d une f i l l e dotée sous l ’ordonnance de
1731 , qui a été autorisée, après avoir renoncé à une
succession ouverte sous l'empire du Code c iv il, h re
tenir sa donation jusqu’à. concurrence des six dixièmes
(t) Voyez arrôt L a r o q u e d e Mons ( S i r e y , tom. 18 , i re p a r t . , p. 98).
Il faut lire le Mémoire en cassation, contenant tout ce qui pouvait être
d ‘t a 1 appui du système contraire à celui adopté par la Cour de cassat '° n , et où sont invoquées toutes les autorités citées par M. DucouiTour;
une Consultation de M. Proudlion , professeur de Droit c iv il, que le
demandeur produisait à l ’appui de sa requôte; enfin le rapport d e
M. P oriq u et, dont l’opinion a été adoptée par l ’arrêt de rejet.
(2) Voyez Journal du Palais, page a 10.
( 3) Voyez S ire y , toiug 2 1 , 2e partie, page 102,
«
�des biens, ce q u i , sur le nombre de cinq enfans, for
mait la réunion de la quotité disponible et de la
légitime ancienne.
Ce droit n’est point contesté à la dame Cisterne.
Mais une circonstance précieuse se fait remarquer
dans l ’arrêt.
Il y avait un autre e n fan t, qui , comme la dame
DucoufFour, avait reçu, sous la loi de germinal an 8 ,
la quotité disponible.
Or r arrêt décida q u ’elle ne pourra y prendre part
q u ’autant que la dot du renonçant serait inférieure au
quart des biens, et jusqu’à concurrence de la diffé
rence entre ce quart et la somme donnée.
C ’est absolument le système de la dame Voyret : elle
ne demande pas autre chose , et convient que si la
donation Cisterne n atteint pas le qua rt, quotité ac
tuellement d isp onib le , la dam e DucoufFour au ra le
droit de prélever le surplus , mais rien de p lus.
Quelles sont les objections ?
_ On dit que la dame Voyret ne peut réclamer que
la légitime du Code , qui est un quart des biens.
C ’est une erreur.
D ’une part , la dame Voyret doit profiter du béné
f ic e de la renonciation Cisterne , tout comme elle
profiterait du bénéfice du rapport, si la dame Cisterne
venait k partage.
D ’ un autre côté, la dame Cisterne, renonçante,
doit compter comme enfant pour fixer la quotité dis
ponible , mais ne compte pas pour prendre part dans
la réserve légale.
�Dès-lors , la part qu ’elle aurait eue accroît a ses
deuoc sceurs, dont l ’amendement, pour chacune d elle,
est alors d ’un quart et demi, au lieu d’un q u a r t, si
cette quotité se trouve encore dans la succession.
C ’est le système de l ’arrêt Laroque, et les résultats
qui doivent nécessairement s’en déduire.
On objecte ensuite que le père ne peut perdre e x
post fa c to , et par une renonciation postérieure à sou
décès, la faculté de disposer de la quotité disponible,
quotité q u ’il n’avait pas d’ailleurs entendu livrer à la
dame Cisterne; q u ’on ne peut tromper ses intentions,
et que le droit de préciput, tenant à la morale, ne
saurait être le jouet du caprice ou de la fraude d ’un
enfant.
Plusieurs réponses se présentent :
On peut d ’abord faire remarquer que cette objec
tion n est pas spéciale pour la cause, et q u ’elle attaque
dans son fondement le système de la Cour de cassa
tion. Mais il ne s’agit pas de savoir si la loi peut être
meilleure, mais bien de rechercher quelle elle est;
encore moins de découvrir si le législateur a mal fait
de changer le système ancien , mais bien de s’assurer,
5 il l ’a réellement changé. 11 faut ici appliquer la maxime
nec nos plus' lege sapere debetnus.
On doit dire ensuite q u ’il n’y a pas de fraude à user
d ’un droit légal.
Il faut même ajouter que s’il était question d ’ap
précier les deux systèmes , on verrait bientôt que l’ancien
est plus choquant que le nouveau, puisque, sous son
�empire, l ’enfant renonçant retenait non seulement la
portion disponible, mais encore la légitime.
Mais si 011 aborde la difficulté de plus près , on
parvient à se convaincre que le droit du père de fa
m ille, qui a fait des avancemens d ’hoirie et qui veut
ultérieurement disposer de la quotité disponible , est
subordonné à l ’acceptation ou renonciation de l’enfant
précédemment doté.
E n effet , ce cas est analogue à celui jugé par la
Cour de cassation, le 19 mai 1819 (1).
Il s’agissait d’un enfant qui était décédé avant son
père, après avoir dissipé la dot q u ’il en avait reçue.
L ’arrêt décide que cette dot devait s’imputer sur la
quotité disponible.
'
Il consacre donc le principe que le droit du père
était subordonné au prédécès de cet enfant.
U n autre objection résulte d ’un arrêt du 28 janvier
1820, rendu par la première chambre de la Cour royale
de Iliom.
• Cet arrêt a décidé q u ’une donation faite en avance
ment d ’ hoirie, sous la loi de germinal an 8 , pouvait
être retenue par l ’enfant qui renonçait à la succession
ouverte depuis le C o d e , jusqu’à c o ncurre n ce , non seu
lement de la quotité rendue disponible par la loi de
germinal, mais encore d’ une portion viriledans le restant
des biens.
Pour la dame DucoufFour, on en tire la conclusion,
que le préciput fait à cette dame l ’ayant été sous la loi
�( 17 )
de germinal, doit être réglé de la même manière que
si la succession se fut ouverte sous l ’empire de cette
loi.
On répond :
Si on admet que , sous la loi de germinal, l ’enfant
renonçant pouvait cumuler la quotité disponible et la
légitime (question très-ardue, et q u i , comme on l ’a
v u , a été jugée dans un sens contraire par la Cour de
Toulouse), tout ce qui résulterait de cet arrêt, c’est
que la dame Cisterne, en renonçant., peut retenir sa
donation jusqu’à concurrence de la quotité disponible
et de la légitime, droit qui ne lui est pas contesté.
Mais on ne saurait induire de l ’arrêt, que le droit
accordé à un seul e n fa n t peut se diviser entre plusieurs j
par exemple, que l ’u n , en renonçant, peut garder la
légitime, et un autre prendre la quotité disponible.
Si la succession se fût ouverte sous la loi de germinal,
le mérite de la donation DucouiFour n ’en aurait pas
moins dépendu de l ’effet de la donation Cisterne }
aussi pour soutenir leur système , les appelans sont-ils
oblig és de déplacer la question que présente la cause.
Il s’agit uniquement de savoir s i , au moment du
mariage de la dame Ducouffour, la donation Cisterne
faisait obstacle au pré ciput,
E t non de rechercher si (mettant de côté la dona
tion Cisterne), le père pouvait donner à sa ixlle D ucouftour, et la quotité disponible et la légitime, c’esta-dire moitié de ses biens.
O r , en considérant la difficulté sous son véritable
point de vu e , on îeste convaincu que la donation
3
�,
( 18 )
faisait au préciput DucouiFour un obstacle conditionnel.
E n effet , si la dame Cisterne préférait sa légitime
légale à sa légitime conventionnelle, et venait à partage ,
sa donation ne faisait pas obstacle au préciput Ducouffour, parce q u ’elle en faisait rapport à la succession.
S i , au contraire, la dame Cisterne optait pour sa
donation, et, pour la conserver, prenait le parti de
renoncer à la succesion; dans ce cas, la donation Cis
terne faisait, au préciput postérieur DucQuffour, un
obstacle total ou p a r tie l, selon que cette donation
absorbait tout ou partie de la quotité disponible.
On dit quotité disponible, parce que l'arrêt accor
dant à la donataire qui renonce, le droit de retenir la
quotité disponible et une portion virile dans le restant
des biens, ne dit)pas laquelle de ces portions sera re
tenue la première, et que-, par argument tiré de l ’art. 8 4 5 du Code c i v i l , il p arait certain que c’est
d ’abord sur la quotité disponible que cette retenue
doit se faire.
Mais s’il fallait commencer par faire l ’imputation de
la donation Cisterne sur la légitime, de quelle légi
time entendrait-on parler ? Serait-ce de la légitime
ancienne ou de la réserve du Code civil ?
D ’abord on ne peut pas dire q u ’en retenant sa dona'
tion , la dame Cisterne ne retient que la réserve du
Code civil.
Doux raisonnemens bien simples détruiraient cette
assertion :
L e premier est que , sous le C o d e , il faut être héri
tier pour avoir part dans la réserve, et que le droit de
�rétention étant abrogé, l ’excédant dé la légitime nou
velle sur la légitime ancienne accroît nécessairement
aux héritiers ;
L e second, que la légitime étant, toujours en corré
lation avec la quotité disponible, on ne peut faire
concourir la légitime du Code avec la quotité disponi
ble ancienne.
r
‘
Tout ce q u ’on peut prétendre, c’est donc que la
dame Cisterne retient la légitime ancienne, q u i, dans
l ’espèce, est d ’un neuvième; donc tout ce qui excéderait
ce neuvième serait évidemment pris sur la quotité
disponible.
Il est convenu que la donation Cisterne doit avoir
tout l ’eiFet que lui attribuaient les lois anciennes,
c’est-à-dire, q u ’elle vaut sept neuvièmes, savoir : six
neuvièmes ou deux tiers pour la quotité disponible,
et un neuvième pour la légitime.
Il est certain que cette donation n’absorbe pas les sept
neuvièmes, mais elle en absorbe plus d ’un. L a question
est donc de savoir sur quelle portion se commencera
rimputation.
O r , l ’article 845 du Code civil, qui régit la cause,
puisque la renonciation a eu lieu sous ce Cod e, indique
que l ’imputation doit commencer par la quotité dis
ponible; e t , si la question paraissait douteuse, il
faudrait se prononcer en fa ve u r de l’opinion qui tend
à ramener entre les héritiers l ’égalité naturelle.
Mais au moins est-il certain que tout ce qui excède
le neuvième qui serait revenu à la dame Cisterne,
�Vttf
,
( 20 )
pour sa légitime, doit être imputé sur la quotité
disponible.
^
§ IIRapport du domaine de Sauvagnat.
L a question de savoir si le choix laissé au sieur
Cisterne, en cas de restitution de la d o t , le rendait
ou non propriétaire du domaine de Sau vagn at, ne
peut intéresser que les époux Cisterne, et conséquemment ne peut être discutée que par e u x , et jugée dans
leu rs intérêts. L e contrat de mariage, quel q u Jil soit,
ne saurait être opposé à des étrangers; il ne peut lier
que les époux dans leurs intérêts respectifs. On ne
saurait donc interpréter ce titre contre leur volonté,
et donner à l ’un d ’eux un droit q u ’il ne réclame pas,
et que l’autre ne saurait contredire, n 'a y an t, dans le
moment actuel , ni v o l o n t é , n i i n t é r ê t , n i capacité
jiour le faire.
Le domaine de Sauvagnat provient du sieur Auteroche de c u ju s ; il a été donné par lui à la dame
Cisterne, sa fille; le rapport fictif doit en être fait
à la succession du donateur,
dans l ’intérêt de ses
héritiers : comment ce rapport doit-il avoir lieu?
Les principes sont positifs.
Les articles 860 et 922 du Code civil veulent que
la réunion fictive ait lieu, d ’après l ’état des biens, à
l ’époque de la donation, et leur v a l e u r a u teins du
d é c è s d u do nateur.
'lo u l le monde sait, îi ce suje t, que restiination de
la chose donnée, portée au contrat, n’a jamais été prise
�( 2! )
en considération, et q u ’il est de principe immuable,
que l ’augmentation de valeur des biens donnés, par la
seule progression du tems, profite aux lcgitimaires.
Les clauses du contrat de mariage de la dame C is
terne changent-elles quelque chose à ces principes?
Ce contrat porte : « Dans tous les cas où la restitu
ii tion d e la d o t a u ra l i e u , i l sera l i b r e au futur,
a ou aux siens, de garder et retenir les biens ci-dessus
« délaissés à la fu tu re , en pa yant, à qui il appar« tiendra , la somme de 25 ,ooo fr. »
Il est évident que cette clause n ’établit point une
vente du beau-père au gendre, puisque les biens sont
donnés directement à la future, et non la somme.
On y prévoit un seul cas : c’est celui de restitution
de la d o t , qui est relatif du mari et de ses héritiers,
à la femme et à ses héritiers uniquement; e t , dans ce
cas, le mari a le choix de rendre les biens ou l ’argent.
O r , conçoit-on une vente sous une condition potes
tative delà part de l ’acquéreur? les principes répondent :
N u lla promissio potest consistere, quœ e x volontate
promissoris statuiti capit{L>. 1 1 8, § Ier, ff. D e v e r ò , ob.').
« Toute obligation est nulle, lorsqu’elle a été con« tractée sous une condition potestative de la part de
« celui qui s’oblige » (Code civi l, art. 11 74).
Si l ’on continue l ’examen du contrat, on y remarque
d abord que le cas de rapport n 'y est pas prévu, et
q u ’il ne pouvait l ’ètre, puisque la future renonçait à
la succession.
Mais deux autres événemens occupent la pensée du
père.
lOf
�1^
*p\
( 22 )
, L e premier est celui du décès de l ’ un des futurs
sans enfans; et alors les constituans stipulent le retour,
non de la somme, mais des biens.
L e second est relatif à la survie des constituans aux
époux laissant des enfans; et alors il est permis aux
constituans de répartir, à leur gré, le profit de leur
constitution entre leurs petits-enfans.
Ainsi, il est démontré que l ’ensemble du contrat,
les* termes de la clause, n ’annoncent q u ’un simple
avantage éventuel de la future k son futur.
Ou ne voit donc rien dans la cause qui puisse faire
déroger aux règles tracées par les articles 860 et 922
du Code civi l, puisqu’il faudrait pour cela une vente
bien positive, "et que, dans l ’espèce, il n ’y en a pas
l ’ombre.
«
11 faut ajouter que Papon rapporte un arrêt, où le
gendre avait reçu un i m m e u b le en paiement de la dot
pécuniaire de son épouse. Venant à partage, il voulait
rapporter la dot; mais il fut condamné à rapporter la
valeur de l ’immeuble au moment du décès.
Il
est actuellement démontré que les premiers juges
ont eu raison de dire :
Que la première clause du contrat de mariage de la
dame Cisterne , était étrangère aux autres enfans
auxquels le père n’avait pas voulu porter préjudice;
Que cette clause n’était q u ’un m o tifd ’encouragement
offert au m a r i , et que d ’ailleurs elle devait être res
treinte au cas q u ’elle prévoit;
Q u ’ enlin les clauses subséquentes e x p l i q u a i e n t par
faitement la première , et a n n o n ç a i e n t assez que les
�(
5.3
)
l< p
conslituans n ’avaient jamais voulu aliéner le domaine
de Sauvagnat d a n s leurs interets et dans celui de leurs
autres enfans.
' ,
§ HT.
R a p p o rt d e la rente d u e p a r le s ie u r V o y r e t .
La rente ayant été remboursée en assignats, doit-elle
être rapportée valeur nominale ou seulement valeur à
l ’échelle.
Le rapport, valeur à l ’échelle, est établi par l ’art. i 5
de la loi du iG nivôse an 6 , ainsi conçu : « Les res« titutions seront faites, par le mari, en valeur ré« d u i t e , pour tout ce q u ’ils auront reçu en papier« monnaie ». L ’article 16 ajoute : « Il en sera usé
« de même dans le cas du rapport des dots. »
L ’article 855 du Code civil dispose «que l ’iinmeuble
« qui a péri par cas forfuit, et sans la faute du
« donataire, n ’est pas sujet à rapport. »
M. Merlin, dans son Répertoire, v ei'bo Rapport,
§ 8 , n° 8 , dit : « Le rapport des rentes, soit fon« cières , soit constituées, se règle par les mêmes
« principes que ceux des héritages. Les rentes doivent
« d o n c , comme les héritages, être
rapportées
en
« espèce, et elles sont, comme eux, aux risques de
« la succession, mais sous la garde du donataire. »
Dans 1’espèce, le r em b o u rs em en t a été forcé : il
était inévitable-, et le sieur Y oyret ne p o u v a it , sans
*f> \
�( >4S )
s’exposer aux plus grands dangers, se refuser à le
recevoir.
^
Une loi du i er avril 1793 prononce des peines graves
contre ceux qui refuseraient les assignats 5 pour la
première fois, c’est une amende de 3 oo francs et de
six mois de détention; en cas de r é c i d i v e l ’amende
était du double, et la peine corporelle de vingt années
de fers.
D ’autres lois des 21 floréal an 2 et 3 pluviôse an 3
infligeaient des peines à ceux qui discréditaient les
assignats ; et pour q u ’il ne manquât rien à cette
cruelle législation, un tribunal révolutionnaire pou
vait à chaque instant en faire l ’application, et même
prononcer impunément, et suivant ses caprices, des
peines plus dures que celles de la loi.
C ’est dans ces circonstances, que le sieur Voyret a
reçu le re m b o u rs em e n t de la rente due à la dame son
épouse. Sa dernière quittance est du 24 nivôse an 3 ;
et le tribunal révolutionnaire n ’a été supprimé que le
12 prairial de la même année.
Com men t aujourd’hui pourrait-on demander compte
au sieur Voyret et à son épouse de ce remboursement,
et les en rendre responsables ? N ont-ils pas code a la
nécessité 3 à une force majeure ? Ce remboursement
n ’est-il pas un cas fortuit q u i , sous aucun rapport, ne
peut-être imputé à faute au sieur Voyret ?
Peu importe le nombre de quittances que le sieur
Voyret peut aVoir données, les formes q u ’il a employées,
�les expressions dont il s’est servi, les engagemens q u ’il
a pu y souscrire! Il était naturel qu ayant une perte a
éprouver, il la rend it la plus légère possible, et q u ’il
f i t tous ses efforts pour obtenir au moins tout ce que
la loi lui accordait. Dès que la rente n ’avait été rem
boursée q u ’au denier vingt , le sieur Voyret devait
exiger un supplément de remboursement, autrement on
lui aurait fait un reproche de ne l ’avoir point demandé.
T o ut se réduit donc à voir si ce remboursement était
fo r c é .
O r , les circonstances du tems, les lois alors exis
tantes , les aveux consignés dans les actes de famille se
réunissent pour attester ce fait.
On connaît les lois. Elles existaient à l ’époque du
mariage de la dame V oy re t; aussi le sieur Àuteroche
savait-il que cette rente devait être remboursée, puis
que ce remboursement lui avait été offert à lui-méme
peu avant le mariage de sa fille.
Toute la famille a reconnu ce fait; il est consigné
dans le contrat de mariage de la dame Ducouifour
elle-même : le père y a fait écrire que le rembourse
ment des rentes avait été fo r c é . Comment la dame
Ducouifour pourrait-elle équivoquer aujourd’ hui sur
un iait reconnu par son père et par elle-même?
On s’arrête ici. Le sieur Voyret croit avoir atteint
le but q u ’il s’est proposé : il ne voulait autre chose
que resserrer dans le cadre le plus étroit les faits et
les moyens principaux de sa cause, sachant bien q u ’il
4
�(26
)
suffi t de fixer l'attention de la Cou r sur les questions
même les plus ardues, pour être toujours sûr d ’en
obtenir une décision conforme aux principes,
à la
saine doctrine, et aux règles de la Justice.
Me Jn - C H. B A Y L E aîné, ancien A vocat.
Me M O U T O N - L A B A S T I D E , A v o u é-L icen cié.
RIOM ,
IM PRIM ERIE
D E S A L L E S , P RES L E P A LA IS D E J U S T IC E .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Auteroche, Marguerite. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bayle
Mouton-Labastide
Subject
The topic of the resource
contrats de mariage
dot
assignats
renonciation à succession
successions
pays de droit écrit
conflit de lois
avancement d'hoirie
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse pour Dame Marguerite Auteroche et le Sieur Voyret, son mari, Docteur en médecine, intimé ; contre Dame Marie Auteroche et le sieur François Malafosse Ducouffour, son mari, Adjudant des Gardes du Corps, compagnie d'Havré, Chevalier des ordres de Saint-Louis et du Phénix, Appelans ; en présence de Dame Marie Auteroche et de sieur Blaise Citerne-Delorme, son mari, aussi Intimés.
Annotations manuscrites : « 8 avril 1824, 2nde chambre, arrêt confirmatif, journal des audiences, p. 255. »
Table Godemel : Donation : 17. quels doivent être les effets d’une donation, faite avant les lois nouvelles, par un père mort depuis le code civil, à une enfant qui renonce pour s’en tenir au don ? La donation fait-elle, nonobstant sa rémunération, nombre parmi les héritiers ; et peut-il retenir l’objet donné, jusqu’à concurrence de la légitime et de la quotité disponible, telles qu’elles étaient fixées par la loi en vigueur au moment du contrat ?
18. quel doit être le sort d’une donation du quart en préciput, faite à un autre enfant, postérieurement à la loi de germinal an huit, lorsque l’objet de la première donation est inférieur à la quotité disponible ancienne, et peut-être même à la disponibilité nouvelle ? - le second donataire, peut-il dans son intérêt, avec les héritiers à réserve, faire considérer le premier donataire comme légitimaire, prendre la quotité disponible au moment de la seconde donation, en imputant sur la légitime du premier donataire, les objets que celui-ci retient ? Dot : 4. dans l’ancien droit un immeuble donné en dot, avec estimation et pouvoir au mari de le retenir pour la somme indiquée, est-il présumé vendu ?
en supposant qu’il y ait eu vente, le don, devenant sujet à un rapport fictif, doit-il être estimé valeur du décès du père ? Rapport : 8. une rente foncière donnée en avancement d’hoirie doit-elle être rapportée, valeur réduite seulement, si elle a été remboursée en assignats au mari de la donataire, bien que le remboursement ait été accepté sous contrainte, qu’il n’ait pas été accompagné de remploi, et que la nullité du remboursement n’ait été mise à couvert que par le fait du mari ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1764-1822
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2607
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2606
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53522/BCU_Factums_G2607.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauvagnat (63410)
Perrier (63275)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
avancement d'hoirie
conflit de lois
contrats de mariage
dot
pays de droit écrit
renonciation à succession
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53499/BCU_Factums_G2513.pdf
19ce6dad3781c767a5c19631a5f29bd2
PDF Text
Text
PRECIS
EN RÉPONSE,
P O U R M a r ie - F r a n ç o is e - M é la n ie de B A I L L E ,
et Hippolyte de L A G R E V O L , Procureur du Roi
à Yssingeaux, son m ari, intimés/
COUR R O Y A LE
DE RIOM.
2 8 CHAMBRE.
ûjyù\'huAtyff
aKtaTu qn\i
^ ^XuuuLh
C O N T R E C l a u d e et M a t h i e u M I J O L L A S , fr è r e s, / - f “ * *
appelans ;
/
7
p-W A.
EN PRÉSENCE
D eJ
,
n
ea
J e a n - P i e r r e C H A M B O U V E T , et J e a n
R O M E Y E R , tuteur de ses en fans mineurs} d'avec
Jeanne Cham bouvet, aussi intimés.
Les lois romaines avaient prévu le cas où l ’on serait
embarrassé de décider si une disposition de dernière
volonté devait être considérée comme testament ou
comme codicille.
Cette distinction était de la plus
�( > )
grande importance; car il était de principe que lorsque
le testateur avait annoncé l ’intention de faire un tes
t a m e n t , l ’acte devait être parfait comme testament,
et q u e , quoiqu’il eût des solennités suffisantes pour
valoir comme codicille, il demeurait néanmoins sans
effet, s’il n ’était accompagné de toutes celles requises
au testament, à moins q u ’il ne contint la clause codicillaire (i). S'il arrivait, d ’ailleurs, q u ’une personne
laissât à sa mort deux dispositions, il était bien im
portant de décider si c’étaient deux testamens j car alors
le premi er était révoqué de plein droit, même sans
clause révocatoire c o n t e n u e dans le second; si, au
g.
contraire, ces dispositions étaient des codicilles, ou s’il
-'X'
*c
y avait un testament et un codicille, le dernier acte
ne révoquait pas le premier.
On trouve dans ces lois non-seulement des règles
générales pour discerner ces sortes d ’actes, mais elles
f ournissent encore des solutions p our des espèces par
ticulières. Ce sera à l’aide de ces principes, que nous
chercherons à déterminer la nature et les caractères
de l’acte qui sert de titre aux appclans. Nous verrons
ensuite quelles sont les modifications q u ’y ont ap
portées les lois qui ont précédé le Code civil 5 enfin
nous examinerons si cet acte pourrait cire validé ?
même en le considérant comme codicille. Telle est la
lâche que nous avons à remplir.
(1) L. 29, nu I)., f/ih' tcsl.fac. poss. ; \ \ , de vuljj, et ¡ni/iit• subit. /
L. i T* , de jure codicil.; et 8, au C. de codidllii.
�( 3 )
FAIT S.
Antoine-Mar in Je Baille avait passé une grande
partie de sa vie dans la compagnie de Jean-Anloine
de Baillej sieur des Crozes, son frère : ils avaient vécu
dans la meilleure union. Le dernier, héritier, par
testament, d ’Antoine de Baille, seigneur de Malmont,
son oncle, avait laissé jouir Antoine-Marin de celte
succession.
Il mourut en l ’an 8 , laissant une fille
Unique, à peine âgée de deux mois. Cette mort fut
pour Antoine - Marin le commencement de grands
malheurs. Arrivé à l àge de soixante-seize ans , des
personnes trop avides captivèrent sa c on f ia nc e , a u x dé
pens de sa nièce q u ’il chérissait, mais qui était trop
faible pour pouvoir rien opposer aux pièges qui lui
étaient dressés. Il fut victime de cette facilité déplo
rable; il périt, en i 8 o 5 , d ’une manière tragique, âgé
de près de quatre-vingt-deux ans.
L a providence veillait aux intérêts de Mélanie de
Baille, alors âgée de cinq ans. Les dispositions que
font valoir aujourd hui les appelans leur parurent sans
doute irrégulières, puisqu’ils ne se présentèrent point
au partage judiciaire de la succession, qui eut lieu
entre Mélanie de Baille et les frères et sœur Cliaml)ouvel. On doit croire que c’est par erreur q u ’ils
disentavoir ignoré les dispositions dusieur d c B a il le ( i ) .
(*) Pages 4 et 5 du Mémoire <lcs appelans.
�On leur prouverait que l ’un d ’eux, Claude Mijollas,
était présent a la confection du testament, reçu Pouzol,
notaire.
Ils gardèrent le silence pendant plusieurs années.
Ce ne fut que le 18 décembre 1 8 1 2 , plus de sept
ans après le dèces, q u ’ils firent connaître, pour la
première fois, leur droit à la succession, en décla
ra n t, par leur exploit de demande, q u ’ils étaient co
héritiers de f e u Antoine de Iia ille -M a n n , suivant son
testament, reçu Rocher, notaire p u b l i c l e 17 frim aire
an 11 , et en demandant, en cette qualité, le partage
de ses biens.
L ’acte du 17 frimaire est ainsi conçu. Il importe de
le faire connaître en entier.
L ’an onze de la république française, et le dix-sept frimaire avant
m id i, par-devant nou s, notaire public p a ten té, et présens les témoins
soussignés, fut présent citoyen Antoine de Baille-Marin , du lieu de
C hevalier, commune tl’Araiiles , liubitnut h présent nu clief-liou dudit
A ra u le s , maison de feu son frère des Crozes , de son gré et vo lo n té, a
donné et d o n n e , par donation ¿1 cause de m ort, à titre d ’institution et
icuvrcs pies , savoir : aux pauvres de Dieu la somme de cinq cents francs,
a eux payable et distribuable après son décès;
p lu s , la somme de
soixante francs, en acquittement de messes par les citoyens piètres qui
desservent l’église de IN’otrc-Damc du P u y ; plus, le quart de ses entiers
biens présens et à v e n ir , aux citoyens Cliambouvet de M onistrol, à sc
partager entr’e u x , au nombre de trois petits-neveux et nièces; plus,
autre quart aux citoyens Claude M ijollas, du lieu de l ’O l l i e r , c o m m u n e
de Saint-Hostien ; Mathieu M ijollas, son frère, et Catherine T a u , leur
mère ; ledit Mathieu du lieu de Tou rcille , commune de Glavenas , à
partager ensemble par égales porjjbtns. Ce qui a été fait et r é c i t é a u d i t
lieu d ’Arnules, maison dudit feu des Crozes, à lui lu en entier a u - d e v a n t
d u lit OÙ il c»t couché , en présence Ucs citoyens Jacques J o u b c it, Louis
�Chevalier, L ouis R e c h à tin , cultivateurs dudit l i e u ,
signés,
de ce
enquis; Joseph Joubert-Cougnac et Claude Descours , aussi cultivateurs
dudit lieu d’A rau le s, qui ont déclaré ne savoir sign e r, de ce enquis. L e
disposant de Baille a déclaré ne pouvoir sign er, à cause de son indispo
sition , de ce enquis.
L a qualification que les appelans eux-mêmes ont
donnée à cet acte dément l ’assurance avec laquelle ils
soutiennent aujourd’hui q u ’il porte la physionomie
d ’un codicille ; q u ’on a évité h dessein le mot testa
m ent; que les mots à titre d ’institution y sont indiff’érens. Ils ont répété trop souvent cette qualification
de testament dans leur procédure, pour q u ’on puisse
croire que c’est légèrement et par inattention, q u ’ils
ont ainsi considéré l ’acte.
Les héritiers du sang en ont demandé la nullité ,
c o m m e contenant une double contravention à Fart. 5
de l ’ordonnance de 1 7 3 5 , par le défaut d ’ un nombre
suffisant de témoins, et par le défaut de prononciation
des dispositions par le testateur; ce q u i , aux termes
de l ’article 47 de la même ordonnance , devait en
entraîner la nullité. Les premiers juges l ’ont prononcée
par les motifs suivans :
Attendu quo les donations , à cause de m o r t , ne pouvaient avoir
aucun effet, môme dans les pays où elles étaient expressément autorisées
avant le C o d e c iv il, que quand elles avaient été faites dans les mômes
foirnes que les testainens et les codicilles; q u ’en fixant ces formalités, le
législateur en a ordonné l ’exécution , à peine de n u l l i t é j
A ttendu qu’en appliquant ces principes à la prétendue donation dont
il s’a g i t , on n'y trouve pas qu ’elle ait été dictée ou prononcée, ou enfin
d autres termes équipollcns , d’où l’on puisse induire que M a r i n de U a i l l o
ait
prononcé
ses
volontés au notaire
rcccvant ; q u ’on en peut conclure
�'I
* «* ►
»
'
(G )
au contraire q u e c ’ est le notaire q u i p a r l e , et n o n le d o n a te u r ; q u ’ ainsi
elle se trouve en co ntravention à l ’ord o nnan ce de 1^35 ;
A t te n d u q u ’ en appréciant cet acte d ’après les termes dans lesquels il
est conçu , on ne peu t d ou ter q u e l ’ in te n tio n d u sieur M arin de B aille a
clé de faire un testament n u n c u p a t i f , puisqu’ il d o n n e , à litre d ’ in stitu
tion , à ceu x qui sont appelés à son h é r é d i t é , la part qu i se trouve à sa
disposition ; que cette intention a été ég alem en t partagée par les d em an
deurs qui agissent dans la dem an de in trod u ctiv e d ’ in s ta n c e, en qu a lité
d ’héritiers d u sieur M arin de B aille ; qu e , dans ce cas , cette disposition
se trouve en opposition avec l ’article 5 de l’ordonnan ce de 1 7 3 5 , q u i
v e u t im périeusem ent q u ’elle soit dictée par le te s t a te u r , en présence de
sept témoins , y compris le n o t a i r e , tandis q u e , dans cet a c t e , il ne s’en
trouve qu e six ;
A t te n d u qu e , si on considérait cet acte com m e co d icille , il serait
ég alem en t contraire à l ’article c i t é , p o u r ne pas y rencontrer l ’ expres
sion non é q u iv o q u e de la dictée de ses volontés au n o t a i r e , et n être pas
r evêtu de la clause codicillaire., q u i ne peu t être su ppléée, co n form ém en t
à la loi 1 1 , au C o d e D e Testam entariâ manumissionc.
D ’ après
ces m o t i f s ,
le trib u n al ju g ea n t en prem ie r ressort, e t c . ,
déclare l ’acte d o n t il s’agit n u l et de n u l e f f e t , et r e n v o i e , etc.
L e d e r n i e r m o t i f , c o m m e o n le v o i t , r e n t r e cla n s le s
deux premiers, c’est-à-dire que, quand même on con
sidérerait l’acte comme codicille, il serait nul, pour 11e
pas contenir l’expression non équivoque de la dictée
des
volontés au notaire ; mais que, d ’ailleurs, il 11e peut
valoir comme codicille, puisqu’il ne contient pas la
clause codicillaire, q u ’011 ne peut suppléer. Voilà évi
demment ce q u ’ont voulu dire les premiers juges, et
ce q u ’ont bien compris les appelans, quoiqu’ils le
déclarent inintelligible.
Quant aux deux autres motifs, nous examinerons,
en premier lieu, celui tiré du défaut de prononciation,
�(
7
)
parce q u ’il s’applique aussi bien à l ’acte considéré comme
codicille que comme testament.
On ne contestera pas, sans doute, que la pronon
ciation ne soit une formalité commune aux testamens
et aux codicilles. C ’est, comme dit Furgole, Vunique
voie certaine p o u r connaître sûrement la volon té' de
c e lu i qui dispose , et obvier a u x captations et sugges
tions. Voyez chapitre 1 2 , nos 11 , 12 et i 5 .
L a définition que les lois romaines avaient donnée
du testament prouve évidemment q u ’on regardait cet
acte comme une loi qui ne devait pas être moins so
lennelle que celles qui concernaient l ’intérêt public.
Testamentum
est v o lu n t a t i s
n o str æ j u s t a
senlentia
Loi i re,
au D . , q u i test. f a c . p o ss. (i)- I l fallait donc que
c el ui qui la dictait s’exprimât de la même manière que
d e eo q u o d q u is p o s t m o rtem su a m J i e r i v u l t .
le législateur qui proposait une loi à tout le peuple
romain.
L ’ordonnance de
1735 établit la nécessité de la
prononciation de la manière la plus formelle;
à la
vérité, et c est le grand argument des appelans , elle
n exigea pas q u ’il fût fait mention de cette formalité;
mais la nécessité de rencontrer dans un testament la
preuve que le défunt avait manifesté sa volonté par
es expressions dispositives sorties de sa bouche, tenait
trop a la substance même du testament, pour avoir
( t ) Godcfroi ajoute sur celte loi : Q ualcnùs d id tu r scntcntia testa m entum , haberc vim le gis dici p o tc sty
�besoin d ’être prescrite par la loi. Ricard avait dcjà
démontré cette nécessité au chapitre 5 , partie i re,
section 3 : « Je passe encore p lu s avant et crois que
3
« quand la coutume ne requerrait pas précisément
« q u ’il fût fait mention, par le testament, des so
it lennités q u ’elle désire être gardées, comme il a été
« dicté, nommé, lu et relu, e t c . , que les légataires
« seraient non recevables à les vouloir vérifier par
«
«
«
«
témoins, et q u ’il y aurait toujours nécessite' que
la preuve s’en rencontrât dans le testament même ,
parce que la coutume désirant, pour la validité d ’un.
testament, que ces solennités y interviennent , il
« n ’est point parfait, à moins q u ’i l ne se reconnaisse,
« p ar l ’acte même , q u ’i l est revêtu des form es près« crites par la lo i qui lu i donne son effet. »
Il s’exprime de même au même chapitre, sèct. 6 :
« Comme il est de principe et de doctrine indubi« t a b l e q u e c ’est à c e lu i q u i veut tirer avantage d ’un
« acte, de faire apparoir q u ’il est revêtu de tout ce
« qui est nécessaire pour le faire subsister, ceux qui
« prétendent se prévaloir d ’un testament, dont une
« formalité essentielle n ’est pas constatée par l’acte
« même, ne pouvant établir, par des moyens extrin« sèques, l’existence de cette formalité, il s’ensuit que
« le testament doit demeurer sans eifet. »
L ’ordonnance
de
1735
n’était
pas entièrement
muette îi cet égard. D ’abord l ’article a 3 déclare que
les mots dic té, nommé, etc. , ne sout point sacra
mentels, mais il suppose évidemment que l ’on doit
�M
(
9
)
trouver dans l ’acte la preuve que cette formalité a été
remplie. L ’article 48 prononce la peine de mort contre
les notaires et témoins qui auraient signé les testamens,
codicilles, ou autres actes do dernière volonté, sans
avoir vu le testateur, et sans V avoir entendu prononcer
ses dispositions. Pour appliquer cette peine, il fallait
lnen s’inscrire en faux contre le notaire et les témoins;
e t , pour q u ’il y eût lieu à l ’inscription de fa ux, il
fallait bien que l’acte énonçât, d ’une manière qu el
conqu e, une fausseté; sans cela, aurait-on osé appli
quer la peine de mort? L e notaire et les témoins
ne se seraient-ils pas excusés sur leur bonne foi, en
prétendant q u ’ils avaient connu , d ’une manière cer
taine, la volonté du défunt, quoique non manifestée
de sa propre bouche? Les dispositions de la loi auraient
donc été violées impunément ? et q u ’on ne s’imagine
pas que ce danger ne fut que chimérique. Il a existé
des notaires assez ignorans ou d’assez mauvaise foi,
pour rédiger des actes de dernière volonté, dont les
dispositions n’avaient été exprimées, par les mourans,
que par signes ou par monosyllabes.
Il
n y a donc pas de formalité plus essentielle dans
le testament nuncupatif, que la dictée ou la pronon
ciation; sans elle, il n ’y a point de testament; et si
elle ne résulte pas des termes de l ’a c t e , il n’y a point
de preuve légale de l'accomplissement de cette for
malité, et par conséquent de la volonté du testateur.
Aussi Fuigole, chap. 2 , sect. i 11^ no 4 , dit <• qu'il
* f aut f/n d paraisse que le testateur en a d icté le
’ H
�«< contenu, ou du moins il est nécessaire q u ’il n’y ait
« point de preuve ni de circonstance qui puisse faire
« présumer que le testatenr n’a pas dicté sa volonté à
« l ’écrivain ; car ce serait alors, non la volonté du
« testateur, de laquelle dépend la force et l'efficace
« du testament, mais celle de l ’écrivain j et ce serait
« en quelque façon tester par procureur, ce que les
« lois ne permettent pas, puisqu’elles n’ont aucun
« égard aux dispositions de la volonté d ’autrui ». Voir
le même chap. 2 , sect. 3 , n° 8.
L ’annotateur de R i c a r d ne s’e xpr ime pas d une
manière moins positive, sur le cliap. 5 , addition 3 ,
noie i re. Il dit « q u 'il a v u attaquer avec succès un
« testam ent, par lequ el le notaire avait dit q ue ,
« s’étant transporté auprès d ’un testateur, et ayant
« été par lui requis de recevoir son testament.,
il
« l ’avait rédigé ainsi q u ’il suit : Il ve u t, etc. ». Ces
expressions, nous l ’avons rédigé, il v eu t, dans la
Louche du notaire, parurent prouver que les disposi
tions n ’avaient pas été prononcées par le testateur et
sous sa dictée, mais que la rédaction était l ’ouvrage
du notaire.
