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Text
MÉ MO I R E
P
o u r
le
Citoyen A L E G R E ,
Marchand en
cette Commune.(de Riom , Demandeur.
Contre
le C it o y e n C H A S S A I N G
O ffic ie u x p r è s
le
m êm e C o m m u n e ,
T r ib u n a l
de
,
D e fe n fe ur
D iftr ic t
D é fe n d e u r •
de
ce tte
i
P O u r faire de nouvelles conftructions à fa g r a n g e , le
citoyen Chaff aing entreprend de priver le citoyen A lè g re ',
fon voifin , des jours & vues de fervitude dont il jouit de
toute ancienneté ; des jours & vues qui font les feuls par
lefquels la maifon A lèg re puiff e être é c la ir é e , fans lefquels
cette maifon ne peut être h a b itée ; jours auff i anciens que
la m a ifon , & qui ont été faits exprès pour fon ufage,
C e font ces jours que le citoyen Chaff ain g veut obftruer;
il les app elle des jours de coutume ; il invoque un prétendu
droit commun ; il r é c la m e une .efpèc e de liberté qui tend à
priver fon voifin de l’air & de la lu m iè r e donnés à tous ^
ainfi., pour colorer fa prétention , il eft, obligé d’oublier l’é
quité naturelle , de dénaturer la co n g éla tio n , & d 'a b u fe r des
principes les plus inco nteftables ; en s' occupant à les rétablir
le citoyen A lc g r e aura prouvé la juftiçe de fa demande.
A
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F
A
I
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S
.
L a maifon du citoyen A lè g r e confine aux afpe£ls de nuit
bife la grange & paffage de grange du citoyen Chaffaing.
I l paroît
il eft évident qu’autrefois cette grange & le
paffage dépendoient de la maifon A lè g re , & appartenoient
au même propriétaire; l ’infpeciïon du local attefte cette v é rité ;
on voit un refte de grande porte t r è s - a n c ie n n e , murée a c
tu e llem e n t, ftc-qui donnolt une entrée à la maifon A lèg re
fur ce paffage ôc dans la grange ; t o u s le s j o u r s & vues de
la maifon , au même afpeft & fur ce paffage j les fenêtres
en faillie , un long rancheau le long du mur , également en
failli , un égout allongé , qui jette les eaux de la maifon
A lè g r e dans ce même paffage: enfin mille caraûères annon
cent une foule de droits de fervitude de la maifon A lè g re
fur le paffage en queftion , & que ces droits ont été confervés à la maiion A lè g r e , lorfque la grange & le paffage
en ont été diftraits, & ont paffé à un autre propriétaire.
Auffi le c it o y e n A l è g r e , & avant lui tous les autres pro
priétaires d e la maifon , ont-ils joui de tous ces droits fans
aucun trouble ni empêchement. L e nombre & la nature de
ces différentes fervitudes en font connoître parfaitement la
légitimité.
&
i °. C ’eft un foupirail de c a v e , qui eft à un demi-pied du fol du
paffage de la grange j la cave du citoyen A lè g re ne peut
recevoir d’ailleurs aucun autre jour ni air ; il paroît être de
l ’ancienneté la plus reculée.
a 0. C ’eft une fenêtre de trois pieds en q u a r r é ,o u en viro n ,
grillée en fer du cô té du citoyen Chaffaing ; eWe annonce
par fa ftru&ure 6c fes matériaux , qu’elle eft auffi ancienne
que la maifon ; elle eft à la hauteur de quatre pieds dix
pouces du fol du paiTage , par conféquent un vrai jour de
•fervitude : c’eft par cette fenêtre feule que la cuifine du
�c ito yen A lè g r e peut recevoir des j o u r s , il lui eft impoilible
d’en avoir d'ailleurs.
5°. A u même re z-d e-ch a u ffée une autre fenêtre de plus
de deux pieds de largeur , & d’une hauteur proportionnée ;
elle fert à éclairer la boutique du C ito y e n A lè g re ; elle eft
aufïi fort ancienne ; fa hauteur du fol de la grange eft de
fept pieds ; par conféquent c’eft encore un jour de fervitude
& non un jour de coutume.
4.®. U ne porte g h o t i q u e , fore large & fort élevée , fa hau
teur fe termine en forme de trèfle , com m e les anciennes
vitres d’églife ; elle porte l’empreinte de la plus grande v é tufté ; elle eft bouchée à la v é r i t é , & la profondeur qu’elle
forme dans la cuifine du citoyen A lè g r e , a donné lieu d’y
faire un buffet. L e citoyen A lè g re ne tire pas de l ’exiftence
de cette porte un droit de fervitude ; mais elle prouve clai
rement qu’il y avoit une entrée de la maifon A lè g re dart*
la grange du citoyen Chaffaing , & que par conféquent l’une
& r autre étoient dans les mains du même propriétaire.
j ° . A u premier étage font des refles d’une ancienne fe
nêtre qui étoit à une hauteur de quatre pieds ôc demi du
fol de la chambre ; elle étoit fort ancienne ; elle eft étoupée
aujourd’hui j mais elle a été remplacée par une autre fenêtre
qui fut pratiquée dans l’efcalier de la maifon A lè g re j elle
le fut du confentement du père du citoyen Chaffaing , il y
a plus de quarante ans ; il ne trouva aucun inconvénient a
fubftituer un jour à la place d’un autre qui lui étoit même
plus à charge & plus incommode.
<5°. U ne croifée donnant du jour à l’efcalier du cito yen
A l è g r e ; c ’eft c e lle qui remplaça la fenêtre dont on vient de
parler; la maçonnerie de Tétoupement de l’une eft de même
date que la confe&ion de l’autre ; le liondar ôc l'accoudoir
de l’ancienne fervirent à la conftru&ion de la nouvelle.
L e citoyen Chaffaing a p ré te n d u que la permiffion nour
cette ouverture n e ‘ fa t donnée que fous la condition de la
boucher lorfqu’il lui p la îro it, ou jufqu’à ce qu’il voulût
Aa
�élever le toit de fa grange , comm e il fait aujourd’hui :
cette allégation n’eft pas exa&e * le déplacement du jour de
fervitude fe fit fans condition quelconque : le citoyen A lè g r e
n en eût,, point fouffert ; ,ij ne faifoit que fubftituer un jour
à un a u tre ; il n'entendoit pas fe nuire à l u i -’ m êm e ; il ne
fut fait aucun acte à cette occaiion ; le citoyen Chaflaing
ne prétendit pas avoir acquis un nouveau d ro it, ou s’il pré
tend en avoir obtenu quelqu’un , il doit l ’établir par â£te
authentique.
,7°. Une autre fe n ê t r e fe r v a n t à éclairer la chambre du
f o n d , au-deffus de la cuifme de la maîfon A l è g r e ; fa largeur
eft de trois pieds fur quatre de hauteur ; elle eft ^ quatre
pied? d’élévation du carrelage de la chambre ; une partie de
cette fenêtre eft de la plus haute ancienneté ; l ’autre partie
a été reconstruite à la même époque des changements faits
dans les jours de fervitude dont on vient de parler.
L e citoyen Chaflaing a prétendu encore qu’il n’avoit confenti à l ’élargiflement qui fut fait à cette c r o if é e , que foui
la même réferve de pouvoir élever fou mur quand il vou droit : c ’eft encore une fu p p o fitlo n , l e confentement à cette
petite i n n o v a ti o n fut fans ré fe r v e , & parce qu’elle étoit peu
c o n f i a é r a b l e , 6c parce qu’il importoit peu au c ito y e n C h a fla in g ,
que cette fen être, qu’il ne pouvoit empêcher d’exifter, eût un
peu plus ou un peu moins d ’ouverture.
Une circonftance effentielle à rem arq u er, c ’eil qu’avant le
nouvel œuvre du citoyen Chaflaing , l’ancien toit de fa
grange , qui s'élevoit prefque à fle u r de cette croifée , moin*
élevé , f o r m o i t au-deflous d'elle une pente rapide & préci
pitée ; pendant que l ’inclinaifon de l ’autre partie du t o i t ,
afpe£t de bife , étoit plus ménagée & moins fe n fib le ; de
manière qu’il étoit facile de re m a rq u e r qu’on avoit forcé la
pente du toit du cô té de m id i, dans le deflein bien exprimé
de refpe£ter le jour & la vue de cette croifée ; cette cir
conftance, digne de frapper la juftice, ne peut être défavouée,
en cas qu'elle le f û t , le citoyen A lè g r e feroit en état
�*
d’en faire la p r e u v e , ôc de ce fait incanteftable, il réfultc
de la part du citoyen Chaflaing ou de fes a u te u rs , une reconnoiflance de fervitude acquife pour cette fe n ê t r e , fans
pouvoir é l e v e r , & de la part du citoyen A lè g r e une confervation a£tive & perpétuelle de fon d r o it} jufqu’au m om ent
de l ’entreprife dont il fe plaint.
8°. A l’étag© fupérieur font deux lucarnes fervant à éclairer
le grenier du citoyen A lè g r e , elles ont la vue pleinement
libre
fans fer maillé ni v e r r e d o rm a n t , ainii que tous les
autres jours donc on vient de parler ; leur accoudoir eft à
un pied ôc demi du p lan ch er, ce qui cara&érife encore la
fervitude exprefle.
p°. E n f in , dans toute la longueur du mur à l ’afpeft de bife
à m id i, règne tout le long un rancheau fort large , qui dans
toute fon épaiifeur fait faillie fur le paifage ôc la grange
ChaiTaing ; il eft foutenu par des bouchecs ou corbeaux ,
tous en faillie du même cô té ; par intervalle font des ouver
tures appellées ranchelets, pour nétoyer ce c a n a l, ôc qui fe
préfentent encore du même c ô t é ; ce rancheau eft deftiné à
recevoir les eaux de la maifon A lèg re , à l’afpe£V de bife ,
ôc même en to u rn a n t, les eaux du toit afpeft de nuit.
T o u te s les circonftances fe réunifient donc pour aifurer
au citoyen A lè g re une propriété exclufive de la totalité du
mur en queftion ; c ’eft ainii qu’il en a joui par lui ou fes
auteurs depuis un temps im m ém orial, ôc c’eft ainfi qu’il doit
en jouir , à moins que le citoyen Chaflaing ne s’arroge le
droit de lui interdire l’ufage de fa maifon. C ’eft vraiement
ce qu’il a prétendu fa ir e ; fous prétexte d’élever le toit de
fa g r a n g e , & de la prolonger le long du paifage , il a , de
fon autorité privée , c o m m e n c é des o u vra g e s qui tendroient
à intercepter le jour de la cuifine du c it o y e n A lèg re , de fa
chambre fur le derrière ôc celui du g r e n ie r , fans qu’il foit
poilîble abfolument au citoyen A lè g re de s’en procurer
d’ailleurs.
Une telle entreprife révolta le citoyen A lè g r e ; elle troubla
A 3
,
�6
l'union & là bonne hàrmonie iqui doivent régner entre voifins;
elle donna lieu à une multitude de difcuffions. L e citoyen
A l è g r e , peiné d’en a v o ir , & très-empreffé de les term iner,
propofa la médiation dé deux hommes de loi , les citoyen»
T o u t é e & Granchier : les lieux furent vifités foigneufement
par eux 6c par des experts avec e u x , les citoyens G c r le 8c
M anneville ; les droits refpé&ifs furent mûrement examinés;
les arbitres proposèrent enfemble un projet d’arrangement
amiable; l’expolant l'accepta fans héfiter; le citoyen Chaffaing
ne s’y refufa pas lui - même * mais les doubles n’étant pas
p r ê t s , ôc la fignature de cet afte ayant ét é différée de quel
ques jours , le citoyen Chaffaing profita de cet intervalle
pour rompre la tr ê v e ; il augmenta fes ouvrages; il fit naître
des difficultés; il ne voulut figner l’a£le qu’il avoit d’abord
adopté, que fous des modifications & des reflritlions ridicules..
11 fallut donc en venir aux voies de rigueur : envain le
Bureau de Conciliation , envain les Juges de Paix qui co n
nurent aufli de cette affaire, effayèrent différents modes d’ar
rangement ; le citoyen A lè g re confentoit à tout , pourvu
que fa maifon ne d e v în t pas dans les mains un objet in u t ile ,
& qu’ il pût y avoir fes jours , pendant que le citoyen
Chaffaing fe refufoit à toute propoiicion raifonnable : enfin
le citoyen A lè g re comparut devant le T r ib u n a l, il y porta
non feulement la confcience intime d ’avoir frit toutes les
d ém arch es, tous les facrifices poffibles pour éviter une conteftation , mais encore avec l’avis unanime de deux anciens
jurifconfultes ôc de deux experts éclairés, qui avoient déclaré
ouvertement & par é c r i t , « que. la d:fpofuion de la coutume
» de Paris, qui permet au propriétaire du foi libre d ’élever
» autant qu’il lui p l a î t , & d appuyer fur le mur v o ifin , en
» dédommageant, ne recevoit ici aucune application , ne pou» voit porter atteinte au droit du citoyen A lègre , 6c que
» les jours dont il avoit joui de temps im m ém orial, étoient
» de véritables jours de fervitude 6c non de fimples jours
de c o u t u m e , qu’il fût permis de boucher en élevant. »
�zr
7
Cependant le citoyen Chaffaing continuoit fes entreprîfes :
une partie des jours abfolumene néceffaires au citoyen A lè g r e
étoient interceptés ; la caufe portée une première fois au
T rib u n a l, un jugement in te rvin t, qui provifoirement défendit
au citoyen Chaffaing de paffer outre à fes nouvelles co n ftru & ion s, & renvoya fur le fond à la première audience.
L a caufe fut de nouveau plaidée contradi&oirement,1le citoyen.
Chaffaing fit envain les plus grands efforts pour faire admet
tre fa p rétention, pour faire eonfidérer le droit d’élever qu’il
s 'a rro g e o it, comme un droit de pure faculté , un droit à l’abri
de la prefcriptîon y fa prétention fut rejettée ; le cito yen
A lè g re invoquoit la ra ifo n , l ’é q u it é , nos m œ u rs, nos lo ix ,
nos ufages ; il foutenoit que ce n’étoit pas le cas de fc pré
valoir en cette occafion des diipefitions de la coutume de
Paris , & que fes jours , les feuls qui éclairent fa maifon ,
étoient jours de fervitude & non jours de c o u t u m e , dans
le langage des ufages de Paris ; il falloit conftater la nature
ôc l’efpèce de ces jours , ce qui ne pouvoit fe faire qu’au
moyen d’une vifite par des experts , êc d ’un plan figuré des
lieux ; le citoyen A lè g re le demanda expreffdment , & le
jugement du T r ib u n a l , du 13 feptembre 1 7 9 3 , le prononça.
Il décida qu’avant de faire droit d é fin itif, & fans préju
dice des fin s , les parties conviendroient d’experts , à l’effet
de vérifier à quelle hauteur du co té de l’intérieur des bâti
ments du citoyen A lè g re , fe trouvent les vues pratiquée*
dans le mur du bâtim ent, à l’afpeft qui confine les propriétés
du citoyen Chaffaing ; de dire quelles font les dimenfions
defdites ouvertures ; fi elles font anciennes ou n ou ve lle s; fi
elles fo n t faillies du cô té du citoyen Chaffaing j f* elles font
à fer maillé 6c v e r r e d o r m a n t ; que les e x p e rts drefferoient
un plan figuré des lieux.
Ainfi donc tout point de droit eft t e r m in é en ce moment ;
le Tribunal a préjugé le fond des difficultés; il ne reite
qu'à examiner le point de fait , de favoir fi les vues en
queilion font dans l ’ intérieur de la maifon A l è g r e , à la hauA 4
�3
teur des vues de coutume ; fi elles font accompagnées dès
autres circonftances q u i , dans la règle 3 cara&érifent les vues
de coutume : ce fait feul refte à d é c id e r , & le rapport des
experts fuffiroit pour prononcer définitivement à cet égard ;
mais le Tribunal ayant aufïï prononcé que fon préjugé é toit
fans préjudice des fins , l ’expofant croit indifpenfable pour
lui de faire un expofé fu c c in S de fes moyens de droit ; cer
tain comme il Te'ft de défendre les droits de la raifon , de
la vérité & de la juftice , il ne craint pas d’en expofer de
nouveau les principes facr^c & invariables , de les fou m ettre,
s’il le fa u t, à un nouvel examen du T r ib u n a l, bien perfuadé
qu’ils ne cefleront jamais d’y être accueillis & protégés.
Sous quelque point de vue qu’on confidére la ridicule
prétention du citoyen ChaiTaing , & qu’on examine les
jours & vues du citoyen A lè g re
foit qu’on les envifage
fous leurs cara&ères de fervitudes avives , ou comme une
fuite de -l'ancieii état des lieux & des arrangements inter
venus en confcquence , fous tous les rapports ces jours &
vues doivent être refpe&és
Un fait confiant dans la caufe , c’eft que ces jours fo n t,
pour la p lu p a rt j aufli anciens que la maifon , que ceux
qui paroiflent avoir une conftru&ion plus moderne • font
établis depuis plus de trente ans , & n'ont fait que rempla
cer d’autres jours placés au m ême afpe£t', & à la même
hauteur.
L e citoyen A lè g r e ayant en fa faveur cette pofleffion
immémoriale , cette jouiflance trentenaire y ne peut plus
être inquiété dans fa poiTeflion ; il a un titre infurmontable ; il eft dans la loi qui fert encore de règle en cette
matière.
L ’article I I du titre X V I I de la Coutum e d’Auvergne
décide que « tous droks , a & io n s , fervitudes & autres droits
» quelconques , prefcriptibles , corporels ou incorporels ,
» fe prefcrivent , acquièrent ou perdent par trente ans. »
L ’article I V ajoute encore que « cette prefeription tient
�y> lieu de titre 6* de droit co n ftitu é , ôc a vigueur de temps
» immémorial. »
Sans doute on ne peut contefter qu'un jour , une vue
établie fur la maifon , fur la propriété d’autrui , ne foit
une véritable fervitude ; eh bien „ par cela feul que le citoyen
A lè g r e en a ioui trente ans utiles & confécutifs , il a acquis
le droit invincible , inconteftable de les^ conferver ; la loi
les lui affure , les lui maintient ; la loi veut que ce droit
foit aufli puiiTant , aufli facré que celui qui réfulte d’un
titre ; &c c o m m e le citoyen Chaffaing n’oferoit pas réfifter
à un titre écrit & formel que rapporteroit le citoyen A l è g r e ,
& qu'il n’effayeroit pas j contre un a&e p r é c is , de lui ôter
fes jours 6c vues ; de même le citoyen A lè g r e ayant joui
depuis un temps im m é m o ria l, eft confidéré com m e ayant joui
en vertu d’un titre é c r i t } en vertu d’un droit infurmontable ,
d’un droit qui maintieat l’ordre focial , qui affure ôc garantit
les propriétés individuelles ; car 3 n’en doutons pas , autant la
iprefcription eft o d ie u fe ou d é p lo r a b le dans les chofes publi
ques ôc nationale»?, autant elle doit être confervée Ôc main
tenue pour les objets privés ôc entre individus refpe£tifs; en
ce fens elle eft appellée judicieufement la patrone du genre
humain ; patrona generis humani.
L a poffeffion immémoriale , ce titre in v in c ib le , écrit dans
la L o i , fuffiroit donc au citoyen A lè g re pour écarter l'abfurde prétention du citoyen Chaffaing; mais le c it o y e n A lè g re
n'eft pas réduit à invoquer uniquement la prefeription ; 1 itifpe&ion la plus légère du l o c a l , le procès - v e r b a l qui en a
été dreiTé par les e x p e rts , établit d i f e r t e m e n t qu autrefois
la maifon du c i t o y e n A l è g r e , ainfi que la grange & paffage
du citoyen Chaffaing j appartenoient au même p rop riétaire,
ôc que lorfqu’ils ont paffé f u c c e f f i v e m e n t dans des mains dif
férentes , on a réglé les ouvertures qui devoient être bou
chées , ôc celles qui devoient être confervées pour l'ufage
itidifpenfable de la maifon A l è g r e ; ainfi , on convint que
la porte g h o t iq u e , qui faifoit la communication de la maifon
�$0
.* »
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A lé g r e à lâ maifon Chaffaing , feroit b o u c h é e , Suffi eft-elle
murée aujourd’hui, & la conftru&ion de fon étoupement parok
fort ancienne; cette précaution étoit jufte & raifonnable ; la
maifon A leg re ne dévoie pas avoir une entrée libre & illi
mitée dans la grange qui en étoit diftraite & appartenante à
un autre propriétaire ; mais il étoit naturel en même temps
que les jours néceffaires à la maifon A lég re fufTent confervés,
& ces jo u r s , aufîi anciens que la porte g h o t iq u e , fubfiftent;
feulement le même principe qui avoit fait boucher la porte
g h otiq u e, e n g a g e a k faire garnir de barres de f e r , les fenêtres
& o u v e r tu r e s qui auroient pu d o n n e r un e e n t r é e trop facile
dans la grange Chaffaing ; mais ceete attention elle-mêm e ,
juñe & co n v e n a b le , confirme la conféquence que ces jours
& vues ont été pris en confidération , & qu’on eft coHvenu
de les laiffer fubfifter, avec la précaution de les faire revêtir
de barres de fer pour défendre les communications récipro
ques , tel fe montre le foupirail de la cave A lé g re , peu
élevé au->deffus du fol du paffage; telle eft aufîi la croifée de
la fenêtre de la cuifine ; des barres de fer empêchent le paffage trop facile des perfonnes fur la propriété Chaffaing ;
mais laiiTent un libre accès au jour , à l'air & à la vue.
Il n’en eft pas de même des jours & vues des autres ap
partements; ils font aufîi antiques; cependant ils font abfolument lib re s, rien ne les b o u ch e , rien ne les g ê n e ; il n’y
a pas de barres de f e r , & il n’ y en a jamais eu , parce que
fans être fort élevés au-deffus du fol du paffage Chaffaing ,
puifqu’ils ne font qu’à la hauteur de fe p t, dix 6c douze pieds,
néanmoins ils ne laiffent pas une communication aufîi facile ;
en conféquence on les a laiffés dans leur état naturel , fans
y rien changer ni ajouter de ce qu’ils étoient autrefois.
D e cette connoiffance du lo c a l , il réfulte qu’il eft aujour
d’hui tel qu’il étoit dans les temps anciens ; qu'il a été joui
fans trouble dans ce même é t a t ; qu’il a été maintenu t e l ,
parce que dans l’origine cela fut ainfi ftipulé, & cela fut con
venu de la f o r t e , parce que fans c e l a , la maifon Alégre^
�privée âbfolument de jours ôc de v u e s , ne pouvoit exifter
comme maifon ; & ces con féq u en ces, ces précomptions font
d’une telle force , que dans les Coutum es mêmes où les
fervitudes ne s’acquièrent pas fans titre s , s’il paroît que les deux
propriétés ont été jadis dans la main du même p ropriétaire,
qu’elles aient été féparées dans la fuite , la pofleiïion des
jours , vues ôc autres fervitudes vaut titre à celui qui en
a joui.
C e principe eft attefté par C h a b r o l, fur la C ou tu m e d’A u
v e r g n e , tom. 2 , pag* 7 *6 ; par F o u r n o u x , C outum e de la
M a r c h e , art. 8<? ; quoique dans cette dernière Coutum e il
n’y ait point de fervitude fans titre ; m a is , dit le C o m m e n
tateur , lorfque les héritages ont appartenu à la même fa
mille 011 à la même communauté , il n’eft pas néceffaire d’un
titre pour établir une fervitude fur l’héritage voifin ; on pré
fume que ce droit a été retenu par les partages & les anciens
règlements.
D u p le iïis, t o m . 1 , liv. 2 , chnp. 2 , pag. 1 2 3 » dit aufli
que les jo u rs , vues ôc partages font préfumés avoir été confervés par le commun confentement des parties; ôc la jouifiance qui en a été continuée après l’aliénation d’une des
m a ifo n s , explique aflez ce qui s’eft paiTé entre les parties
lors de la v e n te ; ainfi s’explique Dupleiïis., ôc 1 on fait qu il
écrivoit dans une C outum e qui exige un titre pour acquérir
une fervitude ; tellement cette poiTeflion , cet ufage immé
morial des fervitudes fur une propriété jadis réunie a celle
qui les r é c la m e , eft regardée comme une fuite naturelle des
anciennes conventions; à plus forte raifon ce principe doit-il
être accueilli dans un e C o u t u m e où les fe rv itu d e s s acquièrent
par la prefcription ; où cette prefcription eft favorifée ouver
te m e n t, vaut le titre le plus f o r t, le d r o it le mieux conftitué.
N e pouvant réfifter à la force de ces moyens , le citoyen
Chaflaing eiTaie de les élu d er: d après la C ou tu m e de Paris,
qui fait la règle générale en cette m a tiè r e , j Y i , dit - i l , le
droit de rendre mitoyen le mur voifin en dedommageant ; ) ai
�5 %.
*v.
I2
pareillement le droit d’élever fur ce mur aux mêmes co n di
tio n s; je ne puis être privé de ce d r o it , qui eft de pure fa
c u l t é , par aucune p refcrip tion, quelque longue qu'elle foit;
les jours & vues du citoyen A lè g re ne peuvent nuire à mon
d ro it; ce font des jours ôc vues de C outum e qui difparoiflent
devant la faculté de bâtir , qui appartient à chaque voifin ,
& qu’aucune prefcription ne peut conferver.
T e l s font les moyens du citoyen Chaifaing ; ils ne préfentent que de vaines fu b tilité s , que de pures chicanes.
E n e f f e t , en a d o p ta n t tout ce qu’on oppofe relativement
à la Coutum e de P a ris , on ne peut e n r ie n c o n c lu r e contre
le citoyen A lè g re ; ce n’eft pas cette C outum e qui fait ici
la règle des parties au fujet des prescriptions des fervitudes ;
c ’eft celle d’Auvergne qui admet la prefcription com m e un
titre invincible ; le moyen de la C outum e de Paris eft donc
ici illufoire.
N o u s avons admis, il eft v r a i, la faculté de fe fervir du
mur voifin & d’y b â t ir , fuivant la C outum e de Paris ; mais
la raifon , l ’équité , l ’honnêteté publique prefcrivent que ce
foit fans t r o p préjudicier à ce voifin dont on veut rendre le
mur mitoyen & s’en fervir; il rdpugne à tous les p rincipes,
à la bonne foi , à l’ordre f o c i a l , que fous prétexte de ce
d ro it, d’ufer de la chofe du voifin , on puiiïe lui inter
cepter abfolument l ’a i r , boucher tous fes j o u r s , le priver de
toutes fes v u e s , en un m o t , lui rendre fa maifon entièrement
i n u t ile , en vertu de la L o i ; fi une telle L o i e x ifto it, elle ,
feroit exécrable , tyrannique ; une réclamation générale la
feroit a u fii-tô t profcrire. Mais une pareille L o i n’exifte nulle
>art, & la faculté de bâtir fur le mur voifin fuppofe que
’exercice de cette faculté , que l ’économ ie politique a fait
é ta b lir, n’aura pas pour le voifin qui prête le mur m itoyen,
des e ffe ts , des conféquences trop funeftes pour lui ; tel eft
le véritable efprit de cette règle bien entendue; elle n'a pas
l ’empreinte de ces principes abfurdes & révoltants qu’on lui
fuppofe fans raifon. V o ilà ce qu’on pourroit dire au citoyen
Î
�'3
C h a fla in g , même dans la Coutum e de P a ris , fans qu’il eût
rien de jufte & de raifonnabie à oppofer.
P ou r fe renfermer toujours dans cette C outum e étrangère ,
il fuppofe que les jours en queftion ne font que des jours
de Coutum e & non de fervitude ; c’eft-à-dire , que ce font
des jours à l’égard defquels en a o b fe rvé, en les pratiquant,
les ufages de la C o u tu m e , ce qui fuppoferoit une fourmilion
à cette Coutum e ; c e f t fur ce point que roule principalement
la conteftation ; c'eft l’objet effentiel : le T rib u n al l ’a ainii
préjugé par fa d é c ifio n interlocutoire ; il s agit de 1 examiner
f o i g n e u f e m e n t , la choie eil bien facile«
Q u e faut-il donc entendre par des jours de C ou tu m e ? C e
font ceux qui , d’après la C ou tu m e de Paris , font à une
certaine h a u te u r, à une certaine diftance } ont certaines dim en fions, & font accompagnés d’autres conditions déter
m inées; aufli le Jugem ent du Tribunal a - 1 - il preicrit aux
experts de détailler exa&ement chacune de ces circonftances
légales dans leur rapport.
■L es jours de C o u tu m e , lo r fq u e le mur appartient en entier
au propriétaire, doivent ê tre ; favoir , au rez de ch au ffée, à
la hauteur de neuf pieds ; s’il joint fans m oyen la propriété
voifine ils doivent être de biez ; ils doivent être encore à
fer maillé & verre dormant ; c’eft-à-d ire, fcellés en plâtre ,
& ne pouvoir point s’ouvrir.
A u x autres érages les jours de Coutum e font réglés à
fept pieds de hauteur du fol de l ’étage ; ils doivent aufli
être de biez , avec fer maillé & verre dorm ant, de même qu’au
premier étage.
V o ilà d o n c les cara&ères exigés pour fo r m e r des vues de
C o u tu m e ; ainfi celles 'qui ne-portent point ces m arques, ces
conditions eifentielles , ne font pas des vu es de C ou tu m e ;
elles doivent être rangées dans une a u tre c la f le , fur - tout
fous l’empire d’une L o i qui admet la prefcription des fervitudes.
' O r , pour peu que le citoyen Chaifaing veuille être fincère,
�J4
pourra - t - i l défavouer qu’il n’eft pas un feul des jours eti
queftion qui ait ces fignes indifpenfables ; par conféquent qu’il
n'en effc aucun qu'on puiffe placer au rang des jours de
Coutume.
A u premier étage aucun n’eft à la hauteur de n e u f p ied s,
n’eft à vue baie ; aucun n’a de grilles ni de verre dormant ;
tous font à vue droite , s’ouvrent lib re m e n t, ôc font à une
élévation utile & com mode pour les divers ufages de la maifon
A lè g r e .
I l en eft de même des autres étages ; tous les jours y font
à une h a u te u r convenable pour le fervice des appartements ;
l ’accoudoir de la fenêtre de la chambre au - défias de la
cuifine , eft à quatre pieds du carrelage , ce qui eft bien
éloigné des fept pieds néceifaires pour conftituer un jour de
C ou tu m e ; on n’y voit non plus ni verre dormant ni fer maillé ;
ces croifées s’ouvrent librement ; les vues en font droites 6c
fans le moindre obftacle; cette defcription du local n’eft point
déguifée ou arrangée à p laifir, elle eft tirée du rapport des
experts ; c ’eft-à-dire, de la pièce fondamentale qui fera la bafe
du jugement. O r , fi toutes les circonftances de ces vues
s’ éloignent fi fort des marques indifpenfables pour des jours
de C o u t u m e ; fi elles fe p r é fe n te n t comm e faites pour le
fervice abfolu de la maifon A l è g r e ; fi cette maifon ne peut
fubfifter fans ces vu es; fi elles ont une origine la plus reçu*
ld e , il eft indubitable qu’on ne peut les regarder com me des
jours de Coutum e ; qu’elles ne viennent pas de la tolérence
6c de la fimple familiarité , mais quelles ont pris le droit
d ’être maintenues dans l’état où eiles font , dans les arran
gements 6c les conventions qui ont eu lieu lorfque la maifon
A lè g r e & la grange ChaiTaing ont palfé à deux propriétaires
différents.
Q u e le citoyen ChaiTaing ne prétende pas que s’il n’a pas
fait boucher ces jours , c ’eft qu’il n’y a pas eu d ’intérêt , ÔC
qu’il n’a pas eu jufqu’à ce moment le projet d’élever fa
g ra n g e ; mais qu’il n'a pas perdu fon droit pour n'en avoir
�J /
pas j o u i , parce que les droits de pure faculté font imprefcriptibles.
C ette vaÎHe allégation ne peut être écoutée : fi le citoyen
Chaflaing ou fes auteurs n’ont point bâti en cette partie de
leur propriété , c ’eft: manifeftement parce qu’ils reconnoiffoient
n’en avoir pas le droit ; parce que la raifon 6c l’équité leur
crioient qu’ils ne pouvaient être fondés à rendre inutile à fon
but la maifon A lè g re , en la privant de toutes fes v u e s , ÔC
cela pour fe procurer une petite comm odité , une aifance de
plus ; la juftice leur enfeignoit qu’il étoit palpable que leur
grange & paffage n’avoient été diftraits de la maifon A lè g r e
que fous la condition que les jours de celle-ci refteroient
dans leur intégrité , & que par conféquent ils ne pouvoient
faire ni ouvrage ni entrepriie pour les gêner ou les inter
cepter : voilà le vrai m o tif de leur filence & de leur in a & io n ,
& le citoyen Chaflaing auroit dû les imiter dans leurs prinprincipes & leur conduite.
S i les jours du citoyen A lè g re étoient dans les termes de
la C outum e de Paris , c'eit tout ce que pourroit faire* le
citoyen Chaflaing , que d’invoquer la faculté de bâtir ^ in
troduite par la C outum e de P a ris; encore le cito yen A lè g r e
p o u rro it-il raifonnablement fe défendre par la p refcrip tion ,
fi favo rifie par la C ou tu m e d’ A u vergn e ; mais ici rien ne
nous ramène à cette C ou tu m e de P a ris , ni a fte s , ni circon fta n c e s , ni difpofitions du local & des jours en queftion ; il
y a même plus , c ’eft que ces jours fe montrent com m e
établis avec ca ra â ère de charge & de fervitudc fur la grange
du eitoyen Chaflaing.
E n effet , le s vues de Coutum e n’ont p o u r b u t que de
procurer le jour , la lu m i è r e a u x b â tim e n ts ; la hauteur &
les entraves que la C ou tu m e leur im p o fe , en
la preuve;
les jouis de fervitude donnent non feulement la lum ière »
mais encore la vue d r o i t e , libre & fans gêne ; ils font pour
.la commodité de celui qui en j o u i t , & une charge pour
celui qui y eft aflujetti. Il y a vraie fervitude -lorfque la
^
�\6
maniéré dont on a joui eft tout - à - fait contraire à Pufage
admis par U Coutum e ; il y a fe rv itu d e , lorfque , pour le
fervice d’un fon ds, la li b e r t é , la com m odité du fonds voifin
eft reftreinte par des affujettiffements qui lui font impofés.
O r , toutes les vues du citoyen A lègre font établies pour fa
commodité ; elles font d ro ite s , larges , avec des accoudoirs
à une. hauteur libre , fans fer maillé ni verre dormant ; ils
plongent dire&ement ôc fans moyens fur la propriété C haflaing;
quelques - uns même font peu élevés au - defïus du fol du
partage,- c ’eft une g ê n e , il eft v ra i, une incommodité pour le
cito yen C h a fla in g ; mais il eft à croire qu’il n’a acheté que
fo u s cette condition ; mais il l’a fupportée depuis tant d’années,
depuis même des fiècles , qu’on ne peut douter qu’il a été
fo rcé de la fouffrir & qu’il n’a pu s’y fouftraire.
C ’eft par des a£tes & des faits que des voiiins expliquent la
manière dont ils entendent jouir refpe£livement ; or la conftruction de l’ancien toit de la grange annonçoit clairement qu’on
avoit regardé les jours en queftion, com me ne devant pas être
bouchés: en e ffe t, il eft confiant que ce t o i t , qui s’approchoit
aflez de la fenêtre de la chambre fun le derrière * étoit moins élevé
de c e c ô t é , & formoit en cet endroit une pente bien plus ra
pide Ôc plus inclinée , qu’il n’en avoit dans l’autre partie ; cette
pente paroiffoic avoir été ainii étudiée , pour ménager le
jour de la chambre ; ce fait eft confiant ; la preuve en feroit
fous les yeux de la ju ftic e , fi le cito yen ChafTaing eût fait
dreffer, comme il le devoit d’abord , un procès - verbal de
l’état des lieux avant de commencer fes nouveaux ouvrages ;
la règle & la bonne foi lui en faifoient un devoir.
D ’autres faits avoient encore interprété les intentions &
la manière de voir des voifins refpeQifs au fujet de ces jours
en queftion. E n I 7 J 2 ou 1 7 ^ 1 le citoyen A lèg re aggrandit
les deux vues de fon efcalier ôc de fa chambre fur le der
r i è r e , ôc qui font marqués au N °. 6 ôc 7 fur le plan des
experts i i l f e fe r v it, comme l ’exprime le rapport, des pierres
�&
des jours anciens, & y en ajouta de nouvelles ,• ce t aggran*
diffement des jours antiques fut coanu du père' du citoyen
ChaiTaing , alors propriétaire , qui ne s’ y oppofa pas : il le
vit fans s’en plaindre ; il jugea avec raifon que puifque le
citoyen A lègre avoit déjà d’autres jours fpacieux fur le paffage ; jours dont on ne pouvoit !e p river, il étoit indifférent
de lui biffer un peu plus aggrandir ceux qu'il avoit déjà ;
lWgmen.t?tion fût donc fa ire, cette époque remonte à pluâ
de quarante ans; c ' e f t - à - d i r e , que la prefcription la met à
l ’abri de toute atteinte; mais de ce fait bien confiant réfulte
une contradiction dans la manière de jouir du citoyen A lè g re ;
cette contvadi&ion a annoncé de fa part l’intention formelle
de jouir de ces jours com me d’une fervitude active , 6c de la
part du citoyen Chsifaing , la reconnoiffance qu’il n’qvoit
aucun droit de fupprimer entièrement l’exiftence de ces jours.
C e tte contradi&ion du citoyen A lèg re lui équivaut à un titre
de propriété de la fervitude , ce principe eft reconnu en
point de droit ; le citoyen C h a f f a i n g , qui étoit procureur ÔC
très-verfé dans les affaires , é ta n t t r è s - e m p lo y é dans fon é t a t ,
n’ignoroit pas la force de cette contradiction ; cependant il
ne l’empêche pas, & le citoyen A lè g re a joui tranquillement
jufqu' à ces derniers temps.
f
L e citoyen Chaifaing a prétendu cependant que fon père
ne fouffrît cet aggrandiifement des jours en queilion que
parce qu’il étoit convaincu que cela ne pourroit nuire à fon
projet d’é le v e r , qu’il avoit conçu déjà , 6c qu’il en fit I obfervation au citoyen A lèg re ; mais cette allégation n a aucun
fondement ; il n’efl pas probable quJun homme rompu aux
affaires , 6c q ui connoifloit la valeur des m o in d re s a des en
fait de fe rv itu d e , dans un pays où elles s’acquièrent par la
prefcription, fe fût contenté de fimples réflexions verbales ,
ne les eût point accompagnées de procès - verbaux 6c d’a&es
d’oppofition 6c co nfervatoires, s’il eût été fondé à en faire ;
il n’y a donc pas eu d’a û e , il V y a Pas eu d’em pêchem ent,
�18
& ce filence eft de la plus grande force en faveur du d roit
de fervitude du citoyen A lèg re .
A tant de m oyen s, de principes & de raifonnements v ic
torieux , le citoyen A lè g re pourroic ajouter des préjugés en
fa faveur; il fe contentera d’en citer un f e u l, c'eft un arrêt
de 1 7 1 0 , rapporté par Augeard ; le citoyen A lèg re l ’invoque
avec d'autant plus de confiance , que le citoyen Chaflaing
s’en fait aulli un moyen dans fa caufe ; mais il eft facile de
voir qu’il ne peut y trouver que fa propre condamnation.
L es C a p u c in s d’ A m ie n s avoient ouvert dans un mur qui
leur appartenoit, un jour pour éclairer le u r dofloir ; cette fe
nêtre étoit élevée de treize pieds du f o l , ils avoient jo u i de
c e jour pendant plus de quatre-vingt ans; après cette époque
le propriétaire voifin éleva fon b â tim e n t, qui intercepta alors
le jour des Capucins; ceux-ci fe pourvurent & demandèrent
la reftitution de leur jour ; on leur obje£loit qu’ils n’avoient
pu prefcrire , parce que leur fenêtre étant à treize pieds de
hauteur., c ’étoit feulement un jour de C ou tu m e ou de tolé
rance ; qu’ils n’avoient pu prefcrire ni s’oppofer à ce que le
voifin é l e v â t , puifqu’il n’y avoit aucune fervitude précife qui
l ’en empêchât ; on leur obje&oit encore qu’ils pouvoient
prendre d’ailleurs du jour pour éclairer leur do&oiF. U n e
fentence du premier Juge avoit rejetté la prétention des C a
p u cins, fur l’appel elle fut confirmée au parlement.
C e jugement eft approuvé par la raifon & les principes ;
le citoyen A lè g re y rend hommage ; il l ’invoque même en
fa fa ve u r; c a r , puifqu’il n’a rejetté la demande des Capucins
que fur le fondement que la fenêtre étoit à treize pieds de
hauteur & vifiblement un jour de C ou tu m e ; il fuit que fi
ce jour n’eût été qu’à quatre ou cinq pieds & hors des con
ditions des jours de C outum e ; le jugement auroit été tout
différent; ce jour auroit été confervé com me une fervitude
a & iv e ; la pofTeifion auroit été maintenue.
C ’eft ce que doit efpérer le citoyen A l è g r e , dont tous lei
jo u r s , toute! les vues bien éloignées des jours de C o u tu m e ,
�\9
& ne préfentent que des fervitudes bien difertement é c r it e s ,
des fervitudes néceiTaires 6c toujours confervées par des faits
& des a£tes extérieurs.
O n reprochoit aux Capucins dè pouvoir fe procurer des
jours d’un autre cô té ; ainfi leur procédé tenoit de la ch ica n e,
de la paflion ; pour fe difpenfer d u n e légère dépenfe t ils
privoient leur voifin d’un grand avantage ; la balance des
intérêts refpeûifs n’étoit pas égale \ mais il s’en faut bien
qu’on puifle en dire autant au citoyen A légre ; la prefque
totalité de fa maifon ne peut recevoir de jo u r s que par ce
paffage ; Ci ces jours font obftrués , fa maifon eft inhabitable i
la com m odité , l ’aifance que veu t fe procurer de plus le
citoyen Chaflaing , eft peu conféquente en comparaifon de
cet inconvénient majeur.
E q prenant donc fous leur véritable face les principes pofés
par cet a r r ê t , il eft évident qu’il prononce contre le cito yen
Chaflaing ; c’eft ce qui r é fu t e aufli des maximes invoquées
avec force 6c netteté par l’À vo ca t - G énéral Chauvelin , qui
portoit la parole en cette difcuiïion ; fes obfervacions pleines
de juftefle ôc de ju g e m e n t , méritent d’être confultées : l’A r r ê tifte Augéard y ajoute encore des réflexions lumineufes , fur
la nature des fervitudes, ôc leur vrai cara&ère.
L e citoyen A lè g r e terminera par une obfervation : c ’eft
que tels font les nouveaux ouvrages du citoyen Chaflaing
qu’ils n’ont ceffé depuis le premier moment d’incommoder
confidérablement le citoyen A lèg re ; ils ont obftrué le rancheau qui donne à fes eaux pluviales l ’écoulement n é c e fla ire ;
ces eaux engorgées fe ré p a n d e n t dans les chambres , dans le
grenier & dans d’autres appartem ents, ce qui caufe un p r é ju
dice notable au c it o y e n A lèg re ; cette re m a rq u e a é c h a p p é
aux citoyens E x p e r ts , lors de leur p r o c è s - v e r b a l ; mais le fait
n’eft pas moins certain , 6c le citoyen A lègre offre de le faire
vérifier; ce fait étant confiant, il r e v ie n t au citoyen A lè g re
un dédommagement pour les dégâts qu il a éprouvés.
A cela près le rapport des experts > ainfi que le plan qui
�l\b
y
20
l ’accompagne , ne Iaiffe aucun doute qu’aucun des jours du
citoyen A lè g re ne porte les caractères des jours de C ou tu m e;
qu'ils font de véritables fervitudes; qu’ils portent l ’empreinte
de l’antiquité la plus reculée ; ce rapport établit que les deux
propriétés n’en faifoient autrefois qu’une feule ; que la maifon
A lè g r e ne peut recevoir des jo u r s , des v u e s , de lumière par
aucun autre endroit; donc ces jours ont été confervés par fti pulatio n , par convention expreffe pour le fervice de la maifon ;
el citoyen Chaff aing ne peut bâtir fans boucher ces jours; donc
la raifon , les p rin cip es, le d r o i t , l’honnêteté publique lui
d é f e n d e n t de chercher à fe d o n n e r une légère aifance , en
caufant un tort bien plus confidérable ; par ces motifs , le
cito yen A lè g re eft bien fondé à demander à être gardé &
maintenu dans le droit & la poffeffion de fa maifon & des
j o u r s , vues & fervitudes qui en dépendent ; qu’il fo it défendu
au citoyen Chaffaing de l’y trou bler, aux peines de d roit; qu’il
foit condamné à démolir les nouveaux ouvrages qui interceptent
lefdits jours & fervitudes, & ce dans la huitaine, à compter d e
la fignification de votre jugement ; fi non , qu’il foit permis au
citoyen A lè g re de les faire abattre & démolir aux frais & dé
pens du c it o y e n Chaff aing , defquels le citoyen A lè g re fera
rembourfé fur fes propres é t a t s , ou fu r les quittances des
ou vriers; que le citoyen Chaff aing foit condamné aux dom
m ag es-in térê ts, réfultants des dégâts occafio nnés au citoyen
À lè g r e par le citoyen Chaffa i n g , fuivant l ’eftimatîon qui en
fera faite par e x p e rts , & qu’il foit condamné aux dépens.'
A
R l O M de l ' i m p rim e rie de M a r t i n D É G O U T T E ,
I m p r im e u r de l ’A d m in ift ra tio n du Diftrict , v i s - à - v i s la
Fontaine des L ig n e s , l'an 3c. de la République.
�
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Factums Godemel
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Alègre. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
servitude
servitude de vue
conflit de voisinage
médiation
experts
prescription
coutume de Paris
mitoyenneté
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le Citoyen Alègre, Marchand en cette commune de Riom, Demandeur. Contre le Citoyen Chassaing, Défendeur officieux près le Tribunal de District de cette même Commune, Défendeur.
Table Godemel : Mitoyenneté : le voisin qui demande à rendre mitoyen le mur intermédiaire pour y élever des constructions, à charge d’indemniser, peut-il obstruer et faire disparaître les jours et vues qui existent ? quelles sont les règles propres à établir si ces jours et vues ont été pratiqués à titre de servitude, ou s’ils ne sont que des jours de coutume et de tolérance ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 3
1791-Circa An 3
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1202
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1203
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53160/BCU_Factums_G1202.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Conflit de voisinage
coutume de Paris
experts
médiation
mitoyenneté
prescription
servitude
servitude de vue
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53422/BCU_Factums_G2126.pdf
70500c959a031c6a0b4c0c89fc07d92c
PDF Text
Text
C ONSULTATION
[!;.:■ C, P
COUR
-/IMPERIALE
D E RIOM.
2 e . CHAMBRE.
L
e
c o n s e il
s o u s s ig n é
,
Après lecture du jugement contradictoire, rendu au tribunal
civil de Clermont-Ferrand, le 2 0 mars 1 8 1 2 , entre M . A u b i e r L a m o n t e i l h e p è r e , d’une part ; M. et M me. d e S a i n t - M a n d e ,
son beau-frère et sa sœ ur, et la d a m e C h a m p f l o u r , veuve
L a m o n t e i l h e , sa belle-fille, d’autre part;
C onsulté , 1°. sur la manière dont la transmission du GrandV erger, situé à Montferrand, que réclame M. Aubier, doit être
opérée pour être irrévocable ;
20. Sur l’intervention de la dame Champflour, veuve Lamon
teilhe ;
que M. Aubier doit attendre avec sécurité la décision
de la Cour impériale de R io m , sur l’appel interjeté par M. et
Mme. de Saint-M ande, et par la dame veuve Lamonteilhe , du
jugement sus-énoncé.
E stim e
1°. M. et Mme. de Saint-Mande ne refusent pas de transmettre
a M. Aubier la pleine propriété du Grand-Verger : les conclu
sions im prim ées, signifiées en prem ière instance, en contiennent
l’offre précise.
�Mais M. et Mme. de Saint-Mande, après avoir dit que jam ais
ils rion t refusé au sieur slu bier de lu i passer acte devant no
ta ire, et à ses f r a i s , ajoutent : Pourvu que le sieur A ubier ne
donnât point dans cet acte , à la dame sa sœ ur, les fausses
qualités de prête-nom et de mandataire.
A in si, M. et M me. de Saint-Mande attachent à la transmission
du V erger, la condition qu’elle ne sera point faite de la part de
la dame de Saint-M ande, comme ayant été la mandataire de
M. Aubier dans.; l'acquisition qu’elle en a faite de la nation.
Cependant la transmission offerte par M. et Mm*. de SaintMande doit avoir une cause : pourquoi ne pas vouloir exprimer
la véritable, la seule cause qui y donne lieu? M. Aubier doit
compter sans doute sur la délicatesse de M. et M” e. de SaintMande ; sans doute ils ne cherchent point à rendre illusoire la
transmission qu’ils lui feraient ; mais beaucoup trop d’inconvé*;
niens, étrangers même à M. et.Mme- de Saint-Mande, pourraient,
résulter d’une subrogation à la propriété du V erger, qui serait
faite sans cause, ou qui aurait une cause autre que celle qui
existe réellem ent, pour que M. Aubier ne doive pas persister
h demander une transmission à sa sœur, cpmme.n’ayant acquis
que pour lu i, d’après les pouvoirs qu’il lui avait.donnés .et qu’ellft.
ayait acceptés.
*
L ’existence d’un mandat entre M. Aubier et M me. de Saint) Mande, ne saurait être problématique.
L e contrat de mandat peut se former sans qu’il intervienne
aucune déclaration expresse de la volonté des parties. Il peut
être donné par lettres, et son acceptation peut résulter de
1 exécution qu’il a reçue de la part du mandataire. Pothier,
Traité du contrat de m a n d a t, chap. i er- > section 5 , nos. 28
et 29. — Code N apoléon, art. i g 85..
O r , le fciandat donné par M. A u b ier, son acceptation par
M me. de Saint-Mande, sont établis, non-seulement par les lettres
de M me. de Saint-Mande, que rapporte M. A ubier, mais encore
«
�( 3 )
f?
par les différens actes passés dans la famille depuis le retour de
M. A ubier, et surtout par l’acte du 18 floréal an g ( 8 mai 1801 ).
Les expressions de ces lettres, de ces actes, sont claires; et il
en sort positivement que ce n’était que pour M. Aubier que
M 1,,e. de S a i n t - M a n d e , d’après les pouvoirs cju’elle avait reçus
de lu i, se rendit adjudicataire des biens qui lui appartenaient,
vendus par la nation.
<
M. et Mme. de Saint-Mande ont contesté faiblem ent, en point
de fait, l’existence du mandat. Ils se sont retranchés sur le point
de droit ; et c ’est sur le point de droit cjue M. Aubier demande
particulièrement l’avis du Conseil.
La loi du 28 mars 179D avait déclaré les émigrés banrtis à
perpétuité du territoire fr a n ç a is , et morts civilement. Suivant
la même lo i, tous les biens des émigrés étaient acquis à la répu
blique. La loi du 12 ventôse an JB, relativement au!x émigrés
avant le 4 nivôse an 8, confirma le principe qu’ils ne pouvaient
-invoquer le droit civil des Français,
M. Aubier ayant été inscrit sur la liste des émigrés le 7 floréal
an a , a-t-il pu ensuite donner à Mn,e. de Saint-Mande un mandat
à l’effet d’acquérir pour lui ceux de ses biens séquestrés qui
seraient vendus par la nation?
Mn,e. de Saint-Mande a-t-elle été liée par l’acceptation et l’exé
cution de ce mandat?
M. et M'ne. de Sàint-Mande soutiennent la négative.
Il est facile d’é ta b lir, d’après les principes élémentaires du
droit, et d’après la jurisprudence,
Q ue le mandat est du nombre des conti-ats du droit des gens ;
Que les émigrés étaient capables de tous les actes qui dérivent
de ce droit :
D ’où se tirera la conséquence que M.' Aubier et M me. de Saint-
?
r V .;
�C4)
Mande étaient respectivement liés par le mandat donné par l’un
et accepté par l’autre.
On a distingué, dans toutes les législations, le droit des gens,
du droit civil.
Les hommes forment différentes sociétés. Il existe des relations
entr’eu x , soit qu’ils fassent partie de la même société, soit qu’ils
fassent partie de sociétés différentes. C ’est comme hommes, et
non comme citoyens d’un é ta t, qu’on doit alors les considérer.
Sous ce rapport, les hommes sont régis par des régies générales,
qui ont été puisées dans la nature, et qu’ils observent tous éga
lem ent, sans qu’elles soient soumises, quant à leur substance,
à aucunes formes particulières.
Ces règles constituent le droit des gens. Qnod naturalis ratiointer omnes homines constitu.it, id apud omnes perœque custo d itu r, 'vocaturque ju s gentium , quasi quo jure ovines gentes
utantur. Instit. de jur. nat. gent. et c i v ., §. i er.
Chaque société, indépendamment des régies universelles, est
soumise aux règles particulières qui ont été établies spéciale
ment pour les hommes qui la com posent, ou q u i , communes
à tous dans leur principe, reçoivent des modifications pour cette
société ; règles particulières qui peuvent faire dépendre la vali
dité des actes qu’elles autorisent, de certaines formalités ou con
ditions qu’elles imposent.
Ces règles constituent le droit civil. Quod quisqitc populus
ipse sibi ju s constituit, id ipsius propriurn civitatis.est, -vocaturque ju s civile , quasi ju s proprium ipsius civitatis. Ibid.
Les relations entre les hommes de différens états devaient
avoir particulièrement pour objet la vente , le louage , le p r ê t,
le commerce, le m andat, la société , le d ép ô t, etc. Aussi les lois,
contiennent-elles l’énumération des contrats , comme tenant en
général au droit des gens. E t e x hoc jure gentium omnes petic
contractus introdueti s u n t, ut emptio et v en d itio , locatio eù
�’
5 }
concluctio , societas , depositum , m utuum , et a lii innumerabiles. Ibid. § 2.
L. 5 , ff. D e justit. et fur. — L. i 5 , ff. D e
interdict. et releg. et déport,
Les adversaires de M. Aubier ont soutenu en première ins
tance , et dans les conclusions imprimées , que le mandat est
un acte qui appartient au droit civil.
Les lois citées ne font pas , à la v é rité , une mention parti
culière du m a n d a t, dans les contrats qu elles disent avoir été
introduits par le droit des gens ; mais serait-il possible que le
mandat ne fût point compris dans ces expressions employées
dans les lo is, et a lii innumerabiles, et caetera sim ilia ?
L e mandat est de sa nature un contrat de bienfaisance, un
contrat qui repose sur la confiance qu’une des parties a dans
1 autre. Il est gratu it, à moins de convention contraire, et le man
dataire fait un office d’ami. A ces caractères on doit reconnaître
un contrat du droit des gens.
D ’ailleurs, le mandat se rattache le plus ordinairement aux
contrats dont parlent les lois , tels que la vente , l’échange , etc.
Un étranger ne peut souvent acquérir et vendre que par le
ministère d’un tie rs, à cause de la distance où il se trouve du
lieu de la vente. Pourrait-il ne pas charger ce tiers de traiter
pour lui? sa présence serait-elle une condition inhérente à la
capacité que la loi lui donne? et en étendant cette réflexion aux
émigrés , q u i, comme on l’établira bien tôt, pouvaient consentir
tous les actes du droit des gen s, n’aurait-ce pas été les en pri
ver que de les obliger à traiter en personne, eux q u i, d’après
la loi du 28 mars 1793, étaient bannis à perpétuité, et ne pou
va ie n t, sous peine de m ort, enfreindre le bannissement?
Le mandat est donc essentiellement un contrat du droit de*
gens. Aussi les auteurs qui ont eu occasion de s’en expliquer ,
ne se sont même pas fait de difficulté à cet égard.
« Le contrat de mandat est de la classe de ceux qu’on appelle
« contrats du droit des gens y contractus ju n s gcntium ; il se
3
�(6 )
« régit par les règles du droit naturel. L e droit civil ne l ’a
« assujéti à aucunes form es, ni à aucunes règles qui lui soient
« particulières, » P o th ier, du contrat du m andat, cliap. i er. ,
section i erc. , n°. 2.
v L e mandat est de la classe des contrats du droit des gens;
« il n’est assujéti à aucune forme ni à aucune règle qui lui soit
cc particulière. Il est aussi-du nombre dés contrats de bienfai« sance, etc. » Répertoire de jurisprudence, au mot M a n d a t,
§. i er., n°. xer.
>
« Le droit des gens est celui qui lie tous les hommes en gé« n é ra l, abstraction faite des sociétés politiques auxquelles
« chacun d’eux peut appartenir. Les actes qui émanent de ce
« droit sont ceux qui établissent des relations entr’e u x , tels
« que la •vente , le dépôt, la société, le p rêt, le m a n d a t etc. »
M. Grenier, Traité des donations et testamens, discours histo
riqu e, page i ere.
,
\
Après avoir établi que le mandat doit être rangé parmi les
contrats du droit des g en s, examinons si les émigrés pouvaient
consentir des pareils contrats.
Les lois prononçaient contre les ém igrés, le bannissement à
perpétuité et la mort civile. O r, dans le droit romain, comme
dans l’ancien droit français, la mort civile, résultant de la dépor
tation ou du bannissement perpétuel, n’emportait que la perte
des droits civils. Les bannis, morts civilem ent, restaient capa
bles de tous les actes du droit des gens.
On trouve ce principe dans la loi i 5 , ff. D e interdictis et
relegatis et deportatis, déjà citée. Deportatus civitatem am ittit,
non llbertatern ; et speciali quidem ju re civitatis non f ru itu r,
ju re tamen gentium utitur.
R icher, dans son Traité de la mort civ ile, page ao 5 , après
avoir dit que , suivant les lois romaines, il est certain que la mort
civile ii’empéchait point d’acquérir à titre onéreux, et de vendre
%
�(7 )
ce qu’on avait acquis; qu’en un m ot, elle ne portait aucune
atteinte à la capacité active et passive, par rapport à ces sortes
de contrats , ajoute :
« T elle était la jurisprudence des Romains sur cette matière ;
« et nos auteurs décident presque tous unanimement que la
« même chose s’observe parmi n ou s, et que celui qui est mort
cc civilement peut jouir des biens par lui acquis depuis sa mort
« civile encourue.
« Carondas , en ses observations , au mot b a n n i, rapporte un
ce arrêt du 5 juillet i 558 , qui a jugé qu’un homme banni à per
te pétuité hors du royaume pouvait trafiquer en France par cor« resporidant, n’étant pas de pire condition qu’un étranger, et
« n’étant pas mort civilement à l’égard du pays où il demeure,
cc O r , cette permission de trafiquer renferme nécessairement
« les facultés qui constituent le trafic, c ’est-à-dire, d’aliéner
« et d’acquérir.
« Lebrun , en son Traité des successions , livre i er. , cliap. 2 ,
« section 2, n°. 9 , dit qu’on succède aux acquisitions faites
cc par un homme condamné au bannissement perpétuel, depuis
cc sa condamnation exécutée : d’où il suit que cet auteur concc vient qu’un homme en cet état peut acquérir. »
Richer pense néanmoins que pour décider de la capacité de
ceux qui sont dans les liens de la mort civile , même par rapport
aux contrats du droit des gens, il faut distinguer les causes qui
opèrent la mort civile. A in si, si elle provient d’une condamnation
à mort naturelle prononcée par coutum ace, il incline à croire
qu’elle ne laisse pas à celui qui l’a encourue, la faculté de con
tracter , au moins dans le royaume.
cc Mais il n’en est pas de m êm e, d it-il, à l’égard de ceux
cc qui n’ont été condamnés qu’à une peine q u i, en leur laissant
cc la v ie , les retranche du nombre des citoyens , comme les gâ
te 1ères ou le bannissement à perpétuité. La justice a cru devoir
cc leur laisser la faculté de vivre. Elle leur a enlevé l’être c iv il,
ce mais elle leur a laissé l’être p hysique, même l’être moral.
4
•
�« N ’ayant pas voulu le leur en lever, elle tolère qu’ils usent des
« moyens qu’ils peuvent tirer de leur industrie, pour se le
« conserver. »
Despeisses, tome 2, page 683 , en rapportant l’arrét du 5 juillet
i 558 , cité par Richer d’après Carondas, enseigne le même prin
cipe.
« L e banny à perpétuité, dit cet a u te u r, s’estant retiré en
« autre pays, y peut user du droict commun. Ainsi un tel banny
« ayant envoyé des marchandises en France pour les y faire
« vendre par sa fem m e, et le procureur du roi les ayant fait
« saisir, par arrest du parlement de Paris, du 5 juillet i 558 ,
« elle en eust main-levée contre le procureur du roi ; car il ne
« doit pas estre de pire condition que l’estranger, et partant
« audit pays il peut contracter, etc. »
On lit dans le Recueil de jurisprudence civile, deRousseaudLacom be, au mot Bannissement, n°. 3 , qu’i l n y a que les bannis
à perpétuité du royaume q u i soient morts civilement.__q u ’ils
retiennent ce qui est du droit des gens...... q u ’ils peuvent tra
fiqu er en France par correspondans. Rousseaud-Lacombe cite
Legrand , sur l’article i 35 de la coutume de Troyes , glos. uniq. r
n05. 54 et 35 , et l’arrét du 5 juillet z 558»
Si dans le droit rom ain, et dans Tancien droit français, le
banni à perpétuité pouvait faire tous les actes du droit des gens,
l’ém igré, sous l’empire de la loi du 28 mars 1793, aurait-il pu
ne pas avoir la même capacité?
Sans contredit, suivant les lois d’alors, l’émigration était con
sidérée comme un grand crim e; mais c ’était un crime politique
qui portait atteinte aux lois particulières de la F ran ce, sans
porter atteinte aux lois universelles et fondamentales reconnues
par toutes les nations, et q u i , comme on l’a vu , forment le
droit des gens. A u x termes de la loi du 12 ventôse an 8 , les
émigrés ne pouvaient invoquer le droit civil des Français. La
peine de l’éinigration était donc bornée à la perte des droits
civils.
�( 9 ); . .
Et comment pourrait-on aujourd’hui lui donner plus d’exten
sion ?
La mort civile encourue par suite de condamnations judi
ciaires , et pour crimes que toutes les nations punissent égale
m ent, ne prive pas néanmoins ceux contre lesquels elle a été
prononcée , de la capacité de contracter. Celui q u i, à cause de
ses opinions, fut forcé de s’expatrier , serait-il traité avec plus
de rigueur ?
Ajoutons que la position de M. Aubier lui imposait la néces
sité d’une fuite q u i , de la part de beaucoup d’autres , était vo
lontaire. Les 11 et 20 août 1792, des mandats d’arrét avaient é té
décernés contre lui par le comité révolutionnaire de Paris. Ses
co-accusés périrent peu de jours après sur l’échafaud.
- Les anciens principes sur les effets de la mort civile n’ont
donc reçu aucun changement par rapport aux émigrés. La Cour
de cassation l’a ainsi décidé par d iffé r e n s arrêts. Il y a p lu s, la
Cour de cassation a jugé que les peines portées par la loi du 28
mars 1795, et les lois subséquentes , n’avaient été établies quo
dans l’intérét de la nation.
Les arrêts de la Cour de cassation, qui sont en date' des 24
germinal an 4 , 20 fructidor an 1 1 , i 5 ventôse an 12 , 28 frimaire
an i 3 , et 28 juin 1808 , ont été rendu s, les uns contre des
émigrés qui demandaient la nullité d’actes par eux consentis
pendant leur inscription ; les autres en leur faveur (1).
Nous nous bornerons à citer quelques-uns des motifs des deux
derniers arrêts.
1.
«
et
«
cc
« Attendu , porte celui du 28 frimaire an i 3 , que les
sitions prohibitives des lois des 28 mars et 26 juillet
ne sont relatives qu’il l'intérêt n a tio n a l, et que par
quent l’émigré , auteur de l’aliénation, ainsi que ses
sentans , sont non recevables à s’en prévaloir ; — q u e
dispo1793 ?
consérepréla dis-
(1) V o y . le Journal de D encvcrs, volume Je l’an 12, png. 97 et 44 1 > vol. de
l’an i 3 , Pag- 17^5 e*
1808', pag. 368 .
H *.
�et
«
cc
«
«
«
position de la loi du 12 ventôse an 8 , qui veut que ceux qui
étoient considérés comme émigrés avant le 4 nivôse an 8 , ne
puissent invoquer le droit civil des Français , ne peut s’appliquer qu'aux actes qui dérivent uniquement de la lo i civile
et du droit de cité , et que dans l’espèce il s’agit d’une vente ,
espèce de contrat qui est du droit naturel et des gens, »
« Attendu , porte également l’arrét du 28 juin 1808, que la
cc mort civile prononcée contre les émigrés par la loi du 28 mars
« 1795, ne leur interdisait que les actes dérivant du droit de
ce cité , et non ceux dérivant du droit naturel et des gens , tels
« que les acquisitions et oblig ation s........... »
La Cour de cassation a fait l’application du même principe,
dans un sens plus favorable encore aux émigrés.
P a r u n arrêt du 17 août 1809, elle a jugé qu’un émigré qui
avait vendu un i m m e u b l e , av a it p u , avant sa radiation, exer
cer l’action en rescision pour cause de lésion d’outre-m oitié,
et ester en jugement sans l ’assistance d’un curateur ; « Consi« dérant que la mort civile n’interdit aux individus qui en sont
c< frappés , que l’exercice des droits et actions q u i dérivent
« du droit civil; qu’aucune loi expresse, avant la promulgation
« du Code Napoléon , ne privait ces individus des droits et
« actions qui dérivent du droit des gens ; — Considérant que « la vente étant un contrat du droit des g en s, l’action en payecc ment du juste prix résultante de ce contrat, dérive nécessai
re rement du même droit des gens; — Considérant qu’à l’époque
« de la vente dont il s’a g it, comme à l’époque de l’action en res
te cision, le vendeur était inscrit sur la liste des émigrés, sans que
te l’ o b je t vendu ait été séquestré; — Considérant que celui qui a
ce droit de vendre, a conséquemment le droit d’exiger le prix... j>
C et arrêt est rapporté , précédé des conclusions conformes
de M. le Procureur-général M erlin, dans le Recueil des ques
tions de droit de ce m agistrat, au mot M ort civ ile , §. 3.
La jurisprudence constante de la Cour de cassation ne laisse
pas de doute sur la capacité qu’avaient les émigrés de consentir
�C
)
tous les actes du droit des gens ; et le mandat est du nombre
de ces actes. Mais on.peut citer un arrêt rendu même pour le
cas particulier du mandat.
Le 2 septembre 1807 , la Cour de cassation a décidé « que les
« émigrés ne peuvent exciper de la mort civile dont ils ont été
«c frappés, pour faire annuller les actes par eux fa its , ou par
« leurs fondes de pouvoirs, pendant la durée de cet é ta t( i) . »
Ce qui a été jugé contre les ém igrés, l ’aurait été contre les
tiers qui avaient traité avec le mandataire, si la nullité des actes
avait été demandée par eux ; et cela surtout d après le prin
cipe consigné dans l'arrêt du 28 frimaire an i 3 , que les disposi
tions prohibitives des lois sur Immigration n’étaient relatives qu’à
l’intérét national.
Quoi qu’il en soit, il résulte évidemment de l’arrêt du 2 sep
tembre 1807 , que les émigrés étaient légalement représentés par
des fondés de pouvoir dans les actes qui leur étaient permis.
L ’arrét du 5 juillet i 558 avait jugé la même chose, à l’égard
des bannis à perpétuité, en décidant qu’ils pouvaient trafiquer
par correspondans.
M. et Mme. de Saint-Mande font une objection fondée sur
l’article 20o5 du Code Napoléon , d’après lequel le mandat finit
par la mort naturelle ou civile soit du matidant, soit du manda
taire ; ils en concluent que l’individu mort civilem ent ne peut
pas constituer de mandat.
Cette conséquence n’est pas ju ste, et l’article 2003 du Codo
ne fournit aucune induction contre M. Aubier.
Il est hors de doute que la mort civile dépouille celui qui l’a
encourue de tous les biens et droits qu’il possède ; il ne peut plus
exercer d’action contre personne, et personne ne peut en exercer
contre lui.
Mais il faut bien distinguer les biens et droits que le mort
(1) V o y . le Journal de D cncvers, vol. tic 1807, p^S'
4**o.
�( 12 )
civilem ent possédait avant d’avoir encouru la mort c iv ile , des
biens et droits qu’il acquiert par la suite.
A l’égard de ces derniers, il est comme s’il n’était pas mort
civilem ent ; il peut en jouir, et il a le droit d’exercer les actions
qui en naissent. C ’est le résultat de ce que dit R iclier, pages 2.0S
et a 5o , et de l’arrêt du 17 août 1809.
O r, de même que le mort civilem ent peut, après la mort civile
encourue, acquérir, vendre et intenter des actions relativement
aux objets dont il est devenu propriétaire ; de m êm e, après la
mort civile encourue, il peut constituer un mandat.
Un mandat donné par un individu peut avoir pris fin dès l’ins
tant de sa mort civ ile, par la môme raison que cet individu a
été dépouillé de tous ses droits et actions généralement quel
conques. Mais un mandat donné pendant la mort civile a obligé
celui qui l’a donné et celui qui l'a re ç u , par la même raison
qu’une vente, ou tout autre contrat, aurait produit des obli
gations réciproques entre le mort civilem ent e t l’autre partie con
tractante.
D ’après c e la , dire qu’un individu mort civilement ne peut pas
constituer de m andat, parce que la loi prononce l’extinction
du mandat par la mort civile, c ’est comme si l’on disait que le
même individu ne peut pas acquérir de b ien s, parce que la loi
le dépouille de tous ceux qu’il a.
C ependant, des acquisitions sont permises pendant la mort
civile. Le mandat l’est également, soit parce que deux contrats
d e la même nature 11e peuvent être régis par des règles diffé
rentes , soit parce q u e , ainsi que la remarque en a déjà été faite,
le mandat se rattache ordinairement à la vente et aux contrats
de la même esp è ce , et que presque tous les individus qui ne
6eraient pas capables du m andat, seraient privés du bénéfice
des autres contrats.
Au reste , la Cour de cassation , par son arrêt du a septembre
1807, a précisément jugé que le mandat donné par un individu
Avant son émigration n’avait point fini, h son égard, par la mort
%
�C *3 )
civile qu’il avait encourue. L ’engagement étant réciproque, le
mandat n’a pas dû prendre fin à l’égard du m andataire, plus
qu’à l’égard du mandant.
Si donc le mandant et le mandataire étaient liés par le mandat
donné et accepté avant l’émigration , à plus forte raison ils
doivent l’étre par le mandat donné et accepté pendant l’ém i
gration.
C ’est le cas dans lequel se trouvent M. Aubier et Mme; de SaintMande.
Il s’ensuit que M. Aubier a contre Mme. de Saint-Mande ,
< l’action appelée en droit manclati directa , de même que M me. de
Saint-Mande a contre lui l’action m andati contraria.
Il s’ensuit que Mme. de Saint-Mande doit à M. Aubier la trans
mission du Verger qu’il réclam e, comme ayant été sa manda
taire à l’effet de racheter cet héritage pour son compte ; et que
le jugement du tribunal civil de Clerm ont, qui a ordonné ainsi
cette transmission, doit être c o n f i r m é p a r la C o u r .
Il
reste à répondre à un moyen qu’on a fait valoir pour M. et
Mme. de Saint-Mande ; moyen qui n’a pas trait à la question qui
vient d’être discutée, et qui porte sur un défaut d’intérêt de la
part de M. Aubier.
uQu’im porte, d it-on , que ce soit à titre de mandataire, ou à
tout autre titre , que M««e. de Saint-Mande transmette à M. A u
bier la pleine propriété du Grand-Verger?
La propriété du Verger ne doit pas être incertaine. Doit-elle
rester sur la tête de Mme. de Saint-Mande, ou passer sur la tête
de M. Aubier? Mme. de Saint-Mande, on n’en doute p a s, est pour
ce dernier parti. Eh bien ! si la propriété du Vet-ger doit passer
sur la tête de M. A u b ier, elle doit y passer sans restriction ; et
il ne faut pas qu’après la transmission, on puisse douter encore
si M. Aubier est, ou n o n , le véritable propriétaire.
O r, quel serait l’effet d’une transmission pure et simple?
On ne pourrait la considérer que comme une libéralité, i
�(
}
Cela posé, Mme. de Saint-Mande, qui avait acquis le bien du
Saulzet, comme le V<rger de M ontfenand, en a transmis la
propriété au sieur l.amonteilhe fils; et cette transmission, si
M me. de Saint-Mande n’était pas jugée la mandataire de M. Aubier,
paraîtrait n’avoir été qu’uae donation de sa part en faveur du
sieur Lainonteillie, de même que la transmission du Verger pa
raîtrait n’étre qu’une donation en faveur de M. Aubier.
Par la transmission du bien du Saulzet, Mme. de Saint-Mande
n’avait-ellc point épuisé la faculté de disposer que lui donnait
la loi?
T elle est la question qui serait élevée après le décès de Mme. de
Saint-Mande, par des héritiers ayant droit de réserve, et qui
pourrait l’étre notamment au nom de mineurs , dans l’intérét
desquels leurs tuteurs devraient, sous leur responsabilité per
sonnelle, scruter les actes passés dans la fam ille; et l’on croit
devoir dire , d’après les faits constans et avoués dans les m é
moires imprimés, que cette question ne pourrait être décidée
à l’avantage de M. Aubier ou de ses héritiers.
A insi, M. Aubier serait obligé de rendre le V erger, qui ren
trerait dans les mains des héritiers de Mme. de Saint-Mande.
M. Aubier devait prévoir cette circonstance. Il a donc agi
prudem m ent, pour lui et pour ses enfans, en n’acceptant pas
une transmission pure et simple du V erger, que Mme. de SaintMande a acquis pour son compte. Son intérêt est évid en t, tandis
que Mn,e. de Saint-Mande , d’après les bonnes intentions qu’elle
a manifestées , n’en a absolument aucun pour persister à de
mander que le titre de mandataire ne lui soit point donné dans
1 acte de transmission.
1
4
2°. Mais la veuve du iils de M. A ubier, la dame Chainpflour,
veuve Lamonteilhe , fa it, en qualité de tutrice de ses enfans,
cause commune avec M. et M0“ . de Saint-Mande; elle est inter
venue dans la contestation.
L e sieur Aubier-Lamonteilhe fils, par son contrat de mariage
�C 1 5 -)
avec la dnme Champflonr, du 11 prairial an 9 , se constitua en
toute propriété le bien et domaine qui lu i appartenait dans le
lieu du Saulzet.
Le domaine du Saulzet appartenait à M. Aubier p è r e , et „
ainsi qu’on vient de le v o ir, il avait été acquis par Mme. de SaintMande, de même que le Verger de MontferrancL t
Ce domaine a été transmis au sieur. Aubier-Lamonteilhe , de
la part de Mme. de Saint-Mande, par des actes auxquels M. Aubier
père a concouru, et qui ont été passés en sa présence, et de son
consentement spécial.
La dame Cham pflour, veuve Lamonteilhe , craint que les
droits de ses enfans ne soient lé sé s, si M. Aubier, parvient à
obtenir la transmission du Verger de M ontferrand,,au titre qu’il
la réclame. C ’est, du moins là le prétexte de son intervention.
Le tribunal civil de Clermont a jugé que cette intervention,
était sans intérêt , « attendu que l’acte du 8 mai 1801,, et la
« subrogation du domaine du Saulzet , ne sont point attaqués,,
« et que toutes discussions à cet égard,seraient prématurées. »
Ces motifs sont décisifs.
La dame v e u v e Lam onteilhe, au nom de ses enfans',, e st en
possession du domaine du Saulzet. M. Aubier a toujours dittqu’iL,
entendait respecter les actes qui avaitnt.étéf passés; il ne de
mande rien à la dame veuve Lamonteilhe (a.)..
(t) Non-seulem ent je n’ai jamais attaqué la subrogation de Sau lzet, mais
m êm e, en tout t. ntps , j’ai offert.de ht ratifier; 11.depuis ma réclamation du
V e rg e r, j’ai signé chez M. Favart, médiateur, une ratification de la subroga
tion de SaulzU. Elle a été imprimée en première instance, à la fin de l’exposé
des
Cela n’a pas empêché M n>e. Lamonteilhe d’assnrcr, dans un mémoire im
prime’ , . ft signé d’elle, que je travaillaistà dépouillerim es;petites-filles de la
moitié de Saulzet, pour vendre cçttc moitié., et fdire-jrctombcr isuf l ’autre Ja
légitime de ses deux beaux-frères.
AUD
1E R
père.
�C 16 )
On dit pour M me. Lamonteilhe :
Etant jugé que M,ne. de Saint-Mande n’a été que la manda
taire de M. A u b ier, à l’effet de racheter ses biens séquestrés ,
il sera jugé que le domaine du Saulzet provient directement de
M. A u bier, que le sieur Lamonteilhe le tient de lui. Par suite,
ses enfans venant à la succession de M. Aubier , devront le
rapport de ce domaine ; ils auront tout au moins à craindre
l’action en retranchement pour la réserve des autres enfans de
M. Aubier.
En premier lieu , ce qui sera jugé avec M. et Mme. de SaintMande pourra d’autant moins être opposé à la dame veuve Lam onteilhe, que M. Aubier a toujours déclaré, et que le juge
ment dit que la subrogation du Saulzet n ’est point attaquée.
En second lieu , il ne peut être question de rapport à une
succession , d’action en retranchement d’une donation , tant
que la succession n’est point ouverte.
Le rapport n’est du que par des héritiers. Le droit de réserve
est attaché au titre d’h éritier, et il ne peut y avoir d’héritiers
d’un homme vivant. Kiventis nulla est hccrcditas.
La dame veuve Lamonteilhe ne peut donc élever aujourd’hui
des questions qui ne pourront être agitées qu’après la mort de
M. Aubier.
En troisième lieu , la dame veuve Lamonteilhe agit contre
le propre intérêt de ses enfans.
En supposant que les choses arrivent comme elle parait le
redouter, ses enfans ne devraient point le rapport du domaine
du Saulzet : les actes de transmission en contiennent la dispense
expresse.
Ils auront au moins, dit-on, à subir un retranchement !
O u i , si M. Aubier ne laisse pas assez de bien pour compléter
la réserve de ses autres enfans.
M ais
�( i7 î
Mais ce retranchement serait beaucoup plus considérable ,
M me. de Saint-Mande n’étant pas jugée mandataire de M. A ubier,
et la transmission du Saulzet étant dès-lors censée être une libé
ralité de sa part.
- ' :-vn ¿‘A ’•~q ■' < > ■
■
En e ffe t, et nous raisonnons toujours cl_après les faits constans et' avoués dans les m ém oires, les enfans Lamonteilhe de
vraient rendre au moins les deux tiers du domaine du Saulzet,
en même temps que M. Aubier devrait rendre le V e r g e r , dont
la transmission serait postérieur^.
.. Dès-lors les enfans Lamonteilhe_courraient_le risq u e , nonseulement d’étre dépouillés de la plus grande partie du domaine
du Saulzet, mais encore de ne rien conserver , pas plus que leur
grand-père et leurs oncles et tantes , des autres biens acquis par
Mme. de Saint-Mande comme mandataire de M. Aubier.
» La dame veuve Lam oateilhe doit-elle donc faire tant d’ef
forts !......
1
E n fin , on ajoute pour la dame veuve Lam onteilhe que la foi
des contrats de mariage ne doit jamais être violée.
Il
ne peut y avoir lieu à l’application de ce principe. M. Aubier
n’attaque point les conventions portées dans le contrat de m a
riage des sieur et dame Lamonteilhe.
La dame veuve Lamonteilhe n’aurait d’ailleurs rien à redouter.
M mfi. de Saint-Mande jugée mandataire de M. Aubier à l’effet cia
racheter ses b ien s, la propriété incommutable du Saulzet n’ en
devra pas moins rester aux enfans Lam onteilhe, puisque M. A u
bier a concouru aux actes de transmission.
1
Et la circonstance d’un retranchem ent!à souffrir p eut-être,
ne rend point cette propriété incertaine; car la faveur du con-*
trat de m ariage, en supposant même qu’il contint la transmis
sion , ne pourrait porter obstacle à l’exercice du droit de réserve,
s il y avait lieu : point certain qui ne pouvait manquer d étre
prévu lors du m ariage, les dispositions des lois étant précises ;
�( 18 )
ce qui écarte toute idée de violation de la foi due au con-;
trat (1).
D é l ib é r é
à R io m , par les avocats soussignés, le
3 o mai 1812
A L L E M A N D , J n. C h. B A Y L E ,
B E R N E T -R O L L A N D E .
Me. D E V È Z E , avoué licencié
(1)M a belle-fille, après avoir bien prou vé, dans son mémoire im prim é, qu’elle
tient Saulzet de ma seule volonté , n’ en a pas moins dit et fait plaider qu’ elle
aimait mieux que ses filles tinssent la confirmation de ce d on , des enfans de
Mme. de Saint-Mande que de moi leur a ïeu l, et de mes enfans leurs oncles. Ce
pendant, quand même elle serait sûre que M . d e S a in t-M a n d e fils conservera,
après la mort de sa mèr e , autant de bonne volonté que M mc. Lamonteilhe lui
en croit à présent, la minorité du p e tit-fils de Mme. de Saint-Mande héritier
pour moitié de celle-ci, ne met-elle pas un obstacle insurmontable à ce qu'on
dispense mes petites-filles de rapporter à la succession de ma sœur plus de moitié
de Saulzet, si ma sœur était réputée avoir acheté mes biens pour son propre
com pte, et non comme ma mandataire, en même temps que ce système me
mettrait dans la necessité de rendre à la mort de ma sœur le V erg er dont
il s’agit?
Je ne suis malheureusement que trop certain que M . de Saint-Mande fils
est le principal prom oteur de cette affaire, du changement de ma sœur à mon
égard, et du refus de toute conciliation.
Je supplie mes juges de pren d re la peine de lire les m ém oires im prim és en
prem ière in stan ce; ils sont absolum ent nécessaires p o u r bien conn aître le gen re
de persécution et d ’offense que j’ép ro u ve de la part d ’une b elle-fi l l e p o u r q u i
j ’ai fait des sacrifices tels q u e , dans l’état actu el des choses, les re v e n u s à m oi
réservés passent en entier à l ’acq u it des dettes assises sur S aulzet, que je paye
p o u r elle.
AUBIER
père.
A R I O M , de l’imp. de T H I B A U D , im p rim . de la C o u r Impériale, et lib raire,
rue des T a u le s , maison L a n d r i o t , — Juin 1812.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier-Lamonteilhe, père. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Bayle
Bernet-Rollande
Devèze
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2126
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2127
BCU_Factums_G2128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53422/BCU_Factums_G2126.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
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0701678de69aaa47da281a6a43e1d900
PDF Text
Text
/
R
E
S
U
M
E
POUR
M . E m m a n u e l A U B I E R - L A M O N T E I L H E , ancien
magistrat, demeurant en la ville de Clerm ont, intimé;
CONTRE
Dam e M a r ie -F r a n ç o is e
B e n o it
FABRE
D E
A U B I E R ,
ép o u se de
S t . M A N D E , a u to r is é e
p a r j u s t i c e , e t le s ie u r D E
S t . M A N D E , so n
m a r i , a p p e la n s ;
ET ENCORE C O N T R E
D am e M a r i e - C l a u d i n e D E C H A M P F L O U R
veuve de sieur Jérôme-Emmanuel A UBIER-L A MONTEILHE , tant en son nom qu'en qualité de tutrice
de leurs deux enfans mineurs t appelante.
L a dame de St. Mande a acquis les biens de M. A ubier, son
frère. L ’adjudication lui en a été faite pendant l'immigration de
ce dernier , qui soutient que sa sœur n’a acheté et agi qu’en
vertu du mandat q u 'e lle avoit reçu et accepté de lui.
En première instance, la dame de St. Mande a prétendu , en
fait, que n’y ayant point eu d’acte synallagmatique constatant
le m andat, elle n’avoit pas été mandataire; en d ro it, qu’il ne
pouvoit pas y avoir de m andat, parce que M Aubier , mort
A
�c 2 \
civilem en t, ne pouvoit s’obliger ni obliger personne par cette
espèce de contrat.
Les premiers ^juges ont vu dans la cause un m andat, et en
ont ordonné l’exécution.
La .dame de St. Mande s’est pourvue contre leur jugement.
Elle a paru d’abord fonder son espérance sur le point de droit.
On lui a répondu par une consultation..
Elle annonce aujourd’hui qu’elle veut s’en tenir au point de
fait.
On lui répond par un résumé des faits.
Antoine Aubier de Lamonteilhe avoit épousé Jeanne de Champilour, à laquelle il a survécu. D e ce mariage sont issus Emma
n u el, intim é, Jean >Baptiste , supplicié révolutionnairement à
Lyon , et Marie-Françoise , épouse du sieur de St. Mande ,
appelante.
L e 4 décembre 1768, Emmanuel a contracté mariage avec
Jeanne Margeride. Ses père et mère l’onflnstitué leur héritier
■universel, sans autre réserve que celle de la somme de 40,000 fr.
pour la légitime paternelle et maternelle de Marie-Françoise, et
celle de Jean-Baptiste, leur frère.
Le 10 février 17 7 7 , M arie-Françoise a épousé le sieur de
St. Mande. Par son contrat de mariage , sa dot a été fixée à
o,ooo francs, pour droits paternels et maternels, moyennant
quoi elle renonce à toutes successions directes et collatérales,
et à tous droits cchus et ¿1 échoir.
L e z brumaire an > Antoine Aubier père est mort en ré
clusion. '
Dans le mois de'pluviôse de la même année, Jean-Baptiste
a perdu Is* vie à Lyon.
A cette époque, Emmanuel étoit fu gitif; il cherclioit à éviter
l ’exécution de deux mandats d’arrdt qui avoient été décernés
contre lui les 11 et ao août 1792. Mais il n y avoit point eu de
jugement par contumace ; son nom ne so trouvoit sur aucuno
liste d'émigrés ; ses biens n étoient ni séquestrés, ni annotés :
5
5
4
�3
(
)
ainsi il s’est trouvé saisi des successions d’Antoine , son père ,
et de Jean-Baptiste , son frère.
Son inscription sur la liste des émigrés , a eu lieu à la m u
nicipalité de C lerm on t, le 18 germinal a» , et au départe
ment , le 7 floréal de la même année. Le séquestre de ses
biens en a été la suite.
M. A u b ier, alors retiré en Prusse, chercha , comme beaucoup
de ses compagnons d’infortune, à conserver ses propriétés , et
à les soustraire à la rigueur des lois révolutionnaires. Il avoit
pour cela deux moyens à em ployer; le premier étoiü, en ob
tenant sa radiation, de se faire restituer ses biens ; le secon d ,
de s’en rendre lui-m ém e adjudicataire, dans le cas où il ne
pourroit empêcher la vente avant d’étre rayé.
Il étoit impossible à un émigré d’agir directem ent ; il falloit
à M. Aubier un intermédiaire. La dame de St. M ande, sa sœur
(e t sa créancière pour reste dé sa d o t), accepta son mandat.
Ses nombreuses lettres montrent qu’elle a répondu à la con
fiance de son frère, avec exactitude, courage et générosité.
Pendant long.temps M. Aubier n’a vu dans ces lettres que
la preuve de la tendresse de sa sœur ; il les conservoit par reconnoissance. Il étoit en effet difficile de croire qu’elles pussent
devenir un jour des pièces de procès, et que M m\ de St. Mande ,
après avoir tout fait pour conserver la fortune de son frère ,
voudroit elle-méme détruire son ouvrage , faire suspecter ses
intentions, et contraindre M. Aubier à produire à la justice,
comme titres obligatoires, ce mêmes lettres.
Aujourd’hui, la dame de St. Mande ne veut plus avoir été la
mandataire de son frère ; cédant aux conseils qui l'entourent
elle se prétend propriétaire des biens par elle acquis.
4
9
Il faut donc lui montrer par ses lettres, rapprochées des actes
de la c a u s e , qu’elle a reçu le mandat de M. A u b ier, q u ’e l l o
l’a accepté , qu’elle l’a exécuté.
Pour c e la , il faut classer les faits sous trois époques.
La première comprend ce qui s’est passé depuis l’émigration
A a
'
�(4)
de M. A u b ier, jusqu'à l’adjudication de ses biens, qui a eu lieu
le
thermidor an 4La seconde embrasse le temps qui s’est écoulé de cette ad
judication à la rentrée de M. Aubier, qui eut lieu avant sa ra
diation, et ne fit conséquemment point cesser l’état de mort
civile que la loi prononçoit contre lui. C ’est pendant ce temps
qu’a été contracté le mariage du sieur Aubier fils avec la de
moiselle Champflour , veuve de Bullion.
E n fin , la troisième se compose de tout ce qui s’est passé de
puis le mariage jusqu’au moment actuel.
25
P
remière
E
poque.
Les premières démarches à faire étoient de provoquer la ra
diation de M. Aubier ; la mainlevée du séquestre devant en être
la suite nécessaire. Pour y parvenir , il falloit simultanément
agir auprès de l’administration du département, et auprès du
ministère : la dame de St. Mande se chargea de présenter,
comme fondée de la procuration de son frè re , toutes les péti
tions qui pourroient être nécessaires, et de surveiller les démar
ches qu’un sieur Busche faisoit à Paris, soit directem ent, soit
par l’intermédiaire de l’ambassadeur de Prusse.
Les difficultés étoient sérieuses ; il falloit du temps pour les
vaincre : intermédiairement les biens pouvoient se vendre, si
l’on ne parvenoit à embarrasser la marche trop active de l'admi
nistration. Mme. de St. Mande seule avoit les moyens de le faire ;
comme cohéritière de son frère , elle pouvoit demander le par
tage , l’envoi en possession provisoire; elle pouvoit m êm e, si les
circonstances l’exigeoient, former opposition aux ventes, et a c
cumuler t o u s les obstacles que la prudence p o u r r o i t lui suggérer,
pour empêcher 1 adjudication ; et ce n’étoit qu après avoir épuisé
toutes ces ressources, q uelle devoit elle-même se rendre adju
dicataire.
La dame de St. Mande a-t-elle agi d une manière conforme
�c 5 }
aux idées que l ’on vient d’expliquer? a-t-elle agi pour M. Aubier?
a-t-elle agi en vertu de ses procurations ou mandats?
Sur toutes ces questions, qu’on l’écoute elle-méme.
D ans une prem ière le ttre , du 20 septembre 179 5, elle d it:
« Il seroit très-urgent d’a g ir, pour te procurer la rem ise de tes
« biens. » E lle assure avoir obtenu un arrêté qui l’envoie en
possession provisoire ; arrêté dont elle n’a pas fait u sa g e , parce
q u ’elle craignoit les suites du partage que le district vouloit
provoquer. E lle ajoute : « Je ne ferai rien qui puisse heurter
« tes vrais intérêts ; hâte-toi de travailler à lever les d ifficultés....
« l ’acte e t brevet que tu as envoyés à ta fe m m e , ne sont pas
« su tfisa n s...... Elle avoit vu d’abord avec chagrin mes clèmar« ches; mais on lui en a fa it sentir /'avantage : je ne désire rien
« que pour ton utilité.
« T u écris souvent à ta fem m e; j’espère que tu me rends la
« justice de me croire portée pour tes intérêts. »
A in s i, la dam e de St. M ande annonce qu’elle n ’agit que pour
son frère ; elle l’invite à lever les d ifficu lté s, en envoyant un acte
plus détaillé ; et elle ne tém oigne qu’un seul chagrin , ce lu i de
voir la confiance de M. A ubier partagée entre elle et sa bellesœur.
P ou r faire cesser les querelles de rivalité entre sa fenrme et
sa sœ ur, M. A ubier leur avoit proposé d’envoyer un de ses fils ,
qui auroit été le fondé de pouvoir de M. A u b ie r; elles s’y re fu
sèrent , en disant que ses trois enfans étoient inscrits ( ce qui
ne s’est pas trouvé vrai ). M me. de St. M ande est ainsi demeurée
seule chargée du mandat de son frère.
Une nouvelle lettre apprend à M. Aubier que sa sœur a ob
tenu l’envoi en possession provisoire de son b ie n , mais qu’elle
n’est que son h o m m e d ’a f f a i r e s . « J’ai agi, dit-elle, par le conseil
« de tes am is, sans aucun intérêt, puisque je serai t o u j o u r s
c< c o m p t a b l e . 53 Elle n a demandé le partage que p o u r mettre
obstacle à la vente, et empêcher la d é g r a d a t i o n . Elle d i t e n f i n :
« Si tu parviens à te faire rayer, ce sera avec to i que je ferai
�( 6 )
« nies comptes ; et tu es bien sur que sans autres intérêts que
« les tiens, je me bornerai à ma légitime. 33
Voilà la dame de St. Mande qui se reconnolt homme d’af
faires , comptable de M. Aubier.
Allons plus loin. Dans une troisième lettre , après avoir re-r
proché à son frère d’avoir envoyé les pièces probantes à d’autres
qu’à e lle, elle dit : « J’ai présenté ton mémoire au département;
« il n’a pas été accueilli............Si l’adjudication se faisoit, j’y
« mettrois opposition, en provoquant le partage. >3
Ainsi encore la dame de St. Mande agit pour son frère.
Une quatrième lettre s’exprime ainsi : « Comment se fait-il
« que je ne reçoive plus de tes nouvelles? Dans un moment.où
« tu dois avoir à me mander ce que tu veux que je fasse, tu
« dois être im patient de savoir où en sont tes affaires ; elles
cc n’avancent pas............ Ici les soumissions se font : on croit
« cependant les ventes reculées, à raison du discrédit des msn»
cc dats........... Je vais faire , en vertu de ta phocuhation , les
te oppositions a u x ventes , et former tous les obstacles que tes
k conseils me suggéreront. »
Cette lettre ne laisse aucune équivoque. La dame de St. Mande
non-seulement n’agissoit que pour M. A u bier, mais encore elle
se conformoit en tout à sa volonté : les actes qu’elle faisoit
n’avoient lieu qu’en vertu de la procuration de son frère , et elle
sentoit elle-méme la nécessité de conformer sa conduite aux
avis des conseils de M. Aubier.
Mais pourroit-on exiger plus d’explication? Que l’on lise la
cinquième lettre.
La dame Aubier y parle des démarches du sieur Busche au
près du ministère; elle dit qu’un voyage à Paris , et une lettre
au ministre de Prusse , seroient nécessaires ; elle ajoute ensuite :
(c J’ai présenté aujourd’hui ton mémoire au département : on
te a eu 1 air tres-étonné j et sans me faire aucune réponse sur
et la validité de ta rnocuiiATiON , on m’a remise à quatre jours,
u M. Boirot a maintenant plus de confiance cri ton a ffa ire, sans
�( 7 ")
« Cependant en répondre. Quand même tu rcussirois h sauver
« la confiscation , il te restera toujours la qualité de père , et
« par conséquent le séquestre. »
Quoi de plus clair ! Toutes les démarches de la dame de
St. Mande ne sont-elies pas dans l’intérét de M. Aubier ? n’estce pas lui qui les dirige? n est-ce pas de son affaire dont il
s’agit? la dame de St. Mande consulte-t-elle dautres conseils
que ceux de son frère , et pour dautres intérêts que les siens?
enfin, fait-elle un seul pas sans produire la procura tion, ou
sans en parler? ne va-t-elle pas jusqu’à craindre que ce guide
de t o u t e s ses démarches ne soit insuffisant ou irrégulier?
Ici les choses changent. Les mesures que le gouvernement
avoit cru devoir prendre contre les émigrés , devenoient de
jour en jour plus sévères, et étoient exécutées à la rigueur. Il
n’y avoit plus de moyens d’obtenir la radiation de M. Aubier ;
le refus en avoit été notifié officiellement au ministre de P russe,
qui lui-méme en avoit donné avis à M™. de St. Mande , sui
vant son propre aveu. La confiscation étoit définitive ; et pour
sauver ses biens, il falloit recourir à la ressource extrême de
l’adjudication.
La dame de St. Mande étoit pressée par le conseil de son
frère , qui Vouloit qu’elle acquit sur-le-champ ; m ais, d’une part,
elle ne trouvoit point sa procuration assez régulière; de l’autre,
elle avoit des craintes , et même des arrangemens à prendre,
qu’elle communique à son frère dans une lettre dont voici l’analise.
Bile dit d'abord qu’elle n'a pas reçu une procuration léga
lisée du m inistre, que M. Aubier lui envoyoit; qu’elle craint
de ne pouvoir plus long-temps éloigner les acquéreurs, et que
M. Boirot lui conseille de soumissionner t o u t , et to u t de su ite;
elle est arrêtée par le défaut d’ argent, et par la crainte de dé
plaire à sa belle-sœur, à qui elle veut donner la jouissance sans
lui donner la propriété , à moins q u e lle ne l ’y fo rce. Mais ,
dit-elle, « dans la nécessité où je serai d'acquérir ta fo r tu n e ,
« je ne veux rien que ma légitime. » Revenant ensuite sur la
�' ( 8 )
nécessité qu’il y a d’acquérir promptement ,■soit parce que le
département ne veut donner aucun d élai, soit parce que le sieur
Busche et l’ambassadeur de Prusse ne laissent plus aucun espoir,
soit enfin parce que les émigrés même rentrés ne peuvent ob
tenir aucune restitution , elle finit par dire : « Si j’ach è te , le
« contrat passé, je vendrai d e s o b j e t s a t o i pour faire le second
« payem ent, et s i m p l i f i e r l a r e c e t t e ; car on est, de part et
« d’autre, trop méfiant pour que je mette la téte dans le sac. »
L ’on ne peut douter que la dame de St. Mande ne pouvoit ni
ne vouloit acheter pour son compte ; que l’état de sa fortune
l’empéchoit même d’y penser ; et qu’il étoit aussi conforme à
ses intérêts, comme créancière de son frère pour sa légitim e,
qu’à l’honnêteté de ses vu e s, de n’acquérir que pour M. Aubier.
Aussi veut-elle une procuration régulière, qui lui permette nonseulement d’acheter, mais même de vendre. Elle ne doit courir
aucune chance ; elle sent bien qu’elle va devenir comptable ;
mais comme elle ne doit acquérir la fortune de son frère que
pour la lui rem ettre, elle veut en distraire tout ce qui sera né
cessaire pour la p a yer, sans y rien mettre du sien.
D euxième
E poque.
i
M. Aubier soutient que la dame de St. Mande ayant reçu la
procuration légalisée qu’elle désiroit, et qui lui avoitété adressée,
acquit, comme mandataire, les biens dont il s’agit, et les ad
ministra ensuite en la même qualité; il ajoute même que tout
acte de transmission de ces biens, qui a pu être fait par la dame
de St. M ande, n’a eu lieu que pour lui et en son nom.
La dame de St. M ande, pour agir utilement en faveur de
son frè re , avoit différentes précautions à prendre. Elle devoit
d’abord intéresser l’adm inistration, et le public même , à la
situation de M. Aubier : l’administration, pour obtenir d'elle un
expert qui n'exagérât point la valeur réelle des biens dont elle
vouloit devenir adjudicataire; le public, pour éloigner les per
sonnes
�9
C
)
sonnes qui auroient eu envie de soumissionner ces mêmes pro
priétés. Le moyen le plus simple étoit de déclarer qu’elle ac*
quéroit pour son frère.
Devenue adjudicataire, la dame de St. M ande, se trouvant
à la téte de l’administration de toute la fortune de son frère ,
devoit également lui rendre un compte exact de sa gestion : de
là la nécessité de ne rien lui laisser ignorer. Les payemens , la
manière dont ils dévoient être faits , l’emploi des revenus ou des
capitaux provenant des ventes qu’il voudroit autoriser, les ré
parations que les héritages exigeoient, tout devoit être connu de
M. A ubier, afin de lui donner les moyens d’apprécier sa situa
tion, et faciliter le compte qu’auroit à rendre la mandataire.
Les pièces et les lettres vont-apprendre ce qu’a fait la dame
de St. M an d e, et en quelle qualité elle a agi.
L ’adjudication est du
thermidor an 4 ; elle comprend les
biens d’Antoine et Jean-Baptiste Aubier , et a été faite moyen
nant la somme de 99,258 liv. 9 sous.
Comme la dame de St. Mande avoit qualité pour venir à
partage ( en rapportant les sommes reçues à compte de sa lé
gitime ), pour rendre le rachat moins onéreux à son frère, elle
ne se fit adjuger que les sept neuvièmes des biens composant
les deux successions.
La dame de St. Mande va nous apprendre toutes les circons
tances et toutes les suites de cet acte.
Une première lettre , du 16 septembre 1796 , dit que l’adju
dication a été faite moyennant 100,000 fr. , parce que l’adju
dicataire n’a pas quitté les experts qui devoient estimer les biens.
Mme. de St. Mande ajoute qu’elle a été secondée par tout le
monde, parce qu’elle a manifesté son in ten tion , et que tous sea
amis lui ont ouvert leur bourse. Après avoir expliqué quelle
vente il faudra faire pour p ayer, elle parle de ré g ie , de répa
rations , des héritages qui ont plus ou moins souffert pendant
le séquestre, et se plaint de ce que l’administration voudroit
exiger la garantie de son mari ; ce qui la gène , car elle a
B
25
�C i° )
tout f a i t en son nom. E lle assure ¡ensuite avoir fait an testa
m ent où l’on trouvera les déclarations k îc e ss a ir e s ; elle dit
q u e , pour les payem ens , elle a fait venir des mandats de Paris ,
parce q u ’ils étoient moins c h e r s , et term ine par ces mots -: « Je
« ne m ’o ccu p e que de cela i j’y suis toute entière et s e u le ,
« le. mari n’étant o ccu p é que d e ses tropues affaires . »
C ette lettre n ’indique-t-elle pas pour qui la dame de SaintM ande a agi? L 'intention qu’elle a m anifestée pou voit-elle* être
autre que d’apprendre qu’elle acquéroit pour son frère? E lle an
nonce que c ’est la source de Y intérêt qu’elle inspiroit à tout le
m onde. La déclaration consignée dans son testam ent pouvoitelle avoir un autre objet ? le soin qu’elle apportoit à em pêcher
que son mari ne contractât -des obligations personnelles , ne
prouve-t-il pas que c ’est p arce qu’e lle agissoit seulem ent com m e
m andataire, e t parce qu’e lle craignoit les suites de son m a n d a t,
qu'elle prenoit toutes les précautions possibles pour em pêcher
que la fortune de son mari ne fût com prom ise?
U ne seconde lettre s’exprim e ainsi : « V oilà le quart qu’il
*t faut payer en num éraire, je suis bien forcée de vendre. Il est
k possible que si ta fem m e parvient à 6emer des inquiétudes ,
a je ne trouve pas d’acquéreurs : alors je serai forcée de m e
« laisser déchoir , car je suis bien résolue de tiy mêler pour
•c rien la fortune de mon mari. L ’opération des experts m ’a
« donné beaucoup d’embarras «t coû té cher. N ous sauverons
« quelque chose ; e t , encore une f o is , cb n ’e s t pas pour moi.
« P r in c ip a u x , revenus , seront bien comi>tiLs , bien ren d us ;
« j’en réponds. »
Ainsi la dam e de St. Mande reconnolt qu’elle a dirigé l’opé
ration des experts. En annonçant qu’elle se laissera d é c h o ir,
s’il faut payer des deniers de son m a ri, elle donne pour raisoo
que c e n’est pas pour e l l e q u ’e l l e a acquis , et s è reconnolt
com ptable des principaux et des revenus.
Dans une troisième lettre, elle dit : « T a femme cherche à
« ven d re, pour rentrer dans le pays montagneux. Lorsque j ’a i
�C
)
ce a ch e té , Ce n’est que pour empêcher q u e l’on adjuge à ’ un
cc autre. On m’a rendu ta rnocunATiON , mais on a gardé le
« mémoire. » Cette lettre parle ensuite des ventes qu’il faut
faire pour finir d'acquitter le. prix de l’adjudication.
Ici se placent plusieurs réflexions. L ’on voit q u e , dans ces deux
lettres , la dame de St. Mande avoit conçu des inquiétudes sur
le compte de M“ e. A u bier; d’abord, elle craignoit qu’elle n’éloignât les acquéreurs ; ensuite elle lui suppose le projet de se
mettre en possession des biens de montagne. Comment la dame de
St. Mande auroit-elle conçu de pareilles idées, si elle eut acquis
pour elle? Ses intérêts étoient absolument séparés de ceux de la
dame Aubier : il est évident que cette dernière ne pou voit rien
exiger de sa belle-soeur; et ce ne peut être que parce que
M me. de St. Mande reconnoissoit que les biens q u e lle venoit
d ’acquérir appartenoient toujours à son fr è r e , qu’elle supposoit à la femme de ce dernier le droit d’y rentrer par des moyens
quelconques.
La procuration dont il est parlé n’est pas insignifiante : c ’est
en vertu de ce titre que la dame de St. Mande agissoit ; et ",
pour donner plus de publicité à ses dém arches, elle l’avoit
déposé à l’administration, après l’avoir communiqué à beaucoup
de monde.
Vient actuellement une quatrième le ttr e , du
décembre
1796, qu’il faut analiser, parce q u e lle prouve tout à la fois, le
mandat , l’administration la plus générale , et l'obligation de
rendre compte.
Elle commence en ces termes : « Je suis toujours occupée
« de TES a f f a i r e s : mes payemens sont faits jusqu au jour. »
Elle dit qu’elle cherche à vendre la maison; qu'elle a affermé
le pays montagneux ,000 francs ; q u elle a fait des réparations
au verger, où elle a planté six douzaines de pommiers. Et après
avoir dit que le département a rendu tous les papiers de fam ille,
elle termine en ces termes : « Je ne saurois assez te dire coma bien les gens de ton village t’aiment : sana cesse ils parlent
B 2
3
5
�(12 )
« de tes enfans ; e t, vraim ent, s ’ils m e connoissoient capable
« de te trom per , je crois qu’ils me chasseroient. Tns a f f a i r e s
cc m’occupent beaucoup. Mon mari me recommande de ne pas
« prendre une broche , que l’on ne pourroit ensuite faire le
« compte. »
N ’est-ce pas toujours des affaires du sieur Aubier dont il est
question ? Un mandataire peut-il reconnoitre plus formellement
qu’il doit un com pte, entrer dans plus de détails; et chacun
de ces détails ne prouve-t-il pas de plus fort le mandat.
A cette ép o qu e, M. Aubier travailloit à se faire rayer de
la liste des émigrés. Sa sœur avoit connoissance de l’instruc
tion qui se faisoit à la police sur cela.
Le 16 janvier 1797, elle lui écrit que l’acquisition qu’elle a
faite de ses biens rend cette mesure inutile ; que la restitution
du p rix , qu’il pourroit espérer, ne produiroit autre chose
qu’une inscription sur le grand livre; ce qui n’étoit pas un
avantage assez considérable pour balancer les sacrifices qu’il
seroit obligé de faire. Cette lettre contient ensuite un tableau
de la position de M. Aubier ; elle lui fait de nouveau sentir la
nécessité de vendre pour payer le prix de l’adjudication ; elle
termine : « Je n’ai d’autres intérêts que les t i e n s ............Si je
« donne quelque chose à ta femme, ce sera en numéraire . . . .
ce Je ferai aller du jour au jour. »
Il est difficile de comprendre pourquoi la dame de St. Mande
ne vouloit pas que M. Aubier se fit rayer. Dans tous les c a s , si
la dame de St. Mande n’eut pas acquis pour son frère , et pour son
frère seulem ent, pourquoi lui parle-t-elle toujours de ses intérêts,
et lui rend-elle com pte, à chaque courrier, de l’administration
d’une propriété qui ne lui auroit pas appartenu? pourquoi annonce-t-elle qu’elle prend sur les revenus de cette propriété ce
qu elle donne à Mm*. Aubier de la part de son mari ?
Une sixième lettre, du 19 janvier 1797, contient l’envoi des
bordereaux de m andats qui ont servi à acquitter le prix de la
vente j elle explique ensuite la manière dont les payemens de-
�3
( i )
voient se fa ire , et comment elle les a effectués; elle dit qu’elle
doit en core, sur le prix de la v e n te , une somme de 16,000 f r .,
envoie la note de ce qui reste à payer aux créanciers de JeanBaptiste, décédé à L y o n , et finit par ces expressions : « C ’est
un dédale où je me perdrois moi-même, si je n’écrivois-exac
tement toutes recettes e t dépenses, e t encore bourse à part. »
- Si la dame de St. Mande a été la mandataire de quelqu’autre
personne que de son frère , que le mandant montre , s’il est
possible, des lettres aussi explicatives qui puissent établir son
droit ; qu’il prouve avoir envoyé des procurations comme
M. Aubier père.
Le 17 mars même année, la dame de St. Mande écrivoit :
« J’ai vendu la terre de Burre, qui touchoit M. de Beyre (1)......
« Quoique je lui aie fait lire la p r o c u r a t i o n que tu m’as en« vo y ée, il me prie de t’engager à mettre sur un billet séparé,
« dans une de tes le ttres, que tu approuves cette v en te ............
« Il donne pour raison que ne pouvant pas déposer cette rno« c u r a t i o n chez un notaire, qui ne la recevroit pas, elle reste
« dans mes m ains , et ne lui sert à rien si je venois à mourir. 33
Cette lettre contient ensuite d’autres détails sur les ven tes, sur
les réparations à faire, et en général sur l’administration des biens.
F a u t-il quelques observations sur cette lettre? La dame de
St. Mande peut-elle dire qu’elle n’avoit point de procuration de
son frère? mais elle nous apprend elle-méme que c’est en vertu
de cette procuration qu’elle agissoit. P eu t-elle dire que c ’est
pour un autre que pour son frère , qu’elle avoit acquis et qu’elle
revendoit? mais c ’est à lui qu’elle s’adresse pour obtenir une
ratification de ces ventes, et pour tranquilliser les acquéreurs,
qui craignoient que la procuration qu’avoit la dame de St. Mande
leur fût in u tile, dans l’impossibilité où elle se trouvoit de la
déposer chez un notaire.
7
( l ) ^USC
Pai* «le M ontferrand, lieu du domicile de la famille et de la situa
tion de la majorité des biens.
�r4
C
)
Dans une autre lettre, de la fin du mois de mars même
année, la dame de St. Mande annonce à M. Aubier l’envoi
qu’elle vient de faire d’une lettre de change au troisième fils
de M. Aubier. « J e t’en préviens, d it-e lle, ne voulant jamais
« leur faire d’envoi à ton insçu. »
A in si, de même que la dame de St. Mande rendoit compte
à M. Aubier de son administration, et des sommes qu’elle avançoit à la dame A u b ie r, de môme elle croyoit devoir l’inforr
mer de tout ce qu’elle envoyoit à ses en fans, parce que c ’étoit
de l’agrément de leur père, et pour son com pte, qu’elle leur
faisoit ces envois.
P e u t-il y avoir une reconnoissance plus formelle' qu’elle est
sa m andataire, dans cette disposition de fonds, comme en touti
L ’on trouve parmi les lettres de Mme. de St. Mande, pro
duites par M. A ubier, quelques-unes adressées aux fils de ce
dernier ; dans toutes, la dame de St. Mande convient qu’elle
n’a été que l ’ i ï O îh m e d ’ a f f a i r e s de M. Aubier père ; elle ajoute
q u e lle désire être débarrassée des peines que sa gestion lui
donne; elle dit positivement qu’elle leur refusera toujours l’ar
gent qu’ils pourroient dem ander, à moins que le pere ne con
sente à leur en envoyer.
A u commencement de 1801, M. Aubier est rentré en France;
il navoit point obtenu sa radiation; il étoit en surveillance y et
conséquemment toujours privé de l’exercice de ses droits civils.
Son retour fu t annoncé à la dame de St. M ande, par le sieur
Aubier, fils aîné, qui reçut de sa tante,dans le courant de février,
la lettre que voici : « Le retour de votre père me fait un plaisir
ce sensible ; mon cœur est satisfait, et l’intérêt de vos affaires,
te celui de ma tranquillité le rendoit nécessaire ; j espère qu’il
« sera rayé définitivement, et alors nous réglerons nos comptes;
« je l u i rendrai t o u t , et c ’est a l u i s e u l et d e l u i s e u l que
« vous pouvez et devez dépendre. Je ne suis et n’a i été que
et SON IlOMMB D AFFAIRES, HC POU VANT, IIQ Voulant RIEN DISPOSER ,
« RIEN A U Î N E n SANS LUI. »
�15
c
)
Cette lettre, qui n’a pas besoin d’interprétation, précéda de
peu de temps l’arrivée de M. Aubier à Clermont. A peine est-il
de retour, que la dame de St. M ande, et tous les acquéreurs à
qui elle avoit toujours dit qu’elle n’étoit que l'homme etaffaires
de son frère , engagent celui-ci à ratifier les ventes qu’elle avoit
consenties. Mme. de St. Mande témoigne en même temps le dé
sir le plus v if de rendre compte de sa gestion , et de se débar
rasser, sinon du mandat de son frère, au moins de toutes les
peines que lui donnoit l’administration de ses biens.
M. Aubier pensoit devoir obtempérer à la volonté de sa sœur;
mais l’un et l’autre étoient arrêtés par les difficultés résultantes
de ce que M. A u b ie r, n’étant pas encore rayé de la liste des
ém igrés, étoit en état de mort civ ile , «t ne pouvoit conséquemm ent reprendre ses propriétés, qui auroient été nécessairement
remises sous le séquestre ; il ne pouvoit non plus les administrer
publiquem ent, puisqu’il auroit eu les mêmes dangers à courir,
et que d’ailleurs les démarches qu’il avoit à faire pour obtenir
'sa radiation, ne lui permettoient pas de se livrer à l’embarras
de ses affaires domestiques. Il falloit donc faire un acte q u i,
tout en débarrassant la dame de St. Mande de l’administration
des biens , lui laissât la qualité de m a n d a ta ir e il falloit égale
ment que cet a cte , tout en constatant que les biens a voient été
acquis pour M. Aubier lui-m êm e, et qu’il en étoit le vrai pro
priétaire , comme il l’avoit été avant leur confiscation, fû t assez
équivoque pour que, dans le cas où le gouvernement voudroit
séquestrer de nouveau ses b ien s, on pût répondre au fisc que
que M. Aubier n’étoit pas propriétaire.
L e sieur Aubier fils parut être, à la dame de St. Mande et
à son frère, un intermédiaire qui pourroit faire cesser toutes ces
difficultés, et l’on pensa à le faire intervenir dans l ’acte * pour
en fa ire , ou le subrogé mandataire de la dame de St. Mande r
dans le cas où M. Aubier nuroit capacité pour reprendre ses
biens, et qualité pour recevoir le compte que lui devoit sa sœur,
ou le représentant de tous les enfans de M. Aubier p è r e , vé-
�C
)
ritable mandant, dans le cas où la continuation de sa mort civile
s’opposeroit à ce qu’il put valablement recevoir la transmission
que la dame de St. Mande vouloit lui faire de ses biens.
En conséquence, tout cela ainsi réglé, il est passé , le 8 mai
1801 , un acte entre la dame de St. Mande, d’une p art, et les
sieurs Emmanuel Aubier , son frère , et Jérôme - Emmanuel
A ubier, son second fils, d’autre part. .
C et acte est intitulé d é c h a r g e et convention.
La dame de St. Mande dit qu’elle a acheté les biens prove
nant d’Antoine et Jean-Baptiste A ubier, pour conserver lesdits
biens à s o n f r è r e ...... ou aux en fan s de son frère; qu’ayant réi
téré ses offres de faire l’acte de transmission desdits b ien s,
Em m anuel A ubier l ’en rem ercie, tant en son nom q u a u n o m
d e s e s e n f a n s , de qui il a déjà remis à sa sœur acte d’adhé
sion à tout arrangement.
L on ajoute ensuite que acte authentique de transmission
définitive desdits biens à E m m a n u e l A u b i e r , n’étant point pos
sible solidem ent, jusqu’à ce que celui-ci a it obtenu sa radia
tion définitive ; d’ailleurs , Emmanuel et sa sœur voulant fixer
sur la téte de Jérôme les principales propriétés, s’il trouve un
mariage avantageux ; que les conditions de ce mariage , et le
résultat de quelques affaires non term inées, devant influer sur
la nature et la quotité des réserves qui doivent être faites ,
tant pour Antoine et Jean-Baptiste-Antoine , premier et troi
sième fils d’E m m anuel, que pour la subsistance nécessaire à
celu i-ci, surtout s’il perdoit sa p la ce , les parties sont convenues
de différer l’acte définitif de transmission.
Cependant la dame de St. Mande , voulant être délivrée des
peines que lui a données le soin de ces propriétés, il a été
convenu qu’elle en demeure dès à présent déchargée.
