1
100
15
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54002/BCU_Factums_DVV09.pdf
18a1578853520025bc2e6e1ef844b7fa
PDF Text
Text
PRODUCTION ET CONCLUSIONS
POUR
C0U R R 0Y A LE
D E RI OM,
Le Sieur GILBERT-M ARIE V IA L E T T E .
cnlraK,
Affairo Gaillard.
C
|ette
cause qui, à distance, paraît formidable lorsqu’on re
garde au nombre et à l’ancienneté des faits qu’elle agite, au v o
lume de scs productions et à sa généalogie dont les lignes couvrent
quatre pages, se réduit pourtant, vue de p rè s, à des proportions
asssez ordinaires :
Déjà les mémoires des sieurs Baisle et Gaillard l’ont considérable
ment avancée ;
Non que le sieur Vialette accepte également les conclusions de
ces deux écrits ; mais au point où ils laissent la discussion, il ne
reste à ceux qui viennent après qu'à résumer le débat.
C ’est aussi un résumé que nous allons présenter : aprcs avoir fixé
les principaux faits et distingué , dans le rapport, la liquidation
proprement d ite, des opérations qui seules rentraient, selon nous ,
dans la mission des experts, nous parcourrons rapidement chacune
des difficultés que cette partie de leur travail a fait naître.
FAITS GÉNÉRAUX.
Il s’agit, entre les parties, du partage des successions
i° De Philibert Senneterre ;
20 De Joseph Senneterre , fils de Philibert.
Philibert Senneterre est mort le 26 avril 1694.
Il s’était marié deux fois, et, de chacun de scs mariages, il avait
eu deux enfans ;
Françoise
u
*, femme de Marin Chanudet, et Catherine , femme de
M ichel Bichon, sont nées du premier mariage avec Marie Montandraud.
�Annct et Joseph sont issus dusecond mariage avec Maine Chapelle.
Au décès de Philibert Senneterre , les enfans du second lit étaient
mineurs : ils passèrent sous la tutelle de Françoise S eyn e, leur
aïeule.
Françoise Seyne étant morte, en l’année 1700, la tutelle fut
déférée à Michel Bichon , qui venait d’épouser Catherine Senneterre.
Ces faits sont attestés par des actes, et reconnus désormais entre
les parties.
En entrant en fonctions, Jean-Baptiste Bichon fît dresser un in
ventaire , le 24 juin 1700, et prit possession de tous les biens.
Les immeubles se composaient :
i° Du domaine de Montaudot ;
20 D ’un bois appelé Labrousse ;
5° Du domaine de Chabassière.
A l’égard du m obilier, on ne connaît que celui qui est porté dans
un inventaire du 24 juin 1700 : c ’est du reste, un des points liti
gieux de la cause.
A peine en possession , Michel Bichon fut recherché par les
créanciers de Philibert Senneterre.
L e 12 juillet 170 3, après un simulacre de formalités, ce tuteur
délaissa à Françoise Senneterre, sa belle-sœur, qui venait d’épouser
Marin Chanudct, une portion du domaine de Montaudot.
Françoise Senneterre disait avoir renoncé à la succession de son
p è re , et c ’était pour se rembourser de la moitié des reprises de
Marie Montandraud, sa mère, qu’elle recevait une portion détachée
du domaine de Montaudot.
Ce mode de paiement et cette répudiation qui, d’ailleurs, est de
meurée sans effet, disent assez la situation de fortune de Philibert
Senneterre , et jettent déjà quelque jour sur les prétentions mobi
lières émises plus tard par quelques-uns de ses descendans.
L e î) mai 1704, le surplus du domaine de Montaudot fut dé
laissé par Michel Bichon à Annct Montandraud, créancier de la
succession : le bois de Labrousse fut aussi compris dans cet abandon.
�Après c e ^ , (le tout le patrimoine de Philibert Senneicrre il ne
resta, dans les mains de Michel Bichon, que le mobilier et le petit
domaine de Chabassière. Ce domaine ne sortit jamais de ses m ains,
et, à cette h eu re, il est encore au pouvoir de scs descendans.
Si nous portons maintenant les yeux vers l'autre côté do la g é
néalogie , en descendant de quelques années, nous retrouvons
Annet et Joseph , enfans du second lit, en pleine majorité.
Q uel fut leur sort à eux, et qu’étaient-ils devenus au décès de
leur père ?
On ne sait, mais il a été allégué que Marie Chapelle, leur mère ,
avait été expulsée par Françoise Seyne; il est du reste avéré qu’à la
mort de Philibert, Marie Chapelle s’était retirée à Saint-Gervais où
elle avait une maison et des propriétés patrimoniales; les enfans du
second lit ne furent pas traités, sans doute, avec plus de façon que la
seconde femme; Annet et Joseph durent accompagner leur mère :
ils étaient d’ailleurs trop jeunes pour se passer de ses soins. Ils vécu
rent donc avec elle, et, à sa mort arrivée en 1 707 , ils succédèrent
aux biens de Saint-Gervais.
Quoi qu’il en soit, ni l’un ni l’autre ne recueillit jamais rien du
patrimoine de Philibert Senneterre; ce fait est reconnu par le sieur
Baisle lui-mème; et ce ne fut qu’en 175g que les héritiers d’Annet
se mirent en possession d’un p ré, d’une maison et d’un jardin , situés
à Chabassière, donnés en préciput à leur père par le contrat de
mariage de Marie Chapelle, du mois d’aoùt 1686.
Joseph mourut sans postérité , le 17 février 172g : il laissa un tes
tament qui renferme seulement quelques legs pies et des recon
naissances.
Précédem m ent, il avait fait en faveur d’Annet, son frè re, mort
en 1720, une institution contractuelle qui a été annulée.
Sa succession se composait :
i° Du quart dans la succession indivise de Philibert Senneterre j
a® D elà moitié du domaine et de la maison de Saint-Gervais, pro
venant de Marie Chapelle;
:>• D ’uumobilier peuconsidérable indivis avec les héritiers d’Annets
�et qui depuis 17 11 était placé en dépôt dans les mains d’un nommé
Péronny.
Conformément à la règle patenta p a tern is, les immeubles
d’origine maternelle revinrent aux héritiers d’Annet.
L e quart de la succession de Philibert fit confusion dans les mains
des autres trois branches ;
Et les héritiers paternels avaient droit au mobilier à la charge de
payer les dettes.
PROCÉDURE.
•
E n 173 9 , dix ans après la mort de Joseph , et quarante-trois ans
après la mort de Philibert Senneterre, personne n’avait encore songé
au partage de leurs successions.
V o ici quelle était, à cette époque, la situation des choses :
La première génération avait disparu. Les enfans de Catherine
et de Jean-Baptiste Bichon étaient en possession du domaine de
Chabassière, et du mobilier inscrit dans l’inventaire du 4 juin 1700.
Les enfans d’Annet et de Jacques Montandraud détenaient le bois
de Labrousse et l’entier domaine de Montaudot. Jacques avait
acheté, en I7 2 9 , la portion délaissée, en 170 3, aux époux Chanudet.
L a vente lui en avait été consentie par les époux Pommerol.
Q uanta Anne Senneterre, lille d’Annet, elle n’avait ni rien vendu,
ni rien recueilli; et, à part le précipulcréé en 1686, dans lequel la
branche Visignol est entrée plus tard, il est à remarquer que les
choses sont encore, en i 855 , ce quelles étaient au début de la pro
cédure.
L ’initiative en appartient à Anne Senneterre et à Jean Visignol.
Le i/| janvier 1739, ils formèrent contre les héritiers d’Annet et
de Jacques Montandraud, tiers-acquéreurs, une demande en désis
tement du domaine de Montaudot et du bois de Labrousse.
Ceux-ci se retournèrent contre les héritiers Pommerol, et deman
dèrent la garantie de la vente de 1729.
�Les héritiers Pommerol prirent fait et cause, excipèrent de leurs
droits dans la succession de Philibert, et conclurent au partage.
En 1749? dix ans après la demande, le 24 m ai, Jean-Baptiste
Bichon, (ils de M ichel, dont les droits sont confondus aujourd’hui
dans la branche V ialette-du-Chazal, intervint dans l’instance. Il
conclut aussi au partage , et offrit le rapport de Chabassière.
Le
25 juillet 175 5 , sentence de la sénéchaussée, qui ordonne le
partage.
Appel au parlement.
Trente-neuf ans s’écoulent sans décision, et, à la suppression des
parlemens , la cause est portée au tribunal ,d’uppcl du département
du P uy-de-D ôm e.
E niin, le 8 frimaire an 7 , ( le 8 novembre 1798, ) arrêt qui
annulle l’institution contractuelle;
Consacre le préçiput en faveur de la branche Visignol ;
Confond la part de Joseph dans la succession de Philibert ;
Ordonne le partage par tiers entre les trois branches;
E t condamne les tiers-détenteurs au rapport.
Cette décision est la base du rapport d’experts dont l’examen
constitue tout le procès; nous recourrons à ses dispositions, ainsi
qu’aux actes de la procédure , selon les besoins de la discussion.
L e rapport des experts est du 6 juin i 8o 5 ; il a sommeillé 28 ans
dans les g reffes, et c’est le 9 février c855 , seulement, que le sieur
Gaillard en a provoqué la discussion.
L a cause a été appointée par arrêt de la Cour, du 24 avril 1 854•
D epuis, les sieurs Baisle et Gaillard ont fait leur production.
DISCUSSION.
Jusqu’ici tout le monde convient que le rapport est défectueux ;
qu’il manque de méthode; qu’on y remarque des omissions, des
contradictions et des r ’dites; qu’il mêle les estimations aux comptes,
et confond ainsi des choses essentiellement distinctes.
A cela deux conclusions :
�(G)
i* Il ne faut pas s’astreindre à l’ordre suivi par les experts ;
2°
11 faut séparer les comptes de l’estimation, et ne s’occuper,
quant à présent, que de cette dernière partie du rapport.
Et en cela , il y a à-la-fois sagesse et légalité : légalité, car les
experts n’ont rien à faire dans les comptes; leur mission est unique
ment d’en préparer les bases; convenance et sagesse, parce qu’il est
probable qu’en s’abordant devant le liquidateur, les parties s’en
tendront sur une foule de difficultés qu’il serait indiscret desoulever
à l’avance.
Toutefois , nous anticiperons sur celle relative aux intérêts des
jouissances , ot en gén éral, des intérêts de tout ce qui est à rap
porter, parce que ce n’est pas là une question iso lée, mais bien
une question multiple dont la solution intéresse tous les élémons du
compte.
En abordant la discussion, le sieur Vialette fera observer queson
double rôle dans la cause lui permet et lui commande m ême l’im
partialité : héritier dans la branche Yisignol de son chef; héritier
dans la branche du Chazal, du chef de la dame Culhat dont il a les
droits, ses intérêts se balancent et se neutralisent. 11 lui est donc
perm is, dans cette position, de faire de l’éclectisme; aussi choisirat-il entre les systèmes pour ne prendre parti, en définitive, que pour
ce qui lui paraîtra juste et vrai.
§ I er.
M asse de la succession de P hilib ert Senneterre.
I.
M asse immobilière. Elle doit demeurer composée exclusi
vement :
i° Du domaine de Montaudot estimé, savoir :
La partie délaissée, le 12 juillet 170 5, aux époux Chanudet, et
vendue à Jacques Montandraud , le 39 janvier 1729. . 8,705 fr.
Celle abandonnée à Annet Montandraud, le 9 mai 1704.
4 i 7^°
Report. . 1 5^435 fr.
�Report. . i 5 j /|55 fr.
2° D u bois de Labrousse compris danscem êm e délais
se m e n t , estimé ...................................................................................
5 , 55o
5° Du domaine de Chabassière, resté aux mains de la
branche d u C h azal, héritière de Catherine, estimé. . .
9,668
T otal............ 27,653 fr.
L e domaine du Fal et la maison de Saint-Gervais doivent être
écartés de cette masse ; il est avéré qu’ils provenaient l’un et l’autre
de Marie Chapelle; celarésulte de plusieurs actes qui sont au procès,
en exprès, d’un partage du 5o avril 1680.
Aussi le sieur Baisle ne conteste-il plus cette origine.
Il doit en être de même du pré Lafont, du jardin et de la maison
situés à Chabassière : ils constituent le prccipnt créé par le contrat
de mariage de 1686. 11 faut donc qu’ils demeurent aux mains de la
branche V ialette-V isign o l, héritière de Joseph, premier enfant
inàle né de ce mariage.
L ’arrêt de l’an 7 l’ordonne, d’ailleurs, ainsi ; et le sieur Vialette}
comme le sieur Baisle, donne les mains à cette rectification du rap
port, demandée par le sieur Gaillard.
II. Masse mobilière. Elle se compose uniquement :
i e Des jouissances et dégradations dues par les héritiers Montandraud ;
20 Des jouissances dues parla branche Vialettc du Chazal , pour
le domaine de Chabassière ;
5* Du mobilier compris dans l’inventaire de 1700, et dont le rap
port est à la charge de la branche du Chazal;
4° Des intérêts de ces divers rapports.
Nous ferons observer aussi que le sieur Baisle réclame contre la
branche Vialette-Visignol, du mobilier qu’il prétend avoir été sous
trait par Marie C h apelle, et qu’il évalue à la somme de 2,000 fr.
Les experts parlent encore de redevances féodales qui , d’après
e u x , étaient dues à la succession de Philibert Scnneterre , et qu»
auraient été perçues par la branche Vialette du Chazal.
�Ces questions , comme toutes celles qui ont été soulevées relati
vement à la masse mobilière , seront plus convenablement traitées
aux § § . des rapports qui concernent chaque branche :
Cependant nous rappellerons ici, pour y donner une complète
adhésion, quelques justes critiques présentées p a rle sieur Baisle,
contre le travail des experts j en ce qui concerne les jouissances :
i° Ils ont omis d’estimer celles du bois de Labrousse; cependant
elles sont dues depuis la vente de 1 704, jusqu’au désistement ;
20 Ils ontfliégligé de faire connaître les bases de leurs estimations :
ils comprennent dans un chiffre collectif la somme des jouissances se
rapportant à une période entière, et ne disent ni les charges ni le
produit brut : ce mode d’évaluation si vague, si m ystérieux, 11e met
à l’aise ni l’approbation ni la critique;
5° Enfin les équations faites par le sieur B aisle, page 48 de son
m ém oire, p r o u v e n t ou de monstreuses erreurs , ou une révoltante
partialité ; on ne réplique pas à des chiffres : nous signalons sur tout,
comme excédant toute m esure, la différence de produits entre des
héritages identiques, selon que ces héritages changent de mains.
C ’est ainsi que, dans les mains des héritiers Montandraud, les im
meubles compris dans le délaissement de 1703 produisent une
moyenne de 2 14 fr. pour la période de 1729 à i8 o5; tandis que ,
dans les mains de la branche Pom m erol, la moyenne de 1700 à
Ï729 11’est que de 87 fr.
11 n’y a rien à ajoutera ces rapprochemens; et le sieur Vialette
adhère aux conséquences que le sieur Baisle en a justement tirées.
§
2.
Succession de Joseph Senne/erre.
i° Massa im m obilière. Distraction faite des biens maternels, le
domaine duFal et la maison de Saint-Gervais, cette masse consiste
uniquement dans le quart de la succession de Philibert; cette quotilé , faisant confusion sur la«tôle des trois branches cohéritières ,
porte a un tiers raniendemciitqùi, pour chacun, n’était d’abord que
du quart.
®
�Les experts ont donc commis une erreur, lorsqu’ils ont dit que
la succession de Joseph se partageait, par égalité, entre les trois
branches; cela n’est vrai que pour les biens paternels.
Mais la critique du sieur G aillard, qui le premier a relevé cette
inadvertance, a cependant peu d’intérêt, parce qu’il faut recon
naître que les experts n’ont pas com pris, en définitive, dans les biens
à partager, les immeubles d’origine maternelle ;
3 ° Relativement au m obilier, on n’en connaît que ce qui a été
porté dans le procès-verbal d’estimation, du 16 avril 1784
A. quoi il faut joindre encore la part des jouissances et intérêts
revenant à cette succession, pour le quart quelle amende dans celle
de Philibert.
Nous renvoyons au §. 4, l'examen des réclamations élevées contre
la branche Y ialette-V isignoî, relativement au mobilier de Joseph.
§
3.
/f
t
* .y
J
Rapports dus par la branche lia le t t e du C h a z a l, heritiere de
v
Çcitherine.
M obilier. Cette branche qui représente aussi Michel Bichon
doit seule rapporter le mobilier compris dans l’inventaire du 4 juin
1700.
Ce mobilier fut remis à Michel Bichon avec la tutelle des enfans,
lors du décès de Françoise Seyn e, et rien 11e prouve qu’il eu ait été
dessaisi.
C ’est donc sans raison que , dans ce chapitre 7 du rapport, les
experts le mettent à la charge de la branche Visignol.
A l’exemple du sieur Baisle, le sieur Vialettc s’empresse de re
connaître la justice de la réclamation du sieur Gaillard.
V a leu r dudit mobilier. Le sieur Viajette r e c o n n a ît r a encore avec
le sieur Baisle que cette valeur doit demeurer fixée à
55 f’r . , mon
tant de l’estimation de l’inventaire du 4 juin 1700,
Les experts évaluent relativement a leur epoque ; mais cent-cinq
ans après, ce mobilier était depuis long-teinsconsommé; en tous cas,
�( 1° )
1’inventaire faisait le droit., et le tuteur ne devait que la chose ou le
prix à laquelle elle fut évaluée ; rien n’a pu changer cette base au
détriment de ses héritiers.
Redevances féodales. C ’est aussi sans fondement que les experts
ont prétendu, dans leur rapport, que les héritiers de celte branche
devraient rapporter des cens et autres redevances féodales , dont ils
donnent la nomenclature; il est vrai qu’ils ont été dans l’impossibilité
d’en fixer le chiffre; maisle principe de l’obligation, en elle-mêm e,
serait aussi malaisé à établir que son quuntùm. Le sieur Violette se
rend pleinement aux raisons par lesquelles le sieur Baisle , page g5
de son mémoire, repousse cette prétention que rien ne justifie.
Jouissances. i° Nous avons vu que la branche Vialetfe du
Ghazal, cominereprésentant Michel Bichon et Catherine Senneterre,
était en possession, depuis l’année 1700, du domaine de Chabassière ; elle doitdonc les fruits de ce domaine.
Mais il faut observer qu’il futaffermé, suivant bail du
23 août 17^0.
pour trois années, au prix de 20 sols pour l’année 170 0 , et 10 fr.
pour chacune des années 1701 et 1702.
#
La modicité de ce prix est expliquée dans le bail; les terres étaient
en fort mauvais état; il y avait des avances à faire; et en 1700, le
domaine était même demeuré sans culture.
Q u’ importe d’ailleurs? le bail fut fait aux enchères, et le tuteur ne
peut rendre compte que de son produit.
Il est vrai qu’il est difficile de savoir ce qu’ont fait les experts à
l’égard de ces trois années, puisque tout est en bloc dans leurs esti
mations; mais si cette critique manquait de quelques preuves, les
présomptions auxquelles on est réduit démontrent, de ] lus fort, les
vices de ces est ¡mations exprimées par un chiffre collectif. Il est
probable du reste que les experts n’ont pas suivi le bail; car, s’ils
l’eussent connu, ils n’auraient pas rejeté sur la branche Visignol
les jouissances dont nous allons parler.
Les experts ont mis , en effet, à la charge de la branche h éii-
�tière d’Annet Sennetcrre , la restitution des fruits du domaine de
M o n i a u d o r , depuis le décès d e Philibert Senneterre, en l’année 1G94,
jusqu’aux délaissemens de 1703 et de 1704 . O r il y a là erreur , car
depuis i 6g 4 jusqu’à sa mort, ce fut Françoise Seyne qui jouit du
domaine. Sa possession est. prouvée par.sa qualité de tutrice , et par
l ’inventaire du 4 juin 1700, qui établit quelle avait fait, le 21 juin
1696, une vente de toutes les récoltes.
A p r è s la mort de Françoise S e y n e , en l’a n n é e 170 0 , les biens
passèrent avec la tutelle, dans les mains de Michel Bichon , qui les
garda jusqu’aux délaissemens de 1703 et de 1704* Cette possession
comme celle du domaine de la Boissière sont constatées par le bail
du 23 août 1700. Les experts auraient dù se renseigner à la mêm e
donnée ; mais il est probable, nous le répétons, qu’ils n’ont pas
connu ce bail.
La branche Vialelte du Chazal doit donc les jouissances de ce
domaine, pour toute la durée de la possession de Michel Bichon;
et le sieur Vialelte offre d’y contribuer pour sa part.
Mais il n’entend p a y e r , p o u r les années 1700, 1701 et 1702 , que
le prix du bail du 23 août 1700; c’est-à-dire 80 fr. par an. Ce bail
devrait être encore le meilleur guide pour les jouissances de 1703
et 1704*
3° Les mêmes observations s’appliquent au bois de Labrousse,
dont les jouissances calculées à 5oo fr. pour les années écoulées
depuis le décès de Philibert Senneterre , jusqu’à la vente de 1704 ,
ont été mises, sans fondement, à la charge de la branche VialelteVisignol.
Elles doivent être portées au compte de la branche Vialelte du
Chazal , mais seulement depuis le mois de juin 1700, jusqu’au mois
de juin 1704, date du délaissement fait à Ànnet Montandraud.
L2 sieur Vialelte donne encore les mains à cette rectification de
mandée par le sieur Gaillard : le sieur Baisle ne conteste pas non
plus. — v. pag.
63 et 73 de son mémoire.
4 ° Mais c’est avec raison que le sieur Baisle se plaint que l’estima
tion des jouissances du domaine deCluibassicre a été singulièrement
forcée.
�( 12 )
Nous avons fait ressortir, à la fin du § i er, ce qu’il y avait de dif
férence choquante entre les diverses évaluations. Nous avons donné,
en preuve, les deux moyennes si disparates, l’une de 87 fr. et l'autre
d e 2 i4 fr. représentant les revenus annuels depropriéiés identiques,
selon qu’elles étaient dans les mains de la branche P om m erol, ou
dans celles des héritiers Montandraud.
On nous d ira , peut-être , que si les experts avaient voulu favoriser
la branche Pom m erol, ils auraient fait fléchir sur-tout leurs évalua
tions , pour cette période plus considérable , de jouissances portées
au compte des tiers-détenteurs, et q u i, par voie de garantie , réflé
chissent en définitif sur la branche Pommerol.
Peut-être dira-t-on aussi que l ’élévation progressive du produit
des propriétés immobilières ne permet pas une comparaison ab
solue entre les moyennes de revenus de différentes périodes; et que
la supériorité des cinquante dernières années , répartie sur cha
cune des années écoulées de 1829a i 8o 5 , a du nécessairement éle
ver la moyenne des revenus de cette période, qui est à la charge
des héritiers Montandraud, comparativement à la moyenne des
années à partir de 1703 jusqu’à 175g.
Nous répondrons à la première objection , qu’erreur ou partia
lité, peu importe, etque c ’ est, surtout, d’ailleurs en ce qui intéresse
la branche du C h azal, que l'estimation a été forcée.
Nous dirons , en second lieu , que les différences de produits
entre les deux périodes n’auraient jamais pu donner l’énorme dis
proportion de 87 fr. à 314 fr.;
Q ue l’erreur est rendue sensible, d’ailleurs, par le résultat géné
ral ; car le compte arrêté en i 8 o 5 , porte à a 5 ,5 i2 fr. 5o c. les
rapports de la branche de Catherine; et à i2,55G sculementceux de
la branche Pom m erol.
Enfin un autre rapprochement complète la démonstration : d’a
près les calculs du sieur Baisle, le terme moyen des jouissances du
domaine de Montaudot, liquidées sur la tôle des Pom m erol, n’est
que de 80 fr. par an.
Tandis que pour les huit années mises par erreur à la charge de
la branche V isignol, c ’est-à-dire de i 6j)4 , époque de la mort de
�Philibert Senneterre, à i 8o 5 , époque des délaissemens faits par
Michel Bichon, le revenu du même domaine a été porté à la somme
de goo f r . , ce qui fait une moyenne de 11 2 fr. 5o c.
De pareils résultats font sentir le besoin de revoir les estimations;
et le sieur Yialette y concluera avec le sieur Baisle.
§
4-
Rapports dus p a r la branche / iule Lie-Visi^nol.
\
I
1.
N
I. Jouissances. Celte branche n’ayant joui d’aucun immeuble de
la succession ? n’a
à
faire aucune restitution de fruits : le rapport des
experts est donc à rectifier à cet égard; car il met à sa charge les
jouissances du domaine de Montaudot,
depuis
1694 jusqu’en
1705 ; et celles du bois de Labrousse, depuis 1694 jusqu’à l’année
1700. Ces dernières sont portées à 5oo fr.
O r , nous avons vu dans le § qui précède, que jusqu’à 1700, ces
fruits s’absorbaient dans la succession de Françoise S eyn e, aïeule
commune : et que de 1 700 à 1 703 et 1 704 , a y a n t été p e r ç u s par
Michel Bichon, ils devaient être rapportés par la branche du
Chazal.
II. M obilier. A cet égard plusieurs difficultés se soni élevées ;
elles intéressent la succession de Philibert Senneterre, et celle de
Joseph Senneterre.
Succession de Philibert.
O ulre le mobilier compris dans l'inventaire du 4 juin 1700, le
sieur Baisle prétend qu’il y avait des meubles meublans pour une
somme considérable; il reproduit contre Marie Chapelle une accu
sation vague déjà consignée dans l’invenlaire, et conclut contre la
branche Vialette-Visignol à uu rapport de 1,000 fr. pour spoliation.
Cette accusation, repoussée par Marie C h apelle, s’est faite bien
vieille depuis 1700 : dans la longue procédure qui remplit tout un
sjecle, personne n’a songé à la renouveler ; d’ailleurs, les présomp
tions sur lesquelles se fonde le sieur Baisle , celles d'un état de
�(
'4 )
maison conforme à la fortune et à la position sociale de Philibert
Senncterre, ne sont-elles pas combattues par des présomptions con
traires! celle fortune n’était-elle pas compromise? FrançoiseSeyne
ne fut-elle pas forcée de vendre des récoltes sur pied? S i , en 1700,
les biens demeurèrent incultes , n’est-ce pas qu’on manquait de res
sources pour les mettre en production? E n 1 703 et 1704, les créan
ciers ne se les firent-ils pas impignorer?
E t puis, à cette époque, le manoir d’un bourgeois campagnard
était-il donc bien luxueux? il ne s’agirait pourtant rien m oins,
d ’après l’assertion du sieur Baisle , que d'argenterie et de m eubles
m eublans ?
Que si Marie Chapelle avait pris les objets qui lui étaient néces
saires pour le logem ent m eu b lé, auquel elle avait d ro it, quel aurait
etc son intérêt à le nier? et comment soustraire des objets de cette
nature aux investigations de l’inventaire, ou à des recherches ulté
rieures? aussi Michel Bichon ne donna-t-il aucune suite à son allé
gation; c’était pourtant son devoir d’aller en avant; ses représentais
sont donc dans l’impossibilité de faire en i 8o 5 , ce que son aïeul ne
put faire en 1700.
L o i n d’emporter aucun objet de la succession de son m ari, lors
qu’elle se retira sur ses propriétés de Saint-G ervais, Marie Cha
pelle ne put même se saisir de ses propres reprises ou de ses gains
matrimoniaux ; c’est ce qu’on établira, lors des comptes , si les ré
c la m a tio n s de scs héritiers étaient s é r ie u s e m e n t combattues : et com
ment aurait-elle été rem boursée, puisque la succession n’avait que
des ressources immobilières saisies par d'autres créanciers? Et com
ment n’aurait-il pas resté des traces de libération dans les m ain s de
Françoise Seyne, ou dans celles du tuteur Bichon ?
Si elle avait spolié, 011 l’aurait poursuivie; si elle avait été désin
téressée, 011 aurait exigé sa décharge.
En résumé , par le d ro it, Marie Chapelle ne fut saisie de rien ,
car tout lui fut enlevé , jusqu’à la tutelle de scs enfans.
Par le fa it 3 elle ne fut pas davantage saisie; car il faudrait que
le fait fut prouvé : c’est la règle, un siècle après, comme au jour de
l’allégation.
�( i
5 )
Les conclusions du sieur Baisle ne peuvent donc être accueillies.
Succession de Joseph.
i° La branche Visignol d o it-e lle le rapport des bestiaux du
domaine duF al ?
N on, et le sieur Baisle le reconnaît à lapag. 12 de son mémoire;
il en donne la raison, c ’est que ces bestiaux, attachés à la culture,
auraient été immeubles par destination.
11 y en a encore une autre, c’est qu’ils n’étaient tenus qu’à cheptel,
et ce cheptel, en date du 2 novembre 17 2 6 , n’a été remboursé que
par Jean Visignol., en l'jS ô.
20 Cette branche doit rapporter seulement le mobilier personnel
de Joseph, dont l’état et la valeur sont consignés dans un procèsverbal d’estimation, du 16 avril 1784 ;
L a totalité est évaluée à 212 livres.
L e sieur Baisle admet bien que l’estimation des experts qui por
tent ce mobilier à 297 fr. 60 c ., ne doit pas être suivie, par les rai
sons qui ont été déduites à l’égard du mobilier de Philibert; mais il
ne comprend pas pourquoi le sieur G aillard, au lieu de 2 1 5 livres ,
prétend n’être forcé en compte que pour la moitié de cette somme.
La raison , pourtant, en estsimple ; c’est quela moitié du mobilier,
seulem ent, appartenait à Joseph : les deux frères l’avaient mis eu
dépôt dans les mains d’un nommé Péronny , en l’année 1711. l i a
fallu plaider pour le ra vo ir, et ce n’est qu’en 1784 qu’on en a été
remboursé : l’acte de dépôt, du 29 février 1711 , établit la pro
priété commune des deux frères.
La branche Visignol n’a donc à rapporter que 10G fr. 10 s . , er.
les intérêts de cette somme depuis 1784*
5° Mais relativement à ce rapport, le sieur Gaillard a élevé une
question préliminaire.
D ’après l’art. 19 , du chap. 12 de la coutume, si les héritiers pa
ternels de Joseph exigent la totalité du mobilier , ils seront chargés
de la totalité des doties personnelles*
�( 16 )
Il faut donc qu’ils fassent une option.
L e sieur Baisle élude la question, ou du moins, il ne la traite que
sous un point de vue : mais il faut pourtant prendre un parti, et
c ’est ce que fait ici le sieur Vialette.
Certainement si la succession mobilière de Joseph ne consistait
que dans la modique somme de io ô fr. 10 sols, les héritiers paternels
n’hésiteraient pas à l’abandonner aux héritiers maternels; et alors
naîtrait la question de savoir si les héritiers maternels ne devraient
p a s, à leur tour , renoncer à un cadeau accompagné d’une charge
aussi onéreuse.
Mais les jouissances revenant à la succession de Joseph , pour le
quart qu’elle amende dans celle de Philibert, appartiennent aussi à
la masse mobilière; il est donc dans l’intérêt des héritiers pater
nels d’accepter le mobilier et de payer les dettes; et c’est à quoi
le sieur Vialette déclare formellement conclure;
Mais sous cette condition , bien entendu, que les restitutions do
fruits accroîtront à la masse mobilière.
4° Q ue s’il était jugé , au contraire, qu’elles n’en font pas partie ,
et que les héritiers paternels voulussent abandonner à l’estoc mater
nel les faibles valeurs qui constitueraient alors le mobilier de Jo
seph pour se décharger des dettes, le sieur Vialette déclare, en ce
qui le concerne, ne pas accepter cet abandon; comme héritier ma
ternel , il entend se placer sur la même ligne que les héritiers pater
nels , et ne prendre, dans le mobilier et dans les dettes, qu’une part
égale à la leur :
A l’appui de cette faculté qu’il réclam e, le sieur Vialette invoque
les autorités rapportées par M. Chabrol , et la propre opinion de ce
jurisconsulte. V o l. i er, pag.
353.
Mais ici naît cette question examinée par le sieur Baisle : chaque
estoc prenant une part égale du mobilier , dans quelles proportions
les dettes seront-elles acquittées? le seront-elles par égalité, ou pro
rata bonorum , eu égard aux biens recueillis par chaque estoc?
L e sieur Baisle se prononce pour ce dernier système qui a pour lui
l’autorité de M. Chabrol :
�Mais il a contre lui le texte précis de l’art. 20 du chap. 12 de la
coutume, et les dispositions combinées de cet article, et des articles
19 et 21.
Ces articles posent trois catégories :
i° Ou les héritiers paternels veulent retenir tout le m obilier, alors
ils payent la totalité des dettes. Art. 19;
20Ou ils ne veulent pas exercer ce privilège, dans ce c a s, le mo
bilier et les dettes se divisent par moitié. Art. 20;
5° Ou il 11’y a n i m eubles ni acquets ; dans cettef hypothèse, les
dettes se partagent pro rata bonorum. Art. 21.
La contribution proportionnelle n’a donc lieu que lorsqu’il n’y a
ni meubles ni acquêts.
A cela, le sieur Baisle oppose .des raisons d’équité : mais qu’ont à
faire les théories lorsqu’un texte est précis ? cela irait, dit-on, à favo
riser la ligne masculine— Comme si cette raison pouvait infirmer la
lettre claire de la loi! Ne connaît-on pas, d’ailleurs, la prédilection du
droit coutumier pour les maies! l’art. 19 que nous venons de rap
peler ne témoigne-t-il pas énergiquement de cette préférence? Si
la succession mobilière était opulente, les héritiers paternels ne la
recueilliraient-ils pas à eux seuls ? On le v o it, cette égalité , cette
justice , dont on se fait des armes contre un texte, sont de ces teins•
....
ci; elles appartiennent à d’autres idées , aune civilisation meilleure;
elles ne sont pas du siècle de la rédaction de la coutume; on n’ad
mettait p a s, au 1 5e siècle, que le privilège d e l à masculinité dût
fléchir devant des nécessités d’égalité'. Prenons donc la coutume
dans ses naïvetés et sa franchise : on peut changer les lois, mais il 11e
faut pas les faire ployer.
E t d’ailleurs, 11’y a-t-il pas aussi des inconvéniens dans la contri
bution proportionnelle ? il y a , tout au moins, ceux d’une ventila
tion , ses frais, ses erreurs probables et sa mobilité. Arrivent à un
estoc des accroissemcns ultérieurs , des valeurs ignorées lors du
partage , la proportion est alors détruite, et c’est à recommencer.
Nous soutenons donc que les dettes doivent , dans cette hypo
th èse , se payer par moitié.
�( '8
)
En résum e, la succession mobilière de Joseph doit comprendre
aussi les restitutions de fruits; et le sieur Vialette opte pour que la
ligne maternelle l’accepte toute entière, à la charge de toutes les
dettes.
Dans ce cas, le rapport de la branche Visignol sera de jo 6 liv. io s.
Dans l’hypothèse contraire, le mobilier et les dettes se partage
ront, et le rapport de la branche Visignol nesera que de 53 liv. 5 s.
§
5.
A
Rcipports^dus p a r les héritiers de Jacques e t A n n e t Montandraud.
i° Ces héritiers figurent dans la cause comme tiers-détenteurs;
ils sont condamnés à se désister du bois de Labrousse et du domaine
de Montaudot, acquis par leurs auteurs, en 1704 et 1729, sauf
recours, pour la vente de 1729, contre la branche Pornmerol.
Ils ont été aussi condamnés à faire compte des jouissances et des
dégradations :
L e calcul des jouissances, pour le domaine de Montaudot, a été
fait conformément à l’arrêt ;
Les dégradations commises au bois de Labrousse ont été por
tées par les experts à 6,000 fr. Les héritiers Montandraud ne
réclameront sans doute pas contre ce chiffre; à l’époque delà vente,
le bois était en futaie; en i 8o 5 , il était couvert de broussailles.
Tout cela est constaté par le rapport.
20 Mais les experts ont omis de porter en ligne les jouissances de
ce bois; les sieurs Baisle et Gaillard ont réclamé contre cette omis
sion , et il sullit de la signaler pour en obtenir la réparation.
Les re p rése n ta i Montandraud prétendront-ils que les jouissances
sont comprises dans les dégradations ? Ce serait confondre l ’indem
nité pour la destruction d’une partie de la chose, avec le produit
annuel de cette chose : si le bois eût été aménagé et conservé ; si
durant les cent années de procédures, on n’y eût pas impitoyable
ment porté la h ach e, les chênes et les fayards qui le peupleraient'
�aujourd’hui» vaudraient plus que l'indemnité allouée pour les dégra
dations; mais indépendamment de ce capital détaché du bois, et
dontles héritiers Montandraud ont été de bonne heure en possession,
ils ont joui de la fraction qu’ils rapportent aujourd’hui, et que les
cxpcrLs évaluent à
5 , 55o fr.
11 suiTit de rapprocher cette somme de celle de l’indemnité, et
de consulter ensuite le chiffre des jouissances produites par des im
meubles de valeur analogue, pour s’assurer q u e les 6,000 fr. d’in
demnité ne peuvent représenter, à-la-fois, et les jouissances et les
dégradations.
§ 6.
Intérêts des jouissances e t des autres rapports mobiliers. *—
R eprises et prèlevem ens. — Renvoi.
Nous avons déjà dit que, dans une affaire de cette proportion, il
fallait se garder de mener ensemble les deux opérations si distinctes
d’un partage, l’expertise et le compte.
La mission de l’expertise est de fixer les élémens du compte; esti
mer les meubles et les immeubles, évaluer les jouissances , appré
cier les dégradations : voilà l’unique affaire des experts;
Pour tout le reste, nous ajournons la discussion au com pte, et
alors, seulem ent, ce sera le cas de s’occuper des difîicultés élevées
sur los reprises, des dettes payées en acquit de Joseph, des droits
matrimoniaux de Marie Chapelle, de ceux de Catherine Montan
draud, des gains de survicf'acquis à Philibert Senneterre son mari,
de cette compensation du recours des Montandraud contre une seule
branche, avec des restitutions de fruits dus a la succession entière;
enfilade ce mode de calculóles intérêts des jouissances à l’égard de
la branche du Chazal, d’ou résulterait que la première année
payerait autant d’intérêt à elle seule, que tonteóles années cumulées:
exagération si bien démontrée par le sieur IJaisle.
Tout cet échafaudage d’opérations vicieuses s’écroulera aux pre
mieres explications devant un liquidateur ;
�( 20 )
Mais nous voulons anticiper ici sur une question multiple, déjà
controversée entre les sieurs Baisle et G a illa rd , celle de l'intérêt
des jouissances , e t , en gén éral, de tout ce qui est à rapporter.
M eubles. — L ’intérêt en est dî^de plein droit^et sans demande,
à compter de l’ouverture de la succession ou de l’époque de la dé
tention de la chose. La raison, c’est qu’il n’y a pas là intérêt d’intérêt :
l ’intérêt, dans cc cas, représente la jouissance des meubles.
Pour le nouveau droit, l’art.
856 du code est formel :
Pour les tems antérieur^* au code , l’art. 309 de la coutume de
Paris, qui renferme des dispositions identiques, faisait le droit com
mun de la France. — Rousseau-Lacom be, v# Intérêts, son 4 >n°
*1•
M. Grenier , des donations, n° 541 • ( M erlin, ré p e rt., v° Intérêts ,
§ 3 , art.
5.
D égradations. « Les sommes allouées pour dégradations pro» duisent aussi intérêt ; mais comme il serait difficile de les calculer,
» parce que le capital ne se forme que progressivem ent, l’héritier
» qui a dégradé garde l’héritage , et en rapporte le prix du jour de
» l’ouverture de la succession : ou bien il rapporte les fruits de cet
» héritage sur le pied de ce qu’il produisait avant qu’il eût été dé» gradé. « ( M erlin, répert. loco citato.
11 faut donc que les 6,000 fr. du bois de Labrousse produisent in
térêt , ou qu’en évaluant les jouissances , on prenne en considéra
tion les deux élémens qui représentent aujourd’hui la chose, savoir
l'estimation du fond et celle des dégradations.
/\
D ettes. — « Les intérêts en sont dus de plein droiLà l’héritier
« qui les a acquittés du jour du paiement. » ( Rolland-Villargue,
diction, du notariat, v° Intérêts, n° 5 a.
Jouissances. — i 0 Les intérêts des jouissances, nous le recon
naissons, ne courent pas de plein droit; ils doivont-être demandés,
mais alors ils sont dus à compter de la demande.
Pour le nouveau d ro it, l’art. 1 155 tranche la question.
Mais le sieur Baisle nie qu’il en fût de même dans le droit an
�térieur a« c o d e , et il s’appuie de l’autorité de Denizard : Denizard
ne dit pas cela; il s’explique seulement sur les intérêts des intérêts,
c'est-à-dire sur un intérêt redoublé ; au lieu qu’il s’agit ici d’intérêt
de fruits, c’est-à-dire d’une chose due^de plein droit, sans autorité
de justice, et formant des capitaux à mesure des échéances. Il n’y a
donc pas anatocisme, car l’intérêt demandé est le premier intérêt ;
o r , c ’était seulement l’anatocisme que l’ancienne législation pros
crivait.
tf On peut demander en justice des intérêts d’arrérages de cens,
« de rentes seigneuriales, de fermages , de f r u i t s , dont on poursuit
« la restitution, et même des intérêts dus de plein droit, parce que
« tous ces arrérages ouintérêts forment un capital, etsont capables
lf de produire des fruits , à la différence des intérêts judiciaires qui
« ne peuvent produire d’autres intérêts.» (M erlin, v° Intérêts, §
4>
article 6. )
Nous ferons encore remarquer que l’opinion de M. Mallevillc ,
invoquée par le sieur Baisle , n’infirme pas ces principes.
« Dans notre pro jet, dit M. M ylleville, — Analyses, art. i i 56 ,
« nous avions proposé un article ainsi conçu : »
I l n’ est point dû d intérêts d ’intérêts ; mais les sommes dues
pour des revenus tels que b a u x à fe r m e , loyers de maisons
9
restitutions d e fruits, fo rm en t des capitaux qu i peuvent produire
des intérêts.
C ’était bien là toute l’expression du vieux droit : mais on voulut
changer la première partie de cet article, et autoriser la demande
d'intérêt d ’intérêt.
C ’était-là une novation, et alors s’é le v a , dit M. M allevillc , une
vive controverse. La novation prévalut, elle est consignée dans
l’art. 1 154 *
On voit donc que les intérêts des jouissances ne furent même pas
mis en question ;
a0 En appliquant ceci à l’espèce, il y a une distinction importante
a faire entre les parties, car la position de toutes n’est pas la même :
Amsi comme la dem ande est la condition fondamentale des in-
�( 22 )
térêts des jouissances , la branche Vialelte du Chazal ne doit aucun
intérêt pour les fruits du domaine de Chabassière , parce qu’il n’a
jamais été formé de demande à cet égard.
Mais il en sera autrementpour la branche Montandraud et les
héritiers Pom m erol, à l’égard du bois de Labrousse et du domaine
de Montaudot. C a r, dans la demande de 17^9 , les époux Visignol
concluent formellement aux restitutions des jouissances , et auor. in
térêts de la somme à laquelle lesdites jouissances se trouveront
m onter , depuis la dem ande ju sq u 'a u paiem ent.
Mêmes conclusions dans la requête du 22 mai f 744 •
Mêmes conclusions encore dans la demande en intervention , du
3 4 mai 1749» Jean-Baptiste Bichon , de la branche du C h azal, de
mande contre les Pommerol et les Montandraud le rapport du bois
de Labrousse et du domaine de Montaudot, ainsi que les jo u is
sa n ces, dégradations et intérêt du, to u t, depuis la dem ande ju s
qu’au parfait paiem ent.
On objecte que la demande seule ne suffit pas; qu’il faut qu’elle ait
été consacrée , et qu’il n’y a de condamnation d’intérêts, ni dans la
sentence de 1753, ni dans l'arrêt de l’an 7.
A cela trois réponses :
i° L e jugement, de l’an 7^dit qu’il sera fait par les parties tels
rapports que de droit. — O r , le rapport des intérêts des jouis
s a n c e s est de droit à l’égard des parties contre lesquelles ces intérêts
ont été demandés \
20Lorsque la demande d’intérêt a été form ée, il n’est pas rigou
reusement nécessaire qu’il y ait condamnation. Ainsi juge par arrêt
de 1777 , — par arrêt de cassation du 17 décembre 1S07 , — et
par arrêt de la Cour de IUom , confirmé par l’arrêt précité de la
C our de cassation. ( M erlin, ré p e rt., o>° Intérêts, §
rapporte ces arrêts. )
4 > ai’1- 1 0 »
5° En tous cas. la demande n’aurait pas été rejetée , car on ne
trouve, dans aucune des sentences, ni de disposition spéciale à cet
égard, ni la formule générale — sur le surplus des dem andes, m et
«
�(
les parties hors d e C o u r .
*3 )
11 n’y a donc pas chose jugée; il y a
simple omission réparable en tout état de cause, car la prescription
n’a pas couru sous la main de la justice.
Les représentans Montandraud et la branche Pommerol doivent
d o n c, chacun en ce qui les concerne , les intérêts dos restitutions
de fruits et des dégradations.
CONCLUSIONS.
Avant de conclure , le sieur Vialette fera observer que c’est vo
lontairement qu’il a omis de parler du partage des immeubles. Peu
ou point d’objections ont été élevées contre cette partie du rapport ;
on pourrait donc la consacrer dès à présent, et envoyer chaque
branche en possession de son lot.
Mais comme une nouvelle expertise est indispensable , soit pour
la révision du prem ier travail, soit pour reprendre les opérations
qui ont été arrêtées en i 8o 5 , il n’y a aucun inconvénient à ajourner
jusqu’au nouveau r a p p o r t .
3
r
En cet état,
il
p la ir a a l a C our
,
i° Séparer le compte des estimations, retenir l’examen de cellesc i, et renvoyer le compte devant un notaire , ou commettre un de
MM. les conseillers.
.
E t statuanLnéanmoins sur la question des intérêts;
D ire qu’ils ont couru,de plein droit et sans dem ande, pour le mo
bilier, les dégradations et les reprises, à compter de l’ouverture
des successions , ou du jour où chaque branche cohéritière a été
saisie;
Et qu’à l’égard des jouissances, lesdits intérêts sont dus seulement
par celles des parties contre lesquelles la demande enoété formée:
S avo ir, par la branche Pommerol et par les représentans Montandraud, à partir du 14 janvier 1 7 0 9 , pour le capitaL formé de
tous les fruits alors perçus sur le domaine de Montauciot et sur le
bois de Labrousse; et, pour les jouissances postérieures, à c o m p t e r
de chaque perception:
�E t par toutes les autres parties, à compter des conclusions du sieur
G aillard, du 2 novembre i 853 .
En ce qui louche l’homologation du rapport :
i° Relativement à la succession de Philibert Senneterre ,
D ire que le domaine du F a l , la maison de Saint-Gervais, d’ori
gine maternelle; la maison, les autres bàtimens, le jardin et le pré
Lafon t, situés à Chabassière, formant le préciput créé par le contrat
de mariage du 8 août 1686, ne seront pas compris dans la masse
immobilière de la succession de Philibert Senneterre.
En ce qui concerne la masse mobilière de la même succession ,
déclarer
i° Que la branche Yisignol n’a aucun rapport à y faire ;
2* Que le rapport de la branche du Chazal consiste uniquement
dans le mobilier compris à l’inventaire du 4 juin *700, d’après la
valeur exprimée dans cet acte ; et dans les jouissance? du domaine
de Chabassicre, à compter de l’année 1700, mais d’après le prix du
bail, du
1702;
23 août de ladite année, pour les années 1700, 1701 et
Que pour toutes les autres années, l’estimation sera soumise à une
nouvelle expertise ;
5° Que les jouissances du bois de Labrousse, à la charge des re
p ré se n ta i Montandraud , omises par le rap p o rt, seront évaluée s
par des experts, à partir de la demande de 1739;
20 Relativement à la succession de Joseph Senneterre ,
Donner acte au sieur Vialette de ce que, acceptant le mobilier
pour sa part, en sa qualité d’hcritier dans la ligne paternelle, il con
sent à payer dans les dettes une part correspondante;
E t , réglant la consistance dudit m obilier, dire qu’il se compose
uniquement de la moitié de celui compris dans l’état estimatif du
j6 avril 1784, dont la valeur restera fixée ainsi qu’elle est exprimée
ilans ledit état;
�»5 )
(
Rejeter toutes conclusions contraires, et, en exprès, celles en
rapport des bestiaux du domaine du F a l, et de la récolte de ce
même domaine pour l’année 172g ;
E t pour être p ro cé d é , soit à l’estimation des jouissances du bois
de Labrousse, soit à la révision des estimations des jouissances du
domaine du Chazal, soit à la reprise de l’ensemble des opérations,
et les continuer, à partir de i 8o 5 , époque où le premier rapport
s’est arrêté, jusqu’à ce jour; commettre de nouveaux experts, à
défaut, par les parties, de s’entendre sur un choix.
Surseoir, jusque-là, à toute opération ultérieure, et réserver les
dépens.
G
il b e r t
-M
a r ie
VIALETTE.
B. GRENIER, Avocat.
ALLARY, Avoué.
A
RIOM ,
DE
L ’IMPRIMERIE
DE
SALLES
FILS.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_DVV06_0001.jpg
Description
An account of the resource
<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vialette, Gilbert-Marie. 1835?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chauvassaigne-Labrugière
De Vissac
Savarin
Subject
The topic of the resource
successions
longues procédures
renonciation
généalogie
paterna paternis
ventes
experts
droits féodaux
domaines agricoles
mobilier
créances
coutume d'Auvergne
glandée
bornage
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Production et conclusions pour le Sieur Gilbert-Marie Vialette
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1835 ?
1694-1835
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV09
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Gervais-d’Auvergne (63354)
Montaudot (domaine de)
Labrousse (bois de)
Chabassière (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/28/54002/BCU_Factums_DVV09.jpg
bornage
coutume d'Auvergne
Créances
domaines agricoles
droits féodaux
experts
généalogie
glandée
Jouissance des eaux
longues procédures
mobilier
paterna paternis
renonciation
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53892/BCU_Factums_M0632.pdf
3cc82c918bd3e4e0977fc00123b6114c
PDF Text
Text
CONCLUSIONS
D E M. M E R L I N , (*)
Procureur général impérial près la Cour de cassation t
Dans l’affaire des Légataires universels de
Mme de Chazerat, contre le Sr M azuel,
demandeur en cassation,
L e 26 messidor an 9 , Marie-Gilberte R o lle t, épouse
du sieur de Chazerat, domiciliée à R io m , fait un tes
tament olographe, par lequel, après plusieurs legs par
ticuliers, et une disposition qui assure à son mari l’usu
fruit de tous ses bien s, elle s’explique ainsi:
« Quant à la propriété de mes biens, mon intention
étant, autant qu’il dépend de moi, de les faire retourner
(*) Telles qu’il les a publiées dans son recueil des questions de d roit.
A
�(a )
à ceux de mes parens qui descendent des estocs des
quels ils me sont parvenus, je donne et lègue tout
ce dont il m’est permis de disposer suivant la loi du
4 germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de la
branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle
de mon aïeule m aternelle, qui seraient en ordre de
me succéder, suivant les règles de la représentation à
V'infini, telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant cou
tume dJAuvergne , pour être partagé entre les trois
branches, au marc la livre de ce qui m’est parvenu
de chacune desdites branches, et être ensuite subdivisé
dans chacune d’elles , suivant les mêmes règles de la
représentation à l’infini. »
L e 14 messidor, la dame de Chazerat fait un codi
cille , dans lequel se trouve une disposition ainsi conçue :
« La nouvelle loi m’ayant accordé la faculté de dis
poser de la totalité de mes biens, je veux et entends
que le legs universel que j’avois fait par le susdit tes
tament , en faveur de mes parens de l’estoc de mes
aïeul et aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon
aïeule m aternelle, de tout ce dont il m’étoit permis
de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait son
effet pour la totalité de mes b ien s, sauf les divisions
et subdivisions à faire entre mesdits héritiers, de la
manière expliquée audit testament*, s a u f aussi mes legs
particuliers, et les dispositions par moi faites en faveur
de mon mari 5 à tout quoi il n’est dérogé par le présent
codicille. »
L e 3 vendémiaire an 14, décès delà dame de Chazerat.
L e 29 du même mois, son testament et son codi-
�(3)
cille sont déposés, en vertu d’une ordonnance du pré
sident du tribunal civil de R io m , entre les mains d’un
notaire de la même ville.
L e i 5 janvier 1807, deux des légataires particuliers
form ent, contre les légataires universels, une demande
en délivrance de leurs legs.
Les assignés se présentent au nombre de trente-sept.
L e 11 juin suivant, d’autres parens de la testatrice,
se prétendant appelés au legs universel, interviennent
dans l’instance.
Tous, en se réunissant pour répondre aux deux léga- taires particuliers , demandent, respectivement les uns
Contre les autres, le partage de la succession de la
dame de Chazerat, et concluent à toutes les opérations
nécessaires pour y parvenir.
L e 28 janvier 1808, le sieur M irlavaud, cousingermain de la défunte, et son plus proche héritier
m aternel, présente une requête en intervention, et
demande > i°. que le legs universel porté aux testa
ment et codicille de la dame de Chazerat, soit déclaré
n u l, attendu q u e, par sa relation à la ci-devant cou
tume d’Auvergne, il est en opposition avec les art. 6
et i q o du Code Napoléon, et avec l’art. 7 de la loi
du 3 o ventôse an 12*,
que la succession ab intestat
soit partagée en deux moitiés, dont l’une pour la ligne
paternelle, et l’autre pour la ligne maternelle.
L e 18 mai suivant, le sieur Mirlavaud fait donation
entre-vifs au sieur M azu e l, son n eveu , de la moitié
de tous les droits qui lui appartiennent dans la suc
cession de la dame de Chazerat, sous la réserve de
3
A2
�(4)
l’usufruit, et de la faculté de poursuivre lu i-m ê m e ,
jusqu’à arrêt définitif, sa demande en nullité du legs
universel, sauf au sieur M azuel à y intervenir, s’il le
juge à propos.
L e 22 juin de la même an n ée, jugement du tri
bunal civil de Riom ', ainsi concu
» :
« La'dame de Chazerat a-t-elle pu ordonner, par la disposition générale, que
ses biens retourneroient aux estocs dont ils étoient provenus j qu’ils seroient
partagés entre les trois branches de sa famille qu’elle dénomme , suivant les
règles de la représentation à l’infini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-d e v a n t
coutume d’A uvergne, et ensuite subdivisés dans chacune d’elles , suivant les
mêmes règles de la représentation à l’infini î
» En exprimant ainsi sa volon té, la damo de Cliazcrat a -t- e lle remis en
vigueur, en termes généraux, une coutume] abolie? A - te lle subordonné sa
disposition aux règles de cette coutume ? et enfin sa volonté ainsi exprimée
doit-elle être réputée non écrite, comme contraire aux lois d’ordre public ?
» Attendu la maxime constante , base de toute législation , et consacrée par
l’article 6 du Code N apoléon, que nul ne peut, par des conventions'particulières, déroger aux lois qui intéressent l ’ordre public et les bonnes m œ urs,
puisque ce qui a été établi pour le bien de tous, no doit pas être interverti
par la volonté changeante des individus ; qu’il faut reconnoitre incontestable
ment pour lois d’ordre public celles qui ont un rapport direct et spécial à la
société en co rp s, dont les conséquences réfléchissent éminemment sur l’en
semble des citoyens ; que s i , à quelques égards , on peut regarder toutes les
lois comme ayant pour objet une certaine utilité publique, dans les unes cepen
dant cette utilité se borne à ne régler que des intérêts privés , pluribits ut singulis ;
dans les autres au contraire cette utilité embrasse la société entièro , elle se lio
à tous les intérêts , pluribus ut universis ; qu’ainsi lorsque le testateur fait la
distribution de scs biens , il use d’une faculté qui est toute relative à lui seul
et dans son intérêt p r iv é ; m ais lo modo dont il so sert, l’ordre qu’il doit obser
ver dans cette répartition est du domaine public , qui est pour lui-même une
barrière insurmontable.
» Attendu que parmi ces lois inviolables, l’art. 1390 a placé la prohibition
faito aux époux do stipuler entre eux d'une manière g én éra le, que leur asso
ciation sera régléo par l’une des coutumes qui régissoient ci-devant les diverses
parties de la France, qui sont abolies ; qu’en effet l’abrogation de tous ces statuts
�( 5 )
locau x, jugés nuisibles tant par leur multitude que par la bizarrerie de grand
nombre de leurs dispositions , que l’avantage d’une loi uniforme, long-temps
désiré et profondément senti, entrent évidemment dans l’intérêt commun de la
société ; que c’est s’élever contre cet intérêt de tous établi au Code pour l o i ,
qué de faire renaître ces lois anéanties, et les tirer de l’oubli auquel le corps
social les a condamnées en grande connoissance de cause.
» Attendu que les testamens, ainsi que tous autres actes ou contrats, sont
indistinctement soumis à ces principes sacrés; que la faction du testament,
comme disent les lois romaines, est incontestablement d'ordre public; que lo
premier devoir du testateur est de lo reconnoitre et de le respecter; que do plus
les grands motifs qui ont dicté cet art. i3 g o , relativement aux contrats do ma
riage , s’appliquent naturellement aux testamens ; que l’avantage du public ,
ainsi que la tranquillité des familles, no sont pas moins compromis en rappelant,
en termes généraux, dans une disposition testamentaire, une coutume abolie,
qu'en la reconnoissant dans un contrat de mariage ; que dans l ’un comme dans
l’autre cas l’intérêt public est violé, puisque la dame de Cliazerat s’est consti
tuée au-dessus de la v o lo n té générale, soit par son mépris étudié de la précieuse
uniformité de nos lois, soit en reproduisant cette multitude infinie de coutumes,
et avec elles les contestations interminables, que la sagesse du législateur a
voulu écarter.
» Attendu que la l o i , en laissant au testateur la plus grande latitude dans la
disposition de ses biens, en l’établissant l ’arbitre et le souverain de scs dernières
volontés, lui a cependant donné pour bornes toutes les règles qui concernent
l ’ordre public , les bonnes mœurs et les formalités des actes; que c ’est sous ces
conditions qu’il a reçu de la loi un pouvoir si étendu ; qu’il perd ce pouvoir, ou
du moins que ce pouvoir est rendu sans effet, dès qu’il oublie les conditions
sous lesquelles il l’a reçu.
» Attendu que la dame de Cliazerat a méconnu ou méprisé ces principes,
lorsque dans son testament et dans son troisième co d icille, au mépris de la
volonté et des intérêts de la société, elle a remis en vigueur , en termes géné
raux , une coutume ab o lie, en ordonnant que ses bi«ns retourneraient aux
estocs desquels ils étoient provenus; qu’ils seroient partagés entre les trois
branches de sa famille qu'elle dénomme, suivant les règles de la représentation
à 1infini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant coutume d’Auvergne, et
ensuite subdivisés dans chacune d’elles suivant les mêmes règles de la repré
sentation à l ’infini.
» Attendu quo ce rappel en termes généraux à la coutume d’Auvergne , ren
ferme une résistance réfléchie à la volonté et à l’utilité publique, sous deux
rapports frappans : l'un en obligeant ses héritiers de faire la rechercho de la
I
I
�( 6 )
nature el de l ’origino des biens dans chaque esto c, suivant la coutume d’A u
vergne, contre la prohibition précise du C o d e ; et l ’autre en astreignant se»
héritiers à faire entre eux les divisions et sous-divisions , suivant la représen
tation à l’infini, dans les principes de la même coutume d’Auvergne. O r , la
coutume d’Auvergne a v o it, sous ces deux rapports, des maximes spéciales et
particulières à elle seule, et qui s’éloignoient de toutes les autres coutumes qui
avoient admis la fameuse règle paterna paternis , materna materais ; et que les
principes de la coutume ont été reproduits par la dame de Chazerat dans sa
famille et dans sa succession, comme un brandon de discorde et de contestations.
» Attendu qu’on objecte vainement que la coutume d’Auvergne n’est rap
pelée dans le testament que comme une démonstration, un point com paratif,
et non comme loi impérieuse : raisonner a in si, c’est jouer sur les mots et abu
ser des term es; car , comment la coutume d’Auvergne ne seroit-elle dans le
testament que comme mode d’indication, lorsque la dame de Chazerat veut
disertement, et en termes gém inés, que cette coutume soit la règle du partage
de ses biens ; lorsque presque tous les appelés par elle ont donné à leurs con
clusions la forme d’une demande en partage, d’après les maximes de la coutume
d’Auvergne; lorsque dans le fait et dans la réalité il seroit impossible à ces héri
tiers de faire co partage tel qu’il est prescrit, sans être guidés par la coutume
d’Auvergne l Ainsi c’est la coutume d’Auvergne à la m ain, qu’ilsseroient obligés
de rechercher quels sont les biens qui sont provenus de chacune des lignes
favorisées ; qu’ils scroient obligés de faire une recherche semblable pour attri
buer à chaque branche, par la subdivision, les biens qui y ont aussi été rap
portés ; qu’il faudroit distinguer les dots pécuniaires ou mobiliaires qui auront
fait souche par double confusion ; qu’il faudroit également dans le cas do la repré
sentation, savoir si l’oncle et le neveu étant en ligne'égale doivent concourir en
semble ; si au préjudice d ’une renonciation , on peut venir par représentation
de son auteur qui a renoncé; si par l’effet de la représentation, le partage doit
se faire par souches ou bien par têtes ; et une multitude d’autres difficultés
semblables : ainsi s’ouvriroit pour ses héritiers une ample carrière do débats ,
aux juges une multitude de questions épineuses, pour la décision desquelles la
coutume d’Auvergne seroit la seule régulatrice.
» Attendu qu’on no peut pas dire que la coutume sera prise ici commo
autorité seulement , et non comme loi nécessîire , puisque cette coutum e,
ses usages , sa jurisprudence , «croient la seule règle par laquelle on devroit
se diriger pour suivre la volonté et les vues rétrogrades do la testatrice ; que
la coutume ne seroit pas simple renseignement, puisquo sans elle , sans s'y
renfermer, on ne pourroit opérer la distinction des biens, éclaircir leur origine,
les appliquer à diverses lignes , aux différentes branches , découvrir les indi-
�. ( 7 )
ridus appelés par la représentation, et parvenir enfin à débrouiller les obscu
rités de ce partage laborieux. L a coutume ne seroit pas un simple mode ,
une condition, puisqu’en général les modes et les conditions peuvent se con
cevoir et s’isoler des conditions auxquelles ils sont apposés ; mais ici le mode',
la condition, prescrits par la dame de Chazerat, sont inséparables : car enfin ,
si la testatrice a institué légataires universels les trois lignes qu’elle a affec
tionnées , c ’est principalement pour prendre les biens provenant de chacune
d’elles , suivant la coutume d’Auvergne ; c ’est pour les subdiviser ensuite
d’après les mûmes principes , d’après la même origine et nature de biens ;
ses vrais héritiers seront ceux qui lui seront doiïnés par la représentation de
la coutume d’Auvergne : ainsi, et forcément, la coutume d’Auvergne se lie pt
s’incorpore à tout lo partage , et commandera à ses opérations.
9 Attendu qu’on oppose encore sans fondement que la dame de Chazerat n’a
pas généralisé son rappel de la coutume d’Auvergne , puisqu’elle l’a restreint
à une seule de ses dispositions. C ’est une erreur : car la soumission à une
coutume prend évidemment la forme de disposition générale, lorsqu’elle porte
sur un objet de disposition générale ; or , c ’est pour la nomination de ses
héritiers universels, que la dame de Chazerat invoque la coutume d’Auvergne ;
c’est cette coutume en général qui règleroit leurs qualités et leurs avantages ,
cette disposition prend nécessairement un caractère de généralité dans ce par
tage. Sans doute la dame de Chazerat eût pu aisément spécialiser sa disposition;
elle eût pu légitimement faire entre ses héritiers l ’application do tels ou
tels de ses b ien s, suivant sa volonté ; elle eût pu , par cette voie spéciale ,
faire rentrer dans chaque ligne , dans chaque branche , la portion de fortune
qu’elle en avoit reçue ; rien ne la gênoit dans cotte manière do disposer ;
par l à , elle eût rempli ses intentions, respecté l ’ordre public , et étouffé
le germe de mille contestations dans sa famille : mais au lieu do faire co
qui lui étoit permis , elle a préféré do fairo ce qui lui étoit défendu. D e telles
dispositions ne peuvent être protégées par la loi qu’elles offensent.
y Attendu qu’en vain on
prétend excuser la dame de Chazerat , en
alléguant qu’on no peut lui fairo un reproche d’avoir établi le partage do
ses biens sur la représentation à l ’in fin i, puisque cette représentation étoit
admiso par la loi du 17 nivôse an 2. Cette justification ne peut être admis«,
i.° parce qu’au décès de la dame de C h a zera t, ce n’étoit pas la loi du 17
nivose qui devoit régler soit la formo , soit le mérite de ses dernières dispo
sitions ; c’éloit le co d e c iv il, sous Pempiro d u q u el elle est décédée, et que
son testament olographe a reçu une date ; 2 .0 la testatrice est loin d’avoir
puisé dans la loi du 17 nivôse la représentation qu’elle ordonne ; cette lo i,
dans toutes les branches, sous tous les points de v u e , établit 1« représentation
�( 8 )
•
sous le rapport de la proximité du sang; au contraire, la coutume d’Auvergne
attachoit la représentation à l’origine et à la nature des biens ; il falloit avoir
pour auteur celui duquel les biens provenoient : la loi du 17 nivAse avoit
à cet égard puisé sa représentation dans l’affection naturelle , l’avoit liée aux
personnes ; la coutume d’Auvergne l’avoit fait dépendre des usages féodaux,
l ’avoit attacbée à la glèbe plutôt qu’aux liens du sang : on ne peut donc
trouver aucune analogie entre ces deux représentations , dont la so u rce,
comme les effets , étoient si difiérens.
» Attendu qu’on oppose encore , sans raison , qu’on ne peut demander la
nullité de la clause dont il s’agit, puisqu’elle n’est pas prononcée par la loi.
C ’est encore une illusion. Il y a nullité absolue dans toute disposition de la loi
négative prohibitive. En prononçant on ne p eu t, la loi use de toute sa puissance,
elle impose un devoir indispensable , elle écarte tout prétexte : excludit potentiam juris e tfa c ti. O r , l’art. 6 du Code, dispose qu’on ne peut déroger, par
des conventions particulières, aux lois qui intéressent l ’ordre public. L ’article
1D90 statue de même que les époux ne peuvent stipuler , d’une manière géné
rale, que leurs conventions seront réglées par l’une des coutumes abolies; et
ces termes impérieux , on ne peut et ne peuvent, renferment sans doute une
prohibition énergique , une impossibilité de faire de semblables dispositions ;
ils prononcent implicitement une nullité insurmontable.
» Attendu que cette nullité ne peut être écartée p arla disposition de l’article
96 7, sur lequel on veut encore s’appuyer. Cet article perm et, à la vérité, au
testateur de manifester sa volonté sous toute espèce de litres et de dénomi
nations ; de sorte que ; soit que le testateur dispose à titre de legs, de donan a tio n , d’institution d’héritier , ou sous toute autre qualification , peu im
porte, sa volonté connue, si elle est conforme à la lo i, çuœ légitim a e s t ,
reçoit toujours son exécution. Mais disposer sous toute dénomination, n’est
pas faire toute espèce de dispositions. En permettant au testateur de se
servir do toutes expressions pour dicter ses intentions, la loi no l ’a pas
autorisé à disposer sous un mode et dans une latitude indéfinis; les moeurs,
l’utilité publique , les formalités des a ctes, et tout ce qui intéresse l ’ordre
social , sont toujours pour lui une barrière in v in c ib le . C ’est d’après co
principe tutélaire que l’article 900 a voulu que dans toutes dispositions
entre-vifs ou testamentaires , les conditions contraires aux lois ou aux mœurs
soient réputees non-écrites ; cest ce que la dame de Chazerat a méconnu
et m éprisé, en faisant l ’institution d’hérititier universel dont il s’agit. Elle
a violé l ’ordro public , en subordonnant sa disposition aux règles d’une
coutumo anéantie; elle l’a vio lé, en rejetant avec affectation le bienfait de
la loi nouvelle ; elle l ’a v io lé , en prescrivant une forme de partage qui
seroit
�( 9 )
soroit une source féconde de contestations. La justice, comme la lo i, ne
peuvent accueillir une telle disposition; il faut donc la regarder comme nonécrite dans le testament de la dame de C h azerat.. . .
» En ce qui touche le partage, attendu que la succession de la dame de
Chazerat s’est ouverte sous l ’empire du Code, qu’ainsi c’est par les principes
do cette loi que le partage doit en être terminé.
» Par ces motifs, le tribunal, par jugement en premier ressort, reçoit le
sieur Mirlavaud partie intervenante dans la contestation pendante entre les
sieurs Farradesche de G rom ond, fils aîné , et le sieur Sablon-Ducorail,
d’une part ; et les héritiers et prétendans droit à la succession de la dame de
Chazerat, d’autre part ; et faisant droit sur ladite intervention, ainsi que sur
la demande en nullité du legs universel en propriété , fait par la dame de
Chazerat; sans s’arrêter, ni avoir égard audit legs universel fait au profit des
trois branches d’héritiers y dénom més, et compris au testament olographe
de la dame de C h a zera t, du 26 messidor an 9 , et codicille du 14 messidor
an II , légalement déposés, enregistrés les 25 et 29 vendémiaire an 14 , lequel
legs universel est déclaré nul et do nul e ffe t, et comme non-écrit dans ledit
testament ; ordonne que, dans la huitaine de la signification du présent juge
ment , il sera procédé au partage de la propriété seulement de tous les
biens , meubles et immeubles , provenus de la dame M arie-Gilberte A ollet,
femme de C h azerat, pour en être délaissé moitié aux parens de la ligne
paternelle , et l’autre moitié aux parens de la ligne maternelle , conformé
ment à l’article 735 du Code Napoléon, sauf les sous-divisions entr’elles , s’il
y a lieu, conformément à l’article 754 du même Code; auquel partage tous
intéressés feront tous rapports et prélèvemens que de d roit, à la charge , par
les héritiers des deux lignes ci-dessus, de souffrir , sur la totalité desdits biens,
meubles et im meubles, l ’usufruit universel au profit du sieur de Chazerat,
époux de ladite dame M arie-Gilberte Rollet...........»
Les légataires universels interjettent appel de ce juge
ment , et font assigner le sieur M azuel, donataire de
la moitié des droits du sieur M irlavaud, en déclai’ation
d’arrêt commun.
Par arrêt du 14 août 1809, la cour de Riom pro
nonça en ces termes sur cet appel :
a
L a dame do Chazerat pouvant disposer de l’universalité de ses b ie n s,
B
�( 10 )
a-t-elle suffisamment exprimé son c h o ix , en désignant les légataires collec
tivement par l’indication certaine de leur origine !
» Le testament de la dame de Chazerat est-il parfait dans la volonté qu’elle
a exprimée / l ’est-il dans la volonté de la loi 1 est-il contraire à l’ordre public ,
aux lois politiques , et au droit naturel et civil de morale l
» A-t-ello soumis sa propre volonté à la volonté générale de la ci-devant
coutume d’ Auvergno , abrogée par les lois nouvelles ?
» Etoit-ce le cas d’appliquer à son testament l’art. i 5c)o du code Napoléon ¡f
» S'il étoit vrai que des termes de la représentation à l ’infini , exprimés
dans le testament , il dût résulter , comme le prétend le sieur M irlavau d ,
que des filles forcloses , ou les descendans d’elles , dussent être exclus du
partage , cette question peut-elle le concerner f n’en demeure-t^il pas moins
exclu lui-même de la succession par le testament / n’e x c ip e -t-il pas du
droit d’autriii en agitant cette question ?
» Attendu, dans le d ro it, que la testatrice a pu disposer à volonté de l ’uni
versalité de ses biens ; qu’elle a pu choisir des légataires entre toutes
personnes capables , et les désigner collectivement ou individuellement , soit
par leurs noms ou états distinctifs , soit par des indications certaines d’origine ,
de iàmille ou de parenté , également propres à les faire connofcre.
» Attendu , dans le fait , qu’on ne conteste ni sa capacité personnelle ,
ni celle de ses légataires , ni la disponibilité de tous ses biens , ni la faculté
d’en disposer à tels titres , et de les distribuer selon telles mesures qu’elle a jugé
à propos , ni la forme extrinsèque de ses testament et codicille.
» Attendu qu’il y a certitude dans sa disposition , puisqu’on convient qu’elle
est de l’universalité des biens ;• qu’il y a certitude égale dans le nombre et
les personnes des légataires , en ce qu’ils sont désignés par leur qualité
spécifique de descendans des trois estocs indiqués , en quelquo nombre qu’ils
so ien t, et que sous co rap p o rt, leur existence individuelle n’est susceptible
d’aucun doute.
» Attendu qu’un testament qui réunit tous ces caractères, est nécessairement
parfait dans la volonté exprimée du testateur , puisqu’elle étoit libre ; et qu’il
est aussi nécessairement parfait dans la volonté de la loi , puisqu’il est fait
sous son a u to rité, et q u ’e lle n ’e x ig e rie n au delà de ce qui a été observé j
» Attendu que celui de M arie-Gilberte RoIIet de Chazerat , étant ainsi
conforme , sous tous les rapports , à toutes les règles prescrites, il est impos
sible qu'il ne soit pas aussi conformo à l ’ordre public , puisqu’il est vrai que
l’ordre est toujours le résultat de l’observation de la règle j
» Attendu que dès lors sa disposition universelle ne devoit recevoir aucune
atteinte des motifs par lesquels on l'a attaquée , et qui ont cependant décidé
�( 11 )
les premiers juges à la déclarer nulle ; que c’est en v a in , et contre l ’évidenca
du fait, qu’on lui reproche d’avoir soumis sa volonté propre à la volonté générala
de la ci-devant coutume d’Auvergne , puisque , d’une p a r t, elle a clairement
et très-expressément déclaré sa vo lon té, dont aucune loi ne lui défendoit de
prendre l’exemple dans une coutume abrogée ; que de l’autre , loin de disposer
généralement, selon le vœu de la coutume , elle s’est au contraire mise en
opposition presque entière avec elle , soit dans sa disposition , en ce qu’elle
est universelle, soit dans le choix de ses légataires , en ce qu’elle a donné à
£on m ari, soit en faisant estoquer les dots au delà de la personne des enfans ,
soit en ne réservant pas ses meubles et acquêts aux seuls parens paternels,
soit en les confondant avec les propres de ces trois estocs , pour n’en faire
qu’une seule masse divisible indistinctement entre tous , dans la proportion
des apports, soit enfin en ce qu’elle a laissé une succession toute testamentaire,
comme elle en avoit le d ro it, au lieu de laisser une succession ab intesta t,
comme le vouloit la coutume ; que c’est par suite de cette illusion , qu’on a
appliqué à son testament l ’art. 1390 du code N apoléon, qui défend aux époux
de stipuler d’une manière générale , que leur association sera réglée par una
des coutumes qui sont abrogées ; que la première erreur qui se remarqua
dans cette assertion , c ’est que l ’article cité n’a rapport qu’aux contrats de
m ariage, et que les prohibitions no s’étendent pas des actes exprimés à ceux
qui ne le sont pasj que celle-ci s’étend si peu aux testamens , qu’indépen
damment de ce que l’article même prouve le contraire par son énonciation et par
la rubrique sous laquelle il est placé , on le voit encore plus clairement par
la comparaison des art. 911 et 1172 , dont l ’u n , relatif aux testamens , dit que
les conditions prohibées par les lois , sont seulement réputées non écrites ; et
l ’autre, relatif aux contrats, veut qu’elles rendent la disposition nulle ; qu’une
erreur plus étonnante que la première , vient de ce qu’on ne s’est arrêté ni au
sens de l’article , ni à la signification grammaticale des deux mots qui y sont
employés , manière générale.
» Que cependant 011 devoit savoir que ce qui est général comprend indéfi
niment toutes les espèces sans en marquer aucune ; car si les espèces
étoient expliquées , la manière cesserait d’être générale, n’y ayant rien de si
opposé à la généralité que la spécialité. Qu’ainsi, un pacte d’association con
tractuelle soumis d’uno manière générale au régime de telle coutume , seroit
évidemment exclusif de toute volonté propre des contractans , et no pourroit recevoir son effet quo des termes do la coutume indiquée, comme un
mandat général reçoit toute son exécution de la volonté do celui qui le rem
plit , par suite de la soumission entière de celui qui l’a donné ; qu’alors on con
çoit comment et pourquoi la loi résiste à ce que les citoyens qu’elle rég it,
Ba
�( 12 )
osent s’arroger la puissance de rétablir l'autorité d’une coutume qui est abolie,
et prétendre faire produire un effet à une cause qui n’existe plus. Mais que
de près ni de loin on ne sauroit rien remarquer dans le testament de Marie
Gilberto R o lle t, qui ressemble à ce cas, puisqu’au contraire tout y est énoncé
et spécifié; qu’il n’y a pas une seule disposition qui ne puisse être exécutée,
indépendamment de toute coutume quelconque, par le seul fait de la volonté
certaine et connue de la testatrice , par la seule autorité du Code N apoléon,
et en opposition totale à celle de la coutume d’Auvergne, qu’on a si singu
lièrement imaginé avoir été p rise , d’une manière générale , pour règle de ce
testament. Q u’à la .vérité, on y parle d’estoc et de représentation à l’iniini
pour désigner les légataires ; mais que cela même prouve la sagesse de la
testatrice, qui, par l’expression la plus b rè v e , fait connoîtrc ses légataires
de la manière la plus parfaite , sous uno désignation qui a deux termes mani
festement certains, l’un , les auteurs indiqués, l ’au tro celui où cesse leur
descendance; que lorsque, pour plus grande intelligence des règles de cette
représentation qu’elle ordonne de su ivre, elle a ajouté ces m ots, selon qu'elle
avoit lieu dans la ci-devant coutume d ’Auvergne, on doit reconnoître d’abord,
qu’au moins dans le seul endroit où elle parle de cette coutum e, elle a spécialisé
la règle qu’elle en em pruntoit, et que ce n’est p lu s , comme on l ’a d it, une
manière générale de s’y référer; que dans la r é a lité , non-seulement elle n’a
rien dit que le Code réprouve, mais qu’elle l’a dit surabondamment, en ce
sens, que la représentation à l’infini s’entend assez d’elle-mêmo pour n’avoir pas.
besoin d’être expliquée par un exemple; qu’ainsi, en regardant cette citation de
la coutume comme vaine, en la supposant même condamnable, il en résulteroit seulement, qu’aux fermes du Code N apoléon, il faudroit la considérer
comme non-écrite, et qu’alors la volonté de la testatrice n’en demeureroit pas
moins entendue ; on ne pourroit l’anéantir sans violer ouvertement la loi, qui en
protège l ’exécution. Que c ’est une erreur manifeste do penser qu’il soit
défendu , en exprimant sa volonté dans un testam ent, de rappeler pour mo
dèle une loi a b o lie, lorsque d’ailleurs on ne veut rien que la loi nouvelle
ne permette; et tandis qu’on ne sauroit n ier, qu’on no nie pas en effet que la
testatrice a pu se choisir des héritiers do l’espèce et de la qualité de ceux
qu ’elle a désignés ; qu’il suffit de lire la phrase pour être convaincu qu’elle
n’a rappelé les règles de la coutume d’Auvergne , quant à la représentation
à l’infini, que pour qu’on ne se trompât pas dans l ’exécution do sa volonté ,
ou plutôt , pour mieux indiquer tous ses héritiers ; si bien , que quand elle
n’ea auroit pas dit un m o t, sa disposition n’en seroit ni moins certaine quant à
sos biens , ni moins expliquée quant à ses héritiers , puisque la représentation
à l'infini » à quoi elle auroit pu se born er, n’auroit été ni la représenta-
�( i3 )
t!on de telle coutume, ni celle de telle autre, mais telle que le mot seul 1«
signifioit, c’est-à-dire, les descendans, tant qu’il y en auroit, des estocs indi
qués. Et que si ces m ots, telle qu’elle avoit lieu, ajoutent quelque chose réelle
ment à l’expression de sa pensée , du moins il est évident que ce qu’ils y
ajoutent n’est qu’une explication do plus, et que par cela même ils témoignent
plus fortement qu’elle a eu une volonté prop re, déterminée et éclairée , bien
loin qu’elle se soit référée d’une manière générale à l’autorité d’une coutume
abrogée. Qu’il (n’est pas permis de voir des fautes là où la loi n’en voit pas ;
et que devant la loi, comme aux yeux de la raison , il n’y en pas plus à citer
une coutume abrogée pour exemple , qu’à rappeler qu’elle a existé, ou à rap
peler ce que porloit tel autre de ses statuts. Que s’il étoit vrai que des ter
mes de la représentation à l'inlini, il dût résulter , comme l’objecte la partie
de B a y le , que des filles forcloses, ou les descendans d’e lle s, dussent être
exclus du partage , cette question no saurait le concerner, puisqu’il n’en de
meurerait pas moins exclu lui-m ême, p a rle testament, de la succession ;
qu’ainsi , il ne fait qu’exciper vainement du droit d’au tru i, en agitant une
question qui n’intéresseroit que les héritiers testamentaires, et qu’ils n’élèvent
pas. Que si pour régler les proportions des partages entre ces h éritiers, il
est nécessaire de remonter à l’origine des biens, et d’en connoître la nature ,
quoique la loi ne considère ni l’un ni l’autre dans les successions ab intesta t,
il n’en résulte autre chose que ce qui résulte de la loi elle-même, c’est-à-dire,
qu’il peut y avoir, selon la loi , deux espèces de successions très-différentes,
l ’une ab intestat, que la loi a réglée comme il lui a p lu ; l’autre testamentaire,
qu’elle a abandonnée à la volonté de ceux qu’elle a autorisés à en disposer ;
qu’i c i, il s’agit de cette dernière espèce de succession , et que la volonté de
l’homme y fait taire légalement celle de la loi.
» Attendu que si la testatrice a été libre , comme on en co n v ien t, de dis
tribuer ses biens selon sa fantaisio, elle a pu aussi, et à plus forto raison ,
les partager ,p a r des motifs qui lui ont paru de justice, entre tous les descondans de ceux dont ils lui étoient provenus; et qu’aucune loi politique, ni
d’ordre public ou do droit naturel ou c iv il, pas plus qu’aucune loi morale , no
lui interdisoient de se déterminer par ce louable m otif; que c’est même un des
bienfaits particuliers de la faculté de tester, et qui n’a point échappé aux con^
seils du législateur ; que par là on peut réparer, en certains cas, les injustices
résultant d’une loi trop générale , ou d’une affection faussement présumée.
» Attendu enfin, que Marie-Gilberte Rollet ne pouvoit pas so montrer moins
attachée à la loi ancienne, qu’elle l ’a fait, en la contrariant presque en tout ; ni
mieux marquer son respect pour les lois nouvelles, qu’en usant
des facultés
qu’elles lui accordoient, en déclarant qu’elle ne youloit le retour do ses biens
�( i4 )
à leur source qu'autant que cela dépendoit d’e lle , comme cela en dépendoit
en effet ; en ne disposant que de ce que la loi lui permettoit de donner à
l ’époque de son testament, et du reste seulement, quand une loi nouvelle 1g
lui a permis ; en ne donnant rien à des personnes prohibées , et n’attachant à
ses libéralités aucune condition défendue; que toutes ses dispositions sont
légitim es, puisque la loi les autorise; et que son testament est lé g a l, puis
qu’on n’en contredit pas la forme.
» L a cour dit qu’il a été mal jugé par le jugement dont est a p p e l, bien
appelé ; émendant, déboute la partie de Ba^le ( le sieur Mirlavaud ) de ses de
mandes ; ordonne que le testament sera exécuté suivant sa forme et teneur;
faisant droit sur la demande en assistance de cause formée contre M azu el,
partie de V a ze ille , attendu qu’il est donataire de M irlavaud, intéressé par
conséquent à la cau se, et qu’il n’a pas plus de droit que son donateur,
déclare l ’arrêt commun avec l u i . . . . . . »
L es sieurs Mirlavaud et M azuel se pourvoient en
cassation contre cet arrêt.
Trois moyens de cassation ( ai-je dit à l’audience de
la section des requêtes, le 10 juillet 18 10 ), vous sont
proposés dans cette affaire. Violation de l’article 1390
du Code N apoléon, portant que les époux ne peuvent
plus stipuler, d’une manière générale, que leur associa
tion sera réglée par l’une des coutumes, lois ou statuts
locaux qui régissoient ci-devant les diverses parties du
territoire français, et qui sont abrogées par le présent
code. Violation des articles 392, 895 et ()Q5 du même
code, qui, en exigeant que le testateur fasse personnelle
ment ses dispositions de dernière volonté, annoncent
clairement l’intention de maintenir les lois romaines,
qui déclarent nulle toute disposition par laquelle un
tCBtateur confie à un tiers le choix de ses héritiers.
Violation de l’article 7 de la loi du 3 o ventôse an 12 ,
qui abroge les lois romaines, les ordonnances et les cou-
�( iS ) .
tûmes générales ou locales, dans les matières qui sont
l’objet des lois composant le Code Napoléon.
Sur ces trois moyens, il s’élève une question préalable
qui leur est commune, et dont nous devons dire un m ot5
c’est de savoir s’ils ne doivent pas être écartés tous trois,
par la circonstance qu’il s'agit ici d’un testament d’une
date antérieure au Code Napoléon.
L ’affirmative seroit incontestable, si ce testament
n’étoit attaqué que dans sa forme extrinsèque -, car il est
de principe que la forme extrinsèque d’un testament ne
dépend que de la loi du temps, comme de la loi du lieu
où il a été fait, et vous l’avez ainsi jugé le premier
brumaire an i 3 , au rapport de IVI. Sieyes, et sur nos
conclu sions , en maintenant un arrêt de la cour d’appel
de Bruxelles, qui avoit déclaré valable un testament fait
dans l’ancienne form e, le 28 nivôse an 9 , par un parti
culier mort le 19 prairial an 1 1 , après la publication des
articles du Code Napoléon, relatifs aux formalités des
dispositions à cause de mort.