Aussi le tribunal d ’appel de Montpellier, par juge
ment du f) fructidor an 9 , rapporté dans les A nnales
du D roit fr a n ç a is,
de G u y o t , de l ’an
1 1 , a-t-il
annullé une donation à cause de mort, parce q u ’elle
n ’avait pas été dictée ou prononcée^ e t , plus récem
ment, la Cour royale de Riom, par arrêt rendu, le
10 juillet 1820, à la première chambre, a annullé la
�C 11 )
donation, à cause de mort, d ’Antciae V a n n i e r , par
acte reçu Joucerand, notaire, le 10 nivôse an 10,
faite dans la forme de testament, en adoptant les
motifs des premiers juges. Cette donation à cause de
mort commençait ainsi : « Est comparu Antoine
« Varinier............... .. lequel, étant malade, a donné
« et donne, à titre de donation à cause de mort, à
« Marie-Thérèse Barrol, sa femme, etc. »
L ’acte se terminait ainsi : « C ’est la dernière do« nation à cause de mort et disposition de dernière
« volonté dudit Antoine Varinier, et, comme telle,
« veut que vaille ou par testament, codicille, ou par
«
«
«
«
toute autre meilleure forme que de droit pourra
valoir, cassant et révoquant, ledit Varinier, toutes
autres donations et dispositions q u ’il pouvait avoir
ci-devant faites, voulant au contraire que la pré-
« sente, dont.............. sorte à effet et soit seule exé« icutée, suivant sa forme et teneur,' en faveur de
« ladite Marie-Thérèse B a rro l, sa fe m m e, et de la■
< dite Marie Varinier, sa sœur, les instituant..'.......
« pour ses héritiers particuliers. E t ainsi vo ulu.........
« E t de nouveau lecture lui a été faite en entier, par
11 nous, dit notaire, de sa présente donation, à la“ fP lclle il a persisté en présence de, etc. »
Les moiils des premiers juges, qui ont été adoptés
pai l.i Cour pour la nullité de cet acte, sont : « Ou il
« résulte de la donation à cause de m ort, du io
« mvose an n i ,
que le donateur n ’en a p c i i t pro-
« nonce les dispositions , puisqu’au commoi.cjinent
�« dudit acte, c’cst le notaüe seul qui déclare que
« Vannier,
de gré et volontairement, a donné et
« donne, à titre de donation, à cause de mort,
et
« q u ’en se contentant d ’employer ces expressions, qui
« étaient usitées chez les notaires pour toutes les
« autres espèces de donations, Joucerand, notaire ,
« ministre de l ’acte, n’a point rempli le vœu de la
« loi j q u ’en vain on remarque dans le corps de l ’acte
« ces mots : C ’est la dernière, etc. 5 bien loin d ’y
« reconnaître la volonté dictée par le donateur, on
« n ’y découvre que le langage du notaire........; que
« les autres clauses de cette d o n a t i o n à cause de mort
« annoncent clairement que le donateur n’a rien dicté
« ni prononcé, et
que ses intentions ont pu être
« connues du notaire par toute autre voie que celle
« exprimée par sa bouche, etc. »
Examinant l’acte du 17 frimaire an 11 , d ’après les
dispositions de lu l o i , la do ct ri ne des ail leurs et la
j u r i s p r u d e n c e , on ne voit rien qui justifie que le
notaire ait écrit les volontés du testateur sous sa
dictée; on v o it , au contraire, que c’est
le
notaire
seul qui parle, en disant que Marin de B a ille a
donné et donne ; il n’y a pas un seul mot qui annonce
qu ’ il ait déclaré lui-méme sa volonté, pas un seul
mot qui apprenne de quelle manière il a (ait connaître
q u ’il voulait disposer de scs biens. Lorsqu’on arrive
ensuite à la menlion de la lecture, il semble que le
testateur a été étranger aux dispositions q u ’on lui
attribuej il ue déclare point q u ’il y persiste, ni rien
�( .3 )
qui annonce une approbation de sa part. On ne voit
la preuve de sa volonté ni dans sa signature, ni dans
aucune déclaration sortie de sa bouche.
Les mots f a it et récité désignent des opérations du
notaire, et non du disposant. On ne récite que ce que
l ’on a étudié et appris de mémoire, ou ce que l ’on
lit sans l ’avoir étudié ; on ne peut pas dire q u ’un
disposant récite ses dispositions : il les prononce à
mesure q u ’elles se forment dans son entendement.
L ’opération de la prononciation, telle q u ’elle est dé
crite par la loi (ordonnance de 1 7 3 5 , article 5) , et
qui consiste, de la part
du disposant, à exprim er
intelligiblem ent ses dispositions en présence cles té
moins et du notaire, fjai les écrit à mesure que le
disposant les e x p r i m e ne saurait être décrite par les
mots f a it et récité, d ’autant plus que, dans leur style
ordinaire, les notaires les employaient jadis (ainsi
qu on peut le prouver) pour tous les actes, même pour
les simples contrats
prononciation.
où la
loi
n’exigeait
aucune
Ainsi les premiers juges n’ont pas créé une nullité
arbitraire, en déclarant l ’acte nul parce q u ’il ne pa
rait point être l’ouvrage du disposant; ils o n t , au
contraire, fait une juste application des articles
5 ,
23 et 47
l'ordonnance. Us n’ont pas exigé une
mention que la loi ne prescrit pas; mais ils ont re
connu, avec raison, que la contexture de l’acte
faisait
présumer q u ’une formalité, aussi essentielle que la
dictée ou la prononciation, n ’avait pas été
remplie;
et
�(
«4
)
certes, ce n ’est pas là l ’eiTet d ’une distraction;
ce
n ’est pas le Code civil qui leur a donné l’idée de cette
nullité ( i ) , pas plus q u ’en l ’an 9 il en avait donné
l ’idée à la Cour de Montpellier.
Ce moyen nous parait victorieux.
Mais allons plus l o in , et prouvons aux appelans que
ce n’est pas nous qui faisons la guerre aux volontés
du sieur de Baille (2), mais q u ’eux-mêmes, en vou
lant faire passer pour codicille un acte q u ’il a entendu
faire comme testament, contrarient ses intentions;
car s’il est vrai q u ’il ait voulu faire un testament, il
est plus prudent de rendre sa disposition sans effe t,
que de lui en faire produire une qui ne serait pas
dans sa volonté. E st magis tolerabile} reddi inutdem
lestaloris dispositionem ,
quam aliq u id adnutti ut
v a lea i contrà ejus voluntatem .
Mantica, lib.
2 ,
lit. 3 , de conject. ult. volunt.
rap
porter tous les textes des lois romaines qui établissent
Nous
serions i n é p u i s a b l e s ,
si
nous v o ul i o n s
q u ’un testament imparfait ne peut pas, sans le se
cours delà clause codicillaire, être converti en codicille,
bien q u ’il contienne toutes les formalités prescrites
pour le codicille; q u ’il nous suffise d ’observer que dans
la loi 1 1 , au C . de tcslamcntarid manumissionc} il
est dit que le legs même de la liberté à un esclave
( , ) Voyez le Mémoire dos nppelans, page 10.
(a) Voyez page 38 du Mémoire des appelans.
�( . 5 )
demeurerait n u l , si la nullité du testament n ’était
réparée par la clause codicillaire; et cependant on sait
combien, chez les Romains, les lois favorisaient la
liberté des esclaves. S i ju r e non subsistit testamentum,
in hoc nec liberlales (chm non fu isse ad jectu m } ut
3
pro co d icillis scriptum valeret , proponas)
rectè
datas constabit. L a raison q u ’en donnent les inter
prètes, c’est que lorsqu’on a négligé les formes de
l ’acte q u ’on a en v u e , on est censé n ’avoir voulu faire
aucune disposition. L a loi présume alors q u ’on a ré
digé à dessein un acte défectueux, pour se dérober
à des suggestions importunes, en paraissant y céder.
Testator, qui omittit débitas sole militâtes ^ prœsumitur
suce 'voluntatis pœ nituisse, et elusorium aclum conJicere voluisse. M antica, loc. cit.
Voyons donc si l ’acte du 17 frimaire an 11 peut
être considéré autrement que comme un testament.
Nous ne suivrons pas les appelans dans leur savante
dissertation sur l ’origine et les progrès des différentes
dispositions de dernière volonté, qui furent admises
en pays de droit écrit. Il nous suffit de savoir, pour
la cause qui nous occupe, q u e , depuis l ’ordonnance
de 17.31 , les donations à cause de mort 11e furent plus
que des tesiamens ou des codicilles; elles cessèrent
d être une manière particulière de disposer de scs
biens, excepté pour les fils de famille, q u i, comme ou
sait, en pays de droit écrit, ne pouvaient pas faire de
testamens ni de co d ic ille s, mais qui pouvaient faire
des donations à causa de m ort, du consentement de
�/
( i <5 )
leur père. Ce f u t donc p our leur laisser cette ressource,
dit M. Grenier, T ra ité des D onations} discours his
6
torique, page g , que la lo i n établit que l ’identité
des form es de la donation à cause de m ort, avec
celles du testament ou du c o d ic ille ,
mais q u e lle
n a lla pas ju s q u ’il Vabolir.
Aussi, depuis cette ordonnance, ou qualifia indis
tinctement de donations à cause de m ort, des actes
qui ne renfermaient que des legs, d ’autres qui contetcnaient des institutions d ’héritier, des substitutions,
et, en général, les actes dont les dispositions ne de
vaient avoir leur effet q u ’au décès du disposant. Il
arrivait même que les notaires ne qualifiaient pas la
disposition., et se bornaient à dire que le défunt avait
déclaré disposer de telle et telle manière,
etc. II
fallait alors recourir à la nature de la disposition ,
pour savoir quelle était la forme q u ’on avait du em
ployer. Il est évident que si l’acte n’avait point de
dénomination, ou s’il était qualifié de donation à
cause de mort, et q u ’il ne contint que des legs ou
des dispositions particulières sans institution, il pou
vait valoir dans la forme du codicille; mais que si,
au contraire, on trouvait dans cet acte une institution
d ’hérilier, une substitution, une exhérédation, ou,
en général, ce qui ne pouvait convenir q u ’au testa
ment, l’acte, de quelque manière q u ’il fut qualifié,
ou n ’eùt-il pas même de dénomination, devait être
considéré comme testament, et devait en avoir les
formes.
�(
x7
)
Ceci nous conduit à examiner quels étaient, d ’après
les lois romaines et d ’après l’ordonnance de
iy3 5 ,
les caractères du testament, et si ces caractères peuvent
et doivent convenir à l ’acte qui fait l ’objet du procès.
Il était de principe q u ’on ne pouvait faire d ’iustilution
d ’héritier que par un testament : cette institution était
la base et le fondement du testament; son véritable
caractère était Vinstitution fo rm elle ( V h é r it ie r q u i,
de sa nature, était universelley et, par co d icille
comme par donation à cause de m ort, on entendait
tous actes de dernière v o lo n té, par lesquels il n ’y
avait pas d ’héritiers de nommés, mais seulement des
legs lim ités a u x objets dont on disposait. Traité des
Donations, lo c. c i t ., page 61.
L ’institution d ’héritier produisait deux effets bien
importans : le premier était de saisir l'institué
de
l ’hérédité, du moment du décès, d ’après la maxime
générale du royaume, le mort saisit le v i f , q u i, cil
pays de droit écrit, s’appliquait aux héritiers testa
mentaires,
de même q u ’en pays de cou tu m e, 011
1 appliquait aux héritiers du sang. En conséquence ,
les institues n’avaient besoin, après l’ouverture du
testament, ni de permission de justice, ni de demander
la délivrance des biens de l’ hérédité j ils étaient les
successeurs immédiats du d éfun t, et avaient droit
aux lruils des liions compris en l'institution, du jour
du décès du testateur.
Le second eflet que produisait l'institution se trouve
établi en lu loi i Te, J f. de heredibus instit. et suiI
l
�( >8 )
vantes. Il consistait en ce que s i , dans le testament,
il n’y avait q u ’un seul héritier institué pour une
partie d e l ’hérédité, les autres portions lui accroissaient
et lui appartenaient, à l ’exclusion des successeurs ab
intestat> d ’après la règle qui voulait q u ’on ne put
décéder partim testatus} partim inteslalus. C ’était
par suite de ce même principe, que lorsqu’on n ’avait
institué un héritier q u ’en une certaine chose, et q u ’on
ne lui avait pas donné d ’autre cohéritier, on lui ad
jugeait cependant l ’entière hérédité, et la succession
ne se partageait pas entre lui et les successeurs ab
intestat.
Voilà quels étaient les eiTets de l ’institution, et ces
effets ne pouvaient être produits que par le testament.
C ’était l ’institution d ’héritier qui distinguait essen
tiellement le testament du codicille. Le codicille, étant
assujetti à des formes bien moins rigoureuses, ne pou
vait être e m p l o y é ni pour faire un héritier., ni pour
déshériter, ni pour substituer. On permit cependant
de laisser l’ hérédité par codicille, en employant la
voie du fidéicommis, c’est-à-dire en priant sou héri
tier légitime de faire la restitution de son hérédité à
la personne q u ’on lui marquait, lorsqu 011 n’avait pas
fait de testament j et en adressant la même prière à
l ’ héritier testamentaire, lorsqu’on avait testé. C ’est
la seule interprétation q u ’on puisse donner de ce pas
sage des Jnstitutes, dont les appelans veulent tiier
parti : Nam ¡1er Jidciconim issiun hœreditas co d icd h s
rcctc rcliru/uilur.
�Il
suffit
d ’ouvrir tous les auteurs pour se convaincre
q u ’il fallait que l'institution fut conçue en termes
obliques, ou de prière; et ce qui confirme la règle
générale q u ’on ne pouvait instituer par codicille, c’est
q u ’on accordait au soldat, comme un privilège extraor
dinaire, la faculté de disposer de son hérédité par
codicille.
E n effet, si les lois eussent permis d’instituer par
un codicille de la même manière que par un testa
ment, il eut été dérisoire d ’avoir prescrit des forma
lités aussi rigoureuses pour les testamens, puisqu’on
aurait toujours été maître de s’en affranchir , en
donnant à l ’acte la dénomination de codicille, ce qui
aurait produit les mêmes effets. Mais la loi avait prévu
cet inconvénient, et y avait porté remède; elle n ’avait
pas voulu q u ’avec les formes du codicille on pût faire *
une véritable institution d ’héritier, un véritable tes
tament. C ’est ce q u ’on voit par la loi 7 , au C . de
co d icillis. S i idem c o d ic illi, cjuod testanienta possent,
cu r diversion his inslrumentis vocabulum mandaretur,
fjuoR v is ac potestas un a sociasset? Igitur specialiter
co d icillis inslituendi ac substituendi potestas ju r is
(luctoritatc data non est.
L a loi voulait aussi que, pour reconnaître l'acte et
déterminer les formalités q u ’on avait dù y employer,
011 s attachât plutôt à la substance, q u ’à la d é n o m i n a
tion qu on aurait ailecté de lui donner. Tel est le vœu
manifestement exprimé dans la loi i 3 ,
D e ju r e c o d ic iL ,
S i er. « On agite quelquefois la question de savoir ce
�«
(
2
0
)
« q u ’on devrait décider, dans le cas oîi un homme
« qui n’aurait pas fait de testament, déclarerait ainsi
« sa volonté dans un co d icille : Je v e u x que T iliu s
« soit mon héritier. »
On voit d ’abord q u e ,
dans l ’espèce, l ’acte est
qualifié de co d icille : C o d icillis ità sci'ipsit. ( C ’est
donc bien mal à propos que les appelans soutiennent
que Furgole, qui rapporte cette loi, y ajoute : « E n
« supposant que l ’acte est qua lifié de co d icille , ce
« que la lo i ne dit p a s, suivant eux) » (i). On voit en
outre que le disposant s’est servi de ternies obliques,
qui semblent annoncer l ’intention de faire un fidéicommis : Titium hœredem esse vo lo . 11 est évident
que les termes seuls annoncent l’ intenlion de iaire une
institution indirecte. On peut s’en convaincre par le
mémoire même des appelans, page 12 , où 011 lil : « Il
« fallait q u ’il (le testament) fût conçu en termes impé« raiifs, p a r c e q u ’ on le considérait comme une loi parli« culière : T iliu s heures esto. C ’est ce q u ’on appela par
« la suile une institution en termes directs, bien
« différente en ses effets avec celle qui 11'élait conçue
« q u ’en termes
obliques
:
Titium
hœredem esse
« v o lo . »
On vo it , d ’ailleurs, aux Tnslitules, liv. 1 , lit. [\ ,
De
si 11g . reh.
p er
J id eic.
rel. \ , quelles étaient les
expressions dont 011 avait coutume de se servir pour
jaire un fiilcicouimis : f erh a autem J id e ic o m m isso ru n i
(1) Voyez page 27 du Mémoire des appelans.
�(
1
31 )
hœc m axim e in usu habentur, p e to , rogo
3 v o lo }
mando , jid e i tuœ commitlo.
Il
y aurait donc dans l ’cspècc double motif de
considérer l ’acte comme codicille ; d ’abord la dénomi
nation qui lui a été donnée, et la formule de l ’insti
tution , qui dénote un fidéicommis. Cependant le
législateur se demande ce q u ’on doit penser de cet acte;
puis il ajoute : « ïl faut bien distinguer s’il a entendu
« faire un codicille, et charger son héritier légitime
« de rendre la succession à T i t i u s , par forme de fidéi« commis, ou s’il a cru faire un testament; car dans
« ce de rnier cas, Titius ne pourrait rien demander à
« l ’héritier légitime.
✓
« On pourra trouver, continue le législateur, dans
« l’écrit même, les moyens de juger quelle a été la
« volonté de celui qui a fait celle disposition. E n
« effet, s’il a chargé ce Titius de payer quelques legs;
« s’il lui a nommé un su btii ué, dans le cas où il ne
« recueillerait
pas la succession , on verra q u ’il a
« entendu faire un testament, et non un codicille. »
Les conséquences de cette loi sont faciles à tirer. On
voit d ’abord que si l’ inslilulion était conçue en termes
directs, le législateur n’ hésiterait pas à regarder l’acle
comme testament, quoique qualifié de codicille, et à
en prononcer lu nullité : J / o c ca sn n ih il à légitim a
( C a r on voit évidemment q u ’ il suppose
que l acte n est pas revelu de loules les formalités du
peti p a ten t.
testament; dans le cas conliaiie, la distinction serait
�y
(
Lien superflue, puisque
2
2
)
l ’acte pourrait valoir,
de
quelque manière q u ’on l’envisageât).
On voit q u e , quoique la disposition soit faite en
termes de jid é ic o m m is, qui sont propres au codicille,
le législateur déclare q u ’il faut néanmoins rechercher
quelle a été l’intention du disposant. A-t-il réellement
voulu transmettre à Titius sa succession par voie de
fidéicommis? a - t - i l , au contraire, fait des dispositions
qui ne peuvent convenir q u ’au testament? Peu importe
la qualification donnée à l’acte, la tournure des expres
sions; il faut s’attacher à la réalité. Si l’acte contient
des legs à la charge de l ’ héritier; si on lui a nommé
un substitué, dans le cas où il ne recueillerait pas la
succession , alors l ’acte ne peut être considéré que
comme testament.
Tel est le véritable sens de la loi i 3 , D e ju r e cod iciL
Pour échapper à son application , les appelans ont
imaginé une distinction qui n ’e^t pas dans la loi. Ils
ont prétendu (i) q u ’il fallait examiner si l’institution
était faite en termes directs ou en termes ordinaires
3
tandis quelles lois ne reconnaissent que les ternies
directs et les termes indirects. Ils ont supposé que
dans la loi 1 3 , l ’institution était faite en termes ordi
naires, tandis q u e , d ’après le passage des Institutes,
que nous avons cité, il est évident que cette institu
tion est
faite en termes indirects.
Ainsi tombe la
( i ) Voyez page a 3 du Mémoire «les appelai!» , in Jiiia.
�(
2
3
)
conséquence que les appelans se sont efforcés de tirer
/de cette loi, que l ’institution, contenue dans un codi
cille , valait par droit de iidéicommis. Cette loi con
firme, au contraire, ce que nous avons dit plus h a u t ,
q u ’on n'e pouvait laisser son hérédité par codicille
q u ’en termes de prière, c’est-à-dire, en chargeant son
héritier d’en faire la remise à celui qui était désigné
dans le codicille.
Cette loi nous offre des points de ressemblance avec
l ’acte du 17 frimaire*, mais avant de les faire ressortir,
ajoutons aux idées générales que nous avons données
sur l ’institution d ’héritier, quelques observations sur
la manière dont on devait s' ex pr imer p o u r a nno nc e r
q u ’on v o u l a i t faire u n héritier.
L a loi 1 , au D. , § 5 , D e Jiceredibus insl. , nous
apprend q u ’on n ’était point rigoureux sur les termes
q u ’on avait employés; q u ’on suppléait facilement à
l'omission de quelque mot en l ’institution , pourvu
q u ’il apparût de la volonté du testateur : Credim us
p lu s nuncupatum
3
minus scriptum . C ’est ainsi que
1 institution paraissait constante et suffisamment ex
primée par ces mots : L u ciu s heures, et même par
ceux-ci : L u ciu s esto} ilia u x o r mca esto j etc., etc.
Les pays de droit écrit n’étaient pas plus rigoureux;
et Ion tenait pour maxime constante q u e , de quelque
manière q u ’il fût évident que le testateur avait v o u l u
faite une institution d héritier, 011 devoit suiv re sa
volonté; l e n e u r ou 1 insuffisance dans les termes 11c
pouvait en détruire l ’cftct.
�(
»4
)
Faisons maintenant l ’application des principes des
à lois romaines, et des ordonnances de 1731 et 1735,*^l ’acte du 17 frimaire. Nous voyons ([ne si cet acte est
qualifié de donation à cause de mort 011 y trouve en
même teins la formule à titre d'institution : c’est donc
3
une donation à cause de mort, contenant une insti
tution d ’héritier; et, de même que, si elle n’eùt con
tenu que des legs ou des dispositions particulières sans
institution , elle eut pu valoir dans la forme du co
dicille, de même aussi, par cela q u ’elle contient une
institution , elle a dû. être faite dans la forme du tes
tament. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire la loi 7,
au C . de testamentis. N on co d icillu m , sed testament
tiim aviani vestra/n fa ce r e v o lu isse, institutio et ex~
heredatio probant evidenter.
Quels eussent été les effets, en pays de droit écrit,
de cette formule, à titre d ’institution? Les appelans
affectent de les méconnaître. Cependant 011 n ’en em
ployait pas d’autres pour faire un héritier dans un
testament. E n donnant tous ses biens, ou une partie,
à titre d'institution, on 11e s’était jamais avisé de
contester le titre d ’héritiers a ceux au proiil desquels
011 disposait ainsi. Cette formule fut même consacrée
par l’ordonnance de 1 7 35 , pour exprimer q u ’on fai
sait des héritiers, comme on peut le voir par les ar
ticles 5 ?., ■}(», etc. Il suffisait même de donner cinq
sous à ses légitimaires, à titre d ’institution, pour q u ’ils
dussent se considérer comme ayant été institués hcriliers, cl 11e pussent opposer le vice de la préiérition
�(
25
)
et l ’on v o m i r a i t qu ’en donnant, au même titre , la
moitié de ses biens, la seule portion dont la loi permit
au sieur de Baille de disposer, il n’ait pas eu l ’inten
tion de se choisir des héritiers! N ’en doutons pas; si
la succession se fût ouverte avant le Code civil, et que
l ’acte eût été régulier, comme testament, les appelans
auraient mis autant de zèle à réclamer l ’honneur et le
profit de cette institution, q u ’ils font aujourd’hui
d ’efforts pour faire perdre à l’acte son caractère essentiel,
et pour faire méconnaître les intentions du sieur de
Baille : ils l ’ont trop bien prouvé par leur demande
et leurs autres écrits signifiés. Si même, lorsque la
succession s’est ouverte sous le Code civil, ils o nt re
connu que l ’acte leur a t t r i b u a i t la q u a l i t é d ’ héritiers,
que n ’auraient- il s pas fait sous une législation qui ne
les eût pas obligés à demander la délivrance?
On ne peut croire que ce soit sérieusement que les
appelans ont avancé que les mots à titre d ’institution
n ’avaient aucune signification réelle (i) . Ils en avaient
une bien réelle, puisqu’ils étaient synonymes des mots
à titre d ’héritiers; puisque cette formule les appelait
directement a la succession du défunt, les saisissait
de son hérédité, et leur donn ait droit aux fruits depuis
le moment du décès.
Mais il est certain auàsi q u ’ ils ne pouvaient obtenir
ce titre honorable; d’ héritiers, que par un testament.
S i idem c o d ic illi, r/uod testamenta passent, etc. ,
h. i
i
( i ) V o ir pages 3o , 3 i et 3 a d u Mémoire des appelai».
4
�loi 7 , au C . de c o d ic illis ; donc il est évident que le
sieur de Baille a voulu faire un testament.
«Mais, disent les appelans, et c’est pour eux un
« rempart q u ’ils croient inexpugnable, « les lois ro« maines sont sans application dans l ’espèce présente,
« pai'ce q u ’à l ’époque où l ’acte a été f a i t , on ne pou« vait point faire d ’institution d ’héritiers : la loi elle« même appelait les .parens à l ’hérédité; celles des
« 17 nivôse an 2 et 4 germinal an 8 ne permirent
« plus la transmission de l ’hérédité; les libéralités
« qui furent autorisées ne furent plus que de simples
« legs, qui é t a i e n t u n e charge imposée à l ’ héritier du
« sang. Ces lois opérèrent en sa faveur une saisine
« directe et immédiate; dès-lors l'institution cessa
« d ’ètre une marque distinctive du testament : ce ne
« fut plus q u ’ un vain mot, une expression inutile ;
« on ne put pas tirer avantage de celle qui était con« tenue
« d ’effet,
un acte : elle n ’y p r o du i sa i t pas plus
q u ’autrefois, dans les pays de coutume, où
dans
« les testamens n’étaient que de véritables codicilles. »
Telle est l’objection des appelans.
Pour y répondre^ examinons rapidement le système
de la législation qui a précédé le Code civil, et voyons
si les conséquences q u ’on en tire sont fondées. D ’abord
la loi du 7 mars 179^ nc peut pas être invoquée,
puisqu’elle se borna à abolir la faculté de disposer eu
ligne directe.
Celles des 5 brumaire et 17 nivôse an 2
e ur e nt
pour objet d ’empccher de dépouiller les héritiers du
�sang par des dispositions trop considérables en faveur
d ’étrangers ; d ’établir entre les successibles la plus
parfaite égalité dans les partages; elles laissèrent aux
époux la liberté de se faire réciproquement des dispo
sitions illimitées, lorsqu’ils n’avaient point d ’en fans,
et sauf réduction à un usufruit, lorsqu’ils en avaient.
Résulta-t-il de ces lois l’abolition générale de tous
les effets de l ’institution d ’héritier? Non : l ’ensemble
de la loi du 17 nivôse démontre le contraire; d ’abord
l ’institution d’ héritier, entre époux sans enfans, pro
duisait les mêmes effets q u ’anciennement; ainsi cette
institution saisissait de plein droit l ’époux institué ,
lui donnait droit aux fruits, du j o u r du décès; et, en
cas q u ’il n ’eut été i n s t i t u é q u ’en u n e p a r t i e , il a u r a i t
eu la t o t a l i t é , en vertu de l ’ i n s t i t u t i o n . L ’article 1 4
de la loi du 17 nivôse ne laisse aucun doute à cet
égard.
De même, celui qui n’avait pas de parens était maître
de disposer de la totalité de sa fortune, et de la même
manière q u ’anciennement, par institution d ’héritier
ou autrement.
Les limites apposées par ces lois à la faculté de dis
poser n ’ayant eu pour objet que l’intérêt des succes
sibles, dont elles déterminèrent la réserve, les insti
tutions d héritiers ne furent abolies q u ’autant q u ’elles
pouvaient porter atteinte à cette réserve. Mais il fut
toujours loisible, en pays de droit écrit, de donner
la portion disponible, soit ¿1 titre d ’institution , soit
à titre de legs.
�Les héritiers du sang n ’étaient àaisis légalement que
de leur réserve, et la saisine de la portion disponible
continua d ’appartenir à ceux q u ’on avait honorés du
titre à'héritiers. On ne trouve dans ces lois aucune
dérogation, ni expresse, ni tacite, au droit ancien
en cette matière; il n’était, comme nous l’avons ob
servé, dans l ’esprit de ces lois que d ’établir l ’égalité
entre les héritiers, et de leur assurer d’une manière
certaine la portion indisponible. Ainsi, pourvu que
les limites q u ’elles avaient tracées fussent respectées ,
elles ne s’occupèrent point de la manière dont on dis
poserait de ce qui n ’était point compris dans sa prohi
bition; et il y eut toujours cette différence entre les
dispositions à titre (Vinstitution et celles faites à titre
de legs, que, par les premières, on était saisi de l ’objet
de l'institution de la même manière que l'héritier
appelé par la loi, au lieu que, par les secondes, on
était obligé (le demander, la tli:l ivianre.
La loi du 17 nivôse avait embrassé, dans sa solli
citude, les païens à 1111 degré quelconque; elle avait
établi en leur faveur une réserve, toutefois plus ou
moins considérable, selon que les parons étaient des
descendans ou des collatéraux., Celle du [\ germinal
an 8 n’établit des réserves q u ’au profit des parons qui
n ’étaient
pas à un degré plus éloigné que celui de
cousin issu de germain : tous ceux dont les païens
étaient au-delà de ce degré rentrèrent dans la pléni
tude de leurs droits; leurs libéralités purent avoir la
même éleudue et les mêmes caractères que celles îles
�f
époux sans enfans, au profit l ’un de l ’autre, sous la
loi du 17 nivôse, et que celles d’ un homme q u i , sous
cette même loi, n ’avait point deparens. Ainsi ils purent
instituer, ou en la totalité de leurs biens, ou en une
partie; et lorsqu’ils n ’avaient fait qu/une institution
particulière, elle devenait universelle, parce que, dans
ce cas, il ne pouvait y avoir des héritiers ab intestat
et des héritiers testamentaires. De même, ceux qui
avaient des héritiers à réserve purent instituer par
testament, pour la portion disponible; et si, par l ’évé
nement du décès du testateur, il n’existait pas d’hé
ritiers auxquels la loi l ’obligeât de laisser une partie
de sa succession, l ’héritier de quote, q u ’il avait fait, la
recueill ait t o u te entière.
Ceux qui o n t prétendu que la loi du 17 nivôse
an 2 avait assimilé les pays de droit écrit aux pavs
couturniers; que les testamens n ’y furent plus que de
véritables codicilles; que l'institution d ’héritier n 'y
produisait que l’eilet d ’un legs, ont commis une grande
erreur.
Ils
auraient du nous donner les preuves de cette
innovation, qui nous paraît autant en opposition avec
1 esprit de la loi, que contraire à ses termes, et con
traire à la manière dont elle a été interprétée en pays
de droit écrit. O n ne citerait pas un seul notaire de
ces pays qui n’ait fait et n ’ait cru pouvoir faire, sous
1 empire des lois des 17 nivôse et !\ germinal, des
actes contenant institution d ’ héritier, de véritables
testamens; e t , sans doute, on 11c prétendra pas qu'en
luisant de pareilles dispositions, ils fussent persuadés
�c 3o )
qu ’elles n’avaient rien de réel; que les termes dont ils
se servaient étaient inutiles, déplacés, et même ri
dicules.
Comment cette loi
aurait-elle
pu a b o li r ,
par
l ’article Gi , tous les principes qui étaient suivis en.
pays de droit écrit, et notamment ceux qui étaient
relatifs à la saisine des institués, lorsque cette loi ne
régla rien sur cette m a tiè re , non plus q u ’en bien
d ’autres? Ne sait-on pas, au contraire, qu e, dans ces
pays, on appliquait le droit romain pour tout ce à
quoi il n’avait pas été dérogé par les lois nouvelles, et
que jamais on ne donnait une trop grande extension
aux dispositions contraires aux anciens principes.
Il
est évident que l ’abolition portée par l ’article 6 r ,
ne doit s’entendre que des lois, coutumes, e tc ., qui
concernaient
la fixation de la quotité disponible,
suivant l’état de la famille du disposant, sa capacité de
d o n ne r , la c apa ci t é de recevoir de la par t d u d o n a t a i r e ,
l ’ordre des païens qui étaient appelés à succéder, etc.
Mais la loi n ’ayant pas réglé de quelle manière on
pouvait donner la portion disponible, ni les effets que
pouvait produire le genre de disposition, il fallut s’en
référer aux anciens principes. Dès-lors on put donner
par testament ou par c o d ic ille , à titre d ’institution,
ou à titra de legs y et la différence qui existait entre
ces manières de disposer fut maintenue, ou plutôt no
fut pas abrogée. Ainsi l’institution ne put avoir l i e u ,
comme auparavant, que par testament; et il fut tou
jours vrai de dire que lorsqu’elle avait lieu dans un
�( 3> )
acte qui n’avait pas de dénomination, ou qui en avait
une douteuse , elle annonçait que l ’acte était un
testament.
S ’il pouvait rester le moindre doute à cet égard, il
suffit de lire le passage suivant de l ’instruction de
M. Bergier, sur la loi du 4 germinal an 8 , sect.
,
6
distinct, i , n° 196 :
« Ce titre d ’héritier peut être, ou déféré à un seul
« institué, ou attribué conjointement à plusieurs,
« pour en partager l ’utilité également ou inégalement;
« enfin, l ’institution peut être accompagnée de legs
« dont les héritiers testamentaires sont chargés; mais
«
«
«
«
elle ne peut pas être limitée à certaines parties de
la succession seulement, sans disposer du surplus ».
De sorte que personne ne peut laisser, en droit
écrit, deux classes d'héritiers de ses biens disponibles ,
« les uns testamentaires, les autres ah intestat; et que
« les héritiers testamentaires, quand ils ne seraient
« institués que pour une faible portion, ne prennent
« pas moins, par accroissement, tout ce qui est dispo« nible de l ’hérédité. »
Cet auteur établit jusqu’à l ’évidence q u ’on pouvait
instituer p our les biens disponibles, et que l ’accrois
sement avait lieu pour tout ce qui était disponible,
et n avait pas été compris dans l ’institution.
Au n° 198 de la même section, il établit que les
héritiers testamentaires, en droit écrit, sont saisis,
par la l o i , des biens disponibles de la succession 7
aussitôt q u ’elle s’oum *.
�( 3* )
Après avoir démontré que, sous les lois en vigueur
à l'époque où lu disposition d ’Antoine-Marin de Baille
a été laite, les effets de l'institution n’étaient pas
abolis, nous pouvons invoquer avec plus de confiance
les principes des lois romaines , et la doctrine des
auteu rs.
L ’application que reçoit à notre espèce la loi i 3 ,
au D. D e ju r e co d icillo ru m , dont nous avons rap
porté le texte, est remarquable. Il s’agit, dans l'acte
du 17 frimaire, comme dans celui de la loi romaine,
d en d é te r mi ne r la nature, par l'intention q u ’a eue le
d i s p o s a n t , et par les dispositions q u ’ il a f aites ...... Le
jurisconsulte romain décide q u e , si l ’acte contient une
substitution, des legs à la charge de Vhéritier institue',
c’est un testament q u ’on a entendu faire, et non un
codicille. Dans notre espèce, le sieur de Baille a fait
une institution , et des legs pies qui sont nécessairement
à la charge des héritiers ins ti t ué s , p u i s q u ’ il ne pou
vait pas porter atteinte à la réserve de la moitié de
ses biens, établie en faveur de ses successeurs ab
intestat. Il y a donc la même raison de décider que
c ’est un testament q u ’on a entendu faire; et notre
espèce est encore plus favorable, en ce que l ’acte n ’a
pas été qualifié de codicille, comme dans la loi ro
maine; il a été qualifié de donation à cause de mort,
qui pouvait être aussi bien un testament q u ’un co
dicille.
On a prétendu que nous avions très-mal
interprète
l ’opinion de i* urgole, sur la manière dont 011 doit,
�reconnaître un teslament d ’aVec un codicille. Pour
éviter un semblable reproche, nous nous abstiendrons
de toute interprétation; nous nous bornerons à rap
porter les passages suivans, quoique ses savantes disser
tations,' contenues auîï chap. 2 , sect. 7 , et chap. 12,
aient besoin d ’etre méditées dans leur ensemble.
Chapitre 2 , section 7 , n° 2. « Au contraire, il
« faudrait regarder la disposition comme un testament
« et non comme un codicille, si elle contenait une
« institution , des substitutions directes, ou une exhé« rédation
3 quand
même on n ’aurait appelé que cinq
•l témoins, par la raison que nous avons touchée, que
« le contenu en la disposition doit en déterminer la
« n a t u r e , plutôt que la formalité extérieure. Loi 14 ,
« au Code D e Testant. Dans ce cas, la disposition
« serait nulle, suivant la loi i 3 , D e ju r e co d icill.T ).
»...
I1'
Chapitre 1 1 , n° 3 5 . « Que si l ’acte n ’est qualifié
« ni de testament ni de codicille, il faut juger de sa
« nature par les dispositions q u ’il contient. Si,
par
« exemple, 1 acte contient des institutions universelles
« et des exhérédations qui ne peuvent pas convenir à
« lin codicille, il faut considérer la disposition comme
« un testament. Loi 1 4 ? au C . non co d ic illu m , sed
« testarnentu/n, etc. »
Même chapitre, n° 37. ft II faut néanmoins prendre
« garde q u e , quoique la disposition soit nommément
“ .qualifiée de codicille dans l a c t é même, néanmoins
M une telle qualification ne doit pas prévaloir sur 1q
�(34
)
k volonté qui paraît clairement par les dispositions
« qui y sont contenues, parce que la difficulté qui
« consiste à déterminer la nature d ’un acte, est une
« question de volonté qui peut être expliquée par la
« qualité des dispositions. Voilà pourquoi, si l ’acte
« contient une institution d ’héritier, une substitution
« directe, et des legs, dont le testateur a chargé son
« héritier dans l ’acte qualifié de codicille, il faudra
« le considérer, non comme un codicille, mais comme
« un testament, et déterminer par-là sa validité ou
« sa nullité, selon que les formalités requises au tes« tament ont été observées ou négligées. L . i 3 , de
« ju r e coclicill. »
Voilà donc à quoi se réduit cette affaire, que pav
tant d ’efforts^on à cherché à rendre douteuse, afin
d ’en tirer la conséquence que, dans le doute} il fa lla it
entendre et exp liqu er l ’acte dans le sens qui peut
le f a i r e 'v a lo ir . Il faud rait, pour q u ’il y eût du
doute, que l ’institution d ’héritier ne fut pas la plus
forte de toutes les preuves de l ’intention q u ’on a eue
de faire un testament, plus forte même que celle qui
se tire de la dénomination donnée à l ’acte, et de la
solennité q u ’on y a observée. Ce ne sont pas seulement
les lois romaines, dont nous avons rapporté le texte,
et Furgole qui
nous l ’apprennent , mais
tous lcs
auteurs qui ont écrit sur cette matière : N am a d h u C
ob illam hœ redis institutionem , testamentum conjîcere
voluisse prœsumitur. liu ju s traditionis ea est ratio >
quia actus non ju d iç a tu r à nudd dcnam inatione, sed
�( 35 )
ab effectu ............ Menochius, D e prœsumptionibiis
3
lib. 4j prœsumptio 3 .
Mantica répond ainsi à l ’objeclion tirée de la ma
nière dont on doit interpréter l ’acte en cas de doute :
N e c officit , quod in dubio sit capienda ilia co n jec
tu ra , quoi fa c it actum v a lere, quia rom anus respondet in D . § T ra cta ii in fin e : hoc verum esse
quando fa c it actum valere eo modo quo f u it actum ;
3
sed eæ hœredis institutione colligitur evidenter, quod
quis voluerit fa cere testamentum. Igitu r contrà voluntatem defuncti non debet id sustineri ju r e cod i-
3
cilloru m , est magis tolerabile reddi inutilem testatoris
dispositionem , quain aliq u id adm itti ut va lca t contrà.
eju s voluntatem . L ib . i , Ut. 3 .