On examine ensuite le compte de sa gestion.
On la remercie de l ’avance des fonds, et des emprunts qu’elle
a faits ; de l ’emploi des revenus et des ca p ita u x , et des objets
qu’elle a revendus pour éteindre tous lesdits emprunts.
1
Em m anuel
�7
( i
)
E m m an uel, tant en son nom q u e n celu i de ses t r o i s n t s ,
ratifie toutes les ventes , et garantit la dame de St. Mande de
toutes recherches.
Il reconnolt que la dame de St. Mande a fait raison de toits
les revenus desdits biens ; de manière q u e , par le résultat du
compte et des compensations, elle est créancière de 2,000 fr.
sur la légitime paternelle et maternelle, que lesdits sieurs Aubier
s’obligent
Jusqu’à
radiation
plutôt un
de lui payer.
l ’arrangement d éfin itif qui sera fa it, soit après la
é£Emmanuel A u b ie r , soit plutôt, s’il se trouvoit
mariage avantageux pour Jérôme, ce lu i-ci est établi
a d m i n i s t r a t e u r des biens, et r e p r é s e n t a n t de toute la f a m ille ,
pour toutes les affaires ; mais ju sq u ’ à la radiation d ’E m m anuel,
il ne pourra recevoir les remboursemens des principaux, faire
aucune vente ou échange, passer de transaction définitive, s a n s
l ’ a u t o r i s a t i o n d e sa t a n t e ; i l reconnoît que ce lle -c i lu i a
remis les titres et papiers desdits biens e t des deux successions ,
q u ’elle a pu retirer des dépôts des autorités constituées.
Jérôme prélèvera sur les revenus 1,200 francs pour sa dé
pense personnelle et ses s o i n s ; il fera du surplus des revenus
l ’emploi qui lu i sera indiqué chaque année par sa tante ,
jusqu’à ce que son père a it obtenu sa radiation.
N ’est-ce pas là le constituer subrogé m andataire?
L ’on a dit en première instance, pour la dame de St. Mande,
que cet acte devoit expliquer ce que les lettres pouvoient avoir
d’équivoque sur le fait du mandat. Cette id é e , dans la situation
où se trouvoientles parties, n’est pas exacte sous tous les rapports.
Mais ce qu’il y a de plus certain , c ’est que cet acte, rappro
ché des différentes lettres que 1 on a déjà analisées , ne sauroit
laisser aucun doute sur le m andat, sur la personne qui l’a
donné et r e ç u , sur celui auquel le compte en est rendu. Lors
même qu’il seroit permis de l'isoler de tous les faits de la
cause, seul il prouveroit encore le mandat.
En e ffe t , la dénomination de l’acte apprend que c ’est une
G
�8
( i
)
décharge qu’a voulue la dame de St. Mande. L ’acte dit que c ’est
pour des biens qu’elle avoit ach etés, à l’effet de les conserver, et
qu’elle offre de remettre : c ’est delà qu’elle tire la nécessité d’une
décharge. Lesdits biens avoient nécessité une gestion; la dame
de St. Mande en rend compte. Il avoit fallu vendre une partie
de ces propriétés pour conseryer le reste; la dame de St. Mande
fait ratifier les ventes. L ’administration de ces biens devient pé
nible et gênante; la dame de St. Mande se fait substituer par
un tiers, en ne conservant que la surveillance. Tout cela n’éta
blit-il pas l’existence d’un mandat? ce qui s’est passé lors de
l ’acte de 1801 n’en est-il pas la suite nécessaire?
La dame de St. Mande avoit acquis pour conserver les biens
« son fr è r e , ou aux enfans de son frère ; elle ne peut point les
transmettre au frère , parce qu’il n’a point sa radiation dé
finitive ; elle retarde cette transmission jusqu’au moment où il
sera rayé : donc elle reconnolt que c ’est pour lui qu’elle avoit
acquis, et que lui seul pouvoit définitivement la décharger des
suites de son mandat. C ’est, d’ailleurs, avec lui personnellement
qu’elle traite ; c ’est à lui que tout se rapporte ; et lorsqu’il est
question des enfans du mandataire , c ’est lui qui les nomme , et
qui en parle toujours en termes collectifs.
M. Aubier père a toujours le soin de les désigner tous les trois,
lorsqu’il s’agit de-recueillir l ’effet du m andat; et s’il est plus
particulièrement question de Jérôme dans cet acte, c ’est parce
que son père le nomme pour représenter toute la famille auprès de
la dame de St. M an de, dans le cas où il ne pourroit recueillir
l’effet de son mandat ; et Jérôm e, devenant alors le subrogé
mandataire de la dame de St. M ande, contracte lui-inéme des
obligations, soit envers la première m andataire, soit envers le
sieur Aubier p ère, lui-m éine.
Jusque - là il étoit impossible de supposer que la dame de
St. Mande pût élever la prétention d’avoir acquis pour son propre
com pte, et avec la faculté de disposer à son gré de ces biens.
Jérôme Aubier voulut bientôt contracter mariage avec la de-
�C 19 )
moiselle Champflonr. M. Aubier père avoit l’intention de faire
à son fils tous les avantages que sa fortune et les lois lui permettoient ; il ne pouvoit prendre, à ce sujet, des renseignemens
certains qu’auprès de la dame de St. Mande; elle connoissoit,
mieux que lu i , l’état réel de sa fortune ; e t, sur l’aperçu qu’elle
lui en donna, il fut convenu que l’on délaisseroit à Jérôme
Aubier le domaine du Sauzet, et le mariage fut conclu.
L ’état de mort civile dans lequel se trouvoit M. A ubier, rendoit
difficile le délaissement de ce domaine. La dame de St. Manda
ne pouvoit agir publiquement, comme mandataire d’ un émigré.
On convenoit cependant qu’elle ne pouvoit rien transmettre
sans l’autorisation de M. Aubier ; et comme il étoit alors frappé
de mort civile , on imagina de le faire assister d’un conseil
de famille , comme cela se pratique pour un homme interdit
de ses droits. La dame de St. Mande y dit qu’elle a acquis pour
transmettre à Em m anuel, si la demande en radiation prospéroit,
ou pour procurer des établissemens aux enfans dudit Emmanuel ;
en conséquence, en présence et du consentement dudit Em m a
nuel, elle délaisse le bien du Sauzet à Jérôm e, moyennant cer
taines conditions, entendant qu’il en jouisse comme s i elle n'avoit
été que le prête-nom de lu i seul. Ainsi cette délibération établit
encore que la dame de St. Mande étoit la mandataire de son
frère ; qu’elle avoit besoin de son consentement pour disposer
de ses biens ; et ce n’est qu'avec l’agrément de M. A u b ie r,
qu’elle dit qu ’ on supposera qu’elle a acquis comme préte-nom
de Jérôme.
Le contrat de mariage de ce dernier est du 11 prairial an g :
Jérôme s’y constitue le bien du Sauzet, toujours du consentement
de son père.
T
roisième
E
poque
.
Mm*. de St. Mande va dire elle-m ôm e si elle a agi comme
propriétaire des biens qu’elle avoit acquis, si elle les a transmis
en-son nom?
G 2
�( 20 )
~ En avril 1801 , elle écrivoit à son frère :
- « Je n’ai agi en tout que pour to i ; il n’a jamais été question ,
« avant le m ariage, que d’une p r o c u r a t i o n que je donnerai à
« ton fils , pour qu’il régisse ce qui resteroit, à ma place , à
« la charge de te rendre compte : cela te laisse bien le maître
« de faire ce que tu voudras. Je te proteste que c ’est p o u r t o i
« que j’ai agi ; qu’à ton retour , m a î t r e de ta fortu n e, tu as eu
« l e plaisir de marier et doter ton fils. Le reste suffit pour les
« autres. »
Ainsi la dame de St. Mande ne regardoit elle-méme l’acte
de 1801 que comme une procuration donnée au fils de M. Aubier
pour gérer à sa place ; elle convient que M. Aubier a toujours
été le maître de ses biens , et que c ’est lui qui a marié et doté
son fils : donc , encore une fois, elle n’agissoit dans ces derniers
actes que comme mandataire ou prête-nom de son frère.
M. Aubier s’aperçut bientôt q u e , pour le porter à faire des
avantages considérables à son fils, on lui avoit déprécié Sauzet,
d’une p a rt, e t , d’autre p a rt, exagéré le reste de sa fortune ,
particulièrem ent les liquidations sur l’E ta t, qui depuis ont été
refusées. Il éprouva quelques chagrins d’avoir été trom pé, le
manifesta à sa Sœur, et se plaignit de ce qu’elle l’avoit engagé
dans une démarche qui faisoit un tort réel et irrévocable à ses
enfans.
L a dame de St. Mande répondit qu’elle avoit pris conseil ;
qu’il lui paroissoit inutile que son frère prit amnistie, parce que
Jérôme ne pouvoit frustrer ses frères, tous les avis étant que l'on
pourra lu i disputer ce q u 'il a , mais qu’il ne pourra, lu i, dis
puter à ses frères ce qu ’ils auront par m oi ; elle dit qu’elle sera
exposée aux tracasseries de Mme. A u b ier, « qui me fera inter« peller pour savoir s i j ’a i été ou non ton prête-nom ........Plus
« je vois tes idées s’em brouiller, et plus je tiendrai à ne pas
« me défaire du verger , quand môme tu resterois et accep
te terois l’amnistie. Je dois pour ma sûreté, pour l’utilité de
« mes n eveux, dire et soutenir que cet objet est à moi; tu
�C 21 )
« 'en auras le revenu ; au lieu que s’il est à t o i , tu n’en auras
cc bientôt plus un sou. »
Quelle lettre ! et combien toute seule elle prouve de choses!
La dame de St. Mande se garde bien de dire qu’elle n’est pas
la mandataire de son frère ; ses lettres, ses actes ne pouvoient
lui permettre un désaveu à cet égard. Mais elle use de finesse
pour se soustraire à l’effet du mandat ; elle engage son frère à ne
point solliciter son amnistie; elle cherche à dissiper les craintes
que sa disposition en faveur de Jérôme lui avoit inspirées; elle
lui fait penser qu’il a tout à redouter des tracasseries de son
épouse ;■elle craint d’étre obligée à'avouer à la justice qu’elle
a été son prête-nom; elle y glisse que, pour sa sûretc, elle dira
que le verger est à elle. Ainsi cette lettre est la plus forte preuve
du mandat. S’il n’eût point existé, la dame de St. Mande auroit
franchement déclaré que les biens lui appartenoient; elle con
vient , au contraire, qu’ils sont à M. Aubier ; et ce n’est qu'en
cas de discussion qu'elle se réserve de nier.
L ’amnistie de M. Aubier est du 10 septembre 1802.
Il parolt , par la correspondance , que les démarches de
M. Aubier à ce sujet étoient contraires aux conseils que lui
avoit donnés Mme. de St. Mande. Cela donna lieu à quelques
altercations épistolaires, au sujet desquelles la dame de SaintMande écriv it, le o septembre : « Je n’a i , vous le savez, jamais
« fait ni signé d’actes que ceux que vous avez im aginés, ré« digés, consultés, et a v o u s s e u l : ainsi il en arrivera ce qu’il
« plaira à Dieu dans la suite. Je ne mets aucune partialité dans
« toutes vos affaires : il m ’est indifférent pour qui en sera le
« succès. »
5
Le 8 juillet 1802, elle disoit : « Je n’étois que votre prête« nom et celui de vos enfans ; je ne l’ai jamais nié. N ’oubliez
« pas que c ’est vous qui avez choisi Lam onteilhe pour a i n i 5 ,
cc et cela depuis trois ans. »
Ces deux lettres 11e disent-elles pas suffisamment que la dame
de St. Mande n’agissoit que comme mandataire, dans les actes
v
�22
(
)
qu'elle prétend aujourd'hui lui appartenir? N ’e s t- c e point
M. Aubier qui a choisi son héritier ? n’est ce pas lui qui a tout
fa it, qui a im aginé, rédigé les actes? La dame de St. Mande
n’est-elle pas obligée de convenir qu’elle s’étoit contentée de
prêter son nom à ces difiérens arrangemens ? ne dit-elle pas
qu’ils lui étoient si étrangers , que le succès des différentes
contestations auxquelles ils peuvent donner lieu lui étoit abso
lument indifférent?
Le contrat de mariage de Jérôme Aubier-Lamonteilhe a été
suivi d’une subrogation que la dame de St. Mande lui f i t , du
domaine du Sauzet, toujours du consentement de M . A ubier,
Elle est postérieure au mariage de trois mois.
A l’occasion de cette subrogation , la dame de St. Mande
écrivoît : « Dans le cas que tu aies des raisons pour ne pas si« gner, je déclare qu'alors j e ne -veux pas q u e t u r e n d e s l ’acte
« a TO a fils , ne voulant absolument le faire qu’autant que tu
« signeras toi-même. »
Ainsi encore la dame de St. Mande avouoit la nécessité de
la signature de son frère ; elle craignoit les suites de tout en
gagement contracté sans sort consentement. Pourquoi ces crain
te s, si elle n’eût point été la mandataire de M. Aubier?
L e juillet 180 î , la dame de St. Mande écrivoit : « Je n’a i,
« mon fr è r e , ni demandé ni désiré le renvoi de mes lettres.
« Vous m’avez dit qu’un jour elles feroient preuve que j e n ’ètoisr
<c que votre prête-nom e t celui de vos enfans; j e n e l ’a i j a m a i s
5
« NIÉ. 5»
«
«
«
u
«
83
L e ao octobre i o , nouvelle lettre : « Vous avez eu six semaines pour voir vos papiers ; vous avez agi l i b r e m e n t , s e u l,
et en pleine connoissance de votre position....... Vous vous
êtes lié et m’avez liée. Si les actes sont illégaux, vos enfans
seront toujours à tem çs, après la mort de leur m è re , de les
faire annuller. »
Enfin, le 26 avril 1804, la dame de St. Mande disoit encore :
« Quant à l'acte fait, dites-vous, par m oi, à Lamonteilhe ,
�« avant ou après le mariage , rien n ’est plus /aux ; et sûrement
« vous ne le croyez pas vous-même. Je n’ai J a it et signé d ’actes
<c que ceux que vous m'avez dictés : je n ’a i et n ’aurai jam ais
« d ’intérêt à en fa ire d ’autre, et je ne comprends pas les motifs
cc que vous avez à m’en prêter. »
Nous terminons ici l’extrait de cette correspondance, et le
bornons à ce qui étoit indispensable pour prouver le mandat.
L ’on auroit pu ajouter à cette p reu ve, en rapprochant beaucoup
de faits consignés dans une foule d’autres lettres ; mais le sieur
A u b ier, animé du désir de ne rien écrire de désagréable à qui
que ce s o it, a cru d evo ir, pour le moment a c tu e l, se res
treindre aux faits qu’il vient de développer.
La dame de St. Mande s’étant plaint à M. A u b ier, par plu
sieurs de ses lettres, de ce qu’il tardoit trop à faire passer l’acte
de transmission du v e rg e r, tandis que d’autre part elle se relusoit à ce que 1 acte énonçât qu elle le lui transmettoit comme
ayant été sa m andataire, M. Aubier la Bt assigner à cet e ffet,
comme elle le désiroit, par exploit du avril 1811.
La dame de Lam onteilhe, contre laquelle M. Aubier ne dirigeoit aucune demande , est intervenue dans la contestation,
pour em pêcher, d it-e lle , que la dame de St. Mande ne çoit
considérée comme le prête-nom de son frère.
Ces deux dames ont plaidé conjointement au tribunal civil
de Clermont ; un mémoire a été imprimé sous leur nom , et
elles n’ont pas craint d'y invoquer toutes les dispositions des
lois sur les émigrés, et d’en demander l’application contre leur
frère et beau-père.
3
Un jugement du 20 mars 1812 a accueilli la demande de
M. A ubier, et a réjeté l'intervention de la veuve Lam onteilhe,
parce que les actes qui lui ont transféré le domaine du S a u z e t
ne sont point attaqués.
Il y a appel de ce jugement.
En la C o u r, les appelantes divisent leurs défenses.
Quels peuvent être leurs moyens ?
�( H )
Quant à la dame de St. M an de, il est impossible q u elle ne
reconnoisse pas qu’elle a agi comme m andataire, lors de l’ad
judication des biens qui appartenoient à M. Aubier, son frère;
ses lettres, les actes qui les ont suivi, ne laissent aucun doute
sur ce fait; elle ne peut le désavouer.
Il est également évident que le mandat avoit été donné par
M. Aubier ; les mêmes lettres l’établissent : elles parlent de
procurations envoyées à différentes époques, et toujours pour
le même objet ; elles s’expliquent sur les suites qu’ont eues ces
procurations ; et comme la dame de St. Mande ne prouve pas
qu’elle ait reçu de mandats d’autres personnes que de son frère,
il faut qu’elle convienne que si elle a été liée envers quelqu’un
par cette espèce de contrat, ce ne peut être qu’envers M. Aubier
père. La transmission qu’elle a faite à Jérôme ne change rien ;
les actes qui ont eu lieu ne sont que la suite du mandat qu’avoit
accepté la dame de St. Mande; c ’est toujours en exécution des
volontés de son frè re , et pour son fr è r e , qu’elle a agi : tous ces
actes sont faits du consentement de ce dernier; conséquemment
ils lui appartiennent, et lui seul doit en garantir l’exécution,
ou en provoquer la nullité.
Quant à la veuve Lam onteilhe, elle n’a point d’intérêt dans
la cause.
D ’abord , M. Aubier n’a formé contre elle aucune de
mande : il a toujours respecté les engagemens qu’il a pris ; il
est même obligé de garantir la transmission qui a été faite à
son m ari, du bien du Sauzet : mais s’il pouvoit s’élever quelques
difficultés , elles ne naltroient qu’au décès de M. A u b ie r, et
entre ses enfans.
En supposant que la dame Lamonteilhe osAt soutenir que sa
tante étoit la mandataire de Jérôme A u b ie r, pour le domaine
du Sauzet, au moins n’oseroit-elle pas aller jusqu’à prétendre quo
son mandat portoit sur tous les biens de M. Aubier. Dès-lors,
le verger ne seroit point compris dans ce»mandat ; et comme
il aeroit au moins certain q u e , sous ce rapport , la dame do
�25
(
)
St. Mande auroit été la mandataire de son fr è r e , il resteroit
également pour constant que la dame de Lamonteilhe n’avoit
ni qualité ni intérêt pour intervenir dans un procès dont l’objet
étoit d’obtenir le délaissement de propriétés qui ne lui ont jamais
appartenu.
Outre ce m oyen, qui seul est déterminant dans la cau se, ne
s’en élève-t-il pas un foule d’autres contre la dame de Lamonteilhe?
E t d’abord, cette dame parolt craindre que les enfans Aubier
ne viennent, par voie de retranchem ent, prendre leur légitime
sur le bien du Sauzet ; mais ne voit-elle pas qu’elle a de plus
grands dangers à courir du côté des enfans de la dame de SaintBlande ?
En e ffe t, si elle a acquis pour e lle -m ê m e , il est évident
q u e lle n’a pas pu disposer de la presque totalité de sa fortune,
et qu’alors ses propres enfans viendront reprendre entre les
mains de madame de Lamonteilhe la plus grande partie du do
maine qui lui a été transmis.
Q ue l’on aille plus loin , et que l’on suppose , si l’on v e u t,
que madame de St. Mande n’a pas été la mandataire de son
frère : au m oins, comme il est certain qu’elle a été mandataire
de quelqu’un, il faudra bien que l’on recherche qui lui a donné
<ce mandat. Eh biei^J si ce n’est point le père s e u l, ce n’est
nonjilus Jérôme seul. Ç e dernier n’étoit rien à l’origine du
mandat; et l’acte du 8 mai '1801 n’en a fait que le représentant
dé toute la famille. S*il-figüre hypothétiquement dans le compte
du mandat, q u ia été.tehdH à*«on père*', il y assiste autant pour
ses frères que pour lui-même. Dans.cette position, tous les avan* tages qui-lui çnt été faits seroient absolument nuls. M. Aubier
■pèrÊ n’.autoiti pu disposer de biens dont il n’étoit plus proprié'ta irfti Mm
.e-.deSt. Mande n’auroit pu Yransmettre à Jérôme seul
c e q u elle avoît acquis pïmr les trois frères ; et les deux autres
qui étoient représentés par Jérôme , et qui même avoient
envoyé leur acquiescement à la décharge du compte rendu
�(
2
6
)
à leur père, auroient aujourd’hui le droit de demander chacun,
et dés à présent, le tiers du Sauzet.
Il seroit facile d’ajouter d’autres réflexions qui démontreroient
de plus en plus que les prétentions de la dame Lamonteilhe sont
en contradiction directe avec les intérêts bien entendus de ses
enfans. Mais comme l’on ne s’est proposé, dans ce résum é,
d’autre but que celui de donner l’extrait des faits de la cause,
et spécialement de ceux servant à établir que la dame de SaintMande n’a agi que comme m andataire, qu’elle tenoit son
mandat de M. A ubier, que c ’est à lui seul qu’elle doit faire la
transmission des biens qu’elle a acq uis, l’on croit devoir s’abs
tenir de toutes discussions, se référant, à cet égard, aux moyens
développés dans la consultation, et qui seront reproduits lors de
la plaidoirie de la cause.
Signe A U B I E R père.
M e. JN. C H. B A Y L E ,
avocat.
M e. D E V É Z E , avoué licencié.
9
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A RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , Im prîm . de la C o u r Im périale, et lib ra ire ,
r u e des T a u le s, m aison L a n d r i o t . — Juillet1 8 1 2 .
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier-Lamonteilhe, Emmanuel. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Aubier
Bayle
Devèze
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Résumé pour M. Emmanuel Aubier-Lamonteilhe, ancien magistrat, demeurant en la ville de Clermont, intimé ; contre Dame Marie-Françoise Aubier, épouse de Benoît Fabre de Saint Mande, autorisée par justice, et le sieur de Saint Mande, son mari, appelans ; et encore contre Dame Marie-Claudine de Champflour, veuve de sieur Jérôme-Emmanuel Aubier-Lamonteilhe, tant en son nom qu'en qualité de tutrice de leurs deux enfans mineurs, appelante.
note manuscrite : « 1er août 1812, 2éme chambre, arrêt…. »
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2127
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53423/BCU_Factums_G2127.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53418/BCU_Factums_G2122.pdf
996920ea8d637f6a28c2d007588feb19
PDF Text
Text
^~r^ )CCoi -tCco
/
l-tC e-
EXPOSÉ
Faits de la Cause pendante au Tribunal
de prem ière instance, entre E m m a n u e l
A U B IE R -L A M O N T E IL H E p ère, et M. D E
S T M AN D E et M a r i e A U B IER , son épouse,
Des
S œ u r d ’EMMANUEL,
U n e cruelle fatalité convertit en procès ce qui eut dû cimenter
l ’union dans ma famille.
On sait quel zèle ma sœur a montré pour moi dans les temps
d ’anarchie , où la difficulté des circonstances ajoutoit à son mérite;
on se rappelle que le jour où elle soumissionna m es b ien s, un
administrateur lui ayant d e m a n d é si c 'étoit pour m o i, elle répondit
hautement: Q u i p o u r r o it e n d o u te r !
L ’Empire a terrassé l’anarchie; cependant la transmission de
mes biens est arrêtée, parce que de mauvais conseils ont conduit
petit à petit ma sœur et mon beau-frère à contester sur tout.,
même sur ma qualité d'héritier de mon père et de mon f rère.
Je les ai long-temps suppliés de nommer eux-mêmes un média
teur ; je me réjouis quand ma sœur choisit un magistrat de la
première cour de l’Empire, aussi respecté à cause de sa profonde
érudition qu'à cause de ses belles qualités morales.
L e 25 juillet dernier, j’ai signé dans son cabinet, à P a ris ,
les deux doubles de la transaction qu’il avoit rédigée, après véri
fication des fails et des actes entre lui et un magistrat d’ Issoire ,
conseil de ma sœur. Ce médiateur la lui a envoyée ( 1).
Quelque mauvais conseil a prévalu ; il a décidé ma sœur et
(1 ) V o y e z à la fin la c o p ie d e c e tt e p iè c e , a in s i q u e la c o p ie d u p r o je t p r é c é
d e m m e n t p ro p o s é p a r M d e
S t. M an d e.
yvus ci
a
tx—f'a jv& x à- f* rtsotCitJ ■
�>.
( o
'
son mari à vouloir qu’il y ait plaidoirie, publicité de débats,
jugement solennel.
C e qui nous divise a deux principes très-différens, à traiter
séparément; i°. ma qualité d’héritier de mon père; 20. le rachat
de mrs biens, fait pour mon compte, par ma sœur, munie de
mes pouvoirs.
Cet exposé contient les faits les plus nécessaires à leur déci
sion ; les mesures dont on me menace me font hâter l’impres
sion , et me feront dire plus que je ne voulois; il aura du moins
l’ utilité de prouver que les divisions de ma famille doivent être
attribuées à des conseillers perfides, auteurs des ridicules versions
qui ont été répandues.
Ier
O
bjet
.
»
— Suis-je héritier de mon père?
Par mon contrat de mariage, en date du 4 décembre 1768,
mon père m ’a institué son seul et unique héritier.
En vertu du- pouvoir à lui donné par ma mère, il m ’a aussi
nommé seul héritier de celle-ci; dont la dot avoit été fondue
dans les biens de mon père.
Il s’en est réservé la jouissance , et sur le tout, 40,000 liv. pour
en former les légitimes de mon frère et de ma sœur.
Par le contrat de mariage de ma sœur, de 1777, elle a renoncé
à toute succession directe et collatérale , moyennant 3 o,ooo liv . ,
tant pour bien paternel que pour bien maternel.
L ors de sa’ signature mon frère réclama ; les 10,000 liv. qui
restoient lui paroissoirnt insuffisantes pour sa légitime; il annonça
qu’à la mort de mon père il en demanderoit le complément par
réduction de la dot de ma sœur.
.
Je mis fin à cette querelle en m ’engageant sur le champ à
garantir personnellement à ma sœur l’intégrité de sa d o t , à mon
frère l’intégrité de sa légitime, et à payer de plus les legs rémunératoires que mon pore voudroit faire; il voulut que l’acte reçu
B aptiste, notaire, limitât cette faculté à 3 ,000 liv.
IVlon père est mort en réclusion le a 5 brumaire an 3, sans avoir
usé de cette faculté.
�( 3 )
J’étois absent; j’avois été obligé de fu i r , par deux mandats
d ’arrêt décernés contre moi par le comité révolutionnaire de Paris,
les i i et 20 août 1792 , et par les poursuites du tribunal révo
lutionnaire créé par le décret du 19 août (1).
A la mort de mon père, il étoit redù à mon beau-frère 12,000
liv. pour reste de la dot de ma sœur.
L eur contrat de mariage ne réservoit'à ma sœur aucun para
phernal , aucune action extra-dotale ; ainsi elle devoit etre en tout
subordonnée à la volonté de son mari.
Gelui-ci n’hésita pas à déclarer, dès l’instant de la mort de mon
père, qu'il s’en tenoit à la constitution dotale; qu’ il y auroit des
millions à gagner, qu’il ne voudroit pas profiter de mon malheur.
Ses opinions politiques et religieuses lui firent ajouter, qu’il
aimeroit mieux perdre les 12,000 liv. à lui dues , que de traiter
avec les agens de la révolution, même pour conserver mes biens,
gages de sa créance ; mais qu’il laissoit à ma sœur la liberté de
fa ire , pour mon compte , les opérations qu’elle jugeroit utiles pour
me sauver mes biens, à condition, i° . q u 'il se ro it d is p e n sé de signer
aucune autorisation de sa fem m e, 20. de faire aucunes avances,
3*. qu’il seroit payé en numéraire des 12,000 liv. à lui redues.
L ’autorisation du mari eût été absolument nécessaire, si ma
sœur eût voulu agir , soumissionner pour son propre compte ,
puisque son contrat de mariage ne lui permettoit point d'extradotal; elle n'avoit pas besoin d’être autorisée par son mari pour
être mon homme d'affaires, mon prête-nom,, comme elle l’a si
souvent d it, écrit. L article iqqo du Code Napoléon a confirmé
ce principe. C e n ’est pas ici que je dois rendre compte de ses
opérations; il suffit de savoir que M . de St. Mande a reçu
e
r
f les 12J000
fr. de ma part, qu’ils lui ont été remis pour mon compte par
ma sœ ur, des deniers à moi appartenans, provenant du rachat
( 1 ) Pour^ punir de mort ceux qu’on ajipcloit alors les com plices <le I.oms X V I ,
pour les finis du r 0 août. MCs coaccusi-s L a p o n e , Iiaclmiami et outres oflicicrs des
gardes-suisscs du r o i, ont ¿ t <5 par lui cn vojc's aussitôt à l’t c h a f^ d .
A 2
�(4)
et revente de mes biens , dont il sera ci-après parlé, et q u ’elle m ’a
porté ces 13,000 liv. en dépense dans le compte qu'elle m’a rendu.
L e dernier payement a été fait en octobre itfoa: ma grande
confiance dans M. de St. Mande,- l’économie des droits, fit différer
d’en prendre quittance notariée ; nous nous bornâmes à en mettre
mention à la fin du double d ’une reconnoissance portant l ’arrêté,
de compte ci-dessu3, demeuré dans les mains de M . de St. Mande.
A la même époque, je donnai connoissanceà Mad. de St. Mande,
de mon amnistie; de l’arrêté me réintégrant dans l ’exercice de mes
droits jusques-là s u s p e n d u s , de mon admission à la qualité d ’héri
tier bénéficiaire dé mon père, par ordonnance du tribunal de pre
mière instance, du 20 vendémiaire an 11.
En i 8 o 5 , quelqu’un ayant cKt à mon beau-frère qu’il pourroit
être recherché en rapport de ce qu’il avoit reçu , il désira un
nouvel acte de garantie de ma part; je le lui envoyai de Berlin ;
il l’a déposé chez M . Clément, notaire h Issoire.
En 1809, j ’ai eu besoin d’avoir quittance notariée; je l’ai
demandée. La première réponse de M . de St. Mande approuvoit la rédaction que je lui avois proposée: peu de jours après,
il m ’envoya un projet totalement écrit de sa main, tout différent;
on m 'y avoit ôté la qualité d’héritier de mon père. On y avoit
inséré cette clause : Emmanuel A u bier contracte l'obligation de
ne rien répéter contre la dame sa sœ ur, pour cause de la ges
tion et administration qu'elle a fa ite pour l u i , n i a u t r e m e n t .
C ’ctoit m’ôter tout'ce que j’avois au monde; car tout étoit dans
les mains de ma sœ u r, ou sur sa tête.
Convaincu .que mon beau-frère n ’avoit point celte intention ,
je lui écrivis qu'il avoit été sans le 'vouloir l'instrument de quel
qu'un qui avoit voulu nous brouiller ; que sûrement ni lui ni
ma sœur n’avoient voulu me dépouiller de ce que ma sœur s’étoit
engagée de me transmettre ; que pour lui prouver ma grande
envie de lui pla ire, je transcrivois littéralement son projet,
quoique la rédaction en fût vicieuse sous tous les rapports,
mais que l ’intérêt de mes énfans, de même que le mien me forçait
%
�( 5)
4
3
d’y ajouter la réserve de ce qu'un acte du 8 mai 1801 me
promettoit.
Je ignai l’acte, jele lui envoyai de Paris, daté du......avril 1810.
Par lettre du 9 avril 1810; mon beau-frère refusa la réserve et me
renvoya l’acte. Peut-être n’a-t-il pas lu ma lettre : on lui a dicté
la réponse.
Sur de nouvelles représentations de ma p a rt, il me dit de
prendre les voies judiciaires.
C ’est alors et à ce sujet que j’ai appris qu'on lui avoit persuadé
qu’e/z conscience il ne pouvoit pas me reconnoître pour héritierde mon p è r e , parce que peut-être mon absence, lors de la mort
de mon pèrç, m ’avoit fait perdre mes droits irrévocablement.
vLes mots en conscience avoient été employés pour interdire
toute réflexion à mon vertueux beau-frère, et l’entraîner à me
forcer à prendre les voies judiciaires comme nécessaires à la dé
charge de ¿a conscience.
Les confiscations révolutionnaires ont réduit la succession béné
ficiaire de mon père à environ 100 liv. de renie dont il reste 80 liv.
chargées de beaucoup de dettes : je l’ai acceptée pour éviter qu’elle
fût déclarée vacante, et un curateur qui auroit occasionné des frais
énormes. Je ne la défends donc point par cupidité ; mais c’est
précisément parce qu’on n’élève de doute sur mes droits que pour
perpétuer le désordre, que je dois les établir, les défendre.
Eh puis , quel père pourroil souffrir qu’un caprice le raye de
$a famille, et menace son existence civile au nom d ’une sœur
q\ù avoit demandé et reçu de ce frère des pouvoirs illimités
pour défendre scs droits, comme on le verra bientôt; elle n ’en
disconvient pas.
J’ai dit que j’avois ote institué seul héritier par mon père; la
question de savoir si h sa mort j’avois conservé mes droits civils,
se résout par les faits et leur date.
O u i , j’étois absentquand mon père est mort; mais je n ’étois ins
crit sur aucune liste d ’émigrés ) je n ’avois point été déclaré en pré.
venlion d'émigration, ce qui tîroitbicn moins à conséquence pour les
droits civils qued'étre inscrit ; enfin je n’étois pas dans le cas de l’èlre.
�*» ■
( 6)
En effet, les perquisitions de ma personne, l’apposition des
scellés chez moi comme fugitif des mandais d ’a rrêt, faites à mon
domicile à Paris, ( domicile de droit par ma charge, domicile de
fait par ma résidence continue depuis quelques années dans la
maison dont le roi m ’avoit donné la jouissance, ) me classoient,
par actes émanés des autorités administratives et judiciaires, parmi
ceux qu’elles avoient obligé de f u i r , malgré leur volonté de
demeurer.
Une condamnation par contumace auroit pu me priver de mes
droits civils; il s’en seroit suivi une confiscation au profit de la
république, comme si j'avois été guillotiné ; mais cette contumace
n ’a jamais été prononcée.
11 y a m ie u x : le courroux qu’avoit excité contre moi ma con
duite près de Louis X V I , avoit été détourné par la réquisition
que j'avois faite à Dumourier à Liège, et à M . Dubois*-Thainville,
chargé des (i) affaires de France à la H a y e , de me recevoir pri
sonnier et de me faire transférer à la b a r r e , pour y défendre
Louis X V I ,
et y répondre aux faits qui m ’étoient imputés;
tous ceux qui avoient un rôle parmi les autorités ne partageoient
pas le délire ; quelques - uns d'accord avec le vénérable M . de
Malsherbes (3) m ’avoient su gré de ma démarche.
C ’est à leurs bons offices que j ’ai dû de n’avoir jamais été ins
crit ni sur la liste de la municipalité de Paris, mon domicile, ni
sur celle du département de la Seine, ni sur la liste générale
arrêtée par les ministres le 29 brumaire an 2..
Notez que celle-ci a été faite par recensement de toutes les listes
particulières de tous les départemens, de toutes les dénonciations
des divers comités des recherches, dont l'un , celui de Paris, pro
vocateur des poursuites faites contre moi.
( 1 ) J'ai leu r réponse en date des 14 décem bre 179a et 7 janvier 1 7 9 3 , annon
çant riífiírj aux m inistres.
( a ) J ’ai u n e ré p o n se d e M a lsh e rb e s en «late d u î a ja n v ie r 1 7 9 3 , <?crite d u T e m p lo
sou* la d ic té e d e L o u is
p lu s ailUL*.
XVI,
q u i d a ig n o it m e .q u alifier l'h om m e d o n t il c’toit le
�( 7 )
Mon père et ma sœur avoient fait valoir d'autres moyens à la
municipalité de Clermont et au département du Puy-de-Dôm e:
inutile de rechercher pourquoi on ne m ’y a voit pas inscrit, il
suffit du fa it que je ne l’étois pas. L ’inscription est un fa it qui
se constate par des registres et listes authentiques ; par conséquent
il ne peut jamais être incertain: o r, il est prouvé par les listes,
par attestât de M . le préfet, par un autre de M . le maire de Cler
m o n t, que je n ’étois inscrit sur aucune liste générale, ni parti
culière, ni supplémentaire, avant le 18 germinal an 2, date de
mon inscription à la municipalité de Clermont.
Je n’ai été inscrit sur la liste départementale que le 7 floréal
suivant.
L ’une et l’autre inscription ont été provoquées par l’espèce de
dénonciation publique, résultante de ce queMad. Aubier a demandé
son divorce comme abandonnée pour cause d’émigration (1).
( 1 ) Madame A ubier a toujours mis tant de franchise dans scs caprices à mon
égard , que je ne peux, pas la soupçonner d ’avoir co n çu , dirigé ce qui s’est pratique
pour Son divorce.
Il étoit si aisé de divorcer le 6 frim aire an a , qu’il devoit lui suffire de m otiver
sa p étitio n , sur l'incom patibilité d’humeur déjh prouvée p a r la séparation depuis
a o ans , et la transaction sur p ro cè s, de 1 7 7 9 , qui régloit tout.
E lle donna sa confiance à quelqu’un qui voulut en faire une occasion de forcer
la m unicipalité de C lerm on t, où se portoit la p étitio n , à m’inscrire sur la liste des
émigrés où je n ’étois pas : à cet e ffe t, sans p arler de l ’incom patibilité , il fonda la
dem ande en divorce , sur la supposition que p a v o is abandonné ma fem m e pour
¿m igrer : il fortifia cette dénonciation par un prétendu acte de n o to rié té , disant
que j’ avois abandonné ma fem m e pour é m ig r e r, quoiqu’il fût notoire à Clennont
que nous étions séparés depuis ao a n s , et que les poursuites du tribunal révo
lutionnaire m’avoient em pêché de revenir a Clerm ont : il y joignit un prétendu
certificat d’adinihistrateur du d ép a rtem en t, disant que j ’étois déjà iu s c r it , quoi
que les listes et registres fissent foi du contraire.
Je suis fondé à d it s que cette pièce est fa u sse , parce qu’aucun des administra
teurs n’a été capable
de certifier un fait dém enti par les actes
authentiques
dont il est dépositaire.
C est cependant sur cela que le divorce f u t prononcé pour f a i t d ém igration e t
d 'in scr ip tio n , le C frim aire au 3 , par É sop e
T ru ch o n ,
ci-devant François*
�Mon père cloit mort le a/j brumaire an 2; par conséquent mes
droits civils et successifs n’avoient alors reçu aucune atteinte; par
conséquent j’ai été saisi dès l’instant même de sa rnort de tout ce
qu'il laissoit.
Supposons que j’en eusse été exclu; j’ai dans mes mains un
testament de mon père, par lequel, en profitant de la faculté
qu’il s’cn étoit réservé par mon contrat de mariage, il a nommé
mon fils aîné son seul et unique héritier, dans le cas où je ne
pourrois pas profiter de son institution en ma faveur.
E tienne , ce sont les term es de Pacte fait en séance publique de la m unicipalité ;
ce qui mit. la m unicipalité dans la nécessité de m’inscrire le 18 germ inal suivant.
Si Mad. A u b ier eût été capable de p areille dénonciation, elle en eût été détournée
par intérêt pour ses enfans et pour elle-m êm e ; car il étoit bien évident que cette
dém arche amenoit mon inscription et la confiscation des biens de mon père , sur les
quels elle avoit 41,000 1. provenant de la vente d’une m aison, rue de la T r e ille , et d’un
bien à Romagnat e tc ., dont le p rix avoit été p lacé par son père chez le m ien, et que cette
dénonciation’ l’exposoit à tous les genres de responsabilité envers moi. A ussi a-t-elle
eu ensuite la sagesse de ne faire aucune poursuite contre moi p ersonnellem ent; elle
s’est fait liquider contre la république par arrêté du d é p a rte m en t, du i 3 fructidor
an 8 ,
pour les 4>>°o° liv .
ci-d e s su s , à quoi se m ontaient toutes scs reprises
quelconques ; elle s’en est p ayée aussitôt par sa mise en possession de C rèvec œ u r , domaine acheté pour ses enfans , sur lequel la transaction de 1779 asseyoit
tout ce qu’elle pourroit jam ais prétendre , m êm e si son divorce étoit ré g u lie r:
cette transaction fut rédigée alors p ar M. Redon son a v o c a t , de l’avis de toute la
fam ille de M ad. A u b ie r , alors m ajeure , qui la sig n a , autorisée par son p ère et par
ju s tic e , et assistée de M. G ro s , représentant sa fam ille.
Par respect pour les principes , et pour que mes enfans ne pussent pas me repro
ch er d’avoir négligé les précautions de sûreté pour la conservation de propriétés
dotales qui lui sont échues depuis son divorce , jo lui ai fait notifier par deux
notaires m* protestation m otivée.
A u re s te , Ici actes sur lesquels M ad. A u b ier s’ est fait liq u id e r, p rouven t que
personnellem ent jo n’ai jamais reçu un sou de sa d o t , ni été mis en possession d ’un
seul héritage.
C ’est dans les mains de Mad. A u b ier qu’est dem euré le, porte-feuille de «on
p è r e , formant toute sa fo rtu n e , lors de sa m o r t, eu mon a b se n ce , parce qu ’il
avoit tout v e n d u , même la succession de scs sœurs
et son m obilier par antici
pation : cela est p rouvé p ar acte public.
D ’autres nctes constatent que depuis 1773 , c est Mad. A ubier qui a t o u c h é tout
revenu , que je suis seul dem eure chargé des trois enfans.
Ainsi
�( 9 )
.
O r , non seulement mon fils aine n ’a jamais ¿té inscrit, mais
même, par décret spécial du 5 germinal an 12 , il a été conservé dans
ses droits. Ce testament réduit ses frères à la légitime de droit.
D ’après ce testament, ce ne seroit ni ma sœur, ni les mineures
Lam onteilhe, ni mon fils de Rioux, qui pourroient profiter de mon
exclusion , si elle pouvoit avoir lie u , ce seroit mon fils aîné.
Je me plais à remarquer que ce testament m ’a été remis par ma
sœur; alors elle n ’écoutoit pas les conseils qui la dirigent en ce
moment.
Si M . et Mad. de St. Mande vouloient me contester la qualité
d ’héritier bénéficiaire de mon p è re , ils devoient prendre qualité
d ’héritier pur et simple; c'est ce dont ils n ’ont pas voulu courir
les risques.
J’étois et je suis le plus ancien créancier de mon père pour des
sommes considérables.
II a laissé entre les mains de mon be au -frè re un long mémoire
écrit et signé de sa main, où il se reconnoit mon débiteur de 80,200!.
C e mémoire 11e peut pas être s u s p e c t , puisque mon père y déclare
l ’avoir fait, parce qu’on lui avoit dit que je voulois révoquer mes
précédentes garanties, et que dans cette crainte il vouloit réunir
tout ce qu’il croyoit pouvoir faire réduire mes droits , accroître
ceux de mon frè re , et dispenser ma sœur de se servir de mon acte
de garantie.
A in si c’est pour donner des ridicules à M ad. A u b ie r , qu’on lui prête d ’avoir dit
que j’ai eu 200,000 liv . d’elle : il est vrai q u e , lors de son m ariage, son père annonçoit que j ’aurois de lu ia o o ,o o o liv . et le double de Mad. de C h azerat; mais, outre
qu il y avoit en cela mémo de 1 exagération , je n en ai jam ais rien reçu que l’hon
n e u r ’de p ayer des dettes , et le plaisir .de lui être utile dans le procès Chazerat.
A u r e s t e , M ad. A u b ier n a probablem ent jam ais lu ce qu’elle a signé contre
moi et contre scs enfans ; car son conseil lui a fait présenter de plus au d istrict,
des déclarations dcnonciativcs contre scs enfans du même genre que contre moi »
heureusem ent qu’on les dédaigna, qu’ ils n’ont jam ais été in scrits, que innsccur leur
obtint certificat de lion in scrip tio n , et que j’ai obtenu pour eu* deux décrets spéciaux,
des 3 frim aire et 5 germ inal an 1 1 , qui m aintiennent leurs droits.
Mais in tcn n éd iaircm en t, elle leu r a occasionné de grandes p o rtes, a retardé leur
rentrée , et leur a fait c o u r ir , sans en
avo ir
l'intention , de grands dangers.
Ii
v
�L e .rapport à lui fait étoit de toute fausseté, puisqu'au contraire,
en toute occasion, j’ai ratifié et renouvelé mes actes de garantie (i).
11 me seroit aisé de prouver que cette prévention l ’a conduit à
près de 20,000 liv. d’erreur à mon préjudice, telle que celle de
m ’imputer sur les capitaux des payemens faits pour intérêts réel
lement dus.‘Mon père se laissoi t gouverner alors par l ’a d u la t i o n ;
je le servois b ie n , lui étois bien soum is, mais je ne savois pas
l ’aduler comme d ’autres.
Il est reconnu que postérieurement à cette reconnoissance de'
80,200 liv., j ’ai emprunté pour mon père , à Paris, et lui ai livré
9,000 liv. par lui employées à achever de solder Sauset ; 'ce qui
porteroit mes créances à 109,000 liv. Si on y
toutes les sommes à moi dues depuis 1 7 9 1 ,
créances à plus de 200,000 liv. , et quiconque
de la qualité d’héritier de mon père, par une
s im p le , deviendrait mon débiteur de tout.
joint les intérêts de
cela porteroit mes
voudroit m ’exclure
acceptation pure et
Si ma sœur avoit conservé quelque doute, ce seroit parce qu’elle
ne se seroit pas donné le temps de lire les papiers de mon père ,
quand elle les fit retirer du lieu où mon père les avoit fait enfouir
par D efforg es, serviteur et ami de la maison; elle les fit jeter par
celui-ci dans la fosse d ’aisance ; elle peut avoir cru qu’il étoit
prudent de cacher au district mes créances , pour être plus libre
dans les démarches qu’alors elle vouloit essayer en son n o m ,
comme elle me le manda, pour me sauver quelque chose.
Plus d'un an après, en 1795, j ’ai'dû penser qu’elle avoit trouvé
( 1 ) Outre les garanties que j’avois données à mon frire c l nia sœur , j avois
ratifié et cautionné la vente faite par mon p o r c , avant ou après mon m ariage, de sept
domaines à A ugerolle ; «le trente journaux de terres et dix-sept journaux de p r is à
M o n t-F erran d , de la maison à Clcrm ont ; des Liens de R io u x , montagne de Lamonteilb e et C licz-Jam bcl. •
Il avoit trouvé les liiens de sa fam ille en saisie réelle , et a tout p ay é par. des
ventes g ra d u elle s; il est reconnu que je n’en ai jamais touché un
so uî
il vouloit
nantir tous intéressés de ma ga ra n tie, crainte que je ne mourusse avant l u i , et que
mes cu faiu ne fussent pas aussi soum is.
_
�(( 1 1
^
1)
dans mon propre secrétaire les papiers qui devoierit justifier toutes
mes créances; en e ffe t, lui ayant demandé si elle avoit sauvé
les papiers de ce secrétaire, elle m ’envoya par M . Barthélém y,
aujourd’hui sénateur, alors négociateur à Basle, une bague que
j ’avois laissée dans le même tiroir, comme preuve, disoit - elle ,
qu?aucun furet n’y avoit mis le nez.
A u reste,- M . et Mad. de St. Mande sont payés de to u t, et
munis de ma garantie: mon frère est m o r t , je suis son seui héri
tier, en vertu de la renonciation de ma sœur à toute succession
collatérale, dont j’ai acquitté le prix. Ainsi il ne peut plus y avoir
lieu à discuter entre eux et moi, sur l’antériorité, le privilège, l ’éten
due de mes créances ; je ne puis en avoir besoin que contre des
étrangers, s’ ils me recherchoient, et j’ ai encore plus qu’il ne faut
pour leur prouver la légitimité de mes créances.
M on frère ayant péri révolutionnairement à L yo n , bien avant
mon inscription, tout ce que je viens de dire quant à la succession
dém on père, s’applique également à celle de mon frère; j ’ai été saisi
de droit de tout , en vertu de la r e n o n c ia tio n de n ia sœur.
Les lois nouvelles, qui ont supprimé les forclusions coutumières,
ont conservé toute leur vigueur aux renonciations conventionnelles :
ainsi nulle difficulté.
J’ajoute, pour ne plus revenir sur cet objet : ma sœur n ’auroit
rien gagné à ne pas être forclose ; le refus de la restitution deé
40,000 li v ., en numéraire ou en lettres de change, trouvées sur
mon frè re, et la confiscation de ses biens, ont fait que le peu de
débris qui ont été sauvés ont été absorbés par ses dettes (1).
2 .e O
bjet
.
Rachat de mes biens.
Sur ce point les détails sont très-importans.
Les biens à moi dévolus par la mort de mon père et mon frère
( 1 ) L es hospices , HIM. Poisson , Chazelède , P e t i t , M ercier, Brufle, etc. , peuvent
X
?
attester avoir été p a y é s , en n um éraire, par ma s œ u r, pour mon co m p te, ou par
moi-m um e, sans qu’un seul ait reçu d’assignats, ni élé renvoyé au grand-livre , tandis
que ceuv qui me critiquent ont p ayé en assignats d ép réciés, quoiqu’ils n’aient pas
éprouve' comme nous confiscation.
B
3
�( 12 )
avant mon inscription, étoient sous le séquestre; j ’étois à Berlin
lorsque M . Barthélémy, négociateur de la paix de Basle, voulut
bien faire passer à ma femme et à ma sœur des lettres par lesquelles
je les priois de s’entendre entre elles et avec moi , pour procurer
la rentrée de mes enfans et la mienne, et sauver notre fortune.
M ad. Aubier répondit aussitôt franchement par un refus.
M a sœur me laissa deux mois sans réponse.
J’allois faire comme d ’autres émigrés en Prusse, accepter les
bons offices de banquiers de Berlin trafiquant en France , d ’y suivre
mes affaires, et de racheter au besoin mes biens, pour mon compte,
lorsque je reçus réponse de ma sœur.
Elle m ’offroit ses services, m ’apprenôit, comme je l’ai d it ,
que son mari ne vouloit avoir aucune relation avec les agens na
tionaux pour les 12,000 liv, à lui dues; me représentoit que si je
donnois mes pouvoirs à ma fe m m e , et que c e l l e - c i rachetât
mes biens , comme elles étoient mal ensemble , elle la renverroit
sur le grand livre: elle m ’ajoutoit tous les détails qu’elle croyoit
les plus- propres à m ’inspirer plus de confiance en elle qu’en ma
fem m e; elle ne mettoit aucune autre condition à son offre de se
charger de mes pleins pouvoirs, que celle d ’être payée en numé
raire des 12,000 liv., reliquat de sa dot.
Je l’acceptai.
Les premiers pouvoirs que je lui ai envoyés étoient confiden
tiels ; la circonstance l’exigeoit : le Code Napoléon a confirmé ce
principe de tous les temps, q u ’ ils peuvent être donnés par lettres;
ils étoient illimités pour toute demande en radiation, rentrée,
réclamation de biens, rachat, au besoin, etc.
Sur ces entrefaites , M ad. Aubier me somma par lettres de lui
renvoyer ses enfans; l’ainé et le troisième étoient avec moi, l'autre
à la Martinique.
Je lui offris de lui envoyer sur le champ le troisième, comme le
plus intelligent et le plus disposé à rentrer aussitôt en France.
J’attendois le passe-port qui m ’avoit été promis à Basle, quand
je reçus une lettre de ma femme qui s’opposoit fortement à ce
�(
*3
)
retour : je l ’ai, elle est d’avril 1795 ; ma femme m ’y faisoit en-*
tendre que mon fils éloit sur la liste , ce qui n ’étoit pas vrai: ma
sœur, qu*e j’avois consultée, en parloit de même.
J’envoyai bientôt après à celle-ci une procuration notariée.
Dans les suites je lui en ai envoyé une légalisée par le ministre
de France à Berlin.
Je le remarque, parce qu'il a\oit ordre de refuser des légalisa
tions aux Français inscrits sur la liste; il me l’accorda, parce qu’il
savoit que le conseil exécutif avoit pensé que je pouvois être classé
parmi les évadés du tribunal révolutionnaire.
M a sœur me manda que M ad. Aubier la tracassoit, en m'observant avec raison, qu’il y avoit entre elles celte différence, que
M ad. Aubier vouloit avoir mes biens pour elle seule, en refusant
de s’engager à rien , pas même envers ses enfans, tandis qu’elle
( ma sœur) ne vouloit rien pour elle que ses 12,000 l i v . , ne vou
loit sauver que pour m oi, ou si je mourois avant d ’être ra yé , pour
mes enfans.
M a s œ u r m e d i s o i t q u ’ a tle n d u q u e je n e p o u v o is p a s s a v o ir c o m m e
e lle c e q u e les c ir c o n s ta n c e s d e m a n d o i e n t , il n e fa llo it é c r ir e à
ma femme et à mes enfans , que dans le sens que ma sœur m ’indiqueroit.
Peu après, mon fils, excité par sa m ère, ayant écrit à ma sœur
sur un ton qui annonçoil qu’elle seroit tracassée si je mourois avant
d ’être rayé, je fis souscrire par chacun de mes trois enfans un
écrit portant qu’ils adhéroient d ’avance à tout ce que ma sœur
auroit fait de concert avec m o i , et acceptation de tout ce qui auroit été réglé entre elle et moi.
L ’espoir d’obtenir mes biens sans les soumissionner fut prolongé
lo n g - te m p s , parce que plusieurs personnes inscrites sûr la liste
après s’étre soustraites à des mandats d’arrêt, obtinrent s u c c e s s iv e
ment leur radiation et la restitution de leurs biens ; les négociateurs
de Haslc voulant bien m ’appuyer, cela d e v o it me réussir.
Mais malheureusement ma famille hasarda , sans mon aveu,
�de dire au département qu’un article secret de Basic m ’accordoit
ma radiation et la restitution de mes biens ; cela fut mandé aux
ministres ; cette supposition les courrouça. Ils repoussèrent les
sollicitations qu’avant ils écoutoient avec indulgence.
M a femme acheva de tout perdreen allantàParis produire partout
l ’acte de divorce prononcé pour fa it d’émigration', en cela elledonnoit un démenti aux notes données en ma iaveur par le ministre
de Prusse appuyé par M . Barthélémy.
En y joignant l’inconséquence de demander, sur le fondement
de mon émigration, la cession gratuite de mes biens, elle occa
sionna l’ordre de les vendre.
M a sœur, avertie par un ami qu’un étranger alloit les soumis
sionner, étant déjà munie de mes pouvoirs illimités, les soumis
sionna sans avoir le temps de me consulter.
J’ai dit en débutant qu’elle avoit déclaré en séance publique
qu’elle achetoit pour moi.
Je le répète avec rcconnoissance, la difficulté des circonstances
augmentait le mérite de sa conduite, quoiqu’aucune loi ne le lui
interdit. A u contraire, la loi romaine, alors en vigueur, dit que
l’achat est un contrat du droit des gens que le banni à perpétuité
peut faire faire par mandataire.
Ce principe n ’a point ¿té abrogé depuis par aucune loi ; la Cour
de cassation l’a reconnu par deux arrêts postérieurs à la publi
cation du Code Napoléon ; l ’article 2 de celui-ci dit en maxime
f o n d a m e n t a le que la loi n ’a point d’effet rét oactif; ainsi quand
011 y trouveroit matière à douter sur cette question, cela seroit
indifférent.
M . Caillard , ministre de France à Berli n , disoit à ce sujet : « Il
» est de l’intérêt politique de la France de le tolérer, pour faire
» rentrer les fonds sortis par les émigrés, ceux qu’ils peuvent gagner
» hors de France, et les rattacher à leur patrie en attendant
» qu’une amnistie les rappelle. »
Et qu’on ne dise pas que cette idée d ’amnistie n’étoit pas encore"
venue , elle étoit déjà venue au moins pour les fugitifs du tribunal
�( i5 )
révolutionnaire : c’est ce qui résulte d’une réponse du Directoire,
me concernant, faite à M. Sandoz en mars 17 9 6 ; j ’en ai la
preuve écrite.
J’avois ignoré l’urgence du rachat; j’avoue que dans le premier
instant je crus que ma sœur s’étoit trop hâtée; mais je n ’en fus
pas moins empressé à avouer, a ratifier ce qu’elle avoit fait ; je
lui envoyai une nouvelle procuration, non seulement pour la ges
tion , comme mon prête-nom, mais encore pour les reventes par
tielles nécessaires pour se libérer, tant des emprunts faits pour
l ’achat que pour diverses dettes , notamment pour payer à son
mari les 12,000 liv. à lui dues, et à ma tante Ducrozet ce qui lui
étoit encore du par mon père, etc. etc.
L e retard de la soumission, occasionné par nos espérances, nous
coûta de payer le quart en numéraire et le reste en mandats. Nous
avions cru bien faire.
M a sœur annonça aussitôt publiquement mes pouvoirs; elle
m e m a n d a q u 'il n’y a v o it p a s u n d e c e u x à q u i e lle r e v e n d o it , q u i
e û t a c h e té , s ’il n ’a v o it p as su q u e c ’é lo it p o u r m o n c o m p te .
M . D e b e r t , ju g e d e p a i x , é t a n t en m a r c h é d ’u n e te rre , d e m a n d a
q u e je lu i é c riv is se q u e je F a p p r o u v o is ; je le fis.
M . Gorce, notaire à Monl-Ferrand , chargé des ventes , ayant
fait marché pour lui-même de 4° œuvres de vignes , voulut que
l’acte notarié fût différé jusqu'à mon retour, afin que je le signasse;
cela s’est fait.
Enfin ma sœur me mandoit par une lettre que j’ai encore, « Si
» les gens de Sauzet croyoient que je n ’ai pas acheté pour toi,
» ils me chasseroient. »
J'ai dit ci-devant que j’avois emprunté pour mon père et mes
enfans ; toutes les fois qu’il en a été question entre ma sœur et
m oi, elle ni a répondu : « Comme c est pour toi seul que j ’ai a ch e té ,
» comme.je ne suis que ton prête-nom, ton homme d’affaires pour
v tes biens, c’est à toi seul à renouveler les effets des dettes dont tu
» voudras que les biens soient chargés. »
C est sur la ioi de c e s diverses p ro m e s se s que j'ai renouvelé seul
�les engagemens des emprunts faits par mon p è re , ou de ceux faits
par mes enfans.
Si j’avois douté de ma sœ ur, jemeserois bien gardé de les signer.
M . de S a n d o z , ministre du roi de Prusse à Paris , ayant obtenu
ma rentrée sous surveillance préparatoirement à ma radiation ,
je suis arrivé à Clermont en fin de mars 1801.
T o u t aussitôt chacun des acquéreurs a voulu que sans attendre
ma radiation, je donne les ratifications promises par ma sœur de
ma part; je lésai données , à mesure que ma sœur me les proposoit,
et en sa présence.
M a sœur voulut aussi que sans attendre ma radiation, un acte
constatât qu’elle avoit rendu le compte qu’elle reconnoissoit devoir
comme le doit tout mandataire, pour tout ce qu’elle avoit acheté,
revendu , géré pour mon compte.
Il a été signé , le 8 mai 1801 , entre elle et m o i , en présence
de mon fils Lamonteilhe et de quatre parens ou amis. Elle y reconnoit avoir acheté mes biens pour me les conserver.
Il finit par une promesse de faire la transmission définitive de
t o u t , dès que je serai rayé.
La joie de me retrouver dans ma patrie, au sein de ma famille,
après tant de crises, achevoit d'effacer de mon souvenir tout ce
(pii avoit pu jadis m’y mécontenter: j ’avois toujours été , sans
rancune, disposé à chercher l’interprétation la plus aisée à excuser,
croyant aux bonnes intentions de mes proches dès qu’il y avoit
p o s s ib ilit é de* me faire illusion, parce queje suisné confiant, aimant.
Cela encouragea mon fils Lamonteilhe à m'annoncer son Incli
nation pour ma nièce Cham pflour, V e Bullion , et qu elle partageoit scs sentimens: ma nièce nie ravoua. Ils me proposèrent de
consentir à leur union; ma sœ ur, mes autres parens me pres
sèrent de donner cette grande preuve d ’une parfaite réconciliation.
La douceur de caractère que j’avois toujours connue dans ma
nièce, sa conduite avec son premier mari et ses parens, l’impres
sion qu'avoil laissée dans mon cœur les vertus, les belles qualités
de ma respectablemere , née Chanipfiour, celles de M ad..Blau, et de
tant
�( *7 )
tant d’autres demoiselles Champflour qui avoient fait le bonheur
des maisons où elles étoient entrées, me décidèrent en faveur de
ma nièce Champflour, V e Bullion.
Je promis tous les avantages qui seroient à ma disposition ; je
n ’étois pas encore rayé : ma radiation étoit entravée, parce qu’oa
avoit mis à ma charge, devant la commission des émigrés, des
imprudences graves d’un de mes parens , de même nom ,
prénom ( i ) , de même commune et même département, mon
filleul , en écartant son surnom particulier j il étoit absent.
Cela seul m ’avoit fait suspendre mes démarches : si je ne les eusse
pas suspendues, j’aurois eu ma radiation avant le mariage.
Cependant mon fils Lamonteilhe et sa future craignoient que
je ne mourusse avant d’être rayé, ce qui les auroit privés d ’un don
régulier des avantages.
Je consentis, en prévoyance de ce cas, à nantir mon fils L a
monteilhe du bien de Sauset, en considération de ce mariage, et
et à le fix e r sur sa tête.
J ’avois annonce ce projet par une clause de l’acte du 8 mai précé
dent ( époque où on m ’avoit déjà proposé ce m a r i a g e ) ; elle portoit
q u e la transmission définitivedecedontma sœurdemeuroit ma d é p o
sitaire, ne pouvoit avoir lieu qu’après ma radiation : je me pro
posons de fix e r les principales propriétés sur la tête de Lamon
teilhe , si avant ma radiation il trouvoit un mariage qui me fût
agréable.
C ’est moi qu i, à la suite de quelques conférences avec M . Pages,
avocat de M . Cham pflour, ai rédigé l’acte de l’assemblée de famille,
sous seing-privé, en date du 10 prairial an y , par.lequel, en ma
présence et de mon consentement, ma sœ u r, mon prête-nom et
( 0 On lie peut pas clouter de cela j ¡1 y a eu audition de 18 témoins à la préfecture
do I’ uris pour écarter l'iden tité ; et lu i-m im e, à son reto u r, a signé chez L asteyras,
notaire , I acte de notoriété de non identité. Il eut été très-com prom is, si je ne lui
eusse pas donne le temps de rentrer , de se mettre en règle avant l'exam en «le >na
demande eu radiation: on verra ensuite que cette com plaisance est la source de ce
procès.
c
�mon chargé de pouvoirs, a subrogé mon fils Lamonteilhe quant
à Sauset.
Par une clause préparatoire d'un partage définitif entre lui et
ses frcres, Lamonteilhe y délaisse à ses frères, en retour de lot
anticipé , son tiers dans le domaine de Crèvecœur, acheté sous le
nom de mes trois enfans, mais payé par moi. Il y est stipulé que
chacun des deux frères recevra, à ma mort, un préciput de quinze
mille livres à prendre tant sur ce qui leur viendra de m oi, que de
ce qui viendroit de toute autre source , du côté paternel, de quel
que branche que ce soit.
L e vague de cette expression fut convenu en prévoyance de
ma mort avant que je fusse r a y é , pour que ce préciput s’exécu
tât sur ce dont ma sœur demeureroit encore mon prèle-nom.
Cet acte est signé par vingt-cinq membres de la famille et deux
jurisconsultes.
C ’est M . Pages qui a rédigé le contrat de mariage , par lequel,
sans autre litre que la permission que je lui en avois donnée la veille,
mon fils s’est constitué le bien de Sauset.
L a délicatesse de M . Pagès assure qu’il ne vouloit pas plus que
moi frauder la légitime de mes autres enfans; il connoissoit les
lois mieux que m o i, mais il étoit comme moi induit en erreur
sur le fait de la valeur des objets composant la masse, et tout le
monde disoit alors que Sauset étoit loin de valoir moitié de la masse.
C ’est M . Cosle , homme d’affaires de M . Champflour, q u i ,
guidé par celui-ci, a rédigé la subrogation notariée du 8 fructidor,
trois mois après le mariage : on l’a obtenue de moi en me disant
que les colons faisoient difficulté de reconnojlre mon fils pour
leur maître; qu’on ne pouvoit pas se s e r v ir de l'acte sous seing
privé pour les y forcer. Je fis quelques difficultés sur ce qu’on avoit.
supprimé la clause accordant à chacun de mes autres enfans i 5 ,ooo
livres préciput sur le reste do mes biens : on l’avoit remplacé
par une clause par laquelle mon fils renonçoit à ma succession
et à toulcsuccession paternelle. On inc dit que c’éloit pour épargner
des droits , et on m'offrit une contre-lettre également rédigée par
�M . Coste, guidé par M . Champflour, portant que cette subroga
tion n’étoit qu’une simple ratification de l’acte de famille.
En m ’observant qu’il y avoit dans le reste plus qu’il ne falloit
pour la légitime des autres frères, que la loi veilloit pour eux , on
obtint à force d’instances ma signature; cela se passa dans la
chambre de M. d ’Orcières, devant lui; M . Duranquet-Montluc
y a assisté à une partie des conférences.
La conduite de Mad. Lamonleilhe avec son mari a justifié la
bonne opinion que j’avois de son caractere.
Sous beaucoup d'autres rapports , les espérances, les assurances
que m ’avoit données sa fam ille, n’ont pas été remplies : je m ’ex
p liq u e r a i davantage quand on le voudra.
Pour moi, je suis coupable envers mes autres enfans; mais c’est
seulement pour avoir eu trop de confiance dans le tableau esti
m atif, en actif et passif, de ce qui m'avoit été sauvé, qui me fut
fait par ma famille, plus spécialement par ma sœur. Je connoissois
d ’autant moins les biens, que mon père avoit tout régi sans permettre
que je m ’en mêlasse, et que Ja révolution avoit renversé les notions
imparfaites que j ’a v o is pu a v o ir.
Dans ce tableau, Sauset étoit estimé 60,000 liv ., tandis qu’il
vaut plus du double.
Les liquidations en divers articles considérables, à nous dues
par l ’É t a t , que je destinois partie à mes autres en fa n s, partie à
payer les dettes, y étoient présentées de manière à me persuader
qu’elles iroient à 80,000 liv., et présentées comme assurées, tan
dis qu’après le mariage il ne s’est trouvé en règle qu’un seul petit
article qui a fait 1900 liv.
L e passif y étoit extrêmement rabaissé, dissimulé.
Enfin, jugeant des sentimensde ma famille par les miens, j’avois
cru qu’en supposant qu'il y eût des erreurs , mes enfans s’en fer'oicnt
amiablement raison lors d'un partage définitif.
Je croyois encore à la solidité des liquidations, et j ’élois encore
dans l’erreur sur la valeur de Sauset, lorsque par sous-seing privé
du 18 prairial an 9 , je déchargeai Lamonteilhe de la dette de i 5, 5oo
C 2
�liv. restée à la charge de Sauset par l’acte de mai i 8 o r ,d e lui signé,
commeprovenant de l'emprunt fait pour l'achatde Sauset, etlorsque
par autre sous-seing privé avec ma sœur et l u i , du 26 messidor an
9 , j’en chargeai le verger entre le s deux villes, demeuré sur la tête
de ma sœur comme mon prête-nom; enfin, lorsque lassé d’être
tourmenté par mon troisième fils pour vendre le verger, et em
barrassé de ce que ma sœur disoit qu’elle étôit prête à le faire si je
l’autorisois, je Assigner, le 5 fructidor an 9, une convention portant
qu’il ne seroit point aliéné, ni par moi, ni par mes e n fa n s, si je
le leur partageois (1).
L e mécontentement de mes autres enfans est fondé , parce que
je me suis mis hors d’état de pouvoir les aider autant que je voudrois;mais il me semble que j ’ai fa it, dès 1802, tout ce qui devoit
m ’excuser, en consacrant aux dettes qui devoient rester sur le ver
ger qu’ils doivent avoir à ma mort , non seulement tous les reli
quats de vente, de rentrée et tout le revenu de ce verger, dont
je devois jouir seul pendant ma vie, mais encore les petites réserves
viagères destinées à ma propre subsistance, établies sur Sauset, et
quelques reliquat d’affaires.
M on amnistie est du 23 fructidor an 10. Avec la permissiondu Ier
C o n su l, je suis retourné , en novembre suivant , en Prusse, où la
bonté du roi me conservoit un état honorable et des ressources.
J’y avois de plus des espérances de fortune pour mes autres
enfans, qui pouvoient me mettre dans le cas non-seulement de
confirmer le don de Sauset en entier en faveur de Lam onteilhe,
mais peut-être d ’y ajouter.
Avant mon départ, ma sœur à qui j ’avois donné de nouveaux
pouvoirs ( en vertu desquels elle avoit géré mes affaires pendant
mon séjour à Paris, de novembre 1801 à novembre 1802 ) , me
rendit un nouveau compte , toujours disant qu’elle n ’étoit que mon
prête-nom , qu’il lui i'alloit un apurement de compte : il a été
( 1 ) 11 faut garder du pain m algré eux aux eufaiis quî veulent tout faire vendre.
�21 )
clos par une décharge que j’ai donnée en marge de celui quVUem ’aToit rendu le 8 mai 1801 : je lui ai donné de nouveaux pouvoirs
pour administrer pendant mon absence.
Pendant mon séjour à Berlin, j'ai été dans le cas de m ’aperce
voir qu’on la travailloit contre moi ; les absens ont tort : l’art. 17 du
Code avoit donné lieud’espérer de pouvoir attaquer mesdroits. Pour
y remédier j’ai obtenu d e S .M . l’Empereurun décret, en datedu 10
brumaire an i4> q u i, en me permettant de garder la place de
chambellan du roi de Prusse , me maintenoit dans tous mes droits
civils et dans ma qualité de Français : je l’envoyai â ma sœur pour
le présenter à M . le préfet; elle s’y refusa : ce refus annonçoit le
plus grand changement dans ses dispositions pour moi : au bout
de 6 mois de prières inutiles , j'eus recours à M . de Trémioles qui
s’en acquitta.
Cependant elle a continué avec zèle la gestion de mes affaires ,
m ’envoyant exactement les rentrées: elleétoit devenue plus minu
tieuse pour les quittances; mais, en cela m ê m e , elle confirmoit
Ce qu’elle mandoit e n c o r e , q u ’e lle ctoit d d p o sita ir e d e m e s pro
priétés, mon homme d affaires, expression qu’elle employoit ,
sans quoi je ne me la permettrois pas.
L ’année précédente, j ’avois obtenu pareil décret pour chacun
de mes enfans.
Toutes nos liquidations ont péri parl’çffet de deux décrets géné
raux de 1808 et 1809, parce que la réclamation n’en avoit pas
été introduite avant l'an cinq. Ce m otif de forclusion n ’avoit pas
encore été publié lors du mariage : ce n ’est pas par ma faute,
puisque je n ’ai eu la permission de revenir en France qu’en l’an
9 ; et si' la faute pouvoit en être imputée à quelqu’un , depuis le
mariage, ce seroit à Lamonteilhe, que l’acte d é n ia i 1801 char. geoit des affaires communes.
A in s i a péri par le fait du Gouvernement, depuis le mariage
de Lam onteilhe, ce qui ctoit destiné à la légitime de scs frères,
ou à payer 1GS dettes.
J’avois compté sur cette ressource pour les 30,000 l i v . , reliquat
�des emprunts faits pour mon père et mes enfans , dont je me
suis chargé, savoir, i 5 , 5oo l i v . , dette pour ç auset déjà expliquée,
et 6,5oo liv. , reste d ’emprunts faits pour les affaires et les pro
priétés en commun de mes trois enfans (i).
Excessivement embarrassé, j'ai sollicité du porteur des effets
un arrangement; il s'y est prêté, parce qu il a vu que mon em
barras ne venoit pas de ma faute. H m'a donné les dehiis les plus
commodes , en morcelant et graduant par année le rembourse
ment du capital, moyennant l’intérêt au taux du commerce, à 6
pour i o o , décroissant à mesure des payemens.
J’ai promis de justifier dans l’année de propriétés le garantis
sant contre le cas de ma mort avant d ’avoir tout payé; c’est ce
qui me presse d ’agir.
Intermédiairement, ma sœ ur, comme mon fondé de pouvoir,
a emprunté 5 ,oooliv. , qu’elle a prêtées à Mad. Aubier: j’en paye
3 oo liv. rente viagère, sur la tête de Mlle. Debar et de sa nièce.
Pour faire face à tout cela , j’ai été obligé de retirer 5 oo liv.
par an sur les Soo que j ’avois attribuées à mon troisième fils.
Par lettre de novembre 180g , ma sœur qui avoit paru jusquelà préférer de garder la gestion de mes affaires et ma propriété
sur sa tê te , m ’a annoncé qu’elle vouloit en être déchargée. Elle
a ajouté qu'elle sauroit m ’y obliger.
Je ne peux pas deviner la cause de ce ton de menace ; c ’étoit
m ’imposer elle-même l’obligation de lui demander la transmission
définitive promise par l’acte de mai 1801. Je l’ai fait ; elle l’a
refusée avec humeur.
On a vu dans la première partie qu’à l’occasion de la quittance
de 13,000 liv. que je demandois à son mari , on avoit fait insérer
dans le projet que celui-ci m ’ e n v o y a en juin 1790, la clause que
je recopie ici :
( 1 ) Je n’y com prends pas 5 , 5o<> liv. d’emprunt fait pour l’ctnlilioscment de mon
fil» a în d , par mon canal et avec ma signature , parce que c’est sa dette p articu lière,
il devroit la rapporter à la masse , si je p arois pour lui comme sa caution.
�Emmanuel Aubier contracte Vobligation de ne rien répéter
de sa sœur pour la gestion et administration qu’elle a fa ite
pour lui , ni a u t r e m e n t .
II y a une singulière contradiction entre l’aveu qu’elle a géré pour
m o i , et cette exigence d ’une renonciation générale à rien répéter de
tout ce dont elle étoit encore dépositaire pour moi. On est bien
plus frappé de cette contradiction , quand on lit quelques lignes
plus bas , dans ce projet écrit de la main de M . de St. M a n d e , que
ma sœur a tout fait dans les vues et la seule intention de sa u v er,
pour mon compte, les débris de ma fortune etd ecelled e mon frère;
la proposition de celte renonciation est tellement en contradiction
avec la noblesse de son caractère , avec les engagemens envers moi,
dont elle s’est toujours fait gloire .et mérite auprès de tous nos
compatriotes, qu’il m’ a été même impossible de croire que cela
fut sérieux.
11 étoit évident que ma sœur avoit été subjuguée par quel
qu’un qui vouloit me dépouiller. Je lui fis des représentations : pour
toute réponse , ma soeur me fait écrire par son mari de. prendre
les voies judiciaires ; il a jo u lo it t r è s - p o lim e n t cju’c l le le v e r r o it sans
a ig r e u r.
J’ai rappelé dans ma citation en conciliation devant le juge de
paix , que je ne prenois la voie judiciaire que parce que ma sœur
et mon beau-frère l'exigeoien t.
M . F aure, fondé de procuration spéciale, signée de M . et
M ad. St. M an d e, a comparu ; sans nier les faits , en se bornant
à dire que plusieurs étaient inutiles , sans rien opposer à la de
mande déduite , il a déclaré, au nom des deux , qu’il n’y avoit
pas lieu à conciliation.
On devoit croire que M . de St. M a n d e , disant qu’il n ’y avoit
pas lieu à conciliation, autoriseroit sa femme à plaider; il a refusé.
IVlon conseil a cru qu’en cela leur conseil vouloit se ménager le
moyen de revenir, au nom du m ari, contre le jugement que j ’aurois obtenu.
L a question de savoir si j’étois héritier de mon père, ou si
�c ’étoit sa fem m e, ne pouvoit pas se juger sans lui , puisqu’il
s’agissoit d'un droit dotal ; de plus , c ’étoit à lui à nie donner
quittance des 12,000 liv. reliquat de dot que je lui avois fait
payer. En conséquence j’ai demandé qu’il assistât personnellement
dans la cause ; et cela a été o r d o n n é .
J’ai dit en débutant qu’après des instances infinies , j’avois
obtenu de ma sœur de nommer un médiateur , et que le 2S juillet
dernier j’avois signé une tr a n s a c tio n rédigée par ce médiateur.
Par cet acte je ratifiois tout ce que ma sœur avoit fait en
vertu de mes pouvoirs , et spécialement la subrogation de Sauset
en faveur de mes petites-filles. Cela renvoyoit après ma mort la
question de savoir si Sauset excède ce dont je peux disposer, si
elles devront quelque retour. Ainsi cet acte leur confirmoit impli
citement la jouissance jusqu'à ma mort ; ma sœur ne l’en a pas
moins refusé.
Je dois répondre ici aux diverses objections qu’on m ’a faites, en
son n o m , dans le cours de mes tentatives pour obtenir un arran
gement amiable.
On a débuté par me dire que le casuiste consulté (1) par M . et
Mad. de St. Mande , pensoit qu’il suffit pour l’acquit de leur cons
cience, i°. que Mad. de St. Mande déclare par son testament être
payée de sa dot; 2°. qu’elle dispose en ma faveur, par ce testament,
de la propriété du verger qui est encore sur sa tète.
Ainsi selon ce soi-disant casuiste, ma sœur auroit pu acheter pour
mon com pte, le reconnoître par divers actes postérieurs, promettre
par .celui de mai 1801 de me transmettre dès que je serai r a y é ,
et cependant à l ’aide d’une restriction mentale, se réserver de
no me rien rendre qu’après sa mort.
Mais ma sœur n’a que £7 ans , j’en al 63 ; elle est d’un tem-
( 1 ) Ma soumission à lV glisc et mon respect pour scs m inislrcs sont connus : les
casuistcs en sont l’clite; mais je suis l)tcn convaincu que celui •, q„| <m a (]onn(r cc
titre dans cette affaire , n a pas cc caractère : au,m oins est-il certain qu’il n’est pas
l ’clùvc tic notre digne e v iq u e ni de son prédécesseur.
pérament
�( ^5 )
pérament bien sain ; je dois, selon l’ordre de la nature, mourir
avant elle : en conséquence il ne me sera jamais rien rendu.
Ainsi selon ce casuiste , c'est à la femme et non au mari à
donner quittance de la dot ; car il n ’offre ni quittance ni testa
ment du m a r i, qui est aussi plus jeune que moi.
Ainsi quand ma sœur a voulu que je renouvelasse seul les
lettres de change ou engagcmcns de mon père et de mes enfans, elle
a voulu , par restriction mentale, que je n ’eusse jamais de quoi
les payer.
Mais avec de pareilles restrictions mentales , il ne falloit pas
faire écrire aux créanciers que si je mourois avant d ’être ra yé ,
on ne payeroit jamais. J’ai quelques-unes des lettres; c ’est par
ménagement que je ne nomme pas ceux qui les ont écrites.
C e que j'ai déjà d i t , prouve combien j'étois confiant dans les pa
roles de ma sœur ; mais ce que je viens de dire des restrictions
mentales du casuiste qui la dirige, me permet de demander, sans
lui manquer de respect, qui garantit, à ceux avec qui j’ai des affaires
à régler, l ’existence d'un te s ta m e n t qui a été aussi quelquefois pro
mis à c h a c u n de mes enfans, parce que l ’o n gouverne les hommes
avec des espérances. Où est-il? qui est - ce qui garantit que s'il
existe, i lne sera pas révoqué? Un père de famille, chargé d ’engagemens pour sa fam ille, peut-il présenter à personne pour garant
l ’espoir d ’un testament, quand tant de faits, tant d ’actes positifs
sont méconnus par le soi-disant casuiste qui dirige celle au nom
de qui on promet le testament ?
Et pourquoi veut - on faire disposer du verger par un testament
de ma sœur? C ’est pour substituer à la vérité qu’elle avoit acheté
pour mon compte , la supposition qu elle a acheté pour son propre
compte. Voyons à quoi cette supposition mène? i°. A ce que la
disposition par testament soit caduque ; car la valeur du verger
excède ce dont la loi lui permet la disposition.
a . A rendre la subrogation de Sauset également c a d u q u e ; car
elle excède bien davantage ce dont Mad. de St. Mande pourroit
D
�disposer. Elle ne sera pas seulement réductible, elle sera totale
ment nulle ; car si en soumissionnant Sauset, elle en est devenue
propriétaire pour son compte , Sauset est devenu à l’instant même
bien dotal, en vertu de son contrat de mariage, qui ne lui permet
poiiit d ’extra-dolal , et par-là il est devenu inaliénable. Mad. de
St. Mande n’ auroit pas pu en disposer même avec le concours
de son m a r i, à plus forte raison sans le concours du m ari, qui
n ’a point signe cette subrogation.
Rappelons ici que M . de St. Mande a voulu que sa femme, ma
sœur, agisse seule dans l’achat, les reventes, la subrogation , pré
cisément parce qu’il a voulu qu’elle ne les fit que comme chargée
de mes pouvoirs, et pour mon compte. Remarquons q u e , pour
écarter tout soupçon , il a poussé le scrupule jusqu’à ne vouloir
elre té m o in d ’a u c u n des actes d’achat, revente, transaction, compte ,
décharge, etc.; d a n s le principe il déclaroit ne vouloir paroitre que
pour loucher les 12,000 l i v . , et en d o n n e r q u it t a n c e ; p a rle z à luimême , il dira que c’est encore ce qu’il v e u t ; s’il a différé cette
quittance , s’il préfère q u ’elle soit prononcée par jugem ent, c ’est
que lecasuiste qu’on fait parler, a alarmé sa conscience, en élevant
des questions qu’il ne sait pas lui expliquer.
C e rte s, c ’est un singulier casuiste que celui qui a pensé qu ’en
conscience M . de St. Mande ne devoit pas profiter ni souffrir que
sa femme profitât de ma dépouille; qui décida alors qu’elle devoit,
en conscience , acheter ma dépouille pour mon compte , et q u i,
après m ’avoir empêché, par de telles promesses, de prendre un
autre fondé de pouvoirs, veut aujourd’hui que ma sœur ne puisse
pas reconnoilre avoir acheté pour mon compte, et que M . de St.
Mande 11c puisse pas souffrir q u ’e lle me rende à ce titre.
Je ne ferois pas de cet homine-lù un instituteur de la jeunesse.
Embarrassé de la probité de M . de St. M a n d e , qui au fond
veut qu’on re n d e , et ne permet de disputer sur la manière que
parce qu’il croit ne pas la com prendre, on m ’a proposé une
vente simulée du verger , moyennant un prix sim ulé, dont ma
�'
(v)
^
sœur donneroit une quittance sim ulée, avec une contre - lettre
portant que le payement n ’est que simule'.
Mais d ’abord , c'est un mensonge, de plus un mensonge inu
tile; car trente actes précédons le dém entent, de même que tous
les fuils dont on ne peut plus faire disparoitre les preuves.
C ’ est un mensonge dangeieux pour mes petites fdles ; car si
vous supposez que ma sœur a acheté pour son compte, le Sauset est
devenu aussitôt dotal comme le verger, et par conséquent inalié
nable , même avec le consentement de son mari, q u i , dans le fait,
n ’a pas concouru à la subrogation de Sauset. Enfin , avec cette sup
position on mettroit les choses au point que ma sœur ne pourroit
pas , même par testament, rendre à la subrogation de Sauset la
validité que ce système anéantiroit irrévocablement, sans possibi
lité d ’y trouver remède.
Vainement on croit pouvoir y remédier, en faisant intervenir
la garantie ou une ratification anticipée des enfans de ma sœur:
si on suppose qu’elle a acquis pour son propre compte au lieu
du mien, le Code détruit d ’a v a n c e l e consentement donné par
les e n f a n s pour l’aliénation de ce bien devenu dotal à leur m ère,
de même que pour étendre sa faculté de disposer.
C r o it- o n que le tuteur d e là mineure, petile-fillede ma sœur,
veuille violer ses devoirs ? c’est un homme d ’honneur qui respecte
la vérité, et qui ne voudroit point participer à une fraude, même
en faveur de son propre enfant.
Si je ne consultois que mon propre intérêt, celte manière plus
expéditive de me faire délivrer le verger auroitpeu d’inconvénient
pour moi ; mais les faits et les actes passés la rendent impossible ;
de plus le projet qui m ’a été proposé éloit plein de clauses astu
cieuses , très-dangereuses pour mes antres enfans.
L'anarchie condamna beaucoup d’honnêles gens à simuler des
actes pour lui arracher ce qu’elle vouloit d é v o r e r : tous les admi
nistrateurs honnêtes aidoient à y parvenir. Onsimuloit tout alors :
on faisoit publiquement serment aux professeurs de licence et
d impiété .qui se croyoient des dieux , de faire ce qu on savoil con-
D 2
�traire à la volonté de Dieu ; on juroil tout Las le contraire
dans le fond de son cœur ; mais ces horribles temps sont passés. Si
nous avions été forcés d’user précédemment de quelques simu
lations, ce seroil l’instant de les effacer et de révéler toute la véri
té: o r , ici la vérité est que ma sœur a acheté pour mon compte;
elle doit le déclarer; le soi-disant casuiste lui fera-t-il affirmer le
contraire? Je peux croire qu’il le lui conseillera; car, dans'ses
instructions par é crit, on lisoit : Mad. de St. Mande n est pas
obl'gée de dire pour le compte de qui elle a acheté. Mais si elle
a voit acheté pour un autre que m o i, elle ne pourroit pas, en cons
cien ce, me vendre, surtout pour un prix sim ulé, avec quittance
simulée , car elle n’auroit pas même ce prix à offrir à l ’autre.
M a sœur est incapable d’affirmer, quand même le so i-d isan t
casuiste lui promettroit de l’absoudre.
Il a p e u r d e c e r e f u s , il se r e to u r n e .
M a sœur pourroit b ie n , dit-il, déclarer qu’elle a acheté pour
moi et mes enfans , indéfiniment, collectivement; on veut con
clure de ce système que je n ’aurois eu droit qu'à un quart.
M ais, i°. ce subterfuge ne peut pas détruire tous les actes antécédens, notamment celui de mai 1801 , et i 5 o lettres de ma sœur
constatant qu’elle a acheté pour moi seul ;
2°. La subrogation passée sans mes autres deux en fa n s, n ’au
roit pas pu les dépouiller du quart que ce système altribueroit
à chacun deux dès l’instant même de l’achat; et remarquez bien
que ce quart pour chacun est précisément ce que le Code Napo
léon leur attribue dans ma succession, dans le cas du don absolu
de ma part de tous les avantages dont la loi me p e r m e t la dispo
sition. C e code est précis sur cela ; il p r o s c r it tout moyen indirect
de s’y soustraire, même les ventes.
D e qui les mineures Lamonteilhe pourroient-elles tenir le quart
auquel ce système me réduiroit? de moi. Quel seroit leur titre ?
mon consentement à la subrogation préparatoire du don d’avan
tages, que j’ai promis d’effectuer dès que je scrois ra y é , par une
transmission définitive que l’acte de mai 1801 renvoie à cette
époque.
�( 29 )
_
Supposons que je me prèle à toutes les fantaisies du soi-disant
casuistede ma sœur, que jesouffrepatiemmentqu’ilmedéclaremort
civilement ; que sa volonté soit plus forte que l’arrêté du Gou
vernement, qui m ’a réintégré dans mes droits , que le décret spécial
de PEmpereur , qui me les a confirmés.
11 s’ensuivroit que ma sœur a été le prête-nom de mes trois
enfans, seulement collectivement; mais ils auroient un droit égal ;
car aucun d’eux n ’est indiqué pour avoir la préférence, et ma sœur,
ne s’est réservé par aucun acte le droit de choisir : au contraire
Pacte de mai 1801, signé par Lam onteilhe, bien connu de toute
la famille Champilour avant le mariage, les appelle tous trois à
me remplacer.
Alors la subrogation de Sauset ne vaudra , en faveur de mes
petites-filles, que pour un tiers , les autres deux tiers appartiendront
déjà, en pleine propriété, à mes autres deux enfans.
Pour m o i , en voyant tant de dangers pour mes petites-filles,
je suis tenté de croire que le conseil secret tend des pièges à Mad.
Lamonteilhe comme à m o i, sans q u e M . et Mad. de S t . Mande
aient tout son secret ; il sème pour la chicane.
L ors du mariage de Lamonteilhe, celui-ci et ses amis Irouvoient
fort avantageux que le retard de ma radiation retardât ces arrangemens définitifs, parce que la loi transitoire d ’alors ne me laissoit pas
autant de liberté d ’élendre ce don , qu’il en étoit annoncé par
le projet du Code Napoléon connu dès-lors.
Les futurs , plus occupés de leurs sentimens que des formes du
don que je leur avois prom is, nous tourmentoient pour hâter la
célébration du mariage. On multiplia, on varia les actes et les
clauses préparatoires : de là une grande différence entre l’acte de
famille et le contrat de mariage; le premier daté de la v e ille , le
second du jour même de leur signature , quoique la signature des
deux ait eu lieu en même séance, dans la chambre de ma sœur.
D e là v ie n t q u e la s u b r o g a tio n n o t a r i é e , r e ç u e p a r Coste,
n o t a i r e , p a r lu i r é d ig é e so u s la d ir e c tio n d e M . C h a m p il o u r , d o n t
il e t o it 1 h o m m e d ’a i t a i r e s , s ig n é e tro is m o is a p rès la c é lé b r a tio n ,
d if i è r e si fo r t d es d e u x p r e m ie r s a c t e s .
�D e là vient que la contre-lettre du même jour, rédigée parCoste,
guidé par M . Champflour, diffère encore de la subrogation , quoi
que signéeau même instant : on ne savoit pascequ’on pouvoit füire;
on alloità tâtons, faisant la version en plusieurs façons, en atten
dant le thème définitif.
Et qu’on y prenne bien garde, en variant à chaque instant de
système sur leur interprétation, on se conduit à une autre question
fort dangereuse pour mes petites-filles.
En e f f e t , ces actes n ’o n t aucune des clauses expressives de dona
tion prescrites pour la validité d ’une donation ; par conséquent
si je mourois avant d ’avoir régularisé, en faveur de mes petitesfilles , le don d ’avantages dont la loi me permet la disposition ,
mes autres enfans seroient fondés à dire que ces subrogations
variées n’ont transmis à leur frère que le caractère que ma sœur
avoit relativement à moi. Quel étoit ce caractère? l’acte de mai
1801 l’a bien déclaré , fixé : celui de dépositaire d’un objet acheté
pour mon compte; d’où ils conclueroientque léur frère n ’a transmis
à ses filles, leurs nièces, que le titre de dépositaires , en attendant
la
ne
ce
de
transmission définitive que l'acte de mai 1801 avoit déclaré
pouvoir avoir lieu qu’après ma radiation. Ils arguëroient de
que Lamonteiîhe, requis par m o i , d ’abord après ma radiation ,
traiter de cet arrangement définitif, le refusa; ils diroient
donc que ses filles ne sont encore que dépositaires.
M . Champflour prévoyoit c e la , et que ces actes ne donnoient
point une sûreté définitive, quand , six mois après le mariage, il
me fit témoigner par un ami commun, M . d ’Orcières, son inquié
tude : j’envoyai aussitôt à M . Champflour un écrit, assurant que
je régnlariscrois le don des avantages, d ’abord après ma radiation.
J’ai sa réponse; il me remercie de mes sentimens pour sa fille.
11 n'y témoigne plus qu’une seule inquiétude, celle que mon fils
n ’ait pas un jour 1 5o,000 üv. de fortune, soit paternelle, soit mater
nelle, ainsi qu’il l’a voit espéré.
Eh bien! malgré la perte des 80,000 liv. de liquidations par le
fait du Gouvernement, malgré d ’autres perles, mes petites-filles
V
�( 3* )
4
auront de nous les i 5 o,ooo 1., car on avoue que Sauscl vautentour
1 5 0.000 liv. ; le verger, le bien de Crèvecœur valent bien ensemble
100.000 liv. ; Mad. Aubier aura de plus entour 180,000 li v . , qui sont
assurées par la confirmation du testament Chazerat. Quand elle
réduiroit ses petites - filles à la légitime de rigueur, celles-ci auront
1 5 0.000 liv. ; pour qu’elles ne les eussent pas , il faudroit que leur
part dans les 280,000 liv. de biens paternels ou maternels autres
que Sauset, ne valut pas ce qui manque ou ce qu’elles auroient à
rendre sur Sauset à leurs oncles lors d ’un partage définitit (1).
Q u ’ai-je fait dès que j’ai été ra yé ? J’ai offert d ’effectuer mes
promesses. Mais quoiqu’on eut encore confiance dans une partie
( 1 ) Il m e sem ble que l’aïeul paternel peut se perm ettre même question que
I’aieul m aternel ; mes p etites-filles en auront-elles autant de leur mère ?
M . C h am pflour, me prom enant, lorsdu m ariage, à B eau m on t, à B e y s s a t, à M a rlilla t,
à Savennes, me disoit : Ma fille aura de nous 4 à 5 oo,ooo liv res; elle a acheté et p ay é
a la fam ille Bullion cette forêt. Cela me paroissoit d o u te u x , exagéré , quoique ma
Sttur et d’autres p a r e ils l’attestassent. Mais ce n’étoit pas cet é ta la g e , c ’étoit la
douceur de sa lille qui »10 plaisoit. Q u ’a-t-elle ré ellem en t, définitivem ent ! quel
ques héritages épars à Ueauinont , sans h a b itatio n , sans bâtimens d ’exploitation ;
on les dit affermés 4,000 liv. , mais elle p aye par an 6 , 5 oo liv. ; son p ère; lui-m êm e,
dans une certaine o cca sio n , m’en a fait com m uniquer l’acte par un ami. Il y a
encore des restes de p rix de vente quelque p a r t , dit-on ; mais on avoue qu’ils sont
entravés par quelques créanciers , et cela se fond aisém ent.
E lle fut avantagée par son contrat de mariage du bien de T au ves , bien m aternel ;
son père l’a vendu depuis : il a produit iGo,ooo liv . dont le père a d isp osé, etc.
Je suis bien éloigiré de la blâm er d ’avoir consenti à l’égalité avec ses sœ urs;
mais ou est cette égalité , aujourd but que les deux belles propriétés paternelles
avec belle liatitation sont entre les mains de ses sœurs q u i , à cet égard, n’ont fait
que ce que l’intérêt de ses enfans dicte à toute m ère ; celle qui est le moins avanta
geusem ent partagé en a jo u r entour a 5 o,ooo liv . L eurs m aris ont eu raison de
vouloir d’autres sûretés que des vain es paroles : la m ort d’un père est toujours
une grande perte ; celle de mou fils Lam onteillic a eu les plus funestes conséquences
pour mes mes petites-filles.
Mad. i.am onteilhe a obéi à son père : le respect filial est la source de ses erreurs
en ca lcu l, en spéculation; à mes yeu x il jette un voile honorable sur ces erreurs;
son estim able fiüe aînJ(. enseignera cette vertu
ù
scj
petites soeurs , sa sagacité
saura les eclairer sur la m esure à garder , pour concilier tous leurs devoirs.
�(32).
des liquidations qui ont péri depuis, il étoit déjà évident qu’il y
avoit erreur dans les estimations qui avoient servi de base aux arrangemens préparatoires.
Après plusieurs prières inutiles , j’ai offert par acte instrumentairedeSarray , notaire, en date du 20 vendémiaire an 1 1 , de sou
mettre tout à des arbitres; j’ai déclaré que je nommois de ma
part M . Dartis*, jurisconsulte aussi conciliant que respectable, et
que partant pour B e rlin , je laissois chez lui une procuration notariée , pour accepter ce qui seroit réglé.
On s’y est refusé. A mon retour, j’ai réitéré cette offre ; on
l ’a rejetée dédaigneusement, dérisoirement. On a fait répandre,
par les dames les commentaires offensans dont les hommes ne
vouloientpas se charger : que je revenois contre ma signature , pro
messes , etc. etc. C'est tout le contraire : j’offre de mettre en forme
légale exécutoire les promesses qui n'ont pas encore ce caractère;
je les offre avec plus de latitude qu’elles ne pouvoienl en avoir lors
du mariage ; mais comme je respecte le Code Napoléon , comme
je suis un sujet fidèle incapable de fraude pour me soustraire à la
l o i , je dis qu'il faut subir les conditions de la lo i, respecter les
limites que la loi met à ma volonté. C e n ’est pas pour moi, c’est
pour mes autres enfans que je la rappelle à Mad. Lamonteilhe : et
quelle loi?4celle par laquelle le Gouvernement n’est que l’interprète
du droit naturel, qui veutqucla fantaisie du père ne soit pas libre de
priver ses autres enfans du nécessaire , pour procurer le superflu à
celui qu’il préfère. L e Gouvernement a modifié le droit de nature
qui sembloit appeler les enfans également. Parce qu’il connoit les
foiblesses humaines, il a voulu que le père eût une certaine liberté
de disposer, pour attacher, par l’espérance ou|p«>r lareconnoissance,
les enfans aux pères. L'anarchie lui avoit appris que les enfans
pouvoient s’égarer ; mais il a posé des limites aux préférences des
pères , parce qu’il a remarqué que l’enfant adulateur donnoit quel
quefois à un pèrefoible des préventions contre le frère trop loyal.
Je veux me conformer au Code Napoléon, au devoir que la loi
divine et naturelle prescrit à tout père : et je crois que le casuiste
de
�de ma sœur rie peut m'absoudre d’aucune violation de ccs devoirs.
Mad. Lamonteilhe aime mieux, d it-on, contester mes droits
qu’accepter la ratification de mes promesses; soit: si c'est son bon
plaisir.
On m ’annonce qu’elle va intervenir, au nom de mes petites-filles,
pour appuyer les difficultés élevées au nom de ma sœur; cela ne
change rien aux faits et aux actes ; la question demeure donc la
même.
Mais il me semble que sous le point de vue de l’intérêt de mes
petites-filles, c ’est une inconséquence bien inutile, imprudente et
même dangereuse.
En e f f e t , tout ce qui auroit pu être jugé entre ma 6œur et
m o i , sans que les mineureé fussent parties, ne pouvoit jamais
préjudicier à leurs droits , s’ils étoient bien établis.
;
•
Si le jugement entre nia sœur et moi avoit pu’ leur nuire après
ma mort pelles auroient pu alors y former opposition, remettre la
question en jugement. Mad. Lamonteilhe et ses filles n ’en auroient
pas moins joui de Sauset, juisques à m a m o r t ; c a r je n 'a i pris au
cune conclusion relative à cela; je ne les ai pas mises e n fcause.
Supposons que l’intervention de Mad. Lamonteilhe fasse juger
la question comme Mad. Lamonteilhe le veut : à m a ’ mort mes
autres deux enfans auront la même voie dé tierce-opposition ; un
jugement sans eux ne peut pas les empêcher de renouveler une
question où ils sont les vraies parties intéressées, et celles avec
qui elle doit être jugée: veut-on les appeler, cela m ’est bien égal;
mais quoi qu’on puisse juger, même eux en cause, les enfans ne
peuvent pas être liés /selon le Code , par ce qu'on leur fait faire ,
du vivant de l’ascendant, pour sa succession.
T o u te question ici est subordonnée à deux futurs contingens.
Vivrai-je assez pour avoir pu payer avant de mourir toutes les
dettes dont je me suis chargé pour ma famille ?
Parviendrai-je à améliorer ma fortune ?
Cela seul dit qu'on ne peut pas savoir encore s’il y aura matiçre
E
�( 34 )
à procès ; par conséquent qu’on a grand tort de vouloir faire procla
mer d'avance par ma belle-fille un acte solennel d ’ingratitude.
« Mais, dit-on , Mad. Lamonteilhc veut élever une question fort
» importante, celle de savoir si la circonstance, que vous n’étiez
« pas rayé quand elle s’est mariée, ne peut pas »faire juger que
» vous étiez, relativement à elle et à ses enfans, comme mort civi» lement ; elle croit que par s u ite on doit juger d’avance qu’après
» votre mort Sauset ne comptera pas pour bien paternel. » .
C elle dernière question seroit encore une question à juger, après
ma m ort, entre mes petiles-filles et mes autres enfans': la faire
juger d’avance avec moi est une chose inutile, puisque mes
autres enfans pourront revenir contre le jugement ; c’est une chose
contre nature; car jamais on n’a dit à un père : Nous venons dis
puter avec vous la question de savoir ce que nous ferons de'volre
dépouille, quand nous aurons eu le plaisir de vous enterrer.
Si je meurs avant que cela soit terminé , mes autres enfans
demeureront libres de faire ce qu’ils voudront.
Mais comme les torls de Mad. Lamonteilhe ( naturellement
bonne, mais gouvernée par_ quelque b o u t e - f e u ) , ne diminue
ront jamais ma tendresse pour mes petites-filles, je déclare que
mon intention est de leur donner, par testam ent, tout ce qui est
à ma disposition, à la charge de la légitime de droit de leurs oncles,
et que la valeur réelle de Sauset entrera dans le règlement de cette
légitime comme bien paternel , attendu que c'est de moi que leur
père le tenoit.
Lors du mariage, Mad. Lamonteilhe ne me demandoit que
2.000 liv. de revenu. On me présenta un bail de Sauset à 3,ooo 1. ,
en me laissant ignorer que le bail étoit , peu de temps a v a n t, de
5.000 liv. , taux a u q u e l le revenu a été porté après le mariage.
L a réserve fut fixée à 1>0oo liv. , elle est la même depuis que
Sauset a été reporté à 5 ,ooo liv. ; elle jouit donc du double de ce
que je lui ai promis.
Sauset a tté acheté en 1808 par mon perc io 5 ,ooo livres;
�( 35)
8 o,ooo liv. en furent aussitôt payés avec pareil capital que mon
père a reconnu alors avoir à moi ( i ) , avec gooo liv. q u ’il a
reconnu avoir fait emprunter par moi à Paris sur ma signature ,
et reconnu avoir employées à payer Sauset (2) ; lje reste du prix
a été fait avec le prix de parcelles d ’héritages à C e y r a t , vendus
par mon père.
L e rachat de Sauset en 179$ a été payé avec le prix d ’héritages
à moi appartenant à Mont-Ferrand , revendus pour payer Sauset.
Je suis encore chargé de i 35 oo liv. de d e tte s, dérivant de l ’em
prunt fait pour payer S a u s e t , restées à la charge de ce bien par
l'acte de mai 1801.
J’ai payé le via g er,
m oyennant lequel Crèvecœ ur avoit été
acheté sous le nom de mes e n f a n s , et les frais du procès pour le
leur conserver, terminé en leur faveur par transaction de 1779*
J’ai payé la finance de la charge de gentilhomme ordinaire de la
chambre de Louis X V I ; et en mettant le titre sur la tète de mon
fils a în é, j’ai mis la fin a n c e de 5o,ooo livres sur leurs trois têtes
en commun ; libéralité qui prouve q u e j-'otois p lu s o c c u p é d ’eux
que de moi , car je n ’avois que cela au m o n d e , fruit de ma
sagesse , et que j’avois le mêm e zèle pour tous trois (3).
J’ai fourni à tout pour eux pendant le cours de quarante-trois
ans de mariage , sans être aidé par leur mère depuis 1773.
J’ai avancé pour leur entretien , éducation , p la c e m e n t, voyages
militaires et ceux occasionnés par la révolution jusqu'au premier
janvier 1793 , la somme de 36 ,400 liv., toute en numéraire. J’ai
avancé depuis pour eux en numéraire 32 , 3 i o l i v . , non compris
les divers frais pour affaires com m u nes, et ceux de tous les voyages
tant en A lle m a g n e qu’en France, commandes tant par les affaires
com m unes
que pour pourvoir au placement de c h a c u n , et les
(0 ^°Xez page9.
(a ) V o y e z l’acte île niai >8o i.
(3 ) 1 : ainti se seroit trouv<? ainsi avoir les frais du service ù sa ch a rg e, sans avoir
plus que les autres dans l'in térêt de la finance, sau f 45 o 1. par quartier pour la table.
E 2
�préserver, eux et leurs biens, des malheurs et pertes dont les
circonstances les menaçoient.
Je suis prêt à l’expliquer, à compter.
C e que j’ai reçu de mon père, avant ma sortie de F ra n c e ,
n ’est que l ’équivalent de la partie du cas d’incompatibilité ou
verte par la sortie de ma femme , le premier janvier 1773 , de la
maison de mon père, qui retenoit le reste pour nourriture de mes
enfans; un compte régulier le prouveroit.
T o u t ce que j ’ai reçu de ma sœur depuis le rachat de mes
biens , a été employé pour aider mes enfans, aux affaires com
munes , â payer les dettes, entre autres à payer ma tante
D ucrozet, ma s œ u r, etc. e t c ., le tout en numéraire, sans que
personne ait reçu d’assignats, ou ait été renvoyé sur le grandlivre.
En résultat, je suis en avances pour ma famille de près de
100.000 l i v , , indépendamment des créances d o n t j’ai parlé cidessus. J’ai fait ces avances sans avoir jamais possédé un pouce
de terre de ma famille , mon père s'étant borné à m ’instituer
héritier sans me revêtir d ’un seul héritage.
Je les ai faites sans avoir jamais possédé un pouce d’héritage à Mad.
A u b ie r, sans avoir jamais touché un soude son avancement d ’hoi
rie placé c h e z ^ n père par IejjÎK?n , ni d’aucune autre manière.
Je les ai faites quoique privé, depuis 17 7 6 , de tout revenu
d ’elle, c a r , depuis cet instant, tout revenu lui a été abandonné,
quoique j'aie gardé les trois enfans ;
J’ai tout fait sans avoir une hypothèque à offrir aux amis qui
m ’offroient leur bourse : et l’on s’étonne que je leur d o iv e encore
20.000 liv. en reliquat de tant d ’avances !
Et on veut me refuser les moyens de les payer, même le titre de
propriété dont ils demandent que je justifie, pour attendre que
les revenus les payent petit à petit !
L e revenu du verger et de tout ce qui reste en réserves viagères
de toute espace, y compris les 5 oo liv. que j ai retirées de mon
fils de R io u x , est actuellement de 2800 livres : c ’est sans e sp o ir
�( $7 )
d ’augmentation depuis là perte dés liquidations, 'et que tous les
petits recouvremens de reliquats de vente sorit finis.
Il y a à payer par an a3oo 1., pour intérêts de dettes ou en à-compte
sur le capital de 20,0001., jusqu’à ce qu’il soit éteint;ce qui sera long.
Dans ces dettes il n’y a pas un sou emprunté pour moi ; toutes
sont reconnues par divers actes de famille signés de ma sœur et
de mes e n fa n s, dont un billet d ’honneur de mon fils de R io u x,
portant d’avance adhésion aux arrangemens que je viens de prendre
pour les dettes : chaque année il paroit quelque réclamation pour
reste d ’affaires et de frais à liquider; en sorte que l’année 1810,
il y a eu déficit d’entour 65 o liv. : cette année il sera plus fort.
. Ainsi j’ai vécu des bienfaits de mes augustes ‘protecteurs, et
je vis encore de quelques reliquats de mes économies sur le fruit
de mes services dans des places honorables mais très-peu utiles;
économies que j’ai faites à force de privations qui, à 65 ans,
deviennent plus pénibles.
r
Que pouvois-je et q u e p u is - je f a ir e de mieux pour contenter ma
famille?
.
J'aurois renoncé à tout pour avoir la paix, si mes engagemens
pour dettes de famille ne m'avoient pas rendu absolument néces
saire ce qui est encore sur la tête de ma sœur, mon prête-nom.
Si ce n’éloit pas pour mon compté- qu’elle eût acheté, revendu,
subrogé, m ’auroit - elle à chaque instant demandé des actes de
ratification, de garantie envers et contre tous de toutes recherches,
pour toutes opérations , etc. etc. Je les ai donnés, répétés.
M . de St. Mande a l’àme la plus pure, un cœur excellent;
ma sœur est serviable, elle l’a bien prouvé.
Mais que de maux me coûtent les rivalités et les entêtemens des
dames de ma familleà qui j'ai affaire depuis 40 ans ! Elles ont entra
v é , daos chaque occasion , ce que j’ai entrepris pour mes en fa n s,
rendu inutiles mes efforts ; et aujourd’hui ma sœur se conduit
commesi ellevouloitdéfaire ce qu’ellea fait pour moi ; cependant son
cœur est naturellement bon ; tout est l’ouvrage de mauvais conseils.
Je ne veux pas croire que le magistrat d ’Issoire que ma sœur dit
�être son conseil, soit l’auteur des difficultés que j’éprouve , parce
qu’en me parlant à moi - m ê m e , il m ’a montré des opinions
opposées à celles qu’on veut lui prêter ; sa correspondance avec
le médiateur pour tout arranger amiablement , repousse ce
soupçon.
L e jurisconsulte que ma sœur a chargé ici de sa cause contre
m o i , est un homme probe, moral, instruit; mais un avocat n’est
pas toujours l’auteur du s y s tè m e qu’il défend avec chaleur; il y a
souvent, derrière la partie qui lui prescrit ce système, un souffleur
tout puissant sur l’esprit de la partie, que l’avocat ne connoit pas,
ne soupçoune pas.
Il y a encore tant de ces incurables de l’ anarchie (i), bien mas
qués en régénérés, qui s’industrient pour brouiller les familles
qu’ils ne peuvent plus torturer autrement ; ils ont tant de plaisir
à vexer l'homme qui eut le malheur d’êlre remarqué pour sa fidé
lité aux principes de la monarchie et i son chef.
Il m ’est tout à fait inconnu , celui qui a le talent de conduire
ma sœur d ’une manière si opposée à son caractère naturellement
noble, délicat, tel qu’elle l’a montré à mon égard jusqu’au mariage
de mon fils Lamonteilhe.
Je suis persuadé que souvent elle déplore en secret la foiblesse
qui l’a fait céder à ces conseils; mais elle croit prouver qu’elle a
du caractère en y persistant.
Vous qui lui avez fait refuser pendant si long-temps tout arbi
trage, qui lui avez fait rejeter la transaction rédigée par le média
teur de son choix ; vous qui voulez me faire punir par elle-même
de la confiance que j’ai eue en elle;
Vous qui avez choisi pour me porter vos coups la main d’une sœur
en qui tant de malheurs domestiques et publics avoient concentré
mes affections et ma confiance, la main d ’une belle-fille que j ’avois
préférée quand quelques souvenirs pouvoient m ’en éloigner;
( 1 ) Ils ont fait pt'rir mon père en p ris o n , îlgti de 77 ansj fait fu s ille r, à L y o n ,
mon ir c r c , chanoine de la C athédrale: leu r avoir échappé est un crim e.
�Vous qui couvrez votre système du nom de mes petites-filles,
pour le rendre plus cruel à un cœur trop sensible;
Montrez-vous : venez dire vous-même en quoi je suis un per
turbateur d’acquéreurs nationaux.
Vous avez des appuis, mais nous avons un préfet juste; le
tribunal où l’affaire va être jugée l'est également : je lui prouve
que c’est moi qui ai été l’acquéreur national de mon propre bien ,
que mes petites-filles le tiennent de rnoii
Quand ces petites innocentes viennent à moi, en sautillant,
me dire : Comment te portes-tu, grand-père? elles ne se doutent
pas que vous voulez me faire dire par elles, devant le tribunal:
l yu es mort pour nous , fu is de nouveau tafam ille ; maman veut
que tu n’en sois plus.
i'
- Non , ce n’est pas là ce que pense-ma belle-fille.
J’appelle d ’une dame séduite par de mauvais conseils, à ma
belle-fille réndue à ses sentimens naturels, faisant usage de son
propre jugement.
L e p ere de ma belle - fille a é té a u ssi s u r la lis te d es é m i
grés , et b ie n a v a n t m o i ; il y a v o it été m is à tort, à grand
tort ; il l’a prouvé par de bons certificats de résidence: mais
si Mad. Lamonteilhé se fût mariée pendant que son père étoit
encore sur la liste, certainement elle .n’auroit pas élevé contre
son père et ses sœurs la question qu'elle veut élever, au nom de
ses enfans , contre moi grand-père, de la tendresse de qui leur
père tenoit tout ce qu’elles ont ; elle n ’auroit pas dit à son père :
Vous êtes mort civilement pour m oi, vous êtes retranche de la
fam ille. Non certainement : sa conduite passée répond pour elle.
E
mmanuel
A U B I E R - L A M O N T E I L H E , Père.
1M B E R T - B A R T H O M E U F , Avoué.
N o la . On re co n n o îtra aisém en t a u x fa u te s , a u x n ég lig en ce s do m on style,
que j’ai p assé les d ix -h u it d e rn iers
de ma vio au milieu d 'u n peup le q u i
p arle une au tre la n g u e. J’espère ce p e n d a n t q u ’on comprendra assez co que j ’ai
Youlu dire , pour ju g e r quo co n ’é to it pas lo ca s de m e m e n a c e r , co m m e l ’o n t
fa it ces d a m e s , d’un conseil de fam ille , c h e z lo juge do p a i x , ni do mettre , en
této do U lis te , M. C h a m p ilo u r et lo parent d o n t j ’ai p a rlé à la p age 17.
�( 4o)
P R O J E T à!Acte proposé par 31. de S t. Mande a M . A ubier,
en juin 1810.
N o ta . L es deux parties qui sc trouvent à la s u ite , en n o te , entre, deux paren
thèses , sont les additions propose'es par M. A u b ie r ; la prem ière se trouve tldjà dans
plusieurs actes précédons ; M. de St. M ande a refusé l’a c te , quoiqu’il r eût p ropose,
à cause de la reserve contenue dans la seconde addition.
]N"ous , soussignés, sieur Benoît Fabre de St. M ande, Marie-Françoise A u b ie r,
épouse dudit sieur de St. M ande, et Emmanuel A u bier, leur frère et beaufrère , avons fait les reconnoissanccs et décharges qui suivent :
»•1 x- .
'
,
Benoît Fabre de St. Mande reconnoît qu’il ne lui est rien dû de la consti
tution dotale faite à la dame son épouse, par leur contrat de mariage du.........
Quo les douze mille francs qui restoient à payer do cette constitution, au
décès de M . Antoine A ubier, pèro ot beau-père des soussignés , l ’ont été en
dix-huit cent un et dix-huit cent deux, sur les fonds que ladite dame a eus à
sa disposition , pour lo compte dudit Emmanuel Aubier, soussigné j que tous
actes relatifs à cet objet ne peuvent lui être opposés comme faisant double
emploi : lo sieur Fabre de St. Mande renonce à toute action contre ledit
sieur Emmanuel Aubi«r pour cause de cette môme constitution , comme ledit
Emmanuel Aubier contracte l ’obligation de ne rien répéter contre lad. dam®
sa sœ u r, pour cause de la gestion et administration qu’elle a faite pour lui ni
autrem ent, reconnoissant. que tout ce qu’a fait ladite dame dans les temps
malheureux de la révolution, a été fait de concert avec lui $t n’a été fait que
dans les vues et la seule intention.de sauver de la tourmente révolutionnaire ,
pdur le compte dudit Emmanuel A u b ier, alors fu gitif, quelques débris tant
de sa fortune que de celle de Jean-Baptiste A u b ie r, chanoine de l’église de
Clerm ont, supplicié révolutionnairement à L yo n , et que ladite dame de St.
Mande n’en a rien retenu, dont quittance et pleine et entière décharge *.
11 sera passé à la premièro réquisition da l’une ou l’autro des parties, mais
aux frais d’Emmanuel Aubier seu l, acte notarié des présentes **.
* ( A vec prom esse, de la part dudit Emmanuel Aubier , de garantir M ad.
de St. M ande de toutes recherches. )
** ( D e même qu'acte notarié de la -transmission de tous biens ou droits
ayant appartenu soit à Antoine Aubier p è r e , soit à Jean-Baptiste A u b ie r,
chanoine, ou provenus il'eux , f/ui pourraient encore sc trouver entre les mains
ou sous le nom do M ad. de St. Mande ).
TRANSACTIOty
�(4 0
T R A N S A C T I O N re'dîgëe par le médiateur choisi par M ad. de
S t. M an d e, signée à Paris par M . Aubier, le a 5 juillet der
nier , envoyée par le médiateur à M ad. de S t. Mande , et par
elle refusée.
JN fou s, soussignés, sommes convenus de l’acte qui suit:
P a r -d e v a n t , e t c .