Mais ce n’est point dans sa forme extrinsèque; ce
n’est point par un défaut de solennité qu’est attaqué le
testament de la dame de Chazerat : il n’est attaqué que
dans le fond de ses dispositions; et tout le monde sait
qu’en ce qui concerne le fond des dispositions d’un
testament, on ne doit s’attacher qu’à la loi du temps où
le testateur est décédé. C ’est ainsi que le 18 janvier 1808,
la section civile a jugé, en reje ta n t le recours de JeanPierre R ayet, contre un arrêt de la cour d’appel d’A g e n ,
du 3 o avril 1806, qu’un testament fait en 1787, étoit nul,
par cela seul qu’il renfermoit une clause de substitution
�.( *6 )
lidéicommissaire, prohibée par l’article 896 du Code
N apoléon, à la publication duquel son auteur avoit
survécu.
On ne peut donc pas douter que le Code Napoléon
ne doive être pris pour la règle du fond des dispositions
de la dame de Cliazei’at ; et par conséquent que si le code
Napoléon condamne la manière dont la dame de Chazerat
a nommé ses légataires universels, les dispositions de la
dame de Chazerat ne soient nulles à cet égard.
Cela posé, entrons dans l’examen des trois moyens
de cassation que les demandeurs vous proposent.
E t d’abord, en jugeant que la dame de Chazerat
avoit pu nommer ses légataires universels, par la seule
vocation de ceux de ses parens, du côté de ses aïeul et
aïeule paternels, et de son aïeule maternelle, qui seroient
en ordre de lui succéder, suivant les règles de la repré
sentation à l’infini, telle qu’elle avoit lieu dans la cidevant coutume d’A uvergn e, la cour d’appel de Riom
a-t-elle violé l’art. 1890 du Code?
Elle l’auroit certainement vio lé, si cet article étoit
applicable au testament de la dame de Chazerat; mais elle
a jugé qu’il ne l’étoit point, et elle s’est fondée sur trois
motifs :
L e premier, que l’article 1890 du code n’est relatif
qu’aux contrats de mariage, et que les prohibitions ne
s’étendent pas des articles exprimés à ceux qui ne le sont
pas.
L e second, que cet article, fût-il com m unaux testamens, 11e seroit pas applicable à celui de la dame de
Chazerat, parce que ce n’est pas d’une manière générale,
mais
�( î7 >
mais seulement pour la détermination des règles de la
représentation à l’in fin i, que la dame de Chazcrat y
a déclaré s’en rapporter à la ci-devant coutume d’A u
vergne.
L e troisième , que les termes par lesquels la dame
de Chazerat s’en est rapportée h la ci-devant coutume
d’Auvei-gne y ne forment dans son testament qu’une
clause surabondante.
D e ces motifs , le troisième s’applique également
à tous les moyens de cassation des dem andeur •, et
nous croyons devoir, par cette raison, en renvoyer la
discussion h la suite de celle du dernier de ces moyens.
Quant aux deux autres, il en est u n , et c’est le
second, qui nous paixrît dénué de tout fondement. .<
En effet, d’art. i q o du Code n’est pas seulement
applicable à la clause d’un contrat de mariage par laquelle
les futurs époux déclareroient adopter telle coutume
pour règle de leurs droits respectifs : il l’est aussi ù la
clause par laquelle ils déclareroient adopter telle cou
tume pour règle de tel droit matrimonial spécialement
désigné*, par exemple, de la communauté ou du douaire :
car, dans un cas comme dans l'autre, les futurs époux ne
spécialiseroient pas eux-mêmes leurs conventions ; ils
les laisseroient dans un vague qui ne pourroit être
fixé que par la coutume à laquelle ils se soumettroient;
et par conséquent il y auroit, dans un cas comme
dans 1 autre , soumission d’une manière générale à la
coutume.
3
, Si donc l’art. 1890 ne doit pas être restreint aux
contrats de m ariage, s’il est commun aux testamens ,
c
�\
, ( 1 8 )
nul cloute qu’il ne soit violé par une disposition tes
tamentaire qui, pour la détermination de l’ordre dans
lequel doivent venir, et des parts que doivent prendre
les légataires universels, renvoie à telle coutume, comme
il le seroit par une disposition par laquelle le testateur
s’en rapporteroit à cette coutume pour le règlement
universel de sa succession j nul doute par conséquent
q u e , dans cette hypothèse, la cour d’appel de Riom
n’ait erré dans son second motif.
Mais cette hypothèse est-elle exacte, ou, en d’au
tres termes, l’art. 1890 est-il véritablement commun
aux testamens, ou, en d'autres termes encore, la cour
d’appel de Riom a-t-elle erré dans son premier motif,
comme dans le deuxième ?
» Sur cette question, il y a deux choses à considérer^
l’esprit dans lequel a été rédigé l’art. 1390, et l’objet
auquel sa rédaction s’applique.
L ’esprit de cet article pai-oît^ manifesté par le pro
cès verbal du conseil d’état :
« lia section de législation, disoit M . T ro n ch et, a
voulu, en proposant cet article, empêcher les notaires
de continuer à insérer dans leurs actes une clause usitée
dans les contrats de mariage, lorsque les parties vouloient établir leur communauté sur d’autres principes
que sur ceux de la c o u t u m e de leur domicile : on exprimoit alors qu’elles se marioient suivant telle ou telle
coutume. Cette clause seroit nulle après la confection
du Code civil •, puisqu’il abroge toutes les coutumes ,
il n’est plus possible de les reconnoître \ o u , si on
leur conservoit une sorte d’existence, le système bien-
�(
1
9
y
Élisant de l’uniformité des lois seroit dérangé. — La pro
position qu’on discute, ajoutoit Al. Berlier, n’implique
nulle contradiction avec la faculté laissée aux époux
de régler leurs conventions comme ils le veulent : cette
faculté n’est pas ici blessée, quant à la matière ; elle
n’est restreinte que quant à la forme. Les époux stipu
leront en détail toutes les conditions de leur union ;
mais ils ne pourront, en termes généraux., se référer
à telle ancienne loi ou à telle ancienne coutume. Voilà
ce que dit l’article, et ce qu’il devoit dire par respect
pour le nouveau Code., et pour atteindre les bienfaits
qu’il permet. Ne seroit-ce pas en effet perpétuer l’exis
tence de quatre cents et quelques lois ou coutu
mes qui régissoient la France, que de permettre de
s’y référer pour les conventions à venir? Qui veut la
fin , veut les m oyens; or, plus d’uniformité, plus de
Code civil, proprement dit ; si l’on permet cette bizarre
alliance. — L e di’oit seroit hérissé (continuoit M. R é a l),
d’autant plus de difficultés, qu’il faudroit étudier à la
fois et le droit qui a existé et le droit qui existe__—
En employant ces clauses générales, disoit également
M . T reilh ard , les notaires peu instruits ignorent le
sens cle ce qu’ils écrivent dans leurs actes; ils ne peuvent
en conséquence l’expliquer aux parties. Il est bon ce
pendant que chacun sache positivement ce qu’il stipule.
On doit craindre , d’un autre côté, que dans certains pays
la routine ne fasse durer encore lo n g - te m p s l’empire des
coutumes. Il ne s’agit, au surplus, que d’empcclier
les citoyens de les rappeler’, ce qui ne gene la liberté
de personne, puisque chacun conserve la faculté de
C2
�( 20 )
faire passer dans son contrat de mariage les dispositions
de la coutume , pourvu qu’il les én o n ce....»
M . Berlier répétoit la même chose dans son discours
au corps législatif: « L e projet ne permet pas aux époux
de stipuler désormais, d'une manière générale, que leur
association sera réglée par l’une des coutum es, lois ou
statuts locaux , qui régissoient ci - devant les diverses
parties du territoire français , et qu’il abroge *, c’eût été
les rejeter dans le dédale d’où il s’agit de les retirer, et
élargir le gouffre que le code civil doit fermer. »
Voilà des motifs qui , assurément 3 s’a d a p t e n t tout
aussi bien aux testamens qu’aux contrats de mariage.
Mais le texte de loi que ces motifs paraissent avoir
d icté, com prend-il ceux-là comme c e u x - c i dans sa
disposition ?
Nullement : ce texte est restreint aux contrats de
mariage , et il y est restreint non seulement par ses
propres term es, mais encore dans la rubrique sous la
quelle il est placé. D e là comment pourriez-vous ann u lle r, comme violant ce texte , un arrêt qui a refusé
de l’étendre aux testamens ? L ’article 66 de la cons
titution du 22 frimaire an 8 , ne vous autorise à casser
les jugemens en dernier ressort, que pour contravention
expresse aux lois 5 et certes , il ne peut pas y avoir
contravention expresse à l’article i q o du Gode Napoléon,
là où on ne peut apercevoir qu’un refus de donner à
cet article une latitude qu’il n’a pas lui-mêm e.
Admettons que la cour d’appel de Riom eût p u , en
s’étayant sur l’identité de raisons , étendre cet article
aux testamens *, admettons même qu’elle eût pu justifier
3
�( 21 )
cette extension, en invoquant, non comme disposition
législative, mais comme raison écrite, les lois 12 et i3 ,
D . de legibus, Non possunt oimies , etc.
Eh bien ! dans cette hypothèse , l’arret qui vous est
dénoncé, pourra-t-il être annullé sur l’unique fondement
qu’il n’a pas fait une extension qu’il eût pu faire ?
Une question semblable a été agitée tout récemment
à l’audience de la section civile. — Les sieurs Pastoris
demandoient la cassation d’un arrêt de la cour d’appel
de T u rin , du 11 juin 1808 , qui avoit déclaré légitime , à raison de la bonne foi de son père et de sa m ère,
l’enfant né à l’ombre d’un second mariage que Thérèse
Bellone avoit contracté dans la Ligurie en 1799, du
vivant de son premier mai’i , avec Henri Pastoris. Pour
établir que ni Henri Pastoris, ni Thérèse Bellone , ne
pouvoient être censés avoir contracté de mariage de
bonne f o i, ils alléguoient, et le fait n’étoit point dénié,
ou plutôt il étoit avoué dans les termes les plus formels,
que ce mariage n’avoit pas été précédé des bans prescrits
par les lois ecclésiastiques ; ils citoient la décrétale Ciim
ïnhibito, qui en effet décidoit que les enfans nés d’un
mariage contracté sans publications préalables , entre
un homme et une femme parens au degré prohibé t
ne dévoient pas jouir des prérogatives de légitim ité,
parce que le défaut de bans ne permettoit pas de pré
sumer que leurs père et mère eussent ignoré l’empê
chement qui s’opposoit à leur union ; et ils ne manquoient
pas d’observer que quoique cette décrétale, qui, en 1799,
faisoit loi en Ligurie comme en P iém on t, ne parlât
que de l’empêchement de parenté , elle n’en devoit
�C 22 )
pas moins être étendue, par identité de raisons, à tous
les autres empêchemens, notamment à celui qui résultoit
de la non-dissolution d’un mariage précédemment con
tracté par l’une des parties j ils prouvoient même que
telle étoit l’opinion d^une foule de canonistes. — En
portant la parole sur cette affaire, nous avons dit que
sans doute la cour d’appel de Turin eût pu donner à
la décrétale Ciim inhibito l’extension que les sieurs
Pastoris l’accusoient de ne lui avoir pas donnée ;
qu’elle n’eût même fait par là que se conformer à la
jui’isprudence du sénat de C h am béry, attestée par le
président Favre ; mais que ne pas étendre une loi au-delà
de ses termes précis, ce n’étoit pas la v io le r , et qu’en
conséquence , il y avoit lieu de rejeter le pourvoi des
sieurs Pastoris.— Par arrêt du 21 mai dernier, au rapport
de M . Carnot , « attendu que les conciles n’ont pas
prononcé la nullité des mariages pour simple défaut
de publication de bans *, que l’on peut seulement en
induire, suivant les cas, qu'ils ont été clandestinement
contractés; mais que dans l’espèce,le vice de clandestinité
ne pouvant être reproché au mariage dont il s’agit,
il en résulte que le seul défaut de publication de bans
n’a pu constituer Thérèse Bellone et H enri Pastoris en
mauvaise foi *, que si la décrétale Cum inhibito a été plus
loin sur ce p o in t, que les décrets des conciles, ce n’a
été que par voie d’exception , et pour le seul cas où
les époux auraient été parens au degré prohibé ; et
que la cour d’appel, en s’en tenant à la lettre de cette loi
d'exception, sans l’étendre par induction au cas d’exis
tence du premier époux réputé m o rt, n’en a pu violer
�<>3 )
ouvertement les dispositions...............................................
La cour rejette. ............................ »
Dans cette espèce cependant, les sieurs Pastoris avoient
deux avantages qui manquent ici aux demandeurs.
D ’une part, les textes du droit romain qui autorisent
les juges à étendre les lois à des cas non compris dans
leurs dispositions, mais auxquels leurs motifs s’adaptent
parfaitement, avoient, pour la cour d’appel de T u rin ,
toute l’autorité des lois proprement dites, puisque le droit
romain étoit la loi supplémentaire du Piémont et de la
Ligurie , à l’époque de la célébration du mariage dont
il étoit question.
I c i , au contraire , ces textes n’avoient pour la cour
d’appel de Riom que l’autorité de la raison écrite.
D ’un autre côté, nulle différence quant au motif qui
avoit déterminé la disposition de la décrétale Ciim inhibito , entre les cas où les époux étoient parens au degré
p rohibé, et le cas où l'un d’eux étoit engagé dans les
liens d'un mariage non encore dissous. Il y avoit m êm e,
pour appliquer cette disposition au second cas, une raison
bien plus puissante que celle qui l’a voit provoquée pour
le prem ier5 car il importe bien plus à l’ordre public
de prévenir les bigamies, que les mariages entre les
parens à certain degré. On pouvoit donc argumenter
à fortiori du cas sur lequel portoit la décrétale Cum
inhibito, à celui qui étoit l’objet de l’urret dont il s’agit.
I c i, au contraire, bien q u ’on puisse dire des testamens comme des contrats de mai*iage, que si l’on y
toléroit l’usage de ne disposer ou de ne traiter que par
des renvois à telles coutumes abrogées par le Code Napo-
�( H )
léon , ces coutumes survivroient en quelque sorte à leur
abrogation } et que les citoyens, les jurisconsultes, les
magistrats seroient obligés de les étudier encore, comme
si elles avoient conservé toute leur autorité ; il n’en est
pas moins vrai q u e , relativement aux motifs de la dis
position de l’article i 3 g o , il existe entre les contrats
de mariage et les testamens deux différences très-sensibles.
D ’abord, avant le Code N apoléon, il étoit extrêmement rare que des testateurs se référassent, pour le
choix de leurs héritiers ou légataires universels, à des
coutumes q u i, ou étoient abrogées , ou le u r étoient
étrangères. Il faut même sortir de l’ancien territoire
français pour en trouver des exemples autres que celui
de la dame de Chazerat ; car les seuls, absolument les
seuls auteurs qui en parlent, sont Grotius et V o ë t ,
tous deux Hollandais -, le premier dans sa Manuductio
ail jurispruclentiam Hollandiæ,liv. 2. cliap. 29 '7le second,
sur le digeste, tit. de hœredibus instituendis, n. i 5 . Et
au contraire , rien n’étoit alors plus fréquent que de
voir des époux adopter, pour règle de leur association ,
des coutumes qui n’étoient ni celles de leur domicile,
ni celles de la situation de leurs biens.
Est-il étonnant, d’après cela, que le législateur ait res
treint, aux contrats de mariage la disposition de l’article
1390 du Code? Il l’a restreinte à ces contrats, parce que
ces contrats étoient les seuls actes où il étoit à craindre
que ce genre d’adoption se perpétuât. Il ne l’a pas
rendue commune aux testamens, parce qu’il n’y a pas
vu le même sujet de crainte j parce qu’il a pensé q u e ,
si quelque testateur venoit un jour à se singulariser, en
adoptant ,
�.( 2 5 )
adoptant, pour le choix de ses légataires universels,
une des coutumes abrogées du territoire français, ce
seroit une bizarrerie sans conséquence , un phénomène
qui ne mériteroit pas qu’une loi expresse lui fît l'hon
neur de le proscrire par anticipation; en un mot, parce
qu’il a dit avec les lois 4 et 6 , D . de legibus : E x his
quee forte aliquo uno çasu accidere possunt, jura non
constituuntur,....
Ensuite, le motif énoncé dans le procès verbal du
conseil d’état, par ceux qui ont parlé sur l’art. 1390,
est-il bien le seul qui ait déterminé, soit la majorité du
conseil, soit la majorité du tribunat, soit la majorité
du corps législatif, à voter pour cet article
Nous pouvons .en douter d’autant plus raisonnable
ment , qu’il se présentait pour réunir tous les suffrages
en faveur de cet article, une raison bien plus grave ,
bien plus décisive , que le motif mis en avant dans le
procès verbal du conseil-d’état.
En effet, il est de la plus haute importance que les
conventions matrimoniales soient rédigées de manière
que tous ceux avec qui l’un ou l’autre des époux peut
être dans le cas de traiter, connoissent d’une manière
certaine et positive les modifications qu’elles ont faites
à la loi, qui,
défaut de stipulations particulières, règle
l’association conjugale. Et comment auroient-ils pu ac
quérir cette connoissance ? Comment sur tout auroientils pu être assurés de l’avoir acquise, s’ils n’avoient pu
la puiser que dans les coutumes, dans les statuts locaux
abrogés, et par conséquent tombés dans l’oubli? Qui
d’eux n’auroit tremblé de voir un jour sortir de ces
D
�( *6 )
statuts, de ces coutumes, des prohibitions, des inca
pacités , des empechemens qui eussent vicié ou neutra
lisé les contrats qu’ils auroient pu faire avec l’un des
époux ? Et n’est-il pas évident que par là on eût exposé
chacun des époux au danger de ne trouver personne qui
eût voulu contracter avec lui ? L e merne inconvénient
n’étoit point à craindre dans les dispositions testamen
taires ; car de deux choses l’une : ou la coutume à laquelle
un testament se réfère , est parfaitement con n ue, ou
elle ne l’est pas. A u premier cas, sa disposition sei-a exécu
tée ; au second, elle sera sans effet, d'après cette maxime
du droit romain , ou plutôt de la raison universelle :
Quœ in testamento scripta essent neque intelligerentur
quid significarent, ea perindè sunt atque si scripta
non essent. L . 2. D. D e his quœ pro non scriptis habentur.
Que devient après cela le grand argument sur lequel
les demandeurs fondent principalement leur système
d’extension de l’art. 1890 aux testamens? Les contrats
de m ariage, disent-ils, sont par leur nature suscep
tibles de toutes les clauses qui ne blessent ni les lois
prohibitives ni les mœurs. Ils sont par conséquent bien
plus favorables que les dispositions testamentaires. Si
donc on ne peut pas , dans un contrat de m ariage, se
référer à une coutume abrogée, combien moins le peuton dans un testament ? Si donc la loi l’a prohibé pour
l’un, à'eom bien plus forte raison est-elle censée l’avoir
prohibé pour l’autre ?
Trois vices essentiels dans cet argument:
i ü. 11 n’est pas vrai que les époux aient plus de liberté
�( 27 )
dans les contrats de m ariage, que les testateurs n’en
ont dans leurs dispositions à cause de mort. Si les époux
peuvent, par les un s, faire toutes les stipulations qui
ne contrarient pas les lois prohibitives, ni ne blessent
les mœurs, les testateurs peuvent également, par les
autres, faire toutes les dispositions qui n’offensent pas
les mœurs et ne heurtent pas des lois px-ohibitives. Les
contx’ats de mariage et les testamens sont donc, quant à
la liberté des parties qui y figurent, des actes absolu
ment parallèles. On ne peut donc pas argumenter à
fortiori des contrats de mariage aux testamens.
2°. L ’argument à fortiori n’est qu’un sophisme , toutes
les fois qu’entx’c les deux objets qu’il tend à faire juger
d’après la même règle, il se trouve une différence quel
conque j et nous venons de voir qu’enti’e les contrats
et les testamens, il existe, relativement à la question
qui nous occupe , deux différences très-frappantes.
3 °. Ce n’est point par des argumens à fortiori que
l’on peut faire trouver dans un arrêt une contravention
à une loi qui ne prévoit pas précisément le cas sur lequel
il statue ; et c’est une vérité dont l’arrêt de la section
civile, du 21 mai dernier, nous fournit à la fois la preuve
et l’exem ple, en rejetant les moyens de cassation que
les sieurs Pastoris cherclioient à tirer de la décrétale
Cum inhibito.
E nfin, Messieurs, il est une grande maxime qui doit ici
écarter toute idée d’extension de l’art. 1390 du Code Na
poléon aux testamens, c’est que les lois qui disposent en
sens contraire aux principes du droit, ne peuvent jamais
être tirées à conséquence, ni étendues hors de leurs
D 2
�( 2 8 }
termes précis : Quod verà contrà rationem ju r is , etc.
L. 1 3 . D . de legibus.
On ne peut clouter, en effet, que la disposition de
l ’art. J390 ne soit contraire aux principes du droit, et
qu’en la décrétant, le'législateur n’ait sacrifié les prin
cipes du droit à des considérations purement politiques.
Il est difficile, disoit M . l’Arcliichancelier*, dans la dis
cussion de cet article au conseil d'état, de concilier
cette disposition avec celle qui précèd e, et qui laisse
aux parties une liberté indéfinie dans leurs conventions
matrimoniales,pourvu qu’elles ne blessent pas les mœurs...
Il ne doit y avoir de stipulations nulles que celles qui
blessent les principes du Gode civil.
Ces observations, il est vrai, n’ont pas empêché Fadoption de l’article qu’elles combattoient ; mais elles n’en
forment pas moins une preuve irrésistible, que cet article,
quelque sage qu’il soit, n’est pas en harmonie, même
avec les principes généraux de la matière des contrats
de mariage , et que par une suite nécessaire, il ne peut
pas être étendu au delà de son objet.
L e premier moyen de cassation des demandeurs ne
peut donc , sous aucun rapport, être accueilli.
L e deuxième est - il mieux fondé ?
Sans doute il n’est pas plus permis à un testateur sous
le Code Napoléon, qu’il ne l’étoit sous l’empire des lois
romaines, de c o n fie r à u n tiers la désignation de ses
héritiers ou légataires universels; et il faut sous le Code
N apoléon, comme il le falloit sous l’empire des lois ro
maines, que le testateur fasse lui-même cette désignation.
Mais est-ce à dire pour cela que le testateur est
�( 29 )
obligé de désigner ses héritiers ou légataires par leurs
noms individuels ? A cette question écoulons la réponse
des lois romaines : Si quis nomen hœredis quidem non
d ix erit, sed indubitabili signo eum demonstraverit,
quod penè nihil à noniine distat... valet inslitutio. L oi
9, § 9, D. de hœredibus instituai dis. L. 34 , D. de conditionibus et dernonstrationibus. Et pourquoi cela ? c’est,
dit la loi G, D . de rebus creditis, parce que la dési
gnation certaine et l’expression du nom sont tellement
identiques dans le droit, qu’elles peuvent s’employer
indifféremment l’une pour l’autre } N ihil refert proprio,
etc....
O r , n’est-ce pas désigner clairement ses héritiers ou
légataires univei'sels, que de déférer sa succession à ceux
qui dévoient la recueillir ab intestat d’après telle l o i ,
telle coutume, tel statut? Nous avons déjà dit que V oët
et Grotius regardent l’affirmative comme une vérité irré
fragable -, et, en effet, voici les termes du premier: Sed
nec dubium quin teslatar rectè testamento hceredes insti
tuât per relationem ad certum statutum , veluti instituendo eos quos ju s scabinicum v el quos ju s ces
dom icum , aut loci alterius le x dejinit ab intestatq
successores , ut id colligi potest e x his quee habet
Hugo Grotius in manuductione ad jurisprudentiam Hol~
landice. Lib. 2, cap. 26.
M a is, disent les demandeurs., et c’est leur troisième
moyen , la coutume d’Auvergne à laquelle la dame de
Chazerat s’est référée, dans le legs univei’sel que con
tient son testament, est abrogée par l’article 7 de la loi
du 3 o ventôse an 12. La dame de Chazerat s’est donç
�(
3°
)
mise, par la manière dont elle a exprimé son legs uni
versel, en rébellion contre cet article. La Cour d’appel
de Riom a donc violé cet article, en déclarant valable
le legs universel do la dame de Chazerat.
Quoi donc ! la dame de Chazerat n’auroit-elle pas p u ,
nonobstant l’abrogation de la coutume d’Auvergne, s’en
approprier littéralement les dispositions, les transcrire
dans son testament, les adapter, et à ceux de ses parens
qu’elle vouloit gratifier, et aux biens dont elle vouloit
disposer en leur faveur ? Les défendeurs sont forcés de
convenir qu’elle en avoit le pouvoir; et si elle l’eût
fait, ajoutent-tils, nous respecterions sa volonté. Mais
quelle différence y a - t - i l entre ce qu’elle eût pu dans
cette hypothèse, et ce qu’elle a fait réellement? Il n’y
en a que dans l’expression : la dame de Chazerat a dit,
en termes très-brefs, Ce qu’elle eût pu délayer dans
plusieurs phrases ; et assurémènt une disposition q u i,
développée dans un long assemblage de m ots, seroit
valable, ne peut pas être nulle parce que la testatrice
l’a exprimée avec le plus de concision qu’il lui a été pos
sible ; assurément la loi du 3 o ventosean 12, que cette
disposition n’offenseroit en aucune manière dans le pre
mier cas , ne peut pas en être blessée dans le second.
En effet, dans un cas comme dans l’au tre, ce n’est
point la coutume d’Auvergne qui régit la succession
de la dame de Chazerat ; dans un cas comme dans l’autre,
cette succession n’est régie que par la volonté de la dame
de Chazerat elle-même ; dans un cas comme dans l’autre,
la coutume d’Auvergne ne fait rien, c’est la volonté
de la dame de ChaztTat qui fait tout.
�( 31 )
Si la dame de Chazerat eût été et fût morte dans un
temps où la coutume d’Auvergne étoit encore dans toute
sa vigu eu r, et que dans son testament elle eût déclaré
instituer légataires universels ceux de ses parens à qui
cette coutume déféroit la succession, à quel titre ses
parens ainsi appelés auroient-ils recueilli ses biens ? comme
héritiers ab intestat, comme saisis par la coutume ?
N o n , ils les auroient recueillis comme légataires uni
versels, comme appelés par la testatrice. Taies instituti
( dit V oët à l’endroit déjà cité N. 18, en parlant du
cas où le testateur institue pour héritiers ceux qui doivent
lui succéder ab intestat ); Taies instituti, non e x v i legis,
sed e x testatoris volúntate succedunt.
E t l’on voudroit qu’il en fût autrement dans notre
espèce ! On voudroit que la coutume abrogée d’A u
vergne régît une succession que ne régiroit pas la
coutume d’Auvergne encore subsistante ! On voudroit
q u e , d’après les dispositions de la dame de Chazerat,
les légataires imiversels de la dame de Chazerat succé
dassent en vertu de la coutume abrogée d’Auvergne ,
tandis que si cette coutume n’étoit pas abrogée, ils ne
pourroient, d’après ces mêmes dispositions , succéder
qu’en vertu de la volonté de la dame de Chazerat !
C ’est une véritable dérision.
Est-ce plus sérieusement que les demandeurs opposent
à l’arret de la cour d’appel le principe écrit dans
l’article 6 du code, qu’on ne peut déroger, par des
conventions particulièx-es, aux lois qui intéressent l’ordre
public et les bonnes moeurs? Est-ce plus sérieusement
que l’on vient vous dire que les successions tiennent à
�( '3a ) '
.
l’ordre publie ; el que c’est attenter à l’ordre public ,
que de créer un ordre de succession contraire à la loi ?
Autant vaudroit-il dire qu’il y a attentat à l’ordre
public, toutes les fois qu’un testateur, usant du pouvoir
que lui en donne la l o i , dispose de ses biens en faveur
d’autres personnes que celles qui y seroient appelées
par la loi elle-m êm e, à défaut de testament.
Car , encore une fo is, ce n’est point de la coutume
abrogée d'Auvergne , que les légataires universels de
la dame de Chazerat tiennent leur vocation ; ils ne lai
tiennent que de la volonté de la testatrice; et la testatrice,
en se. référant en peu de mots à la coutume d’A u v erg n e ,
ne l’a pas plus remise en vigueur comme l o i , qu’elle ne
l’eût fait en calquant, comme elle en avoit incontes
tablement la faculté , ses dispositions personnelles sur
les anciennes dispositions de cette coutume.
A vant l’abrogation des coutumes, un testateur pouvoitil instituer légataires universels de ses meubles, ceux de •
ses parens qui auroient dû y succéder d’après une cou
tume autre que celle de son domicile? pouvoit-ilinstituer
légataires de ses immeubles disponibles, ceux de ses parens
qui aurbient dû y succéder d’après une coutume autre
que celle de leur situation ? Oui , sans doute , il le
pou voit : Voè’t et Grotius nous en donnent l’assurance ,
et les demandeurs eux-mêmes n’eu disconviennent pas.
Cependant on eût pu dire alors, comme le disent
aujourd’hui les demandeurs , qu’en disposant ainsi , le
testateur créoit un ordre de succéder contraire à la loi
qui devoit régir sa succession ; qu’ériger une coutume
étrangère à sa personne et à ses biens , en loi régu
latrice
�( 33 )
latrice clc sa succession , c’étoit faire ce qui n’appartenoit
qu’au législateur ; qu’il n’appartenoit qu’au législateur
d’étendre les limites d’une coutume au - delà de son
territoire. Mais ces objections aui-oient disparu devant
le principe, que ce n’étoit pas comme l o i , que c’étoit
uniquement comme disposition de l’homme , que la
coutume étrangère à la personne et aux biens du tes
tateur a'uroit régi sa succession.
Eh bien ! la dame de Chazerat a-t-elle fait autre chose ?
Si ce n’est pas usurper le pouvoir du législateur , que
de se référer à une loi existante, mais étrangère, comment
pourroit-on être censé l’usurper en se référant à une loi
abrogée ? une loi existante, mais étrangère, n’a pas plus
de force par elle-même, que n’en a une loi qui n’existe
pas \ et de même qu’il n’est permis qu’au législateur de
rappeler à la vie une loi qui n’existe plus , de même
aussi au législateur seul est réservé le droit de rendre
obligatoire dans un pays, une loi qui n’a été faite que
pour un autre pays.
La dame de Chazerat n’a donc pas plus violé , soit
l’art. 6 du code Napoléon , soit l’art. 7 de la loi du 3 o
ventôse an 12 , en disposant par relation à la ci-devant
coutume d’A uvergne, qu’un testateur mort il y a dix ans,
n ’eût v io lé , en disposant par relation à une coutume
étrangère à son domicile et h ses biens , la maxime
de droit public qui restreignoit l’autorité de chaque
coutume aux personnes domiciliées et aux biens situés
dans son arrondissement.
Et comment ne sent-on pas que si l’art. 6 du code
Napoléon , si la seule abrogation des coutumes avoit
E
�I
( 34 )
suffi pour empêcher que l’homme ne se référât , dans
ses dispositions , à des coutumes abrogées , il eût été
inutile que l’article 1390 le défendît spécialement aux
futurs époux ? Comment ne sent-on pas que de là naît,
par la règle , inclusio unius est exclusio a lten u s, la
conséquence que la chose est permise dans les testamens ?
Ecartons donc tous ces grands mots d’attentat à l’ordre
p u b lic, de blasphème contre les lois nouvelles , que
les demandeurs font sonner si haut et si xnal à propos ;
et disons q ue, quand même la clause par laquelle la
dame de Chazerat renvoie à la ci-devant coutume d’A u
vergne le règlement de sa succession, seroit absolument
nécessaire pour l’exécution de sa volonté, cette clause
n’olfriroit rien d’illégal, rien qui ne fût une conséquence
directe de la pleine liberté que le Code Napoléon accorde
à tous les testateurs auxquels il ne survit ni enfans ni
ascendans.
M ais il y a plus, et ici se présente une considération
qui doit faire rentrer dans le n éan t, non-seulement le
troisième moyen de cassation des demandeurs , mais en
core le premier et le second : la cour d’appel a jugé
que cette clause ne forme , dans le testament de la dame
de Chazerat, qu’une disposition surabondante’, qu’elle
y est inutile pour l’exécution de la volonté de la dame de
Chazerat ; que par conséquent elle ne peut pas nuire
à l’exécution de cette volonté: que c’est le cas de la
maxime , utile non viciatur per inutile.
E t qu’oppose - t -011 à cette partie des motifs de l’arrêt
de la cour d’appel ? D e grands détails, de longs raisonDcmens, qui tendent à établir que la cour d’appel s’est
�( 35 )
trom pée, en interprétant ainsi le testament de la dame
de Chazerat.
Supposons-le avec les demandeurs: en résultera-t-il
que l’arrêt de la cour d’appel doit être cassé ?
Sur cette question , M essieurs, nous nous tairons pour
laisser parler l’arrêt que vous avez rendu le 2 février
1808, au rapport de M . Vergés, en sections réunies sous
la présidence de M . le Grand - J u g e , ministre de la
justice : « Considéi'ant que la cour dont l’arrêt est at
taqué, en décidant que la société contractée le il\ octobre
1800, entre M oke et Vankanegliem , étoit simplement
en commandite, s’est déterminée d’après l'interprétation
qu’elle a donnée aux clauses du contrat social et aux
lettres circulaires écrites en exécution de ce contrat ;
que par cette interprétation, qui étoit dans ses attribu
tions , cette cour n’a violé aucune loi ; la cour rejette
le pourvoi des frères Hubert et fils. »
Dans cette espèce , il étoit dém ontré, avec la plus
grande évidence, que la cour de laquelle étoit émané
l’arrêt dont il s’agissoit, sJétoit trompée dans l’interpré
tation qu’elle avoit donnée au contrat de société du 24
octobre 1800, et que ce contrat marquoit dans tous ses
articles l’intention des parties de former entre elles une
société générale et un nom collectif; mais il a suffi qu’en
donnant à ce contrat une interprétation qui clioquoit
toutes les notions reçues en matière de société, elle n’eût
violé aucune l o i , pour vous déterminer à maintenir cet
arrêt.
Et comment pourriez-vous aujourd’hui juger autre
ment ?
E2
�( se )
C ’est, dit - on , parce que les magistrats de la cour
d’appel de R iom , ¿1 qui le texte et l’esprit de leur an- >
cienne coutume sont familiers, et qui en conséquence
savent distinguer parmi les parens de la dame de Chazerat, ceux qui seroient en ordre de lui succéder d’après
la coutume indiquée par e lle , ont supposé qu’on ne
peut pas se méprendre sur les héritiers qu’elle a voulu
se donner, et que ces héritiers, ainsi que leurs droits
respectifs, doivent être considérés comme suffisamment
désignés dans son testament. En un m o t, continue-t-on,
c’est leur érudition particulière , et n o n pas les expres
sions de la dame de Chnzerat, qui les a induits à dire
que cette prétendue désignation se trouve dans sa dis
position , et qu’elle s’y trouve même indépendamment
de l’indication de la coutume d’Auvergne. A u surplus,
ils ont tracé les élémens apparens de leur détermination
k cet égard \ o r , ces élémens se réfèrent non à des points
de fait, mais à des points de droit ou de coutum e, sur
lesquels les juges ont faussement raisonné. « Et à l’appui
de cette assertion, les demandeurs entrent dans de fort
longs développemens pour prouver, i.° que si, de la
disposition de la dame de Chazerat, on retranche la partie où elle indique la coutume d’Auvergne comme expli
cation de sa volonté, on ne saura plus dans q u e lle accep
tion elle aura employé le mot estoc} on ne salira plus
s’il faut en chercher la signification dans la classe des
coutumes de tronc com m un, ou dans celle des coutumes
soudières, ou dans celle des coutumes de côté et ligne \
2.° que dans la même hypothèse on ne sauva pas
comment doit se réglpr la représentation à l’infmi que
�( 57 )
la clame de Chazerat a établie entre ses parens ; que le
mode de la représentation à l’infini n’étoit pas uniforme
dans les coutumes qui l’admettoient ; qu’i c i , les descen
dais du testateur devoient être préférés à ceux qui
n’étoicnt parens que de son côté et ligne , tandis que
là il en étoit autrement ; qu’ici , la succession d’un
défunt qui îï’auroit laissé que des neveux , devoit se
partager par souches , tandis que là elle devoit se
partager par têtes ; q u 'ic i, la représentation à l’infini
pouvoit se faire per saltum , en sorte que l’on pouvoit
remonter à son a ïe u l, lors même que la personne avec
qui l’on concouroit , n’avoit besoin que de la repré
sentation de son père , tandis que là on jugeoit le
contraire , etc.
Mais en admettant tout cela , quelle conséquence
peut-on en tirer ? Il n’y en a qu’une seule de raison
nable : c’est que la cour d’appel de Riom a mal à pi'opos
considéré les mots représentation à Vinfini en ligne col
latérale, comme présentant par eux-mêmes un sens clair,
absolu et indépendant de la coutume d’Auvergne ;
c’est-à-dire, que pour trouver à ces mots un sens clair,
absolu et indépendant de la coutume d’A u vergn e, elle
a mal à propos supposé que les ci - devant coutumes
d’estoc et de représentation à l’infini étoient uniformes;
c’est, si l’on veut , qu’elle a jugé contre le texte de
celles de ces coutumes qui , sur le sens du mot estoc
et sur le mode de la représentation à l’infini, s’écartoient
de la coutume d’Auvergne.
O r, casseriez-vous l’arrêt de la cour d’appel de R iom ,
pour avoir jugé contre le texte de coutumes qui sont
�(
38
)
abrogées ? Proposer cette question , c’est la résoudre
poür la négative. Les dispositions des coutumes abrogées
ne forment plus des points de droit \ elles ne sont plus
que des faits 5 elles n’existent plus que comme monumens historiques de l’ancienne légishition. Les courâ
supérieures peuvent donc les méconnoître , sans qu’on
puisse pour cela les accuser d’avoir violé une loi quel
conque ; et de même que vous ne pourriez pas casser
un arrêt qui eût jugé que -tel événement constaté par
les chartes les plus authentiques , n’est jamais arrivé ;
vous ne pouvez pas davantage casser un arrêt qui
a jugé que toutes les coutumes d’estoc entendoient
uniformément le mot estoc même , et que toutes les
coutumes de représentation à l’infini étoient d’accord
sur le mode d’exercice de ce droit.
* Par ces considérations, nous estimons qu’il y a lieu
de rejeter la requête des demandeurs , et de les con
damner en l’amende de cent cinquante francs.
Arrêt de la Cour de cassation , du 19 juillet
1810, au Rapport de M. Aumont.
« Attendu que l’art. 1890 du code Napoléon est au'
livre 3 , titre 5 , du contrat de mariage et des droits
respectifs des époux ; que c’est l ’association des époux
que cet article défend de régler d’une manière générale,
par l’une des coutumes , lois ou statuts locaux , qui
régissoient ci-devant les diverses parties du territoire
français, et qui sont abrogées \ que les dispositions du
même co d e , relatives au testament, sont au livre 3 ,
�( 3g )
tit. 2, cliap. 5 , art 967 et suivans que la cour d’appel
de Riom ne peut avoir violé l’article 1390 du Code
Napoléon , en ne se croyant pas permis d’étendre aux
testamens une disposition de ce Code , faite pour les
contrats de mariage.
» Attendu que M arie - Gilberte Rollet , veuve de
Chazerat , n’a pas confié à un tiers le soin de choisir
ses légataires, et de régler la distribution de sa succession;
qu’elle les a désignés elle-même et d’une manière certaine ;
qu’elle a déterminé de même la portion revenant à chacun
d’eux dans ses biens , en appelant à les partager tous
ceux de ses parens dans les trois branches de ses
aïeul et aïeules paternels et de son aïeule m aternelle,
qui seroient en ordre de lui succéder suivant les règles
de la représentation à l’infini , telle qu’elle avoit lieu
dans la ci - devant coutume d’Auvergne , pour être
divisés entre les trois branches au marc la livre-de ce
qui lui est parvenu de chacune desdites branches,
et être subdivisés entre chacune d’elles suivant les mêmes
règles de la représentation à l’infini ; qu’en confirmant
un testament d o n t, ainsi que l'observe la cour d’appel,
les dispositions témoignent fortement que la testatrice
a eu une volonté propre , éclairée et déterminée, cette
cour ne peut pas avoir violé les articles 392 , 895 et
965 du Code Napoléon.
» Attendu que le partage de la succession de MarieGilberte Rollet entre ses légataires, aura lieu suivant
les principes de la coutume d’Auvergne, non par la
force de cette coutume qui n’existe plus comme loi de
l’E m p ire, mais par la volonté de ladite R o lle t, qui,
n’ayant ni ascendans ni descendans, maîtresse par con-
�( 40
)
séquent de disposer à son gré de la totalité de ses biens,
a pu les distribuer par testament entre ceux de ses
parens qu’elle a jugé à propos de choisir, qu’ainsi l’arrêt
attaqué ne fait pas revivre une coutume abrogée, et ne
contrevient ni à l’article 6 du Gode N apoléon, ni à l’art.
7 de la loi du 20 ventôse an 12.
» Attendu que la cour d’appel a jugé que la clause,
telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant coutume d’ A u
vergne , n’étoit dans le testament contentieux qu’une
clause surabondante , qu’il n’y avoit pas dans cet acte
une seule disposition qui ne pût être exécutée indé
pendamment de toute coutume quelconque, et parle seul
fait de la volonté certaine et connue de la testatrice ;
qu’on ne peut voir là autre chose qu’une interpréta
tion du testament sur lequel cette cour étoit appelée à
prononcer ; que quand elle auroit mal à propos sup
posé à ces expressions , les règles de la représentation à
l'in fin i, un sens clair, absolu et indépendant de la cou
tume d’A u v e rg n e , cette erreur ne seroit la violation
d’aucune loi.
» Attendu enfin qu’il seroit superflu d’examiner s’il
y a dans l’arrêt de Riom fausse application de l’article
2 5 , titre 12, de la ci-devant coutume d’A u verg n e , puis
que cette fausse application, fût-elle réelle, il ne peut
résulter d’ouverture de cassation, ni de la violation, ni
de la fausse application d’une coutume abrogée.
» Par ces motifs, la Cour rejette le pourvoi des de
mandeurs. »
A.
C l e h m o n t , de l ’im prim erie de
grande rue Sain t-G en ès.
L a n d r i o t ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Merlin
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
jurisprudence
cassation
Description
An account of the resource
Conclusions de M. Merlin, Procureur général impérial près la Cour de cassation, dans l'affaire des légataires universels de madame de Chazerat, contre le sieur Mazuel, demandeur en cassation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
An 9-Circa 1810
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0632
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53892/BCU_Factums_M0632.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cassation
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
jurisprudence
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53830/BCU_Factums_M0519.pdf
71b817de2333ada14037b1505e050990
PDF Text
Text
MÉMOIRE A CONSULTER,
ET CONSULTATION,
POUR
Les L
égataires
u n iv e r s e ls d e M ad am e D E
C H A Z E R A T ,
V
'
CONTRE
L e S ie u r M I R L A V A U D .
M a d a m e R o llet, épouse de M . de Chazerat, ci-devant
intendant d’A u vergn e, est décédée sans postérité au mois
de septembre 1806.
<
L e système restrictif de la loi du 17 nivôse an 2 ayant
été inodiiié par celle du 4 germinal an 8 , qui permettoit
A
�(2 )
a ceux qui n’avoient ni ascendans ni clescendans, ni frères
ni sœurs, ni dcscendans de frères ou de sœurs, de dis
poser des trois quarts de leurs b ie n s , elle crut devoir
profiter de la latitude que lui donnoit celte loi.
E lle fit un testament olographe le 26 messidor an 9.
A p rès un grand nombre de legs particuliers, dont le dé
tail est superflu, elle lègue l’usufruit de ses biens à son m ari,
E t elle dispose de la propriété en ces termes :
« Quant à la propriété de mes b ien s, mon intention
» étant, autant q u i l dépend de m o i, de les faire retour» ner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils m e sont pai’venus, je donne et lègue tout ce
» dont il m ’est permis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8, à tous ceux de mes parens de la branche
,, de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
„ aïeule m aternelle, qui seroient en ordre de me suc»
.»
»
»
»
»
v
céder suivant les règles de la représentation à. l’infini,
telle, q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume
d Auvergne, pour être partagé entre les trois brauc lie s , au marc la livre de ce qui m’est parvenu de
chacune desdites branches, et être ensuite subdivise
dans chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la
représentation à l’infini} et néanmoins, je veux et en-
» tends q u ’avant la division et subdivision, il soit pris
» et prélevé sur la niasse totale des biens compris au
,,
»
»
»
présent le g s, d’abord le montant de mes legs particuliers, cl ensuite le sixième du surplus, que je donne
et lègue au citoyen Fiiirudeche de Grom ont fils aîné,
et au citoyen Sablon - D ucorail a m é , chacun pour
» m o itié , etc. »
�(3 )
M me de Chazerat a fait depuis différons codicilles.
Par les deux prem iers, des 17 floréal an 10 et 14 messi
dor an 11 , après quelques legs particuliers, ou quel
ques changemens à ceux déjà laits, elle persiste au sur
plus dans toutes les dispositions contenues dans son tes
tament.
E t dans le troisièm e, du il\ messidor an 1 1 , postérieur
à la promulgation de la loi du i floréal an 1 1 , sur
les donations et testam ens, elle s’exprim e en ces termes :
« L a-n ouvelle loi m ’ayant accorde la faculté de dis» poser de la totalité de mes biens, je veu x et entends
» que le legs universel que j’avois fait par le susdit tes» tam ent, en faveur de mes parens de l’estoc de mes
-» aïeul et aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon
» aïeule m aternelle, de tout ce dont il m’étoit permis
» de disposer p a r la loi du t\ g e r m i n a l an 8, ait son effet
» poui la totalité de mes biens, sauf les divisions et sub» divisions à faire entre mesdits héritiers, de la m anière
3
»
»
»
»
expliquée audit testament, sauf aussi mes legs particu liers, et les dispositions par moi faites en faveur
de mon m a ri} à tout quoi il n’est rien d é r o g é par
le présent codicille. »
A p rès le décès de M mo. de C h azerat, M . de Chazerat
s est mis en.possession de ses biens, pour en jouir en
(lu■
aUté (Tusu(Vni tier.
dispositions testamentaires ont p a r u pendant long
temps a l’abn de critique.
Ce u u
q u’;ui rnois de janvier 1808, qu un cession'
naire de droits litigie u x, agissanl au nom d’un sieur IVlirlavaud, l’uu j üs
second mariage de Phili-,
A 2
�(4)
bert M a rcelin , aïeul maternel de M m0 de Chazerat, a
cru pouvoir demander la nullité du legs universel de
la propriété de ses biens, et cela sur fe"~fondement que
ce legs universel étoit fait en haine et au mépris des
nouvelles lois.
E t cette prétendue nullité a été accueillie par le tri
bunal d’arrondissement de R iorn, q u i, par son jugem ent
du 22 juin dernier, sans s’arrêter au testament de M me de
Chazerat, du 26 messidor an 9, et à son codicille du 14
messidor an 1 1 , q u i ont été déclarés nuls, quant au le^s
universel, a o r d o n n é le partage de ses b ien s, confor
m ém ent aii Code civil.
L es légataires universels, dépouillés par ce jugem ent
se proposent d’en interjeter appel.
Ils demandent au conseil s’ils y sont fondés.
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a vu et examiné
le testament, les codicilles, le jugem ent et le m ém oire
à con sulter,
que le succès de l’appel que se proposent
d ’interjeter les légataires universels de M m0 de Chazerat
ne peut la ire la matière d’un doute raisonnable.
Si on avoit besoin de justifier M mo de Chazerat du re
proche d’avoir fait son testament en haine des nouvelles
E st d avis
lois , on diroit qu’elle a déclaré form ellement qu’elle entendoit se conform er à là loi du 4 germinal an 8, qui lui
perincttoitde disposer des trois quarts de scs biens, tandis
que la Coutum e qui les régissoit, ne lui auroit permis de
disposer que du quart p a r testament j
�(5 )
Que par respect pour cette l o i , et pour les autres lois
nouvelles, elle déclare qu’elle n’entend disposer de ses
biens qu autant q u il dépend d elle ;
Quvi par déférence pour les nouvelles lois qui ont aboli
la forclusion, elle rappelle à sa succession tous les descendans de ses aïeul et aïeule paternels et de son aïeule ma
ternelle , sans distinction des se x es, des filles foi closes et
de celles qui n e l’étoient pas*,
Qu^elle n’em ploie dans son testament et dans tous ses
codicilles d’autre date que celle du calendrier républicain ;
Q u ’elle emploie les expressions du régim e républicain,
en qualifiant de citoyens M M . Farradèche de G ioinon t
et Sablon-Ducoi*ail, les seuls de ses légataires universels
qui soient désignés par leur nom.
O n ajouteroit que si quelqu’une des dispositions du
testament de M m0 de Chazerat pouvoit être considérée
comme faite en haine dès nouvelles lois, ce seroit sans
doute celle par laquelle il est dit qu’elle entend qu’il soit
3
'distribué chaque année après son décès o setiers from ent
et 10 setiers seigle a u x prêtres et a u x religieuses qui sont
demeurés Jidcles à Vancien culte de la religion catho
lique , apostolique, et qui par cette raison ont été privés
de leur traitement ;
Q ue cependant cette disposition a été f o r m e l l e m e n t ap
prouvée par un décret émané de Sa M ajeste llim p ereu r.
M ais à quoi bon rechercher les motifs des dispositions
de IVl"10 de Gliazerat j il suffit d ’ e x a m i n e r ce qu’elle a fait
et ce qu’elle a pu faire ?
L art. ()iG du Code poi'te: <( -A- défaut d ascendant et
�(
6
5
» de descendant, les libéralités paractes entre-vifs oy tes» tamentaires pourront épuiser la totalité des biens. »
Il y a deux modes de successibilité en collatérale, celui de la lo i, et celui de la volonté de l’homme.
L orsqu’un individu, qui n’aniascendansnidescendans,
m eurt ab intestat, la loi règle l’ordre dans lequel ses biens
sont dévolus à ses héritiers.
S’il a manifesté sa volonté par un testament, la loi se tait;
la volonté du testateur la rem place : dicat testator, et erit
lex .
C ’est dans ces deux mots que consiste toute la théorie
de la législation en matière de successions collatérales.
Cependant le jugem ent que nous examinons fait taire
la volonté de M me de Cliazerat, et préfère aux héritiers
de son choix ceux que la loi ne lui donnoit qu’à dé
faut de dispositions de sa part.
E t on croit justifier c& te interversion de l’ordre de
transmission des biens, établi par le Code lui-même, en
invoquant article G de ce meine C ode, ainsi con çu:
« O n ne peut déroger par des conventions particulières
» aux lois qui intéressent Vordre public et les bonnes
» mœurs. »
Ce principe est com m enté, délayé dans de nom breux
considérans , et répété jusqu’a la satiété.
1
]\]ais jamais on n’en lit une plus fausse application.
Un individu agit contre l’ordre public quand ce qu’il
fait est contraire aux maximes fondamentales du gouver
nem ent, et tend à ébranler l'édifice social.
�(7)
Il agit contre les lionnes mœurs, quand il offense l’iionnêteté publique.
O r, qu’importe à l’ordre public et aux bonnes m œ urs,
que M me de Chazerat ait disposé de ses biens en faveur
de tels ou tels de ses parons, plutôt qu’en faveur de tels ou
tels autres ?
Q u ’on dise, si l’on v e u t, qu’elle en a disposé contre le
vœ u et contre le texte de là l o i , et qu’on mette h l’écart
les grands mots d’ordre public et de bonnes m œurs, alors
on commencera à s’entendre , et la discussion pien d ia le
caractère de simplicité qu’elle doit avoir.
M mo de Chazerat a cité dans son testament la ci-devant
Coutum e d’A u v e rg n e, et cette citation an nu lle,d it-on ,ses
dispositions.
C a r on lit dans l ’article 1.390 du Code , que « les épOUX
» ne peuventplus stipuler d ’une manière générale que leur
» association sera réglée par l’une des coutum es, lois ou
•» statuts locaux qui régissoient ci-devant les diverses par» ties de l’empire français, et qui sont abrogés par le pré» sent Code. »
O n ne se seroit pas attendu a trouver dans cc texte la
nullité des dispositions faites par M m0 de C h a z e ra t en
faveur des consultans.
lCnt, parce que cette lo i, qui est au titre de la commu
naulé, u’a
commun avec les testainens, et sm tout
avec un testament en ligne collatéralle, poux lequel a
loi donne au testateur une latitude sans bornes j
. Q uy celte latitude est telle, qu’aux termes de l’ar
ticle 967 du Code, on peut disposer, soit sous le titic d ius-
�( 8
)
titution, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre
dénomination propre à manifester sa volonté.
2ent, parce qu’il est de principe que les lois prohi
bitives doivent etre restreintes au cas qui y est p ré v u , et
qu’on ne doit pas les étendre d’ un cas à un autre, sur
tout d’une m atière ordinaire à celle' des testamens, où la
volonté est tout.
bluntas in testamentis dominatur.
» T o u t ce qui diminue la plénitude de la liberté est
» odieux et détesté par la loi. » M . d’A guesseau, plai
doyer
.
3ent, parce que la loi de la communauté est du 20 plu
viôse an 12, et que le testament de M me de Chazerat est
du mois de messidor an g , par conséquent antérieur de
plusieurs années;
58
Q u ’en supposant qu’elle fût applicable aux testamens,
et aux testamens en ligne collatérale, on 11e peut raisonna
blem ent exiger que M me de .Chazerat ait dû s’y conformer
avant qu’elle existât.
Car c’est une erreur manifeste de dire, comme on le
fait dans les considérans du jugem ent, que tout ce qui in
téresse la confection du testament, doit se juger d’après
les lois existantes au décès du testateur; tandis qu’il est au
contraire de principe incontestable que la. loi qui est en
vigu eu r au décès du testateur , règle uniquement la
quotité disponible, et que tout ce qui intéresse la confec
tion du testament, ses formes, ses expressions, et le mode
de disposer, se règle par les lois en vigueur au moment où
il a été lait.
M ais i n d é p e n d a m m e n t de ces premiers m o yen s, i l
est facile d’écarter l’application de cette loi au testament
do
�(9)
de M me de Chazerat, par des moyens encore plus di
rects.
Si on analyse le testament et le codicille d e M mede Cliazerat, on y voit qu’elle commence par manifester son in
tention de faire retourner la propriété de ses biens aux
estocs d’où ils lui sont provenus.
Par suite de cette intention qu elle vient d exp iim er,
elle donne et lègue tout ce dont il lui est permis de dis
poser par la loi du 4 germinal an 8.
_
A qui fait-elle ce don et legs ?
A tous ses parens de la branche de ses aïeul et aieule
paternels, et de son aïeule maternelle.
E lle ne les nomme pas chacun par leur nom , et il est
facile d’en sentir la raison; les m orts, les naissances jour
nalières parmi de nom breux h éritiers, auroient pu faire
naître des difficultés, et entraver l’exécution de ses v o
lontés: elle préfère de les appeler à recueillir ses biens par
la dénomination générale de parens de la branche de ses
aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle.
Jusque-là il n’y a rie n , sans doute, dans ce testament,
non-seuleinent qui porte atteinte à l’ordre public et aux
bonnes m œurs, mais qui ne soit en parfaite harmonie
avec les lois existantes alors ou intervenues depuis.
Ce qui suit n’est ni plus illégal ni plus répréhensible.
A p r è s avoir dit qu’elle appelle à r e c u e i l l i r sa succession
ses parens de ces trois branches, M me de Chazerat ajoute,
pour éviter toute équivoque s u r la désignation des parens
appelés, qlle ce Sont ceux qui s e r o i e n t en o ïd ie de lui
succeder, suivant les règles île lu représentation à l injini.
Jusqu’ici , on no trouve encore rien qui offense 1 ordre
B
�( 10 )
public et les bonnes m œ urs, rien qui soit contraire aux
lois.
M me de Chazerat, pouvant choisir parmi tous les être?
vivans ses légataires universels, pouVoit à plus forte raison
les choisir dans sa fam ille, et préférer telles ou telles
branches.
'Son choix fix é, elle avoit incontestablement le droit
d’appeler à sa succession tous les individus de chaque
branche qui seroient existans au moment de son décès; et
le seul m oyen pour cela étoit de les appeler suivant les
règles de la représentation ¿1 1 infini.
Quand le testament de M rae de Chazerat auroit été pos
térieur au C ode, elle auroit été autorisée à disposer ainsi
par le texte formel de l’art. 967, qui lui laissoit le choix de
toutes les dénominations propres à manifester sa volonté.
Xvlais elle ajoute, en parlant de la représentation à l’in
fin i, telle q u e lle avoit lieu dans la ci-devant coutume
d'Auvergne.
Si on en croit les considérans du ju gem en t, il semble
que la terre a dû s’entr’ouvrir au moment où M me de Cha
zerat a transcrit ces lignes fatales; c’est de sa part un
attentat sans exem ple, contre l’ordre public et les bonnes
mœurs ; c’est un blasphème contre la nouvelle législation,
qui appelle la vengeance des tribun aux, et frappe son
testament d’anatheme.
O n croit voir la montagne en travail.
Au*fait. O n a déjà vu que c’étoit en l’an 9 que M m0 de
Chazerat traçoit ces lignes, long-temps avant la loi sur la
com m unauté, insérée dans le Code.
lit on voit dans la discussion qui a eu lieu au conseil
�(
11
)•
d’Etat sur cet article, et par les observations de M . Berlier, que dans les temps les plus orageux de la révolution,
il n’a pas été défendu de stipuler selon telle ou telle cou
tume , m algré la défaveur alors attachée à toutes les an
ciennes institutions.
M . B erlier ajoute que « c’est parce que jusqu’à présent
» il n’y a point eu sur cette matière de nouvelles lois, et
» q u e, pour défendre de stipuler d’après les anciennes,
» par référé et en termes généraux, il falloit bien établir
»» un droit nouveau, etc. »
D ’où il résulte quJen supposant que cette loi nou
velle / uniquem ent créée pour la communauté , fut
applicable au testam ent, m êm e à un testament qui a
pour objet une succession collatérale pour laquelle la
loi donne au testateur une latitude sans bornes , le
rappel d’une ancienne loi dans ce testament seroit sans
conséquence, et il n en conserveroit pas moins toute sa
validité.
Il en seroit de même du codicille fait depuis le Code
c iv il, parce qu’il ne fait que confirm er et étendre à la
fortune entiere de M me de Chazerat, le legs des trois
quarts fait en vertu de la loi du 4 germinal an 8 , et
cela sans qu’on y aperçoive la m oindre trace du rappel des
anciennes lois.
k n second lie u , cet article i3 90 dit seulement que
les époux ne peuvent plus stipuler d u n e manière gé
nérale, qUc leur association sera reglee par lu n e des
coutumes, lois ou statuts locaux qui regissoient ci-devant
les diverses parties du territoire français.
B 2
�( la )
O r, on voit dans la discussion qui eut lieu au conseil
d’état sur cet a rticle, que « chacun conserve la faciiTté
« de faire passer dans son contrat de max-iage les dispo« sitions de la coutume qu’il prend pour rè g le , pourvu
« q u i l les énonce. »
,
A in si, dans le cas m êm e prévu par la loi du règle
m ent de la communauté entx-’ é p o u x , le vice de la con
vention ne consiste pas à r a p p e l e r telle ou telle coutum e,
mais ci la rappeler d’ une manière generate, et sans énon
cer la disposition particulière pour laquelle on l’in
voque.
O r , en
dans la fausse supposition
q u e cette l o i soit applicable à l’espèce, on voit que si
jVIme de Chazerat rappelle dans son testament la coutume
- d’A u v e rg n e , ce n’est pas d’ une manière générale, et
raisonnant^toujoui’S
comme règle unique de sa succession, mais d’une ma
nière particulière , et seulement pour désigner avec
clarté et pi’écision le mode dans lequel elle veut que
ses biens, une fois dévolus aux branches qu’elle appelle
pour les recueillir, soient divisés entre tous les individus
qui les composent, pour qu’il n’y en ait aucun d’exclu.
E lle prend si p e u , en effet, la coutume poux* règle
généi’alc et unique de sa succession, que loin de se con
form er à cette coutum e, elle s’en éloigne en tous
points.
L a coutume d’A u vergn e interdisoit à M m6 de Chazerat
la plus légère libéralité en faveui* de son inaiù, et elle
profite avec autant d’empressement que de reconnoissance de la faculté que la nouvelle loi lui accorde pour
disposer en sa laveur de ¿’usufruit universel de ses biens»
v
�( i
3 .)
L a coutume d’A u verg n e ne permettoit de disposer par
testament que du quart de ses biens, et elle dispose des
trois quarts.
E lle fait p lu s, elle déclare formellement qu’elle fait
cette disposition des trois quarts conformément à la loi
du 4 germinal an 8.
Elle prend donc cette loi pour règle de ses disposi
tions, et nullem ent la coutume d’A u vergne.
M me de Chazerat avoit différentes natures de biens.
D es propres anciens, qui lui étoient parvenus de ses
aïeul et aïeule paternels et de son aïeule m aternelle;
D es acquêts, des contrats sur l ’état et sur particuliers,
et un immense mobilier.
Tous ces acquêts, ces contx*ats, ce m obilier étoient
dévolus par la coutume d’A u vergn e aux parens paternels,
exclusivem ent à tous autres.
O r , M m®de Chazerat, au mépris de cette lo i, dispose
de tous ses biens au profit de ses parens des trois branches
de ses aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule m ater
n elle; elle veut que ces biens soient divisés entre ces
trois branches, au marc la livre de ce qui lui est parvenu
de chacune desdites branches ,* ce qui en assuroit la
majeure partie à la branche de l’aïeule maternelle, qui en
étoit form ellement exclue par la coutume.
Ainsi tout est dans ce testament en sens contraire du
texte et de l’esprit de la coutum e; et loin d e la p re n d ie
poui règle de successibilité cntx’e ses liéx’itiex-s, elle la
fxonde ouvertement dans tous les points.
M mo de C h a z e r a t n ' a pris d ’a u t r e r è g l e pour la quotité
de disposer que la loi du l\ germinal au S»
�( H >‘
E t pour le clioix de ses liéri tiers, elle n’a cherché d’autre
loi que sa volonté*, et cette volon té est absolument en
contradiction avec la coutume (VAuvergne.
L a coutum e d’A u vergn e n’a donc pas été son guide,
sa loi sacrée, l’objet d’une servile adoration, comme le
suppose le jugement.
M ais le sort de sa succession une fois fixé entre ses
parens des trois branches qu’elle a appelées à la recu eillir,
elle a cru devoir expliquer que les divisions et subdivisions
s’en feroient suivant les règles de la représentation à Vinfini.
C ’en étoit assez', elle évitoit par là le détail de tous
les individus qui composoient les trois branches de ses
légataires universels j elle prévenoit d’ailleurs les inconvéniens qui auroient pu résulter des changemens qui
pouvoient arriver dans chaque branche entre son testa
m ent et son décès.
M ais elle a cru devoir donner un plus grand déve
loppem ent à ces expressions, suivant les règles de la re
présentation à Vinfini, et éviter toute équivoque sur ce
m ode de représentation, en indiquant celui qui étoit usité ,
dans la ci-devant Coutum e d’A uvergne.
Cette Coutume n’étoit donc rap pelée, d’une p art, qu’a
vec Vénonciation de l’objet particulier pour lequel on
l’in voquoit, ce qui eût été très-permis, même en contrat
de mariage-, et en réglant la communauté entre époux.
D ’autre part, elle n’étoit rappelée que comme une
indication s u r a b o n d a n t e , superflue si l’on veu t, mais q u i,
telle qu’elle lût, n’a jamais pu nuire à l’objet principal du
testament, à la disposition delà propriété de tous les biens
aux trois branches appelées à les recueillir,
�( i5 )
O r , si la disposition principale estvalable en elle-m êm e,
et indépendamment de l’énonciation surabondante qui
a pu la su ivre, les descendans de Philibert M arcelin ,
aïeul maternel de M me de C liazerat, se trouvent sans
qualité et sans intérêt à contester la prétendue validité
ou invalidité de cette énonciation secondaire, puisqu’elle
n’a pour objet que le mode du partage entre les individus
des trois branches, auquel les descendans de Philibert
M arcelin ne peuvent avoir aucune part.
- Ajoutons que la critique de cette énonciation de la
coutume d’A u v e rg n e , qu’a faite M mede Cliazerat dans son
testament, est d’autant plus déplacée, qu’elle écrivoit ce
testament sous l’empire de la loi du 17 nivôse, qui adinetloit la représentation à l’in fin i, article 82.
Q u en admettant l e mode de p a r ta g e de la représen
tation à l’infini dans les divisions et subdivisions entre
les individus des trois branches appelées à recueillir les
biens de M mc de Cliazerat, on ne peut trouver aucune
diiïerence assignable entre les divisions et subdivisions
a faire conformément à la représentation a l’in fin i, telle
qu'elle avoit lieu dans la ci-devant coutume d ’A uvergne,
et la représentation à l’in fin i, telle q u e lle a voit lieu
d après Varticle 82 de la loi du 17 nivôse.
D e sorte que ces expressions, de la ci-devant coutume
d ’A uvergne, ou de la loi du 17 n ivôse, étoient absolu
ment syn0nymes.
Ce qui justiiieroit de plus en plus M m0 de C liazerat,
s il en étoil besoin, du prétendu délit q u on lui im pute,
puisque son testament étant fait en l’an 9 , sous l’em pire
�( is y
d elà loi du 17 nivôse, et la confection destestamens, quoi
qu’on en puisse dire , ne pouvant se référer qu’aux lois
existantes à cette époque, on ne pourroit porter l’hum eur
et l’injustice jusqu’à lui faire un crime d’avoir rappelé
une disposition des anciennes lo is , qui étoit absolument
conforme à celles de la loi n o u v e lle , qui étoit alors en
pleine vigueur.
L es autres considérans du jugem ent dont se plaignent
les consultans , ne sont fondés que sur des considérations
vagu es, telles que les inconvéniens qui peuvent naître
de l ’ e x é c u t i o n du testament de M me de Cliazerat, à raison
des p r o c è s auxquels il peut donner lieu.
O n parcourt avec affectation la longue nomenclature
de toutes les questions qu’a créées, en matière de succes
sions , la subtilité des praticiens et la funeste abondance
des com m entateurs, depuis la rédaction de la coutume
d’A u verg n e, et on les trouve toutes dans le testament de
M me de Chazerat.
Cependant rien n’est plus simple, d’une exécution plus
facile, et moins susceptible de contestation que l’opéra
tion qu’elle prescrit.
E lle possède des biens propres, provenus de trois estocs:
de son grand-père et de sa grand’m ère paternels, et de sa
grand’m ère maternelle.
Ces biens sont constatés par des partages de famille.
Ces actes sont consignés dans l’inventaire fait après le
décès de M nie de Chazerat. Ils sont d’ailleurs dans les
mains des dcsccndans des trois branches, dont les auteurs
en ont fait le partage avec ceux de JVlme de Chazerat.
A insi,
�»7 5
<
A in s i, rien n’est si facile que de trouver ces bien s, con
sistant tous en fonds de te r r e , qui sont sous les y e u x , et
pour ainsi d ire, sous la main des légataires appelés a les
recueillir
Il n’y a pas plus de difficulté sur la manière de distri
buer ses autres biens, quels q u ils soient, entre les tiois
brandies de ses héritiers.
E lle veu t que la distribution s’en fasse au marc la livre
des propres, c’est-à-dire, par exem ple, que si M
de
Cliazerata laissé pour 600,000 f. de propres, dont ^00,000 .
de l’estoc de l’aïeule m aternelle, 200,000 fr. de 1 estoc e
l’aïeul paternel, et 100,000 fr. de l’aieule paternelle, les
parens de l’estoc de l’aïeule m aternelle prendront la moi
tié de ses autres biens •, les parens de l’estoc de l’aieul pa
ternel un tiers, et les parens de l’aïeule maternelle un
sixième.
Quant à la division secondaire à faire dans chaque
branche, suivant les règles de la représentation à l’infini,
il est impossible d’y trouver le germ e du plus léger procès,
puisqu’elle dépend d’un simple tableau généalogique,
basé sur des actes de naissance et de décès, qui sont des
faits matériels sur lesquels il est diilicile à la chicane la
plus raifinée de trouver prise.
O n ne voit pas d’ailleurs où on a pris qu il faille aa
nuller un testament, parce qu’un praticien avide ou un
acquéreur de droits litigieux peut y trouver des piétextes
de faire des procès et de troubler le repos des 1 ritiers
légitimes appelés par la testatrice h r e c u e i l l i r sa succession.
C est sans doute une sollicitude très-louable que celle de
prévenir et d’éviter des procès dans les familles. M ais
G
�( >8)
faut-il priver les légataires universels de M mo de Chazerat
de 1,200,000 fr. de propriétés, parce qu’il est dans l’ordre
des possibles qu’il survienne un jour quelque contestation
entre les intéressés pour en faire le partage?
C ’est donc en tous points que ce jugement paroît sortir
de la sphère ordinaire des erreurs qui sont le partage de
l’hum aniité
Cependant cette erreur semble accréditée par l’opi
nion d’un auteur, dont l’ouvrage a paru à la veille de
l’aud ien ce, et n’a pas eu sans doute une médiocre influence
sur la d é t e r m i n a t i o n du tribunal (i).
O n lit dans cet ouvrage ce qui suit, tom. , pag. i
:
« Il est bien permis de disposer ù son gré de ses b ens,
» d’après la faculté qu’en donne la loi; mais il ne l’est pas
» de créer un ordre de succéder autre que celui qu’elle
v établit.
3
35
S’il est permis de disposer son gré de ses biens, ce ne
p eu t être que pour changer l’ordre de succéder établi par
la loi.
( Si la loi donne cette faculté de disposer à son g ré , ce ne
peut être que pour faire cesser son empire.
Si on ne p e u t, en cifet, créer en collatérale un oi’dre
de succéder autre que celui que la loi établit, il faut retran
cher du Code le titre entier des Donations et des Testamens, puisque les donations et les testamens n’ont d'autre
but que d’intervertir l’ ordre établi par la loi pour la trans-
( i) T raitJ des Donations et Testam ens, par J. Gronier, (du Puy-de-Dôm e),
ancien jurisconsulte , mombro du T rib u n a to t do la Légion d’honneur.
�( *9 )
mission des biens, et y substituer la volonté d e llio n im e .
A liquando bonus dormitat Jlomerus.
L ’auteur cite ensuite l’art. 6 du C o d e, qui interdit
toutes conventions contraires à l o i dre public et aux
bonnes mœurs.
A b u s étrange des mots et des c h o s e s , auquel on a re
pondu précédem m ent, et sur leq u el il est inutile de
l'evenir.
L a citation que fait cet auteur de l ’art. i
389 n’est pas
plus heureuse.
O n y lit que « L es époux ne peuvent faire aucune
» convention ou renonciation dont l’objet seroit de chan
» ger l’ordre légal des successions, soit par rapport a eux» mêmes dans la succession de leurs enfans ou descen» dans, soit par rapport à leurs enfans entr’eu x , sans pre» judice des donations entre-vifs ou testamentaires, qui
» pourront avoir lieu selon les formes et dans les cas dé>» terminés par le présent Code. »
O utre que cet article n ’a trait qu’à la transmission des
biens en ligne directe, et à l’interdiction qu’il fait atix
époux de donner dans leur contrat de m ariage des lois
particulières à leur postérité \
Q u ’un pareil texte ne peut avoir rien de commun avec
l’espèce qui se p résen te, où il s’agit d’une succession
collatérale dont la transmission dépend uniquem ent e
la volonté du testateur, qui a pu choisir scs liéiitiers non
seulement dans sa fam ille, mais hors de sa fam ille, et
paim i tous les êtres vivans;
Cet article porte sa réponse à l’objection dans les
expressions qui le terminent i Sans préjudice des dona*-
�( 20)
» tions et testamens qui pourront avoir lieu selon les
» form es y et dans les cas déterminés par le présent
» Code. »
E n fin , on oppose encore aux consultans l’article der
nier du C od e, qui porte q u e, « à compter du jour où ces
» lois sont exécu to ires, les lois romaines , les ordon» nances, les coutumes générales ou locales, les statuts,
» les règlemens cessent d’avoir force de loi générale ou
»> particulière dans les matieres qui sont l’effet desdites
» lois c o m p o s a n t le present Code. »
M ais en prononçant que les lois romaines, les ordon
nances et les coutumes cessent d’avoir force de lo i, on a
si peu entendu proscrire la citation de ces anciennes lo is,
et frapper d’anatlième tous les actes dans lesquels on a pu
les rappeler, ou m êm e, si l’on veu t, les prendre pour
règle de ses dispositions ou de ses conventions dans ce qui
n’est pas form ellement prohibé par le C od e, que le droit
romain est encore l’objet principal des cours de législa
tion } que le G ouvernem ent a établi pour l’enseigner des
écoles publiques dans toutes les parties de l’E m p ire , et
que nul ne peut avoir entrée au barreau, ou être admis à
une place de m agistrature, qu’autant qu’il est muni de
diplômes authentiques, qui constatent qu’il en a fait une
longue étude, et qu?il y a acquis de vastes connoissances.
O n terminera cette discussion, qui n’a quelqu’im portance que parce q u ’elle est d’un grand intérêt, par ob
server que si M m0 de Chazerat a traité l’es descendans
du second mariage de Philibert M arcelin, son aïeul ma-
�( 21 )
ternel, moins avantageusement que les descendans de
son aïeul et aïeule paternels et de son aieule m atern elle,
c’est sans doute parce qu’il ne lui etoit parvenu aucuns
biens de cet estoc, et que dans ses principes elle ne leur
devoit rie n , au lieu qu’elle se regardoit comme redevable
de sa fortune aux parens des estocs dont lui étoient par
venus ses propres, parce que c etoit avec ces propres que
s’ étoit soutenue et enrichie sa maison.
A u surplus, elle a pu avoir dautres motifs dont elle
ne devoit compte à personne, pas meme à la lo i, qui lui
laissoit un empire absolu sur sa fortune, et lui p ermettoit
de la transmettre à son gré. D ica t testator, et erit lex .
D élibéré
à Clerm ont-Ferrand, le 29 juillet 1808.
B O IR O T , B E R G IE R , D A R T IS -M A R C IL L A T , /
F A V A R D , M A U G U E , J E U D I-D U M O N T E IX ,
P A G E S , (de R io m ) , A L L E M A N T .
A C L E RM O N T , de l'imprimerie de L a n d r i o t Im p r im eu r de la Préfecture
Libraire, rueSaint-Genès, maison ci-devant
Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Farradèche de Gromont et Sablon-Ducorail. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Bergier
Dartis-Marcillat
Favard
Maugue
Jeudy-Dumonteix
Pagès
Allemand
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultation, pour les légataires universels de Madame de Chazerat, contre le sieur Mirlavaud.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53830/BCU_Factums_M0519.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53829/BCU_Factums_M0518.pdf
e9fd690842b5e9bca8df64778181b075
PDF Text
Text
RÉFUTATION
Des motifs du jugem ent rendu au tribunal de pre
mière instance séant à R io m , le 22 juin 1808,
qui a déclaré les principales dispositions tes
tamentaires de M adam e D E C H A Z E R A T ,
subversives de l’ordre public et de l’ordre
social, nulles et com m e non écrites, par
cela seul que la testatrice, en rendant à trois
branches de ses parens collatéraux les biens
q u 'e lle en avoit reçus, prescrit le partage
entre eu x par souche, dans l ’ordre de la re
présentation
à l’in fin i, telle qu’elle avoit
lieu dans la ci-devant C ou tu m e d ’A u v e rg n e .
M
ad am e de Chazerat , privée d’enfans, n'ayant que
des parens collatéraux éloignés, possédant de g rands biens
d o ta u x , autrefois régis par la Coutume d A u vergn e ,
qui lui in terdisoit toute libéralité envers son époux, et
A
�(2 )
ne lui permettent de disposer enveis d autres que du
quart, par testament, dut voir avec une vive satisfaction
publier la loi du 4 germ inal an 8 , q u i, en lui con
servant la liberté que lui avoit déjà conférée celle du
17 nivôse an 2 , de tout donner à son m ari, y ajoutait
la c o n s o l a n t e faculté d’acquitter les dettes de la reconn o i s s a n c e c t de la justice, en lui permettant de dispo
ser à son gré des trois quarts de sa fortune. Aussi bénitelle cette loi lib érale, e t , sans perdre de tem p s, elle
se livra aux m o u v e m e n s de son cœ ur, de ses affections
les plus n a t u r e l l e s , les plus douces, les plus morales et
les plus justes.
^
_
Son vénérable époux tient la première place dans son
coeur} elle lui donne l’usufruit de tous ses biens, et di
v e r s objets encore en propriété.
X)’un autre côté, sa libéralité se répand en œuvres de
charité : elle récompense la fidélité dès services domes
tiques } elle fait des offrandes à la reconnoissancc et à
l’amitié} elle donne des témoignages d’affection spéciale
à ceux de scs parens avec lesquels elle a des rapports
plus habituels, et termine la longue et honorable série
¿le ces bienfaits, par cette disposition à Litre universel:
Quant à la propriété de mes b ie n s, mon intention
étant autant q u'il dépend de m o i, de les faire retour
ner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
„ desquels ils me sont parvenus, je donne et lègue tout
ce dont il m ’est permis de disposer suivant la loi du
>, /,. germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de
». la branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de
>» celle de mon aïeule m aternelle, qui seroient en ordre
�(3 )
»
»
»
»
»
'»
»
de me succéder, suivant les règles de la représentation à l’infini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
Coutume d’A u vergn e, pour être partagé entre les trois
branches, au marc la livre de ce qui m’est parvenu
de chacune desdites branches, et être ensuite subdivisé
dans chacune d ’elles, suivant les mêmes règles de la
représentation à Vinfini. »
Trois ans plus tard est venu le Gode N apoléon, qui
ne laissant plus subsister de bornes à la faculté de dis
poser, pour ceux qui m eurent sans descendans ni ascendans (« ), perm it à madame de Chazerat de donner
encore un plus grand essor à ses dispositions bienfai
santes. Elle en profite aussitôt par un codicille, oii elle
s’exprim e ainsi :
« L a nouvelle loi m ayant accorde' la fa c u lté de dis» poser de la totalité d t mes b ien s, je 'veux et entends
» que le legs universel que fa v o is fa it par le susdit
» testam ent, en faveur de mes parens de Vestoc de mes
» aïeul et aïeule paternels et de c e u x de Vestoc de
3
»
»
*
»
”
”
”
mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il n iéto it
permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait
son effet pour la totalité de mes biens , sauf les divisions et subdivisions à faire entre inesdits héritiers,
de la manière expliquée audit testament ; sauf aussi
mes legs particuliers, et les dispositions par moi faites en laveur de mon m ari: à tout quoi il n est lie n
nr
/
erogé pai- m0n présent codicille. »
'e cr°ira-t-on ! D es dispositions si naturelles , si sim( a ) Article gtG du Codo Napoléon.
A 2
�(4 )
p ies, si équitables, par lesquelles la testatrice n’a usé
du pouvoir illim ité que la loi venoit de lui conférer
sur ses biens, que
rendre aux différentes branches
de sa la mille ce qu’elle en avoit reçu -, des dispositions
q u e lle a déclaré si form ellement ne faire qu'en vertu
du pouvoir que lui en conféraient les nouvelles lois , ont
été dénoncées à la justice comme un attentat à l’ordre
p u b lic à l’ordre social et aux m œurs, par le dépit de
parens collatéraux à qui la testatrice a cru ne rien devoir,
parce qu’elle n’avolt rien reçu de leur branche.
L e croira-t-on encore ! Cette ridicule dénonciation a
tellem ent fait illusion aux premiers juges, qu’ils ont cru
l’ordre social ébranlé jusques dans ses fondem ens, si la
v o l o n t é de madame de Chazerat, de distribuer ses biens
dans l ’ordre de la représentation à V infini, telle qu elle
¿toit reçue dans la ci-devant Coutume (VAuvergne ,
u’étoit pas promptement frappée d’anatheme.
Ce n’est pas le testament entier qu’ils ont annullé pour
des vices de forme, il est reconnu invulnérable sous ce
rapport.
C e n’ est pas non plus le don universel d’usufruit fait
à MChazerat, ni les nom breux legs particuliers de
la testatrice qu’ils ont condamnés : tous ces legs leur ont
paru à l’abri de la plus sévère critique.
K n iin , ce n’est ni l’excès de la disposition univer7
p o u r
3
selle faite en faveur des trois brandies de parens pré
férées par la testatrice, ni Vincapacité des parens de ces
branches, pour recevoir le bienfait de la lib éralité, qui
ont m otivé la réprobation. Q u’est-ce donc que les pre
miers juges ont frappé d’anatheme ? C ’est uniquem ent
�( 5)
cette locution : J e lègue tout ce dont il m’ est permis de
disposer à tous c e u x de mes païens (de trois bran
ches spécialement désignées ) qui serment en ordre de
me su ccéd er, suivant les règles de la représentation
à l'in fin i, telle q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d’ Auvergne.
O scandale! ô désolation! L a dame de Chazerat, comme
la Pythonisse d ’ E n d o r ( a ) , a évoqué l’ombre des morts,
elle a ressuscité la Coutum e d’ A u verg n e, s’écnoient les
Aristarques dans le p u b lic, et les juges se sont aisse
alarmer par ce bourdonnement.
^
O
déplorable erreur du zèle pour l’inviolabilité des
lois! répondrons-nous : par quel enchantement n avez
vous fait rencontrer que l’illusion à un tribunal qui clicr
choit de si bonne foi la vérité! Approchons la lum ière
des prestiges qui Vont séd u it, nous verrons disparoitre
ces fantômes comme des ombres, et ne laisser aux ver
tueux magistrats q u’ils ont égarés, que le regret d’avoir
embrassé des chimères.
M otifs textuels du jugem ent, en ce qui concerne le legs
universel en propriété', q u i l annuité.
L e legs universel en propriété , porté au testament de madame
de C h a z e r a t , est n u l, d it-o n , « attendu la maxime C° j Sta^ ^
» base de toute législation , et consacrée par l'article G u o e
» N apoléon, que nul ne peut, par des c o n v e n t i o n s particuicres ,
» déroger auoc lois qui intéressent l'ordre public et es onnes
» mecurs, puisque ce qui a été établi pour le bien t e t o u s , ne
» peut pas être interverti par la volonté changeante t es m m us. »
(<*) Premier livre des rois, chap. 28.
�(6 )
Réfutation.
E t nous aussi, prosternés devant cette maxime sacrée,
conservatrice de l’ordre so cial, nous lui rendons un hom
mage solennel : mais, qu’a-t-elle de commun avec le tes
tament de madame de Cliazerat ? En quoi la testatrice
a-t-elle dérogé , par sa volà n té privée, a ux lois qui in
téressent l’ ordre public et les bonnes mœurs? Q u el tort
fait à la société la désignation collective des légataires
universels d’un testateur, par leur qualité de parens
d’une li<me, et leur vocation dans Tordre de la repré
sentation à l’infini, au lieu d’écrire plusieurs pages pour
les dénom m er tous individuellem ent, et désigner par
ticulièrem ent la portion destinée à chacun ? E n quoi
les mœurs sont elles blessées par cette brièveté d’expres
sion aussi commode qu’exacte ?
i rc Suite des motifs.
11 fa u l rcconnoitre incontestablement pour lois d ’ordre p u b lic ,
celles qui ont un rapport direct et spécial à la société en corps ,
dont les conséquences réfléchissent éminemment sur l ’ensemble
des citovens. S i , à quelques égards , on peut regarder les lois
com m e a y a n t pour objet une certaine utilité publique, dans les
unes cependant cette utilité se borne à régler des intérêts privés ,
/ ribus et singulis : dans les autres, au contraire, cette utilité
embrasse la société entière, elle se lie à tous les intérêts, plu -
ribus ut universis. A in s i, lorsqu’un testateur fait la distribution
de ses b ie n s, il use d ’une faculté qui est toute relative à lui seul
et d;ins son intérêt p rivé ; niais le mode dont il se s e r t, l’ordre
q u ’il doit observer dans cette re p a ru tio n , est du domaine public,
qui est pour lui une barrière insurmontable.
�'( 7 )
Réfutation
.
” - <r '
T
Il n’importe nullem ent à la validité du testament de
madame de Chazerat, que ces distinctions aient de la
justesse ou qu’elles en m anquent, et que les lois qui
régissent ce testament appartiennent, les unes au droit
p riv é, les autres au droit p u b lic , lorsque ses disposi
tions "n’offensent ni les lois qui règlent le pouvoir de
dispose!', ni celles qui règlent le mode et l ordre de dis
position à obse'rver. S’il blessoit les unes ou les au tres,
il seroit également réprouvé. M ais que le sieur M irlavaud nous montre celles qui le condamnent •, jusquelà , nous nous contentcTons de lui dire , vous poursuivez
des fantômes.
Suite des motifs.
V o u s voulez des citations? en voici :
« Parm i les lois inviolables, (q u i sont pour un testateur une
3
« barrière insurm ontable), l’ art. i go du C o d e Napoléon a placé
» la prohibition laite aux époux de stipuler entre e u x , d’ une
» manière générale, que leur association sera réglée par une des
» coutumes, lois, ou statuts locaux qui régissoient c i - d e v a n t les
» diverses parties du territoire fra n ça is, et qui sont abrogées par
» le C o d e. »
Refutation.
O rd on n ez • mais nous ne voyons pas dans cet ai tide
une loi prohibitive pour les testateurs, car il ne parle
que des conventions stipulées entre époux par leui con
trat de mariage. O r, les contrats de mariage et les lestamens n’ont lien de commun.
�(8)
3
3e Suite
des motifs.
L ’article i go du C od e s’applique aux testamens, com m e aux
contrats de m ariage, et voici pourquoi : « L ’abrogation de tous les
» statuts locaux, jugés nuisibles tant p arleu r multitude que p a r la
» bizarrerie d ’un grand nombre de leurs dispositions, et l’avantage
» d ’une loi uniform e , long-temps désirée , et profondément sentie,
» entrent évidemment dans l’intérêt commun de la société; et
>, c'est s’élever contre cet intérêt de t o u s , c’est établir un code
« pour s o i , que de faire renaître des lois anéanties, de les tirer
» de l’oubli auquel le corps social les a condamnées en grande con» noissance de cause.