On voit par là que la maxime, in d u b io , est vraie
ii l ’égard de toute disposition q u i , portant à l ’exté
rieur un caractère particulier, ne présente des doutes
que sur le fond des choses’ qui en sont l ’objet; mais
q u ’elle cesse d ’etre applicable, lorsque, la disposition
étant conçue dans des termes qui annoncent un genre
<le disposition, on voudrait, pour lui conserver sou
effet, la transformer en disposition d ’un autre genre :
Quando f i t digressio de una specie in alteram specie ni
divcrsam
, Aleuti
cum digreditur de testamento a d
c o d icillo s...... N am in ca su ..........substantia testamenti
ommnò répugnât substantiæ co d icillo ru m } cum in
c o d ic ilh s , directe quis hæres instim i non p o ssit, et
tamen polest in testamento...... Mcuoch. D e prwsump,
pnesuinpt. a , n° 30.
�fJC V
( X, )
Il
est à remarquer que les auteurs n ’hésitent pas à
regarder comme
testament l’acte qui
contient une
-institution, quand même il serait qualifié de codicille,
et quand même il ne siérait fait q u ’en présence de cinq
témoins. Ne doit-on pas, à plus forte raison , le décider
ainsi pour un acte qui a une qualification commune au
testament et au codicille, et qui est fait en présence de
six témoins, y compris le notaire, dans une-campagne
où le nombre des personnes capables d ’être témoins était
et lorsque, pour un codicille, il suffisait d ’y eu
employer c i n q ? ( O r d o n n a n c e de 1^3 5, art. i 4 )*
Que sert, après cela, de dire q u ’on semble avoir
rare,
évité à dessein le mot testament ( i ) ,
lorsqu’il est
certain q u ’on pouvait faire une donation à cause de
mort par testament, et q u ’en y faisant une institution
d ’ héritier, on faisait un véritable testament? F l i t - i l
v r a i , d ’ailleurs, q u ’on eut évité ce mot à dessein, la
loi n’y v errait pas un motif pour le faire valoir comme *
codicille. Elle y verrait plutôt un moyen détourné
pour faire un héritier, sans employer les formalités
rigoureuses prescrites pour les testamens.
Quelques explications que les appelans s'efforcent
de donner aujourd’ hui sur la qualité de cet acte du
17 frimaire an 1 1 , q u ’ils avaient si long-lcms euxmêmes qualifié de testamens dans tous leurs actes <1°
procédure, leurs propres'aveux prouveront toujours 1*
(1) Voyez page a «lu Mémoire des appelans.
�v'JV
( 37 )
certitude où ils étaient, que M. de Baille avait voulu
les gratifier par un testament, et il devra paraître ex
traordinaire q u ’ils aient cru pouvoir faire, à volonté,
de sa disposition, un testament ou un codicille.
Nous ne pouvons passer sous silence la défaveur
q u ’ils ont cherché à jeter sur la mère de Mélanie de
B a il l e , en supposant q u ’elle n’avait pas vécu en bonne
intelligence avec le testateur (i). Que ne peut-elle
faire entendre, elle-même sa voix, et apprendre à la
justice les manœuvres q u ’on mit peut-être en usage
pour chercher à les désunir ! Les papiers de la suc
cession nous apprennent, toutefois, q u ’Àntoine Marin
était détenteur de la succession cl’A u t o i n e de B a i l l e
de M a l m o n t } que c et te succession appartenait au père
de Mélanie -, que même ce dernier n ’avait touché
q u ’une faible partie de ses droits légitimaires : il ne
réclama rien de son vivant; et son désintéressement
fut imité par sa veuve. Sont-ce là de mauvais pro
cédés, des preuves de mésintelligence?
On ne sait non plus sur quel fondement les adver
saires ont parlé de soupçons mystérieusement répandus,
d ’imputations publiques ou secrettes. Forts de notre
conscience, nous leur faisons le défi de prouver que
nous ayons dit, soit en public, soit en particulier,
autre chose que ce que nous leur avons dit à euxmêmes. Nous nous sommes plaint avec laison de
ce qu ils n avaient produit leur titre que plus de
( i) Page 3 de leur Mémoire.
�sept ans après le décès du sieur de Baille, et de ce
q u ’ils ne s’étaient pas présentés pour concourir au
partage judiciaire.
Quant à leur parenté, nous ne l’avons jamais con
testée; mais nous n ’avons trouvé, dans la succession,
aucun acte qui
en établit le degré; au reste, cette
parenté ne saurait, aux yeux de la C o u r , donner effet
à un acte nul.
Ne serait-ce pas aussi pour inspirer quelque intérêt
de p l u s , que nos adversaires ont cru devoir parler d e
le u r v ê l e m e n t c o m m u n ? c o m m e s’ ils i g n o r a i e n t que si
la justice ne fit jamais acception des personnes, elle
ne se laissa aussi jamais surprendre par ces petits
moyens.
Quant à nous, investis de la succession de notre
oncle, par la voie de la nature et l ’autorité de la loi,
que produit-on pour nous dépouiller? un acte, q u i ,
sous q u e l q u ’a s p e c t q u ’o n l’envisage, ne peut soutenir
les regards de la justice, et sur la validité duquel les
appelans eux-mêmes ont peu compté. Nous devons
donc attendre avec autant de calme que de respect la
décision de la Cour.
D
e
LAGREVOL.
Me L A F O N T , A vo u é-licen cié.
RIOM, IMPRIMERIE DE SALLES, PRES LE PALAIS DE JUSTICE.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baille, Marie-Françoise-Mélanie de. 1821]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Lagrevol
Lafont
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Marie-Françoise-Mélanie de Baille, et Hippolyte de Lagrevol, Procureur du Roi à Yssingeaux, son mari, intimés ; contre Claude et Mathieu Mijollas, frères, appelans ; en présence de Jean, Jean-Pierre Chambouvet, et Jean Romeyer, tuteur de ses enfans mineurs, d'avec Jeanne Chambouvet, aussi intimés.
note manuscrite : « après deux partages, arrêt des chambres réunies, 1 er juin 1821, Journal des audiences, p. 354. »
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1821
An 11-1821
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2513
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2511
BCU_Factums_G2512
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53499/BCU_Factums_G2513.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53497/BCU_Factums_G2511.pdf
eb70863809433f79bc5a3ebc0dcedc7a
PDF Text
Text
MEMOIRE
POUR
COUR ROYALE
_
C
laude
et
M
a t th ie u
.
DE RI OM .
M IJO L A S
frères, ap p e-
lans de jugem ent rendu par le tribunal civil
d’Issengeaux, le 20 avril 18 19 ;
(
CO N TR E
Dame M a r i e - F r a n ç o i s e - M é l a n i e d e
B A I L L E et sieur H y p p o l i t e d e L A G R E V O L , procureur du Roi à Issengeaux,
son mari, intimés
E t contre J e a n et J e a n - P
ierre
CHAM-
B O U V E T } et J e a n R O M E Y E R , en qua
lité de tuteur de ses enf ans mineurs d'avec
Jeanne
CH A M B O UVE T , aussi intimés.
U
N E question q u ’on
a vo it cru sim ple a ce p en d an t
présenté des difficultés assez sérieuses pour partager le
*
—
Chambre
2
�sentiment des magistrats auxquels elle étoit soumise.
La partie doit donc y apporter plus d’attention et le
défenseur ne doit plus s’abandonner à sa propre con
fiance en des moyens qui lui avoient parus décisifs.
Dès qu’un point de droit fait des doutes, il faut le dis
cuter sérieusement, partir des principes, en développer
l’application et en démontrer les conséquences.
Un acte qualifié donation à cause de m ort, où on
semble avoir évité à dessein le mot testam ent, réduit
à de simples leg s, revêtu , d’ailleurs, de toutes les for
malités nécessaires à un codicille, en pays de droit écrit,
est attaqué de nullité. On y lit ces mots placés indifférem
ment : A. titre d'institution. Ils y étoient sans objet; ils
y sont sans effet; et cependant ils servent de prétexte
à une demande en nullité, parce q u e , d it-o n , ils dé
montrent que le défunt vouloit faire un testament et
non un simple codicille, et que l’acte n’est pas fait en
présence d’un nombre de témoins suffisant pour valider
un testament.
N ous avons donc à examiner quel effet peuvent pro
duire contro un acte ces mots à titre d'institution , qui
n’eussent servi à rien pour le faire valoir. Nous le verrons
avec les principes du droit et la doctrine des auteurs saine-*
ment entendue. Nous verrons encore si on peut tirer
parti des subtilités du droit Romain ; si des termes qui
pouvoient y être en quelque sorte sacramentels, sont de
quelque conséquence depuis la loi du 17 nivôse, dans un
temps où les testamens, comme les codicilles, étoient
absolument indépondans de toute institution. «Héritier*
G’est toute la difficulté de cette cause,
�c 3 ;
F A IT S .
Antoine-M arin de Baille , célibataire, avoit pour hé
ritiers présomptifs des neveux qui sont les intimés. Les
M ijolas, appelons, étoient ses neveux à la mode de B re
tagn e, enfans de Catherine F a u , sa cousine germaine.
L ’un d’eux, Claude, avoit demeuré plusieurs années dans
la maison du sieur de Baille ; il en avoit reçu quelques
services; il lui avoit rendu avec beaucoup de reconnoissance tous ceux qui étoient en son pouvoir; il l’avoit
soigné dans plusieurs maladies avec beaucoup d’affection,
et lui avoit été fréquemment utile dans la gestion de
ses affaires.
Après la mort de Jean-Antoine de Baille, son frère,
Antoine-M arin n’avoit pas vécu en bonne intelligence
avec sa belle-sœur ; celle-ci n’avoit pas effacé, bien au
contraire, les sentimens d’affection qu’il avoit pour les
Mijolas; maître de sa fortune, pouvant disposer de
la moitié de ses biensr ayan t, d’ailleurs, par devers lui
d’autres motifs personnels de faire du bien aux M ijolas,
il fit, le 17 frimaire an 1 1 , un acte où. on lit la dispo
sition suivante:
« D e son gré et volonté, a donné et donne par do« nation à cause de m ort, à titre d’institution, en œuvres
« pies, savoir, auxpauvres de D ieu , la somme de cinq cents
« francs à eux payable et distribuable après son décès j
a p lu s, la somme de soixante francs en acquits de messes
» par les citoyens prôtres qui desservent l’église de
«: Notre*Dame du P u y ; plus, le quart de ses entiers biens
«. présens et à venir aux citoyens Ghambouvet de M o1 *
�C4 )
«
«
«
«
«
«
«
«
nistrol, à se partager entr’e u x , au nombre de trois
petits-neveux ou nièces; plus, autre quart aux citoyens Claude M ijolas, Matthieu Mijolas, son frère,
et Catherine F au , leur m ère, à se partager ensemble
par égales portions, du lieu de L o lie r, commune de
Saint-Hostien, et ledit M atthieu, du lieu de la T o u reille, commune de G lavenon, ce qui a été fait et récité, etc. »
Il est inutile de rapporter la form ule, puisqu’elle n’est
pas critiquée ; seulement observons que cet acte est reçu
par M e. Rocher qui étoit le notaire ordinaire du sieur
de B aille, et qu’on n’y trouve que cinq témoins au lieu
de six qui eussent été nécessaires pour un testament
solennel.
Comme on le vo it, le sieur de Baille disposoit seule
ment de la moitié de ses biens ; le surplus demeuroit
dans la succession, ab intestat, pour appartenir à ses
héritiers de droit. La loi qui leur en faisoit réserve et
qui ne permettoit d’instituer personne à leur préjudice,
les instituoit héritiers par cela seul ; nulle part le sieur
de Baille ne dit qu’il veut faire un testament plutôt qu’un
simple codicille; il déclare même ne vouloir faire qu’ une
donation à cause de ??iort, qui s’entendoit ordinairement
du codicille, et qui étoit valable en cette forme ; enfin,
il ne cherche pas à remplir les formalités des testamens,
parce qu’il ne fait que de simples legs.
' L e sieur de Baille survéquit assez long-temps à cet
acte. Le Code civil fut promulgué et lui rendit la fa
culté de disposer de la totalité de scs biens; il paroît
qu’il en proiita. Un acte dont les appelans ne peuvent
�(5)
pas user en ce moment, faute de l’avoir connu assez tôt,
et qu’ils n’ont pas môme encore en forme probante,
en seroit une preuve sans réplique. Revêtu de toute sa.
capacité, le sieur de Baille ne voulut plus disposer d’une
partie, mais de tout; il ne voulut plus faire un codicille,
mais un testament ; le Code réduisoit, d’ailleurs , à cette
forme unique tous les actes à cause de m o rt, et celuici fut fait seulement le 18 nivôse an 1 2 ; aussi le no
taire ne manqua-t-il pas de déclarer en commençant
que le sieur de Baille « l’a requis en vertu des précé« dentes lois, et notamment de celle du 13 floréal dernier,
« de recevoir son testament nuncupatif é c r it, et dis« position de dernière volonté.
« Il lègue 5oo francs aux pauvres, puis à cliacun de
« ses parens et prétendans droit la somme de ¿5 cen t.,
« et pour ses héritiers -particuliers et universels, en
« tous et chacun, ses biens meubles et immeubles. . .
« ..............Il nomme et institue de sa propre bouche y
« savoir, pour un tiers, Françoise-Mélanie de B aille, sa
« nièce ; pour un autre tiers , Claude M ijolas, son pa« rent, fils à Joseph; et pour un autre tiers les trois
« enfans Chambouvet, enfans de feue M arie-Anne A u « lanier, ses petits-neveux et nièces................... auxquels
« susnommés veut les susdits biens appartenir à raison
« d’un tiers comme dessus à chaque branche susnom« m êe, à la charge par eux de payer et satisfaire les
« susdits légats ’ » il casse et annule tous autres testamens ou donation ¿1 cause de mort qu’il pourroit
avoir faits ci-devant; ensuite, il déclare que si le présent
ne pouvoit valoir comme testament, il veut qu’il vaille
�(6)
par donation à cause de m ort; et enfin, par toute autre
meilleure forme que de droit il pourra valoir. L e no
taire Pouzol qui recevoit l’acte, le termine par cette
formule du droit écrit : P r ia n t les témoins ici présens
d'être mémoratifs de sa présente disposition.
. O n voit que par cet acte le sieur de Baille conserve
les mêmes affections ; qu’il dirige ses dispositions en
faveur des mômes personnes. ; que seulement il les
agrandit, parce qu’il peut disposer de tout ; qu’il reconnoît Mijolas pour so7i parent, et l’appelle à sa succession
au même rang que ses neveux et petits-neveux, quoi
que plus éloigné; que voulant faire un testament, il le
dit expressément ; qu’il en emploie toutes les formes ;
qu’il institue des héritiers universels, les charge de cer
tains legs et ajoute la clause codicillaire ; qu’enfin, le no*
taire s’assujétit à toutes les formules du droit rom ain, si
vaines et si inutiles sous le C o d e, mais q u i, autrefois,
étoient caractéristiques du testament et le distinguoient
du simple codicille; et il est fort remarquable que 1&
notaire établit lui-même une différence essentielle entre,
le testament et la simple donation à cause de m ort ;
en effet, on considérait habituellement cette dernière es
pèce de disposition comme différente du testament ,
comme un simple codicille, et les notaires ne manquoient
jamais à qualifier un testament du nom qui lui étoit
propre, et à l’entourer de toutes ces formules qu’ils
apprenoient avant tout et qu’ils regardoient comme sa
cramentelles;
Le 18 décembre 18 12 , les Mijolas ont réclamé le
quart de la succession, en. vertu du- premier acte ; comme
�(7 )
le legs fait en leur faveur étoit un legs de quote ; que
conséquemment ils ne pouvoient l’obtenir qu’en deman
dant un partage et en se soumettant, à toutes les charges,
comme les héritiers ; ils ont pris cette qualité d’héritiers
pour un quart, et ils ont demandé le partage en vertu
du testament du sieur de B aille, du 17 frimaire an 1 1 ,
ne mettant aucune importance à la qualification de l’acte,
dès qu’il n’y en avoit aucune dans les résultats, et dès
que la qualité de légataire ou d’héritier devenoit indif
férente, par cela seul que la succession étoit ouverte
sous le Code civil.
Les intimés demandèrent la nullité de ce testament.
E t cette nullité a été prononcée par les premiers juges,
par trois motifs.
* L ’un qu’on ne trouve pas dans la -prétendue donation
dont il s’agit, que M arin de S a ille ait prononcé ses
dernières volontés au testateur.
L e second, qu’en prenant cet acte dans les termes où
i l est co n çu , on ne peut douter que Vintention du sieur
de Baille a été de faire un testament-nuncuyatif, puis
qu’il donne à titre d'in stitution, à ceux qui sont ap
pelés à son hérédité, la part qui se trouve à sa dispo
sition; que cette intention a été partagée par les deman
deurs qui agissent dans la demande introductive d’ins
tance, en qualité d’héritiers ; qu’enfin, cette disposition
est contraire à l’article 5 de l’ordonnance de 17 3 5 , qui
veut que le testament soit dicté par le testateur, en pré
sence de sept témoins , y compris le notaire, tandis que
dans cet acte on n’en trouve que six.
1
L e troisième m otif porte, qu’en considérant Vacte
�(8'
comme codicille , il seroit encore nui pour ne pas
contenir l’expression non équivoque de la dictée, et n’étrc
pas revêtu de la clause codicillaire.
Sur l’appel de ce jugement est intervenu un arrêt
de partage,
*1
M O YEN S.
. A ne considérer que les motifs du jugement dont est
appel dans les termes où ils sont conçus, on s’étonnerait
d’en voir résulter une question sérieuse.
• Les premiers juges auraient pu d’abord nous faire
grâce du dernier,.qui est absolument inintelligible; en
considérant Vacte comme un co d icille, il seroit n u l,
dit - o n , pour ne pas contenir la clause codicillaire ;
comme si on ne sayoit pas que la clause codicillaire n’étoit
qu’une formule pour faire valoir comme un simple co
dicille l’acte qui n’étoit pas valable comme testament; et
qu’insérer cette clause dans un codicille, c’eût été une
évidente absurdité.
. . . .
. Quant aux autres, nous examinerons avant tout, la pré
tendue nullité tirée du défaut de mention de la dictée, pour
n’avoir à entremêler d’aucune autre la difficulté principale,
celle relative à la qualité de l’acte.
L ’article 5 de l’ordonnance de 17 3 5 , prescrit les for
malités nécessaires pour faire valoir un testament nuncupatif ; il porte que le testament sera prononcé par le
testateur, en présence de sept témoins, y compris le
notaire; que le notaire écrira les dispositions à mesure
qu’elles seront prononcées par le testateur ; après quoi
�C9 )
il sera fa it lecture du testament entier audit testateur,
DE l a q u e l l e LECTURE il sei'a f a i t mention par le
notaire, etc.
Rien de plus clair que cette disposition de l’ordon
nance; elle indique certaines formalités comme essen
tielles: le testateur dictera , le notaire écrira, le notaire
fera la lecture. Parmi ces trois formalités nécessaires,
l’ordonnance en distingue une qui lui paroît, sans doute,
plus essentielle encore que les autres, et croit devoir
l ’assujétir elle-même à une formalité pour constater son
observation ; elle oublie les deux premières q u il lui a
suffi de prescrire, mais elle veut que la troisième soit établie
d’une manière plus solennelle ; de laquelle lecture il
sera f a it mention.
Ici, deux mots suffisent pour détruire l’argument des
premiers juges.
D ’une p art, il étoit vrai alors, comme aujourd’hui
sous l’ordonnance comme sous les Codes, que les juges
ne peuvent prononcer de nullités ni exiger de formalités
que celles qui sont prescrites par la loi ; il suffit donc
que l’article ait gardé le silence sur la mention de la dic
tée, et q u e, ne la prescrivant p a s, il ne prononce pas
de nullité lorsqu’elle est om ise, pour que le juge ne
puisse ni la créer ni la prononcer de sa propre autorité.
E n second lieu, la séparation que fait l’ordonnance
entre les diverses formalités qu’elle e x ig e, suffit pour
démontrer qu’elle n’a pas voulu la mention de la dictée;
1 article en est exclusif, bien loin de la commander.
A ussi, seroit-on en peine de citer un seul arrêt qui
�C IO )
ait annule un testament ou un codicille pour cette cause,
un seul auteur qui ait adopté cette nullité comme point
de doctrine. E lle n’a paru quelque chose aux premiers
juges que par l’idée que peut en avoir donné le Code
civil qui , en effet , exige la mention de la dictée et
prononce la nullité de l’acte où elle est omise ; mais
le Code a créé cette nullité comme celle résultante du
défaut de mention que le notaire a écrit le testament,
et jusqu’à présent personne n’avoit pensé à attaquer un
testament antérieur au C o d e , pour ne pas contenir la
mention qu’il fût écrit de la main du notaire.
Cette pensée n’est donc que l’effet d’une distraction.
C e m oyen écarté, il nous reste à examiner la dispo
sition sous son point de vue principal. L ’acte est-il un
testament ou un codicille? pouvoit-il et devoit-il, sous les
lois nouvelles , être autre chose que ce qu’il est ? les
deux mots, à titre d’ in stitution , qu’on y lit au milieu
d’une phrase où ils ne sont même pas bien placés, gram
maticalement parlant , y eussent été de quelqu’eftet
si le sieur de Baille eût fait un acte valable en la forme,
comme testament? peuvent-ils le vicier si l’acte n’est
pas fait devant un nombre suffisant de témoins pour un
testament solennel? Voilà les questions auxquelles nous
sommes réduits, et qu’il suffit d’examiner pour la
décision de cette cause.
Pour discuter avec clarté, nous commencerons par
l’examen de la difficulté dans le sens où l'ont présen
tée les intimés, et telle qu’elle a été examinée par les
premiers juges, c’est-à-dire, en considérant l’acte comme
�C 11 )
s’il out été fait pendant que les anciennes lois étoient
intégralement en vigueur, lorsque des institutions étoient
non-seulement admises, mais encore essentielles dans un
testament; nous aurons à voir ensuite comment cette
partie de l’ancienne législation pourroit se concilier avec
nos lois nouvelles, et s’il est possible de supposer que
depuis les lois des 7 mars 17935 5 brumaire et 17 nivôse
an 2, une institution d’héritier défendue ou inutile, a pu
produire quelqu’effet dans un testament; mais, avant tout,
posons quelques principes ; ils nous seront nécessaires
pour bien distinguer sous quel rapport et par quelle
cause , en pays de droit écrit, l’institution d’héritier étoit
nécessaire.
L e droit naturel appelle les parens les plus proches
à succéder aux défunts. lie droit romain déféroit la suc
cession aux agnats; en pei’mettant d’y déroger, les légis
lateurs du monde entourèrent l’exercice de cette faculté
de certaines formalités tendantes à prouver authentique
ment que le testateur avoit agi avec liberté et circons
pection , et que sa v o lo n té, devenue certaine autant
qu’elle étoit absolue, avoit été ratifiée publiquem ent; et
comme dans les temps de la république romaine la loi étoit
1 expression de la volonté générale , on voulut que per
sonne ne pût disposer de ses biens qu’en faisant sanc
tionner ses dispositions par l’universalité des citoyens.
Voilà pourquoi le testateur prononçoit ses dispositions
devant le peuple assemblé, et le suffrage des citoyens
produisoit une loi qui étoit alors substituée à la loi
fondamentale.
Celle des douze tables changea cet ordre de choses
�( » )
et ne soumit plus le testament qu’à être l’effet de la
seule volonté du testateur. Sans nous arrêter ici à des
recherches plus curieuses qu’utiles sur les diverses espèces
de testamens successivement admises, et sur les nuances
diverses de la législation rom aine, il nous suffit d’indi
quer immédiatement de quelle manière y furent admis
les testamens nuncupatifs qui furent usités dans notre
droit jusqu’il la publication du Code.
Ce testament ne devoit pas d’abord être écrit, mais
le testateur devoit en prononcer les dispositions en pré
sence de sept témoins qui alloient en faire la déclara
tion chez le juge, après le décès du testateur; on sent
combien un semblable m o d e , si susceptible d’inconvéniens , devoit êti’e entouré de précautions , puisqu’il
s’agissoit de faire passer l’hérédité du défunt à d’autres
personnes qu'à celles appelées par la loi générale pour
laquelle on avoit un si grand respect. Aussi, on vouloit que les témoins ne se trouvassent pas là fortuite
m ent, et qu’ils fussent priés par le testateur d’entendre
ses dispositions et d’en porter témoignage. Peu à peu on
dut prendre l’habitude d'écrire ce testament; car si la
loi ne l’ordonnoit pas, elle le défendoit encore m oins,
et toutes les formules dont on usoit jusqu’alors furent
employées par le testament écrit; il falloit qu’il fût conçu
en termes im pératifs, parce qu ’on le considéroit comme
une loi particulière, T itius hœres es to; c’est ce qu’on
appela par la suite une institution en termes directs,
bien différente dans ses effets avec celle qui n etoit con
çue qu’en termes obliques, Titium hœredem esse volo.
Mais il laut bien se fixer sur cette vérité principale,
�M
( *3 )
que le testament ne fut admis que pour transmettre
Vhérédité; aussi, Vinstitution d’héritier y étoit essen
tielle; elle en étoit le'fondement. Il faut observer aussi
que l’institution devoit être universelle, et que le testa
ment ne pouvoit valoir que pour toute l’hérédité: en telle
sorte, qu’il attribuoit la totalité de la succession, quoique
le testateur n’eût donné qu’une partie ; car ne pouvant pas
mourir partira testa tus , partira intestatus, la seule cir
constance, qu’il avoit institué un héritier, quoique pour
une partie , suiKsoit pour attribuer la succession en
tière à cet héritier. Cette remarque est fort essentielle,
car nous aurons à voir si, en supposant l’acte de l’an 11
valable comme testament, les mots à titre d'institution
qui s’y trouvent, auroient eu la force d’attribuer toute la
succession aux Mijolas. Mais continuons l’examen de la
législation.
X<a loi appelant de droit les enfans à la succession de leur
auteur, ne vouloit pas qu’ils fussent privés de la succession
entière, et, hors le cas d’exhérédation , elle réservoit leur
légitime. E n ce cas, elle vouloit, à peine de nullité ,
que les testateurs les appelassent par le testament, et que
ce qui leur étoit réservé leur fût donné à titre d’institu
tion ; tant étoit grand le respect qu’on portait aux prin
cipes sur la transmission de l’hérédité.
Dans les premiers temps, on ne connoissoit pas lusage
des simples legs ; il falloit tester et instituer des héri
tiers ; celui qui vouloit imposer quelque charge à son
héritier le faisoit par de simples lettres ou par des
moyens semblables, toujours imparfaits, puisqu'ils n’étoient pas obligatoires.
ï
�( r4 )
Bientôt, on reconnut les inconvéniens qu’il y avoit
à exiger pour tous les cas possibles l’exécution de toutes
ces formalités ; on sentit combien cela étoit désavan
tageux pour ceux qui voudroient modifier leurs dis
positions par des legs ou des conditions, et aussi pour
ceux q u i, se trouvant en voyage ou dans des circons
tances particulières , ne pouvoient pas s’assujétir à toutes
les formes du testament solennel.
Alors s’introduisit l’usage des codicilles, pour lesquels
il ne falloit que cinq témoins ; où le style impératif
n’étoit plus nécessaire, et q u i, en un m ot, n’exigeoit
pas des formalités aussi minutieuses, ü n permit d’em
ployer cette forme beaucoup plus sim p le, pour ajou^ter à un testament ou pour le modifier ; on le permit
également pour ceux qui n’avoient pas encore testé ;
mais de même qu’un testament ne pouvoit valoir que
par une institution d’héritier, de même on voulut que
l’institution d’héritier ne pût valoir que par testament;
et il ne fut permis, par le codicille, ni d’instituer un
héritier , ni prononcer une exhérédation ; il ne valoit
que pour de simples legs qui étoient, en ce cas, transmis
au légataix’e par voie de fidéicommis dont on chargeoit
l’héritier institué.
Nous ne devons pas omettre de parler ici d’une troi
sième espèce d’acte qui fut admis dans le droit Rom ain;
nous voulons parler do la donation à cause de m o r t,
qui fut introduite pour donner à chacun la faculté de
disposer directement d’un objet particulier, sans em
ployer la voie du fidéicommis, ni se dépouiller de son
vivant. Dans le principe, elle avoit i\ peu près la même
�C
)
forme que la donation entre-vifs , puisqu’elle avoit pour
objet d’investir le donataire, pour le cas où le donateur
succomberoit à un événement p révu, et qu’elle exigeoit
l’acceptation du donataire ; mais étant faite in contem platione m ortis, elle pouvoit. être révoquée, et le do
nateur , échappé au danger qu’il avoit craint, pouvoit
reprendre ou réclamer l’objet de la donation qui demeuroit alors sans effet.
Dans la suite, elle devint d’un usage plus général ;
elle fut employée pour faire un don cogitatione mortis,
sans la prévoyance d’aucun danger ou d’aucun cas par
ticulier; aussi Justinien la compare-t-il aux dispositions
de dernière vo lo n té, et l’auteur du dernier traité des
donations nous dit, page 67 : « On pouvoit la comparer
« au codicille ,• dans l'un et Vautre c a s , il ne J a llo it
« pas d’institution d’h éritier, qui ne pouvoit être faite
« que par testament ; aussi , c o m m e pour le codicille,
a il n e fa lla it que cinq tém oins, nombre qui ne sufüsoit
a pas pour le testament. »
Ces principes sont incontestables ; on les puise dans
les sources les plus pures du droit : ils furent admis dans
la législation française, et furent généralement observés
dans tous les pays qui avoient adopté le droit écrit, jusqu'à
la publication des ordonnances de 1731 et 1735. Les
notaires étoient familiarisés avec les formules du droit
romain, ils les employoient avec ce rigorisme attaché ;\
1 habitude, et il étoit facile ¿\ leurs expressions, à la simple
pliisionomie de l’acte, au préambule seul, de distinguer
du premier coup d’œil si on avoit voulu faire un testa
ment ou un codicille ou une donation à cause de m ort;
�C 16 )
il n’y avoit jamais de louche qu’entre ces deux dernières
espèces d’actes, parce qu’ils «voient entr.eux des res
semblances telles, qu’il pouvoit être quelquefois diilicile de les distinguer l’un de l’autre.
Il
n’ en fut pas de même dans les pays coutumiers ;
chacun adopta des règles particulières ; quelques-uns,
comme l’A uvergn e , ne permirent par testament que
des dispositions particulières, et n’y autorisèrent pas
l’institution; aussi d isoit-on que dans ses coutumes, il
n’étoit pas permis de tester, et que les actes qualifiés
testament n’étoient, par le fait, que de véritables codi
cilles. Ces distinctions, toutes de principe , nous dé
montrent qu’on ne considéra comme testament que
ceux qui contenoient institution cohéritier et transmis
sion de l’hérédité, et comme simple codicille, tout acte
à cause de mort qui ne faisoit que des legs.
L ’ordonnance de 1731 apporta un changement à cet
état de choses ; elle supprima par son article 3 , la form e
des donations à cause de m o rt, ne les autorisant plus
qu’en contrat de mariage ; elle ne permit que deux
formes de disposer , celle des donations entre-vifs, et
celle des testamens ou codicilles. Dans les pays de droit
écrit on continua de faire par codicille des donations à
cause de m o rt, q u i, en effet, furent valables sous cette
forme.
L ’ordonnance de 1735 vint compléter la législation;
elle adopta, pour les pays de droit écrit, les principes du
droit rom ain, les testamens nuncupatifs écrits et le co
dicille ; elle en régla toutes les formes extérieures ; elle
exigea
�exigea pour le premier sept témoins y compris le notaire,
et pour le second cinq seulement; et quant à 'la forme
ou la nature des dispositions, elle se borna à ne point
déroger aux lois et usages préexistans; c’ést ce qu’on
voit dans l’article 5o , où elle dit que « dans les pays
« ou Pinstitution (f héritier est nécessaire pour la vali« dité du testam ent, ceux qui ont droit de légitime
« seront institués héritiei’S, au moins en ce que le testa
it teur leur donnera, etc. »
A près cette ordonnance, les notaires des pays de droit
écrit Continuèrent à employer les formules auxquelles
ils s’attachoient toujours minutieusement. Jam ais, dans
un testament, ils ne manquoient à dire qu’ils faisoient
un testament n u n cu p a tif‘ à insérer une institution, parce
q u e , disoient-ils , elle est le fondem ent de tout testament
valable ; à y donner cinq sous à titre cCinstitution à
tous les prétendant d ro it, pour eviter la prétérition ; ils
en avoient tellement l’habitude qu’on les voyoit souvent
insérer toutes ces clauses q u i, alo rs, n’étoient plus que
de vaines form ules, dans les dispositions d’individus qui
ne devoient de légitime à personne ; souvent ils ajou
taient là clause c’odicillâire , et quoique la forme des
donations à cause do mort fût abrogée, ils ne disoient
pas moins que si l’acte ne valoit pas comme testament,
le testateur vouloit qu’il valût comme codicille, comme
donation à cauie de m ort, ou sous toute autre fo rm e
sous laquelle U pourroit être valable. T o u t cela dé
montre combien les notaires mettaient do soin à entourer
le testament de toutes les formules usitées; et combien
3
�( i8 )
il filloit se garder de reconnoître l’intention de faire un
testament nuncupatif, à une expression isolée, détachée
de toutes ces formules, produite par la routine, et em
ployée à contx-e sens par un notaire peu instruit, dans un
acte où elle étoit inutile et déplacée.
Les lois nouvelles apportèrent d’autres modifications à
cet état de choses, sans rien changer à la forme exté
rieure des actes de dernière volonté. L ’ordonnance de
1735 continua de la régler dans les pays de droit écrit,
mais le fond des dispositions cessa de pouvoir être le
même , puisqu’une loi qui exigeoit' dans le testament
la transmission de ïh é ré d ité, et du titre d'héritier, fut
remplacée par une autre dont le principal objet fut de la
défendre.
La loi du 7 mars 1793 avoit interdit toutes disposi
tions en ligne directe. Celle du 17 nivôse an 2 alla ’
plus loin ; et sans parler ici de son effet rétroactif, il
nous suffit de remarquer que la nullité prononcée
de toutes dispositions gratuites, continua de subsister
pour le temps à venir , sous la seule inculte laissée
par l'article 16 de disposer du dixième de son bien
en ligne directe et du sixième en ligne collatérale ,
au profit d’autres que des héritiers ; nous devons dire
aussi qu’après avoir, par son article 6 1 , renversé tout le
système de la transmission des biens par succession uu
donation, en abrogeant toutes lois, coutumes ou statuts,
elle régla, par ses articles 62 et suivans, le partage des
successions à ven ir, y appela elle-même ceux qui dé
voient les receuillir dans chaque cas ; ensorte qu’elle
opéra une saisine directe et immédiate en faveur des hé-
�C l9 )
ri tiers du sang. Il falloït bien, en effet, que b saigne légale
succédât immédiatement à cella qui résultait auparavant
de Vinstitution d'héritier.
La loi du 4 germinal an 8 ne changea rien à ces prin
cipes; seulement elle apporta plus de latitude à la faculté
de disposer : « Toutes libéralités, dit-elle, qui seront faites
« soit par actes entre-vifs, soit par actçs de dernière vo « lonté, dans les formes légales, seront valables lors« qu'elles n'excéderont pas le quart des biens du dis—
« posant, s’il laisse à son décès moins de quatre enfans.
/
« La moitié, s’il laisse. . . . soit des frères ou sœurs, soit
« des enfans ou petits-enfans des frères ou des sœurs. »
E n se fixant sur ces lois, sous l’empire desquelles a
été faite la disposition dont il s’agit, on ne peut se dissi
muler que non-seulement la transmission de Vhérédité,
du titre universel d’héritier n’étoit plus nécessaire, mais
qu’il n’étoit plus autorisé par la loi ; la saisine des hé
ritiers naturels résultait de la réserve faite à leur profit;
et quoiqu’il ait été reconnu en jurisprudence que les
dispositions universelles pouvoient être valables , sauf
réduction, il n’en est pas moins vrai qu’elles n’étaient
ni essentielles ni nécessaires à la validité d’un acte quel
conque; elles ne pouvoient l’être dans le testament,
surtout lorsqu’il existait des héritiers à réserve, puisqu’alors il eut été permis de dire qu’elles n’étaient point
valables, ce qui résultait assez des expressions de la loi:
seront valables lorsqu’elles n’excéderont p a s,* et qu’au
moins il est certain qu’elles n’étoient pas valables pour
la quotité réservée dont l’héritier du sang était saisi
3 *
�( 2° )
par la lo i, comme celui qui, de droit, héritoit du défunt.
A vec ces explications, nous éviterons les subtilités, les
arguties, et nous saisirons bien mieux quel doit êlre le
sens, reflet des deux mots ¿1 titre t£institution, ajoutés,
dans l’acte dont il s’a g it, à une disposition de quote
qui x-econnoissoit et i*espectoit le droit des héritiers
naturels.
Examinons-le dans toute la rigueur des principes du
droit écrit, comme si la disposition eût été faite sous
l’empii’e des anciennes lois ; nous verrons ensuite ce que
devient cette difficulté coordonnée avec les lois nouvelles.
On a très-mal interprété l’opinion de Fux’gole sur la
manièx'e dont on doit reconnoitre un testament d’avec
un codicille ; on a donné de cet avis une explication aussi
fausse respectivement aux principes que contraix-e à co
qu’a dit et voulu dire Furgole lui-m êm e. Pour s’en
convaincre, il suffit de se fixer sur le chapitre 20 des
instituts de codicillis, la loi 13 ff de jure codicillorian,
la glose sur ces deux lo is, les docteurs du droit et
F u rgo le lui-même. l'.à, nous verrons que tout ce qu’a
dit Furgole tient à la qualité des mots qui établissoient
dans le droit romain des différences essentielles pour
l’interprétation des actes.
Dans le d ro it, l’institution ne pouvoitêtre valable que
par testament, et n’étoit pas bonne dans le codicille.
Mais comme alors, par des fictions ou par l’emploi
d’une simple form ule, on faisoit valoir par une voit; une
disposition qui n’auroit pas pû valoir sous une autre
mode, les législateurs romains distinguèrent deux cas;
d’abord, celui où l’institution scroitfaite en termes directs}
�( 21 )
et accompagnée de caractères qui lui seroient propres,
et qui ne pourroient être appropriés à une autre espèce
d’acte; par exemple, lorsque le testateur auroit institué
un héritier en ces termes: Titius heres esto, et l’auroit
chargé de legs ou d’une substitution vulgaire ; en ce
cas, il fut reconnu que l’institution étant directe avec
charge de fidéicommis envers des tiers, elle ne pouvoit
être valable que dans un testament, et qu’alors, faute
d’avoir les solennités exigées pour un .testam ent, l’acte
étoit nécessairement nul.
Mais le deuxième cas admis par les romains étoit
bien différent ; imbus de cette pensée digne des légis
lateurs du m onde, qu’un acte doit toujours être validé
dans la forme où il peut valoir lorsque les dispo
sitions qu’il renferme ne sont pas absolument incon
ciliables avec cette forme , ils déclarèrent que lorsqu'un
acte qui pouvoit valoir comme codicille, renfermeroit
seulement une institution en termes ordinaires, verbis
com m unibus, et q u elle ne seroit accompagnée ni dé
substitution ni de legs ù la charge de l’institué, l’ins
titution pourroit valoir comme fidéicommis, et qu’alors
l’acte vaudroit comme codicille, et nonobstant le mot
institution qui seroit considéré comme inutile.