Sont comparus Emmanuel A ubier, seul héritier contractuel d’Antoine Aubier
p è r e , admis au bénéfico d'inventaire, d ’une part j
M. Benoît Fabre de St. M ande, en qualité de maii et maître des biens
dotaux de Marie-Françoise Aubier son épouse , et ladite dame de lui autorisée,
d’autre part ;
Lesquels , pour terminer tout ce qui peut les diviser, et spécialement l ’ins
tance pendante au tribunal de première instance entre lesdites parties , sur
la citation à eux faite à la requête d’Emmanuel A u b ier, par exploit d u ...........
et celle formée contre ledit sieur de St. Mande , par lequête et exploit du . . . .
ont transigé irrévocablement ainsi qu’il suit :
A r t . 1er. Emmanuel Aubier approuve et ratifie do nouveau, en tant que de
besoin , co qui a été fait par la dame de St. Mande sa sœ ur, en vertu des
pouvoirs confidentiels par lui donnés, confirmés ensuite par diverses procura
tions , i°. pour acheter du domaine national les biens provenus des successions
d’Antoine Aubier leur père com m un, et de Jean-Baptiste Aubier leur frère ;
lesquels biens étoient échus audit Emmanuel Aubier, en vertu de son contrat
de mariage et par l'effet des renonciations portées dans celui des sieur et dame
de St. Mande ; 2°. pour payer lesdites adjudications , régir et administrer les
biens qui en faisoient partie ; 3°. pour revendre , échanger diverses parties
desdits biens , et spécialement pour subroger Jérôme A ubier, second fils d’Em
manuel , à la possession de Sauset.
Emmanuel Aubier reconnoit que le tout a été fait pour son compte , avec
son autorisation et consentem ent, ainsi qu’il est porté par divers actes , notam
ment celui de mai i8oi , déposé chez. M. G ile t, notaire , et la subrogation
do Sauset reçue C o ste, notaire , l ’un et l’autre dûment enregistrés.
En conséquence, il promet do garantir et indemniser M . et Mad. do St.
ISlando envers et conlro tous de toutes recherches quelconques.
A r t . 2. I’ourtout terminer, Marie-Françoise A u b ie r remet par ces présentes
it Emmanuel Aubier son frè re , le verger situé entre Cloi rnont et M ont-Ferrand , confiné au midi par la grande tou te, du nord par le pré du Mas.
F
�\ \ ;À
( 42 )
C e p ré dem eu rera ch a rg é , 1°. des g a ra n tie s p ro m ises p ar E m m a n u el A u b ie r
a u x sieu r et dam e de S t. M a n d e , p a r p r iv ilè g e à t o u t ; 2°. de la rente v ia g è re
cré é e , au p ro fit d e M a d e m o ise lle de B a r , p a r a c te d û m en t en registré ; 5 °.
de la g a ra n tie des tr e iz e m ille c in q c e n ts fra n c s m e n tio n n é s dans l ’a c te de
m ai
i
8 o i , tan t d u c a p ita l q u e des in té r ê t s , ju s q u ’à ce q u ’il y a it é té p o u rv u
p a r arran gem en t entre tous co -in té re ssés.
A r t . 3 . E m m a n u el A u b ie r co n tin u e ra de jo u ir et p e r c e v o ir s e u l les sep t cen ts
fra n c s de ré serv e via g è re a lim en ta ire su r la t ê te d u d it E m m a n u el , p o rtés en
la s u b ro g a tio n
de
S a u s e t su s m e n tio n n é e ; les
via g e rs a lim en ta ire s dûs
ce n t q u a tre -v in g t-se p t fra n cs
p a r F ra n ço is D e sfo rg e s ; c e n t v in g t fran cs via g e rs
alim en ta ire s dûs p a r A n n e t V a isset ; q u a ra n te fra n cs v ia g e rs a lim en ta ire s dûs
p a r L a n tin ; et tro is cen t s o ix a n te fra n c s via gers a lim en ta ires dûs p a r M .
B o u ta u d o n , to u s é g a le m e n t cré é s s u r la tête du d it E m m a n u el A u b ie r .
A r t . 4 - M . B en oît F a b re de S t. M a n d e re co n n o ît que p en d a n t que sa fem m e
a é té ch a rg ée de l ’a d m in istra tio n des a ffa ire s de son frè re , elle lu i a p a y é ,
p o u r le co m p te d u d it E m m a n u el , la so m m e de d o u z e m ille fra n c s en c a p it a l,
d o n t le d it E m m a n u el A u b ie r é to it resté d é b ite u r en v ers le d it sieu r B en o ît
F ab re de S t. M an d e , p o u r c o m p le tte r le p a y e m e n t des tren te m ille fr a n c s ,
m o n ta n t de la c o n stitu tio n d o tale de la d ite d am e de S t . M a n d e .
E n c o n s é q u e n c e , led it sie u r de S t . M a n d e et so n é p o u se de lu i au to risée ,
tien n en t q u itte le d it E m m a n u el A u b ie r de t o u t ; d é cla ra n t n ’a v o ir p lu s rie n
à p ré te n d re n i su r le s d ites su cce ssio n s , n i su r les bien s ra ch e tés , n i co n tre
le d it E m m a n u el A u b ie r , q u i d em eu re su b ro g é à leu rs d ro its.
T o u s p ap iers de fam ille é ta n t e n co re a u p o u v o ir do M a d . de S t. M a n d e ,
s e r o n t p a r e lle re m is de b o n n e foi a u d it E m m a n u el A u b i e r , q u i dem eu re
ég alem en t a u to risé à les re tire r de to u s d é p o sita ire s. Il en sera fa it é ta t so m
m a ire a u bas d u q u el il en d o n n era d é ch a rg e .
F a it d o u b le en tre
nous , avec
p ro m e sse do p a sser le p ré se n t a c t e d e v a n t
n otaire à la p re m iè re ré q u isitio n de l ’un de n o u s , et a u x fra is do M . A u b i e r ,
le v in g t-six iè m e de ju ille t m il h u it c e n t o n ze .
A CLERMONT , de l'imprimerie d e L a n d r i o t , Imprimeur-Libraire ,
rue St.G enès.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier-Lamonteilhe, Emmanuel. 1811?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Aubier-Lamonteilhe
Imbert-Barthomeuf
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Exposé des faits de la cause pendante au tribunal de première instance, entre Emmanuel Aubier-Lamonteilhe père, et M. de Saint Mande et Marie Aubier, son épouse, sœur d'Emmanuel.
note manuscrite : « voir le jugement à la page 573 et l'arrêt à la page 628. »
texte de la transaction rédigée par le médiateur.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2122
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2127
BCU_Factums_G2128
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Augerolles (63016)
Berlin (Allemagne)
Lyon (69123)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
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5a5076d638d875e0407d5559c1e5744b
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Text
Ij I
P
R
É
P
O
C
U
JEAN-GILBERT
I
S
R
C HA S S A I NG ,
D E M E U R A N T EN L A CO M M U N E D E R IO M .
A RIOM,
De l’imprimerie de J . C. S A L L E S , rue de la Fraternité.
♦
�P REC
li.V o J & d ïi
IS
/,
^
^
P our J e a n - G i l b e r t C H A S S A I N G ,
demeurant*.
en la commune de R iom.
L
e citoyen Allègre , dans un mémoire imprimé , substitue des
. personnalités à la force des moyens une vaine description de
localité à la bonne foi de convenir que le citoyen Chassaing est le
maître de faire dans son emplacement, les constructions qu’exigent
son état de situation actuelle, et ses intérêts. Il serait difficile
d'imiter ce genre d’écrire, et de persuader. L e citoyen Chassaing
se contentera de dire que si quelqu’un, dans cette affaire, outrage
l' équité naturelle, c’est celui q u i, armé à la manière des furieux,
se rendit coupable d'une violence que la loi aurait réprimée, sans,
la médiation de deux juges de paix , et le pardon généreux qui
en fut le résultat ; mais il est possible que les écarts que l’on
remarque dans le mémoire du citoyen A llègre, ne soient que les
jeux de la plume caustique de celui qui en est le rédacteur. L e
A a
.
(+ ***-
——
�( 4 )
citoyen Chassaingnc s’attacheradoncqu’à établir, par l'exposé des
fa its , par le développement des principes, qu’à l’exception de
laisser subsister un ranchau,, il ne doit à son voisin, ni jo u r, ni
vues , ni servitudes. Il démontrera, plutôt par l’évidence que par
des injures, qu’il lui est libre d’user à son gré du droit sacré de
propriété.
; L e citoyen Chassaing possède dans cette commune une grange ;
elle a pour confins, aux aspects de jour et m idi, la maison du
' citoyen Allègre.
» ¿ C e tte g ran ge , d’une structure absolument vicieuse et écrasée,
. présentait un vaste emplacement ou découvert qui ne servait
4U était facile d’y construire des greniers à foin , et pour
¿^autres espèces de denrées. L e citoyen Chassaing était dans
^'im possibilité de s’en passer ; il prit ses mesures pour parvenir
à une réparation aussi essentielle.
Pour l’exécution sans trouble de ce p ro jet, il était indispen
sable de rendre le mur m itoyen, et de désintéresser le citoyen
A llègre par des offres. Cette précaution ne fut pas négligée. D éjà
les ou vriers du citoyen Chassaing mettaient la main à l’œuvre ;
déjà ils avaient pratiqué un trou p ou r y placer une poutre; toutà-coup le citoyen Allègre se présente ; la fureur était dans ses
yeux ; il rompt à grands coups de hâche une fenêtre à ferm aillé,
qui avait vue sur le toit de la grange; il s’y élance, défend au maçon
architecte de continuer son travail; il l’intimide par des menaces,
et le réduit à l’inaction.
L e citoyen Chassaing et son épouse, témoins de cette scène,
cherchèrent à calmer les emportemens du citoyen A llègre; il ne
répondit à cette modération , que par les invectives les plus
grossières, et qu’en sc prévalant , pour être plus redoutable,1'
d’un fusil qu’il avait alors. L ’excès de cette violence décida le
citoyen Chassaing à donner sa plainte. Les juges de paix se
�(5)
réunirent pour qu’elle n’eût pas de suite. L e citoyen A llègra
avoua ses torts, et les offensés, satisfaits de sa dém arche, n’eurent
plus la force de demander vengeance.
Une lueur d’espoir sem bla, dans cette circonstance, annoncer
un arrangement ; mais le citoyen A llè g r e , en mettant moins de
feu dans ses procédés, ne tarda pas à s’opiniâtrer dans son
opposition. Il ne restait que les ressources judiciaires pour le
contraindre à céder ; le ciloyen Chassaing y eut recours. A van t
de faire l’analyse des débats , il convient de donner une idée
des lieux ; elle n e sera que l’abrégé de la description contenue
dans le procès-verbal des experts.
L e mur de la maison A llègre a quarante-six piés de lo n g ,
depujs l’entrée de la grange jusqu’à l’endroit où il se termine:
l ’on y remarque différentes ouvertures.
i°. Un soupirail de cave; il est à six pouces du pavé du
passage ou découvert. Sa largeur est de dix-sept pouces> sur
quinze de hauteur.
2°. Une porte d’une structure gothique ; son tableau intérieur
est muré, et son évasement, en termes de l’art, forme actuellement
une armoire dans la cuisine du citoyen Allègre.
3°.
Une croisée au-dessus du soupirail de la cave; elle a trois
piés un pouce de la rg e , stir trois piés deux pouces de hauteur
elle est grillée en f e r , et a une araignée arrêtée avec des cloux
et pattes; l ’accoudoir est à quatre piés dix pouces du pavé
de la grange.
4°. Une seconde croisée, large de vingt-cinq pouces, et haute
de vingt-un pouces; elle est à sept piés et d e m i du pavé.
°. Les vestiges d’une ancienne fenêtre; elle ¿tait à quinze
piés six pouces du passage ; les jambages sont d é g r a d é s et le
liondar a été enlevé.
5
6°. Une troisième fenêtre ; elle est à treize piés et demi àü
�* 4U
C6 )
p avé; les jambages sont neufs; l ’accoudoir et le liondar sont
anciens.
7°. Une quatrième fenêtre ; son élévation du pavé est de
quatorze piés six pouces. Sa construction est très-moderne; on
y a employé une partie des matériaux de la fenêtre détruite,
énoncée au n°. 5.
8°. D eux lucarnes et un ranchau en pierre de taille sur
toute la longueur du mur.
C e tableau s u c c in c t , mais ex act, suffit pour convaincre que
le citoyen A llè g r e , jaloux de conserver les aisances de sa m aison,
n’avait d’autre idée que de faire entendre que son intérêt per
sonnel devait l’emporter sur celui de son voisin. C ’est pour
le désabuser que le citoyen Chassaing lui déclara, par acte du
décembre 179 1 > qu’il était dans l’intention de bâtir; qu’il lui
importait de rendre son mur mitoyen; qu’il y avait trois toises
trois quarts qui ne l ’étaient pas ; que le to u t, à 12 livres la
toise, avait été estimé 45 livres , ce qui portait la portion de
ch acu n ù 2.2. livres 10 sous. Il offrait réellement à son adver
saire cette somme , et offrait de plus de p a y e r , après qu’il
aurait élevé son bâtiment, le droit de surcharge, conformément
à la loi et à l’usage. L e citoyen Allègre rejetta ces offres ; il
cita le citoyen Chassaing au bureau de paix. Ses prétentions
étaient trop contraires à l ’esprit de conciliation, pour qu’elles
pussent disposer ù des sacrifices. L ’intention de l’adversaire se.
m a n i f e s t a -encore mieux dans sa requête du 22 décembre 1791.
Il y spécifie tous les genres de servitude qu’il revendique;
demande ù être maintenu dans le droit de propriété et jouissance
de ses : servitudes. 11 veut qu’il soit fait défense au citoyen
Chassaing de continuer sa construction ; qu’il soit condamné .
èiem ettre les lieux dans le même état où ils étaient avant sqi>
3
�4/
( 7 )
entreprise ; il conclut en des domroages-intérêts, et demande
qu’il lui soit permis de faire dresser procès-verbal.
Cette mesure ne nuisait à personne : le tribunal l’autorisa.
L e procès-verbal fut dressé en présence des parties; la description
du local fut faite par le citoyen M annevil, mais cette opération
ne produisit rien ; il en résulta seulement que le citoyen Allègre
répondit, par des désaveux, à toutes les observations importantes
du citoyen Chassaing; qu’il refusa les offres qui lui furent réitérées,
et même celle de Huit livres pour le droit de surcharge.
Des défenses simples, mais fortes en m oyens, furent signifiées;
elles etaient puisées dans ce principe de tous les siècles, et de
toutes les nations où l’équité règne , que les constructions sont de
droit commun , tant qu’un titre n’en prive pas le propriétaire.
Cependant un jugement du 4 janvier 1792, arrêta les réparations
du citoyen Chassaing. Il ordonne qu’au principal les parties procé
deraient en la manière ordinaire, et que le citoyen A llègre réinté
grerait l’araignée à fil de fe r de la fenêtre , q u ’il avait abattue
à coups de hache. Ce jugement donne aussi acte au citoyen
Chassaing, de ses offices réalisées de la somme de o liv. 10 sous,
3
pour le droit de mitoyenneté et de surcharge.
Un second jugement du i septembre 1792, ordonna avant
faire droit, et sans préjudice des J in s, que les parties convien
draient d’experts 3à Veffet de dresser procès-verbal de l ’état des
lieu x contentieux; de dire à quelle hauteur du côté de Vintérieur
des bâtimensde Jean Æ lè g r e , se trouvent des vues pratiquées
dans le mur dudit bâtiment, à l ’aspect q u i c o n f i n e le s propriétés
du Sieur Chassaing; de dire également quelles sont lesdmiensiOJis
desdites ouvertures, si elles sont anciennes ou de nouvelle cons' truction ; si elles f o n t saillie du côté d e s propriétés du sieur
Chassaing-^ si elles sont ferm aillées et à verre donnant; lesquels
experts dresseront 3 s ’ils le ju g e n t nécessaire , un plan J'guvà,
3
�C»)
des lie u x , et spécialement de la partie qui avoisine la couverture
ancienne et nouvelle de la grange du sieur Chassa,ing. Il était
essentielde rapporter le texte littéral de ce jugem ent, que le tri
bunal n’aurait pas rendu , si l'affaire avait été prise sous le point
de vue qu’elle présente. Il le fa u t, parce que l’adversaire croit
qu’ü préjuge la question, et que le procès-verbal qui en a été une
suite , dépose en sa faveur, Ce langage d’une confiance présomp^
tueuse remplit les pages de son mémoire imprimé. Il y a parsemé
des autorités, des arrêts, des opinions de jurisconsultes , et les
sien n es q u ’ il ne donne assurément pas pour les plus faibles. Tout
ce grand échafaudage s’écroule, l o r s q u e , pour l’attaquer f on sç
contente de dire, comme on l’a déjà fait, que toute personne qui
n’est pas contrariée par un titre, peut faire dans §a propriété ce
qu’il juge à propos. L e développement de cette maxime n’exige
ni une longue discussion , ni un fatras scientifique.
L a réfutation d’un mémoire insignifiant, l’application des prin
cipes à la matière qui a engagé la contestation, voilà à quoi se
réduit la défense du cito3ren Chassaing.
L a p rin cip a le objection du citoyen Allègre , celle qui absorbe
tous ses moyens , est de dire q u ’il ne peut être p riv é des jours et
vues de servitude dont il a la jouissance de toute ancienneté.
Mais comment prouve-t-il que les ouvertures pratiquées dans son
mur sont des jours de servitude ? Il se fonde sur l’évidence que la
grange et son passageétaientune dépendance de sa maison. Quel
que degré de probabilité qu’on accorde à cette prétendue évidençç,
elle ne constitue point un droit onéreux; elle ne devient pas à
défaut d’un titre r é e l, un titre d’exclusion. Il est indiffèrent daqs
le moment actuel que la m aison et la grange aient appartenu au
m6me propriétaire• mais il importe que ceux qui possèdent au
jourd’hui t ue s’arrogent pas mutuellement une préférence dans le
rnpdç de jouir. .Si l ’intérêt d’AU«grc exige qu’il ait
mai§op
agréablç
�C 9 );
agréable et commode , Celui; de Chassaing .Vpui-.^piir-^qniilé-d«;
raison, qu’il ait une grange, mi local couvert pqurs^ ï ;ib^iper,le
<lépôt de ses denrée?.
•v^V‘'V\
r ’wv.-.
Quand on conviendrait que ces deux corps d^.bûiin^ent ont élé
■détachés, il faudrait avoir recours au titre d’aliénation , pour ap
prendre s’il réservait ou s’il promettait des servitudes aux vendeurs-,
L a destination du père de famille ne se présume pag "en cette mar
tière d’elle-même; L ’article C C X Y I de la coutume de Parife, qui fuit
le droit commun, apprend que cettedestinalion i’üüi titre t/uand
elle est ou à été par écrit etnon autrement >\5nixrrêl du parlement
clc Paris, du 21 août 1674, rapporté au journal du palais, a cou*
sacré ce principe.
■ Il est donc indispensable qu’Â llègre, au lieu de s’écrier avec un
ton emphatique , qu’il invoque la raison, l ’équité , nos mœurs,
nos lois, nos usages , produise le titre propre à convaincre qu’il
a des jours de servitude. L e luxe des mots n’est qu’une stérile
nomenclature lorsqu’il s’agit de prouver.
Mais il paraît que l’on s’est écarté dans celle affaire cle la véri
table question. Il fallait moins .agiter si A llègre avait pu gagner
par le laps dii tems', des jours sur la grange et son passage, que
démontrer que la faculté d’élever était incontestable; que l’équité
tolérait qu’un propriétaire en fît usage, qu’il n’y avait point d’im
moralité à jouir .de sa chose en bon père de fam ille; que c’était
même le vœu de la loi.
En discutant la question opposée à celle qui aurait dû occuper,
Allègre n’a pas oublié de citer l’a rticle lld u titre X V I I dela_coutume d’A u v e r g n e , qui décide que lés-servitudes s c prescrivent,
Acquièrent ou perdent par trente ans, ,e\ l’art. I V qui porte que la
prescription tient lieu de Litre et a vigueur de lenisimmétiioriai:
Les conséquences qu’il a tiréesde ces dispositrcmssonly.selqniui, le
■fondement d’un droit invariable} iîiconlcstablè, pu issan t, insur-
B
�maniable et sacr/j il en résulte qu’il doit êfre considéré comme
ayant joui en' vertu d'itn titre écrit que la prescription doit être
maintenue entre individus respectifs, parce qu’el!e est ju d i
cieusement appelée la patrone du genre humain.
Allègre abuse, avec les grâces du style , des principes pour
accréditer des subtilités. L ’on convient que celui qui entreprend
d’ouvrir des jours dans un mur, sans moyens, peut se prévaloir du
silence de son voisin, et acquérir les jours qu’il désire par la vois
de la prescription ; mais on ne saurait les regarder comme des
objets de servitude; ils sont subordonnés à la condition de dis
p araître , s’il arrive dans la propriété qui les avoisine un change
ment qui les rend inutiles, et qui exige même qu’ils cessent de
subsister. Ils ont encore contre leur stabilité les moyens de mi
norité , et autres équivalons. Ils sont enfin assujétis à une dis
tinction qui les classe, et à des règles particulières-.
Dans la division la plus ordinaire, on les désigne en jours de
servitude , de coutume et de tolérance; ils admettent des prin
cipes difïërens. Les jours de servitude n’ont lieu qu’autant' qu’un
titre le constate ; c ’est le droit commun de la F ra n ce, l ’esprit
général des coutumes. Les lois romaines, la jurisprudence des
tribunaux enseignent et confirment celte doctrine. Comme les
•servitudes restreignent la liberté du propriétaire , le droit des
gens les combat sans cesse; nulle présomption de faveur ne parle
pour elle, si un acte authentique 11e réclame pas.
L e citoyen Allègre aurait tout cotitre sa prétention, s’il persistait
ù soutenir que les fenêtres construites dans son mur sont des jours
de servitude, parce que lüs principes résistent à son opinion,
parce qu’il ne rapporte pas le titre qui pourrait donner de la
«insistance au droif cpi-il revendique.
Les jours de coutume sont strictement déterminés p arcelle de
Paris, soit pour la hauteur, la grandeur cl les autres dimensions;
�iis dolvcht être à neuf pies de hau t, au-dessus duïéz-dc-ckaiïSséeT
et à sept piés quant aux autres étages. L a coütume recommandé,
aussi qu’ils soient à fermaillé et à verre dormant.
Que l'on examine les jours du citoyen’Allègre-, que l’on prenne
pour boussolle le procès-verbal de l’état des lieu x, l’on n’y recon
naîtra aucune des proportions prescrites ; des inégalités dans le
tout, des dégradations dans de certaines fenêtres, quelques-unes
construites aux dépens d’une partie des démolitions des anciennes,
des jours pleins, sans ferm aillé et verre dormant; tout annonce
combien Allègre et son père ont mésusé de la tolérance de
C h a ss a in g , et combien il serait déplacé, de la part de l’adver
saire, d’ériger en jours de servitude, le résultat de ses propres
entreprises.
Mais quand Ton supposerait qu’en coutume d’A u vergn e , les
jours de servitude peuvent s’acquérir par trente ans , Chassaing
détruirait cette ressource par une observation sans réplique. Son
pere décéda en 1764; scs enfans étaient mineurs à cette époque ;
ils n’ont partagé sa succession qu’en 1782; l’indivision suspendait
jusqu’à cette opération , la faculté de prescrire. Chassaing n’est
devenu propriétaire de la grange , qu’au moment du partage
effectué; c’est lui qui perm it, il y a environ quinze ou seize ans^
de faire la fenêtre n°. 7 du plan. A llè g re , p è r e , acquéreur de sa
maison en 1752 , ne s’avisa d’innover que cinq à six ans après.'
L a tolérance de Chassaing, p ère, comptait tout au pltis douze
années, lors de son décès; la minorité de scs héritiers a arrêté le
cours de toute prescription : les articles II et I V du titre X V I I
de la coutume d’A u vergn e, ne reçoivent donc, dans celte cir
constance , qu’une application vicieuse.
A u reste, tous ces moyens ne sont que siirabondans et Subsi
diaires; qu’on laisse à Allègre le doux plaisir d’étaler son érudition,
de vouloir que les ouvertures dans un mur spient une aiïaire de
B 2
�61
(« o
nifpurs;' il faut ramener la question à son vrai point. L e citoyen
Chassaiug a le droit de construire dan^ son emplacement, d’élever,
altiùs tollendi., sans que des objections puériles -, ou des sophismes
de jurisconsultes, viennent contrarier ses desseins.
. L a coutume de Paris, qu’il faut toujours consulter sur celle
matière, a une disposition si sage et si form elle, que c’est cons
tamment par elle que les difficultés s’expliquent' et se terminent.
L ’article C L X X X V I Ï est ainsi conçu « Quiconque a le sol
« appelé l’étage du rez-de-chaussée, dans un héritage, peut avoir
« le dessus et dessous de son s o l, et peut edifier par-dessus et
« par-dessous, et y faire puits, aisements et autres choses licites*
« s’il n’y a titres au contraire. «
Duplessis, l’un des commentateurs les plus estimés de cette
coutume, observe, page 12,'à, que ce principe est de droit; que
son premier ellet est d’autoriser le propriétaire a bâtir sur son sol
aussi haut qu’il veut, nonobstant qu’il incommode la vue do ses
voisins-, à moins qu’ils eussent titre contraire) ce qui serait servi tus
non altiùs tollendi.
.C’est dans les. sources du droit romain que l’on a puisé cette
disposition. Lu loi 2 -, de seri>iiulibus prwdior., urbanor., ne
laisse aucun doute* SU£ cette vérité : nrbanoruni, prœdioriim ju ra
ta lui sunt : altiùs tollendi, et ojjiciendi luminibus vicini.
. Lalaure, auteur d’un traité des servitudes ( 1), enseigne que celle
appelée àltiùs tollend i, « consisle à donner ii celui qui a ce'droit,
v le pouvoir d’élever sa maison si haut que bon lui semble; mais il
« est rare , ajouté-t-il ,.qne l’on acquiert celle servitude, puisqu’en
« général il est perniis à chacun d’élever sou bâtiment si haut que
« bon lui semble, à moins qu’il n’y ait titre au contraire ; ainsi
«' il n’y* a point d.’pbjet qui .puissorcngager quelqu’un à acquérir
(1) I.iv . r,.- ii,ap. IV - j pag.
�« une faculté qui est donnée par le droit commun ». Ces dernières
expressions sont frappantes ; elles confirm ent, avec la plus grande
précision, que sans un titre il est impossible d’empêcher qu’un
voisin ne bâtisse et n’élève sur son térrein.
L e nouveau commentateur de la coutume d’A uvergne était
pénétré de cette vérité; il convient, tome I I , page 7 2 1 , « que la
« prescription.d’une servitude urbaine ne s’acqnerrait p a s , s i,
« lorsqu’on a commencé à en user, le propriétaire n’avait pas
« intérêt ou droit à s’y opposer, parce que si un droit de, cette
« nature p ouvait s’acquérir par la possession , il en résulterait de
« fâclicuses conséquences,puisqu’il empêcherait le voisin d’élever ».'
C e commentateur cite à l ’appui de son sentiment, un arrêt du
¡1
6 févr 1er 1710 , rapporte, par A ugeard;
juge que les capucins
d’Amiens , qui avaient ouvert une fenêtre depuis quatre-vingts
ans , à treize piés de hauteur du plancher , sur un bâtiment
voisin adossé à leur m ur, n’avaient pu empêcher que le pro
priétaire de ce bâLment n’clevât sur son m u r, de manière qu’il
bouchait entièrement le jour pris par les capucins.
L e commentateur développe son opinion d elà manière la plu3
satisfaisante. « Celui qui perce des jours dans un mur qui lui ap« parlient n’entreprend rien sur la propriété de son voisin; un jour
« qui ne donne que sur son toit, ne saurait l’allarm er, parce
« qu’il ne lui cause aucun préjudice; il n’a dépendu que de lui
« d’élever son bâtiment plutôt ou plus tard. Il y a donc lieu de
« rejtUcr la prescription, et de ne rapporter l ’existence de la
« lenêtre qu’à la simple tolérance ».
On se plait a transcrire li s expressions d’un auteur qui jouissait
parmi nous d’une réputatiou méritée. 11 se c o n f o r m a i t d’ailleurs
en l.vs consignant dans un livre doctrinal,à la jurisprudence de la
ci-devant sénéchaussée d’A uv-rgiic. Quelques années avant que
son ouvrage p arût, il s’éleva une contestation entre les citoyens
�C *4 )
Faure et Versepuy, domiciliés dans cette commune. Celte a flaire
sous tous les rapports présentait les mêmes diflicultés; 011 lit les
mêmes objections ; le plan d’instruction fut le même. L ’on or
donna des vérifications d’experts. Faure voulut d’abord que
Versepuy fût tenu de boucher une fenêtre ouverte dans le mur
de séparation de leur maison. V ersepuy, dans ses défenses, fit
valoir l’ancienneté de son existence; qu’elle était pratiquée dans son
m u r, à une hauteur bien supérieure à celle que prescrit la coutume.
Une expérience qui fixait les droits respectifs, et des réflexions
plus sages convainqu irent Faure qu’il avait tort. Un jugement du
.14 m ars 1 7 7 9 , laissa sub sister, île son consentement, la fenêtre
de Versepuy, L e motif de cette décision était que cette ouverture
ne pouvait préjudicier à F au re, puisque les jours qu’elle procurait
ne donnaient que .sur son toit.
Deux mois après , Faure eut besoin d’un hangar; il l’adossa
au mur du cuvage de V ersepuy, et intercepta par là ses jours.
V ersepuy fil alors ce que fait en ce moment Allègre; il cita Faure,
et ne négligea rien pour s’opposer à sa construction. Fam-è soutint
qu’il était le m aître de disposer de son fonds, et d’y construire
un bâtiment ; il demanda avec la permission de continuer ses
ouvrages , des dommages-intérêts ; un jugement contradictoire
du 17 juin 1 7 7 9 , déclara Versepuy non recevable dans sa pré
tention. L e commentateur, dont on vient de parler, avait donné
un avis favorable à Faure,
, Que l’on compare maintenant ce qui se passe entre Allègre et
Ckassaing , 011 y découvrira une analogie parfaite , avecic procès
des capucins d’Amiens , et celui que l ’on vient d’analyser. A llè g re ,
par un échapatoire peu digue du bon sens , a la faiblesse de sou
tenir , que si les capucins d’Amiens succombèrent, c’est qu’ils
pouvaient se procurer d’autres vues ; mais en lisant l’arrétistc par
Je sçul désir de s’éclairer , l’on voit que les juges ne sc décidèrent
�que p ar ce principe qu’on ne saurait trop répéter, qu’on a la
faculté d’élever chez soi altiùs to lle n d i; que rien ne la modifie,
ne la subordonne; qu’elle est un titre qui parle perpétuellement,
selon l’expression de Dumoulin : semper loquilur.
En se résumant, il est certain que le citoyen A llègre a des torts
inexcusables. C ’est par des insultes et des outrages qu’il a com
mencé ses tracasseries. On n’y a répondu que par des procédés
honnêtes.
Il a prétendu qu’il avait des jours de servitude sur la grange
et le passage du citoyen Chassaing; on lui a prouve par le raison
nement, par les autorités , qu’en pratiquant des ouvertures dans
son m u r, il n’avait fait que ce qu’il pouvait ; que par la même
raison le citoyen Chassaing en faisant des constructions sur son
terrein, a joui d’une faculté qui ne se prescrit jamais.
Il a opposé la prescription; il a cité des articles de la coutume’
d’Auvergne. On lui a démontré que le droit d’élever était à l’abri
de la prescription ; que ce moyen combattu par des minorités ,
l’était encore par le peu de rapport qu’il avait avec l’affaire.
Il résulte de cette discussion qu’on aurait désiré abréger, que le
citoyen Allègre a tout hazardé pour ne rien obtenir; qu’il doit
boucher, quant à présent, la fenêtre désignée au plan n°. 7 ; qu’il
doit aussi des dommages-intérêts considérables; qu’ils ne seront
pour le citoyen Chassaing qu’une faible indemnité. Mais il se con
solera de ses sacrifices, si, par le jugement favorable qu’il espère,
il parvient à convaincre le citoyen Allègre qu’il eût m ieux valu
pour lui, d’écouter la justice et les principes , que les conseils de
ceux qui font un trafic des erreurs où ils plongent ce u x qui ont
la simplicité de croire les premiers qui les endoctrinent.
C h a s s a i n g .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chassaing, Jean-Gilbert. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chassaing
Subject
The topic of the resource
servitude
servitude de vue
conflit de voisinage
médiation
experts
prescription
coutume de Paris
mitoyenneté
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jean-Gilbert Chassaing, demeurant en la commune de Riom.
Annotations manuscrites: « 1ére sentence an 4, 1ére section. Le tribunal donne acte aux parties de leur consentement et conditions respectives pour chacune des servitudes. »
Table Godemel : Mitoyenneté : le voisin qui demande à rendre mitoyen le mur intermédiaire pour y élever des constructions, à charge d’indemniser, peut-il obstruer et faire disparaître les jours et vues qui existent ? quelles sont les règles propres à établir si ces jours et vues ont été pratiqués à titre de servitude, ou s’ils ne sont que des jours de coutume et de tolérance ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de J. C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 3
1791-Circa An 3
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1203
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1202
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53161/BCU_Factums_G1203.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Conflit de voisinage
coutume de Paris
experts
médiation
mitoyenneté
prescription
servitude
servitude de vue
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53421/BCU_Factums_G2125.pdf
3155b9188522e58351e027fa85e4a13e
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JUGEMENT
DU T R I B U N A L D E 1er I N S T A N C E
D E C L E R M O N T (dont est appel; sur quoi, voyez les
Observations à la suite du ju g em en t),
R endu
entre
M.
A u b ie r -L a m o n te ilh e
p ère , in tim é
M . et M a d . de S . - M a n d e , sœur et b e a u -fr è r e dudit
A ubier
et la dame
C hampflour , V e L a m o n te ilhe ,
sa b e l l e - f i l l e , appelans.
N A P O L É O N , par la grâce de Dieu et les Constitutions de l’Empire ,
Empereur des Français, Roi d’Italie, et Protecteur de la Confédération du
R h in , à tous présens et à venir, S a l u t . Savoir faisons que
L e Tribunal de première instance de la ville impériale de Clermont-Ferrand,
chef-lieu du département du Puy-de-D ôm e, a rendu le jugement suivant:
Entre Emmanuel Aubier, ancien m agistrat, habitant de cette ville de
C lermont-Ferrand, demandeur au principal, aux fins de l’exploit du 3 avril
18 11, enregistré le 5 , et défendeur à l’intervention, comparant par M e GilbertHugues Imbert-Barthomeuf, son avoué, d’une p art;
E t dameMarie-Françoise A ubier, femme du sieur Benoît Fabre de S.-M ande,
propriétaire, habitante du lieu de S.-M ande, commune de S .-Y voin e, autorisée
en justice , défenderesse, comparante par M . Etienne T ré b u ch e t, son avoué ,
d’autre part;
E t encore ledit sieur Emmanuel A u bier, demandeur en assistance de cause
et autres fins, suivant les requête, ordonnance et exploit des 3 et 13 juillet
1 8 1 1 , comparant comme dessus, aussi d’une part,;
Et ledit sieur Benoit Fabre de S.-M ande, propriétaire, habitant du lieu de
Saint-Mande, commune de S.-Yvoine , défendeur en assistance de cause, com
parant par M* T réb u ch et, son avoué, d’autre part ;
Et encore entre dame Marie-Claudine de C h am pflo u r , veuve de JérômeEmmanuel Aubier-Lamonteilhe, tant en son nom qu’en qualité de tutrice de
leurs deux enfans mineurs ; propriétaire, habitante de cette ville de ClermontI
�u
( 2)
Ferrancî, intervenante et défenderesse suivant sa requête d’intervention du
i i novembre, signifiée en la cause le i 4 » comparante par ledit M e T réb u ch et,
par révocation de M e M ayet, son avoué, précédemment constitué, d’une p art;
Et ledit sieur Emmanuel Aubier et les sieur et dame de S.-Mande, défen
deurs à ladite intervention, comparans comme dessus, chacun par leur avoué,
d’autre part.
Les conclusions du sieur Emmanuel Aubier sont à ce qu’il plaise au tribunal,
en ce qui touche l’intervention do la dame veuve Aubier-Lamonteilhe, ès-norn
et qualité, la déclarer purement et simplement non-recevable, et la condamner
aux dépens.
En ce qui touche la demande principale :
D ire et ordonner que le sieur Emmanuel Aubier sera maintenu dans la
qualité do seul et unique héritier de son père et de son frère, conformément h
son contrat de mariage et celui de sa sœ ur, et comme admis au bénéfice
d’inventaire.
D ire et ordonner que le sieur de S.-M ande sera tenu de passer quittance au
demandeur , des douze mille livres qui lui restoientduessurladot de sa femmS,
et dont il a été p a y é , soit par le demandeur m êm e, soit pour son compte, par
sa sœur, et de deniers à lui appartenans; et c e , avec subrogation à tous droits,
en conséquence de la renonciation de la dame S.-Mando à toute succession
directe et collatérale.
En ce qui concerne la dame de S.-Mande, en sa qualité personnelle de man
dataire du demandeur :
Ordonner que, dans le jour de la signification du jugement à intervenir, les
sieur et dame de S.-Mande seront tenus de passer, par-devant notairo, acte
de transmission, au demandeur, de la pleine propriété du Grand-Verger, situé
à M ontferrand, de la contenance d’enlour cinq cent3 perches quarrées, joignant
la voie commune de m id i, o lie pré du sieur Dumas do bise; sinon et faute do
ce faire, que le jugement à intervenir en tiendra lieu; qu’en conséquence, lo
demandeur en restera et demeurera propriétaire incom m utable, pour en dis
poser comme il avisera, sous les conditions déjà convenues et acceptées entre
les parties, savoir : i° que ledit vorger demeurera grevé e n v ers les sieur et
dame de S.-M ande, de la garantie de toutes recherches généralement quel
conques, pour quelque cause que ce soit; 2° q u ’il demeurera chargé do la
rente viagère do trois cents francs par an, créée nu profit de mademoiselle
D e b a r , moyennant trois millo francs empruntés d’elle, pour les prêter à
madame Aubier; 3 ° qu il demeurora chargé des intérêts, et garant du rapitai
do treizo mille cinq cents francs, mentionnés en l’acte de mai mil huit cent u n ,
jusqu'il ce qu’il ait été pris d autres arrangemens entre ses enfans et petits-enfans ,
pour l'extinction de ladito dette.
Donner aclo au demandeur do ce qu’il so soumet à employer lo surplus des
�jy j
revenus dudit verger, si plus y a , en payement des intérêts et capitaux de«
autres emprunts par lui faits pour ses autres enfans.
Ordonner qu’il demeurera subrogé à tous droits quelconques, corporels et
incorporels, mobiliers et immobiliers, des sieur et damo de S.-M ande, par eux
prétendus ou à eux alloués, de quelque manière et pour quelque cause quo
ce soit , sur les successions paternelles et maternelles ; de même qu'à tous
revenus, échus, courans ou à échoir, aux offres qu’il fait de ratifier toutes les
garanties par lui promises à la dame de S.-Mande.
Ordonner pareillement que tous les papiers de famille lui seront rem is, tant
par la dame de S.-Mande, sa sœ ur, que par tous dépositaires, état sommaire
d’iceux préalablement dressé, au pied duquel il donnera décharge. E t, enfin,
condamner les sieur et damo de S.-Mande aux dépens.
E t , pour parvenir au payement des condamnations à intervenir contre la
<iaine de S.-M ande, condamner ledit sieur de S.-M ande, son m ari, à indiquer
des biens d’icellej à cet effet, de justifier de leur contrat de m ariage; sinon, et
faute de ce faire dans la huitaine de la signification du jugement à intervenir,
dire et ordonner que lesdites condamnations lui seront et demeureront person
nelles, sans qu’il soit besoin d’autre et nouveau jugement.
Les conclusions des sieur et dame de S.-Mande ont été à ce qu'il plût au
tribunal déclarer le sieur Emmanuel Aubier non-recevable dans toutes ses
demandes; ou, en tous cas, l’en débouter, et le condamner aux dépens.
Les conclusions de la dame veuve Aubier-Lam onteilhe, ès-nom et qualité ,
ont été à ce qu’il plût au tribunal la recevoir partie intervenante en la cause
entre les parties; et, faisant droit au fond, déclarer le sieur Emmanuel Aubier
père non-recevable dans ses demandes, ou autrement l ’en débouler, et le
condamner aux dépens ( * ) .
( * ) M adam e Lam ontcilhc a fo n d é l a ji n de non-rcccvoir sur la supposition que
le m andat, par m oi donné à ma sœ ur, et par e lle accepté à F e ffe t de racheter
pour m oi les lie n s de la succession de mon père et de mon f r è r e , d é v o lu s, par leur
m o rt, avant mon inscription sur la liste des ém ig rés, à m o i, n'étoit obligatoire
que dans l'ordre moral , mais n 'étoit point obligatoire dans l'ordre ju d icia ire ,
parce que f é t a i s in scrit sur la liste des ém igrés quand j 'a i donné le m andat, quand
ma sœur l a a cce p té, lorsq u 'elle s'est engagée à me transmettre to u t, et lorsqu e lle a renouvelé cet engagement par acte du 8 m ai 18 11. Cependant la Cour de
cassation a constamment ju g é , que les é m ig ré s, de même que tout banni à perpé
tu ité , pouvoicnt fa ir e validcm ent les actes du droit des gens , et a spécialem ent
appliqué ce principe au m andat, q u i , par son essen ce, appartient plus au droit
des gens que toute autre espèce d'acte.
(Note de M. Aubier.)
2
�V
( 4 )
POINTS
DE FAIT.
4
Antoine Aubier de Lamonteilhe est m ort, en réclusion, le 25 brumaire an 4 *
laissant de son mariage avec Jeanno do Cliampflour, prédécédée, trois enfans :
Emmanuel, demandeur} Jean-Baptiste, prêtre, chanoine do la cathédrale de
Clermont; et Marie-Françoise, épouse du sieur de S.-M ande, défenderesse.
Jean-Baptiste a péri révolutionnairement à L y o n , en pluviôse suivant.
Par le contrat de mariage d’Emmanuel Aubier avec Jeanne M argeride, reçu
Baptiste, notaire, le 4 décembre 1768, enregistré le 10, Antoine Aubier avoit
institué ledit Emmanuel seul héritier de tous les biens qu’il laisseroit, e t, en
vertu des pouvoirs à lui donnés par ladite Champflour, son épouse, predécédée, il avoit également nommé ledit Emmanuel seul héritier de celle-ci; le
tout sous la réserve de quarante mille francs, pour en faire les légitimes pater
nelles et maternelles des Jean-Baptiste et Marie-Françoise A u bier, ou en disposer.
Par le contrat de m a ria g e de Marie-Françoise Aubier avec le sieur Benoît
Fabro de S.-M ande, en date du 10 février 1770, Antoine Aubier lui avoit cons
titué en dot une somme de trente mille francs, pour tous droits paternels et
maternels, moyennant laquelle elle avoit renoncé à toute succession directe et
collatérale, et à tous droits échus et à échoir.
A l’époque de la mort d’Antoine A ubier, Emmanuel étoit fugitif a cause des
mandats d’arrêt contre lui décernés révolutionnairement les 1 1 et 20 août 1792 »
h l’occasion des faits du io août et des services rendus à Louis X V I , par ledit
Emmanuel A ubier, gentilhomme de sa chambre; mais il n’avoit été prononcé
aucune contumace ; ses biens n’avoient été ni annotés, ni séquestrés ; et il n’étoit
inscrit sur aucune liste d’émigrés, ni générale, ni particulière, ainsi que cela est
constaté par les listes imprimées, publiées par le Gouvernement, et par le certifi
cat du Préfet de ce département, dûment enregistré ; de sorte qu’il a été saisi do
fait et de d roit, do la propriété réelle des biens des successions à lui dévolues.
L e 18 germinal suivant, il a été inscrit sur la liste des émigrés, par la muni
cipalité do Clormont.
Le
7 flo réal m êm e
a n n é e , il a é té in sc rit s u r la listo des é m ig r é s , p a r
l ’a d m in istra tio n d é p a rte m e n ta le , et SOS b ien s ont é té séq u estres.
Emmanuel Aubier articulo et soutient que très-long-temps avant que ses
biens fussent mis en vente, ladam odoSaint-M ande, sa sœ ur, s’étoit chargée de
soigner ses intérêts, do suivre toutes ses affaires, et avoit reçu et accepté do
lui des pouvoirs confidentiels pour travailler a lui conserver ses biens, soit en
obtenant restitution gratuite desdits biens par voie de radiation do la liste dos
ém igrés, soit par leur rachat, si besoin etoit; qu’ensuite, et bien avant que sa
sœur les soumissionnât, elle avoit reçu dudit Emmanuel A u b ier, accusé
îécoption et accepté plusieurs procurations notariées, à l ’effet do racheter
�lesdits tiens pour le compte dudit Emmanuel Aubier seu l; qu’elle a rép été,
par toute sa correspondance, sa promesse de les racheter et conserver pour
lui seul , et qu’elle s’est aussi constituée et reconnue sa mandataire pour lo
rachat, et son prêle-nom pour la conservation de ses biens, jusqu’à ce qu ’il
fût rayé de la liste des émigrés.
L ’acte du 25 thermidor an 4 , par lequel l’administration départementale a
vendu à ladite Marie Françoise A u b ier, sœur dudit Emmanuel, les biens de
celui-ci, avoit alloué à ladite Marie-Françoise Aubier quelques portions dans les
prix des ventes, à raison de ses droits legitimaires et héréditaires ; mais Marie
Aubier et le sieur Benoît Fabre de S.-M ande, son m ari, se sont abstenus de
répéter contre lo gouvernement lesdites portions, ont préféré de s en tenir à la
constitution dotale de ladito Marie A u b ier, et aux clauses de leur contrat de
mariage. Ils ont abdiqué, au profit dudit A u bier, toute prétention, à la seule
condition d’ôtre p a yé , par lu i, en num éraire, des douze mille livres qu’il
j-edevoit sur cette constitution d otale, tant comme seul héritier d’Antoino
Aubier p ère, que comme ayant garanti personnellement ladite constitution,
par acte reçu Baptiste, notaire, le n lévrier 177 7, dûment enregistré.
Emmanuel Aubier a payé ou fait payer les douze mille livres en numéraire,
audit sieur de S.-M ande, qui en convient.
Plusieurs parties des biens ont été revendues avec l ’exprès consentem ent
d 'E m m anuel A u b ie r , porté par une nouvelle p r o c u ra tio n , ratifiant c e qui
avoit été déjà fait.
L e produit des reventes , ainsi quo les revenus des biens, ont été employés
,
à acquitter les emprunts faits pour le rachat des bien s, à payer diverses dettes
des deux successions, notamment ce qui étoit redû à la dame de S.-Mande sur
sa dot, et à la dame Aubier, veuve D ucrozet, leur tante, sur ses droits légiti—
maires; une partie a été envoyée audit Emmanuel A u b ie r, qui déclare et
offre de prouver l’avoir employée en entier aux affaires communos de sa
fam ille, et en avance pour ses enfans.
11 est constaté, par acte du 8 mai 1801, enregistré, quo Marie A u b ie r, femme
de S.-M ande, a rendu compte à Em m anuel, son frère , de toutes ses opérations,
achats, reventes, em plois, dépenses; qu’elle a demandé décharge, et offert de
transmettre aussitôt toutes les propriétés.
Par cet a cte, Emmanuel Aubier a tout approuvé, ratifié; a donné décliargo à
ladite dame de S.-M ande, avec promesse de garantie; a é ta b li J érû m e -E m m an u e l
A u b ier, son fils, régisseur desdits biens , et représentant do la fa m ille , pour
soigner ses affaires, avec douze cents francs d'appointement : à l’effet do quoi
l ’acte constate que tous les papiers de f a m il le , jusques-là demourés entre le s
mains do Marie-Françoise A u bier, ont alors été remis audit Jérômo-Emmanuel
Aubicr-Lam onlcilhe par ladito damo do S.-M ande, qui en a été déchargée.
Par acte reçu Costo , notairo , lo 8 fructidor an 9 , Mario - Françoise
3 .
�( G) .
.Aubier, avec le consentement exprès dudit Emmanuel A u b ie r, mentionné
dans ledit a c te , a subrogé Jérôm e-Em m anuel A u b ie r, son second fils , à la
propriété du domaine du Sau lzet, sous réserve d’une pension viagère de sept
cents livres par an , sur la tête et en faveur dudit Emmanuel Aubier.
Une contre-lettre du même jo u r, enregistrée, porte qu’il avoit été convenu,
dès le principe, que la réserve seroit de mille fran cs; mais qu’Emmanuel
Aubier avoit. réglé que trois cents francs seroient, payés à Jean-BaptisteA n to in e A u b ie r.d e I\ioux, son troisième fils; à l’effet de quoi ledit Jérôme
s’engage, par ladite contre-lettre, de les payer audit Jean-Baptiste sous les
conditions y énoncées.
D e tous les biens provenus desdites successions et du rachat, il n’est
demeuré sur la tête de Marie - Françoise Aubier , que le grand verger
situé entre les villes de Clermont et M ontferrand, mentionné en l’exploit
introductif de l’instance , et quelques recouvremens à faire pour reliquat do
reventes ou autres causes, dont la rentrée a été employée par Marie-Françoise
Aubier et son frère, soit à l’acquit des dettes desdites successions, soit aux
autres affaires communes de la fam ille; sauf trois petits articles dûs , à Montierrand, par François Defiorges, Annet Y eysset, et le nommé L an tin , provenant
de reliquat de reventes, lesquels ont été convertis en rente viagère sur la tête
et en faveur d’Emmanuel A u bier, par acte notarié reçu Gorce , enregistré; et
un article diï par le sieur Boutaudon, en vertu de sentence du tribunal de com
m erce, du 28 fructidor an 9 , enregistrée, encore due audit Emmanuel Aubier.
Emmanuel Aubier a été amnistié le 25 fructidor an 10.
L ’acte du 8 mai 1801, la subrogation de S a u lze t, et sa contre - le ttr e , ne
sont point attaqués.
D ès le mois de vendémiaire an 11 , différentes tentatives de rapprochement
avoient été faites entre les parties, pour terminer à l’amiable les difficultés
qui font la matière du procès ; ces rapprochemens n’avoient eu aucuns succès j
enfin , le sieur Emmanuel a introduit l’instance en ce tribunal.
D ’abord il a fait citer les sieur et dame de S.-Mande en conciliation, sur
la demando qu’il annonçoit vouloir former contr’eux , ayant pour objet la
transmission, à son profit, du grand verger de M ontferrand, sous différentes
conditions précédemment convenues , et qui sont rappelées dans les conclusions
ci-dessus et la remiso des papiers de famille.
Les parties ne purent so concilier, et M. le juSe
Pa*x ®n dressa procès
verbal sous la dato du 2 mars 18 11, enregistré le surlendemain.
Le 5 avril su ivan t, assignation a été donnée en ce tribunal aux sieur et dame
de S.-M ande, aux fins de la demando annoncée en la citation de conciliation,
dont les conclusions sont réitérées audit exploit.
M . de S.-Mande ayant comparu avec la dumosonépouso, par le ministère de
T réb u ch ct, avoué , déclara très-expressément qu’il n’entendoit point autoriser
sa dite épouse à ester en jugement.
�B P -------------------------------------------------------------------------------
' ( 7 )
Le 27 avril 1 8 1 1 , jugement est rendu portant autorisation par justice de
la dame de S.-Mande.
En cet état , Emmanuel Aubier a présenté requête conten an t, contre
M . S.-Mande personnellement, demande en assistance de cause, afin d’être
maintenu , lui Em m anuel, dans la qualité de seul héritier contractuel d’An
toine Aubier père, admis au bénéfice d’inventaire, et de feu Jean-Baptiste Aubier,
chanoine, et afin d’obtenir dudit sieur de S.-Mande quittance notariéô des douze
mille livres parfaisant la dot de son épouse.
En vertu do l’ordonnance de M. le président, du 3 juillet 1 8 1 1 , enregistrée
le i o , M . do S.-Mande a été assigné par exploit du i 3 dudit m ois, enregistré
le même jou r; et cette dernière demande a été jointe à la précédente par juge
ment du 28 août suivant.
En cet état, la dame Cham pflour, veuve de Jérûme-Emmanuel AubierL am o n teilh e , agissant tant en son nom que comme tutrice de leurs enfans
mineurs , s’est rendue partie intervenante en la cause, suivant sa requête du
11 novembre 1811 , et a adhéré aux moyens, et conclusions des sieur et dame
de S.-Mande.
Elle se prétend autorisée à intervenir en vertu de délibération du conseil de
fam ille, du 22 octobre précédent.
Les parties ayant fait signifier leurs conclusions motivées , la cause s’est
présentée à l’audience, et sa discussion a donné lieu à la solution sur les
questions suivantes :
POINT
DE D R O I T .
Emmanuel Aubier est-il seul héritier d’Antoine A u bier, son p ère , et de
Jean-Baptiste A ubier, son frère?
Monsieur de S.-Mande est-il tenu de passer, en faveur dudit Emmanuel
A ubier, quittance de douze m illelivres, que ledit Emmanuel lui a payées ou fait
payer pour reliquat de la constitution dotale do la dame sa sœur ?
Madame de S.-Mande a-t-elle été mandataire de son frè re, pour soumission’
ner et racheter ses biens? peut-ellp être forcée à lui passer déclaration et trans
mission de la propriété réclamée par ledit Emmanuel Aubier i
L ’intervention de la dame veuve Lam onteilhc, tant en son nom qu’au nom
de ses deux filles mineures , enfans dudit Jérôme Lamonteilhe , est-elle
recevable ?
E t quand même elle scroit recevable, n’est-clle pas mal fondéo l
Par qui les papiers do famille doivent-ils être restitues audit Emmanuel
Aubier î
Les qualités ci-dessus ont été signifiées à M e T réb u ch et, avoué des défen*
(
deurs et de l’intervenante, par acte du ministère de V id alein , huissier audien*
�( 8)
cicr, en date du i 3 avril 18 12 , enregistré le surlendemain, sans qu’il soit
survenu aucune opposition à leur rédaction.
.
Cause du rôle ordinaire, n° 620
Ouïs pendant cinq audiences Imbert-Barthomeuf, avoué du sieur Emmanuel
Aubier-Lam onteilhe, demandeur; Jeudi Dum onteix, son avocat; T réb u ch et,
avoué des sieur et dame de S.-M ande, et de la dame veuve A u bier; Rousseau,
leur avocat ; ouï aussi M. Picot-Lacombe , procureur impérial ;
En ce qui touche la demande de M . A u b ier, tendante à être maintenu dans
la qualité de seul héritier de son père et de son frère.
Attendu l’abdication delà dame de S.-M ande, en faveur d’Emmanuel A u b ie r,
son frère, de la part et portion à elle attribuées par les arrêtés de l'administra
tion centrale, pour s’en tenir à sa constitution dotale.
En ce qui touche la demande de M . A ubier, relative à la transmission, de
la part de la damo de S.-M ande, à son profit, du grand verger de Montferrand.
Attendu ce qu’il résulte de la correspondance des parties , et du traité
du 8 mai 1801, que la dame de S.-Mande n’a été que la mandataire d’Emma
nuel A u bier, son frère, à l’effet de racheter pour son compte ledit héritage, et
qu’elle l ’a soumissionné en exécution dudit mandat, et l ’a acquis de l’adminis
tration centrale, par acto du 25 thermidor an 4Attendu d’ailleurs que la transmission dudit verger n’est pas contestée (a ).
En ce qui touche la demande de M . A u b ie r, relative à la quittance de douze
mille livres.
Attendu que cette quittance a été offerte par M . et Mad. de S.-Mande (b ).
En ce qui touche la demande en remise des titres de famille.
Attendu que défunt Jérôme Aubier a été constitué dépositaire desdits titres
par l’acte du 8 mai 1801.
En ce qui touche les intervention et demande de la dame veuve de Jérôme
Aubier.
Attendu que l’acte du 8 mai 1801, enregistré à Pionsat le 2 vendémiaire an 10,
par Chaudillon, qui a reçu 1 fr. 10 centim es, et la subrogation du domaine du
Saulzet, reçue C a stes, notaire, le 8 fructidor an y , enregistrée à Clermont le 15
dudit m ois, ne sont point attaqués ( c ) , cl quo toutes discussions à cet égard
seroient prém aturées, et que dcs-lors son intervention est sans intérêts.
Le T rib u n a l, ouï M . Picot-Lacom be, procureur im périal, déclaro Emmanuel
Aubier seul héritier de son pèro et de son frère.
Ordonne quo dans la quinzaine de la signification du présent jugem ent, les
sieur et dame do S.-Mande seront tenus de passer par-devant notaire,
( a , b , c) V o y ez les notes, A la fin.
acto
�jTS/
............................................... ( 9 )
do transmission à la partie de Jeudi, de la pleine proprie’tjj du Grand-Verger,
situé à Montferrand, énoncé et confiné en l’exploit de demande; sinon, et faute
de ce faire dans ledit temps, et icelui passé, ordonne que le présent jugement
en tiendra lieu, sous les conditions néanmoins, i° que le verger demeurera
grevé envers M. et Mad. de S.-M an de, de la garantie de toutes recherches
généralement quelconques, pour quelque cause que ce soit; 2° quo ledit
sieur Aubier demeurera chargé de la rente viagère de trois cents livres, au
profit de Mad. Debar ; 5° qu’il demeurera chargé dos intérêts , et garant du
capital de treize mille cinq cents livres , mentionnées en 1 acte du 8 mai 18o i .
Ordonne que dans le délai de quinzaine de la signification du présent juge
m ent, le sieur de S.-Mande sera tenu de passer au sieur A u bier, quittance
p ar-d ev a n t notaire, des douze mille francs que le sieur Aubier lui a payés ou
fait payer pour solde de la dot de la dame de S.-M ande; sinon, et faute de ce
faire , ordonne que le présent jugement en tiendra lie u , et servira de bonne et
valable libération en faveur de M. Aubier.
Ordonne enfin que tous les papiers de famille seront remis au sieur Aubier
par la dame veuve Lamonteilhe , représentant à cet égard son m ari, ou par tout
autre dépositaire, état sommaire d’iceux préalablement dressé, au pied duquel
il sera donné décharge;
Sur le surplus des demandes , fins et conclusions de M . Aubier et de la dame
de S.-M ande, ainsi que sur les intervention et demande de la dame veuve Lamontcillie, met les parties hors de procès, dépens compensés, hors l’expédition du
présent jugement, qui sera supporté par M. A u bier, demandeur.
Fait et prononcé judiciairement à l’audience de la première chambre du tri
bunal civil de Clermont-Ferrand, séant Messieurs D om at, président; Chassaing,
juge , et Gauthier , juge à la seconde cham bre, et Monsieur Picot-Lacom bc,
procureur impérial ; le 20 mars 1812: enregistré à Clermont le 7 avril 18 12,
cases 5 , 6 , 7 et 8 ; reçu trois francs pour la reconnoissance d’héritier, mille
vingt francs quatre-vingts centimes pour le droit de m utation, sur le pied de
de vingt-cinq mille cinq cent vingt francs , à raison de 4 pour t o o ; p lu s, reçu
vingt-cinq francs pour droit de réduction sur les premiers cinq mille francs,
et cinquante-un francs huit centimes pour les vingt mille cîhq cent vingt francs
restans ; plus, reçu soixante francs pour le droit de quittance des d o u zo mille
francs, et trois francs pour la mise hors de cause des demandes en inter
vention ; plus, reçu cent seize francs quarante-un centimes pour le dixième
en sus: lesdites sommes payées par ledit sieur A u bier, sous toutes ses réserves de
droit. Signé G o y o n .
Mandons et çrdonnons à tous huissiers sur ce roquis, do mettre le présent
jugement à exécution; à nos procureurs généraux et impériaux près les tribu
naux , d y tenir la main; à tous commandans et officiers do la force-armée, de
prêter inain-forte, lorsqu’ils en seront légalement requis, En foi de quoi, lo
�l e '
( 10 )
présent jugement a été signé par le président et le greffier. Pour expédition ,
signé Laroche, commis-greffier.
Reçu trente-irois francs pour d ro it d’expédition, à Clermont, le 18 avril
an 1812. Signé R ib cy r e , pour G o y o x .
O B S E R V A T I O N S . DE
M.
AUBIER.
(a) Je dois à ma sœur et à mon beau-frère do répéter ic i, que jamais ils n’ont
voulu révoquer leur promesse d’effectuer cette transmission; au contraire , ma
sœur m’a rep roch é, dans plusieurs lettres produites au procès , d’avoir tardé
de lui demander de remplir la formalité de passer l’acte devant notaire ;
mais ceux qui , depuis quelques années, se sont emparés de son esprit, ont
trouvé un moyen indirect de l ’ompêcher, en soutenant tantôt qu’il suffisoit
qu elle me fit cette transmission par testament, tantôt en m’offrant une vente,
et surtout en voulant que l ’acte de transmission ne fit aucune mention du
mandat par moi donné à ma sœ ur, et par elle accepté pour racheter mes biens ,
seul moyen de rendre cette transmission inattaquable; ils ont voulu y substituer
la supposition qu’elle avoit acheté pour son propro com pte: il en résultoitque
le fils et le petit-fils mineur de ma sœ ur, enfin tout représentant ou subrogé
à leurs droits ou à ceux de leurs enfans , même tout créancier des uns et des
autres, auroit eu, dès l ’instant de la mort de ma sœ u r, le d ro it, t°. de mo
dépouiller du verger, parce que, dans ce système , elle seseroit trouvée avoir
épuisé, par la subrogation de Saulzet, toute sa faculté de disposer avant de mo
faire cette transmission; z°. de dépouiller mes potites-filles de la moitié do
Saulzet, comme excédant sa faculté de disposer; et comme mon bcau-frèro
n’avoit pas concouru à la subrogation de Saulzet, mes petites-filles auraient été
exposées à se voir contester mémo la totalité do Saulzet par les représentant
do ma sœur et de mon beau-frère.
L e concours des enfans do ma sœur à la transmission, ne pouvoit procurer
aucune garantie aux m iens, parce que personno no peut traiter valablement
de droits succossifs^ôuverts.
Sur ma réponse que, la vérité et l'intérêt de mes enfans ne me permettoient
pas do me prêter à ce systèm e, je fus engagé à faire citer ma sœur devant lu
juge de paix : elle pensoit, mo d is o it - o n q u ’une conciliation judiciaire assu
rerait plus solidement sa ploino décharge do tout co dont elle avoit été chargée
pour moi; mais à peine cette citation a été donnée, que, sans refuser la trans
m ission, sans désavouer lo m andat, et en so bornant h dire quo les preuves
du mandat étoiont inutiles , il y a eu refus do conciliation , avec annonco do
l ’intervontion do Mad. Lam onteilhc, pour réclamer contro moi toutes les
rigueurs des lois révolutionnaires , mort civile, etc.
�(£) L ’offre de la quittance de 12,000 francs n’a pas été effectuée, parce que
le conseil de ma sœ u r, rédacteur du projet de quittance, y avoit ajouté , et
n’a jamais voulu se départir d’y ajouter une clause , qui me faisoit renoncer
à toute propriété, à tout effet do la transmission: j’ai encore ce projet écrit de
la main de mon beau-frère.
(c) Mes conclusions transcrites
page 2 , font foi que le don de Saulzet
n’a jamais été attaqué , et que j’ai respecté dans cette occasion, comme dans
toutes, mes engagemens.
En nous mettant hors de procès sur l’intervention de ma belle-fille, les Juges
ont pensé avec raison que le don de Saulzet n’étant point attaqué, elle étoit
sans m otif, sans intérêt pour intervenir ; que dans tous les c a s , ce n’etoit
qu’après ma m ort, et avec mes autres enfans, qu’on peut élever la question,
si j’ai pu faire insérer dans la subrogation do S au lzet, que ce bien demeureroit
exempt de rapport en partage.
Ils ont eu raison à tous égards; car ce n’est qu’alors qu’on peut savoir s i ,
même en cas de rapport, il y auroit lieu à retranchement pour compléter la
légitime de mes autres enfans.
Ma belle-fille jouit en paix du bien de Sau lzet; cllo a im prim é, plaidé que
c’étoit moi qui avois voulu, rédigé, et fait signer par ma sœur la subrogation en
vertu de laquelle ma belle-fille jouit : cetto générosité de ma part peut-elle lui
donner le droit d’empêchcr que ma sœur me rende le verger que je me suis
réservé ? L e revenu de ce verger ne fait pas le tiers de celui de Saulzet; ce revenu
est pour vingt ans absorbé par les dettes de mon p ère, de mes enfans, et pré
cisément par celle de i 5, 5 oo fr. dont Saulzet étoit chargé, et que j’ai prise à
mon com pte, après le m ariage, par aveugle tendresse pour son mari et elle.
Et elle pourroit me faire priver des moyens d’obtenir du temps pour acquitter
ce que je veux bien encore payer pour elle !
Je finis en deux mots. Si le système de mort civile, sur lequel elle fondo
ces monstrueuses prétentions, étoit fondé, il autoriseroit mes deux autres enfans
à réclamer chacun sur-le-champ un tiers dans Saulzet. En effet, l ’acte do
fam ille, du 8 mai 180 1, appeloit collectivement mes trois enfans à partager
également tout, si je fusse demeuré sur la liste des émigrés. A in s i, c’est moi
q u i, dans cette affaire, défends les véritables intérêts de mes petites-filles, en
combattant le système des faux amis qui abusent de la foiblesso de leur mère ,
et qui lui font sacrifier les vrais intérêts de ses enfans, au plaisir do provoquer
contre moi l’application des rigueurs prononcées par les décrets rendus contre
les émigrés , en l ’an 5 et suivans.
Mais est-ce au profit des enfans des émigrés qu’ont été créées les listes de
proscription de leurs pères ? autant v a u d ro it diro qu’on a mené les pères à
l ’échafaud pour hâter les jouissances des enfans. Si lc3 résultats d’une si gnmde
�( 12 )
criso politique ont nécessité qu’on maintînt quelques-uns des effets des lois
contre les ém igrés, c’est seulement dans l’intérêt du Gouvernem ent, comme
l ’a décidé la cour de cassation? O r, ici le Gouvernement a été désintéressé et
pleinement satisfait à mes dépens.
Depuis qu’il est si occupé de rétablir les mœurs, peut-il vouloir que les enfans
du père émigré puissent le retenir dans l’anéantissement de la mort civile à
leur égard, et sous le joug de leur insurrection contre les lois de la nature !
Peut-il approuver cette prétention dans la bouche d’une belle-fille dont le
p ère, mon cousin-germain, et le mari ont eu les mêmes opinions que m oi, et
ont suivi avec moi le parti qui m’a mis en besoin d’amnistie ?
Quand le Gouvernement m’a réintégré dans tous mes droits civils, en a-t-il
exclu ceux que je tiens de la nature comme père, et des conventions de
fam ille, autant et plus que de la loi civile î
N on - seulement j ’ai été réintégré dans mes droits par mon amnistie ,
mais même S. M . l’Empereur a , par décret spécial du 10 brumaire an 1 4
déclaré que j’étois conservé dans mes droits civils et ceux attachés à la qualité
de Français.
Mon beau-frère, le plus probe des hommes, n’a voulu que la dot qu’il a
bien reçue en num éraire, et ne veut rien de plus.
M a sœur dit encore qu’elle ne veut rien retenir de mes biens ; ils ne
contestent point la transmission du verger, objet de la demande : tous les deux,
et surtout mon beau-frère, ont exprimé publiquem ent, pendant un mois ,
écoulé entre le jugement et l’appel, leur satisfaction de ce que ce jugement
contenoit tout ce qui pouvoit assurer leur tranquillité. L ’appel fait sous leur
nom est donc le fruit de l’ascendant qu’exercent encore sur leur esprit les
perfides moteurs des divisions de ma famille : sans leurs coupables intrigues,
des amis communs eussent réglé à l’am iable, comme je l’ai toujours demandé,
tout ce qui n’étoit pas encore totalement terminé.
Signé A U B I E R .
M 8 D EVEZE , avoué en la C o u r impériale.
Voy e z les M émoires imprimés en première instance.
A C L E R iV lO N T , de l'Imprimerie de
L andriot,
grande rue St-Genés.
«
Im prim eur-Libraire,
ii
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Jugement. Aubier-Lamonteilhe. 1812?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Devèze
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Jugement du Tribunal de 1ére instance de Clermont, (dont est appel ; sur quoi, voyez les Observations à la suite du jugement), rendu entre M. Aubier-Lamonteilhe père, intimé ; M. et Madame de Saint-Mande, sœur et beau-frère dudit Aubier ; et la dame Champflour, veuve Lamonteilhe, sa belle-fille, appelans.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1812
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2125
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2127
BCU_Factums_G2128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53421/BCU_Factums_G2125.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54019/BCU_Factums_DVV25.pdf
d6e9ed388b9517ccafb20c3d6deaa323
PDF Text
Text
MÉMOIRE
EN
COUR RO YALE
DE RIOM.
RÉPONSE
I re
PO U R
Sieur J o s e p h D UFOUR, Négociant, et d a m e C l a u d i n e
R1BEROLLE son épouse, de lu i autorisée, habitans
de la ville de T hiers, Intimés ;
CONTRE
Sieurs J o seph - J ust R I B E R O L L E et P ierre
R I B E R O L L E , leurs frères et beaux-frères,
Propriétaires, habitant en la commune d'Arconsat,
Appelans.
Conscia mens recti fam œ mendacia ridet.
O vide.
S
i
le mémoire publié par les sieurs R iberolle n’avait
objet que d’exposer leurs prétentions,
d e j u s t i f i e r l e u r s DRoits
.a pour
, et
de discuter les dispositions du jugement r e n d u entre parties par le
tribunal do Thiers , les sieur et dame D ufour, renonçant au secours
de la presse, auraient simplement présente leurs moyens à l’audience
CHAMBRE.
�( 2 )
de la cour. Mais le but réel auquel tendent les efforts dns nppelans
a été d’employer toutes les ressources de la calomnie pour attaquer
le sieur Dufour dans ce qu’il a de plus sacré, sa réputation, sa
probité et son crédit. Un intérêt aussi grave a dû imposer silence à
toutes les considérations qui faisaient désirer le terme d’un débat
toujours fâcheux entre proches ; la publicité delà défense est devenue
un devoir et une nécessité. Toutefois, et malgré l'acrimonie de
l’attaque non seulement dans les imputations qu’elle s’est permises ,
mais encore dans les expressions qu’elle a em ployées, le sieur
Dufour saura se renfermer dans les limites de la modération. Toutes
ses corn' inaisons de r u s e , à!adresse et de subtilité se borneront à
rétablir les faits, à donner aux actes la teneur qui leur appartient,
et à invoquer le témoignage de la vérité. Ses adversaires n’impu
teront qu’à leur propre imprudence les révélations qui peuvent en
découler, malgré son désir d’éviter toute espèce de récrimination.
La liquidation de la succession de la mère commune , toute
m obilière, a mis en mouvement l’ambition des sieurs lliberolle qui
38 45
en recueillent chacun un tiers. L ’aîné, débiteur de
ji
fi** > ne
voudrait rien rapporter à la masse; son frère désirerait y prendre
beaucoup. Pour obtenir ce double résultat, il a fallu, dans le
m ém oire, priver la dame Riberolle de volonté et la déclarer inca
pable de toute gestion ; constituer le sieur Dufour leur beau-frère
le mandataire général de la m è re , et lui attribuer l’administration
de toutes les affaires; supposer qu’il s’est emparé de sommes consi
dérables : qu'outre celles qu’ il avait reçues pour sa belle-m ère
personnellem ent , il a encore profité cle 63,670 fr. 5o c. provenant
de la sucôession A rn a u d ; perçu des créances; vendu plusieurs
o b je ts , et spolié du m obilier p our une v a le u r de 2 6 ,0 19 fr- j
composer J^j^ ccession de tous les iJiffor accumulés pendant
quinze ansS -h+pcapitaux réels ou supposés , et n’admettre , à l’égard
de la dame Riberolle m è re , ni dépenses ni besoins ; ajouter à cette
masse imaginaire un trésor en foui, oublié pendant sept ans et retiré
par tes sieur e t dame D u fou r, à l ’insu de toutes les parlies inté
ressées; o b l i g e r enfin le sieur D ufour, eu sa qualité de m a n d a t a ir e
ou de géran t, à rendr e compte a u x appelans des fo r c e s de la
�succession ainsi form ée, et qu’ils portent dans le tableau annexé à
5
leur mémoire à la somme de 142,818 fr. o c.
La relation exacte des faits et les propres écrits des appelans
suffiront pour faire crouler tout cet échafaudage.
Par eux-mêmes souvent les médians sont traliis.
Gresset, M é c h a n t , acte 3 , scène 5.
FAITS.
Par testament du 6 thermidor an i 5 , Cbarles-Gilbert Riberolle
avait légué à Anne Guillemot son épouse l’usufruit et la jouissance
de la moitié de tous ses biens meubles et immeubles, sans nuire à
sa dot et à ses avantages matrimoniaux. 11 assura à ses deux fils,
appelons, en préciput, le quart de tous ses biens; divers legs
furent stipulés.
L a succession du sieur Riberolle était considérable. Lespropriétés
territoriales valaient 200,000 II*. Les créances, et le mobilier inven
torié, allaient au-delà de 120,000 fr.
En 1809, Joseph-Just Riberolle arracha de sa mère les sacrifices
les plus énormes , en dictant les stipulations de son contrat de
mariage avec demoiselle Monchanin-Desparras , relatives au règle
ment des droits de sa mère.
Ces droits se composaient de la dot portée en son contrat de
mariage du i janvier 1785 ; des sommes et mobiliers reçus par le
5
sieur Riberolle lors dy partage des successions des p è re , mère et
frère de la dame Guillemot son épouse; de ses gains et avantages
matrimoniaux , et enfin de l’usufruit qui lui avait été conféré par le
testament du 6 thermidor an 1 .
3
On la fait intervenir dans le contrai de mariage en date du
2 février 1809, pour déclarer qu’elle convertit tous ses droits
m obiliers, biens et actions, voulant que la présente conversion e t
héduotion
ait effet et 'vaille pour le futur époux
comme
traité
à
forfait ou donation entre-vifs, aux droits et objets suivans :
10
Lue somme de i2 ,5 o o fr. que Joseph-Just Riberolle ne paiera
qu a p rès le d é c è s dp. s a m è r e et sans intérêt;
2° La jouissance de la maison située
à
T h iers, dépendante de la
�succession du sieur R iberolle, ainsi que d’un mobilier nécessaire
pour compléter l'ameublement ;
° La propriété de quelques objets d’argenterie ;
5
4 ° La dispense de rendre compte au futur époux et à ses frère et
sœ ur, cie toutes les denrées qui étaient ameublées à l’époque du
décès du sieur Riberolle p è re , ainsi que des récoltes de toute espèce
qui cont provenues dans les biens dépendant de ladite succession,
qui lui avaient été légués par son mari , et desquels fruits et récoltes
elle déclare avoir fait emploi pour l’acquit des menues dettes de
ladite succession, frais funéraires et de dernière maladie, ainsi que
la nourriture et entretien de Ja commune famille;
5° line
pension annuelle et viagère de 2400 fr. que le futur
époux paiera à sa m ère, en deux termes égaux, les 11 novembre
et 5 mai de chaque année. Il s’oblige de plus à lui fournir tout le
bois nécessaire à son chauffage.
On stipula qxi’au décès de la dame Riberolle , la rente viagère
serait éteinte , et le futur époux libéré même de tous les arrérages
échus quand même il n’en présenterait aucune quittance , à moins
qu’ il n’en eût été formé citation ou demande.
L a dame Riberolle excepte de la cession les sommes et objets
qui lui appartiennent personnellement et que son mari n’a pas reçus,
notamment le recouvrement des sommes à elle dues par les sieurs
C o u rb y-Jo u b ert, et par les héritiers Lacossade et Lachassaigne ,
p o u r différens capitaux et rentes qu’ils prétendent avoir consignés
et en être libérés.
Une clause finale réduit à 1800 fr. la pension de la mère pendant
tout le tems de sa cohabitation avec les futurs époux.
Les dispositions de cet acte sont évidemment combinées de
manière à attribuer au fils aîné un bénéfice annuel sur les revenus
de sa mère , qu’il avait restreints sans modération*
T elle était l’opinion qu’en avait la famille , et notamment le sieur
Guillem ot, de L y o n , qui la manifeste dans une lettre écrite à la
dame Arnaud sa sœ ur, le 10 juillet, six mois avant le m ariage,
lorsqu’on s’occupait du règlement des affaires.
« Je pense, écrit-il, que
votre
première m’annoncera le parti
�«■définitif qu’aura pris notre sœur ; je ne peux voir dans l'incertitude
«■qu’elle montre que de la faiblesse, puisque celui que je vous ai
«• indiqué est le se u l qui puisse assurer à elle de la tranquillité et
« des jouissances , et des avantages à ses enfans , sur-tout à Adèle.
« Quant aux frais d’inventaires, ils ne sont pas aussi considérables
« que les intéressés vous les montrent; fussent-ils plus grands, on
« ne saurait acheter trop cher son repos. Je m’abstiens de vous dire
« toutes les raisons que j’ai eues pour vous donner mon avis à ce
« sujet. Quoi qu’il en so it, j e n ’aurai pas ci me reprocher de vous
« avoir laissé ignorer mon opinion et celle des MM. D upuy.
« C ro y ez-m o i,
«■
outré
de
ses
j ’ai
lu
dans
le
dispositions
coeur
envers
de mon
sa
neveu
MERE.
,
et
j ’ai
Ét f .
»
Ce n’est pas la seule fois que nous invoquerons le témoignage du
sieur G uillem ot, qu’on a voulu opposer aux intimés.
Voyons comment la dame veuve Riberolle s’expliquait sur le
règlement de ses droits, dans une lettre qu’elle écrivait à la dame
Arnaud sa sœur, et dont la date (omise) est fixée par le texte même.
Après avoir parlé de sa belle-fille , de la visite que les nouveaux
époux se proposent de faire à C h arn ay, du contrat de mariage de
son fils, elle ajoute : « Je vous avoue que l’histoire des i2 ,5 o o f r . ,
« dont il a plu à MM. Desparras et D upuy de le mettre jouissant,
« sa n s q u e v o u s n i m o i n o u s p u is s io n s Le m e ttr e d a n s n o tre t ê t e ,
« parce qu’effectivement cela n’avait rien de commun
aux
biens
* fonds que je lui cédais. C ’est donc une injustice que je fais à
« Lan drevy ( Riberolle jeune ). Cela me désespère. V o y e z donc
65
« tout l’avantage qu’a Riberolle avec moi? Il a o fr. des 12,5oo fr.,
« la jouissance des biens pour 3,400 f r ., et dont j’aurais pu tirer
« Sooo fr. en me faisant encore des réserves très-agréables ; voilà
« donc autres 600 fr. q u 'il gagne, et encore l’agrément de la jouis« sauce de la maison de la ville , et plus encore ma pension, et mon
« chauffage qui est Compté à raison de 800 fr. »
A i n s i , d’après le calcul de la mère 3 et en employant scs
expressions, le sieur Just Riberolle g a g n a it annuellement sur elle
au moins i , oo fr.
5
11 réglait dans le môme tems avec sa sœ ur, en obtenant cl’e lle ,
�par deux actes séparés et authentiques des i er et deux du même
mois de février, la cession de ses droits mobiliers dans la succession
paternelle, moyennant 10,000 fr. , et de ses droits immobiliers,
5
moyennant i ,ooo fr.
L e prix stipulé étant hors de proportion avec le quart qu’avait à
prétendre la demoiselle Riberolle dans les biens de son p ère, le
sieur Riberolle, par suite des conventions arrêtées, délivra le même
jour à sa sœur une reconnaissance de la somme de 17,200 fr., pour
supplénn ni de prix.
Lorsqu’on i8 io ,le sie u r Dufour demanda la main de la demoiselle
Riberolle, il lui fut imposé pour condition de ratifier avec elle les
cessions. La quittance du principal, qui était en totalité de 42,200 f. ,
et des intérêts depuis le traité , fut délivrée et signée par eux, après
la rédaction du contrat réglementaire , mais a vant la célébration du
mariage. C ’est donc bien mal à propos que le sieur Riberolle aîné
veut se donner des airs de générosité envers sa sœur.
Les moyens abondaient pour rendre ces précautions inutiles :
le sieur Riberolle père avait dans son testament outre-passé la quotité
disponible; la darne Dufour n’avait pas été éclairée sur la consis
tance des biens; elle éprouvait une lésion énorme; néanmoins, par
respect pour la mémoire de son père et par amour de la p a ix, elle
renonça à toute espèce de.réclamation.
On ignore les arrangemens qui ont été pris entre les deux frères.
La dame Riberolle 11’habita pas long-tems avec son fils ; ce ne
fut point par choix, mais par nécessité, qu’elle se relira chez la dame
A r n a u d . Elle n’avait point de goût pour la campagne qu’elle habitait ;
et une différence de quinze années entr’elle et sa sœur plus âgée ,
ne lui offrait pas les avantages de l ’intimité. Les procédés de son
fils, le non service de sa pension, les besoins qu’elle é p r o u v a i t
furent les seules causes qui la déterminèrent à quitter le domicile
commun.
Ecoutons cette dame dire à sa sœur dans une lettre du 26 juin 1809
( 4 mois après le mariage de son fils ).
<f U n’y a plus pour moi aucune satisfaction sur la terre ; si
« Adèle ne vous l’a pas d it, il faut que j’ose vous l’avouer.
�« douleur s’accroît tous les jours; je ne puis presque pas me
« souffrir ic i, et j’y
tiens plus
que jamais, parce que je chéris tout
« ce que le pauvre M. Riberolle aimait; que je suis près de ses
« cendres et de celles de notre digne m ère, et que les miennes
« ne peuvent pas tarder à s’aller réunir aux leurs..............................
« L e mariage de mon fils a mis le comble à mes m aux , je ne
«• vous en parlerai plus parce que cela 11e sert à rien. Si mon iils
« désire ou fa it sem blant que je reste avec lu i,„ c’est sans doute
v l’ambition qui l’y engage. Dans les lettres qu’il m’écrit de Charnay,
(f il me prie de le pardonnner , s ’ il m’a parlé avec trop de viva« c itéy et qu’il fera tout ce qui dépendra de lui, ainsi que sa femme,
« pour nie rendre heureuse. Ce sont de beaux mots , mais leur
«f
conduite les démentira toujours ; en conséquence ,
« t ô t ou t a r d q u i t t e r l e s
«■mari me force à chérir. »
lieux
il faudra
que le souvenir de mon pauvre
L ’événement prévu par le sieur Guillem ot, qui avait lu dans le
cœ ur de son neveu ses dispositions envers sa m ère3 se réalisa
bientôt. La dame veuve Riberolle accepta un asile chez sa sœur ;
elle s’y retira avec sa Itlle.
Les appélans ont avancé, dans leur ex p o sé imprimé , que leur
mère vivait gratuitement chez la daine Arnaud ; ce fait sur lequel
ils insistent avec réflexion est de toute fausseté. Ce qui eut été
convenable pour un séjour accidentel et déterm iné, cessait de
l’ètre pour une cohabitation perpétuelle ; la dame Riberolle n’aurait
pas accepté une libéralité que sa délicatesse aurait considérée comme
une humiliation que ne comportait pas la somme de ses revenus ;
mais la pension ne fut réglée qu’à 600 fr. par année.
C ’est à Charnay même , et le 28 mars 1810 , que fut contracté le
mariage de la demoiselle Claudine Riberolle avec le sieur Dufour ;
les n o u v e a u x époux établirent leur domicile à Thiers, siège de leur
commerce.
L es sieurs Riberolle font soigneusement remarquer celte époque
(page 11 do. leur mém oire) , comme celle « où le sien/' D ufour
« q u i avait obtenu toute la cortjiatice des dames A rn a u d et
« Riberolle , f u t chargé de la gestion e t de l*administration de
�« toute Leur fortu n e , et devient leur mandataire dans toute la
te signification du mot. »
L ’observation n’est pas plus heureuse
q u ’ elle
n’est vraie. A l’égard
de la dame Arnaud, il sera p ro u vé , et on ne peut le contester, que
le sieur Guillemot son frère, habitant à L y o n , dont Charnay est
éloigné de 5 ou 4 lieues, a été constamment et exclusivement chargé
des affaires de sa sœ ur, jusqu’au décès de celle-ci; sa correspon
dance et les actes Je famille établissent cetie gestion. Aussi le sieur
Dufour y est il resté absolument étranger , sauf une négociation par
ticulière dont on parlera bientôt.
L ’administration de la dame veuve Riberolle était peu compliquée
et ne réclamait pas l’assistance d’un tiers. L e traité du 2 février 1S09
avait fixé tout son avoir à un revenu viager de 2,400 fr. Le sieur
JustRiberolle nele lui a pointpayé: iln e s’est nullement inquiété des
besoins de sa m ère, ni de son entretien, ni des dépenses attachées
à son â g e , à sa position de famille et à ses goûts.
O11 croit avoir tout prévu quand 011 a dit qu’elle n’avait aucune
charge à supporter, aucun besoin à satisfaire.
Les sieurs Riberolle savaient fort bien profiter de la tendresse et
de la générosité de leur mère pour l’empêcher de former des
capitaux avec ses économies.
Ils produisent, sous la date du 11 novembre 1811 , une quittance
écrite en entier de la main du plus jeune, à C h arnay, et revêtue
de la signature de la dame Riberolle, précédée des mots : ¡ ’ approuve
ce que dessus.
Cet acte constaterait que Just Riberolle a payé à sa mère la somme
de
7 , 2 0 0 fi*.,
pour trois ans de sa pension de
2,400
fr . , soit en argent,
soit en effets payables à présentation; qu’elle a reçu de plus 2,000 fr.
pour les denrées qu’elle lui a cédées.
Cette somme de 9,200 francs n’a jamais été délivrée à la dame
Riberolle ; elle ne pouvait l’ê tre, au moins en totalité.
En eiïet, d’une p a rt, la dame Riberolle ne pouvait vendre
à son fils des denrées dont elle avait déjà fait em ploi, lors du traité
de 1809, et qui n’étaient plus dans ses mains ; d’un autre côté , si
cette quittance n’eût pas été une libéralité, laite à scs deux fils, le
�9
(
)
sieur Just Riberolle n’aurait pas manque de réduire les arrérages de
la pension à la somme de 1800 f r . , pendant la durée de la cohabi
tation ; comme aussi de retenir la somme par lui employée en achat
• de diamans ou cadeaux de n o ces, lors de son m ariage, dépense
qu’il avait portée à
5 ou 6000 fr ., quoique sa mère ne l’eut autorisé
que jusqu’à concurrence de 1000 fr. Mais toutes ces déductions
devenaient inutiles, quand 011 se libérait sans bourse délier.
Quel que soit au surplus le mérite de la quittance, ce qu’il est
assez indifférent d’examiner, il paraîtra extraordinaire que les sieurs
Riberolle veuillent constituer le sieur Dufour comptable de cette
somme de 9200 f r . , prétendue payée à C h a rn ay, en son absence,
comme ayant passé immédiatement en ses mains , et ayant été
employée à ses affaires personnelles (p . 12). Quand leur assertion
ne choquerait pas la vraisem blance, elle ne pourrait devenir un
titre contre leur adversaire. On le sent bien , mais il faut frapper les
esprits par le nombre et par l’énormité des réclamations.
L ’harmonie n’existait point dans la famille. Les frères Riberolle,
divisés entre eu x, se refroidirent aussi avec le sieur Dufour.
L a séparation et les griefs de la mère avaient donné lieu à des
explications plus ou moins vives ; 011 se voyait p e u , et la pension
n’était pas servie.
La dame veuve Riberolle fut conseillée de prendre une inscrip
tion sur les biens de son fils : on a écrit au Mémoire (p . i ) qu’elle
5
avait été prise par le sieur Dufour.
Que l’énonciation soit mensonge ou e rreu r, peu importe ; dans
tous les c a s , elle est facile à relever.
L e 12 octobre 18 12 , la dame R iberolle, en envoyant le contrat
de mariage de son fils et un bordereau d’inscription rédigé par
M. Dupuis qui lui avait conseillé celte mesure , pour assurer sa
pension, invitait son gendre à faire les diligences nécessaires, après
avoir pris l’avis d’un jurisconsulte qu’elle lui indiquait. Le sieur
Dufour ayant prié sa belle-m ère de l’en dispenser, elle écrivit
3
directement à un avoué qui déposa le bordereau le 2 janvier 18 1 ,
Ces deux lettres sont rapportées.
Cette femme respectable employait tous scs soins à maintenir la
�( 10 )
bonne intelligence entre ses enfans , recommandant à chacun la
patience et la modération. Ses fils ne parlaient que de leurs besoins;
l’aîné, de ses mauvaises affaires et de ses nombreux enfans. La
mère s’épuisait en libéralités, et accordait sans cesse des délais pour •
le service de la rente viagère.
L e sieur Riberolle-Landrevy peint avec exactitude cet état de
choses dans ses lettres. « T u m’apprends, ma très-chère maman,
« que tu as compté à mon oncle 200 f r ., montant d ’un e ffe t que
« je lui avais souscrit lors de mon voyage à L }o n . L e peu de
(f confiance qu’a mon oncle à mon exactitude, me peine ; si j’eusse
« prévu cela , je me serais procuré celte somme ailleurs.
Dans une autre, du 18 juin 1817 : « J’accepte avec plaisir le
K cadeau que tu veux bien me faire, et t’en remercie. La crainte
« où j'étais que tu eusses besoin de cet a r g e n t est seule cause de
« l’orgueil dont lu me pares. »
C ’est donc par oubli que, dans son interrogatoire, Riberolle
jeune a déclaré que sa mère ne lui avait jamais rien avancé ni donné.
Il d it, dans une troisième, du 20 février 1819 : « Tu me
« témoignes la crainte où lu étais que mon frère me fil demander
k m alhonnêtem ent les clefs à D ufour; sois sans inquiétude ;i cet
« égard : tout se passera selon les désirs. »
L e quinze avril suivant, il lui écrivait: « Si tu fais bien, je
« t’engage à écrire à mon frère que tu désires ardemment être
fr payée , e t , en un m o t, que tu exig es de lu i un règlement
« pour tout ce qui l’est du; engage-le à aller te voir. »
il s’expliquait ainsi, le i er avril 1820 : « Je te sais gré de Tein
te pressement que tu mets à me transmettre les intentions de mon
« frère à mon égard. Si ce qu’il promet s’effectuait, il y a beau
« tems que je serais payé ; tu le serais a u ssi; nous serions contons
(( l’un et l’autre, et lui beaucoup mieux dans scs affaires, lu me
ft recommandes la modération ei le ménagement que l’on doit à un
« frère...... Je ferai lout ce que tu exiges de moi; mais il convient
« qu’il soit pressé , sans cela je n ’obtiendrais jam ais rien. »
Enfin, il écrivait, le
5 juin suivant : «T a lettre m’avait fait espérer
tr que mon frère aurait satisfait à ses engagemens, en me payant
m
�<t dans le courant du mois la moitié de ce qu’il me doit; mais il suit
« en tous points le proverbe (promettre et tenir sont deux). 11 n’est
« pas moins vrai que, pour faire honneur à mes engagemens , il
« me faut recourir aux emprunts, ce qui ne laisse pas que d’ètre
« trcs-désagréable. »
IN’cst-il pas curieux de voir aujourd’hui le sieur Riberolle jeune
se reunir à son frère, pour imputer au sieur Dufour la volonté de
faire naître de mauvaises dispositions entre la mère et le fils?
C ’est encore par oubli sans doute que , dans son interrogatoire,
il a répondu à une question faite d’oflice par le juge-commissaire,
qu’une seule fois sa mère lu i avait d it : Je ne sais pas pourquoi
ton frère ne me paie pas.
La dame Arnaud avait été colloquée, dans un ordre clos devant le
tribunal de T h ie rs, pour deux sommes formant ensemble celle de
9.597 francs , et dont 6000 fr. étaient grevés de l’usufruit du sieur
G uillem ot-D arrot, l’un doses frères. E lle e n v o y a au sieur Dufour
une procuration spéciale pour toucher ces fonds, en l’obligeant au
paiement de l’intérêt annuel dû à l’usufruitier. Ce mandat fut rem pli,
ainsi que le constatent deux actes authentiques, des G et 12 octo
bre 1820.
Immédiatement après la réception des fonds, le sieur Dufour en
donne avis à la dame Arnaud sa tante , qui , de son coté, en instruit
le sieur Guillemot, de Lyon, son chargé d’affaires. Aussi, dans une
leltre du 6 novembre 1820, il écrit à sa soeur : « Je suis charmé
« d’apprendre que Dufour ait reçu pour vous les 9000 fr. qui
« vous étaient dus à T hiers, dont l’intérêt des 6000 fr. doit être
« payé à notre brave frère cadichon (G u illem o t-D arro t), sa vie
3
«f durant, et à vous celui dos ooô fr. »
Bientôt après, ces doux sommes furent remises à la dame A r n a u d
qui ou a délivré quittance au sieur D ufour, le 10 janvier 1821 ,
en ratifiant tous les engagemens contractés en so n n o m par les actes
des (> et 12 octobre précédent. Cette quittance est rapportée.
Il y a plus, les frères Riberolle produisent eux-mêmes une copie
du règlement fait après le décès de la dame Arnaud entre scs d e u x
héritiers, Guillem ot, do L y o n , et la dame veuve Riberolle , dans
�lequel on convient de p a y er p ar moitié la renie de 5oo f r . , qui
éta it due ¿1 leur fr è r e de Thiers ( Guillem ot-D arrot). L ’obli
gation de payer l’intérêt pi’ouve évidemment la réception du
capital.
Où est donc la bonne foi des appelans dans le reproche adressé
au sieur Dulour, de n’avoir jam ais rendu compte des suites de ce
mandat ?
D ’après ces explications, il faudra bien qu’ils se résignent à rayer
encore
du
tableau
indiquant
la
composition
de
la
succession
cette somme de 9 5 9 7 fr. 8 c. ainsi que celle
de 2200 fr. 94 c. pour les intérêts calculés pendant 4 ans et 7 mois.
de la
dame r ib e r o lle
,
Nous avons déjà prouvé qu’on ne peut y comprendre les 9200 fr.
énoncés dans la quittance du 11 novembre 1 8 1 1 , ni les intérêts
calculés à 6670 fr.
Il était dû à la dame veuve Riberolle et au sieur Just Riberolle
son fils une somme de 4810 fr. i
5 c.
, pour laquelle ils avaient été
colloqués dans le même ordre. L ’acte précité du 12 octobre 1820
établit le paiem ent, en l’acquit du débiteur, au sieur Dufour se
portant fort poxir sa belle-m ère , i° de 2/|o5 fr. pour la moitié du
capital; 20 de 209 fr. pour intérêts , total, 2614 fr- » et non pas
2800 f r . , comme on le dit par erreur au mémoire (page i5 ).
L e sieur Riberolle aîné a reçu une somme égale pour la moitié
qui lui appartenait.
On verra dans la suite que cette somme de 2614 fr. a été portée
en ligne de compte dans un règlement fait entre la dame veuve
Riberolle et le sieur Dufour.
C ’est à cette époque, et le 16 janvier 1821 seulement, que la
dame Riberolle put obtenir de son fils le règlement tant promis et
tant attendu. U fut fait à Charnay entre la mère et le bis, et non en
présence des sieurs Riberolle jeune et Dufour, qui n’en ont eu
connaissance que postérieurement (voir les interrogatoires des deux
frères).
L ’état sur lequel ce compte fut ré g lé , et qui est écrit en entier
de la main de la dame R iberolle, constate que les arrérages de sa
pension viagère jusques et compris le
terme échu
le 12 novembre
�1820 , se portaient à 21,960 fr. ; il avait etc payé par le
fils,
en
argent ou pour les impôts de la maison de T liiers, dont la dame
5 25 fr.; par conséquent
Riberolle avait la jouissance , la somme de o
le fils r e s t a i t débiteur de celle de 18,955 fr.
L ’acte souscrit réduit la dette à la somme de i ,ooo fr. stipulée
5
payable après le décès de la m ère, en s ix termes ég au x, d’année
en année, et sans intérêt qu’à défaut de paiement à chaque t^rme.
Ainsi Just Riberolle obtient de la générosité de sa mère une
réduction de g
f r . , un délai éloigné pour le paiem ent, et le
5 55
bénéfice des intérêts qui lui sont remis.
Poursuivant! le système arrêté, de présenter leur beau-frère
comme ayant provoqué par des combinaisons odieuses ce règle
ment pour s’en approprier le pro d u it, les sieurs R iberolle, après
avoir rendu compte de ces résultats, ne craignent pas de dire dans
leur m ém oire, page i\ : le projet conçu p a r le sieur D ufour, de .
s ’em parer des arrérages de la ren ie, dus ¿1 sa belle-m ère, avait
ainsi échoué.
11 y a mauvaise foi et maladresse dans cette réflexion.
i° Il est avéré que Dufour est demeuré étranger au règlement
et à tout ce qui l’a précédé ;
20 L ’acte lui-même offre la preuve qu’il 11 ex e r ç a it aucune
influence sur sa bclle-m cre, ou que s’il avait obtenu sa confiance ,
il n’en abusait pas dans son intérêt personnel. En effet, un ambitieux
qui en aurait eu le pouvoir se serait bien gardé d’accorder à
Riberolle aîné les avantages qu’il a obtenus.
A in si t o m b e n t tou tes ce s a ssertio n s a c c u m u l é e s q u i se d issipen t
au p r e m i e r e x a m e n .
11 est vrai que
la dame Riberolle dont la tendresse était égale
pour tous ses enfans , crut devoir un dédommagement aux sieurs
Riberolle-Landrevy et Dufour. En leur apprenant qu’elle avait
fait une remise à son fils aîn é, elle souscrivit à chacun d’eux un
cilet de 3ooo fr. qui 11e fut payé qu’après la vente de Çharnay. L a
manière dont sa pension était servie ne lui permettait pas d’autre
moyen de compensation.
L a dame G uillem ot, veuve Arnaud, est décédée en décembre
�1821, après avoir institué pour ses héritiers universels la dame veuve
Riberolle et le sieur Joseph Guillemot ses frère et sœ ur, par testa
ment du 18 octobre précédent.
Elle avait donné en outre à sa sœur sou argenterie, ses joyaux
et bijoux, et l’usufruit de son domaine de Charnay, ou, à son choix,
une somme de
5ooo fr. une fois p a yé e ,
comme équivalent de cette
jouisi^nce.
Ce testament contenait de plus différens legs ; savoir : à la dame
Dufour sa n ièce, sa garde-robe et tous les habillemens et linge à son
usage personnel ;
A la fabrique de l’église de C h arn ay,
Au curé de cette paroisse,
5oo ir. ;
5oo fr. ;
E t au sieur Pézard , petit-neveu de son mari , la somme de
10,000 f r . , payable une année après le décès de la testatrice.
La dame R iborolle, vivement affectée de la mort de sa sœ u r,
avait appelé près d’elle toute sa famille. L e sieur Guillemot et sa
femme, les premiers instruits, vinrent partager sa douleur. Just
Riberolle ne jugea pas à propos de se rendre à Charnay. Son
interrogatoire constate qu’il ne répondit pas à l ’invitation de sa
mère qui l’appelait auprès d’elle; mais il y envoya sa fille qui 11’a
q u ille Charnay qu’avec son aïeule. Lorsqu’il fut question de
s’occuper des affaires d’intérêt, Pierre R iberolle, qui s’était rendu
sur les lie u x , 11e pouvant s’entendre avec son oncle G uillem ot, de
L y o n , ne voulut plus s’en mêler. Il en convient dans son interro
gatoire.
Pourra-t-on maintenant blâmer le sieur Dufour d’avoir prêté à sa
belle-m ère une assistance que ses fils lui refusaient? son affection,
son devoir et l’intérêt commun lui en faisaient une n é c e s s ité . Au
surplus, cette coopération était peu importante: elle se réduisait a
aider le frère et la sœur dans le partage ou le règlement de la
succession indivise entr’eux , et à faire face aux détails et aux
embarras qui sont, toujours la suite d’un décès.
La succession de la dame Arnaud se composait du domaine de
Charnay, qu’elle habitait; du mobilier et des denrées contenues
dans les bàtimens ; des fonds placés à L yon par l’intermédiaire du
�( >5 )
sieur G uillem ot, et de quelques modiques créances à répéter sur
les lieux.
Les droits des cohéritiers étaient fixés par le testament du
18 octobre 1821, qui devenait la hase principale du règlement. La
dame R ibërolle, comprenant que l’usufruit du domaine était préfé
rable à la somme de ooo f r ., opta pour la jouissance.
5
Dans cette position, on conçut le projet d’atlribucr à l’usufruitière
la propriété de l’immeuble, en laissant au sieur Guillemot une partie
des valeurs qui étaient dans ses mains, et qui, d’après son compte,
se portaient à la somme de
56 ,000 fr.
L e sieur Dufour rédigea, sur ces données, un traité qui fut accepté
et signé le 4 janvier 1822, après quelques débats; une copie en est
produite par les appelans, et l’un des doubles , lacère, a été trouvé
dans les papiers de la mère com m une, après son décès.
Quelques réflexions firent penser au sieur Guillemot qu’il était
lésé par le traité ; une explication produisit de l’aigreur entre lui
et
son
neveu.
L a dame llib ero lle, toujours animée de seniimens
généreux et du désir de conserver l’harmonie dans sa famille ,
consentit à considérer comme mil l’acte consommé, et à accepter
la médiation du sieur L avcrrière , notaire, proposé par son frère
pour un règlement définitif.
Dans l’intervalle, le sieur Guillemot présenta à sa sœur u n état
particulier de situation avec la dame Arnaud, depuis le
25 octobre
1820, qui le constituait reliquataire, sur les intérêts des capitaux
qu’il avait touchés, d’une somme de 1687 fr. 10 cent. Sa libération
s’ e ife c tu a par u ne compensation avec près de trois ans d’arrérages
>de la pension de 600 f r ., que la dame Ribërolle payait à sa sœur.
Les énonciations écrites par elle, sur l’état produit par les frères
R iberolle, prouvent que la somme de 1687 fr 10 cent. 11’a pas été
versée eu argent. On y lit, en effet, reçu le solde ci-dessus, d ’après
nos arrangQtnens , à C h arn ay, ce 7 janvier 1822. S i g n é veuve
Ribërolle. Plus tard, le sieur G uillem ot, trouvant sans doute celte
quittance insuffisante , lit ajouter par sa sœur un nouvel acquit, sans
date, ainsi conçu : reçu la somme de 1687 fr. 10 cent., de mon frère
�( 10 )
Joseph Guillem ot, pour solde de compte ci-dessus ¡ f a it d ’après
nos arrangemens. Signé veuve Riberolle.
Ainsi, jamais cette somme n’a été dans les mains de cette dame.
Dans tous les ca s, eLsi la tactique des appelans n’était déjà connue,
on ne concevrait pas qu’ils eussent dit dans leur m ém oire, p. 2 1 ,
que le sieur Dufour avait r e çu , sous le nom de sa belle-m ère, cette
somme de 1687 f r . , et qu’il en est comptable.
C ’est le lendemain, 8 janvier, que les parties intéressées, le
sieur Guillemot et la dame R iberolle, acceptèrent le traité proposé
par Me L averrière, pour régler leurs droits respectifs. En voici les
dispositions principales :
i° Au m ojen de la vente consentie le même jour, devant le
médiateur, par le sieur Guillemot à sa sœ ur, de sa moitié du
domaine de C h arn ay, la dame Riberolle reste seule propriétaire
dudit domaine ;
2° Sur l’argent et les dettes actives dont les titres sont au pouvoir
36
3
du sieur Guillemot, ce dernier se retiendra
,oooi’r ., dont ooo fr.
en argent, pour la part e t portion (jni p eu t lu i revenir dans la
succession mobilière et immobilière de M “ ° A r n a u d , les dettes
actives comprises ; il fera compte à M “ 9 Riberolle de la somme
de 20,000 f r . , soit en effets ou argent comptant, sur les
56 ,000 fr .,
pour la rentrée desquels effets les contractans se garantissent, de
part et d ’a u tr e , de toutes pertes qui pouvaient s u r v e n i r jusqu’à
l’échéance des promesses ;
5° Outre la totalité dudit domaine de Charnay et les
20,000 f r .,
la dame veuve Riberolle aura de plus tout le m obilier, linge,
denrées, vin, blé et fourrages, avec les bestiaux et les petites
dettes actives dues à la succession par diverses personnes de
C h arn ay, dont elle fera le recouvrement ¿1 ses périls et risques ,
sans recours contre M. Guillem ot.
Mais la dame Riberolle
demeure
seule
chargée
de
payer
la
totalité des droits de succession, les frais d’enterrement et œuvres
pies de la défunte, les frais de son testament, les frais de maladie,
et tous les petits comptes journaliers dus par la défunte, les gages
�des domestiques com pris , com m e encore les legs en argent faits
par la défunte, montant ensemble à 10,600 fr. ;
4° Enfin la ren te,
frère
des
e lle s ,
parties,
tous
ou les intérêts dus à M . G uillem ot (D a r r o t) ,
sera p ayée p ar ces dernières , par moitié entre
les ans, le
2
o cto b re, jusqu’à son extinction.
P o u r préven ir le désaveu que l’on pourrait faire sur la participa
tion de M® L av e rriè re à ce règlem ent définitif, on prévient qu’011
est porteur de sa quittance d’h on o raires, tant pour la vente que
pour le traite sous signatures privées.
Il est très-im portant de m ontrer quel éta it, à cette é p o q u e , le
tableau de la fortune et des ressources de la dame v e u v e R ib e r o lle ,
ainsi que les charges qui pesaient sur elle.
D e son c h e f, elle 11e pouvait disposer que de sa pension viagère
de 2400 fr. E lle n’en a pas touché un centime de son fils aîné ,
depuis le règlem ent du iG janvier 18 2 1. C ’est un point jugé et non
contesté , que ce dernier doit rapport à la succession de sa m ère de
la totalité des arrérages. L a dame R iberolle n’a donc trouvé aucune
ressource de ce coté.
E lle avait, du ch e f de la dame Arnaud sa sœ u r, la propriété de
C h arnay, qu’elle habitait; la somme de 2 0 ,oo ofr. à répéter contre son
frère de L y o n , le m obilier nécessaire aux bâtimens et à l’exploita
tion, des denrées peu considérables en v a le u r, et quelques petites
créances éparpillées dans Charnay et dont la rentrée était au moins
difficile.
Cependant il fallait p ou rvo ir aux dépenses urgentes qui sont la
suite d ’un d écès; aux œ uvres pies dont la défunte et son héritière
avaient la louable habitude; aux habits de deuil m êm e p our les
dom estiques; aux frais de toute esp èce; à la tenue du m én age; aux
soins de l’exploitation du dom aine, au paiement des dettes journa
lières et des gages des dom estiques; aux droits de s u c c e s s i o n , et
enfin à la délivrance des legs se portant à 10,600 fr.
A e lle était la p o sitio n e x a c t e d e la d a m e R i b e r o ll e .
Disons maintenant
a v e c le r é d a c t e u r d u
m ém oire
deç
appelans :
le s f a i t s com m encent a s’e x p liq u e r ; et v o y o n s , en continuant
3
�#
notre relation, si du même point de départ nous arriverons aux
mêmes conclusions.
L e sieur Dufour avait prêté, en différentes fois, à sa belle-mère ,
une somme de 4000 fr. pour fournir aux premiers besoins.
Après la signature du traité, le sieur Guillemot partit pour L y o n ,
accompagné de son neveu D ufour, auquel il remit une somme de
3ooo fr ., cri or, faisant partie de l’argent comptant ; il reçut en échange
une quittance écrite et signée, le 8 janvier 1822, par la daine
R iberolle, q u i reconnaît avoir reçu cette somme de son frère.
L a mention faite par le sieur G uillem ot, au dos de cette quittance
qu’on produit (page 2 r ) , ne détruirait pas le fait constaté par l’acte.
Mais le sieur Guillem ot lève lui-même toute incertitude par les
termes de sa lettre du 20 janvier : « J’ai reçu, ma chère sœ ur, par
« la Jeannc-Marie , la . lettre que vous m’avez fait le plaisir de
« m’écrire , le 17 de ce mois , par laquelle 'vous ni accusez
« réception des
5ooo fr.
que j e remis pour vous ¿1 M. D u fo u r,
« e t dont il m’ a donné voire reçu. »
Ceci est clair et n’a pas besoin de commentaire. Autre rectification
à faire au tableau.
Cette somme de
5ooo
f r . , reçue en o r , fut remise en même
monnaie par la dame Riberolle à M. M au rice, curé de Morençay ,
qui avait eu l’obligeance de les lui prêter pour suppléer à l’absence
de ses revenus, que son fils 11e payait pas.
Il fallut pourvoir aux dcltes urgentes; le m oyen d’y parvenir était
indiqué par la nature cleis choses. La dame Riberolle 11e pouvait
disposer que de la somme dont elle était créancière de son frère.
L ’économie du teins et de l’argent prescrivait la voie usitée des
traites ou mandais. De là, les trois émissions d’effets tirés, les 14 jan
5
vier, i février, et i.\ mai 1822, à l’ordre du sieur Dufour, qui on
a fait opérer les rentrées jusqu’à concurrence de la dette du sieur
Guillemot.
Ces faits n’ont jamais été déniés; mais ce que ne disent pas les
appelans, les fonds étaient employés au fur et à mesure de leurs
rentrées; et la dame Riberolle, qui se faisait rendre compte des
�recettes et des dépenses, donnait à son gendre les décharges équi
valentes.
La correspondance de la dame Riberolle, les actes qu’elle a passés,
sa conduite avec toute sa fam ille, prouvent tout à-la-fois sa capacité ,
l’exercice de ses droits , la sagesse de sa volon té, et la direction
exclusive de ses affaires personnelles. Elle demandait et acceptait
avec plaisir le concours accidentel de son g en d re, pour les détails
dont Féloignait son sexe ou son â g e , mais elle ne l’a jamais consi
déré comme un mandataire qui agissait pour elle; chaque affaire,
chaque négociation était réglée entr’elle et lu i, aussitôt qu’elle était
terminée.
Il
est indispensable de donner quelques explications sur les
documens que les sieurs Riberolle ont obtenus du sieur Guillemot,
de L yon , leur oncle.
Père de famille, et valétudinaire, le sieur Guillemot profilait
avec empressement des largesses de la dame Arnaud sa sœ ur, qui le
gratifiait annuellement d’une pension de 600 fr .; lors du traité fait
avec la dame R iberolle, il usa de tout l’ascendant qu’il avait sur
e lle, pour obtenir de larges concessions; le sieur Dufour eut le
malheur de combattre quelques unes de ces prétentions, et perdit
dès-lors ses bonnes grâces. Après la clôture du traité, préparé et
rédigé par M e L averrière, le sieur Guillemot voulut encore élever
des difficultés sur son exécution. 11 se croyait dispensé, entr’autres
objets, de compter l’intérêt de la somme de 20,000 fr. qu’il devait
payer à sa sœur; il 11e voulait point contribuer au service de la
3
rente de oo fr. , due à G uillem ot-D arrot. C ’était là le texte
ordinaire de ses plaintes.
On en trouve la preuve dans le projet que produisent les sieurs
Riberolle île sa lettre à sa sœ ur, du i
5 mai
1S22 (page 26) :
« Je vais vous parler de nos intérêts réciproques, et vous témoigner mon étonnement de ce que vous me dites de corresr< pondre avec M. Dufour pour cet objet, ayant une parfaite connais« sance desmotifsparticuliersqui m’en éloignent, p arla perfidie qu’il
<r a eue d 'a j o u t e r à nos conventions l’obligation pour moi de payer
5
«■annuellement i o fr. à notre frère G uillem ot-D cirrot, pendant
�ff
sa v i e ,
ce
a q u o i j e n’ai ja m a is c o n s e n t i
, et
c o l a à l a s u i t e clc
« n o t r e traite q u e je v e n a is d e s i g n e r p a r c o n fia n c e en v o u s , d o n t
« je r é c l a m a i s l ’a n n u l a t i o n
en votre p résen ce,
e t q u ’ il m ’ a r r a c h a
« p a r v i o l e n c e , a v e c m e n a c e d e m e f r a p p e r , e t a u q u e l j’ a i c o n s e n t i
« p a r é g a r d e t a m i t i é p o u r v o u s ............ »
C ’estpar suite de cette irritation, qu’il manifestait, dans une autre
lettre à la dame Riberolle, sa répugnance de traiter avec M. Dufour,
dont j e crains, dit-il, l’astuce et l ’adresse dans les affaires ;
qu’il écrivait encore au sieur Riberolle aîné : ff Je me dispense de
« te parler des affaires d’intérêt que j’ai eues avec ta mère dans le
« partage des biens de ma sœur A rnaud, ou j’ai été sacrifié par ma
w faiblesse, ma mauvaise santé, et ma répugnance de traiter avec
« M . D u fou r, le plus subtil de tous les hom m es, d’une somme
ff très-considérable. »
G’est sans doute aussi dans les intentions les plus pures, qu’il a
c r u d e v o i r remettre à ses neveux ces p réc ie u x documens dont ils
veulent faire des armes foudroyantes contre le sieur Dufour.
11 suffit, pour réfuter toutes ces assertions accumulées de subti
lité , d ’ a d r e s se et de p e r f i d ie , de faire observer que la clause relative
à la rente Guillemot-Darrot se trouve insérée non seulement dans
le premier traité du \ janvier, que la dame Riberolle a bien voulu
anéantir sur la demande de son frè re , mais encore dans celui
du 8, qui a été rédigé p arM . L averrière, et définitivement accepté
par les parties.
M a is é c o u to n s su r tous c e s faits u n t é m o i n d i g n e d e c o n f ia n c e ,
et qu’aucune des parties n’osera recuser, la dame veuve Riberolle,
DANS LES L E T T R ES MEMES QUE PRODUISENT LES APPELANS.
12 mars 1822. ff Je vois avec peine, mon cher frère , tpie vous
ff revenez sur ce qui a été arrêté entre nous par deux sous seings
(( qui ont été rédigés pour éviter toutes difficultés et toutes dis«■ eussions ; c est a cette lin que je me suis chargée d’une propriété
tf qui ne me convenait, pas , et que je nie suis chargée aussi de
" satisfaire à toutes les obligations de la succession, quoiqu’etrau«
25 mai
g è r e aux affaires de celte nature.
1822, en réponse ¿1 celle p r é c ité e , du i5.
�( 21 )
«■Est-il possible qu’après avoir eu le grand malheur de perdre
« ma méritante sœ ur, j’aie celui de voir la discorde dans ma
k fa m ille ? est-il possible que vous croyiez que Dufour eût intention
« de vous battre? E t ne l’aurait-il pas fait dans le moment que
« vous lu i avez mis les deuæ poings sous le m enton, moment oii
«
j ’a d m i r a i so n
r e s p e c t e t sa p r u d e n c e .
Il ne vous a rien proposé •
5
(t que vous n’ayez accepté et signé. Si les i o fr. annuellement
« dus à notre frère vous offusquent, je paierai à moi seule
« les oo fr. »
5
Précédemment, cette digne fem m e, pour étouffer tout r e s s e n
timent, avait encore fait le sacrifice de la moitié des intérêts de la
somme que lui devait son frère.
Comment les sieurs R ib erolle, ayant sous les yeux cette lettre
de leur m è re , ont-ils osé imputer au sieur Dufour des torts imagi
naires dont la fausseté est démontrée par leur propre dossier?
C est encore avec les pièces produites par eux qu’on les battra
sur un autre point. Pour donner c o u l e u r a u système de gestion
exclusive du sieur Dufour et de l’inertie prétendue de la dame
Riberolle dans ses propres affaires, ils invoquent deux lettres
écrites le 2 juin au sieur Guillemot de L yo n , pour lixer le montant
des traites tirées sur lui ainsi que la situation respective; l’une par
la dame Riberolle qu’ils disent évidemment écrite sous la dictée
du sieu r D ufour (p. 27. ) , et l ’a u t r e par le s i e u r Dufour lui-même.
L ’inspection de ces deux lettres prouve leur erreur, volontaire
ou involontaire. Elles sont en effet sous la date uniforme du 2 juin;
mais celle de la dame Riberolle est écrite de C h a rn ü y3 frappée du
timbre d' A nse , bureau de départ de la poste ; tandis que celle du
s ie u r Dufour est datée de 'l1hiers, et porte le timbre de cette ville.
O r on sait qu’il y a 5o lieues de distance entre Charnay et
Thiers : il est donc matériellement démontré que le 2 juin 1822,
le sieur Dufour n’a pu d icter , comme on voudrait le faire
croire,
la lettre écrite par sa belle-m ère ; et ce qu’il y a de plus remarquable
dans ces deux lettres provoquées par celle du sieur G u illem o t,
C est l ’ i d e n t i t é d u r é s u l t a t ,
q u o i q u e c h a c u n e x p l i q u e les c h o s e s à sa
m a n i è r e : o u p e u t l es v é r i f i e r .
•
�11 faut tirer de ce fait la conclusion, conforme à la vérité, que
madame Riberolle réglait elle-rnéme ses affaires, et connaissait par
faitement sa position : toute sa correspondance le prouve.
E lle la connaissait tellement, que, pour se procurer du repos et
pour accomplir le seul vœu que formait sa tendresse, la concorde
entre ses enfans, elle leur proposa le partage anticipé de ses biens.