» L e s te s ta m e n s, ainsi que tous autres actes ou contrats, sont
» i n d i s t i n c t e m e n t soumis à ces principes sacrés. L a faction du
» testam ent, com m e le disent les lois romaines, est incontesta» blem ent d ’ordre public. L e premier devoir du testateur est de le
-» reconnoître et de le respecter : de p lu s , les grands motifs qui
» ont dicté l ’art. 1390, relativement au contrat de m ariage, s’ap» pliquent naturellement au testament : l’avantage du p u b l ic ,
» ainsi que la tranquillité des fam illes, ne sont pas moins compro» m is, en rappelant en ternies généraux, dans une disposition
» testamentaire, une coutume abolie, qu’en la reconnoissant dans
» un contrat de mariage ; dans l’un com m e dans l'autre c a s ,
» l ’intérêt public est violé, et la dame de Chazerat s’est constituée
» au-dessus de la volonté générale,
» Soit par son m ¿Pr‘s étudié de la précieuse uniformité de
« nos lo is,
» Soit en reproduisant cette multitude infinie de coutumes >
» et avec elles les contestations interminables que la sagesse du
» législateur a voulu écarter.
Réfutation.
Discutons de s a n g - f r ° i d 3 et prononçons sans nous laisser
dominer par l'enthousiasme qui outre tout : ne voyons
que
�(9 )
que ce qui est, en un mot : il n’en faudra pas davan
tage pour entendre les premiers juges eux-mêmes abju
rer , avec la bonne foi qui les caractérise , l’erreur qui
les a séduits.
L es lois qui restreignent la liberté n aturelle, qui
défendent ce qui de soi n e s t pas illicite , ou qui déro
gent autrement au droit com m un, ne s’étendent pas
hors du cas spécial pour lequel elles ont été portées.
Les lois qui prohibent certaines conventions spéciales ,
ne s’étendent pas non plus à d’autres contrats dont elles
ne parlent point (i).
Encore moins peut - on les appliquer a u x disposi
tions gratuites, qui se régissent par des principes tout
différens de ceux qui règlent les conventions (2) ; voilà
des principes universellement reconnus.
O r , l’article 1890 se trouve dans les deux cas. L a con
vention qu il proliibe pour l avenir, etoit très-usitée sous
l’ancien ré g im e , et n’a rien d’illicite en soi j il suffît de
lire cet article avec attention pour en rester convaincu.
Que porte-t-il en effet ? « L es époux ne peuvent plus
« stipuler, d’une m anière générale , que leu r association
« sera réglée par l’une des cou tum es, lo is , etc. 3 qui
« sont abrogées par le présent Gode. »
(0
V o ir Donnât, livre i e r , titre I e r , section seco n d e, nombre i 5 et iG ,
e» lo » romaines qu’il cite.
W Cela 0*1 sL vrai > que ,es conditions QU les modifications
illicites qui an-
" ,
. 7 M o n t io n s intéressées auxquelles elles sont apposées par contrat
entre-vifs , d-après les articlos , l 5 l ct , l5 5 du code, n’annullent point les dispositions testam entaires auxquelles elles sont a jo u t é e s , et sont seulement
putées tuai écrites dans I05 testamens, d’après l’article 900.
B
ré
�Ne peuvent plus ! pesons bien ces expressions. Si
les époux ne peuvent p lu s , ils pou voient donc, avant la
loi prohibitive, ce qu’elle dit qu’ils ne pourront plus :
la stipulation qu’elle leur interdit, pour l’avenir seule
m ent , sans l’annuller pour le passé , étoit donc p er
mise avant d’être prohibée : donc elle n’étoit pas illicite
en soi et de sa nature ; donc elle ne l’est aujourd’hui
qu’accidentellem ent, et parce qu’elle est formellement
prohibée : donc l’article 1390 du Code qui la prohibe,
restreint la liberté naturelle des conventions, défend
ce qui de soi n est pas illicite.
Disons pins il déroge à la liberté indéfinie des con
ven tion s matrimoniales elles - mêmes , établie en règle
générale par l’art. 1389, qui le p récèd e, et qui p o rte:
« L a loi ne régit l’association conjugale, quant aux
« b ien s, qu’à défaut de convention sp éciale, que les
« époux peuvent fa ire comme ils le jugent à propos. »
Concluons que l’art. 1890 étant une loi qui déroge a u x
reçues générales , au droit com m un, une loi d’exception ,
en un mot -, il appartient, sous tous les rapports, à la
classe des lois dont l’application doit être renferm ée dans
le cas spécial pour lequel elles ont été portées.
D ’un autre c ô té , quand l’article 1890 seroit suscep
tible d’être appliqué à des cas semblables, ad sim ilia ,
l ’extension de cette loi p ro h ib itive, d’une convention
matrimoniale qu’elle ré p ro u v e, à une disposition testa
mentaire dont elle n’a point parlé , seroit encore inadmis
sible j ca r, quelle ressemblance et quelle analogie peut-il
y avoir entre des conventions matrimoniales , qui sont
des contrats in téressés} des contrats synaUagmatiques,
�( 111
des contrats en tre-vifs, formés par le concours du con
sentement m utuel des époux , dans la vue de régler
leur société conjugale pendant leur vie , et les dispo
sitions testamentaires, qui sont des actes à cause de
mort émanés de la seule volonté libérale du testateur,
et dont l’exécution est renvoyée après son décès ? (a)
(a) N ous l ’avons déjà dit (page 9) : dans les contrats in téressé s, les condi
tions ou les m odifications illic ite s annullent la convention principale qui en est
grevée. A u contraire, dans les actes d e lib éra lité, les conditions et les m odifica
tions illicitesn o donnent point atteinte à la d ispo sitio n p rin cip a leklaquelle elles
sont ajoutées. Ces conditions ou m odifications illic ite s y étant réputées non
é c r it e s , aux termes de l’article goo du C o d e , elles doivent être retranchées du
testament. P ar ce retran chem en t, la disposition devient pure et sim p le , et
n'en est pas m oins valable. C ’est ce qu’a vo ien td it avant le Code N apoléon les
lois rom ain es, et particulièrem ent la loi 14e , au d igeste, d e C ondit. instit. ,
ainsi conçue : « Conditiones contra ed icta iniperatorum , aut contra le g e s , aut
tjuœ contra borios m o re s , v e l derisoriœ su n t , aut hujus m odi cjuas prcvtores
irnprobaverunt , pro non scriptis habentur, e t perin de ac s i hereditati sive
leg ato a djectœ non e s s e n t, hereditas leg atu m ve capitur. » C ’est aussi ce
q u ’observent R ica rd , dans son T r a ité des dispositions conven tion nelles, tit. 2,
cliap.
5 , sect. 2 j
D o m a t, dans ses L o is c iv ile s , seconde partie , liv.
3 , tit.
i er,
sect. 8 , n°. 18 j F u rg o le , T r a ité des testam ens, tom . 2 , ch ap . 7 , sect. 2 ,
n°. 125 , etc. etc.
A p p liqu an t ce principe
, nous
en co n clu ero n s , avec r a is o n , que si
d e.C h a zerat, après avoir légué à trois branches de scs parens
madame
l ’u n i v e r s a l i t é
de
ses b ien s, pour les recu eillir suivant les règles d e la représentation à l infini,
avoit 'fait à sa disposition une m odification réprouvée par la l o i , en a jo u ta n t,
te lle qu’e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutum e d 'A u v erg n e, il faudroit tout
s*niplenient regarder co dernier m em bre de la phrase com m e non éc r it, le
trancher, C[ r <!(iu ire p ar conséquent la disposition au prem ier m em bre, qui
P te . « j 0 donne ct |£gu(j tout c0 j ont .j m ,cst p erm;s Je d isposer, à tous ceu x
01
v
6 mes parcns ({]e teUe ct tcUo brancho) qu; scroierit en ordre de me
» s u c c é d e r , suivant les règles de la représentation a l'in fin i» . O r , ce retran
chement no foro;t pas lo p]us légor dlangenlont à I'efiet de la disposition ; car
v e r r a p lu s b a s q u e la représentation à Vinfini n ^ t o i t p a s ( lifïé ie n t o e u c o u -
tumo d A u v e rg n e , do ce q u ’elle étoit partout.
B a
,
�( 12 )
• Écartons donc pour toujours l’argument de parité, qui
a servi de base à la décision des premiers juges*, puis‘qu’au lieu de parités il n’y a que des disparates impos
sibles à dissimuler entre les conventions matrimoniales
et les dispositions testamentaires.
Y a-t-il plus de justesse dans ce qu’ajoute le sieur
M irlavaud , lorsqu’il semble dire : Q u’importe que l’ar
ticle i qo du Code Napoléon n’ait pas été violé par le
testament de madame de C h azerat, avec lequel il n’a
aucun ra p p o rt, s i l ordre public lui-rneme est violé par
ce testament ? H n’en sera pas moins nul $ car on ne
peut pas plus déroger a 1 ordre p u b lic, par des dispo
sitions testam entaires, que par des conventions matri
moniales : l’art. 900 du Code Napoléon le proclame.
3
D ’accoi’d du principe 5 mais venons au fait. Comm ent
madame de Ghazerat a-t-elle violé Vordre public dans
ses dispositions testamentaires?
Elle l’a violé d’abord , nous dit-on , en se constituant
au-dessus de la volonté générale par son mépris étudié
. de la précieuse uniformité de nos lois.
N ous en demandons bien pardon au tribunal j mais
notre vu e est trop bornée pour apercevoir par quelle
disposition madame de Cliazerat a m érité ce reproche.
E lle sJest mise au-dessus de la volonté générale, par
son mépris étudié de la précieuse uniformité de nos
lo is , elle dont la libéralité étoit enchaînée par le statut
local qui régissoit ses biens avant la révolution, et qui
t ie n loin de repousser avec un mépris étudié le bien
fait de la législation nouvelle , dont la précieuse unifor
mité est venue briser ses ch a în e s, l’a saisi an contraire
�(
.3
)
arec transport! Elle qui a étendu ses largesses à mesure
que la faculté de disposer s’est étendue uniformément
dans tout Vempire, par les lois des 4 germinal an 8 , et 16
floréal an 1 1 !
Il n’y a pas moins d’irréflexion dans le reproche adressé
à la testatrice , de reproduire la multitude infinie de
coutumes que le Code p ro scrit, et avec elles les con
testations interminables que la sagesse du législateur
a voulu écarter. U n e seule des quatre cents et tant de
coutumes de France est rappelée dans son testam en t,
et sur le seul point de la représentation à l infini en
ligne collatérale. L ’unité ne constitua jamais une m ul
titude. D ’ailleurs, cette coutume u n iq u e , la danie de
Chazerat ne l’a même pas reproduite d’une manière
générale. Elle ne l’a pas rendue la seule ordonnatrice
de ses libéralités, ¿du contraire f la coutum e abolie , à
laquelle elle s’est référée sur un seul p o in t, condamnoit
presque toutes les dispositions qu’elle a faites, et notamment,
L e legs universel de l’usufruit de ses biens à son m ari,
au profit duquel tout avantage direct ou indirect lui
étoit interdit par cette loi prétendue ravivée j
L ’épuisement total dè ses biens en libéralités testar
mentaires, que la môme coutume auroit réduites au quart ;
Enfin , la confusion de ses propres, anciens et naissans> de ses acquêts , de son m o b ilier, en une seule
massc qu’elle a léguée en pi'opriété à trois branches de
ses paren s pour être partagée entre les trois branches,
au m a r c la livre de ce qui lu i ¿ to it provenu de chacune
elles, tandis que la coutume auroit attribué les meubles
et acquêts aux parons paternels exclusivem ent; qu’elle
3
�(4 )
n’auroit fait rem onter aux e sto cs d’ou ils étoient proven us,
que les immeubles e x is to n s dans la succession seulement,
et qu’elle n’accordoit aux parens du coté de ses aïeules
paternelle et m aternelle, ni la reprise , ni le rem p lo i des
dots m obilières qu’elles avoient portées dans sa famille.
A u lieu de disposer suivant l’ordre établi par la cidevant co u tu m e, elle n’a donc fait aucune disposition
à titre u n iversel, qui ne soit tout à la fois une v io la tio n
ouverte de ce sta tut l o c a l , et le x e ic ic e le plus indé
pendant de la f a c u l t é illim ité e de d isp o ser à son g r é ,
qu’elle t e n o i t du b i e n f a i t des lois nouvelles.
C o m m e n t expliquer après cela le reproche fait à sa
m é m o i r e , de s’être constituée au-dessus de la volonté
générale, par un m ép ris é tu d ié de la nouvelle législation,
et d’avoir rep ro d u it , d ’u n e m anière g é n é r a le , la cou
tume abrogée?
*
4 * S u ite d es m otifs.
Elle a mérité ce reproche, continue-t-on , « attendu que la lu i,
» en laissant au testateur la plus grande latitude dans la disposi» tion de ses biens, en l’établissant l’arbitre souverain de ses der„ nières volontés, lui a cependant donné pour bornes toutes les
» règles qui concernent l’ ordre public, les bonnes mœurs , et
♦
> les formalités des actes ; que c ’est sous ces conditions qu’il a
» reçu de la loi un pouvoir si étendu; qu’il perd son pouvoir, ou
» du moins que ce pouvoir est rendu sa n s'e ffe t, dès qu ’il oublie
» les conditions sous lesquelles il l’a reçu.
»> Que la dame de Cliazerat a méconnu ou méprisé ces prin
ts cip es, lorsque dans son testament et dans son troisième codi» cille, au mépris de la volonté et des intérêts de la so cié té , elle
» a remis en vigueur, en ternies généraux , une coutume abolie,
»' en o r d o n n a n t que ses biens retourneraient aux- vstocs desquels
�( i
5)
)> ils étoient provenus ; qu’ils seraient partagés entre, le s trois
» branches'de sa fam ille qu’elle dénomme, suivant les régies de
» la représentation à l’ infini, telle qu’ elle avoit heu dans la ci» devant Coutume <?Auvergne, et ensuite subdivisés dans cha» cune d’e lle s , suivant les mêmes règles de la représentation
» à l ’infini, ' »
J
Réfutation.
Ce ne sont là que des redites déjà réfutées ; de pures
illusions dans le droit et dans le fait déjà dissipées.
Elles ont pour base, en point de d ro it, la supposition
que toute disposition testamentaire , par laquelle le
testateur oi’donne , en termes généraux , la distribution
de ses biens d’après l’ordre autrefois suivi dans une
coutume abolie par la nouvelle législation, est illicite
et nulle en s o i, parce qu’elle viole l ’ordre public nou
vellem ent établi •, et en point de f a i t , la supposition
que madame de Cliazerat a ordonné la distribution de
ses biens dans l’ordre ci-devant établi par la coutume
d’A u vergn e.
O r , nous croyons avoir déjà suffisamment prouvé que
ces deux suppositions sont deux erreurs, l’une de droit,
1 autre d é fa it. Nous allons cependant y revenir encore,
afin de ne laisser aucun nuage sur ces vérités \ et emprun
tant , pour m ieux con vain cre, les raisônnemens irré
sistibles d’un orateur du trib u n at, lors de la discussion
l° i du 4 germ inal an 8 , nous dirons :
*
L a faculté de disposer de sa propi'iété est une éma" dation directe de la propriété elle-m em e : le droit
" de donner est le m ême que celui de jouir.
“ k e cU-oit de p ro p riété, co n sid éré dans son essence
�«
«
«
«
<t
«
«
«
/<
«
«
«
«
«
( i6 )
n atu relle, le droit de posséder ce qu’on possède,
existe avant toute société. M ais c’est la société qui le
garan tit} et il est simple q u e , pour prix de cette
garantie
la loi civile puisse imposer à Vexercice du
droit de propriété les contraintes et les formes qui
paroissent convenir au m ain tien , et même au plus
grand avantage de la société qu’elle gouverne. >*
« D e là naît la puissance du droit c iv il, non pas sur
le droit de propriété qu’il ne peut détruire, mais sur
toutes ses conséquences qu il dirige, et par conséquent
q u i l peut étendre ou resserrer à son gré.
« L a p rin c ip a le conséquence de ce droit est la transmission de la propriété elle-même , soit qu’elle s’opère
par la volonté du don ateur, soit qu’à défaut de cette
volonté la loi civile la règ le, et la détermine par la voie
de la succession. »
Il
suit, de ces grandes maximes d’ordre social, que
la faculté illimitée qu’a chaque propriétaire de disposer
de ses biens , comme il lui p la ît, daus les formes et par
les voies que bon lui semble , est la règle générale , le
droit commun : Par co n séq u en t, que toutes les lois
c iv ile s , qui donnent des b o rn es, des gênes ou des
formes à cette faculté illimitée , sont des lois limitatives
de la liberté naturelle ; et par une dernière“conséquence,
que tout ’ ce qu elles ne defendent pas expressément
reste permis au testateur. En deux m ots, que l ’ordre
p u b lic , r e l a t i v e m e n t à la fa c u lté de transmettre ses
biens à litre g ra tu it, se compose uniquement des lois
réglementaires et prohibitives que le législateur a publiées
sur la disponibilité des b ie n s, et sur le mode de dis
poser;
�*7
(
)
poser ,• de sorte qu’il est rigoureusement vrai de d ir e ,
avec le n°. 55 du décret du 22 ventôse an 2, qu'en cette
matière la loi valide ce q u e lle n annuité pas.
O r , n’est-il pas de fait constant qu’aucune loi directe
et positive nannulle la disposition d’un testateur qui ,
pour exprim er sa pensée avec plus de précision et en
moins de m o ts, lègue ses b ien s, comme madame de
Chazerat, à certaines branches de ses parens collatéraux
qu’il dénom m e, et qui prescrit le partage entx-e tous ses
légataires, dans le même ordre suivant lequel ils lui
auroient succédé sous le régim e spécial d’une coutume
abolie auquel il se réfère ? D on c la loi valide cette for
mule de disposition, par cela seul qu’elle ne l’interdit
pas •, car , encore une fois , il n’y a de formules de dis
positions , comme de formules de conventions, nulles ,
que celles qui sont spécialement prohibées.
5e Suite
des motifs.
« L e rappel qu*a fait madame de C h a z e ra t, en termes ge’n é» raux , de la coutume d ’Auvergne ( pour régler la distribution
» de ses biens entre ses légataires ) , renferme une résistance réflé>> chie à la 'volonté et
à l ’utilité publique , sous deux rapports
» frappans ; Pun en obligeant ses héritiers de faire la recherche
M de la nature et de l’origine des biens dans chaque estoc , suivant
ta coutume d ’Auvergne, contre la disposition précise du C o d e ;
et 1 autre , en astreignant ses héritiers à faire enlr eux les divi
sions et sous-divisions, suivant la r e p r é s e n t a t i o n à l in fin i,
» dans les principes de la même coutume d ’ Auvergne; or la
coutume d Auvergne avoit, sous ces deux rapports, des maximes
» spéciales et particulières à elle seule, qui s’éloignoient de toutes
« les autres coutumes qui avoient admis la fameuse rè g le , paterna
c
�(
,8 )
» palernis, materna malernis; et que ces principes de la coutume
» ont été reproduits par la dame de Chazerat dans sa famille
» et dans sa succession , com m e un brandon de discorde et de
» contestations. »
» O n objecteroit vainement que la Cou tu m e d’Auvergne n'est
» rappelée dans le testament que com m e une démonstration, un
/) point com paratif, et non com m e loi impérieuse. Raisonner ainsi,
» c ’est jouer sur les m o ts, et abuser des termes; car, comment la
» C outum e d ’Auvergne ne seroit-elle dans le testament que comme
» mode d ’indication, lorsque la dame de Chazerat veut diserte» m e n t, et en termes géminés, que cette Coutume soit la règle
» du partage de ses biens ? lorsque presque tous les appelés par elle
» ont donné à leurs conclusions la forme d ’une demande en par» tage , d'après les maximes de la Coutume d ’A u ve rg n e ? lorsque
» dans le Tait, et dans la réalité, il seroit impossible à ces héritiers
« de faire ce partage, tel q u ’il est prescrit, sans être guidés par
>, la Coutum e d ’Auvergne. A i n s i , c ’est la Coutum e d’Auvergne
» à la main , qu'ils seroient obligés de rechercher quels sont
» les biens qui sont provenus de chacune des lignes favorisées;
» qu’ils seroient obligés de faire uue recherche semblable, pour
» attribuer à chaque b ra n c h e , par la subdivision , les biens qui y
n ont aussi été rapportés ; qu'il faudroit distinguer les dots rao» biliaire ou pécuniaires, qui auront fait souche par double con>r fusion ; qu ’il faudroit égalem ent, dans le cas de la représenta» t io n , statuer si l ’oncle et le neveu, étant en ligne égale, doivent
« concourir ensem ble; si au préjudice d ’une renonciation on peut
» venir par
re p ré se n ta tio n ;
si
le
partage doit se iaire par souche,
» ou bien par tètes, et une multitude d ’autres difficultés sembla*
» blés. Ainsi
».
s ’o u v r i r o i e n t
pour ces héritiers une ample carrière
de débats , aux juges une multitude de questions
é
♦inenses,
» pour la décision desquelles la Coutume d ’Auvergne seroit la
t> seule régulatrice. .
» Qu'on ne peut pas dire que la coutume sera prise ici comme
« autorité seulement , et non com m e loi nécessaire , puisque
�( i9 )
h
cette c o u t u m e , ses u sages, sa jurisprudence seroienb la seule
» règle sur laquelle on devroit se diriger pour suivre la volonté
» et les vues rétrogrades de la testatrice; que la coutume ne seroit
« pas simple renseignement, puisque sans elle , sans s y renfVrjjier,
» on ne pourrait opérer la distinction des b i e n s , éclaircir leur
» origin e, les appliquer aux diverses lignes
,
a u x
différentes bran-
» c h e s , découvrir les individus appelés par la représentation , et
» parvenir enfin à débrouiller les obscurités de ce travail laborieux.
»» L a coutume ne seroit pas un simple m o d e , une c o n d itio n ,
» puisqu’en 'général les modes et les conditions peuvent se con^
» cevoir et s’isoler des dispositions auxquelles ils sont apj o
,
» mais ici le m o d e , la condition prescrite par la dame ce
» zerat sont inséparables; c a r , enfin , si la testatrice a institue^ e
» gataires universelles les trois lignes q u ’elle a affectionnecs, c est
» spécialement pour prendre les biens provenant de chacune d elles,
» suivant la C outum e d ’A u ve rg n e ; c ’est pour les subdiviser en» su ite , d ’après les mêmes principes, d ’après la même origine et
» nature des biens. Ses vrais héritiers seront ceux qui lui seront
« donnés par la représentation de la C outum e d ’Auvergne ; celte
» coutume se lie et s'incorpore donc à tout ce p artag e , et com » mandera à ses opérations. »
Réfutation.
Quoi! le testament de la dame de Cliazerat aura rappelé
la coutume abolie, en termes généraux ; il aura soumis
l’empire de cette loi m o rte, toutes les opérations du pai
tagede sa succession, la recherche de l’origine de ses biens,
leur application à telle ou telle autre branche de païens ,
leur distribution dans chaque branche j il aina imPos ‘ scs
- nombreux légataires l’obligation de s’y soumettre, sans
restriction et sans réserve, lorsque dans le fa it h dame
Chazerat ne s’est référée qu’à une seule des dispositions
G 2
�delà ci-devant coutum e, et qu’elle l’a contrariée sur toutes
les autres, notamment sur la distribution de ses b ien s,
qu’elle prescrit au marc la livre ?
Q uoi ! elle aura montré une résistance réfléchie à la
volonté et à l'utilité p ubliqu es, proclamées par la nou
velle législation , lorsqu’elle n’a pas fait un seul legs qui
ne soit un hommage à cette législation n o u v e lle, et
l’exercice le plus étendu des pouvoirs que les nouvelles
lois lui ont conférés, et que la coutume lui refusoit ?
E n fin , elle aura eu la folie de singer le législateur, de
prétendre re m e ttre en vigueur la Coutume d’A u v e rg n e ,
de lui redonner l’autorité d’une loi obligatoire , parce
q u’elle a emprunté quelques-unes de scs expressions pour
indiquer Tordre dans lequel elle entendoit distribuer sa
succession ? H é! depuis quand une loi n’est-elle donc plus
une règle générale commune à toutes les personnes qui se
trouveront dans le cas qiv’elle a prévu j Commune prœceptum ? Depuis quand le règlement domestique et privé,
que fait un testateur pour le partage de sa seule succes
sion , est-il donc une lo i?
C e n’est pas encore assez de ces inconcevables méprises.
Les premiers juges, égarés par un zèle louable pour l’in
violabilité de la lo i, mais poussé trop lo in , ont accusé les
intentions de la testatrice, pour faire le procès à ses der
nières volontés. A les entendre , son testament jeté dans
ça fam ille, comme un brandon de discorde, ne fut pas
l’effusion d’uii cœur aimant qui vouloit faire des heureux,
mais le délire de la haine du nouvel ordre établi, qui,
pour s’en jouer, voulut livrer son patrimoine à Pembra
sement des procès.
�( 21 )
A ces mots, il nous semble voir l’ombre de madame de
Cliazerat soulever la tête, et répondre aux magistrats:
« M essieurs, je respecte votre saint emportement : le
» m otif en est sublime ) mais daignez entendre mon
» excuse.
« V ou s ne voyez qu’une boutade extravagante de Fliu» m eur contre la législation n o u v e lle , dans ce passage
» calme et mesuré de mon testament : M on intention étant
* de fa ir e
retourner la p ro p riété d e m es b ie n s , autant
» q u i l d ép e n d de m o i , à c e u x de m es parons (¡ui descen » d o ien t d es e sto cs dont ils nie sont p ro v en u s , je donne
» et lègu e c e dont i l ni-est p er m is d e d is p o s e r , à m es p a » rens de la b ra n ch e de m es a ïe u l et a ïe u le p a te r n e ls , et
» de c e lle de m on a ïeu le m a te r n e lle , pour être partagés
» entre le s trois bran ches , au m arc la livre de c e qui
» m 'est provenu de c h a c u n e , suivant le s règles d e la re» présentation à l in fin i, telle q u e l l e a v o itlie u d a n s la
1
» ci-devant C ou tu m e d 'A uvergne.
O
» Pardonnez mon erreur, M essieurs: en m ’exprimant.
» ainsi, j ai cru parler le langage simple et n a ïf de la rai» son et de la justice. Il étoit loin de ma pensée et de mon
» cœ ur, de vouloir outrager la loi nouvelle, méconnoitre
” ou m epriser son autorité, et lui opposer une résista n ce
” rfJ lé c ld c , en prescrivant la distribution des biens que
je lé g u o is , d a n s Vordre de la représentation à l in fin i ,
entre m cs lég a ta ires, puisque ma v o lo n té n’a agi dans
mes disposiiiOÛS dernières, qu’en vertu des pouvoirs illi” mités que la loi nouvelle m ’a cco rd o it, et que la cou
tume abolie me refusoit.
“ k cussé-je offensée, cette loi nouvelle, q u i, donnant
» un libre essor à mes affections, étoit clière à mon cœur.
�( 22 )
I’eussé-je offensée par nies paroles, par la naïveté de
mes expressions , lorsque j’en saisissois le bienfait avec
transport, lorsque le fond de chacune des dispositions
de mon testament étoit un hommage à son autorité, et
que je la bénissois de cœur et d’intention, l’offense se
rait innocente: faudroit-il donc la punir?
» M inistres de la loi sur la terre, vous savez m ieux que
m oi, q u e lle ne frappe jam ais sans avertir. Lorsque je
testai, elle n’avoit p a s proscrit , et elle n’a point proscrit
encore, la formule de disposition q uem ’inspiroit le seul
amour de la ju stice, et non un fol entêtement pour
exhum er la Coutum e d’A u vergn e, ( qu’il n’étoit, ni
dans ma puissance, ni dans mon intérêt, défaire revivre,
encore moins dans ma volonté, puisque je l’ai contrariée
à chaque ligne de mon testament ). Je l’adoptai, cette
maniéré d’exprim er ma p en sée, uniquem ent parce
qu une longue tradition m ’en avoit appris le sen s,
l’étendue, la portée, et q u eje n’en connoissois pas d’au
tre qui remplît plus parfaitement mes ' intentions de
rem ettre à toute la postérité de mes premiers ancêtres,
sans restriction, les biens, ou le remploi des biens , que
j’avois reçus de chaque branche.
» Si j’en avois connu une plus propre à rendre la plé
nitude de mes intentions , je laurois em ployée: mais
j’ose défier les gens de loi les plus exercés, avec toute
des affaires qu’ils ont, et qui me manquoit
l ’ e x p é r i e n
c e
à m oi, j’ose les défier, dis-je, d’exprim er aussi complè
tement ma volonté en d’autres term es, et en aussi peu
de mots. Cependant il lalloit l’exprim er toute entière ,
ma volon té, puisque la loi du 4 germinal an 8 , et l’ar
ticle 916 du Code N apoléon, la déclarent l’arbitre eu-
�'
( »3 )
» prême dè mon testament : et parce que j aurai exp ïim e
» ma v o lo n té , de la seule m anière qui étoit propre à
» éviter toute lacune, toute m éprise, et à me faire en» tendre sans équivoque, j’aurai violé la nouvelle lo i.
» une loi qui,, sans me prescrire aucune formule:sacra» mentelle pour rendre ma pensee, sans m o n in ieid n e
» aucune, s’étoit bornée à me dire : O rdonnez, et vous
» serez obéie ? L a loi permet ce q u e lle ne défend pas ;
» elle v a lid e c e q u e lle n }an n uité p a s , encoie une fois j
» c’est ainsi que l’on raisonne dans le séjour desmorts, ou
» nous sommes à l’abri des illusions dont les vivans sont
» si souvent le jouet. L ’on n’y étouffe pas la loi pai exces
» de précaution et de zèle pour son inviolabilité j et nous
» plaindrions sincèrement les vivans, si les tribunaux
» avoient sur la terre le terrible pouvoir de boulevei'ser
» la société p a r îles p ro scrip tio n s arbitraires , en s’armant
» du prétexte , injurieux au législateur, de faire m ieux ,
» et d’être plus sages et plus prévoyans que lui.
» Je ne réponds rien à votre ingénieuse dissertation,
» sur les distinctions à faire entre les modes et les condi» tions qui peuvent se concevoir et s’ isoler des dispost» tions, d’avec les modes et les conditions qui en sont
» inséparables , parce que tout cela a trop d’espnt pour
“ m oi, qui ne fus qu’une femme sur la terre, et que je
” n a i pas le bonheur de vous comprendre. Mais ce que
» je crois bien com prendre, c’est que la
necon cam
» n o itp asla formule que j’ai ch oisie poui expum ei m.i
»•pensée : et vous, Messieurs ! plus seveies que le l i Dis
» la leur, de quel droit avez-vous refusé de l’absoudre ? ^
» Je n ai pusà rue justifier du reproche qui in est adi esse,
�» d’avoir im prudem ment je té un brandon de discorde
» dans ma fa m ille , par le prétendu cahos dans lequel
»» mon testament l’a plongée; car ce cahos imaginaire n’est
» qu’un prestige. N o n , n o n , l’esprit de vertige ne s’em» parera pas de mes légataires universels-. Ils ne feront
» pas de mon riche héritage la proie du palais, en rani-*» mant des questions usées, sur lesquelles les opinions
« sont depuis long-temps fixées. Quant aux recherches
» qu’ils auront à iairc pour établir le degré de leur pa» renté, e t ju stifier leur successibilité, elles ne diffèrent
» pas de ce lle s q ue sont tenus de faire tous les héritiers
» ah intestat en général, dans les successions échues à
» des parens collatéraux, appelés à succéder par représentation , dans les cas des articles 742 et 743 du Code; o r,
„ puisqu’elles n’empêchent pas de succéder ab intestat ,
» pourquoi empêclieroient-elles de succéder par la volonté
» d’un testateur ? »
6 e S u ite d es m otifs.
« On oppose en vain que madame de Chazerat n’a pas généra» Usé son rappel de la Coutum e d ’ Auvergne, puisqu’elle Ta res» treint à une seule de scs dispositions. C ’est une e r r e u r , car la
« soumission à une coutume prend évidemment la form e de dispo« silion g é n é rale , lorsqu’elle porte sur un objet de disposition
» générale. Or , c ’est pour la nomination de ses légataires univer» sels, que la dame de Cliazerat invoque la Coutum e d ’ Auvergne;
» c’est celte coutune en général qui regleroit leurs qualités et leurs
» avantages. C e tt e disposition prend donc nécessairement un ca» ractère de généralité dans ce partage.
» L a d a m e de C lia ze ra t eû t pu aisément spécialiser sa disposé
» tion ; elle eût pu lé g itim e m e n t faire entre ses héritiers l ’appli
cation
�(
^5 )
» cation de tels ou tels de ses biens , suivant sa volonté ; elle
» eût pu , par cette voie spéciale , faire rentrer dans chaque
» ligne, dans chaque b r a n c h e , la portion de fortune qu ’elle en
» avoit reçue ; rien ne la gênoit dans cette manière de disposer ;
» par là elle eût rempli ses intentions, respecté l’ordre p u b lic ,
» étouffé le germe de mille contestations dans sa famille ; mais au
» lieu de faire ce qui lui étoit p e r m is , elle a préféré de faire ce qui
» lui étoit défendu. D e telles dispositions ne peuvent être protégées
» par la loi qu’elles offensent. «
Réfutation.
Puisque les motifs du jugem ent se répètent sans cesse,
nous sommes forcés de nous répéter aussi, et nous dirons :
C ’est à pure perte qu’on s’épuise en raisonnemens subtils ,
pour trouver dans le testament de madame de Chazerat
un ra p p el de la cou tu m e d ’ .Auvergne en term es g én éra u x.
Quand cela se ro it, on en concluroit encoi’e mal à.
propos que le legs universel, porté par ce testament et
par le codicille qui le suivit, est n u l-, car aucune loi ne
defend à un testateur de se référer d’une manière géné
rale à une coutume a b o lie , pour la désignation des
héritiers qu'il choisit par sa propre v o lo n té, et la dis
tribution de ses biens. L ’adoption de telle ou de telle
coutume , d'une manière générale, n’est interdite qu aux
époux , pour le régime de leur association conjugale.
5 nous avons démontré que de pareilles lois prohi
bitives de ce qU{ seroit licite en soi ( cessant la prohi
bition ) , üc s’étendent pas d’un cas à l’autre , et surtout
des contrats de mariage aux testamens.
Ce n est pas tout : les prem ici’s juges n’ont pas scuD
�J'.'rnent erre Vlans le d ro it, ils se trompent encore évi
demment sur le fa it, lorsqu’ils veulent que la dame1
de Chazerat se soit référée d’une inanière générale h. la
coutume d’A u vergn e , pour la désignation de ses héri
tiers et la distribution de ses biens , tandis qu’elle n’a
presque pas fait une seule disposition qui ne soit en
contradiction avec l’ordre successif de la coutume ;
qu’elle ne s’y est référée que pour indiquer., par une
dénomination co lle ctiv e , ceux de scs parens qu’elle
entendoit p ré fé re r, et pour suppléer à une nomen
clature individuelle qu il lui eût ete impossible de faire
fivec certitude dans le sens qu elle 1 entendoit, sa volonté
étant de rendre participons à ses libéralités, ceux même
qui naîtroient dans l’intervalle de la faction de son tes
tament à son décès.
’j e Suite des motifs.
« En vain on prétend excuser la dame de Cliazerat, en allé—
» guant qu’on ne peut lui faire un reproche d ’avoir établi le par» tage de ses biens sur la représentation à l’ infini, puisque celte
« représentation étoit admise par la loi du 17 nivôse an 2 : cette
» justification ne peut être adm ise,
« 1”. P a r c e q u ’au décès de madame de C h a z e ra t, ce n ’étoil plus
» la loi du 17 nivôse qui devoit régler soit la fo r m e , soit le mérite
» de ses dernières dispositions; c étoit le Code civil, sous l ’empire
» duquel elle est décédee, et cjue son testament olographe a reçu
» une date.
» 2’ . L a testatrice est loin d avoir puisé dans la loi du 17 nivôse
» la représentation q u ’elle ordonna : cette l o i , dans toutes les
» lignes, toutes les b r a n d ie s , sous tous les points de v u e , établit la
» représentation sous le rapport de la proximité du sang. A u con*
�(
27 )
» traire , la coutume d ’Auvergne attachoit la représentation à
» l’origine et à la nature des biens. 11 falloit avoir pour auteur
» celui duquel les biens provenoient. L a loi du 17 nivôse avoit
» à cet égard puisé sa représentation dans l ’affection naturelle,
» l’avoit liée aux personnes. L a coutume d ’Auvergne l’avoit fait
» dépendre des usages féodaux, l’ avoit attachée à la glèbe, plutôt
» qu'aux liens du sang. On ne peut donc trouver aucune analogie
» entre ces deux représentations, dont la source comme les efiets
» étoient différens. »
,
Réfutation.
Q u ’a-t-on voulu dire avec la représentation prétendue
attachee par la coutume d’ Auvergne à l’ origine et a lanature des biens , plutôt q u a u x personnes j à la glèbe,
plutôt q u aux liens du sang ? Prétend-on qu’en COUume d 'A u vergn e il y avoit des générations de champs
comme des générations d’ hom m es? Q ue ce n’étoient pas
les personnes qui y succédoient par représentation au*
personnes décéd ées, propriétaires, mais les champs qui
succedoient aux cham ps? L e champ neveu, q u i partageoit avec le champ frère la succession du champ oncle?
Jamais les pages de la coutume d’A u vergn e n’ont été
a i l l é e s par ce galimathias inintelligible, et ce n’est
pas non plus ce qu’a dit le jugem ent de premiere ins
tance, n { ce
a v0l,iu t]jr a
GePcndant il n’en est pas moins erron é, lorsqu’il
regarde la représentation à l’in fin i, qu’adinettoit la cou
tume d’A u v e rg n e , comme différente dans sa nature et
ses effets de celle qu’admeltoit la loi du 17 nivôse. Elle
ne diiïère même pas de celle qu’admet encore le Gode
D 2
�(
)
civil. Pour nous en co n vain cre, mcltons-nous le texte
de la coutume sous les yeux.
« L e mort saisit le v i f son plus prochain lignager
<« habile à lui succéder, » porte l’art. Ier, titre 12. L ’art.
explique ces mots habile à succéder, en disant : « 11
« y a deux manières d’hériter , l’une du côté paternel,
« et l’autre du côté m aternel, et retournent les biens
« à Vestoc dont ils sont p ro ven u s, tellement que les
« prochains lignagers du cote paternel succèdent ah
« intestat ès biens provenus dudit estoc , et non les
»> parens du côté m atern el, et è contra. »
M ais ce n’est pas le lignager le plus prochain de f a i t ,
h l’instant du décès , qui succède exclusivem ent dans
chaque ligne ou dans chaque branche ( appelée estoc par
la coutume ). L ’art. 9 admet les parais lignagers à suc
4
céder par représentation de leurs auteurs , en ces termes:
« Représentation a lieu tant en ligne droite que
« collatérale, us que ad injinilum ( ù l'infini ) audit pays
a coutumier. »
E t en quoi consistait cette représentation ? L e com
mentateur Chabrol va répondre.
« On entend assez (nous d i t - i l ) , ce que c e s t que
« la représentation. Elle forme une espèce de fiction ,
«
«
«
«
«
«
par laquelle 011 est mis au lieu et en la place de
celui dont 011 descend. C ’est un moyen par lequel
le parent qui se trouve plus éloigné de celui auquel
il s’agit de su ccéd er, s’en rapproche et se trouve
appelé à la succession, en remontant à l’ascendant
duquel il descend, et qui étoit on degré égal avec
les autres héritiers ou leurs auteurs. Comme les ex cm-
�»9
«
«
«
«
«
«
«
«
»
«
«
(
0
pies sont toujours plus instructifs que les définitions,
continue-t-il, il n’y a qu’à supposer trois frères, P ierre,
P a u l et Jacques. Pierre vient à m ouiir sans enfans,
Paul lui survit*, mais Jacques étoit mort avant lu i,
laissant des enfans. Si la représentation n’avoit pas lieu ,
la succession de Pierre appartiendroit à Paul seul (comme
lignager plus prochain que ses neveux ). M ais par
le m oyen de la représentation , les enfans de Jacques
succèdent conjointement avec l u i , et de la même
manière que si leur père avoit survécu à P ien e. Il
en est de même dans tous les autres d egres, et à
« V in fin i, dans cette coutume. »
Ouvrons maintenant la loi du 17 nivôse an 2 , nous
trouverons à l ’art. 77 et à l’art.
presque les mêmes
expressions, et absolument la même explication de la
nature et des effets de la représentation.
L a représentation a lieu jusq u'il Vinfini en ligne col
latérale, est-il dit dans l’article 77 , et l’article
ajoute:
« Par l’effet de la représentation , les représentons en» trent dans la p la c e , dans le degré, et dans tous les
» droits du représenté. L a succession se divise en au»> tant de ‘parties qu’il y a de branches ap p elées a la
“ re c u e illir, et la subdivision se fait de la même ma" ni ère entre ceux qui en font partie.
l’article 88 achève ainsi le d é v e l o p p e m e n t . « Ces
» règles de représentation seront suivies dans la sub
» division de chaque branche. O n p a rta g es d a b o id la
■
> portion qui est attribuée à ch acu n e, en autant de
» parties égales, que le ch ef de cette branche aura laissé
» d enfans , pour Attribuer ch acu n e de ces pai tics a tous
83
83
�( 3o )
» les héritiers qui descendent de l’un de ces entons , sauf
» à la soudiviser encore entre eux dans les degrés ul» térieurs, proportionnellem ent aux droits de ceux qu’ils
» x’eprésentent. »
Q ue l’on compare maintenant de bonne foi et sans pré
vention la manière de succéder par représentation à Vin
fini de la Coutume d’A u v e rg n e , avec la manière de suc
céder aussi par représentation à l infini de la loi du 17
nivôse an 2, et qu’on nous dise ou est la différence ?
L es esprits les plus subtils n’y en apercevront as
surément aucune.
A llons plus lo in , et lisons le Code Napoléon. Il parle
aussi de représentation, et i l i a définit à l’article 7 3 g ,
précisém ent comme C h abrol, et comme la loi du 17 ni
vôse, en ces termes : « L a représentation est une fiction
» de la loi, dont l’effet est de faire entrer les représen» tans dans la place, dans le degré et dans les droits du
» représenté.
L ’article 740 l’admet à l'infin i, 'comme la Coutume
d’A u v e r g n e , en ligne directe.
4
I/articlc 7 2 l’admet également d’une manière illi
mitée t en ligue collatérale, au profit des enfans et des
cendait S des frères ou sœurs du défunt, conséquemment
¿1 Vinfini, pour cette classe de parens -, et l’article 7^3
déterminant scs effets, veut que dans tous les cas ou
elle est a d m ise, le partage s'opère par souche. E n fin ,
» que si une môme souche a produit plusieurs brandies,
» la subdivision se fasse aussi par souche dans chaque
» branche, et que les membres de la môme branche
» partagent entre eux par tête. »
�(
3.
)
• Que voit-on encore dans ce développem ent? La re
présentation, telle que la Coutume d’A u vergn e l’admettoit, quant à ses effets, avec la seule différence, que
la coutume d’A u vergn e l’admettoit en faveur de tous
les parens collatéraux en gén éral, et par conséquent
aussi-bien en faveur des descendans d’oncles, ou de
grands-oncles du défunt qui auroient été appelés à lui
succéder à défaut de lignagers plus pi*ocliains, s’ils lui
avoient survécu, comme en faveur des descendans de
ses frères ou sœurs} au lieu que le Code Napoléon n’ac
corde le droit de succéder par représentation qu aux
seuls descendans des frères et sœurs du défunt. D e sorte
qu’il est vrai de dire que la représentation du Code et
celle de la coutume ne diffèrent, ni par leurs effets, ni
par leur d u ré e , qui est également à Vinfini dans les
classes de parens où elle a lie u , ni par leur nature ,
puisqu’elles sont attachées l’une et l’autre à la filia tion
des personnes, et nullement à la filiation des biens} mais
que le Code ne l’applique pas à un si grand nombre de cas.
D o n c, c’est à tort qu’on reproche h la dame de Cliazerat d’avoir fait revivre un genre particulier de repré
sentation, qui n a aucune analogie avec la n o u v e l l e lé
gislation , puisque la loi du j 7 nivôse et le Code Napo
léon lui-même en ont admis une absolument identique.
Encore plus mal à p ro p o s, on reproche à madame
Chiiy.yj’.jf- d’avoir voulu laire revivre une représenta
tion que la Coutume d’A u verg n e avoit attachée à la glèbe,
et fa it dépendre des usages féoda ux. L ’avons-nous bien
entendu ?........ L a coutum e nvojt fai t dépendre des usa
ges féo d a u x la représentation de» personnes, qu’elle ac-
�cordoit aux roturiers comme aux nobles, et pour re
cueillir les biens roturiers comme pour recueillir les biens
nobles !
Devons-nous qualifier cette étrange imputation ? n o n ...
Laissons ce soin au lecteur.
Enfin , on semble nous dire encore que si un bon
citoyen peut entendre les mots représentation à l ’ infini,
sans frissonner, dès que le Code Napoléon les em ploie,
«ju moins ne peut-il pas entendie un testateur prescrire
le retour de ses biens a u x estocs desquels ils sont pro
venus. H é ! m essieurs, soyez d’accord avec vous-mêmes :
madame de Chazerat, suivant vous, pouvait faire rentrer
dans chaque lig n e, dans chaque branche ou estoc de ses
parens, la portion de fortune q u e lle en a reçue \ et vous
frappez son testament d’anathême, parce qu’elle a voulu
ce que vous reconnoissez qu’elle pouvoit ! Pardonnez ma
franchise, messieurs, il me semble que ce n’est pas être
conséquens.
8e Suite des motifs.
« On oppose sans raison q u ’on ne peut demander la nullité de
« la clause du testament dont il s’agit, puisqu'elle n'est pas pro» noncée par la loi : c’est encore une illusion. 11 y a nullité absolue
» dans la violation de toute loi négative prohibitive; en pronon-
» /cant
»
peu t , la loi use de toute sa puissance. Elle impose
un devoir indispensable, elle écarte tout prétexte; excludit po~
tentiarn juris et facti. O r l’art. 6 du C od e dispose q u ’on ne
peut dérober par des conventions particulières aux lois qui in téressent l’ ordre public ; l’article 1390 statue de m ê m e , que
»
les époux
»
»
»
on
ne
ne peuvent p a s
stipuler d ’une manière générale, que
» leur association sera réglée par l ’une des coutumes abolies ; et
�( 33 )
» ces termes im p érie u x, on ne peut et ne peuvent, renferm ent
»> sans doute une prohibition énergique , une impossibilité de faire
» de semblable disposition ; ils prononcent implicitement une nul-
» lité insurmontable.
Réfutation.
Puisqu’on ne se lasse point de répéter toujours la même
ch ose, ne nous lassons' point de répéter la m ême ré
ponse , et de redire : L ’application des lois prohibitives,
que l’on invoque ici pour la troisième ou quatrième fois,
est faite hors du cas pour lequel elles sont portées ; elles
n ont rien de commun avec le testament de madame
de Chazerat : qu’on cesse donc enfin d’en abuser, car
les lois prohibitives ne s’étendent pas.
9
S u ite et f in d es m otifs.
« L a nullité du legs universel qui se réfère à la coutume ne
peut etre ecartee par l’article 9 6 7 , sur lequel on veut encore
« s appuyer. C e t article p e r m e t , à la vérité, au testateur de m a» mfester sa volonté sous toute espèce de titres et de dénomi» nations; de sorte que soit que le testateur dispose à litre de
>> legs, de do n a tio n , d ’institution d ’h éritiers, et sous toute au« tre qualification, peu importe; sa volonté connu e, si elle est
« conforme à la lo i, quœ légitima est, reçoit toujours son exécu» tion : mais disposer sous toute dénom ination, n ’est pas faire
” toulp espèce de dispositions. En permettant au testateur de se
servir de toutes expressions pour dicter ses intentions , la loi
,,
Pas aulorisé à disposer sous un mode et dans une latitude
» te s C ln'°* ^ eS mœu^s,
publique, les formalités des ac^ I . * et *°ut ce qui intéresse l’ordre social, sont toujours pour
ui une barrière invincible. C 'est d ’après ce principe tutélaire
*IUC
article 900 a voulu que dans toutes les dispositions enlre-
K
�(
34
)
» vifs, ou testamentaires, les conditions contraires aux lois ou
» aux mœurs soient réputées non écrites.
» C ’est ce que la dame de C h azerat a méconnu ou m ép risé,
» en faisant l’institution d ’héritier universel dont il s’a g i t e l l e a
» violé l’ordre public , en subordonnant sa disposition aux règles
» d’une coutume abolie; elle l ’a violé en rejetant avec affecta» tion le bienfait de la loi nouvelle ; elle l’a violé en prescrivant
» une form e de p artage, qui seroit une source féconde de con» testations. L a justice com m e la loi ne peuvent accueillir une telle
» disposition ; il faut donc la regarder comme non écrite dans le
»> testament de la dam e de Cliazerat.
Réfutation.
Ces motifs ne sont pas nouveaux. On n’y voit que
le résumé de ceux que nous avons déjà réfutés. Faut-il
cependant y répondre encore, au risque de répéter sans
cesse les mêmes choses en d’autres termes ? nous dirons :
O n avoue qu’il est permis à un testateur de se servir
de toutes expressions pour dicter ses intentions, et
que sa volonté reçoit toujours son exécution , en quel
ques termes qu’il l’ait manifestée , pourvu qu’elle ne
blesse ni les m œ urs, ni l’ordre public , ni les lois pro
hibitives , ni les formalités des actes.
Soyons conséquens, et nous concluerons de là , non
comme les premiers ju ges, que les dispositions testa
mentaires de madame de Chazerat doivent être frappées
de proscription ”, mais au contraire qu’elles doivent être
maintenues et recevoir leur entière exécution , nonobs
tant que la testatrice ait emprunté de la coutume d’A u
vergne les expressions dont elle s’est s e rv ie , soit pour
abréger la nomenclature des légataires universels qu’elle
�r35D
'Vouloit ch o isir, qu’elle avoit clairem ent désignés, et
dont elle vouloit qu’aucun n’échappât à ses bienfaits \
.soit pour régler l’ordre et la proportion du partage de
ses biens qu’elle entendoit leur prescrire} et pourquoi?
i°. Parce que son testament ne contient aucune dis
position qui ne soit conforme à la nouvelle l o i , soit
pour le fo n d , soit par l’application qui en est fa ite ,
puisque la loi lui permettoit de disposer de tout ce dont
elle a disposé, et en faveur des personnes au profit des
quelles elle en a disposé.
2°. Parce qu’elle n’a pas plus violé la loi par la forme
de sa disposition que par le fond } car nous persistons
à n ie r , avec l’assurance de la conviction , que madame
de Cliazerat ait blessé, dans son testament, ni les mœurs,
ni 1 ordre public , ni aucune loi prohibitive, en em
ployant quelques expressions de la coutum e d’A u vergn e
pour manifester sa volonté.
Elle ne les a point violés en subordonnant sa dispo
sition à titre universel, aux règles d’une coutume anéan
tie , comme le supposent les premiers ju g e s , soit parce
que cette pretendue subordination de la distribution de
ses biens aux règles de la coutume d’A u v e rg n e , est
purement im aginaire, soit parce qu’en la supposant réelle
elle ne violeroit aucune lo i, ni d’ordre public, ni d’ordre
p r iv é , dès qu’aucune loi quelconque ne l’a interdite.
Elle ne les a pas violés en rejetant avec affectation le
bienfait de la l 0i nouvelle, comme on le lui reproche
en core, puisque son testament n’est d’un bout à 1 autre
que 1 exercice de ce bienfait.
EUe ne les a point violés e n fin , en prescrivant un
�(
36 )
ordre de partage qui soit plus qu’un autre une source
de procès •, car depuis long-temps l'ordre de partage ,
par représentation à l 'infini , étoit u sité, connu , fixé ,
et pratiqué sans qu’il en résu ltât ni trouble ni désordre
dans les familles.
Concluons que les premiers juges ont constamment
abandonné la réalité pour courir après des fictions dans
l’interminable série des motifs qui ont inspiré leur déci
sion. L a cour d’a p p el p o u r ro it-e lle donc hésiter a rétablir
la vérité et les p rin cip e s dans tous leurs droits, en fai
sant re n tre r dans le néant un jugement qui les renverse ?
A C le r m o n t-F e r r a n d , le 8 octobre 1808.
P a r le jurisconsulte ancien ,
B E R G IE R .
A C L E R M O N T , de l'im prim erie de
Landriot,Imprimeur de la Préfecture,
et L ib raire , ruo S ain t-G en è s , maison ci-devant Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Réfutation des motifs du jugement rendu au tribunal de première instance séant à Riom, le 22 juin 1808, qui a déclaré les principales dispositions testamentaires de Madame De Chazerat, subversives de l’ordre public et de l’ordre social, nulles et comme non écrites, par cela seul que la testatrice, en rendant à trois branches de ses parens collatéraux les biens q u 'elle en avait reçus, prescrit le partage entre eux par souche, dans l ’ordre de la représentation à l’infini, telle qu’elle avait lieu dans la ci-devant Coutume d’Auvergne.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0518
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0632
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53829/BCU_Factums_M0518.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53828/BCU_Factums_M0517.pdf
0f49fce5d346ea199058a0f64d750b4b
PDF Text
Text
UN DERNIER MOT
Pour les Légataires universels de Madame
DE
C HAZERAT.
« M a d a me de C h azerat, malgré scs nombreux teslamens et
» codicilles , n’a point disposé de ses biens ; elle en a laissé la dis—
» position à la coutume d’A u verg n e, à une loi abolie ; elle a
» blessé en cela l’ordre public et les bonnes mœurs. il faut donc
» la considérer com m e décédée ab intestat ; dès-lors le jugement
» qui a ordonné le partage de ses biens , conformément au Code
» c iv il, doit être confirmé. »
C ’est à ce sophisme, délayé dans soixante-quatre pages d’im
pression, que se réduit la consultation des sieurs M i r l a v a u d , et
Mazuel , son cessionnaire.
L'homme de sens qui est étranger à toutes les a r g u t i e s du.
Palais, répond : Com m ent se peut-il que madame de Chazerat
n'ait pas disposé de ses biens, et qu’elle soit m orte a b intestat?
Je lis ce qui su it dans son testament du 26 messidor an 9 .
"Q u a n t à la propriété de mes bien s, mon intention étant,
» autant qu 'il dépend de m oi, de les faire retourner à ceux de
A
�( » )
» mes parens qui descendent des estocs dont ils me sont parvenus,
» je donne et lègue tout ce dont il m’ est permis de disposer , sui» vantla lo i du 4 germinal an 8 > à tous ceux de mes parens de
)> la branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
» aïeule m aternelle, qui seroient en ordre de me succéder, sui» vant les règles de la représentation à l’infini. »
E t je lis encore ce qui suit dans son codicille du 14 messidor
an
i i , postérieur au Code civil.
« L a nouvelle loi m ’ayant accordé la faculté de disposer de la
» totalité de mes biens , je veux et entends que le legs universel
» que j’avois fait par le susdit testam en t, en faveur de mes
« parens de l’estoc de mes aïeul et aïeule paternels, et de ceux
» de l’estoc de mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il m ’étoit
» permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait son effet
» pour la totalité de mes biens. />
Je vois évidem m ent, continue l’homme simple qui ne raisonne
que bon sens , que par ces deux testamens ou codicilles , madame
de CHazerat a disposé de ses biens au profit des descendans de
son aïeul paternel, '
. Des descendans de son aïeule paternelle,
D es descendans de son aïeule m aternelle;
Q u elle en a disposé autant qu’ il de'pendoit ¿Celle,, c’est-à-dire,
autant que le lui permettoient les lois ;
Q u ’en l ’an 9 , elle en a disposé suivant la loi du 4 germinal
an 8 , qui étoit alors en vigueur ;
(
Q u’en l’an u < elle :en a disposé suivant le Code civ il, qui
avoit s u c c é d é à la loi du 4 germinal an 8 ; quelle a rappelé et
invoqué ces lois avec la déclaration la plus fom ieile que son
intention étoit de s’y conformer.
Après avoir ainsi appelé & recueillir ses biens les descendans
des trois branches de son aïeul et aïeule paternels et de son aïeule
maternelle , elle ajoute qu elle veut que ces mêmes biens soient
distribués entr’eux suivant les règles do la représentation ¡h
l'infini,
,
�Kieni ïi’étoit plus permis que cet ordre de distribution de ses
biens, que prescrivoit madame de Chazerat entre ses légataires ; il
étoit d’ailleurs conforme à l’art. 82 de la loi du 17 nivôse an 2 , qui
étoit en vigueur au moment de la rédaction de son testament : il
ne s’est pas encore trouvé vin légiste qui ait osé attaquer cette
disposition. T o u s conviennent que si madame de Chazerat s’étoit
arrêtée là , son testament seroit à l'abri de la critique la plus sévère.
Mais après ces m o ts, suivant les règles de la représentation
à Vinfini, madame de Chazerat a ajouté, telle ¿¡u’ elle avoit lieu
dans la ci-devant coutume d’ Auvergne.
E lle n ’a p u , dit-on, ajouter ces expression», sans attenter à
l’ordre public et offenser les bonnes mœurs.
Or , le Code Napoléon d it, en termes formels , art. 6 , « qu on
» 11e peut déroger , par des conventions particulières , aux lois qui
v intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. »
M ais remarquons qu’il s’agit dans cet article du C o d e , de con
ventions particulières qui intéressent l’ordre public et les bonnes
moeurs;
Q u un testament et un codicille ne son t pas des conventions par
ticulières ; que ces expressions ne peuvent s’appliquer qu’aux
transactions sociales, passées entre plusieurs individu» qui contrac
tent en tr’eux des engagemens quelconques, licites’ou illicites. *
11 y a une loi expresse qui règle le sort des dispositions testa
mentaires qui sont^contraires à l’ordre public et aux bonnes
mœurs; c’est l’article goo du C od e; il est conçu en ces t e r m e s :
« D ans toutes dispositions entre-vifs ou testamentaires , les c o n » ditiohs impossibles, celles q u i seront contraires aux lois et aux
»» niœurs , S E R O N T R É P U T É E S N O N -É C R IT E S . »
Et on voit dans la consultation de T u r in , que cct article du
C o d e n’e6t que le résultat de toutes les lois: r o m a i n e s rendues sur
cette m a t i è r e .
S '‘ donc il étojt vral que madamc Je Chazerat, en transcrivant
ces mots dans son testament', t e l l e qu’elle avoit lieu dans la 'c ievant coutume d’Auvergne, eût eu le malheur d’offenser l’ordre
�C4)
public et les bonnes mœurs , tout ce qui pourroit en résulter, ce
seroit que ces expressions seroient réputées non-écrites , et le tes
tament n'en seroit pas moins valable.
L a loi n’annulle pas le testament dans lequel un testateur im
prudent a pu consigner des expressions, ou meme faire quelques
dispositions contraires aux lois et aux mœurs, elle los regarde
seulement comme non-écrites , et le t e s t a m e n t a toute l’exécution
qu’il peut avoir, en retranchant ces expressions ou ces dispositions
inconvenantes et prohibées.
O n pourroit s’en tenir là , et la contestation seroit jugée.
M ais je suppose , dit encore l’homme de sen s, que l'article 6 du
Code civil puisse s’appliquer à un testament , comme aux con
ventions p a r t i c u l i è r e s , aux transactions sociales , où est donc
l ’attentat de madame de C h azerat, contre l’ordre public et les
bonnes
m œ urs !
qu’il lui étoit permis de distribuer ses biens entre
ses légataires universels, suivant les règles de la représentation à
O n co n v ie n t
l’ infini ; que si elle eut terminé sa disposition à ces dernières ex
p r e s s i o n s , elle n ’auroit rien fait contre l’ordre public et les bonnes
m œ urs, et son testament seroit exécuté sans contradiction.
C e t attentat à l'ordre social et aux bonnes mœurs, est donc tout
entier dans ces m o ts, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
coutume d'Auvergne.
Mais observons, d’abord, que ces mois n’ajoutent rien aux
précédens, suivant les règles de la représentation à l'infini.
« C ’est un moyen , dit M . C habrol, sur l’article 9 du titre 12
„ de la C o u t u m e d’A uvergne, par lequel le parent qui se trouve
» plus éloigné de celui auquel il s’agit de succéder, s’en rapproche
« et se trouve a p p e l é à la succession, en remontant à l’ascendant
» dont il descend, et qui étoit à degré égal avec les héritiers ou
» leurs auteurs. »
L e legs u n iversel d e m ad am e d e C h a ze ra t une fois fixé sur les
trois chefs de famille du mémo degré,
L ’aïeul paternel,
1
�( 5 )
' L ’aïeule paternelle,
„ E t l’aïeule m aternelle,
L a représentation à l’infini appeloit à recueillir ce legs tous les
descendans de ces trois chefs, qui seroient vivans a 1 epoque de son
décès : elle les rapproclioit tous également de leurs aut
L eur vocation étoit la m êm e, par les seules réglés gcnerales de
cette représentation à l’infini; et la Coutume d ’A u v e r g n e , rappelée dans ce tes ta m e n t, ne pouvoit ni en augmenter ni
minuer les effets.
,
n
Ces dernières expressions n’étoient donc qu'une super«.. te ,
une vraie sup erfétation , dans le testam ent de ma ame e
.
'
et tout le monde sait que ce qui est inutile ne vicie pas,
la maxime triviale super/lua non nocent.
C es expressions superflues vicient encore moins une
isp
^
lorsqu’elle en est absolument indépendante, et q u elle est enti
et parfaite sans le secours de ces expressions.
A u surplus, de quelle manière madame de Chazerat rappe e
t-elle la ci-devant Coutum e d ’Auvergne?
Après avoir fait le legs universel de ses biens aux descendans
des trois estocs de son aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule
m aternelle, elle prescrit entr’eux un mode de division de ce legs
universel, qui n’a rien de prohibé. Elle veut que cette division,
en soit faite suivant les règles de la représentation à Vinjini.
E t craig.iant que ces expressions laissent encore quelque chose
à. désirer, elle ajou te, pour développer de plus en plus ce mode
de division, que la représentation à l’infini sera telle qu’elle avoit
lieu dans la ci-devant Coutume d’ Auvergne .
A in si, cette ci-devant Coutum e d’Auvergne n ’est r a p p e l é e que
comme exemple , denionstrandi gratid, majoris démonstrations
causd, comme le disent les jurisconsultes de T u rin .
Répétons-le encore; il existe une disposition générale faite de
ses biens par madame de C h a ze ra t, une disposition n e tte , pré
cise, absolue j cette disposition est l'effet de sa volonté, et non
d une loi quelconque.
�(6)
Si sur ce point principal elle rappelle des lois, ce sont des lois
nouvelles ; c’est celle du 4 germinal an 8 ; c’est le Code Napoléon ;
ce sont les seules lois qu’elle invoque, quand il s’agit de disposer
de ses biens : c’est à ces lois qu’elle déclare vouloir se conformer.
Quand il s’agit ensuite de les diviser entre ses légataires univer
sels , c ’est encore sa volonté qui en prescrit le mode ; elle veut
impérieusement que cette division; se fasse suivant les règles de
la représentation à l 'infini.
Si après avoir prescrit ce mode d e division elle rappelle la ci devant Coutume d 'A u v e rg n e , ce n est de sa part qu’un excès de
précaution, une s u r a b o n d a n c e d e paroles, qui n’a d'autre objet
que de développer p l u s clairement sa pensée.
Ajoutons que cette Coutum e étant rappelée pour un objet par
ticulier, pour un objet déterminé, il ne reste pas même le plus léger
prétexte d’appliquer au testament de madame de Chazerat l’article
1390 du C o d e , relatif à la communauté de biens stipulée par
contrat de m ariage, tant de fois et si mal à propos cité dans cette
cause.
BOIROT.
A C L E R M O N T , de l'imprimerie de L a n d r io t t , Imprimeur do la Prefecture,
et L ibraire, rua Saint-Genès, maison ci-devant P otière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mirlavaud. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Un dernier mot. Pour les légataires universels de Madame de Chazerat
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53828/BCU_Factums_M0517.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53827/BCU_Factums_M0516.pdf
054b67313f42d5fab980bb2966900f0a
PDF Text
Text
CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu le testament
et le codicille de madame de C h azera t, la consultation
délibérée à C le rm o n t-F e rra in l, le 29 juillet 1808 , et
le jugem ent rendu par le tribunal de R io m , le 22 juin
p ré cé d e n t,
P artage l'opinion etablie dans la consultation du 29
juillet 1808, dont les raisons lui paroissent suffire pour
dém ontrer l’erreur dans laquelle les premiers juges sont
tombés. O n se seroit donc dispensé d’une nouvelle dis
cussion , si les parties intéressées n’eussent témoigné le
désir que le conseil soussigné m o tiv â t néanmoins particulièrement son adhésion à cette opinion.
A l o r s pour donner à ce nouvel examen un objet
une utilité qui lui soient p rop res, 0n suivra le jugement du tribunal de prem ière instance dans ses m otifs,
et on s'attachera à en faire apercevoir l’illusion.
A
�L e tribunal de R iom s’est déterminé à déclarer nuls
les testament et codicille de madame de Chazerat, parce
qu’il a estimé qu’en léguant tous ses biens î\ ses parens
de l’estoc de ses aïeul et aïeule paternels, et de l’estoc
de son aïeule m aternelle , pour^être partagés e n tre u x t
selon les règles de la représentation à l infini, telle q u e lle
étoit établie par la ci-devant coutume d'Auvergne, ma
dame de Ghazerat a remis en vigueur une coutume
abolie, a subordonné sa disposition aux règles de cette
co u tu m e , et en cela est contievenue a des lois d’ordre
public qui le lui înteidisoient.
O n rcconnoîtra sans aucun doute le principe posé
par le prem ier attendu que présente le jugem ent du
tribunal de R iom , que nul ne p e u t, par des conventions
particulières, déroger a u x lois qui intéressent l ’ordre
public et les bonnes mœurs. L a question est de savoir,
dans le fa it, si les dispositions de madame de Chazerat
dérogent à ces lois. O n accordera encore q u e , dans les
dispositions testam entaires, la forme n’est pas laissée à
l ’arbitraire de celui qui dispose -, mais on nie form elle
m ent que Vordre q u i l doit observer dans la répartition
de ses b ien s, soit du domaine p u b lic, qui doive être pour
lui-même , comme dit le t/ibunal de Riom , une barrière
insurmontable : cette idée est non-seulement inadmis
sible , mais encore in exp lica b le; car comment s’y prendroit-on pour établir que l’iioinm e qui use de la fa
culté que la loi lui donne de disposer en faveur de qui
il lui p laît, ait à observer un ordre déterminé qui soit
du domaine public ? Q uel ordre doit-il donc observer ?
S’il est soumis à un o r d r e , s’il y a pour lui une bar-
�( 3 )
îièrc insurm ontable, il n’a plus rentière liberté de su
disposition. Lorsque le disposant excède la faculté que
hi loi lui donne , c’est alors qu’il franchit la barrière ;
mais il ne s’agit point de cela. M adam e de Cliazerat
n’ayant ni descendans ni ascendans, avoit l’entière dis
position de sa fortune : il n’y avoit point de barrière
pour elle. Q u’on dise alors quel ordre et quelle barrière
on veut qu’elle ait dû rencontrer dans la répartition
qu’il lui plaisoit d’en faire ? Assurém ent la loi ne lui
en a imposé d’aucune espèce. Cette répartition étoit,
comme la disposition, en sa puissance la plus absolue •,
et l’on ne conçoit pas com m ent on a pu placer le droit
de cette répartition dans le domaine public , car rien
n ’est plus manifestement du domaine privé.
O n a du relever d’abord cette bizarre proposition ,
parce qu’elle est le germ e de la fausse opinion que le tri
bunal de R iom s est iormeo des dispositions qu’il a. cru
devoir annuller.
Parm i les lois inviolables dont le tribunal de R iom a
entendu p a rle r, il invoque l’art. i 3 go du C o d e N apo
léon , qui ne perm et pas aux futurs époux de stipuler
d ’une manière générale que leur association sera réglée
par l u n e des coutumes qui r é g i s s o i e n t ci-devant les
diverses parties du territoire , et qui sont abrogées.
Sans doute c’est là une prohibition form elle, et elle
Cst ^ 0l'dve public j mais il s’a g isso it d’établir que celte
prohibition s’appliquoit à l'espèce ; et certe# , ce n’étoit
pas facile.
I
our y arriver , on a répété que la faction du testa
ment étoit d’ordre public. Q uè veut-on dire par la fa c A 2
�( 4 }
tion ? Ce mot vague , qui ue doit s'entendre que du
m atériel de l’a c te , est mal em ployé i c i , où il s’agit du
fond de la disposition. La n é c e s sité ou l’on s’est trouvé
de se servir d’expressions éq u ivoq u es, annonce assez,
que les idées qu’on a voulu rendre n’étoient ni vraies
ni claires.
O n dit que la disposition de l art. 1390 est fondée
sur Vavantage d ’une loi uniforme pour la so c ié té , et
que c est s*é l e v e r contre cet intérêt, que de se faire un
code à s o i , et de fa ire renaître des lois anéanties ;
que ces motifs se doivent appliquer aux testamens
comme a u x pactes de m ariage, la tranquillité des
fam illes n étant pas moins compromise , en rappelant ,
en termes g én éra u x, dans un testam ent, une coutume
abolie , et avec elle toutes les difficultés q u e lle peut
fa ire naître.
Cette doctrine peche dans tous ses fondem ens; et d’a
bord le Code Napoléon a sans doute été donné pour
faire cesser la multiplicité des lois et des coutumes qui se
partageoient la F ran ce, et pour avoir un droit uniforme.
C epen dan t, dans les diverses matières de ce d ro it, une
seule admet deux régim es, au choix des contractons, et
c’est positivem ent le contrat de m ariage, dans lequel il
est permis d'opter entre le régim e dotal et celui de la
communauté. Ce contrat 11 est donc pas uniforme dans
l ’E m p ire , et lovsqu on veut se londer sur l’uniform ité,
il faut convenir que 1 exem ple est mal choisi. L ’article
i3 g o n’offre dès-lors qn une limite posée ¿\ la permission
générale de l’art. 138 7, et a la faculté particulière de
l’art. 1391. C ’e st, com m e le dit l’art. 1387, \xi\q modifi
�( s )
cation de la faculté générale de faire les conventions de
mariage comme les époux le jugeront à propos, et de
celle d’opter ientre le régim e dotal ou la communauté.
Comm ent veut-on après cela rattacher cet article aux
dispositions testamentaires, pour la répartition de la part
disponible, et montrer que ce soit s’élever contre l’uni
formité de la lo i, et se faire un code à soi, que de prendre
pour règle de la répartition d’un legs universel un mode
suivi dans une ancienne coutume. Existe-t-il un article
du Gode qui règle la m anière dont un testateur, qui
donne ce que la loi lui perm et de donner à qui bon
lui sem ble, le répartira entre ses légataires , parens ou
étrangers j qui déterm ine, par exem ple, comment il di
visera son bien dans les différentes lignes de sa parenté,
s il veut donner ù. des parens de diverses lign es? N on
assui ément. Com m ent le vœ u d’une loi uniforme seroit-il
donc v io le , la ou il n’y a de loi que la volonté du testatcui ? Com m ent lin te re t public se ro it-il com prom is,
par la m anière q uelconque, d’appliquer une libéralité
perm ise, qui ne touche que celui qui la fait et celui
qui la reçoit? N ’est-il pas évident qu’en cette matière
le testateur, en se faisant un code à lu i, ne fait qu’user
de la plénitude de sa volonté que la loi lui laisse , et à
^ quelle le public n ’a plus aucun intérêt.
Quand la volonté du testateur est constante en la forme
j,
par la loi 3 pour rendre cette volonté ceitain e,
application de cette volonté ne présente plus qu’un inn °t P1ivé* l’invocation de l’ordre public et des bonnes
cluis , sur le mode de répartition d’un legs universel
U ^icn disponible, est donc aussi déplacée qu’il soit
�( 6 )
possible : c’est néanmoins tout le fondement du système
que le triJ3unal.de R iom a créé.
L ’assimilation du testam ent, sur ce point, avec le con
trat de m ariage, est donc enfin on ne peut pas plus fausse;
puisque, prem ièrem ent, la loi dispose expressément sur
le contrat social des ép o u x, et determine limitativement
les pactes qu’elle leur perm et; et secondement, les pactes
matrim oniaux intéressant les familles dans leurs dispo
sitions, ces dispositions sont d intérêt public.
C e q u i achève de caractériser la fausse application qu’a
faite le tribunal de R io m , c’est l’expression de l’art. 1890
l u i - m ê m e , qui ne prohibe que la stipulation faite d’une
m anière gén érale, de se régler dans les conventions ma
trimoniales par une des coutumes abolies, mais non point
de stipuler nominativement telle ou telle disposition p or
tée par ces coutumes.
Par exem p le, y auroit-il contravention à l’art. 1390,
s’il étoit dit que le mari venant à prédécéder, la femme
auroit un douaire de la moitié des biens de son mari en
usufruit, tel qu’il étoit réglé par la Coutum e de Paris?
O n ne peut pas le penser-, car ce ne seroit point là
régler leur association, et encore moins la régler d’une
m anière générale. Ce que la loi a entendu par cette
m anière gén érale, c’est la stipulation autrefois en usage,
que les époux soumettoient leurs conventions m atrimo
niales ou leur communauté aux dispositions de telle cou
tume par laquelle leurs droits scroient régis et gouvernés^
M ais il n’est point nécessaire de s’appesantir ici sur
les stipulations m atrim oniales, et sur l’application de Par
ticle 1390, à telle ou telle de ces stipulations, car il est
�( 7 )
évident que cet article n ’en peut recevoir aucune A la
disposition que fait un testateur de la portion disponible
de ses biens, et que ce sont deux choses qui ne peuvent
nullem ent être assimilées.
C ’est sans fondem ent, et arbitrairem ent, que le tri
bunal de R iom a établi sur cet article la nullité qu’il a
prononcée du legs universel de madame de Chazerat,
parce qu’elle a ordonné que ses biens seroient partagés
entre les trois branches de sa fa m ille , q u e lle dénomme,
suivant les règles de la représentation a l in fin i, telle
q u e lle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d Auvergne.
C e principal fondement de l’opinion du tribunal de
R io m , pris dans l’article 1390 du Code N ap oléon , et
dans la prétendue similitude de droit entre la répartition
d’un legs universel, et l’association des ép o u x, étant dé
m ontré faux , que reste-t-il ?
Prouvera-t-on jamais qu’en soi, cerap p eld ’un m ode de
répartition admis dans une ancienne co u tu m e, et son
application par un testateur au partage qu’il veut faire de
son bien disponible à ceux de ses païens qu’il institue,
attente à l’ordre pu b lic, blesse la société, et doive rendre
sa disposition nulle?
E li! qu’im porte à la société, que le legs de madame dé
Clinzerat soit réparti entre ses légataires de telle ou telle
ïnaniere, selon les règles de la représentation de la Coud A u v e rg n e , ou selon toute autre; que madame de
hazerut oit renvoyé aux règles de cette coutume qu’elle
pouvoit écrire tout au long dans son testament ? Com*
ment celte indication de la coutume peut-elle vicier et
annuller son-legs ?
�( 8 )
Quand on pourroit penser que madame de Chazërat
ait fait en cela une chose inconvenante et mal sonnante,
où est la loi qui défend de jamais parler d’aucune loi an
cienne , de la prendre pour modèle dans une disposition
q u elco n q u e , à peine de nullité ? O n a fait voir qu’il
n’étoit pas permis de tirer cette conséquence de l’ar
ticle i 3oo du Code Napoléon.
L es nullités ne s’inventent pas; il faut une disposition
expresse de loi pour en établir. Que faudroit-il davan
tage pour faire proscrire 1 opinion du tribunal de Riom !
En vain le tribunal de ltio m dit-il qu’il y a nullité
résultant de toute disposition de loi négative et prohi
bitive ; où est cette loi négative et prohibitive pour le
mode de répartition d’un legs universel?
C e tribunal a dit qu’en disposant comme elle l’a fait,
madame de Chazerat avoit remis en vigueur une cou
tume abolie : assurément.cela n’étoit pas en sa puissance,
et il y auroit en cela contravention à la disposition g é
nérale qui prononce l’abolition.
M ais c’est encore là où le tribunal de R iom s’est ma
nifestement égaré.
Com m ent concevoir qu’un citoyen puisse remettre en
vigu eu r une coutume abolie ? cela lui est impossible dans
le fait comme dans le droit. Si l’acte qu’il veut faire lui
est interdit par le C o d e, cette interdiction sera le prin
cipe essentiel et suffisant de la nullité de son acte, et
le rappel qu’ il aura fait d une loi ancienne n’y ajoutera
rien ; s’il lui est perm is, la c té tirera son autorité du
C o d e , et non du rappel de la loi ancienne : cela est évi
dent : l’acte ne peut donc recevoir de ce rappel ni vice
ni
►
�( 9 )
ni vertu. C e n’est pas de celte loi ancienne que l’acle
tire son d ro it, mais de la volonté du disposant,-' autori
sée par la loi. 'A in si,'d an s l’espèce; madame de Chazerat
avoit reçu du Code la faculté de disposer de tous ses
biens en faveur de qui elle voudroitj et par conséquent,
de les répartir comme il lui plairoit entre plusieurs dona
taires ou légataires.. Lors donc qu’elle a pris pour m o
dèle et pour règle de cette répartition la représentation
telle qu’elle étoit établie par la Coutum e d’A u v e rg n e ,
cette coutume ne reprend pour cela aucune force de
loi ^ la disposition reçoit toute son autorité de la volonté
de madame de C hazerat, et du Code qui laissoit cette
volonté entièrem ent libre.
La Coutume d’A irvergne n'est manifestement appelée
que pour indication, pour démonstration plus ample
de la volonté de la testatrice, qui auroit pu écrire dans
son testament tout ce que la Coutum e disposoit sur ce
p o in t, et qui s’en est dispensée en déclarant qu’elle vouloit faire com m e faisoit autrefois la Coutum e d’A u verg n e,
ce qui est la m ême chose que si elle en eût couché les
dispositions dans ce testament.
Com m ent le tribunal de R iom combat-il des idées aussi
simples et aussi claires ? par une suite d’argumentations
ties-peu claires et nullem ent concluantes, et qui repo
sant sur les fondemens vicieu x qu’on vient de détruire ,
disparoissent avec eux.
^ prétend que c’est jouer sur les mots, et abuser des
lIl,e de ne voir dans le rappel de la Cou hune
j
u ye rg n e , qu’une démonstration, une indication de
a voloulé de la testatrice, lorsque lu dame de Chazerat.
B
�( ÏO )
veut disertement que cette Coutume soit la règle du par
tage de ses biens.
M ais comme le tribunal est entraîné lui-même à le
dire , c’est madame de Chazerat qui le veut ; c’est donc
la volonté de madame de Chazerat qui opère. L a cou
tum e n’agit point \ elle n’est donc là qu'exem p li c a u sâ ,
elle n ’est que pour démonstration. Ce n’est point la
coutum e en s o i, et com m e l o i , qui règle le partage ;
c’est la testatrice, qui a indiqué l’ancienne disposition
de cette coutum e , comme étant celle qu’elle entendoit
donner pour règle à ses légataires. E t en cela , il ne
peut y avoir ni vice ni conséquence , puisque encore
une fois la loi ne m ettoit aucune limite à la volonté
de la testatrice , et que la société n ’avoit aucun intérêt
à la m anière dont madame de Chazerat répartiroit son legs.
L a justesse de ce raisonnement se démontre par la
comparaison du cas sur lequel dispose l’art. 1390 , dont
le tribunal de R io m s’est appuyé.
Pourquoi y auroit-il contravention et n u llité , si des
époux soumettoient leu r société conjugale aux disposi
tions d’une coutume abolie ? C e n’est pas parce qu’ils
r e m e t t r o ie n t en vigueur une coutum e abolie, ce qui
e st ab su rd e , mais ÿ>arce que la loi actuelle interdit tout
a u tr e m ode de société co n ju gale, que le légim e dotal
ou la com m unauté gouvernée par les règles que le Code
établit : il n’est donc plus en la puissance des contractans
d’en vouloir un autre.
A u contraire , dans l ’espèce actuelle, la loi perm ettoit
à la testatrice de donner et de répartir tous ses biens
comme elle voudroit. L e Xnode de cette rép artition ,
�( II )
quelque part qu’il fut p r is , ¿toit donc à ça disposition,
et prenoit son autorité dans sa volonté seule ?
Pour trouver une prohibition en ce cas, il faudroit
aller jusqu’à dire que la seule indication d’une.ajpcàenjie
l o i , son nom seul prononcé dans .une disposition ,, est
une atteinte à l’ordre public et aux bonnes .mcqurs 3 et
qu’ayant la faculté la plus absolue de disposer comme
cette lo i, on peut bien le .fa ir e , mais non pas Je dire.
O n n e pense pas qu’aucun homm e raisonnable. .vouJ-ût
soutenir cette proposition.
D ans le fa it et dans la réalité, dit le tribunal de R io m ,
il est im possible de fa ire ce partage, sans être guidé par
la coutume d’A u verg n e, sans rechercher Vorigine des
biens dans les lig n e s , et la règle de leur subdivision
selon la coutume • et sur ce , le tribunal énum ère toutes
les questions qui ont pu s’elever dans cette coutume.
Si cela est im possible, c’est qu’il est impossible au*
légataires de ne pas se conform er à la volonté de madame
de C h azerat, et d’avoir autre chose que ce q u’elle a
voulu leur donner. Si elle eût écrit ces règles dans .son
testam ent, sans parler de la co u tu m e, n’auroitril pas
fallu s’y conform er? Q u ’a-t-elle fait de plus eu indiquant
ces réglés écrites dans la coutum e } comme étant sa
volonté ?
L a coutum e, continue le tribunal de Rio,m , n'est paß
lci un simple mode , une sim ple condition de la dis
position ; gHq en est inséparable, elle se lie et s JincorP
hé 7 ’ ’ (m parta£e ; c>est clle (l ul (^ siSneva les vrais
ri tiers de madame de C ha zera t, et leur part dans
les biens.
B 2
�( 12 )
C ’est toujours la m ême illusion. La coutume ne les
indiquera que par la volonté de madame de Chazerat:
c’est donc cette volonté qui a g i t , et qui institue réelle
ment les individus.
Cette application de la volonté personnelle à des
dispositions de coutumc , et de cette action de la volonté
de l’homm e dans l’usage de ces dispositions, trouve son
exem ple dans le d ro it, dans les statuts matrimoniaux.
Lorsque des époux se m anoient sans contrat, la loi
du domicile leur en tenoit lie u , non pas par sa propre
force et v e r t u , non v i consuetudinis et in s e , dit D u
m o u l i n , mais par la volonté présumée des parties, qui
étoient censées l’avoir tacitement adoptée.
L e tribunal de R iom examine s’il est vrai que madame
de Chazerat ait rappelé la coutume d’A u vergn e d’une
manière particulière, et pour une disposition spéciale.
Il soutient qu’elle l’a fait d’une manière générale , parce
qu’elle lui soumet généralement le partage de tous ses
biens.
Cette question n’est pas ici de grande importance 5
elle ne doit pas exercer une influence directe sur la
décision de la cause. L e point fondamental est dans la
capacité de madame de Cliazerat de disposer, et dans
le principe qui donne l’être à sa disposition , et qui
n’est autre que sa volonté.
Si madame de Chazerat a pu disposer de tous ses biens
et les répartir entre ses légataires à sa v o lo n té , il im
porte peu de savoir jusqu’à quel point elle a pris la cou
tume d’A u vergn e pour exem ple de sa disposition.
Toutefois il est bon d’observer que le tribunal de
�( i3 )
Riom a confondu , dans ses argum entations, la disposi
tion de madame de Chazerat avec celle par laquelle elle
auroit purement et simplement subordonné sa succession
à la coutume d’A u v e rg n e , et elle auroit laissé aux dis
positions de cette coutume à lui donner des héritiers.
'Par, e x e m p le , si madame de Chazerat eût dit qu’elle
entendoit que sa succession fût gouvei*née par cette
coutume , alors elle n’eût par là désigné aucun héritier
ni légataire j elle n’eût fait par elle-m em e aucune dis
position de ses b ie n s } elle auroit attribue a cette cou
tume , non-seulement la répartition , mais la disposition *,
elle auroit é ta b li, pour sa succession ab intestat, un
autre ordre que celui déterminé par la loi. C ’est en ce
c a s, tout au p lu s , qu’on pourroit dire qu’elle auroit
violé la loi des successions, en prétendant introduire
un autre ordre de succéder que celui établi par elle.
M ais madame de Chazerat a testé j elle a disposé de ses
biens par un legs universel 5 elle a désigné ses légataires, qui
sont ses parens de la ligne de ses aïeul et aïeule paternels,
et ceux de la ligne de son aïeule maternelle ; elle a déclax-é
que son intention étoit que pour la répartition entr’eux
on suivît le mode de la représentation à l’infini tel que
l’admettoit la Coutum e d’A u vergn e : il ne s’agit là que du
partage d’un legs, et du quantum que chaque légataire y
Ple n dra ^ il ne s’agit que du mode de la r e p r é s e n ta tio n .
I«1* disposition de madame de Chazerat est complete
sui les lignes qu’elle appelle et celles qu’elle exclut; sur
a nature des biens qu’elle leur lègue 5 ce sont tous ses
ltns > meubles et im m eubles, a c q u e t s et propres, au
marc la livrc c]e cc q ui luj est venu de chacune de ses
�( >4 )
branches ; sur l'appel des branches dans l’ordre de la
représentation à l’infini. E n fin , le mode de cette repré
sentation sera celui qui avoit lieu dans la coutume d’A u
vergne : voilà sur quoi s e u l e m e n t elle ludique la coutume.
11 est donc vrai qu’elle ne r a p p e lle cette coutume que
d’une m a n iè r e particulière, sur une disposition qu’elle
énonce, et non d’une m a n iè r e générale et indéterminée.
M ais il y a plus, et l’on a très-bien démontré dans la
consultation du *9 juillet dernier, que loin de soumettre
ses dispositions d’une manière générale à la coutume
madame de Chazerat s’en étoit écartée sur
d
’ A
u
v
e
r
g
n
e
,
Lien des points-, i°. en disposant en faveur de son mari;
2°. en disposant de l’universalité de ses biens ; 3 n. en
léguant nominativement en vertu de la faculté que lui
donnoient leg lois nouvelles; 4°* en donnant ses meubles
et ses acquêts à ses parens de la ligne m aternelle, comme
à ceux de la ligne paternelle.
C ’est donc à tort que le tribunal de R iom prétend qu’il
faut voir dans la disposition de madame de Ghazerat une
soumission générale à la coutume <¥A u v e r g n e , et que
c’est cette coutume qui lui donne des h éritiers, et qui
leur partage ses biens : il est au contraix-e bien démontré
q u ’en tout c’est la volonté de madame de Chazerat qui agit.