Voila cette distinction solide et non subtile que faisoient avec raison les législateurs romains; elle nous est
absolument nécessaire pour rassurer le cœur et reposer
1 esprit; car, sans cela , il nous seroit difficile de compi t.ndre comment un acte, d’ailleurs Valable et régulier
sous une form e, peut être déclaré nul pour un seul
�C 22 )
mot qui ne change rien à ses caractères ni au fond des
dispositions, tandis qu’il est bien plus juste, bien plus
naturel, si ce mot peut être considéré comme inutile,
et si la disposition est valable pour la chose qu’elle con
tient, de maintenir l’acte sous la forme où il peut être
b o n , sans s’arrêter au sens étroit de l’expression, par
suite de cette maxime utile per inutile non vitiatur.
Voyons donc la loi et les docteurs.
D ’abord la loi 13 if. de jure codicillorum ; elle s’ex
plique sans équivoque..
L e législateur se demande ce que l’on doit penser de
celui q u i, n’ayant pas fait de testament, a écrit dans son
codicille, je veux que Titius soit mon h éritier 5 et,
nonobstant cette expression ti'ès - positive, il dit qu’il
faut rechercher s’il a néanmoins eu pour objet de faire
passer la succession à T itius par voie de fidéicommis,
qui est bonne dans un codicille, ou s’il a eu la volonté
formelle de faire un testament; car, en ce dernier cas,
l’héritier ne pourra rien demander.
« Tractciri solet de eo , qui cùm tabulas testarnenti
« nonfecisset ,co d icillis scrip sit, Titiuni hœredem esse
« volo ,• sed mulliun interest, utnnnjideicom inissariam
a hœreditalcm à legitimo per hanc scripturam quant
« codicillorum instar habere v o lu it, reliquerit- an vero
a testamentumfacere se existim averit ; n am , hoc casu,
« n il à legitimo p eti poterit. ( in hoc proxim o casu. )
dit Bnrthole pour qu’il n’y ait pas d’incertitude.
A in si, quoique le testateur ait institué un héritier eu
termes exprès, il faut encore rechercher si la disposition
�( *3 )
peut valoir comme fidéicommis dont on charge l’héritier
ab intestat ; car il faut bien observer que cette loi est
dans le cas où il n’existe pas de testament, mais seule
ment un acte isolé, dont on recherche le caractère
pour savoir s’il est un simple codicille ou un véritable
testament ; et on n’a pas perdu de vue que ce cas est
précisément le nôtre.
Après avoir posé cette règ le, le législateur indique
à quels signes on reconnoîtra que l’acte est un testament
ou un simple codicille. Vous le reconnoîtrez, d it-il, par
l’ensemble de l’acte : si Titius a été chargé de quelques
legs , si on lui . a donné par l’acte un substitué dans
le cas où il ne pourroit pas être héritier, il n’est pas
douteux qu’on a voulu faire un testament et non un
codicille.
« V oluntatis autern quœstio ex ( eo ) scripto plerum« que,declarabitur; nam si fo rte ¿1 Titio legata reh q u it,
« substitutum adscripsit, liœres s i non extitisset, sine
«• dubio non cod icillo s, sed testam entum facere voluisse
« intelligetur. »
Godefroi expliquant, d’après Barthole, ces termes
qui sont d’ailleurs assez clairs, nous dit qu’on doit re
chercher par l’ensemble de l’acte si le testateur a voulu
faire une institution directe ou n o n , car il met comme
le législateur lui-même beaucoup de prix à savoir si
1 institution est faite en termes directs ou en termes
ordinaires; et c’est, suivant lui comme suivant eu x , de
cela seul que dépend la décision. E x presumptione colhgitur utrum testator voluerit instituera directo vel
non.
�( 24 )
La loi nous dit assez, d’ailleurs, par ses propres e x ])ressions ce qu’elle entend par l’institution en termes
directs qui ne peut être faite que par testament, et
celles en termes ordinaires qui ne peut valoir dans le
codicille.
A van t de faire ressortir l’application que cette loi reçoit
à notre espèce, voyons le chapitre 20 aux instituts de
co d icillis, il est plus formel encore, s’il est possible.
Après avoir dit qu’on peut faire un codicille sans faire
de testament, l’empereur ajoute qu’on ne peut ni donner
ni ôter directement l’hérédité par un codicille, car l'h éiédité donnée par cette voie se transmet par voie d e jid e icommis et voilà pourquoi on ne peut pas par le codi
cille imposer des conditions à Vhéritier qu’ on institue, n i
lu i substituer un autre directement. Term es précieux
qui ne nous laissent pas même à conclure, mais qui
nous disent ouvertement que l’institution faite-par co-*dicille n’est pas valable directement, mais qu’elle vaut
obliquement comme lideicommis, et que seulement elle
est nulle entièrement, lorsque les conditions qui y sont
ajoutées lui donnent irrévocablement le caractère d’ins
titution directe , et ne permettent plus de le faire Valoir
obliquement et comme fidéicommis.
« C odicillis autem hccreditas iieqite dari, h é que
a adim i potest f lie confundatur ju s testamentorum et
« codicillotum : et ideb nec exhœredatio scribi. D irecto
« autem hcereditas codicillis iiequè d a ri, lieqüe àdim i
« potest: nam, perfidéicommiSsum, hccréditas codicillis
« jure relinquitur. N ec conditiùntm hcèredi instituto
« codicillis
�(
25
)
« codicillis adjicere, neque substituere directo ( quis )
k potest. »
Cela est-il clair ? Il n’y a pas de doute, ce semble.
A u reste, la glose répète la loi presque mot à mot et avee
des explications plus étendues ; elle ne laisse pas plus que
la loi la moindre obscurité sur le sens qu’on doit donner
à ces expressions d’ailleurs si claires, si form elles, si
impérieuses ; quoique l’institution ne vaille pas directe
ment dans le codicille, dit-elle,' elle vaut néanmoins par
droit de fidéicommis ; sed lie et in codicillis hœreditas
directo dari non possit, in illis tamen Jldeicom m issis
ju re relinqui potest.
Il
ne faut donc plus dire que lorsqu’on aura institué un
héritier dansun acte qualifié codicille, ou môme non quali
fié , il faudra y reconnoître un testament, et déclarer l’acte
et les dispositions nulles, si l’acte n’est pas revetu des for
malités du testament. Il faut d ire, au contraire, il faut
avouer que la disposition qui ne pourra pas valoir
comme institution dans un acte qui n’a reçu que la
forme du codicille, vaudra néanmoins par droit de iidéicommis, ù moins que le testateur n’ait ajouté h l’ins
titution des dispositions qui obligent à la prendre di
rectement et s’opposent à ce qu’on puisse la recevoir
par voie de fidéicommis; et cela est conforme à cette
maxime générale de tous les temps, que toutes les fois
qu un acte peut valoir tel qu’il est, sous une forme quel
conqu e, on doit plutôt le faire valoir que l'anéantir,
et que (com m e dit le Code civ il, art. n 5y ), on doit
plutôt lui donner le sens dans lequel il peut produire
•effet, que celui dans lequel il n’en produiront aucun,
4
�il6)
A v e c cette connoissance précise et exacte de la lo i,
on ne se méprendra pas sur l’avis de Furgole. Ne sé
parons pas ce qu’il a dit au chapitre 2 et au chapitre 12.
A u chapitre 2, il établit quatre règles; partout il pose
en principe que si l’acte porte institution d'héritier, il doit
être considéré comme testament ; mais il apporte à ce
principe des explications précieuses.
D ’abord, en disant, n°. 6, que dans le doute il f a u t
entendre et expliquer l'acte dans le sens capable de
le f a ir e valoir.
E n second lieu , en ajoutant que l’institution dont il
parle est celle qui ne peut être apposée qu’au testa
m ent, c’est-à-dire, cette institution directe et universelle
sans laquelle un testament ne peut pas valoir, et qui
elle-même ne peut pas valoir ailleurs: aussi ne séparet-il jamais ces expressions institution et exhérédation,
qui conviennent si bien au sens de la loi ; hœreditas neque
dari neque adim i potest, et qui signifient seulement en
ce cas une disposition qui nomme un héritier direct ou
qui le deshérite directement. A u ssi, après avoir dit sur
chaque cas comment l’acte pourroit être considéré comme
codicille, il ajoute : « Mais s’il y a voit des institutions,
« des substitutions directes, ou une exhérédation , il
« faudroit le considérer comme un testam ent, parce
« que tout cela ne peut exister au codicille. »
Furgole est donc fort clair; il ne s’arrête pas au mot
institution, mais à la chose m êm e, aux caractères do
l’institution, et si on en doute, qu’on le lise au nombre
10 , chap. 2 , section 7.
Il pose le cas où, par des tonnes qui paroissent presqtio
�( 27 )
directs, le testateur aura dit : J e veux que T itius soit
mon héritier (ce sont ceux de la loi m êm e); et il dit
que s’ il n’y a pas à’autre circonstance qu i puisse déterminer au contraire, il faudra regarder la disposition
comme un codicille, et la fa ir e valoir jure fid eicom m issi j il ajoute qu’en ce cas l’institution se trouvant
faite verbis com m unibus, peut être tournée dans le sens
d’un fidéicommis ; il cite ensuite les circonstances qui
peuvent déterminer au contraire, et indique l’institution
en termes directs, la nomination d’un substitué vulgaire,
la charge de legs qui ne peuvent subsister qu’au testa
ment ; il ne fait que traduire la loi : il y ajoute cependant,
car il suppose pour cela que l’acte est qualifié codicille,
ce que la loi ne dit pas ; mais ici nous verrons que l’acte
annonce suffisamment l’intention de faire un simple codi
cille ou donation à cause de m ort, et non un véritable
testament.
T o u t ce qu’a dit Furgole au chapitre 2 , est encore
plus clairement établi au chapitre 12 où il dit positive
m en t, n°. 35 , qu’en parlant d’institution, il n’a entendu
parler que de ces institutions universelles et des exhéré
dations qui ne peuvent pas convenir au codicille, et où
il f i n i t par dire au n°. 37, il est remarquable qu’ il fa u t
toujours, autaut que les circonstances le com portent,
déterminer la n atuie de l’acte dans le sens q u i peut le
faire valoir sans donner atteinte au x règles. O r , il
peut valoir sans porter atteinte aux règles, lorsque
1 institution n’étant faite qu’en termes ordinaires, p eu t,
suivant son expression, être tournée en fid éico m m is,
cest-à-dire, lorsquellc n’a pas les caractères d’institution
4 *
�( 28 )
•
universelle, avec substitution vulgaire, charge de legs, etc.
C ’est pnr suite decesprincipes certains, que M . Grenier,
tom. Ier. , page 6 1 , nous dit que si on employoit dans un
testament fait en payscoutum ier,lc mot d’institution d’hé
ritier , cette institution n étoit considérée que comme
un legs, ........... parce que ces testamens n’étoient que
de véritables codicilles.
A ppliquant ces principes à l’acte, nous voyon s, i°. que
le sieur de Baille a déclaré ne vouloir faire qu’une simple
donation à cause de m ort; 2°. qu’il n’a pas fait d’institution
directe ni universelle et n’a pas nommé d’héritier ; 30. qu’il
n’a pas employé les formalités nécessaires au testament;
trois circonstances qui démontrent une volonté contraire
à celle de faire un testament, et que Furgole a suffisam
ment déclarées etre suffisantes pour établir l’existence
d’un codicille et non d’un testament. E t certes, si l’ins
titution d’héritier, même universelle, étoit valable au co*
dicille lorsqu'elle étoit faite verbis com m im ibus, à plus
forte raison un simple legs de quote, qui réserve le droit
de l’héritier , et qui n’est lui-même qu’une charge im
posée à l’héritier, ne p eu t-il donner à un codicille le
caractère du testament.
E n vain diroit-on que les mots donation à cause de
mort sont insignifians ; le notaire Rocher n’est pas le
seul q u i, depuis l’ordonnance de 173 5 , ait confondu la
donation à cause de mort et le codicille; presque tous
le faisoient ainsi : on le voit dans la cause m êm e, puis
que le notaire P o u zo l, recevant en 1811 le testament
du sieur de B aille, ajouloit que s’il ne vnloit pas comme
les*ninent, il vaudroit comme codicille ou donation à
�( *9 )
cause de m o r t, et en i8 r2 , M . Grenier a d it, au
même endi-oit: « L e véritable caractère du testament,
« étoit l’institution d’héritier , q u i, de sa nature, étoit
k universelle , et par codicille comme par donation
« à cause de m ort, on entendoit tous actes de dernière
« volonté, par lesquels il n’y avoit pas d’héritiers do
« nommés, mais seulement des legs lim ités a u x objets
« dont on disposoit. »
A u reste, remarquons bien que la loi et lés auteurs,
en examinant si l'institution est directe ou oblique, ne
s’occuppent que du seul cas où il y a eu un héritier
nommé ; qu'ils ne reconnoissent de testament que là où
on a donné fus et nomen hœ redis, et q ue, dons aucun
cas, cette distinction ne peut être nécessaire dans une
disposition qui ne contient que de simples legs, et où
le testateur n’a transmis ni voulu transmettre l’hérédité.
V e u t-o n se faire une idée nette sur l’acte de l’an 11 ?
Q u’on se place dans la position o ù , tel qu’il est, et sans
le changement d’un seul m ot, il eût été fait en présence
de sept témoins, et où la succession se fût ouverte sous
l'empire des anciennes lois. E n suivant le système des in
timés , les légataires de moitié eussent pu demander la
totalité de la succession, par cela seul qu’ils avoient reçu
un legs de m oitié, à titre dyinstitution ; alors ils eussent
dit, à bien plus forte raison qu’on ne fait aujourd’hui : ces
deux mots dénotent un testament et non un simple codi
cille ; cela seul suffit pour que le testateur n’ait pas pu
mourir partlrn intestatus ,* le titre d’héritier nous est donc
dévolu, et nous attribue la succession entière. Qu’auroit-on
dit d’une semblable prétention ? auroit-on, pour la favo-
�C 30 )
riser , forcé violemment le sens d’une expression d’ail
leurs fort indifférente ? auroit-on cherché une institu
tion d’héritier là où il n’y avoit qu’un simple legs ?
enfin, auroit-on mis son esprit à la torture pour arra
cher aux héritiers naturels une moitié de la succession
coutre le vœu et l’intention du donateur ? ou b ien , dé
daignant une expression qui n’a pas de sens et qui ne
pouvoit pas avoir d’objet dans l’acte où elle se trouve,
auroit-on jugé de l’acte par son caractère ? de l’étendue
de la disposition par l’expression de la volonté? et au
roit-on restreint le légataire à l’objet de son legs ? N ’en
doutons pas ; de quelque hardiesse d’esprit qu’on pût
être doué, le magistrat toujours sage se fût gardé de prêter
l'oreille à une argutie , pour attribuer aux Mijolas toute
une succession qui ne leur étoit ni dévolue ni transmise.
Les expressions de l’acte, l’ensemble des dispositions, tout
l’eût convaincu que les volontés du testateur ne devoient
pas être étendues ; il eût décidé que l’acte devoit être ren
fermé dans son objet ; que rien n’obligeant à le considérer
comme testament, il ialloit y voir un simple codicille,
un legs de quotité qui pouvoit exister sans un testa
ment solennel ; aucun doute ne se fût élevé dans son
esprit pour repousser une prétention arbitraire, injuste ;
et en ordonnant la délivrance du legs, il eût déféré
aux héritiers du sang le titre d’héritier et le Bénéfice
de l’hérédité.
Mais si tout cela eût été inévitable, comme on ne
peut en douter, comment cet acte au ro it-il d’autres
caractères, les termes inutiles une plus grande force,
h disposition moins d’eilicacité, la volonté moins d’évi-
�(30
dence? pourquoi, enfin, verroit-on l’actc avec d’autres
yeux , parce qu’il s’agit de donner aux légataires ce
qui leur est légué, d’exécuter littéralement et dans leur
vrai sens les volontés du donateur, du testateur si l’on
veu t? pourquoi une expression inutile, ridicule, ne
craignons pas de le d ire, et qui n’auroit servi à rien
pour faire considérer l’acte comme testament quand il
devoit être valable, prendroit-elle un sens et feroit-elle
un testament d’un codicille lorsqu’il faudroit l’annuler?
Cependant la circonstance qu’il manque un témoin pour
en faire un testament est une preuve de plus que le
sieur de Baille n’a voulu faire qu’un simple codicille,
et d’ailleurs, lorsqu’un acte, nul sous une form e, peut
valoir sous un autre, on doit l’exécuter dans le sens où
il est valable ; c’est alors que le magistrat toujours digne
de la justice, voit un acte dans son ensemble, le con
sidère dans son objet, respecte l’intention de celui qui
l’a consenti, et que bien loin de détruire l’intention, la
volonté exprimée, par des termes inutiles et qui contrarient
le surplus de l’acte, il les regarde d’un œil de mépris et leur
applique noblement cette maxime du d r o it, tirée des
premiers principes: V itia n tu r et non vitiant.
" A in s i, et quand bien même nous aurions à. appli
quer le droit romain dans toute sa pureté, il n’y
auroit de doute ni sur la nature de l’acte, ni sur l’in
tention de son auteur, ni sur la nécessité d’exécuter sa
•volonté telle qu’elle est écrite.
Mais est-ce là la position où se trouvent les appelans?
s a g it-il bien ici de rechercher quel sens et quel effet
pouvoient avoir , sous le droit romain, des formules qui
�Sv
f so
tenoient aux principes d’alors ? N on, certes. L ’institution
d’héritier fût-elle positive dans l’acte de l’an i l , elle ne
pourroit ni le faire valoir ni l’annuler; à plus forte rai
son , un seul m ot, sans aucune signification réelle, ne peut
y être d’aucun effet.
Si l’ordonnance de 1735 a dû continuer d’être exé
cutée depuis les lois nouvelles pour les formalités exté
rieures des testamens, il ne faut pas confondre ces formes
avec l’institution qui tenoii moins à la forme qu'a la
substance de l’acte.
Lorsque le testament étoit considéré comme une loi ;
que cette loi devoit embrasser toute la succession, qu’en
fin la loi de l’état faisoit de l’institution (Vhéritier une
partie substantielle du testam ent, on conçoit qu’il pouvoit s’élever des difficultés sur la validité des actes, sui
vant qu’o n pou voit les considérer comme des testamens
ou des codicilles.
Mais lorsque la loi défendit les institutions, que la
faculté de disposer fut réduite à de simples le g s , con
çoit-on la possibilité de tirer le moindre a v a n ta g e , pour
ou contre , du m ot in stitu tio n , ou même d’une ins
titution réelle placée dans un acte de dernière volonté?
lies magistrats n’eurent plus alors qu’une chose à con
sidérer, savoir, si la* personne étoit prohibée, ou si la
disposition excéüoit les bornes. Sous la loi du 17 ni
vôse elle-m êm e, et avant celle du 4 germinal an 8 ,
un acte qualifié testament et entouré de toutes les for
malités du testament solennel, n’en eût pas été moins
valable s’il n’eut contenu qu’un simple legs du dixième
pu du sixièm e, .au profit d’un autre que l'héritier du
sang ;
�( 33 )
sang ; et l’institution d’un dixième ou du sixième eût été
très-b on n e par un simple codicille fait devant cinq
témoins, quoique les dispositions universelles fussent dé
fendues ; le mot ne fut plus rien dès que la nouvelle
loi eut abrogé toutes lois ou coutumes relatives a la
transmission des biens, qu’elle eut prononce la saisine
des héritiers du sang, et réduit à de simples legs la fa
culté de disposer.
Il
en fut de même sous la loi de germinal an 8 ; elle
conserve encore la saisine des héritiers, et dit que les
libéralités vaudront, lorsqu'elles riexcéderont pas la
quotité qui leur est réservée; certes, en réservant ainsi
aux successibles une quotité déterminée de la succession ,
elle leur donne aussi le titre d’héritiers; les dispositions
permises étoient en ce cas de simples legs des choses
dont on disposoit.
A la vérité, et on n’entend pas le dissimuler ici, la loi
jDermettant en certains cas d’épuiser la totalité des biens ,
il a été reconnu par la jurisprudence, que les dispo
sitions universelles furent valables depuis sa publication,
et qu’elles étoient seulement sujettes à réduction, jusqu’à
concurrence de la portion réservée; mais quest-ce que
cela peut avoir de commun avec l’institution d’héritier
qu’exigeoient les anciennes lois pour la validité du tes
tament? Si la loi du 4 germinal permettoit d’instituer,
elle n’y obligeoit pas; l’institution ne vicioit pas la dis
position , mais la disposition valoit sans l’institution ; ce
n etoit donc plus qu’un vain m ot, qu’une expression
inutile, qui ne pouvoit ni soutenir ni vicier le testament;
Ue n’y produisoit pas plus d’eifet qu’autrefois dans les
5
�> ( 3 4 ),
pays de coutum es, et il est vrai de dire q u e , par l’effet
de ces lo is, les testamens ne furent plus que de véri
tables codicilles.
E t si nous plaçons sous les lois nouvelles l’argument
que nous avons fait plus haut ; si nous supposons que
l’acte eût été fait en présence de sept témoins, et qu’il
eût contenu une institution directe de m oitié, et qu’il
n’y eût pas eu d’héritier à réserve, concevrons-nous
que les légataires eussent eu le ridicule de vouloir tirer
des mots à titre d'institution un droit à l’autre moitié,
et établir , pour y arriver , une différence entre les
effets du testament et du codicille ? on eût ri de pitié,
comme du soin cju’auroit pris un notaire de dire, après
les nouvelles lois, et même depuis le Code , qu’une insti
tution est le fondem ent de tout véritable testament, de
léguer cinq sous à tous prétendant d ro it, d'y ajouter
la clause codicillaire et autres choses semblables, et c’est,
en effet, ce qui est arrivé souvent par la force de lliabitude, et à quoi n’a pas manqué le notaire P ouzol,
dans le testament du sieur de B aille, fait seulement de
puis le Code ; acte dans lequel il se croyoit sans doute,
au temps où on faisoit les testamens par simples pax-oles,
puisqu’il prie les témoins d'en être mémoratifs j acte
cependant qui ne seroit pas moins valable, malgré ce
ridicule échaffaudage de formules inutiles; car-ce sont
ces formules et non pas l’acte qui demeurent nulles et
sans effet.
Il
en est de même dans notre espèce. Si le mot ins
titution ne peut pas donner une plus grande valeur à
l'acte testamentaire depuis l’abrogation des dispositions
�( 35 )
.
universelles, pourquoi su présence les vicicroit-elle ?
une semblable proposition, présentée d’une manière géné
rale , seroit-elle autre chose qu’une absurdité ? oseroit-on
la mettre au jour sous le Code ? « ü n a cru , dit en« core l’auteur du 2e. traité des donations, tome i er,
« page 397, devoir toujours permettre la disposition sous
« le nom d’institution d’héritier, par égard pour les an« ciennes habitudes ; mais il est indifférent qu’on qualifie
« celui à qui on fait des dispositions, d’héritier ou de léga« taire. É n matière de testament, les mots donner, insti« tuer h éritier, léguer, deviennent par eux-mêmes sans
« conséquence ; l’objet essentiel est que la disposition
« soit claire et précise ; tel est le résultat de l’art. 967, etc. »
O r , si cela est vrai sous le Code qui a fort étendu la
faculté de disposer, et qui avoit rendu au sieur de Baille
la sienne toute entière; la vérité n’étoit-elle pas plus
certaine encore sous l’empire des lois précédentes qui ne
donnoient qu’une faculté extrêmement lim itée, et ne
reconnoîssoient d’autres héritiers que ceux qu’elles mêmes prenoient soin d’appeler ?
N e recherchons donc pas si le sieur de Baille a voulu
faire autre chose que ce qu’il a fait ; voyons sa disposi»
tion telle qu’elle est, et demeurons convaincus que res
pectant la saisine des héritiers du sang, c’est avec inten
tion qu’il 11e s’est occupé ni d’eux ni de la moitié de ses
biens qui leur étoit réservée ; que sachant bien qu’il ne
pouvoit disposer que de moitié, c’est avec réflexion qu’il
s est borné t\ léguer un quart aux Chambouvet et un
quart aux Mijolas ; qu’il a voulu le faire par simple
donation ¿1 cause de mort ; que le notaire a banni de
�(3
«)
son acte les termes de testament et de testateur que
tous les notaires du droit écrit eussent plutôt répété dix
fois que de les oublier une seule quand ils faisoient un
testament; et disons enfin qup réduite ainsi à de simples
legs de quotité, lorsque la qualité d’héritier étoit attri
buée par la loi à des tiers, lorsque l’institution çouvoit
valoir sans testament et que le testament valoit sans
institution, la disposition a pu valoir sous la forme du
codicille, et qu’elle doit être maintenue puisqu’elle est
revêtue de cette forme.
Il
ne nous reste qu’à repousser une objection des
intimés et du jugement dont est appel : elle n’est pas
redoutable.
Les demandeurs, dit le jugem ent, ont eu x-m êm es
considéré l’acte comme un testam ent, puisqu'ils agissent en qualité cïhéritiers • et pour que l’argument soit
plus v if , les intimés ajoutent que les Mijolas l’ont
fait ainsi par une spéculation d’intérêt, car la qualité
d’hériticr les saisissoit de plein droit, tandis que celle
de légataire les eût assujéti. à demander la délivrance
et leur eût fait perdi*c les fruits de plusieurs années,
pendant lesquelles'ils avoient suspendu leur action. Cette
objection qui tend à favoriser le système gén éral, qu’il
y a une différence entre les effets de l’institution et celle de
simple leg s, n’a pas même le mérite de l’exactitude.
Les premiers juges, non plus que les intimés, n’ont
•pas fait attention que la succession étoit ouverte sous le
Code ; q u e , par conséquent, la qualité d’héritier ou de
légataire étoit absolument indifférente, comme le démon
trent les'articles 967 et 1002; que le testament étoit
�( 37 )
fait sous les lois du 17 nivôse an 2 et 4 germinal an 8 ;
qu’ainsi la disposition seule étoit à considérer, les termes
ou la qualification n’y étant d’aucune conséquence ; que
par suite de cela, il étoit fort indifférent qu’on eût donné
par le testament où qu’on eût pris par la demande la
qualité d’héritier. O11 n’a pas vu que par les résultats de
l’article 1011 , les M ijolas, légataires où héritiers, peu
importe , étoient obligés de demander la délivrance
aux héritiers du sang, puisque le legs n’étoit pas uni
versel, et qu’ainsi ils n’avoient pas le moindre intérêt
à prendre la qualité d'héritiers, puisqu’il n’en résultoit
pour eux aucun bénéfice.
D ’ailleurs, et quelqu’intérêt qu’on pût supposer aux
appélans à prendre une qualité plutôt qu’une au tre,
cela changeoit - il les caractères et la nature de l’acte ?
eussent-ils trouvé dans cette qualité le m oyen de le
rendi’e valable comme testament, s’il ne l’étoit pas;
d’obtenir toute la succession quand on ne leur léguoit
que moitié ? e t , par la même raison, peut-on y puiser
contr’eux un m oyen d’annuler l’acte , s’il est valable
sous une forme quelconque ? O n a droit de s’étonner
lorsqu’on voit détruire des actes avec de semblables
argumens.
.
Voilà cependant tout ce qu’on a pu imaginer pour
échapper aux dispositions du sieur de Baille. O n concevroit plus facilement cette résistance, si des héritiers
directs, investis de la succession de leur auteur, se trouvoient en lutte avec des étrangers, et défendoient contre
eux une portion de leur patrimoine ; mais le sieur de
Baille au momenl de son décès, 11e devoit rien A ses
�collatéraux, cependant il leur a réservé les trois quarts
ou au moins les deux tiers de sa succession ; c’est sans
doute par reconnoissance qu’on fait la guerre à ses vo
lontés, à la réalité desquelles, cependant, l’esprit et le
cœur sont obligés de croire; aussi, a-t-on essayé de ré
pandre mystérieusement quelques soupçons, et refusé
de reconnoître les Mijolas pour parens du sieur de Baille,
quoique leur parenté soit assez proche pour que les
intimés ne pussent pas l’ignorer. Les appelans ne s'oc
cuperont pas de Semblables moyens ; indépendamment
de ce que toutes les circonstances les repoussent, ils savent
combien peu ils doivent en redouter l’eifet devant des'
magistrats qui commandent le l'espect par leur sagesse
profonde autant que par la dignité dont ils sont l'evêtus.
• C ’est sans doute avoir beaucoup trop disserté sur une
question, qu’on persiste à trouver simple et dégagée de
difficultés; mais, encore une fois, on a dû compte de ses
moyens, dès qu’un arrêt de partage a démontré l’existence
du doute. Il faut, en de semblables cas plus encore qu’en
tout autre, se défier de ses propres lum ières, appuyer
les propositions sur les moyens de la loi, ne pas crain
dre de multiplier les preuves et les soumettre avec con
fiance à la sagesse des ministres de la justice ; c’est ce
qu’ont dû faire les appelans; ils ont rempli cette tache.
Plein de respect pour les magistrats auxquels la décision
de leurs intérêts est confiée, ils livrent tous les moyens de
la cause à leur méditation ; ils ne feront aucune imputation
ni publique ni secrète à leurs adversaires, mais ils ose
ront dire qu’ils ne méritent ni ne craignent aucun re
proche ; que sous leur vêtement com m un, ils portent
�A * '*
C 39 )
une âme honnête et une conscience droite ; ils sau
ront garder ce qu’ils doivent à la justice et aux con
venances, et attendre, avec autant de respect que de
confiance, la décision de la Cour.
M e. d e V I S S A C , avocat.
M e. B R E S C H A R D , avoué-licencié.
THIBAUD , Imprimeur du Roi, de la Cour royale et libraire, à Riom.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mijolas, Claude. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Breschard
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude et Matthieu Mijolas frères, appelans de jugement rendu par le tribunal civil d'Issengeaux, le 20 avril 1819 ; contre dame Marie-Françoise-Mélanie de Baille et sieur Hyppolite de Lagrevol, procureur du Roi à Issengeaux, son mari, intimés ; et contre Jean et Jean-Pierre Chambouvet, et Jean Romeyer, en qualité de tuteur de ses enfans mineurs d'avec Jeanne Chambouvet, aussi intimés.
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
An 11-1820
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2511
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2512
BCU_Factums_G2513
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53497/BCU_Factums_G2511.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Saint-Hostien (43194)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53408/BCU_Factums_G2112.pdf
87ca1245af3f67228ab557bcde45720e
PDF Text
Text
PRÉCIS
COUR
ROYALE
DE RIOM.
POUR
2 *.
Les héritiers D E R O N A T ;
CONTRE
Les héritiers CH ASSAIG N E-D U BO ST.
L a question consiste à savoir si une institution con
tractuelle , grevée d’une condition, doit être exécutée
suivant l’intention de l’instituant, et si, après avoir ac
cepté l’institution, il est possible aux donataires de ne
point exécuter la condition, quoiqu’ils entendent retenir
tout l’effet de la libéralité conditionnelle.
Pour composer ainsi avec la bonne foi qui doit régner
dans tous les engagemens, on devine d’avance que les
donataires ne se prévalent pas de leur seule volonté; il
leur faut un prétexte quelconque ; et le seul qu’ils aient
CHAMBRE.1
18 août 1 8 1 4
y
�( 2 )
trouvé consiste à dire que les bonnes mœurs et les lois
leur défendent d’exécuter la condition imposée à la libé
ralité, sans s’opposer néanmoins à ce qu’ils gardent tout
ce qu’on leur a donné, et plus môme qu’on n’a eu l’in
tention de leur donner.
Ce sont là de ces tours de force qui ne sont connus
qu’au palais. Dans la multitude des lois, il s’en trouve
toujours quelqu’une q u i, par équivoque ou obscurité,
se prête au sens qu’on y cherche; mais si cette obscurité
n’est pas éclaircie par la jurisprudence ou par des auto
rités précises, l’abus des mots ne peut convaincre per
sonne, et les tribunaux finissent toujours par faire res
pecter les engagemens, tant qu’une loi évidente ne les
force pas a juger contre la raison et leur conscience.
:?
.Va'*"' -*\k’ .
F A I T S .
'
M. Vidal de Ronat père contracta mariage en 1757
avec mademoiselle de Lots.
M. Cottier-Dubost, oncle de la future, lui fit donation
contractuelle de tous ses biens d’Auvergne, sous la réserve
du quart.
s (
D e ce mariage sont issus sept enfans, dont six sont
défendeurs, et le septième fut M arie-A n n e de Ronat,
mère des demandeurs.
Elle fut mariée le 17 octobre 1776, avec M . Jacques
Chassaigne ; et c’est dans ce contrat de mariage que se
trouve la clause donnant lieu au procès : elle doit dèslors être transcrite littéralement.
« E a considération dudit mariage, les sieur et dame
.
�( 3 )
« père et mère de la future épouse lui ont constitué son
« trousseau , consistant aux habits, linge et dorures à
« l’usage de la future épouse.
« Et en d o t , est intervenu aux présentes M. Cottier« D u b o st, grand-oncle de la future, lequel l’institue
« pour son héritière universelle de tous et un chacun ses
« biens situés en pays de droit écr it, sous la réserve de
« 20,000 francs à prendre sur le domaine de la Boutière,
« pour en.disposer en faveur de qui bon lui semblera;
« et encore à la charge que la présente institution à'hé"
« ritier tiendra lieu de légitime de droits tant paternels
« que maternels à la fu tu r e épouse , laquelle , en conse
il quence, renonce à tout ce qu’elle pouri'oit espérer et
« prétendre dans les successions de ses dits père et m èrey
« tout ainsi et de même que si la d o t a t i o n e u t É T É
« f a i t e p a r s e s PEE.E e t MERE ; à l’exception toute« fois des successions collatérales desdits estocs et lignes,
« que les père et mère lui réservent. »
On lit après cela d’autres clauses qui se rattachent, à
la vé rité , à l’institution, pour le cas du décès de la fu
ture, mais elles sont étrangères à la contestation.
En 1778, M . Cottier-Dubost fit donation à la dame
'Chassaigoe du quart qu’il s’étoit réservé -en 1757; e t,
pour cette fois, il n’imposa aucune charge ni conditioa
à sa libéralité.
M . Cottier-Dubost est mort en 1779.
M . de Ronat père est mort en 181 r.
Madame Cliassaigne n’avoit pas manqué d’accepter
l’institution de son oncle , et de s’emparer de sa suc
cession en 1779. Il est à croire que si elle eût vécu t
ï *
�V-
_
( 4 )
elle en auroit rempli la condition sans tracasser per
sonne ; mais elle est décédée avant son père , et ses
enfans se sont présentés pour réclamer une portion
dans les biens de M. de Ronat.
Les autres enfans de Ronat leur ont répondu : Votre
mère n’a obtenu pour elle seule la succession de notre
oncle, qui valoit i 5o,ooo f r . , qu’à condition de nous
laisser partager sans vous la succession de notre père;
laissez-nous donc cette succession, ou renoncez à celle
qui vous a été donnée en remplacement.
A cela les héritiers Cliassaigne ont répliqué : Nous
voulons garder la succession de notre oncle, et avoir
encore ce qu’il nous a défendu de demander ; car sa
donation est bonne, et la condition est réprouvée par
la loi. D ’après cet ultimatum , ils ont assigné en par
tage de la succession de Ronat.
L e système des demandeurs est développé dans une
requête, où ils invoquent une multitude de lois pour
prétendre que leur mère n’a valablement renoncé à
rien , et qu’elle doit avoir les deux successions. Leurs
objections seront examinées successivement , sans en
oublier aucune ; mais voyons d’abord s’il existe des prin
cipes et des autorités sur la question, telle que la simple
lecture de l’acte de 1776 la présente.,
M O Y E N S .
L a vérité la plus évidente, en matière de libéralité,
c’est que celui qui donne a le droit d’imposer toutes les
conditions qu’il juge à pro pos, pourvu qu’elles soient
�ç5}
.
exécutables, et le donataire doit s’y conformer , ou ne
pas accepter le don. Tout cela est incontestable aux yeux
de la raison, qui nous apprend que celui qui est pro
priétaire de son b ie n , est pai*faitement le maître de ne
le donner qu’avec les conditions onéreuses , difficiles ,
et même bizarres, puisqu’il pouvoit aussi ne pas le donner
du tout. C’est à celui qui doit recevoir, à peser l’avan
tage ou le désavantage de la libéralité ainsi grevée; car
rien ne l’oblige de l’accepter si elle lui paroît onéreuse.
Mais lorsque le donataire a trouvé profitable d’ac
cepter, il est tout à la fois illégal et immoral de vouloir
détruire ensuite la loi du contrat, et se débarrasser d’une
charge qui étoit inséparable de la libéralité. L e droit
rom ain, qui étoit une raison écrite , défend par plusieurs
lois (i) cette violation de la volonté des donateurs. Les
auteurs les plus recommandables du droit français (2)
ont enseigné les mêmes maximes. L e C o d e c iv il (3) les
a répétées après eux ; et, sans qu’il soit besoin de trans
crire ici des citations trop longues ou trop élémentaires,
il suffit de dire que les héritiers Chassaigne auroient
trouvé dans ces vrais principes plus de réflexions qu’ils
(1) Loi 19 , ff. D e condit. et demons t. Loi 4 , D e hœred.
instit. Loi unique , Cod. de caduc, toll. Loi 48 , ff. Famil.
ercisc. Loi
5,
ff. D e oblig. et act. Lois
25 , 56
et 9 a , ff. D e
condit. et demons t.
(2) D o m a t,
Lois civiles.
Traité des conventions, tit. i er.-
Traité des testaraens , tit. i er. Ricard , Traité des dispositions
conditionnelles , tit. 2. Furgol, Traité des testamens, tome
Boucheul, Traité des conventions de succéder , ch. a.
(3) Code civil, articles n 3 4 , n 3 5 , H7_5%
�( 6 )
n’en avoîent besoin, pour s’épargner la tentative d’un
procès inconvenant, au lieu de chercher des arguties
dans des maximes de droit public , qui s’appliquent ù
toute autre chose.
La latitude donnée par les lois romaines à la volonté
de celui qui est libéral, étoit restreinte, à la v érité,
lorsque cette volonté portoit atteinte au droit public ,
ou lorsqu’elle avoit q u elqu e chose d’impossible ; et en
core y a - t - i l une différence à faire entre les testaïnens et les contrats entre-vifs; car dans les testa mens,
les conditions illicites étoient seulement réputées non
'écrites, vitiantur et non vitiant. A u contraire, elles
vicioient radicalement, dans les contrats , les clauses
auxquelles elles étoient apposées. Voilà ce qu’enseignent
Ricard ( i) , Merlin (2) et Chabot (3) de l’A llie r, d’après
le texte des lois romaines (4). Il faut, dit Ricard, que
la stipulation demeure sans eifet, si la condition réputée
impossible ne s’exécute p as, parce qu’un contrat est le
travail’de deux parties intéressées, qui sont présumées
avoir travaillé sérieusement. L e Gode civil a dit la même
chose en l’article 1172 : « Toute condition d’une chose
« im po ssib le, ou contraire aux bonnes mœurs, ou pro« liibée par la l o i , est nulle, et rend nulle la con« çention qu i en dépend. »
(x) Des dispositions conditionnelles , tit. 2 , ch.
5 , sect.
2,
h°. 224(2) Questions de droit, V a. Condition concernant les ma
riages.
(3) Q uestions tran sito ires, V*. Condition.
(4) Loi 3i ; ff* De ad, et ob. Loi 7, iï.D c verb. ob.
�7 \ ..
Jusqu’ici la découverte des héritiers Chassaïgne tour
nerait contre e u x-m ê m e s, puisqu’elle les forcerait 4
abandonner une succession opulente , s’ils s’obstinoient
à regarder la condition de leur institution comme con
traire aux lois et aux bonnes mœurs.