L e sieur Riberolle aîné devait, dans ce cas, rapporter, aux termes
de son contrat de mariage, les i2 ,5 o o f r ., capital de sa m ère; les
5
1 ,ooo fr. d’arrérages liquidés par l’acte du i6 janvier 1821 ; et
enfin l ’arriéré de la pension de 2,400 fr. , depuis celte époque, se
portant à 4000 fr. environ. Ces sommes réunies formaient un capital
de i à 52,000 fr. , qui excédait évidemment son tiers dans la
5
fortune. 11 refusa , préférant éloigner l ’époque du paiement, puis
qu’il 11’avait rien à recevoir.
Un autre motif secret éloignait les deux frères de cet arrange
ment : ils espéraient obtenir de la dame Piiberolle l’avantage préciputaire que le père leur avait accordé. Des tentatives furent
faites auprès de cette bonne m è re , qui fut ferme dans sa volonté.
Ils craignirent, après avoir échoué, que la dame Dufour, leur sœur,
11e se prévalût de leurs démarches pour réclamer en sa faveur :
c’est sur ces doléances que madame Riberolle leur promettait de
conserve
11 e n t r e
eux l é g a l it é
;
mais dès-lors leur inimitié contre
le sieur Dufour et sa femme n’eut plus de bornes.
Cependant la dame veuve Riberolle était loin de surmonter les em
barras qui se présentaient : la teiiue de la maison de Charnay était
dispendieuse; l’exploitation difficile* pour une femme seule et âgée;
les ressources épuisées par le paiement des dettes; la pension viagère
n’était point payée. Elle reconnut bientôt la nécessité de se retirer
à Thiers et de vendre une propriété qui ne lu i convenait pus et
qu’elle n’avait acceptée (¡ne pour fa ir e p laisir à son fr è r e (lettre
du 1 9. mars 1822. )
Celte mesure, dont on veut méchamment
sieur Dufour, pour
p r o f it e r du pr ix
donner l ’in it ia t iv e
5
au
(pages 29 et o() , était depuis
long-iem s indiquée par la famille, connue et approuvée même
^>ar ceux qui eu font aujourd’hui un grief. Prouvons ce fait :
�L e sicur (Guillemot, de L y o n , écrivait à sa sœur, le
5 avril
1822 :
«■Je n’ose me flatter d’avoir le plaisir d’aller vous voir après les
* fêtes, niais si j’en ai la force j’irai avec ma fcnmie vous faire mes
« derniers a d ieu x , bien persuadé que vous to u s déterm inerez à
« vendre votre dom aine, et à rentrer dans votre domicile et votre
« fa m ille pour jouir de la douceur de la voir souvent et de réconK cilierv o sfils avec M . D ufour; je le désire, mais je regarde cette
« réunion bien diilicile.
Dans une lettre, du i
5 mai suivant, le sieur Riberolle-Landrevy
écrivait à sa mère :
« T u me fais espérer que tu viendras bientôt habiter auprès de
«• tes enfans, mais il faut pour c e la , dis-tu, qu’ils soient unis ; ils le
« sont et t’attendent à bras ouverts; quant ¿1 ton g endrey j’ai de la
^ peine à croire que mon frère se décide à mettre les pieds chez lui,
(f, e t il est même prudent de ne pas les engager a, se voir.
« S i t u v e n d s C h a r n a y et que tu veuille disposer de tesfo n d s
« en ma faveur tu me rendrais un grand service , et m’aiderais bien
« dans l’acquisition que j’ai faite. T u pourras prendre toutes tes pré«• cautions pour assurer tes fonds...... »
C’est à cette lettre désintéressée que la dame Riberolle répondait,
le 9 juin : « Votre inimitié pour Dufour est pour moi un surcroît de
cf douleur que je ne puis te rendre; oui, mon am i, le chagrin me
« tue. Soyez tranquilles, mes chers, aucun tort ne vous sera fait;
« j e f e r a i toujours de mon m ieu x pour l’égalité ;
en conséquence,
« JE NE PUIS T E PR O ME T T R E CE QUE T U DEMANDES EN E N T I E R , AYANT
«
TROIS ENFANS. »
Les efforts de cette digne inère étaient impuissans sur le cœur de
ses fils; quoiqu’appelés à Charnay, pour assister à la vente, ils ne
voulurent pas s’y transporter.
Par a cte, sous signature p rivée, du 18 juillet 1832, le sieur
Piérou, m édecin, devint acquéreur du domaine de Charnay.
Une clause précise comprend dans la vente les pressoir, cuves,
vaisseaux vinaires , outils aratoires et autres immeubles par destina
tion; tous les grains vieux et nouveaux étant dans le grenier, tous
les vins v ie u x et nouveaux étant dans la grande
toutes les
cave,
�(
»4
)
bouteilles tant pleines que vides, ex cep té trente pleines d e v in , au
ch o ix de la venderesse;
tout
le
mobilier
,
meubles
meublans,
TOUS LES L I TS MONTÉS ET GARNIS ET GENERALEMENT T O U T CE QUI EST
RENFERME DANS LES MAISON ET BATIMENS VENDUS J desquels objets
mobiliers madame Riberolle aura l’usage jusqu’à son départ, qui
doit avoir lieu dans la quinzaine.
Le prix fixé fui de
,ooo fr. , payables par d ixièm e d'année
en année.
56
11 est stipulé que si, avant deux ans, l’acquéreur veut faire con
vertir la convention en un acte authentique à ses frais, il en aura la
faculté ; mais en ce cas il ne fe r a paraître que 18,000 fr. et le sur
plus sera mentionné dans un traité sur lésion, sous signatures privées.
Toutes les clauses de cet acte sont remarquables. Elles repoussent
toutes insinuations perfides. La 'v en te du m o b ilie r prouve que le
sieur Dufour ne voulait pas se l’approprier. L e paiement du p rix ,
en d ix années, n’annonce pas une spéculation intéressée. La clause
de dissimulation d’une partie du p rix, en cas d’acte authentique,
était dictée par l'acquéreur qui voulait diminuer les frais d’enre
gistrement.
Un pot de vin, ou étrenne de 2000 fr. , avait été convenu, sans
être mentionné dans l’acte. Cette somme fut remise par ü acquéreur
à la dame Riberolle elle-même , ainsi qu’il l’attesle dans sa lettre
du 2 juillet 1826.
L a darne Riberolle s’était réservé son argenterie, et certains
objets et meubles à sa convenance. Elle avait de plus une partie des
objets qui meublaient un petit appartement
qu’avait
occupé
M“ ° Arnaud à L y o n , et qui étaient encore emballés.
C ’est ce mobilier qui , après distraction de q u e l q u e s objets
m odiques, ou hors de se rv ic e , vendus jusqu'à concurrence de
100 f r . , fut emballé, expédié à Thiers, et déposé, non pas, comme
4
on le dit (p ag e ^ )» dans l’habitation du sieur D u four, mais bien
dans la maison paternelle dont la dame Riberolle avait la jouissance.
H y existait encore, presqu’en son entier, à la mort de la dame
Riberolle. Ce n’est que par suite de la vente de la maison qu’a faite
depuis le sieur R iberolle, que ce mobilier a été transporté, du
�consentement des deux frères, dans un des appartemens du sieur
D ufour, père de l'intimé.
L e s i e u r D u f o u r d o i t - i l aussi se l a v e r d e l ’in c u lp a tio n d 'avoir
v id é les celliers, vendu ou f a i t transporter à Thiers quarante
dnées ( m e s u r e ) de vins v ie u x ou nouveaux , montant à une
somme de 2^ 0 0 f r . ( p a g e 5 i ) ?
Cette tâche sera facile.
11 est vrai qu'outre les vins vieux ou nouveaux, déposés dans la
grande Cave, compris dans la vente du 18 juillet, il en avait été
distrait ou réservé une certaine quantité. La dame Riberolle, qui
en avait vendu une partie, se plut à distribuer le surplus dans sa
famille. En voici la preuve :
Dans sa lettre du 29 janvier 1822, le sieur G uillem ot, de L y o n ,
accuse
anees),
nt t - il,
«■mais
réception à sa sœur de cinq bareilles de vin (faisant douze
et lui en fait ses sincères remercîmens. « J’ai p a yé , ajoute
142 fr. 75 c. pour la voiture et les droits d’entrée à la ville;
ne m’attendant pas à ça , je n’ai pu payer au voiturier les
« droits do sortie, et dont je te ferai compte. »
Le sieur Riberolle aîné convient, dans son interrogatoire, que
sa mère lui a envoyé une pièce de vin. Son frère reconnaît aussi
en avoir reçu , sans en déterminer la quantité. Une pièce fut
adressée au sieur Dufour. Le prix d’achat des barils, les droits de
congé et les frais de transport sont portés dans le règlement fait
entre la dame Riberolle et son gendre. Avant le départ de C h arn ay,
trois barriques avaient été adressées au sieur Guillem ot, de Lyon.
Enfin, il en a été transporté pour le compte de la dame Riberollej
à Thiers. On ne contestera pas qu’il y ait actuellem ent dans sa cave
un tonneau de deux cents litres, et plus de quatre cents bouteilles
de vin de Charnay.
Telles ont été les dilapidations du sieur Dufour.
On ne doit pas passer sous silence une circonstance qui rendrait
impossibles les enlèvemens imputés au sieur D uiour, quand leur
fausseté, ne serait pas démontrée. La fille du sieur Just Riberolle se
rendit à Charnay auprès de sa grand’mère , immédiatement après
le décès de la dame Arnaud ; elle y a constamment habité, et n'est
/
4
�revenue à Tliiers qu’avec la clame veuve Riberolle et le sieur
Dufour. Ces faits sont avoues par les sieurs Riberolle dans leurs
interrogatoires.
Ainsi, depuis décembre 1821, jusqu’à la fin de juillet 1822,
c ’est-à-dire pendant sept mois consécutifs, la demoiselle Riberolle
a eu sous les yeux toul le mobilier de sa grand’mère ; elle a assisté
à toutes les négociations, a vu les emballages, les transports et les
envois. Et l’on voudrait faire croire à l’audace et à la vraisemblance
d’une spoliation !........
L ’indifférence que les sieurs Riberolle manifestaient pour leur
m è re , leur résistance aux procédés les plus ordinaires, e t , il faut
le d ire , le besoin des secours et de la compagnie de sa iille ,
portèrent la dame Riberolle à accepter un asile dans la maison du
sieur Dufour. Celle d é t e r m i n a t i o n exaspéra les deux frères qui
oubliaient
com bien
l’essai d’une
autre
cohabitation avait coûté de
larmes à cette femme respectable.
C ’est alors qu’on ne garde plus de mesures.
4
V oici la réponse textuelle de la dame Riberolle,
août 1822 ;
n ous Ici trou vons d a n s le u r d o s sie r .
« Toute criblée de douleurs que je suis , mon cher fils, je viens
<( te prier de ne pas exécuter le projet que tu faisais de venir
« un jou r chez D u fo u r,
a c c o m p a g n e d ’u n n o t a i r e
,
p our prendre
« note de ce qui est à moi. J’aurai soin de faire faire et de faire ce
« qu’il convient pour vous édifier. Je te prie, mon cher (ils, ainsi
« que R iberolle, de meure tous les procédés honnêtes que l’on se
« doit en famille; sur-tout ayez p itié de la douleur que me donne
« votre désunion. J ’y succomberai bientôt, si vous n’avez pas
« égard à ma douleur que je ne puis plus supporter, s i vous n’avez
« pas pitié de moi. Adieu , je vous embrasse louS et suis voire
<r m alheureuse mère. »
L e sieur Dufour était loin de soupçonner la cupide défiance de
ses beaux-frercs. Le dépôt du mobilier dans la maison de la mère
semblaitdevoir rassurer tous
les intérêts. O ccupee du soin d’éloigner
tout motif de discussion, la dame Riberolle 11e lui parla point do
l’exigcance de ses (ils; il ne l’a connue que parle mémoire
imprimé
�( 27 )
ei par la communication des pièces où se trouve la lettre que l’on
vient de lire. Que ne s’adressaient-ils directement à leur beau-frère?
ils auraient obtenu toute satisfaction.
Par acte reçu Grangcon, notaire à Thiers, le 14 décembre 1823,
le sieur Pézard délivra quittance de la somme de 10,000 fr .,
montant du legs porté au testament de la dame Arnaud, et par lui
reçue, est-il énoncé, des mains de M . D n fo u r,
e t ven u e néanmoins
DES DENIERS DE EA DAME VEUVE RIBEROEEE.
Cette attention qu’eut le sieur Dufour de faire insérer, en l’absence
de sa belle-m ère, l’origine des deniers dont on lui donnait quittance
justifie-t-elle les assertions de scs adversaires ?
Dans cette circonstance, comme dans toutes celles ou le sieur
Dufour avait eu momentanément à sa disposition des fonds de la
dame Riberolle pour un emploi déterminé, celle-ci lui remit une
déchargé spéciale des 10,000 fr. que venait de recevoir le sieur
Pézard. Ainsi le sieur Dufour était muni de pièces suffisantes pour
établir la destination des sommes qu’il avait touchées.
Cependant la dame R iberolle, désirant sans doute empêcher des
discussions qu’elle pouvait malheureusement prévoir, voulut régler
définitivement sa position ave/: le sieur Dufour son gendre, sous
une forme authentique.
L ’acte est sous la date du
5o juin
1825 ; il est nécessaire d’en
faire connaître les dispositions que l’on s’est efforcé de torturer.
Quatre articles le composent.
Pau ee p rem ier, la dame vcüve Riberolle énonce et reconnaît,
avec indication de leur objet et de leur em ploi, toutes les sommes
que le sieur Dufour, son gen d re, a payées pour elle et sur sa réqui
sition , ou à elle-même; cet état, qu’il serait tnfp long de transcrire,
produit un total de 10,239 fr.
36 c. V o ici maintenant la teneur du
Surplus de l’acte :
A r t . a. L a d a m e v e u v e R i b e r o l l e d é c l a r e en outre q u e les som
mes payées p a r le s ie u r D u f o u r , ainsi q u ’il est dit en l’article précé
dent, l’onCffti'. pour libérer d ’autant, celui-ci des sommes qu’il avait
r e ç u e s pour elle e t sur son invitation, soit d e la succession de la
daine Arnaud, sa s œu r, soit des débiteurs de cette succession, soit
�( s» )
du sieu r C hervet- V a ch er, suivant un acte reçu par nous G rangeon,
nn dns notaires soussignés, le 12 octobre 1820, enregistré le 21 ,
soit enfin de toutes autres personnes.
A
rt
.
3 . En conséquence,
ladite daine Riberolle veuL que son dit
gendre dem eure q u ille envers elle et les siens, connue il est dit eu
l’ariicle précédent , de la somme totale de 10,239 h'. 56 c . , lui en
passant quittance avec promesse de l’en faire demeurer quitte envers
et contre tous.
A rt.
/f . Convenu qu’au moyen du payem ent de la sonunc to
tale énoncée en l’article p récéd e n t, et de celle quittancée suivant
un acte consenti p a rle sieur Antoine Pézard, devant nous G ran
geon , le 14 décembre 1822, le sieur Dufour-Riberolle
demeurera
envers la d a m e R i b e r o l l e de toutes
les sommes qu’ il a reçues pour elle ju sq u ’à ce jo u r , attendu
bien e t
valablem ent
qu’icelles font un
déchargé
t o ta l
égal
à
celui des sommes payées par ledit
sieur Dufour pour le compte de sa belle-m ère , ou
à
celle-ci elle-
mème. Fait et clos, le , etc.
Ce règlem ent, dicté par la bonne foi, porte avec lui l'empreinte
de la vérité; aussi, n’est-ce q u ’ e n l u t t a n t contre l e u r propre convic
tion que les sieurs Riberolle essaient de lui opposer quelques faibles
objections. Parcourons-les.
Ils n’osent pas contester l’état des créances portées en l’art, p r e
mier,, sur la sincérité duquel ils n’élèvent que des soupçons. En
effet, ses é lé m e n s se c o m p o s e n t en très-grande partie d e s dettes
inévitables de la succession Arnaud: honneurs funèbres ; frais de
dernière maladie, de deuil, du testament, du traité avec le sieur
Guillem ot; gages des domestiques; legs pieux; droits de succes
sion ; coût des diverses quittances; argent donné, etc.
On observe seulement qu’on a dvi ' v r a i s e m b l a b l e m
en t
trouver
dans la maison de la dame Arnaud une somme suffisante pour p a y e r
les frais de dernière maladie et d’inhumation. Rien ne fait présumer
Le silence, gardé sur ce point dans les arrangemens
sieur G uillem ot, de L y o n , prouverait le contraire.
qu’il y en eut.
faits avec le
L ’objection est donc sans fo rce, surtout respectivement au sieur
Dufour, qui a payé.
La critique sur la somme de
456 fr.
comptée au sieur C h e n e t-
�(
29
)
Vacher, pour intérêts de la somme touchée par le sieur Dufour, le
16 octobre 1820, n’est pas fondée, puisqu’il est établi par la quit
tance qu’il p r o d u i t que d ès le 10 janvier 18?. 1 la somme capitale
avait élé m ise au pouvoir de la dame Arnaud.
Il en est de même relativement à la somme de 717 fr. pour les
gages des domestiques. On feint d’oublier : i° qu’ils étaient au nom
bre de trois, dont un mâle pour l’exploitation du domaine, et qui
3
avait plus de oo fr. (le gage; 20 que le sieur Dufour a acquitté,
non-seulement les gages de l’année échue lors du décès de la dame
Arnaud, mais encore ceux qui avaient couru jusqu’à la fin de juil
let 1822 , époque de la vente et du départ de Charnaÿ pour Thiors.
C ’est avec le même esprit qu’on insinue que le sieur Dufour
58
étendait sa surveillance ju s q u 'a u x p lus p etits articles (p a g e
},
en relevant le paiement de plusieurs articles d'épicerie el de ménage.
La plus légère attention aurait fait reconnaître que ce genre de
gestion était impossible, puisque le sieur D u ib ur habitait à Thiers;
mais qu’au moment du départ de sa belle-m ère, il fallût solder les
comptes ouverts de l’épicier, boulanger, etc. 11 n’est donc pas
surpi enant que ces objets se trouvent consignés dans l’état qui en a
été yérifié par la dame veuve Riberolle.
Si les frères Riberolle n'eussent pas été préoccupés fie l’idée fixe
de tout contester, ils se seraient gardés d’articuler que le paiement
de la somme de oo fr. n’a pas été fait au sieur Pézard.
5
Sur la réclamation faite par ce dernier , la dame veuve Riberolle
avait écrit au sieur G uillem ot, de L y o n , de solder celte somme.
On lit dans une lettre du sieur Dufour à son o n d e, le 28 avril 1822 ,
q u ic s l dans le dossier des a p p elo n s, et enregistrée comme toutes
celles par eux produites : « 11 est instant que ma belle-mère sache
«f de suite à quoi vous vous d é c id e z , afin q uelle prenne ses
« arrangemens avec M. P éza rd , qui parait pressé de recevoir les
<(
<f
«
«
«
4 ou 5oo fr. qu’il vous a récla m és, et qu’il est dans I intention
de ma belle-mère de lui faire passer, si c’est la votre. Ainsi, si
vous vous chargez d’acquitter jM. P é z a r d , vous les lui ferai
passer. S i, au contraire , je les lui enverrai p our Ut maman el
clic négocierait alors sur vous son solde.
�(
3o
)
te M . P éza rd m’a aussi écrit pour obtenir les mêmes sommes
«■qu’il vous demandait. »
.
Conformément aux intentions de la dame Riberolle, la somme* de
5oo fr. fut payée au sieur P é za rd , au moyen d’un effet passé.à l’or
dre de Madame Riberolle qui elle-même l’endossa au profit de ce
dernier; il s’exprime ainsi dans sa lettre au sieur Dufour, datée et
timbrée de Paris, le 21 juillet 1822 :
(( J’ai reçu, le 18 du courant, la vôtre du 14 » dans laquelle était
« un effet de 5oo fr. qui m’ont été payés hier, 20 juillet, par
«■M. G avoty, négociant, rue M auconseil, à Paris. »
Ce p a i e m e n t a donc été légitimement porté en ligne dans le
compte présenté par le sieur Dufour à sa belle-m ère, et ratifié par
elle.
Les sieurs Riberolle n’ont pas craint de tomber dans absurde en
1
reprochant au sieur Dufour le défaut d’indication d’emploi d’une
somme de i598 fr. 98 c . , qu’il avait versée entre les mains de la
dame Riberolle. Cette objection ne mérite pas de réfutation, tant
elle est déraisonnable. Au surplus, ils ont fait justice de toutes leurs
allégations, en p o rta n t en ligne dans leur t a b le a u 1«; total de la
quittance du
5o juin
5
1820, à l’exception des oo francs Pézard sur
lesquels ils paraissent vouloir insister.
O11
se dispensera de suivre les appelans dans les efforts de leur
imagination et de leur logique pour faire croire que l’acte du
o juin 1822 ne renferme pas règlement et décharge définitifs, à l’é
gard du sieur Dufour, mais seulement une quittance ¿1 valoir qui le
3
soumet à la nécessité d’un nouveau compte.
La simple lecture de l’acte repousse leurs argumentations. On y
voit en effet qu’après avoir fixé par l’article premier l’état des
sommes payées par Dufour à celle de 10,259
^6 c ., la dame
veuve R iberolle, par les d e u x suivans, le déclare libéré d autant
sur les sommes qu’il «avait reçues pour elle. Cela devait être ainsi,
puisque l’avoir du sieur Duiour surpassait la dépense qui était
allouée jusque.-Ui; mais lorsqu’on a complété le règlement à
l’article /, par l’allocation des 10,000 fr. payés au sieur Pézard en
acquittement de son le g s, on reconnaît alors que la balance ctait
�(
3i
)
égale enire la recette et la dépense ; et c ’est par suite de cette
vérification, que la dame Riberolle déclare son gendre
bien
et
VALABLEMENT DECHARGÉ DE TOUTES LES SOMMES QU’ l L A REÇUES POUR
E L L E JUSQU’A CE JOUR.
Pour combattre ce résultat évident et incontestable , les frères
Riberolle , qui ne peuvent nier que les sommes payées ne s’élèvent
56
à 20,259 frc. se résument à dire que toute la question
e st de savoir s i, à Vépoque de l'acte du o ju in 18 2 5, leur beaufr è r e avait reçu une somme égale ou supérieure (page
de leur
3
43
mémoire. ).
n’y a point là de question. L a dame Riberolle tenait elle-même
11
état des recettes de son gendre. A chaque opération, à chaque
versement, elle délivrait des quittances ou décharges. C ’est sur ces
élémens que le compte a été rédigé. L e traité fait avec le sieur
Guillemot le 8 janvier 1822, et toute la correspondance que pro
duisent les appelans, établissent la consistance de la s u c c e s s i o n et la
quotité des sommes qui ont passé entre les mains du sieur Dufour.
Ces documens rendaient ce travail facile à tout le monde; aussi les
frères Riberolle avaient-ils eux-mêmes résolu la question qu’ils ont
25
posée plus tard en portant eux-mêmes à la page
de leur mémoire,
le total des sommes reçues du sieur Guillemot à la somme de
5
20,587 fi’. o c.
Il y a v a it erreur de leur part, en ce qu’ils comprenaient dans ce
5
total la somme de ooo fr. en o r , reçue et quittancée par la dame
Riberolle elle-même; mais la différence a été, à peu de chose près,
compensée par la décharge spéciale de la somme de 2614 ii’ ,
que le sieur Chervet-Vacher avait délivrée au sieur D ufour, le
12
octobre
1820.
Cette somme fait donc un nouvel article de distraction dans le
tableau créé par les appelans.
Il en Jfera de même d’une somme de 600 fr. payée par le sieuf
Guillomot-Dessapt , puisque le litre que produisent les sieurs
Riberolle (lettre de M“ ' Riberolle à son frè re), apprend que c’est
leur m ire qui a directement reçu ce versement qu’il voudrait mettre
à la charge du sieur Dufour. La dame Riberolle paya elle-même
�(3
2 )
celle somme à M. Guillem ol-D an'ot qui y avail droit en sa qualité
d’usufruitier.
Pour ne laisser sans réponse aucune objection, il faut bien dire
un moi sur la créance Poitrasson et la restitution laite par lu régie,
64
dont 011 prétend que le sieur Dufour a profité (p. 46 et
-)
L e notaire L a v e rriè re , qui a fait opérer les rentrées au nom de
la dame Pùberolle , lui donnait avis par deux lettres des i er juillet
et 2g août 182.5 , dé tirer sur lui pour leur montant réglé à
56 fr. qui lui étaient
ce qui réduisait la somme à 652 fr.
déduction faite de
688 fr.,
dus pour scs honoraires ,
L e sieur Dufour compta cette somme à sa belle-mère, qui lui déli
vra un mandat sur le sieur L averrière, v a leu r reçue c o m p ta n t ; il
a été acquitté par ce dernier.
Ainsi tombent, devant l’évidence des faits et des actes, des asser
tions et des
calculs
hasardés. L e règlement du
3o juin
1823 reste
dans toute sa pureté et dans toute sa fo rc e , comme une décharge
valable et définitive, qui n’aurait pas permis à la dame Riberolle de
revenir en arriè re , quand elle en aurait eu la volonté.
On impute encore au sieur Dufour la conversion en acte authen
tique, de la vente de Charnay, consentie, sous sein g-privé, au
sieur P icro u , pour s’en approprier le prixv( pag. 46 et 47); et selon
le système adopté, on dém ontre en dénaturant les f a its ; il faut
les rétablir.
Lp, G février 1824 > ° sieur Piérou écrit au sieur D ufour : « J ’ap« prends avec déplaisir que Madame Riberolle est frappée d’une at-
1
« taque de paralysie. Celte maladie peut guérir ou du moins se
cc prolonger long-tems; cependant comme nous 11e pouvons ré « pondre des événemens,
je
désirerais
passer
un
contrat
en
« r è g l e n u r o m a i n e q u ’ e l l e m ’ a v e n d u . V eid llez m’ adresser au
«■plutôt la procuration nécessaire à cet effet. ,
Ce n’est donc pas le sieur Dufour qui a provoqué la conversion.
L e médecin Piérou écrit le 20 avril
1824
: « J’attends toujours la
* procuration de Madame Riberolle pour passer le contrat d’acqui« sition du domaine qu’elle m’a vendu sous seing-privé, et je ne
« reçois ni procuration ni réponse.
y a cependant plus d’un
11
�33
(
)
v mois que je vous ai écrit ma seconde lettre à ce sujet, dans la
re quelle je vous marquais que nous suivrions en tout notre double,
« ex cep té pour ce qui serait porté sur le contrat <pii ne serait
cf
que de 17 à 18000 f r . ,
l e s u r p l u s en promesses
payables à l’é-
«• chéance accoutumée. Vous m’obligerez à un voyage, si vous gar« dez plus long-tems le silence à ce sujet et si je ne reçois point
« cette procuration. »
L a pensée de ne point porter la totalité du prix au contrat authen
tique n’appartient donc pas au sieur Dufour, mais à l’acquéreur qui
y avait intérêt et qui déjà en avait fait une clause dans son acte d’ac
quisition du 28 juillet 1822.
C ’est alors seulement que la dame R iberolle, en envoyant une
procuration au sieur N euville, curé de Charnay, lui' écrivit la lettre
4
du 27 a v r il, dont il est parlé au Mémoire (p . G-)’
flu^Prescr*L~
vait les bases de l’acte authentique, conformément aux clauses de
la vente sous sein g -p riv é, et aux demandes insérées dans lc§ trois
lettres du sieur Piérou : cette lettre, écrite par le sieur Dufour, est
signée par la daine Riberolle.
La vente fut reçue par INI* L averrière, le 18 mai 1824.
L e prix réel était de
56 ,ooo fr.
Mais dans le mois de décembre 1822, la dame Riberolle avait
directement reçu du sieur Piérou , à L y o n , une somme de 2000 f.
L u second effet de 2000 f r ., échéant le o mai 1825, avait été
négocié p ar elle aux sieurs Bonfils cl Blanc qui lui en avaient fourni
la valeur.
3
Il ne restait dû par le sieur Piérou que
sition.
52 ,000 fr.
sur son acqui
On porta dans la vente authentique 18,000 fr. seulem ent; ils
n’ont pas été payés et sont dus à la succession.
L e surplus du p rix, qui était de 14,000 f r . , fut converti en qua
tre effets de
35oo
fr. chacun. Pour les sûretés du sieur Piérou, il
fui fut délivré une déclaration sur le prix réel de la vente.
I
u cinquième effet île 1600 fr. eut pour objet 1 intérêt du princi
pal de 52000 f r . , échu lors du règlement authentique.
Tous ces faits sont établis , soii par l’acte de vente , soit par une
5
�lettre du fondé de p o u v o ir, 1« curé N euville, écrite à madame
Ribei’olle , sous la date du 21 mai 1824.
La daine Riberolle reçut le payement du dernier effet relatif aux
intérêts du prix de vente.
Voici l’emploi des quatre autres :
La dame Riberolle, qui avait déjà délivré au sieur Riberolle-Landrevy la somme de 3ooo fr. pour indemnité de la remise dont elle
avait gratifié son fils aîné, lors du règlement du 1G janvier 1821
{faits reconnus clans les interrogatoires et dans le Mémoire ) ,
était débitrice envers le sieur Dufour, son gendre , d’une semblable
somme de 5ooo fr. pour la même cause, plus de celle de 4000 fr.
qu’il lui avait prêtée à diverses époques ; cette créance était assurée
par une reconnaissance de la dame Riberolle, sous la date du
8 janvier 1822.
Pour se libérer, cette dernière passa au profit du sieur Dufour,
l’ordre des deux premiers effets, qui étaient de
55oo fr. chacun, avec
mention que la valeur en était échangée contre le billet qu’ elle
lui avait fa it le 8 janvier 1822, ou les intérêts échus dès ce jour.
L e sieur Dufour en a reçu le montant aux échéances, les 18 sep
tembre 182401 18 septembre i a .
85
Ce paiement est d’autant moins contestable que les sieurs Ribe
rolle reconnaissent la dette dos
5ooo
f r ., et que l’acte du
5o juin
1825, qui établit l’emploi de tontes les sommes reçues par Dufour,
prouve que la dame Riberolle n’avait laissé entre scs mains aucune
valeur p o u r le couvrir de scs avances et de son indemnité.
L ’ordre des deux derniers effets a été passé au sieur Dufour, soit
pour solde de la pension de 1,000 f r . , depuis 1825, soit pour frais
de garde pendant une longue maladie, soit enfin pour la valeur dos
objets contenus dans la garde-robe léguée par la dame Arnaud à
sa nièce, épouse du s i e u r Dufour, dont la dame Riberolle avilit
disposé. Mais comme ces différentes valeurs n’atteignaient pas la
somme de 7000 f r . , montant des deux effets, le sieur Dufour Sous
crivit à sa belle-m ère, deux billets, l’un de 1,000 f r . , l'autre ¡de
^00 fr. pour rétablir la balance; ils sont causes pour s'ôlde de tous
comptes; ces deux reconnaissances ont été trouvées dans les papier,*
�de la dame Ribérolle et font partie de l'actif de sa succession.
Avant de terminer sa carrière, la dameRiberolle voulut constater,
par un acte de dernière volon té, les seniimens et les principes de
toute sa vie.
Son testament, reçu Gourbine , notaire à Thiers , est sous la date
du 2 novembre 1823.
Il contient d’abord un legs à sa dom estique, et un autre de
5oo fr.
à chacun des hospices de Thiers.
La dame Riberolle donne ensuite à sa fille, la dame D uiour, par
précipiit et avantage , certaines rentes modiques , dues par des
particuliers de Péchadoires; et de plus, ses armoires , linge , bijoux
en or ou en argent.
E lle insiitue enfin scs trois en fans, s e s h é r i t i e r s p a r é g a l i t é ,
dans tout ce q u i, au surplus, composera sa succession. Après avoir
indiqué l’ordre et le mode des naiemens, et chargé ses cnfans d’un
devoir p ie u x , elle termine ainsi ses dispositions :
«• Plus, je veux que les règlent eus que j'a i fa its , soit avec mon fils
k
aîné, soit avec mon gendre D ufour, soient exécu tés , e t que les
« quittances que je leur a i données soient respectées.
k Je veux que celui ou ceux de mes enfans qui se permettraient
d’élever aucun débat a c e t é g a r d , soit privé de la quotité dont
« laloi m’autorise de disposer, à son ou à leur préjudice, et qu’ elle
« appartienne ¿1 celui ou ¿1 c e u x qui seraient ainsi querellés , leur
«
« en faisant en ce cas tout don en préciput. Bien entendu que ledit
« cas ayant lie u , ce préciput souffrira celles de mes dispositions
« précédentes, qui pourront être considérées comme prélegs. »
Les sieurs Riberolle font de vains efforts pour disloquer ces
dernières volontés, q u i, librement ém ises, sont marquées au coin
d’une sagesse éclairée, et circonscrites dans la capacité légale.
L ’obstacle que la tendresse ingénieuse de la dame Riberolle a nns a
toute discussion entre scs enfans, est un monument que la justice
s empressera de consacrer.
C est dans le courant du mois de mai 1825, que cette dame
respectable lut enlevée à sa famille.
Les sieurs Riberolle reçurent de suite avis de cet événement. Ce
�qui le p ro u v e , c’est qu’ils étaient présens à l’inhumation et aux
cérémonies funèbres. Leurs dispositions envers leur sœur et son
époux n’étaient point changées. Au lieu de débarquer chez le sieur
D ufour, ils se rendirent chez le sieur Clavel leur avoué. Le sieur
Riberolle aîné affecta de rester dans le salon de réception; il n’entra
pas même dans l’appartement du sieur Dufour. Les deux frères se
retirèrent après la cérémonie.
Peu de jours après, ils envoyèrent deux notaires, MM. Courbine
et D elo t, pour procéder à l’inventaire. Quoique fatigué par cet
oubli des convenances, le sieur Dufour s’empressa de consentir à
cette opération. 11 fut tenu note par les deux notaires , en présence
de Riberolle jeune, et de M e Clavel, chargé des intérêts de Riberolle
aîné, de tous les objets représentés; elle demeura incomplette et
sans être revêtue des signatures, par la présentation des quittances
demandées au sieur D ufour, par la découverte de quelques lettres ,
dont le contenu parut devoir compromettre les intérêts des sieurs
R iberolle, et parce qu’on ne voulut pas consentir, avant le partage
du m obilier, au prélèvement d’une partie des objets que le testament
attribuait en précipul à la dame Dufour.
O11 remarque, dans la copie informe que produisentles appelans,
que l’inventaire a été fait dans la maison appartenant à Al. R iberolle a in é , dont la mère avait la jouissance, aux termes du contrat
de mariage du 2 février 1809. Ce fait établi démontre (contraire
ment aux assertions consignées au mémoire) i° que tout le mobilier
de la dame Riberolle avait été déposé dans sa maison, et non dans
celle de son gendre (p:»ge
54 ) , à l’exception de celui
nécessaire à
son usage personnel; 20 que c ’est du propre secrétaire de la dame
R iberolle, placé dans sa maison, que furent sortis les titr es et pièces
de sa succession , et non d’un secrétaire appartenant au sieur
D ufour, qui n’en a jamais eu chez lui (p»ges
5 et 5o ) ; 5° enfin que
les appelans qui crient à la spoliation du mobilier ne savent et ne
peuvent indiquer les objets qui auraient été distraits. Six couverts
d’argent manquaient; mais il a été vérifié par les sieurs R iberolle,
qui ne le désavoueront pas, que ces objets ont été donnés par leur
mère aux sieurs Guillemot de L y o n , ses neveux. Ce n’est pas h*
�seul acte de libéralité que cette dame ait fait dans sa famille qu’elle
a constamment comblée de bienfaits.
L a succession indivise, loin d’avoir été dilapidée, présentait un
actif aussi considérable que les héritiers pouvaient l’attendre.
En v o i c i le tableau exact :
Art. i er.— Prix delà vente de Charnay, d’après l’acte authentique
du 18 mai 1824, 18,000 f r . , c i...........................
Art. 2,— L a somme de
58 , i 43 fr*
18,000 f. 00 c.
7^ c . , que
doit rapporter le sieur Just R iberolle, et qui se
compose :
i° Des 1 2 , oo fr. de capital pour les reprises
5
de sa m ère, réglées par le contrat de mariage
du 2 février 1809;
5
20 De r ,ooo fr. dont il a été constitué débiteur
de sa mère , par le traité du 16 janvier 1821 ;
° De celle de 10,645 fr. 7 c. pour les arrérages
de la pension de la dame R iberolle, depuis ledit
5
5
jour jusqu’a son décès.
T o t a l , 0 8 ,1
43
fr. 7.5 c. , non contestés et
reconnus par le jugem ent, c i...................................
5
Art. .— Rente duc par les sieurs C o u rb y , au
capital de 4000 fr. Elle appartenait à la dame R ibe
rolle en propre; pour arrérages dus, rooo fr. ci.
4 -— Créance contre demoiselle Constant.
Art. 5 .— Eifet de 2000 f r . , souscrit par le sieur
Art.
Guillemot-Dessapt à la dame Riberolle , ci. . .
58, 1 43
5 .000
5oo
2.000
75
00
00
00
Observer à cet égard que ce p rê t, fait're 8 mars
1823 , constitue un placement postérieur à l’ouver
ture de la succession de la dame Arnaud.
Art. 6. — Autre de 1200 f r . , dû par la dame
Guillem ot-D essapt, ci. ...........................................
Art. 7 ..— Pour arrérages anciens, dus sur
Do cette ¡ art. . . . . .
1,200
00
64,643 f. 76 c.
�(
38
)
D e Iciutrepart............... 64,643 f.
l’obligation de
6 ooo f r ., mentionnée
75 c.
dans l'acte
du 12 octobre 1820, c i................... ......................
2,528
00
D ufour, arrérages compris......................................
2,000
00
Art. 9.— -Pour plusieurs petites créances de la
succession................................................................. ...
1,600
00
Art. 10.— Valeur du mobilier de toute nature.
8,000
00
i,5 o o
00
Art. 8.— Rentes diverses des particuliers de
Péchadoires , léguées en prèciput
la dame
à
Art. 1 j et dernier. — Montant de deux effets
souscrits par le sieur D u fou r, pour solde de tout
compte...........................................................................
T
otal
net
à
partager, toutes dettes et pensions_____________
ducs au sieur Dufour étant soldées.......................
80,071 i. 75 c.
Tous ces documens avaient été loyalement donnés par le sieur
D ufour; mais au lieu de régler aimablement leurs intérêts, les sieurs
Riberolle recoururent aux voies judiciaires. Un jurisconsulte res
pectable avait été proposé et accepté pour arbitre ; mais ils ne
voulurent point lui remettre tous leurs titres, ni déduire leurs pré
tentions.
L ’assignation aux sieurs et dame Dufour est sous la date du
27 novembre 1826. Elle a eu pour objet le partage de la succession
et le rapport de toutes les sommes et valeurs mobilières dont on
prétend qu'ils se sont emparés.
Par leurs conclusions du
janvier 1827, les défendeurs donnent
leur consentement au partage; ils invoquent les actes authentiques
qui règlent la situation respective des héritiers ; ils demandent
enfin aux sieurs Riberolle le rapport de toutes les sommes et valeurs
qu’ils ont reçues de la dame veuve Riberolle.
Des interrogatoires sur faits et articles ont été subis de part cl
d’autre, en exécution
des jugemens qui les avaient ordonnés.
Dans celui prêté par le sieur Dufour, il rappelle les laits; il relève
les inexactitudes, erreurs ou mensonges des demandeurs; il répond
�qu’il n’a jamais été le mandataire général de sa b e lle -m è re , ni le
gérant de ses affaires; qu’il s’est em p ressé, au refus de ses beauxfrè re s , de l’aider quand elle a réclam é scs services; il énonce qu’à
chaque opération la dame R iberolle exigeait de lui le reçu des'
sommes qu’il touchait, et après l’emploi lui en donnait quittance.
Il termine enfin par faire ob server qu’il trouverait, dans tous les cas
5
possibles, une décharge complette dans le règlem ent du o juin 182
et dans les clauses du testament.
Les interrogatoires de la dame Dufour et des sieurs Riberolle ne
présentent aucuns faits qu’il soit indispensable de rappeler actuelle
ment.
C ’est en cet état et sur les docuniens produits par les parties , que
le tribunal de Thiers a statué, tant sur les demandes principales que
sur les preuves respectivement offertes.
L ’cnoncé textuel des motils et du dispositif du jugement, qui est
en date du 6 mars 1828 , doit être soigneusement mis sous les yeux
de la C o u r, afin qu’elle puisse fixer son opinion sur le mérite de
l’appel interjeté par les sieurs Riberolle.
E n ce qui a trait à la dem an de tendante au partage de la succession de
la dame G u i ll e m o t , veuve R ib e r o lle ,
Considérant q u ’ il est reconnu que ladite succession est toute m o b i
l iè re ; que dès-lors il doit être procédé au partage à en faire, et qui n’est
point co n tes té, par-devant un n o taire, après inventaire et estimation des
effets mobiliers dont se compose ladite succession.
E n ce qui touche au compte que les dem andeurs réclament du défen
deur en qualité de mandataire et de gérant des affaires de M adame de
R ib e r o lle , sa b e l l e - m è r e ,
Considérant que s i, com m e on ne saurait en douter d ’après les pièces
produites au procès, le sieur D ufour a géré et administré la majeure
partie des a lia ires de la dame R ib ero lle, il est établi par acte du 3o juin
q u ’ un com pte a eu lieu entre sa belle-m ère et lu i; que cet acte
p o ite quittance des sommes q u ’ il aurait perçues ju s q u ’audit jour ;
Q u en supposant que les perceptions faites excédassent les emplois
énumérés audit acte, 011 ne saurait voir dans la quittance générale q u ’ un
avantage indirect que la dame Riberolle aurait voulu faire à son gendre,
�(
4°
)
ce qui lui était lo isib le, a y a n t , aux termes de la l o i , la libre disposition
du quart de ses b ien s; q u ’ainsi jusqu'à ce q u ’ il soit éta b li, ce qui n ’est
pas même allégué, que le règlem ent dont est q u e s tio n , co ntient un
avantage q u i , joint aux autres dons que la dame Ribero lle aurait pu faire
à sa fille ou à son g en d re , excéderaient la quotité d ispo n ible, le lit acte
doit être maintenu com me règlement de compte, qui est le caractère que
la dame Riberolle a voulu lui im prim er : volonté q u ’elle a exprim ée de
nouveau en son testament, du 2 novembre su iva n t; ce qui rend in a d
missibles les conclusions des demandeurs, qu ant aux comptes des percep
tions faites antérieurem ent à ce règlem ent.
E n ce qui a trait au rapport du prix de la vente du dom aine de
Cliarnay ,
Considérant q u ’il est justifié au procès que la vente de ce d o m a in e ,
dont le sieur Dufour a été le principal négociateur, a été consentie au
sieur P ié r o u , m oyen nant la somme de
38 ,000
f r . , bien que l’acte a u
thentiqu e qui en a été passé n’en porte que 18,000 fr. ;
Q u ’ il est égalem ent établi que sur les
38 ,ooo f r . , prix réel de la vente,
a , 000 fr. ont été payés co m p ta n t, que l ’a cqoéreur a souscrit à la dame
Ribero lle pour 18,000 fr. d ’effets, et que les autres 18,000 fr. portés en
l ’acte de vente sont encore dus ;
Q u e les effets souscrits par Piérou ne se sont point trouvés chez la
dame R iberolle lors de l ’ ouverture de sa succession ;
Q u ’ il n ’ est point désavoué par le défendeur que plusieurs des effets
dont il s’ agit ont été passés à son ordre par sa belle-m ère et pour diffé
rentes causes ;
Q u ’ il importe de savoir si les endos de ces billets sont réguliers et tels
q u ’ ils en avaient transmis la propriété au d éfendeur ;
Q u ’ il importe également de savoir si les causes des transferts sont ou
non légitimes ;
Q u e rien n ’établissant que le sieur D u fo u r se soit trouvé créancier de
sa b elle -m è r e , les effets dont il s’ agit n ’ont pu passer entre ses mains
q u ’ à litre de don indirect ;
Q u e le d éfen deur ayant été et se
trouvant
en core, par le fa it, nan ti
de la majeure partie des effets de la succession, c ’est à lui de représenter
les billets du sieur P ié r o u , sauf aux demandeurs , au cas de non r e p r é
sentation de ces mêmes b illets, à en faire la recherche ou prouver soit
leur soustraction, soit la disposition juste ou illég a le, que la dam e R i
berolle en aurait faite au profit de son gendre ;
�(4 0
Q u ’à ce môme titr e , le défendeur doit être tenu de représenter les
titres constitutifs des créances assises sur les sieurs C o u r b y et Dessapt
et la demoiselle C o n s t a n t .
E n ce qui touche à la soustraction de partie du m obilier de ladite
dame R i b e r o l l e , que les demandeurs im puten t au sieur D u f o u r ,
Considérant
vente
q u ’il est reconnu au procès q u e , postérieurem ent à la
du domaine de C h arn ay, tout le mobilier de la dame de R ib e r o lle ,
non compris dans ladite v e n t e , a été transféré au dom icile du défendeur
où
la dame R ib ero lle est allée habiter ; q u ’ aucuns titres n ’établissent
q uelle était la consistance de ce m obilier ; q u ’au décès de la dame R i berolle il n ’ en a point été fait inventaire; que le tout est resté entre les
mains du sieur D u fo u r; que dès-lors ce dernier doit être tenu de le re
présenter pour en être fait inventaire; sauf aux dem andeurs, en cas d ’ in
fidélité dans la représentation, à justifier tant par titres que par témoins
de la consistance réelle d u d it m obilier.
E n ce qui touche au fait de l ’extraction o p érée, selon les dem andeurs,
par le sieur Dufour, de sommes d ’argent et d ’argenterie enfouies au d o
m aine de Charn ay, par la dame A r n a u d , dont lu dame Riberolle était
h éritière ,
Considérant que, s’ il est des cas où les tribun aux peuvent admettre la
5
preuve par témoins de faits présentant un intérêt de plus de i o f r . , il
en est d ’ autres où la loi leu r défend de recourir à une preuve de celte
es p è ce , comme lorsqu’ il n’existe aucun co m m encem ent de preuves écrites
d u fait a llég ué, ou que le fait en lu i-m êm e n ’a pas eu pour cause l ’ une
de celles indiquées par l’art.
du Code ;
Considérant q u ’outre le danger q u ’ il y aurait à admettre par témoins
la preuve d ’ un fait de la nature dont il s’ agit, il s’élève ici une foule de
considérations qui en dém ontrent l ’ invraisemblance. E n effet, si, com m e
l ’annoncent les d em an deu rs, l ’entrée des alliés en F ra n ce avait engagé
la dame Arnaud à enfouir dans un fournil de sa maison une somme co n
sidérable d ’ a rg e n t, et de
l’argenterie qui devait lui être nécessaire,
n ’est-il pas présuinable q u ’aussitôt après la sortie des troupes étran gères,
elle on a fait ou fait faire l’extraction? Peut-on au contraire penser q u ’elle
ait laissé les objets enfouis jusqu’à son décès? L orsq u e l ’on considère que
les cohéritiers de la dame Arnaud n'en ont point réclamé la remise contre
le sieur Dufour, les présomptions qui naissent des circonstances même
du fait et les considérations qui déco ulen t de l ’esprit de la loi se r é u n i s
sent donc pour faire ecarter la preuve offerte.
6
�(
4*
)
E n ce qui touche à la preuve des autres faits articulés dans les c o n c lu
sions des d em an deurs,
Considérant q u ’il est du devoir des tribu n au x de n ’admettre la preuve
qjie des faits non justifiés ou de ceu x d on t la démonstration pourrait
avoir des résultats utiles pour la justice ;
Q u e la preuve ultérieure de la gestion que le défendeur aurait eue des
affa ires de sa belle-m ère serait absolument in u tile , puisque les faits de
cette gestion sont établis au procès ;
Q u ’il en est de môme de la preuve relative au prix réel de la vente d u
domaine de Charn ay, pu isqu ’ il est reconnu q u ’ il s’est élevé à la somme
de
38 .ooo
fr. ainsi que Pont allégué les demandeurs ;
Q u e les mêmes motifs doivent faire écarter la preuve offerte du séjour
de la dame R ibero lle au dom icile de son gendre, et de l ’état d ’affaiblisse
m en t dans lequ el celle-ci se serait trouvée sur la fin de sa vie : la première
de ces circonstances étant patente au procès, et la seconde pouvant d é
truire le mérite des actes consentis par la dame R ib e r o lle ; q u ’ainsi des
difTérens arliculatsdes d em an deu rs, les seuls dont la preuve puisse avoir
un résultat utile et soit admissible so n t:
i° celui de la soustraction de
partie du m obilier de la dame R ib e r o lle , au cas où la représentation que
le
défendeur
doit
e n f ai r e
serait incom plète, preuve qui doit être réservée
aux demandeurs lors d e là confection de l ’inventaire à intervenir ;
2° L a soustraction ou dispositions illégales des billets consentis par le
sieur P ié r o u , acquéreur du dom aine de Charn ay, au cas où ils ne se
raient point représentés par le sieur Dufour.
E n ce qui touche les conclusions d u défendeur, tendant à obliger le
sieur R i b e r o l l e aîné à rapporter à la masse de la succession, i ° l a so m m ed e
12,000 fr ., m ontant de son avancement d ’ h o irie; 2° celle de 26,3oo fr.
p o u r arrérages de la pension viagère q u ’ il était tenu de payer à sa m ère,
aux termes de l ’acte portant contrat de m ariage, du i février 1807,
Considérant q u ’ il ne s’élève quant à ce aucunes difficultés, le sieur
Ribero lle s’étant à l’audience quant à ce reconnu com ptable envers la
succession des sommes qui lui sont demandées.
Relativem ent au rapport qui lui est demandé d ’ un h u ilier et c h a n d e
lier en a rg e n t, d ’ un m atelas, lit de plu m e et traversin appartenant à la
succession et dont il se trouverait n a n t i ,
Considérant que chacun des cohéritiers doit être tenu de rapporter à
la masse, et lois de l ’inventaire à faire, les effets mobiliers q u ’ il se trou
vait détenir, et que ce n'est q u ’à défaut de rapport et à la clôture de
�l ’inventaire, que la preuve de la rétention de ce m obilier peu t avoir lieu.
R elativem ent au rapport des sommes que chacun des fils R ibero lle au
raient reçu de leur mère,
A tte n d u que les sommes dont il est question ne sauraient être consi
dérées
que
com me de simples largesses que la dame R ib ero lle aurait faites
à ses deux fils et sur ses revenus ; qu'elle en a fait d ’équivalens à sa fille ;
que la loi laissant aux pères et mères la libre disposition de leurs reve
nus , leur permettant d ’en gratifier ceu x de leurs enfans que b o n leur
s e m b le , de pareils dons ne sont p o iul sujets à rapport.
E n ce qui touche à la preuve des faits articulés dans les conclusions
du défendeur; autres que celui de la rétention de la part du sieur R i b e
rolle d ’ un h u ilier et chandelier en argent ci-dessus rappelés,
Considérant que la preuve de tous ces faits serait absolum ent sans ré
sultat pour la cause ; q u ’ elle doit être rejetée com m e inu tile.
P ar
ces
M otifs ,
L e tr ib u n a l, avant faire droit en d éfinitif, ordonne que par un notaire
au choix des parties, à défaut de s’ entendre qu ant à ce dans les trois
jours, h partir de la signification du p résent, par M" G o u r b in e , que le
trib u n al commet à cet effet, il sera procédé à l'inventaire du m ob ilier
d épendant de la succession de la dame Ribero lle -, à défaut de représen
tation de la part des copartageans qui s’en trouvent nantis, ou de repré
sentations incom plètes de leur pa rt, autorise chacune des parties à faire
p r e u v e , tant par litres que par tém oins, de la consistance d ud it m ob i
lier, laquelle preuve se fera en la manière ord in a ire, par-devant M . le
président, juge commis aux enquêtes q u ’ il y aurait à faire, et pour sur
veiller les opérations du partage ;
O rd o n n e que le sieur Dufour represenlera les effets consentis p a r l e
sieur Piérou ; à défaut de représentation , autoiise les demandeurs à faire
preuve en la m ême forme et par-devant le m êm e com m issaire, soit de la
soustraction, soit de la disposition illégale de ces mêmes billets;
O rd on ne que le sieur D u fo u r représentera les titres constitutifs des
créances dues par les sieurs C o u rh y et les mariés G uillem ot-D essapt,
ainsi que par la demoiselle Constant ;
Déclare le sieur Ribero lle aîné d é b ite u r d e là succession, d e là somme
de
38,ooo f r . ,
savoir: 12,000 fr. portés en son contrat de mariage , les
quels aux termes du droit ont dû porter intérêt à partir du décès de la
mère co m m u n e, et les autres 26,3oo fr. pour arrérages de la pension
viagcic dont il était tenu envers sa mère et q u ’il n ’a pas p ayée, lesquels
�(
44
)
produiront intérêt à partir d u jo u r où la dem ande en aura été spéciale
m e n t formée ;
Déclare inadmissible la preuve des autres faits articulés dans les con
clusions des demandeurs et des défendeurs, qui ne se trouve point formel
lem en t autorisée par le présent;
Surseoit à faire droit jusqu’ au jug em en t d éfinitif sur les autres chefs de
conclusions des parties, qui ne se trouveraient point réglés par le présent ;
tous moyens quant à ce leur dem eurent réservés ainsi que les dépens.
Réfutation des moyens des appelans.
Les développemens que le sieur Dufour a dù donner à son ex
posé pour combattre les innombrables assertions de ses adversaires
rendent maintenant oiseuse une longue discussion.
Quelques observations suffiront pour démontrer que l’appel n’est
fondé ni dans le droit ni dans le fait.
Il
se présente en preiniere ligne une considération morale qui do
mine toute la cause.
Dans le système de l’attaque, le sieur Dufour n’aurait pu s’em
parer d’une p a r t ie de la fortune de la d a m e R i b e r o l l e , qu’en trom
pant sa confiance ou avec son concours. Ces deux hypothèses sont
également écartées par les écrits nombreux qui font pièces au p ro
cès. La correspondance de la dame R iberolle, qu’on ne peut lire
sans être pénétré de respect pour ses vertus, prouve quelle s’occu
pait a v e c intelligence de scs affaires, qu’elle en conservait la direc
tion et quelle savait faire prévaloir sa volonté. Elle était trop
éclairée pour se laisser dépouiller impunément ; son attention étant
sur-tout excitée par les surveillans naturels qui l’entouraient. L a
loyauté de cette dame, sa piété sincère, son égale tendresse pour
ses enfans éloignent encore plus fortement la pensée qu’elle ait em
ployé des voies in d ir e c te s et frauduleuses, pour enrichir sa fille et
son gendre en dépouillant ses deux (ils. Au s u r p l u s , tous les actes de
sa v i e , les réglemens successivement faits avec son gen d re, ses dis
positions testamentaires démontrent tout a-la-fois la pureté de sa
conduite, la connaissance des faits, l’exactitude du résultat et la
persévérance de sa volonté.
�Que peuvent espérer les sieurs Riberolle d’une combinaison qui
est un véritable outrage à la mémoire de leur m è re , dont ils osent
suspecter la capacité intellectuelle ou la moralité ?
Pour faire croire à une spoliation, les appelons ont annexé à leur
mémoire un tableau indiquant la composition de la succession de la
dame Riberolle; mais la majeure partie des élémens en est ima
ginaire.
11 a ete démontré, et les pièces produites le justifieront, qu’il faut
distraire de l’actif, i° la somme de 9200 fr. d’arrérages de pension
portée dans la quittance du 11 novembre 1 8 1 1 , dont la dame
Riberolle n’a jamais reçu le montant; 20 celle de 9597 fr. 8 c .,
montant des quittances délivrées par le sieur Dufour, les 6 et
12 octobre 1820 , mais dont il a été déchargé par la dame Arnaud
par la quittance du 10 janvier 1821 ; cette somme faisait nécessai
rement partie des
,000 fr. de capital placés parle sieur Guillemot.
O11 11e peut donc la reproduire sans faire u n d o u b l e emploi; 5° celle
de 1687 fr. quittancée p a r com pensation, le 7 janvier 1822, pour
solde de compte entre le sieur Guillemot de L yo n et la dame
56
Riberolle , et qui ne peut dès-lors cire considérée comme une
valeur réelle.
Ces sommes réunies aux intérêts calculés
au
tableau
, forment
un total de 29,638 fr. qui a été mal à propos comptée dans l’actif
de la succession.
On aurait dû aussi ajouter aux sommes à distraire de l’aclif les
dettes personnellement contractées par la dame Riberolle , et dont
elle s’est libérée ; les dépenses nécessaires pour sa nourriture et son
entretien; les libéralités dont elle gratifiait souvent les personnes
de sa famille et les appelans eux-mêmes, qui se sont luit dispenser
du rapport par la considération que ces largesses avaient été prises
5
sur les revenus ; le service annuel de la somme de oo fr. pour
l’usufruit du sieur Guillem ot-Darrot; et enfin les placemens faits
par elle, tels que celui du sieur Guillemot-Dessapt, se portant
à 2000 fr. ; de la dame Constant pour la somme de
sieur Guillemot son neveu pour
5oo fr.,
3oo
fr. , et du
destinés :i son cautionne
�ment. Les sieurs Riberolle savent qu’elle a remis à ce dernier sa
reconnaissance à titre de libéralité.
Il faudrait aussi faire disparaître en majeure partie les derniers
articles , qui sont imaginaires et évidemment exagérés.
Ces rectifications faites porteront l’actif de la succession à la valeur
réelle, ci-dessus indiquée de 80,000 fr.
Mais les sieurs Riberolle insistent ; ils opposent que la dame
Riberolle a sans nécessité absorbé les capitaux qui lui étaient pro
venus de là dame Arnaud, sa sœ ur, et que le sieur Dufour a profité
seul des fonds qui ont disparu.
La réponse sera péremptoire; il est très-vrai que les capitaux ont
été amortis, mais d’un autre coté les revenus ont formé des capitaux;
dès-lors, il y a compensation.
L ’exactitude de cette conséquence peut être démontrée par un
calcul facile.
L e sieur Riberolle aîné est reconnu débiteur i° de la somme de
5
1 ,ooo f r ., portée au règlement du 16 janvier 1821 ; 20 de celle de
io,643 fr. 75 c . , pour arrérages de la pension échue depuis celte
décès d e la m è r e ; total. . . .
fr. 7 5 C.
dont il fera le rapport à sa succession.
é p o q u e , ju s q u ’a u
25,645
Il est incontestable que la dame Riberolle avaitla faculté d’absorber
scs revenus , et d’en disposer à son gré , sans qu’aucun de ses enfans
put s’en plaindre; elle 11e l’a pas fait. Par tolérance, par nécessité ,
ou par calcul, si l’on veu t, elle a laissé agglom érer les arrérages de
sa pension , pour en former un capital : mais tous ses enfans n’en
profitent pas moins, et ce résultat positif devrait les porter à respecter
l’emploi qu’elle a pu faire de partie des sommes qui lui sont pro
venues de la dame Arnaud sa sœur.
Au surplus, quels ont été les capitaux reçus par la dame Riberolle?
Les 20,000 fr. que lui a soldés le sieur Guillemot de L y o n ,
autres 20,000 fr. sur le prix de Charnay, et quelques modiques
recouvremens.
Mais elle a payé 10,000 fr. légués au sieur Pézard; 10,259 fr.
portés au règlement du
5ooo
50 juin 1823 j 3ooofr. aucuréd eM oren çay;
fr. pour indemnité au sieur Riberolle jeune ; pareille sommo
�(
47
)
sieur Dufour; plus 4000 fr. argent prêté; 5 250 fr
au
pensi on
5o
depuis le règlement du
d’exploitation pendant sept mois
à
p0m, Sfl
juin; les frais de m éna-e et
Charnay; elle a éteint les dettes
de la succession, et fourni à une multitude de dépenses inévitables
L ’on retrouve enfin dans sa succession la somme de i oo f r . ,
montant de deux eil’ets du sieur Dufour.
5
Il y a donc eu emploi légitime et nécessaire des capitaux amortis.
.c<Ju,l,,l,re Parfait
entre la recette et la dépense. L es pré
tentions des appelans s™ t donc déplorables d’après l’explication
des laits.
,
Si la consistance de la succession , telle qu’on vient de la
déterm iner, est exacte, les difficultés spéciales au sieur Dufour
deviennent sans objet. Il importera peu de rechercher quel a été
le gérant des ailaires , si les résultats sont à l’abri de critique.
R i e n dans la cause n'im prim e au sieur D ufour la qualité ni les
oblig
n i a c c e p t e' a u c u n p o u v o i r
? a t i o n s d ’u n , m a n d a ta ir e . H n ’a rr ce vm11 «J
d agir dans 1 intérêt de la dame lliberolle.
y a absurdité d e représenter l e sieur Dufour comme ayant e u ,
11
depuis son mariage en 18 10 , l'administration de tous les biens de s i
belle-mère (p . 71 et 7 2 ), lorsqu’elle n’en possédait aucuns (toute
5
sa fortune consistant dans un capital de 1s , o o fr ., non remboursable,
placé dans les mains de son fils aîné , et dans une pension viagère);
l o r s q u ’elle
résidait a Charnay, tandis que son gendre habitait la ville
de Thiers.
Si après le décès de la dame
Arnaud, le sieur Dufour,
sur le
refus de ses beaux-frères, a momentanément prêté son assistance
à la dame Riberolle , soit pour préparer un traité avec le sieur
Guillemot
soit pour opérer les réglemens urgens,
soit
enfin
son cohéritier,
pour 1aider dans
la vente du domaine de
Charnay et
dans son déménagement, 011 ne peut voir dans cette coopération
quun bon office que prescrivaient les
désir de sa belle-m ère, sans le soumettre aux
purement accidentelle
circonstances et le
obligations d’un comptable.
Fut-il même obligé à un compte, lesieur Dufour ne deviendrait
responsable que des sommes reçues par lu i, mais non de toutes
�(
48
)
c elles qui sont directement parvenues à la dame R iberolle, et on a
vu qu’elles sont assez considérables.
Sous ce rapport, les demandes et l’appel des sieurs Riberolle
sont absolument sans intérêt.
Q uel que soit d’ailleurs le caractère de sa coopération, fu.t-elle même
considérée comme un véritable mandat, le sieur Dufour trouve dans
l’acte du o juin 1823 une quittance des sommes qu’il a reçues.
3
Ce règlement, fait avec pleine connaissa«ce des faits, sur des états
tenus respectivement, et sur des élémens dont les sieurs Riberolle
ont avoué eux-mêmes l’exactitude, restera, malgré tous leurs efforts
pour le dénaturer, comme u n monument qui constitue en faveur
du sieur Dufour une décharge complette et définitive.
Inutile après cela de faire observer que l’acte du
5o juin ne serait
pas moins irréfragable en droit, quand il renfermerait un avantage
indirect au profit du sieur D ufour, puisque cet avantage n’attein
drait pas la quotité disponible.
Enfin, le testament de la dame Riberolle, en confirmant solennel
lement la sincérité des actes et reglemens qu’elle a faits avec ses fils
et gen d re, a imposé à tous ses enfans un obstacle qu’ils sont tenus de
respecter, si non par piété, au moins pour éviter l’application de la
clause pénale que sa sagesse a infligée à ceux de ses enfans qui
soulèveraient des contestations qu’elle a voulu prévenir. Dans tous
les cas possibles , les sieurs Riberolle ne peuvent se soustraire à
Falternative posée par leur m ère, ou d’exécuter les réglemens qu’elle
a approuvés, ou de se restreindre à la réserve faite par la loi : cette
option est pour eux de toute nécessité, ainsi que l’a décidé une ju
risprudence constante.
Il
faut actuellement apprécier le jugement dont est appel, dans
ses dispositions relatives aux effets composant partie du prix du
domaine tie Charnay.
Ce n’est pas en qualité de mandataire, mais comme ayant été
nanti de partie de scs effets , par suite des ordres passés à son
projit} ainsi qu il en convenait lui-m êm e, que les juges de première
�( 4g )
instance ont ordonné que le sieur Dufour représenterait les effets
consentis par le sieur Piérou; en laissant aux sieurs Riberolle la
faculté de faire la recherche de ces effets, à défaut de celte repré
sentation.
En prescrivant ces mesures préliminaires, le tribunal de Thiers
s’est expressément réservé le droit d’examen sur les causes des
ordres souscrits par la dame Riberolle en faveur de son gendre, et
sur la validité des créances du sieur Dufour.
La représentation des effets est aujourd’hui impossible, puisque
le sieur Dufour a touché le montant de ceux dont la propriété lui
a été transmise.
On a vu dans l’exposé des faits que la dame Riberolle a reçu
directement les 2000 fr. de pot de vin ; qu’elle avait aussi touché
de l’acquéreur 2000 fr. en décembre 1822 , et autres 2000 fr. par
négociation avec les sieurs Bon fils et Blanc : total 6000 fr.
C ’est pour cela qu’en passant la venie authentique du 18 mai 1824,
55
le sieur Pierou ne souscrivit que quatre effets de
oo fr. chacun ,
complétant les 14000 fr. qu’il restait devoir sur la partie de prix
qui avait été dissimulée dans l’acte.
On connaît aussi l’emploi de ces quatre effets dont l’ordre a été
passé par la dame Riberolle au sieur D ufour, valeur reçue, soit en
quittances, soit en effets faisant ensemble i oo fr.
5
Si l’on contestait la teneur des endossemens, elle pourrait être
vérifiée, soit par la production qu’en ferait le sieur Piérou qui les a
soldés et retirés, s’il en est encore saisi ; soit par sa déclaration en
justice , s’il ne les a plus en son pouvoir.
Dans tous les cas , les valeurs délivrées par le sieur Dufour étant
réelles et légitimes, il sera nécessairement déchargé de toute repré
sentation desdits effets, soit par la cou r, si elle veut statuer sur ce
chef en l’évoquant ; soit par le tribunal, lors de la discussion des
comptes. Les réserves les plus expresses sont faites sur ce point par
le sieur Dufour.
Le jugement ne fait aucun grief aux appelans sur le mobilier.
Tous les documens ont été donnés sur sa consistance. U11 état informe
a été dresse: les sieurs Riberolle en représentent une copie; on les
7
\
�(
5o
)
défie d’indiquer aucun objet en déficit. Au surplus, si, après un
inventaire régu lier, ils croient avoir à prouver des soustractions,
le jugement leur réserve la faculté d’en administrer la preuve; il
n’y a donc lieu à aucune rectification à cet égard.
On ne s’arrêtera pas à démontrer l’absurdité de la preuve offerte
sur l’extraction d’uue somme d’argent et d’objets d’argenterie,
prétendus enfouis par la dame Arnaud, lors de l’invasion des alliés.
L e jugement a fait justice de cette fable : il suffit de renvoyer aux
motifs qu’il indique.
Au résum é, les imputations et les demandes des frères Riberolle
n’ont d’autre cause qu’un sentiment injuste d’inimitié contre les sieur
et dame Dufour ; c’est sans motif raisonnable qu’ils crient à la
spoliation, lorsqu’on leur démontre que la succession de la mère
commune , dégagée de toutes dettes , a une valeur positive de
80,000 fr. Si les legs, les dettes et les dépenses personnelles ont
absorbé des capitaux, les revenus o n t, par compensation, formé
d’autres capitaux équivalons. La dame Riberolle a scrupuleusement
maintenu entre ses trois enfans l’égalité qu’elle leur avait promise et
q u i était dans so n c œ u r . Les exagérations de ses fils doivent dispa
raître devant la vérité ; et le sieur Dufour , obligé de suivre ses
adversaires dans toutes les assertions qu’ils se sont perm ises, aura
rempli son b u t, s’il a convaincu les magistrats de la cour qu’un
père de sept enfans a été injustement attaqué dans son honneur et
dans sa fortune.
C l a u d i n e RIBERO LLE.
Joseph
D U FO U R .
Me G O D E M E L , ancien avocat.
Me T A IL HAND, avoué-licencié.
RIOM ,
IMPRIMERIE
DE SALLES
FILS,
PRES LE
PALAIS
DE J U S T I C E .
�
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Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dufour, Joseph. 1828?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Godemel
Tailhand
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
testaments
inventaires
dilapidation d'héritage
médiation
ventes
usage du factum
contrats de mariage
viager
correspondances
vin
quittances
mobilier
procédures
spoliation
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour sieur Joseph Dufour, négociant, et dame Claudine Riberolle son épouse, de lui autorisée, habitans de la ville de Thiers, intimés; contre sieurs Joseph-Just Riberolle et Pierre Riberolle, leurs frères et beaux-frères, propriétaires, habitant en la commune d'Arconsat, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1828
1805-1828
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV25
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_DVV24
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/28/54019/BCU_Factums_DVV25.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Arconsat (63008)
Charnay (69047)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
contrats de mariage
correspondances
Dilapidation d'héritage
inventaires
médiation
mobilier
procédures
quittances
spoliation
Successions
testaments
usage du factum
ventes
viager
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54018/BCU_Factums_DVV24.pdf
bfc304cbeb1db19cae6ffb746c244386
PDF Text
Text
EXPOSÉ
POUl\.
LES SIEURS RIBEROLLE t
CONTR:tJ;
LES SIEUR. ET DAME DUFOUR
�TABL~~AU
~1;L()j;91;L(U1;~
~ CIJ1~dtizèn r!& la daCCed.Jtm ch, !cv dcwnf} at!(}l~1Ia
1l1'po1'1. • •• " , • , • • • I~2/o87 f. 77 c.
COMPOSITION SELON M. DUFO T R.
2°.
Mobilier. Inventaire ou notes des notaires ( pas estimés) mémoire.
;2
Vente de Charnay.. . . , . , . , . . . • . . , . . , . • .
3 Arrérages de la rehte viagère due par Riberolle à sa mère. .
4 Rente Courby ( en principal et arrérages ). .
. . . .
5 Effet de mademoiselle Constant...
. , . .
6 Effet de M. Guillemot-Dessapt .
. • . . . , ,
1
7
......
Effet de son épouse.. . . . . . .
.
»»
f.» c.
. 18,000
»
, 38, J 43 75
. 5,000
»
300
»
• 2,000
»)
1,200
»
Sommes proCJenant du prix de la vente de Cltarnay, réglées par effets.
Suivant interrogatoire sur faits ct articles, et leUre du 24 avril 1824 .. 6,000
850
Intérêts de deux ans dix mois. . . . . . . , , . . .
~ Voyez leUre du 24 avril 1824, quatre effets de 3,500 f. chaque (de 1824
à 1827' . . . . . • . . • . , .
.
.
. .
3 Voyez. . . . . Idem. . • . . quatre effets pour intérêt de ceux
ci-dessus ( Idem. ) . . . . , , , . , . . . . . . . , .
l,7 5o
4 Voyez. . . . Idem. . • . quatre effets de 900 fr, chaque, pOUl'
intérêts de vente authentique. • • . . , , . . . . , , .
3,600
1
.. ... .
A AJOUTER SUIVANT LES PREUVES ÉCRITES,
»
»
26,200
»
})
0
77
SO'(lmes emp loyée r; pour ou par madame Rlberolle, qu 'I.'Z conc:zent
de de'dw're dans l'intérêt du sœur ,Dufour, son mandataire.
D 'abord , sommes proçenant de madame Riberolle personnellement.
décembre 1811 ) .• 9,200
Intérêts de quatorze ans six mois.. . . . . . . . . 6,67 0
2
Sommes reçues par Dufour ( se port~nt fort), voyez acte du 18
2,800
octohre 1820. . • . . . . . . . . . . . . . · . .
Intérêts de quatre ans sept mois. . . • .
640
600
3 De Guillemot-Dessapt ( voyez lettre du 5 avril 1823).. . .
60
Intérêts de deux ans. . . • . . . . . . .
)J
Il
»
l)
50
»
»
SOMMES PROVEr ANT DE LA SUCCESSION DE LA DAl\lE ARNAUD.
1
(,
J ~)'970
A Dufour, pour indemnité de 3,000 f. abandonnés à Riberolle a1né ..
Intérêts de quatre ans quatre mois. . . • . •
2
A , M. IUberolle cadet. . . . . . Idem. . . . . . . . . . . • •
Intérêts de quatre ans quatre mois. . . . . . . . .
3 Voyez interrogaloire. Pour deux ans neuf mois de pension de la mère,
à 1,000 fr. par an· . . . . • . • • . . . . . . , . . . • . .
4 A Pezard, légataire. Voyez quittance du I!~ décembre 1822. • • • •
Intérêts de deux ans cinq mois. , • . • • · , . . .
5 Quittance de la mère) du 30 juin 1823 ( 500 fr. déduits, double
emploi Pezard ). . . . , • • .
. . , .
Intérêts de deux ans . . . • • • • . . . , • . . "
3, 000
»
G37
3,000
50
63 7
50
2,250
10,000
1,250
»
t
50
~
Celles provenant de dijférentes créances et de sommes placées
par elle à Lyon, reçues par le sicur Dufour, apant ou aprè le
10.
décès de la dame Arnaud.
l\.eçu par Dufour ( fondé de pouvoirs de madame Arnaud) acte du
6 cctobre 1820. . • . . . . . . . . . . . . . . . .
Intérêts de quatre ans sept mois. . . . . . . . . .
2
Reçu . . . . . . Idem. . . . acte du 12 octobre 1820 •
Intér"ts de quatre ans sept mois.· . . . . . . ...
3 Arrêté de ompLe de 1 21, et quiLtance du 7 jan"ie' 1822. . . • ,
Inlér'lls de trois ans cinq mois. . . . , • .
4 8 janvier 1822 , reçu de Guillemot qui a compté à Dufour .
Intérêts de trois ans cinq mois. . . . • . , .
5 Trois billets ( ordre Dufour) du 14 janvier 1822, mOntant ensemble ..
InLérêts de trois ans cinq mois, , • . • . • • . , •
Dix billets (ordre Dufour) du 15 février 1822, mOutant ensemble .•
Int 'rèls de Lrois ans et trois mois. • . . , . • • . .
})
\
148, 287
Composition suiçant tz'tres ,
RAPPORTÉES PAR LES SIEURS RIBEROLLE.
1 Pour arrérages de pension (voyez quittance du
.. . .
)}
'f}
31, 488
2.
»
»
3,6
97 3 9°
9,739
DédueLtOTt jm'te des sommes employées, 'reste à partager. .
1
7
Cinq billets ( ordre Dufour) du 14 mai 1822, montant ensemble . ••
l' At
' ans. • • • • • . · . • . • • • .
s pour trOI
1ntere
3, 597
825
6,00
1,37 5
1, 68 7
28'
3,000
512
~4. ojnufer: les sommes qui. dépendent de la preuçe offerte contr~
8
le jieur Dufour.
94
n
l
})
»
2
»
3
»
4
5
3,07 5
520
37,47 3
52
»
95
68
1 1, 285
1,833 65
3,026
450
A reporter. .. •
5
6
7
8
Billet de Glainard de Clizy. , . • • • • • • . . . . . . . . . • 2,000
Quarante années de vin vieux ou nouveau, à 30 fr. l'année. . . . , 2,400
Pour petites dettes par Dufour . . . . . ( Mémoire). • . . .• ,
Du sieur Murat, maire de Charnay. . . • , . • • • • • . . .•
400
36 9
Poitrasson, de Charnay. . . , • . . • • . • . • .
.'
Mobilier vendu après le décès de la dame Arnaud. • • • . . . .
200
Mobilier transporté à Thiers (cent quinLaux à 100 fr. le quintal). . 10,000
Restitution par l'enregistrement 1 de trop forle perception. . • . .
650
»
»
)}
]»)
»
»
16, 01 9
})
10,000
»
»
»
»
La masse serait ainsz' de. • • ·
2
NOTA.
9
On aura d1finitivement. • •
• 122, 087 77
....
• .. . .
Si on ajoute, valeul: d'argent et objets déLerrés. • • • • •
On ne peut comprendre ici les intérÛts des dernières sommes j ils ne seront
connus que lorsqu'on connahra l'époque des pcrccplion~ .
�,
COUR ROYAL"&
DE RIOM.
EXPOSE
Ife,
POUR
Sieur
RIBEROLLE, propriét ire, demeurant
JOSEPII -JUST
à Landevie, et maire de la commune d'Arconsat, arron . . .
dissement de Thiers, et sieur PIERRE RIBEROLLE, propriétaire, demeurant au lieu de Lunel, même commune
d'Arconsat, Appelans;
CONTRE
Dame CLAUDINE RIBEROLLE et sz'eur JOSEPlJ DUFOUR,.
son épuux , négociant habilans de la ville de 1 hiers, Intimés,
l
1
des familles, la nécessité d'y faire régner la sécurité et la confiance qui seules peuvent éLablir et conserver
la concorde enLre proches j le devoir plus étroit de réPl'imer avec sévérité les a Les repréhensibles dont l'exemple
P~\lrrait être le plus dangereux; de contraindre à une juste
L'INTÉRÈT
1
J'cpal'atÎon celui qui a épuisé touLe,:, Je,:; çombinaisons
:J
<:lue
Chambre.
�( 2 )
l'adresse, la ruse et le mensonge, peuvent offrir à l'esprit
le plus délié, pour s'emparer d'une fortune qui avait été
confiée à sa foi, ct à la charge d'en rendre compte: tout,'
dans cette affaire, sembJe se réunir pour fixer l'attention du
magistrat d'une manière toute spé"iale.
La dame Guillemot, veuve RiberolIe, avait pour tous ses
enfans une vive affection; elle voulait conser()er l'égalité entre
eux, et , pour cela, faire et faire faire tout ce qui était propre
à les édifier sur l'accomplissement de sa volonté. Mais la daIne
Riberolle était incapable d'agir par elle-même; son âge et ses
infirmités lui rendaient les secours d'autrui nécessaires, et
bientôt le ~ieur Dufour) son gendre, eut l'administration de
toutes ses affaires.
La gesLion du sieur Dufour a commencé en 1810, époque
de son mariage, ct a continué jusqu'au décès de la dame
Vcuye Riberollc, arrivé en 1825. Pendant cet espace de temps,
la dame Riberolle a recueilli la succession de la dame Arnaud,
sa sœur, avec laquelle elle avait cohabité pendant plusieurs
années, et qui est décéd ée à la fin de 1 ~h 1. Cette succession
était considérable; outre un mobilier et des créances d'une
grande valeur, elle comprenait encore un domaine' dans lequel
la dame Arnaud hnbiLait. Au décès de celle dame, le sieur Dufour a non - seulement géré L adminisLré toute la fortune, mais
èncore il en a disposé en maîlre. Le mobiljer a éié vendu, c'est
le sieur Dufour qui en a touché le prix. Les créances ont été
dénaturées, le sieur Durour les a perçues, au moyen ùe billets
à ordre qne lui avait faits sa belle-mère, et qu'il a lui-même
négociés à des tiers. Le domaine a été aliéné, mais ]a
majeure partie du pdx n'a point été comprise dans ]~ "Vente,
et l'acquéreur a souscrit des billets a ordre, que le sieur
Dufour a encore utilisés et employés dans l'inlérêt de son
com merce .
L'acLivité du sieur Dufour est bien remarquable: il est
�( 3)
négociant à Thiers, la dame Arnaud habitait avec la dame
Biberolle, sa sœur, à Charnay près Lyon; cependant, dans
moins d'un an, toute sa succession est dén~turée, elle est
à la disposition du sieur Dufour, qui fait transporter à Thiers
la riche partie du mobilier qu'il n'avait point vendu, et s'y
fait immédiatement. accompagn er par la dame Hiherolle, qui
vi~nt habiter et vivre avec lui en ménage commun.
Depuis long-temps cette dame n'avait plus de volonté: le
sieur Dufour qui recevait lout, pourvoyait aussi aux dépenses
les plus minces. Les titres étaient à sa disposition, il s'en était
rendu le maître, et sa belle-mère avait en lui une telle confiance, qu'elle blâmait jusqu'aux soupçons que les sieurs
Ribcrolle m~ni[esLaient sur la bonne foi de leur beau-frère,.
et leur prom,eltait toujours que l't'galiLé serait conservée, et que
toutes les précautions seraient prises pour les édifier sur ce
point.
Cependant la dame Riberolle e t dé édée chez le sieur Dufour. Alors, que s'est-il passé? P.oi t d'apposilion de scellés
ni d'inventaire; si plus tard des no aires du choix des parties sc présentent, Dufour sort de son propre secrétaire les
titres ct documens qui doivent établir la consistance de la succession desa belle-mère, et soutient qu'une somme de r 8,000 fr.,
qu'il prétend être le prix réel de la vent du domaine de
Charnay, doit seule entrer dans la composition de la masse,
comlue provenant de la succession de la dame Arnaud.
Les sieurs Riberolle demandent alors des explications; ils
,..eulent éviter des débats; à cet effet, des p rsonnes recommandables furenL choisie comme rnédialrices , et entendirent
les parties; mais le sieur Dufour se renferma dans un système de dénégat.ion, qu'il espérait faire prévaloir, à raide de
l'obscurité, dont il avait si laborieusement environné toutes
.Iles relations avec sa belle - mère.
Alors il fallut prendre des renseigncmens: la tache était
1
*
�( 4 )
'difficile; l'éloignement du lieu où la succession de la dame
Arnaud s'était ouverte, de l'arrondissement de Thiers où habitaient les sieurs Riberolle ; la clandest.inité des actes employés
par le sieur Dufour, pour dénaturer l'actif de cette même
succession et pour s'en ,e mparer; tout paraissait faire obstacle
à la découverte de la v~ -ité. Néanmoins, les sieurs Riberolle
réussirent complétement , et un .voyage à Lyon et à Charnay,
les mit à même d' établir, par des titres et par des documens
inattaquables, que le sieur Dufour, outre les sommes qu'il
avait reçues pour sa belle-mère personnellement, avait encore
.profité de 63,673 fr. 50 cent., provenant de la succession
Arnaud, non compris les 18,000 fr., prix de la vente allthentique du domaine de Charnay, prix que le sieur Dufour présentait comme tout ce qui était provenu à la dame veuve RiberolIe, de la succession Arnaud. Des renseignemens, quant à
présent moins positifs, mais dont les résultats pourront être positivement fixés par la preuve qu'offrent les sieurs Riberolle ,
apprennent encore q
le sieur Dufour aurait perçu à Charnay différentes créanc ,vendu plusieurs ohjets, se serait
enfin emparé d'une quantité de mobilier si considérable,
que le tout monlait à la somme de 26,019 [r. Enfin, ce qu'il
y a ùe moins doflteux , mal gré les dénégations du sieur Dufo~r,
c'est que ce der icr a été constamment le mandataire, soit
de la dame Arnaud, soil de la dame Riberol1c , sa belle-mère;
que c'esL en cette qualité qu'il a géré et administré tout ce qui
appartenait à cette dernière; qu'il a disposé de sa forlune
enlière, et abusé de la confiance qui lui avait été accordée,
pour cl ' tourner à son profit la Ineilleure parlie de l'acLif
de eUe ri he successi n.
Les sieurs Riber Ile sc virent dans la nécessiLé d'intenter
une action conLre le sieur Dufour ct la dame on épouse: ils
demandèrent, con tre elle derni ' re , le parLag de la su fes$ion de la dame H.iberolle , leur mère, et conlre le sieur Dufour
�( 5 )
personnellement, le compte du mandat en vertu duquel il
avait liquidé la succession Arnaud, géré, adminisLré, vendu
les biens qui en dépendaient, et reçu les sommes qui en
provenaient à différens titres,
Le sieur Dufour, dans son interrogatoire sur faits et a tieles,
nja le mandat, même la gestion et l'administration; il avait
hien, il est vrai, rendu à sa belle-mère quelqlles se,.~ices, mais
il lui avait tenu compte de suife des sommes qu'il avait reçues
pour elle; au reste, il ne se rappelait, ni des traiLes , ni des
hillets à ordre; il avait même corn pIétement oublié toutes les
opérations auxquelles il avait cependant pris un part si active.
Si on voulait l'en croire, tantôt sa belle- mère devail avoir un
reçu de tout ce qu'elle lui açail confié; plus bas, il n'avait donné
à la dame Riberolle aucun élat, parce qu'il n 'açazL jamais l'zen
"('çu. pour elle; enfin, tout l'argent réclamé avait été cmployé
'p ar cette dame à ses besoins journaliers; el cependant, le sieur
Dufour produisait un titre établissant que sa belle - mère
n'avait aucune somme à sa disposition, et que les plus minces
dépenses, ID "me celles dont ordinairement on ne garde pas
note éraient journellement payées par le sieur Dufour,
Ce mélange d'adresse et de déception ne pouvait CIl imposer
à la justice; les contradi tion du sieur Dufour étaient d'ailleurs
trop saillantes pour ne pas faire suspecter sa honne foi; aussi le
tribunal reconnut-il en lui un véritable mandalaire, ayant géré
t administré la fortune de sa belle-mère, négocié la vente du
domaine de Charnay, fixé son pri ,ct reçu l'ordre de pl usieurs
des effets souscrits par l'acquér ur. Mais quant aux résultats,
le jugemenL déclare qu'un acte du 30 juin r823, doit produire
en faveur du sieur Dufour, pour touLe le sommes qu 'il aurait reçues jusqu'à celte ({poque, l'effet d'un arrêLé de compte
et d'une quittance, au moins jusqu'à con urr nec de]a quoLité
<lisponible; et pour les billet à ordre provenant de la vente
du domaine de Chal'nay , ce jugement veut que Dufour les
J
�( 6 )
représente; et à défaut de ce faire, il perm~t aux sieurs Ribel'olle de les rechercher et de prouver qu'ils ont été soustraits,
ou, qu'au moins, leur mère en a illégalement disposé .
Tel est le premier aperçu de cette affaire et des principales
difficultés qu'elle peut présenter. Un mandataire, pour se dispenser de rendee compte de son mandat, le désavoue; la
justice est bien obligée de reconnaître l'exist nce de ce mandat,
mais elle affranchit le mandataire de l'obligation de rendre
compte, ou, plutôt, elle suppose ce compte rendu, parce que
le mandant a pu indirectcment disposer en faveur de son
mandataire, et que par sa disposiLion, il n'a pas épuisé la
. quotité disponible. C'est vainement que les faits de la cause et
le véritable sens des acles , viennent repousser l'application
d'un pareil système; la darne Riberolle a bien toujours promis
l'égalité à ses enfans ; la clame Dufour, ~a fille, ne peuL Tlléconnaître que sa mère ne lui a jaTnaiJ' rien donné; le sieur Dufour
lui-même n'ose pas se prévaloir du moyen suppléé par le tribunal ; suivant DUrOU1- , au contraire, c'est seulcmenL parce
qu'il n'est pas mandataire qu'il sou Lient' n'être point obligé à
rendre compte; l'acte et le testament de la dame Riberolle
n'apprennent aulre chose si ce n'est que celle dame a réglé
certaines avances ou d 'penses que le sieur Dufour avait faites
pour elle, et qu'elle voulait que ron respectât, quoiqu'elles ne
fussent poin t établies par titres ; cet acte est admis par les
sieurs Riberoll.c dans tout ce qu'il contient, en tant que le
contraire ne serait POiol prouvé par des titres posiLirs , et cependant le jugement di~pense le sieur Durour de rendre
compte de la receLLe, sous le prétexte qu'il a pu recevoir de
sa b Ile-m' re , indit'cclem nt ct à litre d'avantage? la différence de la recclle ~l la dép nse.
Commenl ne pas voir' les dangers, les maux réels qui résulteraient nécessairement de principes appliqués avec autant de
légèreté? Quels sont les chefs de famille qui oseraient confier
�( 7)
.
â leurs enfans l'administration de leurs biens et le soin de leurs
recouvremens , si, de quelques ad es mal interprétés, on
pouvait induire qu'ils ont voulu indirectement disposer, en
faveur de leur mandataire, du produit de son administration
et du montant des sommes par lui recouvrées? D'un autre
côté, quelles défiances, quelles semences de jalousie ct de
haine ne jetteraient pas dans les familles une jurisprudence
dont l'objet serait de rendre redoutable à tous les enrans ]a
confiance, même la plus juste ct la plus raisonnable, que le
père pourrait accorder à quelqu'un d'entre eux? Enfin, quel
app~s offert à la ruse, à la dissimulation, à la perfidie et à
l'avidité, s'il suffisait de captiver la confiance d'une personne
âgée, crédule, incapable ou dégollLée des affaires, pour s'em...
parer de toute sa fortune, et si lorsque pressé par des preuves
multipliées et déterminantes, le spoliateur ne pouvant plus
nier ses actes coupables, ni éviter une juste restituLion , était
admis à dire « Vous m'avez convaincu de mauvaise foi; vous
)~ avez prouvé qu'abusant du mandat qui m'avail été donné,
» je ne In'en suis servi que pour dépouiller mon mandant;
» mais, qu'importe? Ce mandant dont vous êtes héritier est
• décé.d é; il pouvait disposer de parfie de sa fortune j or, il
• n'a point exigé de moi le comple des recettes que j'ai pu
» faire pour lui j il est donc présumable qu'il m'a donné inJI directement,
au moins jusqu'à concurrence de la quotité
,. disponible, t~ut cc que j'ai reçu comme mandataire, et. dont
» je devais lui rendre comple en celte <'lualiLé.» Ainsi, le droit
pounait permettre de reLenir à ti Ire de don, ce qui, en fait,
n'aurait été obtenu que par fe3ude ou par abus d confiance.
Bien évidemmenL les premiers juges auraient reculé devant
de Lels résulLats. Quelle est donc la cause de leur .erreur ? On
ils ont méconnu les fails, ou ils ont négligé de les rapp,·ocher
a'\Tec a sez de soin pour en Caire ressortir les COli séquences qui
devaienl les porler à appliquer les r "-BIcs du lllandat. C'est
�( 8 )
donc ces ü lils qu'il faut d'abord examiner avec la plus grande
attention; il faut les gronper avec soin, les in terroger, et retenir ce qu'ils apP" e nnent sur la volonté de la dame veuve
Ui b er olle ; sur Je m andat qu'elle a donné au sieur Dufour, son
gend re; sur la gestion ct administrat.ion de ce mandataire;
sur le but que le si eur Dufour s'était proposé en gérant les
affaires de sa b elle-mère, but qu'il a atteint par le fait même de
son adm inistn,ll ion ; enfin, sur le véritable sens des actes dans
lesquels les premiers juges ont cru reconnaîLre un arrêlé de
compte, ou , au moins, une dispense de rendre compte accor~,
dée par la dame H.iberolle au sieur Dufour, son gendre. Il
sera ensuite facile de prouver que les premiers juges se sont
mépris sur le véritable é tal de la cause; qu'ils ont méconnu
les principes qui devaient la régir, et qu'aucune des dispositions de teue jugement ne sauraient résister à un examen
s érieux et réfléchi.
EXA~IEN
•
•
DF.S FAITS .
Joseph-Just et Pierre Riberolle, appelans ; Marie-Claudine
Riberolle , épouse du sieur Dufour, intimée, ont tous trois
pour auteurs communs le sieur Charles Riberolle et la dame
Anne Guillemot.
Le sieur Charles Hiberolle a fait son testament le 6 messidor
an 13. Il a légué à la dame son épou~e, l'usufruit de moiLié de
ses hi os meubles et irnmeubles ; a dispensé la léga1aire de
donner caution, et, en m '\me Lemps, déclaré qu'il c tendait
que ce don d'usufruit ne pût nuire, ni à la dot, ni aux avantages matrimoniaux déjà assurés à ]a dame Anne Guillemot
pal' son c nlrai de mat'iage. Ce lestamenL, entre autre
.spo.silions, J:pnlicnL cn or don n pr {cipuL du quart de LoUS les
biens du t.eslélleur en faveur de ses d ux fil Just et Pierre
Riberolle; peu de temps après le teslaLcur est décédé.
En 1809, Joseph-Just RiberoIJe voulut se marier: Il fut
alors
�( 9 )
alors question de fixer les droits de Marie-Claudine Riberolle
à la succession de son père, et de régler ceux d'Anne Guillemot, résultans , soit de son contrat de mariage, soit du testa-.
ment de son époux.
Les actes de famille furent consultés ; Marie - Ciaudine
Riberolle , après avoir pris connaissance du testament, et fait
préalablement eslimer les biens composant la succession de
son père, vendit à Joseph - Just Riberolle, par deux actes
séparés, des 1 er et 2 février 18°9, ses droits dans la succession
mobilière, moyennant la somme de 10,000 francs, ct sa portion dans les immeubles au prix de 15,000 francs. Ces dcux
cessions chargcnt, en outre, l'acquéreur de payer les dettes et
d'acquitter les legs.
Les droits de la dame Anne Guillemot, veuve de Charles
Riherolle, furent réglés par le contrat de mariage dc J oseph- .
Just, son fils.
En effct la veuve Riberolle Intervient dans ce conlrat qui
est sous la date du 2 février 18°9; elle converLit l.ous lcs droits
mobiliers, biens et actions qui lui appartiennent, soit en vertu
de son contrat de mariage du 31 janvier 1783 , soit par suite
des payemens de sommes ou délivrance d~effels mobiliers qui
aurai~nt été faits au sieur Riberolle, son mari, comme provenant des successions de ses père, mère et frère; soit enfin, du
lestament du 6 messidor an 13. Elle ycut que cette conversion
vaille cession de droits et traité à forfait entre elle et son fils,
a lqucl, dans tous les cas, elle fait donalion enire-vifs de tous
ses droits mobiliers, biens et actions , aux conditions sui~
vantes:
1 0 • Le sieur Just Riberolle est reconnu débiteur de la suc....;
ccssion de sa mèrc, d'une somme de 12,500 francs qu'il payera
sans intérêLs après le décès de cette dernière;
~o. La mère aura la jouissance d'une maison située à Thiers,
de plusieurs objcts d'argcnterie -'_ du n1.obilier n(.~ce5saire pou\",
l
~
�(
10 )
compléter l'ameublement de la maison de Thiers; elle est;
en outre, affranchie de l'obligation de rendre compte de toutes.
les denrées et, récoltes provenant de la succession de son
époux , et qui existaient dans sa succession à l'époque de son
"
.
deces;
3°. Le sieur Just Riberolle constitue, en faveur de sa mère,.
une rente viagère de 2,400 francs par an, payable en deux
termes, et se soumet, en outre, à lui fournir son bois de
chauffage. Il est dit que cette rente, qui ne doit point tomber
en arrérages , et dont le débiteur n serait tenu de rapporter
'qui.ttance qu'autant q~ 'il aurait été mis en demeure, représente, tout à la fois, et l'intérêt des 12,500 francs, et la jouissance que le sieur Charles. Riherolle avait léguée par son
testament.
La dame Riberolle excepte de cette cession, tous les ohj'ets
et effels qui lui appartiennent personnellement, et que le mari
n'aurait point réellement reçu ni retiré, quoiqu'il en eût le
(Iroit ; elle se réserve pocore les (',réances cl rente dues par
les sicUJ's Gourby - Joubert ct par les héritiers Lacossade ct
Lacha saigne, mais il est stipulé que la succession du père ne'
sera tenue d'aucune garantie à cet égard.
Enfin, une dernière clause de ce contrat porte que la dame'
veuve l\iberolle cohabitera avec son fils , e~ que sa pension de
2,400 [raucs sera réduiLe à. 1,800 francs pendant le temps de '
cette cohabitation.
La dame Biberolle n'a point habiLé long-temps avec son fils;:
ellc avait pour sœur Marie Guillemot, euve Arnaud , qui
était oomiciliée à Charnay, où elle vivait dans une grande
aisance. Le peu de difC~renee qui existait entre l'âge de ces
deu dame, la conformité de 1 urs goût cL de leurs habitudes"
l'affe Lion qu' lles avaienll'une pour l'auLre, contribuèrent à
les rapprocher, et bienLôL la dame H.iberoll , accompagnée de
Marie - Claudine, sa fille, quitlèrent Landrcvie, domicile do
�(
II )
sieur Just RiberolIe, pour se rendre auprès de sa sœur; ces
deu)C dames y ont vécu sans payer pension et sans y laire
aucune dépense.
En 1810, le sieur Joseph Dufour voulut obtenir la main de
demoiselle Marie - Claudine RiberolIe; ses démarches furent
agréées, et il fut alors question de reconnaître si les actes des
1 er. et 2 février 18 °9 , contenaient un prix représentatif des
droits réels de Marie - Claudine à la succession de Charles
Riberolle, son père. Le sieur Just Riberolle savait que ces deux:
cessions étaient inattaquables ; il suffisait effectivement qu'il
eût été chargé du payement des dettes, et que, conséquemment, il eût des risques et pé;ils à courir pour <qu'il ne dût
point redouter les suites d'une demande en rescision.
Mais le sieur Just Riberolle ne voulut pas profiter des avan~
tages de sa position; il reconnut qu'à l'époque des actes des
1 cr et 2 février 180g, les charges de la succession de Charles
Riberolle paraissaient plus con~iùé.l.-ohles qu'elles ne l'élaient
réellement; que la valeur vénale des immeubles c cédait leur
produit réeL; qu'ainsi, Marie - Claudine avait éprouvé une
lésion. En conséquence, le 28 mars 1810, le sieur Just Riberolle accorda à sa sœur un supplément de 17,200 francs; c'est
à celte époque que le mariage de Marie - Claudine Riberolle
avec Joseph Dufour a eu lieu; il a été célébré à Charnay, au
domicile même de la dame Arnaud.
CeLLe époque doit êLre soigneusmuent remarquée. I .. a dame
Dufour vint habiter la ville de Thiers avec son épou ,mais la
<lame Riberollc continua de rester à la compagnie de la dame
Arnaud, sa sœur, ct, dès cet instant, le sieur Dufour eut Loute
leur confiance, fut chargé de la geslion et de l'administraLion
de toule leur forlune, et devint leur mandataire dans la signi...
fication la plus éLendue de ce mot.
La dame H.iberolle, accueillie chez la dame Arnaud comme
une sœur cL une compagnie, n'avail aucune c1Jargc à suppori
�(
12 )
ter, aucun besoin à satisfaire: aussi avait-clle laissé arrérager
ses revenus, et notamment la pension viagère qui lui était due
par le sieur Just Riberolle, son fils aîné; pensant alors, comme
elle l'a clairement manifesté plus tard, que ces économies
forfileraient un capital dont ses enfans devaient également
profiter.
Les vues généreuses de la dame Riberolle et l'esprit d'égalité qui la dirigeaient, ne pouvaient convenir au sieur Dufour,
son gendre. Ce dernier, occupé e spéculations commerciales
'd e toute nature, connaissait trop bien le prix de l'argent
pour souffrir qu'il demeurât stérile entre les mains de son
beau-frère; il voulut utiliser à son profit les arrérages de la
rente viagère, dus par le sieur Riberolle qui, le I I novembre
'l811, paya à sa mère une somme de 9,200 francs, savoir:
7,200 francs pour trois années d'arrérages de la pension, et
2,000 francs pour prix de denrées que la mère lui avait cédées. Cette somme passa immédiatement dans les mains du
sieur Dufour. lJ.11 i ]"::>. cxnployée à ses affaires personnelles.
La dame Arnaud avait des' recouvremens à faire : le 10 mai
'1818 , le sieur Dufour reçut d'elle une procuration; il. est
d.ifficile de déterminer, d'une manière positive, les sommes
qui lui s-ont rentrées par suite de l'usage qu'il en a pu faire;
mais deux actes au Lhentiques des 6 et 12 octobre 1 8 2 0 , apprennent que Dufour, cornlne fondé de pouvoir de la veuve
'Arnaud , a reçu du sieur Chervet-Vacher deux sommes montant enselnble à celle 'de 9,597 fr. 8 centimes. Le sieur Dufour
n'a jamais rendu compte des suites de ce mandat qui était
cependanl bien spécial.
Le sieur Dut ur n~avaiL besoin, ni de procuration, ni de
manùat spécial pour gérer les affaires de sa belle - mère et r cevoir les sommes qui pouvaient lui apparLenir : sa qualité a
éet égard était tellement connue, que, par acte du 12 octobr
x82o,}e sieur Dufour 1 .sE PORTA~l' FORT pour Anne Guillemot ~
�· ( 13 )
veuve Riberolle, sa belle - mère , reçoit pour elle, du sieur
Chervet-Vacher, une somrne dc 2,800 francs.
Ce fait est important: il prouve que le sieur Dufour disposait en maître de tous les biens de la €lamc Riberollc, et que
sa qualité de mandataire général était si bicn connue, qu'un
simple porté fort de sa part suffisait pour donner aux tiers qui
contractaient avec lui, autant de sécurité que s'ils avaient
traiLé avec la dame Ribcrolle elle- même. Il fallait encore que
la gestion et l'administration du sieur Dufour fussent bien
l1abituelles et déjà bien anciennes pour que, sans mandat spécial, il se permît de recevoir des capitaux qui ne lui appartenaient pas? ct de figurer dans les actes qui intéressaient
exclusivcment sa belle-mère, sans autres pouvoirs que ceux
,qu'il s'était créés à lui-même.
Cependant, à cette époque, le sieur Dufour n'était point
encore satisfait; ses beaux-frères voyaient avec quc1que inquié..·
iude la confiance aveugle qui lUI aVait été accordée, ct cette
circonstance avait porté le sieur Joseph-Just Riberolle à laisser.
arrérager la pension viagère qu'il devait à sa mère. Cettc der'":
nière, de son côté, était loin de se montrer exigeante; elle
voyait même avec plaisir ces arrérages s'agglomérer ntre les
mains de son fils aîné, et y former un capital qui devait un
jour augmenter sa succession et profiter également à chacun de
ses hériLiets.
Ce calcul de prévoyance et de tendresse maternelle ne pouvait convenir au sieur Dufour, qui voulait jouir de la pension .
et se rendre maître des àrrérages échus. POUl.' atteindre e but,
il fallait faire naître dc mauvaises dispositions enh'c la mère
et le fils; le sieur Dufour crut y réussir en prenant, àu nom
de sa bclle-mèr~, une inscription Sur les biens du sieur Just
~iberol1e , ct en exerç nt contre lui Un corrlmencem nt de
P~~rsuÎLes ; mais le sicur Riberolle ne se méprit pas ur Je
,;ventable auteur de ces faits). ;il .s'en expliqua avec la dame sa
�( 14 )
mère qui, en présence dc ses auLres enfans , régla le compte
de ce que son fils pouvait lui devoir jusques et compris le
terme échu le I I noyembre 1820.
Le traité est du 16 janvier 1821 ; il est passé à Charnay, et
règle les arrérages de la pension que le sieur Just Riberolle
devait à sa mère, déduction faite dés impôts tant directs qu'extraordinaires qu'il avait payés pour cette dernière. Ce traité
constitue le sieur Riberolle aîné débiteur de sa mère d'une
somme de 15,000 francs; cette somme est stipulée payable
après le décès de la dame veuve l{iberolle , à tous ses héritiers " y compris le débiteur qui doit se libérer en six
termes égaux, dont le premier échoira un an à dater du jour.
'au décès, avec convention que le capItal ne doit produire
intérêts qu'à défaut de payement à chaque terme. Il résulte des
interrogatoires sur faits ct arlicles, et il est convenu entre
toutes les parties, que lors de ce compte, la mère fit r mise
à son fils aîné d'une somme de 3,000 francs sur ses arrérages,
mais, qu'en même temps, elle donna au sicur Pierre Riberollc , son autre fils ct au sicur Dufour, son gendre, à chacun
pareille somme de 3,000 flancs, pour conserver entre eux une
égalité parfaite.
Lc projet conçu par le sieur Dufour, de s'emparer des arrérages de la l'en te, dus à sa belle-mère, avait ainsi échoué. La
dame veuve Hiberollc était en effet incapable d~ vouloir ct de
se prêt r scieloment à une injustice; sa tendresse pour tous
s s enrans lui aurait fait regarder comme très-blamable tout
acle direcL ou indirect qui aurait eu , pour effet de rompre
r 'galité qu'clle voulait c nserver enlre eux. Comment donc
est-il arrivé que, contrc la volonlé d la dame veuve Riberollc ,
le sieur Dufour se soit ernpar' de la meilleure partie de sa
fortune, qu'il l'ait dénaturée, qu'il en ait disposé à on gré)
ct qu'aujourd'hui ses beaux - frères soient obligés d 'ayoir reours à l'autorité loule-puissanLe de la justice, pour faire resJ
�( 15 )
pecter les volontés de leur mère, et empêcher que le ieur
Dufour s1approprie des capitaux considérables, à l'aide de
combinaisons odielJses que la dame veuve Ptiberolle n 1a pu,
ni prévoir, "ni apprécier?
La dame Marie Guillemot, veuve du sieur Pascal Arnaud,
èst décé ée au mois de novembre 1821. Elle laissait deux héritiers, Joseph Guillemot, son frère, habitant à Lyon, et sa
~œur Anne Guillemot, veuve Riberolle , mère des parties.
Le testament de la dame veuve Arnaud est du 18 octobre
1
'1821. On y voit que la testatrice s 0ccupe avec une affecLion
toute particulière de la darne veuve Riberolle qui habiLait avec
elle à Charnay. Elle lui donne son argenterie, ses joyaux et
hijoux, el 3,000 [ran s qui doivent être payés sur sa succes-'
sion; rnais prévoyant bientôt qu'il serait possible que la dame
veuve Ribcrolle désirât continuer d'habiter Charnay, la veuve
'A rnaud lui léguc }'usufrll:t: ..11' N>rte propriété, ainsi que les
lllcublcs ct biens mobiliers de toute nature qui se trouveront
- dans les bâtimens 1 la dispensant de donner cau lion ; mais
dans le cas oll la dame Ptibcrolle opterait pour ceUe jouis~
sance, elle doit èlre privée des 3,000 francs faisant partie de
la première disposiLion. La dame Arnaud donne ensuite à la
dame Dufour, sa nièce, qui avait auùsi habité Charnay jusqu'à l'époque de son mariage, sa garde-robe, les habiUemens
et linges à son usage personnel. Ce te fament contient encore
un legs de la somme de 10,000 francs en faveur du sieur P zard / '
neveu de madame Arnaud, payable au d ~ ès de celle dernière ; enfin, on y renlarque une institution d'}u.' ritiers uni ...
versels , cha ln pour moitié, faiLe en faveur de ]a veuve
Rib l'olle et du sieur Joseph Guillemot, frère et sœur de la
testatrice.
Au dé ès de la dame Arnaud, le sieur Jo t RiberoJle ne
pa~ut point à Charnay ou continuait d'habiter la dame sa
merc) ct il r C:sulte des inl x-r galoirc.s .sur lail eL adicIes :i
~
*
�( 16 )
'q ue le sieur Pierre Riberolle s'étant renau sur les lieux, sa
mère lui demanda quelques conseils sur la direction de ses
affaires; mais la darne Riberolle ayant fait connaître à son fils
toute la confiance qu'elle croyait defJoù' accorder au sieur Dufour,
son gendre, le sieur Riberolle , dans la crainte de ne pouvoir
s'entendre avec le sieur Dufour, dont il connaissaIt les dispositions, crut devoir s'abstenir même de donner aucun
avis.
Le sieur Dufour eut donc sans partage la direction de toutes
les affaires de sa belle-mère ; on a pu s'assurer que , dès
l'instant de son mariage, il avait géré et administré, non-seu-lement la fortune de la darne veuve RiberoIle, mais encore
celle de la dame veuve Arnaud; qu'il avait reçu pour ces deux
danles différentes sommes qu'il avait employées à son profit;
il faut actuellement le suivre dans les moyens qui lui ont
.servi à dénaturer les biens provenus de la dame Arnaud, et
dévoiler les ruses à l'aide desquelles il est parvenu à s'emparer
de la preSC[lH' to,~1;l6 Je l'acLif de celle riche succession, au
déLrirnent de ses cohéritiers.
. Ici, il est indispensable de rappeler quelques faits, et d'cn
cotcr de nouveaux qui, en faisant mieux connaître les personnes, pourront encore .aider à mieux saisir les différentes
opération du sieur Dufour, opérations qui, d'ailleurs , de~
yront être exposées avec quelques détails.
La dame cuve Riberolle habilait Charnay depuis 1809;
elle y avait été reçue par la dame Arnaud, sa sœur ,
comme une amie dont la compagnie lui était agréable. Aussi
la dame Ribcrolle resLa-L-elle étrangère aux soins comme auX:
dépenses du m {nage, et lout se réduisait pour elle à 5urvcil.
1er le rec u rement de quelques créances qui lui étaient
ducs à Thiers; mais on a encore vu que dès le mois ds mars
l8 [0, époque du mariage du sieur Dufour, ce dernier avait
't té chargé de la geslion de toutes les affaires de sa helle-mère ,
r.
et
-
�( 17 )
el ayait reçu toutes les sommes qui ouvaient lui appartenir.
On conçoit facilement que depuis 1809 jusqu'en 1821 ,
époque du décès de la dame Arnaud, la dame veuve Riberolle,
déjà avancée en âge, et sujette à des infirmités qui, depuis,
n'ont fait qu'augmenter, devait avoir contracté des habitudes
qui la rendaient peu propre aux travaux que nécessitent les
opérations d'un partage, la liquidation d'une succession et
l'administration d'une fortune nouvelle. Le décès de la dame
'A rnaud ne pouvait être pour sa sœur qu'une source de chagrins
bien vifs; aussi la dame Riberolle s'expliquant sur elle-même,
dit - elle dans sa correspondance : « ~e ne suis capable de
» rien, que de ressentir l'affliction la plus vive») (Leltrc du
avril 1822.)
Les démarches, les mesures et les traités que l'ouverture
"d e la succession de la dame Arnaud devait rendre nécessaires,
étaient au - dessus des forces de la dame Riberolle ; le sieur
Dufour devint alors l'homme indispen able; déjà sa belle~
nlère lui avait accordé toute sa confiance; il lui était impossible de ne pas continuer: en effet, qui pouvait être aussi actif,
aussi intelligent en affaires, aussi dévoué aux intérêts de sa belle·
mère, et surtout aussi désintéressé que le sieur Dufour ~ Négociant à Thiers, le sieur Dufour avait quitté ses affair s pour
se rendre à Charnay; là, il traite, adminisLre, g \re , ven.d les
biens de Loufe nature et reçoit tous les capiLaux ; il souffre que
la dame Riberolle l'impose comme son mandataire à tous ceux
qui ont à faire avec clle , même au sieur Guillemot, son
frère, qui, malgré sa répugnance motivée et "clairement manifest ' e, t obligé de tl'ailer avec lui ( LeUr s des 28 avril;
15 mai, 22 mai, 2 juin 1822). Ce n'est pas tout, si les h auxfrères du sieur Dufour font, dans l'inLimité , q'll lque obser'Vations à leur mère, et se permettent de douter du dé inL 'resSem nl ou même de la loyauté de son mandalaire, c est encore
le sieur Dufour qui leur faiL écriX'c cc d'Mec h'anquillc ;,.
:4
1
3
�( r8 )
qu'aucun tort ne leur sera fait; que la mère conservera
'» l'égalité j qu'clle aura soin de faire faire ct de faire ce qui
» convient pour les édifier sur ce point.» (Lettres des 9 juin
ct 4 aOlît 1822. )
Il faut en convenir, l'insistance du sicur Dufour à gérel' ainsi
les affaires de sa belle-mère contre le gré de ceux qui avaien 1:
intérêt à cette gestion, prouve, Ou un dévouement ct une
piété filiale bien rare et bien louable, ou Un degré d'astuce
et d'adresse bien difGcile à atteindre'. Le sieur Dufour est-il un
homme désinléressé, dévoué ct bienveillant, auquel ses beauxfrères doivent de la rcconn'aissance, ou, au contraire, aurail-il
abusé de la confiance de sa b elle-mère jusqu'au point de sous-'
traire à ses cohériliers , contre la volonté de sa mandataire ,
la meillcure part ie de la succession Arnaud? Enfin, r ssorfirai t-il des faits de la ('aus que le sieur Dufour doit èt re considéré comme le plus rusé et le plus suutil de tous les hommes?
t LeUre du 19 septembre 1822.)
La succession Jcla dame Arnaud se composait d'un domainc'
silué. à Charnay, avec ll13ison de maître richement meublée;
il Y avait dans celle maison unc quantiLé considérable de
mobilier qui n'avait point été déballé. I.e doroaine, en luiInêlllC était am ublé de t ut ce qui était néc ssaire à son
exploilation , et les c -Biers contenaient t ullc vin pro enant
de la récolte cl plusieurs années; il élait encore dÎt à la dame
Arn~ud, par plusieurs parli uliers dc Charnay, diŒ'rentc
SOOltrleS monlant ensemble à 3,421 franc , ou à p u-pr \8.
La dame Arnaud lai sait n outre deu objets d'une grand
,'al ur; le premier, dont 1'(> i [ence n'est pas contest' e, tune
somme de 56,00 francs pla ~e à. Lyon par les soin eL l'in termédiair du sieur Guillemol cl ' Lyon; le se nd, one somm
10, 000 fran s qu la dame Arnaud avaiL cachée et enfouie
lors de l'invasjon d es alliés n Fran c, eL qui n'a été retir'e
par le ieur Dufour ct la amc y Uy
iber Ile , du lieu où clIc
»
J
ae
�( I9 )
-avait été placée, qu'après le décè~ de la dame Arnaud. Ce dernier [ait est contesté par le sieur Dufour, ct le tribunal dont
est appel a rejeté la preuve offerte par les sieurs Riberolle à
cet égard.
La première opération à faire, était de régler les droits du
sieur Joseph Guillemot de Lyon et de la veuve Riberollc, à
la succession de la dame Arnaud dont ils étaient seuls héritiers. Les règles à suivre à tet égard, étaient tr(lcées par le
testament du 18 octobre 1821 , qui donnait à la dame veuve
Riberolle l'optjon d'une somme de 3,000 francs à prélever snI'
la succession, ou de l'usufruit du domaine de Charnay, alns~
que des meubles et effets mobiliers qui se trouvaient dans
cette propriété.
Le choix de la dame Riberolle ne pouvait être douteux ~
elle désirait, avant toute chose, ne pas abandonner le domaine
de Charnay, où elle avait toutes ses habitudes, et qui était devenu son domicile d'affecllou; Ju dame Arnaud ne lui en aVàit
donné que l'usufruit, mais le sieur Dufour qui ,-fIait Vi?l7Zt.
sur les Lieux pour y aider sa belle-rnère (Voyez interrogatoire
sur faits ct articles), devait lui faire facilement comprendre
qu~il était avanLageux pour elle de devcnÏI propri 'laire dc ce
domaine. On verra dans la uite que dès ce premier instant)
le sieur Dufour ne conseillait celle acqlli~ilion, que dans la
vue dc pouvoil' plus facilement disposer ct se rendre maître
absolu de tout cc quc la dame veuve UiberoUe avait à prétendre ùans la succession de la (hune Arnaud.
En cons {quence, le !~ janvier 1822 , la dame veuve Riberollc ct le i lIr· GuiIJ mol, on frère, après avoir estimé le
1 lohilier, convinrent que la dame Riberolle ac luillerait 1 ute
le dettes de la su cession, pay rait ious les legs uinsl que les
. honora' l'cS dus au nléd cin ct au nolaire de ]a t statd c çt
lU' fi comp 'nsaLion, elle per evrait les SOffi]IH.! S qlJ~· hqr'fTlt
ducs à la daille Ar/laud dans la commune de Chmnoy.
3 *
1
�(
20 )
La dame veuve Riberolle devait, en ontre; demeurer pro..;
priétaire unique du domaine de Charnay, à la charge de laisserà son frère une somme de 36,000 francs en promesse ou argent,
faisant partie des 56,000 francs, avec intérêts qui y sont joints,
• somme que le frère a entre ses -mains pour le compte de sa
sœur Arnaud, et qu'il promet de remettre à la dame Riberolle, sous la condition que celle - ci lui laissera nominativement 36,000 francs, dont 3,000 francs argent.
Il existàit dans la succession une promesse de la dame
Lafont, qui devint la propriélé du sieur Guillemot; mais la
'd ame veuve Riberolle devint à son tour propriétaire , en
capital et en arrérages, de toutes les sommes qui pouvaient
être dues par Guillemot-Dessap ou par son épouse, en vertu
'd e promesses ou autres titres, ainsi que des rentes de péchadoires.
.
'
Au moyen de ces conventions, la veuve Riberolle renonce à
réclamer aucun avantage, et l'un et l'autre des copartageans
convient qu'il ne peut avoir droit à des resLituLions de jouissance.
La vente du domaine de Charnay a été régularisée entre le
sieur Joseph Guillemot et la dame veuve Riberolle, sa sœur,
par a te public du 8 janvier 1822.