O n ne relèvera pas plus particulièrement ce qu’a dit
le tribunal de R iom des difficultés sans nombre qui naîtroient de l’exécution de ce m ode; on l’a fait suffisamment
dans la consultation du 29 juillet, ou Io n a fait voir que
ces prétendues diilicultés n ctoient qu un épouvantail ;
et quelles que fussent ces difficultés, on n’y pourrôit
jamais trouver un m otif d’annuller le legs.
�( i5 )
On ne suivra pas non plus le tribunal de R iom dans
ses réponses à quelques motifs mis en avant par les léga
taires devant ce tribunal, et qu’on ne reproduira pas ici.
Mais il est un m oyen opposé au sieur M irlavavid, dans
la consultation du 29 juillet, et qui dispenseroit d’entrer
avec lui dans tant de discussions.
L e sieur M irlavaud est le représentant de la branche
de l’aïeul m aternel, non appelée au legs universel, et on
soutient contre lui qu’il est sans qualité et sans intérêt
pour critiquer l’emploi qu’a fait la testatrice, de la C ou
tume d’A u vergn e , attendu qu’il ne s’applique qu’à la
répartition dans les branches appelées, et que la sienne
ne l’étant pas, cette répartition ne l’intéresse pas.
E n effet, l’appel des branches est une prem ière disposi
tion distincte et divise ; quiconque n’est pas de ces bran
ches, n’est pas légataire; dès-lors il est sans intérêt comme
sans qualité pour critiquer le mode de la répartition dans
ces branches. Ces branches sont appelées avec représenta
tion à l’infini : la dame de Chazerat étoit maîtresse de
le vouloir ain si, sans que la disposition eût besoin de la
coutume d’A u vergn e. Q u ’im portojt à la branche du sieur
M irlavaud, qui n’est point appelée ? et.q u e lui importe
après cela , que cette représentation ait lieu selon la
coutume d’A u vergn e ?
Concluons que le mode.dç répartition du legs universel
de madame de Chazerat appartenoit entièrement à la
pleine et entière disposition q u ’e lle avoit de tous ses
•
l’ordre public et.la société u y .ont aucun
ixitéiet 5 que ja COutume d’A u vergn e n’étoit em ployée
�( .G )
que comme démonstration de la volonté de la testatrice;
que la disposition tiroit toute son autorité de cette volonté
et du code' qui n’y mettoit aucune b o rn e; que cette
volonté agit seule, et que l’appel de la coutume ne peut
influer sur le sort de la disposition en bien ni en mal ;
qu’il n’y a aucun argument à tirer de 1 article 1890 dans
l’espèce tout à fait différente ; car il n’y a aucune simili
tude entre la ' stipulation de l’association conjugale et le
partage d’un legs universel; que madame de Chazerat n’a
point appelé la coutume d’A u vergn e à gouverner sa suc
cession, mais l’a s e u l e m e n t indiquée comme exem ple et
comme m ode à suivre, selon sa volonté, dans la réparti
tion de ses legs dans les brandies qu’elle instituoit ; que
loin de soumettre môme ses legs à l’ordre de succéder
et aux principes de cette coutum e, elle s’en est écartée
totalement sur plusieurs points importans ; enfin, que le
sieur M irlavaud, défendeur, d’une branche non instituée,
est sans qualité et sans intérêt pour critiquer le mode de
répartition, qui n’intéresse que les branches appelées.
Il
a donc été mal jugé par le tribunal de R io m , et son
jugem ent ne peut m anquer d’être infirmé sur l’appel.
D élibéré à Paris par nous anciens Avocats soussignés,
ce 8 n o v e m b r e 1808.
DELAMALLE.
PORCHER. POIRIER. JAUBERT.
d e l a c r o i x -f r a i n v i l l e .
CHABOT, de l'Allier. CHABllOUD.
�X li )
f
Lettre de M. J
aubert
Mercredi.
\
à M. B
o ir o t
.
C e n ’est que hier au soir, Monsieur et cher Collègue, qu’on a
porté chez moi les papiers et les consultations que vous m ’aviez
annoncés ce matin. J’ai examiné le tout, et le jugement de Riom
m ’a paru, ainsi qu*à vous et à M . Delam alle, une méprise étrange.
En appliquant à une disposition testamentaire I article i3go du
Code Napoléon, relatif aux conventions matrimoniales, le tribunal
de Riom n’a pas senti quel avoit été le véritable m otif de la dis
position contenue en cet article ; il a supposé qu on avoit voulu
faire oublier lés anciennes lois et coutum es, de manière qu’il ne
pùt plus en être fait mention dans aucun acte.
Ce n ’est pas là le m otif de la loi; il eût été révolutionnaire ou
puéril.
Le Code Napoléon a voulu que les conventions matrimoniales
fussent rédigées de manière que toute tierce personne ayant à
contracter avec l’un ou l’autre époux, pût connoltre d’une manière
positive et claire les pactes de la société conjugale, soit relativement
au pouvoir et à la capacité qu^auroit l’époux de faire tel ou tel
contrat, soit relativement à l’asservissement ou à l’affranchisse
ment de ses biens par les suites du contrat de mariage.
S’il avoit été permis aux époux de stipuler dune m a n iè r e géné
rale, que leur association seroit réglée par telle ou telle c o u t u m e ,
lois ou statuts locaux , il auroit fallu que les tierces personnes
a^ec lesquelles les époux, ou l’un d’eux, auroient par la suite con
ta c té , connussent la coutum e, les lois ou statuts locaux désignés
a” s 1 association des deux époux, ou que retenus par 1° crainte
1 ^ CUt ^ans ^es
anciennes quelque prohibition , quelque
° s^ac^e >^uelqu’incapacité relative, ils s’abslmsscn*-de contracter
avec ceux dont ils ne pouvoient pas bien connoitre les lois aux
quelles il leur auroit plu de s’assujétir. Ce qui eut été dangereux pour
es ^P°ux, ou pour les tiers, et toujours pour la chose publique.
c
�( 18 )
En donnant aux époux la faculté de stipuler d’une manière géné
rale, que leur association seroit réglée par telle coutume, loi ou
usage, etc., on ébranloit le régime hypothécaire, dont l’objet
principal est de fournir aux acquéreurs l’assurance de n’être plus
troublés dans leur possession, et le moyen, de connoitre préala
blement si les biens qu’ils vouloient acquérir leur étoient transmissibles.
C es motifs de l’article 1390 du Code ne peuvent pas s’ appliquer
à des dispositions testamentaires : aussi .cette loi n’a-t-elle pas été
portée d’une manière absolue et pour tous les actes, mais seulement
pour les contrats de mariage.
L ’article précédent d u C o d e Napoléon n’a pour objet que la
prohibition des substitutions, et n 'est relatif qu’à l’ordre des suc
cessions ab intestat.
Ces réflexions que je vous soumets, mon cher Collègue, sont
sans doute surabondantes; mais après les deux consultations que
je viens de lire, on ne peut ajouter que des choses superflues. Je
vous prie d’agréer les respectueuses salutations de votre Collègue,
JA U B E R T .
A C L E R M O N T , de l'imprimerie do L andriot , Imprimeur de la Préfecture,
et Libraire , rue Saint-Genès, maison ci-devant Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mirlavaud. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delamalle
Porcher
Poirier
Jaubert
Delacroix-Frainville
Chabot
Chabroud
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation [Mirlavaud]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0516
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53827/BCU_Factums_M0516.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53826/BCU_Factums_M0515.pdf
fcb1269352cee8c0be5f256c27b47cfe
PDF Text
Text
CONSULTATION.
V
u
le testament olographe de la dame de Chazerat, en
date du 26messidor an 9 , par lequel, entr’autres disposi
tions, on lit la suivante, qui fuit l’objet de cette consulta
tion : « Quant à la propriété de mes biens , mon intention
» étant, autant qu’ il dépend de m o i, de les faire re» tourner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils me sont parvenus, je donne et lègue tout ce
» dont il m’est permis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de la bran* ch e de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de
* mon aïeule maternelle ,
qui seroient en ordre de
* me succéder, suivant les règles de la représentation
à l' in fin i, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
" Coutume d'Auvergne, pour être partagé entre les
A
�» trois branches au marc la livre de ce qui m’est par» venu de chacune desdites branches , et être ensuite
»> subdivisé dans chacune d’elles suivant les mêmes
» règles de la représentation à l'in fin i, et néanmoins
» je veux et entends qu’avant la division et sulxlivi» sion, il soit pris et prélevé sur la masse totale des biens
» compris au présent legs, d’abord le montant de mes
» legs particuliers, et ensuite le sixième du surplus, que
» je donne et lègue au sieur Farradeche-de-Gromont,
» fils aîné, et au citoyen Sablon-Ducorail, aîné, cha» cun par moitié. »
V u les deux codicilles, postérieurement faits par ladite
dame, l’un en date du 7 floréal an 10, et l’autre du 14
messidor an 11 , postérieur celui-ci à la loi du 1
3 flo
réal meme annee, sur les donations et testamens.
Dans ce dernier, qui est relatif à cette consultation,
on lit les expressions suivantes : « La nouvelle loi
« m ’ayant accordé la faculté de disposer de la totalité
« de mes b ien s, je veux et entends que le legs unin vcrsel que j’àvois fait par le susdit testament, en
« faveur de mes parens de l’estoc de
mes aïeul et
« aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon aïeule
« m aternelle, de tout ce dont il m’étoit permis de
« disposer par la loi du l\ germinal an 8, ait son eifet
« pour la totalité de mes biens, sauf les divisions et
�m
- « subdivisions à faire entre mesdits héritiers, de la
« manière expliquée audit testament^ sauf aussi mes
« legs particuliers, et les dispositions par moi faites
« en faveur de mon mari 5 à tout quoi il n’est rien
« dérogé par le présent codicille. »
V u l’arbre généalogique où sont rapportés les trois
estocs dont les descendans sont institués héritiers, et
même le quatrième estoc de l’aïeul maternel, qui dans
cet arbre est marqué comme une tige dont il n est
parvenu aucun bien h la testatrice.
V u le jugement du tribunal civil de R io m , dépar
tement du Puy-de-Dôm e, du 22 juin passé, par lequel
il a été d it, « que sans s’arrêter ni avoir égard audit
« legs universel, fait au profit cles trois branches d’hé« ritiers y nommés, et compris au testament olographe
« de la dame de Chazerat, du 24 messidor an 9 , et
« codicille du 14 messidor an 1 1 . . . . lequel legs uni« versel est déclaré nul et de nul effet, et comme
« non écrit dans ledit testament. »
I n t e r r o g é s s’i l y a l i e u a l a r é p a r a t i o n d e c e j u g e m e n t ,
Nous
répondons
que la singularité de ce
ju g e m e n t,
qui
ne peut que surprendre et étonner tout jurisconsulte,
nous obligc à développer dans cette consultation les prin
cipes fondamentaux sur les institutions, legs universels,
et autres dispositions testamentaires •, principes que nous
A 2
�(4)
aurions dû om ettre, s’il ne falloit y recourir pour démon
trer la futilité et l’erreur des raisonnemens, soit considérans de ce tribunal.
Nous observons donc, en premier lieu,
q u ’il
est de
principe certain et incontestable, qu’il faut dans tout
testament ou disposition
te s ta m e n ta ir e ,
considérer, i°.
la capacité de pouvoir disposer ; 2°- la form e, soit les
3
formalités extrinsèques \ °. le fond du testament, soit
la nature de la disposition \
4 • la chose dont on dispose 5
5°. Jgg causes, conditions, modes et démonstrations appo
sées auxdites dispositions..
Tous ces points ne sont pas réglés par les mêmes
principes. Il n’est pas ici question , ni de l’incapacité
du testateur, ni de la forme extrinsèque de la dispo
sition , ni de la nature de la disposition , c’est-à-dire de
legs ou substitution prohibée, ni de la qualité de la
chose dont on a disposé, c’est-à-d ire, si prohibée ou
n o n ; mais il ne s’agit que d’examiner le dernier point,
soit la nature des causes, modes, <ît, si l’on v e u t, même
des conditions apposées au legs dont il s’agit.
Dans cette discussion, ce que L’on doit singulièrement
observer, c’est qu’une condition impossible, ou mémo
prohibée par les lois, ne rend point, ni d’après le droit
L . i^decond in itit.,1 .
:t 3o de co o d ., et d em ,,
t. 900 du Cod. IS'ip.
rom ain, ni d’après le Code Napoléon , la disposition
nulle, et qu’au c o n t r a is , dclrahilur conditio, et pro
�(5)
non scripta habetur: « Dans toute disposition entre-vifs
« et testamentaires, est-il dit à l’article 900, les condi-
l . 14 . de cond. in stit.,1 .
3o. d e cond. e t dom . art.
600 du Code Napoléon.
« tions impossibles, celles qui seront contraires aux
« lois ou aux mœurs, seront réputées non écrites. «
'»
Ce qui, d’après le droit romain et le Code Napoléùn,
à l’article 1172, n’a pas lieu dans les contrats et obligations.
Si ce principe a lieu dans les conditions qui paroissent
contenir la cause finale de la volonté du testateur, il
doit avoir plus lieu encore lorsqu’il s’agit de simple
mode ou démonstration, que les lois même ne consi
dèrent pas comme la condition aussi rattachée à la volonté
du testateur} et c’est là la maxime que nous voyons éta
blie dans les lois 3 7 , 74, §. 1 et 2, au titre du dig. de
cond. et déni, et dans la Novelle 1 de Justinien : « Quoties
« secundhm voluntatem testatoris facere compellitur-,
« quoties contra iegem nihil sit julurum . . . .
et tamen
« à legato eum non esse repellendum. »
A ces principes sur les dispositions testamentaires, il
faut en ajouter un autre également certain et incon
testable , c’et-à-dire, que toute fois qu’un testateur, pour
mieux désigner sa volonté, exprime une cause, ou fart
démonstration q u i, ou n’existe pas, ou ne peut
existerai faut, comme dit Roer* avec tous les interprètes,
oter la fausse cause et explication, et voir s’il résulte en -
*
., /, ,
TU. de cond. et dcm
infxne.
■
�(6)
core de la volonté du testateur, et de la chose disposée ;
parce qu’alors la fausse cause ou explication non nocet
legatario ; mais, si detrahendo causant, v el démon strationem, il ne conste plus de la chose léguée, la disposition
est nulle ; et ce, pai-ceque, comme dit l’auteur d’après
L . i . , S 8 ,d e dot. praele g ., 1. 2 6 , S u lt. de adim .
e t transf. Ic g ., 1. i 7 ,C o d .
de testam .
les jurisconsultes romains, Quidquid demonstrandi gratia additur reijam salis demonstratajrustra est, etpro
non scripto liabendum y et c est d après ce principe
même
q u e ,
quoiqu’une institution ne puisse se faire con-
tumelice signo, c est-a-dire, en ne désignant l’héritier que
par une action scélérate qu’il auroit faite, cependant
celte institution est efficace, si en ôtant cette désignation
ignominieuse, il conste encore de la personne que le
L.
9,
S de h e r. in stit.
testateur a voulu favoriser, pure enim institutus videtur
cum malediclo.
L . /t8 , S ° - d- P!t- de
h e r. in stit.
D e ce principe concluons donc que toute fois qu'une
cause, une démonstration, soit majeure explication ou
expression même défendue, se trouvent dans une dis
position testamentaire , et que, eam detrahendo, c’està-dire, en la supprimant, il résulte de la personne et
de la chose léguée ces expressions, déclarations, démonstratrations et explications , fJ^oiqu’eiTonnées et
même prohibées, pto tion scriptis habentut, et ne v i
cient ni le legs ni l'institution.
Nous devons encore u ces maximes joindre celle que
�(7)
nous avons sur l'interprétation dés contrats, et à plus
forte raison sur l’interprétation
des
dernières volontés,
qüi selon les lois benigniore interpi'etatione surit donando,
1 . 12de rcg. jons.
c’est-à-dire que, utile per inutile non vitiatur, que les
expressions doivent toujours être entendues dans le sens
que, vitio eurent, d’où' rie suit aucune absurde, et ut
actus potius valent qua'm' pereat.
Posés ces principes incontestables, venons a
1espece.
Nous avons déjà dit qu’il ne s’agit, ni de question de
forme, ni de l’incapacité du testateur, ni de la nature de
la disposition ou de la chose lé g u é e , ’mais seulement
d’expliquer les causes, modes, ou, si l’on veu t, condi
tions apposées à la disposition.
O r , d’après les principes ci-dessus, à supposer même
ces causes, modes ou conditions contraires aux lois, 011
doit les avoir pour non-écrites, mais elles ne vicient
point le legs : donc, à supposer que le mode avec lequel
la testatrice a voulu que se partageât le legs, fût même
une condition ou mode contraire aux lo is, cela ne peut
le rendre nul.
Ce principe certain suffit déjà pour détruire tous les
considérons du tribunal, tirés de ce que la testatrice
a voulu rappeler une Coutume, c’est-à-dire, celle d’A u
vergne, et que ¿a disposition se réglât sur cette cou
tume -, rappel, qU¡ seion \c tribunal seroit p roh ibé,
et coütiendroit un m o d e, ou si l’on veut en core, une
l. i7de!eg.
�(8)
condition ou démonstration contiairc aux lois. Eu sup
primant après les paroles, suivant les règles de la re
présentation à l’ in fin i, celles qui suivent, c’est-à-dire,
telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d’A u
vergne , il est certain qu’il conste de la volonté du tes
tateur et de la chose léguée *, ces expressions donc, si on
les croit contraires à la lo i, ne peuvent, en les suppri
mant , vicier le legs.
L e tribunal veut argumenter de l’article 1390 du Code
Napoléon -, m ais, à supposer encore, ce qui n’est p as,
que l’acte fût n u l, si dans un contrat de mariage on
se fût rapporté à une coutume de la même manière
que la testatrice s’e st, dans l’espèce, rapportée à la Cou
tume d’A u v e rg n e , il nous suffira pour répondre au
tribunal civil, dire que l’on ne peut des contrats ar
gumenter aux dispositions de dernière volonté , puis
que dans celles-ci les modes et conditions contraires
aux lois ne les vicient p o in t, et qu’elles vicient les
actes entre-vifs.
« Ce n'est pas que je prétende , ( dit Furgole en son
„ Traité des Testamens, tom. 2 , chap. 7 , nombre 9 ,
» p . <5), qu’un testateur qui blesse la loi en quelques
» parties perde entièrement le droit de disposer, et
» que tout cc qu’il a làit soit nul; il ne doit être privé
» tle 6011 pouvoir que dans celte partie par rapport à
laquelle
�>' laquelle il à contrevenu ’à la loi \ car1 tout le reste
» qui y est conforme*où qu’elle ne réprouve pas,.doit
» demeurer dans sa force.
-f:'
Non confundamus, quœso, contractus, stipulationes,
et alia quœ inter vivos geruntur, cum iis quœ testamentis ac aliis ultïmis voluntatibus cxpediuntur, ne
inde absurda, et legibus contraria, multa sequantur, ne
juris ordo evertatur, ne forma ejus et solemnia tollantur: ne falsitatibus et dolis aditus aperiatur. Prœclare
TJlpianus : verba contraxerunt, gesserunt, non pertinent
ad ju s testandi. Verba ff. de verb.sig. — F a ch in ., t. i,
liv. 6 , chap. - 71.
Mais le fait est qu’on ne peut môme dire dans l’es
pèce que la testatrice ait apposé, ni eût l’intention
d’apposer à ce legs une explication, une relation, une
démonstration, un mode contraire aux lois.
En effet, il est certain qu’elle commence par ne vou
loir disposer, qu autant q u ii dépend d’ elle ; elle est
donc semblable à ces testateurs, qui disent qu’ils lais
sent ce que la loi leur permet de laisser. O r, dans l’un
ct ^nutre cas, il est clair qu'on ne veut agir ni en haine
fri en fraude des lois.
Cette volonté si clairement manifestée dans le com
mencement de celte disposition , continue , lorsqu elle
dû : » tout ce dont il m'est permis de disposer suivant
B
�là loi du
4
( IO )
germinal an',S. C’- est.dojic, k s tiou^dles
lo is, et non les abrogées', jqui ¿ont.lâîbase <le/sûn^isr
position.
"dl r;; : ::
..iu
-> «
Elle veut favoriser ceux qui'descendeut des trois.estocs
par elle désignés. O r j ja’ayant ni ascendâns ni descendans, rien ne l’empêehoit de le faire, et lorsque ¿même
la loi du 4 germinal tin 8 ne lui permettoit pas de dis
poser de la totalité <le ses .biens , elle n’a disposé que
de ce dont
e lle
pouyoit disposer, et elle nV 'parlé de
la totalité de son hérédité , qu’après que le .Code' N a
poléon lu i en donnait le p o u vo ir, selon les lois des
douze tables, uti pater fam ilias legas.sit, Ma ju s esto.
Toute sa marche est donc-conforme aux nouvelles lois.
En léguant les biens y désignés aux descendans des
trois estocs nommés par e l l e e l l e n’a fait Cette dispo
sition qu’au profit dé ceux qui étoient.déjà nés à son
décès, et la loi n’exige point que les légataires soient
D. leC. S
Imtit.
, de heà.
désignés parleurs noms, mais il suffit, qu’ils existent, et
que indubitabili signo dcnionstrentur,
JElle les appelle suivant les règles de la représenta
tion à l’infini. O r , les,règles de la rqirésentation A ¡’infini
sont connues , et cette volonté peut avoir son e ffe t,
«ans blesser n i ^
111 l’ordre public 9 puisqu’il lui
¿toit permis d’app^^r f^ui elle vouloit à ce legs.
Sa disposition se voit, se copnoît » s’explique, ut pçut
�f
Mi >
avoir son e ffe t'p a rrles, seules expression? de la reptérr
sentation à l’infini; les autres donc: qui: suivent., tell&
q u elle avoit lieu clans la ci-devant Coutume d ’Auvergne,
ne peuvent en rien influer sur son effet, puisqu’en disant
suivant les, règles de la représentation à. l’infini , elle
a dit tout ce qui est nécessaire à cet égard,, e t les ex
pressions suivantes, selon, etc., ne contiennent qu’ua
pléonasme, soit une. déclaration inutile.
Dans- la série et lecture de ses dispositions-, on voit
qu’elle n’a consulté que les nouvelles lo is, qu'elle s’y
est toujours rapportée ; on voit en outre qurellfc o’a
pas dit telle q u e lle a lie u , mais telle q u elle avoit lieii\
expression qui prouve qu’elle a reconnu cette coutume
anéantie par les nouvelles loia, et. qu’ellfe ne l’a- indi?
quée que majoris démonstrations causé.
Comment donc le tribunal a-t-il pu un seul instant
soupçonner que sa disposition’ fût contraire à l’ordre
p u b lic, et y appliquer l’article 6 du Code Napoléon,
puisque la loi qui estr basée sur l’ordre public a tou
jours été le guide de sa volonté et de ses dispositions,
puisque cette môme loi permet aux testateurs , qui n on*
ni asccûdans ni descendans, de disposer au profit de
mieux leur plaît ; puisqu’enfin le mode de divi
sion ne rçgarcie5 ni la faculté de .tester, ni la nature
de la disposition , ni la qualité de la chose lé g u é e ,
B 2
�nnicfue cas où si le testateur ' vôuloit heurter la l o i ,
sa ' disposition seroit frappée de nullité j
-
R ien donc n’a paru plus étonnant au soussigné, que
la singulière opinion du tribunal ù cet égard-, opinion
qui, contraire ;à tout principe de droit, a donné lieu
à un jugement qui ne peut qu’être et qui doit être
émendé.
L e tribunal pose même en matière de contrat dotal
une maxime orronnee, et contiane
3
larticle i q o ,
car, outre ce que j’ai dit ci-deSsus, qu’on ne peut dans
semblables cas de mode, ou condition contraire aux lois,
rien inférer pour celles apposées dans les dernières vo
lontés, ’il est >encore à remarquer qu’il est erronné de
dire qu e'si dès époux stipuloient expressément telle
ou telle chose , ï en ajoutant ensuite tel que cela e'toit
porté par la coutuvie, leur stipulation fût nulle , parce
qu’il est évident qu’ils n’ont pas stipule d’une manière
générale selon la coutume , ainsi que dit l’article sus
cité, ce qui arriveroit s’ils disoient généralement et sim
plem ent, et sans autre spécification, nous stipulons selon
la Coutume de Turin, P a r is, etc. Mais s’ils avoient
stipulé une somme déterminée , ou fait une convention
expresse, par exem ple, z\ T u rin , que l’augment de la
dot seroit un tiers * i ue
Innl'i g^gneroit- la moitié
de la dot , si l’épouse;'vient à mourir sans en fans, on
�( i
3)
ne peut soutenir que cette stipulation soit nulle : dans
le cas de celte stipulation expresse, de telle ou telle
chose, l’addition qu’ils auraient faite, ainsi q u il est porté
par la coutume, ne' nuiroit pas à la stipulation, puis
que l’article
ne
défend pas de nom m er, démonstration
nis c a u s é , les coutumes *, mais il défend seulement de.
stipuler, ¿u n e manière générale, que leur association seroit réglée par les coutumes, stipulation bien différente
de celle qui est faite expressément de telle chose, quoi
qu’ensuite;.la coutume soit énoncée dans l’acte -, car ce
n’est point alors la coutume qui règle la stipulation,
mais les objets qui y sont expressement déterminés.
En un m o t, lorsque les époux se rapportent en
îrénéral,
O
’ et sans autre,' à une coutum e, comme cette
coutume est abrogée, elle ne peut plus rien opérer,
devant la considérer comme'si elle n’avoit jamais existé.
Il ne résulte point de ce que les contractans ont voulu
faire, attendu qu’on ne peut alléguer la coutume pour le
démontrer.
Mais s’ils stipulent expressément telle ou telle chose,
en ajoutant m êm e, ainsi qu’ il étoit porté par la cou
tume , alors la preuve de leur volonté et de la chose
stipulée existe indépendamment de la mention faite de
la coutume.
C ’est donc contre tout principe de droit, et contre
la disposition même de l’article i
39°
^ ^ d t, q u il
�4
( * )
a plu au tribunal dé lui donner cette étrange interpré
tation.
II ne reste plus qu’à répondre à l’autre interprétation
encore plus étrange de la loi du
3o
ventôse an i î ,
qui a abrogé toutes les coutumes; car ici il n’est point
question de donner force à une coutume abrogée; mais
il s’agit simplement de la mention d’une coutume, faite
en addition, ou, pour mieux expliquer la volonté du
testateur, déjà assez expliquée et assez claire par les
expressions antécédentes de la division de son hérédité,
selon les règles de la représentation à l’infini, qui s’enten
dent- très-bien, sans la mention ou énonciation de la Cou
tume d’Auvergne.
D ’ailleurs comment supposer que la testatrice ait voulu
au mépris des lois faire revivre une coutume qui ne lui
permettoit pas de tester ainsi qu’elle l’a fait, et qui vouloit
une succession ah intestat, tandis qu’elle en ordonnoit
une testamentaire.
D ’après tous ces motifs, je suis d’avis, et même plus
qu?intimément persuadé, que le jugement du tribunal
doit être réparé, et qu’en son émendation il sera déclaré
q u e
le
le g s
dont il s agit doit avoir son entière exécution.
T urin, 3o novembre 1808.
Signe
C laude
BERTHLKB. , jurisconsulte,
ancien sénateur et avocat général.
�5
( 1 )
Je soussigné, procureur général impérial près la cour
d’appel séante à Turin , certifie la sincérité des qualités
prises par M . C. B erth ier, rédacteur de l’écrit ci-dessus.
T u rin , 9 décembre 1808.
Signé T I X I E R .
V u , les soussignés sont du meme avis.
Signé C h a r l e s B A L , avocat.
V
ic t o r
B R U N , professeur en droit, ins
pecteur de l'académie de législation.
C A Y E T A N - A M B E L , jurisconsulte.
Louis F E R R E R O , jurisconsulte.
H en ri
B E R T O L O T T E , avocat ju ris
consulte
J
o seph
.
R O L L A N , avocat, censeur de
l'académie de jurisprudence.
G I A C O M E T T E , jurisconsulte.
C L E R M O N T , de l'im p rim e rie de L a n d r i o t , Im p rim eu r de la P r é fe c tu re ,
et L ib r a ir e , ru e S a in t-G e n è s , m aison ci-d e v ant
Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Berthier
Bal
Brun
Cayetan-Ambel
Ferrero
Bertolotte
Rollan
Giacomette
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation [Chazerat]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1801-1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0515
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53826/BCU_Factums_M0515.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Entraigues (63149)
Joze (63180)
Maringues (63210)
Ménétrol (63224)
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53411/BCU_Factums_G2115.pdf
4559a3d3506156b6cf4419cb44fd21c9
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
!
Jean-A lexandre
M U R G E O N , et D
BOU
e n ise
C H A R D , sa fem m e, Propriétaires, demeurant à.
Vendat, appelans d’un jugement du tribunal de
première instance de Gannat, du 7 août 1 8 1 3 ;
CONTRE
L e sieur F r a n ç o i s P A S T I E R , employé à l a recette
générale des contributions d u département d u P u y d e-D ô m e } dem eurant à C lerm on t-F erran d in tim é
CONTRE
L e sieur J e a n - M i c h e l P A I L L A R D , receveur des
dom aines , et dam e F r a n c o i s e - G a b r i e l l e
D E B A R , son épouse, dem eurant à R iom , appe-
l ans du même ju g em en t
I
�EN P R É S E NC E
De J
ean
B O U C H A R D , et J
sa fem m e j A
l e x is
eanne
BOUCHARD,
B O U C H A R D , et
B O U C H A R D , sa fem m e ; et F r a n c ò i s
M a r ie
BOU
C H A R D , tous propriétaires, demeurant en ta com
mune de V erid a t, assignés ^en déclaration d ’arrêt
comm un.
I i E partage de la succession du sieur Gilbert Pastier,
ancien curé de C h a r r o u x , donne lieu à de grandes
discussions.
L e s sieur et dam e M u r g e o n , appelés par un pre
m ie r contrat de mariage à lui succéder, par représen
tation de Gilberte Mandosse, v e u v e M u r g e o n , et de
M a rie B a u d o n , v e u v e Bou ch ard , leurs d eu x m è r e s ,
réclament les droits héréditaires que ces deu x mères
auraient respectivement exercés si elles eussent survécu
au sieur Pastier, c ’est-à-dire la totalité de sa succession,
c o m m e étant ses plus proches parens au m omen t de
son d éc ès, tant dans la ligne paternelle que dans la
ligne maternelle.
L a dam e Paillard, appelée par un contrat de m a
riage subséquent, à représenter le sieur D e b a r , son
p è r e , v e u t , d ’ un autre c ô t é , en exercer les droits de
successibilité, quoique
cette seconde disposition s©
ê
�——— — —
l û ;
—
t r o u v e , par l ' é v é n e m e n t , en opposition a vec la pr em i è r e , qui forme la loi de la famille.
U n sieur François Pastier, de C le rm o n t , qui porte
le môme nom que le défu n t, mais qui n’est point p a
rent , paraît dans l’arène ave c un testament olographe,
et prétend s’em parer , ou de la totalité, ou au moins de
la majeure parlie de la succession, en détruisant ou
modifiant les
premières dispositions contractuelles,
dont il méconnaît Tirrévocabilité.
E n f i n , les frères et sœurs B o u c h a r d , originairement
associés au premier pacte de su ccéder, où ils n’ont pas
élé parlies contractantes, ont dem andé à en partager
le bénéfice avec la dame M u r g e o n , instituée, quoique
la charge d’associer ait été formellement r é v o q u é e
p a r le t e s t am e nt du d é fu n t.
L e s frères et sœurs M u r g e o n , et D e b a r , associés
c o m m e les B o u ch a rd , mais pensant autrement sur la
validité de cette rév oca tion , ont préféré le silence de
la p a i x , aux dangers des débats judiciaires.
Le
tribunal de G a n n a t , qui a jugé le procès en
première instance, a décidé que les dispositions du
testament postérieur devaient prévaloir sur les dispo
sitions antérieures des deu x contrats de m a r i a g e , q u ’il
a considérées c o m m e insignifiantes et révocables. Il a
attribué au légataire Pastier la majeure parlie de la
succession, et m ê m e les portions des associés déchus,
dont il a privé les héritiers contractuels.
%^
^
�-
\ i'k
—
------
En on ce r une telle décision, c'est proclamer que l ’er
reur a triomphé des principes les plus sacrés de la lé
gislation française.... Les sieur et dame Murgeon de
mandent à la C o ur la réforma lion de ce jugeme nt
extraordinaire. Ils se présentent devant les magistrats
distingués qui la com po sen t, avec d ’autant plus de
sécurité, que l ’appel est motivé sur la sagesse des ar
rêts no mbre ux q u ’elle a déjà rendus en cette matière.
Exposons d’abord les faits du procès; nous discute
rons ensuite les questions q u ’ils ont fait naître.
FA ITS.
J e a n - A l e x a n d r e M u r g e o n et Denise Bouchard ont
contracté mariage le
5 septembre 1 7 9 3 , par acte reçu
Poulain,, notaire à Charroux.
Gilberte Mandosse, v e u v e M u rg e o n , et Marie Baudon , veu ve Bo u ch a rd , ont réglé les conventions ma
trimoniales, de concert ave c le sieur Gilbert Paslier,
curé de C h a r r o u x , dont elles étaient alors héiitièies
au mo ins en partie, c o m m e ses plus
proches parentes.
présomptives,
lies deu x futurs é p o u x , et sur-tout le sieur M u r
ge on, avaient toujours été l’objet des plus tendres afiections de ce pa ren t, qui avait accordé des soins à
le u r
e n fan ce, et à qui Murgeon avait déjà rendu d’iin-
portans services dans le cours de la chh> révolution
naire : aussi ce bon parent voulu l-il leur donner une
�IJ
J------------------------ —
preuve de sa tendresse et de sa gratitude, en les pro
clamant ses héritiers.
\
L ’incertitude des circonstances politiques exige'ait
néanmoins quelques ménagemens envers la nombreuse
famille du sieur Paslier, qui aurait craint de s’attirer
la haine des parens q u ’il aurait ouvertement privés de
tout espoir de lui succéder pa rti el lem en t, en ras de
survie. L a prudence lui suggéra l’idée de stipuler sa
libéralité dans des termes qui pussent embrasser l ’ u
niversalité de sa succession, sans affliger ses autres
parens, en laissant dépendre l ’étendue de sa disposi
ti on, du nombr e des héritiers présomptifs que la loi
de la nature appellerait à lui survivre. Voici les termes
dans lesquels il s’expliqua :
« Est in l e r v e n u , au présent contrat, Gilbert Pas « l i e r , p r ê l r e , cu ré de la paroisse de Saint Sébastien
c< de cette ville ( C l i a r r o u x ) , cousin issu de germain
c< des mères desdits futurs, lequel, trouvant le présent
« mariage pour agréable, a rappelé, c o m m e par ces
« présentes il rappelle, lesdits futurs à sa future suc« cession, chacun pour ce qui les co ncer ne, par la re« présentation du chacune m è re , à la d i a r g e , par
« lesdits futurs, d ’associer audit rappel leurs frères et
« sœurs; ¡ceux futurs ont à 1 instant accepté et remer« cié ledit sieur Pasli er, leur cousin. »
Nou s remarquerons q u ’à ce ll e époque Gilbert Paslier avait [jour parens les plus proches, et conséquent-:;
ment pour héritiers présomptils :
�-------------------------------- ^ u j
D an s la ligne paternelle, Marie B a u d o n ,a lo rs v e u v e
de Jean-Baptiste B o u c h a r d , et mère de Denise B o u
chard, future épouse ;
Et dans la ligne maternelle, en remontant à la tige
de Gilberte Pralois, son a ïe u le:
Gilberte Mandosse, v e u v e de Jean Mu rgeon , et
mère de J e a n -A le x a n d r e M u r g e o n , futur é p o u x ;
An t o in e -M a ri e n D e b a r, père de la dame Paillard; la
dam e D e b a r - d e - l ’ I iô p ital, sœur d ’A n t o i n e ; et M a g d e laine Du bu isson, f e m m e d ’An toin e Monpied.
Marie L u c a s , épouse D e l e s v a u x ,
et mère
de la
dame Lois el -G u il lois , était alors déc édée depuis plu
sieurs années; de manière que la dame G u il lo is , sa
fille, était descendue d ’un degré.
L e 27 septembre m ê m e année ( 1 7 9 3 ) , A n t o i n e M arien D e b a r maria sa fille
(Françoise - Gabrielle
D e b a r ) à M . J ean -M iclie l Paillard. L e s invitations
pressantes que l ’on fit au sieur Pastier d ’assister à ce
m ar ia ge, produisirent une intervention de sa part dans
ce n o u v e a u contrat de mariagfc. Elle est stipulée en ces
termes :
« E n contemplation du présent m a r i a g e , Gilbert
a Pastier reconnaissant que ledit sieur Antoine-Marien
« D e b a r , père de la future, est l ’un de ses héritiers
« pr és omptif s
le plus près, et voulant prévenir toute
« discussion à sa succession sur le droit de représenta
it lion q u ’aurait la future si son père venait ù décéder
�-------------------------------------------------- m
------------------------------------------------
« avant ledit Pastier, il a , par ces présentes, volon« laireraent rappelé la future et les siens à sa succes« sion, audit cas de prédécès du sieur D e b a r , pour
« la m êm e portion q u ’aurait droit de prendre le sieur
« D e b a r s’il survivait au sieur Pastier, à la charge
« toute fois d ’associer Annet-Gabriel D e b a r , son frère,
« ou ses descendans, pour moitié au présent rappel.»
C e u x qui ont dicté ce second contrat de mariage,
n ’ont pu se dissimuler q u ’il ne devait point porter at
teinte au premier pacte de succéder, et q u ’il ne pro
duirait d ’effet réel que dans les cas et dans les chances
qui ne seraient point en opposition avec les disposi
tions primitives que la loi déclarait irrévocables.
Il est inutile de parler ici des évé ne men s subséquens
qu’a éprouvés la fortune de Gilbert Pastier, et d ’expli
quer les n o m b r e u x services q u e n ’ont cessé de lui
rendre les sieur et dame M u r g e o n , dans tout le cours,
de sa vie, et au milieu des persécutions auxquelles il
a
été m o m e n t a n é m e n t exposé. Nous nous bornerons
à rappeler les faits utiles à la décision du procès.
L a dame D e b a r - d e - l ’Hôpital est morte vers l ’an
né e 1795.
__
Magdelaine D u b u is s o n , f e m m e M o n p i e d , est d é
cédée le i 5 vendémiaire an 8 ( 7 octobre 1 7 9 9 ) .
M arie B a u d o n , v e u v e Boucha rd, le 28 ventôse
i 3 (ic) mars i 8 o 5 ).
Antoine-Marien D e b a r , père de la dame Paillard,,
le
5 germinal au i 3 (2 6 mars i 8 o 5 ).
�• Gilberte Mandosse, v e u v e M u r g e o n , est morte Ta
dernière, c ’esl-à-dire le 24 mars 1808.
C ependant le hasard fit rencontrer lé vieux curé
de C harroux avec le sieur François Pastier, de Clerm o n t , q u i , jusqu’alors, avaie nt été inconnus l’ un à
l'autre. L a conformité de nom établit entre eux des
com munications, et les sieur et
dame Paslier, de
C l e r m o n t , cherchèrent de concert à capter la bien
veillance du riche pasteur qui portait le m ê m e n o m ,
et sur la famille duquel ils feignaient de s’enter. Ils
firent jouer tous les ressorts pour envahir sa succession.
E n vain ce respectable octogénaire leur disait-il qu’il
était lié par la reconnaissance envers ses parens M u r
g e o n , et par des dispositions contractuelles q u’il n’é
tait pas en son pouvoir de détruire. L ’avidité ingé
nieuse des sieur et dam e Paslier trouvait toujours des
réponses et
des subterfuges; ils répondaient q u ’ils
avaient consulté des personnes qui leur avaient assuré
que les stipulations des contrats de mariages n ’étaient
pas tellement sacrées, q u ’il ne fût possible de les écar
ter par une vente simu lée, pour un prix fictif payé
co m p t a n t , mélangé avec une rente viagère ou une
réserve d ’usufruit, et m êm e par de simples dispositions
testamentaires qui , en restreignant les dispositions
contractuelles, auraient l’apparence de n ’en être que
le com m en taire ou l'interprétation.
Q u o i q u ’affaibli par son grand âge et ses infirmités,
le sieur Paslier eut encore assez de force pour refuser
�(
9 )
i
avec aigreur de signer la ve nte frauduleuse dont la
dame Paslier avait apporté le modèle de Clermont :
il ne voulut pas se dépouiller de sou vivant.
L a dame Paslier ne perdit pas courage; elle usa de
la ressource secondaire d’ un modèle
de testament,
q u ’à force d ’obsessions elle parvint à faire copier lit
téralement par le sieur Pastier, en ces termes ^ sous
l'antidate du i o m a i i 3 i o :
J e soussigné, Gilbert Paslier, prêlre et
ancien
« curé de Sainl-Sébaslien de C harroux , voulant met«. Ire de l’ordre dans mes affaires, prévenir toutes con«■leslalions qui pourraient naître après m o i, et profiter
« de la faculté que m’accorde le C ode N a p o lé o n , de
« disposer de tues biens ainsi que j’aviserai, en maina t e n a n t l e s d i s p o s i t i o n s l é g c i l e m e n l f n i i e s , a i f u i t mon
« testament olographe , que j'ai entièrement écrit f
« signé et daté de ma main,
« J e confirme le rappel porté par le contrat de mar liage du
5 octobre 1 7 9 3 , reçu Poulain, notaire à,
« C h a r r o u x , en faveur de J e a n - A l e x a n d r e Murgeon et
« de Denise B o u c h a r d , pour les portions héréditaires
« seulement que l’ un et l ’autre ont droit d ’am ender
* dans ma succession; je ve ux et entends que ledit.
rappel soit exé cut é chacun par l ê l e , en ce qui con« cerne les mariés; mais je ré voque la clause d ’asso*■ciniion faite au
prolit de
leurs frères et sœurs,
« attendu q u ’ils n ’e n ont ja m is été saisis, et q u ’uno
2
�\ o V
( I 0)
« pareille clause ne peut avoir son effet en faveur de
<r ce ux qui ne contractent point mariage.
« J e ré v oqu e en outre le rappel fait en fa ve ur
<t d ’A n n e t -G a b ri e l D e b a r , frère à demoiselle D e b a r ,
« épouse de M . Paillard.
« Je donne et lègue à M . François Pastier, ern* pl oyé à la recette générale de Clermont , sur tou s
« les biens non com pris d a n s Le rappel, une so m m e
«• de 40,000 fr., à prendre sur les plus clairs desdits
« bie ns, sans être tenu d ’aucunes charges ni dettes à.
« cet égard.
»
«• J ’institue en outre ledit sieur François Pastier +
,
<e m on héritier du surplus de mes biens, à la charge
« par lui de p a y e r , a vec les rappelés à ma succession,
« et par portion égale e n tr’eu x , toutes m es dettes,
« desquelles feront partie les arriérés des gages dus k
<r Catherine C h e n e v i è r e , v e u v e P a l r i n , ma dômes-,
« tiq u e , qui montent à une so m m e de 393 fr.
« D e laisser prendre et retirer de ma maison, par
« ladite C ath erine, son lit garni, non compris l'ul« c o v e , quatre draps de l i t , d e u x arches de sapin,
« un pot de f e r , une poêle et poêlon qui lui a p p a r « tiennent-, de lui d o n n e r , pendant sa vie durant , la
h
jouissance et usufruit d ’ une maison couverte à tuiles
» creuses, et de la moitié du petit jardin qui est a u <r delà de la r u e , le tout en celt e c o m m u n e ot près
« du puits d ’A n t a n l ; de p?iyer aussi à l a d i t e 'C a d j e « l i n e , chaque année et pendant sa vie d u r a n t , une
�( ii
Z & cy
)
<r pension viagère de trois setiers f r o m e n t , et un poin« çon de vin ; laquelle pension lui sera p a y é e , pour
«• la première a n n é e , dans les six premiers mois du
«■jour de m on décès, et ainsi continuer d ’année en
» a n n é e , à com pt er dudit p a i e m e n t , jusqu’au décès
* de ladite Catherine.
« D e p a y e r annuellement et p e rpétuellem en t, aux
« pauvres de cetle c o m m u n e , une reni e de
3 oo fr.,
« pour quoi demeurera un principal de 6,000 fr, , qui
« sera fo rm é par les capitaux qui me sont dus; savoir :
«
3 ,ooo fr. par le sieur Pierre D u b o n , en deu x c o n
te trats, et pareille som m e par le sieur Jean L e v e r t ,
« lesquels contrats de re ntes, à m on décès, seront dé« posés entre les mains du desservant l ’église de cette
« c o m m u n e , q u i , c o n c u r r e m m e n t a v e c le m a i r e d u « dit h eu el le sieur P a s l i e r , ou un de ses représen
te tans, feront la distribution annuelle, aux pauvres
« de cette c o m m u n e , du produit et intérêts desdits
« contrats de ren te, sans que mes héritiers soient t ê
te nus de parfaire les
3 oo f r . , dans le cas où lesdils
te contrats ne donneraient pas annuellement
te s o m m e de
ladite
3 oo f r . ; et enfin de p a y e r , pour mes ob-
« s è q u e s , funérailles et trois annuels, la somme de
« i , o 5 o fr.
te J e nom m e et désigne, pou r m o n ex écuteur tesK tam entuire,' le sieur François
Pastier.
i
*
J e casse et r é v o q u e tous autres tesfamens et co -
» dicilles que je pourrais avoir laits préc éd emm en t >
�X fo
( «
)
« voulant que le présent teslament ait seul son exécn« l io n , c o m m e contenant mes dernières intentions et
» vol on té s; et après J/avoir la et re lu , je déclare q u e
v j ’y persiste. Fait à C h a r r o u x , etc.»
Gilbert
Pastier est mort à C h ar rou x, le
1 « dé
ce mbre 1812.
D e grandes contestations se sont élevées pou r le
partage de sa succession , ouverte dans le dé parte
ment de l ’Allier (territoire du ci-devant Bourbonnais).
I-es scellés ont été apposés. T o u s les parens plus
ou moins éloig n é s, les rappelés, les légataires se sont
présentés; mais à la vu e des contrats de mariag es et
du testament, la plupart des prétendans se sont re
tirés, et il n’a resté sur la scène que les parties qui
plaident aujourd’hui.
U n jugement provisoire a n o m m é le sieur M u r g e o n
administrateur de la succession jusqu’à la décision du
procès.
U n second jugement
a fait délivrance provisoire
des legs pieux et rémunératoires.
L e s demandes respectivement formées ont été dis
cutées dans des mémoires et consultations imprimés.
L a dam e Paillard a demandé le quart de la succes
sion, en vertu du rappel inséré en son contrat de ma
riage, du 27 septembre 1 7 9 3 , sur le fondement q u ’elle
est autorisée à exer cer les droits héréditaires d ’A n -
«
�( *i3 )
foine-Mar ien D e b a r , son pè re, qui aurait hérilé de
la moitié des biens
dévolus à la ligne m at ern el le,
c ’est-à-dire du quart du total de la succession, s’il eût
survécu à Gilbert Pastier. Par cette disposition c o n Iractuelle, a-t-elle dit , le sieur Pastier s’est engagé à
laisser à mon é g a r d , c o m m e à l’égard des sieur et
dame M u r g e o n , sa succession ab intestat j il n ’a pu
la grever d ’aucune disposition testamentaire à m on
préju dice, et je dois parlager la moitié maternelle
a vec le sieur iVJurgeon, mon co -h é ri tie r, par re p r é
sentation de Gilberte Mandosse.
L e s sieur et dame M u rg eon ont soufenn au c o n
traire que la première disposition contractuelle devait
l ’em po rler sur toutes les autres; q u ’elle leur attribuait
l ’universalité de la succession , à raison du prédécès
des parens qui auraient été dans le cas de con c ou
rir avec eux c o m m e représentant leurs mères. Ils di
saient que si la succession eût été ouve rte ab in testat,
et que leurs deux mères eussent élé seules vivantes,
elles auraient recueilli, c o m m e plus proches en degré
dans les deux lignes paternelle et maternelle, la tota
lité des biens; q u’ils étaient autorisés à représenter
leurs mères par l ’effet de la représenta lion c o n v e n
tionnelle ;
Q u ’ une seconde fiction ne pouvait détruire l'effet
de la première fiction contract uelle, qui les reportait
a un degré de parenté plus pr oche; que le pacte de
succéder, stipulé ù leur profit, avait le caractère d ’ir
�lv£
( 14 )
révocabilité, et les effets utiles des institutions c o n
tractuelles,
et q u e , con séq ue m men t
c e ll e qualité
d ’héritiers conventionnels leur assurait toute la suc
cession , par la proximité du degré et la priorité de la
disposition ; que les charges d ’associer, révocables à
l ’égard des non contractons, élaient irrévocables dans
l ’intérêt des institués, et que le bénéfice de la r é v o
cation devait tourner à leur profit; et que ni les frères
B o u c h a r d , ni le légataire Pasiier n’avaient rien à y
p réten dre; que toutes les dispositions testamentaires
devaient disparaître devant les contrats e n t r e - v i f s ,
q u ’il n’était point possible d ’atténuer par des legs i m
menses ou de c o t e , mais seulement d é g r e v e r de quel
ques legs modiques du genre de ce ux expliqués en
l ’art. i o 83 du Code Nap oléon.
L e s associés Bouchard ont prétendu que les charges
d ’associer étaient irrévocables , m ê m e à l ’égard des
associés, et q u ’ils devaient profiler du bénéfice de l ’as
sociation ; mais peu confians dans la solidité de leurs
m o y e n s , ils ont fait défaut dans les plaidoiries.
François
Pasiier est c o n v e n u , dans son m ém o ire
i m p r i m é , que les rappels à successions, stipulés par
contrats de mariage, étaient de véritables institutions
contractuelles irrévocables; mais il a prétendu
que
les portions des associés au rappel étaient tom bée s,
par la r é v o c a t i o n , dans la succession ab in testa t, et que
le sieur Gilbert Pasiier en avait valablement disposé îi
son profil. Il a aussi ré clamé des portions d ’acquêts et
�( 15
)
de pr opre; il a fait des calculs compliqués des portions
qu'il lui plaisait d'attribuer, soit à l u i - m ê m e , soit à
chaque prétendant. Mais lors des plaidoiries, il a c o m
battu son propre sy stè m e, et prétendu que les rappels
à successions, écrits dans les contrats de mariages, ne
saisissaient point les rappelés du droit de succéder, et
n ’avaient d ’autre effet que de les placer dans un degré
d e parenté plus rapproc hé; que le rappelant pouvait
di sposera sa volonté de la totalité de sa succession. I l
a frondé et l ’opinion judicieuse du savant c o m m e n ta
teur de la coutu m e d ’A u v e r g n e , et l’arrêt rendu dans
l ’affaire des R a n d o i n , et tous les m on u m ens de la ju
risprudence.
C e dernier sy s tè m e , dont la bizarrerie fait tout le
m é r i t e , a été adopté par le tribunal de G an na t, quoi
q ue le long délai e m p l o y é à la délib ération dûl laire
espérer le triomphe des vrais principes.
V o i c i le dispositif du j u g e m e n t , qui porte la date du
y août 1 8 1 3 :
« L e tribunal, jugeant en premier ressort, donne
« défaut faute de plaider contre les parties de T r o n « n e t , et ,s ta t u a n t au principal, ordonne que le testa
it ment olographe
du sieur Gilbert Paslier, du
18
« niai i 8 r o , sortira son plein et entier effet, et q u ’à
« cet effet les parties viendront à partage des biens
« meubles et immeubles de la succession de Gilbert
« Paslier;
en co n séq uence , que les parties seront te-
« nues de n o m m er uu ou trois exp ci is dans les trois
�rrü -j
« jours de la signification du présent j u g e m e n t , pour
« procéder audit partage, co n fo rm ém ent à l'article
« 824 du Code N a p o l é o n , et suivans; sinon et faute
« d’en convenir dans ledit délai, n om m e M M . De« Iesvaux, notaire à C h a r r o u x ; R e n a u d e l , notaiie à
a Braussat, et L a p l a n c l ie , géom ètr e à Gannat; lesquels
« prêleront serment par-devant M. Chocheprat - D u « m o u c h e t , j u g e , commis à cet effet, qui, au besoin,
« remplira les fonctions de juge-commissaire; lequel
« fera la délivrance des lofs aux parties, suivant leurs
« droits, qui demeurent ainsi réglés; savoir : à Denise
« Bou ch ard , c o m m e représentant Mari e Ba u don, le
« quart de la moitié, équivalant au huitième de la to« talité des biens de la succession, q u ’aurait recueilli
a M arie Baudon , sa m è r e , du c h e f paternel ; à Alexan« dre M u r g e o n , du c h e f maternel, le tiers du q u a r t ,
« équivalant au douziè m e de la totalité des biens de
« la succession, qu'aurait recueilli Gilberte Mandosse,
« sa m ère ; à Françoise-Gabrielle D e b a r , f e m m e du
« sieur Pai llard, la moitié du qua rt , équivalant ail
« huitième de la totalité des biens, q u ’aurait recueilli
« A n t o i n e - M a r i e n D e b a r , son pè re , aussi du c h e f
« maternel. Sur le surplus des autres biens, ordonne
« que Îe sieur Pas!ier prélèvera la somme de 40,000 fr.,
« franche et quille de toute dette, conformément audit
c< testament ; ordonne q u ’il se mettra eu possession des
« autres biens, à la charge par lui de payer les dettes
« et legs de la succession, conformément au testament,
« avec les rappelés, en proportion de ce que chacun
�C 17 )
£ ?/
« y a m e n d e; que l ’administrateur provisoire sera (enu
« de rendre c o m p t e de sa gestion; ord on ne, e n f i n ,
« que tous les frais faits seront employés en frais de
« partage, m ê m e ce ux faits par les autres prétendant
« droits à ladite succession, révoqués par ledit testa« m e n t , ainsi que le c o û t , l e v é e et signification du
« présent ju g e m e n t ; et dans le cas où lesdits experts
« estimeraient que les biens ne seraient pas dans le cas
« d’être p a r t a g é s , ordonne q u ’ils seront licités paroc devant le tribunal. Fait et j u g é , e t c . »
L e s sieur et dame M u rgeo n ont appelé de ce juge
ment contre toutes les parties.
L e s sieur et dame Paillard en ont aussi interjeté
appel.
L e s frères et sœurs B o u c h a r d
o nt é t é assignés en.
déclaration d’arrêt commun.
L e s discussions respectives présentent à juger les
questions de savoir :
i ° Si le rappel à succession, stipulé par contrat de
m ariage,
sous l’empire de la coutum e de Bourbonnais,
avait 1’eiTet d ’ une institution contractuelle irré vo cable,
ou si, au contraire, l ’auteur de la disposition pouvait
l ’anéantir par une révocation entre-vifs ou testamen
taire ;
2° S i, dans le fa it , les sieur et dam e Mu rgeon ont
été saisis par leur contrat de mariage du droit de r e -
3
�( i8 )
cueillir éve ntuellement l ’ universalité de la succession
de Gilbert Pastier ;
3 ° Si les portions des associés au rappel doivent
tou rn er , par suite de la révoca ti on, au profit des rap
pelés, ou tomber au contraire dans la succession àb
in testa t;
4° Si la première disposition contractuelle était un
obstacle,soit à la dispositionsecondaire faitedansle co n
trat de mariage de la dam e Paillard, soit aux nouvelles
disposilions, à cause de m o r t , insérées dans le testa
m ent olographe du 18 mai 1810.
L a première question est la plus importante : elle est
le ger m e des autres difficultés; sa solution préparera la
décision des questions subséquentes qui se rattachent
plus ou moins aux principes que l’on établira dans la
discussion préliminaire.
Lu matière des rappels est fort aride par e l l e - m ê m e ;
les auteurs sont discordans sur divers points de doc
tr ine, dans leur application aux cas particuliers; mais
ils s’accordent presque tous sur les points fonda men
t a u x , et notamment sur les rappels stipulés par contrat
de mariage. Nous élaguerons
toutes les discussions
oiseuses, et nous les ramènerons aux seuls points de
controverse qui existent au procès.
«
�( '9 )
§
I".
L e rappel à succession , stipulé par contrat de m a
r ia g e , a L’effet d'un e in stitu tion contractuelle irré
vocable.
L e s auteurs définissent Le rappel en g én éra l, une dis
position de l ’h o m m e qui appelle ¿1 sa succession, to
tale ou partielle, une personne qui en serait exclue
par lu loi, ou n’y prendrait q u ’ une moindre part si la
succession s’ouvrait ab intestat.
Cett e définition s’applique ég alem ent aux quatre
espèces de rappel qui étaient usitées dans l ’ancienne
législalion, pour re m éd ier , i° à l ’exhérédation des en; 2° à l’exclusion coutumière des filles dotées; 3 ° à
la r e n on c i at i on a u x successions f ut ur es ; 4° au d éfa u t
fans
de représentation.
Nous ne parlerons ici que du rappel relatif à la re
présentation, parce q u ’il est le seul qui ait de l ’analogie
a vec les questions agitées au procès.
I l im p or te , pour la clarté de la discussion, de r e
m arqu er que le droit romain admettant indéfiniment
la représentation dans la l*jne directe, en avait fixé les
bornes a u x enfans des frères, dans la ligne collatérale,
par les deu x novelles 1 18 et 127.
T^a plupart dès cou tu m es , notamme nt celles de P a n s
et de B o u rb o n n a is, admettaient la représentation eu
directe et e n collatérale, d a n s les termes d u droit r'o-
�\S •
C 20 )
main. : c’était ce que les auteurs appelaient la repré
sentation in lrà terminos j u r i s , confirmée, a vec une
légère addition, par les articles 740 et 742 du Gode
Napoléon.
L e s successions qui s’ouvraient dans Les termes de La
représentation Légale, intrà terminas j u r i s , se parta
geaient par souch es, per stirpes, pour nous servir de
l ’expression textuelle de l ’article
3 o6 de la coutume
de Bourbonnais. L a représentation reportait les en fans du frère pr édécédé
au m ê m e degré que leur
p è r e , et tous ensemble ne formant q u ’ une souche, re
cueillaient la m ê m e part que leur père aurait eue s’il
eût réellement survécu au frère dont on divisait la suc
cession. L a fiction légale imitait la nature, et produi
sait les même s effets.
O n ne consultait, au contraire, que la proximité
réelle du degré de parenté, pour régler les successions
ouvertes hors des termes de la représentation d u droit
co m m u n , extra terminos j u r i s . L es héritiers les plus
proches venaient personnellement {ju r e suo ) à la
succession, et la partageaient entre eu x par tê te , per
capita.
L e s rappels avaient pour objet de suppléer au si
lence des coutumes qui ne connaissaient pas la repré
sentation, c o m m e de remédier à la rigueur des 'c ou
tumes qui rejellaient la représentation, soit dans la
ligne directe? soit dans la collatérale.
L es rappels étaient d ’ un usage fréquent, m êm e
�'
( 21 )
avant la réformation de nos anciennes coutumes. Ils
étaient tellement fa v o r a b l e s , qu’ il suffisait d ’en faire la
déclaration, par le plus simple acte capable de manifes
ter la volonté du rappelant , sur-tout lorsqu’il s’agis
sait d ’ une succession ouverte iatrà terminos j u n s . Ils
conféraient alors la qualité et les droits d'hé rilier; les
biens recueillis par le rappelé étaient réputés propres
sur sa tête.
Lorsque le rappel avait lieu hors des termes de la
représentation d u d r o it, extra terminos ju r i s , il était
considéré co m m e legs; il valait, c o m m e disent les au
te urs, per m oduni leg a ti, et attribuai! au rappelé la
quotité des biens , que la coutum e déclarait disponible
p ar testament. L es biens échus à ce litre avaient la
qualité d'acquêts.
Si l ’on trouve par fois quelque dissidence, sur di
vers points de doctrine, entre les auteurs qui
ont
traité des rappels faits par simple acte déclaratoire ou
par testament, on peut affirmer que la plus parfaite
unanimité règne parmi eux à l’ instant où ils parlent
spécialement d u rappel stipulé par contrat de mariage.
Il change alors de nature, et acquiert Joule la faveur,
tous les privilèges que la législation française accorde
aux conventions matrimoniales; il lait dans tous les
cas un héritier contractuel. « O n n Vx/unine plus ¿dors,
« disent Ihs éditeurs de l'ancienne collection fie ju n s « p r u d e n c e , si le rappel est fait intrà ou extra terminos
v. j u n s ; lu laveur de ce contrat esl si g ran d e, q u ’on
�Iti
^
, (
k
2
2
)
.
passe par-dessus les règles ordinaires pour faire valoir
.« loules les conventions qui ne sont pas contre les« bonnes mœurs. »
A C égard d 'a n rappel, f a it par contrat de m ariage,
dil de R e n u sso n , Tr aité des Propres, cliap. 2 , sect. 8 ,
pag. 1 63 : «S’il est fait dans une coutum e où il est per
te mis de disposer de tous ses biens en tre-vifs , il vaut
« in stitu tion d'héritier, et doit être exéc uté dans toute
« son éten due , quoiq u’il soit fait extra term in osJuris.
« Les conventions de succéder, les institutions d ’héri« lier ont été reçues et autorisées en France p o u r la
« conservation des familles, quand elles sont faites par
« contrat de mariage. »
« Quand le rappel est fait par contrat de mariage
« intrà vel e x tr a term inos ju r is , lit-on dans deLauriere,
a T r a i té des Institutions contractuelles , tom.
I er,
« pag. 1 1 7 , 1 1 8 , etc., n. 45 et suiv., il fait un héri« tier contractuel : il profile non-seulement à celui en
« faveur de qui il a été fait ; mais en cas de prédéces,
« il profite encore à son héritier comme C in stitution
« contractuelle, et,par conséquent,il est vrai dedire que
« le rappel en contrat de mariage est une institution
a qui fait un véritable h éritie r, etc. »
« Si le rappel a été fait par contrat de mariage
« (p ro fess e B rodea ti, sur L o u e t , lettre R , som. 9 ,
« n. i 5 ) , on peut dire, en ce cas, que le rappel est
« une espèce d ’institution contractuelle qui est irré« vocable, s a is it, et est tra n sm issible; sans q u ’il soit
�^LS\
( 23 )
« au po uvo ir de celui qui a fait ef établi la loi du rappel
« dans sa famille, par un contrat si solem nel, de le
« r é v o q u e r , ni m ê m e de le diminuer et affaiblir eti
faisant des dispositions avantageuses au profit des
« autres héritiers, au préjudice de ceux qui ont été
« rappelés. »
L e B r u n , parlant des rappels extra ierminos ju r e s ,
faits en f a v e u r d’arrière-neveux qui ne devraient héri
ter que per rnoclum le g a ti, a j o u t e , n. 1 8 , liv.
chap. i o , s e c t .
3,
3 : « q u ’ils viennent per m odum succes-
« sio n is, q u a n d ¿¿s sont rappelés par contrat de m ae riage; car alors leur appel est une institution co n
te tractuelle, et la succession se doit partager par souw ches , suivant un arrêt d ’audience du 6 mars 1660. »
Cet arrê t, r a p po r t é par de L ciuricrc, pag. 1 1 9 e t
su ivante, est conforme à une multitude d'aulres arrêts
recueillis
par B o u q u ier, B r o d e a u , de R e n u s s o n , et par
le Journal des Audiences, où l ’on remarque particu
lièrement les arrêts des 21 janvier i 6 o 5 , 6 mars 1 660,
et 12 janvier 1 7 1 2 , rendus après des discussions pro
fondes et lumineuses, qui n’ont pas laissé le moindre
doute sur le principe que Le rappel par contrat de m a
riage, întrà comme extra terrninos ju r i s } emportait
in stitu tion contractuelle
C o m b ie n cette m ax im e du droit général n ’acquiertelle pas de force, lorsqu’on agite la question sous une
des trois coutumes qui ont créé les institutions contrac-
�( H
)
tuelles, et servi de type à la jurisprudence universelle
sur cette matière!
Voici les termes textuels de Fart. 21 9 de la coutume
de Bourbonnais, qui régissait le domicile et la fortune
des parties, à la date du contrat de mariage des sieur
et dame M u r g e o n , du
5 septembre 179 3 :
«• Toutes d o n a tio n s, conventions, ava n tages, in sti« tutions cThéritier y et autres choses fa ite s en con« trat de m ariage , en fa v eu r d 'ic e lu i, au p rofit et
« u tilité des m a riés} de Cun d ’e u x , ou des descendans
*■d u d it m a riag e, Le m ariage f a i t par paroles de pré«• sen t, sont bonnes et valables, en quelque fo rm e q u elles
« soient fa ite s , etiam en donnant et retenant ; et posé
« qu elles soient im m en ses, inoffîcieuses et f u s q u à
« Cexhérédation des propres enfa n s d u d it d isp osa n t,
« soient icelles dispositions f a i t e s , apposées ou a fo u » tées a u d it contrat de m a ria g e, avant ou pendant les
ce fia n ça illes , réservé toutefois a u x d its en fan s leur
k
droit de légitim e ,• posé a u s s i que lesdites donations
tr et avantages soient fa it s à personnes étranges co n
te tractant led it m a ria g e, bâtards ou autres quelcon~
« q u es, et saisissent telles disp ositio n s, les cas avenus,
rr q u a n d lesdites donations et dispositions sont fa ite s
« p a r personnes habiles à contracter. »
L e s termes de la coutume sont si absolus, si g é n é
ra u x , q u ’il est impossible di* douter q u ’elle comprenne
les rappels à succession au nombre des d i s p o s i o n s con
tractuelles, puisque ces rappels n ’offrent q u’ un p a cte,
�( 2b J
Z %3
un morte, une con ven an ce de s u cc é d e r, un avantage
on cfio.'e quelconque fa it e en contrat de m a riag e, et
que la coutume enveloppe généralement toutes les
conventions, toutes les stipulations, toutes les choses
en général q u ’il est possible de stipuler dans lés contrats
de m ar ia ge, sous quelque nom et en quelque forme
q u ’elles soient rédigées. Peu importe que les c o n v e n
tions de succéder soient conditionnelles, é v e nt u elles ,
casuelles et inofficieuses j elles ne saisissent pas moins
les contractans lorsque les cas aléatoires se réalisent, et
s a is is s e n t, dit l’art ic le, telles d isp o sitio n s, les cas
avenus.
L e privilège de saisine et d ’irrévocabilité, attaché
aux dispositions contractuelles, qui n’avait jamais été
contesté dans l’ancienne législation, a été consacré de
nouve au par l’art. i er de la loi du 18 pluviôse an 5 , et
par l’art. i o 83 du C o d e Napoléon.
L es jurisconsultes les plus distingués de R io m et de
C le rm on t, au nombre de tr eiz e, qui ont écrit au pro
c è s , ont rendu de concert h om m a ge à ce principe f o n
damental de notre législation. O n lit, dans le mém oire
i m ^ ’imé du sieur Pastier, pag. 6 , les lignes suivantes :
« Lorsque le rappel est fait par contrat de mariage
« c o m m e celui des ép oux M u r g e o n , il est u n ei n s ti tu « tion contractuelle, irrévocable c o m m e toutes les dis« positions contractuelles, en ce sens que l’instituant
« ne peut plus disposer, à titre gratuit, des biens qui
a en sont l’objet, si ce n’est dans les bornes prescrites
* par la loi en pareil cas. »
4
H , r,
�M ô m e doctrine dans la consultation! imprimée à la
suite du m é m o i r e , pag.
38 .
C o m m en t po urr a-t -o n croire que le sieur Pastier,
se mettant en contradiction ouverte avec lui-même et
a v e c tous ses conseils, ait osé plaider ensuite devant le
tribunal de G a n n a l , que le rappel par contrat de m a
riage n’était q u ’ un vain mol qui laissait à son auteur la
faculté de disposer, à titre gratuit, m ê m e par testa
ment , de toute sa succession, au préjudice des rappelés
qui n ’étaient saisis de rien?
C o m m e n t , sur-tou t, pourra-t-on concevoir que des
erreurs si palpables aient pu séduite les juges de pre
mière instance, et leur faire considérer un rappel écrit
dans un contrat solem nel, c o m m e un chiffon qu'un
simple caprice 011 changement de volonté fut capable
de d é t r u i r e ? .. Quelles raisons ont-ils pu donner d'une
si étrange décision?... Ont-ils cité quelques lois, quelq u ’autorité respectable pour violer si ouvertement le
texte de la c o u t u m e , et les maximes les plus certaines
de la jurisprudence universelle?... N o n ; la chose était
impossible : aussi se sont-ils bornés à faire un pardlogistne, en résolvant la question par la question ellem êm e. Ils ont tout simplement supposé «■qu'en con
te tu me de Bourbonnais les rappels du genre de ceux
« des sieurs et d a m e ’Murgeon et Pail'aid, soit q u’ils
« fussent faits par contrat de mariage ou par q u r l q u ’acte que ce fût, n’avaient d ’autre effet que de
« me lire les rappelés en situation d’être dans un degré
>
�(
27 )
'¿ .’¿ S
« de représentation utile pour succéder au rappelant
a dans le cas où ils se trouveraient hors les termes de
« représentation coutumière à son décès; que par c o n
te séquent les rappelés avaient mal à propos soutenu
« que des rappels par cont rat de m ar ia ge, faits en
« Bourbonnais, avaient l ’effet des institutions contrac« tuelles, puisqu’ils (les rappels) n opéraient aucune
« saisine en Leur fa v e u r , tandis que
1 institution co n
te tractuelle d ’hérilier saisissait irrévocablement 1 insti« lué de la qualité d ’hérilier de l’instituant, et ne per
te mettait pas à ce dernier de s’en choisir un autre.
« que le rappel ne produisait d ’autre droit que l’e x p e c« tative de recueillir leur portion dans une succession
« q u ’ils pouvaient perdre par le fait d e l à descendance,
« hors des t e r me s de la représentation coutumière bora née aux enfans des frères , com m e p a r des d i s p o s i « tions contraires, soit par testament ou donation entre« v if s qu aurait pu fa ir e Le sieur P astier lu i-m êm e, etc.a
Q u e signifie la prétendue différence im aginée entre
l ’institution d ’hérilier et le rappel à succession? A p p e le r
un parent ou un étranger à sa succession, n ’ est-ce pas
lui pr om et tr e, lui donner cette succession, le déc larer,
le reconnaître héritier, ou, ce qui est la m ê m e chose,
l ’instituer héritier, puisque toutes ces expressions sont
synonimes, ainsi que le professent les auteurs cités,
notamment de L a u r iè r e , B r o d e a u , R ic a r d , B a q u e t,
L e B tu n 5 etc.
T ou t pacte de su ccéder, stipulé par contrat de ma-
'k s .
�t
k
V.
C 28 )
l i a g e , n ’est-il pas considéré c o m m e inslifulion contrac
tuelle, en quelque forme et sous quelque dénomina
tion q u ’il plaise de le rédiger? Le texle de l a c o u l u m e ,
art. 2 1 9 et 220, n’esf-il pas d ’accord en ce point a v e c
la législation générale?
N ’est-il pas ridicule d ’alléguer q u ’ un rappel à suc
cession n’est q u ’ un rappel à un degré de parenté, sans
effet utile? Les contrats doivent s’entendre cuni effectu,
dans le sens le plus large, le plus favorable aux é p o u x ,
ainsi que l’ont décidé les arrêts, et notamment celui
du parlement de Paris, du
5 avril 1 7 6 6 , rapporté au
Ré pe rtoire de M. M er li n , tom. 6 , pag. 285.
L e mot succession désigne la masse de tous les biens
d 'u n d é fu n t : rappeler
q uelqu’ un
à sa su ccessio n ,
c ’est donc l ’appeler à recueillir les biens q u ’on laissera
en mourant. Dans le fait, l’expression textuelle du
contrat du
5 septembre 1 7 9 3 , rappelle les ép oux Mur-
geon à la Juture succession d u sieur Pastier, et non
pas seulement à un degré vide de sens, à un mol illu
soire. La stipulation qui autorise les épo'ix ÎVIurgeou
à représenter leurs mères, n ’est que la v o i e , le mode
d ’exécution de la disposition, l ’indication de la quotité
des droits et portions q u ’ils sont appelés à recueillir
dans la succession.
Quelle absurdilé de dire que le rappel n’a va't d’antro
effet que de meltre les é p o u x ,Yluigeoii à un d e g i é <lc
repr ésent ation
ulile pour lui succéder, dans le cas où
ils se trouveraient à son décèa hors des t e n n i s de la
«
�(
29 )
z% y
représentalion! X>ü succession de Gilberl Pa stie r, qni
n ’avait ni frères, ni sœurs, mais seulement des cousins
aux sixième et septième d e g r é s , ne pouvait jamais
s’ouvrir dans les termes de la représentalion l é g a l e ,
b orn ée aux enfans des frères. U n e descendance ulté
rieure, de la part des parens, ne pouvait q u’aflaiblir
le lien de la pa renté , au lieu de le ressener. L e rappel
avait été stipulé ex tra terminos j u r i s ; il était donc
impossible qu'il rentrât intra terminos ju r is : il eût été
ex é c u t é c o m m e legs s’il eût été fait par testament; il
doit être ex écut é c o m m e pacte de su cc éd er , ou institu
tion contractuelle, parce q u ’il est écrit dans un contrat
de mariage. U n e multitude d ’arrêts, et spécialement
celui du 6 mars 1 66 0, ont jugé d’ailleurs que le ra p
pel contractuel conservait toujours ses eil'ets, m ê m e
après le décès de tous les frères ou oncles d ont l’existence aurait pu donner lieu au concours.
C o m m e n t supporter l ’idée de la révocabilité par un
changement de volonté du rappelant, lorsque la c o u
t u m e , les lois générales proclament unanimement l’irrévocabilité de toutes les dispositions, de toutes les
conventions, de toutes les choses écrites dans les co n
trats de mariage?
C o m m e n t concilier ce système de révocabilité, et
a vec la saisine pr ononcée par la coutu m e e l l e - m ê m e ,
et avec le principe de la transmission a u x enfans des
mariés, attesté par tous les auteurs, et consacré p a r l e s
arrêts?
�^
'
(
3o )
T e n o n s donc pour constant que le contrat de m a
riage des sieur et dame M u rgeo n n’était point un tilre
illusoire et r év o cab le, et q u’il leur a réellement conféré
la qualité et les droits d’héritiers contractuels des biens
que Gilbert Pastier a laissés à son décès; tenons pour'
constant que le pacte de succéder écrit dans ce p r e
m ier co n t rat, qui forme la loi de la famille, frappe
tous les biens meubles, immeubles, acquêts et propres
qui composent la succession, puisque la coutum e de
Bourbonnais et la jurisprudence générale permettaient
également au feu sieur Pastier de disposer, par c o n
trat de m ariage, de l’ universalité de sa fort u n e, sans
réserve ni modification, jusqu’à l ’exhérédation de ses
propres enfans, s’il en eût laissé.
§
II.
Æ e x a n d r e M urgeon et D en ise B o u c h a r d } sa fem m e,
ont été s a is is , par Leur contrat de m a ria g e, d u droit
de recueillir éventuellement Cuniversalité de la su c
cession de Gilbert P a stier. ■
I l suffit de lire la clause du contrat de m ar ia ge, du
5 septembre 1 7 9 3 , pour être convaincu de cette v é
rité : «Gilbert Pastier, y est-il dit, trouvant le présent
« mariage ( d ’Alexan dre M u rg eon et de Denise B o u « ch ard ) pour agréable, a r ap p elé, co m m e par ces précc sentes il rappelle, lesdits futurs ép oux à sa fu tu r e
« succession y chacun pour ce qui les concern e, par la
« représentation de chacun e m è re , à la ch a rg e , par
�r * 7 .
* * *
« lesdits futurs , d’associer audit rappel leurs frères e t
_/
« sœurs. I ce u x futurs ont à l’instant accepté et remerc ié
« ledit sieur Pastier, leur cousin. »
-i
Cette clause ne présente pas d’é q u ivo qu e : chacun
des deu x ép oux est appelé à recueillir tout ce que sa
mère y recueillerait si elle survivait au sieur Paslier.
Les
deu x mères sont dépouillées, par cette disposi-
l i o n , faite de leur agrément dans le contrat de m a
r i a g e , où elles sont parties figurantes, de l'espoir per
sonnel de succéder au sieur Pastier de c u ju s , malgré
la plus grande proximité du degré de parenté.
T o u s leurs droits successifs, présens, futurs et évei>
tu e l s ,s o n t transmis aux é p o u x , que le contrat de m a
riage investit du litre irrévocable d’héritiers c o n v e n
tionnels d ’ une succession q u i n e peut plus être g re v é e
de dispositions contraires.
L a convention contractuelle, formellement acceptée,
a établi en leur faveur un droit acquis et ind élébile,
quoique sa quotité fût susceptible de varier suivant les
cas et les évé ne mens qui pourraient arriver, c ’est-àdire suivant le nombre d héritiers naturels, au m ê m e
degré des deux mères représentées, que la loi aurait
app elés, lors du décès de Gilbert Pastier, au partage de
sa succession.
Du nsla ligne paternelle des Pastier, Marie B ando n,
v e u v e Bouchard, était la plus proche parenie de G il
bert Paslier de c u ju s ; nul autre parent n existait au
�(
32 )
m ê m e degré pour concourir avec elle ; conséq ue m m e n t , Denise B o u c h a r d , sa fille et représentante, avait
la certitude de recueillir seule la moitié de toute la
succession, déférée a u x parens paternels.
D an s la ligne maternelle (le côté d e s P r a l o i s ) , G il —
b e i t e Mandosse, v e u v e M u r g e o n , pouvait se trouver
en concours a v e c A n t o i n e - M a r i e n D e b a r , la dame
D e b a r - d e - l ’Hôpital, et Magdelaine Du buisson, fem me
M o n p i e d , qui étaient tous trois cousins au m êm e degré
q u ’elle de Gilbert Paslier de c u ja s .
Si ces trois cousins survivaient à Gilbert Pastier, elle ■
n ’avait à espérer que le quart des biens maternels ,
d’après l’art.
3 o 6 précité, qui prescrivait le partage
par tête, hors des termes de représentation , c o m m e le
prescrit encore aujourd’hui le C ode Napoléon.
Si l’ un de ces trois parens p r é d é c é d a i t , les portions
dessurvivans étaient susceptibles d ’augm enter dans la
proportion du nombre des prédécédés.
S i , enfin, les deu x frères D e b a r et Magde laine D u
buisson m ou ra ie nt tous trois avant Gilbert Paslier, Gilberte M ando ss e, c o m m e plus pro che p a r e i l l e , devait
recueillir seule tous les biens maternels, à l’exclusion
des enfans D e b a r et M o n p i e d , plus éloignés q u ’elle
d ’ un degré.
O r , toutes ces chances se sonl réalisées en faveur des
sieur et dam e Murgeon. L e sieur D e b a r - d e - l l l ô p i t a l ,
le sieur D e b a r , père de la dam e Paillard, et M u g d e-
�c 33 )
laine Dubuisson, f e m m e M o n p i e d , - s o n t morts tous
trois avant Gilbert Pastier de cu ju s.
Si donc GilberteMandoss e était v i v a n t e , elle recueil
lerait seule tous les biens maternels; si Marie Baudon
était v i v a n t e , elle recueillerait tous les biens paternels,
c o m m e plus proche parente du défunt.
D è s que les sieur et dame M u rg e o n sont plac és,. p ar
l ’effet de la représentation co nven tio nnelle , dans le,
degré et dans les droits de leurs deux mères , il est évi
dent q u ’ils doivent recueillir tous les droits q u’auraient
exercés leurs mères , c ’e s t - à - d i r e l’ universalité des
biens des deux lignes paternelle et maternelle qui com-"
posent la succession.
L e u r titre d ’héritiers rappelés n'était pas limité à
une m o i t i é , un tiers, un quart ou t o u te au tr e q u o l i l é j
il embrassait tous les droits éventuels, casuels et indé
terminés des deux mères; il frappait sur la généralité
de la succession, suivant le résultat futur des chances
et'des événemens. L e cas étant avenu, pour nous ser
vir des t ermes de Tari. 2 1 9 , 1 a disposition contractuelle
les a saisis de toul le bénéfice aléatoire qui en est r é
su lté, et la succession leur est exclusivement déférée,
f
On a vainem ent objeclé en première instance que
les sieur et dame Murgeon ne devaient exercer leurs
droits à la succession que pour la portion seulement
dont ils auraient hérité naturellement du c h e f rie leurs
mères, pcr ca p ila ? et quo le surplus des portions nm«
�''
femelles, originairement attribuées aux frères et sœurs
associés, n’était pas compris dans leur rappel.
Le
contrat
de mariage repousse victorieusement
celte objection. On y voit très-clairement que les é p oux
M u r g e o n ont été rappelés à la succession Pastier pour
tout ce qui concernait les droits de leurs mères; ils ont
été autorisés à représenter entièrement , et non pas
p a r tie l l e m e n t, chacune des deu x mères. L a charge qui
leur a été imposée, d’associer au rappel leurs frères et
sœurs, démontre de plus en plus l’universalité de leur
titre, qui leur attribuait d ’abord le droit de recueillir
toutes les portion^ de leurs mères, pour en partager
ensuite le bénéfice ave c les frères et sœurs associés.
L e s juges de première instance paraissent avoir re
connu celte vé rit é ; mais ils ont refusé d ’en faire l ’ap
plication en décidant que les parts des associés p o u
vaient être enlevées aux sieur et dame M u r g e o n , et
tourner au profit du légataire Pastier.
Nou s relèverons particulièrement cette erreur de
droit dans le paragraphe suivant.
No us terminerons celui-ci en faisant remarquer que
pour apprécier l’étendue et les effets des rappels ou
dispositions contractuelles, il faut se réfé rer , non à la
date du contrat de m ar ia ge, mais bien au tems du
décès du disposant, ainsi q u ’il a été jugé par l ’arrêt
déjà cité , du parlement de Paris, du
5 avril 1 7 5 6 , et
qu'on le pratique généralement dans les partages de
%
�(
3b )
successions, pour déterminer la quotité des légitimes et
des parts héréditaires.
§
III.
L e s portions des associés B o u ch a rd et M urgeon ap
partiennent entièrement a u x époux M urgeon.
L e s dispositions contractuelles saisissent les mariés
et sont irrévocables en leur faveur ; mais le disposant
peut améliorer leur condition par la révocation des
charges onéreuses, dont il les a primitivement g re v é s,
envers des individus non contractant mariage. C e u x - c i
ne sont point saisis par un contrat qui leur est étran
g e r , et ne peuvent contester la révocation q u ’il plaît à
l ’instituant de faire; mais le bénéfice de cette rév oca
tion ne peut être t ransporté à d ’autres p e r s o n n e s ;
l’instituant ne p e ut d o n n e r à l ’institué un nouvel as
socié. L a révocation éteint la c h a r g e , et en laisse tout
le bénéfice à l’héritier institué qui a pour lui le titre
général et irrévocable.
« L ’associé, dit M . Ch abrol sur la C o u tu m e d’ A u « v er gn e, tome 2 , pag. 3 3 7 , n’étant pas contract ant,
« n’est pas saisi; et s’il n’est pas saisi, la disposition faite
« en sa faveur ne doit être regardée que c o m m e une
« destination révocable a d n u tu m , c o m m e loute autre
« charge attachée à l’institution, dont l’instituant peut
* dispenser l’institué.... »
* L a révocation de la charge n ’autorise pas, c o m m e
�v
36 )
« le démontre encore M .
C h ab rol, une disposition
« nouvelle de la part de l ’instituant, au profit d ’une
« autre personne; elle assure au contraire à l’institué
« l’universalilé de la succession. Il semble, dit-il, que
« l ’instituant ayant donné un associé à l’institué, ne
« peut pas lui en donner un autre : on peut accepter
« tel associé, et refuser tel autre. Un instituant qui a
« imposé des charges, c o m m e de payer telle somme à
« un tiers q u ’il prétend gratifier, ne peut pas disposer
« de celte somme en faveur d’ un autre.
« D ’ailleurs, con tinue t- il, si l ’associé vient à m o u « rir avant l'instituant, l'instilué qui a le titre général
« pour lui, profile de l’entière institution ton ne peut
« le pi iver de l’espérance de cette survie en appelant
« un autre associé; et si l’associé venant à prédécéder
« l ’institué, ce dernier profite de toute la succession,
« p a r le m ê m e principe l ’instituant ne peut su broge r,
« par sa propre v o l o n t é , un associé à l’autre. »
M . G r e n i e r , qui a fortement critiqué les associations,
convient néanmoin s, dans son T r ai té des Donations
et T e s t a m e n s , lom.
3,
pag.
4 3 1 , « q u e , clans /’u sa g e,
« l’opinion de la révocabilité de ces ch arg es, dans 1’inûr térêt seulement
de l’institué, était généralement
« suivie dans les trois provinces d’ A u v e r g n e ,
Bour-
k bonnais ei M a r c h e , dans le sens expliqué par M .C h a « brol.»
M. Cliabot de l’ Allier, dans sesQuestions transitoires,
tom. .2, pag. 108, atteste aussi que cette jurisprudence
�était consacrée par un usage constant dans ces m êmes
provinces,
i
;
'
t
i.
^ '* * j!
j!
3 , chap 2 , n° i 3 , et
;
A u r o u x - d e s - P o m m i e r s , sur l’art. 224 de la cou tum e de
j|
B o u ib o n n a is , uos 8 et 9 , a l l e s t e u l les mêmes principes,
;
qui, d ’ailleurs, ne peuvent plus être sérieusement c o u -
|
testés, depuis que la Cour impériale de Riorn- les a so -
;
L e b r u n , des Successions, liv.
lemnellement consacrés par plusieurs a n ê t s , sur tout
par celui q u ’elle a rendu, le 18 déc em b re 1806. dans
l'affaire des Randoi n, de C r e u z i e r - l e - V ie u x , qui lut
j
discutée ave c les plus grands développemens.