Mais abondons pleinement dans leur sens ; supposons
que l’anathème de la loi s’applique à toutes sortes d’actes ?
et que la libéralité peut subsister séparément, quand la
condition est illégale. Qu’en résultera-t-il ? et en quoi la
condition d’abandonner un droit éventuel pour recevoir
une succession qui vaut le quadruple se tr o u v e - t- e lle
impossible? comment cela est-il contraire aux bonnes
mœurs? quelle est la loi qui le prohibe?
Quoique la loi française soit aussi vague que la loi
romaine sur cette exception de droit p ub lic, il ne faut
pas pour cela supposer que le législateur en a livré l’in
terprétation au caprice de tous c e u x qu i auroient intérêt
d’en faire leur profit.
La condition impossible ne peut s’entendre que de ce
qui ne peut pas etre vaincu par les efforts humains :
veluti si in cœlum ascendcit. Car, suivant Ricard et la
loi par lui citée, « une grande difficulté ne seroit pas
«
«
«
«
capable d’emporter la nullité de la condition d’un legs;
il suffit qu’elle soit possible en soi et dans les moyens
d’y parvenir par quelques moyens que ce soit, quoique
la difficulté se réduise à un quasi impossibilité (i). »
(i)
■^°i
4
Ricard, Des dispositions conditionnelles. lbid> > n°. 3.22.J
> ff- Do statu liber.
�/ ( 8 )
La condition contraire aux bonnes mœurs a une lati
tude telle, qu’il faudroit recourir au Code pénal pour
y chercher des exemples. Sans doute, si une libéralité
imposoit pour condition des actes de débauche, ou toute
autre turpitude, il y auroit lieu à l’application de la loi.
D olive (i) rapporte un arrêt du parlement de Toulouse,
au sujet d’une donation faite à une religieuse, à condi
tion qu’elle renonceroit à ses vœux pour embrasser la
religion protestante. Cette condition étoit contraire aux
bonnes mœurs, parce que la religion catholique étant
alors dominante, c’étoit exiger une action scandaleuse.
O n pourroit ici examiner s’il est vrai que la renoncia
tion à une succession future soit contre les bonnes mœurs;
mais comme cette expression n’a été employée par les
lois que comme motif de prohibition, cet examen sera
renvoyé un peu plus loin.
L a condition prohibée par la loi auroit bien plus
d’étendue encore, s’il falloit l’appliquer à toutes les pro
hibitions d’intérêt privé, comme les héritiers Chassaigne
l’entendent. Par exemple, la loi défend d’établir l’égout
des toits sur le terrain d’un voisin ; elle défend à un
usufruitier de co up er des arbres; elle défend à un tuteur
d’acheter les biens de ses pupilles; elle défend de vendre
le bien d’autrui, etc. Faudroit-il donc pousser l’exagé
ration jusqu’à soutenir qu’un donateur ne pourra pas
imposer à son donataire la condition, ou de souffrir les
eaux de son voisin, ou de laisser couper quelques-uns
(x) Dolive, livre i , chap. 4.
de
�( 9 )
Z ô l
de ses arbres, ou de respecter l’acquisition faite par son
tuteur, ou enfin de consentir à la vente de son ten-ain,
faite ou à faire, par une tierce personne?
Il faut, suivant les auteurs déjà cités, distinguer les
cas de prohibition qui ne tiennent qu’au droit p rivé,
de ceux qui tiennent au droit public. Car la loi n’a eu
pour objet d’interdire que les conditions attentatoires
au droit public; autrement, et comme le dit D om at,
« lorsque les conditions dépendent uniquement du fa it
« de la personne à qui le testateur les a imposées, elles
« doivent s’accomplir comme il l’a réglé , et aussitôt
« que Vexécution "peut en être fa ite ...................... soit
« qu’elle consiste à faire ou ne pas faire , quitter ou
« donner, etc. (i). »
Domat ne cite aucun exemple ; mais Ricard (2) nous
apprend qu’une difficulté s’étoit élevée entre les juris
consultes, pour savoir s’il y av o it lieu de regarder comme
condition prohibée par les lois celle en vertu de laquelle
un testateur auroit fait un legs à son pupille, à condition
qu’il ne demanderoit pas la reddition de son compte.
On sait en effet combien est irritante la prohibition
de la loi contre tout pacte fait avec le tuteur pour la
décharge du compte non visis tabulis ; et comme le
tuteur tient son mandat de la justice, qui protège spé
cialement la minorité, il pouvoit en résulter que, sous
ce rapport, la question tenoit à l’ordre public.
Mais Ricard nous apprend que cette condition est va(1) Domat, liv.
5,
tit. i cr. , sect. 8.
(2) Dispositions conditionnelles, ibid. n°.
2
�1 -> •
( 10 )
lable, et que si le pupille veut conserver son action en
reddition de compte , il doit s’abstenir de l’hérédité. C’est
ainsi, en effet, que le prononce la loi romaine par lui
citée (i) *, et cette loi est d’autant plus essentielle à con
sulter dans le texte, qu’elle est rendue sur une préten
tion que les héritiers Chassaigne semblent avoir prise
pour modèle ; car le pupille avoit commencé , comme
eux, à s’emparer du legs, et au bout d’un certain temps
il n’en avoit pas moins réclamé son compte de tutelle.
Pa p illus legatum p rœ tu lit, et postea nihilomimis petit
quidquid ad tutorem suum ex tutella perçenerit. Mais
la loi lui répond que s’il continue de le demander, contre
la condition du testament, il y sera non recevable, comme
coupable de dol : Kespondit s i pergeret petere i d , in
quo contra conditionem fa c e r e t, dolirnali exceptionetn
obstaturam. Cependant la loi termine par dire qu’à cause
de sa minorité, il faudra lui permettre de revenir sur
le passé, et de rendre le legs qu’il a pris, s’il persiste à
vouloir la reddition du compte : JSisi paratus esset,
quod ex causa fideicom m issipercepisset, reddere,• quod
ci œtatis bénéficia indulgendum est.
Maintenant quelle différence peut-on faire entre la
condition de renoncer à un compte de tutelle, non visis
tabuîis, et la condition de renoncer à une succession à
échoir? La prohibition de la loi est moins irritante dans
cette seconde espèce; et fût-elle même plus fortement
exprimée, il n’est toujours question que de l’intérêt privé,
puisque la partie intéressée a toute liberté d’exécuter la
(1) Loi
26,
ff. Do liber, légat.
�( „
)
X ûJ>
condition, sans que le ministère public intervienne pour
s’y opposer.
A la v é r ité , la loi 30, au code D e p a ctis, déclare
nuls tous les pactes et conventions qui seroient faits sur
une succession qu’on attend; et le motif de cette loi porte
que ces sortes de conventions sont contre les bonnes
mœurs.
Mais la lecture de cette loi prouve que cette accusation
d’immoralité ne s’applique qu’à ceux qui traitent entr’eux
sur la succession d’un absent : ce motif cesse si la con
vention est faite en présence de celui de la succession
duquel il s’agit, parce qu’il n’y a plus d’ immoralité lors
que toutes les parties intéressées sont d’accord. Tune et
enim subîatâ acerbissimâ sp e, licebit e is , Mo scientQ
et jubente hitjiisrnodi pactiones servare.
Cette loi étoit en pleine vigueur en 1776. La Cour de
cassation l’a a p p liq u é e , le i « . brum aire an 1 0 , dans la
cause des frères Falcimaigne, du Cantal; et un traité sur
la succession à échoir d’un père n’a été déclaré nul que
parce que le père n’étoit pas présent à l’acte pour y donner
son consentement (1). Cette loi a été appliquée encore
par la même C ou r, le 7 août 1810. Une renonciation
faite à une succession à échoir et à une succession échue,
a été jugée valable, même pour la succession à échoir,
quoiqu’elle fût faite unico pretio, et quoiqu’elle fût di
rigée au profit d’une fille, mais en présence de la mère
de cujus (2). Ces deux ai’rêts prouvent de plus en plus
(1) Sirey, an 10, p. 119.
(2) Denevers, 1810, p. 4 29*
2
\
*
-4 ^
�C
)
que la prohibition de la lo i, dans cette espèce, n’a tou
jours été considérée que comme intéressant le droit privé.
Aucun auteur.n’a mieux expliqué que M. le Procureur
•général Grenier., le sens qu’il falloit donner aux condi
tions prohibées par les lois. Il enseigne qu’il ne faut
l’entendre que des lois tenant à l’ordre public, ou qui
sont du droit public, et qui sont établies pour l’intérêt
général de la société ; mais qu’il n’en est pas de même
des lois particulières tenant au droit p r iv é , et où il ne
s’agiroit que d’un intérêt pécuniaire ; d’où il conclut
qu’un donateur peut imposer à son donataire la condi
tion de renoncer, au profit d’un tiers, à un droit de
cette nature, parce que les lois elles-mêmes permettent
à tout individu de renoncer à son droit : la condition
est alors purement potestative à l’égard du donataire.
Après avoir professé ces principes, l’auteur prend pour
lin de ses exemples le cas même où nous nous trouvons.
« Rien n’empêché, dit-il, un donateur d’imposer à son
« donataire la condition de renoncer à une succession,
« ainsi qu’à une reddition de compte de tutelle : c’est là un
« droit simplement pécuniaii-e*,......... et c’est aussi un de
« ces cas dans lesquels la donation peut av o ir un elfet au
« profit d ’ un tiers, d’après l ’article 1 1 2 1 du C o d e (1). »
L e parlement de Toulouse, si scrupuleusement attaché
aux principes du droit romain, jugea, le i 0r. décembre
1768, qu’une institution contractuelle avoitpu être grevée
de la condition que la future renonceroit à la succession
(1) Traité des donations et testamens, tome i cr. , page
de l’édition in-8°»,
356
�C 13 )
(le sa m ère, et qu’après avoir accepté l’institution, elle
n’étoit pas recevable à se présenter au partage des biens
maternels. Gatelan (1), qui rapporte cet arrêt, en donne
pour motif que la condition étoit très-légale, et n’avoit
rien contre les bonnes mœurs : son annotateur Vedel (2)
ne revient sur cet arrêt que pour s’étonner que la ques
tion ait pu donner lieu à un procès.
Ainsi les héritiers de Ronat ont en leur faveur tous
les principes et toutes les autorités connues ; et ils n’ont
encore examiné la question que sous le rapport d’une
condition imposée par un donateur, de son propre mou
vement , et sans l’accession et la coopération de celui qui
stipuloit la condition en faveur des siens, et comme ac
croissement de sa propre fortune.
Sans doute M. Cottier-Dubost p ou voit, en instituant
sa n ièce, exiger qu’elle ne réclamai rien dans les biens
de scs père et mère; et cette cond ition eût été de rigueur;,
quand même le père et la mère n’eussent pas été là pour
accepter eux-mêmes cette condition au nom de leurs
autres enfans. On vient de le prouver jusqu’à l’évidence.
Mais les sieur et dame de Ronat ont coopéré à l’acte
de 1776; c’étoit à eux à donner une dot h leur fille, et
c’est pour les soulager de ce fardeau que M . Cottier-Dubost
intervient pour assurer toute sa fortune à la future, en
remplacement de cette dot.
Si cette intention n’étoit pas assez clairement exprimée
par la condition qu’il impose , on verroit dans l’acte
(1) Arrêts de Catelan, liv. 2, ch. 21.
(2) Observations sur Catelan, liy. 2 , ch. ai,.
�même que M . Cottier n’a pas voulu laisser d’équivoque,
puisqu’il débute par dire : E n d o t est intervenu le sieur
C o ttie r -D u b o s t, lequel, etc. ; après cela, et de peur
qu’on ne se méprenne encore sur son projet de rem
placer la dot de la future par ses propres biens, il dé
clare que son institution doit en tenir lieu à la future,
en sorte qu’elle n’ait rien à prétendre dans la succession
de ses père et m ère, tout ainsi et de même que si la
dite donation eût été f a i t e par ses dits père et mère.
D ’après une déclaration aussi précise, conçoit-on que
les héritiers Cliassaigne puissent prétendre aux deux suc
cessions dont ils sont exclus, sans renoncer à celle qui
ne leur a été donnée qu’à titre d’indemnité et de rem
placement. Qu’ils l’appellent, s’ils veulent, une simple
dot ou légitime, elle n’en est pas moins réputée dot profectice, comme si elle étoit provenue des père et mère,
dès qu’elle avoit été donnée en contemplation d’eux et
en leur nom.
On citeroit sur ce point l’opinion de Basmaison (i)
et de M. Chabrol (2), sur la coutume d’A u vergn e, s’il
n’y avoit ici qu’une simple dotation faite par un colla
téral, parce que ces auteurs en induisent la présomption
de droit que cette dotation est toujours présumée faite à
la décharge du père. Mais ces opinions deviennent ici
superflues, puisque M . Cottier a spécialement dit que
tel étoit le motif de sa libéralité. Mais comme ces auteurs
tirent de cette simple présomption la conséquence que
(1) B asm aison, art.
35,
titre 1 2.
(2) C h a b r o l, tQmç a , page 488.
�( i5 )
¿ C ô .?
la fille , ainsi récompensée par un collatéral, n’a pins
d’action pour demander une dot, malgré la réserve ex
presse de la coutum e, il faut dire , à bien plus forte
raison, que la fille dotée au triple de ce qui lui reviendroit dans la succession de ses père et mère, n’a rien à
prendre dans ces successions, lorsque telle a été la con
dition expresse de sa dotation.
O n ne veut pas conclure de tout ce qui a été dit,
que les héritiers Chassaigne soient fo rcés de s’en tenir
à la loi qui leur a été faite en 1776. La loi du 8 avril
1791 ayant rappelé les filles mariées et renonçant aux
successions futures, rien ne les empêcheroit de revenir
contre la renonciation de leur mère, s’ils veulent renon
cer aussi à la succession de M . Cottier, et la rapporter
avec les jouissances, puisqu’un don conditionnel ne peut
pas être scindé, d’après les principes.
On ne peut pas s’étonner q u e , dans ce cas, les Liens
Cottier doivent être rapportés à la succession de Ronat,
puisqu’il les a donnés à un des enfans du sieur de Ronat,
de sa part et à sa décharge. Il n’y a rien là qui ne soit
conforme à l’équité et aux principes. On lit dans Rousseau-Lacombe (1) : « Dot donnée par un étranger, con« templatione patris, est profectice, sujette à rapport,
« et s’impute sur la légitime. » Sur quoi il cite la loi
10, §. 6, D e vulg. et pup. su bit,, et l’opinion de D u
moulin et de Godefroi.
Ce rapport, s’il est offert, doit etre fait par moitié,
(0 Recueil de jurisprudence c iv ile , V?. Rapport à succès-,
sion, sect. 3 , n°. 1.
,
�(
)
h la succession échue du sieur de Ronat père, et à celle
à échoir de la dame de R o n a t, puisque les biens du
sieur Cottier ont été donnés comme dotation J'aite par
eux.
Cependant les héritiers Chassaigne font plusieurs ob
jections, qu’ils disent fondées en droit, pour fortifier
leur système. Il reste à les parcourir pour y répondre.
RÉPONSE
AUX
O B JE C T IO N S.
L e sieur Cottier, d it-o n ,
parloit à une époque où la forclusion étoit de droit ; il
a parlé dans ce sens; il n’a pas prévu l’abolition de 1791 :
cette loi a éteint une condition qui n’étoit que la con
séquence de la forclusion.
RÉPONSE. II.ne faut pas rechercher ce que le sieur
Cottier a pu penser tout bas, mais seulement ce qu’il a
pensé tout haut et par écrit. Les filles forcloses, que les
vieux coutumiers disoient être quasi anciîlœ , raro locupîetes, avoient la plus mince part; et la dame Chas
saigne a eu la plus- forte. P eu t-e tre le sieur de Ronat
l ’eut retenue dans sa maison comme héritière, si le sieur
Cottier n’eût voulu la retenir dans la sienne. Ainsi, il
ne faut pas rêver une forclusion, là où il y a une ins
titution à la décharge des père et mère. C’est pourtant
sur ce rêve qu’est fondée toute la série d’argumentations,
qui mènent à une conséquence fausse.
- Elle est fausse, quand même il y auroit une forclusion ;
car la loi qui les abolit n’a fait que rendre aux filles'-la
qualité d’héritières, sans dissoudre les conventions, autres
que
P
r em ière
o bjectio n .
�( 17 )
H
que la renonciation elle-même. Une fille qui a renoncé,
moyennant une dot, ne peut pas garder la dot et avoir
la succession : de même unefille qui a renoncé à 5o,ooo f.y
moyennant une institution de i5o,ooo f r . , ne peut pas
garder l’institution et avoir les 5o,ooo f r . ; c’est-à-dire,
la chose et le prix. U bi eadem ra tio , ib i idem ju s statuendum.
E n fin , la clause de 1776 semble avoir prévu l’ob
jection pour l’éviter; car s’il y est d’abord parlé de dot,
il n’y a pas moins renonciation à tout ce que mademoiselle
de Ronat auroit à espérer et prétendre dans les suc
cessions de ses père et mère. On ne la regardoit donc
pas comme forclose de droit. Les héritiers n’ont donc
pas la ressource de laisser entendre que l’institution n’é
tant le prix que d’une forclusion ou d’une légitime de
droit, il faudroit au moins leur donner ce qui excè d e
cette lé g itim e , p o u r atteindre leur portion dans les trois
quarts assurés par la loi actuelle. Car si la renonciation
doit avoir son effet à cause du .prix, elle comprend tous
les droits successifs, tels que la loi du décès les règle.
Ce seroitj encore une fois, scinder une clause qui doit
être exécutée toute entière, ou rejetée toute entière.
Dans le fait, on se trompe lorsqu’on dit que la for
clusion étoit de droit. Une très-forte portion des biens
de M. de Ronat se trouvoit en pays de droit é c rit, et
de Bourbonnais, pays qui n’admettoient la forclusion
qu’autant qu’il y avoit renonciation moyennant un prix;
et puis la forclusion légale cessoit avec les maies, tondis
que la renonciation moyennant un prix duroit tant qu’il
y ?Yoit des enfans, fils ou filles; en ce sens, du moins,
3
�ilû
V/A
( 18 )
qu’on ne pouvoit écarter la renonciation sans rapporter
le prix.
»
L ’institution du sieur Cottier
n’étoit qu’une espérance ; il pouvoit vendre et hypo
théquer : on auroit donc renoncé à deux hoiries pour
une chimère.
R é p o n s e . On apprenoit, dans les cours de logique,
que ah actu ad posse valet consecutio ; mais on ne
disoit pas : A posse ad actum. Si M . Cottier avoit
vendu ou hypothéqué ses biens, on diroit qu’il l’a p u ,
parce qu’il n’y avoit qu’une institution; et c’est alors
seulement qu’elle seroit une chimère. Mais il est mort
opulent, et son héritière se trouve si bien de la pré
tendue chimère, qu’elle ne veut pas l’abdiquer. Il-ne
falloit donc pas argumenter de ce qu’a pu faire M. Cottier
par ce qu’il n’a pas fait; et c’est sur un second rêve qu’est
encore fondée cette seconde objection, qui n’a pas besoin
d’une plus ample réponse.
Seconde
o bjectio n.
L e Code civil autorise la
demande en partage; l’article 900 annulle les conditionslégales apposées aux donations; l’article 1130 défend
de traiter sur les successions futures; l’article 1389 dé
fend de changer dans les contrats de mariage l’ordre'
légal des successions : la même prohibition existoit par
les lois des 5 septembre 17 9 1, et 5 brumaire an 2.
RÉPONSE. Il a déjà été répondu à l’article 900, en
prouvant que la cqpdition d’abandonner une succession
n’étoit pas prohibée par la lo i, parce qu’elle étoit to u te .
T
roisièm e
o bjectio n .
�( 19 )
dépendante de l’intérêt p rivé, et que si le donataire la
trouve onéreuse, il peut s’abstenir de la libéralité.
L ’article 1130, en défendant des pactes sur les suc
cessions futures, ne dit pas que le renonçant gardera le
prix qu’il en a reçu. Cet article pourroit être contesté
dans son application à un acte de 1776 , puisqu’il est
contraire à la loi 30, D e p a r tis, et aux arrêts cités;
mais ce seroit prolonger la discussion sans nécessité.
L ’article 1389 parle des conventions faites entre épouxf
et il est tout simple qu’ils ne changent pas d’avance
l’ordre de leurs successions. Cela n’a rien de commun
aux donations que peut faire un collatéral à qui la loi
permet de tout donner.
Les lois des 5 septembre 1791 et 5 brumaire an 2
ne disent rien de plus sur la question que l’art. 900 cidessus : il est donc inutile d’y faire une réponse particulière;
cependant on ne peut s’e m pêcher de ren vo y er i ° . aux
Questions de d ro it, de M . Merlin ( 1 ) , pour voir sa
discussion sur l’effet de ces deux lois, et l’arrêt de cas
sation qui la termine en jugeant que la condition de
faire un mariage pour associer à une institution, n’étoit
pas une clause prohibitive, et que l’associé ne pouvoit
réclamer sans exécuter la condition ; 20. aux Questions
de M. Chabot ( 2 ) , qui traite de l’effet rétroactif des
mêmes lois, et rapporte un arrêt de cassation, du 20
janvier 1806, jugeant qu’une rente viagère donnée sous
(1) Tome 2, V n. Condition.
,
(2) Questions transitoires Vy. Condition
riages.
concernant
3 *
les ma
�tax
n
( 20 )
condition de viduité étoit supprimée par le défaut d’ac
complissement de la condition, parce que l’acte étant
de 1789, ne pouvoit pas être régi par les lois posté
rieures.
L ’opinion de M . Grenier,
qu’une donation peut être grevée de la condition de
renoncer à une succession, ou à un compte de tutelle,
11e se rapporte qu’à une succession échue.
R é p o n s e . Il n’est pas possible que ce soit de bonne
foi qu’une semblable interprétation soit donnée à un
passage aussi clair. Gomment peut-on supposer qu’un
auteur aussi instruit et aussi attentif n’ait parlé que d’une
succession échue, en traitant des conditions prohibées
par la loi ? Elle ne défend pas de traiter sur les suc
cessions échues; ainsi, dans ce sens, il ne se présentait
aucune question.
L ’assimilation qui est faite d’un compte de tutelle ,
prouve que dans les deux cas il s’agissoit de choses à
venir et inconnues; car, renoncer à un compte de tu
telle, suppose évidemment que le tuteur ne l’a pas rendu,
et q u ’il a encore les pièces justificatives. L ’opinion citée
se rapporte donc à une succession à échoir.
Q u atrièm e
OBJECTION.
ClNQUlÈME o b j e c t i o n . L ’arrêt de Toulouse, rapporté
par Gatelan, ne peut être d’aucun secours aux héritiers
de R o n a t, parce que le parlement de Toulouse a été
s u p p r im é , et que sa jurisprudence est tombée avec lui.
R é p o n s e . La demanderesse en partage, qui plaidoit
alors, iuvocjuoit aussi la loi romaine qui annullc les
�Z iô
(> ■ )
conditions contraires aux lois ou aux bonnes mœurs.
L e parlement de Toulouse a jugé qu’il n’y avoit rien de
contraire aux lois, dans un sacrifice pécuniaire exigé d’un
donataire s’il vouloit garder le don. M . Grenier a eu la
même opinion depuis la suppression du parlement de
Toulouse.
Il s’agit ici de juger un acte de 17 76 , dont la vali
dité ou la nullité ne pouvoit être prononcée que par
les lois de celte époque. Les arrêts des parlemens restent
toujours comme interprètes de la l o i , et il est ridicule
de dire que la suppression a éteint ces monumens de
la jurisprudence.
Basmaison , Cliabrol et D u
moulin parlent d’une dot faite ex contemplatione patris.
Ici, au contraire, M . Cottier n’a pas eu cette intention,
parce que M . de Ronat lui étoit étranger. Il avoit élevé
la dame Chassaigne, ainsi le don étoit en contemplation
d’elle seule. L ’acte de 1778 dit expressément qu’il lui
donne le quart réservé , pour l’amitié qu’il lui porte.
R é p o n s e . Il n’est donc pas possible de rencontrer,
Si x i è m e
o bjectio n
.
même en point de fa it, une objection qui ne soit une
chicane. Les parties ne plaident pas sur l'acte de 1778,
ni sur celui de 1 7 7 6 , qui expriment littéralement et
en plusieurs manières, que M . Cottier n’a donné son
bien qu’à la décharge de M. et madame de Ronat; ce
qui est encore plus fort pour désigner qu’il a été libéral
en contemplation d’eux. Il suffit de renvoyer à ce qui
îi ¿té observé là-dessus, sans le répéter.
L ’acte de 17 78 , au lieu de prouver eu faveur des
�W fc
( 32)
héritiers Cliassaigne, prouve, au contraire, que quand
le sieur Cottier a voulu donner à sa nièce, en contem
plation d’elle seule et sans condition, il a fort bien su
le faire entendre. Ainsi la dame Cliassaigne auroit pu
garder le quart donné en 1778, et ne pas accepter la
donation de 17 7 6 , si la condition de celle-ci lui eût
paru trop onéreuse.
La dot n’est réputée profect ic e , que si elle est donnée par le père ou l’aïeul ; mais
non celle donnée par un étranger : tel est l’avis de Domat.
L ’article 85o du Code n’exige le rapport qu’à la suc
cession du donateur. M. Cottier a voulu que le retour
eût lieu à ses héritiers.
R é p o n s e . Une règle générale est une mauvaise cita
tion , à moins qu’elle n’exclue positivement toutes les
exceptions. Sans doute, si M . Cottier avoit doté sa nièce
sans condition, la dot ne seroit pas réputée profectice ;
mais la règle générale cesse lorsqu’il y a clause contraire.
L ’article 85 o , qui n’est aussi qu’une règle générale
sans application, ne devoit pas être séparé de l’article
843, q u i exige le rapport à la succession du défunt de
ce qui a été donné directement ou indirectement, à
moins que le don n’ait été stipulé hors part.
Précisément madame Cliassaigne a l’eçu indirectement
de ses père et mère les biens Cottier, puisque c’est pour
eu x qu’il les a donnés. Bien loin de dire qu’il les donnoit hors p a r t , il a spécialement dit qu’elle n’auroit
aucune p a r t, si elle vouloit les prendre. Ainsi toutes
les citations des héritiers Cliassaigne, loin de leur Être
Septièm e
o bjectio n .
�(
23
)
utiles, prouvent au contraire de plus en plus qu’aucune
loi ne condamne la condition dont ils voudroient s’af
franchir.
;
Leur observation du retour prévu aux héritiers Cottier
n’a aucun b u t, puisque le cas prévu n’est pas arrivé.
Si la dame Chassaigne fût morte sans enfans, il n’étoit
plus besoin de la doter en contemplation du père, et
alors les choses doivent reprendre leur cours naturel ;
mais ses enfans existent, et s’ils veulent partager la suc
cession qui, dans les deux cas prévus, eût été affranchie
de leur portion, la donation devient de plein droit l’in
demnité de ce qu’ils en retrancheront. Les héritiers de
Ronat ont intérêt et qualité pour réclamer cette indem
nité du chef de leur père, et comme héritiers institués,
présomptifs de leur mère. D ’ailleurs, si l’abdication est
faite par les héritiers Chassaigne, avec offre des jouis
sances , le porteur de procuration de m adam e de Ronat
sera présent à l’audience, pour accepter cette abdication
et intervenir au partage, afin d’y réclamer ses droits, et
prendre enfin toutes les conclusions qui seront dans son
intérêt.
Il répugne à la loi actuelle
que des filles forcloses, rappelées, excluent une autre
fille forclose : la loi les rappelle toutes. M . de Ronat
l ’a reconnu ainsi, en ne disposant que d’un quart pour
ses deux fils. Il leur auroit de plus donné la part de la
dame Chassaigne.
R é p o n s e . Déjà i l a été p r o u v é q u e l ’abolition des
forclusions est une loi inutile à lu dame Chassaigne, si
H
u itièm e
objectio n .
�24
on n’offre pas le rapport du prix qu’elle, a reçu pour
renoncer. Les autres filles ne l’imitent pas,' puisqu’elles
rapportent ce qu’elles ont reçu. La dame Chassaigne
n ’étant ni ne pouvant être forclose aujourd’h u i , est
comme un héritier qui répudie aliquo dato ; il ne fait
plus nombre parmi les héritiers, et on partage comme
s’il n’existoit pas. Il n’y a donc plus que six successibles;
et M. de Ronat n’a p u , depuis le C ode c i v i l , disposer
que d’un quart. Il n’a exprimé aucune intention en se
bornant à léguer la quotité disponible.
L . F. D E L A P C H I E R .
A RIO M , de l’imp. de TH IB A U D , imprim. de la Cour royale, et libraire»
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ronat. 1814?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Subject
The topic of the resource
donations contractuelles
renonciation à succession
contrats de mariage
pays de droit écrit
forclusion
dot
successions
donations d'un collatéral
coutume du Bourbonnais
partage
conflit de lois
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour les héritiers de Ronat ; contre les héritiers Chassaigne-Dubost
note manuscrite : « arrêt. Voir journal des audiences, 1814, p. 205 ».
Table Godemel : Institution d'héritier : 10. une institution contractuelle grevée d’une condition (celle de renoncer, pour l’institué, à tous droits dans les successions de ses père et mère), doit-elle être exécutée ? le donataire, après avoir accepté l’institution, peut-il refuser de remplir la condition, quoiqu’il prétende retenir tout l’effet de l’institution ? cette condition est-elle contraire aux lois et aux bonnes mœurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1814
1776-1814
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2113
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Saint-Victor-Montvianeix (63402)
La Boutière (domaine de)
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Domaine public
conflit de lois
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
donations
donations contractuelles
donations d'un collatéral
dot
forclusion
partage
pays de droit écrit
renonciation à succession
Successions
-
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c8a7e80ddd543ee154d9908c01d523f0
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Text
CONSULTATIONS.
L
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a pris lecture,
1 ° Du mémoire à consulter ci-joint;
2° De la consultation délibérée par l ’ un des consultans, le 16 mars 1 8 1 9 ;
E n adoptant entièrement ‘ les principes contenus
dans la consultation, et l ’avis qui en est la conséquence
nécessaire, se contentera, par suite, de répondre à
e
l ’objection contenue dans le mémoire.
Les adversaires, forcés de se rendre aux principes
contenus dans la consultation , ont prétendu que ,
v rais d’après la législation existant au moment de la
révolution, ils avaient éprouvé des changemens consi
dérables par l'effet des lois des 17 nivôse an 2 , et
4 germinal an 8 , q u i, suivant eux, ont défendu la
transmission de l ’ hérédité et du titre d ’héritier; d’où
il suivrait qu e, depuis la promulgation de ces lois,
non-seulement l ’institution d ’ héritier ne fut plus né
cessaire pour la validité du testament, mais encore
q u 'elle n’y eut plus aucun effet, puisque ces lois dé
truisaient la saisine que la loi romaine attribuait à
l ' héritier institué , et décidèrent que cette saisine
appartiendrait, dans tous les cas, aux héritiers,du
sang; donc, ajoutent-ils, depuis cette époque, il n’y
eut plus de différence entre les pays de droit écrit et
les pays coutumiers; et, dans les uns comme dans les
autres, les testamens ne furent plus que de véritables
codicilles; donc l 'institution d’ héritier, eut-elle été
�■
(
2
)
formellement exprimée dans l ’acte de dernière volonté
du sieur Baille, n’y aurait produit aucun çfïet, et eût
été, dès-lors, insuffisante pour assurer à cet acte le
caractère de testament à plus forte raison ne doit-on
y avoir aucun égard, lorsqu’on ne veut s’ en servir que
comme d’un codicille,
A cette objection, qui n’est q u e . spécieuse, on peut
répondre que dès qu’il est avoué, et ce point est
d ’ailleurs incontestable, que les lois intermédiaires
n ’ont rien changé à la forme extérieure des actes de
dernière volonté, ces actes., jusqu’à la promulgation
du G ode, n’ont pu valoir que s u i v a n t la forme pres
crite , pour chacun d’eux , par les anciennes ordon
nances, et que par conséquent toutes les fois qu’ un
testateur a annoncé l ’intention de faire un testatement,
il a dù suivre les formes prescrites pour les testamene
comme il a dù suffire que les règles des codicilles
eussent été suivies , s’il avait annoncé l ’intention de
fa ir e s i m p l e m e n t un codicille. Dans l'espèce, la ques-;
tion est donc uniquement une question d ’inlcntion ;
e t , dès-lors, reviennent tous les argumens qui se
trouvent dans la consultation énoncée plus haut , et
notamment celui qui est tiré de ces mots : A titre
d'institution. C a r , comme il était de principe, en
droit romain, que l ’institution directe d ’héritier ne
pouvait avoir lieu par codicille, on conclut avec raison
que, par cela seul que le testateur s’est servi du mot
institution, il a entendu luire un testament, et non
un simple codicille,
13 uii autre côté, lu ita turc même de ces dispositions}
�(
3
■ '■ Â V
)
ainsi qu’ il a etc dit clans la même consultation, prouve
évidemment que le testateur a entendu faire une véri
table institution d’ héritier, puisqu’il a donné a titre
universel tout ce dont la loi lui permettait de disposer
à cette époque. Peu importe que cette institution n’ait
pu comprendre la totalité des biens , puisqu’il est
certain que dans l ’ancien droit l ’institution n’était pas
moins regardée comme telle, lors même qu’elle avait
lieu en faveur d ’autres personnes que les enfans du
testateur, quoique, dans ce cas, l ’institution ne put
certainement comprendre la totalité de la succession ,
dont une partie était réservée aux enfans, à titre de
légitime.
i
Quant à la loi i 3 , Dig- D e ju i'e coclicill. , opjiosée
par les advex-saires , elle rentre absolument dans le
système qui vient d’être présenté, puisqu’elle décide
formellement que la question dont il s’a g it est une
pure question d!inteution, et que cette intention doit
se juger par les termes du testament. On y voit préci
sément que, si le testateur exprime la volonté que les
legs fussent acquittés par l ’institué, s’il en a fait une
. charge de l ’institution, il y a testament et non pas
codicille. Or, c’est précisément ce qui a lieu dans l ’acte
qui fuit l’objet de la contestation actuelle, puisque,
ta portion indisponible ne pouvant jamais être en
tamée, il cn résultait, pour conséquence nécessaire,
que les legs particuliers étaient une charge de l ’insti
tution.
Délibéré à Paris, ce 3 o avril 1 82 1 .
D E L V IN C O U R T .
�(4 )
L E CO N SEIL SO U SSIG N É, qui a pris lecture de
la consultation ci-dessus et de celle qui a précédé, par
tage entièrement l’avis de son confrère et collègue, et
par les mêmes motifs.
Il
croit devoir ajouter seulement qu ’indépendam
ment de ce que la volonté de faire une institution ,
caractère essentiel des testamens, est exprimée littérament, et de ce que l’intention résulte de ce que les
legs particuliers doivent être acquittés par l ’institué,
comme charge de son institution, l ’argument tiré des
lois des 17 nivôse an 2 et 4 g e r m i n a l an 8 , par les
quelles on prétend que la différence entre les testamens
et les codicilles aurait été abolie, est contraire à la
législation positive, suivant la doctrine de M. Merlin,
R éperto ire, v° Codicille, § 3 , doctrine avouée par
tous les auteurs. C ’est l ’article 7 de la loi du 3 o ¡ven
tôse an 1 2 , qui a la prem ière et seule aboli les dis
positions des lois romaines, à l ’aide desquelles on
pouvait distinguer les codicilles des testamens, et les
différences essentielles de ces deux sortes d’actes.
Ainsi le fait et le droit se réunissent pour déclarer
n u l comme testament, l’acte dont il s’agit, et em
pêcher de le faire valoir comme codicille.
,
Paris le 3 o avril 18 2 1.
PA RD ESSU S.
R I O M , I M P R I M E R I E DE SALLES, PRES LE P ALAIS D E J U S T I C E .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mijolas, Claude. 1821]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delvincourt
Pardessus
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations.
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1821
An 11-1821
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2512
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2511
BCU_Factums_G2513
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
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Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
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ece1b0ecaa2d58f81a9c5109da11e064
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Text
1 I*
M É M O I R E
P O U R N i c o l a s B E A U C L A I R , Cordonnier, c o u r
habitant du lieu de T e il , commune de Saint- de^o^m
Cernin, arrondissement d’Aurillac Appelant;
C O N T R E P i e r r e - P a u l V A N E L et Dame
M a r g u e r i t e C A L O N N E , son Epouse,
habitans du lieu de R ageaud 3 même commune de
Saint-Cernin 3 intimes
.
D es actes authentiques, cimentés de plusieurs
titres muets, et de la destination du père de fa
mille, sollicitent en faveur de l’Appelant le par
tage des eaux de la prairie de la Rivière.
En l'an 9 , les intimés ont donné les mains à ce
partage, et tout étoit consommé. Aujourd’hui plus
ambitieux qu' alors, ils veulent avoir la propriété
exclusive de ces e a u x , et le jugement dont est
appel la leur attribue. Ce jugement sappe sous tous
�les rapports les principes les plus familiers de notre
législation tant ancienne que moderne, et l’équité
seule le réprouve.
Les Juges d’Aurillac, ont mal interprêté les articles
C C X V et C C X V I de la coutume de Paris, et cette
coutume ne régit pas même les parties ; pourroitelle d’ailleurs paralyser des titres positifs^ et rendre
sans effet l'aveu des intimés \
F A I T S :
En pluviôse an 6 , un expert s e u l, du consen
tement de toutes les parties intéressées, procéda au
partage de la succession de M. de Calonne.
De cette succession dépendoit une prairie consi
dérable appelée de la Rivière, qui fut divisée en
plusieurs lots ; l'estimation fut la même pou r tous.
L e premier lot échut aux intimés, et le troisième
à la demoiselle Jeanne-Françoise de Calonne; il est
inutile de parler des autres. Le partage ne fait aucune
mention des eaux de cette prairie, ensorte que pour
le moment elles restèrent indivises,, ainsi que nous
l'apprend l’expert par une déclaration dont on ne
contestera pas la sincérité : nous en parlerons dans
les moyens.
Avant le partage, et lorsque la prairie de la R i
vière ne formoit qu’un tout, elle étoit arrosée, i ° .
par les eaux qui naissent dans le premier lot; i ° .
par un réservoir qu’un chemin public sépare de la
Prairie: ce reservoir est situé dans un pâcher qui
appartient à un sieur Devèze.
i
�C3 )
Postérieurement au partage , cette prairie a été
arrosée comme' elle i ’étoit du temps de M. de
CaLonne; c’est-à-dire, que toutes les eaux qui nais
sent dans la partie échue aux intimés, tout comme
celles du réservoir, ont servi à son entière irrigation;
plusieurs rases anciennes traversent- la prairie, pour
conduire les eaux d’un bout à l’autre.
L e 13 vendémiaire an 9 , Jeanne-Françoise de
C alonne, vendit à l’Appelant le troisième lot de
la prairie, et la vente fut faite avec les servitudes ac
tives et passives, prises et perceptions d ’eau dues et
accoutumées.
Les intimés qui par des arrangemens de famille
sont aujourd’hui propriétaires des deux tiers de la
prairie et d’une grande partie des biens de JV1. de
Calonne, virent avec peine que Beauclair avoit ac
quis ce qu’ils convoitaient depuis long-temps; aussi
ne tardèrent-ils pas à le vexer, en détournant les eaux
lorsqu’il éroit absent, pour en profiter au delà du
temps qu’ils pouvoient les retenir, eu égard à
l ’étendue de leur terrein. L ’intention des sieur et
dame Vanel étoit de forcer Beauclair à leur vendre
ce qu^il avoit acquis; celui-ci voulut conserver sa
propriété.