C s conventions, qui ont éLé entièrement exécuLé s , apprenn nt que la dame veuve Riberolle , qui était chargée de
racquiLlement de tous les legs et deLLes de la succession, était
resLée pr' prié taire de tous les biens meubles et immeubles de
la daIne Arnaud, même des créances qui lui étaient dues ,
moins les 36,000 francs que le sieur Guillemot devait se retenir sur les 56,000 francs qui se trouvai nI. entre ses mains ou
qui a aienl élé plac ~s par lui; de ulanièrc que la dame Riberoll avait 20,000 francs à recevoir de s n frère, qui devait
en outre à la dame Arnaud, sa sœur, un r liquat de compte '
,que la dame Riberolle avait droit d'exiger de lui ~
�( ~I )
'C 'est ici que la gestion et l'administration du sieur Dufour
prennent plus d'activité. Il faut les su'vre dans leurs détails et
en rechercher les résultats.
Les conventions verbales arrêtées entre le sieur Guillemot
et le sieur Dufour stipulant dans les intérêts de sa belle-mère;
étaient du 4 janvier; dès le 7, c'est-à-dire, un jour avant la
vente du domaine de Charnay, le sieur Dufour reçoit, sous le
nom de sa belle - mère, du sieur .Guillemot , une somme de
1,687 fI'. 10 centimes, montant d'un reliquat de compte ou,v ert entre le sieur Guillemot et la dame Arnaud le 25 oclobre
11820, et clos l~ 16 décembre, avec balance, en faveur de la
'dame Arnaud, d'une somme de 1,687 francs 10 centimes, La
quittance est donnée pour solde du compte fait d'après les
arrangemens arrêtés entre les parties.
Le 8 janvier 1822, jour même de la vente du domaine de
Charnay, le sieur Dufour, toujours sous le nom de la dame
veuve Riberolle , reçoit du ~ieur Guillemot la somme de
3,000 francs à compte de l'arrangement que le frère et la sœur
a'v aient pris ensemble ce jour même; et pour qu'il ne reste
point de doute sur la personne qui a rùçu cette somme, on
trouve sur la quittance cette mention écrite de la main du
sieur Guillemot lui··même: « Reçu de ma sœur, veuve Ribe:» rolle, de F., 3,000 francs comptés en monnaie d'or à iVE. Du,( four, son gendre, pour son compte, daté du 8 janvier 1822. )
Les faits commencent à s'expliquer: la présence du sieur
Dufour à tous les arrangernens qui ont eu lieu entre le frère et
la sœur n~c l déjà plus équivoque; on v il la part a Live qu 1il
y a pri e; c'est lui qui a tout réglé dans les inlérêts de sa
belle-rn 're; c'est encore lui qui a reçu pour elle 1 s sommes
payées par le sieur Guillemot, en exécution des arrang mens
31.'1'êtés le jour même ou bien peu de temps avant. Dès l'origine, on dé ouvré donc une gestion générale des affaire de la
dame veuve 1 iberolle par le .sieur Dufour, cL,• .::;o;L que ceUe
�(
22 )
administration lui ait été confiée, soit qu'il s'en soit empé)l"é "
il n'en est pas moins mandataire; ses obligaLions sont les
mêmes, il est tenu de rendre cOl1)pte de son adminislration.
Le sieur Dufour venait de recevoir du sieur Guillemot, sous
les dates des 7 et 8 janvier, 4, 68 7 francs en argent; dans le
même temps, il obtient de sa belle-mère trois bons en blanc;
deux de 1,000 francs, et le troisième de 1,°7 5 francs . Il lui fait
poser deux signatures, l'une au bas du recto, imm ~ djatement
après ces Inots : bon pour 1,000 francs, l'autre au commencement du verso, toutefois à la distance nécessaire pour y écrire
un ord.'e; ensujte, sous la date du 14 janvier [~22, il remplit de sa main les trois recto." chacun d'un billet à ordre ainsi
con çu: Mon r,her frère, payez s'il YOUS plaH à mon ordre, au
» premier fevrier prochain, la somme de ...... valcur (/ imputer
» sur nos arrangemens, suivant }'avi que je vou ~ n donnerai,
» à
harnay, ce 14 janvier 1822. » Le r6 du m ê me moi ,le
i ur Dufour ' cril de a main, sui' 1 verso de hacun de
ces il' i hi Ilels , un rdr ~labli anl qlùl a lJtlytf comptant a
sa h·\I '-[O('rc l monlant de trol biHel à ordre, t quoique
ces lroi ordres s i nl du ruême jour. 1\10 L daté de l 'lu'ers,
dorni île du ieur Du~ ur, et l'auh'~e de Charnay, ou habitait
al rs la dame nib r Il ,1oCêllil ~ distanLes l'un de l'autre de
plu s cl
ingt lieues. Enfin, le 5 ~'vrj r 1822, 1 i ur uJour
l' nit·· de ce eOets aux i ur Bonfils ct Blan , qui,
Hwnt , fon t. a l si ur Dll~ ur les fond , de c
bill ls.
A l'ur tou.' ,le si ur
nGJ et Blanc J s nég
sieur Pon t compagnie, enlre les mains e qui '1
acquitt és.
A m ur
c narr ' d faits, t ut cl i nl dign
l adminisLt'ati n du ieur
Du ()uI' s
pc enfin dan tout
n j ur; c' 'sl lui qui
il il av ir a a disp Ilion t u les apilau qui appartienll nl
a heU -lU '. C; il ne s sert plus du nom ù
li cl rlli '.re
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�( 23 )
que pour avoir 'un~titre qui puisse l'auforisèr à exiger des dé. .
hiteurs le payement des ' sommes qui ' peuvent êrre dues: les
créances de la dame RiberoUc deviennent, par une fiction,
celles du sieur Dufour, qui ose écrire de sa main que sa beUe1nère a reçu de lui comptant la valeur des effets passés à son
ordre; qui ne craint pas de supposer les lieux olL ces Ol'dres
ont été donnés; et qui) enfin, à l'aide de toutes ces mnnœuyres~
(Jont les suites elles rés'uJtaLs nécessaires ne ponvaieut être
appréciés par sa belle-mère, alimente son commerce de fonds
qui ne lui appartiennent pus, C[l 'il ne devait recevoir q le comme
mandataire, et dont, en celle qualilé, il devait compte à la
ûame- Riberolle.
Un mois après, et le 15 .février 1822, le sieur Dufour sort
'{ ]e son porte-feuille, ou se fait donner par sa belle-mère, dix
autres effets en blanc ne conlenanlqu'un ignaLurc au reclo •
ct que le sieur' Du four remplit de sa mllin en ces Lermes :
« Môn cher fl'ère, à vue, je vous prie de payer ontre le pré» sent mandat, à Pordre de ~I, l)ufour- hiberolle , la somme
») d ..... , valeul' à compte de 'nos arrangcmens, lc ... » Ce mode
de r ~dacLion ,qui
L 10ujours le même pour le fond des
cho e , varie pend(lnt dans l' mploi dc q II lqll S xpres-'
sions, mais on 'a ure bienlôt que ce 1 'g\r dif~~ren cs s'expliq lent par l'emplo' (lue 1 sieur Duront' a fait cl c s blancsseings à des ~p l ' plus on moins éloign ~cs de la datc du
15 févl'i r , daLe qui d vaiL hi n Lre celle cl L us les JI ts ,
pui qu , par sa orr . p ndan e, la dame niberolle 1 s a.nn n·
çait 1 u à Il fr'.· sous ccll dale.
E[~ cLivernent, l 22 Inars 1822 , le sieur Du~ 'ur ntilis
quaLr cl
es cfc L ,monLant ns Tnbl à 4, 0 fran s ,en n
pa :lnt l' rdr a
icur Jean -Baptis Gonin: C ordl" . n
~Qn aient val ir qll pour pr w"ation, dô ' C( 'il n TIl
tlOllnai n L point cl
ause ; ain i , le si ur Dufour a r çu eUe
A
somme
d
th
00
ft'al
S.
�( 24 )
Le 17 mai, le sieur Dufour passe ordre de l'un de ces effets'
à un sieur Bouillon-Sugier, qui doit lui faire compte de cet
effet de 1,000 francs, et après quatre autres négociations qui
sont sous les dates des 17, 21 et 22 mai 1822, ce · billet à vue
est présenté au sieur Guillemot qui l'acquitte.
Le sieur Dufour fait une nouvelle négociation, le 22 mai ,.
de deux effets montant ensemble à 2,785 francs 70 centimes;
les ordres sont passés au sieur Jean - Baptiste Gonin, et n'ont
aucune cause.
Enfin, les trois derniers de ces dix effets , composant une
somme totale de 3,499 francs 98 centimes, sont négociés le
2 juin, au même sieur Gonin , par le sieur Dufour, qui, en-,
core, ne donne aucune cause aux ordres qu'il en passe.
C'est de cette manière que le sieur Dufour reçoit, pour
le compt.e de sa bellc-mère, du sieur Guillemot. de Lyon, une
somme de I I ,285 francs 98 centimes, qu'il s'approprie et
qu'il emploie dans son commerce, au fur et à mesure de ses
besoins.
n
troisième série d'effets est sous la date du 14 mai 1822
lA ccUe époque, le sieur Dufour obtint encore de sa belleID '.re cinq bons en blanc, montant ensemble à 3,026 fI'. 82 c.
Quatre de es bons, comme les premiers déjà décrits, ont
delL' ignatures; la première, p1acée au bas du recto; la sesonde au verso, ave un blanc au - dessus propre à contenir
l'ordr du bill l; le cinquième e t un billet à vuc à rordre
du sicur Dufour, écrit par lui-même, et que le 2 juin suivant
il a pas é à l'ordre des sieurs Chipier et Philippe, sans donner
au une au à c transport.
Quanl au hlan '- cings qui pouvai nt recevoir la forme de
bill ls à ordr , le sieur Dufour a {cril de sa rnéllD les ]JiJl [s
t lc ordres sons la même date 14 mai 822; run des ordr s
esl encore daté de Thiers quoique la daIne veuve Riberolle
pabilât Charnay, et tous les quatre sont causés va] ur cn
compte:
�( .25 )
'Compte: on doit même faire remarquer que chacun de ces
effets sont couverts de plusieurs autres ordres; qu'ils ont été
dans le conlmcrce dcpuis le 14 mai 1822 dans l'intérêt du
sicur Dufour, et qu'ils n'ont été acquittés par le sieur Guil~
lemot que dans le courant du mois de juin suivant,
Il se trouve donc ici établi, soit par le reçu du 8 janvier
1822, soit par les billets des 14 janvier, 15 février et 14 mai
suivant, que le sieur Dufour a reçu, pour le compte de sa
belle-mère, du sieur Guillemot, son oncle, 20, 38 7 fr'.50 cent;
qu'il a utilisé celte somme à son profit en l'employant à ses
affaires personnelles et à l'entretien de son commerce, quoiqu'il n'eût d-fi. la recevoir que comme mandataire de sa bellemère, et,. en cette qualité , lui en faire immédiatement
compte.
Ces faits s'expliquent encore par la correspondance qui a
existé entre le sieur Guillemot, la dame veuve Riberolle et
le sieur Dufour lui -même; il est important de s'y fixer avec
attention, puisque , mieux que toute autre chose, elle peut
faire connaître l'éLat d'impuissance où était la dame R.iberolle
de trailer elle-même ses affaires, la confiance aveugle qu'elle
avait dans le sieur Dufour, et l'abus bien condamnable qu'a
fait ce dernier des pouvoirs absolus et illimités que sa bellemère lui avait conférés.
Il paraît que certaines difficultés s'étaient élevées, entre le
frère et la sœur, sur le sens des conventions qui avaient été
arrêtées enlre eux. Il leur eût été facile de s'entendre; mais le
sieur Dufour pressait. avec une rigu ur extrême, la rentrée
des capitaux appartenant à sa belle-mere; illlli tardait de les
avoir à sa disposition ; aussi poussa- t-il l'oubli des convenances jusqu'à faire menacer son oncle par un huissier. Ce
dernier se plaignit avec amerlume , à sa sœur, de procédés
aUssi durs; la dame Riberollc lui répond le 24 avril 1822, et
après avoir désavoué ou atténué, autant qu'il était en eHe, le
1
4
�26
faits reproc1!éS au sieur Dufour, elle continue: «- Que le bon
» Dieu veuille faire la grâce que les affaires d'intérêts soient
» bientôt terminées; à cet effet, je vous prie, comme me le
)) dz't Dufour par sa lettre, de correspondre avec lui; il vous
» sailsfera, j'~spère, par tous les calculs , car, pour mOl:, je ne
» SUIS CA PARLE DE lUE que de ressenti., l'affliction la plus
,v ive ...... )} Ainsi, la dame Riberolle recevait sa direction du
sieur Dufour: elle n'agissait que par lû,i; le sieur Dufour seul
connaiss~it l'état de ses affàires, et pouvait présenter aux in-:
téressés des c~lculs propres à les satisf~lire.
Le sieur Dufour, qui était bien sûr de Loute l'influence
'q u'il ex rçait sur l'esprit de sa belle-mère, et qui, depuis
long - Lemps, l'avait mis dans l!impossibiLité d'agir par ellemême, ' crit , le 28 avril 1822 , au sieur Guillemot. D~ns
cette lettre, Je sieur Dufour exprimc sa surpl'isc d c que le
sicur Guillemot veut correspondre directement avec sa sœur
~u sujet de la succession de la dame Arnaud.
Je vous dirai
» (ajoule - t- il) qu'elle rue cluzrge Cl'pendant dc rn'entreLenir
:» avec vous dc cel. objet, et qu'à sa considération je ne puis
,,> m 1y refuser. »
:Le sieur Guillemot ne répond point au sieur Dufour qui lui
faisait cependant diHërentes propositions: mais le 1 5 m~i 1822,
autre leUre du sieur Guillemot à la dame Hibel'oll , dans 1~
quelle, après avoir éLablisa position, le sieui' Guillcmot énumère
les différcns griefs CI Il 'il ~ contre le sieur Dufour; lui r proche
nolamm nt (j'uCJoil' ajouté aux cO,IlCJcntions q7li avaient ill/ailes
1'elrzlù cment à ta luccesslon Je la darne Arnaud; se plaint même
d'acles de violences que le sieur Dufour aurait e rcés sur sa
l'CI' onn
, ct finit par' dire: « Vous pouvez, si vous oulez,
» fairc pa l de Ina leUre à lVL Dl1four, avec qui, je vous l'éi» l \re , je ne v lL avoil' au une correspondance. »
P ur Loule réponse, lc 22 mai l822, J Urc du sieur Dufour
,u sieur GuillemoL, qui) d'après l'avis qui avait élé donné à
(c
J
�( 27 )
cc dernier par sa sœur, que Je sieur Dufour mettrait en émis...:
sion différentes traites, apprend qu'effectivement il en a négocié pour 5, 18 9 francs 86 centirnes. Six jours après, ct le 28,
la dame Riberolle écrit elle' - même à son frère: « Ma prière,
» mon chère frère, va peut-êh~e vous offenser; c'est de vouloir
» bien satisfaire aux quatre traites que mon gendre doit vous
envoyer.»
La répugnance du sieur Guillemot à traiter ou correspondre
avec le sieur Dufour était loin d'avoir cessée. Le 27 Iuai, il
avait encore écrit directement à sa sœur, dont il reçut une
réponse, le 30 du même mois, où se trouvent ces expressions: «Je vous accuse bien, mon chère frère, la réception de
») votre leUre du 27 du courant, mais le ne vous satisferai pas
» pour les comptes que vous me demandez; si je les ai sus, je les
» ai oubliés; veuill ez attendre que Dufour m'en ait instruite de
» nouveau, je l'attends bientôt. » C'était donc le sieur Dufour
qui seul pouyait satisfaire Je sieu.l' Cu illemot ; c'était donc lui
qui seul avait à sa disposition les élémcns du compte, les papiers, registres et notes propres à l'établir; et en quelle qualité
tous ce tilres auraienl-ils été au pouvoir du sieur Dufour, s'il
n'eûL réellement été le mandataire de sa belle-mère, et s'il
n'eût cu la ge lion de toute::; ses alTai.'C's?
Bientôt après : le sieur Dufour vinl à Charnay, et sous la
. date. du 2 juin, se trouvent deux leUres adressées au sieur
Guillemot. La première, de la main de la danle veuve B.ibel'olle, mais ~ idcmrnent écrite sous la dictée du sieur Dufour,.
contienl le d~lai l par sommes t par dales de toutes les traites
qui onl déjà élé n{~gociées par le si lll'Dufour, ain i que de celles
qu'il metLr'a n {mission par la suiLe : ces traite pré entent
un total de 20,625 francs que la dame
uve Rib l'olle préLend
êLJ'c égal à elui de sa créance, y comprjs 625 franc pour a
Portion trinLérêLs. La seconde lcUre c t écriLe par le ict1L"
Dufour lui - lU 1mc, qui, voulant assur r le payement de
4 ·
)J
�( 28 )
traites qu'il avait misés en circulation, nlenace le sieur Guine..;
mot, dans le cas Oll il serait en retard de faire les fonds, de
prendre les llloyens propres à le contraindre à effectuer sa
libération, et lui dit qu'il penSé bien que ce sera la der» nière qu'il lui écrira à ce sujet. }) Effeclive'm ent, on a vu
que les dernières traites négociées par le sieur Dufour, ont
'é té toutes acquittées par le sieur Guillemot dans les premïers
jours du mois de juin 1822.
Les résultats que présentent ces premiers fails ne sauraien~
'ê tre plus positifs.
Si on consulte la correspondance, elle montre que la dame'
Riberolle , incapable d'agir, ne s'occupait d'aucune espèce
'd 'affaire; que c'est le sieur Dufour qui traitait pour elle, qui
gérait et administrait toute sa fortune, recevait tous ses capitaux; que le sieur Dufour avait encore à sa disposition tous
les papiers de sa belle - mère, recevait et fournissait tous les.
comptes, tenait la correspondance, et que si la dame Riberolle
a écrit quelques lettres au sieur Guillemot, c' st parce que ce
dernier refusait de correspondre avec le sieur Dufour, refus.
que toutefois il faisait bien vainement, puisque sa sœur, qui
ne connaissait rien de ses affaires et ne pouvait s'en occuper,
le renvoyait toujours au sieur Dufour, et que ce dernier n'en
p rsisLait pas moins à r ' gler les affaires de sa belle-mère.
Si on fixe son attention sur les traites, on voit que la daIne
veuve Riberolle, à l'aide de blancs-seings, mel à,1a disposition
du sieur Dufour , son gendre, toutes les sommes qui lui
élaient ducs par le sieur Guillemot, son frèrc ; que le sieur
Dufour rcmplit ces blancs-seings? en fail ùes billeLs à ordre;
qu'il sc les négocie à lui-même; qu'ill ur donne les dates 'lui
lui nvienn nt le mi ux ; les fait circuler dans le COTnffiCrce
suivant q
s s b s'oins ou ses intérêts l'exjgent ; que c'est
ieur Dufour l i aux pOl'Lcur's de sc ordr s, que toutes ces
sommes ont élé payées. Si tout cela ne constitue pas un mandati
(e
�( 29 )
€>u au moins une administration devant produire les mêmes
effets que le mandat le plus exprès, que le sieur Dufour
explique donc à quel autre titre légitime il s'est emparé de la
fortune de sa belle-mère?
La gestion du sieur Dufour devait alarmer ses beaux-frères;
on ne connait encore qu'une partie de cette administralion ,
mais ce qui reste à développer ne fera que mieux sentir com-.
bien les inquiétudes que Je sieur Riberolle avaient conçues
étaient fondées. Deux leUres écrites par le sieur RibcrolleLandrevie à sa mère, contenaient l'expression de ·toutcs ses
craintes, et le développcrnent dcs motifs propres àles justifier;
il paraît même qu'il s'exprimait sur le compte du sieur Du...
fouI' avec assez peu de ménagemens; car, le 9 juin, sa mère,.
répondant à dcux lettres à la fois, dit à son fils que l 'état de
faiblesse de sa santé est augmenté par l'inimilié de ses enfans
contre Dufour, son gendre, et termine ainsi: Soyez tran...
:» quilles, mes chers, aucun tort ne VOltS sera fal't; je ferai
) toujours de rnOTl mieux POUR CONSERVER L'ÉGALITÉ. » Voilà
hien les expressions d'une mère tendre? chérissant également
tous ses enrans; mais comment sa volonté pourra-t-elle être
exécutée, si celui en qui elle a placé sa confiance en est indigne;
si son mandataire est infidèle; si le sieur Dufour, qui dirige
touLes ses volontés, n'use de son influence que pour la Lromper ct consommer la plus criminelle spoliation.
La dame veuve Riberolle était bien éloignée de vouloir
renon er au séjour de Charnay; tout fait au contraire supposer que si eU eût agi par elle- Inêrne, et uivi ses gouts,
le legs qui lui ac ordait l'usufruit de ce domaine, aurait eu
la préférence sur les 3,000 fr. que sa sœur lui avait donnés
par le même testament Toutefois le sieur Dufour en avait
(lécidé autrement; il voulait que Charnay d vînt la propriété
d la dame Riberolle , mais dans l'unique in lenlion de la
(c
p.orlcr ensuiLe il. le 'Vcndre, cL de
IncUl'C ainsi le
prix à
.sa
�( 3° )
disposition. EHccth-emcnt , le sieur Dufour avait fait acquérir
ce domaine à la dame Hiberolle par acte du 8 janvier 182~ ;
cet acte n'était devenu nécessaire entre le frère et la sœur ?
que pour donner à celte dernière, ou plutôt au sieur Dufour, son mandataire, qualité pour transmettre la totalité
de la propriété de Charnay; aussi, dês cet instant, le sieur
Dufour sollicite-t-il sa belle - mère à revendre. D'abord la
dame Riberolle résiste; bientôt elle écoute les conseils du
sieur Dufour avec moins de répugnance, et le 4 avril 1822 ,
elle écrit au sieur Guillemot: (c Veuillez me donner votre
» avis sur les consezts que me donne Dufour, qui paraissent
) sensés', par rapport au domaine qui coûte beaucoup par
') r en tc'etien , et qui rend fort peu ; rnais le quitter Tne dé-.
) ch/re le cœur. »
Ce projet de vente arrêté sur l('s conseils du sieur Du{; ur,'
ce derni r s'occupe avec la plus grande activité du recou,'rement des créances que la dame veuve Riberolle avait dans
]a commune de Charnay. Il reçoit du si.eur Glainard de CJizy ,
une somme de 2, 00 fI'. , monlant (rUn effeL du à madame
Arnaud j d'un sieur Mural, maire de Charnay, 400 fr. ; d'un
sieur Poitrasson , aussi habitant à Charnay, 369 fI'. ; enfin, '
diŒ{rentc, autres petites cr ~ances? dont le monlant ne peut
"tre actu llement fixé. Ce n'est pas tout, le sieur Dufour,
espérant que son projet sc réaliserait promptement, vend
une partie du mobilier. Il e t l'ai que ces faits ne sont point
~lablis par tiLres, mais ]a preuve en a été offerLe en prcIuier in lance, cl sera réilér' e devant la Cour.
Le sieur Dufo lr était enfin parvenu à ncSgocicr la vente cl l
domain de Charnay; c'est un sieur Pierr u , médecin, qui
cn devinl l'acqu ~rellr par acte sous ing - pri é du 18 juillet
8?-2. Le pri de la venl
{ui fixé à 36,00 fr , payable par '
dixierne, d'a.nn(~c cn alluée, avc illlérêL; il fut dil que ces
)ayenlens auraient lieu à Lyùn, cl,lez la personne de confiance
�( 3I
)
aè ] ~ dame :Riberolle, et sur ]a simple quittance sous seing
privé qu'elle fera passer: l'acquéreur se réserva la faculté de
convertir, avant deux ans, la vente sous seing privé en acte
authentique; il fuL con~enu alors que le prix de la ven Le ne
serait porté qu'à 18,000 fr . , et que, jusque - là, la dame HiheroHe donnerait à son acquéreur procuraLion pour revendre;
enfin, dans la quinzaine, l'acqué7'eur deop,it entrer en jouissance.
Il y avait di's~imulation dans le prix de ceLLe ~ente, qui
'é tait entièrement l'œuvre du sieur Du four. Effectivement, le
prix réel était de 38,000 francs, mais le sieur Dufour s'en 'tait
fait payer 2,000 francs comptant, et à J'avance: avait- il caché
cette cir~onstance à sa belle-mère? cette dernière connaissait,
elle au contraire ce fail ? C'est ce que la suile pourra apprendre;
mais dès l'instant même, on peuL Lenir pour certain que le
sieur Dufour a caché, aussi long-temps qu'il a pu, que cette
somUle de 2,0 0 francs fil partie du prix de la vente ; ct il
sera prouvé que plus tard le sieur Dufour, s'étant vu contraint
à reconnaître la vérité de cc faiL, a cherché à indttire la justice en.
erreur sur la personne qui avait 1'éellenlent reçu cette somme.
Le délai accordé à la dame Biber lle pour se retirer de
Charnay était bien court; cependanL 1'aclivilé du sieur Dufour fut telle, qu 1 iL devint en parli inutile: dans l'espace
de quelques jours, le sieur Duroue avait vuidé les celliers,.
vendu ou fail transporler à Thiers 40 années de vin vieux
ou nouveau, monLant à une somIne de 2,400 francs. Quant
au mobilier de Charnay? le sieur Dufour en vendit en ore
une par"lie; c était celle qui avaiL 1 Inoins de valeur? cL dont
Je transport aurait été trop onéreux' le prix de celle enl
slesl monlé à plu de deux cenls francs . Mais il exislait dans
la maison un Inobilier précieux, que la dame Arnaud avait
fai t conduire de Lyon, et dont la majeure partie était en ore
SOtl S
ot'de, le sieur Dufour mballa le reste saIlS aide ct
sans témoin? cL expédia po ur Tlli "...s plus d e cen l qujllfaU
1
�( 32 )
'd 'objets mobiliers, 'dont ]a valeur ne peut être moindre
oe 10,000 francs. On a dit qu'à l'époque de l'invasion des
alliés, la dame Arnaud avait caché la meilleure pOl'Lion de
son argenterie, ainsi qu'une somme considérable en argent
ct autres objets précieux; le sieur Dufour connaissait ce dépôt ct s'en empara, de manière qu'il fut bientôt en position
d'abandonner Charnay à son acquéreur. Plusieurs de ces
faits sont déjà en partie établis par t.itres émanés du sieur
Dufour; au besDin, la preuve pourrait en être faite ou corn..
pIétée par témoins, offre qui a été faite en première instance,
et qui sera renouvelée devant la Cour.
Les mesures du sieur Dufour avaient été bien prises; rien
'd e ce qui composait la succession de la dame Arnaud ne lui
était échappé; sa prévoyance s'était même portée sur l'avenir"
et il pou ail fixer le moment où le prix enlier du domaine
de Charnay, moins 18,000 francs, serait à sa disposition au
Il10yen des billets à ordre que le sieur Pierroux devait sous~
crire plus tard. l y avait cependant encove un danger à é ifer.,
c'élail les explications qui pouvaient avoir lieu enlre la
dame Riberolle et le sieur "Guillemot; ce dernier se plaignit
amèremenl du sieur Dufour; plus d'un moLif semblait rendre
ses plain Les légiLimes; il fallait éviter une enLrevue entre le
frère ct la sœur, et le sieur Dufour n'imagine ricn de mieux
que de for cr sa belle - mère à partir précipitamm~nt, et à
'é rire à on frère une lellrè d'adieux sous la date du 23 juillet 1822, ou, pour la première {ois, elle lui annonce qu'eIl
a vendu le domaine de Charnay au sieur Pierrou ,ID yennant 36,000 francs, lui manifeste tout son chagrin de ce qllC
le sleur uf ur a e cilé sa c 1ère, et floit ainsi: « Lcs affaires
'» de Dufour l'obligent de partir prompLement, IL l!AUT :BIEN
)
LE SUIVRE. »
Ici 1 réfle ions se pressenl ; le si ur Guill mot de Lyon
~vait toujours cu la confiance de la dame Arnal,ld, sa sœur;
,
il
�( 33 )
il plaçait ses ~fonds, était en compte courant avec elle, con';
naissait parfaitement la valeur du domaine de Charnay; cependant, lorsqu'il est question de vendre cette propriété~'
le .sieur Guillemot n'est point instruit; on ne demande pas
ses conseils; on met, au contraire, tous ses soins à l'éviter.
Si la daIne Riberolle écrit à son frère que Charnay est vendu,
le prix de la vente est dissimulé; c'est 36,000 fr. au lieu de
38 : pourquoi cela? La dame Riberolle aurait-elle voulu trom- per son frère? Elle en était incapable; c'est donc le sieur
Dufour qui l'avait portée à cacher la vérité, ou qui, bien plus
probablement, avait trompé la dame ~iberolle, en lui faisant
croire que le domaine de Charnay n'avait été vendu que
36,000 fr., tandis que le prix réel était de 38, et que celte
supercherie le mettait
à mème de bénéficier d'une somme de
r
.2,000 fr., que sa qualité de mandataire lui défendaiL de s'approprier, nlain mise qu'il ne se permetLait, d'ailleurs, qu'à
l'insçu et conLre la volonté de sa belle-mère. Aussi le sieur
Guillemot, qui, mieux que toute autre personne, pouvait
à ceLLe époque juger le sieur Dufour, diL-il dans différenles
leUres, et notarnment dans une, adressée à sa sœur le 7 sep'"
tembre 1822, en réponse à celle du 23 juillet précédent,
qu'un sieur Casaty , noLaire , offrait du domaine 38,000 [r.
sans mobilier; qu'au moyen de l'argent reçu par Dufour, et
des contraLs de rente et promesses qui sont reslés entre ses
Inains, lui Guillemot supporte une perte de plus de 10,000 fr.,
ct que s'il éprouve ce préjudice, c'est par sa répugnance à
» trailer avec Dufour dont il craint l'astuce et l'adresse dans
» les affaires, t qui est le plus subtil et le plus rusé de tous
» le homme.»
Le sieur Dufour qui était obligé de partt:r promptement, et
qui e fai ait suivre par sa belle-mère, élait préc ~dé ou suivi
(c mme on le fera remarquer lors de l'analise d'un a le qui
lui est personnel ) de différenLes voilures conduisant à son
(c
5
�( 34 )
.,
domicile à Thiers tout le mobilier appartenant à la dame Riberolle Cette dernière avait une maison à Thiers, qui n'était
pas louée, dont elle pouvait disposer, et qui contenait déjà
une partie du mobilier ayant appartenu à son mari; ce n'est
point là que la dame Ptiberolle descend; c'est encore moins
dans cette maison que le mobilier provenant de la succession
Arnaud est placé; c'est chez le sieur Dufour que la dame
Riberolle est reçue; il n'y a qu'un ménage tenu par le sieur
Dufour; c'est lui qui continue l'administration des biens de
sa belle-mère, qui fait les frais de son entretien et de ses
plus menues dépenses, qui lui donne jusqu'aux SOmmes que
la darne Riberolle destinait aux domestiques à titre d'étrennes
. ou d'encouragement, et aujourd'hui il est acquis au procès
que la mère payait à son gendre une pension annuelle de
1,000 fI'.
On conçoit que tous ces faits, et notamment la venle de
Charnay et le transport de tout le mobilier de la succession
Arnaud dans la maison Dufour, avaient dîL exciter l'atten1ion
des sieurs Riberolle, el leur faire désirer que leur mère prît
les précautions propres à empêcher que le sieur 'Dufour abusât
de la confiance aveugle et trop entière que la dame l'tiberolle
lui avait accordée. Les sieurs Riberolle désiraient que la propriété mobilière de leur mère fût reconnue et distinguée de
celle du sieur Dufour; pour cela il fallait un inventaire, et
les sieurs H.iberolle avaient écrit plusieurs fois à leur Inère
dans ce sens; il paraît m" rne qu'ils la priaient de p~rmeUre
qu'ils a sis tassent à cet invenLaire, et lui disaient qu'ils
viendrai nt à cet effet chez le sieur Dufour avec un notaire:
mais le 4 août 1822, la mère répond au si ur Riherolle-Landl' ,'ie qu'elle le pri de ne pas cxé uler ce projet, cl pour
l'en d't urner, clIc ajoute: ({ J'aurai soin de FAIRE FAIRE et
») de FAIRE
qni COTI /enl pour vous édifier.
Qui croirait,
après une promesse aussi positive, qu'il n'y a cu entre le
»)
�( 35 )
sieur Dufour et sa belle-mère, aucun inventaire, aucune note
propre à établir la succession de cette dernière; qu'il n'a été
trouvé dans les papiers de la dame Riberolle aucun document, pas le plus petit état propre à éclairer ses hériliers;
qu'au décès de cette dame, le sieur Dufour a cru pouvoir
composer sa succession à son gré , sans autres titres ', sans
autres documens que ceux qu'il a jugé convenable de produire, et qui sont sortis d'un secrétaire à son usage personnel
et exclu sif ?
Actuellement on connaît la nature et l'étendue du mandat
que la dame Riberolle avait donné au sieur Dufour? son
gendre; la gestion ct l'administration de ce dernier, n'est
pas plus incertaine; il présidait à tous les trailés, négociait
et consommait ioutes les ventes, dénaturait à son gré la fortune de sa belle-mère, recevait tous les capitaux, et les utilisait à son profit. La puissance du sieur Dufour sur l'esprit
ct la volonté de la dame Hiberolle? était entière; la bellenlère n'agissait que par l'impulsion et sous le bon plaisir de
son gendre; elle ne s'occupait d'auéune espèce d'affaires;
tout se réduisait pour elle à prêter quelquefois sa plume à
des. JeUres qui lui étaient dictées par le sieur Dufour, ou à
apposer sa signature sur des actes dont elle connaissait à peine
le contenu; au reste, celui qui était chargé de tout r cevoir,
devait également fournir à toutes les dépenses, c'est aussi ce
qui a {lé fait.
En efT t, le J 4 déccmbre 1822, le sieur Pezard , légataire
de la dame Arnaud, fut pnyé des 10,000 francs monlant de
s~n legs, ct en donna quittance à dame Annc Gui1lemot,
Comme reçus des malns du si ur Dufour, et provenant néanmoins des deni rs de la dame Riberolle. JJC même j ur, c Uç
dC('nih·c faiL une dé laration en faveur du ieur Dufour, par
laquelle ll~ dé lare connaître la quillnnc ,cL dit que c'esL
de son c nscnlcmenL cl ~ur sa réquisilion, que Dufour a
5 ""
�( 36 )
payé la somme ci-dessus; en conséquence, elle s'oblige â lui
al/ou,er cette somme dans son compte. Alnsi, la belle-mère et
le gendre reconnaissent donc que les relations qui ont existé
entre eux, ont rendu un compte nécessaire; cette obligation
résultait, au reste, du mandat accepté par le sieur Dufour,
de la gestion qui l'avait suivi; comment le sieur Dufour y a-t-il
satisfait?
.
Sous la date du 30 juin 1823 , se trouve un acte passé entre
]a dame veuve Riberolle et le sieur Dufour; cette pièce est importante et doit être examinée avec l'attention la plus sérieuse.
Il faut, avant tout, se rappeler que le décès de la dame
'A rnaud remonte au mois de novembre ou décembre 1821, et
que le retour à Thiers de la dame veuve Riberolle doit être
fixé à la fin de juillet 1822; il est également bon de ne pas
perdre de vue le fait essentiel articulé par les sieurs Riberolle,
que le sieur Dufour, qui recevait tous les capitaux appartenant
à sa belle-rnère, fournissait également à toutes ses dépenses?
Inême les plus légères.
Or, quel est l'objet de l'acte du 30 juin 1823?' C'est de régler
le montant des sommes payées et avancées par le sieur Dufoup
pour le compte de sa belle-mère, ainsi que de celles qu'il lui
aurait fournies à elle-même, y compris le montant de la pension
que la darne Riberolle payait au sieur Dufour. Ce règlement
étaiL indispe·n able à ce dernier qui n'avait aucun titre constatant les d ~penses qu'if avail pu faire, et qui, sous bien d'autres
rapports, aurait d'ailleurs 'Lé très - embarrassé d'établir que
les sommes qu'il réclamait lui 'taient réellement dues.
Cet a Le ne menLionne qu'une seule SOfnme payée par 1
sieur Dufour avant 1 déc'. de la dame Arnaud; c'esl /.56 fI'.
compl ~s au si ur Chervel-VaclJer , p ur intérêts de la somme
de 2,800 francs, que le sieur Dufour avait reçue le 12 octobre
1820, pour sa belle-m' re et se portant forlpour elle, à la chalge
de supporter l'usufruit ,qu'un ,sieur GuillemoL avait de cette
�( 37 )
somme. Comment le sieur Dufour, qui avait ~eçu ces 2,800 fr.~
qui les avait enployés à son profit, utilisés dans son commerce,~
pouvait-il consciencieusement se déclarer créancier de sa bellemère des intérêls de celte somme, échus depuis le 12 octobre
1820. N'était-il pas évident que ces intérêts devaient être à la
charge du sieur Dufour, puisque le capital qu'ils représentent
éLait resté entre ses mains, et qu'il en avait fait ses affaires
personnelles?
Viennent ensuite les sommes fournies après le décès de la
dame Arnaud: en les parcourant, on trouve dix arti les montant ensernble I,gOI francs go centimes, et qui comprennent
les frais funérajres, les honoraires des médecins, les gages de
la garde malade, enfin, les habits de deuil des domestiques:
'A qui le sieur Dufour fera-t-il croire que la dame Arnaud,'
femme riche et économe , vivant toujours à la campagne,
n'avait poinL lajssé dans sa maison une somme suffisanLe pour,
payer les frais de dernière maladie et d'inhumalion ? Tout
repousse une pareiUe supposition ; la quolité de la SOIume
employée à cet usage est elle-même une preuve de l'état d'ai-:
sance dans lequel la dame Arnaud est décédé.
L'acte apprend ensuite que depuis le mois de décembre
1821 jusqu'au mois de juillet 1822 , le sieur Dufour aurait
payé, à la décharge de sa belle - mère, 7 1 7 [l'an s pour gages
de domesLiques; ceUe somme forme six arLicle différens.
Comment une somme aussi considérable aurait - elle élé employée à cet usage dans un si court espace de temps ? Il est
vrai que ]a dame Arnaud faisai culLiver Charnay, mai elle
n'avait qu'un seul domeslique homme à son servi ; d puis
décembre 1821 , époque de son d' 's , jusqu'au mois de
juillet 1822, daLe de la vente au sieur Pierroux, l' 'fat des
~hos s n'avail pas chang'; à qui donc une somme êlllS i corr~
si~éraLle aurail-elle été complé ? Esl- il préslnnal1le que la
dame Arnaud eût laissé ainsi arrérager les gages de sC:;j dQmes~
�( 38 )
tiques, ou, qu'au moins, il ne se soit point trouvé dans sa
succession des sommes suffisantes pour acquitter des deLtes de
celte nature?
En continuant l'examen de cet état, on s'assure que le sieur
Dufour ~'occupail des plus petits détails, et que rien n'échappait à sa surveillance. C'est lui qui paye l'épicier, qui achète
un cochon, des barils, le sel; qui s'occupe des façons de matelats 1 paye les pods de leUres, la couturière ~ les frais de
mouture, les journées, les clous, le boulanger, le cordonnier,
la chandelle, enfin tous les objets qui enlrent dans la tenue
d'un ménage. Comment, dès lors, né pas recon ndlre que le
sieur Dufour avait la direction de toutes les affaires de sa
peLe-mère; que sa gestion embrassait les choses les plus sérieuses, comme celles de la plus mince importance, et q~e
son mandat, qui étail illimilé , s'exerçait sans restriction sur
lous les intérêts actifs ou passif.'i de la dame r iherolle.
Mais cel acte présenLe encore des fails hi 'n singuliers. I .. a
<lame l\.ibcrollc habitait Charnay; elle n'a c1langé de domicile
<qu'à la fin J juillet, époq e Glaquelle elle esL venue à Thiers;
or , il cst établi par l'élal contenu dans racle du 30 juin 1 23.
que bien a ant le mois de juillet et, anLérieurement Inême
à la venle du domaine de Charnay, il avail éLé expédié à Thiel"s,
en différentes fois, plusieurs barils de vin, qui, bien certainemenl, ~lai nt destinés à la consomuwLion cl à l'usûge du
sieur Dufoul"; h! hien, ce dernier ne crainl pas de porter
en compLe, à sa belle- l \1'c, le pri des ongés ct des droils
d'enLr ~c de ce yin qu'il ne pouvait avoir reçu qu'à tiLre de
cadeau, L cl nt il ayai l ul profité.
Ces <1 \Lails fonl naît e cl s soupçon" Li n légitimes sur l'état
des rt:an 'cs que le sic Ul' Dll[Olll' prés olaiL à sa bIle-mère;
on v rra bienLôl le moyen qui a ~té employé pour le sousLI airc
à la rilirl'lc des sieurs HibJ:!folle ; lllais il est lln arlicJe qui,
Li n é idemmenl 1 n'a point élé p::lyé par le sieur Dufour,
�( 39 )
~t
qui cepcndan t figure dans cet état, en ces termes, sous la
date du 20 juillet: A M. Pezard, en une renlise sur Paris, .
» 500 francs. ») Or, qu'est le sieur Pezard? C'est le légataire
de la dame Arnaud pour une somme de 10,000 francs, et le
testament parle que cett~ somme sera payable une année
après Je décès: il n'était donc pas dû d'intérêts au sieur Pezard
jusqu'à cette époque; or, comme les Ib,OOO francs ont été
pnyés au sieur Pezard dans l'année du déc' s, puisque sa quittance cst du 14 décembre 1822, il est évident et démontré par
titre que Il"\s 500 francs portés en compt.e par le sieur Dufour,
n'ont point dft. être payés, et, effectivement, ils ne l'ont point
été; aussi le sieur Dufour ne rapporte-t-il ni reçu, ni quit~
tance émanés du sieur Pezaro.
Cet état pourJ'ait encore donner lieu à des remarques bien
importantes; on est cependant bien loin de vouloir les présenter toutes avec détail, mais il en est encore quelques-unes
qui doivent être soumises à l'examen d la Cour.
D'abord, ou a vu que le sieur Dufour fournissait à toutes
les dépenses du ménage sans exception; son état établit même
qu'il y a compris de petites SOlnmes qu'il donnaiL. 'de temps
à autre à sa belle-mère; cette dernière n'avait donc aucun
besoin d'argent; effectivement, qu'en aurait-elle fait, puisqu'elle ne pouvait l'employer à rien d'utile? Cependant, si
l'on en croit le sieur Dufour, dans le courant du nlOÎ de
jui.n 1822, il aurait compté à la dame Riherolle une somme
de 1,000 ft'. en espèces; dans le mois d'août, il lui aurait
encore avancé en numéraire 3g8 fI'. 93 cent.; et, chose teut
aussi remarquable, dan le même mois, il lui aurait porté
en comple une omme de 1,000 fr. pour le montant de sa
pension d'une ann' e : ainsi le sieur Dufour, conlptable de
sa belle-mère, ayant à sa di position tou ses capil:1ux, recevant tous ses revenus, se rel nait encore sa pension à ra-vance, ct il veut que ron croie que dans le courant de ]3
J)
,
•
�( 4° )
même :;m née ]a dame Riberolle a dissipé une somme 'd e
I,3g8 fr. 9 8 cent., somme dont k sieur Dufour n'indique
aucun emploi, qui n'a point été trouyée en toul ou en partie
dans la succession de la dame Riberolle, ct d.<;>nt, enfin, il
est impossible de découvrir aucune trace.
Il faut enfin fixer son attention sur un dernier fait qui ressort
de l'état fourni par le sieur Dufour . .On sait que la dame
Riberolle avait quitté Charnay en juillet 1822, la leUre qui
annonce son d épart est du 23 de ce mois; les sieurs Riberolle ont articulé et offert de prouver que leur mère était
par Lie de Charnay avec le sieur Dufour; que ce voyage avait
été précédé et suivi d'un transport de vin et d'une quantité
de mobilier considérable et précieux, du poids de 100 quintaux au moins: eh! bien, l'offre de cette preuve peut devenir désormais inutile, le fait étant complé1ement élabli par
l'état du sieur Dufour, contenu en racle du 30 juin 1823.
Effectiv,ement, ous la date du 30 août 1822, on trouve
les . mentions suivantes:
, « , Pour droit' d'enlrée à 'Thiers de 6 pièces de vin, 36 fr.
)-) 55 . ecn1.
Aux voituriers Musset et Barge, pourZeur premzer voyage,:
.') 180 ft.
»
Au lllêmes, pour autre voyage en juillet même année,
,) 175 fr.
» A Musset seul, pour autre voyage, 80 fI'.
» Au v ilul'Îcr Papillon, 30 fI'. .
» Pour frais de voyag~ en posLé, de Charnay à Thiers,
»
fr. »
Ain i le si ur Du~ ur apprend ici que, disLracLion faiLe des
irais de po l , le mobili r
iluré à Thiers à celle époque,.
a oûlé !) 1 fr. de tran p rl, ce qui, à 2 fr. le luinlal, e cé)
105
derait d beaucoup la quanLiLé de mohilier réclarnée par les
s'. urs RilJcrolle.
On
�( 41
)
On pourrait penser que cet état du sieur Dufour, qui présente un total de 10,239 fr. 36 cent., serait précédé ou suivi
d'un chapitre -de recette; les faits déjà connus sont même
propres à faire supposer que le sieur Dufour a saisi cette
occasion pour faire inventaire . du mobilier appartenan t à sa
belle-mère, et prendre toutes les précautions pour éclairer
les héritiers de cette dernière sur l'état réel de sa fortune.
Cette opération était. en effet, pour le sieur Dufour, un devoir
qu'il lui était bien facile de l'emplir; puisqu'il avait en sa
puissance tous les papiers appartènant à sa belle-mère, qu'il
avait reçu tous ses capitaux, qu'il en .avait disposé, et que
dès lors il était obligé de faire connaître les sommes par
lui reçues, l'emploi qu'il avait cru devoir en faire, ou indiquer la destination que la dame Riberolle leur aurait ellemême donnée. Le sieur DufoQ.r ne pouvait d'ailleurs igno-.
rel' que la darne Riberolle avait promis l'égalité à tous ses
cnfans, qu'elle leur avait ~crit qu'e1leferazl et forait faire tout
cc qui était nécessaire pour les édifier; de là sans doule encore
des motifs bien puissans pour le sieur Dufour, d'agir régulièrement, de rendre un compte exact des sommes par lui
'reçues; de fixer enfin 'positivement la consisLance de la fortune de la d;HI).e Ribcrolle, afin de forcer ses beaux-frères,
déjà prévenus contre lui, à rendre plus tard hommage à la
pureté de ses inLenlions et à la loyauté de sa conduite.
Hien de toul cela n'a cu lieu; mais immédiatement après
l'état pré enté par le sieur Dufour, Qn trouye trois arlicle~
qu'il faut faire cOllnaÎLre te ·tuc11cm nt.
{( La dame veuve H.iberolJe déclare en outre que les sommes
» payées par le si ur Dufour-RiberoUe, ainsi qu'il est dit
» cn l'arLicle précédent, l'onl'été pour libérer n'AUTANT celui» ci des sommes qu'il avait l'e9ues pour elle el sur son inpi(atzon;
» soit de la succession de la dame Arnau,d, sa sœur, soit du
6
�\. 4 2
»)
sieur Chapet-Vacher. .
» PERSONNES.
)
soit enfin de
TOUTES AUTRES
"
" En conséquence, ladite dame veuve RiberoUe veut que
)} sondit gendre demeure quiLle envers elle et les siens~, t\
~ VA'LOIR 'c.omme il est dit en l'article précédent, de la somme
:il totale de 10,239 fr. 36 cent., lui en passant quittance, ayec
i» prornesse de l'en faire tenir quitte envers et contn~ tous.
» Convenu qu'au moyen du payement de la somme totale
) énoncée en l'article précédent, et de celle quittancée par le
» sieur Pezard , le sieur Dufour- Riberolle demeurera bien
» et valablement déchargé envers la dame Riberolle, de
» toutes les sommes qu'il a reçues pour elle jusqu'à ce jou ,
,) attendu qu'icelles font un total égal à celui des somrne$
) payées par ledit sieur Dufour, pour Le compte de sa belle-mère,
») ou à celle-ci elle-même. »
Bien certainement, ceL acte n'est point un compte rendu
par le sieur Dufour à sa belle-mère, puisque le chapitre ~es
recettes n'exist.e pas, et qu'il est entièrement à faire; et
comment ce chapiLre auraiL-il élé établi, et SUTlout vériGé
par la dame veuve Riberolle , lorsqu'il est prouvé que les
titres et docurnens, étaient au pouvoir du sieur Dufour, et
que la dame Riberolle les ignorait, et ne s'occupait en aucune manière, de ce qui pouvait être relatif à ses inlé.'êLs.
T uLefois, quelqu'adresse que put meUre le sieur Duri ur
à, la rédaction de l'acte du 30 juin 1822, il ne put obtenir
de sa belle-mère, autre chose que la déclaraLion qu'elle entendait le libérer d'autant d s sommes qu'il avait reçues pour
clle; et par le même arLicle, ceLLe dame dit posiLiv m nt,
que Dufour a rcçu, non-seulclfi nt les sommcs pro enant
de la succe sion de la dame Arnaud, cellcs payé s par le
sieur Ch rvet-Va ch r , mais en ore, eU ducs par toutes
autrcs personnes. Ainsi, la daIne Rib l'olle déclare donc à
�( 43 )
Dufour lui-même, qu'il était son nlandataire, qu'il avait reçu
ses capitaux de quelques sources qu'ils pussent provenir;
d'où l'obligation bien stricte imposée à Dufour de rendre
compte de sa perception .
. La darne Riberolle veut ensuite que le sieur Dufour <le..;
meure quiHe envers elle des 10,000 francs portés en son
ch?pitre de dépenses; mais en quels termes lui donne-t-elle
celle quittance?
A valozr comme il est dit en l'article pré• cédclLt. » Or, la quittance à valoir que reçoit le sieur Du[our ,
ne lui est donc donnée que pour le libérer d'alitant des '
sommeS qu'il avait encaissées en vertu de son mandat. '
Il est vrai que dans lc dernier article, la dame Riberolle,
en donnant d' cbarge au sieur DufOur des sommes qU'lI a
reçues pOUl' elle jusqu'à ce jour, motive sa quittance ' sor ce
que ces sommes font un total égal à celles payées par ledit
.sieur Dufour, pour le compLe de sa ' belle-m'è re .1 ou à celleci clic-même. C,cUe déclaration est absolument insignifiante;
d'abord, il est ertain que les ,s ommes payées pa~ le sieur
Dufour, pour le compte de sa belle-mère, ou à ellé-même ,
ne peuvent s' élever qu'à 10,239 francs 36 ·centimes. On a
effectivement vu que le chapitre de dépenses du sieur Dufôur,
men Lionne et détaille ces div rses sommes. Toute la question
est donc de savoir si , à l' ~poque de l'acte du 30 juin 1822 ,
le .sieur Du[our avait reçu une somme excédant celle de
20,239 [l'an s 3G centimes, représentant soit le chapitre de
dépense contenu en racle du 30 juin 1822, soit la quittancé
de 10,000 francs, donnée p:lf P zard le 14 décembre 1822.
Commenl la dame TIiberolle aurait-elle pu s'assurer de ce
fail ? Le sieur Dufour ne lui avait poin présenté de chapitre
de receLLe, il ne lui a ail I(lis sous les yeux aucun titre j la
mère n'a ail par-devers elle au un document; ses différcntes
Jeures aLLeslent même qu' lle élait obligée de recoùrir au sieur
Dufour POUl' cl nncr? sur ses propres affair:es '. les rensei6 *
(c
�( 44 )
gnemens qui lui étaiént demandés. La confiance que la dam~
Riberolle avait en son gendre, devait encore l'empêchel"
d'exiger de lui aucune reconnaissance des sommes qu'il recevait pour elle, de manière qu'il 'était bien facile que ]a
dame Riberolle tombât dans l'erreur, ou qu'elle devînt victime du dol et de la surprise que~ son gendre voudrait pratiquer envers elle; aussi n'est-il pas douteux que la dame
Riberolle était en droit de se pourvoir contre rade du 30 jl}in
1823, et d'exiger un compte régulier et fondé sur des pièces
justificatives.
Aujourd'hui ce compte est facile à faire, et avec les pièces
que les sieurs Riberolle sont parvenus enfin à se procurer,
ils peuvent fixer la situation du sieur Dufour et de la dame
Riberolle au 30 juin 1823.
TABLEAU DES RECETTES DU SIEUR DUFOUR.
Sommes provenant de madame Riberolle personnellement.
Pour arrérages de pension ( voyez quittance du II no..:
vembre 1811). . • • . . . . . . • • . . • 9~200 f. » C.
2°. Reçu par Dufour, se portant fort pour sa
belle-mère ( acLe du 12 octobre 1820).. . . • 2~80o
».
3°. Reçu par Dufour, de Guillemot-Dessapt
"( leUre du 5 avril 1823). . • • • • • • • .•
600
»).
10.
Sommes provenant de la dame Arnaud person-.
nellement , ou de sa succession.
Reçu par Dufour, fondé de pouvoir de
madame Arnaud ( acte du 6 octobre 1820 ).. . 3,597
2°. ldem. . . . • • Idem ( a te du 12 octobre 1820 ). . . . . . . . . .
6,000
1°.
8
»
A reporter.. • • • • . • • • 22,197 08
�( 45 )
Report.. . . . . . • • • 2.2,197 f. 8 c.
3°. Reçu par Dufour ( arrêté de compte de
1821 et quittance du 7 janvier 1822.. . . . . 1,687
»
4°. Reçu par Dufour du sieur Guillemot
( 8 janvier 1822). . . • . . . • . . • . . . 3,000
»
5°. Reçu par Dufour, par trois billets passés
à son ordre le 14 janvier 1822, et montant ensemble à.. . . . . . . . . . . . . . . . . 3,°75
».
6°. Reçu par Dufour, par dix billets passés
à son .ordre le 15 février 1822, montant ensemble à.. . . . . . . . . . . . . . . . . Il) 285 68
7°' Reçu par Dufour, par cinq billets passés
à son ordre le 14 mai 1822, montant ensemble
,
a. • . . . . . • . . • . • . . . . . • . .
3,026
8°, 6,000 fr. sur la vente du domaine de Charnay ( interrogatoires sur faits et articles et lettres
du 24 avril 18 2 4.).. . · . .. · . .
6,000
82
)
. 50,271 58
Ce "lableau qui est le résumé exact de tous les ti tres qui
sont aujourd'hui au pouvoir des sieurs Riberolle, prouve, de
la manière la plus certaine, qu'au 30 juin 1823, le sieur Dufour' avait reçu, pour sa belle-mère, une somme de 50,271 fI'.
58 centimes; donc, lorsque le sieur Dufour faisait dire dans
cet acte que la cr'ance Pezard, réunie à son chapi tre de dépense, formaiL un total égal aux sommes qu'il a"ait reçues, il
trompait sa be le-mère, lui faisai t écrire une déclaration contraire à la vérité, et s'appropriait ainsi une somme de plus de
30,000 francs en capital, au préjudice de la dame Riberolle.
Ici, il faut faire remarquer que le tableau présenté ne comI,trend pas les inLérêLs des capitaux que le sieur Dufour a
employés à son proh t j cependan t , d'après les dispositions dll
,C ode civil 7 ces intérêts ~ont dus cl peuvcnt c2h"c approxima....
TOTAL • • • •
�( 46 )
livcnlent fixés ?l la somme de 10,000 fr. On a encore négligé
de porter en recetl e au sieur Dufour la créance Glainard ,
montant à 2,000 francs; les ventes de vin qui ont cu lieu
moyennant 2, 4 00 francs; les créances des siem's 1\1urat et Poitrasson, de Chaenay, montant ensemble à 769 franc:s; enfin,
tout es les sommes qui n'élaient point établies p:lr tit r es, ct
dont rexislenc:e el la qu otité dépendent de la preuve offerte
par les sieurs Riberolle. Ces faits ne sont ici énumér és que.
pour faire mieux apprécier l'erreur dans laquelle le sieur
Du four a induit sa belle-mère, en lui cachant les titres, .en lui
fais ant des déclarations inexacte " et en pratiquant .au près
d'elle les manœuvres les plus propres à abuser de la confian co
absolue qui lui avait été si légèrement accordée.
Quoi qu'il en soit, l'acte du 30 juin 1823 n'avait p~s fait
cesser le mandat du sieu r Dufour; il contin la au ontraire la
gestion des affaires de sa belle - ruère, et disposa en nlaÎlre de
toute sa fortune. Il avait été perçu un droit trop for t à r aison
de l'ouverlure de la succession de la dame Arnaud; une restitution de 650 fI'. fut ordonnée, c'cst le sieur Dufour qui a reçu
celle somme.
.
Ma's ici il se présente un fait d'administration bien auLrenlcnt important Le sieur Pierroux, acquél'eur de Charnay,
avait slipulé dans l'acle de vente sous seing-privé, du 18
juillet 182 2, qu'il pourrait, avant d ux ans, convertir cette
venLe en acte auLhentique qui ne présenLerait pour prix
qu' une SOlnrne de 18,000 [l'an s. Le sieur Dufour n'attendit
poinl que ce d:lai fôt expir', et d'sIc 27 ril J82q. , il fit
écrire (par sa belle - ru' re) au curé de Charnay, une leUre
par laqu Ile le si ur Dufour indique les ba
sur lesqu Iles
il doil trai t r a ec le sieur Pierroux. Le sieul~ Du~ ur eut surtout que la venl aulh nti uc qui serait faite à Pierroux porL
quillance du prix en apilal et intérêts. Celte 1 LLre est évidemnlenl du sicur Dufour; ellc e t écritc en enlier dc sa main; les
�( 47 )
soins apportés à sa rédaction ne laissent d'ailleurs aucun doute
sur ce point. Le sieur Dufour y fait na'lvement connaître
la raison qui le porLe à exiger qne la vente notariée porte
.quiLtance; c'est parce qu'il veut des lettres de change pour
le tout, ou au moins ABSOLUMENT des billets à o,.dre. On
trouve ici le même rnode d'administration que le sieur Dufour
avait adopté dès l'ouvcrLure de la succession de la dame Arnaud; il n'a qu'un seul but, celui de s'approprier la totalité
de cette fortune; pour cela, il faut qu'il Ja dénaLure; qu'il la
meLte à sa disposition, au moyen de leUres de change ou de
billeLs à ordre qu'il emploie dans l'intérêt de son commerce;
on a vu que c'est ce que le sieur Dufour avait déjà fait pour
la créance de Lyon, et c'est ce qu'il veut encore faire pour le
prix de la venle du domaine de Charnay.
Pour atteindre ce but, il fallait que le sieur Dufour exposât
avec soin, au curé de Charnay, les mesures qu'il avait à
prendre pour exécuter le mandat qui lui était donné . Aussi
le sieur Dufour met-il la plus grande alLention à diriger les
opérations qui doivent avoir lieu; il explique chacune des
opéraLions qui lui pa!'aissenl indispensables, et pour plus de
clarté, il classe en autant de tableaux difIérens , les séries des
effets que le sieur Pierroux doit souscrire.
L'acte sous seing-privé donnail pour prix de la vente du
domaine de Charnay une somme de 36,000 francs, sur la..
quelle le sieur Pierroux, qui avait payé 4,000 francs, devait
encore 32,000 fi-ancs. A répoque du 27 avril 1824, étant question d'une v nte authenLique qui ne devait prés nler qu'un
prix de ro,800 fran s , il re Lait hors )a vente 14,00 ' fran s
qui devaient être réglés par billets. Ces 14,000 francs devaient
être enLièrement payés en 1827 ; il était donc question de 1 5
régI l' , ainsi que leurs intérêls, par annuités, jusqu'à cette .
del·~jère époque; il f~llait encore régler pour le même Lemps,
les Intérêt des (8,000 francs qui devaient .c; nuer le pl'Ïx de la
vente aulh ntique.
�( 48 )
Le sieur Dufour forme trois tableaux: le premier, composé
de quatre effets de 3,500 francs chacun, payables en 1824,
~825, J826 et 1827, et formant la SOI~lIne de 14,000 f., capital 'q ui ne devait point être porté dans la vente authentiql1,e.
Le second indique quatre effets devant représenter les intérêts décroissaht du capital de 14,000 francs, et montant
ensemble à 1,750 fr . , payahles aux mêmes époques que le
capital lui-même.
Le troisième de ces tableaux indique les intérêts des 18,000 f.
de capital, qui doivent être portés dans la vente authentique;
capital dont le premier terme ne doit être à échéance qu'en
1828. Ces intérêts qui sont calculés et portés à une somme
de 3,600 fr., se divisent en quatre effets égaux de 900 fI'.
chacun, et paya LIes comme les premiers, en 1824, 1825,
1826 et 1827'
Le sieur Dufour s'occupe ensuite des 18,000 fr. qui doivent
être compris dans la vente authentique, comlue étant' le prix
du domaine de Charnay. On a vu qu'il voulait que cette vente
portât quittance : conformément à cette idée et au désir par
lui manifesté d'oh tenir des leUres de change, ou au moins
des billets à ordre, pour la totalité du prix, le sieur Dufour
dresse deux autres tableaux: par le premier, il divise la somme
de 18,000 fr., capital de la vente, en cinq effels de ,600 fr.
chacun, payalJles de 1828 à 1832. Dans le se ond, le sieur
Dufour présente le calcul d 'croissant de cette somme, et obtient encore un capital de 2,7°0 fr. Pour celte dernière somnlC, ..
il veut encore que le sieur Pierroux souscrive cinq eHets,
également aux éch ~anccs de 1828 à 1832.
'fouLcfois, il paraît que la volonté du sieur Dufour ne fut
poinl compléLcment exécuLée; le sieur Pierroux, s'appuyant
sur sa con ven lion , ne voulut pas consenLir à cc que la ven~e
p.orlât quittance dc~ 18,oo~ fr. ct des intérêts, et c'est sans
doute
�( 49 )
doute à cette circonstance que les sieurs Riberolle doivent
la conservation de c~ capital dans la succession de leur mère;
mais le sieur Pierroux dut souscrire les trois séries d'effets
. qui ont été plus haut indiqués, montan t ensemble à une somlne
de 19,350 fr.; ces effets, quoique souscrits à la dame Ribe-:
roUe, ont été mis à la disposition du sieur Dufour.
Il n'est pas sans importance de connaître la forme de ces
effets, et des ordres qui les ont transmis de la dame Riberolle au sieur Dufour.
Il paraît que les effets du sieur Pierroux sont sOt;Is la date
du 9 mai 1824, et portent intérêt à dater du 18 juillet suivant; i]s sont, comm.e on l'a dit, à l'ordre de la dame veuve
Riberolle.
Le 8 octobre 18 2 4, la dame Riberolle p.asse l'ordre d~ ces
effets au sieur Dufour, en ces termes: « Payez à l'orùre de
» M. Dufour-Riberolle valeur échangée contre le billet que
» ravais fait Je 8 janvier 1822, et les inlérêls édlUS dès ce
jour. » Plus tard 1 et dans le mois de féyrie):, le sieur Dufour négocie lui-même ces effets, et les met en circula Lion,
Il est inutile de dire que les endossemens de la dame Riberolle sont écrits de la main du sieur Dufour. La fausseté des
faits qu'ils renferment, t'st suffisante pour en désigner l'auteur. C mme~t, en effet, soutenir qu'au 8 janvier 1822, ]a
dame Riberolle avait souscrit cn lavcur de son gendre, pOUl'
7,000 d'effets, lorsque sous l~ daLe des 7 ct 8 du même mois,
le sieur Dufonr avait reçu pour elle deux sommes montant
ensemble à 4, G8 7 [l'. ; lorsque~ depuis c Lte 'poque, et jus q u~au
30 juin 1823, il avait cu à sa disposition plus de 5 , 0 00 fr.
de capitaux appartenant à sa belle-mère; lorsque dans ceLacte
du
juin 1823? qui bien c rLaineJTlcnt eontient tou tes lcs
prétentions que le sieur Dufour pouvait élever contre la dame
~ib('.rolle, il n'est pas fait m ntion de
fait si important,
d Un emprunL faiL par la clame Ujberolle à son gendre; ]ors7
1.
�( 50 )
qu'enfin rien ne peut apprendre remploi que la dame Ribe~
rolle aurait pu faire de cette somme, et que tout, au contraire, vient attester qu'elle n'avait aucun besoin à satisfaire,
ni aucunes dettes à payer? De pareils faiLs ne sauraient être
convenablement qualifiés; ils décellent si ouvertement le dol
et la fraude pratiqués par le sieur Dufour, que de nouvelles
"réflexions devraient paraître aussi inutiles que superflues.
Les faits jusqu'ici exposés, font suffisamment connaître toute
l'influence que le sieur Dufour exerçait sur l'esprit de la dame
Riberolle. Il était diHicile à cette dernière de s'y soustraire;
elle habitait avec son gendre, à qui elle avait livré toute sa
fortune; elle était dans un état d'infirmité qui ne lui permettait aucune espèce d'occupation, ni même aucune réflexion
sérieuse; le sieur Dufour pouvait donc tout ce qu'il voulaif
sur l'esprit de la dame Riberolle. Comment le sieur Dufour
usera-t-il de cette influence? Il avait à sa disposition la plus
grande partie de la fortune de la dame Riberolle; il s'était
en outre réservé le moyen d'absorber, ou au moins de diminuer considéra.blement ce qui restait, en se faisant payer une
pension de 1,000 fr. Mais tout cela ne pouvait satisfàire le
sieur Dufour; il lui fallait encore un testament qui calmât
ses inquiétudes, en couvrant autant que possible les mOJens
frauduleux qu'il avait employés pour s'enrichir au préjudice
de ses beaux-frères. Or, commenL 1'obtiendra-L-il? la volonté
de la dame Riberolle lui était connue; pour elle, conserver
l'égalilé entre tous ses enrans, était un principe dont elle ne
se seraiL pas volontairement écartée; c'est une promesse qu'elle
leur avait faite par écrit et verbalement; elle étaiL incapable d'y
manquer. Le sieur Dufour fut donc dans la nécessité de continuer à la tromper; il sut lui pcr~uadcr ql1C l'a le du 30
juin 1823 avait été fail dans rinL ~rêL de Lous; que le repos
de la famille dépendait de s n cxécuLion qui évilerait, des
discussions pour l'avenir. Cette idée pouvait séduire Ja dame
-
�( 5r )
Ribero;Je , qui ne craignait rien tant qu'un procès entre ses
enCans; le sieur Dufour sut habilement profiter de cette disposition, pour obtenir un testament dans lequel il glissa
adroitement quelques termes équivoques, dont il se réserva
l''Ïnterprétation, et à l'aide desquels il put espér"cr pouvoir
retenir par des moyens indirects, ce qu'il avait si directement soustrait.
Ce testament, dont la date est du 2 novembre 1823, est
tout entier de la rédaction du sieur Dufour et de ses conseils.
Il contient d'abord un legs aux hospices et à la domestique
de la dame Riberolle. Celte dernière s'occupe ensuite de sa
fille Marie-Claudine, épouse du sieur Dufour, et lui donne en
préciput, avantage et hors part, les rentes, soit foncières, soit
,mobilières, e semble les capitaux résultant des traités faits
po})r obtenir les remhoursemens d'icelles, le tout dû par les
hahitans de la commune de Péchadoires ; elle lègu~ encore à
sa fiUe , au même titre, ses armoires, linges, hardes, bijoux
en or ou en argent.
La dame Riberolle institue ses trois en fans héritiers
par Iga/ile' dans tout ce qui, au surplus, composera sa succession; néanmoins, elle veut que les sommes qui reviendront
à sa fille, soient prises sur celles qui seront dues par le sicur
Pierroux ; ajoutant que sa fille pay ,e, ce qui restera encore
dû par le sieur Pierroux, apparLiendra au sieur Pierre Hiperolle, pour d'autant le remplir de son amandement dans lesditcs créances; et cc qui rc&tera dû à ce dernier, imputation
fàite de la somme resLée due par Pierroux, doit se prendre
sur celles des auh'es créanc s qui seront exigiblcs, 1 ujours
en commençant par cellcs ducs .rar toules autres personnes
que le fils aîné.
Jusque-là, ce testament prés nte des dispositions fort s3ges
et qui sont hi n certainement les seules que la dame Rib rolle
voull1t faire. Elle :wait habité long-tcrnp avec sa flUe; il éLajt
7
�( 52 )
dès lors nafurel qu'elle 'lui laissât un témoig.nage p:l'rticulicr
de son affection; mais, immédiatement, ]a dame Hiberolle
appelle tous ses enfans au partage de sa succession par égalité;
on voit encore qu'elle pr~nd les plus sages précautions pour
que chacun d'eux prenne ce qui peut. être le plus à sa convenance, sans blesser toutefois les intérêts de ses cohéritiers.
Mais le sieur Dufour voulait que ce testament contînt une
disposition qui Jui fût personnelle j pour 'atteindre ce but, il
confond habilement ses intérêts avec ceux du sieur Riberolle
aîné, qui avait réglé avec sa mère les arr-érages de la pension
viagère qu'il lui devait; alors le sieur Dufour inspire à la dame
Riberolle des craintes sur l'exécution de l'acte qu'elle a passé
avec son fils, et, à raide de cette surpercherie, il parvient
enfin à faire consigner dans le testament les dispositions suivantes:
« Plus, je veux que les RÈGLEMENS que j'ai faits, soit avec
.» mon fils aîné) soit avec mon gendre Dufour, soient exécutés,
)) et que les quittances que je leur ai données soient respectées.
» Je veux que celui ou eux de mes enfans qui se permet» traient d'élever aucun débat à cet égarrl soit privé de la
» quoLité dont la loi m'autorise de disposer à son ou à leur
) préjudice et qu'clle appartienne à celui ou à ceux qui se» raient ain i querellés, leur en faisant, en ce cas, don e.n
» préciput. Bien enLendu que ledit cas ayant lieu, ce préciput
» souffrira celles de mcs disposiLions précédentes, et qui pour) l'ont êLr considérées comme prél gs. »
Ces dernières dispositions doivent nécessairement se coordonner avec la première partie du teslament qui appelle
tous les enfans de la dame Hiberolle par égalité au parlage de
sa succession, sans autre ex ption qu le pré ipuL qu'clle
avait cru devoir accorder a sa fille Dufour. Cette promesse
d' ' galité ne permet pas de supp el' 1 {gèrem nt que la dame
Ribcrollc ait voulu, par une seconde disposition toute con~
1
1
�C53 1
traire à la· première, s'ex.p oser à donner la quotité .disponible
ri un étranger au préjudice de ses autres enrans.
Aussi, que dit la dame niberolle dans la seconde partie de
son teslament? Elle entenù que les 7'i>glemens qu1elle a faits
soient exécutés, ct que les quittances qu1ellc a données soient
respectées; elle veut en~ore -qu'aucun débat ne s'élève à cet
égard; mais sur quoi peut porter celte volonté, si ce n'est sur
les 'choses que la dame Riberolle a pu connaître et appréc' et'
elle-même? Comment, en effet, penser que la mère ait voulu
disposer de sa fortune à l'aveugle, et donner à ' un homme
qui n'était pas son hériLier, et au détritnent de ses enrans, des
sommes dont il lui était impossible de connaître l'imporLance.
Quant au sieur Riberolle aîné, pas de difficultés; la Inère
et toute la famille connaissaient tout ce qui pouvait le concerner: en effet, les arrérages de la pension viagère avaient
été réglés en présence de tous, et si le sieur H.iberolle aîné
avait bénéficié d'une réduction de 3,000 fr., chacun des autres
enfans avait reçu de la mère une somme pareille en compensation ; il n'est donc point étonnant que la dame Riberolle,
respectivement à son fils, ordonne l'exécution d'un règl ement,
et in1pose à ses enfans l'oblj~ation de respecter une quiLLance
qui ne pouvaient convenablement être critiqués par personne.
Mais relativement au sieur Dufour, que pouvait savoir la
dame RibcroIle, et que savait-elle réellement? Le sieur Dufour
avait présenté à sa belle-mère un état des sommes qu 'il avait
payées, fournies ou avancées. Il avait fixé, d'une manière bien
positive, à 10,239 fI'. 36 cent. tout ce que la dame Riberolle
pouvait lui devoir, à quelque titre que cc fût, et on a vu que
pour celle somme considérable, le sieur Dufour n'avait
d'autres preuves que celles qui résulLaicnt de l'approbaL.ion et
du règlement de la dame Riberolle. C'est donc c règlement
que la mère veut que l'on respecte respectivement au sieur
Dufour; pour cela, elle ordonne que touLes les sommes qu'eHe
�( 54 )
a reconnues comme sa dette, seront à l'abri de toutes discus.sions. Il importe peu que ces sommes nc soient pas établies
par titres, elle impose à ses enCans le devoir de respecter les
déclara1ions qu'elle a faites à cet égard; mais bien êvidem..
ment la I11ère n'avait point présentes à la pensée les quittances
p i1r elles données au sieur Dufour. Comment aurait - elle
ordonné qu'on les r ,spectât, ne connaissant pas les sommes
que son gendre avait reçues pour eHe r Eflectivement, le sieur
Dufour n \lyant jamais présenté à sa belJe - mère son chapitre'
de recetLe, comment cclle - ci aurait - elle pu les conn,a îtrc ,
n'ayant aucun titre à sa disposition ; ces titres étant , au
conlraire, tous au pouvoir du sieur Dufour, et ce dernier ne
lui ayant jamais donné état des sommes qu ~il avait reç-ues
pour elle? Aussi, si l'on réfèI·e les di~posiljons du testament
aux tennes de la prétendue qUIUance du 30 juin 1'8-23,
on s'assure que c'clte quiLLance n'a été donnée que pour
libérer rI'autant le sieur Dufour de$ sommes qu'il avait reçues.
pour sa belle-mère; qne la quittance n'est do~néc q1.l\à valoir,
et qu'elle ne peut nvojr d'autre effet que celui de permetlre
au sieur Dufour d'établir que les sommes par lui reçues formaient un total égal avec celles par lui payées ou avancées.
pour le compte de sa belle-mère. Il est donc impossible de
faire res ortir de la disposition testamentaire, une idée quj
est repoussée par les expressions bien entendues de l'acte du
30 juin 182 •
T llierois, lcs sieurs Riberolle ont donné à celle disposition
test.amenlaire toute l'étendue qu'elle pouvait recevoir; ib
n 'onl jamais critiqué Je chapitr de dépense qui y est contenu,
à l'exception, cep ndanl, de Particle indiquant qu'une SOtllU1C
de
0 fI', aurnit été p;:}yéc au sieur Pczard, tandi ' qu'il est
établi par lilr s posilif , que 1 sicur Du four n'a point payé
cell somme j ntais n mêm Lcmps, le sieul's Uiberolle ont
emandé à leur beau - frère qu'il com~lél,~l son compte de
�( 55 )
mandataire ; qu'il présentât un chapitre de recette qui pût
être mis en balance avec le chapitre de dépense; à cet égard.
les sieurs Riberolle n'ont fait que ce que leur mère elle-même
avait le droit de laire; ce qu'elle ferait bien évidemment si
elle .vivait encore et qu'elle pût connaître combien elle avait
été victime de la confiance aveugle qu'elle avait accordée au
sieur Dufour.
Il faut encore faire remarquer que le sieur Dufour n'a
jamais regardé le testament de sa beHe - mère comme imposant à ses beaux-frères, Pobligation de respecter la prétendue
quittance contenue en l'acte du 30 juin 182.3, dans ce sens
qu'elle contiendrait, en faveur de Dufour, remise de l'obligation de rendre compte de ses recettes. Au contraire, le
sieur Dufour a constamment soutenu qu'il n'était point le
mandataire de sa mère; comment, dès-lors, serail il déchargé
par testament des suites d'un mandat qui, suivant lui ,
n'aurait point existé; ct si ce mandat existe, s'il est prouvé
cont,oe le désaveu du sieur Dufour, comment concevoir que
ce dernier, ou la justice pour lui, pourrait, contrairement
à la volonté de la dame Riberolle, et en opposilion même
. à la défense du sieur Du four, interpréter les actes, dans le
seul but d'en faire ressorLir des moyens propres à soustraire
· ~e mandataire au compte régulier qu'il est tenu de rendre?
La dame niberolle est décédée au mois de mai l ?5; le
sieur Dufour ne fit point apposer de scellés, toule la fortune
de sa belle-mère resla à sa disposiLion j il n'y eut aucun invenlaire de dressé.
Cependant les choses ne pouvaient point r sLer n c t état "
aussi quinze jours après Je décès de la dame Riberoll , le
&icur Dufour fLt-il appeler ses deux beaux-frères, et il fut
Convenu qu'un invenlaire serait dressé par le minisl"re
de deux noLaires, Me. Courbine et Me. Delots , qui ont
paraphé tous les titres et papiers ; ces noLaires sont dé-
�( 56 )
'po:;itaires de ]a note uriginale par eux tenue, à l'effet de
dresser un inventaire, qui cependant n'a pu êLre régularisé,
à défàut de la signature des parties.
, Cet inventaire se divise en trois chapitres. Le premier com.J
prend le mobilier trouvé chez la dame Dufour; les sieurs
Hiberolle ont trouvé qu'il était incomplet sous deux rapports;
1°. parce que e sieur Dufour n'avait point représenté le mo ...
Lilier qu 'il avait transporLé de Charnay à Thiers; 2°. parce
qu'il retenait la moitié au rnoins de l'argenterie qui appartenait à la dame Riberolle.
Le second chapitre est intitulé créances ducs: il ne se
compose d'autre chose que des papiers représentés par Je
sieur Dufour, et retirés par lui de son propre secrétaire.
Ces papi ers ne font qu'indiquer les obj ets que le sieur Dufour voulait hien faire rentrer dans la composition de la succession de sa belle-mère.
te troisième chapitre il été enLièrement dressé sur la déclaration du sieur Dufour ., et comme il contient, suivant
ce dernier, la composition de la succession de la veuve lliberolle, il est convenable de 'l'analiser.
Le pr emier artic1e de ce chapitre indique une somme de
18,000 fI'. , duc par l'acquéreur de Charnay, pour le prix d~
la vente du 2 m ars 1824.
Ce prelnier objet provient de la succession Arnaud.
Le sieur Dufour fait un second article d\we somme de
1 5 ,00 0 fr. porlée par le traité passé entre le sieur Hiberolle
cl sa mère? Je 16 janvier 182I.
Celte somme qui est le résultat des arrérages de la renle
viagère que le sieur Riberolle devait à a mère, esL personnelle
à celle d rni' re , ct provient directement d'elle.
I.Jc troisième m,' li le monL:ml â 1 ,800 fr. , compr nd les arrérages de la pension qqi étail due à la mère depuis le traité
du 16 janyicr 182l , jusqu'au l ~ mai 1825 , époque ùu décès
de la dam e Riberolle.
�( 5T)
C eHe somme est ~ncore personnelle à la mère, et ne pro.::
vient pas de la succession ~e la dame A·rnaud. '
Le quatrième article indique une somme de ~2,50o fI'. , montant de la dot consLituée à la dame Uiberolle, et q~le son fils
aîné devait lui rembourser aux termes de .$on conll';lt ùe mariage.
Le cinquième article est rerparquable: il signale de~x. promesses. monlant ensemble à 1,500 fI'. , que le sieur Dufoll;r
aurait faites à sa belle-mère, et qu'il am'ail retir~es d'u n portefeuille plaçé dans l'armoire à l'usage du sieur .1;>ufollr luimême. C'est encore ce dçrnier qui aurpit i~rit ces deux
effets sans dates certaines, et qui ne se sont trquvés revêtus
d'ullcune signature, ni d'aucune nole 'é manée de la dame
Riberolle, propres à attester' l'objet, le but et l'origine de
ces effets. Il faut cependant dire que ce~ effets so~L, call;~és pour solde de tous comptes; mais .pourquoi l€t sieur
Dufour leur a-t-il donné ceLLe cause, si ·l'acle du}o juin 1 ~~3
était sincère, s'il contenait )a vérité tou le entière? Il faut
bien en convenir, le sieur Dufour mcLtait tout ~n usnge pour
masquer. aulan!. qu'il élait en lui, sa positi~n e~vers sa belleInère. Sa conscience, plus pui sante que son adresse, lui inspirait des doutes et des craintes, même sur les mesures qu'il
avait combiné s avec lc plus de soin, el par excès de précaution, il préparait à son insçu les moyens qui devaient
enfin ]e démasquer.
Le sixième article est une rente due par M. Courby, au
enpilal de 4, 00 fr., clle éLait dotale à madame H.iberollc ,
et ne provenait pas de la suc es ion Arnnud.
Le septième arl ide est une créance de 200 fr., due par
mademois ·He onslant.
Celle rr.ance appartenait encore par,liculi' rement à madame
Rib rolle.
~e huil ième ~rlidc compr nd un rre~ d~ 2,000 fr. J ~lû
par le sieur Guillemol-Dcssapt.
8
�( 58 )
Cette"créance, était encOre personnelIe a la damé Riberolle.
Enfin , le neuvième et dernier article , a pour objet nné
somme de 1,200 fr., dont le débiteur est encore lp. s.i eur
Guillemot-Dessapt.
Cette créance comme celle qui ]a précède, était person...
"nelle à la daIne Riberolle, et ne provenait pas de la dame
Arnaud.
Ce chapitre de recette donne un total de 65,300 fr. qui,
suivant le sieur Dufour, représenterait toute le succession de
la dame Riberolle, et il faut ici soigneusement remarquer
que de c.elte masse, 18,000 fr. seulement proviendraient de
'la succession A;naud, à moins que l'on ne veuilJe y ajouter
les deux effets de 1,500 fr. que le sieur Dufour avait souscrits,
.on ne sait par quel motif, en faveur de sa belle-mère, mais
qui ne devaient être à échéance que cinq ans après le décès
de sa belle-mère, et jusque-là non productifs d'intérêts.
Les sieurs Riberolle pouvaient dès cet instant penser qu'ils
n'avaient rien à attendre de la loyauté de leur beau-frère; les
déclarations de ce dernier étaicnt effectivement si peu en harlnonie avec l'idée que l'on pouvait avoir de la valeur des successions réunies des dames Arnaud et Hibcrolle, qu'il faUait
bien se résoudre à rechercher les titres et documens propres
à convaincre ]e sieur Dufour de dissimulation cl de mensongè.
Toutefois, avant d'en vcnir à ce moyen extrême , les sieurs
Riberolle tentèrent quelques voies de conciliation: deux arbitres du choix des parties ]es enl ndir nt ; mais le sieur
Dufour continuant à s'en référer aux tiLres qu'il avait produits,
persistait à nicr le véritahl prix de la v nte du oomaine de
Charnay, à d ~savou r sa qualité de m:lOdalair , et ]a gestion qu'il avait [aite des hi n de sa bcll - tllèl" ; à soutenir
enfin, cque la succ ssi n devait êlre réduite à ce qui est porté
dans la note tenue par les sieurs Dclots cl Com'bine; les
sieurs Hibcrolle durent alors sc décid r à inlcl'fogcr les pet:,
�( 59 )
sonnes qui pouvaient éclairer la justice sur la valeur réelle
de ces deux successions, et à faire la recherche des titres
propres à établir que le sieur Dufour avait dénaturé toute la
succession de la dame Arnaud; et qu'à l'aide de différentes
combinaisons, il était parvenu à confondre dans sa propre
forLune, tous les capitaux qui en provenaient. Un voyage
fait à Lyon et à Charnay, mit bientôt les sieurs Riberolle à
même de faire çonnaître en détail tous les faits de la ges~
tion du sieur Dufour.
La demande des sieurs Riberolle est du 27 novembre
1826 ; elle est dirigée contre la dame Claudine Ri.b erolle et
le sieur Joseph Dufour, son mari. Contre la dame Dufour,
les sieurs Riberolle demandent le partage de la succession de
leur {nère ; ils soutiennent, contre le mari, que ce dern~er
ayant administré, vendu, touché et liquidé la succession de
la dame Arnaud, doit être tenu de rendre compte de cette
administration, et de rapporter au partage tou s les sommes
qu'il allrait reçues pour le comple de sa belle-mère.
Le 2!~ jan,'ier 1827 , le sieur Dufour fait signifier des conclusions, et s'expliquant sur le compte qui lui est demandé,
li dit: « que s'il est vrai qu'il ait reçu des sommes pour le
» comple de la défunte, il est constant que le mandal qu'il
» avait reçu dans ceUe circonstance, a été par lui exécuté;
» que les somm s reçues ont été employées pour ]a délunte ,
~) pour la libérer envers ses créanciers; que cela résulte d'actes
publics d ' 14 d' cembre J 822 et 30 juin 1823.»
~e si ur Dufoue ne pouvait être plus bref dans le développement de la fin de non-recevoir qu'il pposait à ses bea1,lx.{i'ères. Il n'essaye pas d'expliquer quell s sonL les s mUleS
qu'il a reçues pour le compLe de la dame Riberolle; il veut
être libéré, parce qu'il souli nt que deux actes pro~lvent
qu'il a m ployé le montant de ses recettes, suivanl les désÏl"s
de a bellc-Iuèrc ; mais il fauL remarquer qu'au lU ins il n'ose
)1
8 *
�( 60 )
pas soutenir- que la dame Riberolle ait disposé en sa faveur
d'une podion quelconque des sommes qu'il avait pu recevoir.
par suil e de son mandat.
Les sieurs HiberolIe, munis des titres ct des documens qu'ils
s'étaient procur-és, voulurent soumettre le sieur Dufom' à l'épreuve d'un interrogatoire sur faits et articles; à cet effet,
ils colè,'ent différens faits qui furent déclarés pertincns et
admissibles, par jugemcnt du 24 janvier 1827 ; el le 7 février
suivant le sieur DufouL' fiü interrogé.
Sa première réponse est relnarquable : il n'a jamais géré
ni adrrdll;s/ré les biens Je sa belle-mère; seulement, lorsqu'clle
l'a prié ùe lui rendre QUELQUES SERVICES, il la fait.
Il ('st inutile d'attirer l'allcnLion sur le démenLi que tous
les faits de la cause donnent à celte première réponse du
sieur Dufour; il est plus convenable de lai ser à ce dernier
le soin de donncr lui-même Je~ cxplications.
Ainsi, le si ur Dufour va apprendre qu'il n'a point été instihu! le liquidateur de la succcssion Arnaud, ni le mandataire, ni le gérant d Ja darne Hiherolle; qu'il n'a point trailé
avec le sieur Guillemot de Lyon ; qu'il est étranger à la
cession faite par ce dernier à J~ dame ft ibcrolle ; qu 'il a
seulem n L aidé le frère eL la sœu r à se melLre cl 'accord sur le
prix, mai que bien certainement il n'en a point reçu Je montant, el que s'il a r çu quelque chose, il en a tenu compte
de suite :1 sa b lie-mère.
Si on inlcrroge cnsuiLcle sieur Dlifour .surles aulres fail de
sa gc Lion, il a bien aidé a termillcr' la vent de Charnay; il
a CDco,'e m'di à vendre k vi ns; mai
'il n a touché 1 prix,
il en a tCIIU compte d U1 le à sa he lie - rn \r , qu'il a ellcore
aidée ~\ emballer 1 m bilier ré ('l' é par la venl ,rl1obilicr
que, toutefois, la dame Hibcrolle a clle-même fail voilurer à
Thiers .
. Les expressions du sieur Dufour nc pouvaient être calculées
�( 6T î
avec plus de soin; il lui est impossible de tout désavoner ; il
faut bien, dès lors, qu'il déclare ({U 'il a quelque con naissance
des faits ; qu'il y a pris une p:lrt quelconque; m:llS il ne
veut avoir joué dans tout cela q~ 'un personnage secondall'e,
officieux et désintéressé; tous les fails ct leurs conséquences
doiven t, au reste, êLre imputés à sa belle-m \ re qui a agi en
première ligne, tout connu, 10ul pn~paré et Lout exéculé.. Que
Je sieur DufoUl~ essaye au moins de meUre ses n~pon s es Cil
harmonie avec les faiLs les plus conslans de celte cause ?, ,.
Si on interroge le sieur Dufour sur lc temps qui a été
nécessaire pour opérer la liquidation, on lui demande des
explications po~ilivcs sur le Lraites que la dame veuve B.iberolle avait ti,'ées sur son f,'ère de Lyon: ses réponses sont à
recueillit'. Il ne sait pas le temps qu'a dun! la liquidation;
il sail bien que la dame Hiberolle avait tiré. différcnLes lr'aitcs,
mais il ne se rappelle pas si elles éLaicnt en blanc, si ces lrailes
ain i que les endos onL été éC"jls de a main; il ignore
encore plus si ces traites ont élé p:1ssées à son ordre; mais cc
qu'il sait t.rès - bi ~n , c'cst qu'il a fait emploi des somm(>s;
qu'il a une qlliLLance, et, qu'au surplus, il a [ourai à sa beLLemère reçu de toul ce qu'elle pouv3it lui avoir donné cn cHets,
On se demande comment le sieur Du ()lI r, commerçant, ayant
reçu el mis en cil' ulalion des cHets pour des SOll1me aussi
considérables) a cru pouvoir se renfermcr dan d es H~pOTlSes
donL L' ~qllivoqllC st si frappante, et toulefois si fa cile à éclail'cir.
L sieur Duf(wr ignore combien de Lemps a duré la liquidation , cl il
L prouvé, par des actes ém:lnés de lui, qu'il
arée
l'a pn:r
cL faiLe lui-même; sa O'Te pond;tnce L l, cff ts
qu'il, a n 'mplis; le a tes dans lesquels il a figlll' " annon cnL,
jour par jo ur, sa présence el sa coopéraLion à lOut
qui a
éLé f;\il.
}~C sieur Du four ne se rappclle pas si 1 s cffct que lui a
negociés a h '1Ie-mère étaienl en LIane; .si c'est lui qui a éCl·jt
ce
�( 62 )
les traites et les endos; si même elles ont été passées à son
ordre, et ces traites sont là pour lui donner un démenti, ou
pour lui rappeler qu'il a obtenu de sa belle-mère trois séries:
d'effets; qu'il en a disposé cbmme de s.a chose propre, et que
pour effacer même les traces de la propriété de la daIne Ribe,..
roUe sur ces efJels, il n'a pas craint de faire dans les ordres.
des suppositions de lieux, et d'y insérer des causes menson~
gères. Mais le s.ieur Dufour apprend ici un fait important;:.
c'est qu'il a fourni à sa belle -wère U:Q; reçu de tout ce
qu'elle pouvait lui avoir confié en effets; or, ce reçu, où estil? le sieur Dufour l'aurait-il soustrait? n'en. e$t-il pas responsable dès qu'il avait à sa disposition tous les papiers de s~
belle-mère? Enfin, qu'il le rapporte, Si ce reçu est quittancé
pal' la dame Riberolle, le sieur Dufo,ur pourra peut-être dire
qu'il y a décharge en sa faveur de ces effets; mais s'il est intact,
il constilue ~ bien nécessairement, le s,i eur Dufour débiteur du
nlonLant de tous les effets qui y sont mentio{loés..
Mais commenL croire le sieur Dufour dans ses déclarations"
101'sque l'interrogatoire apprend quereculant devant ses propres
aveux, il ne crainl pas de tomber en contradiction avec lui-même.,
Le i ur :pqfour, interrogé d'office sur le fait im:p ortant de
savoir s'il a donné un etat délaiLte à sa belle-mère, répond que
n'ayant jamais :rien reçu pour elle, il ne lui a donné aucun
état. Ainsi le sieur .Dufour termine comme il avait commencé;
il dénie son mandat, sa geslion , son administration, la pel'''':
ceplion qu'il a faile des fond de sa bel1e~mère; peu lui importe
de s conLredire ct qu'on puisse lui reprocher d'avoir dit 1
d'abord, qu'il a fourni un reçu à sa bel1e-mère de tout ce
qu' He p uvaiL lui avoir onfié; d'avoir dit, plus lal,d, qu'jl
ne lui a jamais d nn ~ aucun 'Ial, par qu'il n'a jamais rien
reçu p tU' He.
s
nséquences ne l'inqui' lent pas; une
seul idée le préoccupe, celle de couvril' la vérité d'un voile
imp {nélrable.
�n semble que les
( 63 )
mensonges du sieur Dufour deviennent
encore plus évidens lorsqu'il répond aux questions qui lui sont
adressées sur la vente de Charnay. Il faut bien qu'il convienne
que le prix réel de celte vente était de 38,000 francs, mais il dit
qu'il Y avait 2,000 fr. d'épingles, qu'il croit avoir été reçus par
sa belle-mère. Le sieur Dufour a bien écrit la lettre adressée
au curé de Charnay, mais c'est sous la dictée de sa bellemère; il ignore, au surplus, la somme principale et les intérêts qui pouvaient être restés dus sur le prix de la vente; il
croit bien que conformément à la lettre de la dame Riberolle,
le curé de Charnay a fait consentir à Pierroux une vente authentique dont le prix est de 18,000 fr.; mais il ignore quelle
est la somme qui était resté du.e , et qui avait été réglée par
billeLs j il aHirme , au reste, que le curé a adressé ces eflets
directement à la dame Hiberolle, que celle-ci les a négociés, et
a employé l'argent qui en provenait à ses besoins journaliers.
Il f."lul plaindre Je sieur Dufour de la nécessité 0 il s'est
tcouvé de mentit' ainsi à sa propre conscience, et de se meUre
CR conLradicLion avec les fails les mieux établis ; la rédaction
de la leUre écrite au curé de Charnay ne peut être rouvrage
de la darne Riberolle; elle décèle, en effet, un homme consommé en arfaire, et depuis long- temps exercé aux calculs
les plus minulieux de la banque. Cette leUre indique parfaitement le capital dû par le sieur Pierroux; eUe le distingue
soigneusement de intérêts; elle indique le nombre et la date
des effets que l'acquéreur de Charnay doit souscrire, les
sommes qu chacun de ces effets doit représenter j ct on
comprend qu'il importe peu que le curé de Charnay les ait
adressés à la dame RiberoJ]e ou au sieur Dufour, pui 'que.
dans Lous les cas, il est certain que ces effets ont été tran !ërés
à Dufour par des ordres émanés de sa belle-mère; qu'il est
ID 'ltne prouvé que ces ordres énoncent une cause dont Ja
fausseté esl démonh-ée par toutes les cir onslances de fait qui
�( 64 )
, démenfent lc sieur Dl1folll', et qui ne permettent pas de douter
qu'il élit profité de tous les capitaux apparlenant à la dame
1 ibcrolle, Comment dire encore que celle somme aurait éLé
employée aux besoins journaliers de la dame Riberolle? quels
étaient donc ces besoins ~ A Charnay, elle ne faisait aucune
dépense; clic y vivail avec sa sœur sans payer pension , Au décès
de la dame Aenaud , le sieur Dufour a, suivanl racte du 30 juin
' 1823 , dû fou rnir à toutes les drpenscs qu'elJe avait pu faIre
et que sa nouvelle position exigeait. A Thiers, la dame H.iberolle habitait el ivait ayec le sieur Dufour; ellc lui payait
pension. Enfin, des acLes non inlerrompus, prouvent que le
sieur Dufour , depuis son ' mariage jusqu'au décès de sa
belle - mère, a eonslamment été son mandatai1 e ; qu'il a
reçu pour elle les capitaux les plus con idérables , que ce
lllandataire a employés à ses profils particuliers; que, d'un
aulr'c côté, lc sieur Dufour fournissait à toules les dépenses
de la dame Ribcrolle Que Je sieur Dufour veuille donc indiquer quels étaienL les antres besoins elles autres diipenses de
sa belle-mère, cL l'emploi (lue celle dernière aurait pu {aire
de capitaux aus i imporlans,
,
Cel interrogatoire doit ncore fixcr Patlention sou un autre
rapport: le sieur Dufour convient qu'il a été vendu du mobilier, t qu'il cn a 'Lé lran porté à Tbiers. Il reconnaît égaleIII nt qu'il a été cndu du "in; que les si urs C lainard, Murat
et Poilrasson , étaienL débiLeur de sa belle-mère; qu'il aurait
~té l'cstilué par la régi une somme de G88 Ir, Le sieur Dufour, ur fou
c. fail re onnus par lui, ne cherche qu'à
climinu r le pri ré 1 de objets vendu ,et à fajre supposor
que C' . t la dame Hiberolle qui aurait r çu les SOIn mes provenant d
s cnLes ou d> 1<1 r 'nll ée de difG{"cnles réan
C s av u , nt dc lu pllls gl'anù imporLanc ; i font la preuve
compl "Le des fails arli ulés par le' Sl ur nib '1"olle ; cl Commo
)1 a cl 'ja été établi que la mère n'avq.it pris aucune part à la
liquidaLi0l"\
�( 65 )
liquidalion de la succession Arnaud; que c'était le sieur Dufour qui ava·t tout vendu et tout reçu. Une audition de témoins
ne serait désormais utile que pour faire connaître la consistance du mobilier, la valeur des denrées vendues, et la
quotité des créances payées au sieur Dufour.
L'ordre des dates conduit à l'interrogatoir-e de la darne
Dufour; on ne le mentionne ici que pour faire remaI quel'
une question adressée d'office à c.etLe dame, et la réponse
qu'elle a cru qevoir y faire.
La questiQn est conçue en ces termes: « J.Ja darne veuve
"» Riberolle vous a-t-elle
donné en avantage sur vo~ deux
» frères, toutes les sommes que votre mari avait reçues ou
» qu'il pourrait recevoir pour elle? êtes-vous en état d'affir..
» Iller qu'un don de cette nature vous a été fait? ) La daIne
Dufour répond qu'elle ignore si sa mère a donné quelque
chose à son mari; que, dans tous les cas, c'eût bien été son
inLention; qu'elle pouvait disposer du quart? mais que pour
elle, sa mère ne IUT-' ajamais n'en donné, si ce n'est des petits
cadeaux.
Celle réponse est positive. La mè~e n'a jalnais rien donné à
sa fille, ce qui s'entend des sommes que le sieur Dufour
aurait pu recevoir pour sa belle-mère, car on a YU que par
le teslament ? la darne Riberolle avait fait une disposition en
préciput en faveur de sa fiIJe. Si la mère n'a rien donné à sa
fiUe des sommes reçues par le sieur Dufour, comment en au
rait - elle fait don â ce dernier au détriment de ses pro]?res
nfans , au préjudice de sa fille elle-mème, qui, cependant,.
avait reçu le seul avantage que la mère crut pouvoir faire, contJ~airement à la promesse d'égaliLé que tous ses enfans avaient
reçue d'elle. Un pareil don serait e~ lui - même incroyable;
mais il est encore repous ' par la circon tance qu'il aurait
éLé fait au mari à l'insçu de son épouse, ce qui ne saur~iL rai..,
~onnablcmcnl se s~ pposer; et comment -y croire, lorsque ce
9
�( 66 )
prétendu "a vantage i dit'ect aurait p rté préjudice, même aux
enfans du sieur Dufour, qui ont inlél'H à conserver dans la
succession de leu r mère, tOlit ce qui dOlt convenablement la
cDmposer? N'y auraiL-il pas de la témérité à adopter une supposition contraire aux lois? aux volontés bien clairement
Inanifeslées de la dame Oufour, ct aux intérêLs bien entendus ,"
de la famille enlière.
C'esL sur ces élémens qu'a été rendu, le 6 mars 1828, au
tribunal civil de Thiers, le jugemenL dont est appel.
Ce jugement ordonne,
r O , Qu'jl sera fait invenlaire du mobilier, ct qu'à défaut de
représentation d'icelui, ou en cas de représentation incom ..
pIèle, chacune des parties pourra en prouver la consistance
par titres ou par témoins;
2°. Que le sieur Dufour représentera les effets Pierroux, et
qu'à défaut de ce faire, les sieurs Riberolle prouveront la
souslraction Ou la disposition illégale qui aurait été faite de
ces billets;
3 '. Quc le sieur Durour réprésenlera "les litres conslitutifs
dcs créanc.es ducs par les sieurs Courby, Guillemot, Dessalp
et la demoiselle ConsLant ;
4(J. Déclare le sieur Hiberolle aîné débiteur de la succession
d'une somme ùe 3 ,000 fr. ;
5". D ~clare inadmissible la preuve des f.1ils respecLivement
arlicuh<s par les demandeurs cl les défendeurs;
6°. Enfin. sur. coït, ju qu'à jugemenL définilif, sur les conclusions des padi s, non réglé 's par 1 jugement.
Les moLifs de
ju tY 'm nL se divisent et s'appliquent à
chacun des p inls de
nl slalions qui s'étai ni élevées nh'c
le padies.
Les si ur IHberoll avaicnt dcrn:md ~ au sieur Dufour le
compte qu'il dcvail comme ntandalair'c cL gérant des ilffaire~
de sa belle-mère.
�( 67 )
Sur ce point, les premiers juges reconnaissent qu'il est
prouvé par les pièces produites, que le sieur Dufour a effectivement géré et administré la fortune de )a dame H.iberol1e ;
mais ils disent qu'il est prouvé par l'acte du 30 juin 1823, que
le sieue Dufour a rendu compte de son mandat et a reçu
quittance.
Tirant ensuite la conséquence de ces faiLs , le jugement
suppose que les sommes reçues par le sieur Dufour excédaient
celles qu'il a, employées; il voit, dans cette circonstance, un
avantage indirect qui aurait été fait au sieur Dufour par sa
belle-mère, et comme rien ne prouve que la dame Riberolle
e,ît excédé dans ce cas Ja quolilé disponible, les premiers
juges pensent que l'acte du 30 juin 1823 doit êlre maintenu
comme arrêté de com pte et, qu'ainsi, la demande des sieurs
H.iberolle est inadmissi b1e pour les perceptions qui auraient
été failes par le sieur Dufour, et qui seraient antérieures au
30 juin 1823.
Les premiers juges s'occupent ensuite de la vente de Charnay et de son pr-ix.
A cet ' gard, le jugement retient quatre faits importans.
Le pl' miel', que Dufour a été le principal négociateur de
cette vente, et que son prix réel esl de 38,000 fI'.
Le second') que ces 38,000 fI'. ont été payés par l'acquéreur,
sa oil' : 2,000 fI'. comptant, 18, 000 fr. en effets souscrits par
lui, ct 18,000 fI'. portés par la vente authentique, et qui sont
encore dus.
Le troisième, que les effets sou crits par l'acquéreur nc
se sont point trouvés dans la succession de la dame Rib roUe.
Ioie quatrième, qu'il n~est point désavoué par le sieur Duf; Ur que plusieurs des cffets Pierroux ont été passés à son
ordre par sa belle-mère, pour difVrenles causes.
Ces J~lits po és, le tribnnal pense qu'il j rnporte de savoir!
Si les endos Ulis sur ces cffets par la dame JUher He ,
1
9
*
�( 68 )
sont réguliers et propres à en transmettre la propriété, et si
les causes de transfers sont légitimes.
Et, dans le cas d'affirmative, comme rien n'établit que
Dufour soit créancier de sa belle-mère, il y aurait, de la part
, de cette dernière, don indirect de ces effets.
Au reste, le jugement tire la conséquence que Dufour doit
représenter les effets Pierroux, de la circonstance qu'il est
nanti de la succession de la dame H.iberolle; mais si Dufour ne
les représente pas, le jugement ajoute que les sieurs Riberolle
peuvent faire la recherche de ces effets, et prouver, ou qu'ils
ont été soustraits, ou que la dame Riberolle en a disposé
illégalement.
Le j'ugement s'occupe ensuite des créances Courby, Des&apt et de la demoiselle Constant, et peflse que le sieur
Dufour doit être tenu d'en représenLer les titres constitutifs.
Les conclusions des sieurs Riberolle contenaient une demande en soustraction contre Dufour, du mobilier de la mère.
A cet égard , les motifs du jugement reconnaissent: 1°. qu'après la vente du domaine de Charnay, le mobilier a été
transféré au domicile du sieur Dufour; 2°. que la darne Riberolle est venu habiter avec son gendre, et qu'il n'y a aucun
titre établissant la consistance du mobilier transféré dans la
maison de ce dernier; 3°. qu'au décès de la dame Riberolle,
il n'y a pas eu d'inventaire dr'essé , et que tout ce qui pouvait
composer sa succession, est resté enLr'e les mains et à la disposition du sieur Dufour lui - même.
D'où la conséquence que le sieur Dufour doit représenter
le mobilier, et qu'en cas d'infidélité, les sieurs Hiberol1e
, doivent faire preuve, tant par titres que par témoins, de
sa consi lance.
Un chef de demande des sie s Riberolle , porlait sur
l'exLraction que le sieur Dufour auraiL faite, d'argent ct argenterie, enfouis à \Charnay par la dame Arnaud.
1
�( 69 )
Le jugement écarte ce chef par deux motifs.
Le premier, qui est. fondé sur les dispositions du Code
èivil, porte que la demande des sieurs Riberolle excède 150 f.,
et qu'ils ne peuvent exciper d'aucune des causes prévues par
l'art. 1348 du Code civil, pour être admis à la preuve.
Le second motif considère que la demande des sieurs Ribel'olle est invraisemblable, parce que, d'une part, après la retraite des alliés, la darne Arnaud aurait repris la somme par
elle cachée, et que, de l'autre, les héritiers de cette dame
n'ont élevé aucune réclamation contre le sieur Dufour.
Enfin, les premiers juges examinent les faits articulés et
mis en preuve.
Ils pensent, en principes, qu'on ne doit admettre la preuve
que des faits non justifiés, ou pouvant produire des résultats
utiles.
Or, la gestion du sieur Dufour, le Pr1X réel de la vente
dc' Charnay, le séjour de la dame H.iberolle chez son gendre,
sont avoués ; ~l n'y aurait de contesté que l'affaihlissement de
la san té de la dame Riberolle ; mais ce fait ne saurait détruire
les actes.
Ainsi, suivant les premiers juges, la sousiraction du mobilier de la dame Riberolle , la soustraction des effets Pierroux,
ou la disposition illégale que la mère aurait pu en faire, sout
les seuls faits à établir.
Il est inutile de s'occuper des rapports que le sieur Riberolle aîné doit faire à la succession de sa mère, ni de ceux
que le sieur Dufour demandait à chacun de ses beaux-frères,
pour les sommcs qu'ils auraient reçues de leur mère, ne
pouvant y avoir de difficultés ni de contestations sur ce dernier point.
IJes sieurs Riberolle ont interjeté appel de ce jugement.
11 faut actuellement apprécier ses motifs et ses disposilions
�( 7° )
EXAMEN DU JUGEMENT.
Le pdncipal but que les sieurs Riberolle se proposaient, était
de faire connaHre avec exactitude les faits de ceLLe cause char... '
gée de détails nombreux eL cl irficiles à classer j ce hut est actuellement atLcint, et il est impossible de ne pas voir que le
sieur Dufour, mandataire de sa belle-mère, a constamment
géré et admi nislré la fortune de cette dernière, que par Pabus
le plus coupable de la confiance qui lui avait été accordée, il a
dénaturé toule la fortune de Ja dame Arnaud, l'a convertie en
effets, s'en est emparée, et a )ris toutes les précautions possibles pour que l'on ne pût découvrir les traces d'une spoliation
aussi complete; que le sieur Dufour, au décès de sa belle-mère,
n'a donné aucun renseignement aux sieurs Riberolle; qu'il a
composé la succession à son gré, caché tous les tilres, dissimulé tous les faits, et que dans l'interrogatoire qu'il a subi ,1.1 a
désavoué, et le mandat qu'il avait reç.u, et la gestion qu'il avait
fail e, et la main mise qu'il s'élait per'mis de faire sur les ca pitau appartenant à sa belle-mère j que le sieur Dufour a même
voulu jcLer d l'incertitude s ~r le' effeLs Pie rou , qui, bien
'videlnrnent , sont en son pouvoir, puisque la dame B.iberolle
lui en avait transmis la pt'opri {té par des endossemens.
C'est devant Lous ces fai que les premiers juges, s'arrêtant
à un princip , ont cru dev il' di iser la gesL ion du sieur Dufour en d II époqu ; rune, qui 'arrêterait au 30 juin 182.3,
t pOUl'laquelle 1 s sieurs Rib l'olle seraienL inadmissible à for
(Uer au une spèce de demande; l'auire, qui om prendrait sp 'daIemenL le effeLs d(~p n(1:1n du domaine de Charnay, !reLs
donlle jugemenL permet auX. sieurs Riberolle de faire la recher-
che.
Les premiers jug s nl rr'(~ ct se son t mépris, soit sur la
qualilé cl s p l'sonnes, soit sUr' la naLure des fails au quels ils
a. ai 'nt à fair l'ap licalion des principes,
�( 71
)
Deux espèces de personnes figuraient dans la cause, les sieurs
Jliberolle et la darne Dufour; tous en qualité d'héritiers de leur
mère; venait ensuite le sieur Dufour, qui étalt appelé ·dans
ri nstance corn,?e mandataire de la dame Hiberolle ~ et pour
rendre compte de son mandat.
Les objets en contestation différaient égalemenl enlre euX.
Ponr les héritiers Hiberolle, il n'était question que du p art age
de la succession de leur mère, et? à ce sujet, il ne s'él e\lail aucune difficulté entre eux; mais enlre les héritiers HiberolJe ct
le sieur Dufour, il s"agissait de la reddition de comple du mandat que ce dernier avait reçu de sa mère; c'est sur ce point
unique que porlait toute la djŒculLé du procès.
Ici, on se demande ce qu'est Je mandat ? 11 petit r ésulter d'un
acte spécial, ou même Se former par un quasi-contraL? lors~
que volontairement une personne gère l'afraire d'autrui, ct ,
ùans ce cas, le mandat existe, oit que le proprjétaire conn aissc
la geslion, soit qu'il l'ignore; mais de quelque sonrce que
d {rive le mandat, tout mandataire est tenu de rendre com p te
de sa gestion, et de falre raison au lnand ant de toul e qu 'il a
rcç.u; il doit même les intérêts de toutes les som mes qu 'il a
placée àson profil. Ilfautencoreajoutcl'que celui qui g'l' pOUl'
autrui, contracte l'engagement lacil de continuer Ja gestion
qu'il a commencée. (Voir les art. 13 72 , 1985 cl 1993 du Code
civil. )
Ccla posé, le sieur Dufour a-t-il été le qtandataire de]a daIne
Riberolle?
Pa d doute sur c He que tion: tau }e' fails de la C3us e attestenL l 'e islcnce du mandal; e mandal st rCCOJJnu p:lr le
jugemenllui-rnêlllc, qui reticut e fail important 'orumc yrai,
contI' la dénégation po ilive du sieur Dufour.
Quelle a élé la durée de ce mandat ? Hi n dc plus po ilif cnCOre.
Le sjeur Dufour, depuis son
n'w.·jag
,li
cu la g('sUon
t l 'aù-
�/
( 72 )
ministration de tous les biens de sa belle-mère; il a rrçu tous
]es capitaux qui pouvaient lui appartenir; d'un autre côté, il a
p ayé toutes les dettes, fourni à toutes les dépenses de sa mandante , et cette ad mi istration si générale et si détaillée, a duré
jusqu'au décès de la dame Riberolle,
Quelle est ]a conséquence raisonnable à tirer de ces faits?
Elle ne peut ètre autre que d'imposer au sieur Dufour l'obligat ion de rendre un compte général de ses recettes et de ses dépenses. Ce compte seul peut le libérer des suites dc son mandat,
puisque, suivant les principes, on ne saurait être mandataire qu'à
la charge de rendre compte. On conçoiL donc que si dans le
courant d'unc gestion aussi longue et aussi considérable que
celle qui a été confiée au sieur Dufour, on trouvait des actes
qui eussent pour objet de régler partiellement quelques-uns
des effets de cctte gestion, ccs actes ne pourraient avoir rien
de définitif ; ils ne seraient en effet autre chose que des documens propres à aider à la formation du compte général; mais à
cette dernière époque, toutes les erreurs qui se scraient glissées
dansles acles partiels ou provisoh'es , pourraient êLrerclevécs ou
r ectifiées, el de quelques termes employés dans ces actes on
ne pourrait en induire, de la parL du nlandan L, une renonciation au (roit dc réclamer un compLe , qui est Loujours pour le
mand atai e un devoir à l'acco"m plissernenl duquel il ne saurai t
se soustraire.
Il faut ex~miner ici l'acfe du 30 juin 1823. Qu'est cet acfe?
icn évid mment il ~'a poinL les caractères d'un compte rendu
p ar un rnandataire; la loi ne reconnaît dc règlemenl de comple
que sous la condition qu'il renfermera, dans des chapil cs différen cL parli ulicrs, les re elles quO on L ~Lé fai s par le mandataire. C tnmenl, cn cffel, sans qe double opéralion, seraiLil P"> sible que 1 mandant ml ' clail'é sur sa position? Comment
encor le mandant eL le mandalaire pourraienL-ils arriver à d~~
ft ulLa~s posiLif~, et trouver upe balance qui pût légiLime~cnt
,
libér~H'"
�( 73 )
libérer le mandataire, et faire certainement connaltre lequel
des deux est créancier ou débiteur.
Lors du 30 juin 1823, le sieur Dufour n'a point entendu
rendre un cornpte de son mandat. Le sieur Dufour avait un
tout autre objet, c'était celui de se rendre créancier de sa bellemère d'une somme de 10,239 fr. 36 cent., pour laquelle il
n'avait pas de titre, et qu'il ne pouvait réclamer qu'en vertu de
la reconnaissance que lui en ferait la dame Riberolle. Or , sur
sur ce point, on sait déjà que les sieurs Riberolle respectent
les déclarations faites par leur mère; et que toutes les rectifica-.
tions qu'ils demandent se réduisent à une somme de 500 fr. "prétendue payée par le sieur Dufour au sieur Pezard, payement dont la fausseté est positivement démontrée par des titres
positifs.
Les premiers juges ont cependant cru voir un arrêté de
compte dans l'acte du 30 juin 1823, etle jugement porte que la
dame Riberolle lui a elle-Inême donné ce caractère. On doit
~upposer que le tribunal a :üüt ressortir cette induction de
quelques articles qui suivent l'état de dépense que le sieur Dufour présentait à sa belle-mère. Cette induction est-elle vraie?
Avant de donner à un acte une qualification propre à produire des effets légaux, il faut d'abord examiner si cet acte renferme les caractères que la loi exige, Or, l'acte du 30 juin 1823
ne contient point de chapitre de recelte; le mandataire n'a
donc pu rendre compte de son mandat; tout ce qu'il a pu faire
a éLé de t'lire régler son chapitre de dépense; mais dans une
pareille précaution, pri e dans l'inLérêt du mandaLaire et qui
ne peut profiler qu'à lui, il esL impossible de voir un arrêté de
compte, acte qui suppose toujours une balance établie enLre ce
qui a élé reçu et dépensé.
Légalement on ne peut donc pas dire que racle du 30 juin
1823 esl un arrêLé de compte; mais pourrait-on lui donner cc
caracLère, par l'effeL de la volonté dc la damc l\iJ>crolle ~
lQ
1
�( 74 )
1
D'abord " que dit la mandante? Elle veut (article 2) que les
sommes payées par le sieur Dufour, le libèl"ent d'autant des
sommes qu'il avait reçues pour elle. Elle veut ensuite (article 4)
que la somme de 10,239 fr. 36 cent., total de l'état porté en cet
acte, réunie au 10,000 fr. payés par le sieur Dufour à Pezard,
libèrent le sieur Dufour des sommes qu'il a reçues pour elle,
pal"ce que ces sommes font 'un total égal à celui des sommes
payées' par le .mandataire , pour le compte de sa mandante, ou
, a'11
payees
e e-meme.
Si on s'arrête aux exp,:essions de cet acte, la volonté de la
'd anle H.iberolle est évidente; elle a soin de dire qu'elle ne veut
libérer le sieur Dufour que d 'autant, expression qui renferme
l'idée bien positive que la quittance ne vaudra, pour tout ce
que peut devoir le sieur Dufour, qu'autant qu'il serait établi
,que la recette est égale à la dépense.
Si on consulte ensuite quelles ont pu être les intentions de
la dame Riherolle, il faudra convenir qu'elle n'a voulu déclarer
que ce qu'elle a pu connaître et apprécier. Or, comment fa
dame Riberolle aurait-elle pu savoir que la receLte était égale à
la dépense? Quels titres, quels documens pouvaient-elle co:t1~
suIter pour s'éclairer sur cé point ? Tous les papiers n'étaienfils pas au pouvoir du sieur Dufour; et s'il pouvait être vrai que
quelques-uns fussep.t à la disposition de la da~ Riberolle, qu e
sont-ils devenus ? Ne devaient-ils pas se trou cr dans sa succcs~ion? Or, qui a disposé de ce 'Litres, qui a pu les soustraire à la connaissance de la dame Riberolle et de ses héritiers,
si. ce n'est le sieur Dufour, qui a été constamment en possession des papiers de sa belle-mère, avant ct après son décès?
On peut en ore se faire une autre question. Si la dame Rl~
berollc n) 'lait pas dé édée, si, oyant en s n pouvoir les ti~res
et documcns qui ont ~lé re uvr' · par ses enCans , elle formait
contre le sieur Dufour la dClnanùe ~n reddilion de compte d
son mandat, quel effet pourrait produire l'acte du 30juin 1823 ?