II est essentiel de rappeler les motifs de cet a rrê t,
dont la sagesse est un monument précieux de la jurisprudence :
j
1
« Considérant q u e , suivant les termes de l’art. i fr de
« la loi du 28 pluviôse an 5 , r e l i e institution (celle faite
ce ail profit de Claude R a n d o i n , institué héritier univerv. sel d’ Antoinette T o n i e r , sa m è r e , à la charge d ’y
« associer ses frères) doit avoir tout son e f f e t , confo r« m ém ent aux anciennes lois;
« Considérant q u’il n’était pas ail pouvoir de la m èr e
« c o m m u n e de l’a n é a n t i r , ni m ê m e de l’a t t é n u e r ;
« q u ’elle avait seulement la faculté de restreindre, en
« faveur de son héritier institué, les charges q u’elle lui
« avait imposées; et que le dispensant de les remplir,
* l’institution, qui, par son essence, était i r r é v o c a b l e ,
« aurait eu l’eftet d’attribuer à l’héritier institué tout 1©
« bénéfice qui en pou vait résulter.
'
�(33 )
« Considérant que la mort des associés, donnés à
« Clau de Randoin par cette institution^ aurait produit
« le m êm e résultat que la décharge qui eût été sous«• crite par l ’instituante, et q u ’ainsi la mère c o m m u n e
« ne pouvait pas disposer au préjudice de son héritier
<r institué, ne pouvant pas m ê m e lui donner d’autres
« associés que ce ux auxquels elle l ’avait obligé de faire
«• part de sa libéralité^ il n’a resté aucun bien disponible
« dans sa succession;
» Considérant que la loi ne relranche de ces libéra« lilés que les légitimes de rigueur, revenant aux par« lies de Delap chierj
«■Considérant que l’institution de 178 1 est irrévo« cable dans son tout, dès que la mère c o m m u n e n ’a
a pas affranchi son institué des conditions et des charges
« sous lesquelles elle l ’avait gratifié de l’universalité de
g ses biens, et que ces charges doivent être exécutées
« respectivement à Louis et François R a n d o i n , le
« j e u n e , deu x des parties de Pa gès , q uo iqu’ils n’aient
« pas été mariés avant les lois nouvelles. »
Cet arrêt juge nettement toutes les questions qui s’a
gitent aujourd’hui.
Il décide que la disposition contractuelle, faite au
profil des mariés, les saisit irrévocablement du droit de
recueillir l ’ uuiversalité de la succession de l’instituant j
Q u e la charge d ’associer est révocable, mais seule
ment en faveur de l’institué, qui peut en être déchargé
par l ’instituant ;
�(
39 )
Que le bénéfice de cette révocation ne peut tour*
ner au profit d’aucun autre individu;
Et que l’instituant ne peut ni anéantir, ni atténuer
l’effet de l ’institution contractuelle par aucune disposi
tion nouvelle.
P o u r écarter l ’autorilé de l’arrêt, le sieur Pastier a
al l é g u é , dans son mémoire im prim é, que les R a n d o in
associés étaient morts avant leur m ere, instituante.
C ’est une fausse supposition; les Rando in associés
étaient vivans et vivent encore à Creimer-le-Vieux :
M e Pages plaidait pour e u x ; l ’arrêt le constate.
I i ’application se fait naturellement au procès actuel :
A le xa ndre M u rg e o n et Denise
tis par le pacte d e su ccéder,
de mariage, du 5 s e p t e m b r e
cable de recueillir la successiou
Bouchard ont été inves
écrit dans leur contrat
1 7 9 3 , d u droit irrévo
de Gilbert Pastier.
C e titre universel et illimité leur a év e ntuel lem en t
assuré toute la succession, sous la charge d ’associer
leurs frères et sœurs au bénéfice de ce lte disposition.
Cet te charge d’associer était révocable dans l ’intérêt
des sieur et dame M u r g e o n ; seulement Gilbert Paslier
l ’a ré v oqu ée par une clause formelle de son testament
olographe, du 18 mai 1810. C e teslament est revêtu
des formes légales; la clause d ’association doit donc
être réputée caduque ou c o m m e n ’ayan t jamais existé.
P e u importe que le testateur ait témoigné le désir do
�( 40 )
^
faire passer à un étranger le bénéfice de l ’association
ré v o q u é e , et q u e cette nouvelle disposition soit frappée
de nullité par la loi; la révocation légale n’en existe
pas moins, indé pendamment de toute autre disposition
subséquente. L ’article 1087 du Code N a p o l é o n , c o n
form e aux anciennes lois romaines de a dim en dis vel
transferendis Legates, et à la jurisprudence ancienne et
n o u v e ll e , ne permet pas d’éleve r de doute sur ce point'
de droit.
D an s cette partie du procès, les sieur et dame M u rgeon ont à lutter contre deu x classes différentes d ’ad
versaires. Les frères B ou ch a rd, primitivement associés,*
ont réclamé le bénéfice de l’associai i o n , en s o u t e n a n t
que cetle charge était irrévocable à leur égard co m m e
à l’égard des institués; mais ils n’ont pas osé soutenir à
l ’duHience ce sy stème, cond am né parla jurisprudence’
de la C o u r , qui a toujours jugé que les charges d’asso
cier étaient révocables dans le seul intérêt des institués.
' D ’un autre côté, le sieur Pastier, qui ne respecte ni.
le texte des lois, ni l’autorité des arrêts, a soutenu el a
fail décider , par le tribunal de G a n n a t , que les charges
d ’associés
étaient
révocables
in définim ent ,* que les
biens qui en étaient l’objet faisaient parlie des succes
sions ab in testa t, el que l’instituant pouvait en dispo
ser de n o u v e au , par testament, au profil d ’une autre
personne.
L ’arrêt d e s R a n d o i n , el la discussion de M. Chabrol
repoussent ce syslêm e avec tant dé f o r c e , - q u ’il est
�(
4* )
inutile d’en tr er , à ce sujet, dans de plus longs dé ve loppemens.
Si le sieur Pastier répète qu’ il était indifférent aux
ép o u x M u rg e o n de l’avoir pou r associé, plutôt q u e
leurs frères et sœurs, et taxe encore d ’absurdité la
doctrine professée par ce savant c o m m e n t a t e u r , il suf
fira de lui répondre que le suffrage imposant de la Cour
v e n g e honorab lement sa mémoire de cette critique
plus q u ’indiscrète.
Il
n’était pas indifférent, d’ailleurs, pour les mariés
M u rg e o n d’avoir pour associé le sieur Pastier, légataire,
plutôt que leurs frères et sœurs. L a v oix du sang parle
en faveur des frères, qui s’accordent plus facilement
que des étrangers. Il n ’est pas indifférent, non plus,
pour des é p o u x , en gé n é r a l, de voir leurs frères enri
chis par des libéralités, plutôt q u ’ un étranger : des
frères et leurs descendans ont respectivement l’espoir
d ’hériter les uns des autres, et l’intérêt
pécuniaire
s’ unit dans cette m alière à l’intérêt d ’affection. L e
pacte matrimonial étant irrévocable à l ’égard des m a
riés, ne peut subir aucun c h a n g e m e n t , aucune m odi
fication qui leur soit préjudiciable, m ê m e indirec-.
tement.
L e sieur Pastier a aussi s o u t e n u , en première ins->
tanc e, que les charges d ’associer, apposées aux insti
tutions contractuelles, étaient de véritables substitu
tions fidéicommissaires, dont la nullité d e va i t entraî
ner celle des dispositions elles -m êm es , d ’après la loi di\
6
�¡ w
- . v
.
J
r4 n o v e m b r e - 1 7 9 2 , et l ’article 896 du C o d e N a
poléon.
On lni a répondu que les charges d’associer, dont
l’effet est de rendre à l’instant m ê m e de l’ouverture de
la succession de l’instituant, le tiers associé, co-hérilier
et co-propriétaire avec l’institué, des biens compris
dans l’institution, différaient
essentiellement de la
substitution proprement d it e , qui ôte au gre vé la
qualité de propriétaire, pour en faire un simple usu
fru iti e r, obligé de c o n s e r v e r , pour remettre graduelle
ment , les biens compris dans- la disposition, aux indi
vidus appelés à les recueillir ordtne successlvo. L a
clause d ’association est év idem m ent une institution si
multanée qui saisit à la m ê m e minute l’institué et
l ’associé, à l’époqu e du d é i è s d e l’instituant, et qui ne
vaut au profit de cet associé, parce q u ’il n ’est pas c o n
tractant, que c o m m e une ch arg e, dette ou condition
de la disposition universelle, légalement faite au profit
de l’institué contractant mariage ; aussi M M . Chabrol
et Chabot de l’ Allier attestent-ils que ces charges d ’as
socier n’ont pas changé de caractère, et ont toujours
continué d ’obtenir les mêmes effets dans les trois pro
vinces d ’A u v e r g n e , Bourbonnais et M a r c h e , avant
c o m m e après l’ordonnance des substitutious, de 1 7 4 7 ,
et la loi abolitivo des substitutions, du
bre 179
2
14 n o v e m
*
M . M e r li n , R é p., t o m . 6 , p a g . 264 et 26 5, va m êm e
jusqu’à dire que
1 ait. 896 du Code Napoléon ne s’o p -
>
«
�^
4 U J------------
pose pas à ce que l ’on stipule, encore aujourd’hui, ces
clauses d ’association co m m e charge d ’une disposition
contractuelle; il s’appuie de l’art. 1 1 2 1 , qui paraît fa
vorable à son opinion.
A u reste, l ’article 896 du C o d e , qui annulle les dis
positions principales lorsqu’ elles sont grevées de substi
tutions, est introductif d’un droit nouveau. L a loi du
1 4 no v e m b re 1 79 2 ne prononçait point celt e p e i n e ,
qui ne pourrait jamais suppléer dans un contrat de m a
riage antérieur à la publication du n ou ve au Code. L e s
substitutions étaient seulement réputées non écrites, et
l ’héritier g re vé en acquérait la libération en conservant
tout le bénéfice de la disposition principale.
■
C ’est un point de droit clairement dém o ntr é par
M . C h a b o t , au mot S u b stitu tio n s, tom. 2., pag. 8 7 1 ;
p a r M . M e r l i n , Questions de D r o i t , m ê m e m o t , § 5 , et
textuellement jugé"par deu x arrêts q u ’ils rapportent,
l ’ u n , de la Cou r de cassation, du 19 nivôse an 1 2 , et
l ’a u t r e , de la C our d ’A g e n , d u 9 pluviôse an i 3 .
Ainsi le ju gement de Ga nna t ne peut éc ha ppe r à
riniirmation dans le c h e f qui prive les é p o u x M u rgeo n 1
des portions des associés, pour en attribuer le bénéfice
au légataire Paslier. L e titre des sieur et dam e M u r geon était gén éra l; il comprenait la totalité des droits
successifs q u ’auraient pu recueillir éve ntuellement les
deux mères, Gilberte Mandosse et Marie B a u d o n ; i l
était irrévocable et à l’abri de toutes variations de la
pan de 'l'instituant.
�S
XV-
L e s seconde et troisième dispositions fa ite s par Gilbert
P a s tie r , en fa v eu r de la dam e P a illa r d et de F ra n
çois P a stie r , sont m illes ou ca d u q u es, comme éversives de la première disposition contractuelle.
L e s institutions ou dispositions contractuelles, écrites
dans les contrats de m aria ge , sont essentiellement ir
révocables c o m m e ces contrats eu x -m êm es , qui on t
toute la force des actes entre-vifs. P e u impo rte que ces
dispositions soient pures et simples, ou subordonnées,
dans leurs effets et leur latitude, à des é v é n e m e n s , cas
o u conditions; elles n’en jouissent pas moins d e la fa
v e u r de l’irrévocabilité; elles opèrent, les cas aven us , la
m ê m e saisine que la donation actuelle et effective.
•
T o u t reg ret, tout change m en t de volonté sont in
terdits au disposant; il ne p e u t, sous aucun p r é te x te ,
détruire ni atténuer l ’effet de là première disposition.
E n vain protesterait-il dans la minute qui suit l e m a
r i a g e , en vain chercherait-il à varier par une inter
prétation dérogatoire à l’idée p r im it ive: la faveur due
au mariage, l ’iirévocabilité de ce pacte sacré repous
sent toute interprétation, l o u i e variation qui tendent
a modifier les conventions matrimoniales : toutes con
tre -lettres, tous actes préjudiciables à l ’institution sont
for m elle m ent proscrits.
C e sont là des maximes bien constantes de la juris-
�I «M )
-----
prudence française, attestées par les auteurs déjà cités,
f'.-
§ Ier, et consacrées d ’ailleurs par le texte des lois a n -
?
ciennes et nouvelles.
I
j
« Celui qui a institué aucun (art. 22a de la cou—
j
« tume de Bourbonnais) son héritier eu contrat de
f
* mariage en faveur des mariés 011 descendans dudit
&'j
cc m ariage, ne peu.t faire autre héritier par testament
■
1
t
K ou contrat subs éq ue nt, quel q u’il soit, au préjudice
* de l’héritier ou des héritiers institués par ledit con
te lrat de mariage. »
L'art.
jj
3 i du cliap. 1.4 de la co u tu m e d ’A u v e r g n e ,
•contient une disposition littéralement conforme.
T o u s les auteurs s’accordent à professer que le conse ntement, m êm e du
p re m ie r
institué, ne saurait vali-
;
j
ider la seconde disposition faite à son préjudice.
« L a d o n a t i o n , dans la f o r m e p o r t é e au p r é c é d e n t
I
* article ( q ui a pour objet la disposition par contrat de
*
mariage de tout ou partie des biens que les disposans
laisseront au jour de l e u r d é c è s , et qui n’est autre chose
j
que Tan cie n nei nt it uti on contractuelle), dit l ’art. i o 83
j
du C od e N a p o l é o n ’« sera irrévocable en ce sens seule« m e n t, que le donateur ne pourra plus disposer, à
« litre gratuit, des objets compris dans la donation, si
« ce n’est pour somme modique ou autrement. »
Il
est donc inc ontestable, sous l e rapport du d ro it,
que Gilbert Pastier ne pouvait donner un cohéritier
*Qonventionnet a u x sieur et dame M u r g e o n , ni atténuer^
j
i
�--------Ji)/j
%l 9
„,
par de nouvelles dispositions, les avantages fixes ou
aléatoires que le premier pacte de succéder leur assurait.
Sous le rapport du fait, nous avons dém on tré que le
rappel du
5 septembre 179 3 était susceplible d’embras
ser l’ universalité de la succession de Gilbert Pastier,
s’il n’existait à son décès aucun parent au m ê m e degré
que Marie Baudon et Gilberte Mandosse, fictiveme nt
réputées vivantes p a r l a force de la représenlation con
ventionnelle dans l’intérêt des sieur et d a m e M u r g e o n .
L e s prédécès successifs de Magdelaine Dubuisson,
f e m m e M o n p ie d , du sieur D e b a r - d e - l T I ô p i l a l , et
d ’A n t o in e - M a r i e n Debar, père de la dam e Paillard,
les seuls parens en degré u t i l e , ont fait accomplir la
condition éventuelle qui a saisi les sieur et dame M u r geon de la totalité de la succession, en écartant le co n
cours a v e c les parens du degré de leurs mères.
Sans doute An to ine-Mari en D e b a r aurait dû recueil
lir la moitié des biens maternels du d é f u n t , s’il se fût
tr ouv é vi vant au décès de Gilbert Pastier. L e premier
rappel ne s’opposait pas à l’exercice de ce concours,
puisque les rappelés ne devaient prendre dans la suc
cession que les droits héréditaires q u ’auraient eus leurs
mères vivantes.
Mais le sieur D e b a r étant mort avant l ’ouverture
de la succession, le cas du concours a été entièrement
écarté.
C ’est en vain que 1g sieur Pasiiôr a voulu rappeler
�(
47 )
la dame Paillard, et l ’au tori ser a représenter s o n père
prédécédé. C e l le seconde slipulaliou aurait pour objet
de donner un nouvel associé, un nouveau cohéritier
différent de celui qui était primitivement appelé au
concours; son effet serait de créer deu x cohéritiers au
lieu d ’ u n , et de priver les premiers institués du b é n é
fice de la chance de prédécès du sieur Debar père II
y aurait c o n s é q u e m m e n t , sinon destruction, au moins
éversion partielle de la première disposition. Elle était
irrévoc able; dès-lors la volonté du disposant était i m
puissante pour y déroger, pour la restreindre ou l ’atté
nuer dans aucune de ses chances présentes ou futures.
Gilbert Pastier ne pouvait plus exercer des droits
dont il s’était irrévoc ablement dépouillé par le p r e
mier contrat de m a r ia g e , devenu la loi im m uab le de
la famille; il ne p o u v a i t assurer des droits à la dame
Paillard, que dans le cas où le prédécès des é p o u x
M u r g e o n , sans postérité, rendrait caduc le rappel du
5 septembre 1793.
Ainsi, le second rappel de la dam é Paillard ne peut
lui conférer aucun droit à la succession litigieuse, puisqu il est en opposition, par le résultat des év éne mens
avec les droits éventue ls, mais irrévocables, du pre
m ie r pacte de succéder.
A plus forte raison les dispositions testamentaires
subséquentes .doivent-elles être rejetées c o m m e des
tructives d e l à première disposition contractuelle.
L e testament du 18 mai 1810 présente moins la
�ÎN>6
V
'
(
48 )
libre volonté d ’ un octogénaire environné de sugges
tions, que les rêves systématiques d’un h o m m e subtil
qui a cherché à colorer la violation du pacte de famille
par tous les prestiges de la chicane.
L e sieur Pastier, de C l e r m o n t , ne sVst retranché
sur ce mode d ’en vahissem ent, q u ’après avoir ho nteu
sement échoué dans le projet, bien autrement auda
c i e u x , de ravir toute la succession aux héritiers légi
t i m e s , par une vente fictive et frauduleuse.
D e u x dispositions sont écrites dans le testament :
P a r la p rem ièr e, le testateur lègue au sieur Pastier,
de C le r m o n t , sur tous les biens non compris dans le
ra ppe l, une so m m e de 40,000 fr., à prendre sur les
plus clairs desdits biens, sans être tenu d ’aucune charge
ni dette à cet égard ;
Par la seconde disposition, il institue en outre c e
m ê m e François.Pastier légataire, son héritier du sur
plus de ses biens, à la charge de p a y e r , par portion
égale et par tête, a vec les rappelés, toutes ses dettes et
charges, etc.
O n voit d ’abord que le legs de 40,000 fr. porte à
f a u x ; car il doit être pris sur les biens non compris
dans le ra p pel, et on a démontré que le premier ra p
p e l , indépendam ment du second, embrassait, dans ses
chances, l'universalité de la succession future de G i l
bert Paslier, et que le titre général d ’héritiers, par r e
présentation des deu x mères, avait acquis ce caractère
%
�d ’univers alité, au m o m e n t du décès d ’A n t o i n e - M a r i e n
D eb ar.
C o n s é q u e m m e n t, tous les biens que Gilbert Pastiera laissés à son décès étaient év entu ellement frappés de
la disposition prim itive ; il n’y a donc pas de biens non
compiis dans le rappe l; le legs de 40,000 francs, à
prendre sur ces biens chim ér ique s, devient donc caduc
à défaut d’existence de biens libres qui puissent lui
servir de base ou assignat.
L e legs de 40,000 francs est encore nul à raison de
son én orm it é, qui exc èd e le tiers de la masse nette de
la succession, et de son cumul a vec une institution
d ’héritie r, à titre universel, en fa veur du m ê m e indi
vidu. L a fraude en ce cas n’est pas douteu se, et le tes
tam en t ne peut être considéré que c o m m e une fraude
pratiquée pour d ét ru ir e ou ptténuer l ’effet d ’u n e dis
position c o nt r a c t u e l l e , que son irrévocabilité devait
garantir de toute atteinte.
L ’art. i o 83 du C od e Napoléon ne permettait au sieur
Pastier que des legs de sommes modiques, à titre de
récompense ou autrement. L e testateur a épuisé les
droits que la loi lui conférait, en donnant à sa domeslique la jouissance d une maison et d ’ un jardin, et une
pension viagère de trois setiers f r o m e n t, et d’ un poin
çon de vin ;
E n léguant aux pauvres de C harroux un capital do
6,000 fr. produisant rente perpétuelle de 3oo fr.;
En donnant à l'église, pour œuvres pies, une som m e
de i o 5 o fr.
Conséquemment, les deux legs immenses et inoffi7
'ÏÏoT '
�5ô
cieux fails à François Pastier., et qui fendent à lui attri
buer et le titre et les droits d ’un véritable cohéritier,
I
*
sont caducs, nuls et frauduleux.
On a o b j e c t é , en première instance, que la co u tu m e
de Bourbonnais, ou du moins l’opinion de ses c o m
mentateurs, semblait autoriser les instituans à donner
entre-vifs ou à léguer jusqu’à concurrence du quart des
biens de la succession, et que cette considération devait
conserver ou la disposition faite en faveur de la dame
P a i l l a r d , ou une partie du legs du sieur Pastier.
Da ns la rigueur des principes, le texte de la c o u
tu me et les auteurs les plus recommandables ne regar
daient c o m m e licites que les legs pieux ou r e m u n é r a loires de peu d ’ im porta nce , tels q ue ce ux dont parle
l ’art. i o 83 du C ode N a p o l é o n , qui n’a fait que confir
m er l’opinion la plus accréditée dans l’ancienne juris
prudence. Les dispositions de q u o l e paraissent sur-tout
plus particulièrement prohib ées; cependant les c o m
mentateurs de la co u tu m e de Bourbonnais étaient par
tagés sur ce point de doct rine, et plusieurs inclinaient
à penser que l ’ instiiuant pouvait indifféremment dispo
ser du quart de ses biens, soit par acte entre-vifs, soit
par testament.
Mais en supposant que cette opinion particulière
pût balancer l’autorité de la loi e l l e - m ê m e , le sort du
sieur Pastier, de C l e r m o n t , n ’en deviendrait pas plus
avantageux.
L e testament q u’il a surpris à la fragilité d ’un oct ogé
naire, ne pourrait soutenir la co ncu rrence avec la dis-
�( 5 1 )
'.position contractuelle faite au pr ofi L de,l a d a m e p ail- lard. C elle-ci mériterait l a préfè r e n c e 1 °
' t
parce qu'e l l e ,
a la priorité de dat e 20 parce q u ’elle est s t i p u l é e dans
u n c o n t r a t d e m a r ia g e , qui e s t b i e n plus f avorable
q u ’ un testament; 3° parce q u ’elle a été faite sous l e
rè g ne de la coutume de B o u r b o n n a i s ; 4° parce q ue la
dame Paillard , c o m m e p a r e n t e d u d e f u n t a p l u s d e
d r o i t s
à
la bienveillance d e l a justice.
‘
< v’
Ainsi le testament qui fait l ’uniqu e titre de François
P a s tier, doit ê t r e écartée comm e c o n t r a i r e a u x p r e - ,
. m i è res dispositions contractuelles, d o n t l'irrévoca b ilité ,
-ne saurait êtrë'problématique. L e s sie u r e t d a m e M u r ~geôn se sont plu à seconder l’e x é c ution-des volontés
'
de leur parent e nvers sa domest ique, envers l’église et,l
e
t
s pauvres de C harroux ; mais ils ont dû repousser l’é ranger avide qui a usé des mo y e ns l es plus o d ie u x pour ,
ravir, le p a t r i m o i n e d ’ une f a m ille ave c laquelle il n’a
d ' a u t r e rapport qu ' une sim ilitude de n om S’ils d o i v e n t
subir un retranchement qu elc o n q u e;i l s e r a m oins p é nible p our eu x d'e n v oir passer le bénéfice a une v é r i- ;
..
table parente
F G IV O IS
l
» fw>'
i
1kâ T) *
c
/•
e
k
n
A R iom, de l’Imprimerie deJC
(
1
ip
.
Cour
M e
M A R IE
i
A v o u é
é
1
t
S a l l e s , I mprimeur de la
impériale
,
• _
#.*
I * » " u - i r i x £ î x ^ C \ i » »*>ij i
^iL. «. ^ A4£ru~MrtW», W*WMt
w U W
A v o c a t
c
^
O c , IUwU '¿•»¿1*,+»
w
, ^
W J T V V l^ | i4*jd r ( u ^
U , upl
^
<v LwUL L
i,.
«_ la- yuà»i~y~,
�ÍTT
íT ^ 'í
ü1^ ““ i~ -^ «* u^^J^ooU^rai,»
o«^uîi^,j; ctu> t’t,'v^
^ s^
« ^
^T*
^ r V 'J T *
î ’^ r
V^î ***\^“;:i 1^ T r v*“»«"* s^i'w.mi^r yLltr jL w , t»v
4 «
|»>'I***,|M—<yar^U' ^«^*0 ¿V»**''fj*¿¡l*«á zí- •LttT**üiL-x¿^tciJí>t_
¿»-«h**Juy.-tv-"iiaZ tL. vj'l*'
^í_ <L,>v^^W>m*^~»Îû«-'
WiîjiL,VC,
•u*,í¿fcJ i¿ fc V —
»L ¿yAiM^M^l*fyffJ*--Lw-JuwA^IP¿1L¿¿
H
mm«<h. ¿Uvfc>o*A—
i#%i
’Lt^jMuxr^vJ- jjirJu5)xA-~-«*>~iaS^ û- -(V^U^cïO
Sd
*54- €«—Î jWmW - (L_-.
»uKHi- « /¿^ QwÍL h
Aw*^ Ll .»íha2«v\m—>*v£*- tl^vuy—' H'axaÍÍ***^*'Wl ^OlÿdlUtT' (Uk.<9t^
L*
f V;:;,^:..
*..•»!/—. fl I....f
Vt#»^-)
i>«. O
|uu.f
Iw.
tiut««^
|muv w<J»tu ■
>’—®^* *^<»- |i»»-t«ilt
*J«_t*»J
V /A«**«^fr¡>¿<rv> tfíúmJL*}
¿WUK^fcMWufcum-jtt£*îtO mm* tfr^U* o^JfvU) vl*vJr'tt¿ fa2¿_> /na\h*vtwAfct^wt7<y»«-^>v>
U^luùxUtv
/«¿Je»*»»
<^i*,ȣ^^
«uukm*' M—». ««»Shu-, Í«i»<¿+1—'Cm-*CM*a*_ «wmsijujxJ-, ^v^^và^J^ùûvJ ^*yll»*>tK(lm»--0\«n« ; ft'ttt-AoWM*- juHt o (tu^M. fuLûli»*—t)u^i«AM»-SÖti>«A«)
^I»»>is-ÎU—CA» tf«*—fc*0*^€A^xnA^^M»»l.».1Jr^#nj»I»^.^.llt.
.iPf!. ;P.»
1
1
^
.Æ
)
r t * .v -
—
^
___
---------
J Al a .
•a. KtaM
au
. » • * . . ___
1* A ( r t f f
** <^ul, JMw--iU-'d»4 J^-t«a^tA4pt*JU*v<-
vw»|»iw ««w. cw*v«»«w »»»
jÿîJurJ^ uaJλx*r
"Xo l,#lJtbl«¿ ?«—H» (Lu** ^ ’t/u,UX*-^
«U ^yujlîu—")«*-
L*
Lvo^-Ju— bku
«MU>^=- cU*.
•*“»
Ww; ay^M.^/AA^U**^''». Xtv«
»OK-----
-------- -
«VMMI— (^¿Æ- tvv *^lo JT"2l_ "(5\»JS7Crt AM«û*&<k»
¿vv<AU>-)l-Vtumv^tPi*-^ J)i**cîwu> tl"^tü^wîi, t \ j u * _ W « ^ j n ) » v _ Jj'
.. líijjiLa^uicS«if.
fei>^
XtVtft^fctfK-i^/wxIuwA
\M€Htttw
»ltM*Jlifc .’ « c e
h
iw ttú íf c -'V -ú ttt
MVtfo4iííitM ( ( J /{««tíutuA
.
Ç»w-ïi
<i■•>-<
^ iJt«’Uii*T^tyr-r<
i»—
»4wî**»»uh^ J t w>>*>fc«r
c^SmJTîétJÎîUjt-) jïi- *«•»». iûî *>ivj
trt.. , j '^ 'iM)c. S wxuv *ttT1U*' (f* * ' ' ( j TÎ a . JJr^jgJ i - —WWi^*-?ltl.
-----irrja. j - ....... Q~ _____ ^ _______
í V- (1) I V f . -..I»
G¿y^- ^
i
(L.
14^
itf^an» ~t
*"
*u *4^ *“^^1
MuJbírf—UMW
lu. (jLk.'Uly—î*- i%A*u*r «%^3w*tïio
jiJlëZÇ
1 .A
j
*v
K
_
Jt>
*>'^n* **- (T’*^^iyMa^vour- ttw-'
«*tv^L_- i»>_—
A¿íkjjr^,jk,túu*- itl/C tufltrX^- icVi iiv«*/»vt*^X»_ O jlc_ |\OJj>OVtÚVl—X ^% *A S«.
•
■ j"#“
r *“*lK-*y*'*'> *• ’■*"*r~ *.vy..ß -1
Kfj» (UÎfnWJCÂ* '(UÊ’«Xatiy^#i«M^^4^^*V*Vi^tT^
fl
tJ : -xÆ■
JU
L L —
V -ÎÎE ..- - - a i < - / r ^ ( r
^
S r i» »
- ^ t î “ : '\
t i« jl;* ♦
»**<X ^ »
.*
*
V
f T
- - ‘ .-J
•
>a
r ^ ’
•
**•■•-.
*»*-. <
/
I■
^ .M»n
r
'^ 1 c ; ! £ J v
'
^ f.l. .
i '* i
■ #.
i P
“^ T ,—
*' (»
\^f m/} * - i -
>C ^ ^
■
.x
•*/
<H»4
•
4 •
*
» ^
1
-w
*»4 »*v*é.* '»#i ^
, ..,*.
/ t t*
/ ' #' k-/*
>^Î4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Murgeon, Jean-Alexandre. 1812?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Givois
Marie
Subject
The topic of the resource
successions collatérales
estoc
coutume du Bourbonnais
testaments
conflit de lois
contrats de mariage
paterna paternis
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean-Alexandre Murgeon, et Denise Bouchard, sa femme, propriétaires, demeurant à Vendat, appelans d'un jugement du tribunal de première instance de Gannat, du 7 août 1813 ; contre le sieur François Pastier, employé à la recette générale des contributions du département du Puy-de-Dôme, demeurant à Clermont-Ferrand, intimé ; contre le sieur Jean-Michel Paillard, receveur des domaines, et dame Françoise-Gabrielle Debar, son épouse, demeurant à Riom, appelans du même jugement ; en présence de Jean Bouchard, et Jeanne Bouchard, sa femme ; Alexis Bouchard, et Marie Bouchard, sa femme ; et François Bouchard, tous propriétaires, demeurant en la commune de Vendat, assignés en déclaration d'arrêt commun.
note manuscrite. Texte complet de l'arrêt, 1ére chambre 6 février 1814.
Table Godemel : Rappel à succession, stipulé par contrat de mariage, sous l’empire de la coutume du Bourbonnais, a-t-il l’effet d’une institution contractuelle irrévocable ? Ou, au contraire, peut-il être anéanti ou modifié par dispositions entre-vifs ou testamentaires émanées de l’auteur de la disposition ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1812
1793-1812
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2114
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53411/BCU_Factums_G2115.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vendat (03304)
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Charroux (03063)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
doctrine
estoc
paterna paternis
successions collatérales
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53410/BCU_Factums_G2114.pdf
851101f58600d9f1bfa8027258779ebe
PDF Text
Text
c
m
é
e / d'Voceof
m
o
i
r
e
A CONSULTER,
SUIVI DE CONSULTATION.
�v' G E N E A L O G I E
D U
C O T É
CO TÉ DES P R A L O IS .
P A T E R N E L .
Guillaum e P a s t i e r ,
M arguerite Pastier,
à
sœur de G u i ll a u m e ,
à
N..............
de~J àteiu/
ÇiÆezi~^ tPadiei/-, j3tètte~^>
G É N É A L O G I E
Gilberte P ra lo is ,
DES
P R A L O I S ,
CO TÉ
M A T E R N E L .
A nn et-G ab riël P ra lo is , frère de G ilb erte ,
à
Gilbert Delesvaux.
M arie-M agdelaine A y m é .
Gilbert Baudon.
M arie
C lau d e P a s tie r ,
M arie
à
M arie D elesvaux.
Claude Pastier.
Nota. Po in t d’ héritiers
du côté des D e le s v a u x .
J . - B . Bouchard.
i.
2.
3.
Ann et ,
Marie,
N .......P ra lois,
prêtre,
à
à
à Senat.
N ....... Lucas.
N ....... Maudosse.
Etienne Debar.
N ....... Dubuisson.
Marie
G ilb e r te ,
A n t o in e - M a r ie n ,
M a g d e la in e ,
ù
à
à
à
N ,... Delesvaux.
Jean M urgheon.
Françoise Delafaye.
A ntoine Montpied.
M arie,
Jean A lexa n d re ( * ) ,
F rançolsc-G abriclle ,
N ....... M o n tp ie d ,
à
à
h
à
N > L o iie l Guilluis.
Denise Bouchard (*).
J.n-M ichel P a illa rd .
5.
M arie-A n n e,
N .......Pralois,
à
Gilbert •
I.
2.
Gilbert Pastier,
M arie-Francoise
p r ê tre ,
( f sans postérité ) ,
.
de eu,jus
D en ise (*)
J .-A l. Murgheon (*)•
de eu ju s.
à
M icIieUGilbert Ju ge.
N .......Gobet.
�- J^aéüeu
G IE
D ES
P R A L O IS ,
COTÉ
M A T E R N E L .
Annet-G abriël P ra lois, frère de G ilb e r le ,
Guili
M arie-Magdelaine A y m é .
N..
Gl¡
3.
4-
5.
M arie-A nne ,
N .......Pralois,
à
à
à
N ...... Maudosse.
Etienne Debar.
N ....... Dubuisson.
G i lb e r te ,
A n to in e-M a rien ,
M ag d e la in e,
N .......Pralois j
Ma
lucas.
à
G
•svaux.
sy
i uilluis.
à
Jean Murgheon.
Françoise Delafaye.
Antoine Montpied.
Jean A lexa n d re ( * ) ,
Françoisc-GabrlcUe,
N ....... M ontpied,
à
h
à
Denise B ouchard (*).
J.»-M ichel P aillard.
N ...... Gobe».
�21$
M E M O I R E
A CONSULTER,
ty, j
SUIVI DE CONSULTATION,
POU R
Dame
DEBAR,
F r a n ç o is e -G a b r ie lle
J ea n - M ic h e l
d a m e héritière
PA ILLA R D ,
de
défunt
son
G ilb e r t
et le sieur
mari , ladite
PASTIER ,
prêtre ;
CO N TR E
L e s prétendant droits à la succession d u d it d éfu n t
G ilbert
M
a
d
a
m e
défunt Gilbert
nouvellement
P A S T IE R .
Paill a rd , née D e b a r , est- héritière de
Pasti e r , ancien curé de Charroux ,
décédé.
Elle
réclame c e tte hérédité
î^iiA
u
�'CULX
( 2 )
en ver! 11 de la disposition de son contrai de m aria ge ,
et c o m m e parente dans la ligne maternelle.
11 se présente d’autres héritiers de plusieurs sortes,
les uns en vertu des dispositions contenues en leur
contrat de mar iage, un autre en vertu d ’un testament
olographe du défunt.
P ° ur apprécier le mérite de ces réclamations di«^¿»Sj'erses, il faut
«»¿t?;
faire connaître l ’état de la famille ,
contrats de mariage sur lesquels on appuie
des
-k - ^ p r é t e n t i o n s et le testament lui-même.
O n voit par la généalogie c i - c o n t r e , que Gilbert
Pastier de cu jtis , n ’a laissé des parens q u ’à un
degré assez éloigné.
O n ne connaît pas de parens du c h e f de M a ri e
D e l e s v a u x , sa mère ; il n’y a q u ’ un seul descendant
du
côté
des P a s t ie r ,
qui
est
D enise
B ouchard,
mariée à J e a n - A l e x a n d r e M a r g h e o n , tous les deux
vivans.
D u c h e f de Gilberte Pralois, aïeule maternelle du
défunt ,
les
parens sont
assez
nombreux;
Jean-
A l e x a n d r e M u r g h e o n , ép oux de Den ise B o u c h a r d ,
descend l u i - m ê m e de cet estoc.
M a d a m e Paillard, née D e b a r , est fille d ’Antoin eM a ri e n D e b a r , cousin
issu
de germain
de défunt
Claude Paslier.
L a suite de la discussion établira q u ’on ne doit pas
�( 3 )
¿ 4 3
s’ occuper des aulres parens qui descendent aussi des
Pralois.
L e domicile et les biens du
en Bourbonnais. L e
défunt étaient silués
5 septembre 1 7 9 3 , avant la p u
blication des lois prohibitives, en ligne collatérale ,
le sieur
Pastier
de c u ju s
intervint au contrat
de
mariage de J e a n - A l e x a n d r e M u rg h eo n et de Denise
Bouchard ; les mères des futurs étaient au nombre des
parens les plus proches du sieur Pastier ; mais elles
avaient cessé de vivre à cette époque. L e sieur Pastier
déclare dans le con tr at, q u ’il rappelle les futurs à sa
succession , « chacun pour ce qui les concerne par
« représentation de chacune
leur m è r e " , mais à la
charge par les futurs d ’associer audit rappel leurs frères
et sœurs.
L e 27 du m ê m e
mois
de
septem bre
1793,
ma
demoiselle D eb ar épouse J e a n - M i c h e l Paillard.Le sieur
P astier
intervient à ce contrat de m ariage; le père
de la demoiselle D e b a r vivait e n c o r e , et le mariage
a lieu sous son autorité.
L e sieur Pastier y déclare « q u ’en contemplation du
« présent
mariage , reconnaissant
que
ledit
sieur
« Ant oine-Marien D e b a r , père d e l à f u t u r e , est l ’ un
« de ses héritiers présomptifs le plus p r è s , et voulant
« prévenir toute discussion à sa succession sur le droit
« de représentation q u ’aurait la futu re, si son père
« venait à décéder avant ledit Pastie r, il a , par ces
« présentes, volontairement rappelé la future etlessiens
�( 4 )
« à sa succession, audit cas de prédécès du s.r D e b a r , .
«■pour la m êm e portion q u ’aurait droit de prendre
« le sieur D eb a r s’il survivait au sieur P a s t i e r , à la
« charge toulefois d ’associer A n n e t - G a b r i e l D e b a r ,
« son frère ou ses héritiers, pour moitié au présent
v ra p p e l , etc. ».
L e i8 mai 1810 ; défunt sieur Pastier a fait son
testament ol ographe; il c o m m e n c e par déclarer q u ’il
ve u t profiter de la faculté que lui accorde le C ode
N a p o l é o n , de disposer de ses biens ainsi q u ’il a v is e r a ,
en m aintenant les dispositions légalement fa ite s .
P a r une première disposition, il confirme le rappel
p o r té par le contrat de mariage du 5 septembre 1 7 9 3 ,
e n faveur de J ean-Alexandre M u r g h e o n , et de Denise
Bouchard , pour les portions héréditaires seulement
qu e l ’un et l'autre ont droit d ’am end er dans sa su c
cession ; il veut en outre que ce rappel soit ex écuté
chacun en ce qui les concerne et par tête ; mais il
rév o q u e les clauses d’association faites au profit de leurs
frères et
sœurs
, q u ’il croit n’avoir pas été saisis dès
q u ’ils ne contractaient pas;
2 ° Il rév o q u e le rappel fait en fa ve ur d’A n n e t Gabr iël D e b a r , frère à la dame D e b a r , épouse de
M . Paillard ;
3.° Il donne et lègue à François Pastier, e m p l o y é
à la recette gé nér ale de C l e r m o n t , sur tous les biens
non compris d a n s le rappel, une somme de 4-OjOOo fr.
�( 5 )
H S
à prendre sur le pins clair desdits b i e n s , sans être
te nu à aucune charge ni dette à cet égard ;
4.0
Il institue en outre le m ê m e François Pastier
son héritier du surplus de ses bie ns, à la charge par
lui de p a y e r , a v e c les rappelés à sa succession, et
par portion égale entr’e u x , toutes ses dettes.
Il fait ensuite des legs particuliers au profit de sa
do m est iq u e, et quelques legs dont il est assez inutile
de s’occuper.
Il
n o m m e pour son
exéc ut eu r testamentaire le
m ê m e Jean-François Pastier. Il est b on de remarquer
que ce Jea n- Fra nço is Pastier n ’a d ’autre affinité avec
le testateur, que l ’avantage de porter le m ê m e n o m ;
ou au moins il ne lui appartiendrait q u ’à un degré
si éloigné , q u ’ il n e sa ur ai t pas m ê m e t ’i n d i q u e r .
Ap rès la mort du sieur Gilbert P a s t ie r , les scellés
ont été apposés à la requête de l’héritier testamen
taire qui se trouvait sur les lieux,- on n’a pas daigné
p r év en ir la dame Pa ill ard , q u i , cependant par p r é
c a u t i o n , a formé opposition à la rémotion des scellés.
M a d a m e et M. Paillard désirant être éclairés sur
les droits q u ’ils ont dans cette succession, proposent
au conseil les questions suivantes :
i.° Quel est l ’effet du rappel porté en leur contrat
de m a r ia g e ?
2 -° Quelle portion amendent-ils dans cette successsion ?
�< |V'
( 6 )
3 .° Leurs droifs d o i v e n t - i l s se régler d ’après la
C o u tu m e de Bourbonnais , qui régissait les parlies
à l ’époque de
leur
co n t r a t , ou d ’après le C od e N a
poléon qui règle actuellement le m ode de partage?
4.0 Quelle porlion rc vie n l-i l aux autres cohéritiers?
5 .° Quel sera l’effet du testament fait sous l’empire
du C o d e ? En quoi consistent les droits de l’héritier
testamentaire ?
^ L E S J U R I S C O N S U L T E S A N C I E N S soussignés, qui
ont pris lecture , i.° de l’extrait du contrat de mariage
de J e a n - A l e x a n d r e Murglieon avec Denise Bo u ch ard ,
du 5 septembre
de
dame
1793;
2°
du contrat de mariage
Françoise - Gabrielle
Debar
a vec J e a n -
M i c h e l Paillard, du 27 septembre de la m ê m e a n n é e ;
3 .° du testament olographe de Gilbert P a s l i e r , du
18 mai
1 8 1 0 , de la généalogie des Pastier et du
m é m o i r e à consulter,
E s t i m e n t , sur les questions p ro po sée s;
Q u ’il convient en première ligne de définir ce q u ’on
entend par ra p pel, et quel doit être l ’effet de cette
disposition.
Elle était fort usitée en C o u tu m e de Bou rbonnais,
ou la représentation n ’avait lieu en ligne collatérale,
q u ’entre frères et s œ u r s , et descendans de frères et
sœurs.
Hors les termes de la repré sen tation, les héritiers
�( ? 3
les plus proches succédaient par
u y
têles et non per
siirpes. ( A i t . 3 o6 de la C o u t u m e ) .
Il est assez simple q u ’on dût succéder par tête ,
toutes les fois q u ’on était hors des termes de la r e
présentation, parce q u ’on ne peut succéder par souche
q u ’autant q u ’on se met à la place de que lq u’ un , et
q u ’on prend ce q u ’il aurait pris; c ’e s t - a - d i r e , q u ’il
faut représenter pour succéder per siirpes ; et lors
q u ’on vient de son c h e f , on ne doit succéder que par
te le.
»
D a ns ce dernier cas , l ’héritier le plus prochain en
d e g r é , excluait
éloigné ,
ce ux qui étaient à un degré
successlo
ex tra
plus
terminos representationis
p rp xim io ri defertur. Decullant.
Mais celte m ê m e c o u t u m e é t a i t c e q u ’ o n appelle
d'estoc et lig n e, ce qui veut dire que les biens retour
naient à l ’estoc d’où ils étaient p r o v e n u s , ce qui a
besoin encore d’explication.
O n distinguait les meubles et acquêts d ’a vec les
propres naissans et les propres anciens.
A l ’égard des meubles et a c q u ê ts, il se divisaient
en deu x parts, moitié aux héritiers paternels les plus
p r o c h e s , l ’autre moitié aux héritiers maternels les
plus prochains.
L es propres naissans appartenaient aux plus proches
héritiers du côté et ligne de celui par la mort duquel
ils lui étaient avenus.
�• Quant aux propres a n c i e n s , ils appartenaient aux'
parens les plus proches du défunt , du côté et ligne
d ’où
ils étaient prove nus , q uo iq u’ ils ne fussent pas
les parens les plus prochains du d é f u n t , art. 3 i 5 de
la Coutum e. A u r o u x , sur les art., n.° n , 12 et suiv.
Cette différence , dans la nature et l ’origine des
biens, pour en régler la transmission, a beauco up
exercé les commentateurs de cette C o u t u m e , et donné
lieu à de grandes discussions ; la circonstance que la
succession est ouverte sous le Code N a p o l é o n , dispense
de se livrer à un ex a m en plus profond de
celt e
question, ainsi q u ’on va bientôt l’établir.
Mais il faut en venir au r a p p e l , et il est évident
que le sieur Pastier n ’ignorait pas la disposition de
la C o u tu m e sur les termes de la représentation ; il
savait aussi que le sieur D e b a r , son cousin issu de
g e r m a i n , était un de ses plus proches héritiers; il
craint que le sieur D e b a r ne vienne à le p r é d é c é d e r ,
et que ce prédécès exclue sa fille de sa succession,
parce q u ’elle pourrait ne pas se trouver en degré utile;
il prend le parti de la r a p p e l e r , et de lui assurer la
po rtion que son père aurait eue s’il lui survivait.
C ett e disposition éventuelle est faite entre vifs, par
contrat de mariage , sans aucune réserve , et a un
caractère d ’irrév oc abilité, auquel le testateur n ’a pu
déroger dans la suite ; il avait alors le droit de faire
toutes les libéralités q u ’il lui plaisait. L a première loi
prohibitive
�(9)
prohibitive
n’est
que du
^4 ^
5 brumaire an
2 ( no
vem b re 1 7 9 4 ) .
Quel a été Feiïet de ce ra p pel ? sans contredit, la
dame Paillard a été mise par ce m o y e n à la place de
son p è r e , si celui-ci mourait avant le sieur Pastier;
et ce der n ie r, par celte disposition, a dû laisser sa
succession ab intestat par rapport au rappelé.
I l est sans contradiction que la dame Paillard doit
prendre dans la succession du sieur Pastier, tout ce
que son père y aurait pris, s’il élait vivan t à l ’o u
verture de la succession de Gilbert Pastier.
A la v é r i t é , la dame Paillard était chargée d ’associer
son frère à ce r a p p e l , mais ce frère ne contractait
pas , et n’était pas saisi; c ’était la dame P a i ll a r d , qui
seule était i n v e s t i e cia l i t r e : s o n f rè r e n e pouvtùt
recevoir que d ’elle; c ’était une condition que le sieur
Pastier avait mise à sa libéralité.
Mais en m ê m e tems cette condition était onéreuse,
dès-lors révocable à volonté de la part de l ’auteur de
la disposition. L a faveur due aux contrats de mariage
a fait admettre ce principe, que toutes les clauses
onéreuses sont révocables au profit des mariés.
O r le sieur Pastier ayant par son testament r é
vo q u é la condition de l’association, il en résulte que
la dame Paillard vient exclusivement prendre la portion
qui reviendrait h son p è r e ; la part destinée à son
frère ne peut accroître q u ’à elle ; le sieur Pastier a
3
�disposé de ioute la portion que D e b a r père devait
recueillir.
L a dame Paillard étant ainsi mise à la place de
son p è r e , on doit la considérer c o m m e parente ail
m ê m e degré que le père, c’e s t-à -d ir e , c o m m e cousine,
issue de g e r m a in e , du défunt; alors elle se trouve la
parente la plus prochaine du défunt ; de sorte que
sous la
coutum e m ê m e , elle aurait exclu tous les
pai ens à un degré plus é l o i g n é , aurait succédé par
moitié aux meubles et acquêts, c o m m e héritière m a
ternelle , et à tous les propres anciens provenus des ^
Pralois dont elle descend.
C e qu’ on dit de la dame P a i ll a r d , s’applique éga
le m e n t à Jean - A le xa ndre
Murgheon
et à Denise
Bouchard sa f e m m e ; leurs mères à la vérité n'existaient
plus lors de leur m ar ia ge ; elles étaient aussi cousines,
issues de germ aines , du d é f u n t ; il a mis les ép oux à
la place de leurs mères. M u r g h e o n , c o m m e la dam e
Paillard descend des Pralois; il se trouve au m o y e n
du rappel au m ê m e degré que la dame Paillard : il
aurait donc succédé co ncurremment et par tête sous
l ’ancienne l o i , avec la dame Paillard.
A l’égard de Denise Bouchard , fe m m e M u r g h e o n ,
elle ne descend pas du m ê m e estoc; elle appartient
a la' ligne P a stie r ; elle se serait e n c o r e , sous la C o u
t u m e , trouvée seule au degré pour succéder dans sa
l i g n e ; par conséquent , elle aurait
meubles et
pris moitié des
acquêts , les propres naissans
provenus
�( ii
)
2 SI
jt fj
des P a s t i e r , et les propres anciens qui auraient eu
la m ê m e origine.
. !
Mais il ne faut plus aujourd’hui raisonner d ’après
la C ou tu m e : ce n ’est plus elle qui doit régler le mode
de partage de la succession de Pastier.
L e rappel fait en faveur des ép ou x M u r g h e o n , et _
de la dame Paill ard, a bien un effet présent quant
à l ’irrévocabilité de la disposition ; c’ e s t - à - d i r e , q u ’il
assure à la dame Paillard un droit certain à la suc
cession , mais la
portion
q u ’elle prendra
n’est pas
d é t e r m i n é e , et ne peut être connue q u ’à l’ouverture
de la succession ; c ’est là que la dame Paillard est
r e n v o y é e pour s u cc é d e r, c o m m e son père l ’aurait
fait s’il ne fût pas mort avant Pastier., et celui-ci lui
assure tout ce que la loi qui régira sa s uc c e s s i o n t
aurait accordé à son père.
L e sieur Pastier n’a pu déroger à cette promesse ,
ni régler la portion héréditaire de celui q u ’il a rap
p e lé ; il-s’est engiigé par rapport à l u i, à ne rien faire
qui dérogeât à-ce droit de successibilité, qui diminuât
sa portion lé g a le, quelque changement qui intervienne
dans la législation; en un m o t, il s’est obligé à laisser
sa succession ab intestat.
ar rapport au rappelé.
L a dame Paillaid a m êm e couru la
chance
de
ne rien recueillir, si son père ne s’était pas trouvé
en degré pour s u c c é d e r ,
ou
de prendre toute la
4
j
�U *
( 12 )
portion Cfni lui serait att rib ué e, si son père se trouvait
le païenI le plus proche.
Il est encore sans contradiction que le m o d e ' d e
succéder et de par tager, doit être réglé par la loi
qui est en vigueur à l ’ouve rture de la succession ,
sur-lout pour les successions qui s’ouvrent ab intestat ;
et on vient de voir q u ’il faut considérer sous ce rapport
la succession P a s t ie r , relativement aux rappelés.
L e sieur Pastier l u i- m ê m e a senti que sa succession
devait se régler par le Code Napoléon ; il veut profiter
de la faculté qu'il lui accorde. Il sait et il veut que
toutes dispositions précédentes
et
légalement faites
soient maintenues; il confirme les rappels par lui faits
pr écéde m m en t ; il veut favoriser les rappelés , en ré
vo q uan t les conditions q u ’il y a mises, et dans son
intention bien manifestée, son héritier testamentaire
ne doit rien prendre qu'après que les rappelés auront
eu la portion que la loi leur assure.
O r , quel est celte portion l é g a l e ?
« L a loi ne considère, ni la n a t u r e , ni l’origine
« des biens pour en régler la transmission. (A rt.
« Code N a p o l é o n ) .
« T o u t e succession éc hu e à des
2,
ascendans ou à
« des parens collatéraux, se divise en deux parts égales,
« l’ une pour les parens de la ligne paternelle, Fautre
« pour les parens de la ligne maternelle. (A rt. 7 3 3 ).
« Cette première division opérée
entre les lignes
�( >3 )
2 /3
« paternelles et m atern elles, il ne se fait plus de
« division entre les diverses b ran ch es ;l a portion dé« volue à chaque ligne appartient à l ’héritier ou a u x
« héritiers les plus proches. ( A r t . 784).
Il n ’est personne qui n ’ait reconnu la sagesse de
ce
mode
de
division; il tranche
toute d if fic ulté ,
anéantit une foule de procès ruineux sur l ’origine des
biens, sur la contribution desdettes, sur les refentes, etc.
Déjà
la C o u tu m e
du
Bourbonnais , l ’ancienne loi
des parties, avait adopté cette règle pour le partage
des meubles et acquêts ; et on va voir que la repré
sentation est encore réglée par le C o d e , c o m m e elle
l ’était par cette Coutume.
L ’art. 742 n’admet la représentation en ligne col
l a t é r a l e , q u ’ e n f a v e u r des e n f a n s et d e s c e n d o n s des
frères ou sœurs du d é f u n t . S u i v a n t l ’art. 7 4 3 , le partage
s’opère par souche toutes les fois que la représentation
est admise aux termes de l ’art. 7 5 3 , lorsqu’il n ’y^ a ni
frères ni sœurs, ni descendans d e ‘frères ou de sœurs;
les parens les plus proches succèdent, et lorsqu’il y a
concours de parens collatéraux au m ê m e degré , ils
succèdent par tête.
C e règlement est parfaitement entendu , il ne s’agit
que d ’en faire l’application. L e sieur D e b a r , père
de la dame Paillard , était cousin , issu de
du défunt ; si le sieur D e b a r v i v a i t ,
germ ain,
il serait
le plus
proche parent de sa l ig n e, avec la mère de M u r g l ie o n ,
qui était au m ê m e degré.
�( 14 )
L a dame Paillard et M u rgh eo n sont mis au m ê m e
degré que les ascendans ; ils appartiennent à la ligne
m at e r n e l l e ; moitié de la succession doit être attribuée
à cette l i g n e , quelle que soit la nature et l’origine des
b ie n s ; madame Paillard et M u r g h e o n , parens par
fiction au m êm e degré , se trouvant les plus proches
du d é f u n t , doivent donc recueillir conc urr emment
et par tête, la moitié affectée à leur l i g n e , c ’est-àdire, q u’il revient à chacun le quart des biens délaissés
par Gilbert Pastier.
■ Ma inte na nt que
la
portion revenant à la dame
Paillard est déterminée , il est assez indifférent pour
elle de savoir ce que deviendra la moitié affectée a
la ligne paternelle à laquelle elle est étrangère ; elle
ne doit m ê m e prendre aucune
part aux questions
qui peuvent naître entre l ’héritier de cette ligne et
l ’héritier testamentaire, qui n ’est appelé par la force
de la l o i , et la volonté bien exp rim ée du te sl alp ur,
q u ’après que
les rappelés auront pris ce qui leur
revient.
L a dam e Paillard est bien avertie que le testament
n’a pu faire aucun retranchement dans sa ligne : elle
connaît tout l ’effet que doit avoir son rappel.
Cepe ndant il lui importe de prévenir toute discus
sion avec l ’héritier testamentaire; elle doit m êm e être
en garde sur la qualité q u ’il voudra prendre lors de la
rémolion des scellés et de l’inventaire ; et , dans ce cas,
on doit examiner les prétendus droits de cet héritier.
�( i5 )
2$5
Son tilre s’é v a n o u i t , ses droits s’é t e ig n e n t , et ne
pe uvent résister à la plus légère discussion. D en is e
Bouchard est la seule en ordre de succéder dans la
ligne paternelle; elle se tr o u ve, d ’après la généalogie
qui a été soumise, la cousine issue de germ ain , du
d é f u n t ; elle descend de Guillaume Pastier, aïeul de
Gilbert de c u j u s ; elle est l’héritière la plus proche de
ce ll e l ig n e ; elle le serait sans fiction«, quand m ê m e
elle ne viendrait pas à la place de sa m è r e ; elle est
rappe lé e, en ce qui la conc erne, pour la portion q u ’au
rait recueillie sa mère. L e sieur Pastier, par son tes
t a m e n t , n’a pu ni voulu déroger aux dispositions par
lui c i - d e v a n t faites; il a m ê m e confirmé ce rappel
par le testament.
A u x termes de l’art. 734 du C od e Napoléon , Denise
Bouchard doit r e c u e i l l i r la m o i l i é a f f e c t é e à sa l ig n e ,
il moins q u’il n’y eût d ’autre héritier dans la m ê m e
ligne et au m ê m e degré que la f e m m e Bouchard ; dans
ce cas, l’hérilier testamentaire serait mis à la place de
c e u x qui auraient droit de concourir a vec el le ; mais
si elle est la seule parente au degré utile, l’héritier
testamentaire n’a lie n à prétendre. L e testateur n ’a
pas-été le maître de disposer, au profit d ’ un tiers, d ’ une
chose q u ’il avait déjà d o n n é e ; par conséquent son tes
tament est c o m m e non avenu par rapport au sieur
Pastier; il n’a q u ’ un vain titre, fait au préjudice d ’un
contrat de mariage dont la foi ne peut être violée.
L e sieur Pastier s’abuse, s’il croit avoir un droit quel
�(
16]
conque à la succession de Gilbert de cu ju s. L e partage
de c e ll e succession était déjà réglé par des dispositions
antérieures et irrévocables, que le leslateur a dû res
pecter. Ce n’est que par un mal-entendu qu’il a pensé
que le C ode Napoléon lui donnait le droit de disposer
de ses biens.
L e Code n’accorde cette f a c u l t é , en ligne collatérale,
q u ’autant que le teslaleur n'aurait pas déjà fait des
dispositions e n t r e - v i f s dans un tems utile. L e sieur
Paslier, par les contrats de mariage des 5 et 27 sep
tembre 1 7 9 3 , s’était déjà do nné,des héritiers conven
tionnels. Celui qui a fait un héritier par des libéralités
irrévocables, ne peut plus en faire un second, et son
testament n’aura aucun effet, si ce n’est pour les legs
rémunératoires ou les legs p i e u x , qui doivent avoir
leur e x é c u t i o n , lorsqu’ils ne sont pas excessifs, lorsqu’ils
n e portent pas un préjudice notable aux donataires de
la qualité d ’héritiers.
Ces legs seront acquittés par les rappelés, chacun
dans la proportion de leur amendement.
\
P e u t - ê t r e le testateur a - t - i l pensé q u ’il p o u v a it dis
poser de la portion p r im i ti v e m e n t destinée a u x associés.
C e serait une erreur : la révocation de cette condilion
ne peut profiler et accroître q u ’à ceux qui étaient déjà
investis du titre, malgré la condition qui leur était
im pos ée; ils ont couru la chance du prédécès des asso
ciés,
com m e
ils ont pu espérer une révocation de cette
charge.
En
�t s r
( 17 )
En la r é v o q u a n t , l ’auteur de la disposition ne peut
leur donner d’autres associés malgré eu x -m ê m e s : ils
profitent exclusivement de la révocation.
C ’est donc assez inu tilement que le sieur Pastier a
requis l’apposition des scellés, sans m ê m e prévenir de
cette dém arc h e ce ux qui avaient droit à la succession,
et q u ’il n’a pu méconnaître d’après le testament.
L a dame Paillard a agi prudemment en formant
opposition à la rémotion des scellés; elle oblige par-là
les prétendant droit à l’appeler lors de ce ll e r é m o tio n ,
mais elle ne doit pas s’en tenir à cette démarche pure
m en t conservatoire.
I l est de son intérêt de demander la ré m oti on, de
faire procéder à un inventaire e s t i m a t i f , pour constater
les forces mobiliaires de la succession, sauf ensuite à
demander le partage à ses cohéritiers rappelés c o m m e
elle , e t à faire promptement régler les droits de chacun,
d ’après le mode q u ’on vient de lui indiquer.
D élibéré à R io m , le 26 décembre 1812.
P AGÈS,
L . - F . D E L A P C H I E R , VISSAC , A L L E M A N D ,
J .-C
h.
BAYLE.
A RIOM, de l'imprimerie du Barreau, chez J - C .S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Debar, Françoise-Gabrielle. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Delapchier
Vissac
Allemand
Bayle
Subject
The topic of the resource
successions collatérales
estoc
coutume du Bourbonnais
testaments
conflit de lois
contrats de mariage
paterna paternis
doctrine
généalogie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, suivi de consultation, pour Dame Françoise-Gabrielle Debar, et le sieur Jean-Michel Paillard, son mari, ladite dame héritière de défunt Gilbert Pastier, prêtre ; contre les prétendant droits à la succession dudit défunt Gilbert Pastier.
arbre généalogique
note manuscrite « arrêt du 16 février 1814. Voir journal des audiences, 1814, p. 51 ».
Table Godemel : Rappel à succession, stipulé par contrat de mariage, sous l’empire de la coutume du Bourbonnais, a-t-il l’effet d’une institution contractuelle irrévocable ? Ou, au contraire, peut-il être anéanti ou modifié par dispositions entre-vifs ou testamentaires émanées de l’auteur de la disposition ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Barreau, chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1793-1812
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
17 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2114
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2115
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53410/BCU_Factums_G2114.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vendat (03304)
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
doctrine
estoc
généalogie
paterna paternis
successions collatérales
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53361/BCU_Factums_G1909.pdf
56734f3c53bc8e69cb7d11d5fec9b741
PDF Text
Text
X\x
UN D E R N IE R M O T
Pour les Légataires universels de Madame
DE C HAZERAT.
« M
adame de C h azerat, malgré ses nombreux testamens et
» codicilles , n’a point dispose de ses biens ; elle en a laissé la dis—
» position à la coutume d 'A u v e rg n e , à une loi abolie ; elle a
«
»
»
»
blessé en cela l ’ordre public et les bonnes mœurs. il faut donc
la considérer comme décédée ab intestat ; dès-lors le jugement
qui a ordonné le partage de ses biens , conformément au Code
c iv il, doit être confirmé. »
C ’est à ce sophisme, délayé dans soixante-quatre pages d ’im
pression, que se réduit la consultation des sieurs M irlavau d , et
Mazuel , son cessionnaire.
L ’homme de sens qui est étranger à toutes les arguties du
palais, répond : Comment se peut-il que madame de C ha z e ra t
n ’ait pas disposé de ses biens, et qu’elle soit m o rte intestat?
J e lis ce qui suit dans son testament du 26 messidor an 9.
« Q u a n t à la propriété de mes b ie n s, mon intention étant,
}> autant qu’il dépend de m oi, de les faire retourner
ceux de
A
•fH
�» mes parens qui descendent des estocs dont ils me sont parvenus,
» je donne et lègue tout ce dont il m’est permis de disposer, sui» vant la loi du 4 germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de
» la branche de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de mon
» aïeule m aternelle, qui seroient en ordre de me succéder, sui» vant les règles de la représentation à l ’infini. »
E t je lis encore ce qui suit dans son codicille du 14 messidor
an 1 1 , postérieur au Code civil.
« L a nouvelle loi m ’ayant aiccordé la faculté de disposer de la
» totalité de mes b ie n s , je veux et entends que le legs universel
» que j’avois fait par le susdit testament , en faveur de mes
» parens de l ’estoc de mes aïeul et aïeule paternels, et de ceux
» de l’estoc de mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il m ’étoit
» permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait son effet
» pour la totalité de mes biens. «
J e vois évid em m en t, continue l ’homme simple qui ne raisonne
que bon sens , que par ces' deux testamens ou codicilles , madame
de Chazerat a disposé de ses biens au profit des descendans de
son aïeul paternel,
D es descendans de son aïeule paternelle,
Des descendans de son aïeule maternelle;
Q u ’elle en a disposé autant qu’il dépendoit d 'elle , c'est-à-dire ,
autant que le lui permeltoient les lois;
Qu’en l ’an 9 , elle en a disposé suivant la loi du 4 germinal
an 8 , qui étoit alors en vigueur ;
Qu’en l ’an 1 1 , elle en a disposé suivant le Code civil , qui
avoit succédé à la loi du 4 germinal an 8 ; q u elle a rappelé et
invoqué ces lois avec la déclaration la plus formelle que son
intention étoit de s ’y conformer.
A près avoir ainsi appelé à recueillir ses biens les descendans
des trois branches de son aïeul et aïeule paternels et de son aïeule
m atern elle , elle ajoute qu’elle veut que ces mêmes biens soient
distribués entr'eux suivant les règles de la représentation à
l'infmi.
�Rien n ’eloit plus permis que cet ordre de distribution de son
b ie n s, queprescrivoit madame de Chazerat entre ses légataires; il
¿toit d'ailleurs conforme à l’art. 82 de la loi du 17 nivôse an 2 , qui
«toit en vigueur au moment de la rédaction de son testament : il
ne s’est pas encore trouvé un légiste qui ait osé attaquer cette
disposition. T o u s conviennent que si madame de Chazerat s’étoit
arrêtée là ,son testament seroit à l’abri de la critique la plus sévère.
M ais après ces m o ts, suivant Tes règles de la représentation
à l'infini, madame de Chazerat a ajouté, telle qu’elle avoit lieu
dans la ci-devant coutume d’Auvergne.
Elle n ’a p u , dit-on, ajouter ces expressions, sans attenter à
l’ordre public et offenser les bonnes mœurs.
Or , le Code Napoléon d it, en termes formels , art. 6 , « qu’on
» ne peut déroger, par des conventions particulières , aux lois qui
» intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. »
Mais remarquons qu’il s’agit dans cet article du C o d e , de con
ventions particulières qui intéressent l’ordre public et les bonnes
mœurs;
Qu’un testament et un codicille ne sont pa6 des conventions par
ticulières ; que ces expressions ne peuvent s’appliquer qu’ aux
transactions sociales, passées entre plusieurs individus qui contrac
tent entr’eux des engagemens quelconques , licites ou illicites.
Il y a une loi expresse qui règle le sort des dispositions testa
mentaires qui sont contraires
à l ’ordre public et aux bonnes
m œ u rs; c’est l’article 900 du C o d e ; il est conçu en ces term es:
« Dans toutes dispositions entre-vifs ou testamentaires , les con» ditions impossibles, celles qui seront contraires aux lois et aux
»> mœurs , S E R O N T R É P U T É E S N O N - É C R 1T E S . » '
E t on voit dans la consultation de T u r i n , que cet article du
Code n ’est que le résultat de toutes les lois romaines rendues sur
cette matière.
Si donc il étoit vrai que madame de Chazerat, en transcrivant
ces mots dans son testam ent, telle qu’elle atoit lieu dans la ci•
devant coutume d'Auvergne, eût eu lo malheur d ’offenser l ’ordre
�(
4
)
public et les bonnes mœurs , tout ce qui pourroit en résulter, ce
seroit que ces expressions seroient réputées non-écrites, et le tes
tament n'en seroit pas moins valable.
L a loi n’annulle pas le testament dans lequel un testateur im
prudent a pu consigner des expressions, ou même faire^pielques
dispositions contraires aux lois et aux mœurs, elle 1rs regarde
seulement comme non-e'erites , et le testament a toute l'exécution
qu’il peut avoir, en retranchanfces expressions ou ces dispositions
inconvenantes et prohibées.
On pourroit s’en tenir l à , et la contestation seroit jugée.
M ais je suppose , dit encore l’homme de s e n s, que l’article 6 du
Code civil puisse s’appliquer à un testam ent, comme aux con*vendons particulières, aux transactions so ciale s, où est donc
l ’attentat de madame de C h aze rat, contre l’ordre public et les
bonnes m œ urs?
On convient qu ’il lui étoit permis de distribuer ses biens entre
ses légataires universels, suivant les règles de la représentation à
Vinfini ; que si elle eut terminé sa disposition à ces dernières ex
pressions, elle n ’auroit rien fait contre l’ordre public et les bonnes
m œ urs, et son testament seroit exécuté sans contradiction.
C e t attentat à l'ordre social et aux bonnes mœurs, est donc tout
entier dans ces m o t s , telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
coutume d'Auvergne.
Mais observons, d ’a b o rd , que ces mots n ’ajoutent rien aux
| précédens, suivant les règles de la représentation à l’infini.
'
« C ’est un moyen , dit M . C h ab rol, sur l’article g du titre ia
» de la Coutume d ’A uvergne, par lequel le parent qui se trouve
m plus éloigné de celui auquel il s’agit de succéder, s’en rapproche
• » et se trouve appelé à la succession, en remontant à l'ascendant
» dont il descend, cl qui étoit ù degré égal avec les héritier^ ou
» leurs auteurs. »
L e legs universel de m ad am e de C hazerat une fois fixé sur les
trois chefs de fam ille du nicine d e g r é ,
L ’aïeul p a t e r n e l,
,
�itC
(
5
)
L ’aïeule paternelle,
E t l’aïeule maternelle,
L a représentation à l ’infini appeloit à recueillir ce legs tous les
descendans de ces trois chefs, quiseroient vivans à l’époque de son
décès : elle les rapprochoit tous également de leurs auteurs.
. L e u r vocation étoit la m ê m e , par les seules règles générales de
cette représentation à l ’infini ; et la Coutume d ’A u v e rg n e , rap
pelée dans ce testament, ne pouvoit ni en augmenter ni en di
minuer les effets.
Ces dernières expressions n ’étoient donc qu'une superiluite,
une vraie superfétation, dans le testament de madame de Chazerat ;
et tout le monde sait que ce qui est inutile ne vicie pas, suivant
la maxime triviale superflua non nocent.
Ces expressions superflues vicient encore moins une disposition,
lorsqu’elle en est absolument indépendante, et qu’elle est entière
et parfaite sans le speours de ces expressions.
A u su rp lu s, de quelle manière madame de Chazerat rappellpt-elle la ci-devant C outum e d ’A u v e r g n e ?
Après avoir fait le legs universel de ses biens aux descendans
des trois estocs de son aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule
maternelle, elle prescrit entr’eux un mode de division de ce legs
universel, qui n ’ a rien de prohibé. Elle veut que cette division
en soit faite suivant les règles de la représentation a Vinfini.
E t craignant que ces expressions laissent encore quelque chose
à désirer, elle ajou te, pour développer de plus en plus ce mode
de division, que la représentation à l’infini sera telle qu'elle avoit
lieu dans la ci-devant Coutume d’Auvergne.
A i n s i , cette ci-devant Coutume d ’Auvergne n’est rappelée que
comme exem ple, demomtrandi graticl, majoris d é m o n s trationis
causd , comme le disent les jurisconsultes de T u rin .
Répétons-le encore; il existe une disposition générale laite de
ses biens par madame de C hazerat, une disposition nette, pré
cise, absolue; celle disposition est l'effet de sa volonté, et 11011
d ’une loi quelconque.
m
�Si sur ce point principal elle rappelle des lois, ce -sont des lois
nouvelles ; c’est celle du 4 germinal an 8 , c’est le Code Napoléon ;
ce sont les seules lois qu’elle invoque, quand il s’agit de disposer
de ses biens : c’est à ces lois q u ’elle déclare vouloir se conformer.
Quand il s ’agit ensuite de les diviser entre ses légataires univer
sels , c ’e st encore sa volonté qui en prescrit le mode ; elle veut
impérieusement que cette division se fasse suivant les règles de
la représentation à l’ infini.
Si après avoir prescrit ce mode de division elle rappelle la cidevant Coutume d ’ A u ve rgn e , ce n’est de sa part qu ’un excès de
précaution., une surabondance de paroles, qui n’a d'autre objet
que de développer plus clairement sa pensée.
Ajoutons que cette Coutume étant rappelée pour un objet par
ticulier, pour un objet déterminé, il ne reste pas même le plus léger
prétexte d ’ appliquer au testament de madame de C h azerat l ’article
1390 du C o d e , relatif à la communauté de biens stipulée par
contrat de mariage, tant de fois et si mal à propos cité dans cette
i cause.
B O I R O T.
A
,
C l e r m o n t de l'im prim erie de L a n d r i o t Imprimeur de la préfecture ,
et L ib ra ire , rue Sain t-G en ès, maison ci-devant Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
représentation à l'infini
Description
An account of the resource
Titre complet : Un dernier mot. Pour les légataires universels de Madame de Chazerat.
Table Godemel : Testament : 9. un testateur a-t-il suffisamment exprimé son choix en désignant ses légataires, collectivement, par l’indication certaine de leur origine ? - l’article 1390 du code civil s’applique-t-il aux testaments ? doit-on considérer comme valables des dispositions qui seraient faites sans la désignation particulière de chaque légataire, et par une expression collective en faveur de ceux qui auraient été appelés à succéder suivant les règles de la représentation à l’infini établie par uns coutume abrogée ? ces dispositions sont-elles valables, surtout lorsque l’on ne s’en est pas référé d’une manière générale à la coutume abrogée, et lorsque les termes du testament suffisent, soit pour reconnaître les légataires, soit pour déterminer le mode du partage et l’amendement de chacun ? peut-on, sur des présomptions, étendre un legs au-delà des expressions de la clause qui le constitue ? 19 – 19.
10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1909
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1908
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53361/BCU_Factums_G1909.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Joze (63180)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
représentation à l'infini
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53360/BCU_Factums_G1908.pdf
100704f844531e55ae49d054903704ed
PDF Text
Text
s
C O N S1 U L T A T I O N .
L e
C O N S E IL S O U SSIG N É , qui a vu le testament
et les codiciles de madame Rolet-de-Chazerat, ensemble
un jugement du tribunal de première instance, séant à
R io m , du 22 juin 1808, et deux consultations délibé
rées à Clermont-Ferrand ,,et à Paris, les 29 juillet et 8
novem bre 1808, en faveur des légataires universels de
madame de Chazerat; et un mémoire à con su lter
Répondant à la question proposée dans le m ém oire,
et qui fait l’objet des deux consultations ci-dessus énon
cées, et qui est de savoir si l’on doit considérer com me
valable le legs universel fait par madame de C h a z e r a t ,
dans son testament olographe du 26 messidor an 9 , au
profil de ceux de ses parens qui seraient en ordre de lui
succéder, suivant les règles de la représentation à l’in
fin i, telle qu’elle avait lieu dans la ci-devant coutum e
d ’Auvergne ; et si l’on est bien fondé à espérer que le
�( 2 )
jugement du tribunal civil de R io m , qui a déclaré nul
ce legs universel, sera confirmé sur l’appel qui a été
interjeté de ce jugem ent par les légataires universels;
E
s t im e
, que le legs universel fait par madame de
C h azerat, ayant réellement pour objet de faire revivre
une distinction pro h ibée, sur la nature et l’origine des
biens, et de créer un ordre de su ccéd er, suivant les règles
d ’une coutume abolie, sa disposition qui est contraire
aux lois et à l’ordre public est nulle; et que le jugement
du tribunal de R io m , qui en a prononcé la nullité, ayant
fait une juste application des véritables principes du
droit, ainsi que des règles particulières établies p a r le
code N apoléon, le sieur M irlavaud n’a rien à redouter
de l'appel qui a été interjeté de ce jugement par les
légataires universels.
Cette décision est facile à justifier par les plus sures
maximes du droit, et par des principes qui n’ont jamais
souffert aucune atteinte. M ais, pour exposer ces prin-*cipes avec plus d’ordre, la discussion sera divisée en
deux paragraphes.
On fera voir dans le prem ier, que nul ne peut rap
peler l’ancienne distinction sur la nature des biens
propres paternels ou maternels, ou acquêts, ni créer
un ordre de succéder, autre que celui en vigueur lors
de l’ouverture de lu succession. 11 sera démontré dans
lo second que le testament de madame de Chazerat est
en opposition avec ces principes, ou, en d’autres termes,
quo madame de Chazerut a ordonné la distinction do
�( 3 )
ses biens en propres, paternels ou m aternels, et en
acquêts, et qu’elle a voulu c rée r, et qu’elle a créé en
effet un ordre de su ccéd er, autre que celui qui était
en vigueur à l'époque de son décès,
§ .1 .«
N u l ne peut créer un ordre de succéder, autre que celui
en vigueur lors d s Couverture de la succession.
L e C o n s e i l , avant d ’enlrer en matière sur ce pre
mier paragraphe, croit devoir faire quelques réflexions
sur certains principes qui sont avancés dans la consul
tation de Clerm ont, avec une confiance apparente qui
p ourrait en imposer.
Prem ièrem ent, de ce que l ’art. 916 du code N apo
léon dispose qu’à défaut d’ascendans et de descendans,
les libéralités par actes entre-vifs ou testamentaires pour
ront épuiser la totalité des biens du disposant, les au
teurs de la consultation de Clermont en ont conclu
qu’on pouvait appliquer ¿1 la testatrice, dans toute sa
force, cette m axime du droit rom ain, dicat testator
et erit lex. E t selon e u x , c’est dans ces deux mois que
consiste toute la théorie de la législation, en malière
de successions collatérales.
‘
En premier lieu, cette règle n ’a jamais été admis©
qu’avec la condition que la volonté du lestateur serait
conforme à la lo i, et qu’il 11’aurait voulu que ce que
la loi lui permet luit. C ’est ce qu'on expliquera plus
particulièrement dans la suite.
»
2
�( 4 )
E n second lieu, cette rè g le , dicat testator, et erit lex.
est plus propre au droit romain qu’à notre législation,
ainsi qu'à l’ancienne législation coutumière.
Dans le droit romain , on ne recourait à la succes
sion ab in testat, que lorsqu’il n’y avait pas de testa
ment , leg. x , ff. s i tabul. testament, nuit, ex tab. ; le
pouvoir du testateur y était sans bornes. C ’était un des
principaux chefs de la célèbre loi des douze ta b les,
paterfam ilias u ti legassit super pecutüa tutela i>e suce
rei, Ua j u s esto:et Justinien, dans sa novelle 22, chap. 2 ,
n’a fait que rappeler ce droit ancien, lorsqu’il a pro
clamé la m axime invoquée dans la consultation de
C lerm ont, et dont le texte est disponat unusquisque
super s u is , et sit lex eju s voLuntas. Cette puissance
du testateur tenait à des réglemens politiques, et à des
usages qui nous sont étrangers.
C ’étai t une règle in con te stable du droit coutum ier,
qu’il n’y avait d’autres héritiers que les proches, que
la coutume appelait à la succession. L'héritier légitime
était fait héritier au m om ent de la mort de celui h
qui il succédait, quoique m êm e celte mort lui fût incon
nue. C ’est cette règle que les coutumes exprimaient
par ces termes : L e mort saisit le v i f son prochain
ligna ger habile à lu i succéder.
E t c’est d’après cette différence que l’auteur du
nouveau traité des donations et lestamens (M .G renier),
dit a v e c justesse, tom. 3 , p. 240 ; «dansle droit romain,
w la volonté de l'honnne faisait les héritiers; la liberté
* de disposer était sans bornes....... Dans les coutumes
�.( 5]
« de F ran ce , au contraire, c ’était la loi qui faisait les
« héritiers, et non la volonté de l’homme. Les dispo
se sitions testamentaires étaient réduites à la nature de
« legs, parce que les testa mens étaient assimilés aux
« codiciles. Les héritiers du sang étaient saisis par la l o i ,
<r et ceux qui avaient pour eux des libéralités testamentaires étaient obligés de leur en demander la déli« vrance -*>.
O r, tels sont les principes du code N apoléon, ainsi
que l’observe le m êm e auteur. Cela résulte, i.° de ce
que le code commence par traiter des successions lé
gitimes avant de régler les successions testamentaires;
2.° de ce que les héritiers légitimes ont la saisine légale
(code Nap. art. 7 2 4 ) ; 3 .° de ce q u e, lorsqu’il y a des
héritiers auxquels un droit de réserve est accordé, ces
héritiers ont la saisine légale, et le légataire universel
est obligé de leur demander la délivrance des biens
compris dans le testament (art. 1004), et à défaut d’hé
ritiers h réserve, et de légataire universel, celui qui a
en sa faveur une disposition à titre universel, est obligé
de demander la délivrance des biens qui en sont l’o b jet,
aux héritiers légitimes (art. i o n ) .
11 s’en faut bien que ces observations soient oiseuses.
Elles conduisent à la conséquence certaine que lorsque,
sur un testament, il s’élève des difficultés, dans le doule
•même, la balance doit pencher en faveur de l ’héritier
du sang, contre l’héritier testamentaire ou légataire,
et il n’y a rien de plus vrai que ce que disait le judi
cieux D o m a t, dans une dissertation, en s’expliquant
�( 6 }
m êm e d ’après les principes du droit rom ain, L o is ci
viles , 2.e partie, lii>. i.ei, préface, §. 8 , à LaJ ia : « Dans
<r les doutes où la faveur de l’ une ou l’autre de ces
« deux sortes d’héritiers (testamentaires ou du sang)
» peut être considérée, on doit décider pour celui du
« sang. »
Secondement, on a avancé dans la consultation de
Clerm ont, pag. 8, «qu’il est de principe incontestable
« que la loi qui est en vigueur au décès du testateur,
* règle uniquement la quotité disponible, et que tout
« ce qui intéresse la confection du testam en t, ses
«■formes, ses expressions, et le mode de disposer, se
« règle par les lois en vigueur au m om ent où il a été
«■fait ».
On accorde sans difficulté que tout ce qui concerne
les formalités extérieures du testam ent, est réglé par
la loi observée au moment où il est fait ; mais pour les
conditions et le mode de la disposition , elles se rè
glent par les lois qui régissent la disposition elle-même,
c'est-à-dire, p arla loi en vigueur au moment du décès:
toute proposition contraire est une erreur.
L e mode de disposition , ainsi que les conditions im
posées à la disposition, n’ont aucun rapport avec les
formalités de l’acte, pour lesquelles on ne s u it, à la
vérité, d’autres règles que celles observées lors du tes
tament. Les formalités n’ont trait qu’à la forme exté
rieure de l’acte ; le mode et la condition font partie de
lu disposition, et lui sont inhérentes. Il n’existe aucune
raison de soustraire le mode et la condition de la dis-
�1S5
( 7 ) .
position à l’empire de la loi qui régit la succession. C e
principe évident a au surplus été consacré par plusieurs
arrêts.
Quant à la condition, on peut citer un arrêt de la
Cour de cassation du 23 messidor an 9 , qui est rap
porté par l’auteur qu’on a déjà cité , tom.
3,
n.° 534.
L a question était de savoir si le rapport d’ une dona
tion , lorsqu’il n ’y en avait pas de dispense , devait avoir
lie u , ayant été faite à un successible sous la loi de 1789,
dans la coutume de Nivernais, où le rapport n’avait
point lieu de droit entre les collatéraux, et la succes
sion du donateur s’étant ouverte sous l’empire de la
loi du 7 nivôse an 2.
On disait, pour affranchir le donataire de la néces
sité du rap p o rt, que la loi qui régissait la donation,
lorsqu’elle avait été faite, ne la soumettait pas au rap
port dans le cas où le donataire viendrait à la succes
sion du donateur ; que c ’était là une condition im
posée seulement par la loi qui gouvernait la succession.
À quoi on répondait, de la part des héritiers, que
le droit de succéder était sans contredit subordonné à
la loi qui règle la succession lors de son ouvertu re5 et
qu’il en était de même des conditions sous lesquelles
on succédait.
Sur cette question, le tribunal civil de la Nièvre avait
ordonné le rapport; mais sur l’ap p el, le tribunal civil
de l ’Y on n e ayant jugé différemment, le pourvoi en
cassation fut admis contre son jugement.
L ’arrêt de la C ou r de cassation fut fondé sur le prin-
�( 8 )
tipe qiie tout ce qui concerne la succession, n ’existe
qu’en vertu de la loi qui règle lorsqu’elle s’o u v r e , et
sur ce que l’article 8 de la loi du 17 nivôse ne permettait
de succéder qu'à la charge du rapport des donations
anciennes. L ’auteur qui rapporte cet arrêt, remarque
avec raison qu’il est indifférent que la succession s’ouvre
sous l’empire du code N apoléon, le principe étant le
même que celui de la loi du 17 nivôse. On pourrait
citer plusieurs arrêts de différentes Cours souveraines,
qui ont consacré le même principe. Il faut donc tenir
pour une maxime incontestable, que la condition im
posée à une disposition testamentaire, se règle par la
loi du décès du testateur.
Quant au mode de la disposition, il est également
soumis à la loi exislante à l’époque du décès; c’est un
des points jugés par l'arrêt célèbre, rendu par la Cour
de cassation, le 18 ja n v ier 18 0 7, dans l ’affaire des frères
Rayet. Dans l’espèce de cet arrêt, la chargé imposée
par le testateur à son héritier, de rendre l'entière héré
dité à l’aîné de ses enfans m aies, et à défaut de mâles,
à l’aînée de ses filles, était valable, et autorisée par les
lois au mois de ju i n 17 8 7 , époque du testament ;’mais
parce que le mode de la disposition était prohibé par
l ’art. 896 du code N a p o léo n , en vigueur lors du décès,
la disposition principale, indépendamment de la subs
titution, a été déclarée nulle par un arrêt de la Cour
d’appel d’.A gen, du
3o
avril 1806; et J e a n - P ie r r e
lAnyci s’étant pourvu en cassation contre cet arrêt, son
pourvoi a été rejeté par lu section civile , conform é
ment
�( 9 )
ment aux conclusions de M. le Procureur - général
Merlin.
Les explications dans lesquelles on vient d’entrer,
ont pour objet de faire disparaître, sans retou r, les
sophismes dont les légataires se sont aidés dans la dis
cussion , et de fixer d’ une manière positive les points
de législation qui tiennent à la question.
On a opposé au consultant une fin de non-recevoir,
sur le mérite de laquelle le conseil doit s’expliquer
avant de passer à la discussion du fond. Cette fin de
non-recevoir est tirée d’un prétendu défaut d’intérêt
et de qualité dans la personne di\ consultant.
L a disposition principale du testament de madame
de Chazerat, relative au legs universel fait à ses parens,
est valable en elle-m êm e, dit-on, et indépendamment
de l’énonciation surabondante qui a pu la suivre. Les
descendans de Philibert M arcelin, aïeul maternel de
madame de Chazerat ( l e sieur Mirlavaud est un de
ces descendans), se trouvent sans qualité et sans intérêt
à constater la prétendue validité ou invalidité de cette
énonciation secondaire, puisqu’elle n ’a pour objet que
le mode du partage entre les individus des trois bran
ches, auquel les descendans de Philibert Marcelin ne
peuvent avoir aucune part ( i . re consultation, pag. i5.).
L e même raisonnement est reproduit, sous une autre
form e, dans la seconde consultation (pag. i5.).