Cependant les intimés se rendirent justice; ils con
vinrent que l’Appelant avoit droit au partage des
eaux, et il ne fut plus question entre les parties que
de nommer des experts pour procéder au règlement:.
En conséquence, le 2 1 thermidor an
le sieur
.Vanel, l’Appelant et une Toinette Bouiges qui a
A 2
�(4)
acquis un journal de la prairie de la Rivière, passèrent
un compromis, par lequel ils donnèrent pouvoir aux
sieurs Rames et V id al, géomètres, de procéder à la
division des eaux qui servent ,à l’arrosement de la
totalité de la prairie, et ce par jours et heures, ( escil dit ) conformément au partage.
D'après cet acte, il ne pou voit plus y avoir de
difficulté sur le d»roit de l’Appelant, et tout sembloit
consommé; mais bientôt celui-ci. crut s’appercevoir
qu’il existoit de grandes relations entre les intimés
et les experts; et par prudence, il révoqua le com
promis le 1 7 messidor an 10 . D ’ailleurs, il y fut forcé
par le retard des experts , puisque déjà il s’étoic
écoulé environ un an depuis leur nomination.
Plusieurs mois se passent, et les parties jouissent
alternativement des eaux; mais bientôt les intimés
s’en emparent exclusivement en l’absence de Beau
clair, qui, suivant l’usage du pays, fait de longues
campagnes pour travailler de son état.
Ces voies de faits mirent i’Appelant dans la néces
sité de recourir à la justice; en conséquence, il assi
gna les intimés, le 2$ fructidor an 1 1 , au tribunal
d’Aurillac, pour voir ordonner le partage des eaux
de la prairie de la Rivière^ eu égard à la portion
d’un chacun.
Quelle fut la défense des sieurs et dame V a n el?
Ils prétendirent que i ’Appelant n’avoit ni titre ni
possession, et que d’ailleurs le partage de l ’an 6
repoussoir sa demande, parce qu’il avoit été fait sous
1empire des articles GC.X V et OCJXVidela coutume de
�(s\
Paris, qui n’admettent de servitudes entre cohéritiers
que celles qui sont établies par le partage, et que dans
l ’espèce, le partage de Tan 6 ne taisant aucune men
tion des eaux de la Prairie, chaque cohéritier avoit
dû prendre les lots avec leurs avantages et leurs
inconvéniens.
Quelque extraordinaire que soit ce système, les
premiers juges l’ont adopté le 1 7 frimaire an 1 3 .
L e 19 germinal suivant, Beauclair a interjeté
appel de leur jugement, et c est sur cet appel que
la Cour doit prononcer.
M O Y E N S .
Il est de principe que la destination du père de
famille vaut titre à l’égard des servitudes continues
et apparentes; et il y a destination du père de famille,
lorsqu’il est prouvé que le ionds actuellement divisé
.appartenoit au même p r o p r i é t a i r e , et que c’est par
lui que les choses ont été mises dans l’état duquel
résulte la servitude. Cette maxime n’a jamais éprouvé
de controverse en pays de droit écrit, fli dans la
plupart des coutumes.
Cela est si vrai, que, même entre é tra n g e rslo rs
q u ’il étoit question de savoir si un particulier avoit
acquis un droit de servitude par la possession de
30 ans, l’on examinoit le genre de servitude; et
lorsqu’elle étoit continue et apparente, l’on admettoit la prescription.
P e r s o n n e n’ignore que les servitudes co n t in u e s
et apparentes sont celles dont l’usage est ou peut
�••
.
être continuel, sans avoir besoin du fait actuel de
l’homme; comme, par exemple, des conduites d’eau,
et qui s’annoncent par des ouvrages extérieurs , tels
que des rases propres à faciliter leurs écoulemens.
Un petit nombre de coutumes, comme celle de
Paris, qui est étrangère à ce procès, sembloienc
n’admettre la destination du père de famille, qu’au
tant qu’elle étoit rédigée par écrit; mais aussi quel
ques commentateurs, et particulièrement l’auteur de
l'architecture moderne, sur l’article 1 1 6 , ont pensé
que le titre n’est pas toujours nécessaire, lorsque
la destination a été forcée. D ’ailleurs, en fait de ser
vitudes continues et apparentes, le titre prend son
origine dans la servitude elle-même , parcequ’à
défaut de titres authentiques, il existe des titres
muets qui attestent le droit de servitude : c’est le
vœu de l’article 692 du code civil.
Cela posé, quelle est l’espèce de servitude dont
il s’agit? C ’est une servitude continue et apparente;
elle est continue, puisqu’il s’agit de prise d’eau dont
l ’usage est ou peut être perpétuel; elle est apparente,
puisqu’il existe des grandes rases , qui conduisent
dans toute la prairie les eaux qui l’arrosent.
Les intimés ne contestent point que du vivant de
M de Calonne, père, les eaux dont il s’agit servoient
à l’irrigation de l'entière prairie: c’est ainsi qu’il en
a disposé jusqu’à son décès; or, sa destination équi
valant à un titre, l’Appelant qui a acquis le troi
sième lot de la prairie, n’a-t-il pas le droit de de
mander le partage des eaux/
�c
7
)
.
_
4
M ais, qu'avons nous besoin de la destination du
père de famille pour faire ordonner ce partage \ Les
lois Romaines qui régissent les parties ne sont-elles
pas positives? La loi 3 3 , § l -e\
de servitutïbus preedium rusticorum, après avoir établi que
les servitudes étant attachées aux fonds et non aux
personnes, ne peuvent passer d^une personne à
i^autre, si le fonds n’y passe, nous dit que si le fonds
pour lequel la servitude étoit établie, se divise entre
plusieurs propriétaires, comme entre héritiers léga
taires , acquéreurs ou autrement, chaque portion
conservera l'usage de la servitude, à proportion de
son étendue.
Pe r plurium prœdia aquam duels quoquo modo imposita servitute nisi partum vel stipulatio etiam de
hoc subsccuto est ncque eomm cuivis ne que alii vïciiLs poteris haustum ex vivo cedere.
Ecoutons encore ce que nous dit la loi 2 4 , au
digeste de servit, præd. Rust. ex mco oquœ duc tu
labeo seribit caïlibet posse me vic'mo commodare, pro
duits contra ut ne in meam partem fu n d i, aliam quam
ad quam servitus acquisita s it , uti ea possit, Proculi
sententia verior est.
Ces lois ne sont point équivoques, elles vont
même jusquJà ordonner le partage des e a u x ,
quoique quelques portions de terrein divisés en
eussent moins de besoin, ou que l’usage en fut moins
utile.
Plusieurs auteurs nous enseignent le même prin
cipe, et particulièrement celui que lJillustre d’Agnes-
,
,
,
�(S )
seau, appelle avec raison le jurisconsulte des juris
consultes.
Voudroit-on nous opposer encore ce qu’on a dit
en première instance, que lors du partage de la suc
cession de M . de Calonne, les parties se sont sou
mises à prendre les lots tels qu'ils seroient formés,
avec leurs avantages et leurs inconvéniens, et qu’il
n’a été établi de prise d’eau en faveur d’aucun lot /
Mais outre que l’objection se réfute par les principes
que l’on vient de rappeler, elle ne peut naître que
de l’oubli d’une maxime également certaine, qui
nous apprend que l’égalité doit être l ’ame et la base
des partages; or cette égalité ne seroit-elle pas rom
pue, si les intimés étoient propriétaires exclusifs des
eaux de la prairie ?
Q u o i, les eaux couleroient dans la portion des
sieur et dame V an el, et le lot de l’Appelant ne
seroit point arrosé; l’herbe croîtroit en abondance
dans une partie du pré dont on nous assure que l’es
timation a été la même pour tous les journaux, et le
surplus seroit stérile? Loin de nous un pareil système,
les lois le condamnent, la justice ne peut le tolérer,
l ’égalité le proscrit. S’il en étoit autrement, le lot de
Beauclair ne lui rapporteroit pas de quoi payer les im
pôts, tandis que celui des intimés leur donneroit
un produit considérable ; la portion de l’Appelanc
seroit totalement à sec, sans les eaux qu’il réclame ;
or, les prés ne produisent, qu’autant qu’ils sontarrosés.
Mais q u oi, tous les successeurs de M . de Calonne
n ont-ils pas un droit égal à la division de ces eaux l
�Cp )
f
ce droit ne leur est-il pas acquis par la seule qualité
de cohéritiers? Les eaux de laprairie de la Rivière font
partie de la succession, et forment une propriété
comme le fonds lui-même; or l’Appelant qui a ac
quis le troisième lot de la prairie ,- doit avoir les
mêmes privilèges que sa venderesse.
Si les intimés eussent consulté Despeisse, cet au
teur si célèbre pour le droit écrit, partie première,
section 4 , n°. 5 , ils auroient vu que dans le partage
d’une succession 3 l ’on ne doit rien laisser d indivis.
Ce jurisconsulte ne fait que répéter ce que dit la loi
heredes, § 2 j , ff. fam iliœ ercïscundœ.
Plusieurs lois romaines, notamment la loi Pomponlus
ont porté ce principe si loin, qu’elles veulent qu s i ,
lors d’un partage, les pigeons dJun colombier n’y
sont point, ils soient divisés quand ils y retournent,
tant on doit observer l’égalité entre copartageans.
Pour que la servitude fut éteinte, il faudroit que
le partage en fit une mention expresse ; c’est-à-dire,
que l’experc eût délaissé au troisième lot une plus
grande quantité de terrein, à raison de ce qu’il étoit
privé des eaux; il faudroit en un mot qu’il y eut com
pensation , mais cela n’a point eu lieu.
Ce qui tranche la difficulté, c’est que les actes s’in
terprètent par leur exécution; or, depuis le commen
cement de l’an 6 , époque du partage, les eaux ont
arrosé toute la prairie. La demoiselle de Calonne
n a jamais éprouvé de contradiction ; et si après
qu elle eut vendu son lot, les intimés se sont par lois
empares des eaux au delà du temps qu’ils dévoient
�les percevoir, ce n’est qu^en l’absence de Beauclair *
et presque toujours pendant la nuit.
Une autre règle pour l ’interprétation des actes y
c’est que si l’intention ne se découvre pas par l’ex
pression , et qu’on puisse l ’interpréter par quelque
usage des lieux ou des personnes qui ont fait la con
vention, ou par d’autres voies, il faut s’en tenir à
ce qu’il y a de plus vraisemblable. S i non appareat
quid action e st, erït consequens ut id sequamur quod
in regione in qua actum est frequentatur.
D ’abord , interprétons le partage de l’an 6 par
l ’usage des lieux, et nous demanderons aux intimés,
dans quel autre partage les experts ont oublié de
faire mention des eaux ] Qu’ils en rapportent un seul
ou les eaux d’une prairie de laquelle l’on a fait plu
sieurs lots soient restés indivises. N on, les experts
ne sont pas accoutumés à de pareils oublis.
Interprétons ce partage par la personne qui a fait
la convention, c’est-à-dire, par fexpert qui a procédé.
Eli bien! écoutons sur ce point le sieur Rames dans
sa déclaration du 1 7 messidor dernisr.
Je n’ai pas divisé, dit-il, les eaux des prés du do
maine de Rajeaud, ainsi que du domaine de la Moi
n e, par la raison que la famille Calonne étoit pressée,
et qu’il fallut abréger le procès-verbal de partage des
immeubles, et cette division fut renvoyée après le
partage.
« Je déclare aussi que M. Franiatte et moi avons
y) été chargés de procéder à la division des eaux
» de la prairie de Rajeaud, mais une des demoiselles
�( i l )
« de Calonne ayant vendu sa portion a Beauclair,
» il y eût entre celui-ci et M Vanel des conven» tions notariées pour procéder au partage des eaux.
L ’expert continue en ces termes : « Si Beauclair
« est privé des eaux dont la portion par lui acquise
» étoit arrosée lors de l’estimation que j’ai faite de
» ce pré en totalité, il n’aura plus la même valeur
» que je lui donnai lors de ma visite sur les lieux ;
» et n’ayant plus la même valeur, légalité qui est
» l’ame des partages sera rompue, et il n’y aura plus
l’équilibre que je cherchai alors y>.
Que les intimés lisent cette déclaration, et qu’ils se
taisent.
Enfin, interprétons le partage de P an6, par ce qu’il
y a de plus vraisemblable. E st-il à présumer que
lors du partage les parties aient entendu consentir à
ce qu une portion du pré fût arrosée et que l ’autre
ne le fût point ? N o n , cela ne peut entrer dans l ’idée
de tout être raisonnable.
%
Mais pourquoi nous appesantir sur cette partie de
la discussion ; les intimés n’ont-ils pas formellement
démandé le partage des eaux? oui sans doute ils y
ont consenti, ils l ’ont sollicité; ils ont reconnu le
droit de l’Appelant. Delà résulte une fin de non
recevoir contre leurs prétentions.
L ’on n’a pas perdu de vue le compromis du 2 1
thermidor an 9 , par lequel les différens propriétaires
de U prairie, donnèrent pouvoir à des arbitres de
procéder à la division des eaux. Ce compromis ex
plique le partage, il nous apprend que tous les coJ3 a.
c '^
�>
C 12 )
héritiers ont avoué que ies eaux de la prairie avoient
resté dans ^indivision.
Il est vrai que ce compromis a été révoqué; mais
que résulte-t-il de cette révocation? Il en résulte que
les arbitres ont été dessaisis du droit qu’on leur avoit
attribué de procéder au partage des eaux, mais elle
ne détruit pas le fait essentiel que les copropriétaires
de la prairie dont il s’agit ont reconnu que ies eaux
de cette prairie devoient se partager. Par cet acte,
l ’on n’avoit pas dit aux experts, vous jugerez s’il y
a lieu à la distribution des eaux, mais vous en ferez
la division pro rata ingerum. Ainsi ce compromis,
quoique révo q ué, n’emporte pas moins Paveu que
tous ies propriétaires du pré ont droit aux eaux qui
naissent dans une partie seulement, tout comme à
celles qui découlent du réservoir; et un droit re
connu par toutes les parties, ne peut plus être mis
en doute, ni etre révoqué, puisque toutes les parties
en étant convenues, elles sont censées avoir accepté
l ’aveu les unes des autres, et le contrat s est formé
entre tous, ensorte que quand bien m êm e, ce qui
n’est pas, l’Appelant n’auroit eu aucun droit au par
tage des eaux, il lui seroit acquis par cet acte.
C'est en conformité de ces principes, que, le 2 7
messidor dernier, la Cour vient d'accorder un neu
vième à un cohéritier j quoique par sa seule qualité,
il n’eût droit qu’à un douzième.
C ’est encore pour conserver l’unité de cette juris
prudence, que, par arrêt du 29 du même mois, la
C o u r, dans l’affaire des Fontalard contre R o c h e ,
�( 13 )
vu leurs aveux et approbations géminés, en infir
mant un jugement du Tribunal de Mauriac, a admis
ce dernier au partage des biens de Fontalard père ,
quoique dans l’origine il ne parut pas y avoir de
droit.
Concluons donc a v e c raison, que tout est con
sommé entre les parties par le compromis du 21^ ther
midor an 9 , et que ^obstination des intimes est
vraiment singulière.
L e sieur Vanel semble avoir redouté lui-même
l ’effet du compromis; aussi dans le procès-verbal de
non conciliation, on le voit glisser adroitement que
ce compromis n’a pu lier sa lemme, et qu’il est per
sonnellement étranger à la contestation.
Deux réponses à ce moyen. La première, c’est que
postérieurement au partage, le sieur Vanel a acquis
en son nom de différens cohéritiers plusieursjots de
la prairie; or, en sa qualité d'acquéreur, n’a-t-il pas
pu valablement compromettre
L a seconde, c’est que l’objection ne seroit fondée,
qu'autant qu’il s’agiroit d’aliénation. O r, qu’est ce
que le compromis de l’an 9 ? C est une explication
du partage , un acte d’administration que le sieur
Vanel a pu faire en sa qualité de mari. Dans tous
les c a s , comme le mari a la jouissance des biens
•dotaux de son épouse, et que l’Appelant a un titre
qui émane du sieur V a n e l, il devroit toujours per
cevoir les eaux jusqu’à la dissolution du mariage
¿les intimés.
Que reste-t-il maintenant pour établir le mal jugé
�•
- ,
.
^
1
4
)
du jugement d’Aurillac? Il ne nous reste qu'à en
refuter les principaux motifs.
Les premiers juges ont d’abord mis en principe
que le partage de Tan 6 avoit été fait sous l’empire
de la coutume de Paris; et partant delà, ils ont jugé
én point de droit qu’aux termes de l’article C C X V de
cette coutume, il n’y a de servitudes établies sur les
différents lots que celles qui sont énoncées dans lepartage; et que ce partage de l’an 6 étant muet sur
les eaux de la prairie, ^Appelant n’avoit aucun
droit de servitude sur le lot des intimés.
Ce moyen renferme une double erreur. D*abord,,
la coutume de Paris n’a jamais été suivie dans l’ar
rondissement d’Auriiiac pour les servitudes rustiques.
En second lieu, l ’article C C X V de cette coutumelie dit pas ce qu’on a voulu lui faire dire.
Aurillac est situé en pays de droit écrit; o r, per
sonne n’ignore que ce pays-là se régie par les lois,
romaines.
A Rom e, les maisons formoîent des îles, chaque
propriétaire avoit pour ainsi dire à lui seul une petite
cité qui ne communiquoit point avec ses voisins..
Delà le silence des lois de ce peuple sur les servi
tudes urbaines, elles fussent devenues sans objet.
’ Dans la suite les hommes sentirent la nécessité
d’avoir entr’eux des rapports plus particuliers , et
bientôt les villes ne formèrent plus qu’un amas de
maisons que l’on joignit les unes aux autres.
A lors, il fallut créer des servitudes urbaines, et
faire des lois sur cette matière. L a ville de Paris
�'( r; )
par son grand nombre d’édifices et sa nombreuse
population, fut la première qui en sentit la nécessité.
Plusieurs jurisconsultes s’en occupèrent, et lorsque
leur ouvrage eût paru, il fut adopté par quelques
provinces, vu le silence des lois romaines. Mais la
coutume de Paris n’a jamais reçu d5exécution en pays
de droit écrit, pour les servitudes rustiques; et pour
quoi? C e s t parce que les lois romaines se sont assez
expliquées sur ce point. Eclairons encore cette vérité
par un exemple.
La coutume de Paris veut qu’aucune servitude ne
puisse s'acquérir sans titre; et cependant en pays de
droit écrit, comme dans la plupart des coutum es,
n’attribue-t-on pas tous les jours la servitude à
celui qui a une possession paisible et continuelle dç
3 0 ans ?
C est donc mal-à-propos que les premiers juges
ont prétendu que le partage de la succession de M.
de Calonne avoit été fait sous l ’empire de la cou
tume de Paris.
Non seulement la coutume de Paris est étrangère
au procès, mais encore les juges d’Aurillac en ont
mal interprêté le sens. Que porte l’article C C X V l
Que « Quand un père de famille met hors ses
» mains partie .de sa maison, il faut spécialement
déclarer quelles servitudes il retient sur l’héritage
» qu’il met hors ses mains, ou qu’il constitue .dans
w le sien; il les faut nommément et spécialement
» declarer , tant pour l’ endroit, hauteur, m e s u r e ,
.» qu espèce de servitude, autrement toutes cons-
�o o
)) titutions générales de servitudes, sans les déclarer
» comme dessus ,^ne valent ».
Nous le demandons à l ’homme le plus subtil ;
quel rapport a cet article à la contestation qui nous
divise ? D ’abord , il paroît évident quJil n’a trait
qu’aux servitudes urbaines, puisqu'il ne parle que
du cas où le père de famille met hors ses mains partie
de sa m aison, et qu’ensuite il s^exprime par ces
mots ; hauteur, mesure, expressions étrangères aux
servitudes rustiques.
Mais fût-il vrai que cet article étendit scs dispo
sitions jusqu’aux servitudes rustiques, au moins fautil convenir qu’il n’est point applicable entre c o h é
ritiers: ses termes font assez sentir qu’il doit se res
treindre aux ventes faites par le père de famille. Si
celui-ci vend un h ér it ag e à quelqu’un, il est naturel
que cet héritage soit libre, à moins que la servitude
soit formellement réservée. Les servitudes étant o n é
reuses pour le propriétaire qui en est greve, Io n
présume que les propriétés en sont exemptes, jus
qu’à la preuve du contraire. Ici M. de Calonne n*a
rien mis hors ses mains, pour nous servir des expres
sions de la coutume; tout, au cortraire, y est resté.
Quoique la prairie de la Kiviè.'e ait passé dans les
mains de plusieurs copartageans, n é a n m o i n s ceuxci représentent le père de l a m i l l e , il ne fo nt qu un
avec le défunt! C ’est d o n c avec raison, que nous
avons dit que le principal motif du jugement donc
est appel, contient une double erreur.
Les premiers juges, par une suite de leur système,
on c
�^ :y '
. 4 ry
ont prétendu que la destination du père de famille
devoir être rédigée par écrit, conformément à la cou
tume de Paris; l’ensemble de la discussion détruit
ce moyen..
Il
ne nous reste plus qu’à faire une observation
subsidiaire.
L ’on a vu que les eaux qui arrosent la prairie sont
de deux espèces. Les premières naissent dans le lot des
intimés; les secondes s’écoulent d’un réservoir et
traversent un chemin public avant d^arroser la prairie.
O r, en point de droit, les eaux qui traversent un che
min public deviennent publiques comme le chemin
lui-même, et par conséquent tous les riverains ont
droit au partage; sous ce point de vu e, les intimés
ne peuvent pas conserver la propriété exclusive de
toutes les eaux.
Notre tacne est maintenant remplie; nous avons
prouve que le jugement dont est appel doit être in
firmé, les raisons en sont simples.
Que les intimés ouvrent donc les y eu x, il en est
temps; une plus longue obstination les rendroit in
justes. Mais q u o i, ne s’ aveuglent-ils pas sur leurs
propres intérêts? Ne doivent-ils pas desirer eux-mêmes
l ’infirmation du jugement dont est appel? Si ce ju
gement pou voit être confirmé, alors, sans doute,
l ’Appelant formeroit une demande en garantie ou
dommages, intérêts contre Jeanne-Françoise de Ga
lonné, qui lui a vendu son lo t, avec ses prises d ’eau
dues et accoutumées, et celle-ci à son tour n attaC
�queroît-elle pas le partage de l’an 6 pour cause de
lésion
Ai nsi , que les intimés se consolent; leur fortune
seule auroit dû les rendre plus justes, sur-tout envers
un cordonnier qui n’a pour toute ressource que son
travail et quelques journaux de prés dont on lui
conteste l ’irrigation. Mais plus on est riche, dit un
auteur moderne, plus le désir s' irrite et croît avec
les moyens de s’enrichir davantage. L ’ambition,
comme un exacteur cruel, nous prescrit sans cesse
une nouvelle tâche, les travaux se succèdent sans
fin, et le terme ou l’on veut se reposer, s’éloigne
à mesure qu’on croit en approcher.
£ Y
,
M e D E V E Z E , d 'A urillac, Homme d e loi
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beauclair, Nicolas. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Devèze
Subject
The topic of the resource
partage des eaux
experts-géomètres
servitude
pays de droit coutumier
experts
pays de droit écrit
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Nicolas Beauclair, cordonnier, habitant du lieu de Teil, commune de Saint-Cernin, arrondissement d'Aurillac, appelant ; contre Pierre-Paul Vanel et Dame Marguerite Calonne, son épouse, habitans du lieu de Rageaud, même commune de Saint-Cernin, intimés.
Annotation manuscrite : « 28 frimaire an 14, 19 décembre 1805, 2nde section. La cour dit mal jugé, ordonne que les parties viendront à division et partage de la totalité des eaux, pour être distribuées entre elles eu égard à l'étendue de terrain que chacune d'elles possèdent dans la prairie. »
Table Godemel : Destination du père de famille : 2. - vaut-elle titre à l’égard des servitudes continues et apparentes, en pays de droit écrit, si le fonds divisé appartenait au même propriétaire et si c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude ? peut-on, au contraire, décider que la destination du père de famille doit être établie par écrit et non autrement ? surtout, lorsque le partage des immeubles a été muet sur la servitude elle-même ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1798-Circa An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1614
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0701
BCU_Factums_G1615
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53288/BCU_Factums_G1614.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
experts-géomètres
Jouissance des eaux
partage des eaux
pays de droit coutumier
pays de droit écrit
servitude
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53409/BCU_Factums_G2113.pdf
dc9aa301f648293b61f9bfc2b57b631b
PDF Text
Text
W
PRÉCIS
POUR
S rs A n t o i n e - A n g e C H A S S A I G N E - D U B O S T ,
officier de cavalerie; Joseph C H A S S A I G N E ,
docteur en médecine; C l a u d e - J e a n - M a r i e
C H A S S A IG N E , propriétaire; M e. G i l b e r t A n t o i n e - G a b r i e l C H A S S A IG N E , avocat ;
D les C a t h e r i n e et A n n e C H A S S A I G N E , ma
jeures; dame B é n i g n e - A n t o i n e t t e - A u g u s t i n e C H A S S A I G N E , épouse de Sr François
G r i m a r d i a s , de lui autorisée, appelans d’un
jugement rendu au tribunal civil de Thiers,
le 27 août 18 13;
c o n t r e
Sieur G i l b e r t V I D A L D E R O N A T subs
titut du procureur du Roi au tribunal de
1
m
�C 2 )
Tkiersj S'A
n t o in e
dame B é n i g n e
V ID A L D E R O N A T ;
V ID A L
épouse du S r Barthélémy D
DE R O N A T ,
a r r o t - D ulac y
dame Ca t h e r i n e V I D A L D E R O N A T ,
épouse du sieur Joseph-Gilbert D
arrot;
dame M a r i e - A n n e V I D A L D E R O N A T ,
épouse du S rA
rnaud y
dame A
nne
V ID A L
D E R O N A T y épouse du sieur D am ien
M a l m e n a id e
j
intimés .
X-JES enfans Chassaigne, par représentation de feue
M arie-A n toin ette Vidal de Ronat, leur m ère, sont
héritiers de défunt Claude Vidal de R onat, leur aïeul
maternel, décédé en 1811.
L a dame de Ronat, leur m ère, avoit été mariée sous
l’empire de la coutume, père et mère vivans; elle devoit
être forclose; elle n’a point été dotée par ses père et
mère, mais elle a été instituée en certains biens par un
sieur Cottier, son grand-oncle; et cette institution devoit
lui tenir lieu de sa légitime de droit dans les successions
de ses père et m ère, auxquelles elle renonçoit.
L a succession du sieur Cottier étoit étrangère au sieur
V idal de Ronat père; le sieur Cottier étoit un grandoncle maternel de la dame Chassaigne.
L e sieur Vidal de Ronat est mort en 1811 : les enfans
Chassaigne ont incontestablement le droit de venir à la
�(
3)
Z(C4
succession de leur aïeul, dès que toute forclusion est
abolie.
L e sieur Vidal père a légué en préciput à ses deux
enfans mâles le quart de ses biens. Les enfans sont au
nombre de sept ; ils amendent un septième des trois
quarts.
Pour recueillir cette portion, les enfans Cliassaigne
seront-ils tenus de rapporter à la succession de leur aïeul
la portion que leur mère a reçue de son grand-oncle
maternel ?
Dans le cas où la Cour penseroit que cette dot aventive ( dos adventitia quœ à quovis aîio data f u i t ) fût
sujette à rapport, ne devroit-on pas établir une diffé
rence entre la légitime de droit à laquelle elle a renoncé,
q u i n’étoit alors que d’un quatorzième, et la légitime
d ’aujourd’h u i , qui est plus c o n si d é r a b l e ?
Telles sont les deux questions que la Cour aura à exa
miner. La seconde n’est que subsidiaire; la première est
fort importante, et demande une discussion approfondie.
Mais avant tout, il est nécessaire de rendre'compte des
faits de la cause, et d’analiser les règlemens de famille.
F A I T S .
L e sieur Cottier-Dubost, célibataire, avoit deux nièces;
l’ une avoit épousé le sieur Guillem ot, l’autre le sieur
Vidal de Ronat.
Par le contrat de cette dernière, qui est du 8 février
*7^7, le sieur Cottier lit donation à sa nièce de tous ses
biens de coutum e, sous la réserve du quart.
1 *
^
4 jfA
�C4 )
Sept enfans sont provenus du mariage de la dame de
Lots avec le sieur Vidal de Ronat.
Marie-Antoinette V id al, l’aînée de ces enfans, réunit
toutes les affections de son grand-oncle; il la maria dans
sa maison, avec le sieur Chassaigne, le 17 octobre 1776.
Ses père et mère ne comparoissent au contrat que pour
l ’autoriser, et lui constituer un trousseau consistant aux
habits, linge et dorures à l’usage de leur fille.
« Et en dot, il est dit, est intervenu aux présentes
« messire Antoine Cottier, écuyer, seigneur du Bost,
« chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis,
« mestre de camp de cavalerie, grand-oncle de la demoi« selle future épouse, lequel, de son g r é , a fait, créé,
« nommé et institué la demoiselle M arie-Antoinette
« Vidal de Ronat, pour son héritière universelle de tous
« et un chacun ses biens situés en droit écrit, consistant
« actuellement au fief et seigneurie du Bost, domaine en
« dépendant, directe, rentes et dîmes aussi en dépen« dant, situés en la paroisse de M ontvianeix, et domaine
« de la Boutière, situé en la paroisse de Saint-Victor,
« province du Forez ; de la comprise de laquelle ins« titution d’héritier seront tous les meubles meublans,
« ustensiles de maison, bestiaux et autres effets mobiliers
« qui sont et se trouveront au décès de l’instituant, dans
« lesdits lieux et domaines du Bost, de la Boutière, et
« le cliateau dudit lieu; sous la réserve que fait le sieur
« instituant d’une somme de 20,000 francs à prendre sur
« le domaine de lu Boutière, pour en disposer en faveur
« que bon lui semblera, et par tel acte qu’il jugera à
« propos et dans le cas où il n’eu auroit disposé à. son
’3
�X t\
(5)
«
«
«
«
’«
«
«
«
«
«
«
«
décès, la somme réservée sei’a et demeurera comprise
dans l’institution d’héritier ci-dessus, et fera partie
d’icelle ; et encore à.la charge que la 'présente institution d'héritier tiendra lieu de légitime de d ro it,
tant paternelle que m aternelle, à ladite demoiselle
future épouse, laquelle, en conséquence, renonce à.
tout ce qu’elle pourroit espérer et prétendre dans les
successions de ses dits père et m è re, tout ainsi et de
môme que si la donation eût été faite par ses père et
mère; à l’exception toutefois des successiojis collatéraies desdits estoc et ligne, que les père et mère de
la future lu i réservent expressément.
« Veut et entend que la demoiselle future épouse ne
« puisse disposer du bénéfice de l’institution d’héritier
« ci-dessus, et des biens qui en feront partie, qu’en
« faveur de ses enfans ; et que dans le cas où la demoi- te selle future épouse v iendroit à dé céde r sans enfans,
« ou iceux sans descendans, les biens compris dans la
« présente institution retournent à l ’estoc et ligne du
« sieur Cottier, et pour raison de ce , à la dame mère
« de la future, ou après elle à ses descendans et à ceux
«
«
«
«
«
«
«
de défunte dame Guillemot, et ce par égale portion
à chacune des deux branches, nonobstant la proximité
de degré plus ou moins éloigné ; à l’exception néanmoins d’une somme de 10,000 francs à prendre sur
les biens de l’institution , dont la demoiselle future
aura la pleine et entière disposition en faveur de qui
bon lui semblera, et par tel acte qu’elle avisera. »
Il n ’est peut-être pas inutile d’observer que deux ans
après, et par acte authentique du 10 janvier i77^> siciu^
�( 6 ) ,
Coitier fit donation dntre-vifs, à sa petite-nièce, et sans
aucune condition, du quart des biens de coutume qu’il
s’étoit réservé par le contrat de la dame de llonat mère,
du 8 février 1757.
L e sieur Cotlier-Dubost n’a survécu qu’un an à cette
dernière donation ; il est mort en 1779. La dame Chassaigne, sa petite-nièce, a elle-même prédécédé son père,
qui a vécu jusqu’en 18 11; il a laissé un testament olo
graphe, sous la date du 7 janvier 1806, par lequel il
lègue à Gilbert et à Antoine Vidal de llo n at, ses deux
fils, par préciput et avantage, le quart de ses biens, qui
est la quotité disponible, d’après l’article 913 du Gode
civil.
L e 14 février 18 12, les enfans Chassaigne ont formé
contre les héritiers de Rouât la demande en partage de
la succession de leur aïeul maternel, pour leur en être
attribuée leur portion afférente, avec restitution de jouis
sances ainsi que de droit.
Les héritiers de Rouât ont soutenu qu’au moyen de la
clause stipulée au contrat de mariage de la dame Chas
saigne, ses enfans étoient non recevables dans leur de
m a n de en partage ; qu’ils revenoient contre un pacte de
famille qui n’avoit rien d’illicite, et devoit être exécuté,
à moins que les enfans Chassaigne ne voulussent rapporter
à la succession de leur aïeul ce que leur mère avoit reçu
de son grand-oncle maternel.
La cause portée au tribunal de Thiers, le 27 août 1813,
les héritiers Chassaigne ont été déclarés purement et sim
plement non recevables dans leur demande, et condamnés
aux dépens.
�( 7 )
.. Les premiers juges ont exposé dans leurs motifs,
« I o. Que les contrats de mariage sont susceptibles
« de toute sorte de conventions, et que tout donateur
« peut rendre son bienfait conditionnel, ou le limiter
« à son gré.
« 2°. Pour juger de l’effet d’un engagement, on doit
« consulter la loi qui régissoit au moment où il fut cou-r
« senti : la condition de renoncer à une succession à
« échoir ne présente rien de contraire aux lois et aux
« mœurs, lorsque la renonciation est faite en présence
« de celui de la succession duquel il s’agit.
« 3°. Par le contrat du 17 octobre 1 7 7 6 , le sieur
« Cottier Dubost a institué sa petite-nièce son héritière,
« à la charge que l’institution lui tiendroit lieu de légi« time de d roit, tant paternelle que maternelle; et elle
« renonce en conséquence a tout ce q u ’elle p o ur r o i t
« espérer et prétendre dans la succession de ses père
« et m ère, tout ainsi et de même que si la donation
« eût été faite par les père et mère présens.
« 4°. La stipulation à la charge expresse de cette re
te nonciation étoit inséparable de l’institution ; le pacte
« étoit indivisible, et l’institué ne peut profiter du don
« irrévocable qui lui est acquis, et se dégager par sou
« fait personnel de l’accomplissement de la condition.
« °. Ce qui est donné par donation, contemplatione
« p a tris, est une dot profectice , et regardée comme
« provenue des père et mère, au nom de qui elle a été
« constituée ; et les héritiers Chassaigne se refusent à
« tout rapport de cette donation. »
Les héritiers Chassaigne ont interjeté appel de ce juge-
5
�h V.
( 8 \
ment, dont les motifs, loin d’être convaincans, ne ren
ferment que des erreurs, et prouvent que la question
n’a pas été approfondie.
Elle est cependant fort importante. L e contrat de ma
riage de la dame Chassaigne, passé dans une coutume
d’exclu sion , ne présente qu’ une forclusion ordinaire,
telle qu’elle étoit prononcée par l’article 2 du titre 12
de la coutume. La dame Chassaigne étoit mariée père
et -mère vivans, par conséquent forclose. L ’institution
que son grand-oncle faisoit en sa faveur ne la retenoit
pas dans la maison paternelle. L ’instituant ne pouvoit
que lui réserver sa propre succession, ainsi qu’il résulte
de l’article 28 du même titre; mais il n’avoit ni le droit
ni le pouvoir de lui réserver, une part dans les succes
sions directes ; elle en étoit exclue malgré lui par la
5
force de la loi.
Sa renonciation conventionnelle exprimée au contrat
n’étoit que surérogatoire, pour se servir des termes de
l ’article 9 de la loi du 18 pluviôse an , dès qu’il y
avoit exclusion coutum ière, et n’ajoutoit rien à la for
clusion. La renonciation, comme la forclusion, ne pou
voit profiter qu'aux m âles, conformément à l’article 29
du titre 12 de la coutume, pour la forclusion, et d’après
la doctrine des auteurs et la jurisprudence des arrêts,
pour la renonciation en pays de droit écrit.
Il est impossible de contester ce principe. C’étoit une
exception à la règle qui veut que toutes renonciations
à succession future soient prohibées, comme immorales
et illicites, votum exspectandcu rnortis • et cette excep
tion ne fut admise pour les filles en faveur des m aies,
que
5
�( 9 ) ..
que par des considérations politiques, pour conserver
le lustre et la fortune des familles, ainsi que l’honneur
du nom.
Ce n’est pas sans étonnement que l’on voit dans les
motifs du jugement, que ces renonciations aux succes
sions à échoir étoient permises dans tous les cas, lors
qu’elles étoient faites en présence et du consentement des
personnes de la succession desquelles il s’agissoit, d’après
la loi Quam çis , cod. 30 , D e pactis. O11 sait que la
modification de la loi n’avoit pas été adoptée en France,
comme on l’établira dans la suite, et que les pactes de
cette nature étoient toujours considérés comme illicites.
Mais si elles étoient autorisées pour les filles, les mâles
en proiitoient exclusivement : voilà un point incontes
table.
Lors du contrat de mariage de la dame Chassaigne,
ses père et mère, c o m m e l’instituant, ne p o u v a n t ignorer
la loi, n’avoient donc en v u e que l ’intérêt et la faveur
des mâles; tout annonce que l’intention des père et mère
étoit de doter leurs filles : tel étoit l’empire de l’usage,
la force de la lo i, qu’elle faisoit souvent taire les affec
tions de la nature.
La révolution a fait naître d’autres idées, et a failli
bouleverser l’ordre social par des innovations dange
reuses, et des opinions d’égalité également chimériques.
Mais ces te m p s intermédiaires, qui fuient loin de nous,
ne peuvent rien changer aux anciens principes; et en
se reportant à l’époque du contrat, la forclusion ou la
renonciation de la dame Chassaigne étoit tout en faveur
de ses frères, et De cliangeoit rien au sort de ses sœurs.
�0 10 )
O r , on supposera que la succession du père se fût
ouverte lorsque la forclusion étoit encore en vigueur,
il n’est pas douteux que les frères auroient pris exclu
sivement toute la portion qui seroit avenue à leur sœur,
et qu’il falloit compter, quoique forclose, pour former
la légitime.
La loi n’attribue exclusivement aux mâles la portion
des filles forcloses, qu’en conférant leurs dots; mais cette
collation ou ce rapport ne s’entend que de la dot cons
tituée par le père, et non de celle qui a été constituée
par un tiers. Les frères auroient été dispensés de tout
rapport, dans l’espèce, dès que le père n’avoit rien donné»
Cependant les frères n’auroient pris la portion héré
ditaire de leur sœur que comme la représentant et exer
çant ses droits ; et s’ils eussent été dispensés de conférer
la dot que le sieur Cottier avoit donnée h sa nièce, quelle
seroit donc la raison ou le motif de faire rapporter par
la sœur tout ce qu’elle a reçu de son oncle, aujourd’hui
qu’elle Tentre dans tous ses di*oits, qu’elle est rappelée
dans la maison paternelle par le bénéfice de la loi ?
D e quel droit ses autres sœurs viendroient- elles aussi
profiter de son exhérédation, ou la contraindre au rapport
de ce qu’elle a reçu d’un parent maternel, absolument
étranger au père commun?
Les objections qu’on propose n’ont pas même le mérite
d’être spécieuses. O n dit, en premier lieu, que la dame
Chassaigne n’a été instituée que sous la condition qu’elle
r e n o n c e r o it aux successions de ses père et mère ; et ou
ajoute qu’il dépend de celui qui donne d’imposer à ses
libéralités les conditions qu’il lui plaît.