A
�( 75 )
Le sieur Dufour serait-il admissible à soutentr qrte la déclara.:::
tion insérée dans cet acte équivaut à une quittance définiLive ,
qui le dispense de rendrè compte de ses receLtes? Mais en prouvant au sieur Dufour que la déclaration e~t inexacte, puisqu'au
30 juin 1823, la recette se montait à plus de 50,000 fr·. en capital, tandis que la dépense était de 20,000 fr. environ, la dame
Riberolle lui dirait que si ces inexactitudes sont reffet de l'erreur, elle est, d'après les principes, conservée par les articles
I I og du Code civil, et 541 du Code de procédure, toujours
recevable à s'en faire relever; que s'il est démontré que cette
erreur est la suite et la conséquence nécessaire du dol pratiqué
par le sieur Dufour, qui a constamment caché à sa belle-mère
tous les titres propres à conslater l'état des recettes, cette déclaration peut encore moins produire effet, puisque le dol fait
exception à toutes les règles, et vicie tous les acles auxquels il
a présidé. Or, ici il est évident que le sieur Dufour a ahusé de
la confiance néceSbaire que sa mandataire devaü avoir en lui.
La dame Pâberolle ne pouvait en effet prendre, ni du sieur
Dufour, ni de toute autre personne, aucuns tit.res qui pussent
établir l'élat des receUes. Le contrat de mandat suppose de la
confiance, et celui qui croirait nécessaire de recourir à des pré~
cautions contre son mandalaire, préférerait ne pas donner do
mandat.
Une circonsLance parLiculière vient encore corroborer les
lUoycns des sieurs Riberolle. Depuis le 30 juin 1823, jusqu'au
décès de sa belle - nlère , le sieur Dufour a conservé l'adminisLration ùe biens de lle dernière. Le sieur Dufour a reçu
les capitaux la dame Hiberolle? il se les est Lous nppropriés ,
toujours par les mêmes moyens. Des biUets à ordre avec des
cndosscmens en blanc propres à en Lransférer la propriété;
main-mise constante et journalière sur la fortune de la d;:tme
nÜ)croll ; posse sion exclusive de tous les titres; tclIe st
l'adminisLralio du sieur Du~ ur, l'e écu lion qu'il a donnée à.
;(9
~
�,
( 76 )
son mandat; il faut donc reconnaître, contraire'm ent au jugegement, que l'acte du 30 juin 1823 n'est point un arrêté de
compte; qu'il ne peut ernprunter ces caractères, ni des termes
de la loi, ni de la volonté de la dame Riberolle. Ainsi, il est
démontré que cet acte n'a pu faire cesser l'obligation imposée
à. tout mandataire, de rendre compte de ses recettes, et que
le sieur Dufour est encore dans la nécessité d'y satisfaire; mais
les premiers juges motivent spécialement la disposition de
leur jugement sur la circonstance que l'acte du 30 juin 18;23,
contenant un avantage indir~ct en faveur du sieur Dufour, et
ayant été confirmé par le testament de la darne Riberolle, doit
être exécuté, n'étant point surtout établi que cet avantage
indirect excède la quotité disponible.
On connaît, à cet égard, les difficultés qui se sont élevées
dans la jurisprudence. Les jurisconsulLes et les arrêts ont été
divisés, pendant plusieurs années, sur la question de savoir
si on pouvait faire une libéralité par autre ~cte ct sous autre
forme que celle exigée pour les donations et les dispositions
testamentaires. Ceux qui lenaient le plus scrupuleusement à
l'observation des règles? s'appuyaient sur la maxime du droit
rùmain : fecit quod non potuit, quod potuit non fedt. Les partisans du système contraire, répondaient à leur tour par cette
autre maxime: qui potest dare, potest confiteri; mais après plusieurs dissertations, et après plusieurs arrêts rendus en faveur
(le l'un ou de l'autre système, la jurisprudence est enfin devenue uniforme, et, aujourd'hui, il est sans difficulLés que
celui qui peul donner directement, peut également disposer
par des luoyens indirects.
Toutefois, ce principe ne peut être appliqué san discernement, el l'on ne doiL pas l ~gèrement supposer qu'unc personne
qui a d s nfans ait v ulu leur Cire préjudi e, n disposant
indire lemenl de sa r. rlun n fa ur d'un 'lrangcr, Mais si .
"
comme dans respèce ~ il se trouvait ,q u'une personne eût con-.
�( 77 )
tracté une obligation envers une autre; que hien loin d'y.
satisfaire eUe se fût emparée, par des IDoyens frauduleux, de
la meilleure partie de sa fortune; qu'ensuite, abusant de la
crédulité, de la faiblesse ou de l'aveuglement de sa victime,
elle fût parvenue à obtenir d'elle une espèce d'acquiescement
à des actes aussi repréhensibles. Si elle voulait retenir à litre
de don ce qu'elle n'aurait pris que par des moyens frauduleux
et coupables; si ce prétendu don avait été fait sans que la disposante eût pu connaître la mauvaise foi de celui auquel elle
donnait une preuve d'affection ou de reconnaissance; si, plus
tard, les héritiers d'un pareil donateur prouvaient à ce donataire qu'il n'a été qu'un mandataire infidèle; qu'il a abusé de
la bonne foi, de la confiance de son mandant; qu'il s'est emparé de toule sa fortune; qu 'il lui a dissimulé la véri table valeur
des recettes qu'il faisait pour lui; qu'il l 'a mis dans l'impossibilité , par la retenue de ses titres , de reconnaître l'erreur
dont il l'a rendue victime. On se le demande: un mandataire
pourrait-il, dans de telles circonstances, Opposer aux héritiers
de son m.andant une disposition testamentaire qui ne serait,
bien évidemment, que l'effet de la surprise, et le complément
de la fraude et de la déception pratiquées depuis long-temps.
La raison repousse un système aussi dangereux, et la loi ne
saurait le consacrer. On l'a déjà dit, le dol ct la fraude font
exception à toutes les règles; cependant, si on adoptai! les
motifs du jugement que l'on examine, il faudrait reconnaître
Corom principe, que sous la forme d'un don, un mandataire
infidèle peut se retenir? au préjudice des héritiers légitimes
de son mandant? les fruits de son dol ct de sa fraude. Ainsi,
la sousLraction. les actions les plus nuisibles , lors mêlne
qu'elles seraient inconnues par le fait de leur auteur; qu'il
aurait été impossible à celui qui en a souffert de les connaître
Ou de les apprécier, pourraient devenir l'objet d'un acte de
bjenfai anc L ... Cela est impossible. Le système est déLruit par
.ses conséquences.
1
1
�'Ces considéralions , déjà toutes puissantes, prennent une
nouvelle force de la circonstance que la clame Riberolle était
mère de famille; et comment soutenir qu'elle ail voulu 4isposer du quart de ses bjens en faveur d'un étranger, et en
priver ses propres enfans; et pourquoi la dame Riberolle au,
rait-elle comrnis cette injuslice ? Pour affranchir un manda-taire de l'obligation de rendre compte. Rien n'est moins
présumable, et il faudrait, avant toute chose, qu'elle eût pu
comprendre loutes les suites d'une pareille disposition; gu'elle
eût pu en calculer les résultats et les conséquences. Or, dans
la posi1ion où le sieur Dufour avait placé sa belle-mère, celle-ci
ne pouvait rien connaître. Etrangère à toutes ses affaires, el1e
ne pouvait apprécier, ni l'état, ni la valeur réelle de sa fortune. Qu'aurait - elle donc donné au sieur Dufour qui avait
tout en son pouvoir? Dispenser ce dernier de rendre compte ,.
TI'élait-ce pas touL lui donner? Et comment composer la succession de la dame RiberolIe, si le sieur Dufour n'est pas tenu
de faire recette des capi aux qu'il a reçus pour elle? De
deux choses l'une, ou le sicur Dufour a reçu, pal' le tcstament de la darne Riberolle, un don direct du quart de ses
bicns, ou il n'a ricn reçu, parce qu'il est impos ible de soutenir que la mère ait voulu, par quelquc moyen que ce soit,
le dispenser de rendrc compLe dc ses recettes.
Mais un examen attenLif du tesLament, convainc qu'il nc
saurait conLenir aucun a antagc en faveur du sieur Dufour;
n ·'assur.e même qu ' la darne l1.iberolle n'a voulu lui rien
donner, l que lui-même n'a enL ndu ricn recevoir.
S'il sL quclque hose de vrai, 'est que Lout don suppose,
'd 'une part, 'nLention de donner, et, de l'autre, inlenlion
d'a pl l'. Or, la damc J>jberolle avait-cU inl nlion de donner au sieur Dufour !> LIeUr s cl 9 juin Ldu 4 aoul 1822,
ann n nt, de la par'l d . la lU '.rc, une volon lé l uLe r, nlraire;
dans a IcLLr du 9 juin, elle promet t'égalité à tous ses enfan ;
1
�( 79 )
'd ans celle du 4 a011t, elle promet aux sieurs Riberolle' de fazi'e
ct de faire faire au sieur Dufour tout ce qui est nécessaire
pour les édiG.er sur l'ex.écution loyale et franche du mandat
qu'elle a donné à son gendre; COInment dès lors croire que,
plus tard, la dame Riberolle, se mettant en opposition avec
ses promesses, eût voulu donner au sieur Dufour les moyens
de se soustraire aux engagemens qui étaient les suites de son
lnandat?
Aussi, les sieur et dame Dufour étaient-ils loin de penser
que ce'tèstament contînt un don en leur faveur . La dame Dufour
avoue, dans son interrogatoire, que sa mère ne lui a jamais
rien donné des sommes que le sieur Dufour . avait reçues
comme mandataire. Le sieur Dufour croyait lui - même si peu
-avoir reçu quelque chose, qu'il ne réclame rien en vertu du
testaln~nt; qu'il n'ose pas même remployer comme moyen
contre les prétenLions des sieurs :Riberolle; tout se réduit pour,
lui à nier, l'exisLence du mandat, ou à soutenir que s 'il a reçu
quelques sommes, il les a employées dans l'inlérèl. de sa belle,
,
rnere.
Qu'est-donc une dispositioil teslamentaire dans laquelle les
parties intéressées ne sauraient découvrir le don qui leur a été
fail? La jusLice peuL-elle supposer un avantage indirect en faveur
d'une personne qui n'en réclarne pas? Enfin, ces moyens sonL-ils
de la nature de ceux qu'e le juge a le droit de suppléer? lVIais le
testament repousse lui-mêmp. toule idée d'avantage indirect . .
D'abord, il est évident que la dame Riberolle n'a jamais
voulu donner à qui que ce soit le quad de ses hi ns : elle
vériLé res orl de la di posilion du lesLament, par laquelle la
dame Riberolle? voulant faire un avanlage à sa fille, ne lui
lègue cependant que des cho es délerminé s , déclara t, a l
:reste, immédiatement, qu~ lIe veut que le resLant d 'a suc,
ces ion s it partagé par égalité enlre tous se oh {riliers.
Si oIlréfèrc à celle dis} o.:;ilioll qui (.;ouli '.ull'e "l)l'cssi?1l de la
�( 80 )
volonté de la dame Riherolle, les deux articles du testament dont
les premiers juges ont voulu déduire un avantage indirect en
faveur du sieur Dufour, on ne pourra y voir qu'une clause pénale dont les effets doivent être restreints dans les termes les
plus étroits, ct à ce que la mère a voulu raisonnablement
ordonner.
Or? que dit la dame Riberolle? Elle veut que les règlemens
qu'elle a faits soient exécutés; que Jesquittances qu'elle a données
soient respectées. A cet égard, il a déjà été établi que cette disposition, qui s'applique égalemenL au sieur Dufour et au sieur
Riberolle aîné, doit être entendue d'une manière différente,
suivant la nature des actes dont le testament ordonne l'exécu-.
tion.
nelativement au sieur Dufour, quels sont les règlemens faits
cntre lui et la mère, qui doivent être exécutés? Il est évident
que ceUc disposition ne saurait s'appliquer qu'aux actes qui
ont par eux-mêmes les caractères de règlement, et qui peuvent
valoir comme tels.
Or, que contient l'acte du 30 juin 1823? Il est vrai qu'il est
rr.gZemenl ntr la mère ct le gendre, pour les sommes que
le sieur Dufour prétend avoir employées dans l'inlérêt de sa
])elle-mère ; aussi, sous ce rapport, l'acte est-il respecté, ct les
sieurs Riberolle consentent à son exécution.
J\1ais cet acte du 30 juin 1823 est-il règlement, quant aux
receLles qu'a pu faire le sieur Dufour? C'est ce qu'on ne saurait
J'aisonnabJ menl oUlcnir, puisque cet acte st rnuet sur ce
point; or, c'est uniquemenL cc chapitre de r celle que les sieurs
ltiberollc demandent au ieul' Dufour; ils ne s' ~cartent donc
point de la disposilion testam n lair , t dès-lors ils ne peuvent craindre les cO 'ls de la ,lause pénale.
OuanL à la quillan insér { dans l'acl du
juin 1823, les
ieurs Riberolle ne doivent larespe t r que sous 1 S ondiLions
que la nlèrc a cI1c-même}mposées. Sur ce point, la dame Riberolle
�( 81 )
herolle explique,' en termes positifs 1 qu'elle n'entend lihérer
le sieur Dufour que d'AUTANT; qu'il faut que les receLtes et les
dépenses présentent un total égal pour que le sieur Dufour soit
libéré. Or, comme 'eUe ne dit point que le sieur Dufour lui a
Fendu compte des recettes, qu'elle les a vérifiées, et que, d'un
autre côté, elle ne dispense pas le sieur Dufour de rendre ce
compte, il devient positif que la quittance ne peut avoir d'effet
qu'autant que le sieur Dufour établirait que les dépenses sont
égales à la receLte . Jusque-là, l'obligalion de rendre compte de
ces recettes, existe toujours dans toute sa force contre le sieur
Dufour.
Il est donc établi que, soit que l'on considère l'acte du
30 juin 1823, pris isolément, soit qu'on le confère avec les
dispositions du testament de la dame Riberolle, soit enfin que
l'on applique à cette cause, les principes rigoureux du droit,.
ou mêrue ceux de l'équité, il est impossible 'q ue le sieur Dufour
puisse se soustraire à la demande en reddition de comple , qui
a été dirigée contre lui.
On pourrait borner ici la discussion, puisque le sieur Du four
étant reconnu mandataire, ct les eHets que doit produire cette
qualité étant éLablis, il devient certain que le sieur Dufour doit
.rendre compte de tou es les sommes qu'il a perçues pour sa
belle-mère, avec intérêt, de tout le mobilier, enfin, de toutes
les choses dont il s'esl emparé en cette qualité.
Ce n'est donc que par simples observations, et pour ne rien
négliger, que l'on examinera quelques autres dispositions du
jugement.
D'ahord , les premiers juges reconnaissent que le sieur Dufour doit représenter les effets faisant parlie du pri cl la venle
du domaine de Charnay. Ils sont conduits à ce résultat par les
circonsLances que le sieur Dufour a été le principal négociateur
de la vente; que la daIne Riberolle a consLamment habité avec
SOn gendre depuis sa retaite de Charnay; que cepcnùant ces,
J
1:1;
#
�( 82 )
effets ne se sont point trouvés dans sa succession; qu'il est au
contraire reconnu que plusieurs d'entre eux ont été passés à
l'ordl'e du sieur Dufour; et c'est après de pareils motifs que
l'on trouve que si le sieur Dufour ne représente pas ces effets)
les sieurs Riberolle peuvent en faire la recherche.
L'erreur est ici trop évidente pour que l'on fasse de gral1Js
efforts pour la détruire.
C'est le sieur Dufour qui a les effets en son pouvoir; il ne
peut les détenir que comme mandataire de sa belle-mère) ou
comme héritier des sieurs Riberolle.
Sï ces effets sont au pouvoir de Dufour, en qualité de mandataire, il est évident qu'il est tenu de les représenter, et qu'à
défaut de ce faire, il est responsable de leur valeur.
S'il les retient à tous autres titres, même comme héritier, il
ne les a encore que parce qu'il les aurait soustraits dans la succession de la darrle Riberolle, ou parce que cette dernière lu~
en aurait passé l'ordre en blanc; et comme dans ce dernier cas
il est certain que le sieur Dufour les a négociés, il est encore
dans l'obligation de les représenter, et de faire juger la validité
de ses ordres, à peine encore de demeurer responsable de la
valeur de ces effets.
On peut ajouter que la disposition de ce jugement est inex 'culable: comment les sieurs Riberolle trouveraient-ils ces effets?
où sont - ils? entre qu Iles mains ont - ils passé? Le sieur
Pierroux s'est-il lib 'ré? S'il a pay', voudra-L-il confier ces
effels aux sieurs Riberolle? EL dans toutes ces incertitudes, le
sieur Dufour aurait reçu les capitaux qu~ représentent ces
effets, et il les conserverait par l'impos ibilité où seraient ses
beaux-frères de rclrouver les traces d'une négociation consommée? la esL imp ssible. Le ieur Du~ ur cl il. repré enler
les effels, dèsl'insLant même, ou en rapporter le monLant à la
succession.
La disposition du jugement ,q ui slatue sur la soustraction
�( 83 )
'd u mobilier, reptochée au sieur Dufour, fait aussi naître
quelques réflexions.
Il ne faut pas perdre de vue que le mobilier de Charnay
avait été transféré à Thiers par le sieur Dufour lui - même;
,q ue c'est dans sa maison que la dame Riberolle avait constalnment habité, qu'au décès de cette dame, il n'y a point cu
d'inventaire dressé; que toute la fortune mobilière de la mère
,est restée entre les mains du sieur Dufour, et comme ce dernier n'est point le cohéritier des sieurs Riberolle , ceux- ci
ont bien le droit de l'accuser de soustraction. C'est donc à ce
1ilre qu'ils doivent être admis à prouver contre lui l 'enlèvement ou la retenue illégale de ce mobilier. Cette preuve doit
spécialement porter sur la consistance du mobilier de Charnay
dont le sieur Dufour s'est emparé, sur le vin qu'il a vendu ou
qu'il a fait transporter à Thiers; enfin , sur les différentes
créances quil a reçues ou encaissées pOUl' le compte de sa
belle-ruère.
Resle à examiner la disposition du jugement rclali c à Pc traction qu'aurait faite le sieur Dufour de l'argent et de l'argenterie que la dame Arnaud aurait enfouis à Charnay, lors ùe
rinvasion des alliés,
Sur ce point, les premiers juges ont, invoqué des principes
qui ne sauraient être applicables à l'espèce qu'ils avaient à
juger. Il ne s'agit point, en effet, d'un créancier qui, sans titres,
réclamerait contre son débiteur le payement d'une somme
excédant 150 fr. ; c'est un mandant qui demande à son m an dataire compte d'une somme que ce dernier a reçue ou a prise en
celte qualilé. Si on l'aime mieux , la ' discussion existe en Lrc
cohéritiers qui veulent prouver la v'rilable consistan e de la
uccession à partager. Or, tout se réduit, dès lors, à savoir i
cet arg nt et cette argenterie ont fait partie de la suc ession de
]a dame Rib l'olle ? Les témoins peuvent seuls apprendre ou
éclaircir ce fait.
�( 84 )
L'es premiers juges se sont encore arrêtés devant une invraisemblance. Ils ont pensé que si l'enfouissement avait cu lieu,
les choses qui en étaient l' obj et auraient été reprises par la daIne
'A rnaud après la retraite des alliés; mais le vrai peut ne pas
être toujours vraisemblable; d'ailleurs, fe fait, tout singulier
qu'il puisse paraître, n'est point sans exemple. On sait, au
contraire, que les enfouissemens d'argent où autres choses pré-cieuses, ont spacialementlieu aux époques des invasions de l'enn emi ou d es guerres civiles. Ces choses peuvent n'être p'oint
toujours retirées, même en temps de paix; il peut arriverque des
événemens les fassent oublier pour toujours. C'est là l'origine des
trésors, dont l'invention a donné lieu à plusieurs lois anc1ennes
conservées par le Code civil. La dame Arnaud, en ne retirant
point l'argent et l'argenterie qu'elle avait cachés, du lieu ou
elle les ayait enfouis, n'a donc fait qu ;une chose ordinaire dans
la position où elle était placée, et si, plus tard, la dame Ri ...
berolle s'en est emparée, par elle ou par son mandataire, ces
objets font partie de sa "succession , et ses héritiers ont conséquemment ]e droit de les réclamer, et, en cas de dénégation ,
de prouver leur existence.
Les développemens de celte cause ont pu paraAtre longs; les
sieurs Riberolle avaient à dévoiler une suite de manœuvres
employées pour leur ravir la meilleure partie de leur patrimoine; il est évident que le sieur Dufour s'est enrichi au
préjudice de ses beaux-frères; qu'il a abusé du rédit qu 'il
avail su prendre sur l'esprit de sa belle-mère, et de la confiance que celle dernière lui avait accordée. Le tab1 au, joint
à ce Mémoire, servira à rendre ces vérités plus frappantes.
On y verra quelle slla différence qui existe enLre l 'élaL réel de
]a fortune ]a darne Biber ;le , ct c lui que le sieur Dufour a
osé pré cnler à es beaux-frères. La lua .. sc réell esL ffeclivent de 14 2 ,8J8 francs. 5'1 cenL. , ct eelle avouée nr]e sieur
'pufour, ne serait que de 64,64 3 fI'. 7 5 cent. D'où provient cc
�( 85 )
aéficif, si ce n'est de l'aDus que le sieur D'urour a {ait 'de Son
mandat, de sa funeste avidité qui l'a porté à s'approprier, par
toutes sortes de moyens, des capitaux qui ne lui appartenaient
pas; que la dame Riberolle ne lui avait pas destinés; qu'ellc
n'a jamais voulu qu'il conservât; et si, à tous ces moyens, l'on
ajoute que ce procès prend un caractère d'intérêt public;
qu'il est nécessaire qu'un exemple sévère rassure les familles;
qu'il banisse les inquiétudes que pourraient faire naître entre
frères les abus que quelques-uns d'entre eux, sc permettent ,
lorsqu'ils ont surpris la confianée de parens qui ne peuven t
s ''Occuper par eux-mêmes de leurs affaires; les sieurs Riberollc
doivent espérer que la Cour examinera avec une attention scrupuleuse, les différentes preuves qui sont produites contre le
sieur Dufour, et , qu'enfin, un arrêt le contraindra à une satisfaction que ses beaux-frères ont vainement sollicitée de son
honneur et de sa délicatesse.
JOSEPU .. -JUST
PIERRE
RIBEROLLE .
RIBEHOLLE.
Me. IMBERT,.
GlfJuué.
Ma. J.-Cn. BAYLE, ancien
XUInAUD
1
avoca~,
-
llVlPl\U1.EUJ.\. DE LA COUR ltOYALE .ET L1lll\AlllE A. l.uO~
�
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A name given to the resource
Factums fonds privés
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Riberolle, Joseph-Just. 1828?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Imbert
J.- Ch. Bayle
Subject
The topic of the resource
successions
abus de faiblesse
testaments
inventaires
dilapidation d'héritage
médiation
ventes
Description
An account of the resource
Exposé pour sieur Joseph-Just Riberolle, propriétaire, demeurant à Landevie, et maire de la commune d'Arconsat, arrondissemant de Thiers, et sieur Pierre Riberolle, propriétaire,demeurant au lieu de Lunel, même commune d'Arconsat, appelans; contre dame Claudine Riberolle et sieur Joseph Dufour, son époux, négociant, habitans de la ville de Thiers, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1828
1805-1828
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
85 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV24
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_DVV25
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/28/54018/BCU_Factums_DVV24.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Arconsat (63008)
Charnay (69047)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
Dilapidation d'héritage
inventaires
médiation
Successions
testaments
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53419/BCU_Factums_G2123.pdf
d8d860d9953126b0d8ec9b4d39c9d9e0
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Text
tribunal civil
de
CLERM ONT.
MÉMOIRE
P O U R
D
ame
F
M
a r i e - F r a n ç o ise
abrede
A U B I E R , épouse de M . Benoît
S t . - M e n d e , autorisée p ar j u s t i c e , e t p o u r ledit
Sieu r D E S t . - M E N D E , propriétaires , habitant à S t.M e n d e , co m m u n e de S t . - Y v o i n e , défendeurs ;
E t encore p o u r D a m e MARIE-CLAUDINE D E C H A M P F L O U R ,
ve u v e de M . Jérôm e-E m m an uel A ubier- l a - M onteilhe ,
tant en son nom q u ’en qualité de tutrice de leurs d e u x
enfans m in e u r s , aussi prop riéta ire, d em euran t à C le r
m o n t-F e rra n d , intervenante et défenderesse ;
C O N T R E
M . E m m a n u e l A U B I E R - L A - M O N T E I L H E , ancien magis
trat } demeurant en la même ville ; demandeur.
M. A u b i e r ? frappé de mort civile par l’inscription de son
nom
sur la liste des é m ig r é s , a été réintégré dans ses droits par
un brevet d ’amnistie du 20 fructidor an 10. A ssu rém en t, depuis
n e u f ans, il a eu le tems de méditer le projet de traduire devant
1.re chambre
1 8 1 1.
�les tribunaux la dame de St.-M ende , sa sœ ur , et M. de S t.Mende , son beau-frère , pour les forcer de déclarer que , dans
l ’acquisition que la dame de St.-M ende a faite de la nation
des
biens séquestrés par suite de son ém igration, elle n ’a été que son
prête-nom ou sa mandataire. Ce projet s’est enfin réalisé , puis
qu ’il l é s a fait assigner à ces fins par exploit du 5 avril 18 11.
D ès ce moment , il a été facile de prévoir les desseins de ¡VI.
A u b i e r , et de calculer les conséquences de ses demandes. Aujour
d ’hui tout est connu } puisqu’il « révélé sa pensee d une manière
fort é te n d u e , dans un meinoire im p r im e , auquel celui-ci ya servir
de réponse.
Attaquer la dame sa soeur , en obtenir la déclaration qu’il e x ig e ,
n ’avait pour objet que de s’ouvrir une route pour arriver ensuite
à la dame veuve de la M o n te ilh e , sa belle fille , alin de lui faire
connaître que s i , lors de son mariage , elle a cru pouvoir compter
que le domaine de Saulzet serait une propriété assurée à ses enfans,
elle s’était grandement trompée , et que c’ était vainement que la
dame de S t.-M en d e , et lui même M. A u b i e r , en avaient souscrit
la subrogation à Jérôme A u b i e r , père desdits enfans.
L a dame de S t.-M e n d e , qui avait déjà apperçu le but que se
proposait M. son frère , ne voulant point être exposée au reproche
d ’avoir trompé la famille de Champflour , s’est refusée constamment
ù l’exécution dé pareils desseins, et a préféré combattre des p ré
tentions qu’elle ne peut aucunement approuver.
Mais
comment une s œ u r , qui a exposé mille fois sa v i e , dans
les tems les plus orageux de la révolution , pour le salut de son
fiè re ,
est-elle livrée aux ennuis d ’un procès
im agin é,
sous tous
les rapports , pour navrer son cœ ur de douleur ?
Com m ent encore un b e a u - f r è r e , qui a eu la générosité de refuser
tous les avantages quu les lois nouvelles lui procuraient , est-il in
quiété et soumis à une action judiciaire?
M . A u bier , dans la première ligne de son mémoire , répond d ’a
vance à
ces
convertit
questions, en assurant le public qu’une cruelle fa ta lité
en
procès ce gui eût du cimenter l ’ union dans sa Jam ille.
C e r te s, il faut croire que cette fatalité n ’est pas seulement cruelle,
siais q u e lle est encore bien aveugle , puisqu’elle amène des résultats
�(3 )
totalement opposés aux sentiîrjens que devaient faire naître natu
rellement des actions louables , de» services sigualés et de noble»
sacrifices.
Quoi qu’il en s o it, les choses en sont arrivées au point de fixer
l ’attention de la justice sur l’objet de la contestation, sur les faits qui
la constituent et sur les moyens de droit qui doivent la décicibr, Mais
ici remarquons que la dame de St.-Mende , son m a r i , et la dama
veuve de la Monteilhe ont des moyens différens à faire v a lo ir , et
que s^ils s’occupaient de chaque fait mis en avant par M. A u bier , la
tribunal perdrait nécessairement de vue le véritable point de la cause.
.
Il a plu à M. Aubier , sous le prétexte d’exposer les faits de sa
cause , de donner au public l’histoire de sa vie , et de n oyer l’affaire
qui doit nous occuper dans des détails si m u ltip liés, qu’à peine il est
possible de la reconnaître et de la saisir. A la vérité , cette histoire
est écrite avec la délicatesse de style qu’on acquiert plus particulière
m ent dans les cours des rois ; mais la cla r té , la précision , voilà ce qui
est nécessaire dans les cours de justice. Il y a même lieu de s’étonner
qu ’il ait négligé ces deux qualités essentielles, lui qui , a u tre fo is,
dans l’exercice des fonctions du ministere public , se faisait distin
guer par la réunion des trois qualités les plus precieuses , celles
d’être érudit , fleuri et concis.
Il faut pourtant convenir que M . Aubier a su trouver des res
sources extraordinaires, pour parvenir a masquer les défectuosités
de la plus déplorable de toutes les causes.
Il fallait commencer par se rendre intéressant.
Il a fait aussitôt connaître comment les circonstances les plus glo
rieuses de sa vie avaient en même teins causé ses infortunes ( page 6
de son mémoire ).
Il fallait aussi jeter un vernis odieux sur la conduite actuelle
de sa soeur , devenue son adversaire , et une petite teinte de ridicule
sur un beau-frère que sa probité notoire met à l’nbri de tout autre
genre d ’attaque ; il n’était pas même indifférent de répandre quel
ques agrémens sur un sujet aride et fastidieux de sa nature.
C ’est dans cette vue que M. Aubier a fait e n tier dans son
histoire un petit épisode relatif à un certain casuiste, qui est tout
�entiéi* de sa c r é a tio n , et auquel il fri! tenir un langage ridicule èt
mem.e absurde. Il le présente néanmoins comme le directeur des
consciences de M. et Madame de
S t.-M en de. Mais , d’après les
conseils de ce casuiçîe , M. de St.-Mende , qui veul qu'on rende, ne
sa it comment s'y prendre , et M adam e de St.-M ende ne veut
rendre q u ’ après sa m ort, c'est-à-dire } ja m a is ( pages 2 4 , 2 5 ,
20
27 de son m ém oire).
Il convenait d ’ajouter à l’intérêt de sa personné celui qu’inspirent
des enfans infortunés , et des créanciers sans espoir.
A u s s i , M . Aubier
gémit sur le sort de ses enfans qui , suivant
l u i , seront privés de toute légitime à sa m o r t , et sur le sort de ses
créanciers qu’il 11e pourra jamais p a y e r , si la dame sa sœ u r ne lui
rend rien ( page 56 ).
Enfin , il fallait neutraliser l’intérêt opposé que devait naturelle
m ent exciter la position d ’une veuve et de deux orphelines , obli
gées de se défendre contre un grand-père qui veut leur ôter la
moitié de leur fo rtu n e , assurée par des actes sacrés , tous signés
p a r lui-m êm e.
M. A u bier n ’est point embarrassé de cette difficulté; non-seule
m ent il parvient à neutraliser l ’intérêt de leur cause, mais il fait p lu s ,
il
s’en empare en
se présentant
comme leur vrai défenseur.
Suivant l u i , la fortune de ses petites filles court les plus grands
dangers. La dame de la Monteilhe } leur m è re , est une imprudente ;
elle ne voit pas qu’ un jour les enfans de S t.-M en d e peuvent leur
reprendre le domaine de Saulzet; que les actes qui ont transmis cette
propriété à Jérôme A u b i e r , leur père , sont nuls , et que leur grandp ere ne stipule ici que leurs intérêts , en cherchant à substituer à des
titres invalides , des actes irréfragables ; que s’il no peut leur assurer
que la moitié du domaine de S a u lz e t, c’est que la loi ne permet pas à
un père d ’en faire davantage } et qu ’il vaut mieux , pour ses petites
fille s , avoir une moitié c e rta in e , que d ’être exposées un jour à ne
rien avoir du tout (pages 27 et suivantes).
C ’est ainsi que le génie de l ’homm e peut applanir
tontes les
difficultés , et même les faire tourner à son avantage. Il est fâcheux
pour M. A u bier que les prestiges de l’imagination ne soient pas de
longue durée } (ct qu’on puisse lui prouver que son système do
�défense n ’est dû qu’aux efforts d’ un
esprit brillant , capable de
produire des effets séduisans ; mais d’un esprit qui , à force de
t r a v a il , se subtilise et s’évapore pour faire bientôt place à la vérité
à qui seule appartient le droit de fuiie des impressions duiables et
d ’obtenir des succès non-équivoques.
O r la vérité est que la dame de St.-M ende n ’a point été le p rê le nom ni la mandataire de M. son f r è r e , lors de son acquisition de
la nation.
l i a vérité est q u e, depuis dix a n s , la dame de S t.-M en d e ne
tient rien par le pur effet de sa générosité des biens de M. son
frère ; que le Saulzet est possédé depuis cette époque par les enfans
de la daine veuve de la M o n te ilh e , et que le grand verger de M o n t ferrand est possédé par M . Aubier lui-même.
L a vérité est que les deux fils de M. A u b ie r auront une légitime
a sa m o r t, parce qu’il ne peut vendre le grand verger et le domaine
de C rêve-cœ u r , l’ un à cause des hypothèques et garanties, l ’autre
parce qu’il appartient à ses fils.
L a vérité est que , si M. Aubier ne p aye pas ses créanciers
c ’est
q u ’il aura niai calculé ses ressources et excédé ses moyens.
L a vérité est que les petites-filles de M. A u b ie r sont très-soli
dement propriétaires de Rentier domaine de Saulzet j qu ’il voudrait
leur en ôter la moitié pour pouvoir vendre ensuite à son a is e, afin
d ’acquitter ses prétendues dettes en Prusse
et ailleurs.
L a vérité , enfin , est que la dame de St.-M ende n’a disposé des
biens qu’elle avait achetés de la nation , que par des actes souscrits
conjointement avec M .son frère; que le domaine de Saulzet tout entier
fut assuré à défunt Jérôme A u b i e r , pour lui obtenir la demoiselle
de Champflour en mariage ; que si M. A u b ie r en a regret } la dame
de S t.-M en d e , au contraire, n ’en a aucun r e g r e t , et qu ’elle
c jo î-
rait m a n q u e ra tout ce qu’elle se doit à e lle -m ê m e , que de porter
atteinte à des actes faits en connaissance de cause , et sur la foi
desquels les deux familles A u b ie r et C h a m p f l o u r l a dame de la
Monteilhe et ses enfans ont dû com pter pour toujours.
E n voilà suffisamment pour donner une juste idée de la cause;
maintenant nous allons rappeler les fuit» principuux } a p iès quoi
nous passerons à la discussion des points de droit,
�> 0 *
V -'
( G)
F A
I T
S .
D u mariage d e M . Antoine Aubier-la-M onteilho avec clame A nneJeanne de C h am pflo ur, sont nés quatre enfans , sa v o ir, M. A u b ie r ,
actuellement d e m a n d e u r, M. Pierre A u b i e r ,
M. Jean-J 3aptiste
A u b ie r , qui a été chanoine de la cathédrale de C len n on t , et la
^ !
dame de St.-M en d e.
L e 4 décembre 1 7 G8 , M. Aubier s’étant m a r ié , a été institué
héritier universel de son père.
Quelque teins après, la dame Aubier est décédée, ainsi que Pierre
Au bier , son fils.
i
L e 10 février 1777 , M. de S t.-M en d e ayant épousé mademoiselle
A u b ier , le pcrc de celle-ci lui constitua une dot de 5 o,ooo livres ,
j
1
au moyen de quoi elle renonça à toutes successions directes et co lla -
'
tcrales , et à tous droits échus et à échoir.
M . Antoine A u bier , père c o m m u n , est décédé le 25 brumaire
an 2 ; son fils aîné était alors en fuite pour échapper à des persé
cutions.
M . le chanoine Aubier a péri révolutionnairement à L y o n .
Dans cet état , quelle fut la conduite de M. de St.-Mende ?
j
M. Aubier dit lui-même ( page 5 do son m é m o ir e ) , que « M. de
» S t.-M en de n’hésita pas à d é c la r e r , dès l’instant de la m ort de
» M. A ntoine A u b ie r ,
q u ’il s’en tenait cà la constitution dotale
)> faite à sa femme , et qu’il y aurait des millions à g a g n e r , il
y
)) ne voudrait pas profiter du malheur de son beau-lrère )>.
j
Il était encore du 12,000 livres à M. de S t.-M en de sur la dot de
6on épouse.
L e 18 germinal an 2 , M. Aubier a été inscrit par la municipalité
de C l e r m o n t sur la liste des émigrés. Cet!« inscription a été bientôt
suivie du séquestre des birns délaissés par son père et par son frère ;
et lorsqu’au mois de messidor an 4 , un étranger allait les soumis
sionner , la dame de St.-Mende en fuL avertie , prit les devants et
les soumissionna elle-même
en sorte que les administrateurs du
�département du P u y - d e - D ô m e lui en ont passé vente le 2 5 ther
midor suivant.
Au m om ent de cette acquisition , la dame de St.-Mende ne fut ni
le p rête-n om ni la mandataire de M. son frere. 11 est vrai qu’elle
n ’entendait pas
plus
que son m a r i , profiter de la dépouille de son
fr è r e ; mais il est vrai aussi q u e , si ses intentions lurent toutes en
faveur de ce frère et de ses enfans , rien ne les commandait, et
q u ’elles prenaient leur source dans son extrême affection pour eux ,
ce qui est bien différent que si elle eût été l’instrument nécessaire
des volontés de M -so n frère. Au surplus, la conduite postérieure
de la dame de St.- M ende a bien prouvé la sincérité de ses intentions;
car quel usage a-t-elle fait des biens qu’elle avait achetés ?
Elle en a vendu une partie pour payer à la nation le prix de la
to ta lité , pour acquitter des dettes de M. son p è r e , pour rem plir
son mari des 12,000 livres qui lui restaient dues sur sa dot. Q u e l
usage a -t-e lle encore fait des revenus du surplus ? Elle les a fait
passer à M. son frère et à ses fils. E lle a donc fait tout ce q u ’une
tendre sœur peut faire , ce que peu de parens ont osé enlreprendre
dans des tems si terribles ; et quand le moment est arrivé , elle a
mis le comble à ses procédés généreux par la transmission des fonds.
A u mois de mars 1801 , M. A u bier ayant obtenu de rentrer en
F ran ce , sous la surveillance de M. le p r é f e t , revint à Clerm ont.
« Il se rappelle ( page 16 de son mémoire ) , la joie qu’il éprouva
« de se retrouver dans sa patrie , au sein de sa famille ». A h !
la dame de St.-M ende , sa soeur , se rappelle aussi ce jo u r de
f é lic it é , où elle put serrer dans ses bras un frère cliéri , p ou r
lequel elle avait risqué tant de fois sa vie. Cette allégresse fut
commune à M. de St.-M ende et a ses enfans. A peine M. A u b ier
eut-il goûté quelques jours de r e p o s , que sa sœur lui fit connaître
jusqu’à quel point elle avait porté la tendresse pour lui ; combien
il avait été l ’objet de ses pensées dans son acquisition et dans ses
opérations ultérieures, et combien elle désirait, par un compte e x a c t }
lui prouver que n ’ayant agi que dans l'intérêt de ce frère et de ses
f i l s , elle voulait bien ne garder pour elle quo les peines et les
soins de son acquisition , et leu r en laisser tout le profit.
\
�(8)
E lle ne présumait pas alors que , pour lui faire perdre le mérile
de ses actions son frère profiterait un jour des témoignages d’ une
affection sans bornes , pour la regarder à la lettre comme son prête-
nom , sa m andataire, et lui dicter des lois , et qu’il ne craindrait pas
de la traduire eu justice pour lui faire im prim er ces titres avec
toute la force et les effets que la loi leur donne.
C e r ta in e m e n t, M. A u b ier était alors aussi bien éloigné d’avoir de
telles pensées, et rien ne peut le mieux prouver que l’acte du 8 mai
1801 ( 18 floréal an 9 ) , passé entre la dame de S t .- M e n d e , son
frère et Jerôme A u b ie r , son fils , par les conseils de M M . Boirot
et D a r t is , en présence de M M . Dorcières et de Chardon. On est
étonné que M. Aubier ( page 16 de son m ém oiie ) , ne rappelle cet
acte que pour en extraire deux lignes : « L a dame de St.-M ende
)) y reconnaît , d i t - i l , avoir acheté mes biens pour me les co n se r)) ver. Cet acte finit par une promesse de faire
la transmission
J) définitive de tout , dès que je serai rayé. »
C e n ’était pas cela seulement qu’il fallait y re m a rq u e r, mais
bien si on avait traité alors avec elle comme avec un prête- nom , un
mandataire ; si , au moins , il y
avait quelques expressions qui
pussent en donner l ’idée.
L a lecture de cet acte suffit seule pour détruire toutes les
prétentions de M . A u bier touchant les qualités qu’il veut aujour
d ’hui donner à la dame sa sœur.
D écha rg e et convention entre M adam e de S t.-M e n d e , E m m a
n u el A u b ier , son fr è r e , et Jérôme E m m anuel A u b ie r , son
second fils.
M adam e de S t . - M e n d e aya n t , e n t r e a u t r e s p r e u v e s de tendresse qu’elle a
données à sa fam ille, fait la pénible en treprise d 'acheter de la rép u b liq u e le bien
de S a u lz e t , le grand v e rg e r et autres propriétés provenues de la succession
d’ A n toin e A u b ie r , sou p è r e , m ort en réclusion , et de Jean-B aptistc A u b i e r ,
sou frère , clianoiu c de la cathédrale de C lc r m o n t , condam né par lo trib u n al
ré v o lu tio n n a ire de L y o n , pour conserver lesdils biens à son frère E m m an u el
A u b i e r , soussign é, ou a u x enfans do son frère , et M adam e de S t.-M en d e
a yau t c cjo iiid ’ Iiui réitéré
scî
offres
de
faire l ’ucLu de transm ission desdits b ien s,
�E m m n nu cl A u b ie r l ’cn rem ercie avec la plus v iv e reconnaissance , tan t en son
muni propre qu’au nom de ses enfans , (le q u i il a déjà rem is à sa sœ ur acte
d adhésion à tout arran gem en t q u i p o u rrait être con clu en tre lad ite dam e de
S t.-M e n d c et E m m an u el A u b ie r.
I l la rem ercie p a rticu lièrem e n t des soins m aternels q u e lle a pris pour p rou
v e r que ses enfans n’étaien t point dans le cas de l ’ém igration , d en a v o ir
obten u des certificats au th en tiq u es, et d ’ a v o ir préparé les voies a sa l’ad iation
personnelle de la liste des é m ig ré s, dem ande sur laqu elle est in terven u e u n e
perm ission p ro v iso ire de re n tre r , sous la su rveillan ce du P réfet.
L ’acte au then tiq u e de transmission d éfin itive desdits biens à E m m a n u el
A u b ie r , n ’étant point possible solidem ent , ju squ ’à ce que c elu i-ci ait obten u
sa radiation d éfin itive ; d ’ailleurs E m m a nu el .Aubier et sa sœur se proposant
de fix e r les principales propriétés sur la tête de Jérôm e-E m m anuel A u b ier ,
second des fils d’E m m a n u e l, si ou tro u v a it pour lu i un m ariage avantageux:
agrce de son père et de sa ta n te , enfin , les conditions de ce m ariage e t le 3
résultats de quelques affaires non term inées d evan t in flu e r su r la n atu re e t la
q u alité des reserves q u i d evron t être faites ta n t p o u r A n to in e et Jean-B aptiste^ n t o i n e , p rem ier et second fils d’E m m an u el A u b ie r , que p o u r la subsistance
nécessaire à c e lu i-c i , sur-tout s’il perdait sa place , les partiesso n t convenues
d e difTerer l ’acte d éfin itif de transm ission.
M adam e de S t.-M en d c aya n t cependant désiré qu’ on ne différât pas de la.
délivrer des peines infinies que lu i a données depuis q u atre ans le soin desdites
prop riétés et de toutes les affaires de ces d e u x successions , i l a été con ven u
q u ’elle en dem eurerait dès-à-présent déchargée.
M adam e de St.-M endc aya n t e x ig é de son frère et de son n e v e u , q u ’ils ex a
m inassent le com pte de sa gestion , ils Vont f a i t uniquem ent parce q u ’ elle
l ’exigeait.
Us la rem ercien t de l ’avance de fonds et des em p ru n ts qu’elle a v a it eu la
com plaisance de faire pour cette acquisition , et d u sage em ploi q u ’elle a fa it
des revenus et des cap itau x des objets qu’elle a reven d u s , à éteindre tous
lesdits em p ru n ts, à solder ladite a c q u is itio n ,e t à liq u id e r les affaires des deux
successions très-em brou illées.
E m m a n u el A u b i e r , ta n t en son nom
qu’au nom d’A n to in e e t de Jean-
B ip tis te A n to in e , ses fils, et Jérôm e , soussigné eu son prop re nom , p rom etten t
de ratifier toutes v e n tes.e t re v e n te s, échanges , traités , et autres engagem eiis,
de ga ran tir et indem niser M adam e de S t.-M e n d c de toutes reclirrches quelcon
ques, soit q u elles fussent exercées con tre elle , comme acquércuse desdits biens ,
soit q u e lle fû t seu lem ent actionnée com m e héritière t n partie de aon père et
de son fr è r e .
E m m an uel A u b ie r a rem ercié plus p articu lièrem en t M adam e de S t.-M e n d a
d a vo ir fuit hon neu r à la m ém oire de leu r p è re
et a ïe u l, ainsi que de le u ï
�( ro )
frère et oncle ,en dédom m ageant en n u m éraire quelques personnes dont la créancese tro u v ait ren v o y ée sur le grand liv r e par la confiscation.
Ils reconnaissent que M adam e de S t.-M e n d e leur a f a i t raison des revenus
desdits biens , de m anière que par le résu ltat de tous comptes et de toutes com
pensations , M .“ e de S t -M onde est encore créan cière de d j u x m ille fr .sur sa lé g i
tim e paternelle ou m aternelle,qu ’ils s’obligen t de lu i payer d èsq u ’slle le v o u d ra ;
attendu qu’il est dû sur S au lzet une somme de treize m ille cinq cents francs ,
p ro v en a n t de n e u f m ille fran cs prêtés en 1 7 9 1 à A n toin e A u b ie r , père f par
sim ple b illet portant promesse d’in té r ê ts , pou r solder le p r ix de S au lzet , et de
tou s les intérêts de ce prêt qui sont dûs depuis lors
ju sq u 'à ce jo u r > le déten
t e u r de S au lzet fera p a y er à M adam e D eliolles , v e u v e du gén éral G r o b e u ,
subrogée à celte créance , la ren te v ia g è re de m ille francs , m oyen n an t laq u elle
i l a été composé de cette créance par un arran gem en t con ven u en tre elles et
E m m an u el A u b ie r , q u i porte aussi sur quelques autres ob jets. Jusqu’à l ’arran .
gem eu t d éfin itif qui sera f a i t , soit après la rad iation d’E m m an u el A u b ie r»
père , soit p lu tô t , s’il se tro u v a it plu tôt un m ariage a v a n ta g eu x pou r Jérôm cE m m an u el A u b ie r , c e lu i-c i est étab li ad m in istrateu r desdits biens , et rep ré
sentant de tou te la fam ille pour toutes les affaires des d eu x successions ; m aiSj
ju sq n ’à la rad iation d’E m m an uel A u b i e r ,
son p è r e , il ne p o u rra re c e v o ir
les rem bourseincns des p rin c ip a u x , faire aucune ven te ou échange , passer de
tran saction d éfin itive , sans l ’au torisation de sa tante ; il reco n n aîtq u e c e lle -c i
lu i a remis les titres et papiers desdits biens , et de ces deux successions qu’ elle
a p u retirer des dépôts des autorités constituées.
Jérôm e-E m m anuel A u b i e r , p rélèv era su r les reven u s desdits biens douae
cents francs par an , pour sa dépense personnelle et ses. soins ; l ’em ploi du
su rplu s des reven u s , après charges et entretien payés , lu i sera réglé et in d i
qué chaque année par sa tante , ju squ ’à ce que son père ait ob ten u sa rad iation.
F a it
trip le en tre nous ,
M a r c il l a t
par les Conseils de M M . B o i r o t , D
, Jurisconsultes , Tj U i l t .i e r ^ D o r c i e r e s ,
de-Cuardon
- D
ar tisd e
-
uranquet,
C lerin on t , le 18 floréal an 9 ( v. s . , 8 m ai 1801 ).
A U B IE R , Jérô m e A U B I E R , M a r i e AU B IE R - S r . - M E N D E ,
Em m anuel
L u i l l i e r - D o rcik re s , C u a rd o k - D u r a n q u e t, B o ir o t , D a iitis - M a r r c illa t^
M ich e l C hardon ,
Em m anuel
S t.-M e n d e .
En m a rg e -
Je reconnais que ma soeur m 'a f a i t raison de tou t ce qu elle a reçu pou r m oi,
’depuis le 8 m ai 180t , ju s q u ’ à ce jo u r , sur q u o i elle se retient les deux m ille
fr a n c s à elU dits, suivant l ’ acte ci-contre ; en conséquence elle demeure déchargé*
de toute recette , et j e demeure quitte desdits deux mille fr a n c s , le 7 vendémiaire
a n 1 1 . E m m a n u el A U B I E R ,
Depuis cet acte
,
l 'A B R E - S t . - M E N I ) E .
que s'est—il passé pour son exécution touchant
la transmission des biens acquis
par la damo do St.-M en de.
Jérôme Aubier ayant recherché en mariage la dame de C h a m p -
�f lo u r , alors veuve (le M. fie Bullion , M. Aubier , son p è r e ,
ras
sembla vingt-cinq parens le 10 prairial an 9 , et il fut arrêté que
de son consentement Madame de S t.-M en de subrogeait M. Jéiômo
A u bier à la pleine propriété du domaine de Saulzet , sous diverses
c h a rg e s, notamment de payer à INT. son père une somme annuelle
de 700 * , et qu’il laisserait à ses frères le tiers à lui revenant
dans le domaine de C r ê v e -c œ u r , dont Madame Aubier a la jouis
sance. Moyennant les conditions enoncees dans cet arrete , il fut
dit que , dans tous les cas quelconques , Jérôme Aubier dem eurerait
dispensé de rapporter le domaine de Saulzet a aucun p artage >
et qu’il était autorisé à se le constituer dans son contrat de mariage.
E n e f fe t , le lendemain 11 p ra iria l, le contrat de mariage ayant
été signé entre. Jérôme A u bier et la dame de Cliampflour , veuve
de JJtillion , il se constitua le domaine de S a u lze t, dont lui et ses
enfans n ’ont pas discontinué de jouir depuis cette époque.
L e 3 fructidor suivant , la dame de S t.-M en d e mit M . Aubier
son frère en possession de tout ce qui lui restait de son acquisition ,
et celui-ci lui donna une nouvelle décharge complète, avec la garantie
la plus étendue. Si depuis la dame de Saint-Mende a donné au sieur
G orce u n e procuration pour toucher les revenus du grand v e r g e r ,
avec ordre de les faire passer à M. son f r è r e , elle n ’a donné
ce
pouvoir que pour l’obliger , et non qu’il lui fût nécessaire.
L e casuiste qui , suivant M. Aubier , conseille à sa sœur de ne
rendre qu'après sa m ort , ignore apparem ment toutes ces conven
tions ; car , sans cela , il 11e se creuserait pas le cerveau pour cal
culer l ’époque et la manière de rendre des biens qui . depuis plus
de dix ans , ne sont plus au pouvoir de la dame de S t.-M en d e .
C e casuiste ne sait pas non plus , sans doute , que par un der
nier acte du 8 fructidor an 9 , passé devant M . Coste , notaire à
Beaurnont , la dame de St.-Mende , en présence et du consente
ment exprès de M . A u b ie r , non frère , qui a signé avec les p arties ,
a fait une subrogation bien authentique à Jérôme Aubier du do
maine de S a u lz e t , à la charge , i.° de maintenir les ventes et échan
ges que la dumo de S t.-M en d e a consentis de quelques petites par
celles d’héritages dudit bien; a.° de la garantie de toutes re ch erch e s,.
�5.° de la renonciation de Jérôme Aubier à son tiers dons le domaine
de C rêve-C œ u r , et à toute succession de l’estoc paternel $ 4 .° et
m oyennant une rente viagère de 700
au profit «le j\I. son père.
Si le casuiste eût su tout cela , il se serait dispensé de donner des
conseils sur des choses faites et non à f a ir e , ou plutôt comme M .
et Madame de'St.-M ende n ’ont pas dû lui laisser rien i g n o r e r , il est
clair que c ’est iin personnage de pure invention.
E t comment en d o u t e r , quand on voit M. A u b ie r ( page 58 de
6on m é m o ir e ) , convenir que « celui qui a le talent de conduire sa
» sœur d ’une manière si opposée à son caractère naturellement
)) noble et délicat, lui est tout-à-fait inconnu » ?
1
Si donc tout a été rendu par la dame de S t .- M e n d e , il y a plus de
d ix ans, comment comprendre queJYJ. son frère lui suscite un p ro
cès pour faire ce qu’elle a fait ?
C e qui a porté M . Aubier à en venir aux voies judiciaires , c’est
q u ’il 11e trouve rien de bon , rien de solide dans tous les actes dont
»
nous venons de rendre compte ; et cependant il les a médités avec
des jurisconsultes d’un grand mérite ; il les a présentés à la sanction de
vingt cinq païens j tous les ont non seulement app rouvés, mais signés,
et depuis dix ans ces actes ont reçu leur pleine et entière exécu
tion. T outes ces circonstances n ’ont pu tranquilliser M . A u b i e r , ¡1
a v o u lu ’absolument détruire ces actes , sans égard aux droits des
tiers , et il suppose que c’est sa sœur qui veut détruire ce qu’elle
a fait pour lui ( page 57 du m ém oire).
Puisqu’il voulait des actes n o u v e a u x , rédigés dans son intérêt et
dans le but qu’il avait en v u e , la dame de St.-Mende a trouvé que
ne pouvant y adhérer , il valait mieux lui laisser prendre les voies
judiciaires.
L e 5 avril 1 8 1 1 , M. A u bier fit signifier ù M . et Madame de S t .Mendo le procès-verbul de non-conciliation dressé par M. le juge
d e
p a i x
de M ontferrand le a mars p ré céd e n t, et les traduisit en ce
tribunal pour lui voir adjuger les conclusions suivantes, auxquelles
on doit faire une grande attention , parce que ce sont les conclu
sions qui fixent l’objet de la contestation.
�( i3 )
• V o ir d ire et o rd o n n er q u e , clans le jo u r de la signification tin ju g e m en t
'
!
1
à in te rv e n ir , les sieu r e t clame de St.-M cn de seront tenus de lu i laisser et
abandonner le grand v e rg e r situ e à M ontferran d ,
contenant en viron c in q
cents perches quarrées , et fau te de ce fa ire , que le d it ju gem en t tien d ra
lie u d ’acte de délaissem ent de leu r part ; qn’en conséquence le req u éran t
T estera e t dem eurera p rop riétaire
I
incom m utable , pour en disposer com m e
il a v is e r a , sous les conditions déjà convenues et acceptées entre les parties.;
s a v o ir ,
i,® que le d it v e rg e r dem eurera grev é en vers
M . et M .“ ®de S t.-
M endc de la garan tie de toutes recherches généralem en t quelconques , p o u r
quelques causes que ce soit ; 2.® qu’ il dem eurera charge de la rente v ia g è re
de 3 oo fr . par an , créée au profit de M .lle de I î a r t , m oyennant 3 ooo fr . ,
i
em prun tés d ’elle p o u r les p rêter à M .mc A u b ier , q u i doit les ren d re à l ’épo-
I
que fixée par son ob ligation ; 3 .° qu’ il dem eurera cliargé des in térêts , et
ga ran t d u cap ital de i 3 , 5 oo fr. , m entionné en l ’acte de m ai 1801 , ju squ ’ à
ce q u ’il a it été pris d’autres arrangem ens en tre le req u éran t et ses enfans
et petits eufans p o u r l ’ex tin ctio n de lad ite dette ;
V o i r donner acte au req u éra n t de ce qu’ il se soum et à em p lo yer le surplus
des reven u s d u d it v e r g e r , si plus y
a v a i t , en paiem ent des in térêts
et
d u ca p ita l des autres em prunts par lu i faits p o u r ses enfans j
V o i r ord on n er que le requ éran t dem eurera subrogé à tous droits q u el
conques et tous reven u s échus , courants ou à éch oir , a u x offres qu’il fa it
de ratifier toutes les garanties p a r lu i prom ises a u x sieu r et dame de S t.M en d e ;
V o ir ordonner p areillem en t que tous papiers de fam ille seront rem is audit
re q u é ra n t, tant par lesdits assignés que par tous dépositaires , é la t som m aire
d ’ic e u x préalablem en t dressé , au pied duquel i l donnera décharge ;
E t en ou tre pou r procéd er sur autres conclnsious que le req u éran t se xésorve de prendre par la suite , en tou t éla t de cause et à fin de dépens , sans
p réju d ice au req u éran t de tous ses au 1res d ro its , actions et prétentions géné
r alem e n t
quelconques , et pou r p a rv e n ir au paiem ent des condam nations à
in te r v e n ir contre lad ite daine de St.-M eu d e , se v o ir le d it sieu r de S t.M e n d e , son m ari ,
condam ner à in d iq u er des biens d’icelle à cet e ffe t,
ju stifie r de le u r con trat de m ariage , sinon v o ir d ire et ordonner qu’aprè*
liu ita m e ex p iré e de la M gilificalion
sont et lu i
fra is.
du ju gem en t , les condam nations lu i
d em eu reron t personnelles ,
Ces conclusions sont précédées
tant en
de
p rin cip a l , in té r ê ts , quô
vingt-trois motifs ,
dont
d ix -h u it uu moins sont inutiles ou sans liaison directe avec elles.
On remarquera que I\l, A u b ie r avait oublié de conclure à ce que
�( i4 )
M. de St.-Mendc autorise sa f e m m e , ou qu’elle Ferait autorisée par
la ju s t ic e , comme l’exigent les articles 2 i 5 et 218 du code N a
poléon. Néanmoins M. de St.-M en de , qui n ’avait sans doute pas
fait attention à cette omission , et qui ne voyait pas pourquoi on
lui intentait un procès , à lui qui ne s était melé de rien , déclara
q u ’il ne voulait pas autoriser sa lemine ; ce qui a donne lieu à un
jugement d ’autorisation , rendu le 27 avril dernier.
<
M. A u bier , qui voulait absolument tenir en cause M. de S t .Mende , imagina de présenter une requête tendant à ce qu’il lui
fût permis de l’assigner personnellement , en qualité de mari et
maître des actions dotales de sa femme \
P o u r assister en la cause pendante entre lu i M . A u b ie r et sa soeur , à cause
d u m andat par elle r e m p li, et autres conclusions , pour v o ir d iie qu’en exécu
tion du con trat de m ariage de M . de St.-M ende , lu i M . A u b ie r sera m aintenu
dans la q u alité de seul h é r itie r con tractu el bénéficiaire de son père , et appelé
à r e c u e illir tou t ce qui est proven u de sa succession , ainsi que de celle de son
fr c r c le clianoine j tou t ce q u i a etc conservé et rach eté
à quelque titre et
de quelque m anière que ce s o i t , et attendu que m oyennant la dot de 3 o,ooo fr.
fa ite à la dam e de S t.-M ende , elle a renoncé à toutes successions , et que celle’
d o t a été réellem ent payée à M . de S t.-M en d e , p o u r le com pie de M. A u b i e r ,
i l sera tenu d’en passer q u ittan ce en sa fa v e u r , dans le jo u r de la signification
d u ju gem en t à in t e r v e n ir , sinon que le ju gem en t v a u d ra q u itta n c e ; qu’en
conséquence , M . A u b ie r sera subrogé à tous droits légitim aires , de mémo
q u ’à toute h ypoth èq u e sur tou t ce q u i est p roven u , a été conservé ou racheté
p o u r son com pte ; v o ir au surplus , adjuger ti SI. A u b ie r les conclusions par
lu i prises c o u tr e la dame de S t -M e n d e',personnellem ent com m e sa m an d ataire,
pour la conservution et rach at des biens desdites successions , avec dépens , sous
la rc s e iv e que M . A u b ie r se fa it, pour tous les cas quelconques ,d e ses créances ,
e t de dem ander à q u i il appartien dra d’eu ôtro rcsponsablo le com pte do
tous cap itau x et intérêts.
Cette requeto du 8 juin a été notifiée à M. de St.*Mende le i 3
juillet avec assignation, et lo 28 a o û t , M. Aubier a obtenu
par
défaut 1111 jugement qui joint cette instance a la précédente dirigée
contre sa soeur, pour etre statué sur le tout par un seul et même
jugement.
Depuis et dans le courant d ’octobre , la damo veuve
de la
�( i5 )
M o n te illie , instruite des demandes de M. Aubier , et ne pouvant se
dissimuler qu’elles tendaient à préparer à son beau-père et à ses
enfans des moyens de Kevenir contre la subrogation du domaine de
Saulzet, a senti la nécessité d’intervenir dans la cause pour surveiller
les intérêts de ses deux filles mineures , et combattre les prétention»
de leur grand-père.
Comme t u t r i c e , elle devait se faire autoriser par le conseil de
famille , aux termes de l’article 464 du code Napoléon. Elle l ’a fa it,
et son intervention a été signifiée.
A ce s u je t , nous remarquerons que M. A u bier ( page 3 g de son
mémoire ) , annonce que sa belle-fille veut repousser ses demandes ,
en lui disant : V o u s êtes mort civilem ent pour m o i,
vous êtes
retranché de la fa m ille ; tandis qu’au contraire elle a obtenu l’au
torisation du conseil de famille pour défendre les droits et les titres
de ses enfans, sur-tout dans le cas où leur grand-père viendrait à
alléguer sa mort civile pour détruire l’effet de ses signatures appo
sées à ces titres.
L e procès-verbal du conseil de fam ille, la requête d’interven
tion , signifiés à M. A u b i e r , ne lui permettaient pas de prêter à sa
belle-fille des sentimens tous contraires à ceux qu’elle a e x p r im é s ,
et une défense indécente.
Mais continuons.
Com m e il était essentiel de connaître les actes sur lesquels M.
A u bier s’appuyait pour soutenir que la dame de St.-M ende n’avait
été que son prête-nom ou sa mandataire dans son acquisition de
]a nation , nous l’avons requis de nous donner une copie exacte
de ces actes, et de les déposer pour en prendre communication.
A p rè s nous avoir annoncé qu’il en avait une m ultitude, il a fini par
nous
communiquer sept lettres qui
nous dispensent
d’en yoir
davantage.
Dans l ’u n e , Madame de St.*Mende lui écrit d’un ton familier t
qu’elle n’est que son homme de confiance ; dans une a u t r e , elle
mande que le département lui a remis les litres de la famille j dans
une autre , elle dit qu’elle a présenté le mémoire et la procuratiou
aux administrateurs 3 et que l’ un d ’eux l’a persiflée. E n un
mot,
�iii
(
'
16
)
ces lettres sontloin de faire regarder la dame de St.-M ende comme
un p rê le -n o m ou la mandataire de ¡NI. son frère. Elles n ’ont mémo
pas de date , et leur contenu seul peut faire préjuger l’époque où
elles ont été écrites.
Au r e s te , que peuvent signifier des lettres quand les parties ont
souscrit des actes postérieurs bien plus clairs
bien plus positifs
q u ’une correspondance ? Si M. Aubier a des lettres de sa s œ u r ,
elle en a aussi de lu i, elle l’invite à ne pas la forcer d ’en faire usage.
Maintenant que les faits essentiels sont rappelés , il faut s’occuper
de la discussion.
m
o
y
e
n
S ..
§. I.er
M o yen s de la dame de St.-M ende.
M . Aubier veut que la dame sa sœ ur ait été son prête-nom et sa
mandataire dans son acquisition de la nation. Il allègue ce fait
( page i 5 de son m é m o ire ) , mais il ne le prouve pas. A u contraire ,
il en dit assez pour prouver qu’elle n ’était ni son prête-nom , ni sa
mandataire. Il convient « qu’il avait ignore l ’urgence du rachat j
)) que dans le premier in sta n t, il crut que sa sœur s’étaittropjhâtée,
» mais qu’il n’en fut pas moins empressé à a v o u e r , à ratifier ce
)> qu’elle avait f a i t , et qu’il lui envoya une nouvelle procuration. »
Si la dame de St.-M ende eût acquis de la nation comme prêtenom ou comme mandataire de M. son fr è r e , il n ’aurait pu ignorer
l ’ urgence du r a c h a t , et elle n ’aurait eu besoin ni de son aveu , ni do
sa ratification , ni d ’une nouvelle procuration.
Mais puisque M. A u b i e r , qui devait tout p ro u v e r, n ’a pu rien
prouver , la dame de S t.-M e n d e qui n’est tenue d’aucune preuve, va
faire cesser à l’instant
les vaines déclamations de son frère , en
démontrant à la justice deux vérités : la p re m iè r e , qu’elle n ’a pas
été son p r ê t e -n o m , ni sa mandataire ; la seconde , que ni l u i , ni
elle , ne pouvaient avoir cette pensée au tems de l’acquisition , et que
c ’est par un abus des mots que M A u bier voudrait faire croire à l ’exis*
tencodeln
d o u b le
qualité qu il a imagine do donner
à
la daniesa sœur*
D ’abord, qu’est-ce qu’ un prête-nom dans la réalité , et dans le sen»
des lois ?
�Si
m
( *7 )
C ’est une personne qui, pour accéder aux désirs d ’un autre, consent
à lui prêter sou nom dans une opération qu’elle se propose de faire.
Si le p rête-nom n ’en lire aucun bénéfice ( c e qui est rare ) } c ’est
un pur service ; si le prête-nom prend une rétribution, le service
ayant une récompense , n ’a plus autant de droits à la reconnaissance.
Mais , dans tous les cas possibles , il ne peut y avoir de prête-nom
sans un acte syn a lla g m a tiqu e, c ’est-à-dire, une convention par
laquelle les contraclans s’obligent réciproquement l’ un envers l’autre.
L a nécessité de cette convention résulte de ce que, sans cette p ré
caution, le prête-nom courrait personnellement toutes les chances
de l ’opération , et que celui auquel il aurait prêté son nom pourrait
être déçu de toutes ses espérances.
E n effet , si celui qui achète sous le nom d ’un autre , n ’a pas
fait une convention antérieure qui le prouve , comment pourra-t-il
forcer son prête-nom, qui est en qualité dans le contrat d’acquisition ,
à lui délaisser l’objet acquis? e t , si celui auquel 011 a prêté son nom
ne veut plus tenir ses engagemens
comment le prête-nom qui ne
devait être chargé de rien , et qui cependant est nominativement
obligé dans le contrat,pourra-t-il forcer l’autre à tenir ses engagemens?
Il est donc évident q u e , pour qu’il existe un p rê te -n o m , il faut
une convention antérieure ou authentique , ou du moins sous seingprivé , rédigée en autant d ’originaux qu’il y a de parties ayant un
intérêt distin ct, comme le veut l’art.
i 525
du Code K apoléon.
M. Aubier représente-t-il cette convention ? non. D onc il n ’a
pas eu de prête-nom dans l’acquisition qu’a faite ladame de St.-Mende.
Supposons qu’après son acquisition , la d a m e de S t.-M en de eût été
désavouée par M. son frè r e , qu’elle eût été poursuivie pour payer
la nation , et qu’ elle n eut pu se procurer de l ’a r g e n t, com m ent
serait-elle parvenue à forcer M. son frère à exécuter son marché ?
elle n’aurait pu y p a r v e n ir , parce que n ’étant lié par aucune con
vention antérieure y il lui ét^it impossible de le traduire devant
les tribunaux de Berlin , pour le faire condamner à remplir les
engagemens qu’elle aurait souscrits pour lui.
Il faut donc convenir qu’elle n ’était pas son p rê te -n o m , puis
qu 'elle n’ayait aucun titre ù faire valoir contre lui.
3
�Si elle eût été son p rê te -n o m , est-ce que M. Aubier aurait ea
besoin d’avouer et de ratifier ce qu’elle avaiL fait ? est-ce que , d ’un
autre c ô t é , la dame de S t.-M em le aurait eu besoin de son aveu
et de sa ratification ? leur convention aurait été leur l o i , et il n’a u
rait pas fallu autre chose que la montrer.
A p rès avoir fait voir que la dame de St.-Memle n ’a point été le
prête-nom de M. son f r è r e , allons plus a v a n t, et faisons sentir à
tout le monde que ni l ’un ni l ’autre n ’ont pu avoir cetto pensée
au tems de l’acquisition.
M. Aubier était en m ort civile au 25 therm idor an 4 . Dans cet
é ta t , il pouvait encore a c h e te r, vendre et d o n n e r, parce que ce
sont des contrats du droit des gens , et que les lois ro m ain e s, adop
tées par la jurisprudence française,accordaient cette faveur à celui
qui était en cet état.
Mais il faut prendre garde queles auteurs qui ont traité dé la mort
c iv ile , tels que R i c h e r , page 2o4 et 432 , L e b r u n , dan3 son traité
des successions , liv. i , chap. 2 , sec». 2 , n." 9 , rappellent que
les biens acquis par celui qui était en mort civile , passaient au fisc
après sa mort n a tu re lle ; et C u ja s, en ses observations } lib, Q >
cap. 2 5 , nous en donne la raison : c’e s t , dit-il, parce qu'un hom m e
jnort civilement ne peut pas avoir d héritier.
Si donc M. A u bier ne pouvait ignorer cette rigueur du d r o i t ,
c o m m e n t lui serait-il venu dans l’esprit de racheter ses biens par la
voie d’un p rê te -n om > p o u r , en cas de mort naturelle 3 les laisser
retourner au fisc }
Il y a plus : la rigueur des lois romaines n’était pas à com parer
avec celle des lois p o r t é e s contre les émigrés. L e corps politique >
tourmenté par une fièvre ardente , semblait ne pouvoir se désaLtérer qu’avec le
sang
de ses ennem is, et les emigiés fin en t mis en
prem ière ligne. La peine de m o r t , la confiscation, tout était employé
pour les ruiner et les détruire. O n n ’aurait pas souffert qu’ils jouis
sent en France des biens qu’ils auraient achetés , et s’ils avaient eu
la folie d ’acquérir } 011 leur aurait repris le lendemain
au raien t
racheté la veille. Ils 11e pouvaient tester
leurs droits , elle s’élait
réservé celui
ce qu’ils
la nation était ù
de succéder pendant 5 ®
ans pour c u j , e t de jouir dca usufruits (¿ui reposaient sur leurs têtes.
�( '9
)
C o m m e n t, sons une pareille législation , M. Aubier aurait il pensé
q racheter ses biens par la voie d’un prête-nom ? L a convention qu’-il
aurait passée à ce sujet avec sa sœur , n ’avait qu’à se découvrir par
quelque événement f o r t u i t , son bien retombait encore sous !e poids
cio la confiscation. 11 n ’avait qu’à venir à m o u r ir, ses enfans ne
pouvaient lui succéder , et c ’était encore le fisc qui devenait son.
héritier.
Madame de S t.-M e n d e ,
de son c ô t é ,
pouvait-elle servir de
prête-nom a son f r è r e ? Quelle garantie aurait-elle eue contre ce
fiè r e entièrement dépouillé ? Quelle action aurait-elle pu diriger
contre un homme mort civilement ?
M ais , flit M. A u b i e r , si ma sœur n ’a pas été m on prête-nom t
elle a du moins été ma mandataire.
Pas davantage , et la chose était encore plus impossible.
P o u r elre mandataire d’ un a u t r e , il faut deux c h o s e s , d’abord
qu’il y ait un m a n d a t, ensuite qu’on en fasse usage. O r quand on
supposerait , ce qui n’est nullement p ro u v é , que M . Aubier aurait
envoyé à sa sœ ur des pouvoirs confidentiels pour racheter son
bien , elle eût fait un acte de folie que de s'en servir; car alors la
nation aurait encore le lendemain repris ce qu’elle aurait vendu la
veille ; ou p lu tô t, comme les lois punissaient de m ort quiconque
entretenait des intelligences avec les é m ig ré s, si la dame de S t . Mende eût eu la témérité de se présenter avec une procuration
de son frère pour racheter ses biens , elle se serait jetée elle-m ême
dans le précipice. L a procuration
et le mém oire qu ’elle d i t ,
dans une de ses lettres , avoir présentés au d é p a r te m e n t, n’étaient
relatifs qu’à la radiation de M. A u b i e r , comme cela est avoué dons
l ’acte du 8 mai. M. Aubier était si éloigné de regarder la dame de
S t.-M e n d e , sa s œ u r , comme son prête-nom et sa m andataire,
qu il lui é criv it, peu do jours avant le mariage de son fils Jérôme f
que celui-ci a va it p eu r sans doute que son p è te on ses frères
le trompent. I l me semble cependant , ajoutait M. A u b i e r , que
nantie de tout t contre un père in scr it, sans titr e , sans qualité
p ou r agir , q u i , même après sa radiation , ne peut avoir que
ce que tu lu i céd era s , et p a r conséquent n’aura ja m a is de
�.\*
(
20
)
droit sur Sa u lzel } contre deux fr è r e s , à la vérité munis de
certificat de non-inscription , grâces à t o i, m ois étant à l ’étran
ger , n'ayant point de certifca t de résidence , p a r conséquent
ne p ou v a n t réclam er , de p lu s ne pouvant avoir que les droits que
tu leur transmettrais , il devrait être sans inquiétude,
V oilà qui est encore clair et décisif.
Mais , répond M. Aubier , si ma sœ ur n’a été ni mon p rê t e nom ni ma mandataire , pourquoi a-t-elle donc déclaré , dans l’acta
du 8 niai., qu’elle n ’avait acheté mes biens que pour me les con
server ? Pourquoi m ’a t-elle rendu un co m p te ? Pourquoi m ’a-telle demandé des ratifications et des garanties ? Pourquoi n ’a-t-elle
disposé de rien sans mon consentement revêtu de ma signature ?
Si elle était véritable propriétaire , elle était la maîtresse de faire
comme elle l’e n te n d a it, elle n ’avait pas besoin de moi. O u i , sans
doute , la dame de St.*Mende aurait pu agir comme maîtresse
absolue depuis son acquisition ; mais, pour rem plir ses intentions,
elle devait tenir la conduite qu’elle a tenue.
E lle n ’avait acheté vos biens que pour vous les transmettre ,
si votre demande en radiation prospérait , ou p ou r les em ployer
£ procurer des étal)hssemens et vos enfans . ce sont les termes
des actes du 18 floréal et du 10 prairial an 9. Or un prête-nom >
un mandataire n ’a rien à transmettre, puisque tout appartient à
celui auquel il a prêté son nom , ou à celui qui lui a donné ses
pouvoirs. Si donc la dame de St.-Mende a transmis à vous et à
votre
fils Jérôme
ce
qu’elle avait acheté
de
la nation ,
elle
ne l’a évidemment fait que par l’împulsion de son c œ u r , et non
comme y étant obligée par aucune des qualités que vous lui donnez
actuellement.
Si elle vous a rendu compte , c’est qu elle 1 a bien voulu j et
aussi vous d ites, dans l ’acte du 8 m a i , que vous avez exam ine
ce compte uniquem ent parce q u 'elle Vexigeait . E st-ce là le lan
gage qu ’on lient à un mandataire?
Si elle a demandé des ratifications , c’était pour tranquilliser
des acquéreurs tim id e s, q u i, avant le
18 f r u c t id o r , craignaient
une réaction , ou bien après votre radiation, pour leur servir de
preuve de votre ap p rob atio n , ce qui leur faisait plaisir.
�( 21 )
Si elle vous a fait stipuler des garanties , lors de la transmission
de vos biens , c ’est qu’il était bien juste qu ’en cas de recherches
au sujet de ces mêmes biens } vous l’indemnisiez , puisque voua
en aviez eu tout le profit , et qu’elle n ’en avait retiré que des
peines infinies : ce sont encore les termes de l’acte du 8 mai.
Si elle n ’a disposé de rien que conjointement avec vous , de votr»
co n sen tem en t, et sous l’approbation de vos signatures , c’est que
n ’ayant jamais eu d ’autre intention que de disposer des biens par
elle achetés que d ’une manière qui vous fût agréable et avanta
geuse à vous et à vos enfans, elle a voulu constater par vos signa
tures qu’elle n ’avait suivi à cet égard que vos propres déterminations^
L ’excès de la délicatesse l’a conduite, et aujourd’hui vous faites
ce raisonnement : « M a sœur a agi comme l ’aurait fait un prête-nom
» ou un mandataire , donc elle doit être regardée comme tel. »
V oilà tout le fondement de vos prétentio ns, mais il n ’a rien de
solide, parce que la différence est trop sensible.
L a dame de St.-M ende a agi dans votre i n t é r ê t , pas de doute;
mais elle n ’a agi que par sa propre im p u lsio n , et non par vos
o rd res, ni par l’efiet d ’aucune convention qui la soumît à faire
ce qu’elle a fait.
V oilà la pierre angulaire contre laquelle se brise tout votre s j's tême. P a r ses procédés généreux , elle a cru s’acquérir des droits
éternels à votre reconnaissance , tandis qu’elle en aurait bien peu
si elle s’était rangée dans la classe d ’un p rê te -n o m ou d’un man-:
dataire. Il est impossible que la justice prenne jamais le change
sur les motifs de sa conduite. E t dès-lors vous n ’avez rien à espérer
des tribunaux. L ’autorité publique a le droit de surveiller les actions
et de prendre connaissance des affaires des particuliers ; mais quand
elle ne voit que des actes de bienfaisance , elle se contente d'y ap
p la u d ir , et ne s’ingère jamais à en régler le mode et les conditions.
Q uant à la remise des papiers de famille , vous lui en avez donno
décharge par l ’acte du 8 mai. V os demandes conlre la dame votre
sœ u r doivent donc être re je tée s, car les magistrats, comme le public^
auront meme peine ù comprendre quelle illusion a pu vous décider
ù les m cllre au jour.
�M oyens de M . de St.-M ende.
M . A u b ie r a traduit son beau-frère devant la justice , et il a
pris contre lui trois chefs de conclusions , comme le prouvent ses
requête et exploit des 8 ju il le t i 5 ju ille t, ci-devant relatés.
Il v e u t , i.° que M. de S t - M e n d e , comme mari et maître des
actions dotales de sa fe m m e , soit témoin des débals touchant l’exé
cution du prétendu mandat qu’il prétend avoir donné à sa sœ ur
p our racheter ses biens ; 2.0 que M. de S t.-M e n d e le reconnaisse
pour seul héritier contractuel bénéficiaire de M. Antoine A u b i e r ,
son père ; 3 .° qu’il lui donne quittance de la dot qu’il a reçue.
L a réponse à ses demandes ne sera ni longue ni difficile , et
néanmoins elle sera pérem ptoire comme la précédente.
P r e m iè r e m e n t , M . de S t.-M en d e n ’a jamais voulu profiter des
avantages que les lois nouvelles procuraient à l u i , à sa femme et à
leurs enfans. Content de la dot faite à son épouse , il n ’a jamais été
tenté d’en prendre davantage. Profiter de la dépouille d ’un beau frèro
était une idée propre à le révolter. T o u t ce que-son épouse a fait lui
paraissait si digne de sou approbation t qu ’il ne s ’y est jamais
opposé.
Il savait qu’ elle n ’agissait que dans l ’intérêt de son frère ou de ses
en fa n s; m ais, quoiqu’il apperçût bien tous les dangers auxquels
e ’.le s’e x p o sa it, il crut devoir la laisser f a i r e , persuadé qu ’il existo
une protection
souveraine qui tôt ou tard couronne les bonnes
actions d’ un plein succès. Il voyait dans son épouse une sœur ardente
à sauver du naufrage les biens d ’un f r è r e , conduite par les sentiniens d ’une affection sans bornes, n’ayant que de bons desseins ; c ’en
était assez pour qu’il louât ses dém arches, au lieu de les contrarier.
Jamais il n’a pensé qu e, pour agir a in s i, elle fût le prête-nom ni la
mandataire de M. A u b ie r ; au co n tra ire, il a toujours cru que sa
conduite ne recevait d ’autre impulsion que de son cœ ur ; e t , coinmo
la dame de S t.-M en d e l’a démontré jusqu’à l’évidence da ns scs
m oyens personnels de défense , M. de St -M ende ne peut-être que
témoin de lu défuite de M. A u b i e r , et du rejet de ses demandes
relatives à son prétendu mandai.
�( *3
X
)
Secondem ent, il est vrai que M. A u b ier a été seul h éritie r institué
de son père , et que la dame de St. Mende , m oyennant une dot
fixée à 00,000 fr. , a renoncé à toutes successions directes et c o l
latérales. Mais qui est-ce qui a contesté ce fait à M. Aubier ? p e r
sonne. M. de St. Mende a -t-il demandé et reçu plus que le montant
de la dot qui lui avait été promise ? non. A -t-il pris quelque
portion dans la succession du chanoine A u bier , son beau-frère ?
non. D e quoi se plaint donc M. Aubier , puisqu’il a
pris avec
son fiis Jérôme l’entière succession de son père et de son frère ,
des mains libérales
de sa soeur ? M. Aubier se plaint de ce que
la dame de S t.-M en d e , sa s œ u r , a pris la qualité d ’ héritière en
partie de son père et de son frère le c h a n o in e , dans plusieurs
actes, tandis qu’elle n ’était qu’une fille dotée et renonçante.
V o y o n s donc si elle a eu le droit de
p rend re cette
qualité
tChéritière en p a r tie , qui e st-ce qui la lui a donnée , qui est-co
q u i l ’a reconnue comme t e l le , et si on peut maintenant la lui ôter.
Ce n ’est point M. de S t.-M en d e qui a fait donner à sa fem m e
la qualité d ’héritière en partie de son père et de son frère Je
ch a n o in e , car il est constant qu’il ne s’est mêlé de rien. C ’est la
loi seule qui la lui a donnée : en voici la preuve.
L ’art. I X de la loi du 5 brumaire an a a prescrit le partage
par égalité de toutes les successions directes et collatérales
ouvertes
depuis le i 4 juillet 178g.
L ’art. I X de la loi du 17 nivôse suivant l ’a ordonné de m ê m e ;
et l ’art X I a voulu que les dispositions contractuelles faites en mariant
un héritier présom ptif ne pussent lui être opposées pour l’exclure
du partage é g a l , à la charge de ra p p orter ce qu ’il avait reçu lors
de son mariage.
L ’art. 1 " de cette loi avait annuité les institutions contractuelles
dont l’auteur était encore v i v a n t , ou qui n ’etait décédé que depuis
le 1 4 juillet 1789.
Ces deux lois de brumaire et de nivôse contenaient évidemment
un effet rétroactif. Il fut détruit par la loi du 9 fructidor an 2 , qui
décida que ces lois n ’auraient d ’effet touchant la transmission des
biens qu à compter do leur promulgation. L a loi du .î vendémiaire
&u 4 s u r v in t, qui régla le mode de restituer aux héritiers rétablis
�( 2i
^
les Liens
qui avaient clé
soumis
)
au partage
d’égalité ; or ces
Tiérifiers rétablis étaient ceux dont les auteurs étaient décédés avant
la loi de nivôse. E t comme M. A u b ie r , père co m m u n , ¿taitdécédé
avant cette loi , son institution contractuelle restait toujours valable ,
et la dame de St. Mende n ’avait droit qu’à une légitime de r ig u e u r,
mais elle avait droit au partage d’égalité de la succession de son frère
le chanoine, mort ab intestat. A u s s i , lorsqu’au a 5 thermidor an 4 ,
la darne de St. Mende acheta lés biens délaissés par son p è r e , et
son frère le chanoine , TAdministration départementale régla ses
droits à une légitime de rigu eu r, c ’e st-à -d ir e , d'un neuvième dans
la succession de son p è r e , et à la moitié de îa succession de son
frère le ch an oin e, revenante , dit l’arrêté de l’Administration x à
M a rie A u b ie r , acquéreuse , comme héritière dans cette propor~
iion fie Jean-B aptiste A u b ie r , son frère..
L.a qualité ¿Vhéritière lui fut donc imprimée par l ’Adm inislration départem entale, d’apres les lois existantes ; mais , comme la
République représentait le frère é m ig r é , elle s’attribua le béné
fice de l’institution faite en sa faveur.
Depuis cette époque est survenue la loi du 18 pluviôse an 5 ,
q u i , par son art. X , a déterminé que les filles forcloses par les statuts
seraient appelées au partage des successions ouvertes postérieure
ment à la publication du décret du 8 avril 1791 , et que les filles
qui auraient renoncé dans les p ay s de non-exclusion prendraient
p art au partage des successions ouvertes depuis la publication de
la loi du 5 brumaire an 2.
Il résulterait donc de cette loi ( si tout n ’avait été réglé auparavant
p ar l’arrêté de l’administration d é p a r te m e n ta le ), que la dame do
S t .- M e n d e , quoiqu’ayant renoncé à toutes successions directes et
collatérales dans son contrat île mariage passé à Clerm ont ( pays de
droit écrit ou de non exclusion ) , a dû partager la succession de son
père , mort après la loi du 5 brumaire an u , et qu’ainsi la qualité
d ’héritière en partie de son père et de son frère lui ayant été
donnée par la loi ir.êm e, personne ne peut ni lu lui contester , ni
la lui ôter.
Il suffirait même que l ’administration
départementale
lui eût
imprimé celte qualité, pour que Ai. Aubier n ’eût rien à dire , parco
�(
25
)
q u ’n!ors la nation le r e p ié s e n ta it, et qu’un émigré rayé ou amnistié
doit prendre les choses en l’élal où elles se trouvent. D ’ailleurs , les
tribunaux ne peuvent rien changer aux arrêtés des corps adminis
tratifs , puisqu’ils n’ont pas même le droit de les i n t e r p r é t e r , et
q u ’en cas de dispute sur leur véritable sens , il faut absolument leur
en faire le renvoi, pour qu’ ils y statuent eux-mêmes.
*11 n’y a pas d ’exemple d’ un procès aussi extraordinaire que celuici. M. Aubier a Un-même reconnu sa sœur en qualité A'hèrU i re
en partie de son père et de son fr è r e , dans l’acte du 8 mai. 11 lui a
promis une pleine garantie pour tout ce qu’elle aurait fait en celte
qu alité; et voilà qu’oubliant son propre fait,
il veut que M. de
St.-Mende en réponde , q u o iq u e M .d e St.-Mende n ’y ait coopéré
en rien. C e n ’est pas tou t: M. de S t.-M en de pouvait exiger que sa
femme conservât pour elle et ses enfans les portions de biens qi,e la
nation lui a délaissées comme héritière de son père pour un neu
vième
et comme héritière pour moitié de son frèie le chanoine",
et cependant il lésa refusées pour augmenter la fortune de M. Aubier.
Com ment comprendre qu'un pareil acte de générosité lui vaille un
procès ?
L a qualité d ’héritière est imprimée par la loi même sur la tête de
la dame de S t.-M en de , et M. A u b ie r , après l’avoir reconnue , p ré
tend la lui ôter !
Cette qualité n’ a tourné qu’au profit, de M. A u b ie r , et c’ est lui
qui s’en plaint ! Pourrait-on jamais croire des singularités de cette
espèce ?
T ro isiè m e m en t, et relativement à la quittance de la d o t , M .
Aubier en a déjà plusieurs. Com bien lui en faut-il ?
Par l'acte du 8 mai , Madame de S t.-M e n d e reconnaît qu’il ne
lui est plus dû que 9,ooo liv. sur sa légitim e, et en marge est la
quittance de ces 2,000 liv. , signée de M. de S t . - M e n d e , à la date
du 7 vendémiaire an 11.
D e p u is , M. Aubier a reçu diverses lettres qui prouvent qu’il ne
doit rien rie la légitime de sa sœur ; et enfin , pour lui com plaire,
011 lu ia o lle r t une nouvelle quittance le 28 juillet d e rn ie r, et il l’a
refusée ; elle est encore dans notre d o s s i e r .
T o u t ce que M. do S t.-M en do vient de dire p our sa défense est
4
�tellement d écisif, que M. Aubier doit se reconnaître vaincu aussi
bien par son beau-frère que par sa soeur.
§.
III.
M oyens de la D am e veuve de la M onteilhe,
L ’intervention de la dame veuve de la Monteilhe , tant en son
nom que comme tutrice de ses enfans , était nécessaire , parce qu’en
définitif c ’était sur elle et sur ses enfans que devait porter tout le
poids de la contestation.
E n e f f e t , si la dame de St.-M en de n ’avait été que le prête-nom
ou la mandataire de M. Aubier dans son acquisition de la nation ,
il en résulterait un litige forcé sur la validité de la transmission
du domaine de S a u lz e t, faite à Jérôme A u bier par la dame de S t .M ende et par M. Aubier lui-m ême.
M. A u bier ou ses enfans auraient dit que la transmission de ce
domaine n ’avait pu s’opérer par la dame de S t.-M en d e ^ jugée
n ’être ni acquéreuse ni propriétaire v é rita b le , et que cette trans
mission émanée de M. A u b i e r , jugé véritable acquéreur sous le nom
de sa sœur , ne pouvait valoir que pour la portion héréditaire
de Jérôme Au bier , dont les enfans auraient été tenus de rapp orter
à la succession de leur grand-père le domaine de Saulzet pour c i r e
partagé en trois lois.
On pouvait même appréhender que M . A u b ie r n ayant signé la
subrogation de ce domaine que pendant sa mort c iv ile , son consen
tement ne devînt l’objet d ’une discussion.
Toutes ces considérations ont déterminé le conseil de famille à
autoriser la dame yeuve de la Monteilhe à soutenir les droits de ses
enfans.
F rap p ée de la solidité des moyens développés par la dame de
St.-M ende , elle n ’a point à craindre qu’on répute cette dame prêtejiotn ni mandataire de son frère dans son acquisition de la nation;
et dès-lors la subrogation du S a u lze t, fuite par la dame de S t.M ende à Jérôme Aubier ; conserve loulc sa force c l doit produira
tous ses effets.
�( 27 )
Néanmoins il est à propos de faire sentir u la justice que , quelque
convention qui eût pu exister entre la dame de St.-Mende et son
frère , la dame de la Montcillie et ses enfans
n ’auraient jamais
dû en être les victimes.
L a dame veuve de la Monteilhe s’est mariée avec Jéiôme Aubier.
E lle était alors veuve de M. de Bullion. Elle avait une propriété
personnelle , plus la jouissance des gains nuptiaux que lui avait
assurés son prem ier m a r i , un trousseau et des bijoux d’ une valeur
assez considérable.
E lle
pou vait
être certaine de trouver 25 o,ooo fr.
pour sa portion dans la succession de ses père et m ère ; et ceuxci , en attendant, lui constituaient un revenu annuel de 2}5 oo fr.
A la v é r i t é , elle avait une fille de son prem ier mariage ; mais le
patrim oine de M. de Bullion , son père , et l ’hérédité universelle
de sa grand’m è r e , procuraient à celle demoiselle une assez jolie
fortune personnelle pour n ’êlre jamais à charge à sa mère.
Dans cette situation, Jérôme Aubier l’a recherchée en mariage.
L e s intérêts des deux époux ont été examinés et déterminés par
deux jurisconsultes distingués et par vingt-cinq parens. L ’arrêté
de famille du io prairial an 9 en fait foi. Cet acte fut l’ouvrage
de M. A u b ie r , et il fut trouvé si parfait par les ju risconsu ltes,
q u ’ils l’approuvèrent en tous points. L a preuve s’en trouve encore
dans cotte même lettre écrite par M. A u bier à sa s œ u r , dont nous
avons déjà cité un passage. Elle commence ainsi :
Je devais , ma chère, amie , a ller te voir hier 3 et te porter
l ’acte que j'a v a is p rojeté , il y a six jo u rs. I l avait eu Vap
probation de Pâgés et B c ir o t, sans changer une virgule. Oit
m 'a traîné dix fo is de Coste à P a rtis , de D artis à liio m , etc.
parce que, d isa it-o n , la subrogation étant sans p rix donné p o u
vait être critiquée. B o ir o te t Pages trouvaient q u e, relativem ent
A un acte de fa m ille de bonne f o i , l ’ objection était ridicule.
J ai d u à Caste , auteur de l'objection , q u ’ elle était de p lu s
indecente , et j e l'a i dit a la DIonteilhe , qui revient dix fo is
en a rriéré , « /a crainte que ses avantages ne soient p a s bien
consolidés. P e u m'importent toutes ces difficultés.
C e lle lettre finit par ces mots : L e projet du contrat de m ariage
est littéralement de P a g é s , j ’ avais seulement ajouté l ’ article ,
page 4 .
—
�L a dame de St.-Mende subrogea Jérôme Aubier au domaine du
Saulzet ; et M. A u b ie r , son père , consentit à ce qu’il se constituât
ce bien en mariage. E t ce fut sous la foi de cette constitution
que le mariage a eu lien , et qu’il fut stipulé dans le co n tra t, qu’en
cas de p rédécès, les époux se donnaient mutuellement l’usufruit
de la moitié de leurs biens.
On sait que des conventions matrimoniales sont sacrées , que
la bonne foi doit y présider , et qu’étant le gage de l’ union des
époux et de leurs deux familles , elles sont aussi le fondement de
la fortune des enfans qui naîtront du mariage. On n ’ignore pas
non plus que les droits des tiers sont sous la protection spéciale
des lois et de la justice.
O r la dame de la Monteillie et ses enfans pourraient-ils jamais
souffrir des arraiigemens secrets qui auraient pu avoir existé entre
M . Aubier et Madame de St.-M en de, sa sœ u r? non.
Nous en avons une preuve bien récente dans une circonstance
semblable , qui a donné lieu à une affaire jugée en la cour de
cassation le i . " août dernier , rapportée dans le journal de M.
i
D e n e v e r s , page 4 oy du 10.' cahier de cette année.
L a demoiselle Iiereur-de-M alans, inscrite sur la liste des é m ig ré s,
n ’a été éliminée qu’en l’an g ; et en l ’an 1 2 , elle fut interdite
pour cause de démence. E n l’an 4 , elle avait donné une partie de
ses biens au sieur Higonaux par contrat de mariage.
A p rès son interdiction , son curateur attaqua de nullité cette
donation ; m ais, par arrêt rendu le 5 o mars 1 8 1 0 , la cour de
Besançon l’a m aintenue, « attendu que la loi du 12 ventôse an 8 ,
)) qui frappait de mort civile la demoiselle de Alalane , ne pouvait
» avoir l’effet d ’anéantir, au préjudice d'un tiers , les droits qui lui
» étaient acquis par la donation , avec d autant plus de raison ,
}) que le mariage du fils Rigonaux n ’a eu lieu que sous les auspices
» de cette donation , et que ce serait p riv e r deux familles et les
» enfans issus de ce m ariage, de l’e(Tet d’une libéralité fuite dans
» les formes voulues par la l o i , et sur laquelle ils ont dû compter. »
Cet arrêt a été attaqué , mais la cour do cassation a rejeté lo
pourvoi des héritiers de ]\lalaus ,
»
Attendu (¡u’avant la promulgation du code Napoléon , la dona-
�( 2g )
S 2 5
)> tion entre-vifs éta it, comme appartenant au droit des gens , et
3) non au droit c i v i l , au rang des actes dont les individus morts civi» lement étaient capables ; qu’ainsi la demoiselle de Malans a pu t
)> quoique frappée de mort c iv ile , transmettre valablement partie
» de ses biens à Rigonaux fils , p a r la donation insérée au contrat
» de mariage dudit Rigonaux du g frimaire an 4 , et que la dis—
» position de l’arrêt attaqué qui maintient cette donation , est
)) conforme aux principes et aux lois de la matiere. ))
O n voit , par cet a r r ê t , que les signatures de M. Aubier aux actes
de subrogation du domaine de Saulzet, quoique données pendant sa
inort civile sont valables , et qu’ainsi , sous tous les rapports , le
domaine de Saulzet a été irrévocablement assuré tout entier à Jérôme
Aubier j on voit que les droits des tiers ne peuvent recevoir aucune
atteinte ; on v o i t , enfin , que des conventions matrimoniales doivent
cire respectées. Dans l’espèce actuelle, la dame veuve de la Monteilhe
a de plus la satisfaction de reconnaître que la dame de S t.-M en d e
étail seule propriétaire du domaine qu’elle a cédé à Jérôme Aubier ,
ce qui tranche toute difficulté et dissipe toutes ses inquiétudes.
Elle ne peut néanmoins qu’êlre surprise d’entendre son beau-père
alléguer qu’il n ’aurait pas consenti a la transmission de l’entier
domaine de S a u lz e t, s’il n ’avait été trompé sur sa valeur ; qu’on lui
avait persuadé qu’il n’était afiermé que 5 ,ooo fr. , et que dans cette
proportion avec la masse de ses b ie n s , il n ’avait vu aucun obs
tacle à en saisir son fils Jérôme.
Comment M. Aubier peut-il tenir ce langage ? ... il ne pouvait
pas ignorer la vraie valeur du domaine de S a u lz e t, car dans son m é
moire (page 54 ) , il dit que M. son père l ’a acheté i o 5 ,ooo fr. en 1788.
L e s vingt-cinq parensqui ont été témoins de la subrogation de la dame
de St.-Mende connaissaient aussi la vraie valeur de ce bien. Environné
de tant de lum ières, à portée de juger par lui*mème , croira-t-on
qu’il ait agi par imprudence ? et c ’est après dix ans de mariage de
sa belle-fille , après le décès de son fils , qu’il fait une pareille
réclamation ! E s t - c e que l’acte du 8 mai ne prouve pas qu’il a voulu
fixer ses principales propriétés sur la tête de ce fils ? n est-il pas
constant que le domaine de Saulzet était la propriété principale»
de toutes celles achetées par la dame de St.-M ejide ?
/
�I
* i
(
So
)
M. Aubier se récrie aujourd'hui sur ce que le domaine de Saulzet,
fixé sur la tête d ’un de ses fils , met ses deux autres fils dans
le cas de n ’avoir point de légitime à sa m o r t, comme si la daine
de St.-Mende l’avait violenté dans cette résolution ; tandis qu’on
a v u , et par la c l e du 8 m a i , et par sa lettre à su soeur, que la
subrogation du Saulzet en faveur de son fils Jérôme, fut toujours
dans son intention , el qu’en cela même M. Aubier ne blessait point
la portion héréditaire de ses deux autres fils , sous le rapport des
dispositions du code Napoléon , qui leur servira de règle.
Pour bien ju ger
des choses , il faut se reporter au tems où
elles ont été faites, et apprécier l’esprit qui les a dictées. O r , le
domaine de C rêve-cœ u r , le grand verger , valent bien 100,000 fr. ,
et au tems de la subrogation du domaine de Saulzet
M. Aubier avait
encore plus de 80,000 fr. à espérer d’une liquidation du G o u v e r
nement. N ’y avait-il pas là de quoi assurer la légitime de ses deux
fils ? et fraudra- t-il
parce que celte liquidation est tombée en
déch éan ce, que la veuve et les enfans de Jérôme Aubier en sup
portent la perte ? non. C ’est en vain que M. Aubier colore son
attaque d ’un v if sentiment d ’intérêt pour ses deux fils , il a fait pour
le mariage de son autre fils J é r ô m e , tout ce qu’1111 père pouvait
faire , sans
que ses
autres enfans accusent
son coeur ni
sa
sagesse.
C ’est encore bien vainement qu’il veut persuader à la dame veuve
de la Monteilhe , qu’en assurant par de nouveaux actes à ses p etitesfilles la moitié du domaine du Sau lzet, il leur ferait un bien r é e l ,
et les mettrait à l’abri des attaques que pourraient un jour leur faire
les enfans de S t .- M e n d e , car elle n’a aucune inquiétude
de ce
côté-là.
Q u ’est-co que les enfans de St.-M ende pourraient demander aux
enfans de la dame de la M onleilhe ? quelles seraient leurs p r é
tentions ?
Suivant M. Aubier , les héritiers de St.-M ende pourraient récla
m e r tous les biens achetés de la nation par leur mère , sous le pré
texte que s’étant mariée d o ta lcm e n t, toutes ses acquisitions étaient
nécessairement dolalcs et inaliénables.
�( 3i )
Quand la daine veuve de la Monteilhe n ’aurait pas tous les motifs
qu’elle a de croire à la délicatesse des enfans de St.-Mende , qui se
feront toujours honneur d’imiter leurs pere et m e r e , en- v é r i t é ,
elle ne les craindrait pas.
La subrogation du domaine de Saulzet a été consentie au profit
de son mari par la dame de S t.-M e n d e , comme maîtresse de ses
biens aventifset paraphernaux ; or cette qualité lui a été reconnue
par M. Aubier dans tous les actes qu’il a passés avec elle, et par M. des
S t . M e n d e dans l’arrêté de famille du 10 prairial an y. D ’après c e la ,
comment les enfans de St.-Mende pouiraient-ils s a\isei de donner ,
iur cette qualité r e c o n n u e , même par vingt-cinq pareils et par les
jurisconsultes qui ont signé cet a c te , un démenti à leurs père et
m è r e , et aux deux familles Aubier et Cham pilour ?
L e s biens acquis par la dame de St.-Mende et ceux que l’admi
nistration départementale lui a délaissés en qualité d'héritière pour
un neuvième de son p è r e , et pour moitié de son f r è r e , et qu elle a
ensuite transmis à ce frère et à son fils Jérôme , lui étaient véri
tablement aventifs et
paraphernaux.
La
raison
en
est toute
évidente.
Dans le principe , la dame de St.-Mende avait été mariée avec une
dot fix e , moyennant laquelle elle avait renoncé à toutes successions
directes et collatérales ; mais son contrat de mariage ne porte nul
lement qu’elle se soit constituée en dot ses biens présens et à venir.
O r , comme les articles i / r et 8 du chapitre
i 4 de la Coutuir.e
d’Auvergne , à laquelle M. et Madame de St.-Mende se sont e x p r e s
sément soumis par leur contrat de mariage , répute aventifs et p ara
phernaux tout ce que la fille qui a une dot particulière peut avoir
d ’ailleurs , il est clair que les portions de successions que Madame
de St.-M ende a recueillies an delà de sa dot de 50,000 1. , s o i t comme
héritière de son père , soit comme héritière de son frère le chanoine,
lui est a ve n lif et paraphenuil ;
voyez Chabrol ,
sur l’article 8
précité. L lle a donc pu l’aliéner ensuite à son gré , sans mêm e
1 autorisation do son m a r i , parce q u ’avant le Code , cette auto
risation n était pas nécessaire.
Maintenant qu il est reconnu que la dame do St.-M ende a eu des
biens aventifs et paraphernaux , personne ne peut soutenir que
ses acquisitions soient dotales et inaliénables,
�f C ’est d ’abord une très-fausse idée que de vouloir répnier dotales
et inaliénables des acquisitions faites par une femme niariee , quand
jmême elle se serait constituée en dot ses biens pjésens et à venir.
Dans ce cas là m ê m e ,
ses
acquisitions sont réputées appartenir au
mari. L a loi Quint us M utins 5 i , //• de don. ¡nier vir. et ux. le
d é c id e , e t e l l e a été
adoptée dans
notre jurisprudence. M. C h a b ro l,
liv. 1 , p. 5 i , fait voir par des exemples que ces acquisitions entrent
dans le patrimoine du mari. A i n s i , dans cette hypothèse m ê m e ,
M. de St.-M ende ayant signé la subrogation du S a u lz e t, cette trans
mission consentie par lui-m êm e serait suffisante pour empêcher tes
enfans de la critiquer.
Dans notre hypothèse , il s’agit évidemment de biens p ara p h e rnaux transmis par la dame de S t.-M en de , qui en était dame et
jn a îtresse , comme s’exprim e l’art. 1 du chap. i 4 d e là Coutume.
Com m ent donc ses enfans pourraient - ils attaquer cette trans
mission ?
A la mort de Madame de St -Mende, ils pourraient d i r e , à la vérité,
que les subrogations faites par leur mère ne sont pas de véritables
aliénations; que celle du grand v e r g e r , à la date du 5 fructidor
an g , n ’a aucun prix , et que celle du Saulzet n ’est grevée que
d é ch a rg é s et conditions utiles à M. Aubier et à ses deux fils, et
n ’a rien produit à leur mère ; q u ’ainsi tous ces actes ne peuvent
être considérés que comme des donations
Partant de-là , ils invo
queraient l’article g i 5 du code Napoléon pour établir que leur
mère n’ayant pu donner à des étrangers que le tiers de ses b ie n s,
lesd& ux autres tiers de ce6 acquisitions leur reviennent p a r la force
de la loi.
Cette difficulté semblerait présenter des suites fâcheuses ; mais co
danger qui est dans l’ordre des possibles , a peu d ’npparence et
moins encore de réalité : d’une part , M.
épouse , fille de M. de S t.-M en d e , ont
de Chardon et son
signé l’arrêté de famille du
j o prairial ail (| ; M. de Chardon a encore signé l’acte du 8 mai, et
par un écrit particulier il a itérativement reconnu et confessé que
la dame de S t.-M e n d e , sa belle-mère , n'avait acheté de la
nation les biens de son fr è r e que p ou r les conserver aux enfans
�de ce frère , et qu'ainsi lesdits biens ne fo n t p oint p artie de la
succession de la dame de St.-M ende.
L e fils (le Madame de St.-Mende fait une pareille déclaration. Ainsi
quelle inquiétude peut-on avoir du côté des enfans de St.-M ende ?
Veut-on quelque chose de plus f o r t ? il est facile de consolider
ces déclarations , et de leur donner plus d ’authenticité. Il suffit
d’appeler en cause les enfans de S t.-M e n d e } qui les réitéreront
devant la justice.
L e jugement qui donnera acte de leurs déclarations ne sera point
susceptible d ’être attaqué par eux par voie de tierce opposition après
la m ort de la dame de St.-Mende ; car cette voie n ’est ouverte qu’à
ceux qui n ’ont pas été parties dans les jugeraens } suivant l’art. 4 y 4 du
code de procédure. Ils ne pourraient se pourvoir non plus par
requête c i v i le , n ’ayant à faire valoir aucun des m oyens indiqués
par le titre 2 du livre 4 du même Code. D ’ailleurs , le code Napoléon
ne prohibe point de pareilles déclarations. N ulle loi ne force p er
sonne à garder dans son patrimoine des biens qu’elle ne croit pas en
honneur pouvoir retenir , et qu’elle n ’a achetés que pour les conser
v e r à un autre , et avoir le plaisir de les lui transmettre. Quand
on supposerait donc qu’après un pareil ju g e m e n t , les enfans de
St.-M endë voudraient se déshonorer publiquement en attaquant
M . Aubier et les filles de Jérôme A u b ie r , ils seraient victorieuse
ment repoussés, i.° parce qu’aucune voie judiciaire ne leur serait
ouverte pour attaquer ce jugem ent ; 2.0 parce que leurs déclara
tions s’élèveraient contr’e u x , et qu’ils ne pourraient pas les faire
considérer comme de simples actes de soumission et de déférence à
la volonté de leurs père et mère ; puisque , loin qu’ils soient suspects
d ’avoir participé à aucune fra u d e , la bonne foi de leurs déclara
tions se trouvera justifiée par tous les actes qui auront servi de base
au jugement.
I) après cela , on ne voit pas com m ent jamais les enfans de
Jérôme Aubier pourraient être troublés dans la propriété de l’entier
domaine du Saulzet. Ils n ’ont donc à craindre que leur grand-pere
puisque, sous le prétexte de leur assurer irrévocablement la moitié
de ce dom ain e, il leur euléve l’autre m o itié , et rompt à l’inslant, de
5
�son autorité , les conventions matrimoniales de leurs père et mère.
C e p e n d a n t, si l’on en croyait INI. A u b ie r , ses petites filles seraient
dans un danger im m in e n t, et il y aurait une imprudence extrêm e de
la part de leur mère de ne pas préférer les avantages certains qu’i!
leu r offre aux incertitudes de l ’avenir. E h bien! ne nous contentons
pas de sonder le terrein , puisque M. Aubier prétend
ferm e
qu’il re n
un volcan capable de renverser un jo u r toute la fortune
de ses p e t ite s - f ille s ,
creusons ce te r re in , vérifions-le dans tous
les s e n s , et n ’ayons rien à nous reprocher.
Supposons l’impossible , plaçons-nous au centre du danger dont
on menace la dame veuve de la Monteilhe et ses enfans , et cal
culons si les effets du mal prévu seraient dans le cas de faire regretter
un jour des offres gracieuses qui l’auraient prévenu.
Adm ettons pour un instant qu ’à la mort de la dame de St. M en d e,
ses enfans ne soient arrêtés par aucune considération , par aucun
m oyen ni de fo r m e , ni de d r o it, qu’ils trouvent une justice capa
ble de consacrer leur in ju stice , c ’e s t-à -d ir e , de faire entrer dans
la succession de cette dame tous les biens par elle acquis de la
nation , et de décider qu’elle n ’a pu en sortir que le tiers par voie
de donation.
Dans ce cas , on trouverait que sa succession serait forte de
216,000 fr., savoir, sa dot de 5 o,ooo fr , le Saulzet valant i 5 o,ooo f r . ,
le grand verger 5 o,ooo fr. , et les héritages vendus à Malintra ou
ailleurs par M. A u b i e r , 6,000 f r . , le tiers serait donc de 72,000 f r . ,
irrévocablement acquis aux enfans de Jérôme Aubier. Joignons-y le
tiers du domaine de C r ê v e - c œ u r , qui appartient aux enfans (le
M. A u bier , et qui vaut au moins 54 ,000 fr. , il est clair que ses
petites filles auraient toujours 90,000 fr. Si les acquisitions deMadaino
de St.-M ende pouvaient être réputées appartenir au mari , le tiers des
biens de celui-ci formerait plus de i5 o ,o o o fr.
L orsqu e M. Aubier prétend que ces donations n ’en ont pas la
forme , il ignore donc quo , par plusieurs a r rê ts , la Cour de cassation
a jugé que les ventes simulées sont reputees donations valables pour
Ja portion disponible, quoique non revetues des formes des donations.
M aintenant, qu’auraient-elles d’assuré, si la dame veuve de la
�( 55 )
$ "£ > I
Monteilhe , leur mère , préférait les avantages qne leur offre leür
g ran d-père? elles auraient la moitié de sa succession , savoir , le
quart en préciput , et un autre quart pour leur portion héréditaire
dans les trois quarts. Si la fortune de M. Aubier se co m p osa it, à
sa m o r t , du Saulzet et du grand v e r g e r , on trouverait 180,000 fr.
an prix que nous avons porté ces mêmes biens ; m a is , comme
il prétend avoir 20,000 fr. de dettes , il ne resterait que 160,000 f r . ,
en sorte que les demoiselles la Monteilhe auraient 80,000 fr. p ou r
leur m o itié , plus 18,000 fr. dans le domaine de C r e v e * c œ u r , en
tout 98,000 fr. , ce qui présente une différence de 8,000 fr. de
bénéfice sur ce qu ’elles auraient, au cas où les enfans de St.-M ende
parviendraient à les spolier tout à leur aise.
Mais qui p eu t, répondre que M. Aubier laissera dans sa suc
cession 160,000 fr. ? S ’il était reconnu qu’il a racheté de la nation
ses propres biens par la voie d’un prête-nom ou d ’ un mandataire ,
il serait le maître de réduire sa succession bien plus bas ; c a r , quand
il ferait donation de la moitié du S a u lz e t, et mêm e du grand verger
à ses petites-filles , elles ne seraient pas pour cela sûres de la garder.
M. A u bier pourrait vendre l’autre moitié du Saulzet pour payer les
dettes qu’il prétend a vo ir, ou qu’il contracterait jusqu’à sa mort.
Alors resteraient le grand verger , et la moitié donnée du S au lzet,
qui feraient n 5 ,ooo f r . , dont ses petites-filles auraient la moitié
de .67,500 f r . , qui , réunis aux 18,000 fr. de Créve-coeur , feraient
75,5oo fr. , somme inférieure de i 4 , 5 oo fr.
à celle qui ne p e u t
jamais leur échapper , malgré les entreprises et les succès supposés
des enfans de St.-Mende.
Mais s’ il était vrai encore que l’épouse de M . Au bier eût des
créances considérables à exercer sur les biens de son m a r i , com m e
elle s’en vante p ubliquem ent, il serait possible qu ’elle s’em parât
du grand verger , et il 11e resterait à partager que la moitié du
S au lzet, c ’est-à-dire que la portion des demoiselles la Monteilhe
serait reduite à û2,5oo francs q u i , joints
aux
18,000 francs de
C r e v e - c œ u r , feraient 5 o, 5 oo francs. Ces calculs nous font voir que
la dame veuve de la Monteilhe ne p eu t, ni pour son intérêt, à
cause de sou usufruit et de sa portion dans la succession de sou
'
�( 36 )
y a
fils , décédé après son père Jérôme , ni pour l’intérêt de ses enfans ,
accepter les offres de M. A u b ier , puisqu’il est évident que , dans la
position la plus fâcheuse , les demoiselles la Monteilhe auraient presqu ’autant que si la succession de leur g ran d-pèie devait compii-mlre
tous les biens achetés de la nation par la dame de St.-Mende , et
q u ’en acceptant ses offres, elles courraient des dangers beaucoup
plus grands que celui dont on leur fait peur. Com m e le danger
re la tif aux enfans de St.-Mende n ’est qu’une chimère , M. Aubier
trouvera bon qu’elles préfèrent une fortune de i 5 o,ooo francs à une
nouvelle donation qui commencerait par leur en enlever la m oitié,
sans même pouvoir leur garantir l ’autre moitié.
D ’après c e la , M. Aubier peu t-il tant s’étonner que sa belle-fille
soit intervenue dans une contestation qui l’intéresse si é m in em m en t,
ainsi que ses enfans ? Devait-elle suivre le conseil qu’il lui donnait
d attendre les évènemens , sous le prétexte que la voie d e là tierceopposition lui serait toujours ouverte ?
Si M. A u b ie r eût réussi à faire déclarer sa sœur son prête-nom
ou sa m a n dataire, et que la dame veuve de la Monteilhe ou ses
enfans eussent attendu la mort de M . Au bier ou de Madame de St.M ende p our s’en plaindre , elles auraient vu alors si leur tie rce opposition aurait fait fortune , ou plutôt elles ne seraient pas arri
vées à cette é p o q u e , sans ressentir tous les fâ ilieu x effets de leur
silence.
Si la dame veuve de la Monteilhe ne fût point in terv en u e, elle
aurait manqué de prévoyance , elle aurait fait une faute impardon
nable , surtout pour une mère tutrice. L a dame de St.-M ende seule
n ’avait qu’à succomber , faute du développement de
tous ses
m o y e n s , il serait arrivé que M . A u b ie r aurait fait tout ce qu’il
aurait voulu.
Supposons qu’il n ’eût rien vend» , ses petites-filles n’en auraient
pas moins passé dans te public pour ruinées de la moitié de leur
f o r t u n e , et par conséquent auraient été très-embarrassées lors de
leur établissement.
Supposons que leur grand-père eût vendu une partie du do
maine de Saulzet pour payer les 20,000 fr. qu’il prétend devoir ,
�c 57
)
aussitôt sa "belle-fîlle était obligée de former tierce opposition au
jugement qu’il aurait obtenu contre sa soeur.
Is'e valait-il pas m ieux intervenir de s u i t e , profiter des p iè c e s ,
des documens et des moyens de Madame de St.-Mende , et par
un concert de justice et de raison , arrêter le mal dans sa source ?
Si M. A u bier ne veut pas convenir de cette v é r ité , tout le monde en
conviendra pour lui. L a dame veuve de la Monleilhe arrelerail~la
sa d éfen se, si M. son beau-père ne l’avait forcée d ’y ajouter quelque
chose.
E lle lui demandera d’abord à quelle fin il a p lacé, dans la page 5 i
de son m ém oire, une note tendante à faire croire qu’elle est plus
que ruinée , puisqu’il lui attribue seulement 4 ,000 fr. de revenus ,
chargés d'un paiement annuel de 6 , 5 oo fr. Cette note n'était d’aucuue
utilité pour la cause de M. A u b ie r ; c a r , la fortune plus ou moins
grande de la dame la Monteilhe ne peut influer sur la question de
s a v o ir , si la dame de St.-M ende a été son prête-nom ou sa manda
taire. Il y a plus , cette note tournerait dans la cause au profit de la
dame la Monteilhe ; car moins elle aurait de fortune , plus la justice
devrait se refuser à lui en ôter. E n ajoutant cette note dans son m é
m o ire , M. Aubier aurait dû sentir q u ’elle était pernicieuse pour
la tille aînée de Madame la M o n te ilh e , arrivée dans l ’âge d ’un
établissement ; que c’était faire un mal gratuit à la m ère et aux
enfans qui ne le méritaient certainement pas.