La plus légère attention fait connaître l ’illusion de
cette fin de non-recevoir; la nullité reprochée à la dis
position de madame de Chazerat, est une nullité prin3
�( IO )
cipale et absolue qui vicie le legs universel dans son
essence ; pour êlre recevable à la proposer , il suffit
d’avoir un intérêt à la faire prononcer. O r, 011 ne peut
nier que le sieur M irlavaud ait un véritable intérêt à
faire déclarer nul le legs universel fait par madame de
Chazerat; car si ce legs universel est annuité , la suc
cession de madame de Chazerat élant partagée suivant
les règles introduites par le code N ap o léo n , sera d i- •
visée en deux parts égales; l’une pour les parens de la
ligne paternelle, l'autre pour les parens de la ligne ma
ternelle (art. 7 3 3 ) ; et le sieur M irlavaud sera appelé
à recueillir une portion dans la part attribuée aux pa
rens de la ligne maternelle de la testatrice. Il a donc
intérêt et qualité pour demander la nullité des dispo
sitions faites par madame de Chazerat, et la fin de
n o n -re ce v o ir qu’on lui oppose est évidemment mal
fondée.
Ce que l’on vient de dire par rapport au sieur M ir
lavaud, s’applique également à ceux des autres héri
tiers, à l’égard desquels le jugement n’est pas contra
dictoire. Q u ’après Tiniirmation de ce ju gem en t, pour
en revenir aux règles du code N apoléon, certains hé
ritiers ou légataires universels, veuillent superstitieuse
ment exécuter les dispositions de madame de Cha
zerat , et qu’ils veuillent venir à la succession, selon les
principes de la coutume d ’A u vergn e, on ne peut sans
doute leur contester cette faculté; mais ils 11e peuvent
l’exercer qu’en ce qui concerne leurs portions hérédi
taires, et ce consentement ne peut lie r , en aucune
�1SÏ
(
II
)
manière, ceux des héritiers de droit, à qui la loi con
fère le pouvoir d’attaquer, par voie de nullité, les dis
positions testamentaires de madame de Cliazerat.
Aprt*s avoir ainsi relevé les erreurs, que la moindre
altenlion fait rem arquer, dans les consultations qui
sont mises sous les y e u x du conseil, et après avoir dé
truit la fin de non-recevoir, opposée au sieur M irlav a u d , le conseil va passera la démonstration du grand
principe de droit qu’il a annoncé, sa vo ir, que nul ne
peut créer un ordre de succéder autre que celui en
vigueur lors du décès.
C elte vérité frappe d ’abord par sa seule évidence;
car l ’ordre de succéder étant (de droit public, il n’est
pas au pouvoir des particuliers d’en établir un autre
que celui que les lois ont institué. Il est bien perm is,
dans le cas où on n’a ni ascendans, ni descendans, de
tester de la totalité de ses biens, c’est-à-dire, d’en faire
des libéralités en faveur de personnes certaines et dé
terminées, au préjudice de ses héritiers légitimes; mais
il n’appartient qu’à la loi d ’établir un ordre de succes
sion ab intestat. Quelqu’étendue que soit , dans ce cas,
la puissance du testateur, on est obligé de reconnaître
que celle de la ioi lui est supérieure.’
Si la volonté du testateur est observée, c ’est parce
que la loi le veut ainsi; c’est parce qu’elle lui donne le
pouvoir qu’il exerce : par conséquent l ’e m p i r e qu’a la
volonté du testateur, n’est pas un e m p i r e absolu , puis
qu’il est dépendant de la loi, et qu’il relève d ’elle.
Pour confirmer cette décision par l’autorité du droit
4
�( 12 )
romain lui-m êm e, dont on a invoqué les principes dans
la consultation de Clerm ont, on fera remarquer que
les lois ne permettent pas de déroger au droit public
par des conventions particulières. Privatorum p a c tis,
ju s publicum m utari non potest. Leg.
38 ,f f .
D e pact. ;
que c’est par cette autorité que la loi s’est réservée,
que les sages empereurs Diocletian et M axim ian, dans
la loi 1 3 , ccd. de testament. , décident qu’il est bien
permis à chacun de tester com me il veut de ses biens,
et d’imposer telles conditions que bon lui semble; mais
pourtant qu’il n’est pas permis, ni de changer la forme
des testamens, ni de déroger au droit public; que
c ’est par la même raison qu’en la loi 5 , §. rj ) ff. D e
adm inist. et pericuL tutor., un testateur ayant ordonné
que les tuteurs qu’il avait donnés à ses enfans ne
seraient point com ptables, le jurisconsulte Julien ré
sout qu'ils ne laissent pas d ’être obligés de rendre
compte de leur administration, parce q u e , dit ce cé
lèbre jurisconsulte : Nemo ju sp u b licu m remitterepotest
hujusm ôdi cautionibus, nec mutare form ant antiqui
tus constitutani. On pourrait citer un grand nombre
d ’autres lois qui renferment la même règle de droit:
P lu s potest ju s publicum quam privata conventio. V id .
C u ja s , ad quœst. papin. , lib. 2, a d leg.
38 }J j.
De pact.
C ’est principalement sur les dispositions de ces lois
quesc fondent Ilen rys, et les auteurs qu’il cite ( i) , pour
(i) Vasquins , de successionum création e , lib. i , §. 3,
nurncr. 5 et sequent.
Cravctta, consit. 174 et consil. 97 a. Cavaruvias, de testibus,
cap. 1 . Surdus, decisio 3o.
�( i3 )
décider que le testateur ne peut pas défendre à son
héritier d’accepter la succession par bénéfice d’inven
taire ( H e n r y s , liv. 5 , chap. 4 , quest. 3o.). Et il rap
porte un arrêt du parlement de Paris, du 7 ju ille t i 6 a 5,
qui l’a ainsi jugé sur les conclusions de l’avocat-général
Bignon ; ces conclusions sont remarquables par leur
énergie : « Ouï B ign o n , pour le procureur-général du
« roi, qui a dit que la clause apposée au testament dudit
« défunt étant contraire au droit, est nulle".
*
Si la défense de’ faire usage du bénéfice d’inventaire
est contraire au droit .public, que doit-on décider d’une
disposition qui établit un ordre particulier de succession
ab intestat?
, D o m a t, en expliquant les règles qui veulent que le
testateur ne puisse empêcher par son testament que
ses dispositions ne soient sujettes aux lois, ni rien or
donner qui y soit contraire, dit ; «Ainsi un testateur
* ne peut défendre à son héritier de se déclarer h é « ritier bénéficiaire (L ois civiles, liv. 3 , tilre i . er, sec
tion 7 , n.° 24.).
Furgole, dans son traité des testamens(chap. 7, n.° 3),
s’expliquant sur la question de savoir si le testateur
peut déroger à la lo i, et si sa puissance doit être con
sidérée comme plus forte que celle de la loi, après avoir
cité les textes des lois romaines qui traitent du pouvoir
des testateurs , ajoute : « Mais on ne peut pas induire
» de ces textes, ni d’aucun autre, que la volonté du
« testateur doive prévaloir sur la puissance de la loi.
« L a loi 2 3 , cod. D e légat. , dit nettement le contraire,
�( i4 )
en ce qu’elle exige que la volonté du testateur soit
<r légitime , quæ Légitima est, c'est-à-dire, conforme
« à l ’esprit de la lo i, ou que du moins la loi ne ré« prouve p a s , afin qu’elle puisse dominer et être
et exécutée ».
L a n o v e lle , cliap. 2, le dit encore d'une manière plus
expresse : «Si quodprœcipitur legitim um s it , aut s i non
« illu d aliqua le x prohibeat». Et la novelle 2 2 , chap. 2,
qui veut qu'on considère com m e une loi la volonté
du testateur, y ajoute>cette condition : «Pourvu qu’il
« dispose d’une manière qui ne soit pas contraire aux
« lois-, disponat ut dignurn est « : et cela est ordonné
de même par les lois 7 et 1 4 , ^ D e condit. in stit., et
p a rla loi 1 1 2 , §.
3 ,J F .D e
légat., i°. C e dernier texte
dit : « S i quis scripserit fie r i testamerito quod contra
w j u s est veL bonos mores, non valet ; veluti s i quis scripr serit con tra le g e m a liq u id vei contra edictuni preo«• to ris, vei etiam turpe aliquid».
,
Ces sages dispositions des lois romaines ont été con
firmées par les lois générales et particulières dont ce
compose le code Napoléon; l’article 6 pose le principe
général « q u’on ne peut déroger par des conventions
«• particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public
rr et les bonnes mœurs*. Cet article prononce implici
tement la nullité de toute disposition testamentaire,
par laquelle le testateur aurait dérogé à des lois d’ordre
public; c ’est par une conséquence du même principe
que les conditions contraires aux lois sont réputées non
écrites dans les testamens ( Cod. N a p ., art 900.).
�iC 1
( i5 )
Il ne reste plus pour faire une juste application de
ces principes généraux et particuliers, qu'à déterminer
ce qu’il faut entendre par une disposition testamentaire,
qui déroge à des lois d’ordre public, et par une condi
tion contraire aux lois.
O r , il est inconstestable q u e , créer un ordre de
succéder, différent de celui établi par la loi en vigueur
à l ’époque du décès, c’est non-seulement tout à la fois
déroger aux lois d ’ordie public, qui prescrivent l’uniformité dans le mode de distribution des successions
ab intestat ,• et imposer une condition contraire au
vœu d'uniformité de législation manifesté par le légis
la te u r, mais encore, que c ’est excéder le pouvoir du
testateur; que c ’est vouloir faire dans un testam ent,
ce qui ne peul se faire que par une loi; que c ’est usur
per le pouvoir du législateur.
Ces considérations sont si puissantes, et il est si vrai
que l’ordre légal des successions est de droit public ,
qu’il est formellement défendu de faire , mêm e dans
les contrats de mariage, aucune stipulation qui tende
íi le changer; cependant il a toujours été de prin
cipe universel j dans la jurisprudence française, que
les contrats de mariage sont susceptibles de toutes les
stipulations qu’il plaît aux parties de form er, pourvu
que ces stipulations ne contiennent rien de contraire
aux lois et aux bonnes mœurs (c o d e N a p o l é o n , art.
*387); et le code Napoléon donne pour exemple d’une
stipulation contraire aux lois, celle dont l’objet serait
de changer l’ordre légal des successions, soit par rap-
�( r6 )
port aux époux eux-m êm es, dans la succession de leurs
enfuns ou descendans, soit par rapport à leurs enfans
entr’eux (art. 1389).
C ’est encore une stipulation contraire aux lois, et
par conséquent interdite même, aux époux, dans leur
contrat de mariage, que celle par laquelle il serait con
venu que leur association sera réglée par l’une des cou
tumes, lois ou statuts locaux qui régissaient ci-devant
les diverses parties du territoire français, et qui sont
abrogés par le code Napoléon (art. 1891).
C elle prohibition des stipulations qui auraient pour
objet de changer l’ordre légal des successions, ou qui
tendraient à faire revivre l’une des coutumes abrogées,
résulte suffisamment du principe général exprimé dans
l ’article 6, et si le législateur a jugé nécessaire de décla
rer expressément, et en termes formels, la nullité de
pareilles stipulations, on ne peut attribuer cette mesure
qu’à sa volonté ferme que l ’ordre légal des successions,
qui est de droit public, ne pût être changé par aucune
stipulation, et que les coutumes abrogées ne fussent plus
la règle des conventions matrimoniales, ou des succes
sions.
Les législateurs du code Napoléon furent frappés de
cette idée, que les contrats de mariage ayant constam
ment joui de la plus grande faveur dans notre juris
prudence, qui en protégeait toutes les stipulations qui
n’étaient pas contraires à l’ordre public , quelques per
sonnes, trop prévenues en faveur des coutumes abro
gées, pourraient se faire illusion, au point de 11e point
�(
17 )
>
voir une dérogation à l ’ordre’ p u b lic , dans des stipu
lations entre époux, qui tendraient à perpétuer l’exis
tence d’une législation abolie. Les dispositions des art.
1389 et 1390 n’ont d’antre but que de prévenir ceux
que leur affection, pour les coutumes abrogées, entraî
nerait à en faire la règle de leur succession, ou de leurs
conventions matrimoniales; qu’il n’est pas en leur puis
sance de faire dominer leurs préjugés ou leurs habitudes
sur des lois qui sont d’ordre public, et qu’ils ne pourront
pas invoquer, pour faire maintenir de semblables stipu
lations, la faveur que nos lois accordent aux conven
tions matrimoniales.
L e conseil conclut donc, avec une entière confiance,
que les successions sont de droit public; que s’il est per
m is, dans certains cas, de disposer de tout ou de partie
de ses bien s, en faveur de personnes certaines, et selon
des quotités ou des portions de la succession, que le
lestateur a fixées lui-m êm e; il n’appartient qu’à la,loi
civile de faire des héritiers ab intestat, et p arla mêm e
raison qu’il est hors de la puissance du testateur de
créer un ordre de succéder, autre que celui que la loi
a institué, ou ce qui est la m êm e chose, de p ren d re,
pour régler l ’ordre de la succession, une des coutumes
abolies.
- Ainsi le Conseil regarde com me vrai, comme fon
damental et élémentaire, le principe posé par l ’an leur
du nouveau traité des donations, dont il a été déjà
parlé, 3.e vol. n.° 5^5.
« 11 est bien permis de disposer à son gré de ses
�( i8 )
« biens, d’après la faculté qu’en donne la lo i; mais il
* ne l’est pas de créer un ordre de succéder, autre que
« celui qu’elle établit. I l n’y a pas de différence entre
<r la disposition testamentaire, qui porterait q u e l a s u o
<* cession serait réglée suivant les lois d’Angleterre ou
« de Constantinople, et celle par laquelle il serait dit
« que la succession serait déférée d ’après une des an<r ciennes coutumes de France. Les juges, ne sont pas
« obligés d’étudier toutes ces législations étrangères ou
* supprimées pour en faire l’application, et c’est le cas
« d ’invoquer non-seulement l’art.
3 du
code Napoléon,
« où il est dit, les immeubles, même ceucc possédés par
a des é tra n g e rs , sont régis par les lois françaises ,■mais
« encore l’art. 6 ainsi conçu : On ne peut pas déroger
« par des conventions particulières a u x lois qui inté«■ressent l ’ordre public et les bonnes mœurs. L ’ordre
« de succéder est sans contredit de droit public, et l’on
« a toujours appliqué à ce cas la règle consignée dans
**16 loi 38 , ff. d e pact. dont l’art. 6 du code est l’expres« s io n , j u s publicum privatorum pactis m utari non
« potest ».
C ’est avec raison que l ’auteur a in vo qué, à l’appui
de son opinion , la disposition de l’art. 7 de la loi du
3o
ventôse an 12 , et les art. 1389 et 1390 du code
N a p o lé o n , ces derniers articles sont autant de consé
quences , appliquées par formes d ’exemples, du prin
cipe qui était nécessairement le résultat de l ’ensemble
de la législation.
11 n’est pas inutile de reprendre successivement cha-
'
�ié i
( *9 )
cune des objections par lesquelles les auteurs de la
première consultation ont cru combattre victorieuse
ment le principe. Ils le font en répondant aux expres
sions dans lesquelles l’auteur, qu’ils ont cherché à réfu
ter, a expliqué son opinion, et quoique ces objections
soient présentées avec le ton d’uiie grande confiance,
on ne craint pas de dite qu’elles ne laissent pas d ’être
autant d’erreurs.
« S’il est permis de disposer à soil gré de ses biens
* (disent les auteurs de cette consultation), ce ne peut
* être que pour changer l’ordre dé succéder établi par
<r la loi ».
Lorsque la loi permet à la personne , qui n’a ni
ascendans ni descendans, de disposer à son gré de ses
biens, bien loin que cette faculté ait pour objet de
changer l’ordre de succéder, son effet est au contraire
de faire cesser cet ordre.
C ’est une erreur manifeste que d’assimiler les disposi
tions testamentaires ¿ la création d’un ordre desuccéder,
différent de celui que la loi a établi ; ces deux idées
sont contradictoires, il ne saurait y avoir disposition
testamentaire, là où on ne voit qu’ un ordre de succéder
d ’après une loi abolie.
*
Si la loi lui donne cette faculté de disposer à son
« g r é , ce ne peut être que pour faire cesser son empire
Sans doute, le testateur h qui la loi permet de dis
poser de tout ou d’une partie de ses biens, a la faculté
de faire cesser l’empire de la loi, qui établit l ’ordre de
succession entre les héritiers légitimes ; mais il ne suit
6
�■ ( 20
)
pas de là qu’il puisse se faire un code à lu i, comme
l ’ont très-bien remarqué les juges de Riom. L a loi qui
lui donne le pouvoir de disposer de ses biens , y met
la condition nécessaire, que la disposition qu’il fera
n ’aura rien de contraire aux lois, ni à l ’ordre pu b lic;
et il est contraire aux lois, de faire revivre une légis
lation abolie; il est contraire à l ’ordre public de créer
un ordre de succéder, autre que celui de la loi obser
vée lors du décès.
« Si on ne peut en effet, créer en ligne collatérale un
«• ordre de succéder, autre que celui que la loi établit,
« il faut retrancher du co d e, le titre entier des dona« tions et des testamens , puisque les donations et les
tf testamens n’ont d ’autre but que d ’intervertir l ’ordre
« établi par la loi, pour la transmission des b ie n s, et
« y substituer la volonté de l’h o m m e".
Les auteurs de la consultation n’ont cesséjde con
fondre un donataire ou un légataire avec un héritier
ab intestat ; cependant il existe entre ces deux qualités
autant de différence, qu’il y en a entre la donation ou
le testament , et un ordre de succéder ab intestat.
Il y a testam en t, lorsque la personne, qui fait la
libéralité, désigne elle-m êm e, par leurs nom s, ou ppr
une indication précise , et sans é q u iv o q u e , ceux en
faveur de qui elle fait des legs universels ou particu
liers, et qu’elle indique les biens ou les quotités des
biens, que chacun viendra prendre dans sa succession.
L e testament, suivant la définition que les juriscon
sultes donnent de cot a cte , est l’expression exacte de
�iù
( 21 )
la volonté du testateur, sur la distribution de ses b ie n s,
après sa mort j testamentuni est voluntatis nostrœ ju sta
sententia, leg. i , ff. qui testament, facer. poss. Il suit
de cette définition du testam ent, que la volonté du
testateur doit être certaine et déterminée, tant à l’égard
des personnes, au profit desquelles il dispose, qu’à l’égard
des biens qui sont l ’objet de ses dispositions. C ’est pour
cette raison qu’Ulpien décide , que nul ne peut être
institué héritier dans un testament , s’il n’est désigné
d ’une manière certa in e, hœres in stitu t, n isi ut certe
demonstretur nemo potest; leg. 9 , §. 9 , ff. de hered.
instit. et que le même jurisconsulte déclare nulle, l’ins
titution d ’héritier, d’une personne incertaine; comme
pa r exem p le, si le testateur avait institué héritier, celui
qui se serait rendu le p r e m i e r à ses funéra il les , quisquis'prim us a d fu n u s meum vetierit hœres esto, et le
m o tif que le jurisconsulte donne de cette décision, est,
que la volonté du testateur doit être certaine, quoniam
certum consilium debet esse testantis. U/pian. fragm en.
tit. 2 2 , §. 4 ; on sent que ces règles, établies pour la
désignation des héritiers, s’appliquent aux légataires,
par identité de raison. Ainsi, il n’y a pas de teslamment dans un acte où on ne voit pas la désignation
certaine des personnes qui sont l’objet des libéralités
du testateur, et l’indication précise de ce que chacune
d’elles est appelée à recueillir dans la succession.
Il y a ordre de succéder, toutes les fois que le testa
teur ne faisant aucune distribution particulière de ses
b ie n s, se réfère pour cette 'distribution, à des règles
�( 22 )
établies, ou par une coutum e, ou par des statuts par
ticuliers. Car qu’est-ce que créer un ordre de succé
d e r a i ce n’est établir des règles générales, suivant les
quelles les parens, à tel ou tel degré du défu n t, et d’après
tel ou tel mode de représentation,partageront entr’eux la
succession? Les lois qui règlent lessuccessionsaémiejia^
ont-elles un autre but ?
A u tre chose est donc de faire une donation ou un
testam ent, et autre chose est de créer en ligne colla
térale un ordre de su ccé d e r, différent de celui que
la loi établit.
Quoique les donations et les testamens n ’aient d’autre
objet que d’intervertir l’ordre établi par la loi, pour la
transmission des b ie n s , on ne p e u t , ni par donation,
ni par testament, créer un ordre particulier de succé
der , et il n’y a en cela rien de contradictoire ; car
créer un ordre particulier de succession, suivant une
coutume an cien n e, ce n’est pas substituer la volonté
de l’hom m e établie par la lo i, pour la transmission des
biens, c'est substituer une loi à une autre loi ; c’est subs
tituer un ordre de succéder établi par une coutume
abolie, h l ’ordre de succéder institué par la loi nou
velle.
C e que les auteurs de la première consultation ont
dit, page 19 , contre l’application au testament de ma
dame de C h a ze ra l, des articles 1389 et 1390 du codo
N apoléon, 11’est pas mieux fon d é, et leurs raisonnemens sont tellement faibles qu’011 pourrait p e u t-ê tre
se dispenser de les réfuter.
�( 23 \
Il est dit d ’abord dans l’article 13 8 9 , °Iue ^es époux
a ne peuvent faire aucune con ven tion , ni renoncia» lion , dont l’objet serait de changer l’ordre légal des
« successions, soit par rapport à leurs enfans entr’eux -,
L e législateur pouvait-il dire plus clairement qu'on
ne pourrait substituer un ordre de succéder émané de
toute loi quelconque qui était abolie, à celui qui est
établi par la loi actuelle? E t si le législateur a montré
cette sévérité, à l’égard des contrats de m a ria ge, qui
sont les actes les plus favorables dans la société, n’estce pas raisonner avec sûreté que de dire que cette m êm e
sévérité s’applique, à plus forte raison, au testament
qui est un acte purement de droit civil, et qui doit être
jugé avec une rigueur toute particulière?
L e législateur ajoute ensuite dans le même article ,
« sans préjudice des donations entre-vifs ou testamen» taires qui pourront avoir lieu selon les fo rm e s , et
« dans les cas déterminés par le présent code ».
P ar ces dernières expressions, le législateur fixe la
ligne de démarcation que les auteurs de la consullation s’efforcent de faire perdre de v u e , entre une dis
position q u i, en se référant à une loi ancienne, crée
un ordre de succéder aboli com me cette loi, et une
disposition qui constitue un don direct et précis de la
part d'un testateur, une libéralité qui est l’effet de sa
volonté bien déterminée. Il n’y a de disposition tes
tamentaire que dans le second cas, il n ’y en a point
dans le premier. C ’est alors la loi abolie qui défère les
biens, et non le testateur. Celui-ci a bien voulu ordon-
�(H )
ner celle déférence prescrite par la loi abolie. Mais il a
voulu ce qu’il ne pouvait p a s , et il n’a,pas voulu ce
qu’il pouvait; et c ’est le cas d’appliquer cette maxime
vulgaire, souvent citée au palais, voLuit quod non potu it, et quod p o tu it, non volait.
S i , relativement aux dispositions pour lesquelles
madame de Chazerat s’en réfère sous un rapport gén é
ral, à la coutume d’A u ve rgn e, il faut opérer com me
si madame de Chazerat fût décédée, sans avoir testé,
sous l’empire de la coutume d’A u v e rg n e ; quelle diffé:
rence peut-on faire entre ce cas et celui de l’exécu
tion de ses dispositions? On n’apperçoit, en cette partie,
aucunes traces de la volonté personnelle de madame de
Cliazerat; mais pourquoi? c'est parce que dans la réa
lité , cette volonté personnelle n’existe pas. Elle n ’a eu
d ’autre volonté que de donner vigueur à une loi éteinte,
et qu’il ne lui était pas permis de faire revivre. T oute
volonté personnelle à madame de C h a ze ra t, sur la
distribution de ses biens, à titre de legs, qui seule au
rait pu être la marque caractéristique d'un testament,
cette volonté , disons-nous, disparaît et se fond dans
la volonté de la coutum e d ’Auvergne ; elle est une
avec cette volonté. C est tester sans avoir testé, que
de ne pas connaître ceux qui doivent venir à la suc
cession; or, on est autorisé à croire que madame do
C h a z e r a t ne connaissait pas ceux qu’elle appelait à lui
succéder ; elle s’cn est rapportée, à c e t . é g a r d , à la
coutume d’Auvergne : dans une pareille position, où
pcut-on reconnaître le caractère d ’une véritable dona
tion testamentaire ?
Quant
�( *5 )
i Qnant à l’article 1*390 du code N apoléon, il y est
dit:
« les époux ne peuvent plus stipuler d’une nia
nière générale que leur association sera réglée par
<r l’une des coutumes, lois ou statuts locaux qui régis-
it
« saient les diverses parties du territoire français , et
« qui sont abrogés par le présent code ».
'
Ici on retrouve, et par forme d exem ple, le m êm e
esprit du législateur, qui s’est déjà manifesté, et dans
l ’article 6 du code N apoléon, et dans 1 article 7 de la
loi du 3 o ventôse an 12.
'
¡
- Vous pourrez, a dit le législateur aux ép o u x , fixer
h votre gré les conventions qui devront faire la règle
de votre communauté. Mais ces conventions doivent
émaner , d’une volonté précisé que vous aurez mani
festée; et vous ne pourrez, par une relation générale
à une loi abolie, subordonner le règlement de votre
communauté h la disposition de cette loi. Vous vous
réserveriez le pouvoir de faire revivre ce qui est éteint;
et ce pouvoir vous est refusé, parce que l’intérêt général
serait blessé par la confusion de législation qiii en serait
le résultat, et que l’intérêt général est supérieur aux
intérêts, et à plus forte raison aux caprices des parti
culiers.
Est-il possible de donner un autre sens à cet article
1390, d’après les motifs de son admission exposés par
M. le président M alleville, dans les observations qu’il
y a faites? «On répondit que, permettre aux époux de
« se référer pour leurs conventions h telle loi ou a telle
«• coutum e, ce sciait perpétuer l’existence de ce 110m-
7
�(
2
6
}
* bre infini de lois et de statuts qui se partageaient la
« F ran ce, et manquer le but qu’on s’était proposé en
«r promulgant le code civil; que les parties pourraient
a en détail modeler leurs conventions sur'telles lois ou
a coutumes qu elles Jugeraient à propos ; qu’il y aurait
* même un autre inconvénient à permettre cette re« lation générale à une coutume. C ’est qu’ il pourrait
« arriver que ses dispositions ne pussent plus s'exécuter».
Mais si telle a été la pensée du législateur, par rap
port aux ép o u x , le législateur n’a-t-il pas eu la même
pensée respeclivement aux testateurs? ne leur a t il
pas dit: disposez à votre gré de vos biens ; donnez une
quotité à un tel, un corps de biens à un autre, une
somme à un a u tr e , etc.; qu’il y ait de votre part une
volonté connue et fixe sur vos libéralités, et sous le
rapport de la fixation des dons, et sous le rapport des
individus qui doivent les recueillir. M odelez même , si
vous v o u le z, vos dispositions sur telle loi ou sur telles
coutumes que vous aviserez, et que vous aurez dans
la pensée; mais expliquez vous même vos dispositions
jsur ce plan qui peut être le v ô t r e , mais qui ne peut
jamais être celui des juges. Détaillez vos dispositions,
mettez-les à découvert ; ayez une volonté propre, per
sonnelle; appropriez-vous le plan sur lequel vous dis
poserez, dessinez*le avec des lignes qui partent de votre
main; mais si vous abandonnez simplement votre v o
lonté d’une manière générale, à celle d’une loi abolie,
alors vous 11e faites pas de dispositions, vous manifes
tez seulement le vœu de remettre en vigueur celte loi
�( 27 )
abolie; alors vous sortez du pouvoir que la loi vous
confère; vous mettez vainement en opposition la loi
éteinte et la loi vivanle.
On sent aisément les inconvéniens graves qui résul
teraient de la liberté qui serait accordée à chaque F ran
çais de remettre en v ig u e u r, par des dispositions tes
tamentaires, la loi ou l’ancienne coutume sous laquelle
il aurait vécu ; ce serait admettre le concours de légis
lations diverses dans le même empire; ce serait intro
duire un vrai désordre dans la société ; les contesta
tions renaîtraient en foule au lieu dp diminuer, et le
résultat le plus certain de cette confusion, serait le m é
pris pour la législation actuelle qu’on ne saurait envi
ronner de trop de respect. C ’est cette liberté contre
laquelle le législateur s'est é levé, et une sage politique
lui en imposait le devoir.
E n fin , dans la vue d’écarter l’application de l’art. 7
de la loi du 3 o ventôse an 1 2 , qui abolit toutes les an
ciennes lois et coutum es, les auteurs de la première
consultation s’expliquent ainsi:
« Mais en prononçant que les lois romaines , les
«• ordonnances et les coutumes cessent d’avoir force de
» l o i , on a si peu entendu proscrire la citation des an
te ciennes lois, et frapper d'anathême tousles actes dans
<r lesquels 011 a pu les rappeler, ou m êm e, si l ’on veut
« les prendre pour règles de ses dispositions ou de ses
« conventions dans ce qui n ’est pas formellement pro« hibé par le code , que le dr oi t romain est encore
« l’objet principal des cours de législation; que legou-
8
�«
«
«•
«
«
(
2
8
}
vernemenf a établis pour l’enseigner, des écoles p u bliques dans toutes les parties de l’Empire, et que
nul ne peut avoir entrée au barreau, ou être admis
à une place de magistrature, qu’autant qu’il est muni
de diplômes autlienliques qui constatent qu’il en a
« fait une longue étu d e, et qu’il y a acquis de vastes
«connaissances)?.
L a réponse à ces raisonnemens n est pas embarras
sante. Ce ne sont pas les actes dans lesquels on se serait
borné à citer ou à rappeler les anciennes lois, qu’on a
dit être entachés d’un vice principal qui en entamait
la nullité, mais bien ceux par lesquels on ferait renaître
une distinction défendue sur l’origine et la nature des
biens, ou q u i, ayant pour objet de faire revivre une
coutume abolie, ne présenteraient, dans leur résultat,
aucune disposition sur les personnes ou sur les biens,
personnellement indiquée par le testateur.
L e législateur a pu vouloir l’enseignement du droit
rom ain, parce qu’il est reconnu pour être l’origine et
le plus sûr fondement de toute législation civile, et
que pris comme raison écrite, il peut donner matière à
une extension de décisions sur des cas omis, et cepen
dant il n’est personne qui ne sente qu’il ne peut plus
être rigoureusement suivi com me 16i.
Aussi re m a rq u e -t-o n q u e ,s i les auteurs de la pre
mière consultation ont nié le principe, qu’on ne peut
créer, par un testament, un ordre de succéder autre
quo celui établi par la loi en vigueur lors du décès,
parce qu’ils n’ont pas cru pouvoir échapper aux con-
�1rs
( 29 )
séquences qui en découlaient contre leur décision, dans
la seconde consultation, on a reconnu la vérité du prin
cipe en même tems qu’on a cherché à en montrer le
défaut id’application ci l’espèce.
C ’est dans cette vue que les auteurs de la seconde
consultation font observer que le tribunal de Riom a
confondu la disposition de madame de Chazerat, avec
celle par laquelle «elle aurait purement et simplement
« subordonné sa succession à la coutume d’A u v e rg n e ,
cr et elle aurait laissé aux dispositions de celte coutume
« à lui donner des héritiers; par exemple , si madame
* de Chazerat eût dit qu’elle entendait que sa succes«
«
cc
«
sion fût gouvernée par cette coutume* alorselle n ’eût
par là désigné aucun héritier ni légataire. Elle n’eût
fait par e l l e - m ê m e a u c u n e disposition de ses biens*
elle aurait attribué à cette coutum e, non-seulement
« la répartition , mais la disposition ; elle aurait établi
«r pour sa succession ab intestat un autre ordre que
« celui déterminé par la loi; c ’est en ce cas, tout au
<r p lu s , qu’on pourrait dire qu’elle aurait violé la loi
« des successions en prétendant introduire un autre
« ordre de succéder que celui établi par elle-» (Seconde
« consultation, pag. i 3.).
Ainsi , on voit les auteurs de la seconde consultation,
obligés de reconnaître la vérité du principe de droit,
que nul ne peut créer un ordre de succéder autre que
celui établi par la loi en vigueur lors du décès. A la
vérité, ils réunissent tous leui*s efforts pour écarter les
conséquences qui en résultent dans l’espèce f en pré-
�( 3o )
fendant que madame de Chazerat n’a pas voulu in
troduire un ordre de succéder autre que celui établi
par le code Napoléon; mais outre que le contraire sera
démontré jusqu’à l'évidence dans le paragraphe sui
van t, il suffit, pour le m om ent, de tenir pour certain
que les auteurs de la seconde consultation, qui ont
déclaré partager l’opinion émise dans la prem ière, ad
mettent formellement un principe que les auteurs de
celle-ci réprouvent, et qu’ils qualifient d’abus étranges
des mots et des choses ( Consultation de C le rm o n t,
pag. 19.).
Quelles peuvent donc être les raisons q u i , sur le
m êm e exposé des faits, et pour en venir à une décision
unique, déterminent les auteurs de la première con
sultation à présenter com me faux et erroné un prin
cipe de droit, que les auteurs de la seconde consulta
tion reconnaissent comme vrai et inébranlable ; cette
contradiction sur un principe aussi important pour la
décision uniforme des deux consultations de Clermont
et de Paris, n’annônce-t-elle pas l’erreur de cette dé
cision qu’on cherche à rendre vraisemblable? Et la v é
rité d’une proposition est-elle bien sûrement établie,
quand ceux qui s'efforcent de la démontrer, sont ré
duits à invoquer des principes directement contraires?
�tn
C 3i )
§ .1 1 .
M adam e de C hafer at a voulu, créer, et elle a créé en
effet un ordre de succéder autre que celui établi par
la loi en vigueur à l ’époque de son décès • elle a or
donné la distinction de ses biens en propres et en
acquêts j et ses dispositions testamentaires ne peuvent
être exécutées sans fa ire revivre le mode de succéderf
établi par une coutume abolie, et sans remonter à
une origine de biens que la loi ne, permet plus de
rechercher.
f
Celte proposition se prouve com p lètem en t, et sans
réplique, par, les observations suivantes:
i.° En analysant les dispositions de madame de Chazerat en elles-mêmes ;
\
2 ° E n analysant mêm e les termes dont elle s’est
servie dans son second codicile;
' 3 .° E n énonçant les demandes des héritiers, qui
tendent toutes à un partage de succession, conformé
ment à la loi ancienne;
i
4.0 En établissant que, dans le fait comme.dans le
droit, il y a , dans les dispositions de madame de Cliazerat, ordre de succession.
Développons ces quatre réflexions qui concourent
également h la ruine du système formé par les léga
taires universels.
On dit en premier lieu, qu’en analysant les dispo-
�C 32 )
sitions de madame de Chazerat en elles-mêmes, on y
trouve là preuve qu’elle a voulu établir un ordre de
succéder autre que celui déterminé par le code N apo
lé o n , et qu’elle a ordonné une distinction de biens,
interdite par la loi observée tant à l’ époque du testa
ment qu’au moment du décès.
Commençons par rapporter le texte de ces disposi
tions : «Quant à la propriété de mes biens, mon in « tention é ta n t, autant qu'il dépend de m oi, de les
<r faire retourner à ceux de mes parens qui descendent
«■des estocs desquels ils me sont parven us, je donne
<r et lègue tout ce dont il m'est permis de disposer
« suivant la loi du 4 germinal an 8 , à tous ceux de
« de mes parens de la branche de mes aïeul et aïeule
« paternels, et de celle de mon aïeule maternelle, qui
« seraient en ordre de me succéder su iv a n t les réglés
«■de la représentation ci Cin fin i, telle qu elle avait lieu,
« dans La ci-d eva n t coutume d ’Auvergne, pour être
« partagé, entre les trois branches, au marc la livre
«• de ce qui m ’est parvenu de chacune desdites brnn« ches, et être ensuite subdivisé dans chacune d ’elles
« suivant les règles de la r e p r é s e n t a t i o n à l ’infini ».
I.a première idée qui domine madame de Chazerat,
est que ses biens retournent, autant qu’il est en sa puis
sance, à ceux de ses parens qui descendent des estocsj
ou lignes desquelles ils lui sont provenus.
Ainsi, la testatrice veut faire revivre, dans le partage
de sa succession,cette antique el fameuse règle du droit
coutmnicr,
qui
affectait les biens propres aux parens
do
�................................................( 3 3
)
de la ligne d’où ils étaient venus : Paterna paierais,
materna materais. E l on comprend q u e , pour déter
miner la proportion suivant laquelle chaque branche
appelée à lasuccession viendra recueillir l’effet de la dis
position, il sera inévitable dë recourir à l’ancienne ju
risprudence, et aux règles qui y élaient suivies, pour
décider si des biens devaient être réputés acquêts, ou
propres parternels ou maternels. Ces règles, il s'en faut
bien , n’étaient ni certaines, ni uniformes dans tous les
paj's couturniers; on peut s'en convaincre par ce qu’en
disent de Renusson, dans son traité des propres, sec
tion 1 0 , et L e b r u n , des successions, 'liv. 2, cliap. i . er
sect. i . re
Indépendamment des difficultés générales qui résul
taient de la distinction des biens en propres et en ac
q uêts, la coutume d ’Auvergne avait encore, sur cette
m a tière, des difficultés qui lui étaient propres. L a dis
position de celte coutume est ainsi conçue : «¡Audit
or pays couiumier d'A uvergne , y a deux manières d’hé<r ritie rs jl'u n du côté paternel, et l'autre du côté n ia <r ternel, et retournent les biens à l’estoc dont ils sont
« provenus, tellement que les prochains’lignagers, du
* côté patern el, succèdent ab intestat ès biens provenus
« dudit estoc, et non les parëns du côté maternel : et
« contra.» (Coutum e d’A u ve rgn e, cliap. 12., sect. 2 ,
art. 4. ).
C h a b ro l, sur cet article, observe que lu coutume
établit la règle générale des pays coulumiers : Paterna
pa ternis, materna ma ternis j mais que cette règle no
�( 34 )
s’y pratique pas com me dans les autres coutumes. Il
fallait toujours dans la coutume d’Auvergne remonter
à celui qui avait porté l'héritage dans la fa m ille , et
voir qui lui aurait succédé, si, au lieu d ’avoir des descendans pendant cinq et dix générations, il fût mort
sans postérité; ce qui dérivait de ce principe général,
fondement de l’ordre de la succession des propres en
A u ve rgn e , qu’on devait diviser et subdiviser à l’infini
les biens de chaque estoc. Toutes les coutumes admet
taient bien une première division entre les païens pa
ternels et les païens maternels, suivant la maxime gé n é
rale : Palerna paierais, materna materais; mais non
pas ces sous-divisions à l’infini, qui constituaient l’es
prit de. la coutum e d ’Auvergne dans cette m atière: il
y avait fictivement autant de successions que le défunt
avait laissé de lignagers de toutes les familles qui
avaient pris alliance;avec la sienne, et qui y avaient
apporté les biens qu’il laissait. Chacun reprenait, par
représentation, les biens venus de son côté, com me
s’ils avaient appartenu, en dernier l i e u , à celui qui
les avait portés le premier dans cette famille, et qu’il
fût questionMoujours de.lui succéder immédiatement.
Mais com me dans c e tte multiplicité de branches,
il n’était guère possible qu’il ne s’en trouvât quelqu’une
d’étein te, ou par une défaillance effective, ou par l’im
possibilité de fournir des preuves d’une parenté qui
remontait trop loin , il se présentait souvent la question
do savoir quelle était la ligne qui succédait, en cas de
défaillance, de celle où les biens étaient provenus, si
�( 35 )
c ’était la plus proche du défunt, au tems qu’il était
d écédé, ou s’il fallait remonter plus haut.
Celte question importante ne trouvait passa solution
précise dans la cou tu m e, el on était réduit à s’en ré
férer sur ce point à la jurisprudence des arrêts. Chabrol,
sur l’article ci-dessus ci té rapporte trois arrêts célèbres,
rendus dans des espèces où des difficultés de cette na
ture avaient été agitées ; ce sont les arrêts des R e n a u d ,
des Lescalopier et des Postoly. Ce n’est pas tout : la
distinction des biens auxquels les collatéraux paternels
et maternels succédaient, selon les principes de la cou
tume d ’A u vergn e, donnaient lieu à un très-grand nom
bre de questions difficiles, pour la décision desquelles
on n avait^ le plus souvent, d’autre guide qu’une juris
prudence d’arrêts, flottante et obscure. Chabrol pro
pose, sur cette matière, quatorze questions principales
qu’il serait trop long d’énoncer; mais il suffira de re
marquer que les unes ou les autres de ces questions se
présentaient clans presque tous les partages desuccession,
et que Chabrol ne les résout qu’en rapportant labo
rieusement des arrêts, ou en interrogeant les disposi
tions des coutumes qui avaient quelque conformité
avec celle d ’Auvergne.
D ’après les idées que l’on vient de donner des em
barras inexlricablesdela législation despayscouluiniers,
en matière de distinction des biens en acquêts ou en
propres, on doit reconnaître qu’il était sage d ’abolir
cette législation, comme le fit la loi du 17 nivôse an 2.
L ’article 62 de cette loi porte que »la loi ne reconnaît
�( 36 )
« aucune différence dans la nature des biens ou dans
«• leur origine, pour eu régler la transmission-». L e
code N apoléon, art. 7 3 2 , renferme une disposition,
conforme..
Les expressions du législateur sont remarquables :
« L a loi ne reconnaît aucune différence dans la nature
«• des biens ou dans leur origine»; c ’est-à-dire, que la
loi n’admet plus, qu ’elle n’autorise plus aucune diffé
rence dans la nature des biens ou dans leur origine,
pour en régler la transmission. D evan t la l o i , il n’est
plus permis de rappeler la différence dans la nature
des biens; elle ne le souffre plus.
A in s i, a disparu pour jamais cette distinction des
biens qui devait sa première origine à la féodalité, et
qui é ta it, pour les familles des pays coutum iers, la
source de mille difficultés interminables, pour la déci
sion desquelles on était l iv r é , le plus souvent, a l’arbi
traire des juges, ou aux caprices de la jurisprudence.
M adam e de Chazerat se met en opposition avec une
loi que la sagesse et l ’intérêt public ont dictée. Elle
réunit tous ses efforts pour qu’une loi aussi utile de
meure sans exécution ; elle ne craint pas de fronder
hautement le précepte de la loi, en ordonnant q u ’ou
fasse dans la succession la distinction de plusieurs patrimoines; qu’on fasse une différence de la nature de ces
biens, et dans leur origine; qu’on y distingue, selon
les principes de la coutum e d’A u v e rg n e, ¿es acquêts,
les propres paternels et les propres maternels.
Eu un m ot, elle établit entre ses biens une difl'é-
�H*
( 37
}
rence que n o n -seu lem en t la loi 11e reconnail plus,
mais encore qu’elle défend.
L a séparation des patrimoines paternels et mater
nels étant une fois o p é ré e , quelles sont les personnes
que madame de Chazerat appelle à recueillir la portion
de ses biens, dont la loi du 4 germinal an 8 lui laisse la
disposition? Ce sont ceux de ses parens de la branche
de ses aïeul et aïeule paternels, el de celle de son aïeule
maternelle « qui seraient en ordre de lui succéder sui« vant les règles de la représentation à l’in iiu i, telle
a- qu’elle avait lieu dans la ci-devant coutume d 'A u « vergn e, pour être partagés entre les trois branches,
« au inarc-la-livre de ce qui lui est parvenu de chacune
desdiles branches, et être ensuite subdivisés dans
« chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la re« présentation à l’iniini».
E n d’autres termes , madame de Chazerat établit
entre ses parens l ’ordre de succéder tel qu’il était pres
crit par la ci-devant coutume d ’A u vergn e; elle n’aura
pas d’autres héritiers que ceux de ses parens qui seraient
en étal de lui succéder, suivant les règles de cette cou
tu m e; d ’où il suit que relativement aux biens dont la
loi permet à madame de Chazerat de disposer, el quant
h ceux de ses parens qu’elle appelle à recueillir ces
biens, la coutume d ’Auvergne doit conserver tout sou
empire , el régler la succession de la même manière
qu’elle l’aurait ré g lé e , si elle fût décédée ab in testa t,
avant l’abolition de celle coulum e , ce qui est bien
�C 38 )
évidemment établir un ordre de succéder, suivant les
dispositions d’une coutume abolie.
En second lieu , en analysant même les termes dont
madame de Cliazerat s’est servie dans son second codic i l e , on demeure convaincu que sa volonté était de
partager sa succession entre les héritiers que lui don
nait la ci-devant coutume d’A u vergn e, et selon le mode
que cette coutume établissait.
On ne peut mieux interpréter ou concevoir l’esprit
des dispositions de madame de C h a zerat, que par ce
qu’elle dit e l l e - m ê m e , par la manière dont elle les
présente.
Dans son second codicile, madame de C h azerat,’
voulant désigner ceux de ses parens qu’elle a appelés:
à recueillir la portion de ses biens, dont la loi lui donne
la faculté de disposer, n’emploie pas d’autres expres
sions que celles de ses héritiers y c’est-à-dire d'héritiers
appelés à la succession par la coutum e d’A u v e rg n e , et
non par son testament, autrement elle se serait servie
du terme de ses légataires universels. Sa pensée n'est
pas équivoque dans le passage suivant de son second
codicile : «secondem ent, com m e il pourrait se fa ire ,
« qu’au moyen des dispositions par inoi faites, en faveur
« de mes parens de l’estoc de mon aïeul et aïeule pa« ternels , et celui de mon aïeule m aternelle, il ne
« restât pas h quelqu’ un do mes cousins germains do
« l’estoc de mon aïeule maternelle, appelés par la loi
a à ma succession, une somme suffisante pour leur
�tzs.
(
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
39 )
subsistance, désirant venir h leur secours , et faire
partager mes libéralités à ceux qui en auront besoin,
je veux et entends que si quelques-uns de mes cousins ou cousines ne trouvaient pas danâ leur portion
héréditairej jointe avec ce qu’eux ou leurs enfans
auront d’ailleurs, de quoi former un revenu de cent
francs, tant pour eux que pour chacun de leurs enfans qui existeront au jour de mon d écès, il soit
distrait annuellement de monlegs universel la somme
nécessaire pour compléter ledit revenu de cent francs
h chacun de mes cousins et cousines, et chacun de
« leurs enfans, compris ce qu’eux ou leurs enfans pour« raient avoir d’ailleurs; et ce, pendant la vie de mesdils
« cousins ou cousines et de leurs enfans; à l’égard des
« enfans de cousins germains qui pourraient être ap
te pelés, de Leur c h e f \ a ma succession, je veux éga« lenient que si Leur portion héréditaire, réunie à leurs
« autres facultés, ne se porte pas à un revenu de cent
« francs, je veux que la leur soit com plétée aux dépens
« de mon legs universel pendant leur vie
11 est sensible que ces m ots, mes héritiers, qu’em
ploie constamment madame de Chazerat, dans son tes
tament et dans son premier codicile, mais s u r - t o u t
dans le second, pour désigner ses légataires universels,
veulent dire les héritiers du sang, suivant l ’o r d r e de
succéder prescrit par la coutume d’Auvergne. Cette
idée -se confirme encore par ce que dit la testatrice,
dans son second codicile , de ses parens appelés par la
loi il sa succession (cette loi est la ci-devant coutume
<*v. I-,Uni
�( 4° )
d 'A u vergn e, autrement il faudrait convenir que la suc
cession de madame de Chazerat doit être partagée entre
Jeshériliers que lui donne le codé Napoléon) de leur por
tion hêtéditairz ; on sent “qu’il n ’y a de portion hérédi
taire que dans le cas où on succède ab intestat. Si ma
dame de Chazerat eût entendu parler d’une portion
ou d’ une quotité déterminée de ses biens qu’elle don
nait, par testament , à ceux de ses parens désignés par
elle individuellement, ou , ce qui est la m êm e chose, si
madame de Chazerat eût voulu faire un testament',
elle n’eût pas appelé sa libéralité une portion hérédi
taire. Sa volonté de faire revivre la c i-d e v a n t cou
tume d’A u v e rg n e , de la donner pour loi de l’ordre de
sa succession entre ses p aren s, éclate donc de toutes
parts; et soit qu’on s’attache à la lettre de son testa
ment et de ses codiciles, soit qu’on considère leur es
prit, cetle vo lo n té , contraire aux lois et h. l’ordre pu
blic, ne peut être équivoque.
En troisième lieu, dans l’énoncialion des demandes
des héritiers, et de leur but, tout y comporte un par
tage de succession, conformément à la coutume d’A u
vergne.
Par les conclusions prises par les héritiers devant
le tribunal civil de l l i o m , les uns ont demandé acte
de ce qu ’ils donnaient les mains au partage de ladite
succession, à faire conformément aux bases dé termi
nées par le testam ent, et par les codiciles qui l’ont
suivi ; en conséquence qu’il fût ordonné, que par troi .4
experts convenus, 011 pris et nommés d’office, il serait
procédé
�( 4 1 ')
procédé aux opérations de ce parlage ; qu ’il serait formé?
par ces experts, la masse générale de la succession à
diviser, à laquelle masse chacune des parties ferait tous
rapports et prélèvemens de droil ; que les mêmes e x
perts seraient chargés de déterminer La nature et la
valeur de tous les biens meubles et immeubles qu’a
vait reçus
'4 la dame de Chazerat des branches de sou
aïeul et aïeule paternels, et de son aïeule maternelle;
« soif que ces biens existent encore en nature dans la
.*■succession, soit qu’ils ne s’y trouvent plus; qu’ensuite
« il serait fait par les e x p e r ts , distraction de la masse
•«
«
«
«•
générale de la succession, comme ayant été attribuée
aux héritiers des trois branches, exclusivement par le
troisième codicile; que sur les trois quarts de ladite
masse, il serait fait distraction de tous les legs parti-
« culiers, soit eu nature, soit en valeur; que sur le sur« plus desdits trois.quarts, il serait attribué un sixième
« de ce surplus aux sieurs Farradesche de Gromond et
« Ducorail, et que lé legs de cé sixième et les autres legs
« particuliers s e ro n t, autant que possible, payés en
tr acquêts de ta succession; que le reste des trois quarts
« serait remis au quart de la masse générale, précé* deniment distrait, pour le tout former une masse par«
*
«
«
«
ticulière qui serait divisée et subdivisée entre les héritiers des trois branches ; conformément aux bases
fixées dans le testament ; ordonner en conséquencq
qu’il sera attribué a u x héritiers de chaque branche
les immeubles provenus de celte branche, et qui se
* trouveraient en nature dans la succession ,* que pour
ii
�( 42 )
et remplacer les immeubles qui ne se trouveraient plus
a- en nature, ou qui auraient été employés en paiement
« des legs particuliers, il sera attribué a u x héritiers delà
«• branche de laquelle ces immeubles proviennent, des immeubles d’une valeur égale, pris parmi les acquêts de la
« s u c c e s s io n qu’à l ’égard des meubles qu’avait reçus la
« défunte, de chacune des mêmes branches, il en sera
payé la valeur a u x héritiers de chaque branche, soit
<r aux dépens des meubles de la succession, soit aux
a dépens des acquêts-immeubles j qu’ensuiteles meubles
* et les acquêts restans seront divisés entre les trois
« branches d ’héritiers au marc le franc , de la valeur
« des biens propres, tant mpubles qu’immeubles; qu’a« près la division générale entre les trois branches d’ héct ritiers, il sera fait, d’après les mêmes bases, de la
« même manière , une subdivision particulière entre
« les héritiers de chaque branche».
D ’autres héritiers ont conclu à ce q u e , par experts
convenus, ou nommés d’office , « il fût procédé au par
te tage de la propriété des biens demeurés du décès de
» ladite dame R ollet, épouse de Cliazerat, pour d’iceux
« en être expédié à chacune des parties leur portion
•e ajjérente, conformément auxdits testamens et codi« ciles; qu’à cet effet, lesdits experts seraient tenus de
« distinguer les biens provenans des estocs de M ichel
v R o lle t, François V ig o t, et Gilberte G ros, a ïeu x de
« Ladite défunte dame R o lle t, pour iceux être expédiés
« à chacune des parties, comme représentant lesdits
« estocs ; ordonner pareillement que le surplus des biens
�( 43 )
« serait partagé, conformément auxdits testament et
a codiciles, au marc le franc, entre les trois branches,
« R o lle t, Vigol et Gros».
Il résulte clairement de ces demandes et conclusions,
que les parens, appelés à recueillir le legs universel fait
par madame de Chazerat, ont demandé un partage de
succession plutôt que la délivrance d’un legs fixé et dé
terminé ; qu’ils ont senti eux-mêmes que c ’était le cas
d’un partage de succession entre des héritiers du sang,
comme si la testatrice fût décédée ab intestat, et sous
l’empire de .la coutume d’A u v e rg n e ; il ne peut s’éle
ver à cet égard, le moindre doute, lorsque les héritiers
énoncent dans leurs conclusions qu’il y a une masse’
générale de la succession; que les legs particuliers faits
par madame Rollet de Chazerat, doivent ê tre , autant
que possible, payés en acquêts de la succession; q u ’ils
demandent qu’il soit attribué aux héritiers de chaque
branche, les immeubles provenus de cette bra n ch e,
et qui se trouvaient en nature dans la succession; q u ’il
soit procédé au partage de la propriélé des biens d e
meurés du décèsdqja dame R o llet, épouse de Chazerat;
que les experts soient chargés de déterminer la nature
de tous les biens meubles et immeubles qu’avait reçus
la dame de Chazerat des branches de son aïeul el aïeule
paternels, el de son aïeule maternelle; c’e s t - à - d ir e de
faire la distinction des acquêts et des propres, tant pa
ternels que maternels, suivant les estocs ou les lignes
d’où ils étaient’ provenus. Toutes^ ces demandes ne
peuvent convenir qu’à un partage de succession, selon
�( 44 )
l ’ordre de succéder de la ci-d e v a n t coutume d ’A u
vergne, et c’est en vain qu’on y chercherait les carac
tères d’une demande en-délivrance de legs.
Mais si les juges pouvaient faire droit à de sem
blables demandes, il n’est personne qui ne voie qu'ils
seraient obligés de faire une étude particulière des prin
cipes de l’ancienne coutume d*Auvergne; la distinction
seule des biens, qui n*est qu une opération prélimi
naire du partage, serait la matière d’une multitude de
contestations, pour la décision desquelles on n’aurait
d’autres secours, que des arrêts, et l’opiniçm des com
mentateurs.
Si les demandes des héritiers de la dame de Chazerat
pouvaient être accueillies, les tribunaux retentiraient,
encore pendant trente ans des procès qui s’élèveraient
sur la distinction des biens auxquels les héritiers pa
t er ne ls et m a t e r n e l s succèdent, d’après les règles de la
coutume d’Auvergne.
Com m ent concevoir que nos lois nouvelles se prê
tent à de pareils égaremens ? Comment soutenir ,
qu’ayant abrogé formellement toutes les anciennes
coutumes, elles ont cependant donné à un testateur la
puissance dangereuse d’en perpetuer 1 existence par
l’effet seul de sa volonté? 11 est impossible d ’admettre
jamais de telles idées.
Après ce que l’on vient d’établir, on pourrait re
trancher la quatrième proposition que l’on a énoncée,
ou regarder cette proposition comme complètement
démontrée. Les réflexions précédentes ont suffisam-
�(45}
ment prouvé q u e , dans le fait com me dans le droit,
il y avait dans le legs universel de madame de C h azerat,
création d ’uu ordre de su c cé d era i on ajoute de nouvelles
réflexions à ce qui a été dit, ce n ’est que pour achever
de mettre dans tout son jour la vérité d’une propo
sition qui est île point fondamental de la cause.
Commençons par rappeler les termes
sition : « Je’ donne et lègu e, etc. à tous
«r parens, etc. qui seraient en ordre de
«• suivant les règles de la représentation à
de lu;dispoceux de mes
m e succéder
l’in fin i, telle
* qu’elle avait lieu dans la ci-devant coutum e d ’A u «
«
«
«
vergne, pour être partagé entre les trois branches,
etc. et être ensuite .subdivisé dans chacune d ’elles,
suivant les mêmes règles de la représentation à
l ’infini».
; . ■ .>
'
,
Remarquons q u e , ni l’ordre de vocation entre les
h éritiers, ni la quotité qui est attribuée à chacun
d ’eux , ne sont réglés par la testatrice. M adame de
Chazerat ne sait pas quelè seront ceux de ses parens
qui lui succéderon t, et la portion de sa succession
qu’ils seront
appelés à recueillir in dividuellem ent,
pour fixer l’ordre de ses héritiers entr’e u x , e t lfes droits
de chacun dans sa succession ; il faudra nécessaire
ment en venir à fixer les principes de la représentation,
selon la ci-devant coutume d’Auvergne. C e sera cette
coutume et sa jurisprudence, en matière de représen
tation , en ligne collatérale, qui régleront l’ordre de
succéder entre les héritiers; ce seralaci-devanl coutume
d’Auvergne qui déterminera les droits des héritiers, qui
�( 46 )
lixera la pari qu'ils devront prendre dans la succes
sion; en un m o l, ce sera la coutume d'A uvergne qui
fera les héritiers de madame de Chazerat.
Suivant l’arlicle 9, chap. 12 de la ci-devànt coutume
d'Auvergne : «Représentation a lieu, tant en droite ligne
«■que collatérale, usque in in jitiitu m , audit pays couor
t limier-».
Voilà la règle que madame de Chazerat adopte pour
déterminer l’ordre de vocation de.ses héritiers ; elle veut
que ses biens soient subdivisés:entre ses héritiers, sui
vant les règles de la représentation à l ’infini.
Mais en matière de représentation,la coutume d’A u
vergne avait encore sa jurisprudence particulière; par
exem ple, il s’y agissait souvent de savoir s i , lorsque
différens héritiers sont au mêm e d egré, et qu’ils n’ont
pas besoin de la représentation pour se rapprocher du
d éfu n t, ils doivent succéder par t ê t e , et par égale porlion , ou par souches; d'autres fois, il était question de
décider si l’un des cohéritiers venant à renoncer, son
fils ou son pelit-fils, par représentation 011 autrement,
pourrait venir à la succession. Ces difficultés et plusieurs
autres,'dont 011 peut voir les détails dans Chabrol, sur
f a r lid e 9 , chap. 12 de la co u tu m e , se reproduisent
nécessairement dans le partage de la succession de m a
dame de Chazerat , et les juges se verraient contraints
à en chercher la solution dans la jurisprudence incertmne d ’iin cc o u lim ie abolie.
Si le partage demandé par les héritiers de madame
de. Cliazernt , pouvait être autorisé, il faudrait donc
�( 47 )
qu ’on vît la Cour de cassation réduite à examiner si
un jugement oui un arrêt aurait ou non violé- les prin
cipes, o u , pour m ieux dire, la jurisprudence admise
dans la coutum e d’Auvergne.
i. .
E n fin , il y a vraisemblablement des héritiers de ma
dame de Chazerat, q u i, parce qu’ils descendent de filles
forcloses, aux termes de la coutume d 'A u v e rg n e , pour
raient, être exclus; la dame de Cliazërat ne s’est point
expliquée à,cet égard : elle s'estlentièrement référée à
la coutume d?Auvergne ; en sorte q u ’on aurait encore
h agiter des questions relatives ¿1 l’ancienne forclusion.
Ce serait inutilqtnent que le législateur aurait mani
festé', de la manière la plus expresse, sa volonté d’abolir
les anciennes coutumes et leur jurispmdence incohé
rente. L e pouvoir d’un lesfateur qui n■aiirait ni des
cendons , ni ascendans, s'élèverait au-dessus de la loi ; et
plus puissant qu?elle, il ferait rentrer la législation
civile dans le cahds et dans-l'arbitraire dont elle a été
si heureusement /tirée. On ne pense pas qu’ un aussi
étrange système soit jamais accueilli par les tribunaux,
à qui*la conservaiion des lois est confiée.
On a cru pouvoir justifier madame de Chazerat du
juste reproche d’avoir pris pour règle de vocation de
ses héritiers, ou pour l’ordre de sa succession, le mode
de représentation à l’infini, établi par la ci-devant cou
tume d’A u v e rg n e , en faisant observer qu’elle écrivait
son testament sous l’einpiçp de la loi du i y nivôse
au 2, qui admettait là représentation à l'infini (art. 82),
et qu’il n’y a aucune différence assignable entre les divi-
�(
4
8
}
sions et subdivisions à faire, conformément à la neprér
sentation à l’infini, telle qu’elle avait lieu dans là cidevant coutume d ’À u v e rg n é, et celles qui étaient or
données suivant le mode de représentation , introduit
par l’article 82 de la loi du 17 nivôse,
« D e sorte que ces expressions de la ci-devant cou«• tume d’ Auvergne, ou de la loi du 17 nivôse, étaient
« absolument synonim.es» ( i . re consultation, pag, i 5.).
,
Cette objeclion est facile à détruire en peu de mots.
Premièrement ,on a démontré qu'il est de principe in
contestable que le mode d’une disposition ne peut être
régi que par la loi en vigueur à l’époqùe du décès du tes
tateur; que si la confection du testament, c’est-à-dire:, la
formalité extérieure de l’a c te , n ’est soumise à d ’autres
règles qu’à celles en usage lors du testament, le mode
de disposer est essentiellement gouverné par la loi
existante lors du décès ; ainsi c ’est au code Napoléon
que la disposition de madame de Cliazeràt doit être
conform e, et non à la loi du 17 nivôse an 2.
Secondement, il 11’est pas exact de dire que le mode
de représentation, ordonné' par madame de Chazerat,
est le même que celui qui élait établi par la loi du
17 nivôse an 2 ; celte lo i, dans toutes lfcs lignes, et
dans toutes les branches, établit la représentation sous
le rapport de la proxim ité, du sa n g ; au contraire, la
coutume d ’A u v e r g n e , attachait la représentation à
l ’origine, et à la nature d<es biens • ce mode de repré
sentation tirait son origine du régime féodal: il fallait,
pour être admis à la représentation , suivant les prin
cipes
�( 49 . ) )
cipes de celle cou tum e, avoir pour auteur celui duquel
les biens provenaient.
(
. C e système de représentation jusqu à l infini, en ligne
collatérale , est une source de difficultés, en faisant
mêm e abstraction de celles qui résultent de la dis
tinction des biens pour les affecter ensuite a chaque
ligne.
On contient la célèbre question qui s’était élevée sur
le véritable sens de l’art. 7 de la loi du 17 nivosean 2 x
et qui consistait à savoir si les descendans des ascendant
les plus proches devaient exclure ceux des ascendant
les plus éloignés dans chaque ligne paternelle ou mater
nelle ; ou' bien si on devait admettre les descendans
des ascendans plus éloignés à concourir avec ceux des
.ascendans les plus proches dans chacune de ces deux
lignes.
•.
Cette question, connue dans la, jurisprudence sous lo
nom de question de refertle, avait divisé les juriscon
sultes, les tribunaux et les législateurs eux - mêmes;
elle fut, en l’an 6 , l’objet d’un référé du tribunal de
cassation au corps législatif, sur lequel il futstatuépar un
décret d’ordre du jour, du 8 nivôse un 7. Et la jurispru
dence , plusieurs années vacillante, ne fui fixée que
par un arrêt de la Cour de cassation, du 12 brumaire
an 9. Ce seul exem ple fait voir la sagesse du code Na
poléon, qui a abrogé la représentation à l’infini eu ligne
collatérale.
D e tout ce qui vient d’être dit dans ce second para
graphe, il résulte cette conséquence q u i, pour la déi3
�(
5o
)
cision de la question soumise au conseil, est de la plus
haute importance, que madame de Chazerat, en ce qui
concerne les dispositions de son testament, qui sont at
taquées par voie de nullité, n’a point fait, à propre
ment parler, de dispositions leslamenlaires ; elle n ’a
point légué à des particuliers indiqués et nommés, à
tels ou tels connus mêm e par elle, telle, som m e, tel
objet particulier, telle portion ou quotité àé^ses biens;
elle a simplement voulu une distribution-réglée par la
coutume d'A uvergne : ce n'est point elle qui don n e,
c ’est la coutume.
Pour que les vérités que l’on a déjà établies restent
dans toute leur force , et pour qu’elles ne puissent être
susceptibles d'aucun d o u t e , il ne s’agit plus que de
réfuter quelques objections auxquelles ont n’a pas en
core répondu, et qu’on va extraire des deux consulta
tions délibérées pour les légataires universels.
PREMIÈRE
OBJECTION.
Madame de Chazerat n’ayant ni ascendans, ni descendans, le code Nap. lui donnait la faculté de disposer
de la totalité de ses biens ( i . re consultation, pag. 5 ) ,
a soit sous le titre do l’institution, soit sous le titre do
« legs , soit sous toute autre dénomination propre à
«• manifester sa volonté« (i-re consultation, pag. 8).
Elle n’avait à observer dans la répartition de ses biens
aucun ordre qui fut du domaine public; «elle avait
* Ternièic disposition de sa fortune. Il n'y avait point
�«r de barrière pour elle.... la loi; ne;lui en avait imposé
« d’aucune espèce ( 2.e consultation , pag. 3 ). Il n’existe
« aucun article du code qui règle la manière dont un
« testateur, qui donne ce que la loi lui permet de
« donner à qui bon lui semble, le répartira entre ses
« légataires, parens ou étrangers, qui déterm ine, par
« exem ple, comme il divisera son bien dans les diffé« rentes lignes de la parenté, s’il veut donner à des
« parens de diverses lignes (2.e consultation, pag. 5 ).
«• L a coutume d’Auvergne n'a pas été le guide de
«■madame de Chazerat ; et pour le choix de ses liéri« tie r s , elle n'a cherché d’autre loi que sa volonté
«
«
«•
<r
( i . re consultation, pag. 1 4 ) , lorsqu’elle a pris pour
règle de la répartition de ses biens , la représentation
telle qu’elle était établie par la coutume d’Auvergne ;
cette coutume ne prend pas pour cela aucune force
« de loi : la disposition reçoit toute son autorité de la
a volonté de madame de C h a z e r a t, et du code qui
« laissait cette volonté entièrement libre (2 .e consul«• tation, pag. 9) ».
RÉPONSE.
O u i, sans doute, il y a une volonté, mais ce n’est
pas la volonté que la loi permet d’émettre : on parle
de volonté permise à la testatrice ; voilà précisément
ce qui est en question. On remarque toujours deux
points essentiels dans la disposition de madame de Cha
zerat : qu’elle ne donne point personnellem ent, mais
H
�K.. i
( 52 )
qu’elle veut qu’on distribue ce que la coutume d’A u
vergne déférait à titre de succession; qu’elle ne désigne
pas personnellement l’ordre de vocation de ses héritiers
en lr’eux , mais qu’elle veut qu'on règle leurs droits à
sa succession , d’après l’ordre établi par la coutume
elle-même. L ’on est sans cesse ramené au point de
savoir si une pareille volonté €St admissible d’après la
loi. A in si, tout ce qui est dit dans les deux consultations
sur cette volonté, ne tranche point la difficulté, et ne
tend qu’à résoudre la difficulté par la difficulté même.
Madam e de Chazerat était libre de disposer de la
totalité de ses biens, sous toute dénomination propre à
manifester sa volonté : on le veut; mais cette volonté,
pour qu'elle pût être observée, ne devait rien contenir
de contraire aux lois ni à l’ordre public.
L a loi de qui la testatrice tenait le pouvoir de faire
un t e s t a m e n t , y a v a i t m is celte c o n d i t i o n nécessaire;
elle y avait mis, pour condition nécessaire, de ne pas
faire revivre une distinction de patrimoine qu’elle avait
proscrite : elle y avait mis, pour condition nécessaire,
de ne pas perpétuer l’existence d’une coutume abolie,
en rappelant un ordre de succéder qui ne devait plus
être toléré; elle y avait m is , pour condition nécessaire,
de ne pas apporter d’obstacle à l’uniformité de la légis
lation, dont l’avuntage inappréciable était depuis si
long-tems réclamé pour l ’intérêt de tous.
Comment a-t-on pu dire que la coutume d ’A u v e r
gne n’a pas été le guide de madame de Chazerat? lors
que c’csl cette coutume et sa jurisprudence qui doivent
�lo p
( 53 3
être suivies pour la distinction des Liens propres et ac
quêts paternels et maternels ,• lorsque c’est d’après les
règles établies par la coutum e, que les héritiers seront
appelés à la succession, et que l’ordre de succéder sera
formé.
D ’ailleurs, ce serait abuser d’une manière bien
étrange de ces termes de l’art. 967 du code N apo
léon , «soit sous le titre d’institution d ’héritiers, soit
« sous le titre de legs, soit sous toute autre dénomina«■tion propre à manifester sa volonté », que d’en tirer
la conséquence absolue, que madame de Cliazerat a
pu au fond disposer sous tel mode que bon lui a semblé.
Personne n ’ignore qu e, p a rle s expressions que l’on
vient de rapporter, le législateur a seulement voulu
faire cesser les différentes acceptions attachées dans l’an
cienne jurisprudence, aux mots leg s, institution cChé
ritiers, donation à cause de m ort, et qu’il a entendu
écarter à jamais les conséquences qui en résultaient. Tl
ne s’agit , dans cet article , que de la dénomination
donnée à la disposition, et non du mode de la volonté,
ce qui est bien différent.
On a vainement o b je c té , dans la seconde consulta
tion, que la coutume ne reprenait pas pour cela force
de loi ; que la disposition recevait toute son autorité
de la volonté de madame de Cliazerat, et du code qui
laissait cette volonté entièrement libre.
C e l t e volonté de madame de Chazeral, ayant tou
jours reflet de remettre e n v i g u e u r une coutume abro
g é e , puisque la vérité force de convenir, dans la so-
�( 54 )
conde consultation (pag. 6 ) , que madame de Chazerat
«■a indiqué l’ancienne coutume , comme étant celle
« qu’elle entendait donner pour règle à ses légataires ».
Il faut encore en revenir au point de savoir si madame
de Chazerat a pu donner pour règle du partage entre
ses héritiers ou légataires , l’ancienne coutume d’A u
vergne.
Mais c’est là un paradoxe qu’il n’est pas permis
d’avancer sérieusement, autrement il faut accorder aussi
qu’un testateur a la faculté, sans faire aucune disposi
tion personnelle de ses biens, d ’en ordonner simple
ment la distribution entre ceux qui devraient lui suc
céder, suivant telle ancienne coutum e, ou tel ancien
statut qui seraient abolis, ou selon les lois d’A ngleterre,
ou de Constantinople; ou , en d’autres termes, que l’on
peut créer un ordre de succéder autre que celui établi
par la loi ; ce qui serait renverser les maximes les plus
sures de la jurisprudence.
Faul-il le redire? c ’est une erreur de préfendre que
la volonté de la testatrice était entièrement libre, qu’elle
n’avait aucune limite; elle avait pour limite les lois
d’ordre public auxquelles il était défendu à la testa
trice de porter atteinte; elle a exprimé sa volonté, il
est vrai, mais quel secours peut-on tirer d’ une volonté
contraire aux lois?
C ’est donc inutilement qu’on a invoqué dans les doux
consultations, la volonté de la testatrice; on ne voit là
(juc des efforts impuissans, de la part de leurs auteurs,
pour se dérober à l’évidence qui les poursuit.
�( 55 )
SECONDE OBJECTION.
k
«f L a seconde objection consiste à dire que la cou« tume d’Auvergne n’est rappelée dans le testament de
« madame de C lia z e ra t, que comme une indication
te surabondante ( i.ere consultation, page 1 4 ) ; pour dé« monstration plus ample de la volonté de la testatrice,
<r qui aurait pu écrire dans son testament tout ce que
« la coutume diposait sur ce p o in t, et qui s’en est dis« p en sée, en déclarant qu’elle voulait faire com me
* faisait autrefois la coutume d’Auvergne ; ce qui est
« la mêm e chose que si elle en eût couché les dispo» sitions dans ce testament (2 .e consultation, p. 8.)>5.
R É P O N S E.
Il n’y a dans cette seconde objection que sophisme
et confusion d’idées.
Il faut bien distinguer la simple désignation d’une
coutum e, dont les dispositions auraient servi de m o
tifs et de base au règlement des libéralités contenues
dans le testament, lesquelles libéralités néanmoins se
raient explicitement et positivement développées avec
indication explicative des objets légués, et des indivi
dus appelés à les recueillir; d’une disposition testamen
taire , par laquelle la testatrice appelle seulem ent, et
d’une manière con fuse, ceux qui lui auraient dû suc
céd er, suivant une coutume abolie; d’une disposition
�par laquelle la testatrice veut luire revivre une origine
de biens, heureusement abolie par la loi actuelle; d ’une
disposition dont le résultat est que des juges étudient,
el appliquent une jurisprudence de représentation rela
tive à cette coutum e; dans ce dernier
de volonté personnelle de la part du
reste que la volonté ou l ’empire d’ une
Co n’est pas tout; dans ce dernier cas
cas, il n’y a pas
testateur; il ne
coutume abolie.
en co re, les juges
seraient obligés de faire eux-m êm es, ou de faire faire
par des experts ce que la loi défend; c ’est-à-d ire, de
distinguer une origine de biens, proscrite , e f p a r l a loi
du testament, et par la loi du décès.
Mais réplique-t-on, madame de Chazerat aurait pu
écrire dans son testament tout ce que la coutume dis
posait sur ce point, et sa disposition aurait été valable.
Sans doute, la loi donnait h madame de Chazerat
la faculté de disposer e lle -m ê m e de ses biens, entre
ses piirens, dans l’ordre qu’elle aurait voulu adopter.
Sans doute que si elle eût fait elle-même le partage
de ses biens, entre tous ses parens, tel que la coutume
d’Auvergne l’aurait fait, en les appelant tous, non en
lermes généraux et en masse, mais individuellement,
el en assignant nommément à chacun les biens ou la
quotité des biens qu’elle don n ait, une semblable dis
position n’aurait pas été nulle, quoique par le fait la
testatrice eût réglé la distribution de ses biens, sur le
mode de succéder établi par une coutume abolie.
On va plus loin , et on accorde que madame de
Cluijjerat, après avoir fait elle-même la distribution des
biens
�( 57 )
biens paternels et maternels, qui lui élaient provenus
de chaque estoc, aurait éié libre d’appeler les parens
de chaque branche à les recueillir entr’eux, suivant les
règles de la représentation à l’infini, et à les partager
d ’après un mode dont elle aurait pris les règles dans
les dispositions de la c i-d e v a n t coutume d ’Auvergne.
Dans l’ un et l’autre de ces deux cas, la disposition
de madame de Chazerat aurait pu avoir son effet ;
car dans le premier * il n ’y aurait pas eu de partage
k faire selon les principes d’une coutume abrogée ;
chaque héritier trouvant dans le testament la désigna
tion des biens, ou de la quotité des biens qui lui élaient
assignés, la coutume d’Auvergne n’aurail pas repris son
empire.
Dans le second, madame de Chazerat ayant fa il ellemêm e la dislinclion de ses biens paternels et maternels,
on n’eût pas été dans la nécessité, pour faire celte dis
tinction, de recourir à la grande règle du droit coutum ie r, patenta p a iera is, materna mate rnis ,”~et aux
règles particulières qui étaient suivies dans la coutume
d’Auvergne.
L a disposition de madame de Chazerat n’eût pas été
eu opposition avec cette grande règle du code N apo
léon, et de la loi du 17 nivôse an 2 , suivant laquelle
« la loi ne considère ni la n ature, ni l’origine des
« biens pour en régler la succession (code Napoléon,
art. 732.
règle qui est d ’ordre public, et à laquelle
les particuliers n’ont pas la faculté de déroger parleurs
teslamens.
i
5
�'
( 58 )
Q u’importe quels eussent été les motifs, la pensée
de madame de C h azerat. s’il y avait de sa part des
d isp osio n s personnelles qu’on put regarder comme
produites par le seul m ouvem ent de sa volonté; il ne
serait permis que de s’en tenir aux dispositions nettes
et précises qu’elle aurait faites.
Ce n ’est pas parce qu’elle a rappelé le nom d’ une
co u tu m e, que sa disposition est contraire aux lois ; mais
parce qu’elle a déclaré qu ’elle voulait faire, par forme
de disposition testamentaire, ce que faisait autrefois la
coutume d’A u ve rgn e, et que ce mode de disposer tend
à remettre en vigueur la coutume et sa jurisprudence
auxquelles elle se réfère. En un m o t, la coutume d’A u
vergne n ’est pas seulement indiquée, elle devient l’uni
que règle de la disposition testamentaire.
TROISIÈME
OBJECTION.
« Comment l’intérêt public serait-il compromis, par
* la manière quelconque d’appliquer une libéralité per« mise qui ne louche que celui qui la fait et celui qui la
« reçoit
?
*
« Quand la volonté du testateur est constante, en la
« forme exigée par la loi pour rendre cette volonté
n certaine, l’application de cette volonté ne présente
« plus qu ’un intérêt privé ( a .e consultation, page 3 ).
« Enfin, l’art. 1390 lu i-m ê m e 11e prohibe que la
« stipulation faite d'une manière générale de se régler
« dans les conventions matrimoniales par une des cou-
�Zo&
( 59
« tnmes abolies, mais non point de stipuler nomînar tivement telle ou telle disposition portée par les
« coutumes......... O r, madame de Chazerat n’ayant pas
« rappelé dans son testament la coutume d’Auvergne
« d’une manière générale, et comme règle unique de
« la succession, mais d’une manière particulière, et
« seulement pour désigner avec clarté et précision, le
« mode dans lequel elle voulait que ses biens, une fois
« dévolus aux branches qu’elle appelait pour les retr cueillir, fussent divisés entre tous les individus qui
« les composaient, il s’ensuit que la disposition d e l’article
» 1390 ne serait pas applicable à son testament ( 1 .re con« sulation, p. 12 ; 2.e consullation, p. i i ) a .
•
L a loi de la com m unauté, qui renferme l’art. î 390,
« est du 20 pluviôse an 1 2 , le testament de madame de
« Chazerat est du mois de messidor an 9......... On ne
* peut raisonnablement exiger que madame de Chazerat
« ait dû s’y conformer avant qu’elle existât. ( i . ete con« sultation, page 8).
-
!
RÉPONSE.
On ne cesse de supposer que la libéralité de madame
de Chazerat#est une Libéralité perm ise; mais on a déjà
établi qu’elle ne l’était pas. Les auteurs des deux con
sultations, mises sous les yeu x du conseil, ne cessent de
mettre en proposition ce qui est en question; et on 11e
voit pas qu’ils aient fait une seule réponse aux principes
qui sont établis par le jugement du tribunal de Iliom.
16
�( 6o )
Il ne suffit pas qu’une volonté soit constante; elle
doit encore se coordonner avec la loi.
D e la disposition testamentaire de madame de C h a zerat à la coutume d’A uvergn e, il y a une relation
générale. Elle n’a point lait de dispositions parti
culières ou personnelles. Elle n’a même pas pris la
peine de les modeler sur les principes de la coutume
d’A u v e rg n e , en les expliquant, les détaillant d’après
le type qu’elle aurait pu prendre dans cette coutume
ou ailleurs. Elle a simplement ordonné l’exécution de
la coutume d’A u vergn e.E llea renvoyé aux juges l’étude
et l’application de ccite coutum e, et de sa jurispru
dence incertaine qui s’était efforcée d’en fixer le sens,
C ’est ce qui a été déjà établi.
L e mode et les conditions, dont les dispositions tes
tam entaires peuvent être susceptibles, sont du ressort
de la législation existante lors du décès du disposant; les
formes du testament appartiennent seules à la législa
tion qui est en vigueur à l’époque où il est fait.
Les articles 1389 et 1890 reçoivent donc leur appli
cation au testament de madame de C h a z e r a t, dès
qu’elle est décédée postérieurement à la promulgation
du code Napoléon.
A u surplus, on l’a déjà d it, ces articles ne sont quo
des exemples, des développemens fortuits du principe
qui sort de l'ensemble de notre législation, et sur-1out
des articles 6 et 900 du code Napoléon.
Les auteurs des consultations mettent en opposition
les intérêts privés avec l ’intérêt public.
�( 6 i )
Mais qu’iinporle au fond que la nullité du testament
de la dame de Chazerat tienne à l’ordre public ou non?
Cette nullité est-elle certaine? On a établi qu’elle l’est,
et la vérité est encore que l’ordre des successions étant
de droit p ub lic, celui qui substitue à l’ordre des suc
cessions, établi par là loi en vigueur au moment de son
décès, qui est la véritable époque de son testament,
un ordre de succéder établi par une loi abolie, tombe
dans une contravention à une loi d’ordre public.
QUATRIÈME
OBJECTION.
« Par exem p le, y a u ra it-il contravention à l’arti« cle 1390, s’il était dit que le mari venant à prédécé« der, la femme aurait un douaire de la moitié des biens
« de son mari en usufruit, tel qu’il était réglé par la
« coutume de Paris (2.' consultation, page 6.)»?
r é p o n s e
.
Si dans cette hypothèse l’exécution de la disposi
tion était ordonnée, quelle en serait la raison?
C ’est parce qu’elle présente un don net et précis,
qui est reflet de la volonté personnelle du disposant.
C e don est de la moitié des biens en usufruit. Il n’y
aurait alors qu’une simple indication ou citation de la
coutume de Paris.
Mais il n’y aurait pas une disposition qui se référât
uniquem ent, sous un rapport général, à une coutume
�(
6
2
}
abolie qu’on dût étudier et appliquer. Il y aurait une
disposition personnelle et particulière; c’est cette dis
position dont l’exécution pourrait être ordonnée, abs
traction faite de la loi ancienne qui serait citée : l’in
dication de cette loi ne pourrait être qu’ un motif ; mais le
m otif est indépendant de la disposition qui est claire
ment énoncée.
On pourrait encore combattre cette comparaison
par d’autres m o y e n s ; mais cela devient inutile : il faut
se renfermer dans la difficulté relative au testament de
madame de Chazerat.
L ’exemple présenté parles auteurs de la consultation,
prouve cependant qu’ils ne se sont pas suffisamment
pénétrés de l ’état de la question, et qu’il leur est im
possible de citer un exemple qui rentre dans les dispo
sitions de madame de C h a zera t, et d ’après lequel on
pût les justifier.
CINQUIÈME
*
OBJECTION.
M adam e de Chazerat prend si peu la coutume d’Au-
«■vergne pour règle générale et unique de sa succes<t sion, que, loin de se conformer à cette coutum e, elle
« s’en éloigne en tout point.
« L a coutume d’Auvergne interdisait à madame de
« Chazerat la plus légère libéralité en faveur de son
« mari, et elle lui lègue l ’usufruit do tous ses biens.
«■La coutume d ’Auvergne ne permettait de disposer,
« par testament, que du quart do ses biens , et elle dis-
�( 63 )
« pose des trois quarts, etc.» ( i . re consultation, pag. 12
-et i 3 ; 2,e consultation, pag. 14.).
r;
il"
RÉPONSE.
■.
1
^
Il ne résulte de tout cela d’autre conséquence, si
ce n’est qu’il n^y a de nulles que les dispositions pour
lesquelles madame de Chazerat s’en est rapportée sous
un mode général à l ’empire de la coutume d’Auvergne.
On ne disconviendra pas qu’on ne puisse scinder les
dispositions d’ un testament
annuller celles qui sont
proscrites par la loi, et conserver celles qui lui sont
conformes. C ’est aussi ce qu’a fait le tribunal de R io m ;
il a annullé les dispositions qui étaient vicieuses, en ce
qu’on n’y voyait point
volonté, ruais seulement celle
de la coutume d’A u v e r g n e , dont elle voulait l’appli
cation, en la laissant aux juges qui devaient n’ordonner
autre chose que l’exécution de cette c o u tu m e , et il a
maintenu celles qui émanaient de la volonté directe do
la testatrice.
CONCLUSION.
D e tout ce qui a été dit, il résulte cette conséquence,
que les moyens proposés, tant dans la première que dans
la seconde consullalion, ne détruisent pas la vérité des
deux propositions établies dans les deux paragraphes
précédons.
Dans le droit, nul 11e peut créer un ordre de succé
d er, autre que celui établi par la loi existante lors do
�( 64 )
son décès, ni prendre pour règle de la répartition ou
de la distinction de ses biens, les dispositions d’une cou
tume abolie.
Dans le fait, le legs universel fait par madame de
Chazerat, est en opposition avec ces maximes qui sont
d’ordre public ; car il a été démontré 1.° que madame
de Chazerat a voulu rétablir, entre ses héritiers, l’ordre
de succéder établi par la coutume d’A uvergn e; qu'elle
avait pris cette coutume pour règle générale d e la dis
tribution de ses biens;
2.° Q u’elle a voulu une distinction de ses biens e n
acquêts et en propres, suivant les principes et la juris
prudence de cette coutume ;
3 .°
Q u’elle a voulu un mode de représentation à l’in
fini, tel qu’il était suivi dans cette même coutume.
L e jugement du tribunal civil de R i o m , du 22 juin
1808, qui a p ro n o n c é la nullité de ce legs universel, a
donc fait, en décidant ainsi, une juste application des
principes; et le consultant est bien fondé .à espérer
qu’ une décision aussi sage, et aussi conforme à l’esprit
qu’à la lettre de la lo i, sera confirmée par la Cour
d’appel de R iom.
D é l i b é r é par les a n c i e n s jur is c on s u lte s so u ss ig né s , à
P a r i s , c e 24 j a n v i e r
1809.
D A R D , DESÈZE, L A C A L P R A D E , B E L L A R T .
A RIOM,
DE L’IMPRIMERIE DU PA L A IS , CHEZ J . C . SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
représentation à l'infini
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Testament : 9. un testateur a-t-il suffisamment exprimé son choix en désignant ses légataires, collectivement, par l’indication certaine de leur origine ? - l’article 1390 du code civil s’applique-t-il aux testaments ? doit-on considérer comme valables des dispositions qui seraient faites sans la désignation particulière de chaque légataire, et par une expression collective en faveur de ceux qui auraient été appelés à succéder suivant les règles de la représentation à l’infini établie par uns coutume abrogée ? ces dispositions sont-elles valables, surtout lorsque l’on ne s’en est pas référé d’une manière générale à la coutume abrogée, et lorsque les termes du testament suffisent, soit pour reconnaître les légataires, soit pour déterminer le mode du partage et l’amendement de chacun ? peut-on, sur des présomptions, étendre un legs au-delà des expressions de la clause qui le constitue ? 19 – 19.
10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
64 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1908
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1909
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53360/BCU_Factums_G1908.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Joze (63180)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
représentation à l'infini
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53359/BCU_Factums_G1907.pdf
659fb64667025af029e6f76dd21ff6ba
PDF Text
Text
CONSULTATION.