�Mais d’abord il faudrait, avant tout, que ces condi
tions fussent licites ; et jamais une transaction sur une
succession future n’a été permise. La disposition de la loi
dernière, au code D e p a c tis , n’étoit pas suivie en vente
d’hérédité, o u , ce qui est la même chose, pour une re
nonciation aliquo dato. Prœm atura est hœc species colïationis cum adhuc viçatis de eu ju s bonis quarta de~
ie tu r : irnprobum esse Julianus existim at eum qu i
solîicitus est de vivi Jiœreditate. I/. 3 , §. Interdum de
vulg. et pupill. substit.; L . i re. , D e hœred. vel act. vend,
Louet, lettre H , somm. , rapporte un arrêt du mois
de janvier 1530, rendu dans la cause d’entre Antoine
Lacouture et Louis Blanchefort, qui a jugé que la vente
d’une hérédité, bien qu’elle fût faite du consentement de
celui de euju s Jiœreditate agebatur, étoit nulle, et les
letti’es de rescision furent entérinées. Louet cite tous les
textes de droit sur lesquels on s’étoit fondé ; il rappelle
l’autorité de Cujas, sur la loi 26, in fin e , D e verb. obi.,
qui appelle un marché de ce genre corvinam convenu
tionem , et en prononce la nullité, même avec le con
sentement de la personne. La modification de la loi 30
6
n’étoit adoptée que lorsqu’il s’agissoit d’une convention
qui n’annonçoit pas le désir de succéder; et, par exemple,
lorsque le fils de famille s’obligeoit de payer une dette
quand la succession de ses père et mère lui seroit échue,
si les père et mère n’étoient pas présens à la convention,
elle étoit nulle; mais s’ils y donnoient leur consentement,
elle étoit valable. C’est encore ce que nous dit Louet à
l’endroit cité. Et il est aisé de concevoir cette différence,
parce que toutes les fois qu’on s’oblige de payer, on ne
�désire pas de voir arriver le terme du payement, et
qu’alors il n’y a pas le votum exspectandœ morlis.
Ainsi , point de doute que les transactions sur les
successions futures étoient réprouvées par l’ancien droit
comme dans le nouveau , même avec le consentement
de celui de la succession duquel il s’agissoit, et qu’il
n ’y a voit d’exception que pour la renonciation des filles
en faveur des mâles.
Cela est si v r a i, qu’on n’a jamais mis en question la
nullité d’une renonciation faite par un mâle, même en
présence du père. L e second motif du jugement dont
est appel n’est donc qu’une erreur en point de droit.
En point de fa it, que voit-on dans le contrat de
mariage de la dame Chassaigne ? Il y est dit que la
présente institution d’héritier tiendra lieu de légitime
de d ro it, tant paternelle que maternelle; c’est ensuite
la dame Chassaigne q u i , de son propre mouvement,
renonce à tout ce qu’elle pourroit prétendre dans les
successions paternelle et maternelle , tout ainsi et de
même que si la donation eût été faite par les père et
m ère, qui lui réservent expressément les successions
collatérales.
Cette renonciation est évidemment surérogatoirc, et
il n’y a ici qu’une forclusion coutumière \ la réserve
des successions collatérales en est la preuve , parce qu’en
effet, aux termes de la coutume, elle étoit même exclue
de ces successions, sans une réserve expresse.
Tout est en faveur des mâles, qui seuls pou voient
profiter de cette exclusion, et qui n’auroient été tenus
à aucun r a p p o r t d è s que le père n’avoit pas doté;
�Gomment concevoir alors que les sœurs puissent s’op
poser au retour de la dame Chassaigne ou de ses enfans
à la succession de leur a ïe u l, lorsque les sœurs sont
étrangères à la clause du contrat, lorsqu’il ne pouvoit
rien leur en revenir, qu’elles ne pouvoient en espérer
aucun bénéfice.
A l’égard des frères, et toujours dans l’hypollièse que
la succession se fût ouverte sous l’empire des anciennes
lo is , on convient qu’ils auroient profité de l’exclusion
de la dame Chassaigne.
Mais est-il bien certain que la dame Chassaigne, sous
les anciennes lois , n’eût pas eu le droit de requérir
d’être dotée par son p è r e , à raison de l’institution faite
à son profit par son grand-oncle maternel ? Les premiers
juges ont parlé, sans trop s’entendre, d’une dot proj fectice ; et qu’est-ce qu’une dot profècticc ? D ’après le
jurisconsulte U lpien, et après lui d ’après F u r g o l , ques
tion 4 2 , la dot profectice est celle qui est constituée
par le père. D o s à pâtre profecía. D o s profectitia ¿Li
citar , id est, quam pater mulieris dédit. D o s dicitur adventitia, id e s t , ea quœ à quovis alio data est. La dot
profectice est sujette au droit de retour en faveur du
père, d’après la loi Jure succursum , 6. ff. D e jur. dot.
D o s à pâtre profecía ad patrern revertitur, La dot
aventive, celle qui a été constituée par un tiers, n’a
pas la même faveur : adventilia aulem dos semper
pcmes mariturn renianet. Il n’y a donc pas, dans l’espèce-,,
de dot profectice, dès que le père n’a rien donné; et
l’institution du grand-oncle maternel ne peut être con
sidérée que comme une dot aventive..
�C 14 )
- D ’après l ’article 36 du titre 12 , la fille forclose
qui n’a pas été dotée par le p è r e , peut requérir être
dotée selon que les filles de la maison l’ont été ; et
s’il n’y en a pas qui aient été dotées, d’après l’avis de
parens , eu égard aux constitutions des mariages du
lie u , et voisins de semblable qualité.
La coutume s’arrête à ce p o in t, et ne prévoit pas
le cas où la fille auroit été dotée par un tiers. Basmaison,
sur cet article, dit seulement que si à ladite fille avoit
été constituée dot par un tiers, si c’est en faveur du
p è r e , et pour le relever, telle dot sera réputée profectice et comme provenant des biens du père.
L e dernier commentateur a embrassé cette opinion,
en distinguant cependant ; car il exige que la dot qui
a été constituée à la fille par un parent ou un étranger,
l ’ait été en contemplation du père , comme pour ac
quitter sa dette et l’aider, eu égard k la modicité de sa
fortune et au grand nombre d’enfans qu’il peut avoir. Il
est remarquable que ces deux auteurs ne citent aucuns
préjugés à l’appui de leur opinion; le dernier commen
tateur, au contraire, décide que la fille qui auroit suc
cédé à sa m è re , pourroit tout de même requérir être
dotée par le p è re , parce que son office est de doter.
P e u t - o n dire, dans l’espèce , que le sieur Coltier,
grand-oncle maternel, ait voulu doter sa petite-nièce
en contemplation du père qui lui étoit étranger ; qu’il
soit venu à son secours, eu égard à la modicité de sa
fortune, tandis que le sieur Vidal de Ronnt pouvoit passer
pour opulent? Et ne doit-on pas conclure au contraire
du silence de la loi, de l’avis même des commentateurs,
�( i5 )
que nonobstant l’institution du sieur Cottier , la dame
Chassaigne, sous les anciens principes , auroit pu re
quérir une dot, sauf ensuite aux frères à la conférer,
lorsqu’ils auroient profité de son exclusion.
Cette conséquence devient plus évidente, d’après les
inductions qu’on doit tirer des termes du contrat de
mariage.
y est dit que la dame Chassaigne ne pourra
disposer des biens compris en l’institution qu’au profit
de ses enfans; et dans le cas où elle viendroit à décéder
sans enfans, ou iceux sans descendans, les biens doivent
retourner à l’estoc et ligne de l’instituant, et pour raison
de ce, à la mère de la future, ou après elle à ses des
cendans et à ceux de feue dame Catherine de L ots, nièce
de l’instituant, femme Guillemot, et ce par égale por
tion à chacune des deux branches.
Si l’instituant ordonne impérieusement le retour des
biens à son estoc et lign e, il ne les a donc pas donnés
en contemplation du p ère, ni à sa décharge, puisque le
père étoit étranger au donateur; et cette clause posté
rieure est contradictoire avec la première.
Mais ici s’ouvre une nouvelle carrière, un droit nou
veau. La succession du père n’est ouverte qu’après le
11
Code civil; les forclusion, renonciation conventionelle,
tout ce qui résultoit de la différence des sexes ou du
droit de masculinité, est aboli ; tous les enfans sont
rappelés indistinctement aux successions de leurs ascendans; les libéralités sont limitées, en ligne directe, au
quart des biens, lorsqu’il y a plus de deux enfans.
Quels sont les rapports dont les enfans peuvent être
�Cl6 )
tenus en venant à la succession du père? Pour fixer nos
idées sur ce p o in t, il ne s’agit que d’ouvrir le Gode,
au titre des rapports.
Dans les articles 843 et suivans, on y voit que tout
héritier, même bénéficiaire, venant à une succession,
doit rapporter î\ ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du
défunt directement ou indirectement; qu’il ne peut retenir
les dons et legs à lui faits par le défunt, à moins,que les
dons et legs rie lui aient été faits expressément en préciput ; il ne peut même retenir les dons en préciput,
qu’autant qu’ils n’excéderoient pas la quotité disponible.
• Les dons et legs faits au fils du successible sont tou
jours réputés faits avec dispense de rapport; le rapport
ne se fait qu’à la succession du donateur ,• pas un seul
mot qui assujettisse au rapport les constitutions faites par
des tiers.
E t comment auroit-on pu assujettir au rapport une
constitution faite par un étranger, qui fut le prix d’une
forclusion-qui n’existe plus? comment soutenir que cette
forclusion fut la condition de l’institution , lorsque la
dame Chassaigne auroit été forclose par la seule force de
la l o i , indépendamment de la volonté de l’instituant,
qui n’avoit pas le droit de la retenir dans la maison du
père ?
Comment donner quelqu’eflet à une renonciation surerogatoire, dans les pays d’exclusion, qui d’ailleurs est
elle-même proscrite par les lois des 11 brumaire et 17
nivôse an 2 ?
11 semble que ce système bizarre répugne à tous les
principes
�7
( i )
principes de la nouvelle législation ; que la succession du ¿ 3 $
sieur c}e Ronat père doit être régie par le Code, et qu’au?
trement ce seroit vouloir confondre deux législations,
h
ce qui seroit absurde.
En un m ot, d’après le Gode, il n’existe ni forclusion,
ni i-enonciation; la fille qui revient à la succession de sort
père n’est tenue de rapporter que ce qu’elle a reçu de
lu i, de ce qui provient de sa substance, ex substantia
patris. II est impossible de forcer les enfans Chassaigne
de rapporter ù une succession directe une succession col
latérale qui ne vient pas du même estoc. Les sœurs ne
peuvent avoir aucune qualité pour demander ce rapport,
puisque, dans aucun temps, elles n’ont pu profiter de la
renonciation de la dame Chassaigne. A l’égard des mules,
tout droit d’accroissement est anéanti du moment que les
exclusions des filles ont été proscrites. Dès-lors les enfans
Chassaigne doivent être admis, o u , pour mieux dire,
rappelés à la succession de leur aïeul ; et les premiers
juges, en les repoussant, ont ouvertement violé les dis
positions du Code, et se sont écartés de tous les principes
de justice et d’équité.
Les appelans, devant les premiers juges comme en la
C our, ont cru, à toutes fins, devoir examiner une ques
tion subsidiaire.
S i , par impossible, on vouloit considérer la renon
ciation de la dame Chassaigne comme une condition li
cite; si on vouloit encore donner quelqu’efiet ù une for
clusion coutumière qui a disparu devant les nouvelles
lois, faudroit-il au moins reconnoitre que la condition
3
�( 18 )
du bienfait avoit ses bornes, et ne pourroit être étendue
à la portion entière de la dame Chassaigne dans la suc
cession paternelle.
Dans le contrat de mariage de 1776 , on n’y voit autre
chose , sinon que l’institution de son oncle lui tiendra
lieu de sa légitime de droit; c’est la seule privation qu’on
lui impose; et dans les actes entre-vifs, les expressions
dans lesquelles ils sont conçus doivent être prises dans
leur sens rigoureux, et sans extension : verba tantum
valent quantum sonant.
A l’époque du contrat de mariage de la dame Chas
saigne, la légitime de droit se régloit par l’authentique
tríente et semisse; c’étoit le tiers ou la moitié de ce qu’on
auroit eu dans la succession , si elle se fût ouverte ab
intestat, suivant le nombre des enfans. Il y avoit sept
enfans provenus du mariage du sieur Vidal de Ronatsuivant les règlemens de l’authentique, la légitime de
droit eût été d’un quatorzième.
Ce n’est donc qu’à ce quatorzième, en prenant la clause
dans toute sa rigueur, que la dame de Ronat, femme
Chassaigne, auroit renoncé.
Mais le sieur de Ronat n’ayant fait aucune institution
sous les anciennes lois, n’a pu, conformément à l’art. 913
du Code, disposer au préjudice des enfans que d’un quart
en préciput; ce qu’ il a fait par testament, en faveur de
ses deux enfans mâles. La réserve de la lo i, ou, ce qui
est la même chose, la légitime des enfans, est aujourd’hui
d’un septième dans les trois quarts des biens : dès-lors il
ne pourroit y avoir aucun prétexte de priver les enfans
�*9
(
)
. . . .
Q 'à S
Chassaigne de cet excédant ou de cette ampliation dé la
légitime; c’est-à-dire, qu’on devroit au moins leur faire
raison de la différence qui se trouve entre le quatorzième
et le septième des trois quarts, ce qui fait un tiers eu sus.
Ceci deviendra plus sensible par un thème. On sup
posera une masse de 14,000 fr. à partager.; dans l’ancien
ordre, la légitime de droit eût été de 1,000 fr. ; suivant
le nouveau m o d e , eu faisant distraction du quart, qui
e^t. de 3,5oo francs , il reste i o , oo fr. à partager entre
sêjîi ;Vce ^uMïîit i , t t r f r . «poui^-chacun. I)#irê' c e t t e v
pothèse , il reviendroit toujours aux .frufaos^Chassaigae f
la moitié de ce qu^ïïs auroient eu si leur mère n’avoit
pas renoncé.
Mais cette partie de la cause n’est que très-subsidiaire,
et pour ne rien négliger; car il paroît démontré que
les frères et sœurs de la dame Chassaigne ne peuvent
pas exiger de leurs n e v e u x le rapport du bénéfice de
l ’institution du sieur Cottier.
Dans le droit com m un, l’héritier n’est tenu de rap
porter que ce qu’il a reçu du défunt. La dame Chassaigne
n’a rien reçu du défunt; elle a reçu du sieur Cottier,
son grand-oncle : ce qui lui a été donné par son grand-
5
5
oncle n’a rien de commun avec la succession de son
p ère, qui n’étoit pas successible du sieur Cottier.
La condition imposée dans son contrat, ou qu’on veut
en faire résulter, disparoit avec la forclusion. Il ne faut
considérer cette condition que comme un pacte sur
une succession future, que les lois ont regardé c o m me
illicite et immoral , comme une convention inutile,
+ &
�(C V
( 20)
puisque, sans elle, la forclusion n’en auroit pas moins
eu lie u ; et, sous tous les rapports, les enfans Chasssaigne
sont appelés au partage de la succession de leur aïeul %
pour y prendre une portion égale dans les trois quarts»
M e. P A G E S ancien avocat,
Jl
.
: ;
. t
0
f
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r
M e. B R E S C H A R D , avoué .
ï
de- jlo
• A
( C jjJiAjJi— G»«*
•
_
A RIO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprimeur de la Cour royale, et libraire,
rue des Taules, maison Landriot. — Août 1814,
«
�
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[Factum. Chassaigne-Dubost, Antoine-Ange. 1814]
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An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Breschard
Subject
The topic of the resource
donations contractuelles
renonciation à succession
contrats de mariage
pays de droit écrit
forclusion
dot
successions
donations d'un collatéral
coutume du Bourbonnais
partage
conflit de lois
donations
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Titre complet : Précis pour Sieurs Antoine-Ange Chassaigne-Dubost, officier de cavalerie ; Joseph Chassaigne, docteur en médecine ; Claude-Jean-Marie Chassaigne, propriétaire ; Maître Gilberte-Antoine-Gabriel Chassaigne, avocat ; demoiselles Catherine et Anne Chassaigne, majeures ; dame Bénigne-Antoinette-Augustine Chassaigne, épouse de sieur François Grimardias, de lui autorisée, appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de Thiers, le 27 août 1813 ; contre sieur Gilbert Vidal de Ronat, substitut du procureur du Roi au tribunal de Thiers ; sieur Antoine Vidal de Ronat ; dame Bénigne Vidal de Ronat, épouse du sieur Barthélemy Darrot-Dulac ; dame Catherine Vival de Ronat, épouse du sieur Joseph-Gilbert darrot ; dame Marie-Anne Vidal de Ronat, épouse du sieur Arnaud ; dame Anne Vidal de Ronat, épouse du sieur Damien Malmenaide, intimés.
note manuscrite « Le 20 août 1814, arrêt confirmatif, pour les motifs exprimés au jugement ».
Table Godemel : Institution d'héritier : 10. une institution contractuelle grevée d’une condition (celle de renoncer, pour l’institué, à tous droits dans les successions de ses père et mère), doit-elle être exécutée ? le donataire, après avoir accepté l’institution, peut-il refuser de remplir la condition, quoiqu’il prétende retenir tout l’effet de l’institution ? cette condition est-elle contraire aux lois et aux bonnes mœurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1776-1814
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2113
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2112
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53409/BCU_Factums_G2113.jpg
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Victor-Montvianeix (63402)
La Boutière (domaine de)
Bost (seigneurie du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
donations
donations contractuelles
donations d'un collatéral
dot
forclusion
partage
pays de droit écrit
renonciation à succession
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53123/BCU_Factums_G1025.pdf
ce779e6b2d97f0e33a0eceed0048e187
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MEMOIRE
POUR
Léonard
R I X A l N , propriétaire, habitant de la
ville de Clermont-Ferrand, appelant;
CONTRE
A n t o i n e R I X A I N , propriétaire,
habitant de La
ville de Mauriac 9 intimé;
E T
C O N T R E
D E L M A S propriétaire, habitant de
la ville de Mauriac, aussi intimé.
A n to in e
L es juges, dont est appel, paroissent avoir méconnu,
dans cette cause, les principes de droit les plus familiers,
les plus incontestables.
A
�F A I T S .
>
D u mariage de Jacques Rixain et T h érèse-A n d ré de
L o u v e r t, père et mère com m uns, sont issus cinq enfans,
A n to in e , Germain-Gaspard, Thérèse, M arie, et Léonard.
A n t o in e , l’aîné, a été marié à la maison.
P a r son contrat de mariage, du 6 juin 1764, les père
et mère l ’instituèrent leur héritier général et universel,
sous la réserve d’une somme de 28000 francs pour former
la légitime des autres quatre enfans; savoir, 24000 fr.
de la part du père, et 4000 francs de la part de la mère.
Thérèse entra en religion : les père et mère lui consti
tuèrent, pour sa dot l'eligieuse, une somme de 2Ôoo f r . ,
dont 2400 francs du chef du p è re , et 100 francs du chef
de la mère. Elle est décédée du vivant des père et mère.
M a rie a contracté mariage le 10. janvier 1 7 7 4 , avec
le sieur Delmas : de ce mariage est issu A n to in e Delmas
qui figure dans la contestation comme représentant sa
mère décédée en 1780/'
,
r
G erm ain -G a sp a rd se dévoua à l’état ecclésiastique.
L e 1 5 février 1776, le père voulant, est-il dit, régler et
fixer la légitime paternelle dudit Germain son fils, lui
donna par donation entre-vifs et irrévocable,
U n four bannal ( 1 ) avec une cham bre, boutique et
( 1 ) 11 ne faut pas induire de ce mot bannal, qu’il y eût un droit
de bannalité attaché. On l ’appeloit ban n al, parce q u ’il ne sorvoit
pas uniquement pour l ’usage de la m aison ; qu’il servoit pour le
p ublic, pour tous ceux qui volontairement y venoient faire cuire,
m oyen nan t une petite rétribution.
�s û
m
grenier y attenant, situés dans la ville de M auriac ;
Une terre et petit pré attenant, situés au terroir de
la Bizette ;
A u tr e terre située au terroir Delfraissi.
Il se réserva, durant sa vie et celle de son épouse, l’ usu
fruit des objets donnés.
Cette donation n’a point été insinuée»!
L e i 5 juillet 1 7 7 7 , le père a fixé également la légitime
de Léonard R ix a in ; il lui a cédé et délaissé, du consen
tement de l’aîné présent à l’acte, pour tout droit de légi
time paternelle, une somme de 9000 francs,à prendre
sur un contrat de i s q o o francs, dû-par le sieur Dorcet,
et les intérêts qui pourroient être dûs dudit contrat ,
lesquels intérêts formoieut un objet d’environ 1000 francs.
A u moyen de ce transport, Léonard Rixain a été satis
fait de ses droits paternels.
*
• L e 11 janvier 177g, L éon ard R ixain a contracté mariage
avec la demoiselle Raimond. 11 est inutile de rappeler
les différentes clauses du contrat de mariage ; on ne rappel
lera que celle relative à la contestation.
« E n même faveur du m ariage, e s t-il d it , R ix a in ,
« p r ê t r e , donne de son chef au futur époux son f r è r e ,
« à titre de donation entre-vifs et irrévocable, la moitié
« des biens fonds qui ont été donnés audit donateur, au
« même titre de donation entre-vifs, par le sieur Rixain
« père.
Suit le détail des héritages.
« Sans néanmoins, est-il ajouté , aucune garantie que
« des faits et promesses dudit R ixain , p r ê tr e , donateur,
« et avec subrogation au profit du f u t u r ép o u x , à la
A 2
�< h
(4 )
« m oitié de tous les droits de légitime et autres dudit
« R i x a i n , prêtre , du c h e f paternel.
« L u i donne en outre la moitié des biens qui lui échoi« ront à titre de légitime ou institution , dans la suc« cession de la mère.
« Lesdites donations ainsi faites à la charge de l’usu« fruit et de la jouissance, envers lesdits père et m ère,
« et au dernier vivant. »
Cette donation a été insinuée au registre de fo r m e ,
le 27 avril suivant.
L a mère est décédée en 1 7 8 8 , et le père en 1 7 8 9 , sans
avoir fait d’autres dispositions que celles ci-dessus.
L e père a laissé des propriétés d’une valeur considé
rable. L a fortune de la mère étoit mobilière : elle consistoit uniquement dans la somme de 4656 francs qui lui
avoit été constituée par son contrat de mariage.
R ix a in , prêtre , est décédé en 1 7 9 1 , sans avoir pareil
lement fait de dispositions. Sa succession a été à partager
par tiers entre ses deux frères, et D clm as, son neveu, fils
de M arie , sa sœ u r, prédécédée.
Noua disons par tiers. L a donation faite par R ix a in ,
p rê tre , à L é o n a rd , quoiqu’ il n’ait pas été dit qu’elle
étoit faite par p r é c ip u t, n’étoit pas un obstacle ce que
celui-ci vînt à la succession. O n sait qu’en pays de droit
é c rit, et sous l’empire des anciennes lois, les donations
n’étoient sujettes à rapport qu’en ligne directe ; qu’on
pouvoit en collatérale cumuler la qualité d’héritier et de
donataire.
* '
' En cet état, quels étoient les droits du sieur R ix a in ,
autres que ses droits directs paternels ?
�( 5 )
"Il avoit à prétendre,
D a n s la succession deda m è re, consistant en la somme
de
4656
fr. par elle apportée en d o t ,
i°. U n douzième de son ch ef, montant'de sa légitime
dé rigueur;
20. Gomme donataire.de la moitié des droits maternels
de : R i x a in , p rê tre , la moitié d’un p a r e il. douzième ;
3°. Gomme héritier du ; même R i x a in , prêtre , pour
un tiers, le tiers dans l’autre moitié d’un pareil douzième :
D a n s les biens du p è r e , du chef dudit R i x a in , p r ê tr e ,
aux mêmes q ualités,
L a moitié des fonds donnés".partie père audit R ix a in ,
prêtre , et dont celu i-ci'a v o it disposé<en faveur ;de son
frère par son contrat de m ariage, et lin tiers dans l’autre
moitié.
E t en cas de difficulté, la moitié de la légitime de
rigueur dudit R i x a i n , p r ê t r e , à. laquelle il avoit été
subrogé , et un tiers dans l ’autre moitié.
; . v,
P a r exploit d u 23 ventôse an 12 , il a formé demande
de ces divers droits.
Il a-fait citer au tribunal d’arrondissement de M a u r ia c ,
après avoir épuisé la voie de la conciliation
a în é , -détenteur de tous les biens
R ixaiu
et An toin e D elm as,
so n n e v e u .
Il a conclu contre R ixain aîné , à ce qu’il fût con
damné à lui payer le douzième qu’il ainendoit de son
chef dans la som m e'd e 4 656 fr. montant de la dot de
la mère , et du chef de R ix a in , prêtre , la m o itié , et un
tiers dans l’autre moitié de-pareil douzième , avec intérêts
depuis le décès du père \
�( 6 )
A cc qu’il fût condamné à venir à division et par
tage des biens donnés par le père à Rixain , p r ê tre , par
l’acte de donation du 16 février 1 7 7 5 , pour lui en être
délaissé la m oitié, et un tiers dans l’autre moitié:
E t où les juges y feroient quelque difficulté y il fût con
damné à venir à division et partage de tous les biens
meubles et immeubles dépendans de la succession du père
commun , pour en être distrait un douzième formant la
légitime de droit de R i x a in , prêtre , et ledit douzième
distrait, être divisé pour lui en être délaissé la moitié et
le tiers dans la moitié ;
• A v e c restitution des jouissances et des dégradations des
objets' qui lui. seroient attribués depuis le décès du père.
• K t contre A ntoine D clm as, cohéritier par représen
tation de sa mère dudit R ixain , p r ê tr e , à ce que le
jugement à intervenir fût déclaré commun avec lui.
; S u r cette demandé, jugement contradictoire est inter
ven u , le 23 messidor an 12 , dont les motifs sont la trans
cription'des défenses des parties adverses.
Ce jugement est ainsi conçu:
« Attendu que par le contrat de mariage d’A ntoine
« R ix a in , défendeur , du 6 juin 17^4 > ses père et mère
k l’ont institué leur héritier général et universel, sous
« la seule réserve de disposer de la part du p è re, d’une
« somme de 24000 Irancs, et de la part de la m è r e , d’une
«
*•'
k
a
«
somme de 4000 l l’yiics ?
« Attendu q ue, par ces mêmes réserves , les père et
mère dudit Antoine Rixain se sont imposés des bornes
à leur libéralité qu’ ils n’ont pu outre-passcr , et que
conséquCmmeiit ledit Rixaiu père 11’a pu , au préju-
�(7 )
« dice de ladite institution, donner à Germain-Gaspard
« R ixain des immeubles faisant partie de ladite insti« tution;
,
,
« Attendu d’ailleurs que la donation qu’il a faite de
« ces im meubles, par acte du 1 5 février 1 7 7 5 , est nulle
« faute d’avoir été insinuée, aux termes de l’ordonnance
« de 1731 ;
«
«
«
«
« Attendu q u e , d’après cela , ledit Germain R i x a in ,
prêtre , n’a pu donner valablement à Léonard R ix a in ,
son frère, dans son contrat de mariage du 26 janvier
1 7 7 9 , les immeubles à lui donnés par son p è r e , puisque
la donation faite par celui-ci étoit nulle;
« Attendu que ledit R ix a in , p rê tre , n’a pu donner
« non plus dans le même contrat dema^ipgp, du 26 jan«
«
«
«
vier 1 7 7 9 , et du vivant de ses père et m è re , qui ne
sont décédés q u’en 1788 et 1789 , les droits légitimaires
qu’il pouvoit alors espéi’er dans les successions à échoir
de ses père et m è re , parce que- tout pacle sur-la suc-
c< cession d'une personne vivante est n u l , et contre les
« bonnes mœurs ;
35 A ttendu que ledit R i x a i n , défendeur , a toujours
« offert de payer audit R ix a in , dem andeur, son douzième
« dans la succession m aternelle, et son tiers dans le
«.douzième des légitimes paternelles.et maternelles de
« R ix a in , p rêtre , leur frère commun , après 1111 compte
« à faire entr’e u x , et de plusieurs sommes réclamées par
« ledit Rixain , défendeur , et que ledit Rixain , deman« d eu r, ne s’est pas expliqué sur les prétentions du d é« fendeur ;
« L e tribunal, sans avoir égard à la donation faite par feu
»
�( 8 )
«
«
«
«
«
«
«
«
R ix a in 'p è re , à Germ ain-Gaspard Rixairi-, p r ê t r e , au
profit de Leonai-d R ixain , des objets cdmpris-en ladite
donation de 1 7 7 5 , qu’il déclare de nul effet, cette’première 'donation ] étant nulle ,- sans s’arrêter: non plus
à la1 donation également'faite par le même contrat de
mariage de 1779 , par ledit Rixain , prêtre , au profit
dudit Léonard R ix a in , de la moitié de ses légitimes
paternelle et maternelle, qui 11e lui étoient pas alors
«'acquises, puisque ses père et mère étoient encore
« vivans , et qu’il ne pouvoit faire aucune convention
« sur leur future succession qu’il ne pouvoit pas re«
«
«
«
cueillir ; déclare aussi Iesdites donations nulles ; donne
acte audit A n t o in e 'R ix a in , d éfen d eu r, des offres qu’il
a faites d e'p fy er audit Léonard RiXain son douzième
de la siicccssion mobilière de T h é r è s e - A n d r é , mère
com m u n e, de lui payer aussi son tiers du douzième
« formant la légitime maternelle dudit Gennain-G aspard
« ’R ix a in , et l’autre tiers audit B e lm a s , et de venir à
« partage avec lui ôt ledit Delmas du douzième dans les
« biens du père commun , revenant audit Germain-;Gas« pard Rixain pour sa légitime paternelle, pour en être
« délaissé un tiers audit Léonard Rixain , un autre tiers
« audit Delmas , et le dernier tiers au défendeur, auquel
« demeurent réservés tous scs moyens de compensation,
« exceptions ; fins de n o n -recevo ir, et défenses demeu« rant réservées audit Léonard Rixain ; à l’elfet de quoi
« ils contesteront plus amplement, dépens réservés. »
Jiconnrd Rixain-a interjeté appel de ce jugement; et
c’est sur cet appel que les parties attendent la décision
souveraine de la cour.
M OYENS.
�Jz/
(9 )
.
t
M hO Y E N S ,
L a contestation présente les questions suivantes:
L e père commun a-t-il p u , s’étant réservé seulement
une somme de 24000 fr. à disposer en a rg e n t, fixer la
légitime de R ix a in , prêtre, en,fonds ? L a donation du
i 5 février 1775 est-elle nulle: sous ce rapport?
Cette donation est - elle n u lle , comme n’ayant point
été insinuée ?
Les intim és, héritiers chacun pour une portion de
R ixain , p r ê tr e , ,étant en cette qualité tenus, pour la
part qu’ils amendent dans la succession, des engagemens
dudit R ixain qui a transmis à l’appelant partie de cette
donation, peuvent-ils exciper du défaut d’insinuation?
Dans tous les cas, la donation faite par R ixain , p r ê tr e ,
à l’appelant, de la moitié de ses droits paternels, est-elle
valable? doit-elle avoir son effet?
L ’appelaut, indépendamment de la donation à lui faite
par R ix a in , p rê tre , soitdela moitié des objets particuliers
c o m p r i s dans la donation du 1 5 févi'ier 1775, soit de la m oi
tié de ses droits légitimaires, a - t - i l droit comme cohé
ritier à. une portion dans le surplus des biens dudit
R ix a in , p rêtre, décédé sans avoir fait d’autres disposi
tions? E u d’autres termes, p e u t- il cumuler la qualité
de donataire et d’héritier?
Telles sont les questions sur lesquelles la cour a à
prononcer.
B
�in
\vt
( IO )
P R E M Ì È R E
Q U E S T I O N.
L es juges dont est appel ont jugé que le père s’étant
réservé uniquement une somme en argent à disposer,
n’avoit pu donner des fonds en payement de la légitime.
C ’est une erreur , et une erreur que le plus simple rai
sonnement va rendre sensible.
Celui qui fait une institution , avec réserve d’une
som m e, n’a pas ordinairement cette somme en ses mains.
Il ne peut se la réserver à prendre sur les deniers qu’il n’a
pas -, il ne peut se la réserver à prendre que sui- ce qui
compose la succession. Il a donc le droit de disposer des
fonds de la succession, des immeubles comme des meu
bles , jusqu’A concurrence de la somme résçrvée : tout ce
que l’héritier institué peut exiger , c’est qu’il ne dispose
point au delà!
Celui qui fait une institution, avec réserve d’une
somme, ne promet pas que sa succession sera composée
de tels ou de tels fonds ; il promet seulement sa succes
sion , moins la somme, ou la valeur i*eprésentative d e là
somme qu’il s’est rései'vée.
I c i , la disposition du père est d’autant plus à l’abri de
toute critique, que les fonds donnés à R ixain, prêtre,
ont été donnés en payement de sa légitime; en payement
d ’une dette sacrée, d’une dette que la loi lui imposoit,
d’une dette qui étoit en même temps celle de l’héritier,
d’une dette que l’héritier n’auroit pu se dispenser d’ac-
�( ” )
quitter iluinmeme en fonds; le légitimaire ayant le droit
d’exiger sa portion en corps héréditaires.
. .
L ’instituant :n’a point les mains tellement liées par l’ins
titution , qu’il ne puisse disposer dés fonds de la succes
sion , vendre et aliéner, pourvu que ce ne soit point en
fraude de l’institution ; et ce n’est point en fraude de
l’institution , lorsqu’il n’excède point le montant de la
réserve ; lorsqu’il dispose pour acquitter autant la dette
de l’héritier que la sienne '/lorsqu’il dispose pour acquitter
en fonds, une dette due en fonds ,une dette que l’héritier
n’auroit pu se dispenser, comme on vient de l’observer,
d’acquitter luirmeme en fonds.
L ’héritier ne pourroit se plaindre qu’autant que les
fonds donnés seroient de plus grande valeur. Mais c'est
un cas particulier; on présumeroit alors qu’il y a fraude,
et le cas de fraude est toujours excepté.
Ce n’est point par ce m otif que les juges dont est appel
se sont décidés. Ils ont jugé en droit que le père s'étant
réservé une somme en argent à disposer, n’avoit pu
attribuer des fonds en payement do la légitime. On est
loin d’adopter leur système.
Rixain aîné dira-t-il que les fonds donnés excèdent
la légitime ? qu’ils excèdent la réserve?
Feu importeroit d’abord qu’ils excédassent la légitim e,
pourvu qu’ils n’excédassent point la réserve; et on va dé
montrer , par le calcul le plus sim ple, qu’il s’en faut qu’ils
excèdent la réserve.
L e père commun s’est réservé une somme de 24000 fr.
Sur cette som m e, il a disposé en faveur de Thérèse ,
B 2
�V
(12 )
lors'de ’son- entrée en" religio n , d’une somme de I2400' f. ;
ensuite, en faveur de>M arie > dans son1 contrat "de ma
riage avec D e lm a s, 'd’une sommé de 3795 francs; il a
disposé, en dernier lieu , en faveur de l’appêlant d’uné
somme d’environ 10000 francs ; ces sommes réunies s’élè
vent à celle de 16195 francs ;) il restoit donc libre ,*én:ses
mains , avant d’avoir épuisé la r é s e r v e fune sommé
de 7805 francs. î - '
•
J> ^
'vw ’
Quels sont les objets compris dans la donation ? U n
four. Ce four s’affermoit 130 ou i 5o francs. Que Rixain
aîné produise les baux à ferme. Les autres héritagesisont
une terre et petit p ré , consistant, est-il dit , én dix septerees de te rre, et une autre terre de la contenue dé dix
quartelées ; en tout onze septerées et demie. Il est à ob
server que la septerée à M a u r ia c , comme à A u r illa c ,
n’est que de 400 toises. >L a septerée de la meilleure qua-*lité ne se vendoit pas, avant la r é v o l u t i o n a u delà)de
i 5o francs. Q u ’on juge maintenant.
' .
u •
Peu im porterait, avons-nous d it , que le père eût excédé
la légitim e, pourvu qu’il n’ait point excédé la réserve;
et réciproquement nous dirons : Peu importeroit qu’il ait
excédé la réserve , pou rvu qu’ il n’ait point excédé la
légitime de droit. L a légitime est une portion que la
loi réserve aux enfans, qu’elle retranche des biens du
p è r e , même malgré le père : c’est une réserve lé g a le ,
qui est indépendante de la réserve conventionnelle.
Rixain aîné auroit donc à prouver que les fonds donnés
cxcéd oien t, et la légitime , et la réserve. Il n’uura garde
de s’engnger dans cette vérification.
/
-
�s/y ,
c * 3- v
ii'Enfiri 'y excederoîent-ils ,•.la :dn zia tÎQn n'jau rb i t!point été
nulle? pour icela ; elle! seroit, seulement jsujettq¡à» tetraji-,
chement : ce qui prouve detplùs'en-plusleim aljugé/.du
jugement.
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X iC ijD f(î:i
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c/i Onvne peut dissimuler qüe la donation du x 5 février
1775 n’a point été insinuée du .vivant du père -y et que
dès-lors elle ¡est n u lle, aux termes de l’ordonnance de
i7 3 iv ) ‘Mais les* intimés peùvent-ilsise prévaloir de cette
nullité .-dérivant du fait du:défutit^;donti|s sonjt héritiers,
pour une portion ? 'C ’est cei qu’il s’agit.¡d’examiner, ¡n
jrinbn/i. .noiJ.-utir«îai‘i oh 71101 ?•!> *. p !<>:Jo
■
; -,
TROISIÈME
I I ' ' ' n b l l . r . ' ‘J .
t ‘ ’i l ' V i q
QUESTION.
ç f
. . •»i
:
i .i ¡/un;':;
t
. O j j f t i ’i
'¡-Les adversaires ne manqueront ipoint d’objecter que le
donateur n ’est; point garant d e là chose! donnée v.que son
obligation, àjcèt égard , est différente de celle du vendeur ;
qu’il est censé ne donner la chose que telle, et autant
qu’il l’a .; qu’il seroit injuste ¡qu’on pût s’armer contre le
bienfaiteur , de son bienfait.
, r' ;
: rf j
)
.Cette proposition est vraie qnj.général, mais .elle de
mande d’être expliquée. L e donateur 11’esl,point garant
de la chose donnée, c’est-à-dire, qu’il n’est point garant
que la chose donnée lui appartient; mais il. est garant
de ses faits et promesses. Il n’est point garant que la chose
donnée lui appartient; mais-il ne tfaut pas que ce soit
par son fait que la chose ne lui a point appartenu, ou
�A Ù .
(' h y
a cessé ’¡de; ldi appartenir ; autremèrit il faticFroit cjrrôiqù’il
dépend (JiiJid‘Oïiatduridefrévoquer la. donation j cantre la
m à x im a ,idonnbntfyretenir ne- vaut: ; ’
oo : in' ; . ' ■
A - t - il été au pouvoir de Rixain , prêtre, en" ne satis
faisant point au vœu de l’ordonnance, d’annuller la
donation qu’il ’ a v o it faite lui-même à "sdn3 f r è r e , et en
vu e de laquelle le mariage a été contracté?