L a dame
veuve
de la Monteilhe
défend
ses droits
et ceux
de ses e nfans, contre les prétentions de M. A u b i e r , parce qu’elle en
a senti toutes les conséquences. E lle n ’emploie que des moyens
justes et honnêtes. Pourquoi M. Aubier e st-il sorti de son sujet pour
composer une note aussi déplacée ? puisqu’il reconnaît dans son m é
moire , et même vante les bonnes qualités et la douceur de sa
b e lle - f ille , il semble qu’il aurait dû user de ménagemens envers
elle. H eureusement que M. A u b ie r convient que les soeurs de la
dame la Monteilhe ont eu chacune 25 o,ooo fr. dans le partage
anticipé des biens que leur ont cédés leurs père et mère , et que
dès-lors on no peut douter qu’elle en
a eu
autant quo scs soeurs f
non compris ce qu’elles auront par la suite dans les biens reserves»
par M. et Madame de Champilour.
�C elte n o t e , au su rp lu s, l’a bien moins fatiguée que tout ce que
M. A ub ier s’esl permis de dire touchant M. de C h am pflo ur,
père.
Mais
qu’a
donc fait
M. Cham pflour
pour
sou
exciter le
courroux de M. Aubier ? « Il a été placé en Lête de la liste des parena
)> composant
le conseil de famille qui a autorisé la dame de la
)) Monteilhe à
former
son
intervention
» ( page 5 g
de son
m ém oire ).
Oui , sans dnule, M. Champflour a eu la place qu’il devait te n ir ,
suivant l ’article 4 oy du code Napoléon. E st-cç qu’ un père ne doit
pas élre le premier appelé pour autoriser sa fille ? Est-ce qu’ un
grand-père ne doit pas tenir le prem ier rang dans une assemblée
de parens convoqués pour l’intérêt de ses petites-filles ? C e n ’est
pas lui pour cela qui p ré s id e , mais bien M. le juge de p a i x , suivant
l ’article 4 16 du code. Com m ent M. Aubier peut-il donc se répan
dre en sarcasmes
en épigrammes , en reproches virulens" contre
un père qui 11’a fait que ce que la loi l’obligeait de faire ?
M. Aubier ( page 18 de son mémoire ) dit que M. Coste , homme
tV a ffa ires , et guidé p a r M . Champflour , a rédigé la subrogation
du 8 fructidor an 9 ; qu’ on lui a offert une contre-lettre également
rédigée par M. Coste , guidé p ar 31 . Cham pflour , portant que cette
subrogation n ’était qu’ une simple ratification de l ’acte de famille.Plus
h a u t , à la page 1 7 , M. A u bier avait dit qu’à la suite de quelques
conférences avec M. P a g ê s , avocat de M . Cham pflour , il avait
rédigé l’acte de famille du 10 prairial an 9.
N e croirait-on pas , d’après ces expressions , que M. Champflour
a ‘ tout m e n é , tout conduit pour les intérêts de la dame la M on
teilhe , sa fille ; que M. Coste aurait fait les actes sous sa diclée ,
et comme subordonné à ses vo lo n tés; qu ’e n f in ,
M. I’agès lui—
mêm e 11’aurait manifesté dans les conférences que
des pensées
utiles à M. Champflour ? et n’en conclurait-on pas que M. A u bier
a été circonvenu de toutes parts ?
Cependant il suffit de lire sa lettre à sa sœ ur , ci-devant trans
c r i t e , pour y trouver la justification de M. Champflour. On y lit
ces propres mois : P a gès et Boirot trouvaient qu'en se consti
tuant lu i même seulement scs biens présens et à v en ir , ccux-ci
�( 3 f) )
¿laieut suffisamment établis p a r l ’ acte de fa m ille . L a M ontheille
insiste pour se constituer Saulzet , cepsndant Cham pflour ne f a i t
aucune difficulté.
On y a déjà vu que M. Aubier a rédigé tous les actes,et notamment
l ’arrêté de fam ille, auquel les jurisconsultes ont donné leur a p p ro
bation , au point de
n’en pas retrancher une virgule 5 que
M.
C cste a reçu des reproches assez amers de ce q u 'il fa isa it des
objections-, qu’enfin M. Pages avait rédigé le contrat de mariage de
son fils J é r ô m e , de manière que M. Aubier avait seulem ent ajouté
Varticle page 4 .
Puisque M. Cham pflour ne faisait aucune difficulté , il est évident
qu’il s’en est rapporté à M. Aubier.
Pourquoi donc attaquer une personne qui n ’est pas dans la cause,
et ne peut dès-lors se défendre par lui-même ?
Pourquoi l’aflecter par des imputations injustes?
Quiconque connaît M.
A u b ie r et M. Cham pflour } conviendra
que le p rem ier devait avoir de l ’avantage sur le second , car un
ancien magistrat très-éclairé ne peut se laisser surprendre.
E n o u t r e , à quoi servent les d ia trib e s, surtout entre p arens?
L e s gens de bien les m ép risent, et le public s’en amuse. Ce n ’est
point ainsi que l’on conserve l’honneur des familles et la considéra
tion , qui est un bien précieux , très-difficile à obtenir et très-facile à
perdre.
Vainem ent voudrait-on diminuer dans le cœ ur de la Dame de
la M o n t e i lh e , la force des sentimens qu’elle a p our M. son père ,
elle dira hautement qu’aucun père n’a plus fait pour ses enfans
que M. de Champflour ; il s ’est élevé au-dessus des préjugés et
de l’hab itude, pour ne suivre que l ’équité naturelle dans la distri
bution de ses biens entre tous ses enfans ; et Madame de Champflour
en a agi de même ; l ’égalité de tendresse envers eux a amené l'ego Hlé
tte fortune. M. et Madame de Cham pflour se sont dépouïllés&euxmemes avant le t e m s , pour investir leurs trois filles des sept hui
tièmes de leurs propriétés. Ces exem ples 11e sont pas communs
mais ils n en sont que plus dignes d ’éloges. Ainsi l ’amour filial
devant etre en
rapport avec l ’amour paternel , la dame de la
Monteilhe se sentira toujours blessée quand on blessera M, son
père.
�( 40 )
A quoi bon peuvent encore servir ces déclamations de M. Aubier
qui terminent son mémoire ? et surtout cette p h rase ( page 3 9 ):
V o u s avez des appuis , mais nous avons un préfet ju ste 3 et
le tribunal où l'affaire va être ju g ée l'est aussi. Q ui est-ce qui
doute de la justice de M. le préfet., et de celle du tribunal ? Estce donc à M. et Madame d e S t.-M en d e et à Madame de la M o n teiLhe à redouter la justice des autorités et des organes de la lo i?
Si quelque partie de la cause pouvait se flatter d ’avoir des appuis ,
ce serait bien plutôt M. Aubier. Il est partout , il anime tous
les cercles , il compte de nombreux amis dans toutes les conditions
de la société. C ’est l'effet naturel de son m é r i t e , et de l’amabilité
de son caractère. Chacun de ses parens ne peut que l ’en féliciter.
Mais quels appuis peuvent avoir une veuve et deux orp h e lin es,
telles que la dame veuve d e la Monteilhe et ses deux petites-filles,
sinon ceux qui aiment la justice et désirent sa gloire ?
M . Champfl our , leur père et g ran d -p ère, n ’ignore pas que dans
]a prospérité on a beaucoup d 'a m is , mais qu’il en est tout autre
m ent dans l’adversité. Enfin , M. et Madame d e S t.-M e n d e , relégués
dans une maison de campagne is o lé e , loin des vanités du m o n d e ,
ne
cherchent d ’autres appuis que dans le témoignage de leur
co nscience, d’autre bonheur que celui de leur famille , et se reposant
tranquillement dans le sein de la ju s t i c e , ils ne croyent pas qu’on
puisse avoir jamais besoin de la solliciter.
Signé FABRE-DE-St.-MENDE , AUBIER
femme
DE St.-MENDE , DE CHAMPFLOUR, veuve AUBIERLA-MONTEILHE.
M. P1COT-LACOMBE, procureur-impérial .
M.c C. L. ROUSSEAU , ancien avocat.
M.e TRÉBUCHET, avoué.
A
CLERMONT-FERRAND,
Chez J. VEYSSET , Imprimeur-Librair e r u e d e l a T reille.
1 8 1 1.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier, Marie-Françoise. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Picot-Lacombe
Rousseau
Trébuchet
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Marie-Françoise Aubier, épouse de M. Benoît Fabre de Saint-Mende, autorisée par justice, et pour ledit sieur de Saint-Mende, propriétaires, habitant à Saint-Mende, commune de Saint-Yvoine, défendeurs ; et encore pour dame Marie-Claudine de Champflour, veuve de M. Jérôme-Emmanuel Aubier-la-Monteilhe, tant en son nom qu'en qualité de tutrice de leurs deux enfans mineurs, aussi propriétaire, demeurant à Clermont-Ferrand, intervenante et défenderesse ; contre M. Emmanuel Aubier-la-Monteilhe, ancien magistrat, demeurant en la même ville, demandeur.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2123
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2127
BCU_Factums_G2128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53419/BCU_Factums_G2123.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Malintrat (64204)
Saulzet (domaine de)
Crève-Cœur (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53420/BCU_Factums_G2124.pdf
f86c3308424100eea5668c6b510f1061
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RÉPONSE
tribunal
de
De M. A U B I E R - L A M O N T E I L H E père,
au
M é m o ir e
de M. et M m
e D E ST M A N D E ,
et de M me L A M O N T E I L H E , intervenante
en son nom et comme tutrice de ses mineures,
petites-filles de M. AUBIER.
M
a
dame
L am onteilh e est intervenue dans l'instance pen dan te
entre ma sœ ur et m oi.
Lorsqu e le 22 février dernier je form ai m a dem ande p rim itive,
m on beau-frère m ’avoit annoncé la nécessité de prendre les voies
judiciaires , pour obtenir de ma sœur l’acte notarié de transmission
de la propriété du v e rg e r, q u ’elle m ’a promis par acte de mai 1801,
com m e ayant été m a mandataire pour le rachat des biens confisqués
sur moi par suite de m on inscription sur la liste des émigrés (1).
Je m ’étois soumis par m a demande aux conditions convenues
entre ma sœur et m o i , par divers écrits (2).
Son conseil m ’ a mis ensuite dans la nécessité d ’y ajouter des
conclusions tendant e s , 1°. à c e que je fusse maintenu dans la qu a
lité de seul héritier de mon père et d e mon f r è r e , en vertu de m on
contrat de mariage et de celui de m a s œ u r , portant renoncia
tion à toute succession directe et collatérale; 20, à ce que M . de
( 1 ) On a v u dans mon exposé que je n’ai été inscrit qne vingt mois après ma
fuite à cause des mandats d’arrêt décernés contre moi les 11 et 20 août 1 7 9 2 et
que mon inscription a été provoquée de la manière que j ’ai expliquée dans la note
page 7 de mon Mémoire.
( 2) La copie littérale de ma demande est à la fin de cette réponse.
A
Première Instance
Clermont
1erchambre.
Audienco
du 19 décem bre 1 8 1 1 .
�V
<
( 3 )
St-M ande fû t tenu de m e passer quittance notariée de 12,000 liv.
q e je lui ai payées ou fait payer pour solde de la dot de ma sœur.
11 n ’y a en cela rien qui puisse concerner ma belle-fille et mes
pctiles-fillcs, ni d ir e c te m e n t, ni indirectement ; leur intervention
m e paroissoit une faute tirant à conséquence pour elles. J’avois
cru la leur faire éviter, en publiant, (dès que j’eus avis de ce projet,
et avant qu ’on le r é a lis â t ), un exposé des faits bien sincèrement
détaillé.
C e la n ’ a pas empêché l’intervention ; elle a été accompagnée d ’un
mém oire im p rim é, où les faits sont dénaturés, et les questions tra
vesties au nom de ma belle-fille d'une manière offensante pour m o i .
L e moteur de nos divisions vouloit absolument vin procès où il
p ût aigrir les esprits , en d o n n a n t« m a sœur l ’air d ’être infidèle à
ses prom esses, à moi l ’air d ’être in g r a t , et où ma belle-fille fû t
l ’organe de ses calomnies.
Je suis obligé d ’y répondre. L ’énorm e quantité d ’erreurs et de
suppositions m e forcera d ’être un peu long; je le serois davantage,
si je détaiilois de nouveau les faits. Je prie nos juges de relire m on
exposé. J’y ai expliqué co m m e n t ma sœur m ’ avoit offert en 1795
de se charger de mes pleins pouvoirs pour toutes mes affaires de
F r a n c e ; com m ent elle s’étoit spécialement chargée de sauver mes
b ien s, et d ’y em ployer tous les m oyens que les circonstances demanderoient :
C o m m e n t je lui avois d ’abord e n v o y é , par lettres , des pouvoirs
confidentiels illimités pour tous les cas, pouvoirs qui avoient été sui
vis , confirmés par des procurations notariées, q u ’elle a accepü-es.
Je crois y avoir bien prouvé q u ’elle avoit soumissionné mes biens
pour mon c o m p t e , et reconnu les posséder pour rnoî pour m e les
conserver.
J’ai dit pourquoi j\ 5tois encore sur la liste des émigrés, quand j ’ai
m arié mon fils L am o n te ilh c, et com m ent ma sœur a été alors mon
prête-nom pour le su b ro g e r, pour mon compte , à |a propriété de
S a u lz e t , de m êm e q u ’elle l’avoit été pour la revente de partie de
me* b i e n s , et qu ’elle l ’est encore pour le \ c r g e r , objet de m a
demande.
�^
( 3 )
P ou r suivre l ’ordre judiciaire, j ’exam inerai, avant de passer au
fond , si l'intervention est recevable.
Je finirai par prouver qu ’ il n ’existe point d ’acte régulier et va
lable de transmission de la propriété du verger , com m e on l’a sup
posé pour échapper .par un faux-fuyant à une demande qu ’on sent
incontestable.
O n donne pour base
à
l ’intervention de IVÏad. Lam onteilhe , la
supposition que je n ’ai formé cette demande que pour me préparer
les m oyens d ’attaquer le don de Saulzet.
Cette assertion est dém ontrée fausse , i*. par le texte m êm e de
m a d e m a n d e , et toutes mes conclusions; elles sont imprimées à
la fin , chacun peut y vérifier q u ’il n ’y a pas un m ot qui prête à
cette sup position ..
Elle est démontrée fausse par les ratifications que j’ai données avant
et depuis m a d e m a n d e , car elle est du 5 avril dernier, et c ’est le 2S
juillet suivant que j’ai signé, dans le cabinet de ÎVT. F avard , une tran
saction par lui rédigée, par laquelle je ratiflois le don de Saulzet (1).
Enfin , elle est démontrée fa u sse , par tout ce que j ’ai d i t , f a i t ,
é c r i t , imprimé dans cette affaire. V oyez pag. 3 1 , 32 , 34 de m o n
exposé.
L a supposition que je veux attaquer le don de S a u lz e t, prend
un caractère de calomnie plus g rav e , quand on dit que je v e u x , dès
à
présent, réduire mes petites-filles
à
la moitié de S a u lze t, et q u ’elles
sont menacées de m e voir vendre la moitié que je reprendrai ,
de m a n iè r e ,d it-o n , p. 35 , que l’autre moitié seroit ensuite attaquée
pour contribuer aux légitimes de mes autres enfans.
Je savois que l ’auteur du M é m o ire seroit chargé de débiter
cette calomnie ; pour lui en éviter les r e g r e ts, M . I m b e r t , mon
a voue, a été de ma part lui c o m m u n iq u e r, avec diverses autres
pièces, l’original d ’un écrit fait triple entre ma sœur et moi et
m on fils L a m o n t e ilh e , par lequel je m ’étois volontairement en-
( 1 ) C é to it ma. sœur qui avo ;t proposé M. Favard pour m édiateur.
A 2
�(
4
)
gagé à ne jamais vendre aucune propriété, e t'j’avois statué que si
je les parlageois avant ma m o r t , entre mes e n f a n s , ils ne pourroient rien vendre ; j’avois donné l’exemple de cet engagem ent, pour
obtenir le m êm e engagement de mes enfans.
L ’auteur du M ém oire répondit qu ’il avoit le double de cet écrit;
il l’a bien l u , puisqu’ il en parle plusieurs fois dans ce M é m o ire
pour d'autres o b je ts; ainsi, quand il m ’a accusé , et a répété l’accu
sation en l’a g g r a v a n t, il avoit sous ses y e u x la preuve écrite de la
fausseté de son accusation.
Il dit que le verger et le bien de Crève-C œ ur sont assurés à mes
autres enfans; il les compte com m e biens paternels, parce q u ’il sait
que c ’est moi qui ai payé le prix viager de l’achat de C r è v e -C œ u r ; il
porte ces deux objets ensemble à 100,000 liv. ; il estime Saulzet
i 3o,ooo üy. : d o n c , d'après la connoissance q u ’il avoit de mon
engagement
ne r*en aliéner , et de ne pas souffrir d ’aliénation,
il ne pouvoit craindre pour mes petites-filles, au pis-aller, et selon
sa manière de co m p te r, q u ’un retour de lot de i 5 ,ooo 1. ; donc il ne
pouvoit en aucun cas craindre cette revendication de moitié de
Saulzet, et encore moins que je le vendisse; cela devoit lu i; faire
sentir que son accusation étoit fausse sous tous les rapports?
C e n ’est pas le seul point de ce M é m o ir e , où ce q u ’on lit dans
une page est démenti par ce qui est dit dans qu elqu’autre.
Observons que quand m on fils L am onteilh e a reçu S a u lz e t , il
étoit afferm é 3,000 l i v . , qu ’on ne l’a estimé que 60,000 l i v . , parce
q u ’en 1801 les biens n'avoient pas pris toute leur v a le u r , et que les
grains étoient à bas prix ; on avoue q u ’il vaut aujourd’hui i3 o ,o o o l.,
quelquefois on le porte jusqu’à i 5o,ooo l i v . ; donc les mineures
L a m o n te ilh e , m êm e en faisant le retour de i 5 , 000 l i v . , auroient
encore le double de ce que j ’avois promis à leur p ère; ainsi quand
l ’auteur dy M ém oire a ajouté à sa supposition que la famille Cham pilour se trouveroit trompée , il ne pouvoit pas le croire.
A i - j e fait d ’ailleurs quelque chose qui annonce rarrière-pensée
qu ’on me prête i Entre beau-père et belle-fille, les procédés ne sont
pas sans conséquence, pour l ’intérêt des enfans et pour prévenir
�(5)
J4)
les procès ; puisque l'auteur du M ém oire nous y m è n e , je vais dire
exactement tout ce qui s’est passé.
Il y a environ dix m o is, qu ’ayant fait demander à M a d . L a m o n teilhela permission d ’aller la voir, je lui présentai devan t M . de C lialier
son beau-frère, e t M .d e T r é m i o l e s p è r e , qui m ’avoient accompagné,
un mém oire où je lui rappelois, dans les termes les plus affectueux,
que son m ariage avoit été décide par m a confiance dans son carac
tère ; où je lui représentois que Saulzet valoit le double de ce
q u ’on l’avoit e s t im é , tandis que la perte de 80,000 liv. de liqui
dations faisoit craindre à ses beaux-frères de ne point a vo ir, après
m a m o r t , leur légitime de rigu eu r, et m e m ettoit dans une gêne
telle que je ne pouvois plus les aider ; ou je lui offrois la confir
m ât on de tous les avantages dont je pouvois disposer, sans lui rien
dem ander de mon vivant de plus que ce q u ’elle rendoit, quoique le
revenu en fû t double de celui sur lequel elle avoit dû co m p te r ,
de sorte q u ’elle jouiroit paisiblement jusqu’à ma m o rt ;
O ù je la priois de prendreenconsidération que mon fils aine avoit
renoncé , pour faciliter son m a riag e , aux avantages q u ’il avoit dû
espérer, étant Paine et indiqué par mon père pour avoir la préfé
rence ; que sa soumission
aux décrets de
l ’E m p e r e u r , d ’oc
tobre 1807 , lui ayant fait perdre l’emploi honôrable et utile qu’il
a v o it, et que les malheurs de la Prusse ne lui permettant pas d ’y
trouver des ressources jusqu’à la m o tt de son b e a u -p è re, je la
priois de faire à mon fils aîné quelques avances dont il lui assureroit la r e n tré e , tant en intérêt q u ’en ca p ita l, sur tout ce à
quoi il avoit déjà ou pourroit avoir droit ; que M . d ’Orcières étoit
p o r te u r,
à cet e f f e t , d ’une procuration pour lui en passer a cte,
et pour plus grande sûreté , d ’une lettre de change de 6,000 liv.
M a d . Lam onteilhe me répondit q u ’elle en conféreroit avec son
conseil. J’ai long-temps sollicité une réponse , mais inutilement.
Sans lui faire aucun reproche , je lui ai fait dire par un ami
com m un , que je renonçois à ma p riè re , qu'elle m e fcroit plaisir
de me renvoyer mon M ém oire. Elle l'a gardé. On peut y vérifier
si ce que j’ ai dit est vrai : je n ’ai fait aucune autre démarche. Dos
�»
'
( 6 )
représentations d'un beau-père à sa belle-fille , des prières ( car
je me suis servi de ce m ot ) , ne sont pas un trouble de possession,
quand m êm e je n ’aurois pas retiré ma prière com m e je l’ai fait.
C ’est le cas d ’ajouter ici, que depuis son mariage M a d . L a m o n teilhe, ma belle-fille , a laissé sans réponse toutes les lettres que je
lui ai écrites sur le ton le plus a m i c a l, presque toutes étrangères à
toutes affaires, et m êm e celles accompagnées de manière à exiger
réponse.
Sachant q u ’elle répondoit à d ’autres m em bres de la f a m ille ,
j ’ai cherché à pénétrer la cause de la différence. O n m ’a a v e r t i,
dès 1 8 0 2 , q u ’on le lui avoit d é f e n d u , parce que ses réponses
pourroient se trouver en contradiction avec le plan q u ’on avoit arrêté,
dès q u ’on eut obtenu les signatures qu ’on d é s ir o it, de s ’acheminer,
petit à p e t i t , à soutenir un jour q u ’on ne tenoit rien de moi ; à
m e retrancher de ma fam ille ; à m ’y faire traiter com m e m o rt
civilem ent u son égard. D e la est venue l’excessive hum eur q u ’on
a eue quand j ’ai e n v o y é , en 180 6, le décret du 10 brumaire an 1 4 ,
par lequel S. M . l’E m pereur , en me permettant de garder la
place de chambellan du roi de P r u s s e , me conservoit tous mes
droits.
Il m anquoit aux amertumes dont on m ’a fait abreuver par les
dames derrière lesquelles les directeurs de ce plan se tiennent cachés,
de me voir signalé co m m e un spoliateur de mes petites-filles, pour
lesquelles au contraire je me suis dépouillé m oi-m êm e outre m esure.
D a n s le f a i t , l’instance où ma belle-fille intervient ne conduit
pas plus à la question de savoir s’il y aura lieu h retour de lot
après ma m o r t , q u ’à celle d ’un prétendu projet de m a part de
revenir contre les actes par lesquels j ’ai d o n n é , ou fait d o n n e r ,
Saulzet à mon fils représenté par mes petites-filles , puisqu’on ne
pourroit agiter qu ’après ma m ort cette question de retour de l o t ;
car ce n ’est q u ’alors q u ’on peut savoir ce que je laisserai.
L ’auteur du mém oire défend un acte rédigé par moi , où il est
dit que mon fils L am onteilhe sera dispensé de rapporter Saulzet
en partage. Je ne l’ ai pas attaqué ; et si mes enfans vouloient
�( , )
l ’a tt a q u e r , ils ne pourrolent le faire qu ’après ma m o rt. E n quoi
l ’acte notarié de transmission du verger que je demande ù m a
sœur , peut-il empêcher mes petites-filles de le faire valoir alors?
Il doit suffire pour faire déclarer cette intervention non recev a b le , d ’observer ici que l ’acte de mai 1801 , par lequel ma sœur
s’ est obligée à me passer , par-devant notaire , la transmission que
je de m a n d e , est signé dem enfiis Lam onteilh e. Sa veuve intervient
donc pour s’opposer à çe qui a été convenu avec son mari ; elle
ne peut pas m êm e dire que cette convention n ’a pas été bien
connue de la fam ille Cham pflour avant le mariage. E n e f f e t , on
dit de sa part que le projet de fixer les principales propriétés sur
la tête de mon fils L a m o n t e ilh e , qui est énoncé dans le mêm e
a c t e , avoit été la première base de leur confiance. Elle intervient
donc pour entraver l ’exécution d ’un acte q u ’elle réclam e dans le
m êm e M émoire sous d ’autres rapports.
Cependant cette intervention a été autorisée par une délibération
surprise à six parens. D e p u is, plusieurs d ’entre eux m 'o n t dit, ou fait
d ire, q u ’on leur avoit persuadé que j ’avois déjà attaqué mes petitesfilles, et qu ’ilsavoient cru seulement autoriserla tutriceà les défendre.
D an s
les s i x , il
y
en
a
eu quatre du côté C h a m p flo u r , c ’ est-
à -dire, de ma belle-fille , deux seulement du côté p aternel; tandis
que la loi veut égalité de n o m b 1e , à peine de n u llit é , et que la cir
constance le demandoit encore plus rigoureusement, puisque c ’étoit
la m è r e , née C h am pflour, qui dem andoit une autorisation pour
faire plaider ses mineures contre moi leur aïeul paternel.
Il me semble que l’intérêt des m ineures, autant que la d é c e n c e ,
et mille autres raisons, devoient engager le subrogé tuteur, E m m a
n u el Au bier de C o n d a t ( 1 ) , à chercher à s'éclairer avec m oi sur le
véritable état de la question, avant de faire com m encer les hostilités
par mes petites- filles. Cela eût probablement amené une concilia
( 1 ) Mon cousin et mon fille u l, dont les im prudences avoient été mises à ma
ch a rg e, m avoient compromis et ont tan t retardé ma ra d ia tio n , comme je l a i d it
page »3 de mon Expos«?.
�t i o n , même avec m a sœur ; mais ce n ’étoit pas pour être conciliât eur
que le m oteur de nos divisions l ’avoit fait venir d ’Ardes.
O n avoit tourné l ’exposé de cette délibération de m anière q u ’on
eût pu donner à l ’aggression le sens dont j'ai p a r l é , page 34
d e mon E x p o s é , si celui-ci ne lui eût pas ôté tout espoir de faire
réussir le parti q u ’on vouloit tirer de mon inscription sur la liste
d e s 'ém igrés.
L ’auteur du mém oire dit q u ’au contraire la délibération porte
« autorisation pour défendre les mineures , dans le cas où je vieil-
» drois à alléguer m a m ort civile pour détruire l’effet des signa» tures apposées à ces titres. » L a délibération du conseil de
fam ille ne contient pas cela. A u contraire , elle porte pouvoir
d'intervenir dans une affaire où il ne s’élève aucune question
contre les mineures. O n doit donc en conclure que m on Exposé
ayant renversé son premier p l a n , il s ’est retourné.
.
II y a une autre conclusion à en tirer, c ’est qu ’attendu qu'au lieu
d ’alléguer ma m ort c i v i l e , j ’avois excipé dans mon Exposé de ce
qu ’elle n ’avoit pas pu vicier les divers actes que j ’avois passés avec
m a famille , parce que ces actes sont du droit des gens , et attendu
q u ’au lieu d'attaquer ces a c t e s , j’en ai offert la ratification, il
n ’y avoit pas lieu à l’intervention. M ais la besogne étoit p rê te ;
on n ’a pas voulu q u ’elle fu t p e r d u e , et on s ’est contenté de la
r e to u r n e r , au risque de sc voir en contradiction avec soi-m êm e
ü chaque page.
Si l ’intervention étoit recevable, il faudroit mettre en cause
mes autres e n fa n s; car ils se trouvent parties nécessaires dans la
cause , dès q u ’on veut traiter d ’avance de leurs droits sur mes
biens après ma m o r t , sur la qualité et la quantité des biens qui
doivent entrer en partage.
L ’auteur du M ém oire annonce aussi le projet de m et t r e en
cause le fils et le petit-fils de ma sœur. Ici on ne peut s'empêcher
de reconnoître q u ’il suit bien docilement toutes les idées du m o
teur de nos divisions. V o u la n t éterniser l’a ffa ir e , il veut que le
procès s’établisse* entre ma s œ u r , son m a r i , ses enfans , m o i , mes
en fan s,
�(9)
e n f a n s , mes petits - en fan s , en diverses qualités op p osées, d'où
doivent dériver diverses prétentions et des droits contradictoires ;
et pour q u ’ils le soient encore plus , ils seront à traiter sur h yp o
thèses opposées ; l’u n e , où m a sœur auroit acheté p our elle ;
l'a u t r e , où elle auroit acheté com m e m a mandataire ; de là
doivent n altredeux séries différentes de droits opposés sur les m êm es
biens , à traiter entre l’aieul et les petites-filles ; — entre le beaupère et la belle-fille ; — entre le frère et la sœ u r; — entre mes fils
et leurs nièces mes p etite s-fille s ; — entre m a sœur , tante et
grand’ t a n te , et mes fils ses neveux et mes petites-filles ses petitesnièces; — entre les co usins-germ ains, mes fils et les enfans de
M a d . de S. M a n d e ; entre les représentans et les représentés.
Il veut que M . de S t - M a n d e , m on beau-frère , y figure , no nseulement co m m e autorisant sa f e m m e , mais encore com m e ayant
acquis f sous le nom de sa f e m m e , un droit personnel à mes pro
priétés. C ’est en faire le propriétaire malgré lu i , car il avoue que
M . de S t-M ande ne l'a jamais voulu ; c'est ce que j'ai déjà dit
dans m on e x p o s é , en rendant hom m age à la pureté de son â m e ,
à la loyauté de son caractère.
C ’est com m e héritiers présomptifs d e M . et M a d . de S t-M a n d e ,
qu’il veut y appeler leur fils et leur petit-fils, a fin , d it- il, qu 'en
cette qualité ils puissent consolider le don de S a u lz e l, en fa v e u r
de mes petites-filles, en contractant judiciairement la renonciation
de leurs droits à ce b i e n , après la m o rt de m a sœur ; ainsi il
com m ence par mettre en doute la validité du don d e S a u lz e t, et il
démolit pour avoir le plaisir de faire du nouveau.
M ais quand le C o d e Napoléon annulle tout traité sur droits suc
cessifs non ouverts, faits pendant la vie de ceux dont on doit hé
r i t e r , quand il proscrit tout moyen*indirect de les lie r , ne proscrit-il pas cette espèce de comédie de mise en cause, de déclarations,
de co n v e n tio n s, avec lesquelles l’auteur du Mém oire veut créer
un m oyen indirect de faire ce que la loi défend ? Il n'en dem eureroit qu ’une chose: une reconnoissance en faveur du fils et du petitfils de M a d . de S t-M a n d e, d'un droit éventuel sur S s u lz e t , qu'ils
B
�n ’ont pas. A u cu n e renonciation ne pourroit en détruire l’effe t;
celle de M . de S t.-M an d e fils, quoique m a jeu r, ne vaudroit pas
m ieux que.celle, d e : M . Chardon pour son mineur ; " M . de St.M a n d e fils, tout en feignant de se faire mettre en cause pour
servir mes petites-filles, auroit acquis contre elles, de m êm e que
le mineur Chardon , le droit de d e m a n d e r , après la m ort de ma
sœ u r, la nullité de la subrogation de Saulzet ; celte nullité se trou■veroit déjà préjugée , et m êm e leur droit reconnu , par l ’adhésion
de M a d . Lam onteilhe à ce systèm e: je ne veu x pas dire que ce
soit cette seule arrière-pensée qui rende M . de S t.-M a n d e fils si
ardent pour ce système ; il y met peut-être plus d ’amour-propre '
que de spéculation d ’intérêt; mais il n ’en est pas moins vrai que
M a d . Lam onteilhe a ya n t un ¡peu différé de présenter sa requête
en in terv en tio n , M . de S t.-M a n d e fils est accouru ici ; il n ’a
pas quitté avant de l’avoir vu présenter et d ’avoir vu imprimer
l ’adhésion de M ad. Lamonteilhe à ce systèm e, le plus dangereux
de tous ceux qu^on put imaginer contre ses enfans.
J ’ai prouvé que M a d . Lam onteilh e étoit non recevable dans son
interven tion ; que si elle étoit recevable, on ne pourroit pas se
dispenser d ’appeler en cause mes autres e n fa n s, au lieu de ceux
de M a d . de S t-M ande, tout à fa it étrangers à cette a f fa i r e , sur
tout pendant la vie de leur m ère.
3q passe au fond de l ’instance.
J 'y répondrai d ’avance à tout ce q u ’on voudroit faire valoir pour
M a d . L am o n te ilh e, si l ’intervention étoit admise.
C o m m e l’auteur du M ém o ire me reproche un défaut d ’ordre et
de clarté, je m ’astreindrai à l ’ordre judiciaire de» questions à
juger :
i*. Suis-je héritier de m on p ère?
2*. M . de St-Mande doit-il m e donner quittance des 12,000 liv.
que je lui ai payées ou fait p a y e r, pour solde de la dot de ma sœur ?
5*. M a sœur a-t-elle été ma mandataire ?
4*. E n fin , la transmission q u e lle m ’a promise par acte de mai
1 8 0 1, est-elle faite ?
�< ">
i er0. Question.
- t *
Suis-je héritier de mon p è r e ? L ’ auteur i du
M ém oire avo ue, page 6 , que je sms'héritier u niversel' de m on
p è r e , et page 24» <ïue suivant la loi du g fructidor an 9 , l’ ins
titution contractuelle faite par mon p è r e , en m a fa v e u r , restoit
toujours valable ;
•
20. Q ue m a sœur a renoncé à toute succession directe èt co l
latérale et à tous droits échus et à échoir. V o y . page 6 . '
Il est prouvé que je n’étois pas sur la liste des ém igres, quand
m on père et mon frère sont morts ; par conséquent je dois être
maintenu dans la qualité d ’héritier de mon père et de mon frère (1).
Quand on a l u , t page 6 , que ma sœur a renoncé à tous droits
échus et à échoir ; quand on a l u , dans dix endroits d iffé r e n s ,
que son mari et elle ont voulu s’en tenir l à , com m en t concevoir
q u ’on soutienne, page 5 i , que m a sœur pouvoit prétendre à un
90 dans la succession de m on p è r e , et à la moitié dans la suc
cession de m on f r è r e ? vouloient-ils avoir ce 9 e et cette moitié
au par-dessus dea 3o,ooo l i v . , ce qui eût été contraire aux con
ventions? alors il ne falloit pas déclarer q u ’ils s’en tenoient à la
dot co n stitu é e , q u ’ils étoient fid è le s à leur renonciation à toute
succession directe et collatérale , a tous droits échus et à échoir.
Si
on n ’a feint un instant de vouloir sauver ce 9 e et celte
m o itié , que pour leur assurer de plus en plus ce que je leur d e v o is,
et épargner quelques avances jusqu’à ma rentrée dans mes droits ,
com m e M . et M a d . de St-Mande ont été entièrement payés des
5o,ooo liv. pour mon com p te, avec des deniers q u ’ils ont reconnu
m ’appartenir, ce qui est prouvé par les actes q u ’ils ont signés ; nous
avons fait une opération de toute ju stice, en laisant ce 9" et cette
moitié dans la masse qui m ’ appartenoit, lorsque nous avons traité
et com pté ensemble, par l’acte de mai 1801.
H « ’y a rien à changer à ce qui est fait à cet égard ; l ’acte de
t
( 1 ) O u sait que le testam ent Je mou père appcloit mon fils oint; à me rem pla
cer si j’avois ¿té exclu ; l'auteur du M dm oiie u’a pas pu le n ier ; mon contrat de
mariage y autorisoit mou p ère.
B 2
�( 12 )
mai 1801 est une transaction irrévocable, ainsi que tout ce qui
a été fait d ’après cette ba6e.
Q uels que pussent être les regrets
s’il en a ,
de M . de S. M a n d e fils,
car son père et sa mère pensent trop bien pour en
avoir ; quand m êm e j ’aurois envie d ’y déférer ( en quoi il s’y est
excessivement mal p r i s ) , il ne seroit plus t e m p s , puisque tout et
surtout les avantages faits à L a m o n t e ilh e , ont été pris sur le
résultat de cette opération.
Je ne m ’en cache pas, c ’est à M . de S t.-M a n d e fils, et point à son
père, que j’attribue tout ce système. Aussi, quelles erreurs, m êm e sur
les faits les plus aisés à vérifier I P a r e x e m p le , il y donne à m on
père quatre enfans au lieu de sept ; il y est dit que m a mère et m on
frère Pierre sont morts après mon m a ria g e , et ils sont morts sept
ans avant.
M a sœur n ’auroit pas donné des renseignemens aussi erro n é s ,
et si elle avoit lu le M ém oire avant q u ’il fû t im primé , elle auroit
certainement redressé celte e r r e u r , co m m e tant d ’autres qui lui
font perdre une partie d u m érite de sa belle conduite.
L ’auteur d u M é m o ire suppose que j ’ai reconnu à ma sœur la
qualité d 'h éritiè re , en disant dans l ’acte de m ai 1801 que je pro
met tois de la garantir de tout ce q u ’on pourroit lui demander
co m m e héritière de m o n père ; m ais c ’est au contraire précisé
m ent parce q u ’elle demeuroit fille d o t é e , avec renonciation à m o n
p r o f it , et parce que je restois héritier u n iv e rse l, co m m e il le
d i t , page 34 » <îue cette clause lui promet d e la garantir contre
ceux qui la supposeroient héritière.
M a sœur est née à C l e r m o n t , pays de droit écrit ; c ’est là que
son cotnrat de mariage a été passé , et que m on père et mon
frère étoient domiciliés quand ils sont m orts , et cependant l’au
teur du M ém o ire invoque la C o u tu m e d ’A u v e r g n e , sur le règle
m ent des qualités et droits à leur succession.
T o u t est erreur en droit com m e en fait.
a 8 Q uestion . C e que l ’auteur de ce M ém oire d i t , pour que
M.
de
S t.-M a n d e
soit
dispensé
de
donner quittance
des
�12,000 lîv. par lui tou ch é e s, et à lui payées pour m on com pte
pour solde du reliquat de la dot de sa fe m m e , est rem arquable,
com m e choquant les notions les plus communes.
C e tte quittance existe d é jà , dit-il, parce q u e , lors d ’un 2* compte
de sa gestion que ma sœur m ’a rendu le 27 vendémiaire an n ,
j ’ai mis en marge du double, qui est dans les mains de M a d . de
S t - M a n d e , la mention qu’ils avoient retenu les 2,000 liv. dont
j ’étois demeuré redevable envers le mari sur la dot de m a sœur, lors
du précédent com pte de mai 1801.
" M ais outre que pareille mention n ’est point une quittance suf
fisante , elle n'est pas sur m on d o u b le, elle est seulem ent sur celui
de M . de S t-M an d e. O r , le bon sens dit, co m m e toutes les l o i s ,
que la quittance doit être dans les mains de celui qui se lib è r e ,
et non de celui qui a reçu.
M a confiance en eux étoit toute entière ; ils la m éritoient ; ma
6œur étoit chargée de mes affaires; j ’ai cru que son m ari lui
remettroit la quittance. C e la a été différé ; q ua n d je l'ai dem andé ,
on a voulu larder cette quittance de clauses qui m ’ôtoient le
verger et les réserves, et d ’ailleurs très-nuisibles à mes enfans.
• C e tte quittance nepeut m ’être refusée ; elled oil être pure et simple.
3* Q uestion. M a sœur a-t-elle été m a mandataire ?
L ’auteur du M é m o i r e , fertile en questions préalables ,
me
r e p ro ch e , page i 3 , d ’avoir o u b lié de conclure à ce que M . de
S. M a n d e autorisât sa fem m e à plaider sur cette question.
Je réponds que cela étoit in u tile ; le C o d e N a p o lé o n , article
1 9 9 0 , a confirmé l’ancien principe que la fem m e peut être
mandataire sans être autorisée par son m a r i , celui-ci ayant tou
jours voulu qu’elle usât de cette fa cu lté , m a sœur en a y a n t u s é ,
et m ’ayant déjà rendu c o m p t e , sans l ’assistance de son m a r i ,
com m e cela est prouvé par l’acte de m ai 1801 ; enfin ma demande
n ayant pas alors d ’autre objet que m a réquisition de l ’acte nota
rié qu elle m ’avoit promis s e u le , et q u ’elle devoit passer seule ,
il eût été déplacé d ’appeler le m a ri qui vouloit éviter de s en
mêler. C ’est précisément pour constater q u ’ il ne se mêloit de
�( *4 )
rien de ce qui concernoit ce m a n d a t, q u ’il a voulu ensuite que
m a soeur fu t autorisée par justice. On voit par là que l’auteur
du M ém oire n ’a point consulté M . de S t - M a n d e , en faisant
celte difficulté.
L ’auleur du M ém o ire avoue , i*. que les inscrits sur la liste
des émigrés , de même que tous bannis , ont été capables des actes
du droit des g e n s , et que l’achat est un contrat de ce genre ; 2°.
que le mandat étant aussi un acte du droit des g e n s , que l’inscrit
pouvoit avoir un mandataire qui fit pour son compte tous les actes
du droit des gens. A i n s i , de son aveu , ma sœur a pu être m a
mandataire , à l’effet de r a c h e te r , pour m on compte et à m on
p r o f it , les biens sur moi confisqués.
Il ne s’agit donc plus que de savoir si elle a reçu et accepté
m on mandat.
J ai déjà démontre dans mon E x p o sé , par une chaîne de faits
bien notoires , surtout a C l e r m o n t , qu elle l’avoit reçu , accppté^
q u ’elle avoit acheté pour mon co m p te , qu ’elle avoif été mon prêtenom pour posséder et gérer, pour revendre une partie, pour subro
g e r , par mon o r d r e , m on fils L am onteilh e à la propriété de
S a u lz e t , et j ’ai dit q u ’elle étoit encore mon prête - nom pour me
conserver le verger, sous la condition de m e le transmettre ( i ) .
O n a répondu à m a demande par une sommation de déposer
au g r e f f e , avec inventaire, toutes les pièces qui pouvoient prouver
que ma sœur avoit été ma mandataire et mon prête-nom .
Ici je dois observer q u e , lors du procès verbal de non-concilia
tion , ma sœur et son m a r i, loin de nier les f a i t s , Se sont bornés
u dire q u ’ils étoient inutiles ; ce qui emportoit aveu.
• ^ après cela , j ’aurois cru blesser la délicatesse de ma sœur , en
supposant qu ’elle put jamais autoriser un doute sur un fait si
notoire , sur un fait où tout étant son o u v r a g e , je n'avois jamais
cru avoir besoin d ’autres preuves que sa conscience.
( i ) J'observe i c i , par a n ticip atio n , que la preuve que cette transmission n’est
pas encore fa ite , c ’est qu’on fait encore aujourd'hui les actes et dém archés relatives
i* la propriété du v e r g e r , sous son nom.
�L e Palais n ’a vu dans cet incident qu ’ une envie de paralyser
l'a ffa ir e , calculé sur la gêne dans laquelle on me sàvoii. En e ffe t,
cela ne me m eltoit pas seulement dans le cas de faire t im b r e r ,
enregistrer deux cents lettres de ma sœur , ou de ceux avec qui elle
m ’avoit mis en relation à l ’occasion de ce m a n d a t, lettres contenant
la série des instructions qu ’on me demandoit à chaque instant et
de leur exécution , et contenant de plus mention des promesses
et de payemens qui dévoient donner lieu à de gros droits , cela
m ’eût aussi forcé à déposer au greffe plusieurs sous-seings privés,
dont l'am end e,et le double droit auroient porté les avances à envi
ron 10,000 fr.
L e tribunal m ’a délivré de cette ch ica n e , en autorisant la co m m u
nication amiable de toutes les pièces entre défenseurs, com m e je
l ’avois offert.
D ès que le défenseur de ces dames a vu que cette com m unica
tion ne devoit plus me coûter de frais, il a dit q u ’il nen avoit plus
besoin; au reste, je n ’avois pas attendu c e lle décision pour envoyer
lui o ffrir de faire porter chez l u i , de confiance, tout ce que j'avofs
en mon pouvoir , en lui observant, com m e je l ’avois déjà répondu
par é crit, que lorsque j ’étois reparti pour Berlin , en 1802, lais
sant à ma sœur une nouvelle p rocuration, et encore plein de la
plus grande confiance , je lui avois laissé tous mes autres p ap iers,
M a d . Lam onteilhe doit avoir le reste; l'acte de mai
1 8 0 1, fait
foi que tout avoit été alors remis à son mari par m a sœ u r, et
que rien ne m ’avoit été remis.
E n atte n d a n t, et pendant qu ’il travailloit encore à son m é m o ire ,
je lui avois e n v o y é , co m m e il l’a v o u e , les originaux de sept le t
tres plus que suffisantes pour constater que m a sœur avoit reçu
de moi des pouvoirs illimités confid en tiels, et qu'elle avoit reçu
diverses procurations en form e ( 1 ) , et cela , avant la soumission
de mes biens.
( 1 ) Dans ce nombre il y en avoit une légalisée p a r le m inistre de France à B e r liu .
�( 16 )
C e tte soumission est du 26 fructidor an 4 «
U n e de ces lettres portant expressément mention de procurations,
est du 16 mars p ré c é d e n t, une autre du
4 mai ; ces dates y sont
d e la m ain de m a sœur : leur contenu fixe la date de l ’a n n é e ,
et prouve surtout q u ’elles sont bien antérieures à sa soumission de
m es biens, puisqu’il est dit dans celle du 4 m a i , q u ’elle va faire
usage de m a p ro cu ra tio n , pour s’opposer a u x ventes ou au moins
les retarder.
C ’est parce que ces lettres contenoient des preuves sans réplique
de la réception du m andat confidentiel , des procurations no
tariées et de leur acceptation ; c ’est parce q u ’il a su q u ’il y en
avoit une m ultitude aussi claire s, où m a sœur se déclaroit m on
agent d'affaires et mandataire comptable ; c ’est parce que ce
dernier point étoit prouvé par l’acte de mai 1801 , constatant
compte et apurement de c o m p te , que l’ auteur du M é m o ire a
imaginé de dire que tout cela étoit insignifiant, dès que je ne justifiois pas d ’un acte synallagmatique antérieur à la soumission de
mes b ie n s , qui portât qu’elle ( m a sœur) se constituoit m a m anda
taire et m on p rête-nom , qui détaillât nos obligations réciproques
et leurs conditions, et qui fut fait double s’il étoit sous-seing privé.
Il a invoqué à l’appui de ce systèm e l ’article i 325 d u C od e
N apoléon.
J ’observe d ’abord qu ’ il y a dans le C o d e un titre particulier
du m a n d a t ; que ce n ’est pas là que se trouve cet art. i 3a 5 ;
il est chap. 2 des co n v e n tio n s, section de la preuve littérale.
D a n s le chapitre du m a n d a t, qui est la véritable et seule loi sur
ce d o n l il s’agit , on l i t , article 1 9 2 5 , que le m andat peut être
donné par lettre , que l'acceptation peut même n étre que ta cite,
e t résulter de l'exécu tion qu i lu i a été donnée par le mandataire.
L e s lettres de ma sœur prouvent q u ’elle a reçu mes pouvoirs ;
les lettres de ma sœur portent acceptation de me* pouvoirs; ses
lettres portent q u ’elle a exécuté le m andat, et que dans son exé
cution elle s’est déclarée mon agent d ’a f fa ir e s , par conséquent
ma mandataire ; l ’acte du 8 mai porte q u ’elle a v o u l u , com m e
tout
�.
,
(
*7 )
fs s
tout m andataire, rendre c o m p te , avoir d é ch a rg e , que cela a été
f a i t ; q u ’elle a de m a n d é , com m e tout mandataire
des actes de
ratification et de garantie envers et contre tous ; que je les ai
donnés.
P eut - il y avoir jamais une réunion plus frappante de preuves
de tout genre du m andat? ne vont-elles pas au-delà de ce que le
code demande , pour que le mandataire soit bien irrévocablement
obligé ?
T o u s les raisonnemens que l’auteur du M ém oire fait sur ce que
j ’ai témoigné dans la lettre par laquelle je répondois à l’avis de
l ’exécution de mon m a n d a t , un peu d ’élonnernent de ce que m a
sœur s’étoit hâtée , ne prouvent r ie n , si ce n ’est que j ’avois con
servé plus long-temps l ’espoir d ’une radiation et de la restitution
gratuite.
M ais cela mêm e prouve q u ’elle m ’avoit donné avis q u ’elle avoit
acheté com m e ma mandataire ; car pourquoi auroit-elle voulu
m e prouver qu ’il y avoit urgence à ce q u ’elle r a ch e tâ t, si elle n ’avoit pas été e n cela m a m andataire, mon agent d ’a ffa ires , com m e
elle ne cessoit de me le m ander, com m e elle l’avoit dit à C le r
m ont m ê m e , en pleine séance des A u to r ité s, le jour du rachat.
Cette observation, fortifiée par toutes les lettres de ma s œ u r ,
anéantit tout ce que l’auteur du M ém oire d i t , pour faire croire que
les procurations q u ’il ne peut nier n ’étoient relatives q u ’à m a ra
diation.
J’en ai envoyé plusieurs ; il y en a eu où ma radiation étoit le
principal o b j e t , où le mandat de r a c h a t , qui étoit le pis-aller, n ’étoit
donné qu’en ces te r m e s , fa ire tout ce que les circonstances de
manderont pour me conserver mes biens ; parce qu ’il ne falloit
pas parler plus clair à certaines personnes exagérées à qui la pro
curation devoit être com m uniquée : mais il y en a eu d ’autres
parlant plus clair du rachat; chaque lettre d ’envoi confirmoit des
pouvoirs confidentiels illimités; le C o d e , en validant le mandat par
c
le t tr e , n a-t-il pas validé les pouvoirs confidentiels ? Je défie qu ’on
�( i 8)
en produise aucun qui limite mes pouvoirs à obtenir ma radiation
et la restitution gratuite de mes biens.
C e r ta in e m e n t, ma sœur n ’a pas autorisé l ’auteur du M é m o ire
à faire entendre q u ’elle a v o u lu , en acceptant mes pouvoirs, se
réserver, par restriction m e n ta le , d ’acheter pourelle-m êm e, si ou
ne m'accordoit pas ma radiation. Si c ’est son fils qui a fait faire
cette insinuation par l’auteur du M é m o i r e , c ’est une grande légéreté démentie par tous les faits, toutes les lettres, et que repousse
l ’opinion que ma sœur a donnée de son caractère. Elle a accepté
le mandat purement et simplement ; or il est de principe que celui
qui s’est chargé d ’une opération pour un autre , en acceptant son
m a n d a t , ne peut plus faire celte opération pour l u i - m ê m e , ni
pour aucun autre que celui dont il a accepté le m andat ; l’ applicacation de ce principe doit être d ’autant plus stricte ic i, que ma
sœur m avoit o ffe rt de se charger de m on m a n d a t , q u ’elle m ’ avoit
empêché de le donner à d ’autres, en m e disant que le désir de
sauver les 12,000 liv. que je lui devois Vintéressait à ce que l ’opé
ration f û t faite par e lle ; de sorte qu ’ il y auroit abus de confiance
préparé par un piège, si elle avoit acheté pour en disposer; abus
de confiance d ’une sœur vis-à-vis d ’un frère sous le glaive; abus
de confiance pour lui ôter l’ancien patrim oine de ses pères, que
celte sœur s’étoit chargée de lui conserver : ma sœur ne mérite
pas un tel reproche; elle a reconnu avoir fait l ’opération, comme
mon homme d’ affaires ; elle désavouera cette légéreté qui la c o m
promet.
Si ma sœur m ’eût annoncé sa restriction , j ’aurois donné la
commission du rachat aux banquiers étrangers qui m ’avoient offert
de s en charger , parce qu'alors ils faisoient en France de pareilles
commissions (1).
A u lieu de so dégager du m a n d a t , elle m ’a toujours écrit q u ’elle
travailloit pour moi se u l; héritages , c a p ita u x , revenus , tout te
sera fid èlem en t rendu, disoit-elle dans ses lettres.
( 1 ) Ils avoient alors l’argent à B erlin à /( , et en tiroient ao en F rance.
�(i9)
¿ 3
L ’ auLeur du M ém oire veut aussi exciper de ce que j ’ai donné
des procurations à ma sœ u r, postérieurement au rachat. O u i , j’en
ai donné une; mais pourquoi ? parce que les premières ne parloient
que de racheter mes biens de la confiscation, et de me les con
server ; o r , il falloit en revendre pour p a y e r, et les acqu éreurs,
à qui m a sœur disoit que c ’étoit pour moi q u ’elle avoit a ch eté ,
et qu’elle revendoit, vouloient voir ma procuration; en m ê l a de
m a n d a n t , ma sœur a donné une nouvelle preuve q u ’elle avoit
acheté en vertu de mon m a n d a t , et qu’en fidèle m andataire, elle
ne vouloit pas l’outre-passcr, sans ampliation de pouvoir.
Si elle avoit acheté pour son propre compte , pour avoir mes
biens à sa propre disposition , elle n ’avoit pas besoin de nouvelle
p ro cu ra tio n , elle pouvoit gérer et revendre sans cela ; les acqué
reurs ne m ’auroient pas demandé les ratifications que j ’ai don
nées; elle n ’avoit pas besoin de ce préalable, pour me faire ensuite,
ou faire à mes e n fa n s, tel ca d e a u , telle restitution q u ’elle auroit
voulu.
L ’auteur du M ém oire dit que l ’acte de mai 1801 ne contiendroit pas autant de rem erclm ens, si m a sœur avoit été m a m an
dataire. M ais est-ce q u ’un mandat gratuit n ’exige pas des rem ercimens ? est-ce que la difficulté des circonstances n ’augmentoit
pas le mérite de la conduite de ma sœur ? Je lui devois de la reconnoissance , des rem erclm en s, et c’est cette reconnoissance q u i ,
à mon retour en F r a n c e , m ’a a veuglé, en m ’empêchant de bien
ex a m in e r, si l’ exposé qu’ elle me faisoit de mes affaires n ’étoit
pas erronné. Elle s’offensoit des doutes ; je cédois à sa d ir e c tio n ,
crainte de lui déplaire ; j’ai continué sur ce pied jusqu’à ce que
je me suis vu réduit à une situation qui ne m e le permettoit p lus;
com m e elle ne croit jamais à l'impossibilité de ce q u ’elle ve u t, et
com m e elle n ’aime pas qu’on lui fasse des représentations, elle s’en
est ofienSée, et elle a prêté l ’oreille aux mauvais conseils qui la
dirigent.
M a confiance dans ma sœur étoit encore toute entière lors du
mariage de m on fils L a m o n te ilh e , et ma confiance clans le carac-
C 2
�c ,!-
( 20 )
tère que M nd. L am o n lcillic m ’avoit montré jusques - là fixa mon
clioix ; je ne savois pas qu ’il se mêlât tant de foiblesse à sa bonté
naturelle.
L e s affaires de ma f a m i lle , surtout les valeu rs, étoient plus
connnes de M . de Cham pflour qui étoit sur les lieux , que de moi
qui arrivois de quatre cents lieues, après dix ans d ’absence, sans
m ’être mêlé des biens de ma famille avant ma sortie , parce que
cela regardoit mon père qui vouloit être maître ; d ’ailleurs ma
fam ille me disoit que la révolution avoit tout déprécié , dégradé.
On avoue que la fam ille Cham pflour connoissoit l’acte de mai
de 1801.
Si o n . trouve qu'avant cet acte la qualification de prête-nom
n ’étoit pas le terme le plus propre à ajouter à celle de ma m an
dataire , il faut avouer qu ’au moins à dater de cet
acte , le
term e le plus propre a été celui de préte-nom , puisqu’il porte
que ma sœur possédera pour m o i, jusques à ce que m a radiation
permette de faire définitivement une transmission notariée.
E n tre cette promesse du 8 m ai 1801 et son e xé cu tio n , ma
Sœur n ’a pu être qu’un préte-nom . C e t acte est bien synallagm atique, com m e le demande l’auteur du M é m o ir e , et bien antérieur
à la subrogation de Saulzet; d o n c , quand m a sœur n ’auroit pas
été avant ma m andataire, cet acte suffiroit pour constater q u e ,
lors de la subrogation , ma sœur étoit m on prête-nom .
L ’auteur du Mémoire nous dit lui-m êm e pourquoi nous devions
éviter d ’em ployer dans nos actes le m ot mandataire et le mot
prête-nom , par la peur du fisc. II avoue que tant q u ’on éloit encore
sur la liste, et j 'y étois lors des actes dont il s’a g i t , on d e v o it à s o n
m a n d a ta ire , à son prête-nom , de ne pas le déclarer trop ouver
te m e n t, a plus forte raison dans des actes écrits, qui dévoient se
promener chez les homm es de loi , où ils pouvoient être rencontrés
par les agens du fisc ; il dit q u ’un inscrit qui auroit révélé q u ’il
étoit devenu p ro p riéta ire, auroit pu courir risque d ’une nouvelle
confiscation .de sa propriété ; que s il etoit m o r t , le fisc auroit hérité
de lui. V oilà ce que j ’ai voulu éviter.
�( 21 )
Pourquoi , après avoir d i t , pour les conserver a Emmanuel
A ubier son fr è r e , avons-nous ajouté ou ses en fa n sl C ’est afin
que la survivance d ’un seul de m e se n fa n s empêchât le fisc d ’hé
riter de m oi, si je mourrois avant ma radiation ; et c ’est au nom
de mes e n f a n s , au nom de la belle-fille qui jouit de presque tout
le bénéfice de ces précautions, q u ’on voudroit en abuser, pour
empêcher de reconnoître le principe de mon droit sur les débris !
L ’auteur du M é m o ire , en y révélant lui-même le danger d ’expres
sions plus claires, donne le m o tif et l ’excuse de toutes les réticences
des acles passés avant ma radiation, et de l’amphibologie qui peut en
résulter; mais cela ne détruit pas le fait p rim itif qui explique tou t,
le fait que ma sœur avoit, dès le principe , été m a mandataire , et
que son acceptation de mes pouvoirs l’avoit irrévocablement liée à
n ’être que mon représentant , fait qui donne la solution de tout.
Il étoit reconnu que la propriété n ’étoit sur sa tête que pour
m e la conserver ; q u ’elle nie représentoit, que la jouissance étoit
pour moi , mais sous son nom ; par conséquent elle étoit mon
prête - nom quand je l’ai autorisée, co m m e l’avoue l ’auleur du
M é m o ir e , à subroger mon fils Lam ontrilhc à la possession de
Saulzet ; donc c’esl com m e mon prête-nom que ma sœur a passé
cette subrogation , par acte fait en ma présence et de mon consen
tement. On ne pou voit pas l’indiquer plus clairement que le pacte
de famille le porte ; on y lit ces term es, comme si M ail, de St~
Mande n'avoit été dans celte acquisition que le p re te -n o m dudit
Jerôme-JLmmanuel sJubier seul.
On ne peut pas dire plus clairement que ma sœur avoit été le
prête-nom de quelqu'un, et que ce n ’etoit pas de mon fils Lam onteilhe , car dire que ce sera connue si elle l’avoit été de L a m o n teillie, c ’esl dire q u e lle n'avoit pas été le prête-nom de Lainonteilhe, mais d ’un autre.
D e qui ma sœur pouvoit-elle être prête-nom , si ce n ’est de moi
qui lui avois donné des pouvoirs ; de moi de qui elle les avoit accep
tés ; de moi pour qui elle avoit déclaré conserver les bie n s: ce
mot dit tout. L e mandat avoit été donné pour conserver. 11 n ’y
�\ u .
( 22 )
a que celui qui étoit précédemment propriétaire, à qui ce mot
puisse s’appliquer; car si le m andat avoit eu lieu au profit de tout
a u t r e , il n 'eû t pas été un acte conservatoire ; il eût ôté au vrai
propriétaire primordial, ce que l’ordre de la nature et des conven
tions de famille lui avoit assuré , pour donner à celui qui n’y étoit
pas appelé: or , le propriétaire prim ordial, c ’étoit moi.
Aussi , on lit dans cette mêm e délibération de famille , signée
de vingt-cinq parens et de plusieurs jurisconsultes, quelques lignes
plus h a u t , que le premier but de la conservation avoit ét ê pour
m o i, et pour me remettre mes biens dès que ma radiation Ièveroit les obstacles qui en retardoient la remise.
Rem arquons bien que c ’est dans l’assemblée de famille la plus
no m breuse, la plus solennelle, dans les actes même faits pour
régler les conditions du mariage , que ma sœur , mon fils L a m o n teilhe et son épouse , son père , M . de S t- M a n d e , son f il s , sou
gendre, ont reconnu que ma sœur étoit mon préte-nom.
Je crois que cela répond à tous les sophismes de ce Mémoire.
II est d i t , dans cet acte, que mon fils pourra se constituer Saulzet ;
dans son contrat de mariage daté du lendemain , on n ’a pas dit
qu’il 'avoit été subrogé par mon préte-nom , parce q u ’il dcvoit
passer sous les y eu x du f is c , et le M ém oire nous a dit le danger
auquel ces mots exposoient.
L a subrogation n otariée, reçue par C o s t e , trois mois après,
est déclarée par une contre-lettre, du même instant et du m êm e ré
d a cte u r, n ’être qu’une ratification de la délibération de famille où
L am onteilhe a reçu Saulzet de mon préte-nom.
C ette subrogation le fait renoncer ù toute s u c c e s s i o n paternelle,
et du côte paternel 5 c ’étoit encore p o u r éviter de réveler au fisc
la vraie base de la
d élib é ra tio n
de fa m ille ; elle accordoit i 5,ooo
liv. de préciput à chacun de scs frères, avec le tiers de C rè v e -C œ u r;
le tout étoit une espèce de retour de lot du don de S a u lz e t , ce qui
eut donné lieu à de gros droits.
L e lendem ain, M . C h am p flo u r, qui avoit dicté l’acte à M . C o s t e ,
et me l’avoit envoyé tout prêt , fit faire une consultation à
�fJ O )
^
( 2 3 )
Riom , pour prouver
On étoit déjà
que
cette renonciation
convenu que cette
étoit nulle.
renonciation ne vaut pas
m ieux que celle à la succession maternelle, contenue dans un sousseing privé de
1802, dont ma sœur et M . de C on dat se sont
déclarés dépositaires, en m ’en envo}rant copie de leu r main.
A lo r s Lamonteilhe vouloit renoncer à toute part dans la suc
cession m a te rn elle , pour garder Saulzet en son entier, sans avoir
à donner un plus grand retour delot que son tiers dans C rè v e -C œ u r .
M o n fils Lamonteilhe voyoit que Saulzet valoit le double de ce
qu'on l ’avoit estimé , et que les liquidations destinées à ses frères
étoient peu sûres ; il connoissoit un écrit de M . de Cham pflour
que j’ai encore dans mes m a in s , constatant que la négociation de
son mariage avoit été ouverte et conclue sur la base du plus ou moins
d ’avantage que je pourrois lui faire , com m e père et vrai proprié
taire de tout ce que m a sœur avoit racheté pour moi ; il convenoit
que Saulzet en fatsoit partie, q u ’en conscience et en honneur on
ne pouvoit le n i e r ; il étoit l o y a l , bon fr è r e , il vouloit rendre
justice à ses frères; mais il ne savoit que f a i r e , parce q u ’il ne
pouvoit connoître ma fortune qu'après que le sort des liquidations
seroit c o n n u ; celle de sa m è r e , q u ’après que les espérances don
nées par M a d . de Chazerat seroient réalisées ; de sages conseils
lui avoient dit qu'il ne pouvoit traiter solidement qu ’après ma
m ort pour le paternel, après celle de M a d . Aubier pour le maternel.
A u jo u rd ’hui sa veuve veut Saulzet à p a r t , et encore réserve de
part d ’enfant partout : q u ’elle attende notre m ort pour élever la
question.
E n ce moment il ne peut être question , m êm e sur le fon d de
l ’intervention, quede ce qui fait l’objet du fond de l’instance
en tre
m a sœur et moi : o r , il ne s’agit que d ’accomplir la formalité de
la transmission du verger par-devant n o t a ir e , à l’égard duquel
elle ne peut pas nier qu’elle est ma m andataire, et mêm e q u ’elle
est mon prête-nom , au moins depuis l ’acte de mai 1801 , par
lequel elle a promis cette transmission.
E t co m m en t, après toutes les preuvesque j’en ai données, ne pas
�(H )
être excessivement éfonné de ce qu'on l i t , page 3s du M ém oire
auquel je réponds. — M . Chardon a itérativement reconnu et
confessé que la dame de St-M ande , sa belle-m ère, ri avoit
acheté de la nation les biens de son fr è r e , que pour les con
server aux enfans de son frère ; mais quand M . C hardon a
confessé c e l a , car voilà le m o t que l’auteur du Mém oire em
p lo ie , il avoit signé l’acte de m ai 1801 , portant que M ad. de
St-M ande avoit acheté pour ¿on frère , et que les enians ne dé
voient remplacer leur p è re , que dans le cas où celui-ci ne seroit pas
ra yé ; il avoit signé la délibération de fam ille où il étoit répété
que M a d . de St-M ande avoit acheté ces biens, pour les conserver
à Em m anuel Aubier son frère ( à m o i ) , et me les rendre dès que
je serois rayé.
M . Chardon est un hom m e d ’honneur ; ce noble caractère ne
rend souvent que plus aisé à être trompé ; les directeurs de cette
m anœuvre ont été assez habiles, pour en faire leur instrum ent, soit
qu'ils lui aient surpris sa signature, soit qu'ils soient parvenus à
lui faire illusion.
C e t acte est un des m oyens employés clandestinement pendant
m on absence, pour exécuter le plan de me retrancher de ma
fa m ille , de m ’en e x c lu re , de m e tout ô te r, qu ’on m ’avoit révélé
en 1802 , et auquel je n ’avois pas voulu croire.
L 'a u te u r de ce plan com biné avec plusieurs calomnies imaginées
pour m ’aliéner mes enfans , a cru que l’offre des débris du reste
de ma fortune séduiroit mes autres e n f a n s , et les entralneroit
com m e M a d . Lainonleilhe.
Je ne craindrai jamais que mon fils aîné y participe ; je me tais
sur ce qu’on a employé pour séduire la fougue irréfléchie du troi
s iè m e ; un père ne se souvient jamais des erreurs de SCS e n fa n s,
que pour les avertir de ne plus écouter les mauvais conseillers qui
les ont égarés ; mais le cœur
me saignera jusqu’à la m o r t , de
tout ce que j'ai été dans le cas d ’apprendre, de tout ce q u ’on m 'a
fait éprouver ; je me tais.........
Dans le f a i t , on ne vouloit pas que je revinsse. On avoit cru
que
�■( 25 )
que la guerre entre la France et la Prusse m ’auroit ferm é pour
toujours la porte. M ais je m ’étois conduit de manière que toutes
les autorités françaises militaires, politiques et civiles m ’ont éga
lement rendu justice et témoigné leur eslime.
L ’ acte que je réfute révèle pourquoi on
avoil empêché m a
sœur de présenter à M . le Préfet le décret de S . M . l’E m p e re u r,
du
10 brumaire an i/^ > q11' m'avoit conservé tous mes droits,
en me permettant de garder ma place de chambellan du roi de
Prusse.
P e ut - o n imaginer une inconséquence plus grande que celle qui
se trouve dans ce M é m o ir e , quand, après avoir em ployé qvielques
pages à vouloir prouver que ma sœur a acheté mes biens pour ellem êm e et pour en disposer à sa v o lo n té, on y fait valoir des actes
où les enlans de Mad. de St-Mande déclarent q u ’elle n 'a achetéque
pour conserver aux en fans de son frère.
T o u t e s ces variations sont êgaleirientdangereusespourmospelilesfilles ; car si M a d . d e S t - M a n d e n ’avoit acheté que pour l e s e n f a n t
de s o n frè r e , l'effet de cette expression collective se parlageroit
également entre tous mes enfans par é g a lité , et par conséquent
l ’aîné et le troisième pourroient à l ’instant demander chacun un tiers de S a u lz e l, et sans attendre ma mort.
Mais il faut être bien convaincu d ’avance qu ’alors M a d . L a m o n teilhe auroit grand soin d ’opposer à ses beaux-frères tous les actes
qui constatent que ma sœur a été ma mandataire, et mandataire
de moi seu l; q u ’elle a été mon prdte-nom ; que j’étois le vrai
propriétaire de Saulzet, quand j ’ai autorisé ma sœur à subroger
Lamonteilhe à cette propriété; et qu’ au m oin s, jusqu'à ma m ort,
ils n ’ont aucun droit à critiquer les actes par lesquels je l’ai inves
tie. L ’auteur du Mém oire copieroit, pour défendre M a d . L am on
teilhe et mes petites-filles , tous les raisonnemens q u ’il a trouvés
absurdes dans mon Exp osé; sous sa pl ume ils deviendroient des
vérités élémentaires , q u ’on ne peut [tas combattre de bonne foi.
A u reste, com m e dans les trois rôles d iffe re n s , que ma sœur
prend tour-à-tour dans cette a ffa ir e , elle n ’en persiste pas moins
�dans le noble désintéressement dont son m aii lui a donné l ’exemple,
il ne faut y voir q u ’un changement d'idées sans e ffe t, parce que
le fait prim itif q u ’elle a été ma mandataire s’y oppose.
Passons à la 4 e question.
A cet égard , l ’auteur du M ém oire dit que la transmission du
verger que je demande , existe déjà , par un acte du 5 -fructidor
an 9 ; mais ce ne peut pas être sérieusement qu il le dit.
E n e f f e t , i \ l’écrit auquel il veut donner cette im p ortance, ne
n o m m e pas le verger ; or , il est de principe qu’un acte translatif
de la propriété d'un immeuble , et surtout d ’une propriété rurale ,
doit désigner sa n a tu re , sa situation, et au moins deux de ses
confins ; cette désignation est ordonnée par le C ode Napoléon , a
peine de nullité , m êm e pour une simple action ré e lle , à plus forte
raison , pour l'acte translatif de propriété ;
20. C e t écrit est antérieur, de plus d ’un an , à m on amnistie f
o r , il avoit été statué par l ’acte d e m ai 180 1, antérieur à cet acte,
que l ’acte légal et notarié de transmission définitive ne pourroit
être fait q u ’après ma radiation ou amnistie.
Si cet écrit avoit réellement effectué celte transm ission, pour
quoi encor» aujourd’h u i , tous les actes et démarches de proprié
taires se feroient-ils encore au nom de m a s œ u r , et par son fondé
de pouvoirs?
Pourquoi m'auroit-elle o ffe rt une vente e t m ’auroit-elledit, ainsi
q u ’à lout le monde , qu'elle avoit déposé chez M . C h assaig n e, no
taire, un testament o ù , prévoyant le cas où elle mourroit avant
que nous eussions tout term in é, elle m e transmettoit le verger.
T o u t cela n ’étoit-il qu ’une mystification ?
C e t écrit n ’a été fa it que com m e déclaration de la base qui
m o liv o it la jouissance que je faisois sous le nom de ma soeur, et
pour a jo uter, dans des cas im p ré v u s, à la force de la promesse
contenue dans l’acte de mai 1801.
En lisant cet écrit amphibologique, com m e lous ceux faits avant
ma radiation, et y réfléchissant, on verroit qu ’il étoit fait princi
palement en vue de statuer entre.m a sœur et m o i, com m e règle-
�J ÏS
( 27)
ment de fa m ille , que je ne voulois jamais aliéner aucune propriété;
c ’esl l'écrit dont j’ ai déjà parlé à ce s u je t; je Pavois fait pour
imposer d ’avance à mes
en fa n s
, par mon exemple , com m e je Pavois
déjà d i t , la condition q u ’ils ne pourroient rien aliéner de ce que je
leur partagerois de mon vivant.
Il est signé de ma s œ u r , de moi et de mon fils Lam onteilhe ;
celui-ci est le seul de mes enfans qui 1 ait signe , parce que les au
tres étoient alors en Prusse ; mais ils avoient donné un billet d ’hon
neur portant adhésion à ce que j’aurois réglé.
C e t écrit prolongeoit la réserve de Saulzèt, après ma m o r t, dans
un cas éventuel expliqué ; cette prolongation avoit été convenue
en considération de ce q u e , par acte postérieur de trois mois au
mariage de mon fils Lamonteilhe (ép oqu e où on exagéroit encore
plus If s liquidations), j'avois déchargé L am onteilhe d ’une dette de
i 3, 5oo liv. Je voulois éteindre celte d e tte , sans prendre sur les ca
p ita u x , et rien aliéner; cet écrit étoit sur tous les points la m esuçc d ’ un père de fa m ille , désespéré de ce q u ’on vouloit toujour»
vendre.
Je demande à ces dames et à l’auteur du M é m o i r e , à qui j ’ai
fait co m m u n iquer, par mon avoué, mon double de cet é c r i t , si je
puis le déposer chez un notaire, dans l ’état où il m ’est revenu de la
communication que ma sœur en avoit donnée à quelqu’un pendant
* mon voyage à Paris en 1802 ?
M es enfans peuvent - ils m ’envier la propriété de ce v e r g e r ,
quand il me représente loule l’hérédité de mon p' re et de m on
frère , que personne ne peut me c o n te s te r , puisque je n ’élois pas
inscrit sur la liste des émigrés quand ils sont morts ; quand il me
représente de plus les 200,000 liv. de créances que j’aurois sur celte
succession, par l ’accumulation des intérêts, enfin les 100,000 liv.
d ’avances que j ’ai faites pour mes en fan s, au-delà de ce que j ’ai
touché de nia fam ille, à quelque titre que ce soit?
Je ne demanderois pas c tt acte notarié, si je n ’en avois pas
besoin pour constater ma propriété aux yeux de ceux avec qui
ma sœur elle-m êm e m ’a invité de prendre seul des engagemens
d
2
�(a8)
pour ma famille , ^ ur les assurances qu ’elle me donnoit que je
disposerois seu l de tout. J ’ai annoncé aux créanciers que je m ’étois
interdit d ’aliéner la propriété; mais j’ai gradué mes engagemens,
de manière que les 20,000 liv. de dettes qui restent encore à p ayer,
seront acquittées successivement en capital et intérêts, par l ’ap
plication entière non-seulement des revenus du verger, mais encore
de toutes les réserves viagères que ‘je peux avoir du côté de ma
fa m ille , jusqu'à ce que les 20,000 liv. soient totalement payées.
Personne n ’a reçu de moi un assignat ; aucun des créanciers dont
je me suis chargé pour m a fa m ille , n ’éprouvera de retard aux
époques convenues, si on me laisse libre de pourvoir aux moyens :
si on m'entrave , le désordre tournera au détriment de tous mes
enfans (1).
E t n’est-il pas bien extraordinaire que M a d . Lam onteilhe oublie
que dans cette dette de 20,000 liv. , il y a i3,5o o liv. que je me
suis chargé de payer pour son mari depuis son mariage ; elle sait
que Saulzet dont elle jouit étoit chargé de cette dette ; elle en a la
preuve dans les doubles qui sont en ses mains de l’acte de mai
18 0 1, et de trois autres actes par lesquels j ’en ai pris la charge
sur m o i , actes où son m a r i, m a sœur et moi en avons assigné
le payement sur le revenu du verger; elle sait tout aussi-bien , que
les autres 6 , 5oo liv. sont le reliquat de dettes faites pour son
m a r i , de mêm e que pour ses frères ?
M a d . Lamonteilhe sait q u ’en 1 7 7 3 , quand mon beau-père , M .
M a r g e r id e , mit en vente C r è v e - C œ u r , il consentoit que l’achat
en fût fait en mon nom ; je voulus qu’il le fû t au nom de mes
( 1 ) J’ai
63
ans , jc su;s
sort;r ,le tu telle, >
’» moins qu’on ine fasse inter
dire ; on a murmuré , hasardé ce mot ï\ l’occasion île cette assemblée de fam ille
qui a autorisé l'intervention.
Il paroît que , quoique 4 <lcs parons fussent du ciitc de M. Cham pflour ( lui en
t è t e ) , le m oteur de nos troubles n’a pas osé risquer la propos it iou ; le juge de
paix l’a embarrassé sans doute : ce n est pas une cliose qu’il soit aussi aisé de
faire clandestinem ent, que des écrits du genre de celui que le Mémoire nous r é v ile
sans nous tout dire.
%
�(
29
)
enfans, pour que les parens de M ad. A u b ie r ne pussent pas dire
que j’avois voulu en faire ma propriété personnelle. J’ai payé le
viager ; le tiers qui revenoit à son mari dans le bien, lui a servi de
retour de lot sur Saulzet. Cela est avoué dans son M émoire.
M a d . Lam onteilhe sait q u ’en 1 7 8 4 , un an après avoir acheté
la charge de gentilhomme ordinaire de la cham bre, dont la finance
étoit de 5o,ooo l i v . , j ’ai transféré la propriété de cette finance sur
la tête de mes trois
en fan s
par égalité ; d ’a ille u rs, la preuve en est
dans les actes reçus M o n o t , notaire à Paris.
M a d . Lam onteilhe sait que j ’ai été seul chargé de son mari
com m e de ses frère s, depuis le premier janvier 1 7 7 3 , sans avoir
retenu un sou du revenu de M a d . A u b i e r , qui n ’a jamais con
tribué en rien au soutien de ses enfans.
M a d . Lam onteilhe sait que je n ’ai jamais rien touché du capi
tal de M ad. A u b i e r , placé par son père chez le mien ; que jamais
je n ’ai été mis en possession d'un seul héritage ni de M a d .
A u b i e r , ni de mon père;et elle s ’étonne qu'il soit encore dû 6, 5oo
livres du reliquat des différons emprunts faits par moi seul en
diverses époques pour faire face à tout sans redemander les capi
taux que mon père avoit à moi !
E t M ad. Lam onteilhe ose appeler cela dette supposée , ou fa ite
pour avoir e x c é d é nies moyens en P r u s s e ! C ’est pousser trop loin
la foible docilité pour les intrigans qui la dirigent.
Je n ’ai
jamais excédé mes m o ye n s,
qu'en comblant à l’ex
cès son mari et elle d e mes bienfaits , bienfaits dont elle jouit
aujourd’hui seule, jusqu’à ce que ses filles aient dix-huit ans.
C e Mémoire me reproche aussi la vente de quelques f o n d s ,
dont 011 porte le prix à 6,000 liv. Eh bien , il est prouvé par les
actes de vente qu ’elle a été faite par mon fils L a m o n te illie , en
vertu de procuration de ma sœur ; il n ’y en a pas eu tout à fait
pour 5,ooo liv* , et cette somme a été „aussitôt employée à des dettes
de mou frère, qui avoient été hypothéquées sur les biens ayant
qu 011 les confiscât. L e rachat avoit été fait u mes dépens.
�^» v \
( 3o)
D e p u i s , tout ce qu*il y a eu d'autres recouvremetis r tant en
capitaux q u ’en revenus à moi appartenons , mêm e le produit des
réserves en viager alimentaire , a été employé aux dettes ou en
avances à mes enfans et pour leur établissement. Cela est aisé à
vérifier en comparant les preuves d'emploi avec le# comptes de ma
sœ ur, qui a tout géré jusqu’au
I er
janvier 180 9, qu ’elle a donné
procuration à M . G orce.
Pendant que M a d . Lamonteillie et son père semoienl sur cela
les plus ridicules commentaires , je me taisois sur les immenses
ventes q u ’ils ont faites depuis le mariage de monfils a\ec M ad. L a in on teilh e, et qu ’elle a faites particulièrement depuis q u e lle est
veuve. Il me semble cependant que , com m e aïeul paternel de
mes petites-filles, j’ a i , surtout depuis la mort de leur p è r e , bien
autant de droit que l ’aïeul m aternel, de faire mes observations
sur ce que devient la fortune que lors du mariage on disoit assurée.
Qui de la famille Cham pflour ou de m o i, a été bercé d'espé
rances trompeuses , quand il est prouvé que M a d . Lamonteilhe
n ’aura pas de son côté moitié de ce qu ’on annonçoit, et qu’ elle
a de moi le double de ce que j’ai promis ?
M a d . Lam onteilhe et M a d . de St. M a n d e me menacent de
M a d . A u b ier , et par là elles m e forcent de leur ra p p e le r, que
lorsqu’il étoit question du mariage de Lam onteilhe , je voulois
préalablement composer avec M ad. A u b i e r , et mêm e lui faire
quelques sacrifices pour établir une paix générale dans la famille.
M a s œ u r , mo n fils , le père de M ad. L a m o n t e ilh e , s’y oppo
sèrent égalem ent, pour obtenir encore plus pour La mon t e i l h e ; ils
disoient que M a d . Aubier étoit remplie de ce q u ’elle pouvoit pré
tendre en vertu du traité de 1 7 7 9 , et q ue les pertes q u ’elle nous
îivoit occasionnées depuis , dévoient m ’éloigner de tout sacrifice.
J ’aurois traité malgré ces représentations avec M ad. Au bier , si
celle-ci n ’avoit pas rompu la négociation entamée par M . Dartis.
M ais n ’est - il pas bien étonnant que ce soient aujourd’hui les
mêmes personnes qui cherchent à exciter sur cela de nouvelles
divisions entre M a d . A u b ie r et moi ?
�N ’ont-elles pas déjà causé assez de pertes à mes enfans ?
Je serois fort fâché d ’avoir quelque démêlé avec M a d . A u b ie r ;
mais si elle m ’ altaq uoit, je saurois me défendre et lui opposer
les responsabilités qu’elle a encourues envers moi.
L ’auteur du Mémoire me menace de quelques lettres d ’où il croit
pouvoir tirer de grands argumens ; il n ’a pas la clef de notre cor
respondance, dans ces temps orageux; je l ’attends avec sécu rité,
bien sûr que tout ce que j ’ai d i t , écrit et f a i t , étoit toujours dicté,
et souvent exigé par l ’intérêt de mes enfans , eu égard à chaque
circonstance; com m e elles varioient souvent, il a fallu souvent
varier de mesures et d ’instructions à ma sœur com m e à mes enfans.
Je n ’ai point fait de sarcasmes sur M . C h am pflo ur, mais j ’ai
rendu à saillie la justice qui lui étoit d u c , quand j ’ai dit q u ’elle avoit
erré par lés conseils de son père.
M . Cham pflour a tort de se dire m alheureux ; un père ne peut
pas l'être, quand il est entouré d ’enfans , pelits-enfans , gendres,
qui se conduisent aussi-bien que les siens à son é g ard , dont les
soins sont toujours assidus , empressés , et dont l’obéissance ne
calcule jamais avec lui.
Je n ’ai persifilé personne, comme le suppose le M ém o ire , et
n ’ai voulu nuire à personne.
Je n ’ai parlé de casuiste que parce q u ’on avoit toujours opposé',
à mes observations les plus justes , quelque décision de casuiste
q u ’on ne nommoit jamais.
J’ai voilé le mieux que j’ai pu ce qui eût demandé d ’être traité,
surtout par un p è r e , un a ïe u l, avec des réflexions plus sévères;
mais elles ne sont pas dans mon caractère.
E n résumé, je persiste à dire que le système q u ’on a fait adopter
par M a d . de S l- M a n d e , en la m ettant aujourd’hui en contra
diction
avec elle m ê m e, est ce q u ’on pouvoit imaginer de plus
dangereux pour mes p e t i t e s - f i lle s ; par conséquent ma
belle-
fille a le plus grand tort d ’intervenir pour l’a p p u y er; mais heu
reusement pour nies petites-filles, l'intervention n ’est pas reccvable.
�' •k
( 32 )
A u r e ste , ma sœur, m a belle-fille et mes autres enfans veulentils s’accorder pour accepter une renonciation à la qualité d ’héritier
de m on père et de m on fr è r e , au profit d ’eux tous , ou de tels
d ’entre eux qu ’ils voudront choisir ? je suis très-disposé à la fa ire ;
mais com m e je demeure créancier de 200,000 liv. sur quiconque
représentera la succession de mon p è r e , composons : si l’esprit
d ’égalité veut ici que le père rende compte à ses enfans, ceux-ci
lui doivent alors compte de toutes ses avances pour e u x , et elles
vont à 100,000 liv.
Je ne suis pas difficile en composition ; je suis prêt à me ré
duire pour tout à 2,000 liv. de pension viagère alim entaire, sur
laquelle je rabattrai les petits viagers déjà créés.
Mais pour cela , il faut que M ad. Lam onteilhe commence par
m e donner les i 3, 5oo liv., dette de mon père sur Saulzet, dont j’ai
déchargé ce bien , et dont j'ai renouvelé seul les e ffe ts; attendu
que m oi-m êm e je ne pourrois plus les renou veler, quand on saura
que je suis exclu de tout bien ; il faut qu ’elle ou mes autres en
fans me fassent les 6 , 5oo l i v . , parfaisant les 20,000 liv. dont je
suis encore chargé pour eux.
11 faut q u ’on se charge de toutes les garanties, et q u ’on m ’en
décharge pour toujours.
V eu t-o n en revenir à la transaction faite par notre respectable
m édiateur et a m i, M . F a v a rd , que j’ai déjà signée chez lui le 25
juillet dern ier, contenant ratification spéciale de la subrogation
de Saulzet ( 1) , et généralement de tous mes autres engagemens
avec m a s œ u r , ma belle-fille et mes petites-filles ? J ’y consens :
elle contient toutes les conditions déjà convenues.
(0
Art* 1 • ft'nnianucl A ubier approuve et ratifie *lc nouveau , en tant que (le
besoin , ce qui a etc fait par la tlninc «le S t-M an d e sa s œ u r, en vertu (les pouvoirs
confidentiels par lui donnds, confirmes ensuite par diverses procuration s, i° . pour
acheter du domaine national les b ien s provenus des successions d’A ntoine A ubier
leu r père commun , et de Jean-Baptiste A ubier leur frère ; lesquels biens étoient
échus audit Emmanuel A u b ie r , en vertu de son contrat de mariage et par l’ effet
des renonciations portées dans celui de» sieur et daine de St-Mandc ; a°. pour
11
�(33)
Il y a motivé la transmission du verger sur ce que ma sœur
avoit racheté pour mon com pte, en vertu de mes pouvoirs confi
den tiels , suivis de procurations notariées , parce que cela éloit
surabondamment prouvé; parce que la sûreté de mes petites-filles,
de m êm e que de mes autres e n f a n s , des créanciers et de m o i ,
reposoit toute entière sur cette v é r ité , sur cette base.
O n l ’a jugée également importante pour M . et M a d . de S tM a n d e , com m e établissant à ja m a is, contre mes enfans et ayant
d r o it , le principe de l ’obligation que j ’ai contractée envers M . et
M a d . de S t - M a n d e , de les garantir et indemniser envers et contre
tous de toutes recherches quelconques.
D ’où l’on voit que ma sœur n'a rejeté celte transaction , quoi
que ce fû t elle qui eût choisi M . Favard pour médiateur ( i ) , que
parce que le moteur de nos divisions, son c o n se il, s’est entêté à
vouloir nous faire plaider.
s.
II a voulu que m a sœur eût l ’air d'être infidèle à ses promesses,
p a y e r lesdites adjudications , régir et adm inistrer les biens qui en faisoient partie j
3°. pour revendre , ¿changer diverses parties desdits b ie n s , et spécialem ent pour
subroger Jérôme A u b ier , second fils d’E m m an u el, à la possession de Saulzet.
Emmanuel ,A u b ier reconnoît que le tout a été fait pour son com pte , avec son
autorisation et con sen tem en t, ainsi qu’ il est porté par divers actes , notamment
celui de mai 1801 , déposé chez M. G ile t , n ota ire, et la subrogation de Sau lzet
reçue Coste , notaire , l’un et l’autre dûment enregistrés.
E n conséquence , il prom et de garantir et indem niser M . et M ad. de St-Mande
envers et contre tous de toutes recherches quelconques.
A rt. a. Pour tout term iner , M arie-Françoise A u b ier rem et par ces présentes à
Em m anuel A ubier son frère ,
le
verger situé entre Clerm ont et M ont-Ferrand ,
confiné au midi par la grande r o u te , du nord par le prd du Mas.
Ce pré demeurera ch argé, i° . des garanties promises p ar Em m anuel A ubier aux
sieur et dame de St-Mande , par privilège h tout ; a0, de la rente viagère c r é é e ,
au profit de M ademoiselle de B a r, par acte dûm ent enregistré; 3°. de la garantie
des treize m ille cinq cents francs mentionnés dans l’acte de mai 1801 , tant du
capital que des intérêts , jusqu’à ce qu’il y ait été pourvu par
tous co-intéressés.
arran gem en t
entre
( 1 ) A u bout de 8 ans de refus de nom mer des arbitres , e lle -m im e , pour ter milier tQUt ce qui d iy ijo it la fam ille.
E
�(34)
que son mari m ’engageât à prendre les voies judiciaires, afin de
pouvoir ensuite
m e
supposer m oi-m êm e infidèle à mes engagemens,
pour mettre la division en tout sens, il a fait intervenir M ad.
L am onteilhe
en son nom et au nom de mes petites-filles, qui
n ’eussent jamais dû y êlre que des anges de paix. L e mal ira
toujours croissant tant qu ’on suivra son systèm e; j’en appelle de
nouveau aux sentimens naturels de ma s œ u r , à la b o n t é , à la
justice dont elle nous a donné tant de preuves avant q u ’elle chan
geât de conseil. Q ue de malheurs un bon conseil peut épargner à
une fa m ille ! que de malheurs un mauvais conseil lui attire! on
les oublie aisément quand la paix renaît.
A v e c quel plaisir je verrois renaître dans toute ma famille l’union
pour le retour de laquelle j ’avois fait tant de sacrifices!
En attendant, forcé par l’état des choses, je dois prendre des
conclusions judiciaires.
C O N C L U SIO N S.
M es conclusions s o n t, à ce qu'attendu que dans l’instance pen
dante entre ma sœur et m o i, je n'attaque point la subrogation
de Saulzet, ni aucun autre de mes engagem en s, en faveur de mon
fils Lam onteilhe représenté par sa veuve et mes p e tite s-fille s;
attendu que je consens à leur exécution jusqu’à ma m o r t , M ad.
L am onteilh e soit déclarée non recevable dans
l'intervention par
elle f o r m é e , tant en son nom q u ’au nom dé mes petites-filles;
A ce qu'attendu que je n ’étois point inscrit sur la liste des
émigrés quand mon père et mon frère sont m orts, je sois m ain
tenu dans la qualité de seul héritier de mon pere et de mon
fr è r e , conform ém en t à mon contrat de mariage et celui de ma
sœur ;
A ce q u ’attendu que M . de
S t-M and e a réellement touché
les 12,000 liv. à lui redues sur la dot de sa f e m m e , et qu ’il en
a été p a y é , soit par m o i- m ê m e , soit pour mon c o m p t e , par ma
f
�57!
(35)
sœ u r, et de deniers à moi apparlenans , il soit tenu de m ’en pas-
'
ser quittance , avec subrogation à tout d r o i t , en conséquencé de
la renonciation de ma sœur à toute succession directe et collatérale;
En ce qui concerne ma sœur en sa qualité personnelle de m a
mandataire;
A tten d u qu’elle a reçu et accepté mes pouvoirs confidentiels
suivis de procurations notariées, à l ’etfet de racheter, poi r m on
c o m p te , mes biens par elle soumissionnes et à elle vendus p arles
administrateurs du département du P u y -d e -D ô m e , le 26 fructi
dor an 4 > et ce qui résulte de l’acte du 8 mai 1801 ;
« Ordonner q u e , dans le jour de la signification du jugement à
intervenir, les sieur et dame de St-M ande seront tenus de
me
passer par-devant notaire acte de transmission de la pleine pro
priété du
verger situé à M o n t-F e rra n d , contenant environ cinq
cents perches quarrées ; et faute de ce f a ir e , que le jugement tiendra
lieu ; q u ’en conséquence je resterai et demeurerai propriétaire inco m m u ta b le , pour eu disposer co m m e j ’aviserai, sous les condi
tions déjà convenues et acceptées entre les parties ; savoir, i*. que
ledit verger demeurera grevé envers M . et M ad. de S i M ande de
la garantie de toutes recherches généralement quelconques, pour
quelques causes que ce soit ; 2*. q u ’il demeurera chargé de la rente
viagère de 5oo fr. par an , créée au profit de mademoiselle de B a r ,
m oyennant 5 ,000 f r . , empruntés d ’elle pour les prêter à M ad. A u
bier; 3*. qu ’il demeurera chargé des intérêts, et garant du capital de
i 3, 5oo fr. mentionné en l’acte de mai 1801, jusqu’à ce qu'il ait
été pris d'autres arrangemens entre m o i, mes enfans et petilsenfans, pour l’extinction de ladite d e tte ;
D onner acte de ce que je me soumets à employer le surplus des
revenus dudit verger, si plus y avoit, en payement des intérêts et
du capital des autres emprunts par moi faits pour mes enfans;
Ordonner que je demeurerai subrogé a tous droits quelconques
et tous revenus éch us, courants ou à échoir, aux offres que je fais
de ratifier toutes les garanties par moi promises à dame de StM ande.
-
�Ordonner pareillement que tous papiers de fam ille m e seront
remis , tant par ma sœur que par tous dépositaires, état sommaire
d ’iceux préalablement dressé, au pied duquel je donnerai décharge.
S ig n é E m m anuel A U B IE R - L A M O N T E I L H E , père.
M onsieur P I C O T - L A C O M B E , Procureur impérial.
M . J E U D Y - D U M O N T E I X , A vocat.
I M B E R T - B A R T H O M E U F , Avoué.
P . S. S i ma se n sib ilité , a ce que me fo n t éprouver les moteurs
de nos divisions qu i dirigent ces dam es , m’avoit f a i t é c h o p p e r
quelqu'expression qu i pût b l e s s e r personnellement la délicatesse
de ma sœ u r , à qu i toute la fa m ille a tant d obligations , je
m'empresserai de lu i en fa ire m es ex cu ses.
Je prie le
L ecteu r
de relire mon Exposé des faits, où se trouvent
disertement les m o y e n s , ceci n ’étant q u ’une réponse aux objections.
A CLERMONT
, de l ’Im p rim erie d e L a n drio t ,
ru e S t.-G en ès.
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do
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P réfe c tu r e
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier-Lamonteilhe, père. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Picot-Lacombe
Jeudy-Dumonteix
Imbert-Barthomeuf
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse de M. Aubier-Lamonteilhe père, au mémoire de M. et Madame de Saint Mande, et de Madame Lamonteilhe, intervenante en son nom et comme tutrice de ses mineures, petites-filles de M. Aubier.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2124
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2127
BCU_Factums_G2128
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53420/BCU_Factums_G2124.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53424/BCU_Factums_G2128.pdf
4f0e8acd6b14b96238e1338e1c024436
PDF Text
Text
W \ \U V « V M V V \W V \ U U W V W * V U V U V W V
MÉMOIRE A CONSULTER,
C
DE
ET CONSULTATION,
P O U R E mmanuel A U B IE R -L A M O N T E IL H E , Propriétaire,
SU R
SON
POURVOI
C O N T R E un Arrêt rendu en la 2e chambre de la Cour impériale
de R io m , le 1er août 18 12 ,
entre lu i, les Sieur et Dame
S T. M A N D E , et la Dame veuve de L A M O N T E I L HE.
mandais d’arrêts décernes contre moi par le comité révolutionnaire de
Paris, les 11 et 20 août 1792, m’ont forcé de fuir et de passer les fron
tières.
Pendant ma proscription , ma sœur a été ma mandataire ; elle s’en est ac
quittée avec un zèle vraiment fraternel ; elle m’a sauvé les débris de mon pa
trimoine.
D eux
Par les conclusions sur lesquelles est intervenu l'arrêt contre lequel je me
pourvois, elle a demandé acte de ce qu’elle me reconnaissait pour propriétaire
irrévocable du dernier immeuble dont elle devait me passer, pardevant
notaire , l’acte de transmission convenu.
Elle a fait la même déclaration en ce qui concerne le bien de Sauze t , qu’elle
avait déjà transmis à mon fils Lamonteilhe , en exécution de ma volonté,
comme elle l’a déclaré au procès, et même imprimé.
L ’arret a refusé de donner acte de ces déclarations; il a converti les trans
missions en libéralités , qui , bien loin d’être irrévocables, se trouveraient
d’avance, si cet arrêt subsistait, frappées de nullité, attendu que ma sœur ayant
institué ses héritiers, son fils et sa fille, celle-ci représentée par un m ineur,
et ayant de plus disposé de sa réserve par leurs contrats de mariage , elle n’a
pu disposer de rien à titre gratuit.
CA
�( 2 )
Par-là cet arrêt leur assure le droit de me dépouiller de tout, ainsi que mes
petites-filles Lamonteilhe , d’abord après la m ort de ma sœur.
Mais cet arrêt viole les dispositions les plus précises du Code C ivil, sur le
mandat, sur les engagemens de celui qui a géré volontairement les affaires
d ’autrui.
Dans le nombre infini des erreurs consignées dans les motifs de cet a r r ê t,
on y présuppose des conclusions qui n’ont jamais existé ; on y présuppose aussi
que le jugement de première instance contient une disposition qui n’y est pas.
Le malheur qui me poursuit depuis si long-tems a voulu que ma sœur,
gouvernée par son fils , lui abandonnât la direction de cette affaire, et
que celui-ci donnât toule sa confiance à un étranger q u i, après avoir longtems promené scs essais à Maçon , Lyon , Montbrison , le Puy , Iliom ,
est venu fixer à Glcrmont son talent pour embrouiller les procès : devenu
homme de loi pendant l’anarchie, il l’a portée dans ma famille, et malheu
reusement avec succès.
11 a égaré ma belle-fille au point de la faire intervenir en faveur de son
système , et d’invoquer contre m o i, qui l’ai comblée de bienfaits, les tables de
proscription dont le Gouvernement m ’avait effacé ; elle dont le père y avait
été inscrit et avait dû le salut de sa fortune à la fidélité de son mandataire ;
au point de solliciter elle-m êm e, comme tutrice , l’arrêt qui assure à mon
neveu les moyens de dépouiller scs filles mineures de la propriété que je leur
ai donnée.
Mon respect pour une cour où il y a tant de membres si intègres et si
éclairés , ne saurait être affaibli par l’erreur de cinq membres ( y compris un
jeune et nouvel auditeur ) , dont l’avis a décidé l ’arrêt qui sanctionne la per
sécution que j’éprouve.
Je prouverai mon respect pour ce corps en m ’abstenant dans mes réponses
aux motifs de cet arrêt, de quelques observations qui seraient cependant d’un
grand poids.
Avant tout, je vais présenter à la Cour suprême les faits, les lettres, les
actes constatant le mandat, son acceptation, son exécution.
Mon père est morL en réclusion le 22 brumaire an II.
Le 24 pluviôse suivant, mon frère , chanoine , a péri révolulionnairement à
Lyon.
A leur m ort, je n’étais inscrit sur aucune liste d’émigrés; on peut vérifier
le fait sur les listes imprimées.
Les ministres qui avaient arrêté la liste générale des émigrés , le 16 plu-
�( 3 )
6 c?i
viosc an II ( i ) , me trouvant sur celle des fugitifs <lu tribunal révolutionnaire,
avaient décidé que je ne devais pas être porté sur celle des émigrés.
Je n’ai été inscrit sur celle-ci que le 18 germinal an II (2). Il en résulte
qu’à la mort de mon père et de mon frère , arrivée le 22 brumaire et le
24 pluviôse an I I , leurs successions m’ont été dévolues, et que j’en ai été
saisi de droit, conformément à mon contrat de m ariage, qui me faisait seul
héritier de mon père , sous réserve de la légitime stipulée pour mon
frère et de ma sœur , et,au contrat de mariage de ma sœ ur, portant renon
ciation à toute succession dire.de et collatérale, à tous droits échus cl ¿1 échoir,
moyennant 3o,ooo livres de dot par moi garanties.
Le séquestre sur mes biens a été la suite de mon inscription.
En août 1792 , avant de quitter Paris, j’avais envoyé à mon père une p ro
curation pour soigner mes intérêts, avec pouvoir de s’adjoindre et de subs
tituer qui il voudrait : ma sœur a partagé et. continué ccs soins ; sa gestion de
mes affaires remonte à cette époque, et dès-lors même elle fut lice envers moi
par le quasi-contrat résultant de la gestion de la chose d’autrui.
D ’abord après la paix de Bâlc , j’écrivis à ma sœur et à ma femme pour les
prier de solliciter ma rentrée en France et dans mes biens ; je savais qu’ils
n’étaient pas encore vendus.
Ma sœur me répondit qu’elle se chargerait de continuer de gérer mes af
faires, de solliciter ma radiation cl de me conserver mes biens, mais qu'elle
(1) Ils l ’avaient décidé après avoir vérifié que les mandats d’arrêts avaient été décernés uni
quement parce que j’avais suivi Louis X V I à l ’assemblée le 10 a o û t, et veillé à son clievet aux
F euillans, où il coucha avant d’être conduit au Tem ple.
Considérant que ma place de gentilhomme ordinaire de la chambre du roi m’ attachait au
service de sa personne, ils avaient eu l’indulgence de prendre pour soumission de me repré
senter l ’acte du 12 décembre 1792, par lequel j’avais requis le général de l ’armée du N ord et le
ministre de France à L a H aye de me recevoir prisonnier, et de me faire transférer à la barre
pour y être entendu , et concourir à la défense de L ouis X V I . Ma
réq u isitio n
avait élé envoyée
au Gouvernem ent, à qui mes amis avaient aussi représenté la lettre que M. de M alesherbes
m écrivit à ce sujet, par ordre de Louis X V I , le 12 janvier 1793; elle est connue.
G est sur ces motifs qu’en 1802 le Gouvernem ent m ’avait dispense d une des conditions de
l ’am nistie, et que, par décret du 10 décembre i 8 o 5 , S. M . 1 Lm percur m a confirmé cette
dispense et m ’a maintenu dans mes droits c iv ils , en me permettant de garder la place de
chambellan du roi de Prusse que j’avais alors.
D ep u is, j’ai satisfait à la loi de rentrée en France , du 4 avril 1810.
(2) Je l’ai été sur la demande d'une personne de ma famille que je m ’ abstiens de nommer.
�//><£
•
(4 )
voulait des pouvoirs illimités , pour cire libre de prendre toutes les mesures que
les eve'ncmens, que j e ne pouvais pas juger de si lo in , pourraient demander ■
qu’elle les voulait sans partage avec ma fem m e, parce que leur ancienne
mésintelligence était devenue excessive.
Elle m’apprit que ma femme avait fait divorce; que ce divorce lui avait
fait obtenir le domaine de Crèvecœ ur , dont j’avais payé le p rix, et que
par - là ma femme était payée de tout ce qui pouvait lui etre d û, tandis
qu’elle (m a sœur) était exposée à perdre les 12,000 livres que je lui devais
du reliquat de sa dot.
Ma sœur disait que son mari n’avait aucune confiance dans les achats de
Liens nationaux; qu’il ne voulait pas se procurer l’indemnité de ces 12,000 liv.
en soumissionnant quelques-uns de mes fonds ruraux séquestrés , dans la crainte
qu’on ne les lui reprît; qu’il ne voulait point faire inscrire sa créance sur le grand
liv r e , parce qu’il pouvait arriver telle crise où le litre de créancier de l’Etat
deviendrait dangereux, et où leur lisle pourrait devenir une liste de proscrip
tion ; mais que si j ’envoyais à ma sœur des pouvoirs avec promesse de garantie
dans tous les cas, envers et contre tous, il consentait à ce qu’elle soumis
sionnât mes biens pour mon compte , comme mon homme d’alï'aires, sans au
cune autre condition que celle de lui payer ses 12,000 liv. en numéraire.
l\ien de plus juste que cet accord ; il conservait à chacun de nous ce que
son contrat de mariage lui assurail: lo u t.se réduisait à satisfaire le Gouver
nement; et comme c’était moi qui avais encouru la confiscation , il mettait à
ma charge les frais de sa rédemption et le hasard de toutes les conséquences.
La contestation actuelle me force à dire en quoi ma sœur avait intérêt de
ne pas faire comme tant d’autres pareils ou amis , qui achetaient pour leur
compte personnel, et qui par-là demeuraient libres d’imposer telles condi
tions qu’ils voudraient ; le voici :
Avant de in ’avoir demandé mes p ou voirs, ma sœur avait cru sauver ses
12,000 liv. en faisant, en son propre nom , des actes d’héritier dans la succession
de mon père et de mon irere ; o r , non-seulem ent m on conti'at de mariage et
1(5 sien me faisaient seul héritier de l’un ci de l’autre , mais j’etais de plus alors
créancier de mon père d’environ 120,000 liv. , et mes hypothèques étaient
antérieures de neuf ans à la constitution dotale de ma sœur.
L ’adilion d’hérédité, faite par ma sœ u r, la rendait responsable envers moi
de toutes mes créances dès que je serais rayé.
A celte époque , ma radiation ne paraissait pas devoir souffrir de difficulté;
car depuis la mort de Robespierre jusqu’au 18 fructidor, 011 l’obtenait faci-
�lcment pour ceux qui étaient sortis de France après mandat d’arrêt : ma sœur
avait à craindre que, déduction faite du prix dont le quart était payable en
num éraire, cette acquisition ne rendît pas assez de bénéfice pour faire face aux
dettes, de manière à lui conserver l'intégrité de sa dot.
Il était donc très-sage de sa part d’obtenir de moi une garantie envers et
contre tous, qui emportât renonciation de ma part en sa faveur a l’anteriorite
de mes hypothèques ; elle ne pouvait xne là demander qu’en prenant l’enga
gement de racheter mes biens pour mon compte.
Cette observation explique tout, et particulièrement pourquoi ma sœ ur re
doutait tant que je donnasse ma procuration à ma fem m e, qui l’aurait tour
mentée, et avec qui elle était en guerre;
Pourquoi mon beau-frère n’avait voulu prendre part à rien dans ce qui con
cernait les affaires de la succession de mon père et de mon frère , et les
miennes ;
Pourquoi il avait consenti à ce que ma sœur prît la qualité de maîtresse de
ses biens extra-dotaux, quoique son contrat de mariage ne le lui permît pas ;
Pourquoi c’est en cette qualité qu’elle avait fait, sans l’autorisation de son
mari, l e s actes d’héritier qui, par ce m oyen, pouvaient être désavoués par
son m a ri, demeuré libre de faire ce qui deviendrait le mieux pour lui.
Sa prudence allant jusqu’à la défiance, il déclara, comme ma sœur me l ’a
mandé , qu’il ne lui prêterait pas un sou pour cette opération, et n’autori
serait aucun emprunt.
En envoyant une première procuration à ma sœur , je lui mandai qu’avant
d’avoir reçu scs offres, j’avais donné une procuration notariée à un M. Degènes de Paris, et une autre à un M. Lam olte, négociant de Hambourg , pour
suivre ma radiation; enfin, une troisième à M . L ev y, banquier de B erlin , pour
qu’en cas de confiscation de mes biens, il les fit soumissionner par son cor
respondant en France.
Ma sœur me manda qu’il y aurait du danger de tout gâter, faute de s’en
tendre, si je ne les révoquais pas; qu’elle ne pouvait demeurer chargée qu’à
cette condition.
Je les révoquai.
Deux mois après , ma sœur m’é criv it, par la voie des négociateurs de Baie ,
ce qui suit ;
« J ’ai attendu pour te donner de mes nouvelles, d’avoir réussi à obtenir ce
:» que je sollicitais auprès du corps administratif, qui est la jouissance pro» visoire desdits biens de la succession de mon père ; on me l’a accordée à
�(6 )
s» charge de donner caution. Je pense que lu approuveras le parti que j’ai pris ;
» je ne l’ai fait que d’après le conseil et l’exemple ,de tes ainis, sans aucune
» vue d’in térêt, puisque je suis toujours comptable ; ce n’est que de l’embarras
» que je prends : j’avais d’abord demandé le partage pour mettre obstacle aux
« ventes, j’y ai réussi ; maintenant mon but est d'empêcher tfe couper les
« arbres, d’entretenir les bâtimens : si, comme je l’espère , tu parviens à sortir
» de la classe des ém igrés, ce sera avec toi que j e fera i mes comptes, et lu es
» bien sûr que sans autres intérêts que les t ie n s , je me bornerai à nia légitime,
» que j’espère bien que tu auras la juslice de me donner en fonds, car les
» papiers ne sont plus que monnaie factice; rien ne m’occupe plus que ce
» qui t’intéresse ; je souhaite que tu me rendes la juslice de le croire. »
Ce projei échoua, parce que ma sœur ne trouva point de caution.
Une lettre du i 5 mars 1796 porte qu’elle avait communiqué ma procuration
aux administrateurs ; qu’on n’avait pas voulu s’expliquer sur sa validité.
On n’aurait pas élevé de doute sur sa validité, s’il n’y avait été question
que de demander ma radiation ; 011 joignait tous les jours de pareilles procu
rations aux demandes en radiation : le doute venait de ce que je donnais à
ma sœur pouvoir de soumissionner mes biens pour mon compte avec ma
garantie.
Ma radiation a été refusée dans les premiers jours de m ars, parce qu’au
lieu de rechercher et produire mon mandat d’arrét (que j’ai fort aisément
retrouvé en 1801 aux archives du comité révolutionnaire , et que j’ai produit
alors à la commission des ém igrés), l’agent de ma femme avait présenté des
mémoires qui contredisaient ceux de ma sœur et les miens, et parce qu’on me
confondait avec un de mes parens du même nom.
Dans ce c h o c , le Directoire avait décidé que je devais attendre l’amnistie
qu’alors on projetait de donner à tous ceux que les mandats des comités
révolutionnaires avaient forcé de fuir; la décision m’a été transmise le i 5 mars
officiellement.
M a sœur m’ayant confirmé que ce refus nécessitait qu’elle soumissionnât
mes biens , et réitéré qu’elle ne voulait le faire que pour mon compte, je lui
envoyai une nouvelle procuration notariée, afin que ma promesse de garantie
eut plus d’authenticité; elle contenait des pouvoirs bien illimités pour cette
soumission.
Cependant je lui m andais, p a r la lettre d ’e n v o i, de reculer les frais de rachat
tant qu’elle po u rrait, pour avoir le tems de chercher de l’a rg e n t, et parce que
l ’espoir d’ un adoucissem ent se mêle loujoui’s aux angoisses des infortunés,
�Ma sœur m’a accuse la réception de cette procuration et son acceptation,
par lettre du 4 mai 1796.
“
Les qualités de l’arret contre lequel je me pourvois, rédigées par le défen
seur de mes adversaires , établissent judiciairement en point de f a i t la récep
tion de celle procuration et son acceptation par nia sœur.
J’avais cru inutile de faire légaliser ma procuration par le ministre de
France à B erlin : ma sœur m’ayant observé que cela serait m ieux, je lui en
lis légaliser une seconde; il me l’accorda, parce que j’élais fugitif du tribunal
révolutionnaire ; il le refusait à ceux qui ne prouvaient pas cette exception.
Mon paquet fut retardé en route; ma sœur me mandait à ce sujet, le
4 juin 175)6 :
« J e suis inquiète: il p a ra ît, par une lettre écrite à madame Blau , que lu
« m ’envoyais une procuration légalisée par le m inistre ; je ne l’ai pas reçue ,
» je crains de ne pouvoir éloigner plus long-tems les acquéreurs qui se pré>' sentent; j’ai été bien secondée, mais actuellement je tremble. B o ir o t, qui
» m’avait conseillé de rester tranquille, veut absolument que je soumissionne
» tout, et tout de suite ; mais j e n ’ai pas d ’argent,, première difficulté. Dans
» la nécessité où je suis d’acquérir la fortune , j e ne veux rien que ma légitime.
» L e département m ’a refusé un mois de sursis ; l'ambassadeur rie laisse
» a u c u n espoir ; si j’achctc , le contrat passé, je vendrai des objets à loi pour
» le second paiement et simplifier la recette ; 011 est de part et d’autre irop
» méfiant pour mettre la te te dans le sac ; j e n ’ai pas envie du bien des
« autres. »
L ’im palicnce qu’elle m ontre d’avoir la procuration légalisée confirm e l ’acccplalion qu’ elle avait faite de mes pouvoirs dès l’envoi de la prem ière expé
dition non légalisée; sa peur d’etre obligée de soumissionner avant d’avoir
celle légalisation, prouve com bien elle était prudente , car j’élais aussi obligé à
la garantie par la procuration non légalisée qu’ elle avait déjà que par une
seconde expédition légalisée.
L a dernière phrase avait été occasionnée par une lettre de mon troisième
fils , sûr le ton de la défiance.
C ’est le 27 therm idor suivant (ao û t 1796 ) que ma sœur a soumissionné mes
biens , c l par conséquent ce n’est que trois mois après l’acceptalion de ma pré
cédente procuration , faite par le llrc du 4 inai I 79^-
A l’inslanl de la soumission, en pleine séance, un des administrateurs
demanda à ma sœur s’il était bien vrai qu’elle soumissionnât pour moi ; elle
répondit hautement ; Qui oserait en douter? Ce inot écarla aussitôt divers
�concurrcns : je le rapporte, parce qu’il honore à la fois ma sœur, les adminis
trateurs et mes concitoyens, f^ïe la situation de mes hiens à la porte de
Clermont devait attirer; en même tems, il prouve qu’en achetant, ma sœur
exécutait mon m andat, était mon prête-nom.
M a sœur ne soumissionna que les sept-neuvièmes de mes hiens , parce que
sa légitime fournit une dispense de payer cette portion ; clic promit de l’abdi
quer quand je serais rayé, et aurais complété le paiement de la dot de
3 o,ooo livres, moyennant laquelle elle avait x'enoncé a louL ; elle l’a fait.
L e 24 a o û t, immédiatement après la soumission, ma sœur me donne avis
qu’elle a exécuté le mandat ; elle annonce d’abord ce que mon perc avait
laissé.
»
»
»
»
»
« Tout ce qu’il laissait de denrées a été ven d u , pillé en quatre jours ; les
biens l’auraient été aussi, puisqu’ils étaient de droit confisqués. Les soins de
Boirot et les miens, incidens sur incidcns, que nous avions eu soin de faire,
ont retardé jusqu’à cet instant où rien ne peut échapper. Dans la journée ,
ils allaient être vendus à un étranger, après l’avoir refusé à cinq ; il a fallu
emprunter par-tout, vendre cher à soi (1) pour soumissionner ; m ais, mon
» cher , songe donc que c'est pour toi seul que j’ai pris cette peine.
« Yoilà le quart qu’il faut payer en numéraire ; je suis bien forcée de vendre ;
* il est possible que si ta femme parvient à semer des inquiétudes, je ne
trouve pas d’acquéreurs, alors je serai forcée de me laisser déchoir , étant
» bien résolue de n ’y mêler pour rien la fortune de mon mari.
» L ’opération d’experts m ’a coûté beaucoup d’em barras, a coûté cher. Si
» madame Aubier est d’aussi bonne foi que m o i, nous sauverons quelque
» chose, et encore une fois, ce n’est pas pour m o i; j e crois l ’avoir assez
v répété. »
Le sursis qu’elle ditlui avoir été refusé explique ce qu’elle enLcndait, en disant,
dans la lettre du 4 mai précédent, qu’elle allait faire opposition aux ventes; on
sait que l ’opposition était im possible, sur-tout au nom d’un émigré inscrit;
aussi elle n’en a jamais fait : ma sœur dit qu’elle 11c veut y mêler pour rien la
fortune de son mari; elle dit qu’elle n’achète pas pour elle ; elle dit qu’elle
a soumissionné pour moi seul, et par conséquent en exécution du mandat.
Le premier septembre elle m’é c r iv it.
(1) Ce m ot indique la maison paternelle , de vieilles possessions de la famille que je. devais
recueillir seul, comme seul héritier. J\Ia sœur élait dotée en argent, et n’a pu rien vendre à elle,
%
�( 9 )
«
»
»
»
o y /
« 11 csl juste que je te donne quelques détails. L ’adjudication est faite de
tous tes bien s, moyennant 100,000 liv. Ti^vois que ce n’est pas im m ense;
niais aussi je n’ai pas quitté les experts un m o m en t, et j’ai été bien s e c o n d e e ,
tant par les gens du pays m ontagneux, que par ceux de la plaine. Je n'ai
pas dissimulé rues intentions ; j ’éprouve que même, les plus patriotes ( i) on!
» pitié de ceux qui Joui leur devoir. J ai ¡1 nie louci de tous mes amis ; leur
« bourse m ’était ouverte , et l’on nie prévient, la femme , au c o n tia iie , ne
» trouve pas un sou ; j’ai paye to u t, et le sixième en numéraire.
» L e p etit village n ’a pas le moindre reproch e à se faire ; ils sont venus
« m 'offrir leur bourse ; j’ai refu sé, cela me gênait pour la ferme ; j’ai accepté
« du meunier des Forges , je l’aurais affligé. J e vais fa ire mon testament que
» je remettrai à l ’ami B o iro t ; je ferai l e s d é c l a r a t i o n s NÉCESSAIRES en cas
« que je vienne à m ourir. O n n’aura cependant rien à craindre, car il y a plaisir
» à entendre mes enfans. »
Quelle déclaration ma sœur devait-elle faire , si elle n’était pas ma manda
taire , mon prête-nom ?