■ IB I m
VU
le testament olographe de la dame de Chazerat, en
date du 26 messidor an 9, par lequel, entr’autres disposi
tions, on lit la suivante, qui fait l’objet de cette consulta
tion : « Quant à la propriété de mes b iens, mon intention
» étant, autant q u 'i l dépend de m oi, de les faire re» tourner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» dont ils me sont parvenus, je donne et lègue tout ce
» dont il m’est permis de disposer suivant la loi du 4
» germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de la bran» che de mes aïeul et aïeule paternels, et de celle de
» mon aïeule maternelle ,
m e
qui seroient en ordre de
succéder, suivant les règles de la représentation
» A l’in fin i, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
» Coutume d'Auvergne , pour être partagé entre les
A
�» trois brandies au marc la livre de ce qui m’est p ar-,
» venu de chacune desdites branches , et etre ensuite
» subdivisé dans chacune d’elles suivant les mêmes
» règlps de la représentation à l'in fin i, et néanmoins
» je veux et entends qu’avant la division et subdivi» sion, il soit pris et prélevé sur la masse totale des biens
» compris au présent legs, d’abord le montant de mes
» legs particuliers, et ensuite le sixième du sui’plus, que
» je donne et lègue au sieur larradèche-de-G rom ont,
» iils lîné, et au citoyen Sablon-Dueorail, aîné, clia» cun par moitié. »
V u les deux codicilles, postérieurement faits par ladite
dame, l’un en date du 7 floréal an 10, et l’autre du 14
messidor an 11 , postérieur celui-ci à la loi du 1 3 floréal môme année, sur les donations et tcstamens.
Dans ce dernier, qui est relatif à cette consultation,
on lit les expressions suivantes : « La nouvelle loi
« in’ayant accordé la faculté de disposer de la totalité
« do mes bien s, je veux et entends que le legs uni« vcrscl que j’avois fait par le susdit testament, en
t< faveur de mes parons de l’estoc de
mes aieul et
« aïeule paternels, et de ceux de l’estoc de mon aïeule
a malernellp’V de tout ce* dont il m’étoit permis de
« d isp o se r 'par'la--loi-du t\ germinal an 8 , ait son effet
« pom- la tolalité de'iiltfs biens; .sauf leà divisions et
�.(,3 )
. « subdivisions a faire 'entre mesdits héritiers, de la
« manière expliquée audit ;testament ; sauf aussi mes
« legs particuliers, et les dispositions par moi faites
« en faveur de mon mari *, à tout quoi il n’est rien
« dérogé par le présent codicille. »
,,
V u l’arbre généalogique où. sont rapportés les trois
estocs dont les descendans sont institués liéi-itiers, et
même le quatrième estoc de l’aïeul maternel, qui dans
cet arbre est marqué comme une tige dont il n’est
parvenu aucun bien à la testatrice.
V u le jugement du tribunal civil de R io m , dépar
tement du Puy-de-Dôm e, du 22 juin passé, p ar lequel
il a été d it, « que sans s’arrêter ni avoir égard audit
« legs universel, fait au profit des trois branches d’hé« ritiers y nommés, et compris au testament olographe
« de la dame de Chazerat, du 24 messidor an 9 , et
« codicille du 14 messidor an 1 1 . . . . lequel legs uni« versel est déclaré nul et de nul effet, et comme
« non écrit dans ledit testament. »
I nterrogés s’il r
Nous
répondons
a lieu a la réparation de ce jugement,
que la singularité de ce jugem ent, qui
ne peut que surprendre et étonner tout ju risco n su lte,
nous oblige à développer dans cette consultation les prin
cipes fondam entaux sur les in stilu lio n s, legs universels,
et autres dispositions testamentaires j principes que nous
A 2
�( 4 ) .
aurions dû omettre , s’il ne falloit y recourir pour démon
‘
*
trer la futilité et l’erreur des raisonnemens, soit considérans de ce tribunal.
Nous observons d o n c, en premier lie u , qu’il est de
principe certain et in con testab le, qu’il faut dans tout
testament ou disposition testamentaire, considérer, i°.
la capacité de pouvoir disposer 5 20. la form e, soit les
formalités extrinsèques \ 3 °. le fond du testament, soit
la nature de la disposition \ 4°- la chose dont on dispose 5
5°. les causes, conditions, modes et dém onstrations appo
sées auxdites dispositions.
Tous ces points ne sont pas réglés par les mêmes
principes. Il n’est pas ici question , ni de l’incapacité
du testateur, ni de la forme extrinsèque de la dispo
sition , ni de la nature de la disposition , c’est-à-dire de
legs ou substitution proh ibée, ni de la qualité de la
chose dont oil a -disposé, c’est-à-d ire, si prohibée ou
non*, mais il ne s’agit que d’examiner le dernier point,
soit la nature des causes, modes, et, si l’on v e u t , même
des conditions apposées au legs dont il s’agit.
Dans celte discussion, -ce que l’on doit singulièrement
observer, c’est qu’une condition impossible, ou meine
prohibée par les lois, 11e rend point, ni d’après le droit
I,. i4 d ec o a4 i a i t i t . , 1.
3 et 3ode c o u d ., et dera.,
romain , ni d«iprès le Code Napoléon , la disposition
art. 900 du Cod, Nap.
nulle, i-t qu’au contraire., detmhitur co n d itio , cl pro
�( 5 )
non scripta habetur. « Dans toute disposition entre-vifs
,
*
.
« et testamentaires , est-il dit
à
l’article 900, les condi- 600du Code Napoléon.
« tions impossibles , celles qui seront contraires aux
« lois ou aux mœurs, seront réputées non écrites. »
Ce q u i, d’après le droit romaiu et le Code N apoléon,
à l’article 1 172, n’a pas lieu dans les contrats et obligations.
Si ce principe a lieu dans les conditions qui paraissent
contenir la cause finale de la volonté du testateur, il
doit avoir plus lieu encore lorsqu’il s’agit de simple
inode ou démonstration, que les lois môme ne consi
dèrent pas comme la condition aussi rattachée à la volonté
du testateur; et c’est là la maxime que nous voyons éta
blie dans les lois 3 y, 74, §. 1 et 2, au litre du dig. de
cond. et dem. et dans la Novelle 1 de Justinien ; « Quoties
« secundum voluntatem testcitoris facere com pellitur,
« f/uoties contra legem nihil sit juturum . . . .
et tamen
« à legato eum non esse repellendum. »
A ces principes sur les dispositions testamentaires, il
faut en ajouter un autre également certain et incon
testable , c’et-à-dire, que toute fois qu’un testateur, pour
mieux désigner sa volonté, exprime une cause, ou fait
une démonstration q u i, ou n’existe pas, ou ne peut
exister, il faut, comme dit E.oer* avec tous les interprètes,
oter la haïsse cause et explication, et voir s’il résulte en* F it, de cond. et dem . , n.
4 , et in Jine.
l. i4.decond.în«tit.,i.
3o. de cond. et dom. art,
�Vbw
( <3 )
core de la volonté du testateur, et de la cliose disposée •,
parce qu’alors la fausse cause ou explication non nocet
legatario ,• mais, si detrahendo causam , v el demonslrationem, il ne conste plus de la chose léguée, la disposition
est nulle j et ce, parce que, comme dit l’auteur d’après
leg"' \'i6 s ^ deadirn" ^cs jurisconsultes romains, Quidr/uid demonstrandi grae t t r a n s f . i c g . , i . i 7 ,C od. tici (idditur rei jam satis demonstratajruslra est, et pro
de testam.
non scripto habendum ; et c’est d'après ce principe
même que, quoiqu’une institution ne puisse se faire contumcliæ signo, c’est-à-dire, en ne désignant l’h é ritie r que
par une action scélérate qu’il auroit faite , cependant
cette institution est efficace, si en ôtant cette désignation
L. 9 , S de her.
ignominieuse, il conste encore de la personne que le
mttit. testateur a vo u lu fa vo riser, p u r e cnirn instilutus videtur
cum maledicto,
l.
48.
S°-d- P!t- do
D e ce principe concluons donc que toute fois qu'une
hsr. inslit.
cause, une démonstration, soit majeure explication ou
expression même défendue, se trouvent dans une dis
position testamentaire , et que, eam detrahendo, c’està-dire, en la supprimant, il résulte de la personne et
de la chose léguée ces expressions, déclarations, démonstratrations et explications , quoiqu’erronnées et
même prohibées, pro non scriptis hahentur, et 11c vi
cient ni le legs ni l’institution.
Rons devons encore à ces maximes joindre celle que
�\$7
( 7 )
nous avons sur l'interprétation des contrats, et à plus
forte raison sur l’interprétation des dernières volontés,
qui selon les lois benigniore interpretationc sunt donando,
12àe «s- idr5$-
c’est-à-dire q u e , utile per inutile non vitiatur, que les
expressions doivent toüjours être entendues dans le sens
qu e, vitio eurent, d’où ne suit aucune absurde, et ut
actus potius valent quam pereat.
Posés ces principes incontestables, venons à l’espèce.
Nous avons déjà dit qu’il ne s’agit, ni de question de
forme, ni de l’incapacité du testateur, ni de la nature de
la disposition ou de la cliose léguée , mais seulement
d’expliquer les causes, modes, ou, si l’on veu t, condi
tions apposées à la disposition.
O r , d’après les principes ci-dessus, à supposer même
ces causes, modes ou conditions contraires aux lois, on'
doit les avoir pour non-écriles, mais elles ne vicient
point le legs : donc, à supposer que le mode avec lequel
la testatrice a voulu que se partageât le legs, fût même
une condition ou mode contraire aux lo is, cela ne peut
le rendre nul.
Ce principe certain suffit déjà pour détruire tous les
considérans du tribunal, tirés de ’ce que la testatrice
a voulu rappeler une Coutume, c’est-à-dire, celle d’A u
vergn e, et que sa'disposition se réglât sur cette cou
tume
rappel, qui selon le tribunal seroil p ro h ib é,
et contiendrait un m ode, ou si l’on veut encore , une
L, ,7dcicg.
�(
8 .)
condition ou démonstration contraire aux lois. En sup
primant après les paroles, suivant les règles de la re
présentation à V injini, celles qui suivent, c’est-à-dire,
telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d’A u
vergne , il est certain qu’il conste de la volonté du tes
tateur et de la chose léguée ; ces expressions donc, si on
les croit contraires à la lo i, ne peuven t, en les suppri
mant , vicier le legs.
L e tribunal veut argumenter de l’article 1390 du Code
Napoléon ; mais , à supposer en core, ce qui n’est pas ,
que l’acte fût n u l , si dans un contrat de mariage on
se fût rapporté à une coutume de la même manière
que la testatrice s’e st, dans l’espèce , rapportée à la Cou
tume d’A u v e rg n e , il nous suffira pour ré p o n d re au
trib u n al c iv il, d ire que l’on ne peut des contrats ar
gumenter aux dispositions de dernière volonté, puis
que
dans celles-ci les modes et conditions contraires
aux lois ne les vicient p oin t, et qu’elles vicient les
actes entre-vifs.
« Ce n'est pas que je prétende, ( dit Furgole en son
» Traité des Testam ens, tom. 2 , chap. 7 } nombre 9 ,
» p. G ), qu’un testateur qui blesse la loi en quelques
» parties perde entièrement le droit de disposer, et
» que tout ce qu’il a fait soit nul; il ne doit ctre privé
» de son pouvoir que dans celte partie par rap p o rt k
laquelle
�'( 9 )
» laquelle il a contrevenu''à la loi ; car tout le reste
» qui y est conforme où qu’elle ne réprouve pas,.doit
» demeurer dans sa force.
. j' '
Non confundamus, quœso, contractus, stipulationes,
et alia quæ inter vivo s geruntur, cum iis quæ testamentis ac aliis ultimis voluhtatïbus expediuntur, ne
inde absurda, et legibus contraria, multa sequantur, ne
juris ordo evertatur, ne forma ejus et solemnia tollantur: ne falsitatibus et dolis aditus aperiatur. Prœclarè
Ulpianus : verba contraxerunt, gesserunt, non pertinent
ad ju s testandi. Verba ff. de verb. sig. — F a ch in ., t. i,
liy. 6 , cliap. 71.
•
M ais le fait est q u ’on ne p eu t même dire dans l’es
pèce que la testatrice ait apposé, ni eût l’intention
d’apposer à ce legs une explication, une relation, une
démonstration, un mode contraire aux lois.
En effet, il est certain qu’elle commence par ne vou
loir disposer , quautant q u il dépend d'elle ; elle est
donc semblable à ces testateurs, qui disent qu’ils lais
sent ce que la loi leur permet de laisser. O r, dans l’un
et l’autre cas, il est clair qu'on ne veut agir ni en haine
ni en fraude des lois.
Cette volonté si clairement manifestée dans le com
mencement de cette disposition , continue , lorsqu’elle
dit : >1 tout ce dont il m ’est permis de disposer sunont
B
�( IO )
là loi (la 4 germinal an 8. C ’est donc les nouvelles
l o i s e t non les abrogées , qui font la base de sa dis
position.
Elle veut favoriser ceux qui descendent des trois estocs
par elle désignés. O r , n’ayant ni aseendans ni descendans, rien ne l’empêchoit de le faire, et lorsque même
la loi du 4 germinal nn 8 ne lui permettoit pas de disr
poser de la totalité de ses biens, elle n ’a disposé que
de ce dont elle pouvoit disposer, et elle n’a parlé de
la totalité de son hérédité , qu’après que le Code Na
poléon lui en donnoit le p o u vo ir, selon les lois des
douze tables, uti pater fam ilias legassit, ita ju s esto.
Toute sa marche est donc conforme aux nouvelles lois.
En léguant les biens y désignés aux descendans des
trois estocs nom m és p a r e lle , elle n ’u fait cette dispo
sition qu’au profit tic ceux qui étoient déjà nés à son
décès, et la loi n’exige point que les légataires soient
d. ieg. s s , de hed. désignés par leurs noms, mais il suffit qu’ils existent, et
que indubitabili sigiio demonstrentur.
Elle les appelle suivant les règles de la représenta
tion i l’infini. O r , les règles de la représentation A l ’iniini
sont connues , et cette volonté peut avoir sou effet,
sans blesser ni les lois ni Tordre p u b lic, puisqu’il lui
lütoit permis d’appeler qui -elle vouloit à ce legs. ,
Sa dwj>ositioü se voitv, se conuo^l * t>’ivq>Uqnçv et ¡pw#
�H\
( 11 )
avoir son effet'par les seules expressions' de la repré
sentation à l’infini ; les autres donc qui su iven t, telle
q u elle a voit lieu dans la ci-devant Coutume d’Auvergne,
ne peuvent en rien influer sur son effet, puisqu’on disant
suivant les règles de la représentation à l’in fin i, eût*
a dit tout ce qui est nécessaire à cet égard, et les ex
pressions suivantes, selon, etc., ne contiennent qu’un
pléonasme , soit une déclaration inutile.
Dans la série et lecture de ses dispositions, on voit
qu’elle n’a consulté que les nouvelles lois, qu’elle s’y
est toujours rapportée \ on voit en' outre qu’elle n’a
pas dit telle q u e lle a lieu , mais telle q u elle avoit lieu }
expression qui prouve q u ’elle a reconnu cette coutume
anéantie par les nouvelles lois, et qu’elle ne l’a indi
quée que majoris demonstrationis causé.
Comment donc le tribunal a-t-il pu un seul instant
soupçonner que sa disposition fût contraire à l’ordre
pu b lic, et y appliquer l’article G du Code NapoléonP
puisque la loi qui est basée sur l'ordre public a tou
jours été le guide de sa volonté et de ses dispositions,
puisque cette même loi permet aux testateurs , qui n’ont
ni ascendans ni descendans, de disposer au profit de
qui mieux leur plaît \ puisqu’enfin le mode de divi
sion ne regarde, ni la faculté de tester, ni la nature
de la disposition , ni la qualité de J» chose lé g u é e ,
B a
-<J‘
�-il
( 12 )
unique cas oïi si le testateur vouloit lieurter la l o i ,
sa disposition seroit frappée de nullité 5
Rien donc n’a paru plus étonnant au soussigné, que
la singulière opinion du tribunal à cet égard ; opinion
qui, contraire à tout principe de droit, a donné lieu
à un jugement qui ne peut qu’être et qui doit être
émendé.
Le
tribunal pose même en matière de contrat dotal
une maxime erronnée, et contraire à l’article 1390;
car, outre ce que j’ai dit ci-dessus, qu’on ne peut dans
semblables cas de mode, ou condition contraire aux lois,
rien inférer pour celles apposées dans les dernières vo
lontés , il est encore à remarquer qu’il est erronné de
dire que si des époux stipuloient expressément telle
ou telle ch o s e , en ajoutant ensuite tel que cela e'toit
porté par la coutume, leur stipulation fût nulle , parce
qu’il est évident qu’ils n’ont pas stipulé d’une manière
générale selon la coutume , ainsi que dit l’article sus
cité, ce qui arrivcroit s’ils disoient généralement et sim
plement, et sans autre spécification, nous stipulons selon
la Coutume de Turin, P a r is , etc. Mais s’ils avoient
stipulé une somme déterm inée, ou fait une convention
expresse, par exem ple, à T urin, que l’nugmcnt de la
dot seroit un tiers, que le mari gagneroit la moitié
de la d o t , si l’épouse vient à mourir sans enfans, on
�( 13 )
ne petit soutenir que cette stipulation soit nulle : dans
le cas de cette stipulation expresse, de telle ou telle
ch ose, l’addition qu’ils auroient faite, ainsi q u ile s t porté
par la coutume, ne nuiroit pas à la stipulation, puis
que l’article ne- défend pas de nom m er, dcmonstrationis c a u s é , les coutumes ; mais il défend seulement de
stipuler, d'une manière générale\ que leur association seroit réglée par les coutumes, stipulation bien différente
de celle qui est faite expressément de telle chose, quoi
qu’ensuite la coutume soit énoncée dans l’acte ; car ce
n’est point alors la coutume qui règle la stipulation,
mais les objets qui y sont expressément déterminés.
En un m o t , lorsque les époux se rapportent en
général, et sans autre, à une coutum e, comme cette
coutume est abrogée, elle ne peut plus rien opérer,
devant la considérer comme si elle n’a v o if jamais existé.
Il
ne résulte point de ce que les contractans ont voulu
faire, attendu qu’on ne peut alléguer la coutume pour le
démontrer.
Mais s’ils stipulent expressément telle ou telle chose ,
en ajoutant même , ainsi q u i l étoit porté par la cou
tume , alors la preuve de leur volonté et de la chose
stipulée existe indépendamment de la mention faite de
la coutume.
C est donc contre tout principe de d r o i t , et contre
la disposition m êm e de l ’article i 3 qo du G o d e , q u ’il
�( i4 )
a plu au tribunal de lui donner cette étrange interpré
tation.
Il ne reste plus qu’à répondre à l’autre interprétation
encore plus étrange de la loi du 3 o ventôse an 12 ,
qui a abrogé toutes les coutumes; car ici il n’est point
question de donner force à une coutume abrogée; mais
il s’agit simplement de la mention d’une coutume, faite
en addition, ou, pour mieux expliquer la volonté du
testateur, déjà assez expliquée et assez claire par les
expressions antécédentes de la division de son hérédité,
selon les règles de la représentation à l’infini, qui s’enten
dent très-bien, sans la mention ou énonciation de la Cou
tume d’Auvergne.
D ’ailleurs comment supposer que la testatrice ait voulu
au m épris des lois faire revivre une coutume qui ne lui
permettoit pas de tester ainsi qu’elle l’a fait, et qui vouloit
une succession ab intestat, tandis qu’elle en ordonnoit
une testamentaire.
D ’après tous ces motifs, je suis d’avis, et même plus
qu’intimément persuadé, que le jugement du tribunal
doit être réparé, et qu’en son émendation il sera déclaré
que le legs dont il s’agit doit avoir son entière exécution,
Turin , 3 o novembre 1808.
Signe
C
laude
B E R T H IK B ., jurisconsulte,
ancien sénateur et avocat général.
�( 15 )
Je soussigné, procureur général impérial près la cour
d’appel séante à Turin , certifie la sincérité des qualités
prises par M . G. B erth ier, rédacteur de l’écrit ci-dessus.
T u rin , 9 décembre 1808.
Signé T I X I E R .
V u , les soussignés sont du même avis.
Signé C harles B A L , avocat.
V ictor B R U N , professeur en droit, ins
pecteur de l ’académie de législation.
C A Y E T A N - A M B E L , jurisconsulte.
Louis F E R R E R O , jurisconsulte.
B E R T O L O T T E , avocat ju ris
consulte.
H enri
J oseph R O L L A N , avocat, censeur de
l'académie de jurisprudence.
G I A C O M E T T E , jurisconsulte.
A C L E R M O N T , de l'imprimerie de L a n d r i o t ,Imprimeur de la Préfecture f
et Libraire , rue Saint-Genès, maison ci-devant Potière.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Berthier
Bal
Brun
Cayetan-Ambel
Ferrero
Bertolotte
Rollan
Giacomette
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
représentation à l'infini
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Testament : 9. un testateur a-t-il suffisamment exprimé son choix en désignant ses légataires, collectivement, par l’indication certaine de leur origine ? - l’article 1390 du code civil s’applique-t-il aux testaments ? doit-on considérer comme valables des dispositions qui seraient faites sans la désignation particulière de chaque légataire, et par une expression collective en faveur de ceux qui auraient été appelés à succéder suivant les règles de la représentation à l’infini établie par uns coutume abrogée ? ces dispositions sont-elles valables, surtout lorsque l’on ne s’en est pas référé d’une manière générale à la coutume abrogée, et lorsque les termes du testament suffisent, soit pour reconnaître les légataires, soit pour déterminer le mode du partage et l’amendement de chacun ? peut-on, sur des présomptions, étendre un legs au-delà des expressions de la clause qui le constitue ? 19 – 19.
10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1907
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53359/BCU_Factums_G1907.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Joze (63180)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
représentation à l'infini
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53358/BCU_Factums_G1906.pdf
428e3a66f1c0683c14e0db1612bda1cd
PDF Text
Text
CONSULTATION.
LE C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu le testament:
et le codicille de m adam e de C h a z e r a t , la consultation
délibérée à Clermont -Ferrand , le 29 juillet 1808 , et
le jugement rendu par le tribunal de R io m , le 22 juin
précédent,
P artage l’opinion établie dans la consultation du 2 9
juillet 1808, dont les raisons lui paraissent suffire pour
démontrer l’erreur dans laquelle les premiers juges sont
tombés. On se seroit donc dispensé d’une nouvelle dis
cussion , si les parties intéressées n’eussent témoigné le
désir que le conseil soussigné motivât néanmoins particu
lièrement son adhésion à cette opinion.
Alors , pour donner à ce nouvel examen un objet
et une utilité qui lui soient propres, on suivra le juge
m ent du tribunal de première instance dans ses motifs,
et on s'attachera à en faire apercevoir l'illusion.
A
�( 2 )
L e tribunal de Riom s’est déterminé à déclarer nuls
les testament et codicille de madame de Chazerat, parce
qu’il a estimé qu’en léguant tous ses biens à ses parens
de l’estoc de ses aïeul et aïeule paternels, et de l’estoc
de son aïeule maternelle , pour être partagés e n tr e u x ,
selon les règles de la representation ¿ï Vinfini, telle qu elle
étoit établie par la ci-devant coutume (VAuvergne , ma
dame de Chazerat a remis en vigueur une coutume
abolie, a subordonné sa disposition aux règles de cette
coutume, et en cela est contrevenue ù des lois d’ordre
public qui le lui interdisoient.
On rcconnoîtra sans aucun doute le principe posé
par le premier attendu que présente le jugement du
tribunal de Riom , que nul ne p e u t, par des conventions
particulières, déroger a u x lois qui intéressent l’ordre
public et les bonnes mœurs. La question est de savoir,
dans le la it, si les dispositions de madame de Chazerat
dérogent à ces lois. On accordera encore q u e, dans les
dispositions testamentaires, la l'orme n’est pas laissée à
l’arbitraire de celui qui dispose ; mais 011 nie formelle
ment que Vordre qu’il doit observer dans la répartition
de ses biens, soit du domaine pu b lic, qui doive être pour
lui-même , comme dit le tribunal de liiom >une barrière
insurmontable : cette idée est non-seulement inadmis
sible , mais encore inexplicable ; car comment s’y prendroit-on pour établir que l'homme qui use de la fa
culté quo la loi lui donne de disposer en laveur de qui
il lui plaît, ait à observer un ordre déterminé qui soit
du domaine public? Quel ordre doit-il donc observer?
S’il est soumis à un o r d r e s ’il y a pour lui une bar-
�M2-
.
.«
(3.)
rière>'insurmontable, il n’a plus l’entière liberté de sa
disposition. Lorsque le disposant excède la faculté que
la loi lui donne , c’est alors qu’il francliit la barrière \
mais il ne s’agit point de cela. Madame de Cliazerat
n’ayant ni descendans ni ascendans, avoit l’entière dis- .
position de sa fortune : il n’y avoit point de barrière
pour elle. Qu’on dise alors quel ordre et quelle barrière
on veut qu’elle ait dû ren co n trer dans la répartition
qu’il lui plaisoit d’en faire ? Assurément la loi ne lui
en a imposé d’aucune espèce. Cette répartition étoit,
comme la disposition, en sa puissance la plus absolue;
et l’on ne conçoit pas comment on a pu placer le droit
de cette répartition dans le domaine public , car rien
n’est plus manifestement du domaine privé.
O n a du re le v e r d’abord cette b izarre p roposition ,
parce qu’elle est le germe de la fausse opinion que le tri
bunal de Riom s’est formée des dispositions qu’il a cru
devoir annuller.
Parmi les lois inviolables dont le tribunal de Riom a
entendu parler, il invoque l’art. i 3go du Code Napo
léon , qui ne permet pas aux futurs époux de stipuler
d'une manière générale que leur association sera réglée
par Vune des coutumes qui régissoient ci-devant les
diverses parties du territoire , et qui sont abrogées.
Sans doute c’est là une prohibition formelle , et elle
est d’ordre public ; mais il s’agissoit d’établir que cette
prohibition s’appliquoit à l’ espèce j et certes , ce n’etoit^
pas facile.
Pour y arriver , on a répété que la faction du testa
ment étoit d’ordre public. Que veut-on dire par la fa cA
a
�( 4 )
tion ? Ce mot vague , qui ne doit s'entendre que du
matériel de l’acte , est mal employé ic i, où il s’agit du
fond de la disposition. La nécessité où l’on s’est trouvé
de se servir d’expressions équivoques, annonce assez
que les idées qu’on a voulu rendre n’étoient ni vraies
ni claires.
On dit que la disposition de l’art. 1390 est fondée
sur Vavantage d ’une loi uniforme pour la société, et
que c e s t s’élever contre cet intérêt , que de se faire un
code à s o i, et de fa ire renaître des lois anéanties ;
que ces motifs se doivent appliquer a u x testamens
comme auoc pactes de m ariage, la tranquillité des
fam illes n étant pas moins compromise , en T'appelant,
en tenues généraux , dans un testam ent, une coutume
abolie , et avec elle toutes les difficultés quelle peut
faire naître.
Cette doctrine pêche dans tous ses fondeincns} et d’a
bord le Code Napoléon à sans doute été donné pour
faire cesser la multiplicité des lois et des coutumes qui se
partageoient la France, et pour avoir un droit uniforme.
Cependant, dans les diverses matières de ce droit, une
seule admet deux régimes, au choix des contractans, et
c’est positivement le contrat de mariage, dans lequel il
est permis d'opter entre le régime dotal et celui de la
communauté. Ce contrat n’est donc pas uniforme dans
l ’E m p ire, et lorsqu’on veut se fonder sur l’uniformité,
il faut convenir que l’exemple est mal choisi. L ’article
i 3qo n’offre dès-lors qu’une limite posée à la permission
générale de l’art. 13 8 7 , et à la faculté particulière de
l’art, x^qt. C’est, comme le dit l’art. 138 7, une modiji-
�W5
( 5 }
cation de'là faculté générale de faire lès conventions de
mariage comme les époux le jugeront à propos, et de
celle d’opter entre le régime dotal ou la communauté.
Comment veut-on après cela rattacher cet article aux
dispositions testamentaires, pour la répartition de la part
disponible, et montrer que ce soit s’élever contre l’uni
formité de la loi, et se faire un code à soi, que de prendre
pour règle de la répartition d’un legs universel un mode
suivi dans une ancienne coutume. Existe-t-il un article
du Code qui règle la manière dont un testateur, qui
donne ce que la loi lui permet de donner à qui bon
lui semble, le répartira entre ses légataires , parens ou
étrangers5 qui détermine, par exemple, comment il di
visera son bien dans les différentes lignes de sa parenté,
s’il* veut don n er i\ des paren s de diverses lig n es ? Non
assurément. Comment le vœu d’une loi uniiorme seroit-il
donc violé, là où il n’y a de loi que la volonté du tes
tateur ? Comment l’intérêt public seroit-il compromis,
par la manière quelconque, d’appliquer une libéralité
permise, qui ne touche que celui qui la fait et celui
qui la reçoit? N ’est-il pas évident qu’en cette matière
le testateur, en se faisant un code à lu i, ne fait qu’user
de la plénitude de sa volonté que la loi lui laisse , et à
laquelle le public n’a plus aucun intérêt.
Quand la volonté du testateur est constante en la forme
exigée par la loi, pour rendre cette volonté certaine,
l’application de cette volonté ne présente plus qu’un in
térêt privé; l’invocation de l’ordre public et des bonnes
mœurs, sur le mode .de répartition d’un legs universel
du bien disponible, e$t donc aussi déplacée qu’il soit
�(G)
possible : c’est néanmoins tout le fondement du système
que le tribunal de Riom a créé.
L ’assimilation du testament, sur ce point, avec le con
trat de mariage, est donc enfin on ne peut pas plus fausse j
puisque, premièrement, la loi dispose expressément sur
le contrat social des époux, et détermine limitativement
les pactes qu’elle leur permet} et secondement, les pactes
matrimoniaux intéressant les familles dans leurs dispo
sitions, ces dispositions sont d’intérêt public.
Ce qui achève de caractériser la fausse application qu’a
faite le tribunal de R io m , c’est l’expression de l’art. 1 3f)0
lu i-m êm e, q u i n e p ro h ib e que la stipulation faite d’ une
manière générale, de se régler dans les conventions ma
trimoniales par une des coutumes abolies, mais non point
de stipuler nominativement telle ou telle disposition por
tée par ces coutumes.
P a r e x e m p le , y au ro it-il contravention à l’art. 1890,
s’il étoit dit que le mari venant à prédécéder, la femme
auroit un douaire de la moitié des biens de son mari en
usufruit, tel qu’il étoit réglé par la Coutume de Paris?
On ne peut pas le penser} car ce ne seroit point là
régler leur association, et.encore moins la régler d’une
manière générale. Ce que la loi a entendu par cette
manière générale, c’est la stipulation autrefois en usage,
que les époux soumettoient leurs conventions matrimo
niales 011 leur communauté aux dispositions de telle cou
tume par laquelle leurs droits scroicnt régis et gouvernés.
Mais il n’est point nécessaire de s’appesantir ici sur
les stipulations matrimoniales, et sur l’application de l’ar
ticle i 3«)o, ¿ telle ou telle de ces stipulations, car il est
�( 7 )
évident que cet article n’en peut recevoir aucune à la
disposition que fait un 'testateur de la portion disponible
de ses biens, et que ce sont deux choses qui ne peuvent
nullement être assimilées.
C ’est sans fondement, et arbitrairement, que le tri
bunal de Rioin a établi sur cet article la nullité qu’il a
prononcée du legs universel de madame de Cliazerat,
parce qu’elle a ordonné que ses biens seroient partagés
entre les trois branches de sa fa m ille , q u elle dénomme ,
suivant les règles de la représentation à l’in fin i, telle
quelle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d ’Auvergne.
Ce principal fondement de l’opinion du tribunal de
R iom , pris dans l’article i 3go du Code Napoléon, et
dans la prétendue similitude de droit entre la répartition
d’un legs universel, et l’association des époux, étant dé
montré faux , que reste-t-il ?
Prouvera-t-on jamais qu’en soi, cerappeld’un mode de
répartition admis dans une ancienne coutume, et son
application par un testateur au partage qu’il veut faire de
son bien disponible h ceux de ses parens qu’il institue,
attente à l’ordre public, blesse la société, et doive rendre
sa disposition nulle?
Eli ! qu’importe à la société, que le legs de madame de
Cliazerat soit réparti entre scs légataires de telle ou telle
manière, selon les règles de la représentation de la Cou
tume d’A uvergne, ou selon toute autre j que madame de
Cliazerat ait renvoyé aux règles de cette coutume qu’elle
pouvoit écrire tout au long dans son testam ent ? Com
ment cette indication de la coutume peut-elle vicier et
anmiller son legs ?
�'
( 8 )
Quand on pourroit penser que madame de Chazerat
ait fait en cela une chose inconvenante et mal sonnante,
où est la loi qui défend de jamais parler d’aucune loi an
cienne , de la prendre pour modèle dans une disposition
quelconque, à peine de nullité ? On a fait voir qu’il
n’étoit pas permis de tirer cette conséquence de l’ar
ticle i 3qo du Code Napoléon.
Les nullités ne s’inventent pas; il faut une disposition
expresse de loi pour en établir. Que faudroit-il davan
tage pour faire proscrire l’opinion du tribunal de Riom !
En vain le tribunal de Riom dit-il qu’il y a nullité
résultant de toute disposition de loi négative et prohi
bitive ; où est cette loi n ég a tive et prohibitive pour le
mode de répartition d’un legs universel ?
Ce tribunal a dit qu’en disposant comme elle l’a fait,
madame de Chazerat avoit remis en vigueur une cou
tume abolie : assurément cela n ’élo it pas en sa puissan ce,
et il y aui’oit en cela contravention à la disposition gé
nérale qui prononce l’abolition.
Mais c’est encore là où le tribunal de Riom s’est ma^
nifesteinent égaré.
Comment concevoir qu’un citoyen puisse remettre en
vigueur une coutume abolie ? cela lui est impossible dans
le fait comme dans le droit. Si l’acte q u ’il veut faire lui
est interdit par le Code, cette interdiction sera le prin
cipe essentiel et suffisant de la nullité de son acte, et
le rappel qu’il aura fait d’une loi ancienne n’y ajoutera
lien*, s’il lui est permis, l'acte tirera son autorité du
Code, et non du rappel de la loi ancienne : cela est évi
dent : l’acte ne peut donc recevoir de ce rappel ni vice
ni
�I tcj
( 9 )
ni vertu. Ce n’est pas de cette loi ancienne que l’acte
tire son droit, mais de la volonté du disposant, autori
sée par la loi. A insi, dans l’espèce; madame de Chazerat
a voit reçu du Code la faculté de disposer de tous ses
Liens en faveur de qui elle voudroit; et par conséquent,
de les répartir comme il lui plairoit entre plusieurs dona
taires ou légataires. Lors donc qu’elle a pris pour mo
dèle et pour règle de cette répartition la représentation
telle qu’elle étoit établie par la Ccfutume d’Auvergne,
cette coutume ne reprend pour cela aucune force de
loi 5 la disposition reçoit toute son autorité de la volonté
de madame de Chazerat, et du Code qui laissoit cette
volonté entièrement libre.
La Coutume d’Auvergne n'est manifestement appelée
que pour indication, pour démonstration plus ample
de la volonté de la testatrice, qui auroit pu écrire dans
son testament tout ce que la Coutume disposoit sur ce
point, et qui s’en est dispensée en déclarant qu’elle vouloitfaire comme faisoit autrefois la Coutume d’Auvergne,
O '
ce qui est la même chose que si elle en eut couché les
dispositions dans ce testament.
Comment le tribunal de Riom combat-il des idées aussi
simples et aussi claires? par une suite d’argumentations
très-peu claires et nullement concluantes, et qui repo
sant sur les fondemens vicieux qu’on vient de détruire ,
disparoissent avec eux.
Il prétend que c’est jouer sur les mots, et abuser des
termes, que de ne voir dans le rappel de la Coutume
d’^Auvergne , qu’une démonstration, une indication de
la volonté de la testatrice, lo rsq u e la (lame (le Chazerat
B
�( 10 )
veut disertement que cette Coutume soit la règle du par
tage de ses biens.
Mais comme le tribunal est entraîné lui-même à le
dire , c’çst madame de Chazerat qui le veut ; c’est donc
la volonté de madame de Chazerat qui opère. La cou
tume n’agit point \ elle n’est donc là qu 'exem pli ca u sa ,
elle n’est que pour démonstration. Ce n’est point la
coutume en so i, et comme lo i, qui règle le partage 5
c’est la testatrice, qui a indiqué l’ancienne disposition
de cette coutume, comme étant celle qu’elle entendoit
donner pour règle à ses légataires. Et en cela , il ne
p eu t y a vo ir ni vice ni conséquence , p u isq u e encore
une fois la loi ne mettoit au cu n e limite à la volonté
de la testatrice , et que la société n’avoit aucun intérêt
ù la manière dont madame de Chazerat répartirait son legs.
L a justesse de ce raisonnement se démontre par la
comparaison du cas sur lequel dispose l’art. 1390 , dont
le tribunal de Riom s’est appuyé.
Pourquoi y auroit-il contravention et nullité, si des
époux soumettoient leur société conjugale aux disposi
tions d’une coutume abolie ? Ce 11’est pas parce qu’ils
remettraient en vigueur une coutume abolie, ce qui
est absurde, mais parce que la loi actuelle in terd it tout
autre mode de société c o n ju g a le , que le régime dotal
eu la communauté gouvernée par les règles que le Code
établit : il n’est donc plus en la puissance des contractons
d’en vouloir un autre.
Au contraire , dans l'espèce actuelle, la loi permettait
à la testatrice de donner et de répartir tous ses biens
comme elle voudrait. L e mode de cette répartition,
�( ” )
quelque part qu’il fût p ris, étoit donc à sa disposition ,
et prenôit son autorité dans sa volonté seule ?
Pour trouver une prohibition en ce cas, il faudroit
aller jusqu’à dire que la seule indication d’une ancienne
loi , son nom seul prononcé dans une disposition, est
une atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs ; et
qu’ayant la faculté la plus absolue de disposer comme
cette lo i, on peut bien le faire, mais non pas le dire.
On ne pense pas qu’aucun homme raisonnable voulût
soutenir cette proposition.
D ans le fa it et dans la réalité, dit le tribunal de Riom ,
il est impossible de faire ce partage , sans être guidé par
la coutume d’Auvergne > sans rechercher l’origine des
biens dans les lignes , et la règle fie leur subdivision
selon la coutume ; et s u r ce , le tribunal énumère toutes
les questions qui ont pu s’élever dans cette coutume.
Si cela est impossible, c’est qu’il est impossible aux
légataires de ne pas se conformer à la volonté de madame
de Chazei'at, et d’avoir autre chose que ce qu’elle a
voulu leur donner. Si elle eût écrit ces règles dans son
testament, sans parler de la coutume, n’auroit-il pas
fallu s’y conformer? Qu’a-t-elle fait de plus en indiquant
ces règles écrites dans la coutume , comme étant sa
volonté ?
L a coutume , continue le tribunal de Riom , n ’est pas
ici un simple mode , une simple condition de la dis
position ; elle en est inséparable, elle se lie et s’incorpoiv au partage : c'est elle qui désignera les vrais
héritiers de madame de C hazerat, et leur part dans
les biens.
R 2
�( 12 )
C’est toujours la même illusion. La coutume ne les
indiquera que par la volonté de madame de Cliazerat :
c’est donc cette volonté qui a g it, et qui institue réelle
ment les individus.
Cette application de la volonté personnelle à des
dispositions de coutume , et de cette action de la volonté
de l’homme dans l’usage de ces dispositions, trouve son
exemple dans le d roit, dans les statuts matrimoniaux.
Lorsque des époux se marioicnt sans contrat , la loi
du domicile leur en tenoit lie u , non pas par sa propre
force et vertu , non v i consuetudinis et in se , dit D u
moulin , mais p a r la volnnlé présumée des p a rtie s, qvii
étoient censées l’avoir tacitement adoptée.
Le tribunal de Riom examine s’il est vrai que madame
de Cliazerat ait rappelé la coutume d’Auvergne d’une
manière particulière, et pour une disposition spéciale.
I l soutient q u ’elle l’a fait d’ une m an ière générale , parce
qu’elle lui soumet généralement le partage de tous ses
biens.
Cette question n’est pas ici de grande importance}
elle ne doit pas exercer une influence directe sur la
décision de la cause. L e point fondamental est dans la
capacité de madame de Cliazerat de disposer , et dans
le principe q u i donne l’etre à sa disposition , et qui
n’est autre que sa volonté.
Si madame de Cliazerat a pu disposer de tous scs biens
et les répartir entre ses légataires à sa volonté, il im
porte peu de savoir jusqu’à quel point elle a pris la cou
tume d’Auvergne pour exemple de sa disposition.
-I outelois il est bon d’observer que le tribunal de
�( 13 )
Riom a confondu , dans ses argumentations, la disposi
tion de madame de Chazerat avec celle par laquelle elle
auroit purement et simplement subordonné sa succession
îi la coutume d’A uvergn e, et elle auroit laissé aux dis
positions de cette coutume à lui donner des héritiers.
Par exem ple, si madame de Chazerat eût dit qu’elle
entendoit que sa succession fût gouvernée par cette
coutume, alors elle n’eût par là désigné aucun héritier
ni légataire ; elle n’eût fait par elle-même aucune dis
position de ses biens ; elle auroit attribué à cette cou
tume , non-seulement la répartition , mais la disposition ;
elle auroit établi, pour sa succession ah in testa t , un
autre ordre que celui déterminé par la loi. C’est en ce
cas, tout au p lu s, qu’on pourroit dire qu’elle auroit
violé la loi des successions , en prétendant introduire
un autre ordre de succéder que celui établi par elle.
Mais madame de Chazerat a testé*, elle a disposé de ses
biens par un legs universel j elle a désigné ses légataires, qui
sont ses parens de la ligne de ses aïeul et aïeule paternels,
et ceux de la ligne de son aïeule maternelle; elle a déclaré
que son intention étoit que pour la répartition entr’eux
on suivît le mode de la représentation à l’infini tel que
l’admettoit la Coutume d’Auvergne : il ne s’agit là que du
partage d’un legs, et du quantum que chaque légataire y
prendra -, il ne s’agit que du mode de la representation.
La disposition de madame de Chazerat est complète
sur les lignes qu’elle appelle et celles qu’elle ex c lu t; sur
la nnjiiy.e des biens qu’élle leur lègue; ce sont tous ses
biens, meubles et iniineubles , acquêts et propres, au
marc la livre de ce qui lui est venu de chacune de ses
�UK
( 4 )
branches ; sur l’appel des branches dans l’ordre de la
représentation à l’infini. E n fin , le mode de cette repré
sentation sera celui qui avoit lieu dans la coutume d’A u
vergne : voilà sur quoi seulement elle indique la coutume.
Il est donc vrai qu’elle ne rappelle cette coutume que
d’une manière particulière, sur une disposition qu’elle
énonce, et non d’une manière générale et indéterminée.
Mais il y a plus, et l’on a très-bien démontré dans la
consultation du 29 juillet dernier, que loin de soumettre
ses dispositions d’une manière générale à la coutume
d’A uvergne, madame de Chazerat s’en étoit écartée sur
bien des p o in ts; i° . en disposant en fa v e u r de son mari;
2°. en disposant de l ’universalité ilo ses biens ; 3 \ en
léguant nominativement en vertu de la faculté que lui
donnoient les lois nouvelles; 4°* en donnant ses meubles
et ses acquêts à ses parens de la ligne maternelle, comme
à c e u x de la lig n e p atern elle.
C’est donc à tort que le tribunal de Riom prétend qu’il
faut voir dans la disposition de madame de Chazerat une
soumission générale à la coutume dJA u v erg n e , et que
c’est cette coutume qui lui donne des héritiers, et qui
leur partage scs biens : il est au contraire bien démontré
qu’en tout c’est la volonté de madame de Chazerat qui agit.
On ne relèvera pas plus particulièrement ce qu’a dit
le tribunal de Riom des diilicultés sans nombre qui naîtroient de l’exécution de ce mode; on l’a fait suffisamment
dans la consultation du 39 juillet, où l’on a fait voir que
ces prétendues diilicultés n’ étoient qu’un épouvantail ;
et quelles que fussent ces difficultés, on n’y pourroit
jamais trouver un motif d’annuller le legs.
�( i5 )
On ne suivra pas non plus le tribunal de Riom dans
scs réponses à quelques motifs mis en avant par les léga
taires devant ce tribunal, et qu’on ne reproduira pas ici.
Mais il est un moyen opposé au sieur M irlavaud, dans
la consultation du 29 juillet, et qui dispenseroit d’entrer
avec lui dans tant de discussions.
L e sieur Mirlavaud est le représentant de la branche
de l’aïeul maternel, non appelée au legs universel, et on
soutient contre lui qu’il est sans qualité et sans intérêt
pour critiquer l’emploi qu’a fait la testatrice, de la Cou
tume d’Auvergne , attendu qu’il ne s’applique qu’à la
répartition dans les branches appelées, et que la sienne
ne l’étant pas, cette répartition ne l’intéresse pas.
En effet, l’appel des branches est une première disposi
tion distincte et divise ; quiconque n’est pas de ces bran
ches, n’est pas légataire 5 dès-lors il est sans intérêt comme
sans qualité pour critiquer le mode de la répartition dans
ces branches. Ces branches sont appelées avec représenta
tion à l’infini : la dame de Chazerat étoit maîtresse de
lé vouloir ainsi, sans que la disposition eût besoin de la
coutume d’Auvergne. Qu’importait à la branche du sieur
Mirlavaud, qui n’est point appelée ? et que lui importe
après cela , que cette représentation ait lieu selon la
coutume d’Auvergne ?
Concluons que le mode de répartition du legs universel
de madame de Chazerat appartenoit en tièrem en t h la
pleine et entière disposition qu’elle avoit de tous ses
biens, et que l’ordre public et’ la société n’y ont aucun
intérêt ; que la coutume d’A u v e r g n e n’étoit employée
�( iG )
que comme démonstration de la volonté de la' testatrice ;
que la disposition tiroit toute son autorité de cette volonté
et du code qui n’y mettoit aucune borne ; que cette
volonté agit seule, et que l’appel de la coutume ne peut
influer sur le sort de la disposition en bien ni.en m al;
qu’il n’y a aucun argument à tirer de l’article I 3QO dans
l’espèce tout à fait différente; car il n’y a aucune simili
tude entre la stipulation de l’association conjugale et le
partage d’un legs universel; que madame de Chazerat n’a
point appelé la coutume d’Auvergne à gouverner sa suc
cession, mais l’a seulement indiquée comme exemple et
comme mode à suivre, selon sa volonté, dans la réparti
tion de ses legs dans les branches qu’elle instituent j que
loin de soumettre même ses legs à l’ordro de succéder
et aux principes de cette coutume, elle s’en est écartée
totalement sur plusieurs points irnportans ; enfin, que le
sieur jVIirlavaud, défendeur, d’une brandie non instituée,
est sans qualité et sans intérêt pour critiquer le mode de
répartition, qui n’intéresse que les branches appelées.
11 a donc été mal jugé par le tribunal de Riom , et son
jugement ne peut manquer d’être infirmé sur l’appel.
Délibéré à Paris par nous anciens Avocats soussignés,
ce 8 novembre 1808.
DELAM ALLE.
PORCHER.
PO IR IER.
JA U BER T.
D E LA C R O IX -FR A IN V ILLE.
C H A B O T , de FAllier.
CHABROUD.
�(
x7 )
Mercredi.
Lettre de M.
J aubert
à M.
B o ir o t .
C k n ’est que hier au soir, Monsieur et clier Collègue, q u ’on a
porté chez moi les papiers et les consultations que vous m'aviez
annoncés ce m atin. J ’ai examiné le tou t, et le jugement de Riom
m ’a p a ru , ainsi q u ’à vous et à M. Dclam alle, une méprise étrange.
E n appliquant à une disposition testamentaire 1 article i3go du
Code Napoléon, relatif aux conventions m atrim oniales, le tribunal
de Riom n ’a pas senti quel avoit été le véritable m o tif de la dis
position contenue en cet article ; il a supposé qu'on avôit voulu
faire oublier les anciennes lois et c o u tu m e s , de m anière q u ’il ne
p u t plus en être fait mention dans aucun acte.
C e n ’est pas là le m o tif de la loi; il eût été révolutionnaire ou
puéril.
L e Code Napoléon a voulu que les conventions matrimoniales
fussent rédigées de manière que toute tierce personne ayant à
contracter avec l’un ou l’autre époux, pû t connoître d ’une manière
positive et claire les pactes de la société conjugale, soit relativement
au pouvoir et à la capacité qu'auroit l’époux de faire tel ou tel
c o n tra t, soit relativement à l’asservissement ou à l’affranchisse
m ent de ses biens par les suites du contrat de mariage.
S’il avoit été permis aux époux de stipuler d 'u n e m anière g én é
r a le , que leur association seroit réglée p a r telle ou telle coutum e ,
lois ou sta tu ts lo c a u x , il auroit fallu que les tierces personnes
avec lesquelles les époux, ou l’un d ’eux, auroient par la suite con
tra c té , connussent la coutum e, les lois ou statuts locaux désignés
dans l’association des deux époux, ou que retenus par la crainte
q u ’il y eût dans les lois anciennes quelque pro hibition, quelque
obstacle, quoiqu’incapacité relative, ils s’abstinssent de contracter
avec ceux don t ils ne pouvoient pas bien connoître les lois aux
quelles il leur auroit plu de s’assujétir. C e qui eût été dangereux pour
les épouXj ou pour les tiers, et toujours pour la chose publique.
c
�En don n an t aux époux la faculté de stipuler d ’une manière géné
ra le , que leur association seroit réglée par telle c o u tu m e , loi ou
usage, e tc ., on ébranloit le régime hypothécaire, dont l’objet
principal est de fournir aux acquéreurs l’assurance de n ’étre plus
troublés dans leur possession, et le moyen de connoitre préala
blement si les biens q u ’ils vouloient acquérir leur étoient transmissibles.
Ces motifs de l’article 1390 du Code ne peuvent pas s'appliquer
à des dispositions testamentaires : aussi cette loi n ’a-t-elle pas été
portée d ’une m anière absolue et pour tous les actes, mais seulement
pour les contrats de mariage.
L ’article précédent du Code Napoléon n ’a pour objet que la
prohibition des substitutions, et n ’est relatif qu’à l’ordre des suc
cessions a b in te s ta t.
Ces réflexions que je vous so u m e ts, m on cher Collègue, sont
sans doute surabondantes; mais après les deux consultations que
je viens de lire, on ne peut ajouter que des choses superflues. Je
vous prie d ’agréer les respectueuses salutations de votre Collègue,
JA U B E R T .
A CLER M O N T , de l'imprimerie de L an drio t , Imprimeur de la Préfecture,
et Libraire , rue Saint-Genès, maison ci-devant Potière.
�T A B L E A U explicatif du legs universel, institué par M m0, de
AÏEUL PATERNEL,
Jean Rollct.
AÏEULE P A T E R N E L LE ,
—
Dame Vigot.
.................................
PÈRE,
Jean Rollet.
1
_ .*
«
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
0•
«
•
•
•
•
«
•
•
•
•
•
•
•
•
•*
:
F ille,
Dame de Chazerat,
Testatrice. ,
Mère,
Jeanne Marcelin.
1
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
'.
•
e•
••
•
•
•
«
«
Descendons Gros
MM. . .
:
M M...
:
MM...
MM...
mm
MM. . .
•
ESTO C .
41culc paternelle
,
VIGOT.
Domaines de Mirabelle,
^ °n>(itulion<lotalo i5,oooliv.
•le. etc.
etc. etc.
Fornio lo 4* estoc non-mentionné au
testament, n'ayant possddë aucuns biens. Apres la mort do
«a première femmo, la dame Gilberte Gros, aïeule mater*
nollo de U testatrice ,co sieur Joan-PInlibrrt Marcelin épousa
en secondes noces demoisello N***. C’ost de cc mariago <juc
descend lo sieur M irlavnud,
^ sieur Afazuel se sert du
nom pour critiquer les ustanicn* ®t codicilles do la damo do
Chazerat.
1
'■ÎJi
Mens tk la Testatrice, à elle propres, par elle ou son père.
s?
•
MM...
:
;
ROLLET.
l
:
...
MM. . .
,
I
I
«
.*
...
mm
Ateul paternel
AÏEULE M A T E R IE LL E ,
Descendant Vigot.
Descendons Rollet.
E S T O C .'
en son testament du 26 messidor an
Jean-Philib. Marcelin. — Dame Gilbert« Gros.
I
•
•
•
•
C hazerat
Domaine de Saint-Agoulin.
.
- J e M c n itro l, etc. etc.
Meubles et immeuble», créance«.
:
•
ESTOC.
Aïeule maternelle,
GROS.
Domaines d*Entraigues, Jozc ,
etc. etc.
�\<iio
)r an 9.
T A B L E A U explicatif du legs ui
AÏEUI. P A T E R N
Jean Rollet.
Descendons Rollet.
E
MM...
MM...
MM..
MM...
MM. .
MM. .
ESTOC.
Aieul paternel,
ROLLET.
Domaines de Mirabelle,
etc. etc.
Const
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mirlavaud. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delamalle
Porcher
Poirier
Jaubert
Delacroix-Frainville
Chabot
Chabroud
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
représentation à l'infini
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Particularités : tableau explicatif du legs universel
Table Godemel : Testament : 9. un testateur a-t-il suffisamment exprimé son choix en désignant ses légataires, collectivement, par l’indication certaine de leur origine ? - l’article 1390 du code civil s’applique-t-il aux testaments ? doit-on considérer comme valables des dispositions qui seraient faites sans la désignation particulière de chaque légataire, et par une expression collective en faveur de ceux qui auraient été appelés à succéder suivant les règles de la représentation à l’infini établie par uns coutume abrogée ? ces dispositions sont-elles valables, surtout lorsque l’on ne s’en est pas référé d’une manière générale à la coutume abrogée, et lorsque les termes du testament suffisent, soit pour reconnaître les légataires, soit pour déterminer le mode du partage et l’amendement de chacun ? peut-on, sur des présomptions, étendre un legs au-delà des expressions de la clause qui le constitue ? 19 – 19.
10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1906
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0518
BCU_Factums_M0520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53358/BCU_Factums_G1906.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Joze (63180)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
représentation à l'infini
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53357/BCU_Factums_G1905.pdf
2ace847a468579a5450287738d7b40e7
PDF Text
Text
yj
R É F U T A T IO N
Des motifs du jugement rendu au tribunal de pre
mière instance séant à Biorn, 2 2 juin 1 8 0 8 ,
qui a déclare les principales dispositions tes
tamentaires de M adam e D E C HA Z E R A T ,
subversives de l’ordre public et de l’ordre
social, nulles et comme non écrites., p ar
cela seul que la testatrice, en rendant à trois
branches de ses parens collatéraux les biens
qu elle en avoit reçus, prescrit le partage
entre eux par souche, dans l ordre de la re
présentation à l'infini, telle qu’ elle avoit
lieu dans la ci-devant Coutum e d’Auvergne.
M
de Chazerat, privée d’enfans, n'ayant que
des parens collatéraux éloignés, possédant de grands biens
dotaux, autrefois régis par la Coutume d’Auvergne,
qui lui interdisoit toute libéralité envers son époux, et
adame
'
�ne lui permettait de disposer envers d’autres que du
q u a r t , par testament, dut voir avec une vive satisfaction
publier la loi du 4 germinal an 8, qui, en lui con
servant la liberté que lui avoit déjà conférée celle du
17 nivôse au 2 , de. tout donner à son m ari, y ajoutait
la consolante faculté d’acquitter les dettes de la reconnoissance et de la justice, en lui permettant de dispo
ser à son gré des trois quarts de sa fortune. Aussi bénitelle cette loi libérale, e t , sans perdre de tem ps, elle
se livra aux mouvemens de son cœur, de ses affections
les plus naturelles, les plus douces, les plus morales et
les plus justes.
Son vénérable époux lient la première place dans son
cœur ; elle lui donne l’usufruit de tous ses biens, et di
vers objets encore en propriété.
D ’un autre côté, sa libéralité se répand en œuvres de
cliarité : elle récompense la fidélité des s e r v i c e s d o m e s
tiques *, e lle fait clcs o ffr a n d e s à la i*econnoissance et à
l ’ a m i t i é ; elle donne des témoignages d’affection spéciale
à ceux de ses parens avec lesquels elle a des rapports
plus habituels, et termine la longue et honorable série
de ses bienfaits, par cette disposition à titre universel:
« Quant à la propriété de mes biens , mon intention
» étant, autant q u il dépend de m o i, de les faire retour» ner à ceux de mes parens qui descendent des estocs
» desquels ils me sont parvenus , je donne et lègue tout
» ce dont il m’est permis de disposer suivant la loi du
» l\ germinal an 8 , à tous ceux de mes parens de
» la b ran ch e de mes aïeul et aïeule paternels, et de
» celle Ue mon aïeule maternelle, qui seroient en ordre
�rr
(3 )
»
»
»
»
»
»
»
de me succéder, suivant les règles de la représentation à l’infini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci-devant
Coutume d’Auvergne, pour être partagé entre les trois
branches, au marc la livre de ce qui m’est parvenu
de chacune desdites branches, et être ensuite subdivisé
dans chacune d’elles, suivant les mêmes règles de la
représentation à Vinfini. »
Trois ans plus tard-est venu le Gode Napoléon, qui
ne laissant plus subsister de bornes à la faculté de dis
poser, pour ceux qui meurent sans descendans ni ascendans (« ), permit à madame de Chazerat de donner
encore un plus grand essor à ses dispositions bienfai
santes. Elle en profite aussitôt par un codicille, où elle
s’exprime ainsi :
« L a nouvelle lo i m*ayant accordé la fa cu lté de dis» poser de la totalité d-î mes biens , je veuoc et entends
» que le legs universel que fa v o is fa it p a r le susdit
» testament, en faveur de mes parens de Vestoc de mes
» aïeul et aïeule paternels, et de ceux de Vestoc de
» mon aïeule m aternelle, de tout ce dont il niétoit
» permis de disposer par la loi du 4 germinal an 8 , ait
» son effet pour la totalité de mes biens , sauf les di» visions et subdivisions ù faire entre inesdits héritiers,
» de la manière expliquée audit testament-, sauf aussi
» mes legs particuliers, et les dispositions par moi i’ai» tes en faveur de mon mari ; h tout quoi il n’est rien
» dérogé par mon présent codicille. »
L e croira-t-on ! Des dispositions si naturelles , si sim(fl) Arliclo y iG du Codu Nupok'on.
�(4 )
pies, si équitables, par lesquelles la testatrice n’a usé
iiu pouvoir illimité que îa loi venoit de lui conférer
i^r »es biens, que pour rendre aux différentes branches
ue sa famille ce qu’elle en avoit reçu -, des dispositions
qu elle a déclaré si formellement ne faire qu'en vertu
fin pouvoir (¡ne lui en conféroient les nouvelles lois , ont
été dénoncées à la justice comme un attentat à l’ordre
publicj à l’ordre social et aux mœurs, par le dépit de
pirens collatéraux à qui la testatrice a cru ne rien devoir,
parce qu’elle n’avoit rien reçu de leur branche.
L e croira-t-on encore ! Cette ridicule dénonciation a
tellement fait illusion aux premiers juges, qu’ils ont cru
l’ordre bocial ébranlé jusques dans scs fondemens, si la
volonté de madame de Cba/.erat, de distribuer ses biens
dans l ’ordre de la représentation à Vinfini, telle (pi elle
étoit reçue dans la ci-devant Coutume d ’Auvergne ,
n’étoit pas promptement frappée d’anatliemc.
Ce n'est pas le testament entier qu’ils ont annullé pour
des vices de forme, il est reconnu invulnérable sous ce
rapport.
Ce 11’est pas non plus le don universel d’usufruit fait
à M. de Chazerat, ni les nombreux legs particuliers de
la testatrice qu’ils ont condamnés : tous ces legs leur ont
paru à l’abri de la plus sévère critique.
Enfin , ce n’est ni l’excès de la disposition univer
selle laite en faveur des trois branches de parens pré
férées par la testatrice, ni Vincapacité des parens de ces
branches, pour recevoir le bienfait de la libéralité, qui
ont motivé la réprobation. Qu’est-ce donc que les pre
miers juges ont frappé d’analheme ? C’est uniquement
�celte locution : J e lègue tout ce dont il m’est permis de
disposer a tous ceux" de mes parens (de trois bran
ches spécialement désignées ) qui seroient en ordre de
me succéder, suivant les règles de la représentation
à Vinfini, telle q u elle avoit lieu dans la ci-devant Cou
tume d* Auvergne.
O scandale! ô désolation! La dame de Chazerat, comme
la Pythonisse d’Endor {a), a évoqué l’ombre des morts!
elle a ressuscite la Coutume d’ Auvergne, s’écrioient les
Aristarques dans le public, et les juges se sont laissé
alarmer par ce bourdonnement.
O déplorable erreur du zèle pour l’inviolabilité des
lois! répondrons-nous : par quel enchantement n’avezvous fait rencontrer que l’illusion à un tribunal qui cherclioit de si bonne foi la vérité! A p p r o c h o n s la lumière
des prestiges qu i Vont séd u it, n o u s v e r r o n s disjiaroître
ces fantômes comme des ombres, et ne laisser aux ver
tueux magistrats qu'ils ont égarés, que le regret d’avoir
embrassé des chimères.
Motifs textuels du jugem ent, en ce qui concerne la legs
universel en propriété, q u il annuité.
L e legs universel en propriété, porté au testament de madame
de Cliazerat, est n u l, dit on , « attendu la maxime constante,
»
»
»
»
»
base de toute législation , et consacrée par l ’article 6 du C o d e
Napoléon, que nul ne peut, par des conventions particulières,
déroger aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes
mœurs, puisque ce qui a été établi pour le bien de tous, ne
peut pas être interverti par la volonté changeante des individus. »
(a) l’romicr Iivru des rois, chap. 28.
�(G )
Refutation.
Et nous aussi, prosternés devant cette maxime sacrée,
conservatrice de l’ordre social, nous lui rendons un hom
mage solennel : mais, qu’a-t-elle de commun avec le tes
tament de madame de Chazerat ? Eu quoi la testatrice
a-t-elle dérogé , par sa volonté privée, au x lois qui in
téressent Vordre public et les bonnes mœurs? Quel tort
fait à la société la désignation collective des légataires
universels d’un testateur, par leur qualité de parens
d’une ligne, et leur vocation dans Tordre de la repré
sentation à l’infini, au lieu d’écrire plusieurs pages poul
ies dénommer tous individuellement , et désigner par
ticulièrement la portion destinée à chacun ? En quoi
les mœurs sont-elles blessées par celte brièveté d’expres
sion aussi commode qu’exacte ?
i ,c Su ite des motifs.
Il faut reconnoitre incontestablement pour lois d ’ordre public,
celles qui ont un rapport direct et spécial à la société en co rp s,
dont les conséquences réfléchissent éminemment sur l’ensemble
des citoyens. S i , à quelques é g a rd s, on peut regarder les lois
comme ayant pour objet une certaine utilité publique, dans les
unes cependant celte utilité se borne à régler des intérêts privés ,
pluribus et singulis : dans les autres, au contraire, cette utilité
embrasse la société entière, elle se lie ù tous les intérêts, plu
ribus ut universis. A insi, lorsqu'un testateur fait la distribution
de ses biens, il use d ’une faculté qui est toute relative à lui s e u l'
et dans son intérêt privé; mais le mode dont il se se rt, l’ordre
qu’il doit observer dans cette répartition, est du domaine public,
qui est pour lui une barrière insurmontable.
�f.
( 1)
Réfutation.
Il n’importe nullement à la validité du testament de
madame de Chazerat, que ces distinctions aient de la
justesse ou qu’elles en manquent, et que les lois qui
régissent ce testament appartiennent, les unes au droit
p r iv é , les autres au droit p u b li c , lorsque ses disposi
tions n’offensent ni les lois qui règlent le pouvoir de
disposer , ni celles qui reglen t le m ode et Vordre de dis
position à observer. S’il blessoit les unes ou les autres,
il seroit également réprouvé. Mais que le sieur Mirlavaud nous montre celles qui le condamnent} jusquelà, nous nous contenterons de lui dire , vous poursuivez
des fantômes.
2 e Suite des m otifs .
Vous voulez des citations? en voici :
« Parmi les lois inviolables, (qu i sont pour un testateur une
»
»
»
»
barrière insurmontable), l’art. 1390 du Code-Napoléon a placé
la prohibition faite aux époux de stipuler entre e u x, d ’une
manière générale, que leur association sera réglée par nne des
coutumes, lois, ou statuts locaux qui régissoient ci-devant les
» diverses parties du territoire fr a n ç a is, et qui sont abrogées par
» le Code. »
Réfutation.
Pardonnez -, mais nous ne voyons pas dans cet article
une loi prohibitive pour les testateurs, car il ne parle
que des conventions stipulées entre époux par leur contrat de mariage. Or, les contrats de mariage et les testamens u’ont rien de commun.
�( 8 )
3e Suite des motifs.
L ’article i 3go du Code s'applique aux teslamens, comme aux
contrais de mariage, et voici pourquoi : « L ’ abrogation de tous les
» statuts locaux, jugés nuisibles tant parleur multitude que p arla
» bizarrerie d ’un grand nombre de leurs dispositions, et l’avantage
» d ’une loi uniforme , long-temps désirée , et profondément sentie,
» entrent évidemment dans l’intérêt commun de la société; et
» c'est s'élever contre cet intérêt de tous, c'est -établir un code
» pour soi, que de faire renaître des lois anéanties, de les tirer
» de l’oubli auquel le corps social les a condamnées en grande con» noissance de cause.
» L e s testamens, ainsi que tous autres actes ou contrats, sont
» indistinctement soumis à ces principes sacrés. L a faction du
n testament, comme le disent les lois romaines, est inconlesta» blement d'ordre public. L e premier devoir du testateur est de le
» reconnoitre et de le respecter : de p lu s , les grands motifs qui
»
»
»
»
ont dicté
pliquent
ainsi q u e
m is, en
l’art. 1 3 9 0 , relativement au c o n tra t de mariage, s’apnaturellement au testament : l ’ av a n tag e du public ,
la tra n q u illité des f a m ille s , ne sont pas moins comprorappelant en termes généraux, dans une disposition
» testamentaire, une coutume abolie, qu ’en la reconnoissanl dans
» un contrat de m ariage; dans l'un comme dans l'autre c a s,
» l’intérêt public est violé, et la dame de Chazerat s'est‘ constituée
» au-dessus de la volonté générale,
» Soit par son mépris eludid do la précieuse uniformité de
» nos lo is ,
» Soit en reproduisant cette multitude infinie de coutumes,
» et avec elles les contestations interminables que la sagesse du
» législateur a voulu écarter.
Réfutation.
rHsouion.scle s a i i ^ i V o i d , *-'1 p r o n o n ç o n s s a n s n o u s la isse r
d o m i n e r p ar l 'e n t h o u s i a s m e q u i o u t r e l o u t r n e v o y o n s
quo
�( 9 )
que ce qui est, en un mot : il n’en faudra pas davan
tage pour entendre les premiers juges eux-mêmes abju
rer , avec la bonne foi qui les caractérise , l’erreur qui
les a séduits.
Les lois qui restreignent la liberté naturelle, qui
défendent ce qui de soi n est pas illicite , ou qui déro
gent autrement au droit commun , ne s’étendent pas
hors du cas spécial pour lequel elles ont été portées.
Les lois qui prohibent certaines conventions spéciales ,
ne s’étendent pas non plus a d autres contrats dont elles
ne parlent point (i).
Encore moins peut - on les appliquer a u x disposi
tions gratuites, qui se régissent par des principes tout
diflerens de ceux qui règlent les conventions (2) *, voilà
des principes universellement reconnus.
O r, l’article 1890 se trouve dans les deux cas. L a con
vention qu’il prohibe pour lJavenir, étoit très-usitée sous
l’ancien régime , et n’a rien d’illicite en soi *, il suffit de
lire cet article avec attention pour en rester convaincu.
Que porte-t-il en effet ? « Les époux ne peuvent plus
« stipuler, d’une manière générale, que leur association
« sera réglée par l’une des coutumes, lo is, e tc., qui
_« sont abrogées par le présent Code. »
( i) Voir Domat, livro i e r , titro I e' , section seconde, nombre i 5 et 16 ,
et les lois romaines qu’il cite.
(a) Cela est si v ra i, quo les conditions ou les inodifications illicites qui annullent los conventions intéressées auxquelles elles sont apposées par contrat
entre-vifs , d’après les articles i i 3 i et 1 1 3 3 du code, n ’n n n u l l o n t point les dis
positions testamentaires auxquelles ollcs sont ajoutées, et sont seulement ré
putées non év ites dans les testaraens, d’apris l’srticle goo.
B
�%
( 10 )
Ne peuvent plus ! pesons bien ces expressions. Si
les époux ne peuvent p lu s , ils pouvoient donc, avant la
loi prohibitive, ce qu’elle dit qu’ils ne pourront plus :
la stipulation qu’elle leur interdit, pour l’avenir seule
ment , sans l’annuller pour le passé , étoit donc per
mise avant d’être prohibée : donc elle n’étoit pas illicite
en soi et de sa nature ; donc elle ne l’est aujourd’hui
qu’accidentellement, et parce qu’elle est formellement
prohibée : donc l’article 1390 du Code qui la prohibe,
restreint la liberté naturelle des conventions, défend
ce qui de soi 11 est pas illicite.
Disons plus 5 il déroge à la liberté indéfinie des con
ventions matrimoniales elles-m êm es, établie en règle
générale par l’art. 138 9 , qui le précède, et qui porte:
« La loi ne régit l’association conjugale, quant aux
« biens, qu’à défaut de convention spéciale, que les
« époux peuvent fa ire comme ils le jugent à propos. »
C o n c l u o n s q u e l ’art. 1390 é ta n t u n e lo i q u i déroge aux
règles générales , au droit commun, une loi d’exception ,
en un mot ] il appartient, sous tous les rapports, à la
classe des lois dont l’application doit être renfermée dans
le cas spécial pour lequel elles ont été portées.
D ’un autre côté, quand l’article 1390 seroit suscep
tible d’être appliqué à des cas semblables, ad sim ilia,
l ’extension de cette loi prohibitive, d ’une convention
matrimoniale qu’elle réprouve, à une disposition testa
mentaire dont elle n’a point parlé , seroit encore inadmis
sible; car, quelle ressemblance et quelle analogie peut-il
y avoir entre des conventions matrimoniales , qui sont
des contrats intéressés, des contrats synallagmatiques,
�( ” 1
des contrats entre-vifs, formés par le concours du con
sentement mutuel des époux , dans la vue de régler
leur société conjugale pendant leur vie , et les dispo
sitions testamentaires, qui sont des actes à cause de
mort émanés de la seule volonté libérale du testateur,
et dont l’exécution est renvoyée après son décès ? («)
(a) Nous l’avons déjà dit (page 9) : dans les contrats intéressés, les condi
tions ou les modifications illicites annullent la convention principale qui en est
grevée. Au contraire, dans les actes de libéralité , les conditions et les modifica
tions illicitesne donnent point atteinte à la disposition principale kiaqxieWo elles
sont ajoutées. Ces conditions ou modifications illicites y étant réputées non
écrites, aux termes de l’article 900 du Code, elles doivent être retranchées du
testament. Par ce retranchement, la disposition devient pure et simple, et
n’en est pas moins valable. C’est ce qu’avoientdit avant le Code Napoléon les
lois romainos, et particulièrement la loi 14 e, au digeste, de Condit. .insiit. ,
ainsi conçue : « Conditiones contra edicta iniperatorum , aut contra leg e s , aut
t/iice contra bonos mores, v e l derisoriœ sunt, aut hujus modi (¡uas prwtores
împrobavenmt, pro non scriptis habentur, et perinde ac si hereditati sive
Ir.gato adjectœ non essent, hereditas legatumve capitur. » C’est aussi ce
qu’observent Ricard, dans son T raite des dispositions conventionnelles, tit. 2 ,
cliap. 5 , sect. 2 ; Domat, dans ses Lois civiles, seconde partio , liv. 3 , tit. Ier,
sect. 8 , n°. 1 8 ; Furgolc, T raité des testamens, tom. 2 , chap. 7, sect. 2 ,
n°. i a 5 , etc. etc.
Appliquant ce principe , nous en concluerons, avec raison, que si madamo
do Chazerat, après avoir légué à trois branches de ses parens l’universalité do
ses biens, pour les recueillir suivant les règles de la représentation à l'infini,
avoit fait à sa disposition une modification réprouvée par la l o i , en ajoutant,
telle qu'elle avoit lieu dans la ci-devant Coutume d'Auvergne, il faudroit tout
simplement regarder co dernier membro do la phrase comme non é c r i t ; le
retrancher, et réduire par conséquent la disposition au premier membre, qui
porto : « Je donne et lègue tout co dont il m’est permis de disposer, à tous ceux
» do mes parens (d o tello et toile brancho) qui seroient en ordre de me
» succédor, suivant les règles de la représentation il l'infini ». O r , ce retran
chement no feroit pas le plus léger changement à l’effet do la disposition ; car
J on verra plus bas que la représehtation ¿1 l'infini n’étoit pas différento on cou
tume d’Auvergno, de ce qu’ollo ¿toit partout.
B ?.
�i
« **>(>.
<
‘( 12 )
Ecartons donc pour toujours l’argument de parité, qui
a servi de hase à la décision des premiers ju ges, puisqu’au lieu de parités il n’y a que des disparates impos
sibles à dissimuler entre les conventions matrimoniales
■et les dispositions testamentaires.
T a-t-il plus de justesse dans ce qu’ajoute le sieur
Mirlavaud , lorsqu’il semble dire : Qu’importe que l’ar
ticle 1390 du Code Napoléon n’ait pas été violé par le
testament de madame de Chazerat, avec lequel il n’a
aucun rapport, si l'ordre public lui-même est violé par
ce testament ? Il n’en sera pas moins nul \ car on ne
peut pas plus déroger à l’ordre public, par des dispo
sitions testamentaires, que par des conventions matri
m oniales : l’art. 900 du Code Napoléon le proclame.
D ’accord du principe ; mais venons au fait. Comment
madame de Chazerat a-t-elle violé Vordre public dans
ses d is p o s it io n s t e s t a m e n t a i r e s ?
Elle l’a violé d’abord, nous dit-on , en se constituant
au-dessus de la volonté générale , p a r son mépris étudié
de la précieuse uniformité de nos lois.
Nous en demandons bien pardon au tribunal; mais
notre vue est trop bornée pour apercevoir par quelle
disposition madame de Chazerat a mérité ce reproche.
E lle s'est mise au-dessus de la volonté générale, par
son mépris étudié de la précieuse uniformité de nos
lo is , elle dont la libéralité étoit enchaînée par le statut
local qui régissoit ses biens avant la révolution, et qui
bien loin de repousser avec un mépris étudié le bienfuit de la législation nouvelle , dont la précieuse unifor
mité est venue briser ses ch aîn es, l’a saisi au contraire
�sy
( i3 )
avec transport! Elle qui a étendu ses krgesses à mesure
que la faculté de disposer s’est étendue uniformément
dans tout Vempire, par les lois des 4 germinal an ¡8 , et 16
floréal an n !
Il n’v a pas moins d’irréflexion dans le reproche adressé
à la testatrice, de reproduire la multitude infinie de
coutumes que le Code proscrit, et avec elles les con
testations interminables que la sagesse du législateur
a 'voulu écarter. Une seule des quatre cents et tant de
coutumes de France est rappelée dans son testament,
et sur le seul point de la représentation à l’infini en
ligne collatérale. L ’unité ne constitua jamais une mul
titude. D ’ailleurs, cette coutume unique, la dame de
Ghazerat ne l’a même pas reproduite d’une manière
générale. Elle ne l’a pas rendue la seule ordonnatrice
de ses libéralités. A u contraire , la coutume abolie , à
laquelle elle s’est référée sur un seul p o in t, condamnoit
presque toutes les dispositions qu’elle a faites, et notamment,
L e legs universel de l’usufruit de ses biens à son mari,
au profit duquel tout avantage direct ou indirect lui
étoit interdit par cette loi prétendue ravivée ;
L ’épuisement total de ses biens en libéralités testa
mentaires, que la même coutume auroit réduites au quart ;
E n fin , la confusion de ses propres anciens et naissans, de ses acquêts } de son m obilier, en une seule
masse qu’elle a léguée en propriété à trois branches de
ses parens , pour être partagée entre les trois b ra n ch es ,
au marc la livre de ce qui lui étoit provenu de chacune
d ’elles, tandis que la coutume auroit attribué les meubles
et acquêts aux parens paternels exclusivement j qu’elle
�n’auroit fait remonter aux estocs d’où ils étoient provenus,
que les immeubles existans dans la succession seulement;
et qu’elle n’accordoit aux parens du côté de ses aïeules
paternelle et maternelle, ni la reprise , ni le remploi des
dots mobilières qu’elles avoient portées dans sa famille.
A u lieu de disposer suivant l’ordre établi par la cidevant coutume, elle n’a donc fait aucune disposition
à titre universel, qui ne soit tout à la fois une violation
ouverte de ce statut lo c a l, et l’exercice le plus indé
pendant de la faculté illimitée de disposer à son g r é ,
qu’elle tenoit du bienfait des lois nouvelles.
Gomment expliquer après cela le reproche fait ù sa
mémoire, de s’être constituée au-dessus de la volonté
générale, par un mépris étudié de la nouvelle législation,
et d’avoir reproduit, d'une manière géném lc, la cou
tume abrogée?
,
4° Suite des motifs.
Elle a mérité ce reproche, continue-t-on, « attendu que la loi,
» en laissant au testateur la plus grande latitude dans la disposi» tion de scs biens, en l’établissant l’arbitre souverain de scs der» nières volontés, lui a cependant donné pour bornes toutes les
» règles qui concernent l’ordre public, les bonnes mœurs, et
» les formalités des actes ; que c’ est sous ces conditions qu’ il a
» reçu de la loi un pouvoir si étendu; qu’il perd son pouvoir, ou
» du moins que ce pouvoir esL rendu sans effet, des qu’il oublie
» les conditions sous lesquelles il l’a reçu.
» Que la dame de Chazerat a méconnu ou méprise' ces prin» cipes, lorsque dans son testament et dans son troisième codi» cille, au mépris de la volonté et des intérêts de la société, elle
»> a remis en vigueur, en termes généraux, une coutume abolie,
"
ordonnant que ses biens retourneraient aux estocs desquels
�M ils éloient provenus ; qu’ils seraient partagés entre les trots
n branches de sa fam ille qu’elle dénommé, suivant les règles de
)> la représentation à Vinfini, telle qu’elle avoit lieu dans la ci» devant Coutume (FAuvergne , et ensuite subdivisés dans cha» cune d’elles, suivant les mêmes règles de la représentation
» à l’infini. »
Réfutation.
Ce ne sont là que des redites déjà réfutées ; de pures
illusions dans le droit et dans le fait déjà dissipées. ,
Elles ont pour base, en point de d ro it, la supposition
que toute disposition testamentaire , par laquelle le
testateur ordonne , en tenues généraux , la distribution
de ses biens d’après l’ordre autrefois suivi dans une
coutume abolie par la nouvelle législation, est illicite
et nulle en s o i, parce qu’elle 'viole Vordre public nou
vellement établi’, et en point de fa it , la supposition
que madame de Chazerat a ordonné la distribution de
ses biens dans l’ordre ci-devant établi par la coutume
d’Auvergne.
O r , nous croyons avoir déjà suffisamment prouvé que
ces deux suppositions sont deux erreurs, l’une de droit,
l’autre de fait. Nous allons cependant y revenir encore,
afin de ne laisser aucun nuage sur ces vérités, et emprun
tant , pour mieux convaincre, les raisonnemens irré
sistibles d’ un orateur du tribunat, lors de la discussion
de la loi du 4 germinal an 8 , nous dirons :
« L a faculté de disposer de sa propriété est une éma« nation directe de la propriété elle-même : le droit
» de donner est le môme que celui de jouir.
« L e droit de propriété, considéré dans son essence
�( >6 )
« naturelle, le droit de posséder ce qu’on possède,
« existe avant toute société. Mais c’est la société qui le
« garantit ; et il est simple q u e, pour prix de cette
« garantie , la loi civile puisse imposer à Vexercice du
« droit de propriété les contraintes et les formes qui
« paroissent convenir au maintien, et même au plus
« grand avantage de la société qu’elle gouverne. »
« D e là naît la puissance du droit c iv il, non pas sur
« le droit de propriété qu’il ne peut détruire, mais sur
« toutes ses conséquences q u il dirige, et p a r conséquent
« q u il peut étendre ou resserrer à son gré.
« La principale conséquence de ce droit est la trans
it mission de la propriété elle-même , soit qu’elle s’opère
« par la volonté du donateur, soit qu’à défaut de cette
« volonté la loi civile la règle, et la détermine par la voie
« de la succession. »
II suit, de ces grandes maximes d’ordre social, que
la faculté illimitée qu’a chaque propriétaire de disposer
de ses biens , comme il lui p la ît, dans les formes et par
les voies que bon lui semble , est la règle générale , le
droit commun : Par conséquent , que toutes les lois
civiles , qui donnent des bornes, des gênes ou des
formes à cette faculté illimitée , sont des lois limitatives
de la liberté naturelle \ et par une dernière conséquence,
que tout ce qu’elles ne défendent pas expressément
reste permis au testateur. En deux mots, que Vordre
p u b lic , relativement à la faculté de transmettre ses
biens à titre gratuit, se compose uniquement dos lois
réglementaires et prohibitives que le législateur a publiées
sur la disponibilité des bien s, et sur le mode de dis
poser;
�y
( *7 )
poser y de sorte qu’il est rigoureusement vrai de dire ,
avec le n°. 55 du décret du 22 ventôse an 2 , qu'en cette
matière la loi valide ce (¡11 elle n annulle pas.
O r , n’est-il pas de fait constant qu’aucune loi directe
et positive n annulle la disposition d’un testateur qui ,
pour exprimer sa pensée avec plus de précision et en
moins de mots, lègue ses biens, comme madame de
Cliazerat, à certaines branches de ses parens collatéraux,
qu’il dénomme, et qui prescrit le-partage entre tous ses
légataires , dans le même ordre suivant lequel ils lui
auroient succédé sous le régime spécial d’une coutume
abolie auquel il se réfère ? Donc la loi valide cette for
mule de disposition , par cela seul qu’elle ne l’interdit
pas -, c a r, encore une fois , il n’y a de formules de dis
positions , comme de formules de conventions, nulles ,
que celles qui sont spécialement prohibées.
5 e Suite des motifs.
« L e rappel qu'a fait madame de Chazerat, en termes ge'né» raux , de la coutume d ’Auvergne ( pour rcgler la distribution
» de ses biens entre ses légataires ) , renferme une résistance réilé» chie a la volonté et à Vutilité publique , sous deux rapports
» frappons ; l'un en obligeant scs héritiers de faire la recherche
»
»
»
»
»
»
»
»
de la nature et de l’origine des biens dans chaque estoc , suivant
la coutume d ’ Auvergne, contre la disposition précise du C od e;
et l’autre, en astreignant ses héritiers à faire entr’eux les divisions et sous-divisions , suivant la représentation à l’m fini,
dans les principes de la même coutume d ’ A u v e r g n e ; or la
coutume d ’ Auvergneavoit, sous ces deux r appor t s, des maximes
spéciales et particulières ù elle seule, qui s éloignoient de toutes
les autres coutumes qui avoient admis la fameuse règle, patenta
c
�( ,8 )
» palernis, materna maternis ; et que ces principes de'Ia coutume
ont été reproduits par la dame de Chazerat danS sa famille
et dans sa succession , comme un brandon de discorde et de
contestations. »
« On objecteroit vainement que la Coutume d’Auvergne n'est
rappelée dans le testament que comme une démonstration, un
point comparatif, et non comme loi impérieuse. Raisonner ainsi,
c’est jouer sur les m ots, et abuser des termes; car, comment la
Coutum ed’Auvergne ne seroit-elle dans le testament que comme
mode d ’indication, lorsque la dame de Chazerat veut disertem ent, et en termes géminés, que cette Coutume soit la règle
du partage de ses biens ? lorsque presque tous les appelés par elle
ont donné à leurs conclusions la forme d ’une demande en par
tage , d ’après les maximes de la Coutume d ’A uvergn e? lorsque
dans le f a i t , et dans la réalité, il seroit impossible à ces héritiers
de faire ce partage, tel qu’il est prescrit, sans être guidés par
la Coutume d ’Auvergne. A in s i, c’est la C o u tu m e d ’Auvergne
à la main , qu’ils seroient obligés de rechercher quels sont
les b ien s q u i sont provenus de ch a c u n e des lig n e s iiivorisées;
qu’ ils seroient obligés d e fa ire uue recherche semblable, pour
attribuer à ch a q u e branche, par la subdivision , les biens q u i y
ont aussi été rapportés; qu’il faudroit distinguer les dots [no
biliaire ou pécuniaires, qui auront fait souche par double con
fusion ; qu’il faudroit également, dans le cas de la représenta
tion , statuer si l’oncle et le neveu, étant en ligne égale, doivent
concourir ensemble; si au préjudice d ’une renonciation on peut
venir par représentation; si le partage doit se faire par souche,
ou bien par têtes, ot une multitude d ’autres difficultés semblablés. Ainsi s’ouvriroient pour ces héritiers une ample carrière
de débats, aux juges une multitude de questions épineuses,
pour la décision desquelles la Coutume d’Auvergne scroit la
seule régulatrice.
» Qu’ôn ne peut pas dire que la coutume sera prise ici comme
autorité seulement , et non comme loi nécessaire , puisque
�( l9 )
t» cette coutum e, ses usages, sa jurisprudence seroienfr la seule
» règle sur laquelle on devroit se diriger pour suivre la volonté
» et les vues rétrogrades de la testatrice; que la coutume ne seroit
» pas simple renseignement, puisque sans elle , sans s’y renfermer,
» on ne pourroit opérer la distinction des biens , éclaircir leur
» origine, les a p p l i q u e r aux diverses lignes , aux différentes bran« ches, découvrir les individus appelés par la représentation, et
» parvenir enfin à débrouiller les obscurités de ce travail laborieux.