' L e pc'ré vivo itâ I’époque>du mariage ;'il ïnv^curenéôre
pluâièüF^ 'ûrlnéi's depuis. L ’article^aÔ ide- Tordonnance de
Î731 pòrte, que les donations pourront être insinuées,
âprès le délai de quatre m ois, même après le dccès du
d^nàfàirb^fprtulivüi que' le^donatelir- soit encore vivan t;
elle «apporte seulement cette modification ,-que la donation,
n’aura alors effet que du jour de l’insinuation. Pendant
que le père a Existé , et pendant plusieurs aimées après
le mariage, ila tenu à R ixain, prêtre, de valider son titre,
de s’a^swrer incommiitablement impropriété dos>objets par
llii dônn'és. A -t-il pu} eh no ¡satisfaisant point à ld foriiiàlitó prescrite par'lïordonnaiico, annullor ses propres
engagement ?
Il auroit donc fait à l'appelant un avantage illusoire!
Celui qui donne , est maître de donnery ou de ne pas
donner. M a is, lorsqu’il a d on n é, il 11e peut rien faire
directem ent, ni indirectement qui puisse porter atteinte
ù la donation, qui puisse enfreindre le principe de l’ irréVt>cabilité, caractère essentiel do toute donation entré vifs.
Ltì dònateuì*, comme, celui cjui v e n d , est1 toujours ga
rant de
faits et pi’orriesses. •
S i'l’abbé tlixàin v.ivoit;; si l'appelant réclainoit contre
lui l’exécution de la donation, l’abbé Rixain pourroil-il
�jn
c; «5 ï _
sé[ défendre dè l ’exécuter, en disantricjuc la donation à
■
*
«
lui faite , par le père commun , n’a. point été insinuée,
et qu’il nia pu donner ce qui ne lui appahenoit pas* O n
lui ré p b n d ro it, avec avantage, que'ic’est par son fait
q u’elle n’a point été insinuée.
Mais le doute, s’il pou voiten existei',est levé par la clause
mpme du contrat’de mariage. L e contrat de mqriage prirte:
Sans autre garantie que de ses f a i t s et promesses. Il a
donc* garanti ses faits et promesses : cette obligation de
garantie a passé à ses héritiers. Les adversaires sont donc
garans e u x - m ê m e s , au moins pour la part et portion
pour, laquelle ils sont .héritiers 3 de la nullité qu’ils
opposent.
• ••
vj
: A-.
■ ' - Jo •
j
<;!>':
Q U A T R I È M E
! '
Q U E S T I O N .
f
Par le contrat de mariage de l’appelant, R ix a in , prêtre,
commence par lui donner la moitié des objets compris
dans la donation du i 5 février 1775. Siibsidiairement,
il lui a transmis la moitié de ses droits légitimâmes pa
ternels. Les juges, dont est appel, ont déclaré cette dona
tion subsidiaire également aiulie, comm’e cqntenant un
pacte sur une succession future. C ’est le m otif qu’ils ont
donné de leur décision.
1
1
Si ce m otif n’étoit point consigné dans lin jugem ent,
on auroit peine à penser qu’il fût sérioux.
Est-ce ici un marché odieux sur la succession du père?
Est-ce ici un pacte moyennant un prix ? P e u t-o n assi
miler la donation dont il s’agit à1un pacte par lequel
l ’nn vend et l’autre achète, à vil p rix , des droits sur
�^
, \VL
f
i6 )
une succession future qu’on est impatient dè d évorer? L a
loi.a proscrit ces conventions, comme renfermantr>lè Vœu
inhumain de la m o rt d’autrui. Ce vœu respire dans le
vendeur et dans l ’aclieteur ; dans le vendeur [qui, trou
vant la mort de celui dont il attend la :succession trop
lente , cède à fo rfa it, et cède à un prix d’autant plus
modique , qu’il vend un droit incertain , un droit qui
peut.même devenir caduc , par son prédécès-, dans l’adietéur qui a à désirer, non-seulement de'bénéficier, mais
de n’être pas en perte. La clause dont il s’agit renfermet-elle rien de semblable ? Que reçoit R ixain donateur ?
Qiie donne Rixain donataire1? : Absolument rien; O n
ne voit qu’ un bienfait d’une p a r t , et l’acceptation de ce
bienfait de l’autre. Est-il défendu d’exercer et d’accepter
une libéralité ?
Si R ix a in , prêtre, avoit donné tous ses biens à ven ir,
la donation auroit;bien sans doute .été, valable;, .elle auroit
cependant bien compris les droits légitimaires à recueillir
dans la succession .du père. • 1
j
L a donation n’est pas principalem ent, prin cip a liter,
des droits légitimaires k échoir. L a donation commence
par des. objets fixes et. certains ; le donateur commence
par donner les héritages particuliers compris dans la
donation à lui faite par le père , et dont celui-ci étoit
saisi; donation-, à la v e n t e , non - insinuée , mais qui
pouvoit l’être, tant que le père vivoit. L a donation des
droits légitimaires n’est que sécondairo , et à défaut
d ’exécution de la première ; c’est.une sûreté, une garantie
que le-fr^re a voulu donner sur les [biens A venir. Et
quelle loi alors défeûdoit d’engnger les biens à venir?
Mais
�( *7 )
' r Mais tout pacte sur la succession future étoit-il in
terdit ? L a l o i , au code Q uam vis de p a c t ù , permettoit
les conventions sur successions futures, entre m ajeurs,
po u rvu que ce fût du consentement de celui de cujus.
Cette lo i a été suivie en France ; on peut voir ce que
dit à cet égard Lebrun. Ici la donation a été faite en
présence du père, ou de son fondé de pouvoir ; elle a été
faite par contrat de mariage, en vue de l’établissement
de l’appelant ; et l’on sait que les contrats de mariage
sont susceptibles de toutes sortes de clauses.
CINQUIÈME
QUESTION.
Cette question est suboi’donnée à la décision des pré
cédentes. Il n’y auroit pas lieu , si la cour se déterminoit
à déclarer les deux donations nulles ; il ne s’agiroit point
alors d’exdminer si l’appelant peut réunir la double qua
lité de donataire et d’héritier; mais si , comme on le
présum e, la cour se détermine à infirmer le jugement
qui a déclaré les deux donations nulles, l’appelant, pour
venir à la succession, pour avoir droit au partage des
biens dont R i x a in , prêtre , n’a point disposé, sera-t-il
obligé de rapporter la donation? O n soutient avec con
fiance la négative.
Les parties sont régies par le droit écrit , et aucun
jurisconsulte n’ignore qu’en pays de droit écrit le rapport
n’avoit lieu qu’en d ire cte, et non en ligne collatérale.
L ’appelant réclame l'exécution de son contrat de ma
riage ; il réclame les •avantages qui lui ont été assurés
C
�( 18 )
D e v o i t - i l s’attendre à éprouver de la
par son frère.
contradiction ?
Nous terminerons par une dernière observation.
L e jugement dont est appel réserve à Rixain tous
m oyens de com pensation. Il est ajouté , à la vérité ,
excep tio n s, f in de n on -recevoir, et défenses réservées
au co n tra ire: à l ’effet de q u o i, est-il d it, les parties
contesteront plus amplement;
E t , à raison de cette plus ample contestation, réserve
les dépens.
Quels sont ces moyens de compensation ? L e sieur
Rixain auroit dû les exp liquer, les établir; il auroit dû
au moins en former demande : il ne l’a point fait. Dans
aucune de ses requêtes il n’a pris aucunes conclusions à
cet égard; il s’est contenté de dire vaguement que l’ap
pelant lui doit, que l’abbé R ixain devoit à la succession
du père commun ; mais il n’a point formé de demande.
Les juges dont est appel ont ordonné une plus ample
contestation sur des demandes non formées.
S’il lui est dû par l’appelant, qu’il l’établisse : l’applant offre de le payer sur le ch amp.
M e. P A G È S - M E Y M A C , juriscon sulte.
M e. M A L L E T , avoué.
A R I O M , de l ’imprim erie de LANDRIOT, seul im prim eur de la
C our d ’appel.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rixain, Léonard. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
successions
héritier universel
légitime
four banal
pays de droit écrit
contrats de mariage
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Léonard Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, appelant ; Contre Antoine Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, intimé ; Et contre Antoine Delmas, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, aussi intimé.
Table Godemel : Cumul : le cohéritier peut-il, après l’ouverture de la succession du légitimaire donateur, cumuler la qualité de donataire et d’héritier, c’est-à-dire prendre ce qui lui a été donné par son frère, et, de plus, sa part dans les objets dont il n’a pas été disposé ? Institution d'héritier : 3. le père commun qui, en faisant une institution d’héritier contractuelle en faveur de son fils ainé, se fait réserve d’une somme déterminée pour former la légitime des quatre autres enfans, a-t-il pu composer la légitime de l’un d’eux en bien fonds et lui en faire donation ?
a-t-il en cela préjudicié à l’institution ? le légitimaire donataire a-t-il pu donner valablemt, à un autre de ses frères, légitimaire comme lui, dans son contrat de mariage, une partie des immeubles donnés ; et, en cas de difficulté, lui donner la moitié des droits légitimaires qu’il pouvait espérer dans les successions échues de ses père et mère ? le cohéritier peut-il, après l’ouverture de la succession du légitimaire- donateur, cumuler la qualité de donataire et d’héritier, c'est-à-dire prendre ce qui lui a été donné par son père, et, de plus, sa part dans les objets dont il n’a pas été disposé ? Donation : 6. le légitimaire-donataire a-t-il pû donner valablement, à un autre de ses frères, légitimaire comme lui, dans son contrat de mariage, une partie des immeubles donnés, et, en cas de difficulté, lui donner la moitié des droits légitimaires qu’il pouvait espérer dans les successions à échoir de ses père et mère ? 10 – 563.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1764-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1025
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0737
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53123/BCU_Factums_G1025.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Mauriac (15120)
La Bizette (terroir de)
Delfraissi (terroir de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations
four banal
héritier universel
légitime
pays de droit écrit
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53932/BCU_Factums_M0737.pdf
74b81c522d5208bd3c0bfd55cc12ffc5
PDF Text
Text
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I
POUR
L é o n a r d R I X A I N , propriétaire, habitant de la
ville de Clermont-Ferrand, appelant;
C O N T R E
A n to in e
R I X A I N , propriétaire, habitant de la
ville de M a u r ia c , intim é;
E T
C O N T R E
D E L M A S , propriétaire, habitant de
la ville de M a u r ia c , aussi intimé.
A n to in e
L es juges, dont est appel, paroissent avoir méconnu,
dans cette cause, les principes de droit les plus familiers,
les plus incontestables.
•
A
�c 2 )
F A I T S .
D u mariage de Jacques Rixain et Thérèse-André de
L o u vert, père et mère communs , sont issus cinq enfans,
Antoine, Germain-Gaspard, Thérèse, Marie, et Léonard.
A n to in ei l’aîné, a été marié à la maison.
Par son contrat de mariage, du 6 juin 1764, les père
et mère l’instituèrent leur héritier général et universel,
sous la réserve d’une somme de 28000 francs pour former
la légitime des autres quatre enfans ; savoir, 24000 fr.
de la part du père, et 4000 francs de la part de la mère.,
Thérèse entra en religion : les père et mère lui consti
tuèrent, pour sa dot religieuse, une somme de 25 oo fr .,
dont 2400 francs du chef du père, et 100 francs du chef
de la mère. Elle est décédée du vivant des père et mère.
M arie a contracté mariage le 10 janvier 1774 , avec
le sieur Delmas : de ce mariage est issu Antoine Delmas
qui figure dans la contestation comme représentant sa
mère décédée en 1780.
Germ ain-Gaspard se dévoua à l’état ecclésiastique.
L e i 5 février 1775, le père voulant, est-il dit, régler et
fixer la légitime paternelle dudit Germain son fils, lui
donna par donation entre-vifs et irrévocable,
Un four bannal ( 1 ) avec une chambre, boutique et
( 1) Il ne faut pas induire de ce mot bannal, qu’il y eût un droit
de bannalité attaché. On l’appeloit bannal, parce qu’il ne servoit
pas uniquement pour l’usage de la m aison; qu’il servoit pour le
public, pour tous ceux qui volontairement y venoient faire cuire,
moyennant une petite rétribution.
�( 3)
grenier y attenant, situés dans la ville de Mauriac ;
Une terre et petit pré attenant, situés au terroir de
la Bizette ;
A utre terre située au terroir Delfraissi.
Il se réserva, durant sa vie et celle de son épouse, l’usu
fruit des objets donnés.
Cette donation n’a point été insinuée.
lie i 5 juillet 17 7 7 , le père a fixé également la légitime
de Léonard R ixain; il lui a cédé et délaissé, du consen
tement de l’aîné présent à l’acte, pour tout droit de légi
time paternelle, une somme de 9000 francs à prendre
sur un contrat de 12000 francs , dû par le sieur Dorcet,«
et les intérêts qui pourroient être dûs dudit contrat,
lesquels intérêts formoient un objet d’environ 1000 francs.
A u moyen de ce transport, Léonard Rixain a été satis
fait de ses droits paternels.
L e II janvier I 779 >Léonai-d Rixain a contracté mariage
avec la demoiselle Raimond. Il est inutile de rappeler'
les différentes clauses du contrat de mariage ; on ne rappel
lera que celle relative à la contestation.
cc En même faveur du mariage, est-il d it, R ixain,
« prêtre , donne de son chef au futur époux son frè re ,
« à titre de donation entre-vifs et irrévocable, la moitié
« des biens fonds qui ont été donnés audit donateur, au
« même litre de donation entre-vifs, par le sieur Rixain
a père.
Suit le détail des héritages.
« Sans néanmoins, est-il ajouté , aucune garantie que
« des faits et promesses dudit Rixain, prêtre, donateur,
« et avec subrogation au profit du fu t u r époux, à la
A 2
y
�( 4 }
<* moitié de tous les droits de légitime et autres dudit.
« R ix a in , prêtre , du c h e f paternel.
« L u i donne en outre la moitié des biens qui lui échoi« ront à titre de légitime ou institution , dans la suc« cession de la mère.
« Lesdites donations ainsi faites à la charge de l’usu« fruit et de la jouissance, envers lesdits père et m ère,
« et au dernier vivant. »
Cette donation a été insinuée au registre de form e,
le 27 avril suivant.
La mère est décédée en 1788 , et le père en 1789, sans
avoir fait d’autres dispositions que celles ci-dessus.
L e père a laissé des propriétés d’une valeur considé
rable. La fortune de la mère étoit mobilière : elle consistoit uniquement dans «la somme de 4656 francs qui lui
avoit été constituée par son contrat de mariage.
Ptixain, prêtre , est décédé en 17 9 1, sans avoir pareil
lement fait de dispositions. Sa succession a été à partager
par tiers entre ses deux frères, et Delmas, son neveu, fils
de Marie , sa sœur , prédécédée.
Nous disons par tiers. La donation faite par R ixain,
prêtre, a L éo n ard , quoiqu’il n’ait pas été dit qu’elle
étoit faite par précipu t, n’étoit pas un obstacle h ce que
celui-ci vînt à la succession. On sait qu’en pays de droit
écrit, et sous l’empire des anciennes lois, les donations
n’étoient sujettes à rapport qu’en ligne directe ; qu’on
pouvoit en collatéi’ale cumuler la qualité d’héritier et de
donataire.
E11 cet état, quels étoient les droits du sieur Rixain ,
autres que ses droits directs paternels ?
�((5)j
* Il aVoit a prétendre,
i-,
•: D a n s la succession de la mère , consistant en la somme
de 4656 fr. par elle-"apportée en dot ,>
'*
i°. Un douzième de ¡son ch ef,. mon tant de sa légitime
de rigueur;
T
2°. Comme donataire de la moitié des droits maternels
de R ixain , prêtre, la moitié d’un pareil douzième;
3°, Comme héritier du même R ixain , p rêtre, pour
un tiers, le tiers dans l’autre moitié d’un pareil douzième :
D an s les biens 'du père, du chef dudit R ix a in , p rêtre,
aux mêmes qualités,
La moitié des fonds donnés par le père audit R ixain,
prêtre, et dont celui-ci avoit disposé en faveur de son
frère par son contrat de m ariage, et un tiers dans l’autre
moitié.
E t en cas de difficulté, la moitié de la légitim e de
rigueur dudit Rixain , prêtre , à laquelle il avoit été
subrogé, et un tiers dans l’autre moitié.
Par exploit du 23. ventôse an 1 2 , il a formé demande
de ces divers droits.
. >
Il a fait citer au tribunal d’arrondissement de M auriac,
après avoir épuisé la voie [de la conciliation^ ; Rixain
aîné, détenteur de tous les biens , et Antoiüc.iD clm as,
son neveu', r " i-' • ■'! ri
•
" jvV; ui' j- î r ■
Il a conclu 'contre Rixain a în é , à ce qu7il fût con
damné à lu r payer le douzième qu’il amendoit de sou
chef dans la-somme de 4666 fr. montant dé la dot de
la mère , et du chef de R ixain, prêtre y.la moitié , et un
tiers dans l’autrp'moitié de pareil■
d o u ziëm b avec intérêts,
depuis le décès dû père ;
i- ’ •'* J
»
�(6)
A ce qu’il fût condamné à venir à division et par
tage des biens donnés .par. le père à R ixain , prêtre-, par
l’acte de donation du i6< février 1775 /pour lui en être
délaissé»la m oitié, et un tiers dans l’autre moitié: .
Et où les juges y feroient quelque difficulté, il fût con
damné à venir ù division et partage de tous les »biens
meubles et immeubles dépendans dé la succession du père
commun , pour en être distrait un douzième formant la
légitime, de.droit de R ixain , prêtre, et ledit douzième
distrait, ,être divisé pour lui en être délaissé la moitié et
le tiers dans la moitié ;
t A vec restitution des jouissances et des dégradations des
objets qui lui Iseroient attribués depuis le décès du père.
' E t contre Antoine D elm as, cohéritier par représen
tation de sa mère dudit Rixain , p rêtre, à ce que le
jugement à intervenir fût déclaré commun avec lui.
ù Sur cette demande, jugement contradictoire est inter
venu, le 23 messidor an 12 ,'dont.les motifs sont la trans
cription dès délensès des parties adverses.
Ce jugement est ainsi conçu:
‘
« Attendu que par le contrat de mariage d’Antoine
k R ixain , défendeur, du 6 juin 176 4, ses père et mère
« l’ont'institué lèui ^héritier général et universel, sous
« la seule réserve de disposer de la part du père, d’une
cc somme dé 24000 francs, et de la part de la m ère, d’une
« somme de 4000 francs ;
• k Attendu» que, par ces mêmes réserves , les père et
« m'ère'.düdit Antoine iRixain sé sont imposés des bornes
et àr'liiurLlibéralitéjiqu’Jis u’ont -pu. oulre-passer , et que
a conséquemment ledit Rixain père n’a p u , au préju-
1
�C7 )
clice de ladite institution, donner à Germain-Gaspard
Rixain des immeubles faisant partie de ladite insti
tution; .
,
« Attendu d’ailleurs que la donation qu’il a faite de
ces immeubles, par acte du i5 février 177$ , est nulle
faute d’avoir été insinuée, aux termes de l’ordonnance
de 1731 ;
)\
^
|
« Attendu q u e , d’après cela, ledit Germain Bixain ,
p rêtre, n’a pu donner valablement à Léonard R ixain ,
son frère, dans son contrat de mariage du 26 janvier
1779, les immeubles à lui donnés par son p ère, puisque
la donation faite par celui-ci étoit nulle ;
,
«l Attendu que ledit Rixain.,
prêtre,
n’a
pu donner
• • 1
• .I
«
non plus dans le même contrat de mariage, du 26 janvier 17 7 9 , et du vivant de ses père et'm ère, qui ne
sont décédés qu’en 1788 et 1789 , les droits légitimaires
qu il pouvoit alors espérer dans les successions à échoir
de ses père et m ère, parce que tçut pacte sur la suc
cession d’une personne vivante est n u l, et contre les
bonnes mœurs ;
» Attendu que ledit R ix a in , défendeur , a» toujours
offert de payer audit R ixain, demandeur , son douzième
dans la succession maternelle, et sou tiers dans le
douzième des légitimes paternelles et maternelles, de
R ixain , p rêtre, leur frère commun , après un compte
à faire entr’eu x, et de plusieurs sommes réclamées par
ledit Rixain u défendeur , et que ledit Rixain , deman
d e u r , ne^s’cs.tpas expliqué sur les prétentions du déVfcndçur,;'
; ;.o!!
,
_
, « L e tribunal, sans avoir égard à la donation faite par feu
�«
«'
«
t
«
«
( 8)
r*^ /•'
r^
.
Rixain père , ù Germain-Gaspard R ixain , p lâ tre , au
profit de'Lébrinrd Rixain , des objets compris*en ladite
donation de 1770, qu’il déclare de nul effet, cette pre#
^
*
»{ •r
mière donation , étant nulle , saris s’arrêter non plus
à la donation également faite par le riiemé contrat de
« mariage de 177 9 , par ledit R ix a in , prêtre , au profit
« çludit L éo n a rd R i x a i n , de la m oitié de sêd légitimes
^‘ 'patbrnélle et maternelle- qui nb lui étaient pas alors
W’acqûlses, puisque :ses père et mèi’e étoient encore
« ’ viÿans , e t’qu’il ne pouvoit faire aucune convention
« Jsi1l; leur future succession qu’il ne pouvait pas re« cueillir ; déclare aussi lesdiies donations nulles ; donne
« ^icüe aiitllt Aütüïriô^Rixraîn'j'défendeur, des offres qu’il
CC a filït^ de payer ntidit Léonard Rixain son douzième
c/ dè ‘ia‘ siicccslton m obilière de T h é r è s e - A n d r é , m ère
cc coriimmifej de liii piiVer aussi son tiers du douzième
« forma ril jÎîVlêgitiïne maternelle d üdi t G ermui n-Gaspa rd
c7 Rixàinr^ et'^’aulre'tiôts’ audits .Delmas , et de venir à
r olfi
j
, é •.
t ?
«■'partagé avcêiiti et ledit' Delmas dù douzième dans les
« Liens du père commun , revenant audit Germain-G as• , * • ’ t/. v c 1 . r
, .*V
’ . ’
1
« para RixJiiti pôiii" sa légitime paternëlle, pour en ôlre
« 'clefaîsse uu tife^a’hüdit Luonard Rixain , mi autre tiers
k * nuefit
Inclinas, et îe •dernier tiers au d éfen deu r, auquel
<i * 11• *’ '
!
*
« \leineurent1réservé^ toûs 'sieis moyens de compensation,
«" exceptions ; finâ cîB non-i-éceVoir, et défenses demeu« Aant^'éserveës' auclif LéoiiVircl-Riicafn à l’eiîct de quoi
«1 iis:conlesfcro^t’ pliisü«Viin^VenVMït', dépèns'réservéà!^
* L é o n a r d Rïi'a'iii a1, interjeté'*app6V do c e ^ j u g e m e h t ^ et
c’est sur çe.t a p p e l q u e les parties a tt end en t fci* decfisi'oir
s6uvcrtiirio'clerla Coitr.
u ’
.
iJ
~>
M O Y E N S.
�(9)^
M O Y E N .S. . .
La contestation présente les questions suivantes:
L e père commun a-t-ril p u , s’étant réservé ,seulement
une somme de 24000 fr. à disposerren.,argent,, .fixer la
légitime de Rixain;, .pretre, (en fonds ? L a donation du
i 5 février 1776 est-elle nulle sous ce-rapport?
Cette donation e s t-e lle n ulle, comme (n’ayant point
été insinuée? (
^ t ^
^
Les intim és, héritiers chacun pour une portion de
) Jlü- 7
.
1
! ‘r
Rixain , p r ê t r e é t a n t en cette qualité tenus, pour la
part qu’ils amendent dans la succession, des engagemens
dudit Rixain qui a transmis à l’appelant partie de cette
donation, peuvent-ils exciper du défaut d’insinuation? (
Dans tous les cas, la donatiop faite par Rixain, prêtre ,
à l’appelant, dé la moitié de ses droits paternels, est-elle
valable ? doit-elle avoir son effet ?
L ’appelant, indépendamment de là donation à lui faite
par R ixain, prêtre, soit de la moitié des objets particuliers
compris dans la donation du 1 5 février 177 5, soit de la moi
tié de ses droits légitim ants, a - t - i l droit comme cohé
ritier à une portion dans le surplus des biens dudit
R ixain , prêtre, décédé sans avoir fait d’autres disposi
tions? En d’autres termes, p e u t-il cumuler la qualité
de donataire et d’héritier?
Telles sont les questions sur lesquelles la cour a à
prononcer.
B
�( 10 )
P R E M I-ÈRE!
Q U E S T I O N .
Les-juges dont est appel ont jugé que le père s’étant
réservé uniquement- uné; somme en : argent à disposer,
n’avôit1 pu donner des fonds’en payement de la légitime.
G’est une erreur , et une erreur que le pltts simple rai
sonnement va rendre sensible.
1
Celui qui fait une institution , avec réserve d’une
somm e, n’a pas ordinairement cette somme en. ses mains.
Il ne peut se la réserver à prendre sur les deniers qu’il n’a
pas ; il ne peut se la réserver à prentlré que'sur ce qui
compose la succession. Il a donc le droit de disposer des
fonds de la succession, des immeubles comme des.meu
bles, jusqu’à concurrence de la'somme réservée : tout ce
que l’héritier institué peut e x ig e r, c’ies^ qu’il né dispose
point au delà!
••>
- f
' )■ . I
’il. . •
,
■
* '
Celui qui fait une .institution , avec-réserve d’une
somme, ne promet pas,que sa succession-sera composée
de tels ou.-de tels fonds ; il promet seulement sa succes
sion ^ moins la .sonnrjej ,ou la valeur représentative de la
somme■
s’est
ilqu’il
1 HÎ f"
) réservée.,
•) . •
•;*
I c i, la disposition du père est d’autant plus à l’abri de
toute ¡cri,tique., que les.-fonds donnés à R ixain, prêtre,
ont été donnés en payement de sa-légitime; en payement
d’une dette sacrée, d’mie^dette que la loi lui imposoit,
d’une dette qui étoit en môme temps celle de .l’héritier ,
d’une dette que l’héritier n’auroit pu se dispenser d’ac-
�quitter lui-même en .fonds ; l e légitim aire ayant le droit
<l’exiger)sa portion en „corps héréditaires, sv) t
L ’instituant, n’a point îles ¡mains rtÜllementliëes.par'l-ins!titution , iqu’il ne tpuisse disposer ides -fonds [de^la 'succes
sion , vendre et •aliéner., ^pourviu^querce nè-soit point en
fraude de l’institution ; et ce n’est point ien !fraude de
•l’institution:, lorsqu’il m’excède ipoint;,le montant dé k
réserve -, lorsqu’il dispose pour acquitter.autaiit ria'detto
d el’héritïerque là sienne-•loi’sqa’i.l'di&pose paur aéqiuifter
en fonds, une dette due en>fafrds!’,'unextefèe:c|ue h é r itie r
n’auroit pu>se dispenser,.comme', an vient de l ’observer,
d’acquitter -lui-même ten .fonds.- j . ;n', :
* ‘ L ’héritier ne .-pourroiti se .'plaindre jqu’mitant que les
•fonds donnés seroient,de phis ^grande valeur. Mais c’est
.un 'cas particulier ; ’ on présumeroit.alôrs quTii1 .y a fraude-:,
-et le cas'de fraiidé)est toujours excepté. ..
o Gem’est point pin* .cermbtif que les juges dont .est appel
se sont décidés. Ils ont jugéienidroit què;le père s’étant
•réservé i.une isorhme .en »argent rà disposer., n’a voit pu
attribuer des fonds ren jpDyèmentjde. la.légitime. On e^t
loin d’adopter leur système.
Rixain aîrié dira-t-il que les fonds donnés excèdent
la légitime ?)qu’ils excèdent la Iréserve?
<
Peu importeroit d’abord qu’ils excédassent la légitime ,
.pourvu q u ’ i l s n’excédassent point la réserve; et on va dé- '
montrer, par le calcul le plus sim ple, qu’il s’en faut qu’ils
excèdent ¡la réserve, i . jr
L e p è r e commun s’est réservéïune somme .de 24000 fu.
Sur cette somme, il a disposé cü faveur de Thérèse-,
B 2
�X^ )
lors de son entrée en religion, d’une somme de 2400 f.;
ensuite, en faveur de M a rie, dans son contrat de ma
riage avec Delm as, d’unei sommé de 379^ francs;\il a
disposé, en ^dernier lieu, en faveuride l’appelant, d’une
somme d’environ 10000 francs, ; £es sommes réunies s’élè
vent à celle de 16195 francs; il restoit donc'libre, en ses
mains , avant d’avoir épuisé la réserve, f une somme
de 7805 francs. '
-, /- > j .
.1 ■• .
Quels sont les objets compris dans la donation ? Un
four. Ce four s’affermoit 130 ou i 5o francs: Que Rixain
aîné produise les baux à ferme. Les autres héritages sont
une terre et petit pré, consistant, est-il d it, en dix septe.rées de terre, et une autre terre de la contenue de dix
quartelées ; en tout onze septerées et demie. Il estr à ob
server que la septëréé à M auriac, comme à Aurilla’c ,
n’est que de 400 toises. La septerée de la meilleure qua
lité ne se .vendoit pas, ayant la révolution, au delà de
i 5 oirancs. Qu’on jugéjmaintenant.i
.
ii<j Peu im porteroit, avons-nous d it, que le père eût excédé
la légitime , pourvu qu’il n’ait point excédé la- réserve ;
et réciproquement nous dirons : Peu importeroit qu’il ait
excédé la réserve, pourvu qu’il n’ait point excédé la
légitime de droit. La légitime 'est une portion que la
loi réservé aux çnfans, qu’elle retranche des biens du
-père*' même malgré Ife^père : c’est une réserve légale,
qui est indépendante de la réserve conventionnelle.
Rixain aîné auroit donc à prouver que les fonds donnés
.cxcédoicnt., et la légitime , et la réserve. Il n’aura garde
<de 's’engager dans cette vériiication. , •
^ a
,
�( 13 )
Enfin, excéder oient-ils, la donation n’auroit point été
nulle pour cela ; elle sëroit seulement sujette à retran
chement : ce qui prouve de plus en plus le mal jugé du
jugement.
S E C O NDE
Q U E S T I O N . '
On ne peut dissimuler que la donation du 1 5 février
1775 n’a point été insinuée du.vivant du p è re , et que
dès-lors elle est n u lle , aux termes de l’ordonnance de
1731. Mais les intimés peuvent-ils se prévaloir de cette
nullité dérivant du fait du défunt, dont ils sont héritiers
pour une portion ? C’est ce qu’il s’agit d’examiner.
:
i . ’‘
i .
)
T R O I S I È M E
QUESTION.
.. Les adversaires ne manqueront point d’objecter que le
donateur n’est point garant de la chose donnée; que son
obligation, à cet égard, est différente de celle du vendeur ;
qu’il est censé ne donner la chose que telle, et autant
qu’il l’a ; qu’il seroit injuste qu’on pût s’armer contre le
bienfaiteur , de son bienfait.
Cette proposition est vraie en général, mais elle de
mande d’être expliquée. L e donateur n’est point garant
de la chose donnée, c’est-à-dire, qu’il n’est point garant
que la chose donnée lui appartient ; mais il est garant
de ses faits et promesses. Il n’est point garant que la chose
donnée lui appartient ; mais il ne faut pas que ce soit
par son fait que la chose ne lui a point appartenu, ou
�\
.
. ( 14 3
a cessé de lui appartenir; autrement il faudrait dire qu’il
dépend du donateur-de révoquer la donation-, contre la
maxime, donner et retenir ne vaut.
A -t-il été au pouvoir de R ixain , prêtre, en ne satis
faisant point au vœu de l’ordonnance, d’annuller la
donation qu’il avoit faite lui-même à son frè re , et en
vue de laquelle le mariage a été contracté?
L e père vivôit à l’épôqüe du‘mariage-; 'ila vécur encore
plusieurs années depuis. L ’afrticle 26‘de ^ordonnance de
*731 porte, que ‘les donations'-pourront être insinuées,
après le délai de quatre mois, même après le décès du
donataire, pOitrvu que le donateur soit encore vivant;
elle apporte seulemënt cette modification , que la donation
n’aura alors effet que du jour de l’insinuation. Pendant
que le père a existé , et ipendalnt plusieurs années après
le mariage, il a tenu à R ixain , prêtre, de valider son titre,
'de s’assüret’iincomitiütablèirieiitjla^pi-rtpviétéid'ê's objets par
lui donnés.^A-t-il ptiyen n e 1sôftîsfiiïâafüt point à' ia for
malité prescrite par ;Î’o'rdbtiriariCe , ^nnuller ses’propres
engagemens ?
Il aürôit donc -fait à l’appelant un avantage illusoire!
Celui qui donne , est maître de do'ntier, oüide ne pas
donner. Mais , lorsqu’il a donné, ’il rie peut rien faire
directement, ni^iïdiréc'tertiënt qui puisée porter atteinte
à la donation, qui püisâe enfreindre le principe de l’irré'vocabilitë /caractère essentiel de'-toute donation entre vifs.
’L e'd ü tlateü r/co rrittie Celui qu i v e n d , est toujours ga1rant dé ses'faits!iét promesses.
Si l’dbbé ‘Rixain vivoit ; si rappûla'rit'réelamoit'cOlltrè
lui l’exécution de la donation, l’abbé Rixain pourroit-il
�( i5 )
ge défendre de l’exécuter, eu disant que la donation à
lui faite, par le père commun , n’a point été insinuée,
et qu’il n’a pu donner ce qui ne lui appartenoit pas. On
lui répôndroit, avec avantage , que c’est par son fait
qu’elle n’a point été insinuée.
Mais le doute, s’il pouvoiten exister,est levé parla clause
même du contrat de mariage. L e contrat de mariage porte:
Sans a^itre garantie que de ses f a it s et promesses. 11 a
donc garanti ses faits et promesses: cette obligation de
garantie a passé à ses héritiers. Les adversaires sont donc
garans eux-m êm es, au moins pour la part et portion
pour laquelle ils sont héritiers-, de la nullité qu’ils
opposent.
Q U A T R I È ME
QUESTION.
Par le contrat de mariage de l’appelant, R ixain, prêtre,
commence par lui donner la moitié des objets compris
dans la donation du i 5 février 1775. Subsidiairement,
il lui a transmis la moitié de ses droits légitimaires pa
ternels. Les juges, dont est appel, ont déclaré cette dona
tion subsidiaii'C également nulle, comme contenant un
pacte sur une succession future. C’est le motif qu’ils ont
donné de leur décision.
Si ce motif n’étoit point consigné dans un jugement,
on auroit peine à penser qu’il fût sérieux.
Est-ce ici un marché-odieux sur la succession du père?
Est-ce ici un pacte moyennant un p rix ? Peut-on assi
miler la donation dont il s’agit à un pacte par lequel
l’un vend et l’autre achète, à vil prix, des droits sur
�( i6 )
une succession future qu’on est impatient de dévorer? La
loi a proscrit ces conventions, comme renfermant le vœu
inhumain de la mort d’autrui. Ce vœu respire dans le
vendeur et dans l’acheteur ; dans le vendeur q u i, trou
vant la mort de celui dont il attend la succession trop
lente , cède à fo rfa it, ét cède à un prix d’autant plus
modique , qu’il vend un droit incertain, un droit qui
peut même devenir caduc, par son prédécès ;_dans l’ache
teur qui a à désirer, non-seulement de bénéficier, mais
de n’être pas en perte. La clause dont il s’agit renfermet-elle rien de semblable ? Que reçoit Rixain donateur ?
Que donne Rixain donataire ? Absolument, rien. On
ne voit qu’un bienfait d’une p a rt, et l’acceptation de ce
bienfait de l’autre. Est-il défendu d’exercer et d’accepter
une libéralité ?
Si R ixain, prêtre, avoit donné tous ses biens à venir,
la donation auroit bien sans doute été valable; elle auroit
cependant bien compris les droits légitimaires à recueillir
dans la succession du père.
La donation n’est pas principalement, principaliter,
des droits légitimaires à échoir. L a donation commence
par des objets fixes et certains ; le donateur commence
par donner les héritages particuliers compris dans la
donation à lui faite par le p è re , et dont celui-ci étoit
saisi; donation, à la vérité,’ non - insinuée , mais qui
pouvoit l’être, tant que le père vivoit. La donation des
droits légitimaires n’est que sécondaire , et à défaut
d’exécution de la première ; c’est une sûreté, une garantie
que le frère a voulu donner sur les biens A venir. Et
quelle loi alors défendoit d’engager les biens à venir ?
Mais
�C 17 )
r Mais tout pacte sur la succession future: étoit-il in
terdit ? La lo i, au code Quamvis de pactis, permettait
les conventions sur successions futures, entre majeurs,
pourvu que ce fût du consentement de celui de eufus.
Cette lo i a été suivie en France; on peut voir ce que
dît à cet égard Lebrun.. Ici la-donation, a été. faite en
présence du, père, ou de son fondé de ¡pouvoir; elle a été
faite par contrat de mariage, en 'vu e de;Rétablissement
de l’appelant ; et l’on sait que les contrats de mariage
so n t susceptibles de toutes sortes de clauses.
. '.b .r
••
.
;;c • :
.. ' ?:] * )
i
C I N Q U I È M E Ï Q Ü E S' Î I O liif
‘
-[O' ! -,
Cette question est subordonnée à la décision des pré-r
cédentes. Il n’y auroit pas lieu , si la cour se déterminoit
à. déclarer les deux donations htilltis il ne-¿’agirait point
Alors d’examiner si rappelant'peut réunir la double qua^
lité de donataire et d’héritier; mais si f comme on le
présume, la cour se détermine à infirmer le jugement
qui a;déclaré lés deux donations nulles, l’appelant, pour
venir à la succession, poui* avoir droit' au partage des
biens dont R ix a in , prêtre , n’a point disposé, sera-t-il
obligé de-'rapporter ia donation? On soutient avec con
fiance la négative.
.
.
. ■
Les parties sont régies par le droit écrit , et aucun
jurisconsulte n’ignore qu’en pays de droit écrit le rapport
n’avoit lieu qu’en directe, et non en ligne collatérale.
L ’appelant réclame l’exécution; de son contrat de:m ariage ; il réclame les avantages qui lui ont été assurés
C
�( 18 )
par son frèret Devoit - il s’attendre à éprouver de la
contradiction?
t -Nous terminerons par une dernière observation.
L e jugement dont est appel réserve à Rixain tous
m oyen s de compensation. Il est ajouté, à la v é rité ,
exceptions f in de non-recevoir et défenses réservées
au contraire à l’effet d e q u o i, est-il. d it les parties
contesteront plus amplement;
E t à raison de cette plus ample contestation, réserve
les dépens.
Quels sont ces moyens de compensation ? L e sieur
Rixain auroit dû les expliquer, les établir ; il auroit dû
au moins en former demande : il ne l’a point fait. Dans
aucune de ses reqüêtes il n’a pris aucunes conclusions à
cet égard ; il s’est contenté de dire vaguement que l’ap
pelant lui doit que l’abbé Rixain devoit à la succession
du père commun ; mais il n’a point formé de demande.
Les juges dont est appel ont ordonné une plus ample
contestation su r, des demandes non formées.
S’il lui est dû par l’appelant, qu’il l’établisse : l’applant offre de le payer sur le champ.
I.
M e. P A G È S - M E Y M A C , jurisconsulte.
M e, M A L L E T ,
avoué.
H
A R IO M , de l’imprimerie de
L
, seul imprimeur dela
Cour d’appel.
a n d rio t
�
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Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rixain, Léonard. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
successions
héritier universel
four banal
pays de droit écrit
contrats de mariage
donations
Description
An account of the resource
Mémoire pour Léonard Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, appelant ; contre Antoine Rixain, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, intimé ; et contre Antoine Delmas, propriétaire, habitant de la ville de Mauriac, aussi intimé
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1764-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0737
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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Mauriac (15120)
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