Dans une lettre du 3 novem bre , elle dit « que les adm inistrateurs ne lui
>> ont rendu qu’alors ma procuration qu’elle leur avait laissée. »
L e 3 décembre elle m ’écrit : « Il y a quatre jours que le départem ent m ’a
» rendu tous les papiers de famille ; je suis occupée à les m ettre en ordre ; je
» les étiquette. J ’ai tro u vé, à mon grand étonnement , ceux relatifs à la no» blesse ; au moins il en manquera peu : ceux relatifs à ta femme y
sont
» aussi.
3) J ’ai payé les arrérages des dettes de l ’a b b é .... ( notre frère ).
» L e vicaire du petit village y dem eure caché ; il prie pou r loi dans la cha-
»
»
»
»
»
»
pelle. Je ne saurais assez te dire com bien ces gens t'aiment ; et vraiment,
s ’ils me croyaient capable de te tromper, j e crois qu'ils me chasseraient. Je
ne me serais jamais cru Autant d’a c tiv ité , et je doute que po u r les miennes
je le fusse autant ; cet intérêt est différent : il y a quelque chose qui flatte.
M on m ari me recommande de ne pas prendre une b ro ch e, que l’on ne p o u rrait plus faire ses comptes. »
ISon-seulcm ent elle dit que c’ est p o u r m on co m p te qu’elle a g i t , mais m êm e
qu'elle en est flattée.
C erta in em en t si le départem ent n ’ eût pas recon nu dans m a sœ ur m a m a n -
(1) Les plus exagérés disaient alors, comme les ministres avaient dit: c’est un fu gitif du
tribunal révolutionnaire cjui ne devait pas être inscrit.
a
�''V’ X ,
( 10 )
dataire, il ne lui aurait pas donné les papiers qui m’appartenaient person
nellem ent, sur-tout ceux de m^femme un acquéreur national n’avait pas
qualité pour les réclam er, encore moins ceux de la noblesse (i).
La renonciation de ma sœur la dispensait de payer les dettes de mon frère.
Il est si vrai qu’elle les a payées pour mon compte, qu’elle a porté tous les paiemens qu’elle a faits pour les dettes de mon frère, de même que tous ceux qu’elle
a faits pour dettes de mon père , dans le compte qu’elle m’a rendu , clos par
l ’acte du 8 mai 1801.
E n fin , il était si notoire que ma sœur n’était que mon homme d’affaires ,
que les paysans 11e voulurent point passer bail, avant que je leur eusse écrit
de Berlin , que je les agréais pour fermiers.
Le juge de paix ( M. D eberl ) voulut avoir un mot de ma main qui lui lînL
lieu d’ une expédition de ma procuration. En voici la preuve dans une lettre de
ma sœur, du 17 mars :
« J ’ai vendu la terre de B o u r r e à M . Debert ; quoique je lui aie fa it lire la
» procuration que la m ’as envoyée, il me prie de t’engager à mettre sur un
» billet séparé, dans une de tes lettres , que tu approuves celte vente : il en
» donne pour raison que , ne pouvant pas déposer ta procuration , elle ne lui
» sert à rien , si je viens à mourir. »
Les lettres ci-dessus ont été produites ; elles en disent assez pour que je me
dispense d’en transcrire tant d’autres ; j’en ai produit davantage, et j’en ai plus
de cen t, où ma sœur parle toujours en mandataire, se qualifiant mon prêtenom , mon homme d ’affa ires, demandant des insti'uctions, même sur les
objets les plus minutieux.
En janvier 1801 , mon retour fut annoncé à ma sœur par mon fils aîné; elle
lui répondit : « Le retour de votre père me fait un sensible plaisir ; mon cœur
» est satisfait, et l’intérêt de vos affaires , celui de ma tranquillité, le rendaient
» nécessaire : alors nous réglerons nos comptes, et je lui rendrai tout ; et c’est
» de lui seul que vous pouvez et devez dépendre ; je ne suis et n’ai ete que son
» homme d affaires , ne voulant rien disposer sans lui. »
Ce n’était que parce que ma sœur avait acheté comme ma mandataire, que
sa tranquillité demandait que je vinsse ratifier ce qu’elle avait fa it, recevoir
ses comptes , lui donner décharge.
(1) Lorsque l’assemblée de la noblesse de C lc rm o n t, dont j ’étais m em bre, sc sépara,
<*ti 1789, elle m’avait fait dépositaire de ses papiers,
«
�( ” )
Je suis arrivé à Clermont en mai's 1801.
Aussitôt ma sœur me présenta plusieurs personnes avec qui elle avait traité
pour mon compte , afin que je leur donnasse les ratifications qu’elle leur avait
promises de ma part ; jusqu’à ma radiation je les ai données sous seing-privé.
Ma radiation éprouva des retards (1) , parce qu’on avait mis à ma charge ce
qui concernait un autre Emmanuel A u b ier, mon cousin et mon filleul (aujour
d’hui subrogé-tuteur des mineursLamonteilhe). Il était alors absent, et aurait
été compromis si je ne lui avais pas donné le tems de rentrer avec un certi
ficat de non inscription qu’on lui avait obtenu, en mettant a ma charge ce
qui le concernait, même son inscription sur la liste des émigrés.
Ma sœur voulut qu’un acte constatât aussitôt qu’elle n’avait rien fait que
pour mon compte , qu’elle m’avait rendu ce compte.
En le rédigeant aussitôt, je ne m’attachai qu’à employer les expressions
qui pouvaient le plus satisfaire ma sœ ur, et lui exprimer ma reconnaissance
de son zclc pour moi.
J ’étais loin de prévoir qu’on pût lui faire désavouer un jour le mandat qu’elle
s’honorait alors d’avoir si bien rempli , dont elle me rendait compte et me de
mandait décharge.
L ’acte a été signé le 8 mai 1801 ; il porte que c’est elle qui a exigé que j’exa
minasse et appurasse ses comptes ; il ne peut pas y avoir d’aveu plus formel du
mandat. Cet acte étant p ro d u it, je me borne à en donner ici l’extrait.
Il est qualifié et intitulé , décharge et convention.
D é c h a r g e , p a rce que son p re m ie r et p rin c ip a l b u t était de constater que
ma sœur n ’ayant rien fait que p o u r m on c o m p t e , je là déchargeais de toute
responsabilité personnelle des opérations p ar elle f a it e s , soumission de mes
biens , a c h a t s , em prunts p o u r les solder , reventes de divers héritages p ou r
acquitter les em prunts , administration de tous im m eubles et meubles ; que je
la déchargeais de toute recette p a r elle faite des débiteurs de m on p ère , de
m on frère , de mes enfans, des traites avec ceux qui avaient des intérêts a d é
m ê le r , soit avec la succession de m o n p è r e et de m on frère, soit avec moi-m êm e.
Si ma s œ u r eût soumissionné mes biens com m e tout acquéreur n a t io n a l, et
p o u r son co m p te p e r s o n n e l, elle n’ eût rien eu de tout cela à faire ; elle l ’avait
(1) M a fam ille.cl mes amis m ’ avaient prop osé, en *79 ° ’ ma radiation par des certificats de
résilience; j’avais répondu que ma sortie de France était trop connue pour que je ne craignisse
pas. de compromettre ceux qui voulaient bien m ’offrir de m ’atlcslcr, et que je 11c pouvais pas
jprÊtcr serment de n’èlre jamais sorti de France,
�l'ait comme ma mandataire , parce que mon mandat était illimité pour toutes
affaires où je pouvais avoir in térêt, et parce que je l’avais expressément chargée
de faire honneur à la mémoire de mon père et de mon frère , ainsi que le dit
cet acte.
Convention , en ce que cet acte devait constater , comme il le fait , que ma
sœur n’avait soumissionné m es biens tjiie pour me les conserver ; que j’étais de
meuré propriétaire de to u t, même des deux neuvièmes que l’administration
s’était abstenue de vendre en les lui laissant comme portion héréditaire ; qu’elle
me remettrait cela comme le reste pour s’en tenir a sa dot constituée, moyen
nant laquelle elle avait renoncé à toute succession directe et collatérale, à
tous droits échus et à échoir ; enfin que je ne lui devais plus quç 2000 liv.
Convention, en ce que par cet acte je m’obligeais ¿1 la garantir envers et
contre tous , même, des recherches quelle pourrait éprouver comme héritière ,
à cause des imprudences que son conseil lui avait fait commettre : ma garantie
sur ce poinl était le prix de scs soins , comme ma mandataire.
Convention, parce que la transmission définitive , par acte notarié , n ’étant
pas possible avant ma radiation, il devait être expliqué que nonobstant la
décharge donnée , l ’acte serait différé jusque-là , et que par conséquent ma
sœur devait jusque-là demeurer mon prête-nom pour la propriété.
En prévoyance du cas où je mourrais avant d’être rayé , il y est déclaré que
mes trois enfans sont appelés à me remplacer collectivement.
Cet acte prévoit aussi le cas où je trouverais à marier mon fils Lamonteilhe
avant d’avoir obtenu ma radiation, et dit que je me propose de fixer sur sa tête
les principales propriétés que je laissais encore reposer sur celle de ma sœur.
Mais il ne dit pas que nous voulons par-là les sortir de la masse de mes biens
paternels que ma sœur reconnaît s’être chargée de me conserver: c’est un
avancement d’hoirie qu’il annonce.
Cet acte charge mon fils Lamonteilhe de la régie ; je lui attribue pour cela
1200 liv. d’appointcmcns : c’élnit chose inusitée entre père et fils , mais laite
avec réflexion pour constater qu’il n’était pas propriétaire.
Il y est dit qu’il est représentant de toute la famille , parce que mes enfans
étaient appelés collectivement, par la précédente disposition, à me représenter
si je mourais avant d’être raye, et avaient par-la, dans cette hypothèse, chacun
un tiers de chaque objet à réclamer ; scs frères étaienl absens. Je voulais que
le mot représentant constatât qu’il leur devait compte de to u t, mais qu’il était
autorisé à retenir 1200 liv. par an pour scs peines.
Cet acte contient une reconnaissance bien importante, celle que tous les
�papiers ont etc remis à mon fils Lamonteilhe ; ils sont encore dans les mains de
sa veuve , ce qui me met dans l’impossibilité de produire une multitude d’autres
preuves du mandat.
J ’aurais plus clairem ent exprim é dans cet acte que j’étais le seul et vrai p ro
priétaire, si je n’avais pas été dans le cas de craindre, com m ecela est avoué pat
ines adversaires , que le fisc voulût encore liériler de mes biens, si je mourais
avant d’être rayé.
En exécution de cet acte , et quoiqu’on m’eût touL confisqué , je renou
velai seul tous les engagemens pour dettes de mon pere, de mon frère et de mes
enfans, qui étaient dans le cas d’être renouvelés ; pas un de leurs créanciers
n’a perdu un jour d’intérêl , n’a reçu un assignat, n’a été renvoyé au grand
livre , n’a éprouvé l’échelle de dépréciation.
Personne n’a souffert de ma fu ite , et le fisc a été payé de tout ce qu’il a
voulu.
Lorsque j’avais mis dans l’acte du 8 mai 1801 , que je me proposais de fixer
sur la tête de mon fils Lamonteilhe les principales propriétés, s’il trouvait un
mariage qui me fût agréable , mon fils et ma nièce , aujourd’hui sa veuve ,
m’avaient déjà fait part de leur inclination: peu après , ils me pressèrent de les
unir sans attendre ma radiation. Ts’écoutant que ma tendresse pour eux , trop
confiant dans les senlimens que ma belle-fille m ’exprim ait, j’y consentis.
Comme c’est sur les promesses que je fis alors qu’elle a fondé son inter
vention , il est nécessaire que je rende ici compte des faits et des actes.
Dans le fait, je promis de faire tout ce qui me serait permis par la l o i , dès
que je serais rayé de la liste des émigrés , et en attendant de délaisser à mon
fils le bien de Sauset, sous réserve de 700 liv. viagères sur ma tête, e t 3 oosur
celle de mon troisième fils.
Alors, Sauset ne paraissait pas valoir la m oitié de la m asse, et les liquida
tions sur le Gouvernem ent paraissaient devoir solder tout reliquat de dettes, et
com pléter la légitim e de mes autres enfans.
Les jurisconsultes décidèrent que mon fd s risquerait de se voir dépouille de
Sauset d ’abord après la mort de ma sœur, par ses représentons, si le contrat
de mariage donnait lieu de croire <jue ma sœur fut, donatrice.
De plus, ma sœur trouvait qu’il était contraire à sa délicatesse qu’elle eût
l ’air de disposer de ce qui m’appartenait ; elle ne voulait point d’ un sim u la cre
de vente qui supposerait qu’elle avait reçu de l’argent; enfin, je ne voulais rien
qui pût frauder la légitime de mes autres enfans.
�■
' * ■.
( *4 )
Il fut décide; qu’on suivrait le plan annonce' par l’acte du 8 m a i, en fixant la
propriété de Sauset sur la tète de mon fils, au moyen d’une subrogation qui le
substituerait à ma sœur, qui était reconnue mon prête-nom, sauf à faire, quand
je serais rayé , tous les actes qui paraîtraient nécessaires.
La délibération de famille-, portant cette subrogation, .est datée de la veille
du contrat de mariage.
^
Pour se convaincre que nous n’avons voulu en faire qu’un délaissement
anticipé en avancement de ma future successio n , il suffit de remarquer ,
i°. qu’il y est déclaré que le prix du ra c h a t de Sauset a été fait de mes fonds;
2°. que mon fils y délaisse à ses frères, par anticipation, le tiers du domaine de
Crèvecœur que j’avais acheté au nom de mes trois enfans et paye pour eux ;
3 °. qu’il y consent à un prélèvement sur la masse de ma succession de i 5 ,ooo liv.
en faveur de chacun de scs deux frères: c’était réellement un retour de lot q u i,
avec les liquidations , devait faire plus que la légitime de droit.
Il est vrai qu’il est dit qu’il en sera comme si ma sœur avait été, quant, à
Sauset, prélc-nom de mon fils seul; mais le mot comme exprime que c’était
une fiction dont il fallait se servir dans un acte destiné à devenir public , afin
de se préserver du fisc, si je mourais avant d’être raye et pendant l ’absence
de ses frères.
Si on avait voulu alors, comme mon neveu le prétend aujourd’h u i, que Sauset
fut une libéralité de ma sœ ur, elle aurait été partie dans le contrai de mariage ;
eile n’y est pas même mentionnée comme témoin, quoiqu’il soit signé chez elle
et devant elle.
Il fut rédigé par l’avocat devina b elle-fille, cl M. C osle, son homme d’af
faires alors comme aujourd’hui.
T r o i s mois après ce mariage , mon fils me demanda une subrogation n o ta riée
de Sausel, parce que les fermiers voulaient avoir un bail notarié, il m’offrit
nn e contre-lettre qui déclarait que cet acte n’était qu’une ratification de la
délibération de famille , et qu’il tiendrait les conditions y exprimées.
La subrogation et la contre-lettre furent rédigées par M. Coste , homme
d’affaires de ma belle-fille; je les signai.
C ’est après ce t'acte que ma sœur m’a répété par deux lettres produites:
Tr mis avez eu le plaisir (le doler votre fils ......Je n ’ai été que votre prête-nom.
J’ai été amnistié le a 3 fructidor an X , et réintégré dans mes droits civils.
Aussitôt je me fis admettre à la qualité d’héritier bénéficiaire de mon père,
sous réserve de mes créances. Mes créances sur la succession de mon père se
montaient dès-lors à plus de i3o,ooo liv.; je suis prêt à le prouver: presque
�( i5 )
-
toutes primaient la dot de ma sœ ur; j’étais subrogé de droit aux 12,000 liv.
que je lui avais payées, à 5ooo que j’avais fait payer à la sœur de mon père }
pour reliquat de sa d ot, et à d’autres créanciers.
Mes répétitions se grossissaient d’environ 27,000 livres de dettes que je
m’étais encore chargé de payer pour mon père, mon frère et mes enfans.
L ’adition d’hérédité que ma sœur avait faite avant d’avoir reçu la procu
ration par elle acceptée, le 24 mai 1 7 9 6 l’avait rendue responsable de tout
envers moi ; ses acquêts en étaient grevés envers m oi, si e}le n’avait pas acheté
comme mon prête-nom : Sauset l’était comme le reste.
A in si, tous mes droits sur scs biens me demeuraient conservés, si j’eusse
voulu supprimer toute preuve du mandat et m’en tenir à mes créances.
C ’était le parti le plus avantageux pour m o i, car elles valaient quatre fois
plus que le V erger, seul objet qui me resta après avoir payé , pour ma fam ille,
deux fois plus que je n’en ai jamais eu , non-seulement en capitaux, mais
même en revenu.
Je fis ces observations à ma sœur et à mon beau-frère, le 7 vendém iaire (1802),
à St. Mande , en leur faisant part de mon amnistie et de ce que j’avais pris
la qualité d’héritier bénéficiaire , tant pour les co u vrir de l’im prudente adition d’hérédité de ma sœ ur, que pour consolider la garantie que j e leur avais
donnée envers et contre lous.
Ils me demandèrent de mettre sur leur double de l’acte du 8 mai 1801
que ma sœur m’avait rendu compte de la gestion qu’elle avait continuée •
qu’ils n’avaient retenu que les 2000 livres qui leur étaient redues sur les
12,000, complément de sa d o t, et qu’ils m’avaient soldé le reste; je le iis.
Ce deuxième compte et cette décharge, sont de septembre 1802; ils cons
tatent qu’après ma radiation , ma sœur et mon beau-frère ont reconnu la va' lidité du mandat accepté par ma sœ u r, .et par elle exe'culé pendant que j’ai
clé sur la liste des ém igrés, ce encore après ma radiation.
Je reconnus alors que Sauset, que ma sœur avait estimé de Go,000 à
70,000 livres lors du mariage, valait plus du double , tandis que la liquidation,
qu’on avait dit équivaloir à Sauset, n’ayant pas été mise en règle en tems utile ,
péi'iclitait.
En attendant une décision du Gouvernem ent , je demeurais sans aucun
moyen de subsistance en France , parce que j’avais engagé tout ce qui me
restait de revenu au paiem ent des intérêts des d e ttes, et à donner chaque
année des à-coinptes sur les capitaux, jusqu’à leur cxliuclion.
�*• V ' V '-'
( IG )
Déjà ma b elle-fille, pour qui je m’étais trop dépouillé, refusait de me re
cevoir, parce que je ne pouvais plus lui rien donner.
Embarrassé des instances de mes autres enfans pour obtenir des secours
que je ne pouvais plus donner , il fallut leur prouver qu’il n’y avait pas de ma
faute; à cet effet, je constatai, par acte reçu Sarray , notaire, le i 3 oc
tobre 1802 , mes représentations et leur inutilité.
Je profitai de.ee que le Premier Consul voulut bien me permettre d’aller
jouir en Prusse de la place et des ressources que la bonté du roi m ’y con
servait ; mon fils aîné était sur le point de s’y marier.
M a.sœ ur m ’offrit de se charger de mes pouvoirs; je les lui renouvelai,
laissant encore la propriété du Verger sous son nom pour retarder un gros
droit de mutation.
M on fils Lamonteilhe est mort en 1804.
En i 8 o 5 , j’appvis que le fils de ma sœur, mon neveu , prétendait que mon
séjour en Prusse, quoiqu'avec permission du Gouvernement, me faisait perdre
mes droits civils, et que cela autorisait sa mère à refuser de me passer acte
notarié de remise de la propriété dix Verger.
Je priai le ministre de France à B erlin , et S. Exc. le maréchal Duroc qui
s’ y trouvait, de demander pour moi , à S. M. l’E m p ercu r, une décision.
Un décret impérial de l ’Em pereur, en date du 10 décembre i8o!>, me
confirma la conservation de mes droits civils et français (1). Je l’envoyai à ma
sœur pour le présenter au préfet selon l’usage ; elle me le refusa.
Depuis la mort de la fille de ma sœur, son fiis avait pris sur elle un ascen
dant absolu, et ne cachait plus sa haine pour moi ; j’en fus d’autant plus affecté,
que j’avais pour lui cette prédilection que le titre de parrain inspire à celui
qui voit dans ce lien religieux une sorte d’adoption.
En 1809, je suis venu fixer ma résidence en France.
J ’ai satisfait à la loi du 24 avril 1810, devant M. le procureur-impérial de
Paris.
Par une lettre d’octobre 1809 , nia sœur m’avait annoncé qu’elle voulait être
totalement débai’rassée de la gestion qu’elle exerçait toujours par suite de mon
mandat, et comme étant encore mon prêle-nom pour la propriété, du Verger, etc.
Elle avait ajouté, sinon j e saurai vous y obliger; ce qui me menaçait des
actions que le mandataire peut exercer contre son mandant : celle menace me
(1) Il y ajoutait la permission de garder la place de chambellan du roi de Prusse.
�c *7 )
W 5
.
rappelait une autre lettre où elle s’était plainte de ce que je différais d’ac
cepter une transmission notariée. ,
Je lui répondis que j’étais prêt à l’accepter , qu’elle pouvait choisir dans
C lerm ont, pour terminer entre nous fraternellement, tel conseil qu’elle
voudrait, avocat, magistrat, notaire, avoué , bourgeois, que je donnerais un
blanc-seing à celui qu’elle nommerait.
J ’avoue que j’avais cet avantage, qu’il n’y avait presqug pas un habitant à qui
elle n’eût dit qu’elle était ma mandataire , parce qu’elle aim ait à être com pli
mentée sur son zèle fraternel.
M ais, précisément par cette raison, mon neveu lui avait donné pour conseil
l'étranger dont j’ai déjà parlé.
Il me fit répondre que ma sœur pourvoirait à tout par son testament ; c’était
une derision , car ma sœur a sept ans moins que moi et un bon tempérament.
Je profitai de l’occasion d’une maladie de cet étranger pour aller lui
faire visite et lui proposer d’être arbitre ; mais ce fut inutilei^icnt.
Pendant un a n , j’ai encore inutilem ent sollicité u n arbitrage : mes parens ,
mes a m is, mes concitoyens y ont échoué ; mon neveu est venu rom pre avec
arrogance une entrevue de conciliation chez un m agistrat ; enfin , ma sœur
m ’a fait dire qu’elle voulait être citée devant le juge de p aix, que cela pourrait
s’arranger ; elle fut citée.
Le juge de paix se trouvait être ce M. D ebert à qui elle avait montré ma
procuration en lui vendant un des objets du mandat. Mon neveu sentit que
si ma sœur paraissait en personne, elle ne pourrait pas désavouer ma procu
ration qu’elle lui avait montrée pour traiter avec lui ; pour l’éviter , on lui fit
envoyer un fondé de procuration , qui déclara que le détail du mandat lui pa
raissait inutile , qu’elle refusait toute conciliation.
Se borner à dire que l’aveu du mandat était in u tile , c’était avouer en
quelque sorte son existence.
Il devenait évident qu’on ne refusait de le reconnaître que pour que mon
neveu , et tous représentans de ma sœ u r, pussent soutenir après sa m o rt, que
toute transmission par elle faite était une libéralité faite en contravention à la
lo i, attendu qu’ elle avait institue ses deux enfans héritiers par égale portion,
et donné toute sa réserve à son fils.
Ma situation avec les créanciers cl avec mes enfans m’ayant forcé d’insister
pour avoir un litre notarié, ma sœur me fit dire qu’elle voulait être assignée ,
parce qu’une décharge judiciaire lui donnerait plus de surelc.
E n juin 1811 , ma sœur c l m oi convînmes de nous en rapporter à deux,
3
�( 18 )
magistrats respectables qui avaient notre confiance, comme ils ont celle
de tous nos concitoyens ; ils arrêtèrent entr’eux une transaction qu’ils
croyaient concilier les intérêts respectifs , et que je m ’empressai de signer
chez l’un des deux à P a ris, le 2 juillet 1811. 11 y est dit : « Emmanuel Aubier
» ( c ’est m oi) approuve et ratifie de nouveau, entant que besoin serait, ce
» qui a été fait par la dame de St. Mande , sa sœ u r, en vertu des pouvoirs
» confidentiels par lui donnés, confirmés ensuite par diverses procurations,
» i°. Pour acheter d*u domaine national les biens provenus des successions
» d’Antoine A ubier, leur père commun, et de Jean-Baptiste A u bier, leur frère ,
» lesquels étaient échus audit Emmanuel A ubier , en vertu de son contrat de
;> mariage, et par l ’effet des renonciations portées dans celui des sieur et
j> dame Si. Mande ; 20. Pour payer lesdilesluljudicalions, régir et administrer
» lesdits biens; 3°. Pour revendre, échanger diverses parties desdits biens,
j> et spécialement pour subroger Jérôme A u bier, second fils d’Emmanuel, à
» la propriété de Sauset. En conséquence , il promet de garantir et indem» niser M. et M me de St. Mande envers et contre tous. «
Par l ’art. 2 , ma sœur me transmettait le V erger, à condition, i°. qu’il de
meurerait chargé envers elle et son mari des garanties par moi promises ;
20. d’une rente viagère de 3 oo liv ., provenant d’emprunt fait pour ma femme ;
3 °. d’une dette en capital de i 3 , 5oo liv., provenant d’emprunt fait par mon
père : clause avantageuse à mes petites-filles.
U n des deux magistrats l’envoya à ma sœ ur , signée de m oi , p o u r qu’elle
la signât ; mais dans l’intervalle , les intrigues de l’étranger l’avaient em porté
sur la sagacité des conciliateurs ; elle refusa.
ISon-seiilement l’étranger avait décidé ma sœur à refuser tout arrangem ent,
mais il était encore parvenu à décider ma belle - fille à in t e r v e n ir en
faveur de ce systèm e, qui devait donner a mon neveu le droit de dépouiller
scs filles.
Il n’avait été que trop bien secondé par les faux amis qui entourent ma
b e lle -fille , qui la ru in en t, qui trem blaient qu’elle 11c p rît confiance en m oi et
que je 11c lui ouvrisse les yeux (1).
(1) Ils lui ont fait vendre pour 200,000 liv. de biens ruraux, à elle donnés par son père et
sa m ère; ils se sont fait céder ce qui était à leur convenance, et notamment, les bAtimens,
caves, celliers, etc., dont elle ne peut se passer pour l’exploitation du reste, afin «pic la dépen
dance dans laquelle cela la tient, amenât d ’autres affaires; ils lui en ont dévoré le prix des
�( i9 )
C e lle société avait décidé ma belle-fille , en lui persuadant qu’une ratifica
tion de la subrogation de Sauset par mon neveu vaudrait bien mieux que la
m ienne, parce qu’il était riche.
Cependant il n’y avait pas un de ces faux amis , et sur-tout l’homme de loi,
qui ne sût, i°. que la loi annulle tous engagemens pour droits successifs non
ouverts ;
2°. Que mon neveu partage la qualité d’héritier de ma sœ ur avec le m ineur
Chardon , fils de sa fille ; que le tuteur de celui-ci ne pouvait pas donner pa
reille ratification , et qu’en supposant qu’il se fît autoriser par un avis de pa
rons à la donner, ce serait encore une renonciation à droils successifs non
ouverts qui ne vaudrait rien ;
3 °. 11 était évident que, dans le cas où mon neveu viendrait à m ourir avant
ma sœur, et lorsque celle-ci viendrait ensuite à décéder , les tuteurs des m i
neurs , tant de mon neveu que de sa sœur, seraient obligés , par le devoir de
tu teu r, de demander la nullité de la subrogation de Sauset, nonobstant toute
ralilicalion , s’il n’avait pas été reconnu que ma sœur avait été ma mandataire ,
puisque sans celte reconnaissance, la subrogation de Sauset devenait libéralité
faite en fraude des héritiers.
Dans l’instance entre ma sœur et moi, on a conclu, i°. à ce que je fusse main
tenu dans la qualité de seul héritier dém on père et de mon frère ; 2°. à ce qu’il
me fut donné quittance de t2,ooo liv ., reste de sa dot ; 3 °. à la remise du Verger.
Par sa requête d’intervenlion , ma belle-fille demandait que je fusse déclaré
non-reccvable dans toutes mes demandes; ainsi elle voulait que je ne fusse pas
héritier, de mon père.
Elle se disait autorisée par un avis de parens ; mais n’en donnait pas copie.
Les parens questionnés chacun séparément, disaient n’avoir jamais enlendu
qu’on me contestât ma qualité d’héritier, ni la quittance de 12,000 liv., ni
le Verger ; ils disaient que quand on les avait menés sans citation chez le juge de
paix signer un avis, on ne leur avait parlé que de me demander de respecter le
don de Sauset, et même qu’on leur avait dit que la petite formalité qu’on leur
faisait signer n’était que pour amener un arrangement entre ma sœur et m oi,
où je ratifierais le don de Sauset.
ventes ; ils lui ont fait surcharger le reste de tant de dettes, que depuis deux ans les prêteurs sont
o b lig é s
de se contenter d’hypothèques sur l’usufruit de mes bienfaits que luidonne son contrat
de mariage, et sur la part qu’elle amende dans la succession de mon petit fils, m ort après son
père: ces faux amis jouent sur la dépouille de mes enfans.
�( 20 )
Vérification faite sur la minute de cet acte dont on refusait copie , que dit-il ?
qu’on a exposé aux parens que ma demande contre ma sœur tendait à faire
annuller le don de Sauset, comme fait sans autorisation de ma part : on ne
trouve pas , dans cet acte , un mot d’aucun des trois points auxquels l’affaire
avec ma sœur se bornait.
'
•
Rem arquons, i". que dans l ’exploit introductif, je déclarais que c ’était
par mes ordres et comme-ma mandataire, que ma sœur avait remis Sauset
à mon fils ; i°. que depuis ma demande j’en avais signé la ratification, que cet
étranger avait fait refuser par ma sœur et par ma belle-fille.
Cet exposé prouve qu’on sentait bien que les parens n’autoriseraient pas
l ’intervention , si on leur disait vrai : il prouve en même tems qu’on avait senti
que si on leur avait dit la vérité , ils auraient d éclaré, que bien loin
d’adopter le système de l’étranger, on devait se réunir à moi pour le
combattre. On a donc trompé les juges , en se disant autorisé à y adhérer.
On vient de voir avec quelle adresse cet étranger a d’abord égaré mon
neveu ; comment , à l’aide du fils , il a captive la m ère, et com m ent, à l’aide
de la mère et du fils, il a abusé de la confiance de ma belle-fille ; com m ent, à
l ’aide des trois, il a trompé les parens.
Bientôt il veut que ma sœur, ma belle-fille et mes petites-filles invoquent
les tables de proscription, la m ort civile contre moi. Mais il sait que les
avocats deClerm ont pensent trop bien pour se charger de plaider un si odieux
moyen , au nom des enfans contre leur père.
D ’ailleurs tous savent par la notoriété, et presque tous pour avoir été
consultés, que ma sœur avait accepté mon mandat. Que lait-il ? Il fait révo
quer par ma belle-fille l’avoué qui avait présenté son intervention, et consti
tuer celui de ma sœur: il le fait dès-lors parler au nom de ma sœur cl belleiille collectivem ent, afin de confondre ensemble deux intérêts , qui, au fond ,
étaient opposes. O u i, opposes, et diam étralem ent, puisque ce système assure
aux représentans St. Mande le moyen de dépouiller les mineurs Lamonteilhe.
Aussitôt il fait paraître des conclusions motivées el un mémoire, l’un et
l ’autre imprimés. En incident préalable , on y soutenait que l ’affaire n’était
pas de la compétence des tribunaux civils j qu elle devait être renvoyée aux
autorités administratives.
On voulait faire préjuger p a r -la que j’étais un émigré perturbateur d’acquereurs nationaux , à livrer à la sévérité des lois.
C ’était d autant plus ridicule, que l’autorité administrative près de qui on
�&
avait intrigué, avait dit franchement, que bien loin que ma demande annonçât
un rebelle aux lois contre les ém igrés, elle prouvait que je m ’étais empressé
de me soumettre à la confiscation, en chargeant ma sœur de soumissionner
mes biens pour mon com pte, et que par-là je m’étais moi-mème déclaré
acquéreur national de mon propre bien ; aussi n’avais-je pas hésité à proposer
au secrétaire-général du département d’etre arbitre.
! Dans ces conclusions et ce mémoire , l ’étranger soutenait que mon inscrip
tion sur la liste des émigrés , à l’époque où ma sœur avait accepté ma px-ocuration et soumissionné mes biens , annullait mon mandat ; on en concluait que
ma sœur était devenue propriétaire de mes biens avec faculté d’en disposer.
On allait plus loin , on soutenait que mon beau-frère était devenu aussi proprié taire de mes biens sans y paraître , et qu’il demeurait propriétaire m al "ré
lui.
A l’appui de ce système, on invoquait contre moi les tables de proscription,
et sur-tout la mort civ ile , tandis que c’était pour me préserver de ses con
séquences et me conserver ma propriété que ma sœur avait accepté mon
mandat.
La manière dont l’étranger justifie ce m oyen, est curieuse en morale comme
en droit. L ’intérêt est la mesure des actions, dit-il; et suivant lui ma b e lle fille et mes petites-filles ont besoin de ma mort civile pour que Sa use l soit
réputé don de ma sœ ur; elle a besoin qu’il soit don de ma sœur, pour q u ’il
ne soit pas compté dans la masse paternelle , et que mes autres enfans ne
puissent pas demander un supplément de légitime.
Il est vrai que dans l’état actuel des choses, mes petites-filles courent
risque d’avoir 10,000 liv. à rendre à mes aulres deux enfans ; mais pourquoi ?
1“. parce que Sauset vaut i 5o,ooo liv. au lieu de Go à 70,000 qu’il fut estimé
par ma sœur ; 20. parce que 160,000 liv. de liquidation destinées aux frères ont
cle forcloses p*^' negligence de mon fils IjAmontcilhe : ainsi c’est parce que
mes petites filles ont de moi 80,000 livres de plus que je n’avais promis ,
parce que j’ai etc trop libéral, parce que leur père, et après lui ma belle-fille7
ont etc negligens, que je dois demeurer à leur égard mort civilement.
E t a qui regrette-t-on de voir donner 10,000 liv. après ma m ort par mes
petitcs-iilles! Aux frères de leur père, dont l'un, l’aîné, était appelé p a rle tes
tament de mon père à tout avoir si je demeurais mort civilement.
Daillcurs, il. est encore bien incertain que mes petites-filles aient à donner
les 10,000 liv. , car ce 11’est qu’après ma mort qu’on peut savoir si je n’aurai
pas amélioré nia fortune ; le Gouvernement peut m ’accorder quelque
�indemnité des liquidations, car nos créances sont prouvées , fondées ; nous
n’avons été forclos que faute d’avoir suivi en tenis utile.
Il serait trop long de détailler ici les mensonges injurieux dont ce mémoire
est tissu ; je dois cependant en relever deux qui tiennent à la question à
juger.
On y lit que je veux reprendre Sauset pour en vendre la moitié , et rejeter
la légitime de mes autres enfans sur l’autre m o itié, tandis que ma demande
porte approbation du don de Sauset.
On y lit que je suppose des dettes pour les faire payer par mes enfans,
tandis que, par ma demande , j ’ai requis acte de ce que je me chargeais pour mes
petites-filles d’une dette de i 3 , 5oo liv. que l’acte du 8 mai 1801 avait assignée
sur Sauset, comme emprunt fait par mon père pour son premier achat.
Je ne relèverai poinl ici les divers persifflages ofTensans que ce mémoire
contient. A l’audiencc , l’étranger prononça en termes absolus que je devais
dem eurer, à l’égard de ma belle-lille, dans le néant d’ém igré, parce que
j’étais encore sur la liste le jour du mariage.
J’avoue que lorsque je rédigeais moi-même ( ainsi'qu’elle l’a imprimé )
l ’acte par lequel je ne me suis que trop dépouillé, n’écoulant que scs belles
pi’otestations de reconnaissance et de tendresse , je ne prévoyais pas que ma
nièce , la fille de mon compagnon d’infortune en émigration , inscrit comme
moi , me tiendrait un tel langage.
Mon avocat répondit avec la modération qui convient, à un père outragé, que
selon les lois romaines et françaises , celui qui était m ort civilement pouvait
encore faire les acLes du droit des gen s, et que le mandat était un acte du
droil des gens ;
Que telle était la jurisprudence de la cour de cassation.
Il démontra la réalité du m andat, par l ’acceptation de la procuration , les
lettres et les actes.
M es adversaires avaient fortement insisté sur ce qu’on lisait dans la lettre
du 4 mai 1796 , portant acceptation de ma procuration , ces mots j e vais en
faire usage pour fo rm er opposition au x ventes ; ils avaient voulu en conclure
que ma sœur ne l’avait acceptée qu’a cet effet.
Mon avocat p rou va, par la lettre de ma sœur, en date du 24 août, lende
main de la soumission , que par le mot opposition , elle avait entendu parler
de la demande en. sursis d’ un mois qu’elle y dit lui avoir été refusé;
Q u’il avait éte*impossible que ma sœur se fût chargée d’opposition au*
�( ^3 )
^3
ventes, puisque l’opposition étant un acte du droit civil, il était impossible
d’en faire une à ma requête , tandis que la soumission, comme mon prêtenom, étant un acte du droit des gens , elle pouvait s’en charger; que la loi
ne permettait pas même d’opposition à la requête de ma sœur ;
Que l’opposition, en la supposant possible , eût été sans effet et dangereuse ,
tandis que la soumission , comme mandataire , devait obtenir tout son e ffe t, et
était sans danger en gardant le secret.; que le bon esprit du pays l ’avait tellement
dispensée du secret, qu’elle avait affecté de publier qu’elle était ma mandataire;
que, de son aveu, elle n’en avait été que mieux sccondee; enfin , que toutes
les lettres constataient que ma sœur avait acheté comme ma mandataire.
Dans tout le cours de cette discussion , dans le mémoire et la plaidoierie, ma
sœur et mon beau-frère ne m ’ont pas une seule fois refusé la qualité d’héritier
de mon père, ni la quittance de 120,000 liv. E t depuis le projet de transac
tion que j ’avais signé chez un magistrat de la c o u r , ils ont toujours dit vouloir
me donner un acte de transmission du V erger pardevant notaire, pourvu
qu’on n’y dit pas que ma sœur avait été ma mandalaire.
Cela atteste leur désintéressement personnel , mais cela prouve que leur fils
les a subjugués au point d’en faire les instrumens du système dont ils n’ont
pas voulu eux-mêmes profiter.
Le ministère public conclut en ma faveur.
V oici le jugement prononcé en première instance , le 20 mars 1812 :
« En ce qui touche la demande de M. A u b ie r , tendante à être maintenu
» dans la qualité de seul héritier de son père et de son frère ,
» Attendu l’abdication de la dame de St. M ande, en faveur d’Emmanuel
« Aubier , son frère , de la part et portion à elle attribuée par les arrêtés de
» l’administration centrale, pour s’en tenir à sa constitution dotale;
» En ce qui louche la demande de M. A u b ie r, relative à la transmission ,
» de la part de la dame de St. M ande, à son p r o fit, du Grand-Verger de
» Montferrand ,
»
»
s*
»
» A ttend u , qu’il résulte de la correspondance des parties , et du traité
du 8 mai 1801 , que la dame de St. Mande n’a été que la mandataire d’Em manuel Aubier , son frère , à l’effet de racheter pour son compte ledit
héritage , cl qu’elle l’a soumissionné en execution dudit m andat, et l ’a
acquis de l ’administration centrale, paracle du 25 thermidor an 4 ,
« Attendu d’ailleurs que la transaction d u d itV erger n’est pas contestée ;
« En ce qui touche la demande de M. A u b ie r, relative a la quittance de
» 12,000 livres -,
�¿4 )
« Attendu que cette quittance a clé offerte par M. et Mad. de St. Mande;
» En ce qui touche la demande en remise des titres de famille ,
Attendu que de'funt Jérôme A ubier a été constitué dépositaire desdils
» titres, par l’acte du 8 mai 1801;
V ^
» En ce qui touche les interventions et demande de la dame veuve de
» Jérôme A u b ier,
» Attendu que l’acte du 8 mai 1801, enregistré à Pionsat, le 2 vendémiaire
» an X , par Chaudillon , qui a i*eçu un fr. 10 cent., et la subrogation du
» domaine du Sauset, reçue Costes, notaire, le 8 fructidor an. I X , enregistrée
» (ï C lcrm on t, le i 3 dudit m o is, ne sont point, attaqués , et que toutes dis>’ eussions à cet égard seraient prématurées , et que dès-loi’s son intervention
» est sans intérêt :
» Le tribunal , ouï M. Picot-Lacom be , procureur-im périal, déclare Em » manuel Aubier seul héritier de son père et de son frère ;
» Ordonne que dans la quainzaine de la signification du présent jugem ent,
» les sieur et dame de St. Mande seront tenus de passer pardevant nolairc acte
» de transmission à la partie de Jeudi, de la pleine propriété du Grand-Ycrger,
» situé à M ont-Ferrand', énoncé et confiné en l’exploit de demande ; sinon ,
>' et faute de ce faire dans ledit teins , et icelui passé , ordonne que le présent
33 jugement en tiendra lieu , sous les conditions néanmoins , i°. que le Verger
3) demeurera grevé , envers M. et Mad. de St. Mande , de la garantie de toutes
» recherches généralement quelconques , pour quelque cause que ce soit ;
3) 20. que ledit sieur A ubier demeurera chargé de la rente viagère de
»• 3 oo livres au profit de M lle D cbar ; 3 ». qu’il demeurera chargé des
3> intérêts, et garant du capital de *3 , 5 oo livres mentionné en l’acte du
» 8 mai 1801 ;
3> O rdonne q u e , dans le délai de quinzaine de la signification du présent
3) jugement , le sieur de St. Mande sera tenu de passer au sieur Aubier quil3) tance pardcvanl. notaire des
12,000 livres que le sieur A ubier lui a
» payées ou fait payer pour solde de la dot de la dame de St. Mande; sinon ,
« et faute de ce faire , ordonne que le présent jugement en tiendra lieu , et
3) servira de bonne et valable libération en laveur de M. A u bier;
» Ordonne enfin que tous les papiers de famille seront remis au sieur Aubier
* par la dame veuve L am onlcillie, représentant à cet égard son m ari, ou
» par loul. autre dépositaire , état sommaire d’iceux préalablcmsnt dressé,
» au pied duquel il sera donné décharge.
�LU»
( 25 )
» Sur le surplus (les demandes , fins et conclusions de M. A ubier et la
» dame de St. Mande , ainsi que sur les interventions et demande de la dame
« veuve Lamonteilhe , met les parties hors de procès , dépens compensés ,
» hors l’expédition du présent jugem ent, qui sera supportée par M . A ubier ,
>. demandeur.
>> Fait et prononcé judiciairement à l’audience de la première chambre du
» tribunal civil de Clermont -Ferrand , séant MM. JJom al, p résid en t,
« Chassaing , Gauthier. »
Le 29 avril 1812 , il m’a été signifié , par acte séparé , deux appels de ce juge
ment , l’un à la requête de ma sœur et de son m a ri, l’autre à la requête de ma
b elle-fille. Ils n ’ont rien écrit ni dit avant l’audience.
L ’avoué de ma sœur et son avocat y ont conclu : « à ce qu’il plût a la cour
« mettre l'appellation au néant; émandant et donnant acte à la dame de
'
» St. Mande de scs offres de déclarations consignées dans le jugement dont est
» appel , (le passer au sieur A ubier, à ses fra is, quittance authentique de la
» somme de 12,000 liv ., et acte de transmission.du Verger ; le déclarer non» recevable , ou en tout cas l’en débouter, et le condamner aux dépens des
« causes principales et d’appel , et cependant donner acte aux sieur et dame
» de St. Mande , de leur consentement à ce qu’il soit déclaré que les bleus
» n ’ont jam ais été acquis par ladite dame de St. M ande pour en fa ire sa
» propriété personnelle, sans qu’elle ait jamais été mandataire du sieur
» Aubier ; acte de ce qu’elle ne les a acquis que pour les conserver au sieur
» A ubier , son fr è r e , ou à ses enfans , et qu’elle a valablement transmis la
» propriété de Sauset à Jérôme Aubier , son neveu , et le surplus (les biens à
» Emmanuel A u b ie r , son frère ; qu’enfin les biens sont la propriété iirévo» cable de ceux à qui ils sont transmis. »
Ces déclarations sont un désaveu form el des conclusions prises en leur nom
en première instance, puisqu’on y avait soutenu que ma sœur était devenue
personnellement propriétaire de mes biens; tandis que, par ses conclusions ,
elle reconnaît les avoir achetés pour me les conserver ou à mes enfans ; enfin ,
que nous sommes propriétaires i r r é v o c a b l e s .
11 n est pas inutile de dire ici ce qui a engagé M. et Mad. de St. Mande à
ordonner qu’on fît ces déclarations.
Deux mois après l’a p p el, M. de St. Mande père ignorait qu’on avait inter
jeté appel en son nom du jugement de première instance ; il avait même dit
à plusieurs amis qu’il en clflit satisfait. Un de scs amis a essuyé des reproches
4
�( 26 )
pour le lui avoir appris. C'est par hasard qu’il apprit aussi qu’en première
instance on avait plaide, qu’il était devenu propriétaire de mes biens sans le
vouloir : c’est à la suite de cette révélation, et dans un élan de cette probité
qui lui est si naturelle, qu’il voulut qu’on fit en son nom et au nom de sa femme
(ma sœur) les déclarations ci-dessus. Mais il ne sort jamais de'la campagne; il
laissa ce soin à son fils, toujours dirigé par l’étranger; de là celte intercala
tion des mots sans q u ’elle ail jam ais été mandataire, au lieu de l’aveu du
mandat que l’ensemble de ces déclarations annonce, et que dans le fait elles
contiennent implicitement.
En principe de d ro it, on ne peut pas devenir propriétaire sans le vouloir,
et par conséquent de ce que xna sœur a déclaré judiciairement n’avoir jamais
voulu devenir propriétaire de mes b iens, il s’en suivait de droit qu’elle ne l ’a
jamais é té , pas même une minute.
En principe de d r o it, il ne peut pas y avoir d’achat sans acquéreur ; ainsi,
de ce que ma sœur n’avait pas acheté pour clle-mdme , il s’en suivait qu’elle
avait acheté pour une autre personne.
Cette autre ne pouvait être que m o i, puisqu’elle avouait avoir reçu de moi
une procuration , l ’avoir acceptée, et n’en avoir jamais eu d’autre que de m oi;
puisqu’elle déclarait s’être chargée de me conserver mes biens , et ne les avoir
soumissionnés qjie pour cela.
D ’autre p a r t, on ne peut transmettre valablement, la propriété d’un bien
que quand on en est propriétaire , à moins qu’on ne soit mandataire du vrai
propriétaire ; ainsi ma sœur, en demandant acte de ce qu’elle avait valable
ment transmis Sauset à mon fils, déclarait qu’elle l ’avait transmis comme ma
mandataire et mon prcle-nom; aussi, après avoir passé l’acte, elle me mandait,
par sa lettre d ’avril 1801 : T u as eu le plaisir de marier et doter to n fis ; je n’ai
été que ton prête-nom.
Enfin , il est bien démontré que dans tous les cas , dès qu’elle déclarait judi
ciairement qu’elle 11’élait pas devenue propriétaire , dès qu’aucun autre 11e
l ’avail chargée de le devenir, j’étais demeuré propriétaire, puisque la propriété
demeure à l’ancien propriétaire jusqu’a ce qu’un nouveau soit revêtu de ce
droit.
Dem ander (à la suite de la déclaration qu’elle s’était chargée de me con
server mes bien s) acte de ce qu’elle nous reconnaissait pour propriétaire irré
vocable , c’étaii im plicitem ent com pléter la preuve du mandai.
�( 2? )
Ces mots, sans qu'elle ait ja m a is etc mandataire, ne peuvent jamais détruire
ces déclarations ; ils sont tellement hors-d’œuvre , entre deux virgules, qu’ils ne
peuvent pas les atténuer. C ’est une amphibologie ; or toute amphibologie
placée dans le milieu d'un discours s’explique par l’ensemble de celui-ci ;
quand elle est dans le milieu d’une phrase, comme ic i, il est impossible de
l ’entendre autrement que par le sens entier de la phrase : ce sens y est si
opposé, qu’on crut d’abord que c’était une erreur de copiste. On verra dans
les motifs de l’arrêt à quel usage 011 destinait cette escobarderie. •
On devait s’attendre que l’avoué et l’avocat de ma belle-fille et de scs mineures
demanderaient acte de ce que ma sœur et mon heau-frere reconnaissaient que
Sauset avait été valablement transmis au père des mineures , et de ce qu’elle ch
était propriétaire irrévocable ; mais cela aurait dérangé le plan de l’anarchiste
directeur de cette affaire, qui voulait au contraire préparer à mon neveu les
moyens de les dépouiller.
L ’avoué et l ’avocat de ma b elle -fille , dociles à scs o rd res, ont conclu à
ce que je fusse déclaré non-recevablc dans toutes mes demandes ; ainsi ils ont
demandé que la cour me refusât la quittance de 12,000 livres; qu’elle me
refusât la transmission du V erger, dont mon beau-frère et ma belle-sœ ur me
réitéraient l ’offre , et même qu’elle me refusât la qualité d’héritier de mon père
et de mon frère, que ma sœur et mon beau-frère m ’avaient reconnue par tant
d’actes difTérens.
Qui aurait jamais pu imaginer que le don de SauseJ, quand même il eût été
fait par ma sœur en son nom personnel , pourrait donner à ma belle-fille le
droit de me faire priver des qualités d’héritier de mon père et de mon frè re ,
malgré mon contrat de mariage , malgré celui de ma s œ u r, quoique le Gou
vernement m ’eût réintégré dans mes droits civils par arrêté form el, malgré le
décret spécial, par lequel S. M. l’Em pereur me les avait confirmés? qui aurait
jamais pu penser que ce don lui donnait le droit de me faire rentrer dans le
néant, pour me 6crvir de l’expression de leur avocat en première instance?
Mon avocat en cour d’ap p el, fidèle à la modération que j’ai toujours mise
dans celle affaire, ayant dit qu’il voyait avec plaisir ma sœur renoncer à l’in
vocation de cet odieux m oyen, celui de ma belle-fille l’interrompit pour dire
qu’elle n ’y renonçait point; et c’est une chose fort importante a rem arquer,
qu’à chaque pas on a grand soin de faire dire par ma belle-fille et ses m ineures,
ce que mon neveu n’ose plus faire dire au nom de sa mère depuis que ces
déclarations le désavouent.
Il ne saurait y avoir de plus forte preuve de l’habileté en intrigue de l’c'tran-
�( 28)
ger qui'les dirige, que de voir l’avocat le plus instruit du barreau de R iom , si
renommé, séduit au point de défendre un système dont la conséquence légale
doit tôt ou tard dépouiller ses clientes de toute leur fortune.
M . l’avocat général, à qui la loi confie le soin de protéger les mineurs contre
les erreurs de leurs tuteurs et de leurs défenseurs, condut à la confirmation
pure et simple du jugement de première instance.
Il motiva son avis i sur ce que le mandat, ainsi que l’acliat, étaient des actes
du droit des gens, d’où il résultait que le mandat par moi donné pendant mon
inscription sur la liste des émigrés n’en était pas moins valab le, et que son
acceptation n’en avait pas moins irrévocablement lié ma sœ ur, conformément
à l’art. ig 84 du Code Napoléon ;
a". Sur ce que les lettres antérieures et postérieures à la soumission de mds
biens disent qu’elle avait acheté pour moi seul, et déclarent qu’elle était en
cela mon homme d 'affa ires, mon prê.le-norn ;
3 °. Sur ce que l ’article ic)85 du Code Napoléon , portant que le mandat peut
se contracter par lettres, elles suffisaient pour établir en point de droit irré
vocablement que mon mandat avait été donné et accepté , à l’effet de sou
missionner mes biens pour moi seul ;
4 °. Sur ce que la seule lettre dont on voulaiL induire que ma sœur n’avait
accepté le mandat qu’à l’effet déform er opposition aux ventes, disait seulement
qu’elle allait faire usage de la procuration pour former opposition, mais ne
disait pas qu’elle n’avait voulu se charger que de former une opposition q u i,
dans le d ro it, était impossible, et qu’elle n’a pas faite ;
5 ®.Sur ce que les lettres postérieures , de même que l’acte du 8 mai et tant
d’au tres, confirmaient qu’elle avait accepté le mandaL sans restriction , et
l ’avait exécuté ;
6". Sur ce que l’art. 1986 porte que l’exécution du mandai prouve son exis
tence, et rend ce contrat indissoluble, à plus forte raison le compte rendu et
la décharge donnée par acte.
L ’arrêt a déclaré au contraire que ma sœur n’avait pas été ma mandataire,
et m ’a débouté de ma demande.
Je vais le transcrire en entier, parce que les tournures employées pour tra
vestir la question de droit en question de fait sont si étonnantes, qu’on ne
voudrait pas me croire , si je me bornais à en donner l’extrait.
§. I". Aiiendu.cn droil tjuc le mandat ne se présume p a s , et ne se forme que
par l acceptation du mandataire.
�( 29 )
'
OlJS. Le Code dit que quand un mandat a etc exécuté, on doit juger qu’il
avait existé et avait été accepté ; il n’y a pas là d’autre base qu’une présom p
tion légale. Le législateur s’est fondé sur ce qu’en législation, comme en phy
sique, et même en métaphysique, il est impossible que ce qui a été n’ait pas
été ; mais le rédacteur de l’ari'et voulait que ce qui a ete n eut pas etc ; voila
pourquoi il a débuté de la sorte : on va voir comment il chemine vers son but.
E n attendant, il est bien certain que ma sœur a accep té, par lettre du
4 mai 1796, ma procuration, puisque le défenseur de mes adversaires , ré
dacteur des qualités de l’a rrêt, n’a pas pu se dispenser de le mettre dans le
point de fait; certainement rien ne peut empêcher que les conséquences
légales de la présomption légale établie par l’article 1986 , soient des ques
tions de droit.
L a question de savoir s i , en acceptant mon mandat illimité sans annoncer de
restriction, ma sœur aurait pu , par restriction mentale, limiter ses engagemens, et se réserver la faculté d’acheter pour elle-m êm e, serait encore une
question de droit.
II. Attendu, en point de fa it que la correspondance de la partie de F'issac
avec JEmmanucl A u b ier , son frère , alors émigré ou prévenu d'ém igration,
n ’établit pas qu’elle ait été constituée mandataire, à l'effet d ’acquérir pour lui
ses biens confisqués , et rnis en vente par l ’administration , en vertu des lois du
terns ; attendu au contraire que toutes les lettres dont argumente la partie de
B a y le , loin de faire présumer un m andat, sont d É n k g a t i v e s du m andai, en
vertu duquel Em m anuel Aubier soutient que sa sœur a soumissionné ses
biens, et s ’en est rendue adjudicataire.
§.
Or»s. Jamais mes adversaires n’ont osé en dire autant, parce qu’ils n’ont
jamais présente ni cité aucune lettre dénégative du m andat, et qu’ils savaient
bien que l’usage qu’ils ont fait d’un seul passage tron qu é, dont il sera question
ci-après , se rétorquait contr’eux.
E t comment le rédacteur peut-il qualifier dénégatives , i°. les lettres de la
première époque, antérieures à la soumission de mes biens, où ma sœur s’engage
à acheter pour moi s e u l , à rendre tous biens fo n d s , capitaux, revenus;
2U. rIoutes celles postérieures à la Soumission , où elle dit ne l’avoir fait que
pour moi seu l, q u ’elle n ’est que mon homme d ’affaires, que tout est à m o i,
que mes enfans n ’ont rien à y voir, que c ’est de m oi seul q u ’ils peuvent tenir
ce q u ’elle a soumissionné pour mon compte;
�( 3o )
3 °. Celles postérieures au mariage de mort fils , où clic déclare avoir etc mon
prêle-nom un tout, et n'avoir élé que mon prêle-nom; que j'étais maître de
tout ; que a'était de m oi seid que mes enfans devaient tenir ?
Ces lettres elaient produites ; elles étaient dans les mains du rédacteur dos
motifs , quand il a écrit ce paragraphe. Elles font plus que faire présumer le man
dat, elles le prouvent ; car l’art. ig 85 du Code Napoléon porte que le mandat
peut être établi par lettres ; et quelle force ne reçoivent pas ces lettres de
l’aveu qu’elles avaient été précédées d’une procuration ? L ’acceptation de celleci est présumée de droit illimitée , par le refus que ma sœur fait de la présenter ;
si elle avail élé limitée , ces lettres suffiraient pour prouver que j’avais donné
une ampliation de pouvoirs par les nouvelles procurations ou plutôt par
les confirmations de procurations que j’ai envoyées ensuite, et dont il est
parlé dans les lettres.
L e juge de paix ne doutait pas du m andat, lorsqu’il dit qu’il ne lui suffisait
pas-d’avoir lu ma procuration ; que puisqu’on ne pouvait pas la déposer chez
un notaire, à cause de mon inscription, il voulait un écrit de ma main à lui
directement adressé pour lui tenir lieu de l’expédition.
Les paysans de mon village , à qui ma sœur montrait ma procuration , parce
qu’ils avaient voulu voir ma signature, ne doutaient, jni de l’exislence, ni de la
validité du m andat, quand, de son aveu, ils lui disaient que s ’ils la croyaient
capable de me tromper, ils la chasseraient.
Je n’ai produit que 25 lettres; je pourrais en produire c e n t, où ma soeur
me rend compte de l’exécution du m andat, des détails de sa gestion. Selon
l’art. if )85 du Code Napoléon, chacune de ces lettres a la force d’acte d’ac
ceptation ou ratification du mandai. Leurs conséquences légales sont de même
nature que tousles genres d’acceptation ; dans celle matière, toute lettre vaut
contrat.
III. Attendu , continue l’a rr ê t, que les mêmes lettres apprennent que la
partie de V'issac a spontanément, p a r pure générosité, par la seule impul
sion de l ’irdérêt q u ’elle portait à sa ja m itié, soumissionné les biens confisqués
sur son frère, cl q u ’elle les a acquis au moment même où la partie de
B a y le , espérant les soustraire à la main-mise nationale , sur le fo n d e m e n t
(fu’il clail É t r a n g e r A LA, F R A N C E , n'imaginait pus q u ’ils pussent être mis
en vente.
§.
Q bs . Le premier mars 1796, le Directoire, en me refusant ma radiation, avait
�( 3i )
répondu que je devais attendre l’amnistie qu’on projetait alors de donner aux
Français dont la fuite avait etc forcée.
Cette réponse prouve que j’avais réclame comme F ran çais, et que le D irec
toire voyait en moi un Français. L ’étranger qui dirige la persécution que
j’éprouve , a intrigué pour que ce fut moi que l’arrêt fit étranger a la France.
Comme c’est une lettre du roi de Prusse, du i 5 mars 1793, dont les Gazettes
parlèrent alors, qui lui a servi de p rétexte, je vais la transcrire ici.
« M. d’Aubier , des sentimens pareils à ceux dont vous avez fait foi envers
» l’infortuné monarque que vous avez servi, sont toujours sûrs de mon estime ;
» les pei’sonnes qu’il honora de la sienne y ont d’ailleurs, par celam em e, des
» titres clicrs à mon cœ ur, et chaque fois que je puis récompenser en elles
» les services que Louis X Y I ne put acquitter, je crois offrir un dernier tribut
» à la mémoire de ce souverain respectable et malheureux : je vous donne ma
» clef de chambellan; je vous la donne comme un gage du tendre souvenir que
» je conserve à votre maître , et j’ y joins une pension de six cents écus sur la
» caisse de l’Etat de la cour , pour qu’à l ’abri de l ’infortune, qui poursuit
» vos compagnons d’e x il, vous puissiez consacrer des jours plus tranquilles à
» sa mémoire et à celle de ses vertus, de ses bienfaits et de scs malheurs. J ’ai
» donné ordre à mon ministre , à B e rlin , de vous en expédier le diplôm e, sans
» qu’il vous en coûtât les frais ordinaires, et prie D ie u , M. d’A ubier , qu’il
» vous ait en sa sainte et digne garde ».
Signe F h é d é îu c - G u illa u ih e .
F ra n cfo rt,
i 3 mars 1793.
On voit que le roi de Prusse m’offrait des ressources pour le tems de mon
exil; il ne me demandait donc pas de renoncer à la France, et encore moins à
la qualité de Français , qu’on peut garder hors de France. E l pourquoi me
les offrait-il? Pour services rendus au monarque français.
Comment les connaissait-il? 1°. Parce que le 12 août, quand, dans sa cellule
aux Feuillans, Louis X Y I connut le prem ier mandat d’arrêt contre moi dé
cerné, en me disant de fuir au plus vite , il me chargea d’informer ses frères
et le roi de Prusse des faits du 10 août, du mauvais effet du manifeste, et
de m’opposer à d’autres imprudences ; ce que j’ai fait (i).
(1) Les mémoires du lems disent par quelles représentations j’ai empêché un deuxième ma
nifeste, qui était tourné de manière à compromettre Louis X Y I de plus en plus.
�2° Paire que les hasards de la guerre avaient fait tomber dans ses mains la
lettre que Malesherbcs m’écrivait le 12 janvier 179a , par ordre de Louis X V I ,
où Malesherbcs me disait que Louis X V I ne voulait pas qu'un des hommes
de sa cour dont il était le plus aime, et qu'il estimait, le p lu s , se compromît
inutilement ; qu'il le conjurait de ne pas venir, parce q u ’on rejeterait son
témoignage comme celui d ’un homme à qui son attachement ne permettait pas
d'être impartial. Je n’ai point eu d’autre correspondance qu’avec Malesherbcs
jusqu’à sa in o r t, et je m’honore d’avoir mérité sa confiance ; il ne l ’aurait pas
donnée à un étranger à la France.
Informé qu’on intriguait pour que les motifs de l’arrêt me qualifiassent
étranger à la France, j’ai été, avant le jugement, présenter ces lettres au prési
dent; il les lu t, me dit avoir vu celle du roi de Prusse dans les journaux du
tems , et avoir entendu parler de celle de Malesherbcs ; c’est le lendemain
que, dans les motifs de l ’arrêt, il me fait étranger à la France.
Est-ce parce que j’ai toujours aimé le gouvernement monarchique que je
suis devenu aux yeux du rédacteur un étranger à la France ?
Ou est-ce parce que le roi de Prusse m’envoya la clef de chambellan ?
Mais Voltaire , d’Argens l’avaient reçue sans cesser d’être Français.
Jusqu’au Code , j’ai pu en jouir sans perdre aucuns droits ; cela est si vrai,
que c’est sur la production de la lettre du roi de Prusse et de celle de
Malesherbcs qu’en 1802 le Prem ier Consul me dispensa d’une des conditions
de l’amnistie.
Depuis le Code , j’ai eu besoin d’une permission ; S. M. l ’Empereur me l’a
donnée, par décret spécial de i 8 o 5 ; je n’ai pas attendu la guerre pour
rentrer en F ran ce, et satisfaire au décret de 1810.
A u reste, qu’importe aujourd’hui ce qu’on a pu dire en vain au comité ré
volutionnaire , à la ré g ie , au D irectoire , pour éviter une confiscation
dont la loi m’aurait préservé , s’ils avaient vu en moi un étranger à la
F r a n c e , au lieu d’y voir un Français. Si chacune des phrases employées
pendant la terreur pour échapper à la guillotine , aux tortures, aux confisca
tions, sauver.(lu pain à scs enfans, pouvait être relevée aujourd’hui et servir
de base à un droit (le propriété , en Javeur de tiers, il v a trente mille familles
dont les propriétés pourraient être revendiquées par diverses personnes à la
fois avec un égal titre, celui d’avoir aidé à les cacher, en prêtant leur nom
pour 1rs conserver ; c’est dans ces termes que ma sœur dit s’en être chargée.
Dans tous les c a s , 011 ne pouvait pas dire qu’en août 1796 , je pensais que
�( 33 )
mes biens ne pouvaient pas être mis en vente ; puisque les pièces produites
prouven t,
i°. Que le refus définitif de ma radiation est du premier mars 1796 ;
20. Que ce refus m’a été notifié le i 5 mars;
3 °. Que ma sœur en a été informée a lo rs, et m’a mandé que cela néces
sitait le rachat ;
4 °- Que c’est sur cela que je lui ai envoyé ma procuration ;
5 °. Q u’elle l’a acceptée par lettre du 4 mai, trois mois avant la soumission
de mes biens , et qu’elle m’a mandé qu’elle achèterait pour m oi seul.
Attendu que la partie de Vissrvc est devenue adjudicataire, de son
propre mouvement, dudit bien, dans la seule et honorable idée de les conserver
à son frère ou aux enfans de celui-ci; que celte résolution subite et indépen
dante a clé le résultat d ’un bien dangereux dévouement.
§. I Y .
O b s . Le rédacteur n’a pas pu croire que la resolution de ma sœ ur fût
subite , indépendante , puisqu’il était prouvé que cela était convenu depuis
six mois , et que la procuration était acceptée depuis trois mois.
Elle a fait une action généreuse en faisant gratuitement mes affaires ; elle
l ’aurait faite quand même elle n’aurait pas eu le m otif de sauver les 12,000 liv.
que je lui devais , et d’obtenir ma garantie pour s’affranchir de la responsabi
lité de mes créances qu’elle avait encourue.
Ce n’est donc pas m oi, c’est le rédacteur des motifs de l’arrêt qui veut lui
ôter le mérite de sa générosité, en supposant qu’elle a acheté mes biens pour
se les approprier ou en disposer.
Il la suppose coupable de fausseté , car selon son système , ma sœur ne
m’aurait demandé mes pouvoirs, ne se serait opposée à ce que je lui associasse
ma femme, ne m’aurait fait révoquer ceux que j’avais donnés à d’autres, ne
m’aurait écrit qu’elle achetait pour moi seu l, que pour que je me chargeasse
seul des dettes pendant qu’elle deviendrait propriétaire de mes biens , et libre
de garder tout ou d’en disposer au profit de tout autre que inoi.
Ma sœur en était incapable; elle a, par scs conclusions sur l’appel, désavoué
l 'étranger qui l’avait dit en son nom en première instance.
§. Y . Attendu encore qu'en vertu d'un mandat d ’Em m anuel A ubier, la
partie de V issac , sa sœ ur, ne pouvait acquérir sans compromettre son exis
tence personnelle, et donner même après la vente, ouverture à nouvelle con5
�( 34 )
fiscation, qui aurait irrévocablement dépouillé Em m anuel Aubier sans espoir
de retour.
O bs. L e rédacteur avait sous les yeux les lettres de ma sœur qui désa
vouaient la supposition qu’ elle pût com prom ettre son existence; elle y dit
franchem ent qu’elle a manifesté qu’elle achetait pour m oi ; que les administra
; qu’elle a été approuvée par tout le monde , même les
plus patriotes ; qu’on vient lui offrir de l ’argent ; qu’elle en accepte d’un ancien
d o m estiqu e, crainte de l’affliger; que les liabitans de notre village sont venus
lui po rter leu r b o u rse ; qu’elle l’a refusée; qu’ ils la chasseraient s ’ils la
croyaient capable de me tromper.
D ’ailleurs, la peur de se compromettre eût bien pu exiger qu’elle ne dît
pas si publiquement qu’elle achetait pour m o i, qu’elle était mon pretc-nom ;
mais celle peur ne pouvait pas annuller le mandat.
teurs l’ont
secondée
§. Y I. Attendu que les lettres d ’Em m anuel Aubier démentent le mandat
q iiil présuppose avoir donné ti sa sœur, et qu'il y est d it , que même après sa
radiation, U ne peut avoir que ce que sa sœur lui cédera, et q u ’en conséquence
il n ’aura ja m a is de droit sur le domaine de Sauset.
O b s . H n ’y a pas une seule lettre qui démente le mandat.
L e passage obscur que cet article indique est tiré d’un fragment tronqué
d’une lettre qui prouve le mandat au lieu de le démentir.
En e ffe t, c’est parce que dans cette lettre j’annonce à ma sœur que je
veux donner Sauset à mon fils, sans attendre ma radiation , que j’ajoute qu’a
près ma radiation je n’aurai aucun droit sur Sauset , et c’est parce que
j ’annonce que je ne cède que Sauset, et me réserve le reste , que je lui dis que
j’aurai besoin, après ma radiation , qu’elle m ’en fasse la remise.
Si j’y parle des appréhensions de m on f i l s , c ’est qu ’ il craignait que le
don des avantages ne fût pas so lid e , p a rc e que ce don est un acte du d roit
civil qui ne p o u v ait pas être valid e tant que j’étais su r la liste ; mais il était
loyal et b o n frèi’C ; il ne vo u la it pas frau der la légitim e de scs f r è r e s , il voulait
seulem ent être sûr qu’ on ne d é m e m b re ra it p o in t Sauset p a r un partage , q u ’il
on serait q u ille p o u r un r e to u r de lo i en argent.
Pourquoi mes adversaires n’onl-ils produit que la moitié de la lellre , cl
ont-ils supprimé l’auirc moitié? C ’esi parce qu’on y aurail trouvé bien claire
ment celle explication.
�( 35 )
¿m
Si ce passage, pris isolém ent, eut présenté un doute , il était levé par toutes
les lettres postérieures où ma sœur dit avoir été mon prête-nom, Elles
étaient produites, le rédacteur les avait sous scs yeux.
§. VII. Attendu que la prétention actuelle de la partie île Bayle , ouvertement
condamnée par sa propre correspondance et par celle de sa sœ ur, trouve encore
sa réprobation dans les actes postérieurs qui ont eu lieu dans le sein de la f a
mille ; qu'en effet on y l i t , qu'après la plus mûre délibération à laquelle assis
tèrent vingt-cinq paren s, la partie de
issac, adoptant elle-même la sagesse
des motifs qui ont déterminé cette réunion imposante , et le projet de mçiriage
d ’Em m anuel Aubier avec M arie-Claudine Cham flour, lui a transmis, sous
diverses conditions qui ont été modifiées ensuite, la pleine propriété du do
maine de Sauset, et lui en consent subrogation, comme si elle avait été prêtenom de lui seul pour en fa ire l'acquisition.
O b s . i ». Si ma prétention était ouvertement condamnée par ma propre co r
respondance, on n’aurait pas manqué de produire les lettres qui le d iraien t, et
on n’a pas même osé en citer une ; l ’abus qu’on a fait de l’équivoque d’un
passage tronqué d’une lettre dont on a déchiré la moitié pour lui faire dire ce
qu’elle ne disait pas , prouve qu’on n’avait rien à dire.
2°. S’il y a des actes qui contiennent réprobation de ma prétention, pour
quoi ne pas les transcrire , les citer, au moins en dire la date ?
3 °. Dire qu’il en sera comme si ma sœur avait été p rête-n om , c ’est dire
que c’est une fiction; car telle est, dans la langue française, l’acception du
mot comme ainsi placé ;
/f». L ’interprétation que l’arrêt veut donner à cet a c te , est désavouée par
toutes les lettres postérieures de ma sœ ur ; dans une du 3 juillet suivant, elle
dit : J e n'ai jam ais dem andé, mon frère , le renvoi de mes lettres; vous m’avez
dit qu'elles faisaient preuve que j ’avais été votre prêle-nom; dans une suivante,
elle répétait : J e n ’ai été que votre prête-nom.
Comment se fait-il que sans cesse les motifs de l’arrêt prêtent à ma sœur
des intentions, une conduite autre que celles consignées dans les lettres de sa
main, produites au procès, et q u i étaient entre les mains du rédacteur de
ces motifs ?
Si ma sœur avait voulu que Sauset fût réputé donné par elle, elle l ’aurait
fait mettre dans le contrat de mariage; elle y aurait été donatrice , au lieu de
ne pas même vouloir y être mentionnée comme témoin, Ma sœur désira que
�(36 )
vingt-cinq parens assistassent chez elle à la signature de ce con trat, pour que
tous vissent qu’elle n’y était pour rien ; qu’ils signassent la subrogation
faite par arrêté de fam ille, sous seing-privé, pour qu’ils vissent qu’elle
n’avait été que mon prête-nom ; elle le leur d it , et me l ’écrivit le lendemain:
sa lettre était produite.
Quant à m o i, j’ai désiré l’assistance des parons, pour que leur concours
à l’émission de ma volonté engageât mes autres enfans à la respecter dans
le cas où je viendrais à mourir avant d’être rayé , et à ne pas abuser de ce
que l ’acte du 8 mai les appelait à partager, dans ce ca s, tous également.
Je désirais que Sauset ne fût pas partagé; je comptais sur les liquidations
que ma sœur disait certaines, pour compléter la légitime de mes autres
enfans.
§• V III. Attendu que dans les mêmes acles elle reçoit les remercîmens d ’E m
m anuel A ubier son frère et de toute la fam dle assemblée, des soins qu'elle
a pris, des peines infinies qu 'elle s 'est données pour la conservation des biens et
de sa générosité, sans q u ’Em m anuel A ubier ail fa it entrevoir q u ’elle ait été
sa mandataire.
O b s . Mon fils Lamonteilhe et mon neveu St. M an de, son beau-frère ,
Chardon , le frère de celui-ci, M M. B o ir o t, D artis, jurisconsultes, ont signé
la reddition de compte du mandat, l’acte de mai 1801 : comment ont-ils pu le
faire , et. sur-tout des jurisconsultes aussi éclairés, sans entrevoir que ma
sœ ur avait été ma mandataire ? Cet acte a été remis au père de ma bellefille et à son avocat avant le mariage.
La preuve que le père de ma belle-fille partait de cette base en traitant
avec m o i, est consignée dans un écrit de sa main qui avait été produit, et
que le redacteur avait sous les yeux quand il a écrit ce paragraphe.
A u s s i, quelques mois après le mariage , ma sœur répétait dans scs lettres:
J e n 'a i agi que pour toi seul, cela te laisse maître de faire ce que lu
voudras ; j e te proteste que c'est pour toi que j 'a i ag i, qu'à ton retour, maîlr»
de. ta fo r tu n e , lu as eu le plaisir de marier et doter Ion f i s . Dans une autre :
N'oubliez pas que c ’est vous qui avez choisi Lam onteilhe, et cela depuis
trois ans.
Si tout cela ne laisse pas entrevoir que ina sœur a été ma mandataire , mon
prête-nom , que faul-il donc?
�( 3, )
§. IX. Attendu que l'ensemble de ces actes démontre que la partie de V i s sac
n'eut jam ais celte qualité, mais bien q u ’elle se rendit adjudicataire de sa propre
détermination, et par un dévouement sans borne à son frère et à ses neveux;
attendu que tous les actes auxquels Em m anuel Aubier a concouru attestent
encore la profonde reconnaissance dont il était alors pénétré pour ¿oui ce
q u ’avaitf a i t etfaisa it alors sa sœ ur, et exclut toute idée d ’un mandat.
O b s . Ma reconnaissance, de ce que ma sœur a etc gratuitement ma man
dataire , ne peut pas exclure toute idée du mandat.
Ce mandat avait donné beaucoup de peine à ma sœur ; ma reconnaissance
était juste, mais l’arrét ne devait pas supposer des dangers qu’elle n’a pas
courus, pour lui en faire un droit de disposer des biens dont elle n’avait
jamais voulu , droit qui eût été injuste, puisque c’est sur le fondement que
tout était à m oi, qu’elle m’avait engagé à me charger de toutes les dettes, et
à lui donner garantie envers et contre tous. On lui fait tort en lui prêtant cette
intention. L ’équivoque de sa conduite dans cette affaire appartient à l'étranger.
§. X. Attendu que ces actes doivent être respectés, et q u ’il n ’est pas permis
à la partie de Bayle de se préparer par une voie indirecte le moyen d ’anéantir,
ou du moins d ’atténuer au futur la transmission fa ite par la partie de T^issac
à Jérôme Em m anuel A u bier, du domaine de Sauset, q u ’il n ’attaque pas
dans ce moment.
\
O b s . A i-je pu montrer plus de respect pour les actes qu’en signant les ra
tifications , et particulièrement celle deSauset ? L ’étranger l’a fait refuser, parce
que la famille St. Mande devait aussi ratifier, ce qu’il ne voulait pas; ce
refus ne peut pas avoir eu d’autre m otif que l’envie de demeurer libre d’at
taquer le don de Sauset après la m ort de ma sœur.
§. XI. Attendu qu'Em m anucl A ubier et ses enfans ont du recevoir avec une
respectueuse reconnaissance la loi et les conditions que leur a imposées la partie
de V is s a c , et les ont effectivement subies comme les actes l ’attestent.
O b s . C ’est la partie de Yissac ( ma sœur ) qui a répondu d’avance à cet
article. Dans une lettre postérieure au m ariage, qui est p roduite, on lit :
Q u ’elle ne m ’a imposé aucune condition, que le supposer c ’est l ’outrager.
Ma sœur a toujours dit et dit encore de même.
§. X II. Attendu que le même Em m anuel A u bier, qui voudraitfaire déclarer
�^
( 38 )
que sa sœur f u i mandataire , est non-recevable dans sa dem ande, après avoir
reconnu q u ’il ne pouvait rien obtenir que de la bienfaisance et de l ’obligation
morale contractée envers elle-même dans les principes de la délicatesse, et
après avoir resté pendant d ix ans dans le plus proforul silence sur celte pré
tention inconvenante, et repoussée par tous les fa its dé la cause.
O bs. i °. Selon le C ode, le mandat esl un contrat de bienfaisance: ainsi
j’aurais pu employer ce mot sans qu’il en résultat une fin de non-recevoir;
mais on ne cite ni lettre ni acte où je l ’ai dit.
2°. Si le retard de ma demande avait jamais pu être de nature à élever une
lin de non-recevoir, elle serait écartée par un acte reçu Sarray, notaire ,
en octobre 1802 , par lequel, dans les deux mois qui ont suivi mon amnistie,
quinze mois après le mariage de mon fils , j’ai offert d’op érer, entre tous mes
enfans, un règlement définitif, en me bornant à un très-médiocre viager ; j’avais
proposé, par cet a c te , pour arbitres , M M . Dartis et Mauguc.
3®
. Si j’e'tais devenu non-reccvable, il fallait dire en q u o i, et prononcer la
fin de non-recevoir, au lieu de déclarer qu’il n’y avait pas eu de mandat.
On voit bien pourquoi on ne l’a pas fait. L ’invocation d’une fin de nonrecevoir contre l ’exercice d’un d ro it, dit que ce droit a existé. E lle n’exclut
que celui qui s’est mis dans le cas d’être déclaré non-recevable ; ain si, dans
l ’espèce , en me déclarant personnellement non-recevable , on n’aurait point
attaqué le principe des droits de mes petites-filles sur Saüset. L ’arrêt veut
que M. de St. Mande fils demeure maître de leur ôter Sanse t.
§. X I II . Attendu q u ’en présupposant, q u ’il eût existé dans le principe un man
dat d ’Em m anuel Aubier ¿1 sa sœur pour ac<juérir, ce m andat eût été anéanti
par celui qui l ’a d onn é , et les actes qui l ’ont suivi.
O b s . i°. P ou r fónder l’arrêt sur l’assertion que le mandai a été anéanti
par uii a clc subséquent , il aurait fallu citer , dater et produire l ’acte
subséquent qu’on suppose la v o ir anéanti; o r on ne le cite même pas.
20. Un acte qui anéantirait un mandat constitué par un précédent a c te ,
prouverait l’existence du mandat ; car on n’avait pas besoin de l’anéantir s’il
n’existait pas. On révoque un m andai, mais on ne peut pas faire qu’il n’ait
pas exisié , sur-tout quand on a opéré en exécution du mandai, quand on en
a rendu com pte, reçu décharge et garantie, parce que les conséquences
légales en soni réciproquement acquises à qui de droit. La r é v o c a t i o n ou
l'anéantissement ,
si
on veut l’appeler ainsi , ne pourrait pas rendre jna
�< 39 >
sœur propriétaire de ce qu’elle avait soumissionné en vertu du m andat,
sur-tout après avoir demandé judiciairement acte de ce qu’elle n’avait pas
voulu devenir propriétataire , de ce qu’elle n’avait été que conservatrice ; pour
que le mandataire devînt propriétaire, pour qu’il pût disposer, il faudrait
que le mandant lui cédât ses droits à la propriété.
§. X IV . Attendu que la partie de Pages a eu droit d'intervenir dans la contes
tation pour empêcher que , par une voie oblique , Em m anuel A ubier ou ses
cnfans puissent ja m a is porter atteinte à la transmission de Sauset, et aux
clauses du contrat de mariage qui sont déterminées par cette transmission.
Je n’ai jamais cherché à porter atteinte à la transmission de Sauset, et
je défie que dans les quatre ou cinq cents lettres qui se sont écrites sur nos
O bs.
affaires dans le cours de douze ans , on en trouve le moindre soupçon ; au con
traire , j’ai reconnu sa validité, j’en ai signé la ratification qu’on a refusée.
Si , comme il p a ra ît, par l’adroite c o m b in a is o n de ce paragraphe avec les
précédentes suppositions, on a voulu dire que lors du mariage de mon fils Lamonteilhe , on a eu l’intention cl le but de sortir de la masse de mes biens le
domaine de Sauset, afin qu’il ne comptât pas dans l’évaluation de la légitime
de mes autres cnfans, c?est une fraude dont on suppose coupable ma bellefille , son p è r e , ma sœur , vingt-cinq parens, les quatre jurisconsultes et le
notaire qui ont concouru aux actes : le plus coupable serait l’avocat de ma
belle-fille et de son p è re , qui a tout dirigé , qui a fait le contrat de mariage à
tête reposée chez l u i , qui a revu , rectifié la délibéi’ation de famille , qui a
fa it, avec le notaire de ma belle-fille et son p ère , l’acte de subrogation notarié
de Sauset.
Je les croyais trop délicats pour prêter leur ministère à une fraude ; c’est
cependant ce que nous serions forcés de croire, s’il fallait s’en tenir à ce que
disent les motifs de l’arrct.
Nos juges n’ont pas fait attention qu’eux-mémes, en donnant de tels motifs à
l’arrêt* ont l’air de sanctionner une fraude, tandis que le texte précis du
Code Napoléon leur ordonne au contraire de proscrire tous les moyens indi
rects et frauduleux qui auraient un pareil but.
Cette fraude n’aurait pas même le but d’être utile aux mineurs, comme on
le suppose ; car si Sauscl est une libéralité de ma s œ u r , les mineurs le per
dront tôt ou tard : tous représentans de ma sœur et leurs créanciers en auront
le droit, et de minorilé en m inorité, ce droit peut sc perpétuer cent ans.
�•<
( 4o )
§. X V. Attendu que les deux appels des parties de P~issac et de Pages ont eu
pour objet unique de faire reformer lejugem ent, ainsi attaqué dans la dispo
sition qid déclare la partie V issa c m andataire, et que l'une et l ’autre n'ont
point réclamé contre les dispositions secondaires du ju g em en t , en tant qu'elles
sont fondées sur le consentement qu'a généreusement donné la partie de
P ls s a c , même en abdiquant les droits héréditaires sur la succession de son
père et sur celle de son fr è r e , morts révolutionnai rement à Lyon.
Les deux actes d’appels étaient indéfinis, illimités : on peut aussi voir
dans les conclusions prises à l ’audience ( transcrites , pag- 25 et dans les
qualités de l’arrèt ) , qu’elles ne disent pas ce que le rédacteur leur fait dire.
On peut v o ir , pag. a 3 , que le jugement de première instance ne contient
point de disposition qui déclare ma sœur mandataire.
On peut v o ir , dans les qualités de ce jugement qui sont imprimées , que
O bs.
jamais je ne l ’avais demande ; que je n’avais parlé du mandat que comme m otif
et moyen de ma demande : mes adversaires l’avaient nié , c’était leur moyen
de défense ; mais ils n’avaient jamais demandé qu’il fût prononcé que ma
sœur n’avait pas été ma mandataire. Ils avaient seulement conclu à ce que
je fusse déclaré non-recevable dans mes demandes : or je n’en avais formé
que trois; la prem ière, en maintenue dans la qualité d’héritier: ma sœur et
mon beau-frère y avaient consenti ; la deuxièm e, pour avoir quittance des
12,000 liv. : ils l ’avaient offerte ; la troisièm e, en transmission du V erger : ma
sœur y avait aussi consenti.
Le rédacteur des motifs dit que ces trois demandes et les dispositions qui
les ont accueillies étaient secondaires d’une demande principale qu’il suppose;
jamais mes adversaires n’ont dit cela , et encore moins dans leurs conclusions
sur l’appel où est cette demande principale.
11 veut que je n’aie été héritier de mon père et de mon frère que par
l'effet du consentement de ma sœur et de mon beau-frère, tandis que mon
contrat de mariage et celui de ma sœur me constituaient seul héritier ; tandis
que ma sœur avait renoncé à toute succession directe cl collatérale, à tous
droits échus et à échoir, et déclarait s’en tenir à cela.
C ’est en exécution de ces contrats de mariage et de cette renonciation que
mon beau-frère et ma sœur avaient abdiqué la légitime en corps héréditaire ;
même pendant mon inscription, ma sœur ne pouvait pas avoir tout à-la-fois
Ja dot constituée et la part légitimaire en corps héréditaire ; et certes elle
�( 4i )
avait grand intérêt de s’en tenir à ma garantie de la d o t, puisque les dettes lui
auraient fait perdre les corps héréditaires.
A u reste, la confiscation des biens et droits des émigrés n ’avait pas été p ro
noncée au profit de leurs parens , et par conséquent elle n ’avait pas autorisé
m on beau-frère à se dire h éritier de mon pore.
«
»
»
»
»
«
L e dispositif de l ’arrêt n’est pas moins singulier que ses motifs. L e voici :
« La cour dit qu’il a été mal jugé par le jugement dont est a p p e l, en ce que
la partie de Vissac a été déclarec mandataire de la partie de Bayle bien
appelé ; émendant faisant droit tant sur cette demande que sur l ’inlervention de la partie de Pagès, déboule en ce point la partie de Bayle de sa
demande, et déclare que la partie de Yissac n’a pas été mandataire d’Em manuel Aubier pour acquérir les biens confisqués sur lui ; au résidu , donnant acte a la partie de Yissac de ce qu’elle consent à l’exécution des autres
» dispositions du meme jugem ent, ordonne que ces dispositions sortironl leur
» plein et entier effet sous les conditions qui y sont exprimées (i). »
D e quelle demande suis-je déboulé? Je suis forcé de le rép éter, je n’eiï
avais formé que trois : la i re, en maintenue de nia qualité de seul héritier de
mon père et de mon frère ; ma sœur et morl beau-frère y ont acquiescé avec
grand plaisir, cela les débarrassait; la 2e en quittance de 12,000 liv. : ils y ont
acquiescé avec plaisir , parce que cela constatait qu’ils s’en étaient tenus à
la dot ; la 3 ' en transmission du Verger : cl ils y ont aussi acquiescé en pre
mière instance, le jugement le dit ; ils auraient seulement voulu qu’on les
dispensât d’avouer le mandat.
Cependant ils n’en avaient pas moins demandé acte de c,e qu’ils n’avaient
pas voulu devenir propriétaires de mes biens ; de ce que ma sœur s’était
chargée de me les conserver, ce qui confessait formellement le mandai; ; de
ce qu’ils me reconnaissaient pour propriétaire irrévocable, de ce Verger ; ils
( 1) M. le président V ern y a voulu qu’on sût (ainsi je ne commets point d’indiscrétion
en le répétant ic i, et m im e je le dois à la délicatesse des autres membres de cette respectable
c o u r ) , que c’était lui qui avait rédigé les motifs de l’ai r ô t , ainsi que le dispositif, et
comment il avait fait prévaloir son avis. Il y avait neuf délibérans ; il a révélé que quatre con
seillers avaient ete de l’avis de l’avocat-géuéral sur la validité du mandat et de confirm er le
jugement de première instance; que trois conseillers s’étaient rendus à l’avis du président; que
L’arrct avait été décidé par l’avis du jeune auditeur, qui était le neuvième opinant: c’est l ’élève
du président et le beau-frère de son fils , lequel est aussi conseiller.
Le
gendre du président plaidait contre m oi; et -son n e v e u , a v o u é , occupait
m o i, e t c ., etc.
6
contre
�( 4a )
en disaient autant pour Sausct en faveur de mes petites-filles. Cela déclarait
judiciairement l’existence, le but et l ’exécution du mandat.
Pourquoi l’arrêt n’a-t-il pas donné acte de ces conclusions , portant recon
naissance de nos droits de propriété ? C ’est qu’on voulait en faire des libéra
lités révocables, que St. Mande fils pût faire annuller après la mort de sa mère.
Cet arrêt, en déclarant que ma sœur n’avait pas élé mandataire, ne dit pas
pourquoi on le déclare ainsi. On a glissé tout bas que c’est parce que j’avais
été sur la liste des émigrés; mais on a craint de heurter trop ouvertement
les principes en le mettant dans les motifs.
On a fait quinze paragraphes pour dénaturer graduellement les questions
de droit, et altérer les faits de manière à travestir la question de droit en
question de fait ; mais i°. l ’acceptation de la procuration n’en est pas moins
avouée et prouvée; 20. les lettres, l’exécution du m andat, la déclaration
qu’elle a acheté pour rnoi seul comme mon homme d 'affaires, mon prêtenom , vingt actes ou traités avec divers intéressés à la succession de mon père
et de mon frère , enfin le compte rendu du mandat n’en sont pas moins, selon
les articles 1984 , ig 85 et 1986, des contrats irrévocables, authentiques, dont
toutes les conséquences légales sont des questions de droit.
S’il suffit de qualifier de négatif l’acte qui est affirmatif pour soutenir que
la cour suprême ne peut plus examiner si on a violé la loi, il est inutile de
passer des actes ; le législateur a fort inutilement pris la peine de faire des
lois pour en fixer les conséquences et les effets ; il a inutilement chargé la cour
suprême de les faire respecter.
Une cour, en disant qu’un acte d’acceptation de succession est un acte de
répudiation, serait-elle maîtresse de faire passer à un tiers les droits de l’hé
ritier contractuel qui a accepté la succession? Le cas est le même ici : danscette m atière, l ’acceptation de la procuration, les lettres, les actes , son exé
cution, attestent qu’il était illimité et sa spécialité à l’cftel du rachat ; ce sont
autant de contrats d’acccptation.
E t de même que la loi serait violée et l ’arrêt cassé pour le cas où l ’accep
tation d’hérédité serait travestie en répudiation, de même il doit l’être pour
le cas où Vacceptation du mandai est travestie en refus du mandat.
Le dispositif de l’arrêt suppose que le jugement de l ’inslance contient une
disposition qui déclare ma sœur mandataire On a vu que cela n’est pas ; il
est seulement vrai que la transmission est motivée sur la preuve du mandat.
La tournure de l’arrêt suppose aussi que mon beau-frère , ma sœur et ma
belle-sœur ont conclu à ce qu’ii fût déclaré que ma sœur n’a pas été ma manda
�( 43 )
4
?
taire , et cependant leurs conclusions n’en disent pas un mot ; l’ordre judiciaire
s’oppose à ce qu’on tolère que, pour violer plus aisémenl la l o i , les juges puis
sent supposer des conclusions qui n’existent pas.
Le directeur de toute cette intrigue a si Lien senti que le silence des conclu
sions sur celte demande , leurs contradictions avec les motifs et le dis
positif de l’arrêt décelaient les vues de celui-ci, qu’en faisant imprimer les mo
tifs et le dispositif, il en a écarté les qualités où se trouvaient les conclusions ,
les déclarations de ma sœur, et l’aveu de l'acceptation de ma procuration.
Il paraît que c’était pour que mes petites-filles ne pussent point, à leur ma
jorité, former tierce opposition à l’a rrê t, que l’étranger avait imaginé de faire
intervenir leur mère en qualité de tutrice, afin de donner à son système force
de chose jugée contradictoirement avec les mineurs.
Il paraît que c’est pour y ajouter la force d’un acquiescement spontané
à l’arrêt qu’on l’a fait lever par ma belle-fille , qu’on me l’a fait signifier, tant
en son nom personnel qu’au nom de tuteur de mes petites-filles ; q u ’ on m’a fait
sergenler en toute rigueur, à leur requête, pour l’cxéculoire du coût de
l’a rrê t, quoique j’eusse offert de le payer sous réserve ; mais plus la légèreté
et la faiblesse de ma belle-fille se prêtent à tout ce qui peut compromettre
les droits de ses enfans, cl plus je crois qu’il esl de mon devoir d’aïeul de
travailler à leur sauver des ressources en défendant mes droits , qui sont aussi
les leurs , puisqu’elles doivent hériter de moi.
Au point où 011 a mené les choses , une renonciation de mon neveu au b é
néfice de cet arrêt ne remédierait point au m al, puisqu’il s’agit des droits
successifs non ouverts ; puisqu’il a un cohéritier mineur ; puisqu’il peut mourir
avant sa mère laissant des mineurs: de minorité en minorité , mes pelites-filles
ne pourraient obtenir aucune sûreté, même de la bonne volonté des tuteurs.
Le seul moyen qui pût les mettre à l’abri, serait une garantie de M. de
St. Mande père ; mais il a repousse la proposition qu’on lui en a faile.
Il me semble que la cour suprême doit être plus sévère contre la violation
de la l o i , lorsque le mal jugé est si évident ; lorsqu’on se pavane de ce qu’une
injustice tournée en fait, met à l ’abri de sa censure, car c’est ainsi (pie s’ex
priment ceux qui ont dirigé cette tournure ; lorsque celte violation de la loi a
pour but de donner à des tiers les moyens de dépouiller des mineurs du patri
moine dont leur aïeul avait doté leur père.
La cour suprême 11e voudra pas que deux innocentes , l’une de douze ans,
l’autre de on ze, soient, par cet a rrê t, privées de tout espoir d'établissement ; que
tout moyen de subsistance pour elles dépende, après la mort de ma sœur, des
�( 44 )
caprices d’un jeune homme qui fut élevé dans de bons principes , il est v r a i,
mais à qui les flagorneries de cet étranger on tpcrsuadé qu’il avait le droit d’être
le despote de toute sa fam ille, et qui le fait débuter par en proscrire celui
que l’ordre de la nature , les lois religieuses et civiles,, les contrats de ma
riage , les testamens et toutes les conventions de famille en ont fait le chef ;
qui a passé sa vie à la servir, à payer éducation , placem ent, mariage et dettes
de tous. Un père pousse-t-il trop loin ses prétentions quand il borne son am br
lion à tenir encore aux enfans qu’il a dotés , à les servir, à maintenir l’ordre
et la juslice parmi eux?
J’invoque la justice de la cour pour moi-même : encore chargé de diverses
dettes et de garanties pour ma fam ille, après avoir payé pour elle quatre fois
plus que la valeur du seul objet qui me reste , demeurerai-je exposé à être
dépouillé le jour où j’aurais le malheur de perdre ma sœur? Serai-je à la
merci d’un neveu , d’un filleul qui a répondu à ma prédilection pour lui par les
procédés les plus offensans? Quelle persécution contre un oncle de soixante-cinq
ans , au bout d’une vie si pénible, d’une carrière si malheureuse !
La cour suprêm e, conservatrice des lois que la France doit à la restaura
tion de la monarchie, symbole du gouvernement patriarchal, ne peut pas
penser que le père doive rester dans le néant à l’égard de ses enfans , comme
le décide l’étranger, parce que son attachement au gouvernement monar
chique le fit proscrire quand la monarchie même était proscrite.
Lorsqu’on 1802 le Premier Consul me dispensa d’une des conditions de
l ’amnistie; lorsque S. M. l’Em pereur me maintint la qualité de Français cl ses
droits (quoiqu’alors chambellan du roi de Prusse) , ce fut sur l ’exposé des
circonstances de ma conduite, où le rédacteur des motifs a voulu qu’on vît
celle d’un étranger à la France.
Signé A U B IE R - LAMQ3NTE1LIIE.
�( 45 )
CONSULTATION.
L es anciens avocats en la cour impériale soussignés qui ont lu le mémoire à
consulter du sieur Emmanuel Aubicr-Lam onteilhc, ensemble l’arrêt rendu en
la cour impériale de Riom , le i er août 1812 , et les pièces y jointes sont
d’avis des résolutions suivantes :
De ce que la loi du 16 septembre 1807 a statué que l’erreur dans l’interpretation des conventions ne constitue qu’un mal jugé contre lequel le recours
en cassation n’est point admis , on ne doit pas conclure q u e par cela seul que
les motifs d’un arrêt semblent réduire la question litigieuse à un point de
fa it, cet arrêt se trouve à l ’abri de la cassation.
11 est des cas où la discussion d’un point de fait devient elle-même une
preuve de violation de la lo i, comme par exemple lorsque la loi elle-même
attache à un fait des effets et des conséquences qu’un arrêt a refusé d’adop
ter, ou lorsqu’un fait se trouvant constaté par des a ctes, les résultats légaux
de ces actes ont été méconnus.
t
C ’est ce qui se rencontre dans l’espèce actu elle, pour éluder la disposition
des lois sur le mandat ; la cour impériale de Riom a été plus loin ; nonseulement elle a dénaturé la convention sous le prétexte de l’interpréter, mais
pour faciliter cette violation elle a été jusqu’à mettre en fait Vinexistence d’un
mandat qui était légalement prouvé , qui était reconnu judiciairement, et qui
avait été exécuté dans tout son contenu par la mandataire.
En travestissant la question de droit en question de fa it, cet arrêt a jugé
» que la daine de St. Mande n’a pas été la mandataire de son frère pour ac» quérir ses biens confisqués sur lui par suite de son émigration. »
Examinons si l’existence de sa procuration est légalement prouvée et judi
ciairement reconnue , et si la dame de St. Mande a exécuté le mandat dont
son frère l’avait chargée ; ce premier point établi, il sera prouvé que l ’arrêt
attaqué viole ouvertement les dispositions des articles 1984, ig 85 et 1993 du
Code Napoléon, et les articles i 35 o et i 352 du même Code.
�( 46 )
E t d’abord il a etc avoué cl judiciairement reconnu que la daine de
St. Mande a accepté , par lettre du 4 mai 1796, une procuration de son
frère ; ce qui , selon l’article 198/f du Code Napoléon , la constitue manda
taire : il a été avoué que cette procuration a clé acceptée par la dame de
St. Mande , à la suite d’une gestion volontaire de sa part des affaires de
son frère, laquelle a commencé à l’instant de la mort du père q u i, jusque la r
en était chargé ;
A la suite d’une correspondance confidentielle sur lesdites affaires, par la
quelle le sieur Aubier approuvait et avouait tout ce que sa sœur faisait pour
son compte et dans ses intérêts ;
Enfin , après que la radiation d’Einmanuel Aubier de la liste des émigrés
avait été refusée, ce qui ne laissait plus rien a faire dans son interet que de
soumissionner ses biens pour son com pte, mais sous le nom de sa sœur
comme prête-nom, parce qu’il était sur la liste des émigrés.
Ils est avoué dans la cause, et judiciairement constaté dans les conclusions
prises sur l ’appel par les sieur et dame de St. Mande, que celle-ci s’étail char
gée de conserver à Emmanuel A ubier son frère ses biens, et par conséquent
de les racheter pour son com pte, puisqu’il n’y avait pas d’autres moyens; elle
a demandé acte de ce quelle n’avait pas voulu en devenir propriétaire, de ce
qu’elle a voulu que son frère demeurât propriétaire irrévocable de l’immeuble
dont il s’agit, et les mineurs Lamonteilhe, petites-filles de celui-ci, du bien
de Sauset, qu’elle leur avait transmis ; dès lors le m o lif, le but et l’existence
du mandat ont été judiciairement constatés, et l ’existence du mandat a été
reconnue judiciairement ; dès-lors la confirmation du jugement de première
instance a cessé d’être au fond réellement contestée par les sieur et dame de
St. Mande.
En supposant que l’intervention et les conclusions de la dame veuve
Lamonteilhe pussent former obstacle à la confirmation pure cl simple du juge
ment de première instance, la cour devait dans tous les cas au moins donner
acte des conclusions judiciaires prises p a rles sieur et dame de St. Mande,
cl mettre les parties hors de procès sur l’appel précédemment interjeté par les
sieur el daine de St. Mande.
Mais puisque la cour a pris un parti opposé, nous devons ajouter ici quelques
observations.
Emmanuel Aubier a articulé, et aucune des parties n’a contesté le fait, que
lorsque le sieur Aubier fui forcé de quitter la France pour se soustraire au
mandat d’arrêt décerné contre l u i , il avait chargé son père de la gestion de
�( 47 )
scs affaires : à la mort de celu i-ci, la dame de Si. Mande se chargea de conl'nuer celle gestion, qu’elle a toujours suivie; en conséquence elle s’élablil dèslors la mandataire lacite de son frère.
Lorsque la venle de ses biens fut décidée, la dame de St. Mande s’occupa
du soin de les lui conserver ; ce qu’on ne pouvait faire qu’en les raclielant du
Gouvernement.
Dans ces circonstances, une procuration est adressée à la dame de
St. Mande par le sieur Aubier; madame de Si. Mande en accuse réceplion.
Puisqu’il est avoué par la dame de St. Mande qu’elle l’a reçue et acceptée , il
est indifférent qu’elle eût demandé cette procuration à son frè re , ou que
son frère l’ait envoyée de son propre mouvement. Quand les lettres pos
térieures ne le prouveraient pas, il y a présomption légale que celle p ro
curation élail illimitée , comme le sieur A ubier le soutient, et qu’elle conte
nait pouvoir de soumissionner. Cette présomption devient l ’évidence m êm e,
lorsqu’on remarque que madame de St. M ande, qui p o u v a it faire cesser tous
les doutes sur le contenu de cette procuration en la représentant, ne l’a pas
exhibée dans le cours de l’instance , et n’a exihibé aucune des autres pro
curations qne d’après ses lettres elle paraît avoir reçues.
Il est de principe de droit que le défendeur qui fait valoir une exception
est tenu de la justifier in exceptione reus fit actor.... actori incurnbil anus
probandi. Madame de St. Mande prétend tardivement que la procuration
n’était pas spéciale à l’effet de soumissionner scs biens ; c’est à elle à justifier
la non spécialité du mandat par sa représentation : elle ne la représente p a s,
l’articulation du sieur Emmanuel A ubier et la présomption légale restent
tout entières ; elles rendent la dame de St. Mande non-recevable à opposer
celle exception : d’ailleurs si elle autorisait à faire toul ce qui serait nécessaire
pour lui conserver ses biens, la spécialité du cas particulier se trouve comprise
dans la généralité.
Madame de St. Mande a soumissionné les biens , et s’en est rendue adjudi
cataire : elle en a vendu une partie pour solder le prix? elle a afferm é,
échange, perçu les revenus, liquidé le.s dettes. A u retour de son frère en
ïra n c e , elle lui a rendu un compte général de scs opérations ; elle a porté en
dépensé dans ce compte le prix de ia soumission , et les frais accessoires ; elle
a porté en recette le produit des ventes partielles et des revenus.
Elle a exigé de son frère qu’il ratifiât en son nom toutes les ventes et
échanges qu’elle avait faits ; celui-ci a contracté dans l ’acle qui reçoit ce
compte les conditions de garautio cnycra et conlre tous \ il a parfait le paie
�\ V
C 48 )
ment en numéraire des douze mille francs qui étaient dus à sa sœur sur sa
constitution dotale. C ’étaient les seules conditions qu’elle avait apposées à
l’exécution du mandat. C ’est la loi qui détermine la conséquence de ces faits,
puisque après avoir dit que le contrat du mandai formé par 1’acccptalion du
mandataire, article 1984 , le Code Napoléon ajoute : L ’acceptation du mandat
peut n'être que tacite et résulter de l ’exécution qui lui a été donnée par le
m andataire, article ig 85 .
Il en résulte que l ’arrêt de la cour impériale deRiom , en déclarant que la dame
de St. Mande n’a pas acquis les biens de son frère comme mandataire, lors
qu’il était reconnu au procès que le mandat avait été reçu et exécuté, lors
qu’il est prouvé que la dame de St. Mande avait rendu compte de son exécu
tion, a violé ouvertement les dispositions des articles 1984 et 1985.
E n vain dira-t-on qu’en déclarant que la dame de St. Mande n’a pas été
la mandataire de son frère pour celle acquisition , la cour impériale de lliom
n’a jugé qu’une question de fait dont la cour de cassation ne doit pas con
naître; le législateur a déterminé, par un article précis de la loi (1985), com
ment l ’acceptation du m andat, et par conséquent son existence, pourrait se
reconnaître en cas de dénégation.
Les cours n’ont pas le pouvoir de prononcer contre le texle de la loi :
¡’interprétation contraire à celle que la loi a donnée est une violation positive
de la loi.
L a cour de cassation , dans son arrêt du 22 juillet 18x2, a. établi que lors
qu’il s’agil de déterminer la nature et l’essence d’un acte, une fausse interpré
tation qui tend à maintenir ce (pie la loi prohibe ou annulle est une véritable
violation de la loi; que lorsqu’ une clause est claire et précise, il n’y a pas lieu
à interprétation ; à plus forte raison dans l’espèce présente, où c’est le texte
précis du Code Napoléon qui a fixé l ’effet et les conséquences de l’acceplalion
de la procuration et de son exécution.
Le m andat, dit l’arrêt c o n tre lequel on se pourvoit, ne se présume pas:
c’est une erreur; l’art. 1985 du C o d e N a p o l é o n , porte que l’acceptation peut
s’établir par le seul fail de l ’exécution : comme on ne peut ni accepter, ni
exécuter ce qui n’existe pas , le Code Napoléon a très-justement statué que
l ’existence s’établit, comme l’acceptation, par le seul fail de l ’exécution.
Dans l’espèce, il ne s’agit point d’une présomption fondée sur de simples
raisonnemens, sur des analogies, sur des circonstances, mais d’une présomption
dont l'article 1985 fait une présomption légale; elle dispense de toute preuve
celui au profit duquel elle existe , art. i 35 o et x31)2 .
�(J / S
À*
( 49 )
Quand on voudrait faire à la dame de St. Mande la concession qu’elle n’a
point eu de mandat spécial de son frère pour soumissionner ses biens , l’aveu
par elle fait qu’elle les a achetés pour le compte de son frère et pour les lui
conserver, a dû suffire pour l’établir negotiornmgestor, et la soumettre en
conséquence à toutes les obligations du mandat ? En cela,' de son aveu , elle a
été constituée la mandataire de son frère? L ’arrêt viole donc l ’article 1372 du
Code Napoléon.
C ’est ainsi qu’il devient de plus en plus constant que l’arrêt attaqué a violé
les art. ig 8 5 , i 35 o et i 352 du Code.
E t pourquoi la dame de St. Mande aurait-elle exigé que son frère reçût
son com pte, lui donnât décharge, garantie, si elle n’était pas sa mandataire ? Ce
genre de preuve de l’existence du mandat est plus qu’une présomption légale ,
car cela constate irrévocablement qu’elle a été mandataire. Si madame de
St. Mande voulait se ménager les moyens de contester le m andat, soit qu’elle
voulut le supposer n u l, soit qu’elle voulût contester sa réalité ou en modifier
l ’effet, et sur-tout si elle avait le projcL de faire de la remise des biens une
libéralité, elle ne devait pas présenter à son frère un compte de ses opérations,
exiger q u ’il Vapurât., qu’il donnât décharge et garantie ; en l e faisant, elle s’est
ôté tout moyen et même tout prétexte pour v e n ir, onze ans après , sou
tenir qu’elle avait seulement eu l’intention de s’opposer aux ventes, quand
il est démontré en droit que l ’opposition était impossible; qu’en d ro it, la dame
de St. Mande pouvait soumissionner pour le compte de son frè r e , parce que
l’achat est un acte du droit des gens, quand les faits et les actes constatent
qu’elle l’a fait ; l’arrêt Blayac dit qu’en tel cas on n’écoute pas ce que les
parties disent avoir voulu faire, mais ce que l ’acte atteste avoir été fait.
D e quelle importance n’est-il par pour le sieur Aubier que la dame de
St. Mande ait été sa mandataire! Elle a soumissionné scs biens, et il s’est
chargé des dettes : elle est remboursée du p rix ; il a rempli très-scrupuleuse
ment toutes les conditions que lui imposait sa qualité de mandant, et toutes
celles que la dame de St. Mande avait apposées elle-même à l’acceptation
du mandat de son frèx’e. Il a donc le droit d’exiger, q u ’aux termes de l ’ar
ticle igg^, la remise de ce qui a été acheté en vertu du mandat soit motivé sui
te mandat.
Vainement on dira que la dame de St. Mande offre de faire à M. Aubier
la transmission de propriété de tout ce qui lui reste de la soumission de ses
biens; que l’arrêt confirme le jugement qui la condamne à faire cette trans
mission.
�.
( 5« )
11 faut en revenir à ce point : quel caractère a du avoir, quel caractère doit
conserver la transmission P
Si on s’arrête aux apparences de la transmission de Sausct, faite dans un
tems où on n’osait pas parler bien clair, en faisant abstraction des autres actes
qui constatent que madame de St. Mande a été la mandataire d’Emmanuel
Aubier, cette transmission devient, par l ’effet de l’arrêt, une libéralité, puis
qu’il n’y a pas de prix fixé pour cette transmission , et que la cause qui lui a
donné l’être n’est point exprimée : sera-ce au même titre que le sieur Aubier
aura reçu la transmission du Verger? L ’arrêt le veut ainsi.
Si la dame de St. Mande n’a pas été la mandataire de son frère pour faire
l’acquisition de scs biens , et que la transmission ne soit pas fondée sur le man
dat , cette transmission étant alors également gratuite, ce sera une libéralité
contraire a la lo i, attendu les engagemens qu’elle a pris par les contrats de
mai'iage de scs enfans ; au décès de leur inère , ces enfans viendront dépouiller
le sieur Aubier ou les siens d’un bien qui est incontestablement sa propriété.
L e sort de tous les acquéreurs partiels des biens du sieur Aubier est lié à
cette contestation ; si la dame de St. Mande n’a pas acquis pour le com plc de
son frère , si elle n’est pas jugée sa mandataire, comme la dame de St. Mande
a traité avec les acquéreurs en son nom seul, et sans aucune autorisation de
son m a ri, toutes les ventes par elle faites seront nulles ; malgré les ratifications
du sieur A u b ie r, les acquéreurs de bonne foi seront évincés de leurs pro
priétés; si la dame de St. Mande n’a pas élé mandataire de son frère , tous les
traités par elle passés pour les affaires des deux successions sont nuls , car c’est
le sieur Aubier qui est déclaré seul héritier ; si elle n’a pas été mandataire de
son frère , les m ineuresLam onteilhe, ses petites-filles, perdront tôt ou lard la
propriété de Sauset, de même qu’il perdra le Verger à lui transmis. Voilà
quelles seraient les conséquences d’un système trop légèrement adoplé en la
cour impériale de J\iom !
Nous ne nous étendrons pas davantage sur cela ; nous renvoyons à la con
sultation de M, P o irie r, a celle des jurisconsultes de l\io in , au Mémoire de
M. Darricux ; les principes y sont développés avec la plus grande clarté.
Il ne nous reste plus qu’a dire un mot sur l’intervention de la dame
Lamonteilhe.
Suivant les principes ordinaires du droit, l ’intervention n’est admissible
qu’en faveur du tiers qui a intérêt à la contesta lion pour la conservation de
droits actuels. ^Madame Lamonteilhe n’était pas dans ce cas; en effet, que la
dame de St. Mande ail été mandataire de son frère, cela ne porte aucune
�(50
atteinlc au droit actuel de la dame Lamonteillie et de scs enfans, puisque
M. Aubier reconnaît la validité de la subrogation de S ausct, et l’approuve
comme si elle eût été faite par lui-méme.
La dame Lamonteillie dit : si madame de St. Mande n’a été que le prêlenom du sieur A u b ier, mon mari aura reçu Sauset en avancement de la suc
cession paternelle, et alors ce d o m a in e sera sujet à retranchement pour la
légitime de ses frères; mais c’est en prévoyance de ce cas que le pacle de
famille porte que chacun des autres enfans de M. Aubier a droit de prendre
sur scs biens paternels un prélèvement de i 5 ,ooo livres, au moyen duquel
et de l’abandon; consenti par le sieur Lamonteillie de son tiers dans le
domaine de Crèvecœur , ce dernier est dispensé du rapport du domaine de
Sauset; les craintes de la dame Lamonteillie sont donc rejetées dans une éven
tualité qui ne peut pas légitimer son intervention.
Mais comment ne s’est-elle pas aperçue qu’elle courait un danger plus grand
et certain si la prétention de madame de St. Mande était accueillie ; car il en
résulterait que la transmission de Shusci n’éiaii qu’une libéralité de madame de
St. M ande, libéralité qui, dans tous les cas excéderait ce dont la dame de
St. Mande aurait pu disposer, qui lui était interdite , et qu’elle ne pouvait pas se
permettre depuis l'institution contractuelle qu’elle avait stipulée au profit de
ses enfans en les mariant ; ceux-ci au décès de leur mère auraient donc le droit
de demander la révocation de celte libéralité, et le délaissement à leur
profit du domaine de Sauset ; les mineurs Lamonlcilhe seraient totalement
dépouillés de la propriété de ce domaine ; d’ailleurs on ne peut pas plus pour
des mineurs que pour des majeurs se faire un titre d’ une fraude , et dès que
, Sauset a été acheté pour le compte d’Emmanuel Aubier père, qui a tenu compte
du prix à sa sœ u r, le soustraire à compter dans la masse serait une fraude ;
si c’élait cela que l’arrêt a voulu , il a violé d’autres dispositions du Code.
Il est à regretter que par erreur sans doute, cl par l’effet de quelques con
seils inconsidérés, madame Lamonteillie a it, dans cette circonstance, agi contre
les véritables intérêts de ses enfans, q u i, si cet arrêt n’était pas cassé , p er
dront lot ou tard le bien de Sauset.
Nous finirons par observer que s’il demeurait jugé que la dame de St. Mande
n’a pas été mandataire de son frère , comme c’est en qualité de mandant qu’il
a promis garantie envers et contre tous, il resterait dans le droit d’exercer
toutes ses créances sur les acquêts de sa sœ ur, à cause de la responsabilité en
courue par celle-ci par l’adition d’hérédilé.
Emmanuel A u b ie r , et après lui scs enfans, pourraient demander compte
�( 52 )
du prix du rachat de Sauzet , que la subrogation dit avoir été faite des deniers
paternels; lu i, et après lui ses enfans, auraient droit de rentrer dans la partie
de Sauzet qui n’a pas été soumissionnée ; puisqu’il a payé à sa sœur sa légitime
en deniers, elle n’a pas pu la retenir en biens-fonds.
Il pourrait également, et après lui ses enfans, demander compte de la
partie des autres biens revendus par la dame de St.. M ande, qui n’a pas été
vendue par le Gouvernem ent, ainsi que de tout l’actif de la succession de son
père et de son frè re , touché par la dame de St. Mande et tous autres;
E n fin , Emmanuel Aubier resterait maître de disposer comme il voudrait, et
le sort des mineures Lamonteilhe serait empiré sous tous les rapports. Mais
la cassation de cet arrêt ne peut pas être refusée, et l ’intérêt des mineurs la
sollicite.
Délibéré
à
Paris, le 16 A ou t 18 13
Signé R O U X - L A B O R IE , L A C R O IX - F R A IN V I L L E , D E SÈ Z E .
A PA R IS, DE L ’IMPRIM ERIE D E P IL L E T , RU E CH RISTIN E, N» 5.
�
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Factums Godemel
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubier-Lamonteilhe, Emmanuel. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Roux-Laborie
Lacroix-Frainville
De Sèze
Subject
The topic of the resource
émigrés
prête-nom
successions
renonciation à succession
mandats
amnistie
administration de biens
divorces
dénonciation
créances
forclusion
assignats
médiation
exécutions révolutionnaires
transactions
mort civile
séquestre
correspondances
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour Emmanuel Aubier-Lamonteilhe, propriétaire, sur son pourvoir, contre un arrêt rendu en la 2° chambre de la Cour impériale de Riom, le 1er août 1812, entre lui, les sieur et dame Saint Mande, et la dame veuve de Lamonteilhe.
Table Godemel : mandat : 3. le mandat se présume-t-il, en droit, ou ne peut-il se former que par l’acceptation du mandataire ? l’interprétation de la correspondance et des actes invoqués pour prouver le mandat appartient-elle aux juges du fond ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Pillet (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 2-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
52 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2128
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2124
BCU_Factums_G2123
BCU_Factums_G2122
BCU_Factums_G2125
BCU_Factums_G2126
BCU_Factums_G2127
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53424/BCU_Factums_G2128.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Yvoine (63404)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
administration de biens
amnistie
assignats
correspondances
Créances
dénonciation
divorces
émigrés
exécutions révolutionnaires
forclusion
mandats
médiation
mort civile
prête-nom
renonciation à succession
séquestre
Successions
transactions