» L a coutume ne se ro it pas un simple m o d e , une condition,
» puisqu’en ‘général les modes et les conditions peuvent se con» cevoir et s’ isoler des dispositions auxquelles ils sont apposés ;
» mais ici le mode, la condition prescrite par la dame de Clia» zerat sont inséparables; c a r , enfin, si la testatrice a institué lé»
»
»
»
»
gataires universelles les trois lignes qu’elle a affectionnées, c’est
spécialement pour prendre les biens provenant de chacune d ’elles,
suivant la Coutume d ’A uvergne; c’est pour les subdiviser ensu ite, d ’après les mêmes principes, d ’après la même origine et
nature des biens. Ses vrais héritiers seront ceux qui lui seront
w donnés par la représentation de la Coulume d’ Auvergne ; cette
» coutume se lie et s'incorpore donc à tout ce partage, et com» maadera à ses opérations. »
Réfutation.
Quoi! le testament de la dame de Cliazerat aura rappelé
la coutume abolie, en termes généraux ; il aura soumis à
l’empire de cette loi morte, toutes les opérations du partagede sa succession, la recherche del’origiue de ses biens,
leur application à telle ou telle autre branche de parens ,
leur distribution dans chaque branche ^il aura imposé à scs
nombreux légataires l’obligation de s’y s o u m e t t r e , sans
restriction et sans réserve, lorsque dans le fa it la dame
Chazerat ne s’est référée qu’à une seule des dispositions
C 2
�( 20 )
delà ci-devant coutume, et qu’elle l’a contrariée sur toutes
les autres, notamment sur la distribution de ses biens,
qu’elle prescrit au marc la livre ?
Quoi ! elle aura montré une résistance réfléchie à la
volonté et à Vutilité publiques, proclamées par la nou
velle législation , lorsqu’elle n’a pas fait un seul legs qui
ne soit un hommage à cette législation nouvelle, et
l’exercice le plus étendu des pouvoirs que les nouvelles
lois lui ont conférés, et que la coutume lui refusoit ?
E n fin , elle aura eu la folie de singer le législateur, de
prétendre remettre en vigueur la Coutume d’A uvergn e,
de lui redonner l’autorité d’une loi obligatoire , parce
qu’elle a emprunté quelques-unes de scs expressions pour
indiquer Tordre dans lequel elle cutendoit distribuer sa
succession ? ï lé ! depuis quand une loi n’est-elle donc plus
une règle générale commune à toutes les personnes qui se
trouveront dans le cas q u 'e l l e a prévu-, Com m une præccpturn ? Depuis quand le règlement domestique et privé,
que fait un testateur pour le partage de sa seule succes
sion, est-il donc une loi?
Ce n’est pas encore assez de ces inconcevables méprises.
Les premiers juges, égarés par un zèle louable pour l’in
violabilité de la loi} mais poussé trop loin , ont accusé les
intentions de la testatrice, pour faire le procès h ses der
nières volontés. A les entendre , son testament jeté dans
sa famille, comme un brandon de discorde, ne fut pas
l’eiïusion d’un cœur aimant q u i vouloit laire des heureux,
mais le délire de la haine du nouvel ordre établi, qui,
pour s’en jouer, voulut livrer son patrimoine à l'embra
sement des procès.
�(.21 )
«_ A ces mots,-il nous' semble voir l’ombre de madame! de
Chazerat soulever, la ■¡tête, et répondre aux magistrats:
« Messieurs, je respecte votre saint emportement : le
» motif en est sublime ; mais daignez entendre mon
» excuse.
t
« Vous ne voyez qu’une boutade extravagante de l’iiu» meur contre la législation nouvelle, dans ce passage
» calme et mesuré de m o n testament :Mon intention étant
>* de fa ir e retourner la propriété de mes biens, autant
» q u il dépend de m oi, à ceux de mes parens qui.descen» doient des estocs dont iis me sont provenus, je donne
» et lègue ce dont il in est, permis de disposer, à mes pa» rens de la branche de mes aïeul,et aïeule'paternels, et
» de celle de mon aïeule maternelle, pour être partagés
» entre les trois branches , au m arc la livre de ce qui
» m'est provenu de chacune, suivant les règles de la re» présentation à l’ in fin i, telle q u elle avoit lieu dans la
» ci-devant Coutume d’Auvergne.
j r „
» Pardonnez mon erreur. Messieurs: en m’exprimant
» ainsi, j’ai cru parler le langage simple et naïf de la rai» son et de la justice. Il étoit loin de ma pensée et de mon
» cœur, de vouloir outrager la loi nouvelle, ?néconnoître
» ou mépriser son autorité, et lui opposer une résistance
» réfléchie, en prescrivant la distribution des biens que
» je léguois, dans l ’ordre de la représentation à Vinfini,
» entre mes légataires, puisque ma volonté n’a agi dans
» mes dispositions dernières, qu’en vertu des pouvoirs illi» mités que la loi nouvelle in’accordoit, et que la cou» tume abolie me refusoit.
<
»> L ’eussé-je offensée, cette loi nouvelle, qui, donnant
» un libre essor à mes affections, étoit clière ù mon cœur,
�( 22 )
» l’eussé-je offensée par mes paroles, par la naïveté de
» mes expressions , lorsque j’en saisissois le bienfait avec
» transport, lorsque le fond de chacune des dispositions
» démon testament étoit un hommage à son autorité, et
» que je la bénissois de cœur et d’intention, l’offense se« roit innocente: faudroit-il donc la punir?
» Ministres de la loi sur la terre, vous savez mieux que
» moi, q u elle ne frappe jam ais sans avertir. Lorsque je
» testai, elle n’avoit pas proscrit, et elle n’a point proscrit
» encore, la formule de disposition quem ’inspiroit le seul
» amour de la justice, et non un fol entêtement pour
» exhumer la Coutume d’Auvergne, ( qu’il n’étoit, ni
» dans ma puissance, ni dans mon intérêt, d é f a i r e revivre,
« encore moins dans ma volonté, puisque je l’ai contrariée
» à chaque ligne de mon testament ). J e l’adoptai, cette
» manière d’exprimer ma pensée, uniquement parce
» qu’une longue tradition m’en avoit a p p r i s Le sens,
« l’étendue, la p o r t é e , et q u e je n’en connoissois pas d’au« tre qui remplît plus parfaitement mes intentions de
« remettre à toute la postérité de mes premiers ancêtres,
« sans restriction, les biens, ou le remploi des biens , que
» j’avois reçus de chaque branche.
» Si j’ en avois connu une plus propre à rendre la plé» nitude de mes intentions , je l’aurois employée: mais
» j’ose défier les gens de loi les plus exercés, avec toute
» l’expérience des affaires qu’ils ont, et quime manquoit
» à moi, j’ose les défier, dis-je, d’exprimer aussi cornplè» tement ma volonté en d’autres termes, et en aussi peu
» de mots. Cependant il falloit l’exprimer toute entière,
» ma volonté, puisque la loi du 4 germinal an 8 , et l’ar» ticle 91G du Code Napoléon, la déclarent l’arbitre su-
�y '
(?3 )
» pleine, de moiiiestament : et parce que j’aurai exprimé
» ma volonté ,jfde la seule manière qui étoit propre à
» éviter toute lacune, toute méprise, et à me faire en» tendre sans é q u i v o q u e , j’aurai violé la nouvelle loi!
» u n e l o i q u i * sans m e p r e s c r i r e a u c u n e f o r m u l e sacx-ar
» m e n t e l l e p o u r r e n d r e m a p e n s é e , sans i n ’ e n i n t e r d i r e
» a u c u n e , s’ é to it b o r n é e à m e d ir e : O r d o n n e z , et v o u s
v s e r e z o b é i e ? L a loi permet ce qu elle ne défend pas ;
» elle valide ce q u elle nannulle p a s, encore une fois ]
» c’est ainsi que l’on raisonne dans le séjour des morts, où
» nous sommes à l’abri des illusions dont les vivans sont
» si souvent le jouet. L ’on n’y étouffe pas la loi par excès
» de précaution et de zèle pour son inviolabilité \ et nous
» plaindrions sincèrement les vivans, si les tribunaux
» avoient sur la terre le terrible pouvoir de bouleverser
» la société par des proscriptions arbitraires , en s’armant
» du prétexte , injurieux au législateur, de faire mieux ,
» et d’être plus sages et plus prévoyans que lui.
» J e ne réponds rien à votre ingénieuse dissertation,
» sur les distinctions à faire entre les modes et les condi» tions qui peuvent se concevoir cl s’ isoler des dispos i» tions, d’avec les modes et les conditions qui en sont
» inséparables , parce que tout cela a trop d’esprit pour.
» moi, qui ne fus qu’une femme sur la terre, et que je
» n’ai pas le bonheur de vous comprendre. Mais ce que
» je crois bien comprendre , c’est que la loi ne condnm « noit pas la formule que j’ai choisie pour e x p rim e r ma
» pensée : et vous, Messieurs ! plus sévères que le légis» lateur, de quel di'oit avez-vous refuse de l'absoudre ?
» Je n’ai pasi\me justifier du reproche qui m’est adressé,
�<y>
(*4 )
» d’avoir imprudemment je té un brandon de discorde
» dans ma fam ille , par le prétendu cahos dans lequel
» mon testament l’a plongée} car ce cahos imaginaire n’est
» qu’un prestige. Non, non, l’esprit de vertige ne s’em» parera pas de mes légataires universel?. Ils ne feront
» pas de mon riche héritage la proie du palais1, en rani»,mant des questions usées, sur lesquelles les opinions
» sont depuis long-temps fixées. Quant aux recherches
» qu’ils auront à faire pour établir le degré de leur pa~
» renté, et justifier leur successibilité, elles ne diffèrent
»'pas de celles que sont tenus de faire tous les héritiers
» ab intestat en général, dans les successions échues à
» desparens collatéraux, appelés ù succéder par représen»» tation , dans les cas des articles 74.2 et 7/^ du Code ; or,
» puisqu’elles n’empechent pas de succéder ab intestat,
» pourquoi empeclieroient-elles de succéder par la volonté
» d’un testateur? »
Gc Suite des motifs.
« On oppose en yain que madame de Cliazerat n’a pas généra
it lise son rappel de la Coutume d ’ Auvergne, puisqu’elle l’a res» treint à une seule de scs dispositions. C ’est une e rr e u r , car la
» soumission 5 une coutume prend évidemment la forme de dispo» sition générale, lorsqu’elle porte sur un objet de disposition
« générale. Or , c’est pour la nomination de ses légataires univer» sels, que la daine de Cliazerat invoque la Coutume d ’ Auvergne;
)> c’est cette coutune en général qui règleroit leurs qualités cl leurs
» avantages. Cette disposition prend donc nécessairement un ca» raclure de généralité dans ce partage.
» L a dame de Cliazerat eut pu aisément spécialiser sa disposi)> tion ; elle eût pu légitimement faire entre ses héritiers l'appli
cation
�33
C’S )
» calion de tels ou tels de ses biens , suivant sa volonté ; elle
» eût pu , par cette voie spéciale , faire rentrer dans chaque
» ligne, dans chaque branche, la portion de fortune qu’elle en
» avoit reçue j rien ne la gênoit dans cette manière de disposer ;
» par là elle eût rempli ses intentions, respecté l’ordre public,
»> étouffé le germe de mille contestations dans sa fam ille ; mais au
» lieu de faire ce qui lui étoit permis , elle a préféré de faire ce qui
» lui étoit défendu. D e telles dispositions ne peuvent être protégées
» par la loi qu’elles offensent. »
. ■,
Refutation.
Puisque les motifs du jugement se répètent sans cesse,
nous sommes forcés de nous répéter aussi, et nous dirou? :
C’est à pure perte qu’on s’épuise en raisonnemens subtils,
pour t r o u v e r dans le testament de madame de Chazerat
un rappel de la coutume d ’¿Auvergne en termes généraux.
Quand cela seroit, on eii concluroit encore mal à
propos que le legs universel, porté par ce testament et
par le codicille qui le suivit, est nul) car aucune loi ne
défend à un testateur de se référer d’une manière géné
rale à une coutume abolie , pour la désignation des
héritiers qu'il choisit par sa propre volon té, et la dis
tribution de. ses biens. L ’adoption de telle ou de telle
coutume , d ’une manière générale, n’est interdite qu’aux
époux , pour le régime de leur association conjugale.
O r , nous avons démontré que de pareilles lois prohi
bitives de ce qui seroit licite en soi ( cessant la prohi
bition ) , ne s’étendent pas d’un cas à l’autre, et surtout
des contrais de mariage aux testamens.
- Ce n ’est pas tout : les premiers juges n’ont pas seuD
�( ^6 )
Jcment erré dans le droit, ils se trompent encore évi
d e m m e n t sur le fait, lorsqu’ils veulent que la dame
de Chazerat se soit référée d’une manière générale h la
coutume d’Auvergne , pour la désignation de ses héri
tiers et la distribution de ses bien s, tandis qu’elle n’a
presque pas fait une seule disposition qui ne soit en
contradiction avec l’ordre successif de la coutume }
qu’elle ne s’y est référée que pour indiquer, par une
dénomination collective, ceux de ses parens qu’elle
entendoit préférer, et pour suppléer à une nomen
clature individuelle qu’il lui eût été impossible de faire
avec certitude dans le sens qu’elle l’entendoit, sa volonté
étant de r e n d r e participans à ses libéralités, ceux même
qui naîtroient dans l’intervalle de la faction de son tes
tament à son décès.
7"
Suite des motifs.
a En vain on prétend excuser la dame de Chazerat, en allé—
» guant qu’on ne peut lui faire un reproche d’avoir établi le par>> tage de ses biens sur la représentation à Vinfini, puisque cette
)> représentation étoit admise par la loi du 17 nivôse an a : cette
« justification ne peut être admise,
» i°. Parce qu’au décès de madame de Chazerat, ce n’étoit plus
» la loi du 17 nivôse qui devoit régler soit la fo rm e , soit le mérite
» de ses dernières dispositions; c ’étoil le Code civil, sous l ’empire
» duquel elle est décédée, et que son testament olographe a reçu
» une date.
» 2*. L a testatrice est loin d ’ a v o i r puisé dans la loi du 17 nivôse
>' la représentation qu ’elle ordonna : cette loi, dans toutes les
•> lig n e s , toutes les branches, sous tous les points de vue, établit la
» représentation sous le rapport de la proximité du sang. Au con-
�loi
( 27 )
»
»
«
»
»
»
»
»
'
traire, la coutume d ’Auvergne attachoit la représentation à
l'origine et à la nature des biens. 11 falloit avoir pour auteur
celui duquel les biens provenoient. L a loi du 17 nivôse avoit
à cet égard puisé sa représentation dans l ’affection naturelle,
l’avoit liée aux personnes. L a coutume d’Auvergne l’avoit fait
dépendre des usages féodaux, l’ avoit attachée à la glèbe, plutôt
qu'aux liens du sang. On ne peut donc trouver aucune analogie
entre ces deux représentations, dont la source comme les effets
» étoient différens. »
Réfutation.
Qu’a-t-on voulu dire avec la représentation prétendue
attachée par la coutume d’Auvergne à Vorigine et à la
nature des biens , plutôt qu’ au x personnes ; à la glèbe,
plutôt qu’aux liens du sang ? Prétend-on q u ’ e n couurae d’Auvergne il y avoit des générations île champs
comme des générations d ’hommes ? Que ce n’étoient pas
les personnes qui y succédoient par représentation aux
personnes décédées, propriétaires, mais les champs qui
succédoient aux champs ? L e champ neveu, qui partageoit avec le champ frère la succession du champ oncle?
Jamais les pages de la coutume d’Auvergne n’ont été
souillées par ce galimaihias inintelligible, et ce n’est
pas non plus ce qu’a dit le jugement de première ins
tance, ni ce qu’il a voulu dire.
Cependant il n’en est pas moins erroné, lorsqu’il
regarde la représentation à l’infini, qu’admettoit la cou
tume d’ Auvergne, comme différente dans sa nature et
ses effets de celle qu’admettoit la loi du 17 nivôse. Klle
ne dillère môme pas de celle qu’admet encore le Code
D 2
�( *8 )
civil. Pour nous en convaincre, mettons-nous le texte
de la coutume sous les yeux.
« L e mort saisit le v i f son plus prochain lignager
« habile à lui succéder, » porte l’art. i er, titre 1 2. L ’art. 4
explique ces mots habile à succéder, en disant : « Il
« y a deux manières d’hériter , Pune du côté paternel,
« et l’autre du côté m aternel, et retournent les biens
« à Vestoc dont ils sont provenus , tellement que les
« prochains lignagers du côté paternel succèdent ab
« intestat ès biens provenus dudit estoc , et non les
» pai-ens du côté m aternel, et è contra. »
Mais ce n’est pas le lignager le plus prochain de f a it ,
à l’instant du décès, qui succède exclusivement dans
chaque ligne ou dans chaque branche ( appelée estoc par
la coutume ). L ’art. 9 admet les parens lignagers à suc
céder par représentation de leurs auteurs , en ces termes:
« Représentation a lieu ta n t en ligne droite que
« collatérale, usque ad injinitum ( à l’infini ) audit pays
« coutumier. »
Et en quoi consistoit cette représentation ? L e com
mentateur Chabrol va répondre.
« On entend assez ( nous dit-il ) , ce que c'est que
« la représentation. Elle forme une espèce de fiction ,
« par laquelle on est mis au lieu et eu la place de
<, celui dont on descend. C’est un moyen par lequel
« le parent qui se trouve plus éloigné de celui auquel
« il s’agit de succéder, s’en rapproche et se trouve
'• appelé à la succession, en remontant à l’ascendant
« duquel il descend, et qui étoit en degré égal avec
*> les autres héritiers ou leurs auteurs. Comme les ex cm-
�lo s
( 29 )
V pies sont toujours plus instructifs que les définitions,
« continue-t-il, il n’y a qu’à supposer trois frères, P ierre,
« P a u l et Jacques. .Pierre vient à mourir sans enfans,
« Paul lu i s u rv it- , m a is J a c q u e s é to it m o r t a v a n t lu i,
« laissant des enfans. Si la représentation n’avoit pas lieu ,
« la succession de Pierre appartiendrait à Paul seul (comme
« lignager plus prochain que ses neveux ). Mais par
« le moyen de la représentation , les enfans de Jacques
« succèdent conjointement avec lu i, et de la même
« manière que si leur père avoit survécu à Pierre. Il
« en est de même dans tous les autres degrés, et à
« V infini, dans cette coutume. »
Ouvrons maintenant la loi du 17 nivôse an 2 , nous
trouverons à l’art. 77 et à, Vi\rt. 83 presque les mêmes
expressions, et absolument la même explication de la
nature et des effets de la représentation.
L a représentation a lieu jusqu'à Vinfini en ligne col
latérale, est-il dit dans l’article 77 , et l’article 83 ajoute;
« Par l’effet de la représentation, les représentans en» trent dans la place, dans le degré, et dans tous les
» droits du représenté. La succession se divise en au» tant de parties qu’il y a de branches appelées à la
y recueillir, et la subdivision se fait de la même ma» nière entre ceux qui en font partie.
Enfin, l’article 88 achèveainsile développement: « Ces
v règles de représentation seront suivies dans la subi> division de chaque branche. On partagera d’abord la
» portion qui est attribuée à chacune, eu autant de
u parties égales, que le chef de cette -branche aura laissé
» d’enfuns , pour attribuer chacune de CCS parties à tous
.u,,
�( 3o )
»
»
»
»
les héritiers qui descendent de l’un de ces enfans , sauf'
à la soudiviser encore entre eux dans les degrés ultérieurs, proportionnellement aux droits de ceux qu’ils
représentent. »
Que l’on compare maintenant de bonne foi et sans pré
vention la manière de succéder par représentation à Vinfini de la Coutume d’Auvergne, avec la manière de suc
céder aussi p a r représentation à l 1infini de la loi du 17
nivôse an 2, et qu’on nous dise où est la différence ?
Les esprits les plus subtils n’y en apercevront as
surément aucune.
Allons plus loin, et lisons le Code Napoléon. Il parle
aussi de l’e p r é s e n t a t i o n , et il la définit à l ’a r t ic le 7 3 9 ,
précisément comme Chabrol, et comme la loi du 17 ni
vôse, en ces termes : « La représentation est une fiction
» de la loi, dont l’effet est de faire entrer les représen» tans dans la place, dans le degré et dans les d r o its du
» représenté.
L ’article 740 l’admet à Vinfini, [comme la Coutume
d’A uvergn e, en ligne directe.
L ’article 742 l’admet également d’une manière illi
mitée, en ligne collatérale, au profit des enfans et des
cendons des frères ou sœurs du défunt, conséquermnent
à Vinfini, pour cette classe de parens -, et l’article 743
déterminant ses effets, veut que dans tous les cas oh
elle est adm ise, le partage s'opère par souche. Enfin,
» que si une même souche a produit plusieurs brandies,
» la subdivision se fasse aussi p ar souche dans chaque
» brandie, et que' les membres de la même brancha
» partagent entre 'eux par tête. »
�( 30
. Que voit-on encore dans ce développement? La re
présentation, telle que la Coutume d’Auvergne l’admettoit, quant à ses effets, avec la seule différence,, que
la coutume d’Auvergne l’adinettoit en faveur de tous
les parens collatéraux en général, et par conséquent
aussi-bien en faveur des descendans d’oncles, ou de
grands-oncles du défunt qui auroient été appelés à lui
succéder à défaut de lignagers plus prochains, s’ils lui
avoient survécu, comme en faveur des descendans de
ses frères ou sœurs; au lieu que le Code Napoléon n’ac
corde le droit de succéder par représentation qu’aux
seuls descendans des frèi’cs et sœurs du défunt. De sorte
qu’il est vrai de dire que la représentation du Code et
celle de la coutume ne diffèrent, ni par leurs effets, ni
p a r l e u r durée, qui est également à Vinftni dans les
classes de p a r e n s où e lle a lie u , ni p a r leur nature ,
puisqu’elles sont attachées l’une et l’autre à la filiation
des personnes, et nullement à la filiation des biens*, mais
que le Code ne l’applique pas à un si grand nombre de cas.
Donc, c’est à tort qu’on reproche à la dame de Chazerat d’avoir fait revivre un genre particulier de repré
sentation, qui n’a aucune analogie avec la nouvelle lé
gislation, puisque la loi du 17 nivôse et le Code Napo
léon lui-même en ont admis une absolument identique.
Encore plus mal à propos, on reproche à madame
de Chazerat d’avoir voulu faire revivre une représenta
tion que la Coutume d’Auvergne avoit attachée à la glèbe,
et fa it dépendre des usages féodaux. L ’avons-nous bien
entendu ?........ L a coutume avoit fait dépendre des usa
ges féodaux la représentation des personnes, qu’elle ac-
�(*» )
cordoit aux roturiers comme aux nobles, et pour re
cueillir les biens roturiers comme pour recueillir les biens
nobles !
Devons-nous qualifier cette étrange imputation ? non...
Laissons ce soin au lecteur.
E n fin , on semble nous dire encore que si un bon
citoyen peut entendre les mots représentation à Vinfini,
sans frissonner, dès que le Code Napoléon les emploie,
au moins ne peut-il pas entendre un testateur prescrire
le retour de ses biens aux estocs desquels ils sont pro
venus. H é! messieurs, soyez d’accord avec vous-mêmes :
madame de Chazerat, suivant vous, pouvoit fa ire rentrer
dans chaque lign e, dans chaque branche ou estoc de ses
parens, la portion de fortune q u elle en a reçue, et vous
frappez son testament d’anathême, parce qu’elle a voulu
ce que vous reconnoissez qu’elle pouvoit! Pardonnez ma
franchise, messieurs, il me semble que ce n’est pas être
conséquens.
8r Suite des motifs.
« On oppose sans raison qu’on ne peut demander la nullité de
»
»
»
»
»
»
»
»
»
la clause du testament dont il s'agit, puisqu'elle n'est pas prononcée par la loi : c’est encore une illusion. Il y a nullité absolue
dans la violation de toute loi négative prohibitive ; en prononçant on ne peut, la loi use de toute sa puissance. Elle impose
un devoir indispensable, elle ccarte tout prétexte; excludit potentiarn juris et facti. Or l ’art. 6 du Code dispose qu’on ne
peut déroger par des conventions particulières aux lois qui interessent l ’ordre public ; l’article i 3go statue tic m ê m e, que
l< s époux ne peuvent pas stipuler d ’une manière générale , que
» leu r association sera réglée par l’une des coutumes abolies ; et
ces
�\oy
( 33 )
» ces termes im périeux, on ne peut et ne peuvent, renferment
» sans doute une prohibition énergique , une impossibilité de faire
» de semblable disposition ; ils prononcent implicitement une nul» lité insurmontable.
Réfutation.
Puisqu’on ne se lasse point de répéter toujours la munie
chose, ne nous lassons point de repeter la même ré
ponse , et de redire : L ’application des lois p ro h ib itiv e s ,
que l’on invoque ici pour la troisième ou quatrième fois,
est faite hors du cas pour lequel elles sont portées \ elles
n’ont rien de commun avec le testament de madame
de Chazerat : qu’on cesse donc enfin d’en abuser^ car
les lois prohibitives ne s’étendent pas.
9° Suite et fin des motifs.
« L a nullité du legs universel qui se réfère à la coutume ne
» peut être écartée par l’article 9 6 7 , sur lequel on veut encore
» s’appuyer. Cet article perm et, à la vérité, au testateur de m a»
»
»
»
»
nifester sa volonté sous toute espèce de litres et de dénominations; de sorte que soit que le testateur dispose à titre de
legs, de donation, d’institution d ’héritiers, et sous toute autre qualification, peu importe; sa volonté connue, si elle est
conforme à la loi, quœ légitima est , reçoit toujours son exécu-
» tion : mais disposer sous toute dénomination , n ’est pas faire
»
»
«
»
»
»
»
toute espèce de dispositions. En permettant au testateur de se
servir de toutes expressions pour dicter ses intentions , la loi
ne l’a pas autorisé à disposer sous un mode et dans une latitude
indéfinie. L e s mœurs, l'utilité publique, les formalités des actes, et tout ce qui intéresse l’ordre social, sont toujours pour
lui une barrière invincible. C'est d ’après ce principe tutélaire
que l’article 900 a voulu que dans toutes les dispositions entre-
�( 34 )
» vifs, ou testamentaires, les conditions contraires aux lois ou
» aux mœurs soient réputées non écrites.
» C ’est ce que la dame de Chazerat a méconnu ou méprisé,
» en faisant, l'institution d ’héritier universel dont il s’agit .• elle a
» violé l’ordre public , en subordonnant sa disposition aux règles
» d’une coutume abolie; elle l’a violé en rejetant avec affecta» lion le bienfait (le la loi nouvelle ; elle l’a violé en proscrivant
» une forme de partage, qui seroit une source féconde de con» testations. L a justice comme la loi ne peuvent accueillir une telle
» disposition ; il faut donc la regarder comme non écrite dans le
» testament de la dame de Chazerat.
Réfutation.
Ci;s motifs ne sont pas nouveaux. On n’y voit q u e
le résumé de ceux que nous avons déjà réfutés. Faut-il
cependant y répondre encore, au risque de répéter sans
cesse les mêmes choses en d’autres ternies ? nous dirons :
On avoue qu’il est permis à un testateur de se se rvir
de toutes ex p ressio n s p o u r d icter scs in ten tio n s , et
que sa volonté reçoit toujours son exécution , en quel
ques termes qu’il l’ait manifestée, pourvu qu’elle ne
blesse ni les mœurs, ni l’ordre public, ni les lois p ro
hibitives , ni les formalités des actes.
Soyons conséquens, et nous concilierons de là , non
comme les premiers juges, que les dispositions testa
mentaires de madame de Chazerat doivent être frappées
de proscription ; mais au contraire qu’elles doivent être
maintenues et recevoir leur entière exécution , nonobs
tant que la testatrice ait emprunté de la coutume d’A u
vergne les expressions dont elle s’est servie, soit pour
abréger la nomenclature des légataires universels qu’elle
�( ‘35 )
•vouloit choisir, qu’elle avoit clairement désignés, et
dont elle vouloit qu’aucun n’échappât à ses bienfaits-,
soit pour régler l’ordre et la proportion du partage de
<ses biens qu’elle entendoit leur presci'ire; et pourquoi?
i°. Parce que son testament ne contient aucune dis
position qui ne soit conforme à la nouvelle lo i, soit
pour le fond, soit par l’application qui en est faite,
puisque la loi lui permettoit de disposer de tout ce dont
elle a disposé , et en faveur des personnes au profit des
quelles elle en a disposé.
. 2°. Parce qu’elle n’a pas plus violé la loi par la forme
de sa disposition que par le fond *, car nous persistons
à n ie r, avec l’assurance de la conviction, que madame
de Chazerat ait blessé, dans son testament, ni les mœurs,
ni l’ordre public , ni aucune loi prohibitive , en em
ployant quelques expressions de la coutume d’Auvergne
pour manifester sa volonté.
Elle ne les a point violés en subordonnant sa dispo
sition à titre universel, aux règles d’une coutume anéan
tie , comme le supposent les premiers ju ges, soit parce
que cette prétendue subordination de la distribution de
scs biens aux règles de la coutume d’Auvergne , est
purement imaginaire, soit parce qu’en la supposant réelle
elle ne violcroit aucune loi, ni d’ordre public,, ni d’ordre
p rivé, dès qu’aucune loi quelconque ne l’a interdite.
Elle ne les a pas violés en rejetant avec affectation le
bienfait de la loi nouvelle, comme on le lui r e p r o c h e
encore,puisque son testament n’est d’un bout ù l’autre
que l’exercice de ce bienfait.
Elle ne les a point violés enfin , en prescrivant un
�(36 )
ordre d e partage qui soit plus qu’un autre une source
de procès -, car depuis long-temps l’ordre de partage,
par représentation à l ' in fîn i , étoit usité , connu , fixé ,
et pratiqué sans qu’il eu r é s u l t a t ni trouble ni désordre
dans les familles.
• i
Concluons que les premiers juges ont constamment
abandonné la réalité pour courir après des fictions dans
l’interminable série des motifs qui ont inspiré leur déci
sion. La cour d’appel pourroit-elle donc hésiter à rétablir
la vérité et les principes dans tous leurs droits, en fai
sant rentrer dans le néant un jugement qui les renverse ?
A Clermont-F errand, le 8 octobre 1808.
P a r le jurisconsulte ancien ,
B E R G I ER.
A C L E R M O N T , de l'Imprimerie d e L a n d r io t , Imprimeur de la Préfecture,
et Libraire, rue Saint-Genès, maison ci-devant Potière,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chazerat. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
legs universels
ordre de successions
coutume d'Auvergne
code napoléonien
conflit de lois
paterna paternis
materna maternis
doctrine
représentation à l'infini
Description
An account of the resource
Titre complet : Réfutation des motifs du jugement rendu au tribunal de première instance séant à Riom, le 22 juin 1808, qui a déclaré les principales dispositions testamentaires de Madame De Chazerat, subversives de l’ordre public et de l’ordre social, nulles et comme non écrites, par cela seul que la testatrice, en rendant à trois branches de ses parens collatéraux les biens q u 'elle en avait reçus, prescrit le partage entre eux par souche, dans l ’ordre de la représentation à l’infini, telle qu’elle avait lieu dans la ci-devant Coutume d’Auvergne.
Table Godemel : Testament : 9. un testateur a-t-il suffisamment exprimé son choix en désignant ses légataires, collectivement, par l’indication certaine de leur origine ? - l’article 1390 du code civil s’applique-t-il aux testaments ? doit-on considérer comme valables des dispositions qui seraient faites sans la désignation particulière de chaque légataire, et par une expression collective en faveur de ceux qui auraient été appelés à succéder suivant les règles de la représentation à l’infini établie par uns coutume abrogée ? ces dispositions sont-elles valables, surtout lorsque l’on ne s’en est pas référé d’une manière générale à la coutume abrogée, et lorsque les termes du testament suffisent, soit pour reconnaître les légataires, soit pour déterminer le mode du partage et l’amendement de chacun ? peut-on, sur des présomptions, étendre un legs au-delà des expressions de la clause qui le constitue ? 19 – 19.
10. un testament est-il valable s’il a été fait conformément aux lois existantes lors de sa confection ? Sous l’ordonnance de 1735, était-il nécessaire, pour la validité du testament, qu’il fut fait mention qu’il avait été écrit par le notaire ? un testament peut-il être rédigé à la troisième personne ? est-il nécessaire que le testament contienne mention de la signature du notaire, si d’ailleurs il l’a signé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1806-1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1905
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0512
BCU_Factums_M0513
BCU_Factums_M0514
BCU_Factums_M0515
BCU_Factums_M0516
BCU_Factums_M0517
BCU_Factums_M0632
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53357/BCU_Factums_G1905.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Clermont-Ferrand (63113)
Joze (63180)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Code napoléonien
conflit de lois
coutume d'Auvergne
doctrine
legs universels
materna maternis
ordre de successions
paterna paternis
représentation à l'infini
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52936/BCU_Factums_G0328.pdf
5a9760e5a2bdebc88a85fe84f1752916
PDF Text
Text
P R E CI S
P O U R les Sieurs F O N T F R E Y D E , les fieur &
dame C O U S S A Y R E , Bourgeois, habitants
de la V ille de Clermont-Ferrand >Appellants,
& demoifelle
P
errette
FONTFREYDE ,
- habitante de la Ville de Billo m , Intervenante.
C O N T R E Me. P i e r r e C H A P O U I L L E ,
Avocat en la Ville, de Mauriac, Intimé.
C O N T R E les fieur & dame R O N N A T , les
- f ieur & dame V I O L L E , habitants de la même
V ille , Intimés.
E T encore contre demoif elle M a r i e S I M O N ,
veuve de Jofeph Goutanegre, habitante de la
V ille d’A u rilla c, Intimée.
D
E ux époux , qui avoient vécu enfemble
pendant quarante années, fe donnent en
1763 des preuves de leur attachement
par des inft i tutions reciproques , le fieur
Fontfreyde a furvécu a la dame Antignac , fon
époufe, il étoit age de 86 ans, & dans un état de
A
�démence depuis près de deux années, a peine a-t-il
recueilli le bénéfice de l’inftitution faite h. ion profit
par la dame A ntignac, Ton époufe , que des gens
avides cherchent a l’en dépouiller par deux différen
tes donations, qui , jointes avec les a&es fubféquents qu’on rapporte , prouvent, a n’en pouvoir
douter., la démence du Donateur. La réclamation des fleurs & dame Fontfreyde
donne lieu à deux queftions intéreflantes.
La premiere, entre les fleurs 6c demoifelle Font
freyde & la dame Goutanegre, pour favoir fi le
teilament de la dame Antignac eft compris dans
la prohibition de l’Ordonnance de 1735.
La fécondé , entre les fleurs &: demoifelle Font
freyde , Me.-Chapouille, les fieur & dame R onnat, & les fieur & dame Violle , relativement à
la nullité des différentes donations & autres a&es
iiibfequents , ioufcrits par le fieur Fontfreyde dans
untemps oii .il étoit hors d’ctat de contra&er vala
blement.
Comme les fleurs &: demoifelle Fontfreyde iè
propofent de faire un fimple précis des moyens dont
ils font ufage pour établir leur demande , & .des réponfes qu’iïs'emploicnt pour écarter les obje&ionsde
leurs Ad.veriaires,iils ne rendront aucun compte des
faits, ils divifèront'leurs moyens en deux propofitions;
Dans la premiqre , ils démontreront que le
teilament fait au fieur Fontfreyde , leur oncle ,
jpar la dame Antignac , ion époufe, ne peut être
£onfidéré comme un teilament mutuel.
�Dans la ieconde, ils établiront la nullité des
a&es Ibufcrits par le fieur Fontfreyde, ils rappor
teront à-cet effet la preuve la plus' complette de
l’état de démence auquel.il étoit réduit lors de là
pafTation de ces différents aftes
même près de
deux années avant-leur époque.
«
PR E M IE R E
PROPORTION.
Le tejlament fa it par la dame Antignac en fa»
veur du Jieiir Fontfrcyde, le z z Oclobre
ne peut être confidérê comme un tejlament mu
tuel.
Deux teftaments fontmutuels, lorfqu’ils fe lient
mutuellement par des diipofitions faites en confé
dération 1 une' de l’autre ; par exemple , le don
mutuel ne peut acquérir ce dégré de mutualité
qu’autant que le mari donne a la femme, en confidération de ce- que la: femme donne au m ari, &
réciproquement, fans quoi il n’y auroit point de
mutualité ; c’eft un'principe qui ne peut être ré
voqué en doute.
Ainfi , pour qu’il y eût mutualité dans le teilament fait par la dame Antignac, il faudroit qu’on
y eût inféré cette claufe : finjlitue le Jîeur Fontfreyde mon héritier , en conjidération de ce qu'il
m a inftituce fo n héritiere ; ces mots conRituerocnt
ciTcriticllemcnt la mutualité, dès-lors le teftament
A z
�4
de la dame Antignac trouveroit ia profcription
dans les termes de la loi.
Les teftaments faits conjointement font ceux quifont faits fu b uno & eodcm contextu ; le mot
conjointement annonce cette définition , ‘ & en la
prenant littéralement, il eft certain que deux tefta?
ments faits dans deux a&es féparés ne peuvent
être réputés faits conjointement ; delà il fuit que
la loi , en défendant les teftaments faits conjoin
tement , n’a pas entendu comprendre ceux qui
feraient faits par deux a&es féparés , lorfqu’ils ne
>orteroient point avec eux le cara&ere de mutuaité.
,
L ’article 77 de l’Ordonnance de 173 <5 abroge
non feulement les teftaments mutuels , mais encore
ceux faits conjointement. Le teftament de la dame,
Antignac fèmbleroit donc devoir être compris dans
la prohibition de la loi ; c’eft du moins ce que
la dame Goutanegre voudrait perfuader.
Mais fi l’Ordonnance de 173 «5 a abrogé les
teftaments mutuels 6c ceux faits conjointement,
peut-on en conclure qu’elle ait entendu abroger
toute efpece de teftaments entre mari ôc femme ;
& que celui de la dame Antignac. fe trouve com
pris dans cette prohibition générale, ce ferait une
f au fie conicqucncç.
En effet, il exifte une loi qui permet, en pays
de droit écrit, a deux Conjoints de s’inftituer hé
ritiers l’un de l’autre , c’eft la loi 70 , fï\ de hæred.
injlit. Elle ne peut ctre abrogée par l’Ordonnànce
Î
�,
de 173 ■), & elle autorife les difpofitions , quas
mutuis ajfeclionibus judiciaprovocaverunt, c’eftrà*-.
dire, les.inftitutions di&ées, par l’amitié., pourvu
qu’il n’y ait point'de mutualité, ou que-les¿teftaments ne foient point faits conjointement ; ces for
tes de difpofitions f c nomment tejlaments récipro
ques.
■
ri '
Il faut néceifairement qu’ilÎexiftedes teilaments:
permis e n , pays de droit -écrit, & non abrogés^
par l’Ordonnance de 17 3 ■), parce que la loi qu’on
a déjà citée , permettant en général à deux Con-;
joints ;de s’inilituer réciproquement , 1 il ' y ; auroit
contradiçbion dans-la loi qui permettroit d’un^ôté
ce qu’elle défendrait de l’autre.
Cette contradiction fero.it cependant une fuite
du fyilême '.d'çjja çdame .Goutanegre
puifqu’elle
confond toutes, efpece's der teflaments’iaits entre
mari &rfem me , foiisija dénomination: de ces
mots, mutuels & conjointement ; ;<Sc comme ces
deux eipeces de teilaments, font interdits par TO rdonnance de 1 7 3 , il. s.enfitivroit ,, iüiV.anü là
dame Goutanegre', qu’un mali] &i.iine femme ne
pourroient jamais s’inilituer héritiers- l’un de l’aur
tre , ce qui feroit contraire à la loi poiitive qui
cil en vigueur en pays de droit ictrit^. > f
.»
1 Cette dénomination de '|ellamefrtSj l'éfciproqiies.
diilinds
lépadé.^ des ;tçflaments -.mutuels ,
de ceux faits conjointement ^ èil.àttcdéb par Rouffeau de la Com be, qui a commenté l’Or^oonance
dej ji 7 3 $ ; ^voici comment j l '/j’ç^pliquç :inr l’acrl
77 de cette Ordonnance :
///
H
j
■
�6
» M ais, dit cet A u teu r, les difpofitions réci* proques par des-teftaments ou codicilesi;féparés,
» ne lbn t point abrogés
ont leur effet entre*
»v' perionnes qui peuvent difpoférde$< unes en fa» veur des autres , fuivant les loix , ftatuts <Sc
» coutumes. » >
■
'
Mais ii les teftaments réciproques ne font point'
abrogés, celui-de"la dame Antignac ne peut
être confédéré que comme un teftament récipro
que, puifqu’il ne porte avec lui aucun caraâere
de m u ltu a lité c ’eft-à-dire, qu’il n’efl point fait en
confidération de l’inftitution précédemment faite a
ion.profit parle fïeur Fontfreyde, ion mari, puifque ce telïamcnt. n’eft point fait conjointement
avec celui du fïeur Fontfreyde, puifque le fécond
ne rappeller point le premier , puifqu’enfin on
peut lire celui de la dame Antignac fans y trou~
ver les traces de celui du fïeur, Fontfreyde , ni
même aucune préiomption de fon exiftence.
• Sans vouloir parcourir le Sentiment de R icard,
dans ion traité du don mutuel, qui s’applique
pareillement aux teftaments , fans chercher à répouffer le fentiment de Furgole , celui d’H enris,
& dés autres Auteurs cités par la dame Goutanegre , dont l’un a mal interprété le fentiment
de Ricard qu’il invoquoit, &C les autres n’ont
aucune application à l’eipece , il fuffit d’en venir
aux véritables principes de la matiere pour dé
montrer , jufqu’au dernier degré d’évidence, que
le tcltament.de la dame Antignac ne peut être
�7
confidéré comme un teilament mutuel , ou fait
conjointement.
Les teilaments mutuels ,'o u ceux faits con
jointement , ne peuvent fè révoquer par un des
conjoints, ians’le confentement de l’autre, c’eil
un principe long-temps controverfc, mais aduellement décidé, fuivant le fentiment de Ricard ,
de RouiTeaude la C o m b e, &c la Jurifprudence
des Arrêts ; or le teilament de la dame Antignac
pouvoit être révoqué fans le confentement du
fieur Fontfreyde ; la dame Fontfreyde pouvoit
changer fa volonté, fans que le .teilament de fon
mari en iouffrit la moindre atteinte ; ce teilament
pris féparément navoit aucune relation avec celui
du fieur Fontfreyde, il n’en rappelloït point l’exiitence ; mais ii la dame Antignac avoit ièule la
liberté de révoquer fon teilament , i f n’étoit pas
mutuel.; étant fait :par un a&e féparé de celui clu
fieur Fontfreyde, il n’étoit pas fait conjoin&èmént,
il n’étoit donc ;pas dans le cas de la prohibition de
l’Ordonnance de 1
7
3
.
M ais, dit la dame j G oiitançgre, fut-ïl jamais^
de preuves plus convaincantes de mutualité';, les
fieur
dame Fontfreyde partent enfemble de la
Ville de Mauriac , fe rendent( en celle de Piaux ,
vont chez le même .Notaire, leurs difpoiitions font
rédigées devant les mêmes témoins , Ton y apperçoit les mêmes =expreifions , Jes »mêmes legs ? en
un mot , tout cil conforme ; comment; donc peut011 caradm fcr plus formeflement. la mutuajitc ?
04
�,8 ,
Cette obje&ion paroît d’abord fpécieufe, mais
elle n’eft point folide ; il faut la détruire par l’argu
ment contraire a celui'tdoht"fe fért la dame'Gou-,
tanegrepour autoriier ion iyilème. 1 f
f
Quel a été le but de l’Ordonnance de 173 ^ ?
c’e i t , comme nous l’apprend la dameGoutanegre,
d’empêcher les ^effets" que ‘ pourrait produire fur
refprit de la femme l’autorité du m ari, pour ré
primer les fraudes ^dont un mari pourrôit faire
uiàge , pour furprendre de la foibÎeifè de fa femme
une difpofition que fon cœur déiapprouveroit.
Mais en mettant un frein à la cupidité de l’hom
m e, & en mettant la foibleile de la femme à l’abri
de la violence & de la furprife , le Légiilatem* n’a
pas entendu contraindre la volonté, dont le prin
cipe riaîtroit dans le coçur, & feroit fondé fur l’a
mitié; il n’a point détruit la Loi y o , ff. de hœred.
injîit. qui autorife les difpofitions ; quas mu
tins affeclionibus judicia prœvocavemnt.
Si telle eut été l’intention du Légiflateur, il
l’eût diiertement exprimé;dans fon Ordonnance
de 173>5 , non feulement il eut abrogé les reilaments mutuels ÔC ceux faits conjointement, mais
encore toute efpece de teftament entre mari 6c
femme; il n’auroit fait aucune diilinâion de ceux
di&és par la contrainte d’avec ceux qui auraient:
ctélf l’effet d’une tendre amitié.
Cependant le Légillateur a laiiTc la liberté à deux
conjoints de fe témoigner leur affe&ion par des diipofitions réciproques , il a feulement abrogé tout
�9
J zt
ce qui pourroit annoncer la contrainte ou l’abus
de l’autorité du m ari, pour extorquer de la foibleüè
de fa femme des difpoiitions quelle n’auroit pas
fait librement.
•
_:*
Mais fi les teftàments diQes- par la véritable
amitié ne font point compris dans la prohibition
de la loi, qu’ils aient été concertés entre.le mari 6c
la femme , qu’ils aient été paiies devant le même
Notaire 6c les mêmes témoins-, qu’ils aient été
copiés l’un fur l’autre ; ces'cirçonftançes^ devien
nent fort indifférentes, des qu’ils ne font pas faits
en contemplation l’un de l’autre , ou conjointement
dans le même â&e, ils ne font point -abiogçs par la:
lo i. .
y-
l
’ .'îijfy-' a
r.\i
f ^
v .j
0Î:S*i!-
Ainfi dès que la dame Goutanegre cil hors d’é
tat de prouver, qu’elle n’articule même pas q u ’ i l
y ait eu de la fuggeftion 6c de la captatiori; de la
part du fieur Fonttreyde pour forcer -fa feniime
a faire une inftitution en ià faveur ,'il faut préfu
mer quelaffe&ion a été le mobile du teftament de
la dame Antignac, que fon Teilament eft récipro-.
que , que conféquemment il n’ei]t pgint compris;
dans la prohibition de l’Ordonnance.de, 1735..-.
Que le teilament de la dam e'A ntignac ait été
diûé par l’amitié, il n’eft paspoifible d’en douter •
les deux Epoux avoient vécu dans la plus parfaite
union pendant 40 années, le iieurFontfreyde avoic
confondu fa légitime avec les biens de fa femme
pour les rédimer des hypothéqués dont ils étoienc
grévés, il les avoit amélioré par ion induilrie; la
t»P.
�reconnoifîaneè a excité la-dame Antignac à faire
paiïèr à fon mari un bien qui lui avoit coûté tant
de peines & de »travaux pour le conferver.
La dame Antignac a iurvécu dix années à ion
teftament, en 1764 le fieur Fontfreyde fe ren
dit a Paris pour iolliciter une place aux Invali
des, en 1770 il eft tombé dans un état de dé
mence qui lui ôtoit la liberté de vaquer a fes a f
faires: fi le teftament de la dame Antignac n’eut
point été di&é par l’amitié, combien doccafïons
n’a t-elle pas eu pour le révoquer librement ; dès
qu’elle ne l’a point fait, c’eft une preuve que ce
leftament étoit une. difpofition di&ée par la tendrefîè conjugale, un teftament réciproque qüe
l’Ordonnance de 1735 n’a pas entendu abroger.
Il refte donc pour confiant que le teftament
de la dame Antignac n’a aucun cara&ere de mu-'
îualité, ôc qu’il n’èft pas fait conjointement, ioit
parce : qu’il n’efb point fait en contemplation de
celui du fieur Fontfreyde, foit parce qu’il pouvoit
être révoqué fans le confentemcnt du premier tes
tateur , foit enfin parce qu’il eft fait par un a&e
ieparc qui ne rappelle en aucune maniéré l’exiftence du premier ; la premicre propofition'avan
cée par les iieurs &c demoifelle Fontfreyde eft donc
démontrée juiqu Y la dernière évidence.:
�II
S E C O N D E
p r o p o s i t i o n
:
ont été ja its dans un,état de démence }^ilsj'ont
radicalement nuls.
'
' Pour démontrer que le fieur Fontfreyde ecoitrréellement dans la démence, les fleurs ôt démoifelle Fontfreyde rapportent différents genres de
preuves qui ré.abliiïènt invinciblement. •• J ''
La premiere fe tiré de lavis des parentsVdu
de leurs fondés de procuration, pour faire procé
der à l’interdi&ion du fieur Fontfreyde.
La fécondé fe trouve dans les a&cs cbnfentis
par le iieur Fontfreyde depuis le 2 6 O&obre
I 772
d écès;'io it par leur multitud e , ioit par leur contradi&ion.
La troificme enfin réfulte des interrogatoires
que le fieur Fontfreyde a fubi devant les Juges
de Mauriac & d’Aurillac ; quelques obje&ions
dont Me. Chapouille failè ufage'pour détruire tou
tes ces preuves, elles relieront dans toute leur
vigueur.
La premiere preuve, réfultante de Tavis des
parents ou de leurs fondés de procuration équi
vaut à une preuve teftimoniale, qui eft a l’abri
de toute critique ; quatre Cavaliers de Maréchauilee,
qui réfidoient depuis long-temps dans la Ville de
B i
»
�M auriac, qui connoiÎloient parfaitement l’état du
fieur Fontfreyde, qu i, chargés de veiller au repos
public , prêtent ferment, & méritent , en cette
qualité, quelque considération, ont atteilé, ious la
roi du ferment que le fieur Fontfreyde étoit de
puis deux années hors d’état de vaquer à fes affai
res ; peut-on trouver une preuve teilimoniale plus
complette de Fetac de démence du, iieur Font
freyde.
. ',
■'
. *CW’eil;
que
M e. Chapouille^ voudroit
^
*** en vain
î
A
s*
. cri-'i
tiquer cet avis, de parents , en çe que ; fuivantlui,
ils, devoient y aiïifter eux-mêijies , & non ,par des
fondes de procuration.
'
;
Mais cette objeâion s’évanouit parle fentiment
de D (énifard, Verbo,, ajfembléede.parentsil nous
apprend que les .parents peuvent aiHiter à; ces;
a(lcmb,lées en perionne , ou'par quelques fondés
de procuration, pourvu que , dans ce 1dernier cas,
la procuration contienne l’avis détaillé &; précis du
Conilituant.
* _v
'• è i . ! )
4
? Dans l’efpepe p r é f e n t e , quatre parents pater
nels &: maternels cpnÎèntent dans leurs procura
tions que, s’il appert aux Procureurs conilitués que
le fieur Fontfreyde ait fait différentes donations,
qu’il les ait/évoquéiçf ,r que. par, dçs ;aâes fubféquents il :les ait. ratifiées , ,,qu çn -iu}, mot il foit
hors d’étaf de vaquer à les affaires, en ce cas ils
copfcntent a fonc interdi&ion j peut-on. trouver
des pyqcumtious plijs^pj^qifes. ^Cjïplus .pofitives
Que Tailcmblée "des parents ioit du fait des pa-
�rents eux-mêmes, Me. Chapouille ne peut en dou
ter , il connoît la généalogie de la famille du iieur
Fontfreyde ; mais l’on ne peut ôter a cette aiïèmblée de parents toute la faveur qu’elle mérite, furtout lorfque quatre de ces parents font remplacés
par quatre Habitants de Mauriac , qui étoientfenfés
çonnoître l’état du fieur Fontfreyde.
Il refte donc pour confiant que les dépofitions
faites dans l’aiTemblée des parents , & fur la foi du
ferment par les quatre fondés de procuration qui
ont remplacé les parents abfents, forment une
preuve teftimoniale de l’etat de démence du iieur
Fontfreyde, qui avoit commencé deux ans avant
ion décès.
Si l’on ajoute à cette preuve teiUmoniale une
lettre écrite par le fieur de Tournem ire, Juge de
M auriac, qui annonce que le bruit public de la
V ille de Mauriac atteftoit l’état de démence du fieur
Fontfreyde , pour*a-t-on s’empêcher de conclure
que la démence du fieur Fontfreyde eit prouvée
par témoins? ce premier genre de preuve exifte
donc dans toute la vigueur. r
Les a&es que le fieur Fontfreyde a paifé depuis;
le 26 O&obre 1772 jufqn’à fon décès font le fé
cond genre de preuves rapporté par les ficurs
demoifellc Fontfreyde; il cit intéreilant d’en faire,
fiiccin&ement le détail, afin d’en appercevoir plus
facilement la contradi&ion.
.* 4 peine le fieur Fontfreydp. a-t-il recueilli les:
biens de la dame Ântignac, fon épouiè', décédée ’
�*4
le 21 O Sobre 1 7 7 2 , qu’on cherche k l’en dépouil
ler ; on vit éclore le 26 du même mois d’Q£lobrc une première donation au profit de Me. C h a
pouille, que le Sr. Fontfreyde ne put figner'a caufe
d’un prétendu tremblement de main, mais dans le
v r a i, parce qu’il fe trouvoit dans un état d’ivrefîè
où l’avoit plongé Me. Chapouille, 6c qui fit crain
dre pendant quelques inftants pour la vie du fieur
Fontfreyde.
Me. Chapouille étant parti pour faire infinuer
fa prétendue donation à A urillac, on en vit éclorc
une fécondé le lendemain 27 en faveur des fieurs
& dames Ronnat, V iolle ôc Sim on; celle-ci fut
fignée par le fieur Fontfreyde , mais elle n’en eft
pas plus iolide : le fieur Fontfreyde confent le mê
me jour une obligtion de la fomme de 93 livres
1 6 fols au profit du fieur V io lle , pour le paiement
de laquelle il hypothéqué tous les biens dont il
avoit déjà difpoÎé par deux différentes donations.
Le lendemain 28 il retraite ces deux prétendues
donations, & le même jour il donne une procu
ration à un de fes neveux pour régir des biens fitués à Pérignac & \ Tallande, qui nclui ont jamais
appartenus, & furlefquels il n’eut jamais aucun droit.
Le 23 Novem bre 1772. le fieur Fontfréyde ra
tifie la donation du 1 6 Octobre précédent , &
comme fi Me. Chapouille eût encore douté de ia
donation , il fait faire un teftament en fa faveur
le 23 Janvier 1 7 7 3 , ^ans ^cclue^ ^
encore
ratifier de nouveau cette même donation.
�15
Sur la iimple expofition de tous ces aSes qui
pourroit douter un inftant de la foibleiTe d’efprit
& dé la de'mence du iïeur Fontfreyde ? la contradi&ion qui s’y rencontre eft feule fuffifante pour
nous en convaincre.
En effet le 26 O&obre l ’on fait déclarer au
fieur Fontfreyde que fès baux font partiaires &
verbaux , le lendemain on les qualifie de baux
a ferme ; dans la premiere donation on lui fait
déclarer qu’il ne peut figner , à caufè d’un trem
blement de main , on lui fait cependant figner
la féconde, dans laquelle il afîocie Me. Chapouille
pour un quart, fans fe rappeller que la veille il
avoit fait une donation en fa faveur , le même
jour il confent une obligation au profit du fieur
Violle , de la fomme de 93 liv. 16 fols, qui ne
devoit avoir aucun effet, puifqu’il n*avoit aucun
bien, en ayant déjà difpofé par deux différentes'
donations.
La retra&ation du fieur Frontfreyde du 28 O c
tobre annonce d’un côté combien peu le fieur
Frontfreyde étoit dans l’intention de le dépouiller
de fès biens , ôc de l’autre la foibleiTe de fon
cfprit, ôc de fa mémoire ; la ratification du
2-3 Novembre , le teftament du 23 Janvier fuivant ne font que confirmer la démence du fieur
Frontfreyde, qui, d’ailleurs étoit âgé de 86 ans.
La vielleffe n’efl: point a la vérité un empê
chement pour difpofer ; cependant lorfqu’un vieil
lard eft parvenu à cet état de décrépitude , qui
° AV.
�16
réduit fes organes a un genre de foibleiTe , que nous
appelions communément enfance , la vieilleilè
fait alors préfumer que les aâes ioufcrits par le
vieillard ne peuvent être réfléchis , ôc qu’ils
font le fruit d’une impreiîion étrangère , c’elt ce
que les Auteurs enfeignent , ce que la Juriiprudence a confirmé.
» Encore , dit Ricard , que nous ayç>ns trop
» de. reiped pour la vieilleile, fi avancée qu’elle
» puilFe être , pour la noter de la moindre in» terdiâion , néanmoins , comme les fondions
» de l’efprit dépendent des organes du corps ,
» qui s’altèrent par la longeur du temps , il ar» rive fouvent que l’eiprit diminue de telle forte
» fur le déclin de la vie , que , quoiqu’il ne
« tombe pas dans un délire, il ne conferve pas
» toutefois ailèz de vigeur pour faire un ouvra» ge important, tellement que ce concours d’in« commodité ie rencontrant en la perionne d’un
» vieillard , peut fervir de fondement a la nullité
» de la difpofition qu’il a fait dans le temps
» qu’il étoit réduit à cet état, & fur-tout lorfcjue
» la diminution de fo n efpritparoitpar les acles
» même ejuil a pajfé . »
Ricard appuie fon fentiment fur celui de M eyn ard, liv. 3 , chap. 7 , de fes notables queftions
de droit, qui rapporte un Arrêt du Parlement de
Touloufe au 2 A vril 1*583, qui déclara nul le
teilament d’une femme âgée, parce que , dit cet
A u teu r, il fe reconnoiifoit par cet a&c, & par
quelques
�*7
quelques autres de pareille -qualité qu’elle avoit
paifé, qu’elle e'toit tQmbe'e dans une inconfiance
d’efprit y f&Vqûe ion 'jugement ^toit notablement,
diminué.
*■
. $ -yyj ; r-p
.... '
J l ne'fut peut-etre jamais cl’Arrêt plus appli
cable à l’eipece. préfente que celui que T on ’ vient'
de citer-; le fieur Fojritfreÿde7 etqit âgé de 86 ans,
lo rs.d e'ion décès, -‘ipli efpr it\étoit] dans la Lplus
grande-, incon (lance;deuX/différentes donationsr
qui fe_contrarient entr’elles , un a&e de retra&ation , - deux diffërentesf ratifications., une x)bîigation &c ' un teflamenr ; ' cettç, multitude' d’ac
tes fbics pendant les/trois,derniers mpis:ide la;
vie du fieur Fontfreyde annoncent Finconilance
de ià volon té ; le contraile & la Miverfité qui fe
trouvent-dans tous ces^afles ne :peuyentr ayoir
leur principe que dans la ;foibleile ^d’eiprit,; le dé-..;
faut de jugement ôt de mémoire,"en un-mot^dans^'
la démence de celui qui paroîtJeS avoir fouferits.
Que tous ces différents a£tes paroiiTent iàges
en eux-mêmes, peu importe, leur,enfemble n’e n attelle pas moiiis la démence de leur auteur,-.les
perfonnes qui ont di£lé les donations & ratifi- '
cations avoient le plus grand intérêt que chacun
de ces a£les ,cn particulier parut ctre iàge ; mais
ils ne peuvent empêcher que de raiîèmblage de
tous ces différents aclcs on ne tire la preuve fia
plus convaincante de la démence , du fieur Font
freyde.
C ’eit en vain que Me. Chapouille, prétend tirer
c
w
7
-•
i .
•- j
.
* *
-
» .
J .
. y
-.
•
v
.
v
�avantage de ce que le fieur CouiTàyre a pris en
177-0' une'ceiïion du fieur Frontfreyde, ion on
cle 5i:elle -né peut ’ établit: la fàgeiïè du fieur
Fontfreydé, parce que cet aéte, en lui-m êm e,'
n’eft point une a&ion intimement unie a la perionne du cédant ; il eft pofïible de fuppofer que
le fieur Frontfreyde n?y a contribué que par fa feule
fignkture, le'refte a été iuppléë par les conieils de
la dame Antignac ôc de Me. Chapouille lui-rriêmè ; cette ceiïion avoit été d’ailleurs projettée dès
l’année 1768*;^ n’y a rien en un mot dans cet
acïe', a le confidérer’ efi lui-même , qui Tioit néceifaï&ment ['6c certainement ‘l’ouvrage- 'dc'i la feule
volonté de çelin qui1l’a ’fïgnéi - :
Il eii eft de'même de l'a quittance que Me.
Chapouille oppofe aux- 'fleurs &:• elemoifelle Fontfreÿde- j elle'a-été paiTée dévaiit- Notaire -l'a préicnce du fieur-’ Fontfreydé & fa fignaturé étoient
abfôlqment inutiles, *lc Notaire pduvoit- recevoir
pôur lui • il avoit! même nombré les efpeces en
préfencc du fieur-Fbntfreyde', il ai dit en donner’'
décharge- a celui qui iè libéroit-, lb fieur Fontfrêyde ^n’a donc- contribué a- cet- aile çjue -par fa
feule fignaturé, les fleurs & demoifelle tronfreyde
11’ont donc point reconnu, comme on lé- fuppoie
fi gratuitement' ,* que le; fieur Foritfreydc ,1 leur
oncle-, étoit éti état de- régir fes affaires/
~Mais lè fieur-Chapouille'a reconnu'lui-mcrhe
l’incapacité de fon Donateur , il éroitdû par le-fieur
Fontfreydé plufieur3 années-d’air'érages- dèèens aux
�JSf
19 .
. , .
Bénédi&iris de M auiiat ; ces Religieux etoient fut
le point dê'pjfrtiMièr-des p o n riu fe tjtiVls iivbj'éht
commencé j la 'dame Antignac .vôt^llit l'es éviter
elle fciîàya de p e n d r e . des
’’mais
comme elle ne pou voit s’obliger, & ^ue fon marj
Vie pou voit contra&er valablement ,r;M e, Chap'obiile s’obligea ertVers lesBénédiHin'sde leur^dye? an
nuellement une fomme de 100 liv, jirfqiiVu rertibourfement delà iomme de io o o liv.^'laquelle 1a
dame Antignac avoit elle-même fixé les arrérages.
" Si le fieur Fontfreyde n’eut pas ëtéf en étât
de démence, n ’auroit-il pas trâité lui-mêrrie avet
les Bénédi&ins? M e .:Chapouille ‘n ’àuroit-ïl. pas
exigé à cette époque une indemnité du vérita
ble débiteur ? Me. Chapouille cofihoifïoit par
faitement l’état du Tieur Fontfrfcydé/ il ri’a pas
cru devoir uler de '/ces .fJi'écautiôn'é ; il cipéroit
d ’ailleurs que la dame Antignac furvïvrbit à fon
ma r i , il y avoit tout lieu de le préiumer. '
L ’on trouve encore une preuve de la.difmerioc
du fieur Fontfreyde ddris la conduite de Me! Cha
pon ille &: des féconds Donataires; on les a V u J,
lors du décès du fieur Fonfreyde, & ' à Pépoqüe
de l’appofition du fcellé , fe réferver réciproque
ment la voie de l’infcription de faux contre leurs
a&es , configner leur haine mutuelle dans le pro
cès verbal de l’appofition des fcellés, faire retentir
dans le fan£tuaire de la Juftice d’Aurillac les pro
pos les plus injurieux les uns contre les autres;
ne fuipcndre leur haine que parce qu’elle nuifoit à
�X
10
leurs intérêts, ôc qu’elle ëtabliiloit inconteilablernent,le droit des fieurs & demoifelle Fontfreyde.
O n a entendu M e. Chapouille s’élever en la
Cour contre la fécondé'donation , la rejetter fur
l’infidélité de L aco ile, Notaire , &c fur l’avidité
des fieurs. R o n n at, Yiolle ôc Simon : fi toutes ces
çlanjfcurs ne prouvent point la démence du fieur
Fpntfrgyde, elles laiiTent au moins,appercevoir
de la lenfibilité dans le cœur de Me. Chapouilïe,
de voir qu’il ne peut feul recueillir le fruit de fon
adreffe , que d’autres , en un mot , ont fu ex
torquer., ainii 1que ,lui , de la foibleiîè du fieur
Fontfreyde des a$es qui ne font point émanés
de fa volonté.
¡.,
...
Il relie donc encore pour confiant que les actes
iouicriçs (par je fieur Fontfreyde^ étant contradic
tores ^îîjtr.’eux', n’ont d’autre principe que. la
foibleíTe cPefprit, le défaut de jugement 6c de mé
moire de celui qui paroît les avoir foufcrits ;
qu’en un mot Je fieur Fontfreyde étoit réellement
dans la démence iorsjôc au tempsâde la pailàtion.
de,ces ¡a&es. Le fécond genre de preuve rapporté
par les fieur &.demoifclle Fontfreyde', réliiltant
dqs aûesfoufcrits par leur oncle , ell donc encore
dans .toute fa vigueur.
; f .
,
Pour atténuer ? s’il; étoit poifible , le troifieme
genre île,preuve qui réfulte des interrogatoires fubis par le iicur Fontireyde , Me. Chapouille in
voque d’abord celui fait par le Juge de Mauriac ,
il.prétend y trouver les plus grandes. preuves de
• *
�J?3
II
fageiTe ; mais quoiqu’endife Me. Chapouille, Ion
y trouve au contraire des preuves non équivoques
de la démence du fieur Fontfreyde.
• Il iùffit , pour fe convaincre de cette vérité,
de retracer trois réponfes de cet interrogatoire :
on demande au fieur Fontfreyde s’il a fait des
donations a d’autres qu’à Me. Chapouille ; il ré
pond q u il r ie n fa it rien , q u il ne croit pas en
avoir fait ni avoir rien Jigné. O n lui demande
depuis quel temps eit décédée la dame A ntignac,
ion épouie : il répond, depuis cinq à J ix ans t
quoiqu’il n’y eût réellement que trois mois. O n
lui demande s’il a vu Rigal ôc Lacoiîe , N o
taires, 6c autres perfonnes ; il répond qu'il ne
s'en rappelle pas : à la majeure partie des interrogats il répond,
quoi vous mêlc^-vous., quejlce
quecela\ous fa it? .D ’après ces réponfes il faut donc
conclure, ou que le iieur Fontfreyde étoit réeller
ment dans la démence, ou que Me. Chapouille eit
un infenfé d’olèr foutenir le contraire.
,
Quoique cet interrogatoire foie infede de deux
nullités radicales. ï°. Parce que le Juge de Mauriac
n’avoit pas fait prêter ferment au fieur Fontfreyde.
2.V Parce que le Greffier étoit 1cm parent par allian
ce , ce qui détermina les fleurs 6c dcmoilclle Font
freyde d ’en interjettçr appel à Aurillac , ils font
cependant bien fondés à excipcr des preuves de
démence'qui en réiultent.
>
Mais l’interrogatoire du Jugi d’Aurillac cil une
preuve vraiment démonflrative de la demençe du
�V 'A
fieur Fontfreyde : rien de plus fimple que les interrogacs, ils étoient prefque tous les mêmes que
ceux qui avoient été faits par le Juge de Mauriac ,
cependant ce ne font plus les mêmes réponfes ;
dans celui de Mauriac on avoit fait faire 1 eloge
de Me. Chapouille ; dans celui d’Aurillac il n’en
eft point queftion : le fieur Fontfreyde ne fe rap
pelle même pas de lui avoir fait une donation ; il
ne fe reifouvient n’y defon âgé, ni s’il a des parents;
il ignore l’époque du décès de fes pere
mere ÔC
celui de fa femme.
Le fieur Fontfreyde veut envoyer chercher les
violons pour faire danfer les Juges ; il recomman
de à fa fervante des pompes ou gâteaux, 6c lui crie
de ne point les laifier manger aux Juges d’A uril
lac : il veut marier M e. Chapouille, qui l’étoit
cependant depuis long-temps ; il commande l’exer
cice, il jure, il fe répand en inve&ivesôt engroffieretés contre les Juges. Si à ces traits l’on ne reconnoît point un infenfé, que M e. Chapouille
nous dife donc comment l’on pourra délormais
le connoître.
Que le fieur Fontfreyde ait manqué cilèntiellement aux Juges d’Aurillac , ià démence lui ferv o itd ’excufe; mais que de ce manquement efïcnticl
a la Jnftice Me. Chapouille , A v o c a t, veuille fc
faire un moyen pour établir la fagefTe du fieur
Fontfreyde, & lui fuppofer une fermeté d’am e,
c’ e ft, on oie le dire , le comble de l’abfurdite.
En effet le fieur Fontfreyde, s’il n’eût point été
�a3
JSJ
'
réellement dans la clémence, favoit le refpe& qui
étoit dû a la Juftice ; il avoit contribué a mainte
nir l’ordre public pendant qu’il étoit Exempt de
Marécllauflee , il n’ignoroit point alors que Tes
fonctions l’obligeoient non feulement h veiller au
repos public , mais encore à faire refpe&er les or
dres du R o i, émanés du fanchiaire de la Juftice;
l’idée' feule qu’il auroit eu de manquer aux Juges
eut été le comble de l’égarement & de la folie.
Un des devoirs les plus généraux de la iociété,
ôc que perfonne ne peut méconnoître , eft le re£
pe& dû à la Juftice , parce que tous les fujets reconnoiiïènt dans le Magiftrat qui l’exerce ‘l’homme '
chargé par le Souverain de maintenir les Loix &
de faire reipe&er ion autorité; fi le fieur Fontfreyde
ne pouvoit remplir un de ces devoirs généraux de
la- ibciét'é, mediocritatem ofjïciorum tueri & vitœ
cultum commiinem& ufiiatum, il étoit donc réelle
ment dans la démence.
r Mais ce qui' détruit toutes les obfervations que
pourrait faire Me. Chapouille contre rinterrogatoire du Juge d’Aurilliic, c’eft un Arrêt du 10 Juin
1704 , rendu contre le nommé Doublet, dont les '
réponfes aux interrogats qui lui avoient été faits ;
n’annonçoient pas à beaucoup près autant de démen- '
ce dans c e Particulier'que ceux du fieur Fontfreyde.
C e Particulier fe côntcntoit de répondre quil.
nefavoii ce que- c étoit, q u û n a\6it fa it tort à fe r fonne ; tantôt il demandoit l’heure qu’il étoit, tantôt il *
ne vo'uloit point répondre, a la vuede ces- réponfds,
�N"
24 :
M . l’Avocat Général Joly deFléury dit qu’il regar
dait ces réponiès comme des preuves d’imbécillité,
il n’héfita point à ioutenir que Doublet étoit irnbécille le Parlement le prononça de même : com
bien a plus forte raifon la Cour s’empreiîerajt-elle a
prononcer l’imbécillité du fieur Fontfreyde : qui
oferoit en douter ?
' •
Le iieur Fontfreyde étoit donc réellement dans
la démence ; la fimplicité des interrogats, le peu
de fens, ou ii l’on veut , la groiliereté des réponiès
l’annoncent évidemment, ces mouvements de colere, de gaieté , d’ennui, toutes ces variations, qui
fe terminoient ordinairement par un profond filence, ne font-elles pas des preuves plus que démonftratives de la foiblcife d’eiprit, du défaut de jugement
& de la démence?
. CuL ratiocinatio non conjlat, dit d’Argentré
fur la coutume de Bretagne , article 490 , & mémori ci labitur, nec colhgit, necjenja animi potefl exprimcre , vel quicrebro tranjitin alia prœter propojita,
nec orationem ÿcrficit, & fubinde digredirur.
Tel étoit l’etat du iieur Fontfreyde lors de l’in
terrogatoire du Juge d’Aurillac ; cet interrogatoire
annonce donc la démence du fieur Fontfreyde , &c
non la fermeté de fon ame.
Un inienfé n’eil fenfible à rien , dit Me. Chapouillc, cependant le fieur Fontfreyde témoigna
de la rcconnoiiTance au Juge de Mauriac, il n’étoit
donc point dans la démence.
Un inlenié cil icniiblc à la peine <
5c au plaiiir,
�/ 3/
H
■ ■"
fir,-autant que les facultés de fon ame ôc de fon
corps peuvent le lui permettre ; ces deux fentiments font une impreflion fur les organes, a quelqu état de foibleffe qu’ils foient réduits, parce que,
tant que l’ame n’eft point feparée du corps, il
eft fuiceptible de ièniations, mais il ne faut pas
les confondre avec le jugement ; les iènfations affe&ent les organes du corps, parce que c’eft lam e
qui le fait agir; le jugement eft un com poféd’i
dées, auxquelles l’efprit donne un certain ordre par
le moyen de la réflexion.
^
r Par exemple , que l’on préfente à un enfant
quelques objets qui flattent fa vue , les organes
font à l’inftant laifis d’admiration, ddà naiifent
différentes fenfations de plaiiir ; quon lui dife
quelques phrafes obligeantes, l’efprit nétant pas
aifezfolide pour faifir les idées qu’on veut lui com
muniquer , fon jugement ne reçoit aucune impreifion , il demeure interdit, parce qu’il ne peut
réfléchir ; tel eft l’état d’un homme dans l’enfan
ce ou dans la démence ; tel étoit celui du fieur
Fontfreyde , accoutumé a voir des honnêtes gens ;
il eft fenfible au plaiflr & à la reconnoiflance ,
parce qu’il voit des êtres qui ont le même rapport
que lui a l’humanité.
Il
n’en n’eft pas de même lorfque le fieur Font
freyde voit les Juges d’Aurillac ; le Procureur
du Roi veut lui rappeller qu’ils s’étoient vus plu- '
fleurs fois, quils s’étoient connus , cette idée ne
peut frapper l’idée du fieur Fontfreyde , parce
�que le jugem ent, la réflexion &c la mémoire lui
manquent tout a la fois , il répond q u il ne s'en
fouvient pas ; (i le fleur Fontfreyde n’eut pas
été réellement dans la démence , il n’auroit pu
méconnoître les Juges d’A urillac, il avoit eu des
relations très-fréquentes avec eux étant Exempt de
Maréchauilee, il avoit même mérité leur eltime.
Mais toute la Ville de Mauriac rendoit vi~
lîte ail • iieur Fontfreyde , dit encore Me. Chapouille, m-t-on voir un infenfé ? quel feroit le
but d’une pareille vifite?.
Si les donataires compofent toute la Ville de
M auriac, il n’eft pas douteux que l’objection de
M e. Chapouille paroîtroit avoir quelque fonde
ment , leurs fréquentes viiites ne font que trop
malheureuiement connues des fleurs & demoifclle
Fontfreyde»
Mais en fuppoiant que toute la Ville de Mau
riac eut été rendre viiite au fieur Fontfreyde,
s’en fuivroit-il pour cela qu’il ne fut point infenie ?
la conféquencp ne feroit pas jufte. | le fieur Fontfrçyde fut l’ami de tout le monde , ce qui eft aid
iez rare dans un pays où les diilcntions ne. font
que trop communes, iuivant les propres expreifions de Me. Chapouille ; le fieur Fontfreyde
s’¿toit attiré à jufte ritjre la coniidération des ; gens
honnêtes, il eft- des cas qii une civilité., quoi-'
qu’inutile a celui a qui 011 la rend , elt unç,iàtisfac-‘
tion pour celui qui la fait ; le fieur Fontfreyde
avoit perdu là femme , les Habitants de Mau- .
�• .
. a7,
riac lui devcient, ainfi qu’aux parents de la dame
Antignac , fe devoient à eux-mêmes de rendre vifite au fieur Fontfreyde'; cet acte de 'bieniearxe
ne peut être une preuve de fa fagefTe.
Mais, dit encore M e- Chapouille, le iieur Font
freyde a participé aux Sacrements de l’Eglife
avant fon décès , c’eft une preuve qu*on le regardoit encore comme membre de la fociété civile,
il n’étoit donc point dans la démence.
La participation aux Sacrements eft, fuivantquel;
ques Auteurs , & nottamment Ricard ,, une pré
em ption contre l’état de démence ; ' ce n efl ce
p e n d a n t pas toujours une preuve 'dé fage/lè , nous
avons une preuve bien certaine de cette, vérité
dans la caufe du Prince de Conty ;contre Madame
la Ducheflè de Nem ours, jugée en 1698 l’on
oppoioit ôc l’on prouvoit que M r. l’Abbé d’O r
léans difoit publiquement la Méfie , qu’il approc h o i t duSacremeentde Pénitence, cependant tous
les a&es qu’ils avoir ioucrits à cette époque furent
déclares nuls.
\
f D ’ailleurs qui nous dira que le certificat rappor
té par Me. Chapouille eft bien finccre ? qui nous
afTurera que M e. Chapouille n’a pas ufé de quel
ques précautions inconnues pour ié faire un moyen
contre les fieurs &.dèmoifellé Fontfreyde ? tout fait
p r é f u m e r que c e certificat eft une fable, & qu’il
n’eft pointa l’abri de fufpicion.';
f
1°. Parce qu’on eut foin de faire appeller le beau*
frere* d’un des donataires ' pour" exhorter le^iieùr
D 2,
�Mû /
*
x
28
Fontfreyde a la mort ; ion fentiment devoit pa
raître fu fp eft, mais le Vicaire de Mauriac crut
devoir s’en rapporter a la fimple déclaration de
ce Miniftre, iàns approfondir plus avant les mo
tifs de ion indulgence.
20. Parce qu’il étoit de la connoiflance du Curé
:de Mauriac que le fieur Fontfreyde étoit dans la
démence : témoin le jour auquel le C u ré vint exhor
ter la dame Antignac a la m ort, le fieur Font
freyde l’accabla d’invectives, &: fi l’on n’eut trou
vé une excufe dans l’état de démence d^ fieur Font
freyde , le Cure fe ièroit pourvu contre lui pour
demander réparation ; c’eft un fait fur lequel on in*
voquéroit avec confiance le témoignage des honnê
tes gens qui en furent inftruits : le certificat qu’on
rapporte aujourd’hui, en le fuppofant vrai,eft donq
une politique de Me. Chapouille, & ne peut prou
ver la fagefïe du fieur Fontfreyde.
Le fieur Fontfreyde 7 dit encore Me. Chapouilïe , cil: décédé en poflèfïïon de fon éta t, fes pa7
rents l’avoient abandonné ; ce n’eit |qu’après les
donations confondes par le fieur Fontfreyde qu’ils
ont formé la demande en interdi&ion : cette de
mande étoit donc tardive ? ôt la poflèifion d’état eft
une fin de non-recevoir.
.
1 ^Il cil avoué par Mç< Chapouille que la Scnçencç
^’interdiction eit inutile pour privjçr un hom*ne qui
cil dans l'adémence delà faculté de tjifpofer de fbs
biens; par-une coniequence naturelle çle ce princi
pe les fieurs1& ‘j.çmy.ifellei Fop.j^eyde pouvoiertt
*............. ¿ c i
�omettre cette formalité ; m ais ils vouloicnt mettre
leur oncle à l’abri de l’avidité des donataires, ils
ne pouvoient former cette demande en interdiction
qu’après le. décès de la dame Antignac.
En effet la dame Antignac étoit héritiere teflamentaire de fon m ari, elle avoit dix années de
moins que lui, fuivant les loixde la nature elle devoit lui furvivre ,• elle étoit en état de régir fes af
faires ; les fieurs & demoifèlle Fontfreyde ne pou
voient & ne devoient donc point folliciter l’interdicHon du fieur Fontfreyde gavant ,le décçs, de la
.dame Antignac, elle les auroit,éqarté; par..ia.ieule_
o ppof i t i on& fa qualité eut arr.êté.la'demaridç en
interdiction qu’auroient formé ‘les fieurs
demoifelle Fontfreyde.
f. .
j.j- La> demande en interdiction a\été formée a\^ant
Je .décès du fieur Fontfreyde ^..ilmjelt.don^ poinp
décédé en poifefÎîoii paifible de fon état ; d’ailleurs
il 'n’exiitc.aucune Loi-, aucun Arrêt qui, aient; pro
noncé ,Ja ,fin dç non-recevoir dansv l’efpeçe dont
il s agir.' , -,
( :■'']') jf ;i<r>*«■■
■
ï j '* \ ‘jJm- )Oi;ii \
Toutes les obje&ions; de, Mft:Ohap,opille()ajnfi
réfutées ^il reiie pour confiant que( lç,^ernier gen-re de preuve rapporté par les fieurs& ; clpmoiicl(ç
Fontfreyde , réiultant des intc^oga^pjrcs^de^
ges de .Mauriac r& d ’AuriUac , ^
$e fa vigueur, tout çonçourt douc'.a.pr^otiv^r |u(y
qu’à la dernière évidence 1 état de denience cju
fieur Fontfreyde , & p^r une confcquenqe natu
relle la nullité de 594s.^ s 'j^ c3
B "?aÎièflfJi;qi
>
�Dès que le teilament de la dameAntignac n’eft
point mut uel , qu’il n’eft pas fait conjointement,
qu’il eft feulement le fruit d’une amitié réciproque,
c’eft en vain que la dame Goutanegre prétend
trouver fa profcription dansl’Ordonnance de 173 5,
elle doit s’attendre a'voir rejetter fon fyftême.
Dès que nous rapportons les preuves les plus
convaincantes de la démence du iieur Fontfreyde,
foit par la preuve teftimoniale, foit par la mul
titude &. la contradiction des a&es qu’il a iouicrit,
foit enfin par l’abiurdité des réponies confignées
dans le$ différents interrogatoires qu’il a iu b i, quel
lort doivent efperer les donatairesquelle fera la
recompeniè de1 leur avidité ? qu’ils iè jugent euxmêmes ?
1
En vaininvoqueroient-ils en leur faveur la loi
paterna paternis, materna maternis, en vain M e.
.Chapopjlle foutiendroit-il que U dame Antigrtac
h’avoit iriïVitt^é fon mari Ion héritier q u i la charge
de lur rendre les:biens ; ces différentes allégations
ne pourraient détruire le droit des fieurs & dembiiclle.::F9ntfrcydc.,'(/ '
L :i
10.'M6. Ch^ipouillc nous donne-t-il une preuVe
qpc la datrjé ‘^ntignac n’ait inîVitiié fon mari que
conditionnellement ? trouvera-t-bn dans le teftament
de la dame Antignac quelques expreflions qui
reiIèrriblcÀt à uni fidei-commis' ? non: les alléga
�31
tions dè Me. Chapouille pourroient-elles donc pré
valoir à un a&e qui eft pur &; fimple , à une
inftitution purement gratuite, &; qui n’eft grévée
d’aucune condition ? D ’ailleurs M e. Chapouille
n’étoit pas dans l’ordre dired de fuccéder à la
dame Antignac ; en un mot, fi le fieur Font
freyde fut décédé avant la dame Antignac, l’on
demande à Me. Chapouille.s’il eut rendu les .biens
du fieur Fontfreyde, dans le cas où il eût ;été inftitué héritier par la dame Antignac ; ion avidité
a extorquer une donation du fieur Fontfreyde, trois
jours'après le décès de.la dam e.Antignad, nous
attefte le contraire.
;
' '•?
- i*. La loi paterna paternis. n’eft relative qii’à
l ’ordre ordinaire des iucceiii0nsr c’eft-à-dire, que
Ipçs du partage d’une fuccefïion dans laquelle üi
y 'a eu, confufion des -biens. paternels : &i- mater^
nels i,-on. rend a chacun ;des côhérièr& les biens*
qui viennent de leur eftoc;mais loriqu’unetfemme^
par pure amitié, a inftitué fon mari ion héritier, ce
n’eft plils le cas -.de l’application de-cette maxime.
D ’ailleurs, lorfque le mari recueille la iàcceilion
de fa femme, les biens qui font partie de l’inftitution fe confondent avec ceux! du mar i , &c font
cftoc fur fa tete ; & comme le fieur Fontfreyde
a. recueilli l e s . biens xle la dame'Anrignac, ils font
devenus relativement a fes héritiers biens paternels;
nous pouvons donc invoquer en notre faveur les
mômes maximes employées par nos Advciiaiies.
r N o u s, voila donc enfin ;par venus a u , moment :
�.qui va décider du fort; des Parties ; il s’agit de
conferver a une famille honnête une partie de biens
dont la tendreffe conjugale avoit difpofe en faveur
d 'un Vieillard qui: fut le jouet de la féductio n &
de l’avidité , auff i-tôt qu’il commençoit à jouir des
bienfaits de fon époufe ; a lui 'conferver encore
une autre partie de biens qui faifoit le patrimoine
du fieur Fontfreyde, & qu’il'confondit dans ceux
de fon époufe, pour, les rédimer & les améliorer.
Les fleurs & demoifelle Fontfreyde, incertains
pendant long-temps s’ils recueilleroient la fuccef
fion de leur oncle, puifqu’il en avoit difpoféen faveur
de la dame Antignac, fon époufe, fe font encore vusà la veille 'de la perdre par des manœuvres odieufes & inouies : ils viennent dans le Sanctuaire de
la Juftice demander vengeance contre l’avidité de
leurs Adverfaires, & réclamer des biens que la
loi du fang leur déféré ; leur confiance ne le cède
en , rien a leur efpérance.
Monfieur D U F R A I S S E D E V E R N I N E S ,
Avocat Général.
Me. P R E V O S T , Avocat.
J ULH I A R D , Procureur.
D« l'imprimerie d e P. V IA L L A N E s , près l’ancien Marché au Bled. 1774.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Fontfreyde. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duffraisse de Vernines
Prevost
Julhiard
Subject
The topic of the resource
démence
successions
testament mutuel
conflit de lois
droit écrit
testament distinct
donations entre époux
ordonnance de 1735
intention du testateur
témoins
incapacité
abus de faiblesse
doctrine
paterna paternis
materna maternis
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour les Sieurs Fontfreyde, les sieur et dame Coussayre, Bourgeois, habitants de la Ville de Clermont-Ferrand, Appellants, et demoiselle Pérrette Fontfreyde, habitante de la Ville de Billom, Intervenante. Contre Maître Pierre Chapouille, Avocat en la Ville de Mauriac, Intimé. Contre les sieur et dame Ronnat, les sieur et dame Violle, habitants la même Ville, Intimés. Et encore contre demoiselle Marie Simon, veuve de Joseph Goutanègre, habitante de la Ville d'Aurillac, Intimés.
Table Godemel : Testament : 2. des dispositions testamentaires ayant été faites réciproquement mais séparément par deux époux, le testament invoqué par le survivant peut-il être annulé, aux termes de l’ordonnance de 1735, comme étant mutuel. ce testament a-t-il pu être anéanti indirectement par des donations obtenues de l’époux survivant, octogénaire, et en état de démence ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1763-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0328
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Mauriac (15120)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52936/BCU_Factums_G0328.jpg
abus de faiblesse
conflit de lois
démence
doctrine
donations
donations entre époux
droit écrit
incapacité
intention du testateur
materna maternis
Ordonnance de 1735
paterna paternis
Successions
témoins
testament distinct
testament mutuel